Archives de Catégorie: Warhammer Fantasy

La Bataille de Drünnerwald (Rapport de Bataille Romancé)

Compte-rendu d’un affrontement entre les armées du Nebelheim (dirigées par votre serviteur) et l’ost du fameux hidalgo mort-vivant Arnau de Mataplana (les magnifiques comtes vampires de Roberto Torres). Le but ici était d’émuler les rapports de batailles romancés tels qu’ils figuraient dans les White Dwarf de la grande époque. J’ai toujours trouvé que ce type de narration était plus plaisant à lire qu’un bête compte-rendu d’une bataille au niveau des joueurs, dont acte.

Version PDF: rapport de bataille final

L‘air était aussi glacial que le baiser d’une lame en ce crépuscule de fin d’automne, plongeant l’ensemble de l’ost impérial dans une humeur maussade et lugubre. Lugubre, c’était bien le mot pour décrire le paysage qui s’offrait à la vue des soldats du Nebelheim. L’orée du village de Drünnerwald, symbolisée par une bâtisse abandonnée qui avait autrefois résonné de l’écho des prières des fidèles, laissait place à de petits mamelons rocheux où poussaient par bosquets épars des pins et des aulnes rachitiques. Les hommes étaient silencieux, sans doute intimidés par ce cadre oppressant et par la tâche qui leur incombait. Ils savaient tous pourquoi ils étaient ici, comme ils savaient le sort qui les attendaient, dussent-ils faillir à repousser l’ennemi ce soir. Ils savaient aussi qu’il faudrait un miracle pour qu’ils l’emportent face aux légions sépulcrales qui, quelque part dans les environs, étaient en train de s’éveiller une fois de plus à la non-vie à la faveur de la tombée du jour. En quatre batailles, jamais l’hidalgo vampire Arnau de Mataplana n’avait connu la défaite, et nombre de ceux qui s’étaient dressé face à lui au cours de ces affrontements désespérés livrés sous le regard des lunes marchaient à présent sous sa bannière, esclaves de sa volonté impérieuse. Certains murmuraient même que le capitaine Johan Krull, héros de la guerre contre le Chaos, avait lui aussi rejoint les rangs des morts.

Et pendant que les forces du nécromant se renforçaient à chaque accrochage, celles de la province fondaient inexorablement. Voilà pourquoi Markus Deusmeister, ministre de Sigmar en la cathédrale de Grundwald, avait mené l’armée du comte, ou ce qu’il en restait, jusqu’à ce village isolé à la frontière orientale de la province, dans une ultime tentative de vaincre les hordes du chevalier vampire avant que ces dernières ne réduisent le Nebelheim en un gigantesque charnier.
La forme replète de Morrslieb surgit de derrière les frondaisons des arbres faméliques, et une lumière verdâtre tomba sur le champ de bataille, provoquant un concert de malédictions et de prières inarticulés. Dans un silence seulement brisé par le cliquetis des mailles et la chanson du vent à travers les os nus, l’ost mort-vivant vint prendre place face à son adversaire en une sinistre parodie de la discipline impériale. Un éclair de lumière vint alors déchirer les ténèbres, et la voix puissante de Deusmeister courut d’un bout à l’autre de la ligne de bataille, enjoignant chacun à trouver le courage de se dresser sur le chemin des ennemis de l’Empire, pour la plus grande gloire de Sigmar. Le prêtre termina sa tirade en pointant son épée rutilante vers les rangs immobiles des déjà-morts, et s’élança vers ces derniers avec un cri de colère, ses troupes sur les talons.
..

Le Dernier Jour de Mauer-über-Wogen

Un texte que j’ai écrit en complément d’un mini-diorama (celui en image à la une), pour l’armée de ma Némésis Elfe Noire. Version PDF: LE DERNIER JOUR DE MAUER-UBER-WOGEN

 

Le cri de la sentinelle fit empoigner la garde de son Draïch au seigneur Uelthin. Ses ombres lui avaient pourtant assuré que cette minuscule communauté humaine était à deux jours de marche de l’armée impériale la plus proche, et il avait personnellement mené le débarquement, profitant d’une brume convoquée par Lithteann pour mettre pied à terre dans une crique sauvage et déchiquetée. Ces pathétiques primates ne pouvaient pas avoir contré le plan qu’il avait si soigneusement conçu, alors pourquoi cette alerte?

Autour de lui, ses guerriers s’étaient figés dans une position d’attente, scrutant les alentours du sentier où la petite armée du dynaste progressait. Uelthin gagna en quelques enjambées la tête de la colonne et scruta le point que lui désignait le cavalier noir. Un cruel rictus vint illuminer ses traits durs quand il vit, non pas une armée comme il le redoutait, mais trois vieux humains peiner sur la pente rocailleuse en direction des Druchiis. Il se retourna vers ses suivants et leur donna une série d’ordres brefs. Le rire de l’ost noir résonna sinistrement sur la lande.

***

  • « Es-tu vraiment sûr que c’est une bonne idée? » demanda Hervin pour le dixième fois alors que ses deux compagnons et lui-même progressaient vers l’armée qui se tenait sur la colline surplombant le village de Mauer-uber-Wogen.

Millen stoppa son ascension et se retourna vers le marchand, un mépris à peine voilé inscrit sur son visage.

  • « Je croyais que nous avions conclu que c’était la seule alternative qui nous restait » siffla l’homme chauve, provoquant un mouvement de recul instinctif chez son interlocuteur.

  • « Mais peut-être que si nous parvenons à gagner la forêt, nous réussirons à… »

  • « …à offrir à nos ennemis une partie de chasse au lieu d’une bataille. »

  • « Assez vous deux! » le troisième homme s’appuya lourdement sur sa canne, son cri ayant visiblement drainé ses dernières forces, déjà fortement ponctionnées par la montée de la colline.

  • « Assez mes amis, reprit-il d’une voix faible après avoir cherché son souffle pendant un instant, de tous les mauvais choix que nous avons, celui-ci est le moins pire pour notre ville et ses habitants. Je ne peux promettre la réussite de notre entreprise, mais je peux vous assurer notre ruine à tous si nous rebroussons chemin. Il n’est plus temps de douter à présent. Nos vies sont dans les mains de Sigmar, et lui seul décidera de notre sort. »

  • « Loué soit Sigmar » murmurèrent ses deux compagnons, avant de reprendre leur progression vers le sommet de la butte.

    ***

Uelthin regarda d’un air amusé les trois humains avancer vers la forme imposante de son dragon et savoura la terreur qui se lisait sur leurs visages au fur et à mesure que les rangs de ses guerriers se refermaient autour d’eux, leur coupant toute retraite. L’un d’entre eux en particulier, le plus gras, sursautait à chaque renâclement de Sang-froid, à chaque hululement de Harpie. Les deux autres, un très vieil homme, probablement leur chef, et un chauve au visage taillé à la serpe, semblaient être plus maîtres de leurs émotions, mais Uelthin pouvait sentir leur peur grandir à chaque instant derrière leur masque de bravoure. D’un mot, il força sa monture à s’agenouiller et sauta au sol, sa longue cape pourpre s’animant un instant sous l’effet de la bise. Lorsque les trois hommes furent arrivés à distance de voix, il prit la parole, le langage grossier de ces primates lui irritant la gorge.

  • « Quoique vous aviez à me proposer, humains, parlez rapidement car je n’ai pas de temps à perdre avec des créatures de votre engeance. »

Uelthin avait insufflé assez de mépris et de menace voilée dans son apostrophe pour que le gros barbu laisse échapper un râle d’angoisse. Ses compagnons réussirent à conserver une bonne contenance, mais le dynaste avait terrifié assez d’esclaves à Naggaroth pour savoir que les trois humains étaient rongés par la peur.

  • « Puissant seigneur, fit le plus vieux d’une voix qui couvrait à peine les mugissements du vent, mes compagnons et moi parlons pour nos concitoyens. Nous ne sommes qu’une humble communauté de pêcheurs, bien loin des préoccupations des grands de ce monde. Nous n’avons que peu à offrir à une puissante armée comme la votre, et sommes bien incapables de nous y opposer, aussi apportons nous la clé de la ville en implorant votre clémence. » ne dira pas que le dynaste Uelthin, envoyé du Roi-Sorcier de Naggaroth, ne sait pas se montrer miséricordieux. Le dévouement dont vous faîtes preuve pour vos semblables m’a… ému. Aussi, je vais vous accorder une faveur: nommez un membre de votre…village. Je jure sur mon honneur qu’il ne lui arrivera rien. »

Le vieillard fit un signe de la main, et le chauve s’avança vers le noble Elfe Noir, une lourde clé de bronze posée en travers de sa main calleuse.

Uelthin dut lutter pour ne pas éclater de rire. Une reddition! Ces misérables primates venaient implorer sa pitié! Il laissa son regard courir sur les visages anxieux de la délégation humaine, savourant l’attente douloureuse peinte sur ces derniers. Après une interminable minute, il reprit la parole, un sourire glacé dansant sur ses lèvres fines.

  • « On ne dira pas que le dynaste Uelthin, envoyé du Roi-Sorcier de Naggaroth, ne sait pas se montrer miséricordieux. Le dévouement dont vous faîtes preuve pour vos semblables m’a… ému. Aussi, je vais vous accorder une faveur: nommez un membre de votre…village. Je jure sur mon honneur qu’il ne lui arrivera rien. »

  • « M…mais, qu’arrivera-t-il à tous les autres? » bredouilla le vieux, trop paniqué pour chercher à garder bonne figure.

  • « Eh bien, ils auront l’honneur de devenir nos esclaves à Naggaroth, s’ils sont jugés aptes évidemment. Vous comprenez bien que nous ne pouvons pas nous encombrer des vieux et des infirmes, qui nous serons utiles… à leur manière. »

À ces mots, le gros barbu tomba à genoux en sanglotant, au grand plaisir d’Uelthin . Le vieux, quant à lui était trop choqué pour prononcer quelque chose d’intelligible. Seul le chauve refusa de céder au désespoir, et dans un rugissement de haine, se rua sur le Druchii, un maillet de forgeron dans la main. Instantanément, ses guerriers dégainèrent leurs épées, mais ce dernier leur fit signe de rester en retrait. Son adversaire était aveuglé par sa rage, et ses attaques maladroites n’étaient pas en mesure d’inquiéter un dynaste formé par les meilleurs maîtres d’armes de Naggaroth. Lorsque l’humain, épuisé par son assaut, cessa de mouliner l’air en vain pour tenter de retrouver son souffle, Uelthin passa à l’attaque. Un instant plus tard, le maillet tombait au sol dans un bruit sourd, suivi de près par son possesseur, plié en deux par la douleur causée par la poigne de fer de l’Elfe noir. Sans relâcher sa prise, le dynaste donna une rapide série d’ordres à ses troupes, qui se remirent en marche avec discipline vers le village condamné. Alors que les derniers guerriers disparaissaient derrière le tournant du sentier, le dynaste se pencha vers sa victime, qu’il savait consciente, en dépit de l’atroce souffrance.

  • « Félicitations primate, lui murmura Uelthin à l’oreille, ton comportement stupide m’a distrait, et je t’offre la vie sauve. Tes camarades n’auront pas cette chance, car je n’ai que faire des vieillards débiles et des poltrons. Quant aux autres, nul ne les reverra jamais de ce côté-ci du monde, mais ne t’inquiète pas pour eux: leurs souffrances ne dureront pas longtemps, quelques années tout au plus. »

Le dynaste tira alors une dague barbelée du fourreau qui pendait à sa ceinture, et, en contemplant sa lame se refléter dans la lumière blafarde, continua son monologue.

  • « Vous autres humains avez la mémoire courte, c’est indéniable. Votre petite délégation me l’a amplement démontrée… On ne supplie pas la clémence des Druchiis, je croyais pourtant que quelques centaines d’années de raids vous avaient servi de leçons. Puisque ce n’est pas le cas, voici un aide-mémoire pour l’avenir. »

Uelthin approcha lentement sa dague du visage de l’humain, savourant le mélange de terreur et d’agonie qui s’y reflétait. Délicatement, il apposa la pointe acérée de son arme sur le front de sa victime, faisant perler les premières gouttes de sang sans même avoir le besoin de peser sur la lame. D’un geste fluide du poignet, il traça un mince sillon rouge de l’arcade sourcilière jusqu’à la lèvre supérieure de l’homme, puis s’arrêta pour contempler son œuvre.

  • « Voici de quoi te souvenir un mois… Même si vous autres ne vivez guère longtemps, je pense que c’est loin d’être assez. »

Le Druchii appliqua de nouveau la pointe de sa dague dans la blessure béante, et, appuyant un peu plus fort, il élargit la plaie.

  • «  Ceci devrait durer une année, pas encore assez je gage. »

Une troisième fois, Uelthin fit parcourir à son arme la même trajectoire sur le visage du chauve, à présent inondé de sang, puis une quatrième, une cinquième, une sixième fois, chaque passage ravageant un peu plus les traits de l’humain. Au septième passage, le dynaste atteignit l’os, et sa victime fut secouée de spasmes, avant de sombrer dans l’inconscience.

« Tu n’oublieras pas dans cette vie, ni dans les suivantes. » cracha-t-il en direction de la forme recroquevillée de sa victime, avant d’enfourcher son dragon, qui s’envola dans un rugissement funeste vers le village humain, où résonnait déjà les premiers hurlements des futurs esclaves du roi-sorcier.

***

L‘éclaireur se dirigea à grandes enjambées vers un groupe de cavaliers en tête de la colonne impériale. Ces derniers cessèrent leur conversation lorsqu’ils s’aperçurent du retour du chasseur, qui, après s’être brièvement incliné devant le plus âgé d’entre eux, commença son rapport d’une voix blanche.

  • « Seigneur comte, le village de Mauer-uber-Wogen a effectivement subi une attaque très récemment, pas plus de trois heurs d’après moi. L’enceinte et les bâtiments sont relativement intacts, mais tous les habitants semblent s’être envolés, mis à part ceux dont les corps ont été retrouvés, malades, infirmes et vieillards pour la plupart. »

L’éclaireur eut un hoquet de dégoût à l’évocation des scènes pénibles qu’il avait contemplé à l’intérieur de la ville. Il mit à profit une longue respiration pour se recomposer un visage impassible, et reprit finalement.

  • « Toutefois, nous avons trouvé un survivant. »

À ces mots, des questions commencèrent à fuser, mais le chasseur se contenta de désigner la procession qui se dirigeait vers la colonne. Le reste des éclaireurs était en effet de retour, accompagné par un homme couvert de sang et à moitié inconscient, et qui sans le soutien des soldats impériaux qui l’entouraient, se serait sans doute trouvé dans l’incapacité de marcher.

  • « Nous l’avons trouvé aux portes du village, cloué à un poteau. », reprit le chef des chasseurs. « Il avait la clé de la ville enchaîné autour de la taille, et nous avons trouvé ceci placardé à proximité ».

L’homme tendit à son seigneur un parchemin déchiré, probablement arraché d’un exemplaire du Liber Sigmaris. Une rune druchii avait été peinte avec du sang par dessus les saintes écritures. Le général impérial contempla le symbole pendant un long moment, avant de tendre le vélin souillé au cavalier le plus proche, qui l’étudia à son tour.

  • « Uelthin… » murmura ce dernier à personne en particulier.

  • « Exactement. » confirma le comte. « Notre adversaire est maintenant tellement confiant qu’il se permet de signer ses crimes. »

Pendant ce temps, les chasseurs avaient amené le survivant au niveau de l’attroupement. Le général impérial se pencha de sa selle pour contempler le visage mutilé de son sujet, et ne put contenir une grimace de dégoût à ce spectacle sanguinolent. Une profonde entaille courait en effet sur toute la longueur de la face de l’homme, laissant par endroit paraître l’éclat blanchâtre du crâne. Les lèvres de la plaie avaient gelé à cause du froid mordant, avivant sans doute la douleur du malheureux. Ce dernier respirait lourdement et semblait perdu dans un demi-sommeil cauchemardesque.

Le général fit un signe de la main, et le chasseur le plus proche donna une bourrade au survivant, qui sembla reprendre conscience. Le noble commença à formuler une question, mais s’arrêta en constatant que son interlocuteur ne l’écoutait pas. Ce dernier fixait en effet l’horizon de son seul œil valide, répétant laborieusement la même phrase. Les cavaliers se penchèrent pour mieux entendre, mais l’homme, sans doute sous l’effet de la douleur se mit à hurler de plus en plus fort, jusqu’à ce que le général fasse signe aux éclaireurs d’emporter le survivant à l’arrière. Il se passa toutefois un long moment avant que les vociférations de ce dernier se retrouvent noyées par le bruit des éléments.

  • « Non, nous n’oublierons pas. » murmura le comte pour lui-même.