Archives Mensuelles: avril 2020

LES ÉPÉES DE L’EMPIRE // SWORDS OF THE EMPIRE [WFB]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette chronique du recueil de nouvelles Swords of the Empire, traduit (ce qui est rare pour une anthologie de courts formats) et publié en nos vertes contrées par feu la Bibliothèque Interdite sous le titre Les Épées de l’Empire, en l’an de grâce 2006. Près de quinze ans plus tard, nous voilà à discuter – enfin surtout moi – d’un ouvrage traitant d’un univers disparu, sortie par une émanation de la BL l’étant tout autant. Voilà qui ne nous rajeunit pas.

Dans l’attente de contenu « frais » à critiquer, et dans l’espérance que la Black Library donne une suite à la Warhammer Horror Week qui avait marqué la première semaine de Mai 2019, je me suis donné pour objectif de passer enfin le cap des 100 nouvelles critiquées pour Warhammer Fantasy Battle, si possible à temps pour réagir rapidement en cas de prévision exacte de sortie de la WHW II. En repassant en revue les candidats possibles pour ce middle speed reviewing, je me suis souvenu, avec une émotion non feinte, de ce petit recueil que j’avais récupéré dans une Fnac quelconque au milieu des années 2000. Et je dois avouer que ces Épées de l’Empire1 se situent à part du reste des recueils et ouvrages de GW-Fiction lus depuis mon début dans la carrière, car il s’agit du premier livre de ce genre sur lequel j’ai posé la main. Si l’expérience ne m’avait pas plu, je doute que la question de la 100ème revue se poserait aujourd’hui, et je dois donc beaucoup aux six histoires rassemblées sous cette couverture magnifiquement évocatrice pour le joueur de l’Empire que j’étais et demeure2.

Sommaire Les Epées de l'Empire [WFB]

Au programme de cet épisode, nous nous retrouvons donc avec de longues nouvelles ayant toutes pour point commun de se dérouler dans l’Empire, ou de mettre en scène des personnages venant de la plus grande nation du Vieux Monde. La condition n’est certes pas très contraignante à remplir, mais donne une certaine uniformité à cet ouvrage. Les contributeurs à ce dernier s’avéreront plus ou moins connus de la part du lecteur, des têtes d’affiche comme Dan Abnett (du temps où il écrivait encore pour WfB), Jonathan Green et C. L. Werner, aux plus confidentiels Robert Earl, James Wallis et Gordon Rennie. Notons tout de même que tous ces auteurs ont eu plusieurs romans publiés par la BL au cours des années 2000, ce qui permettra aux intéressés de creuser plus amont si le cœur leur en dit. Pour ma part, je me contenterai de leur relater, au meilleur de mes capacités limitées, de quoi retournent les histoires compilées dans ce livre. Il serait de bon goût qu’elles soient toutes impériales de maîtrise et d’inventivité, mais seul l’avenir nous le dira…

: Comme j’ai lu ce titre en français, il restera à jamais ‘Les Epées de l’Empire’, alors que j’ai tendance à désigner les autres ouvrages publiés par la BL sous leurs titres originaux. Cela dit, la connaissance de ces derniers permet de réaliser la présence de jeux de mots pas forcément traduits dans la langue de Molière, comme ce ‘Rest for the Wicked’ qui est devenu ‘Pas de Répit pour les Braves’.
2 Cadia Nebelheim stands.

.

Les Epées de l'Empire

.

Les Chasseurs de Vampires // The Vampire Hunters – R. Earl :

INTRIGUE:

Bienvenue à Novograd, petit village kislevite blotti dans la nature sauvage de cette contrée septentrionale. Nous arrivons juste à temps pour surprendre un trio de natifs confinés dans l’auberge locale, absorbés par l’activité reine de la mauvaise saison : écouter la tempête secouer les maisons tout en fantasmant sur sa mort prochaine et se cuitant à la vodka pour passer le temps. Voilà bien toute l’âme indomptable du Kislev résumée en quelques mots. Plongés dans cette introspection profonde et alcoolisée, nos personnages sont surpris par les coups donnés sur la porte de leur gîte par une force mystérieuse. Délaissant un instant la mastication de sa moustache, autre passe-temps très populaire dans le pays, l’aubergiste Grigori1 va s’enquérir de la cause de ce raffut pendant que ses compagnons dégainent leurs couteaux à saucisson, dès fois que ce serait Peppa Pig qui viendrait demander l’hospitalité. À l’extérieur, ce sont deux voyageurs assez bien mis, Calixte Lesec et son valet Viento, qui demandent à s’abriter de la tempête. Après avoir hésité un moment, car, comme tout homme civilisé, Grigori à entendu parler de la déplorable réputation des Lesec (remontant jusqu’à leur patriarche, Noisy), le tavernier finit par laisser les visiteurs entrer après qu’ils aient prononcé le mot magique : « nous avons croisé Petrokov sur la route ». Car Petrokov est le fils de Grigori, et s’il est parti en direction de la capitale au cœur de l’hiver, c’est pour y chercher de l’aide. En effet, Novograd a un problème. Un gros, vorace et nudiste problème.

Une fois à l’intérieur, les nouveaux venus confirment qu’ils sont bien venus pour aider les locaux à se débarrasser de leur nuisance vampirique, car c’est bien de cela dont il s’agit, avec une confiance et une désinvolture qui ne leur attire pas les faveurs de Grigori. Pressé de questions par les mercenaires, il donne une description de l’individu suspect collant parfaitement avec le portrait type d’un Stryge (grand, baraqué, naturiste, avec une tête de chauve-souris), et accepte de mener ses hôtes dans les cavernes servant de repaire à la bête dès le lendemain. Sur la route dès potron minet – mais pas avant que Grigori ait pris son petit-déjeuner complet à base de porridge et de thé au miel (de Lustrie), car c’est le repas le plus important de la journée – les trois hommes progressent dans la poudreuse toute la matinée, et finissent par arriver devant les Dents de l’Ours, percées par un réseau de grottes dans lesquelles les locaux ont vu disparaître le vampire avec une proie sous le bras il y a quelques semaines…

Début spoiler…Une fois la partie lancée en indoor, c’est au tour de Grigori de se retrouver à la peine, les rapides et athlétiques Calixte et Viento redoublant de yamakaseries pour coller deux bonnes longueurs d’avance à leur « guide », laissant ce dernier former l’arrière-garde du groupe avec sa phlébite et son couteau. Guère rassuré par la situation, et seulement éclairée par la lueur tremblotante de sa torche, Grigori a beau se répéter que tout est sous contrôle, le bruit d’une cavalcade de griffes sur la roche, se rapprochant de plus en plus de sa position, n’a rien de très rassurant. Et lorsqu’un vieux réflexe de victime de film d’horreur le pousse à lever les yeux vers le plafond de la grotte, il ne peut que constater que la situation est compromise, ce coquinou de Stryge ayant opté pour une approche verticale et se trouvant à quelques centimètres de la tête de notre héros. Paralysé par une abjecte terreur, ce dernier en vient à lâcher son fidèle surin, mais, lorsque la bête se met en tête de lui fouailler la carotide, il a le bon réflexe de lui balancer un bon gros « parle à ma main » pour lui mettre un stop. Comme la main en question portait sa torche, le vampire en est quitte pour une bouchée de braise, ce qui n’est jamais agréable.

C’est le moment choisi par Calixte et Viento pour passer à l’attaque, de façon aussi coordonnée qu’acrobatique, les mercenaires prenant leur proie à son petit jeu de varappe en sautant eux aussi de prise en prise avec l’habileté d’un Alex Honnold sous speed. Sentant que l’on n’a plus vraiment besoin de lui, et plus qu’un peu dégoûté par la BO de la bataille et l’averse de sang qui commence à l’arroser, Grigori opte pour un petit évanouissement réparateur. À son réveil, et après avoir laborieusement retrouvé et rallumé sa torche, il peut constater que le Stryge a été vaincu, mais que ses problèmes, loin de disparaître, ont doublé. Car Calixte et Viento étaient eux aussi des vampires, que leur bataille contre leur lointain cousin skinhead a mis en appétit. Ils somment donc leur hôte de les ramener à Novograd, afin qu’ils puissent bénéficier du gîte et du couvert promis pendant une saison complète que l’offre d’embauche transmise par le délicieux Petrokov mentionnait. Ayant réalisé que son fils était très probablement mort, et que le reste du village ne tarderait pas à les suivre, Grigori, logiquement abattu par le tour qu’ont pris les événements, se met toutefois en route avec diligence, entraînant derrière lui les deux tueurs hémophiles.

Derrière son air de désespoir abêti, Grigori a toutefois un plan, et part au diable vau vert en compagnie des parasites, profitant de la tempête de neige s’étant levée entre temps pour les éloigner de Novograd. Lorsque Calixte finit par se rendre compte de la situation, il est trop tard pour les deux vamps, et la fringale qui travaille Viento pousse ce dernier à attaquer le Kislévite sans réfléchir aux conséquences de son geste, lorsque ce dernier lui balance quelques insultes savamment choisies. En plus de saigner à mort leur seul lien avec la civilisation, l’assoiffé ne s’est pas rendu compte que ce dernier se tenait à dessein sur le bord d’une corniche surplombant un abîme, et les trois randonneurs finissent donc par basculer dans le ravin après que Calixte ait tenté, sans résultat, de calmer les ardeurs de son séide. Ce n’est toutefois pas la fin pour Grigori, qui parvient à regagner la route quelques heures plus tard, malgré des blessures plus graves les unes que les autres, et la perte de 4 litres de sang. Réalisant qu’il est sur le point de devenir un vampire à son tour2, le dévoué aubergiste décide de se sacrifier pour la cause, et sort son meilleur saut de l’ange pour allez à nouveau s’écraser en contrebas. C’en est cette fois fini du petit Grigori, dont on retrouvera le cadavre flottant dans la rivière locale au dégel. Encore un mystère non éclairci…Fin spoiler

1 : Qui a contracté cette sale habitude il y a quarante ans, et qui en a quarante-deux. On vieillit vite à Kislev, c’est connu.
2 : On suppose que Viento a mis la langue pendant leur séance de base jumping en amoureux ?

AVIS:

Soumission solide de la part d’un Robert Earl pas encore obnubilé par les aventures de Florin et Lorenzo (bien que la paire Calixte – Viento s’avère assez semblable à son équivalente bretonienne dans ses relations maître – serviteur), ce Chasseurs de Vampire permet au lecteur de découvrir le Vieux Monde dans toute sa dureté, tant climatique que « sociologique », et de prendre la mesure du fameux tempérament kislévite, garant de la survie de ce peuple plus exposé que les autres aux déprédations des forces du mâââââl. Bénéficiant d’une intrigue bien trouvée et mise en scène, notamment le passage de la grotte et l’approche angoissante du Stryge, qui n’aurait pas dépareillée dans une nouvelle de Warhammer Horror, cette histoire met à profit les éléments constitutifs de la GW-Fiction que sont l’action, le suspense et le grimdark, pour un résultat des plus convaincants. À placer parmi les modèles du genre.

ILS L’ONT ECRIT:

Les Chasseurs de Vampires_Nuff said

.

Charcuterie Ambulante // Meat Wagon – C. L. Werner :

INTRIGUE:

Votre attention s’il vous plaît. La nouvelle qui va suivre comprenant un nombre élevé de personnages nommés (plus ou moins) importants pour notre intrigue, nous vous remercions par avance de suivre attentivement les présentations qui vont vous être faites de notre casting. Vous aurez été prévenus.

Et nous voici donc catapultés dans un relais routier minable sur la route reliant Erengrad à Zandri en passant par Nuln, où une belle bande de personnages attend que leur personnel de bord ait fait le plein et chargé les plateaux repas. Les écouter un instant suffit au lecteur sagace pour deviner où chacun se positionne sur l’organigramme de la nouvelle d’action med-fan1. Nous avons ainsi, par ordre d’apparition : le joueur de cartes (en os, because why not2)/escroc/joli cœur Feldherrn, le gras, riche, désagréable et xénophobe marchand de vodka Emil Steinmetz, sa « fiancée »/chaufferette achetée en soldes à son vieux père Lydia, et son garde du corps couturé et patibulaire, Ravna (surnommé un demi car il utilise une épée bâtarde). À cela, nous nous devons d’ajouter la Baronne von Raeder, vieille fille maniérée et hautaine, mais se baladant avec une rapière au côté, et le jeune ingénieur Nain Fergrim Pointefer, transportant avec lui des caisses frappées de runes auxquelles il tient comme à la prunelle de ses yeux. Pour finir, un mot sur les chauffeurs de ces messieurs-dames : l’Ostlander au fouet et aux chicots pourris, Ocker, et son comparse Strigani à tête de fouine et à moustache pleine de miettes (un signe sûr que c’est un filou… ou une fouine qui vient de tomber sur une baguette), Bresh. Pfiou, une bonne chose de faite.

Tout ce petit monde se dirige donc vers Nuln et doit cohabiter pour quelques heures, même si des tensions se manifestent déjà au sein du groupe. Le voyage du coche est cependant interrompu avant son terme par un fiacre-stopper planté au bord de la route. Reconnaissant un Répurgateur à la forme de son chapeau, les deux gredins tenant les rênes, et que le lecteur avait surpris quelques temps auparavant à échanger des remarques lourdes de sens hors d’écoute de leurs passagers, sont d’abord tentés de l’écraser, mais Mathias Thulmann (car c’était lui) avait habilement prévu le coup en demandant à son homme de main et tortionnaire particulier, Streng, de se positionner stratégiquement avec une arbalète chargée à proximité. Si Thulmann joue du pouce sur les grands chemins, c’est que son cheval à perdu un fer et qu’il a donc besoin d’être dépanné jusqu’à la forge la plus proche. Ne prenant pas les dénégations polies des conducteurs pour argent comptant, il s’installe donc posément dans la diligence, laissant son acolyte suivre cette dernière avec leurs chevaux, et propose un tour de table amical pour briser la glace entre les compagnons de voyage. Venant d’un type qui peut vous condamner au bûcher si vous éternuez de façon bizarre, pas sûr que cela fonctionne beaucoup.

En tous cas, cette rencontre fortuite n’empêche pas Ocker & Bresh de dérouler la suite de leur plan, et donc d’amener leur véhicule jusqu’au charmant petit village de Mureiste, Sylvanie. « Dites donc, c’est étrange que nous fûmes allâtes en direction du Nord-Est alors que la logique voullasse que nous nous dirigeassionnèrent vers le Sud-Ouest » commente ce finaud de Thulmann, à qui on a appris le Reikspiel littéraire et la géographie au Temple de Sigmar. Il ne faut donc pas s’étonner que notre héros dégaine une de ses pétoires de service lorsque l’équipage annonce une pause de quelques minutes à ses passagers, et interdise en des termes non incertains aux ruffians de bouger de leur siège. Cette situation des plus tendues (Streng étant venu appuyer les dires de son employeur avec sa propre arbalète) dégénère cependant tout à fait lorsque les habitants de Mureiste arrivent en masse taper au carreau du fiacre, et pas pour demander s’ils peuvent laver le pare-brise, non non. Car les locaux sont des goules, elles ont faim, et de bien mauvaises manières. Dans le tumulte qui s’en suit, notre compteur de mort horrible se déclenche enfin, grâce à la participation active d’Ocker, qui prend un carreau dans le bide de la part de Streng en tentant de dégainer son tromblon, tombe de son siège, se fait rouler dessus par la voiture qui s’emballe, et dévorer vivant par les relations professionnelles des son collègue. Pas mal pour un début. Bresh, de son côté, réussit à faire décrire des cercles à l’attelage devenu fou jusqu’à ce que le poison des cannibales fasse effet et terrasse les chevaux3. Le coche se renverse, manquant d’écraser Pointefer, mais ne faisant pas d’autres victimes que les chausses de Steinmetz, dont le transit intestinal est accéléré par la vue des goules. Toutefois, tous nos personnages, y compris Bresh, que Thulmann amène manu militari avec lui pour qu’il s’explique, réussissent à se réfugier dans le temple de Sigmar local, et à en barricader les portes.

Dès lors, il s’agit pour nos héros de s’organiser. Pendant que ses camarades fortifient leur position ou sanglotent dans leur coin, le Répurgateur torture un peu son suspect, arrivant à tirer de ce dernier la promesse d’une mort abominable délivrée d’une main de Maître par ce dernier. Il ne faut pas longtemps à Thulmann pour comprendre que les goules ne sont qu’un avant-goût d’une nuit très agitée qui s’annonce, et le zélote va donc prêter main-forte à ses acolytes, qu’il positionne à des endroits stratégiques dans l’attente du prochain assaut. À la tombée du jour, une chauve-souris géante vient déverser des litres de guano sur la grand-place où patientent les Muriestois, avant de se poser et de se changer en, je vous le donne en mille, Ozzy Osbourne. Ou presque. En vampire Stryge. Après s’être fait briefer sur les derniers événements, et avoir repris quelques forces en sirotant le messager4, il lance ses ouailles à l’attaque du monument, en leur indiquant de penser à faire le tour, cette fois-ci. Si la marée de viande écumante (voir « ils l’ont écrit ») ne parvient pas à faire autre chose que trembler les portes dans un premier temps, les nerfs fragiles de cette fiotte de Steinmetz manquent de condamner la team Sigmar lorsque le pleutre décide d’aller libérer Bresh dans l’espoir que ce dernier parvienne à le sauver. Malheureusement pour lui, et pour son nouvel obligé, Lydia donne l’alerte à Thulmann avant que le Strigani n’ait eu le temps de lui planter un couteau dans le dos. Privé de l’avantage de la surprise, les vingt centimètres d’acier du ruffian ne font pas le poids ni la longueur face à l’épée bénite du Répurgateur5, et le malappris se fait posément transpercer la gorge par son adversaire, qui peut aller redonner un coup de main très bienvenu à ses comparses.

C’est le moment que choisit le Stryge pour faire son entrée dans la place, par la fenêtre s’il vous plaît. Chemin faisant, il charcute horriblement la pauvre Baronne von Raeder6, pulvérise un banc et éventre Steinmetz, faisant un peu de ménage dans notre casting. Ses tentatives de griffer à mort Thumann sont cependant mises en échec par le jet d’eau bénite qu’il se prend dans la figure (ça brûle), et par les gros débuffs de zone que lui inflige le sol consacré du lieu saint dans lequel il se trouve. C’est ça aussi de ne pas demander à ses goules de raser le temple de Sigmar du village en temps et en heure. Devant tant de diableries, ou peut-être l’inverse, le vampire décide d’aller prendre l’air, entraînant avec lui ses hordes de groupies décérébrés. L’occasion pour les défenseurs de souffler un peu et de faire leurs comptes, le pauvre Ravna, méchamment tailladé par un ongle sale de goule, n’en ayant plus pour très longtemps…

C’est alors que Pointefer se souvient que le contenu de ses caisses n’est autre que de la poudre à canon. Gag. Jouant leur va-tout, les survivants envoient donc le Nain et le mourant poser une mèche dans les décombres de la diligence, pendant que Thulmann tente de distraire le Stryge. Cela marche tellement bien que, lorsque l’héroïque Ravna se sacrifie pour mettre le feu aux poudres, le buveur de sang est encore occupé à envoyer des gros doigts, ou griffes dans son cas , au Répurgateur depuis le sommet de la diligence. Bilan des courses : un centre ville dévasté, une vingtaine de goules déchiquetées, et un vampire en piteux état, que Thulmann achève d’un coup d’épée en plein cœur en punition de son tapage nocturne7. Ici s’achève notre histoire, les deux chasseurs de sorcières décidant de repartir avec leurs montures (habilement garées dans le temple par Streng un peu plus tôt), même déferrées, plutôt que de s’éterniser plus longtemps dans ce patelin paumé qu’est Mureiste. Et Thulmann de donner ce conseil avisé aux trois survivants de notre échappée belle (voyez si vous pouvez les identifier) : « je suis sûr que ça va marcher ».

1 : Et dans une certaine mesure, de déterminer qui a le plus de chances de mourir dans d’atroces souffrances au cours des prochaines pages.
2 : Même si le matériau utilisé me semble un peu saugrenu. Sans compter de la taille du squelette nécessaire pour tailler des cartes d’une taille suffisante. Sans doute un moyen pour les forces impériales de monétiser les cadavres d’Orques qui s’accumulent comme des feuilles mortes en automne après la Waaagh ! hebdomadaire.
3 : Qui n’ont pas reçu de nom et que je n’inclue donc pas à ma liste, à grand regret.
4 : Don’t shoot the runner, but drink them? Yes you can.
5 : Annule les sauvegardes invulnérables des Démons, coup fatal sur les sorciers à cœur noir.
6 : Dont le tort fut d’être une femme répudiée indépendante, et donc indigne de confiance pour ce misogyne de Thulmann.
7 : Non sans avoir balancé la petite réplique qui va bien juste avant, ici librement empruntée à ‘Le Bon, La Brute et le Truand’ (déjà pastiché par Werner dans sa série ‘Brunner, Bounty Hunter’.

AVIS:

On savait Werner particulièrement à son aise pour la mise en scène de nouvelles d’actions sérialisées, qu’il s’agisse pour lui de suivre une traque du chasseur de primes Brunner, ou une purification expresse dispensée par le zélé Mathias Thulmann. Cette réputation n’est pas usurpée ici, car cette Charcuterie Ambulante tient beaucoup mieux la route, et c’est heureux, que la diligence empruntée par nos héros pour se rendre à Nuln. En plus de bénéficier d’une atmosphère tendue tout à fait appréciable, en grande partie grâce au rythme soutenu imposé par l’auteur, et les quelques descriptions gore à souhait qu’il glisse au fil des pages, cette nouvelle parvient également à faire « vivre » (et mourir, dans beaucoup de cas) sa belle brochette de personnages de façon naturelle et équilibrée, et emprunte avec bonheur au genre du western, dont Werner est un fan assumé. La fameuse scène de l’attaque de la diligence par les Indiens, ou, plus proche de nous, l’attente tendue des 8 Salopards, partagent ainsi des similarités fortes avec le siège de temple de Sigmar par un Stryge et ses goules, preuve que dans la pop culture, tout est dans tout et inversement. Au final, encore une nouvelle solide à mettre au crédit d’un des chasseurs de lignes les plus réputés du Vieux Monde plutôt que du Far West, et une très bonne introduction du personnage de Mathias Thulmann aux non-initiés, si nécessaire.

ILS L’ONT ECRIT:

Charcuterie Ambulante_Nuff said

.

L’Affaire de la Cellule Écarlate // The Case of the Scarlet Cell – G. Rennie :

INTRIGUE:

Les temps sont rudes à Altdorf pour la devineresse décrépite Varra, qui peine à extorquer de quoi payer son loyer et acheter du mou à son chat à la populace locale. En cause, l’absence de la moindre petite catastrophe depuis quelques temps, qu’il s’agisse d’une Waaagh ! Orque ravageant l’arrière-pays, d’une invasion des hordes chaotiques depuis le Nord, ou même une épidémie de peste noire, comme au bon vieux temps de Mandred. Ce sont des événements de ce genre qui donne l’envie aux braves quidams de claquer quelques pièces dans la lecture de leur avenir, et la paix relative dont bénéficie l’Empire au moment où notre histoire prend place ne fait donc pas les affaires de notre pythie au rabais. Aussi, lorsque le traditionnel rideau de perles marquant l’entrée de son cabinet se met à bruire, annonçant l’arrivée d’un gogo client en puissance, Varra se dépêche de prendre un air pénétré et de scruter les profondeurs mystérieuses de sa boule de verre (le cristal, c’est cher). À défaut d’avoir de vrais pouvoirs de divination, un simple coup d’œil au nouveau venu aurait peut-être pu sauver la voyante amateur du triste destin qui l’attend. Lorsque Varra daigne en effet lever les yeux sur son visiteur pour s’enquérir de la raison des ses grognements courroucés, il est trop tard pour elle. Fondu au rouge…

Quelques heures plus tard, c’est l’impeccable Zavant Konniger, Sage-Détective (c’est écrit sur sa carte de visite) qui se rend sur le lieu de ce qui s’est avéré être un crime (sans blagues), suivi de son fidèle serviteur halfling Vido. Si l’illustre personnage a daigné descendre dans la rue des Pythonisses, c’est qu’il réfléchit à prendre l’affaire que lui propose le marchand Gustav von Hassen, fondateur du Comité de vigilance des citoyens d’Altdorf, initiative populaire mise sur pied il y a quelques mois pour aider les autorités incompétentes à mettre fin aux déprédations d’un tueur en série sanguinaire connu sous le nom du Boucher de Reikerbahn (le quartier le plus mal famé d’Altdorf). Bien que le charcutier en question ait fini par être appréhendé, envoyé en prison, jugé et exécuté, von Hassen semble prêt à payer les coquets émoluments demandés par Konniger pour bénéficier de sa légendaire gnose. Dès lors, ce dernier se fait un devoir de visiter les quartiers de la pauvre Varra, éparpillée façon puzzle dans son F3. Le regard acéré de notre enquêteur ne met pas longtemps à remarquer que la victime n’a ni les yeux, ni la langue dans sa poche, ni à leurs emplacements habituels d’ailleurs, et conclut donc que le meurtrier devait avoir des motivations bien spécifiques. En effet, voler les yeux et la langue d’une devineresse semble obéir à une logique particulière.

Sur le chemin du retour, dans le fiacre que Konniger et Vido partagent avec von Hassen et son jouvenceau de neveu, Sigmund, le Sage-Détective n’a pas longtemps à attendre pour tirer les vers du nez de son nouvel employeur, qui révèle deux faits très intéressants à l’enquêteur. Le premier est que le meurtre de Varra n’est que le dernier d’une série en cours, ayant vu un Archilecteur salace perdre cœur (et la vie) dans le lit d’une prostituée de luxe, et pas moins de trois sorciers des collèges de magie perdre la tête (et le contenu de leur boîte crânienne) au cours des dernières semaines. La seconde est relative au fameux Boucher de Reikerbahn, dont la population a été privée de l’exécution publique pour la simple est bonne raison que le suspect était un cultiste de Khorne déjà bien avancé sur le chemin de la mutation (professionnelle ou pas), plus semblable à une bête qu’à un homme, et doué d’une capacité de régénération extraordinaire. Pensez à Wolverine croisé avec Jack l’Éventreur et vous aurez une bonne représentation du joyeux drille. N’ayant rien pu tirer de lui, ni aveu, ni confession, ni parole intelligible, les autorités décidèrent de le brûler dans l’enceinte de sa prison pour clore l’affaire une fois pour toutes.

Une fois rendu à son domicile, Konniger commence à phosphorer avec son efficacité habituelle, faisant remarquer à son domestique que von Hassen, pour concerné qu’il ait l’air d’être par le salut du petit peuple, dissimule sans doute ses véritables motivations, comme l’indique… l’absence de chevalière à sa main droite. Imparable. Cela dit, il faut à notre héros amasser davantage d’indices et de preuves sur cette affaire, et la paire part bientôt en direction de la Kaiserplatz à la rencontre d’une vieille connaissance, travaillant comme geôlier en chef dans la prison municipale de Mundsen, où le Boucher a passé ses dernières heures. Bien aidé par la corruption quasi-totale de son interlocuteur, et pendant qu’il déguste une savoureuse saucisse dans la taverne de la Robuste Matraque, Konniger ne met pas longtemps à convaincre le maton qu’il est dans son meilleur intérêt de lui faire faire une visite guidée de la cellule où était enfermé Boubou, même si les Répurgateurs de Sigmar ont formellement interdit à quiconque d’y pénétrer depuis l’exécution…

Début spoiler…Et pour cause, car exécution il n’y a pas eu. La nuit précédent la mise à mort, le Boucher s’est en effet découvert des talents de scream queen, et lorsque la garde a fini par venir s’enquérir des causes de ce raffut, elle ne put que s’apercevoir que le gonze était également un as de la maroufle. Résultat, des murs (et un plafond) de cellule refaits de neuf avec une épaisse couche de sang, et une disparition totale du détestable artisan. La cellule écarlate continuant à suinter de l’hémoglobine fraîche depuis cette nuit fatidique1, l’Inquisition avait logiquement décidé de noyer l’affaire en faisant croire que tout s’était déroulé normalement, ce qui n’est évidemment pas le cas. Qui peut dire ce qu’il est advenu du Roucher de Beikerbahn ? La visite terminée, Konniger insiste pour ne pas rentrer chez lui directement mais se rendre discrètement au domicile de von Hassen, qu’il soupçonne fortement d’être un disciple de Slaanesh, engagé dans une vendetta très intéressée contre le tueur Khornu qu’il a contribué à faire arrêter la première fois.

Et, effectivement, il ne faut pas longtemps aux deux détectives pour filer Gustav et Sigmund jusqu’à un entrepôt du quartier marchand, qui se révèle être un lieu de débauche des plus païennes. Le temps que Konniger et Vido parviennent à crocheter une serrure et accéder au lieu de la petite sauterie, cependant, il est déjà trop tard, car le Boucher, que Khorne a récompensé de ses bons et loyaux services en lui donnant le pouvoir « brumisateur de sang », ce qui lui a permis de s’extirper de sa cellule, et plus tard, de contourner les mécanismes de protection mis en place par ses proies2, s’est matérialisé en pleine orgie en montant depuis les égouts à travers le sol, que ces crétins de cultistes n’avaient pas pensé à isoler. Et pourtant, tous les chauffagistes vous diront que c’est important. Cette aérosolisation réussie, le tueur a repris forme presque humaine et s’est mis à débiter de l’aristocrate corrompu et du notable concupiscent à tour de griffes, jusqu’à ce que Sigmund, qui se trouvait être la démonette de compagnie de Gustav (en sa qualité de Magister du culte), tombe les masques (de Slaanesh, évidemment) et engage la brutasse au corps à corps. Son intervention courageuse n’est cependant pas suffisante pour arrêter les ravages du fidèle du Dieu du Sang, même si elle permet d’affaiblir ce dernier et donne une chance à Konniger de régler le problème en solo. Saisissant le bâton corrompu encore étreint par la main de Gustav, chairàpâtis-é juste avant son escort démoniaque, Zavant commence à zlataner l’Élu de Khorne de belle manière, parvenant finalement à l’empaler avec le symbole de l’ennemi juré de son Dieu, sur l’autel de l’ennemi juré de son Dieu. C’est la combo fatale pour le Boucher, qui se fait déboucher pour de bon et repart dans les royaumes du Chaos se faire prendre la tête par son suzerain.

À Altdorf, c’est l’incendie opportun de l’entrepôt, suivi d’une opération de nettoyage très poussée menée par les Templiers de Sigmar, et la prise de vacances pour durée indéterminée d’un certain nombre de sommités locales, qui permet à la vie de retrouver une certaine normalité. On espère en tous cas que Konniger s’est fait payer par avance pour cette affaire, car quelque chose me dit que sinon, il l’aura dans l’os…Fin spoiler

1 : Ce qui est certes dégoûtant (en plus d’être dégouttant) mais très utile pour les banques de sang d’Altdorf.
2 : Insaisissabilité renforcée par les dons « anti-magiques » accordés à la suite de la consommation du cœur, cerveaux, yeux et langue de ses victimes précédentes.

AVIS:

Adaptation très convaincante d’une enquête de polar bien noir dans l’univers de Warhammer, L’Affaire de la Cellule Écarlate permet à Gordon Rennie d’entraîner son lecteur dans le tumulte d’Altdorf, depuis ses tavernes animées et son riche quartier marchand jusqu’aux prisons les plus glauques et au tristement célèbre Reikerbahn, ce qui en fait une nouvelle incontournable pour tout amateur de fluff qui se respecte, ainsi que pour les rôlistes à l’affût d’informations (quasi) officielles pour enrichir leurs parties. Mettant à profit son aisance narrative pour plonger son public dans son propos, par exemple en alternant les passages suivants Konniger et Vido avec ceux racontés du point de vue du tueur (ce qui permet de comprendre son douloureux parcours et ses motivations) ou des ses victimes, convoquant avec maestria des descriptions de la vie d’Altdorf, dialogues efficaces (à défaut d’être savoureux) et scènes d’actions rythmées, le tout parsemé de quelques trouvailles gores et saillies humoristiques, Rennie livre ici l’une des toutes meilleures aventures de son héros fétiche, qui tombera malheureusement dans un relatif anonymat1 lorsque son auteur décidera d’arrêter sa collaboration avec la Black Library. Donc, profitez-en car il y en pas des milliers, ni des centaines, ni même des dizaines comme celle-là2 !

1 : Même si le brave Josh Reynolds sortira Zavant de sa pré-retraite le temps de quelques nouvelles au cours des années 2010.
2 : Et en français, je pense que c’est même l’une des seules.

ILS L’ONT ECRIT:

L'Affaire de la Cellule Ecarlate_Nuff said

.

Pas de Répit pour les Braves // Rest for the Wicked – J. Wallis :

INTRIGUE:

Altdorf, et ses rues bruissantes de vie, ses marchés bien achalandés, ses honnêtes citoyens faisant leurs courses… Et, bien entendu, ses forces de police luttant au jour le jour contre les déprédations des mauvais sujets de l’Empereur, ou, dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, celles de dangereux immigrants, comme ce Kislévite à moustache de Kislévite (ok) et aux yeux de Kislévite (plus dur), qui se fait courser comme un lapin par nos héros, les officiers des Lices Dirk Grenner (aka Astérix) et Karl Johansen (aka Lucky Luke1), qui cherchent ainsi à boucler une enquête de trois mois de façon probante. Manque de bol pour les Starsky et Hutch impériaux, leur course poursuite les amène jusqu’aux portes de la ville, où le cortège de Leopold von Bildhofen, Comte Électeur du Middenland, fait son entrée en grande pompe. Le périmètre de sécurité étant strictement maintenu par la garde civile, nos héros ne peuvent que constater la disparition de leur proie dans la foule massée pour l’occasion… jusqu’à ce que le suspect moustachu trouve intelligent de passer en courant devant le cheval de l’Électeur, pile au moment où ce dernier reçoit un carreau en pleine encolure (le cheval, pas le bonhomme). La suite est assez facile à prédire : la bête s’emballe et part au triple galop dans les rues pavées d’Altdorf, en direction de la Königplatz (à ne pas confondre avec la Kaiserplatz) et de son marché bondé. Serait-ce la fin de ce bon vieux Leopold ? NON, car les héroïques Johansen et Grenner subtilisent deux montures à leurs balourds de collègues, piquent des deux et parviennent in extremis à se saisir de l’aristocrate avant que son destrier n’aille s’emboutir dans un food truck, avec des résultats dévastateurs. Malgré leur intervention salutaire, ce snob de von Bildhofen remercie à peine ses sauveurs, et repart avec sa troupe jusqu’à son Air BnB.

De retour au poste, les officiers doivent à présent amadouer la colère de leur patron et chef des Lices d’Altdorf, le Général Hoffmann, devant le capotage complet de l’opération Kosachok. Ce fiasco a toutefois libéré le duo, qui peut enquêter sur la tentative d’assassinat dont l’influent aristocrate vient de faire les frais. Ayant déjà reçu le résultat des expertises du laboratoire alchémico-légal avec lequel les Lices travaillent, qui a établi que le carreau était d’origine tiléenne, Johansen et Grenner partent en direction de la petite Tilée pour creuser la piste d’un assassin étranger engagé par un mystérieux commanditaire pour se débarasser de von Bildhofen. L’héritier du Comte étant son frère Siegfried, marié à une Tiléenne, c’est donc vers ce dernier que les premiers soupçons se portent. Après une rencontre fructueuse avec le signor Argentari, parrain de la pègre italienne tiléenne locale, les deux équipiers filent jusqu’à la Marianstrasse, où leur indic leur a confié que se trouvait le tireur d’élite recruté pour effectuer ce sale boulot. Bien qu’ils parviennent sur place avant que ce dernier n’ait pu retenter sa chance, profitant du passage du Comte Électeur à la sortie de la messe, ils perdent l’élément de surprise lorsque Grenner ne parvient pas à enfoncer la porte de la planque du premier coup. S’en suit un face à face tendu entre les officiers et leur suspect, qui se prend la dague de jet de Johansen dans l’estomac pour commencer, mais riposte en logeant un carreau dans la poitrine de ce dernier. Ce tilean stand-off, qui aurait pu durer longtemps vu la stupidité des participants2, est toutefois interrompu par une boule de feu impromptue, qui ravage la piaule et réduit le sniper en cendres. Comprenant que cette intervention enflammée était probablement celle du commanditaire, peu soucieux de laisser les enquêteurs interroger le tueur à gages, Johansen indique à son partenaire qu’il serait judicieux qu’il aille rendre une visite de courtoisie à la DGSI impériale, une cellule de la Reiksguard (en civil) enquêtant sur les complots et manigances agitant l’entourage de l’Empereur. Cette organisation moyennement secrète (puisque un simple officier des Lices sait qu’elle existe et où elle opère3), du nom d’Untersuchung, s’est faite une spécialité d’enquêter sur les mages renégats, et pourrait donc aider l’enquête à progresser. Pendant que son collègue passe aux urgences se faire recoudre, Grenner se rend donc sur place.

Là, il se fait poliment mais fermement éconduire par ses interlocuteurs, qui ont l’air d’en savoir beaucoup plus qu’ils ne veulent bien en dire sur cette affaire, et ne consentent qu’à lui expliquer la différence entre une boule de feu et une explosion flamboyante. Car non, ce n’est pas la même chose. De retour au poste, Johansen est toutefois briefé par Hoffmann, qui a reçu les infos refusées à son sous fifre par fax pigeon voyageur, sur la situation très délicate dans laquelle ils doivent opérer. La sorcière pyromane se révèle être une certaine Emilie Trautt, mage flamboyante passée libérale depuis quelques années et concubine notoire du fils de Leopold von Bildhofen, Udo, qui passe du coup suspect #1 de l’enquête. Cependant, l’Untersuchung a formellement interdit à ses collègues d’intenter quoi que ce soit envers Trautt, qui pourrait mener le Bureau des Légendes d’Altdorf à de plus gros poissons. Cela n’empêche toutefois pas les Lices de monter un plan audacieux pour protéger le mal-aimé Leopold de ses persécuteurs…

Début spoiler…Et notre duo infernal, maintenu sur l’affaire par un Hoffmann très peu progressiste quand au concept d’ITT et de congés maladie, de se rendre à la place de leur boss au rendez-vous organisé par Udo afin de discuter des mesures de protection prises par les Lices envers le Comte Électeur. Tout aussi odieux que son paternel, Udo gobe toutefois sans broncher les bobards débités par un Johansen imperturbable, qui lui fait croire que les suspects principaux sont les Kislévites (décidément, il ne les aime pas), et lui révèle les dispositions super secrètes prises par son équipe pour protéger le convoi qui amènera le Comte et sa famille à la réception organisée par l’Empereur en leur honneur le soir même, lorsqu’Udo se met à flipper des tables pour exprimer son mécontentement d’être tenu hors de la confidence. Le piège étant tendu, il est maintenant temps de voir si le poisson va mordre…

Aussi, lorsque les rusés officiers changent l’ordre des carrosses banalisés transportant les huiles Middenlander, positionnant celui d’Udo en deuxième position, à la place de celui de Leopold et Siegfried, c’est sans surprise qu’ils constatent la combustion spontanée mais peu naturelle du fiacre. C’est ce qui s’appelle un retour de flamme, je suppose. Bravant les ordres, l’intenable Johansen s’élance ensuite à la poursuite de Trautt sur les toits, ne parvenant pas à refaire son retard (et pourtant, elle était en robe longue) avant que la magicienne utilise ses pouvoirs enflammés pour… partir en lévitation et franchir le mur d’enceinte de la ville, évitant facilement la dague de jet que Johansen lui avait lancée sans sommation. C’en est fini de notre enquête, mais pas du boulot de notre paire de choc, qui devra dès le lendemain faire porter le chapeau de ces tentatives d’assassinat répétées aux, je vous le donne en mille, Kislévites. Comme on dit par chez nous, pas de pitié pour les croissants Cosaques.Fin spoiler

1 : Comprendre que le premier est un petit blond raleur, et le second un grand brun à la gâchette facile.
2 : Ainsi, l’assassin parvient à se surprendre lui-même lorsque sa manœuvre de diversion à l’encontre de Johansen le mène à regarder également dans la direction vers laquelle il pointait son arbalète, permettant à l’officier de lui balancer un pied de chaise dans la tronche en toute impunité.
3 : Rendant son utilisation de mot de passe alambiqué à l’entrée un peu ridicule.

AVIS:

Pastiche assez transparente de la série policière classique des années 80, mettant en scène des flics débrouillards aux méthodes non conventionnelles mais efficaces pour combattre le crime, Pas de Répit pour les Braves souffre des grosses ficelles parodiques utilisées par l’auteur, d’un duo de héros pas vraiment attachants, et de l’intégration assez grossière de l’Untersuchung (que Wallis mettra au centre de son roman La Marque de la Damnation) à l’intrigue pour des raisons relevant selon moi du teasing pur et simple. Si on peut reconnaître à cette nouvelle un rythme enlevé et une enquête potable, même si pas vraiment spectaculaire en termes de rebondissements1, ainsi que quelques détails fluffiques sur Altdorf et ses forces de po-Lices, à prendre avec des pincettes car reprises par personne d’autre depuis, la Black Library a beaucoup mieux à offrir en termes de nouvelles « policières » se déroulant dans le Vieux Monde, à commencer par L’Affaire de la Cellule Écarlate dans la même anthologie, supérieure sur tous les points à Pas de Répit pour les Braves.

1 : En même temps, avec deux suspects identifiés en tout et pour tout, difficile de faire planer longtemps un suspens étouffant. Wallis avait fait beaucoup mieux ceci dit avec sa série Dieter Brossmann (‘The Dead Among Us’ et ‘The Bretonnian Connection’).

ILS L’ONT ECRIT:

Pas de Répit pour les Braves_Nuff said

.

La Cloche de Nagenhof // The Nagenhof Bell – J. Green :

INTRIGUE:

Notre histoire commence avec un paragraphe descriptif expliquant en quelques lignes aussi imagées qu’un mur de classe maternelle1 que, par une nuit sombre et sinistre, frappée par un temps sombre sinistre, et digne du sombre et sinistre dieu de la mort (qui est sombre et sinistre) Morr, un bâtiment sombre et sinistre – le temple de Morr de Nagenhof – est sur le point d’être témoins d’évènements… sinistres et sombres. Ha ! Vous ne l’avez pas vu venir, celui là ! Et, de fait, un trio de ruffians est surpris par le lecteur déjà un petit peu blasé par les effets stylistiques sombres et sinistres de Jonathan Green, très à l’aise dans son rôle de MJ pour CE2, en train de hisser une cloche en haut du beffroi du temple. Le groupe est mené par la figure contrefaite mais très musclée du bossu Otto, recueilli à sa naissance par le prêtre local, Ludwik, après que sa bohémienne de mère soit venue mourir en couches dans son presbytère. En même temps, what did you expect d’un temple de Morr ? Moi je dis que ce n’est pas du tout un fail, à l’inverse de la tentative de Green de pomper discrètement des idées dans des classiques de la littérature. Mais revenons-en à nos bourdons. Otto et ses comparses sont parvenus à installer la nouvelle cloche, qui luit d’un éclat verdâtre peu engageant, à la place de l’ancienne, et le bossu a tôt fait de se débarrasser de ses complices désormais inutiles, dont il empile les cadavres dans la crypte de son lieu de travail. Voilà qui termine le prélude de notre histoire, qui sera, comme vous l’avez compris, sombre et sinistre.

Trois jours plus tard, la bande de mercenaires du charismatique (c’est lui qui le pense en tout cas) Torben Badenov est à pied d’œuvre dans la taverne de la Main de Gloire de Nagenhof, tenue par un de leurs anciens frères d’armes, le manchot Dietrich Hassner. Rangé des voitures depuis dix ans, date à laquelle il a perdu la main, Dietrich se voit malgré tout proposer par Badenov de reprendre du service pour aller faire les quatre cents coups dans le Vieux Monde, comme à la bonne époque. Autour de lui, ses compagnons se pintent généreusement à la bière, et il me faut vous les présenter sans plus attendre, par ordre de participation active à la suite de la nouvelle. Commençons par le nobliau maussade mais futé Pieter Valburg, recruté dans la bande à la suite des événements relatés dans Heart of Darkness, qui l’ont vu venger la perte de sa fiancée. Nous avons ensuite le Kislévite à tête de fouine Oran Scarfen, le jeune et incertain Stanislav Hagar, et le colossal trappeur Yuri Gorsk (qui ne servira à rien, vous pouvez donc l’oublier). Ces plaisantes retrouvailles sont toutefois interrompues par un angélus d’un genre un peu particulier, à la fois lancé à l’heure indue de 9h53, et sonné par une cloche à la sonorité…euh…clivante. Sortis hors de la taverne pour s’enquérir de la source de ce raffut, les ivrognes décident, l’alcool aidant, d’aller jeter un œil dans le temple de Morr d’où provient ce vacarme.

Dans le temple en question, Otto vient d’avoir une petite discussion avec son père et Père, Ludwik, tout juste rentré d’une veille mortuaire dans l’arrière-pays. Le vieil homme était sur le point de filer une trempe de tous les diables à son fils adoptif pour avoir oublié ses corvées de taillage des cierges, balayage des feuilles et exterminage des rats, qui semblent avoir pullulé en son absence, lorsque le lancement du carillon funeste l’a averti d’un problème bien plus pressant. Un rapide coup d’œil à la crypte, grouillante de vermine et contenant deux cadavres bien mâchonnés par cette dernière, lui a en effet permis de constater que la cloche que les habitants de la ville avaient conservé comme souvenir de leur victoire contre les Skavens il y a dix ans, avait disparu. Pas plus bête que le lecteur de la BL moyen, Ludwik a compris que c’est elle qui sonne désormais, et que c’est son infernal bedeau qui tire sur la corde, dans tous les sens du terme. L’explication de texte entre les deux hommes ne s’est toutefois pas passée aussi bien que le prêtre l’avait espéré, le bossu ayant finalement compris que l’ecclésiastique était son vrai père (qui avait abusé de sa mère), et réglé son complexe d’Œdipe de façon littérale en balançant Ludwik du haut du beffroi, dans un remake essoufflé (le contraire d’inspiré) de Notre Dame de Paris. Car Otto a décidé qu’il était un furry, et compte bien se faire adopter par une nouvelle famille aimante de Skavens, qu’il convoque en faisant sonner la cloche hurlante municipale. Question : pourquoi ? Réponse : La Mer Noire. En tous cas, les ratons ont l’ouïe fine, et la marée murine qui a empli les rues de Nagenhof fait présager du pire pour les braves péquenauds.

Nous faisons alors un crochet dans les égouts de la ville, où une cohorte de Skavens menée par le chef de meute Nikkit Skar se dirige vers la crypte du temple, emportant avec elle le Rat Ogre Mâchecrâne. Vous pouvez oublier ces noms dès à présent, car ils ne reviendront plus de la nouvelle, Skar ayant bouclé son cameo et Mâchecrâne redevenant un Rat Ogre anonyme après cela. Contentons nous de nous préparer à un peu de baston sombre et sinistre.

Du côté des gentils, la bande de Badenov, suivie par Dietrich, est arrivée devant le temple, a constaté l’heure du décès de Ludwik, écrasé sur le pavé, ainsi que l’infestation ratière dont semble souffrir le lieu de culte. Prouvant à nouveau que son supérieur est une andouille, Pieter a la bonne réaction de monter dans le beffroi pour faire cesser le carillon, alors que Badenov souhaitait simplement poursuivre l’état des lieux. Toutefois, l’arrivée de l’avant-garde Skavens met un terme définitif à son projet, et il résout à la place de retenir les hommes rats à l’intérieur du temple en compagnie de Dietrich, pendant qu’Oran, Stanislas et Yuri y mettront le feu pour empêcher les mutants d’envahir la cité. Aussitôt dit… pas tout de suite fait. D’une part car les Nagenhofer ne se laissent pas immédiatement convaincre de la nécessité d’incendier leur patrimoine culturel, et qu’il faut un beau discours inspirant de la part de Stanislas pour les y pousser (l’approche injurieuse d’Oran ayant bizarrement donné des résultats contrastés). D’autre part car, après avoir contenu à grand-peine les premières vagues Skavens, Badenov et Dietrich se retrouvent confrontés à un Rat-Ogre très en colère, ce qui les pousse à une prudente retraite dans le beffroi. Heureusement pour eux, les assaillants sont aussi abrutis que notre héros, et ne profitent pas de l’occasion pour s’échapper du bâtiment en flammes, et préfèrent lancer leur monstre sur les talons des mercenaires. Un escalier qui s’effondre plus tard, Badenov est contraint de laisser Dietrich s’expliquer en tête à tête avec Mâchecrâne pendant que lui essaie de se rendre utile en s’enquérant du silence radio de Pieter. Ce dernier, d’abord surpris et presque garrotté à mort par Otto, a toutefois fini par prendre le dessus sur son assaillant, et l’a pendu par le cou jusqu’à ce que mort s’en suive, mettant fin à ses projets d’adoption. Aidé par son incapable de boss, il parvient à décrocher la cloche infernale de sa poutre porteuse, l’envoyant écraser le Rat Ogre en contrebas juste avant qu’il ne puisse donner le coup de grâce à Dietrich, qui mourra avec la satisfaction du devoir accompli. Ceci fait, il ne reste plus à nos deux loustics qu’à effectuer un petit saut de la foi dans une charrette de foin astucieusement positionnée par leurs comparses pour compléter leur mission, et la ruine totale du temple. Il serait cependant litigieux de revendiquer une victoire totale pour l’Empire, la cloche hurlante ayant cassé les oreilles (et pas que) de Nagenhof n’étant pas retrouvée dans les décombres fumantes le lendemain…

1 : Comprendre qu’il y a beaucoup d’images mais qu’elles sont vraiment pas terribles.

AVIS:

Tristement égal à lui-même, Jonathan Green livre avec La Cloche de Nagenhof une nouvelle aventure des plus insipides de sa bande de mercenaires fétiche. Pénalisée par le manque d’inspiration de l’auteur, qui recycle péniblement un classique de la littérature pour meubler son intrigue, ainsi que par le style lourd de Green (champion du monde des « comme (si) » et « eh bien »), l’histoire ne brille ni par le fond (mais pourquoi est-ce qu’Otto pensait qu’il serait accueilli à pattes ouvertes par les Skavens ?) ni par la forme (mais pourquoi est-ce que Green informe le lecteur que Dieter a perdu sa main en combattant Mâchecrâne dix ans plus tôt seulement deux lignes avant que les deux personnages ne se rencontrent à nouveau1 ?). Comme à son habitude, Badenov se révèle être un abruti fini, guidé par la sagacité de l’indispensable Pieter Valburg plutôt que par ses propres réflexions brumeuses, et quant au reste de sa bande, elle sert essentiellement de décor humain au drame qui se noue à Nagenhof, démontrant les lacunes qu’a l’auteur à faire évoluer un groupe de personnages de façon crédible et intéressante. Tout le monde n’est pas Dan Abnett ou C. L. Werner. En définitive, on retiendra simplement que Jonathan Green pourrait poursuivre Assassin’s Creed en justice pour plagiat du saut de la foi2, et que le titre de l’omnibus collectant les nouvelles de la bande de Badenov, « les damnés et les morts » tire son origine de la remarque que se fait son leader minimo à la fin de La Cloche de Nagenhof. Ce qui n’est pas lourd, certes.

1 : C’était pourtant un moyen facile et efficace de faire monter un peu la tension avant l’affrontement. Si Green avait écrit l’Hérésie d’Horus, on aurait appris que l’Empereur était le père de ce dernier au livre 59, pendant une discussion anodine entre Pépé et ses Primarques dans l’ascenseur les menant au téléporteur du Palais Impérial.
2 : La nouvelle ayant été publiée en 2001, 6 ans avant la première édition du jeu.

ILS L’ONT ECRIT:

La Cloche de Nagenhof_Nuff said

.

Les Épées de l’Empire // Swords of the Empire – D. Abnett :

INTRIGUE:

« Cher journalle en pô de shèvre, si je prens la plume aujour dui, bien ke je ne soyes pa un skribhe, mésun chevalié de la Reiksguard, cé ke j’en nai greau et ke le monde doigt savoir. »  Ainsi commence l’histoire narrée par velin caprin interposé par notre narrateur, Jozef von Kassen, qui, pour tromper les longs mois de l’hiver kislévite, s’est mis en tête de chroniquer par le menu les aventures l’ayant amené à squatter avec ses hommes la stanitsa de Kzarla. C’est donc à la chronique d’une chronique, exercice meta en diable, que l’auteur de ces lignes se prête ici, sur un support bien moins classe qu’un parchemin de biquette je le reconnais, mais nécessité fera loi.

Notre récit débute à Altdorf, où von Kassen est chargé par ses supérieurs d’escorter la vadrouille d’Udo Jochrund, maître sorcier du Collège Lumineux et spécialiste de la magie tribale kislévite, sur son terrain de prédilection. Accompagnés d’une vingtaine d’hommes d’armes, notre héros doit assurer la sécurité de sa charge pendant qu’elle recensera les fascinantes traditions chamaniques des peuplades du grand Nord, entreprise qui semble occuper la plus grande partie des étés de Jochrund. Von Kassen, qui est une âme simple, se méfie d’abord des pouvoirs occultes dont son compagnon de voyage dispose, mais la pédagogie dont ce dernier fait usage pour convaincre son protecteur un peu concon qu’il n’a rien à craindre, et la gentillesse manifeste de l’érudit1, finissent par gagner la confiance du soldat. Commence alors un périple long de plusieurs mois, permettant à l’expédition de visiter quantité de communautés kislévites, au lecteur d’apprendre pas mal de choses sur nos personnages (à commencer par l’intérêt fort et sincère que porte von Kassen à tout ce qui à trait aux chèvres2) et sur la culture locale, à Jochrund de collecter des tonnes d’échantillons et de témoignages, et à Abnett de remplir facilement une vingtaine de pages, ou une peau de chèvre entière dans le cas de son héros. Ceci dit, le périple n’est pas sans rencontrer quelques difficultés occasionnelles, comme la fois où les aventuriers ont dû batailler pendant une heure pour repousser l’assaut de brigands locaux, pour un résultat sans appel – mais un peu surprenant si on prend compte la longueur de l’affrontement – de quatre morts à zéro3.

Les choses deviennent un peu plus sérieuses lorsque la petite troupe atteint le village septentrional de Svedora, nommé ainsi à cause du chapeau traditionnel que tous les hommes célibataires avec collier de barbe portent. Eprouvés par des mois de marche à travers les plaine du Kislev, les impériaux ont une allure plutôt miteuse, ce qui mène le krug local à leur barrer la route d’un air menaçant. Von Kassen parvient toutefois à dissiper ce fâcheux malentendu, gagnant la confiance de son homologue, un beau gosse à l’armure et l’épée étincelantes, et à la moustache soyeuse, du nom de Subarin. Accueillis en grande pompe par leurs hôtes, les voyageurs savent qu’il ne leur reste que peu de temps pour faire demi-tour, l’arrivée prochaine de l’automne menaçant de les isoler pour la mauvaise saison dans une stanitsa de troisième ordre. Aussi, c’est avec une lassitude non feinte que von Kassen s’entend réclamer par le sorcier un nouveau délai, pour aller visiter une ultime communauté située à quelques jours de voyage au Nord de Svedora.

Guidés par un trio de guerriers locaux, dont Subarin qui souhaite apparemment concrétiser sa bromance naissante avec von Kassen, les impériaux parviennent à leur destination, Kzarla, mais non sans avoir essuyé une embuscade de la part d’une bande de Kuls agressifs, et perdus quelques membres de l’équipée au passage. Après avoir à nouveau négocié leur entrée dans le village auprès du krug local, les riders de l’extrême sont envoyés crécher dans une yourte à l’extérieur de la communauté, qui est sur le point de célébrer un rituel important pendant lequel aucun étranger n’est toléré intra muros, exception faite de Jochrund et de son assistant, Sigert. Le comportement maniaque de sorcier a cependant alerté von Kassen, et lorsqu’il assiste à ce qui ressemble beaucoup à une procession sacrificielle emmenant une accorte damoiselle locale jusqu’à l’île où se situe le temple local, le preux chevalier ne peut rester dans sa tente à se saoûler au koumiss, comme ses camarades. Faisant fi de l’interdit, il se précipite donc dans le village, épée à la main…

Début spoiler…Ses suspicions se trouvent confirmées lorsqu’il aperçoit Jochrund et Sigert en train d’assister le chamane de Kzarla dans ce qui ne peut être qu’un sacrifice païen de la pauvre vierge droguée. Sans chercher à réfléchir, et comme le vrai GOAT qu’il est, von Kassen interrompt la cérémonie, se saisit de la fille et repart dare-dare vers sa yourte, ayant poussé le chamane dans la flotte gelée et décapité ce fourbe de Sigert au passage, lorsque l’acolyte lui avait planté une dague dans la cuisse. Quant à Jochrund, dont la manie de toujours porter des gants a trouvé une explication logique mais chaotique pendant ce tohu-bohu (les mains du sorcier étaient en fait des griffes), il a écopé d’une javeline de la part de l’estimable Subarin dans la hanche pour sa peine.

La perfidie du sorcier est confirmée par le recueil du témoignage de la donzelle (Mariya), une fois redescendue de son bad trip. Von Kassen apprend ainsi que ce jocrisse de Jochrund a convaincu le chamane local de procéder à un véritable sacrifice – auparavant, les Kislévites se contentaient d’en mimer un, n’étant pas les brutes épaisses pour lesquelles von Kassen les tenait – afin de s’assurer de la réussite d’un rituel de clémence météorologique. Ce qui n’a l’air de rien dit comme ça, mais aurait permis aux hordes de cet obscur chef de guerre du nom d’Arcachon, ou quelque chose comme ça, d’envahir le Kislev et l’Empire plus tôt que normalement possible. Avant de pouvoir alerter ses supérieurs de la duplicité du mage et du grave péril dans lequel le Vieux Monde se trouve, von Kassen doit toutefois négocier un ultime contretemps : l’arrivée d’une large bande de Kurgans convoqués par Jochrund, qui compte bien laver Mariya de tous ses péchés d’un coup de surin enchanté, pour offrir un hiver clément à son boss. Se battant à plus de un contre quatre, le krug local ayant été envoyé chasser le dahut par les manigances de Jochrund quelques jours plus tôt, nos vaillants héros livrent toutefois bataille avec bravoure, perdant la majorité des leurs sous les coups des maraudeurs mais prélevant un lourd tribut parmi leurs assaillants. Alors que tout semblait perdu, le retour inespéré de lanciers ailés de Kzarla scelle la déroute des chaoteux, tandis que Jochrund se fait occire par l’incontournable Subarin d’un revers de sa prodigieuse épée. Il est toutefois trop tard pour que von Kassen et ses survivants puissent faire demi-tour, et c’est ce qui explique le zèle littéraire de notre héros, déterminé à laisser une trace de son passage même s’il devait périr de la grippe saisonnière avant le retour des beaux jours. Voilà un dévouement digne d’éloges.Fin spoiler

1 : Ne jamais sous-estimer le pouvoir du mystérieux sourire de (la) Jochrund.
2 : Ainsi, il prend bien soin de préciser que le départ s’est fait à la St Talve, le patron de l’agnelage, information notable sans aucun doute. Après tout, comme il le dit lui-même : « tout ce qui compte aujourd’hui pour moi peut se mesurer en chèvres ».
3 : À moins que le différent n’ait été réglé par une partie de Blood Bowl, ce qui reste une possibilité.

AVIS:

Dan Abnett poursuit sur la lancée (et les lanciers) des Cavaliers de la Mort avec Les Epées de l’Empire, récit d’aventures dans les steppes du Kislev mettant un noble héros aux prises avec les infâmes forces du Chaos, qui peuvent parfois revêtir des traits familiers. Parvenant à nouveau à embarquer le lecteur dans l’exotisme de cette civilisation méconnue sous bien des aspects, l’auteur combine avec maestria action trépidante, intrigue satisfaisante et immersion fluffique poussée. C’est propre, c’est net, c’est Abnett à son meilleur en matière de nouvelles siglées Warhammer Fantasy Battle, et en plus, c’est traduit en français : que demande le peuple ?

ILS L’ONT ECRIT:

Les Epées de l'Empire_Nuff said

.

***

Voilà qui conclut cette chronique long overdue, comme disent nos amis anglais, d’un recueil historique de nouvelles WFB, qui a plutôt bien accusé le passage des années, si vous voulez mon avis. Passée l’adaptation que nécessite le « retour » à la VF, j’ai trouvé la traduction d’un niveau satisfaisant, bien loin des scories et coquilles fréquentes dans les ouvrages contemporains. Merci à la Bibliothèque Interdite1 d’avoir réalisé un travail sérieux à ce niveau, le contraire ayant pu avoir des conséquences fâcheuses pour le plaisir de lecture. Quant aux nouvelles en elles-mêmes, elles sont majoritairement d’un bon niveau (je vous laisse soin d’identifier les deux exceptions), et permettent de découvrir ou s’immerger dans l’univers sauvage, sombre et malgré tout héroïque, du Monde qui Fut à travers la prose de quelques uns des auteurs les plus doués de la Black Library de l’époque, et aux côtés des têtes relativement connues du Vieux Monde que sont Mathias Thulmann, Zavant Konniger et la bande de Badenov. Si vous êtes nostalgiques du fluff du premier jeu de batailles fantastiques de Games Workshop, et que vous souhaitez vous payer une petite virée dans cet attachant panier de crabes (chaotiques, pour certains), ce petit opus vaut définitivement les quelques euros pour lesquels on peut le trouver d’occasion. Et si vous êtes nouveau sur l’axe Altdorf-Talabheim, Les Epées de l’Empire peut constituer une bonne introduction à la production littéraire dont le Vieux Monde a bénéficié avant sa fin malheureuse, et vous donner envie d’aller plus loin avec vos auteurs favoris de l’anthologie2. Bref, une vieillerie comme on les aime, qui s’est bonnifiée avec le temps et la destruction de sa franchise d’origine pour gagner une délicate patine de nostalgie. Vous m’en lirez des nouvelles !

1 : Ou plutôt Kaneda, créditée pour la traduction de cet ouvrage sur la page de garde.
2 : Malheureusement, si vous ne lisez pas l’Anglais, le choix se réduira à ‘La Marque de la Damnation’ de James Wallis, ‘Mort ou Damné’ de Jonathan Green, et/ou ‘Les Cavaliers de la Mort’ de Dan Abnett. Le dernier est un vrai classique ceci dit.

 

WARRIORS & WARLORDS [40K]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette chronique du recueil Warriors & Warlords, dédié à l’illustration des hauts faits et dirty deeds1 commis par les guerriers et seigneurs du 41ème millénaire, mais également, et de manière plus prosaïque, au regroupement de nouvelles 40K publiées précédemment sous d’autres formats, et rassemblées dans cette anthologie assez conséquente. Comme cela avait été le cas pour son « grand frère » Lords & Tyrants, W&W est donc un moyen commode pour la BL de redonner une seconde jeunesse à des histoires déjà sorties, mais à un prix de gros, ou de grosse, vu que nous sommes ici en présence de 12 courts formats. Et on ne va pas s’en plaindre !

Sommaire Warriors & Warlords (40K)

Première chose à noter avant de se lancer à corps perdu dans la dissection de ce volume, tel un Fabius Bile – qui se trouve d’ailleurs sur la feuille de match, courtesy of Mr Reynolds – en roue libre : le nombre significatif de pointures de la Black Library rassemblée en ces pages. C’est bien simple, la quasi-totalité des noms convoqués ici sera familière aux lecteurs habitués à la GW-Fiction à la sauce grimdark, et même les « nouveaux-venus » que sont Peter McLean, Matt Smith et Rachel Harrison ont déjà fait leurs premières armes pour le compte de la BL. On se gardera bien de présenter les piliers de Segmentum que sont Wraight, Thorpe, McNeill et Haley, et il y a fort à parier que vous ayez déjà jeté un œil aux travaux de Reynolds, McNiven, Lyons et Kelly par le passé, ou que ces noms vous soient a minima familiers si vous lisez ces lignes. Bref, nous sommes ici en territoire plutôt connu, ce qui ne doit pas nous empêcher d’exercer un œil critique et un jugement impartial sur la qualité des nouvelles qui nous sont proposées. Après tout, nous (ou en tout cas, je) avons payé pour les lire. Cet investissement s’est-il avéré rentable ? Voyons donc ça…

1 : Done dirt cheap pour certains d’entre eux, spécialement si un Noise Marines est aux commandes.

Warriors & Warlords

.

Unification – C. Wraight :

INTRIGUE:

UnificationUnification nous propose de suivre le Capitaine Vorx de la Death Guard, bien avant qu’il ne devienne littéralement le Roi du Silence (Lords of Silence), pendant trois événements de sa longue carrière s’étant déroulés, non pas au temps des rires et des chants du rift qu’il est grand, mais au tournant du 31ème millénaire, quand la XIVème Légion était encore fidèle à l’Empereur, et juste après qu’elle se soit faite empestée par Nurgle lors de son voyage retour vers Terra (c’est ce qu’on peut appeler un problème de transit).

Le premier tableau voit les stoïques ex-Dusk Raiders mener à bien la mise en conformité du monde Xenos d’Oura’Nuoma, jusqu’ici la possession d’hommes papillons – ou équivalent, ils ont des ailes1 et des bouches qui ressemblent à des flûtes – en compagnie d’un petit contingent de Blood Angels, affecté à cette opération uniquement pour des raisons marketing, ou du moins si l’on se fie à la vision des choses de notre héros. Après tout, tout le monde sur Terra est fou des fils de Sanguinius, alors que la Death Guard doit se contenter de la simple satisfaction du travail bien accompli. Cela n’empêche pas Vorx de tenter de sympathiser avec un de ses homologues sur le champ de bataille, le Capitaine Camanio. Après s’être tapé deux vents de suite, d’abord en le complimentant sur la précision de ses tirs, puis en assurant que le bastion qu’ils assiègent tombera bientôt (ce qui revient à discuter de la météo pour un Astartes pendant la Grande Croisade), Vorx est distrait de ses tentatives de socialisation par l’arrivée de Mortarion en personne sur le champ de bataille. S’il est ravi et honoré par l’implication de son Primarque, le commentaire acerbe que lui souffle Camanio, qui qualifie Morty de « sac d’os » et tous ceux qui le considèrent comme un fils de l’Empereur de grands malades mentaux (en substance), choque en revanche profondément notre pauvre Capitaine, qui se met à éprouver une certaine colère à l’encontre de son vis-à-vis.

Bien avant cette campagne, nous partons ensuite sur Barbarus, surnommé par l’Empereur « le Finistère galactique » à son arrivée en orbite autour de la planète pour des raisons qui restèrent mystérieuses à la plupart de son entourage, sauf Malcador. C’est un Vorx encore tout minot que nous retrouvons alors, recruté avec le reste des valides de son minuscule hameau pour défendre ce dernier contre les déprédations d’un des terribles Rois Pâles, humanoïdes géants et blafards au sourire bovin et à l’appétit féroce. Au cours de l’escarmouche, Vorx perd ses deux parents sous les coups ou les semelles de l’envahisseur, mais est sauvé par l’intervention inattendue autant que salutaire d’un inconnu gigantesque maniant la faux avec une aisance consommée, et qui a tôt fait de réduite Paulo le Pâlot en carpaccio. Mortarion, car c’était lui, propose ensuite aux villageois reconnaissants de se joindre à son entreprise de fédération rebelle, ce que ces derniers déclinent poliment. Vorx, que plus rien ne retient sur place de toutes façons, décide lui de suivre l’étranger masqué, et finit par devenir l’un des soldats de la petite armée que le Primarque entraîne pour renverser les Rois Pâles. C’est ainsi que le jeune homme apprend lui aussi à manier la faux et à décupler son endurance, lors de trails réguliers dans les montagnes de Barbarus et de batailles incessantes contre les hordes livides des Xenos esclavagistes qui dominent la planète.

Notre histoire se termine pendant le siège de Terra, auquel l’incontournable (et d’autant plus depuis que les dons de Nurgle lui ont fait gagner un bon mètre de tour de taille) Vorx participe avec le reste de sa Légion. L’occasion pour lui de régler un vieux compte avec un certain Blood Angel, dont la remarque mesquine sur Oura’Nuoama n’a toujours pas été digérée. Le duel qui s’engage entre les deux Capitaines, s’il ne s’avère guère équilibré, Vorx pétant la forme dans tous les sens du terme alors que Camanio a été affaibli par des jours de combats incessants et la dégradation irrémédiable de sa précieuse panoplie, permet au moins au futur Seigneur du Silence de mettre un point, ou une faux, final à la querelle qui l’opposait à son rival, et d’apprendre à ce dernier à respecter le nom et le look de Mortarion. Cette leçon de lutte contre le body-shaming valait bien une hérésie, sans doute.

1 : Ironiquement, Vorx considère ces appendices comme une déchéance totale. J’imagine qu’il a changé d’avis lorsque Mortarion est passé sur le bloc des chirurgiens démoniaques.

AVIS:

Si l’inclusion de cette nouvelle dans un recueil portant sur le 41ème millénaire et non l’Hérésie d’Horus, où Unification aurait eu toute sa place, peut poser question, ce qui ne fera pas débat est en revanche le grand intérêt fluffique de cette lecture pour les hobbyistes s’intéressant de près ou de loin à la Death Guard et son Primarque, que l’on voit ici à l’œuvre sur Barbarus, période encore mal couverte de la vie du fumeur de chicha de la fratrie. En moins de vingt pages, Wraight parvient ainsi à donner un éclairage instructif sur la psyché de Mortarion, qui influencera fortement celle de sa Légion après sa redécouverte, ainsi qu’à livrer quelques bribes du combat mené par le fauchard masqué et son armée de partisans contre les mystérieux Rois Pâles régnant sur sa planète d’adoption (dont on apprend également l’origine du nom, au passage). À cela s’ajoute quelques éléments instructifs sur la manière dont la Death Guard opérait en son temps de loyauté, les effectifs qu’elle pouvait mobiliser, les campagnes sur lesquelles elle a été déployée, et, plus important, la manière dont elle était perçue par ses pairs à l’époque. Pour finir, Wraight parvient à faire passer ce contenu utile et passionnant pour les amateurs de lore sous le couvert d’une petite histoire de rivalité professionnelle entre l’affable Vorx et le dédaigneux Camanio, juste assez caractérisés par l’auteur en introduction de son propos pour que le lecteur s’intéresse au règlement de comptes qui vient clore cet Unification, en même temps qu’il semble ouvrir le siège de Terra. Je ne sais s’il faut demander à la Black Library de donner un cookie à Chris Wraight devant ce résultat des plus probants, mais j’espère en tout cas que les pontes de Nottingham penseront à lui lorsque se posera la question de choisir l’auteur de la novella Primarques dédiée à Mortarion…

.

Lightning Run – P. McLean :

INTRIGUE:

Lightning RoadSur la planète d’Elijan III, les forces du glorieux Empereur de l’Humanité sont en train de se faire mettre minable par le culte chaotique local, menaçant de priver l’Imperium des précieuses ressources de prométheum de cette colonie. Affectée au transport d’un général de la Flotte, la pilote Salvatoria Grant patiente dans le cockpit de sa bien-aimée Valkyrieen attendant l’arrivée du colis, et tue le temps en murmurant à l’oreille du tableau de bord de son oiseau de fer, s’attirant des remarques acerbes de son co-pilote, le fumiste et fumeur Herrion. Avant que Grant n’ait eu le loisir de mettre sa menace de flinguer l’irrespectueux à bout portant (grosse ambiance), le général Gobrecht arrive avec son escorte, et enjoint son chauffeur Uber de l’amener à la base Patroclus en moins de huit heures, ce qui ferait la différence entre la victoire et la défaite pour cette campagne. Si un raccourci est techniquement faisable pour tenir ces délais serrés, ce dernier force toutefois la Valkyrie à chevaucher au dessus du territoire ennemi, ce qui, je vous le donne en mille, ne se termine pas super bien pour le fringant appareil. Heureusement pour nous d’ailleurs, sinon la nouvelle aurait fait cinq pages. Bref, le coucou se prend un missile en pleine queue, Sal’ fait du sale, et crashe son appareil dans un bout de forêt bien loin derrière la ligne de front, avant de sombrer dans l’inconscience avec la satisfaction du devoir presque bien accompli1.

À son réveil, elle a tôt fait de réaliser qu’elle est la seule survivante de son atterrissage sauvage, le général Gobrecht s’accrochant à son ultime point de vie juste assez longtemps pour lui remettre un anneau de pouvoir qu’elle devra aller jeter au cœur de la Montagne du Destin, et… euh, pardon, erreur d’univers. L’anneau que le gradé blessé à mort lui remet est un décodeur de niveau vermillon, dont le haut commandement de la base Patroclus aura besoin pour décrypter les plans de bataille de l’ennemi, envoyés par mail sécurisé quelques heures plus tôt. À cela s’ajoute un mot de passe en haut gothique, parce que ça fait classe, qui permettra à la coursière commise d’office d’accéder jusqu’à la base en question sans se faire abattre en cours de route. Ceci fait, il ne reste plus qu’à notre héroïne qu’à troquer sa licence de Kaptain pour celle de Deliveroo, ce qui ne fait pas grande différence, il faut bien le reconnaître. Un rapide coup d’œil sur le temps qui lui reste et sa position sur la carte l’amène toutefois à une conclusion logique : il lui faudra piquer un avion aux hérétiques pour tenir les délais. Coup de chance, une base aérienne chaotique ne se trouve qu’à quelques kilomètres du lieu du crash, permettant à la débrouillarde Grant de hijacker un Lightning laissé à l’abandon sur le tarmac. Quelques tirs de pistolet laser plus tard, et grâce à la magie de la standardisation de la technologie impériale, notre pilote est donc de retour dans les nuages, dans un cockpit détrempé de sang certes, mais nécessité fait loi.

Ce n’est cependant pas la fin des problèmes pour Grant, qui doit maintenant trouver un moyen de se poser sans se faire dégommer par un tir ami, l’aspect proto-punk de son avion incitant les forces impériales de tirer à vue. Ces petits rigolos de cultistes ayant piraté la radio de bord, elle a ainsi toutes les difficultés du monde à se faire comprendre de la part de la tour de contrôle locale, et ne réussit à négocier une autorisation d’atterrir qu’après avoir été forcée d’abattre quelques missiles et détruire quelques Hydres en dessinant l’aquila dans le ciel. Ce léger malentendu, ayant toutefois fait 29 morts du côté loyaliste et réduit l’épaule de notre héroïne en steak haché, dissipé, Grant peut enfin remettre sa précieuse bagouze à la colonel Shrake (baptisée en hommage à l’Ogryn philosophe, avec lequel elle partage une certaine ressemblance physique), et recevoir quelques soins. S’attendant à finir devant le peloton d’exécution à cause du carnage – certes involontaire – qu’elle a provoqué sur la base à son arrivée, elle est cependant la première surprise de se retrouver catapultée héroïne de l’Impérium pour son action décisive dans la campagne d’Elijan III, prestement remportée par le camp des gentils une fois leur décodeur installé.

Ce n’est cependant pas tout à fait la fin pour Grant, dont l’élévation au statut d’outil de propagande ne fait pas grand-chose pour combattre la profonde dépression dans laquelle ses actes désespérés l’ont fait sombrer. Devenue alcoolique, et utilisée sans vergogne par le haut commandement comme motivation speaker, ou quelque chose comme ça, à destination des bidasses des Flotte et Garde impériaux, Grant réalise amèrement qu’il n’est décidément pas facile de faire son devoir pour l’Impérium, que l’on soit simple pilote ou tête de gondole. Espérons qu’elle puisse bénéficier des sages conseils de Ciaphas Cain sur le sujet avant de commettre l’irréparable…

1 : Il y a une leçon à tirer de cet accident. Si tu es un personnage de McLean et que l’on te propose de faire un tour de Valkyrie, run (‘No Hero’).

AVIS:

McLean livre avec Lightning Run une nouvelle d’action pure, qui n’aurait pas dépareillée au sommaire de l’anthologie Wings of Blood, se terminant avec un twist final d’un genre un peu particulier et faisant à mes yeux tout l’intérêt d’une soumission autrement très classique (mais efficacement mise en scène et déroulée quoi qu’il en soit). En effet, en suivant Grant pendant les quelques semaines venant après son sauvetage de la campagne d’Elijan III, l’auteur montre à quel point le statut d’héros de l’Imperium peut être dur à porter malgré les apparences, et comment l’appareil de propagande impérial a tôt fait de mettre à profit les individus méritants, sans grande considération pour leur bien-être ou leur santé mentale. Cet aspect de l’effort de guerre, peu abordé jusqu’ici dans la GW-Fiction, permet de conclure la nouvelle sur une touche un peu plus originale, même si bien sombre1, que ce que le déroulement des événements ne nous le laissait pressentir. La marque d’un auteur qui ne se contente pas de servir la soupe, mais cherche à faire sortir ses écrits du lot, ce qui n’est jamais un mal dès lors que les idées sont intéressantes et l’exécution convenable.

1 : Et encore, je pense que McLean aurait pu faire bien pire dans ce registre. Après tout, Grant finit l’histoire vivante, non ?

.

Light of a Crystal Sun – J. Reynolds :

INTRIGUE:

Light of a Crystal Sun

De retour de sa petite virée shopping & smashing dans le Vaisseau Monde Lugganath (Primogenitor), Fabius Bile se retrouve confronté à un problème aussi insoluble qu’acéré. Le cristal qu’il a dérobé dans le bosquet psychique des Zoneilles, et qu’il compte utiliser pour découvrir la manière dont ces derniers arrivent à stocker l’intellect et la personnalité de leurs Prophètes dans de la matière inerte, refuse obstinément de livrer ses secrets. Pire que ça, il se permet de gueuler comme un putois en rut dans son laboratoire, ce qui apparaît à notre rationnel savant fou (car l’un n’exclut pas l’autre) comme hautement improbable. Après tout, si les morts peuvent danser, ils ne devraient pas pouvoir hurler. Fascinant. Ab-so-lu-ment fa-sci-nant.

Si Bile tient tant que cela à craquer les mots de passe des Eldars, c’est qu’il aimerait bien pouvoir disposer d’une copie externe de sa précieuse personne, qui consomme corpus sur corpus à un rythme soutenu depuis plusieurs millénaires. Et si la maîtrise du clonage dont il dispose lui permet de continuer son grand œuvre sans trop perdre de temps, chaque transfert dans un nouvel organisme s’avère plus risqué que le précédent. Voilà pourquoi notre Apothicaire touche à tout bricole dans son laboratoire depuis plusieurs jours, faisant grande consommation de Psykers maison pour tenter de débloquer ce contenu caché. Ses tâtonnements ayant conduit un grand nombre de ses serviteurs à l’état de légumes décérébrés, Fabio décide de prendre les choses en main, ou plutôt, en tête, se prépare un petit cocktail psychotrope carabiné, et prend place dans le cercle des mutants en voie de disparition, malgré les conseils de prudence proférés par son fidèle Narthecium1, Arrian Zorzi. Après un petit cul sec, c’est donc parti pour une session d’oculus rift d’un genre particulier.

Et si le début de partie se passe sans problème pour notre cyber grand-père, qui, coquet, se choisit même un avatar reflétant sa plastique au moment du siège de Terra, le soleil cristallin au cœur du Vaisseau Monde, habité par les âmes et esprits des Eldars défunts de Lugganath, ne tarde pas à darder des rayons hostiles en direction de l’intrus. S’en suit une bataille digne d’un boss fight de Dark Souls, Fabius cassant du cristal de droite et de gauche – et assommant sans doute quelques Psykers au passage avec ses grands moulinets – sans obtenir de résultats probants jusqu’à l’expiration du timer, marqué par la combustion spontanée des batteries psychiques survivantes. Jugeant cette manifestation comme un signe que la partie était mal engagée, Arrian coupe la connexion à la borne, sauvant probablement la vie de son chef, mais ne décourageant pas ce dernier de retenter sa chance dès que ses laborantins lui auront installé une nouvelle LAN. Press Start… Press Start…

1 : L’équivalent d’un bras droit chez les Apothicaires.

AVIS:

Quand une nouvelle se termine sans avoir fait avancer la situation dans laquelle le protagoniste se trouve au départ, on peut légitimement se poser la question de son intérêt. Et, bien que mon attachement pour Josh Reynolds reste aussi sincère que profond, nous nous trouvons malheureusement dans ce cas de figure avec Light of a Crystal Sun. L’Apothicaire cancéreux arrivera-t-il à hacker le disque dur cristal externe de Lugganath, ou les pare-feux psychiques installés par les Guerriers Aspects du Temple de Dent Bleue1 se révéleront-ils trop coriaces pour le papy gâteux ? Eh bien, on ne le saura pas, ou en tout cas pas ici. Si l’auteur démontre une fois encore qu’il est parfaitement à l’aise dans la mise en scène du 41ème millénaire et l’utilisation de personnages nommés aussi iconiques que Fabius Bile, la copie qu’il rend cette fois-ci est tristement quelconque, et même assez confuse lorsque Georges Cloné se frite avec l’avatar vitreux et vitré du Vaisseau-Monde pillé. Retenons simplement que Fabius a un beef en cours avec ce poseur d’Ahriman – l’information la plus importante de la nouvelle, en toute objectivité – et restons-en là.

1 : Peu connu mais très utile, surtout quand l’âge moyen de votre population dépasse allègrement les 500 ans.

.

Exodus – S. Lyons :

INTRIGUE:

Exodus

Sur la planète Katraxis flotte une petite atmosphère de fin du monde. Et pour cause. Le Culte Genestealers local – parce que maintenant que c’est une faction Codex, tous les mondes dignes de ce nom se doivent d’en avoir un – a particulièrement bien fait ses devoirs, et est parvenu à déclencher catastrophe naturelle sur catastrophe naturelle depuis qu’il a fait son coming out. Entre les séismes, ouragans, tsunamis et autres éruptions solaires que les cultistes semblent capables de provoquer1, les vaillants efforts des Forces de Défense Planétaire du Gouverneur Strawhagen se révèlent insuffisants pour endiguer l’hémorragie et faire revenir la situation à la normale. Même l’aide appréciable apportée par le 132ème Régiment de Valhalla, les fameux Guerriers de Glace, et le coup de main désintéressé des Ultramarines, n’a pas permis d’inverser le cours des choses. Et pourtant, tous les chauves de la planète ont été fusillés en l’espace de quelques semaines (pas de demi-mesure). Rien n’y a fait cependant, et Katraxis ne tardera pas à recevoir la visite d’une vrille de la flotte ruche Kraken, pourtant majoritairement vaincue par ce beau gosse de Calgar il y a peu. Ce que la population civile de la planète, qui se chiffre tout de même en quelques dizaines de milliards, et notre premier héros, le jeune FDP2 Arch Teilloch, ne savent pas, c’est que les pontes de l’Imperium ont déjà fait leurs calculs, et que Katraxis ne sera pas disputée à l’adversaire. Pour l’heure, Teilloch a reçu la mission d’escorter le cortège du Gouverneur jusqu’au spatioport local, malgré l’animosité non dissimulée et grandissante de la plèbe. Car sur Katraxis, tout le monde déteste vraiment la police.

Un peu plus loin, nous faisons la connaissance de notre second protagoniste, le Sergent Konrad Ven Mikkelson de Valhalla, qui, tel le lapin blanc dont il a utilisé la fourrure pour se faire une chapka, est en retard, très en retard. Le zèle xénocide de son escouade l’a en effet poussée à prêter main forte aux locaux dans la purge des cultistes, alors que l’évacuation du régiment était déjà en cours. Rechignant à quitter ce théâtre d’opérations sur ce qui lui semble être une défaite morale (et un taux de pertes scandaleusement bas), Ven Mikkelson doit cependant se hâter s’il ne veut pas être laissé derrière, à un destin qu’il sait ne pas être enviable. Manque de pot pour nos retardataires, leur chemin dans les ruines de la ville croise celui d’un couple de Lictors en goguette, qui mettent à mal un soldat de l’escouade, et auraient sans doute taillés des croupières à ses petits camarades sans l’intervention salutaire d’une escouade d’Ultramarines d’assaut, elle aussi engagée en plein repli tactique. Ayant achevé leur blessé, volé une voiture et grillé allègrement tous les feux rouges et Stops du quartier, Ven Mikkelson et Cie parviennent finalement à sauter dans leur navette au dernier moment possible, provoquant chez le Sergent un soulagement bien compréhensible mêlé d’un sentiment de honte qu’il l’est tout autant…

De l’autre côté du spatioport, la situation est moins joyeuse pour Teilloch et ses collègues, qui se retrouvent contraints de tirer à balles réelles dans la foule pour l’empêcher de prendre d’assaut le terminal. Même les rares bonnes nouvelles de cette sale journée, comme la réquisition d’une flotte marchande pour évacuer quelques centaines de milliers de civils, arrivent avec leur lot de tâches peu enviables, ici le filtre des candidats à l’émigration. Les critères sont draconiens : moins de 35 ans, en bonne santé (après la chauvophobie, c’est la grossophobie qui fait des ravages) et surtout, surtout, pas un cultiste Genestealers. Plus facile à dire qu’à faire, surtout quand on a une demi-seconde pour prendre sa décision et que les éconduits ont la fâcheuse tendance à vouloir vous faire la peau. De plus en plus écœuré par son boulot, et notamment par la fuite sans gloire du Gouverneur, Téloche conserve cependant suffisamment de conscience professionnelle pour… abattre un de ses amis s’étant fait déserteur et tentant d’embarquer à son tour à bord d’un des vaisseaux réquisitionnés. L’uniforme – même s’il est moche – c’est sacré après tout. Cependant, ce dévouement ne sera pas justement récompensé, le dernier message pré-enregistré par ce planqué de Strawhagen informant les masses laborieuses qu’elles auront l’honneur et la joie de recevoir un Exterminatus sur le coin du nez pour priver l’odieux Xenos de son prochain déjeuner. Bizarrement, la nouvelle est assez mal reçue par le petit peuple…

Début spoiler…Dans la sécurité relative de l’espace, nous retrouvons Ven Mikkelson et ses survivants. Le départ de leur vaisseau vers un nouveau théâtre d’opération est cependant brutalement interrompu, provoquant le renversement intempestif d’hectolitres de vodka lorsque tous les buveurs se retrouvent jetés au sol par un soubresaut imprévu. Après les traditionnelles deux heures d’attente pour autant de messages cryptiques de la part du personnel navigant (il y a des choses qui ne s’amélioreront jamais), le Colonel Stan Lee Ztanlev briefe ses hommes sur la situation. Le retard pris au décollage *bravo Ven Mikkelson* a permis aux premiers éléments de la flotte ruche d’arriver dans le système et de couper ce dernier du Warp. Si les autres vaisseaux impériaux ont pu s’échapper à temps, celui du 132ème est coincé sur place, ne laissant plus qu’une option aux vaillants Gardes Impériaux : foncer sur le vaisseau ruche adverse en espérant faire le plus de dégât possible. Et, bien évidemment, en ne débarquant pas les soldats sur la planète auparavant, histoire qu’ils puissent servir à autre chose que rajouter un peu de poids à la tentative d’emboutissage tentée par le capitaine. Ven Mikkelson se sent logiquement très mal, et c’est ainsi que nous quittons ce fieffé traînard, dont le sacrifice ne pèsera finalement pas lourd dans la balance (pensez à un kart qui tenterait de renverser un 35 tonnes).

Sur terre, Teilloch rentre machinalement chez lui après la fin de sa probable dernière journée de travail. Cherchant à donner un but à sa vie, qu’il sait être courte, il assiste avec effroi à l’arrivée en orbite de la flotte Xenos et au vain sacrifice des Valhallans, ce qui le décide à donner un petit discours inspirant aux quelques pelos qui l’entourent. Il n’a pas le temps de finir cependant que les premiers pods s’écrasent sur la planète, enclenchant l’end game pour Katraxis. Teilloch aura au moins la satisfaction de mourir en combattant l’invasion, en compagnie de ses compatriotes. Tout le monde n’a pas pu en dire autant…Fin spoiler

1 : Ils ont dû recruter un joueur désœuvré de Sims City, ce n’est pas possible autrement.  
2 : Vous y avez pensé. Pas moi.

AVIS:

Derrière sa façade de « bête » histoire de Gardes Impériaux issus d’un régiment nommé1, Lyons trousse une nouvelle se concentrant, plus que sur les performances martiales et policières de ses héros, sur les conséquences cruelles des guerres tyraniques pour les planètes jugées indéfendables par l’Imperium, sujet in fine plus intéressant que le récit circonstancié de la purge d’un Culte Genestealers ou l’annihilation d’un essaim de Termagaunts, deux tâches que les défenseurs de Katraxis se sont de toutes façons révélés incapables de mener à bien de façon satisfaisante. Bien fait pour eux, donc.

Mis en fausses vedettes de cette publication, couverture porteuse de chapka à l’appui, les braves Guerriers des Glaces de Valhalla ne s’illustrent pas par leur légendaire bravitude face à l’adversité, seule la décision finale de leur officier de transformer leur vaisseau de transport en voiture bélier (avec des résultats a priori peu concluants) venant sauver l’honneur pour les Ruskovs galactiques. Les irréprochables Ultramarines en prennent également pour leur grade, leur tendance à se frayer un chemin à coups de bolter à travers une foule de civils n’étant certainement pas Codex approved. Dans les deux cas, nécessité fait loi j’imagine, mais le portrait que dresse Lyons du marteau et des meilleurs de l’Empereur n’est certes pas très flatteur. Face à cette faillite morale dissimulée derrière une retraite stratégique, c’est finalement le parcours d’Arch Teilloch qui apparaît le plus héroïque. Passé de milicien sans états d’âmes et tueur de sang froid à figure inspirante pour la résistance locale – certes pour moins de deux minutes au final – il porte haut les couleurs (orange et bleu) des Forces de Défense Planétaire, et devient de fait le parangon de la combativité humaine face aux invasions Xenos2. Mis bout à bout, ces partis pris intéressant, intrigues miroirs et conclusions surprenantes font grimper le capital sympathie de cet Exodus, sauvé de la banalité absolue par l’inventivité de Steve Lyons.

1 : Un sous-genre de la 40K-Fiction auquel Lyons a souvent contribué, que ce soit pour les Guerriers de la Jungle de Catachan (‘Waiting Death’), le Death Korps de Krieg (‘Left for Dead’) ou la Garde de Fer de Mordia (‘Solace’).
2 : Il y a une double trajectoire intéressante dans cette nouvelle. Ven Mikkelson et ses hommes croient qu’ils sont sauvés mais finissent par mourir tout de même, avec un fort sentiment de culpabilité pour le Sergent (positif -> négatif). À l’inverse, la réalisation de Teilloch qu’il est condamné le pousse à devenir meilleur qu’il ne l’a été jusque là (négatif -> positif). Ce double twist final est à mettre au crédit de Lyons.

.

A Company of Shadows // La Compagnie des Ombres – R. Harrison :

INTRIGUE:

A Company of Shadows

Les choses ne se passent pas tout à fait comme prévu sur le front de Gholl pour la Commissaire Severina Raine et ses Fusilières du 11ème régiment d’Antari, forcés d’effectuer un redéploiement stratégique depuis la cité de l’Arrête de Caulder suite à la poussée de ces diables de Clairvoyants. Escortant un officier impérial aussi important pour la suite de la campagne qu’insupportable de morgue, l’escouade de Raine embarque dans une Valkyrie, promptement descendue par un missile qui lui a grillé la priorité à droite, avec des conséquences variant du dommageable au définitif pour notre petite bande de personnages, qui se trouve encore réduite une fois le sol atteint. Perdus au milieu des contreforts escarpés et sous contrôle ennemi connus sous le nom de la Gueule, ralentis par leurs blessés et ne pouvant décemment laisser tomber leur charge entre les mains des cultistes, qui ont déjà démontré de manière graphique qu’ils faisaient grand et bon usage des gradés impériaux, Raine et ses hommes décident de tenter un bluff pour priver les Clairvoyants de leur proie. L’intrépide Commissaire endosse donc l’uniforme de la Tacticae Principal, et organise un dernier carré ne pouvant se terminer par autre chose que sa capture, mais permettant, l’Empereur aidant, au colis d’être récupéré ni vu ni connu par les renforts de la Garde. Téméraire mais pas suicidaire, Raine prend soin de confier au Sergent Wyck (Daven de son nom malheureusement, et pas Jöhn) sa montre de gousset, dont l’imprégnation psychique devrait permettre à un psyker digne de Lui de la retrouver jusque dans le bastion des chaotiques.

Le succès quasi total de la première partie de ce plan audacieux laisse donc nos héros séparés. D’un côté, un commando d’Antaris, incluant, outre les Farouches de Wyck, une escouade de Storm Troopers menée par le Capitaine Andren Fel, âme damnée et probable love interest de Miss Raine, ainsi que la psyker sanctionnée Lydia Zane, se lance dans une course contre la montre (mais avec le concours de cette dernière également, if you see what I mean) pour extraire leur petite camarade des griffes des Clairvoyants. De l’autre, cette dernière a la désagréable surprise d’apprendre que les cultistes ne sont absolument pas tombés dans le panneau, mais qu’ils voulaient la capturer depuis le début. C’est ce que lui apprend le magos en charge des opérations, un charmant individu répondant au nom d’Arcadius Verastus, alias 9/9. Il a en effet perçu dans l’âme de sa prisonnière un potentiel des plus alléchants, qu’il compte offrir à Tzeentch pour favoriser son avancement. Ayant manifestement un peu de temps à tuer avant Severina, il prend plaisir à soumettre l’inflexible Commissaire à un interrogatoire poussé, s’insinuant sans gène dans son esprit pour tenter de lui dérober ses secrets les plus honteux1. Même si ces introspections malpolies permettent au lecteur d’en apprendre un peu plus sur le passé de Raine, et notamment le fait qu’elle a repris le nom de sa mère (la Raine-Mère donc), Lord-General Militant de carrière, et choisi d’enterrer celui de son père, sommairement exécuté pour couardise, elles coûtent cher au psyker indélicat, qui se prend une mandale mentale dans les gencives pour sa peine. Victoire morale de l’Imperium.

Pendant ce temps, les intrépides sauveteurs en terre et Antari réussissent à franchir les cordons de sentinelles (pas si) Clairvoyantes (que ça) grâce à leur badasserie naturelle, et à pénétrer dans le bastion ennemi grâce au traqueur GPS de Zane, qui voit clair à travers les illusions tissées par les sorciers ennemis et emmène ses camarades dans la gueule du loup sous couvert d’un tour de passe-passe de son propre cru. Juste à temps pour empêcher l’énucléation et égorgement sauvage de Purple Raine (interrogatoire musclé oblige) par 9/9, qui apprécie moyennement l’intervention non scriptée des bidasses en folie, et se met à leur tailler des croupières psychiques pour la peine. Malheureusement pour Arcadius, Zane détient un MBA de Stanford en occultisme, alors que lui a à grand peine bouclé sa première année de BTS au Lycée Professionnel Ohrmuzd Ahriman de Vaulx-en-Velin, et la confrontation qui s’en suit est à sens unique. Bien que jurant son grand dieu que tout ça faisait partie de son plan, Arcadius a donc l’obligeance de décéder de mort violente quelques secondes plus tard, après que sa prisonnière lui ait mis un peu de plomb dans la cervelle.

Dès lors, il ne s’agit plus pour nos hardis Antaris (Anthardis donc) que d’évacuer les lieux avant que le Haut Commandement ne déclenche le bombardement orbital de la Gueule, ce qui n’est bien sûr qu’une formalité pour ces soldats d’élite. Voilà comment transformer une honteuse défaite en glorieuse victoire, et arracher l’initiative aux hordes damnées contestant la mainmise de Pépé sur la belle planète de Gholl. Comme on dit chez les Ogryns : Go Gholl !

1 : Comme le nom du Primarque sur lequel elle a écrit des fan fictions torrides pendant ses années à la Schola Progenium. On a tous été jeunes !

AVIS:

Nouvelle conséquente dédiée à la nouvelle égérie de la BL, catégorie Commissaire, A Company of Shadows permet à Rachel Harrison de donner du relief à son imposante galerie de personnages, ainsi que de situer le cadre dans lequel ils évoluent. Tout cela est fait de manière fort capable, et dénote d’une belle ambition en terme de construction d’intrigue , mais le grand nombre de points communs avec la saga Gaunt’s Ghosts (une Commissaire héroïque avec un lourd secret de famille et ses relations tantôt amicales – Fel = Corbec – tantôt à couteaux tirés – Wyck = Rawne – avec les officiers de son régiment, qui sont des super soldats venant d’un monde recouvert de forêts, et engagée dans une vaste campagne contre une faction chaotique…) ne risque-t-il pas d’être rédhibitoire à la dernière née de la Black Library ? Même s’il est plus que probable qu’Abnett approche de la toute fin de sa propre série, à supposer qu’il démarre un nouveau cycle après celui de La Victoire, et laissera donc le champ libre à d’autres auteurs dans un futur plus ou moins proche, il est loin d’être évident que les lecteurs de la BL adhèrent en masse à ce qui sera toujours perçu, plus ou moins consciemment, comme la resucée de la saga phare 40K. Le succès du premier roman de cette nouvelle série en puissance, Honourbound, sera sans doute déterminant pour le futur de Raine et de ses Antari, comme First and Only l’a été, en son temps, pour Gaunt et ses Tanith.

.

Blood and Bone – R. McNiven :

INTRIGUE:

Mystas est perdue. Cette pauvre planète, aux plages ensoleillées et aux mers irisées, avant que les vaisseaux ruches Tyranides ne viennent les siphonner avec leurs pailles géantes, vit en effet ses dernières heures sous domination impériale. Seule une demi-escouade d’Intercessors Space Marines menée par un inflexible Chapelain offre encore quelque résistance aux vagues de chitine qui déferlent sur sa position. Rendu colère par le tour qu’ont pris les événements, le manieur de crozius (et mangeur de crozets), un dénommé Kastor que les lecteurs habitués ne manqueront pas de reconnaître, refuse toutefois obstinément de lâcher le moindre pouce de terrain face aux haineux Xenos, quand bien même son Capitaine (Demeter) lui a donné l’ordre de rentrer au bercail.

Ayant flingué les Gaunts venus demander sa dédicace (un peu) et prélever des échantillons ADN (surtout) en mode automatique jusqu’à ce que même les sophistes reconnaissent que les bestioles sont au contact, Kastor passe en mode manuel, active sa fidèle matraque énergétique et commence à latter des carapaces, prenant suffisamment la confiance pour aller titiller les Guerriers Tyranides formant la seconde ligne des assaillants. Et là, c’est le (quasi) drame. Pris d’un trou de mémoire soudain après la première strophe de sa litanie de haine, Rhagondin se fait malmener par son adversaire, et n’est sauvé que par l’intervention salutaire du frère Cassians, qui se prend un grand jet de bio-acide dans la carrosserie en récompense de ses loyaux services. La situation ne va pas en s’améliorant pour notre héros, qui, victime d’une droite vicieuse d’un autre poids lourd ennemi, se mord la langue et a donc bien du mal à articuler les vers de son rap extrémiste. Sans doute concussé dans la mêlée, il commence même à agir de façon incohérente, en crachant à la gu*ule de l’adversaire… sans enlever son casque. Je demande un protocole commotion cérébrale immédiatement ! Mais que fait l’Arbites ? Finalement, il faut que Demeter, vraiment très déter’, vienne le tirer par la peau du slip énergétique jusqu’à la soute de l’Overlord qu’il a réquisitionné pour évacuer ses derniers hommes de la planète, pour que le combatif Chapelain accepte de rentrer à la niche, non sans avoir écopé d’une belle entaille sur le côté de la figure, et d’un bout de griffe en plein cœur. Just a scratch.

En orbite de la planète condamnée, nous arrivons au côté de l’autre moitié du sang d’Iax, Polixis, frère de Kastor et Apothicaire de la Fulminata (le détachement Primaris rattaché aux Ultramarines). Polo, qui est un type ordonné et méticuleux, applique la procédure et commence donc par traiter les blessés les plus graves, en l’occurrence le malheureux frère Cassians, qui pèle vraiment sévèrement sous son armure. Tout en raclant la bouillasse qui recouvre le torse du malheureux jusqu’à l’os, et en pratiquant son special move, perfectionné après des années de pratiques dans le bloc opératoire, le triple pontage du cœur aux- la réception de scalpel en aveugle, Polixis se fait la réflexion qu’il a condamné son frère à mort. Oh ! Shocking ! Ce qui est bien sûr faux, mais permet de redonner un peu de suspens à une nouvelle qui risquait sinon d’en manquer.

Une fois l’application des deux fines couches de pe…au artificielle appliquée sur le thorax de Cassians, et en attendant de pouvoir lui éclaircir les pec’ et lui faire des free-hands de tétons, Polixis daigne enfin passer au cas familial. On découvre alors que notre bougre donne ses consultations et pratique ses opérations en armure complète, casque compris. Peut-être a-t-il peur de choper le coronavirus. En tout cas, c’est ridicule, tout comme le vilain tour que joue Kastor à son aîné, en faisant semblant de mourir un peu, vision mystique à l’appui, pour le faire bisquer. Cela n’empêche cependant pas l’Apothicaire de retirer la vilaine écharde que le Chapelain avait dans le palpitant à l’aide d’une grosse pince à épiler, et de stabiliser l’état de son frère en deux temps, trois mouvements. Il réalise également que Kastor n’a pas subi une vision prophétique, mais s’est simplement souvenu du bon vieux temps, lorsque tous deux étaient enfants et qu’ils ont décidé d’emprunter la noble voie de l’Astartes. Si Polixis s’est fourvoyé, c’est que lui n’a aucun souvenir de son enfance1. Comment ça, on s’en fout ? En tout cas, c’est sur ces touchantes retrouvailles fraternelles que se termine notre propos, prélude aux événements relatés dans Blood of Iax/Le Sang d’Iax.

1 : Peut-être à cause d’un vilain coup sur la tête pendant son noviciat ? En tout cas ça expliquerait le casque.

AVIS:

Archétype/caricature de la nouvelle filler, Blood and Bone n’a vraiment pas grand-chose à apporter au lecteur, mis à part quelques scènes de combat pas originales du tout entre Ultramarines et Tyranides, suivies d’une opération à cœur ouvert plus ridicule qu’instructive sur les pratiques médicales des Space Marines. Pour les passionnés des frangins bodybuildés1, McNiven soupoudre son récit d’une micro-révélation sur leur passé à moitié oublié (littéralement), et d’un échantillon de leur relation de complémentarivalité, qui sera bien sûr au cœur du roman Blood of Iax/Le Sang d’Iax. Il semblerait toute fois que l’une comme l’autre soit déjà abondamment couvertes dans l’ouvrage en question, ce qui réduit d’autant plus l’intérêt de cette lecture, plus redondante (un peu comme le style de McNiven) qu’éclairante au final.

Bien que l’auteur ait cumulé les handicaps sur cette soumission (travail de commande pour apporter du contenu « exclusif » à l’édition limitée de son roman, protagonistes étant des Space Marines Primaris du Chapitre des Ultramarines – soit la sous-faction la plus soporifique de 40K –, petit nombre de pages…), ces derniers n’expliquent pas à eux seuls le niveau absolument basique de la nouvelle, qui ne donne certes pas envie d’en savoir plus sur les pérégrinations cosmiques des Rizzoli & Isles de l’Ultima Segmentum. Pire, McNiven réutilise ici la technique dite de la « phrase-choc-qui-se-révèle-en-fait-être-une-grossière-exagération », déjà mise à profit dans A Brother’s Confession2, et aggrave donc sérieusement son cas en plus d’épuiser le peu de patience que l’auteur de ses lignes avait gardé en réserve pour sa prose. Bref, je propose de renommer ce Blood & Bone en Bullsh*t & Billevesées (indeed) et de ne plus évoquer ce sujet embarrassant avant quelques millénaires.

1 : Pro tip : l’histoire est beaucoup plus drôle si on se représente les Barbarian Brothers à la place des proprets Kastor et Polixis. Ce qui donnerait ça.
2 : Dans le premier cas, on avait eu le droit à la confession de Polixis du meurtre de l’un de ses frères de bataille… qui s’était avéré n’être qu’un non-ramassage de ses glandes progénoïdes post-mortem, pour cas de force majeure. Ici, on nous expliquer que Polixis a choisi de laisser mourir Kastor… alors que non, il se contente d’appliquer les consignes et de prodiguer des soins aux blessés les plus graves en priorité.

.

The Battle of Blackthunder Mesa – P. Kelly :

INTRIGUE:

The Battle of Blackthunder Mesa

La situation des défenseurs T’au de la planète Dal’yth, et plus particulièrement, de l’académie militaire située sur cette dernière, est positivement catastrophique. Isolés par le retrait des troupes de cette fayotte de Shadowsun, qui s’est repliée sans coup férir au lieu de se battre jusqu’au bout, comme le préconisait Farsight, les derniers guerriers de la caste du feu en sont réduits à livrer de coûteux et futiles combats d’arrière-garde pour ralentir l’avancée des impériaux, et permettre, peut-être, d’évacuer les survivants de la Star Academy locale. Placés sous l’autorité du Commander Bravestorm, adepte convaincu de la vision hypermétrope de la guerre de Farsight (et pour cause), nos héros viennent cependant de recevoir du matos un peu spécial, commandé auprès des grosses têtes de la caste de la terre il y a peu et livré sous forme encore expérimentale : des gants de boxe énergétiques. En effet, poussés par l’épuisement de leurs munitions et la puissance de feu de leur adversaire, Farsight et Bravestorm ont changé leur fusil à impulsion d’épaule, et monté une opération osée pour engager les tanks ennemis au corps à corps. Cela n’est certes pas très conventionnel, comme le fait remarquer la pimbêche (Furuja) du groupe1, mais nécessité faisant loi, Bravestorm emmène donc son cadre de cadets à l’assaut de la tristement célèbre Blackthunder Mesa, transformée en drive-in pour Leman Russ et Basilisks par l’Imperium depuis quelques semaines, avec des conséquences architecturales dramatiques pour la ville universitaire de Dal’Ryu, située en contrebas.

Si le déploiement de notre petite force d’Iron Men ne pose pas de problèmes, grâce à la maîtrise du vol furtif et à la technologie avancée du Bien Suprême, les choses se compliquent toutefois assez rapidement pour les concasseurs de tôle. Bien que Bravestorm ait pris soin d’indiquer à ses élèves qu’il fallait mieux rester au cœur de la mêlée pour gêner les tanks dans leur utilisation de leurs armes de défense, le poids du nombre, le comportement kikoulol de certains, et l’arrivée importune d’un Stormhammer, font lentement grimper les pertes du côté des punchers, bien que leurs maniques custom prélèvent un lourd tribut parmi les colonnes blindées de l’ennemi. L’équilibre des forces se renverse cependant brutalement lorsque, non pas un, mais deux Titans Warlord viennent se joindre aux festivités. L’apparition « subite » de ces discrètes et furtives machines de guerre en dit long sur le degré de préparation de l’opération, mais cela sera une discussion pour une autre fois. De toute façon, Bravestorm est certain que les nouveaux-venus n’oseront pas tirer sur les T’au, qui sont toujours engagés dans une partie d’auto-tamponneuse hardcore avec les blindés impériaux. Sa suffisance de Xenos idéaliste se trouve donc méchamment battue en brèche lorsque le turbo-laser du Titan de tête ouvre le feu sur les empêcheurs de bombarder en rond, réduisant le cadre de Bravestorm en confettis et cuisant ce dernier dans son armure.

Ce n’est cependant pas la fin pour notre héros trop confiant, qui trouve les ressources intérieures nécessaires pour faire abstraction de ses blessures et partir à l’assaut de la machine meurtrière. Son dernier fait d’arme consistera donc à « égorger » son adversaire en lui arrachant le câble d’alimentation, « fier comme un dindon », euh, tendon, courant le long du « cou » de la machine. À quoi cela a-t-il servi ? À rien en fait, puisque Bravestorm se prend à son tour une baffe monumentale – on saluera la dextérité de l’équipage impérial pour arriver à atteindre une cible aussi petite – s’écrase au sol comme une bouse, et sombre dans une inconscience logique. Certes, il a le temps de voir les forces impériales, dont le Titan trachéotomisé, se retirer de la mesa avant de tomber dans le coma, mais la victoire stratégique qu’il revendique au nom du Bien Suprême me semble un peu tirée par les cheveux (lui n’en a pas, je vous l’accorde). Après tout, c’était peut-être seulement l’heure de la cantine du côté adverse ?  En tout cas, notre increvable héros n’a pas dit son dernier mot, puisque sa carcasse mutilée finit par être récupérée sur le champ de bataille par les éboueurs de la caste de la terre. Pas encore tout à fait mort, il entend ses sauveteurs discuter des conséquences positives de son coup d’éclat quasiment fatal, qui a au moins permis de préserver les derniers quartiers de Dal’Ryu des déprédations impériales. La nouvelle se termine sur la réalisation que Bravestorm sera bien sauvé, mais au prix d’un enfermement perpétuel dans son Exo-armure, ses blessures étant trop graves pour espérer une véritable guérison. Assez ironique pour un personnage ouvertement Dreadnoughtophobe2

1 : Qui remonte toutefois dans mon estime grâce au magnifique « OK Gooder » (l’équivalent de notre OK Boomer) expédié à son supérieur un peu plus loin.
2 : Ce n’est pas qu’il en ait peur, mais la vue des pilotes Space Marines mutilés le dégoûte. Il en fait même des cauchemars.

AVIS:

Kelly retourne une fois encore sur la planète Dal’yth (Redemption on… Dal’yth) pour livrer un compte rendu romancé de la première utilisation d’une arme expérimentale T’au, le fameux gantelet Onagre. Si j’ai pu deviner à la lecture de cette nouvelle qu’elle mettait en scène des personnages déjà présentés dans d’autres textes qu’il a consacré à la couverture de la campagne de Damocles, l’immersion dans la galerie de seconds couteaux (rituels) gravitant autour de Farsight ne s’est pas faite sans difficultés de mon côté. En cause, le nombre de personnages convoqués par l’auteur1, et la complexité naturelle des patronymes T’au, qui se sont conjugués pour rendre difficile l’identification, et à travers elle, l’intérêt, de votre serviteur envers les pioupious de l’académie que Bravestorm a pris sous son aile. Cette difficulté évacuée, le récit de la fameuse bataille de Blackthunder Mesa ne m’a pas collé à mon siège, du fait du caractère binaire de l’affrontement en question. Si les Exo-armures commencent par faire des gros trous dans les tanks impériaux, sans vraiment être mises en danger par leurs proies (plutôt qu’adversaires), l’arrivée du titan renverse totalement la situation en un seul tir (merci Bravestorm), éparpillant le maigre suspens agencé jusqu’ici par Kelly aussi facilement que les assaillants Xenos venus souffler dans les chenilles des blindés de l’Empereur. On saluera tout de même la bonne « préparation » faite par l’auteur de la destinée claustrophobie de Bravestorm, qui après la Voie de la Lame Courte suivra celle de la Boîte de Conserve, sort ironique eut égard à l’effroi que lui inspirait les Dreadnoughts Space Marines. Au final, une lecture qui pourra intéresser les familiers de la prose suprêmiste de Kelly, mais qui n’a pas grand-chose à apporter au tout venant à la recherche d’un récit de bataille prenant.

1 : Ironie du sort, ils y passeront presque tous avant la fin de la nouvelle. C’était bien la peine de faire des efforts.

.

By Your Command – G. Thorpe :

INTRIGUE:

By Your Command

<surlaplanetenicomedua> + <ledatasmithundrasactivea> + <reveillerungroupederobotskastelan>… … … <reparamétrage_enclenché>. Ahem. Je disais donc que sur la planète Nicomedua, le Datasmith Undra s’active à réveiller un groupe de robots Kastelan. Plus lisible, clair et agréable ? Je m’en doutais. Mais il va pourtant falloir vous endurcir, amis lecteurs, car cette synthaxe aglutinée reviendra à plusieurs reprises dans notre nouvelle, trouvaille suicidaire1 de Gav Thorpe pour faire comprendre à son public qU’iL y A dEs RoBoTs DaNs SoN hIsToIrE. Mais revenons-en à nos moutons électriques. Nous faisons la connaissance d’Alpha 6-Terror, Kastelan en chef de l’escouade de six qu’Undra a sorti de sa torpeur pour aider l’équipage du Titan Casus Belli à repousser les assauts d’une bande de Space Marines du Chaos, dont les semelles boueuses et les goûts musicaux déplorables (ce sont des Emperor’s Children) menacent la sainteté de leur machine de guerre géante. Ayant reçu ses instructions (Détruire. Sécuriser. Protéger.) de la part du Datasmith, assorties d’une mise en garde formelle contre la puissance destructrice des armes soniques de ses ennemis, Alpha part au combat à la tête de ses hommes machines, le zélé Undra sur ses talons.

Bien que l’épaisseur de leur carapace protectrice et le prodigieux armement qu’ils trimbalent permettent à nos marcheurs de combat de repousser sans ménagement les quatre Astartes emperruqués qu’ils finissent par débusquer en train de faire des cochonneries dans un coin de l’akropoliz titanesque, l’échauffourée en question ne réussit pas le moins du monde à Undra, proprement tronçonné par un Space Marine revanchard avant que ce dernier ne se trouve contraint à la retraite. Dans son dernier souffle, l’adepte parvient toutefois à insérer sa clé USB personnelle dans un port du brave Alpha, transférant son esprit dans la machine. Bien que la perte de son enveloppe corporelle, et l’impossibilité pour le robot porteur de manipuler la délicate tablette de données de son garde chiourme avec ses gros doigts énergétiques, empêche notre duo de garder le contrôle du reste de l’escouade, qui s’en va pesamment DPS-er un peu plus loin, Undra réussit à ordonner à sa nouvelle monture de se rendre à la metempsykoza, où l’animus du défunt pourra être définitivement sauvegardé. Contraint par les trois lois de la robotique, c’est donc le chemin que prend cette terreur d’Alpha.

Evidemment, le parcours se révélera semé d’embûches, mais notre vaillant androïde, bien aidé par son copilote à certains moments, et par d’heureuses coïncidences à d’autres, parvient finalement à proximité de son objectif… pour se prendre un méchant riff de gratte bien saturé en plein cortex de la part d’un Noise Marine embusqué au deuxième balcon, incapacitant notre héros de façon terminale. Et pourtant, on lui avait dit que l’écoute prolongée à haut volume pouvait provoquer des lésions irréversibles ! Alors que ses systèmes se ferment les uns après les autres, présageant sa « mort » prochaine, Alpha a le temps d’échanger quelques questions métaphysiques avec son passager, condamné comme lui, sur la vie, la mort, l’âme et les pizzas hawaïennes avant que son système interne ne plante définitivement. Notre histoire se termine-t-elle sur ce constat d’échec ? Non ! Car Alpha 6-Terror finit par se réveiller, mais réalise qu’il n’est plus en possession de ses membres. Et pour cause, cette sangsue d’Undra, aussi intransférable que Lionel Messi, a échappé au trépas en parasitant son hôte et prenant le contrôle de ses fonctions motrices. Le 31ème millénaire a vu l’invention des Kastelans, le 41ème millénaire celui des Kastelans schizophrènes. Et on dit que l’Imperium ne sait plus innover…

1 : Je veux dire que jusqu’à présent, la seule chose qu’on ne pouvait pas retirer à Thorpe était que son style était lisible. Et voilà qu’il se met lui-même un bâton dans les roues. Quelle légende.

AVIS:

Même en lui faisant grâce de ses vaillants mais peu inspirés efforts calligraphiques, sensés représenter les communications de la sainte trinité du Mechanicus (l’homme, [lamachine] et {l’animus}), Gav Thorpe signe avec ce By Your Command une autre soumission des moins mémorables, car se concentrant quasi-exclusivement sur la mise en scène d’un affrontement insipide entre deux factions dont les particularités ne sont pas bien mises en valeur. Ainsi, la cohorte robotique d’Alpha 6-Terror, bientôt réduite à sa plus simple expression à cause d’un bête oubli de mot de passe (ou l’équivalent au 41ème millénaire), se contente d’errer de salles en salles en tentant de neutraliser quelques Emperor’s Children en maraude, tandis que ces derniers restent cantonnés au rôle de goons en armure à paillettes.

Ce manque d’inventivité de la part de Thorpe dans la nature des péripéties qu’il met sur la route du mâle robot Alpha est d’autant plus triste qu’il semblait avoir préparé le terrain à plusieurs endroits pour introduire un peu de variété à son propos. Undra met en garde son roomba blindé contre le potentiel dévastateur des armes soniques des Noise Marines ? Alpha se prend un tir, certes dévastateur, mais sans grande valeur ajoutée d’un point de vue narratif, d’éclateur sonique, point. Les membres de l’escouade Terror se « rebellent » contre l’autorité de leur chef ? Il les laisse partir sans rechigner1. L’über super duper Magos Dominus Exasas arrive avec ses troupes pour flinguer du traître ? Il repart tout de suite après, et on ne le reverra plus de la nouvelle. Bref, Thorpe a vraiment opté pour la ligne droite en termes d’intrigue et de déroulement de son histoire, ce qui lui permet certes de la boucler en quelques pages, mais n’incite pas vraiment le lecteur à l’enthousiasme délirant à propos de cette dernière.

On pourrait arguer que l’intérêt de ce By Your Command repose davantage dans les réflexions sur ce que la mort (et à travers elle, la conscience de son individualité) représente pour un adepte du Mechanicus (qui peut donc se « réincarner » dans un appareil électroménager à proximité de sa dépouille) et pour un robot conscient comme les modèles Kastelan, mais là encore, ça ne casse pas trois méchadendrites à un Servo-Crâne. Si le sujet peut être intéressant, et a donné à la Science-Fiction des chefs d’œuvre tels que Le Cycle des Robots (Asimov), ce ne sont pas les deux pages que Thorpe consacre à ce thème en conclusion de sa nouvelle qui viendront bouleverser la perception du lecteur sur cette thématique2. La somme de péripéties banales et d’une conclusion embryonnaire ne se révélant pas supérieure à ses parties constitutives, on sera donc pardonné de ranger cette nouvelle dans le dossier meh de la BL.

1 : Moi qui commençait à me hyper pour un duel de robots, j’ai dû prendre sur moi.
2 : Si vous voulez lire une adaptation plus réussie de cette dernière dans l’univers de 40K, je vous recommande ‘The Kaban Project’ de Graham McNeill.

.

Sand Lords – P. McLean :

INTRIGUE:

Sand Lords

Où il sera question du Capitaine Amareo Thrax et de sa colonne blindée du 236ème Régiment des Tallarn Desert Raiders, engagés dans une course éperdue vers la sécurité des lignes impériales. Si Thrax et ses hommes (et femmes, pas de sexisme chez les Tallarn) sont si pressés de rentrer au bercail, c’est d’abord qu’ils ne sont plus très nombreux (un Leman Russ et trois Chimères, sur vingt-huit véhicules initialement engagés), ensuite que les réserves d’eau et de carburant commencent à baisser dangereusement, et enfin que quelque chose de gros, menaçant et très énervé les poursuit sans relâche à travers les dunes de Marbas II. Quelque chose contre lequel même le courage et les ressources de ces légendaires guerriers des sables ne peuvent espérer prévaloir. Mais pour mieux comprendre de quoi il en retourne, il nous faut faire un petit crochet vers le passé récent, pendant que nous laissons Thrax porter un toast à l’urine en l’honneur de la Chimère qui vient de perforer son joint de culasse de façon irrémédiable…

Si notre vaillant Capitaine se trouvait dans le désert de cette planète pour commencer, c’est parce qu’il avait reçu la mission de la part d’un Colonel1 de se rendre dans les ruines de la ville d’Iblis Amrargh, prise par les envahisseurs Orks dont la présence a justifié le déploiement des Tallarn sur Marbas II, pour récupérer le khalig (cimeterre) du Général Al-Fallan, héros des Desert Raiders, dérobé après sa mort par le Big Boss Gorebrakah Urlakk. Une telle relique ne pouvant pas rester entre les griffes des Xenos, qui n’en auraient de toute façon aucune utilité si ce n’est pour émincer des Squigs, le haut commandement du 236ème a donc donné à Thrax l’ordre de reprendre le légendaire coupe papier, localisé dans la cathédrale de la ville, investie par la vermine verte. L’officier a également reçu un briefing plus complet de la part de son boss sur les tenants et aboutissants de la mission, mais ne le partagera pas avec de simples lecteurs tels que nous. Ou en tout cas, pas tout de suite.

Si les premiers temps de l’assaut donné par la colonne blindée sur Iblis Amargh se passent sans soucis, l’armement, le blindage et la vitesse des tanks impériaux leur permettant de forcer sans coup férir les barrages mis en place par les fonctionnaires Grots délégués à la surveillance du camp Ork, un tir de plasma bien senti, pulvérisant une Chimère dans le plus grand des calmes, marque le début des ennuis pour Thrax, qui ne s’attendait pas à rencontrer une résistance si forte si tôt dans la mission. Ayant perdu un peu de temps et beaucoup de munitions à canarder les alentours dans le vain espoir d’abattre le faquin plasmique qui lui a fait des misères et vaporisé son vieux copain Al-Nasir, Thrax finit par donner l’ordre de repartir, perdant de plus en plus de châssis et de personnel au fur et à mesure que les Orks réalisent qu’ils sont attaqués, et que l’insaisissable franc-tireur continue à dégommer les SUV de l’Empereur sans se faire voir. Il en faut cependant plus pour décourager nos héros, qui finissent par pénétrer (en char, sinon c’est pas drôle) dans la cathédrale, où les attend le fameux khalig du nom moins célèbre Al-Fallan, ainsi que des hordes de peaux vertes pas vraiment jouasses…

Début spoiler 1…Victimes de mines dissimulées, et embusqués par des centaines d’Orks gardés en réserve par ce ruzé de Gorebrakah, les Tallarn se battent comme des lions fennecs, parvenant à récupérer le précieux cimeterre à l’absence de nez et au manque de barbe du Big Boss, qui daigne enfin se joindre aux réjouissances après que les assaillants soient parvenus à se défaire de ses deux mini-boss (un Kommando mastoc avec lance-plasma, et un Nob en Mega-armure). Et là, surprise : Gorebrakah a cassé sa tirelire (ou la figure de tous ses rivaux pour leur piquer leurs dents) depuis la dernière fois qu’il a croisé les Desert Raiders, et est maintenant plus machine que champignon, sa parenté avec un Dred Eud’la mort lui permettant  de désosser sans mal les malheureux tanks lui tombant sous la pince. Pour Thrax cependant, l’objectif primaire consiste seulement à repartir avec le coupe-chou d’Al-Fallan, ce qu’il a fait sans hésiter, laissant derrière lui la plus grande partie de ses soldats.

De retour dans le désert, nous apprenons/comprenons donc que le traqueur des Tallarn n’est autre que Gorebrakah, dont l’amour-propre et le statut contraignent à récupérer son bien sous peine de se faire défier par l’ensemble de ses Nobs-1, et que c’est bien sur cela que comptait le Colonel qui a monté le raid de Thrax. Ce dernier doit donc trouver un moyen de franchir la ligne d’arrivée (bleue) avec le colis pour permettre aux forces impériales de régler son compte à cet illustre ennemi. Les Tallarn sont en effet sport, et se sont contentés d’installer une batterie de Basilisks à plusieurs heures/jours de distance d’Iblis Amrargh pour faire sa fête au Big Boss plutôt que, je ne sais pas moi, réquisitionner des appareils de la Flotte qui les amenés sur place ? Gorebrakah est également sport, notez, puisqu’il poursuit les voleurs de loot tout seul. A gentleman’s war, really.

Ce fair-play ne fait cependant pas les affaires de Thrax et de ses survivants, qui se font insensiblement rattraper par leur poursuivant, condamnant d’abord les malheureux n’ayant pas trouvé place dans les Chimères, puis ces dernières et leur équipage (malgré une héroïque action d’arrière-garde de la Duf’Adar Al-Maddon), ne laissant plus que le Leman Russ du Capitaine, à court de munitions et à bout de nerfs (un des servants se suicidera d’ailleurs plutôt que de se faire éplucher par le Big Boss), tenter d’arracher la victoire…

Début spoiler 2…Ce qui sera finalement cas (ouf), Thrax parvenant à passer la ligne en un morceau, avant que le bombardement déclenché par ses petits copains ne vienne sonner le glas de Gorebrakah, qui aurait dû investir dans un Gargant plutôt que dans un Deff’Dread. Tiré de l’inconscience dans laquelle le barrage ami l’avait plongé par la seule autre survivante de la mission, la pilote Kalan, rendue borgne et folle par les événements (ce qui ne lui a pas retiré son sens de l’humour), Thrax n’a plus qu’à attendre l’arrivée des secours, en espérant que la perte de sa jambe dans l’accident ne lui soit pas fatale. La routine, quoi…Fin spoiler

1 : Qui ne sera jamais nommé (j’ai vérifié). McLean devait être tombé en rade de nom à consonance arabe (on peut d’ailleurs s’interroger sur « Amareo Thrax », au passage…).

AVIS:

Pour sa première virée avec un régiment nommé de la Garde Impériale, Peter McLean livre une nouvelle aboutie, généreuse en termes de fluff et consistante en termes d’intrigue, grâce à sa progression alternée entre le Paris-Dakkar extrême auxquels se livrent Thrax et ses survivants, et les flashbacks de leur mission suicide dans la cathédrale d’Iblis Amargh. L’auteur a suffisamment de maîtrise pour prendre son lecteur au jeu des devinettes quant à l’identité de la chose qui traque les valeureux guerriers des sables dans leur retraite éperdue, et aux véritables objectifs poursuivis par la colonne blindée Tallarn, ce qui rend l’expérience assez plaisante, même si les deux révélations en question ne s’avéreront pas renversantes. Autre point appréciable, McLean applique à ses nouveaux souffre-douleur sujets l’approche sans concession qu’il l’avait vu massacrer les uns après les autres ses personnages du 45ème Reslian (‘No Hero’, ‘Baphomet by Night’, ‘Predation of the Eagle’, ‘Blood Sacrifice’), laissant les deux seuls survivants du carnage perpétré par le ruzé mais brutal (et surtout blindé) Gorebrakah profiter du calme après la tempête dans un piteux état, tant physique que mental. À la guerre comme à la guerre, après tout, et McLean fait partie des contributeurs de la BL qui n’a pas peur d’être graphique dans son approche, ce qui est plutôt un trait positif dans ce genre de littérature, à mon humble avis.

Les seuls reproches que j’adresserai à cette soumission seraient relatifs au choix de l’auteur de ne pas expliquer pourquoi le sous-sol de la cathédrale semble regorger d’armes de pointe d’une part, et de faire se terminer son épreuve d’enduro sous un déluge d’obus plutôt que sous les lasers d’un escadron de Vendettas, ce qui aurait certainement permis aux Tallarn de sauver leur chèche, d’autre part. On me dira que leur mort était de toute façon nécessaire pour le déroulement de l’histoire, et on aura raison, mais je trouve tout de même que le plan du Colonel X – et par extension, celui de McLean – n’est pas au dessus de tout reproche. Il y avait certainement moyen de faire mieux, sans épargner pour autant aux soldats de Thrax leur glorieux sacrifice. Après tout, qui peut dire à quelle vitesse un Ork en Giga-armure peut courir, quand il est recouvert du sang de ses ennemis, et qu’on lui a volé son présssssieux ?

.

The Twisted Runes – M. Smith :

INTRIGUE:

The Twisted Runes

Tel Martin Luther King, le Prognosticator Beynan Rhondus a fait un rêve. Contrairement à Martin Luther King, dont le tort a consisté à ne pas être un Psyker du Chapitre des Silver Skulls, Beynan n’a pas rêvé d’harmonie universelle et de paix éternelle, mais de destruction et de malheur. Et contrairement à son estimé collègue Bhehan (‘The Pact’), aucune bannière(s) n’est venue troubler les nuits de notre héros, qui est plutôt du genre à fantasmer sur des dragons, des voleurs masqués (ohé ohé), des armées d’esclaves, des sentinelles au carré et des prophètes désespérés, une grande bête à tuer et un sorcier aux chevilles enflées. En gros. En tout cas, notre ami est formel lors de son grand oral devant le conseil du Prognosticatum : si le Chapitre ne suit pas sa vision, et ne récupère pas l’objet mystérieux dont le fantôme de son mentor, Aharan, lui a révélé l’existence, c’en sera fini des Silver Skulls. Convaincu par l’exposé de son collègue, le maître des Pronos (Vashiro) autorise le rêveur à procéder comme il l’entend, sans savoir que ce dernier ne lui a pas tout dit. En effet, Beynan a également vu un héros auréolé de gloire et célébré pendant des siècles dans sa vision, et a la ferme intention de se garder ce rôle pour lui-même. Il embarque donc pour la planète de Skythis, dont le ciel est marqué par une constellation semblable à des dragons en train de se battre, accompagné de deux escouades de frères de bataille, dont l’une menée par le Sergent Vétéran Tor’ra, grand ami de son défunt maître, et du Techmarine Rikolux.

Arrivés sur place, et après la consultation des runes protocolaire, qui permet à Beynan de s’assurer que les auspices sont favorables, les Silver Skulls s’enfoncent dans la jungle épaisse du monde sauvage, guidés par l’auspex modifié de Rikolux. Il ne leur faut pas longtemps avant de rencontrer leur premier obstacle, en la présence d’une meute de varans (ou équivalent) cracheurs d’acide et très grégaires, qui ne consentira à battre en retraite qu’une fois leur alpha cuit à l’étouffée par les pouvoirs du Prognosticator. Malgré les pertes subies par son escorte, il conserve son optimisme en cochant une nouvelle case de son bingo divinatoire : la grande bête à abattre, c’est fait ! On commence alors à deviner que ce n’est pas l’humilité qui étouffe notre héros, lorsqu’il balance au circonspect Tor’ra que l’histoire se souvient davantage des meneurs (lui) que des serviteurs (Torah). Grosse ambiance chez les crânes argentés. En même temps, la devise du Chapitre est Primus Inter Pares, alors…

Au bout de quelques heures de marche, les Space Marines finissent par arriver devant une petite clairière où les attend un bunker. Avant qu’ils n’aient pu accéder à la porte de ce dernier, quatre emplacements de bolters lourds sortent du sol et commencent à mitrailler à tout va, renvoyant quelques têtes chromées supplémentaires conter fleurette à Pépé. Protégé par ses pouvoirs psychiques et son armure de scénarium, Beynan parvient à distraire les machines suffisamment longtemps pour que ses frères se débarrassent de ce menu désagrément. Il est toutefois trop tard pour le pauvre Rikolux, dont le cadavre est retrouvé par le Sergent Braxus à la fin des combats. Plus inquiétant, le Techmarine n’a pas été victime d’un bolt, mais d’un tir de sniper. Alors que Tor’ra suggère la prudence, Beynan, tout heureux d’avoir vaincu les quatre sentinelles de sa vision, et de plus en plus paranoïaque quant aux intentions du Sergent Vétéran (qu’il soupçonne de vouloir devenir le héros de la prophétie… alors qu’il n’en a parlé à personne), opte pour une méthode différente : confronter la menace invisible en lui hurlant de se montrer. Evidemment, ça ne donne pas de grands résultats, confortant Beynan dans sa conviction que la mort de Rikolux, qu’il n’a pas vu venir, n’est qu’un détail de son histoire. Après avoir dégagé l’accès du bunker et évité les assauts sauvages de la porte, il est temps pour les survivants de pénétrer dans les ténèbres de Skythis…

Début spoiler 1…Là, ils ne mettent pas longtemps à découvrir une projection holographique très endommagée, représentant un Inquisiteur interdisant formellement à quiconque d’aller plus loin. Il en faut toutefois plus pour forcer Beynan à faire demi-tour, quand bien même Tor’ra semble se souvenir d’avoir croisé le gonze il y a longtemps, et que l’autorité du Prognosticator se trouve de plus en plus contestée par son escorte. La mini-crise interne entre Space Marines est toutefois interrompue lorsque Beynan balance un gros « Qui m’aime et est fidèle au Chapitre me suive » avant de rusher dans la salle suivante, entraînant sa petite troupe derrière lui. Il faudra alors à nos surhommes composer avec une armée de Serviteurs surarmés (l’armée d’esclaves de la vision), puis courir après l’intenable Beynan, qui décide de se la jouer solo et parvient à atteindre le niveau inférieur du complexe bien en avance de ses poursuivants, grâce à ses pouvoirs psychiques et son immense confiance en lui. Lorsque les derniers survivants, incluant Tor’ra et Braxus, parviennent enfin à refaire leur retard, le Prognosticator a déjà vaincu l’automate de combat (le prophète désespéré – oui, ça devient un peu tiré par les cheveux –) qui faisait office de boss de fin en lui faisant tomber une dalle de plafond sur la tête. C’est l’avantage d’utiliser du plasbéton au lieu du placo-plâtre dans sa décoration d’intérieur. Enfin, les Silver Skulls peuvent accéder à l’objet recherché par Beynan, qui se révèle être un bouquin conservé dans un champ de stase. Avant qu’il ait pu s’en saisir, toutefois, Tor’ra vient l’interrompre…

Début spoiler 2…Car les souvenirs du vétéran ont été ravivés par la vision du livre. Il s’est remémoré la mission auquel il avait participé, en compagnie d’Aharan et de l’Inquisiteur désincarné il y a bien longtemps, et au cours de laquelle les Silver Skulls ont aidé ce dernier à voler le grimoire aux Eldars. Dûment brainwashés après la réussite de la mission pour empêcher quiconque d’utiliser leurs souvenirs pour accéder à cette relique, les Space Marines purent retourner à leur Chapitre. Alors que Beynan essaye encore de trouver la quadrature du cercle entre cette révélation et sa propre vision, une bande d’Eldars débarque dans la pièce, menée par la Prophétesse Endrasil du Vaisseau Monde Iybraesil. Le combat qui s’en suit est à sens unique, les Banshees de compagnie d’Endrasil se débarrassant sans difficultés des Silver Skulls blessés et épuisés, pendant que cette dernière met Beynan en PLS d’une pichenette mentale. Elle a toutefois l’amabilité d’expliquer au Prognosticator confus le vrai sens de sa vision, qu’elle avait réussi à provoquer grâce à la possession d’une des runes utilisées par Aharan, et héritées par Beynan à la mort de ce dernier. Ayant besoin d’accéder à la relique dérobée par l’Inquisition il y a un siècle, et peu désireuse de mettre en danger de vies Eldars pour ce faire, Endrasil a lancé Beynan sur cette quête, mais s’il était bien le héros de la vision (les Eldars se souviendront de son sacrifice), le voleur masqué était en fait Aharan, la bête à abattre Tor’ra, et l’armée d’esclaves les Space Marines manipulés par la Prophétesse pour faire son sale boulot. Tout fait enfin sens pour Beynan, qui pourra méditer dans l’autre monde sur les difficultés de l’onirocritique…Fin spoiler

AVIS:

Je dois reconnaître que j’ai abordé The Twisted Runes avec une double appréhension, la première causée par l’appréciation mitigée de votre serviteur des travaux de Matt Smith, et la seconde provenant de l’aura de lose entourant le Chapitre depuis son passage entre les mains de Sarah Cawkwell, du temps de Hammer & Bolter. Eh bien, je suis heureux de vous apprendre que ces doutes étaient infondés, et que Smith est brillamment parvenu à briser la malédiction pesant sur les Silver Skulls, en leur donnant une nouvelle des plus intéressantes (même s’ils n’en sortent pas forcément grandis). En plus d’intégrer à son récit de nombreux éléments de fluff intéressants, pour une teneur en background bien supérieure à celle à laquelle Sarah Cawkwell nous avait habituée, Matt Smith parvient également à faire transparaître l’identité « culturelle » du Chapitre dans The Twisted Runes, et particulièrement le rôle central que la divination et ceux qui en sont chargés (les Prognosticators) occupent pour cette confrérie de super soldats. À la fois force et faiblesse, la lecture intensive des présages que font les Silver Skulls apparaît ici comme un trait central de leur credo, leur permettant (enfin !) de se singulariser de la masse des Chapitres vanille.

En plus de contenter le fluffiste, cette nouvelle bénéficie également d’une intrigue soignée, crédible (ce qui n’est jamais garanti lorsque les intrinsèquement casse-gueule « visions de l’avenir » sont convoquées par l’auteur) et bien ancrée dans le lore de 40K1, faisant de sa lecture une expérience prenante et plaisante. Si l’on se doute rapidement que Beynan (que l’auteur rend à la fois héroïque et antipathique, richesse de caractère assez rare pour un Space Marines créé de toutes pièces pour une nouvelle de vingt pages) n’est sans doute pas aussi en contrôle de sa destinée qu’il semble le croire, et que la surprise du dénouement s’en trouve donc un peu amoindrie, Matt Smith parvient néanmoins à clôturer son propos de façon élégante2 et appropriée, sans faux raccord narratif ou omission discutable. Bref, sans doute la nouvelle à lire en priorité si vous voulez (re)donner une chance aux Silver Skulls de briller.

1 : En particulier la bonne utilisation que fait Smith de l’effacement de la mémoire des Space Marines ayant assisté un Inquisiteur sur une mission particulièrement sensible. La pratique a beau être tout ce qu’il y a de plus canon, je l’ai toujours trouvée sous-employée par les auteurs de la BL.    
2 : J’ai particulièrement aimé la double mise en perspective de la science délicate de la divination, d’abord par la révélation d’Endrasil à Beynan qu’il avait fait un hors sujet complet, puis par la réalisation par cette dernière qu’elle-même s’était (légèrement) plantée en pensant que c’était Aharan qui mènerait les Silver Skulls, sans avoir réalisé qu’il était mort depuis des mois.

.

Savage – G. Haley :

INTRIGUE:

SavageNotre histoire s’ouvre sur un concert de ronflements remplissant une tente à l’atmosphère étouffante, alors que le soleil est sur le point de se lever sur Omdurman. Allongé sur son lit de camp, notre héros, Gollph, après avoir courageusement mais vainement tenté de faire abstraction du bruit et de l’odeur la chaleur, décide d’aller se dégourdir les jambes pendant que la température est encore supportable. Gollph, comme ses camarades de la 7ème Companie Motorisée Super-Lourde de Paragonian (ou quelque chose comme ça), est un tankiste, et fier de l’être. Rattaché au Baneblade Cortein’s Honour, où il exerce la noble profession de senior chargeur – ce qui est mieux que serial killer, même si, au fond, cela revient au même –, Gollph espère un jour devenir artilleur. Bien que disposant des aptitudes nécessaires pour occuper cette fonction, notre héros est toutefois handicapé par ses origines : il vient en effet du monde sauvage de Bosovar, qui rime trop avec Kosovar pour que ses ressortissants soient pris au sérieux par les impériaux venant de mondes civilisés. En plus de ça, les Bosovarois ont la peau rose, ce qui, dans le régiment de Paragon dans lequel les hasards de la vie et de la guerre l’ont fait atterrir, est une source de discrimination et de brimades. Que fait donc la HALDE ?

Pour l’heure, Gollph profite du calme ambiant pour aller saluer son char, qui n’a pas vu le moindre combat depuis le début de la campagne, et aller contempler le lever du soleil en marchant pieds nus dans les hautes herbes, comme le petit sauvageon qu’il est resté au fond de lui-même (il n’enlève pas sa chemise tout de même, car le Commissaire n’aimerait pas ça). C’est l’occasion pour lui de se remémorer son parcours depuis les plaines de Bosovar jusqu’aux collines d’Omdurman, en passant par son recrutement dans la Garde, où il a appris à vaincre sa peur des portes. On n’en parle pas assez, mais c’est une technologie des plus dangereuses. Après tout, personne ne s’est jamais coincé les doigt dans un rideau de perles. De retour au camp, et occupé à lustrer des obus pour passer le temps en compagnie de son supérieur ronfleur, le 1er Artilleur Meggen, Gollph est surpris dans son ouvrage par l’arrivée silencieuse, mais pas inodore, de Shoam, le pilote du Cortein’s Honour. Ce dernier a obtenu des nouvelles fraîches faisant état d’un redéploiement imminent de la Compagnie, et de son départ d’Omdurman. Il vient donc rappeler à Gollph et à Meggen le pacte secret que les trois hommes avaient conclu des mois plus tôt, et qu’il leur faut mettre à exécution avant qu’il ne soit trop tard. Si Meggen se montre très enthousiaste à cette idée, Gollph l’est beaucoup moins, s’étant engagé dans l’aventure sous l’emprise de la boisson. Toutefois, une promesse est une promesse, et nos trois conspirateurs se retrouvent donc le soir venu derrière un buisson odoriférant1 pour accomplir leur sinistre dessein…

Début spoiler 1…Si Gollph avait traîné des pieds pour marcher dans la combine, c’est d’abord parce qu’il doit se taper le sale boulot, c’est-à-dire distraire les sentinelles placées devant la tente contenant les réserves de la Compagnie, pendant que ses comparses se glisseront à l’intérieur pour dérober ce dont ils ont besoin pour l’étape suivante de leur machination. En plus d’être dangereuse, cette tâche est humiliante pour le fier Bosovarien, car elle l’oblige à jouer au sauvage pour parvenir à ses fins, alors qu’il se considère comme étant parfaitement intégré au sein de la Garde Impériale. On voit donc Gollph se présenter devant les plantons de service, affublé d’un plastron fait de roseaux tressés (ça fait exotique, dixit Meggen), avec un formulaire mal rempli en main et un affreux dialecte petit nègre à la bouche, et tenter de se faire remettre farine pour dîner Lieutenant, oui oui, s’il te plait Monsieur présentement là dis donc. Pendant que l’héroïque peau rose occupe les gardes, et se fait dérouiller par le plus mal embouché des deux, Meggen et Shoam dévalisent les stocks du régiment, le premier intervenant une fois le forfait commis pour interrompre la bastonnade à laquelle le pauvre Gollph avait droit, et repartir avec lui vers leurs quartiers. La mission a été accomplie, reste à savoir quelle en était le but…

Début spoiler 2…Eh bien, et je n’invente rien, il s’agissait simplement d’organiser une petite fête d’anniversaire pour le Capitaine Bannick, avant que le camp soit levé. Ce dernier est donc pris au dépourvu lorsque son équipage et quelques amis le surprennent à la cantine avec un buffet de pâtisseries paragoniennes et quelques bonnes bouteilles. Parce que ce n’est pas parce que la galaxie est sur le point de s’effondrer qu’il ne faut pas profiter des petits plaisirs de la vie et prendre un pot entre collègues de temps à autres. L’enthousiasme collectif peine toutefois à déteindre sur Gollph, encore un peu marqué par son implication dans le complot pâtissier auquel il a participé, et surtout honteux que trois de ses compatriotes de Bosovar aient été sévèrement punis par les autorités régimentaires pour la disparition des victuailles dérobées par Meggen et Shoam. Il n’y a pas à dire, le racisme anti-rose reste un des fléaux cachés du 41ème millénaire…Fin spoiler

1 : Il a certainement été utilisé par un tankiste pressé comme petit coin, comme Gollph a le plaisir de le découvrir.   

AVIS:

Attention, OVNI. Guy Haley signe avec Savage ce qui restera sans doute comme l’une des nouvelles de Gardes Impériaux les plus surprenantes du corpus de la Black Library. Pas de Xenos, pas de mutants et pas d’hérétiques ici, et à peine un peu de combat à proprement parler (même si la mâchoire de Gollph pourrait contester ce constat), mais la description de la vie d’un camp impérial dans toute sa singulière normalité. Si le « complot » fomenté par nos héros a une dimension comique assumée, et permet à Haley de démontrer qu’il est capable de jouer sur le registre humoristique de façon convaincante, c’est la description que l’auteur fait de la réalité sociologique de ce microcosme, où les préjugés et les discriminations1 entre Gardes de différentes origines demeurent aussi vivaces qu’aujourd’hui malgré les milliers d’années écoulées et la découverte d’autres espèces intelligentes, qui donne tout son sel à cette histoire. Le cosmopolitisme de l’Imperium est une de ses caractéristiques les plus intéressantes, mais rarement mise en valeur par la BL autrement qu’à travers l’exemple extrême des abhumains, du fait de sa ligne éditoriale résolument militariste. Haley démontre ici que la GW-Fiction peut encore totalement surprendre, et en bien, le lecteur, et que si la guerre est éternelle au 41ème millénaire, les à côté de cette dernière valent également la peine d’être racontés.

1 : Autre exemple, Shoam est traité comme un paria par ses camarades car il vient de Savlar, réputée pour être peuplé de criminels.

.

The Death of Uriel Ventris – G. McNeill :

INTRIGUE:

La Mort d'Uriel VentrisCe qui ne devait être qu’un contrôle dentaire de routine est sur le point de prendre un vilain tour pour le Capitaine Uriel Ventris, de la 4ème Compagnie des Ultramarines. Allongé dans le fauteuil du praticien, le patricien écoute avec angoisse le servocrâne de service lui demander de prendre une grande respiration et de la bloquer, afin que l’anesthésie puisse être effectuée. Cela risque de piquer un peu. En repensant à toutes ses sucreries englouties avec Pasanius pendant la Guerre de la Peste, notre héros se dit que s’il s’en sort, il investira pour sûr dans une brosse à dents énergétique, qu’il usera énergétiquement1. Mais pour l’heure, il est temps pour le vaillant mais douillet Capitaine de tomber dans les pommes pour échapper au supplice de la fraise.

Se réveillant dans une espèce de caverne qui ressemble fort à sa Calth natale, Ventris comprend rapidement qu’il expérimente une vision lorsque sa sortie de la grotte se fait sous un grand soleil et devant un paysage bucolique, loin des plaines radioactives dont la véritable planète peut s’enorgueillir depuis 10.000 ans. Comme pour confirmer son délire, il se fait héler par un quidam assis sur un rocher, qui se révèle être ce bon vieux Idaeus, Capitaine de la 4ème Compagnie avant lui, et auquel il a succédé après le sacrifice héroïque du briscard sur Thracia. À peine le temps de détailler les nombreuses cicatrices qui parsèment le corps de l’auguste héros pour s’assurer de son identité que les deux surhommes se mettent à dévaler la pente en direction de la caserne Asigelus (qui n’est pas sur Calth mais sur Macragge, mais bon on s’en fout c’est un rêve), où les hallucinations de Ventris l’entraînent. En chemin, ils croisent la route d’un groupe de jeunes coureurs engagés dans une compétition acharnée pour être le premier à utiliser la douche au retour de leur session d’entraînement, et Uriel reconnaît sans mal Learchus, Cleander, Pasanius et lui-même, tels qu’ils étaient à l’adolescence. Il ne peut qu’assister à nouveau à la tentative malheureuse de dépassement de ce snob de Learchus que son jeune lui avait tenté il y a toutes ces années, et sentir, très douloureusement, le vicieux coup de coude que son rival devenu rival devenu balance devenu Capitaine par intérim devenu Sergent Vétéran lui avait balancé dans le pif pour calmer ces ardeurs. Cela fait toujours aussi mal, et même beaucoup plus mal que cela devrait, mais cette soudaine vulnérabilité attendra un peu, car voici nos deux vétérans rendus devant les portes de la caserne, qui sont, comme de juste, fermées.

Peu disposé à laisser quelques quintaux de fer et d’adamantium se mettre en travers de la route de son flashback, et constatant qu’Idaeus se dégrade à vue d’œil, Ventris pousse de toutes ses forces sur les lourds battants pour pouvoir entrer, là aussi déclenchant des douleurs sans doute excessives par rapport à l’effort consenti par un Space Marines en bonne santé. Enfin parvenu à ses fins, il finit par rentrer dans les baraquements, un Idaeus positivement cacochyme sur les talons. Là, il est témoin du rassemblement de la 4ème Compagnie dans son ensemble, spectacle grandiose même si esthétiquement critiquable2, qui fait battre très fort ses petits cœurs. Après avoir identifié pour le lecteur qui n’en demandait pas temps la moitié des guerriers assemblés en silence sur la place, il est pris à partie par cette vieille baderne de Learchus, qui vient lui reprocher de les avoir abandonnés. « Oui mais bon c’est un rêve buddy et t’étais pas obligé de me foutre la honte devant Idaeus en mentionnant que j’avais prêté un serment de mort petit galapiat » répond Uriel, un peu embarrassé. Qu’importe, Learchus répète à nouveau que Ventris est en train de les abandonner à l’instant même, et lui tourne le dos comme un prince, suivi par l’intégralité de la Compagnie. C’est moche de bouder les enfants. Lorsque le Capitaine abandonné cherche à raisonner le Sergent, ce dernier a de plus la mesquinerie de tomber en poussière, suivi par 99% des Ultra Schtroumpfs. Seul reste ce bon vieux Pasanius, qui en guise d’adieu lui applique une petite imposition des mains sur le torse, mais seulement après avoir passé son membre augmétique au micro-ondes. Bref, ça brûle très fort pour notre pauvre Uriel, qui commence sérieusement à regretter sa consommation irraisonnée de Chupa Chups.

Lorsqu’il reprend ses esprits, le voilà sur Medrengard, et Idaeus a laissé la place à ce fieffé filou de Honsou. Réagissant comme un vrai serviteur de l’Empereur, notre héros commence par corriger bellement cette canaille à mains nues, qui se laisse faire sans protester. Sur le point de commettre l’irréparable avec la propre hache démoniaque de sa Némésis, Ventris réalise au dernier moment que ça pourrait être une mauvaise idée, et suspend son geste. S’engage alors un dialogue Batman vs Joker like entre Force Bleue et Force Jaune avec Rayures Noires, les deux adversaires se balançant des amabilités pendant quelques minutes jusqu’à ce qu’un nuage de poussière ne se profile à l’horizon, annonçant l’arrivée prochaine des War Boys d’Immortan Joe (sans doute le dernier film visionné par Ventris avant son opération), ce qui ne présage rien de bon pour notre héros. Qu’importe, ce dernier se tient prêt à faire face à son destin, et à mourir bravement au combat si nécessaire. Après un dernier « Witness meeeeeee ! » envoyé à Honsou, Uriel se fait pulvériser par l’artillerie montée sur les machines hurlantes qui convergent sur sa position. Fin de l’histoire.

Début spoilerOu en tout cas fin du rêve. De retour dans le cabinet du dentiste, nous assistons à un court dialogue entre l’Apothicaire Selenus et le Chapelain Clausel, alors que l’enveloppe corporelle de Ventris décède sur la table d’opération. Bien que le premier se félicite de la réussite de l’opération3, il prévient son interlocuteur que le plus délicat reste à venir, le Capitaine devant maintenant trouver la force de traverser ce fameux Rubicon4Fin spoiler

1 : Pour sa défense, l’Empereur lui-même n’avait rien prévu de spécial dans ce département pour ses Space Marines. Et pourtant, avec une salive acide, ils auraient eu grand besoin d’un émail renforcé à l’adamantium.
2 : Vert + bleu + jaune, franchement, c’est moche.
3 : « Ça a marché ? »
« Oui, il est mort. »
« GG. »
4 : Qui doit maintenant être encombré de Space Marines de toutes origines, au grand déplaisir de la faune locale et des touristes.

AVIS:

Ayant laissé tomber la saga d’Uriel Ventris il y a bien des années et après avoir seulement lu la première trilogie consacrée par McNeill à sa figure tutélaire dans le futur grimdark, j’avoue que la lecture de The Death of Uriel Ventris ne m’a pas touché plus que ça, mais peut aisément comprendre qu’un fan plus impliqué que votre serviteur ait une toute autre opinion du texte en question. Si l’auteur ne prend pas grand soin pour dissimuler la véritable nature de l’épreuve que le Capitaine traverse en filigrane de cette nouvelle (toutes les douleurs ressenties par ce dernier au fil des pages étant la conséquence de sa Primarisation douloureuse), enlevant donc un peu de suspense à cette dernière, il a au moins l’amabilité de terminer son propos sur un cliffhanger convenable, justifiant le titre donné à l’histoire. Même si je ne doute pas une seconde que notre héros finira par émerger du Rubicon – il doit y avoir un service de ferry pour les personnalités Space Marines, car elles sont vraiment peu nombreuses à s’y être noyées – comme les lois du marketing le demandent expressément, on peut au moins accorder à McNeill une utilisation appropriée de la formule « mort d’Uriel Ventris », ce dernier finissant la nouvelle dans un état minéral (c’est plus grave que le végétatif). À titre personnel, j’aurais apprécié que McNeill précise ou rappelle pourquoi le fier Capitaine a choisi/subi cette opération « risquée », à part pour suivre la dernière mode chez l’Astartes, bien entendu.

Pour le reste, le passage en revue de la carrière et des connaissances les plus marquantes de notre personnage, s’il est cinématiquement mis en scène par l’auteur, risque fort de diviser le lectorat entre ceux qui comprennent qui est qui et a fait quoi, et les autres. En d’autres termes, si vous découvrez Uriel Ventris par l’intermédiaire de cette nouvelle, je ne suis pas convaincu que l’expérience vous semble très intéressante (mais ce n’est que mon avis). En tous les cas, sachez que le personnage dispose d’ores et déjà d’une abondante biographie signée de la main de Graham McNeill, et que ce dernier ne l’ayant certes pas fait « mourir » pour rien, il est à parier que d’autres ouvrages ou nouvelles suivront. Dans le second cas, rendez-vous ici dans quelques temps pour un retour positivement objectif sur la suite des aventures de ce vieux Vent Triste.

.

***

Et voilà qui conclut cette revue de l’anthologie Warriors & Warlords, qui contenait bien ces deux types d’individus en quantités substantielles, en plus de pilotes dépressifs, Chapelains agressifs et sauvages contemplatifs, pour n’en citer que quelques uns. Pour ma part, je place cette anthologie au-dessus de celle qui l’a précédée (Lords & Tyrants), notamment grâce aux vaillants efforts de Peter McLean, Steve Lyons et Guy Haley, qui ont réussi à illustrer par leurs récits des aspects pas vraiment explorés de l’univers de 40K, et/ou à livrer des nouvelles assez différentes de l’habituel de la BL, ce dont je leur sais gré. Pour le reste, Wraight, Harisson, Smith et McNeill livrent des copies plus classiques mais loin d’être désagréables, la déception venant du « ventre mou » du recueil, où les nouvelles d’un Reynolds et un Kelly peu inspirés d’une part, et celles d’un Thorpe et McNiven égaux à eux-mêmes d’autre part, ont été regroupées. En attendant que la Black Library nous dévoile ses prochaines sorties de recueils de courts formats (pour l’heure, je n’ai que l’anthologie No Good Men pour Warhammer Crime dans mon viseur), votre serviteur va pouvoir se replonger dans la chronique de publications plus anciennes, et l’Empereur sait qu’il en reste ! Seule la mort…

INFERNO! [N°5]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette critique du 5ème numéro des nouveaux Inferno ! Oh boy, que l’attente fut longue depuis le numéro précédent ! Et dire que cette sortie en Avril n’a pas été impactée par le Covid19… À croire que le rythme de publication a été sciemment ralenti par la Black Library, pour des raisons que nous ne saurons sans doute jamais. Au menu de ce premier numéro de l’année II, nous dirons au revoir et (peut-être) merci au Prince Maesa et ses compagnons de boisson, toujours coincés dans l’auberge de la griffe outrecuidante – ou quelque chose comme ça –, et saluerons les débuts de Gavin1 G. Smith dans ce qui s’annonce être le roman sérialisé de 2020, The Last Knight.

Sommaire Inferno! #5

Mais ce ne sera pas tout, loin de là. Comme l’aimable (I guess) Richard Garton l’indique dans son édito, rédigé au Paléothique profond d’Août 2019, ce ne sont pas moins de neuf auteurs qui ont fait leurs débuts infernaux avec ce numéro #5. Certains bien connus (Ben Counter, Michael R. Fletcher), d’autres un peu moins (Anna Stephens, Marc Collins) et quelques uns, pas le moins du monde. Il va falloir apprendre à écrire Hanrahan, Grigsby, Kloster, Galley2 et Hayes sans se tromper, mais tout semble facile quand on maîtrise son Aaron Dembski-Bowden, pas vrai ? Mais trêve de banalités et d’orthographe, et place à l’action. Quelque chose me dit qu’on risque d’être servi de ce point de vue…

1 : Eh oui, à partir de maintenant, il y aura 2 Gavin dans la Black Library. Shocking.
2 : Eh oui, à partir de maintenant, il y aura 3 Ben (remember Ben Chessell) dans la Black Library. So shocking.

#5 - Cover.

.

Watchers of Battle – B. Counter [AoS] :

INTRIGUE:

Dans un remake audacieux des Bronzés font du Ski, une coalition de gladiateurs des Spire Tyrants part en direction de la Bonebreak Pass (que l’on peut sans doute traduire par passe de la fracture), qui permet le passage depuis Carngrad à Varanspire à travers les montagnes des Crocs, afin d’y gagner une gloire éternelle. Car s’il ne tombe pas de neige dans ce coin du Bloodwind Spoil (il pleut du sang par contre), c’est là qu’Archaon envoie régulièrement quelques recruteurs scruter les combats et repérer les guerriers de valeur, dignes de rejoindre les armées de l’Everchosen. Voilà l’objectif professionnel que s’est fixé notre héroïne, l’imposante Voleska, qui compte bien taper dans l’œil la visière des taciturnes observateurs qu’elle a aperçus en effectuant une mission de reconnaissance du campement de la Cabale Corvus1, cible toute désignée de la furie martiale des Tyrants. Ayant fait son rapport au Preneur de Tête Ferenk Sunder-Spine, qui en profite pour lui propose de devenir son bras droit, voire de prendre sa place si jamais il devait lui arriver malheur au cours de la bataille du lendemain, Voleska, dont le comportement cabotin et la maîtrise du marteau de guerre lui ont valu le titre de « Donneuse de Cadeaux » (Gift-Giver) auprès des aficionados2, repart sans donner de réponses définitives à cette offre de promotion, persuadée qu’un destin bien plus glorieux qu’assistante de direction des Red Sand Raiders l’attend si elle brille au combat.

Et pour briller, Voleska brille. Fille illégitime de Hulk Hogan et Brienne de Torth, la gladiatrice rend une tête et trente kilos au plus costauds de ses camarades de lutte. Quant aux frêles cabalistes emplumés, ils ne font littéralement pas le poids. L’accrochage entre culturistes enragés et gothiques homicidaires finit donc par tourner en faveur des premiers, Vovo enchaînant les kills spectaculaires (dont sa spécialité, le nut-buster3), allant jusqu’à concasser un Shrike Talon (Achille de son prénom) pour asseoir son statut de best entertainer de la bataille. Cependant, les observateurs d’Archaon ne donnent pas signe d’être très impressionnés par sa performance avicide…

Début spoiler 1…Qu’à cela ne tienne, Voleska tourne son marteau vers ses alliés une fois les cabalistes vaincus. Commençant par refaire le portrait à son side-kick Kyryll, elle fracasse ensuite sans discrimination ses anciens frères et sœurs d’armes de droite et de gauche, finissant par un duel au sommet (ou presque) avec Ferenk, qui mordra lui aussi la poussière4 après un combat accroché. Last woman standing parmi ce carnage indiscriminé, Voleska a enfin la satisfaction de voir deux Elus s’approcher d’elle et lui faire signe de les suivre en direction de la Varanspire, où son destin l’attend…

Début spoiler 2…Mais pas forcément de la façon qu’elle l’imaginait. En effet, amenée dans les forges qui entourent la citadelle d’Archaon, notre survivante est sommairement décapitée au-dessus d’un abreuvoir par ses recruteurs, son sang étant utilisé, comme celui des autres guerriers valeureux draftés par les sbires de l’Everchosen, pour tremper les armes et armures confectionnés pour les osts des véritables Guerriers du Chaos, statut auquel Voleska a eu l’erreur de prétendre. Décidément, le plafond de verre (ou de fer) n’est pas un mythe, même dans les Royaumes Mortels.Fin spoiler

1 : Les Scions (du bois) étaient attendus à la Bonebreak Pass, mais n’ont finalement pas pu décaler leurs prières enflammées pour se libérer. Dommage.
2 : Les cadeaux en question étant les têtes de ses adversaires malheureux, qu’elle arrive à faire voler dans la foule d’un moulinet expert de marteau.
3 : Comme quoi, la Distributrice de Cadeaux était également Castratrice de Corbeaux.
4 : Façon de parler, le coup fatal asséné par Voleska faisant passer son crâne en deux dimensions, d’où quelques difficultés à mastiquer. 

AVIS:

Excellente nouvelle de la part de Ben Counter, qui s’affirme de plus en plus comme l’expert du Bloodwind Spoil, dont il maîtrise comme personne d’autre le côté brutal et nihiliste. Après avoir décrit l’ascension sanguinaire et illusoire d’un guerrier maigrichon des Untamed Beasts (The Devourer’s Demand), il remet ici le couvert avec la quête de reconnaissance professionnelle d’une gladiatrice de Carngrad, prête à tout pour être remarquée par son senpai1. Et, une fois encore, la nature même du Chaos viendra briser les rêves de gloire du héros, avec des conséquences cruellement définitives. Il n’est jamais inutile pour la BL de rappeler que l’adage « beaucoup d’appelés, peu d’Elus » est absolument correct quand il s’agit de décrire la méritocratie chaotique, et quel meilleur moyen pour cela que de mettre en scène des histoires se terminant mal au sein de cette faction ? Après tout, pour un guerrier parvenant à gagner son armure de plates complète, des centaines d’autres ont passé l’arme à gauche dans l’indifférence la plus totale. Ainsi va la vie (et ainsi s’arrête-t-elle) dans les Royaumes Mortels… Prenant dans son déroulé, percutant par sa conclusion, et recouvert d’un discret vernis de gore qui fait tout le charme des nouvelles Warcry, Watchers of Battle est une autre réussite à mettre au crédit du revenant Ben Counter, qui n’a – à mes yeux – jamais été meilleur que depuis qu’il a réduit le rythme de ses contributions. Comme quoi, on a toujours intérêt à choisir ses batailles, et ce n’est pas Voleska qui nous contredira…

1 : Au petit jeu des ressemblances avec les travaux précédents de Counter, il serait dommage de ne pas citer ‘Sacrifice’, nouvelle rattachée au cycle Alaric (Chevaliers Gris), et qui montre comment les armes et armures de ces preux paladins sont réalisées. Là encore, l’opération est plutôt consommatrice en main d’œuvre…

.

No Quarter – R. J. Hayes [40K] :

INTRIGUE:

Le Sergent Malvian Craw et son escouade font partie des forces déployées par l’Imperium pour lutter contre les Eldars sur un monde inconnu, dont on saura juste qu’il comporte au moins une forêt. Craw et ses hommes font partie de la Légion d’Acier d’Armaggedon et… ouaiteuh minüteuh. Armaggedon ? Comme Armaggedon ? La planète consumée par une guerre apocalyptique depuis que Ghazghkull y a décidé de planter sa tente pour les vacances? Celle-là même. Il faut croire que la situation n’est pas si grave que ça, puisque le Gouverneur peut se permettre d’envoyer des troupes prêter main-forte aux copains du Segmentum1. Nous n’en sommes qu’à la troisième ligne de l’histoire, et le lecteur circonspect fronce déjà les sourcils. Voyons ce que donne la suite.

Craw et Cie (le vétéran Kule, le presque Medic Maine, le cadavre Rorak, le futur cadavre Benson, et les soldats Bidule, Truc, Machin, Chose et Laraiponsedaix, dont on n’entendra bien sûr jamais parler) sont donc en vadrouille dans la seule forêt identifiée par l’auteur, et sont tombés dans une embuscade tendue par les perfides Zoneilles. La tuile. Jusqu’alors, les Eldars auxquels ils avaient eu affaire s’étaient laisser expulser sans problème à coup de crosse dans le dos, et… hmmm… my bullshit sense is tingling, comme dirait l’autre. Je me demande bien d’où cela peut venir. Ah, oui, ça y est. Le fait que la Garde Impériale se comporte comme une brigade de CRS mobilisée pour évacuer une ZAD tenue par des Xenos, et pas comme le marteau de l’Empereur. Le lecteur circonspect tombe de sa chaise, mais ne se fait pas trop mal. Poursuivons.

Pris à parti par des tireurs de shurikens habilement camouflés par la verdure environnante, les impériaux sont bloqués sur place, et la mauvaise qualité de leur matos les empêche de prévenir le QG de leurs déboires. Pour passer le temps, Craw va donc s’enquérir de la santé de ses hommes, et plus particulièrement de celle de Benson, qui s’est pris un peu de ferraille dans le bide et geint donc comme la petite pleureuse qu’il est. Demandant au fidèle Kule de le couvrir pendant qu’il sprinte jusqu’au blessé, couché en évidence contre un tronc d’arbre, et désarmé par la rafale qui l’a mis à terre, Craw arrive à bon port, ramasse l’engagé Mauviette, et repart en courant vers la sécurité relative des lignes amies, confiant son fusil à Benson pour qu’il puisse les couvrir. Malgré sa nature sensible, Benson fait mieux que ça, puisqu’il arrive à abattre l’un des assaillants de l’escouade, qui dégringole de son arbre et se cogne la tête sur une racine. Ouille. Ce spectacle insoutenable pousse alors les autres Eldars à balancer une grenade à plasma sur les mon-keigh. Pourquoi ne l’ont-ils pas fait avant ? Mystère. En tout cas, la déflagration carbonise le pauvre Benson. RIP.

Le deuil du malheureux attendra un peu, cependant, car un tout autre problème se matérialise littéralement sous le nez, ou en tout cas dans le ciel, de la planète inconnue. Un Rok vient en effet de se téléporter en orbite très proche, et s’écrase au sol dans les secondes qui suit. Qu’on ne vienne pas me dire que la technologie peau-verte est imprécise après cela. L’onde de choc secoue violemment les arbres sous lesquels le drame se noue, et, après être émergé de la torpeur dans laquelle la chute d’une pomme de pin extraterrestre l’avait plongée, notre brave Sergent se rend compte qu’il est le seul survivant de son escouade. Maine s’est fait enterrer vivant avant d’avoir pu mettre son respirateur, et Kule, qui avait jusqu’ici évité les blessures, à l’exception de cette fois où il s’était fait mordre le derche par un Ork sur Armaggedon (true story), a été écrasé par la chute d’un arbre. Un malheur n’arrivant jamais seul, le premier Ork de la nouvelle fait bientôt son apparition, car, c’est bien connu, certains Boyz sautent de leur Rok avant l’impact pour être les premiers à la castagne. Je veux bien que les Orks soient solides, mais là… Je doute un peu. Le lecteur circonspect est maintenant au troisième sous-sol, entraîné vers les abysses par une force mystérieuse. Où s’arrêtera sa chute ?

Surpris et privé de fusil laser, Craw se prépare à vendre chèrement sa vie, et fait face au Xenos le couteau à la main, lorsque le peau-verte se la fait percer (la peau) par une rafale de shurikens. L’Eldar tombée du nid n’était en fait qu’inconsciente, et a choisi son camp et sa couleur dans la lutte entre le règne animal et végétal (ou mycétique). Cette intervention salutaire permet à Craw de se débarrasser de son adversaire, et avisant que toute combativité semble avoir déserté l’Eldar, peut-être à cause de la blessure qu’elle a récolté à la jambe, il décide donc… de la prendre avec lui pour fuir l’arrivée des Orks. Un Garde Impérial. D’Armageddon (donc naturellement xénophobe, m’est avis). Dont la moitié de l’escouade a été butée par les Eldars même pas deux minutes plus tôt. On m’informe dans l’oreillette que le lecteur circonspect a percé le manteau terrestre, et que sa vitesse continue à croître. Il nous faut pourtant continuer notre chronique.

Bref, Craw et Feuran (c’est le nom de l’elfette cosmique) font contre mauvais karma bon cœur, et cheminent clopin-clopant vers le salut incertain représenté par l’orée de la forêt, s’arrêtant de temps à autre pour flinguer les Orks les plus rapides qui sont partis explorer leur nouveau terrain de jeu. Je vous passe les dialogues mirifiques à base de « Vous les humains, vous êtes tous des monstres/comme les Orks » « Mais non » « Mais si » « C’est celui qui dit qui y est », qui meublent un peu et permettent surtout à nos deux héros d’apprendre à mieux se connaître. C’est d’ailleurs au cours d’une agréable discussion de ce genre que Feuran fait l’erreur fatale d’expliquer à son camarade d’infortune à quoi sert la pierre esprit qu’elle porte sur son armure. Et ça, c’est l’équivalent du flic qui dit qu’il part à la retraite à la fin de la semaine dans un film des années 80. Il est absolument certain que le personnage va crever dans les vingt minutes qui vont suivre. Tant mieux, j’ai envie de vous dire.

Au bout de quelques minutes de course d’orientation, notre duo choqué arrive finalement à découvert, mais poursuivi de près par une foule d’Orks très en colère. La radio de Craw se remet miraculeusement en marche, et l’acariâtre Commissaire-Speaker-DJ de garde, Vanx, lui apprend que les renforts ne vont pas tarder à arriver. Et en effet, une barge de bataille se matérialise par miracle dans le ciel, et largue quelques drop pods pile sur la position de nos fuyards. J’ai envie d’écrire WIJH. Et je le mets en gras. Et en rouge. Et en énorme (et tant pis si ça salope le paragraphe, c’est mérité).

WIJH.

Ça fait du bien. Et le lecteur circonspect s’extirpe d’un cratère, quelque part en Nouvelle Zélande. Je ne pense pas qu’il pourra aller plus loin.

Finissons-en avec notre histoire. Craw est fou de joie devant la tournure prise par les événements. Feuran, elle, tire un peu la tête, sans doute parce qu’elle a lu le Codex Space Marines. En effet, le Sergent Ultramarines2 Shatopethrus qui mène l’assaut des Astartes flingue la Xenos sans sommation, malgré l’air chagrin de Craw, avant d’intimer à ce dernier d’aller rejoindre la bataille. Enfin une décision logique, mais elle arrive bien trop tard pour sauver notre récit. Dégoûté par la tournure prise par les événements (il espérait peut-être conclure, après tout il trouvait les Eldars très similaire aux Humains quelques minutes plus tôt), Craw ramasse la pierre esprit de son ex meilleure pote, et lui promet d’aller la rendre à ses semblables. Peut-être croisera-t-il dans l’espace le cadavre gelé et outré du lecteur circonspect, victime collatérale, comme Feuran, de la terrible littérature de Hayes…

1 : Pour ceux qui argueraient que l’intrigue se passe peut-être avant ou pendant les deux guerres susnommées, la réponse est un grand et massif NON. C’est le héros lui-même qui le dit : il est né peu après la fin de la première, et a participé à la seconde. Seule hypothèse valable restante, ‘No Quarter’ se déroule en M42, et Craw a plus de cent balais.  
2 : Toujours dans les coups foireux ceux-là… Remember ‘Salvation’.

AVIS:

Je me souviens très clairement, au moment de l’écriture de la critique de la nouvelle Salvation de Jonathan Green, m’être dit : « certes, c’est comiquement mauvais et cela entre en conflit frontal avec le fluff le plus basique sur un grand nombre de points, mais cela a été écrit il y a fort longtemps, à une époque où la Black Library venait à peine d’être créée, et où le contrôle éditorial était en conséquence bien plus faible que ce ce que nous connaissons maintenant ». En d’autres termes : cela ne se reproduira plus. Eh bien, j’avais tort. En 2020, la BL est toujours capable de publier des soumissions tellement WTF que l’on peut légitimement se demander si elles n’ont pas été relues et approuvées par un opossum alcoolique, analphabète et surtout aveugle. Comme disait Brassens, rien n’est jamais acquis à l’homme, ni sa faiblesse, ni sa force, ni la qualité des nouvelles de GW-Fiction qu’il lit pour se détendre1. Je nous croyais à l’abri de ce genre de déconvenues, tellement 2000’s, voire 2010’s pour les dernières d’entre elles. Naïf que j’étais. Et le malheureux Rius est donc mort pour rien.

Comme indiqué dans la description de l’intrigue, ce ne sont en effet pas les entorses sauvages au lore qui manquent dans No Quarter, titre pouvant aussi bien faire référence à l’action qui se déroule dans ses pages qu’à la volonté de Hayes de sabrer la guimauve comme rarement avant lui. Et, si je veux bien admettre que tout peut se défendre en termes de background dans une franchise SF couvrant la galaxie entière sur une période de plusieurs millénaires, il faudrait cependant que ces libertés soient argumentées et mises en contexte par l’auteur pour convaincre le lecteur de leur validité. Un peu comme une articulation raide qui gagnerait en souplesse à force d’échauffement et de mise en condition, l’historique peut être permissif, si l’auteur s’en donne les moyens2. Ce n’est pas le cas ici, le fluff se prenant clé de bras sur clé de bras, et finissant la nouvelle en PLS terminale. Ajoutez à cela une intrigue d’une fadeur consommée, une fois toutes les incongruités la parsemant évacuée, ainsi qu’une narration fainéante au possible (ne nommer que quatre soldats d’une escouade de Gardes Impériaux, parce que les autres « ne servent à rien », vraiment…) et vous obtenez ce qui a de grandes chances de définir le nadir absolu de la soumission à Inferno !, nouvelle génération. Rendez-vous en 2040 pour voir si les successeurs de Rob J. Hayes ont réussi à briser la malédiction.

1 : Ce vers n’a été chanté que sur une obscure version bootleg, lors d’un concert à Nottingham.
2 : C’est d’ailleurs ce que Nate Crowley a démontré dans ces mêmes pages avec ‘The Enemy of my Enemy’. On pouvait aimer ou pas le résultat final, mais son raisonnement tenait beaucoup mieux la route que celui de Hayes.

.

Mournclaw – B. Galley [AoS] :

INTRIGUE:

Notre propos débute avec la course effrénée mais peu rapide d’un Duardin esseulé dans un marais putride aux abords de la ville de Kurchok, en Ghur. Se sachant épié et poursuivi, notre nabot embourbé interrompt un moment son mud day dusk pour envoyer sa hache dans le thorax de son stalker, un coureur de boue – plutôt que d’égoût – Skaven. Si le rôdeur n’a pas réussi à arrêter sa proie, c’est sans doute parce qu’il s’agit d’un vulgaire ersratz des ninjas du Clan Eshin, notre raton étant en effet un membre du Clan Skryre. Avant de rejoindre le Royaume de la Ruine, il a toutefois l’obligeance d’expliquer à son tueur qu’il était à la recherche de la Mournclaw, provoquant une réalisation subite chez ce dernier, qu repart en petites foulée en direction de Kurchok.

Dans la ville en question, nous faisons la rencontre de notre véritable héros, le voleur Mallon Tein, alors qu’il se trouve en repérage dans la taverne locale. Ayant choisi de tenter sa chance auprès de la bourse d’un marchand Aelf, il parvient à la faire sienne en un tour de main et un renversement de pinte sur le carnet de notes de sa cible, mais se fait griller comme un bleu en lançant à cette dernière une pièce pour sa peine avant de prendre le chemin de la sortie. Car la pièce venait de la bourse subtilisée, et portait donc la rune personnelle de son propriétaire légitime, qui ne manque pas de saisir l’entourloupe. Ah, Mallon… Ta générosité te perdra ! Ou plutôt, aurait pu te perdre, si un chevalier assis en compagnie d’un groupe de gens louches, dont le Duardin susnommé, arrivé en cours de soirée à l’auberge, n’était intervenu auprès de la foule en colère pour sauver les miches du voleur malchanceux, prétendant le connaître et donnant au marchand déconfit une authentique pépite d’or torope en guise de dédommagement.

La situation s’étant calmée, Mellon est entraîné par son sauveur, Ulriker, jusqu’à son groupe de parole. Les autres membres de la compagnie sont les mercenaires que le chevalier a recrutés pour l’accompagner dans la quête d’un artefact magique : la masse d’armes Mournclaw. Cette dernière serait enterrée dans un tombeau Duardin bâti par les ancêtres de l’avorton boueux et grincheux croisé un peu plus tôt (Durbrord Grimbelly), qui possède une clé capable d’ouvrir la crypte familiale. Seul petit problème se tenant entre Ulriker et ses Lames Rouillées (le nom, qu’il considère sans doute stylé, qu’il a donné à sa franche-compagnie personnelle) et la reconnaissance que le don désintéressé de cette inestimable relique au Stormhost le plus proche ne manquera pas de leur valoir : aucun de nos larrons ne sait où se trouve le tombeau en question. Ceci dit, l’ingénieux Ulriker a un plan aussi simple que rat-dical pour contourner cette difficulté : kidnapper l’individu possédant l’information qu’il recherche, et qui n’est autre que le Warlock Volz Flayfang, du Clan Skryre.

Peu emballé par la perspective d’aller prendre un otage directement chez les Skavens des Fiend Crags, Mellon est toutefois contraint d’accepter de marcher dans la combine, les Lames ayant besoin d’un voleur (même pas très bon) pour compléter les talents de l’équipe, et notre larron n’étant de toute façon pas en mesure de rembourser la dette contractée auprès d’Ulriker pour son sauvetage. Notre joyeuse bande de lurons (Ulriker et son gryph-hound Malefitz, Durbrord et sa bedaine renfrognée, le duo mère fils farouchement anti-Skavens Elfrun et Oddone, le mage de feu non-diplômé Adalbero, le guerrier endormi Lundrich Twice-Killed et notre pickpocket récalcitrant) s’embarque donc dans un périple à travers les paysages pittoresques du Royaume des Bêtes, en direction du terrier de leur proie…

Début spoiler 1…Si leur mission quasiment impossible se déroule d’abord sans trop d’anicroches, puisqu’ils parviennent à pénétrer le repaire de Flayfang, à se frayer un chemin jusqu’à ce dernier et à repartir avec le rat de laboratoire sur l’épaule pour la somme modique d’un mort (Lundrich, qui se prend une gomme-cogne goût malepierre en plein dans le pif) et d’un blessé (Adalbero, victime d’un coup de queue barbelée à l’estomac), la suite s’avère beaucoup plus compliquée pour nos bras cassés. Ayant convaincu leur otage de les mener jusqu’au tombeau Duardin que ses équipes ont commencé à excaver, les Lames Rouillées sont bientôt en proie à une dissension interne de plus en plus marquée, Mallon et Durbrord soupçonnant Ulriker de vouloir récupérer la Mournclaw pour son propre compte plutôt que de la remettre à qui de droit, et ce malgré les avertissements récurrents donnés par le Passe-Partout de la bande1 à son vieux pote à propos de la nature maléfique de l’arme qu’il convoite. En plus de cela, Mallon découvre que son généreux sauveur s’est en fait joué de lui, et du marchand Aelf du début, en utilisant des bouts de ferraille dorés à la place de ses prétendues pépites d’or torope, et Flayfang propose au cambrioleur démotivé de conclure un pacte de non-agression pour sauver sa vie lorsque son armée personnelle aura mis la griffe sur les rat-visseurs de leur boss, ce qui ne saurait tarder.  

Les Lames Rouillées parviennent cependant à atteindre leur objectif, situé dans les montagnes de Cornecroc, perdant ce blaireau d’Adalbero, victime d’un mal d’estomac persistant et en rade de Pantoprazole, sur le chemin, rapidement suivi par Oddone et Elfrun. Bien que l’ambiance ne soit pas au beau fixe entre les survivants, ils finissent toutefois par arriver devant la porte de la salle où Mournclaw est entreposée, mais, problème, cette dernière ne pourra s’ouvrir que si le sang d’un descendant de la lignée est répandu sur la serrure, ce que Dubrord se refuse obstinément de faire. Il en faut toutefois plus pour décourager Ulriker, désormais totalement sous la coupe de Mournclaw,  et qui tranche la main de son compagnon après un court duel et utilise le moignon pour ouvrir l’ultime porte de ce donjon un peu particulier. Le chevalier disgracié n’aura cependant pas le loisir de looter l’arme héritage sur laquelle il avait des vues, ce fourbe de Post Mallon profitant de ses attributs de classe pour lui trancher la gorge en traître (ce qui n’est pas cool), et faisant subir le même sort au loyal Malefitz lorsqu’il tente de secourir son maître (ce qui est impardonnable). Ceci fait, le renégat s’empresse de jeter la masse aux pattes de Flayfang, bientôt rejoint par ses guerriers, espérant que son coup de main lui vaudra la reconnaissance du Warlock…

Début spoiler 2…Malheureusement, un Skaven ne tient jamais sa parole, surtout lorsqu’il est en position de force et cherche à se venger des mauvais traitements subis au cours de sa garde à vue musclée. Si Flayfang accepte donc volontiers Mournclaw, que sa race avait bien corrompue après l’avoir dérobée aux Duardin, c’est uniquement pour jouer au polo avec la tête de son allié. Vous aurez plus de chance à la prochaine session de JDR, les gars !Fin spoiler

1 : Hé, il est petit et porte la clé de son équipe. Je ne pouvais pas laisser passer cette opportunité.

AVIS:

Pour ses débuts au sein de la Black Library, Ben Galley démontre sa maîtrise de la nouvelle de sword & sorcery en mettant en scène la quête d’une bande d’aventuriers pour une mystérieuse relique, qui se révélera, comme de juste, maléfique. Si le sujet en lui-même n’a rien de particulièrement original1, l’auteur réussit à nous embarquer dans les aventures de son groupe de mercenaires rouillés sans coup férir, et parvient à mettre en scène son imposante galerie de personnages (8 au total, si on compte le gryph-hound d’Ulriker) sans donner l’impression que certains d’entre eux ne sont là que pour décorer. Autre réalisation technique à mettre au crédit de Galley, l’introduction narrée du point de vue de Durbrord, qui vient « enrichir » l’expérience de lecture. Ça peut paraître un procédé facile de prime abord (et pour être honnête, ça l’est), mais rien de tel qu’un changement de perspective au cours du récit pour immerger le lecteur dans ce dernier, et si l’astuce est souvent mis à profit dans les romans, il est bien plus rare dans les nouvelles. À cela je dis donc : well done sir.

S’il apparaît rapidement que la conclusion de ce Mournclaw ne sera pas heureuse pour nos protagonistes, dont le nombre descend graduellement au fur et à mesure que les embûches se présentent, ce manque de suspens est compensé par le désir de savoir qui restera le dernier debout, et comment les autres rencontreront leur fin. Il n’y a que la révélation des manigances du cérébral Flayfang, qui se targue d’avoir tout orchestré mais que l’on n’aura finalement pas vu à l’œuvre autrement qu’en pistolero, punching-ball et gossip rat, qui aurait pu être mieux amorcée par Galley. Pour le reste, nous sommes en présence d’une soumission des plus solides, faisant de notre homme un nom à suivre dans le cas où cette collaboration avec la BL serait amenée à continuer.

1 : La comparaison qui me vient avec une nouvelle de la BL serait ‘A Good Thief’ de Simon Jowett, racontant l’histoire d’un voleur recruté contre son gré par un puissant commanditaire pour dérober un livre magique à un seigneur brigand. On peut également penser au tire-laine ayant subtilisé l’anneau des Von Carstein du doigt de Vladd pendant le siège d’Altdorf.

.

The Last Knight : Part One – G. G. Smith [40K] :

INTRIGUE:

Notre histoire se déroule sur le monde chevalier de Leucosia, dont la proximité syllabique avec Leukemia n’est pas totalement anodine. En effet, la planète a particulièrement souffert de l’ouverture de la Cicatrix Maledictum, et des incursions démoniaques l’ayant frappé avec régularité en conséquence de la signature des accords de Schengen entre le Materium et l’Immaterium. Notre héros, le noble Lacutus de la maison Honaratus, porte d’ailleurs un souvenir cuisant de la dernière excursion organisée1 par les hordes démoniaques depuis la Tempête de la Sirène (l’anticyclone warpien local), une engeance chaotique mal embouchée lui ayant craché dans l’œil avec des résultats corrosifs. Envoyé par son père et Gouverneur planétaire en exercice, Forganus, reprendre contact avec les communautés placées sous la protection de sa lignée, Lacutus arrive dans le petit village côtier d’Innsport, où il remarque l’épave d’un vaisseau spatial s’étant écrasé dans la lagune. D’abord content de la découverte, qui lui permettra peut-être de retaper le chevalier familial, le brinquebalant Wargod, en maintenance depuis la dernière bataille contre les springWarpbreakers en goguette sur Leucosia, Lacutus va rapidement déchanter. Sa rencontre avec les autorités locales se passe en effet très mal, l’ancien Fisher étant resté au règne d’Ignatius Honaratus, grand-père de notre héros, refusant de lui donner du « Monseigneur » et de lui faire une petite courbette, et finissant même par lui ordonner de mettre le pied à terre, et le faisant obtempérer d’une pichenette psychique à laquelle Lacutus ne s’attendait pas le moins du monde.

Sauvé par la ruade de son fidèle destrier Augustus, qui fidèle à sa réputation de monture d’un univers de Games Workshop, se charge d’infliger les blessures à l’adversaire quand son cavalier rate toutes ses attaques, Lacutus se relève, dégaine son épée énergétique branchée sur courant alternatif (elle marche un jour sur deux), et fend le faquin à tête bulbeuse en presque deux d’un horion bien placé. Il n’a cependant pas le temps de finir le dernier PV de l’increvable Fisher, qu’un duo de Genestealers émerge d’un taudis tout proche et commence à se rapprocher de façon aussi preste que menaçante. Décidant qu’il est de son devoir de porter la mauvaise nouvelle à la cour de son père plutôt que de mourir bravement au combat, Lacutus enfourche sa monture, pique des deux et arrive à se tirer de ce bien mauvais pas, aidé par sa maîtrise de l’arbalète et les carreaux à tête explosive2 que lui a préparé l’adepte du Mechanicus (formée en MOOG, car les contacts avec le monde forge le plus proche, Metalica, ont été interrompus par les tempêtes récentes3) locale. Une longue chevauchée plus tard, il arrive à bon port, c’est-à-dire le château paternel et capitale planétaire de fait, Landfall Castle, où il fait un rapport sommaire de sa mésaventure à son pôpa avant de tomber dans les pommes.

À son réveil, il est chargé par le vieux Gouverneur, rendu grabataire par sa dernière virée dans Wargod, de prendre la tête de l’armée locale pour aller brûler le village infesté, solution drastique mais efficace au problème rencontré par Leucosia. Les options ne sont en effet pas nombreuses pour les défenseurs de Landfall Castle, dont l’unique Chevalier n’a pas fini d’être retapé par Lydia (l’adepte du Mechanicus en question), et que Lacutus ne peut de toutes façons pas encore conduire, n’ayant jamais passé son permis poids lourd. Quant à l’astropathe local, Vervus, il a simplement déclaré qu’il était trop vieux pour cette m*rde après la dernière incursion démoniaque, et s’est mis de lui-même en pré-retraite clandestine dans les collines avoisinantes, craignant que son prochain envoi de mail soit le dernier. Ayant appelé la milice paysanne aux armes (principalement des arcs longs), Forganus est cependant pris de court par l’arrivée d’une horde de mécontents horriblement mutés, le Culte Genestealer local ayant décidé que l’occasion était bonne pour lancer une petite révolution contre la noblesse leucosiane. Après tout, elle n’a pas été vraiment capable de les protéger ces derniers temps.

C’est donc un siège en bonne et due forme qui s’engage, donnant à Lacutus l’occasion de démontrer ses talents de général (on attendra un peu pour juger ses performances martiales), bien aidé par les trébuchets et balistes customisés par Lydia, l’œil sûr et la main ferme (à défaut des dents) des archers Gult et One-Arrow Nokes, et les gros biscotos du palefrenier Ogryn Kark et de sa petite famille. Face au courage et la technologie rudimentaire des défenseurs, les milliers de cultistes et de mutants déployés par l’ancien Fisher, qui s’est apparemment recousu tout seul comme un grand dans l’intervalle, peuvent compter sur une supériorité numérique écrasante ainsi que sur des tours de siège quasiment efficaces. Car lorsque la dernière d’entre elles arrive finalement au contact des murs, condamnant très probablement les Bretonniens impériaux, Wargod émerge finalement des stands, et se charge de repousser la vague à grands coups d’épée tronçonneuse et de rafales de canon thermique. Face à la fureur mécanique du Chevalier, les Genies décident de ne pas être hasty, et se replient en désordre, permettant aux défenseurs de remporter la première victoire du conflit. Cependant, le prix est lourd pour les Leucosians, particulièrement pour Lacutus, qui ne peut que constater que le baroud d’honneur de son père lui a coûté la vie, le cœur du vieux Gouverneur ayant lâché sous l’effort. Notre héros est maintenant en charge des opérations, et il serait grand temps qu’il apprenne à se servir d’un pédalier et d’un levier de vitesse…

1 : C’est le Chaos après tout. Il y avait bien un Portepeste qui essayait de faire l’appel, mais c’est tout.
2 : Comme un carreau d’arbalète se dit « bolt » en anglais, on peut donc dire que Lacutus utilise des bolts ressemblant furieusement à des bolts.
3 : Comme le dit la sagesse populaire : « Metalica, c’est trop loin pour toi ».

AVIS:

Débuts intéressants de la part de Smith, dont les prémices de The Last Knight rappelleront sans doute quelques souvenirs aux lecteurs familiers des tous premiers temps de la GW-Fiction, époque mythique pendant laquelle des auteurs de SF bien établis s’étaient amusés à mettre l’Imperium en face de ses contradictions, en particulier celles provoquées par la grande diversité des mondes le composant. Qu’il s’agisse de Charles Stross dans Monastery of Death, Bryan Ansell et Bill King dans Deathwing ou encore Barrington J. Bayley dans Children of the Emperor ou Battle of the Archeosaurs, les rencontres entre cultures obscurantistes et merveilles de technologie étaient fréquentes, et c’était ma foi assez sympathique. L’avenir nous dira si Smith se place dans la droite ligne de ces grands anciens, ou bien s’il choisir de tracer sa voie, mais l’initiative est en tout cas à saluer.

Ce premier épisode permet également de se rendre compte que, bien que nouveau dans les ténèbres du futur lointain, Smith maîtrise bien le fluff de la franchise, y compris ses derniers développements, comme l’ouverture de la Cicatrix Maledictum, ou, tout simplement, l’existence des mondes chevaliers de l’Imperium, qui n’ont été mis sur la carte galactique que relativement récemment par Games Workshop. Comme tous les auteurs recrutés par la BL ne se donnent pas forcément la peine de se documenter sur leur univers d’adoption avant de prendre la plume (et l’Empereur sait à quel point il est facile de partir en hors sujet dans les franchises de GW), il convient de le mettre en avant comme point positif. À cela on peut ajouter une bonne capacité à dérouler une histoire prenante, particulièrement grâce à des personnages naturellement attachants, depuis notre adolescent borgne ninja, l’adepte du Bricolicum, les archers patibulaires, ou encore la famille d’Ogryns qui murmuraient à l’oreille des chevaux1. Finalement, le seul reproche que je peux formuler à Smith pour le moment est sa description parfois assez confuse du siège, particulièrement quand les tours de siège se joignent à la fête. On peut également regretter, à la marge, qu’il ait arrêté son propos dans un temps faible de l’intrigue, les hordes chitineuses repoussées pour le moment et la victoire remportée par les héros. Un cliffhanger facile (mais efficace) aurait été de mettre l’histoire sur pause au moment où le pont-levis est abaissé, au grand désespoir de Lacutus. Cela aurait nous amené à attendre le deuxième épisode avec encore plus d’impatience, mais de ce point de vue, Gavin Smith n’a pas de grands soucis à ce faire. Bring it on boy…

1 : Je suis déjà certain que je serais triste s’il leur arrive quelque chose dans les prochains épisodes.

.

River of Death – A. Stephens [AoS] :

INTRIGUE:

Alors que l’aurore pointe à peine sur les maisons endormies de la ville fluviale de Demesnus, en Ghyran, un trio de jeunes gens attend un dernier compagnon sur les quais. Nos héros sont Brida Devholm, pas encore engagée dans les armées de Sigmar (The Siege of Greenspire), et les jumeaux Sati et Cahn, tous trois issus des classes laborieuses de la cité, et chargés par leurs familles d’aller récolter les joncs dont l’industrie locale fait grand usage, pour la teinture et la vannerie. Leur camarade est le mieux né Eron Rush, fils d’une grande famille locale, et néanmoins énamouré de Brida, à laquelle il compte se fiancer prochainement. Cette dernière l’a donc invité à faire la connaissance de ses amis d’enfance prolos, en espérant que quelques heures passées ensemble à faucher du roseau et se pinter à la bière rapprocheront ces deux mondes que tout oppose (sauf elle, bien sûr).

Force est de constater que son plan de copinage se déroule initialement sans problèmes, la bonhomie naturelle et les clowneries outrées d’Eron parvenant à vaincre la suspicion et les préjugés que les jumeaux entretenaient à son égard. Tout va donc pour le mieux dans le meilleur plus vivace des Royaumes, la petite barque du quator remontant la rivière Quamus jusqu’aux bancs de joncs, atteints ces derniers temps par une sorte de maladie mal identifiée, comme c’est bizarre, lorsque, soudain, c’est la chute. Jetée à la flotte par le choc inattendu de son esquif contre un corps solide, Brida sent un corps sinueux et squameux lui frôle le mollet, ce qui n’est pas pour la rassurer. Sitôt remontée dans la barque, la cause de la collision apparaît clairement aux travailleurs de la rivière : une énorme anguille atteinte de la fièvre aphteuse a des vues peu charitables sur leurs carcasses. Équipés seulement de leurs rames et serpettes de kolkhoziens, les teenagers ne font pas tellement les malins, d’autant plus que les coups de boutoirs de la tanche en rut ont tôt fait de provoquer une voix d’eau inécopable (mais si, ça existe, la preuve) et d’assommer Eron, qui se prend un morceau de pagaie en plein dans le pif. Contraints et forcés, ils abandonnent leur pédalo pour gagner à la nage une île toute proche, Brida restant bravement en arrière garde pour ralentir l’anguille le temps que ses compagnons amènent son cher et tendre en sécurité. Et même si elle ne pourrait pas faire longtemps illusion comme Garde Morrsarr, chevauchée peu concluante de l’inamicale bestiole à l’appui, notre héroïne réussit toutefois à distraire suffisamment longtemps la bête pour que le quatuor parvienne à regagner la sécurité de la terre ferme. Sécurité relative, car l’îlot sur lequel ils ont débarqué est réputé être la demeure de Guette-Rivière, l’esprit tutélaire de la Quamus…

Début spoiler 1…Et en effet, il ne leur faut pas longtemps avant de croiser le maître des lieux, un vieil ermite encapuchonné, qui se présente comme étant le mythique Guette-Rivière, et leur promet de régler son compter à l’ennuyeuse poiscaille après avoir entendu le récit de leur mésaventure. Leur hôte parti à la pêche, nos ados éprouvés sombrent rapidement dans un profond sommeil. À leur réveil, plusieurs heures plus tard, Brida et Eron découvrent que les jumeaux ont disparu, et commencent fort naturellement à s’inquiéter, lorsque Sati et Cahn font finalement leur retour. Ils étaient partis casser la croûte en compagnie de Guette-Rivière, qui a préparé à ses visiteurs un petit-déjeuner des plus délicieux, et qu’il serait impoli de décliner. Peu rassurés par la situation, et interloqués par l’enthousiasme démontré par leurs amis pour les talents culinaires de Jo le Clodo, les amoureux finissent toutefois par leur emboîter le pas, et arrivent devant le camp de base de Guette-Rivière, où bout un grand chaudron rempli de ragoût. Les signes bizarres d’ascendant flippants allant en s’accentuant (Sati et Cahn, s’empiffrant littéralement, allant jusqu’à saisir la marmite brûlante à mains nues pour se resservir, le brouet de l’ermite étant glacé en dépit des flammes), Brida et Eron décident sagement de sauter le petit-déjeuner, et de fausser au plus vite compagnie à leur hôte. La fausse bonne idée d’Eron de balancer son bol à la tête de ce dernier pour faire diversion se retourne cependant contre l’initiateur de la bataille de bouffe, Guette-Rivière jetant bas les masques et la capuche, pour se révéler être un Rotbringer, aussi jovial et enthousiaste qu’une Maïté nécrosée. Sa transformation entraîne également celle des jumeaux, que leur consommation non raisonnable de soupe d’anguille pestiférée a changé en séides de Nurgle.

Ce constat posé, il ne reste plus grand-chose d’autre à faire pour nos héros que de pratiquer un peu de distanciation sociale, et prendre leurs jambes à leurs cous pour échapper aux miasmes et à la fringale persistante de leurs anciens camarades. Après une course éprouvante, Brida et Eron arrivent à mettre suffisamment de distance entre eux et les gros tas pour confectionner un radeau de fortune et partir de l’île maudite en battant très fort des jambes. Malheureusement, si la brioche des Maggotkins ne les avantage pas lors des épreuves de course de fond, elle leur permet en revanche de nager comme des poissons dans l’eau, et nos deux tourtereaux se retrouvent donc contraints à repousser les assauts sous-marins de leurs anciens amis à grands coups de latte. Le salut arrivera sous la forme d’une flotte de pêcheurs locaux, qui, en venant à leur secours, fera diversion assez longtemps pour que le courant emporte le radeau de la méduse, maintenu en un seul morceau par l’étreinte ferme d’Eron, jusqu’à la sécurité d’un banc de sable…

Début spoiler 2…Le soulagement de Brida est toutefois de courte durée, puisqu’elle découvre que son chevalier servant s’est sacrifié pour permettre à leur coquille de noix de rester à flot, et s’est fait béqueter une bonne partie des bras par l’insatiable Cahn en chemin. Les pansements à base d’algues n’ayant pas eu l’effet purgatif escompté, Brida ne peut que constater la détérioration de l’état d’Eron, qu’elle décide d’achever par compassion avant que sa transformation en morfale cannibale sclérosé ne soit complète. Ceci fait, et jugeant Demesnus probablement perdue (il suffit qu’un seul pêcheur mordu revienne à bon port pour que l’état d’urgence sanitaire soit déclaré), elle décide d’embrasser la voie martiale et d’aller se faire fille de fer au régiment le plus proche. On sait maintenant pourquoi elle passe son temps à se laver les mains dans la suite des ses aventures1Fin spoiler

1 : C’est bien sûr absolument faux.

AVIS:

Il y a des origin stories qui valent la peine d’être racontées, et celle de Brida Devholm, passée de fille du coupeur de joints joncs à capitaine revêche d’une garnison de la Ligne Émeraude (The Siege of Greenspire) fait partie de celles-ci. Ce qui commence comme une petite virée en bateau un peu mièvre passe en effet rapidement au (script de) film d’horreur par l’intermédiaire d’un goujon méchamment grippé, permettant à Anna Stephens de démontrer sa science de la mise en scène et de l’angoisse au cours des quelques pages suivantes. Depuis l’ambiance « Les Dents de la Mer » lorsque le quator tente tant bien que mal d’échapper à l’anguille putréfiée, jusqu’au final à la « Walking Dead » (prévisible mais bien réalisé) où Brida se trouve contrainte et forcée de plaquer son fiancé pour raisons sanitaires, en passant par l’épisode îlien très influencé par « La Colline a des Yeux » (l’ermite fou qui « convertit » les jumeaux aux joies du Nurglisme) et « Massacre à la Tronçonneuse » (la fuite éperdue de Brida et Eron)1, cette expédition nautique emprunte avec bonheur – sauf celui des protagonistes, évidemment – aux différents classiques du genre, pour un résultat prenant et intense. Seule petite ombre au tableau d’une soumission autrement très maîtrisée, la révélation par la BL que Brida poursuit ses aventures anti-chaotiques dans The Siege of Greenspire enlève un peu de suspens au récit, en prévenant le lecteur que ce personnage, au moins, s’en sortira. Il aurait été plus malin de la part des éditeurs de faire le lien avec l’autre nouvelle d’Anna Stephens en fin de River of Death, mais ce type de mise en contexte étant encore trop rare de la part de Nottingham, on ne leur en tiendra pas trop rigueur. En définitive, une vraie bonne nouvelle (haha), qui surprendra – en bien – peut-être ceux qui se sont familiarisés avec la prose AoSesque de Stephens via son plus classique Siege…, a le bon goût de faire le lien avec les autres récits de la BL traitant de Demesnus (Les Fantômes de Demesnus de Josh Reynolds en particulier) et aurait tout à fait eu sa place dans le prochain recueil de Warhammer Horror

1 : Et un petit clin d’œil plus récent à « Action ou Vérité » avec le sourire figé de Cahn et Sati à l’heure du petit-déjeuner.

.

Respite’s End – M. Collins [40K] :

INTRIGUE:

Sur la planète Respite, les affaires vont pour le mieux pour le Medicae Primus Arlen Cedano, responsable de la production des médicaments qui constitue la principale activité du monde en question. On connaissait les mondes forges, il faudra s’habituer aux mondes pharmacies. Après tout, la Garde Impériale consomme des quantités astronomiques de Mercurochrome, c’est bien connu. Cedano vaque tranquillement à ses occupations dans le complexe de Valderos, qui consistent principalement à développer de nouvelles molécules miraculeuses, telles que le Prime (le redbull du 41ème millénaire), à s’assurer de la santé de la main d’œuvre locale, et accessoirement de faire des rapports réguliers à sa bonne amie Vector Phi, Magos entubée (comprendre qu’elle vit dans un tube), et à l’envoyé plénipotentiaire de ses actionnaires, un progenitor Genestealer. Car derrière ses apparences proprettes de Sanofi véritablement mondialisé, Respite est tombé sous la coupe du culte de l’Hélice Altérée, et répond donc aux commandements de Vejovium III. À chacun ses petits secrets.

Cette tranquillité industrieuse va toutefois voler en éclats lorsque les premiers cas d’une maladie mystérieuse commencent à se manifester parmi les laborantins, et dont les victimes se transformant en Zombies certes décérébrés mais pétés de rire. En première ligne pour trouver un remède au COVID-40.148 (à peu près), Cedano se fait contacter par radio par un certain Jast alors qu’il planche sur son vaccin. Ce dernier lui apprend qu’il est responsable de cette nouvelle pandémie, et qu’il l’a déclenchée uniquement pour mettre à l’épreuve la compétence de celui qu’il voit comme un digne un adversaire. Profitant de la tendance à l’épanchement de ce fan inconnu, Cedano convoque discrètement son vieux copain Heinrich, Clamavus de son état et donc spécialiste en communication, pour qu’il l’aide à trouver l’origine de l’appel et donc l’adresse de ce petit plaisantin. Dans l’intervalle, notre héroïque docteur donne de sa personne pour endiguer la contagion, n’hésitant pas à manier le lance-flamme pour traiter les patients les plus atteints, ce qui le met assez logiquement sur les dents et le plonge temporairement dans les abîmes de la dépression… dont une idée géniale (la chloroquine, peut-être) le sort. Malgré les coups de fil incessants de son groupie pestilentiel, Cedano arrive finalement à mettre au point un protocole a priori efficace, laissant espérer une fin prochaine à la crise.

De leurs côtés, Heinrich et le reste du Comex n’ont pas chômé non plus, le premier localisant l’origine du signal pirate, et les autres mobilisant les forces du culte pour aller purger les importuns une fois pour toutes, dans la cité-usine de Queveron où ils semblent s’être installés. Pendant que l’armée, menée par Heinrich et Vector Phi, sortie de sa boîte pour l’occasion, encercle le complexe, Cedano prépare un plan de contingence et donne la permission de minuit à sa smala d’Aberrants, avant d’entreprendre la longue descente jusqu’aux niveaux inférieurs de Valderos, où son intuition lui indique que se terre sa Némésis.

Et effectivement, pendant que le gros des forces de l’ordre se coltine l’extermination des Zombies ayant remplacé la population de Queveron, Cedano débusque un trio de Death Guards squattant la cave de son propre immeuble. Le leader de l’infecte trinité est bien Jast, Hektor de son prénom, venu proposer un CDI au bon docteur, dont la compétence l’a impressionnée. Cependant, le refus de ce dernier de faire une croix sur ses recherches et de reconnaître le crime de xenophilie, qui reste même en travers de la gorge – ou équivalent – d’un Space Marine du Chaos, provoque l’ire du débonnaire infectiologue. Qu’à cela ne tienne, Cedano n’est pas venu seul, et sa famille élargie tombe sur le râble – ou équivalent – des importuns. Après une mêlée générale plus serrée que ce que le rapport de force initial ne le laissait penser, les Astartes pétomanes sont mis hors d’état de nuire, laissant le seul Cedano en piteux état parmi les cadavres des combattants. À son réveil, un Heinrich très mécontent l’informe que ses petites cachotteries sur la composition des vitamines administrées aux forces chargées de la pacification de Queveron ont eu des effets indésirables, comme la transformation des auxiliaires humains en berserkers ayant chargé dans le tas sans réfléchir, ce qui a conduit à des pertes colossales qui auront des lourdes répercussions sur les projections de croissance du culte. Inacceptable ! Cette dérogation à l’éthique de l’Hélice a tellement mécontenté le Conseil d’Administration que le Medicae Primus est convoqué sur Vejovium III pour un tête à tête avec le Prime Specimen. Et en plus de ça, il a choppé un virus. La médecine du travail n’est décidément pas une sinécure…

AVIS:

Si la deuxième contribution de Marc Collins à la Black Library1 s’avère être une lecture plus intéressant que ses travaux initiaux, j’avoue que la restitution d’un avis sur la qualité de ce ‘Respite’ End’ m’a posé davantage de problèmes que je ne me l’imaginais. En cause, un facteur que je n’ai pas souvent abordé ici, mais qui à mes yeux mérite qu’on le prenne en compte : la familiarité du lecteur avec le background spécifique que l’auteur utilise pour mettre en scène son histoire. En ce qui me concerne, ayant arrêté de longue date de suivre les avancées du fluff avec le zèle des mes jeunes années, où je me faisais un point d’honneur d’acheter les Codex de toutes les factions du jeu (même si je n’ai jamais joué à ce dernier), les Cultes Genestealers restent une race assez mystérieuse. Aussi, j’ai dû « découvrir » par moi-même que la planète Respite était sous leur contrôle au fur et à mesure du récit, à travers les indications, loin d’être transparentes pour le tout venant, de Collins. Ainsi, je n’ai réalisé que l’Hélice Altérée et le culte Verjovian étaient canon, et pas une simple création de Collins, qu’en faisant des recherches annexes pour tenter de confirmer le vieux soupçon qui me tenaillait sur la nature pas très orthodoxe du crédo du héros. Découvrir que la planète modèle est en fait sous la coupe d’un culte Xenos en cours de lecture a donc rendu l’expérience plus plaisante que si ma connaissance du fluff m’avait permis d’identifier le problème à sa première mention. Bref, il se peut très bien qu’un lecteur mieux au fait que votre serviteur des arcanes du background récent trouve ce ‘Respite’s End’ d’une platitude consommée, son principal intérêt ayant été ce qui me concerne cette épiphanie peut-être pas du tout recherchée par l’auteur2.

Car il faut bien reconnaître que l’enquête menée par Cedano et sa fine équipe de freaks pour retrouver les petits malins ayant jeté des boules puantes dans leur magnifique monde-pharmacie ne casse pas trois bras à un Aberrant, tout comme le règlement compte final entre le Professeur Raoult du 41ème millénaire et ce parasite de Jast. Certes, Collins arrive à relever son propos avec quelques trouvailles bien senties, comme les Zombies de la Peste hilares (clin d’œil au Smilex du Joker ?) ou le jugement sévère porté par un Space Marines du Chaos sur l’infestation Genestealers, qu’il considère être un crime terrible envers l’Humanité (alors que se révolter contre l’Empereur et vouer son âme à Nurgle, c’est chill), mais dans l’ensemble, l’intrigue en elle-même est vraiment très classique. À lire pour ceux qui seraient intéressés par une plongée dans ce que Collins présente comme une « utopie tyrani(di)que », soit une planète complètement sous la coupe des agents de la Grande Dévoreuse, mais dont les habitants ont l’air de mieux s’en sortir que ceux du monde-ruche moyen. Je serai intéressé de connaître votre retour sur cette nouvelle (qui a au moins le mérite de s’affranchir de la malédiction du titre jeu de mots3), pour voir si mon relatif noviciat en matière d’infestation extraterrestre à véritablement faussé mon jugement…

1 : La première étant ‘Champions, All’, publiée pendant le Black Library Advent Calendar 2019.
2 : Bien que sa non-utilisation du terme « Genestealer » d’un bout à l’autre de la nouvelle me laisse tout de même penser qu’il savait ce qu’il faisait.
3 : Qui veut que ce type de nouvelle paie les velléités humoristiques de son auteur par un contenu généralement médiocre. Allez lire ‘Virtue’s Reward’ pour vous en convaincre.

.

No Matter the Cost – M. R. Fletcher [AoS] :

INTRIGUE:

Réveil douloureux, comme tous les matins, pour le vieil ermite Fell. Son rituel de lever consiste en effet à constater l’étendue des dégâts infligés par une longue vie et des capacités de guérison très limitées. Et pour cause, notre héros accuse plus de cinq siècles au compteur, et ne peut tout simplement pas se remettre de la moindre blessure, fracture ou luxation. Pourquoi ? Nous n’allons pas tarder à le savoir. Pour l’heure, après avoir rappelé à ses pieds, mains, doigts, genoux et dos à quel point il les détestait (et c’est réciproque), Fell se traîne jusqu’à la cuisine de son petit deux-pièces, où il ne tarde pas à recevoir la visite de sa jeune voisine, Rita. Cette dernière est une bonne âme, qui, en plus de lui apporter quelques victuailles sous la forme de pain et pommes de terre (et, devinez quoi ? Fell déteste les patates), lui fait sa vaisselle, la conversation et l’invite à rejoindre le reste de la communauté à la taverne locale ce soir, où l’aubergiste lui paiera un coup à boire et où il pourra entendre chanter la divine Terese, qui semble avoir le béguin pour l’irascible vieillard, si ses dons réguliers de tubercule peuvent être considérés comme une tentative de flirt (après tout, on est dans un pauvre village de Shyish). Malgré les tombereaux d’insultes et de menaces qu’il déverse sur la fillette, Fell finit par se laisser convaincre d’aller s’en jeter un petit ce soir, histoire de briser sa solitude. Et seul, il l’est…

Un flash-back intercalé avec la trépidante vie sociale de Hollow’s Dell (le hameau en question) nous permet en effet d’en apprendre un plus sur le Grouch du Royaume de la Mort. Scribe employé par les magisters de Glymmsforge, Fell avait, en des temps très anciens, une femme (Ruhinn) et une fille (Leona). Lorsque cette dernière tomba malade et mourut, il mit à profit sa mémoire eidétique pour recopier de tête un grimoire de nécromancie qu’un riche commanditaire lui avait commandé (on ne pose visiblement pas de questions d’éthiques à Glymmsforge), ainsi qu’un dictionnaire bilingue lui permettant de décoder les pages qu’il avait auparavant copié sans comprendre. Ce choix de vie ayant reçu l’approbation de son épouse, tout aussi désespérée que lui par la mort de leur fille, Fell avait passé la décennie suivante à bûcher sa méthode Assimil nécromantique, plongeant le couple dans une misère noire mais lui permettant de se consacrer pleinement à sa nouvelle vocation. L’apprentissage du sort de résurrection ultime s’avérant trop compliqué pour notre autodidacte, il avait fini par accepter l’aide d’une professeur un peu particulière, ayant remarqué à ses prunelles enfiévrées (et sans doute à son teint blafard et ses cernes marquées) que Fell en était, tout comme elle. Appelée Misère, cachant son Âge1 derrière une plastique parfaite, et au service d’une mystérieuse Dame Oh, elle s’était engagée à apprendre à l’amateur les mystères des arcanes, en échange d’un service éternel. Au pied du mur et bientôt au bord de la tombe, Fell avait accepté, mais s’était carapaté discrètement avec sa petite famille une fois la connaissance acquise et le sort final jeté, espérant s’installer avec les femmes de sa vie dans un coin pas trop lugubre de Shyish pour rattraper le temps perdu.

Malheureusement, Misère avait vu clair dans son jeu, et confronté la petite famille sur le bateau les menant vers leur nouvelle vie. Mettant son élève au défi de la stopper, elle avait dissipé le sort lancé sur Leona, renvoyant cette dernière conter fleurette à Nagash, et desséché sur pied la pauvre Ruhinn, avant de jeter à Fell une malédiction d’un genre un peu particulier : l’immortalité doublée d’une incapacité de guérir. C’est ainsi que notre héros en arriva à traîner sa mélancolie et sa carcasse fragile de village en village pendant des siècles, refusant à échéances régulières les offres faites par Misère de reprendre ses études, et se coupant volontairement du monde avec son comportement grossier pour ne pas donner de nouveaux moyens de chantage émotionnel à la vampiresse. Tout un programme.

Alors qu’il se rend au bar du coin, ce soir là, Fell réalise que quelqu’un l’épie du haut de la colline voisine, et, comme de juste, c’est la Misère qui attend de se jeter sur le bas-peuple (lui, en l’occurrence). La tuile. Jugeant qu’il a au moins quelques heures devant lui avant de devoir évacuer les lieux, et souhaitant saluer une dernière fois ses gentils voisins, notre fringant vieillard va s’asseoir au bar, mais est bientôt abordé par un mercenaire patibulaire, envoyé par Misère lui faire la même offre que les décennies passées : rejoindre le service de Dame Oh, ou avoir le saccage de son village d’adoption et le massacre de tous ses habitants et particulièrement celui de Rita, qui s’inscruste sans gêne dans la discussion, sur la conscience. Bien que bluffant à mort que ses concitoyens ne représentent rien pour lui, Fell ne convainc ni le matamore, qui repart en jurant de revenir avec ses troupes dans deux heures, ni lui-même. Décidé à empêcher les ruffians de mettre leur forfait à exécution, notre héros décide donc de rompre le serment qu’il avait fait sur les cendres et ossements de sa famille de ne plus jamais recourir à la Nécromancie, et s’en va donc clopin-clopant rendre une petite visite au cimetière local…

La suite et fin de la nouvelle voit Fell et ses légions de morts sans repos embusquer les reîtres de Misère à leur entrée dans le village, pendant que le reste de la population de ce dernier reste sagement enfermée dans l’auberge, comme leur mascotte édentée leur avait demandée. Le poids du nombre ayant remporté les débats, Fell résout d’aller traiter le problème à la racine, et mettre un terme à la non-vie de sa stalkeuse immortelle. Avant de s’embarquer dans sa croisade personnelle à la tête de ses troupes, il profite de sa nouvelle résolution pour annuler la malédiction que Misère lui avait lancé, et siphonne allègrement l’énergie vitale du menaçant mercenaire, fait prisonnier au cours de la bagarre, pour se refaire une santé et une jeunesse. À nous deux maintenant Misère ! Tu vas bientôt t’en mordre les dents, bougresse.

1 : Oui, son Âge, pas son âge. Ça vous donne une idée du nombre de kilomètres au compteur

AVIS:

Bien qu’il ait déserté pour l’occasion ses bien aimés Ossiarch Bonereapers, Michael Fletcher continue son odyssée Shyishesque de belle manière avec ce No Matter the Cost, dont la plus grande réussite repose à mes yeux dans la variété d’atmosphères que l’auteur convoque. Depuis les débuts plutôt humoristiques de l’histoire, où le lecteur fait la connaissance du cacochyme et ronchon Fell, jusqu’à sa conclusion résolument grimdark, où le même Fell passe enfin full Nécromancien et décide d’aller résoudre l’épineux problème de la Misère dans le monde, en passant par la tragédie personnelle qui l’a poussé à se lancer dans des études occultes, et même la petite touche émotionnelle qui traverse le récit lorsque notre antihéros réalise que, finalement, il s’est attaché à ses concitoyens de Hollow’s Dell et décide de les défendre, Fletcher parvient à habilement changer l’éclairage de la nouvelle au fil des pages, ce qu’il n’avait encore fait que partiellement (Strong Bones) et ce que peu d’auteurs de la BL sont capables de réaliser dans leurs courts formats. Cela démontre donc une maîtrise narrative certaine de la part de ce contributeur, et m’incite d’autant plus à suivre ses prochaines soumissions avec intérêt. Après tout, si un auteur passable peut faire illusion en traitant un sujet foncièrement intéressant, un auteur accompli peut maintenir un niveau de qualité appréciable quelque soit le thème qu’il choisit d’aborder. Partant, il vaut mieux investir son temps et son argent sur les écrivains faisant preuve d’une « technique » suffisante, lorsque cette dernière est détectable. C’est en tout cas mon avis.

À côté de cela, une autre satisfaction que je retire de cette lecture est le choix de Fletcher d’avoir dépeint son héros de Nécromancien sous un jour positif, ce qui n’était pas arrivé depuis…Who Mourns A Necromancer (Brian Craig) ? Même si on se doute que les choix de Fell vont finir par lui monter à la tête, et que le chemin sur lequel il s’est finalement engagé après quelques siècles d’atermoiements, va le mener droit en enfer (ou l’équivalent des Royaumes Mortels), notre protagoniste finit la nouvelle comme un « gentil » avéré, et on se met à rêver de le suivre dans la suite de sa vendetta (ou vendett-Oh) personnelle contre la machiavélique Misère et sa mystérieuse – ou pas – protectrice. S’il est trop tôt pour dire si la BL autorisera Fletcher à poursuivre ses chroniques Fêllées, ce dernier a en tout cas réussi à piquer mon intérêt pour le Nécromancien Blanc de Shyish, qui retourne les armes de ses adversaires contre eux pour lutter contre la tyrannie des Mortarques et de leurs agents. À 40K, ça s’appelle être un radical, et c’est parfois toléré, alors pourquoi pas dans les Royaumes Mortels ?

.

Curse of the Lucky – G. Kloster [NDA] :

INTRIGUE:

Le jeune Cutty coulait des jours tranquilles, à défaut de pouvoir être qualifiés d’heureux, en compagnie de son mentor et maître de stage Kicker, infirmier libéral dispensant ses talents aux bandes locales passant leur temps à se castagner dans ce petit coin de Hive Primus, Necromunda, quand l’irruption dans l’officine d’un Goliath amoché, Rast, vint faire voler son petit monde en éclat. Rendu grincheux par le résultat de l’opération, qui le laissa manchot, et, surtout, ne permit pas de sauver son précieux pistolet bolter, Rast était sur le point d’incruster le doc dans la moquette à coups de rangers lorsque Cutty lui proposa de lui fournir un nouveau flingue pour remplacer la pétoire perdue. Et si notre jeune héros se trouva en mesure de proposer ce deal au malotru, c’est parce qu’il est vraiment très chanceux, et a perfectionné une méthode pour prédire l’avenir en jetant des dés. Avec un talent pareil, il aurait pu remporter l’ETC facilement s’il était né seulement 38 millénaires plus tôt, mais comme dit le poète, on ne choisit pas ses parents, on ne choisit pas sa famille…

L’ayant pris au mot, Rast rassembla une escouade de Goliaths et emboîta le pas de son nouveau porte-bonheur, qui finit, après quelques jets probants, par localiser une cache d’armes dans un conduit d’aération abandonné. Et, ô merveille, le stock ainsi mis à jour contenait un authentique bolter, gagnant à Cutty la reconnaissance éternelle temporaire de son mécène, et quelques regards dubitatifs de la part des autres membres du gang, pas vraiment convaincus qu’un manchot soit capable d’utiliser une arme aussi caractérielle d’une seule main. L’arrivée inattendue d’un groupe de Van Sarr, légitimes propriétaires de la quincaillerie, sur les lieux du loot vint toutefois mettre fin à ces savantes supputations, et donna à Cutty l’occasion rêvée de s’éclipser discrètement, en plongeant en contrebas et atterrissant sans trop de dommage (la chance !) dans une mare d’eau croupie.

Sorti de ce nid à microbes et à rats mutants, qui heureusement se montrèrent plus intéressés par la dégustation du cadavre de Goliaths ayant servi de bouée au jeunot pour rejoindre la rive, Cutty fit rapidement la connaissance des indigènes du cru, une tribu de mutants cannibales, mais sinon assez sympathiques, car tenus en rênes psychiques par une mystérieuse fillette, ravie d’avoir un peu de compagnie normale dans la situation bizarre dans laquelle elle s’est elle-même trouvée depuis que son professeur, du nom de Prof (spoiler : il ne s’agit pas d’un Nain) a cessé de venir lui donner des cours particuliers à domicile, comme il avait l’habitude de le faire. Certes, cela consistait surtout à regarder des cassettes éducatives, mais tout de même, c’était mieux que rien. Au bout de quelques semaines d’ennui profond, notre Psyker en culottes courtes décida donc de partir à la découverte du vaste monde, ce qui la conduisit à devenir la mascotte de la faune dégénérée de cette partie du sous-monde, qui n’a eu d’yeux (qu’ils ont très nombreux) pour elle depuis lors.

Sentant que Cutty avait lui aussi des pouvoirs mentaux, ce qu’il commença par dénier fortement, l’inconnue de la décharge somma son nouvel meilleur ami de lui trouver un nom, si possible aussi hilarant que le sien et celui de Kicker, tous deux inspirés d’un constat cruel (Cutty n’aime pas la vue du sang, et Kicker a perdu l’usage de ses jambes). Parce qu’on sait rire sur Necromunda, non mais. Avant que le baptême ait pu avoir lieu, la descente en rappel des Van Sarr et de Rast, fait prisonnier par ces derniers, vint mettre fin à cette discussion mondaine. Le leader du gang techos se montrait en effet très intéressé par le recrutement d’un porte-bonheur, la capacité de Cutty de localiser sa planque l’ayant favorablement impressionné. Cependant, le refus catégorique de ce dernier de passer de main en mains poussa Little Miss Sewer à lancer ses protecteurs sur les intrus, qui finirent réduits à une poignée de gangers, toujours escortés de l’increvable Rast, non sans avoir massacrés une grande partie des autochtones. Changeant de tactique, la bonne amie de Cutty opta ensuite pour une approche frontale, s’approchant assez près grâce à son innocent minois pour faire tomber le chef des Van Sarr sous sa coupe, et lui ordonner de flinguer ses hommes et son prisonnier, ce qu’il fit sans discuter.

Cependant, la résistance naturelle des Goliaths faillit jouer un mauvais tour à nos héros, lorsque le décidément insubmersible Rast refit surface de la mare où l’impact de laser l’avait projeté, et parvint à régler son compte au tireur envoûté, avant de se saisir de l’irritante Psyker à bras le corps. La situation, fortement compromise, fut toutefois à nouveau sauvée, cette fois-ci par la chance insolente de Cutty, qui convainquit sa Némésis de venir s’expliquer d’homme à homme avec lui, et trouva le moyen de le transformer en torche humaine, et de le poignarder pour la forme, par une suite hilarante (sauf pour Rast) de coups de chance, une fois qu’il eut laissé tomber sa prisonnière. Frappé par l’inspiration, Cutty baptisa cette dernière Shy, en référence à son approche directe des relations sociales, se terminant la plupart du temps très mal pour ses interlocuteurs, il faut le reconnaître.

De retour à la surface, ou en tout cas à des niveaux de la ruche mieux fréquentés, Cutty et Shy ne purent cependant pas s’attarder très longtemps auprès de Kicker, le vieil homme ayant fini par attirer l’attention des autorités à la suite des nombreux coups de chance de son protégé constatés par le voisinage. Placé sous la garde d’une paire d’Enforcers, dirigé par celui que Shy identifia comme étant le fameux Prof, Kicker n’eut que le temps de dire au revoir à son stagiaire, et ce dernier de rassembler quelques affaires – après que Shy eut gagné accès aux locaux en demandant gentiment aux sentinelles laissées sur place de s’entre-tuer – avant que le duo des teenagers extraordinaires ne tire sa révérence pour de bon, espérant sans doute trouver d’autres individus « doués » et/ou « chanceux » dans le reste de la ruche. C’est tout le mal qu’on leur souhaite…

AVIS:

Débuts intéressants de Gary Kloster dans la GW-Fiction en général, et dans le cadre bucolique de Necromunda en particulier. Notre homme démontre en effet une maîtrise appréciable des arcanes de la franchise dans laquelle il s’aventure au même titre que son héros, son utilisation des Maisons Goliath et Van Saar (sans compter une mention bien placée de l’humour glacé et sophistiqué des Delaque) apparaissant tout à fait à propos. Son choix de délaisser la guerre des gangs pour se concentrer sur la trajectoire peu commune – bien qu’il passe une partie de la nouvelle à plonger comme une pierre – de Cutty, que l’on peut sans mal qualifier de Brin Milo du sous-monde1, est cependant ce qui fait l’intérêt de Curse of the Lucky, qui pourrait sur cette base se dérouler sur n’importe quelle planète de l’Imperium, guère réputée pour leur tolérance envers les individus ayant trop de chance, même s’ils se contentent de compter les cartes au Black Jack ou de camoufler un ordinateur dans leur chaussure pour calculer le numéro qui sortira à la roulette. Il y a des choses qui ne changent pas. La rencontre de Cutty et Shy, enfant prodige sortie tout droit d’un cross-over entre Stranger Things et Akira, et la révélation de l’identité du mystérieux enseignant à domicile de cette dernière, fait ainsi basculer le récit de survivalisme en milieu urbain en quête initiatrice, où les jeunes et exceptionnels héros s’unissent pour transcender leur condition de parias. Ecrit comme ça, on dirait presque du Harry Potter2, destin que je ne leur souhaite pas, tant l’usage de « magie » non sanctionnée peut avoir des conséquences malheureuses pour les contemporains du 41ème millénaire. En tout cas, cela donne plutôt envie de connaître la suite, si suite il y a, mais Kloster laisse cette porte largement ouverte, alors pourquoi ne pas espérer ?

1 : Très doué avec les jeux de hasard, mais pas du tout un Psyker, non non…
2 : Ou une version grimdark des Royaumes du Nord, notamment à cause de l’utilisation des dés chanceux de Cutty comme s’il s’agissait d’un aléthiomètre.

.

Best Death Wins – S. Grigsby [40K] :

INTRIGUE:

Alors que la planète Malum vit ses dernières heures de bio-intégrité, un trio de Gardes Impériaux réfugiés dans un bunker blindé doit parvenir à un consensus pour trancher l’épineuse question de leur fin de vie. En effet, les Tyranides ayant infesté ce théâtre d’opérations de manière totale et définitive, il ne reste plus qu’à nos héros, Regula Morrison (l’arrière petite-fille376 de Jim), Consus et Amulius qu’à décider de la manière dont ils rejoindront la droite de l’Empereur. Alors que Regula serait favorable à une charge héroïque, tous fusils laser dehors, Amulius souhaiterait lui mettre à profit les charges de démolition entreposées dans la casemate pour faire un gros trou dans la nuée chitineuse qui commence à faire ses griffes sur la porte. Quant à Consus, dont la jambe a servi de casse-croûte à un Hormagaunt affamé il y a peu, ce qui semble générer chez lui plus d’énervement que de souffrance, et dont l’espérance de vie se compte donc en minutes, il est prêt à partir en cloche-pied botter des derches de cafards de l’espace – très compliqué à faire sans une excellente coordination musculaire ceci dit – ou à participer à la sur-BOOM qu’Amulius appelle de ses vœux. Problème, comme Regula n’est pas du tout chaude pour set the night on fire, comme aurait dit son lointain ancêtre, ce qu’elle considère comme étant une solution de facilité, et qu’Amulius ne veut pas faire de l’entomologie militante, il faut trouver un moyen de résoudre cette opposition de façon civilisée. Mumu propose donc que chacun raconte le récit de la meilleure mort à laquelle il a assistée, et le gagnant du vote populaire décidera de la façon dont la Garde mourra (c’est ce qu’elle sait faire de mieux après tout).

C’est Regula qui commence le tour de table, en racontant la manière dont elle a envoyé son insupportable Sergent, le bien nommé Bernard Wellsmith, rejoindre ses ancêtres en rejouant la bataille du pont 2-4 sur Thracia, avec Bernie le Dingue dans le rôle d’Idaeus et elle-même dans celui du pistolet plasma utilisé par le Capitaine Ultramarines pour provoquer la destruction du pont en question. Il faut dire que Wellsmith s’était montré un bien mauvais officier jusqu’ici, sa recherche permanente de gloire l’ayant conduit à charger régulièrement dans le tas au mépris de ses ordres, entraînant à sa suite son escouade considérablement blasée, et menant cette dernière à subir de nombreuses pertes, dont certaines causées par la CT pitoyable de leur bien-aimé leader.

C’est ensuite à Consus, qui sent son heure approcher, de prendre le mic’ et de narrer la manière dont son pote de régiment et mascotte de peloton, un gringalet du nom de Veritus, a donné ses vies au service de l’Empereur. Oui, ses vies. Capturés par les Orks au cours d’une mission de scoutisme mal négociée, Consus, Veritus et quelques autres bidasses furent amenés dans le camp des peaux-vertes et remis aux bons soins du Painboy local, un nommé Kutrag. Veritus eut alors le bonheur d’être choisi par le dorkteur pour une expérimentation électrifiante aussi novatrice que douloureuse. Le principe était d’une élégante simplicité : tuer le sujet, puis essayer de le ramener à la vie par tous les moyens possibles. À ce petit jeu, Veritus se révéla être particulièrement doué, revenant d’un tir de fling’ en pleine tête, d’une noyade, d’une amputation et d’une bastonnade… et sans doute d’autres morts tout aussi inventives, dont on ne saura malheureusement jamais la teneur, le narrateur décédant en cours de récit. En tout cas, il tient la corde auprès des bookmakers, c’est certain.

Finalement, et bien que le décès de leur comparse ait rendu la perspective d’un vote décisif assez illusoire, c’est au tour d’Amulius de se mettre à table. Et là, surprise, le vétéran raconte simplement comment il a choisi de se réfugier dans ce bunker quelques heures plus tôt, laissant son escouade à la porte par égoïsme, jusqu’à ce que Regula et Consus soient arrivés. Amulius reconnait être un poltron, dont les nerfs l’ont lâché à l’idée de combattre les Tyranides, et qui souhaite simplement une mort rapide et indolore. Ne sachant pas comment déclencher les charges de démolition entreposées dans le bunker, il espérait bénéficier d’un coup de main de la part des nouveaux arrivants, ou, à défaut, d’une exécution sommaire de leur part, sa couardise allant jusqu’à l’empêcher de retourner son arme contre lui. Bref, son histoire ne répond pas du tout au cahier des charges, et est donc disqualifiée. Sur ces entrefaites, un Guerrier Tyranide au bras long parvient à empaler le pleutre sur le bout de sa griffe par un trou dans le plafond, laissant Regula toute latitude quant à la manière dont elle mènera sa vie. Pour les quelques secondes que durera cette dernière, s’entend…

AVIS:

Malgré un titre, un concept et une ouverture alléchants (notamment à cause des petites touches d’humour pince sans rire que Grigsby intègre dans sa narration), Best Death Wins se révèle un peu décevant sur le long-terme. Ceci est dû en bonne partie au déroulé et à la conclusion en demi-teinte de cette nouvelle, qui ne contient finalement qu’un seul récit de mort vraiment spectaculaire (celle de Veritus), que l’auteur laisse d’ailleurs inachevé, et se termine de façon tout à fait classique, ce qui pose la question de l’intérêt du format « porte-manteaux1 » choisi par Grigsby. Puisque rien de surprenant ne se passe dans les dernières pages qui justifie cette version sanglante et futuriste du Decameron, Best Death Wins apparaît davantage comme le moyen pour son auteur de signer une nouvelle d’une longueur suffisante en assemblant des histoires indépendantes les unes aux autres, plutôt qu’un ensemble de récits certes disparates, mais liés par un dénouement unificateur. Je pense qu’il y avait moyen de faire mieux dans l’exploitation de cette idée sympathique, particulièrement dans un univers comme Warhammer 40.000 où la mort est omniprésente.

1 : C’est ainsi que l’anglais désigne une histoire qui contient d’autres histoires.

.

Trail of Ash – G. Lyon [AoS] :

INTRIGUE:

Dernière magister de la cité détruite de Tantalum, en Chamon, Jaqlyn Kouslo, accompagnée par un régiment de survivants de la ville, poursuit un monstre insaisissable depuis plusieurs mois à travers les étendues sauvages de Ghur. La bête en question, qui ne laisse sur son sillage que ruines et cadavres carbonisés (les derniers en date appartenant au petit village de Farhold, dont le défaut fut de ne pas connaître le secret de la potion magique), a été libérée pendant la défense de Tantalum contre les assauts des morts vivants réveillés par le nécro-séisme de Nagash et les Hommes-Bêtes opportunistes des Bois de Fer voisins, ayant décidé que c’était un bon moment pour aller régler leurs comptes avec leurs voisins civilisés, d’une façon qui ne l’était guère. Responsable, mais pas coupable (ou quelque chose comme ça), de ce fiasco1 arcanique, Jaqlyn a juré de mettre ce nouveau danger pour les habitants des Royaumes Mortels hors d’état de nuire, et mène donc sa petite bande de conscrits sur la trace de la mystérieuse calamité, malgré les reproches qui lui sont adressés à mi-voix par la soldatesque, et le poil dans la main de son second, le Sergent Archus2.

Entre deux séances d’orientation en forêt et cauchemars la ramenant dans les ruines de Tantalum, où, dans son zèle d’interrompre le lancement d’un sort par un chaman Homme-Bête, elle a concocté l’imbuvable cocktail magique (une base d’Azyr, un peu de Hysh, un zeste de Ghyran, une pincée de Chamon…) qui a donné naissance au monstre qu’elle poursuit depuis, Jaqlyn finit enfin par refaire son retard avec ce dernier, alors qu’il était sur le point de réduire en charpie un malheureux Duardin isolé…

Début spoiler…Ayant trouvé le moyen de se téléporter avec ses hommes dans la clairière où le drame était sur le point de se dérouler, ou de courir très très vite une fois sa vision terminée, Jaqlyn engage le combat avec la monstruosité, qui se révèle être un Wildfire Taurus de fort belle taille et de méchante humeur. Quand on vous disait que ces sorts étaient persistants, on ne vous a pas menti. Pensez à les dissiper à la fin de la bataille, ce serait sympa pour les voisins. Malgré leur courage et leur discipline, les soldats de Tantalum ne font pas le poids face à la mugissante manifestation, et finissent tous piétinés et encornés, 1D3 blessures mortelles à la fois. Dernier défenseur, Archus se rachète de sa fainéantise passée en mourant bravement au combat contre Mad-guerite, et gagnant le droit de devenir un Stormcast Eternal dans sa prochaine vie3. De son côté, Jaqlyn a bien du mal à mettre à profit le temps acheté par ses protecteurs de leur vie, sa méthode de « dé-tricotage » magique se révélant inefficace contre la Vache qui Cuit. Elle bénéficie toutefois de l’aide inattendue du Duardin précédemment sauvé par son intervention, qui balance pokéball sur pokéball sur l’entité magique, faisant à chaque fois tomber quelques HP, mais ne semblant que retarder l’inévitable.

Comprenant qu’il lui faut changer d’approche si elle veut avoir une chance de remporter ce combat bien mal engagé, notre sorcière se résout à refaire usage de la magie (elle était réticente à le faire depuis la catastrophe de Tantalum), et… invoque un nouveau sort persistant. What could go wrong, après tout? Et pas n’importe quel sort persistant, notez : Pacman. Oui, Pacman. Après tout, on est en Ghur. Au final, la combinaison des assauts du dentier géant, des gadgets astucieux de son allié de petite taille, et la découverte d’un fil de magie un peu décousu, finiront par sonner le glas de la vachette en furie, dans une spectaculaire déflagration. À son réveil, Jaqlyn, laissé désœuvrée par l’accomplissement de sa quête réparatrice, accepte l’offre du providentiel Duardin, l’ingénieur expérimental et doctorant en ectoplasmologie (les Nains ne sont plus ce qu’ils étaient), Thorri Steelfist, de devenir son associée et d’aller combattre les mages maléfiques et leurs créations à travers les Royaumes Mortels. Toss a coin…Fin spoiler  

1 : Ceci est un meta jeu de mots.
2 : Il commence en effet la nouvelle par proposer à sa cheffe de monter le camp dans les ruines de Farhold. On apprend deux lignes plus loin qu’il était à peine midi…
3 : Fun fact : À chaque fois qu’il récupère une âme valeureuse pour ses armées, on peut voir la tête de Sigmar apparaître dans le ciel, et entendre un gros « Yaaaasssss ».

AVIS:

Cela partait pas mal pour Graeme Lyon, son idée de sorts vraiment persistants1 étant bien trouvée, et capitalisant sur une des innovations les plus iconiques d’Age of Sigmar par rapport à son prédécesseur. Un sujet parfait pour une nouvelle AoS, donc. Si la première partie de Trail of Ash, jouant sur le mystère de l’identité du tueur poursuivi par l’inspectrice Klouso et ses séides, et les flashbacks ramenant cette dernière au moment de la création de Buffalo Bill2, se passe plutôt bien, la confrontation finale entre le monstre et la sorcière est en revanche bien moins convaincante. En cause, une combinaison de facilités narratives, permettant certes à Lyon de terminer son histoire (même si le partenariat entre Steelfist et Kouslo laisse à penser que l’auteur est parti sur une série de nouvelles), mais pas de manière très satisfaisante.

Ainsi, entre la convocation, celle-ci sans aucun problème de long terme, d’un nouveau sort persistant pour combattre le mana par le mana (si ça n’a pas marché la première fois, pourquoi cela fonctionnerait la seconde?), l’intervention d’un random Ghostbuster, introduit de façon purement opportuniste dans le récit, ou encore le mode opératoire try again-iste de Jaqlyn (comprendre que sa méthode de dé-tricotage commence par se monter parfaitement inefficace, avant de parvenir à décomposer Raging Bull sans trop de problèmes quelques minutes plus tard), le dénouement de cette traque de longue haleine tient plus de la queue de poisson que de l’apothéose. On ne répétera jamais assez qu’il est important pour un auteur de nouvelle de soigner sa sortie, que cette dernière se fasse à travers un twist final (si possible) bien trouvé, ou bien par l’intermédiaire d’un bon vieux combat entre protagonistes et antagonistes. Et même si la première solution est généralement plus complexe à mettre en scène, la seconde n’est pas beaucoup plus facile à orchestrer de façon satisfaisante, comme de nombreux dénouements de courts formats de la BL au cours des siècles3 l’ont démontré. Better luck next time !

1 : Le pitch a dû se passer comme ça :
“Dude, you know these endless spells stuff? What if… ‘hits joint’…they were really endless? Like they are running away from the battlefield. And you have to chase them.”
“Dude.”
“Bro.”
2 : Pas le chasseur de bisons, hein, le tueur en série.
3 : J’ai techniquement le droit d’utiliser cette formule, et je ne vais pas me gêner.

.

Castle of the Exile – G. Hanrahan [40K] :

INTRIGUE:

Sur un monde féodal inconnu au bataillon, un trio de voyageurs progresse difficilement vers un lieu baigné de légendes dans la culture locale : le château de l’Exilé. Si on en croit les chroniques, un puissant guerrier est descendu du ciel sur un chariot de feu à cet endroit il y a plus de trois siècles, et a amené la paix sur la planète en jetant à bas le maléfique royaume de Calbech, puis en vainquant à lui seul les armées des trois autres royaumes s’étant alliés contre lui à la bataille du champ d’Esstesea1. Devant tant de puissance, les souverains défaits préfèrent capituler plutôt que de connaître le même sort que leur collègue de Calbech et finir eux aussi la tête dans le calbut, ouvrant ainsi une ère de paix centenaire en application de l’édit de l’Exilé, interdisant à l’homme de se battre comme l’homme. Seulement, n’est pas Leto II qui veut, et le sentier d’or imposé par Bob le Conquérant n’a pas résisté très longtemps à la disparition de ce dernier, qui s’est retiré dans le château qu’il a fait construire sur le site de son arrivée par les artisans locaux il y a bien longtemps. Alors que leur planète est sur le point de retomber dans ses vieilles habitudes belliqueuses, le noble Lanig emmène donc le vieil érudit Wrmonoc et le mercenaire Elorn sur les lieux du prodige afin de déterminer si les légendes disaient vrai.

Après avoir bravé la jungle hostile ayant colonisé le parc du château, les voyageurs arrivent enfin devant la bâtisse, qui se révèle être… particulièrement moche et fermée à clé. Flûte. Qu’à cela ne tienne, un léger détour le long des murailles leur permet d’identifier un passage escaladable pour accéder au chemin de ronde. Leurs problèmes ne s’arrêtent cependant pas là, car la cour du château se révèle être envahie par des singes-loups géants, dont certains ont profité du crapahutage de nos héros pour aller se servir dans leurs montures. Il ne reste donc plus aux explorateurs qu’à se glisser discrètement à l’intérieur du bâtiment pour éviter tout prob- en fait non, car cette andouille de Wrmonoc fait tomber une pierre sous le nez des primates carnassiers, ce qui suscite une réaction outrée de ces derniers. Bien que les prouesses martiales d’Elorn parviennent à tenir les brutes affamées en respect, c’est toutefois l’étrange gant lanceur de cristaux que Lanig sort de son sac, et utilise pour aveugler la meute sanguinaire, qui sauve véritablement nos héros d’un destin funeste. Ce petit impondérable ayant été géré, il est grand temps pour eux d’enfin faire leur entrée dans la demeure de l’Exilé…

Début spoiler…Et cette dernière se révèle fidèle en tous points aux légendes locales, en plus de receler d’or et de joyaux. Elorn, dont le père l’a élevé dans le respect du Culte de l’Homme fondé par l’Exilé, avant de se faire trucider pour ses croyances par la milice locale, est profondément marqué par cette découverte, et manque de tomber en pâmoison devant l’armure dorée du guerrier légendaire. Lanig se révèle quant à lui bien moins impressionné, et même plutôt énervé, par cette découverte, et entraîne Wrmonoc à sa suite pour explorer le reste du château, laissant le mercenaire garder leurs arrières. Finissant par retrouver ses esprits, Elorn entreprend de délester un autel richement orné de ses pierreries pour rentrer dans ses frais, ce qui déclenche l’ouverture d’une trappe secrète, contenant un caisson gravé du mot « Calbech » et dans lequel notre insatiable curieux découvre le squelette d’un Eldar Noir2 ainsi qu’un éclat de cristal très similaire à ceux utilisés par son employeur pour repousser la faune locale3. Comprenant qu’il y a Mawloc sous gravillon, Elorn sèche ses larmes – c’est un tueur sensible – et s’empresse de partir à la recherche de ses compagnons, pressentant l’arrivée d’un drame.

En chemin, il découvre le lieu où le chariot de feu de l’Exilé s’est posé sur la planète, ou plutôt s’est écrasé au sol, si on doit en juger par le piteux état de la carrosserie du vaisseau spatial. Ce dernier a cependant subi de légères réparations, dont la pose d’une antenne de fortune fabriquée par les artisans locaux, et dont le but semble d’être de relayer le message à l’aide d’un certain frère de bataille Cromadus de la 4ème Compagnie, seul survivant de l’équipage. Un peu plus loin, Elorn tombe sur le presque cadavre de Wrmonoc, blessé à mort par Lanig alors que les deux hommes étaient sur le point d’accéder au lieu de repos de l’Exilé. Se précipitant dans la crypte pour empêcher son employeur de commettre l’irréparable, le mercenaire se retrouve victime d’un autre gadget de Lanig, qui, en bon méchant de série B qu’il se révèle être, explique longuement qu’il descend en droite ligne de la dernière reine de Calbech, exécutée par l’Exilé à son arrivée sur la planète. Son crime aura été de tolérer les  « Gens Pâles » vivre à sa cour, et dont Lanig a hérité quelques accessoires bien pratiques, dont une télécommande synaptique qu’il compte utiliser pour mettre douloureusement fin au sommeil et à la vie du bourreau de son aïeule, après l’avoir calibré en utilisant son homme de main comme cobaye. Et en effet, l’Exilé, bien qu’endormi, est bien vivant, comme prouve le sang qui s’écoule de la blessure que Lanig lui a fait sur la joue.  

Bien évidemment, la tendance de Lanig à déblatérer d’un air satisfait finira par lui jouer des tours, puisqu’elle permettra à Elorn de prononcer le nom du Beau au Bois Dormant, provoquant un spasme de ce dernier. Profitant de la panique de son tortionnaire, Elorn lui subtilise son gant de pouvoir et lui décoche un cristal en pleine gorge, mettant fin pour de bon à sa traître lignée. Cromadus, lui, retombe dans les bras de Morphée Sus-an, et ne regagnera jamais pleine conscience avant que, cinquante ans après les faits relatés ici, une force de Space Marines arrive finalement sur la planète et vienne le récupérer, au grand désarroi du vieil Elorn, ayant embrassé la vocation de concierge de l’Exilé après avoir sauvé ce dernier. On notera également que notre rusé héros a utilisé la reproduction de l’armure de son idole pour maintenir la paix mondiale, faisant bon usage de l’aura de terreur entourant son personnage pour convaincre les belligérants de regagner leurs pénates avant de se faire claquer le beignet, comme au bon vieux temps. C’est ainsi que se termine la villégiature de Cromadus dans la ruralité galactique profonde, mais, un bonheur/malheur n’arrivant jamais seul, la planète d’Elorn sera désormais rattachée à l’Impérium de l’Humanité, et va pouvoir découvrir que la paix imposée par leur figure tutélaire, finalement, avait ses bons côtés…Fin spoiler

1 : Fun fact, le rapport de force a été estimé par les historiens à 40.000 contre 1.
2 : Pas qu’Elorn soit particulièrement calé en xenologie, mais c’est le squelette lui-même qui lui souffle son origine à l’oreille.
3 : Dont la description fait fortement penser aux Bêtes Griffues utilisées par les Drukhari comme bichons. Comme quoi, il n’y a pas que des mauvais côtés dans la culture Xenos.

AVIS:

Peut-on se lasser de nouvelles dont l’intrigue repose sur l’hétérogénéité des mondes de l’Impérium, dont beaucoup disposent d’un niveau technologique bien rudimentaire par rapport à ce que nous considérons comme étant « la norme » dans le jeu? Pour ma part, la réponse est non, en tout cas tant que des auteurs inspirés comme Gareth Hanrahan arriveront à mettre en scène leurs histoires de façon aussi satisfaisante que c’est le cas ici1. L’auteur prend en effet bien soin de ménager quelques mystères et révélations pour l’amusement de son lectorat, qui s’associe donc rapidement avec les héros archéologues-pillards de Castle of the Exile. Cet exilé mythique est-il bien celui que l’on pense être, ou bien les siècles s’étant écoulés depuis sa distribution de torgnoles généralisée ont-ils déformé la réalité2 ? Qu’est-il devenu après être revenu prendre sa retraite dans son château ? Et pourquoi notre trio tient-il tant à connaître la vérité ? Hanrahan apporte une réponse, au moins partielle, à toutes ces questions, et rehausse au passage le blason des meilleurs de l’Empereur, capables de pacifier une planète littéralement à la mano. Abnett avait posé ce postulat il y a fort longtemps dans Frères du Serpent, et nous assistons donc ici à une remise au goût du jour de la badasserie naturelle de l’Astartes. Nécessaire ou too much, à vous d’en juger, mais l’histoire qui est livrée ici tient en tout cas bien la route, et se termine de façon élégante sur un retournement de perspective sur l’identité de l’exilé : finalement, ce n’était pas le belliqueux surhomme de Cromagnon qui était perdu dans une galaxie hostile, mais bien sa planète d’adoption de transit, qui va désormais pouvoir bénéficier des « largesses » et de la « bonté » de l’Impérium. Elle est pas belle la vie ?

1 : Un autre exemple intéressant de l’exploitation de cette idée peut être trouvée dans le ‘Angels’ de Robert Earl.
2 : Je m’étais hypé pour une révélation de l’Exilé comme étant un Space Marines du Chaos (hypothèse renforcée par le symbole de ce dernier, un crâne ailé). Mais Hanrahan a préféré donne une conclusion « heureuse » à son histoire.

.

At the Sign of the Brazen Claw : The Hounds of Nagash – G. Haley [AoS] :

INTRIGUE:

Dans l’auberge de la griffe bronzée, c’est le moment de passer à la caisse. Quelques instants après que l’inénarrable Pludu Quasque ait achevé son récit larmoyant, à plus d’un titre, un raffut de tous les diables se fait entendre à l’extérieur de la bâtisse. Ce sont les corgis molosses de Nagash, les redoutés Glaivewraiths, qui se manifestent pour escorter le mage voleur jusqu’à la case nécro-prison, en punition du vol qu’il a commis dans une des nombreuses maisons de vacances du Grand Nécromancien. Fort heureusement, les convives ne sont pas sans défense : Idenkor Stonbrak peut compter sur sa hache runique, Maesa sur son épée en bois (mais offerte par Alarielle, donc « hostile aux morts », dixit yours truly), et même nos gentils aubergistes se révèlent être plus équipés qu’une armurerie du Texas profond, Horrin dégainant un tromblon à balles d’argent et une paire de dagues enchantées de son comptoir. Il aurait cependant été plus malin de sa part d’investir dans des charmes répulsifs de qualité que dans un arsenal d’aventurier de D&D, car la protection accordée par les grigris qu’il a accrochés au mur ne tardent pas à rendre l’âme, permettant aux spectres de faire leur entrée dans la place. Pire, la descente en rappel dans la cheminée, Santa Claus style, éteint le feu dans l’âtre, ce qui ne manquera pas d’avoir des conséquences, hum, fumeuses.

Car comme les lecteurs les plus attentifs de ces chroniques s’en souviendront, ce couvre-feu brutal est une très mauvaise nouvelle (supplémentaire) pour nos héros, puisqu’il est voué à réveiller le géant endormi dont la main constitue les fondations de l’auberge. Alors, pendant que ses hôtes font le crâne au carré à la première vague des Nighthaunts, Horrin se démène pour ouallumer le feuheu, comme le chantait le fameux barde Marienburger naturalisé Bretonnien Jauni l’Edenté, en pure perte. À croire que le Glaivewraith coupable de cet acte haineux a uriné sur les braises pour marquer son territoire1. Lorsque les premiers soubresauts du dormeur du val secouent les fondations de la bicoque, il est temps pour notre petite troupe de plier les gaules, malgré les protestations de Horrin. Il faudra l’empalement, mortel, de Ninian (sa femme) par un spectre opportuniste, pour décider notre brave homme à abandonner sa position, Stonbrak emmenant les civils et Quasque en sécurité… ailleurs, pendant que Maesa et Shattercap livrent un dernier carré, ou dans leur cas, ligne droite, héroïque dans le lobby, interrompu avant son terme par le petit lever du fils de Behemat.

À force de saltos et de souplesses arrières purement aelfique, nos héros arrivent toutefois à éviter de se faire écraser par le mobilier, et, profitant de la confusion, parviennent à rattraper leurs comparses. Et là, c’est le drame. Pludu Quasque, qui n’avait pas servi à grand-chose jusqu’ici, a pété les plombs et pris en otage Barnabus (le fils adoptif de Horrin et feu Ninian). Le mage, plus illuminé que lumineux, a pour intention d’échanger son âme contre celle du palefrenier, se gagnant ainsi un peu de répit. Malgré l’offre de Maesa de protéger le sorcier des Nighthaunts s’il voulait bien n’en rien faire, celui-ci refuse tout net, et profite de la série de pompes que Gégé le géant fait pour se remettre en forme pour fausser compagnie au reste des héros, Barnie sous le bras.

La suite de notre histoire est assez confuse, le WOD du titan réduisant progressivement l’auberge en ruines et envoyant voler nos personnages de droite et de gauche. Premier éjecté du ring, Horrin est toutefois sauvé d’une chute mortelle par l’intervention salutaire du cerf de compagnie de Maesa, qui l’emporte en sûreté en contrebas de la montagne. Puis c’est Stonbrak qui voit sa glissade interrompue d’une flèche bien placée du Prince, agrafant ses braies à une planche porteuse. Pendant que le Duardin se démène pour se libérer, Maesa part à la poursuite de Quasque, qu’il finit par acculer dans un coin. Ses talents de négociateur laissant définitivement à désirer, il profite de la distraction que lui procure l’intervention sournoise de Shattercarp, envoyé en éclaireur, qui se fait les crocs sur le bras du kidnapper, pour récupérer Barnabus. Malheureusement, le Sprite passe par-dessus bord lorsque Quasque commence à dabber comme un dingue pour s’en débarrasser, provoquant l’ire bien compréhensible de l’Aelf. Il assiste donc d’un air détaché à la fin de Quasque, confronté et appréhendé par une patrouille de Glaivewraiths, qui repartent sans demander leur reste une fois le mage réduit en poussière.

Est-ce la fin de notre histoire ? Presque, mais pas tout à fait. À présent tout à fait réveillé, le géant de pierre a été témoin du dénouement du drame avec tout l’intérêt qu’un humain un peu benêt peut avoir pour un duel de fourmis prenant place dans sa main. Le spectacle étant terminé, il résout de se débarrasser des derniers restes de l’auberge en s’essuyant sur la montagne la plus proche, forçant Maesa à sauter de sa plateforme, Barnabus sur l’épaule, et atterrir sur une corniche surplombant une falaise à pic. Au matin, Shattercap, plus résistant qu’il n’y paraît, et Stonbrak (et sa fidèle corde) arrivent à la rescousse des naufragés, et une petite séance de rappel permet aux survivants de regagner le plancher des vaches Lumineth, et à Maeasa de faire preuve de sa bogossitude ultime. Par un heureux coup de bol, Barnabus trouve même la précieuse larme d’Adembi sur le chemin du retour, et la confie à Maesa pour qu’il aille la rapporter à qui de droit. Intéressé par la perspective de toucher une récompense de la part des Hyshois reconnaissants, Stonbrak prend le parti d’accompagner l’Aelf dans sa quête restitutrice, et c’est sur ces entrefaites que notre histoire se termine pour de bon, nos héros cravachant dur pour être sûrs de chopper le 15:37 des Kharadron Overlords pour le Portail des Royaumes le plus proche. Pas de répit pour les braves.

1 : Après tout, il a une tête de chien, alors…

AVIS:

Et voici que se referme ce qui resta sans doute, pour des siècles et des siècles, l’histoire signature de l’année I d’Inferno !. Que retenir de ce pastiche des Mille et Une Nuits transposée dans les Royaumes Mortels ? Si l’on commence par s’intéresser par l’épisode final de cette nuit de beuverie à l’auberge, je dois admettre qu’il ne s’agit pas à mes yeux de la partie la plus intéressante du récit déroulé par Haley. En effet, la préparation qu’il en avait fait en conclusion du conte de Horrin (There is a fire that MUST never goes out) et de la quête désespérée de Pludu Quasque (I Want Your Sex Soul) pavait la route des événements narrés dans ce Hounds of Nagash, et alors que les racontars échangés par les voyageurs s’étaient avérés riches en surprises, cette baston nocturne en terrain très dangereux ne l’a pas vraiment été. Autre grief, j’ai trouvé parfois les péripéties difficiles à suivre à partir du moment où le géant s’est réveillé pour de bon, l’orientation de l’auberge et sa dégradation progressive appelant à mes yeux une chute rapide et définitive des héros en contrebas. Ces déceptions évacuées, il faut reconnaître que Guy Haley accomplit son office avec sérieux et compétence, livrant une petite nouvelle d’action pure où le Prince Maesa peut enfin apparaître comme le Legolas des Royaumes Mortels qu’il est. Legolas nécrophile, mais Legolas tout de même. L’auteur fait également la liaison avec la suite des aventures du dandy au sprite, Hungerfiend, qui le voit faire équipe avec Stonbrak sur la route de Hysh.

Si on considère At the Sign of the Brazen Claw dans son ensemble, maintenant, on se retrouve face à une novella très différente de la soumission classique pour Age of Sigmar. Ceci est bien sûr dû à la structure de récit utilisée par Haley, qui faisait très bien l’affaire pour une histoire sérialisée, contrainte que les autres novellas de la GW-Fiction n’ont pas intégrer. Et, ne serait-ce que pour la bouffé d’air frais que ce format particulier apporte au lecteur, je pense que At the Sign… mérite le détour. À cela s’ajoute les nombreux sujets et cultures que le récit aborde, qui intéressera donc une plus large audience que la nouvelle « 1 vs 1 » classique, à commencer par les fluffistes. Notons aussi que les capacités de conteur de Haley sont généralement bien exploitées d’un récit à l’autre, dont le ton varie du très high fantasy (Horrin et sa cheminée géante) au plus grimdark (la conclusion de la novella), en passant par le conte et l’épique. Bref, l’expérience est à mes yeux des plus intéressantes, et scelle un peu plus le statut de Guy Haley comme l’homme à tout faire de la Black Library, capable de jongler entre les styles et les franchises sans faux pas. Reste maintenant à voir si Inferno ! se trouvera un digne successeur pour l’année II…

.

***

Et voilà qui conclut la revue de ce 5ème numéro d’Inferno !, qui aura mis particulièrement l’accent sur la nouveauté, en permettant à une belle cohorte de nouveaux venus de donner leur vision de la GW-Fiction. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le résultat est plutôt convaincant, en plus de s’avérer rafraîchissant pour le lecteur régulier de la BL. Il n’est pas dit que ces collaborations se poursuivront de façon suivie (sauf pour Gavin Smith, qui nous doit au moins un autre épisode de ‘The Last Knight’), beaucoup des nouveaux-venus ayant une carrière déjà établie et leurs propres univers à développer, mais je lirais avec plaisir les hypothétiques prochaines soumissions de la plupart de ces faux rookies. Si le numéro 3 de la série en cours demeure mon préféré, ce #5, tel le flacon de parfum qu’il n’est absolument pas, se positionne juste derrière son glorieux aîné, notamment grâce à l’excellent travail de Counter et Stephens. Quel meilleur symbole pour une publication comme Inferno ! que ce partage de lauriers entre un grand ancien (qui a d’ailleurs commencé sa carrière dans les pages de ce même magazine) et une petite nouvelle de la Black Library ? Pour ma part, j’attendrai donc avec impatience l’annonce de la sortie de la prochaine anthologie infernale, en espérant faire aussi bonne pioche que celle-ci…

 

PERTURABO: THE HAMMER OF OLYMPIA [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette critique de Perturabo : Le Marteau d’Olympia, la novella de la série Primarques consacrée par Guy Haley au fils de l’Empereur le plus… hmm… sous-estimé ? de la fratrie. Car s’il y a bien quelque chose qui caractérise cette figure du background du 31ème millénaire, et sa Légion à travers lui, c’est le manque d’attention dont il a été victime, aussi bien dans le fluff que de la part de Games Workshop en général. Il paraît qu’on ne parle jamais des trains qui arrivent à l’heure, et comme c’était littéralement la spécialité du natif d’Olympia, dont ni la personnalité ni le physique n’étaient des plus exceptionnels (par rapport à ses frangins, s’entend), ce manque de reconnaissance peut se comprendre. Iron(within)iquement, la relégation de Perturabo à l’inauguration des miradors a sans doute joué un rôle dans sa décision d’aller souffler dans les bronches de son Paternel avec ce skinhead d’Horus. En tout cas, s’il y avait une chose que j’attendais de la part de cette novella, c’est bien qu’Haley explique de façon – si possible satisfaisante – comment le bon petit soldat de l’Imperium a fini par rejoindre le camp des traîtres, alors que s’il y a bien une chose qui le débecte, c’est le chaos (c’est tellement… inefficace). Partons donc à la découverte de l’histoire secrète d’un des grands oubliés de l’Hérésie, et voyons si le metteur en scène du Sombre Imperium et programmeur de Cawl réussit à rendre justice à la Hammer…

IV. Perturabo

.

INTRIGUE:

Olympia, la grande banlieue de Lochos, 6:25 (à peu près). Un petit groupe de marcheurs se dirige vers la cité-état, alors que le soleil commence juste à se lever sur la vallée endormie qui abrite cette dernière. Et si la vallée en question est riante, on ne peut pas en dire autant de nos randonneurs de l’aube. Quatre d’entre eux sont des soldats du tyran local, Dammekos, sous le commandement du fidèle Miltiades. Le dernier est un gamin de six ans, qui a consenti à les accompagner jusqu’au palais de leur patron après avoir fini de soloter une falaise à pic (cotation à  vue : 10 b+), parce qu’il se doute que sa vie ne peut pas se résumer à ouvrir des grandes voies et tabasser des monstres à coups de gourdin. Sur le chemin, l’enfant découvre et assimile d’un simple regard les merveilles1 de la civilisation qui s’offrent à lui, car il est dans sa nature d’être génial. Arrivés à destination, Miltiades et ses hommes présentent leur trouvaille, déjà renommée dans l’arrière-pays Lochossien pour ses exploits sportifs, à Dammekos. La trouvaille en question révèle s’appeler Perturabo, et, bien qu’elle manque singulièrement du respect dû aux grands de ce monde, reçoit un accueil enthousiaste de la part du tyran, qui met le jeunot au défi de prouver qu’il est bien celui qu’il pense être. Au programme, un grand oral de forge, que Perturabo réussit haut la main en confectionnant une épée au talent, sa compréhension instinctive du métal lui permettant de compenser ses lacunes techniques. Enchanté par la précocité de son hôte, Dammekos lui annonce qu’il va devenir son pupille, ce que Perturabo accepte sans grand enthousiasme, mais sans se leurrer non plus sur sa capacité à refuser l’offre du tyran.

Pendant que Pepe le Rabot grandit (assez vite) chez les Grecs, nous faisons la connaissance d’un autre personnage important de l’histoire, le Warsmith Barabas Dantioch. Nous sommes à présent à la toute fin du 30ème millénaire, et les Iron Warriors sont engagés dans une opération de maintien de l’ordre galactique comme l’Empereur a pris l’habitude de leur confier, à leur grand déplaisir. Cette fois-ci, il s’agit d’aller casser la gu*ule à une caravane de migrants, afin de les empêcher d’aller s’installer dans les beaux quartiers de l’Imperium en pleine expansion de sa Majesté Humanitaire. Seul petit problème, les migrants en question se dénombrent par milliards, et appartiennent à la race des Hruds2. En plus de sentir très mauvais et de voyager en caravanes populeuses, les Hruds sont les maîtres du temps. Non pas qu’ils se baladent avec des masques de tête de tigre, mais leur proximité fait artificiellement vieillir les êtres et les choses à vitesse grand V, un peu comme la lecture d’un thread Les Anges sur Twitter. Face à ces effets délétères, seuls les Space Marines peuvent tenir la ligne, et même eux éprouvent les pires difficultés à repousser les hordes de réfugiés climatiques temporels qui se dirigent vers le cœur de la galaxie. Dantioch et ses hommes ont reçu ordre de leur Primarque de garder le monde de Gholghis, récemment conquis et fortifié par les Iron Warriors. Cependant, même les fortifications superlatives et la ténacité légendaire de la IVème Légion ne suffisent pas à enrayer le flux. À court de gaz lacrymogène et de grenades de désencerclement, nos braves bidasses se retrouvent donc contraintes à évacuer les lieux, mais pas après que la décision de cette tête de pioche de Dantioch de tenir la ligne contre l’avis raisonnable du Sergent Zolan, ait conduit la garnison aux portes de la mort. Finalement, seuls quatre éclopés parviennent à ramper jusqu’au Thunderhawk brinquebalant qui repart dans l’espace avec sa cargaison de surhommes grabataires, et le Warsmith défait doit maintenant expliquer ce désastre à Perturabo, Primarque aussi compréhensif que patient. Du gâteau pour le gâteux…

À quelques années-lumières de là, toujours dans les Profondeurs de Sak’Trada où les Hruds ont bâti leurs terriers, nous suivons à présent les forces dirigées par le Seigneur de Fer (qui ne s’appelle pas Gaston) en personne alors qu’elles tentent de conquérir le monde de Gugann. La caméra se braque sur l’escouade du Sergent Vodan Zhalsk, engagée sur ce terrain difficile avec le reste de la 165ème Compagnie de la Légion. Parmi les grunts de l’escouade, c’est le noob Fortreidon, tout juste incorporé à cette dernière après avoir bouclé son semestre de formation accélérée sur Olympia, qui nous intéresse plus particulièrement. Mal à l’aise et inexpérimenté, notre bleu bite se retrouve aux premières loges de l’assaut impérial sur la planète, et participe à la prise d’une bibliothèque3 Hrud, escarmouche sanglante et chronophage. Au moins l’avantage avec les Hruds, c’est que l’on cumule les trimestres à cadence soutenue !

Un peu plus haut, à la fois dans la chaîne de commandement et en orbite de Gugann, Perturabo soumet à un trio de Magos dubitatifs son idée, forcément géniale, pour remporter une victoire décisive sur les défenseurs de la planète : une bombe de stase, qui annulerait l’aura débilitante des Hruds et permettrait aux Space Marines d’en faire de la pâtée. Si Kilos le Libéré (qui a dit à son chirurgien esthétique : fais-moi le Krang) a l’audace de rejeter la proposition du Primarque sous couvert de son hétérodoxie, ce dernier trouve toutefois une oreille4 attentive en la personne du Magos-Temporis Tzurin Four, qui accepte d’accorder son aide à Perturabo, corrige une petite approximation de sa part, et lui confirme que son plan pourrait marcher… si la bombe est déclenchée sur place, et pas balancée depuis l’Iron Blood, comme il voulait le faire initialement. Qu’importe pour notre héros, qui prend donc la tête de ses hommes, au grand déplaisir de son Trident, pour mener l’assaut de la dernière chance au cœur du terrier Hrud. La bataille qui s’en suit voit les Iron Warriors, bien que durement éprouvés par l’aura mortifère et l’armement sophistiqué des Hruds, parvenir à garer le tank custom du Mechanicus au beau milieu de la place des fêtes des locaux, et appuyer sur le bouton « pause » pendant assez longtemps pour leur permettre de massacrer les Xenos, complètement pris de court par ce ralentissement soudain. Engagé dans cette bataille titanesque, Fortreidon engrange une expérience précieuse en plus de développer une arthrite précoce, et a même la chance de croiser le regard de son Primarque au détour d’une volée de bolts. Cette victoire sans appel pour l’Imperium, permet aux Iron Warriors de progresser un peu plus vers l’accomplissement de leur objectif, même si la route sera encore longue…

Retour dans le passé et sur Olympia pour suivre les années formatrices de Perturabo. L’enfant boudeur s’est mué en adolescent boudeur, que son beau-père exhibe à la moindre occasion afin de cimenter son statut de tyran, et renforcer l’influence de Lochos sur les autres cités-états. Ainsi, à l’occasion de la visite du tyran Adophus de Kardis, Perturabo commence par tirer le portrait de l’hôte de Dammekos en dix minutes top chrono, tel le caricaturiste de Montmartre qu’il est, au fond de lui, avant de participer à une joute oratoire contre un prêtre local, qui cherche à le convaincre de l’existence des dieux. Sauf que notre ado rebelle est un athée indécrottable, ce qui lui a déjà attiré l’antagonisme de beaucoup d’érudits et théologiens locaux, sans succès. Perturabo a en effet une tête bien faite, et arrive sans problème à pousser son adversaire à l’abandon, en lui ressortant même son coup spécial (le Mythe de la Caverne) en guise de finish him. La journée se termine par un peu de sport, Dammekos poussant Adophus à parier que son champion personnel, l’imposant Ortraxes Falk, ne peut vaincre son protégé en combat singulier. Stupidement, Adophus relève le défi, et assiste à la défaite sans appel de son tueur fétiche, malmené par Perturabo et son fidèle pied de chaise. C’est donc une bonne opération pour Dammekos, qui force ainsi son comparse à honorer une alliance que ce dernier n’était pas prêt à lui accorder sinon.

Perturabo, de son côté, nourrit une rancune tenace envers son père adoptif, qu’il accuse de mettre ses talents en application uniquement pour les choses militaires et les besoins de la realpolitik. Alors que notre jeune idéaliste passe ses journées, enfermé dans chambre, à dessiner des plans de bâtiments civils destinés à améliorer la vie du peuple et à écrire des traités de philosophie positivistes, Dammekos lui demande de décrypter les codes secrets des autres cités états ou de plancher sur des modèles d’armes plus performantes. Se jugeant manipulé, mais ayant juré de servir le tyran jusqu’à sa mort (et une promesse est une promesse), Perturabo ne se rend pas compte de l’affection sincère que Dammekos lui porte, et les relations entre les deux hommes sont par conséquent assez fraîches. Ainsi, lors du 16ème anniversaire de son pupille, qui marque sur Olympia l’entrée dans le monde adulte (alors que Perturabo est déjà un bonhomme depuis ses douze ans), le Primarque refuse de prendre un nom olympien, comme c’est pourtant la coutume, et s’obstine à conserver son patronyme originel – qu’il s’est lui-même attribué. Et tant pis si cela jette un froid dans la salle du banquet que son père lui a gentiment organisé. C’est bien simple, il n’y a que sa demi-sœur Calliphone qu’il apprécie un minimum, la laissant même l’appeler Bo5 et la sauvant d’une tentative d’assassinat dont il était la première cible. Quelques années plus tard, Perturabo part à la conquête de Lochos en commençant par Kardis, dont les murs réputés infranchissables ne font pas le poids face aux nouveaux tanks développés par le génie taciturne. Malgré l’opposition véhémente des autres cités-états, ce n’est qu’une question de temps avant que la planète ne soit assujettie sous le règne de Dammekos…

Back to the Crusade, et à un nouvel affrontement, cette fois-ci spatial, entre les Iron Warriors et les Hruds. Ayant sécurisé le continent occidental de Gugann, les Space Marines s’attaquent cette fois-ci au bastion principal des Xenos, défendu par une flotte imposante. Alors que la bataille semble tourner en faveur des humains, grâce aux stupéfiants talents de micro-management de Perturabo, les aliens sortent un dick move de leurs robes, et fissurent la planète pour permettre à leur terrier de partir dans l’espace, puis de se téléporter ailleurs, dans les couloirs du temps. Ayant oublié les œufs de caille, Perturabo flaire la catastrophe et ordonne à ses vaisseaux de se replier en bon ordre, mais il est trop tard : le départ soudain de Hrudtown génère une vague temporelle qui annihile une bonne partie de la flotte Astartes, l’Iron Blood ne parvenant à éviter le tsunami chronique que d’extrême justesse, et en emboutissant sans ménagement un grand croiseur qui se trouvait sur sa route. Bilan des courses : un cinquième de la Légion est passée en pertes et profits, pour un taux de complétion de moins de 3%… qui tombe d’ailleurs à 2% lorsque le positivement ancien Dantioch arrive finalement devant Perturabo, et lui rapporte la perte de Gholghis. La gérontophobie exacerbée du Primarque, et la fureur qu’il éprouve lorsque le Warsmith vétéran (3.000 ans au compteur, tout de même) lui recommande d’abandonner la campagne et d’aller chercher de nouveaux ordres auprès du Conseil de Terra, mènent Perturabo à placardiser Dantioch et ses survivants sur Damantyne Mineure, où ils auront fort à faire à lutter contre les ravages commis par la population de rats-taupes locaux. Ce n’est pas la fin pour l’Iron Vieillard, mais on n’en en entendra plus parler dans ces pages.

Les quelques jours qui suivent cette retraite infamante sont assez difficiles pour les Iron Warriors, dont le Primarque est parti bouder dans sa chambre sans laisser d’instructions claires à son Comex. Endossant son manteau de manager de transition, Forrix s’attelle donc à la remise sur pied de la flotte, avant que Perturabo ne refasse finalement son apparition dans le Dodekatheon de l’Iron Blood, où les Warsmiths discutent stratégies et s’adonnent à des parties de Warhammer 40.000 pour tester les idées des uns et des autres. Ayant occupé son temps à dessiner la trajectoire probable de la future incursion des Hruds dans l’espace impérial, le Primarque met au défi ses capitaines de mettre en défaut la stratégie imparable qu’il a concoctée pour repousser la migration, grâce à son étude approfondie du Codex Hrud (qu’il a écrit) et de la liste d’armée fanmade pour cette race à Battlefleet Gothic (qu’il a aussi écrite – voilà pourquoi il avait besoin d’un peu de temps). Cependant, avant que le plan du Perturabo ait pu recevoir une revue des pairs approfondie, le Primarque est appelé sur le Strategium par l’équipe Com’ Interne de l’Iron Blood, qui vient de recevoir de bien mauvaises nouvelles…

Et en effet, la situation est grave : la flotte de réapprovisionnement en provenance d’Olympia, qui devait apporter son contingent de recrues et de ressources aux croisés, n’est constituée que d’un unique vaisseau, dont le capitaine apprend au Primarque furibard que sa planète d’adoption s’est rebellée contre l’Imperium après la mort de Dammekos, installé comme Gouverneur après le départ de Perturabo pour la Grande Croisade. Pour le Seigneur de Fer, c’est la goutte d’huile de vidange qui fait déborder la burette. Ayant à grand peine refréné son envie de massacrer l’entièreté de l’assistance, Trident compris, à l’annonce de la nouvelle par un infortuné sous-officier, Perturabo arrive à se calmer suffisamment pour donner le change, mais ceux qui le connaissent voient bien que derrière son masque impassible, le Primarque est vraiment colère6. C’est donc animés d’un très mauvais pressentiment que Forrix et Cie assistent au retour de leur boss sur Olympia, et à la convocation de négociations par Perturabo, pendant lesquelles les cités-états sécessionnistes pourront exposer leurs griefs. Et, bien évidemment, les pourparlers tournent rapidement à l’aigre, le bon docteur Peper’ préconisant une cure sévère de décimation (son remède spécial) à ces ingrats d’Olympiens, et commençant par massacrer les diplomates lui ayant été envoyés et raser Kardis (qui décidément, n’a pas de chance) depuis l’orbite pour se mettre en jambe.

La semaine qui s’ensuit est donc logiquement très pénible pour Olympia, dont les cités sont conquises et détruites les unes après les autres, les Iron Warriors exécutant sans états d’âme leurs anciens compatriotes et réduisant en esclavage les survivants. La discipline légendaire de la Légion est toutefois mise à rude épreuve par ce génocide programmé, et l’escouade de Zhalsk n’est pas épargnée par ces dissensions internes. Lors de l’assaut final sur Lochos, que Perturabo a gardé pour la fin, Fortreidon et ses collègues se découvrent en effet de profonds différents, qui finissent par dégénérer en lutte fratricide durant laquelle les indulgents sont abattus par les enragés (Fortreidon faisant partie de la seconde catégorie7). À quelques encablures de là, Perturabo rend une dernière visite à son ancien foyer, où le corps conservé de son père adoptif est conservé dans un cercueil de verre, Blanche-Neige style. Se découvrant finalement une certaine affection pour Dammekos, il est surpris avant d’avoir pu lui donner un baiser d’amour pour le réveiller (on ne sait jamais) par Calliphone, qui accuse très franchement ses plus de 200 ans, au grand dégoût de son demi-frère. Le dialogue qui s’engage entre les deux parents permet d’exposer la dualité de Perturabo, que ses carences psychologiques et son immaturité sentimentale ont poussé à se poser en victime persécutée, alors que l’Imperium était tout prêt à le considérer comme héros. C’est en tout cas le diagnostic que pose Calliphone, qui finit étranglée par son patient peu patient lorsqu’elle lui annonce que ce sera 232 euros. Cet acte d’infamie final permet cependant à Perturabo de réaliser à quel point il a merdé dans sa gestion de la crise, et que l’Empereur ne lui pardonnera sans doute jamais ce fiasco sanguinaire. C’est dans un état d’hébétude profond qu’il est ainsi découvert par Forrix, qui,après s’être usé les rotules pendant quelques minutes en pure perte, finit par prendre les choses en main et exfiltre discrètement son père génétique avant que le reste de la Légion n’ait pu le voir en pleine dépression. La seule satisfaction qu’éprouve Perturabo alors qu’on le ramène sur l’Iron Blood semble venir du fait que certains de ses Space Marines se sont rebellés face à ses ordres, et ont refusé de massacrer les Olympiens impunément. Bon, ces fortes têtes sont toutes mortes à l’heure qu’il est8, mais pour un homme de principe comme Perturabo, c’est l’intention qui compte.

Notre récit se termine par la description de l’arrivée de l’Empereur sur Olympia, bien des années plus tôt, alors que Perturabo avait conquis la planète au nom de son beau-père depuis des lustres. Comme sied à un personnage de sa stature, Big E a choisi de se téléporter avec quelques Custodiens au somment du Mont Telephus, domaine supposé des dieux Olympiens, où il attend patiemment l’arrivée de son fiston. Ce dernier, rendu fou de joie par la manifestation du Père exceptionnel qu’il se savait, se rend sur place en toute hâte, crashant un avion sur les pentes de la montagne dans son empressement (ça va plus vite que de se pose à l’aéroport le plus proche), et s’enquillant les huit mille mètres d’ascension sans équipement spécial. C’est beau l’amour. Sa paranoïa naturelle le rendant nerveux à l’idée de rencontrer enfin son cher Papa, il manque de dégringoler en bas de la montagne alors qu’il touche au but, mais est rattrapé in extremis par ce beau gosse d’Empereur (très costaud malgré sa carrure normale), qui lui fait bon accueil, et recueille très facilement son allégeance. C’est sur moment, sans doute le plus heureux jamais vécu par Perturabo au cours de sa vie, que nous prenons notre congé du Seigneur de Fer. Profite tant que tu peux, Pepe, la suite sera moins funky…

: Relatives hein, c’est juste qu’il n’a pas de point de référence pour le moment.
2 : La légende raconte qu’ils ont été baptisé ainsi à cause de leur amour pour le héros du film Ant-Man.
3 : Ces Xenos adorent les livres (et sans doute les comics, voir ci-dessus), et se battent jusqu’à la mort pour défendre leurs précieuses collections. Qui pourrait leur en vouloir ?
4 : Au sens figuré, sans doute.
5 : Très certainement parce qu’il avait trouvé une vieille cassette de Bo Didley en faisant des fouilles archéologiques pour découvrir d’où venaient les ancêtres des Olympiens.
6 : C’est tout de même ironique que ce Primarque en particulier ne soit pas doté d’un calme olympien.
7 : On peut comprendre son énervement à rejoindre une Légion Space Marines deux semaines avant qu’elle parte en cacahuète. Il y a des gens qui n’ont pas de chance.
8 : Sauf le vieux Bardan de l’escouade de Fortreidon, laissé pour mort par ses camarades après leur règlement de comptes interne. Il serait intéressant de voir si Haley couvre le cas de ce contestataire dans d’autres publications.

.

AVIS:

Notre propos étant sommairement introduit, passons maintenant à l’évaluation de la prose du sieur Haley. Eh bien, je dois dire que j’ai vraiment apprécié son récit de la geste perturbée de Perturabo, que je place dans les toutes meilleures soumissions de la série Primarques qu’il m’ait été donné de lire1. À quoi ce succès est-il dû ? À une performance vraiment solide et inspirée de la part de l’auteur, en particulier sur les points suivants.

Premièrement, le portrait qu’il livre de Perturabo est à la fois nuancé, réaliste et cohérent avec la manière dont ce Primarque caractériel est décrit ailleurs dans le fluff. Et si d’autres auteurs ont réussi à remplir une ou deux des conditions susmentionnées, ils ne sont pas nombreux à avoir coché un tiercé gagnant, ce qui peut expliquer pourquoi, sur le long terme, certains Primarques apparaissent comme au mieux, des cyclothymiques sevrés de lithium, et au pire, des crétins patentés. Ici, on comprend comment Perturabo est devenu l’être amer et tourmenté qui décide de tourner le dos à l’Empereur malgré le peu d’estime qu’il a pour Horus (comme pour tout le reste de sa fratrie, d’ailleurs), sans qu’Haley n’ait besoin de forcer le trait de façon grossière. La personnalité de Perturabo, renforcée par son enfance complexée sur Olympia, la dureté de la fin de la Grande Croisade, et la rébellion malheureuse de sa planète d’adoption, expliquent en eux-mêmes comment le petit génie de Lochos a fini par péter complètement les plombs, et se condamner lui-même2 à jouer les sous-fifres du Maître de Guerre félon. Pas besoin de deus ex machina facile, ou de sombrer dans le TGCP pour faire comprendre au lecteur comment nous en sommes arrivés là, ce qui est la difficulté supplémentaire que les auteurs traitant des Primarques renégats se doivent de surmonter.

Autre satisfaction, Haley arrive à dépeindre son héros sous une multitude de jours, certains plus favorables, ou au moins sympathiques, que d’autres. Ainsi, le récit des premières années du Primarque sur Olympia, tout comme sa rencontre finale avec l’Empereur, montrent Perturabo sous le meilleur jour que ce surhomme, à la personnalité assez compliquée, il faut bien le reconnaître, ait connu : capable d’empathie, et même d’amour sans réserve, pour son prochain, soucieux d’améliorer la vie de ses concitoyens et de les amener vers un âge de progrès et de raison, et forcé par les circonstances et son père adoptif à n’être « qu’un » instrument de guerre, ce Perturabo est un personnage tragique envers lequel on ne peut que ressentir de la compassion. À l’opposé, le général impitoyable, sacrifiant ses hommes sans une arrière-pensée, et punissant de manière disproportionnée ceux ayant eu le malheur d’échouer à exécuter ses ordres et à le mettre en face de ses propres échecs, ou le pillard sanguinaire ordonnant le massacre de son propre monde parce que sa révolte a blessé son orgueil, est absolument odieux. Entre ces deux extrêmes, le Perturabo qui tente d’arrêter la migration des Hruds alterne entre serviteur dévoué de l’Empereur abandonné à son sort par ce dernier et seigneur de guerre paranoïaque, se croyant persécuté et méprisé par l’univers entier. Où se trouve la vérité entre ces deux versions des événements ? Sans doute entre ces deux extrêmes, mais cela sera au lecteur d’en décider. Le dialogue entre Perturabo et Calliphone dans les ruines du palais de Lochos est d’ailleurs particulièrement bien trouvé, car il résume les deux facettes du Primarque, et permet de remettre en question son sentiment victimaire persistant. Bref, Haley livre un personnage complexe, ce qui contraste agréablement avec les Primarques liiiiiisses de certains des autres bouquins de la série.

D’un point de vue scénaristique, il faut aussi reconnaître à l’auteur une belle maîtrise de son sujet, puisqu’il arrive à faire tenir en une novella (certes un peu plus conséquente que le roman Primarques moyen) la quasi-totalité des événements dignes d’intérêt du parcours pré-hérétique de Perturabo. Son arrivée sur Olympia, son enfance à Lochos, sa rencontre avec l’Empereur3, la campagne contre les Hruds, la rébellion et le châtiment d’Olympia… Il n’y a que la décimation initiale de sa Légion qui manque à l’appel, si on veut chipoter. Quand d’autres tomes de la série se contentent de mettre en scène une conquête planétaire (voire une bataille, pas vrai Annandale ?) et/ou les années formatrices du Primarque sur sa planète natale, Guy Haley démontre qu’il y a largement moyen de couvrir la vie du sujet de façon plus exhaustive, sans que le lecteur ait l’impression pour autant d’un rythme effréné ou décousu. À titre personnel, j’ai également apprécié que Haley se donne la peine d’intégrer Barabas Dantioch à son intrigue, ce qui permet de faire le lien avec d’autres publications de l’Hérésie, en particulier The Iron Within de Rob Sanders (2011 !), qui prend la suite de la retraite très mouvementée de l’Iron Fossil presque immédiatement après que ce dernier se soit fait limogé (ou, Lesserdamantyné, en cette occasion) par son Primarque. Rien n’obligeait Guy Haley à faire le lien avec la nouvelle de son collègue, lui-même ayant repris en main la destinée du Papi faisant de la résistance après les événements relatées dans cette dernière. Il l’a fait tout de même, et je trouve ça plutôt sympa !

Le fluff est également, et logiquement, mis à l’honneur de ce Marteau d’Olympia, qui dépeint précisément la planète susnommée, pastiche intelligente de la société grecque antique à la sauce 40K  et la Légion des Iron Warriors, en plus de couvrir le cas de Mr P. En plus de remplir les blancs, Haley glisse également quelques informations dignes de débat dans son propos, comme la science infuse dont semble bénéficier son héros (les autres Primarques sont ils également nés avec une compréhension instinctive de leur environnement, ou bien ont-ils tout appris très vite ?), ou l’amnésie qui frappe Perturabo à son arrivée à Lochos (simulée par le jeunot, et si oui, pourquoi ?, ou bien véritable – et causée par quoi alors ?), et la relation particulière qu’entretiennent le Primarque et son auguste Géniteur (Perturabo en fait il trop ou l’Empereur l’a-t-il vraiment envoyé au casse-pipe en connaissance de cause contre les Hruds ?).

À propos de ces derniers, et pour terminer la liste des bons points, j’ai trouvé que Haley avait fait un beau boulot de présentation de cette race Xenos, qui fait plus que servir de punching-ball aux Iron Warriors (sans grand succès d’ailleurs), mais parvient à se faire une vraie place dans la galerie des aliens galactiques, grâce à leurs pouvoirs temporels et leurs étranges habitudes migratoires (sans parler de leur amour pour les bouquins, ce qui me le rend sympathiques). Ils ont définitivement le potentiel de devenir une véritable faction de 40K, et offrent une variante bienvenue aux batailles fratricides qui forment la majeure partie du corpus hérétique.

Bien sûr, tout n’est pas parfait, et en plus du prix trop élevé de l’ouvrage (je vous avais prévenu que je continuerai avec ce grief), on peut regretter un manque de développement par l’auteur des relations entre Perturabo et sa double fratrie. La fin de la novella permet certes de boucler la boucle avec Calliphone, abandonnée en cours de route après la tentative d’assassinat subie par les deux aristocrates avant le début de la conquête d’Olympia, mais les autres Primarques sont par contre totalement absent du récit, ce que je trouve un peu dommage. Cela aurait permis de juger s’ils étaient vraiment si mauvais camarades, ou bien si Perturabo en a – comme à son habitude – rajouté une couche. La non-apparition d’Horus avant le sac d’Olympia (le fluff nous dit que c’est lui qui a prévenu son frère de la trahison de sa planète, et lui a donné un marteau dédicacé par les Fab 4 juste avant que Perturabo décide de traiter son foyer comme une piñata) est d’ailleurs un peu problématique en termes de cohérence de l’intrigue globale de l’Hérésie, mais on passera outre.

Autre point d’amélioration possible de cette copie autrement très correcte, le manque de surprise et de rebondissement dans l’intrigue déroulée par Haley. C’est en quelque sorte le revers naturel du choix fait par ce dernier de se concentrer sur les épisodes déjà connus de l’histoire de Perturabo : le lecteur au fait du fluff de la Grande Croisade et de l’Hérésie saura déjà comment la campagne contre les Hruds et la « pacification » d’Olympia vont se finir (ou ne pas se finir, dans le premier cas). Il n’y a donc que l’enfance de Perturabo qui s’avère être terra nullius dans les grandes largeurs, mais là encore, Guy Haley se concentre sur la description de la personnalité de son héros plutôt que sur les aventures qu’il n’a sans doute pas manqué de vivre en son jeune temps. Rien de rédhibitoire donc, mais un aspect néanmoins important de ce Hammer of Olympia qui le distingue d’autres livres de la série.

Bref, j’ai bien aimé, et ai donc hâte que les autres soumissions Primarques signées par Haley soient inclus dans un Humble Bundle, histoire de lire si Corax et Konrad Curze bénéficient du même type de traitement…

1 : 6 pour le moment, soit un tiers du total final (sauf si GW se décide à nommer un des Primarques disparus d’ici à la fin de l’Hérésie).
2 : C’est particulièrement bien fait de la part de Haley je trouve. Même dans son ultime moment de clarté, dans les ruines du palais de Lochos, il ne peut s’empêcher de céder à son sentiment de supériorité et sa tendance masochiste, en considérant que l’Empereur ne lui pardonnera pas ses actes (alors qu’il n’en sait rien), ce qui le même donc logiquement dans les bras opportunistes d’Horus.
3 : Astucieusement placée en toute fin du récit par Haley, ce qui lui permet de terminer son propos sur une touche douce-amère, voire pathos, que je trouve assez intéressante. Cela renforce l’aspect tragique de Perturabo, sans estomper la facette sombre qu’il a révélé lors du sac d’Olympia dans les pages précédentes.

.

FLUFF:

  • Perturabo (Physique) : Haley donne assez peu de détails physiques sur le Primarque, mis à part la couleur de ses yeux, d’un bleu glacial, et… la largeur de ses doigts, similaire à celle d’une pelle. Il a (au moins) deux cœurs. De nombreux câbles sont implantés à l’arrière de son crâne, lui donnant parfois l’impression d’arborer des dreadlocks. Il est d’une stature « primarquielle » et domine le plus grand de ses Iron Warriors de la tête et des épaules. Il a atteint sa taille adulte à 12 ans. Son armure est d’une facture exceptionnelle, à même de résister même aux effets délétères des Hruds. Il se bat avec des canons montés sur les avant-bras de son armure. Il va au combat escorté de vétérans appartenant à l’élite des Tyranthikos (rq : sans doute 12, pour refléter les 12 tyrans d’Olympia).
  • Perturabo (Personnalité) : De manière unique, il est le seul Primarque qui s’est lui-même baptisé, et a toujours refusé de prendre un nom Olympien. Il a une nature boudeuse, obstinée et rancunière. Il est introspectif, secret, paranoïaque et hautain (rq : les « qualités » requises pour un tyran d’Olympia, exacerbées par les nombreuses tentatives d’assassinat qu’il a subies pendant sa conquête de la planète). C’est un génie avec un ego surdimensionné, qui souffre d’un complexe d’infériorité envers son père et ses frères, un enfant immature dans le corps d’un demi-dieu. Il ne s’excuse jamais, et attend naturellement de ceux qui le servent leur totale fidélité, jusqu’à la mort s’il le faut. Il a des difficultés à exprimer ce qu’il ressent, et ne sait pas dire non à l’autorité, même s’il juge les ordres qu’il reçoit stupides. Il a une tendance obsessionnelle au micromanagement, allant jusqu’à diriger lui-même les Serviteurs de son vaisseau lors de batailles spatiales. Malgré ses abords froids, il peut lui arriver de s’emporter, auxquels cas il peut se montrer violent et cruel. Il s’oppose au concept du divin, même en ce qui concerne l’Empereur. Sa carrière militaire lui a permis de réaliser, à son regret, que le meurtre lui procure une sensation de calme. La chose qui semble l’effrayer est l’Œil de la Terreur, notamment parce qu’il est le seul à le voir sur Olympia, ce qui lui donne l’impression d’être fou. Il est supérieurement intelligent, rationnel et logique. Il possède la science infuse sur de nombreux sujets, et n’a qu’à contempler les choses pour comprendre comment elles fonctionnent. Il comprend le binaire. Il a un grand talent pour le dessin, et est un inventeur prolifique, avec une passion particulière pour l’architecture. Il a hérité de l’Empereur le goût du grandiose et de l’absolu, même s’il réalise que ses projets utopiques ne peuvent pas se réaliser. Il aime les oiseaux, et a conservé l’habitude d’avoir des oiseaux en cage dans ses quartiers et dans le Strategium de l’Iron Blood.
  • Perturabo (Proches) : Il a été « découvert » sur Olympia par Dammekos, Tyran de Lochos, en 799.M30, alors qu’il avait 6 ans. Il affirme ne pas se souvenir de son passé avant ce jour, même si les légendes locales lui prêtent des exploits précoces, comme la chasse de jalpidae (des serpents à plumes géants) ou d’hydraka (hydre) avec une massue (rq : un clin d’œil aux 12 Travaux d’Hercule). Éduqué à la cour de Lochos comme pupille, puis fils adoptif, il a côtoyé les enfants naturels du Tyran : Herakon, Andos et Calliphone, qui fut la seule personne à qui il manifesta une véritable affection (rq : il la laissa notamment le surnommer Bo, ce qui en dit long !). Cela ne l’empêcha pas de la tuer de ses propres mains lors du sac d’Olympia pendant la Grande Croisade. Il reprocha toujours à Dammekos de l’utiliser comme un outil politique, et de ne mettre à profit ses talents qu’à des fins militaires. Une fois aux commandes de sa Légion, il s’entoura d’un trio de conseillers, le Trident, composé des Warsmiths Forrix et Harkor et du Capitaine Golg pendant la campagne contre les Hruds. Il considère Forrix comme le plus fidèle de ses fils, mais a des sentiments plus mitigés envers Harkor et Golg (dont il regrette même parfois l’élévation au sein du Trident). Le seul être pour lequel il éprouve un amour sans bornes est son père, l’Empereur de l’Humanité (rq : désolé pour McNeill est sa bromance entre Perturabo et Magnus…).
  • L’Empereur de l’Humanité : Il est arrivé sur Olympia au sommet du mont Telephus, le siège supposé des dieux de la planète en 849.M30, et y a attendu Perturabo (alors âgé de 56 ans) en compagnie de sa Garde Custodienne. Lors de leur rencontre, il avait la stature d’un homme normal, mais a facilement rattrapé Perturabo lorsque ce dernier a failli basculer dans le vide, et le Primarque a immédiatement réalisé que son Père lui était supérieur en tous points. Il s’est montré heureux de ces retrouvailles, et a révélé à Perturabo qu’il l’avait voulu indomptable, infatigable, implacable, et qu’il lui réservait des tâches qui le mettraient à rude épreuve, mais qu’il était le seul à pouvoir accomplir. Il lui a donné le titre de Seigneur de Fer.
  • Dammekos : Tyran de Lochos, 3ème des douze Tyranthikos, seigneur d’Irex, Kerroitan, Domminiki, et des Septologies d’Alka. Il a deux fils (Herakon, qu’il fit noyer dans une barrique de vin lorsqu’il tenta de le renverser, et Andos) et une fille (Calliphone) en plus de Perturabo, qu’il a adopté. Il devient gouverneur planétaire à l’arrivée de l’Empereur, et maintient la planète sous son contrôle jusqu’à sa mort en 999.M30, à plus de 200 ans.
  • Olympia (Géopolitique) : Planète humaine de culture hellénistique, où le pouvoir était divisé entre plusieurs cités-états, pour certaines dirigées par des tyrans. Les villes d’importances sont Lochos (tyran : Dammekos), Kardis (tyran : Adophus), Sodalian (Tyran : Zhinnar), Messanae (tyrannie), Irex, Edifus, Epherium, Byzellion, Achos, Phoros, Iskia, Vren. Perturabo, fils adoptif de Dammekos, entreprit l’unification de la planète en 824.M30, et y parvint malgré l’opposition de l’Hexopolis Achéen et la Ligue Penthuique, qui se constituèrent pour lui faire obstacle. Olympia passa sous le giron impérial 25 ans plus tard, à l’arrivée de l’Empereur. Perturabo participa à la Grande Croisade et laissa son père adoptif régner comme Gouverneur planétaire. À sa mort, les cités d’Olympia se divisèrent entre sécessionnistes et partisans de l’Imperium, ce qui conduisit Perturabo à raser la planète en représailles.
  • Olympia (Culture) : La société olympienne a régressé technologiquement pendant la Longue Nuit, perdant entre autres sa maîtrise de l’atome (que Perturabo redécouvrit). Ses soldats se battaient cependant avec des fusils et des tanks, et ses citoyens se déplaçaient en avions. Les Olympiens sont polythéistes, et leur panthéon compte notamment Gozek et Calaphais (les dieux tyrans jumeaux), Anoinkai (déesse du destin) et Hephona (déesse de la vie). Les dieux siègent depuis le sommet du Mont Telephus, la plus haute montagne de la planète (presque 8.000 mètres). Leurs contreparties maléfiques sont les Juges Noirs, qui viennent collecter leur dîme sur Olympia à intervalles réguliers (rq : sans doute des Eldars Noirs). Livres nommés : la Dialecta de Hrastor d’Epherium et la Mythica (mythologie d’Olympia). Philosophes : Demonius, Adrakastor, Heplon, Hrastor, Antibus.
  • Hruds : Race Xenos, aussi appelés temporaferrox. Leur apparence est globalement humanoïde, avec quatre membres et une tête. Ils possèdent de grands yeux noirs, dénués d’expression, implantés dans une large face glabre recouverte d’un mucus sécrété par les pores de leur peau, qui est constamment moite. Ils ont des mandibules au coin de la bouche. Ils sont recouverts de la tête aux pieds par des robes puantes. Ils sont de constitution malingre, et un seul Space Marines peut rivaliser en force avec plusieurs d’entre eux. Ils vivent dans une région de l’espace appelée les Profondeurs de Sak’trada, et possèdent 15 mondes majeurs et 84 mondes mineurs, sur lesquels ils ont établis leurs terriers, dont  Gholghis (brièvement conquis par la 51ème Expédition, sous le commandement du Warsmith Dantioch), et Gugann (conquis par Perturabo). Les Hruds ont un rapport particulier au temps, et leur proximité fait « vieillir » les êtres et les choses de façon accélérée. Leur présence est ressentie par une élévation rapide de la température. Le champ temporel qui les entoure rend inefficace une grande partie des projectiles qui les visent (les bolts détonnent trop tôt ou pas du tout, les balles se décomposent avant de les atteindre). Seules les armes laser restent optimales. Ils utilisent des armes à plasma et des lames dessiccatives au combat. Ils apportent une grande importance à leurs archives, et défendent leurs livres jusqu’à la mort. Pendant la Grande Croisade, le Conseil de Terra a envoyé Perturabo et sa Légion contenir la migration des Hruds qui menaçait d’envahir l’espace impérial, et particulièrement les systèmes de Cadomus et Haldos, les mondes de Birgitta, Jonsclaim et Magna Aphrodite, et éventuellement, Baal.
  • Iron Warriors : Pendant la Grande Croisade, les effectifs de la Légion s’établissaient à 150.000 Astartes, dont 20% sont morts pendant la campagne xenocidaire Hrud. Une grande partie des effectifs venaient d’Olympia, ce qui a généré des tensions avec les habitants de la planète, dont une grande partie des fils ont été recruté par la Légion. Il ne fallait alors que 6 mois pour transformer un aspirant en Space Marines. Le vaisseau amiral de la Légion est le Iron Blood. Les vaisseaux Iron Warriors n’ont que très peu de fenêtres, et leurs équipages sont beaucoup plus réduits que ceux des autres Légions, toutes les redondances ayant été supprimées et les simples humains remplacés si possible par des légionnaires ou des serviteurs. La loge maçonnique de la Légion est le Dodekatheon, où les Warsmiths discutent et testent leurs théories (notamment avec des simulations de wargames). Il se réunit à l’avant de l’Iron Blood, au niveau du rostre d’abordage du vaisseau. La Légion n’est pas prudente au combat, et prend des risques que d’autres Astartes réfléchiraient à deux fois avant d’assumer.

***

Au final, Haley se sort avec les honneurs de ce Perturabo: The Hammer of Olympia, qui est sans doute l’ouvrage de la Black Library qui traite du Seigneur de Fer de la façon la plus complète et complexe. Si ce Primarque (ou les Hruds…) vous intéresse, et que vous souhaitez comprendre comment il a fait les premiers pas sur le chemin de l’Hérésie, il s’agit d’une lecture chaudement recommandée. La GW-Fiction n’étant pas spécialement connue pour ses personnages profonds et nuancés, il faut apprécier à sa juste valeur le portrait clair obscur que Haley fait de son héros, démontrant de manière convaincante que l’on peut être un surhomme génial placé à la tête d’une légion de super-soldats totalement dévoués pour conquérir la galaxie au nom d’un Empereur bienveillant, et malgré tout traîner d’énorme problèmes psychologiques. Dur dur d’être un Primarque…

ANATHEMAS [Recueil]

Jamais deux sans trois dit le proverbe, qui se trouve vérifié une fois encore par la sortie de ce troisième recueil de nouvelles de la gamme Warhammer Horror, faisant suite aux Maledictions et Invocations proférées quelques mois auparavant. Cette nouvelle publication démontre l’intérêt que la Black Library porte au segment horrifique, qui a bénéficié d’un suivi conséquent depuis le lancement de cette franchise l’année dernière. En ces temps de confinement où les distractions se font rares, un peu de lecture est la bienvenue, d’autant plus qu’il y a de fortes chances que les nouvelles contenues dans cette anthologie nous fassent relativiser notre situation. En matière de VDM, les Royaumes Mortels et le 41ème millénaire placent en effet la barre très haut, comme nous allons le voir plus loin.

Sommaire Anathemas (MIS)

Comportant 14 courts-formats, pour la plupart inédits à ce jour, Anathemas convoque quelques habitués de la gamme (Gray, Annandale, Werner, Strachan), qui signent avec ce volume une terrifiante passe de trois. D’autres figures connues (Hill, Hinks, Ozga) contribuent également à cet ouvrage collectif, mais, comme pour Maledictions et Invocations, l’attention du lecteur devrait se porter en premier lieu sur les nouveaux auteurs recrutés par la Black Library pour cette compilation, et en particulier sur les spécialistes du genre que sont Tim Waggoner et John Goodrich. Ce troisième volet s’affirmera-t-il comme le meilleur du lot? Nous n’allons pas tarder à le savoir, j’en ai bien peur.

Anathemas

.

Hab Fever Lockdown – J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE:

Arvid et Tarja, couple de prolos de la cité ruche de Panxir, vivent une vie relativement heureuse dans le futur dystopique du 41ème millénaire. Lui travaille comme mineur de détritus dans les sous-sols de la cité, elle fait les 35 heures (par jour) à l’usine. Ils crèchent dans un appartement presque neuf et pas trop moisi d’une nouvelle spire résidentielle, où les refoulements de canalisation ne sont pas encore quotidiens, et où l’ambiance entre voisins est bonne1. Bref, si on fait abstraction de leur oppression absolue par un système productiviste totalement inhumain, les choses vont plutôt bien pour notre couple. Malheureusement, cela ne va pas durer.

Rentrant du boulot après une rude journée de labeur à piocher dans les sacs poubelles et les cartons usagés, Arvid trouve Tarja alitée dans leur piaule, victime d’une morsure de rat bilieux. « Quelle gourde » pense notre héros, qui, gentleman, rassure toutefois sa chère et tendre sur l’issue heureuse de ce mal passager. Après tout, personne n’est jamais mort de ce genre de petit tracas. L’état de Tarja ne s’améliorant cependant pas pendant la nuit, Arvid résout d’aller chercher du désinfectant et de l’ibuprofène à la pharmacie du coin, même si cela va dangereusement grever le budget, extrêmement serré, du couple. Qu’importe, il fera une double rotation à la mine pendant quelques temps, et avec un peu de chance, tombera sur un objet de valeur qu’il pourra revendre sur le marché noir, comme une portière de Clio par exemple2. Malheureusement, cette course chevaleresque est tuée dans l’œuf par l’imposition par les autorités d’une quarantaine pour raisons sanitaires (si vous lisez cette chronique en Avril 2020, vous devez l’avoir mauvaise). En effet, des sujets porteurs d’une maladie infectieuse grave ont débarqués sur la planète il y a quelques jours, et contaminés la population locale malgré les mesures drastiques prises par le gouvernement3, comme la dépressurisation sauvage du spatioport affecté (20.000 morts tout de même). Devant la progression du virus, le confinement a été décrété, et les citoyens sommés de rejoindre leurs habitations dans les dix minutes, sous peine d’une amende de 135€ de mort. Simple, efficace.

Ayant réussi à regagner ses pénates en esquivant les balles, Arvid est néanmoins bien embêté. La fièvre de Tarja empire, et le frigo est déjà quasiment vide. Après un jour à piétiner dans son 8m2 sans fenêtre, il n’y tient plus et décide de sortir pour aller chercher un remède chez un revendeur de ses connaissances, deux étages plus haut. Si l’aller se passe sans problème, et que l’apothicaire/barman accepte de lui fournir de l’antiseptique sans rechigner, le retour est beaucoup plus compliqué. D’une, Arvid réalise avec horreur que son interlocuteur, ainsi que les clients du bar clandestin que ce dernier opère, ont tous attrapé la fameuse maladie dont les autorités font mention. De deux, il doit s’accrocher à une gouttière à 487 mètres au dessus du sol pour éviter de se faire repérer et abattre par une patrouille d’Enforcers faisant sa ronde dans le quartier. Lorsqu’il arrive enfin à bon port, il croit pouvoir profiter d’un peu de répit auprès de son aimée…

Début spoiler…Mais se rend compte rapidement que cette dernière n’est plus simplement fiévreuse, mais affamée, et qu’elle a des vues pas vraiment charitables sur son anatomie. You’ve lost that loving feeling, et tout ça. Ce rat bilieux devait avoir la rage. Un problème n’arrivant jamais seul, il réalise également qu’il a choppé la peste grise, ce qui devrait le condamner à plus ou moins court terme. Bien sûr, avant cela, il faudra qu’il survive aux attentions cannibales de Tarja, ce qui est loin d’être gagné. Il y a des jours comme ça…Fin spoiler

1 : La preuve, il y a toujours une bonne âme pour répandre du sable sur la chaussée pour éviter que les gens glissent. C’est ce genre de petits détails qui font le charme du quartier.
2 : 38 millénaires après l’arrêt de sa production, il s’agit toujours du modèle véhicule le plus volé dans l’Imperium. Une preuve indubitable de qualité.
3 : Pas assez sévèrement appliquées cependant, les nantis ayant pu se rendre dans leurs maisons de campagne avant que le confinement ne soit mis en place. Les leçons du lointain passé n’ont apparemment pas été retenues.

AVIS:

Petite nouvelle d’ambiance sympathique de la part de Justin D. Hill, qui parvient en quelques pages à brosser un tableau saisissant et désespéré de la vie dans une cité ruche… et ce avant même que l’horreur fasse son entrée dans son récit (ce qu’elle fait à travers le twist final de la nouvelle). Le lecteur ressort de Hab Fever Lockdown avec un rappel sans frais que, finalement, la vie « normale » des sujets de l’Imperium n’est guère éloignée d’un scénario de film d’horreur, particulièrement pour les masses laborieuses se tuant littéralement à la tâche dans les cauchemardesques cités-ruches du 41ème millénaire. Un job abrutissant et très dangereux, un proche qui tombe malade à la suite de la morsure d’un parasite, des forces de l’ordre qui imposent une quarantaine à coup de chevrotine, une maladie contagieuse et sans doute mortelle qui se répand de blocs en blocs… Pour nous, millenials fragiles, ce serait la descente dans la psychose assurée, alors que pour le stoïque Arvid, c’est simplement un jeudi1. Le style sans fioritures de Hill sert très bien son propos, et facilite l’entrée dans le quotidien sordide de nos héros, et si l’usage de la deuxième personne du singulier (déjà mis en œuvre par David Annandale dans The Hunt // La Traque) n’a ici pas de conséquences en termes d’intrigue, l’effet fonctionne efficacement et renforce encore l’impression du lecteur d’assister en direct à la scène. D’ailleurs, je vous conseille vivement de lire cette nouvelle pour vous en faire une idée, le résumé ci-dessus ne rendant pas vraiment justice à l’atmosphère que l’auteur parvient à insuffler à son récit. Bref, une soumission des plus solides de la part de Hill, qui démontre qu’il est aussi à l’aise avec les affaires civiles qu’avec les choses militaires (Cadia Tiendra, Cadian Honour…). Voire peut-être plus.

1 : Et je parie qu’après avoir réglé son problème conjugal, il est allé retourner bosser comme si de rien n’était à la levée du confinement. Ces factures d’eau ne vont pas se payer toutes seules !

.

Suffer the Vision – J. Ozga [AoS] :

INTRIGUE:

Dans les collines de Ghur, un chasseur de sorcières anonyme accompagné de trois mercenaires barbares locaux (Grar, No’Grok et Rhunkhal) tombe sur les restes mutilés de la bande de cultistes chaotiques qu’il traquait depuis quelques temps. Victimes d’une attaque d’ours ronchon, les proies de notre zélote masqué (il se balade avec un casque intégral imitant celui d’un Stormcast Eternal, en bon fanboy de Sigmar qu’il est1) ne sont plus en état de corrompre qui que soit, mais lorsque ce dernier détermine qu’un enfant les accompagnait, sans pouvoir trouver son cadavre dans le campement ravagé, sa conscience professionnelle le force à pousser les recherches jusqu’à un village tout proche. Arrivant dans un véritable havre de paix, dont les habitants vaquent paisiblement à leurs occupations sans crainte des déprédations des tribus chaotiques qui écument pourtant la région, nos pisteurs se persuadent rapidement que le tableau est bien trop idyllique pour ne pas dissimuler une vérité hideuse. Appliquant ce bon vieux principe de précaution persécution, le héros décide donc de réduire la paisible communauté en cendres. On n’est jamais trop prudent. Cette bonne résolution prise, il tombe en syncope, expérimente quelques visions fiévreuses, et revient finalement à lui au milieu d’une situation tendue.

Le moment de faiblesse de leur boss a en effet mis les mercenaires sur les dents (taillées en pointes), les menant à considérer la nourriture que leur avaient apporté les anciens du village comme empoisonnée. Ce possible malentendu (le héros ayant un passif de migraines débilitantes, qu’il considère comme la preuve que Sigmar s’intéresse à ses faits et gestes) a déclenché un affrontement en règle entre les locaux et les visiteurs, remportés de haute lutte par les seconds, mais au prix de la vie du fidèle Rhunkhal, abattu d’une flèche. Les villageois s’étant repliés dans les bois, le chasseur de sorcières a tout le temps de juger les trois anciens capturé par ses comparses. Et plutôt que de s’embêter à mener un interrogatoire serré des suspects (boring !), il préfère les paratonnerriser – c’est comme une crucifixion, sauf que les mains de la victime sont maintenues au-dessus de sa tête par un pieu métallique les traversant. Le principe est très simple : il suffit ensuite d’attendre qu’un orage se déclare, et qu’un éclair frappe la tige de métal. Si le foudroyé voit son âme confisquée par Sigmar, c’est qu’il était innocent. Sinon, il était coupable. Dans tous les cas, il est mort, mais on ne va pas s’arrêter à ce genre de petit détail, pas vrai ?

La nuit passe donc dans une ambiance électrique, les trois suppliciés étant tous reconnus coupables, l’un après l’autre, sans avoir cependant confessé grand-chose d’utile au Torquemada des Royaumes Mortels. Au moins, le spectacle est au rendez-vous car l’incendie qui s’étend depuis l’arbre où sont poinçonnés les suspects jusqu’aux maisons aux alentours produit des flammes de couleur pas vraiment réglementaires. Sans doute enragés de voir leurs aînés finir en marshmallow et leurs logis partir en fumée, les villageois font cependant une autre tentative pour chasser les intrus, sonnant méchamment notre héros et provoquant une commotion cérébrale sévère chez No’grok. Devant cette fronde et ces frondes, le vertueux trio décide de se replier dans la tour abandonnée qui se trouve à l’entrée du village, seul bâtiment en pierre et défendable aux alentours, grâce à la diversion procurée par la pétoire enchantée du héros. Le répit que lui et ses sbires trouvent à l’intérieur est toutefois de courte durée, les Primozoulinois en délire venant mettre le siège au refuge des vertueux défenseurs de la foi. Sans d’autres options à leur disposition, ces derniers en sont réduits à emprunter les escaliers menant vers les sous-sols, d’où le sorceleur masqué à cru entendre monter une voix d’enfant.

Laissant No’grok faire tampon dans une embrasure de couloir trop étroite pour sa carrure d’Ogor, Grar et son patron finissent par déboucher, après avoir parcouru des kilomètres de galeries, dans la tanière de l’ours responsable du massacre du début de la nouvelle. Tout est dans tout, et inversement2. Le plantigrade, aussi maussade que muté3, fait mauvais accueil aux intrus, blessant à mort Grar avant de tomber sous la balle (il ne lui restait plus qu’un tir) du héros. C’est alors que le récit, déjà assez obscur, atteint un nouveau niveau de cryptisme (certes assez poétique). Notre chasseur de sorcières découvre qu’une jeune fille – celle qu’il cherchait depuis le début de la nouvelle – cohabitait avec le monstre. Elle lui touche le front et son mal de crâne persistant disparaît miraculeusement. Après avoir réalisé que son père, qu’il tenait pour un saint homme, était un vrai salaud (il n’est jamais trop tard pour une petite thérapie), il décide de la prendre sous son aile, et les deux compagnons partent à travers un portail qui semble déboucher sur le Labyrinthe de Cristal de Tzeentch. The f*ck did I just read ? En tout cas, c’est sur cette image poético-tragico-nonsensique que se termine notre récit. Charge au lecteur de faire sens de tout ça.

1 : Son but dans la vie est d’ailleurs de devenir un Stormcast lui-même, en attirant le regard du Roi Dieu sur ses actions prosélytes et souvent meurtrières. Notice me Sigmar-senpai! 
2 : À ce stade, j’avais arrêté de me poser des questions, mais les principales sont listées dans le paragraphe ci-dessous, si vous le souhaitez.
3 : La description qu’Ozga en fait m’a rappelé la faune divine de ‘Princesse Mononoke’, influence que je n’ai pas retrouvé ailleurs dans la nouvelle.

AVIS:

Fidèle à son approche de la GW-Fiction, Jake Ozga livre à nouveau un récit envoûtant, mais loin d’être exempt de tous reproches d’un point de vue strictement narratif, ce qui affaiblit quelque peu ce Suffer the Vision. L’auteur convoque en effet plus d’éléments (potentiellement) importants pour l’intrigue qu’il ne se donne la peine d’en justifier la présence, laissant le lecteur combler les vides et les non-dits du scénario de la nouvelle. Quel est le rapport du narrateur avec ses parents et avec le chasseur de sorcières qui l’a recueilli (et qui semble être finalement un très sale type) ? Pourquoi ce dernier collectionnait-il les apprentis ? Cela a-t-il un lien avec les migraines sanglantes qui affligent le héros ? Et peut-il vraiment convoquer des orages pour rendre ses jugements (ou est-il l’esclave des bulletins météo pour faire son travail) ? Qui les habitants du village vénèrent-ils (il semble que cela soit Tzeentch, mais ce n’est confirmé nulle part) ? Sont-ils conscients/responsables de la création de l’ours-garou, qui semble les protéger du monde extérieur ? Quel usage font-ils des enfants qu’ils placent dans les souterrains ? La nouvelle se termine-t-elle sur le départ du héros et de son acolyte vers les Royaumes du Chaos (je l’interprète comme ça en tout cas) ? Bref, beaucoup de questions laissées sans réponses, ou de manière trop cryptique pour moi. C’est dommage car Ozga a vraiment du style, et que l’on suit avec plaisir les errements du chasseur de sorcières épileptique qui lui sert de héros. Mais si la forme est satisfaisante, il faudrait que le fond ne laisse pas trop à désirer non plus.

.

A Threnody for Kolchev – D. Hinks [40K] :

INTRIGUE:

Appelé à son chevet par le compositeur Johann Kolchev, interné d’office dans le sanatorium pour gens riches et puissants dont la famille n’a pas intérêt à ce qu’ils meurent trop vite du bon docteur Morfran, le musicien Varamis se rend sur place. Après quelques négociations avec le docteur en question, et une bonne heure de marche pour se rendre devant la cellule de son ancien mentor (pensez à installer des tapis roulants les gars !), il est – enfin – introduit en la présence du maestro. Ce dernier, sujet à une cure d’électrochocs sensés lui inculquer la crainte de l’Empereur, a été horriblement défiguré dans l’incendie de son domicile, événement ayant provoqué son internement. Tiré de son douloureux coma par Morfran, le compositeur déchu peut enfin délivrer son message à Varamis.

Il s’avère que Koko a très mal vécu la dernière représentation donnée par cet arriviste de Zelter au théâtre de Valgaast (wink wink), le génie manifeste de la composition de son jeune rival l’ayant douloureusement confronté à sa propre nullité (supposée). Pensez à Saliari découvrant Mozart dans le film de Milos Forman et vous aurez une bonne idée de la situation. Après s’être descendu trois fois de suite la spire de la soif – ce qui nécessite une certaine endurance – pour noyer son chagrin, Kolchev finit par atterrir dans la boutique d’un luthier minable, où il fait l’acquisition d’un dulcimer1 en argent à vil prix auprès d’un individu louche, après avoir été frappé par l’inspiration en jouant ‘Bali Balo’ sur l’instrument.

Rentré chez lui avec son précieux sous le bras, Kolchev passe les jours qui suivent à composer fiévreusement sur son dulcimer, persuadé d’avoir retrouver l’inspiration qui lui avait valu ses premiers lauriers. Satisfait de son œuvre, il finit par inviter Zelter à dîner pour lui jouer sa nouvelle création, à l’émerveillement non feint de son hôte. La joie de Kolchev à la suite de ce succès retombe cependant brutalement lorsque Zelter prend le micro les marteaux pour jouer à son tour un petit air, qui s’avère être bien supérieur à la ritournelle du vieux maître. Désespéré, ce dernier fait mine de jeter son dulcimer dans la cage d’escalier pour s’en débarrasser (les ravages de la jalousie), ce qui provoque la mort accidentelle de Zelter lorsqu’il tente de rattraper le précieux instrument au vol, et va s’écraser avec lui en contrebas. Au moins, le clavecin portatif n’a pas souffert de la chute.

Paniqué par la tournure tragique prise par les événements, Kolchev dissimule le cadavre dans une pièce secrète de son manoir, avant de recommencer à jouer sur l’instrument, pris d’une inspiration qu’il ne peut totalement expliquer. Ayant réalisé que le dulcimer avait mémorisé la composition de Zelter, il finit par suspecter que l’objet n’est pas ce qu’il semble être, mais se trouve dans l’incapacité de se soustraire à son emprise néfaste. Pire, comprenant que le dulcimer se nourrit du génie de qui en joue (et étant complètement à sec de ce côté depuis longtemps), il finit par inviter un autre compositeur reconnu, Demetrias, auquel il arrive également un fâcheux accident au moment du dessert.

Réalisant enfin qu’il se trouve sur une mauvaise pente, qu’aucune orchestration novatrice de Wonderwall ne pourra jamais justifier, Kolchev se résout à faire disparaître les corps et les cordes en y mettant le feu, mais s’y prend tellement mal qu’il finit lui-même en torche humaine, tandis que le dulcimer échappe au brasier grâce à ses pouvoirs démoniaques et ses propriétés ignifuges. Jugeant qu’il est de sa responsabilité que l’instrument maléfique soit détruit une fois pour toutes, Kolchev implore son ami d’aller finir le travail en se rendant à son domicile (ou plutôt celui de son père, Koko n’ayant toujours pas pris son indépendance malgré ses 60 ans bien tassés), ce que Varamis accepte…

Début spoiler…Bien évidemment, le pyromane virtuose faillira à sa mission, et commencera à jouer sur le dulcimer dans la cuisine du manoir, tombant à son tour sous la coupe de l’instrument. N’est pas Paul Simonon qui veut.Fin spoiler

1 : Ca ressemble à ça. Peut-être que Hinks a choisi cet instrument en raison de sa proximité avec ‘Lucifer’ ?

AVIS:

Hinks fait des débuts cultivés (pouce vert si toi aussi tu as dû googler « threnody » (thrène en français) pour savoir ce que ça voulait dire) et classiques dans la gamme Warhammer Horror avec cette nouvelle reprenant le thème bien connu de l’objet maléfique conférant à son possesseur des pouvoirs extraordinaires, mais au prix d’actes ou de conséquences maléfiques (La Patte de Singe, Le Veston Ensorcelé). En choisissant de décliner cette intrigue dans le registre musical, peu commun pour Warhammer 40.0001, Hinks donne à son propos un exotisme certain, et, même si la chute de la nouvelle ne surprendra pas grand monde, on doit tout de même reconnaître à l’auteur une soumission propre et nette, à défaut d’être originale et véritablement angoissante.

1 : On se souviendra de ‘The Carrion Anthem’ de David Annandale, qui a également exploré le sujet (et les dangers) de l’orchestration dans les ténèbres amusiques et amusées du futur lointain.

.

These Hands, These Wings – L. Gray [AoS] :

INTRIGUE:

Si vivre dans un donjon n’est pas facile quand on est une fille de onze ans qui a la pneumonie, vivre dans une ferme de Shyish quand on est un garçon de treize ans, orphelin de père et de mère et recueilli par un oncle sociopathe et alcoolique, n’est pas non plus aisé. Frappé par ce sort peu enviable, notre héros, Myles, essaie tant bien que mal de s’adapter à la dureté de son nouveau quotidien, entre brimades incessantes de la part de son tonton Ourii et conséquences, variant du morose au mortel, du dernier nécroséisme provoqué par ce fripon de Nagash.

Victime des conditions climatiques détestables des derniers mois et d’une pénurie de main d’œuvre inquiétante, Ourii envoie un beau violet matin son neveu faire mission d’épouvantail1 dans son champ de maïs, afin d’en éloigner les corbeaux qui picorent les maigres récoltes en devenir, les pièges installés aux alentours ne s’étant pas révélé très efficaces. Myles, qui de son propre aveu est encore un grand bébé, accepte la mission plus par peur de sévices corporels que par gaieté de cœur, et se découvre une certaine sympathie pour la gent emplumée, dont la solidarité collective contraste douloureusement avec sa situation de paria. Ayant passé la journée à observer et baptiser les membres de la volée de corbeaux contre laquelle Ourii l’avait envoyé, il finit même par partager avec eux son maigre déjeuner. Revenu à la ferme le soir venu, et dans l’attente que son oncle lui apporte les restes de son dîner, comme il en a l’habitude, Myles se perche sur une branche et se met à rêver de devenir Corax. Mal lui en prend car lorsqu’Ourii finit par sortir lui donner royalement la carcasse de poularde rôtie qu’il a englouti pour son souper, l’attitude proprement volage de l’adolescent lui vaut une bonne raclée, tellement sévèrement appliquée que Myles en perd une dent (qu’il garde toutefois contre son oncle).

Levé avant l’aube le lendemain pour aller retrouver ceux qu’il considère comme étant ses nouveaux amis (les drames de l’enfance malheureuse), Myles brave un brouillard de mauvais augure pour aller rejoindre son poste, et a la douleur de découvrir que le Vieux Borgne, patriarche protecteur de la volée, s’est pris l’aile dans un collet, et gît en piteux état à proximité du champ. Déterminé à intervenir, notre héros décide qu’un bon petit-déjeuner réglera sans doute le problème et va cueillir un épi pour nourrir l’oiseau blessé. Malheureusement, les rejets non contrôlés de magie nécromantique par la Nagash Corp. ont eu un effet délétère sur les cultures alentours, et au lieu de grains de maïs, ce sont des dents qui garnissent la rafle2. Cela ne décourage cependant pas le Vieux Borgne de déjeuner sur le pouce, ou la serre dans son cas, en béquetant l’intérieur de la tige qui lui est proposée, et se révèle être convenablement protéinée. Les vegans en rêvaient, Nagash l’a fait : de la viande végétale. Ça mérite un prix Nobel.

Collation et découverte sont cependant interrompues par l’arrivée impromptue d’Ourii et de sa fidèle pelle, qui scellent le sort du pauvre corbeau estropié, à la grande horreur de Myles. Guère touché par le souci que son oncle semblait se faire pour lui, l’ado rebelle attaque au contraire son tuteur après que ce dernier ait fracassé le crâne de l’oiseau. L’histoire se serait mal terminée pour notre héros, auquel le sanguin Ourii n’aurait pas hésité à rouler une pelle pour lui apprendre la vie, sans l’intervention du reste de la volée de corbeaux, qui fond sur le paysan furibard et commence à lui prélever des échantillons de tissus mous (mouchoirs, cravate, oreille et œil). Myles profite de cette distraction salutaire pour récupérer la bêche qu’Ourii a laissé bêtement tomber pour terminer proprement le travail, réduisant son oncle en engrais biodégradé en quelques minutes. Voilà qui devrait améliorer les rendements. Ceci fait, il ne reste plus à notre apprenti Raven Guard qu’à suivre sa famille d’adoption en battant des bras et en croassant à plein gorge, signe manifeste d’un équilibre mental parfaitement préservé. Comme quoi, les Anglais ne se sont pas trompé en appelant un rassemblement de corbeaux murder

1 : Les véritables épouvantails ayant une fâcheuse tendance à s’animer et à attaquer leurs propriétaires dans le merveilleux royaume de Shyish (particulièrement à proximité de Murghast, que Gray n’oublie pas de citer au détour d’un paragraphe), Ourii a pris la sage et luddiste décision de remplacer la machine, ou en tout cas l’artefact, par de la main d’œuvre.
2 : Un mal pour un bien vraiment. Ourii n’a plus qu’à devenir prothésiste dentaire, ou producteur d’ivoire, deux activités sans doute plus rentables que le maraîchage.  

AVIS:

Gray signe à nouveau une très satisfaisante nouvelle horrifique, se concentrant cette fois-ci sur l’atmosphère de sa pièce plutôt que sur son intrigue (comprendre que, contrairement à He Feasts Forever, le récit se termine sans grande surprise ou révélation pour le lecteur). À rapprocher de La Petite Marchande d’Allumettes d’Andersen, conte tragique avec lequel These Hands, These Wings (encore un titre d’une classe folle à mettre au crédit de Gray !) partage son schéma narratif : un héros innocent et en grande difficulté, et qui sera condamné plutôt que sauvé par les rares événements positifs se produisant au cours de l’histoire. Oui, cette nouvelle tire un peu sur la corde du pathos, mais une fois de temps en temps, on ne va pas s’en plaindre. Comme c’est le cas avec les nouvelles d’ambiance de la gamme Warhammer Horror, je ne peux que vous recommander de lire These Hands, These Wings (en espérant que la BL traduise le recueil un de ces jours/mois/années), auquel cette critique humoristico-factuelleTM ne fait pas honneur. Pas étonnant que les éditeurs d’Anathemas ait choisi de baser l’illustration de couverture de l’anthologie sur cette nouvelle, qui se révèle être l’une des plus abouties du lot.

.

Vox Daemonicus – J. Forster [40K] :

INTRIGUE:

Exerçant la noble et utile profession de boucher (ou groxier, 41ème millénaire oblige) sur un monde ruche, Josun rentre du travail avec son jeune fils Markus lorsque le système sono que l’Ecclésiarchie a installé dans les rues se fait soudainement hacker, provoquant la surprise des passants. Après quelques secondes du concerto d’épée tronçonneuse en si bémol, une voix sinistre salue les seigneurs de la nuit (Ave Dominus Nox) avant d’annoncer aux citoyens bouche-bée qu’ils arrivent. L’identité de ces « ils » n’apparaissant pas clairement à nos braves civils – tout le monde n’a pas la chance d’avoir accès à la Black Library – ces derniers décident sagement de déclencher une émeute pour retourner à leur domicile dans une fuite éperdue. Choisissant dans un premier temps de se planquer dans leur échoppe le temps que les choses se calment, et ayant échappé à une arrestation sommaire de la part d’un duo d’Enforcers1, s’étant miraculeusement trouvé des priorités plus pressantes que le coffrage de deux quidams coopératifs, comme aller au secours d’un collègue pris en embuscade par une bande de black blocks vindicatifs, père et fils laissent ainsi passer quelques jours, avant que le manque d’eau et de nourriture2 ne les contraigne à reprendre la route de leur appartement.

Malgré le soin pris par Josun pour éviter les mauvaises rencontres, nos deux héros se retrouvent pris malgré eux dans une opération de maintien de l’ordre brutalement exécutée par une patrouille d’Enforcers, qui n’hésitent pas à abattre les civils prisonniers d’une bande d’affreux casseurs après avoir réglé leur compte à ces derniers. Motif : l’Inquisition ne veut pas prendre de risque avec les auditeurs du Vox Daemonicus (le podcast pirate des Night Lords), dont la simple écoute peut suffire à corrompre même l’âme la plus vertueuse (un peu comme Despacito). Sans autre option que la légitime défense, Josun et Markus parviennent à se débarrasser des apprentis Judges Dredd, permettant au père de récupérer l’uniforme de l’un des officiers pour faciliter leur progression dans l’enfer urbain qu’est devenu la cité-ruche. Enfin arrivés devant leur tour d’immeuble, le duo doit encore négocier un trio de cambrioleurs occupés à fouiller leur F3, avec l’aide providentielle d’une Enforcer démissionnaire du nom d’Yronne Lam (celle-là même qui avait tenté de les arrêter quelques jours plus tôt). Les charognards refroidis, Josun, Markus et Yronne prennent le chemin de la Cathédrale de l’Aube, où la Chanoinesse Haunild organise une journée porte-ouverte au bénéfice des nombreux nécessiteux touchés par cette crise. Prévoyant un afflux d’indigents supérieur aux stocks constitués par les bonnes sœurs, Haunild a toutefois précisé dans son faire part radiophonique que l’offre ne s’adressait qu’aux familles avec enfant, ce que Markus est (à son grand agacement) encore…

Début spoiler…Introduits dans le saint lieu par une bande de vigiles patibulaires, les trois rescapés ne mettent pas longtemps avant de se rendre compte que l’église est un charnier, les corps suppliciés des membres de l’Ordre décorant les murs et les plafonds comme autant de guirlandes sanguinolentes. Avant qu’ils n’aient pu faire demi-tour, un Night Lord débarque depuis le confessionnal et met Josun et Yronne en PLS, avant d’entraîner Markus avec lui. Instruit par la speakerine chaotique ayant enregistré les messages en lieu et place de Haunild, afin d’enjoindre les locaux à amener leurs bambins dans la cathédrale, que son fils allait devenir un aspirant Astartes, Josun supplie la Denise Fabre du Maelstrom de le laisser accompagner Markus, ou au moins de le voir partir de la planète. Denise s’en foutant comme de l’an 40.000, notre héros, éborgné et édenté par le jab ravageur du colosse en céramite, se traîne donc jusqu’à l’extérieur du bâtiment, juste à temps pour voir le Thunderhawk emportant Markus disparaître dans le ciel. Quant au fameux Vox Daemonicus responsable du massacre préventif organisé par l’Inquisition, il ne s’agissait que d’un jingle un peu travaillé de la part des Night Lords pour mettre les saints Ordos sur les dents. Quelle bande de farceurs.Fin spoiler

1 : Au motif du non-respect de la « quarantaine intellectuelle », entre autres crimes haineux. C’est 25 ans de colonie pénitentiaire minimum, ça.
2 : Apparemment, on ne peut pas faire de tartare de grox, sinon ils auraient pu attendre M42 peinards.

AVIS:

Les débuts de James Forster dans la GW-Fiction ne sont malheureusement pas à marquer d’une pierre, ou plume, blanche. Bien que son idée de départ (les méthodes de recrutement particulières des Night Lords) soit intéressante1, sa mise en œuvre pêche sur plusieurs points, faisant de Vox Daemonicus une lecture dispensable. Premièrement, le duo de personnages principaux ne m’est pas apparu comme particulièrement attachant, ce qui est rédhibitoire pour le genre horrifique, où une certaine empathie doit être ressentie envers le héros.  Deuxièmement, la préparation de la conclusion de l’histoire est réalisée de façon assez grossière, la petite dédicace balancée par les Night Lords en début de nouvelle éventant une grande partie du suspens, et l’absence de participation active de ces maîtres de la guerre psychologique apparaissant comme une occasion manquée dans une histoire Warhammer Horror. Troisièmement, les péripéties occupant Josun et Markus entre le déclenchement de l’émeute et leur arrivée au couvent, si elles ont chacune leur utilité pour l’intrigue, m’ont semblé s’enchainer avec une certaine indolence, ce qui ne contribue pas à faire monter la pression pour le lecteur. Au final, Vox Daemonicus se termine sans avoir vraiment mis ce dernier mal à l’aise (en tout cas en ce qui me concerne), ce qui est dommage au vu du passif des forces en présence.

1 : À défaut d’être totalement originale, Peter Fehervari l’ayant déjà exploité dans son ‘Nightfall’ (‘Heroes of the Space Marines’).

.

Skin Man – T. Waggoner [40K] :

INTRIGUE:

La fraîche et accorte Marceline (oui, Marceline) se fait un sang d’encre pour son époux Cole, qui a déserté le logis depuis maintenant 6 jours, la laissant, elle et les deux jeunes enfants du couple, dans une situation précaire. Cole est en effet archéologue/ferrailleur/récupérateur de stuff dans la cité de Lowtown, et son métier le pousse à explorer les quartiers en ruines de la ville à la recherche d’objets de valeur qu’il pourra ensuite revendre sur le marché local. La planète sur laquelle Lowtown est située ayant été construite avec des cloisons (sur le Warp) très fines, l’occupation est des plus périlleuses, car une bonne partie de la cité est hantée par des entités démoniaques aux oreilles sensibles et au caractère grincheux. Cole ne s’étant jamais absenté plus de trois jours consécutifs dans ses virées de chinage, Marceline décide d’aller rendre une visite à l’acquéreur habituel – Darrick – des trouvailles de son époux à la Croisée des Chemins, le Carrefour de la communauté.

Sur place, elle ne reçoit malheureusement pas de nouvelles fraîches sur les faits et geste de son homme, mais seulement une proposition de mise en ménage brutalement honnête de la part du grossier grossiste, dont la réputation de tout régler cash n’est pas galvaudée. Cette situation gênante est toutefois interrompue par l’arrivée de la vieille folle du cru, qui met Marceline sur la piste de Cole. Ce dernier aurait en effet confié à la bigote édentée qu’il ne pouvait pas prendre deux minutes pour discuter de son seigneur et sauveur l’Empereur de l’Humanité1, car il avait une course à faire sur la Black Lane, soit littéralement l’endroit le plus mal famé et dangereux de tout Lowtown, où rôde notamment l’infâme Skin Man… Il en faut cependant plus pour décourager notre héroïne, qui décide d’aller tirer son mari du mauvais pas dans lequel il s’est très probablement fourré.

Une fois engagée sur la funeste rue, qui suinte tellement le vice que même le macadam en est tout chose, il ne faut pas longtemps pour que Marceline fasse une mauvaise rencontre, en l’occurrence une bande de petites goules faméliques, bien décidées à ne pas sauter leur quatre heures, comme elles ont dû le faire les 28 millénaires précédents. Au terme d’un sprint parfaitement négocié, elle parvient toutefois à les semer en se précipitant à l’intérieur d’une bâtisse décrépite, où est entreposé du matériel médical à la propreté douteuse. Et pour cause, elle vient d’entrer dans l’officine du Skin Man, qui, après l’avoir complimenté sur son chrono et son finish, s’approche doucement pour discuter affaire. À l’origine médecin militaire2 dans le conflit local ayant opposé l’Imperium au Chaos, il fut corrompu par les Puissances des Ténèbres pour devenir une créature démoniaque, combattant sa gangrène tenace en remplaçant les parties défectueuses de son organisme avec celles des malheureux lui tombant sous la main. Malheureusement pour Cole, sa séance de lèche vitrine sur Black Lane le mit nez à nez avec le Skin Man… qui lui en préleva un bout (c’est d’ailleurs comme ça que cette physionomiste de Marceline comprend ce qu’il est arrivé à son époux), ainsi qu’un œil, la lèvre supérieure, et peut-être la pommette gauche. Bref, Cole a été dispersé façon puzzle et ses bits mis à profit par l’ancienne entité, qui se montre toutefois ouverte à un marché : remettre le malheureux sur pied en échange d’une juste compensation, bien sûr.

Prête à tout pour voir revenir son épars époux, Marceline accepte le deal, et donne la main (gauche) à pépé patchwork, qui s’empresse de la lui arracher (les scies, c’est pour les lopettes) afin de remplacer son propre appendice, arrivé en bout de course. Une cautérisation au prométhéum plus tard, il n’y paraît presque plus rien. Se réveillant quelques minutes plus tard à la sortie de la Black Lane, Marceline doit maintenant ramener au Skin Man les composants nécessaires à la restitution des éléments constitutifs de Cole, ce qui revient à trouver une nouvelle victime au dépiauteur de Lowtown…

Début spoiler 1…Fort heureusement, c’est le moment que choisit Darrick pour venir s’enquérir de la santé de son love body interest, qu’il avait suivi de loin jusqu’à ce qu’elle s’aventure sur la Black Lane (il a la dalle, mais pas à ce point). Déjà dégoûtée par la muflerie du personnage, Marceline ne tarde pas à découvrir que ce dernier, en plus d’être lâche, a également monté la tête de Cole pour qu’il parte dans sa dernière mission impossible, afin d’avoir le champ libre pour courtiser sa veuve. Et par-dessus le marché, il tente de la violer quand elle a le culot de le mettre en face de ses responsabilités. C’est donc sans le moindre scrupule que Marceline règle son compte à ce malfaisant d’un coup de surin bien placé, avant de ramener le cadavre encore chaud à son client. Le Skin Man, bien que regrettant amèrement que le sang de Darrick ait été gaspillé (il comptait peut-être faire du boudin), accepte de tenir sa parole, et promet à la manchote que son mari reviendra au foyer dès le lendemain…

Début spoiler 2…Et c’est bien ce qui se passe, mais c’est un Cole avec la tête d’un Pinhead épilé et l’air éteint d’un mérou échoué qui rentre au domicile familial. Non pas qu’il s’en soit jeté un petit au club sadomasochiste local avant de se présenter au logis, mais plutôt que Skin Man ne s’est pas foulé pour remettre son généreux mécène en état. Après tout, comme il le fait remarquer à Marceline avant de rompre contact, elle lui a donné un cadavre, il lui rend la pareille. C’est honnête. Plutôt que de se formaliser outre mesure de l’état pitoyable dans lequel se trouve son mari, notre madone des temps futurs décide donc de faire contre mauvaise fortune bon cœur, et termine de préparer le petit déjeuner pour toute la famille pendant que son zombie domestique serre ses chers enfants dans ses bras. Ah, les miracles de l’amour…Fin spoiler

1 : Si vous vous étonnez du manque de considération que les Lowtowniens ont pour la chose religieuse, sachez qu’ils ont une bonne raison pour cela. Leurs ancêtres sont les colons malheureux laissés sur place par l’Imperium après que les démons de la planète se soient faits botter les fesses… malheureusement pas de façon définitive. Le syndic s’est montré injoignable depuis, Malcador ayant laissé un faux numéro.
2 : Médecin d’un genre un peu particulier, puisque chargé de rafistoler les blessés en prélevant des organes aux vivants (et non aux morts).

AVIS:

Très bons débuts de Tim Waggoner dans la GW-Fiction avec ce positivement malaisant Skin Man, qui permet à cet auteur établi de donner sa vision des (forcément) difficiles relations qu’entretiennent les habitants du Materium et de l’Immaterium. Il est plaisant de lire un récit d’horreur écrit par un spécialiste du genre, qui arrive en quelques lignes à instiller une atmosphère lourde et tendue à son histoire (mention spéciale à l’arrivée de Marceline dans la Black Lane, que j’ai trouvée vraiment bien mise en scène), en suggérant plus qu’en ne décrivant les périls guettant l’héroïne. Une autre bonne trouvaille de Waggoner aura été de faire du Skin Man, non pas une abomination décérébrée écumante de rage, mais un personnage, certes intrinsèquement dangereux et maléfique, doué de parole et de raison, avec lequel il est possible de marchander. La conclusion macabre de la nouvelle est également très bien trouvée, en ce qu’elle permet de remettre en question l’interprétation du lecteur de l’horreur de la situation de Marceline et de sa famille : au fond, ce n’est pas la mutilation qu’elle a subie, ou le retour de son mari sous forme de zombie qui est le plus terrible, mais sa décision de faire comme si tout cela était normal. Les enfants du couple en seront quitte pour des années de thérapie, s’ils survivent jusqu’à l’âge adulte, s’entend. Efficace, maîtrisé et bien intégré dans le lore de 40K (plus que les soumissions des autres auteurs spécialisés sollicités par la BL pour Warhammer Horror en tout cas), Skin Man mérite le détour et la lecture pour tous les amateurs de récits dérangeants.

.

A Deep and Steady Tread – D. Annandale [AoS] :

INTRIGUE:

C’est jour d’exécution publique à Everyth, ville de Ghyran où la vie ne gagne donc pas toujours à la fin. La liesse populaire, bien compréhensible, n’est cependant pas partagée par Velaya et Beretice Navaan, respectivement fille et femme de la victime de l’assassin qui répondra de ses crimes aujourd’hui. Le meurtre du brave Mr Navaan, retrouvé en train de barboter dans un caniveau quelques jours plus tôt, leur pèse en effet lourdement, bien que la veuve semble moins affectée que l’orpheline par cet odieux forfait. Coupable avoué de ce dernier, Jerek Holforn, scion d’une autre puissante famille de la ville avec laquelle les Navaan sont en bisbille depuis des temps immémoriaux, est amené au bloc par nul autre que Krentz Navaan, fils du défunt et bourreau de circonstance, après avoir servi de tortionnaire pour extorquer au scélérat ses aveux circonstanciés. Après tout, l’adage dit bien que quand on veut que les choses soient bien faites…

Sanglé dans une bride porcine l’empêchant de prêcher son innocence de façon intelligible, le malheureux Jerek finit la journée raccourci d’une bonne tête, après que Krentz ait accompli son sanglant office – il lui aura fallu deux tentatives tout de même, preuve que la décollation est un art délicat –. Plus sensible que sa parentèle, Velaya a bien du mal à se réjouir que justice ait été rendue, quand bien même le maire d’Everyth a promis à sa mère à la fin de la cérémonie de poursuivre les investigations portant sur le reste des Holforn. Une des clauses du jugement rendu dans cette affaire condamnant en outre les Holforn à céder leur manoir à la partie lésée, Velaya a toutefois l’occasion de se changer les idées en accompagnant son frère à la remise des clés, prévue le lendemain de l’exécution. Surprise : l’état des lieux révèle que les précédents propriétaires se sont tous entre-tués, servants compris, ce qui n’a pas l’air de toucher ni surprendre beaucoup l’impitoyable et imperturbable Krentz. Sa sœur se sentant indisposée par l’odeur de charnier se dégageant de la bâtisse, et prétendant de plus entendre des chuchotements de mauvais augure en provenance de la cave à vin, notre homme à tout faire accepte galamment de prendre en charge seul le nettoyage des locaux, prouvant ainsi qu’il est tout à fait bon à marier.

De retour dans le manoir familial, où l’attend la froide Beretice, Velaya attend une journée entière le retour de son frère, en vain. Inquiète par cette absence prolongée – Krentz est d’habitude le prince de la serpillière, il faut croire – elle finit par retourner chez les Horlorn, malgré le conseil appuyé du maire d’Everyth de ne rien en faire…

Début spoiler 1…Sur place, il est vrai que l’atmosphère ne s’est guère améliorée, malgré l’enlèvement des cadavres. De retour dans la cave bavarde après une visite non concluante du reste de la bâtisse, Velaya finit par trouver l’anneau d’argent de son frère, taché de sang, sous un tonneau de gros rouge. C’est à ce moment que quelque chose commence à faire des claquettes au premier étage de la baraque, provoquant la fuite éperdue de la jouvencelle.

Sa confrontation avec sa mère à propos de la disparition inquiétante de Krentz, si elle ne permet pas de lever ce mystère, jette cependant un nouvel éclairage sur les derniers événements. Il s’avère que Beretice et Krentz ont organisé le meurtre de leur mari et père pour pouvoir faire porter le chapeau (et le masque de cochon) à Jerek Holforn, et pouvoir se débarrasser du reste de la smala sans éveiller les soupçons dans la foulée. Ne jamais sous-estimer la ténacité de la rancune de vos voisins. Horrifiée par cette révélation, Velaya va s’enfermer dans sa chambre, et voit bientôt approcher la silhouette de son tueur de frère, transformé par la grâce de Nagash en Lord Executioner, entouré des crânes volants de ses innocentes victimes. Paralysée par la peur, elle ne peut que suivre de loin les ravages provoqués par le (doublement) revenant, qu’elle espère – égoïstement – se terminer avec la mort de sa mère. Après tout, elle n’a rien à voir dans toute cette combine, pas vrai ? Aussi, lorsqu’elle entend le pas pesant et posey du spectre1 monter jusqu’à elle, elle hurle de toutes ses forces « parle à ma main porte », ce qui, miracle !, stoppe le spectre…

Début spoiler 2…Jusqu’à ce qu’elle commette l’erreur de passer une tête en dehors de sa chambre après quelques minutes de silence. Krentz attendait poliment qu’elle lui ouvre, sans doute pour ne pas avoir à fracasser la porte. La nouvelle se termine sur le final cut du Lord Executioner, ayant enfin remis les pendules à l’heure entre Navaan et Holforn. Merci qui ? Merci Naggie !  Fin spoiler

1 : D’ailleurs, ce n’est pas très logique : les Nighthaunts sont tous des culs de jatte. J’imagine que Krentz frappe deux crânes l’un sur l’autre pour faire le bruitage, Monty Python style.

AVIS:

Le retour d’Annandale à Everyth (la ville où se déroulait La Traque, autre nouvelle Warhammer Horror signée de sa main) se passe malheureusement de façon mitigée. Plus classique dans sa construction, cette histoire de vendetta entre deux familles nobles manque de suspens, l’implication des Navaan dans la déchéance et l’anéantissement des Holforn ne faisant guère de doutes après quelques pages parcourues. Dès lors, la vengeance d’outre-tombe des innocents assassinés tient plus de la chronique factuelle, matinée de mise en avant commerciale1, que du récit d’angoisse, et le « pas lent et régulier » de justice divine se mue en pénible traînement des pieds2. Comme quoi, il ne suffit pas de convoquer l’esprit et la substance des morts sans repos pour accoucher d’une nouvelle d’horreur réussie.

1 : Sentiment particulièrement renforcé lorsque Annandale fait le choix d’identifier Krentz comme Lord Executioner (une entrée spécifique de l’armée Nighthaunt), ce qui fait basculer la nouvelle dans la publicité romancée plus que dans l’histoire d’horreur.
2 : Mention spéciale à Krentz qui attend poliment une heure devant la chambre de sa sœur qu’elle sorte, au lieu de se frayer un chemin à la hache comme il l’a fait précédemment… Quel farceur !

.

The Thing in the Woods – P. Kearney [40K] :

INTRIGUE:

Sur Carcanis, planète sauvage recouverte d’impénétrables forêts, la missionnaire Dynah, dernière survivante du groupe d’évangélistes envoyés par l’Ecclésiarchie apprendre les bonnes mœurs et le respect de Pépé aux farouches tribus locales, a depuis longtemps passé l’âge d’aller crapahuter par monts et par vaux. Retirée dans l’aptemment nommée Retraite dans laquelle sa congrégation s’était établie il y a des décennies, elle passe ses journées en prières, dégustation de thé (très important) préparé par sa dévouée servante Bruni – Carlos de son prénom – et menus travaux de calligraphie. Ayant été témoin de l’avènement, long, complexe et meurtrier, du culte impérial sur Carcanis, elle se remémore souvent l’existence de ses camarades de culte, dont peu d’entre eux ont eu la chance de mourir dans leur lit. La faute à l’animisme fondamentaliste qui constituait la religion dominante au moment où les prosélytes sont arrivés sur la planète, et le très mauvais œil avec lequel ses fidèles ont vu, non pas les efforts déployés par les nouveaux-venus pour les rallier à leur cause, mais bien le défrichage du terrain autour de Retraite. Car sur Carcanis, couper un arbre, c’est vraiment mal élevé1. Le premier qui en fit les frais fut d’ailleurs le jovial frère Gunnor, écorché vif (mais avec le sourire) par les khmers verts après un fâcheux malentendu ayant impliqué sa hache et un bosquet de feuillus.

Cependant, à force de persévérance, de sermons enflammés, et, parce que la même  la meilleure volonté de la galaxie a ses limites, de quelques massacres d’indécrottables païens, le culte végétal des indigènes fut souplement supplanté par la seule vraie foi, celle de l’Empereur. C’est la satisfaction que tire Dynah de son service de longue durée sur la planète, elle qui se trouve à présent reléguée au second plan par les seigneurs locaux, mais accepte tout de même de lire gentiment le courrier aux chefs de tribus locaux, tous complètement illettrés. Elle reçoit ainsi la visite du Hastman Trivos des Trevassi, venu avec trois enveloppes dans sa besace. Évacuées les factures et offres de marabouts, la nouvelle tombe : les margoulins de la tribu Gurun de Yar Godoris sont sur le pied de guerre, et il revient à Trivos de les bouter au-delà de la rivière Timari. Devant l’acceptation un peu trop enthousiaste de cette mission de pacification par son interlocuteur, qu’elle ne peut de toutes façons pas blairer, Dynah décide de rédiger un courrier de dénonciation au castellan d’Ab Suren, afin qu’il vienne mettre au pas le louche Trivos. Trop vieille pour aller porter elle-même la missive à qui de droit, l’aïeule charge sa brave Bruni de cette tâche, séparation douloureuse, et pas uniquement parce que Dynah n’aura plus personne pour lui préparer sa tisane le matin…

Début spoiler…Lorsque la nuit tombe sur Retraite, la désormais solitaire Dynah décide d’aller prendre l’air sur les remparts de son domicile (c’est classe tout de même), où elle entend résonner des tambours dans les profondeurs de la forêt. De très mauvais augure, car le culte de Pépé était censé avoir aboli cette pratique déplorable2 il y a des décennies de cela. Voyant une torche clignoter à l’orée des bois, Dydy comprend qu’on l’appelle et se met en route après s’être équipée de ses fidèles épée et pistolet laser. Arrivée devant le flambeau, elle a la douleur de voir qu’il signale un pieu sur lequel est fiché la tête de la pauvre Bruni. Le coupable ne met pas longtemps à se dénoncer, Trivos, déguisé en caribou, sortant du sous-bois pour revendiquer le crime. Dynah n’a pas le loisir de corriger le félon qu’elle est saisie par les suivants de ce dernier, qui a rejeté le culte impérial pour retourner aux us traditionnels de Carcanis, et emmenée manu militari jusqu’au cœur de la forêt primaire.

Face à un arbre proprement colossal, et en pleine zone nudiste (tout le monde s’est foutu à poil), la malheureuse missionnaire en pré-retraite est sommée par Trivos de pénétrer dans la caverne naturelle creusée dans le tronc du bonzaï géant. C’est là le temple et l’antre du Seigneur des Arbres, dieu endormi depuis des lustres mais finalement de nouveau réveillé. Alors qu’elle avance vers son destin, Dynah voit deux yeux rouges s’allumer dans les ténèbres de la caverne… Blaireau sorti d’hibernation ? I think not. Bref, vivement que Gaunt et ses Fantômes viennent s’installer : cette planète forestière est vraiment mal tenue.Fin spoiler

1 : Ce qui explique pourquoi la population de castors locaux est proche de zéro.
2 : Comme toutes les personnes âgées, l’Empereur supporte mal que l’on fasse le zouave devant ses fenêtres à des heures indues. Si vous n’arrêtez pas, il n’hésitera pas à envoyer les Custodiens.

AVIS:

Retour gagnant de Paul Kearney avec cette nouvelle bien construite et bien écrite, qui illustre parfaitement l’axiome bien connu de tous les amateurs d’horreur : ce qui fait le plus peur, c’est l’avant. En terminant son récit au moment où notre pauvre mémé commence à entrevoir sa Némésis, l’auteur laisse toute latitude à l’imagination de son public pour se représenter ce mystérieux dieu des arbres aux commandements si sanglants. Avant cela, Kearney avait réussi à entraîner le lecteur dans son histoire en dépeignant la situation de Dynah et de Carcanis de façon réaliste et prenante, ce qui lui permet en outre de mettre en avant la dureté de la fonction de missionnaire au sein de l’Imperium. Accepter de passer sa vie à convertir des foules pas forcément très jouasses à la vérité impériale, et se dans le meilleur des cas isolé sans espoir de secours sur des planètes de troisième ordre, voila qui nécessite un caractère bien trempé et une vie intérieure riche.

Au-delà des considérations d’ordre géo-politiques et des échanges doux-amers entre Dynah et sa bonniche, qui forment le gros de la première partie de la nouvelle, Kearney prend bien soin d’insérer des passages violents et crus (le triste destin de Gunnor, suivi de celui de Bruni), narrés de façon concise et percutante, pour une efficacité maximale. C’est là aussi une preuve de savoir-faire de la part de l’auteur que d’user de son « crédit gore » avec parcimonie, quand certains de ses collègues ne se gênent pas pour en tartiner leurs pages. Les tortures et mises à mort graphiques sont tellement fréquentes dans la GW-Fiction que le lecteur vétéran aura sans doute développé une résistance à ces dernières : croyez-moi, Kearney réussit bien à rappeler qu’il s’agit de pratiques barbares et choquantes, un exemple sanglant à la fois. Bref, The Thing in the Woods démontre de façon admirable qu’une bande de rednecks pagans peut être tout aussi flippante qu’une incursion démoniaque ou une invasion tyranide. Cette bonne vieille chaleur humaine…

.

Mud and Mist – J. Goodrich [40K] :

INTRIGUE:

Sur la planète boueuse de Forlorn Hope, le 33ème Hephaestus tient ses tranchées (boueuses aussi) contre la menace tyranide. Éprouvés par les assauts, pas incessants mais réguliers (15 en trois mois), des hordes chitineuses, les Gardes passent le temps comme ils peuvent dans l’attente de la prochaine attaque. Pour nos héros, les servants de lance-flamme lourd Constantine Panas et Dimitri Hiondros, cela revient à respectivement faire la liste des choses et gens qu’il déteste, et faire des blagues de mauvais goût, comme gueuler ‘Ils arrivent !!!’ alors qu’il ne s’est rien passé. Nos deux bidasses se retrouvent toutefois unies dans la crainte et la détestation commune du sadique Commissaire Heston1, toujours à la recherche d’une nouvelle victime à exécuter pour faillite morale. Dimitri s’étant racheté de sa bourde initiale en ne rapportant pas la saute d’humeur – compréhensible – à l’officier, l’ambiance se réchauffe quelque peu entre les deux partenaires, jusqu’à ce qu’un barrage d’artillerie se déclenche, annonciateur de l’assaut tant redouté.

Cependant, au lieu de nuées de biomorphes agressifs, c’est un épais nuage de brume2 qui se présente à l’horizon, ce qui ne rassure pas le moins du monde la première ligne impériale. Ayant raté leur test de stupidité, les Gardes ne réalisent cependant pas qu’il serait judicieux d’enfiler leur masque à gaz jusqu’à ce que l’appelé Padbol tire une bonne latte du brouillard suspect, et tombe raide mort (toujours dans la boue). Inspirés par son contre-exemple, ses camarades se hâtent de s’équiper, et c’est alors que Constantine réalise que son matos a été rendu défectueux par une fissure mal placée. La tuile. N’ayant pas le temps d’appeler Carglass, notre pyromane patenté prend la seule décision logique : apprendre à son camarade comment se servir de son ar– piquer le masque de Dimitri. La sélection naturelle à l’œuvre, dans toute sa tragique beauté ! Malheureusement, si son comparse a l’obligeance de mourir sans faire d’histoire ni essayer de récupérer son bien, le forfait de Constantine a attiré l’attention de Heston, qui se délecte d’avance du bolt qu’il va coller dans la nuque du camaricide. Mis à nouveau au pied du mur, et aidé par la diversion fournie par un tir de laser ami, ‘Tantine arrive toutefois à maîtriser son bourreau, et à le noyer dans la boue après une petite séance de pugilat.

Avec tout ça, on en aurait presque oublié que les cafards ont sonné la charge. Et c’est un paisible Toxicrene qui se présente finalement devant les fusils lasers de la Garde, qui ne donnent pas les résultats escomptés face à la carapace renforcée de la monstruosité. Bien que son brasier se révèle plus efficace contre la créature, Constantine se trouve fort dépourvu quand cette dernière arrive à portée de tentacules. La suite et la fin de la nouvelle voit notre malheureux survivant se faire violemment hentai-er et entailler par Toto, et balancer comme un sac de patates dans la… boue. Où il sombre à son tour après avoir eu la bonne idée de décéder. Eh, what did you expect ?

1 : Qui pour tous ses défauts, connaît tout de même ses hommes par leurs prénoms et noms.
2 : C’est une nouvelle technique Tyranide, qui nécessite de nourrir tous les Carnifex de l’essaim de fayots pendant une semaine.

AVIS:

Goodrich signe une nouvelle absolument classique de Gardes Impériaux engagés contre une flotte ruche tyranide (ici réduite à son plus simple élément, le gros monstre hentai), dont la valeur ajoutée en termes d’horreur reste franchement à démontrer. À titre personnel, j’aurais tendance à lier ce hors-sujet à l’absence de connaissance probable de l’auteur de la littérature 40K1, qui regorge de textes similaires2 et dont certains sont, assez ironiquement, bien plus angoissants que la soumission de John Goodrich (cette conclusion de The Fall of Malvolion, alors…). Si la Grande Dévoreuse est intrinsèquement terrifiante, son utilisation comme antagoniste identifié dès le départ retire toute sensation de surprise – un composant clé d’une bonne histoire d’horreur – aux propos de Goodrich, dont le lecteur n’a guère de difficulté à se représenter la fin de l’histoire à partir de ce moment. Les confrontations entre bidasses impériales et cafards galactiques sont en effet généralement à sens unique ! Ce constat posé, il ne reste plus que les relations entre Constantine, Dimitri et le Commissaire Heston pour mettre un peu de suspens dans cette nouvelle, et si l’auteur arrive à dépeindre les dilemmes de son héros, qui doit choisir à deux reprises entre sa vie et son devoir, le calvaire vécu par notre servant de lance-flamme lourd ne me l’a pas rendu très sympathique pour autant. Au final, Mud and Mist se révèle être une erreur de casting pure et simple, même pas sauvée par une intrigue ou une narration particulièrement réussies. Il faudra revoir cette copie.

1 : Sentiment renforcé par la mention en cours de nouvelle des regrets des personnages de ne plus revoir leurs familles… Mais c’est le lot de la Garde ça, les gars.
2 : ‘The Fall of Malvolion’ (Abnett), ‘Sector 13’ (Mitchell), ‘Voidsong’ (Zhou), ‘Fear Itself’ (McKenna), ‘The Enemy of my Enemy’ (Crowley)…

.

The Shadow Crown – C. L. Werner [AoS] :

INTRIGUE:

Sortie crépusculaire et secrète pour la Dame Cualli, qui brave la mauvaise foi réputation nocturne de sa cité de Maktlan, en Aqshy, pour aller écouter, non pas aux portes, mais aux fontaines. Faisant fi des rumeurs de monstres, de malades et de monstres malades sensés errer dans les rues désertées à la lune tombée pour se repaître des passants malchanceux, notre aristocrate a été dépêchée par son mentor et suggar daddy Ekurzakir, saint homme très bien en cour depuis qu’il a sauvé le fils du roi Tlanextli1, espionner la rencontre entre le chancelier disgracié Icnoyotl et un autre conspirateur, pour le moment inconnu. Bien qu’elle n’ait aucun scrupule à dénoncer le fourbe fonctionnaire pour s’attirer les faveurs de son influent patron, l’ambitieuse Cualli se retrouve confrontée à un dilemme cornélien lorsqu’elle s’aperçoit que le date d’Icnoyotl n’est autre que son propre frère Tochtli, le capitaine de la Garde Jaguar de Sang du roi. D’autant plus que ce dernier avoue qu’il n’a accepté de rencontrer le chancelier que pour tirer sa sœur de l’emprise d’Ekurzakir, qui l’inquiète au plus haut point.

Tiraillée entre sa carrière et sa famille (comme beaucoup de femmes, il faut le reconnaître), Cualli finit par trouver une solution tierce : balancer Icnogood et prétendre qu’elle n’a pas vu le visage de son interlocuteur. De retour dans les appartements du prêtre, que ce dernier a tapissé des plans du métro de Mhurghast – c’est un style – elle patiente un bon moment sur le canapé défraîchi de son hôte en se servant des petits coups à boire (malgré le malaise que lui provoque le regard fixe que lui jette le serviteur contrefait d’Ekurzakir2), jusqu’à ce que ce dernier finisse par faire son entrée depuis l’escalier de service. Et là, c’est le drame : ce fragile de chancelier a craqué sous la torture, et balancé tous ses complices, y compris Tochtli, qu’Ekurzakir a fait fissa arrêter à son tour. Peu content de la traîtrise de sa subalterne, le prêtre la punit en la mettant littéralement en face (via un miroir) de la décrépitude qui l’a gagnée. Victime de la même maladie que le prince, Cualli avait en effet jusqu’ici été épargnée de ses effets délétères et bubons disgracieux par la magie d’Ekurzakir, qui lui est désormais retirée. Chassée par son thérapeute, l’intrigante n’a plus qu’à aller se jeter dans la fontaine de lave la plus proche pour abréger ses souffrances.

La caméra se braque alors sur le malheureux Tochtli, jeté dans un cachot après une séance de torture plus intense qu’un WOD de crossfit. Résigné à mourir avec dignité, le capitaine a toutefois la surprise de voir la porte de sa prison s’ouvrir, et apparaître le visage amical de son second, le fidèle Xochipepe. Les Jaguars de Sang se sont en effet cotisés pour soudoyer le geôlier, et permettre à leur bien-aimé officier d’échapper à son triste destin. Touché par ce geste, Tochtli demande d’abord à ce qu’on l’autorise à aller chercher Cualli pour l’emmener avec lui, et apprend du même coup que this girl was on fire, toussa toussa. Tristesse. Déterminé à venger cette mort, dont il tient – à raison – Ekurzakir responsable, il convainc Pepe la grenouille jaguar de lui prêter son macuahuitl pour qu’il aille obsidienner la gu*ule du prêtre, et qu’importent les conséquences…

Fin spoiler…Trouvant les appartements du saint homme désertés, Tochtli erre quelques temps entre la cuisine et le salon, avant de se faire attaquer par derrière par le serviteur d’Ekurzakir. Mordu jusqu’au sang par le furtif bossu, le capitaine le coupe prestement en deux d’un coup de sa massue crantée. Surprise, le cadavre se révèle être celui d’un rat humanoïde, ce qui évoque à notre héros le souvenir de l’ancienne guerre des premiers habitants de Maktlan contre les mystérieux rampeurs de l’ombre. Avisant l’escalier par lequel le raton est entré, précédemment caché par une tapisserie décidément moche, Tochtli s’enfonce dans les souterrains, jusqu’à rencontrer le reste de la colonie Skavens locale. Sans blague. Le clan Pestilens a en effet envoyé quelques infectiologues experts contrôler l’impureté de l’aquifère local, et l’intrépide Jaguar voit avec horreur les ratons préparer une mixture innommable dans un grand chaudron. Tout s’explique. Comprenant qu’il est de son devoir de prévenir le roi de la situation, Tochtli rebrousse chemin, mais croise Ekurzakir en route. Surprise, le prêtre n’est pas non plus celui qu’il semble être, l’anneau enchanté qu’il porte au doigt camouflant son identité secrète de Prêtre de la Peste. Tout se re-explique. Malheureusement, comme ce rat d’Ekurzakir est venu avec quelques bedauds, notre héros n’aura pas l’occasion d’accomplir son destin de lanceur d’alerte. Poule jaguar au pot, ce n’est pas mal non plus, notez.Début spoiler

1 : Qui n’est pas un hommage à la cité gallosie de Llanelli. Je suis formel.
2 : Le bougre a du trop regarder de vidéos avec des filles sur des canapés.

AVIS:

Après le Japon (Last of the Blood, Reflections in Steel) et la Russie (A Sending from the Grave), Werner poursuit son œuvre « civilisatrice » des Royaumes Mortels en mettant en scène une histoire d’Incas dans la chaleur torride d’Aqshy. Il s’agit malheureusement du seul aspect mémorable de The Shadow Crown1, dont l’intrigue et le déroulé se révèlent d’une platitude décevante pour un contributeur de la trempe et de l’expérience de C. L. Werner. Signes révélateurs de cet échec, les deux partis pris narratifs forts (le changement de personnage principal en milieu de récit et la révélation de l’identité d’Ekurzakir2) de l’auteur desservent la nouvelle plutôt qu’ils ne la renforcent ; quant à la dimension horrifique de cette dernière, on peine à bien la discerner. Certes, l’histoire se termine mal pour les héros, qui ne parviennent pas à contrecarrer les manigances pustuleuses des Skavens, mais il y avait tellement moyen de faire plus trash avec ces antagonistes – ce que Werner a déjà fait par le passé – qu’on ne peut conclure qu’à une occasion manquée. Retenons simplement que les hommes rats sont apparemment capables d’infiltrer très facilement les sociétés humaines (et sans doute celles des autres races, il n’y a pas de raison3), ce qui écorne sérieusement au passage l’utilité du clan Eshin, et passons à autre chose.

1 : Dont je réalise après coup qu’elle n’a même pas été identifiée à coup sûr par l’auteur… Rien à voir avec la babiole d’Alith Anar, ceci dit.
2 : Chose (heureusement) rare, Werner prend limite son lecteur pour une buse à ce sujet. On avait compris, Clint.
3 : Après tout, on commence toujours par tester les nouvelles technologies sur les souris. Depuis le temps, ces dernières doivent maîtriser la transfiguration sur le bout des moustaches.

.

Runner – A. Bao [40K] :

INTRIGUE:

RunnerSur un monde ruche inconnu1, un peloton de Gardes Impériaux envoyé défendre une spire en avant du gros de son régiment est sur le point de se faire peloter jusqu’à ce que mort s’en suive par les hordes décérébrées de Papa Nurgle. Alors que Zombies de la Peste et autres Portepestes progressent, lentement mais sûrement, vers la dernière redoute tenue par l’Imperium, avec un bon gros reggae en fond sonore (avouez que ça le ferait), un vieux Sergent du nom de Vieux Sergent envoie notre héros, le Caporal Machinchose2, faire une course jusqu’au camp de base impérial, situé à quelques 200 miles de l’avant-poste pestiféré, afin de porter la mauvaise nouvelle au haut commandement. Car oui, le gros reggae des pesteux a brouillé les communications des bidasses jusqu’à les rendre inutilisables. Cette mission n’a pas été attribué au Caporal Petit Gars – c’est comme ça que l’appelait son copain de régiment Bullard, avant de disparaître à moitié en fumée (les cités ruches de grande solitude, tout ça…) – par hasard : notre homme est en effet connu sous (l’autre) surnom de Coureur, non pas à cause de son amour des jupons des autochtones, mais parce qu’il est doué d’une endurance peu commune. Le genre de type à finir un marathon en deux heures trente, et repartir aussi sec en sens inverse pour aller chercher sa voiture sur le parking du départ. Bref, Coureur prend ses jambes à son cou et commence à tracer la route, seulement chargé d’une gourde et de sa foi en l’Empereur (son fusil laser lui a été repris sur la ligne de départ, so-disant parce que ça pesait trop lourd).

Le terrain sur lequel il progresse, sorte de toundra gelée recouverte de cristaux aiguisés, pour bucolique qu’il soit, n’est pas sans poser de gros problèmes matériels à notre héros, dont les godillots n’ont pas été pensés pour résister à ce type d’environnement. Il ne faut donc pas longtemps avant que le brave Coureur se retrouve avec les pieds en lambeaux et les chaussures en sang (ou l’inverse), ce qui commence, lentement mais sûrement, à miner son enthousiasme jusqu’ici intact. Se raccrochant à son endoctrinement martial, il récite des prières pour se maintenir motivé, mais le poison du doute (et de la déshydratation) commence à le tenailler. Ajoutez à cela les voix de ses camarades défunts qu’il commence à entendre dans sa tête, et la méchanceté de la faune locale, qui refuse de se faire manger alors qu’il crève la dalle, et vous aurez une bonne idée de la situation peu brillante dans laquelle le Caporal Wanlek – au moins, il se souvient maintenant de son nom – se trouve…

Début spoiler…Alors que les heures de course/marche/quatre pattes se succèdent les unes aux autres, Wanlek se retrouve de plus en plus tenté d’écouter les murmures amicaux de ses anciens frères d’armes, qui lui promettent de le débarrasser de sa souffrance s’il consent à les attendre (malgré son état, il avance en effet plus vite que ces lambins de Zombies). Concomitamment, la mémoire de sa vie d’avant la Garde, quand il était encore le fils à sa maman sur une planète somme toute assez sympathique, lui revient de plus en plus distinctement, ce qui lui permet de réaliser que son service au sein des armées de cet impotent d’Empereur de l’Humanité ne lui a apporté que des emmerdes. Lorsqu’il commence à fredonner des refrains en heptasyllabes à la place des prières officielles du Ministorum, c’est la fin pour Petit Gars, qui embrasse le putride salut qui lui est offert par la team Nurgle, et sombre dans un sommeil réparateur, où il a la chance de retrouver tous ses potes et sa vieille môman, certes un peu pourris, mais de bonne et joyeuse composition.

À son réveil, il se découvre en pleine forme et peut doc terminer son trek sans difficulté, malgré un tir de fusil laser ami pris dans l’épaule pendant la dernière ligne droite. Amené devant ses supérieurs, le discours incohérent qu’il leur tient sur la raison de sa venue provoque la réaction classique du gradé en colère : un direct du droit en pleine poire. C’était malheureusement une mauvaise idée de la part du puncher, car du nez brisé de Wanlek s’échappe un nuage verdâtre, qui permettra aux armées du Grand-Père de prendre pied, ou pseudopode, dans le bastion impérial. La nouvelle se termine sans que nous ne sachions si le Coureur a reçu un pourboire de la part de ses camarades pour son service héroïque en temps de pandémie. Il ne l’aurait vraiment pas volé.Fin spoiler

1 : Et volontairement en plus, ce qui n’est tout de même pas commun. Ca vous pose le jemenfoutisme du héros.
2 : Vous allez rire, mais il commence vraiment la nouvelle en ne souvenant plus de son prénom. C’est plus du jemenfoutisme là, c’est un Alzheimer précoce.

AVIS:

Alan Bao signe un nouvelle inaugurale placée sous le double signe de Papa Nurgle et du respect du fluff, ce qui fait de The Runner une expérience de lecture doublement sympathique (wholesome, comme disent les Anglais), nonobstant sa conclusion sans grande surprise. C’est dommage car je pense qu’il aurait pu laisser planer un chouilla plus de suspens dans le dernier tiers de son récit, plutôt que de changer son héros en héraut sans aucune équivoque. Ceci dit, la bonne mise en contexte préalable du côté jovial et affectueux de Nurgle, mis en perspective de la dureté et vacuité (apparente) du credo impérial, permet à la nouvelle de se terminer de façon tout à fait satisfaisante, même si convenue. Bref, si vous avez apprécié l’approche « pus & love » de la faction telle que mise en scène par Chris Wraight (‘Les Seigneurs du Silence’, ‘Endurer’) et dans une moindre mesure Andy Clark (‘Croisade’), ne boudez pas votre plaisir et venez assister au dernier trail du Caporal Wanlek avant une retraite bien méritée.

.

Miracles – N. Wolff [40K] :

INTRIGUE:

Ouvrier dans une usine fabriquant des chargeurs de fusils laser sur le monde ruche d’Entorum, Jacen Hertz vit le rêve américain impérial dans son petit appartement de fonction, en compagnie de sa femme aimante (Myra) et de ses trois enfants (les jumeaux Markus et Arden et la petite Sophya). N’eut été son amour légèrement immodéré pour la dive bouteille, héritage d’une enfance traumatique qui le laissa orphelin de mère (évanouie dans la nature à la suite de visions psychotiques) et de père (mort de chagrin après le départ de cette dernière), et la fatigue chronique résultant de ses journées de travail de 16 heures, Jacen serait parfaitement heureux. Certes, les rumeurs insistantes de disparitions mystérieuses de citoyens de Praxis (la ruche où habite la famille Hertz) ont créé un climat de suspicion et de paranoïa parmi la population locale, en plus de multiplier les patrouilles – et donc les bavures – d’Enforcers, mais Entorum n’est pas sans connaître son lot de bonnes nouvelles, comme la guérison miraculeuse du mendiant et ex Garde Impérial Guryn Mansk, ayant retrouvé la vue un beau matin après qu’un ange lui ait rendu visite dans son sommeil. Loués soient Saint Jude et l’Empereur.

Un peu plus tard, nous retrouvons notre héros, un peu fatigué par le rythme de travail éreintant que nécessite la réalisation (où la limitation de la non-réalisation) des quotas de production fixés par l’Adeptus Terra, surtout depuis que les disparitions se sont multipliées, et ont forcé l’institution d’heures supplémentaires obligatoires pour compenser l’absentéisme galopant qui touche les forces vives de Praxis. Bref, Jacen a beau faire de son mieux pour produire ses batteries, il est lui-même presque à plat. Ces soucis de productivité deviennent cependant soudainement secondaires lorsqu’une surcharge critique du réacteur à plasma de l’usine se déclare, avec des conséquences catastrophiques pour cette dernière et ses milliers d’ouvriers. Pris dans le souffle de la conflagration, Jacen est visité par une vision, où un ange ayant pris les traits de sa mère lui annonce que l’Empereur l’a choisi pour mener à bien son dessein sur Entorum, et que sa vie sera donc préservée. En échange de cette protection divine, Jacen devra prouver sa dévotion à son Sauveur en sacrifiant sa petite dernière à la cause, seul moyen d’empêcher la planète de sombrer dans l’apocalypse. Les voies de l’Empereur sont décidément des plus impénétrables.

À son réveil dans les décombres de son lieu de travail, Jacen découvre que l’ange a tenu parole, lui seul ayant été épargné par l’explosion qui a réduit l’usine en ruines et ses collègues de chaîne d’assemblage en chiche-kebab. Cette exception statistique lui attire toutefois la suspicion des forces de l’ordre, qui l’interrogent sans ménagement afin de comprendre comment il a pu échapper au funeste destin de ses camarades. Peu convaincu par son explication angélique, l’Enforcer en chef laisse toutefois le bénéfice du doute au témoin assisté, et, au lieu de l’exécuter séance tenante comme son mandat impérial le lui permet (voilà qui doit désengorger les tribunaux et les prisons d’Entorum), le laisse partir avec la vie sauve. Notre héros se trouve toutefois en proie à un dilemme insoluble: exécuter la mission que lui a donné l’ange, dont les chuchotis motivateurs le suivent désormais où qu’il aille, ou prendre le risque de voir sa planète réduite en cendres, comme révélé dans le teaser visionnaire auquel il a assisté?

Début spoilerDe retour chez lui, Jacen prend la décision d’agir pour le bien commun, et, après avoir englouti une bouteille d’amasec pour se donner du courage, va border Sophya pour la dernière fois. Manque de pot, les protestations – fort légitimes – de cette dernière attirent l’attention de Myra, contraignant l’Abraham du 41ème millénaire à faire un tir, ou plutôt un prélèvement (l’ange ayant spécifiquement demandé s’il avait du cœur), groupé. Son sombre forfait accompli, Jacen demande un accusé de réception à son commanditaire, et la preuve qu’il a véritablement préservé Entorum de la catastrophe. À cela, l’ange répond qu’elle a une bonne et une mauvaise nouvelle. La mauvaise est qu’elle s’est jouée de la crédulité de notre héros, et que les meurtres commis par ce dernier, comme ceux perpétrés par les autres citoyens de Praxis auxquels elle a offert ses « services » (dont l’aveugle Guryn Mansk, qui s’est jeté sous un car scolaire, dévoré par le remords devant son acte monstrueux) ont au contraire servi les desseins génocidaires de l’entité démoniaque que l’ange se révèle être au final. Mais la bonne nouvelle est que Jacen a pu enfin reprendre contact avec sa chère maman, qui n’est autre que la psyker que le démon en question a possédé après que ses visions apocalyptiques l’aient mené à tuer son mari et à quitter le domicile familial. C’est sur ce triptyque Travail – Famille – Batterie (de fusil laser) que se termine l’histoire (et probablement la vie) de Jacen Hertz, l’homme qui en avait trop vu et bu.Fin spoiler

AVIS:

Fort belle soumission de la part de Nicholas Wolf que ce Miracles, qui parvient, à la différence de beaucoup d’autres histoires estampillées Warhammer Horror, à distiller une atmosphère réellement oppressante et angoissante, en exploitant quelques tropes du genre (la vision angélique dévoyée, les chuchotements/apparitions que seul le héros perçoit, le dilemme insoluble dont la résolution fait sombrer dans la folie…) de façon très efficace. De la même façon, le choix de l’auteur de choisir un citoyen lambda de l’Imperium comme protagoniste, et de le confronter à toute l’horreur gothique de Warhammer 40.000, donne des résultats convaincants. Cerise sur le gâteau, la petite révélation finale sur l’identité de l’entité qui a pris Jacen sous son aile permet de clôturer le récit de fort dérangeante manière, en plus de souligner l’un des concepts forts du fluff de la franchise, que Wolf maîtrise assez pour exploiter avec talent ses caractéristiques les plus dérangeantes et morbides. Bref, une vraie réussite que cette seconde nouvelle (la première étant Reborn1) du nouveau venu Wolf, qui mérite d’être suivi au cours des mois à venir.

1 : Et la troisième, encore une fois fuitée par la biographie de l’auteur à la fin de l’e-short, Negavolt.

.

Voices in the Glass – R. Strachan [AoS] :

INTRIGUE:

Envoyé prendre la relève et des nouvelles de son collègue et ami Yollin, Prêtre Guerrier sigmarite affecté à la difficile paroisse de Shadespire, en Hyish, Gilvar peine à prendre ses marques dans la cité des miroirs, malgré l’accueil enthousiaste qui lui a été réservé par l’amicale des fidèles. Travaillé par la disparition mystérieuse de l’ancien chargé de culte, et les notes intrigantes faisant état de voix sépulcrales et de verre maudit que son prédécesseur lui a laissé, notre héros ne tarde pas à être victime d’étranges et angoissants phénomènes auditifs, qui lui font également entendre les lamentations bruyantes d’âmes en peine non identifiées. N’ayant pas pensé à ramener ses boules quies depuis Hammerhal, Gilvar passe des nuits agitées, tombant à l’occasion de son lit, et a donc bien du mal à entraîner sa congrégation sur le chemin d’une foi pure et vertueuse, d’autant plus que les membres de son conseil d’ad…juration1 lui jurent leur grand dieu Sigmar qu’ils n’entendent absolument pas la moindre voix du tout

N’ayant pas désespéré de retrouver la trace de son compagnon d’armes, Gilvar se met à errer dans la banlieue littéralement morte de Shadespire pour mener son enquête et occuper ses soirées, loin du tapage qui semble affliger particulièrement sa résidence. Il a ainsi l’occasion d’échanger quelques banalités avec le jeune Prentiss, qui a choisi de s’installer dans un manoir lors de son arrivée dans la cité (qui a beaucoup de problèmes, mais où l’immobilier est apparemment donné). Malgré l’invitation de ce dernier d’aller prendre un dernier verre dans sa chambre, Gilvar, sans doute traumatisé par ces histoires de miroir, refuse tout net la proposition de son hôte. Sur le chemin du retour, cependant, il est de nouveau assailli par un barrage de plaintes tourmentées, dont celles d’une petite fille à laquelle on a manifestement refuser d’acheter un poney, si on en doit en juger par le caractère strident et insupportable de ses pleurs. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le bénitier pour Gigi, qui s’en fuit en courant pleurer dans sa chambre, comme le gros fragile qu’il est, en fait.

Le lendemain, mis très en colère par sa propre incapacité à mettre sa vie en ordre, il livre un sermon aussi bref (quatre phrases) que culpabilisant à ses ouailles, qui repartent de l’église la tête dans le culte. Cette crise de colère a au moins eu l’effet de débloquer la parole de la vieille Lizabet, la bonne de Gilvar, qui révèle à ce dernier que sous leurs airs nonchalants, les Shadespiriens sont également victimes des vocalises d’outre-tombe qui affligent le prêtre. Résolu à faire cesser ces nuisances sonores, ce dernier empoigne son marteau pour aller briser la glace, ce qui est un comportement tout  à fait pertinent en cas d’urgence, comme chacun peut en témoigner…

Début spoiler…Le plan de Gilvar est simple : ne pas laisser un carreau, une vitre ou une glace intacte dans toute la ville. Il soupçonne en effet que ces surfaces servent d’interface aux âmes damnées du coin, et, plutôt que d’aller consoler ces dernières, il préfère qu’elles aillent hanter ailleurs. Non mais. Guidé dans sa vendetta totalement éclatée par la voix de Yollin jusqu’au manoir de Prentiss, il se décide cette fois à y pénétrer, et découvre que le jeune homme a recréé la galerie des glaces dans toutes les pièces de la demeure. Outré par tant de narcissisme, Gilvar enfile sa salopette de Wreck It Ralph et démolit consciencieusement tous les miroirs passant à portée de son marteau, sourd aux lamentations des spectres qui tambourinent de l’autre côté de la paroi (et à celles de la femme de ménage qui devra se taper de tout balayer). La salle finale se révèle cependant être un défi bien plus coriace pour notre vertueux vandale : confronté à l’esprit de Yollin, piégé lui aussi dans un cadre enchanté, Gilvar n’entend pas venir le fourbe Prentiss, qui lui plante une dague dans le buffet et l’envoie fissa au tapis. À son réveil, il ne peut que constater qu’il est lui aussi passé de l’autre côté du miroir, à la vue de l’antiquaire en train de floss dance­-r sur son cadavre. C’est la fin de l’histoire pour notre zélote, qui pourra peut-être sortir de sa dimension parallèle une fois que ses 687.234634 années de malheur seront écoulées…Fin spoiler

1 : Le Duardin Dunnot, l’Aelf Amyrillis, le fat Dunceyn, le grabataire Brenton et le « normal » Prentiss.

AVIS:

Si Shadespire est un décor rêvé pour une histoire d’horreur se déroulant dans les Royaumes Mortels, Richard Strachan ne réussit malheureusement pas à tirer la substantifique moelle, ou glace, du potentiel angoissant de la cité des miroirs. La faute à une intrigue insuffisamment développée, qui consiste principalement en une virée destructrice du héros après que ce dernier ait fait les frais de quelques manifestions spectrales. Si l’imposante galerie de personnages présentée par l’auteur (pour une nouvelle de quinze pages) avait sans doute pour but de mener le lecteur sur une fausse piste quant à l’identité de l’antagoniste, ce but louable est toutefois contrarié par la mauvaise exposition du problème auquel Gilvar se retrouve confronté. Sans rire, je n’ai compris que ce dernier était engagé dans un scénario PvP que dans les dernières pages, étant auparavant persuadé que le caractère maléfique « natif » de Shadespire constituerait la Némésis de notre Prêtre Guerrier malchanceux. La conclusion du récit, pour attendue qu’elle soit, est pour finir amenée sans finesse par Strachan, qui fait one-shoter son héros, qui devrait pourtant être familier des choses de la guerre, par un antiquaire armé d’un coupe papier. L’entrainement des recrues laisse vraiment à désirer à Azyrheim. Il est en outre dommage que l’auteur n’ait pas choisi de développer davantage les aspects les plus intéressants (à mes yeux) de son histoire, comme la présence de non humains dans le culte de Sigmar, ou la raison qui pousse les paroissiens de Shadespire à faire comme si la situation était normale, alors qu’ils sont tout à fait au courant de la précarité de leur situation (comme la confession de Lyzabet le révèle). Bref, une soumission assez décevante compte tenu de ce qu’elle aurait pu être, et qui n’ajoute même pas un peu de guimauve shadespirienne à moudre au moulin du fluffiste acharné.

.

The Funeral – D. Hinks [40K] :

INTRIGUE:

L’Inquisiteur Rabbath est mort. Et, chose tragique, ce noble servant des Saints Ordos n’a pas rencontré son destin en luttant bravement contre les hérétiques, mais a été emporté par une démence sénile après avoir été excommunié pour faute déontologique grave. Qu’importe cependant la fin ignominieuse connue par son bien-aimé maître pour le fidèle Croisé Voconis ! Seul parmi les membres de la suite de Rabbath à l’avoir accompagné en exil, et à s’être occupé de lui pendant ses derniers jours, ce fonctionnaire et factotum modèle a décidé de marquer l’occasion en invitant tous ses anciens collègues à l’enterrement de l’Inquisiteur, qu’il a tenu à organiser dans la basilique d’Eremos, où la carrière de Rabbath s’est définitivement arrêtée.

Ne s’attendant pas à ce que quiconque fasse le déplacement pour honorer la mémoire et l’œuvre du héros disgracié, Voconis est surpris de voir arriver d’abord l’Interrogateur Tashk (qu’il n’aime pas vraiment), puis le Frater Arzen (qu’il ne peut pas tellement blairer non plus), suivis par tous les acolytes, prestataires, fournisseurs et vacataires employés par Rabbath de son vivant, Ogryns compris. Enchanté par le tour pris par les événements, notre Croisé prend alors la parole pour prononcer un panégyrique des plus émouvants, avant d’inviter ses hôtes à échanger leurs souvenirs de service. Attiré dans un groupe de parole par le sagace Arzen, Voconis est encouragé par ce dernier à raconter sa version du désastreux procès de Voldori, qui a coûté à Rabbath sa rosette, sa réputation et au final, sa vie. Le Croisé s’exécute volontiers, et, alcool1 aidant, retrace l’historique de ce cas peu banal…

Début spoilerVoldori était le fils du Gouverneur de Caria Prime, et suspecté par Rabbath d’être un hérétique. Ayant réussi à capturer en secret le noble (potentiellement) dévoyé, l’Inquisiteur l’avait fait amener dans cette même basilique, pour lui extirper la confession de ses crimes haineux contre l’Imperium. L’honnête Voconis ayant hérité de ce sale boulot, il s’était mis à pied d’œuvre avec enthousiasme, mais sans parvenir à ses fins. Il faut dire qu’à la base, il était Croisé, et pas Interrogateur. Pressé par le temps, Voconis avait commis l’erreur « d’oublier » son prisonnier dans la cellule où était conduit son interrogatoire, située en zone totalement inondable (il n’y a pas que sur Terra que la montée du niveau des mers pose problème). Au final, Voldori fut retrouvé noyé dans son cachot à la marée descendante, et bien que Voconis ait juré, d’abord à son boss, puis au procès de ce dernier, que le noble s’était confessé avant d’expirer, sa déposition ne fut pas suffisante pour éviter à Rabbath l’infamie d’une radiation. Rendu fou par la ruine de sa réputation, et ayant fini par comprendre que son serviteur lui avait menti, Rabbath avait fini sa vie dans un état déplorable, ce dont Voconis se sent coupable.

Ayant entraîné ses hôtes jusqu’à la cellule en question pour démontrer sa bonne foi, le Croisé est pris à part par Arzen, qui a bien senti que l’exposé véhément de son ancien collègue dissimule un problème de taille. Et en effet, Voconis finit par reconnaître que, non, Voldori n’a jamais avoués ses crimes, et est donc mort innocent. Soulagé d’avoir enfin partagé ce lourd secret avec une oreille compatissante, notre héros se perd dans une rêverie mélancolique, qui se trouve brutalement interrompue par le silence pesant qui l’entoure. Revenant à lui, il a la surprise de constater qu’il est seul dans le cachot, déjà en train de se remplir de flotte, comme lors du douloureux fiasco précédemment exposé. Seul l’attend sur le seuil de la porte l’affable Arzen… qui se révèle être Voldori, revenu d’entre les morts pour se venger de son bourreau. Comment ? Mystère. Il ne fait cependant aucun doute que le noyé était bien un psyker, qui a embrouillé les sens de Voconis en lui faisant croire que son invitation avait été honorée par la suite de Rabbath. C’est donc une victoire morale pour notre Croisé, qui pourra attendre la mort avec la certitude de l’homme juste, car Voldori l’enferme à son tour dans la cellule avant de retourner… faire un jacuzzi, j’imagine ? Moralité : il est très dangereux de boire dans des occasions professionnelles, tenez-le vous pour dit les enfants.Fin spoiler

1 : Un cépage des plus fins, en provenance des fameux terroirs de Valgaast…

AVIS:

Cet enterrement était pourtant si bien parti pour Darius Hinks… En quelques pages, l’auteur avait réussi à poser une atmosphère prenante et à exposer un sujet des plus intéressants : la difficile cohabitation des membres d’une suite inquisitoriale après la mort de leur patron. Le vertueux Voconis, d’abord persuadé du manque de gratitude de ses anciens collègues, se retrouvant agréablement surpris et sincèrement touché par leur venue inespérée, et commençant à révéler, fragment par fragment, les détails de la triste fin de Rabbath, dont la démence terminale a été en bonne partie causée par ses méthodes d’interrogatoire peu orthodoxes (on s’en fout) et peu efficaces (beaucoup plus grave). La descente dans la cellule où le présumé hérétique s’est noyé préparant la révélation finale qui ne pouvait manquer de conclure le récit… Et là, pouf, un TGCM de bas étage juste avant le rideau de fin. Quel dommage ! Si Hinks avait pris la peine d’expliquer comment le véritable interlocuteur de Voconis avait pu se trouver sur place, ou au moins suggérer un début d’explication plausible1, cette nouvelle aurait été la plus réussie signée de sa main. Au lieu de ça, le lecteur se trouve confronté à une impossibilité de premier ordre, qui vient sérieusement écorner la sacro-sainte suspension d’incrédulité qui permet à la GW-Fiction d’opérer normalement. Malgré ce final décevant, The Funeral demeure cependant une lecture agréable, qui, j’espère, servira de nouvelle référence aux productions de Darius Hinks.

1 : Bon, il y a bien cette micro mention de Rabbath ayant trempé dans l’occultisme et la nécromancie sur ses vieux jours, et qui aurait pu expliquer le retour de Mr. V., mais la piste est tellement ténue que j’ai du relire la nouvelle pour l’identifier.

.

***

Au final, Anathemas se positionne davantage comme un successeur de Maledictions que d’Invocations, en ceci que ma préférence globale reste au second tome de la série, le plus réussi des trois à mes yeux. Cela ne veut cependant pas dire que je déconseille la lecture de cet opus aux curieux et amateurs de Warhammer Horror, bien au contraire, mais s’il n’en fallait qu’en retenir qu’un, mon choix serait sans appel. Avec ses 14 nouvelles, Anathemas remporte cependant la palme de l’ouvrage le plus conséquent de cette (pour le moment) trilogie, et comporte quelques histoires méritant vraiment le détour, telles que Skin Man, The Thing in the Woods, Runner et surtout Miracle pour le 41ème millénaire1, et These Hands, These Wings pour les Royaumes Mortels. Le reste des soumissions, pour moins mémorable qu’il soit, est néanmoins fort correct, et il y a fort à parier que vous ne regretterez pas d’avoir passé quelques heures à vous plonger dans cette anthologie si vous êtes un habitué de la BL. À l’heure où je termine cette chronique, nous ne savons pas encore ce que l’avenir – et les éditeurs de Nottingham – réservera à Warhammer Horror, aucune nouvelle sortie n’étant annoncée pour le moment. Cela dit, si la BL donne une suite à sa Warhammer Horror Week au début du mois de Mai, il y aura sans doute matière à sortir au moins un nouveau recueil de nouvelles, comme cela a été le cas avec Invocations en fin d’année dernière. D’ici là, portez vous bien et, surtout, restez sur vos gardes…

1 : Cela tombe plutôt bien car ces deux dernières nouvelles sont disponibles à l’unité sur le site de la Black Library.