Archives Mensuelles: juillet 2023

SUMMER OF READING 2015 [40K-HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du Summer of Reading 2015, deuxième tentative de la Black Library d’égayer l’été de ses fidèles en leur proposant « quelques » nouvelles pendant les mois chauds. Si j’utilise ici des guillemets, c’est que la particularité du SoR 2015 se trouve dans la taille du corpus mis à disposition par les pontes de Nottingham. Alors que les autres SoR tournent entre cinq et sept histoires, celui qui nous intéresse aujourd’hui regroupe pas moins de 21 nouvelles, réunies en trois « livres ». On savait vivre à l’époque.

À y regarder de plus près cependant, les habitués ne manquèrent ni ne manqueront guère de remarquer que les livres 2 et 3 sont constitués en totalité par des nouvelles déjà publiées dans le cadre des webzines Hammer & Bolter (2010-12), rompant ainsi avec la tradition de la BL de ne proposer que des inédits dans le cadre de ses événements ponctuels. Ayant pour ma part déjà fait le tour du catalogue H&B (à retrouver ici), je me concentrerai ici sur les sept véritables nouveautés de cet été 2015, regroupées dans le livre premier du SoR.

Summer of Reading 2015

Au programme, six nouvelles siglées 40K pour une seule nous venant du 31ème millénaire, et rien à se mettre sous la dent pour les amateurs d’heroic fantasy. 2015 ayant été l’année de la mort de Warhammer Fantasy Battle et du lancement d’Age of Sigmar, cette lacune s’explique facilement avec le recul, même si un peu de variété n’aurait pas fait de mal. Côté contributeurs, on retrouve un intéressant mélange de vétérans (dont Annandale et French, déjà conviés au SoR 2014) et de petits nouveaux. Andy Clark fait ainsi ses débuts dans la carrière avec Whiteout, et Ray Harrison, pas encore dévouée à l’héroïque Commissaire Raine, fait une pige pour le compte des Black Templars dans Dishonoured. Les protagonistes étant (à peu près) présentés, il est temps d’ouvrir ce fameux livre 1, et de voir ce qu’il a dans la tranche…

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Summer of Reading 2015

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The Wreckage – D. Annandale [40K] :

INTRIGUE :

The WreckageOù il sera question des premières années de service de Sebastian Yarrick, avant qu’il ne devienne la légende acariâtre que l’Imperium connaît et adore redoute. Déjà engagé aux côtés de la Légion d’Acier d’Armaggedon, notre héros se retrouve en mauvaise posture lors de la traque d’une bande de pirates hérétiques ayant fait du vilain dans le secteur de Statheros, et qui semble avoir un coup d’avance sur ses adversaires impériaux. Débarqué à la surface d’Aionos, une lune servant de décharge à vaisseaux spatiaux en fin de vie, le 252ème Régiment de la Légion d’Acier tombe dans une embuscade qui le force à s’abriter derrière une épave (d’où le titre. Ça, c’est fait.), en attendant des jours meilleurs, ou un coup de génie militaire de la part du Capitaine Jeren Marsec, leader charismatique mais tête brûlée de l’expédition. Yarrick, bien moins dominateur que dans ses dernières années, se contente d’observer avec circonspection la tournure que prennent les événements, échangeant quelques remarques acerbes avec son pote Otto Hanoszek, Sergent expérimenté du 252ème, avec lequel il partage quelques doutes sur la qualité du Capitaine Marsec. Ce dernier, qui a vraiment la confiance, se permet de faire des blagues au sujet de son Commissaire, et propose en toute simplicité de charger en masse les lignes ennemies (situées en hauteur et mieux fortifiées que celles des impériaux) afin de forcer les hérétiques à se concentrer au même endroit pour repousser l’attaque, les transformant en cible facile pour la frégate d’Armaggedon (Castellan Belasco) qui stationne en orbite. Moyennement emballé par ce plan à 80% suicidaire, Yarrick accepte tout de même de marcher dans la combine, mais le coup de bluff de Marsec ne donne rien. Il semble en effet que le fourbe ennemi se soit fait la malle au lieu de tenir sa position, comme il était convenu qu’il le fasse.

Dépité autant que déboussolé par ce coup du sort, Marsec contacte la frégate pour annuler la frappe orbitale, mais réalise un peu tard qu’il vient de re-re-retomber dans un piège, les hérétiques ayant capturé le vaisseau et n’attendant que la confirmation du Capitaine que ses troupes forment un gros tas bien compact au sol pour donner du macrocanon. Le subtil accent nazillard de l’opérateur radio auquel Marsec s’adresse met toutefois la puce à l’oreille de Yarrick, qui parvient à sauver quelques meubles en ordonnant une dispersion stratégique quelques instants avant que la catastrophe ne frappe. La situation du 252ème est toutefois des plus précaires, réduit à quelques escouades éparses, mené par un officier totalement hébété par la tournure qu’on prit les événements, et confronté, en plus des pirates de l’espace, à une escouade de Space Marines du Chaos des tristement célèbres Harkanor’s Reavers (la Légion des Damnés, goût Hérésie).

Prenant en charge les opérations le temps que Marsec sorte de sa torpeur, Yarrick entraîne ses survivants dans un complexe de pyramides enfoui sous le sol de Aionos, et découvert par le bombardement spatial. Je ne vous ferai pas l’insulte de laisser planer l’ombre d’un suspens sur la présence de Necrons dans cette nécropole, car c’est évidement le cas. Pris entre le marteau du Chaos et l’enclume des Xenos, Yarrick parvient à feinter son monde en passant en mode furtif, laissant les hérétiques menés par leurs gros copains énergétiques se ruer sur les robots tueurs, avec des résultats concluants. Un bonheur n’arrivant jamais seul, nos héros apprennent que l’équipage du Castellan Belasco a réussi à se libérer et est sur le point de reprendre le contrôle du vaisseau, ce qui permettrait au 252ème de tirer sa révérence sur cette victoire mineure. Problème, le bombardement a séparé les Gardes Impériaux en deux, et le groupe mené par le Sergent Hanoszek est confronté à la même situation que celui de Yarrick (hérétiques, Space Marines du Chaos, pyramide…), sans bénéficier de la présence scénaristiquement salvatrice de ce dernier.

Conscient que la situation de ses camarades est sans espoir1, Yarrick essaie de convaincre Marsec, qui a enfin repris ses esprits, de ne pas jouer au héros en essayant de monter une opération de secours vouée à l’échec. En vain. Seb la Frite passe alors en mode Commissaire et colle un bolt dans la tête de l’officier, qui n’attendait que ça en fait, histoire de mourir en martyre au lieu de devoir justifier son incompétence auprès du haut commandement à son retour. Grand prince, Yarrick annonce lui-même à Hanoszek qu’il a été désigné volontaire pour mourir au nom de l’Empereur, ce que ce dernier accepte avec stoïcisme, et laisse sa radio ouverte jusqu’au bout pour recueillir les derniers râles des héroïques bidasses. Kelôm.

1 : Ils sont confrontés à 3 Astartes du Chaos. 3 ! C’est Gaunt qui doit doucement rigoler dans son coin.

AVIS :

Une nouvelle sur Yarrick où aucun Ork ne vient pointer le bout de son (absence de) nez, cela fait bizarre, tant cette race de Xenos est centrale dans la saga du vieux Commissaire. Le récit que fait Annandale du début de la carrière du héros d’Armaggedon, que l’on découvre déjà animé de puissantes convictions quant à la manière d’accomplir son devoir, même s’il se laisse ici marcher sur les pieds par cette fantoche de Marsec, ne s’avère pas vraiment mémorable, et je pense que le nombre très important de factions convoquées dans cette courte nouvelle joue un rôle important dans ce constat de bofitude. Était-il vraiment nécessaire de faire intervenir les Necrons (qui n’apparaissent même pas directement dans le récit d’ailleurs) dans cette péripétie mineure de la carrière de Yarrick ? Cela renforce en tout cas le running gag de la nécropole enfouie sous trois centimètres de sable, et qui se réveille dès que le chien du héros la déterre par inadvertance en creusant un trou pour son os. À vouloir jouer à la fois sur le tableau de la psychologie (Yarrick se retrouve confronté à un dilemme moral qui aura des conséquences sur la suite de sa vie) et de l’action (Yarrick doit mener ses hommes à la victoire en dépit des circonstances) en aussi peu de pages, Annandale score moyennement sur les deux dimensions, et ce faisant, ne rend pas vraiment service au héros qu’il est sensé glorifier.

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Hollow Beginnings – M. Clapham [40K] :

INTRIGUE :

Hollow BeginningsSur la planète Durrl du système Alixind, les efforts combinés de la Garde Impériale et de la 4ème Compagnie des Space Wolves sont sur le point de venir à bout des hordes d’Orks du Big Boss Stumpgutz. Le dernier bastion tenu par les peaux vertes a subi un bombardement en règle de la part des troupes impériales, et n’est plus qu’un amas de ruines embrasées. Ce n’est toutefois pas suffisant pour Anvindr Grodrichsson et sa meute, bien décidés à ramener la tête du tyran au bercail pour terminer la campagne avec panache.

L’arrivée sur site des cinq loulous écumants fait l’affaire de la Capitaine Anju Bayda et de sa petite patrouille de cavaliers légers, surpris par quelques Orks ayant réussi à s’extirper des décombres fumants de leur fort démoli. Malmenés par les Xenos, les Tallarn et leurs montures auraient sûrement finis en lasagnes Findus sans l’intervention désintéressée des Space Wolves, qui règlent leur compte aux faquins et poursuivent leur route sans s’arrêter1.

Les quelques pages qui suivent sont l’occasion pour le lecteur de se (re)familiariser avec les cinq surhommes poilus, dentus et rigolards qui font office de protagonistes à notre propos. En plus d’Anvindr le meneur bougon aux cœurs d’or, on retrouve Sindri le boute en train puéril2, Gulbandr le tireur d’élite impassible, Tormodr le gros balèze pyromane, et Hoenir le rouquin et pièce rapportée de la meute, ayant rejoint cette dernière après la disparition tragique de Liulfr sur Beltrasse (voir ‘In Hrondir’s Tomb’). Les Orks ont beau se présenter par dizaines devant eux, leurs capacités martiales et la coopération instinctive qu’ils ont développé sur des centaines de champs de bataille permettent à nos héros de s’acquitter sans grand mal de leur mission, seul Stumpgutz parvenant à envoyer un vicieux high kick dans la mâchoire de Gulbandr avant d’être mis au tapis et décapité sans autre forme de procès par les Astartes. Bien que sévère, la blessure n’est pas mortelle (celle de Gulbandr, évidemment), et la meute peut revenir dans ses pénates avec un effectif complet et une grosse tête verte pour ajouter à la collection du Croc.

Notre nouvelle n’est cependant pas tout à fait terminée. Le barbecue de la victoire est en effet interrompu par l’atterrissage d’un vaisseau inquisitorial à proximité du camp impérial, d’où s’extrait péniblement la Némésis d’Anvindr : Pranix3. Devenu Inquisiteur depuis les événements de Beltrasse, pendant lesquels il n’était qu’un simple Interrogateur, Pranix n’a que le temps d’annoncer à son comité d’accueil, pas vraiment ravi de le voir (les Space Wolves sont très rancuniers), qu’un mystérieux tyran s’est emparé de neuf mondes impériaux avant de tomber en syncope. Son honneur martial l’empêchant de frapper un homme chauve à terre, Anvindr retient son juste courroux et ordonne à ses hommes d’amener l’Inquisiteur éprouvé à l’infirmerie. La vengeance est un plat qui se mange froid…

1 : Badya et ses soldats n’ayant plus d’autre rôle dans ‘Hollow Beginnings’ à part la commande d’un Über pour le compte d’Anvindr et ses hommes une fois leur mission accomplie, je suppose que Clapham les a inclus dans la nouvelle en raison de leur présence dans ‘Tyrant of the Hollow Worlds’.  En tout cas je l’espère, car sinon c’est un beau fail narratif.
2 : Et ce n’est pas de sa faute car il est frappé du syndrome du poupon, ce qui doit être très pénalisant dans un Chapitre où le respect est proportionnel à l’épaisseur de la moustache.
3 : Anvindr considère que c’est l’absence de collaboration de Pranix qui a conduit à la mort de son camarade. Il est marrant de voir que l’Inquisiteur Montiyf, déjà absolument pas respecté dans ‘In Hrondir’s Tomb’, n’a pas même pas eu l’honneur d’être considéré par Anvindr comme le responsable de la mort de Liulfr.

AVIS :

Il est clair que ‘Hollow Beginnings’ a été écrit pour servir de trailer à ‘The Tyrant of the Hollow Worlds’, le roman que Mark Clapham a consacré aux Red Corsairs de Huron Sombrecoeur, et dans lequel on retrouve la meute d’Anvindr Godrichsson (même le titre de la nouvelle vend la mèche, c’est dire). Si certains auteurs de la Black Library arrivent à rendre en pareil cas des copies intéressantes, même pour les lecteurs qui ne liront pas le roman en question, Clapham ne fait malheureusement pas partie de ce cercle. Cette « nouvelle », que l’on pourrait sans mal requalifier de prologue ou de chapitre 0 de ‘The Tyrant…’ se révèle être une Space Marinade de très piètre qualité, tant sur le fond que sur la forme, et porte ainsi très bien son nom…

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Whiteout – A. Clark [40K] :

INTRIGUE :

WhiteoutLa première mission de Lothar Redfang, ambianceur Space Wolf envoyé servir dans la Deathwatch par ses supérieurs qui ne supportaient plus ses blagues honteuses, se passe relativement bien. Expédié à la surface d’Atrophon avec quatre comparses (un White Scar luddiste, un Iron Hand Asperger, un Raven Guard mutique et un Sergent Ultramarine1), le loubard énergétique a été chargé par l’Inquisition de supprimer un Gromek Ork dont les inventions mortelles font pencher la balance du côté des envahisseurs Xenos. Malheureusement pour notre fine équipe, leur Drop Pod se fait repérer et pilonner par un Dakkajet plutôt chanceux, et son insertion ne se fait pas au milieu de la zone industrielle où Badklaw a installé ses ateliers, mais du mauvais côté de la rivière Strakk, ligne de front entre les Orks et les forces éprouvées de la Garde Impériale.

Dans leur malheur, les chasseurs d’aliens ont toutefois la chance de tomber sur un pont intact, qui leur permettra de rejoindre à pinces leur cible. Ce pont aurait cependant dû être détruit par les forces impériales au moment de leur retraite stratégique, sa praticabilité exposant la Garde à une prise en revers par les verts, ce qui est loin d’être un scénario idéal pour le Marteau de l’Empereur. La tempête de neige qui s’abat sur l’ouvrage d’art rendant le signalement de ce léger détail au haut commandement impossible, les Space Marines décident de prendre les choses en main et de faire sauter le pont avant que les Orks n’aient eu le temps de débarquer en force.

En cela, ils sont aidés par la présence de quelques bombes à plasma posées sur les piliers du pont par une équipe de sapeurs Catachan malheureux, abattus dans l’accomplissement de leur mission par des éclaireurs ennemis. Pendant que Gorrvan l’Iron Hand reste au poste de contrôle pour geeker un peu et coordonner les actions de ses collègues, Lothar, Sor’khal, Kordus et Cantos partent enclencher les détonateurs à la mano. Bien entendu, ils devront composer avec l’arrivée des premières vagues d’Orks (et pour le furtif Kordus avec les caprices de son jet pack, qui tombe en rade au pire moment – et son porteur avec lui), ce qui nous donne quelques scènes de bagarre dont nos farouches héros se tireront plus ou moins bien. Personne ne meurt, rassurez-vous, sauf l’altruiste Gorrvan qui guide ses coéquipiers vers un conduit d’aération leur permettant d’éviter les Xenos en furie, mais reste à son poste pour appuyer sur le gros bouton rouge avec sa main de fer, le blizzard carabiné rendant incertain un déclenchement à distance. Bilan des courses : un pont détruit, des centaines d’Orks pulvérisés, un camarade tombé au combat… et une mission loin d’être bouclée, car la nouvelle s’arrête sur ces entrefaites. On a connu la Deathwatch plus décisive.

1 : Ce sont toujours les Ultramarines qui commandent, à croire qu’ils ont passé un pacte avec l’Inquisition.

AVIS :

Pour sa toute première nouvelle pour le compte de la Black Library1, Andy Clark signe une histoire Deathwatch très classique (une bande de Space Marines que tout oppose mais qui finissent par apprendre à opérer ensemble), reprenant de manière troublante l’intrigue de ‘Chains of Command’ (un pont à faire sauter pour empêcher l’ennemi de faire une percée fatale). À défaut d’être mémorable, ce premier travail est assez sérieux et il serait mesquin de reprocher à un jeune auteur de se raccrocher à des schémas narratifs éprouvés pour son entrée dans le grand bain de la GW-Fiction. Encourageant.

1 : Tellement ancienne qu’elle ne lui ait même pas attribuée lorsqu’on entre « Andy Clark » dans la barre de recherche du site de la BL.

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Monolith – C. Dows [40K] :

INTRIGUE :

MonolithOn retrouve le Sergent Zachariah et son escouade de Paras Elyséens, déjà croisés dans ‘The Mouth of Chaos’, alors qu’ils répondent à l’appel à l’aide d’une force de Cadiens stationnés sur le monde d’Ophel Minoris, et attaqués par un ennemi des plus terrifiants : une bande de Raptors chaotiques. Fidèles à leur doctrine, les Elysées commencent la nouvelle assis dans la soute de la Valkyrie qui les amène au-dessus de leur cible (un monolithe géant assez semblable aux pylônes noirs de Cadia), mais le calme relatif de ce déplacement professionnel est interrompu par un grand boum sur la carlingue de l’appareil. Ce n’est pas la DCA ennemie qui a repéré les engins impériaux, non non : c’est un Raptor qui a pris sur lui d’attaquer à la griffe énergétique le Blablavion de Zach et Cie, situation ubuesque mais aux conséquences tragiques, puisque seul notre héros et un de ses hommes (Adullam) survivront à cet assaut. Cela n’empêche pas Zachariah de s’illustrer par un exploit improbable dont il est coutumier, cette fois-ci en attrapant au vol un Cadien qui s’était fait balancer par-dessus-bord par les Astartes renégats, et en le ramenant sain et sauf sur le plancher des vaches. Prends des notes, Spiderman.

Après avoir pansé ses blessures, le trio (le Cadien s’appelle Pedazhur, by the way) décide de monter tout en haut du monolithe afin d’empêcher les Raptors de faire sauter l’espèce de temple en ruines qui se trouve au sommet de la structure. Personne ne sait trop à quoi cette dernière sert, mais dans le doute, faire de l’antijeu reste une tactique valable. S’en suit le récit d’une ascension pénible, aussi bien pour nos braves Gardes, qui doivent composer avec l’attaque d’un Raptor un peu trop stupide pour son propre bien et une infrastructure en très mauvais état, que pour le lecteur qui a bien du mal à comprendre ce dont il en retourne, tant Dows peine à rendre intelligible sa description des combats.

Sans surprise, la nouvelle se termine par un affrontement (littéralement) au sommet entre les teams Z (pour Zachariah) et S (pour Shamhuth). Chaque équipe comptant trois membres, et celle du Chaos n’étant composée que de Raptors frais et dispos, alors que l’Imperium est représenté par des Gardes blessés et épuisés par vingt étages montés à pied, on se dit que le match va être plié en deux-deux. Cependant, Pépé devait veiller sur ses ouailles à ce moment précis, car la Garde Impériale remporte une victoire probante par un score final de 3 morts à 1, seul Pet d’Azur succombant à un violent choc à la tête pendant la baston. La palme revient une fois de plus à l’insurpassable Zachariah, qui se paie le luxe de tuer Shamhuth en lui glissant une grenade dans le slip alors que les deux adversaires étaient en train de se faire des papouilles en chute libre, Gandalf & Balrog style, avant de lui piquer son jet pack, de le remettre en route, de repartir jusqu’en haut du monolithe (suspendu à bout de bras), et de se laisser choir dans les ruines du temple juste avant que le jet pack ne tombe à court d’énergie. Bien sûr, l’expérience le laisse un peu moulu, mais c’est un petit prix à payer pour se farcir une escouade de Raptors quasi en solo. Sly Marbo n’a qu’à bien se tenir…

AVIS :

Eh bien, ça faisait longtemps que je n’avais rien lu d’aussi nul. Le verdict peut paraître sévère (et il l’est), mais j’ai du mal à croire que Chris Dows se soit beaucoup foulé pour écrire cette nouvelle indigente, et surtout complètement incompréhensible par moments. Les scènes d’action en trois dimensions – assez fréquentes quand la plupart des participants ont un jet pack – sont en effet si mal mises en scène que j’ai rapidement cessé de tenter de me représenter ce qu’il se passait dans ces moments, confiant dans le fait que Zachariah finirait toujours par s’en sortir, peut-être imité par un de ses sous-fifres, et que ses adversaires mordraient au contraire la poussière d’une manière plus ou moins réaliste.

Et puisqu’on parle de réalisme, mon autre principal grief porte sur ce point précis. Lorsque j’ai lu le résumé de ‘Monolith’ au moment de son achat sur le site de la BL, j’étais curieux de voir comment Dows parviendrait à rendre de façon crédible une (probable) victoire de Paras Elyséens sur des adversaires leur étant supérieurs en tout point. Dan Abnett ayant été taxé d’infâme gros bill lorsque ses Tanith avaient corrigé quelques Astartes félons dans ‘A Blooding’ et ‘Traitor General’, je me doutais que la tâche ne serait pas aisée pour Dows, mais on assiste ici à un refus d’obstacle pur et simple. Pour le dire crûment, nos héros réussissent absolument tout ce qu’ils tentent et bénéficient d’une chance insolente, tandis que leurs adversaires, en plus d’être cons comme des balais, sont poursuivis par une déveine carabinée… quand ils n’oublient pas tout bêtement d’utiliser leur équipement. Dans ces conditions-là, même le physique avantageux, l’entraînement poussé et l’équipement de pointe d’un Space Marine ne peut rivaliser. Dommage que la vraisemblance du récit passe également à la trappe.

Bref, vous aurez compris que je ne recommande absolument pas ce ‘Monolith’, à moins d’être attiré par les entrées nanardesques du catalogue de la Black Library. Si c’est le cas, ruez-vous au contraire sur cette nouvelle.

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The Eagle’s Talon – J. French [HH] :

INTRIGUE :

The Eagle's TalonCent quatre-vingt-dix-sept jours, dix heures, dix-sept minutes et trente-et-une secondes après le début de la bataille de Tallarn, le macro-transport Eagle’s Talon (à ne pas confondre avec l’Achille Talon, vaisseau amiral de la 2nde Légion du temps de sa gloire) s’écrasa à la surface de la planète suppliciée. En plus de forcer les combats faisant rage sur l’hémisphère sud à s’interrompre pour quelques heures, cet événement priva les Iron Warriors de précieux renforts qui auraient pu faire basculer le conflit du côté des hérétiques. Bien des années après les faits, une série d’extraits audio captés par une sonde spatiale s’étant retrouvée à proximité de l’Eagle’s Talon permit de lever le voile sur les raisons de cet accident, qui n’en était en fait pas un.

À travers sept enregistrements successifs, nous suivons la dernière mission des escouades Gammus, Theophon et Arcad des Imperial Fists, alors qu’elles infiltrent le vaisseau ennemi avec pour objectif de… le détourner, j’imagine ? En tout cas, pas de le faire s’écraser sur Tallarn, comme cela finira par être le cas, car ces idéalistes de jaunards ne souhaitent pas causer des pertes parmi leurs alliés humains. Mais ces nobles sentiments ne font pas le poids face à l’adversité et les hordes de soldats et de membres d’équipage qui finissent par converger sur la position des loyalistes, une fois leur présence à bord découverte. L’escouade Arcad ayant échoué à s’emparer de la salle de contrôle de l’Eagle’s Talon, comme c’était pourtant son objectif, le pragmatique Theophon déclenche les charges qu’il avait posé en douce sur le conduit d’alimentation central du vaisseau (apparemment aussi sensible que le pot d’échappement thermique de l’Etoile Noire), après que Gammus ait refusé de le faire pour sauvegarder son précieux honneur. Heureusement qu’il y en a encore qui acceptent de faire le sale boulot…

AVIS :

Si le script de certains audio dramas peut se révéler indifférenciable d’une simple nouvelle, le doute n’est en revanche pas permis dans d’autres cas, et ‘The Eagle’s Talon’ appartient à la seconde catégorie. Il est très clair à sa lecture que cette histoire a été écrite pour être écoutée, étant composée à 90% de dialogues et de bruitages, qui doivent sans doute rendre très bien avec un casque sur les oreilles mais s’avèrent moins spectaculaires en mute. Autre indice probant, la très grande simplicité, pour ne pas dire vacuité, de l’intrigue déployée par French, parfaite pour qui n’a pas envie de dédier 100% de ses capacités cognitives à la compréhension des tenants et des aboutissants de cette mission d’infiltration. Là encore, le passage au format nouvelle n’est pas à l’avantage de ‘The Eagle’s Talon’, le lecteur moyen n’appréciant sans doute guère qu’on le prenne pour un abruti (ça a été mon ressenti, en tout cas). Sur ce coup-là, je subodore que l’élève French a été meilleur à l’oral qu’à l’écrit…

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Dishonoured – R. Harrison [40K] :

INTRIGUE :

DishonouredLa croisade lancée par le Sénéchal Helbrecht pour reprendre le monde minier de Schrödinger VII aux Nécrons ne se passe aussi bien qu’il l’espérait. Bien que les Black Templars combattent avec le zèle et la hargne qu’on leur connait, les robots tueurs sont trop nombreux pour permettre aux meilleurs de l’Empereur de saisir l’initiative, et les pertes s’accumulent du côté des über men in black (and white). Comble de l’infamie, un Cryptek curieux du nom de Khephrys se téléporte sans crier gare avec sa garde rapprochée de Factionnaires au contact de l’escouade de commandement d’Helbrecht, et repart avec l’étendard de ce dernier, ainsi que son porteur (Evrain). Pris au dépourvu par cette stratégie capture the flag, le Maréchal prend une décision radicale : pendant qu’il ira mener l’assaut des Black Templars sur la ville de Blight’s Edge, où l’ennemi s’est retranché en nombre, son champion personnel, Aergard, partira avec deux collègues (Garel et Thibaut) arracher le précieux drapeau aux sales griffes nécrones, et possiblement ramener Evrain au bercail, si cela est possible.

S’en suit une narration alternée entre la balade pédestre d’Helbrecht et de ses deux Frères d’Epée restants à travers la toundra de Schrödinger VII jusqu’au point de ralliement des croisés, et la mission d’infiltration de l’autre trio dans les galeries d’un complexe minier où Evrain, ou tout du moins son armure, semble être d’après la puce GPS logée dans la cuirasse. Bien évidemment, les deux groupes rencontreront quelques adversaires en chemin (un trio de Moissonneurs et un Deathmark pernicieux du côté d’Helbrecht, des Guerriers et un Spectre pernicieux aussi du côté d’Aergard), causant quelques pertes de part et d’autre. Leur fortune sera toutefois bien différente…

Début spoiler…Là où Aergard et Garel signeront un sans faute en parvenant à récupérer leur étendard ainsi que le pauvre Evrain (qui décèdera de ses blessures une fois revenu au camp, mais ça ne compte pas vraiment pas vrai), après avoir secouru une escouade de Black Templars et les civils protégés par ces derniers (qui se feront impitoyablement moléculiser par les Nécrons une fois les Astartes partis, mais ça ne compte pas non plus), assiégés depuis des heures par les implacables Xenos, Helbrecht se couvrira de honte et d’ecchymoses.

Ayant opté pour une approche plus subtile du problème que celle déployée par son bourrin de subalterne Jenovar, à savoir charger en force le pont reliant Blight’s Edge au reste du plateau et se faire repousser sans ménagement par les Necrons barricadés, le rusé Sénéchal enverra le gros de ses forces attaquer la position ennemie en passant par les souterrains, tandis que lui et quelques hommes resteront à la surface pour faire diversion. Fort bien. C’était sans compter la présence dans les rangs adverses d’un autre personnage nommé, Imotekh le Seigneur des Tempêtes, a.k.a. le Saigneur des Templiers. Désireux de croiser le fer avec son vis-à-vis, le Phaëron se téléporte à son tour devant Helbrecht en gueulant « Sénéchal me voilà », lui met une rouste monumentale, lui envoie une décharge de 100.000 volts dans les ratiches, le morigène longuement et lui coupe la main droite pour lui apprendre à se la jouer comme Sigismund, avant de le balancer dans une crevasse. BRUTAL. Rassurez-vous, Helbrecht survivra à cette déculottée honteuse, et la nouvelle se termine sur la pose de sa nouvelle main par un artificier du Chapitre, et sur le serment solennel fait par le manchot de l’Empereur de se venger de cette infâmie. La suite à Davatas…Fin spoiler

AVIS :

Rachel (qui signe ici Ray) Harrison donne une dimension romanesque à un épisode marquant de la carrière du Haut Sénéchal Helbrecht, sa première rencontre avec l’insaisissable Imotekh. Je ne sais pas si elle cherchait à rendre son héros plus sympathique au lecteur en dressant un portrait en clair-obscur (vu la livrée des Black Templars, c’est fluff) du tempétueux guerrier, mais je sors de ‘Dishonoured’ avec l’idée que le dévoué Aergard l’emporte sur son boss sur tous les tableaux. En plus de parvenir à remplir une mission impossible sur laquelle Helbrecht semble l’avoir mis pour garder la face après avoir perdu son étendard, il est présenté comme le stratège, conseiller et intendant sur lequel le Sénéchal s’appuie en permanence. De son côté, ce dernier brille surtout par son zèle irréprochable, qui ne lui sert pas à grand-chose face à un Imotekh qui le surclasse de la tête et des épaules.

Bien que le propos de cette nouvelle ne soit aucunement novateur, on peut mettre au crédit d’Harrison sa volonté de compenser la vacuité du fond par un travail formel intéressant, en dédoublant l’intrigue à partir du tiers du récit et déroulant les deux trajectoires sans faillir. Pas brillant, mais solide.

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The Cost of Command – S. Mitchell [40K] :

INTRIGUE :

The Cost of CommandDans la forteresse monastère des Astral Knights, sur le monde cristallin d’Obsidia, un duel d’honneur est sur le point de s’engager entre deux membres du Chapitre, Lanthus et Aldwyn. Cela n’aurait pas grand-chose d’étonnant pour cette confrérie aussi susceptible que portée sur les choses de l’honneur, n’eut été la décision du second de combattre jusqu’à la mort, la tradition étant plutôt d’aller seulement jusqu’au premier sang. Pour comprendre pourquoi Al(ec Bal)dwyn en veut autant à son Sergent, il faut remonter quelques semaines plus tôt, lors de la campagne de Summerfall.

Ayant répondu à l’appel à l’aide des autorités planétaires, submergées par une Waaagh ! Ork s’étant manifestée sans crier gare dans le système, la 3ème Compagnie du Capitane Galad se déploya à la surface du monde supplicié pour tenter d’endiguer la marée verte. Au cours des premiers engagements, l’escouade Caromort où servaient Lanthus et Aldwyn commit l’erreur d’engager le combat avec une tribu de peaux vertes au grand complet, pensant embusquer un convoi de quelques Truks à la place. Bien que l’engagement fût remporté par les Astral Knights, grâce à leur discipline de tir et l’usage magistral du lance-roquette par le frère Beves, le Sergent Caromort termina la journée dans le même état que le carreau de son patronyme. A la surprise générale, Galad choisit de promouvoir le taciturne et réfléchi Lanthus à la place du charismatique mais impétueux Aldwyn (pour la superbe raison que ce dernier aurait accepté tout de suite, alors que Lanthus a pris deux secondes pour réfléchir). Les voies du management sont souvent impénétrables.

Quelques jours après cette réorganisation, l’escouade Lanthus se vit confier une mission capitale pour le succès de la campagne : infiltrer la capitale planétaire par les égouts pour en ouvrir les portes et permettre au reste de la Compagnie d’attaquer en force le dernier bastion tenu par les Orks. Après avoir mené à bien la première partie de leur tâche en nageant littéralement dans un flot d’étrons pendant de longues minutes, les Space Marines se séparèrent en deux demi-escouades pour maximiser leurs chances de succès, la première menée par Lanthus et la seconde par Aldwyn.

Les styles de commandement très différents de nos deux héros eurent un impact non négligeable sur la suite des événements. Pendant que Lanthus rasait les murs et progressait dans les ombres pour se rapprocher de la salle de commandement, Aldwyn fonçait dans le tas tous flingues dehors, attirant logiquement à lui un nombre de plus en plus important d’Orks, toujours partants pour une bonne bagarre. Et bien que ses hommes lui reprochassent de laisser leurs camarades se débrouiller tout seuls contre les peaux vertes en furie, Lanthus choisit de prioriser l’accomplissement de sa mission, qu’il réussit à mener à bien, permettant aux renforts d’arriver sur les lieux et de reprendre la capitale au prix de durs combats, plutôt que d’aller secourir la team Aldwyn. Au final, seul ce dernier parvint à survivre à la fureur des Orks, et lors de leur debriefing d’après bataille, il jura à Lanthus qu’il se vengerait de sa mesquinerie. Fin du flashback et retour sur Obsidia.

Le duel s’engage entre les deux rivaux, et tourne assez rapidement en faveur de Lanthus, qui réussit à piéger son adversaire fou furieux et à lui planter son poignard de cristal dans la jugulaire, suscitant des remous dans l’auguste assemblée réunie pour assister au combat. Mortellement blessé, Aldwyn parvient tout de même à rendre la monnaie de sa pièce à son assassin, en le rendant hémiplégique d’un coup de surin dans l’aisselle. La nouvelle se termine avec le Maître de Chapitre Amhrad qui vient métaphoriquement remuer le couteau dans la plaie du pauvre Lanthus, qui après tout n’a fait que son devoir dans des circonstances difficiles, comme tout bon fils de Dorn est sensé le faire. Le karma galactique se chargera de te venger, gamin.

AVIS :

Ce n’est pas tous les jours que l’on à droit à autre chose que le récit des exploits de Ciaphas Cain lorsqu’on lit Sandy Mitchell, et ‘The Cost of Command’ est donc une rareté dans l’imposant catalogue que notre homme a produit pour le compte de la Black Library depuis vingt ans. Malheureusement, on ne retrouve pas la touche d’humour décalée qui fait tout le charme et l’originalité de sa prose dans cette Space Marinade tout à fait sérieuse, et qui se révèle dont être faite du même bois que les dizaines d’autres courts formats dédiés aux batailles menées par les héroïques Astartes. Mis à part quelques informations intéressantes sur les Astral Knights, on peut donc faire l’impasse sur cette histoire des plus classiques.

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Voilà qui conclut cette revue du Summer of Reading 2015, et si ce millésime remporte haut la main la palme de la quantité, il ne fait pas si bien en matière de qualité, ni de diversité (5 histoires de Marounes sur 7 nouvelles, cébokou). 2015 étant une année particulière pour la BL, on sera magnanime, mais on a connu des étés plus palpitants que celui-ci…

SUMMER OF READING 2014 [40K]

Bonjour et bienvenue dans cette revue du Summer of Reading 2014, première itération de cette série estivale que la Black Library maintint jusqu’en 2019. Dans ces temps très reculés, les semaines NCD (new content daily) de la BL n’étaient pas aussi fréquentes qu’elles le sont aujourd’hui, et la formule « classique » à laquelle nous nous sommes habitués (compilation de cinq ou six histoires provenant des franchises principales de la GW-Fiction, vendues avec une petite ristourne en cas d’achat groupé) n’avait pas encore été découverte par les cerveaux géniaux de Nottingham. 2014 a également une année particulière pour la Black Library : alors que Warhammer Fantasy Battle vivait ses derniers mois et qu’Age of Sigmar n’était pas encore lancé, il ne restait plus que 40,000 (et dans une moindre mesure, l’Hérésie d’Horus) pour tenir la barraque. Cela explique sans doute pourquoi les cinq nouvelles de ce SoR 2014 nous viennent toutes du lointain futur.

Summer of Reading 2014

Côté contributeurs, on retrouve quelques-unes des plumes les plus établies de la Black Library (en tout cas, au moment où cette chronique est écrite), avec pas moins de trois « Seigneurs de Terra » (French, Wraight, Haley), l’éditeur en chef Nick Kyme, et l’incontournable David Annandale. Il est en revanche possible que les personnages mis en avant dans ces nouvelles vous soient moins familier si, comme moi, vous vous attelez à cette lecture près de dix ans après les faits. Bien sûr, tout le connaît Ahriman et Yarrick, mais Ctesias, Lorkar et Brusc n’ont pas la renommée de ces deux têtes d’affiche, malgré le fait qu’ils appartiennent tous à la catégorie des personnages récurrents de la GW-Fiction (un statut exalté qu’Ingvar le Space Wolf n’a pas, à ma connaissance, atteint). Le décor étant planté, il est temps de sauter dans notre machine à remonter le temps, et de partir pour l’été de 2014…

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Summer of Reading 2014

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The Dead Oracle – J. French :

AVIS :

Ahriman_The Dead OracleC’est maintenant au tour de Ctesias, démoniste Thousand Sons ayant collaboré à la petite Rubrique d’Ahriman en son jeune temps, de prendre la plume à défaut du micro pour raconter son histoire, qui se confond tout de même fortement avec celle de son meilleur ennemi, reconnaissons-le. La nouvelle commence par un rêve à la limite du cauchemardesque, dans lequel celui qui était encore prisonnier d’Amon, Capitaine de la 9ème Compagnie de la Légion déchue, voit lui apparaître un des nombreux démons qu’il a asservis. Ses conditions de détention ne lui permettant normalement de recevoir de la visite, même ou peut-être surtout psychique, Ctesias comprend que quelque chose d’important vient de se produire. Renvoyant son familier un peu trop familier à ses chères études en lui récitant son nom d’état civil complet, le bleu et jaune au bois dormant se réveille à temps pour constater la présence à son chevet de nul autre qu’Ahriman, revêtu de l’armure pimpée d’Amon. Il est clair que l’ancien paria a réussi à prendre la place de sa Némésis, et bien que Ctesias ne l’apprécie guère, il est trop malin pour refuser la main tendue du nouveau patron. Il accepte donc de se mettre à nouveau au service d’Ahri le sorcier, qui a évidemment un plan tout tracé pour le futur.

Ce plan consiste dans un premier temps à rendre une visite de courtoisie à un autre Thousand Sons rangé des voitures, le prophète Menkaura. Ce dernier réside dans un petit studio au cœur de l’Œil de la Terreur, ce qui nécessite un voyage que l’on devine éprouvant dans la zone tampon entre Materium et Immaterium. Pas que la présence du Warp incommode particulièrement Ctesias, notez bien, mais plutôt que ça le force à interagir avec Astraeos et Sanakht, deux suivants de son nouveau boss qu’il n’apprécie pas du tout (en même temps, il n’a pas l’air d’aimer grand monde). Rendus sur place, tout ce petit monde est introduit dans le salon de Menkaura, qui flotte doucement dans sa bulle psychique, et Ahriman demande gentiment à leur hôte de lui révéler son avenir. Pressentant une rebuffade de la part du devin, il a discrètement briefé Ctesias avant la rencontre pour que ce dernier se prépare à asservir le medium en cas de non-coopération, et c’est ce que le démoniste s’apprête affaire quand tout à coup, l’ambiance commence à dégouliner des murs…

Début spoiler…Car si Menk’ fait un refus d’obstacle, ce n’est pas tant qu’il ne puisse pas blairer son visiteur (ce qui serait compréhensible, vu sa manie de ne pas répondre quand on lui adresse la parole) qu’il a été capturé par un Grand Immonde prosélyte, cherchant à recruter Ahriman, Astreos et Sanakht1 pour la plus grande gloire de Papy Nurgle. Téléportés à leur corps et leur âme défendant au cœur des Jardins du Grand Père, les visiteurs se retrouvent en bien mauvaise posture, cernés par une horde de Portepestes et bonimentés par un tas de saindoux moisi super size. Il faut tout le self control d’Ahriman pour faire remarquer à son interlocuteur qu’en prenant la place de l’oracle, il est contractuellement tenu de répondre à la première question qu’on lui posera, et cette dernière sera bien sûr : « mais comment tu t’appelleuuuuh ? ». Bien que le Grand Immonde, peu fair play pour le coup, tente de massacrer les mortels outrecuidants pendants les 30 secondes nécessaires à l’énonciation complète de son nom de baptême, ces derniers parviennent à le maintenir à distance, et les compétences de Ctesias font le reste.

L’expérience est toutefois éprouvante pour notre héros, qui se réveille bien plus tard sur le vaisseau d’Ahriman, après avoir pu s’entretenir avec le véritable Menkaura, pas si mort que ça au final, dans un autre de ses rêves extralucides. On comprend que ce futé d’Ahzek avait anticipé l’usurpation d’identité du devin, mais avait tenu ce détail caché à son complice pour s’assurer de sa coopération, l’asservissement d’un démon majeur n’étant pas un projet auquel Ctesias aurait participé en connaissance de cause. Ce ne sont pas des bases saines pour une relation apaisée, mais mon Empereur que cela risque d’être distrayant…Fin spoiler

1 : Et pas Ctesias, car apparemment les démons ne peuvent pas encadrer les démonistes. Ce qui se tient quelque part.

INTRIGUE :

Sous ses abords simples, ‘The Dead Oracle’ n’est pas une histoire facile à appréhender pour qui n’est pas familier de la série consacrée par John French à Stan Harry the Man, et a minima au premier tome de la quadrilogie (au moment où cette chronique est écrite), ‘Ahriman: Exile’. Avec un début pareil, vous devez vous douter que c’était mon cas, et vous avez bien raison. Si on arrive à comprendre rapidement que Ctesias et Ahriman ont une histoire commune et ne s’apprécient plus guère après des millénaires à guerroyer et comploter ensemble ; tant le but poursuivi par le personnage tutélaire de la saga que l’importance de la petite galerie de personnages mineurs convoqués par French (Astraeos, Sanakht, Menkaura) me sont restés cryptiques. Ce n’est qu’après avoir comblé mes lacunes sur le Lexicanum que j’ai pu (à peu près) comprendre de quoi il en retournait, et je pense que John French aurait pu rendre une copie plus accessible aux newbies (après tout ‘The Dead Oracle’ a d’abord été publié dans un Summer of Reading, produit grand public par excellence) sans gâcher le plaisir de ses lecteurs vétérans.

Passé ce reproche introductif, je dois dire que cette nouvelle tient plutôt bien la route, en ce qu’elle parvient à nous plonger dans l’univers totalement mystico-barré, mais loin d’être anarchique1, des Thousand Sons, et à présenter rapidement et efficacement le personnage de Ctesias, dompteur de démons vétéran et Marie Kondo de la mnémonique. Je n’irai pas jusqu’à dire que cela m’a donné envie de connaître la suite, mais une indifférence polie n’est pas le pire résultat qu’un contributeur de la BL peut récolter pour un de ses travaux. Littéralement passable.

1 : Comme l’argument massue d’Ahriman au Maggot Lord : « si tu prends sa place, prends son handicap sa servitude », et l’impossibilité pour ce dernier de faire autrement qu’obtempérer, le démontrent bien. Ce serait encore plus drôle avec un Buveur de Sang exalté.

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Onyx – C. Wraight :

AVIS :

OnyxDans la station de minage Valmar’s Gorge, établie dans la ceinture d’astéroïdes d’un système impérial quelconque, le morne quotidien des quelques cinq mille travailleurs collectant et raffinant les précieux minerais dont l’Imperium raffole est interrompu par une attaque d’Eldars Noirs. Malgré l’application scrupuleuse des consignes de sécurité, mineurs et ouvriers se font tailler en pièces (de manière fatale pour les plus chanceux d’entre eux) par les sadiques Xenos, dont les réflexes surhumains et la technologie avancée neutralisent sans mal les faibles et pataudes tentatives de contre-attaques impériales. Les plus dégourdis, comme le dénommé Kaivon (accessoirement héros personnage principal de cette nouvelle), parviennent à s’enfuir et à se cacher dans les recoins les plus secrets de la station, mais ce n’est qu’une question de temps avant que les Drukhari ne leur mettent la main dessus.

Dans leur malheur, les Valmagorgiens ont toutefois un peu de chance : la ceinture de Phalamos est victime des raids des Eldars Noirs depuis plusieurs années, et leur goût pour l’ostentatoire les a rendus prévisibles. L’Inquisiteur de l’Ordo Xenos Aoart Hallafiore, devinant que les pillards finiraient par attaquer Valmar’s Gorge afin de terminer de dessiner une teub géante la rune yllianua avec la localisation GPS de leurs méfaits, a envoyé l’escouade Onyx de la Deathwatch camper incognito dans un container de minerai en prévision de l’assaut. L’objectif des United Colors of Space Marines est simple : capturer l’Haemonculus qui dirige les opérations du côté des bath Zoneilles, et le ramener au poste pour un interrogatoire serré. C’est ainsi que le charismatique Ultramarines Callimachus se manifeste à point nommé pour épargner à Tallia, agente de sécurité totalement dépassée par la situation, une séance de body piercing sans anesthésie1.

Les forces en présence étant arrivées sur le champ de bataille, il est temps pour la mission d’Onyx de commencer pour de bon, et… elle se passe sans accroc. Bon, si on veut chipoter, Callimachus manque de se faire bolosser par un Cabalite en grande forme qu’il avait laissé s’approcher d’un peu trop près, et Leonides (le Blood Angels de la bande) se prend un vilain coup de jus en essayant de tirer la cape de chaînes de l’Haemonculus. Mais sinon, rien à signaler, vraiment. Après une petite fusillade tout ce qu’il y a de plus classique, le suspect principal se fait appréhender grâce à une grenade de stase bien placée, et les Space Marines repartent dans leur Thunderhawk en direction du QG inquisitorial. Seul le Space Wolf Ingvar est un peu grognon de laisser les civils se débrouiller tout seuls, son tempérament de noble barbare lui enjoignant de les défendre contre la deuxième vague Xenos qui débarque en catastrophe après avoir appris le kidnapping de leur chef. Il n’aura cependant pas gain de cause, et la nouvelle se termine sur la mort de Tallia et la capture de Kaivon, bien incapables de faire face aux renforts drukhari par leurs propres moyens. Voilà qui est fort triste (non).

1 : Pour des raisons que Chris Wraight ne prend pas la peine d’expliquer, Callimachus commence la mission séparé du reste de son escouade. Je pense qu’il a dû faire jouer son statut d’Ultramarines pour obtenir un surclassement.

INTRIGUE :

On sent à la lecture de cet ‘Onyx’ que Chris Wraight et la BL avaient pour projet de poursuivre l’histoire de cette petite bande de Space Marines mal assortis mais très efficaces (un peu trop d’ailleurs) dans d’autres publications. Pour des raisons que j’ignore, cela n’a pas été le cas, Steve Parker gardant le monopole sur ce créneau (et remplissant sa tâche avec brio je dois dire) avec sa fameuse escouade Talon. Toujours est-il que cette nouvelle est d’une platitude et d’un ennui terrible, les péripéties s’enchaînant tranquillement (un comble pour du bolt porn) d’un bout à l’autre de l’histoire, ou bien étant si mal mises en scène par un Chris Wraight qu’on a connu plus inspiré qu’elles se trouvent privées de toute chance de surprendre le lecteur. J’en veux pour exemple la dernière partie du récit, où on comprend que Kaivon et Tallia ne seront pas secourus comme ils l’espèrent, et sont donc condamnés à une fin atroce. Comme cela est expliqué sans aucune équivoque dans la scène précédente, pendant laquelle Callimachus et Ingvar ont une franche explication de texte dans l’habitacle du Thunderhawk qui les ramène au bercail, les trois pages qui clôturent ‘Onyx’ ménagent un faux suspens digne d’une télénovela de second ordre. L’idée aurait pu fonctionner avec un séquençage mieux travaillé et une narration plus incisive, mais là, ça tombe franchement à plat.

Côté personnages, on n’est pas très gâté non plus, tous les Space Marines ayant tiré la carte « Je suis un stéréotype de mon Chapitre » dans le paquet des personnalités, et les deux humains très laborieusement intégrés à l’intrigue étant d’une transparence confondante. Bref, une soumission franchement médiocre de la part de Wraight, qui s’est heureusement bien rattrapé depuis.

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Devil’s Trappings – N. Kyme :

AVIS :

Devil's TrappingsLaissée à la dérive à travers le vide infini, la station spatiale de type Colossus (ça veut dire qu’il y a pas mal de place dans le coffre) Demetrion attire l’attention de la demi-Compagnie de Marines Malevolent placée sous le commandement du Sergent Lorkar. Leur but est loin d’être aussi noble que la purge d’un essaim de Genestealers squattant la soute de l’épave, ou la récupération de technologies datant de la Grande Croisade, comme c’est souvent le cas lorsque des Space Marines participent à une opération portes ouvertes dans l’espace. Non, les Malveillants sont plus prosaïquement à la recherche de matériel, d’armes et de munitions, leur goût immodéré pour la baston combiné à leur sale caractère ayant mené le Chapitre à manquer cruellement de consommables. Quand on passe son temps à s’embrouiller avec l’Adeptus Mechanicus et l’Administratum, il ne faut pas s’étonner que les livraisons de matos s’espacent de plus en plus.

De son côté, Lorkar poursuit le rêve de rejoindre la Première Compagnie (les Vil(l)ifiers1) du Capitaine Kastor, et a bon espoir qu’un loot digne de ce nom lui gagnera les faveurs de l’officier, et ainsi son ticket d’entrée dans cette confrérie exaltée2. Les objectifs personnels et professionnels de notre héros semblent donc s’aligner parfaitement, mais c’est sans compter sur sa paranoïa exacerbée qui lui fait voir dans son homologue Jerak Curhn, dont l’escouade a été rattachée au groupe de combat de Lorkar pour cette mission, un rival dangereux. Cela aura bien sûr de lourdes conséquences un peu plus tard dans la nouvelle…

La chance semble sourire à l’expédition lorsque les deux escouades de Lorkar et Curhn tombent sur les restes d’un affrontement sans merci entre des Space Marines (non identifiés) et des Eldars (non identifiés non plus). Bien que les forces en présence soient étranges pour une station spatiale n’appartenant pas à une flotte Astartes, les Malevolent ne perdent pas de temps à gloser sur les causes du pugilat, car à spalière abandonnée, on ne regarde pas l’étiquette, comme dit le proverbe. Les Marounes se ruent donc  sur les armures énergétiques abandonnées comme un essaim de Termagants sur un buffet à volonté, et remplacent les pièces défectueuses ou hors d’âge de leur panoplie par des modèles plus seyants et modernes. Ceci fait, Lorkar ordonne la reprise de l’exploration, et nos surhommes finissent par déboucher dans une sorte d’immense chambre froide, dans laquelle des capsules contenant des plantes exotiques sont alignées en grand nombre. Saisi d’une inspiration géniale, le wannabe Vilifier rétablit le chauffage lorsqu’il parvient au panneau de contrôle, et provoque involontairement le réveil de la biodiversité qui hibernait dans la salle…

Début spoiler…Une horde de Sslyths mal embouchés déferle alors sur les Space Marines, qui n’ont d’autres choix que de battre en retraite vers la sortie la plus proche, perdant quelques-uns des leurs au passage, dont le malheureux Curhn, tué trois fois de suite par l’archi félon Lorkar. Ce dernier profite en effet de la confusion des combats pour faire son affaire à son rival de manière aussi discrète (hum) qu’efficace (hum hum), récupérant le leadership de l’escouade endeuillée (apparemment, les Marines Malevolent se torchent avec le Codex Astartes, mais ça ne m’étonne pas d’eux). Ayant réussi à mettre une barrière aussi infranchissable qu’une porte fermée entre eux et l’armée d’hommes serpents à quatre bras qui les poursuivait, les survivants sont frappés par une nouvelle calamité. Les pièces d’armure qu’ils ont récupérées sur les cadavres du Demetrion sont en effet tout ce qu’il y a de plus chaotiques, comme les runes impies et les mutations grotesques qui y apparaissent d’un coup d’un seul le révèlent sans équivoque. Il ne vous surprendra guère d’apprendre que nos héros se trouvent dans l’incapacité de retirer ces reliques incriminantes, ce qui les contrait à un walk of shame jusqu’au Purgatory, croiseur d’attaque du Capitaine Vinyar3.

Bien que Vinyar n’apprécie guère les désirs de mobilité professionnelle de son subalterne, et soit en droit de condamner les pilleurs de cadavres malchanceux à mort, ou pire à la corvée de chiottes, pour port de matériel hérétique, le magnanime Capitaine décide de passer l’éponge, mais à une condition. Lorkar et son ses escouades devront aller passer le bonjour à ces saintes nitouches de Salamanders sur Nocturne, et il est malheureusement fort probable qu’un regrettable accident arrive à Tu’shan pendant la visite…Fin spoiler

1 : Les plus mauvais de tous les Marines Malevolent, y compris en orthographe apparemment. Ou alors Kyme ne s’est pas relu.
2 : Toute ressemblance avec un autre Space Marine proprement imbuvable faisant des pieds et des mains pour rejoindre la Première Compagnie de son Chapitre serait bien évidemment fortuite.
3 : En bon camarade, Lorkar met un bolt dans la tête du Sergent Amigdus lorsque ce dernier remarque la nouvelle héraldique de son camarade. Et une escouade de plus qui tombe dans la musette, c’est fou.

INTRIGUE :

Je ne peux m’empêcher de penser que Nick Kyme avait l’envie d’émuler son collègue Aaron Dembski-Bowden et ses charismatiques Night Lords dans ce ‘Devil’s Trappings’, qui arbore de fortes ressemblances avec les mésaventures de Talos et de sa Première Griffe, à commencer par le sous-thème « exploration de vaisseaux abandonnés pour récupérer du matos » qui sous-tend cette nouvelle. Malheureusement, il y a quelques classes d’écart entre ces deux auteurs, et là où ADB arrive à nous embarquer sans mal dans le quotidien à la fois prosaïque et exaltant de ses renégats, Kyme peine à nous intéresser au sort de ses bad guys loyalistes. Comme souvent dans ses courts formats, il a en effet la fâcheuse tendance à se disperser en cours de route, multipliant les retournements de situation sans se soucier de la solidité narrative de l’ensemble.

On a ainsi droit ici à une rivalité mortelle qui tourne au puéril faute d’être contextualisée, à une horde de Xenos apparaissant et disparaissant de l’intrigue sur commande, à des armures chaotiques qui ne se manifestent comme telles que lorsque le scénario en à besoin, et à des centaines de milliards de personnages nommés dont moins d’un quart méritait vraiment de l’être. C’est d’autant plus dommage que les Marines Malevolent ont un potentiel indéniable en termes de story telling, étant parmi les seuls Chapitres « méchants mais loyaux » de l’univers de 40K (les Dark Angels et les Iron Hands ne méritant qu’une mention déshonorable). Comble de forfaiture de la part de Kyme, il me semble qu’il n’a pas donné suite à ‘Devil’s Trappings’, et que nous sommes toujours sans nouvelles de la mission secrète de Lorkar et de ses gredins. Et pourtant, c’est sans doute le plus intéressant à retenir de cette histoire…

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Season of Shadows – G. Haley :

AVIS :

Season of ShadowsLa saison du feu s’achève sur Armageddon, laissant la place à la plus sombre mais plus calme saison des ombres, pendant laquelle humains et Orks ont tout loisir de repartir au combat dans des conditions dignes. Quelque part dans les déserts de cendres qui forment une bonne partie de la surface émergée de la planète, un hôpital de campagne est sur le point d’être évacué et détruit par ses occupants, afin de priver les peaux vertes de la réserve de doliprane qu’ils convoitent tant. Sous le commandement du Frère d’Epée Brusc, soignants, patients et Gardes Impériaux prennent place à bord d’un convoi motorisé qui les ramènera, si l’Empereur le veut, jusqu’à la cité ruche la plus proche. Il faudra pour cela parcourir des centaines de kilomètres dans le no man’s land, et une rencontre fortuite avec un Kult de la Vitesse en maraude est une possibilité distincte.

Pendant que les véhicules impériaux filent vers leur destination, on en apprend un peu plus sur Brusc, qui fait difficilement son deuil de son ancien Novice devenu Initié devenu Bestie devenu cadavre, Osric. Il paraît même qu’il en a perdu son sens de l’humour, ce qui est doublement tragique pour un Black Templar car ce Chapitre ne compte pas des masses de gais lurons dans ses rangs pour commencer. Brusc est accompagné par un Initié fan de tunning du nom de Sunno, du Novice de ce dernier (Doneal), et d’un autre pioupiou (Marcomar) qu’il a charitablement recueilli après que son tuteur se soit fait refroidir par les Orks. Je ne sais pas vraiment pourquoi je m’étends sur ces personnages, qui ne serviront pas à grand-chose dans l’histoire, mais tant que j’y suis, citons par souci d’exhaustivité le Lieutenant Ghaskar, qui dirige le peloton de Gardes Jopali, et la Sœur Hospitalière Rosa, qui… a deux lignes de dialogue dans la nouvelle. Passons.

Comme on pouvait s’y attendre, la colonne blindée se fait attaquer par un gang de bikers Orks, donnant l’occasion aux Space Marines de démontrer leur fortitude énergétique, pendant que leurs alliés humains se contentent de mourir bêtement à l’arrière-plan. L’assaut ayant été temporairement repoussé, et une tempête (tardive pour la saison, saleté de changement climatique) menaçant de s’abattre sur l’expédition éprouvée, Brusc emmène ses charges dans une mine abandonnée à proximité de leur route, afin d’y attendre la fin du grain. Il ne faut pas longtemps aux Black Templars pour se rendre compte qu’une très sale atmosphère plane sur leur aire de camping, provoquant des tensions et des bagarres entre Jopali. Les phénomènes mystérieux (des murmures désincarnés et l’apparition d’une terrible… porte) et les cadavres mutilés se multipliant dans le périmètre, Brusc prend ses responsabilités et s’en va seul se plaindre auprès du voisin du dessous, qu’il devine être un démon.

Son flair de vieux briscard ne lui ayant pas fait défaut, le Frère d’Epée ne tarde pas à faire la connaissance d’un serpent tricéphale géant, confortablement lové autour d’un obélisque impie depuis un petit bout de temps (la première guerre mondiale, pour être précis). Taraudé par l’ennui, le démon s’amuse à rendre fou et/ou hérétique les mortels qui passent dans sa zone d’influence, et propose tout bonnement à Brusc de laisser derrière lui sa carrière honorable mais assez quelconque, il faut le reconnaître (six siècles de service et même pas Maréchal ? pas vraiment de quoi pavoiser) pour goûter aux joies du Warp. Douloureusement tenté, notre héros réussit toutefois son test de résolution, et crible le piédestal du crotale maléfique de bolts, ayant été persuadé par ce dernier qu’il était insensible à la saturation. Le monument impie finit par se fragmenter, ce qui a pour conséquence de libérer le démon (bien joué Brusc) et d’enfouir le Black Templar sous des tonnes de gravats. Qu’on se rassure, notre héros sera extirpé des décombres par ses camarades quelques temps plus tard, signant la fin de la nouvelle. Une fin heureuse, techniquement.

INTRIGUE :

Coup de moins bien pour le Croisey Haley dans ce ‘Season of Shadows’, suite mollassonne et peu inspirée de ‘Only Blood’. On suit sans s’enthousiasmer la transhumance de quelques personnages peu enthousiasmants, qui se battent un peu contre les Orks, puis un peu contre les Démons, sans que cela ne semble servir à grand-chose dans le déroulé de l’intrigue. Une sortie de piste indigne pour le personnage de Papy Brusc, érigé au rang de personnage récurrent de la BL par Haley au début des années 2010. La vieillesse est définitivement un naufrage…

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The Gallows Saint – D. Annandale :

AVIS :

The Gallows SaintNous retrouvons un jeune Sebastian Yarrick au début de sa carrière, alors qu’il assiste avec son régiment au triomphe organisé sur la planète Abydos à l’issue d’une campagne victorieuse contre l’Empire T’au. Cet événement bon enfant est toutefois endeuillé par l’assassinat du Gouverneur Planétaire, Antonin Schroth, victime d’un tir de sniper pendant la parade militaire. La capture quasi instantanée du tireur, un humble scribe de l’Administratum apparemment gagné à l’idéologie du Bien Suprême, provoque un début de suspicion chez notre méfiant héros, dont la paranoïa n’a fait que croître depuis ses démêlés sanglants avec la très sainte et très politisée Inquisition, sur Mistral et Molossus.

Profitant de son statut d’officier politique, il rend visite à l’héroïne du jour, Lyuda Koval, dont l’intervention désintéressée a permis d’appréhender le terroriste supposé sur le vif, et interroge ce dernier, Paulus Holten, dans sa cellule. Ses doutes se confirment lorsqu’à la faveur d’un test d’acuité visuelle, Yarrick établit de façon irréfutable que le suspect est myope comme une taupe, ce qui est un lourd handicap lorsqu’on doit utiliser un fusil de précision. Cette information étant trop sensible pour être partagée, le Commissaire poursuit son enquête incognito, et se met à surveiller les allées et venues de Koval, qu’il pense être liée au commanditaire de l’assassinat du Gouverneur.

Au bout de quelques jours, il parvient à la prendre en filature jusqu’à la statue de Saint Carrinus, où l’attendent deux individus pas vraiment lambda (ni tau non plus, si je peux me permettre) : Valentin Schroth, fils et héritier de feu papa Schroth, et Herennia Vernac, comtesse, cousine et conseillère de ce dernier, et chargée de la mission de réconciliation purge planétaire, étape nécessaire à la reconstruction d’Abydos. En écoutant leur conversation, Yarrick comprend que c’est Schroth Jr qui a organisé l’assassinat de son paternel, perpétré par Koval, pour éviter que le Gouverneur ne découvre le passif collaborationniste de son fiston pendant la guerre contre les Bleus. Vernac, dont la xénophobie chevillée au corps et l’influence dans les cercles du pouvoir s’avèreront sans doute problématique pour Valentin à court terme, aurait sans doute été la prochaine notable d’Abydos à tomber sous les coups d’une cellule de guérilleros pro-T’au, sans l’intervention salutaire de Yarrick, qui s’interpose au moment où Koval dégaine sa matraque électrique.

Au terme d’un combat plus accroché que prévu (Yarrick avait amené son pistolet bolter et son épée tronçonneuse, alors que Koval ne peut compter que sur son gourdin gégène), Koval et Schroth finissent éclatés sur le parvis du Square de la Grace Exterminatrice, balancés en contrebas de la statue par un Yarrick au sens de la justice bien expéditif. Cela fera de Vernac la nouvelle Gouverneure d’Abydos, et permettra de tourner pour de bon cette page douloureuse de l’histoire planétaire. Cela ne sauvera pas en revanche Paulus Holten, qui devra pour le bien collectif endosser la défroque de l’assassin d’Antonin Schroth. En guise de consolation, Yarrick lui révèle le fin mot de l’histoire la veille de son exécution en place publique, et le noble et altruiste Holten accepte sa destinée sans faiblir. Le vrai héros de la nouvelle, c’est lui.

INTRIGUE :

David Annandale nous sert une petite nouvelle d’investigation tout à fait acceptable avec ce ‘The Gallows Saint’, qui ne nous apprend pas grand-chose sur Yarrick mais se laisse lire sans aucun problème. On est assez loin de la maestria déployée par Dan Abnett dans ce style de la GW-Fiction (je pense en particulier à ses courts formats inquisitoriaux, comme ‘Missing in Action’, ‘The Curiosity’ ou ‘Gardens of Tycho’), mais le travail est fait avec sérieux.

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Et voilà qui conclut cette revue du Summer of Reading 2014. Pour ne rien vous cacher, je suis franchement déçu de la qualité proposée par cette mini-anthologie, seul David Annandale parvenant à rendre une copie propre. Fort heureusement, cela n’empêchera pas la Black Library de remettre le couvert dès l’année suivante (et celles d’après), et de nous fournir quelques nouvelles fort sympathiques. Humble beginnings, en quelque sorte.

BLACK LIBRARY CHARACTER DAY 2023 [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du Black Library Character Day 2023, continuation logique (si on met de côté le titre…) des Character Weeks que la BL nous offre depuis l’été 2020. De manière assez classique, nous avons ici affaire à cinq nouvelles tirées des franchises majeures que sont Warhamme 40,000 et Age of Sigmar, et centrées sur quelques-uns des personnages nommés les plus populaires du moment.

Au menu de l’été 2022, nous retrouvons des têtes bien connues, tel que ce vieux ronchon de Gotrek Gurnisson (déjà mis à l’honneur dans la Character Week 2020 avec ‘Death on the Road to Svardheim’), ou encore l’infatigable Minka Lesk. Les Blacktalons seront également de la partie, ainsi que deux héroïnes impériales relativement confidentielles (pour le moment) : la Sniper cadienne Darya Nevic et la pilote de chasse Lucille von Shard.

Black Library Character Day 2023

Côté auteurs, Nottingham a choisi de s’appuyer sur des plumes déjà éprouvées (en tout bien tout honneur) en les personnes de Justin D. Hill, Darius Hinks et Denny Flowers. On peut également étendre ce qualificatif à Liane Merciel, qui n’a commencé à collaborer que récemment avec la Black Library mais est loin de son coup d’essai littéraire. Reste Rob Young, qui signe avec ‘Memories of Broken Glass’ sa troisième nouvelle pour le compte de la GW-Fiction, en attendant la sortie du roman ‘Longshot’ dans quelques mois. Le décor étant posé, il est temps de faire connaissance avec les VIP convoqués par la BL pour égayer notre été, en espérant qu’ils soient de bonne humeur…

Black Library Character Day 2023

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Arcady Pride – J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE :

Arcady PrideLes troupes de choc cadiennes ont remporté la campagne de Malouri et repris le Roc du Traître à ce dernier (et à ses nombreux séides). Laissés à glander dans les décombres du champ de bataille en attendant que le devoir les appelle ailleurs, la Sergent Minka Lesk et quelques membres de sa garde rapprochée (Blanchez, Jaromir et Yedrin) décident d’aller tuer le temps en descendant quelques bouteilles dans un baraquement abandonné. C’est l’occasion pour les quatre frères et sœurs d’armes d’évoquer leurs expériences passées, de rendre hommage à leurs camarades défunts1, et de prendre une murge bien méritée, et pas nécessairement dans cet ordre.

Cette plaisante session de team squad building est toutefois interrompue par l’arrivée à l’improviste du Sergent-Chef Zarv, déjà fin bourré et ayant l’alcool assez mauvais. Alors que Minka abordait enfin le sujet, traumatique au possible pour elle, de la chute de Cadia, qu’elle a vécu aux premières loges, ce fieffé malotru ne trouve rien de plus approprié que de lui balbutier à la face qu’elle aurait dû mourir sur place, comme une bonne petite soldate. Rien d’étonnant à ce que notre héroïne au caractère bien trempé n’allonge un crochet ravageur à ce gougnafier, qu’elle aurait sans doute bellement corrigé sans l’intervention salutaire de ses camarades.

La tension étant un peu retombée, Minka consent finalement à partager son expérience de Bouclier Blanc sur une planète en sursis, et à narrer en détail le récit des derniers jours de Cadia, dans toute leur grandeur et leur horreur. Sans surprise, cette anecdote pas piquée des vers, comme la boutanche que les vétérans se partagent (la fameuse Fierté d’Arcadie dont il est question dans le titre), met tout le monde d’accord et nous offre un beau moment de communion entre Gardes Impériaux, Cadiens ou pas. Santé tout le monde, vous en aurez besoin par la suite…

1 : Dido pour Lesk, et une foule d’inconnus pour Jaromir, qu’un pet au casque au premier degré à rendu à moitié amnésique.

AVIS :

Justin D. Hill se frotte à un style de nouvelles de Gardes Impériaux un peu particulier, créé et perfectionné par nul autre que le maître Abnett (et plus tard repris par d’autres, comme Rachel Harrison) dans ses ‘Fantômes de Gaunt’ : l’entrecombat. Le concept est simple, mais difficile à maîtriser : il s’agit de mettre en scène des personnages taillés pour des scènes d’action dans des situations plus (exemple : ‘Family’) ou moins (exemple : ‘Vermilion Level)’ pacifiques et intéressantes à suivre pour le lecteur. Cela nécessite bien sûr d’avoir auparavant suffisamment développé la personnalité et les interactions entre les personnages en question pour que l’exercice n’apparaisse pas comme une perte de temps et un gaspillage d’encre et de papier, ce qui n’est pas à la portée du premier contributeur de la Black Library venu.

N’ayant lu de la série cadienne de Justin D. Hill que les nouvelles consacrées par ce dernier à son personnage fétiche de Minka Lesk, et n’ayant pas franchement accroché avec cette dernière, je ne me trouve pas dans une situation idéale pour porter un jugement un minimum objectif sur cet ‘Arcady Pride’. Je me cantonnerai à dire que le résultat ne m’a pas emballé (pour changer), mais que les personnages de Hill sont suffisamment ébauchés (Blanchez la groupie énamourée de sa chef, Jaromir le colosse amnésique et pas très malin, Yedrin… qui a le vertige) pour que l’expérience ne soit pas aussi fadasse qu’elle l’aurait pu être. Sans doute qu’un lecteur ayant pris la peine de s’enquiller ‘Cadian Honour’, ‘Traitor Rock’, et en bonus ‘Cadia Stands’ (que Lesk re-raconte de son point de vue dans la deuxième partie de la nouvelle) – dédicace @gilian – aura plus de plaisir à parcourir ces quelques pages, et appréciera la mention de personnages absents mais qu’on devine important (ici Dido, qui n’est sans doute pas la chanteuse).

On peut tout de même noter que la fin de cette nouvelle semble paver la voie à un futur roman où Lesk et ses âmes damnées retourneront sur Cadia pour retrouver le fumeur de cigares le plus badass de la galaxie, porté disparu mais pas formellement déclaré mort. Qui d’autre que Hill, qui a déjà mis sa plume au service de ce vieux briscard d’Ursarkar E. Creed, pour relever ce défi ?

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The Crown of Karak-Khazhar – D. Hinks [AoS] :

INTRIGUE :

The Crown of Karak-KhazharLa cité de Sephyrum, siège du clan Pic de Fer et havre d’ordre et de stabilité pendant des centaines d’années, a été à moitié envahie par les hordes emplumées et encornées de Tzeentch, qui entre autres méfaits ont répandu du mercure mutagène partout dans les rues. Les monstres. Bien que quelques défenseurs aient décidé de vendre chèrement leur vie/leur progression (dans le cas des Stormcast Eternals) dans un dernier carré héroïque et futile, il ne fait aucun doute que le Chaos a remporté cette bataille, ne laissant que peu d’alternatives aux citadins survivants. L’une d’entre elles est la Brisefer Ulvgrid, qui a décidé après mûre réflexion que sa meilleure stratégie était de marchander son passage vers un environnement plus salubre en échange de la légendaire couronne de Karak-Khazhar, autrefois possession et emblème de son clan, et maintenant bibelot inutile depuis la mort du dernier roi et de la majorité de ses sujets au combat. Son commanditaire est un individu louche du nom de Pharasalus, dont l’arène gladiatoriale ne désemplit pas depuis le début du siège. Ce n’est pas parce qu’une armée chaotique a envahi la ville qu’il faut arrêter de sortir le soir, c’est vrai ça.

Le duo peut également compter sur la présence taciturne mais rassurante de l’impayable Gotrek, que les hasards de la vie ont amené dans Sephyrum en ce moment délicat, et qui semble satisfait de refaire le portrait des gladiateurs semi-pros et des barriques de bière que Pharasalus lui met à disposition. Il suffit toutefois à Ulvgrid de mentionner qu’un homme-bête d’une carrure hors normes a pris ses aises dans la chambre forte où la couronne est conservée pour que le Tueur old school se joigne à l’aventure.

Le chemin jusqu’à la salle du boss est l’occasion pour Gotrek et Ulvgrid de sympathiser en trucidant quelques Hurleurs de concert (c’est approprié me direz-vous), et en échangeant des banalités sur la qualité intrinsèque de l’infrastructure urbaine de Sephyrum, bâtie par le clan de la Brisefer freelance. Cette dernière ne comprend pas pourquoi Gotrek se laisse houspiller par Pharasalus. Gotrek voit d’un mauvais œil (le seul qui lui reste) l’abandon d’une relique duardin à un profiteur humain. Bref, la communication n’est pas facile entre les deux demi-portions, mais on s’en fout car voilà qu’arrive (enfin) le combat final.

Juste après avoir récupéré la couronne grâce à la connaissance qu’Ulvgrid avait des lieux et la clé de service qu’elle avait conservé1, Pharasalus se révèle être un pharasalaud (pretends to be shocked), abandonnant ses camarades du mauvais côté d’une flaque de mercurochrome carcinogène et reprotoxique, et s’apprêtant à déguerpir avec son loot dans un éclat de rire sardonique. Son hilarité s’interrompt toutefois lorsque le Myrmidon qu’Ulvgrid avait aperçu lors de sa reconnaissance des lieux finit par rentrer au bercail, et lui plante sa lance dans le torse pour lui apprendre à empiéter sur la propriété d’autrui. S’ensuit un combat « indécis » entre Gotrek et le monstre, au cours duquel Ulvgrid intervient (un peu) pour démontrer son utilité. Quand la poussière retombe et le plafond commence à s’effondrer, notre héroïne réalise qu’elle a perdu sa chance de s’exfiltrer hors de la ville déchue, mais se fait convaincre par Gotrek de garder la couronne en sa possession au lieu de la refourguer au premier marchand venu, et de l’utiliser pour redonner du baume au cœur et un semblant d’unité aux survivants de son clan. Le roi est mort, vive l’arène.

1 : Le prestige des Brisefer a vraiment beaucoup baissé entre le Monde qui Fut et les Royaumes Mortels. Ça avait plus de gueule de purger les souterrains des peaux vertes et des Skavens que de garder la salle des coffres du grand chef.  

AVIS :

Darius Hinks délaie considérablement son propos dans ce bien longuet ‘The Crown of Karak-Khazhar’, qui n’a pas grand-chose à nous apporter de nouveau depuis l’époque de ‘The Dark Beneath the World’ (1990…), autre nouvelle où un Gotrek ronchon et nihiliste accompagne des aventuriers dans des ruines naines – sur lesquelles il ne tarit pas d’éloges – pour récupérer une relique inestimable. Rien n’est surprenant dans cette histoire, depuis la trahison de Pharasalus (qui aurait pu croire que ce personnage de salaud cupide serait un… salaud cupide et fourbe ?) jusqu’au déroulé et à l’issue du combat contre le mini boss de fin. On n’apprend pas grand-chose non plus sur les Royaumes Mortels à sa lecture (ce qui est en fait la vraie valeur ajoutée des nouvelles mettant en scène Gotrek, à mes yeux), ce qui aurait été la moindre des choses.

Pour finir, Hinks reste criminellement vague sur le seul point qui a piqué mon intérêt dans ‘The Crown…’, à savoir les raisons qui ont poussé notre Tueur préféré à embrasser la carrière de gladiateur dans une arène souterraine alors qu’une cité remplie d’innocents est attaqué et envahie par les hordes de Tzeentch deux étages plus haut1. Si dans l’absolu, ce motif (un peu puéril, mais Gogo n’est pas le personnage le plus mature qui soit) peut tenir la route, l’auteur aurait pu se donner la peine de mieux le contextualiser pour les lecteurs qui, comme moi, voient le petit rouquin comme un parangon d’honneur martial depuis plus de trois décennies. Bref, copie très moyenne pour Darius Hinks, qui a bien fait de laisser un autre chroniqueur, on l’espère plus inspiré, reprendre en main la geste de l’increvable nabot.

1 : À croire que l’expérience de la défense de Praag ait été si éprouvante qu’il a choisi de faire l’impasse cette fois.

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Memories of Broken Glass – R. Young [40K] :

INTRIGUE :

Memories of Broken GlassDéployé sur le monde pollué et désertique (au moins à l’équateur) de Kizmir pour combattre une insurrection chaotique, le 217ème Cadien a décidé de se la jouer sneaky et a envoyé un duo de Snipers (Darya Nevic – déjà croisée dans ‘Transplants’ – et Iago Ullaeus) camper à proximité d’une route où un haut gradé ennemi est sensé passé dans peu de temps soixante heures. Un moyen comme un autre d’accélérer la résolution du conflit, vous me direz. Comme l’attente en plein cagnard n’est pas des plus agréables, les deux Gardes échangent quelques anecdotes pour tuer le temps, en attendant de pouvoir faire de même avec leur cible. De fil en aiguille, nous voilà plongés dans le récit de la dernière mission réalisée par Darya pour le compte de son régiment d’origine, les Janissaires Coclerati…

Cela s’est passé sur la planète forestière de Graxis IV, soumise au pillage indiscriminé d’un régiment de Gardes Impériaux ayant tourné casaque et rejoint le camp des Fab Four. À l’époque, Darya servait déjà dans un corps d’élite, les Guides (Wayfinders), combinant les compétences d’éclaireurs, tireurs d’élite et agents de renseignement. La légende raconte même qu’ils faisaient le café, si on demandait gentiment. Alors qu’elle montait la garde aux abords du camp retranché de son unité, son Sergent (Mihail Ozeck) vint la brancher sur une mission aussi urgente que mystérieuse : aller enquêter sur les raisons du silence d’une famille de hardis bûcherons locaux, ayant accepté de collaborer avec les forces impériales en échange de quelques flacons d’antiseptique et paquets de pralines. Sur le chemin, Darya remarque vite que son supérieur se comporte d’une manière étrange, la laissant prendre toutes les décisions et semblant juger sa manière de procéder, comme si elle n’était qu’une aspirante en train de passer son grand oral d’infiltration. Machisme décomplexé ou agenda secret ? Il est trop tôt pour le dire.

Lorsque les deux soldats arrivent jusqu’à la petite maison dans la prairie clairière, c’est le choc et la consternation : l’humble cahute a été incendiée et criblée de tirs de laser, pendant que ses habitants se trouvaient à l’intérieur. Un tour pendable de ces fieffés Skjardi, qui ont souhaité faire un exemple des collabos1 ! L’émotive et vertueuse Darya souhaite ardemment venger ces morts cruelles en pourchassant la bande de maraudeurs responsables du massacre, mais lorsqu’Ozeck lui révèle que les Moisin étaient des informateurs, et que leur dernier rapport détaille l’emplacement d’une zone de ravitaillement skjardie où un haut gradé devrait se trouver, elle parvient à faire la part des choses et opte pour la poursuite de l’objectif stratégique, plutôt que le feel good kill. La marque des grands.

De retour au camp des Janissaires après avoir abattu un officier adverse et mis le camp retranché des Skjardi en ébullition d’un tir de laser dans une caisse d’obus, Darya et Ozeck sont reçus très froidement par le Capitaine Mugir, qui semble fulminer sous son masque doré. En cause, la décision du Sergent d’emmener sa protégée sur ce que l’on peut raisonnablement appeler un plan foireux, soi-disant pour lui donner une dernière leçon de philosophie martiale appliquée, alors qu’il était tout simplement chargé de lui annoncer qu’elle avait été affectée dans un prestigieux régiment cadien en manque d’effectifs qualifiés. Darya partira rejoindre le 217ème sans savoir si son mentor a échappé au bolt que la Commissaire attachée aux Janissaires semblait lui réserver pour le lourd crime de prise d’initiative, mais garde de cette journée particulière un souvenir impérissable, que l’environnement désertique de Kizmir lui a remis en tête.

Quelques minutes/heures/années plus tard, la décapotable du maréchal-général Hektor Ogier Talassan finit par emprunter la piste poussiéreuse surveillée par Darya et Iago, scellant le destin de l’officier félon (dont on ne connaîtra jamais les causses de la trahison, et ce n’est pas important dixit la pragmatique et disciplinée Darya) et de son chauffeur particulier. La campagne de Kizmir n’est pas terminée, mais sa conclusion se rapproche…

1 : Pas sûr que ça marche bien sur une planète où la densité démographique tutoie les 1 habitant par kilomètre carré. Les voisins ne passeront pas tout de suite.

AVIS :

Rob Young continue de planter le décor des aventures du 217ème Cadien, régiment recomposé par excellence, dans ce satisfaisant ‘Memories of Broken Glass’. Son sens du détail dans la présentation faite des Janissaires Coclerati et des sauvages Skjardi, dotés d’une identité forte en l’espace de quelques pages, fait mouche et donne envie de voir ce dont notre homme est capable dans un long format. Il manque encore un petit supplément de charisme à Darya Nevic pour s’imposer comme une protagoniste de premier plan, mais s’il continue sur cette lancée, Young ne devrait pas tarder à atteindre ce stade.

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The Eyeless Mask – L. Merciel [AoS] :

INTRIGUE :

The Eyeless MaskNeave Blacktalon et ses guerriers (et mage) d’élite sont envoyés à la rescousse d’une expédition sigmarite, portée disparue dans la jungle ghyrane alors qu’elle cherchait à prendre possession des ruines de la cité d’Arphallos, réputée à travers les Royaumes Mortels pour deux spécialités locales. 1) elle contient des artefacts mystérieux d’une puissance incommensurable, et 2) elle finit par rendre fou tous ceux qui osent y pénétrer, à cause de vibrations inexpliquées retentissant en permanence dans la ville.

Une première exploration rapide du périmètre autour du camp où les soldats disparus étaient cantonnés n’ayant rien donné, les Blacktalons décident de partir en direction de la Piscine à Bulles Bosquet Bouillonnant mentionné dans les notes laissées par le Liberator Prime des Hallowed Knights qui accompagnaient les mortels dans leur expédition archéologique. On apprend aussi au passage que le vieux Hendrick a eu une vision d’un « masque jaune sans yeux chantant une chanson terrible alors qu’il s’abreuvait de sang et d’éclair », ce qui aurait décidé la compréhensive (à bien des égards) Neave à partir pour Arphallos. C’était ça ou interdire au vétéran de forcer sur la bouteille pendant le service, et quand on vient juste de prendre la place de son ancien boss sur décision managériale, comme cela a été le cas ici, il est important de ménager les susceptibilités.

Tout ça pour dire que nos héros finissent par déboucher sur un quartier d’Arphallos où des formations de pierre jaune semblent avoir pris au piège les Stormcast égarés, comme les reflets révélant la présence de colosses en sigmarite dans les anfractuosités de la roche permettent à l’instinctive Blacktalon de le deviner en un éclair. Quelques coups de masse plus tard, son intuition est confirmée et les Hallowed Knights éprouvés et drainés par l’épreuve s’extirpent des gravats, porteurs d’une bien mauvaise nouvelle : les sorciers de l’Ordre de la Nuit Brûlante, qui accompagnait l’expédition, ont été corrompus par Tzeentch et se sont retournés contre leurs alliés. C’est eux qui sont responsables de l’emprisonnement des meilleurs de Sigmar (ainsi que celles des miliciens des Cités Libres, mais comme ces derniers n’ont pas survécu à l’épreuve à cause de leurs armures en papier mâché, on n’en parlera plus), et eux qui serviront donc d’adversaires à Neave et Cie.

J’aurais bien aimé vous faire un compte rendu détaillé de cet affrontement titanesque, mais comme vous l’aurez peut-être déjà deviné à la lecture du paragraphe précédent, j’éprouve quelques difficultés à rendre justice à un combat où le grand méchant est un bloc de pierre avec des reflets étranges, et dites vous bien que ce n’était que l’échauffement pour Merciel. Pour faire simple, les sorciers corrompus sortent également des décombres et commencent à hurler « OOOOOHMMMM » tellement fort que les Blacktalons se sentent mal, ce qui ne les empêche pas de combattre, pour ceux qui savent le faire (sorry Lorai). Leur incantation provoque l’apparition d’un dôme tentaculaire, au sens premier du terme, qui cherche à siphonner l’énergie de tous les combattants présents en faisant du peau à pierre. Le dôme finit par se transformer en le fameux masque de la prémonition de Hendrick, puis utilise ses tentacules pour transformer les sorciers en amalgames chaotiques, après avoir piqué leurs yeux et leurs métacarpes pour s’en faire des colliers. Neave a alors une autre épiphanie salutaire, et comprend qu’il lui faut tuer les mini boss pour affaiblir leur gros copain, ce qu’elle réussit à faire grâce à sa super vitesse avant que les bad vibes des affreux ne la mettent en PLS. Ceci fait, il est facile aux Blacktalons de réduire en poudre the Masked Screamer, remportant ainsi une victoire aussi indéniable que foutraque pour le compte de Sigmar. Il y a des jours comme ça…

AVIS :

C’est au tour de Liane Merciel de se frotter aux Blacktalons, et je dois dire que je n’ai pas été emballé par le résultat. Si elle arrive fort bien à mettre en scène la cité perdue d’Arphallos et la jungle aussi exubérante que mortelle qui l’entoure, Merciel se retrouve en revanche embarrassée par le nombre important de personnages qu’elle doit faire intéragir1, et son idée de faire de l’antagoniste de la nouvelle une sorte d’horreur indicible à la Lovecraft fait long feu, pour un résultat plus proche de la description romancée d’un combat contre un boss d’Elden Ring, remporté grâce à la super vitesse de Neave The Flash Blacktalon. Autre déception, alors que les deux précédents « épisodes » de la série (signés par Gary Kloster et Chris Thursten) étaient parvenus à donner de la profondeur aux Blacktalons et à mettre en lumière leurs relations, parfois complexes et ambivalentes, ‘The Eyeless Mask’ ne nous apprend absolument rien de nouveau sur le sujet, mis à part que Rostus semble avoir une excellente mémoire et qu’Hendrick a des visions. Peu concluant.

1 : Au point de faire déclarer à Lorai son absolue inutilité pour la mission en cours. C’est révélateur.

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Starstruck – D. Flowers [40K] :

INTRIGUE :

StarstruckAlors qu’elle était en train de tourner quelques images de propagande pour supporter l’effort de guerre impérial sur la planète de Shohi, la pilote de chasse devenue influenceuse galactique Lucille von Shard a le déplaisir de se faire réquisitionner comme le premier bidasse venu par un patron auquel on ne peut pas dire non : l’Inquisition. L’Inquisiteur Otis Atenbach souhaite en effet se faire livrer un paquet un peu spécial depuis la surface de Shohi jusqu’à son vaisseau personnel, et ce dans les meilleurs délais. La présence en orbite de la planète d’une vrille de la flotte ruche Leviathan venant compliquer l’équation, son bras droit (qui se trouve être Rile von Shard, frère de Lucille) a naturellement opté pour mettre l’as des as sur cette mission. Après des retrouvailles compliquées et acerbes, Lulu accepte finalement de jouer le jeu et passe derrière le manche de la Valkyrie custom d’Atenbach, dans la soute de laquelle Rile prend place en compagnie de quelques Scions, d’un Psyker assermenté qui ne tarde pas à exhiber des stigmates de mauvais augure, et d’un coffret de noctilithe à la surface fissurée. Vraiment pas de quoi s’inquiéter.

L’escadre inquisitoriale décolle, et croise bien vite la route de la plupart des entrées du Codex Tyranides possédant le mot clé « vol », depuis la nuée de Gargouilles jusqu’à l’imposante Harridan, en passant par quelques Harpies entreprenantes. Il semble assez certain que les Xenos sont attirés par la cargaison inquisitoriale, et les deux von Shard passent quelques pages pénibles à gérer les conséquences de cette attraction prononcée, Lucille en tenant à distance les entreprenantes créatures, Rile en allant littéralement repêcher le précieux colis après que des turbulences un peu trop fortes aient envoyé le coffret valdinguer dans le ciel nocturne de Shohi. Il a ainsi l’occasion de se rendre compte des pouvoirs que possèdent le colis de son patron, capable d’assommer tous les Tyranides à plusieurs mètres à la ronde après avoir été stimulé, capacité des plus utiles et qui pourrait évidemment aider l’Humanité dans sa lutte contre les flottes ruches.

Au bout du compte, Lucille parvient à poser la Valkyrie très esquintée d’Atenbach dans le hangar du vaisseau inquisitorial, sans avoir perdu ni son frère ni le précieux chargement de ce dernier, ce qui démontre une fois encore qu’elle est sans doute la meilleure pilote de ce côté de la Cicatrix Maledictum. L’alégresse éprouvée par Rile après cette survie miraculeuse est cependant tempérée par l’état pitoyable de sa sœur, dont la vie de poster girl du Munitorum n’est apparemment pas de tout repos. C’est toutefois une victoire indéniable pour l’Imperium, et toutes les occasions sont bonnes à Lucille pour lever le coude…

AVIS :

Lucille von Shard nous revient en pleine verve, à défaut de pleine forme (la fin de la nouvelle en est même un peu inquiétante…), dans cette histoire de livraison où rien ne se passe évidemment comme prévu. La grande force de Denny Flowers aura été de parvenir à jongler entre action tendue à la sauce grimdark et dialogues fendards entre le frère et la sœur von Shard, qui s’ils n’ont pas de réelle complicité, fonctionnent très bien en tant que duo comique, sur le modèle de Sherlock et Mycroft Holmes dans la série qui a révélé Buttercup Cumbersnacht au grand public. Il réussit aussi à nous intéresser aux agissements de l’irascible Lucille dans ses précédentes aventures (que j’imagine avoir été abordées dans ‘Outgunned’), ce qui est assez rare de la part d’un auteur de la BL pour que je le souligne ici. Pour terminer, le mystère qu’il laisse planer sur le contenu du mystérieux colis ramené à grand peine à l’Inquisiteur Atenbach donne également envie d’en savoir plus sur ce qui semble être une arme prometteuse pour lutter contre la Grande Dévoreuse. Bref, une addition parfaite à l’arc von Shard, que j’espère se voir se poursuivre dans les prochaines années.

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Voilà qui conclut cette revue de la Black Library Character Day 2023, livraison assez décevante avec seulement deux nouvelles intéressantes (pour votre humble serviteur, bien sûr). On peut au moins se réconforter avec la confirmation que Rob Young et Denny Flowers, et à travers eux, leurs personnages fétiches, sont des valeurs sûres de la GW-Fiction. C’est tout pour le moment, bon été à tous !

WARHAMMER 40.000 ESHORT WEEK 2023 [40K]

Bonjour et bienvenue dans cette chronique des nouvelles de la Warhammer 40.000 eShort Week 2023 (on a déjà vu la Black Library plus inspirée dans le choix de ses titres), regroupant cinq courts formats ayant pour point commun les bucoliques ténèbres du lointain futur… et c’est tout (on a déjà la BL plus inspirée dans le choix de ses fils rouges). Après l’Astra Militarum Week, de la Black Library Celebration Week et de la Dawnbringers Week, il s’agit de la quatrième semaine new content daily de la maison d’édition de Nottingham pour l’année 2023, rythme soutenu que voter humble serviteur a eu quelques difficultés à suivre, d’où ce retour tardif.

Warhammer 40,000 EShort Week 2023

Comme souvent ces derniers temps, on retrouve au sommaire de cette série une majorité de nouveaux ou récents auteurs… y compris quand leur nom peut sembler familier de prime abord. En effet, le Richard Ford dont il est question ici n’est pas celui qui a écrit quelques nouvelles pour le compte de la GW-Fiction dans les années 2000, mais un nouveau venu homonyme de son insigne prédécesseur. L’identification est plus facile pour les newbies Carrie Harris et Matthew Harffy, qui ne partagent pas leur patronyme avec d’autres auteurs de la BL, et si on peut encore avoir besoin de présenter J. H. Archer, qui signe avec ‘The Dust that Remains’ sa troisième soumission pour la GW-Fiction, aucune introduction n’est sans doute nécessaire pour Peter Fehervari et son Dark Coil, qu’on (en tout cas, moi) est toujours heureux de revoir poursuivre sa long and winding road vers… mieux vaut ne pas le savoir.

Warhammer 40,000 eShort Week 2023

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Altar of Maws – P. Fehervari :

INTRIGUE :

Altar of MawsFi’draah, c’est un peu comme si l’Empereur avait visité le marais poitevin lors d’un week-end vadrouille (il a bien fallu qu’il s’occupe tous ces millénaires avant de prendre les commandes de Terra), adoré ce cadre bucolique, et décidé qu’il fallait étendre ce concept à l’échelle d’une planète entière. Résultat : un enfer marécageux et moite, plus adapté aux Saprobiontes et aux Gatormen qu’à des espèces à sang chaud et à peau fine, comme les humains et les T’au. Mais il faut plus qu’une atmosphère irrespirable et un taux d’humidité à faire pleurer un urodèle pour convaincre ces deux factions de laisser tomber cette planète, à l’intérêt stratégique contestable, aux mains de l’ENNEMI. La guerre fait donc rage sur ce caillou imbibé, sans qu’un camp ait réussi à infliger une défaite cuisante et définitive à l’autre.

Nous suivons l’expédition commandée par la Shas’vre Ibolja alors qu’elle progresse dans les méandres de Fi’draah, afin de ramener un contingent de prisonniers impériaux jusqu’à la base arrière du Bien Suprême. Il aurait été plus simple et plus rapide de faire le voyage par voie aérienne, mais comme le commandant T’au est un sadique, il a opté pour offrir une croisière mémorable aux gue’la captifs afin de leur faire comprendre qui est le boss. Ah, et s’il peut arriver malheur aux nouvelles recrues (shas’saal), guère prometteuses, envoyées renforcer le contingent de Guerriers de Feu de Fi’draah, ce ne serait pas plus mal. Grosse ambiance chez les bleus, donc.

Les T’au peuvent toutefois compter sur la présence de plusieurs vétérans pour compenser la présence de novices abrutis et d’officiers peu concernés. Les shas’ui Tal’Hanzo et Jhi’kaara (cette dernière accompagnée par sa pote Ogryn Coraline), chacun affligés par leurs propres démons – un spleen incurable pour le premier, une gu*ule de porte-bonheur pour la seconde – feront ainsi office de protagonistes pour cette virée en eaux troubles. Lorsque les barges de transport du Bien Suprême se retrouvent sans crier gare sur un lac non indiqué sur les cartes, attirant l’attention du vaisseau fantôme champignon local, commandé par un zélé glaviomancien (il lit l’avenir dans ses glaires, avouez que c’est original), une traque mortelle débute, dont l’enjeu n’est autre que la libération du Grand Ancien résident de Fi’draah – ou quelque chose comme ça. Plongés malgré eux dans la Twilight Zone locale1, répondant au doux nom de Dolorosa Coil, nos héros en seront quitte pour une nuit éprouvante, qui les laissera sans nul doute hydrophobes au dernier degré

1 : Il en faut une dans toutes les nouvelles de Peter Fehervari.

AVIS :

Peter Fehervari retourne dans son coin à champignons préféré, la planète contestée de Fi’draah (qui servait déjà de théâtre spongieux et sporesque à la nouvelle ‘A Sanctuary of Wyrms’), avec un nouvel épisode du tentaculaire Dark Coil. On y retrouve une autre ancienne connaissance des amateurs de la prose de cet auteur iconoclaste de la BL, la Guerrière de Feu Jhi’kaara, qui servait d’(anti) héroïne du court format ‘Out Caste’.

Comme d’habitude avec Fehervari, cet ‘Altar of Maws’ est baigné d’un épais mystère, qu’une connaissance des événements relatés dans les romans et nouvelles précédents aideront à dissiper… en partie. Un peu comme la brume persistante qui recouvre Fi’draah, l’approche narrative de Fehervari se complait à laisser son lectorat tâtonner et spéculer sur l’origine et la motivation des personnages (particulièrement celles du mirifique Capitaine dans le cas présent, qui ne semble pas avoir compris qu’il boxait pour Papy Nurgle), et faire sens des phénomènes inexplicables et franchement déplaisants qui s’abattent sur les pauvres protagonistes ayant commis la grave erreur de pénétrer dans une zone de porosité warpesque. Candelabrum, Dolorosa Coil : même combat.

Le résultat est digne des standards élevés de Fehervari, et ‘Altar of Maws’ se déguste avec enthousiasme et curiosité, même si sa fin très peu « conclusive », et donnant plus l’impression d’un chapitre de roman que d’une nouvelle indépendante, m’a quelque peu déçue de la part de cet auteur. Bien qu’il ne se soit jamais caché de son dessein de relier toutes les intrigues développées dans son corpus de GW Fiction au sein d’un tout cohérent, je trouve qu’il a déjà réussi de meilleures sorties que celle de cette nouvelle, qui semble hurler « à suivre… » à la tête du lecteur1. Pas très élégant, si vous voulez mon avis.

Malgré ce petit bémol, ‘Altar of Maws’ est une soumission qui ravira les fans de Fehervari et vient complexifier encore un peu plus (comme si c’était nécessaire) son Dark Coil. Et si le grand méchant de Fi’draah n’était pas la Grande Dévoreuse, mais le Gros Dégobilleur ? Vous avez deux heures…

1 : Et comme Fehervari revient sur Fi’draah tous les 11 ans, il ne vaut mieux pas être trop pressé de connaître la destinée de Jhi’kaara, Tal’hanzo et compagnie.

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A Forbidden Meal – C. Harris :

INTRIGUE :

A Forbidden MealEn transition entre Arkunasha et Fort Pykman, la bande de mercenaires Kroots co-menée par les frères ennemis Skeith et Crewk (le premier soupçonnant le second d’être responsable de la mort de l’ancien leader de la bande, Akh) fait étape sur la colonie impériale de K’bakt et propose ses services au Gouverneur local, Belv, en échange d’une cambuse remplie et d’une révision gratuite de leur tacot spatial (le Pinacle). Malgré l’accueil peu agréable qu’ils reçoivent de la part des « peaux molles », qui ne voient en eux que des dindons cannibales, les Kroots acceptent d’enquêter sur une série d’attaques ayant fait de nombreuses victimes parmi la population de mineurs, et attribuées à un prédateur natif des jungles de K’bakt, le sicklefang1, sorte de gros chat grincheux aux canines disproportionnées.

Après avoir inspecté le dernier site où une attaque s’est produit et fait quelques prélèvements de matériel génétique pour juger du potentiel de ses futures victimes (contrairement aux humains, les Kroots n’ont pas de désir particulier de se transformer en furries), Skeith déploie ses traqueurs à la surface de K’bakt et les met au défi de ramener le plus gros matou possible afin d’organiser un petit buffet dégustation entre pigeons homicidaires. Jugeant qu’il est dans son intérêt de sortir vainqueur de cette épreuve pour maintenir son statut de meneur, et dégrader la popularité de son rival dans la bande, notre héros convainc la jeune et impulsive Re’at de collaborer avec lui afin de débusquer une meute de sicklefangs, plutôt que de se contenter de dégommer un seul individu, comme le reste de la troupe. Les deux chasseurs s’enfoncent donc dans la jungle à la recherche des grumpiest cats, une tâche compliquée par le fait qu’il est impossible de faire « psspssspsss » quand on a un bec.

La chance est toutefois de leur côté, et ils finissent par identifier un terrier (ce sont des chats croisés avec des blaireaux, sans doute) de sicklefangs, dans lequel ils pénètrent sans tarder. Très territoriaux, les félins ne sont pas longs à se ruer sur les intrus afin de défendre leur bac à litière, mais leurs assauts désorganisés ne font pas le poids face à l’entraînement et l’expérience des Kroots2. Après avoir exterminés les gros minets, les Xenos réalisent, snacking de Garfield à l’appui, que ces derniers étaient en fait en train de fuir une menace ayant pris possession des niveaux inférieurs de leur antre, et, curieux de percer ce mystère à jour, ils décident de constater par eux-mêmes de quoi il en retourne…

Début spoiler…Et le fin mot de l’histoire ne leur fait pas plaisir du tout. Skeith et Re’at tombent en effet sur un couple de Genestealers, très occupés à infecter les derniers sicklefangs du terrier. On ne saura pas pourquoi les Génovores se sont piqués d’intérêt pour les sacs à puces de K’bakt (Skeith suppute qu’ils en ont eu marre de se faire voler leurs proies humaines par les sicklefangs, et ont donc décidé de remonter d’un niveau dans la chaîne alimentaire), mais c’est une question bien accessoire pour nos héros, qui décident bravement de se carapater de la planète le plus rapidement possible plutôt que d’aider les autorités à lutter contre ce fléau. On les comprend. Cette cruche de Skeith rate toutefois son jet de discrétion au moment de repartir vers la surface, déclenchant une course poursuite mortelle inter-Xenos, dont les Kroots sortent vainqueurs en faisant s’effondrer les galeries du terrier sur la tête de leurs poursuivants. Ayant réussi à récupérer une tête de Genestealer à moitié enfoui sous les décombres pour prouver leurs dires, les deux chasseurs rentrent au bercail, font leur rapport à Belv, et se préparent à mettre les voiles, le ventre vide.

Cette fringale dévorante aura toutefois une conséquence positive pour Skeith, car il surprend son rival en train de becqueter le trophée qu’il a ramené au Pinacle, malgré l’anathème qui frappe la viande de Tyranides (c’est haram, tous les Kroots le savent). C’est la fringale de trop pour Crewk, qui se fait promptement garroter par son camarade, avant que les effets dopants du pâté de tête de Genestealers ne puissent se manifester pleinement. Voici Skeith propulsé seul chef de sa petite bande par cette tragédie culinaire, et prêt à la mener à travers les étoiles à la recherche des gueuletons les plus mémorables et profitables qui soient.Fin spoiler

1 : Qui fomentent avec le requin hammerhead une révolution pour déposer Pépé et le remplacer par une dictature communiste. Des bêtes détestables, donc.
2 : Et le programme de musculation spécialement mis en place par Skeith afin de gonfler ses jambes de coq.

AVIS :

On sent que Carrie Harris est une auteur expérimentée à la lecture de ce ‘A Forbidden Meal’, nouvelle solidement bâtie autour d’une intrigue simple mais tout à fait convenable, et servie par des personnages suffisamment esquissés pour permettre un brin d’empathie de la part du lecteur. Point très appréciable, Harris se donne la peine de mettre en avant la culture particulière, et jusqu’ici très peu couverte (à ma connaissance) dans la GW Fiction, des Kroots dans cette histoire, et révèle au passage qu’elle est très à l’aise avec le lore de cette nouvelle (pour elle) franchise. Tous les auteurs débutants recrutés par la Black Library ne peuvent pas en dire autant.

Le seul « défaut » que je reprocherai à ‘A Forbidden Meal’ est sa conclusion très rapide, pour ne pas dire bâclée, durant laquelle le personnage que je voyais parti pour être l’antagoniste récurrent d’une probable série (cette nouvelle ressemble fortement à un épisode pilote, si vous voulez mon avis) se fait régler son compte en deux temps trois mouvements par Super Poulet, après avoir pris une décision suicidaire que rien ne justifiait… à part la nécessité de terminer un arc narratif de manière définitive. Un peu dommage, mais si ça peut permettre à Carrie Harris et à sa bande de palmipèdes de choc de revenir claquer du bec dans un futur proche, je pense qu’on en sort tous gagnants.

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The Dust that Remains – J. H. Archer :

INTRIGUE :

The Dust That RemainsSur une des centaines de planètes contestées par les enfants gâtés (dans tous les sens du terme) galactiques que sont l’Imperium et le Chaos, nous suivons l’ingrate mais nécessaire mission de la Sœur Hospitalière Isolde, chargée par son Inquisitrice référente de mener une étude clinique sur une maladie mortelle faisant des ravages indiscriminés sur la ligne de front : la peste grise. Comme on peut s’en douter, les Saints Ordos n’y vont pas avec le dos de la cuillère énergétique, et plutôt que d’essayer de développer un vaccin en suivant les meilleures pratiques scientifiques et déontologiques, se contentent d’envoyer une centaine de Gardes Impériaux suspectés d’avoir été exposés à des agents contaminateurs lors de leurs opérations en quarantaine sévère, et laissent carte blanche à Isolde et son équipe pour suivre l’évolution de la situation. Comme le dit l’Inquistrice Marie-Chantal « il y en a plein d’autres de là où ils viennent ». Ce qui est loin d’être faux, il faut le reconnaître.

Pour sa part, notre héroïne a une approche plus humaine de son sacerdoce, sans doute due au fait qu’elle a vécu des moments très difficiles et franchement dégu*ulasses lors de sa précédente affectation. Dernière survivante de son Ordre, décimé jusqu’à la dernière novice par les assauts des cultistes chaotiques auxquels il était opposé, Isolde a connu le sort peu enviable de se faire « adopter » par un Marine de la Peste après avoir été capturée au combat. Proutor s’amusa à la faire prolonger la vie de ses autres victimes pour décupler leur souffrance, puis lui planta un couteau plein de germes dans le buffet pour lui offrir un Nurgle trip digne de ce nom, en récompense de ses bons et loyaux services. Sauvée in extremis par sa foi absolue en l’Empereur, la contre-attaque des forces impériales, et un système immunitaire digne d’un rat-taupe de Catachan, Isolde est depuis en réhabilitation sous la tutelle de Marie-Chantal, l’éradication de son Ordre lui barrant la route d’une réaffectation rapide.

Isolée avec ses sujets d’expérimentation patients, Isolde s’attend à les voir tomber comme des mouches, mais au fur et à mesure que les jours s’écoulent, rien de bien fâcheux ne se produit dans sa clinique de fortune. Etonnamment, cela n’a pas l’air d’enchanter Marie-Chantal, qui décide d’aller faire des virées dans l’arrière-pays avec quelques détenus Gardes, dont elle est la seule à revenir. Flairant un mauvais coup, et ayant finit par comprendre que sa protectrice a installé plusieurs camps comme le sien aux alentours, Isolde décide d’aller rendre une visite secrète à ses collègues les plus proches, non sans avoir d’abord envoyé un S.O.S. aux Ordres de Sistas du sous-secteur (#Sororité)…

Début spoiler…Comme on pouvait s’en douter, elle trouve rapidement sur place des preuves accablantes du double jeu de Marie-Chantal, qui ne cherche pas tant un antidote à la peste grise qu’un moyen d’en décupler la virulence, comme le révèle Jean-Alphonse Raoult, Medicae en chef du camp visité par Isolde, juste avant de pourrir sur pied. Et si le contingent suivi par Isolde est jusqu’ici passé entre les gouttes, c’est qu’ils sont tous des porteurs sains : issus d’une planète agricole où une forme moins virulente de la peste grise affecte les troupeaux, tous les bidasses ont été contaminés mais ont survécu à l’infection pendant leur enfance.

Une fois passé le choc de cette terrible révélation, Isolde organise une mutinerie dans le camp et se barricade avec les Gardes Impériaux révoltés dans la chapelle locale, dans l’espoir que ses demi-Sœurs ne la laissent pas indéfiniment sur « vu ». Assiégés par Marie-Chantal, qui sous ses abords BCBG dissimule une charogne possédée par le même Démon que celui qui cohabitait avec le Marine de la Peste qui l’avait prise en grippe (pour Nurgle, c’est positif) quelques temps plus tôt, et ses troupes de choc trop disciplinées pour se rendre compte qu’ils sont les baddies, les immuno-opprimés livrent un dernier carré héroïque, pendant lequel Isolde fait bon usage de la dernière relique de feu (haha, vous allez voir) son Ordre : le lance-flamme de maître de Sainte Guinevere. Ayant cautérisé au septième degré la sale tronche de Marie-Chantal au plus fort de la bagarre, Isolde constate avec autant de satisfaction que de lassitude l’arrivée, un peu tardive mais on leur pardonne, des Sœurs de Bataille tant espérées. Un doliprane, et ça repartira.Fin spoiler

AVIS :

J. H. Archer nous sert une nouvelle beaucoup plus classique que ses premières soumissions (‘King of Pigs’ et ‘Collapse’), qui rappellera sans doute quelques souvenirs1 aux vétérans de la GW-Fiction dans son propos et sa conclusion. Mis à part son titre trompeur (on ne parle pas du tout de poussière dans cette histoire, aussi bien au sens propre qu’au figuré), il n’y a pas grand-chose à redire à la qualité de ce ‘The Dust that Remains’, qui à défaut d’être aussi original que les précédents opus d’Archer, tient tout à fait la route. L’auteur a également la bonne idée d’intercaler à son récit, déroulé comme une narration à la première personne du point de vue d’Isolde, des passages écrits comme s’il s’agissait de rapports ou de comptes rendus officiels (et donc dûment caviardés), ce qui offre une expérience de lecture assez dépaysante. Le sans-faute continue donc pour Archer, qui est en passe de devenir Tireur d’Elite.

1 : ‘Pestilence’ de Dan Abnett, publié en l’an de grâce 2001, ce qui ne nous rajeunit pas.

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The Whispering Blade – M. Harffy :

INTRIGUE :

The Whispering BladeLorsqu’un Inquisiteur et ses hommes débarquent sur la planète agricole de Monsanto Cantwarum, le déserteur devenu ouvrier agricole Jonas A’Cado ne met pas longtemps à comprendre que les nouveaux venus en ont après lui. Entré en possession d’une dague Xenos dotée de pouvoirs occultes à la fin de la campagne de Bernixia, pendant laquelle son régiment d’origine a été co-massacré par les hordes chaotiques et les Chevaliers Gris envoyés en « renfort » des braves Gardes Impériaux à la fin conflit, Jonas, qui n’a dû sa survie qu’à la capacité procurée par la dague en question de rendre son porteur invisible (ou tellement insignifiant que tout le monde oublie qu’il est là, c’est selon), s’est frayé un chemin jusqu’à cette planète isolée à la suite de plusieurs années de cavale galactique, et a tenté tant bien que mal de recommencer sa vie loin des traumatismes de la guerre.

Ayant été témoin du doxing en règle de son adresse civile par un marchand de sa connaissance, logiquement assez nerveux d’être au centre de l’intérêt d’un officiel des Saints Ordos, Jonas décide contre toute logique de rentrer en catastrophe dans ses pénates au lieu de quitter la planète par le premier vaisseau cargo, comme il en a l’habitude. Ce choix est motivé par la survie de la seule personne avec laquelle il a réussi à lier une relation amicale sur Cantwarum depuis son arrivée, sa patronne Genevieve Tasqo. Sachant fort bien que l’Inquisition n’est pas du genre à faire la distinction entre un suspect coupable et un simple témoin, Jojo espère arriver à temps à la ferme qu’il partage avec Gen pour alerter cette dernière de la venue imminente de visiteurs non désirés…

Début spoiler…Manque de bol, si l’Inquisition a les moyens de vous faire parler, elle a aussi ceux de se payer des moyens de transport plus rapide que la Kangoo d’occasion de Jonas, comme une Valkyrie par exemple. Notre héros arrive donc à temps pour voir la ferme se faire détruire par un missile bien placé et ses ruines ravager par les tirs de la suite inquisitoriale, pour faire bonne mesure. Se sentant coupable de la mort de Gen, Jonas se résout à venger le trépas collatéral de sa bonne amie en tombant sur le râble des hommes de main grâce à sa dague de furtivité. Un plan audacieux qui aurait sans aucun doute capoté1 sans l’intervention aussi inattendue qu’héroïque de Gen, qui se révèle être une Sœur de Bataille déserteuse (gasp), du nom de Genuflax (LOL) Sturm. Comme le comprend rapidement Jonas alors que sa bonne amie, qui avait gardé ses armes et armure avec elle dans sa retraite paysanne, tatane sévèrement la gu*ule des indésirables avec une efficacité autrement plus grande que la sienne, l’Inquisition était en fait sur la piste de la SistAWOL, et non sur la sienne. Un regrettable malentendu, donc.

Jonas a tout de même l’occasion de servir à quelque chose en plantant son coupe chou impie dans la carotide de l’Inquisiteur alors qu’il s’apprêtait à exécuter Gen, envoyée au tapis par une décharge du pistolet de maître du porteur de rosette (Pierre, sans doute). Ceci fait, les deux comparses décident d’un commun accord qu’il est grand temps de laisser derrière eux les étendues polluées de Cantwarum derrière eux, et d’aller voir dans un autre Segmentum s’ils y sont. La suite (et l’explication de texte entre Gen et Jonas au sujet de la dague de ce dernier, dont la première n’est pas au courant de l’existence au moment où la nouvelle se termine) dans un prochain épisode…Fin spoiler

1 : De son propre aveu, G.I. Jo est un tireur médiocre, et il ne parvient qu’à buter un ennemi avant de se prendre un tir de laser dans l’épaule – je précise qu’il avait à ce stade enclenché le mode invisible, c’est dire s’il est nul.

AVIS :

L’univers de Warhammer 40.000 est tellement vaste qu’il est théoriquement possible de retrouver tous les genres de fiction dans une œuvre de la Black Library, même si certains sont évidemment plus communs que d’autres. Pour sa première soumission en tant que contributeur à la GW-Fiction, le newbie Matthew Harffy nous offre donc ce qui est à ma connaissance la première nouvelle « survivaliste » (pensez à ‘Robinson Crusoé’ de Daniel Defoe) de ce corpus pourtant des plus fournis. Il consacre en effet une bonne moitié de son propos à relater la désastreuse campagne de Bernixia, ainsi que les mois de solitude qui suivirent pour le pauvre Janos, là où « l’usage » au sein de la BL aurait voulu qu’un flashback de quelques pages suffise largement à tenir le lecteur au courant des tenants et aboutissants de l’intrigue. Un choix assez dépaysant pour le vétéran que je suis, et qui montre qu’on peut compter sur les nouveaux auteurs pour mettre des (petits) coups de pied dans l’institution pulp qu’est devenu le BL-style, de temps à autres.

Malheureusement pour Harffy, tous les choix qu’il opère dans ce ‘The Whispering Blade’ ne sont pas aussi réussis, ou en tout cas, sans conséquence sur la qualité de sa production. Il commet en effet une série de bourdes littéraires ou fluffiques avec le personnage de Genevieve Tasqo, qui aurait eu grand besoin du même type d’exposition détaillée de son passé dont son acolyte Janos bénéficie, pour faire davantage sens aux yeux du lecteur. On ne saura ainsi pas ce qui l’a amené à renier ses anciens engagements (ce que le fluff nous indique être normalement impossible), pourquoi elle est le seul personnage à être immunisé à la compétence furtivité du coupe papier chaotique, alors qu’elle ne semble pas avoir de pouvoirs psychiques ou être une Paria (les deux explications les plus logiques à mes yeux), ou plus prosaïquement, comment elle a fait pour être alerté de l’arrivée de l’Inquisition sur Cantwarum, ce qui l’a amené à revêtir son armure énergétique juste au bon moment pour éviter d’être transformée en Jeanne d’Arc du lointain futur. De telles lacunes de story telling sont problématiques, à plus fortes raisons lorsque l’auteur passe des pages entières à décrire des événements bien moins importants pour son propos juste avant…

Au final, c’est donc un bilan contrasté que je pose pour ‘The Whispering Blade’. Comme Harffy s’est ménagé une fin adaptée au lancement d’un arc narratif, il sera peut-être possible de suivre les aventures de Jon, Gen et le coupe-fromage bavard à travers la galaxie dans d’autres épisodes, et ces hypothétiques (à ce stade) futures nouvelles parviendront peut-être à corriger les défauts exposés ci-dessus. Sins of the father, burden of the son, vous connaissez la chanson…

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Stealing Orpheon – R. Ford :

INTRIGUE :

Stealing OrpheonAprès une opération rondement menée, l’agente spéciale Katta Myron, transfuge de la tristement célèbre (?) Divisio Immoralis, sollicite une audience auprès de sa n+1 afin de délivrer son rapport de mission. Pas la partie la plus excitante de la vie d’une super espionne mandatée par nul autre que Roboute Guilliman afin de, je cite, « mieux comprendre cet Imperium bordélique dans lequel je me suis réveillé, sans dec’ », mais de la part d’un bureaucrate de la trempe du Grand Schtroumpf, il fallait s’y attendre. Etant tombé cette fois-ci sur une superviseur plus curieuse que la moyenne, Katta en est quitte pour relater par le menu ses péripéties à la surface de la planète ruche Hermetica, qu’elle avait quitté il y a bien des années après avoir été « drafté » par l’Adeptus Arbites à la suite d’un contrôle d’identité s’étant très mal passé…

Arrivée à la surface de son monde natal sous le déguisement d’une pélerine venue participer à l’adoration du saint local, Katta réussit sans mal à se frayer un chemin jusqu’à la basilique de la ruche Casaubon, où l’attendait une de ses vieilles connaissances de son passé de ganger hermétique (herméticienne ?), Filo Sethis. Malgré sa disparition soudaine et, forcément, peu appréciée par ses camarades mafieux, Katta réussit successivement à convaincre Filo de lui organiser un rencard avec la meneuse du puissant clan Cestus, Stelia Malakine, puis à persuader cette dernière de lui prêter main forte dans le casse très osé de la chambre forte du gouverneur planétaire, le redoutable Menelleus Octan. En échange de sa participation, Stelia et ses sbires pourront looter à leur content les inestimables trésors du gouverneur, tandis qu’elle se contentera d’une modeste statue, connue sous le nom d’Orpheon.

L’opération se passe relativement bien grâce aux déguisements et fausses identités fournies par le très débrouillard Filo, et aux compétences avancées de Katta en matière de persuasion de PNJ et d’ouverture de coffre. Bien que la petite équipe se soit trouvée dans l’obligation de mettre au tapis l’intendant d’Octan après qu’il ait percé à jour les manigances des gredins avant que ces derniers aient fait de même avec la porte de la crypte, elle parvient finalement à négocier ce dernier obstacle, et le pillage éhonté des possessions matérielles du pauvre gouverneur peut commencer. Laissant ses comparses se ruer sur la collection de lunettes de soleil de marque et de patinettes électriques dernier cri du notable, notre héroïne localise prestement l’Orpheon, le fracasse sans sourciller sur un coin de table et récupère la clé USB qui était dissimulée dans le piédestal de la statue, contenant les preuves de la participation active de Menelleus Octan dans la purge très enthousiaste de la population d’Hermetica par les Minotaures à la suite de l’invasion avortée de la planète par Leyak le Dévoreur, il y a quelques siècles de cela. C’est cependant à ce moment qu’Octan et ses gardes du corps choisissent pour rentrer dans leurs pénates, et c’est bien évidemment la Katta cata pour les gangers.

Au bout d’une fusillade ayant fait fondre les effectifs de l’équipe de Katta et Stelia comme neige au soleil, les derniers prolos survivants parviennent toutefois à s’enfuir avec leurs biens mal acquis, mais leur navette se fait dégommer sur le chemin du sous monde par le dispositif de sécurité du gouverneur. Seules nos deux personnages nommés sortiront vivants de ce crash, et bien qu’elle choisisse de taire à sa supérieur la nouvelle de la survie de Stelia afin d’éviter à son ancienne mentor/instructrice/figure maternelle de substitution le sort peu enviable que toute organisation secrète réserve aux quidams qui en savent trop, Katta a le droit à un dernier échange avec l’ancienne cheffe de clan, condamnée à l’exil pour éviter la vindicte du gouverneur spolié, avant que cette dernière ne parte refaire sa vie sur une autre planète. De son côté, Katta est bien trop énamourée du grand, beau et ingénu Guilliman1 (qu’elle a rencontré une fois, quelle chance) pour accepter la proposition de Stelia de l’accompagner. La vocation du service public impérial, que voilà une noble chose.

1 : Et depuis qu’il a trouvé comment enlever son armure pour pouvoir enfin prendre une douche, son charisme n’a fait qu’augmenter.

AVIS :

Richard Ford pioche dans le lore de Dark Heresy (seule source mentionnant la Divisio Immoralis à ma connaissance) et dans le fluff plus récent (Roboute Guilliman tries to clean the mess) pour sa première incursion dans la GW Fiction, et pour un résultat des plus honnêtes, à défaut d’être particulièrement emballant. On sent bien à la lecture de ce ‘Stealing Orpheon’ que notre homme cherche à installer Katta Myron comme un personnage récurrent de la Black Library, et c’est tout le mal qu’on lui souhaite, même si le créneau des agents d’organisations secrètes au service de l’Imperium commence à être sérieusement bouché ces temps-ci. On verra bien si ce couple auteur/personnage a ce qu’il faut pour s’imposer sur cette scène des plus compétitives.

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Voilà qui termine cette revue de la Warhammer 40.000 eShort Week 2023, qui s’est révélée être plutôt qualitative, et sera peut-être le fondement de nouvelles séries récurrentes pour le côté 40K de la GW-Fiction, en plus d’être la continuation du tentaculaire arc du Dark Coil. Plutôt pas mal pour une opération avec un nom aussi peu gracieux que celui-ci. Rendez-vous prochainement pour de nouvelles chroniques, possiblement à l’heure celles-ci…