Hypothèse

Nouvelle écrite pour un concours sur le Warhammer Forum. Je n’avais pas encore compris à l’époque qu’il ne fallait pas écrire un texte en rapport avec Warhammer… Je suis assez content du résultat et de la dynamique narrative. Version PDF: HYPOTHÈSE

Taar’Me’Ghydan contemplait sa création convulser sur le sol herbeux de la clairière. Le long des flancs, encore empoissés par le liquide de la cuve de croissance, les ventricules pulmonaires s’ouvraient et se refermaient avec l’énergie du désespoir, un ridicule petit bruit de succion accompagnant chacune des tentatives désespérées du sujet d »aspirer un peu d’air. Les six pattes terminées par des petites griffes noires et luisantes ruaient en tous sens en direction du ciel rouge de la planète, les spasmes de la bête l’ayant amenée à se retrouver sur le dos, mauvais pas dont elle n’arriverait sans doute pas à se tirer avant d’avoir épuisé ses dernières forces.

Mentalement, Taar’Me’Ghydan nota qu’il lui faudrait accentuer le saillant de la carapace, afin de permettre aux prochains sujets de se remettre plus facilement d’aplomb. Peut-être gagnerait-il également à allonger la taille de la queue, qui pour l’heure fouettait l’air avec une énergie admirable, consommant une quantité folle d’énergie sans aider d’aucune façon son propriétaire à retrouver son aplomb.

Perdu dans ses pensées, le créateur assista distraitement aux derniers soubresauts de l’être qu’il avait conçu, jusqu’à ce que la forme noire de ce dernier se recroqueville sur elle-même et se fige enfin dans la mort. Celui-ci avait résisté plus de deux cents battements de cœur, une amélioration nette, stupéfiante même, d’un point de vue scientifique. Aucune autre souche n’avait, à sa connaissance, dépassé les cinquante battements à ce stade d’expérimentation.

L‘atmosphère de Tre’Gdara’N, soigneusement reconfigurée pour attaquer les tissus vivants de tous les organismes ne portant pas le bon marqueur génétique, avait pourtant scellé le sort de dizaines de milliers de cobayes au cours des siècles. Toutes les nouvelles espèces qui peuplaient à l’heure actuelle la galaxie avaient payé un lourd tribut à cette planète, des dizaines de leurs ancêtres ayant été impitoyablement sacrifiés par les géniurges slanns dans leur recherche des meilleures souches possibles. Sous les cieux cramoisis de Tre’Gdara’N, des centaines de civilisations potentielles s’étaient étiolées en l’espace de quelques instants, leurs premiers, et derniers, représentants incapables de satisfaire aux exigences de leurs créateurs. Ici, le droit de bâtir des empires millénaires s’étendant sur des myriades de systèmes était accordé, le plus souvent à la seconde près. Il était de notoriété commune que les orgueilleux eldars, si certains de leur supériorité sur les autres races de la galaxie, avaient réussi ce test d’extrême justesse, et de nombreux géniurges, dont Taar’Me’Ghydan, étaient convaincus que Goan’Jivl avait modifié après coup les résultats pour que ses frêles protégés soient homologués par le Haut Conseil.

Vraiment, deux cent battements, c’était tout à fait remarquable. Bien sûr, cette souche n’avait qu’un intérêt récréatif, comme toutes les autres expérimentations volontairement hyper-spécialisées, et jamais les descendants du spécimen qui venait d’expirer aux pieds de Taar’Me’Ghydan n’auraient la chance de fouler un autre sol que celui de Tre’Gdara’N. En un sens, c’était plutôt heureux pour les autres races de l’univers, car qui savait ce qu’une espèce capable de survivre aussi longtemps à l’atmosphère létale de la planète laboratoire était capable d’accomplir dans des conditions plus favorables? Mais peu importait au slann Taar’Me’Ghydan. Sa création avait toutes les chances de remporter le concours de survie de ce soir, et par conséquent, d’asseoir une fois pour toute sa réputation de meilleur géniurge en activité. Il serait toujours temps après cela de se replonger dans des recherches plus sérieuses.

La note psychique de l’Ebral’An vint tirer Taar’Me’Ghydan. Il ne restait plus beaucoup de temps avant l’expiration du délai, mais il était persuadé de pouvoir encore améliorer sa création avant le début du concours. Quittant la clairière sans un regard pour son dernier spécimen, il se dirigea d’un pas rapide vers son laboratoire.

***

Sous les cieux rouges de Tre’Gdara’N, trois paires de pattes noires se déplièrent à l’unisson et se mirent à se balancer de droite à gauche, donnant assez d’élan à leur propriétaire pour qu’il puisse se remettre d’aplomb. L’élimination de la toxine présente dans l’air, et qui avait failli le tuer, l’avait laissé très faible, mais en vie. Et maintenant, il avait faim.

 

 

À propos de Schattra

Égoïstement optimiste, çapourraitêtrebienpirologiste assumé. Selfishly optimistic, proud itcouldbemuchworsologist

Publié le août 28, 2012, dans Textes, Warhammer 40.000, et tagué , . Bookmarquez ce permalien. Poster un commentaire.

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