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BLACK LIBRARY CELEBRATION WEEK 2020 [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette chronique de la Black Library Celebration Week 2020, qui a vu se succéder les nouvelles inédites en préparation de la Black Library Celebration annuelle, le samedi 29 Février. J’espère que vous avez pu profiter des nombreuses sorties, pour certaines en avant première et en quantités limitées, qui ont accompagné ce moment fort de l’année en matière de GW-Fiction. Si l’on peut critiquer le fonctionnement de cette institution sur certains aspects (ce que je fais assez souvent, je le reconnais), il faut toutefois convenir que la Black Library a réussi à faire de cette période un rendez-vous incontournable pour ses fidèles, et une porte d’entrée idéale pour les simples curieux, notamment par la distribution gratuite d’un recueil de courts formats (qui sera critiqué dans un autre billet dès que mon exemplaire VO me sera parvenu).

Sommaire Black Library Advent Celebration Week 2020 (MIS)

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Un peu plus cher (dur de faire mieux que gratuit) que son vis à vis physique, mais constitué d’histoires toutes fraîches se déroulant aussi bien dans les Royaumes Mortels que dans le Sombre Imperium, et faisant cohabiter la Grande Croisade avec Warhammer Horror, que vaut l’amuse-gueule hebdomadaire qui nous a été proposé par la BL en 2020? Nous n’allons pas tarder à le découvrir…

BLCW 2020

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The Harrowing Deep – M. A. Drake :

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INTRIGUE:

The Harrowng DeepLe Prince Cycladaean poursuit le noble but de l’unification de toutes les enclaves Idoneth, préférablement sous la férule de son boss, le Haut Roi Volturnos, à qui il sert d’émissaire et de diplomate itinérant. Ayant engrangé quelques succès notables, notre héroïque héraut trouve cependant dans l’enclave de Dhom-Hain, gouvernés par la Haute Reine Mheáve et son époux, le très consort (le -sort est silencieux), Roi Akhamar, un défi à la mesure de ses talents. Incarnations même des farouches péquenots de Ghur – qu’ils sont, dans une certaine mesure – les Idoneth de Dhom-Hain n’ont pas l’hospitalité facile envers leurs cousins ultramarins, et ne se montrent guère emballés par le projet de désenclavement (c’est le cas de le dire) que Cycladaean pilote. Il n’y a guère que Mheáve pour se montrer moins glaciale que le reste de ses sujets, et tolérer que Cy’ prenne la parole à la cour, quand son butor de mari ne fait pas le moindre effort pour masquer l’animosité qu’il nourrit à l’égard de son hôte. Et il paraît que l’air marin rend aimable1.

Ce délicat jeu de pouvoir et d’influence, dans lequel Cycladaean part perdant, est toutefois perturbé par les ravages causés par un mystérieux prédateur, ayant déjà rasé plusieurs hameaux périphériques de la cité de Rundhar, capitale de Dhom-Hain, et englouti corps et biens les trois expéditions de chasseurs envoyées lui faire les écailles. Saisissant sa chance, notre héros parvient à se faire inviter à la nouvelle partie de chasse montée par leurs altesses bassesses royales, contrariant tellement Akhamar au passage que le Roi décide de se joindre également aux réjouissances, afin de montrer que lui aussi, il en a (des branchies, sans doute). Empoignant sa fourchette magique Pontumahár et chevauchant sa fière monture tentaculaire Ishcetus, Malbrough Cycla s’en va en guerre mer, aux côtés d’une force conséquente d’Akhelians, tous montés sur des bestioles au nom décidément compliqué pour quiconque n’est pas familier de leur livre d’armée (sans blague). Sur la route des profondeurs, le Prince fait la connaissance de Saranyss, l’Isharann de garde, qui, eau surprise, se montre elle aussi plutôt sensible aux arguments fédéralistes, déistes et lumineux développés par l’onctueux VRP. Il faut dire que la donzelle a voyagé pendant sa jeunesse, et roulé sa vague d’enclaves en enclaves, ce qui lui a ouvert les yeux (façon de parler, voilà la fig’) sur les bienfaits de la coopération.

Sur ces entrefaites, l’expédition vengeresse autant que chasseresse arrive sur les lieux des dernières déprédations du monstre, que ses membres se mettent à fouiller à la recherche d’indices. Pas de chance pour eux, ils ne réalisent qu’un peu tard que l’absence de traces sortant du village dévasté ne peut signifier qu’une chose : la présence du monstre en question, qui, malin autant que rusé, s’était caché dans un espace fumeur pour s’en griller une petite en attendant que son dessert arrive. Confronté à un Kharibdyss pétant le feu (c’est le cas de le dire), les Deepkin ne sont pas à la fête, d’autant plus que la coopération entre Cycladaean et ses comparses est loin d’être optimale : passe encore que Saranyss reste dans sa bulle – après tout, c’est à ça qu’elle sert – mais l’approche prudentielle adoptée par Akhamar et ses sbires laisse notre preux paladin en fâcheuse posture. Esquivant tant bien que mal les suçons insistants de la bête, il parvient de justesse à se désengager, et décide de charger son rival pour se passer les nerfs. Bon en fait, pas vraiment, il s’arrête juste avant de commettre l’irréparable et se contente d’engueuler Akhalamar comme du poisson pourri, ce qui est assez fluff. Il faut l’arrivée salvatrice de Saranyss, et son expertise pour faire retomber la pression, pour que les alliés ne commencent pas à se fritter, et se lancent à la place à la poursuite du Kharibdyss importun, blessé mais loin d’être mort.

Après quelques minutes de marche, ou de nage, dans les profondeurs stygiennes de l’océan, les survivants arrivent en vue de l’antre du monstre, qui se trouve être le cadavre d’un autre monstre, mais plus gros (comme la plupart des bâtiments sur Ghur d’ailleurs). Comprenant que ses camarades de chasse ont toutes les dents de la mer contre lui, Cycladaean se décide à la jouer finement, et parvient à faire passer tous les PNJs restant en pertes et profits, à l’aide de sa science du placement (toujours mettre un gus entre soi et le concombre de mer polycéphale et enragé dont on viole l’intimité, c’est une règle d’or). Gardant le meilleur pour la fin, notre héros, un tout petit peu revanchard, joint l’utile à l’agréable en enchaînant un double kill grâce à son trident incendiaire2 : la bête et le bête. Émergeant seul, mais victorieux, de cette confrontation, le Prince rejoint Saranyss, qui avait une nouvelle fois décidé d’attendre prudemment à l’extérieur (dur de garer un leviadon, même en double file), et nos deux comparses se mettent en route pour Rundhar, où Cycladaean a maintenant bon espoir de convaincre Mheáve d’accepter le principe d’une reprise de contact avec les autres enclaves Idoneth. Après tout, la formule consacrée ne dit-elle pas : sans âme, ouvre-toi (au monde extérieur) ?

1 : On aurait beau jeu de me répondre que les Idoneth Deepkin n’en ont cure puisqu’ils vivent sous les flots. Ce que j’accepte.
2 : C’est encore plus fort sous l’eau.

AVIS:

Plongée (haha) réussie de la part de Miles A. Drake dans le monde baroque et exotique des Idoneth Deepkin, ‘The Harrowing Deep’ se montre plus intéressant dans sa contextualisation de la faction dont il traite (leur rapport à Teclis, la volonté unificatrice de Volturnos, l’isolationnisme de certaines enclaves…) que dans la traque du Kharibdyss qui occupe une bonne moitié du récit. Non pas que l’auteur pêche (qu’est-ce que je suis spirituel, vraiment) dans sa mise en scène des passages d’action, qui se révèlent tout ce qu’il y a de plus correct, même si sans enjeu (on ne doute pas un instant que le héros va s’en sortir), mais seulement que ces derniers n’apportent qu’une faible valeur ajoutée par rapport aux descriptions « géo-politiques » qui ont précédé. Le temps passé par Drake à présenter Cycladaean, et dans une moindre mesure Saranyss, me laisse à penser que nous pourrions retrouver notre/s héros dans de nouvelles aventures d’ici peu, ce que le titre de la nouvelle (‘Ghosts of Khaphtar’, qui est une autre enclave Idoneth) citée dans la bio de notre homme laisserait en effet supposer. Même si le Prince de Belle Eau ne m’a pas emballé outre mesure, le concept du diplomate errant est suffisamment riche pour que j’accueille avec curiosité une nouvelle soumission de cet acabit. On peut enfin reconnaître à Miles A. Drake son appropriation et utilisation poussées du lore des Idoneth Deepkin, à tel point que le profane se perd parfois dans le glossaire racial dont l’auteur imbibe son récit. Pas que je m’en plaigne, notez, je préfère de loin faire quelques recherches complémentaires en cours de lecture plutôt que d’avoir l’impression d’être pris pour un abruti fini incapable de la moindre extrapolation. Tous dans le grand bain !

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Redemption on Dal’Yth – P. Kelly :

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INTRIGUE:

Redemption on Dal'YthLes cadets de la caste du Feu en visite culturelle du musée de la conquête de Dal’yth, en ce Jeudi 18 Octobre 000.078.M41 (ou quelque chose comme ça) ne le savent pas encore, mais quelque chose de très spécial est sur le point de se produire durant leur découverte de la campagne menée par leurs héroïques ancêtres, bien des années auparavant. Menés par un conférencier de la caste de l’Eau grabataire et alcoolique1, qui déblatère son discours pré-mâché avec la fougue professionnelle que tous les sujets du Bien Suprême se doivent de posséder sous peine de mort, nos pioupious arrivent dans la pièce maîtresse de l’exposition: une représentation grandeur nature de l’affrontement entre Sha’kanthas, une figure illustre de la Seconde Sphère d’Expansion, et accessoirement mentor de ce traître de Farsight, et un Space Marine physiquement ravagé du bulbe. Comme le Stéphane B(l)e(u)rn dal’ythien ne leur manque pas de faire remarquer, il ne s’agit pas d’une banale reconstitution de cet affrontement mythique, mais bien du véritable duel entre les deux héros capturés sur le vif, certes, mais surtout par un champ de stase déclenché par l’Astartes en désespoir de cause, et qui a figé la scène à jamais… Ou presque. Car, après quelques siècles de bons et loyaux et services, la pile plate alimentant le gadget impérial finit par rejoindre la droite de l’Omnimessie, ramenant brutalement nos combattants dans la quatrième dimension.

S’engage, ou plutôt se poursuit, un duel homérique entre Sha’kanthas, bien handicapé par les problèmes techniques rencontrés par son exo-armure XV8, l’empêchant tout bonnement de tirer son coup (de plasma), et le Maître de Chapitre Durian2, dont l’amour pour des technologies bien plus fiables (Paf…épée! Clong… bouclier!) se révèle d’abord gagnant. Désarmé par les moulinets de son adversaire, ainsi que par son obstination à vouloir continuer le combat alors que le rapport de force est de quelques millions pour un, Shak’ opte pour la technique du chasseur prudent, sort de son opercule de fonction (désormais inutilisable) et entraîne le Space Marine à sa suite dans le dédale du complexe commémoratif, tout en tentant tant bien que mal de réduire les pertes civiles. Fort heureusement pour lui, notre héros peut compter sur l’aide enthousiaste et la connaissance des lieux des Fire cadets précédemment évoqués, qui le guident jusqu’à une salle où est stockée une autre exo-armure XV8, relique technologique des temps anciens de l’empire. Cela tombe bien car c’est le seul modèle que notre Pa’pi résistant sait manœuvrer, la disparition du levier de vitesse et de l’embrayage à pédale sur les versions plus récentes constituant un mystère insoluble pour le valeureux ancêtre.

Un bonheur n’arrivant jamais seul, il se trouve que l’auto-radio de sa nouvelle bécane est également opérationnel, ce qui permet à Sha’kanthas d’être contacté par son ancien élève Farsight, dont le sentimentalisme l’avait poussé à sanctuariser la fréquence d’émission utilisée par son vieux maître avant sa cryogénisation subite. Les élucubrations de Shak’ pendant les premières minutes de la seconde mi-temps (vous parlez d’une coupure pub) ne sont donc pas tombées dans l’oreille d’un kroot, mais bien dans celles d’ O’shovah, qui se fait un plaisir de distiller de sages conseils à son tuteur. Ce dernier, bien que rendu chafouin par la réalisation brutale de la défection de son élève, accepte de jouer le jeu, et occupe cet écorché vif de Durian assez longtemps pour qu’une humble cadette au nom plus insignifiant qu’imprononçable3 ne place un neck shot bien senti dans le gorgerin du Space Marine, ce qui le distrait assez longtemps pour que Sha’kanthas lui règle définitivement son compte de sa botte secrète: le coup du chass’taupes (ça ne marche qu’avec des adversaire qui ne portent pas de casques). La nouvelle se termine par le remplacement de la vitrine perdue du musée par une dissection de toute beauté du cadavre de Durian, et un Sha’kanthas ayant pris un rendez-vous avec son conseiller Apec pour réaliser le bilan de compétences qui devrait lui permettre de donner un nouvel élan à sa carrière. Ces trimestres ne vont pas se cotiser tous seuls!

1 : Les experts sont formels, le ‘dzincta’ tape à 45°C.
2 : Qui a choisi ce nom en hommage au fruit de Terra, dont il partageait le distinct fumet.
3 : Kha’lithra, si vous insistez. Voilà un scroll de souris que vous ne pourrez jamais regagner.

AVIS:

L’avenir nous dira si la création/exhumation par Phil Kelly d’une nouvelle figure notable de l’entourage du Commandeur Farsight servira à autre chose que mettre ce dernier en valeur, et lui permettre d’avoir des dialogues profonds. Sha’kanthas ne marque en effet pas le lecteur par son charisme débridé, et son empoignade avec le malheureux Durian ne lui donne pas l’occasion de s’illustrer outre mesure. De son côté, le Maître de Chapitre éprouve les pires difficultés à faire une phrase sujet verbe complément (même quand son adversaire a la gentillesse de lui traduire ses répliques), et se contente de courser T’auT’au en rugissant comme un possédé. On s’interrogera enfin sur la plausibilité qu’un simple champ de stase impérial ait mis en échec la technologie avancée du Bien Suprême, qui n’a pas déployé de grands efforts pour récupérer l’un de ses héros les plus célèbres. À noter que les ingénieurs de la caste de la Terre ont trouvé un moyen pour déplacer une bulle de stase, ce qui me semble conceptuellement difficile (ça ne tient pas sur un monte charge classique tout de même?). Bref, une nouvelle dont la fin, et surtout, la poursuite, semble justifier les moyens et le peu d’intérêt narratif pour Phil Kelly. Il a intérêt à faire le taf’, ce Sha’kanthas…

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The Fist of an Angry God – W. King :

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INTRIGUE:

The Fist of an Angry GodAssignés à la conquête de la forteresse d’Azumbard, dans le Royaume d’Aqshy, le Liberator-Prime Balthus1 et ses Knights Excelsior sont à la peine. Non seulement la décoration psychédélique et les relents d’encens bon marché de leurs adversaires Tzeentchiens sont un affront à leurs sur-sens de surhommes, mais, nombre sacré du Dieu Poulet oblige, ils ont passé des plombes à sécuriser les neuf tours du bastion adverse, ce qui pèsera lourdement sur leur rémunération variable de l’année, alors que les Hammers of Sigmar affectés au front Slaaneshi ont une charge de travail un tiers moindre. Saleté de numérologie cosmique. Faisant contre mauvaise fortune feu de tout bois, Balthus mène ses ouailles à l’assaut de l’ultime donjon adverse, sans réussir à se défaire d’une étrange sensation de déjà-vu, qui ne lui dit rien qui vaille. L’absence de résistance des disciples de Tzeentch lui semble en effet de mauvais augure, et cette sinistre prémonition se trouve vérifiée lorsque la petite force de Stormcast qu’il commande se retrouve embusquée et submergée par une horde d’emplumés vindicatifs. Ayant pris deux méchants coups sur l’occiput, notre héros tombe dans les bras de morphine, et se réveille enchaîné dans un laboratoire arcanique, où il fait la connaissance de la sorcière Aesha, qui à son grand étonnement, semble le connaître2.

Après quelques instants consacrés à tenter de se défaire de ses liens enchantés, sans grand succès (ces derniers se resserrant de plus en plus à chaque fois que Balthus force dessus, conséquence d’un puissant enchantement… ou de l’utilisation d’un simple demi-nœud), le Liberator prisonnier – ironie – accepte d’ouvrir le dialogue avec Aesha, qui, cornes et sabot mis à part, se révèle être une hôte plutôt décente, et se montre plus intéressée par la poursuite des examens initiés sur son sujet d’étude que sur le sacrifice de ce dernier. L’échange permet de comprendre que les motivations de la magus sont, en toute simplicité, de percer à jour les secrets ayant permis à Sigmar de créer les Stormcast Eternals, qu’Aesha considère comme la clé de la transcendance divine. Ayant appris, sans doute à la lecture des tomes de la Fin des Temps (trouvés en occasion sur e-bay), que beaucoup des membres du panthéon de l’Ordre et de la Mort ont commencé leur carrière comme de simples mortels dans le Monde qui Fut, notre ambitieuse sorcière ne voit pas de raison de ne pas tenter le coup à son tour. Horrifié par ce projet blasphématoire, et peut-être également par le résultat de l’IRM complet qu’Aesha lui a fait passé grâce à ses miroirs ensorcelés, Balthus décide de contrecarrer les plans de sa Némésis en… rage-quittant. Ou plutôt, en essayant de rage-quitter. Car sa tentative héroïque de se suicider en tirant à mort (littéralement) sur ses chaînes se fait contrecarrer par Aesha, qui le met en pause avant qu’il ne perde son dernier PV, et profite de son coma réparateur pour infiltrer ce rêve, étrange pénétrant, de la fin inconnue de Balthus.

En des temps très anciens, Balthus était en effet Leoric, prince héritier du royaume d’Asqualon. Son règne fut toutefois aussi court (3 minutes et 26 secondes) que sanglant, puisqu’il hérita de la couronne après la mort de son père pendant la défense du Temple de l’Orage, dernier bastion de l’Ordre face aux assauts du démon Arkatryx et de ses disciples indisciplinés. Garrotté par son adversaire, Leoric invoqua Sigmar pour venger son paternel, et fut exaucé lorsque le Dieu lui envoya un éclair salvateur, non pas directement sur le démon, ce qui aurait été trop simple, mais sur l’épée que notre héros brandissait toujours. Chargé à bloc, Leoric trouva la force d’électrocuter son adversaire d’un ultime horion, avant de partir en direction de la forge divine. Par un hasard qui n’en était sans doute pas un, Aesha était également présente ce jour là (après tout, c’est elle qui a coup fatalisé le roi Aldred), ce qui donne un nouveau sujet de discussion tout trouvé à nos deux personnages une fois Balthus émergé de sa torpeur. S’en suit une joute verbale digne d’un débat de la primaire démocrate, avec Aesha se posant en Bernie Sanders chaotique, en lutte contre le 1% asqualique ayant exploité le petit peuple et fait exécuter son père parce qu’il avait volé une miche de pain. Face à ce déferlement de progressisme, Balthus ne peut que se référer aux bullet points qui lui ont été inculqués pendant sa formation: « l’Ordre, c’est cool » et « Yes, Sig’ Can ».

Ce passionnant échange est toutefois écourté par la notification que reçoit Aesha sur son portable professionnel, l’informant de l’intrusion d’une meute de militants en sigmarite dans son QG, avanie qu’il lui faut gérer sans attendre. « Pas si vite poulette » lui répond Balthus, qui dégaine son special move et gueule « Par le pouvoir du <insert random stuff here> ancestral, je détiens la force toute puissante! », et parvient enfin à se défaire de ses chaînes par l’intervention du saint sigmarite esprit. La fin de la nouvelle voit nos deux protagonistes jouer au chat et à la souris dans le dédale du donjon d’Aesha, jusqu’à ce qu’ils arrivent dans la salle de téléportation aménagée par cette dernière, et qui se révèle être le Temple de l’Orage où ils se sont rencontrés pour la première fois il y a des millénaires. S’il ne parvient pas à stopper la bougresse avant qu’elle ne s’éclipse, Balthus a au moins la satisfaction de mettre la main sur son ancienne épée, qu’il était le seul à pouvoir retirer de la pierre dans laquelle il l’avait plantée en transperçant le démon (ça me dit vaguement quelque chose…). Un milliard de Tzaangors occis plus tard, notre héros est récupéré par ses frères d’armes, esquinté mais en vie, et ayant inscrit sur sa to do liste de caler un nouveau tête à tête avec Aesha pour discuter du bon vieux temps dès qu’elle se montrera disponible.

À ne pas confondre (je l’écris car je l’ai fait moi-même) avec Balthas Arum, la réincarnation de Balthazar Gelt dans les Royaumes Mortels. 
2 : Le plus étonnant pour le lecteur est surtout la question que pose Balthus à sa geôlière juste après qu’elle l’ait identifié. OSEF quoi mon grand.

AVIS:

King fait ses premiers pas dans les Royaumes Mortels de manière assez discrète avec The Fist of an Angry God. Comme on pouvait l’attendre, et peut-être l’espérer, son passif d’auteur historique pour Warhammer Fantasy Battle apparaît clairement dans cette nouvelle à travers le personnage d’Aesha, dont la connaissance du Monde Qui Fut apparaît comme un clin d’œil (je le vois comme ça en tout cas) au parcours de King. Ce dernier prend en marche le train du « Sigmar-bashing » qui sous-tend beaucoup des dernières publications mettant en scène des Stormcast Eternals, et dépeint les méthodes de recrutement du Dieu Roi sous un jour contrasté, tout en justifiant en partie le passage au Chaos d’Aesha. Pas de manichéisme ici donc, et c’est bien le moins qu’on attendait de la part d’un contributeur aussi expérimenté que Bill King, dont les écrits ont toujours mis en avant la « grisaille » ambiante des univers de GW.

À titre personnel, je suis toutefois déçu de l’articulation de la nouvelle, dont le début est finalement insignifiant (je m’attendais à ce que King fasse une révélation sur un stratagème spatio-temporel utilisé par les disciples de Tzeentch, ce qui aurait justifié la sensation de « déjà-combattu » de Balthus) et la fin hurle littéralement « À SUIVRE… » à la tête du lecteur1. Le fond étant, comme dit plus haut, assez intéressant à défaut d’être captivant (cela montre au moins que King a digéré le background de cette nouvelle franchise), je trouve dommage que la forme n’ait pas été plus pensée et soignée par l’auteur. Ceci dit, King ne s’est jamais montré très doué sur les très courts formats, ses meilleures nouvelles se situant sur la marque des 40/50 pages. Quoiqu’il en soit, il convient de suivre la suite des événements avec attention, et espérer que le King finisse par remettre la plume sur le fils spirituel ayant lui aussi réussi son passage de Warhammer Fantasy Battle à Age of Sigmar, un certain Mr G. Gurnisson…

1 : En plus de passer vraiment vite sur des éléments pas anodins du tout pour l’intrigue, comme la libération miraculeuse de Balthus.

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The Will of the Legion – A. Clark :

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INTRIGUE:

The Will of the LegionLa 3ème flotte d’expédition de la Grande Croisade, engagée dans la joyeuse réunification humanitaire de la galaxie désirée par l’Empereur, est tombée dans une embuscade à la sortie d’une rocade warpienne. Assaillis par l’armada destroy mais pléthorique des Driftborn, une civilisation humaine ayant passé quelques millénaires à vivoter dans une ceinture d’astéroïdes en s’adonnant à la récupération et à l’upcycling des épaves passant à portée de leurs cités roches (les ruches, ce sera après le passage à l’âge impérial), les Imperial Fists qui constituent le gros (et le grand) des forces expéditionnaires se font donc un devoir de repousser les piteux abordages de leurs lointains cousins. Nous faisons ainsi la connaissance du Capitaine Hashin Yonnad, de la 39èmeCompagnie Maisonnée d’Inwit, alors qu’il mène une escouade de Breachers, le corps anti-émeutes de sa Légion, dans la purge du Tribune, vaisseau amiral de la flotte impériale. Ayant massacré la plupart des malheureux corsaires ayant croisé sa route, et fait, dans son infinie bonté, prisonniers les autres avant qu’ils ne meurent de froid  dans les coursives extérieures mal isolées du Tribune, Yonnad reçoit une convocation urgente à se rendre à l’autre bout du vaisseau, où il embarque sans tarder dans un Stormbird, en compagnie de ses vétérans… et de Rogal Dorn, rendu très chafouin par la tournure prise par les événements1.

Rendu perplexe par l’absence de briefing quant au déploiement de la force de frappe Astartes que le Primarque emmène à l’assaut de la principale cité ennemie, Yonnad demande respectivement à son boss de bien vouloir partager sa gnose avec ses fistons, afin que ces derniers soient en mesure de mener à bien ses plans. Dorn s’exécute, et indique à ses Légionnaires que leur cible est un dôme stratégiquement important, dont la capture mettra fin au conflit de façon rapide. La moue désapprobatrice (encore plus que d’habitude) qu’il affiche fait cependant rapidement comprendre à Yoyo que les Driftborn ont épuisé la patience, pas très fournie de base, du Primarque, et que ce dernier considère très clairement l’annihilation pure et simple de ces derniers comme une option de travail. Après tout, la mort, autant que le mur, est son métier.

Débarqués en plein cœur du marché aux puces local, les Imperial Fists tracent la route sans trop (trois morts) forcer jusqu’à leur objectif, massacrant l’arrière garde adverse au passage, un Rogal Dorn toujours aussi revêche collé à leur train. Papa se contente en effet de marcher derrière sa marmaille en fronçant très fort les sourcils, observateur plutôt qu’acteur de la sanglante et implacable progression impériale. Une fois le dôme sécurisé, il demande, que dis-je, il orDORNne à ses Techmarines de bidouiller les consoles de l’endroit afin de pouvoir disposer d’un gros bouton (sans doute jaune) qui pourra couper le chauffage et l’air conditionné  l’échelle de la cité entière d’une simple pression, avec des conséquences funestes pour qui ne porterait pas une armure énergétique (ou s’appellerait Marneus Calgar). Trop snob pour se salir les mains, il somme le brave Yonnad de se mettre en position devant le buzzer magique, tandis que lui donne une dernière chance à ses malheureux adversaires de se rallier à l’Imperium. Ayant bien fait comprendre aux Driftborn qu’il avait été bien gentil jusqu’ici, mais qu’il n’avait, en sa qualité d’architecte de la destinée galactique de l’humanité (d’abord) et de décorateur intérieur de l’Empereur (surtout), absolument rien à carrer de leur civilisation minable, il leur donne royalement impérialement quelques instants de réflexion après avoir terminé sa harangue. Assez pour plonger Yonnad dans de profondes considérations éthiques quant à la trop grande facilité qu’il aurait à presser le bouton, et donc à signer l’arrêt de morts de millions d’êtres humains, pas coupables de grand-chose au fond, sur un simple branlement du chef de son Primarque. Fort heureusement pour notre héros philosophe, les Driftborn choisissent sagement de capituler, rendant leur dépressurisation inutile. La nouvelle se termine sur cette victoire décisive de la Team Pépé, qui ne suffit cependant pas à dissiper les doutes du Capitaine Dubious. Béni soit l’esprit…

1: Cela se perçoit dans la manière dont il prononce « connerie ». Et je ne parle pas de son accent chantant de Mareuh-seilleuh.

AVIS:

Petite nouvelle de bonne facture de la part d’Andy Clark, qui donne un peu de profondeur tant à Hashin Yonnad, avant sa sortie de route sur Phall, qu’à Rogal Dorn, qui gagne ici quelques précisions fluffiques qui ne manqueront pas d’intéresser le chaland, en attendant que le Primarque trumpien (build the wall!) ne dispose de son tome dans la série du même nom. Les lecteurs du troisième livre Forge World de l’Hérésie d’Horus apprécieront sans doute également de revoir apparaître les Driftborn du Consus Drift, présentés dans ce même ouvrage il y a quelques années. Narrativement parlant, l’intérêt principal de The Will of the Legion repose toutefois dans ses dernières pages, et la réalisation incrédule et dérangeante par Yonnad de son total endoctrinement à la cause de Dorn, dont il appliquera sans hésiter tous les ordres, même les plus immoraux. Nul doute que Clark voulait faire ressortir par cette réflexion intérieure toute l’ambivalence de l’Hérésie d’Horus, dont beaucoup des combattants se sont retrouvés dans un camp qu’ils n’avaient au final pas vraiment choisi, simplement parce qu’ils s’étaient contentés de suivre l’exemple, presque irrésistible, de leur Primarque. Il réussit bien son coup, et souligne donc de manière convaincante qu’entre « gentils » et « méchants », la ligne est souvent des plus fines.

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Tithemarked – S. Sheil :

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INTRIGUE:

TithemarkedTout le monde n’a pas la chance d’être fils unique, ni orphelin. Ainsi songe sombrement Petras, notre héros, tandis qu’il essaie de se soustraire au grand projet que nourrissent pour lui ses chers frères (Grandon et Bron) et père (Gaston? Napoléon? Hachilthalon?), qui consiste à le mettre à contribution pour atteindre le quota d’os demandé par le collecteur Ossiarch Reaper venu démarcher leur village. Ayant déterré tous les cadavres du cimetière, et abréger les souffrances des vieillards, agonisants et enrhumés, sans pour autant remplir l’attaché case du patibulaire revenant, les bouseux se résolvent donc à sacrifier leurs éléments les moins utiles pour le bien de la communauté, et au petit jeu du hachoir musical, Petras se retrouve rapidement shortlisté. Ses vigoureuses dénégations n’y font rien: c’est bien à lui que revient l’honneur de mettre la dernière main, ou plus exactement, le dernier bras, à la collecte de déchets organiques organisée par le Nag’. Au moment où le couperet tombe, il se révèle brutalement, amputé certes, mais depuis un bail: cela fait douze ans que le bras lui en est tombé, et l’enfant mal aimé et chétif est devenu…un jeune homme mal aimé et chétif1.

Les relations avec sa famille ne s’étant guère arrangées depuis ce jour fatidique, Petras a depuis quitté le foyer paternel pour voler de sa propre aile, n’écopant malheureusement pas d’une grande sympathie de la part des ses concitoyens de Shyish. Et pour cause, ces derniers le considèrent comme un porte-malheur, lié à jamais aux terribles Ossiarch Reapers par sa manche vide, et ne lui réserve donc pas le meilleur accueil. Malgré cela, Petras tient le coup car il a un but et un rêve: se faire poser une prothèse. Il connaît même l’artisan idéal pour cette opération, un forgeron prodige nommé Helstane, vers l’atelier duquel il se dirige avec toutes ses économies. Croisant sur la route un marchand, qui a lui aussi bénéficié de la science du prothésiste (il a pris sa jambe à son coût), il apprend toutefois de la bouche du colporteur qu’Helstane est loin d’être conventionné, et que ses services ne sont pas donnés. Souhaitant malgré tout tenter sa chance, Petras arrive enfin jusqu’à la forge de son potentiel sauveur… qui lui sort un gros doigt2 pour sa peine. Flûtcke. Le désespoir de notre héros arrive toutefois à émouvoir quelque peu le bourru et pingre Helstane, qui promet à son visiteur d’accéder  sa requête et de lui forger un membre – en tout bien tout honneur -, s’il se met à son service sans rechigner, et pour une durée indéterminée. Ce que Petras accepte.

Après un an, un mois et une semaine de durs labeurs, de bastonnades régulières et de café dégueulasse (c’est le pire), Petras demande gentiment à son boss quand est-ce qu’il prévoit de lui passer la main (et le reste, tant qu’à faire), provoquant une nouveau geste mal élevé impliquant un doigt de la part du maître artisan. Ce dernier informe en effet sa bonniche qu’il n’a cotisé que pour l’équivalent d’un doigt, ce qui revient  dire qu’il a travaillé à l’œil. Mondes cruels que ces Royaumes Mortels, où le fléau de l’esclavage moderne est tout aussi présent que dans le nôtre. Sauf qu’au lieu de confisquer les papiers des travailleurs, on leur refuse leur ferraille. Inacceptable. Bref, Petras en a gros, et commence à désespérer d’être jamais appareillé, ce qui explique en partie pourquoi, lorsque son patron envoie paître un ferrailleur de grands chemins lui ayant proposé d’acheter un bras d’Ossiarch Reaper, après avoir échoué à lui refourguer un plastron bosselé, l’infirme suit discrètement le vendeur éconduit, et lui subtilise son bien à la faveur de la nuit…

Début spoiler…Fasciné par l’objet, qu’il garde en secret dans sa paillasse, Petras finit par réaliser son fantasme en « essayant » la camelote, ce qui fonctionne… mais surtout pour le reste d’animus complètement dément prisonnier à l’intérieur du triquetrum (dont on ne parle pas assez à mon goût) enchanté. Cette greffe instantanée a des conséquences fâcheuses pour Petras, dont le nouveau bras gauche, pour habile et fort qu’il soit, n’en fait qu’à sa tête – ce qui est conceptuellement compliqué pour un bras -, mais plus encore pour Helstane, dont l’imposante carrure tape dans l’œil dudit bras (restez concentrés), et qui finit donc sa carrière sous les coups de son propre marteau, confisqué par son boy possédé. Il l’avait un peu cherché tout de même. Ce n’est que le début d’un parcours sanglant et psychotique pour Petras, qui retourne à son village pour régler ses comptes avec ses proches, sous l’emprise du membre maudit. En plus de commettre de massacrer et de désosser les malheureux croisant sa route (ses frères, leurs familles, les voisins, la boulangère…), puis d’aller déterrer le cadavre de son père pour se faire un bonnet avec son crâne, Petras, devenu complètement barge, se cloue les meilleurs morceaux de ses victimes sur le corps, dans une tentative valeureuse mais malheureuse de cosplay Ossiarch Reaper. Malheureuse car, au moment de se présenter devant ses pairs, dans la forteresse hantée la plus proche, l’apprenti Squelettor se fait déposséder de son calcium par les factotums de garde, qui ne laissent que ses corps mous et son âme devant l’entrée. C’est ce qui s’appelle tomber sur un os.…Fin spoiler

1En fait cette histoire, c’est ‘Cendrillon’ qui rencontre ‘Saw’. Moignillon.  
2En anglais on dit ‘he gave him the finger’, ce qui marche tout aussi bien.

AVIS:

Sheil signe une nouvelle très convaincante avec ce Tithemarked, qui parvient à marier efficacement deux types d’horreur: celle, psychologique, provoquée par la mise en scène de la déchéance morale inévitable d’un héros pathétique, qui finit par commettre l’irréparable dans la poursuite d’un objectif justifié, mais inatteignable (un peu comme Carrie dans le film du même nom), et une bonne dose de gore allant crescendo dans le sanguinolent et le macabre, ce qui fait toujours plaisir aux amateurs du genre. En outre, sa vision et description des Ossiarch Reapers, la nouvelle faction des Royaumes Mortels, sont plutôt réussies, et parviennent à donner de la profondeur (pas totalement négative, qui plus est) aux petits soldats de Nagash. Bref, une franche réussite à mettre à l’actif de ce rookie, qui je l’espère aura l’occasion de remettre le couvert dans les mois à venir.

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War in the Museum – R. Rath :

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INTRIGUE:

War in the MuseumS‘il y a bien une chose d’infinie chez Trazyn, c’est sa capacité à se mettre dans l’embarras tout seul comme un grand, bien souvent en tentant le diable C’Tan pour embellir sa collection de Chibis. Nous retrouvons notre esthète millionnaire (aussi bien en ressources qu’en années) alors qu’il finalise la restauration d’un spécimen de Prince Tyranide, collecté en même temps qu’un essaim entier de ses congénères de la flotte ruche de Kronos sur le monde de Vuros un quart de siècle plus tôt. Cet attrait pour les cafards de l’espace ne lui a pas valu que des commentaires élogieux dans le Telerama Necron, beaucoup parmi ses congénères voyant d’un mauvais œil les derniers ajouts opérés par l’excentrique Overlord à ses galeries personnelles. Même Orikan le Devin s’est fendu d’une petite prophétie à ce sujet, pressentant que la Grande Dévoreuse finirait par engloutir Trazyn et son musée… sans succès jusqu’ici.

Tandis que son équipe s’active à réhydrater le Prince endormi, afin qu’il puisse prendre dignement sa place dans l’aile tyranique récemment aménagée par notre héros, ce dernier reçoit une alerte l’avertissant d’une présence inconnue à proximité. Ayant placé l’opération Blanche-Neige (il connaît ses classiques, le bougre) sous très haute surveillance, Trazyn décide d’aller enquêter lui-même sur la cause de ce désagrément, et remonte la piste des signaux jusqu’au cœur de sa soigneuse reconstitution de la défense héroïque d’un avant poste impérial par les hordes chitineuses de Kronos… et se fait massacrer par un Lictor en pleine possession de ses moyens. Les risques du métier. Ce n’est évidemment  pas la fin pour Trazyn, rassurez-vous, qui a sagement stocké ses fichiers de sauvegarde sur le Cloud, et peut donc se matérialiser dans l’un de ses suivants pour mener à bien l’opération de chasse au gros qui s’impose. Laissant son Cryptek terminer le repulpage de sa pièce maîtresse, il entraîne donc ses Lychguards pour une partie de « Où est Charlictor? », dont il ne doute pas un instant du résultat. Il a donc la désagréable surprise de voir son escorte se faire fracasser avec une aisance déplorable par le Xenos en goguette, qui prend de plus un malin plaisir à cibler particulièrement le noble Necron, forçant ce dernier à transférer ses données d’hôte en hôte jusqu’à se retrouver seul, l’insatiable bestiole toujours sur les talons.

Aux grands maux, les grands remèdes: se souvenant sans doute des vidéos de Qui veut gagner des millions? qu’il a découvert après avoir pillé les quartiers privés de Malcador au lendemain de l’Hérésie d’Horus, Trazyn décide de faire appel à un ami, ou, à défaut, un Magos spécialiste dans la lutte contre les Tyranides. Et ça tombe bien, il a justement en stock Mr. V1, qu’il sort de stase en cette heure de besoin. V accepte de filer un coup de méchadendrite à son hôte et geôlier, sous réserve qu’il lui permette de rester en veille prolongée au lieu de l’éteindre systématiquement, ce qui lui permettra de rester productif tout en prenant la pose de façon convenable pour les visiteurs de Trazyn. Marché conclu. La recommandation du senior consultant est de réveiller deux autres spécimens du musée ayant l’expérience de la lutte contre les xenomorphes: les sœurs et Sœurs de Bataille Clara et Setine Fontaine, « prélevées » lors de la défense d’Okassis contre la flotte ruche Kraken. Ayant pris soin de leur poser des scarabées firewall pour éviter tout excès de zèle fâcheux, Trazyn s’exécute, et convainc les Sistas de lui prêter main forte, en échange d’une libération de l’exposition où elle figurait jusque là. N’ayant pas beaucoup d’autres alternatives de toute façon, les filles de l’Empereur acceptent le deal.

Je me dois de faire un petit aparté ici pour souligner une trouvaille scénaristique drôlatique de Rath. Il s’avère en effet que, si Clara est bien Clara, Setine, elle, s’est trouvée trop endommagée pour être mise en scène de façon photogénique par ce perfectionniste de Trazyn. Ce dernier a donc opté par un remplacement pur et simple, même s’il a réutilisé les parties valides de Setine pour réparer Clara (une pratique courante dans les musées, comme il le fait remarquer à cette dernière, horrifiée d’apprendre qu’elle a hérité de la main droite, la cornée et des organes internes de sa sœur). Setine est en fait Magdalena, et n’a jamais combattu les Tyranides, ce qui est logique car elle a servi au 36ème millénaire, sous les ordres de… Goge Vandire, auquel elle reste totalement dévouée. La reconstitution historique mène à des résultats parfois étranges…

Notre fine équipe sort affronter le Lictor, qui finit par mordre la poussière après quelques échanges de bolts, lasers et rayons de fuseur nourris. Ce n’est toutefois pas la fin des e**erdes pour Trazyn et ses alliés de circonstance, puisque tous les champs de stase dans lesquels ses spécimens sont conservés tombent en panne les uns après les autres. Se retrouver au milieu de 20.000 Tyranides, certes un peu groggy, mais définitivement affamés, et menés par leur Prince, qui arrive tel un lui-même après avoir disposé du Cryptek de garde, n’étant pas porteur de grandes perspectives pour nos héros, ils décident sagement de battre en retraite, pendant que le musée se transforme en champ de bataille apocalyptique. Comprenant que quelqu’un tire les ficelles et appuie sur les boutons dans l’ombre, Trazyn fait grand train jusqu’au Nexus Mundi, la salle de contrôle de son centre d’exposition…

Début spoiler…Où il tombe nez à nez (façon de parler pour des Necrons) avec Orikan, qui n’a pas digéré (façon de parler aussi) que Solemnace et son maître ne se soient pas faits assimiler par la floche ruche Behemoth, comme il l’avait pourtant prédit. Sa réputation étant en jeu, Orikan complote depuis lors à la chute de son rival, des griffes, tentacules et proboscis des Tyranides, afin de maintenir son aura d’infaillibilité. Bien aidé par ses pouvoirs temporels, cela fait plusieurs fois qu’il essaie de provoquer l’accident que le musée vit en ce moment, ce qui explique comment un simple Lictor a pu donner tant de fil à retordre à un Overlord et sa garde personnelle (ce mauvais perdant d’Orikan appuyant sur Start à chaque nouvel échec).

Les deux immortels se mettent à se crêper la crête (pour le chignon, on repassera), d’abord sous forme de paquets de bits, puis par hôtes interposés, Clara et Magdalena ayant la malchance d’être chacune pén- investie par un Necron en goguette (voire par les deux, dans le cas de Magdalena, qui prend ce threesome mental de façon très posée). L’arrivée du Prince Tyranide sur les lieux de l’empoignade provoque toutefois la fin du match, lorsqu’Orikan tente de hacker super cafard… et se fait jeter comme une bouse, précipitant sa retraite hors de Solemnace. Son rival vaincu, Trazyn n’a aucun mal (en tout cas, c’est ellipsé) à remettre de l’ordre dans son arrière boutique, et le temple de l’Empereur au milieu de la cité  ruche. Fidèle à sa parole, il laisse le Magos V compter tranquillement jusqu’à lui-même dans un coin, et change de place Clara et Magdalena (il n’avait pas promis autre chose!), permettant notamment à cette dernière de contempler la reconstitution de la décapitation de son cher Goge Vandire. Qui a dit que les conservateurs de musée étaient de tristes sires?…Fin spoiler

1Quasi-certainement le Magos Varnak, qui commandait la garnison impériale du monde de Tyran, au moment où vous savez qui ont débarqué. Une célébrité donc.

AVIS:

J‘ai été très favorablement impressionné par cette nouvelle de Rath, qui se place plusieurs crans au-dessus de son inaugural Divine Sanction à mes yeux. En plus de parvenir à faire gagner à son propos en intensité dramatique et scénaristique au fil des pages (ça commence comme Predator, et ça finit comme Independence Day), Rath explore de façon jubilatoire le côté excentrique et pince sans rire de Trazyn, et met à profit les possibilités offertes par les prouesses technologiques Necron pour concocter quelques situations savoureuses. Il se paie même le luxe de poser un teaser fluff en fin de récit, Trazyn comprenant que si Orikan s’est contenté de monter une opération de faible envergure contre lui au lieu de revenir dans le passé pour s’assurer que la flotte ruche Behemoth ne rate pas Solemnace, comme la première fois, c’est parce qu’il a découvert la présence dans les collections de son ennemi d’une pièce de choix, abîmée mais toujours capable d’après lui de permettre l’apothéose Necron. Quelle est elle? Mystère (pour moi en tout cas), mais ça donne vraiment envie d’en savoir plus. Réservez votre pass coupe-file dès maintenant pour la prochaine exposition!

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En conclusion, un cru très respectable que cette Black Library Celebration Week 2020, qui compte un bon nombre de soumissions de fort belle facture, et aucun ratage patenté. L’offre tenant encore pour quelques temps, profitez du prix de gros proposé par la Black Library pour l’ensemble, ou choisissez la/es nouvelle(s) qui vous conviendra(en)t dans le lot. Il y a de grandes chances que toutes finissent par être republiées dans des anthologies (même si ça serait une première pour The Will of the Legion, la série Primarques n’ayant donné que des novellas pour le moment). Cette décennie de speed reviewing commence en tout cas sur des bases solides!