HAMMER AND BOLTER [N°1]

Petite revue du bouzin après une première lecture. 6 travaux différents dans ce premier numéro, 4 en rapport avec 40K et 2 avec Warhammer. On a également droit à une micro-interview de Nick Kyme, actuellement en train de bosser sur le troisième tome de sa trilogie consacrée aux Salamanders, Nocturne. Apparemment, il aimerait bien écrire un bouquin sur Vulkan dans le cadre de l’Hérésie d’Horus, mais ce ne se serait pas pour tout de suite.


The Strange Demise of Titus Endor – D. Abnett [40K] :

The Strange Demise of Titus EndorLe nom de Titus Endor ne sera pas étranger aux lecteurs de la série des Eisenhorn. N’ayant pas lu les romans en question, une bonne partie des références distillées dans la nouvelle m’est passée au dessus de la tête, mais de ce que j’ai pu comprendre, Titus Endor est un Inquisiteur passablement désabusé, ancien ami d’Eisenhorn du temps où les deux étaient Interrogateurs. Bien que le plus prometteur des deux, la carrière d’Endor n’a jamais décollé, si on peut dire, et il traîne son ennui de monde minable en monde minable, à la recherche du même criminel depuis des années.

Je dirais que l’intérêt de cette nouvelle réside plus dans l’atmosphère lourde, très typée « film noir », qu’Abnett réussit à instiller dans son récit, que dans l’intrigue proprement dite, très peu originale (voire simpliste) et insuffisamment étayée par l’auteur et qui laisse le lecteur avec des questions non résolues après le point final. On peut considérer que ces mystères persistants sont une part du style développé par Abnett, mais ce dernier a prouvé à de nombreuses reprises qu’il était capable de bien mieux, aussi je pense que le bon Dan, à qui on a demandé un petite contribution originale pour aider à lancer le nouveau magazine, a pondu son texte à la va-vite. Mais la patte du « maître » est là, et on suit avec plaisir les déambulations d’Endor, entre flashbacks et investigations, jusqu’à la conclusion attendue de sa lente déchéance.

Prospero Burns – Ch. 1 – D. Abnett [HH] :

Un autre texte du big fish de la BL, tiré de son roman sur le différend ayant opposé les Loulous aux Égyptiens pendant l’Hérésie d’Horus. N’ayant pas lu ce livre non plus, j’ai pu profiter pleinement de cette preview (parce que payer pour quelque chose que l’on connaît déjà…). Là encore, c’est de l’Abnett, et de l’Abnett plus solide que lors la première nouvelle, donc la fin du chapitre vient frustrer le lecteur (en même temps, c’est le jeu). Le problème, et les lecteurs assidus d’Abnett en conviendront avec moi, est que le penchant de Danny pour les schémas narratifs complexes et volontairement confus dans les premières pages, amène ce dernier à mélanger allégrement narration en temps réel (ici, un raid surprise d’une tribu de Fenris sur une autre, en réaction à ce qui a été pris pour un mauvais présage par leur chamane) et flashbacks en tout genre de la vie de celui qu’on devine être le héros. Pour qui a loisir de terminer le bouquin, tout finit par se mettre en place, mais quand on n’a qu’un chapitre à se mettre sous la dent, l’intrigue reste bien embrouillée.

Je pense particulièrement au long passage sur les mystérieuses statues que l’équipe du héros (archéologue de son état) découvre sur Terra (et qui auront à n’en pas douter un rôle important à jouer dans le comportement futur des protagonistes), dans lequel l’auteur bombarde son lecteur avec des détails et des anecdotes dont ce dernier n’a pas l’usage immédiat. En gros, c’est assez déroutant pour qui n’est pas familier avec le style d’Abnett, et assez frustrant (si on aime le sujet abordé dans le bouquin) pour qui l’est.

Dernier point, j’ai trouvé la description de la vie des farouches tribus de Fenris très intéressante, notamment en ce qui concerne leur rapport avec l’environnement hostile, qu’Abnett prend bien en considération au moment des combats (combattre en chemise par -15°C, c’est pas la même chose que par 15°C, tout comme manœuvrer un drakkar sur de la glace au milieu de bourrasques glaciales, ce n’est pas la même chose que faire de l’optimiste en baie de Somme au milieu du mois de juillet).

A Place of Quiet Assembly – J. Brunner [WFB] :

A Place of Quiet AssemblyDans l’introduction du magazine, Christian Dunn est apparemment très fier d’annoncer que l’une des nouvelles a été écrite par John Brunner. Personnellement, je n’avais jamais entendu parler du bonhomme avant que Dunn ne le présente comme une légende du genre, auteur notamment de Tous à Zanzibar, un classique du steam-punk récompensé par le prix Hugo (merci wikipédia), et c’est donc en parfait novice que j’ai pu juger de son travail. Là où ça devient franchement intéressant, c’est que John ne se contente (ou ne s’est pas contenté plutôt, étant donné qu’il est mort en 1995) pas de développer ses propres personnages et d’ajouter sa petite pierre au fluff du monde de Warhammer, mais qu’il s’approprie carrément deux icônes et les fait évoluer dans une aventure de son cru. Et ces icônes, ce sont Gotrek et Felix.

Autant dire que le style de Brunner détonne totalement avec les canons de la BL, et donc avec celui de King et Long, les deux autres auteurs impliqués dans la série. On a beau y être préparé, cela surprend forcément un peu. Exit donc le med-fan glauque tendance hack’n’slash que l’on était en droit d’attendre pour une aventure du fameux tueur nain, et bonjour le fantastique, dans le sens premier du mot (donc la progressive intrusion de l’inexplicable et du dérangeant dans la vie du héros). Étonnant donc, mais rafraîchissant (enfin, je trouve).

On se rend très rapidement compte que Brunner est un vrai bon auteur de SF, que le background pré-établi de Warhammer ennuie plutôt qu’autre chose (il n’utilise ainsi que très peu le personnage de Felix, et encore moins celui de Gotrek, préférant baser sa nouvelle autour d’un héros de son cru ; à ce titre, il serait plus juste de parler d’une histoire avec Gotrek et Félix qu’une histoire de Gotrek et Félix), et qu’il utilise de manière assez convenue et peu finaude (on a du le briefer rapidement avant qu’il ne commence à écrire). En plus de cela, les « conventions » sur le fluff ayant beaucoup changé entre le moment de la rédaction de la nouvelle (début des années 90) et aujourd’hui, la chute peut sembler un peu bizarre pour un lecteur n’ayant pas baigné dans le fluff canonique (ce que je suis). Cependant, il est vraiment intéressant de voir ce qu’un auteur extérieur à la BL peut tirer de l’univers qui nous est bien familier, et la nouvelle de Brunner constitue à ce titre la lecture la plus intéressante de tout le magazine (à mes yeux).

Primary Instinct – S. Cawkwell [40K] :

Primary InstinctL’un des principal intérêt de ce genre de publication (immatérielle maintenant ^^) étant de permettre à de nouveaux auteurs de débuter, c’est donc logiquement que la première nouvelle de Sarah Cawkwell s’est retrouvée dans les pages virtuelles d’Hammer & Bolter. Présentée comme un « hot new talent » par Christian Dunn, la donzelle ne m’a toutefois pas convaincu.

Premièrement, le sujet qu’elle traite est ennuyeusement commun: un groupe de Space Marines est engagé dans la traque d’une bande de pirates Eldars sur un monde sauvage. Plus classique que ça, c’est le background de la boîte d’initiation. Le pire est que si l’on remplace « Space Marines », « pirates Eldars » et « monde sauvage » par « vétérans des forces spéciales », « trafiquants de drogue », « jungle », on se retrouve avec un pitch classique de film hollywoodien bourrin et crétin. Bref, bonjour l’originalité.

Deuxièmement, Cawkwell a du mal à faire émerger une quelconque personnalité des marounes qu’elle décrit, et, plus grave, à détacher le chapitre des Silver Skulls du douillet anonymat qui était le sien jusqu’alors. En gros, à la fin de la nouvelle, on ne sait toujours pas ce que c’est d’être un Silver Skull, mis à part le fait d’être recouvert de tatouages des pieds à la tête. De ce que j’ai pu comprendre, leur mentalité semble se situer à mi-chemin entre les Space Wolves (côté sauvage et superstitieux) et les White Scars (ils font une fixation sur la tête de leurs ennemis morts), mais à part ça, on n’apprend rien, et c’est bien dommage.

Troisièmement, le rythme n’est pas au rendez-vous, les marines passant les ¾ de la nouvelle à tourner autour de l’épave qu’ils découvrent au cœur de la jungle, leur chef demandant à l’Archiviste qui accompagne son escouade de consulter ses runes toutes les cinq minutes. Évidemment, il finit par y avoir du combat, marounes oblige, mais je n’ai pas accroché non plus (Cawkwell n’arrive pas à bien rendre la brutalité et l’obstination propre aux Astartes, principalement à cause de la nature de leurs adversaires il faut dire, mais c’est elle qui a choisi ces derniers, hein…) .

Quatrièmement, le fluff, sans être victime d’un gangbang brutal, est bizarrement traité. Un Archiviste accompagnant une pauvre escouade de 5 marines d’Assaut dans une quête qui tient plus de la vengeance que de l’absolue nécessité? Des marines incapables de reconnaître leurs adversaires dans un premier temps, puis qui les identifient sans coup férir parce qu’ils se souviennent de les avoir sur leurs cassettes d’endoctrinement? Mais ce sont surtout ces fameux ennemis qui me restent dans la gorge. À la fin de la nouvelle, ils sont présentés comme une terrible nouvelle menace pour l’Imperium, alors que ce dernier les combat depuis belle lurette. La description qu’en fait Cawkwell ne permet également pas de se faire une bonne image de ces derniers, ce que je trouve assez frustrant.

Bref, de la BL passable, que je suis maintenant trop blasé pour apprécier.

Phalanx – Ch. 1 et 2 – B. Counter [40K] :

PhalanxConcept sympa proposé par la BL, le roman de Counter devrait normalement être le roman-feuilleton du magazine. Pour ceux qui l’ont oublié (moi en premier), le Phalanx est le principal vaisseau des Imperial Fists, une barge de bataille incroyablement vieille, et donc incomparablement supérieure à tous les autres vaisseaux de l’Imperium de l’univers du monde du cosmos (ah, Ben, je t’aime pour ça ^^). Pour ceux qui ne l’ont jamais su (moi en premier), ce roman prend place dans la série des Soul Drinkers, un chapitre successeur des Fists frappé par le fléau de la mutation (pour plus d’info, voir là). Après de multiples péripéties, les Soul Drinkers sont décimés par une coalition de chapitres loyalistes, et les survivants traînés dans la barge des Imperial Fists pour être jugés. Oui, je sais, on ne voit pas pourquoi les marounes s’embêteraient à organiser un procès quand un bolt en pleine tête suffirait à régler le problème une fois pour toute, et d’ailleurs la majorité des personnages est de mon avis, mais Vladimir Pugh (le maître des Fists) est un légaliste forcené, qui tient absolument à tout faire dans les règles, car les Soul Drinkers se considèrent comme encore loyaux envers l’Empereur, et donc ont théoriquement le droit de s’expliquer. On suit donc les jours précédents l’ouverture du procès, avec les séances d’interrogation musclées de vigueur (haaa, le « Gant de Douleur »… de grands malades, ces Fists) et les arrivées des délégations des autres Chapitres (ça fait un peu réunion du G8). Pendant ce temps, une équipe de scouts est envoyée sur un monde nécron à la recherche d’on ne sait pas trop quoi…

Bon, c’est du Counter, donc on aime ou on aime pas, mais j’ai pas trouvé ça dégueu à lire, bien que je n’ai lu aucun bouquin de la série des Soul Drinkers (pour changer). On retrouve la figure bien connue de Lysander, et le personnage de Sarpedon, le maître muté des Drinkers, est attachant malgré sa tendance à donner dans les réflexions métaphysiques. Même si on devine que les accusés ne vont pas rester tranquillement dans leur box jusqu’à la lecture du verdict (et Counter, comme beaucoup de ses copains, à la mauvaise idée de recourir à la facile « vision mystique » pour prévenir le lecteur que ça va chier), voir des Astartes faire autre chose que purger de l’hérétique ou du xenos est assez sympa. À côté de ça, les passages où les scouts apparaissent sont bien rythmés, même si pas originaux pour deux sous (il faudrait vraiment un gars talentueux pour innover -en bien- de ce côté là ceci-dit). Si Counter résiste à son penchant prononcé pour l’escalade pyrotechnique et s’empêche de faire de son histoire l’évènement le plus important depuis l’Hérésie Do, ça devrait même être agréable à suivre.

Questing Knight – A. Reynolds [WFB] :

Questing KnightDernière nouvelle du numéro, Questing Knight raconte très originalement les aventures d’un chevalier de la quête, le preux (quoique…) Calard de Garamont, de retour sur ses terres après une absence de six ans. Il n’a pas bu au Graal, non non, la Dame lui a envoyé une vision (encore!), l’enjoignant de rejoindre son fief sur le champ, et Calard, suivi par un larbin hideux et froussard, comme le veut la tradition, s’exécute. Pas de chance pour lui, son beau château a tout brûlé pendant son absence, son petit cousin a disparu, et il découvre que la belle qu’il aimait en secret est la mère des enfants de son rival… S’ensuit une aventure que j’ai trouvé pénible à lire et inintéressante au possible, mais je n’attendais pas grand chose d’autre de la part de Reynolds.

Outre le fait que tous les rebondissements sont absolument prévisibles (« Quoi, 2 chevaliers ont réussi à massacrer tous mes vassaux et hommes d’armes? Se pourrait-il qu’il s’agisse de …? » Un indice, la réponse est oui) et que les scènes de combats ont tendance à être incroyablement foutraques (le héros et ses potes se battent à un moment dans une auberge fortifiée, et je défie quiconque de comprendre ce qui se passe), c’est surtout la transparence confondante de ses personnages qui pénalise l’auteur. Le héros est héroïque, résolu, vertueux, fidèle, légèrement-méprisant-envers-la-roture-mais-pas-trop…, tandis que son serviteur est lâche, contrefait, mesquin, grossier, terre à terre, etc… Si seulement Anthony Reynolds avait donné un des traits de caractère du noble chevalier au vil paysan, et vice-versa, il aurait même pu frôler le passable, mais non: les méchants sont soit des éminences grises machiavéliques, soit des gros bourrins cruels, alors que le rival du héros est exactement basé sur celui de Pokémon (mais si, vous savez, le gosse de riche arrogant et énervant).

Cette ennuyeuse orthodoxie rend les maladroites tentatives d’explication de Reynolds au sujet des « déviances » de comportement de ses personnages encore plus grossières et risibles: par exemple, le très héroïque Calard passe son temps à fuir le combat, sous prétexte que la Dame ne voudrait pas qu’il se fasse poutrer la gueule par des adversaires indignes de lui (quand il se bat contre de la horde) ou bien qu’il meure en vain face à des adversaires trop puissants (quand il se bat contre le boss de fin).

Enfin, Reynolds ne réussit pas à tirer parti de son seul point fort, c’est à dire sa très bonne connaissance du fluff actuel (étant un hobbyiste et ayant bossé pour GW avant de devenir un auteur de la BL) pour faire passer sa salade en ajoutant des détails de fluff un minimum sympa. Tout est plat, convenu et attendu, et pourtant, il y avait de quoi faire dans le bizarre et le surprenant (l’histoire se termine à Moussillon tout de même).

En conclusion, il y a plus de bonnes que de mauvaises choses dans ce numéro, mais alors que ce qui est bon l’est plutôt moyennement (Abnett un peu en dessous ou dans un format pas adapté, Brunner qui aurait été meilleur s’il n’avait fait que du Brunner, Counter égal à lui-même), ce qui est mauvais (ou plutôt insipide, ne soyons pas trop dur) l’est beaucoup plus franchement (Cawkwell et Reynolds inoriginaux au possible et parfois confus). Pour 4 euros, j’estime en avoir eu pour mon argent (en plus, c’est beaucoup plus discret de lire un e-book en cours que de sortir un White Dwarf de son sac devant le prof), mais j’attendais un peu mieux de ce genre de publication (un premier texte vraiment prometteur, un nouveau personnage intéressant, des nouvelles sérieusement construites…). À vous de voir!

Real TiredYou_don't_say-

À propos de Schattra

Égoïstement optimiste, çapourraitêtrebienpirologiste assumé. Selfishly optimistic, proud itcouldbemuchworsologist

Publié le août 25, 2012, dans Chronique, et tagué , , , , , , , , , , , , , , , , , . Bookmarquez ce permalien. Poster un commentaire.

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