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BLACK LIBRARY 2012 ADVENT CALENDAR [40K – WFB – HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du Black Library 2012 Advent Calendar, pot-pourri de 24 nouvelles et audio dramas proposé par la BL à ses afficionados pendant les semaines ayant précédé Noël 2012 (qui tomba un mardi, comme vous le savez). Si, plus de dix après, ce concept vous semblera sans doute des plus familiers, à l’époque il s’agissait d’un saut dans l’inconnu de la part de Nottingham, qui se cherchait encore en matière de publication numérique. Nous sommes donc en présence du tout premier Advent Calendar de la Black Library, ce qui peut expliquer pourquoi ce lointain ancêtre ne ressemble guère aux dernières moutures sorties par la BL.

Black Library 2012 Advent Calendar

Outre le fait que la sélection que nous allons explorer ci-dessous compte des nouvelles prenant place dans le Monde Qui Fut (ce qui ne se reproduira plus, même si la Fin des Temps ne prit place qu’en 20151), une autre différence majeure entre le millésime 2012 et ceux qui suivirent est le format des histoires publiées par la BL : croyez-le ou non, mais il fut une époque (heureusement révolue depuis lors) où les nouvelles de 1.000 mots (soit entre quatre et cinq pages) étaient vues comme un produit tout à fait valable par la Black Library. Vendues à 1,49€ l’unité2, ces ultra courts formats étaient certes rapides à écrire pour les auteurs de GW-Fiction, mais peu furent en mesure de proposer des histoires un tant soit peu intéressantes en respectant cette longueur limite. Tout le monde n’est pas Hemingway ou Monterroso.

Les 21 nouvelles et 3 audio dramas n’ont donc pas marqué l’imposant corpus de la GW-Fiction, mais doivent plus être vues comme des exercices de style de la part des plumes de la BL, et pas des moindres (Abnett, Reynolds, Wraight, Thorpe, McNeill, Werner, Counter, Mitchell, Fehervari…). Avant même de m’atteler à cette revue, je peux déjà vous dire que le rapport qualité/prix de cette sélection sera absolument exécrable (près de 90€ à débourser pour disposer de toute la série…), mais j’espère ne pas être l’abri d’une (ou deux, ou plus) bonne(s) surprise(s) dans le lot…

1 : Je pense que la décision de bazarder Warhammer Fantasy Battle a été prise par Games Workshop fin 2013, ce qui peut expliquer pourquoi la Black Library a progressivement arrêté de publier des inédits pour cette franchise historique à partir de ce moment.
2 : À l’époque. Au moment où cette critique est écrite, la BL ne s’est pas gênée pour harmoniser les prix de tous ses courts formats, et le lecteur curieux devra s’acquitter des 3,49€ réglementaires pour mettre la main sur ces quelques pages. Ça pourrait passer si la BL indiquait clairement la longueur des nouvelles sur son site, afin de ne pas piéger les fans croyant avoir affaire à des histoires plus consistantes, mais non (pas de manière systématique en tout cas). Pas très élégant.

Black Library 2012 Advent Calendar

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Born to Us – D. Abnett [40K] :

INTRIGUE :

Born to UsComme il aime bien le faire en ses vieux jours (depuis qu’il a passé son premier siècle, en tout cas), Gregor Eisenhorn, Inquisiteur vétéran ayant roulé sa bosse et son crâne chauve d’un bout à l’autre du Daniverse, se remémore les épisodes les plus marquants de sa longue carrière. Cette fois-ci, direction la planète Koradrum où Greg a enquêté sur la disparition d’un archéologiste de renom, Darred Lenhema, alors qu’il fouillait un ancien tumulus avec son équipe.

Les temps de transport au sein de l’Imperium étant ce qu’ils sont, Eisenhorn et son gros bras de service Harlon Nayl n’arrivèrent sur les lieux que deux ans après que Lenhema ait été déclaré AWOL. Il ne servait donc à rien de se ruer sur le site de fouille pour relever des empreintes, ce qui laissa un peu de temps à notre duo de choc pour se renseigner sur la culture et les croyances locales. Il s’avéra que les crédules Koradrumois considéraient l’arrivée dans le firmament d’une nouvelle étoile (en fait un simple passage en supernova d’un astre proche) comme le signe de la réincarnation prochaine d’un grand meneur, voire d’une figure divine, qui mènerait son peuple vers le salut, ou quelque chose comme ça. Eisenhorn, qui est très culturé et aime entendre le son de sa propre voix, s’empressa de faire un cours magistral au pauvre Nayl sur la récurrence du mythe de la figure – n’ayons pas peur des mots – christique au sein de l’Imperium, même si à l’approche du 41ème millénaire, peu de gens savaient d’où ce mythe provient. Et c’est bien triste, ma pauvre dame.

Sur ces entrefaites, l’Inquisiteur et son garde du corps arrivèrent à proximité du tumulus, où l’équipement de Lenhema et de son équipe gisait au sol. Il semblerait que la réponse de cette énigme se trouve à l’intérieur de l’ancienne tombe…

Début spoiler…Et comme Eisenhorn aime à le marteler, toutes les légendes, mêmes les plus farfelues, ont toujours un fond de vérité. Un messie s’était bien réveillé sur Koradrum après un sommeil millénaire, mais il s’agissait d’un Tétrarque Necron et pas d’un charpentier hippie ; et s’il a bien multiplié les pains, ce fut en direction des archéologues sans gêne ayant envahi son intimité. Nous quittons Eisenhorn et Nayl sur cette épiphanie grimdark, mais rassurez-vous, ils s’en sont tous les deux sortis…Fin spoiler

AVIS :

Des personnages populaires, un peu de fluff et une petite surprise finale pour relever le tout : Dan Abnett fait bon usage de son budget très serré de mots dans cet inconséquent mais sympathique ‘Born to Us’, qui nous permet de nous souvenir que le brave Gregor est à l’origine un membre de l’Ordo Xenos. Il y a évidemment des nouvelles bien supérieures à celle-ci dans le corpus inquisitorial d’Abnett, mais ‘Born to Us’ tient assez bien son rang, dans la catégorie poids plume.

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Binding – R. Harrison [40K] :

INTRIGUE :

BindingLe Sergent vétéran Leonen Kyarus des Imperial Fists se réveille brutalement pour constater que quelqu’un a laissé la vitre de toit de son Rhino de fonction ouverte, ce qui rafraichit considérablement l’habitacle. Ah là là, ces j- Wait a minute. La minute qui suit voit notre héros reprendre péniblement ses esprits et sortir de la ruine fumante du véhicule, constatant au passage qu’une de ses mains n’a pas survécu au crash. Plus inquiétant, le reste de son escouade manque à l’appel, alors qu’une voix désincarnée râle « frérooooot… » à la limite de sa perception auditive. La radio de son armure ne fonctionnant plus guère, Leonen en est réduit à partir à la recherche de l’homme qui murmurait à l’oreille de Lyman (hoarse whisperer, en V.O.), ce qui l’amène dans un bâtiment en ruines…

Début spoiler…Où l’attendent ses frères de bataille, qui s’étaient passés le mot pour lui faire une surprise pour son anniversaire sont tous morts autour d’un pilier de pierre trotrodark, servant de perchoir et de prison à un Démon ventriloque (sans doute un Duc du Changement, si on prend en compte ses plumes, son bec et son champ lexical de perroquet domestique). Leonen comprend en un éclair que cette abomination a attiré ses camarades jusqu’à lui pour leur voler leur âme et gagner ainsi en puissance pour se libérer de son emprisonnement, et qu’il est le prochain sur la liste. Comme le Démon lui fait doctement remarquer, ce n’est pas un combat qu’il est statistiquement en mesure de remporter, mais le brave Sergent rétorque qu’il n’est pas venu pour ça avant que le combat ne s’engage et que le rideau tombe sur notre histoire. On ne saura jamais s’il a pu utiliser les toilettes, du coup…Fin spoiler

AVIS :

Pour sa toute première histoire écrite pour le compte de la Black Library Rachel (Ray) Harrison signe une micro-fiction appliquée et assez atmosphérique (ce qui est bien), même si son dénouement tombe un peu à plat1 (ce qui l’est moins). Je pense qu’il y avait moyen de choisir un autre antagoniste pour se sortir de cette ornière, mais dans l’ensemble, c’est très honnête pour une nouvelle de 1.000 mots.

1 : Ou plutôt, suscite des questions que Harrison laisse sans réponse, faute d’espace pour les traiter. Comment le Démon a-t-il fait pour attirer un à un les Space Marines jusqu’à son pilier, alors qu’ils ont tous commencé la nouvelle dans l’épave du Rhino (et qu’on peut supposer qu’ils ne s’en seraient pas écartés aussi facilement que Leonen s’ils avaient vu que leurs camarades étaient blessés) ? Est-ce lui qui a enchainé le cadavre de Damanios à son pilier, et pourquoi ? Le Démon peut animer les cadavres de ses victimes, mais à quoi cela lui sert-il ?

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The Riddle of Scorpions – J. Reynolds [WFB] :

INTRIGUE :

The Riddle of ScorpionsZavant Konniger et son assistant Vido ont été appelés pour enquêter sur la mort suspecte d’un marchand d’Altdorf, dont le corps a été retrouvé dans la caverne d’Ali Baba qui lui servait de bureau. Jorge Mueller, car c’était son nom, s’était en effet fait une réputation dans l’importation et la vente d’artefacts rares provenant des quatre coins du Vieux Monde et au-delà, et était bien connu pour ne pas hésiter à employer des moyens douteux pour enrichir sa collection.

Comme souvent, Konniger questionne Vido pour (tenter de) développer les capacités déductives du Halfling, lui-même ayant bien sûr déjà établi sans l’ombre d’un doute le motif et le déroulé des événements ayant conduit Herr Mueller à passer l’arme à gauche. Guère intéressé par le cadavre affalé sur sa chaise, ou par les remarques de son employeur d’ailleurs, Vido préfère inspecter le bureau du défunt, et ramasse un tube finement ouvragé dont les extrémités sont occupées par une reproduction de scorpion en métal. Voilà qui ferait un presse papier de premier choix…

Mais ce que Vido prenait pour un simple objet décoratif se révèle être un piège-scorpion arabien, qui se referme sur ses doigts alors qu’il le manipule, et dont les dards se rapprochent rapidement de ses phalanges. Si l’expérience se révèle traumatisante pour le Halfling aux mains baladeuses, Konniger lui ne se départit pas de son calme et continue de tester la sagacité de son acolyte sur les causes du décès de Mueller, tout en l’informant qu’il lui suffit d’entrer le bon code sur le cadran du piège pour se libérer avant qu’il ne soit trop tard. Un vrai jeu d’enfant (d’ailleurs, c’est comme ça que les jeunes Arabiens se distraient, à ce qu’il paraît) !

Début spoiler…Au final, Vido ne parvient pas à résoudre l’énigme des scorpions avant de se faire piquer, mais comme les dards n’étaient pas empoisonnés, la seule victime à déplorer est son amour propre. Konniger entre la combinaison en un tour de main, et révèle à son serviteur éprouvé que c’est cette même mésaventure qui a causé la mort de Mueller, dont le cœur a lâché sous le stress lorsqu’il s’est trouvé par inadvertance prisonnier du piège. On peut appeler ça les risques du métier.Fin spoiler

AVIS :

Josh Reynolds ne choisit pas la facilité en tentant un whodunit dans un format 1.000 mots (1.014 ici, si on veut chipoter), mais on ne pouvait pas s’attendre à autre chose dans une nouvelle dont le héros est le légendaire Zavant Konniger. Cela fait toujours plaisir de revoir des personnages mythiques de la GW-Fiction reprendre du service sous la plume de nouveaux auteurs, et le Sage-Détective d’Altdorf est à ce titre bien tombé avec Reynolds, qui se sort honorablement de cette situation épineuse (bien mieux que Vido en tout cas). Bien sûr, le côté « énigme » de ce ‘The Riddle of Scorpions’ n’est pas très abouti, mais pour un très court format, c’est loin d’être indigent. Bravo pour le panache, M. Reynolds.

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Failure’s Reward – C. Wraight [40K] :

INTRIGUE :

Failure's RewardTarolf est ce qu’on peut considérer comme un loser du 41ème millénaire, ou plutôt, un lo(up)ser. Né sur la planète Fenris, il a tenté pendant sa jeunesse de rejoindre les fiers Guerriers Célestes (aussi connus sous le nom de Space Wolves par l’Administratum) mais quelque chose s’est mal passé pour lui pendant le sévère processus de sélections des aspirants du Chapitre le plus cabotin de l’Imperium. On ne saura jamais ce qui est parti en cacahouète pour le pauvre Mister T. mais toujours est-il qu’il s’est fait recaler. Heureusement, les Space Wolves ont une fibre sociale bien connue et ont proposé au candidat malheureux de servir l’Empereur d’une autre manière qu’en zlatanant ses ennemis à travers la galaxie, et Tarolf est donc devenu assistant armurier dans les forges du Croc.

Comme il nous le raconte avec ses propres mots (assez simples, car il est probable que les Prêtres Loups l’aient un peu lobotomisé sur les bords pour s’assurer de sa docilité1), sa tâche consiste à customiser des genouillères d’armures énergétiques, afin que les Space Wolves puissent guerroyer avec le style flamboyant pour lequel ils sont réputés à travers tout l’Imperium. Free hand de dragon, de wyrm, de troll ou de loup : Toralf est un as du poinçon, de la cire et de l’acide, et même s’il reconnait sans mal que le moindre boulot peut lui prendre des mois (ce qui est long tout de même quand on considère la taille de la pièce), l’important est d’assurer un rendu irréprochable. La qualité totale, que voilà une belle doctrine !

1 : Et fait stériliser pour les mêmes raisons, mais en cela il ne diffère sans doute pas des recrues confirmées du Chapitre…

AVIS :

Chris Wraight lorgne clairement du côté des encarts fluff des Codex et suppléments de jeu de rôle avec ce contemplatif ‘Failure’s Reward’, qui décrit avec un luxe de détails le quotidien d’un des milliers de serfs anonymes qui triment pour le compte des Space Wolves. Pas d’intrigue passionnante ou de conclusion tonitruante à attendre ici, seulement la réalité terne, assez triste et souvent violente du 41ème millénaire, « filmée » à hauteur d’homme (ou d’humanoïde, un aspirant Space Wolves n’ayant pas un physique ordinaire). Assez proche dans l’esprit du ‘Sacrifice’ de Ben Counter, qui était une autre bonne surprise du corpus de 40K.

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The Quickening – A. Smillie [40K] :

INTRIGUE :

The QuickeningL’Archiviste Balthiel des Flesh Tearers a choisi d’opérer seul derrière les lignes ennemies pour mener à bien l’assassinat du Gouverneur hérétique de Spheris, et nous le voyons faire usage de ses pouvoirs psychiques, dont son signature move : the quickening (une sorte de bullet time qui lui permet de ralentir l’écoulement du temps autour de lui), pour se débarrasser de la garde personnelle du félon. Bien que très efficace, l’abus du Warp est dangereux pour la santé mentale, et Balthiel finit la novelinette (3 pages !) en PLS, sa mission accomplie mais sa messagerie mentale submergée de spam de Démons cherchant à lui vendre des analgésiques miraculeux et/ou à lui faire rencontre des hot single spawns dans son voisinage. Bref, un jeudi ordinaire pour notre ami Flesh Pseaker.

AVIS :

Andy Smillie continue sa série consacrée à la mise en scène des pouvoirs psychiques des Blood Angels (et descendants) dans ses nouvelles Flesh Tearers avec cet insignifiant à tout point de vue ‘The Quickening’. Les amateurs de ce genre très particulier peuvent se tourner vers ‘From the Blood’ pour voir l’incroyable Balthiel utiliser le Bouclier de Sanguinius d’une manière fort peu orthodoxe (et tomber à nouveau dans les pommes, comme le gros bébé fragile qu’il est). Les autres économiseront les 3.49€ demandés pour ces quelques lignes peu mémorables1 et iront dépenser leur capital chèrement acquis ailleurs.

1 : Qui bénéficient malgré tout d’une recommandation de nul autre que James Swallow (« So visceral, you can taste the blood in your teeth »). Si ça ne vous donne pas une bonne raison supplémentaire de ne pas acheter ‘The Quickening’, vous allez vite apprendre…

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Never Forgive – G. Thorpe [WFB] :

INTRIGUE :

Never ForgivePeu de temps après la bataille de Maledor, durant laquelle le jeune (à l’époque) Malekith se fit bellement corriger par Caledor the Preums, nous faisons la connaissance d’un des lieutenants du Roi Prétendant Sorcier, Alandrian de Nagarythe. Elfe féru de grands espaces et de randonnées, il prit le parti de mener ses guerriers survivants dans le Val de Caerasin après la défaite de son camp plutôt que de se réfugier à Anlec avec le gros des troupes druchii, et eut la chance de se trouver en hauteur lorsque ce rigolo de Malekith ouvrit les vannes et noya la province sous une vague monstrueuse. Plutôt que de se lamenter sur son sort, comme il aurait été pourtant en droit de le faire, Alandrian décida de partir à la conquête de sa propre contrée submergée et marcha sur le premier village du vallon avec la ferme intention d’en faire sa base d’opérations. That’s the spirit, boy.

Malheureusement pour lui, et surtout pour ses cinq cents guerriers, le village en question était placé sous la protection de dangereux anar(chiste)s, menés par un jeune prince du nom d’Alice Alith. Bien que les Druchiis disposassent (eh oui) de l’avantage numérique, les flèches des Guerriers Fantômes ne tardèrent pas à mettre la cohorte d’Alandrian en déroute, et ce dernier ne se fit guère prier pour prendre également ses jambes à son cou. C’est alors qu’Alith Anar en personne se dressa devant sa route, lui colla une flèche dans le cuissot pour le mettre à terre, avant de lui balancer un grand coup de latte dans la tempe, remportant cet affrontement fratricide par un K.O. probant à la première reprise.

À son réveil, Alandrian se rend compte qu’il est encore en un morceau, et seulement attaché aux branches et aux racines d’un jeune arbre. Cette clémence étonne beaucoup le Druchii, qui est bien placé pour savoir qu’à Nagarythe, on ne fait pas de cadeau à l’ennemi. Alith Anar lui affirme cependant qu’il ne sera ni torturé, ni affamé ou assoiffé, comme il en avait l’intuition. Au contraire, des enfants du village qu’il avait cherché à conquérir lui apporteront de quoi boire et manger tous les jours pour le garder en bonne santé. Vraiment, ça a l’air cool d’être fait prisonnier par Alith Cooper !

Début spoiler…À court et moyen termes tout du moins. Le dessein d’Alith Anar est en effet de laisser l’arbre auquel Alandrian est attaché faire le sale boulot pour lui : dans quelques années ou décennies, les branches auront suffisamment poussé pour que l’Elfe Noir se trouve écartelé par la tension de la corde qui lie ses pieds aux racines de l’arbre. La vengeance est un plat qui se mangera quand les moules auront des gants, comme on dit à Athel Maranth…Fin spoiler

AVIS :

Continuation de son roman dédié au plus mystérieux et revanchard des Hauts Elfes (‘Shadow King’), ‘Never Forgive’ ne brille pas par la qualité de son intrigue, mais compense par les éléments fluff qu’il apporte à l’amateur de culture et d’histoire elfique, et par la fin grinçante que Thorpe a concoctée pour le pauvre Alandrian. C’est assez bien trouvé je dois dire, car cela donne une bonne idée du rapport particulier que les Elfes ont au temps, en plus d’illustrer le caractère impitoyable d’Alith Anar. C’est validé.

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Warmaster – J. French [HH] :

INTRIGUE :

WarmasterHorus profite d’un de ses rares moments de paix depuis qu’il a lancé son hérésie pour soliloquer sur le sort qui est le sien dans le confort ouaté marbré de la salle du trône du Vengeful Spirit. Comme il le dit lui-même, être Maître de Guerre n’est pas une sinécure, surtout lorsque le titre est décerné par un Empereur plus concerné par ce que le Primarque inter pares ne doit pas faire que par ce que le poste apporte comme avantages. De même, il n’est pas facile de mener à bien un coup d’état galactique quand on hérite de la moitié la plus dysfonctionnelle de la super fratrie pour jouer au régicide contre son Pépé. À tout prendre, Horus aurait bien aimé que Sanguinius, Roboute Guilliman et même Corax (un peu d’amour pour les corbeaux emo, ça fait du bien) le rejoignent, plutôt que de se coltiner les manigances tarabiscotées et inefficaces de Lorgar et d’Alpharius, les bouderies de Mortarion et la cyclothymie de Perturabo. Comme on disait à la fin de M1, if you can’t be with the ones you love, love the ones you’re with.

Qu’importe ces menus désagréments et la nullité crasse des bras cassés qui l’accompagnent, Horus sait qu’il est le surhomme pour le job, et que chaque bataille, chaque massacre, chaque désastre, sert sa cause. C’est ça l’avantage de servir le Chaos : on est autorisé à se réjouir lorsque tout part à vau l’eau, car après tout c’est ce que les patrons désirent, pas vrai ? Notre histoire se termine avec la révélation de l’identité du bienheureux individu à qui Horus a déballé ses profondes réflexions sur la conjoncture, car non, il n’est pas (encore) assez fou pour parler tout seul…

Début spoiler…Et il s’agit du psychiatre préféré des Primarques félons, Ferrus Manus en personne1. Ou son crâne, en tout cas, que le Maître de Guerre a gardé comme souvenir du bon vieux temps. Qui pourrait se lasser de prendre la tête de la Gorgone, aussi, hein ?Fin spoiler

1 : Fulgrim aussi apprécie beaucoup faire des confidences à son frère favori (‘Imperfect’).

AVIS :

Un seul en scène d’Horus, sur un livret de John French, franchement, ça se prend. Mine de rien, recueillir les états d’âme du protagoniste (et antagoniste) de l’Hérésie, c’est toujours appréciable d’autant plus que ça n’arrive pas si souvent que ça au cours de la série. French nous livre un Horus encore fréquentable, toujours charismatique, et sans langue de bois sur ses alliés aussi bien que sur ses adversaires : voilà un Primarque tel qu’on aime en voir dans les pages de la GW-Fiction. Solide.

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Dust – G. McNeill [40K] :

INTRIGUE :

DustSur la Planète des Sorciers, le plus éminent et vaniteux d’entre eux (il parle de lui à la troisième personne tout de même) a rendu une petite visite à l’un de ses collègues, le bellâtre Hegazha. Ahzek Ahriman, car c’était bien sûr lui, est venu lui faire une offre qu’il ne peut pas refuser : rejoindre son projet top secret de boys band cabale (c’est techniquement la même chose, on est d’accord) afin de trouver une cure à l’épidémie de mutation qui décime les rangs des Thousand Sons, déjà clairsemés par la dérouillée infligée par Leman Russ et ses loubards sur Prospero. Après tout, qui ne souhaiterait pas participer à une mission de bien commun comme celle-ci, hein ?

Tout naturellement, Hegazha refuse et envoie son bureau fait en volonté (c’est ‘achement rare, ça doit coûter une blinde) dans la tête de son invité. Il a de bonnes raisons pour faire la sourde oreille au plaidoyer d’Ahriman, notez : déjà frappé par la malédiction de Tzeentch, qui a changé ses mains en serres d’oiseau, Hegazha s’est engagé à fond dans la voie du body positivism, et considère ces mutations comme une bénédiction plutôt que comme un fléau. Cependant, Ahri’ n’a jamais accepté non pour réponse, et s’il doit mettre les mains dans le cambouis pour mettre sur pied sa fine équipe, ainsi soit-il. Les deux rivaux échangent donc des sorts destructeurs en haut de la tour de Hegazha, jusqu’à ce que ce dernier saute à la gorge de son visiteur et que les deux basculent dans le vide et tombent comme des pierres vers le sol, quelques centaines de mètres plus bas…

Début spoiler…Cela ne trouble pas outre mesure Ahriman, qui en tant que Corvidae a vu son avenir et sait qu’il survivra à la chute. Et en effet, avant que la collision fatale ne se produise, le wingman que l’Archiviste en chef avait missionné pour lui donner un coup de main utilise ses propres pouvoirs pour amortir l’impact, et placer Hegazha en stase. C’est ce vieil Hathor Maat qui rend ce fier service à Ahriman, et bien que ses capacités de télékine laissent encore un peu à désirer, comme les lombaires douloureuses de notre héros peuvent en témoigner, il réussit par contre parfaitement à geler Heghaza sur pied, ce qui permettra aux cabalites de l’utiliser comme ingrédient pour leur futur grand œuvre, à défaut de pouvoir compter sur sa coopération active. Waste not, want change not, comme on disait à Tizca…Fin spoiler

AVIS :

Guère plus qu’une scène coupée dans l’épopée consacrée par Graham McNeill à Ahriman et Magnus le Rouge, ‘Dust’ fait partie de ces nouvelles irritantes qui n’apportent rien aux connaisseurs, tout en étant relativement cryptiques pour le néophyte. Si vous n’êtes pas familier des cultes Thousand Sons (Corvidae et Pavoni) ou ne savez pas qui sont Hathor Maat et Phosis T’kar, ne comptez pas sur McNeill pour vous briefer sur ces sujets, ce qui est dommage car ces détails sont au centre de son propos.

Si cette histoire est donc assez décevante, il est en revanche intéressant de noter que lors de sa sortie en 2012, elle fut rattachée au corpus 40K et non Hérésie d’Horus par la Black Library, ce qui était chronologiquement possible à ce moment. Cinq ans plus tard, McNeill fit mourir Hathor Maat avant la fin de l’Hérésie dans ‘The Crimson King’, plaçant une fois pour toute ‘Dust’ dans cette franchise. Cette nouvelle peut donc être considérée comme la secret track de l’Hérésie d’Horus (et comme beaucoup de secret tracks, elle n’est pas incontournable).

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Last Watch – L. Goulding [40K] :

INTRIGUE :

Last WatchSur la planète jungle de Phirus, le frère Felgir, Space Wolf rattaché à la Death Watch, a juré de traquer et de tuer en solo le dernier1 xénomorphe tyranide souillant de son infecte présence le domaine de l’Empereur. Bien qu’il soit parmi les chasseurs les plus mortels et discrets de la galaxie, le fier Loulou se fait toutefois surprendre comme un perdreau de l’année par sa proie, et un féroce combat s’engage entre le représentant de l’humanité et celui de la Grande Dévoreuse.

Malgré ses meilleurs efforts, récompensés par un poignet douloureux pour son adversaire chitineux, Felgir se fait surclasser par la vitesse et la férocité du Lictor, mais surtout par ses fléchettes thoraciques empoisonnées (et pourtant, c’est kikoolol, on est d’accord), dont la toxicité menace de transformer la Space Watch en Death Wolf. Terrassé par les toxines xenos, Fergy développe une gueule de bois express plus carabinée que s’il avait fait un cul sec de tonneau de mjød. Il se voit mourir et le lecteur aussi : cette histoire va-t-elle se conclure dans le sang et les larmes ?

Début spoilerRéponse : oui, mais pour le Lictor. Il s’avère que le Sergent de l’escouade de Felgir n’a finalement pas permis à cette tête brûlée de soloter le dernier boss de Phirus, mais a utilisé l’imprudent Space Wolf comme appât pour débusquer l’insaisissable bestiole et lui coller un bolt au mercure dans les cervicales pendant qu’elle était occupée à martyriser notre ami velu. Tout est bien qui finit bien (sauf pour le Lictor, encore une fois), et Marek Angeloi envoie un rapport confirmant le succès de la purge de Phirus à ses maîtres de l’Ordo Xenos, et demandant à être sorti du service actif de la Death Watch pour poursuivre ses xenocides sous les couleurs de son Chapitre d’origine. Et on peut compter sur un(e) Scythe of the Emperor pour continuer à moissonner du tyty…Fin spoiler

1 : Je sais ce que vous vous dîtes : comment peut-on être sûr que c’est le dernier ? Eh bien, il semble qu’il existe une technologie impériale très précise d’identification des Lictors, puisqu’il s’agit de la seconde histoire de la Black Library (après ‘13th Legion’) où le héros piste l’ultime Tyranide de la planète. TGCBL !

AVIS :

Goulding signe une petite histoire reprenant la trame classique du « chasseur/chassé », relevée par un coup de théâtre final relativement efficace (bien aidé en cela par le fait que dans un univers aussi grimdark que Warhammer 40,000, la nouvelle aurait très bien pu se terminer par la mort de Felgir). Il donne également des nouvelles de l’un de ses personnages SotE récurrents, la forte tête Marek Angeloi, dont on ne sait pas encore à ce stade si la demande de réaffectation a été acceptée par l’Inquisition. La bureaucratie génère des délais incompressibles, c’est connu…

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Thanquol Triumphant – C. L. Werner [WFB] :

INTRIGUE :

Thanquol TriumphantServir la volonté de l’Hérésiarque Kritislik n’est pas tous les jours chose facile, et ce n’est pas Thanquol qui dira le contraire. Chargé par son boss de détruire le Clan Krawl, dont l’alliance potentielle avec le Clan Mors pourrait déséquilibrer les rapports de force à Skarogne et réduire l’influence des Prophètes Gris sur la société skaven, notre machiavélique héros a réussi à convaincre le seigneur Fissk d’emmener son armée à l’assaut du camp orque le plus proche, en lui faisant le coup de la panne de la vision prophétique (en même temps, c’est dans sa fiche de poste).

Les combats font rage et ne tournent pas franchement en faveur des hommes rats, qui se font concasser par les brutes vertes au corps à corps et bombarder de rochers à distance. Cette situation compromise fait toutefois les affaires de Thanquol, qui n’attend que l’inévitable débâcle générale de l’armée skaven pour faire une belle plus-value. Le Prophète Gris s’est en effet arrangé avec le Clan Skully (on ne peut pas toujours compter sur le Clan Moulder) pour organiser un comité d’accueil dans les galeries du Clan Krawl, et réduire en esclavage les survivants de cette bataille. Cette fortune future ne lui sera toutefois d’aucune utilité s’il ne survit pas à la mêlée, et bien qu’il ait pris le soin de se positionner dans les lignes arrière, comme il sied à son rang, l’artillerie peau verte se révèle un peu trop précise à son goût. Après avoir manqué de finir en rat-prenade deux fois de suite en l’espace de quelques minutes, Thanquol décide que la plaisanterie a assez duré et envoie une bonne malefoudre carboniser l’irritant lance-roc. Problème réglé !

Début spoiler…Mais Thanquol ne serait pas Thanquol s’il arrivait tranquillement à ses fins, bien sûr. Il y a des gens qui ont de la chance dans leur malheur, Mr T. lui a de la poisse dans son bonheur. Avant de partir en fumée, le lance-roc a le temps d’expédier une ultime cartouche dans la boîte, qui dévie franchement et écrase le seigneur de guerre orque et sa garde rapprochée, paniquant le reste de sa Waaagh ! et renforçant le moral des Skavens. Voilà qui s’appelle arracher la victoire des mâchoires de la défaite, et si ce n’était pas ce qui avait été prévu par Thanquol, ce dernier a suffisamment de métier et de vice pour tirer profit de ce résultat improbable. Après tout, n’est-il pas le génial stratège ayant guidé le Clan Krawl vers une victoire éclatante sur la vermine orque grâce à ses visions, hein ?Fin spoiler

AVIS :

Thanquol, comme ses Némésis habituelles que sont Gotrek & Felix, fait partie des personnages de la Black Library dont les apparitions sont scriptées. On sait dès la première ligne que l’ingénieux Skaven va preeeeeeeeeesque réussir à mettre en exécution un plan aussi génial que retors, échouer de la manière la plus improbable qui soit, mais réussir malgré tout à se tirer d’affaire, souvent à un poil de moustache près. Ce petit ‘Thanquol Triumphant’ peut donc être vu comme un échantillon représentatif de ce (sous) genre, dont C. L. Werner est le principal représentant. Je pense qu’il aurait pu faire preuve d’un peu plus d’inventivité dans le déroulé de ces quelques pages, qui parviennent à être répétitives en dépit de leur nombre très limité, et la fin est un peu trop cousue de fil blanc à mon goût, mais ça reste tout à fait lisible.

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The Emperor’s Chosen – M. Lee [40K] :

INTRIGUE :

The Emperor's ChosenAlors qu’il se préparait studieusement avec ses frères au prochain assaut sur Sepharis Ultra, un jeune initié Black Templar du nom de Reinhardt est frappé par une vision de l’Empereur, lui annonçant qu’il est son 100,000,000,000,000ème sujet à lui adresser une prière aujourd’hui, et qu’il a donc gagné un iphone 7 ainsi que le droit de devenir son Champion dans la prochaine campagne. Quelle chance.

Reinhardt court au Reclusiam vider son sac auprès du Chapelain Karst, qui a tôt fait d’établir la véracité de l’expérience transcendantale vécue par le frère de bataille, et fait donc mander la panoplie du parfait petit Champion dans l’arsenal de la Barge de Bataille qui amène les Black Templars jusqu’à Sepharis Ultra. Protégé par l’Armure de la Foi et équipé de l’Epée Noire1, Reinhardt aura pour mission d’abattre le meneur des Seigneurs de la Désolation, une bande de Space Marines renégats ayant conquis cette planète impériale pour accomplir leurs sombres desseins. Du succès de ce duel avec le sorcier Word Bearers X’hal Urus dépendra le destin de ce monde, mais heureusement, l’Empereur a donné ses meilleurs conseils de bretteur à Son Champion, et Reinhardt débarque donc sur le champ de bataille avec une confiance inébranlable dans ses capacités…

Début spoiler…Malheureusement pour notre fringant héros, il sait aussi que son triomphe sera de courte durée, et que X’hal Urus lui portera un coup fatal avant de mourir. Un peu comme le duel entre l’Empereur et Horus, vous me direz. C’est tellement fluff que l’on peut supposer que ce fan transi de Reinhardt n’espérait pas meilleure destinée, et si le rideau tombe sur l’affrontement entre loyalistes et hérétiques avant que ce duel fatidique n’ait vraiment débuté, on peut tout de même considérer que cette nouvelle se termine par une happy end.Fin spoiler

1 : Enfin, une des Armures de la Foi, et une des Epées Noires du Chapitre (celle-ci avait tout de même plus de 9 400 ans au moment de la campagne, c’était un vieux modèle). Il faut bien faire des compromis sur l’originalité des reliques si on veut guerroyer à travers la galaxie.

AVIS :

Plus connu pour ses travaux Crimson Fists que Black Templars, Mike Lee s’empare d’un des mythes centraux de cette fière fraternité des fils de Dorn et en tire une micro-nouvelle illustrant le fanatisme fataliste des surhommes en noir et blanc. Sans être mauvais, le résultat est assez quelconque.

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Voyage of the Sunspear – B. Counter [WFB] :

INTRIGUE :

Voyage of the SunspearLorsqu’une flotte pirate mal inspirée décide de piller le littoral d’Ulthuan, la réaction des fiers Hauts Elfes ne se fait pas attendre, et une véritable armada prend la mer pour châtier les humains qui ont cru malin de titiller Doughnut Land. Menée par la grande amirale Caladoria depuis la barre de son catamaran de combat, le Sunspear, c’est une escadre entière de navires tous plus wahou les uns que les autres qui a pris la mer et franchi les portes de Lothern pour cingler vers le Vieux Monde. Bateau-tour pour l’Archimage Galindorm, yacht cristallin pour le Prince Keldorim, navire à menhirs envoyé par la cour de la Reine Éternelle, galère à feu grégeois de Caledor, sans compter la douzaine de vaisseaux classiques et les frégates-dagues qui escortent tout ce beau monde… c’est un spectacle époustouflant qui s’offre à la vue du lecteur (et des mouettes de Lothern), et on se dit que les malheureux adversaires de cette flotte bariolée ont vraiment du souci à se faire…

Début spoiler…Enfin ça, c’est si le Sunspear et ses camarades arrivent à bon port, ce qui est loin d’être certain. La nouvelle se termine en effet dans l’habitacle enfumé du Grimnir Revenge, un sous-marin nain dont le capitaine n’hésite pas longtemps avant d’ordonner un torpillage en règle de la flotte elfique. On ne saura pas ce qui a provoqué cette réaction belliqueuse, les Hauts Elfes n’en ayant pas après les Nains à ce stade, mais faut-il une raison à ces deux races pour se tirer dans les pattes (et les coques) depuis la Guerre de la Barbe, hein ? Fin spoiler

AVIS :

Ben Counter fait un crochet par le Monde qui Fut et nous livre une nouvelle maritime que l’on devine construite autour de son twist final, ce qui se conçoit tout à fait même si pour ma part, j’ai du mal à considérer qu’un vaisseau nain ferait acte de guerre envers une flotte haut elfe sans aucune provocation, rancune ou pas rancune. La décision fatidique du capitaine Granitebrow aurait pu être motivée dans une éventuelle suite à ce (dernier) ‘Voyage of the Sunspear’, mais à ma connaissance, on en est resté là.

Chose étonnante pour un habitué de 40K, et qui n’aura (à ma connaissance) signé qu’un roman et deux nouvelles – dont celle-ci – pour la franchise medfan de la GW-Fiction, Counter ne se gêne pas pour nous balancer des tonnes de fluff au détour de ces quelques pages, et nous livrer la description la plus fouillée de la marine de guerre des Hauts Elfes qui soit1. Cela rend la lecture de ‘Voyage of the Sunspear’ indispensable pour tout amateur de lore warhammeresque devant l’éternel.

1 : Il faut tout de même noter que Dread Fleet était sorti en 2011, l’année précédent la publication de cette nouvelle. Et la page du site de la Black Library où ‘Voyage of the Sunspear’ est offert à la vente fait encore la pub pour Man O ’War Corsair (mais que font leurs stagiaires ?)…

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The Third Wise Man – N. Vincent [40K] :

INTRIGUE :

The Third Wise ManPour le frère Constantine du Chapitre des Iron Snakes, l’heure du grand oral a sonné. Notre ami ambitionne de devenir Chapelain, mais pour cela il doit convaincre trois Capitaines (Didymos, Pheus et Cules) qu’il est le surhomme pour ce poste stratégique1. Prostré au sol dans la position du supplicateur ithakien (c’est-à-dire front contre sol, bras écarté et probablement en petite tenue – on sait s’amuser chez les Chapitres d’obédience hellénique), Constantine se fait fraîchement recevoir par son jury, chacun des Capitaines y allant de sa petite anecdote honteuse sur la carrière de l’impétrant.

Didymos ouvre les hostilités en lui rappelant qu’il a perdu trois hommes de son escouade lors de la mission sur Manolis. Cules renchérit en notant qu’il a fait pire sur Hrystalla, où il a été le seul survivant de son escouade, et a pantouflé pendant sept longues saisons sur Ithaka le temps de se refaire une santé après cela. Pheus enfonce enfin le clou en évoquant son refus d’obtempérer lors de la campagne de Baltasar, durant laquelle il n’a pas daigné participer à l’assaut en drop pod sur cette planète, qui fut finalement conquise par l’ennemi et arrachée du giron de l’Empereur. Ça fait tout de même beaucoup, vous le reconnaitrez, et ce ne sont pas les plus plates contritions de Constantine, qui « endure la douleur atroce de la perte de <insert boulette here>, depuis ce jour fatidique jusqu’à aujourd’hui, les cœurs lourds », qui changeront quelque chose à cette litanie d’échecs.

Toutefois, si Constantine n’a pas toujours brillé sur le champ de bataille, il a en revanche su cultiver de solides relations, et trois d’entre elles viennent prendre sa défense. Le premier à parler n’est autre que l’incontournable Sergent Priad, qui rappelle à l’auguste assemblée que Manolis s’est terminé par une victoire impériale, et que cinq milliards de loyaux sujets de l’Empereur ont été sauvés par l’action de Constantine et de ses hommes2. Et pour marquer le coup, Priad humecte délicatement le crâne chauve et les mains tendues de son poto, dans le respect des traditions aquatiques d’Ithaka.

Le deuxième avocat de Constantine est le frère Kater Holofurnace, fraîchement revenu de la Croisade de Sabbat, qui souligne que son camarade, dont Hrystalla était la première véritable mission, a réussi à ramener avec lui les glandes progénoïdes de toute son escouade, ce qui a permis au Chapitre de reconstituer ses forces. Ça n’excuse pas tout mais c’est tout de même honorable. Et Holofurnace de dégainer à son tour sa gourde pour une petit goutte à goutte rituel.

Enfin, c’est le Maître de Chapitre Seydon qui débarque en grande pompe dans la salle d’examen, et, conscient d’être en retard, se contente de micro waterboarder Constantine comme la tradition le veut, avant de le relever et de le féliciter pour son élévation au rang de Chapelain. Ce n’est qu’un peu plus tard que nous avons le fin mot de l’histoire à propos des opérations de Baltasar. Seydon, qui n’était que Capitaine à l’époque, a pris la décision d’un assaut en drop pod contre l’avis de Constantine, et le résultat désastreux de cette initiative montra avec le recul qui était le plus malin des deux. Mais ça n’a pas empêché Seydon de faire carrière, et c’est bien la morale de cette histoire : chez les Iron Snakes, la séniorité prend toujours le pas sur la sagesse. And I think it’s beautiful…

1 : Il doit aussi leur apporter des cadeaux (deux lances et un caleçon en cuir de wyrm marin), dans la plus grande tradition du népotisme impérial.
2 : Et puis Priad ne peut pas vraiment se permettre de juger sévèrement un collègue Sergent qui a perdu des hommes au combat, lui-même n’étant pas exempt de toute critique de ce point de vue là…

AVIS :

On croyait en avoir fini avec les Iron Snakes après ‘Brothers of the Snake’, mais ces Space Marines ont la peau dure et la sympathie d’un certain nombre d’auteurs de la Black Library (en plus de celle de Dan Abnett, bien sûr), ce qui explique leur persistance discrète dans la GW-Fiction. Cette petite histoire nous en apprend un peu plus sur les rites, décidément très fétichistes (tous ces échanges de fluides en gros balèzes en petite tenue, c’est suspect), de cette confrérie écailleuse, et de passer en revue une grande partie des têtes nommées de cet auguste Chapitre. Si vous êtes fans de ce dernier, c’est donc un must read absolu, sinon, vous pourrez tout de même apprécier une histoire de Space Marines où personne ne meurt et qui se finit bien (ce qui est assez rare).

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Strike and Fade – G. Haley [HH] :

INTRIGUE :

Strike and FadeAu lendemain de la monumentale trahison d’Isstvan V, un groupe de quatre Légionnaires Salamanders (Jo’phor, Hae’Phast, Go’sol et Donak) essaie tant bien que mal de survivre dans les désolations désolantes et désolées de cette planète désormais maudite. Bien que le moral soit bas, les loyalistes peuvent compter sur des activités de team building cathartique pour tenir le coup, comme par exemple embusquer des bikers Night Lords s’étant aventurés dans la pampa pour pratiquer la chasse à courre nostramane. C’est exactement comme celle que l’on connaît, sauf qu’il faut remplacer le renard par un Raven Guard à poil (si on n’en a pas, une autre Légion fait aussi l’affaire), et les chevaux par des motos. On peut utiliser une meute si on en a une sous la main, ce qui n’était pas le cas de nos amis de la 8ème. On ne peut pas toujours tout prévoir.

Comme on peut s’y attendre, les gentils lézards règlent leur affaire aux affreux jojos avec une efficacité consommée, et en profitent pour piquer le matos et les rations de leurs victimes afin d’alimenter leur effort de guérilla. Comme on dit, les petits ruisseaux font les grandes rafales de bolter. Malheureusement, leur camarade corbeau hérite d’une blessure thoracique mortelle au cours de l’échange de tir, et meurt dans les bras du noble Joe Fort, non sans avoir exprimé sa gratitude éternelle (plus que lui en tout cas) à ses frères de bataille pour l’avoir sauvé des griffes des Night Lords. Victoire tactique et victoire morale pour les Salamanders. Qu’ils en profitent, il n’y en aura plus beaucoup d’autres d’ici à la fin de l’Hérésie…

AVIS :

Si en 2012 tout le monde connaissait déjà la grande histoire d’Isstvan V (racontée dans ‘Galaxy in Flames’ par Ben Counter dès 2006), le sort des quelques survivants épars des Légions loyalistes étant tombées dans le piège de ce fieffé fripon d’Horus n’avait pas encore été couvert par grand-monde au sein de la Black Library. Guy Haley fut donc parmi les premiers à (re)donner leurs lettres de noblesse aux losers magnifiques des Légions Brisées, bien avant que Nottingham ne leur consacre un recueil de nouvelles (2017). Cette parenthèse historique mise à part, il n’y a pas grand-chose à dire de ce ‘Strike and Fade’, qui présente les Salamanders sous l’angle favorable qu’on leur connaît, mais ne développe pas assez son quatuor de personnages pour qu’on s’attache à eux. Potable.

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Honours – J. Swallow [40K] :

INTRIGUE :

HonoursLe Capitaine de la 1ère Compagnie des Blood Angels nous fait l’honneur d’expliquer comment il a gagné ses cicatrices, armes et emblèmes au cours de sa longue carrière. Il perdit un œil dans sa jeunesse, après avoir cru pouvoir se débarrasser en solo d’un Psyker finalement plus coriace que prévu. Son Maître de Chapitre lui remit l’épée énergétique Challenger après qu’il eut gagné un tournoi de tennis, et il l’utilisa pour bannir le Prince Démon de Tzeentch Sethselameth. Après être venu au secours d’une poignée d’Imperial Fists piégés pendant deux cents ans dans le siège d’une station spatiale (le rêve absolu pour eux), les fils de Dorn lui firent cadeau d’un bolter jaune poussin. Enfin, la gemme bleue ornant l’aquila de son plastron lui est revenue après des années de bons et loyaux services1.

On apprend pour terminer que le Capichef est en fait mort au combat, tout son stuff légendaire n’ayant pas fait le poids face à une horde de peaux vertes motivés à faire du vilain sur le monde ruche de Levion Gamma. Ce sont les risques du métier.

1 : Swallow ne devait plus avoir d’idées à ce moment là de l’écriture.

AVIS :

Swallow tire le maximum du format compliqué du 1.000 mots en troussant en décrivant par ses faits d’armes notables (avec un peu de fluff dedans, c’est appréciable) d’un héros méconnu du Chapitre des Blood Angels, ce qui est tout de même plus sympa à lire qu’une micro-baston entre deux tondus et trois pelés. Il y a même un micro-twist à la fin, attention appréciable de la part de l’auteur. Toujours trop cher pour ce que c’est, mais il y a bien pire que cet ‘Honours’, soyez-en certains.

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Deliverance Detail – D. Guymer [40K] :

INTRIGUE :

Deliverance DetailLa nouvelle commence mal pour Callan, membre des Forces de Défense Planétaire d’une planète tout juste conquise par un envahisseur extraterrestre. Emmené avec ses milliers de compagnons d’infortune dans une base militaire tenue par les vainqueurs, il attend, menotté et aveuglé, que son sort soit décidé. Malgré ces circonstances difficiles, il peut au moins compter sur sa foi en l’Empereur pour tenir le coup, à condition de rester discret pendant ses prières : ses gardes ont formellement interdit aux captifs de mentionner Son nom. Qu’importe : Callan est fier d’avoir fait son devoir et de s’être battu trois longues années contre les assauts des hordes chaotiques qui se sont abattues sur sa planète…

Début spoiler…En tout cas, c’est ce qu’il (et ses camarades) croyaient, jusqu’à ce que les assaillants soient rejoints par d’authentiques Space Marines. En plus de plier la campagne avec leur efficacité légendaire, les Astartes firent réaliser à Callan et ses comparses qu’ils s’étaient battus du mauvais côté de l’histoire, la faute à la corruption des dirigeants de la planète et à leur effort de propagande plutôt efficace.

Bien que notre héros dupé se soit aussitôt rendu après avoir réalisé sa méprise, la légendaire bienveillance impériale le mena tout droit au peloton d’exécution. On ne saura pas si la Garde Impériale réserva le même sort aux quinze millions de FDP hérétiques à l’insu de leur plein gré, mais ça ne m’étonnerait qu’à moitié…Fin spoiler

AVIS :

David Guymer livre une micro-histoire tout à fait grimdark dans ce ‘Deliverance Detail’, qui illustre à merveille que l’Imperium, lui, ne fait dedans (le détail, si vous ne suivez pas) lorsqu’il s’agit de pacifier une zone de guerre. Tant pis si vous avez été victime des circonstances ou d’un tour pendable du destin, la morale de l’histoire est qu’il y en a suffisamment comme vous à travers la galaxie pour que votre injuste disparition ne chagrine personne. Personne d’important en tout cas.

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The Contest – J. Ellinger [WFB] :

INTRIGUE :

The ContestLorsque Gotrek et Felix pénètrent dans une auberge minable comme le glorieux Empire en compte tant, après s’être tiré d’une embuscade perpétrée par des bandits locaux peu de temps auparavant, ils ne s’attendaient sans doute pas à ce que leur repos bien mérité soit interrompu par de belliqueux piliers de comptoir. Le récit de leur mésaventure par un Felix encore tout encrassé par cette algarade attire en effet l’attention hostile d’un certain Boxen, dont l’un des cousins a choisi l’honnête carrière de malandrin, et qui a sans doute payé de sa vie sa rencontre malavisée avec le power duo le plus mortel du Vieux Monde. Les risques du métier.

Boxen, qui bénéficie de l’avantage numérique grâce à la présence de quatre compagnons tout aussi interlopes que lui, est tout prêt à lancer une bagarre générale pour réparer l’honneur familial, mais l’aubergiste le convainc que ce n’est pas dans son intérêt d’attirer l’attention de la milice locale sur son gang de petites frappes : aussi, l’affaire sera résolue d’une manière beaucoup plus civile. Un concours de descente de pintes est lancé sans plus tarder, le perdant se retrouvant à la merci du gagnant pour une explication de texte dans un coin tranquille et à l’abri des regards.

Gotrek, sûr de la force de son bras (et de son foie) accepte sans broncher ni réfléchir les conditions défavorables formulées par le retors Boxen avant que l’épreuve ne commence. Alors que le Nain lèvera le coude seul, Boxen et ses hommes picoleront en équipe et se partageront les pintes, rapport de force qui alerte Felix malgré les solides atouts dont le Tueur dispose en matière de picole.

Au final, et après plusieurs heures et tonneaux vidés sans pitié, le concours se termine avant que Boxen et Gotrek n’aient rendu les armes, faute de liquide alcoolisé à ingérer. Très déçu par ce match nul, Gotrek décide de se passer les nerfs sur le dernier ruffian encore debout et éclate donc le pif de Boxen pour la forme, dont le coma éthylique doit se poursuivre encore aujourd’hui…

AVIS :

Une aventure de Gotrek et Felix où personne ne meurt (ou en tout cas, pas face caméra), c’est assez rare pour le souligner. Ceci dit, j’aurais bien aimé que Jordan Ellinger relève le défi d’adapter le plus fidèlement possible le schéma narratif classique de ce sous-genre emblématique de la GW-Fiction dans un format micro-fiction, pour pouvoir juger sur pièce si le concept tient la route (franchement, il y a moyen de faire quelque chose je pense). Cela aurait rendu ‘The Contest’ plus mémorable que ces quelques pages alcoolisées, sans nul doute.

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The Little Things – S. Mitchell [40K] :

INTRIGUE :

The Little THingsDe passage sur une station orbitale très touristique entre deux affections sur le front, le Commissaire Ciaphas Cain profite de la relâche pour rendre une visite de courtoisie à sa bonne amie l’Inquisitrice Amberley Veil, qui réside dans une suite de luxe sous une de ses identités d’emprunt. En gentleman qu’il est, Cain prend soin d’acheter en chemin un bouquet d’heganthas car comme il le dit très bien en aparté quelques lignes plus loin : sur le champ de bataille comme dans un rendez-vous galant, c’est l’attention aux petits détails qui sépare les victimes des vainqueurs.

Accueilli chez sa chère et tendre par sa suivante Zemelda pendant qu’Amberley vocalise sous la douche, Cain a à peine le temps de saluer sa sculpturale hôtesse à la sortie de sa toilette qu’un domestique indélicat vient tambouriner à la porte. Cette impolitesse s’explique par le fait que le nouveau venu n’est pas vraiment venu pour monter des clubs sandwiches aux tourtereaux, comme il le prétend, mais pour tenter de kidnapper Amberley a.k.a. la riche duchesse Trucmuche de la planète de Cétréloin afin de demander une rançon à sa famille. Les pauvres jaloux des riches, vraiment, quelle plaie.

Malheureusement pour le ruffian et ses deux comparses, il faut plus qu’une arrivée au débotté pour mettre en difficulté un héros de la trempe de Cain, surtout s’il peut compter sur l’aide d’Amberley qui n’hésite pas un instant à reconvertir sa serviette drap en fouet, désarmant le dernier larron au moment où il allait donner au Commissaire un nouveau trou de balle et permettant à ce dernier de lui rendre la pareille de manière préventive. Comme Cain le fait remarquer avant que le rideau ne tombe définitivement sur cette soirée entre adultes consentants, le malfrat aura au moins eu la chance d’emporter avec lui une dernière vision beaucoup plus plaisante que la majorité des tués du 41ème millénaire. Ce n’est pas grand-chose c’est vrai, mais comme dit plus haut, ce sont les petites choses qui comptent…

AVIS :

Aventure plus grivoise que musclée de Ciaphas Cain, ‘The Little Things’ ne fait rien d’autre que montrer au lectorat de l’héroïque Commissaire que ce dernier sait prendre du bon temps lorsque le devoir ne l’appelle pas, même si sa capacité surnaturelle à créer du drama autour de lui peut générer quelques menus désagréments de temps à autre. Rien que les habitués de la saga ne connaissent pas déjà.

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On the Heels of Morkai – N. Kyme [40K] :

INTRIGUE :

On the Heels of MorkaiÀ la surface de Fenris, un humain solitaire est poursuivi par deux des loups géants pour lesquels la planète est célèbre à travers l’Imperium. Sa course échevelée (tous les locaux portent la moumoute, c’est une coutume immémoriale) le mène à travers un lac gelé, où il réveille par mégarde un kraken endormi sous la surface. N’étant équipé que de sa biht1 et de son couteau, cette rencontre aurait pu très mal se terminer pour notre marathonien de l’extrême, qui parvient toutefois à regagner la terre ferme avant de se faire tentaculer par le poulpe d’eau douce.

Pas le temps de reprendre son souffle, cependant : il faut à notre coureur isolé traverser une forêt pleine d’arbres en bois, puis s’atteler à l’ascension en solo d’une falaise de 400 mètres de haut, toujours poursuivi par les infatigables prédateurs de la toundra de Fenris (qui ont certainement trouvé un chemin pour monter en haut du pic, ce qui pose la question de pourquoi notre athlète n’a pas fait la même chose au lieu de risquer sa vie de la sorte…). Enfin arrivé au sommet, il fait face à la figure imposante d’un Prêtre des Runes Space Wolf, et se prépare à être jugé par cet austère guerrier…

Début spoiler…Enfin ça, c’est si notre héros avait été un simple impétrant au Chapitre. Canis Wolfborn, car c’était lui, a passé cette épreuve depuis belle lurette, et le gonze qui l’attend en haut de la montagne est simplement venu le rappeler à ses devoirs. Un appel à l’aide est parvenu jusqu’au Croc, et en l’absence probable de Harald Deathwolf, il revient à son champion de décider si le rout y donnera suite. Comme on peut s’y attendre, Canis accepte avec joie de relever ce défi, promettant à ses loups de compagnie Timba et Mia (avec lesquels il faisait la course, et n’était pas chassé par ces derniers comme on en avait l’impression) qu’il leur accordera une revanche à son retour. Mais le travail avant tout. Fin spoiler

1 : Un mot fenrisien dont le sens a malheureusement été perdu. C’est dommage.

AVIS :

Mine de rien, les nouvelles de la Black Library où un Space Wolf court comme un dératé à travers la toundra en essayant de survivre aux conditions extrêmes dans lesquelles il évolue sont suffisamment nombreuses pour constituer un sous-genre de la littérature grimdark. Même si la concurrence n’est pas pléthorique, ‘On the Heels of Morkai’ peine à s’imposer comme un modèle du genre, la surprise finale réservée au lecteur par Nick Kyme ne s’avérant (à mon sens) guère crédible. Voir un Prêtre Rune attendre patiemment en haut d’une falaise que son boss termine sa morning routine (et venir sur place avec Fangir1 pour encore plus de fun) au lieu de cueillir Canis en plein milieu de la pampa avec un Stormfang me semble vraiment peu correspondre au lore de 40K. Dispensable.

1 : Ici orthographié Fregir, probablement parce que Kyme est trop haut placé à la BL pour que ses textes soient relus et édités.

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The Last Little Bit – R. Earl [WFB] :

INTRIGUE :

The Last Little BitIl est temps pour Gofg Dent d’Or Tyran de sa tribu depuis plus de quarante ans, de se choisir un héritier. Il se fait vieux (même pour un Ogre), et a déjà dû refroidir les ardeurs parricides de deux de ses fils d’une manière définitive par le passé : il est grand temps de passer la main. Pour ce faire, il a convié le reste de sa marmaille à un gueuleton de compétition, où les règles sont simples : qui mange gagne.

Après trois jours à banqueter sans interruption, ils ne sont plus que trois à la table : Papa Gofg, Grond et Graissus. Bien que les trois Ogres soient depuis longtemps passés dans le dur, aucun n’est prêt à baisser la garde ni à jeter la serviette, et le Boucher de la tribu continue à les régaler de ses spécialités carnées (et plus ou moins faisandées, ça rajoute du goût), jusqu’à ce que le drame se produise : le garde-manger a été vidé, il ne reste plus rien à ingérer pour nos fins gourmets.

Bien que Père Castor Dent d’Or soit en faveur de déclarer un match nul, quitte à recommencer plus tard (le temps de digérer un peu, et de passer au petit coin – je plains le service de ménage Gnoblar…), Graissus ne peut se résoudre à interrompre son effort si près de la victoire. Il attrape donc une chaise, et la fracasse péniblement sur le crâne paternel, envoyant ad patres le vieux Tyran. Dès lors, la suite est toute tracée : le Boucher découpe prestement le cadavre du macchabée en deux parts égales (de 250 kilos chacune, tout de même), et le concours d’ingestion peut reprendre de plus belle.

Malgré les conséquences terribles pour son système digestif, poussé dans ses derniers retranchements par cette boulimie cannibale, Graissus parvient en premier à terminer sa moitié alors que Grond démontre des signes manifestes de calage. Enfin, presque terminer. Il lui reste en effet sa part du « dernier petit bout1 » paternel à ingurgiter, et lorsque le Boucher fait son office et tranche l’ultime portion en deux, Grond se met à dégobiller le contenu de sa panse boursoufflée. Qui a dit que les Ogres n’étaient pas sensibles ? Ce déluge de vomi, dont il prend quelques litres en pleine figure, ne perturbe pas le moins du monde Graissus, qui avale sans faiblir le dernier morceau et devient par la même occasion Tyran incontesté de la tribu Dent d’Or. La suite appartient à l’histoire (et à la cuvette des toilettes…).

1 : Que Robert Earl se contente d’appeler de cette manière, comme s’il s’agissait d’une expression consacrée (après quelques recherches, je n’ai rien trouvé de tel). Vous pouvez donc vous représentez ce que vous voulez, et pas seulement l’option la plus salace qui soit (pervers).

AVIS :

Robert Earl, grand spécialiste des Ogres devant l’éternel, développe en quelques pages l’origin story du plus grand – et gras – des Tyrans des Montagnes des Larmes, présentée de manière succincte dans les Livres d’Armée de cette noble race. Même si on sait d’avance comment l’histoire se termine, notre homme est assez bon conteur pour que le récit de ce banquet proprement pantagruélique, voire même carrément gargantuesque, mérite la lecture. C’est gore, c’est glauque, mais ça reste malgré tout assez drôle tellement c’est over the top en matière d’ingestion de protéines. À consommer jusqu’au dernier petit bout, comme il se doit.

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Like Father, Like Son – M. Latham [WFB] :

INTRIGUE :

Like Father, Like SonUn homme (Jens) et son jeune fils de cinq ans s’aventurent en pleine nuit à travers les terres sauvages et pas vraiment hospitalières de l’arrière-pays du Middenland. En chemin, Jens prend soin d’inculquer à son rejeton tous les trucs et astuces de trappeur trotro balèze qu’il a lui-même appris de ses aïeux ou développé au cours de sa longue et ardue existence, comme ne jamais utiliser l’autoroute (c’est cher et c’est mal fréquenté), ou encore éviter la compagnie des étrangers. Un gai luron ce Jens, vraiment.

Leur road trip nocturne emmène les deux marcheurs à travers les ténèbres de la Drakwald, et sur le territoire des multiples prédateurs qui y rôdent. Après avoir repoussé l’attaque d’une meute de loups un peu trop entreprenante, et évité les toiles d’araignées de fort belle taille, la destination que Jens cherchait à atteindre apparaît enfin au détour du sentier. Nul doute que ça valait le déplacement…

Début spoiler…Et en effet, on ne trouve pas plus chaude ambiance à des lieues à la ronde que le campement d’Hommes Bêtes où le vieil excentrique a amenés son fiston. Jens n’est pourtant pas un adepte du Chaos, seulement un père lucide : son petit gars est un mutant dont les difformités sont trop visibles pour lui permettre de vivre normalement parmi ses semblables, et le seul moyen pour lui d’échapper au bûcher des Répurgateurs est de partir en pension dans une harde de Gors plus ouverts d’esprit que le péquin impérial moyen. La nouvelle se termine alors que le Chamane de la tribu s’en va accueillir la nouvelle recrue de cette dernière, laissant Jens partir sain et sauf mais le cœur gros d’abandonner son enfant. Le placement est parfois la seule solution qui vaille…Fin spoiler

AVIS :

Même si on se doute rapidement à la lecture de ‘Like Father, Like Son’ que Mark Latham nous réserve une surprise finale, ce dernier mène bien sa barque et parvient à accomplir son objectif avec cette petite nouvelle qui explore de manière assez touchante les liens ténus mais pas absents entre humains « normaux » et mutants dans le monde de Warhammer. A classer à proximité de ‘The Hunter’ (G. Lyon), tant pour la longueur que pour les protagonistes, mais à placer au-dessus de cette autre microfiction.

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Out Caste – P. Fehervari [40K] :

INTRIGUE :

Out CasteUne vétérane (et c’est assez rare pour le souligner) couturée de la Caste de Feu se souvient de ses débuts au service du Bien Suprême, du temps où elle était une jeune recrue charismatique et déterminée à s’élever dans les rangs. Baptisée J’kaara (miroir) en raison de sa nature altruiste et de sa capacité à tirer le meilleur de ses camarades, elle commença sa carrière lors de campagnes mineures contre la menace Ork. Le vrai test fut cependant l’invasion de la planète Oba’rai, monde impérial isolé et défendu par un seul régiment de Gardes Impériaux, des adversaires bien plus nobles que les peaux vertes aux yeux de l’idéaliste Kaaren.

La campagne se déroula parfaitement du point de vue du haut commandement, les humains se faisant surclasser par les tactiques de frappes éclair et la supériorité technologique de leurs adversaires. Lorsque la capitale planétaire tomba sous les bombardements, des auxiliaires Kroots furent envoyés faire le sale boulot (et casser la croûte) dans les décombres de la cité pour éliminer les dernières poches de résistance, plutôt que de risquer la vie de braves, mais pas téméraires, T’au. Ce choix raisonnable ne satisfit cependant pas J’Kaara, qui désobéit aux ordres et emmena son escouade faire un peu de tourisme en zone de guerre urbaine afin d’assouvir ses penchants héroïco-morbides.

Mal lui en prit toutefois, car elle croisa en route un Commissaire impérial brûlé au 8ème degré mais dont la vue d’une peau bleue le sortit de l’état catatonique dans laquelle la tempête de feu déchaînée par les T’au l’avait placé. Bien que ses camarades ionisèrent le faquin avant qu’il n’ait pu régler son affaire à la pauvre J’kaara, cette dernière sortit de cette rencontre fortuite avec une énorme balafre, l’épée tronçonneuse de l’officier gue’la ayant transpercé son casque sans coup férir. Cette mésaventure ne fractura pas seulement le crâne de notre héroïne, mais également son sentiment de fraternité avec ses camarades, qui se mirent à appeler la shas’ui Jhi’kaara, ou miroir brisé. Sometimes, it’s better not to say hi, you know…

AVIS :

Peter Fehervari nous entraîne dans les premières vrilles de son Dark Coil1 avec cet ‘Out Caste’, qui met en scène le premier personnage récurrent de cette série iconique de la Black Library, la gueule cassée Jhi’kaara (que l’on retrouve dans ‘A Sanctuary of Wyrms’ et ‘Altar of Maws’), dont on apprend en quelques pages l’histoire traumatisante – dans tous les sens du terme. Ce n’est pas aussi inventif dans le propos ou virtuose dans l’exécution que les nouvelles et romans qui ont suivi, mais ça reste malgré tout une très bonne entrée de GW-Fiction.

1 : Sa première nouvelle (‘Nightfall’) pour la Black Library date de 2011, et bien qu’elle se déroule techniquement dans le même coin de galaxie que le reste du corpus Fehervariesque, les liens avec ce dernier sont assez ténus, comme si notre homme n’avait pas encore décidé de se lancer dans une véritable œuvre au long cours à ce stade.

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Czevak to the Dark Tower Came – R. Sanders [40K] :

INTRIGUE :

Czevak to the Dark Tower CameLe calme profond de la lune Savignor, centre de recherche et de formation réputé parmi l’élite du Segmentum Obscurus, est brutalement brisé par l’arrivée pétaradante de l’Inquisiteur Bronislaw Czevak, qui franchit l’un des portails de la Toile aux manettes d’une motojet sans nul doute « empruntée » à une connaissance Eldar.

Si les universitaires qui composent la majorité des habitants de ce petit havre de paix et d’ordre dans une galaxie tourmentée s’offusquent de cette arrivée bruyante autant qu’inattendue, ils n’en donnent pas signe. Ils ont pour cela une bonne raison, comme Czevak ne tarde pas à le découvrir une fois qu’il a terminé des faire des burn dans les pelouses de son ancien QG (il a étudié sur Savignor en son jeune temps) : ils sont tous morts. Un suicide de masse semble avoir été décrété sur la lune il y a quelques heures, et les Savignoriens, en bons sujets de l’Imperium, se sont pliés à cette injonction morbide sans rechigner. Comme c’est gentil de leur part.

Enquêter sur les raisons de cet acte de folie collective aurait sans doute pris des plombes, mais heureusement notre héros a de bonnes raisons de suspecter que ce fieffé coquin d’Ahzek Ahriman est derrière tout ça (comme il était derrière Tizca). Czevak part donc à fond de train en direction de la fameuse Tour Sombre de Savignor, où sont enfermés les reliques et tomes les plus dangereux de la collection planétaire afin de préserver l’Imperium de leur sinistre influence tout en permettant aux quelques esprits assez aiguisés pour cette tâche de consulter ces archives interdites. Si le concept ressemble furieusement à la Bibliothèque Interdite des Eldars, où Czevak a finalement réussi à obtenir sa carte (‘Atlas Infernal’), ce n’est absolument pas une coïncidence. Malheureusement pour les gardiens de la Tour Sombre, le Materium est beaucoup trop accessible aux ruffians de tout espèce, et le petit contingent de Gardes Impériaux (en robe !) stationné sur la lune pour en assurer la sécurité n’a rien pu faire contre la fureur méthodique des Rubric Marines d’Ahriman, comme les impacts de bolter parsemant les murs et les corps croisés par Czevak le montrent bien.

Après une ascension éprouvante et capacitiste (il n’y a aucun ascenseur dans la Tour Sombre, soi-disant pour permettre aux visiteurs de discuter et débattre entre eux sur le chemin de la connaissance), notre héros arrive à l’épicentre du drame qui s’est joué sur Savignor. Dans un hall d’exposition comme la Tour en compte des dizaines, les éclats épars d’une statue de cristal jonchent le sol. Cette statue, un jeune Czevak l’avait contemplée un jour qu’il était entré par effraction dans la Tour Sombre (dont le niveau de protection laisse vraiment à désirer), sans comprendre qu’il s’agissait des restes d’un Prophète Eldar trèèèèèèèèès âgé. Ce n’est que des années plus tard, et grâce aux connaissances glanées au contact des Prophètes Blancs de la Bibliothèque Interdite, que l’Inquisiteur a réalisé que cette statue kitschissime était une relique psychique d’une valeur incommensurable, dont l’un des nombreux usages pouvait être un catalyseur de prophétie, ou quelque chose comme ça (vous voyez l’idée).

On ne saura pas comment Ahriman eut vent de l’existence et de la localisation de cette statue, mais force est de constater qu’il a réussi son coup, comme les fragments cristallins et la très lourde ambiance planant sur les décombres le laissent constater. L’esprit endurci de Czevak et la protection apportée par l’Atlas Infernal lui permettent de ne pas succomber à la même sinistrose terminale que celle qui a déferlé sur les pauvres Savignorais lorsque que le Sorcier suédois s’est offert une latte de crystal meth, mais les nouvelles ne sont pas bonnes pour autant. Il semble qu’Ahriman ait localisé un fil de destinée qui lui permettrait d’atteindre son but : être élevé au rang de divinité (mineure, faut pas déconner) du Chaos. À Bronislaw Czevak d’empêcher cette ascension s’il le peut : le sort de l’Imperium pourrait bien en dépendre…

AVIS :

Rob Sanders poursuit sa biographie de l’Inquisiteur Czevak dans ce court (sauf le titre) ‘Czevak to the Dark Tower Came1’, publié après la sortie du roman ‘Atlas Infernal’, déjà consacré à ce membre iconoclaste des Saints Ordos. On sent une volonté de l’auteur de remettre une pièce dans la machine, et de redonner un but à son héros bariolé après les événements narrés dans le long format précédemment cité. Le résultat est convenable, les miettes de fluff relatifs à Czevak et au Segmentum Obscurus que contiennent ces quelques pages venant agréablement compléter une intrigue simple mais bien alignée avec les canons du grimdark (il n’y a qu’à 40K que des millions de personnes peuvent se suicider après qu’une babiole en cristal de roche ait été fracassée au sol). Ayant déjà lu le reste des travaux Czevakiens de Sanders au moment où je m’attèle à cette revue, je peux malheureusement vous assurer qu’il est mieux de laisser définitivement le bon Inquisiteur sur ce relatif succès narratif, plutôt que de s’affliger les péripéties pataudes que Sanders et la BL crurent bon de développer dans ‘Necessary Evil’ et ‘Shadow Play’.

1 : Une référence au poème de ‘Childe Roland to the Dark Tower Came’ Robert Browning, lui-même inspiré d’une tirade du ‘Roi Lear’ de Shakespeare. C’est la même « tour sombre » qui inspira également les œuvres de C. S. Lewis (le papa des ‘Chroniques de Narnia’) et de Stephen King.

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Veritas Ferrum – D. Annandale [HH] :

INTRIGUE :

Veritas FerrumIl est des événements auxquels il vaut mieux arriver tôt pour être certain de les expérimenter dans les meilleures conditions. Qu’il s’agisse de se retrouver au 78ème rang d’un concert à la sono capricieuse, ou de découvrir que le bar ne sert plus que des soft, on a tous connu des grands moments de solitude de temps à autres. Fort heureusement (?) pour le Capitaine Durun Atticus et son contingent d’Iron Hands embarqués sur le Veritas Ferrum, le massacre d’Isstvan V ne se déroula pas selon la règle du « premier arrivé, premier servi ». Bien que relégués dans la seconde vague medusane à cause de l’empressement de Ferrus Manus d’aller mettre une taloche à ses frangins rebelles, et ainsi gagner la gratitude (à défaut de l’amour, ce serait trop demander) paternelle, Atticus et ses Space Marines arrivent dans le système à temps pour bénéficier de la légendaire hospitalité des légions renégates, et le Veritas Ferrum se retrouve engagé par deux croiseurs des Night Lords et de l’Alpha Legion à peine sorti du point de Mandeville. On peut dire ce qu’on veut de lui, mais Horus a toujours été un hôte prévenant.

Trop pragmatique et désincarné pour se ronger les ongles (par absence de dents et d’ongles) devant ce coup du sort, Atticus passe en mode MathHammer et prend les décisions qui s’imposent pour sortir victorieux de ce threesome non désiré. Rencardé sur la situation désastreuse des loyalistes à la surface d’Isstvan V et le probable décès de son Primarque par les extraits de communication entre unités Iron Hands captés par le pont du Veritas Ferrum, le pragmatique Capitaine ordonne la retraite, conscient qu’il est de sa responsabilité de sauver ce qui peut l’être de sa Légion de cette débâcle.

C’est le moment que choisissent deux Thunderhawks Salamanders pour se joindre aux réjouissances, talonnés par une escadre de vaisseaux Sons of Horus et Emperor’s Children. À leur bord, le Sergent Khi’dem contacte le Veritas Ferrum pour l’implorer de les prendre en stop avant qu’il ne leur arrive malheur, et parvient à toucher une des rares cordes sensibles d’Atticus lorsqu’il révèle que des Iron Hands font partie des survivants ramassés par les altruistes fils de Vulkan avant leur départ en catastrophe. Atticus se ravise donc, et le Veritas Ferrum se jette dans la gueule du loup lunaire1 pour prendre à son bord les Thunderhawks durement éprouvés, héritant au passage de quelques dommages supplémentaires dont une brèche critique sur un flanc.

Au final, l’acte chevaleresque d’Atticus lui coûte plus de vies d’Astartes qu’il n’en rapporte (c’est ce qui s’appelle se faire ratio au 31ème millénaire), et le saut Warp que le Veritas Ferrum s’apprête à faire pour semer ses poursuivants s’avère des plus risqués, les dommages de coque subis lors de la dernière canonnade ayant compromis son intégrité. Les mains de fer et leurs amis à écailles et à plumes parviendront-ils à s’en sortir ? La réponse au prochain épisode…

1 : Enfin plus vraiment à ce stade, mais si vous avez compris la référence, vous excuserez la blague (ou l’inverse).

AVIS :

Prologue du plus mauvais (ou en tout cas, le moins bien accueilli par la communauté, comme sa note de 3.23 – aux dernières nouvelles – sur GoodReads le montre) roman de l’Hérésie d’Horus, ‘Veritas Ferrum’ n’est pas aussi mauvais que son infâme filiation pourrait le laisser craindre. Cette petite nouvelle permet ainsi d’illustrer le côté sans concession des Iron Hands, prêts à abandonner leurs frères et leur Primarque sur le champ de bataille si cela leur permet de maximiser leurs chances de remporter la campagne. Pas mémorable, mais pas abominable non plus.

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Et voilà qui conclut cette revue, tardive mais pas inutile (en tout cas je l’espère) du Black Library 2012 Advent Calendar. Je dois reconnaître que j’ai été favorablement surpris par la qualité des soumissions proposées par les 24 auteurs rassemblés par les pontes de Nottingham pour cette expérimentation festive, malgré un format peu évident à négocier et une offre commerciale réservée à la clientèle la plus aisée de ce hobby de riches qui est le nôtre. Rien que pour ce dernier facteur, je ne regrette pas d’avoir fait l’impasse sur ce bundle à sa sortie, tout comme je ne regrette pas d’avoir parcouru cette sélection de microfictions écrites par quelques-unes de meilleures plumes de la GW-Fiction. Vous parlez d’un paradoxe. Rendez-vous dans un futur incertain mais sans doute pas trop lointain pour la suite de la série, dont vous pouvez déjà deviner l’année, sans nul doute…

INFERNO! – ANNEE 6

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de la 6ème année d’Inferno!, le magazine bi-mensuel publié par la Black Library entre 1997 et 2005, et dédié à la GW-Fiction sous toutes ses formes. Les six numéros dont il sera fait mention ici sont sortis entre juillet 2002 et mai 2003, et regroupent entre eux pas moins de 21 nouvelles, tirées de façon quasi paritaire des franchises Warhammer Fantasy Battle (11 histoires) et Warhammer 40.000 (10 histoires). Pour les plus attentifs et/ou fidèles d’entre vous, l’absence de nouvelles Necromundesques, qui ont pourtant fait partie du périmètre infernal depuis le premier numéro (‘The Demon Bottle’) s’explique à mes yeux par la concurrence faite par un autre jeu « spécialistes » futuriste, et qui venait de sortir à l’époque : Inquisitor1. Un clou chasse l’autre, comme on dit.

1 : J’en veux pour preuve la nouvelle ‘Payback’ de Graham McNeill, qui prend place sur Karis Cephalon, la planète où se déroulent les événements du livret de campagne ‘Death of an Angel’ (2003).

Inferno!_Année 6

Que les admirateurs éperdus de Nathan Creed et de Kal Jericho se consolent, s’ils le peuvent, avec la promesse d’une très haute concentration de personnages nommés (et parfois fameux) dans les numéros qui nous intéressent aujourd’hui. En plus de Gotrek & Felix (‘Redhand’s Daughter’), qui bénéficient, comme les Fantômes de Gaunt avant eux, d’un numéro (#36) à leur gloire, cette année sixième vit le retour d’Uriel Ventris (‘Leviathan’), Mathias Thulmann (‘Meat Wagon’), Angeika Fleischer (‘Head Hunting’), le Sergent Priad (‘Blue Blood’), Torben Badenov (‘Mark of the Beast’), sans oublier l’affable Gregor Eisenhorn (‘Backcloth for a Crown Additional’). Le millésime 2002/2003 vit également la création de figures importantes de la GW-Fiction, à commencer par l’impayable Ciaphas Cain (‘Fight or Flight’, ‘The Beguiling’) et l’efficace Brunner (‘What Price Vengeance?’). Moins gâtés par le passage des ans, mais méritants tout de même une mention spéciale, signalons enfin la présence des agents des lices Dirk Grenner et Karl Johansen (‘Rest for the Wicked’), du Magos Biologis Valentin Drusher (‘The Curiosity’) et du flamboyant corsaire Luka Silvaro (‘A Ship Called Rumour’), que nous aurons l’occasion de recroiser plus tard.

En ce qui concerne les contributeurs de cette année 6, il ne surprendra sans doute personne d’apprendre que ce fut une fois de plus Dan Abnett qui se révéla être le primo plumo (ouais je parle italien) de cette série, avec pas moins de quatre nouvelles à son nom. Suivent les sieurs McNeill, Werner, Mitchell et Spurrier (dont il s’agit pour les deux derniers des premières collaborations avec la Black Library), avec deux contributions par têtes de pipe. Et puisque nous avons commencé notre propos par un rappel de la disparition de Necromunda des pages infernales, terminons par une accolade aux auteurs qui ne reviendront plus nous faire bénéficier de leur talent dans le futur (du passé, mais je me comprends) : Brian Craig et Neil McIntosh. Mention spectrale à Robin D. Laws et Simon Jowett, qui poursuiveront encore quelque temps leur collaboration avec la BL, mais qui n’écriront plus pour Inferno!  par la suite.

Le cadre étant, je le pense, suffisamment planté, il est temps de passer aux choses sérieuses et de partir à la découverte de cette année slaaneshi (allez directement à ‘The Beguiling’ si vous voulez rester dans le thème)…

Inferno! Année 6

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Backcloth for a Crown Additional – D. Abnett [40K] – #31 :

INTRIGUE :

40K_Backcloth for a Crown AdditionalEn villégiature dans son domaine de Gudrun, l’Inquisiteur Gregor Eisehorn doit interrompre ses vacances pour enquêter sur la mort suspecte d’un de ses amis notables. Le seigneur Froigre a en effet passé l’arme à gauche à la suite de la fête organisée pour le retour de son fils sur la planète, à l’âge déçu de 82 ans. Par considération pour la famille, Eisenhorn accepte de jeter un œil au dossier, même si l’affaire lui semble d’une banalité consommée. Pourtant, au fur et à mesure que les indices s’accumulent, Greg va devoir admettre que ce cas n’est peut-être pas aussi éloigné de ses enquêtes habituelles. Le Chaos ne respecte rien, pas même les RTT des fonctionnaires de l’Ordo Xenos. Vilain Chaos, vilain.

AVIS :

Backcloth for a Crown Additional est la réponse d’Abnett à la question que nous nous sommes tous posés un jour : « mais que font les Inquisiteurs pendant leurs congés ? ». Plutôt que de partir à la pêche à la mouche ou faire des paniers en rotin, Gregor Eisenhorn joue donc au Cluedo avec quelques-unes de ses connaissances, ce qui ne doit pas vraiment le changer du boulot. Pour le lecteur, c’est toutefois l’occasion de découvrir l’iconique héros d’Abnett et ses plus proches collaborateurs (Bequin et Aemos) dans un cadre de quasi normalité.

La « gratuité » de cette nouvelle1, qui relate une anecdote assez inconséquente de la longue et difficile carrière d’Eisenhorn, permet à l’auteur de faire la démonstration de sa maîtrise du tempo romanesque : le rythme posé des vingt premières pages, au cours desquelles Abnett fait siens tous les codes du polar d’enquête, s’accélère brusquement et débouche sur un final enlevé, pendant lequel le bon Gregorbotte le cul calleux d’une bouteille de mercure possédée. 

Si la Black Library compte des contributeurs capables d’écrire de bons textes d’action pure, et (mais c’est plus rare) de bons textes « contemplatifs », ils sont en revanche très peu nombreux à savoir marier les deux approches de manière convaincante, ce qui est une autre raison de placer Dan Abnett en tête de peloton.

1 : Comprendre que, contrairement aux autres courts formats prenant place dans la saga inquisitoriale d’Abnett, Backcloth… n’a aucune incidence sur le reste de la série (Thorn Wishes Talon), ni ne révèle d’éléments intéressants sur le passé (Missing in Action, Playing Patience) ou le destin (The Strange Demise of Titus Endor) d’un personnage important de cette dernière.

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Head Hunting – R. D. Laws [WFB] – #31 :

INTRIGUE :

WFB_Head HuntingRetour au Col du Feu Noir (car c’est là que ça se Passe… mouéhéhé) en compagnie d’Angelika Fleischer et de son protecteur (ce qu’il pense) /stalker (ce qu’elle pense), Franziskus. C’est une journée normale pour Angie, qui exerce l’utile profession de récupératrice des champs de bataille, et a localisé le site d’une embuscade grâce aux croassements des corbeaux faisant bombance sur les cadavres abandonnés. Bien que Franziskus, en aristocrate principiel qu’il est, trouve la pratique dégradante, il faut bien que quelqu’un se charge de remettre sur le marché les biens et espèces qui resteraient sinon à prendre la pluie sur leurs défunts propriétaires, au lieu de créer du PIB, comme Baltazar Gelt le voudrait. La moisson du jour est plutôt bonne (un anneau nain pouvant servir de bracelet – les Dawi ont des doigts boudinés – et quelques pièces pour s’acheter un Sub’ en rentrant), mais se fait interrompre par un bruit caractéristique et de mauvais augure : celui d’une hache taillant de la barbaque. Prudents, les deux looters se cachent sur le bord de la route et surprennent peu de temps après un voyageur marchant avec une hache sur l’épaule et un sac suspect à la ceinture.

L’explication de texte entre les trois larrons permet au nouvel arrivant, qui se présente comme le professeur Victor Schreber, de dissiper tout malentendu quant à son accoutrement. Certes, il se balade avec un sac de têtes tranchées, et certes, c’est lui qui les a séparées de leurs précédents propriétaires, mais il l’a fait pour la science. Schreber est en effet un expert en phrénologie, et collectionne les crânes afin de percer le mystère des humeurs et des sentiments de ses semblables. Voyant que le bougre est seulement un gros nerd, et pas un psychopathe en puissance, Angelika et Franziskus ne le retiennent pas plus, mais à leur grande surprise, le prof a eu proposition à leur faire. Il revient en effet du petit village de Verldorf, situé en amont du Col, où il espérait pouvoir collecter un spécimen unique : le crâne du malandrin notoire appelé Potocki, récemment capturé et exécuté pour ses mauvaises actions par les Verldorfer. Ces derniers n’ont pas accepté l’offre, pourtant généreuse, de Schreber de leur prendre la tête (on les comprend), et l’ont chassé à coup de pierres lorsqu’il a insisté. Déterminé à agrandir sa collection, il propose donc deux cents shillings à nos héros en l’échange du crâne tant convoité, à collecter après livraison du paquet à son domicile. Il leur remet également une boîte rembourrée pour faciliter le transport et éviter toute casse pendant le voyage. La présence d’un cadenas pour fermer ladite boîte ne manque par contre pas d’interroger Franziskus…

Après un voyage sans encombre, Angie et Frankie arrivent à Verldorf, hameau misérable dont la principale attraction est le gibet où croupit un cadavre bien amoché, suspendu dans une cage en fer. Malgré son état décati, Potocki terrifie visiblement les locaux, qui refusent de parler de lui en dépit des perches que leur tend une Angelika preneuse d’informations pour faciliter son futur larcin. Ce n’est pas grave, elle fera sans, en bonne professionnelle qu’elle est. Ayant pris résidence dans l’auberge locale, les deux Bonereapers avant l’heure se glissent dehors au cœur de la nuit pour aller perpétrer leur forfait, neutralisant au passage l’alarme que l’aubergiste avait installé à sa fenêtre pour empêcher les mauvais payeurs de s’échapper sans régler l’addition. C’est du moins ce qu’Angelika et son side kick supputent, jusqu’à que l’horrible vérité leur saute littéralement à la figure…

Début spoiler…Potocki n’était en fait pas aussi mort qu’il n’y paraissait, et lorsqu’Angelika fait mine de le raser à l’œil, le cadavre s’anime et l’attaque furieusement. Bien qu’elle s’en sorte sans dommage, le raffut causé par l’affrontement réveille Verldorf, forçant notre héroïne à sortir une masterclass d’improvisation. Elle n’a pas été prise la main dans le sac en train d’attenter à l’intégrité d’un cadavre, non non : elle a été prise d’une crise de somnambulisme causée par l’influence maligne de la goule locale, dont personne, absolument personne ne l’a mis au courant. SKANDHAL !!! Totalement mystifiés par la prestation de leur hôte, les Verldorfer retournent se coucher sans faire d’esclandres, après avoir expliqué que la situation actuelle est le seul moyen qu’ils ont trouvé pour tenir à l’œil l’increvable et intenable Potocki, qui les tourmente depuis des générations et dont la vitalité maléfique défie l’imagination. Faute avouée étant à demi pardonnée, Angelika et Franziskus retournent également se pieuter…

…Et refont une sortie sans tarder, utilisant cette fois-ci la clé qu’Angelika a dérobé à l’aubergiste pendant qu’il lui présentait ses plus plates excuses, ce qui simplifie grandement l’opération « Louis XVI » planifiée par nos héros. Bien que Potocki ne se laisse pas faire, et que le bruit attire à nouveau les villageois hors de leurs masures, la tête finit par être collectée, et les deux gredins peuvent s’enfuir à toutes jambes en direction du manoir de Schreber.

Comme on pouvait s’y attendre de la part d’un employeur ayant omis de préciser ce « petit » détail au moment du briefing, Schreber se révèle être un mauvais payeur, qui sort un pistolet de son armoire au lieu des deux cents shillings promis. Angie avait toutefois prévu le coup, et se contente d’ouvrir la boîte contenant la tête de Potocki en direction de l’érudit félon. Pris au dépourvu par la manœuvre et par le crâne pourrissant qui lui saute à la jugulaire, Schreber est rapidement hors du coup (et hors de cou), ce qui laisse à Angelika et Franziskus toute latitude pour fouiller son domicile à la recherche d’un dédommagement, une fois qu’ils ont pris soin de réduire la tête enragée en bouillie, bien sûr. Au final, les deux comparses repartent avec un nouveau pistolet, ce qui n’est pas beaucoup mais déjà mieux que rien. Ils constatent d’un air détaché que la traînée informe qui était la tête de Potocki semble également être sur le départ, mais à la vitesse où elle progresse, le bougre ne devrait pas faire parler de lui avant cent vingt cinq ans. La Fin des Temps n’attend pour personne…Fin spoiler

AVIS :

Seconde (et à ma connaissance dernière) nouvelle consacrée par Laws à son personnage fétiche d’Angelika Fleischer, ‘Head Hunting’ semble tout droit sorti de l’imagination d’un DM facétieux, et peut se lire comme tel. Malgré l’horreur que représente un cadavre animé (de mauvais sentiments) et apparemment invulnérable, le ton léger avec lequel Robin D. Laws narre cette histoire la fait basculer dans le royaume de la comic fantasy, mais pas dans la parodie pure et simple de Warhammer Fantasy Battle, ce qui est appréciable. Un sympathique interlude entre deux lectures plus sombres.

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Liberation Day – M. Farrer & E. Rusk [40K] – #31 :

INTRIGUE :

40K_Liberation's DayFarrer et Rusk nous plongent dans les entrailles d’un Space Hulk colonisés par les orks, et dans lequel une communauté d’esclaves humains en fuite tente tant bien que mal de survivre. Profitant de la taille cyclopéenne du vaisseau et de la nature paresseuse des peaux vertes, nos héros ont en effet réussi à installer un camp de fortune dans le dédale de coursives et de ponts abandonnés du Hulk.

Les orks étant, comme chacun sait, des voisins abominables (tapage nocturne, poubelles renversées, murs taggés, voitures volées, crottes de squigs non ramassées…), la petite bande de survivants se venge comme elle peut en organisant des raids réguliers en territoire xenos, à la recherche de matériel utile et d’esclaves pas trop esquintés à libérer. Un de ces derniers ayant réussi à convaincre le leader des évadés (Challis) que le Space Hulk convergeait vers la Waaagh ! la plus proche, nos guérilleros décident de monter une expédition jusqu’à la salle des communications1 afin de faire connaître leur situation au reste de l’Imperium.

Coup de chance, ils arrivent à contacter l’astropathe de garde du Ragnarok, une barge de bataille Space Marines, et à convaincre le commandant de cette dernière de leur venir en aide. Mais pour cela, il faudra que Challis et ses potes réussissent à faire taire les défenses du Hulk, faute de quoi la libération tant espérée ne pourra avoir lieu.

1 : Ou plus exactement, l’enclos à bizarboys.

AVIS :

Liberation Day est une nouvelle intéressante à plus d’un titre. D’un point de vue strictement narratif, tout d’abord, elle présente une construction impeccable, les deux auteurs étant parvenus à optimiser leur séquençage du récit avec brio, permettant à l’intrigue de suivre son cours sans temps mort ni faux raccords. Le découpage du texte en cinq parties distinctes, relatant chacune un évènement important ayant pris place avant le fameux jour de la libération1, laisse ainsi apparaître la trame de la nouvelle2. Le résultat aurait pu être scolaire et décousu, mais Farrer et Rusk ont assez de métier pour éviter cet écueil et agrémenter l’ossature du récit de péripéties plaisantes à lire.

Deuxièmement, le fluff de 40K est non seulement respecté, mais également mis en perspective de manière intéressante. C’est indéniablement l’une des forces de Matthew Farrer (je ne me prononcerai pas sur le cas d’Edward Rusk, dont c’est la seule contribution à la Black Library) que de proposer un angle de vue à la fois original et pertinent de l’univers de Warhammer 40.000. Ici, il rappelle ainsi au lecteur que l’écrasante majorité des citoyens de l’Imperium n’a qu’une compréhension très limitée de la technologie et de l’organisation de ce dernier, ce qui n’est pas sans poser des problèmes que la plupart des autres auteurs de la BL auraient balayés d’un revers de plume, en conférant à leurs héros la confortable (quasi3) omniscience qui est la leur. Ainsi, le héros de Liberation Day a beau venir d’un monde assez développé, il n’a aucune connaissance en matière de voyage spatial (et n’a donc pas la moindre idée de la manière dont faire parvenir un SOS au reste de l’Imperium depuis le Space Hulk qu’il squatte), et rit carrément au nez de l’intello du groupe lorsque ce dernier lui affirme que les Space Marines existent bel et bien. Ça fait bizarre au début, tant l’Astartes est une figure centrale de la Black Library, mais c’est tout à fait cohérent d’un point de vue fluff, et je remercie Farrer de placer (pour une fois) la caméra au niveau du Mr Tout le monde de l’Imperium. C’est tellement rare4.

Troisièmement, la nouvelle se termine par un twist final pas trop mal introduit.

Au final, Liberation Day est une livraison plus que correcte de la part d’un des tout meilleurs (à mes yeux) contributeurs de la Black Library. On est assez loin du niveau de Faces, le must read absolu de Matthew Farrer, mais c’est tout de même suffisant pour faire passer un bon moment au lecteur gavé de Thorperies, Cawkwelleries et autres Swalloweries qui désespère en chacun de nous. C’est déjà pas mal. .

1 : Le premier chapitre s’intitule ainsi « 115 jours avant la libération », le deuxième « 112 jours avant la libération », et le dernier « Jour de libération ».
2 : Passage 1 : Challis libère un petit groupe d’esclaves.
Passage 2 : Un des nouveaux membres de la bande informe Challis que le Space Hulk approche d’une zone de guerre, et qu’il sera donc potentiellement possible d’envoyer un SOS à l’Imperium. Problème : comment s’y prendre ?
Passage 3 : Découverte d’un stock d’armes et de l’emplacement de la salle des communications du Space Hulk. Problème du passage 2 résolu.
Passage 4 : Raid chez les bizarboys, communication avec les Space Marines.
Passage 5 : Attaque des défenses orques afin de permettre la téléportation des Space Marines dans le Hulk. Pas de chance, c’étaient des Iron Warriors. C’est ballot.
3 : Il n’y a guère que les trois choses que le héros moyen de la Black Library découvre par lui-même au cours de ses aventures : 1) Le KO cé vrément pa kool 2) Ne jamais faire confiance à l’Inquisition 3) Ce n’est pas une bonne idée de partir en randonnée dans une mystérieuse nécropole peuplée de statues en métal à l’air patibulaire.
4 : Sur les 102 nouvelles 40K lues jusqu’à présent par votre serviteur (rq : c’était il y a bien longtemps, et surtout avant le lancement de Warhammer Horror et Warhammer Crime, mais j’ai la flemme de remettre à jour, donc ça restera comme ça) , seules 8 ont été écrites depuis le point de vue du sujet de l’Imperium lambda :  Liberation Day donc, mais aussi Warped Stars (Ian Watson), Nightmare (Gavin Thorpe), Angels (Robert Earl), Ancient History (Andy Chambers), Faces (Matthew Farrer), Survivor (Steve Parker) et The Shadow in the Glass (Steve Lyons). Les trois dernières sont des pépites que je recommande à tout le monde.

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A Matter of Evidence – B. Craig [WFB] – #31 :

INTRIGUE :

WFB_A Matter of EvidenceL’hiver est long et la vie est courte dans le grand Nord de Kislev, et de ces deux constats irréfutables vient peut-être l’attrait que Danila, cousine de la Reine des Glaces en personne et Electrice de la cité de Volkolamsk, éprouve pour les beaux jeunes hommes. Incarnation même de la noblesse guerrière de cette contrée inhospitalière, adulée de ses troupes pour sa bravoure au combat, qui lui a valu une cicatrices d’étoile sous l’œil gauche à la suite d’un accrochage avec une bande de chevaucheurs de loup Gobelins1, Danila a porté son dévolu sur Ivan Skavinsky, un modeste archer de la ville ayant pour particularité de posséder des yeux presque entièrement noirs. Et alors, me demandez-vous ? Et alors, ces yeux de chiot lui permettent de mentir avec aplomb, car ils rendent toute détection de ses bobards quasi-impossible, personne ne pouvant affirmer que la pupille de notre homme grossit ou diminue, signes indéniables de la véracité, ou non, d’un propos.

Les premiers temps de la passion entre nos deux tourtereaux se passent splendidement, mais Ivan commence bientôt à tourner autour d’une autre femme, plus de son âge que cette cougar de Danila. Cette dernière, informée de l’infidélité de son amant, lui laisse toutefois une chance de renoncer à sa folie, en lui faisant jurer sur ses yeux qu’il n’aime qu’elle, ce que le jeune freluquet, un peu trop confiant dans la noirceur de ses quinquets, accepte sans ciller. Arrive ce qui doit arriver, Danila surprend un peu plus tard un regard lourd de sens entre son rigolo de gigolo et une servante du nom de Natasha, et les bâtonnets de carotte sont cuits pour Ivan. Rancunière mais inventive dans sa jalousie, l’Electrice fait arracher les yeux du parjure, avant de les remplacer par des billes de bois qu’elle enchante pour que notre homme ne voit plus qu’elle, jour et nuit (en fait elle a inventé le FaceTime du Vieux Monde).

Ayant appris sa leçon sur les serments un peu trop hâtifs, et se disant sans doute qu’il n’a plus rien à perdre, Ivan décide de passer en mode mari honnête – même s’il n’est qu’un amant, bien sûr – et ne cherche plus à dissimuler la vérité à sa Dominatrice. Cette dernière peut ainsi jouir d’un sursis d’affection avant que l’archer aveugle (très utile à la défense de la ville donc) ne retombe amoureux des doux roucoulements de Natasha, et se permette même de lui balancer un « so what ? (bitch) » lorsqu’il est pris sur le fait. Déçue mais pas surprise, et au-dessus de ces petites mesquineries, Danila se contente de lui faire casser les doigts et arracher les ongles, et jeter en prison jusqu’à la fin de ses jours, où il pourra entendre jacasser les commères qu’elle envoie à dessein raconter les anecdotes croustillantes sur les coucheries de Volkolamsk, les siennes et celles de Natasha en priorité bien entendue. Moralité : mieux vaut garder ses yeux dans ses poches, pour ne pas finir comme tel.

 1 : Ils semblent toujours viser au même endroit, comme peut en témoigner Gotrek.

AVIS :

Brian Craig déroule une histoire d’amour, de jalousie et de vengeance, bâtie sur une caractéristique physique des plus spécifiques (la rétractation pupillaire, rien que ça) dans le monde impitoyable de Warhammer Fantasy Battle. Il aurait pu le faire n’importe où ailleurs que cela aurait marché, son talent de conteur entraînant sans mal le lecteur à sa suite, et pour ma part, j’ai plutôt apprécié ce petit texte à valeur de conte, avertissant des dangers de se faire de ses amis puissants des ennemis l’étant tout autant. On peut toutefois reprocher à ce A Matter of Evidence de ne pas vraiment remplir le cahier des charges d’une publication de la Black Library, l’utilisation du Vieux Monde comme trame d’une histoire d’amour dysfonctionnelle apparaissant comme un détournement, plutôt qualitatif il faut dire, de la mission première du contributeur de la maison d’édition de Nottingham : donner vie et enrichir le background des franchises de GW, sans trop s’éloigner des choses de la guerre qui constituent le cœur du sujet quand on donne dans le wargame. Peut-être ne faut-il donc pas trop s’étonner de constater que cette nouvelle fut la dernière de Brian Craig publiée dans Inferno! (à ce jour), tout comme sa non inclusion dans les recueils et anthologies de la Black Library tombe naturellement sous le sens. Les Liaisons Dangereuses ne s’accordent en effet pas facilement au hack’n’slash et au sword and sorcery, et la BL a choisi son camp depuis longtemps.

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On Mournful Wings – S. Spurrier [40K] – #32 :

INTRIGUE :

40K_On Mournful WingsLes jumeaux Ica et Delus1, seuls membres de leur tribu ayant survécu à l’ouragan qui a frappé leur village, voyagent jusqu’à la capitale de Gathis II afin de participer au processus de sélection des aspirants du Chapitre des Doom Eagles. Shortlistés par l’Archiviste faisant office de DRH en raison de leur imperturbable pessimisme, les deux adolescents se retrouvent engagés dans une course contre la montre, la mort et le désespoir ;  leur parcours d’initiation consistant à s’échapper de l’intérieur d’un volcan sur le point d’entrer en éruption afin de rejoindre la forteresse monastère du Chapitre.

Alors que leurs condisciples périssent les uns après les autres, victime des nombreux dangers parsemant la voie menant vers le salut et l’honneur de rejoindre les meilleurs consommateurs de Prozac de l’Empereur, Ica et Dalus triomphent de toutes leurs épreuves et se présentent ensemble devant les portes de l’Aire des Doom Eagles. Un ultime test les attend toutefois avant de pénétrer dans le sanctuaire des Astartes, qui fera ressortir l’unique, mais crucial, point de divergence entre les deux frères.

1 : Un exemplaire dédicacé de La Mythologie Grecque pour les Nuls à celui qui identifie la légende à laquelle ces noms font référence. Exemplaire remporté.

AVIS :

En choisissant de centrer son récit sur la psyché si particulière des Doom Eagles, le plus emo des Chapitres loyalistes, Simon Spurrier n’a pas opté pour la facilité. Il est en effet assez compliqué de rendre justice au mélange de fatalisme et de résolution qui caractérise les locataires de Ghostmountain, et dont l’état d’esprit morbide se révèle être une force (il n’y a pas grand-chose qui puisse effrayer un Space Marine qui se considère comme étant déjà mort) plutôt qu’un handicap. Si la force de la foi et le psycho-conditionnement des surhommes du 41ème millénaire constituent des pistes crédibles pour expliquer ce paradoxe, ces justificatifs bien pratiques ne peuvent pas être avancés pour les recrues du Chapitre, qui, en tant qu’êtres humains normaux, ont la fâcheuse tendance à se noyer dans leur désespoir au lieu de s’en servir comme bouclier.

Bref, Spurrier marchait écrivait sur des œufs, et je trouve qu’il s’en est remarquablement tiré. Outre le fait que sa présentation des Doom Eagles rend hommage à ces derniers (plus que le portrait qu’en a fait Ben Counter dans son Phalanx) en faisant ressortir à la fois leur singularité et leur noblesse, la rivalité latente des deux héros de la nouvelle est rendue avec justesse et suffisamment bien mise en contexte pour que la conclusion d’On Mournful Wings (même le titre a grave la classe) fasse mouche1. On appréciera également l’art consommé avec lequel Spurrier entremêle scènes d’actions, flashbacks et contemplations d’Ica sur son sort, pour un résultat aussi digeste qu’élégant. Inspirée, conséquente et bien construite, On Mournful Wings est définitivement l’une de ces nouvelles justifiant à elles seules l’achat du recueil (‘Crucible of War’) entier2.

1 : Arrivés devant l’entrée de la forteresse des Doom Eagles, les jumeaux sont sondés psychiquement par l’Archiviste en charge du recrutement des novices du Chapitre. Ica a la mentalité nécessaire pour devenir un Doom Eagle, mais Dalus, qui toute sa vie n’a cherché qu’à sortir de l’ombre de son frère en surpassant ce dernier à la moindre occasion (en pure perte, Ica restant le favori des parents des jumeaux, à cause de sa – relative – aînesse), est jugé trop amer et torturé pour être introduit dans l’Aire…et est donc condamné à mourir de faim, de froid et d’épuisement au pied du portail que seul son frère a eu le droit de franchir.
2 : Et au prix dudit recueil (Crucible of War) sur le marché de l’occasion, on aurait tort de se priver.

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A Good Thief – S. Jowett [WFB] – #32 :

INTRIGUE :

A Good ThiefFrançois Villon est un poète (naaaaaan ???) à l’esprit vif et à la langue bien pendue, ce qui lui cause autant de problèmes que d’opportunités. Forcé à l’exil de sa Marienburg natale après que les vers qu’il a composés sur les activités extra-maritales de la femme de l’un des princes marchands de la cité soient parvenus aux oreilles du mari cocu, il a trouvé refuge dans la petite ville de Wallenholt, et est devenu le poète de cour du Graf local. Une occupation indigne de ses talents, qui sont de son avis de spécialiste, superlatifs, mais qui lui permet de vivoter tranquillement aux crochets de son mécène.

La situation de Villon se complique lorsque le Graf de Wallenholt reçoit la visite d’une délégation de notables impériaux, dans laquelle se trouve un parent de la Frau von Klacht, dont les frasques libertines ont été mises en vers (et contre tous) par notre poète. Reconnu par le visiteur, Villon est fissa envoyé à la case prison par son employeur, qui préfère logiquement se séparer de son flagorneur licencié plutôt que d’hériter d’une guerre commerciale avec l’un des marchands les plus influents du Vieux Monde. Par chance pour Villon, la petite soirée pendant laquelle son destin s’est joué s’est déroulée devant un autre témoin, d’opinion plus favorable envers le rimailleur de cour. Le Magister (puisqu’on ne le connaîtra pas sous d’autres noms) organise l’évasion de notre héros pendant son transfert vers Marienburg, et lui remet une mission très spéciale en échange de ce coup de pouce inespéré : il doit se rendre dans un village du Reikwald tombé sous la coupe du bandit Gerhard Kraus, et mettre la main sur un artefact magique que le même Kraus a acquis pour le compte du Magister, avant de décider de le garder pour lui. Tout cela est bien mystérieux.

A son arrivée à Krausberg, Villon ne perd pas de temps à s’encanailler avec les hommes du seigneur brigand, qui reste lui complètement reclus dans ses quartiers. Il lui faudra attendre une nuit de beuverie pendant laquelle son public lui demande de réciter pour la énième fois son ode épique sur Frau von Klacht pour que Kraus daigne faire son apparition, et défie Villon à un duel… de poésie. Original, n’est-ce pas ? Le brigand n’est cependant pas un adepte du free style, et se contente de réciter les strophes tirées d’un petit livre qu’il a amené avec lui, et dont la nature arcanique ne fait rapidement pas de doute à Villon, qui se fait happer par la déclamation de Kraus au même titre que le reste de l’assemblée. Il est évident que c’est l’objet que le Magister l’a envoyé reprendre au mercenaire indélicat, et Villon décide d’agir la nuit même, profitant du gros coup de mou subi par Kraus après la fin de sa prestation. L’art est épuisant, c’est vrai.

Voleur avant d’être poète, Villon n’a aucun mal à se glisser dans la chambre du bandit et à mettre la main sur le livre en question, dont l’influence néfaste n’est pas à sous-estimer. Ne pouvant corrompre directement notre héros (qui est analphabète, et c’est bien pour cela que le Magister l’a choisi en premier lieu) comme il l’a fait pour Kraus, le grimoire possède ce dernier et un combat féroce s’engage entre les deux chineurs d’antiquités pour la possession du grimoire. Villon finit par remporter le match et s’enfuit par la fenêtre avec son butin sous le bras, laissant Kraus éborgné et exposé comme fraude littéraire (une double sanction bien sévère, si vous voulez mon avis). Après un voyage vers Altdorf, où le Magister lui a donné rendez-vous, le poète remet le bouquin tant convoité à son commanditaire, qui le jette immédiatement dans le feu, OPA Gandalf-style. Contrairement à l’Anneau Unique, le parchemin est inflammable et l’ouvrage maudit (askip) finit en fumée. Voilà une nouvelle menace qui planait insidieusement sur l’Empire écartée pour de bon…

Début spoiler…Enfin presque. Villon a en effet jugé malin de donner au Magister un livre dérobé au hasard dans la bibliothèque municipale la plus proche, préférant trouver un riche gogo pour lui acheter le vrai grimoire un peu plus tard. A malin, malin et demi cependant : le Magister ne met pas longtemps à se rendre compte qu’il a été dupé, et se fait un plaisir de faire arrêter Villon pour lui apprendre à jouer des tours aux puissants de ce monde. Par chance pour notre poète-escroc, M a une nouvelle mission à lui confier, ce qui est toujours mieux que danser la gigue des pendus (en attendant d’en composer la ballade, bien sûr)…Fin spoiler

AVIS :

Simon Jowett prend son temps et déroule une histoire originale de poète-voleur missionné pour dérober un grimoire de sonnets à un seigneur bandit trop cultivé pour son propre bien (je vous défie de trouver une intrigue comparable dans tout le corpus de la GW-Fiction) dans ce ‘A Good Thief’, dont la moitié des pages est finalement consacrée à la présentation du héros. Jowett est suffisamment doué avec sa plume pour que le lecteur n’ait pas l’impression de se faire flouer dans la manœuvre, mais il ne reste pas moins que cette nouvelle ressemble plus à l’introduction d’un roman, qui n’aura au final pas été écrit1, qu’à une œuvre indépendante. Une sympathique curiosité.

1 : Un puissant et mystérieux commanditaire œuvrant en secret pour le bien de l’Empire recrute des agents doués de talents particuliers parmi le gibier de potence impérial ? Ça me dit vaguement quelque chose

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Payback – G. McNeill [40K] – #32 :

INTRIGUE :

40K_PaybackLe trafiquant d’armes Cornelius Barden se retrouve dans une situation difficile après qu’une transaction avec des activistes de la cause mutante ait été interrompue par l’arrivée impromptue du baron du crime local (« Red » Ivan Constantine) et de ses hommes, pas très jouasses à l’idée de laisser Barden marcher sur leurs plates-bandes en écoulant sa came sur leur territoire. Blessé dans la fusillade qui s’en suit, trahi par son partenaire qui s’enfuit avec le magot, et recherché à la fois par Constantine et par les mutants, Barden va devoir la jouer fine pour espérer sortir entier du pétrin dans lequel il s’est fourré.

AVIS :

Ecrite à la suite de la sortie du jeu Inquisitor (dont le background est en grande partie centré sur la planète Karis Cephalon, où se déroule également la nouvelle de McNeill), Payback est selon son auteur1 un hommage au style de James Ellroy (le pape du roman noir moderne, auteur notamment du Dahlia Noir et de L.A. Confidential), arrangé à la sauce Warhammer 40.000.

À l’image de son anti-héros violent et cynique mais droit dans ses bottes, Payback est un agrégat de clichés mis en forme de manière très cinématique par un McNeill égal à lui-même, c’est-à-dire sensiblement meilleur que la moyenne des contributeurs de la BL, mais pas mémorable non plus. Il manque ainsi une véritable profondeur à ses personnages, que le lecteur cerne totalement à leur première réplique, ce qui n’est certes pas vraiment un problème pour une nouvelle « one-shot », mais aurait pu se transformer en handicap si Payback n’avait été que le prélude d’un travail plus conséquent (comme Kinstrife a préfiguré le diptyque Defenders of Ulthuan et Sons of Ellyrion par exemple).

S’il n’est pas exclu que Cornelius Barden revienne faire un petit tour de piste dans les années à venir, j’espère sincèrement que McNeill parviendra à développer son Harlon Naye (le gros bras des séries Eisenhorn et Ravenor) personnel de manière un peu plus poussée que dans ce premier jet.

1 : Le site de Graham McNeill comporte une partie « short story », dans laquelle chaque publication est commentée et resituée dans son contexte d’écriture.

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Rest for the Wicked – J. Wallis [WFB] – #32 :

INTRIGUE :

WFB_Rest for the WickedAltdorf, et ses rues bruissantes de vie, ses marchés bien achalandés, ses honnêtes citoyens faisant leurs courses… Et, bien entendu, ses forces de police luttant au jour le jour contre les déprédations des mauvais sujets de l’Empereur, ou, dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, celles de dangereux immigrants, comme ce Kislévite à moustache de Kislévite (ok) et aux yeux de Kislévite (plus dur), qui se fait courser comme un lapin par nos héros, les officiers des Lices Dirk Grenner (aka Astérix) et Karl Johansen (aka Lucky Luke1), qui cherchent ainsi à boucler une enquête de trois mois de façon probante. Manque de bol pour les Starsky et Hutch impériaux, leur course poursuite les amène jusqu’aux portes de la ville, où le cortège de Leopold von Bildhofen, Comte Électeur du Middenland, fait son entrée en grande pompe. Le périmètre de sécurité étant strictement maintenu par la garde civile, nos héros ne peuvent que constater la disparition de leur proie dans la foule massée pour l’occasion… jusqu’à ce que le suspect moustachu trouve intelligent de passer en courant devant le cheval de l’Électeur, pile au moment où ce dernier reçoit un carreau en pleine encolure (le cheval, pas le bonhomme). La suite est assez facile à prédire : la bête s’emballe et part au triple galop dans les rues pavées d’Altdorf, en direction de la Königplatz (à ne pas confondre avec la Kaiserplatz) et de son marché bondé. Serait-ce la fin de ce bon vieux Leopold ? NON, car les héroïques Johansen et Grenner subtilisent deux montures à leurs balourds de collègues, piquent des deux et parviennent in extremis à se saisir de l’aristocrate avant que son destrier n’aille s’emboutir dans un food truck, avec des résultats dévastateurs. Malgré leur intervention salutaire, ce snob de von Bildhofen remercie à peine ses sauveurs, et repart avec sa troupe jusqu’à son Air BnB.

De retour au poste, les officiers doivent à présent amadouer la colère de leur patron et chef des Lices d’Altdorf, le Général Hoffmann, devant le capotage complet de l’opération Kosachok. Ce fiasco a toutefois libéré le duo, qui peut enquêter sur la tentative d’assassinat dont l’influent aristocrate vient de faire les frais. Ayant déjà reçu le résultat des expertises du laboratoire alchémico-légal avec lequel les Lices travaillent, qui a établi que le carreau était d’origine tiléenne, Johansen et Grenner partent en direction de la petite Tilée pour creuser la piste d’un assassin étranger engagé par un mystérieux commanditaire pour se débarasser de von Bildhofen. L’héritier du Comte étant son frère Siegfried, marié à une Tiléenne, c’est donc vers ce dernier que les premiers soupçons se portent. Après une rencontre fructueuse avec le signor Argentari, parrain de la pègre italienne tiléenne locale, les deux équipiers filent jusqu’à la Marianstrasse, où leur indic leur a confié que se trouvait le tireur d’élite recruté pour effectuer ce sale boulot. Bien qu’ils parviennent sur place avant que ce dernier n’ait pu retenter sa chance, profitant du passage du Comte Électeur à la sortie de la messe, ils perdent l’élément de surprise lorsque Grenner ne parvient pas à enfoncer la porte de la planque du premier coup. S’en suit un face à face tendu entre les officiers et leur suspect, qui se prend la dague de jet de Johansen dans l’estomac pour commencer, mais riposte en logeant un carreau dans la poitrine de ce dernier. Ce tilean stand-off, qui aurait pu durer longtemps vu la stupidité des participants2, est toutefois interrompu par une boule de feu impromptue, qui ravage la piaule et réduit le sniper en cendres. Comprenant que cette intervention enflammée était probablement celle du commanditaire, peu soucieux de laisser les enquêteurs interroger le tueur à gages, Johansen indique à son partenaire qu’il serait judicieux qu’il aille rendre une visite de courtoisie à la DGSI impériale, une cellule de la Reiksguard (en civil) enquêtant sur les complots et manigances agitant l’entourage de l’Empereur. Cette organisation moyennement secrète (puisque un simple officier des Lices sait qu’elle existe et où elle opère3), du nom d’Untersuchung, s’est faite une spécialité d’enquêter sur les mages renégats, et pourrait donc aider l’enquête à progresser. Pendant que son collègue passe aux urgences se faire recoudre, Grenner se rend donc sur place.

Là, il se fait poliment mais fermement éconduire par ses interlocuteurs, qui ont l’air d’en savoir beaucoup plus qu’ils ne veulent bien en dire sur cette affaire, et ne consentent qu’à lui expliquer la différence entre une boule de feu et une explosion flamboyante. Car non, ce n’est pas la même chose. De retour au poste, Johansen est toutefois briefé par Hoffmann, qui a reçu les infos refusées à son sous fifre par fax pigeon voyageur, sur la situation très délicate dans laquelle ils doivent opérer. La sorcière pyromane se révèle être une certaine Emilie Trautt, mage flamboyante passée libérale depuis quelques années et concubine notoire du fils de Leopold von Bildhofen, Udo, qui passe du coup suspect #1 de l’enquête. Cependant, l’Untersuchung a formellement interdit à ses collègues d’intenter quoi que ce soit envers Trautt, qui pourrait mener le Bureau des Légendes d’Altdorf à de plus gros poissons. Cela n’empêche toutefois pas les Lices de monter un plan audacieux pour protéger le mal-aimé Leopold de ses persécuteurs…

Début spoiler…Et notre duo infernal, maintenu sur l’affaire par un Hoffmann très peu progressiste quand au concept d’ITT et de congés maladie, de se rendre à la place de leur boss au rendez-vous organisé par Udo afin de discuter des mesures de protection prises par les Lices envers le Comte Électeur. Tout aussi odieux que son paternel, Udo gobe toutefois sans broncher les bobards débités par un Johansen imperturbable, qui lui fait croire que les suspects principaux sont les Kislévites (décidément, il ne les aime pas), et lui révèle les dispositions super secrètes prises par son équipe pour protéger le convoi qui amènera le Comte et sa famille à la réception organisée par l’Empereur en leur honneur le soir même, lorsqu’Udo se met à flipper des tables pour exprimer son mécontentement d’être tenu hors de la confidence. Le piège étant tendu, il est maintenant temps de voir si le poisson va mordre…

Aussi, lorsque les rusés officiers changent l’ordre des carrosses banalisés transportant les huiles Middenlander, positionnant celui d’Udo en deuxième position, à la place de celui de Leopold et Siegfried, c’est sans surprise qu’ils constatent la combustion spontanée mais peu naturelle du fiacre. C’est ce qui s’appelle un retour de flamme, je suppose. Bravant les ordres, l’intenable Johansen s’élance ensuite à la poursuite de Trautt sur les toits, ne parvenant pas à refaire son retard (et pourtant, elle était en robe longue) avant que la magicienne utilise ses pouvoirs enflammés pour… partir en lévitation et franchir le mur d’enceinte de la ville, évitant facilement la dague de jet que Johansen lui avait lancée sans sommation. C’en est fini de notre enquête, mais pas du boulot de notre paire de choc, qui devra dès le lendemain faire porter le chapeau de ces tentatives d’assassinat répétées aux, je vous le donne en mille, Kislévites. Comme on dit par chez nous, pas de pitié pour les croissants Cosaques.Fin spoiler

1 : Comprendre que le premier est un petit blond raleur, et le second un grand brun à la gâchette facile.
2 : Ainsi, l’assassin parvient à se surprendre lui-même lorsque sa manœuvre de diversion à l’encontre de Johansen le mène à regarder également dans la direction vers laquelle il pointait son arbalète, permettant à l’officier de lui balancer un pied de chaise dans la tronche en toute impunité.
3 : Rendant son utilisation de mot de passe alambiqué à l’entrée un peu ridicule.

AVIS :

Pastiche assez transparente de la série policière classique des années 80, mettant en scène des flics débrouillards aux méthodes non conventionnelles mais efficaces pour combattre le crime, Pas de Répit pour les Braves souffre des grosses ficelles parodiques utilisées par l’auteur, d’un duo de héros pas vraiment attachants, et de l’intégration assez grossière de l’Untersuchung (que Wallis mettra au centre de son roman La Marque de la Damnation) à l’intrigue pour des raisons relevant selon moi du teasing pur et simple. Si on peut reconnaître à cette nouvelle un rythme enlevé et une enquête potable, même si pas vraiment spectaculaire en termes de rebondissements1, ainsi que quelques détails fluffiques sur Altdorf et ses forces de po-Lices, à prendre avec des pincettes car reprises par personne d’autre depuis, la Black Library a beaucoup mieux à offrir en termes de nouvelles « policières » se déroulant dans le Vieux Monde, à commencer par L’Affaire de la Cellule Écarlate dans la même anthologie, supérieure sur tous les points à Pas de Répit pour les Braves.

1 : En même temps, avec deux suspects identifiés en tout et pour tout, difficile de faire planer longtemps un suspens étouffant. Wallis avait fait beaucoup mieux ceci dit avec sa série Dieter Brossmann (‘The Dead Among Us’ et ‘The Bretonnian Connection’).

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Blue Blood – D. Abnett [40K] – #33 :

INTRIGUE :

40K_Blue BloodLa nouvelle affectation de l’escouade Damocles, fraîchement de retour à plein effectif après son passage au stand sur Ithaka (‘Crimson Storm’) ne ravit guère le Sergent Priad. Il s’agit en effet de faire de la figuration protocolaire lors des cérémonies de couronnement du nouveau souverain d’Iorgu, planète d’importance des mondes récifs dont les Iron Snakes sont les défenseurs attitrés. Priad et ses hommes espéraient faire un peu de team building sur le front, histoire que les grands nouveaux et les petits anciens1 puissent sympathiser en situation de travail, mais les ordres sont les ordres. Bien que l’accueil réservé par leurs hôtes soit impeccable, et permette à nos spartiates (haha) héros de découvrir des concepts d’une opulence inouïe – comme celui du lit – l’ennui guette rapidement les Space Marines, qui commencent à développer des TOC à force de banquets et de processions.

Fort heureusement, cette festive monotonie est brisée par l’arrivée d’une tête connue, celle de l’Inquisiteur Mabuse (‘Red Rain’). King Mab est présent sur Iorgu incognito, car il soupçonne que la disparition de la vieille reine n’était pas due à son âge avancé, mais bien à une conspiration dont il doit percer à jour les tenants et aboutissants. La suite des événements lui donne rapidement raison : la ferveur bon enfant d’Iorgu City tourne vite au vinaigre et à l’émeute alors qu’une pluie diluvienne se met à tomber sur la ville. C’est peut-être un détail pour vous, mais comme Iargu connaît un léger crachin une fois tous les vingt ans, on peut comprendre que les citoyens commencent à paniquer à l’idée de devoir acheter des bottes en caoutchouc pour marcher dans rue. La situation dégénère tellement rapidement que la jet set ayant fait le déplacement décide de quitter les lieux sans tarder, et Priad se trouve noyé sous les demandes d’escorte émanant des plus hautes sphères, sollicitations que même son psycho-endoctrinement rigoureux ne l’a pas préparé à encaisser.

Le salut vient, une fois de plus, de Mabuse, qui envoie un doigt aux Iron Snakes afin de solliciter leur assistance immédiate sur le Mont Sacré, où les reliques les plus anciennes d’Iorgu (dont les regalia utilisés pour le couronnement) sont gardées. Cette bonne excuse permet à Priad d’envoyer balader un Lord Militant irritant et de réquisitionner la limousine d’une princesse royale pourrie gâtée, ce qui est tout de même satisfaisant. Les Iron Snakes rejoignent l’Inquisiteur après avoir été témoins de phénomènes paranormaux, une sûre indication que le Warp est de la partie. Le briefing qu’ils reçoivent est simple : escorter Mabuse dans la crypte du Mont Sacré où les regalia sont conservés, et les remettre à leur place. Ces objets ne sont en effet pas uniquement des symboles un peu kitsch, mais font partie intégrante du dispositif de stase que les premiers habitants d’Iorgu ont installé pour exiler un démon local, peu après leur arrivée. Les cultistes du Chaos que l’escouade Damocles doit affronter en cours de route cherchent évidemment à réveiller celui que Mabuse appelle le Dormeur (sans doute un crabe gigantesque), et cela aurait des conséquences assez graves pour la Pax Imperialis, donc autant éviter.

Après moultes péripéties, le crypt rush se solde par une victoire sur le gong pour le camp impérial, qui n’a à déplorer que la perte de l’Inquisiteur, criblé de balles lors d’un accrochage sur le chemin. Dans son dernier souffle, il a cependant l’amabilité d’enregistrer un vlog élogieux sur le dévouement de Damocles à destination du Maître de Chapitre des Iron Snakes, permettant de contrebalancer la shit storm de revues négatives laissées par les pontes que les Space Marines ont ignoré/rudoyé/spolié lors de leur intervention urgente. L’image de marque, ça reste important au 41ème millénaire.

1 : Les Space Marines de Dan Abnett ont la morphologie d’une équipe de rugby des années 80, ça doit être pratique lors des essayages de matériel.

AVIS :

Il lui aura fallu cinq tentatives et une soixantaine de pages, mais Dan Abnett a finalement réussi à faire sortir les Iron Snakes de l’océan de médiocrité littéraire dans lequel les fiers fils de la fière Ithaka pataugeaient (fièrement, sans nul doute) depuis ‘White Heat’. On retrouve ici les talents de conteur d’histoires et de distillateur d’atmosphère et d’univers1 de l’Abnett des séries Eisenhorn et Ravenor (et le retour gagnant – sauf pour lui – de l’Inquisiteur Mabuse y est sans doute pour quelque chose), capable de camper un monde impérial et sa culture propre en l’espace de quelques paragraphes bien sentis. Je ne pouvais donc pas aborder cette critique sans remettre à ‘Blue Blood’ les lauriers de meilleure nouvelle de la pentalogie chromatique reptilienne (vous êtes au 3ème millénaire, moi je suis déjà au 30ème) de Dan Abnett. Pas que la concurrence ait été très rude, notez bien, mais cette soumission n’est pas seulement la moins pire du lot, elle est objectivement satisfaisante, ce qui change agréablement.

Malheureusement, et c’est très ironique, cette amélioration notable se fait aux dépends des Iron Snakes eux-mêmes, qui sont ici relégués au rang de simples super soldats sans personnalité2. Inutile donc de s’être enfilé les quatre épisodes précédents, et surtout le Space Marines-onlyCrimson Storm’ pour apprécier à sa juste valeur cette nouvelle. L’escouade Damocles est juste une escouade tactique classique, et son Sergent n’a rien de particulier qui le distingue des milliers d’autres officiers Astartes de la Black Library. C’est comme si Abnett avait finalement décidé de ne pas écrire une histoire de Space Marines – ce qu’il ne sait, ou savait en tous cas, pas vraiment faire – mais une histoire avec des Space Marines – ce qui ne lui pose aucun problème. Le résultat est convaincant, mais on ne retrouvera plus trace des Iron Snakes dans Inferno ! après ‘Blue Blood’, alors que le magazine sera encore publié pendant deux ans à la suite de ce numéro #33. On peut expliquer cet abandon par de multiples raisons, mais je choisis de penser qu’Abnett a gagné son bras de fer avec la BL sur ce sujet, et est parvenu à démontrer par l’absurde qu’il ne servait à rien de s’acharner dans cette direction. ‘Blue Blood’ a donc une saveur particulière, et mérite donc la lecture à plus d’un titre.

1 : La description de l’intérieur du Mont Sacré m’a également fait penser à ce qu’on pourrait lire quelques années plus tard dans ‘Legion’, lorsque sont décrits les pouvoirs d’invocation et d’illusion des cultistes du Chaos de Nurth.
2 : Il est donc assez savoureux de lire dans la nouvelle que Priad s’insurge contre ce même constat, qui est appliqué à l’escouade Damocles par le nouveau roi d’Iorgu. Eh oui mon pauvre choupinet, ce n’est pas la carrure ou la taille qui sont d’une grande utilité sur ce plan…

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What Price Vengeance? – C. L. Werner [WFB] – #33 :

INTRIGUE :

What Price VengeanceLa bande de mercenaires tiléens du Capitaine Ursio a connu de meilleurs jours : engagée par le rusé Vicomte Augustine de Chegney pour brigander en son nom sur les terres de ses voisins, elle a failli à sa mission et a en conséquence essuyé une attaque meurtrière de la part d’autres sbires de l’implacable Bretonien, peu enclin à laisser des témoins de sa vilénie ternir sa réputation. Il paraît que les chevaliers du Royaume sont h.o.n.o.r.a.b.l.e.s après tout. Malheureusement pour Gus, les reitres ont survécu, et sont maintenant assoiffés de vengeance. Profitant de la bonté de Claudan de Chegney (fils du premier), ils investissent donc la place forte que ce dernier occupe au nom de son père – et qu’il a dérobé à un autre voisin, impérial celui-ci – en prétextant chercher à s’abriter des terribles orages des Montagnes Grises… et passent tous les habitants du château par le fil de l’épée pour se passer les nerfs. Tous ? Pas tout à fait. À malin, malin à demi : Ursio repart donc se cacher dans la campagne avoisinante avec le jeune fils de feu Claudan et sa nourrice, et charge le gouverneur du noble trucidé d’aller porter sa demande de rançon à Augustine.

Bien que n’étant pas vraiment un enfant de chœur, comme on a pu le voir plus haut, le Vicomte est un family man, ne serait-ce que parce qu’il est trop bête d’agrandir le fief familial uniquement pour le voir disparaître à sa mort, faute d’héritiers. N’ayant plus que Claudan Junior (que nous appellerons Cloclo) de ce côté-là, il est prêt à dépenser sans compter pour retrouver l’usufruit de son petit-fils, mais est convaincu par son conseiller (Plaisant) de ne pas négocier avec des terroristes, et de recruter à la place un tueur professionnel pour aller récupérer le bébé à ses ravisseurs. Cela tombe bien, Plaisant a justement un nom à souffler à son patron : celui du redoutable Brunner, un impérial que l’on dit de noble ascendance (ça compte pour les Bretonniens), et n’ayant jamais failli à la tâche. Augustine envoie donc son sénéchal recruter le chasseur de primes… qui refuse de prendre la mission, malgré les 200 couronnes d’or sonnantes et trébuchantes que le bon Plaise lui fait miroiter. Enfin, il fait mine de refuser plutôt, le temps de laisser un Plaisant très colère repartir de la taverne dans laquelle le rendez-vous a pris place, et se faire embusquer quelques mètres plus loin par un groupe de truands de bas étage, qui n’ont pas pu résister à la grosse bourse (au singulier ça va) du sénéchal. Cette avidité leur sera fatale, Brunner sortant des ombres au moment fatidique pour leur régler leur compte avec une efficacité consumée, et empocher au passage les quelques pièces d’argent que la mort de ces soudards lui rapporteront. Y a pas de petits profits.

Un peu plus tard, nous retrouvons le taciturne mercenaire sur les terres du Vicomte, qu’il semble très bien connaître. Ayant joué le rôle de l’innocent (mais tout de même très bien armé) voyageur pour attirer trois des hommes d’Ursio à se montrer auprès de son feu de camp, il a tôt fait d’en envoyer deux chez Morio (le Morr tiléen), gardant le troisième en vie pour qu’il lui indique où se sont cachés ses petits camarades. Et si la tour de guet abandonnée que les kidnappeurs ont choisi comme repaire semblait être un endroit parfait pour surveiller les environs, on s’aperçoit bien vite que Brunner joue vraiment à domicile, puisqu’il pénètre dans le donjon au nez et à la barbe des sentinelles grâce à sa connaissance du passage secret reliant l’édifice à un tunnel à proximité. Cet avantage lui permet de neutraliser discrètement (au début) les hommes d’Ursio, laissant ce dernier seulement accompagné de ses deux derniers lieutenants, et de ce cher Cloclo (la nourrice ayant été étranglée par un mercenaire nerveux après que Brunner ait arrêté le mode silencieux, et commencé à castagner du sbire sans retenue), dans la salle principale de la tour.

Ce remake Battle de ‘Trois Hommes et un Couffin’ ne se termine pas aussi bien que l’œuvre originale pour le trio en question. Les compagnons d’Ursio tombent rapidement sous les balles et les lames du chasseur de primes, ce qui laisse leur Capitaine s’échapper en courant avec le bébé dans les bras… jusqu’à ce qu’il fasse la rencontre des chausse-trapes que Brunner a pris soin de semer en bas de l’escalier de la tour, ce qui ruine ses sneakers et l’envoie au tapis (et le pauvre Cloclo avec, encore un drame des bébés secoués). Lorsque le Tiléen voit sa Némésis apparaître sur le pallier, il tente de le convaincre de le ramener avec lui chez de Chegney, ce que Brunner accepte… partiellement. Comme il le révèle à sa victime, le Vicomte n’a en effet payé que pour sa tête, le reste de son anatomie peut donc rester sur place.

La nouvelle se termine avec un face à face entre Brunner et de Chegney, le premier annonçant à son employeur que, malheureusement, Cloclo n’a pas survécu à sa capture. Dévasté par la nouvelle, le noble accepte tout de même d’honorer sa part du contrat et remet à son chasseur de tête (qui n’est pas revenu les mains vides) la moitié restante de la somme convenue, avant de lui donner congé…

Début spoiler…Mais la scène « post-credit » (si je puis dire) révèle que Brunner a menti, et gardé le bébé avec lui. Ne pouvant l’élever seul, il le confie à un couple de marchands, auxquels il remet également la prime versée par de Chegney. On comprend quand il présente Cloclo comme étant également son petit-fils que le chasseur de primes était en fait le Graf Von Drakenburg dont de Chegney a usurpé le domaine, marié de force la fille à son fils, et vendu à des esclavagistes pour s’en débarrasser. Cela explique la connaissance approfondie des terres des Von Drakenburg dont Brunner dispose, et son peu d’empressement à rendre Cloclo à Gus. La garde partagée est un plat qui se mange froid.Fin spoiler

AVIS :

Après nous avoir fait don de Mathias Thulmann quelques infernaux numéros plus tôt, C. L. Werner remet le couvert avec ‘What Price Vengeance?’, nouvelle introductive de l’un de ses personnages les plus marquants, le chasseur de primes Brunner. Le charme opère immédiatement dans cette histoire de prise d’otage (violente) et d’opération de libération (tout aussi violente), l’auteur parvenant à nous embarquer d’un tour de plume dans les bas-fonds du Vieux Monde en compagnie de brigands sanguinaires, de nobles cauteleux et de mercenaires impitoyables. L’intrigue est très solide, le déroulé plaisant à lire et idéalement dosé (Werner fait partie de ces bons écrivains qui savent prendre leur temps sans qu’on ait l’impression qu’ils meublent, qualité trop souvent absente des écrits de la Black Library à mon goût), la conclusion apporte sa petite révélation bien sentie et finement préparée par Werner au cours des pages précédentes, il y a du fluff et des one liners bien sentis… Que demande le peuple ?

Le seul petit défaut qu’on pourrait reprocher à cette masterclass med-fan est la tonne de descriptions vestimentaires dont Werner nous abreuve dès lors qu’un personnage important nous est introduit pour la première fois, une excentricité qu’on ne retrouve chez personne d’autre au sein de la BL à ma connaissance. A part ça, on a affaire à une nouvelle de très haute volée, tout comme l’anti-héros qu’elle nous présente.

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Fight or Flight – S. Mitchell [40K] – #33 :

INTRIGUE :

40K_Fight or FlightAyant récemment achevé ses classes de Commissaire, Ciaphas Cain intègre le 12ème régiment d’artillerie de campagne de Valhalla. Cette affectation sied tout à fait au futur Héros de l’Imperium, sensible aux nombreux avantages procurés par le fait que sa nouvelle unité contribue à l’effort de guerre depuis une distance confortable du front et de ses dangers. Malheureusement pour Cain, ses grands projets de pré-retraite avant l’heure vont être contrariés par l’arrivée inopinée d’un fragment de la flotte ruche Kraken en orbite de la planète Desolatia IV. L’occasion pour notre anti-héros de commencer à écrire sa légende, tout à fait malgré lui bien sûr.

AVIS :

Fight or Flight est la première consacrée par Sandy Mitchell à son personnage fétiche de Ciaphas Cain, le Commissaire le plus cool de la Garde Impérial. Même si le concept du petit rigolo perdu dans l’univers gothique du 41ème millénaire a fini par s’épuiser au fil des publications, cette introduction conserve encore aujourd’hui une indéniable fraîcheur, résultant de l’approche mesurée qu’à Mitchell de son sujet : même s’il s’agit pour lui de divertir le lecteur en usant des ressorts comiques de Cain (« mais non, je n’étais pas en train de m’enfuir ! ») et de son fidèle Jurgen (« mon odeur corporelle est une arme de destruction massive), et plus tard de l’Inquisitrice Amberley « girl next door » Vail, il prend en effet soin de ne pas sombrer dans la caricature, ce qui ne rend que plus attachant la bande de bras cassés qui lui sert de héros.

Pour résumer, si la lecture de la saga de Ciaphas Cain (neuf romans à date) n’est pas recommandée aux inconditionnels de la science-fiction « premier degré » de la Black Library, celle de Fight or Flight, parce qu’elle permet justement de se faire une religion sur les travaux du trublion Sandy Mitchell, est elle fortement conseillée par l’auteur de ces lignes.

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The Path of Warriors – N. McIntosh [WFB] – #33 :

INTRIGUE :

WFB_The Path of WarriorsOn le sait, la vie en Kislev n’est pas de tout repos. En plus du rude climat et de l’isolement qui frappe la plupart des communautés éparpillées sur ces vastes steppes, la menace d’une visite de « courtoisie » rendue par des voisins nordiques avides de pillage plane en permanence au-dessus des chapkas des braves sujets du Tsar. C’est donc avec plus de fatalisme que d’appréhension que Fedor Kumansky, pêcheur buriné par ses années à taquiner la tanche dans l’estuaire du Lynsk, voit approcher une flotille de maraudeurs venus tout droit de la Mer des Griffes. Il a même reçu un songe prémonitoire de la tuile qui n’allait pas tarder à tomber sur le petit village d’Odensk la nuit passée, c’est dire s’il est au fait des événements.

Accompagné par son fils aîné, Stefan, il se hâte de porter la mauvaise nouvelle à ses concitoyens, et prend la tête de la milice de farouches péquenauds bien décidée à repousser les Norscans s’ils leur venaient l’idée de s’arrêter à Odensk avant de remonter jusqu’à Erengrad. Il laisse son autre fils, Mikhal, aux bons soins de l’aîné, et fait promettre à ce dernier de protéger son cadet comme il l’avait lui-même juré à sa défunte femme sur son lit de mort. À ce stade, vous devez sans doute vous dire qu’un tel comportement ne peut signifier qu’une chose pour le brave Fedor : une mort prématurée d’ici à la fin de la nouvelle. Et vous avez raison, futés que vous êtes. Sans beaucoup de surprise, mais tout de même hors champ (donc il s’est peut-être simplement empalé sur son épée en trébuchant sur un caillou, laissons le bénéfice du doute aux maraudeurs), Papa Kumansky ne passe pas la nuit, vaincu avec ses camarades par la furie sanguinaire des hommes du Nord.

De leur côté, les fistons Kumansky s’en sortent beaucoup mieux. Planqués dans la maison familiale, ils commettent l’erreur de quitter leur refuge au premier bruit de bottes venu, confondant en cela la démarche chaloupée des Kislevites avec celle, chaloupée aussi à leur décharge, des Norscans. Livrés à eux-mêmes dans la scène de chaos (c’est fluff) que constitue le pillage d’Odensk, les frérots parviennent à échapper aux sales pattes d’un duo de maraudeurs mal-intentionnés, dont un se fait éborgner par le petit couteau de Stefan au passage. S’étant tapis au fond d’une barrique remplie de tripes de poissons (on ne jette rien à Kislev), le temps que le jour se lève et que la poussière retombe, Stefan et Mikhal sortent de leur cachette une fois le calme revenu à Odensk, et se rendent compte qu’ils sont probablement les seuls survivants de cette terrible nuit. Sans autre recours, les orphelins prennent le chemin de la terrible et dangereuse civilisation (sans doute Erengrad, tbh), empruntant par là-même le chemin des guerriers (wink wink), qui les mènera des années plus tard à exercer leur VENGEANCE sur les méchants qui leur ont fait du tort et navré à mort leur pauvre papounet. Sans doute que les chemins des mages et des voleurs étaient en travaux, à ce moment.

AVIS :

Neil McIntosh lève le voile sur la tragic origin story des frères Kumansky, qui servent de héros à la trilogie ‘Star of Erengrad’/’Tainted Faith’/’Keeper of the Faith’ que cet auteur a signé pour la Black Library en des temps très anciens ; dans ce très honnête ‘The Path of Warriors’. Si le déroulé des événements ne surprendra pas grand-monde, et que le cameo du maraudeur éborgné (que l’on retrouve plus tard dans les bouquins, mais dont le nom m’échappe au moment d’écrire cette chronique) risque de ne résonner qu’auprès de la toute petite communauté des fans hardcore de cette série aujourd’hui tombée dans l’anonymat le plus complet, on peut apprécier d’être enfin en présence de personnages un minimum complexe et sympathique, ce qui n’est pas le cas dans la majeure partie des Kumanskynneries que j’ai pu lire avant. La meilleure nouvelle de la trilogie de courts formats que McIntosh a écrit pour accompagner les romans, à mon humble avis.

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Leviathan – G. McNeill [40K] – #34 :

INTRIGUE :

40K_LeviathanLeviathan prend place entre les deux premiers tomes de la saga d’Uriel Vent Triste, Nightbringer et Warriors of Ultramar. La sorte de prologue qui ouvre la nouvelle voit le nouveau capitaine de la 4ème compagnie des Ultramarines se forger une épée pour remplacer l’arme dont il a hérité à la mort d’Idaeus, son prédécesseur à la tête des schtroumpfs verts. Euh… soit. La suite est plus classique, Uriel menant ses hommes dans le Space Hulk Death of Virtue dans le but de détruire ce dernier en posant quelques bombes à des endroits clés. Bien évidemment, les Space Marines vont rencontrer une opposition aussi féroce que prévisible, d’abord sous la forme d’Orks poltrons, puis de Genestealers grognons. Ce qui ne les empêchera pas de compléter leur mission, bien entendu. Le texte se termine par la détection de l’ombre dans le Warp par les astropathes du croiseur d’attaque Vae Victus, ce qui permet à McNeill de faire le lien avec la campagne de Tarsis Ultra. Ils arrivent…

AVIS :

Il y a des nouvelles dont on se demande à quoi elles servent, et Leviathan fait indéniablement partie de ces travaux à l’intérêt des moins évidents. Selon les mots mêmes de l’auteur, il s’agit d’une histoire « très simple », ce qui ne suffit pas à excuser le profond sentiment d’ennui qui émane de la quarantaine de pages consacrée par McNeill à cet épisode de transition, qui, s’il n’aurait sans doute pas pu être intégré au corps de Warriors of Ultramar sans ralentir considérablement le rythme de ce dernier, ne méritait pas franchement non plus de se voir dédier une nouvelle entière (et une nouvelle assez longue qui plus est). Pour résumer le fond de ma pensée, Leviathan est du proto-Cawkwell, ce qui est loin d’être un compliment.

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Glow – S. Spurrier [WFB] – #34 :

INTRIGUE :

GlowC’est la fin de l’automne à Talabheim, et le Temple de Sigmar local, dirigé par le capitaine Richt ‘Hmm’ Karver, enquête sur une addiction d’un nouvel ordre qui s’étend dans les bas-fonds de la cité. Le Glow, une poudre verte de composition inconnue, fait en effet des ravages parmi les déshérités de la métropole cratérisée. Très addictif, il a en outre comme fâcheux effet secondaire de provoquer des mutations spontanées chez ses utilisateurs réguliers, ce qui n’est pas du tout du goût de ce gentleman de Karver. Après avoir mené un raid dans un taudis dont l’adresse lui avait été donnée par un suspect, l’impeccable capitaine repart avec un cadavre frais de junkie agressif ainsi qu’une petite réserve de la substance en question, qu’il choisit d’ajouter à la diète du rat géant skaven qu’il a adopté comme animal de compagnie après une purge des souterrains de Talabheim l’année passée. Le savoir fait le pouvoir, c’est bien connu.

Les mois passent et l’hiver arrive sur l’Empire, sans que la filière locale de Glow soit démantelée malgré les meilleurs efforts de Karver et de ses hommes (Kubler, Holst et Spielmunn). L’épidémie ne fait au contraire que progresser, ce qui force les chasseurs de sorcières crackheads à muscler leurs méthodes, déjà assez viriles. Interrogatoires menés au tison, menaces d’envoyer leurs indics au bûcher s’ils ne s’activent pas et autres descentes dans la ville tous flingues dehors se multiplient. C’est au cours de l’une d’entre elles que Karver commet une bavure : surpris par la réaction de l’occupant d’un laboratoire clandestin où le Glow était produit, il déchargea sa pétoire sur ce qui se révéla être, après inspection post mortem, une fillette réduite en esclavage par le maître du cartel pour la confection des tablettes inondant la cité. Enchaînée dans son local et ayant été privée de langue par son tortionnaire, elle cherchait seulement à expliquer pourquoi elle n’était pas en capacité d’obtempérer aux ordres des Templiers lorsqu’un Karver sur les nerfs lui envoya un pruneau dans le caisson pour slow play. Ce sont des choses qui arrivent…

L’opération ne fut cependant pas un total échec, notre héros mettant le gant sur la poudre entrant dans la composition du Glow en fouillant le laboratoire. Ayant fait pression sur un sorcier de Jade pour obtenir une expertise express, il reçut la confirmation de ses soupçons : l’ingrédient actif du Glow était bien de la malepierre. Une erreur de manipulation de la part du thaumaturge lui permit de recevoir une autre information utile : la substance toxique se trouvait à la fois dans le gant utilisé pour recueillir la poudre dans le laboratoire, mais également à l’extérieur de ce dernier, indiquant sans équivoque que Karver avait manipulé de la malepierre peu de temps auparavant. Un résultat étrange, à moins que…

Début spoiler…À moins que la broche ornée d’une pierre verte que son meilleur disciple, Kubler, portait à la boutonnière ce jour-là n’ait pas été montée d’une émeraude, comme il le pensait, mais d’un minéral bien plus sinistre. La confrontation entre les deux hommes prend place dans la chambre froide creusée sous le Temple de Sigmar, dans lequel les répurgateurs stockent leurs cadavres contaminés dans l’attente du dégel. Ayant participé à la purge des terriers skavens en compagnie de son mentor, Kubler avait eu la mauvaise idée de s’intéresser à la malepierre utilisée comme monnaie d’échange par ces derniers, et qui le transforma rapidement en méchant de série B.

Ayant dupé la vigilance de son supérieur jusqu’à son fashion faux pas en matière d’accessorisation de sa tenue, Kubler est pris au dépourvu lorsque Karver le trouve en train de faire les poches des corps de Guerriers des Clans gardés en réserve par les Templiers à la recherche de cailloux verts. La surprise change toutefois de camp après qu’un Kubler gravement blessé par le tir de son patron passe en mode Technomage et avale d’un seul coup tous les éclats de malepierre qu’il trimballait sur lui, se transformant en mutant à la force et à la rapidité décuplés. C’est au tour de Karver de se retrouver dans les cordes, mais notre héros avait gardé un atout dans sa manche, ou plutôt au bout d’une chaîne : son rat de compagnie. Transformé en abomination (et pas Abomination, ça ne serait pas rentré dans son bureau) poilue par sa consommation régulière de Glow, Ratatouille est libéré par son maître et ne perd pas une seconde pour creuser un terrier dans la bedaine de Kubler afin d’accéder à la malepierre récemment consommée par le ruffian. Cet affrontement sans merci résulte en la mort simultanée des deux adversaires, laissant Karver le seul survivant de ce truel chaotique. Il faudra penser à passer un coup de mop, tout de même.Fin spoiler

AVIS :

Spurrier transpose avec succès une enquête des stups dans le monde de Warhammer Fantasy Battle avec ce ‘Glow’, qui illustre le sombre mais palpitant quotidien des Templiers de Sigmar lorsqu’ils n’ont pas de sorcières à se mettre sous la dent. Ambiance poisseuse, action rythmée, twist final bien amené… Simon Spurrier démontre l’étendue de ses talents de scénariste et sa valeur comme contributeur à la GW-Fiction avec cette nouvelle, qui sera malheureusement sa seule incursion dans le Monde qui Fut. Comme le hamster adoptif de Richt Karver, on aurait bien aimé avoir du rab’.

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The Curiosity – D. Abnett [40K] – #34 :

INTRIGUE :

40K_The CuriosityChargé par le gouverneur de Gershom d’établir la taxinomie complète des espèces animales de la planète, le magos biologis Valentin Drusher est sur le point de remettre son rapport lorsqu’il a vent des ravages causés par un mystérieux prédateur dans la région reculée de l’Udar Extérieur. Ayant consacré les sept dernières années à étudier la faune locale sans jamais rencontrer une créature pouvant être tenue responsable des attaques, la curiosité et l’orgueil professionnel de Drusher sont piqués au vif par ces échos lointains, et il décide en conséquence de répondre à l’invitation du baron du cru afin de tirer les choses au clair.

Associé à une Arbites (Germaine Macks) et à un chasseur de gros gibier (Fernal Skoh1), Drusher va rapidement se rendre compte que la « curiosité » de l’Udar est une réalité tangible, et que ses exploits sanglants et son élusivité ne doivent pas grand-chose au hasard. Quelqu’un se sert de la bête pour faire passer un message, mais qui, et pourquoi ?

1 : On retrouve d’autres membres de la famille Skoh (Feaver et Fernan, tous deux impliqués dans le juteux business de l’import de créatures exotiques destinées à combattre dans les arènes impériales) mêlés à l’intrigue de la trilogie Ravenor. Car-car-carnivora !

AVIS :

Si vous avez vu le film Le Pacte des Loups1, ni l’intrigue ni la conclusion de The Curiosity ne vous sembleront très originales, ce qui ne devrait pas vous empêcher de goûter malgré tout à cette première enquête de Valentin Drusher (que l’on retrouve également dans Gardens of Tycho, toujours en compagnie de Germaine Macks).

Très à son aise pour dépeindre la vie quotidienne des sujets de l’Imperium, à la fois dans sa normalité (Drusher étant l’incarnation même du fonctionnaire désabusé par son travail, et Macks celle du flic de province à qui on ne la fait pas) et son anormalité2, Abnett prouve qu’il maîtrise les codes du polar et est capable de les transposer dans l’univers gothique de 40K. Merci à Dan de démontrer sans équivoque que l’envers de l’Imperium (le côté civil) est au moins aussi passionnant que l’endroit (le côté militaire), et qu’il est possible de satisfaire le lecteur de la Black Library sans impliquer la moindre faction de Warhammer 40.000 au récit3. Avis aux autorités compétentes…

1 : Le long métrage de Christophe Gans étant sorti en 2001 et le recueil Crucible of War en 2003, il n’est pas interdit de voir en The Curiosity un pastiche volontaire de ce gros succès du box-office français.
2 : La bête du Gévaudan d’Abnett se révèle être un bête hormagaunt (bien qu’il nous l’ait plutôt vendu comme la Mort Bondissante en personne), ramené en sous-main par un membre de l’Ecclésiarchie cherchant à assurer la fidélité de ses ouailles aux offices dominicales (ou leur équivalent du 41ème millénaire), et auquel on a implanté une sorte de puce électronique dans le crâne afin de réguler son humeur mutine.
3 : Bon, ok, il y 1 hormagaunt qui vient contredire cette affirmation. Mais cette affectueuse bestiole est ici utilisée dans un rôle à contre-emploi (on est très loin des hordes chitineuses noircissant l’horizon), ce qui justifie à mon sens le fait qu’on ne puisse pas parler d’histoire de tyranides pour The Curiosity.

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Mark of the Beast – J. Green [WFB] – #34 :

INTRIGUE :

Mark of the BeastSoldat de carrière dans l’armée du Tzar de Kislev, Torben Badenov a gravi les échelons jusqu’à devenir le commandant d’une unité d’éclaireurs montés (15 exactement, et tous présentés par Green dès la première page de la nouvelle1). Pour son grand malheur, il sert sous le Capitaine Arman Yasharov, un noble kislevite aussi incompétent que méprisant, et bien décidé à faire tout ce qui est en son pouvoir pour revenir le plus tôt possible vidanger le samovar de la Reine des Glaces (en tout bien tout honneur, bien sûr). La bande d’Hommes Bêtes que son armée poursuit, et qui signe ses méfaits en apposant la titulaire « marque de la bête » dans les décombres des villages qu’elle a rasée2, bénéficie donc d’un avantage certain sur ses adversaires humains, et le pauvre Badenov en est réduit à limiter les dégâts causés par le leadership exécrable de son officier.

Envoyés par Yasharov pister la trace de la harde, qui semble avoir fait des prisonniers lors de sa dernière attaque, comme le faible nombre de cadavres trouvés dans les ruines du hameau où la nouvelle débute le laisse à penser, Badenov et ses scouts se font surprendre en rase taïga par une bande d’Ungors dépêchés par le Seigneur des Bêtes Gashrakk Blackhoof pour faire le service d’ordre à proximité de son campement. Gashrakk est en effet un visionnaire, dont le grand dessein est de réveiller le Seigneur du Dawa (Lord of Misrule en V.O.), une déité 100% chaotique que les légendes des Bêtes du Chaos font reposer en dessous de la pierre des hardes de la tribu de la Corne Noire. Pour permettre au Dawaster de sortir de son trou et de régner à nouveau sur son « royaume de confusion » (sicoù on n’écoute que du Genesis à fond les ballons, j’imagine), le big G. a un plan : sacrifier un nombre suffisant de prisonniers au Chaos, en mettant le feu à une effigie géante d’Homme Bête construit avec des cages en bois. Et moi qui pensait qu’ils ne savaient rien faire de leurs dix (?) doigts (?), me voilà corrigé. L’approche peu subtile de Yasharov ayant alerté le chamane Cathbad, Gashrakk sait que son projet X risque d’être interrompu par des Kislevites en maraude, et a donc envoyé quelques bandes désœuvrées contrecarrer la manœuvre. Il a aussi envoyé une doublette de chars à sangleboucs, malheureusement pour les cavaliers légers de Badenov, qui sont contraints à se replier en désordre après l’intervention des panzers adverses, abandonnant quelques morts et blessés sur le champ de bataille.

De retour au campement kislévite, Badenov réussit à obtenir de son Capitaine l’autorisation de lancer une mission d’infiltration de la base adverse (repérée par d’autres scouts, plus doués, eux) pour tenter de libérer ses camarades prisonniers, et peut-être secourir quelques civils au passage. Yasharov n’est absolument pas convaincu par la menace posée par un rituel sacrificiel qu’il s’agirait d’empêcher avant que l’attaque de son armée ne débute, mais il laisse tout de même à son sous-fifre jusqu’à la tombée de la nuit pour mettre à exécution son plan, après quoi il donnera l’assaut. Réduits à mi-effectifs à ce stade de la nouvelle, les Badenov’s Baddies profitent d’un coup de pouce de la part du script pour progresser vers leur objectif : le campement des Hommes Bêtes a été établi sur un ancien oppidum ungol, et compte bien entendu un souterrain secret reliant le centre de la place forte à l’extérieur. Haaa. Et nos héros trouvent bien sûr ce souterrain secret en l’espace de trois minutes. Hooo. Leur chance tourne cependant lorsqu’ils découvrent que les Gors ont décidé d’installer leurs latrines à l’endroit où le tunnel émerge dans leur campement. Un petit prix à payer pour speed runner cette quête, cependant.

De son côté, Gashrakk ne s’est pas tourné les sabots et a entamé le rite de réveil démoniaque/feu de joie païen avec Cathbad. L’arrivée imminente de l’armée kislevite, que sa bande d’Ungors n’a manifestement pas arrêtée (comme c’est bizarre) force toutefois le Seigneur des Hardes à accélérer le protocole, et à balancer une torche sur son bonhomme (bête) carnaval avant que le chamane n’ait pu terminer de réciter « je te tiens par la barbichette » 666 fois de suite. C’est le moment que choisissent Badenov et ses hommes pour lancer leur attaque sur les mutants, confiants dans le fait qu’il ne leur faudra tenir que quelques minutes avant que le reste de leurs forces n’arrivent en renfort, pas vrai ? PAS VRAI ? En cela, ils ont sous-estimé le jemenfoutisme de Yasharov, qui se contente d’envoyer quelques cavaliers barricader les portes du campement (?) pour empêcher les Hommes Bêtes de sortir. Car apparemment, ces derniers savent construire des statues en bois de 10 mètres de haut, mais le concept de distance de sécurité par rapport à un foyer de combustion leur est inconnu. La magie du scénario…

Toujours est-il que cette défection de dernière minute ne fait pas les affaires de nos héros. Si Cathbad se fait assez facilement soloter par Arnwolf le Norse, Badenov n’a pas la partie facile contre Gashrakk. Finalement, un anneau nasal trop solidement fixé, un crochet attaché à une chaîne elle-même fixée à la pierre des hardes, et surtout un positionnement malheureux du Seigneur des Blettes vis-à-vis de l’angle de chute de son effigie enflammée, auront raison du pauvre Blackhoof. C’est ce qu’on appelle un bûcher des vanités, vraiment. S’il ne réussit pas à réveiller le Dawaster et perd toute sa tribu en même temps que sa vie dans cette folle soirée (les Hommes Bêtes le sont vraiment, faut croire), il peut au moins se réconforter en songeant que tous les villageois capturés ont également fini en marshmallow (donc je ne comprends pas pourquoi son plan n’a pas marché… à moins que les invocations de Cathbad soient vraiment capitales), ainsi que la plupart des hommes de Badenov. En comptant l’évasion miraculeuse d’Oran et de Manfred, qui avaient été faits prisonniers par les Ungors, nos héros ne sont plus que six, et c’est assez naturellement qu’ils décident de déserter pour devenir des mercenaires, loin de l’incompétente brutalité des officiers placés là par leur famille. D’ailleurs, à ce propos…

Début spoiler…Il n’est jamais trop tard pour se venger de mauvais traitements, surtout quand on n’a plus rien à perdre. Badenov et Oran rendent donc visite à Yasharov au cœur de la nuit, et procèdent à un échange du meilleur goût : ils laissent la tête calcinée de Gashrakk dans le lit de l’aristocrate, Le Parrain-style, et vont planter la sienne sur une pique à l’extérieur du camp kislévite, avant de partir voir ailleurs s’ils y sont. On connaît la suite…Fin spoiler

1 : Et si vous pensez que je n’ai pas la patience ou la mesquinerie nécessaire pour relayer l’information, vous devez être nouveau ici : Torben Badenov, Oran Scarfen, Vladimir Grozny, Alexi, Arkady et Andrei Tolyev, Manfred, Oleg Chenkov, Arnwolf, Zabrov, Mikhail Polenko, Yuri Gorsk Kiryl, Evgenii, Cheslav, Stefan. Il n’en resteraque six  à la fin, ne vous attachez pas trop.
2 : Parfois en utilisant des matériaux… plus biodégradables que d’autres.

AVIS :

S’il ne s’agit pas de la première nouvelle écrite par Jonathan Green pour sa bande de mercenaires préférés, ‘Mark of the Beast’ peut au moins se prévaloir d’être le premier épisode de la série qui donnera au final le recueil ‘The Dead and the Damned’. Le résultat n’est pas aussi navrant qu’il a pu être dans d’autres péripéties badenoviennes, la haute teneur en action (bas du front) injectée par Green dans cette aventure l’empêchant de trop s’empêtrer dans son scénario, même si ce dernier apparaît tout de même très fragile dès lors qu’on a le malheur de s’intéresser un peu trop à lui. Si le héros s’appelle Badenov, l’auteur a pour sa part bien mérité le nom de Good Enough… De la cheap fantasy très peu intéressante, à moins que vous ne cherchiez à voir ce que le BL style a produit de plus suranné.

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A Ship Called Rumour – D. Abnett [WFB] – #35 :

INTRIGUE :

WFB_A Ship Called RumourDe retour à Sartosa, la cité pirate du Vieux Monde, après avoir effectué un séjour dans les geôles tilléennes, Luka Silvaro compte bien reprendre en main sa petite affaire familiale, récupérée par son demi-frère Guido après sa malheureuse incarcération. Très originalement pour l’endroit, Luka est un capitaine pirate, et pour rentrer en possession de ses biens (et personnes), il lui faut vaincre en « duel » – lui doit se battre seul, son adversaire non – son fourbe de parent. Ce qu’il fait avec les formes, dans le cadre bucolique d’une taverne enfumée, et sous les yeux d’un compagnon (Sesto) qui l’a suivi depuis Luccini pour s’assurer qu’il mettrait à profit sa liberté retrouvée pour accomplir une mission d’importance : traquer et couler le Butcher’s Ship, un vaisseau pirate semant la terreur sur le Grand Océan. Gentleman jusqu’au bout, Luka se contente d’amputer son gredin de frérot de sa main gauche (de toute façon, il ne lui restait plus que deux doigts de ce côté-là) plutôt que de l’achever, comme il en avait pourtant le droit et l’envie.

La suite de la nouvelle suit la préparation du capitaine abandonné réhabilité et de ses principaux lieutenants pour partir en chasse, sur les deux vaisseaux (la Rumeur et le Saphir) que compte la petite flotte de Silvaro. Les coques calfatées et les cambuses remplies, il est temps pour ce beau monde de cingler les voiles afin de… trouver un tuyau sur la localisation du Bucher’s Ship. Car malgré toute sa bonne volonté, Luka n’a pas la moindre idée d’où se cache sa proie, ce qui ne va pas faciliter la levée de sa probation et le versement des mille couronnes promises par Luccini en échange de l’accomplissement de sa mission. Il croit que sa chance a tourné lorsque se présente au loin les galères du collègue pirate arabien Ru’Af, mais ce qui devait n’être qu’une discussion informelle entre gens de mer se transforme soudainement et sans crier gare en bataille navale rangée. En cause : encore ce maudit Boucher, qui a tellement vidé les eaux internationales de leur trafic habituel que les pirates en sont réduits à s’attaquer les uns les autres pour tenter de survivre. Quelle époque mes pauvres amis.

Cueilli à froid par la traîtrise de Ru’Af, il faut bien quelques pages de féroces combats, et la perte d’un membre du casting, pour que Luka Silvaro parvienne à se tirer de cette mauvaise passe. La nouvelle se termine sur l’annonce officielle faite à son équipage de la mission qui lui a été confiée par ses employeurs tiléens, et sur un peu de name dropping de bon aloi. Il se pourrait que ce soit ce triste sire d’Henri le Breton qui se cache derrière la barre du Butcher’s Ship. Encore les Bretons (pourquoi ne suis-je pas surpris, sans déconner ?). Quelle mafia alors.

AVIS :

Comme il sait si bien le faire (lire ‘Les Cavaliers de la Mort’ pour s’en convaincre), Dan Abnett donne souffle et vie à un petit bout du Vieux Monde de manière aussi convaincante que prenante dans ce ‘A Ship Call Rumor’. On se fait rapidement happer par cette histoire de flibustiers au long cours, aussi exotique que fascinante pour l’habitué de la GW-Fiction, et suffisamment bien écrite pour être à la portée des nouveaux venus (après tout, tout le monde sait ce qu’est un pirate). Si on peut reprocher à ces quinze pages d’être très chargées en personnages, qui ne font pas forcément grand-chose d’intéressant une fois les présentations effectuées, et à l’action en elle-même de traîner en longueur, il s’agit d’un petit et logique prix à payer pour poser les fondations d’une serie feuilleton, qui semble avoir été pensée dès sa conception par Abnett et la BL comme publiable à terme comme un roman dont les chapitres seraient les nouvelles1 (ce qui sera le cas au final : ‘Fell Cargo’). On termine ce segment introductif avec une intrigue bien mise en place et une envie certaine de connaître la suite des aventures de Luka Silvaro et de ses hommes : c’est donc mission accomplie par Dan Abnett.

1 : Une pratique très courante à cette époque pour la Black Library, dont une bonne partie du catalogue lors de ses premières années était constitué de romans patchworks, aussi bien pour Warhammer Fantasy Battle (‘Tueur de Trolls’, ‘Hammers of Ulric’, ‘Gilead’s Blood’) que pour 40K (‘Ghostmaker’, ‘Brothers of the Snake’). On constate qu’Abnett a contribué à quatre de ces cinq exemples, ce qui en fait le champion du repackaging littéraire !

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The Beguiling – S. Mitchell [40K] – #35 :

INTRIGUE :

Nous retrouvons le Commissaire préféré de ton Garde Impérial préféré peu de temps après la campagne de Keffia (‘Sector 13’), sur la planète de Slawkenberg et engagé, aux côtés du 12ème Régiment d’artillerie de campagne de Valhalla (Jurgen, Divas et Mostrue sont de la partie), dans la purge du culte chaotique ayant déclenché une insurrection sur ce monde autrement paisible. Ou plutôt, des cultes chaotiques, comme nous allons le voir. Après quelques mois de routine agréable, passés à bombarder les positions ennemies à 71,99 pouces de la ligne de front le matin, déjeuner dans des petits bistrots sympathiques, et déguster de l’amasec vintage en charmante compagnie l’après-midi, notre fringant mais prudent héros se rend compte qu’il s’ennuie quelque peu, et décide de suivre une patrouille d’observateurs avancés de son régiment, accompagné de son fidèle Jurgen, pour voir du paysage et soigner sa réputation d’officier héroïque et proche de ses hommes.

Ce qui ne devait être qu’une simple balade en Salamander va bien sûr mal tourner, d’abord en raison d’une météo capricieuse et de l’absence de capote (livrée en option sur ce type de véhicule), puis à cause d’une embuscade maladroitement commise par un groupe de Prouteux en vadrouille, forçant les Valhallans à s’enfoncer dans une forêt profonde sur un petit chemin au lieu de rester sur la route (détruite par leur botte secrète : l’appel à un ami qui a une batterie de Basilisks sous ses ordres). Au bout de quatre heures de rallye pluvieux, Cain et ses charges retournent enfin à la civilisation, représentée par un manoir isolé mais apparemment occupé, comme son illumination l’atteste.

Ayant garé leur Salamander à quelque distance de la bâtisse afin de pouvoir la reconnaître discrètement, les Gardes sont surpris par l’arrivée désespérée d’une jeune fille affolée et fort peu vêtue, poursuivie par un petit groupe de cultistes de Nurgle. Si les maraudeurs pestiférés sont rapidement mis hors d’état de nuire, à défaut de puire, par les bidasses en goguette, et que la demoiselle en détresse, rapidement rejointe par quelques accortes amies, tombe dans les bras de ses sauveurs, Cain éprouve un vague mal-être (et une démangeaison palmaire de mauvais augure) devant la tournure prise par les événements. Quelque chose ne sent pas bon dans cette affaire, et ce n’est pas Jurgen (pas que, en tous cas)…

Début spoiler…Et en effet, la petite soirée que nos quatre militaires passent à l’Académie pour jeunes filles du monde de St Trynia, si elle s’avère mémorable, ne l’est pas pour les bonnes raisons, et se révèle aussi être la dernière pour deux des camarades de Cain. Alors que ce dernier se retrouve dans les quartiers privés de la directrice pour une séance de tantrisme extra-curriculum, l’ambiance retombe brutalement lorsque la voluptueuse Mademoiselle Duboir confie à son coup d’un soir qu’elle l’a tout de suite identifié comme un fidèle de Slaanesh. Ce que Cain ne pense pas qu’il est (encore1), merci pour lui. Il prend d’ailleurs la mouche au point d’abattre sans sommation son hôte après cette petite confidence. Et à propos de mouche, voici les Nurgleux qui reviennent à la charge, et prennent d’assaut le manoir et ses habitantes, offrant à Cain et à Jurgen (mis très mal à l’aise par le rentre dedans qu’il a subi toute la soirée de la part des prêtresses du plaisir sous camouflage) la couverture parfaite pour s’éclipser discrètement, laissant les dépouilles de leurs camarades malheureux au milieu du champ de bataille. Un petit coup de fil au Colonel Mostrue et un bombardement de la Chaos Star Academy plus tard, tout est bien qui finit bien pour le Héros de l’Imperium, qui décide suite à cette aventure de reprendre en main son hygiène de vie afin de ne plus être pris pour sex addict par la première cultiste venue. Non mais.Fin spoiler

1 : D’ailleurs à l’époque, Cain ne sait même pas trop qui sont les Dieux du Chaos (il l’apprendra plus tard en traînant avec l’Inquisitrice Vail). Mais comme Mitchell est partisan de la théorie des signes chaotiques (les noms et symboles des Dieux du Chaos sont tellement horribles que les entendre ou les voir provoque une réaction épidermique même chez les profanes), la confidence sur l’oreiller de Miss Duboir suffit à convaincre notre héros qu’il y a slaanguille sous resh.

AVIS :

Mitchell livre une nouvelle Cainesque tout ce qu’il y a de plus classique avec ce ‘The Beguiling’, qui mélange action, humour, grimdark et second degré avec un goût certain. Si l’expérience de lecture est assez plaisante, comme souvent avec les aventures du Commissaire le plus cool1 et coulant de tout le Segmentum, je regrette toutefois que Sandy Mitchell n’ait fait aucun effort pour ménager un peu de suspens sur l’opposition entre les deux factions antagonistes (Prout vs Meuh), qui nous est annoncée dès la première page, puis est mise en scène de façon très directe dès l’arrivée de Cain et ses hommes dans le manoir de Duboir. Etant certain de la capacité de Mitchell, en tant que scénariste et narrateur, à obtenir un résultat plus palpitant que ce très et trop convenu ‘The Beguiling’ (comme il a pu le montrer dans ‘Last Night at the Resplendent’ par exemple) s’il avait voulu s’en donner la peine, je reste un peu sur ma faim avec cette nouvelle, et ne la place donc pas parmi les tout meilleurs épisodes de la saga de Ciaphas Cain. Peut mieux faire et a mieux fait.

1 : Logique pour un officier rattaché à un régime de Valhalla, vous me direz.

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Meat Wagon – C. L. Werner [WFB] – #35 :

INTRIGUE :

WFB_Meat WagonVotre attention s’il vous plaît. La nouvelle qui va suivre comprenant un nombre élevé de personnages nommés (plus ou moins) importants pour notre intrigue, nous vous remercions par avance de suivre attentivement les présentations qui vont vous être faites de notre casting. Vous aurez été prévenus.

Et nous voici donc catapultés dans un relais routier minable sur la route reliant Erengrad à Zandri en passant par Nuln, où une belle bande de personnages attend que leur personnel de bord ait fait le plein et chargé les plateaux repas. Les écouter un instant suffit au lecteur sagace pour deviner où chacun se positionne sur l’organigramme de la nouvelle d’action med-fan1. Nous avons ainsi, par ordre d’apparition : le joueur de cartes (en os, because why not2)/escroc/joli cœur Feldherrn, le gras, riche, désagréable et xénophobe marchand de vodka Emil Steinmetz, sa « fiancée »/chaufferette achetée en soldes à son vieux père Lydia, et son garde du corps couturé et patibulaire, Ravna (surnommé un demi car il utilise une épée bâtarde). À cela, nous nous devons d’ajouter la Baronne von Raeder, vieille fille maniérée et hautaine, mais se baladant avec une rapière au côté, et le jeune ingénieur Nain Fergrim Pointefer, transportant avec lui des caisses frappées de runes auxquelles il tient comme à la prunelle de ses yeux. Pour finir, un mot sur les chauffeurs de ces messieurs-dames : l’Ostlander au fouet et aux chicots pourris, Ocker, et son comparse Strigani à tête de fouine et à moustache pleine de miettes (un signe sûr que c’est un filou… ou une fouine qui vient de tomber sur une baguette), Bresh. Pfiou, une bonne chose de faite.

Tout ce petit monde se dirige donc vers Nuln et doit cohabiter pour quelques heures, même si des tensions se manifestent déjà au sein du groupe. Le voyage du coche est cependant interrompu avant son terme par un fiacre-stopper planté au bord de la route. Reconnaissant un Répurgateur à la forme de son chapeau, les deux gredins tenant les rênes, et que le lecteur avait surpris quelques temps auparavant à échanger des remarques lourdes de sens hors d’écoute de leurs passagers, sont d’abord tentés de l’écraser, mais Mathias Thulmann (car c’était lui) avait habilement prévu le coup en demandant à son homme de main et tortionnaire particulier, Streng, de se positionner stratégiquement avec une arbalète chargée à proximité. Si Thulmann joue du pouce sur les grands chemins, c’est que son cheval à perdu un fer et qu’il a donc besoin d’être dépanné jusqu’à la forge la plus proche. Ne prenant pas les dénégations polies des conducteurs pour argent comptant, il s’installe donc posément dans la diligence, laissant son acolyte suivre cette dernière avec leurs chevaux, et propose un tour de table amical pour briser la glace entre les compagnons de voyage. Venant d’un type qui peut vous condamner au bûcher si vous éternuez de façon bizarre, pas sûr que cela fonctionne beaucoup.

En tous cas, cette rencontre fortuite n’empêche pas Ocker & Bresh de dérouler la suite de leur plan, et donc d’amener leur véhicule jusqu’au charmant petit village de Mureiste, Sylvanie. « Dites donc, c’est étrange que nous fûmes allâtes en direction du Nord-Est alors que la logique voullasse que nous nous dirigeassionnèrent vers le Sud-Ouest » commente ce finaud de Thulmann, à qui on a appris le Reikspiel littéraire et la géographie au Temple de Sigmar. Il ne faut donc pas s’étonner que notre héros dégaine une de ses pétoires de service lorsque l’équipage annonce une pause de quelques minutes à ses passagers, et interdise en des termes non incertains aux ruffians de bouger de leur siège. Cette situation des plus tendues (Streng étant venu appuyer les dires de son employeur avec sa propre arbalète) dégénère cependant tout à fait lorsque les habitants de Mureiste arrivent en masse taper au carreau du fiacre, et pas pour demander s’ils peuvent laver le pare-brise, non non. Car les locaux sont des goules, elles ont faim, et de bien mauvaises manières. Dans le tumulte qui s’en suit, notre compteur de mort horrible se déclenche enfin, grâce à la participation active d’Ocker, qui prend un carreau dans le bide de la part de Streng en tentant de dégainer son tromblon, tombe de son siège, se fait rouler dessus par la voiture qui s’emballe, et dévorer vivant par les relations professionnelles des son collègue. Pas mal pour un début. Bresh, de son côté, réussit à faire décrire des cercles à l’attelage devenu fou jusqu’à ce que le poison des cannibales fasse effet et terrasse les chevaux3. Le coche se renverse, manquant d’écraser Pointefer, mais ne faisant pas d’autres victimes que les chausses de Steinmetz, dont le transit intestinal est accéléré par la vue des goules. Toutefois, tous nos personnages, y compris Bresh, que Thulmann amène manu militari avec lui pour qu’il s’explique, réussissent à se réfugier dans le temple de Sigmar local, et à en barricader les portes.

Dès lors, il s’agit pour nos héros de s’organiser. Pendant que ses camarades fortifient leur position ou sanglotent dans leur coin, le Répurgateur torture un peu son suspect, arrivant à tirer de ce dernier la promesse d’une mort abominable délivrée d’une main de Maître par ce dernier. Il ne faut pas longtemps à Thulmann pour comprendre que les goules ne sont qu’un avant-goût d’une nuit très agitée qui s’annonce, et le zélote va donc prêter main-forte à ses acolytes, qu’il positionne à des endroits stratégiques dans l’attente du prochain assaut. À la tombée du jour, une chauve-souris géante vient déverser des litres de guano sur la grand-place où patientent les Muriestois, avant de se poser et de se changer en, je vous le donne en mille, Ozzy Osbourne. Ou presque. En vampire Stryge. Après s’être fait briefer sur les derniers événements, et avoir repris quelques forces en sirotant le messager4, il lance ses ouailles à l’attaque du monument, en leur indiquant de penser à faire le tour, cette fois-ci. Si la marée de viande écumante (voir « ils l’ont écrit ») ne parvient pas à faire autre chose que trembler les portes dans un premier temps, les nerfs fragiles de cette fiotte de Steinmetz manquent de condamner la team Sigmar lorsque le pleutre décide d’aller libérer Bresh dans l’espoir que ce dernier parvienne à le sauver. Malheureusement pour lui, et pour son nouvel obligé, Lydia donne l’alerte à Thulmann avant que le Strigani n’ait eu le temps de lui planter un couteau dans le dos. Privé de l’avantage de la surprise, les vingt centimètres d’acier du ruffian ne font pas le poids ni la longueur face à l’épée bénite du Répurgateur5, et le malappris se fait posément transpercer la gorge par son adversaire, qui peut aller redonner un coup de main très bienvenu à ses comparses.

C’est le moment que choisit le Stryge pour faire son entrée dans la place, par la fenêtre s’il vous plaît. Chemin faisant, il charcute horriblement la pauvre Baronne von Raeder6, pulvérise un banc et éventre Steinmetz, faisant un peu de ménage dans notre casting. Ses tentatives de griffer à mort Thumann sont cependant mises en échec par le jet d’eau bénite qu’il se prend dans la figure (ça brûle), et par les gros débuffs de zone que lui inflige le sol consacré du lieu saint dans lequel il se trouve. C’est ça aussi de ne pas demander à ses goules de raser le temple de Sigmar du village en temps et en heure. Devant tant de diableries, ou peut-être l’inverse, le vampire décide d’aller prendre l’air, entraînant avec lui ses hordes de groupies décérébrés. L’occasion pour les défenseurs de souffler un peu et de faire leurs comptes, le pauvre Ravna, méchamment tailladé par un ongle sale de goule, n’en ayant plus pour très longtemps…

C’est alors que Pointefer se souvient que le contenu de ses caisses n’est autre que de la poudre à canon. Gag. Jouant leur va-tout, les survivants envoient donc le Nain et le mourant poser une mèche dans les décombres de la diligence, pendant que Thulmann tente de distraire le Stryge. Cela marche tellement bien que, lorsque l’héroïque Ravna se sacrifie pour mettre le feu aux poudres, le buveur de sang est encore occupé à envoyer des gros doigts, ou griffes dans son cas , au Répurgateur depuis le sommet de la diligence. Bilan des courses : un centre ville dévasté, une vingtaine de goules déchiquetées, et un vampire en piteux état, que Thulmann achève d’un coup d’épée en plein cœur en punition de son tapage nocturne7. Ici s’achève notre histoire, les deux chasseurs de sorcières décidant de repartir avec leurs montures (habilement garées dans le temple par Streng un peu plus tôt), même déferrées, plutôt que de s’éterniser plus longtemps dans ce patelin paumé qu’est Mureiste. Et Thulmann de donner ce conseil avisé aux trois survivants de notre échappée belle (voyez si vous pouvez les identifier) : « je suis sûr que ça va marcher ».

1 : Et dans une certaine mesure, de déterminer qui a le plus de chances de mourir dans d’atroces souffrances au cours des prochaines pages.
2 : Même si le matériau utilisé me semble un peu saugrenu. Sans compter de la taille du squelette nécessaire pour tailler des cartes d’une taille suffisante. Sans doute un moyen pour les forces impériales de monétiser les cadavres d’Orques qui s’accumulent comme des feuilles mortes en automne après la Waaagh ! hebdomadaire.
3 : Qui n’ont pas reçu de nom et que je n’inclue donc pas à ma liste, à grand regret.
4 : Don’t shoot the runner, but drink them? Yes you can.
5 : Annule les sauvegardes invulnérables des Démons, coup fatal sur les sorciers à cœur noir.
6 : Dont le tort fut d’être une femme répudiée indépendante, et donc indigne de confiance pour ce misogyne de Thulmann.
7 : Non sans avoir balancé la petite réplique qui va bien juste avant, ici librement empruntée à ‘Le Bon, La Brute et le Truand’ (déjà pastiché par Werner dans sa série ‘Brunner, Bounty Hunter’.

AVIS :

On savait Werner particulièrement à son aise pour la mise en scène de nouvelles d’actions sérialisées, qu’il s’agisse pour lui de suivre une traque du chasseur de primes Brunner, ou une purification expresse dispensée par le zélé Mathias Thulmann. Cette réputation n’est pas usurpée ici, car cette Charcuterie Ambulante tient beaucoup mieux la route, et c’est heureux, que la diligence empruntée par nos héros pour se rendre à Nuln. En plus de bénéficier d’une atmosphère tendue tout à fait appréciable, en grande partie grâce au rythme soutenu imposé par l’auteur, et les quelques descriptions gore à souhait qu’il glisse au fil des pages, cette nouvelle parvient également à faire « vivre » (et mourir, dans beaucoup de cas) sa belle brochette de personnages de façon naturelle et équilibrée, et emprunte avec bonheur au genre du western, dont Werner est un fan assumé. La fameuse scène de l’attaque de la diligence par les Indiens, ou, plus proche de nous, l’attente tendue des 8 Salopards, partagent ainsi des similarités fortes avec le siège de temple de Sigmar par un Stryge et ses goules, preuve que dans la pop culture, tout est dans tout et inversement. Au final, encore une nouvelle solide à mettre au crédit d’un des chasseurs de lignes les plus réputés du Vieux Monde plutôt que du Far West, et une très bonne introduction du personnage de Mathias Thulmann aux non-initiés, si nécessaire.

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Warp Spawn – M. Ralphs [40K] – #35 :

INTRIGUE :

Ayant accepté à son bord un couple de clandestins et leur petite fille qui cherchaient à quitter la planète Vrantis III, le capitaine Matteus du transporteur Sable Bess ne se doute pas qu’il est sur le point de vivre la traversée la plus éprouvante de sa carrière. La famille idéale se révèle être un couple d’adorateurs du Chaos, et leur enfant la BFF des jumelles Apex, volontairement droguée par ses parents aimants afin de l’empêcher de jouer avec son ami imaginaire (je ne sais pas pour vous, mais ça m’évoque Marie Frisson et Gros Chat), un peu soupe au lait il faut bien le reconnaître. Loi de Murphy oblige, la maléfique fillette est bien sûr réanimée par l’équipage, dont la majeure partie ne vivra pas assez longtemps pour regretter cette décision. Dans le Warp, personne ne vous entend crier…

AVIS :

L’univers de Warhammer 40.000 est tellement vaste qu’il peut – en théorie – servir de cadre n’importe quel type de récit, même ceux les plus éloignés du standard de la Black Library (SF d’action). Partant, la décision de Matt Ralphs de signer une pure nouvelle d’horreur avec son Warp Spawn est loin d’être incongrue, d’autant plus que le bonhomme sait s’y prendre pour narrer des scènes cinégéniques en diable (oups). Le calvaire vécu part Matteus et ses comparses a beau ne pas être bien original, Ralphs parvient à instiller une atmosphère de slasher mâtiné d’épouvante surnaturelle à son propos, qui retombe malheureusement bien avant la conclusion (assez bancale) de la nouvelle.

Au final, si les deux premiers tiers de Warp Spawn sont un régal, le dernier tiers est franchement décevant, et aurait gagné à être plus développé par un auteur à court de place, de patience et/ou d’inspiration pour donner à son récit un final digne de ce nom. Dommage.

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Redhand’s Daughter – W. King [WFB] – #36 :

INTRIGUE :

WFB_Redhand's DaughterAprès avoir fait les 400 coups (de hache runique) en Arabie, quelques temps après leur retour d’Albion (Tueur de Géants), Gotrek et Felix se retrouvent sur le cuirassé nain du Capitaine Ahabsson, croisant sur les eaux du golfe d’Arabie depuis la forteresse de Barak Varr. Toujours à la recherche d’une fin glorieuse, le célèbre Tueur doit ronger son frein pendant la croisière, ce qu’il fait en s’enfilant pinte sur pinte et en gueulant sur Ceniormeteo, le dieu elfique des dépressions, tandis que Felix préfère meubler ses journées en regardant les dauphins et entretenant des pensées sinistres, comme à son habitude. Nos plaisanciers ne tardent cependant pas à être mis à l’épreuve (autrement, cela aurait été la nouvelle de Gotrek & Felix la plus ch*ante du monde), d’abord par la survenue d’un grain sévère, qui endommage bellement le Storm Hammer, puis par la rencontre avec un navire de pirates Orcs, qu’Ahabsson décide, en corsaire assermenté, d’aller piller. L’enthousiasme fiévreux du capitaine se heurte toutefois à quelques dures réalités, à commencer par les projectiles enflammés projetés par la catapulte de proue du vaisseau adverse, qui cabossent suffisamment le steamer nain pour que ce dernier se retrouve à portée d’abordage par l’équipage peaux-vertes, beaucoup plus nombreux que ses vis-à-vis. La bataille qui s’en suit permet à Gotrek de se dégourdir les orteils (pas mieux à espérer contre de simples boyz), et à Felix de voler à la rescousse d’une prisonnière de l’infâme Capitaine Goldtusk, qu’il réussit à escorter jusqu’au Storm Hammer avant que ce dernier ne parvienne à se désengager.

Vainqueurs éprouvés de l’affrontement, les Nains décident d’aller mouiller l’ancre sur l’une des îles toutes proches, encouragés en cela par le récit fait par la rescapée (Katja Murillo) du légendaire trésor que le pirate Redhand, qui se trouve être son père, a dissimulé sur cette dernière. Elle-même capitaine au long cours, elle promet à ses sauveurs de partager les bénéfices de son héritage s’ils l’aident à mettre la main dessus. Capturée par Goldtusk alors qu’elle voguait vers le butin avec son propre équipage, Katja n’a dû son salut qu’à l’avidité de l’Orc, qui a épargné sa vie en échange d’un aller simple vers le magot familial. Jamais les derniers à se lancer dans la quête de richesses mal acquises, Ahabsson et ses gars acceptent la proposition qui leur est faite, et tout ce petit monde (plus deux humains) débarque sur une île volcanique couverte d’une épaisse forêt où est sensé se trouver la fortune de Redhand.

Bien que charmé par le ravissant minois de la donzelle (ce qui est la raison pour laquelle il s’est rué à son secours en premier lieu), Felix se montre assez suspect des motivations de cette dernière, et ne peut s’empêcher de penser que Katja dissimule quelque chose à ses partenaires. Gotrek de son côté s’avère plus intéressé par la perspective de se frotter au monstrueux gardien d’une gemme légendaire conservée dans l’un des temples en ruines de l’île (dixit Katja, toujours), ou a défaut, par la régulation de la population locale de peaux vertes. L’enthousiasme général est à peine entamé par la disparition mystérieuse de plusieurs membres d’équipage au fur et à mesure que l’expédition s’enfonce dans la jungle, énigme rapidement résolue par un Gotrek peu tolérant envers les facéties des Gobelins arboricoles du cru. Après un pittoresque trail tropical, les aventuriers parviennent jusque dans la cité abandonnée promise par leur guide, qui se trouve être un lieu de villégiature couru par la gent orcoïde (un club Mork, sans doute), forçant nos héros à la plus grande discrétion. Même Gotrek, dont le premier but était pourtant de tailler des croupières aux locaux, accepte de faire crête basse jusqu’à ce que ses camarades aient pu sécuriser le trésor, ce qui est fort urbain de sa part. En même temps, ils sont sortis de la forêt, donc…

Une fois rendu dans le temple où Redhand aurait déposé ses bagages, et après avoir négocié de façon soupçonneusement facile au goût de ce rabat-joie de Felix l’accès jusqu’au cœur de l’édifice, qui dispose d’une installation géothermique de pointe sous la forme de puits de lave intégrés à la structure du bâtiment (attention à ne pas se brûler en prenant sa douche, tout de même), l’expédition se retrouve confrontée à un défi de taille, en la présence d’un Elémental de lave qui surgit de son jaccuzzi pour empêcher les intrus de faire main basse sur le trésor du pirate ainsi que sur l’énorme gemme qui fait office de décoration d’intérieur. Au lieu de s’émerveiller de la culture du gardien des lieux, qui s’exprime en Reikspiel parfait alors que sa prise de fonction remonte à des millénaires (ce sont les Anciens qui ont signé son contrat de travail), l’esprit mesquin de Felix ne peut s’empêcher de se concentrer sur le fait que MagMan semble connaître Katja, qu’il qualifie de sorcière (ce qui n’est pas très sympathique). De son côté, Gotrek se contente de foncer dans le tas (de roches en fusion) avec son ardeur habituelle, distrayant la Chose assez longtemps pour que Katja réussisse à s’emparer de la gemme, avant de disparaître dans un éclat de rire sardonique. On comprend alors que la capitaine corsaire n’était pas la fille, mais la femme de Redhand, qu’elle a poussé à prendre d’assaut le temple pour récupérer le diam’s des années plus tôt, sans succès. On comprend aussi que le joyau en question n’avait pas qu’une utilité symbolique, mais servait surtout de régulateur de l’activité tellurique du volcan local, qui se réveille violemment une fois la gemme dérobée.

Ayant tout de même réussi à refroidir les ardeurs du gardien, puis à le(s lui) briser menu, Gotrek et Felix en sont quittes pour une session de hack’n’slash intense pour sortir du temple avant que ce dernier ne soit noyé par la lave. Laissant leurs camarades survivants se débrouiller tous seuls comme des grands petits, le duo se fraie un chemin sanglant à travers les hordes de Gobelins que Goldtusk, arrivé sur place après le naufrage de son navire, a recruté pour… visiter le temple également je suppose1. Cette louable idée de sortie culturelle prend donc un tour funeste lorsque le Tueur et son comparse décident de couper la file, résultant en des centaines de morts parmi les visiteurs, dont Goldtusk en personne, décapité par un Gotrek littéralement chauffé à blanc. Ceci fait, il ne reste plus à nos inséparables qu’à partir en petites foulées vers la plage où mouille le Storm Hammer, avant que l’éruption du Krakatorka ne mette un terme honteux et cendreux à la carrière du Tueur. Spoiler alert : Ils s’en sortent. Si si.

1 : King ne donnant aucun signe que les Nains aient été détectés par les peaux vertes à leur arrivée.

AVIS :

Cette aventure conséquente (28 pages) permet à William King de renouer avec les origines littéraires de Gotrek & Felix, héros de nouvelles conduits plus tard par le succès à évoluer dans de plus longs formats. Se déroulant après les événements relatés dans Tueur de Géants, dernier roman signé de la série signé par King (et le moins réussi du lot à mon humble avis, comme quoi il a bien fait d’arrêter), Redhand’s Daughter peut être considéré comme l’ultime tour de piste des deux troublions sous la plume de leur créateur, et un écho aux longues nouvelles originelles du duo (Wolf Riders, The Dark Beneath the World). Bénéficiant d’une localisation exotique (je ne pense pas que quiconque se soit aventuré dans la Chaîne Mégaleane – qui n’apparaît sur aucune carte à ma connaissance – depuis lors), de péripéties rythmées et, elles aussi, assez innovantes pour le lecteur, comme la bataille navale introductive entre corsaires Nains et pirates peaux vertes, Redhand’s Daughter a un petit goût de pastiche de The Queen of the Black Coast (a.k.a. Conan en croisière), avec Katja en Belit et Gotrek & Felix se partageant le rôle du ténébreux Cimmerien. Ces considérations évacuées, on se retrouve cependant avec une soumission assez classique du sous-genre créé par King, qui déroule son propos et coche les cases du cahier des charges avec aisance plus que maestria. On notera pour terminer que l’auteur n’a pas encore tenu sa promesse de faire remettre Katja Murillo sur le chemin de nos baroudeurs, et qu’avec la destruction du monde de Warhammer (et donc celle de Katja et Felix), il lui sera assez difficile de tenir sa parole…

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Et voilà qui conclut cette revue de l’année 6 d’Inferno! Que dire d’autre à part qu’il reste deux années à couvrir et que ce sera bientôt le cas ? Stay tuned (and hydrated) et à la prochaine !

BLACK LIBRARY WEEKENDER ANTHOLOGY I [Recueil]

Bonjour et bienvenue dans cette revue de la Black Library Weekender Anthology I, autre recueil confidentiel que la BL a « rendu disponible » en 2012. La particularité de l’objet qui nous intéresse aujourd’hui, partagée avec son pendant qu’est la Black Library Weekender Anthology… II, est qu’il ne fut diffusé qu’à un endroit (le Nottingham Belfry hotel), et pendant une seule journée (le 3 novembre 2012), ce qui en fait l’un des livres les plus collector qui soient de toute la GW-Fiction. Comme vous vous en doutez avec un nom pareil, le but était bien évidemment de récompenser les fans ayant fait le déplacement jusqu’à cette contrée reculée que sont les East Midlands en leur permettant de mettre la main sur quelques nouvelles inédites. Et on peut reconnaître à la BL d’avoir fait les choses en grand, puisqu’un recueil différent fut proposé pendant chacune des deux journées de l’événement.

Black Library Weekender Anthology I.

Sur le modèle des Black Library Games Day Anthologies (chroniqué ici pour le millésime 2011/12, et pour le millésime 2012/13), les BLWA regroupent six courts formats, mélangeant l’Hérésie d’Horus, le 41ème millénaire et le Monde Qui Fut. Côté line up, le 6 rassemblé par les éditeurs de la BL pour cette première mi-temps est plutôt solide, avec un James Swallow en dernier défenseur hérétique, Smillie, French et Mitchell en milieux grimdark et McNeill et Josh Reynolds à la pointe de l’attaque med fan. Que dire de plus, à part Go Go Notts !  

Black Library Weekender Anthology I

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Lost Sons – J. Swallow |HH] :

INTRIGUE :

Lost SonsLes jours se suivent et se ressemblent sur Baal depuis que les Blood Angels sont tous partis châtier les Nephilim dans l’amas de Signus, comme demandé par Horus ‘Primes Inter Pares’ Lupercal à son frérot Sanguinius. Tous ? Non ! Comme l’addendum de l’ordre de mission l’autorisait, l’Ange a laissé une équipe de maintenance dans sa forteresse pour veiller au grain de sable en attendant son retour. Les 20 tondus ayant eu le grand honneur de rester à domicile patientent depuis plus de cinq ans dans le calme absolu de l’arrière-pays baalite, maintenant l’inflexible discipline et l’élégance vestimentaire qui ont fait la réputation des Blood Angels. Le chef de cette petite confrérie est le Chapelain Arkad, catapulté Gardien de Baal (c’est mieux que gardien de but) par Sanguinius avant son départ. Bien qu’habituellement calme, son sacerdoce l’a déjà amené à deux doigts de crozuser la goule de ses frères, lorsque certains d’eux ont cherché à abandonner leur poste pour partir à la recherche de leur famille perdue. Le déclenchement de la Tempête de la Ruine a en effet rendu toute communication avec la Légion angélique impossible, laissant nos plantons ressasser des idées plus noires que rouges sur le destin des Blood Angels.

A cela est venu s’ajouter les rumeurs, puis la confirmation officielle, de la trahison d’Horus et des massacres d’Isstvan et de Calth, et plus généralement d’une guerre civile de grande ampleur dans l’Imperium. Aussi, lorsqu’un vaisseau émerge du point de Mandeville du système de Baal et se dirige droit vers la forteresse quasi-déserte, c’est la méfiance qui domine chez Arkad et ses comparses. Il s’avère que le nouvel arrivé dispose de l’immunité diplomatique du 30ème millénaire, en cela qu’il est au service de Malcador le Sigilite, qui du haut de son poste de Régent de Terra, agit comme bon lui semble pendant que l’Empereur essaie désespérément d’isoler les combles de son Palais contre les courants d’air de Warp. Pingre comme jamais, le vioque a envoyé un unique émissaire, le Space Marine Tylos Rubio, ayant abandonné le bleu profond des Ultramarines pour le gris terne des Chevaliers Errants. Au moins, l’entretien est facile. Arkad et son copain Hezen sont atterrés de voir que leur visiteur est un Archiviste (Edit de Nikea, etc…), mais le sont bien davantage lorsque Rubio leur tend un parchemin avec accusé de réception annonçant la dissolution des Blood Angels. Gasp.

 La raison de cet acte administratif d’une brutalité sans nom est simple : considérant la 9ème Légion définitivement perdue du fait de la disparition pure et simple de l’amas de Signus, Malcador souhaite mettre la main sur les ressources considérables des Blood Angels en termes de matériel, d’armement et de glandes progénoïdes, afin de gérer au mieux son effort de guerre. Rien de personnel les gars, c’est que du business. Rubio informe toutefois ses hôtes que refuser d’obtempérer leur vaudra d’être déclarés traîtres à l’Imperium à leur tour, mais qu’il peut faire jouer ses relations pour leur trouver un poste à la MLCDR Corp, s’ils le souhaitent.

Cette décision unilatérale passe évidemment très mal chez les anges, aussi sanguins que leur blase le laisse présager. Après une réunion de famille houleuse, le Gardien s’en va porter la réponse du groupe à Rubio, qui patiente dans son véhicule de fonction en écoutant les Grosses Têtes : un non franc et massif. L’Archiviste s’attendait à ce refus de principe, et ne trouve rien à redire au projet des 20 derniers Blood Angels, qui ont repeint leur armure en noir pour l’occasion (parce qu’ils se considèrent comme faisant partie de la Compagnie de la Mort maintenant, wink wink) d’aller traquer Horus pour lui passer un savon1. Il est par contre beaucoup moins conciliant lorsque ses vis-à-vis refusent aussi d’ordonner à l’équipage de la petite flotte laissée par Sanguinius en orbite autour de Baal de coopérer à leur réaffectation prochaine. La tension monte soudainement d’un cran entre les cousins énergétiques.

Avant que Rubio n’ait pu commettre l’irréparable, comme crier « tu dépasses les bornes, Arkad ! » à son homologue, l’Astropathe local arrive en courant pour transmettre un message des plus urgents à ses patrons. Il s’agit d’une communication signée Raldoron, le premier Capitaine des Blood Angels, déclarant que Sanguinius est bien en vie et que la Légion perdure. Ce voicemail opportun, même s’il sonne le glas de l’Astropathe (ou peut-être est-ce son sprint de 300 mètres qui lui a été fatal), réjouit fortement Arkad et ses boys, et leur donne une opportunité en or pour renvoyer Rubio vers Terra avec la coiffe psychique entre les jambes. Ça ne s’est pas joué à grand-chose, mais les Blood Angels sont toujours officiellement dans la course, et il faudra compter sur eux pendant la seconde moitié de l’Hérésie.

1 : Enfin si, il trouve ça très con. Mais chacun ses fétiches hein.

AVIS :

James Swallow nous sert une nouvelle behind the scenes de l’Hérésie d’Horus, en se penchant sur les lignes trèèèès arrières d’une galaxie certes déchirée par la guerre, mais où un bon paquet de planètes sont tout de même loin du front. L’ironie de voir des Astartes se languir dans leur forteresse déserte et isolée pendant que tout le monde s’amuse sans eux rajoute du piment à cette histoire à la fois rafraichissante et intéressante d’un point de vue fluff. Un autre de ses points forts est de brouiller les lignes entre la position pragmatique à l’extrême de Malcador, et la fidélité romantique mais contre-productive des Blood Angels à leur Primarque : aucun de ces deux points de vue ne peut être considéré comme étant intrinsèquement supérieur à l’autre, et il revient au lecteur de décider dans quel camp il se retrouve le plus. Très sympathique.

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Know Thyself – A. Smillie |40K] :

INTRIGUE :

Know ThyselfLa nouvelle s’ouvre sur une description proprement marseillaise dans son exagération du vaisseau amiral des Flesh Tearers, ce bon vieux Victus, avec sa coque de céramite de plusieurs kilomètres d’épaisseur, et ses états de service l’ayant amené à effectuer un millier d’Exterminatus. Bien que très marrante pour tout le monde, sauf pour la crédibilité de l’auteur et de la nouvelle, cette introduction superlative n’a pas grand-chose à voir avec la suite de l’intrigue, et c’est donc à regret que nous continuons à l’intérieur de la mirifique barge de bataille, où nous retrouvons le Chapelain Appollus et le Champion de Compagnie Harahel. Les deux compères ont été envoyé par Gabriel Seth, le Maître des Flesh Tearers, accueillir un visiteur de marque : l’Inquisiteur Corvin Herrold. La mauvaise réputation et les agissements borderline des Flesh Tearers ont en effet fini par les rattraper, et à la suite d’un massacre sanglant et avec témoin commis sur une population civile pendant les Guerres de l’Eclipse, un signalement a été envoyé aux autorités compétentes par des lanceurs d’alerte bien intentionnés1.

Ne pouvant pas envoyer balader un Inquisiteur comme il fuit d’habitude ses responsabilités, Gaby consent à une entrevue, mais avec une mauvaise volonté oscillant entre le palpable et le quasi physique. Séparé de sa suite dès son débarquement sur le Victus, même pas autorisé à enregistrer la conversation avec Seth, et forcé à poireauter dans une salle sans chaise pendant que son hôte finit sa séance de pilates dans le Reclusiam, Corvin endure les mesquineries des Flesh Tearers avec flegme, jusqu’à ce que le Maître de Chapitre finisse enfin par passer la porte. N’étant pas en temps normal particulièrement empathique et conciliant, Seth se montre ici particulièrement abrupt, menaçant et péremptoire au cours de la conversation, déniant en bloc les accusations d’exactions pesant sur son Chapitre, molestant physiquement Corvin, puis lui donnant quinze minutes pour quitter le Victus, sous peine d’être renvoyé à ses chères études par macrocanon interposé…

Début spoiler…Cette confrontation n’était toutefois qu’une ruse destinée à permettre au véritable Corvin d’explorer le vaisseau des Flesh Tearers sans attirer l’attention. Déguisé en simple scribe de la suite inquisitoriale, Coco parvient à se glisser jusqu’au niveau où les Space Marines ayant succombé à la Rage Noire sont gardés en attendant une bataille digne de ce nom. Ayant dû en abattre un qui menaçait de lui sauter au cou après qu’il ait ouvert la porte de sa cellule pour documenter son investigation, l’Inquisiteur se prépare à repartir incognito vers la navette, mais est pris la main dans le sac par ce diable d’Appollus, qui avait vu clair dans son petit jeu. Assommé par le Chapelain à l’issue d’un duel très déséquilibré, Corvin se réveille attaché à une chaise, en compagnie de Seth, Appollus, de l’Archiviste Balthiel et d’un autre membre de la Compagnie de la Mort des Flesh Tearers, amené dans la salle d’interrogatoire à des fins pédagogiques. Voulant faire comprendre à son prisonnier à quel point la Rage Noire est dévorante, Seth ordonne à Balthiel de donner à l’Inquisiteur un aperçu de la psyché dévastée de Frère Gragraouh, une expérience douloureuse et débilitante pour ce fragile de Corvin, qui fait un burn out. Dans un accès de magnanimité aussi rare que stratégiquement stupide, Seth laisse toutefois repartir son visiteur, balancé sans ménagement dans sa navette avec les morceaux déchiquetés de ses serviteurs et gardes du corps. Il pensait peut-être donner une bonne leçon à l’Inquisition, mais s’il y a une constante dans l’univers de Warhammer 40.000, c’est que les Ordos ne sont pas de bons perdants…Fin spoiler

1 : Quand ce sont les Space Wolves, et leur rapport conflictuel avec les saints Ordos, qui te balancent à l’Inquisition, c’est que la boulette que tu as commise pourrait être qualifiée de planétoïde.

AVIS :

Nouvelle de pur remplissage, où l’on n’apprend strictement rien de nouveau sur les Flesh Tearers du 41ème millénaire qui n’ait été couvert précédemment1 (par Smillie ou par d’autres), ‘Know Thyself’ a pour elle le petit twist sympathique de la révélation de l’échange des rôles entre l’Inquisiteur et son grouillot, que je n’avais franchement pas vu venir. Je ne sais pas si c’est à mettre honnêtement au crédit d’Andy Smillie, car je pensais initialement que la couardise manifeste du pseudo Corvin devant les grognements de Seth se justifiait simplement par une nouvelle mauvaise interprétation du lore de 40K par l’auteur. C’est dire à quel point je rabaisse mes standards quand je lis sa prose. ‘Know Thyself’ peut à l’extrême limite être considérée comme un tournant majeur dans l’histoire contemporaine du Chapitre, car c’est là que commence le feud avec l’Inquisition (poursuivi dans ‘Blood in the Machine’), mais c’est faire beaucoup de cas de 13 pages très banales.

1 : Bon, si on veut vraiment chipoter, on (moi en tous cas) découvre que Manakel – un personnage Flesh Tearers ayant vécu au moment de la création du Chapitre – est devenu un Dreadnought. C’est peut-être couvert dans une autre nouvelle, mais je l’avais laissé en un seul morceau dans ‘Sons of Wrath’ et ‘Flesh of Cretacia’.

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Gods of Flesh and Blood – G. McNeill |WFB] :

INTRIGUE :

Immédiatement après les événements racontés dans ‘Let the Great Axe Fall’ (Sigmar & Alaric vs Krell, en résumé), l’Empereur Unberogen et ses guerriers survivants, toujours accompagné du Sorcier Bransùil, peinent dans un col enneigé à la suite de Rangers Nains de Karak Izor. Certains des compagnons de Sigmar ayant grand besoin de soin, à commencer par Gorseth, qui s’est pris un méchant coup de hache dans la clavicule, Alaric a fait jouer ses relations et sa réputation de grand fou génie pour obtenir un sauf conduit jusqu’au hall du Thane Egril Barazul, dont le but dans la vie semble être de ressembler le plus possible à Abraracourcix. À chacun ses hobbies.

Accueillis plus avec la main sur la hache que le cœur sur la main, les humains bénéficient tout de même de la médecine de pointe des Dawi, qui consiste en des lits trop petits et des bains d’eau glacée. Ça forge le caractère, parait-il. Un vénérable Nain du nom de Gromthi Okri, si vieux que même sa barbe a des rides, est toutefois dépêché auprès des hôtes de Barazul pour leur faire faire une visite guidée de la forteresse (sympa), et leur faire remarquer que Gorseth, malgré son obstination à ne pas périr, est condamné par la magie funeste de l’arme de son bourreau. Ce qui attend le jeune guerrier, c’est une éternité à arpenter les Voûtes Grises comme une âme peine, et rien ne pourra conjurer ce triste sort.

Avant que Gromthi ait eu le temps de dégainer son terminal carte bleue pour faire payer ses bons services aux Unberogens éplorés (rien n’est gratuit chez les Nains), Bransùil s’inscrit en faux du diagnostic du nabot cacochyme, prenant pour exemple Sigmar lui-même. L’Empereur n’a-t-il été secouru par son propre père de cet endroit maudit lorsqu’il s’y était perdu, lors de son adolescence ? C’est donc la preuve qu’il est encore possible de ramener Gorseth dans le monde des vivants, pour peu que Sigmar accepte d’y retourner, bien sûr. Ne pouvant pas laisser un guerrier ayant donné sa vie pour lui dans la hess, Ziggy relève le défi et se retrouve propulsé dans les limbes Warhammeriennes grâce aux compétences chamaniques de Bransùil.

Malgré la présence de son fidèle Ghal Maraz, très efficace dans le bannissement des esprits maudits qui errent dans la pénombre perpétuelle des Voûtes, Sigmar se retrouve rapidement à la peine, après avoir tout aussi rapidement retrouvé l’âme de Gorseth, qui luttait vaillamment (et sans arme OP, elle) depuis plusieurs jours contre les assauts des habitants spectraux de cette terre maudite. Le nombre infini des ennemis s’abattant sur les deux combattants, et le manque de réactivité de Bransùil à ramener ses alliés du bon côté de la barrière (il était sans doute parti se brosser les dents à ce moment), mènent le puissant guerrier à tomber à genoux et à lâcher son maillet magique au terme d’un dur combat. Serait-ce la fin pour l’infortuné Sigmar ?

Début spoiler…Bien sûr que non (vous n’y avez pas cru vous-mêmes, avouez-le). Car surgit soudainement de la brume le légendaire Nain Blanc, toujours là pour tirer ses copains de l’embarras. Quelques moulinets de hache runique plus tard, tous les esprits funestes dans un rayon de cinquante mètres se sont fait fumés (ou sont partis en fumée, c’est selon), ne laissant que nos trois compères sur le champ de bataille. Après avoir dûment remercié Grombrindal pour son intervention salutaire, et lui avoir promis de lui rendre la pareille lorsque le temps sera venu, Sigmar a toutefois la douleur de constater que c’en est fini pour Gorseth, qui a définitivement rejoint le monde des esprits et ne pourra plus revenir chez les vivants. Toutefois, le serviable Nain Blanc accepte de guider l’âme du nouvellement défunt jusqu’à un endroit plus recommandable que ces sinistres Voûtes, et Sigmar peut refaire surface auprès de ses guerriers pour leur raconter cette aventure peu commune (et enterrer le cadavre de Gorseth aussi, tant qu’à faire).Fin spoiler

AVIS :

Graham McNeill donne une troisième mi-temps au match contre Krell dans ce ‘Gods of Flesh and Blood1, ce qui est assez drôle si on considère qu’il avait déjà coupé cette nouvelle en deux lors de sa publication initiale dans Hammer & Bolter. A ce compte-là, une troisième partie n’aurait surpris personne et la séparation entre ‘Let the Great Axe Fall’ et cette nouvelle apparaît donc comme très artificielle.

Ces considérations séquentielles mises à part, on est en présence d’une petite nouvelle assez sympathique, pour trois raisons principales. Premièrement, des infos fluff sur Karak Izor, forteresse d’importance pour les Nains mais assez peu couverte dans la GW-Fiction jusqu’ici. Deuxièmement, la participation d’un personnage nommé des plus charismatiques, ce qui est tout à fait dans la veine super friends exploitée par McNeill sur cette série. Troisièmement et pour terminer, une conclusion bien plus intéressante que ce à quoi je m’attendais de prime abord, démontrant que même l’intervention de figures quasi-divines ne suffit pas toujours à obtenir un happy ending. Sans doute la meilleure partie de cette « trilogie ».

1 : Titre assez classe mais que je ne m’explique pas vraiment… Je veux bien qu’il y ait plusieurs « Dieux » au casting, mais un seul d’entre eux peut être considéré comme de chair et de sang.

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Crucible – J. French |40K] :

INTRIGUE :

CrucibleSi le travail en équipe est notre lot quotidien, mammifères sociaux que nous sommes, il n’en reste pas moins que pour certaines missions, il est préférable d’agir en autonomie. Ce n’est pas le Frère Istafel de la 7ème Fraternité des Chevaliers Gris qui dira le contraire, ni ses supérieurs d’ailleurs. Envoyé en solitaire aborder l’épave du Crucible, un vaisseau impérial détruit alors que son moteur Warp était en surchauffe, Istafel est chargé d’une authentique mission suicide comme son Chapitre d’adoption aime en donner à ses membres de temps à autre : botter les fesses d’un puissant démon en train de reprendre pied dans le Materium avant qu’il ne soit en mesure de nuire à l’Imperium.

Si notre héros doit se taper ce sale boulot en solitaire, c’est qu’il s’agissait du seul moyen de s’assurer que ce soit bien ce démon qui s’incarne sur le Crucible. En effet, le complexe système de Némésis et de karma cosmique auquel les résidents de l’Immaterium sont assujettis obligeait le Duc du Changement dont il est question ici (et qu’on appellera Obu pour des raisons de simplicité) à se manifester si le Chevalier Gris portant le « bon » nom, et uniquement lui, se présentait devant la faille Warp. Il faut s’imaginer une longue file de Démons Majeurs patientant pour revenir dans notre dimension avec leur petit ticket à la main, et le Duc Obu griller la politesse à tous ses camarades en caquetant « Heeeeey mais c’est my maaaaaaaaaaaan Istafel !!! », un peu comme lorsqu’on se fraie un chemin vers le premier rang d’un concert parce qu’un pote s’y trouve déjà (sérieusement, ne faîtes pas ça). Tout est possible dans le Warp, et c’est très drôle beau je trouve.

Si la perspective d’être envoyé se petit-suissider pour maximiser les chances de renvoyer le pauvre Obu patienter encore un millénaire sur le banc de touche trouble Istafel, ce fier parangon de noblesse et de dévouement n’en montre rien. Après avoir monté et démonté quatre fois de suite son armure et ses armes pendant le transit jusqu’au Crucible, et apposé les 777 sceaux de pureté réglementaires sur sa panoplie guerrière1 (il doit ressembler à Harry Tuttle à la fin de sa vie, truth be told), Istafel prend le chemin du Crucible et de sa destinée.

Sur place, il (et nous par la même occasion) a droit à un affrontement assez « classique » contre les forces démoniaques, se déroulant en grande partie dans son esprit et au cours duquel il a l’occasion de hallebarder – c’est comme poignarder, mais avec une hallebarde – quelques démons mineurs trop entreprenants, ainsi que le tout premier Spite-Revenant de l’histoire de Games Workshop (trois ans avant la sortie d’Age of Sigmar, c’est très fort). Après ce round d’échauffement, le combat contre Obu peut enfin commencer… et tout se passe comme prévu. C’est-à-dire que le pauvre Istafel se fait méchamment corriger, mais parvient tout de même à lier son âme à celle de sa proie, ce qui a pour effet de les bannir tous les deux (me demandez pas comment par contre). On remarquera juste qu’il est étrange que le Chevalier Gris ait attendu d’être à moitié mort pour dire les mots magiques et ainsi remporter la victoire morale et psychique, s’il n’avait que ça à faire pour gagner le match. Peut-être avait il des penchants masochistes, qui sait.

La nouvelle se termine avec une notification astrale envoyée au triumvirat d’officiers ayant envoyé Istafel saluer le Duc Obu. Après avoir observé une milliseconde de silence en l’honneur de leur frère disparu, ils ajoutent son nom à la loooooongue liste des morts glorieux de la Fraternité, qu’ils doivent régulièrement réciter en tant que responsables du devoir de mémoire. C’est la moindre des choses.

1 : Ce qui est assez mal avisé quand on doit se battre contre un démon de Tzeentch, et pas de Nurgle. Mais je suppose qu’il n’y avait plus de place.

AVIS :

John French prend un concept (assez sympa, il faut le dire) du fluff des Grey Knights et en fait une nouvelle de 13 pages. Sur le papier, et vu le pedigree de cet auteur, l’idée parait bonne mais on se retrouve au final avec 10 pages de baston, deux pages et demie de préparation à ladite baston, un quart de page de conclusion, et un quart de page de révélation un tant soit peu sympathique. Le ratio est, vous le reconnaitrez, assez famélique. On peut se consoler en se disant qu’une nouvelle de Grey Knights que l’on oubliera aussitôt après l’avoir terminé, c’est finalement tout à fait dans l’esprit de ce Chapitre des plus secrets, mais pour être honnête, j’aurais préféré lire quelque chose d’un peu plus mémorable.

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Berthold’s Beard – J. Reynolds |WFB] :

INTRIGUE :

Berthold's BeardDe passage à Wolfenburg, Gotrek et Felix acceptent l’offre d’Aldrich Berthold, dernier héritier connu de l’illustre famille du même nom, de l’escorter jusqu’à une bâtisse en ruines située au milieu des Montagnes du Milieu. La raison de ce périple en territoire Homme Bête est simple : pour prouver aux notaires qui préservent les intérêts des Berthold qu’il est le digne descendant du patriarche Bollin Berthold, et ainsi obtenir accès aux capitaux familiaux, Aldrich doit ramener une boucle de la barbe de son aïeul, enterré sous les fondations de sa demeure. Comme cette dernière a été abandonnée lorsque les hardes du Seigneur des Bêtes Gorthor1 ont ravagé le Nord de l’Empire, ce pèlerinage capillaire est loin d’être une partie de plaisir, et, bien que la tradition veuille que les Berthold accomplissent l’aller-retour en solitaire, l’épidémie de morts suspectes ayant frappé les autres héritiers de la dynastie au cours des derniers mois a convaincu Aldrich qu’un peu d’aide ne lui ferait pas de mal. On n’est jamais trop prudent.

Arrivé devant les décombres du Hall Etoilé (le nom du manoir), durement marqué par le passage des années, le trio se fait attaquer par une petite bande d’Hommes Bêtes squattant les ruines, et dont Gotrek et Felix se débarrassent sans beaucoup de difficultés. La nuit s’apprêtant à tomber, les aventuriers décident qu’il est plus prudent de bivouaquer dans les ruines, et de repartir le lendemain, une fois la preuve poilue prélevée sur le corps de papi Bollin. Ça tombe bien, les Hommes Bêtes avaient fait un feu au rez de chaussée, et il n’est pas encore éteint. Wait… depuis quand les Hommes Bêtes savent-ils faire du feu2 ?

Début spoiler…Il y a donc anguille, ou plutôt épi, sous roche, mais les manifestations troublantes ne commencent qu’un peu plus tard, lorsque Felix voit quelque chose remuer dans les ténèbres (Gotrek à ce moment là était en train de fixer le feu d’un air absent, sans doute en proie à des PTSD sévères et non traités). À l’inspection, il s’avère qu’il s’agit de sortes de tentacules noirs, qui s’emparent des cadavres des Hommes Bêtes pour les faire attaquer nos héros, comme des pantins manipulés par des fils. C’est le moment où Aldrich décide qu’il aimerait bien un peu d’intimité, et menace ses protecteurs avec un pistolet, leur intimant de partir sans tarder. Gotrek étant trop occupé à castagner les revenants, c’est à Felix que revient la lourde mais nécessaire tâche de tirer les choses au clair avec son commanditaire, qui dissimulait de noirs et très improbables secrets. Accrochez-vous.

Il s’avère que le Hall Etoilé a été construit dans le cratère d’une météorite de malepierre, et cette influence maligne a transformé Bollin Berthold en monstre difforme, que ses enfants ont emmuré vivant dans la crypte familiale avant d’aller s’installer à Wolfenburg. Maintenu en vie par cette source d’énergie aussi puissante que dangereuse qu’est la malepierre brute, Bollin a continué à croître en beauté pilosité dans son antre, se hissant au rang de divinité mineure pour les Hommes Bêtes des environs, qui lui sacrifièrent des victimes de temps à autre. Pater familias dans l’âme, Bollin ne s’attaqua jamais aux descendants qui vinrent lui tirer les moustaches à chaque nouvelle génération, faisant de son existence un secret honteux que les Berthold devaient assumer pour toucher leur héritage. Toutefois, Aldrich avait d’autres plans pour ce dernier, et après avoir orchestré la mort de tous ses cousins mieux placés que lui dans l’ordre de succession, a bien l’intention de s’établir à Marienburg sous un nom d’emprunt, mettant un terme à cette belle tradition.

Son erreur, autre que de menacer de mort deux personnages protégés par une armure de scenarium plus solide que la parole d’un Nain s’entend, fut de révéler son plan à haute voix pendant qu’il tenait Felix en joue, provoquant la fureur de Bollin, dont c’étaient – tenez-vous bien – les poils qui animaient les cadavres. On n’appelle pas ça des dreadlocks pour rien. Fou de rage, le patriarche (guère plus qu’une tête géante chevelue et barbue, à ce stade avancé) crève le plancher et dévore son rejeton ingrat, sous les yeux horrifiés de Felix et du lecteur. Ce crime ne restera pas impuni, Gotrek dégainant son coupe chou pour offrir une taille gratuite à ce monstre très particulier, avant de mettre feu à son abondante tignasse, provoquant la mort définitive du coriace Bollin. Une conclusion au poil, on peut le reconnaître.Fin spoiler

1 : Dont la fin a été racontée par le même Josh Reynolds dans l’un de ses premiers textes pour la Black Library, ‘The Gods Demand’. La boucle est bouclée.
2 : C’est une vraie question posée par Reynolds, et c’est un peu fâcheux car aussi bien les anciens Livres d’Armée que les nouvelles figurines montrent que les Hommes Bêtes, pour bestiaux qu’ils soient, maîtrisent cette technologie.

AVIS :

Je pense que Josh Reynolds devait s’ennuyer au moment d’écrire cette histoire de Gotrek & Felix (et comme il avait déjà écrit deux romans et deux nouvelles pour le duo à ce moment, cela peut se comprendre), et a décidé de troller un peu ses éditeurs de la Black Library. Le boss final de cette petite aventure est en effet tellement WTF que je peine à croire que le très professionnel et calé en fluff Reynolds n’avait pas un message subliminal à faire passer à ses patrons et aux lecteurs de ce ‘Berthold’s Beard1. Si vous êtes un fan hardcore du petit rouquin teigneux, cette nouvelle est donc incontournable car qui pourrait passer à côté de ce Hairslayer totalement échevelé, et de la Némésis la plus étrange que Gotrek ait eu à corriger de toute sa longue et distinguée carrière ? Dans tous les autres cas, vous pouvez faire l’impasse sur cette histoire absurde, qui tombe, oserais-je le dire, comme un cheveu sur la soupe.

1 : La BL a tellement aimé le concept que ‘Berthold’s Beard a été mis au sommaire de la Black Library Weekender Anthology I, ce qui peut être considéré comme une consécration.

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The Smallest Detail – S. Mitchell |40K] :

INTRIGUE :

The Smallest DetailÀ la recherche de petits extras pour égayer l’ordinaire de son cher Commissaire Cain, le brave Jurgen a pris sur lui de visiter les entrepôts de la milice de Helengon, monde banal sur lequel la Garde a été déployée pour écraser une insurrection l’étant tout autant. Usant de la considérable influence de son supérieur pour impressionner le responsable de l’entrepôt, un certain Sergent Merser, l’homme à tout faire du Héros de l’Imperium déambule longuement entre les travées et les étagères, emplissant sa musette des spécialités culinaires locales les plus appétissantes, à commencer par un saucisson d’anguille de sable tout simplement comestible, ce qui est déjà plus que ce que la majorité des rations du Ministorum peuvent revendiquer. Ces emplettes complétées, Jurgen se dirige tranquillement vers la sortie du site, mais remarque rapidement qu’il a été pris en filature par des amateurs, ce qui ne le trouble pas outre mesure1. Et en effet, l’embuscade dans laquelle il prend soin de tomber, et qu’il déjoue grâce à son entraînement et équipement supérieur, n’aurait pas cassé trois pattes à une Sentinelle. Seul petit problème, l’échange de tirs entre notre héros et son dernier adversaire a eu pour effet de déclencher un incendie (c’est ça que de s’abriter derrière des fûts de prométhéum), rendant l’identification des assaillants de Jurgen difficile.

Rejoint par la Prévôte Liana, qui se trouve en charge de l’enquête de cette tentative d’assassinat caractérisé, et par le Sergent Merser, qui accepte de jeter un œil sur les inventaires des autres entrepôts de la milice pour tenter de comprendre comment les tueurs en (im)puissance ont réussi à trouver uniformes et fusil laser2, Jurgen accepte de coopérer à l’investigation, mais seulement jusqu’au moment où il devra rentrer au camp pour préparer le jambon-purée de Cain. Très étrangement, l’étude des documents officiels ne donne rien, les inventaires inspectés par Merser étant trop mal tenus pour détecter des absences ou surplus de matériel (contrairement aux siens, d’une impeccable et implacable précision). Le dossier menaçant de piétiner, Jurgen prend congé, indiquant à ses comparses son intention de rentrer au bercail à pied, comme il est venu…

Début spoiler…Sauf qu’il était en fait venu en moto (une Salamander n’étant pas pratique dans une ville pas encore en ruines, et donc pleine de feux rouges, de livreurs Deliveroo et de petites mamies en déambulateur), et qu’il a fait exprès de mettre Merser sur une fausse piste, car il se doutait de la participation du Sergent dans la conspiration le visant. Aussi, lorsqu’il le voit sortir en courant de l’entrepôt quelques minutes après lui et sauter dans une camionnette qui part à fond de train pour rattraper le piéton qui n’en était pas un, Jurgen prévient Liana et se met en filature de la taupe, qu’il rattrape et immobilise au premier carrefour venu. Finalement, il s’avère que toute cette affaire n’a été qu’un énorme et regrettable (pour Merser, et plus encore pour ses complices) malentendu, le Sergent faisant partie d’un gang détournant de la nourriture pour la revendre à prix d’or sur le marché noir. Persuadé que Jurgen allait le dénoncer auprès de Cain (ce que l’aide de camp n’avait pas du tout l’intention de faire, car comme il le reconnaît lui-même, tout le monde fait ça), Merser a tenté de réduire le Valhallan odoriférant au silence, avec des résultats médiocres. Ironie de l’histoire, ce sont ses inventaires trop parfaits qui ont mis la puce à l’oreille de Jurgen, qui, en tant que Garde vétéran, sait bien que ce genre de documents sont par nature inexacts. Encore une fois, le mieux a été l’ennemi du bien !Fin spoiler

1 : Quand on est un vétéran ayant combattu les Tyranides et les Necrons à plusieurs reprises, plus grand-chose ne vous excite.
2 : L’absence de -s est volontaire, car sur les trois assaillants, un seul était convenablement armé.

AVIS :

Si cette petite nouvelle mettant à l’honneur le fidèle sidekick de Ciaphas Cain plutôt que ce dernier1 se laisse lire sans problème, et permet au lecteur non familier de l’approche particulière que Sandy Mitchell a du grimdark de découvrir cette dernière, je m’interroge sur la pertinence de l’intégrer dans un recueil dédié aux icônes de la GW-Fiction, dont Jurgen ne fait définitivement pas partie. Ce ne sont pourtant pas les courts formats où Cain tient la vedette qui manquent, et qui auraient à mes yeux bien mieux fait l’affaire ici. Je suis également un peu déçu que le titre équivoque de l’histoire n’ait au final débouché sur rien dans le dénouement de l’intrigue. Mitchell nous montre en effet Jurgen prendre en note mentale le nom d’un parfait inconnu, parce qu’on ne sait jamais, ça peut servir… sauf que ça n’a servi à rien ici. Le fusil de laser de Tchekov, ça te dit quelque chose ? Bref, ‘The Smallest Detail’ est loin d’être la meilleure, ni la plus adaptée, des nouvelles de Ciaphas Cain que l’on puisse parcourir, et je recommanderai donc au lecteur de retenter sa chance avec une autre soumission pour prendre la véritable mesure du Héros de l’Imperium.

1 : Ce n’est pas le premier texte de ce type, l’hyper court format ‘A Mug of Recaff’ étant également centré sur Jurgen.

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Et voilà qui termine cette revue de la Black Library Weekender Anthology I, qui n’a pas envoyé beaucoup de rêve, je dois dire. Espérons que le volume II soit autrement plus captivant.

WAR UNENDING [WFB]

Bonjour et bienvenue dans cette chronique de ‘War Unending’, le recueil de nouvelles Warhammer Fantasy Battle le plus confidentiel jamais publié par Games Workshop. Cela n’est pas dû à son âge vénérable (il date de 2010, ce qui le place au contraire parmi les publications les plus récentes pour cette franchise), ni à sa diffusion très sélective (comme cela a pu être le cas pour les mini anthologies distribuées lors des Black Library Weekenders, au temps où ces derniers avaient encore lieu), mais bien au choix effectué par la BL de ne proposer cet opus qu’en format numérique. Retiré de la vente sur le site de l’éditeur depuis plusieurs années, comme la plupart des ouvrages traitant du Monde qui Fut, ‘War Unending’ ne subsiste plus que dans la mémoire d’érudits de la GW-Fiction et à travers de rares mentions sur des sites de la communauté1. Il m’aura fallu un après-midi pluvieux et quelques recherches oiseuses pour découvrir l’existence de ce bouquin, ce qui est bien la preuve que la GW-Fiction est un puits sans fond…

1 : Je remercie donc l’auteur de Complete Gotrek & Felix pour son impeccable travail d’archivage (d’autant plus remarquable que le recueil qui nous intéresse ne contient qu’une seule nouvelle consacrée à l’héroïque duo), sans lequel cette chronique n’existerait pas.

War Unending

Ne pouvant pas me procurer d’exemplaire de ce recueil, je ne peux avoir de certitudes sur sa genèse, mais sa date de sortie et son illustration de couverture me laissent à penser qu’il s’agissait pour la BL d’accompagner la sortie de la 8ème version de WFB, comme les anthologies ‘XXX & Other Stories’ le font depuis plusieurs années. Les 11 nouvelles qui le composent, provenant d’une variété d’autres anthologies et publications allant du plutôt ancien (‘Portrait of my Undying Lady’ – 2001) au très récent (‘Virtue’s Reward’, qui venait d’être publié dans le numéro 3 de Hammer & Bolter, et ‘Broken Blood’, tiré de ‘Death & Dishonour’ – 2010). On trouve tout de même au sommaire une nouveauté en la présence de ‘The Blood Price’, introduction à la série consacrée par Mike Lee et Dan Abnett à Malus Darkblade. Avec sept nouvelles provenant des vénérables pages du magazine Inferno !, on peut toutefois considérer ‘War Unending’ comme l’ultime anthologie « infernale » publiée par la Black Library, près de six ans après la sortie du dernier numéro du légendaire bimensuel.

Sans plus attendre, partons à la (re)découverte de ce volume quasi-oublié, et tâchons de voir s’il en valait la peine, du temps où il était encore disponible. Si la guerre est éternelle, la politique de distribution de la BL est elle plutôt volatile…

War Unending

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Swords of the Empire – D. Abnett :

INTRIGUE :

« Cher journalle en pô de shèvre, si je prens la plume aujour dui, bien ke je ne soyes pa un skribhe, mésun chevalié de la Reiksguard, cé ke j’en nai greau et ke le monde doigt savoir. »  Ainsi commence l’histoire narrée par velin caprin interposé par notre narrateur, Jozef von Kassen, qui, pour tromper les longs mois de l’hiver kislévite, s’est mis en tête de chroniquer par le menu les aventures l’ayant amené à squatter avec ses hommes la stanitsa de Kzarla. C’est donc à la chronique d’une chronique, exercice meta en diable, que l’auteur de ces lignes se prête ici, sur un support bien moins classe qu’un parchemin de biquette je le reconnais, mais nécessité fera loi.

Notre récit débute à Altdorf, où von Kassen est chargé par ses supérieurs d’escorter la vadrouille d’Udo Jochrund, maître sorcier du Collège Lumineux et spécialiste de la magie tribale kislévite, sur son terrain de prédilection. Accompagnés d’une vingtaine d’hommes d’armes, notre héros doit assurer la sécurité de sa charge pendant qu’elle recensera les fascinantes traditions chamaniques des peuplades du grand Nord, entreprise qui semble occuper la plus grande partie des étés de Jochrund. Von Kassen, qui est une âme simple, se méfie d’abord des pouvoirs occultes dont son compagnon de voyage dispose, mais la pédagogie dont ce dernier fait usage pour convaincre son protecteur un peu concon qu’il n’a rien à craindre, et la gentillesse manifeste de l’érudit1, finissent par gagner la confiance du soldat. Commence alors un périple long de plusieurs mois, permettant à l’expédition de visiter quantité de communautés kislévites, au lecteur d’apprendre pas mal de choses sur nos personnages (à commencer par l’intérêt fort et sincère que porte von Kassen à tout ce qui à trait aux chèvres2) et sur la culture locale, à Jochrund de collecter des tonnes d’échantillons et de témoignages, et à Abnett de remplir facilement une vingtaine de pages, ou une peau de chèvre entière dans le cas de son héros. Ceci dit, le périple n’est pas sans rencontrer quelques difficultés occasionnelles, comme la fois où les aventuriers ont dû batailler pendant une heure pour repousser l’assaut de brigands locaux, pour un résultat sans appel – mais un peu surprenant si on prend compte la longueur de l’affrontement – de quatre morts à zéro3.

Les choses deviennent un peu plus sérieuses lorsque la petite troupe atteint le village septentrional de Svedora, nommé ainsi à cause du chapeau traditionnel que tous les hommes célibataires avec collier de barbe portent. Eprouvés par des mois de marche à travers les plaine du Kislev, les impériaux ont une allure plutôt miteuse, ce qui mène le krug local à leur barrer la route d’un air menaçant. Von Kassen parvient toutefois à dissiper ce fâcheux malentendu, gagnant la confiance de son homologue, un beau gosse à l’armure et l’épée étincelantes, et à la moustache soyeuse, du nom de Subarin. Accueillis en grande pompe par leurs hôtes, les voyageurs savent qu’il ne leur reste que peu de temps pour faire demi-tour, l’arrivée prochaine de l’automne menaçant de les isoler pour la mauvaise saison dans une stanitsa de troisième ordre. Aussi, c’est avec une lassitude non feinte que von Kassen s’entend réclamer par le sorcier un nouveau délai, pour aller visiter une ultime communauté située à quelques jours de voyage au Nord de Svedora.

Guidés par un trio de guerriers locaux, dont Subarin qui souhaite apparemment concrétiser sa bromance naissante avec von Kassen, les impériaux parviennent à leur destination, Kzarla, mais non sans avoir essuyé une embuscade de la part d’une bande de Kuls agressifs, et perdus quelques membres de l’équipée au passage. Après avoir à nouveau négocié leur entrée dans le village auprès du krug local, les riders de l’extrême sont envoyés crécher dans une yourte à l’extérieur de la communauté, qui est sur le point de célébrer un rituel important pendant lequel aucun étranger n’est toléré intra muros, exception faite de Jochrund et de son assistant, Sigert. Le comportement maniaque de sorcier a cependant alerté von Kassen, et lorsqu’il assiste à ce qui ressemble beaucoup à une procession sacrificielle emmenant une accorte damoiselle locale jusqu’à l’île où se situe le temple local, le preux chevalier ne peut rester dans sa tente à se saoûler au koumiss, comme ses camarades. Faisant fi de l’interdit, il se précipite donc dans le village, épée à la main…

Début spoiler…Ses suspicions se trouvent confirmées lorsqu’il aperçoit Jochrund et Sigert en train d’assister le chamane de Kzarla dans ce qui ne peut être qu’un sacrifice païen de la pauvre vierge droguée. Sans chercher à réfléchir, et comme le vrai GOAT qu’il est, von Kassen interrompt la cérémonie, se saisit de la fille et repart dare-dare vers sa yourte, ayant poussé le chamane dans la flotte gelée et décapité ce fourbe de Sigert au passage, lorsque l’acolyte lui avait planté une dague dans la cuisse. Quant à Jochrund, dont la manie de toujours porter des gants a trouvé une explication logique mais chaotique pendant ce tohu-bohu (les mains du sorcier étaient en fait des griffes), il a écopé d’une javeline de la part de l’estimable Subarin dans la hanche pour sa peine.

La perfidie du sorcier est confirmée par le recueil du témoignage de la donzelle (Mariya), une fois redescendue de son bad trip. Von Kassen apprend ainsi que ce jocrisse de Jochrund a convaincu le chamane local de procéder à un véritable sacrifice – auparavant, les Kislévites se contentaient d’en mimer un, n’étant pas les brutes épaisses pour lesquelles von Kassen les tenait – afin de s’assurer de la réussite d’un rituel de clémence météorologique. Ce qui n’a l’air de rien dit comme ça, mais aurait permis aux hordes de cet obscur chef de guerre du nom d’Arcachon, ou quelque chose comme ça, d’envahir le Kislev et l’Empire plus tôt que normalement possible. Avant de pouvoir alerter ses supérieurs de la duplicité du mage et du grave péril dans lequel le Vieux Monde se trouve, von Kassen doit toutefois négocier un ultime contretemps : l’arrivée d’une large bande de Kurgans convoqués par Jochrund, qui compte bien laver Mariya de tous ses péchés d’un coup de surin enchanté, pour offrir un hiver clément à son boss. Se battant à plus de un contre quatre, le krug local ayant été envoyé chasser le dahut par les manigances de Jochrund quelques jours plus tôt, nos vaillants héros livrent toutefois bataille avec bravoure, perdant la majorité des leurs sous les coups des maraudeurs mais prélevant un lourd tribut parmi leurs assaillants. Alors que tout semblait perdu, le retour inespéré de lanciers ailés de Kzarla scelle la déroute des chaoteux, tandis que Jochrund se fait occire par l’incontournable Subarin d’un revers de sa prodigieuse épée. Il est toutefois trop tard pour que von Kassen et ses survivants puissent faire demi-tour, et c’est ce qui explique le zèle littéraire de notre héros, déterminé à laisser une trace de son passage même s’il devait périr de la grippe saisonnière avant le retour des beaux jours. Voilà un dévouement digne d’éloges.Fin spoiler

1 : Ne jamais sous-estimer le pouvoir du mystérieux sourire de (la) Jochrund.
2 : Ainsi, il prend bien soin de préciser que le départ s’est fait à la St Talve, le patron de l’agnelage, information notable sans aucun doute. Après tout, comme il le dit lui-même : « tout ce qui compte aujourd’hui pour moi peut se mesurer en chèvres ».
3 : À moins que le différent n’ait été réglé par une partie de Blood Bowl, ce qui reste une possibilité.

AVIS :

Dan Abnett poursuit sur la lancée (et les lanciers) des Cavaliers de la Mort avec Les Epées de l’Empire, récit d’aventures dans les steppes du Kislev mettant un noble héros aux prises avec les infâmes forces du Chaos, qui peuvent parfois revêtir des traits familiers. Parvenant à nouveau à embarquer le lecteur dans l’exotisme de cette civilisation méconnue sous bien des aspects, l’auteur combine avec maestria action trépidante, intrigue satisfaisante et immersion fluffique poussée. C’est propre, c’est net, c’est Abnett à son meilleur en matière de nouvelles siglées Warhammer Fantasy Battle, et en plus, c’est traduit en français : que demande le peuple ?

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The Small Ones – C. L. Werner :

INTRIGUE :

WFB_The Small OnesLa vie paisible du village de Marburg, perdu au milieu du Stirland profond (aussi appelé Stirland), est bouleversée par l’arrivée impromptue d’un Sorcier du Chaos mal en point (Thyssen Krotzigk), en fuite après que sa congrégation ait été passée par l’épée par la Garde Noire de Morr du Capitaine Ernst Ditmarr. Prêtre de Morr à l’esprit mal tourné, Thyssen avait profité de sa nomination dans une paroisse reculée pour se vouer à l’étude et à la vénération des Dieux du Chaos avec une totale impunité, jusqu’à ce que le rectorat lui envoie un inspecteur (auquel il arriva un regrettable accident), puis un bataillon de Templiers. La bataille qui fit rage entre cultistes et gothiques se solda par la victoire de ces derniers, mais Thyssen parvint malgré tout à s’enfuir (en clopinant, du fait d’une jambe cassée), laissant Ditmarr avec une manche vide (le feu, ça brûle) et un désir de vengeance inextinguible.

Les Fab Four faisant bien les choses, Thyssen est découvert par une bande d’enfants du coin alors qu’ils jouaient dans la forêt. Ayant tiré le don « sosie d’Alf, mais en grimdark » sur le tableau de l’Œil des Dieux (comprendre qu’il ressemble au fruit des relations incestueuses entre un Gamorréen et un Ewok), le petit Sorcier se fait instantanément adopter par Keren, fille du meunier de Marburg, fan de furries et forme non évoluée de Karen, qui convainc tout aussi rapidement ses camarades (Paul, Therese et Kurt) de cacher celui qu’elle considère comme un prince victime d’une malédiction dans le moulin abandonné du rival de son père (auquel il arriva un regrettable accident, bis). C’est le jackpot pour Thyssen, qui peut se rétablir tranquillement et confortablement grâce aux victuailles que les enfants de Marburg prélèvent dans le garde-manger familial pour son bénéfice, tout en commençant à corrompre son jeune public grâce aux contes séditieux sur Sigmar et les Quatre Princes dont il les abreuve. Après tout, c’est vrai qu’il ressemble beaucoup à Père Castor.

La situation de Thyssen est toutefois précaire, les Marburgeois ne restant pas les bras croisés devant la disparition d’un nombre croissant de leurs rejetons, qui préfèrent squatter dans le moulin de leur copain porcin plutôt que de trimer sang et eau pour leurs vieux (on les comprend). Ils commencent par engager un pisteur pour remonter la trace des disparus… auquel il arrive un regrettable accident, ter. Un peu plus tard, Thyssen mène une vendetta contre le vieux prêtre de Sigmar Hackl, proche de convaincre le conseil municipal de mettre des Répurgateurs sur le coup. Bien que le combat reste longtemps indécis entre le vieillard chétif et l’avorton boiteux (un match d’une violence insoutenable, retransmis à travers les Royaumes du Chaos), Thyssen finit par avoir raison du sigmarite, et met en scène son cadavre pour que, vous l’avez deviné, cela ait l’air d’un regrettable accident. Je ne sais pas si le concept de l’assurance-vie existait dans l’Empire avant la Fin des Temps, mais si c’est le cas, l’activité devait être implantée dans le Stirland.

C’est le moment que choisissent Ditmarr et sa gueule de porte-bonheur pour arriver à Marburg. Toujours sur la piste de sa Némésis poilue, le Garde de Morr disgracié (il s’est fait virer par l’ordre pour abandon de poste) n’est pas contre donner un coup de la seule main qu’il lui reste aux bouseux du coin dans leur problème de fugues infantiles. De son côté, Thyssen considère la venue fortuite de son persécuteur comme un nouveau cadeau des Dieux Noirs, et envoie donc l’un de ses enfants perdus attirer le Templier jusqu’à son QG, pendant qu’il réfléchit à la mise en scène d’un nouvel accident regrettable. Cependant, le messager en culottes courtes sous-estime la méfiance du Garde Noir, qui comprend rapidement que quelque chose ne tourne pas rond dans l’histoire qu’on lui sert, et ne se rend pas seul sur les lieux, comme il aurait dû le faire. En effet, il ordonne aux placides Marburgeois de mettre le feu au moulin au moindre bruit suspect, et, bien qu’ils aient conscience que la plupart de leurs rejetons soient présents dans l’édifice, ils suivent à la lettre les consignes de Ditmarr après que ce dernier se soit fait submerger par ses petits adversaires. Encore une arnaque à l’assurance, ça.

Dans le chaos qui s’ensuit, le Templier ne parvient qu’à crever un œil à Thyssen avant que ce dernier ne prenne à nouveau la poudre d’escampette, laissant ses cultistes puérils faire le coup de feu. L’un d’eux se fait d’ailleurs brièvement posséder par un Buveur de Sang (c’est les hormones) alors qu’il était sur le point de sacrifier Ditmarr pour la plus grande gloire de Khorne, et bastonne le Garde Noir comme plâtre pendant les trente secondes que durent son feat. Bien que le coriace chevalier parvienne à se sortir du brasier après cette tannée surprise, il décède de ses blessures le lendemain, après que les villageois lui aient fait croire que le corps de Thyssen avait été retrouvé dans les décombres du moulin…

Début spoiler…Alors qu’en fait, le Sorcier de poche était déjà loin de Marburg, mais pas dans une situation idéale. La nouvelle se termine en effet sur sa rencontre avec une bande de Gors qui semblent plus emballés par une dégustation de saucisson que par l’accueil d’un nouveau mutant. On ne peut pas leur en vouloir cela dit : le Pumbagor ne faisait pas encore partie du bestiaire des Bêtes du Chaos au moment où cette nouvelle a été écrite…Fin spoiler

AVIS :

Si on ne compte plus les nouvelles de GW-Fiction où des guerriers surhumains s’affrontent pour faire triompher leurs idéaux, celles mettant en scène leurs exacts opposés sont en revanche beaucoup plus rares. On peut donc remercier C. L. Werner d’avoir livré sa version de ‘Sa Majesté des Mouches1 pour Warhammer Fantasy Battle avec ce ‘The Small Ones’, sorte de huis-clos psychologique où le potentiel malaisant d’une bande d’enfants manipulés par un être maléfique est exploité de bien belle façon. Je mets aussi au crédit de l’auteur un séquençage impeccable du récit, qui alterne entre Thyssen, ses petits protégés, et Ditmarr, ainsi que les contes de Sigmar et des Quatre Princes, sorte d’histoire dans l’histoire qui aurait mérité d’être racontée dans une nouvelle séparée. Seul petit bémol : une conclusion un peu bâclée, qui ne donne pas d’indication sur le sort des enfants de Marburg (si Ditmarr a réussi à s’échapper du moulin après avoir boxé deux rounds contre un Sanguinaire, la marmaille chaotique a de bonnes chances de s’en être tirée) et laisse le destin de Thyssen en suspens. On reste cependant en présence d’une très bonne soumission de la part de Werner, dont l’originalité se doit d’être reconnue.

1 : Une comparaison d’autant plus apte que le grand méchant de l’histoire a/est dans les deux cas une tête de cochon.

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Rattenkrieg – R. Earl :

INTRIGUE :

WFB_RattenkriegUn vieux Prêtre de Morr fan de jardinage et ami des petits oiseaux voit sa paisible retraite interrompue en pleine nuit par l’arrivée d’un visiteur imprévu. Sous ses abords de clochard odoriférant et plus qu’à moitié fou, le nouveau venu se révèle être un Capitaine mercenaire du nom d’Otto van Delft, ayant fait de la dératisation sa spécialité et son gagne-pain. Ereinté par les épreuves qu’il a traversé au cours des derniers jours, le chien de guerre accepte volontiers la soirée boutanche et anecdotes que lui propose l’aimable ecclésiastique pour apaiser son âme troublée. Nous voilà donc plongés dans le Rattenkrieg, ou guerre contre les rats pour ceux qui n’ont ni fait allemand au collège, ni joué à Return to Castle Wolfenstein, menée par la cité impériale de Magdeburg contre ses voisins du dessous.

La casus belli était tout à fait respectable, reconnaissons-le, la jeune et blonde fille du Bourgmestre de la ville, Freda (son papa s’appelle Gottlieb, by the way) s’étant fait enlever par une bande de Coureurs d’Egouts ayant creusé un tunnel jusqu’à dans l’armoire de sa chambre, au nez et à la barbe moustache de son paternel, trop occupé à s’envoyer la jeune fille au pair pour prêter attention aux crises de terreur nocturne de sa chérubine. Déterminé à la retrouver, Gottlieb engagea un expert en dératisation pour aider sa milice à purger les terriers des envahissantes bestioles, ce qui se passa plutôt bien au début. Avec le recul, Otto réalise que cela aurait dû lui mettre la puce à l’oreille, mais pour une fois qu’une expédition dans les souterrains ne se termine pas en eau de boudin au bout de deux heures, pourquoi s’en plaindre, hein ?

D’autres indices incriminants a posteriori furent les cartes très détaillées des galeries Skaven que Gottlieb parvint on ne sait trop comment à fournir à ses hommes, leur permettant de nettoyer plusieurs colonies mineures avec une facilité insolente. Confrontés à rien de plus méchant qu’une meute d’Esclaves à moitié moribonds, Otto et ses miliciens remportèrent leurs premières escarmouches sans coup férir, mais ce n’était malheureusement qu’un gigantesque traquenard mis en place par un ennemi beaucoup trop sournois pour notre brave Capitaine. La bascule eut lieu lorsqu’un de ses lieutenants, Krinvaller, fut retrouvé seul et à l’agonie dans une galerie, serrant dans ses poings une des précieuses cartes utilisées par les impériaux. Le corps dévoré par les poisons utilisés par les Assassins lui ayant planté un surin entre les côtes quelques instants plus tôt, Krinvaller délivra un message incohérent à son supérieur, l’avertissant de l’échec de leur mini croisade et le suppliant d’empêcher Gottlieb de consulter ces fameuses cartes. Otto n’eut pas le temps de se creuser la tête sur ce message cryptique avant qu’une nouvelle attaque ne se produise, celle-ci menée par des Vermines de Choc. Malgré les ravages causés par le tromblon custom de notre héros (affectueusement surnommé Gudrun), l’affrontement se transforma rapidement en débandade échevelée, les humains étant canalisés par leurs adversaires jusqu’à une chambre souterraine afin de permettre l’utilisation de lance-feu dans des conditions optimales.

Fort heureusement, le joueur Skaven fit une série d’incidents de tir au moment de lancer les dés de touche, causant plus de dégâts parmi les Guerriers des Clans amassés pour le son et lumière promis par leur Technomage et à la structure de la caverne qu’aux quelques miliciens encore debout à ce stade avancé de la déroute impériale. L’éboulement qui s’en suivit força les deux camps à stopper les hostilités, au moins temporairement, et si Otto parvint à s’extirper par miracle des décombres et à regagner la surface, aucun de ses compagnons ne fut aussi chanceux.

Cela n’empêche pas le Capitaine déterré et déterminé de repartir aussi sec vers Magdeburg une fois son récit et la bouteille de gnole du Prêtre terminés. Bien que sa réputation soit aussi ruinée que sa garde-robe, nous avons affaire à un professionnel, qui utilisera toutes ses ressources et ses dernières forces à mener à bien sa mission. C’est beau. La détestation qu’il voue à la noble race anthropomurine n’a en outre qu’été renforcée par la réalisation de la manipulation dont il a fait l’objet, les cartes lui ayant été remises ayant guidé ses forces vers trois clans mineurs, dont l’extermination a fait les affaires d’un quatrième clan, ayant probablement tout manigancé depuis le départ. Et à ce propos…

Début spoiler…Le vieux Prêtre ne tarde pas à comprendre pourquoi son hôte lui a laissé ses cartes au moment de partir. Un examen approfondi de ces dernières permet en effet d’établir sans l’ombre d’un doute qu’elles ont été faites avec de la peau humaine, et très probablement celle de la pauvre Freda, dont l’enlèvement a déclenché la malheureuse Rattenkrieg. Ou comment joindre l’utile à l’agréable, Skaven style…Fin spoiler

AVIS :

Robert Earl fait partie des auteurs de la BL maîtrisant particulièrement bien la mise en scène de l’insidieuse menace Skaven dans leurs écrits (je place C. L. Werner dans cette même catégorie), et il le démontre dans ce ‘Rattenkrieg’ efficace et atmosphérique. Plutôt que de nous abreuver d’une litanie de scènes d’actions sanguinolentes, il fait le choix de relater cette campagne condamnée dès sa première heure à travers une série de flashbacks, ce qui lui permet de couvrir tous les événements marquants de cet affrontement souterrain d’une manière concise et prenante. La petite révélation finale, si elle n’approche pas grand-chose à l’intrigue à ce stade, est une addition narrative bien trouvée, soulignant avec à propos à quel point les Skavens sont infréquentables. La seule chose que je peux reprocher à cette histoire est l’importance un peu trop grande accordée à des personnages qui finalement ne servent pas à grand-chose dans le déroulé du récit, qu’il s’agisse du Prêtre de Morr (qui bénéficie de sa petite scène d’introduction « au jardin », pas très utile à mes yeux) ou du lieutenant Gunter, qui disparait purement et simplement de la nouvelle à un certain moment.

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Redhand’s Daughter – W. King :

INTRIGUE :

WFB_Redhand's DaughterAprès avoir fait les 400 coups (de hache runique) en Arabie, quelques temps après leur retour d’Albion (Tueur de Géants), Gotrek et Felix se retrouvent sur le cuirassé nain du Capitaine Ahabsson, croisant sur les eaux du golfe d’Arabie depuis la forteresse de Barak Varr. Toujours à la recherche d’une fin glorieuse, le célèbre Tueur doit ronger son frein pendant la croisière, ce qu’il fait en s’enfilant pinte sur pinte et en gueulant sur Ceniormeteo, le dieu elfique des dépressions, tandis que Felix préfère meubler ses journées en regardant les dauphins et entretenant des pensées sinistres, comme à son habitude. Nos plaisanciers ne tardent cependant pas à être mis à l’épreuve (autrement, cela aurait été la nouvelle de Gotrek & Felix la plus ch*ante du monde), d’abord par la survenue d’un grain sévère, qui endommage bellement le Storm Hammer, puis par la rencontre avec un navire de pirates Orcs, qu’Ahabsson décide, en corsaire assermenté, d’aller piller. L’enthousiasme fiévreux du capitaine se heurte toutefois à quelques dures réalités, à commencer par les projectiles enflammés projetés par la catapulte de proue du vaisseau adverse, qui cabossent suffisamment le steamer nain pour que ce dernier se retrouve à portée d’abordage par l’équipage peaux-vertes, beaucoup plus nombreux que ses vis-à-vis. La bataille qui s’en suit permet à Gotrek de se dégourdir les orteils (pas mieux à espérer contre de simples boyz), et à Felix de voler à la rescousse d’une prisonnière de l’infâme Capitaine Goldtusk, qu’il réussit à escorter jusqu’au Storm Hammer avant que ce dernier ne parvienne à se désengager.

Vainqueurs éprouvés de l’affrontement, les Nains décident d’aller mouiller l’ancre sur l’une des îles toutes proches, encouragés en cela par le récit fait par la rescapée (Katja Murillo) du légendaire trésor que le pirate Redhand, qui se trouve être son père, a dissimulé sur cette dernière. Elle-même capitaine au long cours, elle promet à ses sauveurs de partager les bénéfices de son héritage s’ils l’aident à mettre la main dessus. Capturée par Goldtusk alors qu’elle voguait vers le butin avec son propre équipage, Katja n’a dû son salut qu’à l’avidité de l’Orc, qui a épargné sa vie en échange d’un aller simple vers le magot familial. Jamais les derniers à se lancer dans la quête de richesses mal acquises, Ahabsson et ses gars acceptent la proposition qui leur est faite, et tout ce petit monde (plus deux humains) débarque sur une île volcanique couverte d’une épaisse forêt où est sensé se trouver la fortune de Redhand.

Bien que charmé par le ravissant minois de la donzelle (ce qui est la raison pour laquelle il s’est rué à son secours en premier lieu), Felix se montre assez suspect des motivations de cette dernière, et ne peut s’empêcher de penser que Katja dissimule quelque chose à ses partenaires. Gotrek de son côté s’avère plus intéressé par la perspective de se frotter au monstrueux gardien d’une gemme légendaire conservée dans l’un des temples en ruines de l’île (dixit Katja, toujours), ou a défaut, par la régulation de la population locale de peaux vertes. L’enthousiasme général est à peine entamé par la disparition mystérieuse de plusieurs membres d’équipage au fur et à mesure que l’expédition s’enfonce dans la jungle, énigme rapidement résolue par un Gotrek peu tolérant envers les facéties des Gobelins arboricoles du cru. Après un pittoresque trail tropical, les aventuriers parviennent jusque dans la cité abandonnée promise par leur guide, qui se trouve être un lieu de villégiature couru par la gent orcoïde (un club Mork, sans doute), forçant nos héros à la plus grande discrétion. Même Gotrek, dont le premier but était pourtant de tailler des croupières aux locaux, accepte de faire crête basse jusqu’à ce que ses camarades aient pu sécuriser le trésor, ce qui est fort urbain de sa part. En même temps, ils sont sortis de la forêt, donc…

Une fois rendu dans le temple où Redhand aurait déposé ses bagages, et après avoir négocié de façon soupçonneusement facile au goût de ce rabat-joie de Felix l’accès jusqu’au cœur de l’édifice, qui dispose d’une installation géothermique de pointe sous la forme de puits de lave intégrés à la structure du bâtiment (attention à ne pas se brûler en prenant sa douche, tout de même), l’expédition se retrouve confrontée à un défi de taille, en la présence d’un Elémental de lave qui surgit de son jaccuzzi pour empêcher les intrus de faire main basse sur le trésor du pirate ainsi que sur l’énorme gemme qui fait office de décoration d’intérieur. Au lieu de s’émerveiller de la culture du gardien des lieux, qui s’exprime en Reikspiel parfait alors que sa prise de fonction remonte à des millénaires (ce sont les Anciens qui ont signé son contrat de travail), l’esprit mesquin de Felix ne peut s’empêcher de se concentrer sur le fait que MagMan semble connaître Katja, qu’il qualifie de sorcière (ce qui n’est pas très sympathique). De son côté, Gotrek se contente de foncer dans le tas (de roches en fusion) avec son ardeur habituelle, distrayant la Chose assez longtemps pour que Katja réussisse à s’emparer de la gemme, avant de disparaître dans un éclat de rire sardonique. On comprend alors que la capitaine corsaire n’était pas la fille, mais la femme de Redhand, qu’elle a poussé à prendre d’assaut le temple pour récupérer le diam’s des années plus tôt, sans succès. On comprend aussi que le joyau en question n’avait pas qu’une utilité symbolique, mais servait surtout de régulateur de l’activité tellurique du volcan local, qui se réveille violemment une fois la gemme dérobée.

Ayant tout de même réussi à refroidir les ardeurs du gardien, puis à le(s lui) briser menu, Gotrek et Felix en sont quittes pour une session de hack’n’slash intense pour sortir du temple avant que ce dernier ne soit noyé par la lave. Laissant leurs camarades survivants se débrouiller tous seuls comme des grands petits, le duo se fraie un chemin sanglant à travers les hordes de Gobelins que Goldtusk, arrivé sur place après le naufrage de son navire, a recruté pour… visiter le temple également je suppose1. Cette louable idée de sortie culturelle prend donc un tour funeste lorsque le Tueur et son comparse décident de couper la file, résultant en des centaines de morts parmi les visiteurs, dont Goldtusk en personne, décapité par un Gotrek littéralement chauffé à blanc. Ceci fait, il ne reste plus à nos inséparables qu’à partir en petites foulées vers la plage où mouille le Storm Hammer, avant que l’éruption du Krakatorka ne mette un terme honteux et cendreux à la carrière du Tueur. Spoiler alert : Ils s’en sortent. Si si.

1 : King ne donnant aucun signe que les Nains aient été détectés par les peaux vertes à leur arrivée.

AVIS :

Cette aventure conséquente (28 pages) permet à William King de renouer avec les origines littéraires de Gotrek & Felix, héros de nouvelles conduits plus tard par le succès à évoluer dans de plus longs formats. Se déroulant après les événements relatés dans Tueur de Géants, dernier roman signé de la série signé par King (et le moins réussi du lot à mon humble avis, comme quoi il a bien fait d’arrêter), Redhand’s Daughter peut être considéré comme l’ultime tour de piste des deux troublions sous la plume de leur créateur, et un écho aux longues nouvelles originelles du duo (Wolf Riders, The Dark Beneath the World). Bénéficiant d’une localisation exotique (je ne pense pas que quiconque se soit aventuré dans la Chaîne Mégaleane – qui n’apparaît sur aucune carte à ma connaissance – depuis lors), de péripéties rythmées et, elles aussi, assez innovantes pour le lecteur, comme la bataille navale introductive entre corsaires Nains et pirates peaux vertes, Redhand’s Daughter a un petit goût de pastiche de The Queen of the Black Coast (a.k.a. Conan en croisière), avec Katja en Belit et Gotrek & Felix se partageant le rôle du ténébreux Cimmerien. Ces considérations évacuées, on se retrouve cependant avec une soumission assez classique du sous-genre créé par King, qui déroule son propos et coche les cases du cahier des charges avec aisance plus que maestria. On notera pour terminer que l’auteur n’a pas encore tenu sa promesse de faire remettre Katja Murillo sur le chemin de nos baroudeurs, et qu’avec la destruction du monde de Warhammer (et donc celle de Katja et Felix), il lui sera assez difficile de tenir sa parole…

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Portrait of my Undying Lady – G. Rennie :

INTRIGUE :

WFB_Portrait of my Undying LadyLe génial Giovanni Gottio, portraitiste reconnu mais un peu trop attaché à la représentation de la vérité crue et sans fard chez ses modèles pour son propre bien, est approché dans une taverne de Trantio par un généreux mécène, cherchant à le convaincre d’accepter une commission d’un genre un peu particulier. Malgré les trois pichets de vinasse royalement avancés par son interlocuteur, l’incorrigible Gottio, blessé dans son orgueil par l’accueil glacial que sa représentation de la femme de Lorenzo Lupo a reçu de la part de son commanditaire, refuse avec emphase d’accepter cette commande et tire sa révérence avec toute l’élégance permise par une cuite au gros rouge. Il est cependant difficile de refuser la proposition d’un Vampire quand on fait un mètre cinquante, avec un petit bedon et 3 grammes d’alcool dans le sang, comme l’immense Gottio ne tarde pas à le découvrir à ses dépends. Ramené manu militari par son nouveau meilleur ami (Mariato) jusqu’à son véhicule de fonction, le peintre sombre dans l’inconscience avant que le fiacre n’arrive à destination.

Se réveillant à l’intérieur d’une villa de campagne des environs de Trantio passablement délabrée, l’illustre Gottio est conduit jusqu’à celle qui va devenir sa muse, de gré ou de force : Dame Khemalla de Lahmia. Comme son titre, sa pâleur morbide et les nombreux portraits d’elle peints par des artistes ayant vécus il y a des siècles l’indiquent, Khemalla est une Vampire, dont l’un des vices les plus innocents est de se faire peindre par les maîtres de chaque époque, afin de pallier à son incapacité d’utiliser un miroir. Cela l’aide à ne pas sombrer dans la folie sanguinaire qui guette les buveurs de sang les plus vénérables, comme elle révèle sans ambages à son hôte. N’ayant pas d’autres choix que de s’exécuter sous peine de l’être, l’incomparable Gottio se met au travail pour accoucher de sa meilleure ou de sa dernière œuvre, comme il le remarque sombrement.

Au cours des nuits suivantes, notre héros va peu à peu découvrir la réalité, pas forcément toujours glamour, d’une cour vampirique. En plus de devoir squatter une demeure abandonnée, et donc franchement insalubre sur les bords, il doit s’habituer au rythme décalé auquel vivent ses geôliers, les bruits de succion persistants qui résonnent près de sa cellule, les ballets de chauves souris géantes jusqu’à pas d’heure, ou encore les interruptions brutales de sessions pour cause de vendettas contre une autre lignée. Pire que tout, l’époustouflant Gottio se fait carrément menacer par cette fouine de Mariato, très jaloux de l’intérêt que sa maîtresse porte au scribouillard. Il aurait dû apprendre à dessiner au lieu de menacer gratuitement son prochain ceci dit, car peu de temps après que l’extraordinaire(ment effrayé) Gottio ait balancé son camarade à Khemalla, Mariato devient boursier (c’est-à-dire que l’insondable Gottio trouve ses cendres à l’intérieur d’une bourse glissée sous son lit). Le harcèlement professionnel, c’est un vrai sujet chez les Lahmianes apparemment.

Enfin, la toile est complétée et l’exténué Gottio peut la présenter à sa commanditaire, qui s’apprête à partir pour des cieux plus cléments. Satisfaite du travail de son invisonnier, elle lui remet une coquette somme en dédommagement de ses services, ainsi qu’un élixir de longue vie dans la dernière coupe qu’ils partagent avant le départ de l’une et le coma de l’autre. De retour dans son gourbi minable par l’opération du sang esprit, le miraculé Gottio se découvre une nouvelle jeunesse grâce au tonique à l’hémoglobine de Dame Khemalla, et entreprend de mettre un peu d’ordre dans sa vie pour permettre à son talent d’être reconnu comme il se doit. C’est ce qui s’appelle être en veine.

AVIS :

Gordon Rennie s’autorise une aventure extra Zavantale avec ‘Portrait of My Undying Lady’, mettant en scène la Némésis du sage détective d’Altdorf, Dame Khemalla, dans un huis clos où elle n’apparaît pas comme la maléfique éminence grise de service (pour changer). Cette petite nouvelle, si elle ne s’avère pas spécialement rythmée ou palpitante, et n’apporte rien à l’arc narratif de Zavant en tant que tel, se laisse toutefois lire sans problème, et a le bon goût de comporter quelques détails fluffiques qui pourront intéresser les plus curieux des lecteurs. Un amuse-gueule littéraire tout à fait convenable, en quelque sorte.

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Virtue’s Reward – D. Hinks :

INTRIGUE :

Le lecteur suit les aventures de Virtue von Stahl, sans doute appelée de la sorte pour que Darius puisse se fendre du jeu de mots qui sert de titre à la nouvelle (hohoho), une novice de l’ordre des Sœurs de Sigmar. Comme on peut s’en douter, c’est donc Mordheim qui sert de décor à cette histoire, Virtue et ses deux acolytes étant chargées de ramener chacune un morceau de malepierre au couvent afin de devenir des membres à part entière de cette secte apocalyptique (et dire que la noblesse impériale se battait pour y envoyer ses filles…).

AVIS :

À ce stade, on se dit que même si Darius n’a pas une once d’originalité dans sa manière de narrer les péripéties de ses héroïnes, la cité des damnés suffira à elle seule à relever le goût insipide de la soupe qu’il nous sert, en ajoutant un peu de sa folie latente au bouillon de clichés que le chef Hinks nous a concocté. C’est vrai quoi, même sans jouer une partie pour se mettre dans l’ambiance, il suffit de survoler les illustrations magnifiquement dérangeantes de John Blanche émaillant le livre de règles pour que les idées jaillissent. Malheureusement, la seule chose que Darius semble avoir retenu du background de Mordheim, et encore de manière inconsciente, est qu’il est vain d’espérer que les choses s’améliorent dans cette ville maudite. Pour le lecteur, cela signifie que le niveau restera d’une stabilité remarquablement basse de la première à la dernière ligne, et donc qu’il s’ennuiera ferme en suivant Virtue et ses copines dans leur soirée d’enterrement de vie de jeunes filles (ou ce qui s’en rapproche le plus, étant donné le contexte). J’attends encore l’auteur qui me décrira la Mordheim baroque, glauque et flamboyante que je m’imagine, et je peux d’ores et déjà dire que cet auteur, ce ne sera pas Darius Hinks. Voilà pour la touche Warhammer.

Si on se concentre à présent sur le schéma narratif et les relations entre personnages, les choses se corsent un peu plus: le premier est d’un simplisme primaire qui me fait suggérer que Darius Hinks n’avait en tout et pour tout qu’une idée à développer lors de sa nouvelle (elle servira de switch final pathétique), et qu’il a bien pataugé pour meubler les 30 pages entre le titre et cette apothéose douteuse. Les relations entre personnages (la nouvelle en compte trois principaux) sont tout aussi basiques, Darius ne trouvant rien de mieux que de nous resservir le triangle « héroïne trop bonne trop conne- amie option meatshield – rivale pouffiasse et fourbe ». Les personnages secondaires restent dans la même veine ultra conformiste, puisqu’on pourra également croiser un duo de ruffians convenablement couards, un chevalier bretonnien arrogant et son dévoué serviteur contrefait, ainsi qu’une mère supérieure à qui on ne la fait pas (Dumbledore-like dans la relation avec l’héroïne).

Bref, une nouvelle fade et creuse, ce qui, compte tenu du background choisi (ou peut-être imposé de force, ça expliquerait des choses) par l’auteur, tient de la contreperformance la plus grandiose.

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The Blood Price – M. Lee :

INTRIGUE :

The Blood PriceContrairement aux autres jeunes aristocrates druchiis, Malus de Fréjus Hag Graef n’est pas le moins du monde emballé par la croisière corsaire servant de rite de passage à l’âge adulte parmi la jeunesse nantie de Naggaroth, malgré le fait que son paternel Lurhan Fellblade lui ait réservé une place sur un navire tout ce qu’il y a de plus convenable, la Manticore du capitaine Hethan Gul. Fils à maman (une Sorcière) par excellence, Malus ne sait que trop bien que son père profitera certainement de l’occasion pour se débarrasser d’un rejeton qu’il n’a jamais voulu, mais surveillé de trop près par son influente génitrice pour qu’il tente un assassinat à domicile. C’est donc le cœur lourd et sous l’escorte d’une patrouille de gardes civils peu commodes que notre héros grimpe à bord de la Manticore, accompagné de l’unique suivant que son père a embauché pour sauver les apparences, le jeune, idéaliste et passablement fauché chevalier Silar Thornblood.

Ne connaissant rien aux choses de la mer et souhaitant revenir le plus tôt possible faire la tournée des bars de Clar Karond et d’ailleurs, Malus a un coup de génie involontaire lorsqu’il décline le projet de pillage proposé par Gul, un cabotage classique le long des côtes bretonniennes pendant plusieurs longs mois, au profit d’un raid très osé sur les côtes d’Ulthuan. Cette audace lui vaut l’admiration du second de la Manticore, la coriace Lhunara, qui lui révèle en douce ce que le nobliau avait déjà soupçonné : cet itinéraire pépouze se serait conclu d’une façon tragique pour lui, Lurhan ayant payé Gul pour qu’un accident malheureux se produise lors du raid d’un village de pécores. Le gros caprice de Malus rebat donc les cartes, mais encore lui faut-il parvenir à revenir vivant de sa visite chez ses cousins d’en haut, et échapper aux coups de l’assassin de rechange que Lurhan a probablement engagé pour garantir le succès de son infanticide. Chez les Druchiis, on ne laisse rien au hasard.

Appelez cela chance du débutant ou révélation du génie de l’improvisation du petit Malus (un talent qui lui sera fort utile dans la suite de ses aventures), mais son plan très audacieux se déroule presque comme sur des roulettes. Après avoir manqué de se faire surprendre par un navire de patrouille de Lothern à proximité de l’Île Blafarde, et s’être tirée d’affaire en abordant et coulant l’importun, la Manticore débarque son contingent de Corsaires sur la côte d’Asur et, par une opération cosplay brillamment négociée et le sang froid de Lhunara, qui a fait haut elfe en LV2, la bande d’affreux parvient à s’emparer d’une petite cité au fil de l’épée. Il ne reste plus aux pillards qu’à regagner leur bord avec leur butin et leurs esclaves, mais hélas, la chance insolente de Malus commence à lui faire défaut.

Bien qu’il ait réussi à renvoyer la moitié de ses hommes et les biens confisqués à ses infâmes cousins sur son navire, Malus attend en vain que Gul renvoie les canots sur le continent, le rusé capitaine jouant la montre le temps que la Manticore se fasse malheureusement repérer par le second navire de Lothern qui croisait dans ces eaux. Dans ces conditions, il n’est que naturel que le capitaine choisisse d’abandonner les hommes encore à terre pour tenter de regagner le large, pas vrai (les Druchiis se donnent vraiment beaucoup de mal pour sauver les apparences, je trouve) ? Isolé avec une cinquantaine de Corsaires et une trentaine de prisonniers, et alors qu’une colonne de Gardes Maritimes approche de la crique où il fait le pied de grue, Malus se retrouve dans de biens beaux draps…

Début spoiler…Ce qui le contraint à sacrifier ses futurs esclaves pour, à nouveau, duper les naïfs Asurs grâce un rapide changement d’atours, et les convaincre que les héroïques captifs ont réussi à se libérer de leurs tortionnaires par la seule force de leurs petits bras musclés et de leurs manucures impeccables. Une attaque surprise plus tard, les Corsaires peuvent repartir en direction des canots laissés par les Gardes Maritimes abusés et estourbis pour débarquer depuis leur navire, et arriver à temps pour sauver la Manticore des assauts vengeurs du reste de l’équipage haut elfe.

Tout est donc bien qui ne finit pas trop mal pour Malus, qui peut repartir vers Clar Karond avec un peu de loot, deux suivants à la loyauté confirmée, et passer le temps en amputant lentement le pauvre Gul, dont la trahison n’a évidemment pas été pardonnée, de toutes ses protubérances. Et le deuxième assassin, me demanderez-vous ? Eh bien, il s’agissait du second lieutenant Amaleth, dont la seule tentative aura été un carreau d’arbalète tiré dans la confusion de l’abordage du premier vaisseau de Lothern. Le pauvre elfe fit partie des victimes du deuxième combat naval (une mort tout à fait « naturelle » celle-là, enfin je me comprends), et était de toute façon surveillé de près par la prudente Lhunara, qui n’avait pas encore choisi son camp à ce moment. Qui pourrait lui en vouloir de la jouer safe dans ces conditions, hein ? Pas Malus, en tout cas…Fin spoiler

AVIS :

Nouvelle assez conséquente servant de prologue à la série des Malus Darkblade, ‘The Blood Price’ capitalise sur les points forts de cette saga : des personnages torturés et assez horribles, mais qui finissent tout de même par devenir sympathiques, de l’action effrénée avec des rebondissements en cascade, et une très généreuse rasade de fluff elfe noir. Autant de raisons de savourer cette histoire, et de poursuivre la lecture des mythiques mésaventures malusiennes dans l’hexalogie qui prend place après les événements relatés ici.

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Glow – S. Spurrier :

INTRIGUE :

GlowC’est la fin de l’automne à Talabheim, et le Temple de Sigmar local, dirigé par le capitaine Richt ‘Hmm’ Karver, enquête sur une addiction d’un nouvel ordre qui s’étend dans les bas-fonds de la cité. Le Glow, une poudre verte de composition inconnue, fait en effet des ravages parmi les déshérités de la métropole cratérisée. Très addictif, il a en outre comme fâcheux effet secondaire de provoquer des mutations spontanées chez ses utilisateurs réguliers, ce qui n’est pas du tout du goût de ce gentleman de Karver. Après avoir mené un raid dans un taudis dont l’adresse lui avait été donnée par un suspect, l’impeccable capitaine repart avec un cadavre frais de junkie agressif ainsi qu’une petite réserve de la substance en question, qu’il choisit d’ajouter à la diète du rat géant skaven qu’il a adopté comme animal de compagnie après une purge des souterrains de Talabheim l’année passée. Le savoir fait le pouvoir, c’est bien connu.

Les mois passent et l’hiver arrive sur l’Empire, sans que la filière locale de Glow soit démantelée malgré les meilleurs efforts de Karver et de ses hommes (Kubler, Holst et Spielmunn). L’épidémie ne fait au contraire que progresser, ce qui force les chasseurs de sorcières crackheads à muscler leurs méthodes, déjà assez viriles. Interrogatoires menés au tison, menaces d’envoyer leurs indics au bûcher s’ils ne s’activent pas et autres descentes dans la ville tous flingues dehors se multiplient. C’est au cours de l’une d’entre elles que Karver commet une bavure : surpris par la réaction de l’occupant d’un laboratoire clandestin où le Glow était produit, il déchargea sa pétoire sur ce qui se révéla être, après inspection post mortem, une fillette réduite en esclavage par le maître du cartel pour la confection des tablettes inondant la cité. Enchaînée dans son local et ayant été privée de langue par son tortionnaire, elle cherchait seulement à expliquer pourquoi elle n’était pas en capacité d’obtempérer aux ordres des Templiers lorsqu’un Karver sur les nerfs lui envoya un pruneau dans le caisson pour slow play. Ce sont des choses qui arrivent…

L’opération ne fut cependant pas un total échec, notre héros mettant le gant sur la poudre entrant dans la composition du Glow en fouillant le laboratoire. Ayant fait pression sur un sorcier de Jade pour obtenir une expertise express, il reçut la confirmation de ses soupçons : l’ingrédient actif du Glow était bien de la malepierre. Une erreur de manipulation de la part du thaumaturge lui permit de recevoir une autre information utile : la substance toxique se trouvait à la fois dans le gant utilisé pour recueillir la poudre dans le laboratoire, mais également à l’extérieur de ce dernier, indiquant sans équivoque que Karver avait manipulé de la malepierre peu de temps auparavant. Un résultat étrange, à moins que…

Début spoiler…À moins que la broche ornée d’une pierre verte que son meilleur disciple, Kubler, portait à la boutonnière ce jour-là n’ait pas été montée d’une émeraude, comme il le pensait, mais d’un minéral bien plus sinistre. La confrontation entre les deux hommes prend place dans la chambre froide creusée sous le Temple de Sigmar, dans lequel les répurgateurs stockent leurs cadavres contaminés dans l’attente du dégel. Ayant participé à la purge des terriers skavens en compagnie de son mentor, Kubler avait eu la mauvaise idée de s’intéresser à la malepierre utilisée comme monnaie d’échange par ces derniers, et qui le transforma rapidement en méchant de série B.

Ayant dupé la vigilance de son supérieur jusqu’à son fashion faux pas en matière d’accessorisation de sa tenue, Kubler est pris au dépourvu lorsque Karver le trouve en train de faire les poches des corps de Guerriers des Clans gardés en réserve par les Templiers à la recherche de cailloux verts. La surprise change toutefois de camp après qu’un Kubler gravement blessé par le tir de son patron passe en mode Technomage et avale d’un seul coup tous les éclats de malepierre qu’il trimballait sur lui, se transformant en mutant à la force et à la rapidité décuplés. C’est au tour de Karver de se retrouver dans les cordes, mais notre héros avait gardé un atout dans sa manche, ou plutôt au bout d’une chaîne : son rat de compagnie. Transformé en abomination (et pas Abomination, ça ne serait pas rentré dans son bureau) poilue par sa consommation régulière de Glow, Ratatouille est libéré par son maître et ne perd pas une seconde pour creuser un terrier dans la bedaine de Kubler afin d’accéder à la malepierre récemment consommée par le ruffian. Cet affrontement sans merci résulte en la mort simultanée des deux adversaires, laissant Karver le seul survivant de ce truel chaotique. Il faudra penser à passer un coup de mop, tout de même.Fin spoiler

AVIS :

Spurrier transpose avec succès une enquête des stups dans le monde de Warhammer Fantasy Battle avec ce ‘Glow’, qui illustre le sombre mais palpitant quotidien des Templiers de Sigmar lorsqu’ils n’ont pas de sorcières à se mettre sous la dent. Ambiance poisseuse, action rythmée, twist final bien amené… Simon Spurrier démontre l’étendue de ses talents de scénariste et sa valeur comme contributeur à la GW-Fiction avec cette nouvelle, qui sera malheureusement sa seule incursion dans le Monde qui Fut. Comme le hamster adoptif de Richt Karver, on aurait bien aimé avoir du rab’.

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Three Knights – G. McNeill :

INTRIGUE :

WFB_Three KnightsLes trois frères Massone, Luc, Fontaine (?) et Belmonde (!?!), ont entrepris une quête d’aucuns considèreraient comme ambitieuse, pour le dire poliment : purger à eux seuls les ruines du Fort du Sang, autrefois bastion des tristement célèbres Vampires Dragons de Sang, et soigneusement évité par tous les voyageurs sains d’esprit depuis sa destruction il y a des décennies. Cette idée chevaleresquement stupide est celle de l’aîné du trio, Luc, qui s’est taillé une réputation de bretteur sans égal d’un bout à l’autre du Vieux Monde. Ses cadets (et par vertu de leur noms débiles, side kicks) ont accepté de lui prêter main forte dans son entreprise hardie, bien que ne disposant pas d’un pedigree aussi ronflant que Lulu. D’ailleurs, Belmonde n’est même pas encore un véritable chevalier du Royaume, ce qui vous situe le niveau moyen de la fine équipe.

Après avoir fait leur arrêt réglementaire dans le village bretonnien puant et boueux (Gugarde) situé sur la route du Fort, et avoir tout aussi réglementairement refusé d’écouter les sages conseils du vétéran couturé qui picolait à la taverne locale, et avait pu en son jeune temps se rendre compte par lui-même qu’un Vampire n’était pas un adversaire à prendre à la légère1, les frangins repartent le lendemain avec un guide en direction de la forteresse maudite. Les choses sérieuses et mortelles commencent réellement à la tombée de la nuit, lorsque les quatre montagnards amateurs se font attaquer par une meute de loups funestes, qui croquent prestement le guide et la mule de bât de l’équipe. Une nuit passée à prélever de la biodiversité pourrissante, et une journée à peiner dans la neige et le froid plus tard, c’est enfin le Fort du Sang qui se présente devant nos héros, qui entrent prestement se mettre au sec et se remettre de leurs émotions.

Guidés par Luc jusqu’à la salle des festins de la bâtisse abandonnée, les frères Massone se font cueillir comme des bleus par une vague de squelettes s’étant animés à la nuit tombée, et qui voient d’une mauvaise orbite trois punks à cheval venir squatter chez leurs ex-patrons. La quantité venant toujours à bout de la qualité, les chevaliers se font acculer dans un coin de la salle, et Fontaine finit embroché comme un döner kebab, au grand désarroi de ses frérots. Luc prend alors sa grosse voix et exige à parler au(x) directeur(s)… ce qui fait battre en retraite les squelettes et arriver un trio de Dragons de Sang, plus intrigués par la déclaration du paladin qu’il a réussi à tuer l’un des leurs qu’animés de chrétiennes (et pour cause, c’est pas le bon univers) intentions envers leurs hôtes du soir…

Début spoiler 1…Ayant prouvé ses dires en solotant une des brutes qui lui avait mal parlé, Luc abat ensuite ses cartes en décapitant en traître Belmonde, afin de prouver aux Dragons de Sang qu’il possède à la fois le talent martial et la fibre morale, ou plutôt son absence, nécessaires pour rejoindre leur ordre. En effet, le chevalier désire bénéficier de la vie éternelle dont disposent les Vampires, et ses grands discours de purge du Fort du Sang n’étaient en fait qu’une ruse pour attirer ses idéalistes de frangins jusqu’au repaire des fils de Harkon. Interloqué par cette demande excentrique, le Kastellan finit par s’exécuter et s’approche de Luc pour lui donner le baiser de sang…

Début spoiler 2…Ou plutôt lui cracher dans la jugulaire, car on se rend compte lors de l’attaque punitive sur Gugarde qui termine la nouvelle que le fier et brave chevalier s’est reconverti, contre sa volonté sans doute, en nécrophage ahuri. Pas le plan de carrière auquel Luc aspirait, mais une salutaire, si définitive, leçon de modestie inculquée à ce dernier par les très select Dragons de Sang. Après tout, le Roy dit nous voulons…Fin spoiler

1 : En bonus, Fontaine et Belmonde participent à la soirée open mic’ en reprenant leurs rôles de plus mauvais duo d’acteurs du Monde qui Fut.

AVIS :

Nouvelle très solide de la part de Graham McNeill, ‘Three Knights’ offre un concentré de grimdark à la sauce WFB à son lecteur à travers les péripéties plus ou moins chevaleresques de ses héros. En plus de mettre en perspective la proverbiale droiture des paladins de Bretonnie, qui tient finalement assez souvent de la légende urbaine rurale, cette nouvelle dispose d’une intrigue bien pensée et mise en place (une deuxième lecture de ‘Three Knights’ permet de repérer les jalons laissés par McNeill au cours des premières pages pour préparer sa conclusion), ainsi que d’une chute impeccable en termes d’exécution. Peut-être le meilleur court format de cet auteur pour Warhammer Fantasy Battle.

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The Seventh Boon – M. Scanlon :

INTRIGUE :

WFB_The Seventh BoonL’ambiance est pesante dans l’orphelinat Notre Dame Shallya du Cœur Béni de Marienburg, dont les petits pensionnaires sont amenés par douzaines devant un couple de riches notables, Herr et Frau Forst, à la recherche d’un petit animal de compagnie mignon pour bien paraître en société. C’est toutefois l’avis de la brave sœur Altruda après plusieurs heures de « casting » infructueuses, la jeune Madame Forst (Greta) se montrant aussi exigeante que vague sur les qualités recherchées de son futur héritier. Son mari étant un des bienfaiteurs principaux de l’établissement depuis de nombreuses années, Altruda est toutefois toute disposée à laisser Greta épuiser ses stocks d’enfants abandonnés, jusqu’à ce que, miracle, elle jette son dévolu sur un garçon de huit ans aussi mutique qu’innocent. L’affaire étant entendue, les époux Frost repartent en calèche avec leur acquisition artistiquement emballée dans une pochette cadeau, petit geste commercial réservé aux membres du club Platinum.

Il s’avère rapidement que cette adoption n’a pas grand-chose de désintéressée, et que si Gunther Forst a laissé sa femme jouer le premier rôle auprès de Sœur Altruda, c’est bien lui qui a planifié l’opération Marine1. Notre homme est en effet sous ses abords respectables un cultiste chaotique accompli, dont les activités interlopes nécessiteront dans un futur très proche un être à la pureté irréprochable, et certainement pas pour répondre à des questions de Steve Harvey, croyez-moi. Comme même à Marienburg, un homme célibataire de quarante ans ne peut pas adopter un gamin des rues sans que cela ne fasse jaser, et que Gunther tient absolument à ne pas attirer l’attention sur sa précieuse personne, il a embauché les services de Greta, prosti…sane de son état, pour jouer le rôle de sa tendre moitié et ainsi détourner les soupçons des nonnes. Cette mascarade tarifée prend brutalement fin lorsque le fiacre dans lequel le trio a pris place est arrêté par deux malfrats, dont l’un se révèle être le souteneur de Greta. Ayant compris que l’enfant soigneusement sélectionné par sa complice avait une valeur certaine sur le marché noir, le dénommé Ruprecht ne reculera pas devant un meurtre de sang froid pour s’emparer de la marchandise, mais c’est sans compter les talents de Gunther au couteau. Aussi efficace avec sa lame, tant au corps à corps qu’à distance, que Filthy Harald en personne, Herr Forst règle leur affaire aux malfrats, avant de repartir en petites foulées vers sa destination, son sidekick sur le dos. Une fin méritée pour ces trafiquants d’êtres humains en puissance, si vous voulez mon avis.

La caméra se braque ensuite sur les décombres des Six Couronnes, autrefois taverne fréquentée par les individus les plus louches de Marienburg et des environs, et désormais ruines abandonnées à la suite d’un malheureux incendie. Alors que Gunther se prépare à réaliser un rituel à l’importance cruciale tandis que son petit compagnon se gave de bonbons bourrés de somnifères (ça vaut mieux pour lui), on en apprend plus sur le passif et les motivations de notre héros.

Il y a de cela 150 ans, Gunther se rendit à un rencard très particulier à ce même endroit, et fit la rencontre de Samael, Prince Démon de Slaanesh undercover et collectionneur d’âmes patenté. Obsédé par l’atteinte de l’immortalité, Gunther était prêt à se séparer de son essence en échange de la vie éternelle que seul un puissant Démon tel que Samael était en mesure de lui accorder. Au bout d’une négociation serrée, les deux larrons tombèrent d’accord sur un deal satisfaisant tout le monde : à Gunther sept fois 25 ans de non-sénescence2, à Samael l’exaucement de sept faveurs pas trop compliquées par son associé mortel, et la pleine propriété de l’âme de ce dernier une fois le contrat terminé3. Ce petit arrangement tint pendant de nombreuses années, mais à l’approche de son septième et ultime rendez-vous intermédiaire avec son protecteur, le prudent Gunther se rendit compte que ce dernier allait probablement essayer de l’empapaouter dès la réalisation de sa septième requête, et récupérer ainsi son dû avant que les vingt-cinq dernières années prévues au contrat ne s’écoulent. Après tout, les Démons ne sont pas connus pour être les créatures les plus réglos qui soient (à l’exception de ceux de Solkan bien sûr).

Fort heureusement, un siècle et demi est plus que suffisant pour peaufiner ses connaissances ésotériques, et Gunther a eu tout loisir de dénicher dans d’antiques grimoires une solution à son problème existantiel (littéralement). Pour la faire simple, son plan consiste à piéger Samael entre deux cercles de conjuration, et à renvoyer le Démon patienter mille ans dans le Warp grâce à une balle enchantée et ointe du sang d’un être à la pureté absolue (pléonasme, vous me direz). Lorsque le ponctuel Samael se présente sur le lieu du rendez-vous à minuit précise, Gunther est prêt à le recevoir comme il se doit…

Début spoiler…Si la première partie de son stratagème se réalise sans anicroche, Sam se retrouvant coincé entre un graffiti magique et une mini douve d’eau bénite, le sacrifice du frêle enfançon ne se passe pas comme prévu. L’orphelin mutique était en effet une Démonette déguisée, un être à la pureté irréprochable si l’on se réfère au 2) de la définition du Petit Larousse, et pas au 3) comme Gunther l’a fait. Le tête à tête entre le cultiste dupé et le Démon mineur se termine de façon expéditive et définitive pour le pauvre M. Forst, qui aurait dû se douter qu’on n’arnaque pas si facilement une créature millénaire. Son grand œuvre ne reste toutefois pas inachevé, Samael utilisant le sang de sa créature pour terminer la réalisation de la balle dem-dem, car après tout, ce genre de munition peut s’avérer précieuse…Fin spoiler

1 : Comme Marine Lorphelin. J’espère que vous l’aviez.
2 : Comme le fait remarquer justement Samael, des cas de forces majeures peuvent s’appliquer.
3 : Je sais ce que vous vous dîtes : ça aurait été plus fluff pour un Prince Démon de Slaanesh de partir sur une base six plutôt qu’une base sept. Mais les temps sont durs, ma pauvre dame…

AVIS :

De toutes les nouvelles mettant en scène un pacte ou une invocation démoniaque (et les conséquences souvent hilarantes, salissantes et/ou catastrophiques qui en découlent) que la GW-Fiction nous a proposé au fil des années, ‘The Seventh Boon’ est sans doute l’une des plus réussies. Mitchel Scanlon met en scène de manière habile ce jeu de dupes entre un homme prêt à tout et un Démon faussement débonnaire, avec suffisamment de rebondissements (mention spéciale à cet échange, qui joue habilement avec les codes du pacte démoniaque) et de suspens1 pour garder l’intérêt du lecteur du début jusqu’à la fin. Chose appréciable, Scanlon se permet également quelques ajouts fluffiques qui, s’ils ne révolutionneront pas la face du Vieux Monde, méritent la lecture pour quiconque s’intéresse à ce genre de choses. A real boon.

1 : Et de mots savants pour enrichir le vocabulaire de son public. Je ne savais pas ce qu’était un trocart jusqu’à aujourd’hui, je le reconnais humblement.

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Broken Blood – P. Kearney :

INTRIGUE :

Broken BloodBroken Blood relate la bataille au cours de laquelle les deux frères Morgan, Gabriel et Michael, se retrouvent enfin face à face, en plein cœur du Pays des Trolls. Quelques flashbacks explicatifs permettent à Kearney de resituer son propos et de retracer la trajectoire des deux frangins : partis purger le grand Nord quelques mois avant le début de la Fin des Temps, les Morgan ont été séparés par un Prince Démon kleptomane ayant enlevé Michael pendant une bataille. Epargné par ses ravisseurs, l’aîné des frères Morgan refait son apparition quelques années après sa disparition, à la tête d’une armée de maraudeurs. Ne pouvant plus sauver son frérot, Gabriel se résout à lui offrir le repos éternel et engage l’ost chaotique avec les survivants de son contingent.

AVIS :

Si la nouvelle de Paul Kearney n’impressionne pas vraiment par l’originalité de son scénario1, elle satisfait par contre par sa mise en scène de l’ultime confrontation finale des frères Morgan. La facilité aurait consisté à décrire Gabriel se frayer un chemin à travers les rangs de l’armée ennemie jusqu’à sa Némésis, approche de pure hack’n’slash rapidement lassante pour le lecteur (après tout, il n’y a pas trente-six façons de tuer un adversaire sur un champ de bataille med-fan). En « élargissant » de temps à autre son point de vue, Kearney apporte un peu de variété bienvenue aux scènes de boucherie classiques qui constituent le gros de Broken Blood, et permet au tout venant de suivre le déroulement de l’affrontement avec un peu plus de recul. Mine de rien, cela demande un certain niveau. Bref : basique mais efficace.

1 : Le thème du noble guerrier rejoignant les rangs du Chaos, et se retrouvant opposé à une ancienne connaissance (ami, parent, amant) ayant été déjà exploré dans Riders of the Dead (Abnett) et The Heart of Chaos (Thorpe), pour rester dans l’univers de Warhammer Fantasy. Du côté de 40K, on a bien sûr l’Hérésie d’Horus.

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Voilà qui conclut cette revue de ‘War Unending’, et je dois dire qu’il est très dommage que ce recueil ne soit plus distribué car, mis à part la sortie de route de Darius Hinks, toutes les nouvelles proposées dans cet ouvrage sont de bonne qualité, ce qui est un ratio que votre humble serviteur n’a jamais vu dans aucune autre collection de courts formats publiés par la Black Library. On peut se consoler en se disant que toutes les histoires regroupées dans ces pages sont assez facilement trouvables par ailleurs, mais pour une fois que le boulot était vraiment bien fait, ce peu de postérité est très frustrant. Ce sont vraiment les meilleurs qui partent le plus tôt…

INFERNO! – ANNEE 2

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue des nouvelles publiées dans les numéros #7 à #12 d’Inferno !, soit la seconde année de publication de cet auguste et vénérable bimensuel (Juillet 98 à Mai 99). Si l’on jette un œil sur les auteurs mis à contribution pour ces six numéros, on constate qu’Abnett le jeune caracole en tête des charts avec pas moins de quatre soumissions à son nom, en majorité consacrée à Warhammer Fantasy Battle. Il est suivi d’assez loin (2 nouvelles) par deux autres figures de la Black Library : l’inoxydable Gav Thorpe et l’immarcescible Bill King. Notons enfin l’arrivée pendant cette période de plusieurs plumes notables : Matthew Farrer (‘Badlands Skelter’s Downhive Monster Show’) et Ben Counter (‘Daemonblood’), Hall of Famers de la BL, et Barrington J. Bayley (‘Children of the Emperor’) comme invité de marque et caution SF de ce jeune magazine.

Inferno!_Année 2

Les 21 nouvelles regroupées ici présentent la GW-Fiction dans toute sa foisonnante diversité, explorant les recoins les plus reculés du Monde qui Fut et du 41ème millénaire (y compris Necromunda) avec une liberté et une inventivité qui laisseront progressivement la place à plus de contrôle de la part des maîtres du fluff de Nottingham. Que vous soyez à la recherche d’une romance avec un loup-garou (‘Wolf in the Fold’), ou de Space Marines se frottant à la réalité virtuelle (‘Hell in a Bottle’), il n’y a qu’ici que vous trouverez quelque chose tout ce qu’il y a de plus officiel à vous mettre sous la dent.

On trouve également dans cette anthologie de vrais classiques, qui peuvent se comparer favorablement avec des nouvelles écrites plus de vingt ans plus tard, comme ‘In the Belly of the Beast’ (King) ou ‘Acceptable Losses’ (Thorpe). C’est également en cette fin de millénaire que l’indispensable Zavant Konniger fit ses premiers pas et savantes déductions sous la plume de Gordon Rennie (‘The Affair of the Araby Exhibit’). Vous l’aurez compris, cette deuxième année infernale mérite le coup d’œil pour tous les amateurs de GW-Fiction, qu’ils soient nostalgiques de ce passé mythique ou pas. En selle pour un petit tour du propriétaire bibliothécaire.

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A Company of Wolves – D. Abnett [WFB] – #7 :

INTRIGUE :

WFB_A Company of WolvesUne compagnie de Chevaliers du Loup Blanc plongée en plein doute existentielle à la suite de la mort de leur commandant au cours d’un raid mal négocié dans la Drakwald quelques mois plus tôt retourne en forêt pour une session de teambuilding mâtinée de skullbashing. Les problèmes affligeant nos héros, que l’on ne peut pas qualifier de sans peur (le vétéran Gruber a le trouillomètre à zéro depuis le décès tragique de son supérieur et ami Jurgen) ni de sans reproche (dans le désordre : Morgenstern a un gros problème d’alcool, Anspach est un parieur pathologique, Vandam une tête brûlée carriériste, et le nouveau chef, Ganz, a moins de charisme que la tête de loup qui orne son armure) sont nombreux, mais le Grand Maître de l’ordre a bon espoir que l’air pur, la nature préservée et les hordes de mutants assoifées de sang qui hantent la Drakwald parviendront à guérir la compagnie rouge de son spleen persistant. Preuve de sa confiance dans ses hommes, il leur a même confié le précieux étendard de Vess1 pour cette virée forestière, ce qui relève un peu le moral des troupes.

Le plan de Ganz consistant à errer dans les bois jusqu’à tomber sur une bande de néfastes à massacrer au nom d’Ulric, notre petite bande baguenaude cavalièrement jusqu’à faire la rencontre de quelques Hommes-Bêtes venus se recueillir devant une idole païenne. L’escarmouche qui s’en suit, si elle ne dure pas longtemps et se termine par une victoire sans appel pour le camp impérial, révèle toutefois de façon criante les maux profonds qui affectent la compagnie. Gruber refuse ainsi de charger l’ennemi, prétextant la perte de fer de sa monture, Morgenstern est couché net par une branche basse qu’il n’a pas pu esquiver, Vandam fonce tête baissée à la poursuite des fuyards malgré les ordres de Ganz, et Von Glick, sommé de le faire revenir au bercail, se fait grièvement blesser par un Ungor embusqué sur le chemin du retour. Cette blessure force les templiers à monter le camp pour la nuit en plein cœur de la Drakwald, et à perdre un des leurs sous les flèches des Hommes-Bêtes (on peut saluer la prescience d’Abnett sur le sujet) pour couronner le tout.

Alors que la compagnie semble sur le point de se désagréger, tel le premier boys band venu après un second album décevant, l’inspiration finit par frapper les loulous, qui décident de tenter le tout pour le tout. Faisant mine de laisser derrière eux leurs morts, blessés et étendard sous faible garde, les chevaliers tournent bride vers Middenheim, espérant ainsi attirer le reste de la harde à découvert. Ce qui ne manque évidemment pas d’arriver. La vaillante action d’arrière-garde conduite par Aric, Gruber et Von Glick permet de retenir les mutants assez longtemps pour que la cavalerie arrive revienne, et annihile les cornus d’une dévastatrice charge de flanc d’école. Bonus appréciable : il s’agissait de la même bande de fieffés violeurs de poules responsables de la mort de Jurgen, qui se trouve donc vengé de façon satisfaisante. Au final, et malgré la mort au combat de Vandam (sans doute en plein grand écart facial) et de Von Glick, nos héros peuvent prendre le chemin du retour unis comme jamais et à nouveau pleinement opérationnels. Une vraie fin de loup(s), en somme.

: Car Vess de Loup (blanc), évidemment. Je ne vois pas d’autres explications satisfaisantes et n’accepterai pas de contestations.

AVIS :

Dans la foulée du lancement réussi de la série des Fantômes de Gaunt dans les pages d’Inferno!, Abnett se livre à un exercice similaire avec ce ‘A Company of Wolves’, introduisant au lecteur une confrérie de templiers du Loup Blanc, dont les exploits seront relatés dans une succession de nouvelles, puis compilées et conclues dans le roman ‘Hammers of Ulric’. Bien que cette péripétie inaugurale soit relatée avec l’aisance habituelle de la plume Alpha de la Black Library, j’ai trouvé le résultat final un peu moins réussi qu’à l’accoutumée. Parmi les raisons de ce (léger) coup de moins bien, j’identifie le nombre important de protagonistes et la « singularisation » moins aboutie de ces derniers (sauf pour Morgenstern, catalogué comic relief de façon outrageuse, ce qui est un autre défaut), une intrigue somme toute assez banale combinée à une mise en scène parfois complaisante1, ou encore la très nette sensation qu’Abnett avait déjà acté qu’il ferait vivre ses nouveaux héros sur plusieurs nouvelles, et a traité A Company… comme un chapitre introductif plutôt qu’un stand-alone (ce qui relève plus de la faute de goût que de la catastrophe industrielle, certes). Pour autant, on a tout de même droit à du Dan Abnett tout ce qu’il y a de plus solide, avec des personnages attachants dès lors qu’on arrive à les différencier les uns des autres, des scènes d’action prenantes où la mort frappe sans prévenir, et une exécution globalement propre. Rien de grave donc.

1 : La possibilité qu’un chevalier puisse se prendre une flèche dans le cou alors qu’il dort au milieu de ses frères d’armes, protégé par des sentinelles habituées des choses de la guerre, et n’être découvert qu’au petit matin, ne me semble pas des plus réalistes. À un autre niveau, le « tour de pâté de maisons » effectué par le gros des troupes (et je ne parle pas de Morgenstern) pour surprendre la harde d’Hommes-Bêtes… qui se trouve être la même que celle qui a tué Jurgen quelques mois plus tôt (#WIJH) est un expédient un peu trop facile à mon goût.  

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Children of the Emperor – B. J. Bayley [40K] – #7 :

INTRIGUE :

Ayant échappé de justesse à la destruction du vaisseau qui transportait son régiment jusqu’à sa nouvelle affectation, le Garde Impérial Floscan Hartoum n’a d’autre choix que de faire atterrir sa capsule de sauvetage à la surface d’une planète mystérieuse dans l’attente d’être secouru. Recueilli par une tribu d’abhumains (deux paires de jambes) dont la mutation a été volontairement déclenchée par leurs ancêtres colons afin de lutter contre la forte gravité de leur monde d’adoption, Hartoum verra son courage et sa vision de l’Imperium sérieusement testés au cours de son séjour chez les enfants perdus de l’Empereur.

AVIS :

Children of the Emperor est une petite gemme, et sa lecture est fortement conseillée à tous les esprits curieux familiers des publications de la Black Library. Cette nouvelle jette en effet un éclairage particulier et très dépaysant sur l’univers de Warhammer 40.000, en prenant toutefois garde de bien respecter le background qui existait à l’époque, attention aussi délicate que louable de la part d’un auteur aussi établi que Barrington J Bayley. L’un des charmes de Children of the Emperor est ainsi son absence d’aberrations fluffiques, preuve indubitable du sérieux travail de « documentation » effectué par Bayley avant la rédaction de ce texte1 (tous les contributeurs de la BL ne peuvent en dire autant, pas vrai Nik Vincent ?).

Mais les principales plus-values apportées par la plume experte de Bayley restent son style, affirmé, maîtrisé et très différent des canons de la BL (ce qui fait tout son intérêt), ainsi que son expérience d’écrivain de SF vétéran, qui lui permet d’attirer l’attention du lecteur sur des points jamais soulevés jusqu’ici par les autres auteurs de la maison (comme les variations de gravité d’une planète à l’autre, et les conséquences de ce changement sur un organisme humain normal) ; mais également d’amener son public à réfléchir sur des questions aussi centrales que celle de la tolérance envers la mutation (et donc du droit à la différence de manière plus large) au sein d’un Imperium dont la psychorigidité sur ce sujet – personnifiée par le personnage du Commissaire Leminkanen, zélote écumant et pas très futé – apparaît comme assez grotesque, eut égard à son histoire millénaire et au million de planètes qui le compose. Bref, on peut remercier Barrington J Bayley pour l’amical coup de pied dans la fourmilière qu’il a mis dans le background de Warhammer 40.000, qui n’était (et n’est toujours) pas au-dessus de tous reproches à l’époque, malgré le soin que lui a apporté Priestley et Cie au moment de son élaboration.

1 : Il va même jusqu’à faire mention d’éléments de background un peu avancés, tels que les fameux Schémas de Construction Standardisés. Chapeau l’artiste.

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The Chaos Beneath – M. Brendan [WFB] – #7 :

INTRIGUE :

WFB_The Chaos BeneathÀ la suite d’une cérémonie d’invocation quelque peu salopée par des cultistes amateurs, un Prince Démon de Tzeentch se retrouve coincé dans le corps d’un hôte mort. Assumant l’identité du cadavre qu’il habite, c’est-à-dire celle d’Obediah Cain, chasseur de sorcières un brin malchanceux, le démon convainc Michael de La Lune (si si), apprenti sorcier fraîchement renvoyé du Collège de Magie de Marienburg pour manque d’aptitudes à l’exercice des arts occultes, de lui rapporter une copie du 3ème Tome du Liber Nagash. Cette dernière repose en effet dans une bibliothèque du Collège, protégée par de puissants enchantements que le Prince Démon n’est pas en mesure de briser en son état actuel. Michael va-t-il s’apercevoir des noirs desseins poursuivis par son acolyte avant qu’il ne soit trop tard ?

AVIS :

Encore une déclinaison sur le thème de l’objet magique maléfique que le héros doit rapporter au méchant à son insu. The Chaos Beneath n’est donc pas la nouvelle la plus originale de la Black Library, ni la mieux écrite d’ailleurs : que peut-on donc avancer afin de justifier sa lecture ? Pour être tout à fait honnête, pas grand-chose si ce n’est le ton assez léger employé par Brendan, transformant du même coup le Prince Démon en méchant de cartoon plutôt qu’en implacable antagoniste. Ajoutez une pincée de fluff, et vous aurez fait le tour de tous les points forts de The Chaos Beneath. Ce qui ne fait pas lourd, je vous l’accorde.

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The Hollows of Hell – D. Abnett [40K] – #8 :

INTRIGUE :

The Hollows of HellNouvel épisode de La Croisade s’amuse et nouveau théâtre d’opérations pour Gaunt et ses Fantômes, qui participent à l’invasion du monde ruche de Caligula, en compagnie de millions d’autres Gardes Impériaux. Déployés par navettes à la surface de la planète depuis le transporteur Navarre, les Tanith doivent essuyer une DCA nourrie (ce qui était attendu), ainsi qu’une tempête psychique conjurée au pire moment par les assiégés (ce qui est plus surprenant). Résultat des courses : le transport de Gaunt, où se trouvaient également le Major Rawne, Bragg, Caffran et Milo (pour ne citer que les têtes d’affiche fantômatiques), dévie fortement de son cap, et s’écrase dans l’une des cuvettes parsemant la planète, qui se trouve être colonisée par une forêt tropicale. Protégés par leur invincibilité scénaristique, nos héros émergent crânement des décombres de l’appareil et se préparent au long trekk jusqu’aux lignes amies qui les attend, le crochet imprévu initié par le blow-out de leur Astropathe1 les ayant conduits trente miles au nord de leur cible, en plein territoire ennemi. Cette réalisation inspirera à Bragg cette phrase immortelle, qui constitue la meilleure citation de toute la série, point à la ligne. Pas de quoi perturber l’inflexible Commissaire cependant, qui entraîne les survivants dans une excursion verte vers une base isolée située à proximité du crash.

Cette avanie technique laisse Corbec seul en charge des Tanith ayant réussi à atterrir sans problèmes, et le Colonel se tire fort honnêtement de sa mission. Confrontés à une atmosphère oppressante et teintée de corruption psychique, les braves forestiers progressent du mieux qu’ils peuvent dans la jungle urbaine que constitue la banlieue de la ruche Nero, jusqu’à ce que leur rencontre avec un polyplacophore démoniaque, heureusement mis en fuite par une crise de nerfs de Larkin (qui sort de ses gonds après avoir vu des Furbies crucifiés par les cultistes – des poupées d’accord, mais des Furbies, c’est trop – ), ne force Corbec à faire une pause technique. Se sentant dépassée par la situation, notre barbouze barbue décide d’utiliser un de ses jokers pour progresser dans la partie, et passe donc un coup de fil à un ami, qui se trouve être officier sur le Navarre. Usant de ses influences, ce dernier parvient à mettre en application le plan de Maître Corbec : la macro cannonisation de la cité sensible où les Fantômes sont embourbés, opération peu régulière mais couronnée de succès, comme la fin brutale de la tempête psychique suite à l’arasement de la ZUS le démontre. Problem solved.

De son côté, Gaunt finit par arriver en vue de l’installation convoitée, défendue à son grand dam par quelques Serviteurs de combat un peu trop zélés. Ce regrettable malentendu sera toutefois rapidement réglé, sans qu’aucune perte ne soit à déplorer parmi les forces en présences disposant d’un cerveau intégral. À l’intérieur, le Commissaire a la surprise de découvrir une de ses vieilles connaissances, l’agent de renseignement Rael Tagore, qui, quand il n’essaie pas d’entre en contact avec les Elohim, enquête sur le réseau d’espions mis en place par le très paranoïaque Maccaroth depuis sa prise de fonctions. Soupçonnant beaucoup de choses mais sans l’ombre d’une preuve tangible (un point commun avec notre Raël), Tagore accepte toutefois de ramener ses hôtes sur le front grâce à la navette qu’il avait utilisée pour se mettre au vert peu avant le début de l’offensive impériale. La nouvelle se termine ainsi par une heureuse réunification régimentaire, et la conjuration par Gaunt et Tagore du bon vieux temps sur Estragon Prime. Ah, Estragon Prime. Il y aurait beaucoup à dire sur cette singulière planète, mais ceci est une autre histoire…

1 : Maladresse ou mauvaise appréciation fluffique de la part d’Abnett, la présence dudit Astropathe dans une navette de déploiement de troupes de la Garde Impériale laisse à penser que l’opération a mobilisé quelques centaines de milliers de psykers assermentés du côté impérial.

AVIS :

Pour la première fois depuis le début de sa série, Abnett marque le coup avec une soumission sensiblement inférieure à ce dont il nous avait habitués précédemment. En plus de se révéler d’un intérêt assez quelconque en termes d’intrigue, que soit côté cour (Corbec et ses hommes jouent à la guéguerre avec quelques cultistes, avant d’appeler l’artillerie spatiale et revendiquer une victoire assez mesquine) ou jardin (Gaunt fait de la randonnée et s’inscrit sur Copains d’Avant), l’auteur prend des libertés assez grandes avec le fluff de 40K, tendance que l’on avait déjà vu à l’œuvre dans de précédentes nouvelles – notamment à travers les World Eaters gérés en 2-2 par les Fantômes dans ‘A Blooding’ – mais qui prend une autre dimension dans ‘The Hollows of Hell’. En plus de l’intégration malheureuse d’un Astropathe à l’histoire, l’identification immédiate par l’impayable Varl du caractère démoniaque du mollusque géant rencontré par les Tanith, et l’absence de censure inquisitoriale suite à cette entrevue malaisante au possible, interrogent. N’ayant que de vagues souvenirs de ‘Ghostmaker’, second tome de la série des ‘Fantômes de Gaunt’ dans lequel Abnett a collecté toutes les nouvelles publiées dans Inferno ! avant l’écriture de ‘Premier & Unique’, je ne pourrais dire si ‘The Hollows of Hell’ a été retravaillée par son auteur avant la sortie de ce roman-recueil. Toujours est-il que nous tenons ici l’un des maillons les plus faibles d’une saga autrement plus robuste.

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Gilead’s Fate – D. Abnett [WFB] – #8 :

INTRIGUE :

WFB_GIlead's FateRevenus de leur quête de vengeance décennale (‘Gilead’s Wake’), Gilead et Fithvael ont réinvesti le domaine de Tor Anrok, propriété légitime autant que décatie du premier. La traque du tueur de Galeth, le jumeau de notre héros, a en effet porté un coup fatal à la lignée déjà périclitante de Lothain, dont Gilou est le dernier représentant, et Fithvael l’unique suivant encore vivant. Alors que son majordome préfère camper en forêt et se consacrer à l’entretien de ses domaines horticoles, Gilead a lui sombré dans la dépression et l’alcoolisme, et attend la cirrhose fatale qui aura raison de son spleen (ainsi que de son foie) et de son Endurance de 3. Un événement imprévu va toutefois forcer notre héros dépravé à sortir de sa stupeur…

Entre ainsi en scène Betsen Corpath (Serge de son prénom1), qui, comme Gilead, se trouve être la dernière survivante de sa lignée. Fille de marchands de Munzig, Betsen a perdu toute sa famille au cours d’une terrible soirée, où l’intégralité des Corpath ainsi que tous leurs servants ont été massacré dans leur maison par un meurtrier inconnu. La jeune fille n’a dû son salut qu’à son absence du domaine familial au moment des faits, ses parents l’ayant envoyé faire un stage de demoiselle de compagnie à la cour de Middenheim. Eprouvée par cette tragédie, mais résolue à obtenir justice, Betsen s’est livrée au cours des deux années qui suivirent le Munzig Zweihander Massacre, comme le crime aurait été surnommé par les locaux si j’en avais fait partie, à une investigation fouillée, lui ayant permis de concentrer ses soupçons sur la personne de Lugos, autre marchand de Munzig à la réputation sulfureuse. Malheureusement pour la teenager vengeresse, ses capacités à confronter Lulu sont pratiquement inexistantes, le bougre ayant l’influence et la richesse nécessaires pour entretenir une garde personnelle rivalisant avec la milice locale. En désespoir de cause, Betsen décide donc d’utiliser les bonnes vieilles méthodes de sa défunte (elle aussi) nourrice, à savoir aller déposer plainte au tribunal elfique local, qui se trouve être à côté de la source d’Eilonthay. Les légendes populaires veulent en effet que les habitants de la Tour de Tor Anrok portent secours aux malheureux qui établissent une main courante en ce lieu, à supposer qu’ils le trouvent – ce qui n’est pas facile – et que leur cause soit juste.

Ayant localisé cette fameuse source après des mois de trekking dans les Principautés Frontalières, et ouvert 4 GR Pays dans la foulée, Betsen s’en retourne fréquemment plaider sa cause auprès de l’onde aussi amère qu’elle-même, et finit par émouvoir (ou importuner, c’est selon) Fithvael, qui élaguait à proximité. Notre bonelfe décide d’aller informer son patron de la doléance de la jeune fille, à laquelle il serait de son devoir et de son honneur de répondre. Malheureusement pour le majordome au grand cœur, Gilead, qui a bu trois dés à coudre de cidre brut la soirée précédente, a horriblement mal aux cheveux (qu’il a longs) et ne se montre ni empathique, ni coopératif, en dépit du heroshaming éhonté auquel se livre Fithvael. Ayant échappé aux jets de boutanche de son maître furibard, Fifi décide d’aller régler lui-même le problème… et échoue comme une bouse. Ramassé à l’article de la mort devant l’entrée de Tor Anrok par un Gilead un peu plus sobre le lendemain matin, le vieillard se retrouve cloué au lit, mais peut au moins se réconforter en réalisant qu’il a atteint son but, le calvaire de son meilleur ami ayant donné à Gilead, comme à Rocky Balboa, John Wick et Robert McCall avant/après lui, la motivation nécessaire pour botter quelques fesses.

Après avoir pris contact avec Betsen et reçu un briefing sommaire de la situation, notre vigilante titubant se met en chasse, emmenant sa commanditaire avec lui pour… le fun on dirait, son aide n’étant absolument pas nécessaire. Plutôt que de s’embêter à corroborer les allégations de Miss Corpath, qui, après tout, aurait pu faire fausse route du haut de ses quinze ans, Gilou opte pour une approche radicale, et se fraye un chemin sanglant dans la demeure de sa cible, jusqu’à faire intrusion dans sa salle à manger en plein milieu de son dîner, ce qui n’est pas très poli. S’en suit une séquence d’action frénétique, où la shadowfasttitude de Gilead en fait voir de toutes les couleurs – mais surtout du rouge sang – aux sbires de Lugos. Détail marrant, ce n’est qu’après avoir occis la majorité du personnel du marchand, qui n’avait sans doute rien à voir avec les meurtres des Corpath, que notre héros demande la confirmation qu’il est bien chez Mr Lugos, qui a alors la meilleure réaction possible au vu de la situation : 1) balancer une réplique badass, 2) gagner du temps en confessant ses crimes jusqu’à l’arrivée de son garde du corps personnel, une montagne de muscles chaotiques (ou une montagne chaotique de muscles, ça marche aussi) du nom de Siddroc.

Confronté à un adversaire un peu plus coriace, et sans aucun doute responsable de la triste et graphique fin de la famille Corpath, Gilead fait moins le malin, et casse même son épée sur l’armure de plates du Sid. Il faudra une attaque suicidaire, dans tous les sens du terme, pour tromper la vigilance et la protection quasi-intégrale du colosse, provoquant la fuite éperdue mais d’assez courte durée de Lugos, dégommé en pleine course par une Betsen planquée avec son arbalète à la sortie du manoir. Détail marrant bis, cette dernière (la fille, pas l’arbalète hein) demandera elle aussi une confirmation qu’elle a bien descendu la bonne personne après avoir appuyé sur la détente. Dans les Principautés Frontalières, on tire d’abord, on pose les questions après (#MutantLivesMatter).

Cette quête vengeresse terminée, Gilead laisse Betsen gérer les indélébiles traumatismes et névroses provoqués par la perte de sa famille et le meurtre du responsable de cette dernière à sa convenance (easy peasy quand on a quinze ans, personne sur qui compter, et bientôt soupçonné du meurtre d’un notable et de tout son personnel) et repart au chevet de son domestique. Une fois remis sur pied, les deux compères décident de repartir à l’aventure, non sans avoir mis le feu à la Tour de Tor Anrok afin de tirer un trait définitif sur leur passé2. Le destin de Gilead (et donc de Fithvael) sera d’écumer le Vieux Monde en quête d’innocents à secourir, de torts à venger, et de couteaux à remouler. Il n’y a pas de sottes professions.

1 : Ce n’est pas vrai et il y a des chances que les plus jeunes des lecteurs ne comprennent pas la référence, mais je trouve ça fendard d’imaginer une frêle donzelle de 15 ans sous les traits du French Reaper.
2 : En fait, c’était une arnaque à l’assurance. Mais ça ferait mauvais genre dans une saga épique.

AVIS :

Après avoir posé ses personnages dans l’introductif et probablement pensé comme un one shotGilead’s Wake’, Abnett remet Gilead et Fithvael sur le devant de la scène dans une petite nouvelle plus intéressante dans ce qu’elle dit de la déchéance morale et physique d’un héros dont la race pouvait laisser penser qu’il serait immunisé à ce genre de désagréments, que dans la narration de la revanche prise par Betsen sur les meurtriers de sa famille. Cela ne veut pas dire pour autant que cette soumission ne mérite pas le détour (ne serait-ce que pour la réalisation que Gilead est en fait le Batman du Vieux Monde – ou au moins de Munzig – et Fithvael son Alfred), mais plutôt que ses points forts (à mes yeux) sont plus « périphériques », si l’on me passe l’expression, que d’habitude pour un récit de Dan Abnett. Ainsi la scène d’ouverture, qui débute sur la charmante description d’une fratrie de jeunes enfants régalés de contes par leur nourrice, et qui bascule en un éclair sur la description bien gore de leur cadavre, illustre la maestria de l’auteur en termes de narration. Pour le reste, Abnett prend soin de préparer la suite, et l’on sait d’ores et déjà que l’on aura des nouvelles des deux comparses à l’avenir. On the road again

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The Raven’s Claw – J. Curran [40K] – #8 :

INTRIGUE :

Début de journée difficile pour Veronique Sanson, le héros de The Raven’s Claw (nouvelle au titre potterien s’il en est). Tiré d’une gueule de bois carabinée par le quasi-crash de son vaisseau en plein cœur d’une zone de guerre urbaine, notre protagoniste se rend rapidement compte que 1) il n’a absolument aucun souvenir de qui il est, et 2) il fait visiblement partie d’un régiment de Légionnaires Pénaux. Vivement le week-end.

AVIS :

Jouant honnêtement de cette ficelle narrative bien connue qu’est l’amnésie du héros, Curran trousse une petite nouvelle ma foi fort potable, si on la replace dans son contexte (c’est-à-dire 1999, une époque où les contributeurs de la BL n’étaient pas tenus d’être docteurs -es fluff pour proposer leur travail1). Le background est en effet quelque peu malmené au cours du récit, en particulier au moment de la conclusion de l’histoire, qui aurait pu être mieux négociée, surtout au vu du choix effectué par l’auteur à son endroit2. Ce manque de maîtrise du background de Warhammer 40.000 est d’autant plus gênant que Curran termine son histoire avec un exposé bancal sur la nature de l’Imperium, dont il donne une image biaisée, et finalement assez fausse3. Bref, une mention passable bien méritée.

1 : Non pas que ce soit actuellement le cas aujourd’hui d’ailleurs (l’espoir fait vivre).
2 : Vero se révèle être un (et non pas une – d’après le fluff, c’est rare mais pas impossible – ) assassin Callidus, envoyé sur le terrain afin de faire la peau à un Gouverneur planétaire félon. Sauf que l’utilisation faite par Vero (Averius de son vrai nom) de la fameuse polymorphine est complètement marginale (« Et hop, je passe de L à M en taille de veste ! Ils ne me reconnaîtront jamais ! »), ce qui est tout de même dommage étant donné que c’est cette dernière qui fait tout le charme de cette caste particulière. Étant donné les spécificités de cette mission (à savoir, la présence d’un psyker prescient aux côtés du Gouverneur), un Culexus aurait à mon sens bien mieux fait l’affaire. Quant à la Raven’s Claw qui donne son titre à la nouvelle, il s’agit d’une sorte de neuro-gantelet subdermal, arme appartenant davantage à l’arsenal des assassins Eversor qu’à leurs consœurs Callidus.
3 : Selon Curran, l’Imperium a envoyé Vero recueillir la confession du Gouverneur renégat, car, ayant trahi la confiance de l’Empereur, ce dernier se trouve être un hérétique (nié ?), et tout hérétique doit se repentir avant de recevoir sa punition (nié ?). Et Vero d’expliquer que la rébellion aurait pu être matée en deux deux, et qu’une force d’intervention constituée de plusieurs régiments de Gardes Impériaux ainsi que d’un contingent de White Scars attend tranquillement en orbite son feu vert avant de débarquer sur la planète remettre un peu d’ordre dans tout ce bordel. Et tout ce temps gâché, toutes ces ressources dépensées, toutes ces vies perdues, pour quoi ? Pour permettre à Vero d’absoudre sa cible de ses pêchés. Amen.

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Hell in a Bottle – S. Jowett [40K] – #8 :

INTRIGUE :

40K_Hell in a BottleLe Sergent Instructeur Tydaeus des Iron Hearts doit faire face à une situation inédite: la machine Mimesis, simulateur de conflits utilisé pour l’entraînement des recrues du Chapitre, a été envahie par un ost démoniaque, mené par le prince démon Kargon. N’ayant pas réalisés que leur dernière conquête était un monde virtuel, les démons se retrouvent bloqués dans la réalité numérique de la machine, à la merci d’un Tydaeus qui doit maintenant décider s’il préfère la jouer safe (débrancher Mimesis et l’envoyer à l’incinérateur) ou héroïque (débuter une « partie » et aller botter les fesses calleuses de Kargon en live).

AVIS :

Hell in a Bottle est sans doute la nouvelle la plus étrange d’Into the Maelstrom, voire de toutes les publications 40K de la Black Library. L’argument du récit, déjà très peu banal en lui-même (« et si les Space Marines s’entraînaient sur des bornes de shoot ‘em up ? »), se combine en effet à une interprétation pour le moins libérale du fluff de la part de Simon Jowett, qui n’hésite pas à nommer un des Primarques inconnus dans le cours du récit, ou encore à dépeindre son héros en employé de bureau désabusé plutôt qu’en inflexible moine-guerrier. Il faut dire que Tydaeus n’est, à proprement parler, pas vraiment un Space Marines, son corps ayant rejeté les implants génétiques lui étant destiné au cours de son initiation. Le Chapitre des Iron Hearts étant néanmoins très humain (malgré ce que laisse penser leur nom), notre héros a été reclassé à un poste de non-combattant au lieu d’être transformé en serviteur, ou pire. Dans les ténèbres d’un lointain futur, la loi handicap de 2005 est toujours en vigueur. Bravo.

De l’autre côté de la matrice, le prince démon Kargon n’est pas vraiment reste, sa diction sifflante et ses pratiques sexuelles peu banales (ce n’est pas pour rien qu’on l’appelle Seed-Bearer, monsieur inséminant personnellement les planètes qu’il a conquis avec des spermatozoïdes chaotiques) faisant de lui une Nemesis pittoresque pour Tydaeus, qui, bien sûr, ne résistera pas à l’envie d’aller casser du démon, pensant (à tort) qu’il ne pourrait rien lui arriver de plus fâcheux que d’être déconnecté du serveur une fois tous ses points de vie envolés.

Parenthèse parodique (volontaire ou non) de l’univers gothique de Warhammer 40.000, Hell in a Bottle est un souvenir d’une époque révolue de l’histoire de la Black Library, pendant laquelle les contributeurs pouvaient se permettre d’écrire tout ce qui leur passait par la tête. Et, rien que pour ça, cette nouvelle mérite d’être lue.

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A Wolf in Sheep’s Clothing – D. Abnett [WFB] – #9 :

INTRIGUE :

WFB_Wolf in Sheep's ClothingAprès le succès de leur session de team building dans la Drakwald (‘A Company of Wolves’), nous retrouvons les chevaliers de la Compagnie Blanche de l’ordre du Loup Blanc (the whitest of the white) alors qu’ils s’apprêtent à partir dans une nouvelle mission, beaucoup moins funky qu’ils ne l’espéraient de prime abord. Le Graf de Middenheim a en effet reçu une missive désespérée d’un de ses cousins, le Margrave Ganmark, dont le domaine a été attaqué et incendié par une bande de galapiats, et qui se retrouve donc SDF par la force des choses. Alors qu’il revient aux pompeux et hautains Chevaliers Panthères de traquer les coupables de cet abominable forfait, les Loups Blancs doivent se contenter d’escorter cousin Hubert, sa famille et ses gens, jusqu’à la sécurité de Middenheim. Autant dire que le Commandant Ganz doit essuyer une grogne bien compréhensible de la part de ses hommes, parmi lesquels on compte deux nouveaux : le bleu-bite Krieg Drakken, et le sang bleu Lowenhertz.

Après un aller sans embûches, nos templiers prennent en charge leurs protégés, et se consolent légèrement en constatant que la femme du Margrave, Gudrun, est vraiment bonnasse. Il n’y a que le jeune Drakken pour reluquer davantage la servante Lenya que la plantureuse maîtresse de maison, que le cousin Hub’ a épousé quelque temps après la mort de sa première femme. Les introductions étant faites et le barda chargé dans les chariots, la troupe repart vers la cité, pendant que les Panthères de Von Volk/t se lancent à la poursuite des mécréants. Bien évidemment, ces derniers éviteront facilement la confrontation avec leurs traqueurs, et se concentreront sur les loulous et les migrants. Surpris une première fois par un assaut de Nazguls puant la cannelle, qui laissera le pauvre Drakken tout estafilé, les chevaliers devront relever le plus difficile des défis : utiliser leurs neurones. Car, si pour le lecteur, il ne fait rapidement aucun doute que les stoners spectraux1 sont à la recherche de quelque chose ou de quelqu’un voyageant avec les templiers, pour ces derniers, le mystère est à la limite de l’insoluble. C’est d’ailleurs tout juste si Ganz ne condamne pas Lowenhertz au bûcher pour avoir émis l’hypothèse précédente, qui relevait pourtant du bon sens plus que de la mise en pratique de savoirs interdits…

Début spoilerAu final, et après avoir essuyé une nouvelle vague de goons à la faveur d’un bivouac en pleine forêt, les Loups Blancs finiront par identifier la source de tous leurs maux, qui se trouve être, non pas l’exotique bimbo avec qui le Margrave a refait sa vie, comme le soupçonnait ce misogyne de Gruber, mais la vieille nourrice rom’ des enfants du pater familias, elle aussi arrivée récemment dans l’entourage de l’aristocrate. Plus particulièrement, l’aïeule trimballe avec elle un bijou en forme de griffe, qui lui porte apparemment chance mais que ses ancêtres ont certainement dérobé dans une tombe arabienne, et que ses propriétaires légitimes souhaitent vivement récupérer. Leurs adversaires pouvant respawner toutes les deux heures, Ganz, dans un éclair de génie inhabituel, réalise qu’il doit prendre des mesures drastiques pour arracher la victoire avant que ses hommes se fassent massacrer. Peu enclin à restituer la babiole avec un petit mot d’excuse, comme on le ferait de nos jours, le fier chevalier préfère réduire en poudre le colifichet sépulcral, bousillant le marteau de Lowenhertz dans la manœuvre (c’est du bizutage). Nazguls jusqu’au bout, les assaillants se dissipent alors dans un gémissement piteux, permettant à nos héros de reprendre leur route au matin sans plus d’interruptions. La nouvelle se termine sur leur retour triomphal à Middenheim, et sur la remise par Ganz à Lowenhertz du marteau de feu Von Glick, en dédommagement de l’arme perdue en chemin. Dans l’Empire plus qu’ailleurs, les bons comtes électeurs font les bons amis.Fin spoiler

1 : Ils ont les yeux rouges et ne s’expriment qu’en grognements inintelligibles.

AVIS :

Abnett poursuit sa série (louve) blanche sur des bases sensiblement similaires à celles posées dans ‘A Company of Wolves’, même si l’intrigue se montre un peu plus fouillée et complexe que lors des débuts de Ganz et Cie. Si la révélation de l’identité du responsable des malheurs du Margrave ne risque pas de surprendre grand-monde, on peut tout de même mettre au crédit de Dan Abnett l’inclusion d’une authentique et valable fausse piste dans sa nouvelle, ce qui, pour une soumission de 12 pages, est un accomplissement notable. Pour le reste, on se contentera d’un peu de character development pour nos vaillants chevaliers, qui gagnent deux nouvelles recrues dans ce second épisode, dont au moins une (Lowenhertz) semble tenir à cœur à l’auteur ; ainsi que quelques scènes d’actions très potables.

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Wolf in the Fold – B. Chessell [WFB] – #9 :

INTRIGUE :

WFB_Wolf in the FoldLe sommeil de l’Archidiacre Kaslain de Nuln est interrompu en pleine nuit par l’arrivée impromptue d’un visiteur de marque, venu chercher l’absolution que seul un haut prêtre de Sigmar peut conférer. Mortellement blessé, l’assassin légendaire connu comme la Guêpe Tiléenne (Tilean Wasp) se vide de son sang dans les appartements privés du prélat, dédiant ses derniers instants au récit du seul crime de sa longue carrière pour lequel il éprouve le besoin de se confesser : l’assassinat d’un prêtre.

AVIS :

Si l’histoire narrée par Ben Chessell dans Wolf in the Fold n’est pas aussi aboutie que son Hatred, et que la conclusion de cette courte nouvelle ne s’avère pas être une grande surprise, sa lecture n’en est pas moins agréable, et ce pour deux raisons principales.

La première, c’est l’audace manifestée par ce novice de la Black Library, qui pour sa deuxième soumission, s’offre le privilège de tuer un personnage nommé (l’archilecteur Kaslain, abordé dans les Livres Armées de l’Empire – c’est était un électeur impérial – et dans quelques suppléments du jeu de rôle). Bon, d’accord, il ne s’agissait pas vraiment d’une figure de premier plan du fluff, mais tout de même.

La seconde, et la plus importante à mes yeux, c’est le complet changement de style opéré par Chessell entre Hatred et Wolf in the Fold, sans que ses talents de conteur ne pâtissent de cette transformation. La grande majorité des auteurs de la BL ayant une patte facilement identifiable (pour le meilleur ou le pire) et abordant toujours leur sujet avec le même angle d’attaque, il est remarquable qu’une plume de cette auguste maison soit d’une « agilité » littéraire suffisante pour proposer deux récits si différents l’un de l’autre que l’on aurait pu sans mal les attribuer à deux contributeurs distincts. Si Hatred possédait une ambiance mélancolique et désincarnée, Wolf in the Fold se caractérise au contraire par un style riche et un goût prononcé pour le détail, assez proche dans l’esprit de celui de Brian Craig.

En conclusion, une autre excellente livraison de la part de Ben Chessell, dont la très courte carrière au sein de la Black Library apparaît décidément comme une de ces injustices dont la vie a le secret.

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The Lake – T. R. Summers [NDA] – #9 :

INTRIGUE :

Les dernières semaines ont été dures pour le gang des Brassers de Lord Orl, meneur Orlock qui se rêvait seigneur éboueur du sous-monde. Affaibli par une guerre territoriale constante contre les Goliaths de la Main Noire (encore eux1), les Orlocks ont de plus perdu leur précieux puits lors d’un récent tremblement de ruche, les laissant à la merci d’individus peu scrupuleux pour se sortir de ce mauvais pas. D’individus comme le Guilder Rorget Ahn, par exemple, qui a proposé à Lord Orl de s’associer dans une affaire a priori juteuse : la chasse aux mulk spiders infestant un petit lac souterrain que le même séisme qui a enfoui le puits des Brassers a rendu accessible, après des siècles coupé du reste de Necromunda. Les yeux de ces bestioles, semblables à des gemmes, sont très recherchés par les riches du haut de ruche, et leur vente devrait permettre aux Orlock de se remettre d’aplomb. Bien entendu, chasser des argyronètes géantes ayant colonisé une mare hautement toxique monté sur un pédalo fatigué (le semi rigide proposé par Rorget coûtait trop cher à la location) n’est pas une entreprise de tout repos, mais il en faut plus pour décourager nos hardis Gangers, qui jettent donc leurs lignes sur le plan d’eau de liquide sans tarder.

Les péripéties violentes et humides ne tarderont pas à leur tomber dessus comme un mange-visage de Catachan sur l’arrière-arrière-arrière374 petit fils de Logan Paul2, aux inévitables morts causées par l’agressive faune locale venant s’ajouter celles provoquée par l’épique bataille navale entre Brassers et Main Noire, également embauchés par ce traître de Rorget Ahn pour cette mission lacustre. Lord Orl, en bon leader, n’hésite pas une seconde à mouiller le maillot, mais sans doute plus qu’il ne l’avait prévu. Une baignade involontaire dans les boues de vidange violacées faisant office de lac lui est en effet imposée à la suite de l’explosion de son canoë, et s’il parvient à regagner son QG avec ses quelques hommes restants et un sac d’yeux de mulk spiders pour leur peine, il ne tarde pas à développer une forte fièvre et une purulence de mauvais aloi, que les bons soins du Dokker Hack’n’Slash ne parviennent pas à traiter. Comble de déveine, les précieuses gemmes collectées lors de la mémorable partie de pêche ne tardent pas à fondre comme neige radioactive au soleil, laissant les Brassers dans une situation encore plus désespérée que précédemment.

Fort heureusement, il reste encore sa légitime vengeance contre Rorget Ahn pour motiver Lord Orl, de moins en moins présentable à mesure que les jours passent et que les mutations causées par sa baignade impromptue se manifestent. S’étant surpris à boulotter goulument un bras gardé par Dokker comme pièce détachée dans son officine (on ne sait jamais de quoi on aura besoin pour rafistoler un Ganger de passage), Orl décide de s’isoler du reste de ses hommes pour leur propre bien, et retourne vers le lac, inexplicablement attiré par une pulsion inconsciente… ou peut-être par le secret espoir de retrouver l’Apple Watch qu’il a perdue sur place lors de sa dernière visite…

Début spoiler…Une nouvelle séquence de baignade, suivie d’une épiphanie aussi totale que brutale et non expliquée (il arrive sur une île au milieu du lac et paf, l’illumination le frappe), mènent assez logiquement à la réalisation par Lord Orl et le lecteur que les mulk spiders qui vivent dans cet écosystème unique en son genre ne sont autres que les formes mutées des malheureux qui ont bu la tasse et la crasse mutagène, cancérigène et reprotoxique de cette onde véritablement amère3. D’ailleurs, notre héros reconnaît son bras droit R’daff, emporté par le fond par une araignée entreprenante lors de la première expédition, parmi le comité d’accueil qui s’est réuni pour lui souhaiter la bienvenue dans sa nouvelle communauté. Acceptant son sort sans se plaindre, Lord Orl a toutefois une dernière virée dans le monde civilisé à faire avant de prendre définitivement sa retraite et d’aller faire des bulles dans l’eau avec ses petits copains. Sa cible : ce bougre de Rorget Ahn, à qui il offre gracieusement le pot de l’amitié pour solde de tout compte. Je vous laisse deviner ce qu’il y avait dans le verre…Fin spoiler

1 : Déjà croisés dans ‘The Day of Thirst’, du même auteur. Comme on le verra plus loin, les Goliaths de Krug n’arrivent pas à prendre les points à l’extérieur, ce qui est embêtant quand on lutte pour le maintien la survie.
2 : Youtuber trololol comme son aïeul.
3 : Les mystérieux « Gene Lords », et leur sale manie de collecter et stocker l’ADN des formes de vie croisant leur route dans la cuve recherche qui est devenue ce fameux lac après des millénaires d’abandon, sont à blâmer ici.

AVIS :

Summers mène assez bien sa barque (mouahaha) avec ‘The Lake’, qui présente les deux qualités appréciables pour une nouvelle d’une intrigue n’étant pas prévisible des pages à l’avance – au moins dans la première moitié du récit – et d’une construction bien fichue, où la boucle se retrouve bouclée à la fin du récit. On appréciera également le cadre assez original de cette histoire pour une soumission siglée Necromunda, sans doute l’une des franchises de la GW-Fiction où l’on s’attend le moins à ce qu’un « lac » serve de décor. Le seul reproche que je ferai à Summers est relatif à son inclusion très artificielle, et à mes yeux inutile, des « Gene Lords » dans son propos. Pourquoi faire entrer une faction de démiurges mystérieux et une réalisation proprement miraculeuse de leur implication par Orl dans ses déboires, quand un bon vieux recours au Chaos (après tout, il est question de mutation ici) aurait pu faire l’affaire plus simplement et « proprement » ? Comme le mieux, le tarabiscoté est l’ennemi du bien, et je pense que ‘The Lake’ aurait gagné à rester en terrain fluffique connu. Mais le résultat reste tout de même satisfaisant.

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Acceptable Losses – G. Thorpe [40K] – #9 :

INTRIGUE :

40K_Acceptable LossesNommé à la tête du tristement célèbre escadron de Maraudeurs Raptor, le commandant Jaeger a l’occasion de prouver la valeur de ses hommes au cours d’une mission aussi vitale que périlleuse : la destruction des réacteurs d’un Space Hulk grouillant d’orks. Livrés à eux-mêmes dans l’immensité hostile de l’espace, les Raptors se rendront rapidement compte qu’il n’y a pas d’ennemi plus mortel que l’ami dans lequel on a placé (à tort) sa confiance.

AVIS :

Après les Nains et les Hauts Elfes, Battlefleet Gothic est l’une des lubies du bon Gav Thorpe, qui ne manque jamais une occasion de mettre en scène une petite bataille spatiale dans ses écrits futuristes. Sachant qu’Into the Maelstrom (et donc Acceptable Losses, par la même occasion) a été publié en 1999, soit l’année de sortie du livre de règles BFG, il était inévitable que cette nouvelle fasse la part belle à des héros maîtrisant l’art subtil de la guerre dans l’espace.

Cette nouvelle conséquente (33 pages, ce qui en fait la plus longue du recueil) se divise ainsi en deux parties distinctes. La première (un tiers) voit Jaeger et ses hommes faire connaissance, les premières impressions mitigées faisant rapidement place à une véritable camaraderie entre un commandant sévère-mais-humain et des équipages indisciplinés-mais-courageux-et-loyaux (et l’Oscar du meilleur scénario original est attribué à…). Thorpe sait qu’il doit en passer par là pour que la suite de son récit tienne la route et s’exécute de bonne grâce, son style passe-partout lui permettant d’expédier cette introduction sans trop lasser le lecteur (en partie grâce à la partie « contes et légendes de l’Imperium »).

La deuxième partie (deux tiers) est une description minutieuse de la mission plus ou moins suicide de l’escadron Raptor, sur lequel s’acharne bien entendu un sort contraire : escorte de Thunderbolts retirée au dernier moment, Rok en maraude à négocier en solo, rencontre inopinée avec une escadrille de chassa-bombas, cible protégée par une hénôrme batterie de lance-plasma… autant de petits riens qui font que la vie d’un pilote de Maraudeur vaut d’être vécue (et se termine de manière prématurée). Fort de son expertise dans le sujet, Thorpe réussit à faire de ce compte rendu une expérience plaisante, tant par son originalité que par son enthousiasme perceptible pour cette forme de combat, dont les règles diffèrent considérablement de la classique bataille rangée de fantassins et de véhicules à laquelle l’amateur de 40K a droit d’habitude.

Bon, ça reste du Thorpe, et du Thorpe « primitif » qui plus est, ce qui signifie que l’histoire en elle-même ne vole pas beaucoup plus haut qu’un plongeur de la mort ayant fait un six sur son jet d’incident de tir (ouais, j’ai pas peur des mélanges). En même temps, difficile de révolutionner l’art de la nouvelle de science-fiction avec un pitch aussi ingrat qu’une bataille spatiale vue depuis l’intérieur d’un cockpit de Maraudeur. On a donc le droit à une triple dose d’héroïsme désintéressé et de sacrifice pour la bonne cause, généreusement saupoudrés de « bon sang, c’était moins une »1 et de « mais où est notre écran de chasseurs ? » : une fois de temps en temps, pourquoi pas.

Bref, Thorpe réussit assez bien son coup avec Acceptable Losses, un de ses meilleurs courts formats pour la BL à date, et fait mieux que tenir la comparaison avec beaucoup des nouvelles plus récentes intégrées à On Wings of Blood.

1 : Appelons ça le syndrome de l’Etoile de la Mort.

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In the Belly of the Beast – W. King [40K] – #10 :

INTRIGUE :

40K_In the Belly of the BeastUne escouade de Griffes Sanglantes menée par un Garde Loup est envoyée explorer l’intérieur d’un vaisseau tyranide. Même si la Grande Dévoreuse a la tête dans le biomorphe après quelques éons passés à dériver dans la galaxie, les Loulous vont vite se rendre compte qu’entrer par effraction chez les cafards de l’espace est une très, très mauvaise idée.

AVIS :

In the Belly of the Beast est la nouvelle de type « et si ? » par excellence. Son principal intérêt est de permettre au lecteur de découvrir un pan jusqu’ici peu exploré du fluff, ici la structure et le fonctionnement d’un bio vaisseau tyranide. King accomplit cette mission avec sérieux et réussite, et parvient à décrire ce petit monde complétement alien (c’est le cas de le dire) à l’esprit humain de manière convaincante, insistant bien sur sa perfection organique et son aspect oppressant. Il enrichit en outre son propos en décrivant la progression des Space Wolves depuis le point de vue de chacune des Griffes Sanglantes, dont les réactions varient entre rage bestiale (Egil), prémonition funeste (Njal), légèreté feinte (Gunnar) ou encore crainte dissimulée (Sven). L’éveil progressif de l’écosystème tyranide en réponse à l’intrusion des marounes donne enfin l’occasion à l’auteur de relever son texte de quelques passages d’action tout à fait convenables, et d’une poignée de décès astucieusement gores (mention spéciale à la disparition de Njal).

On peut en revanche regretter le manque flagrant d’inspiration de King au moment d’insérer In the Belly of the Beast dans l’univers de 40K. Comment, en effet, justifier l’envoi d’une (seule) escouade de Space Marines inexpérimentés dans une mission aussi dangereuse que l’exploration d’un vaisseau tyranide, même inerte ? Réponse de l’intéressé : nos héros sont assignés à un navire marchand (et quand je dis assigné, c’est en mode larbin hein : à côté, la Wolfblade c’est une nomination honorifique), dont le capitaine, apparemment ignare au dernier stade, n’est pas foutu de repérer une bioconstruction tyranide quand il en croise une (manque évident de culture générale également partagé par le sergent Hakon, ceci dit). Le navigateur de bord – un homme cultivé, lui – a beau insister lourdement pour que ce mystérieux vaisseau soit détruit sur le champ, le capitaine envoie tout de même ses loulous de compagnie explorer ce dernier dans l’espoir de « découvrir quelque chose dont l’Imperium pourrait avoir l’utilité ». Pour un point de départ pourri, c’est un point de départ pourri. Dans la même veine, on ne peut que s’émerveiller de l’innocence des Space Wolves, qui ne réalisent qu’ils sont au cœur d’un vaisseau tyranide qu’au moment où ils débarquent dans la salle centrale et assistent au réveil d’une tripotée de guerriers. Allo nan mais allo quoi.

En dépit des quelques couleuvres que King tente de faire avaler au lecteur pour justifier les actions stupides de ses personnages, In the Belly of the Beast est une nouvelle honorable, dont l’ambiance d’horreur lovecraftienne détonne agréablement des productions classiques de la BL, où l’action omniprésente laisse peu de place au développement d’atmosphères oppressantes dignes de ce nom.

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The Affair of the Araby Exhibit (Buried Secrets) – G. Rennie [WFB] – #10 :

INTRIGUE :

La tranquille soirée de réflexion-chichon sur la théorie du Chaos1 de Zavant Konniger, érudit iconoclaste et détective privé de l’extrême, est interrompue par l’arrivée impromptue d’un émissaire du culte de Sigmar au domicile du Sage Enquêteur. Un cambriolage a eu lieu dans les archives de l’institution, et l’expertise de l’ancien prêtre est requise pour remonter la piste des ruffians, qui n’ont pas hésité à stranguler deux pauvres gardes qui ne faisaient que leur devoir pour faire main basse sur… quelque chose2. Sa propre demande d’accréditation à l’accès de la nouvelle exposition arabienne, où s’est déroulée ce regretable incident, lui ayant été refusée il y a quelques jours, Zavant saute sur l’occasion de mettre son nez, qu’il a prononcé et arqué, dans les réserves du culte, et part sur les lieux du crime en compagnie du factotum sigmarite et de son fidèle serviteur Halfling, Vido.

Sur place, les capacités d’observation et d’analyse du fin limier, doublées de sa prodigieuse culture générale, et de sa correspondance épistolaire avec le frère Wollen, jeune archiviste passionné de culture arabienne, et principal suspect du double meurtre du fait de sa disparition mystérieuse, permettent à Zavant d’identifier en quelques minutes les coupables de cet effroyable forfait : le culte d’Ishmail, des adorateurs de démons made in Arabie, contactés par le mal-avisé Wollen (retrouvé garroté au fond d’un sarcophage) pour la vente d’une des jarres démoniaques dans laquelle ont été scellés les sombres maîtres du culte, il y a fooooooort longtemps. Ce n’est pas la première transaction Le Bon Coin qui tourne mal, mais il convient désormais d’agir prestement pour empêcher les cultistes, qui ont profité des nombreux passages secrets reliant le district sigmarite d’Altdorf au reste de la cité, de profiter de leur bien mal acquis. Ayant repéré dans le registre fluvial, qu’il lit tous les matins avec son verre de lait de quinoa bio dynamique, l’arrivée d’une nef arabienne dans le port de la ville, c’est vers les quais que Konniger entraîne son monde et la cavalerie, espérant arraisonner les fuyards avant qu’ils n’aient pu se faire la malle.

Bien évidemment, les cultistes ne s’en laissent pas compter, et pendant que son patron les corrige bellement à grands coups de gaffe dans les gencives, Vido doit trouver un moyen de stopper le vaisseau avant qu’il ait passé les portes de la cité. Une heureuse réaction en chaîne (de cabestan) fera jeter l’ancre au navire avant la ligne d’arrivée, le ralentissant assez pour que les zélés zélotes de Sigmar y mettent le feu à grand renfort de flèches embrasées. Un plongeon dans les eaux saumâtres du Reik, et une quasi noyade dans le cas de Vido, plus tard, l’amphore maudite gît par le fond du fleuve, ce qui devrait la mettre à l’abri des attentions déplacées de cultistes chaotiques pendant quelques millénaires. Après tout, quelles sont les chances qu’une paire de Halflings aille pêcher le gros à cet endroit, le jour de l’anniversaire de celui qui s’appelle Smeagol ? Négligeable, très négligeable…

: Qui est moins funky que notre théorie du chaos. Sur l’axe Goldblum, on se rapproche plus de Seth Brundle que d’Ian Malcolm.
2 : Ces archives ne seraient pas dignes de ce nom si elles étaient correctement archivées, bien sûr.

AVIS :

Grand début du personnage de Zavant Konniger dans les pages d’Inferno !, et, par la même occasion, dans la GW-Fiction, ‘The Affair of the Araby Exhibit’ établit en une quinzaine de pages les prémisses de la série de Rennie, pastiche décomplexée du Sherlock Holmes de Conan Doyle à la sauce Warhammer, et mélange bien équilibré d’enquête policière et d’action frénétique, à haute teneur en fluff et comique de situation (ce qui n’empêche pas l’auteur d’insérer une bonne dose de grimdark à son propos de temps à autre, comme dans ‘The Scarlet Case’). La brieveté de la nouvelle ne permet pas à Gordon Rennie de développer un whodunit digne de ce nom, mais sa maîtrise de la narration et du rythme, provenant sant doute de ses compétences de scénariste de comics, compense largement cette absence de challenge intellectuel pour le lecteur (à vrai dire, la série des Konniger ne se positionnera jamais vraiment sur ce créneau). De la pulp fiction rondement écrite, et assez originale par rapport au reste des publications de la Black Library : en a-t-on jamais assez ?

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Sisters – N. Rutledge [NDA] – #10 :

INTRIGUE :

La dernière empoignade auquel son gang d’Eschers a participé s’est mal passé pour Blades : malgré la victoire sans conteste obtenue contre la patriarchie, les féministes du sous-monde ont perdu l’une des leurs, Katz, la sœur de leur bien-aimée leader.e. Et même pas aux mains de l’ennemi qui plus est, mais bêtement et salement, la jouvencelle ayant glissé sur une flaque d’huile et étant tombée dans une mare de boue toxique. Tout le monde n’étant pas Harley Queen, c’en fut fait de Katz, qui aurait pourtant pu et dû retomber sur ses patz. Monde cruel.

Après avoir tenté sans succès de noyer son chagrin dans l’alcool (impossible quand on ne tient pas ce dernier), Blades décide de partir en mission de nettoyage dans les environs d’Ashcliff, le village qu’elle et ses filles « protègent » des menaces extérieures. À la fois pour s’occuper l’esprit, mais également pour montrer à ses subordonnées qu’elle est toujours la patronne, et ne pas laisser croire que la place de Pacha Mama est à prendre. Au menu de ce soir (après le fameux ragoût de Licksy, le barman sénile mais gentil du seul rade d’Ashcliff), un Zombie égaré, comme il en vient de temps en temps dans le voisinage. Guidé par le scout Ratskin qui a repéré la créature décérébrée, Blades part en chasse avec son fidèle fusil à pompe et une paire de lunettes de vision nocturne.

En chemin, le duo s’arrête chez le prospecteur Jakey, fils de Jake, fils de Joe, dont un des oncles a eu la mauvaise idée de braver le couvre-feu sans attestation, et s’est fait salement esquinter par le Zombie pour sa peine. Bien que Ma Honka, sa sœur, semble déterminée à soigner le blessé, les règles sont les règles et Blades se fait un devoir de les appliquer et de planter un stylet dans le cœur de l’inconscient inconscient. Le respect des gestes barrières, on connaît la chanson. Ceci fait, l’Escher de garde emboîte le pas à son guide indigène, qui l’emmène dans les galeries de la mine où le mort vivant s’est enterré, et qui se trouve être l’endroit où Blades et Katz ont passé une bonne partie de leur enfance à chasser l’araignée géante et le rat mutant. Que de souvenirs…

Début spoiler…Comme vous vous en doutez si vous savez comment une intrigue de nouvelle fonctionne, le Zombie en question se trouve être Katz. #SansBlague Il n’y a que Blades que cela surprend, et choque fortement, à tel point que c’est au Ratskin que revient la tâche de mettre fin aux souffrances errances de la revenant d’un tir de mousquet bien placé. Cette bonne action ne sera cependant pas récompensée, Blades ne pouvant supporter la sale blague qu’elle croit que le Ratskin lui a fait (il savait que c’était Katz et qu’elles étaient sœurs, mais n’a rien dit), ni prendre le risque qu’il révèle à tout le monde que Blades a probablement tué un innocent par excès de zèle, Katz n’étant techniquement pas un Zombie, mais quelque chose comme The Toxic Avenger.e (et donc non contagieuse, en tout cas pas de cette façon). Un tir de fusil à pompe a l’arrière du crâne règle l’affaire de façon définitive à défaut d’être élégante, laissant enfin toute latitude à Blades pour commencer/terminer son deuil. La morale pourrait être quelque chose comme ‘Souvent femme (à fusil) varie, bien fol qui s’y fie (bouffi)’. En tout cas, c’est empowering.Fin spoiler

AVIS :

Neil Rutledge livre une histoire qui lorgne franchement du côté du Western (une inspiration assez évidente de Necromunda), et qui se laisse lire sans problème malgré le manque total de surprise au niveau de l’identité du Zombie. Cette déception est toutefois compensée par le soin qu’a pris l’auteur de soigner l’authenticité de son récit, par exemple en incluant du jargon local (worms pour les habitants d’Ashcliff, scragger pour être tué…), et par la conclusion glorieusement immorale (c’est le véritable héros de l’histoire qui se fait descendre par derrière et pour couvrir la bévue de sa partenaire), et donc tout à fait adaptée, de cette nouvelle sororitaire (?).

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Ulric’s Children – W. King [WFB] – #11 :

INTRIGUE :

WFB_Ulric's ChildrenUne nouvelle fois égarés dans une impénétrable forêt des moins accueillantes (décidément, c’est une constante), Gotrek et Felix, backpackers de l’extrême1, doivent braver la neige, le froid et la perspective d’une meute de loups affamés lorsque le rideau se lève sur Ulric’s Children. Quant aux fameux enfants d’Ulric qui ont donné leur nom à cette nouvelle, nous apprenons bientôt qu’il s’agit du nom populaire des loups-garous, considérés comme les descendants des relations tumultueuses du Dieu avec quelques accortes mortelles dans des temps très anciens. Figures légendaires du bestiaire impérial, leur existence paraît soudainement bien plus probable à Felix alors qu’il s’échine dans les congères à la suite du Tueur, des vocalises lupines plein les oreilles. Le grand blond à la cape rouge n’a toutefois guère le temps de ressasser son habituelle litanie misérabiliste que Gotrek, dont l’ouïe est aussi fine que son animal totem (l’acraga coa2), part en sprint dans les sous-bois en direction de la clameur d’une bataille toute proche… et disparaît corps et bien de notre histoire, tel un vulgaire PNJ de Skyrim, laissant Felix seul aux commandes de cette dernière.

Arrivé sur les lieux de l’esclandre, Felix se retrouve confronté à la méfiante hostilité d’une petite troupe de soldats, venant de repousser non sans mal les assauts d’une harde lupine. Prudence étant mère de sûreté, les survivants décident de faire prisonnier le bon samaritain, qui se retrouve menotté comme un vulgaire gilet jaune à l’arrière de la carriole des routiers – pas vraiment sympas pour le coup – où il fait la connaissance d’une autre prisonnière du comte Hrothgar, une dénommée Katarina dont le calme glacial et les remarques sibyllines semblent indiquer une inquiétante proximité avec la meute aux trousses de la soldatesque impériale. Pour ne rien arranger, Felix attire l’attention du sorcier de compagnie de son ravisseur, un certain Voorman dont ni l’haleine fétide, ni l’intérêt déplacé pour sa personne, ne sont au goût de notre héros, qui ne peut que maudire les oreilles aiguisées et les courtes jambes de son compagnon d’infortune.

Rendue quelques heures plus tard au pavillon de chasse de Hrothgar, la troupe investit les lieux et jette Felix et sa camarade dans une geôle sombre, froide mais pas vraiment bien fermée, ce qui se révélera assez utile par la suite, comme nous allons le voir. La visite de Voorman permet à Blondin d’en apprendre un peu plus sur sa situation, qui se révèle être assez précaire : le comte et son thaumaturge s’avèrent être des cultistes de Tzeentch, fomentant quelque obscur et indubitablement dangereux dessein, dont la réalisation nécessite l’implication du père de Katarina, loup-garou au pedigree impeccable. Ergo la capture de la gente demoiselle, ergo les attaques répétées de la part de la gent lupine que Hrothgar (du Nord) et ses sbires ont subi jusqu’ici. Si Felix ne souhaite pas ingérer dans les affaires des uns et des autres, il ne lui faut pas longtemps pour déterminer qu’il a davantage intérêt à coopérer avec Katarina que de faire cavalier seul. Profitant de l’étourderie manifeste de Voorman, qui repart sans verrouiller la porte, et de la confusion générale générée par l’intrusion de la meute dans l’enceinte fortifiée, la faute, une fois encore, à un verrou oublié, les gardés à vue se font la malle et se séparent rapidement.

Pendant que Katarina va faire ami ami avec les quadrupèdes, Felix erre dans les couloirs, et finit par surprendre une conversation entre Hrothgar et Voorman venant confirmer ses sombres pressentiments sur le dessein poursuivi par les deux crapules. Le sorcier parti euthanasier quelques clebards à grand coup de boules de feu, Felix sort de sa cachette, assomme Hrothgar et lui subtilise la dague magique avec laquelle le faquin avait menacé le mage quelques instants auparavant. Tout est alors prêt pour que le dénouement tant attendu (ou pas) prenne place. Un autre coup de chance (décidément, Felix n’a pas volé son nom) conduit le Baudelaire impérial dans une pièce où Voorman se confronte au grand méchant loup, que l’on devine être le père aimant de Katarina. Le triomphe du lycanthrope, qui décapite le sorcier d’un revers de patte, est toutefois de courte durée, l’esprit vengeur de l’arcaniste venant posséder son assassin quelques secondes après la décollation du premier par le second. C’était en effet l’objectif poursuivi par Voorman, qui souhaitait faire siennes l’immortalité et l’invulnérabilité supposées des loups-garous, et ainsi attendre pépouze la fin des temps. Bien entendu, sa rencontre avec Felix, et surtout, sa dague enchantée dérobée à Hrothgar, viendra mettre un terme définitif aux rêves de grandeur de notre ami le furry. Il reste alors 10 lignes à King pour terminer son histoire, ce qu’il fait en faisant arriver Gotrek (enfin !) et Katarina, la seconde prisonnière du premier. Quel sort le duo réservera-t-il à l’orpheline, pas vraiment innocente certes, mais qui ne leur a rien fait de mal à proprement parler ? Eh bien, on ne le saura pas (dans cette nouvelle en tout cas). Concluons sur ce constat, toujours d’actualité, que lorsqu’il y a un flou, c’est qu’il y a un loup. Et inversement.

1 : Dommage que la Fin des Temps ait pris place avant que le projet ‘J’irai occire chez vous’ se soit concrétisé. Je suis sûr que ça aurait fait un carton d’audience.
2 : D’où croyez-vous que la teinte orange de sa crète venait, enfin ? Et, oui, les mites font partie des espèces dotées de l’audition la plus performante du règne animal.

AVIS :

Il est assez dommage que Ulric’s Children laisse le lecteur sur sa faim (de loup, donc), car le récit brossé par King avait un potentiel certain, que la brieveté de l’histoire empêche de s’exprimer de manière aboutie. Je suis persuadé qu’une dizaine de pages supplémentaires après que Felix et Katarina soient sortis de leur cachot aurait pu permettre à cette nouvelle de se terminer de façon plus convaincante que l’enchaînement de non-péripéties qui mène au dénouement lapidaire et lacunaire qui est le sien. Pour tout dire, la dernière demi-page d’Ulric’s Children mérite la lecture afin de prendre la pleine mesure du caractère comiquement abrupt de sa conclusion. Il y avait pourtant beaucoup de pistes intéressantes à explorer avant de rayer la ligne « Tueur de Loup » de la bucket slaying list du petit rouquin teigneux, et notamment le personnage de Katarina, sorte d’Ulrika1 avant l’heure que King place au cœur de son récit avant de laisser totalement tomber. Un vrai loupé, si on me permet l’usage de cette tournure.

Si le choix de King de se passer de son personnage tutélaire pour cette soumission peut surprendre le lecteur, le pari aurait pu s’avérer payant si l’auteur avait permis à Herr Jaeger de s’illustrer de façon convaincante et spécifique : si Gotrek est une machine de guerre invincible, qui résout tous les problèmes auquel il est confronté à coup de hache, Felix aurait pu compenser par une approche un peu plus cérébrale et astucieuse de la situation. Ce n’est pas le cas ici, notre héros enchaînant les coups de chance critiques sans véritable réflexion de sa part. En cela, la comparaison avec l’élève Long n’est clairement pas à l’avantage du maître King, le premier faisant preuve d’une véritable aisance scénaristique, quand le second a davantage tendance à passer en maniaque automatique, les prouesses martiales du Nain disgracié venant meubler les intrigues simplistes concoctées par son auteur. Si la passation n’était pas encore proche au moment de la publication de Ulric’s Children (Mars 1999, soit 4 ans avant la sortie de Tueur de Géant, le dernier roman de King dans la série – à ce jour –), il est possible qu’une certaine lassitude ait déjà été à l’œuvre chez King à ce moment, ce qui expliquerait le caractère inachevé de cette nouvelle. Quoi qu’il en soit, cette dernière ne fait définitivement pas partie des bonnes pages de la saga de Gotrek et Felix, et sa lecture n’est indispensable qu’aux fans transis de la série.

1 : C’est-à-dire la jeune fille frappée d’une malédiction passible de mort dans les sociétés civilisées du Vieux Monde (la lycanthropie pour l’une, le vampirisme pour l’autre), mais dont les motivations ne sont pas intrinsèquement mauvaises, et qui demande juste à ce qu’on la laisse tranquille.

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Badlands Skelter’s Downhive Monster Show – M. Farrer [NDA] – #11 :

INTRIGUE :

NDA_Badlands Skelter's Downhive Monster ShowSkelter et sa bande de joyeux saltimbanques, acrobates et spécimens de foire voyagent de ville en ville dans la banlieue des ruches necromundiennes, garant leurs roulottes et dressant leur barnum sur les grand-places pour le bonheur des petits et des grands. De passage à Fever’s Break, la troupe ne va pas tarder à découvrir que cette charmante bourgade compte une forte proportion de résidents très, mais alors très conservateurs, que l’arrivée de baladins bariolés, basanés et écailleux (il y a un Scaly dans le lot) n’enchante pas le moins du monde. Et bien que la première confrontation avec l’éructant Jago, chef de la milice Cawdor locale, se solde par une victoire sans appel des visiteurs, grâce aux talents de pistolero de Skelter et à la charge de la brigade légère (des sump toads), ce n’est évidemment que partie remise pour l’affrontement entre carnavaleux et porteurs de masque. Une rivalité haute en couleurs et spectaculaire, s’il en est.

L’acte deux de cette bisbille se joue devant le tribunal local, quelques heures plus tard : le procédurier Jago a fait accuser les forains de ne pas respecter les diverses lois en vigueur à Necromunda en ce qui concerne le transport d’espèces menacées et menaçantes, le paiement des heures supplémentaires d’intermittents du spectacle, ou encore le contrôle de l’inertie psychique des sujets impériaux. Si le timing du dépôt de ces plaintes contraint Skelter à rembourser les billets de sa première représentation (un sort pire que la mort pour notre honnête bateleur), pour cause d’annulation de dernière minute, notre héros dispose bien de tous les permis et licenses nécessaires pour exercer sa noble et utile profession, ce qui rabat le clapet de son détracteur, dont l’éloquence ampoulée ne sauve pas du ridicule. Ce n’est toutefois pas la fin des ennuis pour les artistes persécutés, qui devront faire face à une attaque en bonne et due forme de la part du gang Cawdor au grand complet pendant leur représentation suivante, une bonne partie de leur public se révélant être des cultistes en civils n’attendant que le signal de leur chef pour mettre à bas les masques. Ou le contraire.

Dans la confusion qui s’en suit, nous emboîtons le pas à quelques personnages de la troupe (Skelter, le chasseur de primes retraité Kamusz, la dresseuse Tara, le Scaly Issig) alors qu’ils corrigent bellement les zélotes, plus doués pour chanter à la messe le dimanche que pour purger un cirque au lance-flamme. Pour des raisons qui m’ont échappé, les Cawdors semblent en avoir particulièrement contre les (nombreux) enfants de la troupe, ce qui n’est pas très gentil pour commencer, et met logiquement nos héros en rogne. Acculé à une roulotte avec le fils de Skelter comme otage, Jago rate sa sortie comme il a à peu près tout raté avant cela, et finit projeté dans l’enclos à ripper-jacks avec des conséquences aussi sanglantes que définitives, sans avoir pu mener à bien ses sombres desseins infanticides. Tout est donc bien qui finit bien, et la petite bande peut quitter sans regret Fever’s Break pour sa prochaine étape, qu’on leur souhaite moins agitée que celle-ci.

AVIS :

Farrer avait les cartes en main et le talent nécessaire pour faire de cette nouvelle au titre artistiquement alambiqué1 un petit OVNI drôlatique dans l’univers autrement plus violent et bas du front de Necromunda, mais force est de constater que la sauce n’a pas superbement pris dans ce ‘Badlands…’, et j’en suis le premier désolé. Si cette nouvelle a quelques moments de grâce comique, comme le trilogue de sourds entre Skelter, Kamusz et Tara dans l’antichambre du juge de Fever’s Break, elle semble hésiter entre un traitement au premier ou second degré de son sujet, avant de se terminer sur une scène d’action aux enjeux confus (pourquoi les Cawdors en ont-ils spécifiquement après la marmaille ?) et à l’exécution sans saveur. Pour les amateurs de GW-fiction loufoque mettant en vedette une troupe de baladins, leur ménagerie à la limite de la légalité et leurs déboires avec le bon peuple de la ville où ils ont planté leurs tentes, on conseillera donc l’ancien mais plus abouti ‘Pulg’s Grand Carnival’, preuve incontestable que la production littéraire commanditée par Games Workshop est d’une richesse insoupçonnée.

1 : En même temps, venant de l’auteur de ‘The Headstone and the Hammerstone Kings’, ce n’est pas très étonnant. Bon, il a écrit ‘Faces’ aussi, c’est donc qu’il sait faire simple quand il a envie.

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The Blessed Ones – R. Kellock [WFB] – #11 :

INTRIGUE :

Truand minable, Jurgen Kuhnslieb se voit forcer d’accepter une mission un peu particulière afin de pouvoir rembourser les nombreuses dettes de jeu qu’il a contractées. Chargé par un jeune noble décadent de voler un tableau dont son propriétaire ne souhaite pas se séparer, Jurgen va rapidement se rendre compte qu’il s’est empêtré dans une affaire aux proportions insoupçonnées, et que ses employeurs ne sont pas du genre à laisser un cambrioleur à la petite semaine se mettre en travers de leur chemin.

AVIS :

The Blessed Ones aurait sans doute gagné à être développé en « moyen format » (50 – 100 pages), plutôt que de se retrouver confiné à la vingtaine de pages de sa version définitive. La banalité de l’intrigue proposée par Rani Kellock, cousue de fil blanc et à la conclusion courue d’avance dès les premières lignes1, aurait pu ainsi être compensée par la mise en place d’une ambiance réellement oppressante, soulignant la traque impitoyable dont Jurgen fait l’objet de la part de ses clients. L’instillation d’une atmosphère de roman noir ne pouvant se faire que sur la durée, la relative brièveté de la nouvelle de Kellock ne lui a pas permis de parvenir à un résultat concluant, ce qui s’avère au final être assez dommageable.

1 : C’est bien simple, si un riche notable engage une petite frappe pour récupérer un artefact d’un genre un peu spécial, il y a environ 143,87% de chances que le commanditaire se révèle être un cultiste du Chaos/nécromancien/membre d’une organisation secrète.

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Ancient Lances – A. Hammond [40K] – #11 :

INTRIGUE :

40K_Ancient LancesDe retour sur son Attila natale après des années de bons et loyaux services, le commandeur Al’Kahan découvre avec stupeur que son monde et ses compatriotes se sont détournés de leur mode de vie ancestral, et se font exploiter sans vergogne par les marchands de l’Imperium. Outré par cette infamie, il rejoint ce qu’il reste de sa tribu, et l’entraine dans une vendetta sanglante contre des voisins indélicats, ayant fait leurs les pâturages et les troupeaux des clans environnants. La victoire acquise, il repart aussi sec dans le vaisseau par lequel il est arrivé, ayant visiblement décidé de passer sa retraite ailleurs que de ce bled paumé. Merde, ils n’ont même pas la wifi.

AVIS :

SAncient Lances s’avère plus consistant qu’Emperor’s Grace (dont le personnage principal, le Commissaire Streck, fait deux brèves apparitions en début et fin de nouvelle, sans qu’on comprenne trop ce qu’il vient faire dans cette histoire1), la seconde publication d’Alex Hammond comporte elle aussi son lot d’imperfections. On notera tout d’abord que l’auteur orthographie « Atilla » la planète d’Al’Kahan, ce qui laisse planer un gros doute aussi bien sur sa maitrise du background de la Garde Impériale que sur son niveau de culture générale. Deuxièmement, la meilleure progression narrative d’Ancient Lances par rapport à Emperor’s Grace (comprendre que la première se termine de manière un peu plus compréhensible que la seconde) n’empêche pas Hammond de perdre le lecteur par endroits, la faute à une absence de mise en exergue de points importants pour la compréhension de son propos.

Par exemple, lorsqu’Al’Kahan sort du vaisseau spatial qui l’a ramené sur Attila au début de la nouvelle, il se fait contrôler par deux Gardes Impériaux d’un autre régiment, qui lui demandent de présenter ses papiers. Notre héros s’exécute… et leur casse la gueule. Violence gratuite d’un vétéran psychotique ? Pas exactement, les victimes d’Al’Kahan appartenant au XIIIème régiment de Prakash, sauvé de la destruction quelques pages plus tôt par le sacrifice de la cavalerie Attilane. On peut donc comprendre que le vieux commandeur n’ait pas apprécié l’intervention des Prakashiens, et le leur ai fait savoir de manière appuyée. Seulement voilà, Hammond ne facilite pas ce travail de déduction, puisqu’il ne prend pas la peine de rappeler de manière explicite la cause de la rancune d’Al’Kahan envers ces deux pauvres bidasses, (trop) confiant qu’il est dans la capacité du lecteur à faire le lien entre les trois micro-passages où est mentionné le XIIIème Prakashien (dispersés sur neuf pages). Faut pas baisser la garde.

J’ai également eu du mal à accrocher au personnage d’Al’Kahan, vétéran couturé aux motivations aussi nébuleuses que son sens tactique2. Comme le fait remarquer le méchant de l’histoire juste avant de se faire trucider par le Zapata des grandes steppes, notre héros a beau gueuler contre les ravages de la galaxisation (c’est le même principe que la mondialisation, mais à l’échelle supérieure) sur Attila et se faire le défenseur des anciennes traditions de la planète, il ne se gêne pas pour utiliser l’arsenal de la Garde Impériale, beaucoup plus avancé que les armes de fer et de corne utilisées par ses compatriotes, afin de faire triompher sa cause. Bref, faîtes ce que je dis, mais ne regardez pas comment je le fais. On notera aussi qu’Al’kahan se barre juste après la victoire de son camp (abandonnant une deuxième fois sa femme et son – second – mari, mutilé par ses bons soins au passage), très probablement pour prendre possession de la province d’un autre monde lui ayant été promise en récompense de ses impeccables états de service. C’est ce qu’on appelle avoir de la suite dans les idées.

Toutefois, Ancient Lances est toutefois plus sympathique que pénible, en grande partie grâce aux détails de fluff apportés par un Hammond assez crédible dans son propos. Cette nouvelle a également le mérite de traiter des frictions pouvant naître de la rencontre de plusieurs cultures d’un niveau technologique très différent, sujet intéressant à aborder dans le cadre d’un empire galactique d’un million de mondes, où cette question doit évidemment se poser de manière récurrente sur pas mal de planètes. En conclusion, si vous ne deviez lire qu’un seul texte de Hammond, c’est celui-là que je vous recommande, et de loin.

1Ancient Lances se déroule un peu avant Emperor’s Grace, mais les deux nouvelles n’ont d’autre point commun que la présence de Streck dans l’un et l’autre. Je n’ai d’ailleurs pas bien compris pourquoi Ancient Lances figure après The Emperor’s Grace dans Into the Maelstrom, soit à l’inverse de l’ordre chronologique. Peut-être Hammond avait-il pour projet de développer une série dont Sterck serait le héros ? Malheureusement pour lui, Ibram Gaunt (et plus tard Ciaphas Cain) avait déjà pris la place du Commissaire héroïque au sein de la Black Library.
2« Salut tout le monde, c’est Al’Kahan ! Ça fait 30 ans que je vous ai quitté, mais maintenant que je suis revenu, vous allez tous faire exactement ce que je dis. »
« Et pourquoi ? »
« Parce que sinon, je vais devenir très méchant. Et comme presque tous les hommes en âge de se battre sont morts, je ne vois pas comment vous pourriez m’empêcher de devenir le nouveau chef de tribu. D’ailleurs, voilà la femme que j’ai épousée juste avant de partir me battre pour l’Empereur (je suis un vrai gentleman). Elle n’a pas l’air très contente de me voir, mais je vais lui offrir la main tranchée de son deuxième mari, ça lui fera plaisir. »
« Bon ok. On n’a pas le choix de toute façon. Mais on te prévient, on s’est fait volé tout notre cheptel par le clan d’à côté, dont le chef a construit une forteresse imprenable depuis laquelle il pille les terres alentours en toute impunité. »
« Pas de problème, j’en fais mon affaire. En ma qualité de soldat vétéran, je vous propose ce plan infaillible : nous allons charger les murs de son bastion à cheval, comme on le faisait à mon époque ! »
« C’est complètement con. »
« Et toi, à la prochaine remarque désobligeante, t’es complètement mort. Nan, mais en fait, je vous ai ramené quelques lances à têtes explosives, ça devrait faire de gros trous dans les murs, qui nous permettront de passer. »
« Ok, mais comment on arrive à s’approcher assez près pour utiliser ces armes fabuleuses ? La forteresse est entourée de pieux en acier, spécialement conçus pour briser une charge de cavalerie. »
« C’est pas un problème, j’ai également un fusil plasma, qui me permettra de détruire ces obstacles pendant notre glorieuse chevauchée ! »
« Heu, tu veux dire avant notre glorieuse chevauchée, non ? Genre on envoie un éclaireur préparer le terrain pour éviter les mauvaise surprises. »
« Pas du tout, on charge comme des débiles un ennemi bien retranché et mieux armé que nous, en faisant une confiance aveugle à mes talents de tireur. C’est non négociable. »
« C’est complètement c- »

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Daemonblood – B. Counter [40K] – #12 :

INTRIGUE :

DaemonbloodSur la planète (forcément bleeue) de Saafir, Papy Nurgle est sur le point de rafler le vote populaire, au grand dam des défenseurs impériaux dépéchés par Pépé (l’autre) pour passer la serpilière. Isolés par les aléas de la guerre, la Sœur de Bataille Aescarion et le Sergent Ultramarines Castus se retrouvent dans les souterrains de la capitale planétaire (éponyme), où se trouve s’étend une station d’épuration possédée par le Warp, forme physique imposante du Prince Démon Parmenides le Vil. Comme il est difficile de passer par l’épée, ou, dans le cas de cette brutale d’Aescarion par la hache énergétique, une flaque de morve et d’excréments couvrant plusieurs hectares, M. et Mme Meilleurs de l’Empereur sont bien embêtés. Profitant de leur désarroi, le vil Parmenides lave/salit le cerveau du Space Marine avec ses confidences crasseuses sur l’état de la galaxie, transformant le pauvre Castus en séide chaotique. Immunisée à cet insidieux virus par sa foi dévorante et absolue, Aescarion n’est cependant pas de taille à achever les souffrances et les errances métaphysiques de son compagnon, et ne doit son salut qu’à la robustesse de son jetpack, qui la ramène à la surface avant qu’elle ne se retrouve féminicidée par le renégat.

On n’échappe cependant pas aussi facilement à cette force puissante qu’est la Destinée au 41ème millénaire, et les routes d’Aescarion et de Castus se croiseront à deux nouvelles reprises pendant les décennies suivantes. La première fois lors de la purge d’un Space Hulk squaté par les suivants de Parmenides, dont Castus est devenu le porte-parole officiel. Castoche aurait pu se faire trouer les pores par un peloton de Sistas judicieusement gardé en réserve par Aescarion, n’eut été la compétence « corps de mouches » développée par le M. Impropre de Saafir, et qui lui permet de tirer sa révérence sans dommage. La seconde, et dernière fois, se déroule sur le vaisseau du Seigneur du Chaos, le Defixio1, et avec la bénédiction de l’Inquisition, qui souhaitait contenir l’expansion cancéreuse de l’empire spatial de Parmenides en envoyant un petit Exterminatus bien senti sur Saafir. Il fallait bien ça à la Canonnesse de l’Ordre du Calice d’Ebène, auquel Aescarion appartient, pour autoriser l’impulsive et revancharde vétérante à se mesurer une nouvelle fois avec sa Némésis. Les deux précédentes tentatives ayant eu un coût élevé en termes de vies de Sœurs de Bataille aguerries, on comprend sa réticence à permettre à sa sous-fifre de sortir à nouveau le karscher. La connaissance intime de notre héroïne de la mentalité et des forces et faiblesses de Castus en faisait toutefois la meilleure candidate pour mener l’expédition impériale jusqu’à bonne orbite, en dépit de la défense acharnée orchestrée par le fidèle Castus du pré de la décharge carrée de son seigneur et maître.

Ayant soigneusement préparé son combat en oignant sa hache de gel Harpic, Aescarion parvient assez facilement à vaincre son adversaire, mais ne l’achève pas immédiatement. Elle souhaite en effet le faire revenir du côté lumineux, et aseptisé, de la force avant qu’il ne soit trop tard, et parvient (assez facilement *2) à convaincre Castus de retourner sa veste énergétique. Cachant une balise de visée, ou quelque chose comme ça, entre deux bourrelets du champion déchu, elle envoie son ancien camarade apporter ses salutations les plus distinguées à Parmenides dans les profondeurs de Saafir, permettant à l’ex Ultramarine de partir avec les mains sales, certes, mais une ardoise propre2. C’est ce qu’on appelle passer l’éponge, grimdark style.

1 : Je précise car Counter a écrit une autre nouvelle portant ce nom, pour ceux que ça intéresse.
2 : Le fait que Parmenides ne se souvienne même pas du nom de son champion après toutes ces décennies de collaboration à également dû convaincre ce dernier d’envoyer tout balader.

AVIS :

Bien des années ont passé et bien des textes ont été écrits depuis, mais il faut se rappeler que c’est avec ‘Daemonblood’ qu’un tout jeune Ben Counter a fait ses débuts pour la Black Library, dans un numéro d’Inferno ! Si je ne placerais pas cette petite nouvelle parmi les meilleures soumissions de cet auteur, capable du moins convaincant1 comme du meilleur, cette première tentative a plutôt bien vieillie (notamment quand on la compare à certaines nouvelles publiées au début des années 2000), et s’avère assez solide dans sa réalisation, même si très peu originale dans son propos. Les milliards de Space Marinades qui nous ont été servies par la BL au cours des dernières décennies y sont sûrement pour quelque chose…

Ici, on peut tout de même mettre au crédit de Counter une conclusion un peu plus originale que le traditionnel « le-méchant-chaoteux-meurt-sur-un-gros-malentendu-avant-d’avoir-pu-mettre-son-plan-presque-infaillible-à-exécution », avec l’exploration d’un thème assez rare dans l’univers grimdark de 40K : la rédemption.  Cela compense largement à mes yeux les points techniques sur lesquels on pourrait venir lui chercher des noises, comme l’apparente facilité avec laquelle une « simple » Sœur de Bataille vétérante arrive à tailler des croupières à un Seigneur de la Peste. On apprendra d’ailleurs par la suite que la bonne Aescarion est une véritable héroïne d’action, ayant plus d’un Space Marine à son tableau de chasse, ce qui pourrait être perçu comme du féminisme de GW-Fiction avant-gardiste de la part de Ben Counter. Quel visionnaire alors…

1 : Vus les loustics qui ont bossé pour la BL, je ne peux pas décemment utiliser le qualificatif de pire pour la prose de Ben Counter. Il y a bien plus mauvais que lui.

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Deliverance – G. Thorpe [40K] – #12 :

INTRIGUE :

Sur la planète Georgia, ou un nom équivalent étant donné que sa « capitale » se nomme Deliverance et que ses habitants sont des rednecks tout ce qu’il y a de plus primitif, le hagard Araga, chasseur-cueilleur (de champignons hallucinogènes) de son état voit son trip roots tourner au psychédélique morbide lorsqu’une spore mycétique contenant un Lictor sautillant s’écrase à quelque distance de sa position. Trop stone pour faire autre chose que contempler le Xenos s’approcher en faisant des claquettes et agitant son chapeau haut de forme (il n’y a pas à dire, c’est de la bonne), notre brave McGuffin est sauvé d’une descente brutale et d’une mort certaine par l’arrivée à point nommé d’un peloton de Last Chancers, mené par notre ami et confident Kage, qui fait sa fête à l’immigrant clandestin avec une brutale efficacité qui aurait arraché des larmes de joie à Trump en personne.

Cette menue péripétie est le point de départ du récit de la défense de Deliverance par une force impériale regroupant, en plus des Légionnaires Pénaux de choc de l’impayable Colonel Schaeffer, une milice de braves indigènes et un contingent de Sœurs de Bataille, contre les hordes chitineuses du Grand Dévoreur. L’occasion pour Thorpe de confronter ses petits chouchous à une galerie de créatures sanguinaires et décérébrées, aux noms aussi étranges que Franx, Letts, Feonix, Truko et Kruzo, pour ne citer que quelques-unes de ces immondes formes de vie. Bref, la vie d’un organisme Tyranide n’est pas rose tous les jours, à supposer qu’il distingue la couleur. De son côté, le Lieutenant Kage narre avec son style inimitable la défense inspirée du périmètre impérial qu’il assure avec ses hommes. Et lui aussi est bon pour un passage en revue du bestiaire opposé, aux Gargouilles succédant des Termagaunts, Guerriers et même, Hormagaunt Ormahgard un petit Carnifex plutôt farouche. Il laisse toutefois le soin à son increvable autant qu’inflexible supérieur le soin de se farcir le Prince Tyranide qui mène l’assaut, ce que Schaeffer fait avec professionnalisme1 (et hors champ, ce qui est encore plus rapide). Bénéficiant de son armure en scenarium, même s’il finit la nouvelle à l’infirmerie, tout l’enjeu pour Kage est de conserver intacte la motivation fluctuante de sa mauvaise troupe, ce qu’il fait en alternant argumentaire pessimiste2, discours inspirant et mensonges éhontés, lorsqu’il aperçoit l’arrivée de transports de gardes impériaux et comprend que cette bonne nouvelle risque d’entrainer un coupable relâchement chez ses Légionnaires. Décidément, même au 41ème millénaire, le management reste un art délicat.

1 : Quel dommage qu’il n’ait pas été là sur Macragge pour baby-sitter cet empoté de Calgar contre le Maître des Essaims. Avec lui, ça n’aurait pas traîné.
2 : Top Ten Reasons of NOT Running Away From A Fight Against Tyranids (Number 3 Will SHOCK You ! – normal c’est un Trygon – ).

AVIS :

La défense d’un bastion quelconque contre une attaque de Tyranides est devenue au fil des années l’un des scénarios les plus communs dans le catalogue de la Black Library, et même si Deliverance1 peut se targuer d’être l’un des premiers textes couvrant le sujet publié par la BL, il y a fort à parier que le lecteur soit déjà familier de ce type de propos. L’approche méthodique que Thorpe utilise pour mener sa barque, en passant d’un type de bestiole hargneuse à l’autre et présentant pour chacune ses principales caractéristiques dans la foulée, à défaut d’être follement originale, remplit convenablement sa mission. La gouaille habituelle de Kage permet de faire passer plus facilement la pilule pour les lecteurs les plus blasés, et les insinuations du caractère paranormal de Schaeffer, qui donne également de sa personne lors des combats (chose assez rarement couverte dans les récits Last Chancers, généralement centrés sur Kage et les pauvres malheureux qui lui servent de réservoir à points de vie), apportent un supplément d’intérêt à Deliverance, même si cette piste intéressante n’est qu’à peine effleurée par Thorpe. Pour le reste, cette nouvelle est tout ce que l’on est en droit d’attendre de la part d’un affrontement entre la Garde Impériale et les cafards de l’espace, avec un body count des plus respectables et de l’héroïsme cheap à foison.

1 : On peut voir dans ce choix de nom un présage de la future relation particulière entretenue par Gav Thorpe et Corax. Nous étions au moment de la publication initiale de cette nouvelle huit ans avant le début de l’Hérésie d’Horus.

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The Doorway Between – R. Davidson [WFB] – #12 :

INTRIGUE :

WFB_The Doorway BetweenFrantz Heidel, chasseur de sorcières agoraphobe, est engagé par le baron von Kleist pour retrouver le pendentif qui lui a été dérobé par une bande de mutants sur la route de Bechafen. Escorté par un pisteur à tête de fouine du nom de Karl Sassen, notre héros se lance à la poursuite des voleurs dans l’arrière-pays de la capitale de l’Ostermark, sans se douter que son employeur ne lui pas dit toute la vérité au sujet de l’artefact qu’il doit récupérer.

AVIS :

The Doorway Between est un récit très classique (la quête d’un objet magique qui se révèle être maléfique), conduit d’une manière tout aussi classique par Rjurik Davidson. Sans être mauvaise, cette nouvelle est toutefois loin d’être mémorable, et ne mérite au mieux qu’une lecture rapide, tant il est possible de trouver mieux ailleurs dans le catalogue de la Black Library (pour les amateurs de chasseurs de sorcières, la trilogie Mathias Thulmann de C.L. Werner est à mon goût bien supérieure).

Lorgnant sur la fin vers la buddy story, lorsque Heidel et son rival Immanuel Mendelsohn sont contraints de faire équipe pour contrecarrer les plans de leur ennemi commun, The Doorway Between aurait sans doute gagné en intérêt si Davidson s’était davantage écarté des chemins battus de l’heroic-fantasy.

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Et voilà qui conclut ce voyage dans la memory lane infernale, plus de vingt ans après la publication initiale de ces nouvelles de l’An II d’Inferno!. À l’heure où le futur de cette revue devenue recueil est plus incertain que jamais1, revisiter ce glorieux et fantasque passé ne peut pas faire de mal. Rendez-vous prochainement ici-même pour le troisième volet de cette saga au long cours…

1 : Amazon nous informe (au moment où cette revue est postée) qu’un recueil thématique ‘Inferno! presents The Emperor’s Finest’, similaire à celui proposé l’année dernière (‘Inferno! presents The Inquisition’) sortira en Novembre 2022. Après ça, on ne peut plus qu’espérer…

INFERNABULUM! – HAMMERS & SLAYERS

Bonjour à tous et bienvenue dans ce cinquième numéro d’Infernabulum!, la revue des nouvelles les plus obscures jamais publiées par la Black Library dans les pages de la première version du magazine Inferno! Les plus observateurs parmi vous auront sans doute noté que l’existence même de ce nouveau numéro s’inscrit en faux de la conclusion du précédent (chroniqué ici), qui avait traité des derniers courts formats « introuvables » de cette auguste publication. Ce format de chronique m’a toutefois tellement plu que j’ai décidé de poursuivre un peu l’expérience, en incluant cette fois-ci des nouvelles certes un peu plus accessibles, mais pas non plus à la portée du premier courte-barbe venu, et en essayant de donner un thème à chaque nouveau numéro. Tout un programme.

Infernabulum! - Slayer &amp; Hammers

Ce cinquième volet sera ainsi consacré à deux franchises que l’on peut qualifier comme historiques de la BL, du fait de leur âge respectable. Leurs destinées ont toutefois été radicalement différentes: alors qu’on n’a guère besoin de présenter Gotrek (accompagné de Felix à l’époque), qui poursuit encore aujourd’hui ses massacres littéraux et littéraires après avoir été téléporté du Monde qui Fut aux Royaumes Mortels, il y a fort à parier que les lecteurs familiers avec les Chevaliers du Loup Blanc de Dan Abnett et du taciturne prêtre de Morr/détective privé Dieter Brossmann (James Wallis) soient beaucoup moins nombreux. Il faut dire que les uns comme l’autre n’ont pas connu de nouvelles aventures depuis la publication du roman choral ‘Hammers of Ulric‘ en 2000, ce qui fait tout de même un petit bout de temps. 

L’occasion est donc rêvée pour remettre ces héros oubliés de la Black Library sur le devant de la scène, ne serait-ce qu’à mon humble niveau. Qui sait, peut-être que cela créera des envies de lecture de l’autre côté de l’écran? Sans plus tarder, place à l’action!

Infernabulum!#5

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Ulric’s Children (Inferno! #11) – W. King [WFB]:

INTRIGUE:

WFB_Ulric's ChildrenUne nouvelle fois égarés dans une impénétrable forêt des moins accueillantes (décidément, c’est une constante), Gotrek et Felix, backpackers de l’extrême1, doivent braver la neige, le froid et la perspective d’une meute de loups affamés lorsque le rideau se lève sur Ulric’s Children. Quant aux fameux enfants d’Ulric qui ont donné leur nom à cette nouvelle, nous apprenons bientôt qu’il s’agit du nom populaire des loups-garous, considérés comme les descendants des relations tumultueuses du Dieu avec quelques accortes mortelles dans des temps très anciens. Figures légendaires du bestiaire impérial, leur existence paraît soudainement bien plus probable à Felix alors qu’il s’échine dans les congères à la suite du Tueur, des vocalises lupines plein les oreilles. Le grand blond à la cape rouge n’a toutefois guère le temps de ressasser son habituelle litanie misérabiliste que Gotrek, dont l’ouïe est aussi fine que son animal totem (l’acraga coa2), part en sprint dans les sous-bois en direction de la clameur d’une bataille toute proche… et disparaît corps et bien de notre histoire, tel un vulgaire PNJ de Skyrim, laissant Felix seul aux commandes de cette dernière.

Arrivé sur les lieux de l’esclandre, Felix se retrouve confronté à la méfiante hostilité d’une petite troupe de soldats, venant de repousser non sans mal les assauts d’une harde lupine. Prudence étant mère de sûreté, les survivants décident de faire prisonnier le bon samaritain, qui se retrouve menotté comme un vulgaire gilet jaune à l’arrière de la carriole des routiers – pas vraiment sympas pour le coup – où il fait la connaissance d’une autre prisonnière du comte Hrothgar, une dénommée Katarina dont le calme glacial et les remarques sibyllines semblent indiquer une inquiétante proximité avec la meute aux trousses de la soldatesque impériale. Pour ne rien arranger, Felix attire l’attention du sorcier de compagnie de son ravisseur, un certain Voorman dont ni l’haleine fétide, ni l’intérêt déplacé pour sa personne, ne sont au goût de notre héros, qui ne peut que maudire les oreilles aiguisées et les courtes jambes de son compagnon d’infortune.

Rendue quelques heures plus tard au pavillon de chasse de Hrothgar, la troupe investit les lieux et jette Felix et sa camarade dans une geôle sombre, froide mais pas vraiment bien fermée, ce qui se révélera assez utile par la suite, comme nous allons le voir. La visite de Voorman permet à Blondin d’en apprendre un peu plus sur sa situation, qui se révèle être assez précaire : le comte et son thaumaturge s’avèrent être des cultistes de Tzeentch, fomentant quelque obscur et indubitablement dangereux dessein, dont la réalisation nécessite l’implication du père de Katarina, loup-garou au pedigree impeccable. Ergo la capture de la gente demoiselle, ergo les attaques répétées de la part de la gent lupine que Hrothgar (du Nord) et ses sbires ont subi jusqu’ici. Si Felix ne souhaite pas ingérer dans les affaires des uns et des autres, il ne lui faut pas longtemps pour déterminer qu’il a davantage intérêt à coopérer avec Katarina que de faire cavalier seul. Profitant de l’étourderie manifeste de Voorman, qui repart sans verrouiller la porte, et de la confusion générale générée par l’intrusion de la meute dans l’enceinte fortifiée, la faute, une fois encore, à un verrou oublié, les gardés à vue se font la malle et se séparent rapidement.

Pendant que Katarina va faire ami ami avec les quadrupèdes, Felix erre dans les couloirs, et finit par surprendre une conversation entre Hrothgar et Voorman venant confirmer ses sombres pressentiments sur le dessein poursuivi par les deux crapules. Le sorcier parti euthanasier quelques clebards à grand coup de boules de feu, Felix sort de sa cachette, assomme Hrothgar et lui subtilise la dague magique avec laquelle le faquin avait menacé le mage quelques instants auparavant. Tout est alors prêt pour que le dénouement tant attendu (ou pas) prenne place. Un autre coup de chance (décidément, Felix n’a pas volé son nom) conduit le Baudelaire impérial dans une pièce où Voorman se confronte au grand méchant loup, que l’on devine être le père aimant de Katarina. Le triomphe du lycanthrope, qui décapite le sorcier d’un revers de patte, est toutefois de courte durée, l’esprit vengeur de l’arcaniste venant posséder son assassin quelques secondes après la décollation du premier par le second. C’était en effet l’objectif poursuivi par Voorman, qui souhaitait faire siennes l’immortalité et l’invulnérabilité supposées des loups-garous, et ainsi attendre pépouze la fin des temps. Bien entendu, sa rencontre avec Felix, et surtout, sa dague enchantée dérobée à Hrothgar, viendra mettre un terme définitif aux rêves de grandeur de notre ami le furry. Il reste alors 10 lignes à King pour terminer son histoire, ce qu’il fait en faisant arriver Gotrek (enfin !) et Katarina, la seconde prisonnière du premier. Quel sort le duo réservera-t-il à l’orpheline, pas vraiment innocente certes, mais qui ne leur a rien fait de mal à proprement parler ? Eh bien, on ne le saura pas (dans cette nouvelle en tout cas). Concluons sur ce constat, toujours d’actualité, que lorsqu’il y a un flou, c’est qu’il y a un loup. Et inversement.

1 : Dommage que la Fin des Temps ait pris place avant que le projet ‘J’irai occire chez vous’ se soit concrétisé. Je suis sûr que ça aurait fait un carton d’audience.
2 : D’où croyez-vous que la teinte orange de sa crête venait, enfin ? Et, oui, les mites font partie des espèces dotées de l’audition la plus performante du règne animal.

AVIS:

Il est assez dommage que Ulric’s Children laisse le lecteur sur sa faim (de loup, donc), car le récit brossé par King avait un potentiel certain, que la brieveté de l’histoire empêche de s’exprimer de manière aboutie. Je suis persuadé qu’une dizaine de pages supplémentaires après que Felix et Katarina soient sortis de leur cachot aurait pu permettre à cette nouvelle de se terminer de façon plus convaincante que l’enchaînement de non-péripéties qui mène au dénouement lapidaire et lacunaire qui est le sien. Pour tout dire, la dernière demi-page d’Ulric’s Children mérite la lecture afin de prendre la pleine mesure du caractère comiquement abrupt de sa conclusion. Il y avait pourtant beaucoup de pistes intéressantes à explorer avant de rayer la ligne « Tueur de Loup » de la bucket slaying list du petit rouquin teigneux, et notamment le personnage de Katarina, sorte d’Ulrika1 avant l’heure que King place au cœur de son récit avant de laisser totalement tomber. Un vrai loupé, si on me permet l’usage de cette tournure.

Si le choix de King de se passer de son personnage tutélaire pour cette soumission peut surprendre le lecteur, le pari aurait pu s’avérer payant si l’auteur avait permis à Herr Jaeger de s’illustrer de façon convaincante et spécifique : si Gotrek est une machine de guerre invincible, qui résout tous les problèmes auquel il est confronté à coup de hache, Felix aurait pu compenser par une approche un peu plus cérébrale et astucieuse de la situation. Ce n’est pas le cas ici, notre héros enchaînant les coups de chance critiques sans véritable réflexion de sa part. En cela, la comparaison avec l’élève Long n’est clairement pas à l’avantage du maître King, le premier faisant preuve d’une véritable aisance scénaristique, quand le second a davantage tendance à passer en maniaque automatique, les prouesses martiales du Nain disgracié venant meubler les intrigues simplistes concoctées par son auteur. Si la passation n’était pas encore proche au moment de la publication de Ulric’s Children (Mars 1999, soit 4 ans avant la sortie de Tueur de Géant, le dernier roman de King dans la série – à ce jour –), il est possible qu’une certaine lassitude ait déjà été à l’œuvre chez King à ce moment, ce qui expliquerait le caractère inachevé de cette nouvelle. Quoi qu’il en soit, cette dernière ne fait définitivement pas partie des bonnes pages de la saga de Gotrek et Felix, et sa lecture n’est indispensable qu’aux fans transis de la série.

1 : C’est-à-dire la jeune fille frappée d’une malédiction passible de mort dans les sociétés civilisées du Vieux Monde (la lycanthropie pour l’une, le vampirisme pour l’autre), mais dont les motivations ne sont pas intrinsèquement mauvaises, et qui demande juste à ce qu’on la laisse tranquille.

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Redhand’s Daughter (Inferno! #36) – W. King [WFB]:

INTRIGUE:

WFB_Redhand's DaughterAprès avoir fait les 400 coups (de hache runique) en Arabie, quelques temps après leur retour d’Albion (Tueur de Géants), Gotrek et Felix se retrouvent sur le cuirassé nain du Capitaine Ahabsson, croisant sur les eaux du golfe d’Arabie depuis la forteresse de Barak Varr. Toujours à la recherche d’une fin glorieuse, le célèbre Tueur doit ronger son frein pendant la croisière, ce qu’il fait en s’enfilant pinte sur pinte et en gueulant sur Ceniormeteo, le dieu elfique des dépressions, tandis que Felix préfère meubler ses journées en regardant les dauphins et entretenant des pensées sinistres, comme à son habitude. Nos plaisanciers ne tardent cependant pas à être mis à l’épreuve (autrement, cela aurait été la nouvelle de Gotrek & Felix la plus ch*ante du monde), d’abord par la survenue d’un grain sévère, qui endommage bellement le Storm Hammer, puis par la rencontre avec un navire de pirates Orcs, qu’Ahabsson décide, en corsaire assermenté, d’aller piller. L’enthousiasme fiévreux du capitaine se heurte toutefois à quelques dures réalités, à commencer par les projectiles enflammés projetés par la catapulte de proue du vaisseau adverse, qui cabossent suffisamment le steamer nain pour que ce dernier se retrouve à portée d’abordage par l’équipage peaux-vertes, beaucoup plus nombreux que ses vis-à-vis. La bataille qui s’en suit permet à Gotrek de se dégourdir les orteils (pas mieux à espérer contre de simples boyz), et à Felix de voler à la rescousse d’une prisonnière de l’infâme Capitaine Goldtusk, qu’il réussit à escorter jusqu’au Storm Hammer avant que ce dernier ne parvienne à se désengager.

Vainqueurs éprouvés de l’affrontement, les Nains décident d’aller mouiller l’ancre sur l’une des îles toutes proches, encouragés en cela par le récit fait par la rescapée (Katja Murillo) du légendaire trésor que le pirate Redhand, qui se trouve être son père, a dissimulé sur cette dernière. Elle-même capitaine au long cours, elle promet à ses sauveurs de partager les bénéfices de son héritage s’ils l’aident à mettre la main dessus. Capturée par Goldtusk alors qu’elle voguait vers le butin avec son propre équipage, Katja n’a dû son salut qu’à l’avidité de l’Orc, qui a épargné sa vie en échange d’un aller simple vers le magot familial. Jamais les derniers à se lancer dans la quête de richesses mal acquises, Ahabsson et ses gars acceptent la proposition qui leur est faite, et tout ce petit monde (plus deux humains) débarque sur une île volcanique couverte d’une épaisse forêt où est sensé se trouver la fortune de Redhand.

Bien que charmé par le ravissant minois de la donzelle (ce qui est la raison pour laquelle il s’est rué à son secours en premier lieu), Felix se montre assez suspect des motivations de cette dernière, et ne peut s’empêcher de penser que Katja dissimule quelque chose à ses partenaires. Gotrek de son côté s’avère plus intéressé par la perspective de se frotter au monstrueux gardien d’une gemme légendaire conservée dans l’un des temples en ruines de l’île (dixit Katja, toujours), ou a défaut, par la régulation de la population locale de peaux vertes. L’enthousiasme général est à peine entamé par la disparition mystérieuse de plusieurs membres d’équipage au fur et à mesure que l’expédition s’enfonce dans la jungle, énigme rapidement résolue par un Gotrek peu tolérant envers les facéties des Gobelins arboricoles du cru. Après un pittoresque trail tropical, les aventuriers parviennent jusque dans la cité abandonnée promise par leur guide, qui se trouve être un lieu de villégiature couru par la gent orcoïde (un club Mork, sans doute), forçant nos héros à la plus grande discrétion. Même Gotrek, dont le premier but était pourtant de tailler des croupières aux locaux, accepte de faire crête basse jusqu’à ce que ses camarades aient pu sécuriser le trésor, ce qui est fort urbain de sa part. En même temps, ils sont sortis de la forêt, donc…

Une fois rendu dans le temple où Redhand aurait déposé ses bagages, et après avoir négocié de façon soupçonneusement facile au goût de ce rabat-joie de Felix l’accès jusqu’au cœur de l’édifice, qui dispose d’une installation géothermique de pointe sous la forme de puits de lave intégrés à la structure du bâtiment (attention à ne pas se brûler en prenant sa douche, tout de même), l’expédition se retrouve confrontée à un défi de taille, en la présence d’un Elémental de lave qui surgit de son jaccuzzi pour empêcher les intrus de faire main basse sur le trésor du pirate ainsi que sur l’énorme gemme qui fait office de décoration d’intérieur. Au lieu de s’émerveiller de la culture du gardien des lieux, qui s’exprime en Reikspiel parfait alors que sa prise de fonction remonte à des millénaires (ce sont les Anciens qui ont signé son contrat de travail), l’esprit mesquin de Felix ne peut s’empêcher de se concentrer sur le fait que MagMan semble connaître Katja, qu’il qualifie de sorcière (ce qui n’est pas très sympathique). De son côté, Gotrek se contente de foncer dans le tas (de roches en fusion) avec son ardeur habituelle, distrayant la Chose assez longtemps pour que Katja réussisse à s’emparer de la gemme, avant de disparaître dans un éclat de rire sardonique. On comprend alors que la capitaine corsaire n’était pas la fille, mais la femme de Redhand, qu’elle a poussé à prendre d’assaut le temple pour récupérer le diam’s des années plus tôt, sans succès. On comprend aussi que le joyau en question n’avait pas qu’une utilité symbolique, mais servait surtout de régulateur de l’activité tellurique du volcan local, qui se réveille violemment une fois la gemme dérobée.

Ayant tout de même réussi à refroidir les ardeurs du gardien, puis à le(s lui) briser menu, Gotrek et Felix en sont quittes pour une session de hack’n’slash intense pour sortir du temple avant que ce dernier ne soit noyé par la lave. Laissant leurs camarades survivants se débrouiller tous seuls comme des grands petits, le duo se fraie un chemin sanglant à travers les hordes de Gobelins que Goldtusk, arrivé sur place après le naufrage de son navire, a recruté pour… visiter le temple également je suppose1. Cette louable idée de sortie culturelle prend donc un tour funeste lorsque le Tueur et son comparse décident de couper la file, résultant en des centaines de morts parmi les visiteurs, dont Goldtusk en personne, décapité par un Gotrek littéralement chauffé à blanc. Ceci fait, il ne reste plus à nos inséparables qu’à partir en petites foulées vers la plage où mouille le Storm Hammer, avant que l’éruption du Krakatorka ne mette un terme honteux et cendreux à la carrière du Tueur. Spoiler alert : Ils s’en sortent. Si si.

1 : King ne donnant aucun signe que les Nains aient été détectés par les peaux vertes à leur arrivée.

AVIS:

Cette aventure conséquente (28 pages) permet à William King de renouer avec les origines littéraires de Gotrek & Felix, héros de nouvelles conduits plus tard par le succès à évoluer dans de plus longs formats. Se déroulant après les événements relatés dans Tueur de Géants, dernier roman signé de la série signé par King (et le moins réussi du lot à mon humble avis, comme quoi il a bien fait d’arrêter), Redhand’s Daughter peut être considéré comme l’ultime tour de piste des deux troublions sous la plume de leur créateur, et un écho aux longues nouvelles originelles du duo (Wolf Riders, The Dark Beneath the World). Bénéficiant d’une localisation exotique (je ne pense pas que quiconque se soit aventuré dans la Chaîne Mégaleane – qui n’apparaît sur aucune carte à ma connaissance – depuis lors), de péripéties rythmées et, elles aussi, assez innovantes pour le lecteur, comme la bataille navale introductive entre corsaires Nains et pirates peaux vertes, Redhand’s Daughter a un petit goût de pastiche de The Queen of the Black Coast (a.k.a. Conan en croisière), avec Katja en Belit et Gotrek & Felix se partageant le rôle du ténébreux Cimmerien. Ces considérations évacuées, on se retrouve cependant avec une soumission assez classique du sous-genre créé par King, qui déroule son propos et coche les cases du cahier des charges avec aisance plus que maestria. On notera pour terminer que l’auteur n’a pas encore tenu sa promesse de faire remettre Katja Murillo sur le chemin de nos baroudeurs, et qu’avec la destruction du monde de Warhammer (et donc celle de Katja et Felix), il lui sera assez difficile de tenir sa parole…

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A Company of Wolves (Inferno! #7)- D. Abnett [WFB]:

INTRIGUE:

WFB_A Company of WolvesUne compagnie de Chevaliers du Loup Blanc plongée en plein doute existentielle à la suite de la mort de leur commandant au cours d’un raid mal négocié dans la Drakwald quelques mois plus tôt retourne en forêt pour une session de teambuilding mâtinée de skullbashing. Les problèmes affligeant nos héros, que l’on ne peut pas qualifier de sans peur (le vétéran Gruber a le trouillomètre à zéro depuis le décès tragique de son supérieur et ami Jurgen) ni de sans reproche (dans le désordre : Morgenstern a un gros problème d’alcool, Anspach est un parieur pathologique, Vandam une tête brûlée carriériste, et le nouveau chef, Ganz, a moins de charisme que la tête de loup qui orne son armure) sont nombreux, mais le Grand Maître de l’ordre a bon espoir que l’air pur, la nature préservée et les hordes de mutants assoifées de sang qui hantent la Drakwald parviendront à guérir la compagnie rouge de son spleen persistant. Preuve de sa confiance dans ses hommes, il leur a même confié le précieux étendard de Vess1 pour cette virée forestière, ce qui rélève un peu le moral des troupes.

Le plan de Ganz consistant à errer dans les bois jusqu’à tomber sur une bande de néfastes à massacrer au nom d’Ulric, notre petite bande baguenaude cavalièrement jusqu’à faire la rencontre de quelques Hommes-Bêtes venus se recueillir devant une idole païenne. L’escarmouche qui s’en suit, si elle ne dure pas longtemps et se termine par une victoire sans appel pour le camp impérial, révèle toutefois de façon criante les maux profonds qui affectent la compagnie. Gruber refuse ainsi de charger l’ennemi, prétextant la perte de fer de sa monture, Morgenstern est couché net par une branche basse qu’il n’a pas pu esquiver, Vandam fonce tête baissée à la poursuite des fuyards malgré les ordres de Ganz, et Von Glick, sommé de le faire revenir au bercail, se fait grièvement blesser par un Ungor embusqué sur le chemin du retour. Cette blessure force les templiers à monter le camp pour la nuit en plein cœur de la Drakwald, et à perdre un des leurs sous les flèches des Hommes-Bêtes (on peut saluer la prescience d’Abnett sur le sujet) pour couronner le tout.  

Alors que la compagnie semble sur le point de se désagréger, tel le premier boys band venu après un second album décevant, l’inspiration finit par frapper les loulous, qui décident de tenter le tout pour le tout. Faisant mine de laisser derrière eux leurs morts, blessés et étendard sous faible garde, les chevaliers tournent bride vers Middenheim, espérant ainsi attirer le reste de la harde à découvert. Ce qui ne manque évidemment pas d’arriver. La vaillante action d’arrière-garde conduite par Aric, Gruber et Von Glick permet de retenir les mutants assez longtemps pour que la cavalerie arrive revienne, et annihile les cornus d’une dévastatrice charge de flanc d’école. Bonus appréciable : il s’agissait de la même bande de fieffés violeurs de poules responsables de la mort de Jurgen, qui se trouve donc vengé de façon satisfaisante. Au final, et malgré la mort au combat de Vandam (sans doute en plein grand écart facial) et de Von Glick, nos héros peuvent prendre le chemin du retour unis comme jamais et à nouveau pleinement opérationnels. Une vraie fin de loup(s), en somme.

: Car Vess de Loup (blanc), évidemment. Je ne vois pas d’autres explications satisaisantes et n’accepterai pas de contestations.

AVIS:

Dans la foulée du lancement réussi de la série des Fantômes de Gaunt dans les pages d’Inferno!, Abnett se livre à un exercice similaire avec ce ‘A Company of Wolves’, introduisant au lecteur une confrérie de templiers du Loup Blanc, dont les exploits seront relatés dans une succession de nouvelles, puis compilées et conclues dans le roman ‘Hammers of Ulric’. Bien que cette péripétie inaugurale soit relatée avec l’aisance habituelle de la plume Alpha de la Black Library, j’ai trouvé le résultat final un peu moins réussi qu’à l’accoutumée. Parmi les raisons de ce (léger) coup de moins bien, j’identifie le nombre important de protagonistes et la « singularisation » moins aboutie de ces derniers (sauf pour Morgenstern, catalogué comic relief de façon outrageuse, ce qui est un autre défaut), une intrigue somme toute assez banale combinée à une mise en scène parfois complaisante1, ou encore la très nette sensation qu’Abnett avait déjà acté qu’il ferait vivre ses nouveaux héros sur plusieurs nouvelles, et a traité A Company… comme un chapitre introductif plutôt qu’un stand-alone (ce qui relève plus de la faute de goût que de la catastrophe industrielle, certes). Pour autant, on a tout de même droit à du Dan Abnett tout ce qu’il y a de plus solide, avec des personnages attachants dès lors qu’on arrive à les différencier les uns des autres, des scènes d’action prenantes où la mort frappe sans prévenir, et une exécution globalement propre. Rien de grave donc.

1 : La possibilité qu’un chevalier puisse se prendre une flèche dans le cou alors qu’il dort au milieu de ses frères d’armes, protégé par des sentinelles habituées des choses de la guerre, et n’être découvert qu’au petit matin, ne me semble pas des plus réalistes. À un autre niveau, le « tour de pâté de maisons » effectué par le gros des troupes (et je ne parle pas de Morgenstern) pour surprendre la harde d’Hommes-Bêtes… qui se trouve être la même que celle qui a tué Jurgen quelques mois plus tôt (#WIJH) est un expédient un peu trop facile à mon goût.  

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A Wolf in Sheep’s Clothing (Inferno! #9)- D. Abnett [WFB]:

INTRIGUE:

WFB_Wolf in Sheep's ClothingAprès le succès de leur session de team building dans la Drakwald (‘A Company of Wolves’), nous retrouvons les chevaliers de la Compagnie Blanche de l’ordre du Loup Blanc (the whitest of the white) alors qu’ils s’apprêtent à partir dans une nouvelle mission, beaucoup moins funky qu’ils ne l’espéraient de prime abord. Le Graf de Middenheim a en effet reçu une missive désespérée d’un de ses cousins, le Margrave Ganmark, dont le domaine a été attaqué et incendié par une bande de galapiats, et qui se retrouve donc SDF par la force des choses. Alors qu’il revient aux pompeux et hautains Chevaliers Panthères de traquer les coupables de cet abominable forfait, les Loups Blancs doivent se contenter d’escorter cousin Hubert, sa famille et ses gens, jusqu’à la sécurité de Middenheim. Autant dire que le Commandant Ganz doit essuyer une grogne bien compréhensible de la part de ses hommes, parmi lesquels on compte deux nouveaux : le bleu-bite Krieg Drakken, et le sang bleu Lowenhertz.

Après un aller sans embûches, nos templiers prennent en charge leurs protégés, et se consolent légèrement en constatant que la femme du Margrave, Gudrun, est vraiment bonnasse. Il n’y a que le jeune Drakken pour reluquer davantage la servante Lenya que la plantureuse maîtresse de maison, que le cousin Hub’ a épousé quelque temps après la mort de sa première femme. Les introductions étant faites et le barda chargé dans les chariots, la troupe repart vers la cité, pendant que les Panthères de Von Volk/t se lancent à la poursuite des mécréants. Bien évidemment, ces derniers éviteront facilement la confrontation avec leurs traqueurs, et se concentreront sur les loulous et les migrants. Surpris une première fois par un assaut de Nazguls puant la cannelle, qui laissera le pauvre Drakken tout estafilé, les chevaliers devront relever le plus difficile des défis : utiliser leurs neurones. Car, si pour le lecteur, il ne fait rapidement aucun doute que les stoners spectraux1 sont à la recherche de quelque chose ou de quelqu’un voyageant avec les templiers, pour ces derniers, le mystère est à la limite de l’insoluble. C’est d’ailleurs tout juste si Ganz ne condamne pas Lowenhertz au bûcher pour avoir émis l’hypothèse précédente, qui relevait pourtant du bon sens plus que de la mise en pratique de savoirs interdits…

Début spoiler…Au final, et après avoir essuyé une nouvelle vague de goons à la faveur d’un bivouac en pleine forêt, les Loups Blancs finiront par identifier la source de tous leurs maux, qui se trouve être, non pas l’exotique bimbo avec qui le Margrave a refait sa vie, comme le soupçonnait ce misogyne de Gruber, mais la vieille nourrice rom’ des enfants du pater familias, elle aussi arrivée récemment dans l’entourage de l’aristocrate. Plus particulièrement, l’aïeule trimballe avec elle un bijou en forme de griffe, qui lui porte apparemment chance mais que ses ancêtres ont certainement dérobé dans une tombe arabienne, et que ses propriétaires légitimes souhaitent vivement récupérer. Leurs adversaires pouvant respawner toutes les deux heures, Ganz, dans un éclair de génie inhabituel, réalise qu’il doit prendre des mesures drastiques pour arracher la victoire avant que ses hommes se fassent massacrer. Peu enclin à restituer la babiole avec un petit mot d’excuse, comme on le ferait de nos jours, le fier chevalier préfère réduire en poudre le colifichet sépulcral, bousillant le marteau de Lowenhertz dans la manœuvre (c’est du bizutage). Nazguls jusqu’au bout, les assaillants se dissipent alors dans un gémissement piteux, permettant à nos héros de reprendre leur route au matin sans plus d’interruptions. La nouvelle se termine sur leur retour triomphal à Middenheim, et sur la remise par Ganz à Lowenhertz du marteau de feu Von Glick, en dédommagement de l’arme perdue en chemin. Dans l’Empire plus qu’ailleurs, les bons comtes électeurs font les bons amis.Fin spoiler

1 : Ils ont les yeux rouges et ne s’expriment qu’en grognements inintelligibles.

AVIS:

Abnett poursuit sa série (louve) blanche sur des bases sensiblement similaires à celles posées dans ‘A Company of Wolves’, même si l’intrigue se montre un peu plus fouillée et complexe que lors des débuts de Ganz et Cie. Si la révélation de l’identité du responsable des malheurs du Margrave ne risque pas de surprendre grand-monde, on peut tout de même mettre au crédit de Dan Abnett l’inclusion d’une authentique et valable fausse piste dans sa nouvelle, ce qui, pour une soumission de 12 pages, est un accomplissement notable. Pour le reste, on se contentera d’un peu de character development pour nos vaillants chevaliers, qui gagnent deux nouvelles recrues dans ce second épisode, dont au moins une (Lowenhertz) semble tenir à cœur à l’auteur ; ainsi que quelques scènes d’actions très potables.  

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The Bretonnian Connection (Inferno! #13)- J. Wallis [WFB]:

INTRIGUE:

WFB_The Bretonnian ConnectionNous retrouvons l’homme qui tua Liberty Valance Frère Gilbertus (‘The Dead Among Us’), l’ex-marchand devenu Prêtre de Morr Dieter Brossmann, peu de temps après la conclusion de la première nouvelle dont il était le (sombre, taciturne et antisocial) héros. Alors que le temple dans lequel notre ecclésiastique est encore en réparation, et que le clergé survivant tente tant bien que mal de creuser des tombes dans la terre encore gelée du Morrspark, une nouvelle d’importance parvient à leurs oreilles rougies par le froid de ce début de printemps : la Comtesse Sophia d’Altdorf, représentante de Karl Franz auprès de la cour du Graf, et, accessoirement, femme séparée du Dauphin de Bretonnie, a été retrouvée morte dans ses appartements, et pas de causes naturelles. Sophia étant une figure populaire dans la Cité du Loup Blanc, les Prêtres se préparent à quelques jours d’intense activité, la populace de Middenheim se tournant en grand nombre vers les Croque-Morrs pour obtenir un réconfort spirituel dans cette période troublée.

Cette agitation ne concerne cependant que marginalement notre héros, que son nouveau supérieur, Père Ralf, envoie collecter un cadavre de mendiant dans un hospice de l’Altquartier au lieu de le mobiliser pour répondre aux atermoiements de la foule. Ceci est somme toute assez logique car Dieter déteste tout le monde, lui y compris, et manque donc de l’empathie nécessaire pour cette tâche. Nous suivons donc Didi alors qu’il se rend là où sa fonction l’appelle, en fredonnant sa chanson préférée. Sur place, il a la surprise de constater que le macchabée était connu de lui, du temps où il était un des marchands les plus en vue de Middenheim : c’est bien ce vieux Reinhold, homme à tout faire, et surtout les mauvais coups, qui gît raide comme une planche sur une des paillasses de l’hospice. Passée la vague nostalgie suscitée par cette découverte, Dieter se livre à un rapide examen du cadavre, et n’est pas long à découvrir que les causes de la mort sont loin d’être naturelles. Déterminé à démasquer le coupable du meurtre de son ancien sous-fifre, Brossmann repart de l’Altquartier à la recherche d’une certaine Louise, désignée par le propriétaire des lieux comme la bonne amie du défunt, et qui est la dernière personne avec laquelle Reinhold a été vu.

Une fois la donzelle localisée, Dieter apprend qu’un de ses vieux ennemis est de retour en ville, et certainement pas pour lui conter fleurette. Du temps où il était aux affaires, notre héros a en effet cru malin de piéger un concurrent potentiel, le marchand Claus Grubheimer, surnommé Grubworm, qui souhaitait ouvrir un comptoir d’herbes de Loren dans la cité. Sous ses abords bonnasses, Brossmann s’est arrangé pour faire trouver par la milice urbaine des substances illicites dans les quartiers du Middenheimer d’origine Bretonnienne (c’est important), provoquant sa disgrâce et sa fuite. On savait rire à l’époque. Reinhold ayant aidé Brossmann à réaliser ce tour pendable (littéralement, le recel de lotus noir étant puni de mort), il suppute fortement que le décès violent de son ex-associé implique Grubworm, et que ce dernier ne va pas tarder à lui rendre une visite de courtoisie. Une fois ces informations obtenues de Louise, qui, comme son nom l’indique, est également une Bretonnienne d’origine, le Prêtre repart vers le temple, où il compte bien réaliser une autopsie de la dépouille de Reinhold.

Ces nobles projets sont toutefois contrariés par le déplaisir manifeste du Père Ralf, qui trouve que l’empathie de son inférieur laisse singulièrement à désirer, et insiste donc pour le faire participer à la messe funèbre donnée en l’honneur de Sophia, en pénitence de sa froideur manifeste. Contraint par cet impondérable, et de plus en plus inquiet pour son intégrité physique, Dieter change de plan et s’en va se rencarder auprès d’une autre de ses vieilles et interlopes connaissance, le bien nommé Grizzly Bruno (Koala Bob était absent ce jour là), qui accepte d’envoyer un de ses hommes localiser Grubworm au bénéfice du Prêtre. Ceci fait, ce dernier retrouve Louise, qu’il a sèchement rabroué au cours de leur précédent échange, au moment même où elle s’apprêtait à lui donner une information importante. C’est ballot. Bien heureusement, Dieter est un crack, et parvient sans mal à connecter entre elles toutes les pièces du puzzle à la seconde tentative. Prenez note : c’est Reinhold, dont la connaissance des tunnels sous Middenheim et les compétences de crochetage rendaient très qualifié pour le job, qui a assassiné la Comtesse Sophia. Pourquoi ? Eh bien, il semblerait que ce mauvais garçon, ayant eu vent du retour de Grubworm et devinant que ses heures étaient comptées, ait agi pour tirer sa révérence de façon « glorieuse »1, tout en vengeant sa chère et tendre au passage, qui s’était faite lourdée sans ménagement par Sophia quelques années plus tôt. Des motifs très profonds, comme vous pouvez le voir. Ayant convaincu la « veuve » de Reinhold de lui remettre l’anneau de fiançailles de la Comtesse, dérobée par le coupe-gorge comme preuve de son crime et moyen pour lui de se faire une place dans l’histoire, Dieter repart dare dare vers le temple, où la messe doit commencer sous peu.

Les choses s’accélèrent à son arrivée sur place, trop tard pour prendre la sienne dans la cérémonie (au grand déplaisir de Père Ralf), mais pile au bon moment pour croiser Grubworm. Peu confiant en ses chances de sortir d’un vainqueur d’une confrontation avec sa Némésis (pour tabasser les Nécromanciens rachitiques, il y a du monde par contre), Dieter s’enfuit dans l’aile résidentielle du bâtiment, jusqu’à sa cellule où il trouve un sac de poudre de lotus noir placé bien en évidence. Comprenant que Grubworm cherche à lui refaire la bonne blague qu’il avait organisé à ses dépends quelques années plus tôt, notre héros se saisit de la bourse incriminante, et profite de l’arrivée impromptue d’un de ses collègues, Frère Jakob, pour lui refiler en douce le chichon. Bien lui en prend, car la paire se fait arrêter à la sortie du temple par une patrouille de miliciens, rencardés par Grubworm, comme Dieter s’y attendait. Notre héros va-t-il laisser son innocent coreligionnaire se faire alpaguer à sa place ? Que nenni. Tirant parti des tours de passe passe que Reinhold lui a enseigné, il fait mine de sortir l’anneau de la comtesse du pourpoint de son accusateur, en gueulant « OH MAIS REGARDEZ CE QU’IL A DANS LA POCHE-EUH » à la cantonnade. Cette preuve très incriminante, couplée aux origines Bretonniennes de Grubworm, placent ce dernier dans une situation des plus délicates, et entraînent une réaction malheureuse (surtout pour Jakob) de sa part : dégainant un couteau, il tente de se faire justice lui-même, mais c’est sans compter l’égoïsme patenté de Dieter, qui prend soin de placer son collègue dans la trajectoire. Bilan des courses : Grubworm se fait lui-même occire séance tenante par un quidam révolté (qui se trouve être le complice de Grizzly Bruno), Jakob passe du statut de Prêtre de Morr à celui de Prêtre mort (notez la subtile différence), mais Dieter a réussi à sauver sa tonsure, ce qui est bien tout ce qui lui importe. La guerre probable entre l’Empire et la Bretonnie causée par cet incident diplomatique n’est d’ailleurs que le cadet de ses soucis, tout comme le fait que, si on regarde bien, c’est lui le méchant de l’histoire. Que voulez-vous, le Vieux Monde est un endroit cruel…

1 : On a affaire au Mark David Chapman du Vieux Monde, ou en tout cas, à un sévère syndrome d’Erostrate.

AVIS:

James Wallis relève la barre (qui était déjà assez haute) de sa série consacrée à Dieter Brossmann, le Dexter de Middenheim, avec cet excellent ‘The Bretonnian Connection’. Le lecteur a droit à une transposition réussie du roman noir dans le monde de Warhammer, qui se révèle être naturellement assez glauque, injuste et immorale pour que cette adaptation fonctionne à plein régime. En plus de proposer un récit d’enquête tout à fait correct, cette nouvelle permet de placer le héros de Wallis sous un nouvel angle, dont il sort plus approfondi que grandi. Exit le Prêtre de Morr ayant adopté la chasuble pour pouvoir continuer ses investigations sur la disparition de sa femme et de son fils : Brossmann apparaît comme un authentique salopard, prêt à tout pour éliminer la concurrence et préserver sa précieuse personne. Malgré ces révélations peu ragoutantes, Wallis parvient à conserver un fond de sympathie dans son personnage, que le lecteur aura bien du mal à haïr en dépit du caractère trouble de son passé, son réseau et ses agissements. Intéressant à plus d’un titre, autant par la plongée dans le Middenheim profond et la géopolitique du Vieux Monde qu’il offre, que dans la mise en scène de personnages plus complexes que la moyenne (pour la Black Library), ‘The Bretonnian Connection’ est l’une des toutes meilleures soumissions de James Wallis, ainsi que l’une des tentatives les plus abouties de la BL en termes de récit policier (ce qui est un peu triste pour Warhammer Crime, mais bon).

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Voilà qui conclut ce premier numéro thématique d’Infernabulum! Je ne dirais pas qu’il en reste plein de là où il vient, mais j’ai assez de matériel pour poursuivre la série pendant quelques temps, donc à très bientôt pour une nouvelle plongée dans le monde (littéraire) qui fut.

SILVER NAILS [WFB]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette critique d’un recueil de nouvelles Warhammer Fantasy Battle doublement spécial: ‘Silver Nails’. Cet opus présente en effet la caractéristique notable de ne rassembler les œuvres que d’un seul auteur, Jack Yeovil (nom de plume de Kim Newman pour la GW-Fiction), ce qui n’est pas la norme pour une publication de la Black Library. La préférence de la maison d’édition va en effet vers les pots pourris collectifs en ce qui concerne les anthologies, et seuls quelques rares élus (William King, Dan Abnett, John French…) ont reçu l’insigne privilège de voir leurs courts formats réunis dans un ouvrage personnel. Vu l’importance cruciale qu’a eu Yeovil dans les premiers temps de la GW-Fiction, qu’il a soutenue à bout de bras et de stylo lorsque David Pringle et Bryan Ansell tentaient tant bien que mal de mettre au monde leur projet commun, il y a maintenant plus de 30 ans, ce traitement particulier était on ne peut plus mérité, même si les héros dont nous allons parler ici sont sans doute peu familiers à la plupart des lecteurs.

Sommaire Silver Nails (WFB)

La deuxième particularité de ‘Silver Nails’ est d’avoir été écrit sur deux périodes très distinctes. Les trois premières nouvelles de cette anthologie ont en effet été intégrées dans les premiers recueils de GW Books (‘The Ignorant Armies’, ‘Wolf Raiders‘ et ‘Red Thirst‘), parus entre 1989 et 1990. Si elles partagent la même bande de protagonistes (Genevieve la Vampire, Dietlef Sierck le dramaturge, Johann von Mecklenberg et son tuteur Vukotich, ‘Filthy’ Harald Kleindest et Rosanna Ophuls) que ces premiers écrits, la dernière histoire (‘The Ibby the Fish Factor‘) a elle été écrite beaucoup plus tard, peu de temps avant la première sortie de ‘Silver Nails‘ (2002). Quand à ‘The Warhawk’elle est restée dans les cartons de l’auteur pendant de nombreuses années, peut-être victime indirecte de l’instabilité chronique des premiers temps dela GW-Fiction (GW Books et Boxtree). Il s’agissait pour Yeovil de donner l’épaisseur requise à ce recueil, tout en rendant une dernière visite aux acteurs de sa trilogie ‘The Vampire Genevieve‘ avant de passer définitivement à autre chose. Profitons donc de l’intégration de ‘Silver Nails‘ dans la réédition récente de cet omnibus par la BL pour poursuivre notre œuvre de revue de nouvelles, en nous attaquant à un monument, oublié mais incontournable, de la GW-Fiction1.

1 : On peut regretter que cette réédition n’inclue pas, en tout cas sous sa forme numérique, la préface écrite par Yeovil à l’occasion de la sortie de la première anthologie Genevieve, en 2005. Cette dernière, présente sur le site de l’auteur, donne des informations intéressantes et n’est pas avare en commentaires savoureux sur la genèse de cette oeuvre.

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Red Thirst :

INTRIGUE:

Réveil brutal pour Vukotich le mercenaire (dont nous croiseront l’incarnation vénérable dans ‘The Ignorant Armies’), qui émerge d’un coma moins éthylique que concussé, conséquence regrettable mais prévisible de sa grande idée de vouloir s’encanailler dans une taverne clandestine de Zhufbar, alors que Claes Glinka et ses séides y avaient pris leurs quartiers d’hiver. Qui est Claes Glinka, me demanderez-vous ? Eh bien, pauvres incultes que vous êtes, Herr Glinka n’est rien de moins que le Frigide Barjot du Vieux Monde, soit un zélote obscurantiste horrifié par la décadence des mœurs contemporaines, mais possédant un talent marketing et événementiel certain, ce qui lui a permis de recruter assez de followers et d’influence auprès des autorités compétentes – ici l’Empereur Luitpold – pour organiser des manifs pour (et contre) tous d’un bout à l’autre du pays. Entre deux autodafés, fermeture de bordels et abattage de vignobles, Glinka trouve également le temps d’ouvrir des Starbucks à la place des estaminets dans les villes que sa caravane visite. Bref, un fléau.

Vuko, lui, est un jeune mercenaire en quête d’un nouvel employeur, à la suite du décès prématuré du précédent, et qui se disait que passer une tête – moustachue – dans la cité où se tenait le Festival d’Ulric (l’équivalent de l’Eurosatory de l’Empire) serait une riche idée pour se trouver une nouvelle affectation. Peu concerné, ou sensible, aux arguments du Gardien de la Moralité, notre héros s’est donc fait surprendre en plein stupre (la fornication était en projet) par quelques croisés à gourdins, et revient à lui à l’arrière d’une carriole l’emmenant, ainsi que quelques dizaines de malheureux, dans des camps de travail gobelins. C’est comme ça que la Glinka se finance. Seule consolation, il réalise que le compagnon de travée auquel il est enchaîné est une fort accorte escort, embarquée comme lui par la patrouille. En tête de wagon, nous faisons la connaissance de Dien Ch’ing, Cathayen d’origine, comme son nom l’indique, et fidèle suivant de Glinka… en apparence. En fait, Ch’ing est un disciple de Tsien-Tsin, où Tzeentch comme certains l’appellent également, expulsé de sa pagode par les moines guerriers du Roi Singe, l’ennemi mortel des Dieux du Chaos dans le grand Orient. Guidé par ses visions, Ch’ing a infiltré la croisade de Glinka afin de porter quelques plans retors du Grand Architecte à maturité, et n’attend que le bon moment pour retourner son kimono. En attendant, il s’amuse à convoyer les mauvais sujets de l’Empire au goulag, ce qui est une activité comme une autre.

Un arbre tombé en travers de la route donne toutefois l’occasion à Vukotich d’échapper à ce funeste destin, notre intrépide Kislévite saisissant sa chance ainsi que son infortunée voisine, et plongeant dans la forêt en contrebas de la route après l’immobilisation du wagon. Outré par ce manque de savoir-vivre, Ch’ing envoie un trio de grouillots régler leur compte aux déserteurs, qui n’ont cependant aucun mal à en venir à bout. Craignant initialement que sa camarade de chaîne ne se révèle être un boulet (ce qui aurait été logique, finalement), Vukotich est favorablement surpris, et même impressionné, par l’agilité et la dextérité de sa compagne, dont l’aide se révèle précieuse pour dézinguer les goons de Ch’ing. C’est donc avec regret qu’il se résout à lui trancher la main avec l’épée qu’il a récupérée sur un cadavre de PNG malchanceux, afin de regagner sa liberté… sans grand succès. Et pour cause, sa comparse n’est autre que la vampire Genevieve, dont les super pouvoirs incluent donc une peau en kevlar (pratique). Mi (plutôt que morte) vivante avec des principes, elle pardonne à Vukotich son coup de sang, et, ne pouvant pas non plus briser les menottes qui les lient – surtout que la sienne est plaquée argent –, le convainc de faire équipe jusqu’à la première forge qui se présentera à eux. Proposition acceptée par son (désormais) side-kick, qui réalise de toute façon qu’il a intérêt à filer droit s’il ne souhaite pas terminer en casse-dalle pour amphisbaenae1.

img430Après quelques heures de marche, notre couple involontaire arrive dans un petit bled paumé, et réussit à squatter une cabane abandonnée pour permettre à Vukotich de reprendre des forces2. Par un hasard qui ne sera pas heureux pour tout le monde, comme nous allons le voir, cette même cabane a été choisie par deux individus de rang pour se rencontrer discrètement. Le premier est le Seigneur Maréchal de Zhufbar, Wladislaw Blasko, qui a laissé Glinka mettre la cité en coupe réglée sans faire trop de vagues… parce qu’il est lui aussi un agent du Chaos infiltré. Ça commence à faire beaucoup. Son interlocuteur est le Haut Prêtre de Tzeentch Yefimovich, ayant tiré le don « je suis une ampoule de feu rouge » dans la table des mutations, et habituellement stationné dans le Kislev, mais en goguette dans le Sud pour les vacances. Nos deux conspirateurs s’entretiennent de leur plan machiavélique, qui consiste en l’assassinat de Glinka lors d’une prochaine cérémonie, ce qui permettra à Blasko de prendre sa place à la tête de la croisade, et de laisser opportunément ouverts aux hordes orientales les cols des Montagnes Noires. Bien évidemment, Vukotich et Genevieve, camouflé sous un drap de scenarium, voient et entendent tout, et décident, à contre-cœur mais il le faut bien, d’aller sauver le Gardien de la Moralité pour éviter son remplacement.

Un peu plus loin, nous retrouvons Dien Ch’ing, perturbé par de sombres pressentiments et l’insatisfaction du devoir non-accompli. Ayant été chargé par Yefimovich d’occire Glinka, il ne veut rien laisser au hasard, et se lance dans une séance de divination à l’aide d’un bol tournant, ce qui lui permet d’assister par visio à la rencontre de son boss avec Blasko, mais également de s’apercevoir que ces derniers n’étaient pas seuls dans la piaule. Contrarié par ce coup du sort, il invoque le fantôme de l’un de ses vénérables ancêtres, l’honorable Xhou, aller négocier (ils sont urbains ces Cathayens) avec les contrevenants, afin qu’ils laissent les événements suivre leur cours. Malgré les trésors de courtoisie et de diplomatie dont fait preuve Xhou, qui se matérialise devant Vukotich et Genevieve alors qu’ils avaient repris la route de Zhufbar en charrette, il ne parvient pas à conclure un deal avec nos héros, qui finissent par le bannir comme l’ennuyeux pop-up spectral qu’il est. Au moins, Ch’ing aura essayé de résoudre le différent à l’amiable. Il passe à nouveau à l’action quelques heures plus tard en envoyant cinq élémentaux régler leur compte aux fâcheux à leur sortie de la ville de Chloesti, où les séides de Glinka avaient organisé un autodafé de la délation3 (c’est comme un pot de l’amitié, sauf que c’est différent), qui a fini dans une très chaude ambiance4. Dépassés par les événements, les aventuriers s’en sortent grâce à la culture G de Mme G, qui réussit à monter les démons les uns contre les autres en demandant innocemment qui avait la plus grosse… énergie mystique parmi le quintet, provoquant un affrontement fratricide aux résultats peu concluants.

Tout est prêt pour le grand final de cette longue nouvelle. Genevieve et ce gros dalleux de Vukotich arrivent sur les rivages de la Blackwater, trouvent un bateau de pêche et partent à la rame vers Zhufbar. Dans la cité, Ch’ing se prépare à commettre l’irréparable au cours d’une adresse publique de Glinka, organisée sur la plage municipale (pourquoi se priver ?). Le plan machiavélique et savamment planifié de nos affreux est toutefois contrarié par l’arrivée soudaine de Genny et Vuko, qui parviennent à créer une belle pagaille parmi l’auguste assemblée, peut-être en exhibant les parties charnues de leur anatomie à la cantonade. Hé, il faut ce qu’il faut. La dague magique de Ch’ing n’ayant pas eu le temps de charger totalement, le cultiste voit s’enfuir sa cible sans avoir pu tenter sa chance. Il a toutefois l’occasion de se venger des éléments perturbateurs et de leurs gros nez d’Occidentaux en leur faisant bénéficier d’un masterclass de MMA5.

Le combat qui s’engage voit le bonze démoniaque tenter de mettre des grands chassés dans la face de ses Némésis, avec des résultats peu concluants, la vampiritude de Genevieve lui permettant d’esquiver ou d’encaisser facilement les coups de pied retournés et manchettes cathayennes de Ch’ing. On suppose que Vukotich, toujours enchaîné à sa dulcinée, a dû avoir un bras disloqué à la fin de la journée. Frustré dans ses tentatives de muay-thaï, l’expat’ se rabat sur ses pouvoirs arcaniques pour finir le taf, mais se trouve là encore contrecarré, cette fois-ci par l’alliance, que dis-je, l’alliage, de circonstance entre le fer et l’argent des chaînes liant Genevieve et Vukotich, qui se révèle être l’anathème du choke-tilège jeté par Ch’ing sur le malheureux Glinka. L’homme sage connaissant ses limites, le moine Ch’(aol)ing décide enfin d’aller voir ailleurs si Tsien-Tsin y est, et prend son congé de Zhufbar, non sans promettre à Genevieve qu’il reprendra contact sous quinzaine (de jours, d’années ou de siècles, mystère). On se rend alors compte que Blasko, qui avait tenté d’aider son pote chaotique dans la mêlée en surinant Vukotich, est tombé dans la Blackwater en armure complète, et peut donc être rayé des cadres. Plus intéressant, l’inflexible puritain Glinka se révèle être un mutant, comme l’atteste la paire de bras surnuméraires qu’il dissimulait sous sa chasuble. C’en est fini de sa croisade, et probablement de son existence, si l’Empire se révèle fidèle à sa politique en matière de diversité.

Fatigué par les événements, Vukotich pique un gros roupillon de deux jours sitôt ses menottes ôtées par le forgeron de fonction, et apprend à son réveil que sa partner in crime-solving n’a pas fait de vieux os à Zhufbar, et est repartie vivre sa non-vie dans l’anonymat qui lui convient mieux. C’est l’affable Maximilian von Konigswald, père d’Oswald (le vainqueur de Drachenfels et compagnon d’armes de Genevieve), qui met le mercenaire au courant des dernières actualités, entre deux rasades d’eau de vie. Plaqué par son crush, Vukotich se sent tout d’un coup bien chose, mais, rassurez-vous, il s’en remettra.

1 : Vous ne savez pas ce que c’est ? Moins non plus. Seul Jack Yeovil est au courant, à mon avis.
2 : Et de rêver, prémonitoirement, d’une bataille au sommet du monde mettant aux prises une faune bigarrée. Il l’ignore encore, mais il s’agit de la conclusion d’Ignorant Armies.
3 : Et où Genevieve rencontre un tout jeune Dietlef Sierck (‘Drachenfels’) déjà sensible aux choses artistiques, et son acariâtre môman.
4 : Pour Vukotich aussi, notez, car une péripétie annexe mais distrayante voit nos héros passer la nuit dans un hôtel de passe reconverti en établissement honorable à la suite des puritains de Glinka, et profiter l’un de l’autre pour réaliser un échange de fluides. Surpris au réveil par une bande de clercs de notaires patibulaires, nos tourtereaux étaient sur le point de se marier sous la contrainte au moment où arriva le cinquième élément (et ses potes avec lui).
: Ce qui dans ce contexte veut dire Mystic Martial Arts.

AVIS:

‘Red Thirst’ (baptisé ainsi en référence au penchant de Genevieve pour le gros rouge) est une des nouvelles qui justifient que l’on s’intéresse de plus près aux origines de la GW-Fiction. Jack Yeovil fait en effet très fort avec cet épisode de ce que l’on doit bien appeler son cycle Genevieve, en parvenant à cocher toutes les cases du cahier des charges de ce type de publication. On pourrait bien sûr parler de son choix de mettre en avant un pan mystérieux du fluff de Warhammer Fantasy, et ce faisant, de le développer, par l’inclusion du personnage de Ch’ing (à ma connaissance le seul Cathayen dépeint dans une œuvre de fiction). Il faudrait alors souligner qu’en quelques lignes, Yeovil parvient à donner une véritable impression d’exotisme et de profondeur à un concept sur lequel GW s’est assis pendant plus de trente ans. Les apports de background ne se cantonnent cependant pas à l’Extrême Orient : l’Empire en bénéficie également, tant au niveau culturel que géopolitique. Et que dire de la figure de Yefimovich, qui illumine (dans tous les sens du terme) de sa présence les quelques pages dans lesquelles il apparaît.

Une autre réussite à mettre au crédit de Jack Yeovil réside dans la construction et le déroulement de son propos, qui enchaîne les péripéties avec un rythme et une facilité déconcertants. La taille du résumé (qui porte bien son nom, car il en reste de là où ça vient) ci-dessus devrait vous donner une bonne idée de la richesse narrative de Red Thirst. C’est la marque des grands conteurs que d’arriver à agencer leur récit sans temps mort ni à coups, et Yeovil fait définitivement partie de cette catégorie. Soulignons en outre la belle variété d’ambiance dont bénéficie cette nouvelle, du grimdark as usual au vaudeville (la scène dans l’hôtel de passe est savoureuse) en passant par la fugace romance entre Vukotich et Genevieve et la légende orientale (l’attaque des élémentaux). Peu nombreux sont les textes de GW-Fiction disposant d’une telle amplitude, bien que l’on puisse également citer William King (un autre grand ancien) ici.

Terminons par la remarque que Jack Yeovil a sans doute été le premier auteur de GW à raisonner en termes d’univers narratif, bien des années avant qu’Abnett ne créé son Daniverse, imité par Graham McNeill et d’autres contributeurs de la Black Library au fil des années. Les liens d’intrigues tissés par Yeovil dans ce Red Thirst sont une autre très bonne raison de lire cette nouvelle… si vous êtes familiers avec la galerie de personnages créés par l’auteur. Genevieve, bien sûr, mais également Vukotich (Ignorant Armies, qui gagne ici son surnom d’Homme de Fer), la lignée des von Konigswald (Drachenfels), un Dietlef Sierck en culottes courtes (ibid)… et sans doute d’autres figures que Yeovil a repris dans d’autres nouvelles et romans lors de sa pige pour Games Workshop. Mine de rien, savoir que l’investissement dans le corpus d’un auteur sera récompensé par des caméos, clins d’œil et autres easter eggs constitue une motivation forte pour le lecteur, et je suis plus déterminé que jamais à combler mes lacunes en Yeovilerie1. Bref, une authentique pépite de la littérature GWesque, injustement condamnée à l’oubli par la politique éditoriale de Nottingham. Si cette critique ne vous donne ne serait-ce que l’envie de vous pencher sur le cas Jack Yeovil (toujours non-traduit à l’heure actuelle, et c’est tragique), elle aura atteint son objectif.

1 : Je suis sûr que cela fera de moi un nouvel homme. 😉

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Ignorant Armies :

INTRIGUE:

Depuis dix ans, date du sac du manoir familial, du massacre de ses occupants et de l’enlèvement de son jeune frère Wolf par le Champion du Chaos Cicatrice (qui s’appelle ainsi à cause de… son strabisme appuyé, évidemment), Johann von Mecklenberg piste la bande de sa Némésis, espérant toujours pouvoir tirer son cadet des griffes du pillard balafré. Accompagné par son taciturne et ironique (on le surnomme l’Homme de Fer) tuteur, Vukotich, le jeune noble a traîné ses guêtres chamarrées et sa crinière de feu – si l’on se fie à la vision de John Blanche de son sujet – d’un bout à l’autre du Vieux Monde, et vécut maintes pittoresques aventures au passage, sans pour autant parvenir à refaire son retard sur l’insaisissable Cicatrice. Jusqu’à maintenant tout du moins.

S’étant arrêtés pour la nuit dans une sombre forêt du nord de Kislev, les chasseurs, après avoir achevé l’un de leurs chevaux qui montrait quelques signes de faiblesse, tendent un piège à un quatuor de mutants peu discrets, envoyés par ‘Tris leur régler leur compte. Comme les 798.841 fois précédentes – en dix ans, on a le temps d’en fomenter des embuscades – Jojo et Vuko s’en sortent haut la main, bien que ce dernier ait perdu quelques points de vie au contact du sang contaminé (un scandale !) de l’homme crapaud qu’il vient de mettre en bouteille. Il en faut toutefois plus pour décourager notre paire de choc, Johann bricolant fissa un brancard de fortune pour permettre à son mentor de passer une convalescence relativement confortable au cul de leur dernier cheval. Que demande le peuple. Ayant appris de la bouche l’orifice facial du meneur des traînards, une ancienne connaissance (Andreas) du manoir des von Mecklenberg ayant abandonné ses études de taxidermie pour devenir Élu du Chaos à la suite de la descente de Cicatrice, que ce dernier se dirigeait vers le Nord et un mystérieux champ de bataille, Johann mène ses suivants (je compte le cheval qui aurait dû s’appeler Tsar – it’s complicated –  parmi ces derniers pour pouvoir user du pluriel) dans la direction indiquée, et finit par déboucher sur une plaine jonchée de cadavres en divers états de décomposition.

Un hameau se dresse, de façon incongrue, au milieu du charnier, qui ne peut être que le champ de bataille auquel le moribond a fait référence. Hêlant les habitants du lieu afin d’obtenir l’hospitalité pour la nuit, Johann fait bientôt la rencontre d’une troupe de lunatiques bigarrés mais très cordiaux, qui acceptent sans trop discuter d’accueillir les deux nouveaux-venus dans leurs cahutes. Le dîner qui s’en suit permet au baron déchu de faire la connaissance du Nain Kleinzack, autorité temporelle de la communauté, et dont le mandat de maire n’est en rien perturbé par l’épée qui le traverse de part en part (blessure de guerre). Ce dernier informe obligeamment ses hôtes qu’ils ont bien atteint le lieu où, chaque nuit, les armées du Chaos s’affrontent pour gagner la faveur des Dieux Sombres. L’endroit est un détour obligé pour les Champions avides de faire leur preuve, et il n’est donc pas étonnant que Cicatrice ait emmené sa bande y passer le weekend. Comme en témoigne le vacarme assourdissant qui s’abat bientôt sur le village, la légende est tout ce qu’il y a de plus fondée, et, si le sommeil ne vient pas facilement à nos héros cette nuit là (en même temps, difficile de faire venir la maréchaussée dans le Pays des Trolls pour faire constater du tapage nocturne), ils s’endorment avec la certitude que leur quête est sur le point de s’achever.

Le lendemain, Johann et Vukotich accompagnent leurs bienfaiteurs à la surface, où ces derniers s’activent à piller les cadavres et à nettoyer le champ de bataille afin que les combattants du soir puissent s’entre-tuer dans des conditions décentes. Demandant à tout hasard à Kleinzack s’il aurait entendu parler de la bande de Cicatrice, dont les guerriers arborent un éclair rouge à travers le visage, les deux voyageurs ont la surprise d’entendre ce dernier leur proposer de les mener jusqu’au chef de guerre en personne. Et en effet, c’est bien cette vieille badingue de Cicatrice que Johann et Vukotich trouvent à l’agonie sur le pré, bien loin de sa prime et terrifiante jeunesse il faut bien le dire. Avant que la mort ne l’emporte (un suicide plein de classe démontrant que, malgré ses méfaits, notre homme avait le cœur sur, ou en tout cas dans, la main), le vieux Champion révèle à un Johann outré s’être fait cruellement navrer par le plus si innocent que ça Wolf. Ce dernier a en effet repris les rênes de la bande depuis deux ans, reléguant Cicatrice à une pré-retraite honorifique, qui s’est donc finie en eau de boudin.

Une mauvaise nouvelle n’arrivant jamais seule, J&V tombent dans l’embuscade tendue par Kleinzack et ses sbires, que Wolf a payé pour qu’ils leur remettent leurs indéfectibles poursuivants. Malheureusement pour le fourbe nain, son avidité le mènera à sa perte lorsque Johann parvient à se libérer de ses liens alors que le nabot était en train de lui faire les poches. Délesté de son épée au moment de sa capture, Johann se venge en faisant une « Roi Arthur » sur Kleinzack, lui empruntant l’épée qu’il avait en travers du thorax depuis toutes ces années, avec des conséquences fatales pour l’avorton. La nuit étant tombée entre temps, l’affrontement final entre les deux frères peut prendre place, et Johann fait bientôt face à son frangin, qui a acquis la plupart des caractéristiques de son animal totem depuis la dernière fois qu’il se sont vus, il y a dix ans.

Le combat entre les deux von Mecklenberg s’engage donc, tandis que Vukotich corrige les groupies de Wolf à grands coups de hache à l’arrière plan, et, alors que le nouveau chef de guerre semble insensible aux attaques fraternelles, Johann a soudain la bonne idée de viser l’épaule de son adversaire bestial. C’est là que la flèche qu’il avait tirée – comme une patate il faut bien le reconnaître – dix ans plus tôt au cours d’une chasse, avait atteint par erreur Wolf, et contraint ce dernier à retourner au manoir pour se faire soigner, juste au moment où Cicatrice frappait à la porte (pas de chance). Laissée sans traitement pendant une décennie, cette blessure, en tant que seul lien avec son passé « civilisé », constitue le point faible du Champion. Alors qu’il est sur le point de donner le coup de grâce à son frère, Johann est interrompu par le kill-bomb de Vukotich, qui se place sur la trajectoire de la lame et se retrouve prestement embroché. Pourquoi, me demanderez-vous ? Eh bien parce que l’altruiste mentor a un plan pour inverser la malédiction chaotique ayant transformé Wolf, mais doit pour cela donner de sa personne, et de son sang, plus précisément. S’étant littéralement saigné aux quatre veines tout en marmonnant les incantations consacrées, Vuko’ tombe raide mort, le devoir accompli. Décidément, il ne fait pas bon s’appeler Iron Man. Son sacrifice n’est toutefois pas vain, un Wolf frais comme un gardon émergeant de la sorte de chrysalide magique s’étant refermée sur lui suite à ce rituel impromptu, et que Johann a défendue jusqu’à la levée du jour en bon grand frère protecteur qu’il est. Bref, si vous aviez encore besoin d’être convaincu que le don de sang peut sauver des vies, j’espère que vous êtes maintenant convaincus !

AVIS:

Ignorant Armies - 1Depuis son titre, d’une classe folle1 et d’un warhammerisme consommé (la véritable nature du Chaos n’apparaît pas à ceux qui se battent en son nom jusqu’à ce qu’il soit trop tard), jusqu’à sa conclusion heureuse-même-si-on-pourrait-arguer-qu-elle-n-est-pas-valide-d-un-point-de-vue-fluffique, The Ignorant Armies est une démonstration de ce qu’une nouvelle WFB devrait être. La quête décennale de Johann et de Vukotich à travers le Vieux Monde, sur les traces de l’insaisissable Cicatrice et sa bande de maraudeurs chaotiques, permet à Yeovil d’aborder tous les grands thèmes de l’univers de Warhammer : l’opposition/complémentarité entre l’ordre et le Chaos (depuis les ravages infligés par Cicatrice à l’Empire, dont il était un des défenseurs autrefois2, jusqu’au village du champ de bataille, « symbiote civilisé » opérant de concert avec l’anarchie de la mêlée perpétuelle qui sévit à sa porte), le grimdark héroïque3 (le cheval qu’on présente en détail avant de l’achever, faisant écho avec le sacrifice ultime de Vukotich à la fin de la nouvelle), l’étrangeté inquiétante et démente de l’univers (à peu près tous les habitants du village, avec des mentions spéciales attribuées à Kleinzack l’embroché et Mischa le polythéiste), sans oublier la nature proprement inhumaine et traître du Chaos, qui finit toujours par se retourner contre ses serviteurs. La description du terrible Cicatrice en vieillard défiguré par les mutations et laissé à l’agonie sur le champ de bataille est très intéressante de ce point de vue, mais l’accrochage avec Andreas en début de nouvelle tombe tout aussi juste.

En plus de faire carton plein sur le fond, Yeovil régale sur la forme, démontrant avec style et brio sa maîtrise de la nouvelle d’aventures. Son usage intelligent de flashbacks en début de récit donne l’impression au lecteur d’évoluer dans un roman de trois cents pages plutôt que dans une nouvelle de cinquante, en plus de donner une profondeur certaine à la traque de Johann et de son mentor. Plutôt à l’aise dans la mise en scène de combats, une composante essentielle du genre, dont il faut savoir user sans en abuser, Jack Yeovil donne au lecteur ce qu’il est en droit d’attendre à ce niveau, mais ce sont bien dans les scènes plus « calmes », qu’il s’agisse de descriptions ou de dialogues, que les talents de conteur de notre homme se révèlent les plus prenants et efficaces.

Lire cette nouvelle, c’est toucher au cœur battant, à la fois pourri et grandiose, du fluff de Warhammer Fantasy Battle, et s’il n’y avait qu’un texte de GW-Fiction à recommander au nouveau-venu désireux de prendre la mesure de cet univers si particulier, The Ignorant Armies serait probablement mon choix.

: Comme l’indiquent les trois vers placés par l’auteur au début de la nouvelle, cette dernière a également été inspirée par le poème ‘Dover Beach’ de Matthew Arnold (1867).
2 : Décidément, Archaon n’a rien inventé.
3 : La notion que les « gentils » ne peuvent triompher sans consentir à de lourds sacrifices, alors que les « méchants » arrivent généralement facilement à leurs fins.

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No Gold in the Grey Mountains :

INTRIGUE:

No Gold in the Grey MountainsJoh Lamprecht, patron d’une TPE de collecte de fonds dans l’arrière-pays du Reikland, emmène sa bande de hors la loi à l’assaut de la diligence transportant les taxes de la ville minière de Raukner jusqu’aux coffres du bon empereur Karl Franz, lorsque le destin lui joue un bien vilain tour. Le fiacre ciblé se révèle inexplicablement dénué du précieux chargement convoité par les bandits1, qui peuvent cependant se consoler, après s’être passé les nerfs sur le pauvre conducteur et le noble pompeux qui voyageait dans la carriole (et s’est rendu compte de la dangerosité insoupçonnée de l’essuyage de carreaux, si votre interlocuteur a une arbalète), à la vue de la dernière passagère. La dame Melissa d’Acques, 12 ans, autant de neurones et, surtout, son papa très riche, peuvent en effet faire le bonheur de Joh et consorts, pour un peu que l’ado attardée sur laquelle ils ont mis la main, et qui ne réalise pas du tout la gravité de sa situation, leur donne les moyens d’expédier une demande de rançon en bonne et due forme à l’un de ses nombreux domiciles.

Pour l’heure, les malfrats (l’affreux Johjoh, le nemrod anxieux Yann Groeteschele, le gladiateur psychopathe et lycantrope Rotwang, et Fat Fool Freder, comme ses collègues l’appellent) décident d’emmener leur invitée jusqu’à leur camp de base, installé dans les ruines lugubres mais désertes du château de Drachenfels (l’histoire se déroule après la purge organisée par Oswald et Genevieve). L’ambiance n’est pas folichonne et la déco franchement datée, mais les voisins ne viennent pas vous embêter, c’est certain. La nuit tombée et Melissa enfermée dans sa chambre, la bande se réunit pour établir un plan d’actions visant à enfin toucher le gros lot, après des mois de chiche brigandage. Cependant, à l’intérieur du château abandonné, une ancienne et maléfique présence s’est éveillée, et Melissa pourrait bien ne pas être la seule à devoir se faire un mauvais sang…

1 : Qui aurait dû se douter que les braves mineurs de Raukner, dont trois virements avaient déjà été interceptés par les ruffians dans des conditions similaires, avaient changé leurs préférences de paiement. Un petit Lydia, ça change tout.

AVIS:

Après avoir donné un petit masterclass en matière de nouvelle d’aventures à la sauce Warhammer dans son Ignorant Armies, publié dans le recueil du même nom, Yeovil se penche sur un genre qu’il maîtrise particulièrement : l’horreur. Et si on ne retrouve pas ici de personnage précédemment mis en scène par l’auteur, mis à part une discrète mention de Geneviève et d’Oswald, l’utilisation du château – abandonné – de Drachenfels comme décor de ce court format à la sauce survival/maison hantée ferait presque illusion, tant ce lieu maudit pèse sur l’ambiance et l’intrigue de No Gold… On parle souvent d’Abnett comme le mètre étalon de la GW-Fiction, et c’est indubitablement vrai pour la production moderne et contemporaine de cette dernière (depuis le lancement de la Black Library, pour simplifier), mais Yeovil aurait fait un concurrent sérieux s’il avait repris du service après la fin de l’aventure GW Books/Boxtree. Ici, l’auteur démontre en quelques paragraphes sa capacité à instiller une atmosphère et convoquer des personnages plus intrigants qu’attachants, faisant de cette nouvelle un authentique page-turner. À un autre niveau, l’intégration d’un rebondissement final à l’intrigue permet de voir « travailler » un scénariste doué, que l’on ait deviné qui était l’antagoniste1 avant le dénouement final – auquel cas, on remarque l’habileté avec laquelle Yeovil entraîne le lecteur sur une fausse piste, en évitant avec maestria le moindre « faux raccord narratif » – ou bien que la surprise joue à plein – chanceux que vous êtes ! Blooding on the cake, on a même droit à quelques éléments de fluff, qui, si on peut douter de leur caractère canonique2 aujourd’hui, apportent une valeur ajoutée supplémentaire à No Gold… Bref, nous tenons ici, près de 30 ans avant que GW ne se lance sur le créneau, la toute première nouvelle de Warhammer Horror, qui n’a pas pris une ride et ferait une pièce centrale de choix dans les anthologies modernes de la BL. Faîtes moi confiance, je les ai lues…

1 : Ce qui était mon cas à la seconde lecture (qui a pris place tellement longtemps après la première que j’avais tout oublié de l’histoire, donc il y avait tout de même un challenge !). Je ne sais pas pourquoi mais j’ai eu une sorte d’épiphanie à la « Entretien avec un Vampire » au moment de la première apparition de la vieille dans la nouvelle.
2 : Friendly reminder que Yeovil a tellement impressionné le patron de l’époque de GW, Bryan Ansell, que ce dernier a arbitré un conflit de background en faveur de l’écrivain. C’est ainsi que Genevieve est restée une Vampire au lieu de devenir une Elfe.

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The Warhawk :

INTRIGUE:

La bête qui terrorisait Altdorf (‘Beasts in Velvet’) a beau avoir été mise hors d’état de nuire, la nature a horreur du vide et un nouveau tueur en série est venu égayer les rues de la capitale impériale, pour le plus grand divertissement macabre des sujets de Karl Franz. Enfin, ceux qui ne tombent pas sous les coups, ou plutôt, les serres, de l’Autour (Warhawk en anglais1), un psychopathe de haute volée assassinant ses proies par l’intermédiaire de son rapace soigneusement dressé, Belle. On pourrait se dire qu’un faucon n’est pas de taille à tuer un être humain normalement constitué, mais si l’oiseau dispose de rasoirs au bout des pattes et a été dressé pour viser la jugulaire, je pense que ça se tente. Ca tombe bien, c’est ici le cas. Si l’Autour tue, c’est parce qu’il est convaincu qu’il pourra réaliser son rêve aérien et s’élancer dans les cieux à la suite de Belle dès que cette dernière aura tué treize fois. Atteindre ce chiffre symbolique, ce sera accomplir le Moyen, une prophétie que notre tueur tient de son père, lui aussi passionné de fauconnerie martiale, et réussir là où les prototypes des ingénieurs et les incantations des sorciers ont échoué2. Au moment où notre histoire débute, l’Autour est en chasse de son dixième sacrifice, qu’il finit par choisir en la personne de Klaus-Ulric Stahlman, officier du guet de faction sur la Konigsplatz et flic le plus malchanceux du mois. Le temps d’un aller-retour aussi feutré que sanglant, le maléfique faucon scalpe proprement le malheureux poulet, laissant la foule ébruiter la nouvelle du nouveau crime de l’Autour.

Ce dixième assassinat ne fait pas les affaires de ‘Filthy’ Harald Kleindest, bombardé commandant de la « Brigade des Atrocités » à la suite de ses résultats probants dans la traque de la Bête, mais qui patine dans la choucroute sur cette nouvelle affaire. Et pour cause, l’Autour ne semble suivre aucune logique dans le choix de ses victimes, qui vont de l’orphelin des rues à la haute bourgeoisie d’Altdorf. La mort de Stahlman, représentant des forces de l’ordre, sonne de plus comme un pied de nez adressé par le tueur en série à ses adversaires, incapables de l’empêcher de nuire. Harald sait qu’il doit trouver un moyen de boucler l’affaire dans les prochains jours, avant que l’Autour ne frappe à nouveau, s’il veut conserver son statut, son poste et possiblement son intégrité physique (une foule effrayée peut être violente, c’est connu), mais la piste est désespérément ténue. Même les pouvoirs surnaturels de sa complice Rosanna Ophuls, clairvoyante de profession, ne lui apportent que de maigres indices sur le mode opératoire et l’affiliation de l’Autour. Cependant, la certitude que ce dernier ait fait sien le surnom donné à son propre père donne une idée à Harald, qui se rend aux archives du guet et exhume un mandat d’arrêt datant de trente ans, établi à l’encontre du Prince Vastarien et de son armée de mercenaires, les Vendeurs de Quiches Vainqueurs (Vastarien’s Vanquishers en VO, ça claque plus). Considéré par la moitié de l’Empire comme une tête brûlée incontrôlable et séditieuse, et par l’autre comme un héros romanesque traquant le mal au mépris des conventions et des arrangements entre puissants, Vastarien s’attacha les services de Papa Autour quelques décennies plus tôt, comme la mention de Warhawk sur le parchemin l’atteste de façon formelle. L’étape suivante sera de trouver un survivant de cette bande de chenapans qui serait disposé à souffler le véritable nom du père, pour en déduire celui du fils. Et cela tombe bien, la prison de Mundsen accueille en ce moment un de ces rares individus.

Pour prometteuse que soit cette piste, elle se montre rapidement complexe à suivre. Premièrement, le gouverneur de Mundsen ne se montre pas franchement coopératif, et il faut un petit tirage de chemise de la part de Harald pour le convaincre d’obtempérer. Deuxièmement, ni les années, si son séjour en prison n’ont été tendre envers le dénommé Rickard Stieglitz, qui se révèle être, entre autres lacunes, dénué de langue. Peu pratique pour dialoguer franchement avec ses premiers visiteurs depuis des lustres, il faut le reconnaître. Stieglitz, qui souhaite aider l’enquête, sans doute pour obtenir une remise de peine, sait bien lire et écrire, mais il lui manque le bras gauche et la majorité des doigts de la main droite, ce qui l’empêche de passer l’information par parchemin interposé. Enfin et surtout, il a été choisi par l’Autour comme onzième victime, et Harald et Rosanna ne peuvent empêcher Belle de venir mettre fin aux souffrances de Stieglitz en un tourbillon d’aile. Ce fiasco sanglant mène les autorités (in)compétentes à retirer l’enquête à Harald, pour la remettre à son rival Viereck, dont la sale manie d’exécuter le premier suspect lui tombant sous la main après chaque nouveau meurtre n’avait pas donné de résultats probants.

Il en faut cependant plus que cela pour décourager notre héros, son estomac crimophobe3 et son fidèle Magnin (une machette de jet, en quelque sorte). Comme il dispose toujours de son badge d’officier du guet et d’une réputation terrifiante auprès des cercles interlopes d’Altdorf, il décide d’user de ses derniers atouts pour obtenir l’information qui lui fait défaut auprès de la pègre locale, d’ordinaire très renseignée. Pour cela, il avise un trafiquant de substances illicites de sa connaissance qui traînait dans la taverne la plus mal famée de la ville, lui extorque quelques grammes de poussière de démon, un puissant analgésique/excitant/hallucinogène, traditionnellement utilisé par les berserkers de Norsca pour s’enjailler avant la bataille, et… commence à tabasser au hasard tous les individus (hommes et femmes, pas de sexisme) lui tombant sous la main. À chaque fois qu’il « termine » la visite d’un établissement, il fait un petit discours expliquant qu’il serait dans l’interêt de tout le monde que le nom de l’Autour Père lui soit communiqué dans les meilleurs délais, sans quoi sa croisade personnelle contre le crime se poursuivra with extreme prejudice. Après une folle nuit à fracasser des chaises sur des crânes, mettre des mandales dans des groins et transformer les tavernes en kits Ikea, Harald connaît logiquement une chute de tension brutale lorsque sa came cesse de faire effet, et est transporté au poste le plus proche pour se remettre de ses émotions.

À son réveil, c’est Rosanna qui lui apporte la nouvelle pour laquelle il a dévasté une bonne partie d’Altdorf : le dealer qu’il a racketé la veille (Ruger) s’est soudainement souvenu qu’un autre vétéran des Vainqueurs de Vastarien était en ville en ce moment, et comme il s’agit d’un Nain, il n’aura sans doute aucun mal à renseigner Harald sur l’identité des Autours père & fils. Mais il ne s’agit pas de n’importe quel Nain, notez bien : c’est du seul et de l’unique Gotrek Gurnisson dont il est question ici. Malgré le fait que son corps n’est plus qu’une plaie, Harald se traîne hors de sa paillasse et se met en route vers le bouge minable où le Tueur et son chroniqueur ont été aperçus pour la dernière fois pour avoir une petite discussion d’homme à Nain. Le temps presse en effet, car l’Autour a fait sa 12ème victime : Viereck, au moment où il exécutait un nouveau coupable ayant avoué sous la torture. Et Belle a laissé une invitation au nom de Kleindest sur les lieux du crime, invitant ce dernier à attraper son maître, s’il en était capable, bien sûr.

La rencontre entre nos héros se déroulant sans trop d’accroc, grâce aux capacités de facilitateur de leur sidekick respectif, Harald apprend enfin le nom de son suspect, et, surprise, ça ne fait aucun sens pour lui. Andrzej Robida lui est en effet un parfait inconnu, mais cela ne l’empêchera évidemment pas de mettre son rejeton hors d’état de nuire… dès qu’il aura trouvé où il crêche, évidemment. Ne voulant pas mettre en danger sa fidèle Rosanna, il la renvoie au QG de la Brigade des Atrocités avant de partir vers le quartier où la demeure Robida se trouve. Une rencontre fortuite avec le véritable Ruger, identifié par un constable qui trainait dans le coin pendant qu’elle attendait son Hubert (le système de fiacre d’Altdorf), met toutefois la puce à l’oreille de la voyante qu’il y a anguille sous roche. Si le camé qui lèche les pavés en bavant n’est pas celui qui l’a rencardé il y a quelques heures, qui l’a fait, et pourquoi ?

Début spoiler…La réponse est évidemment l’Autour (fils) lui-même, et parce qu’il a choisi Rosanna pour être sa treizième et dernière victime. Selon les règles cryptiques mais immuables du Moyen, cet ultime sacrifice doit venir de son plein gré se faire raptoriser par Belle, et les machinations du tueur4 conduisent effectivement Rosanna à rejoindre Harald chez Robida. Bien que disposant du double avantage de la préparation et de la connaissance des lieux, l’Autour échoue comme une buse à faire assassiner Miss Ophuls, la pauvre Belle se mangeant le Magnin d’Harald en plein dans le bréchet avant d’avoir rempli son office. Le ton passe alors au comique sur les ultimes pages de la nouvelle, l’Autour saisissant son oiseau à moitié crevé par les pattes pour tenter de finir le boulot par serres interposées avant que son faucon ne rende l’âme, mais se faisant interrompre violemment par Harald sans avoir pu griffer à mort Rosanna, et balancer depuis le balcon vers une mort certaine en contrebas, avec une petite punchline digne de ce nom. Avec un piteux 1/13, cette enquête ne rentrera pas dans les best scores de Filthy Harald, mais l’ordre peut au moins de nouveau régner dans les rues d’Altdorf…Fin spoiler

1 : Ce qui se traduit littéralement par « faucon de guerre ». C’est trop moche pour un nom de tueur en série, vous me l’accorderez.
2 : L’histoire ne dit pas s’il a essayé de boire du Red Bull. En même temps, l’Ostland, c’est pas à côté.
3 : Sans rire, c’est un peu son super pouvoir de mutant : dès qu’il sent un agissement répréhensible, Harald a une remontée d’acide. Utile mais caustique.
4 : Et une bonne dose de chance, car si Rosanna n’avait pas croisé fortuitement Ruger et un officier du guet capable d’identifier ce dernier au même moment, juste après le départ d’Harald, le fauconnier aurait pu se la mettre derrière l’oreille.

AVIS:

The Warhawk’ est la version miniaturisée de ‘Beasts in Velvet’, le roman de Yeovil adaptant les codes du polar noir à l’univers de Warhammer Fantasy Battle. Bien que la nouvelle se déroule après la traque de la Bête en question par Harald et Rosanna, l’auteur a eu le bon goût de dissocier les deux intrigues, rendant la lecture individuelle de ‘The Warhawk’ tout à fait possible pour ceux qui n’ont pas (encore) lu le long format précédemment nommé. Comme à chaque fois avec Yeovil, on a le droit à un savant mélange d’immersion profonde et fouillée dans l’univers où se déroule son récit et de clins d’œil appuyés à notre monde, assez faciles à identifier pour le lecteur attentif. D’un côté, c’est un Altdorf populaire, impitoyable et politique (mention spéciale aux factions de révolutionnaires anti-impérialistes que Yeovil passe en revue) qui prend vie comme peu souvent dans les œuvres de la BL. De l’autre, on prend plaisir à voir l’inspecteur Harald dégainer son énorme Magnin1 pour ruiner la journée des punks du Reikland. L’alternance entre les points de vue de l’Autour et ceux de ses poursuivants, et la succession de courtes vignettes, donne un dynamisme indéniable à cette nouvelle qui traîne du côté de la novella par sa longueur, et vient quelque peu compenser le manque de suspens de l’intrigue, qui s’avère finalement assez pauvre en rebondissements et révélations. On peut d’ailleurs arguer que c’est le petit mais savoureux cameo de Gotrek (à l’image de ce dernier) qui constitue l’apex de ‘The Warhawk’, bien plus que la confrontation finale entre le tueur et Harald et Rosanna. Comme dit plus haut, cette conclusion n’est pas vraiment à la hauteur des pages précédentes, ce qui est évidemment dommage, mais était peut-être voulu par Yeovil. En effet, l’auteur fait réaliser à Harald à ce moment que les monstres criminels ne se révèlent toujours être que de « simples » détraqués une fois qu’ils ont été identifiés et capturés, et malgré son plan (presque) infaillible et son costume en cuir fait maison, l’Autour n’a pas fait exception. Une vraie bonne lecture en somme, que l’on peut considérer comme l’ancêtre de la gamme Warhammer Crime2, avec 18 ans d’avance…

1 : Pour les plus jeunes lecteurs de cette chronique, c’est une référence à l’Inspecteur Harry (Dirty Harry en VO) et à son improbable 44 Magnum.
2 : Comme Yeovil est également le père de Warhammer Horror (‘Drachenfels’ a été réédité spécialement pour le lancement de cette gamme), ça fait deux franchises de la GW-Fiction placées sous le tutelage du bon Jack.

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The Ibby the Fish Factor :

INTRIGUE:

Dix ans après avoir déserté Altdorf et son grand amour Detlef Sierck, the one & only Genevieve Sandrine du Pointe du Lac Dieudonné, Vampire teenager, actrice amatrice et accessoirement sauveuse de l’Empire, est de retour dans la capitale impériale. La cité n’est toutefois pas sûre pour une mort-vivante, même aussi accorte et raisonnable que Gené (pour les intimes). Déjà bien échaudées par les guerres vampiriques instiguées par ces tapes à l’œil de Comtes von Carstein, les bonnes gens de l’Empire prêtent en effet une oreille attentive aux discours d’une nouvelle figure eclésiastique, Antiochus Bland, Patriarche du Temple de Morr et ennemi farouche de la non-vie. À son instigation, l’Empereur a décrété l’Acte de Santé Publique (Sanitation Bill), dont la fameuse Clause 17 autorise les disciples du culte à incinérer tous les cadavres non sollicités par leurs proches sous trois jours. Genevieve, qui est techniquement considérée comme un cadavre du fait de sa nature vampirique, prend donc bien soin de passer pour la jeune et frêle Bretonienne tout juste arrivée dans la métropole que son apparence suggère qu’elle est. Toutefois, un accrochage bénin avec un tire laine ayant des vues sur sa bourse, pendant qu’elle mettait à exécution les fameux conseils du grand philosophe de Bordeleaux Zack Girac pour passer pour une bonne vivante, dégénère au point qu’elle se trouve entourée par une foule hostile, toute prête à lui planter des choses peu ragoûtantes à divers endroits de son anatomie. La tuile. Dans ces situations, il est toutefois pratique de pouvoir compter sur une force et une agilité peu commune, et Genevieve parvient à se tirer de ce traquenard grâce à sa détente sèche de Masaï sous stéroïde, le gros paquet de Sigmar (si si), et une statue creuse de l’Impératrice Margritta débouchant sur les égouts de la ville.

Pendant que notre héroïne se remet de ses émotions et nage vers sa destination, remontons à la surface pour nous retrouver dans le bureau d’un Detlef Sierck toujours génial mais bien moins svelte que dans ‘Drachenfels’. À la tête du théâtre Vargr Breughel, le dramaturge, metteur en scène et acteur a mené une vie de bohême depuis le départ de sa bien-aimée, et est actuellement occupé à la finition de sa dernière pièce ‘Genevieve et Vukotich: Complot Céleste à Zhufbar’. Librement adapté des véritables aventures de ces deux aventuriers, du temps où Sierck n’était qu’un gamin joufflu (voir ‘Red Thirst’), cette œuvre présente le défaut majeur d’avoir une Vampire comme héroïne, ce à quoi le visiteur du maître des lieux, Bland en personne, est farouchement opposé. Faudrait pas donner de mauvaises idées aux jeunes, toussa toussa. Ayant réussi à se débarrasser de l’insistant zélote en promettant de réfléchir à ses arguments, Sierck entend gratter derrière une cloison, et quand il ouvre le passage secret d’où vient le bruit suspect, c’est Genevieve qui lui tombe dans les bras. Après 1) un bain et 2) d’émouvantes, sensuelles et sanglantes retrouvailles, Gené doit cependant avouer à son amant que ce n’est pas que pour lui qu’elle est revenue à Altdorf. Elle a en effet été invitée par un autre Vampire pour une réunion pressante, et celle qui l’a faite mander n’est autre que sa chère « grand-mère » en non-vie, Dame Melissa d’Acques. Ayant reçu le baiser de sang à l’âge de 12 ans (mais il y a plus d’un millénaire), Melissa n’a eu aucun mal à se faire passer pour la pauvre orpheline Elsie, recueillie/exploitée par Sierck il y a un mois pour distribuer des programmes et vendre des churros, dans l’attente de l’arrivée de sa petite-fillotte. Elle a même contribué à assainir le théâtre en subsistant sur la colonie de rats qui y vivait, affamant cependant les chats résidents du Vargr Breughel. Une perle.

Si Melissa « Missy » d’Acques a organisé cette rencontre, c’est pour protéger la vie d’Antiochus Bland, qu’une bonne partie des Vampires du Vieux Monde veut voir aussi mort qu’eux. Un assassin mort vivant est prêt à frapper le meneur religieux, Missy en est certaine, et si cela pourrait provoquer une brève satisfaction (parce que le type est abject, reconnaissons-le), les conséquences à moyen et long termes risquent d’être terribles pour la gent vampirique. Il est donc convenu que Genevieve tente d’approcher Bland en prétendant être une recrue du culte de Morr, afin de pouvoir le protéger si besoin était, tandis que Missy et son « oncle » Sierck auront pour tâche d’enquêter parmi la communauté mort-vivante d’Altdorf à la recherche d’informations utiles sur l’identité de l’assassin en puissance.

Avant que les trois conspirateurs n’aient pu commencer à mettre leur plan à exécution, sortons dans la nuit interlope et humide d’Altdorf pour nous rendre sur les lieux d’un crime sordide. Le corps d’Ibrahim « Ibby » Fleuchtweig, figure proéminente du tristement célèbre gang des Poissons, a en effet été retrouvé sans vie dans une allée sombre du quartier des quais. Le cadavre porte une blessure caractéristique au niveau du cou, faisant logiquement penser aux forces de l’ordre et experts arcanolégistes (coucou Rosanna Ophuls !) présents sur les lieux qu’Ibby s’est fait pécho, euh pécher, par ses ennemis de toujours, le gang des Hameçons. Depuis que l’homme est homme et avant que les Dieux du Chaos ne poussent leur premier hurlement/râle/pet/pion, les Poissons et les Hameçons se font la guerre sur le Reikerbahn, à coup de noyades et d’égorgements très codifiés. L’affaire est donc un non-événement pour le guet, mais Bland et ses disciples, prévenus par des indicateurs, ne sont pas de cet avis. L’occasion est en effet trop belle pour la laisser passer : il serait très opportun que le malheureux Ibby ait été la victime d’une attaque de Vampire plutôt que d’un banal règlement de comptes. Faisant fi des protestations de la maréchaussée, Bland catapulte le Poisson pourrissant martyre de sa guerre contre les morts sans repos, et prend la pose pour la postérité avec la tête du macchabée, décapité dans la plus pure tradition vampirifuge, dans les mains, pour le bénéfice de sa chargée de com’, l’affutée Liesel von Sutin. Tirée à des centaines d’exemplaires et affichée sur tous les murs de la ville, cette illustration va contribuer à convaincre l’opinion publique de la nécessité et de l’urgence de mettre un terme à la menace de la non-vie (assez limitée en réalité) : c’est donc ça le fameux effet « Ibby le Poisson » (The Ibby the Fish Factor) qui a donné son titre à cette nouvelle. Je savais que vous vous posiez la question. Retour au théâtre pour le troisième acte.

Commençons par suivre Melissa et Dietlef dans la rue des cent tavernes, et plus précisément au Croissant de Lune, l’établissement de choix de l’aristocratie de la nuit. Inaccessible au tout venant et quasi désert en raison de la sale ambiance régnant à Altdorf, le Croissant reste toutefois une plaque tournante incontournable pour quiconque cherche des contacts et des informations à tendance nécrophiles. Bien que la méthode d’investigation de Melissa (se pinter au gros rouge en racontant sa vieillesse) laisse à désirer, et manque de laisser son chaperon à la merci des intentions hémophiles des quelques buveurs de sang zonant entre le flipper et le comptoir, l’arrivée soudaine d’une connaissance et employé de Dietlef, le machiniste Alvdnov Renastic, permet de faire avancer un peu l’intrigue. Car le nouveau-venu est…

Début spoiler…un ventriloquiste amateur, que Genevieve avait surpris en train de répéter en coulisse lors de son arrivée furtive dans le théâtre depuis les égouts. Vue et entendue de loin, la scène donnait à penser à la conjuration d’un démon mineur « azoivé de zang » (il faut que le Jeff Panacloc travaille un peu sa technique de projection de voix) plutôt qu’à la répétition d’une graine de Tatayet. Mais le plus important est surtout qu’Alvdnov Renastic se trouve être Vlad von Carstein – bravo aux férus d’anagrammes parmi vous. Pas LE Vlad von Carstein hein, mais l’héritier de la fameuse lignée, venu au Croissant de Lune dénoncer publiquement les rumeurs selon lesquelles il mènerait bientôt les morts sans repos contre les vivants. Renastic, qui n’est même pas un Vampire, préférerait percer dans le music hall, et fait donc une petite démonstration de son talent à Sierck et Melissa, avec des résultats mitigés. Mais nos deux larrons apprennent tout de même de sa bouche que l’assassin que l’on dit aux trousses de Bland serait Genevieve en personne, ce qui est évidemment peu probable…Fin spoiler

Genevieve, sous le pseudonyme et la perruque de Jenny Godgift (jeu-jeu-jeu de mots !) a quant à elle réussi à se faire embaucher comme garde du corps de Bland, après avoir fait mordre la poussière à un catcheur reconverti en moine, grâce à sa maîtrise des arts martiaux cathayens. Je vous assure que cette phrase reflète parfaitement ce qui se passe dans l’histoire, aucune exagération de ma part ici (comme si c’était mon genre). Elle a à peine le temps de commencer à sympathiser avec la dévouée Liesel von Sutin, qui se donne corps et âme au projet de croisade de son imbécile de patron, pour lequel elle éprouve des sentiments variés, que Bland se fait finalement attaquer dans sa cellule, malgré la protection des gardes postés devant sa porte (drogués et mordus au cou). Lorsqu’elle entre dans la piaule pour tenter d’empêcher l’irréparable et confronter l’assaillant, elle a la surprise de se retrouver face à un sosie de sa personne (en un peu plus grand, c’est vrai). Mais il ne s’agit évidemment que d’une pâle blonde imitation, fond teint blafard et crocs en os de poulet à l’appui, jouée par nulle autre que la diva Eva Savinien. Qui mieux qu’elle, qui a passé une bonne partie de sa carrière à camper Genevieve dans les productions de Dietlef Sierck, peut en effet mieux faire illusion dans ce rôle ? Ceci dit, des grands airs de Jacqueline Maillan, des griffes en plaqué argent et un vieux reste d’animus de l’inconstant Drachenfels1 ne font pas le poids face aux capacités surnaturelles d’une véritable immortelle. Après un crépage de chignon en règle, et un début d’incendie dans la chambre de Bland, toujours en vie mais affaibli par le suçon sanglant que lui a infligé Savinien, cette dernière finit en torche humaine, permettant à Genevieve d’évacuer les lieux avec son protégé avant qu’il ne suffoque.

Cet acte de bonté, qui a ruiné la permanente et le maquillage de Gené à tel point qu’elle se fait promptement identifier comme Vampire par le reste de la garde du temple, et maîtriser sans vergogne, aurait pu lui coûter très cher sans l’arrivée salutaire de Melissa et Sierck… et la misogynie absolue des sous fifres de Bland, qui refusent catégoriquement d’obéir aux ordres de Liesel von Sutin alors qu’elle est (et a toujours été) la seule à savoir ce qu’elle fait. On apprend que c’est elle qui a fomenté l’assassinat du Patriarche, et a pour cela drogué ses gardes, afin de pouvoir prendre sa place à la tête de la croisade et get some sh*t done. Pour cette mauvaise action, elle gagne un stage non rémunéré dans le Pays des Trolls dans un ordre d’anachorètes intégristes, afin de méditer sur la juste place des femmes dans les sociétés modernes. Non mais. De son côté, Bland est puni pour l’ensemble de son œuvre en étant vampirisé par Melissa, qui agrandit ainsi sa famille et force le culte de Morr à se choisir une nouvelle figure de proue du même coup. Les échanges de fluide ont parfois du bon tout de même.

Notre histoire se termine sur un tableau digne d’un conte de fées et indigne du monde sauvage, violent et nihiliste de Warhammer Fantasy Battle (mais une fois de temps en temps…) : Genevieve et Dietlef se marient en grande pompe dans leur théâtre, entourés de tous leurs proches et amis, depuis l’hériter du trône impérial jusqu’au doyen de l’EHPAD vampirique où Melissa crèche à l’année, et la la Clause 17 est dénoncée par Karl Franz. Vous pouvez transfuser le marié !

1 : Savinien a été brièvement possédée par ce dernier lors de la représentation finale de ‘Drachenfels’.

AVIS:

Tour de piste final pour les deux personnages centraux du cycle Geneviève (la principale intéressée et son love/blood interest Detlef Sierck), ‘The Ibby the Fish Factor’ termine en apothéose l’œuvre de Jack Yeovil pour Warhammer Fantasy Battle. Tout est réussi et porte la patte particulière du maître dans cette novella, depuis le titre1 merveilleusement non-sensique, jusqu’à l’happy ending marital de l’arc Geneviève & Dietlef2, faisant de ‘The Ibby…’ une lecture obligatoire pour tous les amateurs de cette série. Comme à son habitude, Yeovil jongle habilement entre les styles (action, suspens, humour) et parvient à concilier ajouts fluffiques notables, même si probablement pas très canon, et références savoureuses à notre monde. On croise ainsi William King, Popeye et Blanche-Neige au hasard des pages, tous dûment warhammerisés bien sûr, et je suis à peu près certain que cela n’est que la partie émergée de l’easter egg. Cette formule gagnante ayant été reprise des décennies plus tard par Josh Reynolds, notamment dans sa série sur l’Ordre de Manann, j’invite vivement tous les amateurs de cette dernière à donner sa chance à ‘The Ibby…’, qui a de grandes chances de leur plaire.

Si l’intrigue développée dans cette nouvelle fait de nombreuses références, et à plus d’un niveau, à celle de ‘Red Thirst‘, avec Bland dans le rôle de Glinka (notons que ces deux antagonistes connaîtront une fin similaire: « possédé » par le mal qu’ils avaient juré de détruire, et mis au ban de la société en conséquence) , dans une volonté manifeste de Yeovil de « boucler la boucle », c’est tout le Geniverse qui est passé, de près ou de loin, en revue dans cette ultime histoire, depuis le regretté Vukotich (‘Ignorant Armies’) jusqu’au plus récent Autour (‘The Warhawk’), en passant par Filthy Harald et Rosanna Ophuls (‘Beasts in Velvet’), Eva Sarinen (‘Drachenfels’) ou encore Melissa D’Acques (‘No Gold in the Grey Mountains’). On doit d’ailleurs décerner à la mamie Vampire le prix de meilleur second rôle comique dans ‘The Ibby…’, loin du registre horrifique dans lequel elle s’était illustrée dans ‘No Gold…’. Comme quoi, il n’est jamais trop tard pour se réinventer, surtout avec un auteur du calibre de Yeovil au scénario et aux dialogues. Dans un tout autre style, c’est l’assistante dévouée de Bland, Liesel von List, qui attire l’intérêt du lecteur par sa complexité et son ambivalence. Malgré son positionnement clair dans le camp des antagonistes, il n’est pas difficile d’éprouver de la compassion, voire de la sympathie envers ce personnage intelligent, totalement dévoué à sa cause et faisant preuve d’empathie pour son prochain, mais réduit au statut d’esclave domestique par sa condition féminine et l’univers éminemment mysogyne dans lequel elle évolue. Le sous-texte féministe de la nouvelle est d’ailleurs renforcé par le constat que tous les personnages véritablement actifs de cette dernière sont féminins, Sierck et Bland étant au final davantage spectateurs qu’acteurs du drame qui se joue.

Pour ces raisons, comme pour beaucoup d’autres, ‘The Ibby…’ mérite sa place parmi les tous meilleurs courts formats de GW-Fiction, tout comme Jack Yeovil mérite la sienne parmi ses contributeurs les plus illustres. À lire de préférence après avoir terminé/dévoré les autres romans et nouvelles de la série Genevieve, mais à lire en tous les cas, si vous en avez l’occasion.

1: Je dois humblement avouer que c’est le seul titre de GW-Fiction que je n’ai initialement pas compris. L’ajout de guillemets pour guider l’oeil des anglophones non natifs (The « Ibby the Fish » Factor) aurait certainement pu aider, Monsieur Yeovil! Au final, cela rajoute du charme à cette soumission qui n’en manquait déjà pas.
2: On ne peut pas s’attendre à ce qu’ils aient eu beaucoup d’enfants (à moins d’adoptions bien sûr), mais on peut espérer qu’ils vécurent heureux jusqu’à la fin de leur jour et la disparition du Monde qui Fut. L’indispensable Josh Reynolds, qui a évidemment lu la série, a même pris la peine de faire apparaître Geneviève dans ses bouquins ‘End Times’.

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En conclusion,Silver Nails‘ se révèle être un ouvrage d’une cohérence et d’une qualité rare pour un recueil de nouvelles de la Black Library. Si le second point n’est pas une surprise pour quiconque est familier de la prose de Jack Yeovil, le premier aurait pu poser question, eut égard aux conditions particulières de l’écriture de cette anthologie. Cette réédition est donc une très bonne occasion pour les amateurs de GW-Fiction de découvrir ou redécouvrir une des oeuvres les plus marquantes de la « préhistoire » de la BL, qui a influencé, de près ou de loin, la grande majorité des auteurs ayant écrit des romans et nouvelles pour le compte de Games Workshop depuis. Même s’il est passé à autre chose depuis longtemps, et que ses franchises de prédilection aient toutes les deux été détruites par GW, je me surprends à espérer que Jack Yeovil daigne un jour reprendre la plume pour le compte de la BL, même si cela ne débouche que sur une collaboration ponctuelle. S’il y a une chose à retenir des aventures de Genevieve Sandrine du Pointe du Lac Dieudonné en effet, c’est que l’on a toujours besoin de ses grands anciens…

INFERNO! – ANNEE 1

Bonjour à tous et bienvenue dans cette chronique dédiée à la première année du magazine Inferno!, bimensuel lancé par la Black Library au temps de ses débuts, en l’an de grâce 1997. Il s’agit donc, et il faut le préciser d’emblée, de publications distinctes des recueils Inferno! que la même BL a commencé à éditer, à intervalles irréguliers et de plus en plus distants, à l’automne 2018. On peut d’ailleurs plus facilement comparer ces premières publications infernales au défunt et regretté Hammer & Bolter (2010-2012), qui a repris une grande partie du cahier des charges d’Inferno! en se concentrant sur les nouvelles et avec un rythme de sortie plus soutenu (mensuel). Voilà pour la contextualisation1.

1: Si la genèse d’Inferno! vous intéresse, rendez-vous ici.

Sommaire Old Inferno!_Year 1 (MIS)

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Les six numéros, pour 24 nouvelles, présentés par le menu ci-dessous forment un pan historique important de la Black Library, et plus largement, de la GW-Fiction. C’est en effet dans ces pages que certains auteurs aujourd’hui incontournables de la maison d’édition de Nottingham ont commencé leur collaboration avec cette dernière. Gavin Thorpe et l’aptemment nommé ‘Birth of a Legend‘ (‘Inferno! #2’), Dan Abnett avec ‘Gilead’s Wake‘ (‘Inferno! #3‘) et ‘Ghostmaker’ (‘Inferno! #4), ou encore Jonathan Green – même s’il est moins connu du chaland moyen qu’au début des années 2000 -, qui signe le triplé des franchises avec ‘Salvation’ (‘Inferno!’ #1‘), ‘Bad Spirits’ (‘Inferno! #2′) et ‘Dark Heart’ (‘Inferno! #5′). Mais ce premier millésime est également marqué du sceau des disparus glorieux (à voir) de la BL, qui contribuèrent lors de son premier âge et partirent vers d’autres cieux peu de temps après. Citons ici Alex Hammond et Chris Pramas (3 soumissions chacun), mais également le cas d’Andy Jones et de ses Maraudeurs de Grunsson, qui occupa le rôle de rédacteur en chef d’Inferno! et d’éditeur des premiers recueils de nouvelles de la Black Library (‘Realm of Chaos pour Warhammer Fantasy Battle,Into the Maelstrom pour 40K et Status : Deadzone pour Necromunda), dont le sommaire empruntait en bonne partie à celui du bimensuel. Enfin, soulignons aussi le retour de celui qui était déjà un grand ancien de la GW-Fiction à l’époque, l’inoxydable William King, dont ‘The Mutant Master‘ occupe la place symbolique et méritée de première nouvelle publiée dans un numéro d’Inferno!

Bienvenue donc dans cette plongée historico-littéraire et littéralement historique (on peut sans exagérer dire que l’on parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître) du court format made in GW, à l’époque où le Vieux Monde avait la vie devant lui, où Necromunda était le tout nouveau jeu du moment, et où les gens s’abonnaient à des magazines de fluff romancé en format papier. Incroyable je sais.

Couverture Année 1

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The Mutant Master – W. King [WFB] – #1 :

INTRIGUE :

Après Bogenhafen, Blutdorf1. Nous retrouvons notre paire fétiche dans une situation similaire à celle de l’initial ‘Geheimnisnacht’, c’est-à-dire à pinces dans une forêt impériale assez mal famée, avec un Gotrek d’une humeur aussi massacrante que sa profession de foi et un Felix tout aussi geignard et craintif que l’on est en droit de s’y attendre. Coup de chance pour l’acariâtre à crête, ses gesticulations et beuglements impudiques finissent par attirer l’attention d’une petite troupe de mutants, à la verticalité tout aussi contrariée que celle de notre héros. Un peu déçu de sa trouvaille, Gogo massacre tout de même la cohorte en quelques moulinets de sa hache runique, histoire de se dégourdir un peu la rancune, aidé par Felix à la hauteur de ses moyens.

Une fois arrivés dans le village en question, qui s’avère être tout aussi riant que la périphérie semi-rurale de Niort ravagée par une coulée de boue toxique et survolée par des essaims de criquets cannibales écoutant du Jul à fond un jeudi soir pluvieux de Février (ambiance), nos comparses fondent sur le bar tabac local, où ils ont tôt fait d’apprendre qu’un sorcier maléfique a placé la paisible communauté sous sa coupe, et kidnappé tous les enfants de cette dernière pour s’assurer de la docilité de leurs parents. Il n’en faut pas plus pour attirer l’intérêt morbide mais professionnel du Tueur, que la perspective de se confronter à un magicien chaotique et son monstre de compagnie enchante plus qu’autre chose. Las, le boui-boui était tenu par un lointain cousin de Bill Cosby, et nos héros ne tardent pas à sombrer dans l’inconscience après avoir éclusé quelques pintes de Jupiler éventée…

Se réveillant enchaînés aux parois d’un cachot souterrain, les vigilante du Vieux Monde ne tardent pas à faire la connaissance de leur hôte, un dénommé Albericht Kruger, que Felix a la surprise de reconnaître. Les deux hommes ont en effet fait leurs classes universitaires ensemble, avant que le militantisme alter-mondialiste pour l’un et le vol de manuscrits interdits pour l’autre ne les sépare. Poursuivant des rêves mégalomaniaques d’omnipotence arcanique, Kruger s’est depuis lancé à corps (de lâche) perdu dans la recherche fondamentale, troquant son âme et sa raison pour la maîtrise revendiquée de la transmutation magique. Soit. Sa prestance de bigorneau diphtérique est toutefois renforcée par la présence de son mutant de main, une montagne de muscles décérébrée répondant au nom d’Oleg. Pendant que Gotrek fait des pieds et des mains pour desceller les anneaux le retenant au mur, Felix arrive à attirer l’attention de son copain d’avant suffisamment longtemps pour permettre au nabot de se déchaîner, d’abord au sens propre, puis au sens figuré. La bataille qui s’en suit est évidemment à sens unique, l’avorton en rut ne daignant même pas ramasser son coupe-chou pour terrasser le gorille de Kruger, qui s’enfuit piteusement dans ses quartiers…

Début spoiler…Soucieux de soigner leur réputation auprès des Blutdorfers, qui ont sans doute du stuff pas dégueu en stock pour les aventuriers amis, Felix et Gotrek décident de finir le donjon proprement avant de repartir péter la gueule à ce fourbe d’aubergiste, en occissant l’infâme Albericht et libérant ses otages. Il leur faudra pour cela se frayer un chemin à travers les groupes (hordes serait un peu trop généreux) de mutants que le mage dément met sur leur route, avec des résultats mitigés, comme vous pouvez vous en douter. Blessé à mort par une dague de jet décochée par Felix (encore un point commun avec Geheimnisnacht), Kruger peut toutefois savourer une revanche post mortem, puisqu’il apprend aux héros, juste avant de gagner un stage de solo base jump (donc sans équipement, comme par exemple un parachute), que les goons qu’ils viennent de massacrer – et avant eux, la petite bande exterminée sur le chemin du village – n’étaient autres que les enfants de Blutdorf, sur lequel le sombre individu avait mené d’indicibles expériences. Comprenant que l’accueil à la salle des fêtes de Blutforf ne sera pas aussi triomphant que prévu, notre paire fait une croix sur le rang d’Exalté auprès de la populace locale, et repart vers de nouvelles aventures après avoir mis le feu à la barraque pour maquiller ses crimes.Fin spoiler

1 : Le village sanglant en bon reikspiel, tout un programme…

AVIS :

Clairement un filler dans la longue et sanglante carrière de nos compères, ‘The Mutant Master’ présente Gotrek et Felix sous un jour plutôt ennuyeux. Enfermés dans leurs rôles respectifs, et lancés sur une quête des plus simplistes, tant en termes de motivation que de déroulement, les héros de King apparaissent vidés de toute substance et intérêt dans cette péripétie des plus mineures de leur interminable saga. Peut-être faut-il y voir un début de lassitude de la part de King, qui traînait déjà ses iconiques rejetons derrière lui depuis huit ans au moment de la première publication de cette nouvelle. Seule qualité rédemptrice à mes yeux, le petit twist grimdark final, contrastant assez fortemment (et même grossièrement) avec le ridicule consommé de l’antagoniste, permet d’ancrer ce récit dans l’atmosphère particulière de Warhammer. Mais, franchement, ‘Geheimnisnacht’ faisait cela (le grimdark et le comique) beaucoup mieux que ‘The Mutant Master’. Demandez l’original !

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Salvation – J. Green [40K] – #1 :

INTRIGUE :

Salvation suit la laborieuse épopée de frère Rius (André de son prénom), Terminator de son état au sein de la première compagnie des Ultramarines. Envoyés défendre le monde de Jaroth contre un car de tyranides s’étant perdu sur la route d’Ichar IV, Rius et ses petits camarades tombent dans une embuscade tendue par des Genestealers, au cours de laquelle notre héros prend un vilain coup sur le crâne, et se réveille en conséquence totalement amnésique. Recueilli par la population indigène, Rius fera-t-il triompher son village d’adoption aux Intervilles locales, ou renouera-t-il avec son passé de meilleur de l’Empereur ?

AVIS :

Comme dit en introduction, se frotter aux descendants de Guiliman s’apparente plus un à exercice de haute voltige qu’à une promenade de santé, l’abondante littérature leur ayant été consacrée au fil du temps obligeant l’auteur chargé de cette délicate mission à se livrer à un véritable travail de recherche afin de respecter le background établi par ses prédécesseurs. Certes, le fluff des Schtroumpfs énergétiques n’était pas aussi fouillé à l’époque de l’écriture de Salvation qu’il ne l’est aujourd’hui (où l’on connaît jusqu’au nom du cousin de la belle-sœur du professeur de piano d’Uriel Ventris), mais cela n’a pas empêché Green de pêcher, par nonchalance ou ignorance crasse, comme un bleu.

C’est en effet à un festival d’approximations, de contre-sens et absurdités en tous genres que Jonathan Green se livre dans Salvation, témoignage douloureux (pour les zygomatiques et les fluffistes acharnés) de ses lacunes en matière de 41ème millénaire. Cela commence très fort dès la deuxième ligne du récit, avec la mention de « vétérans de la Première Compagnie d’Ultramar », illustres guerriers n’existant que dans la représentation confuse que se fait l’auteur du Chapitre des Ultramarines. Quelques pages plus loin, Green fait mention de « cette vieille Terre » (Old Earth), ignorant sans doute que les gens respectables parlent plutôt de Terra. L’inclusion de la nouvelle dans la chronologie de Warhammer 40.000 ne m’a également pas semblé au-dessus de tous soupçons, Rius étant présenté comme un vétéran d’Ichar IV alors que les tyranides qu’il affronte semblent plutôt appartenir à la flotte ruche Béhémoth (corps rouges/violets), annihilée 200 ans avant l’arrivée de Léviathan dans l’espace impérial. On lui laissera cependant le bénéfice du doute, d’autres critiques plus franches, et celles-là indiscutables, pouvant lui être adressées.

Car la plus grande atteinte au fluff commise par Green très peu documenté ne vient pas tant du manque de connaissances de ce dernier sur les Ultramarines, mais bien de son manque de connaissances sur les Space Marines en général, décrits par l’auteur comme de vulgaires super-soldats disposant d’un équipement de pointe, tableau ultra (haha) réducteur et sensiblement erroné de la condition d’Ange de la Mort. Par exemple, Green affirme sans broncher que la présence des Ultramarines sur le monde de Jaroth s’explique par la présence du Gauntlet of Macragge (présenté comme rien de moins que le vaisseau amiral de la flotte Ultra – inutile de préciser que c’est la seule fois où il est fait mention de ce nom dans un texte de la BL1– ) à proximité de la planète suite à une « visite de routine dans l’Est de l’Ultima Segmentum ». Et les Space Marines, bien braves, de voler à la rescousse d’un monde tribal ne faisant même pas partie de l’Imperium, et d’envoyer la crème de leurs vétérans (qui n’avaient rien d’autre à faire que de participer à cette patrouille, sans doute) castagner la Grande Dévoreuse pour sauver trois poules et deux cochons, au lieu de lui balancer un petit Exterminatus sur le coin du museau depuis la sécurité de l’orbite haute. Bref, les Ultramarines de Jonathan Green tiennent plus des casques bleus galactiques (c’est la couleur qui l’a induit en erreur je pense) que des moines-soldats cherchant avant tout à sauvegarder leur empire personnel d’une galaxie hostile et méchante.

Beaucoup plus grave, Green fait reposer son intrigue sur une aberration, que dis-je, une hérésie pure et simple, qui ne manquera pas d’arracher un sanglot de rage à tous ceux n’ayant ne serait-ce que feuilletés distraitement un Codex Space Marines au cours de leur vie. Au moment de l’embuscade qui laisse Rius amnésique, son escouade était en effet engagée dans une opération de nettoyage des dernières poches de résistance tyranides de la planète (oui, de la planète, ils avaient visiblement un peu de temps devant eux), mission perturbée comme dit plus haut par une bande de Genestealers adeptes du « coucou qui c’est ? ». Résultats des courses : l’épave de Thunderhawk qui servait de décor à l’embuscade en question explose suite à une utilisation peu finaude du lance-flammes par frère Hastus, projetant notre héros contre un arbre à l’écorce visiblement plus dure que son crâne, vus les résultats désastreux sur ses facultés mnémoniques. Le paragraphe suivant nous apprend que Rius se réveille, seul, dans la maison du couple qui l’a recueilli2 suite à sa funeste rencontre avec un tronc (Georges de son prénom), ce qui signifie (accrochez-vous) que les Ultramarines sont repartis de Jaroth sans chercher à s’enquérir du destin d’une entière escouade de Terminators, faute de quoi ils auraient fatalement retrouvés Rius, qui n’a pas dû atterrir bien loin du lieu de l’explosion.

Je veux bien que les Ultra soient un Chapitre pétés de thunes, mais de là à « oublier » cinq armures Terminators sur une planète de huitième ordre (sans parler de la valeur intrinsèque des bonhommes occupant lesdites armures : ce n’est pas comme si la Première Compagnie des Ultramarines s’était faite massacrée jusqu’au dernier pignouf quelques années plus tôt, hein), il y a une sacrée marge tout de même. Dans la catégorie relique à la valeur incommensurable, une Crux Terminatus (avec un vrai morceau de l’armure de l’Empereur dedans !) ça se pose là tout de même, alors cinq… Malheureusement pour tout le monde, et surtout pour lui, Green ne voit cependant aucun problème à faire disparaître totalement le reste des Marines de Salvation passé ce moment, ce qui donne au lecteur la furieuse envie d’emboîter le pas de ces derniers, et de tourner la page (dans tous les sens du terme) de cette piètre nouvelle.

Avec tout ça, on en oublierait presque que Green n’est pas, même lorsqu’il maîtrise un tant soit peu son sujet, un écrivain des plus intéressants, son absence de style le rendant parfait pour pondre des encadrés d’ambiance génériques dans les Codices GW, mais beaucoup moins convaincant dès qu’il s’agit de garder le lecteur en haleine plus de trois paragraphes d’affilée. Seul personnage un tant soit peu développé de Salvation, Rius (du latin rius, ce qui veut dire rillettes) pâtit particulièrement du manque d’inspiration de son créateur, et justifie à lui seul l’image de fadeur bleuâtre ayant poursuivi les Ultramarines depuis la création de Warhammer 40.000. Pour être honnête, le personnage le plus charismatique de la nouvelle reste à mes yeux, et de loin, le brave Carnifex faisant office de boss de fin, talonné de près par le Prince tyranide nain3 dézingué hors champ quelques pages plus tôt par la bleusaille en colère.

Imparfait sur le fond comme sur la forme, Salvation est la preuve irréfutable que la BL publiait vraiment n’importe quoi à ses débuts, sale habitude dont elle n’est malheureusement toujours pas guérie à l’heure actuelle. On notera pour finir que Salvation a réussi à se faire rééditer dans l’anthologie Let the Galaxy Burn (2006), présentée au moment de sa sortie comme la somme des nouvelles les plus remarquables jamais écrites pour 40K. Remarquable, oui, c’est le mot.

: On notera tout de même le fétichisme des Ultramarines (ou de leurs auteurs) en matière de « gantelets » quand on en vient au baptême de leurs vaisseaux. À l’hypothétique Gauntlet of Macragge viennent ainsi s’ajouter le Gauntlet of Victory et le Gauntlet of Glory, ce qui nous fait trois moufles et ouvre des perspectives intéressantes quant à un hypothétique « troisième bras » de Roboute Guilliman. Moi je dis que si Fulgrim s’est enquiquiné à venir égorger son frangin bien après la fin de l’Hérésie d’Horus, c’est qu’il avait ses raisons.
2 : « Chérie, j’ai une surprise pour toi ! »
« Tu m’as ramené des fleurs ? C’est trop ge- »
« Euh, non, pas exactement des fleurs. »
3 : « The hive tyrant was a truly terrifying figure to behold. The monster stood over two metres tall […] »
Sachant qu’un Space Marine normal taille dans les deux mètres cinquante, et qu’engoncé dans une armure Terminator, il frôle les trois mètres, je ne vois pas pourquoi il souillerait son slip à la vue d’un gros criquet.

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The Demon Bottle – A. Hammond [NDA] – #1 :

INTRIGUE :

Dure journée pour Sarak le (demi) Ratskin. Réveillé de bon matin (07:00) par une tentative de meurtre raciste intentée par un prêcheur Cawdor au tempérament plus incandescent que son lance-flamme – et heureusement pour notre héros –, notre ivrogne désoeuvré échappe de justesse au lynchage et s’en va se remettre de ses émotions en assouvissant son penchant coupable pour la dive bouteille. Son statut d’homme à tout faire de la colonie du sous monde où il occupe la position exaltée de marginal alcoolique lui vaut cependant de risquer à nouveau sa vie dans la même matinée, sa mission de nettoyage du conduit d’aération de son lieu de villégiature habituel passant à un cheveu du drame. C’est que la faune locale de Necromunda est autrement plus agressive et mortelle que nos bêtes grenouilles et hérissons. Cela ne fait que renforcer sa motivation d’émigrer vers le haut de la ruche, qu’il s’imagine être une sorte de Disneyland peuplé de pole dancers parfumées. Son désir d’une vie meilleure est toutefois contrarié par une rencontre pas vraiment fortuite avec les sbires d’Otto Gunta, un gros bonnet du crime local, qui souhaite instamment lui parler et n’a pas pour coutume d’attendre le bon vouloir de ses débiteurs.

Une injection de tranquilisants et un réveil difficile plus tard, Sarak se retrouve dans une position qui l’est tout autant. Gunta demande à être remboursé séance tenante, mais la valeur des possessions physiques du (demi) Ratskin ne couvre pas la moitié de son encours, même en prenant en compte la vente de son cadavre à l’usine Findus la plus proche. Qu’à cela ne tienne, les talents d’exterminateur de nuisibles de Sarak donnent une idée au parrain, dont le territoire a été envahi par une bande de mutants cannibales difficile à déloger (saleté de trève hivernale). Le poivrot n’a qu’à s’arranger pour régler son compte au chef des squatteurs, par exemple en glissant un peu d’eau de javel dans son hydroxychloroquine, et son ardoise sera effacée. Plus facile qu’à dire qu’à faire, mais sous le regard vigilant et la menace implicite du gros bras de Gunta, un (demi) cyborg nommé Lugtekk, Sarak n’a d’autres choix qu’obtempérer. Il peut heureusement compter sur les largesses de son employeur, qui lui fournit un déguisement convaincant de Scavvy ainsi qu’un cadavre frais pour la soupe de ses futurs meilleurs copains, avant de partir en mission.

Cette journée déjà riche en événements va alors prendre un tour encore plus frénétique, puisqu’après avoir réussi à gagner la confiance de ses hôtes, Sarak parvient à glisser les pilules empoisonnées de Gunta dans la bouteille de WildSnake de sa cible (Hoegas), mais est témoin du meurtre de cette dernière par un rival mécontent (Blotta). Devenu calife à la place du calife, cet infâme communiste de Blotta insiste pour que tous les membres de la tribu prennent une rasade à sa boutanche – son coup d’état n’a été causé que par l’égoïsme de Hoegas, c’est dire s’il avait soif – à commencer par Sarak. Notre héros s’exécute, espérant survivre assez longtemps pour recevoir un éventuel antidote de la part de Gunta, mais doit avant cela suivre les Scavvies dans l’attaque d’une caravane de Guilders. Le cadavre apporté par le (demi) Ratskin avait en effet une carte sur lui, assez détaillée pour donner envie à une bande de goules basses du front de fomenter une embuscade. Il s’agissait évidemment d’un piège de Gunta, dont les hommes occupent les lieux et commencent à flinguer à tout va les mutants en goguette. Comme si la situation n’était pas assez critique, Sarak finit par se rendre compte que les pilules magiques qu’il a glissé dans le pinard sont du spook, une substance psychoactive provoquant au mieux des hallucinations, au pire des possessions démoniaques. Notre héros n’étant pas dans un bon jour, c’est le deuxième cas de figure qui se produit, et le (demi) Ratskin se retrouve contraint de partager son corps avec le démon le plus chill du Warp1, ce qui est tout de même pratique pour encaisser une fusillade à bout portant sans effets secondaires désagréables, comme la mort par exemple. Sarak n’a cependant pas dit son dernier mot, et abat sa dernière carte pour faire la nique à ses bullies avant de tirer sa révérence : atteindre le Nirvana sans crier gare, ce qui met fin à la possession, et faire un gros calin au mafieux alors qu’il a été transformé en torche humaine par son infection chaotique, pour entraîner Gunta dans la tombe. Je ne sais pas si on peut lier ce décès aux dangers de l’alcoolisme, mais il y a définitivement une morale à cette histoire, si on cherche bien.

1 : Vous en connaissez beaucoup des neverborn qui appellent leur hôte « boyo » ?

AVIS :

Difficile de dire si c’était l’effet recherché par Alex Hammond lorsqu’il a écrit ‘The Demon Bottle’, mais on ressort de cette courte (9 pages) nouvelle avec un début de mal de crâne similaire à celui que pourrait causer une gueule de bois. En cause, la deuxième moitié hystérique de cette histoire, qui fait s’enchaîner les péripéties avec une frénésie digne d’un Héraut Exalté de Khorne. Ce grand final foutraque vient très largement masquer les points positifs que l’on pouvait mettre au crédit de Hammond, comme sa réflexion sur les illusions que les habitants du sous monde se font de la réalité des étages mieux famés de la ruche Prime1, ou les petites touches humoristiques que l’auteur a intégré à sa narration. Un éditeur critique aurait demandé à ce que la fin de ‘The Demon Bottle’ soit plus cohérente, ou accordé cinq pages de plus pour laisser l’intrigue respirer un peu plus, mais à l’époque farouche à laquelle ce texte a été écrit et publié, je doute que la BL disposait des ressources et de l’envie nécessaires pour soigner la qualité de ses sorties. On peut d’ailleurs toujours se poser la question aujourd’hui d’ailleurs. Dommage donc pour ‘The Demon Bottle’, que l’on peut remiser sans regret sur la pile des nouvelles médiocres de la Black Library.

1 : Sujet en partie récupéré par l’auteur pour ‘Rat in the Walls’ ceci dit.

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Grunsonn’s Marauders – A. Jones [WFB] – #1 :

INTRIGUE :

Les maraudeurs de Grunsonn (un nain crado, un elfe libidineux, un barbare chermanik et un impérial benêt) sont engagés par un sorcier pour retrouver une relique enchantée, le « mythique » Doigt de Vie (Finger of Life), qui repose sous bonne garde dans une caverne oubliée des Montagnes Grises.

AVIS :

Attention, OVNI. S’il n’est pas rare pour le lecteur de la BL de rire un bon coup en parcourant les textes des contributeurs les moins doués de cette auguste maison d’édition, il est en revanche bien moins courant que cette hilarité ait été sciemment recherchée par l’auteur au moment de l’écriture de son texte.

C’est toutefois indéniablement le cas avec ce ‘Grunsonn’s Marauders’, première des deux nouvelles consacrées par Andy Jones (également co-éditeur du recueil ‘Realm of Chaos’ dans laquelle ce texte a été publié pour la première fois) au plus improbable quatuor de héros de l’histoire de la Black Library. Faisant feu de tout bois, Andy enchaîne dialogues absurdes, comportements parodiques, péripéties grotesques et calembours de comptoir (mention spéciale au barbare de la bande, le bien nommé Keanu the Reaver), pour un résultat dans la droite ligne de bouquins tels que ‘Lord of the Ringards’, ‘Bilbo the Postit’ ou encore ‘La Der des Etoiles’. Etant donnée la brièveté de l’opus et son caractère résolument novateur par rapport au med-fan premier degré qui caractérise la BL, la sauce prend toutefois mieux que pour les « chefs d’œuvre » précédemment cités, ce qui n’est pas plus mal.

Bref, ‘Grunsonn’s Marauders’ est une lecture indispensable pour tous les acharnés de la Black Library, une curiosité tout autant qu’une relique d’une époque où Games Workshop ne se prenait pas encore (trop) au sérieux. Un vrai collector1.

1: Pour la petite histoire, les maraudeurs de Grunsonn étaient les personnages de la bande Heroquest d’Andy Jones et de son cercle d’amis. Ce qui explique beaucoup de choses.

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Birth of a Legend – G. Thorpe [WFB] – #2 :

INTRIGUE :

‘Birth of a Legend’ relate un épisode central du background de Warhammer, à savoir le sauvetage du Haut Roi Kurgan par une cohorte d’Unberogens en vadrouille.

Capturé par le Big Boss Vagraz Head Stomper alors qu’il se rendait dans les Montagnes Grises pour un tournoi de belote, notre pauvre nain est sur le point de finir dans la marmite des peaux vertes lorsque ses ravisseurs se font soudainement attaquer par une bande d’humains hirsutes menés par un adolescent très énervé. Ce dernier, bien aidé par le marteau que lui prête obligeamment son nouveau pote barbu, renverse le cours de la bataille en concassant le crâne de Vagraz d’un revers à une main (long de ligne)1. La nouvelle se termine par une présentation en règle des nouveaux BFF, le sauveur providentiel n’étant nul autre que…

Début spoilerLaurent Delahousse2.Fin spoiler

1 : Punk jusqu’au bout, le Big Boss envoie un bon gros fuck des familles à Sigmar juste avant que ce dernier ne l’achève. That’s the spirit.
2 : Bon, ok, en fait c’était ΣR. Il n’y a que Gav pour ménager de telles « surprises » à ses lecteurs.

AVIS :

Dix ans avant le lancement de la collection Time of Legends, Gavin Thorpe se paie donc le luxe de mettre en scène un évènement qui n’était jusqu’alors couvert que dans la partie fluff des livres d’armées de Warhammer. Et force est de reconnaître qu’il s’en tire plutôt honorablement (bien mieux en tout cas que pour Aenarion, methinks), sa version de ce passage marquant de la geste Sigmarienne s’inscrivant dans la droite ligne de ce qu’on savait déjà du personnage, et permettant au fluffiste sommeillant dans chaque lecteur de la BL de grappiller quelques détails supplémentaires sur la vie du Musclor de GW. Je ne suis pas loin de penser que Gav n’est jamais aussi bon que lorsqu’il donne dans le background romancé (surtout quand il y a du nain dedans) plutôt que dans la pure fiction. En fait, je le pense vraiment.

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The Black Pearl – C. Pramas [40K] – #2 :

INTRIGUE :

Fraîchement nommé Chapelain Interrogateur, Uzziel des Dark Angels emmène ses frères sur le monde exodite de Lughnasa, afin de vérifier une information obtenue du premier Déchu qu’il a capturé. Selon la confession du traître, la mythique épée du Lion, maniée par le Primarque de la première Légion au cours de la Grande Croisade, et perdue au cours de la destruction de Caliban, reposerait en effet dans un temple de cette planète.

AVIS :

Une nouvelle rythmée et assez bien construite, dans la droite lignée d’Into the Maelstrom. Comme cette dernière histoire, The Black Pearl se termine par un petit twist1 qui, sans être transcendant, conclut le récit de manière opportune et démontre que Pramas a bien intégré les codes de 40K (Praaaaa-maaaaaaaaas…ton univers impitoyaaaa-aaa-bleuh).

Reste qu’utiliser les Dark Angels comme protagonistes est un exercice périlleux, les multiples couches de secrets et de rumeurs entourant les Impardonnés obligeant l’auteur à procéder avec prudence. Malgré sa maîtrise du background (mention est faite de Moloc(h)ia, Chapelain Interrogateur détenteur du highest score en matière de confessions de Déchus), Pramas se prend les pieds dans le tapis pelucheux du fluff des Anges de la Mort à quelques reprises. Rien de très grave, je vous rassure, mais il fallait tout de même que le signale. Paradoxalement cependant, ce sont les (petites) révélations sur le passé des Dark Angels glissées par Pramas dans The Black Pearl2 qui constituent l’intérêt principal de la nouvelle. Les vieux de la vieille apprécieront aussi la présence de chevaliers dragons Exodites en tant qu’antagonistes, même si l’auteur se contente de les balancer sur les Space Marines dans une reconstitution futuriste de la charge de la brigade légère (si tant est qu’un chevaucheur de megadon puisse être considéré comme un cavalier léger) à la bataille de la Balaklava, et ne s’attarde donc guère sur la culture de ces fiers guerriers tribaux.

Honnête mais finalement assez terne, en ce qu’elle n’explore pas assez à mon goût la psyché si particulière des Dark Angels (une joyeuse bande de zélotes psychorigides et intolérants au plus haut point, à la fois arrogants à l’extrême et terrifiés à l’idée que le reste de l’Imperium apprenne leur honteux petit secret), The Black Pearl constitue une lecture assez dispensable, sauf si vous êtes un amateur inconditionnel de Lionel et de ses fistons. 

1: L’épée du Lion se révèle au final être l’épée de Luther.
2: Référence à la perle noire que les Chapelains Interrogateurs des chapitres Impardonnés ajoutent à leur Rosarius pour chaque Déchu qu’ils « convainquent » de se confesser.

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Hatred – B. Chessell [WHB] – #2 :

INTRIGUE :

La vie tranquille de Kurtbad, un village en déréliction situé en plein cœur de l’Averland, est bouleversée par le meurtre de l’un de ses habitants, puis par l’arrivée soudaine d’un chasseur de sorcières mal en point. Alors que la traque du tueur s’organise, la destinée de quatre Kurtbader (-iens? -ois? -ais?) va être changée à jamais.

AVIS :

‘Hatred’ s’avère être un huis-clos à l’ambiance particulière et la construction soignée, deux caractéristiques faisant l’originalité et l’intérêt de cette nouvelle de Ben Chessell.

Le style purement factuel déployé par l’auteur pour raconter le drame se jouant à Kurtbad, les vérités énoncées à demi-mot et ne faisant sens que bien plus tard dans le récit, l’inclusion de passages écrits à la première personne depuis le point de vue de l’antagoniste (dont on ignore l’identité jusqu’aux dernières pages) entre le récit des péripéties, ou encore l’approche résolument anticonformiste qu’à Chessell du Chaos et de son effet sur les êtres vivants qu’il touche et transforme, sont autant de raisons de lire et d’apprécier ‘Hatred’, qui est assurément l’un des meilleurs « très courts formats » (15 pages) de la Black Library.

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Tenebrae – M. Brendan [40K] – #2 :

INTRIGUE :

‘Tenebrae’ relate les derniers moments du gouverneur planétaire Dane Cortez, alors qu’il contemple les forces du Chaos prendre d’assaut la capitale de son monde. Seul dans sa chambre de commandement, Cortez se remémore les évènements ayant conduits à la débâcle actuelle, et assiste à l’arrivée du général des hordes chaotiques, Lord Vog des Word Bearers, sur la place centrale de la capitale. Le réquisitoire sans concession qu’il dresse de ses errements et erreurs en tant que régent de Tenebrae (le nom de la planète qu’il dirige), et la colère qu’il éprouve envers l’Imperium pour avoir abandonné cette dernière dans son heure de besoin finissent par ouvrir un portail Warp dans son sanctuaire, duquel s’extirpent une poignée de Sanguinaires en goguette. Cortez aura alors un ultime choix à faire : au nom de qui, ou de quoi, donner sa vie ?

AVIS :

Mark Brendan (dont c’est la seule contribution connue à la Black Library) signe avec Tenebrae un texte assez étrange. L’approche adoptée à beau être originale, privilégiant l’examen de conscience de Cortez à une banale scène de guerre urbaine, on ne peut s’empêcher de se demander « et alors ? » à la fin de la lecture de cette courte nouvelle (15 pages). Il ne se passe en effet pas grand-chose dans Tenebrae, si l’on met de côté les atermoiements et imprécations de notre héros, entrecoupés de quelques flashbacks explicatifs (où l’on comprend comment Cortez est arrivé à la tête de la planète, en récompense de ses bons services dans la Garde Impériale) et rapports sur l’avancée des troupes adverses dans Wormwood (la capitale de Tenebrae, tu parles d’un nom). Malgré sa bonne volonté, Brendan n’a pas le talent de Brian Craig pour tenir son lecteur en haleine de manière non-violente, ni le souci du détail d’un Abnett ou d’un Dembski-Bowden, lacunes faisant de Tenebrae une curiosité assez fade au final. Rideau.

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Gilead’s Wake – D. Abnett [WFB] – #3 :

WFB_Gilead's WakeINTRIGUE :

Kidnappé tout bébé (27 ans : les Elfes portent encore des couches à cet âge) par une bande d’infâmes truands s’étant établie à proximité de la ville de Munzing, et par conséquent du domaine familial, Gilead fait l’objet d’une demande de rançon que ses proches font mine d’accepter, mais résultant en une opération commando menée par le frère jumeau du héros, Galeth, afin de libérer l’otage. Intimement lié à son frangin (quand l’un des deux mange un tacos, l’autre massacre les toilettes), Gilead vit très mal – on peut même dire qu’il meurt un petit peu – le décès tragique de son sauveur, qui se fait carreler comme une vulgaire salle de bains par un maraud revanchard sur le chemin du retour.

10 ans plus tard, le sombre héros de l’amer est sur le point de mener au terme la vengeance dont il poursuit l’insaisissable Gibbetath depuis une décennie. Ayant découvert que ce Skaven était derrière les opérations crapuleuses de la bande de malfrats l’ayant capturé et occis son bien-aimé frangin, Gilead a écumé le Vieux Monde avec quelques compagnons (dont il ne reste plus que l’increvable Fithvael) sur les traces de cette éminence grise, démantelant son empire et massacrant ses sbires au cours d’une inexorable vendetta. Finalement, Gilead et Fithvael mettent le siège à l’ultime cabane en rondins du malfaisant rongeur, dézinguent les quelques hommes et ogres de main engagés par ce dernier pour sa protection, et notre héros peut enfin faire face au responsable de son blues persistant…

Début spoiler…qui se révèle être un petit bonhomme famélique et bien malade, et non pas un Skaven. Gag. Gibbetath explique à son futur bourreau que ce n’était qu’un alias qui lui a permis d’opérer de façon discrète et de terrifier ses opposants, ce qui ne le décharge en rien de sa responsabilité dans le meurtre de Galeth et le règne de terreur qui a été le sien au cours des dernières décennies. Ayant claqué jusqu’à son dernier centime pour tenter de se débarrasser de sa Némésis, Gibbetath attend la mort avec fatalité, et se retrouve donc bien dépité lorsque Gilead s’en va sans lui porter l’estocade. Pas par excès de magnanimité, non, mais pour faire durer le malheur d’un adversaire ayant, de son propre aveu, absolument tout perdu, ce que Gilead considère être également son cas (ce qui n’est pas sympa pour Fithvael, ni pour sa petite sœur). C’est sur cette fin batmanesque que s’achève le premier volet de la saga de Gilead, héros totalement wokeFin spoiler

AVIS :

Gilead Lothain. Aux plus jeunes d’entre vous, ce nom ne dira rien. Les anciens lecteurs risquent au contraire de ressentir une bouffée de nostalgie à cette mention, qui les replongera un millénaire en arrière (eh si, techniquement c’est correct), à l’époque où 1) Warhammer Fantasy Battle était le jeu principal de Games Workshop, 2) Inferno! était un nouveau projet excitant de la toute jeune Black Library, et 3) Dan Abnett était un parfait inconnu. Ce qui ne nous rajeunit pas, c’est certain. À mes yeux, il n’y a pas de personnage plus iconique de cette période précise de la GW-Fiction, car Gilead, contrairement à d’autres figures de cette dernière, n’a pas connu un développement suivi au fil des années, et est resté cantonné à la période 1997 – 2001 (jusqu’au regrettable come-back de l’année 2012). Bref, ‘Gilead’s Wake’, comme les autres nouvelles consacrées par Abnett à son mince et morne héros ayant été publiées dans Inferno!, est un texte collector, et celui-ci l’est même doublement puisque c’est par lui que tout a commencé (pour Gilou comme pour Abnett).

À travers ce court récit de traque et de vengeance, l’auteur arrive à brosser de façon convaincante le spleen persistant du dernier héritier de Tor Anrok (même si ce dernier a une petite sœur), et justifie parfaitement la mélancolie incurable qui accompagne notre héros, et qui a pu donner lieu à d’innombrables blagues par la suite1. Je le sais car j’en ai fait moi-même. Le regrette-je ? Non. Comprends-je mieux pourquoi Gilead tire en permanence une tête de six pieds de long ? Oui. La symbiose jumellaire entre les fistons Lothain est soulignée avec tellement de soin par Abnett au cours de ces quelques pages que le traumatisme vécu par Gilead à la mort de son twin ne fait aucun doute. Comme ce cafard persistant ne quittera jamais notre héros, mais que les causes de ce dernier ne seront pas aussi clairement explicitées par la suite, la lecture de ‘Gilead’s Wake’ est donc, pas indispensable, mais plus qu’utile, de ce point de vue.

Autre caractéristique de la nouvelle, sa complète autonomie, voire finitude, qui ne présageait absolument pas d’une poursuite de la saga de Gilead (même si le titre envoyait un tout autre message). Abnett aurait pu arrêter les frais et le Prozac à la fin de ces huit pages, sans que cela cause du mécontentement de la part du lectorat d’Inferno!. Heureusement, ou pas (quand on voit la fin de carrière de notre héros, la question se pose), nous n’étions qu’au début de l’histoire de Gilead, auquel une carrière de vigilante du Vieux Monde était sur le point de tendre les bras. Notons tout de même que ces débuts troubles en matière de Skavens préfiguraient peut-être l’ahurissante et abrutissante apparition du Roi des Rats, quinze ans plus tard…

1 : Sérieusement, ceci est sa figurine officielle. Joie de vivre…  

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The Emperor’s Grace – A. Hammond [40K] – #3 :

INTRIGUE :

Hammond propose au lecteur de suivre la lutte pour la possession de la planète d’Olstar Prime entre Impériaux et Eldars par les yeux de deux personnages aux vues radicalement divergentes sur la question. Au zèle fanatique du Commissaire Streck s’oppose en effet le pragmatisme du Lieutenant Catachan Lownes, et alors que le premier se tient prêt à sacrifier jusqu’au dernier soldat pour repousser les Xenos, le second serait plutôt du genre à filer à l’anglaise avec les survivants de son unité avant que les zoneilles ne massacrent tout le monde. Pressé par le temps et surveillé de près par un Streck ayant mal digéré le retrait stratégique ordonné par Lownes, notre Lieutenant tire au flanc arrivera-t-il à mener son projet de désertion à bien ?

AVIS :

À y regarder de plus près, ‘The Emperor’s Grace’ n’est pas tant une nouvelle que le développement sur une vingtaine de pages par Hammond du dilemme classique du Garde Impérial : est-il vraiment condamnable de chercher à sauver sa peau plutôt que de voir sa vie sacrifiée par des officiers indifférents pour la défense d’une planète insignifiante ? Ce parti pris aurait pu être payant si l’auteur avait réussi à répondre à cette question, somme toute centrale dans l’univers violent et totalitaire de Warhammer 40.000, de manière convaincante et/ou originale. Au lieu de ça, Hammond termine son propos avec un piteux WIJH1, laissant un fort goût d’inachevé au lecteur à la fin de ‘The Emperor’s Grace’ (dans la même veine, mais pour Warhammer Battle, on retrouve ‘The Last Charge’ d’Andy Hoare). À oublier.

1: Well, It Just Happened que la personne qui devait permettre à Lownes et ses hommes de quitter la planète s’est pris un missile Eldar dans le buffet, ce qui condamne les Catachans à se battre aux côtés des défenseurs d’Olstar Prime.

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The Faithful Servant – G. Thorpe [WFB] – #3 :

INTRIGUE :

Au sortir d’une bataille perdue par l’Empire contre une armée chaotique dans le nord du Kislev, le prêtre guerrier Markus revient à lui dans un champ de cadavres. Piégé sous la dépouille de sa monture, il ne peut se dérober lorsqu’un guerrier des puissances noires se présente devant lui. À sa grande surprise, son ennemi ne semble pas tant être intéressé par sa vie que son âme, ses sombres maîtres lui ayant promis l’immortalité en échange de la corruption d’un certain nombre d’individus vertueux. Markus pourrait être la dernière victime d’Estebar, le maître du massacre, dont l’ost se débanderait après l’élévation de son général au rang de Prince Démon, épargnant ainsi les vies de milliers d’innocents. Mais notre héros est-il prêt à consentir au sacrifice ultime pour préserver ses compatriotes des ravages des hordes du Chaos ?

AVIS :

La damnation et les chemins, souvent détournés et pavés de bonnes intentions, qui y mènent, font partie des thèmes de prédilection de Gav Thorpe, qui a consacré au sujet sa première trilogie en tant qu’auteur de la Black Library (‘Slaves to Darkness’). ‘The Faithful Servant’, publié quelques années avant ces romans, peut donc être considéré comme un galop d’essai de la part du Gav. On retrouve ainsi dans cette nouvelle un héros placé face à un choix cornélien, dont les répercussions ne manqueront pas d’ébranler le Vieux Monde (c’est du Thorpe après tout).

Construit exclusivement comme « écrin narratif » à sa question centrale, ‘The Faithful Servant’ tient davantage du conte philosophique (même si une telle appellation est un peu galvaudée par son enrobage med-fan) que de la nouvelle de sword and sorcery classique, et ce n’est pas plus mal. Sans s’avérer particulièrement mémorable ni éloquent, le débat opposant Markus à Estebar se révèle être assez plaisant à lire. En choisissant de conclure son propos avant que le prêtre guerrier n’ait fait son choix, Thorpe gratifie de plus sa nouvelle d’une conclusion, que dis-je, d’une ouverture, d’une élégante sobriété (pour changer).

Si elle s’adresse en premier chef aux lecteurs récemment initiés au background de Warhammer (les vétérans n’y trouvant rien que de déjà très connu d’eux), ‘The Faithful Servant’ est sans doute l’une des meilleures soumissions de Gavin Thorpe.

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Bad Spirits – J. Green [NDA] – #3 :

INTRIGUE :

Dans l’univers impitoyable du Far West Down, il est un nom qui inspire la crainte même plus endurci des gangers et au plus sanguinaire des mutants : Nathan Creed. Chasseur de Primes de profession et de titre1, Nath’ est le résultat que l’on aurait obtenu si Clint Eastwood avait tourné dans un film post-apocalyptique italien dans la foulée des ses Western spaghetti. Promenant son charisme minéral, ses mégots de cigarillos et ses deux pétoires de gros calibre d’un bout à l’autre du sous monde, Nathan Creed règle les problèmes des uns et des autres contre crédits sonnants et trébuchants, et de manière définitive.

Chargé par un vieux chef Ratskin (Thunderslag) dont la moitié de la tribu a été massacrée par une bête mystérieuse, et l’autre moitié a décidé de lui faire faux bond pour aller se venger sur les habitants « civilisés » de l’avant poste le plus proche (because why not), de faire lumière sur ces événements tragiques, Creed débarque dans le riant bourg de Toxic Sump pour mener sa petite enquête. Son passage obligatoire dans le saloon local lui permet de prendre le pouls de l’opinion publique, tout aussi stupide, raciste et prompte au lynchage que l’on peut se l’imaginer. Il fait également la connaissance d’un certain Cyrus Beckerman, qui lui conseille vivement de quitter la ville au plus vite, afin de ne pas connaître le même sort que les colons sommairement scalpés par les Peaux Rouges en furie. Il en faut évidemment bien plus pour décourager un professionnel comme Creed, dont l’intérêt est piqué par le décès brutal et suspect de Quinn (l’Eskimo), un prospecteur local venu s’en jeter un petit pour se remonter le moral après avoir échappé de très peu à la hache de guerre des Ratskins renégats. Comme le malheureux s’est étouffé après avoir descendu d’un trait un verre de WildSnake que lui avait tendu l’affable Beckerman, c’est naturellement vers ce dernier que les soupçons de notre héros se portent.

Ayant décidé d’inspecter les fouilles du défunt, Creed se fait surprendre dans son étude des empreintes parsemant la grotte mise à jour par Quinn par l’inévitable Beckerman, qui se révèle être un ganger Van Saar en maraude. Plus stalker que killer, Beckie ne parvient pas à régler son compte au chasseur de primes, qui blesse son adversaire et profite de l’effondrement d’une partie de la galerie souterraine, causée par la chute de son adversaire sur un détonateur enclenché qui traînait négligemment au sol (comme quoi, ça n’arrive pas que dans les cartoons), pour fausser compagnie au faux jeton. Ne pouvant plus ressortir, Creed est contraint de se frayer un chemin dans les profondeurs du sous monde, négociant avec brio un attroupement de Zombies de la Peste peu farouches, dans ce qui ressemble au parcours de FPS le plus bullet timé de l’univers. Le hasard (et le manque de pages) faisant bien les choses, Nath’ finit par déboucher dans une caverne remplie d’archeotech où Ratskins et Van Saar sont à deux doigts de se mettre sur le nez. On comprend que les seconds achètent aux premiers les artefacts qu’ils remontent des couches inférieures de la ruche, et que l’embrouille a été causée par la prime de risque demandées par les locaux, inquiets des déprédations causées par le mystérieux monstre sur lequel Creed enquête.

Comme s’il avait deviné que la progression de l’intrigue passait par lui, le monstre en question finit par arriver sur les lieux, sauvant au passage les miches de Nathan Creed dont le manteau flottant avait malencontreusement fait tomber une bouteille au sol, lui attirant un feu nourri de la part des conspirateurs. Un prix acceptable à payer pour être fashion en toutes circonstances (et que l’on a une armure en scénarium enrichi). Laissant les goons se faire massacrer par l’élément perturbateur, rien de plus qu’un vieux cyborg de garde réveillé par les fouilles explosives des colons, Creed cherche à s’éclipser en catimini, mais croise à nouveau la route de Beckermann. Toujours aussi empoté, le Van Saar ne parvient ni à déclencher l’explosion qui aurait enfoui la caverne et ses occupants sous des tonnes de roche, ni à régler une bonne foi pour toutes son compte au gun slinger, avant que le monstre ne vienne l’empaler sur sa griffe et lui arracher la tête pour faire bonne mesure. Fort heureusement, Creed réussira là où son adversaire avait lamentablement échoué, réglant définitivement le problème du chef Thunderslag et apaisant l’esprit des morts par la même occasion. Ne pouvant pas partir vers le lointain sur son cheval et dans le soleil couchant pour des raisons évidentes, notre héros s’en va dignement à pinces sous la lueur vacillante de néons en fin de vie. Ce qui est presque aussi bien.

1 : Green passe un temps inconfortablement long à appeler son personnage « The Bounty Hunter » en début de nouvelle, avant de passer aux familiarités.

AVIS :

Première nouvelle de Nathan Creed, le second pistolero le plus connu de Necromunda (après Kal Jerico), ce qui est tout de même malheureux pour Green compte tenu de la compétition limitée sur ce créneau, ‘Bad Spirits’ est un pastiche de western tout à fait quelconque et à l’intrigue aussi friable que les cavernes dans lesquelles se déroule notre propos. Entre le monstre qui émerge sur un gros coup de déveine (alors que tout auteur digne de ce nom aurait pu imaginer une raison un minimum intéressante/inventive/connectée au reste de l’histoire à sa venue), les coups de chance successifs de Creed pour parvenir à ses fins, et le manque d’intérêt absolu du méchant de l’histoire, il n’y a pas grand-chose à sauver et à retenir des débuts de Creed dans le sous monde. Une entrée en matière finalement à l’image de la série en elle-même, à laquelle Green ne donna jamais les moyens de s’élever au-dessus de son pitch de base (Mon Curé chez les NudistesLee Van Cleef à Necromunda). Il faut vraiment être un archéoBListe acharné pour convoquer le souvenir de Nathan Creed aujourd’hui… et c’était déjà valable à l’époque.

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Ghostmaker – D. Abnett [40K] – #4 :

40K_GhostmakerINTRIGUE :

Le Commissaire Ibram Gaunt, officier capable et favori de feu le Seigneur de Guerre Slaydo, est envoyé par le Haut Commandement de la Croisade des mondes de Sabbat superviser la levée de nouveaux régiments sur le monde forestier de Tanith. Déprimé par la mort de son mentor, tué pendant la bataille de Balhaut, Gaunt n’est guère impressionné par les recrues de Tanith, dont le look de hippies (cheveux longs, tatouages, piercings et boucles d’oreille) et l’accent chantant (c’est canon), sans parler de la cornemuse incessante en bande-son, ne font pas un grand effet à notre inflexible héros. Résolu à expédier les formalités le plus rapidement possible, possiblement à cause d’un mal de cheveux (qu’il a pourtant courts) persistant, Gaunt insiste lourdement pour que ses futures troupes commencent à embarquer dans leurs transports dès la fin de la parade protocolaire. Croyez-le ou non, mais de la gueule de bois de ce vieil Ibram dépendra beaucoup de choses, car la malheureuse Tanith ne tarde pas à recevoir la visite non-désirée d’une flotte chaotique, ayant profité du laxisme de Macaroth après sa prise de fonction pour aller faire du terrotourisme dans l’espace impérial. Aussi vulnérable qu’un monde Squat face à la démotivation du studio GW une flotte ruche tyrannide, la planète ne peut être sauvée, et Gaunt donne l’ordre d’une cruelle mais logique évacuation des régiments tout juste assemblés, laissant le reste de Tanith partir en fumée comme une briquette d’allume barbecue. Donnant de sa personne en bon héros de série d’action, Ibram sauve le jeune piper qui lui vrillait les tympans depuis son arrivée sur le plancher des vaches (où l’équivalent local de ce placide ruminant), mais perd au passage son fidèle assistant, Sym (you cannot unsee it), et avec lui, tout espoir de retrouver un jour sa chemise grise. Malgré de lourdes pertes – 6 zeta tonnes, tout de même – l’équivalent d’un régiment parvient tout de même à quitter la planète condamnée, sans se douter un instant du glorieux destin qui l’attend dans les années à venir.

La suite de la nouvelle voit Gaunt et ses hommes commencer à s’apprivoiser mutuellement, et donne l’occasion à Abnett de présenter quelques unes des figures les plus connues du Premier et Unique de Tanith, telles que Corbec, Rawne (dont la promotion au rang de Colonel et Major est due à leur présence dans la délégation de soldats venue exprimer son mal-être auprès de leur officier quelques heures après leur départ précipité), Larkin et Bragg. Les Fantômes de Gaunt, nom trouvé par Larkin sur une inspiration géniale, font leurs premières armes sur Blackshard, leurs talents d’infiltrateurs sans pareil leur permettant de frapper au cœur du dispositif ennemi, et de faire sauter la box internet de leurs adversaires chaotiques, provoquant un suicide de masse de ces derniers, sans doute déspérés de ne plus pouvoir organiser des soirées Netflix & Kill pour tuer le temps (Blackshard, ce n’est pas une destination très sympa). Ce premier fait d’armes voit aussi la première tentative d’homicide de Rawne sur Gaunt, nonchalamment éventée par le colossal Commissaire1, qui, peu rancunier, repart vers les lignes impériales avec son BFF sur l’épaule après l’avoir mis hors d’état de nuire. La base quoi. La base.

: Abnett indique que son héros fait « bien plus que deux mètres ». Quand on apprend que Corbec est plus grand que Gaunt, et que lui-même est chétif par rapport à Bragg, on comprend mieux comment les Tanith réussissent à claquer le beignet d’Astartes félons en deux temps trois mouvements.

AVIS :

Comme beaucoup de lecteurs de la BL, j’ai découvert les Fantômes de Gaunt à travers le premier roman de la série, ‘Premier & Unique’, qui raconte les exploits guerriers des scouts les plus fumés de la Garde Impériale sur le théâtre de Menazoid Epsilon. Cependant, les véritables débuts de la saga la plus mythique de la GW-Fiction sont à dater du 4ème numéro d’Inferno! et du ‘Ghostmaker’ signé par un tout jeune Dan Abnett, qui avait fait ses débuts au sein de la Black Library deux mois plus tôt avec une autre figure mythique du panthéon Warhammerstique, l’inconsolable Gilead (‘Gilead’s Wake’). Cette nouvelle, incluse dans le 2ème roman de la saga des Fantômes, nommé également ‘Ghostmaker’, pose les fondations de la série avec une efficacité redoutable, le talent littéraire d’Abnett permettant au lecteur de se familiariser avec les principaux fantômes1, d’apprendre les conditions tragiques dans lesquelles le Premier et Unique a été formé, et de suivre ce dernier (et à travers lui, Dan Abnett) lors de son baptème du feu. Plus de vingt ans plus tard, l’alchimie fonctionne toujours, et il n’est guère difficile de comprendre pourquoi les petits gars de Tanith ont connu la carrière qu’on leur sait à la lecture de ces premiers exploits. La patte magique d’Abnett opère parfaitement, et entraîne le lecteur dans une aventure rythmée et violente, tout en prenant le temps de donner une appréciable profondeur à ses personnages. Un fething masterclass en somme, dont la lecture (et la relecture) reste rigoureusement conseillée à tous les amoureux de la BL.

1 : Et d’autres moins fameux, mais dont la connaissance vous permettra de briller à la prochaine convention 40K à laquelle vous participerez. Citons le Colonel Torth et le Major Garth, qui auraient dû seconder Gaunt à la place de Corbec et Rawne, s’ils n’avaient pas raté leur navette d’évacuation, et le soldat Forgal, qui a eu l’insigne (mais douloureux) honneur d’être le premier Fantôme à mourir en opération de la série.

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Paradise Lost – A. Jones [WFB] – #4 :

INTRIGUE :

Nous retrouvons les maraudeurs de Grunsonn dans une bien mauvaise passe : à la dérive au milieu de l’océan sur une coquille de noix, sans eau ni nourriture, et délestés de la cargaison d’or qu’ils avaient soutirée de la cale d’un galion abandonné par un pirate indélicat. Heureusement pour notre quatuor de choc, le salut finit par poindre à l’horizon, sous la forme d’une île où accoster afin de se refaire une santé. Et lorsque les indigènes (une colonie de skinks) se mettent en tête que les maraudeurs ne sont autres que Losteriksson et ses guerriers, revenus après des siècles d’absence régner sur leurs adorateurs à sang froid, il ne fait plus de doute que le temps des vacances a sonné pour nos quatre aventuriers.

AVIS :

Deuxième et dernier épisode de la (courte) saga consacrée par Andy Jones à Grimcrag Grunsonn et ses maraudeurs, ‘Paradise Lost’ est une soumission sensiblement supérieure à ‘Grunsonn’s Marauders’, et ce sur tous les plans. Fidèle à son approche décomplexée du monde de Warhammer, Jones continue en effet sur sa lancée de med-fan parodique, tout en dotant son récit d’une intrigue bien plus charpentée (appréciable attention), et en s’arrangeant pour combler – à sa manière – les blancs laissés dans le background officiel au lieu de chercher à réécrire ce dernier à sa sauce. Autre point positif, l’inclusion de véritables personnages secondaires (shout out à Froggo, le skink de compagnie de Johan Anstein, qui se rêvait méchant de James Bond), permettant à l’auteur de confronter ses héros à des antagonistes à leur hauteur, c’est-à-dire complètement barrés.

Au final, ‘Paradise Lost’ n’est rien de moins que la tentative la plus aboutie de la part d’un auteur de la Black Library de tourner en dérision l’univers de Battle, et rien que pour ça, cette nouvelle vaut le détour.

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Rites of Passage – G. Rennie [NDA] – #4 :

INTRIGUE :

Une nouvelle fournée de jeunes Orlocks se préparent à passer l’épreuve pratique du bac necromundesque, à savoir partir se fritter avec les affreux d’en face (ces c*nnards de Cawdor) dans une arène désolée située au beau milieu du sous monde. Il y a là le gros costaud Dorn, probablement baptisé ainsi car ses parents étaient fans du Trône de Fer, ses lieutenants putatifs Mikhal et Lan, et les frangins Mallin (qui l’est) et Jaal (qui ne l’est pas car ça ne veut rien dire : faîtes un effort tout de même). Ce dernier a été adopté par la famille de Mallin après que la sienne ait été assassinée par des gangers rivaux, et occupe le poste ingrat mais indispensable dans tout groupe de souffre-douleur attitré. Après avoir reçu un discours inspirant de leur instructeur, les djeun’s partent à l’aventure dans la pampa, certains de revenir d’ici deux jours avec les preuves de leur victoire contre la canaille estrangère et bigote.

Ce que le club des cinq ne peut pas savoir, c’est que rôde dans les parages un Spyrien solitaire, tellement accro au meurtre sauvage de prolo’ qu’il n’est jamais remonté à la surface depuis sa dernière virée. Engoncé dans son armure dernier cri (à plusieurs titres, comme nous le verrons plus tard), le Chasseur, car c’est ainsi qu’il se nomme1, ne dit pas non à un petit massacre d’adolescents attardés, après avoir fait des sashimis de leurs rivaux Cawdors quelques heures plus tôt. Le premier à y passer sera le malchanceux Mallin, qui se fait emporter dans les airs (moins une main) par le traqueur des ombres, malgré l’avertissement de dernière minute seconde que lui avait lancé son frère. Que l’on découvre être un Psyker latent, ce qui n’est pas un statut beaucoup plus enviable que punching ball à bully, si vous voulez mon avis. D’ailleurs, ce balourd de Dorn, aussi épais et dense mentalement qu’une fortification érigée par son saint patron, manque de se passer les nerfs en flinguant son sous-fifre, dont la prescience lui semble être la preuve d’une connivence entre Jaal et le Spyrien. Cependant, l’appel à l’aide de Mallin qui s’élève d’un tas de décombres à quelque distance du lieu de l’embuscade suspend le procès en trahison que Dorn était en train de conduire sur le pouce (ou le poing ? avec un nom pareil), et les quatre survivants partent en direction des cris pour tenter de secourir leur comparse…

Début spoiler…Qui bien évidemment, était mort depuis longtemps à leur arrivée, comme son cadavre crucifié et décapité l’atteste formellement. C’était une ruse du Chasseur, qui avait enregistré les derniers instants de sa proie, pour attirer le reste du gang dans un nouveau piège. Cette fois-ci, c’est l’hécatombe, et Dorn, Mikhal et Lan décèdent violemment, ne laissant que Jaal debout, mais en fuite, pour la team Orlock. Le rapport de force est déséquilibré, mais le Spyrien s’amuse trop pour sonner rapidement l’hallali, et il ne se doute évidemment pas que le teenager maigrelet qu’il finit par coincer sur une passerelle a plus d’un tour dans son cortex. Le stress de sa mort prochaine provoque une poussée télékinésique chez Jaal, ce qui fait un gros trou dans la plateforme, forcément branlante et rouillée, où le tête à tête avait lieu. Normalement pas un problème pour le Chasseur, dont l’armure a une fonction bat grappin, mais figurez vous que Jaal est un prodige psychique, comptant parmi ses nouvelles compétences celle de « l’auto-tune balistique ». Un nom compliqué et sans doute inventé de toutes pièces, qui veut dire qu’en se concentrant très fort, il est capable de réaliser des tirs proprement improbables grâce un correcteur de trajectoire venu tout droit du Warp (comme Jul, ce qui fait un autre point commun avec l’auto-tune). Vous devinez la suite : un hotshot improbable sur le filin du Spyrien, précipité dans l’abysse avec son armure dernier cri. Et même pas le sien en plus. Il n’avait pas reset les réglages, ce chien.

La nouvelle se termine, non pas sur des retrouvailles joyeuses à Orlock city, mais sur le constat par le reste du gang de la disparition de leurs ados. Jaal assiste de loin à la fermeture des portes du campement, ayant compris qu’en tant que Psyker, il n’avait plus sa place auprès de sa famille adoptive. Le début d’une existence de paria solitaire dans le sous-monde, sans doute courte et violente mais certainement riche en émotions, qui ne sera cependant pas narrée ici. ENDS.Fin spoiler

1 : Et son pronom est ‘it’, si vous voulez tout savoir. Be an ally.

AVIS :

Nouvelle histoire sur le passage à l’âge adulte dans l’univers pas tendre de Necromunda (il y a aussi ‘Mark of a Warrior’, pour ceux qui demandent), ‘Rites of Passage’ démontre que Gordon Rennie sait mettre en scène une nouvelle d’action de manière potable, ce qui n’est guère étonnant au vu de son passif d’auteur de comics. Rien n’est particulièrement mémorable dans ces quelques pages, mais tout tient de debout et s’enchaîne sans heurt ni incohérence, ce qui est déjà un niveau appréciable pour de la GW-Fiction. Si c’est une de vos premières lectures necromundesques, vous auriez pu tomber sur bien pire. Si vous êtes déjà familier avec cette riante planète, à la fois trop et absolument pas urbaine, vous auriez pu tomber sur bien mieux. Tout est affaire d’équilibrage, j’imagine.

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Into the Maelstrom – C. Pramas [40K] – #4 :

INTRIGUE :

Capturé après l’abordage malheureux d’un croiseur White Scars par ses camarades Red Corsairs, l’archiviste Sartak doit prouver sa loyauté retrouvée envers l’Empereur (car la vue d’une dizaine de bolters braqués sur sa tête l’a aisément convaincu de retourner sa veste énergétique, étonnant non ?) en informant ses nouveaux copains de la destination du prochain raid de Huron Sombrecoeur hors du Maelstrom. Notre héros repentant arrivera-t-il à abuser le paranoïaque ex Tyran de Badab assez longtemps pour accomplir sa périlleuse mission ?

AVIS :

Si on met de côté les zones d’ombre1 de l’argument d’Into the Maelstrom, que l’on peut imputer à la plus grande permissivité qui régnait à cette époque (voir Hell in a Bottle de Simon Jowett pour s’en convaincre), cette nouvelle se révèle être très convenable. La force de l’écriture de Pramas est d’arriver à retranscrire la course contre la montre dans laquelle est engagée son héros, et l’étau qui se resserre de plus en plus autour de lui au fur et à mesure des pages. Into the Maelstrom peut également se targuer de bénéficier d’un final réussi, autant du point de vue de la construction narrative que du respect de l’ambiance nihiliste de Warhammer 40.000, et de la participation du Huron Sombrecœur convaincant en psychopathe retors et flamboyant.

1: « Seigneur Subotai Khan, le Red Corsair que nous avons fait prisonnier après l’attaque de notre barge de bataille (au lieu de lui coller un bolt dans le crâne, comme il aurait été normal) est réveillé et attend votre bon plaisir. »
« Faîtes le entrer. »
« Qui a été un vilain garnement, hum ? »
« Je dois reconnaître que j’ai commis quelques erreurs ces dernières années votre honneur, mais depuis que vous m’avez capturé et me tenez à votre merci, j’ai très envie que nous devenions copains. Vive l’Imperium donc. »
« Merveilleux. Maintenant que tu as miraculeusement retrouvé foi en l’Empereur, tu es libre de retourner chez les Red Corsairs. Essaie juste de nous dire où Huron dirigera sa prochaine attaque, de manière à nous permettre de le prendre en embuscade. »
«  Vous ne préférez pas plutôt que je vous mène directement jusqu’à la flotte des Red Corsairs, chose dont je suis capable selon l’auteur de la nouvelle ? »
« Nan. »
« Euh, d’accord, c’est comme vous voulez… Mais imaginons – je dis bien imaginons –  que mon repentir ne soit pas sincère, et qu’une fois de retour dans le Maelstrom, je vous fasse parvenir des informations erronées, permettant à Huron d’attaquer une planète sans défense, ou pire, de retourner l’embuscade des White Scars contre eux. Vous avez prévu quelque chose pour ce cas de figure ? »
« Bien sûr ! Le fidèle Arghun ici présent t’accompagnera dans ta mission, et s’assurera que tu mènes à bien cette dernière. »
« Vous êtes bien conscient que Huron risque de le faire tuer à la minute où il posera les yeux sur lui, hein ? Et que même dans le cas où il survivrait à son bizutage, il n’aurait aucun moyen de vous avertir de mon hypothétique trahison, étant donné que je serai celui qui vous transmettra les coordonnées du prochain objectif de Huron grâce à mes pouvoirs psychiques ? »
« Tu as raison Sartak, mon plan repose entièrement sur ta pleine et entière coopération. Mais j’ai tout à fait confiance en toi, car nos trente secondes d’entretien m’ont convaincu qu’en dépit des actes monstrueux que tu as commis en tant que Red Corsairs, tu es quelqu’un de bien. Pars avec ma bénédiction. »
« Merci Subotai Con, heu Khan. »

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The Dead Among Us – J. Wallis [WFB] – #5 :

WFB_The Dead Among UsINTRIGUE :

Prêtre de Morr s’étant découvert une passion pour l’au-delà sur le tard, après la disparition non élucidée de sa femme et de son fils, Dieter Brossmann, celui-qui-n’aime-pas-que-son-nom-soit-prononcé, officie dans la Cité du Loup Blanc en compagnie de coreligionnaires variant du balourd (Frère Gilbertus) à l’affairiste (Albrecht Zimmerman, le Sett Blater du dieu des morts). Ancien marchand un peu plus fin que le Middenheimer moyen – qui, comme chacun sait, a tendance à résoudre ses problèmes à coups de marteau – Brossman collabore régulièrement avec la Garde Urbaine sur des affaires complexes, et c’est à ce sujet qu’il est fait mander par le Capitaine Schtutt en pleine consécration funèbre. Laissant l’inutile Gilbertus prendre le relai, notre héros se hâte jusqu’à la scène du crime, où l’attend le cadavre d’une fille de joie Norse, dont le bras amputé se trouve être un tentacule. C’est en tout cas la conclusion sur laquelle Captain Obvious Schutt s’empresse de bondir, tel le glouton peu dégourdi qui est son animal totem. Il en faut toutefois plus pour convaincre Brossman, qui tient à réaliser une autopsie en bonne et due forme au temple, avant de faire parvenir son rapport circonstancié au Graf, comme le veut la procédure lorsqu’un cas de souillure chaotique est suspecté.

De retour à la Morr-gue, Brossman tente de faire parler la macchabée (c’est pratique tout de même, la foi), mais se heurte à une espèce de firewall post-mortem sur lequel ses meilleurs efforts ne peuvent prévaloir. Suspectant qu’il y a anguille sous roche, ou dans ce cas, asticot sous escarre, notre héros tente d’intéresser son supérieur à ce cas complexe, sans succès. Zimmerman a en effet mieux à faire que sauver l’âme d’une prostipoulpe, et le fait savoir en termes non incertains à son subalterne. Mal lui en prend au final, car la nuit même, la morte reprend ses esprits et se livre à un sanglant massacre sur le personnel de garde du temple, envoyant quelques bedauds et diacres de seconde classe, ainsi que le pauvre Zimmerman, dont la diction mal assurée ne lui permet pas d’achever son incantation purificatrice avant de l’être lui-même (achevé), rencontrer leur divinité tutélaire. Si Brossman arrive à mettre fin aux déprédations de la Zombie à l’aide du combo bien connu huile sacrée + allumette, le culte de Morr local s’en trouve très affaibli, ce qui provoque une intense réflexion chez notre enquêteur…

Début spoiler…Pris d’une intuition subite, il se rend dans une taverne mal famée de l’Altquartier (le Pigalle de Middenheim) pour rencontrer une ancienne connaissance, le trafficant et informateur Alfric Half-nose, auquel il a rendu service il y a quelques temps. Alfric étant un Nain, Brossman en appelle au sens de l’honneur de son hôte, et demande des informations sur la présence d’éventuels Nécromants à Middenheim, ce que son interlocuteur au demi-nez confirme à demi-mots. Il semblerait en effet que le Frère Gilbertus ne soit pas très orthodoxe dans la conduite de ses rites funéraires, résultant en des cadavres vulnérables à une possession par un esprit malin, ce qui est justement ce qu’un prêtre de Morr est censé empêcher. Convaincu de tenir son coupable, Brossmann se rend directement jusqu’à la Falaise des Soupirs, d’où sont précipités les morts sans le sou de la cité, voir son suspect opérer. Et force est de constater que Gigi rajoute des couplets très lourds au cantique officiel, ce qui confirme les soupçons de Brossman. Une fois la foule dispersée, notre héros confronte donc son collègue retors, qui avoue assez facilement être un Nécromancien, dont le plan machiavélique consistait à introduire un cadavre suspect (le tentacule n’était en fait qu’un montage grossier pour obliger les autorités à rapatrier le corps au temple) chez les Morrticiens, le réanimer en douce et l’envoyer trucider Zimmie, afin que Gilbertus puisse reprendre sa place. Quelle meilleure position pour un Nécromancien que Haut Prêtre de Morr, en effet ? Malheureusement pour Gilbertus, l’absence d’Insensible à la Douleur sur son profil le pénalise fortement lorsque Brossman parvient à le couper (doublement) dans l’énonciation de son sortilège meurtrier. Une pathétique empoignade plus tard, et l’apprenti Nagash bascule à son tour de la falaise, avec des conséquences tout ce qu’il y a de plus fatales. Middenheim est sauve, pour cette fois, mais Brossman va devoir faire un certain nombre d’heures sup’ dans les jours à venir…Fin spoiler

AVIS :

Nouvelle policière sympathique (plus que sa série ‘Marks of Chaos’ à mon avis) de la part de James Wallis, qui plonge le lecteur dans deux institutions temporelle et spirituelle du Vieux Monde : la Cité du Loup Blanc d’une part et le culte de Morr d’autre part. Plus que la conduite de l’enquête par Brossman, qui s’avère très correcte mais pêche logiquement par sa brieveté1, c’est l’immersion dans une atmosphère tout ce qu’il y a de plus WFB qui fait l’intérêt de cette nouvelle, où se croisent mutants, prêtres, nains et nécromanciens dans le charme pittoresque de Middenheim, que Wallis fait parcourir en long et en large à son lecteur. Bref, un court format très satisfaisant pour qui souhaite découvrir l’Empire dans toute sa trouble normalité (c’est-à-dire autrement que pendant une invasion massive mettant la survie de la civilisation dans la balance).

: Dans une nouvelle de 14 pages, on se doute bien que le coupable sera forcément l’un des 2 ou 3 personnages tiers que l’auteur met sur le chemin du héros, et un chouilla de bon sens permet de percer à jour l’identité du coupable bien à l’avance.

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Unthinking Justice – A. Millward [40K] – #5 :

INTRIGUE :

Une force de Black Consuls est envoyée sur la planète Suracto, en rébellion ouverte contre l’Imperium. Au fur et à mesure du déroulement de la mission, il apparaît toutefois que les traîtres ne sont pas forcément ceux auxquels on pense.

AVIS :

Une petite nouvelle sympatoche, qui commence comme une histoire de marounes classique, puis se corse salutairement grâce à la mise en scène d’un (léger1) doute quant à la nature de l’ennemi véritable des Black Consuls. On est très loin de l’Elucidium’ de Simon Spurrier et du ‘We Are One’ de John French, mais on ne peut que saluer l’intention d’Andras Millward de donner au lecteur davantage qu’une Cawkwell-erie lambda. La conclusion de l’histoire est toutefois assez nébuleuse, ce qui affaiblit un peu le twist final concocté par l’auteur.

1« Alors vermine, pourquoi t’es-tu rebellé contre l’Empereur ?»
« Monseigneur Marine, il y a malentendu. Les copains et moi nous sommes soulevés contre l’administration planétaire parce qu’elle cherche à faire tomber la planète aux mains du Chaos. Nous avons des preuves solides de son implication dans un compl- »
« BAM BAM BAM »
« Administrateur ! C’est le cinquième prisonnier que vous exécutez en plein interrogatoire, juste au moment où il allait vous mettre en cause dans cette triste histoire. Je commence à croire que vous nous cachez quelque chose… »
« Veuillez me pardonner, ça n’arrivera plus. J’ai tendance à sur réagir quand ma fidélité envers l’Imperium est mise en doute. Héhé. »
« Bon, d’accord. Mais que je ne vous y reprenne pas une sixième fois, hein ! »

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Dark Heart – J. Green [WFB] – #5 :

INTRIGUE :

Ayant décidé d’abandonner le Kislev pour tenter leur chance sous des cieux plus cléments, Badenov et sa bande de mercenaires se retrouvent entraînés dans une sombre histoire sur la route de Bechafen. Il semblerait en effet qu’un ancien mal soit en passe de se réveiller dans le petit village d’Ostenwald, forçant notre fine équipe à unir ses forces avec celles d’un jeune noble dont la fiancée vient de succomber à une crise d’anémie aigüe. Vampire, vous avez dit vampire ?

AVIS :

Dans la série des aventures de Torben Badenov et de sa fine équipe de bras cassés, ‘Dark Heart’ fait figure d’épisode central, car il permet à Green d’introduire le personnage de Pieter Valburg, qui rejoindra la bande à la fin de la nouvelle. J’ai une affection toute particulière pour Pieter, car il n’aura de cesse de miner l’autorité de Badenov auprès de ses comparses, en faisant éclater au grand jour la stupidité crasse et l’amateurisme décomplexé qui caractérisent le « héros » de la série ‘The Lost and the Damned’. S’il n’est encore qu’un personnage de second plan dans ‘Dark Heart’, Herr Valburg y fait néanmoins des débuts remarqués, et s’affirme d’ores et déjà comme le membre le plus important de la bande, après Badenov bien sûr.

‘Dark Heart’ donne également l’occasion à Jonathan Green de dérouler le grand jeu, en gratifiant ses lecteurs d’une narration à double point de vue (celui des mercenaires de Badenov, et celui du vampire comateux traqué par ces derniers), ainsi que d’un petit twist final, deux extras que l’on prendra soin d’apprécier à leur juste valeur (relative hein, parce que dans l’absolu, on est loin du chef d’œuvre).

Malheureusement, ces éléments positifs sont largement marginalisés par le monceau d’approximations, d’incongruités et de carabistouilles que nous sert un Green résolument hermétique à toute tentative de livrer un récit un tant soit peu cohérent à son public. Des villageois courant aussi vite que des chevaux lancés au galop à la décision d’aller affronter un vampire de nuit dans son antre, en passant par l’incroyable capacité de l’auteur à livrer deux versions totalement différentes du même évènement à quelques pages d’intervalle1, ou encore la brillante idée qu’à Badenov d’aller enquêter dans un village dont lui et ses potes viennent de massacrer tous les hommes valides sur un gros malentendu, c’est à un festival d’inepties auquel lecteur a droit. Et dire que ça aurait presque pu être correct…

1 : Le vampire d’Ostenwald a-t-il été originellement vaincu par 1) une troupe de paysans enragés, ou 2) une bande d’aventuriers menés par un prêtre de Sigmar ? Le mystère est encore entier. 

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Last Chance – G. Thorpe [40K] – #5 :

INTRIGUE :

La tranchée tenue par les Gardes de Fer (sur le point de se transformer en Gardes de Rouille du fait de conditions climatiques peu favorables) du Lieutenant Martinez reçoit la visite d’un hôte de marque, en la personne de cette tête brûlée de Kage, tout juste revenu de sa balade quotidienne dans le no man’s land entourant la cité rebelle de Coritanorum. Esquivant balles, lasers, grenades, obus et quolibets avec la grâce qu’on lui connaît, notre héros se crashe comme une bouse aux pieds de l’officier, et s’en fait immédiatement un ennemi en aspergeant ses bottes de boue dans la foulée. Plus doué pour survivre à une purge de Space Hulk armé seulement d’une fourchette en plastique et d’un caleçon troué que pour se faire passer pour un Mordian discipliné et méticuleux (et peu aidé par le fait qu’il n’a même pas pris le temps de mémoriser le nom du soldat mort auquel il a dérobé son uniforme), Kage se fait immédiatement gauler par le Commissaire régimentaire qui passait dans le coin, mais arrive à gagner un sursis en révélant qu’il est membre d’une force d’infiltration impériale en mission top secrète derrière les lignes ennemies. Ce qui est précisément ce que dirait un soldat rebelle cherchant à infiltrer les lignes impériales s’il était fait prisonnier. Peut-être convaincu par le charisme naturel exsudé par le Last Chancer (ou conscient que l’armure de scénarium de ce dernier est trop épaisse pour leurs armes), les officiers Mordian se contentent de faire garder à vue notre héros par une poignée de Boucliers Blancs, qui tombent immédiatement sous le charme viril du vétéran balafré.

N’ayant rien d’autre à faire pour le moment, Kage commence à leur raconter sa vie, et notamment la manière dont il a atterri dans la Légion Pénale, suite à une rivalité amoureuse s’étant réglée dans le sang et les tripes entre lui et son Sergent de l’époque. Le récit du Père Kagetor est toutefois écourté par le déclenchement d’un bombardement orbital de Coritanorum, accompagné par un assaut généralisé sur les positions ennemies, juste pour être sûr de la mortitude définitive des défenseurs I guess, ou parce que ça coûtait trop cher en prométheum de rapatrier en orbite tous les régiments participants au siège. Après tout, et comme le dit le proverbe, la Garde meurt. L’occasion rêvée pour Kage de fausser compagnie à sa couvée de pioupious et mettre en exécution son projet d’évasion… si les choses s’étaient passées comme prévues. Malheureusement pour notre pénaliste expert, son fan club s’avérera trop fourni et trop collant pour lui permettre de filer à la Tanith, la perte de toute la chaîne de commandement Mordian au cours des premières minutes de l’assaut conduisant les Cadets à se tourner vers le torse velu et les mâles accents de Kage pour les guider vers une hypothétique survie. À toute chose, malheur est bon car les enfants-soldats de Mordian sauveront notre héros d’une mort prématurée lorsqu’il retombera, comme à la fin de chaque épisode, sur cette vieille baderne de Schaeffer. Tout prêt à exécuter son sous-fifre pris en flagrant délit de fuite, l’imperturbable Colonel est finalement convaincu de faire preuve de clémence par la dizaine de fusils laser braqués dans sa direction par la Kage Army. Ce n’est toutefois qu’un pis-aller pour Last Chance (qui mérite encore une fois son surnom) car Schaeffer a réservé une table pour deux dans un petit resto sympathique de Coritanorum, et il ne serait pas correct de faire attendre leurs hôtes…

AVIS :

Figures emblématiques du Thorpiverse, les Légionnaires Pénaux du Colonel Schaeffer, aussi connus sous le nom de Last Chancers, ont bénéficié d’une trilogie (chroniquée ici) et de quelques nouvelles de la part de Gav Thorpe entre la fin des années 90 et le milieu des années 2000. Ce ‘Last Chance’ est probablement le coup d’essai de notre homme avec ces anti-héros hauts en couleurs, et sert d’introduction au duo central de la 13ème Légion Pénale, l’increvable Schaeffer et sa (tout aussi increvable) âme damnée Kage. Nouvelle de guerre de tranchée typique du style BL dans sa deuxième partie, c’est le début de la soumission qui présente le plus d’intérêt à mes yeux, puisqu’y est détaillé le parcours de Kage jusqu’à sa rencontre fatidique avec celui qui deviendra son bien-aimé supérieur pour les années à venir, éléments intéressants pour les fans des Last Chancers ne se retrouvant pas dans les autres écrits consacrés par Thorpe à son équipe de bras cassés casseurs de bras. On appréciera également la narration gouailleuse de Kage lors des passages racontés depuis son point de vue, qui s’avère être vraiment réussie. Les puristes noteront que les événements couverts par la nouvelle ne sont pas cohérents avec la conclusion de 13th Legion, le premier roman de la trilogie Last Chancers, qui voit les derniers survivants de la première levée de Schaeffer infiltrer Coritanorum pour surcharger les réacteurs de la cité rebelle. Mais y a-t-il vraiment des puristes Last Chancers?

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A Blooding – D. Abnett [40K] – #6 :

40K_A BloodingINTRIGUE :

Après avoir fait leur connaissance dans ‘Ghostmaker’ (Inferno! #4), nous retrouvons les recrues de Tanith à l’occasion de leur première campagne d’envergure, deux mois après leurs débuts laborieux et la perte de leur planète natale. Ayant eu vent de leur action décisive dans la prise de Blackshard, le haut commandement du théâtre de Voltemand, incarné en la personne du Général Sturm du 50ème Volpone, réquisitionne les insaisissables Fantômes en support du siège de la capitale planétaire, Voltis City, mené par son régiment d’élite. Ce que Gaunt et ses hommes ne savent pas, c’est que l’infâme Sturm compte bien faire d’une pierre deux coups, ou d’un obus deux victimes, en veillant à ce que les hardis éclaireurs rencontrent un funeste destin au cours de l’opération, des mains de l’ennemi ou de celles de leurs alliés. Une occasion rêvée pour l’ambitieux Volpone de se faire bien voir de la part de Macaroth, qui ne porte pas les favoris de son prédécesseur dans son cœur.

Ignorants des manigances des Sangs Bleus (le surnom du 50ème), les Fantômes se dirigent vers la cité assiégée, secourant une colonne blindée que la venue d’une escouade de World Eaters beuglant avait laissée fort dépourvue (les servants de Basilisk font moins les malins lorsque l’ennemi est à 35.99 pas, c’est connu). Une fois rendus sur place, les Tanith se faufilent discrètement jusqu’au pied des murailles ennemies, avec pour objectif de faire sauter la buse par laquelle la rivière locale sort de la cité1, ou à défaut, de réaliser la même manœuvre à l’endroit où se déversent les égoûts de Voltis. Malheureusement pour nos infiltrateurs, l’effet de surprise ne dure pas assez longtemps pour leur permettre de s’emparer de leurs objectifs, les cultistes ayant le temps d’initier un largage sauvage venant éteindre l’enthousiasme des impériaux sous des mètres cubes d’eau saumâtre. Prêt à sonner la retraite pour minimiser les pertes, Gaunt est toutefois surpris par la détonation de la station d’épuration municipale, preuve que les sous-fifres qu’il avait envoyés au petit coin ont, eux, réussi leur coup. Ce succès inespéré permet au reste des forces impériales de se mettre en branle dans la joie et la bonne humeur, et d’écrabouiller la résistance chaotique avec l’efficacité pour laquelle le marteau de l’Empereur est célèbre.

Cette victoire, un peu chanceuse, il faut bien le reconnaître, n’est cependant pas la fin de l’histoire pour nos Fantômes – lessivés pour certains, emmer*és pour d’autres. Ayant reçu la nouvelle de la prise de Voltis, le méphistophélique Sturm ordonne à l’artillerie de campagne de bombarder la position des Tanith alors qu’ils se replient vers leurs lignes, provoquant un grand carnage chez ces derniers. Protégés par leur armure de scenarium, Gaunt et ses VIG (Very Important Ghosts) émergent cependant de l’enfer avec un fort sentiment d’incompréhension et une envie bien légitime de casser de l’artilleur, comme la pommette gauche du Colonel Ortiz du 17ème Kotzek – le même régiment secouru par le Premier et Unique en début de nouvelle – l’apprend à ses dépends. Il ne faut cependant pas longtemps au Commissaire-Colonel pour identifier le véritable coupable de cette malheureuse bévue, qu’il confronte dans son QG quelques heures plus tard. Tentant de justifier sa très saine colère, comme Ségolène Royal avant lui, Gaunt aurait été bon pour la cour martiale n’eut-été la correction opportune par Ortiz du compte-rendu de l’incident au haut-commandement (un bouchon de champagne à la trajectoire hasardeuse pendant le pot de victoire). C’était moins une pour notre héros, qui peut retourner auprès de ses hommes avec la satisfaction du devoir accompli et la connaissance de ses meilleurs ennemis, qu’il sera amené à croiser de nombreuses fois au cours des années à venir…

1 : Une manœuvre inspirée par la lecture de Jihair Ertolk’ Yen, fameux général de M2 ayant repoussé les Orks s’étant aventuré sur Terra en cette période lointaine. Le fait que les Aeldars aient pu assister les humains dans cette campagne, qui vit le Big Boss Evil Sunz Gortor battre en retraite après que le héros Ratling Fordo lui ait crevé l’œil à l’aide d’un digilaser, est encore sujet à controverse parmi les érudits impériaux.

AVIS :

Retour concluant pour les Fantômes de Gaunt, qui s’illustrent à nouveau dans une mission à haut risque venant asseoir leur statut de meilleurs infiltrateurs de la Garde Impériale. Cette nouvelle permet entre autres choses de faire la connaissance de trois seconds couteaux bien connus des amateurs de la série (Caffran, Varl et Meryn), ainsi que des rivaux jurés de nos héros tatoués, les imbittables Blueblood de Volpone, représentés ici par le sans-cœur Général Sturm et le sans-gène Major Gilbear. Abnett démontre à nouveau une belle aptitude à mettre en scène des affrontements nerveux et prenants, bien que c’est également de ce ‘A Blooding’ que l’on peut faire remonter sa tendance à idéaliser les performances d’un garde impérial moyen, comme le révèle l’accrochage introduisant son propos et la facilité déconcertante avec laquelle les jeunes et inexpérimentés Fantômes parviennent à massacrer une escouade de Berzerkers World Eaters en moins de temps qu’il en faut au Major Gilbear pour décliner son état civil complet1. On peut d’ailleurs noter que le Major en question, qu’Abnett voulait sans doute plus imposant que Gaunt pour lui faire adopter la posture de sombre brute, émarge à la taille confortable de 2m50, ce qui le met au niveau de l’Astartes classique. Essentiel à la construction de l’historique des Fantômes, ce court format n’est cependant pas exempt de tout reproche, en particulier le recours par l’auteur à un petit Deus ex Machina – indigne de son standing habituel – lors de l’assaut sur les murs et les caniveaux de Voltis City2. Rien de rédhibitoire cependant.

1 : Soit Gizhaum Danver De Banzi Haight Gilbear de Solenhofen, ou Gigi pour les intimes.
2 : On passe en effet de ça à ça, sans explications. À part une intervention miraculeuse de Canard WC ou des Tortues Ninja, le retournement de situation opéré par les Fantômes reste mystérieux.

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A World Above – A. Hammond [NDA] – #6 :

NDA_A World AboveINTRIGUE :

Aldus Harkon occupe la noble profession d’organisateur de voyages pour CSP+, et nous le suivons jusqu’au lieu de prise en charge de ses derniers clients en date, une petite bande de gosses de riches surexcités à l’idée de s’encanailler dans les favelas d’un pays du tiers monde. Comme notre histoire se passe sur la ruche Primus de Necromunda, il faut toutefois apporter quelques nuances à ce tableau jusqu’ici fort banal. Le service que propose Harkon tient en effet plus du safari que de l’escapade touristique boboïsante, avec les résidents du sous-monde dans le rôle de la faune sauvage et des Spyriens sur-équipés dans celui des dentistes américains1. Ayant manqué de se faire écraser par le vaisseau des fils et filles de Guilders lors de son atterrissage sur le tarmac, alors qu’il tuait le temps en glaviotant d’un air pénétré sur le rebord de la ruche, notre flegmatique et phlegmatique G.O. rassure ses Ran’Lo de clients sur la qualité de la prestation qu’il leur a vendue : il y aura de l’action et du fun à gogo pour les gogos, ce n’est pas la première excursion en terre inconnue qu’il organise, que diable !

Un peu plus tard et beaucoup plus bas, nous faisons la connaissance de Knife-Edge Liz, chef d’un gang d’Eschers dont la grande majorité des membres vient de connaître une fin brutale. Elle-même un peu esquintée par un combat d’une violence telle qu’elle a du mal à s’en souvenir, elle ne peut que constater que ses filles se sont faites féminicider de manière contondante, tranchante et pénétrante, ce qui en dit long sur les standards de gender equality à Necromunda. Quelques flashbacks épars et pas vraiment linéaires permettent au lecteur de recoller les morceaux de cet après-midi décidément très agité : mises sur un mauvais coup par Harkon, Liz et son gang ont vu leur projet d’embuscade d’une cargaison de matos Orlock échouer de façon spectaculairement sanglante, les chasseuses tombant dans le piège tendu par les Ran’Lo présentés plus haut. Dans l’affrontement qui s’en suivit, Liz vit périr ses BFF Bekka (Corinne Masiero avec un bolter lourd) et Kat (la Princesse Peach, mais en plus empotée) sous les coups des assaillants, ce qui la mit suffisamment en rogne pour lui permettre d’exterminer à elle seule la totalité de l’équipe adverse. Performance aussi impressionnante que statistiquement improbable, pour qui est familier du système de jeu, mais toujours est-il que Liz termine la partie comme Last Woman Limping, ce qui est toujours ça de pris.

Attirée par les gémissements de l’une de ses victimes/bourreaux, rendue aveugle par un coup pris à la tête, Liz fait preuve d’un peu de compassion en accompagnant la future macchabée dans ses derniers instants. Cela lui permet de réaliser qu’en dépit des différences de culture, statut et richesse qui les séparent, la Spyrienne et elle sont très similaire… ce qui est une raison de plus de la laisser crever comme un rat sur un tas d’ordures. Personne n’est gentil ni altruiste dans le sous monde, et chaque mort douloureuse est amplement méritée.

La nouvelle se termine avec une nouvelle rencontre entre Harkon et ses clients, réduits à leur portion congrue du fait de la disparition tragique de tous les Spyriens dans l’échauffourée précédemment exposée. Et de fait, c’est Liz qui a pris la place de sa dernière victime en date dans l’exo-squelette de celle-ci pour donner le change à l’onctueux intermédiaire. Comme elle l’annonce à un Harkon qui risque de passer un sale quart d’heure, la traque ne fait que commencer…

1 : Un jour cette référence sera complètement obscure pour le lecteur, mais j’ai bon espoir qu’en 2021, elle soit encore compréhensible.

AVIS :

On ne va pas se le cacher, les Spyriens font partie des factions de Necromunda au fluff le plus intéressant, et toute nouvelle les intégrant à son casting jouit donc d’un a priori favorable de la part de votre serviteur. Le capital sympathie de ‘A World Above’ est toutefois grandement dilapidé par Alex Hammond dans la série de flashbacks assez obscurs qui constitue le cœur de son propos, et à travers laquelle le lecteur finit par comprendre pourquoi et comment Liz et une Spyrienne aveugle sympathisent (presque) après que la poudre ait fini de parler. Cette intrigue a beau être intéressante dans l’absolu, et se terminer de façon convenablement grimdark en sus, l’exécution n’est pas aussi propre qu’il aurait été souhaitable pour un plaisir de lecture optimal. On n’est pas passé loin de la pépite Necromundienne, et la suite des aventures vengeresses de Knife Edge Liz (‘Rat in the Walls’) pourrait être franchement sympathique si Hammond règle un peu sa mire, mais ‘A World Above’ a laissé un goût marqué et rédhibitoire d’inachevé à votre serviteur.

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Mormacar’s Lament – C. Pramas [WFB] – #6 :

INTRIGUE :

Fait prisonnier par les Elfes Noirs au cours d’une mission d’infiltration à Naggaroth, le Guerrier Fantôme Mormacar profite de l’effondrement d’une galerie dans la mine où il était retenu comme esclave pour se faire la malle, accompagné d’un barbare de Norsca. Leur but est de rallier Arnheim, tête de pont des Hauts Elfes en territoire Druchii, en empruntant le dédale de souterrains s’étendant sous les fondations de Hag Graef. Il leur faudra pour cela se frayer un chemin dans les profondeurs glacées et hostiles de la terre du grand froid, en évitant les patrouilles elfes noires, les expéditions hommes-lézards (eh oui, ils ont dû prendre la mauvaise sortie sur l’autoroute) et les formes de vie les plus agressives de l’écosystème local. Bref, une véritable promenade de santé.

AVIS :

Chris Pramas nous sert un honnête récit d’évasion et d’aventure, dont l’intérêt vient autant du cadre exotique dans lequel il situe son propos que de la vision très sombre qu’à l’auteur du monde de Warhammer1, dans la droite ligne du background officiel. Sans être particulièrement mémorable le duo Mormacar – Einar (le nordique) fonctionne assez correctement, le « choc des cultures » des premières pages se transformant comme de juste en collaboration sincère, puis en amitié réelle.

On peut par contre regretter que les antagonistes, et en particulier le personnage de Lady Bela, sorcière ayant un gros faible pour le cuir et les cravaches, n’aient pas été plus développés, Pramas assurant le service minimum en matière de cruauté et de sadisme druchii. Il y avait sans doute moyen de faire mieux, et de relever du même coup le niveau général de la nouvelle, qui de sympathique aurait pu passer à remarquable.

En résumé, ‘Mormacar’s Lament’ est une soumission sérieuse et d’assez bonne facture, mais dont les « finitions » auraient gagné à être davantage travaillées par l’auteur.

1 : C’est une constante chez Pramas : les héros de ses nouvelles finissent toujours très mal.

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The Day of Thirst – T. R. Summers [NDA] – #6 :

INTRIGUE :

Vous, fringant et amène lecteur, incarnez une recrue Goliath sur le point d’intégrer le gang de la Main Noire, et parti s’en jeter un petit au bar du coin pour marquer l’occasion. Votre interlocuteur est le taulier du rade en question, un individu ouvert aux ragots et aux confidences, qui va se faire un malin plaisir de vous expliquer pourquoi ce recrutement par Krug Face-Mauler, le chef de la Main Noire, n’est peut-être pas une aussi bonne nouvelle que ça…

Quelques jours plus tôt, l’auguste établissement de Furet (le surnom du barman) et QG officieux de la Main Noire avait reçu la visite de courtoise de l’imposante Mother Dark et de ses Eschers, venus rappeler à Krug qu’il leur devait un sacrifice dans le cadre de leur pacte de non agression, et que la livraison était attendue dans quatre heures précises au lieu dit des Pierre Soiffardes (Drinking Stones), sans quoi ça allait chauffer. N’ayant pas jugé bon d’informer ses hommes du petit arrangement passé avec les Eschers, et blessé dans son honneur de mâle alpha qu’une bonne femme vienne lui foutre la honte devant sa bande, Krug se souvint que la meilleure attaque était l’offensive, et monta sur le tas une opération punitive en mobilisant les quelques gangers qu’il avait sous la main (qu’il a noire), ainsi que Furet pour faire le nombre. Manque de pot, le remontage du bolter lourd manié par le balèze de l’équipe (Dramuck) prit tellement de temps que le petit groupe ne rattrapa pas Mother Dark et ses soubrettes en territoire Goliath, comme cela était initialement prévu.

Le règlement de comptes se passa donc à proximité des Pierres Soiffardes, et finit par tourner en faveur de la team XX, dont la prise à revers de la bande de Krug sonna le glas des velléités machistes des crétins à crête. Laissant Dramuck empalé sur le mobilier urbain après que son bolter lourd eut explosé (maudite surchauffe) et Furet enfoui sous un tas de gravats pour sa peine, Krug décida que la meilleure défense était la fuite et détala sans demander son reste. De son côté Furet parvint à faire son trou et à filer à son tour quelques heures plus tard, non sans avoir été témoin contre sa volonté de la fin douloureuse et sanglante de Dramuck, épilé à la cire chaude, liposucé sans anesthésie et surtout écorché à vif par ses tortionnaires pour nourrir le corgi de Mother Dark, enfermé sous les Pierres Soiffardes et impatient d’aller marquer son territoire dans le sous monde quand sa mémère décidera de l’emmener en balade.

Fin du flashback et retour au bar, où Furet s’interroge tout haut sur la vraie motivation de Krug de remplacer le défunt Dramuck par votre honorable personne. Est-ce vraiment pour renforcer son gang, ou simplement pour pouvoir fournir à Mother Dark une nouvelle victime sacrifiable lorsqu’elle en fera la demande ? Mal en a pris à notre pipelette car vous décidez de filer sans demander votre reste, et surtout sans payer votre verre de WildSnake. Petit chenapan que vous êtes.

AVIS :

Résultats mitigés pour Tully R. Summers avec ce ‘The Day of Thirst’, très correct sur la forme mais moins intéressant sur le fond. L’aisance narrative dont l’auteur fait preuve pour brosser en quelques pages le compte rendu d’un accrochage classique entre Goliaths et Eschers se retrouve en effet battue en brèche par l’inclusion d’éléments trop sommairement couverts pour ne pas paraître étranges. Un chef de gang Goliath qui manigance en secret avec des Eschers pour éviter la confrontation ? Une sororité chaotique qui invoque des démons sous les fontaines ? Tout cela n’est pas incompatible avec le background de Necromunda dans l’absolu1, mais balancer ces idées sans les contextualiser ni les étayer de quelque façon que ce soit dans une nouvelle de cinq pages donne logiquement l’impression d’une mécompréhension de l’historique et de l’ambiance du sous monde, tels que décrits dans les sources officielles du jeu. Il faut savoir se contenter de peu et apporter modestement son gravillon à l’édifice, plutôt que de chercher à mettre des coups de pied dans la fourmilière (rarement une bonne idée quand on parle de cités ruches…).

1 : D’ailleurs une des règles fondamentales du fluff est que tout peut se justifier si l’on s’en donne les moyens.

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Il est difficile de conclure cette revue de façon profonde et subtile (comme à mon habitude), tant cette dernière porte sur un corpus indiscriminé. Si on peut leur reprocher beaucoup de choses, les recueils de nouvelles de la Black Library ont au moins l’avantage de ne porter généralement que sur une franchise, et ont (parfois) une ligne éditoriale dont on peut commenter la netteté du suivi. Rien de tout ça ici, seulement un beau pêle-mêle de nouvelles surannées et collector, et donc collectées ici pour your reading pleasure. J’espère donc seulement que cela vous a plu, car il nous reste six ans de publications infernales à couvrir. Ce ne se fera sans doute pas tout de suite, mais j’ai bon espoir d’en venir à bout. Je vous laisse juger si ce futur haut fait fera de moi l’équivalent de Lucifer, et vous dit à bientôt pour de nouvelles critiques sanglantes.

DEATH ON THE PITCH : EXTRA TIME [BB]

Bonjour et bienvenue dans cette revue critique de ‘Death on the Pitch : Extra Time’, entreprise littéraire extra ordinaire pour l’auteur de ces lignes. C’est en effet la première fois que je traite d’un ouvrage de la Black Library entièrement consacré au noble sport du Blood Bowl. Pour ma défense, ce type d’opuscule n’a jamais constitué le cœur des publications de la maison d’édition de Nottingham, tout comme ce jeu de ballon (à pointes) n’a jamais été celui de Games Workshop. Toutefois, s’il est une qualité que Blood Bowl peut revendiquer, c’est le peu commun engouement qu’il a réussi à créer et à soutenir parmi sa communauté de joueurs et d’enthousiastes, ce qui a permis à ce jeu de négocier avec succès plusieurs traversées du désert, notamment entre ses troisième et quatrième éditions, séparées par un véritable gouffre de 26 ans. Aujourd’hui, la franchise semble mieux se porter que jamais, avec un suivi régulier de la part de la maison mère, plusieurs jeux vidéos à son actif, et une nouvelle version publiée en novembre 2020, et qui a donné lieu à la (re)sortie du présent ouvrage1.

Sommaire Death on the Pitch_Extra Time (BB)

« Qu’est-ce que Blood Bowl? » me demanderez-vous peut-être pour commencer. Eh bien, pour schématiser grossièrement, c’est une adaptation du football américain dans l’univers de Warhammer Fantasy Battle. On doit cette pastiche, devenue culte, au vénérable Jarvis Johnson, qui coucha les premières règles de ce jeu de plateau d’un style particulier sur l’astrogranit en 1987. Il convient ici de souligner que si Blood Bowl reprend les références, les races, les lieux et l’histoire de WFB, il ne s’intègre pas vraiment dans ce que l’on peut appeler la réalité canonique du Monde Qui Fut. En effet, les relations entre les différentes factions représentées à Blood Bowl ne furent jamais si cordiales qu’elles purent conclure de faire une trêve le temps d’organiser une ligue ou un tournoi (sans compter les difficultés logistiques inhérentes à un match entre des Hommes Lézards et des Nains du Chaos, par exemple). Ce qui a permis à la dimension parallèle de Blood Bowl de continuer à vivre alors que le Vieux Monde mit le pied en touche en 2015, comme chacun sait. Pour vivre heureux longtemps, vivons cachés? 

Nous retrouvons sur la feuille de match de cette copieuse anthologie (14 nouvelles, plus de 250 pages) beaucoup de têtes et plumes connues de l’amateur éclairé de la prose BLesque (Josh Reynolds, Gav Thorpe, Guy Haley, David Guymer, David Annandale2), ainsi que quelques spécialistes de la littérature sportive de la GW Fiction : Matt Forbeck (auteur de la quadrilogie ‘Blood Bowl‘), Andy Hall, dont toute la carrière pour la BL se résume aux deux nouvelles incluses dans cette anthologie, et Graeme Lyon, également double contributeur d’icelle. Enfin un trio de nouveaux auteurs (McNiven, Rath et Worley) viennent compléter ce rooster hétéroclite, mais que l’on espère tout de même qualitatif. Sera-ce le cas? Eh bien, il n’y a qu’une seule manière de s’en assurer…

1 : Comme le titre le laisse un peu deviner, ‘Death on the Pitch : Extra Time’ est une réédition de ‘Death on the Pitch‘, agrémenté de deux nouvelles supplémentaires : ‘The Freelancer’ et ‘Dismember the Titans’. La seconde ayant été initialement publiée dans ‘Inferno #3’ en 2019, la soumission de Robert Rath est techniquement la seule pure nouveauté que cette prolongation apporte à l’aficionado. La BL n’ayant pas retiré de la vente le premier recueil, qui est vendu le même prix que son successeur, il faut faire preuve de vigilance pour éviter de faire une mauvaise affaire en ligne…
2 : Pour ce qui est, sauf erreur de ma part, sa seule nouvelle liée à Warhammer Fantasy Battle. 

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Manglers Never Lose – J. Reynolds :

INTRIGUE :

Tyros Bundt, coach des Presque célèbres Middenplatz Manglers, et confronté à un problème de taille à quelques heures du début du match décisif de son équipe contre les Haakenstadt Screechers, dans les phases finales du Doom Bowl de Drachenstadt. Son joueur star, le Blitzer Marius Hertz, a en effet été retrouvé nu, violacé, en compagnie de deux pom-pom girls Elfes, et surtout, totalement et irrémédiablement mort, comme l’habile diagnostic du Doc Morgrim ne tarde pas à le confirmer. Après avoir passé quelques minutes à se bercer d’illusions sur une résurrection miraculeuse de son poulain, et constaté que beaucoup de personnes devaient lui en vouloir (4 types de poisons différents utilisés, tout de même1), Bundt passe en mode manager et charge Morgrim d’aller lui dégotter un Nécromancien raisonnablement capable et aux tarifs abordables, pendant que lui se chargera d’apporter le cadavre du Blitzer jusqu’au stade. En effet, l’effectif des Manglers a été sévèrement diminué au cours des premiers matchs du tournoi, et sans la présence de Marius au coup d’envoi, l’équipe devra déclarer forfait, ce qui est contre l’éthique sportive de Bundt et les traditions de l’institution. Après tout, Manglers never lose2 !

Après quelques péripéties (et un illustre caméo), le coach parvient à amener le cadavre flasque et plus vraiment étanche de Marius jusque dans les vestiaires gagnés de haute lutte par les Manglers contre l’adversité et les équipes rivales au début du Doom Bowl. Le temps que Morgrim arrive avec son spécialiste, Bundt a le temps de découvrir que son joueur a été soudoyé par le coach de l’équipe adverse, qui a de plus envoyé deux fans Orques rappeler au Blitzer qu’il compte sur lui pour ne pas opposer de résistance aux Screechers lors du prochain match. Résultat des courses : Marius écope d’une nouvelle blessure mortelle dans l’algarade, mais vu son état, cela ne s’avère guère dommageable. À toute chose, corruption est bonne ceci dit, car le pécule mal gagné du parjure permet à Bundt de s’attacher les services du Nécromancien de Morgrim3, qui ne paie pas de mine (les plumes de pigeon teintes en noir pour imiter le corbeau, ça fait cheap), mais parvient à transformer Marius en Zombie baveux mais docile à temps pour le début du match. Comme l’exige la tradition sportive, Bundt livre un discours enflammé à ses joueurs (vivants) avant qu’ils entrent sur l’astrogranit, ce qui permet de découvrir que Marius Hertz a été victime d’une véritable cabale de la part de ses coéquipiers, qui avaient (presque) tous une bonne raison de vouloir sa mort, pour des causes sportives (« il était trop perso »), morales (« il a déshonoré ma sœur, mes frères, mes cousins, leur chèvre… »), financières (« il m’a laissé son ardoise au bar ») ou personnelles (« il me fouettait avec sa serviette sous la douche »). Au moins, l’abcès est crevé. Dommage qu’il ait fallu que Marius le devienne également.

Il sera cependant temps plus tard de régler ses comptes et d’inculquer un peu d’éthique aux survivants (et de trouver un nouveau sponsor, le chevaleresque ‘Errance Magazine’ appréciant moyennement être représenté par un athlète mort vivant), car c’est désormais l’HEURE DU MAAAAAATCH ! Eh bien que la nouvelle se termine avant la fin du temps réglementaire, les choses semblent bien se passer pour les Manglers, qui peuvent compter sur la résistance écœurante de Marius pour scorer (touchdown sans bras et à cloche-pied, la grande classe), et sur les bons offices de Franco Fiducci pour relever les pertes à la mi-temps. Avec de tels atouts, ce serait malheureux que les Manglers ne fassent pas honneur à leur réputation de gagneurs !

1 : Sans compter le couteau retrouvé dans son estomac, que Morgrim n’a pas relevé dans son autopsie car, après tout, ce que font les humains avec la coutellerie et leur système digestif ne regarde qu’eux.
2 : Except when they do. Ce qui arrive finalement assez fréquemment.
3 : Un certain Franco Fiducci, déjà croisé par Erkhart Dubnitz dans la série de nouvelles consacrées par Reynolds au très saint et très violent Ordre de Manann.

AVIS :

Josh Reynolds nous sert une nouvelle comme il sait si bien les écrire et nous si bien les aimer : drolatique, érudite (les clins d’œil et easter eggs de vieux fluff parsèment le récit), bien construite et diablement rythmée. En plus de tout cela, on retrouve dans ce ‘Manglers Never Lose’ la figure familière et livide de Franco Fiducci, perdue de vue pour ma part au détour d’un ‘Hammer & Bolter’ il y a quelques années, ce qui fait de chouettes retrouvailles. Dans la droite ligne de l’impayable ‘Dead Man’s Party’, cette nouvelle est un carton plein qui vient rappeler à point nommé, et malheureusement à titre « posthume » (maintenant que Reynolds est parti voir ailleurs si l’encre était plus verte), que la BL a eu beaucoup de chance de compter Josh Reynolds parmi ses contributeurs.

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Fixed – R. McNiven :

FixedINTRIGUE :

Bien qu’il ait mené son équipe à la victoire contre une opposition farouche d’Hommes Lézards, Garr Greyg des Nordland Rangers a écopé d’une sale blessure à la cuisse pendant le match, victime d’un contact rugueux avec le Kroxigor adverse. Opéré contre son gré par le médecin des Rangers, l’alcoolique mais efficace Frisk, le meilleur Blitzer que le Nordland ait connu (it’s something) se remet doucement dans le calme dépouillé de son manoir, en attendant de pouvoir 1) participer à la finale contre les East End Boyz, pour une place en ligue majeure la saison prochaine, 2) trouver un moyen de rembourser ses dettes au Vampire Grizmund, qui lui a fait comprendre en des termes non incertains qu’il attendait que son dû lui soit payé avec impatience.

Veillé par son ogre à tout faire Nor, Garr reprend du poil de la bête, mais finit par se rendre compte que le doc a outrepassé ses prérogatives en lui greffant une jambe de Saurus à la place de son membre esquinté, ce qui lui pose plus des problèmes de style que physiologie, à la décharge de Frisk. Cette découverte sinistre est interrompue par la matérialisation près du lit du patient d’un individu louche et puant (mais qui est Bretonnien, ce qui suffit à justifier son accent étrange et sa drôle d’odeur, apparemment), se présentant comme Mister Squimper. L’impétrant fait une offre non-refusable à Garr : une convalescence rapide et complète, assortie d’une belle bourse de reikmarks, en échange d’un menu service lors du prochain match…

Comme on s’en doute, ce service consiste à s’assurer que les Rangers s’inclinent contre les peaux vertes, ce que le Blitzer s’emploie à faire de manière pas trop évidente. Malgré la mauvaise volonté, les deux mains gauches et les pieds carrés de leur joueur star, les humains parviennent cependant à faire jeu égal avec les East End Boyz de Krapnugg, et la partie va se jouer sur une ultime possession, alors que les deux équipes sont à égalité au tableau d’affichage. Alors que la balle atterrit dans ses bras, Garr va devoir prendre la décision la plus importante de sa vie…

Début spoiler…Qui consiste à jouer pour la gloire et la gagne plutôt que pour la vie et l’argent. C’est noble de sa part. Malgré la douleur insidieuse de son greffon, parasité par la magie néfaste de Mister Squimper qui regarde le match depuis les gradins, le Blitzer se fraie un chemin parmi les lignes adverses, évite le plaquage de Krapnugg, lui crève un œil pour faire bonne mesure, et envoie la passe victorieuse à un receveur de son équipe. Alors que le stade explose dans tous les sens du terme (les adversaires précédents des East End Boys ont eu la défaite mauvaise), Garr a la satisfaction finale de voir du coin de l’œil son fidèle Nor mettre la main sur Squimper, qui était en fait deux Prophètes Gris sous une toge. Le Rat Cornu, jamais réputé pour être très sports, ne sauve pas ses élus de la poigne de fer de l’Ogre domestique, qui fracasse le crâne des rongeurs truqueurs. Tout est bien qui finit bien donc (Garr pourra payer ses dettes grâce à la prime de victoire), si la foule ne piétine pas les joueurs à mort, s’entend…Fin spoiler

AVIS :

Robbie McNiven nous sert ce que l’on peut appeler une histoire classique de Blood Bowl avec cet aptement nommé ‘Fixed’ (truqué en français) : un joueur charismatique mais borderline, qui doit gérer des magouilles extra-sportives tout en mouillant tout de même le maillot sur le terrain. C’est honnête à défaut d’être follement excitant, mais l’impression d’ensemble reste pour ma part gâchée par deux points faibles de la prose de McNiven : un manque de clarté dans la description des passages sportifs pour commencer (au point que j’ai cru à un moment que le match se jouait avec deux balles, une par équipe), et aucune explication donnée pour justifier pourquoi l’énigmatique Mister Squimper a senti le besoin de se faire passer pour un humain dans cette histoire. Après tout, Blood Bowl est beaucoup plus tolérant et cosmopolite que Warhammer Fantasy Battle par nature : un Skaven n’a donc aucune véritable raison de se déguiser pour interagir avec des individus plus fréquentables que lui. Dommage dommage.

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Da Bank Job – A. Hall :

Da Bank JobINTRIGUE :

Les Kostos de Brobrag ont passé une première saison mémorable, mais pas pour les bonnes raisons. Incapables de remporter le moindre match, et généreux fournisseurs de séquences d’anthologie pour le bêtisier de la ligue, l’équipe ne semble pas promise à un grand avenir. Cependant, les mystérieux Ger et Bil, homme et gobelin d’affaires à l’air louche et aux intentions suspectes, ont des projets grandioses pour Brobrag et ses joueurs : une participation au Reikland Invitational pendant l’intersaison, avec à la clé un match d’anthologie contre les célèbres Reavers pour la meilleure équipe de la phase de poules. Non pas que les Kostos aient des chances de parvenir jusqu’à ce stade de la compétition, mais surtout pour couvrir le cambriolage de la salle des coffres de l’Oldbowl d’Altdorf par quelques complices pendant que le reste des peaux vertes fera de la figuration sur le terrain.

Si le plan avait l’air solide sur le papier, il ne tarde pas à devenir caduque, dans la plus pure tradition des stratégies taqueutiques et tequeuniques d’avant match. Bien que l’excentrique sorcier humain (Chanzeenmitt) que Ger & Bil ont intégré à l’équipe ait rempli sa part du marché en ouvrant un portail où se sont engouffrés Fingurs, le bloqueur Orque noir et solide bras droit de Brobrag, et une poignée de goons destinés à déclencher les pièges à congres qui jonchent le chemin de la salle des coffres, les Kostos ont la désagréable surprise de se retrouver opposés non pas aux inoffensifs Merrywald Chums, mais directement aux Reikland Reavers. C’est un match que les peaux vertes ne peuvent pas gagner, mais qu’ils peuvent au moins essayer de faire durer assez longtemps pour permettre à leurs complices de récupérer le butin.

Comme prévu, Fingurs finit par se retrouver seul après la mort tragique mais pas surprenante de ses sous fifres, et, guidé par la voix dans sa tête, fait main basse sur… un sifflet. Ce qui le lui coupe1. Lorsqu’il fait son retour sur le banc de l’Oldbowl, c’est la mi-temps et les Kostos sont menés 4-0, avec déjà quelques pertes à déplorer. Les quinze minutes de répit réglementaires sont cependant bien mis à profit par Andy Hall pour débrouiller son intrigue (Chanzeenmitt est en fait deux sorciers de Tzeentch fusionnés dans le même corps, et il(s) a/ont doublé Ger & Bil pour récupérer le mythique sifflet de Nuffle pour son compte), et par Brobrag pour retourner la situation à son avantage. Car il est dit que quiconque énonce un commandement de Nuffle et siffle dans son sifflet voit son énoncé réalisé. That’s the rules, stoopid. Un mage maigrelet et skizophrène ne faisant pas le poids contre un chef Orque en rogne, notre héros récupère facilement l’instrument convoité, et décrète que « c’est celui qui siffle qui gagne ». S’en suit une remontada digne de Barcelone en 2017, aussi inexplicable pour les commentateurs que pour les spectateurs et surtout les Reavers, et, surtout, la première victoire, certes volée mais pas imméritée, de Brobrag et de ses Boyz. Bien sûr, le sifflet attise les convoitises et déchaîne les passions, mais heureusement, le Boss a un endroit beaucoup plus sûr qu’un bête coffre pour conserver son bien mal acquis : l’estomac du Troll de l’équipe. Il fallait y panser.

1 : Le squeeg. Ceci est une blague de niche.

AVIS :

Andy Hall se disperse un peu trop à mon goût dans ce ‘Da Bank Job’, tant au niveau de l’intrigue (quel besoin d’impliquer un/deux sorcier.s de Tzeentch et un match de Blood Bowl dans une histoire de casse ?) que des personnages (à quoi servent Ger & Bil ?). Moins grave mais également handicapant pour sa nouvelle, il bâcle totalement la fin de cette dernière d’un point de vue stylistique, ce qui laisse une sale impression au lecteur au moment d’en terminer. On lui accordera tout de même quelques points pour le grand nombre de célébrités croisées dans ces quelques pages, depuis Jim Johnson et Bob Bifford jusqu’à Lord Borak, le Mighty Zug et Griff Oberwald, ainsi que pour un ajout fluffique notable à l’univers parallèle de Blood Bowl avec le surpuissant sifflet de Nuffle. Mais c’est à peu près tout et ça ne suffit pas pour faire de ‘Da Bank Job’ une réussite.

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The Hack Attack – M. Forbeck :

The Hack AttackINTRIGUE :

Les Pascal et Fontaine de Warhammer Fantasy Battle, Jim Johnson et Bob Bifford, animent une émission live de ‘Que sont ils devenus ?’, consacré à la légende des Bad Bay Hackers, Dirk Heldmann. Ayant déchaussé les crampons pour devenir coach en binôme de son ancienne équipe, Dirk se plie de plus ou moins bonne grâce au petit jeu de la nostalgie (son frère Dunk, sa belle-sœur Spinne Schönheit, M’Grash K’Thragsh, Edgar l’Homme Arbre…) et de la commémoration de sa période active. Bien évidemment, il est question du match contre les Chaos All-Stars de Serby Triomphe, où le sort de l’Empire s’est joué. L’interview se termine de façon assez brutale par…

Début spoiler…Le meurtre de Bob Bifford par Dirk Heldmann, après que sa petite amie Lästiges Weibchen, journaliste de terrain virée par le duo infernal pour incompétence caractérisée, lui ait envoyé une balle de Blood Bowl contenant un pieux, qu’il plante dans le torse de l’ogre retraité. Apparemment pour lui piquer sa place de présentateur. La nouvelle s’arrête et la pub se déclenche alors que Jim Johnson semble sur le point de subir le même sort que son comparse. La fin d’une époque. FinFin spoiler

AVIS :

Il n’y a que deux choses à retenir de cette très courte nouvelle (9 pages) de Matt Forbeck. Primo, il s’agit de la conclusion de sa quadrilogie de romans Blood Bowl consacrés aux Bad Bay Hackers et aux frères Heldmann. Si certains auteurs plus doués que la moyenne parviennent sans mal à tourner leurs propos de telle manière que même un novice complet puisse comprendre et apprécier de quoi il en retourne lorsqu’il traite d’une série bien établie, avec de nombreux personnages ayant vécu des aventures variées et entretenant des rapports complexes les uns par rapport aux autres (Dan Abnett fait ça très bien dans ‘Les Fantômes de Gaunt’ par exemple), Forbeck ne s’est pas donné cette peine ici. Pour être honnête, n’ayant pas lu les romans en question, j’ai compris que quelque chose clochait à la moitié de l’histoire et à l’évocation du dixième personnage nommé en cinq pages, ce qui est un ratio peu commun. Et effectivement, une lecture du résumé de l’anthologie ‘Blood Bowl’ permet de comprendre que Matt Forbeck a un historique conséquent avec les frangins Dirk et Dunk. Dommage qu’il se montre si « exclusif » dans son approche de ‘The Hack Attack’ car reconnaissons-le : les souvenirs émus et les histoires de couple/fesse de Dirk Heldmann n’intéressent pas grand-monde  mis à part la poignée de fans transis de ce dernier.

Secundo, la fin de cette nouvelle, si elle a le mérite de surprendre le lecteur, m’a semblé relever du crime de lèse-majesté concernant deux personnalités aussi centrales et vénérables de Blood Bowl que le duo Bifford & Johnson. À moins que Forbeck ait créé ce dernier (ce qui est possible, mais me semble incertain au vu de l’ancienneté des illustrations du regretté Wayne England), quel droit avait-il de siffler la fin de leur match, et de manière si cavalière qui plus est ? Les personnages nommés de Warhammer Fantasy Battle eurent droit à un requiem digne de ce nom avec The End Times en 2015, ceux de Blood Bowl devront se contenter de ‘The Hack Attack’ deux ans plus tard. Assez indigne, tant sur le fond que sur la forme.

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Mazlocke’s Cantrip of Superior Substitution – G. Lyon :

Mazlocke's Cantrip of Superior SubstitutionINTRIGUE :

Le Light’s Hope Stadium de Talabheim accueille un match de ligue mineure entre les presque redoutables Talabheim Titans et les positivement nuls Black Water Boyz. Tellement nuls d’ailleurs que leur coach, Borgut, a résolu de tenter le tout pour le tout pour arracher la victoire, et a placé ses dernières économies entre les mains d’un sorcier non homologué, Mazlocke. Ce dernier maîtrise en effet un sort au nom aussi compliqué (Cantrip of Superior Substitution) que ses effets sont spectaculaires : remplacer les plots verts de l’équipe visiteuse par des légendes de Blood Bowl, le temps d’un match. Sur le papier, le plan est brillant, mais comme vous vous en doutez, les choses ne vont pas se passer de manière optimale.

Il est temps pour nous de faire la connaissance des rivaux des Black Water Boyz, et en particulier du receveur Johann Walsh et du blitzer Kurt Grafstein. Ils partagent tous deux le statut de joueur vedette de leur équipe, mais là où Johann est gentil et serviable (il est même copain avec l’Ogre de l’équipe, Ghurg, c’est dire s’il est cool), Kurt se la pète méchamment et drague lourdement/harcèle sexuellement la pom pom girl Juliana, qui est également un personnage important. Pour le moment, contentons-nous de dire qu’elle préférerait pratiquer sa passion sur l’astrogranit plutôt que de se déhancher devant des hordes de fans mal dégrossis, mais la nature patriarcale de l’Empire l’a contrainte de faire contre mauvaise fortune bon cœur. Enfin, dans les gradins du stade, le fan #1 de Kurt Grafstein, Gerhardt Mannheim, est venu assister à la rencontre comme à chacune de celles des Talabheim Titans. Gerhardt est l’incarnation du fan de sport aussi incollable en historique et statistiques qu’incapable de courir 50 mètres sans cracher ses poumons ni de monter un escalier sans passer au rouge vif. La passion qu’il voue à Grafstein, qui a son âge et vient du même village que lui, est une sorte d’amour jaloux flirtant avec le malsain, et totalement à sens unique, son idole n’ayant jugé bon de répondre aux douzaines de lettres enthousiastes qu’il lui a envoyées.

Si cette exposition détaillée de la galerie de personnages a été nécessaire, c’est que le sort de Mazlocke va se solder par un demi-échec, et permuter les personnalités et les corps de certains des individus présents au Light’s Hope Stadium. Ainsi, Johann se retrouve à devoir jouer du pom-pom le long du virage nord, tandis que Juliana réalise son rêve de jouer un match de Blood Bowl en étant propulsée receveur des Titans. Bien entendu, Kurt et Gerhardt forment un autre couple d’inversion, ce qui leur permet de découvrir que la vie d’un fan/blitzer n’est pas de tout repos. Enfin, le receveur Gobelin (c’est son vrai nom) des Black Water Boyz a la chance d’être catapulté aux manettes de l’imposant châssis de l’Ogre Ghurg (et vice-versa), ce qui va lui permettre de se venger dans le sang et la violence des brimades et mauvais traitements que lui ont fait subir le reste de l’équipe depuis des années. Un comportement presque normal de la part de Ghurg, si on réfléchit, et qui n’attire donc pas l’œil de Jim Bifford et Bob Johnson en tribunes (qui ont leur propres problèmes, comme le lecteur avisé l’aura reconnu).

Comme on peut s’en douter, les effets du cantrip de Mazlocke, qui a essayé de partir avec la caisse mais s’est téléporté dans les gradins du stade au lieu de partir en Bretonnie comme il l’escomptait (c’est ça aussi de s’auto-former), mettent un beau boxon sur le terrain. Lorsqu’un mage assermenté parvient enfin à remettre chaque chose et conscience à sa place, tous nos personnages en auront été quitte pour une expérience marquante, aussi bien au sens intellectuel que physique du terme. Ainsi, Juliana, qui a réussi à marquer un beau touchdown en solo, se fait signer par la coach d’une équipe Amazone, tandis que Johann devient un ally de la lutte contre le sexisme ordinaire. Kurt et Gerhardt finissent voisins de lit à l’hôpital, en grande partie à cause de Gobelin et Ghurg, le second ayant négligemment balancé le premier dans la foule, avec une retombée funeste sur le fan ventripotent (Kurt ayant pour sa part été projeté dans les gradins par un Orque taquin). La leçon du jour est la suivante : tant qu’à tricher, autant se faire épauler par des professionnels capables de garantir des résultats de qualité plutôt que de s’appuyer sur des amateurs incompétents. Non mais.

AVIS :

Graeme Lyon signe avec ‘Mazlocke’s Cantrip of Superior Substitution’ une nouvelle marquante, et pas seulement grâce à son titre extravagant (même s’il faut reconnaître que cela joue, et que le catalogue de la BL compte quelques challengers). L’intrigue mise en place par l’auteur nécessitait une construction rigoureuse, pour ne pas perdre le lecteur entre les péripéties vécues par les 3 « couples » (4 si on inclue le transfert entre Jim Johnson et Bob Bifford dans la loge des commentateurs), qui s’entremêlent les unes aux autres jusqu’au dénouement final, et Lyon s’en sort très bien je trouve. J’ai également apprécié l’intégration d’éléments additionnels à une nouvelle de Blood Bowl classique, comme les réflexions féministes de l’arc Johana, et la figure du fan transi/névrosé via Gerhardt Mannheim. Bref, le résultat est se montre à la hauteur des ambitions poursuivies par l’auteur de cette opérette sportive, et mérite certainement la lecture par les amateurs de littérature Blood Bowl.

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Pride and Penitence – A. Worley :

Pride and PenitenceINTRIGUE :

Les Bright Crusaders, l’équipe la plus fair play qui soit (un cruel désavantage à Blood Bowl, il faut le reconnaître), disputent la finale de la Purity Cup contre les Doomtown Rats, et la mi-temps vient de sonner. De retour au vestiaire avec un avantage au tableau d’affichage, mais trois joueurs passés ad patres du fait du Rat Ogre de l’équipe adverse, les Crusaders doivent mettre au point une stratégie robuste pour espérer conserver leur avance jusqu’à la fin du match. Bien que techniquement plus doués que leurs adversaires du jour, la férocité de Skrut Manpeeler, la vitesse des coureurs d’égouts et la supériorité numérique des ratons sont autant de désavantages que le coach Dolph ‘Le Saint’ Gutmann essaie de gommer dans sa causerie de mi-match. Comme si cela ne suffisait pas, le joueur star de l’équipe, Gerhardt le Pénitent, est pris d’une nouvelle crise expiatoire, comme cela lui est arrivé à de nombreuses reprises au cours de la saison. Ex-flagellant puritain et masochiste, Gerhardt est un blitzer d’un talent et d’une endurance rares, quelque peu diminués par sa tendance à se punir de manière extrême dès que son sens aigu de la justice lui indique que son adversaire a souffert d’un handicap injuste. Cela l’a ainsi amené à s’immoler, s’enterrer, tenter de se casser les membres, ou encore vouloir jouer sans protection, comme il insiste pour le faire après avoir entendu Gutmann avancer que la supériorité technique des huit Crusaders survivants leur donnait un avantage sur les Skavens d’en face.

Fort heureusement pour ses coéquipiers, ils peuvent faire appel au sens moral hypertrophié de Gerhardt pour lui faire entendre raison, en lui rappelant qu’ils doivent à tout prix remporter la Purity Cup pour pouvoir éponger les dettes de Sœur Bertilda et de ses orphelins, qui ont écrit de nombreuses lettres touchantes et pathétiques au Pénitent au cours de la saison. Ce dernier accepte donc avec regret de se rhabiller pour cette fois, mais fait promettre aux Crusaders de l’accompagner dans une séance de pénitence de son choix une fois le match gagné, ce qu’ils acceptent sans rechigner.

Une fois les choses remises en ordre et la coquille de Gerhardt en place, la deuxième mi-temps peut commencer, et le lecteur voir le blitzer prodigue en action. Et il faut bien reconnaître qu’il fait honneur à sa réputation altruiste (en prenant un rocher envoyé par un fan taquin à la place d’un coéquipier) et sportive (en corrigeant bellement Skrut Manpeeler en un contre un), ce qui n’empêche pas les Crusaders d’encaisser le touchdown qui ramène les deux équipes à égalité. Dès lors, la tactique du coach Gutmann consiste à tenir la balle en espérant un miracle, schéma tactique dans lequel Gerhardt doit se contenter d’occuper le plus de joueurs adverses possibles, ce qu’il fait parfaitement en se colletinant trois trois quarts Skavens. C’est alors que deux Crusaders parviennent à passer la ligne d’avantage et à foncer vers l’en but adverse, où les attend toutefois un Skrut revanchard et très énervé. Dur dilemme moral pour Gerhardt, piétiné dans la boue par ses adversaires : s’en tenir au plan de jeu ou voler aux secours de ses partenaires ?

C’est finalement pour la deuxième option que se décide notre héros, qui échappe à ses tortionnaires en se glissant hors de son armure et finit donc par jouer à poil, comme il le souhaitait. Ce manque d’équipement ne réduit en rien son talent, puisqu’il parvient à décocher un coup de boule tellement parfait à Skrut que ce dernier finit dans les tribunes, sort peu enviable pour un joueur de Blood Bowl, comme chacun le sait. La partie se termine sur le score de 3 à 2, faisant des Bright Crusaders les récipiendaires de la Purity Cup, et permettant à l’orphelinat de Sœur Bertilda d’être sauvé de la destruction. D’ailleurs, la grâcieuse créature a fait le déplacement avec ses protégés, et c’est vers eux que Gerhardt se précipite lorsque le coup de sifflet final retentit dans le stade…

Début spoiler…Seulement pour découvrir que Bertilda était en fait l’assistant du coach déguisé en religieuse (paire de navets à l’appui), et les orphelins une troupe d’intermittents du spectacle Gobelins, qui profitent de l’occasion pour aller tabasser le pauvre Skrut à coups de béquille, obéissant à la nature profonde des enfants humains et des peaux vertes. Cette ruse, indigne des Crusaders, était le seul moyen trouvé par Dolph Gutmann pour canaliser son joueur, qui tombe des nues devant ce stratagème honteusement filou. Beau jeu jusqu’au bout, Gutmann et les Crusaders se tiennent prêts à abandonner la victoire au profit de leurs adversaires en contrition de leur péché de mensonge, mais Gerhardt ne l’entend pas de cette oreille : la Purity Cup a été remportée sans tricher et revient donc de droit aux Bright Crusaders. Il sera bien temps plus tard d’expier cette faute collective lors de la séance de pénitence à laquelle ses camarades ont accepté un peu vite de se plier…

Et en effet, la nouvelle se termine par l’interview de Gutmann par une journaliste Halfling, alors que le coach et son équipe (y compris Gerhardt) sont enterrés jusqu’au cou dans la pelouse du stade, pour une durée d’un mois. Un temps nécessaire pour songer à leur faute morale, et qui ne leur sera peut-être pas fatal à tous, car le Pénitent a permis à l’assistant du coach de venir nourrir et faire boire les joueurs pendant leur retraite spirituelle. Il faudra cependant se méfier du jardinier aveugle et alcoolique lorsqu’il passera la tondeuse…Fin spoiler

AVIS :

Alec Worley capte parfaitement l’ambiance délurée propre à Blood Bowl dans cette nouvelle posant une des questions les plus intéressantes de cette franchise en prémisse de son intrigue : « et si une équipe tenait absolument à jouer sans tricher ? ». Les Bright Crusaders et leur parangon de vertu mortificatrice Gerhardt le Pénitent, répondent à cette interrogation, sans doute purement rhétorique avant ‘Pride and Penitence’ de façon aussi convaincante que distrayante, faisant de cette nouvelle une vraie réussite et un must read pour les aficionados de Blood Bowl.

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The Skeleton Key – D. Annandale :

The Skeleton KeyINTRIGUE :

Quittons un instant l’astrogranit pour nous intéresser à une variante populaire du Blood Bowl, le Dungeon Bowl. Si les règles sont à peu près les mêmes, et la violence tout aussi répandue que dans le jeu de base, le Dungeon Bowl a la particularité de se jouer, le croirez-vous, dans un donjon. Deux équipes de six joueurs doivent explorer ce terrain peu banal à la recherche de la balle, cachée dans un des coffres répartis dans les salles du labyrinthe, puis l’apporter dans l’en-but adverse, qui doit également être découvert. Variante oblige, la victoire appartient à la première équipe à marquer un touchdown, c’est donc un système à mort subite qui est utilisé ici. Voilà pour les présentations.

Le match que nous allons suivre oppose les honorables Bright Crusaders aux vénérables Champions of Death, menés par l’authentiquement réac Ramtut the Third (à ne pas confondre avec son avorton de frangin, Ramthit the Turd). C’est bien simple, rien de ce qui est moderne – c’est-à-dire à moins de deux mille ans – ne trouve grâce aux yeux desséchés du Fat des Tombes, et c’est d’ailleurs à se demander ce qui l’a convaincu de participer à cet événement, où lui et ses squelettes occupent le rôle des monstres opposés aux héroïques et vertueux Crusaders. Il ne s’en doute pas, mais il n’est pas le seul à désirer la défaite de ces derniers : une bande de Gobelins fans de Da Deff Skwad, la dernière équipe battue par nos paloufs, est bien décidée à venger ses idoles et à se faire un paquet de blé au passage, en forçant les Bright Crusaders à tricher contre leur gré, ce qui serait du jamais vu dans l’histoire de la franchise (et offre donc une côte intéressante chez les bookmakers). Comme toujours avec les Gobelins, le plan est aussi retors que vicieux, et consiste donc à installer des faux coffres explosifs à proximité de la zone de départ des Crusaders… pour les ralentir j’imagine ? Ayant graissé la patte d’un arbitre Halfling corruptible, les conspirateurs ont accès au donjon quelques minutes avant le coup d’envoi début des hostilités, et se mettent à pied d’œuvre sans traîner.

La partie en elle-même se déroule de façon assez confuse, principalement à travers les bandelettes de Ramtut. Ce dernier perd tous ses squelettes dans les premières minutes du match, victimes de collisions frontales avec les Crusaders ou de pièges explosifs, mais parvient tout de même à se saisir de la balle… plusieurs fois de suite. Car la fâcheuse tendance de cette dernière de tomber dans la lave hache un peu le jeu, même si les organisateurs ont la bonne idée de remettre un ballon sur le terrain dès que le besoin s’en fait sentir. De leur côté, les humains perdent également des joueurs à un rythme soutenu, et parfois de façon complètement ridicule1, jusqu’à ce que le match vire à la catastrophe à la suite d’un trop grand afflux de Squelettes dans les téléporteurs (la règle stipule que les équipes commencent avec six joueurs, pas qu’elles ne peuvent pas en recevoir davantage en cours de jeu). Pris dans un geyser de magie brute, Ramtut et Sternright, le capitaine des Crusaders, sont aspirés dans un autre monde, et surtout, dans une autre époque. Une époque futuriste et puissamment grimdark, if you see what I mean. Tellement grimdark d’ailleurs qu’ils emportent avec eux un Hormagaunt sur le chemin du retour, qui leur subtilise la balle et remonte tout le donjon pour aller marquer un touchdown. Pour qui ? Mystère…

Le cataclysme magique ayant fragilisé la structure du stade, le terrain commence à disparaître dans la lave, ce qui pose problème à tout le monde… sauf à Ramtut, qui saute dans le magma la balle en main pour aller marquer l’essai de la victoire au nez et à la barbe des deux derniers Bright Crusaders. Car dans la dimension parallèle de Blood Bowl, les momies ne sont pas inflammables, qu’on se le dise. Cette issue défavorable n’atteint toutefois pas à l’honneur des Crusaders, toutes les manigances gobelines pour les pousser à la faute et à la triche ayant échoué les unes après les autres. Victoire sportive pour les uns, victoire morale pour les autres : tout le monde est content !

1 : Mention spéciale à Guy Gallant, qui se fait berner par un Gobelin sur échasse déguisée en demoiselle en détresse (véridique), et qui tombe dans le magma de manière très Looney Tunesque.

AVIS :

David Annandale voulait indubitablement bien faire en mettant en scène une partie de Dungeon Bowl mettant aux prises deux équipes bien connues des fans, mais la mise en scène pêche malheureusement trop pour que l’on puisse qualifier ‘The Skeleton Key’ (titre qui m’échappe je dois le reconnaître, car il n’y a aucun passe-partout dans la nouvelle, et le jeu de mots avec « squelette » me semble tiré par les cheveux) de réussite. Dès lors que les choses sérieuses commencent, l’avalanche de règles spéciales propres à ce format, et davantage complexifiées par les manigances des Gobelins mauvais perdants, viennent brouiller l’intrigue jusqu’à ce qu’on ne distingue plus que des joueurs courant de salle en salle, parfois avec la balle, parfois non, en évitant les flaques de lave (et parfois non), sans aucune logique ni stratégie. Annandale convoque également une belle galerie de personnages, sans que la plupart ne joue vraiment un rôle important dans l’histoire, seul Ramtut faisant office de véritable protagoniste. Tout cela ajoute encore à l’impression de foire d’empoigne échevelée et par moment incohérente qui se dégage de ce récit, ce qui n’est pas un compliment, même pour une nouvelle de Blood Bowl. On peut noter au passage que David Annandale réussit à caser du 40K même dans sa seule (à ma connaissance) contribution à la BL se déroulant dans l’univers de WFB, ce que l’on peut considérer comme un clin d’œil appuyé ou une dépendance incurable, selon la perspective. En tout état de cause, ‘The Skeleton Key’ ne joue pas dans la première division du corpus de Blood Bowl. Triste, mais pas vraiment surprenant, si ?

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Scrape to Glory – G. Thorpe :

Scrape to VictoryINTRIGUE :

Joueur du dimanche de Blood Bowl au sein des parfaitement nommés Crookback Cretins, le Skaven Kikkit a toutefois attiré l’œil des recruteurs des célèbres Skavenblight Scramblers, qui l’ont convié à une session d’essai de présaison à la condition qu’il batte le record du nombre d’adversaires blessés alors qu’ils étaient au sol de la ligue SCABB. Avec 42 unités au compteur et un match à jouer contre les redoutables Morglum’s Marauders, Kikkit n’a qu’un coup bas à assener pour rat-ffler la mise et s’ouvrir les portes d’une carrière professionnelle, loin de sa vie misérable et industrieuse de Rats des Clans passant ses journées à limer des engrenages pour les ateliers du clan Skryre. Un nouveau départ lui permettrait également de laisser derrière lui les dettes accumulées auprès de maîtres des bêtes peu commodes du clan Moulder, qui lui réclament la coquette somme de 50.000 couronnes d’or pour passer l’éponge. Bref, la motivation est à bloc pour cette ultime rencontre, et pas seulement parce qu’une défaite condamnerait les Cretins de l’Alpe à être sacrifiés au Rat Cornu, comme le trio de Prophètes Gris qui sponsorisent l’équipe le soulignent clairement dans leur causerie d’avant match.

La chance sourit aux ratons cependant, car ce ne sont pas les terribles Marauders Orques qui se présentent dans le stade de Crookback Mountain, mais leurs adversaires malheureux des demi-finales, les nettement moins impressionnants Tinklebrook Trotters, qui se trouvent être des Halflings. Tout à fait confiant dans l’issue de ce match, Kikkit s’explique avant les hymnes pour aller parier toutes ses économies chez un bookmaker Gobelin de sa connaissance, qui lui fait une cote pas encore mise à jour et donc diablement lucrative. Après tout, quand on ne peut pas investir dans le Bitcoin, on fait du profit comme on peut. Ceci fait, notre héros à moustaches retourne dare-dare au stade pour prendre sa place sur le pré. Il alors la mauvaise surprise de constater que les Halflings se sont fait accompagner par deux Hommes Arbres, qui fermaient la colonne des visiteurs du fait de leur train de sénateurs, et qu’il n’a donc pas vu avant de partir placer son magot. Voilà qui rat-joute un peu de suspense.

Le match s’engage et s’avère assez disputé, les grandes baffes épineuses distribuées les frères Tronc (Georges et Mega) et la consommation de substances énergisantes des petits gloutons empêchant les Cretins de prendre le large, et à Kikkit de faire une dernière victime. Au terme du temps réglementaire, le score est de trois partout, ce qui mène logiquement aux traditionnelles prolongations en mort subite. Par un curieux hasard dont Nuffle est sans aucun doute responsable, Kikkit se retrouve dans une position délicate, où il doit choisir de faire un bloc qui permettra sans aucun doute à son équipe de marquer le touchdown de la victoire, ou d’aller maraver la goule d’un Halfling sonné à proximité de la zone d’en but des Trotters. N’écoutant que son intérêt propre, en bon Skaven qu’il est, notre héros choisit évidemment la seconde option, et pique son meilleur sprint à travers la défense adverse pour aller jeanclaudevandamiser la mâchoire de l’avorton vulnérable. Un choix doublement récompensé, car en plus de porter son total de victimes à 43, Kikkit marque également le point décisif de la partie, s’étant débrouillé pour emporter avec lui la balle crevée sur une des piques de son épaulière, après qu’il « par mégarde » tacler son lanceur pour éviter que le match ne s’arrête trop tôt. Et c’est sur cette victoire sur tous les tableaux que se termine notre histoire, qui finit scandaleusement bien pour une nouvelle de Skavens, si vous voulez mon avis.

AVIS :

Gav Thorpe se frotte aux Hommes Rats de Warhammer Fantasy Battle (pas une de ses factions de cœur pour cette franchise) et signe une petite nouvelle qui se place dans la moyennement très légèrement haute du genre. C’est raisonnablement drôle, le fluff Skavens (et Halflings !) est respecté, et on retrouve l’ambiance propre au Blood Bowl, sans que l’intrigue soit particulièrement fouillée, la mise en scène impeccable ou le background significativement enrichi. Le seul petit reproche que je pourrais faire à ‘Scrape to Victory’ est, comme dit ci-dessus, son absence de ratage final, tant il est vrai que les séides du Rat Cornu sont célèbres pour arracher la catastrophe des griffes du triomphe avec une constance remarquable. Outre ce manquement de ca-rat-ctérisation, je n’ai rien à dire de cette histoire, qui se laisse tout à fait lire.

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Doc Morgrim’s Vow – J. Reynolds :

Doc Morgrim's VowINTRIGUE :

Les Middenplatz Manglers ont accumulé les victoires depuis la mort tragique mais finalement bénéfique de leur Blitzer vedette (‘Manglers Never Lose’), et sont maintenant à la recherche de nouvelles opportunités de briller. Malgré les protestations répétées de leur apothicaire, le solide Morgrim Ironbane, le coach Tyros Bundt a accepté l’invitation qui lui a été faite de prendre part au Tournoi des Cent Malheurs, organisé dans la forteresse de Karaz Ankor. Gagner un match contre les redoutables, mais isolés, Dragon’s Hold Drakeslayers, permettrait aux Manglers de mettre la main sur l’Angry Dragon Cup, un trophée légendaire au sein de la communauté des fans. Dans le dirigeable Makaisson & Sons qui les emmène en Norsca, les Manglers discutent le bout de gras, Bundt et Franco Fiducci (le Nécromancien qui fait tenir en un morceau les deux tiers de l’équipe) essayant de découvrir pourquoi le Doc Morgrim se montre si récalcitrant à revenir dans sa cité natale, en vain.

La réponse se fait jour lorsque les visiteurs sont accueillis par une escouade d’Arquebusiers, et placés sous bonne garde le temps qu’un notable vienne leur rendre visite. Ce notable, c’est le Thane Thunor Thunorsson, figure importante de Karaz Ankor, coach des Drakeslayers, et accessoirement, père de Hrulda Thunorsdottir, capitaine de l’équipe, Tueuse de Trolls et… fiancée de Morgrim. On apprend ainsi que ce dernier s’est éclipsé sournoisement alors qu’il avait déjà échangé ses vœux avec Hrulda, préférant le deshonneur et l’errance au conservatisme rigide du Dragon’s Hold. En plus, c’était le seul moyen pour lui de jouer au Blood Bowl, sa passion, dans des conditions normales, l’équipe et le stade locaux étant très particuliers, comme nous allons le voir. Bien entendu, ce camouflet n’a pas été bien perçu par sa promise et sa lignée, et c’est donc assez naturellement que Morgrim se prend un bourre pif bien mérité de la part de Hrulda pour arriérés de paiement. Bien que Thunor souhaite enfin marier les deux tourtereaux, de force s’il le faut, pour restaurer son honneur, Morgrim parvient à négocier une échappatoire : si les Manglers gagnent le match, il sera libre de partir. Si les Drakeslayers restent invaincus, il épousera Hrulda. Les choses étant clarifiées et les parties en présence d’accord sur les termes, il est temps de passer aux choses sérieuses.

Le match se déroule selon les règles du Dungeon Bowl, un peu adaptées par les locaux. Foin de coffres explosifs ici, mais des monstres errants et des pièges mortels en tout genre, et un terrain en trois dimensions puisque placé à flanc de montagne. Morgrim apprend d’ailleurs à ses acolytes que la tactique préférée des Drakeslayers est de partir en PvE (tous leurs joueurs sont des Tueurs), et d’attendre que leurs adversaires se fassent tuer, plutôt que de chercher à jouer la balle. Une vraie approche naine, qui fait chaud au cœur. Fort heureusement, la forte teneur en morts vivants des Manglers leur donne une résistance accrue qui s’avère précieuse, et Marius Hertz, leur Blitzer vedette, est en grande forme. C’est d’ailleurs lui qui marque le touchdown de la victoire, après avoir arraché la balle de l’œsophage d’un Drake qui passait dans le coin, et s’était mis à harceler la pauvre Hrulda (galamment secourue par Morgrim, contre toutes les règles du Dungeon Bowl, ceci dit). Tout est bien qui finit bien donc, le Doc réalisant même que son ancienne fiancée ne lui en veut pas tant que ça, en fait. Ca aurait été des Elfes, on aurait eu le droit à un baiser langoureux en tomber de rideau, mais les Nains sont heureusement plus dignes, et Hrulda se contente de péter le pif de son sauveur pour intervention illicite, en tout bien tout honneur évidemment. Il y a des signes qui ne trompent pas…

AVIS :

Josh Reynolds poursuit sa saga Manglers avec la suite logique de ‘Manglers Never Lose’, qu’il n’est même pas nécessaire d’avoir lu pour comprendre de quoi il en retourne ici, l’auteur prenant la peine de bien contextualiser cette nouvelle, en vrai gentleman. L’accent a été ici mis sur l’intrigue plus que sur l’ambiance, ce qui fait de ‘Doc Morgrim’s Vow’ un bon contrepoint à l’épisode précédent : l’un est plus drôle, l’autre plus étoffé, mais les deux sont d’un très bon niveau, et Reynolds distille assez de punchlines (mention spéciale au dialogue portant sur la neige biologique et artisanale de Karaz Ankor) pour que le lecteur ne se sente pas dans une classique histoire de WFB… même si les ajouts fluffiques de cet incorrigible Josh Reynolds donnent vraiment envie de prendre cette historiette au sérieux. Encore un essai transformé pour l’auteur, qui honore ici sa réputation bien méritée de star writer de la BL.

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A Last Sniff of Glory – D. Guymer :

A Last Sniff at GloryINTRIGUE :

Red Claw” Rurrk est une légende du Blood Bowl Skaven. Blitzer vedette des célèbres Skavenblight Scramblers, il a été de tous les succès notables de l’équipe, comme ce match de légende contre le Princedom of Pain, à Erengrad. La première défaite en trois siècles pour le Prince Amaranth l’Inviolé, un qualificatif pas vraiment mérité au vu du score final… Enfin, ça, c’était il y a sept ans, bien longtemps pour un Skaven. Rurrk se fait bien vieux aujourd’hui, et n’a plus la forme d’antan, comme son match catastrophique contre les Mootland Raiders en début de saison l’a démontré. Lent, ankylosé, courbaturé et à moitié aveugle, il ne lui reste plus guère que son vice naturel, son expérience prodigieuse et sa consommation effrénée de malepierre pour faire illusion. L’heure de la retraite, ou l’équivalent pour les Skavens, a sonné depuis longtemps pour le vénérable champion, mais ce dernier s’est fixé un dernier objectif avant de raccrocher (ou plutôt, d’enterrer) son iconique griffe rouge : participer à l’Eight Point Star Cup à Drakenhof, afin de pouvoir affronter une nouvelle fois Amaranth.

Il lui faut pour cela convaincre le nouveau coach des Scramblers, le Prophète Gris Razzel, de lui laisser une place sur la feuille de match, ce qui est loin d’être évident. Rurrk est cependant prêt à tous les sacrifices (y compris ceux des membres de son équipe) pour revenir dans les bonnes grâces du sélectionneur, et parvient à ses fins après avoir massacré deux coéquipiers au cours d’un match d’entraînement, et menacé de faire subir le même sort au Rat Ogre de l’équipe. Il n’y a guère que le Coureur d’Egout Silkpaw qui se trouve à l’abri de la rivalité « amicale » du vétéran, leurs styles de jeu étant diamétralement opposés, ce qui préserve le jeunot des tacles appuyés de Rurrk. Soucieux d’éviter une hécatombe pré-tournoi, Razzel finit donc par accepter la requête du Blitzer, ce qui promet des retrouvailles touchantes avec le Princedom of Pain…

Début spoiler…Et en effet, les fans en délire assistent à un match dans le match entre les deux rivaux, qui se tabassent avec entrain au milieu du terrain pendant que leurs équipes respectives tentent tant bien que mal de jouer la balle. Si Rurrk s’est dopé jusqu’au moustaches pour pouvoir tenir son rang, il ne fait cependant pas le poids face à Amaranth, dont la puissance a augmenté (merci la possession démoniaque) au cours des insignifiantes sept années qui se sont écoulées depuis leur première rencontre. Le duel de mandales finit donc par tourner en faveur du Prince possédé, qui empale son adversaire sur le bout de sa pince, bien aidé en cela par la discrète poussette que ce fourbe de Silkpaw inflige à son équipier au pire moment. Pour la défense du Coureur d’Egout, les deux capitaines monopolisaient la balle sans rien en faire, et son intervention décisive permet aux Scramblers de marquer un précieux touchdown. C’est avec le hurlement des fans en délire dans les oreilles, scandant son nom comme à la belle époque, que le vieux champion tire donc sa révérence, après avoir grignoté une dernière croûte de gloire comme il le souhaitait. J’en verserais presque une larme tiens.Fin spoiler

AVIS :

David Guymer prend le lecteur à contre pied comme un receveur feinte un trois-quart avec ‘A Last Sniff of Glory’, qui joue la carte de la nostalgie plutôt que de l’humour sadique et nihiliste, qu’on était doublement en droit d’attendre de la part d’une nouvelle de Skavens jouant au Blood Bowl. On ne lui en tiendra toutefois pas rigueur, car en plus d’être originale, cette histoire est bigrement réussie. Ce n’était pas un mince défi de rendre la figure de Rurrk sympathique, voire même pathétique, tant l’anti héros de cette soumission exemplifie tous les traits les plus vils et veules de son ignoble race, mais Guymer y parvient de manière probante. On termine ‘A Last Sniff of Glory’ dans le même état émotionnel que ‘The Wrestler’, Mickey Rourke ayant seulement été remplacé par une Vermine de Choc en armure lourde, et le ring de catch par un terrain de Blood Bowl. Cette nouvelle mérite la lecture par sa singularité autant que par sa qualité d’exécution (même le niveau d’anglais est plus recherché qu’à l’accoutumée, pour autant que je puisse en juger), ce qui font deux bonnes raisons d’assister au jubilé du Petit Tâcheron Rouge…

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Foul Play – A. Hall :

Foul PlayINTRIGUE :

Rangé des voitures et des crampons après une sale blessure alors qu’il jouait trois quart pour les Marauders, Gulden von Sulkenhof, alias Sulk, s’est reconverti dans le crime organisé. Il sert désormais les frères Kobassi, gangsters Ogres bien établis dans le milieu d’Altdorf, et a été chargé par ces derniers de cambrioler le domicile de Gerald Frost-Thumbs, le présentateur météo vedette de CabalVision, à la recherche d’éléments compromettants pour le faire chanter. Quelle n’est pas sa surprise de voir ses employeurs débarquer sur les lieux de son forfait alors qu’il farfouille dans les caleçons du Louis Bodin du Vieux Monde, ce qui ne peut que signifier qu’ils ont compris qu’il était une balance et s’apprêtent à le châtier à leur manière, pas vrai ? Eh bien… non. Les Kobassi se sont déplacés pour faire à Sulk une proposition qu’il ne peut vraiment pas refuser, comme le dit l’expression consacrée. Les truands ont parié gros sur la prochaine victoire des Gouged Eyes sur les Dwarf Giants, malgré le statut de favoris de ces derniers. Ils comptent donc sur leur agent pour s’assurer de ce résultat, en sa qualité d’arbitre du match, reconversion tout à fait logique pour un ancien joueur il faut bien le reconnaître.

Le hic, c’est que l’autre patron de Sulk, le Lord Chamberlain d’Altdorf, souhaite au contraire que les Giants gagnent afin de fragiliser la position des Kobassi. Et comme notre héros a été recruté par le réseau d’espion du notable, ses Yeux, il n’est pas vraiment en position de refuser. Le Lord Chamberlain sait en effet qu’il a recueilli la chèvre mascotte (Janet) de son ancienne équipe, la pauvre bête étant sur le point d’être abattue après que des fans particulièrement obtus aient prétendu qu’il s’agissait d’un Gor marchant à quatre pattes. Un moyen de chantage comme un autre, Sulk étant un défenseur de la cause animale devant l’éternel. On devine donc le dilemme devant lequel l’ex-joueur, futur arbitre et agent double se trouve : quel que soit le résultat du match, l’un de ses employeurs sera très mécontent de lui, avec des résultats potentiellement mortels…

Ces considérations morbides ne reculent cependant pas le jour de la rencontre, qui finit par avoir lieu dans un Oldbowl rempli à bloc. Surveillé de près par les frères Kobassi en tribunes, et par un autre agent de Chamberlain, Hinter (qui s’est fait nommer arbitre assistant), sur le terrain, Sulk essaie de ménager la chèvre et le chou pour sauver la première sans se prendre le second. Enfin je me comprends. Craignant davantage la vengeance brutale et immédiate des Ogres, l’arbitre torturé commence par sanctionner sévèrement les Nains, notamment en refusant toute intrusion de matériel de guerre (dont les roulemorts) sur le terrain, mais se fait contrecarrer par Hinter, qui use des règles les plus triviales du Blood Bowl pour équilibrer les débats. À la mi-temps, les Giants mène 1-0, et Hinter vient menacer Sulk de remettre les preuves de sa duplicité, qu’il conserve dans le livret qu’il garde dans la poche, aux Kobassi s’il continue à faire sa tête de mule. Cette intimidation donne toutefois une idée à l’homme au sifflet, qui finit par autoriser les Nains à faire entrer leur roulemort à quelques minutes de la fin du match, et pousse négligemment son adjoint sous le rouleau de la machine lors de la remise en jeu, faisant disparaître le gêneur et les éléments à charge contre lui, avant de redonner la possession aux Gouged Eyes pour aggression caractérisée du corps arbitral par les Giants. CQFD. Ce retournement de situation permet aux peaux vertes de marquer le touchdown de la victoire au bout du suspense, ce qui fait les affaires des Kobassi. Bien sûr, le Lord Chamberlain n’est pas content, mais Sulk parvient à le convaincre de l’intérêt de pouvoir compter sur ses services maintenant qu’il est plus populaire que jamais auprès des gangsters pour l’empêcher de méchouiller la pauvre Janet. Au final, il s’avère même que les Kobassi étaient également au courant que Sulk travaillait dans leur dos, ce qu’ils ont toléré car cela leur permet de donner de fausses informations à leur rival. Notre héros en est quitte pour se fendre un beau statut « Situation professionnelle : it’s complicated » sur sa page FaceTome, avant d’aller secourir Rolf le terrier, mascotte des Dwarf Giants menacée de mort par les fans de Gouged Eyes. No rest for the wicked !

AVIS :

La Black Library a son lot de nouvelles et de romans mettant en scène des intrigues damned if I do and damned if I don’t1 et Andy Hall adapte ce classique à l’univers de Blood Bowl avec ‘Foul Play’. Tout l’enjeu de ce type de soumission, si on demande mon avis, est d’arriver à trouver une issue élégante à un dilemme a priori insoluble, et Hall ne casse pas la baraque ici. Sa soumission reste malgré tout convenable, et permet d’approcher des « fameux » frères Kobassi, qui ont eu l’honneur de figurer dans la campagne du jeu vidéo Blood Bowl II (et peut-être aussi le premier, I don’t know). C’est à peu près tout ce que je retiens de notable de cette nouvelle, qui n’est guère plus qu’un honnête filler, comme les équipes de Blood Bowl ont leurs ternes trois quarts. Tout le monde ne peut pas être une star.

1 : ‘The Assassin’s Dilemma’ (David Earle), mais aussi ‘Tainted Blood’, le 3ème tome de la série ‘Black Hearts’ (Nathan Long), par exemple.

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Hoppo’s Pies – G. Haley :

Hoppo's PiesINTRIGUE :

Coach des positivement médiocres Grotty Stealers depuis que sa carrière de receveur s’est trouvée engloutie en même temps que son bras gauche par un Squig-ball affamé, Diglit doit gérer de multiples problèmes. Et, croyez-le ou non, la nullité crasse de ses joueurs, un ramassis de Gobelins amateurs complété par un Orque rigolard mais bas du front et un lanceur Troll ayant la sale manie de boulotter les Snotlings qui lui sont confiés, n’est que le cadet de ses soucis. Car son sponsor a perdu patience devant la série de défaites des Stealers et décidé de vendre leur stade à un promoteur immobilier (Nain, qui plus es), et que notre héros doit de l’argent à Boris le Pervers (un…Elfe noir), qui insiste lors d’un tête à tête rugueux pour être remboursé à l’issue du match de demain. Joué contre une équipe de Minotaures. Bref, la situation est très compliquée pour Diglit, qui erre dans les rues à trois heures du matin après avoir été jeté de la carriole de son créditeur par ses malabars Orques. Un mardi classique pour un Gobelin.

Son errance l’amène jusqu’à une ruelle d’où se dégage une irrésistible odeur de tourte, et comme rien ne vaut un petit gueuleton nocturne pour se remonter le moral, et qu’en plus il a presque de quoi payer, le coach éprouvé décide de faire un crochet sur le chemin du stade pour casser la croûte. Il est acceuilli par une roulotte colorée, un poney obèse et un Halfling jovial, qui se présente comme Hoppo Longfoot, tourtier itinérant et fournisseur régulier de snacks de premier choix aux fans de Blood Bowl. En préparation de la rencontre de la journée, il termine une fournée un peu spéciale, dont il accepte de céder une tourte à Diglit devant l’air déconfit et tuméfié du peau verte. Les Halfling ont bon cœur, c’est connu. Sans révéler l’ingrédient secret de sa préparation, qu’il prend tout de même soin de sortir du four avec des gantelets de plomb, il sert son client nocturne qui n’en croit pas ses papilles. La pâtisserie produit sur lui un effet prodigieux, et assez similaire à un rail de coke aromatisé à la morphine quand on y réfléchit. Ce boost soudain donne une idée à Diglit pour remporter le prochain match, et il kidnappe donc caravane, poney et Halfling, direction le stade.

La suite ne fait pas un pli, comme vous vous en doutez, sagaces lecteurs : les Grotty Stealers se gavent de tourtes et entrent sur le terrain pumpés comme jamais, ce qui leur permet de faire tourner en bourrique leurs imposants adversaires et de prendre le large au tableau d’affichage. Cependant, rien n’est gratuit dans le cruel monde de Warhammer, et la consommation irraisonnée de malepierre (car c’était évidemment ça l’ingrédient secret des tourtes de Hoppo, qui compte des Skavens parmi sa clientèle) de l’équipe locale finit par avoir des conséquences aussi visibles qu’handicapantes. Flairant une tricherie, les fans des Bovine Brawlers envahissent le terrain, et le match par à vau l’eau au grand désespoir de Diglit. Sa seule consolation consiste en la repousse miraculeuse de son bras (certes rose pétant désormais), ce qui entre autres mutations, lui permettra de reprendre une licence de joueur et peut-être d’intégrer une équipe du Chaos lors de la prochaine saison. S’il arrive à convaincre ce vieux Boris d’étaler une nouvelle fois ses traites, s’entend…

AVIS :

Guy Haley adapte le concept de la potion magique à l’univers tout aussi humoristique mais bien moins bon enfant de Blood Bowl avec ce ‘Hoppo’s Pies’. On l’a connu plus efficace et inspiré dans la réalisation (on pourrait enlever la première moitié de la nouvelle sans problème, ça fait un peu remplissage pour atteindre la vingtaine de pages), mais comme d’habitude avec cet auteur vétéran de la BL, une qualité minimale est assurée, ce qui fait de cette histoire une lecture pas essentielle mais tout à fait correcte.

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The Freelancer – R. Rath :

INTRIGUE :

Arbitre de Blood Bowl disgracié après que sa corruption ait été mise à jour, et reconverti dans les tâches les moins glamour de l’industrie de ce noble sport, Mort d’Arthur a été chargé par le patron des Nuln Gunners de veiller à l’intégrité physique et physiologique du joueur star de l’équipe, le turbulent Kaspar Hoozier. Ce dernier dispose par contrat d’une nuit de bamboche hors du stade avant chaque match, et l’avisé Cherbourg (le propriétaire de la franchise) se doute bien que laissé sans surveillance, le lanceur vedette sombrera dans ses vieilles addictions, ce qui le disqualifiera d’office lors du test médical de pré-rencontre. Pour parer à ce fâcheux désagrément, qui risquerait de faire perdre aux Gunners leur demi-finale sur tapis vert et poudre blanche, mais mènerait également à l’exclusion à vie de Hoozier de la ligue (ce qui n’est pas top pour vendre des maillots à son effigie), Mort a été engagé pour baby sitter le colosse jusqu’au début du match, une mission qui frôle dangereusement l’impossible à cause du manque de coopération de sa charge.

Ainsi, alors qu’il croit avoir gagné quelques précieuses minutes en envoyant une serveuse du bar où le duo s’est réfugié monter quelques bières à Hoozier dans le salon VIP, Mort est accosté par sa Némésis murine, Skellig Queem. Reporter à Spike !, le Skaven a révélé au grand jour les petites combines de Mort lorsque ce dernier était encore appelé l’Incorruptible, ce qui a précipité sa déchéance. Queem cherche à présent un scoop impliquant Hoozier et une quantité non négligeable de bonnet de fou, ce que Mort cherche bien entendu à éviter… mais qu’il a provoqué par inadvertance en envoyant une barmaid dealeuse servir son protégé. Résultat des courses : Hoozier est désormais convaincu qu’il est un Prêtre Mage Slaan, et lorsque son garde du corps cherche à faire quitter les lieux à Queem avant qu’il ait eu le temps de prendre une photo compromettante, le colosse passe en mode berzerk devant l’outrage causé par l’intrusion d’un Skaven dans son temple. Un coup de sifflet enchanté et un assomage à coup de plastron d’acier plus tard, Mort a réussi à reprendre le dessus, en bon professionnel qu’il est. Il arrive même à convaincre le rat-porter de ne pas faire son papier en l’échange de la révélation d’une combine utilisée par le staff de joueurs dissipés pour nettoyer leur système avant le début d’un match important. Intrigué par cette offre, qui se double d’une interview de Cherbourg en personne, Skellig Queem accepte et le trio part dans les bas fonds de Nuln avant que la garde de nuit ne rapplique.

C’est chez le Docteur Piotr Klenblüd, alias Cleanblood (mais il deteste le sobriquet) que Mort amène ses acolytes. Piotr est un vampire, assez disgracieux et chétif certes, mais un vampire tout de même, et est donc en mesure de réaliser une dialyse expresse de Hoozier pendant que ce dernier est toujours dans les vapes. L’importante concentration de bonnet de fou dans l’hémoglobine du joueur a toutefois raison de la résistance naturelle et de la flegme professionnelle du bon docteur, qui sombre dans une frénésie sanguinaire digne de Konrad von Carstein. Il faudra l’intervention décisive de Queem, qui ne sort jamais sans une dague de secours, pour calmer la soif de sang hallucinée du praticien vampirique. Ceci dit, l’opération a été un succès, et Hoozier peut prendre le chemin du stade dans une forme étincelante pour sa visite médicale d’avant match, échappant juste à une embuscade tendue par les fans adverses en route. Ce qui commence à faire beaucoup de coïncidences malheureuses, tout de même…

Début spoiler…Et en effet, lorsque Mort va récupérer sa paie auprès de Cherbourg, il expose à ce dernier ses suspicions (renforcées par la présence de la barmaid de la veille parmi les pom pom girls des Nuln Gunners) : quelqu’un voulait véritablement empêcher Hoozier de disputer ce match, par tous les moyens possibles. Quelqu’un qui toucherait l’assurance placée sur ce joueur capital, par exemple, ce qui lui permettrait de se refaire une santé financière, et tant pis si un freelancer comme Mort se trouvait impliqué dans la magouille, pas vrai ? Se croyant à l’abri des regards et des oreilles indiscrets, Cherbourg confesse sans tarder son forfait, avant de dégainer un pistolet pour faire taire le fouineur. Mal lui en a pris car Mort, en bon professionnel, était entré dans le bureau du manager avec micro et camra discrète pour donner à Queem l’interview de Cherbourg qu’il avait promise, et qui a été retransmise en direct sur les écrans du stade. Pour skoop, c’est un skoop.Fin spoiler

AVIS :

Robert Rath vient braconner sur les terres rigolardes de Josh Reynolds avec ce ‘The Freelancer’, dont l’intrigue n’est pas si différente du ‘Dead Man’s Party’ de son confrère. Et il a très bien fait, aussi bien dans l’idée que dans la réalisation, ce qui est tout au bénéfice du lecteur. On a donc le droit à des scènes d’une absurdité rafraichissante (comme l’intreview que donne Hoozier, persuadé être un Slaan qui doit se faire passer pour lui-même, à Skellig Queem), de l’action nerveuse, des références en pagaille (et on voit la spécialisation de Rath – c’est un historien – ressortir dans le nom de son héros), et même, touchdown sur l’astrogranit, une petite enquête policière pour conclure cette nouvelle menée tambour battant. Il n’y a rien à jeter dans cette première, et pour le moment seule, contribution de Rath au corpus bloodballique, et j’espère que cet héritier putatif et stylistique du regretté Reynolds aura d’autres occasions de prouver ce qu’il sait faire dans un futur pas trop lointain1.

1 : Points de bonification accordés s’il trouve le moyen d’inviter Trazyn à la fête. Après tout, ce serait techniquement possible.

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Dismember the Titans – G. Lyon :

INTRIGUE :

La saison prometteuse des Talabheim Titans se retrouve perturbée par des événements extra-sportifs impactant fortement la vie de l’équipe : une série de meurtres passablement gore (éventrement et amputations, ça commence à sentir l’acharnement) décime les joueurs de la franchise, sans que les autorités locales ne s’en émeuvent1. Par chance pour les Titans, leur duo de choc, la blitzeu…se (?) Juliana Tainer et le receveur Johann Walsh, prennent sur eux de mener l’enquête, épaulé dans cette lourde tâche par le nouvel apothicaire de l’équipe, l’excentrique, vaguement inquiétant et passablement obsédé par la nécromancie Dr Werner von Blaustein (un brave type). Ce dernier, après avoir examiné la dépouille mortelle de la plus récente victime du DéventramembreurTM, aiguille nos héros sur la piste d’un spécialiste de l’anatomie (comme lui), maniant des instruments très tranchants (comme les siens). Percevant la sagesse du raisonnement du bon docteur, J&J épluchent le courrier des fans à la recherche de récriminations particulièrement véhémentes, qui pourraient indiquer l’identité du tueur. Et, coup de bol, ils trouvent effectivement un suspect intéressant en la personne d’un barbier atrabilaire et très remonté, pour des motifs nébuleux, contre les Titans.

Ayant décidé de la jouer discrètement, les détectives en herbe astrogranite passent la nuit en planque devant l’échoppe de leur détracteur, mais s’endorment comme des masses avant de n’avoir décelé quoi que ce soit de compromettant, non sans avoir mis au point un système de commandes par tapotage de casque interposé, ce qui est toujours utile dans ce type de profession. Le coach ne leur ayant pas laissé toute la journée, Juliana et Johann décident à leur réveil de précipiter les choses en rendant une visite de courtoisie à l’aimable praticien, pour découvrir que lui aussi s’est fait décarcasser par l’insaisissable assassin. Comble de déveine, ce dernier a laissé derrière lui un trio de Zombies patchwork, composé de membres cousus ensemble, ce qui permet à nos héros de comprendre pourquoi les victimes précédentes ont été retrouvées fortement diminuées (c’est du kit bashing organique, au final). Une course déterminée, une passe longue réussie, et une lanterne pleine d’huile fracassée plus tard, J&J sortent de la boutique en feu de feu leur principal suspect, et retournent au bercail pour débriefer le reste de l’équipe.

Sur place, ils ont le déplaisir d’être accueillis par la nouvelle d’un autre décès dans l’équipe, signe que leur persécuteur n’a pas chômé ces derniers temps. Invités par von Blaustein à une réunion de travail dans son bureau, ils finissent par comprendre, suite à une remarque compromettante glissée par leur médecin traitant au cours de la discussion, que ce dernier est derrière cette sanglante série. Ayant eu la mauvaise idée d’accepter le thé préparé par l’apothicaire, ils sombrent cependant dans une inconscience malvenue avant d’avoir pu agir. Nos héros reviennent à eux dans la cave de la maison familiale de von Blaustein, qui a la bonté d’expliquer ses motivations avant de commencer ses sinistres opérations : fan éperdu des Titans, le jeune vB ne voulait rien tant que de rejoindre l’équipe, ce que ses faibles capacités physiques l’ont empêché de faire. Humilié par cette mésaventure, il jura de provoquer la perte de la franchise, puis de remplacer cette dernière par une équipe de cadavres réanimés, composés à partir des meilleurs morceaux des Titans. Quelques années plus tard, après avoir été diplômé en nécromancie à l’université de Sylvanie, il revint dans sa ville natale pour mettre à exécution son plan machiavélique. Le plaisir coupable du monologue satisfait de grand méchant coûtera cependant cher – comme d’habitude – à Scalpelator, puisque Johann trouvera le moyen de se délivrer de l’étreinte ferme mais faillible du Zombie le maintenant au sol avant que sa laparotomie ne débute. Une fois de retour sur leurs appuis, la puissance et l’expérience supérieurs des titulaires viendra sans problème à bout des malhabiles gesticulations de leurs remplaçants, l’action se terminant de façon péremptoire par une inflammation généralisée de l’équipe zombie, coach compris. L’illustration même de l’importance de maîtriser les fondamentaux dans les sports collectifs.

À Blood Bowl comme dans la vraie vie, la lutte des classes entre sportifs professionnels grassement payés et classes laborieuses exploitées empoisonne les relations entre les uns et les autres.

AVIS :

Il m’est venu à l’esprit en écrivant cette chronique que la plupart, si ce n’est tous, des prochaines nouvelles publiées par la BL et se déroulant dans l’univers de Fantasy Battle auraient pour cadre un match de Blood Bowl, pour la simple et bonne raison qu’il s’agit de la dernière franchise vivante prenant place dans le Monde que Fut. Raison de plus pour espérer que la qualité soit au rendez-vous, ce qui est plutôt le cas de ‘Dismember the Titans’. En 17 pages, ce qui est court, Lyon trousse en effet une petite enquête policière dans le monde impitoyable du sport professionnel de WFB, répondant à toutes les exigences du cahier des charges de ce type de publication, (micro) twist final inclus. Certes, la nécessité de garder le propos dans les limites fixées n’a pas permis à notre homme de perdre le lecteur dans un dédale de fausses pistes, et l’identité du meurtrier n’est donc pas longtemps sujette à discussion, mais on ne peut enlever à Lyon qu’il a fait le job de manière tout à fait satisfaisante, et est même allé au delà de l’acceptable, en prenant le temps d’intégrer un set-up utile au dénouement de l’intrigue au détour d’un paragraphe. Ça n’a l’air de rien comme ça, mais nombre d’auteurs de la BL auraient donné dans le TGCM/WIJH pour justifier le revirement de situation final, et il convient donc de distribuer un bon point à Lyon pour son application sur ce sujet1.

Lors de ma première chronique de cette nouvelle, à l’occasion de sa publication dans ‘Inferno!’ #3, j’avais poursuivi en regrettant l’humour un peu too much de ‘Dismember the Titans’. Mais je n’avais pas bien compris à l’époque que Blood Bowl était un univers parallèle et déconnecté de Warhammer Fantasy Battle, et que ce côté déluré et outrancier faisait partie de son ADN. Je retire donc cette critique, M. Lyon.

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Et voilà qui termine cette revue de ‘Death on the Pitch : Extra Time’. À quelques jours près, j’aurais pu faire un parallèle facile avec les résultats du Super Bowl LV, mais je n’ai pas été assez prompt à la finition pour cela (comme les Kansas City Chiefs, d’ailleurs). Quoi qu’il en soit, ce recueil reste une réussite notable de la part de la Black Library, qui a produit suffisamment d’ouvrages collectifs moyens (plus ou mois) pour que l’on prenne le temps de souligner les tomes qui sortent du lot. On retrouve bien dans ces quatorze histoires toute l’atmosphère rigolarde, vicieuse et irrévérencieuse-envers-le-fluff-de-Warhammer-Fantasy-Battle-tout-en-respectant-ce-dernier propre au Blood Bowl, sans se retrouver, comme cela a été le cas pour d’autres anthologies de niche, confrontés à la même variation sur un thème commun, ce qui a tendance à décourager même les meilleures volontés. Ici, les auteurs se complémentent plutôt qu’ils ne rivalisent : Josh Reynolds et Robert Rath jouent la carte du comique et du second degré, tandis que Graeme Lyon préfère étoffer ses intrigues, David Guymer verser dans la nostalgie, Matt Forbeck conclure sa saga en faisant intervenir des célébrités, et Andy Hall utiliser le Blood Bowl comme prétexte pour raconter une toute autre histoire (entre autres exemples).

Cette variété contentera tant le nouvel arrivant (comme l’auteur de ces lignes) que l’aficionado acharné, et donnera je gage l’envie à plus d’un lecteur de se mettre au jeu (de figurines et/ou vidéo). Il est heureux que ce recueil, qui restera sans doute pendant un certain temps le seul proposé par la BL sur ce créneau, se soit avéré aussi qualitatif, car on aurait pu penser que cette franchise mineure de Games Workshop serait traitée de façon cavalière par la division littéraire de l’entreprise. Que celui ou celle qui n’a jamais lu une nouvelle ou un roman médiocre pour Warhammer 40,000, Age of Sigmar ou l’Hérésie d’Horus me jette la première pierre. Le tout puissant Nuffle devait cependant veiller sur la genèse de cet ouvrage, qui pourrait même convaincre certains nostalgiques du « véritable » Vieux Monde de lui donner une chance, en attendant que GW nous révèle enfin ses plans pour la franchise qui fut. C’est donc un touchdown propre, net et sans besoin de référer à la VAR que nous avons ici, et cela fait plaisir, tout simplement.

RED THIRST [WFB]

Bonjour et bienvenue dans cette critique de Red Thirst, troisième et ultime recueil de nouvelles Warhammer Fantasy Battle sorti par GW Books, l’ancêtre lointain, disgracieux, mais coloré (sans blagues, jaugez-moi ces couvertures !) de notre Black Library. Si vous avez lu, parcouru ou survolé les deux épisodes précédents (ici et ), vous ne serez pas dépaysés par cette nouvelle descente dans le monde merveilleux, mais souvent daté, voire kitsch, des courts formats du tournant des années 901. Encore une fois – et c’est la dernière, alors profitez-en –, nous partirons à la découverte des pépites et pétoncles de cette époque fondatrice, ou en tout cas exploratoire, de la GW-Fiction, et tâcherons d’en apprendre un peu plus sur le (vraiment) Vieux Monde, tel qu’il apparaissait en ces temps antédiluviens.

Sommaire Red Thirst (WFB)

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Troisième round aidant, la majorité du casting de ce Red Thirst nous est déjà plus (Yeovil, King, Craig) ou moins (Baxter, Griffith) familière, seul l’énigmatique Neil Jones faisant ses débuts dans la carrière par l’intermédiaire de cette publication. Cette récurrence des auteurs se solde par le retour de personnages familiers : Gotrek et Felix, Genevieve et Vukotich, ou encore Sam Warble. On notera également que l’ouvrage regroupe des travaux plus conséquents que ses prédécesseurs, avec trois nouvelles (sur six, au lieu des huit « habituelles ») de plus de quarante pages au sommaire, ce qui se ressentira peut-être dans le rythme global du livre. Nous verrons bien. Ce qui ne change pas, en revanche, c’est l’usage délectable d’illustrateurs patentés qui ont égayé les pages de leurs esquisses2. Voilà qui me semble suffire en guide de propos liminaire : à table donc, pour s’en jeter un petit. C’est ma tournée.

1 : 1990, pour les petits malins. J’étais là (Gandalf…), déjà, à l’époque. Pas vieux, mais présent.
2 : Pour être honnête, j’ai même racheté un exemplaire du bouquin en version GW Books (mon premier achat était un Boxtree), pour pouvoir bénéficier de ces illustrations. La GW Fiction, cette passion ruineuse…

Red Thirt

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Red Thirst – J. Yeovil:

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INTRIGUE:

Réveil brutal pour Vukotich le mercenaire (dont nous avons croisé l’incarnation vénérable dans The Ignorant Armies), qui émerge d’un coma moins éthylique que concussé, conséquence regrettable mais prévisible de sa grande idée de vouloir s’encanailler dans une taverne clandestine de Zhufbar, alors que Claes Glinka et ses séides y avaient pris leurs quartiers d’hiver. Qui est Claes Glinka, me demanderez-vous ? Eh bien, pauvres incultes que vous êtes, Herr Glinka n’est rien de moins que le Frigide Barjot du Vieux Monde, soit un zélote obscurantiste horrifié par la décadence des mœurs contemporaines, mais possédant un talent marketing et événementiel certain, ce qui lui a permis de recruter assez de followers et d’influence auprès des autorités compétentes – ici l’Empereur Luitpold – pour organiser des manifs pour (et contre) tous d’un bout à l’autre du pays. Entre deux autodafés, fermeture de bordels et abattage de vignobles, Glinka trouve également le temps d’ouvrir des Starbucks à la place des estaminets dans les villes que sa caravane visite. Bref, un fléau.

Vuko, lui, est un jeune mercenaire en quête d’un nouvel employeur, à la suite du décès prématuré du précédent, et qui se disait que passer une tête – moustachue – dans la cité où se tenait le Festival d’Ulric (l’équivalent de l’Eurosatory de l’Empire) serait une riche idée pour se trouver une nouvelle affectation. Peu concerné, ou sensible, aux arguments du Gardien de la Moralité, notre héros s’est donc fait surprendre en plein stupre (la fornication était en projet) par quelques croisés à gourdins, et revient à lui à l’arrière d’une carriole l’emmenant, ainsi que quelques dizaines de malheureux, dans des camps de travail gobelins. C’est comme ça que la Glinka se finance. Seule consolation, il réalise que le compagnon de travée auquel il est enchaîné est une fort accorte escort, embarquée comme lui par la patrouille. En tête de wagon, nous faisons la connaissance de Dien Ch’ing, Cathayen d’origine, comme son nom l’indique, et fidèle suivant de Glinka… en apparence. En fait, Ch’ing est un disciple de Tsien-Tsin, où Tzeentch comme certains l’appellent également, expulsé de sa pagode par les moines guerriers du Roi Singe, l’ennemi mortel des Dieux du Chaos dans le grand Orient. Guidé par ses visions, Ch’ing a infiltré la croisade de Glinka afin de porter quelques plans retors du Grand Architecte à maturité, et n’attend que le bon moment pour retourner son kimono. En attendant, il s’amuse à convoyer les mauvais sujets de l’Empire au goulag, ce qui est une activité comme une autre.

Un arbre tombé en travers de la route donne toutefois l’occasion à Vukotich d’échapper à ce funeste destin, notre intrépide Kislévite saisissant sa chance ainsi que son infortunée voisine, et plongeant dans la forêt en contrebas de la route après l’immobilisation du wagon. Outré par ce manque de savoir-vivre, Ch’ing envoie un trio de grouillots régler leur compte aux déserteurs, qui n’ont cependant aucun mal à en venir à bout. Craignant initialement que sa camarade de chaîne ne se révèle être un boulet (ce qui aurait été logique, finalement), Vukotich est favorablement surpris, et même impressionné, par l’agilité et la dextérité de sa compagne, dont l’aide se révèle précieuse pour dézinguer les goons de Ch’ing. C’est donc avec regret qu’il se résout à lui trancher la main avec l’épée qu’il a récupérée sur un cadavre de PNG malchanceux, afin de regagner sa liberté… sans grand succès. Et pour cause, sa comparse n’est autre que la vampire Genevieve, dont les super pouvoirs incluent donc une peau en kevlar (pratique). Mi (plutôt que morte) vivante avec des principes, elle pardonne à Vukotich son coup de sang, et, ne pouvant pas non plus briser les menottes qui les lient – surtout que la sienne est plaquée argent –, le convainc de faire équipe jusqu’à la première forge qui se présentera à eux. Proposition acceptée par son (désormais) side-kick, qui réalise de toute façon qu’il a intérêt à filer droit s’il ne souhaite pas terminer en casse-dalle pour amphisbaenae1.

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Après quelques heures de marche, notre couple involontaire arrive dans un petit bled paumé, et réussit à squatter une cabane abandonnée pour permettre à Vukotich de reprendre des forces2. Par un hasard qui ne sera pas heureux pour tout le monde, comme nous allons le voir, cette même cabane a été choisie par deux individus de rang pour se rencontrer discrètement. Le premier est le Seigneur Maréchal de Zhufbar, Wladislaw Blasko, qui a laissé Glinka mettre la cité en coupe réglée sans faire trop de vagues… parce qu’il est lui aussi un agent du Chaos infiltré. Ça commence à faire beaucoup. Son interlocuteur est le Haut Prêtre de Tzeentch Yefimovich, ayant tiré le don « je suis une ampoule de feu rouge » dans la table des mutations, et habituellement stationné dans le Kislev, mais en goguette dans le Sud pour les vacances. Nos deux conspirateurs s’entretiennent de leur plan machiavélique, qui consiste en l’assassinat de Glinka lors d’une prochaine cérémonie, ce qui permettra à Blasko de prendre sa place à la tête de la croisade, et de laisser opportunément ouverts aux hordes orientales les cols des Montagnes Noires. Bien évidemment, Vukotich et Genevieve, camouflé sous un drap de scenarium, voient et entendent tout, et décident, à contre-cœur mais il le faut bien, d’aller sauver le Gardien de la Moralité pour éviter son remplacement.

Un peu plus loin, nous retrouvons Dien Ch’ing, perturbé par de sombres pressentiments et l’insatisfaction du devoir non-accompli. Ayant été chargé par Yefimovich d’occire Glinka, il ne veut rien laisser au hasard, et se lance dans une séance de divination à l’aide d’un bol tournant, ce qui lui permet d’assister par visio à la rencontre de son boss avec Blasko, mais également de s’apercevoir que ces derniers n’étaient pas seuls dans la piaule. Contrarié par ce coup du sort, il invoque le fantôme de l’un de ses vénérables ancêtres, l’honorable Xhou, aller négocier (ils sont urbains ces Cathayens) avec les contrevenants, afin qu’ils laissent les événements suivre leur cours. Malgré les trésors de courtoisie et de diplomatie dont fait preuve Xhou, qui se matérialise devant Vukotich et Genevieve alors qu’ils avaient repris la route de Zhufbar en charrette, il ne parvient pas à conclure un deal avec nos héros, qui finissent par le bannir comme l’ennuyeux pop-up spectral qu’il est. Au moins, Ch’ing aura essayé de résoudre le différent à l’amiable. Il passe à nouveau à l’action quelques heures plus tard en envoyant cinq élémentaux régler leur compte aux fâcheux à leur sortie de la ville de Chloesti, où les séides de Glinka avaient organisé un autodafé de la délation3 (c’est comme un pot de l’amitié, sauf que c’est différent), qui a fini dans une très chaude ambiance4. Dépassés par les événements, les aventuriers s’en sortent grâce à la culture G de Mme G, qui réussit à monter les démons les uns contre les autres en demandant innocemment qui avait la plus grosse… énergie mystique parmi le quintet, provoquant un affrontement fratricide aux résultats peu concluants.

Tout est prêt pour le grand final de cette longue nouvelle. Genevieve et ce gros dalleux de Vukotich arrivent sur les rivages de la Blackwater, trouvent un bateau de pêche et partent à la rame vers Zhufbar. Dans la cité, Ch’ing se prépare à commettre l’irréparable au cours d’une adresse publique de Glinka, organisée sur la plage municipale (pourquoi se priver ?). Le plan machiavélique et savamment planifié de nos affreux est toutefois contrarié par l’arrivée soudaine de Genny et Vuko, qui parviennent à créer une belle pagaille parmi l’auguste assemblée, peut-être en exhibant les parties charnues de leur anatomie à la cantonade. Hé, il faut ce qu’il faut. La dague magique de Ch’ing n’ayant pas eu le temps de charger totalement, le cultiste voit s’enfuir sa cible sans avoir pu tenter sa chance. Il a toutefois l’occasion de se venger des éléments perturbateurs et de leurs gros nez d’Occidentaux en leur faisant bénéficier d’un masterclass de MMA5.

Le combat qui s’engage voit le bonze démoniaque tenter de mettre des grands chassés dans la face de ses Némésis, avec des résultats peu concluants, la vampiritude de Genevieve lui permettant d’esquiver ou d’encaisser facilement les coups de pied retournés et manchettes cathayennes de Ch’ing. On suppose que Vukotich, toujours enchaîné à sa dulcinée, a dû avoir un bras disloqué à la fin de la journée. Frustré dans ses tentatives de muay-thaï, l’expat’ se rabat sur ses pouvoirs arcaniques pour finir le taf, mais se trouve là encore contrecarré, cette fois-ci par l’alliance, que dis-je, l’alliage, de circonstance entre le fer et l’argent des chaînes liant Genevieve et Vukotich, qui se révèle être l’anathème du choke-tilège jeté par Ch’ing sur le malheureux Glinka. L’homme sage connaissant ses limites, le moine Ch’(aol)ing décide enfin d’aller voir ailleurs si Tsien-Tsin y est, et prend son congé de Zhufbar, non sans promettre à Genevieve qu’il reprendra contact sous quinzaine (de jours, d’années ou de siècles, mystère). On se rend alors compte que Blasko, qui avait tenté d’aider son pote chaotique dans la mêlée en surinant Vukotich, est tombé dans la Blackwater en armure complète, et peut donc être rayé des cadres. Plus intéressant, l’inflexible puritain Glinka se révèle être un mutant, comme l’atteste la paire de bras surnuméraires qu’il dissimulait sous sa chasuble. C’en est fini de sa croisade, et probablement de son existence, si l’Empire se révèle fidèle à sa politique en matière de diversité.

Fatigué par les événements, Vukotich pique un gros roupillon de deux jours sitôt ses menottes ôtées par le forgeron de fonction, et apprend à son réveil que sa partner in crime-solving n’a pas fait de vieux os à Zhufbar, et est repartie vivre sa non-vie dans l’anonymat qui lui convient mieux. C’est l’affable Maximilian von Konigswald, père d’Oswald (le vainqueur de Drachenfels et compagnon d’armes de Genevieve), qui met le mercenaire au courant des dernières actualités, entre deux rasades d’eau de vie. Plaqué par son crush, Vukotich se sent tout d’un coup bien chose, mais, rassurez-vous, il s’en remettra.

1 : Vous ne savez pas ce que c’est ? Moins non plus. Seul Jack Yeovil est au courant, à mon avis.
2 : Et de rêver, prémonitoirement, d’une bataille au sommet du monde mettant aux prises une faune bigarrée. Il l’ignore encore, mais il s’agit de la conclusion d’Ignorant Armies.
3 : Et où Genevieve rencontre un tout jeune Dietlef Sierck (‘Drachenfels’) déjà sensible aux choses artistiques, et son acariâtre môman.
4 : Pour Vukotich aussi, notez, car une péripétie annexe mais distrayante voit nos héros passer la nuit dans un hôtel de passe reconverti en établissement honorable à la suite des puritains de Glinka, et profiter l’un de l’autre pour réaliser un échange de fluides. Surpris au réveil par une bande de clercs de notaires patibulaires, nos tourtereaux étaient sur le point de se marier sous la contrainte au moment où arriva le cinquième élément (et ses potes avec lui).
: Ce qui dans ce contexte veut dire Mystic Martial Arts.

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AVIS:

Red Thirst (baptisé ainsi en référence au penchant de Genevieve pour le gros rouge) est une des nouvelles qui justifient que l’on s’intéresse de plus près aux origines de la GW-Fiction. Jack Yeovil fait en effet très fort avec cet épisode de ce que l’on doit bien appeler son cycle Genevieve, en parvenant à cocher toutes les cases du cahier des charges de ce type de publication. On pourrait bien sûr parler de son choix de mettre en avant un pan mystérieux du fluff de Warhammer Fantasy, et ce faisant, de le développer, par l’inclusion du personnage de Ch’ing (à ma connaissance le seul Cathayen dépeint dans une œuvre de fiction). Il faudrait alors souligner qu’en quelques lignes, Yeovil parvient à donner une véritable impression d’exotisme et de profondeur à un concept sur lequel GW s’est assis pendant plus de trente ans. Les apports de background ne se cantonnent cependant pas à l’Extrême Orient : l’Empire en bénéficie également, tant au niveau culturel que géopolitique. Et que dire de la figure de Yefimovich, qui illumine (dans tous les sens du terme) de sa présence les quelques pages dans lesquelles il apparaît.

Une autre réussite à mettre au crédit de Jack Yeovil réside dans la construction et le déroulement de son propos, qui enchaîne les péripéties avec un rythme et une facilité déconcertants. La taille du résumé (qui porte bien son nom, car il en reste de là où ça vient) ci-dessus devrait vous donner une bonne idée de la richesse narrative de Red Thirst. C’est la marque des grands conteurs que d’arriver à agencer leur récit sans temps mort ni à coups, et Yeovil fait définitivement partie de cette catégorie. Soulignons en outre la belle variété d’ambiance dont bénéficie cette nouvelle, du grimdark as usual au vaudeville (la scène dans l’hôtel de passe est savoureuse) en passant par la fugace romance entre Vukotich et Genevieve et la légende orientale (l’attaque des élémentaux). Peu nombreux sont les textes de GW-Fiction disposant d’une telle amplitude, bien que l’on puisse également citer William King (un autre grand ancien) ici.

Terminons par la remarque que Jack Yeovil a sans doute été le premier auteur de GW à raisonner en termes d’univers narratif, bien des années avant qu’Abnett ne créé son Daniverse, imité par Graham McNeill et d’autres contributeurs de la Black Library au fil des années. Les liens d’intrigues tissés par Yeovil dans ce Red Thirst sont une autre très bonne raison de lire cette nouvelle… si vous êtes familiers avec la galerie de personnages créés par l’auteur. Genevieve, bien sûr, mais également Vukotich (Ignorant Armies, qui gagne ici son surnom d’Homme de Fer), la lignée des von Konigswald (Drachenfels), un Dietlef Sierck en culottes courtes (ibid)… et sans doute d’autres figures que Yeovil a repris dans d’autres nouvelles et romans lors de sa pige pour Games Workshop. Mine de rien, savoir que l’investissement dans le corpus d’un auteur sera récompensé par des caméos, clins d’œil et autres easter eggs constitue une motivation forte pour le lecteur, et je suis plus déterminé que jamais à combler mes lacunes en Yeovilerie1. Bref, une authentique pépite de la littérature GWesque, injustement condamnée à l’oubli par la politique éditoriale de Nottingham. Si cette critique ne vous donne ne serait-ce que l’envie de vous pencher sur le cas Jack Yeovil (toujours non-traduit à l’heure actuelle, et c’est tragique), elle aura atteint son objectif.

1 : Je suis sûr que cela fera de moi un nouvel homme. 😉

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The Dark Beneath the World – W. King:

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INTRIGUE:

Après avoir recouvré leur indépendance, à la suite de la tentative avortée de la dynastie des Von Diehl de bâtir leur petite baronnie dans la prairie des Principautés Frontalières (Wolf Riders), Gotrek et Felix prennent la route de Karak aux Huit Pics, toujours bien décidés (surtout pour le Tueur) à mettre la main sur le magot dont leur a parlé le tavernier Faragrim lors de leur dernier passage à Altdorf. Sur le chemin de la forteresse, le duo vole à la rescousse d’un petit groupe de voyageurs embusqués par une tribu de peaux vertes alors qu’ils traversaient une rivière. Alors que Gotrek parvient à rendre une copie propre, en débitant quelques Orques avec le professionnalisme qu’on lui connaît, cette mauviette de Felix trouve le moyen de tomber dans l’eau (normal pour une poule mouillée, me direz-vous) lors de son duel, et manque de basculer dans l’inévitable cascade qui s’écoule à proximité du gué. Il n’en rate décidément pas une. Les ruffians mis en fuite et/ou en morceaux, il est l’heure de procéder aux présentations, pendant que blondin se change1 : seuls survivants du groupe d’aventuriers partis faire la boucle de huit pics, le templier Aldred Keppler de l’ordre du Cœur Enflammé, le mage Johann Zauberlich et le pisteur bretonnien Jules Gascoigne sont fort aise de pouvoir compter sur la compagnie de Gotrek et de son commémorateur. Le désormais trio voyage en effet lui aussi en direction du chantier de réhabilitation du Roi Belegar, guidé par la vision que Keppler pense que Sigmar lui a envoyée, qui lui intime d’aller récupérer l’épée magique Karaghul, une relique de son ordre, perdue en même temps que son porteur – le propre frère de Keppler – lors de la tentative de reconquête de la forteresse. Bien que la proximité du trésor convoité par Gotrek rende ce dernier aussi méfiant qu’antisocial, il accepte toutefois de tracer la route avec ces compagnons d’infortune, sans rien révéler de ses propres motivations.

L’arrivée de la petite troupe dans la tête de pont sécurisée à grand peine par les survivants de l’expédition de Belegar, dépeint par King comme un mélange des pires aspects de Theoden et de Denethor (un vieillard cacochyme mais empli de morgue et de malice), se passe sans difficulté notable, tout comme l’obtention par l’un et l’autre groupe de l’autorisation de pénétrer dans les niveaux inférieurs du Karak, toujours aux mains des Gobelins et/ou des Skavens. Gotrek impressionne même la prêtresse de Vallaya locale – Magda Freyadotter – à tel point qu’elle lui remet une carte (en braille – ou son équivalent nain – ) des souterrains, en lui recommandant toutefois la prudence car des fantômes ont été aperçus par les colons. Et là, surprise, on découvre que le farouche Gotrek a une peur bleue des ectoplasmes. Attendons de voir comment il se débrouillera face aux Nighthaunts des Royaumes Mortels… Il en faut toutefois plus pour faire rebrousser chemin à un Tueur auquel on a promis un Troll et un trésor aussi gros l’un que l’autre. Prenant son courage comme sa hache, c’est-à-dire à deux mains, le petit rouquin teigneux quitte la zone des PNJ et part explorer la map, ses sidekicks sur les talons.

La descente dans les entrailles de la forteresse déchue réserve à nos aventuriers son lot de découvertes, recueillement et, inévitablement, emmerdes. En témoigne ce premier accrochage contre une bande de gobelinoïdes, menés par un Ogre ayant lui aussi fait le choix du mohawk (bicolore dans son cas), à moins que ça ne soit un gladiateur Goliath de Necromunda s’étant trompé de porte en allant bosser ce matin là; et qui permet à nos héros de faire montre de leur habileté dans le maniement des armes et des boules de feu2. Sauf Felix, qui rate son test de terrain dangereux en voulant corriger un Gobelin lui ayant tiré la langue, et s’étale de tout son long dans l’escalier qu’il était censé gardé en tant qu’avant dernier défenseur (heureusement que Jules Gascoigne veillait au grain) de la troupe. Ayant mis leurs ennemis en fuite, les aventuriers croisent un fantôme de Nain timide, ce qui n’est pas loin de provoquer une crise d’apoplexie chez Gotrek. Un peu plus tard, cette andouille de Felix, après avoir manqué de se suicider en buvant de l’eau contaminée avec de la malepierre, trouve le moyen de s’illustrer à nouveau, en accusant à demi-mot Zauberlich de fricoter avec le Chaos… avant de s’écraser comme une grosse bouse lorsque Keppler, et sa grande épée, viennent à la rescousse du mage. Décidément, il n’en rate pas une.

Après avoir négocié une infestation de mites géantes – true story, lisez la nouvelle – et s’être faits remettre une quête annexe – passer le balai dans la crypte locale – par une Fantômette courte sur patte, Gotrek et Cie finissent par toucher au but. La crypte en question est en fait celle décrite par Faragrim pendant la nuit de beuverie qui a déclenché le road trip du Tueur, et comme Keppler n’a pas de meilleure idée d’où peut se trouver l’épée qu’il recherche, il décide également de passer une tête… avant de la perdre de façon sanglante et définitive. Le mausolée est en effet le QG  d’un Troll du Chaos effectivement monstrueux, dont la consommation d’eau lourde n’a pas amélioré la photogénie. On comprend alors que Faragrim, dans son avidité, a cherché à faire main basse sur le trésor des rois défunts de Karak aux Huit Pics, en fracturant la porte scellée menant à leurs tombes. L’arrivée du Troll en question, peu de temps après, a mis un énorme, vorace et odoriférant bâton dans les roues du charognard, qui s’est enfui sans avoir pu récupérer son bien mal acquis. C’est la persistance de la présence de ce squatteur disgracieux qui a contraint nos braves Nains retraités à aller demander un coup de main à leurs descendants, sans succès jusqu’à l’arrivée salutaire de Gotrek (OSEF de Felix, vraiment).

Le combat qui s’engage voit rapidement périr les deux autres accompagnants du binôme héroïque, Gascoigne se prenant une torgnole fatale et Zauberlich finissant pincé à mort avant d’avoir pu balancer son Inferno. Pendant que Gotrek se tape tout le sale boulot, Felix réussit à grand mal à se défaire de la tête tranchée de nourrisson que le Troll arborait comme fleur à la boutonnière, et sombre dans son désespoir habituel de fin de nouvelle – comme à chaque fois que la Nemesis du Tueur pointe le bout de son anatomie – avant de se ressaisir et d’enfin servir à quelque chose. Bricolant un cocktail molotov avec le contenu de sa besace, il parvient en effet à enflammer le Troll, l’affaiblissant assez pour permettre à Gotrek de lui porter le coup de grâce. La situation de nos héros ne s’améliore cependant que marginalement après la mort du monstre, une armée de peaux vertes, attirée par le son et lumière organisé de façon impromptue par les aventuriers, décidant de venir se joindre aux mondanités. Résignés à mourir dignement, ces derniers sont toutefois sauvés par l’arrivée de l’armée des morts de petite taille, les esprits ancestraux de Karak aux Huit Pics venant finir le boulot commencé par leur factotum, jugeant sans doute le problème matériel (à défaut de l’être, eux). Ceci fait, il ne reste plus à notre vieux couple qu’à reprendre le chemin de la surface, Felix ayant gagné au passage l’épée Karaghul (qui se trouvait bien dans le trésor du Troll), tandis que Gotrek décide noblement de repartir sans le moindre petit loot, mais avec la promesse, faite par la Mimi (Mathy) Geignarde locale que sa fin serait grandiose. C’est déjà ça.

1 : On apprend ainsi que Felix voyage avec des capes de rechange. Ce qui explique pourquoi sa fameuse houppelande de laine rouge du Suddenland, que King nous ressort à toutes les sauces – c’est le troisième personnage principal de la saga, devant Ulrika et Snorri – résiste si bien aux aventures de son porteur.
2 : J’ai découvert en lisant la nouvelle que cette scène avait servi d’inspiration à une illustration vintage mais assez connue – puisqu’elle a été reprise en couverture de la première édition du JDR Warhammer – de WFB. Eh oui, le Tueur à barbe blanche, c’est bien Gotrek (qui a également regagné un œil au passage). On notera que le seul personnage absent du tableau est… Felix. Quelle surprise.

AVIS:

Avec The Dark Beneath the World, William King signe le dernier volet du corpus “fondateur” de la série Gotrek & Felix. Après avoir présenté les personnages dans Geheimnisnacht, puis avoir mis en scène une aventure où Felix, et le Vieux Monde, tenaient la vedette (Wolf Riders), l’auteur choisit cette fois de se concentrer sur la quête de mort de Gotrek, et à travers lui, la déchéance de l’empire nain, avec des résultats une nouvelle fois probants. Aventure empruntant fortement aux codes du RPG (ce qui semble n’avoir échappé à personne, même pas à GW – voir remarque ci-dessus –), The Dark… mise beaucoup sur ses scènes de combat, et sur l’ambiance particulière apportée par l’exploration des ruines mal fréquentées d’une ancienne forteresse naine. Très riche en fluff, même si ce dernier est parfois daté (notamment les fantômes nains, qui auraient pu gagner la guerre souterraine à eux tout seuls s’ils l’avaient voulu), cette nouvelle constitue également un tournant dans la saga de King, qui aurait pu choisir de tuer son héros de manière « satisfaisante » en conclusion de son propos. Après tout, quelle plus belle fin pour un Tueur nain que de mourir au combat contre un Troll, entouré des tombes et de l’or de ses ancêtres? Peut-être que King s’est réellement posé la question du devenir de son personnage en cette année 1990, ou bien peut-être qu’il avait toujours eu pour projet de faire vivre à ce dernier des aventures interminables (et interminées à ce jour). Qui peut dire ? En tout cas, The Dark… demeure pour moi un jalon essentiel dans le parcours, singulier et iconique, de Gotrek (que l’on découvre de plus capable d’émotion telles que la mélancolie, le désespoir et la peur, ce qui contribue à l’humaniser quelque peu), et à ce titre, sans doute l’un des textes les plus essentiels de la série.

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The Spells Below – N. Jones:

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INTRIGUE:

Katarina Kraeber, apprentie sorcière à l’IUT (Institut Universitaire de Thaumaturgie) de Waldenhof1 retournait tranquillement chez son tuteur, père adoptif et amant (ce qui fait beaucoup, même pour la Sylvannie), en s’amusant à faire tourner les girouettes contre le sens du vent malgré les froncements de narine des braves bourgeois du cru, lorsqu’elle se retrouve mêlée à une opération de gens d’armerie de grande ampleur. La maison où elle réside avec son cher et tendre Anton Freiwald, sorcier de grand renom, est en effet entourée par une véritable armée de gardes, envoyés par le Graf Jurgen von Stolzing mettre un terme aux recherches non sanctionnées du praticien des arts occultes. Un peu trop occultes donc. Révoltée autant qu’inquiète par ce revirement de situation, Katarina tente d’en apprendre plus sur le guêpier dans lequel Anton s’est fourré, non pas en lisant dans l’esprit des gardes aux alentours (trop simple), mais en leur lançant un sort de loquacité, qui les fait déblatérer de tout et de rien. Entre deux remarques sur la météo et le résultat du match de Blood Bowl de la veille, notre héroïne apprend que le Graf a donné pour ordre à ses nervis de capturer le sorcier vivant afin de lui soutirer ses secrets. Son petit tour de passe passe (ou plutôt de bla bla) a toutefois été remarqué par un autre mage, et non des moindres, puisque c’est le rival de Freiwald et maître de la guilde des mages locale, Gerhard Lehner, qui lui met la main au collet, et l’amène jusque devant la litière du Graf, pour un interrogatoire express. La séance de questions-réponses est rapidement interrompue par le début des opérations à proprement parler, et, plutôt que d’envoyer quelques hommes ouvrir la porte avec un bélier, les autorités compétentes décident de bombarder le domicile du sorcier avec une catapulte, OKLM. Fort heureusement pour les tuiles d’Anton Freiwald, un bouclier mystique arrête le projectile en pleine trajectoire, prodige magique estomaquant l’assistance assez longtemps pour que Katarina se libère et se rue vers la porte de son domicile.

Elle aussi sauvée par le champ de force magique qui ralentit les flèches que ne manque pas de lui décocher la maréchaussée, elle arrive à bon port et est accueillie par la figure sévère-mais-juste-et-tellement-beau-gosse de Freiwald, secondé par sa garde personnelle de mercenaires Kislevites et son homonculus contrefait. Jugeant la situation grave mais pas désespérée, le sorcier recherché annonce qu’il a besoin de renforcer ses capacités arcaniques dans son laboratoire souterrain, et qu’il a besoin d’y aller seul, malgré les protestations de Katarina. Ayant sécurisé la loyauté de ses gros bras en leur lançant un petit sort de loyauté sous le manteau – c’est contre le RGPD, mais on n’est pas à ça près –, il part donc en sous sol avec son familier, laissant Katarina à la porte. Bien évidemment, cette dernière décide finalement de rejoindre son sugar daddy, motivée en cela par l’arrivée impromptue dans les locaux d’un adepte de Khaine, dûment mandaté par le Graf pour mettre fin au bazar et lui économiser de devoir payer les heures supplémentaires de tous les fonctionnaires mobilisés en cas de siège interminable. Protégé par une amulette enchantée, le tueur assermenté n’a aucun mal à déjouer les différentes protections magiques que Freiwald a placé dans l’escalier menant à son étude… ce qui n’est pas le cas de la pauvre Katarina, que son amour pousse à poursuivre l’assassin.

Une alarme sonore et un serpent en 3D plus tard, la voilà en bas de l’escalier, où elle se fait mordiller la cheville par l’homonculus domestique du sorcier, décidément moins bien élevé que le regretté Dobby. Encore une porte à poignée brûlante-mais-pas-vraiment à ouvrir, et la voilà à l’intérieur… malheureusement un chouilla trop tard. Si l’assassin est décédé, victime d’une attaque imparable de filet à provision constrictor (Anton est décidémment le spécialiste des pièges à c*ns et autres farces et attrapes), il a eu le temps de planter une dague en plein cœur de sa cible, elle aussi tout à fait morte.  Désespoir de Katarina, qui ne peut qu’empêcher l’homonculus de son défunt protecteur de boulotter le cadavre de son créateur, en lui balançant une flasque à la tronche. C’est ça aussi que de ne pas nourrir ses animaux de compagnie…

Début spoiler…Kat’ ne met cependant pas longtemps à se rendre compte qu’elle éprouve beaucoup moins de chagrin qu’elle pensait en ressentir à la mort de son cher Anton, et pour cause… Les Kislevites laissé en arrière garde pour ralentir les troupes du Graf ne sont pas les seuls à avoir été victimes de l’emprise mentale du mage défunt : Katarina réalise brutalement qu’elle était sous la coupe de Freiwald, et que l’amour qu’elle éprouvait pour lui était aussi réel que celui des candidats de Love Island. Trahison (et du coup, détournement de mineur) ! Dégoûtée par cet abus de confiance2, elle décide de se faire la malle par le souterrain prolongeant le laboratoire du sorcier, après avoir mis la main sur son grimoire, afin de pouvoir continuer ses études en toute indépendance. Localiser le fameux bouquin n’est cependant pas chose facile, même si elle finit par déduire que le précieux livre est caché derrière l’imposant portrait qu’Anton avait fait faire de lui-même – en toute modestie – et gardé par un prototype de Tisse-Mort en fin de batterie, ce qui sauve Katarina du même destin que le cultiste de Khaine. Un tableau fracassé et un coffre-fort à moitié Mimic ouvert à coups de latte (véridique) plus tard, le manuel de sorcellerie est enfin récupéré.

Ces péripéties ont toutefois assez retardé Katarina pour qu’elle assiste à la réincarnation de son tourmenteur, qui prend possession de son homonculus, laissé à dessein en back-up par le mage. Ce n’est pas la première fois que Freiwald change de corps, comme son ancienne élève le découvre en voyant le crâne du cadavre du sorcier rejoindre les cinq autres artefacts similaires qui tournoient au milieu de la pièce, et dont le mage tirait une grande partie de ses pouvoirs. Un peu groggy par cette restauration de session après un arrêt non programmé, Freiwald a la surprise de constater que son esclave sexuelle ne le regarde plus avec les yeux de Chimène, et lui renvoie même le premier sort d’entrave qu’il tente de lui lancer dans les dents. Comprenant que rien ne sera plus comme avant, la chose qui était Anton Freiwald se résout au meurtre de son ancienne complice avant de prendre la fuite pour une nouvelle ville et nouvelle vie, avec ses crânes et son grimoire… sauf que Katarina ne l’entend pas de cette oreille, et parvient à se saisir de la dague toujours plantée dans le torse de l’ancien cadavre de Freiwald, avant de trucider le disque dur externe fait homme (unculus) qui lui fait des misères. Pris au dépourvu par ce revirement de ce situation, c’en est cette fois définitivement fini de notre grand méchant, qui n’avait pas penser à faire une sauvegarde de sa sauvegarde, comme le gros noob qu’il est. Sad! Enfin débarrassée de cette masculinité toxique, Katarina est libre de prendre la poudre d’escampette, et d’aller s’installer en praticienne libérale dans la banlieue de Bogenhafen, comme son vieux père l’aurait voulu.Fin spoiler

1 : La capitale de Sylvannie (tout comme Canberra est la capitale de l’Australie… c’est tout à fait vrai mais ce n’est pas à cette ville qu’on pense immédiatement), qui bénéficie donc d’une académie de magie d’après Neil Jones. Je prendrais cette info avec des pincettes.
2 : En même temps, Anton était un disciple de l’école de magie arc-en-ciel, et organisait la marche des fiertés de Waldenhof (l’une de ces affirmations est fausse, mais laquelle). Elle aurait dû le voir venir.

AVIS:

Si on met de côté les éléments ayant très mal vieilli de The Spells Below, qui sont suffisamment nombreux pour parasiter un chouilla la lecture pour ne rien vous cacher, on se retrouve avec une histoire de rape and revenge matinée de sword and sorcery, mélange à ma connaissance inédit dans la GW-Fiction. L’intrigue que déroule Neil Jones tient assez bien la route, et réserve quelques surprises bienvenues au lecteur ; quant au personnage de Katarina, il est loin d’être celui d’une simple potiche énamourée, comme le début – et l’illustration de Kev Walker – pouvaient le laisser craindre. On se trouve même en présence d’une nouvelle que l’on pourrait qualifier de féministe, ce qui se doit d’être souligné pour un texte aussi ancien (la lutte contre le patriarcat n’était pas un sujet aussi fort qu’il l’est devenu aujourd’hui). Bref, une nouvelle comme on en écrit plus depuis longtemps, signée par un auteur dont on est sans nouvelles depuis des lustres. Dépaysement, à défaut de satisfaction (c’est quand vraiment WTF sur les bords…), garanti.

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The Light of Transfiguration – B. Craig:

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INTRIGUE:

Fidèle à son approche résolument bretonnisante du background de Warhammer Fantasy, Brian Craig nous revient avec une nouvelle histoire se déroulant sur les terres du Roy, racontée par nul autre que le ménestrel itinérant Orfeo, protagoniste de la trilogie Zaragoz, Plague Daemon et Storm Warriors. Notre propos débute avec la croisade purificatrice ordonnée par un aïeul du bon souverain Charles contre les déprédations commises par le sorcier Khemis Kezula depuis la cité fortifiée de Selindre, à proximité des Voûtes. Chargeant son plus preux paladin Super Dupont Lanval de Valancourt d’aller apprendre les bonnes manières, le port du béret et la dégustation de cuisses de skinks à cet intégriste de Kezula, le noble Roy sort de notre conte, avec la satisfaction du devoir accompli. De son côté, LdV se met à la tâche sans tarder, et parvient à enlever la citadelle ennemie, mettant un point final au règne de terreur du mage noir, qui se révéla être un cultiste chaotique. Le bon sens franchouillard de Lanval lui fit également raser le donjon de Kezula, dont il soupçonnait – à raison – le caractère profondément néfaste, et pas seulement à cause de l’infestation de punaises de lit qu’il y constata une fois la victoire obtenue. Le temps suivit son cours, et les terres de Selindre passèrent aux descendants de Lanval après le décès de ce dernier, jusqu’à ce que son arrière-petit fils, Lanfranc, arrive aux affaires. Traumatisé par une méchante chute de cheval terminée tête la première sur un pavé mal placé alors qu’il faisait le kéké sur les lieux des exploits de son aïeul, le père de Lanfranc, Jehan, avait en effet couché sur son testament sa volonté que Selindre soit léguée au culte de Shallya, afin que les bonnes sœurs viennent purifier l’endroit de leurs saines prières.

Guère enthousiasmées par cette – pourtant généreuse – donation (il n’y a qu’à voir la tête qu’elles tirent sur l’illustration), les sistas acceptèrent toutefois de tenir un couvent sur le gazon maudit de Khemis Kezula, à condition que le nouveau comte mette à leur disposition quelques maçons pour construire le lieu de culte. Un peu chafouin d’avoir perdu un bout de fief des suites de la démence paternelle, Lanfranc se montra tout de même gentilhomme, et accéda à la requête des bonnes sœurs, avant de quitter à son tour l’intrigue pour de bon. Nous faisons alors la rencontre de la véritable héroïne de notre histoire, la jeune Adalia, envoyée avec quelques collègues s’occuper de la joint venture si habilement négociée par le culte. Fille d’un artisan vitrier réputé de Quenelles, Adalia avait démontré quelques aptitudes pour la magie durant son adolescence, provoquant son intégration dans les ordres (autre temps, autres mœurs…). Malheureusement pour elle, ces signes prometteurs ne débouchèrent sur rien de concret, condamnant la novice à végéter en bas de l’échelle régulière. Affectée aux tâches ménagères par sa supérieure, la Mère Thelinda, en support des manœuvres et artisans obligeamment prêtés par Lanfranc, Adalia occupe ses journées à faire du mortier et ses soirées à consacrer1 les murs de la cellule minable qu’elle a reçu en dotation, quotidien assez morne il faut bien le reconnaître.

Tout change lorsqu’elle reçoit une nouvelle mission de la part de Thelinda : inspecter les ruines de la forteresse de Kezula à la recherche d’objets récupérables. Lorsqu’elle trouve des éclats de verre colorés jonchant le sol, elle ne met pas longtemps à comprendre qu’il s’agit des restes d’un vitrail ayant orné l’ancienne bâtisse, et décide naturellement de… le reconstituer (sans que Thelinda s’émeuve beaucoup du projet un chouilla hérétique de sa charge). La suite de la nouvelle relate les longs mois de labeur qu’Adalia consacre à sa nouvelle marotte, entre la recherche de fragments dans les décombres et la mise en place de ces derniers dans sa chambre, deux processus longs et ingrats, mais pour lesquels elle se passionne néanmoins. Alors qu’elle est sur le point de toucher au but, et que les parties reconstituées de la rosace se mettent à briller d’eux-mêmes à la nuit tombée (ce qui n’est aaaabsolument pas inquiétant), permettant à Adalia de bosser sans éveiller les soupçons qu’une consommation disproportionnée de chandelles pourrait causer; notre héroïne réalise qu’il lui manque les pièces centrales du puzzle, ce qui la plonge dans l’embarras. Fort heureusement, un Nain, probablement du Chaos3, se présente à elle peu de temps après pour lui remettre le DLC dont elle a besoin pour terminer son ouvrage, contre la modique somme de son âme (probablement).

Dès lors, plus d’échappatoire possible pour la malheureuse Adalia, dont la ferveur et la considération pour Shallya avaient de toute façon baissées de façon drastique au cours des derniers mois. Par une nuit fatidique, elle termine la reconstitution du vitrail, au centre duquel se révèle être un homme oiseau à l’aspect peu amène. Cette complétion permet de débloquer complètement le mode photophore hallucinogène de la pièce, d’où Adalia voit apparaître Birdman en chair et en plumes. Extase mirifique pour notre nonne nerd, mais malheureusement de courte durée. Son cadavre est en effet retrouvé le lendemain par le reste de sa congrégation, carbonisé et incrusté des mêmes éclats qu’elle avait passé tant de soin à récupérer. L’autopsie conclura à une mal-fonction critique d’une cabine à UV dans laquelle se serait trouvée une boule à facettes, mais nous savons tous que la vérité est ailleurs…

1 : Ce qui n’est pas facile car ce diable de Kezula a visiblement traité les pierres (noires) de son donjon, récupérées pour servir de base au couvent des Sœurs, au PFAS, rendant leur blanchiment très compliqué. Et en plus, ça donne le cancer.
2 : La Mère Thelinda tient en effet plus de Thénardier que de Teresa. Le seul moment de la nouvelle où elle fait mine d’intervenir dans le hobby peu recommandable de sa subalterne est quand cette dernière explose son forfait bougie à force de travailler sur son 10.000 pièces toute la nuit.
3 : Une légende locale raconte en effet qu’un clan de Nains des Voûtes choisit d’abandonner Grugni pour se tourner vers une divinité capable de leur apprendre les mystères et merveilles de la confection du cristal. Les érudits supputent qu’il s’agit du dieu du Chaos mineur Bhakkara.

AVIS:

Une Craig-erie très classique et sérieuse que ce The Light of Transfiguration, qui est à ranger aux côtés de A Gardener in Parravon, dans la catégorie « Tentations Chaotiques » du corpus de cet auteur. Si les talent de conteur et le style particulier de ce dernier permettent au lecteur de suivre sans peine la tragique destinée d’Adalia, cette nouvelle ne s’avère toutefois pas aussi prenante, ni divertissante, que d’autres travaux de Craig, qui n’est jamais aussi pertinent que lorsqu’il s’attaque aux « bons côtés » du lore de WFB (Who Mourns a Necromancer ?, The Phantom of Yremi). La GW-Fiction regorgeant de récits dépeignant la déchéance vers le Chaos, et les conséquences, au mieux simplement fatales, de ce choix de carrière pour les malheureux qui se lancent/glissent sur cette voie, les contributions de Brian Craig à ce topos des plus classiques ne sont pas celles que je mettrais le plus en avant, même si la qualité reste présente. Vous voilà prévenus.

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The Song – S. Baxter:

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INTRIGUE:

Abordé à sa table fétiche du Tablier d’Esmeralda, son QG bistronomique du quartier halfling de Marienburg, par une poignée de congénères aussi bavards que dissipés, le détective privé Sam Warble tente tant bien que mal d’envoyer paître les nouveaux venus pour finir son repas en paix, sans grand succès. Refusant catégoriquement, et à la grande surprise de ses interlocuteurs, de participer à une partie de cartes pour célébrer ces retrouvailles moyennement appréciées, Warble se justifie en commençant le récit d’une mésaventure lui étant arrivé récemment, et qui lui a passé le goût du jeu.

Quelques jours plus tôt, en effet, notre limier de poche se trouvait engagé dans une partie de three cards pegasus, toujours au Tablier, contre un marchand Haut Elfe aussi insupportablement hautain que diablement chanceux. Voire un peu plus que chanceux. En fort mauvaise posture, mais refusant obstinément de s’avouer vaincu, Warble avait commis l’erreur de faire un tapis sur la foi d’une main quasiment imbattable… mais au final battue, ce qui avait eu pour conséquence de lui faire perdre littéralement l’esprit, confisqué par son adversaire (Eladriel) en guise de dette de jeu. Voilà pourquoi il ne faut jamais jouer avec des mages. S’étant réveillé une semaine plus tard avec la sensation désagréable d’avoir perdu la moitié de ses sens, Warble reçut une convocation pour se présenter dans une maison isolée du quartier elfique, où l’attendait son vainqueur, sa garde du corps contrefaite mais très costaude (à défaut d’avoir de la conversation), ainsi qu’une petite bouteille où Eladriel avait scellé une bonne partie de la sensibilité de notre héros, et qu’il n’accepterait de lui restituer que si ce dernier lui rendait un petit service. Le marchand kleptomane était en effet féru d’art, et, en plus d’être une sommité mondiale en matière de boucles de ceinture tiléennes, s’était piqué de chant lyrique et désirait ardemment entendre un récital – ou à défaut, une seule chanson – de la jeune Lora, chanteuse exceptionnelle dont l’un de ses congénères, le nabab Periel avait fait l’acquisition sur le marché au noir municipal. The Voice Marienburg, ça ne rigole vraiment pas. Charge à Warble de trouver un moyen de ramener à Eladriel l’objet de ses désirs, s’il voulait retrouver la pleine mesure de ses capacités.

Seulement équipé d’une fiole de verre enchantée semblable à celle dans laquelle Eladriel gardait son précieux, Warble prit le chemin de l’île privée où le puissant Periel avait fait bâtir sa demeure, persuadant un pêcheur cocu et complexé par sa calvitie (ce sont de vrais détails de la nouvelle) de le faire traverser contre quelques espèces sonnantes et trébuchantes. Une fois sur place, le halfling diminué avait eu la mauvaise surprise de croiser le chemin de l’Ogre domestique de Periel, qui semblait de prime abord bien décidé à le renvoyer sur l’autre rive à grands coups de massue. Pour diminué qu’il fut, sensitivement parlant, Warble demeurait toutefois assez vif d’esprit pour embrouiller le vigile, et le dépouiller de toutes ses possessions terrestres (y compris son inestimable – et inestimée – collection de fientes de chauve-souris géante) en quelques rounds de three cards pegasus. Profitant du désespoir de sa pauvre victime, l’impitoyable halfling l’avait alors assommé à l’aide de sa propre massue, confisquée en même temps que son pagne en recouvrement de dettes. Les ravages du jeu.

Cet obstacle écarté, Warble n’avait pas eu de mal à trouver le chemin des quartiers de Lora, dont le mécène s’occupait de façon attentive et loin d’être abusive. Profondément touché par la pureté du chant de la captive, Sam commença par échafauder des plans de libération audacieux, visant à ramener la belle auprès de ses parents, avant que cette dernière ne lui fasse comprendre qu’elle ne tenait pas spécialement à retourner dans la porcherie familiale, merci beaucoup. Comprenant que la partie était mal engagée, Warble eut toutefois la présence d’esprit de faire enregistrer à la cantatrice snob un single sur Snapchat, à l’aide de la bouteille remise (et heureusement d’ailleurs #CaTombeBien #FacilitéNarrative), dont l’enchantement protecteur lui permit de survivre aux vocalises ultrasoniques de Lora.

De retour chez Eladriel, Warble n’eut qu’à convaincre ce dernier de prêter une oreille attentive aux castafioreries de Lora, pour récupérer pleine possession de ses moyens lorsque la roucoulade de la prima donna vint fracasser la flasque dans laquelle le roué Elfe avait enfermé la mise perdue par son adversaire (c’était bien la peine de préciser un peu plus tôt que le carafon était indestructible…). Beau joueur, Eladriel accepta de laisser partir son prestataire sans le faire étriper par sa domestique, ayant eu comme convenu l’occasion d’écouter Lora se produire, ne fut-ce que pour une chanson (son tube en plus : Snowflake). Et voilà qui explique à la foi l’approche distanciée que Warble a développé envers les jeux de cartes, et le nouvel anneau d’or rehaussé d’éclats de cristal qu’il porte au doigt. À notre détective, et à Erik Satie, reviennent le mot de la fin : et tout cela m’est advenu par la faute de la musique.

AVIS:

Steve Baxter reprend impeccablement le flambeau de Sandy Mitchell, créateur du personnage de Sam Warble (The Tilean Rat), avec ce court récit d’enquête dans le dédale pittoresque de Marienburg, mettant en avant avec un second degré assumé la vie « normale » des habitants de la plus grande, riche et corrompue cité du Vieux Monde. Plus originale en termes d’intrigue que la soumission, totalement parodique, de Mitchell, The Song comporte cependant son lot de situations drôlatiques, à tel point que l’on se prend à rêver d’une adaptation du personnage de Warble sur le petit écran en format sitcom (il paraît que Games Workshop veut se positionner sur ce média, alors…). Sans prétention particulière au niveau de sa construction ou de ses apports de fluff, cette nouvelle constitue un petit entracte burlesque bienvenu entre deux œuvres plus caractéristiques, et donc plus sérieuses, de la GW-Fiction. Dommage que Baxter n’ait pas persévéré sur cette voie, il avait un talent certain pour l’exercice. Petit détail amusant (encore un), l’illustration réalisée par Martin McKenna pour cette nouvelle intègre une représentation de McKenna lui-même, en bas à droite du cadre.

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The Voyage South – N. Griffith:

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INTRIGUE:

Ariel et Isabel sont deux sœurs issues de la haute bourgeoisie de Quenelles, et profitant comme chaque année du domaine familial sur les hauteurs de la cité pour passer l’été en compagnie d’autres jeunes gens bien nés. Jusqu’ici, rien de bien méchant, jusqu’à ce que la partie fine slaaneshi à laquelle les frangines se sont rendues pour passer la soirée tourne au drame. Initiée par un autre convive au plaisir psychotrope du lait d’Olla, substance hallucinogène ramenée à grands frais d’Arabie par des marchands peu fréquentables (la meth du Vieux Monde, en quelque sorte), Isabel fait une overdose subite, et décède quelques jours plus tard après une agonie totalement biscor-« Nuh ». Saleté d’intolérance au lactose. Pour Ariel, qui culpabilise un petit peu de n’avoir pas su protéger sa sœur des ravages de la drooooooooogue, débute alors une quête de longue haleine afin de comprendre comment ce drame a pu avoir lieu1. Ayant fait analyser le reste du lait dont Isabel s’était enduit le visage, elle commence par découvrir que la substance a été coupée avec de la caronna, plante estalienne agissant comme un poison à haute dose. En cherchant à identifier le fournisseur du produit laitier avarié dont sa frangine à fait les frais, elle finit par s’engager sur la Rosamund, un navire marchand remontant la Brienne de Quenelles à Brionne, et profitant des étapes sur la route pour faire un peu de transport de fret, dont le fameux pâté de Cixous (ne rigolez pas, Griffith y revient souvent au cours de l’histoire). Cette décision, qui s’apparente plus à une crise d’adolescence un peu tardive qu’à un véritable choix réfléchi, lui permet de côtoyer quelques matelots forts en gueule, hauts en couleurs et avec un cœur gros comme ça, comme l’alcoolique mais secourable Marya (au physique de Capitaine Marlot, ou plutôt Merlot, du fait de son penchant prononcé pour la dîve bouteille), le bourru mais généreux Capitaine Holseher, ou encore son second Jean-Luc, qui ne sert pas à grand-chose dans l’histoire mais qui méritait qu’on le cite rien que pour son nom2.

La croisière fluviale n’est pas de tout repos, à la rudesse de la vie de matelot venant s’ajouter les signes inquiétants d’une traque dont Ariel est la cible de la part d’individus louches, dont un type très grand et très mince, qui trouve le moyen de s’introduire dans la cale où notre héroïne se retrouve confinée pour se dérober aux regards, et lui conseille fortement de stopper son enquête avant qu’il soit trop tard. Guère convaincue par l’argumentaire du slender man, Ariel lui saute dessus le couteau à la main… et se fait bolosser en deux secondes par son interlocuteur, qui se révèle porter d’étranges rembourrages sous ses vêtements. Spoiler, c’est un Elfe dont il s’agit, et qui cherche ainsi à estomper son manque de carrure par rapport à un être humain normalement constitué. Hit the gym, bro ! Résolument non violent, le visiteur se retire sans abuser de sa position de force, laissant Ariel nager en plein marasme sur les forces en présence dans ce trafic de yaourt. Un peu plus tard, la Rosamund tombe dans une embuscade alors que le navire venait de sortir d’une zone de rapides, forçant son équipage à se défendre bellement contre les ruffians qui montent à l’abordage, bien aidé il faut dire par le mystérieux skipper du pédalo qui suivait la barge de près depuis son départ de Cixous, et canarde les affreux avec un arc indubitablement elfique. Tiens tiens. En tout cas, sans son intervention salutaire, cela aurait senti le pâté pour Ariel et ses comparses, et pas seulement à cause de la cargaison embarquée.

Finalement arrivée à Brionne, où elle se rend compte que le dealer qu’elle poursuivait depuis Quenelles, et dont elle a appris qu’il travaillait pour l’amiral Escribano de Magritta, venait de quitter la ville pour l’Estalie, Ariel décide de lui emboîter le pas, et quitte la Rosamund pour s’engager sur un navire faisant la traversée jusqu’à Bilbali. Débarquant seule au terme de cette transat, elle est fort mal accueillie par la populace locale, qui prend ombrage de son teint pâle et de ses cheveux blonds et se met donc à la poursuivre dans les rues en la bombardant de salades. Les monstres. Tout cela aurait pu mal finir sans l’intervention opportune de Mr Corps de Lâche, qui entraîne la malheureuse dans sa maison en plein quartier elfique… Parce que oui, c’est un Elfe. En même temps, je vous avais prévenu. Par un mystérieux hasard, il s’avère que le sauveur d’Ariel, qui s’appelle Senduiuiel Cortengren, mais que ses amis tout le monde appelle Send (alors que Oui Oui aurait tout aussi bien fait l’affaire), a également une dent contre Escribano, qui rackette allègrement tous les navires croisant au large de Magritta, y compris les pacifiques voiliers elfiques. Après un entretien d’embauche rapidement expédié, Send accepte qu’Ariel lui file un coup de main dans son grand projet géo-politique. Cette confiance est rapidement récompensée lorsque la Bretonnienne en vadrouille sauve le Phil de fer de la capture des mains de la milice locale, alors qu’il faisait des signaux de lanterne au Uber naval qu’il avait commandé pour quitter Magritta incognito, après un repérage discret pendant lequel Ariel s’était surtout intéressée à la confection des pasteis de nata du Vieux Monde, et du dosage précis de farine de caronna que ces pâtisseries réputées nécessitent.

S’étant jetés à l’eau pour la bonne cause, nos deux espions sont repêchés par un sultan arabien qui chillait tranquillement sur son yacht de plaisance, en compagnie de sa famille et ses domestiques. Il s’avère rapidement que leur sauveur providentiel est de mèche avec Send pour calmer les velléités impérialistes d’Escribano, et que l’Elfe a conclu un accord avec le divin Hamqa – c’est son nom – pour que leurs flottes combinées aillent couler l’armada magrittane. Après un peu de stratégie et beaucoup de croquettes de poisson, nous passons enfin à la bataille finale, qui voit s’affronter la puissante alliance des Azur et des Arabiens et… la flotte mal réveillée d’Escribano, complètement prise au dépourvue, et qui n’a donc pas le temps de se mettre en position que déjà les assaillants ont envoyé leurs navires brûlots foutre le souk dans leur marina. Et bien que l’amiral estalien soit réputé avoir conclu un pacte avec le Dieu du Sang, ce partenariat impie ne donne rien de bien concluant pour les défenseurs, car Send, qui est un mage en plus d’un archer, invoque un Gardien des Secrets aquatique pour aller souffler dans les branchies du colérique Rhug’guari’ihlulan, démon majeur de Khorne de son état. Ce dernier ne trouve rien de plus malin à faire que de fracasser les navires de son propre camp, avant de chercher à faire boire la tasse – après tout, c’est un buveur –  à son rival parfumé, sans doute jaloux de son maillot deux pièces fuschia. Quoi qu’il en soit, la victoire est totale et sans appel pour nos héros, qui se séparent peu de temps après en léger froid (c’est souvent le cas lorsque votre collègue se révèle être un mage chaotique). Peu emballée par l’idée de revenir à Quenelles, Ariel résout de tenter sa chance dans le shipping longue distance, en partenariat avec l’une des filles du sultan Hamqa, elle aussi en quête d’indépendance. Le women empowerment, il n’y a que ça de vrai.

1 : On notera au passage que sa mère (et donc celle d’Isabel) se montre plus intéressée par la sauvegarde de la réputation familiale que par l’identification d’un éventuel coupable du décès de sa fille, qu’elle considère – à raison tout de même – comme une hédoniste délurée n’ayant pas volé ce qui lui est arrivé. Il faut croire qu’au début des années 90, on pouvait flirter avec le Chaos sans passer dans le camp des méchants.
2 : Avouez que c’est le premier Jean-Luc que vous croisez à Warhammer Battle. Le dernier aussi, sans doute.

AVIS:

Nicola Griffith s’offre un dernier tour de piste (à ce jour en tout cas) d’anthologie avec The Voyage South, OVNI de la GW-Fiction à bien des égards, et donc d’une lecture conseillée à tous les amateurs d’exotisme littéraire. Exit le grimdark pluvieux et désespéré caractéristique d’un Empire assailli/gangréné par des hordes d’ennemis, et bonjour au boat trip entre Quenelles et l’Arabie, en passant par les contrées ensoleillées d’Estalie. S’il est vrai que la région compte de nombreux périls, il flotte malgré tout un goût de soleil et de farniente sur cette longue nouvelle, dont l’héroïne bien née réalise un voyage initiatique dans des conditions un peu rudes mais loin d’être horribles, et qui pourraient être qualifiées de croisière touristique si on se réfère aux standards habituels de Warhammer Fantasy. Ajoutez à cela le manque de crédibilité induit (en tout cas pour un lectorat francophone) par l’intégration d’un personnage nommé Jean-Luc et la fixette que fait Griffith sur le pâté, et la prise au premier degré des tribulations d’Ariel se complique encore davantage. L’auteur a beau mettre en scène une intrigue finalement assez intéressante de trafic de drogue frelatée comme instrument de déstabilisation politique, mis en œuvre par des Estaliens qu’on ne savait pas si entreprenants, la petite histoire ne cesse de prendre le pas sur la grande, bien aidée en cela par le finalement tout petit rôle joué par le grand méchant Escribano et son âme damnée Jorge, qui n’apparaîtront jamais directement dans la nouvelle, même pas lors de la bataille finale, dont le déroulement à sens unique vient conclure ces cinquante pages de façon un peu terne. À titre personnel, j’aurais apprécié que Griffith développe un peu plus le personnage de Send, dont le positionnement ambigu (pour le dire poliment) renforce considérablement l’intérêt. Pour l’anecdote, on notera que Nicola Griffith avait indiqué dans il y a quelques temps considérer la possibilité de donner une suite aux aventures d’Ariel et Cie, en rebaptisant les personnages et enlevant toutes les références à l’univers de WFB de son propos afin de ne pas avoir de problème avec Games Workshop. Ce vœu pieux n’a pas encore réalisé à ce jour, mais tout vient à point à qui sait attendre…

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Et voilà qui termine (pour un temps en tout cas) cette plongée dans les profondeurs doublement vintage de la GW-Fiction à la sauce médiévale-fantastique. Si Red Thirst s’avère à bien des égards être la continuation de la ligne éditoriale déjà affirmée dans Ignorant Armies et Wolf Riders, le parti pris de David Pringle de se concentrer sur des nouvelles plus longues qu’à l’accoutumée se révèle avoir un vrai impact sur l’expérience de lecture. On a en effet l’impression d’une immersion plus poussée et profonde dans le Vieux Monde, sensation renforcée par le choix des auteurs d’intégrer des éléments assez exotiques dans leur récit : Cathay, Kislev, l’Estalie, l’Arabie, Karak aux Huits Pics, Marienburg… Il n’y a finalement que Neil Jones pour s’être cantonné à l’Empire. Si vous avez envie d’un peu plus de variété qu’à l’accoutumée dans vos lectures d’ouvrages GW, Red Thirst pourrait donc vous convenir, davantage en tout cas que les deux volumes précédents.

D’un point vue qualitatif, cet ouvrage s’avère également être assez solide, ne serait-ce que parce qu’il renferme une pépite de Jack Yeovil et probablement LA meilleure nouvelle de Gotrek et Felix jamais écrite par Bill King. The Voyage South, bien qu’un peu particulier dans son approche, mérite également le détour, tandis que les trois (plus) courts formats qui complètent le sommaire s’avèrent tout ce qu’il y a de plus lisibles, même si aucun d’entre eux ne peut prétendre à une distinction spéciale dans le corpus de la GW-Fiction. Finalement, on peut aussi remarquer que, bien des années avant que le sujet d’une meilleure représentation des genres ne soit vraiment considéré en haut lieu, Red Thirst était un recueil finalement assez féministe, puisque quatre de ses six nouvelles ont mises en avant une héroïne plutôt qu’un héros (même si cela ne s’est pas toujours bien fini pour cette dernière, comme Adalia peut en témoigner). Finalement, 1990 était une année très moderne…