HAMMER & BOLTER [N°23]

Bonjour à tous, et bienvenue dans cette chronique du 23ème numéro de Hammer & Bolter ! L’établissement est heureux de vous proposer un menu littéronomique complet, avec entrée (Bloodline – Swallow), plat (Let the Great Axe Fall (Part 1) – McNeill), dessert (Necessary Evil – Sanders) et café (The Hunter – Lyon). Les amateurs éclairés, majeurs et consentants pourront même se rincer le palais avec notre digestif maison (Gilead’s Curse (Ch. 9) – Abnett & Vincent), enfin de retour après quelques semaines d’absence. Oui, il a toujours ce léger goût de tourbe et de pneu caramélisé, ne vous inquiétez pas. On ne l’aimerait pas autrement, n’est-ce pas ? Tout le monde est bien installé ? Formidable. Ne bougez pas, on s’occupe de vous.

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Bloodline – J. Swallow [40K] :

BloodlineDe retour dans Hammer & Bolter quelques mois après sa première soumission (Redeemed – H&B 16), James Swallow s’empare à nouveau de son chapitre et héros favoris, respectivement les Blood Angels et ce bon vieux Rafen, et livre ce qui se révèle être l’épilogue (pour l’instant) de l’arc narratif Rafenesque (et non pas Rat Fennec), tout en meublant un peu le background d’un autre de ses personnages, l’ingénu Meros, arrière57 grand-oncle du précédent, lui aussi déjà aperçu dans un numéro antérieur de cette auguste publication (Fear to TreadH&B 21). Le lecteur attentif ne manquera pas de faire remarquer qu’une petite dizaine de millénaires sépare nos larrons, ce qui semble compliquer la mise en place d’un contrat de génération entre les deux compères. Alors, comment Swallow s’y est-il pris pour les inclure tous deux dans son Insta Story ? Lisez donc ce qui suit.

Tout commence par un lendemain de cuite très, mais alors très, compliqué pour ce pauvre Raf’, que l’on retrouve immédiatement après les évènements relatés dans Black Tide. De retour sur Baal après avoir recouvré la précieuse fiole contenant le sang de son Primarque, dérobée par ce fripon de Fabius Bile quelques semaines plus tôt, Rafen a tôt fait de sombrer dans un coma éthylique des plus profonds, causé par l’injection inconsidérée du plasma Sanguiniesque dans son organisme, péripétie (apparemment) nécessaire au triomphe béat des BA sur Dynikas V, mais dont les conséquences ne tardent pas à se faire sentir pour notre héros1. Exfiltré en douce jusqu’à la tour d’Amareo, ultime refuge des Anges ayant succombé à la Rage Noire, il fait l’objet d’une tractation bon enfant entre Corbulo et Lemartes, le premier partisan d’un sevrage sévère et le second d’un bolt dans la tête. La méthode douce ayant été retenue, Rafen est expédié en cellule de dégrisement, qui pour les Blood Angels ne sont autres que les sarcophages utilisés pour transformer les minots maigrichons et irradiés de Baal Prime et Secundus en colosses hématophiles. Alors que notre héros se voit incarcérer dans la machine qui l’a transformé en sur-homme des décennies plus tôt, Mephiston, qui passait par là lui jette un regard lourd de sens (et rien de plus, il doit demander plus cher que Stan Lee en terme de caméo) avant de laisser Rafen face à sa destinée. Quel dommage tout de même que les secrets de la dialyse se soient perdus au fil des siècles les copains, ça aurait peut-être été utile dans cette situation.

Il y a très, très longtemps, mais dans la même galaxie, c’est au tour de Meros d’être pris en flag’ d’utilisation de substances prohibées par le Codex. Alors qu’il devait superviser l’évacuation de civils impériaux stationnés sur la planète Octus, l’incorrigible Apothicaire n’a rien trouvé de mieux que de récupérer du crystal auprès du dealer Eldar Noir du coin, et de se le faire injecter en intraveineuse pendant son service. Honteux. Transporté dans un état second jusqu’au flagship BA, il est lui aussi confié aux bon soins d’un caisson de survie, qui se trouve être – roulement de tambour – le même que celui de Rafen (The Touch of Sanguine Dawn2). Coïncidence ? I think not.

Arrive ce qu’il doit arriver, nos lascars se rencontrent au milieu d’un paysage désolé (ressemblant à s’y méprendre à la dune du Pilat), et bien que méfiants envers l’un l’autre, une fragile entente se met en place entre les deux BA, chacun venant à la rescousse de son compagnon d’infortune lorsque ce dernier se fait attaquer par ses Némésis fantasmagoriques (les hordes du marchand de sable pour Rafen, des Raiders en pelures d’épiderme pour Meros – on appelle ça le delirium tremens, les enfants – ). Las, cette coopération instinctive finit par voler en éclats, aux insinuations de possession démoniaque émise par Rafen venant se heurter l’incompréhension indignée de Meros lorsque son comparse lui affirme que Sanguinius est day – cé – day depuis 10.000 ans. Rude. S’en suit un pugilat homérique, couvrant allègrement plusieurs heures selon Swallow (on va dire que le temps s’écoule bizarrement quand on rêve), nos deux héros se claquant le beignet avec une belle énergie, sous le regard bienveillant du Sanguinor qui flotte tel un ballon d’hélium plaqué or au-dessus de la mêlée. Il faudra une nouvelle attaque de goons pour faire réaliser à Rafen qu’il a eu tort de pousser Méméros dans les orties (et inversement) et que c’est leur camaraderie, qui tire son origine et sa force dans le sang qu’ils partagent, qui leur permettra de s’en sortir. Cette leçon capitale apprise, chacun peut retourner à ses pénates, le Sanguinor intervenant juste à point nommé pour empêcher Rafen de spoiler l’Hérésie d’Horus à son condisciple3.

La nouvelle se termine par le réveil de nos protagonistes, Rafen accueilli par son suggar daddy Mephiston à la sortie du jacuzzi, tandis que Meros a le droit à la visite d’Azkaellon en personne, qui lui annonce que les Blood Angels ont hérité d’une mission capitale : la libération de l’amas de Signus. La suite va vous étonner…

Sans conteste la meilleure publication de Swallow dans Hammer & Bolter, Bloodline n’est pas non plus une œuvre mémorable. Parmi les satisfactions à retenir de cette nouvelle, on peut noter l’intéressante mise en perspective du Space Marine 30K (pré-Hérésie qui plus est) avec son homologue du tur-fu, la « naïveté » et « l’optimisme » du premier tranchant sensiblement avec le caractère beaucoup plus soupçonneux et nihiliste du second. Ce qui se conçoit somme toute assez bien, les Blood Angels ayant connu leur lot de déboires depuis la fin de la Grande Croisade jusqu’à l’époque actuelle, peut-être plus que toute autre Légion loyaliste, la perte de leur Primarque, la Soif Rouge et la Rage Noire étant autant de raisons pour les fils de Sanguinius de sombrer dans la sinistrose. Ajoutons un usage généreux de personnages nommés (ce qui est toujours sympathique, même lorsqu’ils ne servent pas à grand-chose dans l’histoire – ce qui est le cas ici –), et quelques éléments de fluff à se mettre sous la canine, et vous obtiendrez une soumission respectable, à défaut d’être emballante. Pas mal pour une dernière.

1: Une maturation de 10.000 ans, ça corse un peu la gnôle du grand-père, c’est connu. Surtout quand il n’y a pas que de la pomme.

2: La légende raconte que ce nom a été choisi en hommage à un ancien texte retrouvé dans les archives de Terra et faisant état d’un élixir merveilleux nommé Malibu Sunrise.

3: Ce qui échoue d’une certaine façon puisque Meros se souviendra sur Signus Prime de l’avertissement émis par son héritier à propos d’Horus, et interviendra pour empêcher le sacrifice de Sanguinius.

Gilead’s Curse (ch. 9) – N. Vincent & D. Abnett [WFB] :

Gilead's CurseIl est des personnes auxquelles des vacances font un bien souverain, et Gilead te tuin Tor Anrok fait assurément partie de celles-là. Le hiatus du numéro 22 de Hammer & Bolter, où nous avions quitté le grand blond à l’humeur noire à sa victoire sur le comte Vampire, a bénéficié à plus d’un titre à notre protagoniste, qui revient frais et dispos terminer son second roman dans les pages du webzine de la BL.

Ayant visiblement pris de bonnes résolutions durant son break syndical et salutaire, Gilou commence le chapitre par une mise au clair de l’intrigue, ce qui ne pouvait pas faire de mal. Quelques grandes questions sont ainsi évoquées et traitées en l’espace de deux pages, permettant à l’histoire de repartir sur des bases aussi saines que possible. Où aller maintenant que les deux antagonistes principaux ont passé l’arme à gauche ? À Nuln. Pourquoi là-bas ? Gilead veut rencontrer un érudit humain, que l’on devine avoir joué un rôle dans le premier tome des aventures du longiligne lymphatique, et qui pourrait avoir des informations sur le « Malaise » (en français dans le texte), nom que Gilead et ses compagnons donne à l’affliction qui frappe le Vieux Monde au moment du récit. C’est ce même Malaise qui a entrainé le décès prématuré de Baneth (de pain Tor Anrok), estimé cousin du héros, et donc provoqué la quête de ce dernier. Et voilà comment on retape une intrigue torte, gourde et contrefaite en moins de temps qu’il n’en faut pour se demander ce qu’il est arrivé à la chaîne alimentaire1. Ce n’est certes pas parfait, mais Abnett ne pouvait pas tout recommencer de zéro, et il s’en est plutôt pas mal sorti. Car oui, la principale cause à la brusque, significative et pour tout dire, inespérée, amélioration de l’état littéraire de Gilead’s Curse relève à mon avis d’un simple changement d’auteur. Je n’ai pas de preuves pour étayer cette hypothèse, mais le ressenti à la lecture est net, et les indices suffisamment nombreux et francs pour que le doute soit permis2.

Nous suivons donc Gilead, Fithvael et Laban dans leur excursion Nulnoise, et aux retrouvailles, cinquante après, entre le flegmatique Haut Elfe et l’éminent docteur Mondelblatt, professeur d’EPC (Ethnologie Physique et Corporelle) à l’université locale. De ce que j’en ai compris, ce dernier était, lors de sa première rencontre avec Gilles-Léhade, un escroc patenté ayant usurpé sa position d’érudit expert es elfologie, et n’avait dû son salut qu’à la coopération de notre héros, qui s’était retenu d’exposer la nullité crasse de Mondelblatt au grand jour. Comptant bien se faire repayer de sa magnanimité passée par quelques informations fraîches sur ce fameux Malaise, Gilead s’introduit donc en douce chez son vieil ami, le tire de son lit et le kidnappe l’escorte jusqu’à un bouge mal famé de Nuln afin d’avoir une petite conversation. Le chapitre se termine par un cliffhanger insoutenable, Mondelblatt semblant bien être en capacité d’aider les Asurs à avancer dans leur quête. C’était moins une.

Vous l’aurez compris, ce neuvième chapitre est, sans conteste, le meilleur du lot par une marge assez confortable. En permettant au lecteur martyrisé dans son intellect et son amour-propre de renouer avec des choses aussi fondamentales qu’une intrigue qui progresse, de la logique, du rythme, et même un peu d’humour (non-involontaire, s’entend), le duo d’auteurs débute la rédemption de son jusqu’ici très décevant roman. Cela n’empêche pas quelques défaillances en cours de route, qu’il s’agisse d’un usage un peu lourdingue de gags peu finauds (Laban qui saute en l’air pour éviter un balayage à coup de serpillière – je sais que ça va vous intriguer, mais ça arrive bien dans le chapitre – et se fracasse la tête au plafond de l’auberge) voire carrément scatologiques (le professeur Mondelblatt qui passe son temps à boire et finit par se faire dessus), un faux-raccord narratif qui aurait pu facilement être évité, nouvelle marque d’un changement probable de rédacteur, un épisode de précipitations, sans doute porteur de sens pour la fin de l’histoire, mais assez cryptique dans sa mise en forme, ou encore les relations assez étranges que se mettent à entretenir la triplette elfique, Gilead débutant un bizutage en règle de Laban, qui se met à jouer à l’ado rebelle (et un peu con, il faut l’admettre), tandis que Fithvael oscille entre obséquiosité servile et camaraderie franche avec son partenaire de crime. Mais ne tirons pas sur l’ambulance quand le pouls du patient repart, ce serait indigne. Nous verrons bien si les derniers tours de piste de Gilead parviennent à racheter son début catastrophique.

1: Et en question existentielle bonus, à quoi servaient les reliques rassemblées par le Roi des Rats (et que Gilead a tout de même passé tout un chapitre à dévisager lors d’un long trip à l’acide) ? Réponse ici.

2: À commencer par l’utilisation de dialogues. Oui, de dialogues. De plus de 10 mots. Et compréhensibles. Du jamais vu dans Gilead’s Curse. Moi aussi, j’ai été choqué.

Let the Great Axe Fall (partie I) – G. McNeill [WFB] :

Cette nouvelle en deux parties signe le retour du gars McNeill dans Hammer & Bolter, après The Iron Without (H&B #17), et comme cette dernière, voit Graham ajouter un chapitre à la saga d’un de ses personnages fétiches plutôt que de partir en free-style avec un tout nouveau héros. Comme le titre ne l’indique pas du tout, cette soumission sera donc consacrée à Sigmar Heldenhammer, fondateur de l’Empire et dernier héritier de celui-ci (how strange), et fait suite à la trilogie que le Mac a dévoué à l’ascension et au règne du He-Man du monde qui fut.

Notre propos commence dans un petit bourg impérial appelé Heofonum, qui de probablement charmant est devenu indubitablement sanglant suite à la visite que lui a rendu ce mauvais sujet de Krell. Laissé « orphelin » par la défaite de Nagash à la bataille du Reik quelques semaines auparavant, le champion mort vivant a en effet décidé de se mettre à son compte et exerce désormais l’honorable profession de livreur Deliveroo dans le sud de l’Empire, en attendant d’avoir assez d’argent pour pouvoir retourner chez lui. Mis en retard par un accident de chars à bœufs sur le périphérique extérieur, Krell arriva avec sa livraison de sashimis 31 minutes après la commande à la porte du client. D’où une mauvaise notation. D’où l’énervement du cadavérique coursier. D’où le massacre en règle de l’entière population de Heofonum, et la constitution d’une pyramide avec leurs têtes écorchées. Tout cela est fort logique somme toute, c’est vraiment la faute à pas de chance.

Circonstances atténuantes ou non, le fait ne peut pas rester impuni, d’autant plus que Krell est un multi-récidiviste en la matière. Il revient donc à Sigmar, accompagné d’une poignée de ses plus fidèles lieutenants, de mettre un terme aux meurtriers maraudages du revenant. Rejoint par Alaric le Fou et son escorte, l’Empereur prend le chemin des Voûtes sur les traces de sa proie, en profite pour s’initier aux joies de la géologie, mais également pour faire la connaissance d’un mystérieux sorcier, dont la connaissance du dentifrice et des arcanes de l’illusion permettront à notre petit groupe d’améliorer leur hygiène bucco-dentaire, mais également d’échapper à l’annihilation lorsque leur bivouac reçoit la visite impromptue d’une colonne de skavens.

Assez indolente en termes de rythme et de péripéties, cette première partie est davantage consacrée à la description des conséquences de l’attaque de Nagash pour les principaux personnages de la trilogie Heldenhammer//Empire//Godking, plus ou moins marqués par l’épisode. Les premières pages sont ainsi centrées sur Wenyld et Cuthwin, guerriers Unberogen et compagnons de la première heure de Sigmar, qui lui-même ne fera son apparition qu’au quart du récit. Nul doute que les lecteurs de la saga de McNeill apprécieront ce suivi, les autres devant patienter un peu pour voir les VIP (very important protagonists) en action. Cette action consistant en recueillement, équitation et douche écossaise pour Ziggie, et en conférence magistrale et ronflements pour Alaric, il n’y a guère que les petits bouts de fluff éparpillés dans le récit qui justifient sa lecture. Let the Great Axe Fall ? Plutôt Let’s get this Thing Started pour le moment.

The Hunter – G. Lyon [WFB] :

Baptême de l’encre pour Graeme Lyon (à ne pas confondre avec Steve Lyons) dans Hammer & Bolter, avec ce qui constitue certainement le plus court des courts formats publiés dans ces pages. À noter que notre homme s’est fait une spécialité des publications concises, son catalogue Black Library, déjà assez fourni, ne comprenant que des nouvelles, écrites pour à peu près toutes les franchises GW (il y a même du Blood Bowl !).

Du haut de ses quatre pages, The Hunter convie le lecteur à une traque écrite à la première personne dans l’atmosphère oppressante d’une forêt du Vieux Monde. Lancé sur la piste d’un groupe d’intrus ayant pénétré sur ses terres, le Chasseur devra mettre à profit toute sa science et son habileté pour espérer triompher de ce combat inégal.

Lyon conclut son propos par un twist final assez bien amené (le Chasseur est un Homme-Bête, et ses proies sont des humains, alors que les descriptions des uns et des autres laissaient jusque-là présager du contraire), ce qui fait de The Hunter une des rares nouvelles écrites du point de vue d’un représentant d’une race « non-civilisée ».

Necessary Evil – R. Sanders [40K] :

Necessary EvilContributeur régulier de Hammer & Bolter au cours de la première année du webzine (The Iron Within, The Long Games at Carcharias), Rob Sanders revient conclure ce 23ème numéro avec une nouvelle au titre peu inspiré, à mi-chemin entre le Bitter End de Sarah Cawkwell et le Lesser Evils de Tom Foster, deux soumissions n’ayant pas beaucoup contribué à élever le niveau de H&B. Alors, le sieur Sanders est-il arrivé cette implacable loi de la BL, voulant qu’à titre bateau, récit médiocre ? Voyons ça.

Débarqué sur le monde de Nereus grâce à sa connaissance de la Toile et les bons services de l’Atlas Infernal, l’Inquisiteur Bronislaw Czevak a peu de temps pour localiser et détruire un RCA (random chaotic artifact) avant que ce dernier ne tombe entre de mauvaises mains, ici celles de cette fripouille d’Ahriman, insistante Nemésis de notre héros. Cette mission, déjà peu simple, se trouve encore compliquée par la position de Nereus, monde dépotoir obligeamment placé à la sortie d’une faille Warp nommée The Craw, et à la surface duquel s’écrasent avec régularité les épaves de vaisseaux malchanceux. Ajoutez à cela la présence de quelques entités démoniaques, convenablement sustentées par la proximité de l’Immaterium, et vous obtenez un théâtre d’opérations assez délicat. Sauf que Bro’ n’a pas le temps. Mais alors, pas du tout le temps.

Necessary Evil s’affranchit donc rapidement de ce détail que l’on nomme progression narrative, et prend le plus rapide chemin vers sa conclusion logique, sacrifiant au passage toute crédibilité sur l’autel de l’efficience pure. Quick and dirty style. Revenons donc vers Czevak pour prendre mesure de l’ampleur de la catastrophe : à peine arrivé sur Nereus, il manque de se faire écraser par un navire en perdition terminant sa course sur la planète, et, blessé au cours de la collision, se fait cueillir par une équipe des récupérateurs qui constituent la population locale. Resté inconscient pendant dix heures, il finit par se réveiller, obtient un entretien avec le chef de la colonie et avertit ce dernier de l’arrivée prochaine d’une expédition Thousand Sons, à la recherche du Bacillum Formidonis, le Crozius Arcanum de l’Apôtre Noir Rhadamanthys, capable de rendre toute armée chaotique invincible. Devant la fin de non-recevoir ferme et polie que son interlocuteur lui oppose, Czevak trouve la relique par un horrible coup de chance trente secondes plus tard, la balance dans l’océan et s’en va avec le sentiment du devoir accompli, laissant les colons de Nereus, qui se révèlent être noyautés par un culte Genestealer, s’expliquer avec les sbires d’Ahriman. Et voici comment on sauve l’Imperium de la destruction en vingt minutes bien pesées les enfants. Prenez-en de la graine, groupies de Guilliman.

Séquelle (dans tous les sens du terme) du roman consacré par Sanders à l’inquisiteur Czevak, Necessery Evil est très loin d’être le travail le plus réussi de son auteur. L’approche cavalière que ce dernier a de son propos, tant au niveau de la construction du récit (particulièrement bien illustré dans cette réponse lapidaire du Cze à une question pleine de bonne sens de son hôte) que du respect des convention de fluff (le moindre clampin de Nereus connaît l’existence des Thousand Sons) finit par donner à la nouvelle un faux air d’épisode de Dr Who ou de Stargate, ce qui est faire injure à la richesse du background de 40K et au talent d’écrivain de Sanders, jusque-là plutôt bon dans ce qu’il faisait pour le compte de la BL. Un vrai coup de moins bien donc, sans conséquence pour la suite espérons-le.

Au final, ce 23ème numéro se caractérise par un centre de gravité « qualitatif » très ramassé autour d’une honnête, mais peu enthousiasmante, moyenne. Derrière cette terminologie jargonneuse et barbare, un constat implacable : ceux de qui on pouvait espérer les meilleures soumissions (McNeill, Sanders) ont globalement déçu, alors qu’à l’inverse, les cas plus désespérés (Swallow, Gilead’s Curse) ont relativement surperformé. En résulte un recueil absolument passable, et dont la lecture ne se révèle donc en rien nécessaire, si vous voulez mon avis. Ite, critica est.

À propos de Schattra

Égoïstement optimiste, çapourraitêtrebienpirologiste assumé. Selfishly optimistic, proud itcouldbemuchworsologist

Publié le décembre 16, 2018, dans Chronique, et tagué , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , . Bookmarquez ce permalien. Poster un commentaire.

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