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BLACK LIBRARY 2012 ADVENT CALENDAR [40K – WFB – HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du Black Library 2012 Advent Calendar, pot-pourri de 24 nouvelles et audio dramas proposé par la BL à ses afficionados pendant les semaines ayant précédé Noël 2012 (qui tomba un mardi, comme vous le savez). Si, plus de dix après, ce concept vous semblera sans doute des plus familiers, à l’époque il s’agissait d’un saut dans l’inconnu de la part de Nottingham, qui se cherchait encore en matière de publication numérique. Nous sommes donc en présence du tout premier Advent Calendar de la Black Library, ce qui peut expliquer pourquoi ce lointain ancêtre ne ressemble guère aux dernières moutures sorties par la BL.

Black Library 2012 Advent Calendar

Outre le fait que la sélection que nous allons explorer ci-dessous compte des nouvelles prenant place dans le Monde Qui Fut (ce qui ne se reproduira plus, même si la Fin des Temps ne prit place qu’en 20151), une autre différence majeure entre le millésime 2012 et ceux qui suivirent est le format des histoires publiées par la BL : croyez-le ou non, mais il fut une époque (heureusement révolue depuis lors) où les nouvelles de 1.000 mots (soit entre quatre et cinq pages) étaient vues comme un produit tout à fait valable par la Black Library. Vendues à 1,49€ l’unité2, ces ultra courts formats étaient certes rapides à écrire pour les auteurs de GW-Fiction, mais peu furent en mesure de proposer des histoires un tant soit peu intéressantes en respectant cette longueur limite. Tout le monde n’est pas Hemingway ou Monterroso.

Les 21 nouvelles et 3 audio dramas n’ont donc pas marqué l’imposant corpus de la GW-Fiction, mais doivent plus être vues comme des exercices de style de la part des plumes de la BL, et pas des moindres (Abnett, Reynolds, Wraight, Thorpe, McNeill, Werner, Counter, Mitchell, Fehervari…). Avant même de m’atteler à cette revue, je peux déjà vous dire que le rapport qualité/prix de cette sélection sera absolument exécrable (près de 90€ à débourser pour disposer de toute la série…), mais j’espère ne pas être l’abri d’une (ou deux, ou plus) bonne(s) surprise(s) dans le lot…

1 : Je pense que la décision de bazarder Warhammer Fantasy Battle a été prise par Games Workshop fin 2013, ce qui peut expliquer pourquoi la Black Library a progressivement arrêté de publier des inédits pour cette franchise historique à partir de ce moment.
2 : À l’époque. Au moment où cette critique est écrite, la BL ne s’est pas gênée pour harmoniser les prix de tous ses courts formats, et le lecteur curieux devra s’acquitter des 3,49€ réglementaires pour mettre la main sur ces quelques pages. Ça pourrait passer si la BL indiquait clairement la longueur des nouvelles sur son site, afin de ne pas piéger les fans croyant avoir affaire à des histoires plus consistantes, mais non (pas de manière systématique en tout cas). Pas très élégant.

Black Library 2012 Advent Calendar

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Born to Us – D. Abnett [40K] :

INTRIGUE :

Born to UsComme il aime bien le faire en ses vieux jours (depuis qu’il a passé son premier siècle, en tout cas), Gregor Eisenhorn, Inquisiteur vétéran ayant roulé sa bosse et son crâne chauve d’un bout à l’autre du Daniverse, se remémore les épisodes les plus marquants de sa longue carrière. Cette fois-ci, direction la planète Koradrum où Greg a enquêté sur la disparition d’un archéologiste de renom, Darred Lenhema, alors qu’il fouillait un ancien tumulus avec son équipe.

Les temps de transport au sein de l’Imperium étant ce qu’ils sont, Eisenhorn et son gros bras de service Harlon Nayl n’arrivèrent sur les lieux que deux ans après que Lenhema ait été déclaré AWOL. Il ne servait donc à rien de se ruer sur le site de fouille pour relever des empreintes, ce qui laissa un peu de temps à notre duo de choc pour se renseigner sur la culture et les croyances locales. Il s’avéra que les crédules Koradrumois considéraient l’arrivée dans le firmament d’une nouvelle étoile (en fait un simple passage en supernova d’un astre proche) comme le signe de la réincarnation prochaine d’un grand meneur, voire d’une figure divine, qui mènerait son peuple vers le salut, ou quelque chose comme ça. Eisenhorn, qui est très culturé et aime entendre le son de sa propre voix, s’empressa de faire un cours magistral au pauvre Nayl sur la récurrence du mythe de la figure – n’ayons pas peur des mots – christique au sein de l’Imperium, même si à l’approche du 41ème millénaire, peu de gens savaient d’où ce mythe provient. Et c’est bien triste, ma pauvre dame.

Sur ces entrefaites, l’Inquisiteur et son garde du corps arrivèrent à proximité du tumulus, où l’équipement de Lenhema et de son équipe gisait au sol. Il semblerait que la réponse de cette énigme se trouve à l’intérieur de l’ancienne tombe…

Début spoiler…Et comme Eisenhorn aime à le marteler, toutes les légendes, mêmes les plus farfelues, ont toujours un fond de vérité. Un messie s’était bien réveillé sur Koradrum après un sommeil millénaire, mais il s’agissait d’un Tétrarque Necron et pas d’un charpentier hippie ; et s’il a bien multiplié les pains, ce fut en direction des archéologues sans gêne ayant envahi son intimité. Nous quittons Eisenhorn et Nayl sur cette épiphanie grimdark, mais rassurez-vous, ils s’en sont tous les deux sortis…Fin spoiler

AVIS :

Des personnages populaires, un peu de fluff et une petite surprise finale pour relever le tout : Dan Abnett fait bon usage de son budget très serré de mots dans cet inconséquent mais sympathique ‘Born to Us’, qui nous permet de nous souvenir que le brave Gregor est à l’origine un membre de l’Ordo Xenos. Il y a évidemment des nouvelles bien supérieures à celle-ci dans le corpus inquisitorial d’Abnett, mais ‘Born to Us’ tient assez bien son rang, dans la catégorie poids plume.

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Binding – R. Harrison [40K] :

INTRIGUE :

BindingLe Sergent vétéran Leonen Kyarus des Imperial Fists se réveille brutalement pour constater que quelqu’un a laissé la vitre de toit de son Rhino de fonction ouverte, ce qui rafraichit considérablement l’habitacle. Ah là là, ces j- Wait a minute. La minute qui suit voit notre héros reprendre péniblement ses esprits et sortir de la ruine fumante du véhicule, constatant au passage qu’une de ses mains n’a pas survécu au crash. Plus inquiétant, le reste de son escouade manque à l’appel, alors qu’une voix désincarnée râle « frérooooot… » à la limite de sa perception auditive. La radio de son armure ne fonctionnant plus guère, Leonen en est réduit à partir à la recherche de l’homme qui murmurait à l’oreille de Lyman (hoarse whisperer, en V.O.), ce qui l’amène dans un bâtiment en ruines…

Début spoiler…Où l’attendent ses frères de bataille, qui s’étaient passés le mot pour lui faire une surprise pour son anniversaire sont tous morts autour d’un pilier de pierre trotrodark, servant de perchoir et de prison à un Démon ventriloque (sans doute un Duc du Changement, si on prend en compte ses plumes, son bec et son champ lexical de perroquet domestique). Leonen comprend en un éclair que cette abomination a attiré ses camarades jusqu’à lui pour leur voler leur âme et gagner ainsi en puissance pour se libérer de son emprisonnement, et qu’il est le prochain sur la liste. Comme le Démon lui fait doctement remarquer, ce n’est pas un combat qu’il est statistiquement en mesure de remporter, mais le brave Sergent rétorque qu’il n’est pas venu pour ça avant que le combat ne s’engage et que le rideau tombe sur notre histoire. On ne saura jamais s’il a pu utiliser les toilettes, du coup…Fin spoiler

AVIS :

Pour sa toute première histoire écrite pour le compte de la Black Library Rachel (Ray) Harrison signe une micro-fiction appliquée et assez atmosphérique (ce qui est bien), même si son dénouement tombe un peu à plat1 (ce qui l’est moins). Je pense qu’il y avait moyen de choisir un autre antagoniste pour se sortir de cette ornière, mais dans l’ensemble, c’est très honnête pour une nouvelle de 1.000 mots.

1 : Ou plutôt, suscite des questions que Harrison laisse sans réponse, faute d’espace pour les traiter. Comment le Démon a-t-il fait pour attirer un à un les Space Marines jusqu’à son pilier, alors qu’ils ont tous commencé la nouvelle dans l’épave du Rhino (et qu’on peut supposer qu’ils ne s’en seraient pas écartés aussi facilement que Leonen s’ils avaient vu que leurs camarades étaient blessés) ? Est-ce lui qui a enchainé le cadavre de Damanios à son pilier, et pourquoi ? Le Démon peut animer les cadavres de ses victimes, mais à quoi cela lui sert-il ?

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The Riddle of Scorpions – J. Reynolds [WFB] :

INTRIGUE :

The Riddle of ScorpionsZavant Konniger et son assistant Vido ont été appelés pour enquêter sur la mort suspecte d’un marchand d’Altdorf, dont le corps a été retrouvé dans la caverne d’Ali Baba qui lui servait de bureau. Jorge Mueller, car c’était son nom, s’était en effet fait une réputation dans l’importation et la vente d’artefacts rares provenant des quatre coins du Vieux Monde et au-delà, et était bien connu pour ne pas hésiter à employer des moyens douteux pour enrichir sa collection.

Comme souvent, Konniger questionne Vido pour (tenter de) développer les capacités déductives du Halfling, lui-même ayant bien sûr déjà établi sans l’ombre d’un doute le motif et le déroulé des événements ayant conduit Herr Mueller à passer l’arme à gauche. Guère intéressé par le cadavre affalé sur sa chaise, ou par les remarques de son employeur d’ailleurs, Vido préfère inspecter le bureau du défunt, et ramasse un tube finement ouvragé dont les extrémités sont occupées par une reproduction de scorpion en métal. Voilà qui ferait un presse papier de premier choix…

Mais ce que Vido prenait pour un simple objet décoratif se révèle être un piège-scorpion arabien, qui se referme sur ses doigts alors qu’il le manipule, et dont les dards se rapprochent rapidement de ses phalanges. Si l’expérience se révèle traumatisante pour le Halfling aux mains baladeuses, Konniger lui ne se départit pas de son calme et continue de tester la sagacité de son acolyte sur les causes du décès de Mueller, tout en l’informant qu’il lui suffit d’entrer le bon code sur le cadran du piège pour se libérer avant qu’il ne soit trop tard. Un vrai jeu d’enfant (d’ailleurs, c’est comme ça que les jeunes Arabiens se distraient, à ce qu’il paraît) !

Début spoiler…Au final, Vido ne parvient pas à résoudre l’énigme des scorpions avant de se faire piquer, mais comme les dards n’étaient pas empoisonnés, la seule victime à déplorer est son amour propre. Konniger entre la combinaison en un tour de main, et révèle à son serviteur éprouvé que c’est cette même mésaventure qui a causé la mort de Mueller, dont le cœur a lâché sous le stress lorsqu’il s’est trouvé par inadvertance prisonnier du piège. On peut appeler ça les risques du métier.Fin spoiler

AVIS :

Josh Reynolds ne choisit pas la facilité en tentant un whodunit dans un format 1.000 mots (1.014 ici, si on veut chipoter), mais on ne pouvait pas s’attendre à autre chose dans une nouvelle dont le héros est le légendaire Zavant Konniger. Cela fait toujours plaisir de revoir des personnages mythiques de la GW-Fiction reprendre du service sous la plume de nouveaux auteurs, et le Sage-Détective d’Altdorf est à ce titre bien tombé avec Reynolds, qui se sort honorablement de cette situation épineuse (bien mieux que Vido en tout cas). Bien sûr, le côté « énigme » de ce ‘The Riddle of Scorpions’ n’est pas très abouti, mais pour un très court format, c’est loin d’être indigent. Bravo pour le panache, M. Reynolds.

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Failure’s Reward – C. Wraight [40K] :

INTRIGUE :

Failure's RewardTarolf est ce qu’on peut considérer comme un loser du 41ème millénaire, ou plutôt, un lo(up)ser. Né sur la planète Fenris, il a tenté pendant sa jeunesse de rejoindre les fiers Guerriers Célestes (aussi connus sous le nom de Space Wolves par l’Administratum) mais quelque chose s’est mal passé pour lui pendant le sévère processus de sélections des aspirants du Chapitre le plus cabotin de l’Imperium. On ne saura jamais ce qui est parti en cacahouète pour le pauvre Mister T. mais toujours est-il qu’il s’est fait recaler. Heureusement, les Space Wolves ont une fibre sociale bien connue et ont proposé au candidat malheureux de servir l’Empereur d’une autre manière qu’en zlatanant ses ennemis à travers la galaxie, et Tarolf est donc devenu assistant armurier dans les forges du Croc.

Comme il nous le raconte avec ses propres mots (assez simples, car il est probable que les Prêtres Loups l’aient un peu lobotomisé sur les bords pour s’assurer de sa docilité1), sa tâche consiste à customiser des genouillères d’armures énergétiques, afin que les Space Wolves puissent guerroyer avec le style flamboyant pour lequel ils sont réputés à travers tout l’Imperium. Free hand de dragon, de wyrm, de troll ou de loup : Toralf est un as du poinçon, de la cire et de l’acide, et même s’il reconnait sans mal que le moindre boulot peut lui prendre des mois (ce qui est long tout de même quand on considère la taille de la pièce), l’important est d’assurer un rendu irréprochable. La qualité totale, que voilà une belle doctrine !

1 : Et fait stériliser pour les mêmes raisons, mais en cela il ne diffère sans doute pas des recrues confirmées du Chapitre…

AVIS :

Chris Wraight lorgne clairement du côté des encarts fluff des Codex et suppléments de jeu de rôle avec ce contemplatif ‘Failure’s Reward’, qui décrit avec un luxe de détails le quotidien d’un des milliers de serfs anonymes qui triment pour le compte des Space Wolves. Pas d’intrigue passionnante ou de conclusion tonitruante à attendre ici, seulement la réalité terne, assez triste et souvent violente du 41ème millénaire, « filmée » à hauteur d’homme (ou d’humanoïde, un aspirant Space Wolves n’ayant pas un physique ordinaire). Assez proche dans l’esprit du ‘Sacrifice’ de Ben Counter, qui était une autre bonne surprise du corpus de 40K.

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The Quickening – A. Smillie [40K] :

INTRIGUE :

The QuickeningL’Archiviste Balthiel des Flesh Tearers a choisi d’opérer seul derrière les lignes ennemies pour mener à bien l’assassinat du Gouverneur hérétique de Spheris, et nous le voyons faire usage de ses pouvoirs psychiques, dont son signature move : the quickening (une sorte de bullet time qui lui permet de ralentir l’écoulement du temps autour de lui), pour se débarrasser de la garde personnelle du félon. Bien que très efficace, l’abus du Warp est dangereux pour la santé mentale, et Balthiel finit la novelinette (3 pages !) en PLS, sa mission accomplie mais sa messagerie mentale submergée de spam de Démons cherchant à lui vendre des analgésiques miraculeux et/ou à lui faire rencontre des hot single spawns dans son voisinage. Bref, un jeudi ordinaire pour notre ami Flesh Pseaker.

AVIS :

Andy Smillie continue sa série consacrée à la mise en scène des pouvoirs psychiques des Blood Angels (et descendants) dans ses nouvelles Flesh Tearers avec cet insignifiant à tout point de vue ‘The Quickening’. Les amateurs de ce genre très particulier peuvent se tourner vers ‘From the Blood’ pour voir l’incroyable Balthiel utiliser le Bouclier de Sanguinius d’une manière fort peu orthodoxe (et tomber à nouveau dans les pommes, comme le gros bébé fragile qu’il est). Les autres économiseront les 3.49€ demandés pour ces quelques lignes peu mémorables1 et iront dépenser leur capital chèrement acquis ailleurs.

1 : Qui bénéficient malgré tout d’une recommandation de nul autre que James Swallow (« So visceral, you can taste the blood in your teeth »). Si ça ne vous donne pas une bonne raison supplémentaire de ne pas acheter ‘The Quickening’, vous allez vite apprendre…

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Never Forgive – G. Thorpe [WFB] :

INTRIGUE :

Never ForgivePeu de temps après la bataille de Maledor, durant laquelle le jeune (à l’époque) Malekith se fit bellement corriger par Caledor the Preums, nous faisons la connaissance d’un des lieutenants du Roi Prétendant Sorcier, Alandrian de Nagarythe. Elfe féru de grands espaces et de randonnées, il prit le parti de mener ses guerriers survivants dans le Val de Caerasin après la défaite de son camp plutôt que de se réfugier à Anlec avec le gros des troupes druchii, et eut la chance de se trouver en hauteur lorsque ce rigolo de Malekith ouvrit les vannes et noya la province sous une vague monstrueuse. Plutôt que de se lamenter sur son sort, comme il aurait été pourtant en droit de le faire, Alandrian décida de partir à la conquête de sa propre contrée submergée et marcha sur le premier village du vallon avec la ferme intention d’en faire sa base d’opérations. That’s the spirit, boy.

Malheureusement pour lui, et surtout pour ses cinq cents guerriers, le village en question était placé sous la protection de dangereux anar(chiste)s, menés par un jeune prince du nom d’Alice Alith. Bien que les Druchiis disposassent (eh oui) de l’avantage numérique, les flèches des Guerriers Fantômes ne tardèrent pas à mettre la cohorte d’Alandrian en déroute, et ce dernier ne se fit guère prier pour prendre également ses jambes à son cou. C’est alors qu’Alith Anar en personne se dressa devant sa route, lui colla une flèche dans le cuissot pour le mettre à terre, avant de lui balancer un grand coup de latte dans la tempe, remportant cet affrontement fratricide par un K.O. probant à la première reprise.

À son réveil, Alandrian se rend compte qu’il est encore en un morceau, et seulement attaché aux branches et aux racines d’un jeune arbre. Cette clémence étonne beaucoup le Druchii, qui est bien placé pour savoir qu’à Nagarythe, on ne fait pas de cadeau à l’ennemi. Alith Anar lui affirme cependant qu’il ne sera ni torturé, ni affamé ou assoiffé, comme il en avait l’intuition. Au contraire, des enfants du village qu’il avait cherché à conquérir lui apporteront de quoi boire et manger tous les jours pour le garder en bonne santé. Vraiment, ça a l’air cool d’être fait prisonnier par Alith Cooper !

Début spoiler…À court et moyen termes tout du moins. Le dessein d’Alith Anar est en effet de laisser l’arbre auquel Alandrian est attaché faire le sale boulot pour lui : dans quelques années ou décennies, les branches auront suffisamment poussé pour que l’Elfe Noir se trouve écartelé par la tension de la corde qui lie ses pieds aux racines de l’arbre. La vengeance est un plat qui se mangera quand les moules auront des gants, comme on dit à Athel Maranth…Fin spoiler

AVIS :

Continuation de son roman dédié au plus mystérieux et revanchard des Hauts Elfes (‘Shadow King’), ‘Never Forgive’ ne brille pas par la qualité de son intrigue, mais compense par les éléments fluff qu’il apporte à l’amateur de culture et d’histoire elfique, et par la fin grinçante que Thorpe a concoctée pour le pauvre Alandrian. C’est assez bien trouvé je dois dire, car cela donne une bonne idée du rapport particulier que les Elfes ont au temps, en plus d’illustrer le caractère impitoyable d’Alith Anar. C’est validé.

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Warmaster – J. French [HH] :

INTRIGUE :

WarmasterHorus profite d’un de ses rares moments de paix depuis qu’il a lancé son hérésie pour soliloquer sur le sort qui est le sien dans le confort ouaté marbré de la salle du trône du Vengeful Spirit. Comme il le dit lui-même, être Maître de Guerre n’est pas une sinécure, surtout lorsque le titre est décerné par un Empereur plus concerné par ce que le Primarque inter pares ne doit pas faire que par ce que le poste apporte comme avantages. De même, il n’est pas facile de mener à bien un coup d’état galactique quand on hérite de la moitié la plus dysfonctionnelle de la super fratrie pour jouer au régicide contre son Pépé. À tout prendre, Horus aurait bien aimé que Sanguinius, Roboute Guilliman et même Corax (un peu d’amour pour les corbeaux emo, ça fait du bien) le rejoignent, plutôt que de se coltiner les manigances tarabiscotées et inefficaces de Lorgar et d’Alpharius, les bouderies de Mortarion et la cyclothymie de Perturabo. Comme on disait à la fin de M1, if you can’t be with the ones you love, love the ones you’re with.

Qu’importe ces menus désagréments et la nullité crasse des bras cassés qui l’accompagnent, Horus sait qu’il est le surhomme pour le job, et que chaque bataille, chaque massacre, chaque désastre, sert sa cause. C’est ça l’avantage de servir le Chaos : on est autorisé à se réjouir lorsque tout part à vau l’eau, car après tout c’est ce que les patrons désirent, pas vrai ? Notre histoire se termine avec la révélation de l’identité du bienheureux individu à qui Horus a déballé ses profondes réflexions sur la conjoncture, car non, il n’est pas (encore) assez fou pour parler tout seul…

Début spoiler…Et il s’agit du psychiatre préféré des Primarques félons, Ferrus Manus en personne1. Ou son crâne, en tout cas, que le Maître de Guerre a gardé comme souvenir du bon vieux temps. Qui pourrait se lasser de prendre la tête de la Gorgone, aussi, hein ?Fin spoiler

1 : Fulgrim aussi apprécie beaucoup faire des confidences à son frère favori (‘Imperfect’).

AVIS :

Un seul en scène d’Horus, sur un livret de John French, franchement, ça se prend. Mine de rien, recueillir les états d’âme du protagoniste (et antagoniste) de l’Hérésie, c’est toujours appréciable d’autant plus que ça n’arrive pas si souvent que ça au cours de la série. French nous livre un Horus encore fréquentable, toujours charismatique, et sans langue de bois sur ses alliés aussi bien que sur ses adversaires : voilà un Primarque tel qu’on aime en voir dans les pages de la GW-Fiction. Solide.

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Dust – G. McNeill [40K] :

INTRIGUE :

DustSur la Planète des Sorciers, le plus éminent et vaniteux d’entre eux (il parle de lui à la troisième personne tout de même) a rendu une petite visite à l’un de ses collègues, le bellâtre Hegazha. Ahzek Ahriman, car c’était bien sûr lui, est venu lui faire une offre qu’il ne peut pas refuser : rejoindre son projet top secret de boys band cabale (c’est techniquement la même chose, on est d’accord) afin de trouver une cure à l’épidémie de mutation qui décime les rangs des Thousand Sons, déjà clairsemés par la dérouillée infligée par Leman Russ et ses loubards sur Prospero. Après tout, qui ne souhaiterait pas participer à une mission de bien commun comme celle-ci, hein ?

Tout naturellement, Hegazha refuse et envoie son bureau fait en volonté (c’est ‘achement rare, ça doit coûter une blinde) dans la tête de son invité. Il a de bonnes raisons pour faire la sourde oreille au plaidoyer d’Ahriman, notez : déjà frappé par la malédiction de Tzeentch, qui a changé ses mains en serres d’oiseau, Hegazha s’est engagé à fond dans la voie du body positivism, et considère ces mutations comme une bénédiction plutôt que comme un fléau. Cependant, Ahri’ n’a jamais accepté non pour réponse, et s’il doit mettre les mains dans le cambouis pour mettre sur pied sa fine équipe, ainsi soit-il. Les deux rivaux échangent donc des sorts destructeurs en haut de la tour de Hegazha, jusqu’à ce que ce dernier saute à la gorge de son visiteur et que les deux basculent dans le vide et tombent comme des pierres vers le sol, quelques centaines de mètres plus bas…

Début spoiler…Cela ne trouble pas outre mesure Ahriman, qui en tant que Corvidae a vu son avenir et sait qu’il survivra à la chute. Et en effet, avant que la collision fatale ne se produise, le wingman que l’Archiviste en chef avait missionné pour lui donner un coup de main utilise ses propres pouvoirs pour amortir l’impact, et placer Hegazha en stase. C’est ce vieil Hathor Maat qui rend ce fier service à Ahriman, et bien que ses capacités de télékine laissent encore un peu à désirer, comme les lombaires douloureuses de notre héros peuvent en témoigner, il réussit par contre parfaitement à geler Heghaza sur pied, ce qui permettra aux cabalites de l’utiliser comme ingrédient pour leur futur grand œuvre, à défaut de pouvoir compter sur sa coopération active. Waste not, want change not, comme on disait à Tizca…Fin spoiler

AVIS :

Guère plus qu’une scène coupée dans l’épopée consacrée par Graham McNeill à Ahriman et Magnus le Rouge, ‘Dust’ fait partie de ces nouvelles irritantes qui n’apportent rien aux connaisseurs, tout en étant relativement cryptiques pour le néophyte. Si vous n’êtes pas familier des cultes Thousand Sons (Corvidae et Pavoni) ou ne savez pas qui sont Hathor Maat et Phosis T’kar, ne comptez pas sur McNeill pour vous briefer sur ces sujets, ce qui est dommage car ces détails sont au centre de son propos.

Si cette histoire est donc assez décevante, il est en revanche intéressant de noter que lors de sa sortie en 2012, elle fut rattachée au corpus 40K et non Hérésie d’Horus par la Black Library, ce qui était chronologiquement possible à ce moment. Cinq ans plus tard, McNeill fit mourir Hathor Maat avant la fin de l’Hérésie dans ‘The Crimson King’, plaçant une fois pour toute ‘Dust’ dans cette franchise. Cette nouvelle peut donc être considérée comme la secret track de l’Hérésie d’Horus (et comme beaucoup de secret tracks, elle n’est pas incontournable).

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Last Watch – L. Goulding [40K] :

INTRIGUE :

Last WatchSur la planète jungle de Phirus, le frère Felgir, Space Wolf rattaché à la Death Watch, a juré de traquer et de tuer en solo le dernier1 xénomorphe tyranide souillant de son infecte présence le domaine de l’Empereur. Bien qu’il soit parmi les chasseurs les plus mortels et discrets de la galaxie, le fier Loulou se fait toutefois surprendre comme un perdreau de l’année par sa proie, et un féroce combat s’engage entre le représentant de l’humanité et celui de la Grande Dévoreuse.

Malgré ses meilleurs efforts, récompensés par un poignet douloureux pour son adversaire chitineux, Felgir se fait surclasser par la vitesse et la férocité du Lictor, mais surtout par ses fléchettes thoraciques empoisonnées (et pourtant, c’est kikoolol, on est d’accord), dont la toxicité menace de transformer la Space Watch en Death Wolf. Terrassé par les toxines xenos, Fergy développe une gueule de bois express plus carabinée que s’il avait fait un cul sec de tonneau de mjød. Il se voit mourir et le lecteur aussi : cette histoire va-t-elle se conclure dans le sang et les larmes ?

Début spoilerRéponse : oui, mais pour le Lictor. Il s’avère que le Sergent de l’escouade de Felgir n’a finalement pas permis à cette tête brûlée de soloter le dernier boss de Phirus, mais a utilisé l’imprudent Space Wolf comme appât pour débusquer l’insaisissable bestiole et lui coller un bolt au mercure dans les cervicales pendant qu’elle était occupée à martyriser notre ami velu. Tout est bien qui finit bien (sauf pour le Lictor, encore une fois), et Marek Angeloi envoie un rapport confirmant le succès de la purge de Phirus à ses maîtres de l’Ordo Xenos, et demandant à être sorti du service actif de la Death Watch pour poursuivre ses xenocides sous les couleurs de son Chapitre d’origine. Et on peut compter sur un(e) Scythe of the Emperor pour continuer à moissonner du tyty…Fin spoiler

1 : Je sais ce que vous vous dîtes : comment peut-on être sûr que c’est le dernier ? Eh bien, il semble qu’il existe une technologie impériale très précise d’identification des Lictors, puisqu’il s’agit de la seconde histoire de la Black Library (après ‘13th Legion’) où le héros piste l’ultime Tyranide de la planète. TGCBL !

AVIS :

Goulding signe une petite histoire reprenant la trame classique du « chasseur/chassé », relevée par un coup de théâtre final relativement efficace (bien aidé en cela par le fait que dans un univers aussi grimdark que Warhammer 40,000, la nouvelle aurait très bien pu se terminer par la mort de Felgir). Il donne également des nouvelles de l’un de ses personnages SotE récurrents, la forte tête Marek Angeloi, dont on ne sait pas encore à ce stade si la demande de réaffectation a été acceptée par l’Inquisition. La bureaucratie génère des délais incompressibles, c’est connu…

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Thanquol Triumphant – C. L. Werner [WFB] :

INTRIGUE :

Thanquol TriumphantServir la volonté de l’Hérésiarque Kritislik n’est pas tous les jours chose facile, et ce n’est pas Thanquol qui dira le contraire. Chargé par son boss de détruire le Clan Krawl, dont l’alliance potentielle avec le Clan Mors pourrait déséquilibrer les rapports de force à Skarogne et réduire l’influence des Prophètes Gris sur la société skaven, notre machiavélique héros a réussi à convaincre le seigneur Fissk d’emmener son armée à l’assaut du camp orque le plus proche, en lui faisant le coup de la panne de la vision prophétique (en même temps, c’est dans sa fiche de poste).

Les combats font rage et ne tournent pas franchement en faveur des hommes rats, qui se font concasser par les brutes vertes au corps à corps et bombarder de rochers à distance. Cette situation compromise fait toutefois les affaires de Thanquol, qui n’attend que l’inévitable débâcle générale de l’armée skaven pour faire une belle plus-value. Le Prophète Gris s’est en effet arrangé avec le Clan Skully (on ne peut pas toujours compter sur le Clan Moulder) pour organiser un comité d’accueil dans les galeries du Clan Krawl, et réduire en esclavage les survivants de cette bataille. Cette fortune future ne lui sera toutefois d’aucune utilité s’il ne survit pas à la mêlée, et bien qu’il ait pris le soin de se positionner dans les lignes arrière, comme il sied à son rang, l’artillerie peau verte se révèle un peu trop précise à son goût. Après avoir manqué de finir en rat-prenade deux fois de suite en l’espace de quelques minutes, Thanquol décide que la plaisanterie a assez duré et envoie une bonne malefoudre carboniser l’irritant lance-roc. Problème réglé !

Début spoiler…Mais Thanquol ne serait pas Thanquol s’il arrivait tranquillement à ses fins, bien sûr. Il y a des gens qui ont de la chance dans leur malheur, Mr T. lui a de la poisse dans son bonheur. Avant de partir en fumée, le lance-roc a le temps d’expédier une ultime cartouche dans la boîte, qui dévie franchement et écrase le seigneur de guerre orque et sa garde rapprochée, paniquant le reste de sa Waaagh ! et renforçant le moral des Skavens. Voilà qui s’appelle arracher la victoire des mâchoires de la défaite, et si ce n’était pas ce qui avait été prévu par Thanquol, ce dernier a suffisamment de métier et de vice pour tirer profit de ce résultat improbable. Après tout, n’est-il pas le génial stratège ayant guidé le Clan Krawl vers une victoire éclatante sur la vermine orque grâce à ses visions, hein ?Fin spoiler

AVIS :

Thanquol, comme ses Némésis habituelles que sont Gotrek & Felix, fait partie des personnages de la Black Library dont les apparitions sont scriptées. On sait dès la première ligne que l’ingénieux Skaven va preeeeeeeeeesque réussir à mettre en exécution un plan aussi génial que retors, échouer de la manière la plus improbable qui soit, mais réussir malgré tout à se tirer d’affaire, souvent à un poil de moustache près. Ce petit ‘Thanquol Triumphant’ peut donc être vu comme un échantillon représentatif de ce (sous) genre, dont C. L. Werner est le principal représentant. Je pense qu’il aurait pu faire preuve d’un peu plus d’inventivité dans le déroulé de ces quelques pages, qui parviennent à être répétitives en dépit de leur nombre très limité, et la fin est un peu trop cousue de fil blanc à mon goût, mais ça reste tout à fait lisible.

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The Emperor’s Chosen – M. Lee [40K] :

INTRIGUE :

The Emperor's ChosenAlors qu’il se préparait studieusement avec ses frères au prochain assaut sur Sepharis Ultra, un jeune initié Black Templar du nom de Reinhardt est frappé par une vision de l’Empereur, lui annonçant qu’il est son 100,000,000,000,000ème sujet à lui adresser une prière aujourd’hui, et qu’il a donc gagné un iphone 7 ainsi que le droit de devenir son Champion dans la prochaine campagne. Quelle chance.

Reinhardt court au Reclusiam vider son sac auprès du Chapelain Karst, qui a tôt fait d’établir la véracité de l’expérience transcendantale vécue par le frère de bataille, et fait donc mander la panoplie du parfait petit Champion dans l’arsenal de la Barge de Bataille qui amène les Black Templars jusqu’à Sepharis Ultra. Protégé par l’Armure de la Foi et équipé de l’Epée Noire1, Reinhardt aura pour mission d’abattre le meneur des Seigneurs de la Désolation, une bande de Space Marines renégats ayant conquis cette planète impériale pour accomplir leurs sombres desseins. Du succès de ce duel avec le sorcier Word Bearers X’hal Urus dépendra le destin de ce monde, mais heureusement, l’Empereur a donné ses meilleurs conseils de bretteur à Son Champion, et Reinhardt débarque donc sur le champ de bataille avec une confiance inébranlable dans ses capacités…

Début spoiler…Malheureusement pour notre fringant héros, il sait aussi que son triomphe sera de courte durée, et que X’hal Urus lui portera un coup fatal avant de mourir. Un peu comme le duel entre l’Empereur et Horus, vous me direz. C’est tellement fluff que l’on peut supposer que ce fan transi de Reinhardt n’espérait pas meilleure destinée, et si le rideau tombe sur l’affrontement entre loyalistes et hérétiques avant que ce duel fatidique n’ait vraiment débuté, on peut tout de même considérer que cette nouvelle se termine par une happy end.Fin spoiler

1 : Enfin, une des Armures de la Foi, et une des Epées Noires du Chapitre (celle-ci avait tout de même plus de 9 400 ans au moment de la campagne, c’était un vieux modèle). Il faut bien faire des compromis sur l’originalité des reliques si on veut guerroyer à travers la galaxie.

AVIS :

Plus connu pour ses travaux Crimson Fists que Black Templars, Mike Lee s’empare d’un des mythes centraux de cette fière fraternité des fils de Dorn et en tire une micro-nouvelle illustrant le fanatisme fataliste des surhommes en noir et blanc. Sans être mauvais, le résultat est assez quelconque.

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Voyage of the Sunspear – B. Counter [WFB] :

INTRIGUE :

Voyage of the SunspearLorsqu’une flotte pirate mal inspirée décide de piller le littoral d’Ulthuan, la réaction des fiers Hauts Elfes ne se fait pas attendre, et une véritable armada prend la mer pour châtier les humains qui ont cru malin de titiller Doughnut Land. Menée par la grande amirale Caladoria depuis la barre de son catamaran de combat, le Sunspear, c’est une escadre entière de navires tous plus wahou les uns que les autres qui a pris la mer et franchi les portes de Lothern pour cingler vers le Vieux Monde. Bateau-tour pour l’Archimage Galindorm, yacht cristallin pour le Prince Keldorim, navire à menhirs envoyé par la cour de la Reine Éternelle, galère à feu grégeois de Caledor, sans compter la douzaine de vaisseaux classiques et les frégates-dagues qui escortent tout ce beau monde… c’est un spectacle époustouflant qui s’offre à la vue du lecteur (et des mouettes de Lothern), et on se dit que les malheureux adversaires de cette flotte bariolée ont vraiment du souci à se faire…

Début spoiler…Enfin ça, c’est si le Sunspear et ses camarades arrivent à bon port, ce qui est loin d’être certain. La nouvelle se termine en effet dans l’habitacle enfumé du Grimnir Revenge, un sous-marin nain dont le capitaine n’hésite pas longtemps avant d’ordonner un torpillage en règle de la flotte elfique. On ne saura pas ce qui a provoqué cette réaction belliqueuse, les Hauts Elfes n’en ayant pas après les Nains à ce stade, mais faut-il une raison à ces deux races pour se tirer dans les pattes (et les coques) depuis la Guerre de la Barbe, hein ? Fin spoiler

AVIS :

Ben Counter fait un crochet par le Monde qui Fut et nous livre une nouvelle maritime que l’on devine construite autour de son twist final, ce qui se conçoit tout à fait même si pour ma part, j’ai du mal à considérer qu’un vaisseau nain ferait acte de guerre envers une flotte haut elfe sans aucune provocation, rancune ou pas rancune. La décision fatidique du capitaine Granitebrow aurait pu être motivée dans une éventuelle suite à ce (dernier) ‘Voyage of the Sunspear’, mais à ma connaissance, on en est resté là.

Chose étonnante pour un habitué de 40K, et qui n’aura (à ma connaissance) signé qu’un roman et deux nouvelles – dont celle-ci – pour la franchise medfan de la GW-Fiction, Counter ne se gêne pas pour nous balancer des tonnes de fluff au détour de ces quelques pages, et nous livrer la description la plus fouillée de la marine de guerre des Hauts Elfes qui soit1. Cela rend la lecture de ‘Voyage of the Sunspear’ indispensable pour tout amateur de lore warhammeresque devant l’éternel.

1 : Il faut tout de même noter que Dread Fleet était sorti en 2011, l’année précédent la publication de cette nouvelle. Et la page du site de la Black Library où ‘Voyage of the Sunspear’ est offert à la vente fait encore la pub pour Man O ’War Corsair (mais que font leurs stagiaires ?)…

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The Third Wise Man – N. Vincent [40K] :

INTRIGUE :

The Third Wise ManPour le frère Constantine du Chapitre des Iron Snakes, l’heure du grand oral a sonné. Notre ami ambitionne de devenir Chapelain, mais pour cela il doit convaincre trois Capitaines (Didymos, Pheus et Cules) qu’il est le surhomme pour ce poste stratégique1. Prostré au sol dans la position du supplicateur ithakien (c’est-à-dire front contre sol, bras écarté et probablement en petite tenue – on sait s’amuser chez les Chapitres d’obédience hellénique), Constantine se fait fraîchement recevoir par son jury, chacun des Capitaines y allant de sa petite anecdote honteuse sur la carrière de l’impétrant.

Didymos ouvre les hostilités en lui rappelant qu’il a perdu trois hommes de son escouade lors de la mission sur Manolis. Cules renchérit en notant qu’il a fait pire sur Hrystalla, où il a été le seul survivant de son escouade, et a pantouflé pendant sept longues saisons sur Ithaka le temps de se refaire une santé après cela. Pheus enfonce enfin le clou en évoquant son refus d’obtempérer lors de la campagne de Baltasar, durant laquelle il n’a pas daigné participer à l’assaut en drop pod sur cette planète, qui fut finalement conquise par l’ennemi et arrachée du giron de l’Empereur. Ça fait tout de même beaucoup, vous le reconnaitrez, et ce ne sont pas les plus plates contritions de Constantine, qui « endure la douleur atroce de la perte de <insert boulette here>, depuis ce jour fatidique jusqu’à aujourd’hui, les cœurs lourds », qui changeront quelque chose à cette litanie d’échecs.

Toutefois, si Constantine n’a pas toujours brillé sur le champ de bataille, il a en revanche su cultiver de solides relations, et trois d’entre elles viennent prendre sa défense. Le premier à parler n’est autre que l’incontournable Sergent Priad, qui rappelle à l’auguste assemblée que Manolis s’est terminé par une victoire impériale, et que cinq milliards de loyaux sujets de l’Empereur ont été sauvés par l’action de Constantine et de ses hommes2. Et pour marquer le coup, Priad humecte délicatement le crâne chauve et les mains tendues de son poto, dans le respect des traditions aquatiques d’Ithaka.

Le deuxième avocat de Constantine est le frère Kater Holofurnace, fraîchement revenu de la Croisade de Sabbat, qui souligne que son camarade, dont Hrystalla était la première véritable mission, a réussi à ramener avec lui les glandes progénoïdes de toute son escouade, ce qui a permis au Chapitre de reconstituer ses forces. Ça n’excuse pas tout mais c’est tout de même honorable. Et Holofurnace de dégainer à son tour sa gourde pour une petit goutte à goutte rituel.

Enfin, c’est le Maître de Chapitre Seydon qui débarque en grande pompe dans la salle d’examen, et, conscient d’être en retard, se contente de micro waterboarder Constantine comme la tradition le veut, avant de le relever et de le féliciter pour son élévation au rang de Chapelain. Ce n’est qu’un peu plus tard que nous avons le fin mot de l’histoire à propos des opérations de Baltasar. Seydon, qui n’était que Capitaine à l’époque, a pris la décision d’un assaut en drop pod contre l’avis de Constantine, et le résultat désastreux de cette initiative montra avec le recul qui était le plus malin des deux. Mais ça n’a pas empêché Seydon de faire carrière, et c’est bien la morale de cette histoire : chez les Iron Snakes, la séniorité prend toujours le pas sur la sagesse. And I think it’s beautiful…

1 : Il doit aussi leur apporter des cadeaux (deux lances et un caleçon en cuir de wyrm marin), dans la plus grande tradition du népotisme impérial.
2 : Et puis Priad ne peut pas vraiment se permettre de juger sévèrement un collègue Sergent qui a perdu des hommes au combat, lui-même n’étant pas exempt de toute critique de ce point de vue là…

AVIS :

On croyait en avoir fini avec les Iron Snakes après ‘Brothers of the Snake’, mais ces Space Marines ont la peau dure et la sympathie d’un certain nombre d’auteurs de la Black Library (en plus de celle de Dan Abnett, bien sûr), ce qui explique leur persistance discrète dans la GW-Fiction. Cette petite histoire nous en apprend un peu plus sur les rites, décidément très fétichistes (tous ces échanges de fluides en gros balèzes en petite tenue, c’est suspect), de cette confrérie écailleuse, et de passer en revue une grande partie des têtes nommées de cet auguste Chapitre. Si vous êtes fans de ce dernier, c’est donc un must read absolu, sinon, vous pourrez tout de même apprécier une histoire de Space Marines où personne ne meurt et qui se finit bien (ce qui est assez rare).

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Strike and Fade – G. Haley [HH] :

INTRIGUE :

Strike and FadeAu lendemain de la monumentale trahison d’Isstvan V, un groupe de quatre Légionnaires Salamanders (Jo’phor, Hae’Phast, Go’sol et Donak) essaie tant bien que mal de survivre dans les désolations désolantes et désolées de cette planète désormais maudite. Bien que le moral soit bas, les loyalistes peuvent compter sur des activités de team building cathartique pour tenir le coup, comme par exemple embusquer des bikers Night Lords s’étant aventurés dans la pampa pour pratiquer la chasse à courre nostramane. C’est exactement comme celle que l’on connaît, sauf qu’il faut remplacer le renard par un Raven Guard à poil (si on n’en a pas, une autre Légion fait aussi l’affaire), et les chevaux par des motos. On peut utiliser une meute si on en a une sous la main, ce qui n’était pas le cas de nos amis de la 8ème. On ne peut pas toujours tout prévoir.

Comme on peut s’y attendre, les gentils lézards règlent leur affaire aux affreux jojos avec une efficacité consommée, et en profitent pour piquer le matos et les rations de leurs victimes afin d’alimenter leur effort de guérilla. Comme on dit, les petits ruisseaux font les grandes rafales de bolter. Malheureusement, leur camarade corbeau hérite d’une blessure thoracique mortelle au cours de l’échange de tir, et meurt dans les bras du noble Joe Fort, non sans avoir exprimé sa gratitude éternelle (plus que lui en tout cas) à ses frères de bataille pour l’avoir sauvé des griffes des Night Lords. Victoire tactique et victoire morale pour les Salamanders. Qu’ils en profitent, il n’y en aura plus beaucoup d’autres d’ici à la fin de l’Hérésie…

AVIS :

Si en 2012 tout le monde connaissait déjà la grande histoire d’Isstvan V (racontée dans ‘Galaxy in Flames’ par Ben Counter dès 2006), le sort des quelques survivants épars des Légions loyalistes étant tombées dans le piège de ce fieffé fripon d’Horus n’avait pas encore été couvert par grand-monde au sein de la Black Library. Guy Haley fut donc parmi les premiers à (re)donner leurs lettres de noblesse aux losers magnifiques des Légions Brisées, bien avant que Nottingham ne leur consacre un recueil de nouvelles (2017). Cette parenthèse historique mise à part, il n’y a pas grand-chose à dire de ce ‘Strike and Fade’, qui présente les Salamanders sous l’angle favorable qu’on leur connaît, mais ne développe pas assez son quatuor de personnages pour qu’on s’attache à eux. Potable.

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Honours – J. Swallow [40K] :

INTRIGUE :

HonoursLe Capitaine de la 1ère Compagnie des Blood Angels nous fait l’honneur d’expliquer comment il a gagné ses cicatrices, armes et emblèmes au cours de sa longue carrière. Il perdit un œil dans sa jeunesse, après avoir cru pouvoir se débarrasser en solo d’un Psyker finalement plus coriace que prévu. Son Maître de Chapitre lui remit l’épée énergétique Challenger après qu’il eut gagné un tournoi de tennis, et il l’utilisa pour bannir le Prince Démon de Tzeentch Sethselameth. Après être venu au secours d’une poignée d’Imperial Fists piégés pendant deux cents ans dans le siège d’une station spatiale (le rêve absolu pour eux), les fils de Dorn lui firent cadeau d’un bolter jaune poussin. Enfin, la gemme bleue ornant l’aquila de son plastron lui est revenue après des années de bons et loyaux services1.

On apprend pour terminer que le Capichef est en fait mort au combat, tout son stuff légendaire n’ayant pas fait le poids face à une horde de peaux vertes motivés à faire du vilain sur le monde ruche de Levion Gamma. Ce sont les risques du métier.

1 : Swallow ne devait plus avoir d’idées à ce moment là de l’écriture.

AVIS :

Swallow tire le maximum du format compliqué du 1.000 mots en troussant en décrivant par ses faits d’armes notables (avec un peu de fluff dedans, c’est appréciable) d’un héros méconnu du Chapitre des Blood Angels, ce qui est tout de même plus sympa à lire qu’une micro-baston entre deux tondus et trois pelés. Il y a même un micro-twist à la fin, attention appréciable de la part de l’auteur. Toujours trop cher pour ce que c’est, mais il y a bien pire que cet ‘Honours’, soyez-en certains.

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Deliverance Detail – D. Guymer [40K] :

INTRIGUE :

Deliverance DetailLa nouvelle commence mal pour Callan, membre des Forces de Défense Planétaire d’une planète tout juste conquise par un envahisseur extraterrestre. Emmené avec ses milliers de compagnons d’infortune dans une base militaire tenue par les vainqueurs, il attend, menotté et aveuglé, que son sort soit décidé. Malgré ces circonstances difficiles, il peut au moins compter sur sa foi en l’Empereur pour tenir le coup, à condition de rester discret pendant ses prières : ses gardes ont formellement interdit aux captifs de mentionner Son nom. Qu’importe : Callan est fier d’avoir fait son devoir et de s’être battu trois longues années contre les assauts des hordes chaotiques qui se sont abattues sur sa planète…

Début spoiler…En tout cas, c’est ce qu’il (et ses camarades) croyaient, jusqu’à ce que les assaillants soient rejoints par d’authentiques Space Marines. En plus de plier la campagne avec leur efficacité légendaire, les Astartes firent réaliser à Callan et ses comparses qu’ils s’étaient battus du mauvais côté de l’histoire, la faute à la corruption des dirigeants de la planète et à leur effort de propagande plutôt efficace.

Bien que notre héros dupé se soit aussitôt rendu après avoir réalisé sa méprise, la légendaire bienveillance impériale le mena tout droit au peloton d’exécution. On ne saura pas si la Garde Impériale réserva le même sort aux quinze millions de FDP hérétiques à l’insu de leur plein gré, mais ça ne m’étonnerait qu’à moitié…Fin spoiler

AVIS :

David Guymer livre une micro-histoire tout à fait grimdark dans ce ‘Deliverance Detail’, qui illustre à merveille que l’Imperium, lui, ne fait dedans (le détail, si vous ne suivez pas) lorsqu’il s’agit de pacifier une zone de guerre. Tant pis si vous avez été victime des circonstances ou d’un tour pendable du destin, la morale de l’histoire est qu’il y en a suffisamment comme vous à travers la galaxie pour que votre injuste disparition ne chagrine personne. Personne d’important en tout cas.

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The Contest – J. Ellinger [WFB] :

INTRIGUE :

The ContestLorsque Gotrek et Felix pénètrent dans une auberge minable comme le glorieux Empire en compte tant, après s’être tiré d’une embuscade perpétrée par des bandits locaux peu de temps auparavant, ils ne s’attendaient sans doute pas à ce que leur repos bien mérité soit interrompu par de belliqueux piliers de comptoir. Le récit de leur mésaventure par un Felix encore tout encrassé par cette algarade attire en effet l’attention hostile d’un certain Boxen, dont l’un des cousins a choisi l’honnête carrière de malandrin, et qui a sans doute payé de sa vie sa rencontre malavisée avec le power duo le plus mortel du Vieux Monde. Les risques du métier.

Boxen, qui bénéficie de l’avantage numérique grâce à la présence de quatre compagnons tout aussi interlopes que lui, est tout prêt à lancer une bagarre générale pour réparer l’honneur familial, mais l’aubergiste le convainc que ce n’est pas dans son intérêt d’attirer l’attention de la milice locale sur son gang de petites frappes : aussi, l’affaire sera résolue d’une manière beaucoup plus civile. Un concours de descente de pintes est lancé sans plus tarder, le perdant se retrouvant à la merci du gagnant pour une explication de texte dans un coin tranquille et à l’abri des regards.

Gotrek, sûr de la force de son bras (et de son foie) accepte sans broncher ni réfléchir les conditions défavorables formulées par le retors Boxen avant que l’épreuve ne commence. Alors que le Nain lèvera le coude seul, Boxen et ses hommes picoleront en équipe et se partageront les pintes, rapport de force qui alerte Felix malgré les solides atouts dont le Tueur dispose en matière de picole.

Au final, et après plusieurs heures et tonneaux vidés sans pitié, le concours se termine avant que Boxen et Gotrek n’aient rendu les armes, faute de liquide alcoolisé à ingérer. Très déçu par ce match nul, Gotrek décide de se passer les nerfs sur le dernier ruffian encore debout et éclate donc le pif de Boxen pour la forme, dont le coma éthylique doit se poursuivre encore aujourd’hui…

AVIS :

Une aventure de Gotrek et Felix où personne ne meurt (ou en tout cas, pas face caméra), c’est assez rare pour le souligner. Ceci dit, j’aurais bien aimé que Jordan Ellinger relève le défi d’adapter le plus fidèlement possible le schéma narratif classique de ce sous-genre emblématique de la GW-Fiction dans un format micro-fiction, pour pouvoir juger sur pièce si le concept tient la route (franchement, il y a moyen de faire quelque chose je pense). Cela aurait rendu ‘The Contest’ plus mémorable que ces quelques pages alcoolisées, sans nul doute.

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The Little Things – S. Mitchell [40K] :

INTRIGUE :

The Little THingsDe passage sur une station orbitale très touristique entre deux affections sur le front, le Commissaire Ciaphas Cain profite de la relâche pour rendre une visite de courtoisie à sa bonne amie l’Inquisitrice Amberley Veil, qui réside dans une suite de luxe sous une de ses identités d’emprunt. En gentleman qu’il est, Cain prend soin d’acheter en chemin un bouquet d’heganthas car comme il le dit très bien en aparté quelques lignes plus loin : sur le champ de bataille comme dans un rendez-vous galant, c’est l’attention aux petits détails qui sépare les victimes des vainqueurs.

Accueilli chez sa chère et tendre par sa suivante Zemelda pendant qu’Amberley vocalise sous la douche, Cain a à peine le temps de saluer sa sculpturale hôtesse à la sortie de sa toilette qu’un domestique indélicat vient tambouriner à la porte. Cette impolitesse s’explique par le fait que le nouveau venu n’est pas vraiment venu pour monter des clubs sandwiches aux tourtereaux, comme il le prétend, mais pour tenter de kidnapper Amberley a.k.a. la riche duchesse Trucmuche de la planète de Cétréloin afin de demander une rançon à sa famille. Les pauvres jaloux des riches, vraiment, quelle plaie.

Malheureusement pour le ruffian et ses deux comparses, il faut plus qu’une arrivée au débotté pour mettre en difficulté un héros de la trempe de Cain, surtout s’il peut compter sur l’aide d’Amberley qui n’hésite pas un instant à reconvertir sa serviette drap en fouet, désarmant le dernier larron au moment où il allait donner au Commissaire un nouveau trou de balle et permettant à ce dernier de lui rendre la pareille de manière préventive. Comme Cain le fait remarquer avant que le rideau ne tombe définitivement sur cette soirée entre adultes consentants, le malfrat aura au moins eu la chance d’emporter avec lui une dernière vision beaucoup plus plaisante que la majorité des tués du 41ème millénaire. Ce n’est pas grand-chose c’est vrai, mais comme dit plus haut, ce sont les petites choses qui comptent…

AVIS :

Aventure plus grivoise que musclée de Ciaphas Cain, ‘The Little Things’ ne fait rien d’autre que montrer au lectorat de l’héroïque Commissaire que ce dernier sait prendre du bon temps lorsque le devoir ne l’appelle pas, même si sa capacité surnaturelle à créer du drama autour de lui peut générer quelques menus désagréments de temps à autre. Rien que les habitués de la saga ne connaissent pas déjà.

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On the Heels of Morkai – N. Kyme [40K] :

INTRIGUE :

On the Heels of MorkaiÀ la surface de Fenris, un humain solitaire est poursuivi par deux des loups géants pour lesquels la planète est célèbre à travers l’Imperium. Sa course échevelée (tous les locaux portent la moumoute, c’est une coutume immémoriale) le mène à travers un lac gelé, où il réveille par mégarde un kraken endormi sous la surface. N’étant équipé que de sa biht1 et de son couteau, cette rencontre aurait pu très mal se terminer pour notre marathonien de l’extrême, qui parvient toutefois à regagner la terre ferme avant de se faire tentaculer par le poulpe d’eau douce.

Pas le temps de reprendre son souffle, cependant : il faut à notre coureur isolé traverser une forêt pleine d’arbres en bois, puis s’atteler à l’ascension en solo d’une falaise de 400 mètres de haut, toujours poursuivi par les infatigables prédateurs de la toundra de Fenris (qui ont certainement trouvé un chemin pour monter en haut du pic, ce qui pose la question de pourquoi notre athlète n’a pas fait la même chose au lieu de risquer sa vie de la sorte…). Enfin arrivé au sommet, il fait face à la figure imposante d’un Prêtre des Runes Space Wolf, et se prépare à être jugé par cet austère guerrier…

Début spoiler…Enfin ça, c’est si notre héros avait été un simple impétrant au Chapitre. Canis Wolfborn, car c’était lui, a passé cette épreuve depuis belle lurette, et le gonze qui l’attend en haut de la montagne est simplement venu le rappeler à ses devoirs. Un appel à l’aide est parvenu jusqu’au Croc, et en l’absence probable de Harald Deathwolf, il revient à son champion de décider si le rout y donnera suite. Comme on peut s’y attendre, Canis accepte avec joie de relever ce défi, promettant à ses loups de compagnie Timba et Mia (avec lesquels il faisait la course, et n’était pas chassé par ces derniers comme on en avait l’impression) qu’il leur accordera une revanche à son retour. Mais le travail avant tout. Fin spoiler

1 : Un mot fenrisien dont le sens a malheureusement été perdu. C’est dommage.

AVIS :

Mine de rien, les nouvelles de la Black Library où un Space Wolf court comme un dératé à travers la toundra en essayant de survivre aux conditions extrêmes dans lesquelles il évolue sont suffisamment nombreuses pour constituer un sous-genre de la littérature grimdark. Même si la concurrence n’est pas pléthorique, ‘On the Heels of Morkai’ peine à s’imposer comme un modèle du genre, la surprise finale réservée au lecteur par Nick Kyme ne s’avérant (à mon sens) guère crédible. Voir un Prêtre Rune attendre patiemment en haut d’une falaise que son boss termine sa morning routine (et venir sur place avec Fangir1 pour encore plus de fun) au lieu de cueillir Canis en plein milieu de la pampa avec un Stormfang me semble vraiment peu correspondre au lore de 40K. Dispensable.

1 : Ici orthographié Fregir, probablement parce que Kyme est trop haut placé à la BL pour que ses textes soient relus et édités.

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The Last Little Bit – R. Earl [WFB] :

INTRIGUE :

The Last Little BitIl est temps pour Gofg Dent d’Or Tyran de sa tribu depuis plus de quarante ans, de se choisir un héritier. Il se fait vieux (même pour un Ogre), et a déjà dû refroidir les ardeurs parricides de deux de ses fils d’une manière définitive par le passé : il est grand temps de passer la main. Pour ce faire, il a convié le reste de sa marmaille à un gueuleton de compétition, où les règles sont simples : qui mange gagne.

Après trois jours à banqueter sans interruption, ils ne sont plus que trois à la table : Papa Gofg, Grond et Graissus. Bien que les trois Ogres soient depuis longtemps passés dans le dur, aucun n’est prêt à baisser la garde ni à jeter la serviette, et le Boucher de la tribu continue à les régaler de ses spécialités carnées (et plus ou moins faisandées, ça rajoute du goût), jusqu’à ce que le drame se produise : le garde-manger a été vidé, il ne reste plus rien à ingérer pour nos fins gourmets.

Bien que Père Castor Dent d’Or soit en faveur de déclarer un match nul, quitte à recommencer plus tard (le temps de digérer un peu, et de passer au petit coin – je plains le service de ménage Gnoblar…), Graissus ne peut se résoudre à interrompre son effort si près de la victoire. Il attrape donc une chaise, et la fracasse péniblement sur le crâne paternel, envoyant ad patres le vieux Tyran. Dès lors, la suite est toute tracée : le Boucher découpe prestement le cadavre du macchabée en deux parts égales (de 250 kilos chacune, tout de même), et le concours d’ingestion peut reprendre de plus belle.

Malgré les conséquences terribles pour son système digestif, poussé dans ses derniers retranchements par cette boulimie cannibale, Graissus parvient en premier à terminer sa moitié alors que Grond démontre des signes manifestes de calage. Enfin, presque terminer. Il lui reste en effet sa part du « dernier petit bout1 » paternel à ingurgiter, et lorsque le Boucher fait son office et tranche l’ultime portion en deux, Grond se met à dégobiller le contenu de sa panse boursoufflée. Qui a dit que les Ogres n’étaient pas sensibles ? Ce déluge de vomi, dont il prend quelques litres en pleine figure, ne perturbe pas le moins du monde Graissus, qui avale sans faiblir le dernier morceau et devient par la même occasion Tyran incontesté de la tribu Dent d’Or. La suite appartient à l’histoire (et à la cuvette des toilettes…).

1 : Que Robert Earl se contente d’appeler de cette manière, comme s’il s’agissait d’une expression consacrée (après quelques recherches, je n’ai rien trouvé de tel). Vous pouvez donc vous représentez ce que vous voulez, et pas seulement l’option la plus salace qui soit (pervers).

AVIS :

Robert Earl, grand spécialiste des Ogres devant l’éternel, développe en quelques pages l’origin story du plus grand – et gras – des Tyrans des Montagnes des Larmes, présentée de manière succincte dans les Livres d’Armée de cette noble race. Même si on sait d’avance comment l’histoire se termine, notre homme est assez bon conteur pour que le récit de ce banquet proprement pantagruélique, voire même carrément gargantuesque, mérite la lecture. C’est gore, c’est glauque, mais ça reste malgré tout assez drôle tellement c’est over the top en matière d’ingestion de protéines. À consommer jusqu’au dernier petit bout, comme il se doit.

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Like Father, Like Son – M. Latham [WFB] :

INTRIGUE :

Like Father, Like SonUn homme (Jens) et son jeune fils de cinq ans s’aventurent en pleine nuit à travers les terres sauvages et pas vraiment hospitalières de l’arrière-pays du Middenland. En chemin, Jens prend soin d’inculquer à son rejeton tous les trucs et astuces de trappeur trotro balèze qu’il a lui-même appris de ses aïeux ou développé au cours de sa longue et ardue existence, comme ne jamais utiliser l’autoroute (c’est cher et c’est mal fréquenté), ou encore éviter la compagnie des étrangers. Un gai luron ce Jens, vraiment.

Leur road trip nocturne emmène les deux marcheurs à travers les ténèbres de la Drakwald, et sur le territoire des multiples prédateurs qui y rôdent. Après avoir repoussé l’attaque d’une meute de loups un peu trop entreprenante, et évité les toiles d’araignées de fort belle taille, la destination que Jens cherchait à atteindre apparaît enfin au détour du sentier. Nul doute que ça valait le déplacement…

Début spoiler…Et en effet, on ne trouve pas plus chaude ambiance à des lieues à la ronde que le campement d’Hommes Bêtes où le vieil excentrique a amenés son fiston. Jens n’est pourtant pas un adepte du Chaos, seulement un père lucide : son petit gars est un mutant dont les difformités sont trop visibles pour lui permettre de vivre normalement parmi ses semblables, et le seul moyen pour lui d’échapper au bûcher des Répurgateurs est de partir en pension dans une harde de Gors plus ouverts d’esprit que le péquin impérial moyen. La nouvelle se termine alors que le Chamane de la tribu s’en va accueillir la nouvelle recrue de cette dernière, laissant Jens partir sain et sauf mais le cœur gros d’abandonner son enfant. Le placement est parfois la seule solution qui vaille…Fin spoiler

AVIS :

Même si on se doute rapidement à la lecture de ‘Like Father, Like Son’ que Mark Latham nous réserve une surprise finale, ce dernier mène bien sa barque et parvient à accomplir son objectif avec cette petite nouvelle qui explore de manière assez touchante les liens ténus mais pas absents entre humains « normaux » et mutants dans le monde de Warhammer. A classer à proximité de ‘The Hunter’ (G. Lyon), tant pour la longueur que pour les protagonistes, mais à placer au-dessus de cette autre microfiction.

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Out Caste – P. Fehervari [40K] :

INTRIGUE :

Out CasteUne vétérane (et c’est assez rare pour le souligner) couturée de la Caste de Feu se souvient de ses débuts au service du Bien Suprême, du temps où elle était une jeune recrue charismatique et déterminée à s’élever dans les rangs. Baptisée J’kaara (miroir) en raison de sa nature altruiste et de sa capacité à tirer le meilleur de ses camarades, elle commença sa carrière lors de campagnes mineures contre la menace Ork. Le vrai test fut cependant l’invasion de la planète Oba’rai, monde impérial isolé et défendu par un seul régiment de Gardes Impériaux, des adversaires bien plus nobles que les peaux vertes aux yeux de l’idéaliste Kaaren.

La campagne se déroula parfaitement du point de vue du haut commandement, les humains se faisant surclasser par les tactiques de frappes éclair et la supériorité technologique de leurs adversaires. Lorsque la capitale planétaire tomba sous les bombardements, des auxiliaires Kroots furent envoyés faire le sale boulot (et casser la croûte) dans les décombres de la cité pour éliminer les dernières poches de résistance, plutôt que de risquer la vie de braves, mais pas téméraires, T’au. Ce choix raisonnable ne satisfit cependant pas J’Kaara, qui désobéit aux ordres et emmena son escouade faire un peu de tourisme en zone de guerre urbaine afin d’assouvir ses penchants héroïco-morbides.

Mal lui en prit toutefois, car elle croisa en route un Commissaire impérial brûlé au 8ème degré mais dont la vue d’une peau bleue le sortit de l’état catatonique dans laquelle la tempête de feu déchaînée par les T’au l’avait placé. Bien que ses camarades ionisèrent le faquin avant qu’il n’ait pu régler son affaire à la pauvre J’kaara, cette dernière sortit de cette rencontre fortuite avec une énorme balafre, l’épée tronçonneuse de l’officier gue’la ayant transpercé son casque sans coup férir. Cette mésaventure ne fractura pas seulement le crâne de notre héroïne, mais également son sentiment de fraternité avec ses camarades, qui se mirent à appeler la shas’ui Jhi’kaara, ou miroir brisé. Sometimes, it’s better not to say hi, you know…

AVIS :

Peter Fehervari nous entraîne dans les premières vrilles de son Dark Coil1 avec cet ‘Out Caste’, qui met en scène le premier personnage récurrent de cette série iconique de la Black Library, la gueule cassée Jhi’kaara (que l’on retrouve dans ‘A Sanctuary of Wyrms’ et ‘Altar of Maws’), dont on apprend en quelques pages l’histoire traumatisante – dans tous les sens du terme. Ce n’est pas aussi inventif dans le propos ou virtuose dans l’exécution que les nouvelles et romans qui ont suivi, mais ça reste malgré tout une très bonne entrée de GW-Fiction.

1 : Sa première nouvelle (‘Nightfall’) pour la Black Library date de 2011, et bien qu’elle se déroule techniquement dans le même coin de galaxie que le reste du corpus Fehervariesque, les liens avec ce dernier sont assez ténus, comme si notre homme n’avait pas encore décidé de se lancer dans une véritable œuvre au long cours à ce stade.

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Czevak to the Dark Tower Came – R. Sanders [40K] :

INTRIGUE :

Czevak to the Dark Tower CameLe calme profond de la lune Savignor, centre de recherche et de formation réputé parmi l’élite du Segmentum Obscurus, est brutalement brisé par l’arrivée pétaradante de l’Inquisiteur Bronislaw Czevak, qui franchit l’un des portails de la Toile aux manettes d’une motojet sans nul doute « empruntée » à une connaissance Eldar.

Si les universitaires qui composent la majorité des habitants de ce petit havre de paix et d’ordre dans une galaxie tourmentée s’offusquent de cette arrivée bruyante autant qu’inattendue, ils n’en donnent pas signe. Ils ont pour cela une bonne raison, comme Czevak ne tarde pas à le découvrir une fois qu’il a terminé des faire des burn dans les pelouses de son ancien QG (il a étudié sur Savignor en son jeune temps) : ils sont tous morts. Un suicide de masse semble avoir été décrété sur la lune il y a quelques heures, et les Savignoriens, en bons sujets de l’Imperium, se sont pliés à cette injonction morbide sans rechigner. Comme c’est gentil de leur part.

Enquêter sur les raisons de cet acte de folie collective aurait sans doute pris des plombes, mais heureusement notre héros a de bonnes raisons de suspecter que ce fieffé coquin d’Ahzek Ahriman est derrière tout ça (comme il était derrière Tizca). Czevak part donc à fond de train en direction de la fameuse Tour Sombre de Savignor, où sont enfermés les reliques et tomes les plus dangereux de la collection planétaire afin de préserver l’Imperium de leur sinistre influence tout en permettant aux quelques esprits assez aiguisés pour cette tâche de consulter ces archives interdites. Si le concept ressemble furieusement à la Bibliothèque Interdite des Eldars, où Czevak a finalement réussi à obtenir sa carte (‘Atlas Infernal’), ce n’est absolument pas une coïncidence. Malheureusement pour les gardiens de la Tour Sombre, le Materium est beaucoup trop accessible aux ruffians de tout espèce, et le petit contingent de Gardes Impériaux (en robe !) stationné sur la lune pour en assurer la sécurité n’a rien pu faire contre la fureur méthodique des Rubric Marines d’Ahriman, comme les impacts de bolter parsemant les murs et les corps croisés par Czevak le montrent bien.

Après une ascension éprouvante et capacitiste (il n’y a aucun ascenseur dans la Tour Sombre, soi-disant pour permettre aux visiteurs de discuter et débattre entre eux sur le chemin de la connaissance), notre héros arrive à l’épicentre du drame qui s’est joué sur Savignor. Dans un hall d’exposition comme la Tour en compte des dizaines, les éclats épars d’une statue de cristal jonchent le sol. Cette statue, un jeune Czevak l’avait contemplée un jour qu’il était entré par effraction dans la Tour Sombre (dont le niveau de protection laisse vraiment à désirer), sans comprendre qu’il s’agissait des restes d’un Prophète Eldar trèèèèèèèèès âgé. Ce n’est que des années plus tard, et grâce aux connaissances glanées au contact des Prophètes Blancs de la Bibliothèque Interdite, que l’Inquisiteur a réalisé que cette statue kitschissime était une relique psychique d’une valeur incommensurable, dont l’un des nombreux usages pouvait être un catalyseur de prophétie, ou quelque chose comme ça (vous voyez l’idée).

On ne saura pas comment Ahriman eut vent de l’existence et de la localisation de cette statue, mais force est de constater qu’il a réussi son coup, comme les fragments cristallins et la très lourde ambiance planant sur les décombres le laissent constater. L’esprit endurci de Czevak et la protection apportée par l’Atlas Infernal lui permettent de ne pas succomber à la même sinistrose terminale que celle qui a déferlé sur les pauvres Savignorais lorsque que le Sorcier suédois s’est offert une latte de crystal meth, mais les nouvelles ne sont pas bonnes pour autant. Il semble qu’Ahriman ait localisé un fil de destinée qui lui permettrait d’atteindre son but : être élevé au rang de divinité (mineure, faut pas déconner) du Chaos. À Bronislaw Czevak d’empêcher cette ascension s’il le peut : le sort de l’Imperium pourrait bien en dépendre…

AVIS :

Rob Sanders poursuit sa biographie de l’Inquisiteur Czevak dans ce court (sauf le titre) ‘Czevak to the Dark Tower Came1’, publié après la sortie du roman ‘Atlas Infernal’, déjà consacré à ce membre iconoclaste des Saints Ordos. On sent une volonté de l’auteur de remettre une pièce dans la machine, et de redonner un but à son héros bariolé après les événements narrés dans le long format précédemment cité. Le résultat est convenable, les miettes de fluff relatifs à Czevak et au Segmentum Obscurus que contiennent ces quelques pages venant agréablement compléter une intrigue simple mais bien alignée avec les canons du grimdark (il n’y a qu’à 40K que des millions de personnes peuvent se suicider après qu’une babiole en cristal de roche ait été fracassée au sol). Ayant déjà lu le reste des travaux Czevakiens de Sanders au moment où je m’attèle à cette revue, je peux malheureusement vous assurer qu’il est mieux de laisser définitivement le bon Inquisiteur sur ce relatif succès narratif, plutôt que de s’affliger les péripéties pataudes que Sanders et la BL crurent bon de développer dans ‘Necessary Evil’ et ‘Shadow Play’.

1 : Une référence au poème de ‘Childe Roland to the Dark Tower Came’ Robert Browning, lui-même inspiré d’une tirade du ‘Roi Lear’ de Shakespeare. C’est la même « tour sombre » qui inspira également les œuvres de C. S. Lewis (le papa des ‘Chroniques de Narnia’) et de Stephen King.

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Veritas Ferrum – D. Annandale [HH] :

INTRIGUE :

Veritas FerrumIl est des événements auxquels il vaut mieux arriver tôt pour être certain de les expérimenter dans les meilleures conditions. Qu’il s’agisse de se retrouver au 78ème rang d’un concert à la sono capricieuse, ou de découvrir que le bar ne sert plus que des soft, on a tous connu des grands moments de solitude de temps à autres. Fort heureusement (?) pour le Capitaine Durun Atticus et son contingent d’Iron Hands embarqués sur le Veritas Ferrum, le massacre d’Isstvan V ne se déroula pas selon la règle du « premier arrivé, premier servi ». Bien que relégués dans la seconde vague medusane à cause de l’empressement de Ferrus Manus d’aller mettre une taloche à ses frangins rebelles, et ainsi gagner la gratitude (à défaut de l’amour, ce serait trop demander) paternelle, Atticus et ses Space Marines arrivent dans le système à temps pour bénéficier de la légendaire hospitalité des légions renégates, et le Veritas Ferrum se retrouve engagé par deux croiseurs des Night Lords et de l’Alpha Legion à peine sorti du point de Mandeville. On peut dire ce qu’on veut de lui, mais Horus a toujours été un hôte prévenant.

Trop pragmatique et désincarné pour se ronger les ongles (par absence de dents et d’ongles) devant ce coup du sort, Atticus passe en mode MathHammer et prend les décisions qui s’imposent pour sortir victorieux de ce threesome non désiré. Rencardé sur la situation désastreuse des loyalistes à la surface d’Isstvan V et le probable décès de son Primarque par les extraits de communication entre unités Iron Hands captés par le pont du Veritas Ferrum, le pragmatique Capitaine ordonne la retraite, conscient qu’il est de sa responsabilité de sauver ce qui peut l’être de sa Légion de cette débâcle.

C’est le moment que choisissent deux Thunderhawks Salamanders pour se joindre aux réjouissances, talonnés par une escadre de vaisseaux Sons of Horus et Emperor’s Children. À leur bord, le Sergent Khi’dem contacte le Veritas Ferrum pour l’implorer de les prendre en stop avant qu’il ne leur arrive malheur, et parvient à toucher une des rares cordes sensibles d’Atticus lorsqu’il révèle que des Iron Hands font partie des survivants ramassés par les altruistes fils de Vulkan avant leur départ en catastrophe. Atticus se ravise donc, et le Veritas Ferrum se jette dans la gueule du loup lunaire1 pour prendre à son bord les Thunderhawks durement éprouvés, héritant au passage de quelques dommages supplémentaires dont une brèche critique sur un flanc.

Au final, l’acte chevaleresque d’Atticus lui coûte plus de vies d’Astartes qu’il n’en rapporte (c’est ce qui s’appelle se faire ratio au 31ème millénaire), et le saut Warp que le Veritas Ferrum s’apprête à faire pour semer ses poursuivants s’avère des plus risqués, les dommages de coque subis lors de la dernière canonnade ayant compromis son intégrité. Les mains de fer et leurs amis à écailles et à plumes parviendront-ils à s’en sortir ? La réponse au prochain épisode…

1 : Enfin plus vraiment à ce stade, mais si vous avez compris la référence, vous excuserez la blague (ou l’inverse).

AVIS :

Prologue du plus mauvais (ou en tout cas, le moins bien accueilli par la communauté, comme sa note de 3.23 – aux dernières nouvelles – sur GoodReads le montre) roman de l’Hérésie d’Horus, ‘Veritas Ferrum’ n’est pas aussi mauvais que son infâme filiation pourrait le laisser craindre. Cette petite nouvelle permet ainsi d’illustrer le côté sans concession des Iron Hands, prêts à abandonner leurs frères et leur Primarque sur le champ de bataille si cela leur permet de maximiser leurs chances de remporter la campagne. Pas mémorable, mais pas abominable non plus.

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Et voilà qui conclut cette revue, tardive mais pas inutile (en tout cas je l’espère) du Black Library 2012 Advent Calendar. Je dois reconnaître que j’ai été favorablement surpris par la qualité des soumissions proposées par les 24 auteurs rassemblés par les pontes de Nottingham pour cette expérimentation festive, malgré un format peu évident à négocier et une offre commerciale réservée à la clientèle la plus aisée de ce hobby de riches qui est le nôtre. Rien que pour ce dernier facteur, je ne regrette pas d’avoir fait l’impasse sur ce bundle à sa sortie, tout comme je ne regrette pas d’avoir parcouru cette sélection de microfictions écrites par quelques-unes de meilleures plumes de la GW-Fiction. Vous parlez d’un paradoxe. Rendez-vous dans un futur incertain mais sans doute pas trop lointain pour la suite de la série, dont vous pouvez déjà deviner l’année, sans nul doute…

INFERNO! – ANNEE 8

Bonjour et bienvenue dans cette revue de la huitième et dernière année d’Inferno!, le magazine de fictions bimensuel de la Black Library. Cette fois-ci ça y est, nous voilà arrivés à la fin de la route, qui se termina brutalement en janvier 2005 sur un 46ème numéro à la couverture démoniaque. Si on peut arguer que le Duc du Changement choisi par la BL pour orner la revue apparaissait comme un signe prémonitoire de rupture, le traditionnel édito signé par le rédacteur en chef (Christian Dunn à l’époque) ne laissait pas du tout apercevoir une fin de cycle, et se terminait même par un « rendez-vous dans deux mois ! » des plus enthousiastes. A ce jour, j’ignore ce qui a poussé Games Workshop à débrancher sa feuille de chou aussi précipitamment, et si vous avez des informations à partager sur le sujet, je suis preneur1.

1 : En relisant ce fameux édito, je me suis rendu compte que Christian Dunn y expliquait que l’équipe rédactionnelle avait choisi de faire figurer ‘Menshad Korum’ (C. S. Goto) dans le numéro à la place d’une autre histoire d’Eldars Noirs intitulée ‘Power, Corruption and Lies’ (jamais publiée, ou en tout cas pas sous ce titre, à ma connaissance. Il est possible que ce choix ait offensé un esprit maléfique fan de New Order, qui aurait maudit Inferno! en punition de cette outrecuidance. En tout cas, c’est une théorie.

Inferno!_Année 8

Cette année huit, en plus d’être la dernière du lot, est également la plus courte (4 numéros pour 14 nouvelles). Ce fut toutefois suffisant pour y faire figurer une aventure du chasseur de primes Brunner (‘Sickhouse, qui par le jeu de la mise en page se trouve être l’ultime nouvelle infernale), une enquête de terrain de Valentin Drusher2 (‘Gardens of Tycho’, avant-dernière nouvelle infernale), et une Space Marinade, sauce au bleu, d’Uriel Ventris (‘Consequences’). Nous ferons également la connaissance de Gabriel Angelos, transposé sur papier après avoir commencé sa carrière sur PC, et du malchanceux trublion Reiner Hetzau, protagoniste de (l’excellente) trilogie des Dark Hearts.

Parlons enfin des auteurs rassemblés pour ce grand final un peu tronqué. On retrouve évidemment Dan Abnett, mais c’est Graham McNeill qui lui chipe le titre de premier contributeur (deux nouvelles), aidé en grande partie par le numéro consacré aux Ultramarines (#44) dont il fut le seul auteur. L’année 8 vit également le retour de Brian Maycock (‘To Guard the Dead’), C. S. Goto (‘Menshad Korum’) et James Peaty (‘The Cuckoo of Hammerbildt’), ainsi que les débuts de Lee Lightner (‘Engage the Enemy’), Lucien Soulban (‘Altar of Cyrene’) et Nathan Long (‘Hetzau’s Follies’). Voyons ce que ça a donné…

2 : Drusher fera un comeback très inattendu treize ans plus tard en devenant le protagoniste de ‘The Magos’. Comme quoi il ne faut jamais désespérer de rien (surtout avec Abnett).

Inferno! Année 8

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The Seventh Boon – M. Scanlon [WFB] – #43 :

INTRIGUE :

WFB_The Seventh BoonL’ambiance est pesante dans l’orphelinat Notre Dame Shallya du Cœur Béni de Marienburg, dont les petits pensionnaires sont amenés par douzaines devant un couple de riches notables, Herr et Frau Forst, à la recherche d’un petit animal de compagnie mignon pour bien paraître en société. C’est toutefois l’avis de la brave sœur Altruda après plusieurs heures de « casting » infructueuses, la jeune Madame Forst (Greta) se montrant aussi exigeante que vague sur les qualités recherchées de son futur héritier. Son mari étant un des bienfaiteurs principaux de l’établissement depuis de nombreuses années, Altruda est toutefois toute disposée à laisser Greta épuiser ses stocks d’enfants abandonnés, jusqu’à ce que, miracle, elle jette son dévolu sur un garçon de huit ans aussi mutique qu’innocent. L’affaire étant entendue, les époux Frost repartent en calèche avec leur acquisition artistiquement emballée dans une pochette cadeau, petit geste commercial réservé aux membres du club Platinum.

Il s’avère rapidement que cette adoption n’a pas grand-chose de désintéressée, et que si Gunther Forst a laissé sa femme jouer le premier rôle auprès de Sœur Altruda, c’est bien lui qui a planifié l’opération Marine1. Notre homme est en effet sous ses abords respectables un cultiste chaotique accompli, dont les activités interlopes nécessiteront dans un futur très proche un être à la pureté irréprochable, et certainement pas pour répondre à des questions de Steve Harvey, croyez-moi. Comme même à Marienburg, un homme célibataire de quarante ans ne peut pas adopter un gamin des rues sans que cela ne fasse jaser, et que Gunther tient absolument à ne pas attirer l’attention sur sa précieuse personne, il a embauché les services de Greta, prosti…sane de son état, pour jouer le rôle de sa tendre moitié et ainsi détourner les soupçons des nonnes. Cette mascarade tarifée prend brutalement fin lorsque le fiacre dans lequel le trio a pris place est arrêté par deux malfrats, dont l’un se révèle être le souteneur de Greta. Ayant compris que l’enfant soigneusement sélectionné par sa complice avait une valeur certaine sur le marché noir, le dénommé Ruprecht ne reculera pas devant un meurtre de sang froid pour s’emparer de la marchandise, mais c’est sans compter les talents de Gunther au couteau. Aussi efficace avec sa lame, tant au corps à corps qu’à distance, que Filthy Harald en personne, Herr Forst règle leur affaire aux malfrats, avant de repartir en petites foulées vers sa destination, son sidekick sur le dos. Une fin méritée pour ces trafiquants d’êtres humains en puissance, si vous voulez mon avis.

La caméra se braque ensuite sur les décombres des Six Couronnes, autrefois taverne fréquentée par les individus les plus louches de Marienburg et des environs, et désormais ruines abandonnées à la suite d’un malheureux incendie. Alors que Gunther se prépare à réaliser un rituel à l’importance cruciale tandis que son petit compagnon se gave de bonbons bourrés de somnifères (ça vaut mieux pour lui), on en apprend plus sur le passif et les motivations de notre héros.

Il y a de cela 150 ans, Gunther se rendit à un rencard très particulier à ce même endroit, et fit la rencontre de Samael, Prince Démon de Slaanesh undercover et collectionneur d’âmes patenté. Obsédé par l’atteinte de l’immortalité, Gunther était prêt à se séparer de son essence en échange de la vie éternelle que seul un puissant Démon tel que Samael était en mesure de lui accorder. Au bout d’une négociation serrée, les deux larrons tombèrent d’accord sur un deal satisfaisant tout le monde : à Gunther sept fois 25 ans de non-sénescence2, à Samael l’exaucement de sept faveurs pas trop compliquées par son associé mortel, et la pleine propriété de l’âme de ce dernier une fois le contrat terminé3. Ce petit arrangement tint pendant de nombreuses années, mais à l’approche de son septième et ultime rendez-vous intermédiaire avec son protecteur, le prudent Gunther se rendit compte que ce dernier allait probablement essayer de l’empapaouter dès la réalisation de sa septième requête, et récupérer ainsi son dû avant que les vingt-cinq dernières années prévues au contrat ne s’écoulent. Après tout, les Démons ne sont pas connus pour être les créatures les plus réglos qui soient (à l’exception de ceux de Solkan bien sûr).

Fort heureusement, un siècle et demi est plus que suffisant pour peaufiner ses connaissances ésotériques, et Gunther a eu tout loisir de dénicher dans d’antiques grimoires une solution à son problème existantiel (littéralement). Pour la faire simple, son plan consiste à piéger Samael entre deux cercles de conjuration, et à renvoyer le Démon patienter mille ans dans le Warp grâce à une balle enchantée et ointe du sang d’un être à la pureté absolue (pléonasme, vous me direz). Lorsque le ponctuel Samael se présente sur le lieu du rendez-vous à minuit précise, Gunther est prêt à le recevoir comme il se doit…

Début spoiler…Si la première partie de son stratagème se réalise sans anicroche, Sam se retrouvant coincé entre un graffiti magique et une mini douve d’eau bénite, le sacrifice du frêle enfançon ne se passe pas comme prévu. L’orphelin mutique était en effet une Démonette déguisée, un être à la pureté irréprochable si l’on se réfère au 2) de la définition du Petit Larousse, et pas au 3) comme Gunther l’a fait. Le tête à tête entre le cultiste dupé et le Démon mineur se termine de façon expéditive et définitive pour le pauvre M. Forst, qui aurait dû se douter qu’on n’arnaque pas si facilement une créature millénaire. Son grand œuvre ne reste toutefois pas inachevé, Samael utilisant le sang de sa créature pour terminer la réalisation de la balle dem-dem, car après tout, ce genre de munition peut s’avérer précieuse…Fin spoiler

1 : Comme Marine Lorphelin. J’espère que vous l’aviez.
2 : Comme le fait remarquer justement Samael, des cas de forces majeures peuvent s’appliquer.
3 : Je sais ce que vous vous dîtes : ça aurait été plus fluff pour un Prince Démon de Slaanesh de partir sur une base six plutôt qu’une base sept. Mais les temps sont durs, ma pauvre dame…

AVIS :

De toutes les nouvelles mettant en scène un pacte ou une invocation démoniaque (et les conséquences souvent hilarantes, salissantes et/ou catastrophiques qui en découlent) que la GW-Fiction nous a proposé au fil des années, ‘The Seventh Boon’ est sans doute l’une des plus réussies. Mitchel Scanlon met en scène de manière habile ce jeu de dupes entre un homme prêt à tout et un Démon faussement débonnaire, avec suffisamment de rebondissements (mention spéciale à cet échange, qui joue habilement avec les codes du pacte démoniaque) et de suspens1 pour garder l’intérêt du lecteur du début jusqu’à la fin. Chose appréciable, Scanlon se permet également quelques ajouts fluffiques qui, s’ils ne révolutionneront pas la face du Vieux Monde, méritent la lecture pour quiconque s’intéresse à ce genre de choses. A real boon.

1 : Et de mots savants pour enrichir le vocabulaire de son public. Je ne savais pas ce qu’était un trocart jusqu’à aujourd’hui, je le reconnais humblement.

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Relics – J. Swallow [40K] – #43 :

INTRIGUE :

40K_RelicsEn mission d’entraînement sur le monde mort de Setrek, le Sergent Vétéran Tarikus et ses hommes sont confrontés à des phénomènes inquiétants autant qu’inédits, la planète bac à sable (de basalte) des Doom Eagles étant sensée être dépourvue de toute forme de vie depuis des millénaires. Témoin de la disparition brutale du Novice Doramaca1 au cours d’une patrouille de routine, son camarade de promotion Colius donne l’alerte, et opte pour attendre prudemment l’arrivée des renforts depuis un escarpement rocheux plutôt que de s’hasarder dans les sables qui ont aspiré le malheureux aspirant. Les doutes nourris par l’inflexible Tarikus quant à la possibilité que quelque chose puisse en avoir après les meilleurs de l’Empereur sont rapidement dissipés lorsque, arrivé sur place, il se rend compte en visitant le Rok Ork (à portière papillon, comme quoi les peaux vertes ne sont pas aussi nuls que l’on le dit souvent en termes de design) englouti par les sables qui a servi de refuge à son couard de Novice que quelque chose ne tourne effectivement par rond, les cadavres desséchés des occupants de l’astéroïde ayant tous été soigneusement dépouillés de leurs composants métalliques. L’arrivée honteuse du reste des Doom Doom Boys, menés par le flegmatique2 Vétéran Korica, délesté d’un bras après que la caverne utilisée comme base arrière par les Astartes se soit révélée être remplie de vermine ferrophage, apporte la confirmation que les Space Marines partagent la planète avec des voisins pas très compréhensifs. L’heure est grave et il faut agir sans tarder.

Plutôt que de tenter de contacter leur vaisseau pour regagner la sécurité de l’orbite, Tarikus entraîne les survivants dans une exploration des souterrains sur lesquels donne le Rok, ce qui permet aux Doom Eagles d’en apprendre plus sur l’histoire mouvementée de leur terrain d’entraînement favori. Le visionnage d’une vidéo datant de quelques milliers d’années (on utilisait du matos performant à l’époque) permet d’établir sans équivoque possible que Setrek a été victime du réveil de sa colonie de Necrons, incident géré de main de maître par les habitants de la planète, qui ont préféré s’auto-nuker la gueule plutôt que de laisser les goules de métal avoir le dernier mot. That’s the spirit, guys. Harcelés par un nombre croissant de scarabées et de Mecharachnides Canopteks, rejoints rapidement par un Seigneur Necron au corps upcyclé, les Doom Eagles réalisent que la situation est sur le point de leur échapper et décident donc de finir ce que leurs lointains prédécesseurs avaient commencé, en faisant détonner les ogives nucléaires enfouies à proximité des lignes tectoniques de la planète. Une fois le final countdown lancé, Tarikus sonne la retraite générale et téléporte tout son petit monde dans la Kangoo chapitrale, au nez (peut-être) et à la barbe (sans doute) de Junkyard Man et de ses nuisibles. Voilà encore un conflit de voisinage réglé avec professionnalisme et efficacité par la team Pépé.

1 : Ce qui n’est pas une grosse perte, au vu de l’incapacité de ce dernier à se mettre à couvert sans ridiculiser son Primarque.
2 : Décider de piquer un roupillon alors qu’un camarade vient de disparaître dans des conditions suspectes, voilà bien une réaction impavide. Ou alors, la nuit précédente a été courte.

AVIS :

Avant de dédier sa plume aux Blood Angels, James Swallow s’est exercé à la littérature génétiquement modifiée en se frottant aux Doom Eagles, Chapitre dont la nature fataliste et résignée faisait une victime expiatoire parfaite pour ce genre d’ébauche1. Relics ne peut prétendre ni à une intrigue originale – comme la plupart des travaux mettant en scène des Necrons, d’ailleurs – ni à une exécution irréprochable, les tribulations de Tarikus et consorts suscitant leur lot de haussements et/ou de froncements de sourcils de la part du lecteur. Ces considérations évacuées, mon sentiment dominant à la suite de la lecture de Relics demeure un grand et massif so what ?, l’absence totale d’originalité de cette soumission de Swallow s’inscrivant en faux avec le cahier des charges de la Black Library, dont les publications sont censées étoffer et enrichir le fluff des franchises de GW. Rien de tel ici, et donc rien qui ne fasse de cette nouvelle une lecture obligatoire conseillée intéressante. Passez votre chemin, braves gens.

1 : Il semble d’ailleurs  que les Doom Eagles aient été « le » Chapitre d’Inferno !, un nombre important de nouvelles ayant été consacré aux natifs de Gathis II par les contributeurs du magazine, avec des résultats plus ou moins probants.

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The Cuckoo of Hammerbild – J. Peaty [WFB] – #43 :

INTRIGUE :

La paisible ville d’Hammerbildt voit son quotidien bouleversé lorsqu’un matin, la fermière Gudrun trouve un homme blessé gisant dans la rivière communale. Ce dernier, Kahn, venait juste de dérober à un trio de soldats du Stirland les sacs d’or qu’ils transportaient en vue du paiement d’une rançon de guerre, et profite de l’hospitalité qui lui est généreusement offerte par les Hammerbildter pour se présenter comme une honnête estafette, dépouillée et blessée par des bandits de grand chemin portant l’uniforme du comte du Stirland (#ISeeWhatYouDidThere). Si les résidents de la ville acceptent la version de Kahn sans sourciller, le milicien Tobias, qui poursuit Gudrun de ses ardeurs tenaces et intrusives, prend le rescapé en grippe du seul fait qu’il se trouve hébergé par sa sauveuse le temps de reprendre des forces, ce qui ne manque pas d’exciter la jalousie du prétendant malheureux1. La popularité du nouveau-venu atteint cependant des sommets après qu’il ait contribué à repousser la (petite : 3 mutants seulement) attaque d’Hommes Bêtes sur Hammerbildt peu après son arrivée, ce qui est d’autant plus injuste que Tobias a également donné de sa personne dans l’escarmouche, et terrassé un des assaillants bestiaux à coups de lyre, ce qui aurait dû lui rapporter des points de style, tout de même. Le monde est vraiment injuste.

Le lendemain de cette nuit agitée, la ville reçoit la visite des trois Stirlanders précédemment entraperçus, qui demandent à ce que Kahn ainsi que ses biens mal-acquis leur soient remis, sous peine de représailles sanglantes. Hammerbildt tenant toutefois son héros local, le chef de la milice refuse catégoriquement d’obtempérer, et serait allé au clash avec les forces de l’ordre, n’eut été le départ précipité de Kahn (préférant aller écouler ses couronnes en toute quiétude plutôt que de refaire le coup de feu avec ses groupies), qui croise Tobias à la sortie de la ville. La grande gueule du ruffian lui joue alors un tour pendable, ce dernier se vantant d’avoir roulé son monde dans la farine, et avouant avoir levé la main sur Gudrun alors qu’elle cherchait à le convaincre de rester. Tremblant de rage dans son collier de barbe et sous son fedora qu’un rustre ait osé violenter m’lady, ‘Nice Guy’ Tobias tombe à bras raccourcis sur son rival, et les deux dégringolent la colline jusqu’à atterrir dans le jardin de la donzelle en question. Cette dernière, rancunière, embroche son ex d’un coup de fourche bien placé, permettant au final à Hammerbildt d’éviter le courroux de la soldatesque Stirlander, le corps du gredin et la quasi-totalité de l’or dérobé lui étant remis avec les plus plates confuses du conseil de la ville et la démission du chef de la milice en sus. La quasi-totalité, donc, Gudrun et Tobias détournant un petit sac de couronnes à leur profit, afin de financer leur déménagement dans la grande ville la plus proche. Une autre forme de prélèvement à la source, somme toute.

1 : À raison d’ailleurs car Kahn ne mettra pas longtemps avant d’emballer son hôtesse. Le charme canaille du baroudeur, sans doute.

AVIS :

Avant de commencer à lire cette nouvelle, j’étais à peu près certain que cette dernière tournerait autour d’une horloge maudite, dont les maléfices scelleraient le sort de la malheureuse bourgade d’Hammerbildt. Ma surprise a donc été non feinte lorsque je me suis rendu compte que Peaty avait choisi l’autre sens de « cuckoo1 » comme ressort narratif de son histoire, qui s’en est avérée du même coup être bien plus terre-à-terre. Sans être dépourvu d’intérêt, ‘The Cuckoo of Hammerbildt’ tient plus de la fable sociale, la survenue d’un évènement extraordinaire dans le microcosme figé d’une petite ville impériale permettant à chaque protagoniste de révéler sa nature profonde, que du récit med-fan, seul le trio d’Hommes-Bêtes en maraude prestement euthanasié par les Hammerbildter en furie ancrant de façon indéniable le propos de James Peaty dans l’univers de WFB. À titre de comparaison, le ‘Hatred’ de Ben Chessell (‘Inferno!’ #2 ; ‘Realm of Chaos’), s’il partage un argument sensiblement similaire (un mystérieux étranger blessé arrive dans une communauté reculée et se fait passer pour quelqu’un d’autre auprès des villageois qui le recueillent) avec ‘The Cuckoo…’ intégrait à son intrigue une réflexion typiquement ‘Warhammeresque’ en abordant le thème du statut de mutant au sein des sociétés civilisées du Vieux Monde. La « banalité » du propos de la soumission de Peaty dessert donc fortement cette dernière, et même s’il est parfois bon de constater que les habitants de l’Empire ont une vie à peu près normale entre deux invasions chaotiques, Waaagh ! orque ou épidémie de pourriture de Nurgle, il y a fort à parier que le lecteur sorte blasé de cette historiette d’usurpation d’identité à fins bassement crapuleuses, sur fond d’idylle pastorale contrariée. Du sang pour le Dieu du Sang fanboy !

1 : Imposteur, comme dans l’expression ‘cuckoo in the nest’, qui tire son origine du comportement opportuniste de cet oiseau en période de nidification.

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To Guard the Dead – B. Maycock [WFB] – #43 :

INTRIGUE :

WFB_To Guard the DeadTémoins du suicide de Lord Brecker, qui s’est jeté du haut de sa tour de manière dramatique, les paysans Max et Werner Karlin s’empressent de colporter la nouvelle jusqu’à la taverne du village voisin, où elle tombe dans des oreilles intéressées. Les premières sont celles de Marcus, un étranger arrivé récemment sur place et décidé à avoir une discussion privée avec Brecker, ou à défaut, son cadavre, pour des raisons non révélées. Les secondes appartiennent à Walther Balg et Kurt Halder, deux anciens miliciens s’étant établis dans le village où se passe notre récit après une vie de campagnes et de pillages dans les armées impériales. Lorsque le vieux servant de Brecker, Josef, vient s’enquérir de la disponibilité de gardes pour assurer la protection de la jeune veuve de son maître, Lady Margarethe, et la quiétude de son manoir, nos deux ruffians sont prompts à saisir l’opportunité qui s’offre à eux, et s’installent rapidement sur le domaine dont ils sont maintenant les protecteurs attitrés.

Leur vigilance est toutefois mise en défaut par Marcus, qui parvient à se glisser jusque dans le mausolée des Brecker et à soulever le couvercle du sarcophage renfermant la dépouille mortelle de l’homme glaviot (un oiseau, ça vole, tout le monde sait ça). Ce qu’il voit semble confirmer les soupçons qu’il entretenait avant son arrivée, mais cette découverte ne lui ait que peu d’utilité, un faux mouvement le conduisant à traverser le plancher vermoulu de la crypte, et à se retrouver coincé au sous-sol sous une poutre de fort beau gabarit. Un peu plus loin, les deux gros bras de Lady Margarethe reçoivent l’occasion de mettre ces derniers en action, une bande de paysans fins saouls progressant bruyamment vers le manoir seigneurial, et certainement pas pour présenter leurs condoléances à la châtelaine éplorée. Prompts à l’action, Walther et Kurt massacrent la majorité des bouseux, en laissant quelques-uns repartir pour transmettre leur message de fermeté au reste du village, et s’en vont collecter la récompense de leurs bons et loyaux services auprès de Josef.

Il ne faut cependant pas longtemps à nos deux compères, logés dehors comme de vulgaires molosses, pour décider d’aller jeter un œil dans les appartements de leur employeuse, beaucoup plus confortables et bien mieux chauffés que leur cabane au fond du jardin. Là, pendant que Kurt se contente de s’endormir devant la cheminée, comme l’honnête squatteur qu’il est, Walther se décide à rôder un peu dans les coursives, et aperçoit de loin passer la jeune et jolie châtelaine, pudiquement voilée par un crêpe de deuil, accompagné par son serviteur. Se décidant à tenter sa chance dans l’espoir de devenir à son tour seigneur, notre homme file en ville avec l’argent gagné par la paire quelques heures plus tôt afin de s’acheter une respectabilité et pouvoir demander sa main à Lady Margarethe…

Début spoilerDe retour au manoir, il se prépare à devoir expliquer à Kurt pourquoi il a claqué en fringues et en alliance l’intégralité de leurs gages sans lui demander sa permission, lorsque des cris stridents attirent les comparses jusque dans le mausolée tout proche. C’est là qu’ils trouvent et libèrent Marcus, qui se révèle être un Chasseur de Sorcières, soupçonnant à l’origine Lord Brecker d’être de mèche avec les puissances de la ruine, mais convaincu à la vision du cadavre exsangue de ce dernier que l’ennemie #1 des bons sigmarites se trouve être Lady Margarethe, qui ne peut être qu’un Vampire ! Sollicitant l’aide de ses sauveurs pour mettre un terme au règne sanglant de la morte vivante, il a la surprise de voir ces derniers s’enfuir ventre à terre, la réalisation d’avoir assassiné des villageois pour le compte d’une goule les incitant à ne pas rester dans les parages d’un Répurgateur, espèce d’homme peu réputée pour sa compréhension et sa compassion.

Pendant que Marcus retourne au village et arrive à rameuter assez de partisans pour mener une expédition purificatrice dans le château des Brecker, qui se terminera de façon peu concluante en général, et assez douloureuse pour lui, les deux jambes broyées par les roues du carrosse qui parvient à s’échapper du domaine à l’arrivée des péquenauds, Walther et Kurt ont une franche explication de texte, qui se solde par la mort du premier de la main du second, peu convaincu par ses grands projets d’ascension sociale, et guère compréhensif quant à l’usage un peu trop cavalier fait par son ami des ressources communes. Déterminé à empocher son dû, Kurt emporte la main de son camarade contenant l’anneau d’or qu’il proposait d’offrir à Lady Margarethe, jusqu’au marchand le plus proche afin de l’échanger contre des espèces sonnantes et trébuchantes.

Début spoiler 2Quelle n’est pas la (mauvaise, croyez-moi) surprise de Kurt lorsqu’il croise le cadavre de son frère d’armes au détour d’une rue, alors qu’il était sur le point de laisser village et manoir derrière lui ! Trop surpris pour réagir aussi promptement que la situation l’exigeait, le fratricide est mis KO par une gauche (la droite n’étant plus disponible) de Walther, et se réveille dans le fameux fiacre des Brecker, où lui font face la belle endeuillée, son serviteur, et le champion continental des poids wealter, dont le regard noir et vide laisse peu de doute quant à son état de zombification avancé. Kurt s’attend à subir le même sort de la part de Lady Margarethe, mais lorsque Josef soulève son voile, c’est pour révéler un autre zombie, bien moins frais que Walther. Et le serviteur de révéler que Margarethe est sa femme, qu’il a surprise en train de se compromettre avec un autre homme, et accidentellement tuée dans la dispute qui s’en est suivi. Praticien des arts occultes, Lord Brecker, car c’était lui, a réussi à faire revenir d’entre les morts sa chère et tendre, et s’est débarrassé du servant qui l’avait trompé, mort sous la torture, en précipitant son cadavre habillé des  vêtements de son maître depuis la tour du manoir sous les yeux de ses paysans. Débusqué par les Répurgateurs, il n’a guère eu le choix que de prendre la fuite avec son épouse pour aller poursuivre ses études nécromantiques dans un environnement plus apaisé, mais n’aura pas trop de deux fidèles serviteurs pour l’aider à s’installer sous des cieux plus cléments…Fin spoiler

AVIS :

Deuxième et ultime contribution de Brian Maycock à la Black Library, ce ‘To Guard the Dead’ confirme les débuts prometteurs que constituait ‘A Fool’s Bargain’. Comme en témoigne la longueur inhabituelle de la section Intrigue ci-dessus, l’auteur délivre un récit complexe et palpitant, digne d’éloges tant dans la forme (une succession de vignettes, dont certaines en prolepse – ce que l’on comprendra plus tard -, endossant les points de vue des divers protagonistes, et volontairement schématisée pour l’établissement de ce résumé) que sur le fond, avec non pas un, mais deux retournements de situation artistement amenés, ce qui dénote d’une maîtrise consommée quand on se souvient que le récit ne fait que 12 pages ! Si elle apporte peu de choses en termes de background, cette nouvelle est une des plus aboutie qu’il m’ait été donné de lire au niveau de sa construction, et mérite de ce fait amplement le détour. Il est vraiment dommage que la BL n’ait pas jugé bon de republier un travail de cette qualité, qui aurait eu sa place dans toutes les anthologies WFB éditées au cours des 15 dernières années. J’espère que ces quelques lignes enthousiastes vous donneront l’envie de vous plonger dans cette courte mais satisfaisante histoire (sous réserve que vous n’ayez pas déjà appris le fin mot de cette dernière, ce qui serait dommage), c’est bien le moins que je puisse faire pour réparer l’injustice littéraire qui a été faite à l’intriguant1, mais fort doué, Mr Maycock.

1 : Dont je n’ai pas retrouvé la trace sur internet, mis à part en tant que contributeur du recueil ‘Visionary Tongue’, édité par Storm Constantine, une (très) ancienne contributrice de Warhammer Books – la proto BL – avec ‘Lacrymata’.

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Consequences – G. McNeill [40K] – #44 :

INTRIGUE :

40K_ConsequencesL’année est 999.M40, nous sommes sur Macragge, et Uriel Ventris est en tôle. Ainsi commence la présente nouvelle, qui prend la suite immédiate des événements relatés dans ‘Warriors of Ultramar’ (et la nouvelle ‘Leviathan’), qui avaient vu les héroiques Space Schtroumpfs de la 4ème Compagnie tenir tête à la Grande Dévoreuse au côté de leurs cousins éloignés et plus qu’un peu creepy des Mortifactors sur Tarsis Ultra. Si la victoire avait souri aux Impériaux, deux problèmes de taille attendaient Ventris à son retour à la base.

Premièrement, et très littéralement, graver le nom des soixante-dix-huit (78 !!!) Frères de Bataille tombés au champ d’honneur pendant le conflit contre les Tyranides, sur les murs du Temple de la Correction. Soit un taux de perte de <prend une calculette> 78%. Pas mal du tout pour une deuxième campagne je dois dire. Après plus de trois jours passés à buriner du marbre, le hardi Capitaine se fait alpaguer par son collègue Pythea, en charge de la 2nde Compagnie, et un duo de Terminators, alors qu’il était en train de chanter innocemment « Guilli reviens » avec les pèlerins présents dans la Chapelle du Primarque. Pas qu’il chantait si mal que ça, notez bien, mais surtout en conséquence des terribles accusations portées sur lui par le Sergent Vétéran et balai psychorigide Learchus : des déviations répétées aux enseignements du Codex Astartes. Comme les Ultramarines prennent ces choses là très aus sérieux, Ventris est escorté sans autre cérémonie dans une cellule froide et humide, en attendant de passer en jugement accéléré devant Marneus Calgar et les Capitaines présents sur Macragge. Voilà pour le deuxièe problème.

Après avoir tué le temps en faisant comme tout prisonnier de film d’action qui se respecte dans l’intimité de sa cellule, c’est-à-dire de la musculation, Ventris est amené devant ses juges en compagnie de son vieux complice Pasanius, dont le tort aura sans doute été d’être un peu trop proche de son supérieur hiérarchique (et pas du tout d’avoir un bras en métal sentient, comme on pourrait l’imaginer). S’en suit un interrogatoire/réquisitoire serré du fantasque Capitaine, qui donne l’occasion à Graham McNeill de livrer une version condensée de la nouvelle ‘Chains of Command’, pour ceux qui n’avaient pas eu le bonheur de la lire auparavant ; et aux lecteurs celle de réaliser que les Ultramarines des années 2000 étaient vraiment des chochottes1. Cette première phase du procès ayant pris toute la journée, les accusés sont ramenés à leur cellule pour passer la nuit et préparer leur plaidoyer de défense, la parole devant leur être donnée le lendemain.

Bien que très fâché par les accusations le ciblant, qui, si elles sont exactes, ne font pas honneur au sens du devoir et du sacrifice que Ventris tient particulièrement au cœur, notre susceptible héros est bien décidé à balancer leurs quatre vérités à ses détracteurs, mais la visite nocturne et secrète du Capitaine Agemman (à la demande expresse de Calgar en personne, ou du moins le dit-il) vient le convaincre de n’en rien faire. Car pour les Ultramarines, le respect de l’institution passe avant toute chose (ils auraient fait de bons fans de football quelques millénaires plus tôt, en ce sens) et malgré le fait que le procès ne soit pas public, il ne faudrait pas que Ventris entame la confiance absolue que les Frères de Bataille ont dans leurs supérieurs en s’opposant au verdict de ses pairs. Corporates jusqu’au bout, Ventris et Pasanius acceptent donc de se taire et d’accepter le jugement de Calgar, qui les remercie en… les condamnant à mort. Sympa, le Grand Schtroumpf.

Mais attention, pas n’importe quelle mort. Plutôt que de les balancer du haut des falaises formant les chutes de l’Hera, comme la tradition le dicte, le Maître de Chapitre ordonne aux deux brebis galeuses d’aller voir ailleurs s’il y est, dans le cas présent, dans l’Œil de la Terreur, où Tigurius a vu dans un de ses rêves une fabrique à bébés Space Marines du Chaos, qu’il serait opportun de détruire dans les plus brefs délais. Une fois tous les symboles chapitraux enlevés de leurs armures et de leurs personnes, Ventris et Pasanius prennent donc le chemin de l’exil, pour une mission suicide dont ils ne sont pas sensés revenir (mais reviendrons quand même, évidemment).

1 : Voici leur (les plus hauts gradés de ce Chapitre de la Première Fondation, je précise à nouveau) réaction lorsque le terme « Night Lords » est prononcé devant eux.

AVIS :

Nouvelle de transition entre ‘Warriors of Ultramar’ et ‘Dead Sky, Black Sun’, ‘Consequences’ est un épisode assez important de la saga d’Uriel Ventris, car elle explique ce qu’il arrive au Capitaine de la 4ème Compagnie à son retour sur Macragge et le déshonneur subi par ce dernier pour avoir été un libre penseur. En cela, cette histoire est un must read pour tous les lecteurs intéressés par les aventures de Ventris, devant toutes les autres nouvelles (franchement dispensables) que McNeill a consacré à son héros.

Un autre facteur à mettre au crédit de ‘Consequences’ est sa haute teneur en fluff ultramarin, son déroulé sur Macragge et la présence du grand nombre de sommités du Chapitre au casting lui donnant un avantage certain sur la concurrence. Certes, toutes les informations véhiculées dans ces quelques pages n’ont pas survécu au passage des années (qui se souvient encore du Capitaine Pythea ?), mais les détails donnés sur la Forteresse de Hera méritent toujours le détour, si vous êtes friands de ce type de littérature.

Cela dit, tant le déroulé que le style de cette nouvelle se révèlent être des plus classiques, pour ne pas dire quelconques, et McNeill rate son objectif de faire apparaître les deux camps comme étant dans leur bon droit, malgré des vues diamétralement opposées. La rigidité absolue des Ultramarines sur leur précieux Codex, dont la moindre déviation est punissable de mort, paraît bien exagérée (tant aujourd’hui qu’à l’époque, c’est-à-dire avant la résurrection de Guilliman et les révélations qui sont allées avec sur la vision qu’avait le grand homme de ces principes), et les manigances de Calgar pour faire taire Ventris et ainsi préserver l’harmonie de façade du Chapitre, assez indignes du meneur sage et humain qu’il est sensé être. Je pense que McNeill aurait pu trouver un moyen plus vraisemblable de faire bannir son héros dans l’Œil de la Terreur, mais comme partout en ce bas monde, la fin justifie les moyens…

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The Enemy of my Enemy – G. McNeill [40K] – #44 :

INTRIGUE :

40K_The Enemy of my EnemyRescapés malheureux du second siège d’Hydra Cordatus, qui a vu les Iron Warriors du Warsmith (à l’époque où la Légion était si peu abordée par le fluff BL qu’il n’y avait pas besoin de préciser duquel il est question) s’emparer des réserves de glandes progénoïdes stockées dans la forteresse, le Lieutenant-Colonel Mikhail Leonid et le Sergent Ellard du 383ème Jouran Dragoons éprouvent quelques difficultés à s’adapter à leur nouvelle vie d’esclaves sur Medrengard, la planète forteresse de Perturabo et ses cronies. Affectés à la forge d’Obax Zakayo, les Gardes Impériaux triment comme des bêtes dans un environnement de travail difficile, et certainement pas certifié OHSAS 18001. Déjà que nos deux vétérans devraient disposer d’un mi-temps thérapeutique pour traiter le cancer obligeamment refilé par les pilules magiques de l’Adeptus Terra pendant leur garnison sur Hydra Cordatus (portant à un nouveau niveau l’assertion maintes fois vérifiées que la cantine, ce n’est pas bon), la non application par Zakayo des règles les plus élémentaires de Santé & Sécurité résultent logiquement en de nombreux accidents du travail, ce qui ne fait jamais bien dans le rapport annuel. Pour ne rien arranger, les prisonniers profitent d’un relâchement de leur contremaître1 pour fomenter une petite mutinerie, certes très mal organisée et donc condamnée à échouer, mais qui fout un bordel monstre dans l’atelier, et vient définitivement enterrer les objectifs de productivité mensuelle établis par le haut commandement. Comble de déveine, les démons emprisonnés dans les hauts fourneaux sont libérés dans la bagarre, ce qui rend la forge impropre à toute production pendant au moins quelque temps. Avec de tels bras cassés comme fournisseurs, il n’est pas étonnant qu’Abaddon ait dû attendre des siècles entre chaque Croisade Noire, si vous voulez mon avis.

Faisant contre mauvaise fortune cœur de fer (et main de fer), Zakayo emmène les larbins ayant survécu au piquet de grève et à la répression sanglante de ce dernier en randonnée à travers les plaines monochromes de Medrengard, afin de mettre ses esclaves à disposition de Honsou, nouveau commandant de la Grande Compagnie après la promotion de Mr Smith (Zeewähr de son prénom), ancien CEO de la branche. Après quelques jours de marche, les survivants arrivent dans une gare un peu spéciale, et encore plus mal famée que Marseille St Charles, où ne les attend rien de moins que l’Omphalos Daemonium, le Poudlard Express de l’Oeil de la Terreur2. Problème, les esclaves n’ont pas de tickets, et les contrôleurs du bord, une huitaine de démons cousins de Lompal l’Homme Pâle du Labyrinthe de Pan, ne sont guère conciliants. Après avoir dévoré quelques menus morceaux (surtout les cancers, parce que c’est bon les cancers), le gang accepte toutefois de prendre en charge les migrants, qu’ils entassent dans un wagon de deuxième classe tandis que Zakayo va chiller au bar de la première.

Serrés comme des sardines au fond de leur compartiment, Leonid et Ellard se disent qu’il serait judicieux de monter une évasion avant d’arriver à destination, et sont exaucés de manière inattendue par l’attaque du train maléfique, non pas par une bande de peaux-rouges sanguinaires, mais par des Space Marines renégats menés par Ardaric Vaanes, ex Raven Guard, ex Red Corsairs, et désormais tueur en fin de droit sur Medrengard. À peine le temps de faire les présentations et d’ouvrir les portes du wagon que le chevalier albinos est pris à parti par Zakayo, guère satisfait de son intervention. Pendant qu’il règle ce différend, Vaanes enjoint les deux Gardes de stopper l’Horreur Express avant qu’il n’arrive à mauvais port, ce que nos bidasses s’empressent d’entreprendre. Arrivés en tête de train, après avoir évité les contrôleurs avec l’expertise d’un resquilleur du RER B, Leonid et Ellard font la connaissance d’Ivor the Engine Driver, aussi connu sous le nom de Slaughterman, qui prend assez mal leur intervention et refuse tout net de stopper la machine. Il faudra à nos héros toute leur habileté et motivation pour mener à bien la mission qu’ils ont reçue de leur sauveur, et couper les gaz  de la locomotive après que cette dernière ait goulument avalée son malheureux pilote. Seuls rescapés des usagers de la ligne Hell, les Dragoons acceptent l’offre de Vaness’  de rejoindre sa petite bande de parasites, ce qui est toujours mieux que de s’oblitérer la santé dans un métier àlakon pour un patron indifférent. La suite de l’histoire est contée dans à Soleil Noir, Ciel Mort.  It was time for Thomas to leave, he had seen everything…

1 : Lequel est pris d’un coup de barre (de fer) passager, permettant à ses charges de prendre une pause syndicale bien méritée. Pour un Space Marine, se faire sonner par une attaque d’un simple humain malade, affamé et épuisé, ce n’est pas vraiment glorieux.
2 : Oui, McNeill a créé un train démoniaque dans ses romans. Il a dû avoir la révélation après être resté bloqué 30 minutes entre deux stations dans un petit gris transilien non climatisé et complètement bondé pendant ses vacances d’été à Paris.

AVIS :

Passage bonus de la saga centrale de McNeill, mettant aux prises les frères cousins éloignés ennemis Uriel Ventris et Honsou, The Enemy of my Enemy détaille la manière dont les rescapés impériaux de Déluge d’Acier ont été recrutés par les maquisards de Medrengard, peu avant l’arrivée fracassante du Capitaine Ultramarines disgracié et de son sidekick disgracieux sur la planète des Iron Warriors. Comme souvent pour des travaux de jonction de ce type, l’intrigue ne se révèle pas être des plus palpitantes, le principal intérêt de cette nouvelle résidant en la présence de personnages (normalement/peut-être) connus du lecteur, et que ce dernier aura (peut-être/normalement) plaisir à retrouver. Pour le reste, McNeill fait le job de manière correcte et livre un avant ou arrière-goût de l’enfer baroque et industriel des ZAE et réseaux ferrés de la Blagnac de l’Œil de la Terreur. Pas indispensable, mais loin d’être désagréable, donc.

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Altar of Cyrene – L. Soulban [40K] – #45 :

INTRIGUE :

40K_Altar of CyreneVous êtes-vous jamais demandé ce qui s’était passé juste avant les évènements de la campagne de Tartarus, relatée dans le premier jeu de la série Dawn of War ? C’est à cette question que répond ‘Altar of Cyrene’, et, croyez-moi, ça vaut plutôt le détour. Nous nous retrouvons donc à la surface de cette planète suppliciée, alors que son Exterminatus va bon train. Comme l’Inquisition n’aime rien laisser au hasard1, et que les crimes des citoyens de Cyrene étaient apparemment très très haineux (pensez-vous, ils ont voulu devenir indépendants, les monstres), une simple torpille cyclonique ne saurait faire l’affaire, et alors que les vaisseaux de l’Ordo Malleus font pleuvoir la mort sur le monde condamné, des forces issues des troupes de choc inquisitoriales, des Grey Knights et des Blood Ravens passent les cités de Cyrene au fil de l’épée tronçonneuse2. C’est toujours bon d’avoir un contrôle qualité pour s’assurer qu’on ne tue que des morts.

La caméra zoome sur deux personnages bien connus du hobbyiste, le Capitaine Gabriel Angelos et l’Archiviste Akios. Le premier est très colère (au point d’enfoncer des portes à coups de pied alors qu’il y a un trou dans le mur juste à côté, ce qui attire l’attention de Khorne en personne, vous pouvez en être certains), pour une raison mal définie mais qui porte le nom d’Esmond, et que l’officier Blood Ravens souhaite absolument trouver. Habitué aux coups de sang de son ami, Akios tente de calmer la fureur d’Angelos et de convaincre ce dernier d’évacuer sans tarder la zone, qui deviendra récipiendaire du feu et de la fureur impériaux dans quelques minutes. Rien à faire cependant, Gaby veut absolument mettre la main sur l’objet de son désir, et l’Archiviste accepte de lui servir de chauffeur privé (c’est pratique la prescience quand il y a du brouillard sur la route) pour faciliter sa quête, que l’on devine être de vengeance.

Suivent quelques péripéties martiales, qui verront Carlos et Kyrgios massacrer une bande de psykers mutants (avec toucher gracieux et subtil d’oreillette en prime – osef mais c’est dans le récit, alors profitons-en –), taper la discute avec une escouade de Chevaliers Gris entre deux exécutions sommaires de masse, perdre leur Land Speeder d’un tir de missile bien ajusté, décimer une foule de citoyens (loyaux à l’Empereur, je précise) en colère devant la destruction de leur monde, et finalement rallier à pied le lieu où le fameux Esmond a été localisé par un groupe de Blood Ravens (dont un 2ème Akios, parce que c’était visiblement trop compliqué de varier les noms quand on a un casting de plus de quatre Blood Ravens). Là, Angelos donne son après-midi à son chauffeur, et pénètre seul dans le mémorial de Saint Bellstus, où il trouve sa cible en train de prier3. Et là, mes amis, nous passons en mode psychanalyse car Esmond n’est autre que le père de Gabriel Angelos. Si si.

Nous assistons donc à un dialogue de sourds entre les deux vieillards (Angelos a déjà quelques siècles de service à son actif), le fils reprochant au père, que l’on comprend être le Gouverneur Planétaire de Cyrene, d’avoir mené son peuple à la catastrophe, tandis que de l’autre côté du filet, Papa tance son fiston d’avoir attiré l’attention de l’Inquisition sur l’entreprise familiale. Malgré l’apparente justesse de sa cause (on a vu que les insurgés comptaient quelques mutants bien chaotiques dans leurs rangs un peu plus tôt), Gab’ ressort perdant de cette joute verbale à cause de sa sale manie de ramener tout à lui-même, et de se lamenter en premier lieu de la honte que lui apporte la trahison de sa planète, avant de regretter le massacre de quelques milliards de ses ex-concitoyens. Se souvenant subitement que la zone est sur le point de se faire thermoformer depuis l’orbite, Angelos coupe court au débat et réalise un tour de magie qui serait génial s’il n’était pas nul. Saisissant son pistolet bolter, dans lequel il ne reste plus qu’un bolt, il le tend à son père en lui proposant de se suicider pour mettre fin à sa disgrâce. Ce dernier refuse. Angelos reprend alors son arme, y insère son dernier bolt (parce qu’il était en fait moyennement sûr que son pôpa ne cherche pas à le flinguer plutôt que de s’envoyer en l’air, pas folle la buse), et met fin à la réunion de famille d’une pression de l’index, non sans avoir eu la délicate attention de rappeler le bon souvenir de sa mère, qui, elle, a eu le bon goût de s’euthanasier avec l’arme de son fiston, comme il le lui avait intimé. Le truc jaune se roule par terre en bavant à l’arrière-plan, ça doit être le complexe d’Œdipe de la famille Angelos.

Une fois cette formalité accomplie, le bien nommé dernier fils de Cyrene rejoint son vaisseau, où il est rapidement lavé de toute suspicion par le Grand Maître Grey Knights qui supervisait l’opération. On apprend également que cette petite fouine d’Angelos, une fois le problème de sédition de sa planète connu, ne s’est pas contentée de demander un audit inquisitorial, mais a bel et bien requis la destruction de son monde. Avec des ressortissants pareils, pas besoin d’Arch-ennemi. Laissé un poil songeur par les derniers évènements, Gaby sans famille apprend enfin que l’aide de sa Compagnie a été sollicitée sur Tartarus, monde sanctuaire situé à proximité de l’Oeil de la Terreur et victime d’une invasion Ork en verte et pleine forme. La suite ne sera qu’un jeu d’enfant…

: Et a un goût tout à fait merveilleux. Les bombes qu’elle déverse sur Cyrene ont ainsi la forme de statues de l’Empereur (encore plus classe qu’un âne en béton !). Je suis sûr qu’ils ont dû apprécier en bas.
2 : Et laissez-moi vous dire que les pauvres Cyrenois dégustent plutôt salement. Entre les champs de crucifixion et les grenades à acide, ceux qui ont la chance de se prendre un bolt dans le crâne peuvent s’estimer heureux.
3 : Prier qui, on ne sait pas, car il s’est tout de même détourné de l’Empereur, le bougre.

AVIS :

Lucian Soulban est un personnage mystérieux au sein de la cosmogonie BL, qu’il n’a fréquenté que quelques mois vers le milieu des années 2000. Saoudien d’origine (ce qui ne tombe pas sous le sens avec un tel patronyme), notre homme est une figure du monde du jeu vidéo, qui lui doit quelques scripts de blockbusters tels que Far Cry 3 & 4 et Watch Dogs 2.

Les origin stories ont souvent tendance à être convenues et ennuyeuses, en se contentant de souligner les traits saillants d’un personnage connu et cherchant à les expliquer par quelque évènement traumatisant ayant pris place pendant leur enfance. Celle du Capitaine Gabriel Angelos ne rencontre pas ce type de problème, c’est le moins que l’on puisse dire. Et, dans le cas (peu probable je l’avoue) où le lecteur serait un fan transi de la tête de gondole de l’Adeptus Astartes en version PC, le nom de Lucian Soulban pourrait attirer quelques jurons et malédictions bien sentis, tant l’auteur parvient à faire de son héros un énaurme c*nnard, ce qu’il n’était certes pas dans la campagne de Tartarus. Tour à tour dépeint comme colérique, impulsif, sadique, fourbe et mesquin, Angelos est loin d’être un ange, ce qui en soit n’a rien de répréhensible (la compassion est une faiblesse mortelle à 40K), mais s’inscrit tellement en faux avec le personnage de la série Dawn of War que l’on peut légitiment crier au faux raccord. À côté de son supérieur et ami, Akios apparaît comme un sage et un saint, ce qui rend sa déchéance et l’abnégation de cette tête à claque de Gabriel, d’autant plus contre-intuitive. Le lecteur d’’Altar of Cyrene’ n’ayant pas joué la campagne de Tartarus et auquel on demanderait qui des deux larrons a le plus de chance de passer à l’ennemi pourrait légitimement opter pour le fiston d’Esmond, qu’on ne lui en tiendrait pas rigueur. Bref, la characterisation de Mr Soulban ne m’a pas semblé optimale.

Autre source de mécontentement, la maîtrise du fluff assez hasardeuse dont l’auteur fait preuve au cours de son récit. Qu’il s’agisse d’un Exterminatus lancé alors que des forces impériales (non sacrifiables) sont encore au sol, de la présence de Grey Knights en vulgaires Waffen SS inquisitoriaux alors qu’aucun démon ne pointe le bout de sa corne de toute la nouvelle, de la captation en live du massacre des citoyens de Cyrene1, ou encore la mémoire eidétique défectueuse de notre (anti) héros, le cadre d’Altar of Cyrene’ semble être un ersatz un peu grossier de Warhammer 40.000, résultant d’une vague familiarité de l’auteur avec le lore plutôt que d’une véritable appropriation du second par le premier. L’élément le plus problématique de la nouvelle reste toutefois la relation filiale entretenue par Esmond et Angelos, que le psycho-endoctrinement subi par toutes les recrues Space Marines devrait rendre impossible. Bref, si cette soumission s’avère être indéniablement distrayante pour le lecteur, elle l’est majoritairement pour des raisons peu recommandables, et ne présente donc pas un intérêt des plus marqués.

1 : Soit disant pour effet de propagande et instruction des populations d’autres mondes… Ce qui supposerait que l’Imperium reconnaisse que certaines de ses planètes sont tombées aux mains du Chaos et ont dû être intégralement purgées. Pas terrible pour le moral des troupes. Je pense que c’est un Inquisiteur un peu tordu qui souhaitait réaliser un Top 10 des meilleures hécatombes du Segmentum Terra pour animer le séminaire annuel de son Ordos.

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Rattenkrieg – R. Earl [WFB] – #45 :

INTRIGUE :

WFB_RattenkriegUn vieux Prêtre de Morr fan de jardinage et ami des petits oiseaux voit sa paisible retraite interrompue en pleine nuit par l’arrivée d’un visiteur imprévu. Sous ses abords de clochard odoriférant et plus qu’à moitié fou, le nouveau venu se révèle être un Capitaine mercenaire du nom d’Otto van Delft, ayant fait de la dératisation sa spécialité et son gagne-pain. Ereinté par les épreuves qu’il a traversé au cours des derniers jours, le chien de guerre accepte volontiers la soirée boutanche et anecdotes que lui propose l’aimable ecclésiastique pour apaiser son âme troublée. Nous voilà donc plongés dans le Rattenkrieg, ou guerre contre les rats pour ceux qui n’ont ni fait allemand au collège, ni joué à Return to Castle Wolfenstein, menée par la cité impériale de Magdeburg contre ses voisins du dessous.

La casus belli était tout à fait respectable, reconnaissons-le, la jeune et blonde fille du Bourgmestre de la ville, Freda (son papa s’appelle Gottlieb, by the way) s’étant fait enlever par une bande de Coureurs d’Egouts ayant creusé un tunnel jusqu’à dans l’armoire de sa chambre, au nez et à la barbe moustache de son paternel, trop occupé à s’envoyer la jeune fille au pair pour prêter attention aux crises de terreur nocturne de sa chérubine. Déterminé à la retrouver, Gottlieb engagea un expert en dératisation pour aider sa milice à purger les terriers des envahissantes bestioles, ce qui se passa plutôt bien au début. Avec le recul, Otto réalise que cela aurait dû lui mettre la puce à l’oreille, mais pour une fois qu’une expédition dans les souterrains ne se termine pas en eau de boudin au bout de deux heures, pourquoi s’en plaindre, hein ?

D’autres indices incriminants a posteriori furent les cartes très détaillées des galeries Skaven que Gottlieb parvint on ne sait trop comment à fournir à ses hommes, leur permettant de nettoyer plusieurs colonies mineures avec une facilité insolente. Confrontés à rien de plus méchant qu’une meute d’Esclaves à moitié moribonds, Otto et ses miliciens remportèrent leurs premières escarmouches sans coup férir, mais ce n’était malheureusement qu’un gigantesque traquenard mis en place par un ennemi beaucoup trop sournois pour notre brave Capitaine. La bascule eut lieu lorsqu’un de ses lieutenants, Krinvaller, fut retrouvé seul et à l’agonie dans une galerie, serrant dans ses poings une des précieuses cartes utilisées par les impériaux. Le corps dévoré par les poisons utilisés par les Assassins lui ayant planté un surin entre les côtes quelques instants plus tôt, Krinvaller délivra un message incohérent à son supérieur, l’avertissant de l’échec de leur mini croisade et le suppliant d’empêcher Gottlieb de consulter ces fameuses cartes. Otto n’eut pas le temps de se creuser la tête sur ce message cryptique avant qu’une nouvelle attaque ne se produise, celle-ci menée par des Vermines de Choc. Malgré les ravages causés par le tromblon custom de notre héros (affectueusement surnommé Gudrun), l’affrontement se transforma rapidement en débandade échevelée, les humains étant canalisés par leurs adversaires jusqu’à une chambre souterraine afin de permettre l’utilisation de lance-feu dans des conditions optimales.

Fort heureusement, le joueur Skaven fit une série d’incidents de tir au moment de lancer les dés de touche, causant plus de dégâts parmi les Guerriers des Clans amassés pour le son et lumière promis par leur Technomage et à la structure de la caverne qu’aux quelques miliciens encore debout à ce stade avancé de la déroute impériale. L’éboulement qui s’en suivit força les deux camps à stopper les hostilités, au moins temporairement, et si Otto parvint à s’extirper par miracle des décombres et à regagner la surface, aucun de ses compagnons ne fut aussi chanceux.

Cela n’empêche pas le Capitaine déterré et déterminé de repartir aussi sec vers Magdeburg une fois son récit et la bouteille de gnôle du Prêtre terminés. Bien que sa réputation soit aussi ruinée que sa garde-robe, nous avons affaire à un professionnel, qui utilisera toutes ses ressources et ses dernières forces à mener à bien sa mission. C’est beau. La détestation qu’il voue à la noble race anthropomurine n’a en outre qu’été renforcée par la réalisation de la manipulation dont il a fait l’objet, les cartes lui ayant été remises ayant guidé ses forces vers trois clans mineurs, dont l’extermination a fait les affaires d’un quatrième clan, ayant probablement tout manigancé depuis le départ. Et à ce propos…

Début spoiler…Le vieux Prêtre ne tarde pas à comprendre pourquoi son hôte lui a laissé ses cartes au moment de partir. Un examen approfondi de ces dernières permet en effet d’établir sans l’ombre d’un doute qu’elles ont été faites avec de la peau humaine, et très probablement celle de la pauvre Freda, dont l’enlèvement a déclenché la malheureuse Rattenkrieg. Ou comment joindre l’utile à l’agréable, Skaven style…Fin spoiler

AVIS :

Robert Earl fait partie des auteurs de la BL maîtrisant particulièrement bien la mise en scène de l’insidieuse menace Skaven dans leurs écrits (je place C. L. Werner dans cette même catégorie), et il le démontre dans ce ‘Rattenkrieg’ efficace et atmosphérique. Plutôt que de nous abreuver d’une litanie de scènes d’actions sanguinolentes, il fait le choix de relater cette campagne condamnée dès sa première heure à travers une série de flashbacks, ce qui lui permet de couvrir tous les événements marquants de cet affrontement souterrain d’une manière concise et prenante. La petite révélation finale, si elle n’approche pas grand-chose à l’intrigue à ce stade, est une addition narrative bien trouvée, soulignant avec à propos à quel point les Skavens sont infréquentables. La seule chose que je peux reprocher à cette histoire est l’importance un peu trop grande accordée à des personnages qui finalement ne servent pas à grand-chose dans le déroulé du récit, qu’il s’agisse du Prêtre de Morr (qui bénéficie de sa petite scène d’introduction « au jardin », pas très utile à mes yeux) ou du lieutenant Gunter, qui disparait purement et simplement de la nouvelle à un certain moment.

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As Dead as Flesh – N. Kyme [WFB] – #45 :

INTRIGUE :

WFB_As Dead as FleshAlors qu’ils purgeaient tranquillement1 sereinement quelques Zombies dans une localité non identifiée mais définitivement mal famée de l’Empire, la bande de Templiers de Morr du Capitaine Reiner doit composer avec les blessures assez sévères de quelques-uns de ses membres, forçant la sinistre compagnie à faire grand train vers la bourgade la plus proche (Hochsleben) afin de confier ces derniers aux bons soins de l’hospice de Shallya qui s’y trouve. L’ambiance n’est toutefois pas rose dans le patelin, comme le rapporte le diacre alcoolique (Dolmoth) qui tient la permanence morrienne du lieu. Notre homme a des raisons de forcer sur la piquette en effet : tous les jours depuis plusieurs mois, un cadavre frais, et la plupart du temps, délesté d’une partie de son épiderme, est déposé sur les marches de son office, ce qui lui fait faire des heures supplémentaires excessives. N’ayant rien d’autre à faire en attendant que leurs blessés soient remis ou rejoignent le big boss, Reiner et ses sbires (Mikael, Halbranc, Kalten) offrent leur aide afin de débusquer le sinistre Reaper qui tourmente la cité.

L’enquête commence par une autopsie en bonne et due forme, réalisée au sous-sol du temple de Morr par un acolyte dénommé Merrick, qui s’est trouvé un bon petit business au vu du taux de criminalité de Hochsleben. Le malheur des uns… Notre homme n’a toutefois pas grand-chose de neuf à apporter aux investigations, le cadavre présentant toutes les marques habituelles de ce farceur de Reaper. On apprend toutefois au détour de la conversation, que le doc’ a récemment perdu son fils, piétiné par la brigade montée impériale pendant une manifestation de surcôts flaves s’étant mal terminée. Triste. Tout le monde ne s’appelle Felix Jaeger et ne dispose pas d’un pote Tueur Nain imbutable et imbitable pour lui servir de garde du corps. Utilisant les quelques indices glanés au cours des mois précédents et de leur solide bon sens, les Templiers procèdent à quelques interrogatoires de suspects, dont le tanneur de la ville (Lothmar), qui vit reclus dans son échoppe et arbore un masque de cuir pour camoufler les graves brûlures que ses activités professionnelles lui ont valu. Le délit de faciès n’étant pas combattu dans l’Empire, le vaillant petit tanneur est à deux doigts de finir en coupable tout désigné, lorsque de nouveaux évènements viennent relancer l’enquête.

Alors qu’ils se détendaient à l’auberge après cette rude journée, les chevaliers de Morr sont alertés par les cris perçants d’une honnête péripatéticienne, qui a croisé un individu portant ce qui lui a semblé être un cadavre sur son dos. Comme quoi, si on n’est pas très malin à Hochsleben, on est au moins ponctuel. La course poursuite qui s’en suit, mettant aux prises Mikael et Halbranc avec le mystérieux portefaix, se solde toutefois par un échec complet pour les nobles Templiers, le second s’écroulant par la faute d’un point de côté après quelques pas, et le premier faisant de même lorsque sa proie réussit à le poignarder au détour d’une allée, ce qui le met KO pour quelques temps. Il a toutefois la présence d’esprit d’arracher à son agresseur une partie de ses effets, qui se révèlent être un masque très similaire à celui porté par le tanneur. L’enquête progresse ! Se réveillant à la taverne (à croire que l’hospice local était bondé), Mik’ dégaine toutefois l’arme fatale des guerriers de Morr et des auteurs peu inspirés, une bonne vision prophétique des familles, qui lui a montré toute sa compagnie zombifiée. C’est plus qu’il n’en faut pour convaincre notre héros, accompagné du prêtre de la bande (Sigson), de se lancer à la poursuite de leurs frères d’armes afin de s’enquérir de leur bonne forme (en commençant évidemment par les valides, parce que les comateux peuvent se défendre tous seuls, c’est bien connu)…

Début spoiler…Pendant ce temps, Reiner et Cie se sont rendus chez le fameux Lothmar pour une petite explication de texte, mais encore une fois, l’entreprise s’est terminée par des plaies et des bosses, l’intraitable Capitaine mordant à son tour la poussière sous les horions d’un guignol maléfique. Rattrapé par Mikael et Sigson, qui ont croisé Halbranc en compagnie de Merrick sur le chemin (mais non, c’est pas compliqué), Reiner explique à ses hommes que Lothmar était déjà mort à son arrivée, ce qui le retire de la liste des suspects2. Cependant, la disparition de Kalten, qui accompagnait son supérieur sur les lieux, constitue une nouvelle énigme que les Maures doivent résoudre. Heureusement, Sigson connaît un rituel qui permet aux enquêteurs de mener un interrogatoire express de feu Lothar, révélant un indice capital : son tueur puait. Aha.

Sur ces entrefaites, débarquent de nouveaux personnages (comme si l’intrigue n’était déjà pas assez embrouillée comme ça), un Prêtre Guerrier de Sigmar (Rathorne) et son sidekick renifleur Vislen. Il s’avère que Rathorne est également sur la piste du Reaper, et, plutôt que de se présenter à ses confrères de culte, a préféré suivre leurs progrès du coin de l’œil, jusqu’à maintenant. Son aide, ou plutôt celle de son larbin, s’avère toutefois précieuse car elle permet d’identifier l’odeur qui colle aux habits de Mikael comme celle de liquides d’embaumement. Bref, c’est Merrick le coupable, comme tout lecteur avec deux neurones fonctionnels l’avait compris dès l’instant où Kyme avait révélé la mort tragique du fils de ce dernier.

La nouvelle peut enfin entrer dans sa phase finale, avec les héros en état de combattre faisant s’abattre leur juste colère sur le repaire du malfaisant. Pour équilibrer un peu les choses, le doc’ peut compter sur l’appui de l’entité maléfique qu’il a réussi, on ne sait trop comment, à ramener depuis les morts, et qui lui a promis son aide pour ressusciter son fils en échange de cadavres frais (mais jamais assez, si cela fait trois mois que Merrick surine à tout va). La baston qui s’engage se termine comme de juste par un incendie généralisé du temple de Morr, qui a raison de l’hôte de Voldemorr (ce pauvre Kalten), et permet donc à Hochsleben de refermer cette page douloureuse de son histoire. Cependant, l’absence du cadavre de Merrick dans les décombres du lieu saint, et la vision fugace de ce dernier respirant une mystérieuse fumée noire3 exhalée par un Kalten possédé, fait craindre le pire à nos zélés Templiers…Fin spoiler

1 : Difficile d’être tranquille quand on se bat contre des adversaires capables de percer l’acier d’une cuirasse à main nue. Les Zombies de Kyme ont pris des stéroïdes, ce n’est pas possible autrement.
2 : En fait, le tanneur était albinos, ce qui explique pourquoi il ne sortait pas le jour. On s’en fout au final mais Kyme tenait à ce détail, donc autant le préciser ici.
3 : Le qualificatif est important, car au milieu d’un incendie, des fumées noires classiques, ce n’est pas ce qui manque.

AVIS :

Avec ce As Dead as Flesh, Kyme livre une nouvelle réussissant l’exploit d’être à la fois trop simple et inutilement complexe dans son intrigue. D’un côté, l’enquête à laquelle se livrent les héros se trouve être résolue par le lecteur un minimum familier des techniques narratives du genre (« oh, un personnage secondaire sur lequel l’auteur nos donne des précisions nous permettant de l’identifier facilement par la suite, et disposant d’une bonne raison d’en vouloir à ses concitoyens… ») moins d’une page après avoir été commencée. De l’autre, les allers et venues de la galerie conséquente de personnages convoqués par Nick Kyme pour soutenir son propos brassent de l’air et des pages, et leurs chassés croisés occupent la majeure partie du propos. Si on ajoute à cela le fait que les personnages en question n’ont pas grand-chose d’intéressant ou d’attachant (même si la pusillanimité de Mikael, qui a peur de beaucoup de choses depuis le jugement de Reiner jusqu’à la grosse voix du tavernier, se révèle être une caractéristique « mémorable »), on se retrouve avec une sorte de mauvaise pièce de théâtre de boulevard tragico-fantastique, mélange assez indigeste et surtout, très peu intéressant. Je ne peux donc pas assez conseiller aux amateurs du genre de se pencher sur les travaux, assez similaires dans l’esprit mais beaucoup plus aboutis dans la forme, que Josh Reynolds a consacré au très saint et très violent Ordre de Manann, afin de plonger dans le quotidien trépidant de Templiers impériaux. Malheureusement pour Kyme, less is Morr…

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Engage the Enemy – J. Smith & H. Heckel [40K] – #45 :

INTRIGUE :

40K_Engage the EnemyThokar, Prêtre Loup des Space Wolves, emmène une petite force de fils de Russ à la surface d’un monde jungle où l’Imperium livre bataille aux hordes chaotiques d’Abaddon. S’attendant à une forte résistance de la part des Iron Warriors auxquels il souhaite contester le champ de bataille, Toto s’étonne de ne trouver que des cadavres de renégats, autour desquels flotte une odeur fauve bien caractéristique. S’il apparaît rapidement que des Wulfens trempent dans ce mystère (c’est bien la seule chose dans laquelle ces chiens fous acceptent de s’immerger), un rapide décompte des Astartes présent sur le terrain permet d’établir sans doute possible qu’aucune des charges de Thokar n’a perdu les pédales. Après avoir relevé des éclats de peinture d’un gris très particulier (c’est Les Experts : Fenris, cette nouvelle), le Prêtre Loup finit par comprendre que c’est la légendaire 13ème Compagnie qui est responsable des malheurs des Irons Warriors. Et un petit coup de patte de la part de leurs lointains cousins ne sera pas de trop lorsque les Marines chaotiques lanceront leur contre-attaque…

AVIS :

Petite nouvelle sans prétention ayant presque plus sa place dans un encadré fluff du Codex Eye of Terror que dans un numéro d’Inferno !, ‘Engage the Enemy’ se révèle être un compte-rendu romancé d’un accrochage sans enjeu (ce qui est tolérable) ni tension narrative (ce qui l’est moins) entre une bande d’Iron Warriors totalement à côté de leurs augmétiques1 et une force de Space Wolves dont le meneur tient plus du chien renifleur que du loup alpha. De là à dire que Thokar est en un, il n’y a qu’un pas que je laisse à chacun le soin de franchir en son âme et conscience. Sur la forme, la première soumission de Lee Lightner (l’incarnation littéraire de Harry Heckel et Jeff Smith) n’est guère plus remarquable, ou alors pas à son avantage, le style parfois répétitif (Wolf lord, vous avez dit wolf lord ? Comme c’est wolf lord), parfois abrupt du duo ne contribuant guère à hameçonner le lecteur. Passe encore que ça ne dure que 8 pages, plus (et notamment ‘Sons of Fenris’ et ‘Wolf’s Honour’) aurait sans doute été déplacé. De l’habitude naît l’ennui, mais de l’hébétude naît l’inuit. Ce qui ne veut rien dire. Comme cette nouvelle.

1 : Mentions spéciales jumelées aux Champions Dalloc et Kurnos, le premier pour s’être montré plus captivé par les jeux de lumière sur sa griffe énergétique que son environnement immédiat – ce qui lui fit perdre la tête –, le second pour avoir sagement attendu que la mort vienne le prendre dès l’instant où il a croisé la route des loubards du Warp.

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Menshad Korum – C. S. Goto [40K] – #46 :

INTRIGUE :

40K_Menshad KorumL’Exarque Vlalmerch du clan Saeemrar a été assassiné dans son sanctuaire de Saim-Hann, et sa pierre d’âme volée. Le défunt n’était pas seulement un seigneur de guerre respecté, mais également le Menshad Korum, ou Guerrier Perdu, statut honorifique autant qu’horrifique, car reflétant les irrépressibles penchants meurtriers du bonhomme. Pratique pour mener ses troupes à la victoire et mettre le feu (Vlalmerch a fait trois siècles de service dans le temple Dragon de Feu avant de retourner au bercail) au dancefloor, moins adapté en revanche à une paisible retraite dans le réseau d’infinité servant d’EHPAD aux Eldars canés. C’est pourtant ce que ses assassins, l’Exarque Guerrier Scorpion Arbariar et l’Arccube (mi-Archonte, mi-Succube, c’est une Guerrière Concept) Bureea, ont derrière la tête1, et elles se hâtent lentement vers le cœur du Vaisseau Monde pour aller plugger la babiole sur le disque dur de Saim-Hann. Pourquoi me direz-vous ? Eh bien, c’est compliqué et nébuleux, mais j’ai cru comprendre que c’était l’option la moins pire se présentant aux conjurés, averties par des visions troubles de la corruption totale de Vlalmerch et donc du danger de 1) le laisser vivre et 2) laisser sa pierre d’âme enchâssée dans son armure rituelle, où elle pervertirait à coup sûr son successeur. Les clans Chevaucheurs Sauvages étant fondamentalement opposés à la décharge sauvage de déchets dans l’espace, l’option de balancer discretos le caillou par un hublot ne fut pas retenue, déclenchant au bout du compte une guerre civile entre Saeemrar et Scorpionidas (Arbariar et Bureea ayant eu l’excellente idée de partir en mission commando avec des shurikens en forme de scorpion, permettant aux suivants de Vlalmerch d’identifier les coupables en deux secondes).

Avant de commencer la vendetta que le meurtre de V’la l’Merch impose, il faut toutefois offrir au défunt des obsèques dignes de son rang, et surtout, choisir son successeur parmi les guerriers du clan. Cette prérogative revient normalement à un Prescient, mais voyant que personne n’écoute ses mises en garde, ce dernier lâche rapidement l’affaire et se désintéresse du sujet, faisant de Quereshir, fils de Vlalmerch, l’heureux nouveau possesseur de l’armure paternelle. Après une session d’essayage compliquée, relevant plus de l’enfilage de camisole de force enduite de poil à gratter que du subtil alignement des pierres esprits des anciens porteurs avec l’esprit de l’impétrant, c’est enfin l’heure de la revanche, et Quereshir emmène ses forces toquer à la porte du temple des Scorpionidas pour une petite explication de texte. S’en suit une boucherie sans nom ni subtilité, au cours de laquelle tombent un grand nombre d’Eldars, y compris Bureea (la Psyker au mental le plus fragile qui soit) et Lureeal (le second de Quereshir) qui le valait bien alors que son armure ne valait, elle, rien.

Au bout du suspense, ou en tout cas de la dernière ligne droite vers le port USB central, Quereshir et Arbariar finissent par s’affronter (quand je vous disais que cette dernière n’avait pas une grosse pointe de vitesse, je n’exagérais pas2), et le Menshad Korum sort logiquement vainqueur de ce duel inégal. Il faut dire que quand il n’y a pas de piliers pour renvoyer les shurikens, c’est tout de suite plus dur pour Arbie. Malgré les supplications de cette dernière, Quereshir récupère la pierre paternelle et la replace sur son armure, ignorant sa noirceur de mauvais aloi…

Début spoiler…Et, ô surprise, il se fait immédiatement souljacker par la présence dérangée de Vlalmerch, confirmant les craintes de la désormais défunte Arbariar. À l’autre bout de la galaxie, cette bonne vieille Lelith Hesperax, qui avait été vaincue il y a un siècle de cela par l’alliance des clans Saeemrar et Scorpionidas, s’interrompt un instant entre deux décapitations de Succubes (une pratique sadomasochiste extrême mais courante chez les Drukharis) et réception de brouillard parfumé au terreau pour partir d’un grand rire machiavélique. ‘Twas her all along, bien sûr, et la corruption de Vlalmerch autant que la guerre civile ayant endeuillée Saim-Hann sont de son fait. Demandez pas comment par contre, car la bougresse s’est contentée de se faire fesser en beauté face caméra par Vlalmerch et Arbariar lors de leur précédent affrontement, ce qui n’explique pas comment son plan diabolique a pu se mettre en place. À moins que le pacte qu’elle a conclu avec Slaanesh y soit pour quelque chose. Wait… Les Eldars Noirs n’ont peut-être pas de Psykers (enfin si, ils ont Lelith WAIT…), mais ils maîtrisent l’art cryptique du TGCM. Ca se vaut, moi je dis.Fin spoiler

1 : Vlalmerch ayant lui derrière la sienne un éclat de shuriken lui ayant été fatal, la redoutable technique du ricochet sur pilier de moelle spectrale étant venue à bout de ce guerrier suprême, mais joueur de billard médiocre.
2 : Les Saeemrar ont tout de même eu le temps d’organiser les funérailles de leur chef, les essayages de son successeur, et l’assaut sur le temple Scorpionidas, sans qu’Arbariar soit foutue de voyager jusqu’au cœur de Saim Hann avec sa bécane à vitesse sonique. Je la vois comme ça hein.

AVIS :

Goto s’embourbe dans des facilités scénaristiques aussi inexplicables que regrettables avec ce ‘Menshad Korum’, venant ruiner les sincères efforts qu’il déploie en introduction pour dépeindre la culture eldar (fonctionnement de la Voie et des temples aspects, importance du psychisme, géopolitique des clans de Saim-Hann…). On est en droit de considérer cette tentative comme pas très subtile, les personnages se balançant des vagues d’émotions dans les gencives comme nous autres pauvres Mon-keigh nous enverrions des seaux d’eau à la figure, mais on doit au moins reconnaître que Goto a essayé de dépayser son lectorat (sans respecter le background établi, certes). Malheureusement, tant l’intrigue que son déroulé s’avèrent rapidement problématiques, empêchant de prendre longtemps au sérieux cette histoire à la fois bêtement simple et stupidement complexe. Le tout donne l’impression de servir d’introduction à un arc narratif qui aurait été développé ailleurs par l’auteur (histoire de comprendre le rôle d’Hesperax dans la choukhroute et l’identité de la mystérieuse divinité avec laquelle elle a conclu un pacte1), et à en croire certains retours de fans, ce serait plus ou moins le cas2. Bref, une nouvelle qui ne viendra pas relever la réputation de notre homme parmi les amateurs de GW-Fiction, ce qui est dommage car il y avait un potentiel assez intéressant dans cette histoire.

1 : D’instinct, j’aurais dit Slaanesh, mais la description qu’en fait Goto laisse plutôt penser à Nurgle.
2 : Il semblerait que ‘Menshad Korum’ ait été intégré, au moins en partie, dans le roman ‘Warrior Coven’ (en piste pour le prix du roman de la BL à la couverture la plus moche).

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Hetzau’s Follies – N. Long [WFB] – #46 :

INTRIGUE :

Stationné dans la petite ville de Vulsk, à la frontière du Kislev, après avoir été glorieusement et légèrement blessé lors d’un affrontement contre les hordes nordiques, le Pistolier Reiner Hetzau, rat de taverne devant l’éternel, s’ennuie ferme pendant sa convalescence. Accompagné de son stagiaire (Karl Hennig), qu’il se fait un point d’honneur d’initier aux joies et plaisirs de la vie de soldat en campagne, notre héros doit de plus composer avec des problèmes de trésorerie conséquents, la paie promise par le Comte Jurgen ayant été perdue corps et bien dans l’attaque du wagon du trésorier payeur par une bande de Maraudeurs, qui auront bien mérités leur qualification pour le coup. Désespérant de pouvoir mener le train que son sang (bleu) lui réclame mais que sa bourse (plate) lui refuse, Hetzau voit l’arrivée en ville d’un convoi de grands blessés, mené par une frêle et plutôt mignonne sœur de Shallya, comme l’occasion de joindre l’utile le vertueux à l’agréable, et propose donc à la pauvre Anyaka son aide après que l’accès à Vulk lui ait été refusé par un butor de Sergent, plus préoccupé par la santé publique du campement impérial que par le malheur de quelques moribonds.

Ayant négocié auprès d’une mère maquerelle de sa connaissance la sous-location des étables de sa taverne, Hetzau supervise l’installation d’Anyaka et de ses charges dans les locaux réquisitionnés, empochant au passage, en plus de la reconnaissance émue de la pauvresse, une partie non négligeable du contenu de la cassette qu’elle a prise avec elle au moment du sac de son hospice par les Kurgans. Dépensant rapidement leur pécule en spiritueux et accorte compagnie, les deux Pistoliers reviennent rapidement s’enquérir du bien-être de leur connaissance (un peu) et trouver un nouveau moyen de la délester de ses espèces (surtout). Coup de bol, Anyaka semble toute disposée à écouler son magot en récompense de menus services que les deux compères sont heureux de lui rendre, comme faire accepter un Kislevite très abîmé à l’hôpital de campagne impérial ou l’approvisionner en simples auprès de la guérisseuse locale. La suspicion d’Hetzau est toutefois attisée lorsque la naturopathe kislevite l’informe que la liste de courses remise par Anyaka n’est composée que de substances très toxiques, et donc plutôt impropres à la consommation, sans parler de leurs vertus curatives des plus discutables. De plus, la crise que Baba Yaga pique quand l’affable impérial cherche à la payer avec un anneau hérité d’Anyaka, et que la mégère reconnaît comme étant la possession d’un Boyar local, tombé au combat contre le Chaos et enterré avec son bien il y a quelques temps, achève de convaincre notre fin limier que quelque chose ne tourne pas rond…

Début spoiler…De retour à l’étable/mouroir d’Anyaka, Hetzau cherche à confronter cette dernière, mais la promesse d’une récompense en nature de ses bons et loyaux services susurrée au creux de son oreille suffit à rediriger suffisamment de sang du cerveau au… de notre héros pour qu’il oublie soudainement toutes ses réserves envers la sœur de Shallya, et accepte à nouveau de lui rendre service. Il s’agit cette fois-ci de charrier deux cadavres vers le lieu de leur dernier repos, la décharge morricipale pour le premier, et le cimetière local pour le second. Si le début de la mission se déroule sans coup férir, les deux croque-morts amateurs sont témoins sur le chemin de l’ossuaire d’un spectacle inquiétant : le repêchage du puits de la ville du cadavre putréfié et ballonné d’un des soldats qu’Anyaka avait sous sa garde, ce qui ravive aussi sec les soupçons de ce galant d’Hetzau. Faisant volte-face pour aller demander des explications à leur commanditaire, les Pistoliers sont ralentis sur le chemin du retour par l’explosion de leur dernier macchabée, qui répand une nuée de Nurglings aux alentours.

Tout à fait convaincu de s’être fait rouler, ce qui le chagrine beaucoup, Hetzau arrive finalement aux écuries, où il trouve l’ingénue Anyaka en pleine séance de naturisme hardcore, à concocter une tisane un peu spéciale sur son brasero en rendant hommage à Nurgle. Bref, c’est la mouise. Désireux de corriger le tir, ce qui pour des Pistoliers est une qualité première, Hetzau et Hennig se lancent à l’assaut de la bougresse, mais l’invocation massive de Nurglings que cette dernière fait passer en irrésistible (on est à Warhammer Fantasy Battle, notez bien) a bientôt raison du sidekick, grignoté à mort par les Schtroumpfs du Chaos, et retarde suffisamment Hetzau pour permettre à la cultiste de s’échapper de l’écurie et aller emmener sa marmaille s’encanailler dans la taverne toute proche, avec des résultats déplaisants pour les clients de cette dernière. Suivant malgré tout de près, notre héros arrive presque à acculer (le préfixe est important) Anyaka dans une alcôve, mais cette garce arrive à se faire passer pour la pauvre sœur de Shallya qu’elle prétend être auprès d’une paire de chevaliers en maraude, qui voient donc d’un mauvais œil les velléités féminicides entretenues par Hetzau envers sa presque ex.

Finalement, après quelques péripéties et passes d’armes effrénées, le Pistolier arrive à neutraliser la sorcière en la pendant haut et court à une poutre de l’étable en feu. Malheureusement pour lui, ce haut fait se révèle être difficile à justifier auprès des autorités compétentes, le corps d’Anyaka disparaissant dans les flammes avec toutes les preuves matérielles de sa duplicité, et faisant d’Hetzau le coupable tout désigné des forfaits perpétrés par cette dernière. La nouvelle se termine donc sur la vision morose de notre héros attendant dans sa cellule sa prochaine exécution pour crime de haute trahison et propagation épidémique. Ceci dit, Hetzau est un vrai disciple de Ranald, et il n’y a pas de mauvais pas duquel il ne saurait se tirer si on lui autorise un jet de persuasion. Et ça tombe bien, son geôlier est une vieille connaissance…Fin spoiler

AVIS :

Introduction de fort bon aloi livrée par un Nathan Long, alors nouveau contributeur de la Black Library, à son personnage fétiche de Reiner Hetzau et à la série des Black Hearts, Hetzau’s Follies est un modèle de nouvelle d’action et d’aventure prenant place dans le Vieux Monde. Long parvient en effet à cocher toutes les cases du genre avec bonheur et panache, combinant une présentation de son héros et de la situation qui l’a mené à rejoindre les Black Hearts, avec une investigation mâtinée de combats menée tambour battant dans l’univers sinistre et envoûtant de Warhammer Fantasy Battle. Qui plus est, Hetzau’s Follies fonctionne réellement comme une soumission indépendante, et, bien que la nouvelle ait été intégrée comme chapitre introductif du premier tome de la série des Black Hearts, Valmir’s Bane, peut être lue indépendamment de ce dernier sans donner l’impression d’avoir été brutalement arrachée à une œuvre plus conséquente, ce qui arrive malheureusement assez souvent quand on considère les nouvelles « introductives » de la BL.  Cela n’a peut-être l’air de rien pour le lecteur non familier des standards habituels de cette dernière, mais laissez-moi vous dire que cette maîtrise narrative place notre homme dans le haut du panier des contributeurs de la maison d’édition de Nottingham, et vous tenez avec ce Hetzau’s Follies un échantillon tout à fait représentatif de sa prose efficace autant qu’inspirée. À consommer sans modération (comme sa série Black Hearts d’ailleurs), mais soyez prévenus que le retour à l’ordinaire de la Black Library risque d’être difficile…

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Gardens of Tycho – D. Abnett [40K] – #46 :

INTRIGUE :

40K_Gardens of TychoLa morne vie du Magos Biologis désoeuvré (maintenant qu’il a terminé la taxonomie de Gershom depuis belle lurette, voir ‘The Curiosity’) Valentin Drusher est interrompue un soir par l’arrivée imprévue d’un agent de l’Arbites dans son humble logement. Croyant que ce sont ses activités illicites de professeur particulier d’aquarelle de la fille d’un maffieux local – alors que l’Administratum l’emploie déjà et interdit formellement le cumul des emplois ! – qui lui valent cette visite, le timide Drusher se voit déjà condamné à perpétuité en punition de ce crime odieux, et suit sans broncher l’officier Falken jusqu’au poste, situé dans la ville en ruines de Tycho. C’est très dommage car son protecteur lui avait donné un beau bout de brisket en extra cette fois-ci, mais que voulez-vous, nul ne peut échapper à la loi.

Il s’avère au final que notre héros a été appelé en renforts par une ancienne connaissance commune (de lui et de vous, lecteur instruit) : Germaine Macks. Simple adjointe au moment des faits de ‘The Curiosity’, sept ans plus tôt, Macks a pris du galon depuis et est maintenant en charge du maintien de l’ordre à Tycho, cité ravagée par les affres de la guerre civile. Depuis quelques temps, des cadavres portant des blessures similaires et ayant été en partie consommés s’accumulent dans la morgue locale, et Macks soupçonne un des pensionnaires exotiques du zoo de Tycho, tombé en deshérence pendant le conflit, d’être responsable de ces meurtres. Pour vérifier cette intuition, elle a jugé bon de faire appel à son vieux copain Drusher, sommité incontestable en matière de grands prédateurs. Bien que le Magos ne soit d’abord pas emballé par la proposition, la perspective d’arrondir un peu ses fins de mois et de passer du temps avec son lointain crush germain le convainquent rapidement de mettre ses compétences spéciales au service de l’oie et du jars de l’ordre.

Après un rapide examen du cadavre le plus frais du lot, littéralement défiguré par une blessure à la précision chirurgicale, Drusher et Macks enchaînent les visites au zoo abadonné (so romantic), les inspections de scènes de crime (even more romantic), et les nuits sur le canapé défoncé du poste (marry me already), jusqu’à ce qu’enfin se présente une occasion de coincer l’insaisissable tueur (possiblement un carnodon de Gudrun), après qu’un junky terrorisé ait appelé les Arbites à l’aide suite à des bruits suspects à l’étage du dessus de son squat…

Début spoiler…L’arrivée des forces de l’ordre est toutefois trop tardive pour permettre à la victime, une femme âgée qui vivait seule, de s’en tirer en un morceau. Si le cadavre porte bien la trace de consommation par un grand carnivore comme le carnodon, Drusher remarque cependant des divergences majeures avec les corps précédemment inspectés. Son travail est toutefois interrompu par le meurtre brutal d’un des Arbites qui était parti inspecter les alentours, proprement découpé à son tour par le tueur en série. Par chance, Drusher parvient à apercevoir ce dernier au moment où il prend la fuite, et conclut de manière définitive que ce n’est pas grumpy cat le coupable, mais bien un individu humanoïde, qu’il convient maintenant d’empêcher de nuire.

Cette réalisation tombe au plus mal, car Falken – malgré son alcoolisme notoire – réussit à abattre le fameux carnodon (qui avait vu de meilleurs jours) échappé du zoo lors d’une patrouille de routine. Convaincus qu’ils sont venus à bout du meurtrier, les Arbites ne sont guère intéressés par les doutes de leur expert animalier, jusqu’à ce Drusher démontre à Macks que les victimes peuvent être classées en deux catégories : une minorité a bien été tuée, ou au moins dévorée, par le carnodon grabataire et opportuniste que Falken a changé en descente de lit ; mais la majorité, dont les corps ont été laissé intacts mis à part leur défiguration clinique, peut être attribuée au mystérieux rôdeur entraperçu par Drusher. Une fois les victimes de Diego sortis de l’équation, on se rend compte que le second tueur opère sur un périmètre parfaitement circulaire, comme s’il était programmé pour le faire…

Début spoiler 2…Et c’est en effet le cas, car c’est un Serviteur de combat détraqué qui se trouve être responsable des assassinats, commis avec les deux tronçonneuses qu’il a montées au bout des bras. Chargé de protéger le bâtiment central de l’Administratum pendant la guerre civile, et oublié là par les belligérants après la fin de cette dernière, le brave cyborg a continué à châtier les misérables pénétrant dans son périmètre assigné. Qui peut le blâmer pour cela ? Au terme d’une traque stressante et mortelle pour la moitié des collègues de Macks, l’homme machine est enfin mis hors service, mettant un terme à ses déprédations… et signant le début de la romance qu’on attendait tous entre le distingué Magos et la flic dure à cuire. Ils se marièrent (brièvement) et eurent beaucoup d’enfants emmerdes…Fin spoiler

AVIS :

Dan Abnett fait reprendre du service au Magos Biologis Valentin Drusher et à sa coriace partenaire Germaine Macks dans ce ‘Gardens of Tycho’, qui reprend la recette du succès de ‘The Curiosity’ et nous livre une nouvelle enquête animalière-mais-en-fait-c-est-plus-compliqué-que-ça, ma foi fort réussie. Comme précédemment, Abnett parvient à mélanger savamment investigations policières un peu gore, mise en scène du quotidien d’une planète lambda de l’Imperium, et interactions entre personnages aussi désabusés qu’attachants, pour un cocktail final d’une très grande efficacité. On ne saura jamais si l’arrêt brutal de la publication d’Inferno! au numéro #46 (où cette nouvelle figurait) est venu mettre un terme prématuré aux plans que Dan Abnett avait pour cette paire mal assortie mais détonnante, mais il convient en tout état de cause de savourer la courte1 carrière de Magos Valentin Drusher comme héros de la Black Library. C’est de la bonne.

1 : Bien des années plus tard, Abnett remettra Drusher et Macks sur le devant du Daniverse dans ‘The Magos’, où ils se feront recruter par un Eisenhorn très très rogue pour enquêter sur une série de disparitions impliquant des ursidés grognons.   

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Sickhouse – C. L. Werner [WFB] – #46 :

INTRIGUE :

WFB_SickhouseSur la piste du voleur Riano, parti se planquer dans l’arrière-pays de Mirigliano après ses derniers exploits, Brunner se retrouve contraint de coopérer avec un collègue chasseur de primes (Sabarra), lui aussi à la recherche du fugitif. Frappée de plein fouet par une épidémie de varicelle fièvre rouge, la région grouille en effet de cultistes de Nurgle menés par leur zozotant champion Pulstlitz, bien décidé à raser l’hospice de Shallya local pour la plus grande gloire de papy Prout.

Un peu barbouillé suite à un échange de fluides avec un Pestigor très entreprenant, Brunner n’a d’autre choix que de se rendre lui aussi à l’hospice en question, où il tombe sur une vieille connaissance (Elisia), lui tenant toujours un peu rigueur de l’avoir utilisée pour mener à bien un contrat précédent. L’inflexible chasseur de primes réussira-t-il à vaincre Ebola à temps pour empêcher les cultistes de pourrir la moquette du lieu saint avec leurs gros pieds boueux ? Parviendra-t-il à recoller les morceaux avec Elisia ? Le lance-harpon utilisé par Sabarra sert-il vraiment à quelque chose ? Pulstlitz est-il seulement capable de prononcer son nom correctement ? Autant de questions dont les réponses peuvent être trouvées dans la suite de ‘Sickhouse’.

AVIS :

Werner prouve une nouvelle fois qu’il maîtrise parfaitement le genre de la nouvelle sérialisée, en faisant vivre à son héros une aventure finement menée et impeccablement rythmée. Il prend en outre le temps de développer le caractère et la psychologie de ses personnages, qui se distinguent en conséquence des légions de stéréotypes à peine nommés qui constituent une part importante des protagonistes des publications de la BL. L’auteur justifie également les actions et les choix de ses personnages de manière claire et cohérente1, ce qui est toujours appréciable et dénote un savoir-faire consommé, l’abus de TGCM/WIJH2 étant une autre tare récurrente dans les écrits de ses petits camarades de jeu. Enfin, dans la catégorie « writer skills », on notera le soin avec lequel Werner replace Sickhouse dans le contexte de la série Brunner, Bounty Hunter (en relatant par exemple la précédente rencontre entre BBH et la douce Elisia), ce qui permet de profiter de cette nouvelle sans avoir nécessairement lu les précédentes. Certains considèreront que les bons points distribués dans ce paragraphe devraient aller de soi (sans doute à raison), mais le niveau des contributeurs de la Black Library est si hétérogène qu’il est toujours bon de saluer le travail d’un vrai professionnel.

Par ailleurs, j’ai apprécié les références faites par ce matois de C.L. Werner à l’univers du western dans sa nouvelle, en particulier aux deux derniers films de la Trilogie des Dollars (Et pour quelques dollars de plus – Le Bon, la Brute et le Truand). Sabarra est ainsi décrit comme une sorte de Lee Van Cleef tiléen, tandis que Brunner joue les Clint Eastwood de service, les dialogues entre les deux se révélant tout à fait dans le ton de ceux du film de Sergio Leone. Le passage où Sabarra est contraint d’amener Brunner à l’hospice de Shallya afin que ce dernier consente à lui dire où se cache le voleur en fuite est également une réjouissante pastiche de la traversée du désert de Blondin et Tuco3.

Nerveux, crédible, sombre et caustique, ‘Sickhouse’ est le genre de nouvelle pour lequel on s’obstine à lire des bouquins de la Black Library, le genre de nouvelle que Warhammer Fantasy mérite.

1 : Par exemple, il prend bien soin d’expliquer pourquoi Elisia, qui déteste Brunner, décide de donner à ce dernier un peu de l’incommensurablement précieuse « eau de vie » (au premier degré) de Shallya, normalement réservée à l’usage exclusif des membres du clergé de la déesse. Qui plus est, il donne une raison bassement terre à terre pour justifier cet acte, ce qui ne le rend que plus crédible. Elisia est en effet consciente que laisser mourir Brunner alors qu’elle a la possibilité de le sauver, uniquement parce qu’elle lui en veut, irait à l’encontre des enseignements de Shallya. C’est donc pour éviter d’être hantée jusqu’à la fin de ses jours par cette « mauvaise action » qu’Elisia décide de sauver la vie du chasseur de primes. Comme elle le dit elle-même : « I am too selfish to let you die ».
2 : TGCM = Ta Gueule, C’est Magique. Ou comment utiliser la nature « magique » de la fantasy pour masquer le fait qu’on n’a jamais réfléchi à certains problèmes (généralement très prosaïques).
Exemple :
« Comment les Hordes du Chaos peuvent-elles être aussi nombreuses, alors qu’elles viennent de steppes désolées et glacées peuplées de créatures monstrueuses et de démons, et passent leur temps à se battre entre elles ? »
« TGCM »
WIJH = Well, It Just Happened. Ruse scénaristique utilisée par les auteurs médiocres pour insérer des péripéties rocambolesques dans leurs histoires sans se soucier de leur vraisemblance.
Exemple :
« WIJH qu’un ordre entier de chevaliers impériaux passait à proximité de (ou plutôt, s’est matérialisé dans) Helmstrumburg pile au moment où la ville était sur le point de tomber aux mains des Hommes-Bêtes. »
3 : Original : “I’ll sleep better knowing my good friend is by my side to protect me.” Hommage: “You should start praying again. Pray now that I recover.”

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Et voilà qui conclut, à la fois cette revue de l’ultime année de publication de la série initiale d’Inferno!, mais également mes critiques sur les 173 nouvelles qui constituent ce corpus fondateur de la Black Library. Même si j’ai commencé cette activité, il y a maintenant plus d’une décennie, avec un tout autre but que celui-ci, ces histoires ont rapidement eu une place centrale dans mes chroniques, que ce soit à travers la revue des nombreux recueils que la BL a sorti pour les remettre au goût du jour, ou plus tard, par l’étude directe des numéros d’Inferno! Ce n’est donc pas sans une certaine émotion que je tourne cette looooooongue mais fondamentale page, en espérant que ma passion (parfois un peu vache, je l’avoue) pour la GW-Fiction ait été perceptible de l’autre côté de l’écran. Bien qu’au moment où ces lignes sont écrites, la Black Library a l’air d’avoir re-remisé le concept d’Inferno! au placard, je reste persuadé que ce n’est pas la dernière fois que nous croiserons ce nom légendaire ici. On a déjà eu droit à un come back inespéré, alors pourquoi pas à nouveau ?

INFERNO! – ANNEE 6

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de la 6ème année d’Inferno!, le magazine bi-mensuel publié par la Black Library entre 1997 et 2005, et dédié à la GW-Fiction sous toutes ses formes. Les six numéros dont il sera fait mention ici sont sortis entre juillet 2002 et mai 2003, et regroupent entre eux pas moins de 21 nouvelles, tirées de façon quasi paritaire des franchises Warhammer Fantasy Battle (11 histoires) et Warhammer 40.000 (10 histoires). Pour les plus attentifs et/ou fidèles d’entre vous, l’absence de nouvelles Necromundesques, qui ont pourtant fait partie du périmètre infernal depuis le premier numéro (‘The Demon Bottle’) s’explique à mes yeux par la concurrence faite par un autre jeu « spécialistes » futuriste, et qui venait de sortir à l’époque : Inquisitor1. Un clou chasse l’autre, comme on dit.

1 : J’en veux pour preuve la nouvelle ‘Payback’ de Graham McNeill, qui prend place sur Karis Cephalon, la planète où se déroulent les événements du livret de campagne ‘Death of an Angel’ (2003).

Inferno!_Année 6

Que les admirateurs éperdus de Nathan Creed et de Kal Jericho se consolent, s’ils le peuvent, avec la promesse d’une très haute concentration de personnages nommés (et parfois fameux) dans les numéros qui nous intéressent aujourd’hui. En plus de Gotrek & Felix (‘Redhand’s Daughter’), qui bénéficient, comme les Fantômes de Gaunt avant eux, d’un numéro (#36) à leur gloire, cette année sixième vit le retour d’Uriel Ventris (‘Leviathan’), Mathias Thulmann (‘Meat Wagon’), Angeika Fleischer (‘Head Hunting’), le Sergent Priad (‘Blue Blood’), Torben Badenov (‘Mark of the Beast’), sans oublier l’affable Gregor Eisenhorn (‘Backcloth for a Crown Additional’). Le millésime 2002/2003 vit également la création de figures importantes de la GW-Fiction, à commencer par l’impayable Ciaphas Cain (‘Fight or Flight’, ‘The Beguiling’) et l’efficace Brunner (‘What Price Vengeance?’). Moins gâtés par le passage des ans, mais méritants tout de même une mention spéciale, signalons enfin la présence des agents des lices Dirk Grenner et Karl Johansen (‘Rest for the Wicked’), du Magos Biologis Valentin Drusher (‘The Curiosity’) et du flamboyant corsaire Luka Silvaro (‘A Ship Called Rumour’), que nous aurons l’occasion de recroiser plus tard.

En ce qui concerne les contributeurs de cette année 6, il ne surprendra sans doute personne d’apprendre que ce fut une fois de plus Dan Abnett qui se révéla être le primo plumo (ouais je parle italien) de cette série, avec pas moins de quatre nouvelles à son nom. Suivent les sieurs McNeill, Werner, Mitchell et Spurrier (dont il s’agit pour les deux derniers des premières collaborations avec la Black Library), avec deux contributions par têtes de pipe. Et puisque nous avons commencé notre propos par un rappel de la disparition de Necromunda des pages infernales, terminons par une accolade aux auteurs qui ne reviendront plus nous faire bénéficier de leur talent dans le futur (du passé, mais je me comprends) : Brian Craig et Neil McIntosh. Mention spectrale à Robin D. Laws et Simon Jowett, qui poursuiveront encore quelque temps leur collaboration avec la BL, mais qui n’écriront plus pour Inferno!  par la suite.

Le cadre étant, je le pense, suffisamment planté, il est temps de passer aux choses sérieuses et de partir à la découverte de cette année slaaneshi (allez directement à ‘The Beguiling’ si vous voulez rester dans le thème)…

Inferno! Année 6

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Backcloth for a Crown Additional – D. Abnett [40K] – #31 :

INTRIGUE :

40K_Backcloth for a Crown AdditionalEn villégiature dans son domaine de Gudrun, l’Inquisiteur Gregor Eisehorn doit interrompre ses vacances pour enquêter sur la mort suspecte d’un de ses amis notables. Le seigneur Froigre a en effet passé l’arme à gauche à la suite de la fête organisée pour le retour de son fils sur la planète, à l’âge déçu de 82 ans. Par considération pour la famille, Eisenhorn accepte de jeter un œil au dossier, même si l’affaire lui semble d’une banalité consommée. Pourtant, au fur et à mesure que les indices s’accumulent, Greg va devoir admettre que ce cas n’est peut-être pas aussi éloigné de ses enquêtes habituelles. Le Chaos ne respecte rien, pas même les RTT des fonctionnaires de l’Ordo Xenos. Vilain Chaos, vilain.

AVIS :

Backcloth for a Crown Additional est la réponse d’Abnett à la question que nous nous sommes tous posés un jour : « mais que font les Inquisiteurs pendant leurs congés ? ». Plutôt que de partir à la pêche à la mouche ou faire des paniers en rotin, Gregor Eisenhorn joue donc au Cluedo avec quelques-unes de ses connaissances, ce qui ne doit pas vraiment le changer du boulot. Pour le lecteur, c’est toutefois l’occasion de découvrir l’iconique héros d’Abnett et ses plus proches collaborateurs (Bequin et Aemos) dans un cadre de quasi normalité.

La « gratuité » de cette nouvelle1, qui relate une anecdote assez inconséquente de la longue et difficile carrière d’Eisenhorn, permet à l’auteur de faire la démonstration de sa maîtrise du tempo romanesque : le rythme posé des vingt premières pages, au cours desquelles Abnett fait siens tous les codes du polar d’enquête, s’accélère brusquement et débouche sur un final enlevé, pendant lequel le bon Gregorbotte le cul calleux d’une bouteille de mercure possédée. 

Si la Black Library compte des contributeurs capables d’écrire de bons textes d’action pure, et (mais c’est plus rare) de bons textes « contemplatifs », ils sont en revanche très peu nombreux à savoir marier les deux approches de manière convaincante, ce qui est une autre raison de placer Dan Abnett en tête de peloton.

1 : Comprendre que, contrairement aux autres courts formats prenant place dans la saga inquisitoriale d’Abnett, Backcloth… n’a aucune incidence sur le reste de la série (Thorn Wishes Talon), ni ne révèle d’éléments intéressants sur le passé (Missing in Action, Playing Patience) ou le destin (The Strange Demise of Titus Endor) d’un personnage important de cette dernière.

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Head Hunting – R. D. Laws [WFB] – #31 :

INTRIGUE :

WFB_Head HuntingRetour au Col du Feu Noir (car c’est là que ça se Passe… mouéhéhé) en compagnie d’Angelika Fleischer et de son protecteur (ce qu’il pense) /stalker (ce qu’elle pense), Franziskus. C’est une journée normale pour Angie, qui exerce l’utile profession de récupératrice des champs de bataille, et a localisé le site d’une embuscade grâce aux croassements des corbeaux faisant bombance sur les cadavres abandonnés. Bien que Franziskus, en aristocrate principiel qu’il est, trouve la pratique dégradante, il faut bien que quelqu’un se charge de remettre sur le marché les biens et espèces qui resteraient sinon à prendre la pluie sur leurs défunts propriétaires, au lieu de créer du PIB, comme Baltazar Gelt le voudrait. La moisson du jour est plutôt bonne (un anneau nain pouvant servir de bracelet – les Dawi ont des doigts boudinés – et quelques pièces pour s’acheter un Sub’ en rentrant), mais se fait interrompre par un bruit caractéristique et de mauvais augure : celui d’une hache taillant de la barbaque. Prudents, les deux looters se cachent sur le bord de la route et surprennent peu de temps après un voyageur marchant avec une hache sur l’épaule et un sac suspect à la ceinture.

L’explication de texte entre les trois larrons permet au nouvel arrivant, qui se présente comme le professeur Victor Schreber, de dissiper tout malentendu quant à son accoutrement. Certes, il se balade avec un sac de têtes tranchées, et certes, c’est lui qui les a séparées de leurs précédents propriétaires, mais il l’a fait pour la science. Schreber est en effet un expert en phrénologie, et collectionne les crânes afin de percer le mystère des humeurs et des sentiments de ses semblables. Voyant que le bougre est seulement un gros nerd, et pas un psychopathe en puissance, Angelika et Franziskus ne le retiennent pas plus, mais à leur grande surprise, le prof a eu proposition à leur faire. Il revient en effet du petit village de Verldorf, situé en amont du Col, où il espérait pouvoir collecter un spécimen unique : le crâne du malandrin notoire appelé Potocki, récemment capturé et exécuté pour ses mauvaises actions par les Verldorfer. Ces derniers n’ont pas accepté l’offre, pourtant généreuse, de Schreber de leur prendre la tête (on les comprend), et l’ont chassé à coup de pierres lorsqu’il a insisté. Déterminé à agrandir sa collection, il propose donc deux cents shillings à nos héros en l’échange du crâne tant convoité, à collecter après livraison du paquet à son domicile. Il leur remet également une boîte rembourrée pour faciliter le transport et éviter toute casse pendant le voyage. La présence d’un cadenas pour fermer ladite boîte ne manque par contre pas d’interroger Franziskus…

Après un voyage sans encombre, Angie et Frankie arrivent à Verldorf, hameau misérable dont la principale attraction est le gibet où croupit un cadavre bien amoché, suspendu dans une cage en fer. Malgré son état décati, Potocki terrifie visiblement les locaux, qui refusent de parler de lui en dépit des perches que leur tend une Angelika preneuse d’informations pour faciliter son futur larcin. Ce n’est pas grave, elle fera sans, en bonne professionnelle qu’elle est. Ayant pris résidence dans l’auberge locale, les deux Bonereapers avant l’heure se glissent dehors au cœur de la nuit pour aller perpétrer leur forfait, neutralisant au passage l’alarme que l’aubergiste avait installé à sa fenêtre pour empêcher les mauvais payeurs de s’échapper sans régler l’addition. C’est du moins ce qu’Angelika et son side kick supputent, jusqu’à que l’horrible vérité leur saute littéralement à la figure…

Début spoiler…Potocki n’était en fait pas aussi mort qu’il n’y paraissait, et lorsqu’Angelika fait mine de le raser à l’œil, le cadavre s’anime et l’attaque furieusement. Bien qu’elle s’en sorte sans dommage, le raffut causé par l’affrontement réveille Verldorf, forçant notre héroïne à sortir une masterclass d’improvisation. Elle n’a pas été prise la main dans le sac en train d’attenter à l’intégrité d’un cadavre, non non : elle a été prise d’une crise de somnambulisme causée par l’influence maligne de la goule locale, dont personne, absolument personne ne l’a mis au courant. SKANDHAL !!! Totalement mystifiés par la prestation de leur hôte, les Verldorfer retournent se coucher sans faire d’esclandres, après avoir expliqué que la situation actuelle est le seul moyen qu’ils ont trouvé pour tenir à l’œil l’increvable et intenable Potocki, qui les tourmente depuis des générations et dont la vitalité maléfique défie l’imagination. Faute avouée étant à demi pardonnée, Angelika et Franziskus retournent également se pieuter…

…Et refont une sortie sans tarder, utilisant cette fois-ci la clé qu’Angelika a dérobé à l’aubergiste pendant qu’il lui présentait ses plus plates excuses, ce qui simplifie grandement l’opération « Louis XVI » planifiée par nos héros. Bien que Potocki ne se laisse pas faire, et que le bruit attire à nouveau les villageois hors de leurs masures, la tête finit par être collectée, et les deux gredins peuvent s’enfuir à toutes jambes en direction du manoir de Schreber.

Comme on pouvait s’y attendre de la part d’un employeur ayant omis de préciser ce « petit » détail au moment du briefing, Schreber se révèle être un mauvais payeur, qui sort un pistolet de son armoire au lieu des deux cents shillings promis. Angie avait toutefois prévu le coup, et se contente d’ouvrir la boîte contenant la tête de Potocki en direction de l’érudit félon. Pris au dépourvu par la manœuvre et par le crâne pourrissant qui lui saute à la jugulaire, Schreber est rapidement hors du coup (et hors de cou), ce qui laisse à Angelika et Franziskus toute latitude pour fouiller son domicile à la recherche d’un dédommagement, une fois qu’ils ont pris soin de réduire la tête enragée en bouillie, bien sûr. Au final, les deux comparses repartent avec un nouveau pistolet, ce qui n’est pas beaucoup mais déjà mieux que rien. Ils constatent d’un air détaché que la traînée informe qui était la tête de Potocki semble également être sur le départ, mais à la vitesse où elle progresse, le bougre ne devrait pas faire parler de lui avant cent vingt cinq ans. La Fin des Temps n’attend pour personne…Fin spoiler

AVIS :

Seconde (et à ma connaissance dernière) nouvelle consacrée par Laws à son personnage fétiche d’Angelika Fleischer, ‘Head Hunting’ semble tout droit sorti de l’imagination d’un DM facétieux, et peut se lire comme tel. Malgré l’horreur que représente un cadavre animé (de mauvais sentiments) et apparemment invulnérable, le ton léger avec lequel Robin D. Laws narre cette histoire la fait basculer dans le royaume de la comic fantasy, mais pas dans la parodie pure et simple de Warhammer Fantasy Battle, ce qui est appréciable. Un sympathique interlude entre deux lectures plus sombres.

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Liberation Day – M. Farrer & E. Rusk [40K] – #31 :

INTRIGUE :

40K_Liberation's DayFarrer et Rusk nous plongent dans les entrailles d’un Space Hulk colonisés par les orks, et dans lequel une communauté d’esclaves humains en fuite tente tant bien que mal de survivre. Profitant de la taille cyclopéenne du vaisseau et de la nature paresseuse des peaux vertes, nos héros ont en effet réussi à installer un camp de fortune dans le dédale de coursives et de ponts abandonnés du Hulk.

Les orks étant, comme chacun sait, des voisins abominables (tapage nocturne, poubelles renversées, murs taggés, voitures volées, crottes de squigs non ramassées…), la petite bande de survivants se venge comme elle peut en organisant des raids réguliers en territoire xenos, à la recherche de matériel utile et d’esclaves pas trop esquintés à libérer. Un de ces derniers ayant réussi à convaincre le leader des évadés (Challis) que le Space Hulk convergeait vers la Waaagh ! la plus proche, nos guérilleros décident de monter une expédition jusqu’à la salle des communications1 afin de faire connaître leur situation au reste de l’Imperium.

Coup de chance, ils arrivent à contacter l’astropathe de garde du Ragnarok, une barge de bataille Space Marines, et à convaincre le commandant de cette dernière de leur venir en aide. Mais pour cela, il faudra que Challis et ses potes réussissent à faire taire les défenses du Hulk, faute de quoi la libération tant espérée ne pourra avoir lieu.

1 : Ou plus exactement, l’enclos à bizarboys.

AVIS :

Liberation Day est une nouvelle intéressante à plus d’un titre. D’un point de vue strictement narratif, tout d’abord, elle présente une construction impeccable, les deux auteurs étant parvenus à optimiser leur séquençage du récit avec brio, permettant à l’intrigue de suivre son cours sans temps mort ni faux raccords. Le découpage du texte en cinq parties distinctes, relatant chacune un évènement important ayant pris place avant le fameux jour de la libération1, laisse ainsi apparaître la trame de la nouvelle2. Le résultat aurait pu être scolaire et décousu, mais Farrer et Rusk ont assez de métier pour éviter cet écueil et agrémenter l’ossature du récit de péripéties plaisantes à lire.

Deuxièmement, le fluff de 40K est non seulement respecté, mais également mis en perspective de manière intéressante. C’est indéniablement l’une des forces de Matthew Farrer (je ne me prononcerai pas sur le cas d’Edward Rusk, dont c’est la seule contribution à la Black Library) que de proposer un angle de vue à la fois original et pertinent de l’univers de Warhammer 40.000. Ici, il rappelle ainsi au lecteur que l’écrasante majorité des citoyens de l’Imperium n’a qu’une compréhension très limitée de la technologie et de l’organisation de ce dernier, ce qui n’est pas sans poser des problèmes que la plupart des autres auteurs de la BL auraient balayés d’un revers de plume, en conférant à leurs héros la confortable (quasi3) omniscience qui est la leur. Ainsi, le héros de Liberation Day a beau venir d’un monde assez développé, il n’a aucune connaissance en matière de voyage spatial (et n’a donc pas la moindre idée de la manière dont faire parvenir un SOS au reste de l’Imperium depuis le Space Hulk qu’il squatte), et rit carrément au nez de l’intello du groupe lorsque ce dernier lui affirme que les Space Marines existent bel et bien. Ça fait bizarre au début, tant l’Astartes est une figure centrale de la Black Library, mais c’est tout à fait cohérent d’un point de vue fluff, et je remercie Farrer de placer (pour une fois) la caméra au niveau du Mr Tout le monde de l’Imperium. C’est tellement rare4.

Troisièmement, la nouvelle se termine par un twist final pas trop mal introduit.

Au final, Liberation Day est une livraison plus que correcte de la part d’un des tout meilleurs (à mes yeux) contributeurs de la Black Library. On est assez loin du niveau de Faces, le must read absolu de Matthew Farrer, mais c’est tout de même suffisant pour faire passer un bon moment au lecteur gavé de Thorperies, Cawkwelleries et autres Swalloweries qui désespère en chacun de nous. C’est déjà pas mal. .

1 : Le premier chapitre s’intitule ainsi « 115 jours avant la libération », le deuxième « 112 jours avant la libération », et le dernier « Jour de libération ».
2 : Passage 1 : Challis libère un petit groupe d’esclaves.
Passage 2 : Un des nouveaux membres de la bande informe Challis que le Space Hulk approche d’une zone de guerre, et qu’il sera donc potentiellement possible d’envoyer un SOS à l’Imperium. Problème : comment s’y prendre ?
Passage 3 : Découverte d’un stock d’armes et de l’emplacement de la salle des communications du Space Hulk. Problème du passage 2 résolu.
Passage 4 : Raid chez les bizarboys, communication avec les Space Marines.
Passage 5 : Attaque des défenses orques afin de permettre la téléportation des Space Marines dans le Hulk. Pas de chance, c’étaient des Iron Warriors. C’est ballot.
3 : Il n’y a guère que les trois choses que le héros moyen de la Black Library découvre par lui-même au cours de ses aventures : 1) Le KO cé vrément pa kool 2) Ne jamais faire confiance à l’Inquisition 3) Ce n’est pas une bonne idée de partir en randonnée dans une mystérieuse nécropole peuplée de statues en métal à l’air patibulaire.
4 : Sur les 102 nouvelles 40K lues jusqu’à présent par votre serviteur (rq : c’était il y a bien longtemps, et surtout avant le lancement de Warhammer Horror et Warhammer Crime, mais j’ai la flemme de remettre à jour, donc ça restera comme ça) , seules 8 ont été écrites depuis le point de vue du sujet de l’Imperium lambda :  Liberation Day donc, mais aussi Warped Stars (Ian Watson), Nightmare (Gavin Thorpe), Angels (Robert Earl), Ancient History (Andy Chambers), Faces (Matthew Farrer), Survivor (Steve Parker) et The Shadow in the Glass (Steve Lyons). Les trois dernières sont des pépites que je recommande à tout le monde.

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A Matter of Evidence – B. Craig [WFB] – #31 :

INTRIGUE :

WFB_A Matter of EvidenceL’hiver est long et la vie est courte dans le grand Nord de Kislev, et de ces deux constats irréfutables vient peut-être l’attrait que Danila, cousine de la Reine des Glaces en personne et Electrice de la cité de Volkolamsk, éprouve pour les beaux jeunes hommes. Incarnation même de la noblesse guerrière de cette contrée inhospitalière, adulée de ses troupes pour sa bravoure au combat, qui lui a valu une cicatrices d’étoile sous l’œil gauche à la suite d’un accrochage avec une bande de chevaucheurs de loup Gobelins1, Danila a porté son dévolu sur Ivan Skavinsky, un modeste archer de la ville ayant pour particularité de posséder des yeux presque entièrement noirs. Et alors, me demandez-vous ? Et alors, ces yeux de chiot lui permettent de mentir avec aplomb, car ils rendent toute détection de ses bobards quasi-impossible, personne ne pouvant affirmer que la pupille de notre homme grossit ou diminue, signes indéniables de la véracité, ou non, d’un propos.

Les premiers temps de la passion entre nos deux tourtereaux se passent splendidement, mais Ivan commence bientôt à tourner autour d’une autre femme, plus de son âge que cette cougar de Danila. Cette dernière, informée de l’infidélité de son amant, lui laisse toutefois une chance de renoncer à sa folie, en lui faisant jurer sur ses yeux qu’il n’aime qu’elle, ce que le jeune freluquet, un peu trop confiant dans la noirceur de ses quinquets, accepte sans ciller. Arrive ce qui doit arriver, Danila surprend un peu plus tard un regard lourd de sens entre son rigolo de gigolo et une servante du nom de Natasha, et les bâtonnets de carotte sont cuits pour Ivan. Rancunière mais inventive dans sa jalousie, l’Electrice fait arracher les yeux du parjure, avant de les remplacer par des billes de bois qu’elle enchante pour que notre homme ne voit plus qu’elle, jour et nuit (en fait elle a inventé le FaceTime du Vieux Monde).

Ayant appris sa leçon sur les serments un peu trop hâtifs, et se disant sans doute qu’il n’a plus rien à perdre, Ivan décide de passer en mode mari honnête – même s’il n’est qu’un amant, bien sûr – et ne cherche plus à dissimuler la vérité à sa Dominatrice. Cette dernière peut ainsi jouir d’un sursis d’affection avant que l’archer aveugle (très utile à la défense de la ville donc) ne retombe amoureux des doux roucoulements de Natasha, et se permette même de lui balancer un « so what ? (bitch) » lorsqu’il est pris sur le fait. Déçue mais pas surprise, et au-dessus de ces petites mesquineries, Danila se contente de lui faire casser les doigts et arracher les ongles, et jeter en prison jusqu’à la fin de ses jours, où il pourra entendre jacasser les commères qu’elle envoie à dessein raconter les anecdotes croustillantes sur les coucheries de Volkolamsk, les siennes et celles de Natasha en priorité bien entendue. Moralité : mieux vaut garder ses yeux dans ses poches, pour ne pas finir comme tel.

 1 : Ils semblent toujours viser au même endroit, comme peut en témoigner Gotrek.

AVIS :

Brian Craig déroule une histoire d’amour, de jalousie et de vengeance, bâtie sur une caractéristique physique des plus spécifiques (la rétractation pupillaire, rien que ça) dans le monde impitoyable de Warhammer Fantasy Battle. Il aurait pu le faire n’importe où ailleurs que cela aurait marché, son talent de conteur entraînant sans mal le lecteur à sa suite, et pour ma part, j’ai plutôt apprécié ce petit texte à valeur de conte, avertissant des dangers de se faire de ses amis puissants des ennemis l’étant tout autant. On peut toutefois reprocher à ce A Matter of Evidence de ne pas vraiment remplir le cahier des charges d’une publication de la Black Library, l’utilisation du Vieux Monde comme trame d’une histoire d’amour dysfonctionnelle apparaissant comme un détournement, plutôt qualitatif il faut dire, de la mission première du contributeur de la maison d’édition de Nottingham : donner vie et enrichir le background des franchises de GW, sans trop s’éloigner des choses de la guerre qui constituent le cœur du sujet quand on donne dans le wargame. Peut-être ne faut-il donc pas trop s’étonner de constater que cette nouvelle fut la dernière de Brian Craig publiée dans Inferno! (à ce jour), tout comme sa non inclusion dans les recueils et anthologies de la Black Library tombe naturellement sous le sens. Les Liaisons Dangereuses ne s’accordent en effet pas facilement au hack’n’slash et au sword and sorcery, et la BL a choisi son camp depuis longtemps.

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On Mournful Wings – S. Spurrier [40K] – #32 :

INTRIGUE :

40K_On Mournful WingsLes jumeaux Ica et Delus1, seuls membres de leur tribu ayant survécu à l’ouragan qui a frappé leur village, voyagent jusqu’à la capitale de Gathis II afin de participer au processus de sélection des aspirants du Chapitre des Doom Eagles. Shortlistés par l’Archiviste faisant office de DRH en raison de leur imperturbable pessimisme, les deux adolescents se retrouvent engagés dans une course contre la montre, la mort et le désespoir ;  leur parcours d’initiation consistant à s’échapper de l’intérieur d’un volcan sur le point d’entrer en éruption afin de rejoindre la forteresse monastère du Chapitre.

Alors que leurs condisciples périssent les uns après les autres, victime des nombreux dangers parsemant la voie menant vers le salut et l’honneur de rejoindre les meilleurs consommateurs de Prozac de l’Empereur, Ica et Dalus triomphent de toutes leurs épreuves et se présentent ensemble devant les portes de l’Aire des Doom Eagles. Un ultime test les attend toutefois avant de pénétrer dans le sanctuaire des Astartes, qui fera ressortir l’unique, mais crucial, point de divergence entre les deux frères.

1 : Un exemplaire dédicacé de La Mythologie Grecque pour les Nuls à celui qui identifie la légende à laquelle ces noms font référence. Exemplaire remporté.

AVIS :

En choisissant de centrer son récit sur la psyché si particulière des Doom Eagles, le plus emo des Chapitres loyalistes, Simon Spurrier n’a pas opté pour la facilité. Il est en effet assez compliqué de rendre justice au mélange de fatalisme et de résolution qui caractérise les locataires de Ghostmountain, et dont l’état d’esprit morbide se révèle être une force (il n’y a pas grand-chose qui puisse effrayer un Space Marine qui se considère comme étant déjà mort) plutôt qu’un handicap. Si la force de la foi et le psycho-conditionnement des surhommes du 41ème millénaire constituent des pistes crédibles pour expliquer ce paradoxe, ces justificatifs bien pratiques ne peuvent pas être avancés pour les recrues du Chapitre, qui, en tant qu’êtres humains normaux, ont la fâcheuse tendance à se noyer dans leur désespoir au lieu de s’en servir comme bouclier.

Bref, Spurrier marchait écrivait sur des œufs, et je trouve qu’il s’en est remarquablement tiré. Outre le fait que sa présentation des Doom Eagles rend hommage à ces derniers (plus que le portrait qu’en a fait Ben Counter dans son Phalanx) en faisant ressortir à la fois leur singularité et leur noblesse, la rivalité latente des deux héros de la nouvelle est rendue avec justesse et suffisamment bien mise en contexte pour que la conclusion d’On Mournful Wings (même le titre a grave la classe) fasse mouche1. On appréciera également l’art consommé avec lequel Spurrier entremêle scènes d’actions, flashbacks et contemplations d’Ica sur son sort, pour un résultat aussi digeste qu’élégant. Inspirée, conséquente et bien construite, On Mournful Wings est définitivement l’une de ces nouvelles justifiant à elles seules l’achat du recueil (‘Crucible of War’) entier2.

1 : Arrivés devant l’entrée de la forteresse des Doom Eagles, les jumeaux sont sondés psychiquement par l’Archiviste en charge du recrutement des novices du Chapitre. Ica a la mentalité nécessaire pour devenir un Doom Eagle, mais Dalus, qui toute sa vie n’a cherché qu’à sortir de l’ombre de son frère en surpassant ce dernier à la moindre occasion (en pure perte, Ica restant le favori des parents des jumeaux, à cause de sa – relative – aînesse), est jugé trop amer et torturé pour être introduit dans l’Aire…et est donc condamné à mourir de faim, de froid et d’épuisement au pied du portail que seul son frère a eu le droit de franchir.
2 : Et au prix dudit recueil (Crucible of War) sur le marché de l’occasion, on aurait tort de se priver.

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A Good Thief – S. Jowett [WFB] – #32 :

INTRIGUE :

A Good ThiefFrançois Villon est un poète (naaaaaan ???) à l’esprit vif et à la langue bien pendue, ce qui lui cause autant de problèmes que d’opportunités. Forcé à l’exil de sa Marienburg natale après que les vers qu’il a composés sur les activités extra-maritales de la femme de l’un des princes marchands de la cité soient parvenus aux oreilles du mari cocu, il a trouvé refuge dans la petite ville de Wallenholt, et est devenu le poète de cour du Graf local. Une occupation indigne de ses talents, qui sont de son avis de spécialiste, superlatifs, mais qui lui permet de vivoter tranquillement aux crochets de son mécène.

La situation de Villon se complique lorsque le Graf de Wallenholt reçoit la visite d’une délégation de notables impériaux, dans laquelle se trouve un parent de la Frau von Klacht, dont les frasques libertines ont été mises en vers (et contre tous) par notre poète. Reconnu par le visiteur, Villon est fissa envoyé à la case prison par son employeur, qui préfère logiquement se séparer de son flagorneur licencié plutôt que d’hériter d’une guerre commerciale avec l’un des marchands les plus influents du Vieux Monde. Par chance pour Villon, la petite soirée pendant laquelle son destin s’est joué s’est déroulée devant un autre témoin, d’opinion plus favorable envers le rimailleur de cour. Le Magister (puisqu’on ne le connaîtra pas sous d’autres noms) organise l’évasion de notre héros pendant son transfert vers Marienburg, et lui remet une mission très spéciale en échange de ce coup de pouce inespéré : il doit se rendre dans un village du Reikwald tombé sous la coupe du bandit Gerhard Kraus, et mettre la main sur un artefact magique que le même Kraus a acquis pour le compte du Magister, avant de décider de le garder pour lui. Tout cela est bien mystérieux.

A son arrivée à Krausberg, Villon ne perd pas de temps à s’encanailler avec les hommes du seigneur brigand, qui reste lui complètement reclus dans ses quartiers. Il lui faudra attendre une nuit de beuverie pendant laquelle son public lui demande de réciter pour la énième fois son ode épique sur Frau von Klacht pour que Kraus daigne faire son apparition, et défie Villon à un duel… de poésie. Original, n’est-ce pas ? Le brigand n’est cependant pas un adepte du free style, et se contente de réciter les strophes tirées d’un petit livre qu’il a amené avec lui, et dont la nature arcanique ne fait rapidement pas de doute à Villon, qui se fait happer par la déclamation de Kraus au même titre que le reste de l’assemblée. Il est évident que c’est l’objet que le Magister l’a envoyé reprendre au mercenaire indélicat, et Villon décide d’agir la nuit même, profitant du gros coup de mou subi par Kraus après la fin de sa prestation. L’art est épuisant, c’est vrai.

Voleur avant d’être poète, Villon n’a aucun mal à se glisser dans la chambre du bandit et à mettre la main sur le livre en question, dont l’influence néfaste n’est pas à sous-estimer. Ne pouvant corrompre directement notre héros (qui est analphabète, et c’est bien pour cela que le Magister l’a choisi en premier lieu) comme il l’a fait pour Kraus, le grimoire possède ce dernier et un combat féroce s’engage entre les deux chineurs d’antiquités pour la possession du grimoire. Villon finit par remporter le match et s’enfuit par la fenêtre avec son butin sous le bras, laissant Kraus éborgné et exposé comme fraude littéraire (une double sanction bien sévère, si vous voulez mon avis). Après un voyage vers Altdorf, où le Magister lui a donné rendez-vous, le poète remet le bouquin tant convoité à son commanditaire, qui le jette immédiatement dans le feu, OPA Gandalf-style. Contrairement à l’Anneau Unique, le parchemin est inflammable et l’ouvrage maudit (askip) finit en fumée. Voilà une nouvelle menace qui planait insidieusement sur l’Empire écartée pour de bon…

Début spoiler…Enfin presque. Villon a en effet jugé malin de donner au Magister un livre dérobé au hasard dans la bibliothèque municipale la plus proche, préférant trouver un riche gogo pour lui acheter le vrai grimoire un peu plus tard. A malin, malin et demi cependant : le Magister ne met pas longtemps à se rendre compte qu’il a été dupé, et se fait un plaisir de faire arrêter Villon pour lui apprendre à jouer des tours aux puissants de ce monde. Par chance pour notre poète-escroc, M a une nouvelle mission à lui confier, ce qui est toujours mieux que danser la gigue des pendus (en attendant d’en composer la ballade, bien sûr)…Fin spoiler

AVIS :

Simon Jowett prend son temps et déroule une histoire originale de poète-voleur missionné pour dérober un grimoire de sonnets à un seigneur bandit trop cultivé pour son propre bien (je vous défie de trouver une intrigue comparable dans tout le corpus de la GW-Fiction) dans ce ‘A Good Thief’, dont la moitié des pages est finalement consacrée à la présentation du héros. Jowett est suffisamment doué avec sa plume pour que le lecteur n’ait pas l’impression de se faire flouer dans la manœuvre, mais il ne reste pas moins que cette nouvelle ressemble plus à l’introduction d’un roman, qui n’aura au final pas été écrit1, qu’à une œuvre indépendante. Une sympathique curiosité.

1 : Un puissant et mystérieux commanditaire œuvrant en secret pour le bien de l’Empire recrute des agents doués de talents particuliers parmi le gibier de potence impérial ? Ça me dit vaguement quelque chose

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Payback – G. McNeill [40K] – #32 :

INTRIGUE :

40K_PaybackLe trafiquant d’armes Cornelius Barden se retrouve dans une situation difficile après qu’une transaction avec des activistes de la cause mutante ait été interrompue par l’arrivée impromptue du baron du crime local (« Red » Ivan Constantine) et de ses hommes, pas très jouasses à l’idée de laisser Barden marcher sur leurs plates-bandes en écoulant sa came sur leur territoire. Blessé dans la fusillade qui s’en suit, trahi par son partenaire qui s’enfuit avec le magot, et recherché à la fois par Constantine et par les mutants, Barden va devoir la jouer fine pour espérer sortir entier du pétrin dans lequel il s’est fourré.

AVIS :

Ecrite à la suite de la sortie du jeu Inquisitor (dont le background est en grande partie centré sur la planète Karis Cephalon, où se déroule également la nouvelle de McNeill), Payback est selon son auteur1 un hommage au style de James Ellroy (le pape du roman noir moderne, auteur notamment du Dahlia Noir et de L.A. Confidential), arrangé à la sauce Warhammer 40.000.

À l’image de son anti-héros violent et cynique mais droit dans ses bottes, Payback est un agrégat de clichés mis en forme de manière très cinématique par un McNeill égal à lui-même, c’est-à-dire sensiblement meilleur que la moyenne des contributeurs de la BL, mais pas mémorable non plus. Il manque ainsi une véritable profondeur à ses personnages, que le lecteur cerne totalement à leur première réplique, ce qui n’est certes pas vraiment un problème pour une nouvelle « one-shot », mais aurait pu se transformer en handicap si Payback n’avait été que le prélude d’un travail plus conséquent (comme Kinstrife a préfiguré le diptyque Defenders of Ulthuan et Sons of Ellyrion par exemple).

S’il n’est pas exclu que Cornelius Barden revienne faire un petit tour de piste dans les années à venir, j’espère sincèrement que McNeill parviendra à développer son Harlon Naye (le gros bras des séries Eisenhorn et Ravenor) personnel de manière un peu plus poussée que dans ce premier jet.

1 : Le site de Graham McNeill comporte une partie « short story », dans laquelle chaque publication est commentée et resituée dans son contexte d’écriture.

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Rest for the Wicked – J. Wallis [WFB] – #32 :

INTRIGUE :

WFB_Rest for the WickedAltdorf, et ses rues bruissantes de vie, ses marchés bien achalandés, ses honnêtes citoyens faisant leurs courses… Et, bien entendu, ses forces de police luttant au jour le jour contre les déprédations des mauvais sujets de l’Empereur, ou, dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, celles de dangereux immigrants, comme ce Kislévite à moustache de Kislévite (ok) et aux yeux de Kislévite (plus dur), qui se fait courser comme un lapin par nos héros, les officiers des Lices Dirk Grenner (aka Astérix) et Karl Johansen (aka Lucky Luke1), qui cherchent ainsi à boucler une enquête de trois mois de façon probante. Manque de bol pour les Starsky et Hutch impériaux, leur course poursuite les amène jusqu’aux portes de la ville, où le cortège de Leopold von Bildhofen, Comte Électeur du Middenland, fait son entrée en grande pompe. Le périmètre de sécurité étant strictement maintenu par la garde civile, nos héros ne peuvent que constater la disparition de leur proie dans la foule massée pour l’occasion… jusqu’à ce que le suspect moustachu trouve intelligent de passer en courant devant le cheval de l’Électeur, pile au moment où ce dernier reçoit un carreau en pleine encolure (le cheval, pas le bonhomme). La suite est assez facile à prédire : la bête s’emballe et part au triple galop dans les rues pavées d’Altdorf, en direction de la Königplatz (à ne pas confondre avec la Kaiserplatz) et de son marché bondé. Serait-ce la fin de ce bon vieux Leopold ? NON, car les héroïques Johansen et Grenner subtilisent deux montures à leurs balourds de collègues, piquent des deux et parviennent in extremis à se saisir de l’aristocrate avant que son destrier n’aille s’emboutir dans un food truck, avec des résultats dévastateurs. Malgré leur intervention salutaire, ce snob de von Bildhofen remercie à peine ses sauveurs, et repart avec sa troupe jusqu’à son Air BnB.

De retour au poste, les officiers doivent à présent amadouer la colère de leur patron et chef des Lices d’Altdorf, le Général Hoffmann, devant le capotage complet de l’opération Kosachok. Ce fiasco a toutefois libéré le duo, qui peut enquêter sur la tentative d’assassinat dont l’influent aristocrate vient de faire les frais. Ayant déjà reçu le résultat des expertises du laboratoire alchémico-légal avec lequel les Lices travaillent, qui a établi que le carreau était d’origine tiléenne, Johansen et Grenner partent en direction de la petite Tilée pour creuser la piste d’un assassin étranger engagé par un mystérieux commanditaire pour se débarasser de von Bildhofen. L’héritier du Comte étant son frère Siegfried, marié à une Tiléenne, c’est donc vers ce dernier que les premiers soupçons se portent. Après une rencontre fructueuse avec le signor Argentari, parrain de la pègre italienne tiléenne locale, les deux équipiers filent jusqu’à la Marianstrasse, où leur indic leur a confié que se trouvait le tireur d’élite recruté pour effectuer ce sale boulot. Bien qu’ils parviennent sur place avant que ce dernier n’ait pu retenter sa chance, profitant du passage du Comte Électeur à la sortie de la messe, ils perdent l’élément de surprise lorsque Grenner ne parvient pas à enfoncer la porte de la planque du premier coup. S’en suit un face à face tendu entre les officiers et leur suspect, qui se prend la dague de jet de Johansen dans l’estomac pour commencer, mais riposte en logeant un carreau dans la poitrine de ce dernier. Ce tilean stand-off, qui aurait pu durer longtemps vu la stupidité des participants2, est toutefois interrompu par une boule de feu impromptue, qui ravage la piaule et réduit le sniper en cendres. Comprenant que cette intervention enflammée était probablement celle du commanditaire, peu soucieux de laisser les enquêteurs interroger le tueur à gages, Johansen indique à son partenaire qu’il serait judicieux qu’il aille rendre une visite de courtoisie à la DGSI impériale, une cellule de la Reiksguard (en civil) enquêtant sur les complots et manigances agitant l’entourage de l’Empereur. Cette organisation moyennement secrète (puisque un simple officier des Lices sait qu’elle existe et où elle opère3), du nom d’Untersuchung, s’est faite une spécialité d’enquêter sur les mages renégats, et pourrait donc aider l’enquête à progresser. Pendant que son collègue passe aux urgences se faire recoudre, Grenner se rend donc sur place.

Là, il se fait poliment mais fermement éconduire par ses interlocuteurs, qui ont l’air d’en savoir beaucoup plus qu’ils ne veulent bien en dire sur cette affaire, et ne consentent qu’à lui expliquer la différence entre une boule de feu et une explosion flamboyante. Car non, ce n’est pas la même chose. De retour au poste, Johansen est toutefois briefé par Hoffmann, qui a reçu les infos refusées à son sous fifre par fax pigeon voyageur, sur la situation très délicate dans laquelle ils doivent opérer. La sorcière pyromane se révèle être une certaine Emilie Trautt, mage flamboyante passée libérale depuis quelques années et concubine notoire du fils de Leopold von Bildhofen, Udo, qui passe du coup suspect #1 de l’enquête. Cependant, l’Untersuchung a formellement interdit à ses collègues d’intenter quoi que ce soit envers Trautt, qui pourrait mener le Bureau des Légendes d’Altdorf à de plus gros poissons. Cela n’empêche toutefois pas les Lices de monter un plan audacieux pour protéger le mal-aimé Leopold de ses persécuteurs…

Début spoiler…Et notre duo infernal, maintenu sur l’affaire par un Hoffmann très peu progressiste quand au concept d’ITT et de congés maladie, de se rendre à la place de leur boss au rendez-vous organisé par Udo afin de discuter des mesures de protection prises par les Lices envers le Comte Électeur. Tout aussi odieux que son paternel, Udo gobe toutefois sans broncher les bobards débités par un Johansen imperturbable, qui lui fait croire que les suspects principaux sont les Kislévites (décidément, il ne les aime pas), et lui révèle les dispositions super secrètes prises par son équipe pour protéger le convoi qui amènera le Comte et sa famille à la réception organisée par l’Empereur en leur honneur le soir même, lorsqu’Udo se met à flipper des tables pour exprimer son mécontentement d’être tenu hors de la confidence. Le piège étant tendu, il est maintenant temps de voir si le poisson va mordre…

Aussi, lorsque les rusés officiers changent l’ordre des carrosses banalisés transportant les huiles Middenlander, positionnant celui d’Udo en deuxième position, à la place de celui de Leopold et Siegfried, c’est sans surprise qu’ils constatent la combustion spontanée mais peu naturelle du fiacre. C’est ce qui s’appelle un retour de flamme, je suppose. Bravant les ordres, l’intenable Johansen s’élance ensuite à la poursuite de Trautt sur les toits, ne parvenant pas à refaire son retard (et pourtant, elle était en robe longue) avant que la magicienne utilise ses pouvoirs enflammés pour… partir en lévitation et franchir le mur d’enceinte de la ville, évitant facilement la dague de jet que Johansen lui avait lancée sans sommation. C’en est fini de notre enquête, mais pas du boulot de notre paire de choc, qui devra dès le lendemain faire porter le chapeau de ces tentatives d’assassinat répétées aux, je vous le donne en mille, Kislévites. Comme on dit par chez nous, pas de pitié pour les croissants Cosaques.Fin spoiler

1 : Comprendre que le premier est un petit blond raleur, et le second un grand brun à la gâchette facile.
2 : Ainsi, l’assassin parvient à se surprendre lui-même lorsque sa manœuvre de diversion à l’encontre de Johansen le mène à regarder également dans la direction vers laquelle il pointait son arbalète, permettant à l’officier de lui balancer un pied de chaise dans la tronche en toute impunité.
3 : Rendant son utilisation de mot de passe alambiqué à l’entrée un peu ridicule.

AVIS :

Pastiche assez transparente de la série policière classique des années 80, mettant en scène des flics débrouillards aux méthodes non conventionnelles mais efficaces pour combattre le crime, Pas de Répit pour les Braves souffre des grosses ficelles parodiques utilisées par l’auteur, d’un duo de héros pas vraiment attachants, et de l’intégration assez grossière de l’Untersuchung (que Wallis mettra au centre de son roman La Marque de la Damnation) à l’intrigue pour des raisons relevant selon moi du teasing pur et simple. Si on peut reconnaître à cette nouvelle un rythme enlevé et une enquête potable, même si pas vraiment spectaculaire en termes de rebondissements1, ainsi que quelques détails fluffiques sur Altdorf et ses forces de po-Lices, à prendre avec des pincettes car reprises par personne d’autre depuis, la Black Library a beaucoup mieux à offrir en termes de nouvelles « policières » se déroulant dans le Vieux Monde, à commencer par L’Affaire de la Cellule Écarlate dans la même anthologie, supérieure sur tous les points à Pas de Répit pour les Braves.

1 : En même temps, avec deux suspects identifiés en tout et pour tout, difficile de faire planer longtemps un suspens étouffant. Wallis avait fait beaucoup mieux ceci dit avec sa série Dieter Brossmann (‘The Dead Among Us’ et ‘The Bretonnian Connection’).

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Blue Blood – D. Abnett [40K] – #33 :

INTRIGUE :

40K_Blue BloodLa nouvelle affectation de l’escouade Damocles, fraîchement de retour à plein effectif après son passage au stand sur Ithaka (‘Crimson Storm’) ne ravit guère le Sergent Priad. Il s’agit en effet de faire de la figuration protocolaire lors des cérémonies de couronnement du nouveau souverain d’Iorgu, planète d’importance des mondes récifs dont les Iron Snakes sont les défenseurs attitrés. Priad et ses hommes espéraient faire un peu de team building sur le front, histoire que les grands nouveaux et les petits anciens1 puissent sympathiser en situation de travail, mais les ordres sont les ordres. Bien que l’accueil réservé par leurs hôtes soit impeccable, et permette à nos spartiates (haha) héros de découvrir des concepts d’une opulence inouïe – comme celui du lit – l’ennui guette rapidement les Space Marines, qui commencent à développer des TOC à force de banquets et de processions.

Fort heureusement, cette festive monotonie est brisée par l’arrivée d’une tête connue, celle de l’Inquisiteur Mabuse (‘Red Rain’). King Mab est présent sur Iorgu incognito, car il soupçonne que la disparition de la vieille reine n’était pas due à son âge avancé, mais bien à une conspiration dont il doit percer à jour les tenants et aboutissants. La suite des événements lui donne rapidement raison : la ferveur bon enfant d’Iorgu City tourne vite au vinaigre et à l’émeute alors qu’une pluie diluvienne se met à tomber sur la ville. C’est peut-être un détail pour vous, mais comme Iargu connaît un léger crachin une fois tous les vingt ans, on peut comprendre que les citoyens commencent à paniquer à l’idée de devoir acheter des bottes en caoutchouc pour marcher dans rue. La situation dégénère tellement rapidement que la jet set ayant fait le déplacement décide de quitter les lieux sans tarder, et Priad se trouve noyé sous les demandes d’escorte émanant des plus hautes sphères, sollicitations que même son psycho-endoctrinement rigoureux ne l’a pas préparé à encaisser.

Le salut vient, une fois de plus, de Mabuse, qui envoie un doigt aux Iron Snakes afin de solliciter leur assistance immédiate sur le Mont Sacré, où les reliques les plus anciennes d’Iorgu (dont les regalia utilisés pour le couronnement) sont gardées. Cette bonne excuse permet à Priad d’envoyer balader un Lord Militant irritant et de réquisitionner la limousine d’une princesse royale pourrie gâtée, ce qui est tout de même satisfaisant. Les Iron Snakes rejoignent l’Inquisiteur après avoir été témoins de phénomènes paranormaux, une sûre indication que le Warp est de la partie. Le briefing qu’ils reçoivent est simple : escorter Mabuse dans la crypte du Mont Sacré où les regalia sont conservés, et les remettre à leur place. Ces objets ne sont en effet pas uniquement des symboles un peu kitsch, mais font partie intégrante du dispositif de stase que les premiers habitants d’Iorgu ont installé pour exiler un démon local, peu après leur arrivée. Les cultistes du Chaos que l’escouade Damocles doit affronter en cours de route cherchent évidemment à réveiller celui que Mabuse appelle le Dormeur (sans doute un crabe gigantesque), et cela aurait des conséquences assez graves pour la Pax Imperialis, donc autant éviter.

Après moultes péripéties, le crypt rush se solde par une victoire sur le gong pour le camp impérial, qui n’a à déplorer que la perte de l’Inquisiteur, criblé de balles lors d’un accrochage sur le chemin. Dans son dernier souffle, il a cependant l’amabilité d’enregistrer un vlog élogieux sur le dévouement de Damocles à destination du Maître de Chapitre des Iron Snakes, permettant de contrebalancer la shit storm de revues négatives laissées par les pontes que les Space Marines ont ignoré/rudoyé/spolié lors de leur intervention urgente. L’image de marque, ça reste important au 41ème millénaire.

1 : Les Space Marines de Dan Abnett ont la morphologie d’une équipe de rugby des années 80, ça doit être pratique lors des essayages de matériel.

AVIS :

Il lui aura fallu cinq tentatives et une soixantaine de pages, mais Dan Abnett a finalement réussi à faire sortir les Iron Snakes de l’océan de médiocrité littéraire dans lequel les fiers fils de la fière Ithaka pataugeaient (fièrement, sans nul doute) depuis ‘White Heat’. On retrouve ici les talents de conteur d’histoires et de distillateur d’atmosphère et d’univers1 de l’Abnett des séries Eisenhorn et Ravenor (et le retour gagnant – sauf pour lui – de l’Inquisiteur Mabuse y est sans doute pour quelque chose), capable de camper un monde impérial et sa culture propre en l’espace de quelques paragraphes bien sentis. Je ne pouvais donc pas aborder cette critique sans remettre à ‘Blue Blood’ les lauriers de meilleure nouvelle de la pentalogie chromatique reptilienne (vous êtes au 3ème millénaire, moi je suis déjà au 30ème) de Dan Abnett. Pas que la concurrence ait été très rude, notez bien, mais cette soumission n’est pas seulement la moins pire du lot, elle est objectivement satisfaisante, ce qui change agréablement.

Malheureusement, et c’est très ironique, cette amélioration notable se fait aux dépends des Iron Snakes eux-mêmes, qui sont ici relégués au rang de simples super soldats sans personnalité2. Inutile donc de s’être enfilé les quatre épisodes précédents, et surtout le Space Marines-onlyCrimson Storm’ pour apprécier à sa juste valeur cette nouvelle. L’escouade Damocles est juste une escouade tactique classique, et son Sergent n’a rien de particulier qui le distingue des milliers d’autres officiers Astartes de la Black Library. C’est comme si Abnett avait finalement décidé de ne pas écrire une histoire de Space Marines – ce qu’il ne sait, ou savait en tous cas, pas vraiment faire – mais une histoire avec des Space Marines – ce qui ne lui pose aucun problème. Le résultat est convaincant, mais on ne retrouvera plus trace des Iron Snakes dans Inferno ! après ‘Blue Blood’, alors que le magazine sera encore publié pendant deux ans à la suite de ce numéro #33. On peut expliquer cet abandon par de multiples raisons, mais je choisis de penser qu’Abnett a gagné son bras de fer avec la BL sur ce sujet, et est parvenu à démontrer par l’absurde qu’il ne servait à rien de s’acharner dans cette direction. ‘Blue Blood’ a donc une saveur particulière, et mérite donc la lecture à plus d’un titre.

1 : La description de l’intérieur du Mont Sacré m’a également fait penser à ce qu’on pourrait lire quelques années plus tard dans ‘Legion’, lorsque sont décrits les pouvoirs d’invocation et d’illusion des cultistes du Chaos de Nurth.
2 : Il est donc assez savoureux de lire dans la nouvelle que Priad s’insurge contre ce même constat, qui est appliqué à l’escouade Damocles par le nouveau roi d’Iorgu. Eh oui mon pauvre choupinet, ce n’est pas la carrure ou la taille qui sont d’une grande utilité sur ce plan…

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What Price Vengeance? – C. L. Werner [WFB] – #33 :

INTRIGUE :

What Price VengeanceLa bande de mercenaires tiléens du Capitaine Ursio a connu de meilleurs jours : engagée par le rusé Vicomte Augustine de Chegney pour brigander en son nom sur les terres de ses voisins, elle a failli à sa mission et a en conséquence essuyé une attaque meurtrière de la part d’autres sbires de l’implacable Bretonien, peu enclin à laisser des témoins de sa vilénie ternir sa réputation. Il paraît que les chevaliers du Royaume sont h.o.n.o.r.a.b.l.e.s après tout. Malheureusement pour Gus, les reitres ont survécu, et sont maintenant assoiffés de vengeance. Profitant de la bonté de Claudan de Chegney (fils du premier), ils investissent donc la place forte que ce dernier occupe au nom de son père – et qu’il a dérobé à un autre voisin, impérial celui-ci – en prétextant chercher à s’abriter des terribles orages des Montagnes Grises… et passent tous les habitants du château par le fil de l’épée pour se passer les nerfs. Tous ? Pas tout à fait. À malin, malin à demi : Ursio repart donc se cacher dans la campagne avoisinante avec le jeune fils de feu Claudan et sa nourrice, et charge le gouverneur du noble trucidé d’aller porter sa demande de rançon à Augustine.

Bien que n’étant pas vraiment un enfant de chœur, comme on a pu le voir plus haut, le Vicomte est un family man, ne serait-ce que parce qu’il est trop bête d’agrandir le fief familial uniquement pour le voir disparaître à sa mort, faute d’héritiers. N’ayant plus que Claudan Junior (que nous appellerons Cloclo) de ce côté-là, il est prêt à dépenser sans compter pour retrouver l’usufruit de son petit-fils, mais est convaincu par son conseiller (Plaisant) de ne pas négocier avec des terroristes, et de recruter à la place un tueur professionnel pour aller récupérer le bébé à ses ravisseurs. Cela tombe bien, Plaisant a justement un nom à souffler à son patron : celui du redoutable Brunner, un impérial que l’on dit de noble ascendance (ça compte pour les Bretonniens), et n’ayant jamais failli à la tâche. Augustine envoie donc son sénéchal recruter le chasseur de primes… qui refuse de prendre la mission, malgré les 200 couronnes d’or sonnantes et trébuchantes que le bon Plaise lui fait miroiter. Enfin, il fait mine de refuser plutôt, le temps de laisser un Plaisant très colère repartir de la taverne dans laquelle le rendez-vous a pris place, et se faire embusquer quelques mètres plus loin par un groupe de truands de bas étage, qui n’ont pas pu résister à la grosse bourse (au singulier ça va) du sénéchal. Cette avidité leur sera fatale, Brunner sortant des ombres au moment fatidique pour leur régler leur compte avec une efficacité consumée, et empocher au passage les quelques pièces d’argent que la mort de ces soudards lui rapporteront. Y a pas de petits profits.

Un peu plus tard, nous retrouvons le taciturne mercenaire sur les terres du Vicomte, qu’il semble très bien connaître. Ayant joué le rôle de l’innocent (mais tout de même très bien armé) voyageur pour attirer trois des hommes d’Ursio à se montrer auprès de son feu de camp, il a tôt fait d’en envoyer deux chez Morio (le Morr tiléen), gardant le troisième en vie pour qu’il lui indique où se sont cachés ses petits camarades. Et si la tour de guet abandonnée que les kidnappeurs ont choisi comme repaire semblait être un endroit parfait pour surveiller les environs, on s’aperçoit bien vite que Brunner joue vraiment à domicile, puisqu’il pénètre dans le donjon au nez et à la barbe des sentinelles grâce à sa connaissance du passage secret reliant l’édifice à un tunnel à proximité. Cet avantage lui permet de neutraliser discrètement (au début) les hommes d’Ursio, laissant ce dernier seulement accompagné de ses deux derniers lieutenants, et de ce cher Cloclo (la nourrice ayant été étranglée par un mercenaire nerveux après que Brunner ait arrêté le mode silencieux, et commencé à castagner du sbire sans retenue), dans la salle principale de la tour.

Ce remake Battle de ‘Trois Hommes et un Couffin’ ne se termine pas aussi bien que l’œuvre originale pour le trio en question. Les compagnons d’Ursio tombent rapidement sous les balles et les lames du chasseur de primes, ce qui laisse leur Capitaine s’échapper en courant avec le bébé dans les bras… jusqu’à ce qu’il fasse la rencontre des chausse-trapes que Brunner a pris soin de semer en bas de l’escalier de la tour, ce qui ruine ses sneakers et l’envoie au tapis (et le pauvre Cloclo avec, encore un drame des bébés secoués). Lorsque le Tiléen voit sa Némésis apparaître sur le pallier, il tente de le convaincre de le ramener avec lui chez de Chegney, ce que Brunner accepte… partiellement. Comme il le révèle à sa victime, le Vicomte n’a en effet payé que pour sa tête, le reste de son anatomie peut donc rester sur place.

La nouvelle se termine avec un face à face entre Brunner et de Chegney, le premier annonçant à son employeur que, malheureusement, Cloclo n’a pas survécu à sa capture. Dévasté par la nouvelle, le noble accepte tout de même d’honorer sa part du contrat et remet à son chasseur de tête (qui n’est pas revenu les mains vides) la moitié restante de la somme convenue, avant de lui donner congé…

Début spoiler…Mais la scène « post-credit » (si je puis dire) révèle que Brunner a menti, et gardé le bébé avec lui. Ne pouvant l’élever seul, il le confie à un couple de marchands, auxquels il remet également la prime versée par de Chegney. On comprend quand il présente Cloclo comme étant également son petit-fils que le chasseur de primes était en fait le Graf Von Drakenburg dont de Chegney a usurpé le domaine, marié de force la fille à son fils, et vendu à des esclavagistes pour s’en débarrasser. Cela explique la connaissance approfondie des terres des Von Drakenburg dont Brunner dispose, et son peu d’empressement à rendre Cloclo à Gus. La garde partagée est un plat qui se mange froid.Fin spoiler

AVIS :

Après nous avoir fait don de Mathias Thulmann quelques infernaux numéros plus tôt, C. L. Werner remet le couvert avec ‘What Price Vengeance?’, nouvelle introductive de l’un de ses personnages les plus marquants, le chasseur de primes Brunner. Le charme opère immédiatement dans cette histoire de prise d’otage (violente) et d’opération de libération (tout aussi violente), l’auteur parvenant à nous embarquer d’un tour de plume dans les bas-fonds du Vieux Monde en compagnie de brigands sanguinaires, de nobles cauteleux et de mercenaires impitoyables. L’intrigue est très solide, le déroulé plaisant à lire et idéalement dosé (Werner fait partie de ces bons écrivains qui savent prendre leur temps sans qu’on ait l’impression qu’ils meublent, qualité trop souvent absente des écrits de la Black Library à mon goût), la conclusion apporte sa petite révélation bien sentie et finement préparée par Werner au cours des pages précédentes, il y a du fluff et des one liners bien sentis… Que demande le peuple ?

Le seul petit défaut qu’on pourrait reprocher à cette masterclass med-fan est la tonne de descriptions vestimentaires dont Werner nous abreuve dès lors qu’un personnage important nous est introduit pour la première fois, une excentricité qu’on ne retrouve chez personne d’autre au sein de la BL à ma connaissance. A part ça, on a affaire à une nouvelle de très haute volée, tout comme l’anti-héros qu’elle nous présente.

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Fight or Flight – S. Mitchell [40K] – #33 :

INTRIGUE :

40K_Fight or FlightAyant récemment achevé ses classes de Commissaire, Ciaphas Cain intègre le 12ème régiment d’artillerie de campagne de Valhalla. Cette affectation sied tout à fait au futur Héros de l’Imperium, sensible aux nombreux avantages procurés par le fait que sa nouvelle unité contribue à l’effort de guerre depuis une distance confortable du front et de ses dangers. Malheureusement pour Cain, ses grands projets de pré-retraite avant l’heure vont être contrariés par l’arrivée inopinée d’un fragment de la flotte ruche Kraken en orbite de la planète Desolatia IV. L’occasion pour notre anti-héros de commencer à écrire sa légende, tout à fait malgré lui bien sûr.

AVIS :

Fight or Flight est la première consacrée par Sandy Mitchell à son personnage fétiche de Ciaphas Cain, le Commissaire le plus cool de la Garde Impérial. Même si le concept du petit rigolo perdu dans l’univers gothique du 41ème millénaire a fini par s’épuiser au fil des publications, cette introduction conserve encore aujourd’hui une indéniable fraîcheur, résultant de l’approche mesurée qu’à Mitchell de son sujet : même s’il s’agit pour lui de divertir le lecteur en usant des ressorts comiques de Cain (« mais non, je n’étais pas en train de m’enfuir ! ») et de son fidèle Jurgen (« mon odeur corporelle est une arme de destruction massive), et plus tard de l’Inquisitrice Amberley « girl next door » Vail, il prend en effet soin de ne pas sombrer dans la caricature, ce qui ne rend que plus attachant la bande de bras cassés qui lui sert de héros.

Pour résumer, si la lecture de la saga de Ciaphas Cain (neuf romans à date) n’est pas recommandée aux inconditionnels de la science-fiction « premier degré » de la Black Library, celle de Fight or Flight, parce qu’elle permet justement de se faire une religion sur les travaux du trublion Sandy Mitchell, est elle fortement conseillée par l’auteur de ces lignes.

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The Path of Warriors – N. McIntosh [WFB] – #33 :

INTRIGUE :

WFB_The Path of WarriorsOn le sait, la vie en Kislev n’est pas de tout repos. En plus du rude climat et de l’isolement qui frappe la plupart des communautés éparpillées sur ces vastes steppes, la menace d’une visite de « courtoisie » rendue par des voisins nordiques avides de pillage plane en permanence au-dessus des chapkas des braves sujets du Tsar. C’est donc avec plus de fatalisme que d’appréhension que Fedor Kumansky, pêcheur buriné par ses années à taquiner la tanche dans l’estuaire du Lynsk, voit approcher une flotille de maraudeurs venus tout droit de la Mer des Griffes. Il a même reçu un songe prémonitoire de la tuile qui n’allait pas tarder à tomber sur le petit village d’Odensk la nuit passée, c’est dire s’il est au fait des événements.

Accompagné par son fils aîné, Stefan, il se hâte de porter la mauvaise nouvelle à ses concitoyens, et prend la tête de la milice de farouches péquenauds bien décidée à repousser les Norscans s’ils leur venaient l’idée de s’arrêter à Odensk avant de remonter jusqu’à Erengrad. Il laisse son autre fils, Mikhal, aux bons soins de l’aîné, et fait promettre à ce dernier de protéger son cadet comme il l’avait lui-même juré à sa défunte femme sur son lit de mort. À ce stade, vous devez sans doute vous dire qu’un tel comportement ne peut signifier qu’une chose pour le brave Fedor : une mort prématurée d’ici à la fin de la nouvelle. Et vous avez raison, futés que vous êtes. Sans beaucoup de surprise, mais tout de même hors champ (donc il s’est peut-être simplement empalé sur son épée en trébuchant sur un caillou, laissons le bénéfice du doute aux maraudeurs), Papa Kumansky ne passe pas la nuit, vaincu avec ses camarades par la furie sanguinaire des hommes du Nord.

De leur côté, les fistons Kumansky s’en sortent beaucoup mieux. Planqués dans la maison familiale, ils commettent l’erreur de quitter leur refuge au premier bruit de bottes venu, confondant en cela la démarche chaloupée des Kislevites avec celle, chaloupée aussi à leur décharge, des Norscans. Livrés à eux-mêmes dans la scène de chaos (c’est fluff) que constitue le pillage d’Odensk, les frérots parviennent à échapper aux sales pattes d’un duo de maraudeurs mal-intentionnés, dont un se fait éborgner par le petit couteau de Stefan au passage. S’étant tapis au fond d’une barrique remplie de tripes de poissons (on ne jette rien à Kislev), le temps que le jour se lève et que la poussière retombe, Stefan et Mikhal sortent de leur cachette une fois le calme revenu à Odensk, et se rendent compte qu’ils sont probablement les seuls survivants de cette terrible nuit. Sans autre recours, les orphelins prennent le chemin de la terrible et dangereuse civilisation (sans doute Erengrad, tbh), empruntant par là-même le chemin des guerriers (wink wink), qui les mènera des années plus tard à exercer leur VENGEANCE sur les méchants qui leur ont fait du tort et navré à mort leur pauvre papounet. Sans doute que les chemins des mages et des voleurs étaient en travaux, à ce moment.

AVIS :

Neil McIntosh lève le voile sur la tragic origin story des frères Kumansky, qui servent de héros à la trilogie ‘Star of Erengrad’/’Tainted Faith’/’Keeper of the Faith’ que cet auteur a signé pour la Black Library en des temps très anciens ; dans ce très honnête ‘The Path of Warriors’. Si le déroulé des événements ne surprendra pas grand-monde, et que le cameo du maraudeur éborgné (que l’on retrouve plus tard dans les bouquins, mais dont le nom m’échappe au moment d’écrire cette chronique) risque de ne résonner qu’auprès de la toute petite communauté des fans hardcore de cette série aujourd’hui tombée dans l’anonymat le plus complet, on peut apprécier d’être enfin en présence de personnages un minimum complexe et sympathique, ce qui n’est pas le cas dans la majeure partie des Kumanskynneries que j’ai pu lire avant. La meilleure nouvelle de la trilogie de courts formats que McIntosh a écrit pour accompagner les romans, à mon humble avis.

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Leviathan – G. McNeill [40K] – #34 :

INTRIGUE :

40K_LeviathanLeviathan prend place entre les deux premiers tomes de la saga d’Uriel Vent Triste, Nightbringer et Warriors of Ultramar. La sorte de prologue qui ouvre la nouvelle voit le nouveau capitaine de la 4ème compagnie des Ultramarines se forger une épée pour remplacer l’arme dont il a hérité à la mort d’Idaeus, son prédécesseur à la tête des schtroumpfs verts. Euh… soit. La suite est plus classique, Uriel menant ses hommes dans le Space Hulk Death of Virtue dans le but de détruire ce dernier en posant quelques bombes à des endroits clés. Bien évidemment, les Space Marines vont rencontrer une opposition aussi féroce que prévisible, d’abord sous la forme d’Orks poltrons, puis de Genestealers grognons. Ce qui ne les empêchera pas de compléter leur mission, bien entendu. Le texte se termine par la détection de l’ombre dans le Warp par les astropathes du croiseur d’attaque Vae Victus, ce qui permet à McNeill de faire le lien avec la campagne de Tarsis Ultra. Ils arrivent…

AVIS :

Il y a des nouvelles dont on se demande à quoi elles servent, et Leviathan fait indéniablement partie de ces travaux à l’intérêt des moins évidents. Selon les mots mêmes de l’auteur, il s’agit d’une histoire « très simple », ce qui ne suffit pas à excuser le profond sentiment d’ennui qui émane de la quarantaine de pages consacrée par McNeill à cet épisode de transition, qui, s’il n’aurait sans doute pas pu être intégré au corps de Warriors of Ultramar sans ralentir considérablement le rythme de ce dernier, ne méritait pas franchement non plus de se voir dédier une nouvelle entière (et une nouvelle assez longue qui plus est). Pour résumer le fond de ma pensée, Leviathan est du proto-Cawkwell, ce qui est loin d’être un compliment.

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Glow – S. Spurrier [WFB] – #34 :

INTRIGUE :

GlowC’est la fin de l’automne à Talabheim, et le Temple de Sigmar local, dirigé par le capitaine Richt ‘Hmm’ Karver, enquête sur une addiction d’un nouvel ordre qui s’étend dans les bas-fonds de la cité. Le Glow, une poudre verte de composition inconnue, fait en effet des ravages parmi les déshérités de la métropole cratérisée. Très addictif, il a en outre comme fâcheux effet secondaire de provoquer des mutations spontanées chez ses utilisateurs réguliers, ce qui n’est pas du tout du goût de ce gentleman de Karver. Après avoir mené un raid dans un taudis dont l’adresse lui avait été donnée par un suspect, l’impeccable capitaine repart avec un cadavre frais de junkie agressif ainsi qu’une petite réserve de la substance en question, qu’il choisit d’ajouter à la diète du rat géant skaven qu’il a adopté comme animal de compagnie après une purge des souterrains de Talabheim l’année passée. Le savoir fait le pouvoir, c’est bien connu.

Les mois passent et l’hiver arrive sur l’Empire, sans que la filière locale de Glow soit démantelée malgré les meilleurs efforts de Karver et de ses hommes (Kubler, Holst et Spielmunn). L’épidémie ne fait au contraire que progresser, ce qui force les chasseurs de sorcières crackheads à muscler leurs méthodes, déjà assez viriles. Interrogatoires menés au tison, menaces d’envoyer leurs indics au bûcher s’ils ne s’activent pas et autres descentes dans la ville tous flingues dehors se multiplient. C’est au cours de l’une d’entre elles que Karver commet une bavure : surpris par la réaction de l’occupant d’un laboratoire clandestin où le Glow était produit, il déchargea sa pétoire sur ce qui se révéla être, après inspection post mortem, une fillette réduite en esclavage par le maître du cartel pour la confection des tablettes inondant la cité. Enchaînée dans son local et ayant été privée de langue par son tortionnaire, elle cherchait seulement à expliquer pourquoi elle n’était pas en capacité d’obtempérer aux ordres des Templiers lorsqu’un Karver sur les nerfs lui envoya un pruneau dans le caisson pour slow play. Ce sont des choses qui arrivent…

L’opération ne fut cependant pas un total échec, notre héros mettant le gant sur la poudre entrant dans la composition du Glow en fouillant le laboratoire. Ayant fait pression sur un sorcier de Jade pour obtenir une expertise express, il reçut la confirmation de ses soupçons : l’ingrédient actif du Glow était bien de la malepierre. Une erreur de manipulation de la part du thaumaturge lui permit de recevoir une autre information utile : la substance toxique se trouvait à la fois dans le gant utilisé pour recueillir la poudre dans le laboratoire, mais également à l’extérieur de ce dernier, indiquant sans équivoque que Karver avait manipulé de la malepierre peu de temps auparavant. Un résultat étrange, à moins que…

Début spoiler…À moins que la broche ornée d’une pierre verte que son meilleur disciple, Kubler, portait à la boutonnière ce jour-là n’ait pas été montée d’une émeraude, comme il le pensait, mais d’un minéral bien plus sinistre. La confrontation entre les deux hommes prend place dans la chambre froide creusée sous le Temple de Sigmar, dans lequel les répurgateurs stockent leurs cadavres contaminés dans l’attente du dégel. Ayant participé à la purge des terriers skavens en compagnie de son mentor, Kubler avait eu la mauvaise idée de s’intéresser à la malepierre utilisée comme monnaie d’échange par ces derniers, et qui le transforma rapidement en méchant de série B.

Ayant dupé la vigilance de son supérieur jusqu’à son fashion faux pas en matière d’accessorisation de sa tenue, Kubler est pris au dépourvu lorsque Karver le trouve en train de faire les poches des corps de Guerriers des Clans gardés en réserve par les Templiers à la recherche de cailloux verts. La surprise change toutefois de camp après qu’un Kubler gravement blessé par le tir de son patron passe en mode Technomage et avale d’un seul coup tous les éclats de malepierre qu’il trimballait sur lui, se transformant en mutant à la force et à la rapidité décuplés. C’est au tour de Karver de se retrouver dans les cordes, mais notre héros avait gardé un atout dans sa manche, ou plutôt au bout d’une chaîne : son rat de compagnie. Transformé en abomination (et pas Abomination, ça ne serait pas rentré dans son bureau) poilue par sa consommation régulière de Glow, Ratatouille est libéré par son maître et ne perd pas une seconde pour creuser un terrier dans la bedaine de Kubler afin d’accéder à la malepierre récemment consommée par le ruffian. Cet affrontement sans merci résulte en la mort simultanée des deux adversaires, laissant Karver le seul survivant de ce truel chaotique. Il faudra penser à passer un coup de mop, tout de même.Fin spoiler

AVIS :

Spurrier transpose avec succès une enquête des stups dans le monde de Warhammer Fantasy Battle avec ce ‘Glow’, qui illustre le sombre mais palpitant quotidien des Templiers de Sigmar lorsqu’ils n’ont pas de sorcières à se mettre sous la dent. Ambiance poisseuse, action rythmée, twist final bien amené… Simon Spurrier démontre l’étendue de ses talents de scénariste et sa valeur comme contributeur à la GW-Fiction avec cette nouvelle, qui sera malheureusement sa seule incursion dans le Monde qui Fut. Comme le hamster adoptif de Richt Karver, on aurait bien aimé avoir du rab’.

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The Curiosity – D. Abnett [40K] – #34 :

INTRIGUE :

40K_The CuriosityChargé par le gouverneur de Gershom d’établir la taxinomie complète des espèces animales de la planète, le magos biologis Valentin Drusher est sur le point de remettre son rapport lorsqu’il a vent des ravages causés par un mystérieux prédateur dans la région reculée de l’Udar Extérieur. Ayant consacré les sept dernières années à étudier la faune locale sans jamais rencontrer une créature pouvant être tenue responsable des attaques, la curiosité et l’orgueil professionnel de Drusher sont piqués au vif par ces échos lointains, et il décide en conséquence de répondre à l’invitation du baron du cru afin de tirer les choses au clair.

Associé à une Arbites (Germaine Macks) et à un chasseur de gros gibier (Fernal Skoh1), Drusher va rapidement se rendre compte que la « curiosité » de l’Udar est une réalité tangible, et que ses exploits sanglants et son élusivité ne doivent pas grand-chose au hasard. Quelqu’un se sert de la bête pour faire passer un message, mais qui, et pourquoi ?

1 : On retrouve d’autres membres de la famille Skoh (Feaver et Fernan, tous deux impliqués dans le juteux business de l’import de créatures exotiques destinées à combattre dans les arènes impériales) mêlés à l’intrigue de la trilogie Ravenor. Car-car-carnivora !

AVIS :

Si vous avez vu le film Le Pacte des Loups1, ni l’intrigue ni la conclusion de The Curiosity ne vous sembleront très originales, ce qui ne devrait pas vous empêcher de goûter malgré tout à cette première enquête de Valentin Drusher (que l’on retrouve également dans Gardens of Tycho, toujours en compagnie de Germaine Macks).

Très à son aise pour dépeindre la vie quotidienne des sujets de l’Imperium, à la fois dans sa normalité (Drusher étant l’incarnation même du fonctionnaire désabusé par son travail, et Macks celle du flic de province à qui on ne la fait pas) et son anormalité2, Abnett prouve qu’il maîtrise les codes du polar et est capable de les transposer dans l’univers gothique de 40K. Merci à Dan de démontrer sans équivoque que l’envers de l’Imperium (le côté civil) est au moins aussi passionnant que l’endroit (le côté militaire), et qu’il est possible de satisfaire le lecteur de la Black Library sans impliquer la moindre faction de Warhammer 40.000 au récit3. Avis aux autorités compétentes…

1 : Le long métrage de Christophe Gans étant sorti en 2001 et le recueil Crucible of War en 2003, il n’est pas interdit de voir en The Curiosity un pastiche volontaire de ce gros succès du box-office français.
2 : La bête du Gévaudan d’Abnett se révèle être un bête hormagaunt (bien qu’il nous l’ait plutôt vendu comme la Mort Bondissante en personne), ramené en sous-main par un membre de l’Ecclésiarchie cherchant à assurer la fidélité de ses ouailles aux offices dominicales (ou leur équivalent du 41ème millénaire), et auquel on a implanté une sorte de puce électronique dans le crâne afin de réguler son humeur mutine.
3 : Bon, ok, il y 1 hormagaunt qui vient contredire cette affirmation. Mais cette affectueuse bestiole est ici utilisée dans un rôle à contre-emploi (on est très loin des hordes chitineuses noircissant l’horizon), ce qui justifie à mon sens le fait qu’on ne puisse pas parler d’histoire de tyranides pour The Curiosity.

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Mark of the Beast – J. Green [WFB] – #34 :

INTRIGUE :

Mark of the BeastSoldat de carrière dans l’armée du Tzar de Kislev, Torben Badenov a gravi les échelons jusqu’à devenir le commandant d’une unité d’éclaireurs montés (15 exactement, et tous présentés par Green dès la première page de la nouvelle1). Pour son grand malheur, il sert sous le Capitaine Arman Yasharov, un noble kislevite aussi incompétent que méprisant, et bien décidé à faire tout ce qui est en son pouvoir pour revenir le plus tôt possible vidanger le samovar de la Reine des Glaces (en tout bien tout honneur, bien sûr). La bande d’Hommes Bêtes que son armée poursuit, et qui signe ses méfaits en apposant la titulaire « marque de la bête » dans les décombres des villages qu’elle a rasée2, bénéficie donc d’un avantage certain sur ses adversaires humains, et le pauvre Badenov en est réduit à limiter les dégâts causés par le leadership exécrable de son officier.

Envoyés par Yasharov pister la trace de la harde, qui semble avoir fait des prisonniers lors de sa dernière attaque, comme le faible nombre de cadavres trouvés dans les ruines du hameau où la nouvelle débute le laisse à penser, Badenov et ses scouts se font surprendre en rase taïga par une bande d’Ungors dépêchés par le Seigneur des Bêtes Gashrakk Blackhoof pour faire le service d’ordre à proximité de son campement. Gashrakk est en effet un visionnaire, dont le grand dessein est de réveiller le Seigneur du Dawa (Lord of Misrule en V.O.), une déité 100% chaotique que les légendes des Bêtes du Chaos font reposer en dessous de la pierre des hardes de la tribu de la Corne Noire. Pour permettre au Dawaster de sortir de son trou et de régner à nouveau sur son « royaume de confusion » (sicoù on n’écoute que du Genesis à fond les ballons, j’imagine), le big G. a un plan : sacrifier un nombre suffisant de prisonniers au Chaos, en mettant le feu à une effigie géante d’Homme Bête construit avec des cages en bois. Et moi qui pensait qu’ils ne savaient rien faire de leurs dix (?) doigts (?), me voilà corrigé. L’approche peu subtile de Yasharov ayant alerté le chamane Cathbad, Gashrakk sait que son projet X risque d’être interrompu par des Kislevites en maraude, et a donc envoyé quelques bandes désœuvrées contrecarrer la manœuvre. Il a aussi envoyé une doublette de chars à sangleboucs, malheureusement pour les cavaliers légers de Badenov, qui sont contraints à se replier en désordre après l’intervention des panzers adverses, abandonnant quelques morts et blessés sur le champ de bataille.

De retour au campement kislévite, Badenov réussit à obtenir de son Capitaine l’autorisation de lancer une mission d’infiltration de la base adverse (repérée par d’autres scouts, plus doués, eux) pour tenter de libérer ses camarades prisonniers, et peut-être secourir quelques civils au passage. Yasharov n’est absolument pas convaincu par la menace posée par un rituel sacrificiel qu’il s’agirait d’empêcher avant que l’attaque de son armée ne débute, mais il laisse tout de même à son sous-fifre jusqu’à la tombée de la nuit pour mettre à exécution son plan, après quoi il donnera l’assaut. Réduits à mi-effectifs à ce stade de la nouvelle, les Badenov’s Baddies profitent d’un coup de pouce de la part du script pour progresser vers leur objectif : le campement des Hommes Bêtes a été établi sur un ancien oppidum ungol, et compte bien entendu un souterrain secret reliant le centre de la place forte à l’extérieur. Haaa. Et nos héros trouvent bien sûr ce souterrain secret en l’espace de trois minutes. Hooo. Leur chance tourne cependant lorsqu’ils découvrent que les Gors ont décidé d’installer leurs latrines à l’endroit où le tunnel émerge dans leur campement. Un petit prix à payer pour speed runner cette quête, cependant.

De son côté, Gashrakk ne s’est pas tourné les sabots et a entamé le rite de réveil démoniaque/feu de joie païen avec Cathbad. L’arrivée imminente de l’armée kislevite, que sa bande d’Ungors n’a manifestement pas arrêtée (comme c’est bizarre) force toutefois le Seigneur des Hardes à accélérer le protocole, et à balancer une torche sur son bonhomme (bête) carnaval avant que le chamane n’ait pu terminer de réciter « je te tiens par la barbichette » 666 fois de suite. C’est le moment que choisissent Badenov et ses hommes pour lancer leur attaque sur les mutants, confiants dans le fait qu’il ne leur faudra tenir que quelques minutes avant que le reste de leurs forces n’arrivent en renfort, pas vrai ? PAS VRAI ? En cela, ils ont sous-estimé le jemenfoutisme de Yasharov, qui se contente d’envoyer quelques cavaliers barricader les portes du campement (?) pour empêcher les Hommes Bêtes de sortir. Car apparemment, ces derniers savent construire des statues en bois de 10 mètres de haut, mais le concept de distance de sécurité par rapport à un foyer de combustion leur est inconnu. La magie du scénario…

Toujours est-il que cette défection de dernière minute ne fait pas les affaires de nos héros. Si Cathbad se fait assez facilement soloter par Arnwolf le Norse, Badenov n’a pas la partie facile contre Gashrakk. Finalement, un anneau nasal trop solidement fixé, un crochet attaché à une chaîne elle-même fixée à la pierre des hardes, et surtout un positionnement malheureux du Seigneur des Blettes vis-à-vis de l’angle de chute de son effigie enflammée, auront raison du pauvre Blackhoof. C’est ce qu’on appelle un bûcher des vanités, vraiment. S’il ne réussit pas à réveiller le Dawaster et perd toute sa tribu en même temps que sa vie dans cette folle soirée (les Hommes Bêtes le sont vraiment, faut croire), il peut au moins se réconforter en songeant que tous les villageois capturés ont également fini en marshmallow (donc je ne comprends pas pourquoi son plan n’a pas marché… à moins que les invocations de Cathbad soient vraiment capitales), ainsi que la plupart des hommes de Badenov. En comptant l’évasion miraculeuse d’Oran et de Manfred, qui avaient été faits prisonniers par les Ungors, nos héros ne sont plus que six, et c’est assez naturellement qu’ils décident de déserter pour devenir des mercenaires, loin de l’incompétente brutalité des officiers placés là par leur famille. D’ailleurs, à ce propos…

Début spoiler…Il n’est jamais trop tard pour se venger de mauvais traitements, surtout quand on n’a plus rien à perdre. Badenov et Oran rendent donc visite à Yasharov au cœur de la nuit, et procèdent à un échange du meilleur goût : ils laissent la tête calcinée de Gashrakk dans le lit de l’aristocrate, Le Parrain-style, et vont planter la sienne sur une pique à l’extérieur du camp kislévite, avant de partir voir ailleurs s’ils y sont. On connaît la suite…Fin spoiler

1 : Et si vous pensez que je n’ai pas la patience ou la mesquinerie nécessaire pour relayer l’information, vous devez être nouveau ici : Torben Badenov, Oran Scarfen, Vladimir Grozny, Alexi, Arkady et Andrei Tolyev, Manfred, Oleg Chenkov, Arnwolf, Zabrov, Mikhail Polenko, Yuri Gorsk Kiryl, Evgenii, Cheslav, Stefan. Il n’en resteraque six  à la fin, ne vous attachez pas trop.
2 : Parfois en utilisant des matériaux… plus biodégradables que d’autres.

AVIS :

S’il ne s’agit pas de la première nouvelle écrite par Jonathan Green pour sa bande de mercenaires préférés, ‘Mark of the Beast’ peut au moins se prévaloir d’être le premier épisode de la série qui donnera au final le recueil ‘The Dead and the Damned’. Le résultat n’est pas aussi navrant qu’il a pu être dans d’autres péripéties badenoviennes, la haute teneur en action (bas du front) injectée par Green dans cette aventure l’empêchant de trop s’empêtrer dans son scénario, même si ce dernier apparaît tout de même très fragile dès lors qu’on a le malheur de s’intéresser un peu trop à lui. Si le héros s’appelle Badenov, l’auteur a pour sa part bien mérité le nom de Good Enough… De la cheap fantasy très peu intéressante, à moins que vous ne cherchiez à voir ce que le BL style a produit de plus suranné.

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A Ship Called Rumour – D. Abnett [WFB] – #35 :

INTRIGUE :

WFB_A Ship Called RumourDe retour à Sartosa, la cité pirate du Vieux Monde, après avoir effectué un séjour dans les geôles tilléennes, Luka Silvaro compte bien reprendre en main sa petite affaire familiale, récupérée par son demi-frère Guido après sa malheureuse incarcération. Très originalement pour l’endroit, Luka est un capitaine pirate, et pour rentrer en possession de ses biens (et personnes), il lui faut vaincre en « duel » – lui doit se battre seul, son adversaire non – son fourbe de parent. Ce qu’il fait avec les formes, dans le cadre bucolique d’une taverne enfumée, et sous les yeux d’un compagnon (Sesto) qui l’a suivi depuis Luccini pour s’assurer qu’il mettrait à profit sa liberté retrouvée pour accomplir une mission d’importance : traquer et couler le Butcher’s Ship, un vaisseau pirate semant la terreur sur le Grand Océan. Gentleman jusqu’au bout, Luka se contente d’amputer son gredin de frérot de sa main gauche (de toute façon, il ne lui restait plus que deux doigts de ce côté-là) plutôt que de l’achever, comme il en avait pourtant le droit et l’envie.

La suite de la nouvelle suit la préparation du capitaine abandonné réhabilité et de ses principaux lieutenants pour partir en chasse, sur les deux vaisseaux (la Rumeur et le Saphir) que compte la petite flotte de Silvaro. Les coques calfatées et les cambuses remplies, il est temps pour ce beau monde de cingler les voiles afin de… trouver un tuyau sur la localisation du Bucher’s Ship. Car malgré toute sa bonne volonté, Luka n’a pas la moindre idée d’où se cache sa proie, ce qui ne va pas faciliter la levée de sa probation et le versement des mille couronnes promises par Luccini en échange de l’accomplissement de sa mission. Il croit que sa chance a tourné lorsque se présente au loin les galères du collègue pirate arabien Ru’Af, mais ce qui devait n’être qu’une discussion informelle entre gens de mer se transforme soudainement et sans crier gare en bataille navale rangée. En cause : encore ce maudit Boucher, qui a tellement vidé les eaux internationales de leur trafic habituel que les pirates en sont réduits à s’attaquer les uns les autres pour tenter de survivre. Quelle époque mes pauvres amis.

Cueilli à froid par la traîtrise de Ru’Af, il faut bien quelques pages de féroces combats, et la perte d’un membre du casting, pour que Luka Silvaro parvienne à se tirer de cette mauvaise passe. La nouvelle se termine sur l’annonce officielle faite à son équipage de la mission qui lui a été confiée par ses employeurs tiléens, et sur un peu de name dropping de bon aloi. Il se pourrait que ce soit ce triste sire d’Henri le Breton qui se cache derrière la barre du Butcher’s Ship. Encore les Bretons (pourquoi ne suis-je pas surpris, sans déconner ?). Quelle mafia alors.

AVIS :

Comme il sait si bien le faire (lire ‘Les Cavaliers de la Mort’ pour s’en convaincre), Dan Abnett donne souffle et vie à un petit bout du Vieux Monde de manière aussi convaincante que prenante dans ce ‘A Ship Call Rumor’. On se fait rapidement happer par cette histoire de flibustiers au long cours, aussi exotique que fascinante pour l’habitué de la GW-Fiction, et suffisamment bien écrite pour être à la portée des nouveaux venus (après tout, tout le monde sait ce qu’est un pirate). Si on peut reprocher à ces quinze pages d’être très chargées en personnages, qui ne font pas forcément grand-chose d’intéressant une fois les présentations effectuées, et à l’action en elle-même de traîner en longueur, il s’agit d’un petit et logique prix à payer pour poser les fondations d’une serie feuilleton, qui semble avoir été pensée dès sa conception par Abnett et la BL comme publiable à terme comme un roman dont les chapitres seraient les nouvelles1 (ce qui sera le cas au final : ‘Fell Cargo’). On termine ce segment introductif avec une intrigue bien mise en place et une envie certaine de connaître la suite des aventures de Luka Silvaro et de ses hommes : c’est donc mission accomplie par Dan Abnett.

1 : Une pratique très courante à cette époque pour la Black Library, dont une bonne partie du catalogue lors de ses premières années était constitué de romans patchworks, aussi bien pour Warhammer Fantasy Battle (‘Tueur de Trolls’, ‘Hammers of Ulric’, ‘Gilead’s Blood’) que pour 40K (‘Ghostmaker’, ‘Brothers of the Snake’). On constate qu’Abnett a contribué à quatre de ces cinq exemples, ce qui en fait le champion du repackaging littéraire !

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The Beguiling – S. Mitchell [40K] – #35 :

INTRIGUE :

Nous retrouvons le Commissaire préféré de ton Garde Impérial préféré peu de temps après la campagne de Keffia (‘Sector 13’), sur la planète de Slawkenberg et engagé, aux côtés du 12ème Régiment d’artillerie de campagne de Valhalla (Jurgen, Divas et Mostrue sont de la partie), dans la purge du culte chaotique ayant déclenché une insurrection sur ce monde autrement paisible. Ou plutôt, des cultes chaotiques, comme nous allons le voir. Après quelques mois de routine agréable, passés à bombarder les positions ennemies à 71,99 pouces de la ligne de front le matin, déjeuner dans des petits bistrots sympathiques, et déguster de l’amasec vintage en charmante compagnie l’après-midi, notre fringant mais prudent héros se rend compte qu’il s’ennuie quelque peu, et décide de suivre une patrouille d’observateurs avancés de son régiment, accompagné de son fidèle Jurgen, pour voir du paysage et soigner sa réputation d’officier héroïque et proche de ses hommes.

Ce qui ne devait être qu’une simple balade en Salamander va bien sûr mal tourner, d’abord en raison d’une météo capricieuse et de l’absence de capote (livrée en option sur ce type de véhicule), puis à cause d’une embuscade maladroitement commise par un groupe de Prouteux en vadrouille, forçant les Valhallans à s’enfoncer dans une forêt profonde sur un petit chemin au lieu de rester sur la route (détruite par leur botte secrète : l’appel à un ami qui a une batterie de Basilisks sous ses ordres). Au bout de quatre heures de rallye pluvieux, Cain et ses charges retournent enfin à la civilisation, représentée par un manoir isolé mais apparemment occupé, comme son illumination l’atteste.

Ayant garé leur Salamander à quelque distance de la bâtisse afin de pouvoir la reconnaître discrètement, les Gardes sont surpris par l’arrivée désespérée d’une jeune fille affolée et fort peu vêtue, poursuivie par un petit groupe de cultistes de Nurgle. Si les maraudeurs pestiférés sont rapidement mis hors d’état de nuire, à défaut de puire, par les bidasses en goguette, et que la demoiselle en détresse, rapidement rejointe par quelques accortes amies, tombe dans les bras de ses sauveurs, Cain éprouve un vague mal-être (et une démangeaison palmaire de mauvais augure) devant la tournure prise par les événements. Quelque chose ne sent pas bon dans cette affaire, et ce n’est pas Jurgen (pas que, en tous cas)…

Début spoiler…Et en effet, la petite soirée que nos quatre militaires passent à l’Académie pour jeunes filles du monde de St Trynia, si elle s’avère mémorable, ne l’est pas pour les bonnes raisons, et se révèle aussi être la dernière pour deux des camarades de Cain. Alors que ce dernier se retrouve dans les quartiers privés de la directrice pour une séance de tantrisme extra-curriculum, l’ambiance retombe brutalement lorsque la voluptueuse Mademoiselle Duboir confie à son coup d’un soir qu’elle l’a tout de suite identifié comme un fidèle de Slaanesh. Ce que Cain ne pense pas qu’il est (encore1), merci pour lui. Il prend d’ailleurs la mouche au point d’abattre sans sommation son hôte après cette petite confidence. Et à propos de mouche, voici les Nurgleux qui reviennent à la charge, et prennent d’assaut le manoir et ses habitantes, offrant à Cain et à Jurgen (mis très mal à l’aise par le rentre dedans qu’il a subi toute la soirée de la part des prêtresses du plaisir sous camouflage) la couverture parfaite pour s’éclipser discrètement, laissant les dépouilles de leurs camarades malheureux au milieu du champ de bataille. Un petit coup de fil au Colonel Mostrue et un bombardement de la Chaos Star Academy plus tard, tout est bien qui finit bien pour le Héros de l’Imperium, qui décide suite à cette aventure de reprendre en main son hygiène de vie afin de ne plus être pris pour sex addict par la première cultiste venue. Non mais.Fin spoiler

1 : D’ailleurs à l’époque, Cain ne sait même pas trop qui sont les Dieux du Chaos (il l’apprendra plus tard en traînant avec l’Inquisitrice Vail). Mais comme Mitchell est partisan de la théorie des signes chaotiques (les noms et symboles des Dieux du Chaos sont tellement horribles que les entendre ou les voir provoque une réaction épidermique même chez les profanes), la confidence sur l’oreiller de Miss Duboir suffit à convaincre notre héros qu’il y a slaanguille sous resh.

AVIS :

Mitchell livre une nouvelle Cainesque tout ce qu’il y a de plus classique avec ce ‘The Beguiling’, qui mélange action, humour, grimdark et second degré avec un goût certain. Si l’expérience de lecture est assez plaisante, comme souvent avec les aventures du Commissaire le plus cool1 et coulant de tout le Segmentum, je regrette toutefois que Sandy Mitchell n’ait fait aucun effort pour ménager un peu de suspens sur l’opposition entre les deux factions antagonistes (Prout vs Meuh), qui nous est annoncée dès la première page, puis est mise en scène de façon très directe dès l’arrivée de Cain et ses hommes dans le manoir de Duboir. Etant certain de la capacité de Mitchell, en tant que scénariste et narrateur, à obtenir un résultat plus palpitant que ce très et trop convenu ‘The Beguiling’ (comme il a pu le montrer dans ‘Last Night at the Resplendent’ par exemple) s’il avait voulu s’en donner la peine, je reste un peu sur ma faim avec cette nouvelle, et ne la place donc pas parmi les tout meilleurs épisodes de la saga de Ciaphas Cain. Peut mieux faire et a mieux fait.

1 : Logique pour un officier rattaché à un régime de Valhalla, vous me direz.

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Meat Wagon – C. L. Werner [WFB] – #35 :

INTRIGUE :

WFB_Meat WagonVotre attention s’il vous plaît. La nouvelle qui va suivre comprenant un nombre élevé de personnages nommés (plus ou moins) importants pour notre intrigue, nous vous remercions par avance de suivre attentivement les présentations qui vont vous être faites de notre casting. Vous aurez été prévenus.

Et nous voici donc catapultés dans un relais routier minable sur la route reliant Erengrad à Zandri en passant par Nuln, où une belle bande de personnages attend que leur personnel de bord ait fait le plein et chargé les plateaux repas. Les écouter un instant suffit au lecteur sagace pour deviner où chacun se positionne sur l’organigramme de la nouvelle d’action med-fan1. Nous avons ainsi, par ordre d’apparition : le joueur de cartes (en os, because why not2)/escroc/joli cœur Feldherrn, le gras, riche, désagréable et xénophobe marchand de vodka Emil Steinmetz, sa « fiancée »/chaufferette achetée en soldes à son vieux père Lydia, et son garde du corps couturé et patibulaire, Ravna (surnommé un demi car il utilise une épée bâtarde). À cela, nous nous devons d’ajouter la Baronne von Raeder, vieille fille maniérée et hautaine, mais se baladant avec une rapière au côté, et le jeune ingénieur Nain Fergrim Pointefer, transportant avec lui des caisses frappées de runes auxquelles il tient comme à la prunelle de ses yeux. Pour finir, un mot sur les chauffeurs de ces messieurs-dames : l’Ostlander au fouet et aux chicots pourris, Ocker, et son comparse Strigani à tête de fouine et à moustache pleine de miettes (un signe sûr que c’est un filou… ou une fouine qui vient de tomber sur une baguette), Bresh. Pfiou, une bonne chose de faite.

Tout ce petit monde se dirige donc vers Nuln et doit cohabiter pour quelques heures, même si des tensions se manifestent déjà au sein du groupe. Le voyage du coche est cependant interrompu avant son terme par un fiacre-stopper planté au bord de la route. Reconnaissant un Répurgateur à la forme de son chapeau, les deux gredins tenant les rênes, et que le lecteur avait surpris quelques temps auparavant à échanger des remarques lourdes de sens hors d’écoute de leurs passagers, sont d’abord tentés de l’écraser, mais Mathias Thulmann (car c’était lui) avait habilement prévu le coup en demandant à son homme de main et tortionnaire particulier, Streng, de se positionner stratégiquement avec une arbalète chargée à proximité. Si Thulmann joue du pouce sur les grands chemins, c’est que son cheval à perdu un fer et qu’il a donc besoin d’être dépanné jusqu’à la forge la plus proche. Ne prenant pas les dénégations polies des conducteurs pour argent comptant, il s’installe donc posément dans la diligence, laissant son acolyte suivre cette dernière avec leurs chevaux, et propose un tour de table amical pour briser la glace entre les compagnons de voyage. Venant d’un type qui peut vous condamner au bûcher si vous éternuez de façon bizarre, pas sûr que cela fonctionne beaucoup.

En tous cas, cette rencontre fortuite n’empêche pas Ocker & Bresh de dérouler la suite de leur plan, et donc d’amener leur véhicule jusqu’au charmant petit village de Mureiste, Sylvanie. « Dites donc, c’est étrange que nous fûmes allâtes en direction du Nord-Est alors que la logique voullasse que nous nous dirigeassionnèrent vers le Sud-Ouest » commente ce finaud de Thulmann, à qui on a appris le Reikspiel littéraire et la géographie au Temple de Sigmar. Il ne faut donc pas s’étonner que notre héros dégaine une de ses pétoires de service lorsque l’équipage annonce une pause de quelques minutes à ses passagers, et interdise en des termes non incertains aux ruffians de bouger de leur siège. Cette situation des plus tendues (Streng étant venu appuyer les dires de son employeur avec sa propre arbalète) dégénère cependant tout à fait lorsque les habitants de Mureiste arrivent en masse taper au carreau du fiacre, et pas pour demander s’ils peuvent laver le pare-brise, non non. Car les locaux sont des goules, elles ont faim, et de bien mauvaises manières. Dans le tumulte qui s’en suit, notre compteur de mort horrible se déclenche enfin, grâce à la participation active d’Ocker, qui prend un carreau dans le bide de la part de Streng en tentant de dégainer son tromblon, tombe de son siège, se fait rouler dessus par la voiture qui s’emballe, et dévorer vivant par les relations professionnelles des son collègue. Pas mal pour un début. Bresh, de son côté, réussit à faire décrire des cercles à l’attelage devenu fou jusqu’à ce que le poison des cannibales fasse effet et terrasse les chevaux3. Le coche se renverse, manquant d’écraser Pointefer, mais ne faisant pas d’autres victimes que les chausses de Steinmetz, dont le transit intestinal est accéléré par la vue des goules. Toutefois, tous nos personnages, y compris Bresh, que Thulmann amène manu militari avec lui pour qu’il s’explique, réussissent à se réfugier dans le temple de Sigmar local, et à en barricader les portes.

Dès lors, il s’agit pour nos héros de s’organiser. Pendant que ses camarades fortifient leur position ou sanglotent dans leur coin, le Répurgateur torture un peu son suspect, arrivant à tirer de ce dernier la promesse d’une mort abominable délivrée d’une main de Maître par ce dernier. Il ne faut pas longtemps à Thulmann pour comprendre que les goules ne sont qu’un avant-goût d’une nuit très agitée qui s’annonce, et le zélote va donc prêter main-forte à ses acolytes, qu’il positionne à des endroits stratégiques dans l’attente du prochain assaut. À la tombée du jour, une chauve-souris géante vient déverser des litres de guano sur la grand-place où patientent les Muriestois, avant de se poser et de se changer en, je vous le donne en mille, Ozzy Osbourne. Ou presque. En vampire Stryge. Après s’être fait briefer sur les derniers événements, et avoir repris quelques forces en sirotant le messager4, il lance ses ouailles à l’attaque du monument, en leur indiquant de penser à faire le tour, cette fois-ci. Si la marée de viande écumante (voir « ils l’ont écrit ») ne parvient pas à faire autre chose que trembler les portes dans un premier temps, les nerfs fragiles de cette fiotte de Steinmetz manquent de condamner la team Sigmar lorsque le pleutre décide d’aller libérer Bresh dans l’espoir que ce dernier parvienne à le sauver. Malheureusement pour lui, et pour son nouvel obligé, Lydia donne l’alerte à Thulmann avant que le Strigani n’ait eu le temps de lui planter un couteau dans le dos. Privé de l’avantage de la surprise, les vingt centimètres d’acier du ruffian ne font pas le poids ni la longueur face à l’épée bénite du Répurgateur5, et le malappris se fait posément transpercer la gorge par son adversaire, qui peut aller redonner un coup de main très bienvenu à ses comparses.

C’est le moment que choisit le Stryge pour faire son entrée dans la place, par la fenêtre s’il vous plaît. Chemin faisant, il charcute horriblement la pauvre Baronne von Raeder6, pulvérise un banc et éventre Steinmetz, faisant un peu de ménage dans notre casting. Ses tentatives de griffer à mort Thumann sont cependant mises en échec par le jet d’eau bénite qu’il se prend dans la figure (ça brûle), et par les gros débuffs de zone que lui inflige le sol consacré du lieu saint dans lequel il se trouve. C’est ça aussi de ne pas demander à ses goules de raser le temple de Sigmar du village en temps et en heure. Devant tant de diableries, ou peut-être l’inverse, le vampire décide d’aller prendre l’air, entraînant avec lui ses hordes de groupies décérébrés. L’occasion pour les défenseurs de souffler un peu et de faire leurs comptes, le pauvre Ravna, méchamment tailladé par un ongle sale de goule, n’en ayant plus pour très longtemps…

C’est alors que Pointefer se souvient que le contenu de ses caisses n’est autre que de la poudre à canon. Gag. Jouant leur va-tout, les survivants envoient donc le Nain et le mourant poser une mèche dans les décombres de la diligence, pendant que Thulmann tente de distraire le Stryge. Cela marche tellement bien que, lorsque l’héroïque Ravna se sacrifie pour mettre le feu aux poudres, le buveur de sang est encore occupé à envoyer des gros doigts, ou griffes dans son cas , au Répurgateur depuis le sommet de la diligence. Bilan des courses : un centre ville dévasté, une vingtaine de goules déchiquetées, et un vampire en piteux état, que Thulmann achève d’un coup d’épée en plein cœur en punition de son tapage nocturne7. Ici s’achève notre histoire, les deux chasseurs de sorcières décidant de repartir avec leurs montures (habilement garées dans le temple par Streng un peu plus tôt), même déferrées, plutôt que de s’éterniser plus longtemps dans ce patelin paumé qu’est Mureiste. Et Thulmann de donner ce conseil avisé aux trois survivants de notre échappée belle (voyez si vous pouvez les identifier) : « je suis sûr que ça va marcher ».

1 : Et dans une certaine mesure, de déterminer qui a le plus de chances de mourir dans d’atroces souffrances au cours des prochaines pages.
2 : Même si le matériau utilisé me semble un peu saugrenu. Sans compter de la taille du squelette nécessaire pour tailler des cartes d’une taille suffisante. Sans doute un moyen pour les forces impériales de monétiser les cadavres d’Orques qui s’accumulent comme des feuilles mortes en automne après la Waaagh ! hebdomadaire.
3 : Qui n’ont pas reçu de nom et que je n’inclue donc pas à ma liste, à grand regret.
4 : Don’t shoot the runner, but drink them? Yes you can.
5 : Annule les sauvegardes invulnérables des Démons, coup fatal sur les sorciers à cœur noir.
6 : Dont le tort fut d’être une femme répudiée indépendante, et donc indigne de confiance pour ce misogyne de Thulmann.
7 : Non sans avoir balancé la petite réplique qui va bien juste avant, ici librement empruntée à ‘Le Bon, La Brute et le Truand’ (déjà pastiché par Werner dans sa série ‘Brunner, Bounty Hunter’.

AVIS :

On savait Werner particulièrement à son aise pour la mise en scène de nouvelles d’actions sérialisées, qu’il s’agisse pour lui de suivre une traque du chasseur de primes Brunner, ou une purification expresse dispensée par le zélé Mathias Thulmann. Cette réputation n’est pas usurpée ici, car cette Charcuterie Ambulante tient beaucoup mieux la route, et c’est heureux, que la diligence empruntée par nos héros pour se rendre à Nuln. En plus de bénéficier d’une atmosphère tendue tout à fait appréciable, en grande partie grâce au rythme soutenu imposé par l’auteur, et les quelques descriptions gore à souhait qu’il glisse au fil des pages, cette nouvelle parvient également à faire « vivre » (et mourir, dans beaucoup de cas) sa belle brochette de personnages de façon naturelle et équilibrée, et emprunte avec bonheur au genre du western, dont Werner est un fan assumé. La fameuse scène de l’attaque de la diligence par les Indiens, ou, plus proche de nous, l’attente tendue des 8 Salopards, partagent ainsi des similarités fortes avec le siège de temple de Sigmar par un Stryge et ses goules, preuve que dans la pop culture, tout est dans tout et inversement. Au final, encore une nouvelle solide à mettre au crédit d’un des chasseurs de lignes les plus réputés du Vieux Monde plutôt que du Far West, et une très bonne introduction du personnage de Mathias Thulmann aux non-initiés, si nécessaire.

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Warp Spawn – M. Ralphs [40K] – #35 :

INTRIGUE :

Ayant accepté à son bord un couple de clandestins et leur petite fille qui cherchaient à quitter la planète Vrantis III, le capitaine Matteus du transporteur Sable Bess ne se doute pas qu’il est sur le point de vivre la traversée la plus éprouvante de sa carrière. La famille idéale se révèle être un couple d’adorateurs du Chaos, et leur enfant la BFF des jumelles Apex, volontairement droguée par ses parents aimants afin de l’empêcher de jouer avec son ami imaginaire (je ne sais pas pour vous, mais ça m’évoque Marie Frisson et Gros Chat), un peu soupe au lait il faut bien le reconnaître. Loi de Murphy oblige, la maléfique fillette est bien sûr réanimée par l’équipage, dont la majeure partie ne vivra pas assez longtemps pour regretter cette décision. Dans le Warp, personne ne vous entend crier…

AVIS :

L’univers de Warhammer 40.000 est tellement vaste qu’il peut – en théorie – servir de cadre n’importe quel type de récit, même ceux les plus éloignés du standard de la Black Library (SF d’action). Partant, la décision de Matt Ralphs de signer une pure nouvelle d’horreur avec son Warp Spawn est loin d’être incongrue, d’autant plus que le bonhomme sait s’y prendre pour narrer des scènes cinégéniques en diable (oups). Le calvaire vécu part Matteus et ses comparses a beau ne pas être bien original, Ralphs parvient à instiller une atmosphère de slasher mâtiné d’épouvante surnaturelle à son propos, qui retombe malheureusement bien avant la conclusion (assez bancale) de la nouvelle.

Au final, si les deux premiers tiers de Warp Spawn sont un régal, le dernier tiers est franchement décevant, et aurait gagné à être plus développé par un auteur à court de place, de patience et/ou d’inspiration pour donner à son récit un final digne de ce nom. Dommage.

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Redhand’s Daughter – W. King [WFB] – #36 :

INTRIGUE :

WFB_Redhand's DaughterAprès avoir fait les 400 coups (de hache runique) en Arabie, quelques temps après leur retour d’Albion (Tueur de Géants), Gotrek et Felix se retrouvent sur le cuirassé nain du Capitaine Ahabsson, croisant sur les eaux du golfe d’Arabie depuis la forteresse de Barak Varr. Toujours à la recherche d’une fin glorieuse, le célèbre Tueur doit ronger son frein pendant la croisière, ce qu’il fait en s’enfilant pinte sur pinte et en gueulant sur Ceniormeteo, le dieu elfique des dépressions, tandis que Felix préfère meubler ses journées en regardant les dauphins et entretenant des pensées sinistres, comme à son habitude. Nos plaisanciers ne tardent cependant pas à être mis à l’épreuve (autrement, cela aurait été la nouvelle de Gotrek & Felix la plus ch*ante du monde), d’abord par la survenue d’un grain sévère, qui endommage bellement le Storm Hammer, puis par la rencontre avec un navire de pirates Orcs, qu’Ahabsson décide, en corsaire assermenté, d’aller piller. L’enthousiasme fiévreux du capitaine se heurte toutefois à quelques dures réalités, à commencer par les projectiles enflammés projetés par la catapulte de proue du vaisseau adverse, qui cabossent suffisamment le steamer nain pour que ce dernier se retrouve à portée d’abordage par l’équipage peaux-vertes, beaucoup plus nombreux que ses vis-à-vis. La bataille qui s’en suit permet à Gotrek de se dégourdir les orteils (pas mieux à espérer contre de simples boyz), et à Felix de voler à la rescousse d’une prisonnière de l’infâme Capitaine Goldtusk, qu’il réussit à escorter jusqu’au Storm Hammer avant que ce dernier ne parvienne à se désengager.

Vainqueurs éprouvés de l’affrontement, les Nains décident d’aller mouiller l’ancre sur l’une des îles toutes proches, encouragés en cela par le récit fait par la rescapée (Katja Murillo) du légendaire trésor que le pirate Redhand, qui se trouve être son père, a dissimulé sur cette dernière. Elle-même capitaine au long cours, elle promet à ses sauveurs de partager les bénéfices de son héritage s’ils l’aident à mettre la main dessus. Capturée par Goldtusk alors qu’elle voguait vers le butin avec son propre équipage, Katja n’a dû son salut qu’à l’avidité de l’Orc, qui a épargné sa vie en échange d’un aller simple vers le magot familial. Jamais les derniers à se lancer dans la quête de richesses mal acquises, Ahabsson et ses gars acceptent la proposition qui leur est faite, et tout ce petit monde (plus deux humains) débarque sur une île volcanique couverte d’une épaisse forêt où est sensé se trouver la fortune de Redhand.

Bien que charmé par le ravissant minois de la donzelle (ce qui est la raison pour laquelle il s’est rué à son secours en premier lieu), Felix se montre assez suspect des motivations de cette dernière, et ne peut s’empêcher de penser que Katja dissimule quelque chose à ses partenaires. Gotrek de son côté s’avère plus intéressé par la perspective de se frotter au monstrueux gardien d’une gemme légendaire conservée dans l’un des temples en ruines de l’île (dixit Katja, toujours), ou a défaut, par la régulation de la population locale de peaux vertes. L’enthousiasme général est à peine entamé par la disparition mystérieuse de plusieurs membres d’équipage au fur et à mesure que l’expédition s’enfonce dans la jungle, énigme rapidement résolue par un Gotrek peu tolérant envers les facéties des Gobelins arboricoles du cru. Après un pittoresque trail tropical, les aventuriers parviennent jusque dans la cité abandonnée promise par leur guide, qui se trouve être un lieu de villégiature couru par la gent orcoïde (un club Mork, sans doute), forçant nos héros à la plus grande discrétion. Même Gotrek, dont le premier but était pourtant de tailler des croupières aux locaux, accepte de faire crête basse jusqu’à ce que ses camarades aient pu sécuriser le trésor, ce qui est fort urbain de sa part. En même temps, ils sont sortis de la forêt, donc…

Une fois rendu dans le temple où Redhand aurait déposé ses bagages, et après avoir négocié de façon soupçonneusement facile au goût de ce rabat-joie de Felix l’accès jusqu’au cœur de l’édifice, qui dispose d’une installation géothermique de pointe sous la forme de puits de lave intégrés à la structure du bâtiment (attention à ne pas se brûler en prenant sa douche, tout de même), l’expédition se retrouve confrontée à un défi de taille, en la présence d’un Elémental de lave qui surgit de son jaccuzzi pour empêcher les intrus de faire main basse sur le trésor du pirate ainsi que sur l’énorme gemme qui fait office de décoration d’intérieur. Au lieu de s’émerveiller de la culture du gardien des lieux, qui s’exprime en Reikspiel parfait alors que sa prise de fonction remonte à des millénaires (ce sont les Anciens qui ont signé son contrat de travail), l’esprit mesquin de Felix ne peut s’empêcher de se concentrer sur le fait que MagMan semble connaître Katja, qu’il qualifie de sorcière (ce qui n’est pas très sympathique). De son côté, Gotrek se contente de foncer dans le tas (de roches en fusion) avec son ardeur habituelle, distrayant la Chose assez longtemps pour que Katja réussisse à s’emparer de la gemme, avant de disparaître dans un éclat de rire sardonique. On comprend alors que la capitaine corsaire n’était pas la fille, mais la femme de Redhand, qu’elle a poussé à prendre d’assaut le temple pour récupérer le diam’s des années plus tôt, sans succès. On comprend aussi que le joyau en question n’avait pas qu’une utilité symbolique, mais servait surtout de régulateur de l’activité tellurique du volcan local, qui se réveille violemment une fois la gemme dérobée.

Ayant tout de même réussi à refroidir les ardeurs du gardien, puis à le(s lui) briser menu, Gotrek et Felix en sont quittes pour une session de hack’n’slash intense pour sortir du temple avant que ce dernier ne soit noyé par la lave. Laissant leurs camarades survivants se débrouiller tous seuls comme des grands petits, le duo se fraie un chemin sanglant à travers les hordes de Gobelins que Goldtusk, arrivé sur place après le naufrage de son navire, a recruté pour… visiter le temple également je suppose1. Cette louable idée de sortie culturelle prend donc un tour funeste lorsque le Tueur et son comparse décident de couper la file, résultant en des centaines de morts parmi les visiteurs, dont Goldtusk en personne, décapité par un Gotrek littéralement chauffé à blanc. Ceci fait, il ne reste plus à nos inséparables qu’à partir en petites foulées vers la plage où mouille le Storm Hammer, avant que l’éruption du Krakatorka ne mette un terme honteux et cendreux à la carrière du Tueur. Spoiler alert : Ils s’en sortent. Si si.

1 : King ne donnant aucun signe que les Nains aient été détectés par les peaux vertes à leur arrivée.

AVIS :

Cette aventure conséquente (28 pages) permet à William King de renouer avec les origines littéraires de Gotrek & Felix, héros de nouvelles conduits plus tard par le succès à évoluer dans de plus longs formats. Se déroulant après les événements relatés dans Tueur de Géants, dernier roman signé de la série signé par King (et le moins réussi du lot à mon humble avis, comme quoi il a bien fait d’arrêter), Redhand’s Daughter peut être considéré comme l’ultime tour de piste des deux troublions sous la plume de leur créateur, et un écho aux longues nouvelles originelles du duo (Wolf Riders, The Dark Beneath the World). Bénéficiant d’une localisation exotique (je ne pense pas que quiconque se soit aventuré dans la Chaîne Mégaleane – qui n’apparaît sur aucune carte à ma connaissance – depuis lors), de péripéties rythmées et, elles aussi, assez innovantes pour le lecteur, comme la bataille navale introductive entre corsaires Nains et pirates peaux vertes, Redhand’s Daughter a un petit goût de pastiche de The Queen of the Black Coast (a.k.a. Conan en croisière), avec Katja en Belit et Gotrek & Felix se partageant le rôle du ténébreux Cimmerien. Ces considérations évacuées, on se retrouve cependant avec une soumission assez classique du sous-genre créé par King, qui déroule son propos et coche les cases du cahier des charges avec aisance plus que maestria. On notera pour terminer que l’auteur n’a pas encore tenu sa promesse de faire remettre Katja Murillo sur le chemin de nos baroudeurs, et qu’avec la destruction du monde de Warhammer (et donc celle de Katja et Felix), il lui sera assez difficile de tenir sa parole…

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Et voilà qui conclut cette revue de l’année 6 d’Inferno! Que dire d’autre à part qu’il reste deux années à couvrir et que ce sera bientôt le cas ? Stay tuned (and hydrated) et à la prochaine !

INFERNO! – ANNEE 4

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de l’année 4 d’Inferno!, le bimensuel de nouvelles, comics et articles de background publié par la Black Library entre 1997 et 2005. S’étendant de juillet 2000 à mai 2001, cette quatrième année regroupe pas moins de 24 courts formats issus des trois franchises soutenues par la BL à cette époque : Warhammer Fantasy Battle, Warhammer 40.000 et la petite dernière (au sale caractère) Necromunda. Croyez-le ou non, mais on ne fera jamais mieux en termes de quantité. Année quatre, année faste…

Inferno!_Année 4

Pas moins de 16 auteurs ont été mis à contribution pour produire cette abondante prose, dont deux (à l’époque) débutants dont le nom vous dira peut-être quelque chose : C. L. Werner (‘A Choice of Hatreds’) et Graham McNeill (‘Unforgiven’ et ‘Business as Usual’). À un tout autre niveau d’implication, Gav Thorpe et Jonathan Green se placent au premier rang des contributeurs de ces six numéros, avec trois nouvelles à mettre à l’actif de chacun. Enfin, même si son activité n’a pas été aussi frénétique que lors des années précédentes (ou suivantes, car il a vraiment été prolifique), l’incontournable Dan Abnett signe tout de même deux nouvelles (‘Red Rain’ et ‘Pestilence’) sur cet exercice.

Parmi les personnages notables et célébrités de niche nous ayant fait l’honneur de leur présence dans ces augustes et vénérables pages, on retrouve beaucoup de héros aujourd’hui méconnus des amateurs de GW-Fiction. Si les noms de Stefan Kumansky (‘The Gifts of Tal Dur’, ‘Debts of Blood’) ou Nathan Creed (‘Mama’s Boys’, ‘Boyz in the Hive’) vous sont familiers, vous faîtes partie d’une très petite minorité. Bande de nerds. Signalons également que cette année quatre a vu la création de héros aussi emblématiques que le Chasseur de Sorcières Mathias Thulmann (‘A Choice of Hatreds’), qui aura l’honneur de bénéficier de sa propre trilogie suite à ses débuts réussis, et le retour du Sergent Iron Snakes Priad (‘Red Rain’), déjà croisé dans ‘White Heat’.

Le décor de cette année 4 étant planté, il est temps de passer à l’étude détaillée et impitoyable de cet échantillon représentatif de la GW-Fiction du tournant du millénaire. All aboard the memory train…

Inferno! Année 4

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Ancient History – A. Chambers [40K] – #19 :

INTRIGUE :

40K_Ancient HistoryRecruté contre son gré comme équipier polyvalent du Retribution, fier vaisseau de la flotte impériale à rade de personnel, à l’issue d’une opération porte fermée (traduction : une fois qu’on est rentré, on ne peut plus sortir), Nathan, notre héros, découvre progressivement les joies et les peines de la vie de canonnier de marine, noble et utile occupation qu’il projette toutefois d’abandonner dès qu’une occasion de déserter se présentera à lui. Cette frilosité à s’engager sur le long terme dans une institution impériale pourtant aussi respectable que la Navy1 s’explique en partie par la présence d’un nuisible connu de Nathan, Kendrikson, dans l’équipage de Balthasar (le nom du macrocanon auquel notre homme a été affecté). Les deux forçats se sont quittés fâchés au cours d’une précédente collaboration, et bien que Nath’ ne serait pas contre une petite vendetta pour régler ses comptes avec son ex-nouveau collègue, il préférerait à tout prendre mettre quelques années lumières entre eux, un « accident » du travail étant si vite arrivé… En plus de ces problèmes relationnels, le Warp ne s’avère pas être un long fleuve tranquille, et sa traversée pèse lourdement sur l’estomac et la psyché des rats de cale. En témoigne le coup de sang passager d’un passager, Fetchin, qui succombe à une crise de claustrophobie démoniaque, puis à une décharge de fusil à pompe à bout portant, non sans avoir envoyé quelques badauds à l’hôpital et à la morgue auparavant.

Nathan a toutefois la chance de pouvoir compter sur le patronage bienveillant de Kron, canonnier vétéran dont l’accent chantant, les histoires passionnantes, les relations privilégiées avec le management et la connaissance intime des coursives du Retribution permettent au bizut d’acquérir des connaissances et compétences précieuses, monter dans la hiérarchie balthasaresque et, accessoirement, échapper à la tentative d’assassinat dont il fait les frais de la part de ce mauvais sujet de Kendrikson, qui se révèle être un Luminen2 infiltré.

Cette prise de fonction mouvementée culmine avec la toute première bataille spatiale à laquelle Nathan participe, baptême du feu à plus d’un titre au cours duquel il aura l’occasion de se frotter à l’ennemi de plus près que prévu sur sa fiche de poste, le crash d’une torpille d’abordage à proximité de son espace de co-working le forçant à prendre les armes pour défendre la vertu et l’intégrité de Balthasar contre les assauts païens de vils cultistes chaotiques, dont l’encadrant se trouve être un Space Marine renégat. Il faudra une nouvelle fois l’intervention décisive de Kron, qui sous ses abords décatis, se révèle être un individu décidément plein de ressources et d’énergie (il se relève d’un tir de pistolet bolter à bout portant et tase l’Astartes à mains nues), pour permettre à notre héros de se sortir de ce coup de Trafalgar. Les mystères de l’origine et des motivations du mentor de Nathan ne seront pas levés par Chambers avant la conclusion de cet ‘Ancient History3′, mais une chose est sûre, quand on est Kron, on est Kron.

1 : Sécurité de l’emploi, gîte et couvert offerts, destinations variées, activités physiques régulières… Ça c’est un job de rêve.
2 : Plus de quinze ans avant la sortie du Codex Adeptus Mechanicus, Chambers convoquait déjà des électro-prêtres dans ses nouvelles.
3 : Qui a peut-être été suivi d’une autre nouvelle, et aurait dû l’être ? Je suis sur le coup les aminches.

AVIS :

Nouvelle protéiforme et un peu foutraque, ‘Ancient History’ est une soumission plutôt hétérodoxe, mais loin d’être inintéressante de la part d’Andy Chambers. En multipliant les partis pris narratifs (cela commence comme un récit d’évasion, avant d’intégrer un passage « mythes et légendes », puis d’embrayer sur une révélation plutôt étrange sur un des personnages principaux, et de tourner à l’action pure et dure, pour se terminer sur un mystère vraiment mystérieux) et les péripéties, le grand méchant joueur n’a pas choisi la facilité, et son propos en paraît en conséquence décousu et incertain dans sa finalité. Pour autant, le simple fait de mettre sur le devant de la scène des personnages très peu abordés par la BL mais au moins aussi caractéristiques du grimdark de 40K que les Space Marines ou l’Inquisition (les « marins » de la Flotte Impériale) ne manquera pas d’attirer la curiosité bienveillante des lecteurs avides d’en apprendre plus sur la vie des travailleurs de la mer l’espace, ce en quoi Chambers se montre plutôt généreux. En outre, l’inclusion de la Complainte du Vieux Marin à la sauce 40K dans le récit s’avère être un interlude des plus intéressants entre deux scènes d’action, et ne manquera pas de susciter les hypothèses les plus radicales de la part des exégètes de tout poil qui constituent une part non négligeable du lectorat de la Black Library. La balance est donc plus que positive pour ‘Ancient History’ dont les apports fluff et l’originalité compensent largement les tâtonnements et… l’originalité (aussi).

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Mark of a Warrior – R. Williams [NDA] – #19 :

INTRIGUE :

NDA_Mark of a WarriorAprès avoir passé des années à jouer aux Gangers et aux Arbites avec ses petits camarades en rêvant du jour où il aurait enfin son flingue rien qu’à lui (la vraie marque d’un guerrier, clin d’œil au titre, ça c’est fait), un juv’ Goliath se présente à son examen de passage pour intégrer le gang local. Logiquement nerveux, mais souhaitant faire bonne impression à son chaperon, une sorte de Bane grimdark cachant de beaux restes sous ses abords défraîchis et son masque à oxygène, Yogo – appelons le comme ça – joue les blasés jusqu’à apprendre la nature de sa future épreuve : descendre dans un boyau de mine abandonnée pour aller chasser le milliasaur, et rapporter « kekchose eul’ ver peut pas viv’ sans », dixit l’Immortan Joe sous chimio, afin de prouve sa valeur. Pas vraiment une promenade de santé en perspective pour notre héros, qui pourra toutefois compter sur sa toute première pétoire (émotion), obligeamment prêtée par son évaluateur avant que les choses sérieuses ne commencent. Mais attention, comme tout bon Goliath qui se respecte, il s’agira de prouver sa force en usant de son arme, sans dépendre de cette dernière. Un point particulier du crédo Gogo que Yogo aura l’occasion de mettre en application dans les prochaines heures, nul doute.

Descendu dans la mine sans presqu’avoir eu l’air ridicule en accrochant sa ceinture à un crochet qui dépassait du mur au passage, Yogo rampe un peu, panique quelques fois, mais surtout fait des plans sur la comète en se rêvant un parcours météoritique parmi les Gangers du Sous-Monde, depuis son premier affrontement avec les Scavvies jusqu’à son couronnement d’Helmawr à la place de Helmawr. Cet enthousiasme juvénile, aussi appelé étourderie, manque de lui être fatal lorsqu’il entre sans s’en rendre compte sur le territoire d’un milliausaur, qui lui tombe sur le râble depuis le plafond de la mine. Le combat qui s’en suit reste longtemps mal engagé pour Yogo, dont la pétoire a la mauvaise idée de s’enrayer juste au moment où il aurait été utile de pouvoir descendre un mille-pattes géant et agressif à bout touchant. Mais la bestiole a tout de même l’amabilité de décéder en s’étougorgeant après avoir avalé le couteau du Goliath, le bout pointu en premier. Coincé sous le cadavre de son trophée, Yogo peut savourer sa victoire comme il se doit…

Début spoiler…Mais comme les bonnes choses ont une fin, il parvient tout de même à se dégager, retrouvant l’usage de ses membres et la circulation dans son bras droit (ce qui pique un peu après une demi-heure de garrotage). Là, il se rend compte de deux choses capitales : 1) son flingue ne s’est pas enrayé, il n’y avait en fait aucune balle dans le barillet du revolver (faire preuve de force, la dépendance céleumaltoussa toussa…), et 2) décapiter une créature qui a une carapace de pierre avec un éclat de canif, ça ne va pas être de la tarte. Une petite ellipse plus tard, Yogo, bien éprouvé, finit par sortir de la mine avec son trophée, qu’il jette aux pieds de son examinateur impassible. Ce dernier le reste même lorsque la nouvelle recrue lui décoche un crochet du droit bien mérité, avant de repartir vers le QG du gang, le Juv’ furibard sur l’épaule, en se gondolant comme une baleine. Ca doit être un rite Goliath.Fin spoiler

AVIS :

Petite nouvelle sympathique de la part de Richard Williams, ‘Mark of a Warrior’ fait mouche grâce à l’aisance stylistique de son auteur. En entrée, un beau McGuffin mettant en scène un jeu de gamins comme s’il s’agissait d’une traque mortelle. En plat de résistance, l’opposition savamment mise en scène entre la dureté et la cruauté du sous monde et l’insouciance, souvent dangereuse, du héros, qui est resté très jeune dans sa tête malgré son physique d’armoire à glace. Et en dessert, une utilisation à propos, et plutôt deux fois qu’une, considérant ce dont il est question ici, du fusil de Tchekov soigneusement intégré par Williams à son propos. La philosophie Goliath n’est certes pas diserte, mais elle contient quelques concepts à méditer. Le seul bémol que je mettrai à cette autrement appréciable soumission est la partie de spéléologie appliquée de la nouvelle, qui n’apporte pas grand-chose à l’intrigue et ralentit plutôt cette dernière. Mais à part cela, et ce n’est pas grand-chose, ce ‘Mark of a Warrior’ témoigne d’un examen de passage réussi pour la recrue Williams.

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Words of Blood – B. Counter [40K] – #19 :

INTRIGUE :

40K_Words of BloodSur la planète quasiment abandonnée d’Empyrion IX, le Commandeur Athellenas des Black Templars doit relever un défi de taille : empêcher une armée de 6.000 cultistes de Khorne de s’emparer du seul spatioport de ce monde minable, ce qui permettrait aux hordes dépravées et mal fringuées du terrible Manskinner de fondre sur Macharia pour y commettre un génocide. Le tout avec seulement trente Space Marines à disposition. Le rapport de force n’est pas en faveur de l’Astartes, mais Athellenas a… un plan (et pour un Black Templar, c’est déjà beaucoup). Le seul problème, c’est que ses frères risquent de ne pas l’apprécier du tout, ce qui va le contraindre à jouer très finement la partie1.

Du côté adverse, les préparatifs vont bon train pour ce qui ne devrait être qu’un massacre en bonne et due forme entre deux factions peu réputées pour leur tactique d’évitement. Le Manskinner, qui a reçu de sa divinité tutélaire le don démoniaque « parole de sang », ce qui lui permet de plonger son audimat dans une folie furieuse (et non pas de se mordre la langue à chaque fois qu’il prononce une phrase), prononce une petite causerie d’avant-match qui met ses ouailles de bonne humeur, et envoie sa cavalerie (si si) à l’assaut des positions retranchées des Marines. Il se doute que les fringants hussards ne feront pas long feu face à l’arsenal des Black Templars, mais cela devrait laisser le temps nécessaire au gros de ses forces d’arriver à portée de charge.

Conformément à ses pronostics, la brigade légère du bien nommé Die(ss) tombe glorieusement au champ d’honneur, sur le score sans appel de 210 morts à trois doigts tranchés. C’est alors que le rusé Athellenas dévoile la profondeur insondable de son génie stratégique, en ordonnant la retraite. Stupeur et bégaiements chez les meilleurs de l’Empereur, qui n’ont pas pour habitude d’abandonner du terrain à l’ennemi, à plus forte raison un temple millénaire à la gloire de Pépé, comme celui qu’ils occupent actuellement. Il faut donc claquer quelques PC au Commandeur pour passer le stratagème « Y a pas de mais », permettant un repli en bon ordre jusqu’à la ville voisine où une nouvelle position défensive est installée sans tarder.

Si cette manœuvre n’a pas fait consensus chez les Black Templars, elle a cependant compliqué la situation du Manskinner, dont l’emprise sur les éléments les plus foufous de son armée commence à s’effilocher. Malgré son éloquence sans pareille – en même temps, la plupart de ses suivants ont perdu l’usage de la parole, donc la compétition n’est pas féroce – Manski’ ne parvient pas à empêcher un de ses lieutenants, le Caporal Recoba, de partir à la chasse aux Marounes sans attendre les retardataires. L’ennui est que le charismatique officier embarque avec lui deux mille copains, divisant l’armée des cultistes en deux. Comme on peut s’y attendre, cet empressement à porter le combat à l’ennemi sera fatal pour Recoba et ses suivants, qui tomberont sous les bolts et les coups des Space Marines lors d’une embuscade savamment orchestrée par Athellenas et ses Sergents.

Cette nouvelle victoire est cependant rapidement ternie par la décision de Big A. de battre à nouveau en retraite, cette fois-ci pour une défense sur la ligne (ici le spatioport d’Empyrion IX). Cette annonce dévaste le Devastator Valerian, qui menace de se faire renégat plutôt que de commettre la forfaiture de la marche arrière, et n’accepte finalement de se plier aux instructions de son supérieur qu’après s’être fait menacer de sanctions disciplinaires dans cette vie et dans la suivante.

De son côté, le Manskinner enrage (comme d’hab’ vous me direz) de la couardise manifeste de ses adversaires, qui rend son armée sevrée de violence de plus en plus difficile à contrôler. Ayant compris qu’il s’agit d’un stratagème pour désorganiser ses forces, il tente de calmer les ardeurs de ses cultistes en exaltant les valeurs de la vengeance et de la patience, mais se fait brutalement interrompre par son dernier sous-fifre (Kireeah) avant d’avoir pu terminer son sermon. Bien que l’impoli paie son impudence de sa tête, proprement séparée de son corps par la paire de ciseaux géants que le Manskinner arbore à la place de son bras droit – c’est pratique pour inaugurer les bâtiments, je me demande pourquoi Charles III ne s’en est pas déjà équipé – le mal est fait et les Khorneux se lancent dans un sprint éperdu en direction du spatioport. Après avoir tenté de remettre un semblant d’ordre dans la horde en cisaillant de droite et de gauche, Manski’ décide de se joindre à la fête car après tout, les Marines n’ont plus nulle part où aller et l’avantage numérique est toujours largement en faveur des rouges…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur le besoin pathologique des Khorneux de cogner sur quelque chose ou quelqu’un dans les plus brefs délais, qui va jouer un bien mauvais tour aux hérétiques. Alors qu’ils ne sont plus qu’à quelques dizaines de mètres de leurs cibles, leur soif de sang finit par se retourner contre eux et l’armée du Manskinner se transforme en battle royal géante, de laquelle seuls quelques survivants confus et blessés émergent à la fin des combats pour tomber aussitôt sous les coups des Marines. C’était ce sur quoi comptait Athellenas, qui a interdit à ses frères d’ouvrir le feu pour ne pas permettre aux cultistes de se reconcentrer sur leurs priorités. Malin. Ce qu’il l’aurait été encore plus, ce serait d’avoir partagé son plan avec ses hommes pour s’assurer que tout se déroule bien, plutôt que de compter aveuglément sur la discipline et la loyauté vacillante de ces derniers. Mais comme Athellenas l’explique doctement à Valerian une fois la bataille remportée, les meneurs n’ont pas à se justifier auprès des exécutants. Ce n’est pas avec une telle mentalité que notre héros gagnera le prix de camaraderie, mais les résultats parlent d’eux-mêmes, et c’est plus qu’assez au 41ème millénaire…Fin spoiler

1 : Je choisis de penser qu’il s’est équipé d’un poing énergétique (qu’il n’utilisera pas une fois de la nouvelle, malgré ce que l’illustration grimdark à souhait laisse penser) pour donner l’impression à ses bourrins de collègues qu’il serait le premier à sauter dans la mêlée. Mais la moufle ne fait pas le moine de l’espace…

AVIS :

Words of Blood’ fait partie des nouvelles écrites pour explorer une situation paradoxale ou problématique si on se réfère au background canon de univers de Games Workshop1, ici : « que se passerait-il si le seul moyen pour des Black Templars de remporter une bataille était de battre en retraite ? ». Je précise qu’à l’époque où cette histoire a été écrite, les zélés fils de Dorn prenaient leur serment de défense de l’Imperium de manière beaucoup plus littérale – certains esprits chagrins pourraient dire « basse du front », mais il ne faut pas écouter ces vils persifleurs – que maintenant. Sur ces prémisses intéressantes, en tout cas plus qu’une vulgaire empoignade entre Space Marounes et mutants/hérétiques/Xenos (rayer la ou les mentions inutiles), Ben Counter développe un propos qui, s’il accuse aujourd’hui sérieusement son âge, mérite encore la lecture à mon sens.

En effet, si on fait abstraction des quelques éléments surannés de ‘Words of Blood’ (le serment de non-reculade des Black Templars, les attaques de cavalerie…), la trame de l’histoire reste solide. Mieux encore, cette nouvelle présente un parallélisme aussi élégant que satisfaisant entre les dilemmes tactiques et managériaux auxquels sont confrontés les deux commandants ennemis. Tant Athellenas que le Manskinner doivent en effet réfréner les penchants naturels de leurs troupes pour espérer l’emporter, et composer avec la mauvaise volonté de ces dernières à obéir à des ordres avec lesquels elles ne sont pas en phase. À ce petit jeu, la discipline naturelle des Space Marines finit par l’emporter (mais de très peu), provoquant la fin des hordes hérétiques de la manière la plus Khorneuse qui soit. Le vieux fluffiste qui sommeille en moi a d’ailleurs failli verser une larme (de sang) en lisant la harangue de la dernière chance faite par le Manskinner à ses troupes indisciplinées juste avant qu’elles ne piquent leur sprint fatal vers le spatioport d’Empyrion IX. Car oui, Khorne était dans l’archéofluff une divinité plus complexe que l’immonde bourrin qu’il est devenu au fil des versions2, et Counter mérite une accolade pour avoir reflété ces fifty shades of red dans sa nouvelle.

Boni appréciables, il s’est également donné la peine de développer un minimum sa galerie de personnages (les plus intéressants étant le Manskinner philosophe et ses lieutenants exaltés), et se révèle plutôt généreux en termes de fluff Black Templar, même s’il est permis de douter de la validité de ces informations plus de vingt ans après l’écriture de cette nouvelle (à l’époque, cette faction ne disposait pas de son propre Codex, et on pouvait donc y aller franco sur leur background). Pour ne rien gâcher, la nouvelle se termine par un petit twist final, un peu ruiné par le TGJSUO (Ta Gu*ule Je Suis Un Officier) que l’aimable Athellenas décoche au pauvre Valerian, mais on n’en tiendra pas rigueur à l’auteur. Bref, même si ‘Words of Blood’ a un peu vieilli depuis sa sortie (en 2000, on peut être miséricordieux), il elle ça se laisse lire sans problème encore aujourd’hui.

1 : Marc Gascoigne indique dans son introduction de l’anthologie ‘Let the Galaxy Burn’ que la Black Library a été (au moins en partie) créée à cette fin. C’est dire si ce « genre » est important.
2 : Quand on voit les dernières entrées du Codex World Eaters, on ne s’étonne pas que le mot « subtilité » s’écrive avec neuf lettres, et non pas huit…

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The Gifts of Tal Dur – N. McIntosh [WFB] – #20 :

INTRIGUE :

WFB_The Gift of Tal DurFraîchement revenus de leurs aventures à Erengrad (couvertes dans le roman Star of Erengrad), les aventuriers Stefan Kumansky et Bruno Hausmann font halte dans la petite ville de Mielstadt, où convergent les traces de leur ancien compagnon d’armes Alexei Zucharov, ayant eu la mauvaise idée de ramasser une babiole chaotique sur le champ de bataille. L’objet en question, sans doute un tract de la campagne présidentielle de François Hollande de 2012, l’a tellement convaincu que le changement, c’était maintenant, qu’il en a renié son allégeance ‘chaotique bonne’ pour rejoindre le camp de Tzeentch. Jugeant qu’il est de leur devoir d’empêcher leur comparse renégat de nuire, Stefan et Bruno ont poursuivi ce dernier à travers le Nord de l’Empire, confiants en leurs capacités de traqueurs pour mettre la main au collet de Zucharov avant que l’addition de ses déprédations ne soit trop salée.

À Mielstadt, nos héros n’ont rien de plus pressé que d’empêcher la pendaison arbitraire de l’infirmière de garde locale, soupçonnée, non sans raisons, par les locaux de bénéficier de pouvoirs surnaturels de guérison. N’ayant ni le temps, ni l’envie d’expliquer à une bande de rednecks agressifs les bienfaits reconnus de la balnéothérapie pour les patients en convalescence (la pauvresse, Katarina von Lucht de son nom, tenant un centre de cure thermale dans la forêt voisine, au lieu-dit de la source de Tal Dur), Stefan et Bruno se contentent de faire parler l’acier, sauvant Katarina d’un destin funeste mais s’attirant du même coup la neutralité malveillante du Graf de la ville, un certain Augustus Sierck (sans doute un parent éloigné de Detlef). La soirée passée à l’auberge locale en compagnie de ses sauveurs permet à Miss van Lucht de leur faire la pub de son établissement et des ses compétences de thérapeute, Tal Dur pouvant en effet accélérer la guérison de celui qui s’y baigne, mais seulement si ses pieds sont propres son âme est pure et qu’elle-même est présente pour superviser le procédé. Il n’y a pas à dire, elle sait comment verrouiller un business et préserver un gagne-pain. Enfreindre ces deux règles a généralement des conséquences fâcheuses, comme l’intervention d’un maître-nageur furibard armé d’une zweihander, ou quelque chose comme ça.

De leur côté, Stefan et Bruno ne perdent non plus pas de temps, le premier à briefer leur hôte sur la présence probable de Zucharov dans les parages et son souhait, tout aussi probable, d’utiliser le pouvoir de Tal Dur pour… se faire enlever le tatouage chaotique qui recouvre petit à petit sa peau (ce tract de François Hollande devait être très mal imprimé pour dégorger de la sorte). Eh, pourquoi pas après tout, le délit de faciès est une réalité même dans le Vieux Monde apparemment. Le second, quant à lui, chauffe suffisamment la serveuse de l’estaminet pour qu’elle lui laisse son adresse sur un bout de parchemin à la fin de son service, ce qui est une Victoire Majeure pour l’Empire, comme tous le reconnaîtront. Malheureusement, ou heureusement, en l’absence de Google Maps, et malgré le fait que la ville ne doit pas être si grande que ça, Bruno erre comme un gland toute la nuit sans arriver à bon port. Grand bien lui fasse car, à son insu, la serveuse était déjà maqué avec Zucharov, et cherchait donc à le faire tomber dans un piège (ou avait accepté de réaliser le fantasme de son nouveau petit copain en participant un plan à 3, même si l’esprit est plus Slaaneshi que Tzeentchien). La perfide aubergiste paiera toutefois cher son double jeu, son désir irrépressible d’allumer la lumière malgré les réticences de son coup d’un soir débouchant sur une crise de terreur nocturne aux conséquences fatales.

Le lendemain matin, Stefan est cueilli au creux du lit par le Graf et ses soldats, trop contents de mettre sur le dos des voyageurs le meurtre de la serveuse. Pas du genre à se laisser molester par une bande de bouseux après avoir sauvé l’Empire à quasi lui tout seul, Kumansky a vite fait d’apprendre aux forces de l’ordre la politesse en retournant leurs armes contre eux, et emmenant le Graf en balade à Tal Dur en compagnie de son sidekick lubrique. Là-bas, et après avoir libéré son otage (parce qu’il le vaut bien), Kumansky fait enfin face à sa Némésis, qui a capturé Katarina et se tient prêt à commettre l’irréparable. Le duel héroïque qui s’en suit verra le bien triompher de justesse, Stefan trouvant la rage de vaincre (ou plutôt, de péter le petit pont en bois sur lequel se trouve Zucharov à grands coups de latte) malgré ses graves blessures dans la réalisation soudaine que s’il meurt maintenant, il n’aura pas la possibilité d’aller se pinter la gueule avec son frère à Altdorf dans une semaine. À chacun ses motivations, il y a des Nains qui sont devenus berzerk pour moins que ça. Plouf font Stefy et Zuky en tombant dans le grand bain, qui ne leur réservera pas le même destin. Aidé à sortir de l’eau par Katarina, Kumansky émerge de l’onde amère frais comme un gardon et totalement guéri, tandis que son adversaire refait surface ridé comme un pruneau, avant d’être définitivement aspiré au fond de la piscine par… le poids de sa conscience coupable, j’imagine. Au moins, il meurt propre, l’encre chaotique ayant été lessivée par les eaux purificatrices de Tal Dur, décidément très efficaces.

Vient alors l’heure pour nos deux héros de repartir vers de nouvelles aventures (incluant donc une nuit de beuverie au Helmsman, qui a l’air de valoir vraiment le coup s’il parvient à ranimer les mourants), forts du sentiment du devoir accompli. Peut-être un peu déçu par le refus de Katarina de l’accompagner jusqu’à Altdorf – les affaires sont les affaires – Stefan peut toutefois se consoler par le chaste baiser que la belle lui accorde avant de le laisser repartir. Ce ne sera peut-être (sûrement même, my it-s-bloody-obvious-the-way-the-author-wrote-it sense is tingling) que partie remise…

AVIS :

Ayant lu il y a fooooooooort longtemps le roman Star of Erengrad, premier tome de la trilogie consacrée par Neil McIntosh au personnage de Stefan Kumansky, qui se terminait sur la victoire des gentils et la corruption d’Alexei Zucharov, je n’ai pas eu de difficulté à me plonger (haha) dans cette nouvelle, qui n’est autre que la suite logique du roman mentionné plus haut. Ceci dit, le bon travail de contextualisation qu’effectue McIntosh en introduction de son propos aurait permis à n’importe qui de comprendre facilement les tenants et aboutissants de l’intrigue déroulée dans ce The Gifts of Tal Dur, soumission simple mais pas simpliste, et d’honnête et robuste facture. Sur un canevas certes peu original dans l’absolu (le héros sauvant sa belle des griffes du méchant, l’épée à la main), mais relativement peu utilisé dans les écrits de la BL, où les protagonistes ont généralement autre chose à faire que secourir des damoiselles en détresse, l’auteur place un vernis légèrement grimdark mais totalement WFB, avec le Chaos venant jouer son rôle de force corruptrice et destructrice, retournant les frères d’armes l’un contre l’autre et laissant à son hôte malheureux quelques secondes pour réaliser l’étendue de sa folie avant que le voile de la mort ne tombe. So cinematic. Bref, un honnête filler dans les rayonnages bien achalandés de la Black Library, qui permettra au lecteur de se faire une bonne idée du style et des capacités de Neil McIntosh.

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The Plague Pit – J. Green [WFB] – #20 :

INTRIGUE :

WFB_The Plague PitLa vie de mercenaire est souvent plus glamour dans les livres qu’en réalité. Sauf quand c’est un livre de Jonathan Green. C’est le triste constat que font Torben Badenov et sa bande de joyeux drilles (le noble puritain Pieter Valburg, Oren « face de rat/oneliner » Scarfen, big boi Stanislav, old boi Alexi et that other boi Yuri), alors qu’ils se trouvent forcé de passer la nuit à la belle étoile dans la désolation sauvage de l’Ostermark profond. S’ils sont de sortie, c’est que leur mission actuelle consiste à assurer la sécurité de l’érudit Johannes Verfallen, passionné par les tribus de l’époque pré-impériale et prêt à débourser une coquette somme pour être escorté jusqu’au monolithe antique qu’il a l’intention d’étudier sous toutes les coutures. Bien que les critères d’hygiène corporelle de l’universitaire laissent sérieusement à désirer de l’aveu du capitaine mercenaire (Torben Badenov étant lui, comme chacun le sait, un mannequin l’Oréal s’ignorant et ignorant), les caisses de la fine équipe sont suffisamment vides pour qu’ils ne fassent pas la fine bouche devant cette offre. La soirée est toutefois brutalement interrompue par les vomissements suspects de Verfallen, que ses gardes avaient laissé à marmonner au pied de l’édifice pendant qu’ils s’échangeaient des remarques de haute volée sur la météo locale et les derniers résultats de Blood Bowl. Le sort de l’érudit est vite plié lorsque son estomac commence à enfler de manière inquiétante, avant de s’ouvrir et de répandre une ventrée (c’est le cas de le dire) d’asticots aux alentours. Le calvaire de Verfallen ne s’arrête pas là, puisqu’en fin de compte il finit transformé en Enfant du Chaos à tête de cheval, sous le regard vaguement circonspect et pas vraiment empathique des mercenaires.

Fidèle à sa nature chafouine, la bestiole nouvelle née se rue (c’est approprié direz vous) sur Badenov et Cie, qui n’ont cependant guère de mal à en venir à bout. Seul Alexi se fait souffler dans les naseaux par ce bourrin de bourrin, le marquant discrètement comme le-membre-de-la-bande-destiné-à-mourir-pour-apporter-un-peu-de-tension-à-l-histoire. Mais je m’avance en besogne. La tête de mule n’est pas sitôt équarrie que le temps tourne brutalement à l’orage, et que des ombres entourant le feu de camp sort une nuée de Nurglings, sans doute alléchés par l’idée de faire griller quelques chamallows sur les flammes. Peu partageurs, les mercenaires choisissent de déguerpir et d’aller se réfugier dans le moulin surplombant la colline toute proche de leur bivouac, et de se barricader en attendant que la tension retombe. Leur QG improvisé se révèle cependant être plus riche en surprises qu’en farine, comme la présence de nombreux ouvrages traitant de démonologie et de magie chaotique, lectures peu communes pour le meunier impérial moyen, l’atteste. Il faut l’intuition et la culture de Pieter Valburg, MVP récurrent des aventures de la bande de Badenov (plus que le personnage titre d’ailleurs, c’en est navrant), pour comprendre que ces grimoires appartenaient à Verfallen, et que ce dernier n’était pas un simple passionné des vieilles pierres, mais un sorcier cherchant à atteindre le statut de Prince Démon de Nurgle en lançant le rituel dont la formule était inscrite sur le monolithe qu’il étudiait. Malheureusement pour lui, il a prononcé palimpeste au lieu de palimpseste pendant l’incantation, et au lieu de devenir sa Majesté des Mouches, il n’a gagné qu’un skin tout pourri de BoJack Horseman. That’s life.

Ces révélations ne font cependant pas les affaires de nos héros, qui doivent défendre une épave thermique, très mal isolée, contre une nuée de petits Démons entreprenants. À ce jeu là, rien ne vaut l’utilisation de faux et de râteaux à la place de haches et d’épées (si tu veux Jonathan hein), mais même la quincaillerie de Jardiland ne constitue qu’un pis aller. Submergés par les Nurglings, qui ont mordu Alexi à la cheville, histoire de nous faire vraiment comprendre que c’est lui qui va y passer, les fiers compagnons doivent se replier dans le sous-sol du moulin, sur une idée originale de… Pieter. Il faut croire que même prendre une décision quand on n’a qu’une option est trop compliqué pour Torben Badenov, bellâtre benêt.

Leur nouvel environnement a beau être Nurglings-proof, le puits condamné par une grille en fer toute rouillée qui trône en son centre n’inspire pas franchement la confiance aux nouveaux-venus. À raison, car il communique avec le cairn funéraire de Morruut, un sorcier de Nurgle des temps très anciens, et le premier à avoir eu l’idée démoniaque de transcender son humanité. It didn’t work because of things, mais sa dépouille mortelle a été patiemment ramenée à la pseudo-vie par Verfallen dans le cadre des ses expérimentations, et les élucubrations de ce dernier ont redonné du poil de la bête à la moruue qui clapote au fond du trou. C’est à la fois un danger mortel mais également une chance d’en finir pour les mercenaires, qui supputent (enfin, surtout Pieter, comme d’habitude) que s’ils arrivent à exorciser le tas de morve qui braille en contrebas, la tempête s’arrêtera et les Nurglings seront bannis. Plus facile à dire qu’à faire évidemment, car Morruut ne l’entend pas de cette oreille de dinde (googlez pas ça hein), et va tenter de tentaculer les répurgateurs amateurs, avec quelques interludes consacrés à des numéros d’imitation (Verfallen d’abord, puis Alexi, après que le vieux schnoque soit tombé dans le puits) et de crachage de mouches (un grand classique du nurglisme) entre les sessions de papouilles à pseudopodes. Au terme d’une lutte acharnée, Pieter parvient presque à terminer le rite d’exorcisme, mais se fait entraîner en sous-sol par le Démon bien membré (la suite est heureusement hors champ). Ce n’est pas grave toutefois car Stanislav décapite Morruut/Alexi, mettant le Chaos KO. Ce n’est pas logique, mais après tout, on ne peut pas comprendre les Fab 4. Alors que le moulin s’écroule, les survivants s’extirpent de la ruine, parvenant à récupérer in extremis Pieter au passage (qui quant à lui récupère en douce un grimoire nurglesque), et ainsi à limiter leurs pertes à la portion congrue. Encore une victoire probante, mais mal rémunérée, pour la bande de Badenov dont le slogan devrait être « Mort ou Fauchés ».

AVIS :

Je dois avouer ici que lors de ma première lecture de ‘The Plague Pit’, il y a quelques années, j’avais trouvé cette histoire tellement creuse et caricaturale dans le genre « aventures d’une bande de héros dans un univers medieval fantastique » que je m’attendais à passer un mauvais moment en la relisant pour le compte de la chronique de ‘Lords of Valour’. Peut-être suis-je devenu moins exigeant, plus conciliant au fil des années (certaines critiques récentes de votre serviteur permettent toutefois d’en douter), mais en tous cas, ‘The Plague Pit’ est loin d’être la pire histoire de la bande de Badenov que j’ai pu lire à ce jour, et je tenais à le dire ici1. En effet, on ne s’y trouve pas confronté à des énormes trous dans l’intrigue comme dans ‘Dark Heart’, et l’arc narratif de la série progresse sensiblement entre le début et la fin (avec le début de la corruption de Pieter plus qu’à travers la disparition d’Alexi), ce qui est ce que l’on peut raisonnablement espérer de mieux de la part du Jonathan Green du début des années 2000, très franchement.

Le parti pris de l’auteur de mettre l’action au cœur de son histoire, et les difficultés de ce même Green de livrer autre chose que des scènes de combat dignes d’un livre dont vous êtes le héros écrit par un bot nourri aux runs de Dragon Slayer et Diablo, rendent la lecture un peu longuette et l’impression d’assister à un boss fight en bonne et due forme lorsque les héros affrontent Pater patterns Morruut vient sortir un peu plus le lecteur de son immersion med-fan, mais rien de rédhibitoire ici. Le plus gênant, mais distrayant, pour moi reste l’inutilité crasse de Torben Badenov, encore une fois complètement éclipsé par Pieter Valburg dès qu’une décision un minimum intelligente doit être prise. Les autres personnages sont tellement peu développés qu’il n’y a pas de compétition entre la tête et les jambes cheveux de l’équipe, et c’est d’ailleurs une autre lacune stylistique de Green : tuer des personnages ne marche que lorsque le lecteur ressent un minimum d’empathie pour ces derniers. Ce n’est pas le cas pour Alexi de Nuln, je n’ai pas de problème à le dire. Bref, c’est très moyen mais ça se laisse lire, et ça ne m’étonnerait pas que ce soit le haut du panier badenovien, alors…

1 : Pour être tout à fait clair, je considère tout de même que cette série est très dispensable, mais si vous tenez à la lire, ce sera peut-être l’un des épisodes les plus intéressants.

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Hive Fleet Horror – B. J. Bayley [40K] – #20 :

INTRIGUE :

40K_Hive Fleet HorrorJako Jaxabarm exerce la profession d’apothicaire (et pas d’Apothicaire, la minuscule est importante) sur une planète tellement quelconque qu’on saura seulement qu’elle est semi-industrielle1, et située dans le Segmentum Ultima, et gagne sa croûte en soignant les petits bobos du prolétariat local à grand renfort de baume du tigre (bleu). Un contrôle d’identité anodin au sortir d’une consultation rapidement expédiée avec un travailleur aux bras cloqués (Drenthan Drews) le met cependant dans de beaux draps. Par un malheureux – et inexpliqué – hasard, l’Arbitrator qui lui demande ses papiers l’identifie comme étant le Genetor van Leedrix, un Magus de l’Adeptus Mechanicus en fuite depuis des décennies. Ce qui est bien le cas, et provoque l’arrestation sommaire de Jako la fraude et de celui que le zélé fonctionnaire considère comme étant son acolyte (Drews).

Enfermés dans une cellule avec un Garde Impérial accusé de couardise devant l’ennemi, Jako, Drews et le lecteur en sont quitte pour un petit briefing sur la situation compliquée dans laquelle se trouve la planète. L’humble bidasse ne se fait en effet pas prier pour révéler à Jako que la Flotte Ruche Kraken est attendue en gare dans les prochaines heures2, et que les chances pour que la rencontre se passe bien sont assez faibles. Bon d’accord, Jako est un Psyker débutant (la raison pour laquelle il est en fuite depuis pas loin d’un siècle, sa différence n’ayant pas été bien reçue par ses collègues de travail), mais ce n’est pas une raison pour balancer des secrets défense au premier venu, Engagé Chochotte ! Comme pour confirmer les dires de leur informateur, une annonce micro retentit dans la caserne des Arbitrators, annonçant que tous les prisonniers sont priés d’aller mourir au combat contre l’essaim de Hormagaunts qui s’approche en bondissant de la cité. Les portes de la cellule s’ouvrent, des fusils lasers sont distribués, et pendant que le Garde démotivé préfère se suicider plutôt que de retourner au front, Jako et Drews profitent de la quille pour aller faire un tour en ville.

Las, cette escapade est bientôt interrompue par la soirée mousse que les Tyranides lancent soudainement sur la cité, et dont l’effet principal est d’empêtrer les défenseurs impériaux dans une sorte de barbe à papa Xenos, permettant aux envahisseurs de ramener tout ce beau monde dans leurs vaisseaux. C’est l’occasion pour nos héros (et pour le lecteur) d’en apprendre plus sur les motivations profondes de cette race extra-galactique – merci les pouvoirs psychiques de Jako pour justifier le remplissage éhonté auquel se livre Bayley – et d’assister aux premières loges à la terrible cruauté de ces créatures sanguinaires, qui dissèquent un (1) prisonnier avec un intérêt tout scientifique. LES MONSTRES.

Grands nerds devant l’Esprit de la Ruche, les Krakens sont tirés de leurs travaux pratiques par l’arrivée d’une escouade de Space Marines quelconques, qui se contentent de déposer une charge explosive dans la salle de classe avant de repartir en ignorant royalement les captifs humains survivants. Il en faut toutefois plus pour décourager nos deux héros de tenter de faire ami-ami avec les meilleurs de l’Empereur, et ils profitent de la confusion pour suivre à la trace leurs (presque) sauveteurs à travers les corridors organiques du vaisseau ruche, jusqu’au Thunderhawk que les Space Marines acceptent gentiment de partager avec des civils pour le retour au bercail. La nouvelle se termine avec l’explosion du vaisseau sur lequel Jako et Drews étaient retenus prisonniers, et sur le constat qu’il en reste cependant plein d’où il en vient. C’est ça l’embêtant avec les Tyranides, ils n’ont pas vraiment le sens de la mesure…

1 : Ce qui est assez honteux selon les standards de l’Imperium, où tous les concepts sont poussés à fond.
2 : A bord des fameux vaisseaux escargots qui forment le gros des flottes tyranides.

AVIS :

Hive Fleet Horror’ est sans doute la nouvelle de Barrington J. Bayley à avoir le plus mal vieilli de tout son catalogue. On peut à la rigueur passer l’éponge sur la vision très datée que l’auteur a et donne des Tyranides, ici dépeints comme des insectes géants pas foncièrement mauvais mais uniquement intéressés par la survie de l’espèce1, plutôt que comme l’horreur alien absolue qu’ils sont devenus dans le background actuel. Il ne faut pas oublier que Games Workshop a revu sa copie à propos de cette faction à plusieurs reprises, et qu’il fut un temps (certes lointain, et déjà révolu lorsque cette nouvelle a été publiée) où les Tyranides étaient effectivement relativement fréquentables. Soit.

Ce qui est en revanche impardonnable est l’absence d’intrigue et de rythme de cette nouvelle, qui prend le temps de nous présenter avec un luxe de détail disproportionné pour une histoire de 14 pages le passif de son protagoniste (sans que cela serve le récit d’une quelconque façon), l’affuble d’un side kick nommé à l’utilité toute relative, et leur fait vivre une « aventure » d’une simplicité digne de Fantômette ou du Club des Cinq. Certes, cela permet à Bayley de contextualiser ce qui semble être le but premier de ‘Hive Fleet Horror’, c’est-à-dire une présentation de la raison d’être des Tyranides pour les nuls et les newbies, mais le résultat est tellement décalé et téléphoné que je peine à croire qu’un éditeur de la Black Library ait donné son accord pour publier ce texte. Très décevant, et c’est d’autant plus triste qu’il s’agit de la dernière incursion de cet auteur iconique au 41ème millénaire. Au moins, l’illustration d’Adam Smith est très sympa…

1 : Et capable de débarquer sur une planète sans crier gare. L’Ombre dans le Warp, un concept inconnu pour Bayley.

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Deus ex Mechanicus – A. Chambers [40K] – #20 :

INTRIGUE :

Deus Ex MechanicusL’arrivée sur Naogeddon, monde mort et terne par excellence, de l’ingénieur et Techno-Prêtre (double cursus, t’as vu) Lakius Danzager et de son acolyte Osil manque de très mal se finir pour nos deux personnages, embarqué à bord d’un vaisseau à l’autopilote très bas de gamme. En chute libre depuis l’atmosphère haute de la planète, la navette occupée par les envoyés du Mechanicus est rebootée à temps par le dégourdi Lakius pour éviter un crash mortel à la surface désertique de ce roc sans vie, mais accueillant des ruines très anciennes qu’un Magos Explorator (Egal) souhaite étudier. En tant que spécialiste de la cryo-stase, Lakius dispose d’une expertise précieuse en matière de compréhension de technologie Necron (à ce stade, vous aviez sans doute déjà deviné qu’on prenait ce chemin…), et Egal l’a donc réquisitionné pour assister sa petite équipe de super geeks.

A peine remis de leur atterrissage mouvementé, Lakius et Osil doivent encaisser une nouvelle expérience traumatisante : l’attaque du camp du Mechanicus par quelques escouades de Guerriers Necrons, vomies comme toutes les six heures par la Necropole encore endormie qu’Egal a commencé à explorer. Bien que l’effet de surprise ne soit pas de leur côté, et que les servants de l’Omnimessie puissent compter sur une cohorte de Prétoriens ainsi que de solides fortifications pour les défendre, les robots squelettiques vendent chèrement leur châssis, forçant les adeptes à partir à la découverte de la crypte exhumée par le Magos avec une protection réduite.

De manière très prévisible, la progression du petit groupe (Egal, Lakius, Osil et quelques personnages secondaires à l’espérance de vie très limitée) rencontre une résistance qui va croissant, depuis des marches très hautes qui obligent les Prétoriens à rouler à deux à l’heure, jusqu’à des champs magnétiques générateurs de trouille, ou plus prosaïquement des vagues de Scarabées kamikazes. Au bout du compte, Lakius et Egal se retrouvent seuls dans la salle des bornes de chargement sarcophages de la Nécropole, tandis qu’Osil, qui s’est pris quelques échardes dans la fesse gauche pendant l’expédition indoor, a été ramené au campement de base par le dernier Pretorien pour désinfection et pose de pansement. La tension est à son comble…

Début spoiler…Commençons par évoquer le destin d’Osil, que son maître a chargé d’une mission simple mais capitale : réveiller au plus vite l’Assassin Eversor qui végète dans la soute de leur vaisseau. Lakius soupçonne en effet que la Necropole est en train de se réveiller, et que seule l’intervention d’une machine à tuer bourrée de Red Bull a une chance d’enrayer cette trajectoire menaçante. Malheureusement, la navette du Techno-Prêtre s’est fait coloniser par une nuée de… barnacles (vous croyiez que les Necrons s’en étaient tenus aux scarabées ? erreur) métalliques pendant l’absence de ses propriétaires, empêchant l’acolyte de sortir le tueur de sa torpeur. Voilà qui est dommage.

De leur côté, Lakius et Egal récupèrent un « Bâton de Lumière » dans le sarcophage (vide) du probable Phaëron du lieu, avant de prendre à leur tour le chemin de la sortie. Bien que le Magos assure à son compagnon que cette relique a le pouvoir de tenir à distance les gardiens de la Nécropole, Lakius décide de jouer la carte de la sécurité et de détruire le générateur de phase qui a ouvert le portail permettant d’accéder à l’intérieur du complexe, une fois les deux explorateurs sortis de ce dernier. Egal n’est pas d’accord, et la dispute académique dégénère rapidement en duel de carabine laser, au cours duquel Lakius colle un tir à pleine puissance en pleine tête de son estimé confrère, avant de réduire le générateur en cendres. Une conclusion regrettable, mais la fin justifie les moyens…

Début spoiler 2…Sauf qu’Egal refuse de rester au sol, et pour cause. Sous le fond de teint soigneusement appliqué, c’était un C’tan qui avait revêtu les robes écarlates du Mechanicus. On ne saura jamais ce qu’il cherchait à faire sur Naogeddon, à part troller quelques pauvres adeptes qui n’avaient rien demandé, bien sûr, mais comme on peut s’y attendre, les tirs désespérés de Lakius le font doucement rigoler. Beau joueur, il laisse ce dernier s’enfermer avec Osil dans le laboratoire installé par les chercheurs, avant de frapper doucement à la porte pour essayer de leur vendre des boîtes de biscuits pour financer sa classe de neige et/ou des bons du trésor moldave. Lorsque la paroi finit par céder sous ses coups, le C’tan s’aperçoit que ses proies n’ont pas été oisives, et ont bricolé une étrange machine avec les composants qu’ils avaient sous la main. That’s cute, but too little, too late

Début spoiler 3…Eh non. La machine en question était un générateur de stase, qui emprisonne fissa la truculente Echarde dans une bulle atemporelle. Fin. Comment, vous trouvez ça un peu tiré par les cheveux ? Mais qu’attendiez vous d’une histoire qui s’appelle presque Deus ex Machina, enfin ? Fin spoiler

AVIS :

Les nouvelles d’exploration de Nécropoles Necron, un sous-genre assez populaire de la littérature 40K, ne sont pas vraiment ma tasse de thé. J’ai toujours l’impression de lire la même histoire, basée autour d’un faux suspens (« eh non, ils ne dormaient pas en fait… SHOCKING ») et finissant généralement par une course effrénée vers la sortie de la petite bande de héros ayant eu la mauvaise idée de faire de l’archéologie chez les grands anciens galactiques. Ce ‘Deus Ex Mechanicus’ a pour lui de proposer des variations assez intéressantes à cette base éculée (l’intervention d’un C’tan transformiste1, la presque intervention d’un Assassin Eversor), ce dont je sais gré à Andy Chambers.

Malheureusement pour ce dernier, il ne suffit pas d’avoir des idées innovantes pour accoucher d’une nouvelle réussie : encore faut il les intégrer à l’intrigue et en soutenir le développement de manière un tant soit peu crédible, ce qui n’est pas le cas ici. On ne saura donc pas comment un Techno Adepte du Mechanicus a pu se retrouver en possession d’un Eversor (l’Adeptus Assassinarum n’étant pas vraiment connu pour sa générosité), comment le C’tan transformiste a pris la place d’Egal (ou pourquoi il s’est donné le mal de revenir sur sa planète natale avec des acolytes humains, si le Magos n’a toujours été qu’une couverture), ou ce qu’il se passe après que cette divinité en vadrouille se soit retrouvée piégée dans un champ de stase (ce qui pourrait sans doute intéresser l’Inquisition, et impacter fortement le fluff de Warhammer 40,000… mais je dis ça comme ça). Ou même à quoi sert la scène initiale de la nouvelle (le quasi-crash du vaisseau de nos deux lurons), dont il ne sera plus jamais fait mention par la suite et qui aurait pu être remplacée par une arrivée sur site des plus classiques sans que cela ne change rien à la suite. Trop brouillon.

1 : Qui avec le recul ressemble fortement à Trazyn l’Infini, dans le genre boute en train avide de connaissances. Vu l’âge canonique de cette nouvelle, cette similitude ne peut être autre chose qu’une coïncidence troublante…

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Red Rain – D. Abnett [40K] – #21 :

INTRIGUE :

40K_Red RainL’agrimonde Ceres est tombé sous la coupe d’une secte vénérant Khorne, menaçant les systèmes avoisinants de famine si la situation n’est pas corrigée dans les plus brefs délais. Mobilisés par les autorités compétentes, les Iron Snakes du Capitaine Phobor sont envoyé tataner du bouseux sanguinaire, sous le commandement avisé du Docteur de l’Inquisiteur Mabuse. Ce dernier, qui a sans doute rêvé de percer dans le one man show dans sa prime jeunesse vu le nombre de calembours éculés qu’il balance pendant le briefing, suggère que les Space Marines se rendent dans chacun des dix-sept hameaux qui parsèment la surface de la planète, à la recherche d’indices permettant de séparer le bon grain impérial de l’ivraie chaotique. Il semblerait en effet qu’au moins six communautés aient été corrompues, mini-épouvantail khorneux à l’appui.

Pour une raison non précisée, les Iron Snakes décident de faire leur tournée en Rhino au lieu d’utiliser leurs Thunderhawks, comme n’importe quel être doué de raison l’aurait fait. Peut-être est-ce l’absence du génial Petrok (‘White Heat’) qui a mené ce gâteux de Phobor prendre une décision stupide, ou peut-être que le Chapitre adore faire des balades en blindé dans l’arrière-pays. En tout cas, l’escouade Damocles du Sergent Priad passe quelques longues journées serrée sur les banquettes arrières de leur véhicule1. Le premier et le second villages (Nyru et Yyria) qu’ils visitent n’ont rien de suspect, la population du troisième (Flax) a été complètement massacrée par les cultistes, et le quatrième (Hekat) est un peu beaucoup trop calme, pour reprendre l’expression consacrée.

La fouille méthodique organisée par Priad ne donne pas grand-chose jusqu’à ce qu’une paire de nos surhommes se fasse violemment molester par un jaguar de Khorne (comprendre qu’il bouge tellement vite que personne ne voit trop à quoi il ressemble, mis à part une couleur rougeâtre, des crocs longs comme des couteaux et une queue barbelée) au détour d’une grange. Bilan : un blessé grave et un disparu, ce qui fiche un sacré coup au moral des Snakes, qui se voyaient jusque-là comme les plus grands, les plus forts et les plus beaux. Quelques minutes plus tard, la population du village est retrouvée terrée dans une cave, et explique à ses sauveurs qu’elle se cache des déprédations d’un monstre sanguinaire ayant déjà fait de nombreuses victimes et hante les rues désertées.

Jurant de faire la peau à cette ennuyeuse bestiole et de retrouver le frère Pindor, Priad envoie ses hommes ratisser la ville, et accomplit finalement ses deux objectifs, même si de façon sous-optimale. Le molosse démoniaque est renvoyé dans le Warp à coup de bolt, mais pas avant d’avoir déchiqueté le malheureux frère Illyus. Quant à Pindor, il est retrouvé par son escouade juste au moment où il allait se faire sacrifier par les Enfants de Khorne, qui cherchaient ainsi à invoquer un démon encore plus gros pour poursuivre leur campagne de terreur. Cet heureux dénouement est cependant un peu gâché par la révélation que la totalité des habitants de Hekat est constituée de cultistes, qui décident de venger la mort de Rantanplan en attaquant les Iron Snakes en masse. A ce petit jeu, les Space Marines sont toutefois assez forts, et au terme d’une nuit de combats acharnés, pendant laquelle deux autres serpents énergétiques passent l’arme à gauche (l’Apothicaire Memnes et le première classe Calignes), l’ordre règle à Hekat. Sa mission accomplie, l’escouade Damocles peut repartir en orbite boire un chti canon d’eau de mer en hommage à ses chers disparus, comme c’est la tradition, et poster des offres de recrutement sur l’intranet du Chapitre pour remplacer les pertes. La routine habituelle, quoi.

1 : Il faut cependant noter ici qu’Abnett semble avoir en tête tout autre chose que nous, humbles hobbyistes, quand il pense à un Rhino. Entre le pilotage au gouvernail qui s’effectue torse nu pour plus de confort et la hauteur sous plafond permettant à un colosse de plus de deux mètres de s’équipper d’une bannière dorsale avant de sortir, je crois qu’il n’a jamais jeté les yeux sur la glorieuse exiguïté d’un Rhino avant de prendre la plume.

AVIS :

Les choses s’améliorent un petit peu pour les Iron Snakes et Dan Abnett dans cette troisième nouvelle, qui bénéficie d’une intrigue et d’une atmosphère sensiblement plus travaillées que ce qu’on a pu lire dans ‘Black Gold’ et ‘White Heat’. L’escouade Damocles prend enfin un petit peu de profondeur, et l’inclusion d’un Inquisiteur, même affublé d’un nom aussi ridicule, et d’un culte hérétique caché permet à Abnett de flirter avec le style polar qu’il maîtrise beaucoup mieux que le bolter porn. Cette soumission souffre toutefois de deux défauts majeurs, le premier étant le manque criant de connaissance de l’auteur sur le background de l’Adeptus Astartes. Si le Rhino à géométrie variable remarqué plus haut n’est finalement qu’un exemple sans conséquence, d’autres fourvoiements fluffiques ont un vrai impact sur l’intrigue, ce qui est vraiment ennuyeux. On apprend ainsi que les Iron Snakes ont la promotion très rapidequ’ils ont de gros problèmes de discipline, ou encore que leur endoctrinement et leur résilience est très loin des standards habituels des Space Marines. On pourra me rétorquer qu’à l’époque de l’écriture de ‘Red Rain’, le background était encore assez permissif en la matière, mais à moins qu’Abnett n’ait sorti de ses tiroirs une vieillerie qu’il a remis à la BL sans se donner la peine de la mettre au goût du fluff, je ferais remarquer que ‘Red Rain’ a été publié en 2000, ce qui n’est pas non plus si lointain. Au final, les Iron Snakes se retrouvent dépeints comme une version inférieure des Fantômes de Gaunt du même auteur, ce qui ne devrait être absolument pas le cas.

Deuxièmement, la nouvelle se conclut de façon très abrupte après que le chien de Khorne ait été renvoyé à la niche. Alors que le rythme était assez lent (et prenant) jusque-là, Abnett décide de plier les choses en moins d’une page à partir de ce moment, et torche la battle royale de Hekat en une demi-page, mort de protagonistes incluse. Un dénouement un peu plus « aéré » aurait été bien plus appréciable à mes yeux, et je comprends mieux en refermant cette nouvelle pourquoi l’auteur s’est traîné une réputation de « bâcleur d’intrigue » au début de sa carrière. La critique est tout à fait légitime ici.

Finalement, la meilleure partie de ce ‘Red Rain’ restera, et de loin, la superbe illustration de Paul Dainton qui accompagnait la nouvelle lors de sa publication originale dans Inferno!. Peut encore et toujours mieux faire, donc.

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The Sound Which Wakes You – B. Chessell [WFB] – #21:

INTRIGUE :

Le jeune Tomas, fils cadet du forgeron du petit village de Montreuil, perdu dans les contreforts bretonniens des Montagnes Grises, en a gros. Comme tous les adolescents de son âge, il éprouve de grandes difficultés à respecter l’autorité, mais la colère de notre héros n’est pas seulement dirigée contre son père (Pierro), mais également et surtout contre le Marquis Gilbert de la Roserie, seigneur de Montreuil, despote impénitent et surtout ordonnateur de l’exécution du frère aîné de Tomas, après que ce dernier ait tué un des Sergents d’armes du village pour venger la mort de sa bien-aimée. Dégoûté par l’attitude placide et servile des Montreuillois devant les exactions de leur suzerain, Tomas occupe ses journées à planifier la Révolution avec un grand -R et des grands airs, qui permettra à son bled de jeter à bas la tyrannie gilbertienne.

Après une cuite au brandy avec son pote Luc, le blanc bec se décide à passer à l’action, ce qui consiste en son cas à aller foutre le feu à la haie entourant le château de Gilbert, et dont le domaine tire son nom. Cet acte plus délinquant que criminel fait grand bruit au sein du village, mais la réputation de hooligan de notre héros est de notoriété tellement publique que c’est chez lui que le Marquis fait une descente de police gendarmerie le soir même. Si Tomas, prévenu par son père du risque qu’il court, parvient à s’échapper en passant par le toit de la forge, le brave Pierro ne survit pas à sa tentative d’arrestation par la maréchaussée, et meurt l’épée à la main pour couvrir la fuite de son fiston. Désormais hors la loi, notre héros se rend dans la forêt toute proche où son père lui a indiqué d’aller, sans trop d’idée précise sur la suite qu’il souhaite donner à sa carrière de repris de justice…

Début spoiler…Sur place, il est rejoint par une douzaine d’hommes de Montreuil, qui lui expliquent qu’il est vraiment trop c*n vilain. Son feu de joie et les conséquences macabres de ce dernier sont venus faire obstacle au patient projet d’insurrection qu’ils planifiaient depuis des années, sous la houlette de Pierro. Le forgeron n’avait en effet pas pardonné non plus au Marquis la mort de son fils aîné, mais plutôt que de s’en plaindre bruyamment et futilement comme ce trublion de Tomas, avait patiemment réuni autour de lui des partisans et des épées, forgées incognito avec ses vieux stocks de minerai.

Désemparés par la disparition de leur chef, les conjurés consanguins décident de mettre Tomas aux affaires, le management héréditaire apparaissant sans doute comme d’une familiarité rassurante pour ces âmes simples. Fidèle à son approche cavalière et opportuniste, qui lui a si bien réussie jusqu’ici il faut le dire (…), Toto décide que cette nuit est le moment idéal pour déposer le Marquis, et sans plus de préparation, entraîne ses guérilleros en sabots jusqu’au château de leur Némésis.

Ayant réussi à mettre hors de combat une poignée de gardes grâce à l’effet de surprise, les Jacques en furie finissent par se retrouver confrontés à une forte troupe (environ 12) de Sergents d’armes. Laissant ses troupes se débrouiller face à la maréchaussée, Tomas s’introduit dans les quartiers privés de l’horrible Gilbert avec un compagnon pour pétitioner son suzerain à coup de colichemarde dans les ratiches. Ce dernier, réveillé par le tumulte de l’insurrection, est toutefois frais et dispos pour un duel au saut du lit, et malgré toute leur bonne volonté, Tomas et son sidekick ne sont pas de taille à lutter contre un escrimeur aguerri comme la Roserie. L’erreur de son excellence sera toutefois de vouloir jouer avec ses adversaires au lieu de les coucher fissa, et de faire un peu trop confiance à la solidité de la rapière fashion que lui avait forgé Pierro. Cassée nette après avoir rencontré un os un peu trop calcifié, la lame du joujou de Gigi fait défaut à son porteur au pire moment, et permet à Tomas de remporter le combat d’un horion de gueux bien dégueu’, mais indéniablement efficace.

La mort de leur maître et, surtout, la perspective de ne plus recevoir de solde, ayant conduit les Sergents survivants à déposer les armes, la vie peut reprendre son court à Montreuil. Sentant que sa place n’est plus parmi les siens, Tomas part tenter sa chance sur les routes de Bretonnie, tandis que le château de la Roserie tombe à l’abandon. Pour le reste, c’est bonnet blanc et flanc de poney, comme on dit du côté de Montsoir en Barreuil. Au moins, les roses ont repoussé…Fin spoiler

AVIS :

Ben Chessell se positionne comme le chaînon manquant entre la prose contemplative de Brian Craig1 et les productions classiques de la Black Library avec ‘The Sound Which Wakes You’ et son histoire de jacquerie à la petite semaine dans un village perdu de Bretonnie. Le style neutre et détaché utilisé par l’auteur pour décrire l’insurrection de Montreuil contre son cruel suzerain détonne fortement avec ce que l’on a l’habitude de lire en matière de GW-Fiction (hors Craig, encore une fois), mais l’expérience n’en est pas désagréable pour autant. Cette approche dépassionnée de son sujet permet même à Chessell de terminer la nouvelle avec un des excipits les plus sinistrement percutants (et donc en quelque sorte, grimdark) que la BL ait connu. ‘The Sound Which Wakes You’ est la chronique sociale de Bretonnie que personne n’attendait et qui n’a (très bizarrement…) pas fait école, mais qui mérite le détour pour son originalité et pour son exécution, dans la pure veine des travaux précédents de Ben Chessell, qui termine ici son parcours au sein de la GW-Fiction.

1 : Un autre auteur dont la Bretonnie est plus médiévale que fantastique.

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Mama’s Boys – J. Green [NDA] – #21 :

INTRIGUE :

NDA_Mama's BoysLa petite ville de Sulphur Creek, blottie dans un recoin du sous-monde comme une escarre dans un bourrelet, a vécu pendant des années sous la menace du gang des Kaynn, une famille de mutants scavvies aux mœurs pas très policées. Les déprédations homicidaires de la Degrada Familia, gouvernée d’une main de fer par la terrible Mama Kaynn, ont longtemps été gardées sous contrôle par un petit arrangement entre les colons et les desperados, les premiers fermant les yeux sur les disparitions occasionnelles de prospecteurs malchanceux en échange d’une relative tranquilité. Les déprédations excessives du petit dernier de la fratrie, Django, ont cependant attiré l’attention des Guilders, qui ont mis sa tête à prix. C’est vrai qu’un serial killer cannibale avec une vingtaine de victimes à son actif, ça fait un peu tache dans le décor. Les cinquante crédits offerts pour la remise de cet incorrigible garnement aux autorités ont attiré le chasseur de primes émérite Nathan Creed, qui parvient après un affrontement dans un entrepôt désert, à capturer le mauvais sujet et le jeter dans la prison locale.

Les choses sérieuses ne font que commencer pour notre héros, cependant. Comme Django Unchained le fait remarquer à son geôlier, les Kaynn, malgré tous leurs défauts, ont le sens de la famille, et le reste de la tribu va bientôt débarquer en ville pour libérer leur frérot et se venger de façon PEGI 18 sur Creed. Ces menaces glissent cependant sur le flegme du pistolero comme de la boue toxique sur les écailles d’un sumpkroc, qui indique à son prisonnier qu’il espère bien que le gang utilise son droit de visite. Le premier à se présenter, Tuntan, pense surprendre Creed en train de piquer un roupillon sous le porche de la prison, mais réalise vite son erreur lorsque notre héros lui troue le cuir avec ses fidèles pétoires après que le mutant ait dévoilé sa présence. Visiteur : 2 – Locaux : 0.

Piqués au vif malgré leurs écailles épaisses, les Kaynn débarquent en force de leur marigot pour se venger de l’estranger qui les tourmente. C’est l’occasion pour Green de nous présenter Buboe, Ezra, Loko et Creeping Spider Kaynn, chacun dotés de son arsenal personnel (globes empoisonnés, chien d’attaque) ou de compétences particulières (furtivité, mimétisme), qui ne font évidemment pas le poids face à l’awesomeness plaqué au scenarium enrichi de Creed, qui règle leur compte aux Dalton de fond de ruche sans trop se fouler, au grand dam de Django. Ce dernier reste toutefois confiant, car il lui reste encore un frère, et le plus coriace du lot : Gator. Kaynn le survivant et son bon pote Nuwt the Grinch ne font toutefois pas long feu non plus. Si le sumpkroc de compagnie de Gator parvient à mordiller un bras de Creed avant d’avaler une grenade, les deux assaillants ne parviennent qu’à détruire la prison avec leurs pitreries pyrotechniques, avant de se faire refroidir à leur tour. Leur ignoble sacrifice permet toutefois à Django de prendre la poudre d’escampette, ce qui n’arrange pas les affaires de notre héros…

Début spoiler…Mais Creed n’est pas devenu une légende du sous-monde en enfilant des perles, et il ramasse nonchalement un flingue qui trainait par terre avant d’exploser les rotules du fugitif pour lui apprendre à partir sans dire au revoir. Ce revers de fortune chagrine profondément Django, qui pensait sincèrement être protégé par l’Habeas Corpus necromundien, et commence à craindre pour sa vie, malgré la clause protectrice du contrat placé sur sa tête. Et il fait bien de douter, car Creed révèle au dernier des MohiKaynn que les Guilders ont en fait offert une récompense pour la mise hors d’état de nuire du gang des Kaynn dans son ensemble. Django a donc servi d’appât pour faire sortir sa parentèle de son marais toxique et permettre à notre héros d’accomplir sa mission sans ruiner ses bottes. Habile. Une fois que l’acariâtre Ma’ aura ramené ses verrues à Sulphur Creek, la réunion familiale organisée par Creed sera complète…Fin spoiler

AVIS :

Puisque les histoires de Nathan Creed sont des pastiches assumés des western spaghetti de la grande époque, il serait injuste de reprocher à Green son manque d’inventivité dans l’intrigue de ce ‘Mama’s Boys’, qui transpose le trope du héros solitaire opposé à un gang de voyous, et qui sort victorieux de cet affrontement inégal grâce à ses colts et sa vista1, à Necromunda. J’irai même plus loin en reconnaissant que notre homme fait ici un job tout à fait honnête, et même plaisant à lire une fois que l’on a compris à quel objet littéraire on avait affaire. Les confrontations entre le pistolero du sous-monde à la bande d’affreux mutants qui lui tient lieu d’adversaires sont certes dénuées de tout suspens, mais Green a pris soin de gratifier chaque Kaynn de sa propre fin, ce qui est un effort appréciable. On a même le droit à un petit twist final bien trouvé, ce qui n’est jamais garanti pour une soumission de GW-Fiction, et encore moins de la part de Jonathan Green : apprécions donc cette nouvelle sans prétention à sa juste valeur, que diable.

1 : Il y a probablement un film qui a servi d’inspiration à Green pour cette nouvelle, mais je manque de culture cinématographique pour l’identifier. Et puisque l’on parle du 7ème art, il ne vous aura sans doute pas échappé que l’illustration de cette nouvelle, signée John Gravato, dépeint Creed sous les traits de Clint Eastwood, alors qu’il est un sosie de Lee Van Cleef dans les illustrations de Des Henley.

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Son and Heir – I. Winterton [WFB] – #21 :

INTRIGUE :

WFB_Son &amp; HeirAlors qu’il patrouillait gentiment sur le domaine de son patron, le Baron Gregory de Chambourt, le Chevalier du Graal Gilles Ettringer surprend un groupe d’Hommes Bêtes traînant sans masque ni attestation ni respect des gestes barrières à proximité d’une chapelle de la Dame. N’écoutant que son devoir, il se rue sur les mutants l’épée au clair et les met à l’amende (135 horions par tête de pipe), avant d’aller investiguer sur la raison qui poussait les Gors à squatter à côté d’un lieu saint. Il ne tarde pas à découvrir, monceaux de déchets et de cadavres torturés et/ou putréfiés à l’appui, que la chapelle a été profanée par des adorateurs du Chaos, dont un grand costaud en tenu d’Adam doté d’une énorme… capacité de régénération, et d’un sens de l’humour un peu particulier. Maîtrisé sans coup férir par Gilles, qui veut faire les choses dans les règles et offrir une expérience de torture judiciaire avant exécution interminable complète à son prisonnier, l’anarcho-nudiste est ramené jusqu’au château de Chambourt, en compagnie d’une complice également alpaguée sur les lieux du crime, et qui se révèle être la jeune sœur (Juliette) du Baron…

Ce dernier, comme le veut la tradition locale, était en train de se pinter la gueule avec quelques copains pendant que sa femme, la Dame Isobella, donnait naissance au premier enfant du couple. Dégrisé par la nouvelle de la souillure de ses terres et, très probablement, de sa sœur, considérée jusqu’ici comme un modèle de pureté, Greg pète une durite et donne carte blanche à ses tortionnaires pour attendrir un peu le suspect, qui n’a même pas consenti à donner son nom au Baron. Une heure, une tonsure expresse, une dizaine de dents et deux doigts en moins et une flagellation en bonne et due forme plus tard, le cultiste impénitent est ramené devant son juge, mais continue à prendre la situation à la légère. Il va mène jusqu’à annoncer qu’il est la Némésis du noble, et qu’il lui prendra absolument tout ce qui lui est cher dans les années à venir, à commencer par sa femme (il félicite tout de même l’heureux papa pour la naissance de son fils, parce que c’est pas un monstre absolu). Et en effet, lorsque Gregory se rue au chevet de sa femme après qu’un serviteur lui ait porté la nouvelle de la fin de l’accouchement, il est impuissant à stopper la gingivite foudroyante qui emporte Isobella dans ses bras. Le lendemain, c’est la fourbe Juliette qui se fait décapiter par un garde en situation de légitime défense, après qu’elle ait fait exploser la tête de deux de ses camarades d’un simple mot lorsqu’ils étaient venus lui apporter son petit déjeuner en cellule. Ca devait pas être le mot magique auquel ils s’attendaient, pour sûr. Pour ne rien arranger, le cultiste parvient, lui, à disparaître sans laisser de traces, même s’il laisse sa langue dans la poche du Baron (de plus en plus énervé, et on le comprend) au passage.

Avec tout ça, il n’est pas difficile de comprendre la paranoïa exacerbée de Gregory envers la sécurité de son fils (également appelé Gregory), qu’il maintient enfermé dans son château jusqu’à ses douze ans révolus. Finalement convaincu par l’adolescent de l’emmener à la chasse pour célébrer son anniversaire, Old Greg regrette rapidement son choix lorsque la colonne bretonienne tombe dans une embuscade d’Homme Bêtes. Bien que les assaillants soient repoussés au prix de lourdes pertes, Young Greg et Gilles Ettringer font partie des disparus, présumés capturés par la harde du Chaos. Et en effet, lorsque Gillou se réveille, il découvre avec stupeur que toute l’opération a été montée par une vieille connaissance : le streaker cultiste, (re)venu avec son grand couteau et son énorme b…onhommie. Un peu handicapé par son absence de langue, il arrive tout de même à faire comprendre au chevalier qu’il a des grands plans pour ses prisonniers, dont Greg Junior, grâce à ses compétences de mime. En douze ans, on a le temps de s’améliorer au Time’s Up, c’est vrai. Mais c’est sans compter sur la détermination de Gilles, qui parvient à se libérer de ses liens et à perturber le rituel sacrificiel des hordes chaotiques armé seulement d’un couteau à pain Monoprix ébréché, mais aussi et surtout sur l’arrivée providentielle de Papou Greg et de ses hommes, qui ont trouvé la trace des Hommes Bêtes et leur tombent dessus with extreme prejudice. Bilan des courses, le cultiste en chef se fait refaire le portrait par Gilles avant d’avoir pu exécuter le fils prodigue, et est ramené manu militari au château pour enfin répondre de ses crimes…

Début spoiler…Dûment torturé pendant les quelques jours qui ont été nécessaires à monter le bûcher sur lequel il est conduit en grande cérémonie, la Némésis de Chambourt ne fait plus le malin lorsqu’il est attaché au poteau. Il semble même demander grâce au Baron, mais sans langue ni dents et avec une mâchoire démantibulée, c’est dur de se faire comprendre. Gilles, qui a été salement amoché au cours de son héroïque intervention, assiste à l’exécution depuis le balcon de sa chambre, accompagné de Baby Greg. Intrigué par le changement radical de comportement du cultiste depuis sa seconde arrestation, le vieux chevalier finit par réaliser que quelque chose ne tourne pas rond… mais n’aura pas le temps de partager son horrible réalisation avec quiconque, car son compagnon lui balance la mère de tous les « OK Boomers » dans la face, ce qui lui brise littéralement son petit cœur fragile. Pendant qu’il agonise, « Greg » lui confirme ce qu’il vient de comprendre : le rituel interrompu quelques jours plus tôt avait pour but d’échanger les corps du cultiste et du fils du Baron, et c’est donc ce dernier qui a été brûlé en place publique. Le mot qu’il essayait de faire comprendre à son bourreau était « Père », mais ce dernier n’a évidemment pas capté le message. Ce petit secret emporté dans sa tombe par Gilles, Gregory the Kid a maintenant toute latitude pour poursuivre sa vendetta personnelle contre son bien aimé paternel…Fin spoiler

AVIS :

Ian Winterton n’a peut-être pas laissé derrière lui un corpus aussi impressionnant que d’autres contributeurs de la Black Library, mais ce dont son œuvre manque en quantité, elle le rattrape en qualité. C’est bien simple, à chaque fois que je lis ‘Son and Heir’, je termine cette nouvelle en concluant qu’il s’agit d’une des toutes meilleures jamais publiées pour Warhammer Fantasy Battle, et pour la GW-Fiction en général. En l’espace de 20 pages, Winterton déroule une histoire captivante, surprenante, et d’une noirceur exemplaire, soit tout ce que l’on peut attendre d’une soumission de la BL. Ce résultat spectaculaire est en grande partie atteinte grâce à la maîtrise impressionnante que notre homme a du rythme de sa narration (ce qui lui permet d’amener des rebondissements de manière brusque, ce qui n’est pas donné à tout le monde en littérature), et son usage consommé des allusions, qui terminent de façon percutante bon nombre des courtes séquences qui découpent le récit. Cela fait totalement oublier les petites approximations fluffiques de l’auteur (sorcier masculin, « ordre » des chevaliers du Graal…), pas parfaitement au fait des us et coutume de la maison. C’est pas grave hein. Pas grave du tout. J’incite vivement tout ceux qu’ils le peuvent et le souhaitent à lire ‘Son and Heir’, car voir Winterton à l’œuvre est beaucoup plus gratifiant que de s’enquiller ma morne prose. Clairement, l’un des joyaux cachés et oubliés de la GW-Fiction, que j’estime être de mon devoir que de faire sortir de son anonymat1.

1 : Même l’illustration d’Adrian Smith dans Inferno ! pète la classe. Une réussite absolue.

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Portrait of my Undying Lady – G. Rennie [WFB] – #21 :

INTRIGUE :

WFB_Portrait of my Undying LadyLe génial Giovanni Gottio, portraitiste reconnu mais un peu trop attaché à la représentation de la vérité crue et sans fard chez ses modèles pour son propre bien, est approché dans une taverne de Trantio par un généreux mécène, cherchant à le convaincre d’accepter une commission d’un genre un peu particulier. Malgré les trois pichets de vinasse royalement avancés par son interlocuteur, l’incorrigible Gottio, blessé dans son orgueil par l’accueil glacial que sa représentation de la femme de Lorenzo Lupo a reçu de la part de son commanditaire, refuse avec emphase d’accepter cette commande et tire sa révérence avec toute l’élégance permise par une cuite au gros rouge. Il est cependant difficile de refuser la proposition d’un Vampire quand on fait un mètre cinquante, avec un petit bedon et 3 grammes d’alcool dans le sang, comme l’immense Gottio ne tarde pas à le découvrir à ses dépends. Ramené manu militari par son nouveau meilleur ami (Mariato) jusqu’à son véhicule de fonction, le peintre sombre dans l’inconscience avant que le fiacre n’arrive à destination.

Se réveillant à l’intérieur d’une villa de campagne des environs de Trantio passablement délabrée, l’illustre Gottio est conduit jusqu’à celle qui va devenir sa muse, de gré ou de force : Dame Khemalla de Lahmia. Comme son titre, sa pâleur morbide et les nombreux portraits d’elle peints par des artistes ayant vécus il y a des siècles l’indiquent, Khemalla est une Vampire, dont l’un des vices les plus innocents est de se faire peindre par les maîtres de chaque époque, afin de pallier à son incapacité d’utiliser un miroir. Cela l’aide à ne pas sombrer dans la folie sanguinaire qui guette les buveurs de sang les plus vénérables, comme elle révèle sans ambages à son hôte. N’ayant pas d’autres choix que de s’exécuter sous peine de l’être, l’incomparable Gottio se met au travail pour accoucher de sa meilleure ou de sa dernière œuvre, comme il le remarque sombrement.

Au cours des nuits suivantes, notre héros va peu à peu découvrir la réalité, pas forcément toujours glamour, d’une cour vampirique. En plus de devoir squatter une demeure abandonnée, et donc franchement insalubre sur les bords, il doit s’habituer au rythme décalé auquel vivent ses geôliers, les bruits de succion persistants qui résonnent près de sa cellule, les ballets de chauves souris géantes jusqu’à pas d’heure, ou encore les interruptions brutales de sessions pour cause de vendettas contre une autre lignée. Pire que tout, l’époustouflant Gottio se fait carrément menacer par cette fouine de Mariato, très jaloux de l’intérêt que sa maîtresse porte au scribouillard. Il aurait dû apprendre à dessiner au lieu de menacer gratuitement son prochain ceci dit, car peu de temps après que l’extraordinaire(ment effrayé) Gottio ait balancé son camarade à Khemalla, Mariato devient boursier (c’est-à-dire que l’insondable Gottio trouve ses cendres à l’intérieur d’une bourse glissée sous son lit). Le harcèlement professionnel, c’est un vrai sujet chez les Lahmianes apparemment.

Enfin, la toile est complétée et l’exténué Gottio peut la présenter à sa commanditaire, qui s’apprête à partir pour des cieux plus cléments. Satisfaite du travail de son invisonnier, elle lui remet une coquette somme en dédommagement de ses services, ainsi qu’un élixir de longue vie dans la dernière coupe qu’ils partagent avant le départ de l’une et le coma de l’autre. De retour dans son gourbi minable par l’opération du sang esprit, le miraculé Gottio se découvre une nouvelle jeunesse grâce au tonique à l’hémoglobine de Dame Khemalla, et entreprend de mettre un peu d’ordre dans sa vie pour permettre à son talent d’être reconnu comme il se doit. C’est ce qui s’appelle être en veine.

AVIS :

Gordon Rennie s’autorise une aventure extra Zavantale avec ‘Portrait of My Undying Lady’, mettant en scène la Némésis du sage détective d’Altdorf, Dame Khemalla, dans un huis clos où elle n’apparaît pas comme la maléfique éminence grise de service (pour changer). Cette petite nouvelle, si elle ne s’avère pas spécialement rythmée ou palpitante, et n’apporte rien à l’arc narratif de Zavant en tant que tel, se laisse toutefois lire sans problème, et a le bon goût de comporter quelques détails fluffiques qui pourront intéresser les plus curieux des lecteurs. Un amuse-gueule littéraire tout à fait convenable, en quelque sorte.

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Suffer not the Unclean to Live – G. Thorpe [40K] – #22 :

INTRIGUE :

40K_Suffer not the Unclean to LiveC’est sur la planète de Karis Cephalon que les ambitions carriéristes du prêcheur Yakov ont été brutalement stoppées. Il faut dire que l’amour du bling-bling (Yakov est un Armormant) de notre héros lui ont attiré la morgue et la défiance du Cardinal Kodaczka, d’obédience Lucide, et donc bien moins porté sur la pompe et le clinquant que son subalterne. Ceci explique probablement que Yakov ait reçu la charge d’une paroisse située en territoire mutant, classe laborieuse et opprimée de Karis Cephalon, qui doit sûrement se spécialiser dans l’élevage de crevettes, la fabrication de briques et le tissage de tapis. Dans cette épreuve, tant pour son amour propre que pour son odorat, Yakov peut toutefois compter sur sa foi sincère en l’Empereur, et sur la dévotion véritable de ses ouailles, qui acceptent leur condition servile avec une constance admirable. Ou plutôt, acceptaient.

Car, comme le prêcheur ne tarde pas à le découvrir lors de son retour dans le bidonville qui lui sert de QG, une fois son cours de yoga du mercredi soir achevé, une épidémie s’est déclarée parmi les mutants, et ces derniers montrent des signes aisément compréhensibles d’énervement devant le manque à peu près total de réaction des autorités compétentes. Sachant qu’aller gueuler « On en a gros » devant la préfecture n’aura que des effets limités, et probablement déplaisants, Yakov convainc ses fidèles de prendre leur mal en patience, mais accepte tout de même, à la demande insistante de Lathesia, une jeune hors-la-loi altruiste dont la mutation consiste à être gothique, de faire doléance d’aspirine et de gel hydroalcoolique auprès de Kodaczka… qui refuse bien évidemment de consacrer le moindre kopeck à ce problème de santé publique. Et puis quoi encore. Laissant le prélat sur une maigre promesse de prière en faveur des nécessiteux, Yakov retourne dans sa banlieue, calme une nouvelle émeute naissante, et va se coucher. Il est toutefois réveillé en plein milieu de la nuit par Lathesia et son complice Byzanthus, qui ont remis une pièce dans la machine et réussi à générer une foule en colère digne de ce nom, après que le fossoyeur de la communauté ait été retrouvé égorgé. Malgré ses meilleurs efforts et son implication physique sans faille, Yakov ne parvient pas à dissiper la manif sauvage avant qu’elle se fasse disperser à coups de chevrotine laser par les forces de l’ordre. Et pas la peine d’attendre une contre-enquête de l’IGS.

La situation commence alors à échapper à notre héros, qui tente le lendemain de l’émeute matée dans le sang de convaincre Lathesia et sa bande d’arrêter leurs bêtises avant qu’il ne soit trop tard, mais ne parvient qu’à les intéresser à enquêter sur le meurtre du fossoyeur. Une visite au cimetière municipal plus tard, la bande fait l’acquisition d’un cercueil en métal, dont la particularité est d’être couvert de chaînes, comme pour empêcher son occupant d’en sortir. Pas le temps toutefois de percer ce mystère, car la planque des mutants est attaquée par les Enforcers. Byzanthus et les autres figurants vendent alors chèrement leur vie pour permettre à leur meneuse et au prêcheur de s’enfuir. Vous trouvez que ça va vite ? Accrochez-vous car Thorpe lâche les freins.

Toujours déterminés à tirer les choses au clair, Yakov et Lathesia décident de retourner dans le squat de cette dernière le jour suivant, pour enfin déterminer ce qui se cache dans le cercueil verrouillé qu’ils ont abandonné sur place. Ils font alors la connaissance d’un type louche qui se présente comme un free lance inquisitorial (il bosse pour l’Inquisition… sans en faire partie), lui aussi intéressé par ce mystérieux sarcophage. Et comme jamais deux sans trois est resté un proverbe très populaire au 41ème millénaire, les deux complices acceptent d’intégrer le nouveau-venu dans leur raid, sans lui demander plus de précisions sur ses motivations. À l’intérieur, la petite bande a la surprise de tomber en plein milieu d’un rituel manifestement chaotique, auquel participe rien de moins que le Gouverneur de Karis Cephalon. Parce qu’on peut être l’individu le plus puissant d’une planète et ne pas trouver un livreur pour amener un colis un peu encombrant jusqu’à son palais depuis une ZUS toute proche. Le problème des no go zones s’est manifestement perpétué dans le lointain futur. Bref, la fainéantise des uns (le Gouverneur et Thorpe) faisant le bonheur des autres (Yakov, Lathesia et leur invité mystère), la petite cérémonie païenne est interrompue par le mitraillage en règle des libertins, laissant le cercueil (et le Gouverneur) en possession du trio. Il reste alors une page et demie à Thorpe pour conclure, ce qui n’est pas suffisant pour trouver et utiliser une pince monseigneur, ni faire des présentations dignes de ce nom, mais assez pour que la tierce partie de confiance de notre histoire explique à ses compagnons que Keris Cephalon est sur le point de vivre cinq années très difficiles, que le Gouverneur a organisé la révolte de mutants pour pouvoir les sacrifier aux Dieux du Chaos, et qu’il pourrait tirer quelques ficelles pour permettre à Yakov d’être muté sur une planète plus tranquille. Noblement, notre héros décline cette offre, prétextant que ses chers mutants auront besoin de son aide dans l’épreuve à venir, mais quelque chose me dit qu’il n’en a pas fini avec l’Inquisition1

1 : Cette illustration vient du livre de règles Inquisitor et représente Yakov (le grand type) et l’investigateur Malovich (le hippie renfrogné), surplombant quelques Gilets Jaunes très colère.

AVIS :

Ça partait bien pour Thorpe avec cette plongée atmosphérique dans les bas fonds de Keris Cephalon, ‘Suffer…’ bénéficiant, une fois n’est pas coutume, d’un personnage principal et d’un contexte étonnement complexes et fouillés (aux vues des standards de l’auteur). Malheureusement, ce dernier a vu trop grand, ou plutôt trop long (ou pas assez, ça dépend du point de vue) avec son intrigue, qui se retrouve bâclée, estropiée et finalement catapultée à un prochain et hypothétique épisode au lieu de s’achever avec un peu de tenue et de dignité. La raison, comme dit ci-dessus, tient sans doute à la volonté de GW et de la BL de soutenir le lancement d’Inquisitor avec un peu de background romancé, comme d’autres auteurs (McNeill et ‘Payback’, par exemple) le firent également à la même époque. Mais si le motif est tout à fait compréhensible, l’exécution laisse franchement à désirer, et transforme ‘Suffer…’ en objet littéraire finalement aussi contrefait et difforme que les mutants dont le héros s’occupe. Vous parlez d’une mise en abyme ! J’espère franchement que Thorpe a fini son cycle Yakovien ailleurs, ne serait-ce que dans un rapport de bataille ou une nouvelle du White Dwarf, mais je n’en suis pas absolument convaincu…

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A Choice of Hatreds – C. L. Werner [WFB] – #22 :

INTRIGUE :

Alors que le petit village Petitvillage (Kleinsdorf en Reikspiel) se prépare à fêter comme il se doit le Wilhemstag en dansant, buvant, flirtant, et tirant des enclumes d’artifice1, deux cavaliers entrent dans la ville sans se soucier de la joyeuse ambiance qui y règne. Il s’agit du Répurgateur et fashion victim Mathias Thulmann et de son associé et tortionnaire de fonction, Streng2, en route pour aller chasser la sorcière dans le Stirland. C’est la saison. Pendant que son homme de main est heureux de passer la nuit à s’envoyer des pintes en racontant ses meilleures anecdotes de brodequins, dans l’espoir de matcher avec une locale, Thulmann préfère aller sagement se pieuter pour pouvoir reprendre la route dès potron minet le lendemain. Avisant une auberge convenable, il va ruiner le groove de son propriétaire en s’installant dans la meilleure chambre (la sienne), pour un quart du prix habituel, et en se faisant servir un copieux dîner pour se remettre de sa chevauchée. C’est Volkmar qui paie, après tout. L’arrivée du Chasseur de Sorcières n’est cependant pas passée inaperçue, et deux individus aux motivations diverses vont agir en conséquence…

Le premier d’entre eux est un noble du nom de Reinhardt von Lichtberg, promis à un brillant avenir dans la Reiksguard jusqu’à peu, mais désormais déterminé à faire la peau à Thulmann depuis que ce dernier a condamné sa fiancée Mina au bûcher (il l’a aussi un peu torturée avant, pour ne rien arranger). Le second est un marchand local, Gerhardt Knauf, qui est devenu cultiste de Tzeentch et sorcier amateur pour arranger ses affaires, et qui est convaincu que si le Répurgateur est arrivé en ville, c’est pour lui régler son compte. Il paie donc grassement une bande de mercenaires pour se débarrasser de l’importun, et va se barricader chez lui en attendant que ses gros bras viennent lui annoncer la bonne nouvelle. Comme on peut s’y attendre, Reinhardt et les reîtres de Knauf arrivent dans la chambre de Thulmann à peu près au même moment, ce qui permet à notre héros de jouer de la surprise commune pour tuer ou blesser les brutes locales, et menotter l’aristocrate revanchard à son lit, non pas pour une mise en scène improvisée de Fifty Shades (grim)Darker, mais pour empêcher le nobliau de lui chercher des noises pendant qu’il va s’expliquer franchement avec l’Herr Knauf, honteusement balancé par l’un de ses nervis. Car, contrairement à ce que son image de zélote fanatique le laisse à penser, Thulmann n’est pas insensible à la pitié ou à la miséricorde, et ne se contente pas d’exécuter froidement Reinhardt malgré son assaut caractérisé sur personne détentrice de l’autorité. Il prend même le temps de donner sa version de l’affaire Mina à son ancien amant, et de lui révéler que la belle a en fait été corrompue par une pilule du lendemain à base de malepierre que son médecin de famille lui avait remis pour arrêter une grossesse non désirée et ainsi permettre à Reinhardt de poursuivre sa carrière militaire au lieu de devoir se marier tôt pour élever son gosse. Rien ne vaut les préservatifs en peau de squig, c’est moi qui vous le dit.

Un peu plus loin, Knauf se ronge les sangs en attendant le retour de ses tueurs, mais comprend lorsque sa porte est ouverte d’un coup de pistolet qu’il va lui falloir trouver un plan B. Ou plutôt, recourir au système D, comme démoniaque. Notre homme grimpe donc dans son grenier pour invoquer une Horreur Rose, dans l’espoir qu’elle le défende contre le Répurgateur. Seulement, dans sa hâte, il oublie de se placer dans un pentacle répulsif, et devient donc la première victime du démon, qui le pèle puis l’avale comme une banane. Ca nous fait déjà deux victimes de protections défectueuses dans cette histoire : plus que jamais, sortez couverts les jeunes. C’est sur ces entrefaites que le beau, le grand, le brave Mathias Thulmann arrive à l’étage, pistolet et rapière à la lame d’argent bénie par le Grand Théogoniste en personne à la main… et se fait misérablement bolosser par l’Horreur qui lui fait face. Mais vraiment bien. Du niveau du « poussé dans les escaliers » + « piétiné comme un paillasson ». Heureusement que Knauf n’était pas un cultiste de Nurgle ou de Slaanesh (et ne parlons pas de Khorne, mais c’est rare pour un marchand) hein. Et le plus drôle dans tout ça, c’est quand notre héros parvient enfin sur un vieux malentendu à empaler le démon sur âme consacrée… il prend encore plus cher des mains des Horreurs Bleues qui arrivent ensuite. On repassera plus tard pour tenter de vaincre un Vampire, hein.

Il faut l’arrivée providentielle de Reinhardt, qui a pu se libérer en piquant la hachette que Thulmann avait laissé traîner sur un cadavre de mercenaire dans sa chambre, pour mettre fin aux tourments de Répurgateur. En bien mauvais état, il fait remarquer au jeune premier qu’un duel à l’épée ne serait guère équitable, et lorsque Reinhardt lui propose de régler ça au pistolet à la place, il accepte et prête à son adversaire une de ses pétoires… celle qui est déchargée, évidemment. De son côté, il n’a pas de scrupules pour loger une balle dans l’épaule du Capitaine Fracassé, histoire de lui apprendre à faire confiance à des inconnus et surtout le mettre hors d’état de nuire assez longtemps pour passer une nuit sereine. La nouvelle se termine avec un Reinhardt qui jure à Thulmann de revenir pour se venger, mais ceci sera une autre histoire…

1 : Une spécialité bucolique mais bougrement dangereuse, en plus d’être assez peu spectaculaire lorsqu’elle a lieu de nuit.
2 : Qui a fait sien l’adage bien connu « le gras c’est la vue ».

AVIS :

Première nouvelle consacrée par C. L. Werner (qui fait ainsi ses débuts au sein de la BL) à son personnage de Mathias Thulmann, anti-héros taciturne, antipathique mais vertueux (un peu comme le chasseur de primes Brunner, un autre favori de Werner), ‘A Choice of Hatreds’ démontre déjà la science de l’homme au chapeau en termes de mise en scène de courts formats très rythmés. En l’espace de 25 pages, on a ainsi droit à une intrigue assez complexe, ponctuée par des rebondissements, confrontations et explications savamment séquencés par un Werner maître de son art et de ses effets de narration. Si Thulmann lui-même ne se révèle pas être particulièrement mémorable ou attachant, on prend plaisir à lire le récit de sa nuit agitée, grâce à laquelle C. L. Werner réussit son entrée dans le monde de la GW-Fiction.

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Pestilence – D. Abnett [40K] – #22 :

INTRIGUE :

40K_PestilenceLorsque les forces impériales lancées à la conquête de Genovingia commencent à tomber comme des mouches sous les coups et les miasmes de la Peste d’Uhlren, les autorités compétentes agissent sans tarder. Et, une fois n’est pas coutume, leur réaction n’est ni brutale, ni sanglante, ni stupide, ou en tout cas pas tout de suite. Car c’est bien à Lemual Sark et à ses collègues érudits que le Maître de Guerre Rhyngold s’adresse, chargeant notre héros et ses homologues de fouiller les archives à la recherche de toute information qui pourrait s’avérer utile à l’endiguement du fléau.

Sark est, pour résumer grossièrement, un archiviste épidémiologique, double spécialisation très rare proposée uniquement par le centre universitaire Du Guesclin de Béziers. Il passe donc ses journées à enquêter sur les épidémies du passé, dans le but d’aider ses contemporains à se prémunir contre les joyeusetés concoctées à tour de chaudron par papy Nurgle. Après une harassante recherche Doctossimo durant laquelle il a appris à vingt-huit reprises qu’il avait contracté un cancer généralisé des cuticules, Sark finit par trouver une piste digne d’intérêt, qui l’emmène sur Symbal Iota, planète marine où tout le monde se déplace en catamaran et où Kevin Costner a été élevé au statut de saint impérial. C’est en effet là le dernier domicile connu de Fege Ebhoe, Général émérite du 23ème Régiment de Lanciers de Lammark, et survivant de la vague de varicelle carabinée qui a décimé ses hommes sur Pirody, il y a de cela bien des années. Avec un peu de chance, Sark pourra tirer au vétéran quelques confessions utiles pour les victimes de la Peste d’Uhlren, pour lesquelles ni l’homéopathie, ni l’hydroxychloroquine, ni l’ingestion d’eau de javel n’ont été efficaces.

Arrivé sur place avec son Serviteur Kalibane et un chapeau tellement ridicule qu’il manque de le faire interner d’office, Sark expose son cas au très relax frère Baptrice, qui s’occupe de l’administration de l’Hospice Saint Bastian, spécialisé dans l’accueil et le traitement de vétérans de la Garde Impériale complètement traumatisés par leur expérience du front. C’est en effet dans cette maison de repos d’un genre un peu spécial que Ebhoe a passé les trente-quatre dernières années, plongé dans le noir le plus total (une séquelle neurologique de son expérience sur Pirody). Après s’être un peu fait désirer, le patient finit par accepter de répondre aux questions de son visiteur, bien que cela semble manifestement beaucoup l’éprouver. Et pour cause, Pirody n’a pas vraiment été une partie de plaisir.

Envoyé au front contre des hordes de cultistes du Chaos, en plein été polaire et sans masques de sommeil (ce qui n’a pas dû aider), le 23ème Lanciers de Lammark s’est vite retrouvé débordé par la situation et assiégé sans espoir de secours par l’ennemi. Fort heureusement, une Compagnie de Space Marines des Doom Eagles (toujours dans les bons coups) était également présente pour leur prêter main forte, et empêcher la cité de tomber aux mains purulentes et malpropres des séides de Nurgle. Les Astartes ne purent en revanche pas faire grand-chose pour empêcher un mal aussi mortel que contagieux, sobrement baptisé le Tourment, de s’abattre sur la garnison et les civils, faisant des centaines puis des milliers de morts du côté loyaliste. Malgré tous les efforts de l’Apothicaire Subjunctus Valis, la situation continua de dégénérer jusqu’à… la coupure pub, déclenchée par la prononciation par Ebhoe d’un mot tellement sââââle que son voisin de cellule passe en mode berzerk et fait mine de sauter sur Sark, sauvé par l’intervention altruiste mais inefficace de son Serviteur, et surtout par les matraques énergétiques du personnel soignant de Saint Bastian. L’incident clos, Sark apprend qu’il lui sera demandé de quitter les lieux au matin pour éviter de perturber plus encore la vie jusqu’ici tranquille de l’hospice. Cela ne fait évidemment pas les affaires de notre détective, qui profite de la nuit pour rendre la visite de la dernière chance à Ebhoe…

Début spoiler…Déterminé à obtenir le fin mot de l’histoire, quitte à menacer son interlocuteur avec une lampe torche1, Lark apprend que la situation désespérée de Pirody a été sauvée au dernier moment par la découverte par Ebhoe que le vertueux et altruiste Valis était lui aussi totalement Tourmenté, et avait œuvré en sous-main pour propager le virus parmi les défenseurs (Space Marines compris) à l’aide de « vaccins » pas vraiment homologués par l’OGS. Trahi par un bubon disgracieux juste en dessous de son oreille, Valis fut promptement incinéré par le lance-flamme d’Ebhoe, qui paya chèrement son acte héroïque, l’incendie du laboratoire de l’Apothicaire corrompu lui ravageant le corps. Les hurlements du vétéran ont également comme effets secondaires pas très Charlie de plonger à nouveau l’asile dans la folie, menant à quelques morts parmi le personnel et les pensionnaires de Saint Bastian. Tout est cependant bien qui finit (presque) bien pour Sark, qui peut rentrer au bercail avec sa précieuse info, dont le Haut Commandement de la campagne de Genovingia se servira pour faire exécuter quelques dizaines de médecins, juste au cas où. Ebhoe, de son côté, est parti rejoindre l’Empereur, sa dernière crise d’hystérie ayant fait lâcher son cœur fragile. On pourra dire de lui qu’il a donné son corps à la science, au moins.Fin spoiler  

1 : « Nous affons les moyens de fous faire parler, Herr Ebhoe… »

AVIS :

Dan Abnett a plutôt réussi son coup avec ‘Pestilence’, courte nouvelle d’ambiance et de suspens à haute teneur en grimdark. On peut rapprocher ce one-shot des travaux inquisitoriaux de notre homme, ainsi que de la mini-série des aventures animalières de Valentin Drusher, où Abnett se fait un malin plaisir de plonger dans la vie quotidienne de l’Imperium, loin derrière les lignes de front et les combats sanguinaires illustrés dans le jeu de figurines, mais qui comporte son lot de caractéristiques allant du dérangeant à l’insoutenable. L’enquête de notre héros à la recherche d’une cure pour un mal surnaturel dans un asile pour aliénés est naturellement riche en glauquerie, ce qui permet à Abnett de jouer avec les préjugés de son lecteur : finalement, les bons samaritains de l’hospice ne sont pas une secte de cultistes chaotiques sous couverture, mais bien d’authentiques philanthropes cherchant véritablement à soulager la détresse de leurs patients (de manière très 40Kesque, certes). Il s’agit à mes yeux de la réussite la plus franche de ‘Pestilence’, sa révélation sur l’identité du patient 0 du Tourment n’étant pas vraiment renversante (dur de maintenir le suspens quand on a qu’un seul suspect aussi). Bref, une petite histoire assez sympathique mais pas mémorable, comme Dan Abnett en a écrit beaucoup au début de sa carrière au sein de la BL.

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Unforgiven – G. McNeill [40K] – #22 :

INTRIGUE :

40K_UnforgivenMission classique pour le Sergent Dark Angels Kaelen et son escouade de marsouins vert bouteille. Largués sur leur cible, une cathédrale quelconque1, par Thunderhawk furtif, les angles eud’la muerta se posent sans encombre sur une place grouillante d’ennemis, qui ne tardent pas à goûter à la colère des meilleurs de l’Empereur. Chargés d’accompagner le Chapelain Interrogateur2 Bareus jusqu’au mystérieux prophète ayant fait basculer la jusque là paisible Valedor dans l’hérésie la plus totale, Kaelen et ses hommes sont surpris d’entendre l’officier leur annoncer, après avoir regardé sous les jupes des filles cultistes comme un gros père vert (ce qu’il est), que le QG ennemi doit être capturé, et non pas exécuté, comme c’était jusqu’ici le plan. En privé, ce grand meneur d’homme de Bareus avoue sans détour à son sous-fifre qu’il s’attend à ce que tous les bidasses de l’escouade rejoignent la droite de l’Empereur au cours des prochaines minutes, ce qui énerve un peu notre Sergent, qui aurait bien aimé qu’on lui annonce sa participation à une mission suicide en temps et en heure. Histoire d’avoir pu demander à un camarade de dortoir de supprimer son historique de navigation avant de partir, sans doute. Quoi qu’il en soit, la prédiction funeste du Chapelain ne met pas longtemps avant de commencer à se réaliser, le pauvre frère Lucius payant de sa vie son ultime double screwgie de grenade à travers les vitraux de la cathédrale, mais permettant tout de même au reste de l’escouade de pénétrer à l’intérieur du bâtiment sans trop de casse3.

À l’intérieur, la résistance va croissante au fur et à mesure que nos braves héros se rapprochent de la dernière position connue de leur cible. Cette dernière profite que quelques apartés dans l’action frénétique de cette nouvelle endiablée pour commencer à se faire connaître, et, ô surprise, c’est très probablement peut-être certainement sans doute un Déchu. Mais on n’est pas sûr. En tout cas, si Bareus a des grands projets pour sa verdâtre Némésis, cette dernière n’est pas en reste, puisqu’elle instruit spécifiquement son second, Casta, de lui laisser s’occuper du Chapelain. Le reste des Space Marines peut cependant être massacré sans arrière-pensée, quelque chose que le mystérieux Ange des Lames, que le prophète charge son side kick de réveiller, devrait être capable de faire sans problème.

Un peu plus loin, Kaelan commence à se douter qu’il y a Luther sous Roc et qu’on ne lui a pas tout dit, lorsqu’il constate que la décoration d’intérieur de l’église a été refaite à base d’anges en feu, de planète qui explosent et de têtes de lion empaillées. En plus de cela, les vagues de cultistes qui s’abattent sur lui et ses frères, de moins en moins nombreux au fur et à mesure que McNeill les zigouille, sont habillés comme des cosplayers d’Impardonnés, ce qui est impardonnable. Malgré cela, Bareus ne consent pas à lui donner plus d’infos sur la nature véritable de sa mission, bien que notre balourd de Chapelain soit très fort pour mettre les pieds dans le plat. Devant tant de cachotteries, le Sergent Garcia se rabat sur les fondamentaux pour tenter d’atteindre un objectif qui paraît de plus en plus inatteignable, au fur et à mesure que les Astartes mordent la poussière. Heureusement pour lui, sa foi en l’Empereur et sa haine de l’onanisme l’aident à venir à bout de ses adversaires, jusqu’à ce que les survivants parviennent dans la salle du mini-boss de fin. C’est en effet là qu’il se trouvent confrontés à rien de moins que le premier Metabrutus de l’histoire, soit un Dreadnought muté monté sur crampons et exhibant fièrement son grillz et ses tablettes de chocolat aux alentours. Le pire dans tout ça, c’est que le fameux Ange des Lames est également un ex-Dark Angels, comme le symbole de son caisson le montre bien. Pas le temps de tergiverser pour nos héros cependant, il faut décarcasser le Père Ducroc.

Dans la bagarre qui s’ensuit, la plupart des survivants loyalistes se font écharper par Lââm, ne laissant en vie que Bas Rhésus, Koala et le pauvre frère Persus, qui commence à se douter qu’il ne finira pas la nouvelle en un seul morceau. À raison. Car c’est au tour du grand méchant de faire son entrée, qui se révèle être…

Début spoiler…Un Déchu. Et si. Incroyable. Je suis siégé de ma tombe. Le sinistre individu en question s’appelle Cephesus, et il a trouvé un hobby passionnant pour s’occuper depuis 10.000 ans : collectionner les Lames de la Raison des Chapelains Dark Angels qui cherchent à le capturer. La quincaillerie de Bareus lui permettra d’arriver à douze goodies, ce qui est score respectable sachant que même Molochia n’avait que dix perles sur son Rosarius. Le combat s’engage, et le Déchu parvient sans mal à trucider Persus, qui meurt en gueulant « Je le savaiiiiiiiis !!! », et à égorger Bareus avec son trousseau de clés énergétiques. La suffisance dont il fait preuve lui sera cependant fatale, car elle permettra à Kaelan, blessé mais pas vaincu, de lui arracher son Rosarius et sa précieuse sauvegarde invulnérable, avant de lui décocher un direct au foie et à la foi ravageur avec sa moufle. Traversé par un mal-être profond et le bras armé de son adversaire, Cephesus tombe raide mort au sol, et avec lui la rébellion de Valedor. Kaelan reçoit ensuite les clés du camion de la part du Chapelain mourant, qui lui vomit le mot « Deathwing » au visage dans un dernier souffle. C’est une nouvelle carrière qui s’ouvre pour notre Sergent, comme il l’annonce fièrement au Terminator de la Deathwing qui arrive peinard devant la cathédrale quelques minutes plus tard. À croire qu’on n’avait pas besoin de lui plus tôt. La relève est assurée.Fin spoiler

1 : Car nous sommes sur un monde cathédrale. Donc pour l’originalité, on repassera.
2 : Ca m’est venu comme ça mais… C’est tout de même ballot que les Dark Angels aient donné un titre spécial aux types chargés d’une mission top secrète que personne ne doit connaître. Parce que moi, si on me dit que Gérard Duchmol n’est pas comptable, mais « Comptable-Investigateur », je vais fatalement me demander ce qu’il cherche à investiguer. Et probablement me prendre un bolt dans la tête. Ou un contrôle fiscal.
3 : Le frère Marius se fracturant toutefois la hanche en glissant sur une peau de banane traîtreusement jetée par les hérétiques. Pas de quoi l’arrêter ceci dit.  

AVIS :

McNeill, qui ne devait pas être vieux à l’époque, signe une nouvelle Dark Angels des plus classiques avec ce ‘Unforgiven’, mettant évidemment en scène la traque d’un ennemi mystérieux se révélant au final être un Déchu. À croire que les lionceaux ne font que ça de leurs journées. À défaut de surprise et de suspens, il y a au moins de l’action dans cette histoire, mais pas grand-chose en termes de fluff, ce qui est dommage pour un Chapitre au passé aussi riche. On passera généreusement sur les quelques approximations et incongruités du récit, comme la disparition mystérieuse des jet-packs de l’escouade une fois rendue sur place (ça aurait pourtant pratique pour avancer jusqu’à la cible), ou le Chapelain le moins tenu au secret professionnel de l’univers, à mettre sur le compte d’une volonté manifeste de divertir le fanboy plutôt que de satisfaire le lecteur. Si vous voulez mon avis, ‘The Falls of Marakross’ de Steve Parker est en tous points supérieurs à cet ‘Unforgiven’, qui à défaut d’être pardonné, peut être oublié.

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Loyalty’s Reward – S. Jowett [40K] – #23 :

INTRIGUE :

40K_Loyalty's RewardNotre histoire commence par une scène tendue à l’arrière de l’honorable établissement du Cochon PFendu, taverne située à proximité du spatioport de Praxis, cité prospère d’Equus III. Mikhail Kravi, jeune loup à l’ambition féroce et bras droit d’un des Protektors affiliés à la puissante Maison Gaudi, est venu avec quelques gros bras de ses amis « persuader » le marchand Leon Kleist, un peu trop porté sur la dive bouteille pour son propre bien, d’offrir un superbe présent au nouveau Graf Gaudi lors de son intronisation prochaine. Cela serait un moyen judicieux de faire oublier à ce dernier les mots un peu lestes qu’un Leon rond comme une queue de pelle a eu à son égard il y a quelques jours, et dans une cité mise en coupe réglée par de puissants gangs depuis des siècles, s’attirer l’inimitié d’un Graf n’est pas une perspective attrayante. Convaincu par l’argumentaire de Mikhail autant que par son solide crochet du gauche, Leon le Persiffleur se fait un honneur de remettre à Viktor Gaudi une babiole hors de prix dès le surlendemain, lors de la cérémonie durant laquelle le jeune héritier prend officiellement le titre et la place de feu son grand-père Bruno.

Alors que Papi Gaudi préférait maintenir des relations cordiales et éviter les affrontements larvés avec les autres Maisons de Praxis, Viktor nourrit des rêves de conquêtes urbaines. Bien que sa faction compte parmi les plus puissantes de la ruche, elle n’est pas de taille à affronter frontalement tous ses rivaux… jusqu’à ce qu’un marchand (Brek) se présente avec une occasion en or : une cargaison de catapultes shuriken reconditionnées, qu’il est prêt à céder à vil prix au Graf ambitieux. C’est le début d’une OPA agressive sur les territoires des autres Maisons, dans laquelle Mikhail s’illustre particulièrement en organisant l’assassinat du Graf Reisiger, abattu avec ses conseillers les plus proches alors qu’ils dînaient dans un kebab de luxe. Récompensé par l’élévation au rang de Protektor, Mikhail est convié avec tous ses collègues à une petite soirée au manoir Gaudi, et se réveille le lendemain matin dans son appartement, nu comme un ver, couvert de sang et pris d’une gerbe carabinée. La nuit a dû être bonne !

Début spoiler…Les quelques souvenirs qui finissent par lui revenir après s’être envoyé une demi-bouteille de cointreau pour se remettre les idées en place ne sont cependant pas très sympathiques. Il a de vagues réminiscences de litanies prononcées dans une langue inconnue, en direction d’un bloc d’obsidienne couvert de runes bizarres. N’ayant pas atteint sa position en étant complètement obtus, et étant un croyant convaincu et pratiquant du culte impérial (comme la plupart des habitants de la pieuse Equus III), Mikhail comprend vite qu’il a assisté à des activités encore plus prohibées que la moyenne, et qu’il est de son devoir d’en alerter les autorités compétentes l’Ecclesiarchie. Il sèche donc le nouvel afterwork organisé par Viktor Gaudi et son pote Brek pour aller se confesser dans le temple le plus proche, espérant que sa coopération désintéressée (en partie tout du moins) lui permettra d’échapper au jugement réservé aux cultistes, même involontaires.

Le hasard faisant bien les choses, un Inquisiteur de l’Ordo Malleus (Belael) passait dans le coin, en même temps qu’un contingent de Chevaliers Gris. Tout ce petit monde débarque fissa à la casa Gaudi, et pas pour causer modernisme catalan, croyez-le bien. Au terme d’une opération rondement et prestement menée, tous les membres de la cabale de Tzeentch sont passés par le bolter, scellant la fin de la Maison Gaudi. Et la balance Mikhail, me direz-vous ?

Début spoiler 2…Bien qu’il se voie déjà pardonné, ordonné Prêtre et oint Cardinal sur un monde très lointain en reconnaissance de son impeccable probité, Belael avait d’autres idées en tête lorsqu’il lui a promis une « juste récompense » en échange de sa collaboration totale. Ayant été infecté par une présence démoniaque pendant sa soirée blackout chez Totor, comme tous les Protektors invités, Mikhail n’héritera donc que d’un rituel de purification (privé, c’est déjà appréciable) et d’un bolt dans la tête. Ce n’est pas pour rien qu’on parle du fardeau et non du bonheur de la loyauté…Fin spoiler

AVIS :

Bien des années avant le lancement de Warhammer Crime et de son approche résolument urbaine et quotidienne du 41ème millénaire, Simon Jowett signait avec ‘Loyalty’s Reward’ une très bonne nouvelle dans ce registre low-key. Librement inspirée du Parrain de Coppola, et relevée d’un zeste de conspiration chaotique à la Eisenhorn dans sa seconde moitié, cette histoire démontre qu’il est tout à fait possible d’intéresser le lecteur sans avoir besoin de mettre en scène des batailles gigantesques ou des machinations à l’échelle galactique. L’immersion est réussie, l’intrigue se déroule de manière fluide et parfois assez inventive pour de la GW-Fiction (petit Mcguffin réussi avec le tabassage du pauvre Leon en introduction) : c’est un travail soigné auquel on a droit. Mon seul petit regret porte sur le choix de Jowett du Chaos comme antagoniste, alors que les symptômes éprouvés par Mikhail le lendemain de sa « cuite » faisaient plutôt penser à une infestation Genestealer, ce qui aurait été (à mes yeux) encore plus viscéral – à tous niveaux. Top qualité.

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Debt of Blood – N. McIntosh [WFB] – #23 :

INTRIGUE :

WFB_Debt of BloodFinalement de retour à Altdorf après son road trip à Erengrad et dans le nord de l’Empire, l’aventurier Stefan Kumansky jouit d’un repos bien mérité et récolte les dividendes de ses actions héroïques en se faisant payer des coups à boire à l’occasion de l’Heldenstag, comme c’est la tradition. Soucieux de ne pas voir apparaître son frère, qui apparemment constitue son compagnon de beuverie favori1, Kumansky décide de se rendre directement chez ce dernier, et se retrouve fissa mis en garde à vue en compagnie de son frérot, trempé jusqu’au cou dans une sombre affaire de haute trahison, qui pourrait conduire à son incarcération à vie. Seul échappatoire pour les frangins Kumansky, le marché que leur propose Rheinhardt Kessler, l’autoritaire Prévôt du Conseil des Anciens d’Altdorf. Il s’agit pour Stefan de servir de chaperon à Heinrich von Diehl, scion d’une famille décadente ayant donné à l’Empire un sorcier du Chaos (Lothar) et un guerrier de Khorne (Kurt), rien que ça. Heinrich, lui, semble ok pour témoigner dans un procès d’importance devant se tenir dans quelques jours à Altdorf, et auquel sa chère famille souhaiterait vivement qu’il ne participe pas. La corruption légendaire des grandes cités ne rendant pas possible la mise en place d’un système de protection des témoins classique, Kessler décide donc de placer son mouchard #1 sous la protection d’un reître dont il ne sait pas grand-chose, et dont l’obéissance est acquise via un chantage familial. Je m’avance peut-être mais il me semble que nous sommes un tout petit peu hors procédure sur ce coup-là.

Toujours est-il que Stefan ne peut décemment pas refuser, et passe donc une semaine morne et tendue à s’assurer du bon état de santé de sa charge. Convoqué à une entrevue urgente avec Kessler dans une taverne à la veille de l’ouverture du procès, HvD est escorté par Kumansky et un poignée de gardes jusqu’au lieu du rendez-vous, qui se trouve être comme de juste rapidement assailli par une bande de… méchants (par manque de description des motivations des attaquants), menés par un mutant particulièrement véhément, que notre héros parviendra à vaincre grâce à l’usage ingénieux du traditionnel lustre en fer forgé que tout lieu de duel à l’épée se doit de comporter (c’est dans le cahier des charges des écrits med-fan Sword & Sorcery, j’ai vérifié). Manque de bol pour la petite bande, von Diehl se mange un carreau (d’arbalète, sinon ce serait moins grave) au moment de sortir de l’estaminet, résultant en une blessure non mortelle mais suffisamment grave pour que le passage à l’hospice de Shallya le plus proche devienne obligatoire. Ce dernier, tenu par la brave Sœur Agnetha, que des années de coupes budgétaires ont laissé toute seule pour tenir la permanence de quartier, permet à l’aristo décadent de reprendre quelques forces, mais ne sera pas en mesure de soutenir le siège en règle qui ne manquera pas d’être mis à la bâtisse incessamment sous peu. Très héroïquement, Kumansky ordonne à son dernier PNJ garde d’exfiltrer la street medic et reste seul avec son témoin, confiant dans sa capacité à le défendre contre toute nouvelle tentative d’homicide (kelhôme).

L’attente anxieuse de notre héros n’est que de courte durée, un discret bruissement derrière lui annonçant l’arrivée d’une tierce personne, armée d’une arbalète et d’intentions bien peu charitables envers le garde du corps de von Diehl. La nouvelle venue se révèle être Natalia Zucharov, sœur d’Alexei Zucharov, ancien compagnon d’armes de Kumansky ayant accompagné ce dernier jusqu’à Erengrad puis sombré dans l’adoration des Dieux Sombres sur un malentendu (Star of Erengrad), et ayant été finalement exécuté par ses anciens alliés sur le chemin du retour (The Gifts of Tal Dur). Comme on peut s’y attendre, Natalia a un râtelier contre Stefan, qu’elle accuse d’avoir assassiné son frère de sang-froid.  C’est elle qui a ouvert le feu sur les survivants de l’embuscade à la sortie de la taverne, et fiché un carreau dans le buffet de von Diehl du fait de sa maîtrise toute relative de l’arbalète. Elle a une excuse cependant, étant d’abord une apprentie du Collège Gris, ce qui explique sa capacité à apparaître derrière les gens sans crier gare. Sentant qu’un affreux malentendu est sur le point de se produire, Kumansky arrive à convaincre Zucharov d’escorter von Diehl en lieu sûr, arguant qu’elle lui doit bien ça après avoir manqué de le tuer deux heures plus tôt. Natalia accepte et emmène Heinrich jusqu’à la maison de Bruno Hausmann, le comparse de Stefan, jurant de revenir un peu plus tard pour terminer son affaire.

Cette fois-ci totalement seul, Kumansky est enfin libre de faire son héros, en repoussant des hordes de… méchants (là encore, la description est succincte) sortant du sol de l’hospice. Vaincu par la multitude après un combat épique, il a la surprise 1) de se réveiller et 2) de faire face à Kessler, apparemment très pressé de savoir où se trouve von Diehl. Il ne faut pas longtemps à  Stefan pour se rendre compte que son commanditaire est passé de l’autre bord, et cherche le noble pour lui faire la peau. Résolu à endurer stoïquement toutes les tortures que son ravisseur ne manquera pas de lui faire subir, Stefan refuse crânement d’obtempérer, mais se fait sauver des poucettes par l’arrivée de von Diehl, qui s’est rendu aux hommes de Kessler sans soupçonner l’entourloupe. Tout est-il perdu pour la team Gentil ? Non ! Car von Diehl était en fait Natalia Zucharov dissimulé par un sort d’illusion, et dans la cohue qui suit son coming out, la paire réussit à se libérer, régler son compte à Kessler (qui malgré ses rodomontades de boss de fin de niveau, s’écroule à la première touche de sa hitbox) et s’échapper par la fenêtre et jusqu’à la sécurité de la maison de Bruno, malgré le vertige handicapant de la donzelle, rattrapé in extremis par un Kumansky toujours chevaleresque.

Ayant réussi à déjouer les manigances de Kessler, et confiant dans la protection apportée par un de leurs amis hauts placés pour mener à bien leur mission, nos héros se quittent presque bons amis, la promesse de Natalia de revenir honorer la dette de sang contractée par Stefan suite au meurtre de son frère apparaissant comme bien hypothétique (encore cinq pages et elle finissait dans son lit). Mais ceci est une autre histoire…

1 : Voir The Gifts of Tal Dur, et les trésors de motivation tirés par notre héros de la soirée picole promise par son frangin lors du combat final.

AVIS :

Se déroulant (probablement) après les événements couverts dans Taint of Evil, cette nouvelle s’avère être assez complexe dans son intrigue, aux manigances politiques de la haute société d’Altdorf venant se mêler la vengeance personnelle de cette brave Natalia, que McIntosh fait apparaître comme une cruche d’un bout à l’autre de son récit. Tireuse à l’arbalète médiocre, arcaniste peu sûre d’elle (de son propre aveu, le sort qui a sauvé Kumansky aurait pu tout aussi bien le tuer, et le sceau magique laissé sur la porte de la maison de Bruno a été brisé à son retour), combattante pathétique, sujette au vertige et aux phrases absconses, la sœur Zucharov tient plus de la damoiselle en détresse que de la traqueuse mortelle qu’elle était censée être. Il semble qu’il s’agisse d’une constante chez McIntosh (voir le rôle de faire-valoir de Katarina von Lucht dans The Gifts of Tal Dur), qui pour sa défense écrivait à une époque où le Women’s empowerment n’était pas encore un concept à la mode dans le monde de la fiction med-fan. De son côté, l’héroïquement héroïque Stefan Kumansky s’en tire comme d’habitude avec les honneurs, seul son manque absolu de personnalité et d’intérêt venant rebuter le lecteur.

La réalisation de McIntosh s’avère par moment assez fébrile, les scènes de combat par exemple souffrant de leur caractère générique, l’intrépide jeune premier faisant face à des rangées de goons assez mal définis, ce qui empêche de vraiment s’impliquer dans ses péripéties. La palme est remise aux… choses qui sortent des sous-sols de l’hospice de Shallya, dont on ne sait pas s’il s’agit de mutants, de démons ou de morts-vivants, qui les a convoqués et pourquoi elles n’ont pas mis Kumansky en pièces après que ce dernier ait perdu son dernier point de vie. Non pas qu’une autre issue eut été possible, mais comme Kessler n’est jamais vraiment présenté comme capable de s’attacher les services de ce genre de gros bras (sinon, il n’aurait pas été mis en échec par un sort de niveau 1, je gage) et que le fourbe Prévôt est le seul antagoniste présenté dans la nouvelle, il aurait été logique qu’il soit l’orchestrateur direct de l’attaque. Bref, l’exécution de ce Debt of Blood pêche sérieusement, et comme les personnages mis en scène par McIntosh ne présentent en eux-mêmes pas grand intérêt, on se rabattra de guerre lasse sur les quelques éléments fluff mis à disposition par l’auteur pour se convaincre de finir la lecture de ce nouvel épisode de Kumansky & Hausmann, les Starsky & Hutch du Vieux Monde.

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Boyz in the Hive – J. Green [NDA] – #23 :

INTRIGUE :

NDA_Boyz in the HiveLorsqu’il n’est pas occupé à recoudre des Gangers amochés dans son officine, le Doc Haze (déjà croisé dans ‘Firestarter’) se passionne pour des sujets de recherche fondamentale, et c’est tout à son honneur. Le sous-monde de Necromunda n’étant pas super bien desservi (les travaux de la Grande Ruche Primus ont quelques millénaires de retard), il est assez rare que le Doc puisse mettre les gants sur des sujets d’expérimentation n’étant pas des sumpkrocs grognons ou des milliasaurs affamés. C’est donc un grand jour pour la blouse (à peu près) blanche lorsqu’une capsule de stase contenant un Ork s’écrase à proximité de son laboratoire. Commandé par le Gouverneur Helmawr pour l’enrichissement de sa ménagerie personnelle, le peau-verte s’est fait repérer par ces rabat-joie d’Arbites pendant son transit, menant à son abandon sans cérémonie dans un terrain vague du sous-monde. Privé de son forever home à cause de la mesquine administration impériale, ce pauvre petit Xenos est maintenant livré à lui-même sur une planète inconnue et hostile, et c’est fort triste.

N’écoutant que son grand cœur (un peu) et son désir d’expérimenter sur un sujet à la résistance proverbiale (surtout), Haze embauche une vieille connaissance, le chasseur de primes et cosplayeur de Lee Van Cleef émérite, Nathan Creed, pour lui ramener la paisible créature, vivante de préférence. Alleché par les 400 crédits en jeu, le pistolero accepte ce contrat à haut risque et part sans tarder remonter la piste de destruction laissée par l’imposant Boï derrière lui.

Bien qu’il arrive trop tard pour empêcher sa proie de dévaster une champignonière (bien aidé il faut dire par la maladresse et la malchance des péquenots du coin, que l’on peut tenir responsable de l’incendie de leur ferme), Creed surprend l’Ork alors que ce dernier s’invite à un règlement de comptes entre Escher et Cawdor, et parvient à mettre les deux gangs en fuite par ses propres moyens (qui a dit que les peaux-vertes ne savaient pas viser ?). Dans la confusion, notre héros parvient à administrer une dose généreuse d’anasthésiant au colosse vert grâce au pistolet hypodermique que lui a remis son commanditaire, mais l’Ork ne se laisse pas abattre aussi facilement et il faudra finalement lui fracasser la moitié du crane avec un crochet de grue – après lui avoir troué la peau une demi-douzaine de fois, pour faire bonne mesure – pour enfin le mettre au tapis.

Ce n’est toutefois pas la fin des problèmes pour Haze et Creed, car l’indomptable Xenos se réveille d’une humeur massacrante dans le laboratoire du Doc, avant que ce dernier n’ait pu l’entraver de manière appropriée. Résultat des courses : un Serviteur sévèrement amoché, un intérieur complètement dévasté, et un sujet d’expérimentation cristallisé en désespoir de cause, Haze autorisant Creed à régler son compte à l’Ork furibard, constatant le manque de bonne volonté manifeste du peau-verte à servir de cobaye. Au final, il faudra un bain de nitrogène liquide suivi par une ultime balle dum dum aux effets proprement fracassants pour mettre fin aux ravages du géant vert. C’est bien dommage pour Doc Haze (qui doit en plus de ça passer à la caisse car Creed estime – à juste titre – avoir accompli sa part du marché), mais tout n’est pas perdu pour le scientifique timbré. En effet, l’Ork a eu le temps de libérer quelques spores à la surface de Necromunda pendant son bref mais inoubliable passage sur la planète, et la nouvelle se termine sur un Doc Haze ravi d’avoir localisé un coin à champignons des plus prometteurs…

AVIS :

Après avoir évoqué le sujet de l’importation illégale d’espèces invasives dans ‘Firestarter’, Jonathan Green concrétise son idée de mettre le blasé Nathan Creed aux prises avec un adversaire à sa mesure (voire franchement plus grand que lui) dans ce mensonger1Boyz in the Hive’. Pas grand-chose à se mettre sous la dent dans cette nouvelle de pure action, dont la longueur est directement corelée à la résistance proprement inhumaine de son antagoniste, qui encaisse avec une fortitude admirable les balles et les beignes qu’un Creed protégé par son duster en scenarium lui balance dans la tronche pendant des pages entières. On appréciera tout de même (peut-être) le retour de Doc Haze, un des seuls personnages secondaires récurrents de la série, et à travers lui, l’effort fait par Green pour créer une continuité dans ce qui était jusqu’alors qu’une collection d’aventures assez décousues2. Les amateurs de fluff apprecieront (peut-être) également l’explication fournie par l’auteur sur le système de reproduction des Orks. Après tout, s’il doit y avoir une autorité indiscutable sur ce sujet hautement polémique, c’est bien quelqu’un qui s’appelle Green !

1 : Il n’y a qu’un Ork (les spores ne comptent pas) au casting de cette nouvelle, alors que le titre parle de Boyz. Je m’attendais à ce que Green révèle que le spécimen introduit sur Necromunda ne soit qu’un membre d’un groupe plus conséquent (ce qui aurait été fendard), mais il n’en est rien au final.
2 : On peut ainsi établir une succession chronologique entre ‘Firestarter’, ‘Mama’s Boys’ et ‘Boyz in the Hive’.

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Ancestral Honour – G. Thorpe [WFB] – #23 :

INTRIGUE :

La vie de Grimli (oui oui, je sais… l’oliphant dans la pièce) ‘Blacktooth’ Skrundigor à Karaz A Karak est aussi sombre et désespérée que le surnom que notre nabot de héros se trimballe. Nain à tout faire dans une taverne fréquentée par des mineurs bruyants, ivrognes et rancuniers, Grimli a passé une décennie à se faire snober par la grande majorité des clients de son établissement, pour la simple et bonne raison qu’il descend d’une lignée maudite par le Haut Roi en personne il y a plusieurs millénaires de cela. Son arrière15 grand-père Okrinok a en effet commis la faute grave, lourde et impardonnable de fuir un combat contre les Grobis, laissant en plan la fille chérie du souverain se faire friser les tresses par les peaux vertes en furie. À défaut d’avoir pu être retrouvé pour passer en conseil de discipline à l’époque des faits, Okrinok a condamné sa famille sur dix-sept générations à devenir la lie, ou plutôt, le fond de fût, de la société naine, ce qui explique les problèmes de connexion dont Grimli souffre au quotidien1. Après un nouveau shift misérable, il décide cependant de rendre son tablier et de prêter le serment du Tueur, se disant qu’il aura au moins la chance de se faire quelques potes avant de probablement mourir dans de tragiques circonstances et un futur assez proche. Après tout, 200 ans à faire la plonge sans espérer le moindre pourboire, ça fait beaucoup.

Alors qu’il s’apprête à pénétrer dans le temple de Grimnir de la forteresse, il est arrêté par un Tueur blanchi sous le harnais et sa coloration au henné naturel, répondant au nom de Dammaz (rancune en Khazalide). Ce dernier semble lire dans les pensées du jeune Nain, et lui propose tout de go de partir avec lui visiter Karak Azgal, où il a quelque chose d’important à lui montrer, avant que Grimli ne devienne un rouquin assermenté. Cette destination n’est pas anodine, car c’est là qu’Okrinok s’est couvert d’opprobre en laissant ses employeurs (il était garde du corps physionomiste pour les Nains de la haute – un peu contradictoire, je sais) se faire découper en rondelles alors qu’ils visitaient les mines de la forteresse, juste avant la chute de cette dernière. N’ayant rien d’autre à faire et à l’abri du besoin pour quelques mois grâce à la rupture conventionnelle négociée avec son patron, Grimli accepte, et la paire part pour le Sud.

Cette randonnée sauvage en duo permet à notre héros, qui n’avait jamais tenu une arme auparavant, de s’aguerrir en chemin, jusqu’à être capable d’occire un Troll en solo, comme Dammaz lui apprend patiemment. Après des centaines de kilomètres avalés, et autant de Gobelins et de Skavens occis au passage, les compagnons de la baston finissent par arriver dans la place to be. Les mystérieux pouvoirs de la mémoire ancestrale des Nains se réveillent alors, permettant à Grimli de revivre en rêve le drame ayant sali le blason des Skrundigor il y a tant d’années…

Début spoiler…Et comme on pouvait s’y attendre, la réalité était un peu plus complexe que ce que le seul survivant de l’embuscade a raconté à son suzerain, lorsqu’il s’est réveillé parmi les cadavres mais n’a pas vu celui d’Okrinok dans le tas. La mort du Prince et de la Princesse qu’il avait juré de protéger a fait basculer l’acariâtre nabot dans une folie sanguinaire, le menant à charger droit devant lui pour tuer le plus de Grobis possible, sans se soucier du qu’en dira-t-on ni de la cohésion de son unité. Cette percée funèbre a été mal perçue par ses collègues, et en absence de VAR (la technologie ne sera inventée de que 379 ans plus tard), le mal était fait et la messe dite pour Okrinok.

Ce n’est toutefois pas la fin des révélations pour Grimli, car à son réveil, Dammaz l’entraîne jusque dans une caverne naturelle, où se trouve une stalagmite géante constituée des restes calcifiés et empilés de centaines de Gobelins. Au sommet, piétinant ses innombrables victimes, c’est le cadavre d’Okrinok, figé dans la mort et par la magie d’un Shamane commissionné par un Grand Chef sportif dans l’âme, qui attend depuis des siècles que la vérité éclate enfin à son sujet. Et ce n’est pas une pure spéculation de ma part, mais bien le dessein du défunt, qui s’est réincarné en Dammaz pour sauver les miches et les tifs de son ultime descendant. Il aurait certes pu le faire avant (les seize générations séparant Okrinok de Grimli doivent se retourner dans leurs tombes), mais un Nain ne se hâte pas, c’est bien connu. Avant de disparaître, et de laisser son petit fillot se dém*erder seul pour sortir d’une forteresse infestée de peaux vertes et d’hommes rats, Dammaz/Okrinrok indique à Grimli de ramener avec lui son marteau gravé de la rune majeure de Sur La Vie De Ma Mère, faisant que son porteur est automatiquement cru sur parole2, afin de prouver ses dires. L’honneur des Skrundigor est en enfin lavé, ce qui correspond au happy end ultime chez les Dawi à ce qu’il me semble. Grimli peut mourir tranquille, et on me souffle d’ailleurs dans l’oreillette qu’il y a de grandes chances pour que ça soit effectivement passé comme ça…Fin spoiler

1 : Il se serait appelé Bluetooth, ça aurait pas été la même, je gage.
2 : Je ne vois pas comment Grimli peut convaincre autrement ce vieux ronchon de Thorgrim de rayer une rancune de son bottin autrement.

AVIS :

Si on met de côté les petites maladresses d’un Thorpe encore novice dans l’écriture de nouvelles au moment de la publication de cet ‘Ancestral Honour’ (le clin d’œil tellement appuyé qu’il en devient pastiche au ‘Seigneur des Anneaux’, la décision arbitraire du héros de changer de vie deux minute après le début de l’histoire), cette soumission s’avère assez plaisante pour un amateur de background romancé nain. Thorpe est à son aise pour dépeindre cette société dans ses particularismes et ses paradoxes, et la description qu’il fait de la vie d’un paria déshonoré comme Grimli est particulièrement intéressante à mes yeux. On comprend ainsi tout le « jusqu’au boutisme » des Nains, dont la rigueur morale est telle qu’ils ne voient pas de problèmes à punir les leurs sur des générations pour le crime isolé d’un seul individu. L’auteur emploie également le mythe, très spécifique à cette faction, de l’ancêtre réincarné pour venger un affront à son honneur tellement grave qu’il ne peut pas trouver le repos dans l’au-delà. C’est une caractéristique fascinante en termes de lore et de potentiel narratif des Nains (on peut penser à Grombrindal et aux ancêtres de Belegar, mais cela apparaît également dans la nouvelle ‘The Dark Beneath the World’ de William King), qui n’a été que peu mise en avant dans le fluff des suppléments de jeu (pour autant que je le sache), et je suis content que Gav Thorpe l’ait intégré à son récit, même si de manière un peu téléphonée. Une soumission qui démontre surtout que Thorpe est capable de faire honneur à son statut quand il travaille sur un sujet qui lui plaît et l’inspire visiblement, alors qu’il peut à l’inverse sombrer dans la caricature la plus indéfendable si le cœur n’y est pas1. ‘Ancestral Honour’ n’est pas spectaculaire, mais très solide, comme les œuvres de la race qu’elle dépeint.

1 : Voir ‘Tybalt’s Quest’, également publié dans ‘Lords of Valour’ pour s’en convaincre.

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Business as Usual – G. McNeill [40K] – #24 :

INTRIGUE :

40K_Business as UsualTrois mois après la victoire de l’Imperium sur la Flotte Ruche Leviathan sur le monde de Tarsis Ultra, la vie a retrouvé un cours plus ou moins normal dans la capitale planétaire, Erebus (rien à voir avec l’affreux vieillard ridé et son couteau tout chelou). Pour Snowdog et son gang de trafiquants de drogue, cela signifie la reprise d’activités illicites dans la zone tampon séparant le sous-monde de cette cité ruchette1 et la banlieue mal famée où rôde une faune aussi sauvage que mortelle. Et je ne parle pas uniquement des essaims tyranides qui squattent l’endroit à la suite de la destruction de leur vaisseau mère. La nouvelle débute ainsi sur une rencontre business assez tendue entre notre héros peroxydé et trois de ses acolytes (Lex, Silver et Tigerlily), et une bande de Jackboys cherchant à écouler une grande quantité de Kalma, sorte d’ecstasy grimdark.

Bien que la came soit de qualité, comme le trip cosmique du brave Lex, ayant pris sur lui de goûter le produit, le révèle sans ambages, le sixième sens de Snowdog le titille méchamment. Il se doute que ses interlocuteurs vont essayer de la lui faire à l’envers, et lorsque les Jackboys dégainent leurs pétoires pour piquer les crédits durement gagnés du Malamut, ce dernier ne se laisse pas faire. L’échange de tirs entre les deux gangs finit par tourner en faveur de celui composé à 100% de personnages nommés (comme c’est étrange), mais attire également l’attention de la patrouille d’Arbites du Capitaine Jakob Gunderson. Ce dernier voue une détestation cordiale à Snowdog, coupable de l’impardonnable crime de vente de dope dans son périmètre, et n’est que trop heureux d’entraîner ses hommes sur les lieux de l’échauffourée après que quelques bribes d’échanges radio entre Jackboys lui aient permis de connaître l’identité de leur adversaire.

L’arrivée de cette troisième faction rebat les cartes, et scelle surtout le destin du pauvre Lex, utilisé par un Snowdog loyal sans excès envers ses hommes comme bouclier humain contre les balles à guidage laser de Gunderson. L’utilisation judicieuse d’un chapelet de grenades artisanales récupérées sur le cadavre d’un Jackboy permet toutefois aux trois survivants de se ménager une sortie explosive (et de tuer une grande partie des camarades de Gunderson, qui étaient pourtant à deux jours de la retraite), mais leur course effrénée les amène en territoire tyranide, ce qui n’est pas l’idée du siècle, et encore moins du millénaire. Rattrapés par les deux Arbites survivants alors qu’ils contemplaient les cadavres récurés de quelques gangers malheureux dans le boyau des égouts qu’ils avaient empruntés pour filer à l’anglaise, Snowdog, Silver et Tigerlily se retrouvent en mauvaise posture. Gendarmes et voleurs se réconcilient cependant en un éclair lorsqu’une horde d’Hormagaunts interrompt leur règlement de comptes, et les humains décident sagement de se carapater le plus loin possible de la menace Xenos, à plus forte raison lorsque le Guerrier Tyranide qui manage la horde chitineuse arrive à son tour pour profiter des calories faciles que représentent nos héros.

La poursuite tunnelière qui s’ensuit n’est pas sans causer quelques pertes déchirantes (dans tous les sens du terme) parmi les hominidés, le dernier collègue de Gunderson gagnant une séance d’acupuncture tyran(n)ique, avant que la pauvre Tigerlily n’aille rejoindre Peter Pan, Sanguinius et Geneviève de Fontenay dans le pays imaginaire. Lorsque l’affreuse bestiole assomme Gundy et met la griffe broyeuse sur la veste gifesque (c’est beau le 41ème millénaire tout de même) de Snowdog, la messe semble dite pour nos héros…

Début spoiler…C’était toutefois sans compter sur le pouvoir de l’amitié la foi la Force la DROOOOOOGUE. En désespoir de cause, Snowdog balance en effet sans s’en rendre compte la totalité du stock de Kalma piqué aux Jackboys dans le gosier du Guerrier, provoquant un KO technique suivi d’une overdose fatale en moins de vingt secondes. Magnanime, El Doggo décide d’épargner la vie de Gunderson au lieu de profiter de son piteux état pour lui faire passer la matraque énergétique à gauche, et les deux gangers survivants s’en repartent vers d’autres aventures. Ils ne savaient pas encore qu’ils vivaient sur du temps empruntéFin spoiler

: Tarsis Ultra n’était censé avoir que 60 millions d’habitants avant de se prendre un enchaînement fatal Tyranides-Iron Warriors dans la biosphère, ce qui est positivement clairsemé à l’aune des standards impériaux.

AVIS :

Graham McNeill n’a jamais (pour autant que je le sache et au moment où cette chronique est publiée) écrit pour Necromunda, mais les amateurs de ce monde-ruche si bucolique ne seront pas dépaysés par ce ‘Business as Usual’. Des gangs ennemis qui s’étripent pour de la dope dans des usines en ruines et des terrains vagues toxiques, avant qu’une escouade d’Arbites nommée bavure et quelques bestioles atrabilaires ne viennent se mêler aux réjouissances : on est ici en terrain connu (mais dangereux tout de même, relancez vos 1 si vous pouvez). À titre personnel, il n’y a pas grand-chose qui me fasse vibrer dans cette nouvelle qui ne détonne absolument pas du mètre étalon de la GW-Fiction, et qui a plutôt mal vieilli sur certains aspects, notamment l’argot utilisé par Snowdog et ses acolytes, qui sonne aujourd’hui terriblement daté. À chacun son sale goût.

Pour la petite histoire de cette petite histoire, ‘Business as Usual’ a en fait été écrite avant ‘Warriors of Ultramar’, dans laquelle Snowdog fait également une apparition au côté d’Uriel Ventris et des héroïques défenseurs de Tarsis Ultra, même si elle prend place après les événements relatés dans ce roman. Voilà de quoi briller en société, sans nul doute.

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Raptor Down – G. Thorpe [40K] – #24 :

INTRIGUE :

40K_Raptor DownNous retrouvons le Commandant Jacques Jaeger de l’escadron Raptor, après les évènements couverts dans Acceptable Losses, et la prise de fonction compliquée et sanglante de notre héros à l’occasion d’une bataille spatiale contre un Rok Ork. 18 mois plus tard, le Divine Justice, croiseur impérial auquel les Raptors sont rattachés, est passé à autre chose, et fait partie de la flotte d’invasion du système de Mearopyis, que l’Imperium cherche à reprendre aux Noctal après quelques millénaires d’atermoiements (saleté de bureaucratie). Ayant eu largement le temps de se familiariser avec son nouveau poste, de se faire accepter par ses hommes et de terroriser les nouvelles recrues venues remplacer les pertes subies au cours de  la campagne précédente, Jacques le Fataliste1 supervise les opérations de soutien du déploiement de la Garde Impériale au sol, qui consistent surtout à aller bombarder les cibles les plus juteuses à la surface de la planète capitale du système, tâche grandement facilitée par l’absence de chasseurs à capacité de projection spatiale dans le camp d’en face, ce qui permet aux Maraudeurs de frapper avec une impunité assez totale.

Chargés d’une nouvelle mission de démolition de l’infrastructure militaire locale, les escadrons Raptor et Storm, accompagnés  de leurs écrans de chasseurs (pour une fois qu’ils sont là, ces vole au flanc) quittent leur vaisseau mère pour ce qui ne semble être qu’une formalité pour ces pilotes aguerris. Malgré la tentative malheureuse d’interception de la part des Noctal, prestement contrecarrée par le professionnalisme et les gros flingues impériaux, tout semble baigner dans l’huile de moteur pour Jaeger et ses hommes, jusqu’à ce que ce dernier ait la malheureuse et déplorable idée de… prendre une initiative. Ahlàlà. Pour sa défense, son projet d’attaque d’une colonne blindée Noctal, repérée par l’esprit de la machine d’un missile2, et dont l’utilisation fourbe de la géographie locale avait permis d’échapper aux scanners de la flotte jusqu’ici, partait d’une bonne intention : protéger l’avance des bidasses de la Garde et les empêcher d’être pris en tenaille par les défenseurs. Malheureusement, les grands projets de canyoning de Jaeger, pour prometteurs qu’ils aient semblé sur le papier (en voilà une activité de team building qu’elle est bonne !), se trouvent rapidement et violemment contrariés par la puissance de feu des assaillis. Et même si Thorpe ne se donne pas vraiment la peine de décrire la manière dont les Noctal parviennent à dégommer l’invincible armada de manière aussi brutale, le résultat de l’accrochage n’est pas franchement en faveur des Impériaux. Bien que ces derniers aient pu larguer quelques missiles sur zone, le bilan est très lourd, et même Jaeger ne s’en sort pas indemne, son appareil étant lui aussi abattu en plein vol, forçant l’impulsif et inconstant Commandant3 à évacuer la carlingue en compagnie de ses hommes. Se réveillant avec une jambe cassée dans le désert de Mearopyis, Jacquou le Croqueur de feuille de match doit maintenant digérer les conséquences humaines et matérielles de son coup de sang : avec deux tiers de ses Maraudeurs et la moitié des Thunderhawks passés en perte et profit, le bilan est lourd pour Herr Jaeger. Cela en valait-il la peine ? C’est sur cette question lourde de sens que nous quittons notre héros, qui pourra attendre d’être secouru en dessinant des faucons. C’est ça d’être une buse.

AVIS :

Suite de l’acceptable Acceptable LossesRaptor Down donne l’occasion à Gav Thorpe de nous tenir au courant de l’évolution de carrière ce bon vieux commandant Jaeger, et met l’escadron de ce dernier aux prises avec un nouvel ennemi et sur un nouveau théâtre d’opérations. Après l’espace froid et mortel qui a vu les Raptors aller au casse-pipe contre un Rok, nous sommes donc témoins d’une excursion atmosphérique dans les déserts de Mearopyis, ce qui illustre bien la versatilité des Maraudeurs impériaux. Sur la forme, la nouvelle de Thorpe se révèle être d’un niveau sensiblement égal à ses œuvres « spatiales » précédentes, c’est-à-dire très correct. Si on peut critiquer la prose de notre homme à bien des égards, il faut lui reconnaître une capacité à dépeindre un engagement aéronautique/spatial de manière convaincante et intéressante, beaucoup mieux que la plupart de ses collègues en tout cas. Sa maîtrise des unités (tant spatiales4 que temporelles5) et des facteurs propres à ce type de combat, comme la vitesse et la direction du vent, ou le niveau de carburant et des munitions embarqués rendent la lecture des péripéties aériennes de l’escadron Raptor plutôt prenante. Thorpe fait même du zèle en intégrant en début de récit une retransmission d’un affrontement spatial entre la flotte impériale et son homologue Noctal, que le supérieur de Jaeger se  repasse en boucle comme d’autres matent un top 10 NBA. Petit plaisir coupable, que nous lui pardonnons sans mal puisque le résultat est là aussi assez qualitatif.

L’intrigue et la construction de Raptor Down, en revanche, s’avèrent être moins satisfaisantes. La première est une variation sans originalité du scenario d’Acceptable Losses (un escadron de Maraudeurs chargé d’une mission où rien ne se passe comme prévu), ce qui n’est en soit pas un gros problème puisque la possibilité de Thorpe d’innover sur le sujet est passablement limitée (un Maraudeur, ça maraude, poingue). Ce qui est moins acceptable à mes yeux est la manière dont l’auteur fait passer Jaeger de Mr Baillezeubouque à Dr Folamour en l’espace de deux paragraphes, le chef d’escadre précautionneux se muant en tête brûlée sans qu’aucun élément préalablement établi par Thorpe sur le caractère de son personnage ne puisse laisser augurer ce changement radical de tempérament. Autre point plutôt mal géré par le Gav, le raid des Maraudeurs sur la colonne blindée, torché en même pas une page, et qui tient plus du tir au pigeon que de l’attaque en rase-motte. Le fait qu’on ne voit même pas à qui les impériaux sont confrontés, ce qui ne permet pas de comprendre pourquoi ils se font ainsi décimer par un adversaire totalement à leur merci sur le papier (à moins que les Raptors aient eu la malchance de tomber sur un convoi DCA Noctal), annihile toute tension narrative, les (bol)os des as se faisant canarder (un comble pour des raptors6) en l’espace de quelques secondes. Finalement, la conclusion même de la nouvelle ne m’est pas apparue comme particulièrement maîtrisée, les états d’âme douloureux de Jaeger alors qu’il se retrouve isolé avec ses hommes en territoire ennemi, ne suscitant qu’un distrait « so what ? » chez votre serviteur. À titre personnel, je pense que Thorpe a laissé ainsi la porte ouverte à un nouvel épisode (à ma connaissance jamais écrit), et que cette fin n’en était en fait pas vraiment une. Pas de chance, cela n’a débouché sur rien, et la dernière image que le lecteur emportera du commandant Jaeger sera celle du matelot du radeau de la Méduse fixant l’horizon d’un œil torve, le menton dans la main. Ce qui n’est pas commun, avouons-le.

1 : Il reconnaît lui-même qu’il n’est jamais heureux. Sauf quand il vole. Et encore, il stresse tellement que j’ai du mal à voir quel plaisir il tire de l’expérience. Pauvre bonhomme.
2 : On peut remercier le Techno-Adepte Ferrix, l’homme qui murmurait à l’oreille des (AGM-119) Pingouins.
3 : Pour un gars qui avait passé la nouvelle à ressasser son amour des plans qui se déroulent sans accrocs et la nécessité de se conformer aux règles établies, surtout quand elles touchent à la Santé & Sécurité, décider de se la jouer berzerk à la première colonne blindée, c’est assez surprenant.
4 : Quand on est un pilote de Maraudeur, 150 kilomètres, c’est proche.
5 : Quand on est un pilote de Maraudeur, 3 minutes, c’est long.
6 : ‘Rapace’ en anglais. Rien à voir avec les dinosaures donc.

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Jahama’s Lesson – M. Farrer [WFB] – #24 :

INTRIGUE :

Jahama's LessonLe Seigneur Khreos Maledict a quitté sa cité de Karond Kar avec armes et bagages pour mener un raid sur les côtes bretonniennes. Pillard invétéré, il a laissé la fougue de sa jeunesse derrière lui et cherche désormais à remporter ses campagnes en évitant de passer par la case « bataille rangée ». C’est à cette fin qu’il a recruté la Matriarche Miharan Diamo, et surtout son protégé, l’assassin Jahama, pour mener une opération de diversion au cœur du château du Duc d’Argent, dont l’armée pourrait s’opposer à celle des Elfes Noirs. Maledict a aussi embarqué son neveu (Khrait), officiellement pour le former au métier, mais d’abord et surtout pour pouvoir débiter d’interminables et pompeux monologues sur son génie stratégique. Nos quatre personnages débarquent en avance des troupes druchii pour accompagner Jahama jusqu’à l’endroit où sa mission d’infiltration doit commencer. Après avoir reçu la bénédiction de sa tutrice, le tueur prend la clé des champs et se dirige vers la forteresse ennemie.

Sur le chemin les ramenant vers l’Arche Noire que le Dynaste a affrétée pour sa virée shopping ultramarine, Khreos et Miharan échangent quelques piques au sujet des qualités de l’assassin. Le noble se fait un plaisir de révéler à la Matriarche que son élève va se retrouver confronté à une opposition exceptionnelle, le Duc d’Argent étant une force de la nature au tableau de chasse impressionnant, sans parler de son entourage de chevaliers endurcis et de fidèles hommes d’armes. Supprimer le commandant bretonnien ne sera donc pas une partie de plaisir pour Jahama, dont c’est pourtant la mission. Miharan ne se montre cependant pas très inquiète, et commence à raconter à l’oncle et au neveu la dernière épreuve à laquelle Jahama a dû se soumettre pour gagner ses galons d’assassin. Hellebron étant cette année-là d’une humeur particulièrement massacrante (on suppose qu’elle était en rade d’anti-rides), la mégère avait défié les impétrants de pénétrer dans son manoir bourré de pièges, et de prendre à son assassin personnel, le redouté (autant qu’inconnu, mais c’est plutôt flatteur dans ce métier) Hakoer, son collier d’argent serti d’un rubis. Comme ledit Hakoer avait hérité de l’Epée de Mort de son employeuse le temps de l’épreuve pour en relever encore un peu la difficulté, les bookmakers de Har Ganeth avaient mis une côte stratosphérique sur la promotion Kermit1. Le trio remonte à bord et se sépare pour se préparer à l’assaut contre les humains avant que la Matriarche ait pu finir son histoire, laissant Khreos et Khrait dubitatifs sur la véracité de son récit.

De son côté, Jahama ne traîne pas en besogne, et parvient à se glisser à l’intérieur du château d’Argent alors qu’un banquet célébrant une campagne victorieuse contre une harde d’Hommes Bêtes en maraude bat son plein. Mais eu lieu de se rendre dans la chambre du Duc pour se cacher dans un placard pour le surprendre en pyjama, l’assassin préfère foutre un bordel monstre dans les festivités bretonniennes, et de façon tout à fait visible qui plus est. Après avoir suriné/fléchetté/garrotté/savaté une dizaine de convives et de serviteurs, l’alerte générale est donnée et le Druchii meurtrier se retrouve confronté à une horde d’adversaires compensant leur manque d’armure et leur alcoolémie élevée par les vertus du juste courroux et de la motivation implacable. Malgré ses talents de combattant et d’acrobate, Jahama finit par se retrouver en mauvaise posture, et le Duc d’Argent en personne se fraie un chemin jusqu’à lui pour le défier en duel, dans la plus pure tradition locale. Peu intéressé par la proposition, l’Elfe Noir se contente d’envoyer sa dernière dague de jet dans la poitrine d’une Demoiselle qui avait commis l’erreur de traîner dans le coin, avant de littéralement tirer sa révérence et de s’enfuir du château, poursuivi par une meute d’humains vengeurs.

Retour du côté Druchii, où l’armée de Maledict progresse sans se presser vers la forteresse d’Argent. Khreos révèle en aparté à son neveu qu’il a mis Jahama sur une mission suicide, dont le but était de désorganiser les Bretonniens plutôt que de tuer leur Duc, et qu’il a pour projet d’arranger un regrettable accident pour Miharan avant que l’expédition ne se termine, afin qu’elle ne puisse pas lui tenir rigueur de la mort de son pupille. Ces confidences sont toutefois interrompues par une clameur qui retentit à l’horizon, alors que les Elfes Noirs sont encore en ordre dispersé…

Début spoiler…C’est l’armée du Duc d’Argent qui s’est portée à leur rencontre, et qui roule sur les pillards comme un 4×4 sur un crapaud (gothique). Dans la mêlée qui s’ensuit, Khreos est mortellement blessé par l’ennemi, et tente péniblement de ramper hors du champ de bataille pour rejoindre le littoral et l’Arche Noire qui y est amarrée. Sa lente progression est stoppée par Jahama, qui lui révèle qu’il a « malencontreusement » laissé tomber la carte sur laquelle l’itinéraire des Elfes Noirs était indiqué au moment où il quittait le château du Duc. C’est vraiment ballot, mes plus confuses dude ! Il s’agissait pour lui de donner une leçon à un noble arrogant, qui prétendait utiliser le culte de Khaine comme de vulgaires mercenaires, et d’inculquer le respect de cette ignoble institution au reste des puissants de Naggaroth. Avant qu’il ne soit abandonné par Jahama, qui après tout a un bateau à prendre, Khreos a le temps de remarquer que le responsable de sa chute porte un collier d’argent où brille un rubis…Fin spoiler

1 : Les classes d’Assassins Elfes Noirs sont baptisés en honneur des marionnettes du Muppets Show. Nul ne sait d’où vient cette tradition.

AVIS :

Pour sa seule incursion recensée dans le Vieux Monde, Matthew Farrer signe une petite fable grinçante illustrant parfaitement le caractère impitoyable et retors de la société elfe noire, un genre d’histoire dont on peut difficilement se lasser, dès lors que la qualité est au rendez-vous, ce qui est ici le cas. De plus, il prolonge le plaisir en mettant en scène avec un luxe de détails et une vraisemblance rarement atteints (à ma connaissance) dans la GW-Fiction deux pans incontournables du fluff des Druchii : piller les côtes du Vieux Monde d’une part, et assassiner leurs rivaux d’autre part. Si les Elfes Noirs sont votre faction de cœur, ‘Jahama’s Lesson’ est un must read absolu, et tant pis pour Khreos Maledict.

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The Emperor’s Will – D. Charters [40K] – #24 :

INTRIGUE :

40K_The Emperor's WillSur le chemin de leur monde chapitral (Taran (!!!) III) après une croisade victorieuse s’étant étalée sur quinze années, les Storm Warriors sont chargés d’écraser la rébellion fomentée par le gouverneur de Tesra IV avant de pouvoir reprendre leur périple vers leur planète d’origine. Bien que disposant des forces nécessaires pour mener à bien cette mission (600 Space Marines tout de même), le maître de Chapitre Calan hésite à lancer un assaut en règle sur les bastions des sécessionnistes, sachant qu’une telle approche engendrerait inévitablement de lourdes pertes chez les loyalistes, déjà fortement éprouvés par les combats qu’ils ont dû mener au cours de leur périple galactique.

Après plusieurs jours de statu quo, la flotte impériale orbitant autour de Tesra IV sans esquisser la moindre attaque (au grand émoi du premier capitaine des Storm Warriors, une sombre brute du nom de Kortar1, ainsi que du contingent de Black Templars qui passait par là), le dilemme de Calan trouve une solution grâce à l’arrivée de l’Inquisiteur Adrijssen, qui propose un modus operandi à même de faire retourner la planète séditieuse dans l’ample giron de l’Imperium, et ce sans tirer un coup de feu. Enfin si, un coup de feu. Mais quel coup de feu…

1 : Qui doit ressembler à peu près à ça, à en juger par ses lignes de texte.

AVIS :

Un commandant Space Marines adepte de la diplomatie, cela est suffisamment rare pour être souligné. Cette idée originale ne suffit cependant pas à faire de The Emperor’s Will une lecture des plus intéressantes, tant David Charters déroule son propos avec maladresse. S’il est possible de passer l’éponge sur les approximations fluffiques qui parsèment son texte (le maître de Chapitre qui appelle ses guerriers « gentlemen », l’invention du grade de lieutenant Space Marine, une flotte impériale laissée « en garnison » d’un monde…) du fait des âges canoniques au cours desquels ce dernier a été écrit, il est en revanche beaucoup plus difficile de faire abstraction des pures aberrations narratives qui affligent The Emperor’s Will. Des vaisseaux spatiaux qui se déplacent en ligne1 ?  Un commandant dépeint comme circonspect et économe de la vie de ses hommes qui décide sur un coup de sang de protéger la descente d’un drop pod non identifié largué par un vaisseau suspect, et ce en ordonnant à ses croiseurs de descendre dans l’atmosphère de la planète pour servir de diversion aux stations de défense ennemie ? Un gouverneur traître à l’Imperium et entretenant des relations privilégiées avec des cultes chaotiques, auquel on redonne les clés du pouvoir après une simple tape sur les fesses et un regard lourd de reproche2 ? Allons mon petit David, sois sérieux deux minutes !

Au final, The Emperor’s Will se situe à mi-chemin entre les délires datés des contributeurs historiques de la BL et la fade conformité des nouveaux auteurs de cette auguste maison d’édition, et réussit l’exploit d’emprunter les aspects négatifs de chaque école sans bénéficier de leurs points forts. It’s something.

1 : Je mentionne cette atteinte aux lois de la physique, somme toute assez mineure et sans aucun impact sur le reste de la nouvelle, car il s’agit littéralement de la première phrase du texte. Il y a des incipits qui ne donnent pas envie de prendre la suite au sérieux.
2 : Et que dire de ce Vindicare trotro balèze, qui risque sa vie et celles de milliers d’autres lors de son déploiement (le péquin dans le drop pod, c’était lui !), escalade en solo une montagne réputée infranchissable pour atteindre une position de tir idéale, reste en joue pendant des jours sans bouger dans un froid glacial, puis réalise un headshot impeccable sur une cible située à plusieurs kilomètres de là… sauf qu’au lieu de faire exploser la tête du traître, notre tireur d’élite se contente de lui injecter une dose d’un poison mortel (le gouverneur a l’impression de s’être fait piquer par un insecte, c’est dire si la balle utilisée était légère – et donc stable en vol – ), afin que Calan, venu en diplomate, puisse marchander la soumission du grand vilain Ignatius en échange d’un antidote. Je suis le seul qui trouve chaque étape de ce plan plus débile et tarabiscotée que la précédente?

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Et voilà qui conclut cette revue de l’année 4 d’Inferno!, qui a été, on peut le reconnaître avec le recul de quelques décennies (ouch), très riche. Comme toujours, la qualité n’a pas toujours été au rendez-vous, mais le lecteur habitué de la GW-Fiction fera avec – il/elle en a vu d’autres. La suite au prochain épisode.

BLACK LIBRARY WEEKENDER ANTHOLOGY I [Recueil]

Bonjour et bienvenue dans cette revue de la Black Library Weekender Anthology I, autre recueil confidentiel que la BL a « rendu disponible » en 2012. La particularité de l’objet qui nous intéresse aujourd’hui, partagée avec son pendant qu’est la Black Library Weekender Anthology… II, est qu’il ne fut diffusé qu’à un endroit (le Nottingham Belfry hotel), et pendant une seule journée (le 3 novembre 2012), ce qui en fait l’un des livres les plus collector qui soient de toute la GW-Fiction. Comme vous vous en doutez avec un nom pareil, le but était bien évidemment de récompenser les fans ayant fait le déplacement jusqu’à cette contrée reculée que sont les East Midlands en leur permettant de mettre la main sur quelques nouvelles inédites. Et on peut reconnaître à la BL d’avoir fait les choses en grand, puisqu’un recueil différent fut proposé pendant chacune des deux journées de l’événement.

Black Library Weekender Anthology I.

Sur le modèle des Black Library Games Day Anthologies (chroniqué ici pour le millésime 2011/12, et pour le millésime 2012/13), les BLWA regroupent six courts formats, mélangeant l’Hérésie d’Horus, le 41ème millénaire et le Monde Qui Fut. Côté line up, le 6 rassemblé par les éditeurs de la BL pour cette première mi-temps est plutôt solide, avec un James Swallow en dernier défenseur hérétique, Smillie, French et Mitchell en milieux grimdark et McNeill et Josh Reynolds à la pointe de l’attaque med fan. Que dire de plus, à part Go Go Notts !  

Black Library Weekender Anthology I

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Lost Sons – J. Swallow |HH] :

INTRIGUE :

Lost SonsLes jours se suivent et se ressemblent sur Baal depuis que les Blood Angels sont tous partis châtier les Nephilim dans l’amas de Signus, comme demandé par Horus ‘Primes Inter Pares’ Lupercal à son frérot Sanguinius. Tous ? Non ! Comme l’addendum de l’ordre de mission l’autorisait, l’Ange a laissé une équipe de maintenance dans sa forteresse pour veiller au grain de sable en attendant son retour. Les 20 tondus ayant eu le grand honneur de rester à domicile patientent depuis plus de cinq ans dans le calme absolu de l’arrière-pays baalite, maintenant l’inflexible discipline et l’élégance vestimentaire qui ont fait la réputation des Blood Angels. Le chef de cette petite confrérie est le Chapelain Arkad, catapulté Gardien de Baal (c’est mieux que gardien de but) par Sanguinius avant son départ. Bien qu’habituellement calme, son sacerdoce l’a déjà amené à deux doigts de crozuser la goule de ses frères, lorsque certains d’eux ont cherché à abandonner leur poste pour partir à la recherche de leur famille perdue. Le déclenchement de la Tempête de la Ruine a en effet rendu toute communication avec la Légion angélique impossible, laissant nos plantons ressasser des idées plus noires que rouges sur le destin des Blood Angels.

A cela est venu s’ajouter les rumeurs, puis la confirmation officielle, de la trahison d’Horus et des massacres d’Isstvan et de Calth, et plus généralement d’une guerre civile de grande ampleur dans l’Imperium. Aussi, lorsqu’un vaisseau émerge du point de Mandeville du système de Baal et se dirige droit vers la forteresse quasi-déserte, c’est la méfiance qui domine chez Arkad et ses comparses. Il s’avère que le nouvel arrivé dispose de l’immunité diplomatique du 30ème millénaire, en cela qu’il est au service de Malcador le Sigilite, qui du haut de son poste de Régent de Terra, agit comme bon lui semble pendant que l’Empereur essaie désespérément d’isoler les combles de son Palais contre les courants d’air de Warp. Pingre comme jamais, le vioque a envoyé un unique émissaire, le Space Marine Tylos Rubio, ayant abandonné le bleu profond des Ultramarines pour le gris terne des Chevaliers Errants. Au moins, l’entretien est facile. Arkad et son copain Hezen sont atterrés de voir que leur visiteur est un Archiviste (Edit de Nikea, etc…), mais le sont bien davantage lorsque Rubio leur tend un parchemin avec accusé de réception annonçant la dissolution des Blood Angels. Gasp.

 La raison de cet acte administratif d’une brutalité sans nom est simple : considérant la 9ème Légion définitivement perdue du fait de la disparition pure et simple de l’amas de Signus, Malcador souhaite mettre la main sur les ressources considérables des Blood Angels en termes de matériel, d’armement et de glandes progénoïdes, afin de gérer au mieux son effort de guerre. Rien de personnel les gars, c’est que du business. Rubio informe toutefois ses hôtes que refuser d’obtempérer leur vaudra d’être déclarés traîtres à l’Imperium à leur tour, mais qu’il peut faire jouer ses relations pour leur trouver un poste à la MLCDR Corp, s’ils le souhaitent.

Cette décision unilatérale passe évidemment très mal chez les anges, aussi sanguins que leur blase le laisse présager. Après une réunion de famille houleuse, le Gardien s’en va porter la réponse du groupe à Rubio, qui patiente dans son véhicule de fonction en écoutant les Grosses Têtes : un non franc et massif. L’Archiviste s’attendait à ce refus de principe, et ne trouve rien à redire au projet des 20 derniers Blood Angels, qui ont repeint leur armure en noir pour l’occasion (parce qu’ils se considèrent comme faisant partie de la Compagnie de la Mort maintenant, wink wink) d’aller traquer Horus pour lui passer un savon1. Il est par contre beaucoup moins conciliant lorsque ses vis-à-vis refusent aussi d’ordonner à l’équipage de la petite flotte laissée par Sanguinius en orbite autour de Baal de coopérer à leur réaffectation prochaine. La tension monte soudainement d’un cran entre les cousins énergétiques.

Avant que Rubio n’ait pu commettre l’irréparable, comme crier « tu dépasses les bornes, Arkad ! » à son homologue, l’Astropathe local arrive en courant pour transmettre un message des plus urgents à ses patrons. Il s’agit d’une communication signée Raldoron, le premier Capitaine des Blood Angels, déclarant que Sanguinius est bien en vie et que la Légion perdure. Ce voicemail opportun, même s’il sonne le glas de l’Astropathe (ou peut-être est-ce son sprint de 300 mètres qui lui a été fatal), réjouit fortement Arkad et ses boys, et leur donne une opportunité en or pour renvoyer Rubio vers Terra avec la coiffe psychique entre les jambes. Ça ne s’est pas joué à grand-chose, mais les Blood Angels sont toujours officiellement dans la course, et il faudra compter sur eux pendant la seconde moitié de l’Hérésie.

1 : Enfin si, il trouve ça très con. Mais chacun ses fétiches hein.

AVIS :

James Swallow nous sert une nouvelle behind the scenes de l’Hérésie d’Horus, en se penchant sur les lignes trèèèès arrières d’une galaxie certes déchirée par la guerre, mais où un bon paquet de planètes sont tout de même loin du front. L’ironie de voir des Astartes se languir dans leur forteresse déserte et isolée pendant que tout le monde s’amuse sans eux rajoute du piment à cette histoire à la fois rafraichissante et intéressante d’un point de vue fluff. Un autre de ses points forts est de brouiller les lignes entre la position pragmatique à l’extrême de Malcador, et la fidélité romantique mais contre-productive des Blood Angels à leur Primarque : aucun de ces deux points de vue ne peut être considéré comme étant intrinsèquement supérieur à l’autre, et il revient au lecteur de décider dans quel camp il se retrouve le plus. Très sympathique.

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Know Thyself – A. Smillie |40K] :

INTRIGUE :

Know ThyselfLa nouvelle s’ouvre sur une description proprement marseillaise dans son exagération du vaisseau amiral des Flesh Tearers, ce bon vieux Victus, avec sa coque de céramite de plusieurs kilomètres d’épaisseur, et ses états de service l’ayant amené à effectuer un millier d’Exterminatus. Bien que très marrante pour tout le monde, sauf pour la crédibilité de l’auteur et de la nouvelle, cette introduction superlative n’a pas grand-chose à voir avec la suite de l’intrigue, et c’est donc à regret que nous continuons à l’intérieur de la mirifique barge de bataille, où nous retrouvons le Chapelain Appollus et le Champion de Compagnie Harahel. Les deux compères ont été envoyé par Gabriel Seth, le Maître des Flesh Tearers, accueillir un visiteur de marque : l’Inquisiteur Corvin Herrold. La mauvaise réputation et les agissements borderline des Flesh Tearers ont en effet fini par les rattraper, et à la suite d’un massacre sanglant et avec témoin commis sur une population civile pendant les Guerres de l’Eclipse, un signalement a été envoyé aux autorités compétentes par des lanceurs d’alerte bien intentionnés1.

Ne pouvant pas envoyer balader un Inquisiteur comme il fuit d’habitude ses responsabilités, Gaby consent à une entrevue, mais avec une mauvaise volonté oscillant entre le palpable et le quasi physique. Séparé de sa suite dès son débarquement sur le Victus, même pas autorisé à enregistrer la conversation avec Seth, et forcé à poireauter dans une salle sans chaise pendant que son hôte finit sa séance de pilates dans le Reclusiam, Corvin endure les mesquineries des Flesh Tearers avec flegme, jusqu’à ce que le Maître de Chapitre finisse enfin par passer la porte. N’étant pas en temps normal particulièrement empathique et conciliant, Seth se montre ici particulièrement abrupt, menaçant et péremptoire au cours de la conversation, déniant en bloc les accusations d’exactions pesant sur son Chapitre, molestant physiquement Corvin, puis lui donnant quinze minutes pour quitter le Victus, sous peine d’être renvoyé à ses chères études par macrocanon interposé…

Début spoiler…Cette confrontation n’était toutefois qu’une ruse destinée à permettre au véritable Corvin d’explorer le vaisseau des Flesh Tearers sans attirer l’attention. Déguisé en simple scribe de la suite inquisitoriale, Coco parvient à se glisser jusqu’au niveau où les Space Marines ayant succombé à la Rage Noire sont gardés en attendant une bataille digne de ce nom. Ayant dû en abattre un qui menaçait de lui sauter au cou après qu’il ait ouvert la porte de sa cellule pour documenter son investigation, l’Inquisiteur se prépare à repartir incognito vers la navette, mais est pris la main dans le sac par ce diable d’Appollus, qui avait vu clair dans son petit jeu. Assommé par le Chapelain à l’issue d’un duel très déséquilibré, Corvin se réveille attaché à une chaise, en compagnie de Seth, Appollus, de l’Archiviste Balthiel et d’un autre membre de la Compagnie de la Mort des Flesh Tearers, amené dans la salle d’interrogatoire à des fins pédagogiques. Voulant faire comprendre à son prisonnier à quel point la Rage Noire est dévorante, Seth ordonne à Balthiel de donner à l’Inquisiteur un aperçu de la psyché dévastée de Frère Gragraouh, une expérience douloureuse et débilitante pour ce fragile de Corvin, qui fait un burn out. Dans un accès de magnanimité aussi rare que stratégiquement stupide, Seth laisse toutefois repartir son visiteur, balancé sans ménagement dans sa navette avec les morceaux déchiquetés de ses serviteurs et gardes du corps. Il pensait peut-être donner une bonne leçon à l’Inquisition, mais s’il y a une constante dans l’univers de Warhammer 40.000, c’est que les Ordos ne sont pas de bons perdants…Fin spoiler

1 : Quand ce sont les Space Wolves, et leur rapport conflictuel avec les saints Ordos, qui te balancent à l’Inquisition, c’est que la boulette que tu as commise pourrait être qualifiée de planétoïde.

AVIS :

Nouvelle de pur remplissage, où l’on n’apprend strictement rien de nouveau sur les Flesh Tearers du 41ème millénaire qui n’ait été couvert précédemment1 (par Smillie ou par d’autres), ‘Know Thyself’ a pour elle le petit twist sympathique de la révélation de l’échange des rôles entre l’Inquisiteur et son grouillot, que je n’avais franchement pas vu venir. Je ne sais pas si c’est à mettre honnêtement au crédit d’Andy Smillie, car je pensais initialement que la couardise manifeste du pseudo Corvin devant les grognements de Seth se justifiait simplement par une nouvelle mauvaise interprétation du lore de 40K par l’auteur. C’est dire à quel point je rabaisse mes standards quand je lis sa prose. ‘Know Thyself’ peut à l’extrême limite être considérée comme un tournant majeur dans l’histoire contemporaine du Chapitre, car c’est là que commence le feud avec l’Inquisition (poursuivi dans ‘Blood in the Machine’), mais c’est faire beaucoup de cas de 13 pages très banales.

1 : Bon, si on veut vraiment chipoter, on (moi en tous cas) découvre que Manakel – un personnage Flesh Tearers ayant vécu au moment de la création du Chapitre – est devenu un Dreadnought. C’est peut-être couvert dans une autre nouvelle, mais je l’avais laissé en un seul morceau dans ‘Sons of Wrath’ et ‘Flesh of Cretacia’.

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Gods of Flesh and Blood – G. McNeill |WFB] :

INTRIGUE :

Immédiatement après les événements racontés dans ‘Let the Great Axe Fall’ (Sigmar & Alaric vs Krell, en résumé), l’Empereur Unberogen et ses guerriers survivants, toujours accompagné du Sorcier Bransùil, peinent dans un col enneigé à la suite de Rangers Nains de Karak Izor. Certains des compagnons de Sigmar ayant grand besoin de soin, à commencer par Gorseth, qui s’est pris un méchant coup de hache dans la clavicule, Alaric a fait jouer ses relations et sa réputation de grand fou génie pour obtenir un sauf conduit jusqu’au hall du Thane Egril Barazul, dont le but dans la vie semble être de ressembler le plus possible à Abraracourcix. À chacun ses hobbies.

Accueillis plus avec la main sur la hache que le cœur sur la main, les humains bénéficient tout de même de la médecine de pointe des Dawi, qui consiste en des lits trop petits et des bains d’eau glacée. Ça forge le caractère, parait-il. Un vénérable Nain du nom de Gromthi Okri, si vieux que même sa barbe a des rides, est toutefois dépêché auprès des hôtes de Barazul pour leur faire faire une visite guidée de la forteresse (sympa), et leur faire remarquer que Gorseth, malgré son obstination à ne pas périr, est condamné par la magie funeste de l’arme de son bourreau. Ce qui attend le jeune guerrier, c’est une éternité à arpenter les Voûtes Grises comme une âme peine, et rien ne pourra conjurer ce triste sort.

Avant que Gromthi ait eu le temps de dégainer son terminal carte bleue pour faire payer ses bons services aux Unberogens éplorés (rien n’est gratuit chez les Nains), Bransùil s’inscrit en faux du diagnostic du nabot cacochyme, prenant pour exemple Sigmar lui-même. L’Empereur n’a-t-il été secouru par son propre père de cet endroit maudit lorsqu’il s’y était perdu, lors de son adolescence ? C’est donc la preuve qu’il est encore possible de ramener Gorseth dans le monde des vivants, pour peu que Sigmar accepte d’y retourner, bien sûr. Ne pouvant pas laisser un guerrier ayant donné sa vie pour lui dans la hess, Ziggy relève le défi et se retrouve propulsé dans les limbes Warhammeriennes grâce aux compétences chamaniques de Bransùil.

Malgré la présence de son fidèle Ghal Maraz, très efficace dans le bannissement des esprits maudits qui errent dans la pénombre perpétuelle des Voûtes, Sigmar se retrouve rapidement à la peine, après avoir tout aussi rapidement retrouvé l’âme de Gorseth, qui luttait vaillamment (et sans arme OP, elle) depuis plusieurs jours contre les assauts des habitants spectraux de cette terre maudite. Le nombre infini des ennemis s’abattant sur les deux combattants, et le manque de réactivité de Bransùil à ramener ses alliés du bon côté de la barrière (il était sans doute parti se brosser les dents à ce moment), mènent le puissant guerrier à tomber à genoux et à lâcher son maillet magique au terme d’un dur combat. Serait-ce la fin pour l’infortuné Sigmar ?

Début spoiler…Bien sûr que non (vous n’y avez pas cru vous-mêmes, avouez-le). Car surgit soudainement de la brume le légendaire Nain Blanc, toujours là pour tirer ses copains de l’embarras. Quelques moulinets de hache runique plus tard, tous les esprits funestes dans un rayon de cinquante mètres se sont fait fumés (ou sont partis en fumée, c’est selon), ne laissant que nos trois compères sur le champ de bataille. Après avoir dûment remercié Grombrindal pour son intervention salutaire, et lui avoir promis de lui rendre la pareille lorsque le temps sera venu, Sigmar a toutefois la douleur de constater que c’en est fini pour Gorseth, qui a définitivement rejoint le monde des esprits et ne pourra plus revenir chez les vivants. Toutefois, le serviable Nain Blanc accepte de guider l’âme du nouvellement défunt jusqu’à un endroit plus recommandable que ces sinistres Voûtes, et Sigmar peut refaire surface auprès de ses guerriers pour leur raconter cette aventure peu commune (et enterrer le cadavre de Gorseth aussi, tant qu’à faire).Fin spoiler

AVIS :

Graham McNeill donne une troisième mi-temps au match contre Krell dans ce ‘Gods of Flesh and Blood1, ce qui est assez drôle si on considère qu’il avait déjà coupé cette nouvelle en deux lors de sa publication initiale dans Hammer & Bolter. A ce compte-là, une troisième partie n’aurait surpris personne et la séparation entre ‘Let the Great Axe Fall’ et cette nouvelle apparaît donc comme très artificielle.

Ces considérations séquentielles mises à part, on est en présence d’une petite nouvelle assez sympathique, pour trois raisons principales. Premièrement, des infos fluff sur Karak Izor, forteresse d’importance pour les Nains mais assez peu couverte dans la GW-Fiction jusqu’ici. Deuxièmement, la participation d’un personnage nommé des plus charismatiques, ce qui est tout à fait dans la veine super friends exploitée par McNeill sur cette série. Troisièmement et pour terminer, une conclusion bien plus intéressante que ce à quoi je m’attendais de prime abord, démontrant que même l’intervention de figures quasi-divines ne suffit pas toujours à obtenir un happy ending. Sans doute la meilleure partie de cette « trilogie ».

1 : Titre assez classe mais que je ne m’explique pas vraiment… Je veux bien qu’il y ait plusieurs « Dieux » au casting, mais un seul d’entre eux peut être considéré comme de chair et de sang.

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Crucible – J. French |40K] :

INTRIGUE :

CrucibleSi le travail en équipe est notre lot quotidien, mammifères sociaux que nous sommes, il n’en reste pas moins que pour certaines missions, il est préférable d’agir en autonomie. Ce n’est pas le Frère Istafel de la 7ème Fraternité des Chevaliers Gris qui dira le contraire, ni ses supérieurs d’ailleurs. Envoyé en solitaire aborder l’épave du Crucible, un vaisseau impérial détruit alors que son moteur Warp était en surchauffe, Istafel est chargé d’une authentique mission suicide comme son Chapitre d’adoption aime en donner à ses membres de temps à autre : botter les fesses d’un puissant démon en train de reprendre pied dans le Materium avant qu’il ne soit en mesure de nuire à l’Imperium.

Si notre héros doit se taper ce sale boulot en solitaire, c’est qu’il s’agissait du seul moyen de s’assurer que ce soit bien ce démon qui s’incarne sur le Crucible. En effet, le complexe système de Némésis et de karma cosmique auquel les résidents de l’Immaterium sont assujettis obligeait le Duc du Changement dont il est question ici (et qu’on appellera Obu pour des raisons de simplicité) à se manifester si le Chevalier Gris portant le « bon » nom, et uniquement lui, se présentait devant la faille Warp. Il faut s’imaginer une longue file de Démons Majeurs patientant pour revenir dans notre dimension avec leur petit ticket à la main, et le Duc Obu griller la politesse à tous ses camarades en caquetant « Heeeeey mais c’est my maaaaaaaaaaaan Istafel !!! », un peu comme lorsqu’on se fraie un chemin vers le premier rang d’un concert parce qu’un pote s’y trouve déjà (sérieusement, ne faîtes pas ça). Tout est possible dans le Warp, et c’est très drôle beau je trouve.

Si la perspective d’être envoyé se petit-suissider pour maximiser les chances de renvoyer le pauvre Obu patienter encore un millénaire sur le banc de touche trouble Istafel, ce fier parangon de noblesse et de dévouement n’en montre rien. Après avoir monté et démonté quatre fois de suite son armure et ses armes pendant le transit jusqu’au Crucible, et apposé les 777 sceaux de pureté réglementaires sur sa panoplie guerrière1 (il doit ressembler à Harry Tuttle à la fin de sa vie, truth be told), Istafel prend le chemin du Crucible et de sa destinée.

Sur place, il (et nous par la même occasion) a droit à un affrontement assez « classique » contre les forces démoniaques, se déroulant en grande partie dans son esprit et au cours duquel il a l’occasion de hallebarder – c’est comme poignarder, mais avec une hallebarde – quelques démons mineurs trop entreprenants, ainsi que le tout premier Spite-Revenant de l’histoire de Games Workshop (trois ans avant la sortie d’Age of Sigmar, c’est très fort). Après ce round d’échauffement, le combat contre Obu peut enfin commencer… et tout se passe comme prévu. C’est-à-dire que le pauvre Istafel se fait méchamment corriger, mais parvient tout de même à lier son âme à celle de sa proie, ce qui a pour effet de les bannir tous les deux (me demandez pas comment par contre). On remarquera juste qu’il est étrange que le Chevalier Gris ait attendu d’être à moitié mort pour dire les mots magiques et ainsi remporter la victoire morale et psychique, s’il n’avait que ça à faire pour gagner le match. Peut-être avait il des penchants masochistes, qui sait.

La nouvelle se termine avec une notification astrale envoyée au triumvirat d’officiers ayant envoyé Istafel saluer le Duc Obu. Après avoir observé une milliseconde de silence en l’honneur de leur frère disparu, ils ajoutent son nom à la loooooongue liste des morts glorieux de la Fraternité, qu’ils doivent régulièrement réciter en tant que responsables du devoir de mémoire. C’est la moindre des choses.

1 : Ce qui est assez mal avisé quand on doit se battre contre un démon de Tzeentch, et pas de Nurgle. Mais je suppose qu’il n’y avait plus de place.

AVIS :

John French prend un concept (assez sympa, il faut le dire) du fluff des Grey Knights et en fait une nouvelle de 13 pages. Sur le papier, et vu le pedigree de cet auteur, l’idée parait bonne mais on se retrouve au final avec 10 pages de baston, deux pages et demie de préparation à ladite baston, un quart de page de conclusion, et un quart de page de révélation un tant soit peu sympathique. Le ratio est, vous le reconnaitrez, assez famélique. On peut se consoler en se disant qu’une nouvelle de Grey Knights que l’on oubliera aussitôt après l’avoir terminé, c’est finalement tout à fait dans l’esprit de ce Chapitre des plus secrets, mais pour être honnête, j’aurais préféré lire quelque chose d’un peu plus mémorable.

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Berthold’s Beard – J. Reynolds |WFB] :

INTRIGUE :

Berthold's BeardDe passage à Wolfenburg, Gotrek et Felix acceptent l’offre d’Aldrich Berthold, dernier héritier connu de l’illustre famille du même nom, de l’escorter jusqu’à une bâtisse en ruines située au milieu des Montagnes du Milieu. La raison de ce périple en territoire Homme Bête est simple : pour prouver aux notaires qui préservent les intérêts des Berthold qu’il est le digne descendant du patriarche Bollin Berthold, et ainsi obtenir accès aux capitaux familiaux, Aldrich doit ramener une boucle de la barbe de son aïeul, enterré sous les fondations de sa demeure. Comme cette dernière a été abandonnée lorsque les hardes du Seigneur des Bêtes Gorthor1 ont ravagé le Nord de l’Empire, ce pèlerinage capillaire est loin d’être une partie de plaisir, et, bien que la tradition veuille que les Berthold accomplissent l’aller-retour en solitaire, l’épidémie de morts suspectes ayant frappé les autres héritiers de la dynastie au cours des derniers mois a convaincu Aldrich qu’un peu d’aide ne lui ferait pas de mal. On n’est jamais trop prudent.

Arrivé devant les décombres du Hall Etoilé (le nom du manoir), durement marqué par le passage des années, le trio se fait attaquer par une petite bande d’Hommes Bêtes squattant les ruines, et dont Gotrek et Felix se débarrassent sans beaucoup de difficultés. La nuit s’apprêtant à tomber, les aventuriers décident qu’il est plus prudent de bivouaquer dans les ruines, et de repartir le lendemain, une fois la preuve poilue prélevée sur le corps de papi Bollin. Ça tombe bien, les Hommes Bêtes avaient fait un feu au rez de chaussée, et il n’est pas encore éteint. Wait… depuis quand les Hommes Bêtes savent-ils faire du feu2 ?

Début spoiler…Il y a donc anguille, ou plutôt épi, sous roche, mais les manifestations troublantes ne commencent qu’un peu plus tard, lorsque Felix voit quelque chose remuer dans les ténèbres (Gotrek à ce moment là était en train de fixer le feu d’un air absent, sans doute en proie à des PTSD sévères et non traités). À l’inspection, il s’avère qu’il s’agit de sortes de tentacules noirs, qui s’emparent des cadavres des Hommes Bêtes pour les faire attaquer nos héros, comme des pantins manipulés par des fils. C’est le moment où Aldrich décide qu’il aimerait bien un peu d’intimité, et menace ses protecteurs avec un pistolet, leur intimant de partir sans tarder. Gotrek étant trop occupé à castagner les revenants, c’est à Felix que revient la lourde mais nécessaire tâche de tirer les choses au clair avec son commanditaire, qui dissimulait de noirs et très improbables secrets. Accrochez-vous.

Il s’avère que le Hall Etoilé a été construit dans le cratère d’une météorite de malepierre, et cette influence maligne a transformé Bollin Berthold en monstre difforme, que ses enfants ont emmuré vivant dans la crypte familiale avant d’aller s’installer à Wolfenburg. Maintenu en vie par cette source d’énergie aussi puissante que dangereuse qu’est la malepierre brute, Bollin a continué à croître en beauté pilosité dans son antre, se hissant au rang de divinité mineure pour les Hommes Bêtes des environs, qui lui sacrifièrent des victimes de temps à autre. Pater familias dans l’âme, Bollin ne s’attaqua jamais aux descendants qui vinrent lui tirer les moustaches à chaque nouvelle génération, faisant de son existence un secret honteux que les Berthold devaient assumer pour toucher leur héritage. Toutefois, Aldrich avait d’autres plans pour ce dernier, et après avoir orchestré la mort de tous ses cousins mieux placés que lui dans l’ordre de succession, a bien l’intention de s’établir à Marienburg sous un nom d’emprunt, mettant un terme à cette belle tradition.

Son erreur, autre que de menacer de mort deux personnages protégés par une armure de scenarium plus solide que la parole d’un Nain s’entend, fut de révéler son plan à haute voix pendant qu’il tenait Felix en joue, provoquant la fureur de Bollin, dont c’étaient – tenez-vous bien – les poils qui animaient les cadavres. On n’appelle pas ça des dreadlocks pour rien. Fou de rage, le patriarche (guère plus qu’une tête géante chevelue et barbue, à ce stade avancé) crève le plancher et dévore son rejeton ingrat, sous les yeux horrifiés de Felix et du lecteur. Ce crime ne restera pas impuni, Gotrek dégainant son coupe chou pour offrir une taille gratuite à ce monstre très particulier, avant de mettre feu à son abondante tignasse, provoquant la mort définitive du coriace Bollin. Une conclusion au poil, on peut le reconnaître.Fin spoiler

1 : Dont la fin a été racontée par le même Josh Reynolds dans l’un de ses premiers textes pour la Black Library, ‘The Gods Demand’. La boucle est bouclée.
2 : C’est une vraie question posée par Reynolds, et c’est un peu fâcheux car aussi bien les anciens Livres d’Armée que les nouvelles figurines montrent que les Hommes Bêtes, pour bestiaux qu’ils soient, maîtrisent cette technologie.

AVIS :

Je pense que Josh Reynolds devait s’ennuyer au moment d’écrire cette histoire de Gotrek & Felix (et comme il avait déjà écrit deux romans et deux nouvelles pour le duo à ce moment, cela peut se comprendre), et a décidé de troller un peu ses éditeurs de la Black Library. Le boss final de cette petite aventure est en effet tellement WTF que je peine à croire que le très professionnel et calé en fluff Reynolds n’avait pas un message subliminal à faire passer à ses patrons et aux lecteurs de ce ‘Berthold’s Beard1. Si vous êtes un fan hardcore du petit rouquin teigneux, cette nouvelle est donc incontournable car qui pourrait passer à côté de ce Hairslayer totalement échevelé, et de la Némésis la plus étrange que Gotrek ait eu à corriger de toute sa longue et distinguée carrière ? Dans tous les autres cas, vous pouvez faire l’impasse sur cette histoire absurde, qui tombe, oserais-je le dire, comme un cheveu sur la soupe.

1 : La BL a tellement aimé le concept que ‘Berthold’s Beard a été mis au sommaire de la Black Library Weekender Anthology I, ce qui peut être considéré comme une consécration.

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The Smallest Detail – S. Mitchell |40K] :

INTRIGUE :

The Smallest DetailÀ la recherche de petits extras pour égayer l’ordinaire de son cher Commissaire Cain, le brave Jurgen a pris sur lui de visiter les entrepôts de la milice de Helengon, monde banal sur lequel la Garde a été déployée pour écraser une insurrection l’étant tout autant. Usant de la considérable influence de son supérieur pour impressionner le responsable de l’entrepôt, un certain Sergent Merser, l’homme à tout faire du Héros de l’Imperium déambule longuement entre les travées et les étagères, emplissant sa musette des spécialités culinaires locales les plus appétissantes, à commencer par un saucisson d’anguille de sable tout simplement comestible, ce qui est déjà plus que ce que la majorité des rations du Ministorum peuvent revendiquer. Ces emplettes complétées, Jurgen se dirige tranquillement vers la sortie du site, mais remarque rapidement qu’il a été pris en filature par des amateurs, ce qui ne le trouble pas outre mesure1. Et en effet, l’embuscade dans laquelle il prend soin de tomber, et qu’il déjoue grâce à son entraînement et équipement supérieur, n’aurait pas cassé trois pattes à une Sentinelle. Seul petit problème, l’échange de tirs entre notre héros et son dernier adversaire a eu pour effet de déclencher un incendie (c’est ça que de s’abriter derrière des fûts de prométhéum), rendant l’identification des assaillants de Jurgen difficile.

Rejoint par la Prévôte Liana, qui se trouve en charge de l’enquête de cette tentative d’assassinat caractérisé, et par le Sergent Merser, qui accepte de jeter un œil sur les inventaires des autres entrepôts de la milice pour tenter de comprendre comment les tueurs en (im)puissance ont réussi à trouver uniformes et fusil laser2, Jurgen accepte de coopérer à l’investigation, mais seulement jusqu’au moment où il devra rentrer au camp pour préparer le jambon-purée de Cain. Très étrangement, l’étude des documents officiels ne donne rien, les inventaires inspectés par Merser étant trop mal tenus pour détecter des absences ou surplus de matériel (contrairement aux siens, d’une impeccable et implacable précision). Le dossier menaçant de piétiner, Jurgen prend congé, indiquant à ses comparses son intention de rentrer au bercail à pied, comme il est venu…

Début spoiler…Sauf qu’il était en fait venu en moto (une Salamander n’étant pas pratique dans une ville pas encore en ruines, et donc pleine de feux rouges, de livreurs Deliveroo et de petites mamies en déambulateur), et qu’il a fait exprès de mettre Merser sur une fausse piste, car il se doutait de la participation du Sergent dans la conspiration le visant. Aussi, lorsqu’il le voit sortir en courant de l’entrepôt quelques minutes après lui et sauter dans une camionnette qui part à fond de train pour rattraper le piéton qui n’en était pas un, Jurgen prévient Liana et se met en filature de la taupe, qu’il rattrape et immobilise au premier carrefour venu. Finalement, il s’avère que toute cette affaire n’a été qu’un énorme et regrettable (pour Merser, et plus encore pour ses complices) malentendu, le Sergent faisant partie d’un gang détournant de la nourriture pour la revendre à prix d’or sur le marché noir. Persuadé que Jurgen allait le dénoncer auprès de Cain (ce que l’aide de camp n’avait pas du tout l’intention de faire, car comme il le reconnaît lui-même, tout le monde fait ça), Merser a tenté de réduire le Valhallan odoriférant au silence, avec des résultats médiocres. Ironie de l’histoire, ce sont ses inventaires trop parfaits qui ont mis la puce à l’oreille de Jurgen, qui, en tant que Garde vétéran, sait bien que ce genre de documents sont par nature inexacts. Encore une fois, le mieux a été l’ennemi du bien !Fin spoiler

1 : Quand on est un vétéran ayant combattu les Tyranides et les Necrons à plusieurs reprises, plus grand-chose ne vous excite.
2 : L’absence de -s est volontaire, car sur les trois assaillants, un seul était convenablement armé.

AVIS :

Si cette petite nouvelle mettant à l’honneur le fidèle sidekick de Ciaphas Cain plutôt que ce dernier1 se laisse lire sans problème, et permet au lecteur non familier de l’approche particulière que Sandy Mitchell a du grimdark de découvrir cette dernière, je m’interroge sur la pertinence de l’intégrer dans un recueil dédié aux icônes de la GW-Fiction, dont Jurgen ne fait définitivement pas partie. Ce ne sont pourtant pas les courts formats où Cain tient la vedette qui manquent, et qui auraient à mes yeux bien mieux fait l’affaire ici. Je suis également un peu déçu que le titre équivoque de l’histoire n’ait au final débouché sur rien dans le dénouement de l’intrigue. Mitchell nous montre en effet Jurgen prendre en note mentale le nom d’un parfait inconnu, parce qu’on ne sait jamais, ça peut servir… sauf que ça n’a servi à rien ici. Le fusil de laser de Tchekov, ça te dit quelque chose ? Bref, ‘The Smallest Detail’ est loin d’être la meilleure, ni la plus adaptée, des nouvelles de Ciaphas Cain que l’on puisse parcourir, et je recommanderai donc au lecteur de retenter sa chance avec une autre soumission pour prendre la véritable mesure du Héros de l’Imperium.

1 : Ce n’est pas le premier texte de ce type, l’hyper court format ‘A Mug of Recaff’ étant également centré sur Jurgen.

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Et voilà qui termine cette revue de la Black Library Weekender Anthology I, qui n’a pas envoyé beaucoup de rêve, je dois dire. Espérons que le volume II soit autrement plus captivant.

BLACK LIBRARY GAMES DAY ANTHOLOGY 2011/12 [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue imprévue de la Black Library Games Day Anthology 2011/12. Pourquoi « imprévue » ? Eh bien, parce que je n’étais seulement pas au courant de l’existence de ce petit recueil (6 nouvelles) il y a quelques jours. Il aura fallu un enchainement assez improbable de circonstances, de pages et de liens du Lexicanum pour me faire découvrir cet obscur opus, publié par la Black Library pour distribution exclusive lors des Games Days (anglophones j’imagine) des années 2011 et 2012. Comme on peut le voir sur la couverture, Nottingham s’enorgueillit d’un tirage limité à 3.000 exemplaires1, rendant l’acquisition de cette curiosité compliquée il y a une décennie, et à la limite de l’impossible à l’heure actuelle. Fort heureusement, les histoires mis au sommaire de la BLDGA1112 (c’est peut-être pas mieux, mais c’est plus court) ont été republiées depuis cette époque héroïque, rendant sa critique par procuration possible.

Black Library Games Day Anthology 2011_12

Vous avez peut-être suivi ma tentative de retracer le contenu des Summer of Readings de la Black Library au cours des dernières semaines (c’est ). Cette tâche étant désormais accomplie du mieux de mes capacités, je cherchais un nouvel objectif littéraire, si possible varié en termes de franchises abordées (je ne me sens pas de m’enquiller un recueil pur 40K/AoS/WFB/HH pour le moment) : la découverte de cette série – car oui, il y en a d’autres – s’est donc produit à un moment très opportun.

Si on se penche sur la BLDGA1112, on constate qu’il s’agit d’un pur produit de présentation de la gamme couverte par la Black Library à l’époque, un modèle qui sera repris par la suite pour les recueils Black Library Celebration. On a ainsi droit à une nouvelle de l’Hérésie d’Horus (plus tard intégrée à ‘Shadows of Treachery’), deux nouvelles Warhammer Fantasy Battle (ça faisait longtemps…) et trois nouvelles Warhammer 40.0002. Du côté des contributeurs, du classique et de l’éprouvé : McNeill, Wraight, Thorpe, Chambers, Werner et Kyme. On sentait que la BL voulait faire bonne impression. A-t-elle réussi ? On va voir ça.  

1 : Et 1.000 en format numérique. Si si. Games Workshop n’avait pas encore compris internet en 2011 (pas sûr qu’ils l’aient compris aujourd’hui, c’est vrai)
2 : Dont ‘Emperor’s Deliverance’, que je pensais être un pur inédit au moment où je l’ai découverte dans l’ultime numéro de Hammer & Bolter, mais j’ai maintenant un gros doute… Ça n’a rien changé pour moi au final, mais j’aurais été un peu marri d’avoir payé un numéro qui ne contenait pas que de nouveautés.

Black Library Games Day Anthology 2011_2012

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Death of a Silversmith – G. McNeill [HH] :

INTRIGUE :

Death of a SilversmithDans ses quartiers du Vengeful Spirit, un vieux Commémorateur, spécialisé en orfèvrerie, se débat futilement contre la mort qui approche. Sa trachée a en effet été écrasée par un de ses clients quelques minutes auparavant, pas parce que ce dernier était mécontent de son travail, mais plutôt parce qu’il ne souhaitait pas laisser de témoins de sa commande (on suppose qu’il a pris les tickets de caisse avec lui également). Avant d’apprendre le pourquoi du comment de cette tragique histoire, notre héros agonisant passe en revue les étapes les plus marquantes de sa longue vie, qui l’ont mené depuis le sol de Terra jusqu’à la moquette du Vengeful Spirit.

Destiné depuis son plus jeune âge aux travaux manuels, dans la droite ligne de son grand-père, également orfèvre, notre homme (que nous appellerons Bobby, parce que pourquoi pas) a eu la chance de commencer sa carrière à la fin des guerres d’Unification, et dans une région du monde déjà sous la coupe de Pépé, ce qui lui a permis d’éviter de se manger une botte de Guerrier Tonnerre dans le ventre, ou de voir sa cité rasée jusqu’aux fondations par les armées conquérantes de l’Empereur, ce qui est un plus pour assurer une continuité de l’activité professionnelle. Son talent lui permit en outre de travailler pour les grands de ce monde, confectionnant d’exquis bijoux, gardes d’épée, stylos, ou encore reliquaires, comme celui réalisé pour un Général ayant été récompensé de ses loyaux services par un bout de bannière Iron Hands, remise par le Primarque1 en personne, qui n’avait plus de cash sur lui à ce moment là.

De fil en aiguille, et sa réputation ne cessant de croître, Bobby fut approché par un vieux monsieur à l’épaisse crinière blanche, qui souhaitait le recruter pour son projet d’artistes couvrant la future Grande Croisade de l’Empereur. Après avoir poliment décliné l’offre du noble vieillard, qui lui remit malgré tout une enveloppe avant de partir, Bobby finit par accepter l’offre de Malcador (car c’était lui), sans doute convaincu par les menaces de mort et les dessins suggestifs que contenaient le pli. Il faut ce qu’il faut. Bref, voici notre orfèvre en route pour le Palais Impérial, et de là, pour le Vengeful Spirit d’Horus2 et des Luna Wolves. Le début de deux siècles de péripéties galactiques, de rencontres marquantes (coucou Ignace Karkasy) et de réalisations grandioses, dont certaines commandées par d’illustres clients. Ce fut le cas d’Hastur Sejanus, qui tenait à faire réaliser des chevalières pour les membres du Mournival, mais qui oublia d’aller chercher les bagouzes une fois ces dernières confectionnées. L’ultime réalisation de Bobby fut cependant réalisée pour un Légionnaire patibulaire, qui souhaitait obtenir un moule pour tirer des médailles représentant un loup et une lune. Travail facile pour notre héros, qui plia l’affaire en deux-deux, et se retrouva pris au dépourvu lorsque son client lui broya le larynx en guise de paiement, le laissant suffoquer sur le sol comme un poisson hors de l’eau, justifiant son acte par un cryptique « J’peux pas dire » à l’oreille de sa victime, avant de repartir.

Même si Bobby finit par être secouru par Sejanus, qui dans son empressement écrasera par mégarde l’anneau réalisé pour lui par ce dernier sous sa semelle énergétique – présageant le triste destin de ce membre du Mournival – il est trop tard pour le vieil orfèvre, qui n’aura que le temps de souffler la réplique assassine de Serghar Targost (car c’était lui) à son sauveteur. Mais que fait la Miviludes ?

1 : Ce qui voudrait dire que Ferrus Manus a combattu pendant les guerres d’Unification… ou que McNeill a sauté depuis le haut de la troisième corde sur le fluff de la Grande Croisade. Au choix.
2 : Ce qui voudrait dire qu’Horus avait déjà rejoint son Père avant le début de la Grande Croisade… ou que McNeill… (voir ci-dessus).

AVIS :

Petite nouvelle d’ambiance, sans aucune conséquence sur l’histoire avec un grand H de l’Hérésie, mais apportant une nouvelle perspective sur quelques uns des personnages et événements clés du début de cette dernière, Death of a Silversmith1 est à réserver aux inconditionnels de McNeill, qui trouve encore le moyen de se balancer un petit clin d’œil (mention de la dernière église de Terra, au-delà du « pont argenté », que l’Empereur a faite détruire…) mais surtout celui de massacrer le fluff en convoquant des Primarques dans son récit de façon totalement anachronique. Et on ne peut même pas l’excuser en mettant en avant la date d’écriture de cette nouvelle, car cette dernière date du début des années 2010, époque à laquelle l’Hérésie comptait déjà une bonne dizaine d’ouvrages, dont plusieurs écrits de la main du Mac. Ce gros et indigne fail est un peu rattrapé par le suspens que l’auteur laisse planer sur l’identité du tueur, que de petits indices permettront toutefois au lecteur attentif d’identifier sans trop de difficultés. On apprend également que les Loges n’étaient pas à la fête même avant Davin, ou en tout cas tenaient plus à leur confidentialité qu’à la vie d’un pauvre civil innocent. Pas de quoi réécrire l’histoire de l’Hérésie, mais intéressant tout de même.

1 : Je me demande encore aujourd’hui si ce titre est un hommage aux Kinks ou aux Smiths.

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The March of Doom – C. Wraight [WFB] :

INTRIGUE :

Meet Mathilde. Mathilde a été pendant une bonne partie de sa vie la femme d’un forgeron, et la mère de neuf enfants, quelque part dans le Middenheim profond. Après que son village se soit retrouvé sur la trajectoire d’une harde d’Hommes Bêtes décidés à faire du vilain, Mathilde est devenue la veuve d’un forgeron, et la mère de neuf enfants morts dans d’atroces souffrances. Comme on peut aisément le concevoir, l’expérience n’a pas été facile, et les premiers temps du deuil ont été difficiles (surtout la partie où il a fallu s’enfuir seule dans la forêt pour échapper aux bêtes chaotiques). Mais dans son épreuve, Mathilde a eu la chance de faire une belle rencontre : un homme bon, sincère et passionné, qui lui a donné confiance en elle, une marque de comète sur le front et un hachoir rouillé. Cet homme, c’est Luthor Huss, et maintenant Mathilde vit sa meilleure vie avec ses copains Flagellants, alors qu’ils accompagnent Huss dans la purge d’un bout de la Drakwald. Mathilde n’a pas mangé depuis trois jours, dort à même le sol et empeste comme une charogne, mais Mathilde est reconnaissante. Be more like Mathilde.

Après une première bataille brillamment boueusement remportée contre quelques centaines d’Hommes Bêtes stationnés sur un terre-plein, pendant laquelle Mathilde démontre la fortitude de sa foi et Luthor celle de sa force (car il est vraiment très fort, il arrive à manier son arme lourde à une main quand ça l’arrange), on en apprend plus sur le but de cette croisade de pénitents, ou procession funeste. Deux semaines plus tôt, Huss avait plaidé sa cause auprès du Margrave de Kohlsdorf, un gros plein de soupe confiant en l’épaisseur de ses murs et guère emballé par l’idée du Prêtre Guerrier d’aller faire quelques prélèvements de gros gibier à l’extérieur des murailles de la ville, quand bien même les hameaux alentours tombaient les uns après les autres sous les coups des pillards bestiaux. Révolté par le manque de foi (compensé par une abondance de foie, il faut dire) de son interlocuteur – Bors von Aachen – Huss prit l’affaire en main et partit avec son embryon d’armée botter quelques croupes poilues dans l’arrière-pays. Bien que les conditions soient éprouvantes et la biodiversité franchement hostile, les vertueux et pouilleux croisés se révélèrent digne de Sigmar et firent place nette devant eux. Continuellement renforcés par les réfugiés des communautés détruites par leur ennemi, les Flagellants prirent finalement le chemin du retour vers Kohlsdorf, tous les rapports indiquant que le bourg serait la prochaine cible de la harde principale.

À leur arrivée, la partie est déjà pliée pour les défenseurs impériaux, dépassés par la furie sanguinaire de leurs adversaires. Après avoir attendu vingt longues minutes en contemplant la ville suppliciée, pour savourer le seum immense du Magrave indélicat sans doute, Huss ordonne à ses fidèles de chasser le bétail enragé de Kohlsdorf, ce qui ne se fait pas sans violence, vous pouvez me croire. À la pointe des combats, le Prophète de Sigmar mène l’assaut sur le temple de son Dieu, seul édifice encore défendu par les citadins, et tue en combat singulier le Seigneur des Bêtes commandant la harde, provoquant la retraite de cette dernière. Malheureusement, Mathilde n’est pas aussi chanceuse que son idole et compte parmi les morts glorieux de la journée, causant une vague de tristesse et de fierté dans l’âme de notre inflexible héros à la vue de son cadavre bien amoché, mais entouré d’ennemis. Cette communion post mortem est hélas interrompue de la pire des façons…

Début spoiler…Par une tentative de corruption de la part de cet incapable de Bors von Aachen, qui est prêt à récompenser Huss pour son intervention, mais seulement avec des espèces sonnantes et trébuchantes. Le bougre trouve de plus le moyen de fouler au pied le corps de la pauvre Mathilde en faisant sa proposition mal venue, ce qui met l’incorruptible mais soupe au lait prêtre d’humeur massacrante. Plutôt que de lui enfoncer la tête dans les épaules d’un coup de marteau, comme sa nature profonde le lui conseillait, Huss opte pour une solution plus magnanime : recruter von Aachen dans la procession funeste, de gré ou de force. Première étape : un marquage au fer rouge sur le front. Ça pique un peu au début, mais comme le dit Luthor le Breton à son futur collègue, la gloire, elle, est éternelle (comme la cicatrice)…Fin spoiler

AVIS :

Très bonne soumission de la part de Chris Wraight, qui donne ses lettres de noblesse à deux symboles impériaux rarement croisé jusqu’alors dans les pages de la GW-Fiction : Luthor Huss et les Flagellants. ‘The March Doom’ nous plonge de manière viscérale dans le quotidien pour le moins intense d’une croisade de zélotes, confrontée à un ennemi à peine plus bestial et sauvage qu’eux, et le destin tragique de Mathilde, pauvre mère au foyer transformée en virago écumante et moins facile à effrayer qu’un Space Marine, s’avère un choix narratif payant pour Wraight. Huss de son côté se révèle égal à lui-même : un guerrier austère et formidable, dont l’humanité est réelle mais distordue par son crédo sigmarite pour le moins radical. Sur cette trame solide, l’auteur plaque quelques scènes de bataille très honnêtes et une conclusion satisfaisante (même si pas très surprenante) : c’est un sans faute en ce qui me concerne, et une lecture que je recommande à tous les fans de l’Empire.

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The Curse of Shaa-Dom – G. Thorpe [40K] :

INTRIGUE :

The Curse of Shaa-DomGav Thorpe nous propose ici une histoire en deux actes, ce qui est ambitieux pour une nouvelle de 14 pages, mais on (enfin vous, moi c’est fait) jugera sur pièce. Dans la première partie de la nouvelle, on suit le Prophète Blanc Beige1 Elemenath dans l’accomplissement d’une corvée que lui ont filé ses collègues plus expérimentés : rapporter une relique teintée par le Chaos, le Scarabée de Jade de Neimenh, jusqu’à la fameuse Bibliothèque Interdite, où elle sera étudiée et détruite par les meilleurs experts en la matière. Il est accompagné par un quatuor de mercenaires, les Rangers Anithei et Khai-lian, le Corsaire Syllion et le pilote Zain Jalir (à ne pas confondre avec Jain Zar, bien sûr).

Après un voyage sans encombre à travers la Toile, la petite troupe arrive devant le portail de la Bibliothèque, attend qu’on vienne lui ouvrir, remet le colis soigneusement emballé dans son caisson anti-psy, et… repart. On ne parle pas assez des trains qui arrivent à l’heure, ou des remises de Colissimo où le livreur fait vraiment l’effort de sonner, c’est vrai. Entracte.

Sur le chemin du retour vers le vaisseau, Anithei entend soudainement une sorte de chant plaintif qui s’élève de la paroi de la Toile. Les autres non, mais je suppose qu’ils sont plus âgés et ont perdu l’audition des fréquences élevées. Une rapide inspection des lieux permet de localiser le cadavre d’une Druchii morte depuis longtemps, quelques dégâts dans la structure de la galerie de Toile à proximité de la défunte (comme un dégât des eaux, mais c’est le Warp qui dégouline des murs), et c’est tout. Enfin presque. Grâce à son ouïe affutée, Anithei est attirée jusqu’à une gemme de la taille de son poing, d’où semble provenir la mélopée entêtante. Sans trop savoir pourquoi, elle la range dans sa besace sans que les autres, trop occupés à remplir le formulaire de constatation des dommages, ne le remarquent, ou du moins le pense-t-elle.

On ne dupe en effet pas si facilement un Prophète Blanc, même junior, dont la spécialité est de détecter et de contrôler le Chaos. Elemenath sollicite donc un tête à tête avec la Ranger une fois tout ce petit monde rentré au vaisseau, afin qu’elle lui permette d’examiner sa trouvaille. Seulement, n’est pas Gandalf qui veut et sa demande désintéressée cause une réaction violente chez Anithei, déjà tombée sous la coupe de son présssssieux. Elle fracasse le crâne d’œuf du Prophète d’un coup de gemme dans la tempe, avant de se faire trancher la gorge quelques instants plus tard par Syllion, lui aussi brainwashé par le bibelot maléfique. De fil en aiguille et de meurtre en meurtre, c’est Zain Jalir qui hérite de la gemme après la mort du reste de la bande. On apprend alors que le pilote était en fait un Eldar Noir sous couverture, œuvrant à la reconquête de la cité engloutie (dans le Warp) de Shaa-Dom. Par un heureux hasard, la gemme est une clé permettant d’accéder aux ruines de cette métropole, et Zain Jalir se voit déjà monter une expédition grâce aux espèces sonnantes et trébuchantes que vont lui rapporter la vente des pierres des âmes de ses défunts camarades…

Début spoiler…Malheureusement pour lui, son choix d’utiliser des petites routes de la Toile pour rentrer à Commoragh au lieu des canaux principaux pour ne pas attirer l’attention va lui être fatal. Son chemin croise en effet celui d’une meute d’Ur-ghuls, qui décident de se faire un bon gueuleton aux dépends du pauvre ZJ. Abandonnée parmi les reliefs de ce repas sanglant, la clé de Shaa-Dom attendra encore un peu d’être ramassée par un porteur digne d’elle…Fin spoiler

1 : Il est novice (et donc pas encore tout à fait blanc), et l’appellation « prophète gris » est déjà prise.

AVIS :

J’ai la tenace impression qu’une évaluation impartiale de ‘The Curse of Shaa-Dom’ ne peut être faite que par un lecteur s’étant enquillé les deux trilogies Aeldari (‘Path of the Eldar’ et ‘Path of the Dark Eldar’) commises par Gav Thorpe et Andy Chambers dans leur jeune temps, tant l’histoire qui narrée ici semble compléter un ou plusieurs arcs de plus grande envergure. Et, devinez quoi ? Je ne n’ai ni le temps ni l’envie de m’atteler à cette tâche, aussi il faudra faire sans.

On se retrouve donc confronté à une histoire assez banale d’objet maléfique provoquant la mort de ses porteurs successifs en attisant chez eux leurs pires sentiments, à peine inspirée par un livre obscur commençant par « L » et se terminant par « e Seigneur des Anneaux » (vous êtes pardonnés si vous ne connaissez pas, après tout cette nouvelle ne date que de 2011). D’une manière étrange, cette histoire est imbriquée dans une autre histoire assez banale d’objet maléfique, provoquant la mort de ses porteurs successifs en attirant sur eux le courroux de nobles mais pragmatiques gardiens1. Nuance. Si vous vous dîtes que c’est étrange d’avoir doublé le quota d’artefact néfaste dans une nouvelle de moins de 15 pages, rassurez-vous, Gav Thorpe aussi. Ça ne sauve pas ‘The Curse…’ du ridicule mais au moins, c’est marrant.

Finalement, la seule qualité indéniable de ce texte est son apport généreux en fluff Eldar, et notamment le voyage qu’il nous offre jusqu’à la mythique Bibliothèque Interdite, qui a tout de même donné son nom à la maison d’édition de Nottingham. Pour le reste, c’est soit très quelconque, soit très parcellaire (pour ne pas dire cryptique) : je ne considère pas que cette lecture soit des plus essentielles.

1 : L’un de ces objets disparaîtra pour toujours de la GW-Fiction après cette courte mise en lumière, et l’autre a peut-être un discret retour dans un roman obscur de la BL.

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The Treasures of Biel-Tanigh – A. Chambers [40K] :

INTRIGUE :

The Treasures of Biel-TanighL’Archon Yllithian a décidé, en son insondable sagesse et/ou son incommensurable ennui, de récupérer une relique gardée sous clé dans un des endroits les plus secrets de la galaxie : la Bibliothèque Interdite (Biel-Tanigh en langue locale). Comme regarder les gangs rivaux lui ayant juré allégeance s’étriper pour lui montrer qui a la plus grosse (fidélité) lui prend tout son temps, il charge deux de ses sbires, les jumeaux Vyriadh et Xyril, de la sale besogne. Après leur avoir donné des indications d’une précision absolue1, Yllithian retourne comater devant l’Intervilles de Commoragh, et les twins se mettent en chasse.

Les quelques pages qui sont nécessaires à couvrir la distance entre le palais de l’Archon et l’entrée du campus de Biel-Tanigh permettent à Chambers de nous apprendre que les jumeaux, développés à partir d’une seule cellule par un Haemoncule, jouissent d’une symbiose tellement forte qu’ils sont capables de communiquer télépathiquement, ce qui serait très pratique si ce n’était pas interdit sur Commoragh, comme toute forme de gaminerie psychique d’ailleurs. En contrepartie de ce don inutil(isabl)e, la mort de l’un causera un tel choc à l’autre qu’il est possible qu’il meure de catatonie quelques heures ou jours plus tard. Comme on dit chez les Araignées Spectrales : « de grands pouvoirs entraînent de grandes responsabilités, mais toi t’as vraiment pas eu de chance mon lapin » (ça rend beaucoup mieux en runes eldar, je vous assure). Retenez ça, il est probable que l’auteur ait voulu nous préparer à quelque chose de manière subeuh-tileuh. Ah, et tout aussi subeuh-tileuh-mengue, Chambers nous glisse que ses héros ont le super pouvoir de détecter les objets chargés d’énergie psychique à distance (ça s’appelle la psychométrie), ce qui est pratique pour éviter de perdre du temps à explorer le moindre recoin d’une sous-dimension de l’espace-temps à la recherche du galet commandé par Yllithian. Il a vraiment pensé à tout2.

Vyriadh et Xyril finissent par arriver sur les lieux du casse, et les ennuis commencent pour les Lannister aux oreilles pointues. Des ennemis aussi terribles que du lierre, un Guerrier Fantôme, un projecteur, du lierre, une tour à escalader (en évitant le lierre), des mono-filaments très coupants, sans oublier du lierre, se dressent en effet sur leur route, mais les jumeaux triomphent de toutes ces embuches pour arriver pile au bon endroit, comme les grands professionnels qu’ils sont. Mais au moment où Xyril s’empare de la relique convoitée par son boss, un quatuor d’Arlequins (je crois) se manifeste pour lui demander de s’arrêter, comme le légendaire Ay-dew’Aar Bhalad’Uhr en son temps. Sans surprise, les cambrioleurs refusent de s’exécuter, et une fusillade s’engage entre les étagères de bouquins et les armoires à trophées. Sans surprise non plus, la pierre ramassée par Xyril possède sa volonté propre (celle des milliers d’habitants de la cité de Shaa-Dom, engloutie par le Warp il y a fort longtemps), et ordonne à sa nouvelle « propriétaire » de se carapater en vitesse, laissant derrière elle le pauvre Vyriadh se sacrifier pour la cause.

Traumatisée par la perte de son âme sœur et handicapée par l’interdiction qu’elle a reçue de lâcher la pierre, ne serait-ce que pour la mettre dans sa poche3, Xyril parvient malgré tout à sortir de la Bibliothèque Interdite et à retourner dans la Toile, mais meurt (de chagrin, sans doute) avant d’être revenue à Commoragh, abandonnant la relique dans un coin paumé du périphérique aeldari. Alerté du décès, et plus grave encore, de l’échec de ses nervis par sa montre connectée, Yllithian s’autorise un profond soupir d’énervement avant de commander la petite sœur (même si dans ce cas, le pluriel serait plus adapté) à son Haemoncule personnel, Syiin. La persistance – des autres, hein, fôpadékoné non plus – c’est la clé de la clé.

1 : « Alors vous allez à l’endroit là où le fleuve rencontre une espèce de terrain vague immense, et il y aura un portail caché quelque part qui vous emmènera jusqu’à Biel-Tanigh. Là, vous vous démerdez pour me trouver une pierre de la taille d’un poing, avec peut-être des points de lumière qui apparaissent à sa surface (mais c’est pas sûr et de toute façon, on s’en fout). Ah et faîtes gaffe parce qu’il y aura des gardiens. J’ai vraiment trop la flemme de vous expliquer qui ils sont, mais si vous les croisez, vous êtes morts. Voilà, bisous. »
2 : Sauf peut-être au fait que la grande majorité des reliques de la Bibliothèque Interdite sont des chargés psychiquement, d’une manière ou d’une autre…
3 : Une consigne que la relique ne donnera plus à ses porteurs dans la nouvelle ‘The Curse of Shaa-Dom’ (Gav Thorpe), qui suit celle-ci. Si même un caillou peut apprendre de ses erreurs, il y a de l’espoir pour vous.

AVIS :

On sent qu’Andy Chambers ne s’est pas donné beaucoup de mal sur ce coup-là, mais comme il est probable que ‘The Treasures of Biel-Tanigh’ n’a été écrit que pour figurer dans un recueil introductif tiré à quelques milliers d’exemplaires1, et dont l’un des buts était de faire vendre la trilogie ‘Path of the Dark Eldar’ (où Yllithian joue le premier rôle), cette attitude je m’en foutiste peut se comprendre. Cela ne rend pas la lecture de cette nouvelle vraiment bâclée agréable pour autant, mais comme Chambers n’en a pas fait des caisses et plie les gaules avant la barrière psychologique des 15 pages, je ne crierai pas au scandale, d’autant plus que la première partie du récit contient quelques ajouts de fluff sur Commoragh que j’ai trouvé intéressants.

1 : Pour vous donner une idée du niveau d’amateurisme de la démarche, l’histoire qui se déroule juste après ‘The Treasures…’ a été placée avant cette dernière dans le recueil. C’est du grand art.

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Plague Priest – C. L. Werner [WFB] :

INTRIGUE :

Plague PriestDans la vie, tout est affaire de préparation. C’est vrai pour réussir à faire une tarte aux pommes ou à passer son bac, mais aussi pour lancer une épidémie qui ravagera la plus grande nation du Monde Connu, l’Empire. Il n’est donc pas étonnant que les Skavens, responsables de cette (future) calamité, peaufinent leur approche en réalisant quelques tests grandeur nature sur des villages témoins. Dans le rôle du superviseur aussi attentif que discret, on retrouve l’affable Skritsch, bras droit et rat à tout faire du Seigneur Nashqik du Clan Filch. Son maître lui a confié la mission de glisser quelques sacs de céréales préparés par ses nouveaux alliés du Clan Pestilens dans la cargaison destinée au Baron von Greitz, qui règne en maître sur le village Morberg et ses environs. Bien que ni les serfs chargés de convoyer les sacs jusqu’à l’entrepôt seigneurial, ni les gardes en faction à l’entrée de Morberg, ne soient du genre à effectuer des contrôles du chargement (un manque de motivation qui peut coûter cher quand un ennemi invisible est prêt à utiliser des armes bactériologiques contre vous), cette opération bien montée se trouve mise en échec par la vigilance d’une sœur de Shallya, Kathryn, dont l’odorat plus développé que la moyenne et/ou les pouvoirs surnaturels lui permettent de repérer le sac de grain empoisonné avant qu’il ne soit déchargé.

Ironie de l’histoire, ce n’est pas l’autorité naturelle de la prêtresse ni la prière de dépistage/imposition des mains qu’elle réalise qui convainc le bailli du Baron de détruire la cargaison avariée, mais un accroc bien placé dans la tunique d’un des deux portefaix, révélant à la populace que ce dernier est porteur d’une variante de peste bubonique. Il n’y a pas à dire, l’Empire du XIIème siècle était vraiment très macho. Homme pratique et radical, le bailli décide de purifier par les flammes le grain et ses livreurs, ignorant leurs protestations d’innocence et les appels à la compassion de la brave Kathryn, qui a décidemment du mal à faire entendre sa voix. Bien que le spectacle d’un autodafé lui réjouisse le cœur, Skritsch doit se rendre à l’évidence : l’opération est un échec, et c’est à lui que revient la tâche peu enviable d’apprendre la nouvelle à Nashqik.

De retour dans le Gouffre de Slashcratch, quartier terrier général du Clan Filch, l’espion à moustaches est surpris par le manque de peps dans la démarche des compatriotes Skavens qu’il croise dans les galeries. Son flair affûté et sa paranoïa naturelle ne mettent pas longtemps à lui faire réaliser que les membres du Clan ont été contaminés par le même mal que celui que la petite délégation du Prêtre de la Peste Puskab Foulfur, émissaire spécial du Clan Pestilens, a concocté pour les habitants de la surface. Ce n’est évidemment pas ce qui avait été prévu dans le pacte conclu entre les deux puissances mineures (à l’époque), et Skritsch réalise rapidement que cette information pourrait lui permettre de rester dans les bonnes grâces de son patron, si elle véridique bien sûr. Le fouineur décide donc d’aller jeter un œil sur les activités des dévots ratons, installés dans une ancienne nurserie désaffectée (mais loin d’être désinfectée).

Sans surprise, les soupçons de Skritsch se révèlent fondés. Il est témoin de la contamination du grain destiné au Clan Filch par des scalps humains infestés de puces porteuses de bacille pesteux, crime monstrueux que Puskab a dissimulé aux nez sensibles de ses hôtes par l’usage généreux de… parfum (sans doute le fameux Numéro 13 de Rannel). Si le but de cette traîtrise reste mystérieux à notre héros, il ne fait aucun doute que Nashqik doit en être prévenu afin de prendre les mesures qui s’imposent. Malheureusement pour Skritsch, Puskab dispose de pouvoirs cachés, au premier rang desquels une vision inf🐀rouge, qui lui permet de repérer l’espion alors qu’il était planqué dans un tunnel d’aération, et une conju🐀ion de friabilité du sol, qui fait s’effondrer la paroi de la planque de l’infiltré. Skritsch ne manque toutefois pas de répondant, et parvient à se frayer un chemin dans les rangs dépenaillés et pas très coordonnés des Moines de la Peste que Puskab lance à ses trousses. Sorti de ce mauvais pas, il n’a plus qu’à filer porter la funeste nouvelle au Seigneur du Clan, et à le laisser déchainer sa fureur sur ses traîtres alliés…

Début spoiler…Seulement, la gloutonnerie de Nashqik lui a joué un tour pendable, et lorsque Skritsch arrive dans les quartiers du despote, il ne peut que constater que ce dernier est déjà rendu au stade terminal de la maladie, sa consommation de grain contaminé ayant causé sa perte. La situation de notre héros n’est guère plus enviable, car comme lui fait remarquer Puskab une fois qu’il l’a rattrapé (essayez de courir avec une surcharge pondérale, des poumons pleins de glaires et une chasuble miteuse), son bref contact avec les dévots du Rat Cornu a été suffisant pour développer à son tour une infection dont le nom ne tardera pas à résonner à travers tout l’Empire : la terrible peste noire…Fin spoiler

AVIS :

Autre nouvelle d’accompagnement de sa trilogie dédiée aux Guerres Skavens, ce ‘Plague Priest’ de C. L. Werner partait sur des bases intéressantes avec le récit de l’infiltration presque réussie (comme la plupart des plans skavens) par un Homme-Rat d’un village impérial. Cette approche novatrice laisse cependant rapidement la place à un propos bien plus classique, et donc moins palpitant, lorsque Skrit retourne à son terrier et démasque la conspiration de Puskab. Comme cette dernière ne laisse guère de doutes et que la conclusion ne présente aucune surprise, la nouvelle se termine de façon que j’ai trouvé franchement décevante.

Je pensais que Werner profiterait de ‘Plague Priest’ pour présenter quelques personnages importants des romans, et c’est seulement partiellement vrai. Si Puskab Foulfur peut être considéré comme l’antagoniste (ou le héros, ça dépend de votre faction de cœur j’imagine) des Guerres Skavens, ni Kathryn ni Skritsch ni Nashqik ne feront d’apparition dans la suite de ce prologue à la trilogie de l’homme au chapeau. Très dispensable.

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Emperor’s Deliverance – N. Kyme [40K] :

INTRIGUE :

‘Emperor’s Deliverance’ catapulte le lecteur sur Armageddon, le Geoffroy Guichard du Segmentum Solar (comprendre qu’il s’agit d’un lieu très animé où les prolos de l’industrie lourde et la couleur verte règnent en maîtres), pour un épisode de Faîtes Comme Chez Vous ! d’un genre un peu spécial. Voici le pitch : notre héroïne, la Sœur Sourire Scalpel Athena s’efforce d’apporter le peu de réconfort et de chaleur humaine aux milliers d’âmes perdues réfugiées dans le camp qu’elle dirige avec sa stagiaire (Betheniel), un homme de ménage philippin (Sanson) et le fils de la gardienne (Kolber). Malheureusement pour tout ce petit monde, leur fragile écosystème, jusque-là à peu près préservé des déprédations des ultras Stéphanois (les Verts, pour ceux qui ne suivent pas) se retrouve mis à mal quand la gardienne (le Colonel Hauptman) en question accepte une mutation à la droite de l’Empereur après un craquage de fumigènes mal négocié. La demande de remplacement du personnel dûment envoyée par Athena à la copro se solde par l’arrivée d’un duo de gorilles pas vraiment amènes (Nemiok et Varik, intérimaires Marines malveillants, malvoyants et malpolis, placés sur le poste par l’agence Manlpower locale), adeptes convaincus du itsnotmyjob-isme et jamais les derniers pour faire le coup de feu avec les footix du coin quand l’occasion se présente, sans considération pour le confort et la sécurité de leurs charges, ni pour les pétunias de Mme Ledoux, puisqu’il faut dire les choses. Ayant tenté, sans succès, d’obtenir une coopération plus active de la part de son nouveau service d’ordre, Athena finit par laisser les Marines malotrus vaquer à leurs occupations, encaissant de manière stoïque la surcharge de travail générée par la défection de ces malappris.

La situation finit toutefois par tout à fait dégénérer lorsque les Magic Fans décident de faire une virée dans la propriété, profitant du portail laissé ouvert par les malavisés Nem’ et Var’. Dans le chaos qui s’ensuit, tout le staff d’Athena finit à l’hôpital (section morgue), cette dernière ne devant son salut qu’au retour tardif des Marines mal-embouchés, qui finissent par bouter les ultras hors de la place à grand renfort de gomme cogne et de grenades de désencerclement, dont l’usage inconsidéré et indiscriminé ne fait qu’ajouter à la confusion en plus de faire grimper le nombre de blessés (dont la pauvre Betheniel, élevée grande maîtresse de l’ordre de Rémi Fraisse après une rencontre malheureuse avec un flashball grognon). Hors d’elle, Athena enguirlande vertement (un comble !) les Marines malfaiteurs, et manque à son tour de se faire molester par ces derniers, n’étant sauvée que par le crochet du droit de Varik à Nemiok, le premier ayant manifestement jugé que son comparse était effectivement un malfrat.

La situation ayant fini par s’apaiser et les Magic Fans ayant écopé d’une interdiction de stade pour le prochain match, les Marines malfaisants sont convoqués à l’agence par le responsable (Capitaine Vinyar) pour s’expliquer sur les évènements. Loin de s’offusquer des débordements constatés, le maléfique individu se révèle au contraire tout à fait satisfait par la tournure prise par les évènements, la dérouillée subie par les Verts justifiant à ses yeux les sévices endurés par les quidams pris entre deux feux1. Ayant renvoyé ses malabars vaquer à leur manœuvres malsaines, Vinyar à la surprise d’entendre frapper à la porte peu de temps après leur départ, et décide de manière malavisée d’ouvrir. Entre alors nul autre que Jean-Claude Tu’shan, vert de rage et noir d’humeur d’avoir appris les déprédations commises par les Marines maladroits. Ne pouvant plus rien pour les innocentes victimes de ce carnage inutile, le Tu’sh les venge en (probablement, voir ci-dessous) maltraitant et malmenant malicieusement Vinyar pour malfaçon. Malaisant.

1: Vinyar, arière-arrière-arrière78 petit fils de Jan-Meeshail Awlath, le fameux magnat Franc du début du IIIème millénaire ? C’est une piste sérieuse.

AVIS :

Kyme ne fait décidément rien comme les autres auteurs de la BL. Ayant pris le parti, comme certains avant lui, de développer un bout de fluff officiel pour lui donner souffle et vie, il choisit de se pencher sur une péripétie tout à fait mineure1 de l’histoire de son chapitre fétiche, et de s’arrêter, un peu comme son comparse Hoare dans ‘The Last Charge’, au moment où les choses commençaient à devenir intéressantes pour le fan-boy sommeillant en chacun de nous, c’est-à-dire l’explication de texte entre le défenseur des Droits de l’Hominidé (parce qu’il ne faut pas oublier les Ratlings, les Squats et les Ogryns) et Super Connard. Cette franche algarade aurait pu déboucher sur quelque chose d’intéressant, du fait du pedigree des participants, de la rareté de la situation et de l’incertitude qui plane sur le résultat de la confrontation. On a beau supposer que Tu’shan, en tant que gentil et Maître d’un chapitre bien connu, l’emporte sur Vinyar, qui n’est « qu’un » méchant Capitaine d’un chapitre très obscur, la tournure de la phrase sur laquelle Kyme a bâti sa nouvelle évoque simplement un échange de coups entre nos deux compaings, ce qui pourrait tout aussi bien signifier une égalité, voire la victoire de Vinyar sur son Bisounours de collègue. Ça, ce serait cool. Et ça aurait pu l’être, si Kyme n’avait pas perdu de précieuses pages à disserter sur les avanies d’Athena et Cie, ce qui sert bien entendu à exposer la vilénie des Marines Vol au Vent, mais ne méritait peut-être pas de constituer le corps du propos. Et quand bien même on garderait l’intégralité d’Emperor’s Deliverance’, les 15 pages de la nouvelle auraient pu en accueillir 5 de plus sans problème, laissant à Nick assez de place pour dépeindre la controverse de Waaaghadolid de manière convaincante et imaginée. Pour une fois que je shippais une baston entre SM, il faut que l’on me la retire, destin cruel. Que t’ai-je dont fait, Pépé ?

Conclusion tronquée mise à part, il faut reconnaître que Kyme se sort honorablement de l’exercice, sa tendance à sombrer dans le ridicule à force de vouloir rendre ses scènes d’actions le plus cool possible, sans se soucier ni de la vraisemblance, ni des conséquences, ayant plus d’une fois desservi notre homme. Rien de tout ceci dans ‘Emperor’s Deliverance’ donc, seulement du bon vieux BL-style, croustillant mais insipide, comme les galettes de riz complet bio Björg. C’est pas du lembas Nick, mais faute de grives2

1: Introduite en une demi-ligne dans l’Index Astartes dédiée aux Salles à Manger, si je ne m’abuse.
2: « …mangez de la brioche. » (Roboute Robuchon). C’est plus une phrase de conclusion, c’est un cadavre nerdxquis. Vivement que ça s’arrête.

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Et c’est tout pour cette revue de cette relique d’un temps pas si lointain, mais aujourd’hui je l’espère totalement révolu (et tant mieux, restreindre l’accès à du contenu que des gens seraient prêts à payer pour avoir, juste pour créer un peu de buzz, je ne trouve ça ni malin, ni honnête). Comme la fameuse clé de Shaa-Dom dont les nouvelles de Thorpe et Chambers parlent, cette anthologie aurait toute sa place dans la Bibliothèque Interdite, mais pas forcément pour les raisons que l’on peut croire (à vous d’interpréter ce message cryptique). Comme il ne s’agit que de la première publication d’une série s’étant perpétuée jusqu’en 2020, vous pouvez vous attendre à ce que les opus suivants soient aussi disséqués sur ces pages dans les semaines à venir…

GODS & MORTALS [AoS]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de Gods & Mortals, anthologie de nouvelles Age of Sigmar publiée par la Black Library en l’an de grâce 2019. Premier recueil de courts formats de l’ère « moderne » d’AoS1, ce copieux pavé de 512 pages regroupe pas moins de 18 nouvelles, ce qui en fait l’ouvrage le plus imposant de sa catégorie, à ce stade. Il fallait au moins cela pour tenter de livrer une synthèse un tant soit peu complète des nouvelles sorties entre 2016 et 2018 et prenant place dans les riants et primesautiers Royaumes Mortels.

Gods &amp; Mortals

C’est qu’il s’en est passé des choses en l’espace de trois années, aussi bien dans qu’autour cette franchise de la GW-Fiction. Ainsi, si Josh Reynolds et David Guymer se taillent la part du lion parmi les contributeurs convoqués, avec quatre histoires chacun à leur crédit, il s’agissait pour le premier d’un chant du cygne2, alors que le second continue à l’heure actuelle sa collaboration avec la Black Library. Du côté des personnages mis en scène dans ce florilège de nouvelles, on découvre ou retrouve beaucoup de têtes de figure d’Age of Sigmar, tels que Hamilcar (présent dans 100% des soumissions de son créateur, David Guymer), Neferata, Neave Blacktalon, Callis & Toll et Esselt & Talorcan. Si certains d’entre eux ont réussi à inscrire leur nom au Panthéon des héros des Royaumes Mortels, d’autres n’ont pas eu cette chance et sont rapidement retombés dans l’oubli. La concurrence est rude…

A l’heure où d’autres auteurs (Richard Strachan, Dale Lucas, Anna Stephens…) et d’autres personnages (Drekki Flynt, Cado Ezechiar…) sont déjà venus remiser les travaux de Gods & Mortals dans le passé, certes récent, des Royaumes Mortels, l’heure est opportune pour donner à cette anthologie que l’on peut qualifier de classique le long and hard look que les anglo-saxons réservent aux choses qui méritent un jugement digne de ce nom.

1 : Qui peut se reconnaître grâce au modèle « binaire » utilisé pour les titres d’anthologies (‘Gods & Mortals’, ‘Myths & Revenants’, ‘Oaths & Conquests’, ‘Lords & Tyrants’…).
2 : Après un hiatus de quelques mois, Reynolds annoncera sa décision de cesser de travailler pour la BL en Mai 2020.

Gods &amp; Mortals

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Force of Personality – D. Guymer:

INTRIGUE:

Force of PersonalityLa guerre opposant Sigmar aux Fab4 fait toujours rage dans les Royaumes Mortels, et les champs de bataille sur lesquels s’illustrer ne manquent pas pour les Stormcast Eternals. Certains sortent cependant franchement du lot, et c’est une remarque qui s’applique aux deux catégories précédemment citées. C’est ainsi qu’on retrouve le Lord Castellant Hamilcar Bear Eater en position de conseiller stratégique dans la ville flottante de Nemisuvik, assiégée par la flotte du redoutable Capitaine Blackjaw depuis de longs mois. Une affectation que notre grandiloquent héros n’apprécie guère à cause du choix de l’ennemi de bombarder la cité à distance respectable, ce qui rend impossible l’honnête confrontation d’homme à homme qu’Hamilcar considère comme la forme la plus civilisée du combat. De leur côté, les Nemisuvikois prennent les événements avec une décontraction et une résilience impressionnantes, heureux de passer le temps en regardant leur allié surhumain insulter les Khorneux depuis les remparts de la ville.

Les choses se décantent toutefois lorsque Hamilcar est témoin d’une émeute opposant une foule en colère à quelques gardes entourant ce qui ne semblait être à première vue qu’un bassin de plus dans cette cité portuaire maritime1. Les mécontents semblent réclamer la présence d’un certain Roi Gris, qui ne tarde pas à apparaître dans notre histoire après qu’une manifestante ait réussi à déjouer l’attention du service d’ordre et à plonger dans la cuvette. Elle a ainsi l’honneur de se faire ramasser par un immense tentacule, qui la jette dans une non moins immense gueule, celle du Roi Gris en question, ou Angujakkak pour les locaux, comme un notable de Nemisuvik l’explique ensuite à Hamilcar autour d’une soupe de poisson. A la fois protecteur et prisonnier de la cité flottante, le Roi Gris grandit lentement sous cette dernière jusqu’à atteindre la taille et la force nécessaires pour déchirer les filets qui l’emprisonnent, et finalement partir faire sa vie dans l’océan ghurite, non sans avoir laissé un œuf derrière lui pour que le cycle se perpétue. Les gilets jaunes de Nemisuvik essayaient donc d’accélérer le processus en sortant Angujakkak de sa léthargie grâce à un bon gueuleton, afin qu’il aille couler la flotte de Blackjaw avant que cette dernière n’ait rasé la cité. Un plan que ce bon Hamilcar trouve absolument génial, mais qui est fermement refusé par le conseil des anciens de Nemisuvik, car Jak n’a pas encore pondu de mini-lui2. S’il part maintenant, qui prendra sa place ?

Et la réponse sera au final : Sigmar. Pas littéralement, bien sûr (encore que, pour ce qu’il fait en ce moment pour aider l’effort de guerre dans les Royaumes Mortels, il pourrait barboter dans une piscine d’eau de mer sur le littoral de Ghur), mais philosophiquement. Suite à un strike chanceux d’une catapulte chaotique ayant envoyé Hamilcar et quelques défenseurs de Nemisuvik à la flotte, le Roi Gris décide enfin de se secouer les écailles et d’aller se servir dans les eaux très poissonneuses qui baignent la cité. Hamilcar se convainc tout seul que c’est son impayable personne qui est responsable de ce petit miracle, son combat acharné contre les multiples bestioles ayant tenté de le becqueter alors qu’il faisait de la brasse coulée ayant été sanglant, mais la vérité restera probablement un mystère. Toujours est-il qu’Angujakkak est de sortie, et que la flotte de Blackjaw n’était pas prête pour cette attaque de bête zodiacale. Les navires chaotiques sont réduits en allumettes les uns après les autres par les tentacules musclés du Roi Gris, en plus de servir de trompe de mûmak pour un Hamilcar qui passe en mode Legolas une fois sorti de sa trempette, et finit par arriver sur le pont du navire amiral de sa Némésis. Cette dernière étant visiblement plus à l’aise au tir qu’au corps à corps (shocking je sais, même Hamilcar n’en revient pas), le rideau tombe sur cette nouvelle avant même que ce duel déséquilibré ne soit conclu. Et c’est ainsi que Nemisuvik a banni à jamais le maintien en captivité de grands animaux marins, deux ans après Marineland. Une pratique barbare qui n’avait plus lieu d’être dans une époque aussi avancée que l’Âge de Sigmar, bien évidemment…

1 : Car les habitants de Nemisuvik ne maîtrisent pas l’art de la construction navale, ce qui explique aussi pourquoi ce siège prend aussi longtemps.
2 : Comment une bande d’Inuits hippies ne maîtrisant pas la technologie du kayak est capable d’asséner de grandes vérités sur la reproduction des poulpes géants me dépasse.

AVIS:

David Guymer nous donne une nouvelle de Hamilcar à son plus drôle avec ‘Force of Personality’, qui peut donc logiquement concourir pour le titre de meilleure entrée de cette saga haute en couleur, et mérite donc d’être lu par tous ceux qui souhaitent vivre l’Hamilcar experience dans des conditions idéales. En auteur vétéran et maître de l’exercice délicat de l’écriture comique, Guymer s’applique à faire de chaque élément de cette histoire autrement très classique une source d’amusement pour le lecteur, la palme revenant sans doute aux dialogues riches en one liners percutants et aux commentaires en aparté que Hamilcar distille à son auditoire alors qu’il narre ses invraisemblables exploits.

De plus, tout le monde agit stupidement dans cette histoire, depuis la flotte de Blackjaw qui n’arrive pas à toucher un éléphant dans un couloir avec ses catapultes mais s’obstine à bombarder Nemisuvik pendant des mois plutôt que de l’attaquer, jusqu’aux habitants de la cité qui préfèrent attendre que leur mascotte finisse de grandir plutôt que de hâter un peu les événements, et même jusqu’à Sigmar qui envoie le pire choix possible parmi ses Stormcast Eternals pour renforcer une ville soumise à un barrage d’artillerie. Comme il est clair que Guymer ne se prend pas du tout au sérieux, le résultat final n’est pas grotesque (ce qu’il aurait été si l’histoire avait été racontée au premier degré) mais ajoute à la folie ambiante de ce mélange entre un épisode d’American Dad et un rapport de bataille de ManoWar à la sauce Age of Sigmar. Très sympathique, si vous aussi vous aimez quand la BL sort de son paradigme grimdark de temps à autres.

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Pilgrim’s Trial – R. MacNiven:

INTRIGUE:

Vanik, aussi appelé le Pèlerin Noir (ça sonne mieux en anglais), est un seigneur de guerre chaotique poursuivant le rêve de toute une faction : rejoindre la Varanguard pour approcher le GOAT Archaon. Une telle position se mérite cependant (beaucoup d’Elus, mais peu d’appelés…), et ce n’est pas avec un CV aussi famélique que le sien que Vanik a la moindre chance de réussir son casting : notre héros doit en effet se contenter d’une modeste bande d’une vingtaine de chevaliers du chaos (la Fraternité de Fer) pour toute armée, ainsi que d’un écuyer froussard (Modred) et d’une épée qui coupe. Bien décidé à améliorer son inventaire afin de devenir un redouté Bling King, Vanik entraîne son monde jusqu’en Aqshy, et plus précisément à l’orée du Bois de Braises (Cinderwood), où il a le sentiment que, je cite, sa destinée l’attend. Sa destinée a du coup un point commun avec la Fraternité, qu’il laisse sur le parking de la forêt avec le cadavre de sa monture, sacrifiée pour des raisons aussi brumeuses que la visibilité locale (normal pour une forêt qui passe son temps à brûler, vous me direz). Il est en effet capital qu’il entreprenne la quête qui va suivre seul, et également en moins d’une journée (mais pourquoi, mystère) : s’il n’est pas revenu au premier champ du c(ha)oq, ses braves guerriers ont ordre d’aller porter la nouvelle de sa mort tragique, ou de son égarement gênant, à sa sœur Jevcha, Reine de Guerre de son état. Elle lui donnera un enterrement digne de ce nom, ou viendra le ramener à la maison, selon la situation.

Nous suivons donc Vanik alors qu’il explore le Bois des Braises à la recherche de quelque chose, ou de quelqu’un. Cette quête est entrecoupée par des passages narrés en italiques par un personnage qui semble flotter à quelques mètres de l’aspirant garde du corps sans que ce dernier s’en aperçoive, et qui se matérialise lentement grâce à la puissante émanation de… quête qui entoure Vanik. Ses vues sur ce dernier sont ambivalentes, pour dire le moins, mais c’est un problème que le Peignoir Nain devra gérer un peu plus tard, occupé qu’il est à défendre son intégrité physique contre la faune bigarrée qui hante la forêt. D’abord un Chien de Khorne à collerette verte (original), du nom de Korhel1, auquel il n’arrive pas à apprendre à donner la papatte en dépit de ses meilleurs efforts – qui consistent à lui balancer des grands coups d’épée dans la truffe, ceci dit. Ensuite à un duo de Chasseurs de Kurnoth équipés d’arcs, ayant mis en déroute le pauvre cabot avant de flécher la sortie à ce mortel égaré dans leur réserve naturelle. Ayant la vue très basse pour un champion du Chaos (ou ayant mis son heaume à l’envers ce matin-là), Vanik opte pour une fuite éperdue à travers les arbres, mais finit par se faire rattraper par les intraitables Sylvaneth, qui lui mettent une solide raclée au corps à corps et menacent d’interrompre brutalement sa quête de gloire. Ça commence à sentir le sapin…

Début spoiler…Heureusement, la cavalerie finit par arriver. Ou plutôt, la monture démoniaque finit par se matérialiser. Car c’était bien ça qui zieutait sans gêne le Pèlerin quelques pages plus tôt. Baptisée Tzatzo, la cavale infernale triomphe là où son (futur) maître avait échoué – un grand classique des wargames – et réduit les Kurnothi en granulés de biomasse en quelques secondes, un chouilla aidée par cet assisté de Vanik. C’est évidemment le début d’une grande amitié entre ces deux êtres que tout oppose, et la nouvelle se termine sur le retour triomphal de notre héros au camp de base de la Fraternité de Fer, et l’annonce de la nouvelle et dernière étape de sa classe quête préparatoire : aller chiner une épée démon aux puces de Saint Ouen. Ce sera risqué, mais il faut bien ça pour attirer l’œil des dieux…Fin spoiler

1 : On ne sait pas d’où vient cette connaissance poussée qu’a Vanik du nom des démons qu’il rencontre (sans doute un Pokédex chaotique ramassé dans un donjon mineur), mais en tout cas, cela ne lui rapporte aucun avantage au combat.

AVIS:

Introduction au roman qu’il a consacré à l’ascension carriériste (plutôt que démoniaque) de son héros Vanik le Pèlerin Noir, ‘Pilgrim’s Trial’ ne frappe pas par son originalité, tant au niveau de l’intrigue que du style ou des personnages mis en avant. J’irai même jusqu’à dire que sa lecture est hautement facultative, même si Robbie MacNiven ne livre pas une copie honteuse. Qui a dit que le cheval, c’était génial ?

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The Dance of the Skulls – D. Annandale:

INTRIGUE:

The Dance of the SkullsInvitée à honorer de sa présence un bal donné par la reine Ahalaset et le seigneur Nagen dans la cité de Mortannis, Nefarata se doute bien que cet évènement mondain n’est qu’un prétexte commode pour permettre à ces deux grandes lignées d’agir à ses dépends, ce qui ne l’empêche pas d’accepter gracieusement de se rendre sur place, n’ayant de toute façon rien d’autre de prévu ce soir là. Voyant d’un mauvais œil le rapprochement s’étant récemment opéré entre Ahalaset et Nagen, la Mortarque de Sang suppute avec raison qu’un piège va lui être tendu, et se réjouit d’avance de cette (més)aventure, le quotidien de Nulahmia devant apparemment être assez terne.

Après avoir été accueillie avec tout le faste et la pompe liés à son r/sang (et infligé râteau sur râteau à ce pauvre Nagen, auquel elle promet toutefois une danse plus tard dans la soirée1), Neffie se voit proposer par son hôte une dégustation privée de crus tirés de l’hématothèque personnelle d’Ahalaset, ce qui ne se refuse pas. Guidée jusqu’à un salon lounge où l’attendent une dizaine d’esclaves qui s’appellent tous Mathusalem ou Réhoboam, notre rusée vampire à tôt fait d’identifier l’aiguille d’argent se terrant sous la roche, en l’occurrence un assassin assermenté doté d’une fourchette à escargot à la place du bras (c’est la mode à Hammerhal). Ayant raté son test d’Initiative, le faquin est toutefois aisément neutralisé par sa victime supposée, qui l’attache à son service d’un langoureux battement de cils. Satisfaite de la tournure prise par les évènements, et comme toute quinqua-millénaire de la bonne société après une dure journée de labeur, Neferata s’accorde un petit verre (et fracasse au passage toutes les « bouteilles », qui espéraient peut-être qu’on les laisse tranquille le temps qu’elles refassent le plein) aux frais de ses hôtes avant de revenir se joindre à la fête.

Là, il est temps pour la Lahmiane de porter l’estocade aux traîtres débusqués, et en musique s’il vous plaît, la danse des crânes consentie à ce benêt de Nagen donnant amplement le temps à notre héroïne de cimenter sa victoire en enchantant légèrement son cavalier, qui ne trouvera rien de plus malin lorsque l’assassin d’Ahalaset viendra sonner les douze coups de minuit à son ancienne patronne à l’aide de son argenterie intégrée, de lancer sa devise dans le silence de mort (héhé) qui s’ensuit. Cette dernière tombera à plat comme la totalité de ses blagues, et, mal comprise par la garde de la reine défunte, aura des conséquences tragiques pour notre pauvre Nagen. Un verre ça va, trois verres…

1 : En même temps, cette coquetterie de laisser dépasser une canine par dessus sa lèvre inférieure ne doit pas aider à lui donner un air très intelligent.

AVIS:

C’est peu de chose de dire que la prose de Herr Annandale n’était pas tenue en haute estime de ce côté du clavier, depuis la chronique de ses débuts pour la BL (The Carrion AnthemHammer & Bolter #11) jusqu’à aujourd’hui. Les choses ont légèrement évolué avec cette Danse des Crânes, qui s’affirme facilement comme la meilleure soumission de notre homme que j’ai pu lire à ce jour. Certes, on parle ici en progrès relatif plutôt qu’en performance absolue, cette courte nouvelle ne se comparant guère aux travaux d’auteurs que je considère être plus méritants que David Annandale, Abnett, Dembski-Bowden, Farrer et Fehervari en tête, pour n’en citer que quelques uns (la liste serait assez longue sinon), mais j’aurais trop beau jeu de ne pointer que les trous dans la cuirasse ou les défauts dans la raquette des travaux de ce régulier de la BL, si je ne soulignais pas également les sources de satisfaction à la lecture de ces derniers. L’Empereur sait qu’ils sont encore rares à cette heure.

Alors, quels sont les éléments positifs de La Danse des Crânes ? Pour commencer, une absence de ce que l’on peut presque appeler une « annandalerie », terme forgé par votre serviteur et désignant une mauvaise, grossière ou grotesque exploitation d’une idée de départ pourtant assez sympathique, pour des résultats évidemment décevants. Le huis-clos victorien qui nous est proposé ici ne pêche ainsi pas par excès de zèle ou manque de structuration, les péripéties s’enchaînant de façon tout à fait convenable et crédible, ce qui pourrait sembler aller de soi mais n’était pas gagné d’avance au vu du pedigree de l’auteur. On sent que ce dernier a réfléchi à la manière dont il devait dérouler son récit pour que le plan alambiqué de Nefarata puisse se dérouler sans (trop) d’accroc, et même si l’usage d’un petit TGCM en fin de nouvelle pour parfaire le triomphe de Mama Lahmia peut être noté, c’est finalement peu de chose comparé aux problèmes structurels émaillant quelques unes des précédentes soumissions de David Annandale.

Autre source de contentement, la description intéressante qui nous est faite de la haute société mort-vivante, nid de vipères aux crocs acérés et n’hésitant pas un instant à comploter pour précipiter la chute de leurs prochains, alors même que les ennemis extérieurs se comptent par milliers, et qu’un brin de solidarité entre macchabées ne serait pas de trop pour défendre le pré carré de Nagash. Le fait que cette société, mêlant vampires et humains à tous les échelons, apparaisse comme fonctionnelle et pérenne (en même temps, c’est bien le minimum quand on est immortel) est une autre réussite d’Annandale, qui parvient à donner un volume fort bienvenu à une faction qui jusque là se réduisait à des légions de squelettes traînant leur mélancolie dans des déserts violacés. On peut s’amuser aussi en Shyish, telle est la morale de cette petite histoire.

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Tourney of Fate – J. Reynolds:

INTRIGUE:

Lorsque la plus totalement fraîche mais tout de même respectable Dame de Cankerwall, régente des Duchés Niellés, est enlevée par un Héraut de Tzeentch pendant un tournoi opposant la fine fleur (fanée) des chevaliers pesteux des environs, nombreux sont les braves qui jurent de libérer leur suzeraine et se mettent en quête de la tour ambulante où le faquin se terre avec sa victime. Parmi eux se trouve le jeune Carkus Gryme, qui doit encore gagner ses éperons et sa bedaine de Blightknight, mais qui compense son inexpérience et sa taille 36 par une dévotion et une noblesse indéniable. Ayant reçu l’autorisation de la Dame de participer au tournoi malgré son statut inférieur, il était bien décidé à l’impressionner de ses putrides prouesses1, et en veut donc mortellement au disciple du dieu poulet, Ompallious Zeyros. Accompagné d’un Pestigor cuisinier et fataliste (Blisterback), Carkus remonte la piste de la caravane de Zeyros, espérant la rattraper avant que les autres paladins enrhumés (qui ont des montures, eux) ne récoltent toute la gloire.

À toute chose lenteur est bonne cependant, car le peloton de tête a visiblement rencontré plus fort que lui. Carkus tombe en effet sur les cadavres épars de ses frères de pus, éparpillés façon puzzle par un adversaire mystérieux. Avant cela, il avait reçu la visite d’un vieux démon de Tzeentch asservi par Ompallious, et chargé par ce dernier de dissuader le blanc-bec de se frotter à lui. Ayant considéré cette offre comme la preuve que son adversaire avait peur de lui, notre héros avait refusé crânement. Pour sa peine, il se trouve donc confronté au plus Disney de tous les adversaires : un chevalier constitué entièrement d’une nuée de rossignols, grives et autres merles, contre lequel son épée est bien inutile. Heureusement, le sagace Blisterback parvient à identifier l’oiseau en chef, qu’il capture et gobe aussi sec, provoquant la désagrégation de la murmuration. Ce premier adversaire vaincu, Carkus et son sidekick sont libres d’accéder au logement de fonction d’Ompallious, dans lequel le pas encore chevalier pénètre seul, comme le panonceau interdisant l’entrée à nos amis les animaux situé à côté du paillasson le stipule.

La troisième épreuve de notre héros (la deuxième étant de ne pas s’arracher les yeux devant les choix de décoration intérieure très tzeentchy de son hôte) est d’affronter un autre serviteur de Lompallious, et en l’occurrence, une (quasi) célébrité : Mordrek le Maudit en personne. Bien que ce vénérable guerrier se plaigne que les petits jeunes chaoteux d’aujourd’hui ne le connaissent plus, il a gardé suffisamment de punch pour pousser Carkus dans ses derniers retranchements. Qui plus est, les Dieux du Chaos n’ont pas résilié son immortalité lors de son transfert de franchise, ce qui fait une fausse joie au pesteux après qu’un coup chanceux ait brisé la nuque de son adversaire, qui se relève sans broncher quelques secondes plus tard. Désespérément surclassé et n’ayant pas la caisse d’un véritable Blightknight, Carkus voit sa dernière heure son compostage arriver… mais réussit un deuxième coup critique d’affilée, ce qui convainc Mordrek de le laisser poursuivre sa quête et de se confronter enfin au maître des lieux.

Ce dernier l’attend en compagnie de la Dame de Cankerwall, qu’il a kidnappé pour qu’elle l’aide à guérir d’une maladie honteuse refilée par un champion de Nurgle avec lequel il a eu un duel non protégé il y a de cela bien longtemps. L’heure des révélations ayant sonné, Carkus apprend coup sur coup qu’Ompallious Zeyros faisait partie de l’ordre des chevaliers ayant juré allégeance à la Dame lors de son arrivée dans les Duchés, et que si le premier cherchait tant à éviter le combat, c’est parce qu’il est en fait son lointain ancêtre. Cette double annonce ne détourne cependant pas Carkus de son leitmotiv, mais son état de fatigue avancée ne lui permet pas d’inquiéter Ompallious, qui le flanque par terre sans ménagement. Il aurait incinéré son arrière petit fillot sans état d’âme n’eut été l’intervention conjointe de la Dame de Cankerwall et de Mordrek, la première acceptant de débarrasser Ooumpa Loompa de ses mycoses tenaces en échange de la vie de Carkus, et le second forçant son ex-patron (son contrat d’asservissement contenant une clause suspensive à la première défaite enregistrée) à tenir sa parole après sa guérison express.

Son problème sanitaire ayant été traité, Ompallious donne congé à ses invités (c’est fort civil de sa part) et met le cap sur un autre Royaume pour passer sa convalescence. De son côté, si Carkus n’a pas le bonheur d’être élevé au rang de Blightknight par sa Dame, il repart tout de même avec un lot de consolation fort sympathique, en l’occurrence un cor de chasse enchanté lui permettant d’invoquer le redoutable Mordrek (qui part faire du tourisme de l’Apocalypse dans cette franchise qu’il ne connaît pas) en soufflant dedans. Quant à la Dame, elle souhaitait en fait utiliser le Héraut de Tzeentch pour ressusciter un ancien champion après qu’il eut atteint un taux de moisissure satisfaisant (un peu comme un roquefort), et n’a donc pas vraiment apprécié l’intervention du morveux, mais se calme lorsque Carkus révèle qu’il a gardé un bout de la biopsie de son illustre aîné pendant qu’Ompallious passait le reste au lance-flamme, ce qui donne une réelle chance de revival à l’ancien. Quelqu’un aurait-il une boîte de Petri en rab ?

1 : Dessiner un blason en vomissant est le comble du chic chez les Maggotkin.

AVIS:

Josh Reynolds exerce son talent de conteur dans ce ‘Tourney of Fate’, qui parvient à donner leurs lettres de noblesse aux Maggotkin de Nurgle sans galvauder le moins du monde leur aspect foncièrement morbide et résigné, qui ne le destinait pas du tout à endosser le rôle de protagonistes (à mon humble avis). En faisant de son héros un parangon de chevalerie, certes putride mais animé des sentiments les plus honorables, Reynolds démontre sa capacité à questionner les stéréotypes de fantasy que nous avons tous intégrés – souvent sans nous en rendre compte –, ce qui contribue à en faire l’un des auteurs les plus intéressants et talentueux de la Black Library. Si l’aventure dans laquelle le jeune Carkus Gryme est, elle, relativement convenue (même si de bonne facture), ‘Tourney of Fate’ mérite donc la lecture rien que par son originalité par rapport aux autres nouvelles chaotiques d’Age of Sigmar.

Ceci dit, cette histoire a d’autres atouts à faire valoir, Josh Reynolds ayant été particulièrement motivé par son sujet. Ainsi, il prend soin de poser les jalons d’un arc narratif plus ambitieux que cette nouvelle, à laquelle répondent plusieurs autres de ses travaux. On peut retrouver Ompallious Zeyros dans ‘The Last Gift’, et Feculus dans ‘The Tainted Axe’, ce qui est suffisant pour parler d’un mini-Reyniverse des Royaumes Mortels. Dommage que son départ de la BL ne lui ait pas donné l’occasion de mener à bien son projet, par exemple en faisant intervenir Gryme et Zeyros dans la série des Huit Lamentations, aux côtés du champion de Khorne Ahazian Kel. Avec des antagonistes aussi charismatiques, et un auteur aussi doué que Reynolds à l’écriture, les épisodes suivants de la saga auraient été passionnants à suivre. Quoiqu’il en soit, ‘Tourney of Fate’ est une nouvelle qui sera d’autant plus intéressante que le lecteur est familier des histoires déclinées en parallèle de la quête de justice de Carkus Gryme.

Pour finir, il régale le fluffiste en réalisant un savoureux cross over entre Warhammer Fantasy Battle et Age of Sigmar, à travers la convocation du Comte Mordrek, personnage nommé de second ordre du Vieux Monde (et qui apparaissait déjà dans des productions écrites pour WFB par Reynolds). Il nous avait déjà fait le coup avec Aekold le Miraculeux dans ‘Hammerhal’, et cela ne fait que m’inciter à lire le reste de sa bibliographie AoSesque pour voir s’il n’y a pas d’autres easter eggs dissimulés au fil des pages. Bref, c’est du Josh Reynolds comme on adore le lire, et dont il serait dommage de se priver.

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The Hardest Word – D. Guymer:

INTRIGUE:

The Hardest WordEn poste dans la forteresse des Sept Mots (sans doute construite par les sept nains) en Ghur, l’incommensurable Hamilcar Bear Eater reçoit la visite de la Lord-Veritant Vikaeus, qui arrive porteuse, outre de son heaume et d’une moue dédaigneuse, de troublantes nouvelles. Prophétesse reconnue à travers les osts de Sigmar, Vicky a eu la vision d’une horde de Skavens attaquant le bastion tenu par les Astral Templars et capturant l’insurpassable Hamilcar pour en faire le sujet d’une expérimentation aussi obscure dans ses motifs que douloureuse dans son application (d’après la description qui en faite, Hamilcar passerait de battant à batterie, ce qui n’est pas une évolution de carrière très désirable). Pour notre inarrêtable héros, il est clair qu’il faut saisir le rat-taupe par les bornes, et tant pis si la prophétie de son invitée n’est guère précise à propos du moment où le danger se matérialisera, et la direction d’où il viendra. Prédiction, mobilisation, comme dit le proverbe.

Lors donc, Hamilcar s’emploie à rassembler le ban et l’arrière-ban de son petit domaine, sans tenir compte du regard courroucé ni des réflexions désobligeantes de Vikaeus, qui est la première à reconnaître que ses annonces sont encore trop vagues pour mettre les Sept Mots sur le pied de guerre. C’est mal connaître l’inqualifiable Hamilcar, qui a une idée bien précise de la manière d’écarter le risque d’une future invasion de ratons : ayant laissé à la Lord-Veritant toute latitude (ainsi que son fidèle gryph hound, Crow) pour faire son enquête de terrain, notre héros va se planter à l’entrée de sa forteresse, et hurle un défi à la cantonade : si les Skavens arrivent à la vaincre en combat – et même pas en combat singulier, c’est dire s’il est sûr de son fait – les Sept Mots leur seront remis sans coup férir. Voilà une offre qui ne se refuse pas, et à la grande surprise de l’assistance réunie pour voir le patron faire ses pitreries, un émissaire Skaven se présente quelques instants plus tard pour annoncer à la grande-gueule en armure violette que le Warlock Ikrit accepte la confrontation.

Comme on pouvait s’y attendre de la part d’une race totalement étrangère au concept d’honneur martial, Ikrit ne se déplace pas en personne, mais envoie une de ses créations, que l’on peut décrire comme le fruit des amours illicites entre un Cuirassier Némésis et un Rat Ogre, s’emparer de l’indémodable Hamilcar, qui l’intéresse beaucoup plus que la possession des Sept Mots. Bien que le cédant à son adversaire mécanique en carrure et en force, et devant composer avec le feu nourri des Jezzails que le prudent Ikrit a également mis sur le coup (on n’est jamais trop prudent), le Lord-Castellant préféré de ton Lord-Castellant préféré réussi à vaincre son adversaire déséquilibrant l’exo-ratmure et la mettant sur le ventre. Ce triomphe est toutefois assombri par le retour de cette pimbêche de Vikaeus, très courroucée d’être tombée sur une bande d’éclaireurs Skavens pendant ses investigations, et d’avoir dû s’en débarrasser par elle-même. Avant de s’en aller bouder dans ses quartiers, elle assure à l’indécrottable Hamilcar que son récent exploit n’a fait que repousser l’échéance, et que les Hommes Rats en ont toujours après lui. Ce qui est fort possible – après tout, qui ne rêverait de posséder une copie conforme de Sigmar ? – mais sera l’affaire d’une autre histoire…

AVIS:

David Guymer prépare dans ce ‘The Hardest Word’ (rien à voir avec la chanson d’Elton John, pour autant que je puisse le dire) l’intrigue du roman qu’il consacrera à son personnage fétiche (‘Hamilcar : Champion of the Gods’), et dans lequel le Stormcast prodigue et prodige devra défendre son intégrité physique contre les assauts répétés d’un Skaven illuminé. On y voit un Hamilcar en grande forme faire ce dans quoi il excelle : prendre des décisions radicales sur un coup de tête, se battre comme un chiffonnier (et gagner à la fin), et plus important, balancer des vannes dirigées autant vers ses camarades que vers le lecteur, ce qui est une raison suffisante pour lire les travaux consacrés à ce personnage haut en couleurs d’Age of Sigmar, si vous voulez mon avis. Une honnête réussite pour Guymer, qui arrive à trouver le juste équilibre entre les nombreux composants d’une bonne histoire d’Hamilcar Bear Eater (intrigue, contextualisation, développement des personnages, style…), ce qu’il ne parvient pas à faire à tous les coups.

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Auction of Blood – J. Reynolds:

INTRIGUE:

Auction of BloodLes plans pour une soirée de bouquinage tranquille de Palem Bo(o)k, libraire d’incunables à Eauxgrises et accessoirement espion à la solde de Nefarata, sont brutalement et définitivement balayés lorsque notre fin lettré reçoit l’ordre de représenter sa généreuse patronne à une session d’enchères privées, se tenant le soir même au Nid de Pie, une institution bien connue par les habitués de la vie secrète de la métropole Ghyranite. Bien forcé d’accéder à la gracieuse et impérieuse requête de sa bienfaitrice s’il tient à conserver sa jugulaire intacte, Bok se rend sur place, et réussit à négocier son entrée, malgré une absence d’invitation (les grandes de ce monde ne prennent pas en compte des détails aussi triviaux) et une vigile elfique vraiment patibulaire du tout. Même pas briefé sur l’objet qu’il devra acquérir pour le compte de sa maîtresse, il a peine le temps de jeter un regard sur le reste de l’assistance, où se pressent pêle-mêle un mage lumineux et son dragonnet de compagnie, un Nain du Chaos essayant de camoufler son appartenance à une franchise défunte sous une épaisse capuche, et la Femme en Rouge locale (il en faut une dans tous les univers med-fan dignes de ce nom apparemment), beauté ténébreuse et balafrée au sourire qui aurait pu être avenant s’il ne dévoilait pas des dents taillées en pointe.

Attendant patiemment que son heure vienne pendant que les premiers lots trouvent preneurs, Bok finit par comprendre que la babiole que Nefarata veut ajouter à sa collection est l’étrange fouet à huit lanières que le commissaire priseur révèle être Charu, le Fouette-Âme, rien de moins que l’une des huit Lamentations de Khorne ! Pressentant que cette acquisition va le mettre sur la paille, à condition qu’il arrive à remporter l’enchère avec ses moyens somme toute limités (l’industrie du livre est en crise partout), Bok est sauvé de la faillite par l’intervention inattendue de Melissandre, qui se trouve être une activiste de Khorne et ne goutte pas du tout à ce que cette sainte relique soit vendue comme un vulgaire bibelot lantique. Preuve que la malabar de l’entrée n’a pas fait son job de façon correcte, une demi-douzaine de comparses de la Lady in Red (Kesh de son prénom), se lèvent pour appuyer la revendication de leur meneuse, et la situation dégénère tranquillement lorsque le préposé à la vente tente de prévenir le service d’ordre et se prend une hache de jet entre les deux yeux pour sa peine.

Dans la mêlée générale qui s’en suit, Bok a l’occasion d’assister aux premières loges à une démonstration de fouet que n’auraient renié ni Corax ni Indiana Jones, Kesh ayant réussi à mettre la main sur l’arme du crime, dont le deuxième effet kiss cool est de voler l’âme des malheureux qu’elle lacère. D’abord contraint de régler leur compte à quelques cultistes mugissants tout prêts à l’enkhorner, Bok est rapidement convaincu par le talent meurtrier de Kesh de mettre le Charu avant les boeufs. Malheureusement pour notre héros, this girl is on fire et sa pétoire, bien que de fabrication Duardin, ne suffit pas à mettre fin au tohu-bohu. Animée de mauvaises intentions, malgré la perte d’un hémisphère cervical consécutif à un headshot proprement exécuté, Kesh l’est également par la magie impie de son arme, et il faudra que quelqu’un se dévoue à lui prendre littéralement la main pour que l’ambiance, finalement, retombe. La seule autre survivante de la soirée étant l’Aelf de garde, à présent chômeuse et à laquelle il s’empresse de proposer un job, Bok n’a aucun mal à faire main basse sur la vieille Charu, dont on se doute que Nefarata fera un usage raisonné…

AVIS:

Voilà une nouvelle de Josh Reynolds telle qu’on les aime. Loin du fracas des combats de première ligne entre Stormcasts et indigènes, Enchères de Sang s’attache à dépeindre la vie dans une cité libre de Sigmar, où, si l’ordre règne, tous les citoyens n’épousent pas forcément les vues progressistes et altruistes du Dieu céleste. Comme le Monde qui Fut avant lui, les Royaumes Mortels sont gangrenés par les agissements souterrains d’individus peu recommandables, ce qui est dans l’ordre naturel des choses à mon avis, mais méritait quand même d’être couvert par une nouvelle ou deux afin que le lecteur, surtout novice, ne s’y trompe pas1. Les amateurs de la série Malus Darkblade apprécieront sans doute le récit de la soirée très compliquée de Bok, contraint comme son lointain et illustre prédécesseur de prendre tous les risques pour récupérer une relique impie pour le compte d’un employeur pas vraiment compréhensif. Les nostalgiques du Vieux Monde et de l’archéo-fluff souriront à la rencontre des quelques easter eggs que l’auteur a glissé au fil des pages2. Tous reconnaîtront que Reynolds sait s’y prendre pour dépeindre les côtés peu reluisants d’une métropole med-fan, quadrillée par les sociétés secrètes en tout genre, les cultes chaotiques de quartier et les exécuteurs des basses œuvres d’éminences d’un gris souvent très foncé. Une chose est sûre, cela donne plutôt envie de découvrir quelles sont les sept autres lamentations que ce distrait de Khorne a égaré dans les Royaumes Mortels, dans ce qui pourrait bien être la série la plus intéressante des premières années d’Age of Sigmar. Les paris (et les enchères) sont ouverts…

1 : À quand la sortie du supplément ‘Quelque chose de pourri à Hammerhal’ ?
2 : On peut d’ailleurs s’étonner que la BL ait laissé passer la mention faite à Necoho, divinité chaotique désavouée par GW depuis des lustres. Ne boudons pas notre plaisir, ce n’est sans doute pas demain la veille que nous recroiserons ce Dieu renégat.

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Pantheon – G. Haley:

INTRIGUE:

PantheonÀ une époque lointaine et plus heureuse, Sigmar prit sur lui de faire construire l’équivalent de Strasbourg (une ville avec du cachet + un lieu de rassemblement pour les décideurs politiques) sur la plus haute montagne d’Azyr. Nommé Highheim, ce qui sonne convenablement alsacien vous le reconnaitrez, ce complexe accueillit pendant un temps, voire une ère, les Dieux (plus ou moins) civilisés qui formèrent le panthéon des Royaumes Mortels. Puis le Chaos arriva, et chacun repartit dans ses pénates, laissant le pauvre Ziggy errer comme une âme en peine dans les allées désertes de la Theopolis.

La guerre totale décrétée par le divin barbu contre les quatre affreux est toutefois l’occasion pour le premier de réactiver ses vieux réseaux, et par une belle mâtinée pas encore tout à fait ensoleillée, il invite Alarielle à faire un Teams (avec webcam) pour parler du bon vieux temps. Au début franchement sur la défensive – ne pas oublier que la blitzkrieg sigmarienne a failli très mal finir pour elle – la Déesse finit par se détendre un peu, et accepte d’accompagner son hôte jusqu’à la place centrale du Highheim, où se trouve comme de juste une pièce d’eau. Mais attention, ce n’est pas n’importe quoi : plutôt qu’un bête bassin avec une fontaine rococo et des fientes de pigeon sur la margelle, il s’agit d’un miroir argenté créé par le mage Sanasay Bayla, et offert au Panthéon comme cadeau, outil et avertissement. Bayla, qui n’était pas la moitié d’un abruti, a en effet réussi à réaliser une œuvre qui permet à qui la contemple de voyager dans l’espace et dans le temps. Si Sigmar a tenu à ce qu’Alarielle vienne avec lui devant le miroir, ce n’est pas pour tenter de conclure avec la seule Déesse un tant soit peu accorte de son entourage (on est d’accord que Morathi est un peu creepy sur les bords), mais pour mater ensemble la vie de Brian Bayla, qui en plus d’être distrayante – on parle tout de même d’un type qui a réussi à maîtriser cinq des huit formes de magie – pourrait se révéler instructive.

La caméra se braque donc sur le mage prodige, au moment où une crise existentielle le saisit. A force d’exceller en tout, notre homme ne sait plus quel but se donner dans la vie, et après mûre réflexion, il décide d’aller vérifier si les Royaumes Mortels ont bien une fin physique, just for the thrill of it. La première étape de cette odyssée est de fact checker le sujet auprès d’une sommité en la matière, et comme Bayla a le bras long et le cœur bien accroché, il monte tout en haut du minaret du temple de Teclis le plus proche, entre en transe et se téléporte directement auprès du Dieu, qui lui assure que l’on peut bien s’asseoir sur le rebord du monde1. Cependant, cela n’est pas donné au premier clampin venu, car il faut passer par une porte secrète qui ne peut s’ouvrir qu’avec une clé forgée exprès par Grugni, puis terrasser un monstre immortel. Ca fait cher le coup d’œil.

Ce topo ne fait cependant pas peur à Bayla, qui abandonne séance tenance femme et enfants pour se lancer dans ce trek de l’extrême, ce qui l’occupe pendant quelques années. S’il ne parvient pas à négocier une audience auprès du Dieu forgeron lorsqu’il se rend à son temple de Chamon, il réussit tout du moins à obtenir un double de la clé en partageant sa Rince-Cochon avec le Nain Blanc (qui passait dans le coin). Il trouve également une astuce pour venir à bout du loup géant (Afrener) qui garde l’accès au bord du monde en se suicidant à 99% pour pouvoir rencontre Nagash, qui accepte d’euthanasier l’encombrant clébard en échange de cinq siècles et cinq jours de servitude post-mortem. Faut ce qu’il faut.

Ces obstacles enfin négociés, Bayla peut enfin boucler son périple, et contempler l’immensité magique et chaotique où les Royaumes (ici Ghyran) commencent et s’achèvent. Il est cependant immédiatement alpagué par un Magister de Tzeentch, qui essaie de lui vendre un plan de carrière mirobolant en l’échange de son âme, mais qui commet l’erreur de révéler que l’équilibre perso-pro ne serait alors pas vraiment respecté. Car Bayla est, au fond de lui, un authentique pater familias, et toutes ses pérégrinations lui ont ouvert les yeux sur le fait qu’il n’a pas été très présent au cours de la dernière décennie. Raccrochant violemment au bec de son démarcheur (ou l’équivalent dans les Royaumes Mortels), il repart dare dare en direction de son foyer, non sans avoir eu la vision d’une époque lointaine où ce dernier serait frappé par la guerre. Sachant qu’il ne serait plus là pour le voir, et donc l’empêcher, il décide de créer son fameux miroir pour que les Dieux puissent s’en servir dans leur veille constante contre le Chaos. Ce qui nous ramène au point de départ et à Highheim.

La nouvelle se termine sur un petit speech de Sigmar à sa bonne amie, qu’il voudrait plus active auprès des mortels afin de contrecarrer les fake news répandues par le Chaos à propos de la vie éternelle qui attendrait les serviteurs des puissances de la ruine. Qui de plus qualifié que la Déesse de la Vie pour porter ce message optimiste et philosophique auprès des habitants des Royaumes Mortels, hein ? Alarielle lâche un gros « mouais, j’y penserais » et repart semer du gazon en Ghyran, laissant Sigmar passer la mop et fermer la lumière sur Higgheim. C’est pas tous les jours facile d’être un petit patron.

1 : C’est malin, je vois maintenant Teclis avec la moustache de Francis Cabrel.

AVIS:

On savait Guy Haley très à l’aise dans le registre « mythique », qu’il est l’un des seuls contributeurs de la Black Library à pratiquer de manière régulière1, et ‘Pantheon’ est sans doute sa soumission de référence en la matière. Il parvient en effet à mettre en scène une épopée légendaire comparable à celle Gilgamesh (un héros d’une puissance quasi-divine s’embarque dans une quête impossible), transposée dans l’univers d’Age of Sigmar, et même plus largement, de la GW-Fiction, comme les références au Monde qui Fut qui émaillent le récit le dénotent. On se laisse embarquer dans ce voyage très différent des nouvelles ordinaires de la BL, où le moindre personnage est un Dieu, une Bête Zodiacale ou un individu mythique, et qui se termine comme souvent dans ce type de littérature par un enseignement moral à méditer (ici un bon carpe diem des familles). C’est à la fois rafraichissant et bien réalisé, et mérite donc vraiment d’être lu par celles et ceux qui souhaitent explorer le catalogue de la Black Library à la sauce AoS. Un classique en devenir, à mon humble opinion.

1 : Voir sa série sur le Prince Maesa, par exemple.

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Vault of Souls – E. Dicken:

INTRIGUE:

Envoyés par Sigmar en personne explorer Shadespire à la recherche de toute information utile à l’amélioration du processus de Reforge des Stormcast Eternals, et en particulier l’effritement de leur personnalité au fil du temps (le fameux syndrome de délavage), le Knight Incantor Averon Stormsire et ses deux acolytes (Ammis et Rastus) sont sur une piste aussi prometteuse que dangereuse : celle du Katophrane Thalasar. Ce dernier est passé maître dans l’art nécromantique, ce qui pousse Stormsire à penser qu’il pourrait utiliser ses savoirs (un peu impies certes, mais on ne fait pas de surhommelettes sans casser des œufs) pour avancer dans sa propre thèse de recherche fondamentale. Problème, Thalasar est discret, et remonter sa piste n’est pas facile, même pour un arcaniste du talent de notre Knight Incantor. Problème bis, Thalasar était le gardien de la Briar Queen avant que le Nécroséisme ne vienne la libérer, et cette âme damnée n’a pas oublié les millénaires de tourments qu’elle a subi des mains de son geôlier. Son but dans la non-vie est donc de lui rendre la pareille, et elle hante (haha) elle aussi la Nightvault à la recherche de sa proie.

Les Cursebreakers disposent toutefois d’un coup d’avance grâce à leurs sacro-saints pouvoirs, qu’ils mettent à contribution pour localiser, immobiliser et fouiller une construction nécromantique de Thalasar, faisant office de raffinerie à âmes mobile. L’automate collecteur n’avait cependant pas été laissé sans surveillance par son propriétaire, et le trio de choc doit affronter un golem animé par une source d’énergie particulièrement détestable pour nos vertueux héros : l’âme d’un de leurs cousins de chambrée. Grâce au copieux grimoire de sort de Stormsire, la menace est neutralisée, et le chemin menant vers le laboratoire secret de Thalasar localisé grâce un rituel tellement limite-limite que l’acariâtre meneur de bande demande à ses sous-fifres de l’attendre dehors pendant qu’il fait sa petite affaire. Il me faut préciser ici que l’ambiance n’est pas au beau fixe chez les Cursebreakers, Stormsire étant l’archétype du vieux de la vieille aigri et cassant, tandis que Rastus est un newb plein d’enthousiasme affublé d’une fâcheuse tendance à foncer dans le tas sans réfléchir. Ammis quant à elle essaie de fluidifier les échanges entre ses collègues, mais souvent sans résultat.

Ces considérations psychologiques doivent cependant être remises à plus tard, car l’écho de la bataille et le rituel de Stormsire a attiré la Briar Queen et son épineuse cour de spectres, et une confrontation ne serait pas forcément en faveur des Stormcast Eternals (peut-être que c’est la méta qui veut ça). Guidé par sa vision, Stormsire peut toutefois entraîner sa troupe en direction du repaire de Thalasar, situé au plus profond de la Nightvault, et juste en dessous du trône où la Briar Queen a passé quelques siècles à se faire spiritboarder. Les Cursebreakers sont accueillis par une vision de mauvaise augure de Stormcast se faisant laminer et dépouiller de leur âme et de leur matos par les golems du Katophrane, ce qui explique pourquoi les pertes ont été si élevées lors de la première exploration de Shadespire par les larbins du divin barbu. Et bien évidemment, le piège que leur avait tendu Thalasar ne manque pas de se refermer sur eux…

Début spoiler…Le Katophrane reclus était en fait aussi intéressé par Stormsire que ce dernier, et cherchait à l’attirer dans son laboratoire afin de s’incarner dans son corps1. Terrassé par la douleur de cette tentative d’usurpation d’identité, Stormsire ne peut qu’assister du coin de l’œil à l’attaque brave mais futile de Rastus contre les sortes d’aimants à âmes que Thalasar a installé dans son sous-sol, et qu’il utilise pour animer ses golems. Les éclairs conjurés par l’Evocator sont en effet absorbés par la machinerie infernale au lieu de l’endommager, et les automates de Thalasar ne tardent pas à se mêler à la partie, pour ne rien arranger.

La solution viendra d’Ammis, qui sous ses airs de sainte nitouche, avait retenu les invocations pas très recommandables de son supérieur et les utilisera pour combattre l’influence néfaste de Thalasar. Ce léger sursis permet à Stormsire d’endommager le VPN arcanique déployé par le Katophrane sur son labo, attirant immédiatement l’attention de la Briar Queen, qui débarque avec pertes et fracas pour régler ses comptes avec son vieux copain, faisant s’écrouler le plafond sur les machines infernales de ce dernier et renversant par la même le cours de l’affrontement. Peu enclin à goûter sa propre médecine, Thalasar supplie Stormsire de le laisser crécher dans son cerveau pour échapper aux funestes intentions de la Briar Queen, et aurait sans doute obtenu un bail mental sans l’intervention d’Ammis, qui choisit de régler son compte au faquin d’un cri qui tue bien placé. Bien que Stormsire commence par lui reprocher sa prise d’initiative après que les Cursebreakers se soient tirés d’affaire dans la confusion de la bataille, il finit par réaliser que la prudence de l’Evocator était sans doute bien fondée. La journée n’a cependant pas été vaine, nos héros ayant recueilli l’âme de plusieurs Stormcast Eternals gardés comme batterie d’appoint par Thalasar dans leurs gourdes magiques, en plus d’avoir fait s’écrouler le laboratoire du Katophrane sur le suaire de la Briar Queen. Il faut parfois savoir remporter une partie grâce aux objectifs secondaires…Fin spoiler

1 : Petit rappel utile si vous n’êtes pas familier avec le fluff de Shadespire, les Katophrane ont été emprisonnés par Nagash dans des éclats de shadeglass (verre d’ombre ?). Pratique pour résister au passage du temps, mais plutôt restrictif en termes de mouvement.

AVIS:

Evan Dicken signe une masterclass dans le sous-genre particulièrement casse-gueule de la nouvelle d’Underwolds, sur lequel plus d’un contributeur de la Black Library s’est cassé les dents depuis que cette mini franchise dispose de son accompagnement littéraire, avec ce ‘Vaults of Souls’. Il y est parvenu en adoptant une approche pragmatique qui lui a permis d’éviter les écueils que les prémisses de cet univers (des bandes immortelles cherchant toutes à accomplir un objectif impossible) présentent à tout auteur cherchant à intéresser son lectorat à une aventure qui ne peut pas, par nature, s’achever. Voici comment il s’y est pris.

Premièrement, en créant un antagoniste original pour la bande à laquelle l’histoire est consacrée, ce qui a le grand intérêt de permettre aux héros de se débarrasser pour de bon de leur Némésis, au lieu de devoir souffrir l’infamie de la voir s’en tirer d’une manière ou d’une autre. Cela permet également d’éviter le classique, mais maladroit, « bande contre bande » que certains auteurs ont cherché à mettre en scène, avec des résultats généralement assez peu concluants (pour la raison ci-dessus, a.k.a. personne ne peut gagner). Notons tout de même qu’Evan Dicken a enrichi son histoire en intégrant les Epines de la Briar Queen à cette dernière, mais en prenant soin de ne jamais opposer directement les deux bandes sur le champ de bataille. À la place, leur rivalité pour embaucher Thalasar comme free lance permet de faire avancer l’intrigue de manière fluide, sans risquer de déboucher sur un bête statut quo.

Deuxièmement, en permettant à ses héros d’accomplir un objectif, même mineur, à la fin de leur aventure. Ici, il s’agit de la récupération des âmes de Stormcast : on est loin du secret de la Reforge sans déperdition d’énergie qui est le leitmotiv d’Averon et de ses gorilles, mais c’est tout de même une victoire notable pour ces derniers, et surtout, une progression nette par rapport au début de la nouvelle.

Troisièmement et pour terminer, en faisant évoluer ses protagonistes entre le début et la fin de la nouvelle, ce qui donne une bonne raison pour le lecteur de s’intéresser à leur sort. Le trio de Stormcast Eternals bénéficie de ces délicates attentions de character development : Averon Stormsire gagne en empathie envers ses camarades, Ammis sort de cette aventure légèrement corrompue par son utilisation de magie nécromantique, et Rastus a appris à réfréner sa nature impulsive. Bien qu’ils soient légers (et pour être honnête, il n’y avait pas grand-chose de plus que Dicken pouvait s’autoriser s’il ne voulait pas enfreindre son cahier des charges), ces changements donnent l’impression que les Cursebreakers ne sont pas un trio monolithique condamné à errer dans le sous monde jusqu’à la Fin des Temps (ou l’arrêt du jeu), mais une bande de héros affectés par leur quête.

Vous l’aurez compris, c’est une franche réussite en ce qui me concerne, et un, si ce n’est le, modèle à suivre pour les prochaines nouvelles de Warhammer Underworlds.

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The Road of Blades – J. Reynolds:

INTRIGUE:

The Road of BladesAhazian Kel est ce que l’on peut appeler un routard des Royaumes Mortels. Guerrier accompli et sans pitié, il a tout sacrifié (y compris sa famille et sa tribu) pour se vouer à Khorne et devenir le plus grand dresseur Pokémon la guerre incarnée, avec un certain succès il faut le dire. Au début de notre propos, nous cueillons cette grande baderne flegmatique (y a pas grand-chose qui touche sa hache qui fait bouger son marteau) au saut du cheval, sa monture ayant prise une flèche dans l’œil après qu’il ait été repéré par un groupe de maraudeurs de Caldera alors qu’il parcourait les Herbes Noires, une steppe d’Aqshy. Peu impressionné par cet accueil hostile, Ahazian découpe quelques-uns de ces faquins mongoloïdes, ce qui convainc les survivants d’aller voir ailleurs s’il y est. L’Elu de Khorne peut donc reprendre sa route, qui doit le mener… à une autre route, mais pas n’importe laquelle : il a en effet reçu des présages insistants l’enjoignant à rejoindre la légendaire cité de Soulmaw, située à la croisée des Royaumes et centre névralgique de la production d’armes et d’armures des hordes du Dieu du Sang. Pour cela, il est nécessaire d’emprunter une huit voies, connue sous le nom de Route des Lames.

L’appellation n’est pas mensongère, comme il ne tarde pas à s’en rendre compte, puisque cette route est littéralement constituée de lames fondues ensemble, comme si un conquérant Targaryen anonyme avait eu des envies de tapis plutôt que de fauteuil. A chacun ses goûts. Comme Khorne n’est pas du genre à ménager ses champions, Ahazian est confronté à quelques épreuves sur le chemin de Soulmaw : des Epées de Vive-Argent s’extirpent de la route et lui tombent sur le râble, des automates tueurs lui refusent la priorité, et d’autres aspirants attirés par les mêmes présages de carnage et de grandeur que lui cherchent querelle alors qu’il attend à la sortie de la bretelle de péage. Pas vraiment ce qu’on peut appeler de la mobilité douce. Le sanguin A-ha est bien décidé à resteeeeeer sur sa route, en recourant au meurtre si nécessaire, mais avant que l’irréparable ne se produise, il est téléporté à l’intérieur d’une forge spacieuse mais rustique, où le maître des lieux lui accorde audience.

L’hôte en question, le Skullgrinder Volundr, n’est pas n’importe qui. Il s’agit de l’un des huit Maîtres de Forge de Khorne, soit l’élite de la crème des forgerons chaotiques. Chacun d’entre eux a notamment créé l’une des huit Lamentations du Dieu du Sang, armes exceptionnelles que Khorne avait offert à ses frères1, et qui furent perdues pendant l’Âge du Sang. Vovo a ainsi confectionné l’épée Coupemoelle (Marrowcutter, c’est à peine moins ridicule), trempée dans le sang de cent démons. C’est lui qui a convoqué Ahazian, car il sait que les armées du Chaos auront bientôt besoin d’être menées par des héros maniant des armes légendaires, et il a pressenti que notre homme, s’il est le dernier des Kel, n’était pas le dernier des abrutis, et pourrait avoir l’étoffe nécessaire pour le job. Pour en être sûr, et comme c’est la tradition lors de recrutement à la Khorne Khorp., il défie Ahazian en duel, et se fait vaincre par une fourchette dans les yeux vicelarde mais réglementaire. Satisfait par le fighting spirit de sa recrue, il lui remet une hache bien stylée, et le prend à l’essai pour un premier contrat. La suite dans ‘The Spear of Shadows’.

1 : Ce qui est assez stupide de sa part car cela fait 2.666666666666667 armes par Dieu. Il en aurait fait 9, ça aurait été plus simple.

AVIS:

Nouvelle présentant les origines du principal antagoniste de ‘The Spear of Shadows’ et contextualisant la légende entourant les Lamentations de Khorne, ‘The Road of Blades’ n’a curieusement pas été nommément reliée au cycle éponyme par la Black Library, alors qu’elle y a toute sa place. Il n’en reste pas moins que cette histoire de champion chaotique embarqué dans une quête mortelle et affrontant des dangers aussi variés que surnaturels (Chaos oblige) se laisse lire sans problème, et permet à Reynolds de nous livrer un beau spécimen d’anti-héros aussi charismatique que détestable. Comme le dit l’adage, une bonne histoire repose en grande partie sur la qualité de son méchant, et Ahazian Kel est un (futur) antagoniste auquel on s’attache rapidement. Lecture essentielle si vous vous lancez dans la saga, malheureusement inachevée, de Reynolds pour Age of Sigmar, et sympathique sinon.

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Bear Eater – D. Guymer:

INTRIGUE:

Bear EaterToujours en maraude dans les Royaumes Mortels (ici en Ghur) avec ses Astral Templars pour le compte du patron, Hamilcar Bear Eater voit une occasion en or d’agrandir le protectorat sigmarite se présenter à lui lorsqu’il arrive en vue de la cité de Jercho. Miraculeusement épargnée des déprédations des hordes du Chaos, cette ville ferait un bastion idéal pour les croisés d’Azyr… si Hamilcar arrive à convaincre son monarque, le Roi Soleil Joraad el Ranoon, de rejoindre le camp de l’Ordre. Rien de plus facile pour notre héros, dont les prouesses martiales ne sont égalées que par ses talents de diplomate (du moins c’est comme ça qu’il voit les choses, en sa qualité de plus grand fan de lui-même).

Après une petite parade militaire réalisée dans des conditions éprouvantes (#SousLeSoleilExactement), même pour des immortels en sigmarite, Hamilcar et ses lieutenants (le vieux bougon Broudiccan et un random dude du nom de Thracius) sont pris à parti par une émissaire de Jojo et sommés de laisser leurs armes au vestiaire pour respecter le protocole officiel. Lorsque nos trois compères finissent par obtempérer, ils ont la désagréable de surprise de constater qu’ils sont tombés dans un piège, une petite armée de gardes se déversant dans le hall avec des velléités peu charitables envers les Stormcasts.

Punk à chien gryffhound dans l’âme, Hamilcar ne perd pas de temps à tenter de résoudre ce conflit par la parole, et commence à zlataner à tout va les malheureux mortels qui lui passent sous la main. Ayant manifestement sous-estimés la puissance de leurs adversaires, les miliciens de Jercho finissent par battre en retraite, laissant toute latitude à notre héros de monter une expédition punitive envers ce pendard de Joraad el Ranoon (officiellement) et d’annexer la cité pour la plus grande gloire de Sigmar (officieusement)1. Sur le chemin de la salle du trône, il rencontre une vieille connaissance, le général Sarmiel el Talame, avec qui il a fait le coup de feu contre les Sankrit quelques semaines auparavant, et qui l’avait mis sur la route de Jercho après la bataille de Heliopalis. Miraculeusement convaincu par Hamilcar en l’espace de deux répliques qu’il était dans le camp des méchants, Sarmiel fait défection de la Garde Solaire et accepte de guider ses gros copains jusqu’au Palais de la Lune, où le Roi Soleil tient sa cour.

En route vers son objectif, Hamilcar développe un point de côté persistant2 et se retrouve confronté, en plus des bidasses solaires qui défendent le Palais, à des vampires feulant, preuve irréfutable du passage de ce coquin de Mannfred von Castein (ennemi juré de notre héros depuis qu’il s’est fait tuer par le Mortarque3) par Jercho. Il en faut toutefois plus pour empêcher l’injouable Mimil – qui se paie le luxe d’infliger une Mike Tyson à un suceur de sang un peu trop sûr de lui – de se frayer un chemin jusqu’à l’affreux Jojo. Ce dernier ne peut compter que sur ses rayons, des serviteurs totalement assujettis à sa volonté, pour faire office de derniers défenseurs, et place Hamilcar devant un dilemme cornélien pour le héros du Bien (avec un grand B et un grand nez) qu’il est : massacrer des innocents pour atteindre son objectif, ou les épargner et laisser le Roi Soleil s’en tirer à peu de frais…

Début spoiler…Malheureusement pour Joraad el Ranoon, une troisième voie était possible, à savoir embrocher le lumineux monarque sur son trône d’un jet de hallebarde bien senti. La mort rapide et sanglante du roitelet permet au moins d’établir qu’il n’avait pas été changé en vampire par Mannfred von Carstein, ce qui est… une information. Et le savoir est le pouvoir, paraît-il. La nouvelle s’achève sur cette conquête nette et (presque) sans bavure d’une nouvelle Cité de Sigmar par les Astral Templars. Du travail bien fait.Fin spoiler

1 : On peut remercier Guymer d’adapter un grand classique de la culture britannique à la sauce d’Age of Sigmar. Appelons ça le Fardeau du Mangeur d’Ours Blanc.
2 : Qui ne sera pas expliqué dans la suite de la nouvelle et n’aura pas d’impact sur la conclusion de cette dernière, mais suggère fortement que Guymer avait quelque chose de particulier en tête au moment de l’écriture.
3 : Voir ‘Beasts of Cartha’.

AVIS:

Je ressors de ce ‘Bear Eater’ avec une persistante sensation de gâchis au fond de la gorge (ou peut-être du cerveau), ce qui me désole au plus haut point compte tenu de mon attachement pour le personnage de Hamilcar, une des premières têtes d’affiche moderne (comprendre, un brin complexe) des Royaumes Mortels, et qui faisait ici ses grands débuts dans la carrière. En cause, le choix de David Guymer de placer son intrigue dans un cadre exotique et singulier (donc intéressant) en diable, mais de confiner ce dernier à une toile de fond au profit d’une nième baston entre Stormcast Eternals et locaux impénitents. La deuxième moitié de la nouvelle vient ainsi ruiner le travail de world building de la première, en se focalisant uniquement sur les exploits martiaux du fortiche Hamilcar, qui parviendra une fois encore et sans aucune surprise à vaincre l’affreux vilain que la destinée lui a mis sur son chemin. Et comme les compétences martiales de sa Némésis du jour (ou de la nuit) culminent à « lever le bras d’un air vaguement menaçant », on n’a même pas le droit à un combat final digne de ce nom, comme cela avait été le cas lors d’épisodes précédents de la série.

De manière générale, il se perçoit bien trop clairement à la lecture que ‘Bear Eater’ n’est qu’un segment d’un arc narratif bien plus large, dans la droite ligne des événements relatés dans ‘The Realmgate Wars’, écrits à quatre mains par Guymer et Josh Reynolds lors des premières années d’Age of Sigmar. Les références à la traque de Mannfred von Carstein sont tellement nombreuses au fil des pages que je soupçonne que cette nouvelle devait initialement faire partie d’une nouvelle tétralogie (comme ‘The Hunt for Nagash’ et ‘Knights of Vengeance’), avant que le projet soit abandonné pour une raison non précisée. Cela expliquerait aussi cette fin des plus abruptes ainsi que le traitement bizarre réservé au personnage de Sarmiel el Talame, qui semble avoir un passif conséquent avec Hamilcar et ses Astral Templars : je suis prêt à mettre une pièce sur le fait que cette première rencontre aurait dû faire l’objet d’une nouvelle ou d’un audio drama. Bref, un véritable et regrettable accident de parcours pour la paire Guymer & Hamilcar, sans doute causé par les errements éditoriaux de la Black Library à l’époque.

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Gravesend Gold – C. L. Werner:

INTRIGUE:

Les affaires n’ont pas été bonnes ces derniers temps pour le capitaine Brokrin Ullisson et l’équipage de l’Iron Dragon. Après les tapisseries pleines de rats de la lamaserie de Kheitar (‘Shiprats’) et les manticores mal lunées de Silverreach (‘Overlords of the Iron Dragon’), les ports d’attache visités récemment par l’Ironclad n’ont pas permis aux Kharadrons de se refaire, et le spectre d’une campagne déficitaire plane désormais sur les Duardins. Aussi, lorsque la vigie repère l’épave d’un vieux modèle de cargo volant Kharadron encastré dans une falaise, Brokrin saute sur l’occasion et met le cap sur le lieux de l’accident afin de fouiller cette trouvaille miraculeuse à la recherche de quoi remplir sa cale.

La chance semble enfin sourire à l’Iron Dragon lorsque les explorateurs mettent la main sur une cargaison d’or profond, un minerai incroyablement rare dont la source s’est tarie depuis des siècles, pendant les soubresauts de l’Âge du Chaos. Bien que l’épave exsude une aura inquiétante, qui met mal à l’aise ceux qui s’en approchent trop, Brokrin et ses hommes repartent avec un lingot échantillon, et se promettent de transbahuter le reste du magot sur leur rafiot dès le lendemain, lorsque les conditions de luminosité permettront une opération sécurisée. Car si les Kharadrons sont avides, la sécurité sur le lieu de travail est strictement réglementée dans leur Code, et aucun capitaine digne de ce nom ne risquerait de se faire intenter un procès aux Prud’uardin pour mise en danger de ses employés.

Toutefois, la tombée de la nuit provoque un événement fâcheux : l’épave se transforme en vaisseau spectral, manœuvrée par un équipage d’esprits de Kharadrons des temps jadis, et part à la poursuite de l’Iron Dragon pour reprendre ce qui lui appartient. Malgré la diversité et la puissance de l’armement dont dispose l’Ironclad (canons, mine volante, harpon géant…), rien n’arrête la menace fantôme, et l’abordage tant redouté finit par se produire. Les pistolets et coutelas étant aussi inefficaces contre les ectoplasmes barbus qu’un déodorant sur un Grand Immonde, l’affaire semble bien mal engagée pour Brokrin et Cie

Début spoiler…Heureusement, le capitaine n’est pas le dernier des abrutis et comprend vite que ses visiteurs ne souhaitent que rentrer en possession de leur lingot. Bien qu’ils n’en ont guère l’usage dans l’état où il sont réduits, cela n’affaiblit pas le moins du monde la légitimité de leur requête, et Brokrin peut respecter cela. Cependant, il ne s’attendait pas à ce que son homologue mort-vivant demande en sus à être compensé pour le dommage moral subi. Mais le Code étant le Code, et lui-même guère en position de refuser quoi que ce soit à un adversaire éthéré au dernier degré, il n’a d’autre choix que de consentir à ce que les quelques marchandises que l’Iron Dragon ramenait à bon port soient accaparées par ses visiteurs nocturnes. Voilà qui lui apprendra à laisser les épaves abandonnées tranquilles…Fin spoiler

AVIS:

Ça sent très fort la panne d’inspiration du côté de C. L. Werner avec ce très quelconque ‘Gravesend Gold’, qui vient « conclure » le premier arc de l’équipage de l’Iron Dragon sans apporter le moindre développement digne de ce nom à ses personnages. Pour un scénariste aussi consommé que notre homme, se contenter d’une simple fouille d’épave qui se termine mal, sans aucune surprise dans le déroulé ni dans l’issue de l’histoire, est un aveu de je m’en foutisme assez patent. Sans doute une commande expédiée à la va-vite pour faire plaisir à la Black Library… Quoi qu’il en soit, on peut faire l’impasse sans problème sur cette micro-péripétie et se concentrer sur ‘Shiprats’ et/ou sur les nouvelles de Drekki Flynt de Guy Haley, si on est à la recherche de khourts formats digne de ce nom.

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The Tainted Axe – J. Reynolds:

INTRIGUE:

The Tainted AxePeu de temps après les événements relatés dans ‘Spear of Shadows’, nous retrouvons le chevalier – ou plutôt, demigryphier – Roggen de Ghyrwood March, de retour en Ghyran avec une main en moins et des souvenirs en plus. Ayant refusé l’offre de Grugni de remplacer son membre manquant par une réplique mécanique, au profit d’une solution plus naturelle, notre héros n’a toutefois pas trouvé chaussure à son pied ni prothèse à son moignon. Sa convalescence prend un tour particulier lorsqu’il se sent appelé une nuit dans le bosquet de ferbois consacré de son ordre, où l’attend une Branchwraith mutine, avec une nouvelle quête divine à lui confier.

Loin au Sud se trouve le Gaut Tors1, une forêt qui a cruellement souffert des déprédations de Nurgle et des ses séides au cours des dernières années. Un champion du Dieu des maladies y a jadis mené une expédition corruptrice, dont il n’est jamais revenu mais qui a résulté en l’abandon de sa hache maudite sous un tas de feuilles. Depuis lors, cette arme maléfique corrompt les bois aux alentours, comme une pile au mercure enterrée dans l’humus. La mission de Roggen consistera donc à localiser cette relique impie et à la ramener à sa commanditrice, qui en échange de ses bons et loyaux ordonnés services lui fera pousser une nouvelle menotte. Bien que notre héros ne soit pas né de la dernière pluie, et se méfie à juste titre des fantasques Sylvaneth, le serment d’allégeance à Alarielle qu’il a prêté en devenant chevalier, et l’attrait de retrouver la main, le convainquent rapidement d’accepter cette quête. Avant de retourner écouter pousser les fleurs, la Branchwraith a l’amabilité de lui adjoindre les services d’un sherpa forestier, en la personne compacte mais grincheuse d’un esprit de la forêt.

Nous suivons alors Roggen, son guide mal-luné (il passe son temps à appeler le chevalier « viande », ce qui n’est guère aimable) et sa farouche monture (Harrow) jusque dans les profondeurs mal famées du Gaut Tors. Bien que sa patronne lui a promis qu’il aurait un droit de passage auprès des Sylvaneth du cru, le fait que ces derniers soient perturbés par les émanations toxiques de la hache perdue d’une part, et leur allégeance à nulle autre que Drycha Hamadreth d’autre part (un petit détail que la Branchwraith avait omis de préciser à son prestataire pendant le briefing), n’incitent pas Roggen à la détente de son slip (en bois, comme le reste de sa garde-robe). Le trio finit toutefois par arriver dans une clairière, où un petit groupe de Rotbringers est à pied (gangréné) d’œuvre, et vient d’exhumer une sorte de cocon de racines calcifiées, qui ne peut être que le réceptacle de cette fameuse hache.

Confiant dans ses capacités de bretteur et l’effet de surprise, Roggen fonce dans le tas avec abandon, mais se retrouve rapidement en difficulté, notamment du fait que ses adversaires ont apporté avec eux des arbalètes, ce qui n’est pas très fluff tout de même. Avant que l’impétueux chevalier n’ait été transformé en hérisson manchot (ce qui vaut mieux qu’un échidné pingouin, qu’on se le dise), une voix tonitruante vient intimer aux Nurgoons de cesser le feu. Il s’agit du Blight Knight qui commande l’expédition des prouteux, et qui, en véritable chevalier de l’ordre de la mouche, propose à Roggen de régler l’affaire par un duel tout ce qu’il y a de plus honorable, et au gagnant le loot. N’ayant pas de meilleure option sous la main, notre héros accepte la proposition de son adversaire (Feculus), et les deux champions se mettent sans tarder à l’ouvrage.

Si sa monture parvient sans mal à vaincre le destrier démoniaque de sa Némésis, Roggen éprouve quant à lui les pires difficultés à tenir tête à cette dernière, qui est à la fois plus forte et plus résistante que lui. Au bout du compte, il faudra l’intervention, pas vraiment fair play mais très secourable, de son sidekick végétal (qui utilise l’attaque airbark) pour que Roggen parvienne à vaincre l’ignoble Feculus. La mort de leur patron libère toutefois les Rotbringers de leur serment de non-intervention, et le chevalier Dubois n’aurait pas fait long feu sans l’arrivée à point nommée des Sylvaneth du Gaut Tors, qui se font un plaisir d’offrir une démonstration de bio compostage express à leurs ennemis honnis. Cela laisse le temps à Roggen de repartir avec sa relique rouillée, et de se retrouver en bout du compte avec une greffe maniable. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.

1 : Je ne sais pas si cette nouvelle a été traduite en français, mais je suis hyper fier de ma proposition (Writhing Weald en VO).

AVIS:

On ne le savait pas encore à l’époque de sa publication, mais ‘The Tainted Axe’ constituait la dernière apparition du chevalier Roggen de de Ghyrwood March, l’un des personnages attachants1 créés par Josh Reynolds dans le cadre de sa saga – laissée inachevée – des Lamentations de Khorne. Si cette péripétie mineure ne se place pas parmi les meilleures soumissions de notre homme, on y retrouve toutefois les points forts habituels de sa prose, à savoir des personnages intéressants (mention spéciale au jovial Feculus, que l’on retrouve cité dans les écrits consacrés par Reynolds à l’ordre de la mouche), une intrigue et un développement qui tiennent la route, et une généreuse dose de fluff pour napper le tout. Des nouvelles comme ça, je pourrais en lire 10 par jour sans me lasser. A mettre entre toutes les mains (haha).

1 : Notamment parce qu’il a pas mal de traits communs avec Erkhart Dubnitz, du très saint et très violent ordre de Manann, un des héros les plus hauts en couleurs de la Black Library.

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The Witch Takers – C. L. Werner:

INTRIGUE:

The Witch TakersMis sur une sale histoire de meurtre dans la ruralité profonde du Khanat d’Arkl, en Chamon, les chasseurs de sorcières Esselt et Talorcan, unis à la scène comme à la ville, remontent une piste, forcément chaude, à travers les dunes du désert de Droost. De villages martyrs en tombes profanées et cadavres possédés il ne faut pas longtemps à notre fine équipe pour subodorer que quelque chose de pas sigmarite se cache au fond de ce dossier. Il semblerait que quelqu’un hante Droost avec pour seule mission de massacrer tout ceux ayant le malheur de croiser sa route. Quelqu’un… ou quelque chose, qui asservirait ses hôtes les uns après les autres, passant de main en main et ne laissant que les dépouilles de ses victimes et de ses porteurs derrière lui. Alors que les deux Répurgateurs approchent l’oasis de Tora Grae, miraculeusement épargnée par la folie environnante, il leur faudra agir rapidement et intelligemment pour empêcher le Tournetueur (pun intended) de commettre un nouveau carnage…

AVIS:

C.L. Werner qui met en scène un duo de Répurgateurs embarqués dans une quête qui les conduira dans quelque sinistre recoin de leur « circonscription » : du tout cuit pour l’auteur de la (plutôt bonne) série des Mathias Thulmann me direz-vous. C’est aussi ce que je pensais avant de commencer la lecture de ces Tueurs de Sorcières, et me suis donc surpris à reconsidérer légèrement ce postulat une fois passé le point final. Comme quoi, rien n’est gravé dans le marbre dans ce bas monde. La première divergence notable qui m’est apparue est la relation amoureuse unissant Esselt et Talorcan, ce qui n’a rien de rédhibitoire en soi (et est même suffisamment rare dans une publication de la Black Library pour qu’on puisse au contraire saluer l’audace de l’auteur), mais m’a semblé tellement éloignée des conventions usuelles de ce genre de littérature que mon expérience de lecture s’en est trouvée, pas polluée, le terme serait un peu fort, mais au moins perturbée par les roucoulades échangées par nos héros1. Passées ces considérations romantiques, l’intrigue que nous propose Werner ne s’avère pas être très haletante, la course poursuite par hôte interposé à laquelle se livrent Buffy, Xander et le bracelet perdu de Valkia la Sanglante suivant son cours avec une linéarité décevante, alors que la méconnaissance par nos héros de la nature et de la forme du mal qu’ils ont à combattre ouvrait la porte au développement de fausses pistes. Quant au binôme de choc proposé par l’auteur, il se révèle être d’une décevante platitude, Esselt et Talcoran ne s’écartant pas d’un pouce de leur stéréotype respectif (la paladine zélée et le rôdeur débrouillard), ce qui ne donne pas vraiment envie d’embrayer sur le roman que Werner leur a consacré (Le Cœur Corrompu//The Tainted Heart). Pour terminer, les apports fluff de cette nouvelle se comptent sur les doigts d’une main d’un Zombie de la Peste, le fait qu’elle se déroule dans un bout de désert perdu au milieu de nulle part ne jouant évidemment pas en la faveur d’inclusions significatives (même si ce genre de théâtre d’opérations n’est en rien rédhibitoire pour peu qu’on veuille s’en donner la peine, comme Guy Haley l’a prouvé avec Les Sables du Chagrin//The Sands of Grief). En conclusion, il ne reste guère que le métier de C. L. Werner pour faire tenir ces Tueurs de Sorcières debout, ce qui est suffisant pour une lecture rapide de l’ouvrage, mais à peine.

1 : Quand bien même ces dernières sont restées d’une sobriété bienvenue. C’est ainsi, j’ai du mal à voir des « Mon amour » apparaître dans une nouvelle de la Black Library.

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The Old Ways – N. Horth:

INTRIGUE:

Callis and Toll_The Old WaysAffecté à la surveillance de la cité d’Excelsis, dans le royaume de Ghur, le répurgateur de l’Ordre d’Azyr Halliver Toll, escorté de son sidekick Armand Callis, est envoyé par ses supérieurs tirer au clair une sombre histoire de disparition à Marshpoint, une ville agricole située en périphérie de la Cité des Secrets. Le fils aîné de la puissante famille Junica n’a en effet plus donné signe de vie après avoir eu maille à partir avec quelques soldats de l’autre grande famille locale, les Dezraed, qui l’ont poursuivi jusque dans les profondeurs de la forêt d’Ulwhyr. L’entente entre Junica et Dezraed n’ayant jamais été cordiale, c’est une vendetta en bonne et due forme qui menace d’éclater entre les Capulet et les Montaigu de Ghur, gueguerre qui mettrait en péril l’approvisionnement des régiments d’Excelsis en précieuse soie d’acier, ressource collectée depuis les fermes arachnides de Marshpoint. Il va donc de l’interêt général que cette triste affaire soit réglée dans les meilleurs délais, et qui de plus qualifié qu’un répurgateur pour traiter ce problème ?

Nous suivons donc Thalys et Colle au cours de l’enquête à laquelle ils se livrent à leur arrivée dans le bourg miteux et boueux de Marshpoint. Après un interrogatoire croisé des patriciens des deux familles, l’énorme et suintant Fenrol var Dezraed, autoproclamé Gardien de Marshpoint du fait de sa capacité de bloquer à lui seul l’entrée de la ville s’il lui prenait l’envie de s’asseoir en travers du portail, et le sec et irritable Kiervaan Junica, nos experts se rendent sur les lieux de la disparition à proprement parler, escortés par l’homme de confiance du patricien Junica, un natif du nom de Ghedren, et par un trio de gardes Dezraed. Et s’il se pourrait bien que la rivalité larvée entre familles nobles ait bien fait couler le sang, les enquêteurs feraient bien de prendre au sérieux les rumeurs entourant la Sorcière Blanche d’Ulwyhr. Après tout, ils ont pénétré sur son domaine…

AVIS:

C’est avec enthousiasme que j’avais vu revenir la figure iconique du chasseur de sorcières/répurgateur dans le lore d’Age of Sigmar, que son inclinaison high fantasy aurait pu « immuniser » à l’introduction de ce type de personnage, très grimdark par nature. La lutte contre les cultes chaotiques gangrénant le nouvel ordre rutilant de Sigmar constitue en effet à mes yeux un axe de développement des plus intéressants, et une prise de recul bienvenue sur le manichéisme caractéristique des premières années d’AoS. Encore fallait-il que l’image d’Epinal Hammerhal de l’inquisiteur traquant le vice et la trahison parmi les sujets obéissants de l’autorité centrale (préférablement divine, c’est plus classe) soit convenablement adaptée dans cette nouvelle franchise, la profession en question exigeant une rigueur morale confinant à la psychose, ce qui n’est pas franchement la norme parmi la soldatesque sigmarite (ces martel-sans-rire de Celestial Vindicators mis à part), dépeinte à de nombreuses reprises comme adepte du compromis et de la tempérance. Qu’en est-il avec la paire Callis & Toll, promise à un bel avenir au sein de la BL à en juger de la façon dont leurs noms ressortent dans tous les ouvrages auxquels ils ont été inclus ? Eh bien, c’est plutôt pas mal, encore que pas spécialement pour les raisons détaillées ci-dessus. Je m’explique.

Si le fanatisme (dans le bon sens du terme, car, si si, dans la littérature med-fan, cela existe) de nos héros laisse à désirer, la retenue dont fait preuve Toll, sensé être le vrai bad guy du duo, dans le jugement qu’il délivre au coupable, le plaçant à un petit 2 sur l’échelle de Mathias Thulmann (le référentiel absolu de la maison à cet égard), Horth se rattrape néanmoins en glissant quelques remarques de bon aloi à propos d’un certain White Reaper (Cerrus Sentanus sur son état civil), Stormcast Eternal pas vraiment Charlie, à tel point que son nom est utilisé pour effrayer les enfants d’Excelsis. Voilà un type qui mérite que l’on suive, et j’espère bien que ça sera le cas dans un futur pas trop lointain. Celà étant dit, The Old Ways a d’autres qualités, la première étant de proposer une petite enquête policière pas trop mal troussée au vu du nombre de pages limité avec lequel elle doit composer1, l’atmosphère horrifique du passage « sylvestre » du récit étant une autre source de satisfaction. D’autre part, cette nouvelle présente également l’intérêt de creuser le background de la cité libre d’Excelsis, qui devrait normalement ne pas disparaître corps et bien dans les annales du fluff, au vu du nombre d’apparitions qu’elle a faite dans divers écrits depuis son introduction dans le background. En apprendre plus sur cette bourgade présente donc un intérêt pour le fluffiste, tellement bombardé d’informations géographiques par ailleurs qu’on ne peut lui reprocher de ne pas prendre note de tout ce qu’on lui soumet.

Enfin, de façon plus large, elle fait ressortir un concept intéressant : le fossé existant entre natifs d’Azyr et populations locales au sein des cités libres, les seconds étant généralement mal considérés, voire méprisés par les premiers, qui les qualifient « d’Amendés » (traduction personnelle de Reclaimed, qui peut aussi s’entendre comme « Récupéré ») ou de « Sang Maudit » (curseblood), ce qui n’est pas très sympathique, mais ajoute de la profondeur à la société sigmarite. Quand on lit que même un personnage « égalitariste » comme Toll n’aurait pas de problème à raser toutes les forêts de Ghur pour pouvoir accélérer la colonisation de ce Royaume, au grand désarroi des locaux qui ont appris à vivre dans les étendues sauvages et à les respecter, on se dit que la possibilité d’un soulèvement des indigènes contre la métropole et ses représentants est une possibilité réelle… et c’est tant mieux en termes de potentiel narratif ! Bref, une plongée satisfaisante dans l’arrière-pays d’Excelsis, et une nouvelle qui vaut le coup d’être lue pour qui s’intéresse au fluff des cités libres.

On saluera également le twist proprement « meta » de Horth, qui fait dire à Toll qu’il avait identifié le coupable depuis belle lurette et attendait juste de voir combien de temps il faudrait à Callis (et donc au lecteur) pour faire de même. On ne me l’avait jamais faite celle-là.

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The Library of Forgotten Moments – J. Reynolds:

INTRIGUE:

Peu après les événements de ‘Soul Wars’, le Lord-Arcanum Balthas Arum des Anvils of the Heldenhammer décide d’aller faire retraite dans une bibliothèque perdue dans les montagnes de Shyish, afin de creuser son sujet de mémoire professionnel : la Reforge des Stormcast Eternals, et comment l’améliorer (ils ont tous le même, ces escrocs). L’endroit n’est mentionné que dans quelques vieux grimoires poussiéreux, et son accès n’est pas facile, mais il en faut plus pour décourager Balthas, qui arrive comme un prince, monté sur son gryph-charger Quicksilver, et est froidement accueilli par les archivistes morts vivants qui s’occupent de ce temple du savoir. Ayant juré qu’il venait en paix et après avoir montré sa carte d’étudiant, le Stormcast peut pénétrer dans l’édifice, contenant des montagnes d’ouvrages plus exotiques les uns que les autres.

Cependant, Balthas n’est intéressé que par un type bien précis de littérature : les classiques préhistoriques. La rumeur court en effet que la bibliothèque des moments oubliés (son petit nom) contient des savoirs prédatant les Royaumes Mortels, et venant du Monde qui Fut. Persuadé que la clé de sa quête d’information se trouve dans le lointain passé, Balthas part donc à la recherche des livres les plus anciens qu’il puisse trouver, bien aidé par ses sens arcaniques aiguisés. Après quelques temps, il finit par localiser une zone prometteuse, mais remarque un détail curieux sur les codex qu’il feuillette : si leur contenu semble bien provenir d’un autre temps, comme en témoignent l’usage d’écritures inconnues et le sentiment persistant de déjà-lu qu’il éprouve en les consultant, leur reliure est récente. Qui aurait pu écrire l’histoire d’un monde détruit il y a des milliers d’années ?

Cette question académique devra cependant attendre un peu, car l’étude de Balthas est interrompue par l’arrivée d’un autre visiteur, qui s’il rit beaucoup, n’en est pas sympathique pour autant : Mannfred Von Carstein en personne. Le Mortarque de la Nuit ayant été déclaré ennemi d’Azyr par Sigmar, le Lord-Arcanum se sent dans l’obligation d’appréhender le maraud, mais ce dernier ne se laisse pas faire. L’affrontement magique qui s’en suit dévaste quelques sections de la bibliothèque, forçant ses gardiens à s’interposer et à proposer aux belligérants de faire une trêve, en échange de l’accès au secret le mieux gardé de ces archives (quasi) infinies. Balthas et Mannfred partageant le même amour pour les informations confidentielles, ils acceptent de mettre leur inimitié en veilleuse pour quelques minutes et sont escortés par leurs hôtes jusqu’à une caverne située sous la bibliothèque…

Début spoiler…Cette dernière a la particularité d’accueillir un authentique fragment de Mallus, a.k.a. le Monde qui Fut, dont les éclats sont utilisés par l’armée de scribes qui travaille dans la grotte pour retranscrire des connaissances datant de cette époque légendaire. Ceci explique comment des incunables comme ceux négligemment carbonisés et réduits en compost par les deux affreux quelques instants plus tôt ont pu être proposés à la lecture. Cette découverte enchante Mannfred, qui se doutait bien que l’endroit recelait un secret pouvant intéresser Nagash, et avait multiplié les visites depuis plusieurs années afin de mettre la griffe dessus, en pure perte jusqu’ici. Cependant, Balthas refuse de laisser le vampire repartir avec le caillou antédiluvien, redoutant l’usage que le Grand Nécromancien pourrait en faire, et le fragile cessez-le-feu vole en éclat. Dans la bataille qui s’en suit, le Stormcast et le Mortarque semblent revivre les (douloureux) souvenirs de vies antérieures, et le premier remporte le match en poignardant son adversaire avec une écharde tirée du rocher miraculeux. Le cringe est trop grand pour Mannfred, qui se téléporte hors de la bibliothèque, laissant Balthas seul avec les archivistes. Lorsqu’il les interroge sur les raisons qui les ont poussés à lui révéler leur secret, ils répondent que c’est Mallus qui leur a demandé de le faire, sans doute pour permettre à un être digne de lui de bénéficier de sa gnose. Quoi qu’il en soit, Balthas a maintenant accès au Verrah Rubicon, et si on n’a plus guère entendu parler de lui depuis lors, c’est qu’il doit être en train d’en dévorer le fluff…Fin spoiler

AVIS:

Josh Reynolds fait plaisir aux fluffistes et aux amoureux de Warhammer Fantasy Battle en proposant une nouvelle clin d’œil aux événements de la Fin de Temps (qu’il a écrit en grande partie). Comme vous l’aurez sans doute compris à ce stade, et c’est encore plus évident à la lecture de cette histoire, Balthas Arum n’est autre que la réincarnation de Balthasar Gelt, et si Mannfred Von Carstein semble persuadé qu’il a déjà rencontré le Lord-Arcanum masqué (bon je triche, ils le sont tous), c’est parce que c’est le cas : après avoir trahi l’Empire et s’être réfugié auprès de Vlad Von Carstein, Gelt se fit tuer par Mannfred lors de l’ultime bataille de cette campagne eschatologique. Inutile de dire que si vous êtes au courant de ce menu détail, ‘The Library of Forgotten Moments’ est une gourmandise délectable, Reynolds se faisant un plaisir de faire comprendre au lecteur qu’il sait qu’il sait (qu’il sait). Pour les autres, cette nouvelle sera sans doute moins intéressante – soyons honnête, il ne s’y passe pas grand-chose au final – mais elle reste suffisamment bien écrite pour pouvoir être lue avec plaisir par l’amateur de GW-Fiction.

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Gods’ Gift – D. Guymer:

INTRIGUE:

Gods' GiftPrenant place après les évènements narrés dans Great Red et The Beasts of Cartha, pour ne citer que deux des précédentes aventures de notre fougueux héros, Gods’ Gift voit Hamilcar et quelques uns de ses potes des Astral Templars accomplir une mission d’intérêt général, sans doute pour avoir commis quelque tour pendable à une chambre rivale lors d’une permission à Hammerhall. Il s’agit en l’état de punir et faire stopper les exactions d’une bête monstrueuse s’amusant à disposer des hardis bûcherons d’un camp de colons récemment implanté dans les terres farouches de Ghur, tâche récréative pour des Stormcast Eternals de la trempe de nos gais lurons. Guidés par un local – Fage – qui malgré son âge vénérable semble tout émoustillé par la seule présence des Elus de Sigmar, Hamilcar & Cie s’embarquent donc dans une épopée aussi directe et rapide qu’une quête de zone de didacticiel de World of Warcraft.

Depuis le relevé de empreintes jusqu’à la constatation de l’heure du décès, ou plutôt, de l’abattage, il ne se passera ainsi qu’une petite journée, soit une vingtaine de pages pour le lecteur, juste le temps pour Ham’ de piquer un roupillon qui lui apportera un rêve plus ou moins prophétique, dans lequel un chêne vient lui chanter Je suis malade (ce qui est ‘achement dur pour un végétal, et mérite le respect), ce qui lui permettra de prendre une décision des plus inspirées quelques heures plus tard. La nouvelle se terminant pour un petit cliffhanger pas vraiment haletant, mais sans doute important pour la suite de la saga d’Hamilcar (Mark de son prénom), le lecteur en est quitte pour embrayer sur directement sur la première, ou plutôt le premier roman dédié à Guymer à sa coqueluche hirsute (Champion of the Gods), dans lequel il est presque certain que des réponses seront apportées aux questions laissées en suspens à la fin de Gods’ Gift.

: L’Homme Arbre qui s’était chargé de la besogne de déshumanisation – c’est comme la désinsectisation, mais avec des primates – servant de pied à terre racine à humus à une sylvaneth passablement enrhumée.

AVIS:

Malgré les dizaines de titres que compte sa bibliographie BL à l’heure actuelle, ce n’était que la deuxième soumission de Mr Guymer m’étant tombée sous la main depuis l’inaugural The Tilean Talisman, initialement publié en 2011. Et je dois dire que mon appréciation de l’œuvre du bonhomme est resté scrupuleusement identique, huit ans plus tard : des aptitudes certaines en terme de narration, avec des personnages au minimum distrayants, à défaut d’être immédiatement attachants (mention spéciale à Brouddican, l’Hillarion Lefuneste personnel de cette grande gueule d’Hamilcar), relevé par quelques notes boisées – c’est le cas de le dire – de fluff, plombées par une vacuité de l’intrigue assez rédhibitoire. C’est bien simple, celle de Gods’ Gift (d’ailleurs, on ne comprend pas vraiment quel est le don auquel Guymer fait référence dans le titre de sa nouvelle1) s’articule en deux temps trois mouvements, sans qu’on ait l’impression d’une quelconque progression entre le début et la fin de la nouvelle. Hamilcar traque un monstre. Hamilcar rêve d’un chêne. Hamilcar tombe dans une embuscade d’Hommes Bêtes (il faut bien qu’il montre qu’il est un cador du corps à corps). Hamilcar débouche sur un bosquet de chênes sacrés, gardé par… le monstre qu’il traquait. Coup de bol. Baston. Victoire. Fin.

Bref, rien de bien challengeant pour l’intellect du lecteur, qui aurait pu s’attendre à quelques liens de causalité entre les différents éléments constitutifs du propos de Guymer. Rien de tel ici, ou de manière tellement évidente et peu fine que les relever n’a pas grand intérêt. Comme dit plus haut, cela peut sans doute se justifier par le fait que Gods’ Gift est un rehaut littéraire à un travail plus conséquent, avec lequel l’auteur prend bien soin de faire la liaison. Telle la rondelle de tomate venant décorer une entrecôte frites, cette nouvelle peut être consommée si on a vraiment faim, mais ne remplira pas l’estomac pour autant. Et comme dit plus tôt (Décembre 2014, pour être précis), c’est plutôt cher payé pour ce que c’est. On me souffle dans l’oreillette que c’est fois ci, c’est gratuit. Bon. Mais avant cela, cela ne valait certes pas les 2,99€ demandés. Rem-bour-sez nos in-vi-tat-tions !

1 : Soit ce sont les visions vagues envoyées par Sigmar, soit c’est le photophore magique remis par icelui, et qui permettra à notre fier héros de venir à bout de Marylise Lebranchu. Au lecteur de décider s’il prend le messie ou la lanterne.

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Obsidian – D. Annandale:

INTRIGUE:

ObsidianBien que la mort soit importante à Nulahmia, l’amour a également sa place dans la métropole vampire, et c’est lui qui réunit Karya Treveign et Evered Halorecht dans la Grande Chapelle de la Fringale (ok c’est Night’s Hunger en VO et je me suis un peu emballé dans ma traduction). Nourrissant l’un envers l’autre une passion dévorante et sincère, malgré les siècles d’inimitié opposant leurs dynasties, les deux tourtereaux sont décidés à utiliser la mort récente et tragique du conseiller du père de Karya (Vorst), afin d’obtenir la bénédiction de Neferata à leur union. Seule la souveraine est en effet en mesure d’imposer l’arrêt des hostilités entre les Capulet et Montaigu de Nulahmia, et comme elle ne peut manquer d’aller rendre hommage au cadavre du noble vampire qui repose dans la Grande Chapelle, Karya et Evered n’ont qu’à attendre qu’elle arrive pour lui soumettre leur projet nuptial. Dans un bon jour, ou une bonne nuit, Nefarata accepte de bénir cette union pourtant porteuse de danger pour elle, comme sa conseillère et maîtresse espionne Mereneth lui fait remarquer : Treveign et Halorecht s’affaiblissaient mutuellement à travers leur futile vendetta, mais réunis en une seule lignée, ils pourraient devenir une force redoutable. Cela ne semble pourtant pas inquiéter outre mesure la Mortarque du Sang, qui décide même d’assister à la noce en personne.

Le jour venu, la cérémonie se déroule sans anicroche jusqu’à l’échange des vœux sangs entre fiancés, puis sombre de manière assez prévisible dans le chaos et l’émeute après que non pas un, mais deux assassins se soient manifestés au cœur de l’assemblée. Le premier fait perdre la tête à la matriarche Halorecht, et le second fait mine d’attaquer Karya : lorsque le chevaleresque Evered s’interpose, c’est lui qui hérite d’une lame en argent plein cœur, et va donc rejoindre sa vieille maman au paradis des vampires. Bouleversée par la tournure tragique qu’a pris le plus beau jour de sa vie, Karya reste un temps hébétée sur le cadavre de son cher et tendre, oublieuse de l’affrontement rangé qui oppose Treveign et Halorecht autour d’elle. Lorsqu’elle revient à elle, elle surprend toutefois le regard mauvais d’un membre de l’assistance, et comprend en un éclair que cette personne est responsable de cette tragédie…

Début spoiler…Ce qui est fort, reconnaissons-le, mais surtout pratique pour accélérer la résolution de l’intrique. Le coupable s’avère donc être Vorst Treveign en personne, et lorsque que Karya parvient enfin à le rattraper au sommet du beffroi de la Grande Chapelle, pour obtenir des explications sur son geste insensé, elle manque de se faire défenestrer par son paternel. Seule l’intervention salutaire de Nefarata évite le pire à notre héroïne, qui ne tarde pas à devenir matriarche de sa dynastie après que la souveraine ait réglé son compte au mauvais noceur. Mais pourquoi a-t-il agi de la sorte ? me demanderez-vous. Eh bien, pour plaire à Neferata, bien sûr. Vorst avait en effet été convaincu par sa reine de prouver sa loyauté à la couronne en provoquant un bain de sang pendant le mariage de sa fille. Malheureusement pour lui, Neferata trouvait également plus sage de le remplacer par une dynaste lui étant totalement acquise, par exemple parce que convaincue que sa suzeraine lui a sauvé la vie. Au final, la Mortarque du Sang sort de cette journée maritale plus forte que jamais, de potentiels rivaux ayant été transformé en laquais affaiblis et dévoués. Et elle vécut heureuse et eut beaucoup de descendants…Fin spoiler

AVIS:

La Nefarata de David Annandale est décidément très occupée par la vie sociale et amoureuse des nobles de Nulahmia (voir ‘The Dance of the Skulls’), mais comme l’auteur parvient à utiliser ces cérémonies mondaines comme trame et excuse pour nous faire entrer dans la complexe géopolitique de Neferatia de manière originale et efficace, on ne lui en tiendra pas rigueur. Les quelques pages de cette nouvelle suffisent en effet à Annandale pour nous servir une petite conspiration assez réussie, en ce qu’elle démontre bien à quel point Neferata est retorse, et manipule son monde pour maintenir un statut quo qui consolide son pouvoir. Le fait que nous ne soyons pas en mesure de découvrir l’identité du commanditaire du double assassinat de la rue l’église Morgue par déduction logique n’est donc pas si rédhibitoire que ça, car notre propos n’est pas tant un Whodunit qu’une chronique de la realpolitik vampirique.

Finalement, le seul défaut que je trouve à ‘Obsidian’ est une petite incohérence logique1 oubliée par un David Annandale plus intéressé par le développement du background de sa faction de cœur que par des basses considérations terre à terre. Tels Neferata à la fin de cette histoire, faisons preuve de magnanimité et pardonnons-lui.

1 : Annandale explique que les familles de vampires nobles ne transforment que l’aîné de leurs enfants en immortels, afin de préserver la lignée (les vampires ne pouvant plus se reproduire après le Baiser de Sang). Or Karya et Evered sont tous les deux vampires, et tous les deux enfants uniques.

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Hunting Shadows – A. Clark:

INTRIGUE:

Hunting ShadowsNeave Blacktalon, Knight-Zephyros des Hammers of Sigmar et chasseuse de têtes personnelle du grand barbu, opère traditionnellement seule. La mission sur laquelle son divin boss l’a mise, et qui l’a conduite sur les terres désolées d’Ashy, s’avère cependant tellement délicate que les autorités compétentes ont jugé bon de lui adjoindre du renfort, sous la forme du Knight-Venator Tarion Arl (et son aigle étoilé Krien) et d’une unité de Vanguard-Palladors, menée par une vieille connaissance avec laquelle elle a déjà coopéré pour disperser une bande de hippies ayant monté une opération escargot1 dans les Royaumes Mortels, Kalparius Foerunner. Je sais, je sais, cela fait beaucoup de jargon sigmarite en peu de lignes, mais rassurez-vous, savoir qui fait quoi est moins important que de se souvenir de la hiérarchie héroïque à l’œuvre dans cette nouvelle, qui décidera qui devra mourir et à quel moment.

Blacktalon les traîne un peu à l’idée de devoir faire équipe avec des collègues, mais un ordre est un ordre, et si l’on en juge par les charniers calcinés que sa proie (qu’elle peut traquer avec l’espèce de GPS sensoriel peu précis dont Sigmar lui a fait don) a laissé derrière elle, un peu d’aide sera en effet utile. Passée les formalités d’usage, la petite bande part donc en courant/volant/transmutant dans la direction indiquée par la chasseresse, qui ressent de façon diffuse que sa cible possède un moyen de brouiller sa ΣG embarquée. En gros, si elle est toujours capable de savoir vers où se diriger, elle ne peut pas jauger de la distance qui la sépare de son gibier, ce qui aura son importance plus tard. Pour l’heure, la fine équipe, en retard sur l’abomination qu’elle pourchasse, doit faire un choix potentiellement lourd de conséquences à proximité de la ville de Sigenvale, qui a reçu la visite du monstre et a été réduite en miettes/cendres par ce dernier. Neave est plutôt partante pour se remettre en route sans tarder, mais Tarion parvient à la convaincre de faire un crochet rapide par les ruines, histoire de secourir d’éventuels survivants. Malheureusement pour l’altruiste voltigeur, la Marque ténébreuse n’en a laissé aucun, et bien que les chasseurs puissent se passer les nerfs sur un pauvre corpsejaw ne faisant que ce que la nature l’a équipé pour faire (c’est-à-dire bouffer les cadavres croisant sa route), il se fait vite jour que le mystérieux prédateur/incendiaire/décapiteur est déjà loin des lieux du crime. Il faut donc à nos héros repartir sans tarder, d’autant plus que le cogfort sensé participer à la traque semble être avoir fait une mauvaise rencontre quelques kilomètres plus loin, comme le bruit de ses canons l’atteste sans doute possible.

Bien évidemment, les traqueurs arrivent trop tard sur place pour secourir la machine de guerre (représentez vous le fruit des amours incestueux entre une Forteresse de la Rédemption et une Arachnarok), qui s’est faite éventrer et toute sa garnison massacrée par l’insaissable bestiole. Blacktalon est colère devant ce carnage dont elle impute en partie la responsabilité à ce gros sensible de Tarion, mais avant qu’elle puisse reprendre les choses en main et relancer la poursuite, une forme colossale émerge soudainement du lac de montagne à côté duquel reposait la carcasse du cogfort…

Début spoiler…Les pouvoirs de brouillage arcanique dont dispose la cible des chasseurs lui a en effet permis de tendre un piège à ces derniers, qui se retrouvent confronter à… pour faire simple, représentez vous Clifford le grand chien rouge, mais dont la maîtresse ne serait pas la gentille et aimante Emily, mais Valkhia la Sanglante. C’est donc à un pitbull mécanique de Khorne de fort belle taille (et crachant le feu) que les Stormcast Eternals doivent faire face, avec des résultats au début peu concluants, comme on peut s’en douter. Très étrangement, ce sont d’abord les Palladors qui sont envoyés pallader par le juggernaut, rapidement suivis par le brave Foerunner, ne laissant que Blacktalon et Tarion, tous les deux sévèrement blessés, pour tenter de renverser la situation. Ce n’est cependant pas chose facile car leur ennemi est très grand, très fort, très rapide, très costaud, et sans faiblesse apparente, mis à part l’écoutille chaînée qui lui sert de nombril.

Après quelques moments difficiles dans les décombres du cogfort où les deux héros ont trouvé un refuge précaire, le temps de décapsuler quelques potions de vie, le traditionnel plan de la dernière chance est conçu et immédiatement mis à exécution, permettant aux gardes chasses de Sigmar de remporter la victoire. Pour information, le haut fait en question nécessitera que Neave se déchaîne, et que son comparse loge un tir de l’aigle dans un cratère volcanique chatouilleux, ce qui aura pour effet final de noyer l’habitacle de la machine démon dans la lave. Statistiquement improbable je vous l’accorde, mais la high fantasy et les nouvelles d’action de la BL ne s’embarrassent pas de détails de ce genre. Ceci fait, les deux Knights-…, devenus bons copains dans l’adversité, peuvent reprendre le chemin d’Azyr, où ils pourront passer une convalescence bien méritée, ou se suicider pour être reforgés et ainsi redevenir opérationnels plus rapidement. Les politiques sociales sigmarites sont un peu particulières…Fin spoiler

1 : Organisée par l’incontournable Horticulous Slimux bien sûr.

AVIS:

Introduction au personnage de Neave Blacktalon (et à celui de son sidekick, Tarion Arl), ‘Hunting Shadows’ met particulièrement l’accent sur les caractéristiques de super héros des Stormcast Eternals (Blacktalon bénéficie en effet de sens ultra développés, et est capable de courir grotesquement vite – pensez Bip Bip et Vil Coyote), faisant de cette traque monstrueuse une sorte d’adaptation de comics Marvel dans les Royaumes Mortels. Je ne dis pas que c’est foncièrement désagréable, mais ça surprend tout de même un peu. Autre point saillant de cette nouvelle, son côté technique en matière de bestiaire et de hiérarchie Stormcast Eternals. C’est bien simple, on dirait qu’Andy Clark a fait exprès d’aller piocher dans les entrées les plus baroques du Battletome pour trouver ses protagonistes, ce qui peut aisément dérouter/saoûler le lecteur non averti. En cela, ‘Hunting Shadows’ n’est pas très newbie-friendly, même si l’intrigue reste relativement facile à suivre, du fait du schéma narratif très simple utilisé par l’auteur. En fait, le seul suspense de l’histoire repose dans l’identité de la proie traquée par Blacktalon et ses sous fifres, qui, manque de pot, se trouve être une création inédite de la part de Clark (à moins que la gamme chaotique d’Age of Sigmar comporte un modèle de chien de métal géant). Manque de pot car le lecteur ne peut même pas au final tenter de deviner qui est derrière ces exactions sanglantes et fumantes en se basant sur sa connaissance du fluff. Petite frustration, mais frustration quand même. Pour conclure, j’ai été très moyennement convaincue par cette démonstration de force de la Wonder Woman d’Azyrheim, héroïne certes très balaise mais assez peu attachante. Peut-être que cela est corrigé dans le roman qu’Andy Clark lui a consacré ?

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Et voilà qui conclut la revue de ‘Gods & Mortals, une anthologie de bonne facture dont le plus gros point faible est le manque de contextualisation des nouvelles qui la compose. C’est d’autant plus dommage qu’il y avait de quoi présenter Hamilcar Bear Eater et le « Lamentiverse » de Josh Reynolds d’une manière acceptable avec des efforts minimes, à commencer par un regroupement dans le sommaire et quelques paragraphes de présentation de l’intrigue de ces séries. Comme souvent, il revient au lecteur de faire ses propres recherches pour relier les points et faire sens de ce patchwork littéraire, ce qui me retient de conseiller ‘Gods & Mortals’ à tous les enthousiastes de GW-Fiction, en particulier ceux qui ne seraient pas familiers avec les personnages abordés ici. Les vétérans de cette franchise trouveront par contre dans ce recueil un contenu varié et solide, en grande partie grâce à la grande forme de Reynolds, bien épaulé par un Guy Haley très inspiré, un David Annandale irréprochable (soulignons le, ce n’est pas tout le temps) et un David Guymer souvent distrayant. Si C. L. Werner avait été égal à lui-même, on aurait tenu le mètre étalon des anthologies Age of Sigmar, c’est moi qui vous le dit!

WAY OF THE DEAD [WFB]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette chronique de ‘Way of the Dead’, recueil de nouvelles se déroulant dans le monde de la bataille de la fantaisie du marteau de guerre (voilà un concept qu’il est profond). Comme ses prédécesseurs directs (‘Realms of Chaos’ et ‘Lords of Valour’), ‘Way of the Dead’ est composé1 de courts formats publiés dans les pages d’Inferno!, plus précisément entre les numéros 24 et 34, ce qui correspond à la période 2001 à 2002. Il est à noter qu’il s’agit de la dernière anthologie proprement « infernale » pour WFB, les nouvelles de fantasy publiées par la suite dans le bimensuel de la BL ayant été compilées sans grande logique dans plusieurs ouvrages (‘Tales of the Old World’, ‘The Cold Hand of Betrayal’, ‘Swords of the Empire’…). On y retrouve un certain nombre de têtes connues du lecteur habitué de la maison, comme Brunner le chasseur de primes, Angelika Fleischer la pillarde récupératrice de champs de bataille, ou encore la tristement célèbre bande de mercenaires de Torben Badenov. À la différence de ses prédécesseurs directs cependant, ‘Way of the Dead’ est toujours (au moment où cette chronique est écrite) disponible à l’achat sur le site de la Black Library – mais seulement en format numérique, faut pas déconner non plus – ce qui en facilite grandement l’accès et la découverte par le public intéressé.

Way of the Dead

Si on se penche sur les contributeurs de cet insigne opus, il convient de reconnaître que Brian Craig (une novella) et C. L. Werner (deux nouvelles) occupent les premiers rôles dans la distribution concoctée par les compères Gascoigne et Dunn. Ils sont épaulés par les plumes capables de Matthew Farrer (première – et unique – soumission pour WFB), Graham McNeill, Jonathan Green, Robin D. Laws, et des deux Simon (Jowett et Spurrier). Un casting assez représentatif des débuts des années 2000 au sein de la BL, avec quelques noms qui parleront au lecteur d’aujourd’hui, j’en suis sûr. Notre propos étant ainsi introduit, il est plus que temps de nous hasarder sur le chemin des morts, en espérant qu’il ne soit pas aussi mal famé que celui emprunté par Aragorn et Cie dans leur quête d’un raccourci vers Minas Tirith…

1 : En majorité, pas exclusivement, car la novella ‘The Road to Damnation’ de Brian Craig constitue un inédit. Logique pour une histoire de plus de cinquante pages.

Way of the Dead

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Glow – S. Spurrier :

INTRIGUE :

GlowC’est la fin de l’automne à Talabheim, et le Temple de Sigmar local, dirigé par le capitaine Richt ‘Hmm’ Karver, enquête sur une addiction d’un nouvel ordre qui s’étend dans les bas-fonds de la cité. Le Glow, une poudre verte de composition inconnue, fait en effet des ravages parmi les déshérités de la métropole cratérisée. Très addictif, il a en outre comme fâcheux effet secondaire de provoquer des mutations spontanées chez ses utilisateurs réguliers, ce qui n’est pas du tout du goût de ce gentleman de Karver. Après avoir mené un raid dans un taudis dont l’adresse lui avait été donnée par un suspect, l’impeccable capitaine repart avec un cadavre frais de junkie agressif ainsi qu’une petite réserve de la substance en question, qu’il choisit d’ajouter à la diète du rat géant skaven qu’il a adopté comme animal de compagnie après une purge des souterrains de Talabheim l’année passée. Le savoir fait le pouvoir, c’est bien connu.

Les mois passent et l’hiver arrive sur l’Empire, sans que la filière locale de Glow soit démantelée malgré les meilleurs efforts de Karver et de ses hommes (Kubler, Holst et Spielmunn). L’épidémie ne fait au contraire que progresser, ce qui force les chasseurs de sorcières crackheads à muscler leurs méthodes, déjà assez viriles. Interrogatoires menés au tison, menaces d’envoyer leurs indics au bûcher s’ils ne s’activent pas et autres descentes dans la ville tous flingues dehors se multiplient. C’est au cours de l’une d’entre elles que Karver commet une bavure : surpris par la réaction de l’occupant d’un laboratoire clandestin où le Glow était produit, il déchargea sa pétoire sur ce qui se révéla être, après inspection post mortem, une fillette réduite en esclavage par le maître du cartel pour la confection des tablettes inondant la cité. Enchaînée dans son local et ayant été privée de langue par son tortionnaire, elle cherchait seulement à expliquer pourquoi elle n’était pas en capacité d’obtempérer aux ordres des Templiers lorsqu’un Karver sur les nerfs lui envoya un pruneau dans le caisson pour slow play. Ce sont des choses qui arrivent…

L’opération ne fut cependant pas un total échec, notre héros mettant le gant sur la poudre entrant dans la composition du Glow en fouillant le laboratoire. Ayant fait pression sur un sorcier de Jade pour obtenir une expertise express, il reçut la confirmation de ses soupçons : l’ingrédient actif du Glow était bien de la malepierre. Une erreur de manipulation de la part du thaumaturge lui permit de recevoir une autre information utile : la substance toxique se trouvait à la fois dans le gant utilisé pour recueillir la poudre dans le laboratoire, mais également à l’extérieur de ce dernier, indiquant sans équivoque que Karver avait manipulé de la malepierre peu de temps auparavant. Un résultat étrange, à moins que…

Début spoiler…À moins que la broche ornée d’une pierre verte que son meilleur disciple, Kubler, portait à la boutonnière ce jour-là n’ait pas été montée d’une émeraude, comme il le pensait, mais d’un minéral bien plus sinistre. La confrontation entre les deux hommes prend place dans la chambre froide creusée sous le Temple de Sigmar, dans lequel les répurgateurs stockent leurs cadavres contaminés dans l’attente du dégel. Ayant participé à la purge des terriers skavens en compagnie de son mentor, Kubler avait eu la mauvaise idée de s’intéresser à la malepierre utilisée comme monnaie d’échange par ces derniers, et qui le transforma rapidement en méchant de série B.

Ayant dupé la vigilance de son supérieur jusqu’à son fashion faux pas en matière d’accessorisation de sa tenue, Kubler est pris au dépourvu lorsque Karver le trouve en train de faire les poches des corps de Guerriers des Clans gardés en réserve par les Templiers à la recherche de cailloux verts. La surprise change toutefois de camp après qu’un Kubler gravement blessé par le tir de son patron passe en mode Technomage et avale d’un seul coup tous les éclats de malepierre qu’il trimballait sur lui, se transformant en mutant à la force et à la rapidité décuplés. C’est au tour de Karver de se retrouver dans les cordes, mais notre héros avait gardé un atout dans sa manche, ou plutôt au bout d’une chaîne : son rat de compagnie. Transformé en abomination (et pas Abomination, ça ne serait pas rentré dans son bureau) poilue par sa consommation régulière de Glow, Ratatouille est libéré par son maître et ne perd pas une seconde pour creuser un terrier dans la bedaine de Kubler afin d’accéder à la malepierre récemment consommée par le ruffian. Cet affrontement sans merci résulte en la mort simultanée des deux adversaires, laissant Karver le seul survivant de ce truel chaotique. Il faudra penser à passer un coup de mop, tout de même.Fin spoiler

AVIS :

Spurrier transpose avec succès une enquête des stups dans le monde de Warhammer Fantasy Battle avec ce ‘Glow’, qui illustre le sombre mais palpitant quotidien des Templiers de Sigmar lorsqu’ils n’ont pas de sorcières à se mettre sous la dent. Ambiance poisseuse, action rythmée, twist final bien amené… Simon Spurrier démontre l’étendue de ses talents de scénariste et sa valeur comme contributeur à la GW-Fiction avec cette nouvelle, qui sera malheureusement sa seule incursion dans le Monde qui Fut. Comme le hamster adoptif de Richt Karver, on aurait bien aimé avoir du rab’.

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Head Hunting – R. D. Laws :

INTRIGUE :

Head HuntingRetour au Col du Feu Noir (car c’est là que ça se Passe… mouéhéhé) en compagnie d’Angelika Fleischer et de son protecteur (ce qu’il pense) /stalker (ce qu’elle pense), Franziskus. C’est une journée normale pour Angie, qui exerce l’utile profession de récupératrice des champs de bataille, et a localisé le site d’une embuscade grâce aux croassements des corbeaux faisant bombance sur les cadavres abandonnés. Bien que Franziskus, en aristocrate principiel qu’il est, trouve la pratique dégradante, il faut bien que quelqu’un se charge de remettre sur le marché les biens et espèces qui resteraient sinon à prendre la pluie sur leurs défunts propriétaires, au lieu de créer du PIB, comme Baltazar Gelt le voudrait. La moisson du jour est plutôt bonne (un anneau nain pouvant servir de bracelet – les Dawi ont des doigts boudinés – et quelques pièces pour s’acheter un Sub’ en rentrant), mais se fait interrompre par un bruit caractéristique et de mauvais augure : celui d’une hache taillant de la barbaque. Prudents, les deux looters se cachent sur le bord de la route et surprennent peu de temps après un voyageur marchant avec une hache sur l’épaule et un sac suspect à la ceinture.

L’explication de texte entre les trois larrons permet au nouvel arrivant, qui se présente comme le professeur Victor Schreber, de dissiper tout malentendu quant à son accoutrement. Certes, il se balade avec un sac de têtes tranchées, et certes, c’est lui qui les a séparées de leurs précédents propriétaires, mais il l’a fait pour la science. Schreber est en effet un expert en phrénologie, et collectionne les crânes afin de percer le mystère des humeurs et des sentiments de ses semblables. Voyant que le bougre est seulement un gros nerd, et pas un psychopathe en puissance, Angelika et Franziskus ne le retiennent pas plus, mais à leur grande surprise, le prof a eu proposition à leur faire. Il revient en effet du petit village de Verldorf, situé en amont du Col, où il espérait pouvoir collecter un spécimen unique : le crâne du malandrin notoire appelé Potocki, récemment capturé et exécuté pour ses mauvaises actions par les Verldorfer. Ces derniers n’ont pas accepté l’offre, pourtant généreuse, de Schreber de leur prendre la tête (on les comprend), et l’ont chassé à coup de pierres lorsqu’il a insisté. Déterminé à agrandir sa collection, il propose donc deux cents shillings à nos héros en l’échange du crâne tant convoité, à collecter après livraison du paquet à son domicile. Il leur remet également une boîte rembourrée pour faciliter le transport et éviter toute casse pendant le voyage. La présence d’un cadenas pour fermer ladite boîte ne manque par contre pas d’interroger Franziskus…

Après un voyage sans encombre, Angie et Frankie arrivent à Verldorf, hameau misérable dont la principale attraction est le gibet où croupit un cadavre bien amoché, suspendu dans une cage en fer. Malgré son état décati, Potocki terrifie visiblement les locaux, qui refusent de parler de lui en dépit des perches que leur tend une Angelika preneuse d’informations pour faciliter son futur larcin. Ce n’est pas grave, elle fera sans, en bonne professionnelle qu’elle est. Ayant pris résidence dans l’auberge locale, les deux Bonereapers avant l’heure se glissent dehors au cœur de la nuit pour aller perpétrer leur forfait, neutralisant au passage l’alarme que l’aubergiste avait installé à sa fenêtre pour empêcher les mauvais payeurs de s’échapper sans régler l’addition. C’est du moins ce qu’Angelika et son side kick supputent, jusqu’à que l’horrible vérité leur saute littéralement à la figure…

Début spoiler…Potocki n’était en fait pas aussi mort qu’il n’y paraissait, et lorsqu’Angelika fait mine de le raser à l’œil, le cadavre s’anime et l’attaque furieusement. Bien qu’elle s’en sorte sans dommage, le raffut causé par l’affrontement réveille Verldorf, forçant notre héroïne à sortir une masterclass d’improvisation. Elle n’a pas été prise la main dans le sac en train d’attenter à l’intégrité d’un cadavre, non non : elle a été prise d’une crise de somnambulisme causée par l’influence maligne de la goule locale, dont personne, absolument personne ne l’a mis au courant. SKANDHAL !!! Totalement mystifiés par la prestation de leur hôte, les Verldorfer retournent se coucher sans faire d’esclandres, après avoir expliqué que la situation actuelle est le seul moyen qu’ils ont trouvé pour tenir à l’œil l’increvable et intenable Potocki, qui les tourmente depuis des générations et dont la vitalité maléfique défie l’imagination. Faute avouée étant à demi pardonnée, Angelika et Franziskus retournent également se pieuter…

…Et refont une sortie sans tarder, utilisant cette fois-ci la clé qu’Angelika a dérobé à l’aubergiste pendant qu’il lui présentait ses plus plates excuses, ce qui simplifie grandement l’opération « Louis XVI » planifiée par nos héros. Bien que Potocki ne se laisse pas faire, et que le bruit attire à nouveau les villageois hors de leurs masures, la tête finit par être collectée, et les deux gredins peuvent s’enfuir à toutes jambes en direction du manoir de Schreber.

Comme on pouvait s’y attendre de la part d’un employeur ayant omis de préciser ce « petit » détail au moment du briefing, Schreber se révèle être un mauvais payeur, qui sort un pistolet de son armoire au lieu des deux cents shillings promis. Angie avait toutefois prévu le coup, et se contente d’ouvrir la boîte contenant la tête de Potocki en direction de l’érudit félon. Pris au dépourvu par la manœuvre et par le crâne pourrissant qui lui saute à la jugulaire, Schreber est rapidement hors du coup (et hors de cou), ce qui laisse à Angelika et Franziskus toute latitude pour fouiller son domicile à la recherche d’un dédommagement, une fois qu’ils ont pris soin de réduire la tête enragée en bouillie, bien sûr. Au final, les deux comparses repartent avec un nouveau pistolet, ce qui n’est pas beaucoup mais déjà mieux que rien. Ils constatent d’un air détaché que la traînée informe qui était la tête de Potocki semble également être sur le départ, mais à la vitesse où elle progresse, le bougre ne devrait pas faire parler de lui avant cent vingt cinq ans. La Fin des Temps n’attend pour personne…Fin spoiler

AVIS :

Seconde (et à ma connaissance dernière) nouvelle consacrée par Laws à son personnage fétiche d’Angelika Fleischer, ‘Head Hunting’ semble tout droit sorti de l’imagination d’un DM facétieux, et peut se lire comme tel. Malgré l’horreur que représente un cadavre animé (de mauvais sentiments) et apparemment invulnérable, le ton léger avec lequel Robin D. Laws narre cette histoire la fait basculer dans le royaume de la comic fantasy, mais pas dans la parodie pure et simple de Warhammer Fantasy Battle, ce qui est appréciable. Un sympathique interlude entre deux lectures plus sombres.

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The Small Ones – C. L. Werner :

INTRIGUE :

The Small OnesLa vie paisible du village de Marburg, perdu au milieu du Stirland profond (aussi appelé Stirland), est bouleversée par l’arrivée impromptue d’un Sorcier du Chaos mal en point (Thyssen Krotzigk), en fuite après que sa congrégation ait été passée par l’épée par la Garde Noire de Morr du Capitaine Ernst Ditmarr. Prêtre de Morr à l’esprit mal tourné, Thyssen avait profité de sa nomination dans une paroisse reculée pour se vouer à l’étude et à la vénération des Dieux du Chaos avec une totale impunité, jusqu’à ce que le rectorat lui envoie un inspecteur (auquel il arriva un regrettable accident), puis un bataillon de Templiers. La bataille qui fit rage entre cultistes et gothiques se solda par la victoire de ces derniers, mais Thyssen parvint malgré tout à s’enfuir (en clopinant, du fait d’une jambe cassée), laissant Ditmarr avec une manche vide (le feu, ça brûle) et un désir de vengeance inextinguible.

Les Fab Four faisant bien les choses, Thyssen est découvert par une bande d’enfants du coin alors qu’ils jouaient dans la forêt. Ayant tiré le don « sosie d’Alf, mais en grimdark » sur le tableau de l’Œil des Dieux (comprendre qu’il ressemble au fruit des relations incestueuses entre un Gamorréen et un Ewok), le petit Sorcier se fait instantanément adopter par Keren, fille du meunier de Marburg, fan de furries et forme non évoluée de Karen, qui convainc tout aussi rapidement ses camarades (Paul, Therese et Kurt) de cacher celui qu’elle considère comme un prince victime d’une malédiction dans le moulin abandonné du rival de son père (auquel il arriva un regrettable accident, bis). C’est le jackpot pour Thyssen, qui peut se rétablir tranquillement et confortablement grâce aux victuailles que les enfants de Marburg prélèvent dans le garde-manger familial pour son bénéfice, tout en commençant à corrompre son jeune public grâce aux contes séditieux sur Sigmar et les Quatre Princes dont il les abreuve. Après tout, c’est vrai qu’il ressemble beaucoup à Père Castor.

La situation de Thyssen est toutefois précaire, les Marburgeois ne restant pas les bras croisés devant la disparition d’un nombre croissant de leurs rejetons, qui préfèrent squatter dans le moulin de leur copain porcin plutôt que de trimer sang et eau pour leurs vieux (on les comprend). Ils commencent par engager un pisteur pour remonter la trace des disparus… auquel il arrive un regrettable accident, ter. Un peu plus tard, Thyssen mène une vendetta contre le vieux prêtre de Sigmar Hackl, proche de convaincre le conseil municipal de mettre des Répurgateurs sur le coup. Bien que le combat reste longtemps indécis entre le vieillard chétif et l’avorton boiteux (un match d’une violence insoutenable, retransmis à travers les Royaumes du Chaos), Thyssen finit par avoir raison du sigmarite, et met en scène son cadavre pour que, vous l’avez deviné, cela ait l’air d’un regrettable accident. Je ne sais pas si le concept de l’assurance-vie existait dans l’Empire avant la Fin des Temps, mais si c’est le cas, l’activité devait être implantée dans le Stirland.

C’est le moment que choisissent Ditmarr et sa gueule de porte-bonheur pour arriver à Marburg. Toujours sur la piste de sa Némésis poilue, le Garde de Morr disgracié (il s’est fait virer par l’ordre pour abandon de poste) n’est pas contre donner un coup de la seule main qu’il lui reste aux bouseux du coin dans leur problème de fugues infantiles. De son côté, Thyssen considère la venue fortuite de son persécuteur comme un nouveau cadeau des Dieux Noirs, et envoie donc l’un de ses enfants perdus attirer le Templier jusqu’à son QG, pendant qu’il réfléchit à la mise en scène d’un nouvel accident regrettable. Cependant, le messager en culottes courtes sous-estime la méfiance du Garde Noir, qui comprend rapidement que quelque chose ne tourne pas rond dans l’histoire qu’on lui sert, et ne se rend pas seul sur les lieux, comme il aurait dû le faire. En effet, il ordonne aux placides Marburgeois de mettre le feu au moulin au moindre bruit suspect, et, bien qu’ils aient conscience que la plupart de leurs rejetons soient présents dans l’édifice, ils suivent à la lettre les consignes de Ditmarr après que ce dernier se soit fait submerger par ses petits adversaires. Encore une arnaque à l’assurance, ça.

Dans le chaos qui s’ensuit, le Templier ne parvient qu’à crever un œil à Thyssen avant que ce dernier ne prenne à nouveau la poudre d’escampette, laissant ses cultistes puérils faire le coup de feu. L’un d’eux se fait d’ailleurs brièvement posséder par un Buveur de Sang (c’est les hormones) alors qu’il était sur le point de sacrifier Ditmarr pour la plus grande gloire de Khorne, et bastonne le Garde Noir comme plâtre pendant les trente secondes que durent son feat. Bien que le coriace chevalier parvienne à se sortir du brasier après cette tannée surprise, il décède de ses blessures le lendemain, après que les villageois lui aient fait croire que le corps de Thyssen avait été retrouvé dans les décombres du moulin…

Début spoiler…Alors qu’en fait, le Sorcier de poche était déjà loin de Marburg, mais pas dans une situation idéale. La nouvelle se termine en effet sur sa rencontre avec une bande de Gors qui semblent plus emballés par une dégustation de saucisson que par l’accueil d’un nouveau mutant. On ne peut pas leur en vouloir cela dit : le Pumbagor ne faisait pas encore partie du bestiaire des Bêtes du Chaos au moment où cette nouvelle a été écrite…Fin spoiler

AVIS :

Si on ne compte plus les nouvelles de GW-Fiction où des guerriers surhumains s’affrontent pour faire triompher leurs idéaux, celles mettant en scène leurs exacts opposés sont en revanche beaucoup plus rares. On peut donc remercier C. L. Werner d’avoir livré sa version de ‘Sa Majesté des Mouches1 pour Warhammer Fantasy Battle avec ce ‘The Little Ones’, sorte de huis-clos psychologique où le potentiel malaisant d’une bande d’enfants manipulés par un être maléfique est exploité de bien belle façon. Je mets aussi au crédit de l’auteur un séquençage impeccable du récit, qui alterne entre Thyssen, ses petits protégés, et Ditmarr, ainsi que les contes de Sigmar et des Quatre Princes, sorte d’histoire dans l’histoire qui aurait mérité d’être racontée dans une nouvelle séparée. Seul petit bémol : une conclusion un peu bâclée, qui ne donne pas d’indication sur le sort des enfants de Marburg (si Ditmarr a réussi à s’échapper du moulin après avoir boxé deux rounds contre un Sanguinaire, la marmaille chaotique a de bonnes chances de s’en être tirée) et laisse le destin de Thyssen en suspens. On reste cependant en présence d’une très bonne soumission de la part de Werner, dont l’originalité se doit d’être reconnue.

1 : Une comparaison d’autant plus apte que le grand méchant de l’histoire a/est dans les deux cas une tête de cochon.

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Three Knights – G. McNeill :

INTRIGUE :

WFB_Three KnightsLes trois frères Massone, Luc, Fontaine (?) et Belmonde (!?!), ont entrepris une quête d’aucuns considèreraient comme ambitieuse, pour le dire poliment : purger à eux seuls les ruines du Fort du Sang, autrefois bastion des tristement célèbres Vampires Dragons de Sang, et soigneusement évité par tous les voyageurs sains d’esprit depuis sa destruction il y a des décennies. Cette idée chevaleresquement stupide est celle de l’aîné du trio, Luc, qui s’est taillé une réputation de bretteur sans égal d’un bout à l’autre du Vieux Monde. Ses cadets (et par vertu de leur noms débiles, side kicks) ont accepté de lui prêter main forte dans son entreprise hardie, bien que ne disposant pas d’un pedigree aussi ronflant que Lulu. D’ailleurs, Belmonde n’est même pas encore un véritable chevalier du Royaume, ce qui vous situe le niveau moyen de la fine équipe.

Après avoir fait leur arrêt réglementaire dans le village bretonnien puant et boueux (Gugarde) situé sur la route du Fort, et avoir tout aussi réglementairement refusé d’écouter les sages conseils du vétéran couturé qui picolait à la taverne locale, et avait pu en son jeune temps se rendre compte par lui-même qu’un Vampire n’était pas un adversaire à prendre à la légère1, les frangins repartent le lendemain avec un guide en direction de la forteresse maudite. Les choses sérieuses et mortelles commencent réellement à la tombée de la nuit, lorsque les quatre montagnards amateurs se font attaquer par une meute de loups funestes, qui croquent prestement le guide et la mule de bât de l’équipe. Une nuit passée à prélever de la biodiversité pourrissante, et une journée à peiner dans la neige et le froid plus tard, c’est enfin le Fort du Sang qui se présente devant nos héros, qui entrent prestement se mettre au sec et se remettre de leurs émotions.

Guidés par Luc jusqu’à la salle des festins de la bâtisse abandonnée, les frères Massone se font cueillir comme des bleus par une vague de squelettes s’étant animés à la nuit tombée, et qui voient d’une mauvaise orbite trois punks à cheval venir squatter chez leurs ex-patrons. La quantité venant toujours à bout de la qualité, les chevaliers se font acculer dans un coin de la salle, et Fontaine finit embroché comme un döner kebab, au grand désarroi de ses frérots. Luc prend alors sa grosse voix et exige à parler au(x) directeur(s)… ce qui fait battre en retraite les squelettes et arriver un trio de Dragons de Sang, plus intrigués par la déclaration du paladin qu’il a réussi à tuer l’un des leurs qu’animés de chrétiennes (et pour cause, c’est pas le bon univers) intentions envers leurs hôtes du soir…

Début spoiler 1…Ayant prouvé ses dires en solotant une des brutes qui lui avait mal parlé, Luc abat ensuite ses cartes en décapitant en traître Belmonde, afin de prouver aux Dragons de Sang qu’il possède à la fois le talent martial et la fibre morale, ou plutôt son absence, nécessaires pour rejoindre leur ordre. En effet, le chevalier désire bénéficier de la vie éternelle dont disposent les Vampires, et ses grands discours de purge du Fort du Sang n’étaient en fait qu’une ruse pour attirer ses idéalistes de frangins jusqu’au repaire des fils de Harkon. Interloqué par cette demande excentrique, le Kastellan finit par s’exécuter et s’approche de Luc pour lui donner le baiser de sang…

Début spoiler 2…Ou plutôt lui cracher dans la jugulaire, car on se rend compte lors de l’attaque punitive sur Gugarde qui termine la nouvelle que le fier et brave chevalier s’est reconverti, contre sa volonté sans doute, en nécrophage ahuri. Pas le plan de carrière auquel Luc aspirait, mais une salutaire, si définitive, leçon de modestie inculquée à ce dernier par les très select Dragons de Sang. Après tout, le Roy dit nous voulons…Fin spoiler

1 : En bonus, Fontaine et Belmonde participent à la soirée open mic’ en reprenant leurs rôles de plus mauvais duo d’acteurs du Monde qui Fut.

AVIS :

Nouvelle très solide de la part de Graham McNeill, ‘Three Knights’ offre un concentré de grimdark à la sauce WFB à son lecteur à travers les péripéties plus ou moins chevaleresques de ses héros. En plus de mettre en perspective la proverbiale droiture des paladins de Bretonnie, qui tient finalement assez souvent de la légende urbaine rurale, cette nouvelle dispose d’une intrigue bien pensée et mise en place (une deuxième lecture de ‘Three Knights’ permet de repérer les jalons laissés par McNeill au cours des premières pages pour préparer sa conclusion), ainsi que d’une chute impeccable en termes d’exécution. Peut-être le meilleur court format de cet auteur pour Warhammer Fantasy Battle.

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The Road to Damnation – B. Craig :

INTRIGUE :

The Road to DamnationQu’est-ce qui peut pousser un noble estalien (Luis Quintal) et un pirate arabien (Memet Ashraf) à collaborer au lieu de se tailler des croupières, dans la plus pure tradition de leurs nations respectives ? Dans le monde hostile et cruel de Warhammer, où les gens civilisés sont rares, la réponse est : bien des choses. Dans le cas présent, il s’avère que nos deux comparses se sont retrouvés échoués dans les Badlands après que leurs navires aient fait naufrage. Cette région du Vieux Monde étant largement plus connue pour ses innombrables dangers que pour ses petits ports de pêche bucoliques, Quintal et Ashraf ont eu tôt fait de mettre leur bisbille de côté pour maximiser leurs chances de survie. Un choix d’autant plus sensé lorsqu’on est poursuivi par une bande de maraudeurs Orques & Gobelins, comme c’est le cas pour nos deux héros.

Bien qu’étant capables de se défendre (Ashraf à l’arc et Quintal au sabre), leur désavantage numérique et l’épuisement de leurs montures ne les incite pas à l’optimisme. Les compadres se sont en effet enfoncés profondément dans les terres sauvages, à la recherche de la mystérieuse cité antique que le cousin de Quintal avait découvert lors d’une précédente expédition, et qui regorgeait selon lui de gemmes et de trésors. Ce périple les a amenés aux portes du désert nehekharien, dont la chaleur et le sable ont prélevé un lourd tribut sur leurs montures. Sans accès rapide à une source, le fataliste Ashraf considère que les chevaux ne passeront pas la journée (alors qu’un sanglier orque peut cavaler des jours sans boire, encore une preuve de la supériorité de la gent porcine), ce qui condamnera les humains à une mort lente des mains des peaux vertes. La chance des aventuriers semble toutefois tourner lorsqu’ils trouvent une ancienne route, puis repèrent un vol de vautours tournoyant au-dessus d’un sanglier en détresse. Cela n’inspire rien d’autre à Quintal qu’une envie de saucisson, mais son compagnon a tôt fait de comprendre que l’animal avait localisé une source d’eau grâce à son flair, mais n’a pas pu y accéder pour la bonne et simple raison qu’il s’agissait d’un puits couvert. Cette découverte fortuite requinque nos héros, qui feront cependant trajectoire à part pour la suite de la nouvelle, la corde utilisée pour descendre Quintal dans le puits afin de remplir leurs gourdes cédant brutalement, faisant choir l’Estalien dans une rivière souterraine qui l’emporte aussitôt en aval. Envoyer le gars qui s’appelle littéralement « 100 kilos » faire de la varappe n’était peut-être pas le meilleur plan qui soit…

Cette séance de de canyoning improvisée n’est toutefois pas fatale à Quintal, qui finit par arriver dans un bassin donnant sur les niveaux inférieurs d’une sorte de temple. Après quelques heures à errer dans les ténèbres à la recherche d’une sortie, il finit par arriver dans une grande salle où plusieurs arbres centenaires ont poussé, et dont les branches lui permettront de rejoindre les ouvertures ménagées en hauteur, et donnant sur l’extérieur. Il repère aussi un peu de loot à récupérer au passage, à savoir un sceptre rehaussé de pierres précieuses dans la main d’une grande statue dominant ce qui se trouve être un autel sacrificiel, et présentant la particularité d’être moitié homme et moitié femme (#NousSachons). Se croyant tiré d’affaire, il s’autorise donc un petit somme réparateur pour recharger ses batteries… et ne tarde pas à s’en mordre les doigts lorsqu’il est surpris à son réveil par l’arrivée des peaux-vertes dans le temple. Bien que disposant d’une longueur d’avance, ses poursuivants devant élargir les ouvertures à moitié effondrées pour accéder au bâtiment, son isolation et son absence d’arme (il avait confié son sabre à Ashraf avant de partir en spéléo) semblent le condamner à court terme. S’étant réfugié dans les niveaux inférieurs du temple pour tenter de mettre le plus de distance entre ses bullies et lui, il a la surprise d’entendre une voix résonner dans sa tête et lui proposer un marché : son âme contre un bundle de cadeaux fantastiques, dont une vision infrarouge et un service de protection assuré par une vingtaine d’Ushabtis. A court d’options, Quintal accepte (sans même savoir ce qu’est un Ushabti, il y aurait pu avoir entourloupe si la voix avait été celle d’un Démon de Zuvassin), et constate grâce à sa nouvelle acuité visuelle que ce qu’il avait considéré comme étant de simples statues de crocodiles se mettent effectivement à bouger, et à poursuivre les Gobelins envoyés en éclaireurs dans le temple par leurs gros copains verts.

De son côté, Ashraf s’est aventuré dans la cité déserte après avoir abreuvé les chevaux, jugeant probable que son compagnon ait été emporté dans cette direction par le courant. Il assiste aux travaux d’excavation sauvage menés par les peaux vertes pour accéder au temple, sans se douter d’abord des raisons de leur enthousiasme pour cette ruine, et se glisse à l’intérieur du bâtiment à leur suite pour tenter d’en éliminer le plus possible tant que la bande n’est pas au complet. Juché sur un des arbres du temple, il assiste aux premières loges à un match de catch par équipe des plus originaux, les Orques et Gobelins faisant face à des Ushabtis visiblement plus intéressés par faire de gros câlins à leurs adversaires qu’à les réduire en morceaux. Hésitant sur la conduite à suivre et en faveur de qui intervenir, Ashraf se retrouve lui aussi désarmé après que des serpents venimeux aient décidé de s’installer sur son arc et ses flèches, forçant l’Arabien à les laisser tomber pour éviter une morsure. Il assiste ensuite à l’arrivée d’un Quintal visiblement pas dans son état normal, et dont l’entrée en jeu permet à la team Crocos de remporter le match sans coup férir (#ImpactPlayer).

La cérémonie de sacrifice des peaux vertes à laquelle Quintal se livre ensuite (en même temps qu’à un monologue digne du méchant de série B qu’il est devenu) est interrompue par l’incendie déclenché par Ashraf dans les branches de l’arbre où il s’était réfugié, manière pour lui de détourner l’attention de son ex-collègue et de ses gardes du corps sauriens, le temps qu’il puisse se glisser dans les niveaux inférieurs du temple, où il pense avoir de meilleures chances de survie. Cette stratégie fonctionne, mais Quintal prend l’interruption de séance et la combustion de ses Ushabtis (très inflammables) avec un recul digne d’un paresseux sous tranquillisants, et se contente de ramasser le sceptre que tenait l’idole – définitivement Slaaneshi – du temple lorsque la chaleur du brasier la fait tomber en morceaux, avant de suivre Ashraf.

La réunion entre les deux partenaires, si elle s’engage de manière très courtoise, menace de dégénérer à tout moment, Ashraf étant à ce stade convaincu que son camarade est devenu le serviteur d’une puissance néfaste. Lorsque Quintal lui propose de renouveler leur collaboration, et de le suivre sur la route de la damnation, l’Arabien pèse soigneusement ses options…

Début spoiler…Et décide finalement d’accepter. Après tout, et comme il le reconnaît lui-même sans honte, il n’est pas un enfant de chœur, et ses chances de se sortir du guêpier dans lequel il s’est mis sans l’assistance de Quintal et de ses nouveaux pouvoirs sont infinitésimales, pour le dire poliment. C’est ainsi qu’une nouvelle grande puissance (régionale) fit son apparition sur la mappemonde géopolitique du Vieux Monde : les Rois des Tombes du Chaos. Que voilà un exemple d’assimilation réussie !Fin spoiler   

AVIS :

Brian Craig s’est toujours tenu à part des autres auteurs de la Black Library, même à l’époque où ce contingent était si réduit qu’il en formait une bonne partie à lui seul. Son approche personnelle de la fantasy était en effet bien trop classique et, osons le terme, intellectuelle, pour une GW-Fiction plutôt portée sur l’action et l’aventure (une inclinaison normale pour la division littéraire d’un jeu de batailles fantastiques, il faut le reconnaître). ‘The Road to Damnation’, une de ses dernières nouvelles publiées pour le compte de cette franchise, peut être considérée comme sa soumission la plus alignée avec le BL-style que les éditeurs vétérans Marc Gascoigne et Christian Dunn établirent dans les premières années d’existence de la Black Library1. Mais si son intrigue ne détonne pas avec celles des travaux de ses camarades d’écurie, ‘The Road to Damnation’ porte très clairement la patte de Craig, tant sur le fond que sur la forme.

Le récit des mésaventures de Quintal et Ashraf se fait en effet à un rythme relativement posé, loin de la frénésie d’action que l’on associe avec les courts formats de la BL (un sentiment renforcé par la tendance de Craig à intégrer à sa narration les réflexions de ses personnages), et reste particulièrement prosaïque et « à hauteur d’homme » pour une nouvelle se déroulant dans le monde Warhammer Fantasy Battle, un univers défini en grande partie par l’action de forces divines et surnaturelles, auxquelles les mortels ne peuvent en général pas se soustraire. Cela se percevait dans d’autres travaux de Brian Craig (‘Who Mourns a Necromancer ?’, ‘The Winter Wind’), mais l’auteur vétéran pousse ici le paradoxe encore plus loin, puisque cette novella met en scène une authentique corruption chaotique, immédiatement identifiée comme telle par Quintal et Ashraf (ce qui fait une grosse différence par rapport au sort des héros de ‘A Gardener in Parravon’ et ‘The Light of Transfiguration’, qui tombent – parfois littéralement – dans le Chaos sans s’en rendre compte), mais qui semble être sous sa plume devenir un processus presque banal, et non un événement traumatisant. Pour un contributeur moins talentueux que Craig, cette approche aurait fini en hors sujet total, mais la pilule passe ici très bien, dès lors que le lecteur s’acclimate aux particularités narratives et stylistiques de l’auteur. On en est quitte pour cinquante pages d’exploration d’un temple antique dédié à une divinité maléfique, à la manière d’une aventure de Conan le Cimmérien ou de Solomon Kane, et il serait dommage de bouder son plaisir.

Le seul bémol que je mettrai à ‘The Road to Damnation’ est relative au background. Alors que Craig avait toujours montré des bonnes dispositions à respecter le lore de Warhammer Fantasy Battle, il nous sert ici un crossover très (trop) ambitieux entre le fluff des Rois des Tombes et celui des serviteurs du Chaos, et dont on dira pudiquement qu’il n’a pas fait école. Ironiquement, lorsque la BL lèvera le voile sur les origines de Nagash, bien des années plus tard, l’hypothèse d’un culte de Slaanesh clandestin à Nehekhara se fera moins farfelue2. Cela ne gène pas le plaisir de lecture, mais invite à considérer les informations fluffiques relayées dans la nouvelle avec des pincettes. Un petit prix à payer pour profiter de la Craig’s touch

1 : ‘The Road to Damnation’ a été publiée dans le recueil ‘Way of the Dead’ (ça en fait des noms de rues sympathiques !), en 2003.
2 : Nagash apprenant la magie noire d’une cabale d’Elfes Noirs menée par une Sorcière, peut-être familière avec les croyances de Morathi…

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Mark of the Beast – J. Green :

INTRIGUE :

Mark of the BeastSoldat de carrière dans l’armée du Tzar de Kislev, Torben Badenov a gravi les échelons jusqu’à devenir le commandant d’une unité d’éclaireurs montés (15 exactement, et tous présentés par Green dès la première page de la nouvelle1). Pour son grand malheur, il sert sous le Capitaine Arman Yasharov, un noble kislevite aussi incompétent que méprisant, et bien décidé à faire tout ce qui est en son pouvoir pour revenir le plus tôt possible vidanger le samovar de la Reine des Glaces (en tout bien tout honneur, bien sûr). La bande d’Hommes Bêtes que son armée poursuit, et qui signe ses méfaits en apposant la titulaire « marque de la bête » dans les décombres des villages qu’elle a rasée2, bénéficie donc d’un avantage certain sur ses adversaires humains, et le pauvre Badenov en est réduit à limiter les dégâts causés par le leadership exécrable de son officier.

Envoyés par Yasharov pister la trace de la harde, qui semble avoir fait des prisonniers lors de sa dernière attaque, comme le faible nombre de cadavres trouvés dans les ruines du hameau où la nouvelle débute le laisse à penser, Badenov et ses scouts se font surprendre en rase taïga par une bande d’Ungors dépêchés par le Seigneur des Bêtes Gashrakk Blackhoof pour faire le service d’ordre à proximité de son campement. Gashrakk est en effet un visionnaire, dont le grand dessein est de réveiller le Seigneur du Dawa (Lord of Misrule en V.O.), une déité 100% chaotique que les légendes des Bêtes du Chaos font reposer en dessous de la pierre des hardes de la tribu de la Corne Noire. Pour permettre au Dawaster de sortir de son trou et de régner à nouveau sur son « royaume de confusion » (sicoù on n’écoute que du Genesis à fond les ballons, j’imagine), le big G. a un plan : sacrifier un nombre suffisant de prisonniers au Chaos, en mettant le feu à une effigie géante d’Homme Bête construit avec des cages en bois. Et moi qui pensait qu’ils ne savaient rien faire de leurs dix (?) doigts (?), me voilà corrigé. L’approche peu subtile de Yasharov ayant alerté le chamane Cathbad, Gashrakk sait que son projet X risque d’être interrompu par des Kislevites en maraude, et a donc envoyé quelques bandes désœuvrées contrecarrer la manœuvre. Il a aussi envoyé une doublette de chars à sangleboucs, malheureusement pour les cavaliers légers de Badenov, qui sont contraints à se replier en désordre après l’intervention des panzers adverses, abandonnant quelques morts et blessés sur le champ de bataille.

De retour au campement kislévite, Badenov réussit à obtenir de son Capitaine l’autorisation de lancer une mission d’infiltration de la base adverse (repérée par d’autres scouts, plus doués, eux) pour tenter de libérer ses camarades prisonniers, et peut-être secourir quelques civils au passage. Yasharov n’est absolument pas convaincu par la menace posée par un rituel sacrificiel qu’il s’agirait d’empêcher avant que l’attaque de son armée ne débute, mais il laisse tout de même à son sous-fifre jusqu’à la tombée de la nuit pour mettre à exécution son plan, après quoi il donnera l’assaut. Réduits à mi-effectifs à ce stade de la nouvelle, les Badenov’s Baddies profitent d’un coup de pouce de la part du script pour progresser vers leur objectif : le campement des Hommes Bêtes a été établi sur un ancien oppidum ungol, et compte bien entendu un souterrain secret reliant le centre de la place forte à l’extérieur. Haaa. Et nos héros trouvent bien sûr ce souterrain secret en l’espace de trois minutes. Hooo. Leur chance tourne cependant lorsqu’ils découvrent que les Gors ont décidé d’installer leurs latrines à l’endroit où le tunnel émerge dans leur campement. Un petit prix à payer pour speed runner cette quête, cependant.

De son côté, Gashrakk ne s’est pas tourné les sabots et a entamé le rite de réveil démoniaque/feu de joie païen avec Cathbad. L’arrivée imminente de l’armée kislevite, que sa bande d’Ungors n’a manifestement pas arrêtée (comme c’est bizarre) force toutefois le Seigneur des Hardes à accélérer le protocole, et à balancer une torche sur son bonhomme (bête) carnaval avant que le chamane n’ait pu terminer de réciter « je te tiens par la barbichette » 666 fois de suite. C’est le moment que choisissent Badenov et ses hommes pour lancer leur attaque sur les mutants, confiants dans le fait qu’il ne leur faudra tenir que quelques minutes avant que le reste de leurs forces n’arrivent en renfort, pas vrai ? PAS VRAI ? En cela, ils ont sous-estimé le jemenfoutisme de Yasharov, qui se contente d’envoyer quelques cavaliers barricader les portes du campement (?) pour empêcher les Hommes Bêtes de sortir. Car apparemment, ces derniers savent construire des statues en bois de 10 mètres de haut, mais le concept de distance de sécurité par rapport à un foyer de combustion leur est inconnu. La magie du scénario…

Toujours est-il que cette défection de dernière minute ne fait pas les affaires de nos héros. Si Cathbad se fait assez facilement soloter par Arnwolf le Norse, Badenov n’a pas la partie facile contre Gashrakk. Finalement, un anneau nasal trop solidement fixé, un crochet attaché à une chaîne elle-même fixée à la pierre des hardes, et surtout un positionnement malheureux du Seigneur des Blettes vis-à-vis de l’angle de chute de son effigie enflammée, auront raison du pauvre Blackhoof. C’est ce qu’on appelle un bûcher des vanités, vraiment. S’il ne réussit pas à réveiller le Dawaster et perd toute sa tribu en même temps que sa vie dans cette folle soirée (les Hommes Bêtes le sont vraiment, faut croire), il peut au moins se réconforter en songeant que tous les villageois capturés ont également fini en marshmallow (donc je ne comprends pas pourquoi son plan n’a pas marché… à moins que les invocations de Cathbad soient vraiment capitales), ainsi que la plupart des hommes de Badenov. En comptant l’évasion miraculeuse d’Oran et de Manfred, qui avaient été faits prisonniers par les Ungors, nos héros ne sont plus que six, et c’est assez naturellement qu’ils décident de déserter pour devenir des mercenaires, loin de l’incompétente brutalité des officiers placés là par leur famille. D’ailleurs, à ce propos…

Début spoiler…Il n’est jamais trop tard pour se venger de mauvais traitements, surtout quand on n’a plus rien à perdre. Badenov et Oran rendent donc visite à Yasharov au cœur de la nuit, et procèdent à un échange du meilleur goût : ils laissent la tête calcinée de Gashrakk dans le lit de l’aristocrate, Le Parrain-style, et vont planter la sienne sur une pique à l’extérieur du camp kislévite, avant de partir voir ailleurs s’ils y sont. On connaît la suite…Fin spoiler

1 : Et si vous pensez que je n’ai pas la patience ou la mesquinerie nécessaire pour relayer l’information, vous devez être nouveau ici : Torben Badenov, Oran Scarfen, Vladimir Grozny, Alexi, Arkady et Andrei Tolyev, Manfred, Oleg Chenkov, Arnwolf, Zabrov, Mikhail Polenko, Yuri Gorsk Kiryl, Evgenii, Cheslav, Stefan. Il n’en resteraque six  à la fin, ne vous attachez pas trop.
2 : Parfois en utilisant des matériaux… plus biodégradables que d’autres.

AVIS :

S’il ne s’agit pas de la première nouvelle écrite par Jonathan Green pour sa bande de mercenaires préférés, ‘Mark of the Beast’ peut au moins se prévaloir d’être le premier épisode de la série qui donnera au final le recueil ‘The Dead and the Damned’. Le résultat n’est pas aussi navrant qu’il a pu être dans d’autres péripéties badenoviennes, la haute teneur en action (bas du front) injectée par Green dans cette aventure l’empêchant de trop s’empêtrer dans son scénario, même si ce dernier apparaît tout de même très fragile dès lors qu’on a le malheur de s’intéresser un peu trop à lui. Si le héros s’appelle Badenov, l’auteur a pour sa part bien mérité le nom de Good Enough… De la cheap fantasy très peu intéressante, à moins que vous ne cherchiez à voir ce que le BL style a produit de plus suranné.

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Jahama’s Lesson – M. Farrer :

INTRIGUE :

Jahama's LessonLe Seigneur Khreos Maledict a quitté sa cité de Karond Kar avec armes et bagages pour mener un raid sur les côtes bretonniennes. Pillard invétéré, il a laissé la fougue de sa jeunesse derrière lui et cherche désormais à remporter ses campagnes en évitant de passer par la case « bataille rangée ». C’est à cette fin qu’il a recruté la Matriarche Miharan Diamo, et surtout son protégé, l’assassin Jahama, pour mener une opération de diversion au cœur du château du Duc d’Argent, dont l’armée pourrait s’opposer à celle des Elfes Noirs. Maledict a aussi embarqué son neveu (Khrait), officiellement pour le former au métier, mais d’abord et surtout pour pouvoir débiter d’interminables et pompeux monologues sur son génie stratégique. Nos quatre personnages débarquent en avance des troupes druchii pour accompagner Jahama jusqu’à l’endroit où sa mission d’infiltration doit commencer. Après avoir reçu la bénédiction de sa tutrice, le tueur prend la clé des champs et se dirige vers la forteresse ennemie.

Sur le chemin les ramenant vers l’Arche Noire que le Dynaste a affrétée pour sa virée shopping ultramarine, Khreos et Miharan échangent quelques piques au sujet des qualités de l’assassin. Le noble se fait un plaisir de révéler à la Matriarche que son élève va se retrouver confronté à une opposition exceptionnelle, le Duc d’Argent étant une force de la nature au tableau de chasse impressionnant, sans parler de son entourage de chevaliers endurcis et de fidèles hommes d’armes. Supprimer le commandant bretonnien ne sera donc pas une partie de plaisir pour Jahama, dont c’est pourtant la mission. Miharan ne se montre cependant pas très inquiète, et commence à raconter à l’oncle et au neveu la dernière épreuve à laquelle Jahama a dû se soumettre pour gagner ses galons d’assassin. Hellebron étant cette année-là d’une humeur particulièrement massacrante (on suppose qu’elle était en rade d’anti-rides), la mégère avait défié les impétrants de pénétrer dans son manoir bourré de pièges, et de prendre à son assassin personnel, le redouté (autant qu’inconnu, mais c’est plutôt flatteur dans ce métier) Hakoer, son collier d’argent serti d’un rubis. Comme ledit Hakoer avait hérité de l’Epée de Mort de son employeuse le temps de l’épreuve pour en relever encore un peu la difficulté, les bookmakers de Har Ganeth avaient mis une côte stratosphérique sur la promotion Kermit1. Le trio remonte à bord et se sépare pour se préparer à l’assaut contre les humains avant que la Matriarche ait pu finir son histoire, laissant Khreos et Khrait dubitatifs sur la véracité de son récit.

De son côté, Jahama ne traîne pas en besogne, et parvient à se glisser à l’intérieur du château d’Argent alors qu’un banquet célébrant une campagne victorieuse contre une harde d’Hommes Bêtes en maraude bat son plein. Mais eu lieu de se rendre dans la chambre du Duc pour se cacher dans un placard pour le surprendre en pyjama, l’assassin préfère foutre un bordel monstre dans les festivités bretonniennes, et de façon tout à fait visible qui plus est. Après avoir suriné/fléchetté/garrotté/savaté une dizaine de convives et de serviteurs, l’alerte générale est donnée et le Druchii meurtrier se retrouve confronté à une horde d’adversaires compensant leur manque d’armure et leur alcoolémie élevée par les vertus du juste courroux et de la motivation implacable. Malgré ses talents de combattant et d’acrobate, Jahama finit par se retrouver en mauvaise posture, et le Duc d’Argent en personne se fraie un chemin jusqu’à lui pour le défier en duel, dans la plus pure tradition locale. Peu intéressé par la proposition, l’Elfe Noir se contente d’envoyer sa dernière dague de jet dans la poitrine d’une Demoiselle qui avait commis l’erreur de traîner dans le coin, avant de littéralement tirer sa révérence et de s’enfuir du château, poursuivi par une meute d’humains vengeurs.

Retour du côté Druchii, où l’armée de Maledict progresse sans se presser vers la forteresse d’Argent. Khreos révèle en aparté à son neveu qu’il a mis Jahama sur une mission suicide, dont le but était de désorganiser les Bretonniens plutôt que de tuer leur Duc, et qu’il a pour projet d’arranger un regrettable accident pour Miharan avant que l’expédition ne se termine, afin qu’elle ne puisse pas lui tenir rigueur de la mort de son pupille. Ces confidences sont toutefois interrompues par une clameur qui retentit à l’horizon, alors que les Elfes Noirs sont encore en ordre dispersé…

Début spoiler…C’est l’armée du Duc d’Argent qui s’est portée à leur rencontre, et qui roule sur les pillards comme un 4×4 sur un crapaud (gothique). Dans la mêlée qui s’ensuit, Khreos est mortellement blessé par l’ennemi, et tente péniblement de ramper hors du champ de bataille pour rejoindre le littoral et l’Arche Noire qui y est amarrée. Sa lente progression est stoppée par Jahama, qui lui révèle qu’il a « malencontreusement » laissé tomber la carte sur laquelle l’itinéraire des Elfes Noirs était indiqué au moment où il quittait le château du Duc. C’est vraiment ballot, mes plus confuses dude ! Il s’agissait pour lui de donner une leçon à un noble arrogant, qui prétendait utiliser le culte de Khaine comme de vulgaires mercenaires, et d’inculquer le respect de cette ignoble institution au reste des puissants de Naggaroth. Avant qu’il ne soit abandonné par Jahama, qui après tout a un bateau à prendre, Khreos a le temps de remarquer que le responsable de sa chute porte un collier d’argent où brille un rubis…Fin spoiler

1 : Les classes d’Assassins Elfes Noirs sont baptisés en honneur des marionnettes du Muppets Show. Nul ne sait d’où vient cette tradition.

AVIS :

Pour sa seule incursion recensée dans le Vieux Monde, Matthew Farrer signe une petite fable grinçante illustrant parfaitement le caractère impitoyable et retors de la société elfe noire, un genre d’histoire dont on peut difficilement se lasser, dès lors que la qualité est au rendez-vous, ce qui est ici le cas. De plus, il prolonge le plaisir en mettant en scène avec un luxe de détails et une vraisemblance rarement atteints (à ma connaissance) dans la GW-Fiction deux pans incontournables du fluff des Druchii : piller les côtes du Vieux Monde d’une part, et assassiner leurs rivaux d’autre part. Si les Elfes Noirs sont votre faction de cœur, ‘Jahama’s Lesson’ est un must read absolu, et tant pis pour Khreos Maledict.

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A Good Thief – S. Jowett :

INTRIGUE :

A Good ThiefFrançois Villon est un poète (naaaaaan ???) à l’esprit vif et à la langue bien pendue, ce qui lui cause autant de problèmes que d’opportunités. Forcé à l’exil de sa Marienburg natale après que les vers qu’il a composés sur les activités extra-maritales de la femme de l’un des princes marchands de la cité soient parvenus aux oreilles du mari cocu, il a trouvé refuge dans la petite ville de Wallenholt, et est devenu le poète de cour du Graf local. Une occupation indigne de ses talents, qui sont de son avis de spécialiste, superlatifs, mais qui lui permet de vivoter tranquillement aux crochets de son mécène.

La situation de Villon se complique lorsque le Graf de Wallenholt reçoit la visite d’une délégation de notables impériaux, dans laquelle se trouve un parent de la Frau von Klacht, dont les frasques libertines ont été mises en vers (et contre tous) par notre poète. Reconnu par le visiteur, Villon est fissa envoyé à la case prison par son employeur, qui préfère logiquement se séparer de son flagorneur licencié plutôt que d’hériter d’une guerre commerciale avec l’un des marchands les plus influents du Vieux Monde. Par chance pour Villon, la petite soirée pendant laquelle son destin s’est joué s’est déroulée devant un autre témoin, d’opinion plus favorable envers le rimailleur de cour. Le Magister (puisqu’on ne le connaîtra pas sous d’autres noms) organise l’évasion de notre héros pendant son transfert vers Marienburg, et lui remet une mission très spéciale en échange de ce coup de pouce inespéré : il doit se rendre dans un village du Reikwald tombé sous la coupe du bandit Gerhard Kraus, et mettre la main sur un artefact magique que le même Kraus a acquis pour le compte du Magister, avant de décider de le garder pour lui. Tout cela est bien mystérieux.

A son arrivée à Krausberg, Villon ne perd pas de temps à s’encanailler avec les hommes du seigneur brigand, qui reste lui complètement reclus dans ses quartiers. Il lui faudra attendre une nuit de beuverie pendant laquelle son public lui demande de réciter pour la énième fois son ode épique sur Frau von Klacht pour que Kraus daigne faire son apparition, et défie Villon à un duel… de poésie. Original, n’est-ce pas ? Le brigand n’est cependant pas un adepte du free style, et se contente de réciter les strophes tirées d’un petit livre qu’il a amené avec lui, et dont la nature arcanique ne fait rapidement pas de doute à Villon, qui se fait happer par la déclamation de Kraus au même titre que le reste de l’assemblée. Il est évident que c’est l’objet que le Magister l’a envoyé reprendre au mercenaire indélicat, et Villon décide d’agir la nuit même, profitant du gros coup de mou subi par Kraus après la fin de sa prestation. L’art est épuisant, c’est vrai.

Voleur avant d’être poète, Villon n’a aucun mal à se glisser dans la chambre du bandit et à mettre la main sur le livre en question, dont l’influence néfaste n’est pas à sous-estimer. Ne pouvant corrompre directement notre héros (qui est analphabète, et c’est bien pour cela que le Magister l’a choisi en premier lieu) comme il l’a fait pour Kraus, le grimoire possède ce dernier et un combat féroce s’engage entre les deux chineurs d’antiquités pour la possession du grimoire. Villon finit par remporter le match et s’enfuit par la fenêtre avec son butin sous le bras, laissant Kraus éborgné et exposé comme fraude littéraire (une double sanction bien sévère, si vous voulez mon avis). Après un voyage vers Altdorf, où le Magister lui a donné rendez-vous, le poète remet le bouquin tant convoité à son commanditaire, qui le jette immédiatement dans le feu, OPA Gandalf-style. Contrairement à l’Anneau Unique, le parchemin est inflammable et l’ouvrage maudit (askip) finit en fumée. Voilà une nouvelle menace qui planait insidieusement sur l’Empire écartée pour de bon…

Début spoiler…Enfin presque. Villon a en effet jugé malin de donner au Magister un livre dérobé au hasard dans la bibliothèque municipale la plus proche, préférant trouver un riche gogo pour lui acheter le vrai grimoire un peu plus tard. A malin, malin et demi cependant : le Magister ne met pas longtemps à se rendre compte qu’il a été dupé, et se fait un plaisir de faire arrêter Villon pour lui apprendre à jouer des tours aux puissants de ce monde. Par chance pour notre poète-escroc, M a une nouvelle mission à lui confier, ce qui est toujours mieux que danser la gigue des pendus (en attendant d’en composer la ballade, bien sûr)…Fin spoiler

AVIS :

Simon Jowett prend son temps et déroule une histoire originale de poète-voleur missionné pour dérober un grimoire de sonnets à un seigneur bandit trop cultivé pour son propre bien (je vous défie de trouver une intrigue comparable dans tout le corpus de la GW-Fiction) dans ce ‘A Good Thief’, dont la moitié des pages est finalement consacrée à la présentation du héros. Jowett est suffisamment doué avec sa plume pour que le lecteur n’ait pas l’impression de se faire flouer dans la manœuvre, mais il ne reste pas moins que cette nouvelle ressemble plus à l’introduction d’un roman, qui n’aura au final pas été écrit1, qu’à une œuvre indépendante. Une sympathique curiosité.

1 : Un puissant et mystérieux commanditaire œuvrant en secret pour le bien de l’Empire recrute des agents doués de talents particuliers parmi le gibier de potence impérial ? Ça me dit vaguement quelque chose

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What Price Vengeance? – C. L. Werner :

INTRIGUE :

What Price VengeanceLa bande de mercenaires tiléens du Capitaine Ursio a connu de meilleurs jours : engagée par le rusé Vicomte Augustine de Chegney pour brigander en son nom sur les terres de ses voisins, elle a failli à sa mission et a en conséquence essuyé une attaque meurtrière de la part d’autres sbires de l’implacable Bretonien, peu enclin à laisser des témoins de sa vilénie ternir sa réputation. Il paraît que les chevaliers du Royaume sont h.o.n.o.r.a.b.l.e.s après tout. Malheureusement pour Gus, les reitres ont survécu, et sont maintenant assoiffés de vengeance. Profitant de la bonté de Claudan de Chegney (fils du premier), ils investissent donc la place forte que ce dernier occupe au nom de son père – et qu’il a dérobé à un autre voisin, impérial celui-ci – en prétextant chercher à s’abriter des terribles orages des Montagnes Grises… et passent tous les habitants du château par le fil de l’épée pour se passer les nerfs. Tous ? Pas tout à fait. À malin, malin à demi : Ursio repart donc se cacher dans la campagne avoisinante avec le jeune fils de feu Claudan et sa nourrice, et charge le gouverneur du noble trucidé d’aller porter sa demande de rançon à Augustine.

Bien que n’étant pas vraiment un enfant de chœur, comme on a pu le voir plus haut, le Vicomte est un family man, ne serait-ce que parce qu’il est trop bête d’agrandir le fief familial uniquement pour le voir disparaître à sa mort, faute d’héritiers. N’ayant plus que Claudan Junior (que nous appellerons Cloclo) de ce côté-là, il est prêt à dépenser sans compter pour retrouver l’usufruit de son petit-fils, mais est convaincu par son conseiller (Plaisant) de ne pas négocier avec des terroristes, et de recruter à la place un tueur professionnel pour aller récupérer le bébé à ses ravisseurs. Cela tombe bien, Plaisant a justement un nom à souffler à son patron : celui du redoutable Brunner, un impérial que l’on dit de noble ascendance (ça compte pour les Bretonniens), et n’ayant jamais failli à la tâche. Augustine envoie donc son sénéchal recruter le chasseur de primes… qui refuse de prendre la mission, malgré les 200 couronnes d’or sonnantes et trébuchantes que le bon Plaise lui fait miroiter. Enfin, il fait mine de refuser plutôt, le temps de laisser un Plaisant très colère repartir de la taverne dans laquelle le rendez-vous a pris place, et se faire embusquer quelques mètres plus loin par un groupe de truands de bas étage, qui n’ont pas pu résister à la grosse bourse (au singulier ça va) du sénéchal. Cette avidité leur sera fatale, Brunner sortant des ombres au moment fatidique pour leur régler leur compte avec une efficacité consumée, et empocher au passage les quelques pièces d’argent que la mort de ces soudards lui rapporteront. Y a pas de petits profits.

Un peu plus tard, nous retrouvons le taciturne mercenaire sur les terres du Vicomte, qu’il semble très bien connaître. Ayant joué le rôle de l’innocent (mais tout de même très bien armé) voyageur pour attirer trois des hommes d’Ursio à se montrer auprès de son feu de camp, il a tôt fait d’en envoyer deux chez Morio (le Morr tiléen), gardant le troisième en vie pour qu’il lui indique où se sont cachés ses petits camarades. Et si la tour de guet abandonnée que les kidnappeurs ont choisi comme repaire semblait être un endroit parfait pour surveiller les environs, on s’aperçoit bien vite que Brunner joue vraiment à domicile, puisqu’il pénètre dans le donjon au nez et à la barbe des sentinelles grâce à sa connaissance du passage secret reliant l’édifice à un tunnel à proximité. Cet avantage lui permet de neutraliser discrètement (au début) les hommes d’Ursio, laissant ce dernier seulement accompagné de ses deux derniers lieutenants, et de ce cher Cloclo (la nourrice ayant été étranglée par un mercenaire nerveux après que Brunner ait arrêté le mode silencieux, et commencé à castagner du sbire sans retenue), dans la salle principale de la tour.

Ce remake Battle de ‘Trois Hommes et un Couffin’ ne se termine pas aussi bien que l’œuvre originale pour le trio en question. Les compagnons d’Ursio tombent rapidement sous les balles et les lames du chasseur de primes, ce qui laisse leur Capitaine s’échapper en courant avec le bébé dans les bras… jusqu’à ce qu’il fasse la rencontre des chausse-trapes que Brunner a pris soin de semer en bas de l’escalier de la tour, ce qui ruine ses sneakers et l’envoie au tapis (et le pauvre Cloclo avec, encore un drame des bébés secoués). Lorsque le Tiléen voit sa Némésis apparaître sur le pallier, il tente de le convaincre de le ramener avec lui chez de Chegney, ce que Brunner accepte… partiellement. Comme il le révèle à sa victime, le Vicomte n’a en effet payé que pour sa tête, le reste de son anatomie peut donc rester sur place.

La nouvelle se termine avec un face à face entre Brunner et de Chegney, le premier annonçant à son employeur que, malheureusement, Cloclo n’a pas survécu à sa capture. Dévasté par la nouvelle, le noble accepte tout de même d’honorer sa part du contrat et remet à son chasseur de tête (qui n’est pas revenu les mains vides) la moitié restante de la somme convenue, avant de lui donner congé…

Début spoiler…Mais la scène « post-credit » (si je puis dire) révèle que Brunner a menti, et gardé le bébé avec lui. Ne pouvant l’élever seul, il le confie à un couple de marchands, auxquels il remet également la prime versée par de Chegney. On comprend quand il présente Cloclo comme étant également son petit-fils que le chasseur de primes était en fait le Graf Von Drakenburg dont de Chegney a usurpé le domaine, marié de force la fille à son fils, et vendu à des esclavagistes pour s’en débarrasser. Cela explique la connaissance approfondie des terres des Von Drakenburg dont Brunner dispose, et son peu d’empressement à rendre Cloclo à Gus. La garde partagée est un plat qui se mange froid.Fin spoiler

AVIS :

Après nous avoir fait don de Mathias Thulmann quelques infernaux numéros plus tôt, C. L. Werner remet le couvert avec ‘What Price Vengeance ?’, nouvelle introductive de l’un de ses personnages les plus marquants, le chasseur de primes Brunner. Le charme opère immédiatement dans cette histoire de prise d’otage (violente) et d’opération de libération (tout aussi violente), l’auteur parvenant à nous embarquer d’un tour de plume dans les bas-fonds du Vieux Monde en compagnie de brigands sanguinaires, de nobles cauteleux et de mercenaires impitoyables. L’intrigue est très solide, le déroulé plaisant à lire et idéalement dosé (Werner fait partie de ces bons écrivains qui savent prendre leur temps sans qu’on ait l’impression qu’ils meublent, qualité trop souvent absente des écrits de la Black Library à mon goût), la conclusion apporte sa petite révélation bien sentie et finement préparée par Werner au cours des pages précédentes, il y a du fluff et des one liners bien sentis… Que demande le peuple ?

Le seul petit défaut qu’on pourrait reprocher à cette masterclass med-fan est la tonne de descriptions vestimentaires dont Werner nous abreuve dès lors qu’un personnage important nous est introduit pour la première fois, une excentricité qu’on ne retrouve chez personne d’autre au sein de la BL à ma connaissance. A part ça, on a affaire à une nouvelle de très haute volée, tout comme l’anti-héros qu’elle nous présente.

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Et voilà qui termine cette revue de ‘Way of the Dead’, une anthologie qui a ma foi fort bien vieillie quand on la compare aux autres recueils de nouvelles de Warhammer Fantasy Battle, et même à ceux d’Age of Sigmar, à tel point que je le conseille comme point d’entrée dans cette franchise pour tous les lecteurs souhaitant découvrir le Monde qui Fut. La qualité est en effet largement au rendez-vous, et même l’histoire la plus faible du lot (désolé Jonathan Green) se révèle intéressante à lire d’un point de vue académique (le mot est lâché), puisqu’elle permet de déterminer le « plancher » qualitatif de la GW-Fiction moderne1. Par ailleurs, ‘Way of the Dead’ se paie également le luxe d’être assez diversifié pour un recueil de seulement neuf nouvelles, des soumissions assez classiques cohabitant avec le charme un peu suranné de Brian Craig ou le second degré presque assumé de Robin D. Laws. Enfin, il faut souligner que cet opus met en avant quelques un des héros majeurs de WFB, et qui plus est, au début de leurs aventures, ce qui achève de faire de ‘Way of the Dead’ le recueil introductif par excellence.

1 : Je garde les très vieux recueils de nouvelles, prédatant la Black Library (‘Ignorant Armies’, ‘Red Thirst’ et ‘Wolf Riders’, chroniqués , et si ça vous intéresse) à part. Si certaines de leurs histoires s’intègrent parfaitement dans le corpus classique de Warhammer Fantasy Battle, d’autres sont par contre tellement différentes de ce que nous considérons comme étant la norme de la GW-Fiction qu’il serait déloyal d’établir un comparatif.

INFERNO! – ANNEE 2

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue des nouvelles publiées dans les numéros #7 à #12 d’Inferno !, soit la seconde année de publication de cet auguste et vénérable bimensuel (Juillet 98 à Mai 99). Si l’on jette un œil sur les auteurs mis à contribution pour ces six numéros, on constate qu’Abnett le jeune caracole en tête des charts avec pas moins de quatre soumissions à son nom, en majorité consacrée à Warhammer Fantasy Battle. Il est suivi d’assez loin (2 nouvelles) par deux autres figures de la Black Library : l’inoxydable Gav Thorpe et l’immarcescible Bill King. Notons enfin l’arrivée pendant cette période de plusieurs plumes notables : Matthew Farrer (‘Badlands Skelter’s Downhive Monster Show’) et Ben Counter (‘Daemonblood’), Hall of Famers de la BL, et Barrington J. Bayley (‘Children of the Emperor’) comme invité de marque et caution SF de ce jeune magazine.

Inferno!_Année 2

Les 21 nouvelles regroupées ici présentent la GW-Fiction dans toute sa foisonnante diversité, explorant les recoins les plus reculés du Monde qui Fut et du 41ème millénaire (y compris Necromunda) avec une liberté et une inventivité qui laisseront progressivement la place à plus de contrôle de la part des maîtres du fluff de Nottingham. Que vous soyez à la recherche d’une romance avec un loup-garou (‘Wolf in the Fold’), ou de Space Marines se frottant à la réalité virtuelle (‘Hell in a Bottle’), il n’y a qu’ici que vous trouverez quelque chose tout ce qu’il y a de plus officiel à vous mettre sous la dent.

On trouve également dans cette anthologie de vrais classiques, qui peuvent se comparer favorablement avec des nouvelles écrites plus de vingt ans plus tard, comme ‘In the Belly of the Beast’ (King) ou ‘Acceptable Losses’ (Thorpe). C’est également en cette fin de millénaire que l’indispensable Zavant Konniger fit ses premiers pas et savantes déductions sous la plume de Gordon Rennie (‘The Affair of the Araby Exhibit’). Vous l’aurez compris, cette deuxième année infernale mérite le coup d’œil pour tous les amateurs de GW-Fiction, qu’ils soient nostalgiques de ce passé mythique ou pas. En selle pour un petit tour du propriétaire bibliothécaire.

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A Company of Wolves – D. Abnett [WFB] – #7 :

INTRIGUE :

WFB_A Company of WolvesUne compagnie de Chevaliers du Loup Blanc plongée en plein doute existentielle à la suite de la mort de leur commandant au cours d’un raid mal négocié dans la Drakwald quelques mois plus tôt retourne en forêt pour une session de teambuilding mâtinée de skullbashing. Les problèmes affligeant nos héros, que l’on ne peut pas qualifier de sans peur (le vétéran Gruber a le trouillomètre à zéro depuis le décès tragique de son supérieur et ami Jurgen) ni de sans reproche (dans le désordre : Morgenstern a un gros problème d’alcool, Anspach est un parieur pathologique, Vandam une tête brûlée carriériste, et le nouveau chef, Ganz, a moins de charisme que la tête de loup qui orne son armure) sont nombreux, mais le Grand Maître de l’ordre a bon espoir que l’air pur, la nature préservée et les hordes de mutants assoifées de sang qui hantent la Drakwald parviendront à guérir la compagnie rouge de son spleen persistant. Preuve de sa confiance dans ses hommes, il leur a même confié le précieux étendard de Vess1 pour cette virée forestière, ce qui relève un peu le moral des troupes.

Le plan de Ganz consistant à errer dans les bois jusqu’à tomber sur une bande de néfastes à massacrer au nom d’Ulric, notre petite bande baguenaude cavalièrement jusqu’à faire la rencontre de quelques Hommes-Bêtes venus se recueillir devant une idole païenne. L’escarmouche qui s’en suit, si elle ne dure pas longtemps et se termine par une victoire sans appel pour le camp impérial, révèle toutefois de façon criante les maux profonds qui affectent la compagnie. Gruber refuse ainsi de charger l’ennemi, prétextant la perte de fer de sa monture, Morgenstern est couché net par une branche basse qu’il n’a pas pu esquiver, Vandam fonce tête baissée à la poursuite des fuyards malgré les ordres de Ganz, et Von Glick, sommé de le faire revenir au bercail, se fait grièvement blesser par un Ungor embusqué sur le chemin du retour. Cette blessure force les templiers à monter le camp pour la nuit en plein cœur de la Drakwald, et à perdre un des leurs sous les flèches des Hommes-Bêtes (on peut saluer la prescience d’Abnett sur le sujet) pour couronner le tout.

Alors que la compagnie semble sur le point de se désagréger, tel le premier boys band venu après un second album décevant, l’inspiration finit par frapper les loulous, qui décident de tenter le tout pour le tout. Faisant mine de laisser derrière eux leurs morts, blessés et étendard sous faible garde, les chevaliers tournent bride vers Middenheim, espérant ainsi attirer le reste de la harde à découvert. Ce qui ne manque évidemment pas d’arriver. La vaillante action d’arrière-garde conduite par Aric, Gruber et Von Glick permet de retenir les mutants assez longtemps pour que la cavalerie arrive revienne, et annihile les cornus d’une dévastatrice charge de flanc d’école. Bonus appréciable : il s’agissait de la même bande de fieffés violeurs de poules responsables de la mort de Jurgen, qui se trouve donc vengé de façon satisfaisante. Au final, et malgré la mort au combat de Vandam (sans doute en plein grand écart facial) et de Von Glick, nos héros peuvent prendre le chemin du retour unis comme jamais et à nouveau pleinement opérationnels. Une vraie fin de loup(s), en somme.

: Car Vess de Loup (blanc), évidemment. Je ne vois pas d’autres explications satisfaisantes et n’accepterai pas de contestations.

AVIS :

Dans la foulée du lancement réussi de la série des Fantômes de Gaunt dans les pages d’Inferno!, Abnett se livre à un exercice similaire avec ce ‘A Company of Wolves’, introduisant au lecteur une confrérie de templiers du Loup Blanc, dont les exploits seront relatés dans une succession de nouvelles, puis compilées et conclues dans le roman ‘Hammers of Ulric’. Bien que cette péripétie inaugurale soit relatée avec l’aisance habituelle de la plume Alpha de la Black Library, j’ai trouvé le résultat final un peu moins réussi qu’à l’accoutumée. Parmi les raisons de ce (léger) coup de moins bien, j’identifie le nombre important de protagonistes et la « singularisation » moins aboutie de ces derniers (sauf pour Morgenstern, catalogué comic relief de façon outrageuse, ce qui est un autre défaut), une intrigue somme toute assez banale combinée à une mise en scène parfois complaisante1, ou encore la très nette sensation qu’Abnett avait déjà acté qu’il ferait vivre ses nouveaux héros sur plusieurs nouvelles, et a traité A Company… comme un chapitre introductif plutôt qu’un stand-alone (ce qui relève plus de la faute de goût que de la catastrophe industrielle, certes). Pour autant, on a tout de même droit à du Dan Abnett tout ce qu’il y a de plus solide, avec des personnages attachants dès lors qu’on arrive à les différencier les uns des autres, des scènes d’action prenantes où la mort frappe sans prévenir, et une exécution globalement propre. Rien de grave donc.

1 : La possibilité qu’un chevalier puisse se prendre une flèche dans le cou alors qu’il dort au milieu de ses frères d’armes, protégé par des sentinelles habituées des choses de la guerre, et n’être découvert qu’au petit matin, ne me semble pas des plus réalistes. À un autre niveau, le « tour de pâté de maisons » effectué par le gros des troupes (et je ne parle pas de Morgenstern) pour surprendre la harde d’Hommes-Bêtes… qui se trouve être la même que celle qui a tué Jurgen quelques mois plus tôt (#WIJH) est un expédient un peu trop facile à mon goût.  

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Children of the Emperor – B. J. Bayley [40K] – #7 :

INTRIGUE :

Ayant échappé de justesse à la destruction du vaisseau qui transportait son régiment jusqu’à sa nouvelle affectation, le Garde Impérial Floscan Hartoum n’a d’autre choix que de faire atterrir sa capsule de sauvetage à la surface d’une planète mystérieuse dans l’attente d’être secouru. Recueilli par une tribu d’abhumains (deux paires de jambes) dont la mutation a été volontairement déclenchée par leurs ancêtres colons afin de lutter contre la forte gravité de leur monde d’adoption, Hartoum verra son courage et sa vision de l’Imperium sérieusement testés au cours de son séjour chez les enfants perdus de l’Empereur.

AVIS :

Children of the Emperor est une petite gemme, et sa lecture est fortement conseillée à tous les esprits curieux familiers des publications de la Black Library. Cette nouvelle jette en effet un éclairage particulier et très dépaysant sur l’univers de Warhammer 40.000, en prenant toutefois garde de bien respecter le background qui existait à l’époque, attention aussi délicate que louable de la part d’un auteur aussi établi que Barrington J Bayley. L’un des charmes de Children of the Emperor est ainsi son absence d’aberrations fluffiques, preuve indubitable du sérieux travail de « documentation » effectué par Bayley avant la rédaction de ce texte1 (tous les contributeurs de la BL ne peuvent en dire autant, pas vrai Nik Vincent ?).

Mais les principales plus-values apportées par la plume experte de Bayley restent son style, affirmé, maîtrisé et très différent des canons de la BL (ce qui fait tout son intérêt), ainsi que son expérience d’écrivain de SF vétéran, qui lui permet d’attirer l’attention du lecteur sur des points jamais soulevés jusqu’ici par les autres auteurs de la maison (comme les variations de gravité d’une planète à l’autre, et les conséquences de ce changement sur un organisme humain normal) ; mais également d’amener son public à réfléchir sur des questions aussi centrales que celle de la tolérance envers la mutation (et donc du droit à la différence de manière plus large) au sein d’un Imperium dont la psychorigidité sur ce sujet – personnifiée par le personnage du Commissaire Leminkanen, zélote écumant et pas très futé – apparaît comme assez grotesque, eut égard à son histoire millénaire et au million de planètes qui le compose. Bref, on peut remercier Barrington J Bayley pour l’amical coup de pied dans la fourmilière qu’il a mis dans le background de Warhammer 40.000, qui n’était (et n’est toujours) pas au-dessus de tous reproches à l’époque, malgré le soin que lui a apporté Priestley et Cie au moment de son élaboration.

1 : Il va même jusqu’à faire mention d’éléments de background un peu avancés, tels que les fameux Schémas de Construction Standardisés. Chapeau l’artiste.

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The Chaos Beneath – M. Brendan [WFB] – #7 :

INTRIGUE :

WFB_The Chaos BeneathÀ la suite d’une cérémonie d’invocation quelque peu salopée par des cultistes amateurs, un Prince Démon de Tzeentch se retrouve coincé dans le corps d’un hôte mort. Assumant l’identité du cadavre qu’il habite, c’est-à-dire celle d’Obediah Cain, chasseur de sorcières un brin malchanceux, le démon convainc Michael de La Lune (si si), apprenti sorcier fraîchement renvoyé du Collège de Magie de Marienburg pour manque d’aptitudes à l’exercice des arts occultes, de lui rapporter une copie du 3ème Tome du Liber Nagash. Cette dernière repose en effet dans une bibliothèque du Collège, protégée par de puissants enchantements que le Prince Démon n’est pas en mesure de briser en son état actuel. Michael va-t-il s’apercevoir des noirs desseins poursuivis par son acolyte avant qu’il ne soit trop tard ?

AVIS :

Encore une déclinaison sur le thème de l’objet magique maléfique que le héros doit rapporter au méchant à son insu. The Chaos Beneath n’est donc pas la nouvelle la plus originale de la Black Library, ni la mieux écrite d’ailleurs : que peut-on donc avancer afin de justifier sa lecture ? Pour être tout à fait honnête, pas grand-chose si ce n’est le ton assez léger employé par Brendan, transformant du même coup le Prince Démon en méchant de cartoon plutôt qu’en implacable antagoniste. Ajoutez une pincée de fluff, et vous aurez fait le tour de tous les points forts de The Chaos Beneath. Ce qui ne fait pas lourd, je vous l’accorde.

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The Hollows of Hell – D. Abnett [40K] – #8 :

INTRIGUE :

The Hollows of HellNouvel épisode de La Croisade s’amuse et nouveau théâtre d’opérations pour Gaunt et ses Fantômes, qui participent à l’invasion du monde ruche de Caligula, en compagnie de millions d’autres Gardes Impériaux. Déployés par navettes à la surface de la planète depuis le transporteur Navarre, les Tanith doivent essuyer une DCA nourrie (ce qui était attendu), ainsi qu’une tempête psychique conjurée au pire moment par les assiégés (ce qui est plus surprenant). Résultat des courses : le transport de Gaunt, où se trouvaient également le Major Rawne, Bragg, Caffran et Milo (pour ne citer que les têtes d’affiche fantômatiques), dévie fortement de son cap, et s’écrase dans l’une des cuvettes parsemant la planète, qui se trouve être colonisée par une forêt tropicale. Protégés par leur invincibilité scénaristique, nos héros émergent crânement des décombres de l’appareil et se préparent au long trekk jusqu’aux lignes amies qui les attend, le crochet imprévu initié par le blow-out de leur Astropathe1 les ayant conduits trente miles au nord de leur cible, en plein territoire ennemi. Cette réalisation inspirera à Bragg cette phrase immortelle, qui constitue la meilleure citation de toute la série, point à la ligne. Pas de quoi perturber l’inflexible Commissaire cependant, qui entraîne les survivants dans une excursion verte vers une base isolée située à proximité du crash.

Cette avanie technique laisse Corbec seul en charge des Tanith ayant réussi à atterrir sans problèmes, et le Colonel se tire fort honnêtement de sa mission. Confrontés à une atmosphère oppressante et teintée de corruption psychique, les braves forestiers progressent du mieux qu’ils peuvent dans la jungle urbaine que constitue la banlieue de la ruche Nero, jusqu’à ce que leur rencontre avec un polyplacophore démoniaque, heureusement mis en fuite par une crise de nerfs de Larkin (qui sort de ses gonds après avoir vu des Furbies crucifiés par les cultistes – des poupées d’accord, mais des Furbies, c’est trop – ), ne force Corbec à faire une pause technique. Se sentant dépassée par la situation, notre barbouze barbue décide d’utiliser un de ses jokers pour progresser dans la partie, et passe donc un coup de fil à un ami, qui se trouve être officier sur le Navarre. Usant de ses influences, ce dernier parvient à mettre en application le plan de Maître Corbec : la macro cannonisation de la cité sensible où les Fantômes sont embourbés, opération peu régulière mais couronnée de succès, comme la fin brutale de la tempête psychique suite à l’arasement de la ZUS le démontre. Problem solved.

De son côté, Gaunt finit par arriver en vue de l’installation convoitée, défendue à son grand dam par quelques Serviteurs de combat un peu trop zélés. Ce regrettable malentendu sera toutefois rapidement réglé, sans qu’aucune perte ne soit à déplorer parmi les forces en présences disposant d’un cerveau intégral. À l’intérieur, le Commissaire a la surprise de découvrir une de ses vieilles connaissances, l’agent de renseignement Rael Tagore, qui, quand il n’essaie pas d’entre en contact avec les Elohim, enquête sur le réseau d’espions mis en place par le très paranoïaque Maccaroth depuis sa prise de fonctions. Soupçonnant beaucoup de choses mais sans l’ombre d’une preuve tangible (un point commun avec notre Raël), Tagore accepte toutefois de ramener ses hôtes sur le front grâce à la navette qu’il avait utilisée pour se mettre au vert peu avant le début de l’offensive impériale. La nouvelle se termine ainsi par une heureuse réunification régimentaire, et la conjuration par Gaunt et Tagore du bon vieux temps sur Estragon Prime. Ah, Estragon Prime. Il y aurait beaucoup à dire sur cette singulière planète, mais ceci est une autre histoire…

1 : Maladresse ou mauvaise appréciation fluffique de la part d’Abnett, la présence dudit Astropathe dans une navette de déploiement de troupes de la Garde Impériale laisse à penser que l’opération a mobilisé quelques centaines de milliers de psykers assermentés du côté impérial.

AVIS :

Pour la première fois depuis le début de sa série, Abnett marque le coup avec une soumission sensiblement inférieure à ce dont il nous avait habitués précédemment. En plus de se révéler d’un intérêt assez quelconque en termes d’intrigue, que soit côté cour (Corbec et ses hommes jouent à la guéguerre avec quelques cultistes, avant d’appeler l’artillerie spatiale et revendiquer une victoire assez mesquine) ou jardin (Gaunt fait de la randonnée et s’inscrit sur Copains d’Avant), l’auteur prend des libertés assez grandes avec le fluff de 40K, tendance que l’on avait déjà vu à l’œuvre dans de précédentes nouvelles – notamment à travers les World Eaters gérés en 2-2 par les Fantômes dans ‘A Blooding’ – mais qui prend une autre dimension dans ‘The Hollows of Hell’. En plus de l’intégration malheureuse d’un Astropathe à l’histoire, l’identification immédiate par l’impayable Varl du caractère démoniaque du mollusque géant rencontré par les Tanith, et l’absence de censure inquisitoriale suite à cette entrevue malaisante au possible, interrogent. N’ayant que de vagues souvenirs de ‘Ghostmaker’, second tome de la série des ‘Fantômes de Gaunt’ dans lequel Abnett a collecté toutes les nouvelles publiées dans Inferno ! avant l’écriture de ‘Premier & Unique’, je ne pourrais dire si ‘The Hollows of Hell’ a été retravaillée par son auteur avant la sortie de ce roman-recueil. Toujours est-il que nous tenons ici l’un des maillons les plus faibles d’une saga autrement plus robuste.

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Gilead’s Fate – D. Abnett [WFB] – #8 :

INTRIGUE :

WFB_GIlead's FateRevenus de leur quête de vengeance décennale (‘Gilead’s Wake’), Gilead et Fithvael ont réinvesti le domaine de Tor Anrok, propriété légitime autant que décatie du premier. La traque du tueur de Galeth, le jumeau de notre héros, a en effet porté un coup fatal à la lignée déjà périclitante de Lothain, dont Gilou est le dernier représentant, et Fithvael l’unique suivant encore vivant. Alors que son majordome préfère camper en forêt et se consacrer à l’entretien de ses domaines horticoles, Gilead a lui sombré dans la dépression et l’alcoolisme, et attend la cirrhose fatale qui aura raison de son spleen (ainsi que de son foie) et de son Endurance de 3. Un événement imprévu va toutefois forcer notre héros dépravé à sortir de sa stupeur…

Entre ainsi en scène Betsen Corpath (Serge de son prénom1), qui, comme Gilead, se trouve être la dernière survivante de sa lignée. Fille de marchands de Munzig, Betsen a perdu toute sa famille au cours d’une terrible soirée, où l’intégralité des Corpath ainsi que tous leurs servants ont été massacré dans leur maison par un meurtrier inconnu. La jeune fille n’a dû son salut qu’à son absence du domaine familial au moment des faits, ses parents l’ayant envoyé faire un stage de demoiselle de compagnie à la cour de Middenheim. Eprouvée par cette tragédie, mais résolue à obtenir justice, Betsen s’est livrée au cours des deux années qui suivirent le Munzig Zweihander Massacre, comme le crime aurait été surnommé par les locaux si j’en avais fait partie, à une investigation fouillée, lui ayant permis de concentrer ses soupçons sur la personne de Lugos, autre marchand de Munzig à la réputation sulfureuse. Malheureusement pour la teenager vengeresse, ses capacités à confronter Lulu sont pratiquement inexistantes, le bougre ayant l’influence et la richesse nécessaires pour entretenir une garde personnelle rivalisant avec la milice locale. En désespoir de cause, Betsen décide donc d’utiliser les bonnes vieilles méthodes de sa défunte (elle aussi) nourrice, à savoir aller déposer plainte au tribunal elfique local, qui se trouve être à côté de la source d’Eilonthay. Les légendes populaires veulent en effet que les habitants de la Tour de Tor Anrok portent secours aux malheureux qui établissent une main courante en ce lieu, à supposer qu’ils le trouvent – ce qui n’est pas facile – et que leur cause soit juste.

Ayant localisé cette fameuse source après des mois de trekking dans les Principautés Frontalières, et ouvert 4 GR Pays dans la foulée, Betsen s’en retourne fréquemment plaider sa cause auprès de l’onde aussi amère qu’elle-même, et finit par émouvoir (ou importuner, c’est selon) Fithvael, qui élaguait à proximité. Notre bonelfe décide d’aller informer son patron de la doléance de la jeune fille, à laquelle il serait de son devoir et de son honneur de répondre. Malheureusement pour le majordome au grand cœur, Gilead, qui a bu trois dés à coudre de cidre brut la soirée précédente, a horriblement mal aux cheveux (qu’il a longs) et ne se montre ni empathique, ni coopératif, en dépit du heroshaming éhonté auquel se livre Fithvael. Ayant échappé aux jets de boutanche de son maître furibard, Fifi décide d’aller régler lui-même le problème… et échoue comme une bouse. Ramassé à l’article de la mort devant l’entrée de Tor Anrok par un Gilead un peu plus sobre le lendemain matin, le vieillard se retrouve cloué au lit, mais peut au moins se réconforter en réalisant qu’il a atteint son but, le calvaire de son meilleur ami ayant donné à Gilead, comme à Rocky Balboa, John Wick et Robert McCall avant/après lui, la motivation nécessaire pour botter quelques fesses.

Après avoir pris contact avec Betsen et reçu un briefing sommaire de la situation, notre vigilante titubant se met en chasse, emmenant sa commanditaire avec lui pour… le fun on dirait, son aide n’étant absolument pas nécessaire. Plutôt que de s’embêter à corroborer les allégations de Miss Corpath, qui, après tout, aurait pu faire fausse route du haut de ses quinze ans, Gilou opte pour une approche radicale, et se fraye un chemin sanglant dans la demeure de sa cible, jusqu’à faire intrusion dans sa salle à manger en plein milieu de son dîner, ce qui n’est pas très poli. S’en suit une séquence d’action frénétique, où la shadowfasttitude de Gilead en fait voir de toutes les couleurs – mais surtout du rouge sang – aux sbires de Lugos. Détail marrant, ce n’est qu’après avoir occis la majorité du personnel du marchand, qui n’avait sans doute rien à voir avec les meurtres des Corpath, que notre héros demande la confirmation qu’il est bien chez Mr Lugos, qui a alors la meilleure réaction possible au vu de la situation : 1) balancer une réplique badass, 2) gagner du temps en confessant ses crimes jusqu’à l’arrivée de son garde du corps personnel, une montagne de muscles chaotiques (ou une montagne chaotique de muscles, ça marche aussi) du nom de Siddroc.

Confronté à un adversaire un peu plus coriace, et sans aucun doute responsable de la triste et graphique fin de la famille Corpath, Gilead fait moins le malin, et casse même son épée sur l’armure de plates du Sid. Il faudra une attaque suicidaire, dans tous les sens du terme, pour tromper la vigilance et la protection quasi-intégrale du colosse, provoquant la fuite éperdue mais d’assez courte durée de Lugos, dégommé en pleine course par une Betsen planquée avec son arbalète à la sortie du manoir. Détail marrant bis, cette dernière (la fille, pas l’arbalète hein) demandera elle aussi une confirmation qu’elle a bien descendu la bonne personne après avoir appuyé sur la détente. Dans les Principautés Frontalières, on tire d’abord, on pose les questions après (#MutantLivesMatter).

Cette quête vengeresse terminée, Gilead laisse Betsen gérer les indélébiles traumatismes et névroses provoqués par la perte de sa famille et le meurtre du responsable de cette dernière à sa convenance (easy peasy quand on a quinze ans, personne sur qui compter, et bientôt soupçonné du meurtre d’un notable et de tout son personnel) et repart au chevet de son domestique. Une fois remis sur pied, les deux compères décident de repartir à l’aventure, non sans avoir mis le feu à la Tour de Tor Anrok afin de tirer un trait définitif sur leur passé2. Le destin de Gilead (et donc de Fithvael) sera d’écumer le Vieux Monde en quête d’innocents à secourir, de torts à venger, et de couteaux à remouler. Il n’y a pas de sottes professions.

1 : Ce n’est pas vrai et il y a des chances que les plus jeunes des lecteurs ne comprennent pas la référence, mais je trouve ça fendard d’imaginer une frêle donzelle de 15 ans sous les traits du French Reaper.
2 : En fait, c’était une arnaque à l’assurance. Mais ça ferait mauvais genre dans une saga épique.

AVIS :

Après avoir posé ses personnages dans l’introductif et probablement pensé comme un one shotGilead’s Wake’, Abnett remet Gilead et Fithvael sur le devant de la scène dans une petite nouvelle plus intéressante dans ce qu’elle dit de la déchéance morale et physique d’un héros dont la race pouvait laisser penser qu’il serait immunisé à ce genre de désagréments, que dans la narration de la revanche prise par Betsen sur les meurtriers de sa famille. Cela ne veut pas dire pour autant que cette soumission ne mérite pas le détour (ne serait-ce que pour la réalisation que Gilead est en fait le Batman du Vieux Monde – ou au moins de Munzig – et Fithvael son Alfred), mais plutôt que ses points forts (à mes yeux) sont plus « périphériques », si l’on me passe l’expression, que d’habitude pour un récit de Dan Abnett. Ainsi la scène d’ouverture, qui débute sur la charmante description d’une fratrie de jeunes enfants régalés de contes par leur nourrice, et qui bascule en un éclair sur la description bien gore de leur cadavre, illustre la maestria de l’auteur en termes de narration. Pour le reste, Abnett prend soin de préparer la suite, et l’on sait d’ores et déjà que l’on aura des nouvelles des deux comparses à l’avenir. On the road again

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The Raven’s Claw – J. Curran [40K] – #8 :

INTRIGUE :

Début de journée difficile pour Veronique Sanson, le héros de The Raven’s Claw (nouvelle au titre potterien s’il en est). Tiré d’une gueule de bois carabinée par le quasi-crash de son vaisseau en plein cœur d’une zone de guerre urbaine, notre protagoniste se rend rapidement compte que 1) il n’a absolument aucun souvenir de qui il est, et 2) il fait visiblement partie d’un régiment de Légionnaires Pénaux. Vivement le week-end.

AVIS :

Jouant honnêtement de cette ficelle narrative bien connue qu’est l’amnésie du héros, Curran trousse une petite nouvelle ma foi fort potable, si on la replace dans son contexte (c’est-à-dire 1999, une époque où les contributeurs de la BL n’étaient pas tenus d’être docteurs -es fluff pour proposer leur travail1). Le background est en effet quelque peu malmené au cours du récit, en particulier au moment de la conclusion de l’histoire, qui aurait pu être mieux négociée, surtout au vu du choix effectué par l’auteur à son endroit2. Ce manque de maîtrise du background de Warhammer 40.000 est d’autant plus gênant que Curran termine son histoire avec un exposé bancal sur la nature de l’Imperium, dont il donne une image biaisée, et finalement assez fausse3. Bref, une mention passable bien méritée.

1 : Non pas que ce soit actuellement le cas aujourd’hui d’ailleurs (l’espoir fait vivre).
2 : Vero se révèle être un (et non pas une – d’après le fluff, c’est rare mais pas impossible – ) assassin Callidus, envoyé sur le terrain afin de faire la peau à un Gouverneur planétaire félon. Sauf que l’utilisation faite par Vero (Averius de son vrai nom) de la fameuse polymorphine est complètement marginale (« Et hop, je passe de L à M en taille de veste ! Ils ne me reconnaîtront jamais ! »), ce qui est tout de même dommage étant donné que c’est cette dernière qui fait tout le charme de cette caste particulière. Étant donné les spécificités de cette mission (à savoir, la présence d’un psyker prescient aux côtés du Gouverneur), un Culexus aurait à mon sens bien mieux fait l’affaire. Quant à la Raven’s Claw qui donne son titre à la nouvelle, il s’agit d’une sorte de neuro-gantelet subdermal, arme appartenant davantage à l’arsenal des assassins Eversor qu’à leurs consœurs Callidus.
3 : Selon Curran, l’Imperium a envoyé Vero recueillir la confession du Gouverneur renégat, car, ayant trahi la confiance de l’Empereur, ce dernier se trouve être un hérétique (nié ?), et tout hérétique doit se repentir avant de recevoir sa punition (nié ?). Et Vero d’expliquer que la rébellion aurait pu être matée en deux deux, et qu’une force d’intervention constituée de plusieurs régiments de Gardes Impériaux ainsi que d’un contingent de White Scars attend tranquillement en orbite son feu vert avant de débarquer sur la planète remettre un peu d’ordre dans tout ce bordel. Et tout ce temps gâché, toutes ces ressources dépensées, toutes ces vies perdues, pour quoi ? Pour permettre à Vero d’absoudre sa cible de ses pêchés. Amen.

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Hell in a Bottle – S. Jowett [40K] – #8 :

INTRIGUE :

40K_Hell in a BottleLe Sergent Instructeur Tydaeus des Iron Hearts doit faire face à une situation inédite: la machine Mimesis, simulateur de conflits utilisé pour l’entraînement des recrues du Chapitre, a été envahie par un ost démoniaque, mené par le prince démon Kargon. N’ayant pas réalisés que leur dernière conquête était un monde virtuel, les démons se retrouvent bloqués dans la réalité numérique de la machine, à la merci d’un Tydaeus qui doit maintenant décider s’il préfère la jouer safe (débrancher Mimesis et l’envoyer à l’incinérateur) ou héroïque (débuter une « partie » et aller botter les fesses calleuses de Kargon en live).

AVIS :

Hell in a Bottle est sans doute la nouvelle la plus étrange d’Into the Maelstrom, voire de toutes les publications 40K de la Black Library. L’argument du récit, déjà très peu banal en lui-même (« et si les Space Marines s’entraînaient sur des bornes de shoot ‘em up ? »), se combine en effet à une interprétation pour le moins libérale du fluff de la part de Simon Jowett, qui n’hésite pas à nommer un des Primarques inconnus dans le cours du récit, ou encore à dépeindre son héros en employé de bureau désabusé plutôt qu’en inflexible moine-guerrier. Il faut dire que Tydaeus n’est, à proprement parler, pas vraiment un Space Marines, son corps ayant rejeté les implants génétiques lui étant destiné au cours de son initiation. Le Chapitre des Iron Hearts étant néanmoins très humain (malgré ce que laisse penser leur nom), notre héros a été reclassé à un poste de non-combattant au lieu d’être transformé en serviteur, ou pire. Dans les ténèbres d’un lointain futur, la loi handicap de 2005 est toujours en vigueur. Bravo.

De l’autre côté de la matrice, le prince démon Kargon n’est pas vraiment reste, sa diction sifflante et ses pratiques sexuelles peu banales (ce n’est pas pour rien qu’on l’appelle Seed-Bearer, monsieur inséminant personnellement les planètes qu’il a conquis avec des spermatozoïdes chaotiques) faisant de lui une Nemesis pittoresque pour Tydaeus, qui, bien sûr, ne résistera pas à l’envie d’aller casser du démon, pensant (à tort) qu’il ne pourrait rien lui arriver de plus fâcheux que d’être déconnecté du serveur une fois tous ses points de vie envolés.

Parenthèse parodique (volontaire ou non) de l’univers gothique de Warhammer 40.000, Hell in a Bottle est un souvenir d’une époque révolue de l’histoire de la Black Library, pendant laquelle les contributeurs pouvaient se permettre d’écrire tout ce qui leur passait par la tête. Et, rien que pour ça, cette nouvelle mérite d’être lue.

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A Wolf in Sheep’s Clothing – D. Abnett [WFB] – #9 :

INTRIGUE :

WFB_Wolf in Sheep's ClothingAprès le succès de leur session de team building dans la Drakwald (‘A Company of Wolves’), nous retrouvons les chevaliers de la Compagnie Blanche de l’ordre du Loup Blanc (the whitest of the white) alors qu’ils s’apprêtent à partir dans une nouvelle mission, beaucoup moins funky qu’ils ne l’espéraient de prime abord. Le Graf de Middenheim a en effet reçu une missive désespérée d’un de ses cousins, le Margrave Ganmark, dont le domaine a été attaqué et incendié par une bande de galapiats, et qui se retrouve donc SDF par la force des choses. Alors qu’il revient aux pompeux et hautains Chevaliers Panthères de traquer les coupables de cet abominable forfait, les Loups Blancs doivent se contenter d’escorter cousin Hubert, sa famille et ses gens, jusqu’à la sécurité de Middenheim. Autant dire que le Commandant Ganz doit essuyer une grogne bien compréhensible de la part de ses hommes, parmi lesquels on compte deux nouveaux : le bleu-bite Krieg Drakken, et le sang bleu Lowenhertz.

Après un aller sans embûches, nos templiers prennent en charge leurs protégés, et se consolent légèrement en constatant que la femme du Margrave, Gudrun, est vraiment bonnasse. Il n’y a que le jeune Drakken pour reluquer davantage la servante Lenya que la plantureuse maîtresse de maison, que le cousin Hub’ a épousé quelque temps après la mort de sa première femme. Les introductions étant faites et le barda chargé dans les chariots, la troupe repart vers la cité, pendant que les Panthères de Von Volk/t se lancent à la poursuite des mécréants. Bien évidemment, ces derniers éviteront facilement la confrontation avec leurs traqueurs, et se concentreront sur les loulous et les migrants. Surpris une première fois par un assaut de Nazguls puant la cannelle, qui laissera le pauvre Drakken tout estafilé, les chevaliers devront relever le plus difficile des défis : utiliser leurs neurones. Car, si pour le lecteur, il ne fait rapidement aucun doute que les stoners spectraux1 sont à la recherche de quelque chose ou de quelqu’un voyageant avec les templiers, pour ces derniers, le mystère est à la limite de l’insoluble. C’est d’ailleurs tout juste si Ganz ne condamne pas Lowenhertz au bûcher pour avoir émis l’hypothèse précédente, qui relevait pourtant du bon sens plus que de la mise en pratique de savoirs interdits…

Début spoilerAu final, et après avoir essuyé une nouvelle vague de goons à la faveur d’un bivouac en pleine forêt, les Loups Blancs finiront par identifier la source de tous leurs maux, qui se trouve être, non pas l’exotique bimbo avec qui le Margrave a refait sa vie, comme le soupçonnait ce misogyne de Gruber, mais la vieille nourrice rom’ des enfants du pater familias, elle aussi arrivée récemment dans l’entourage de l’aristocrate. Plus particulièrement, l’aïeule trimballe avec elle un bijou en forme de griffe, qui lui porte apparemment chance mais que ses ancêtres ont certainement dérobé dans une tombe arabienne, et que ses propriétaires légitimes souhaitent vivement récupérer. Leurs adversaires pouvant respawner toutes les deux heures, Ganz, dans un éclair de génie inhabituel, réalise qu’il doit prendre des mesures drastiques pour arracher la victoire avant que ses hommes se fassent massacrer. Peu enclin à restituer la babiole avec un petit mot d’excuse, comme on le ferait de nos jours, le fier chevalier préfère réduire en poudre le colifichet sépulcral, bousillant le marteau de Lowenhertz dans la manœuvre (c’est du bizutage). Nazguls jusqu’au bout, les assaillants se dissipent alors dans un gémissement piteux, permettant à nos héros de reprendre leur route au matin sans plus d’interruptions. La nouvelle se termine sur leur retour triomphal à Middenheim, et sur la remise par Ganz à Lowenhertz du marteau de feu Von Glick, en dédommagement de l’arme perdue en chemin. Dans l’Empire plus qu’ailleurs, les bons comtes électeurs font les bons amis.Fin spoiler

1 : Ils ont les yeux rouges et ne s’expriment qu’en grognements inintelligibles.

AVIS :

Abnett poursuit sa série (louve) blanche sur des bases sensiblement similaires à celles posées dans ‘A Company of Wolves’, même si l’intrigue se montre un peu plus fouillée et complexe que lors des débuts de Ganz et Cie. Si la révélation de l’identité du responsable des malheurs du Margrave ne risque pas de surprendre grand-monde, on peut tout de même mettre au crédit de Dan Abnett l’inclusion d’une authentique et valable fausse piste dans sa nouvelle, ce qui, pour une soumission de 12 pages, est un accomplissement notable. Pour le reste, on se contentera d’un peu de character development pour nos vaillants chevaliers, qui gagnent deux nouvelles recrues dans ce second épisode, dont au moins une (Lowenhertz) semble tenir à cœur à l’auteur ; ainsi que quelques scènes d’actions très potables.

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Wolf in the Fold – B. Chessell [WFB] – #9 :

INTRIGUE :

WFB_Wolf in the FoldLe sommeil de l’Archidiacre Kaslain de Nuln est interrompu en pleine nuit par l’arrivée impromptue d’un visiteur de marque, venu chercher l’absolution que seul un haut prêtre de Sigmar peut conférer. Mortellement blessé, l’assassin légendaire connu comme la Guêpe Tiléenne (Tilean Wasp) se vide de son sang dans les appartements privés du prélat, dédiant ses derniers instants au récit du seul crime de sa longue carrière pour lequel il éprouve le besoin de se confesser : l’assassinat d’un prêtre.

AVIS :

Si l’histoire narrée par Ben Chessell dans Wolf in the Fold n’est pas aussi aboutie que son Hatred, et que la conclusion de cette courte nouvelle ne s’avère pas être une grande surprise, sa lecture n’en est pas moins agréable, et ce pour deux raisons principales.

La première, c’est l’audace manifestée par ce novice de la Black Library, qui pour sa deuxième soumission, s’offre le privilège de tuer un personnage nommé (l’archilecteur Kaslain, abordé dans les Livres Armées de l’Empire – c’est était un électeur impérial – et dans quelques suppléments du jeu de rôle). Bon, d’accord, il ne s’agissait pas vraiment d’une figure de premier plan du fluff, mais tout de même.

La seconde, et la plus importante à mes yeux, c’est le complet changement de style opéré par Chessell entre Hatred et Wolf in the Fold, sans que ses talents de conteur ne pâtissent de cette transformation. La grande majorité des auteurs de la BL ayant une patte facilement identifiable (pour le meilleur ou le pire) et abordant toujours leur sujet avec le même angle d’attaque, il est remarquable qu’une plume de cette auguste maison soit d’une « agilité » littéraire suffisante pour proposer deux récits si différents l’un de l’autre que l’on aurait pu sans mal les attribuer à deux contributeurs distincts. Si Hatred possédait une ambiance mélancolique et désincarnée, Wolf in the Fold se caractérise au contraire par un style riche et un goût prononcé pour le détail, assez proche dans l’esprit de celui de Brian Craig.

En conclusion, une autre excellente livraison de la part de Ben Chessell, dont la très courte carrière au sein de la Black Library apparaît décidément comme une de ces injustices dont la vie a le secret.

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The Lake – T. R. Summers [NDA] – #9 :

INTRIGUE :

Les dernières semaines ont été dures pour le gang des Brassers de Lord Orl, meneur Orlock qui se rêvait seigneur éboueur du sous-monde. Affaibli par une guerre territoriale constante contre les Goliaths de la Main Noire (encore eux1), les Orlocks ont de plus perdu leur précieux puits lors d’un récent tremblement de ruche, les laissant à la merci d’individus peu scrupuleux pour se sortir de ce mauvais pas. D’individus comme le Guilder Rorget Ahn, par exemple, qui a proposé à Lord Orl de s’associer dans une affaire a priori juteuse : la chasse aux mulk spiders infestant un petit lac souterrain que le même séisme qui a enfoui le puits des Brassers a rendu accessible, après des siècles coupé du reste de Necromunda. Les yeux de ces bestioles, semblables à des gemmes, sont très recherchés par les riches du haut de ruche, et leur vente devrait permettre aux Orlock de se remettre d’aplomb. Bien entendu, chasser des argyronètes géantes ayant colonisé une mare hautement toxique monté sur un pédalo fatigué (le semi rigide proposé par Rorget coûtait trop cher à la location) n’est pas une entreprise de tout repos, mais il en faut plus pour décourager nos hardis Gangers, qui jettent donc leurs lignes sur le plan d’eau de liquide sans tarder.

Les péripéties violentes et humides ne tarderont pas à leur tomber dessus comme un mange-visage de Catachan sur l’arrière-arrière-arrière374 petit fils de Logan Paul2, aux inévitables morts causées par l’agressive faune locale venant s’ajouter celles provoquée par l’épique bataille navale entre Brassers et Main Noire, également embauchés par ce traître de Rorget Ahn pour cette mission lacustre. Lord Orl, en bon leader, n’hésite pas une seconde à mouiller le maillot, mais sans doute plus qu’il ne l’avait prévu. Une baignade involontaire dans les boues de vidange violacées faisant office de lac lui est en effet imposée à la suite de l’explosion de son canoë, et s’il parvient à regagner son QG avec ses quelques hommes restants et un sac d’yeux de mulk spiders pour leur peine, il ne tarde pas à développer une forte fièvre et une purulence de mauvais aloi, que les bons soins du Dokker Hack’n’Slash ne parviennent pas à traiter. Comble de déveine, les précieuses gemmes collectées lors de la mémorable partie de pêche ne tardent pas à fondre comme neige radioactive au soleil, laissant les Brassers dans une situation encore plus désespérée que précédemment.

Fort heureusement, il reste encore sa légitime vengeance contre Rorget Ahn pour motiver Lord Orl, de moins en moins présentable à mesure que les jours passent et que les mutations causées par sa baignade impromptue se manifestent. S’étant surpris à boulotter goulument un bras gardé par Dokker comme pièce détachée dans son officine (on ne sait jamais de quoi on aura besoin pour rafistoler un Ganger de passage), Orl décide de s’isoler du reste de ses hommes pour leur propre bien, et retourne vers le lac, inexplicablement attiré par une pulsion inconsciente… ou peut-être par le secret espoir de retrouver l’Apple Watch qu’il a perdue sur place lors de sa dernière visite…

Début spoiler…Une nouvelle séquence de baignade, suivie d’une épiphanie aussi totale que brutale et non expliquée (il arrive sur une île au milieu du lac et paf, l’illumination le frappe), mènent assez logiquement à la réalisation par Lord Orl et le lecteur que les mulk spiders qui vivent dans cet écosystème unique en son genre ne sont autres que les formes mutées des malheureux qui ont bu la tasse et la crasse mutagène, cancérigène et reprotoxique de cette onde véritablement amère3. D’ailleurs, notre héros reconnaît son bras droit R’daff, emporté par le fond par une araignée entreprenante lors de la première expédition, parmi le comité d’accueil qui s’est réuni pour lui souhaiter la bienvenue dans sa nouvelle communauté. Acceptant son sort sans se plaindre, Lord Orl a toutefois une dernière virée dans le monde civilisé à faire avant de prendre définitivement sa retraite et d’aller faire des bulles dans l’eau avec ses petits copains. Sa cible : ce bougre de Rorget Ahn, à qui il offre gracieusement le pot de l’amitié pour solde de tout compte. Je vous laisse deviner ce qu’il y avait dans le verre…Fin spoiler

1 : Déjà croisés dans ‘The Day of Thirst’, du même auteur. Comme on le verra plus loin, les Goliaths de Krug n’arrivent pas à prendre les points à l’extérieur, ce qui est embêtant quand on lutte pour le maintien la survie.
2 : Youtuber trololol comme son aïeul.
3 : Les mystérieux « Gene Lords », et leur sale manie de collecter et stocker l’ADN des formes de vie croisant leur route dans la cuve recherche qui est devenue ce fameux lac après des millénaires d’abandon, sont à blâmer ici.

AVIS :

Summers mène assez bien sa barque (mouahaha) avec ‘The Lake’, qui présente les deux qualités appréciables pour une nouvelle d’une intrigue n’étant pas prévisible des pages à l’avance – au moins dans la première moitié du récit – et d’une construction bien fichue, où la boucle se retrouve bouclée à la fin du récit. On appréciera également le cadre assez original de cette histoire pour une soumission siglée Necromunda, sans doute l’une des franchises de la GW-Fiction où l’on s’attend le moins à ce qu’un « lac » serve de décor. Le seul reproche que je ferai à Summers est relatif à son inclusion très artificielle, et à mes yeux inutile, des « Gene Lords » dans son propos. Pourquoi faire entrer une faction de démiurges mystérieux et une réalisation proprement miraculeuse de leur implication par Orl dans ses déboires, quand un bon vieux recours au Chaos (après tout, il est question de mutation ici) aurait pu faire l’affaire plus simplement et « proprement » ? Comme le mieux, le tarabiscoté est l’ennemi du bien, et je pense que ‘The Lake’ aurait gagné à rester en terrain fluffique connu. Mais le résultat reste tout de même satisfaisant.

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Acceptable Losses – G. Thorpe [40K] – #9 :

INTRIGUE :

40K_Acceptable LossesNommé à la tête du tristement célèbre escadron de Maraudeurs Raptor, le commandant Jaeger a l’occasion de prouver la valeur de ses hommes au cours d’une mission aussi vitale que périlleuse : la destruction des réacteurs d’un Space Hulk grouillant d’orks. Livrés à eux-mêmes dans l’immensité hostile de l’espace, les Raptors se rendront rapidement compte qu’il n’y a pas d’ennemi plus mortel que l’ami dans lequel on a placé (à tort) sa confiance.

AVIS :

Après les Nains et les Hauts Elfes, Battlefleet Gothic est l’une des lubies du bon Gav Thorpe, qui ne manque jamais une occasion de mettre en scène une petite bataille spatiale dans ses écrits futuristes. Sachant qu’Into the Maelstrom (et donc Acceptable Losses, par la même occasion) a été publié en 1999, soit l’année de sortie du livre de règles BFG, il était inévitable que cette nouvelle fasse la part belle à des héros maîtrisant l’art subtil de la guerre dans l’espace.

Cette nouvelle conséquente (33 pages, ce qui en fait la plus longue du recueil) se divise ainsi en deux parties distinctes. La première (un tiers) voit Jaeger et ses hommes faire connaissance, les premières impressions mitigées faisant rapidement place à une véritable camaraderie entre un commandant sévère-mais-humain et des équipages indisciplinés-mais-courageux-et-loyaux (et l’Oscar du meilleur scénario original est attribué à…). Thorpe sait qu’il doit en passer par là pour que la suite de son récit tienne la route et s’exécute de bonne grâce, son style passe-partout lui permettant d’expédier cette introduction sans trop lasser le lecteur (en partie grâce à la partie « contes et légendes de l’Imperium »).

La deuxième partie (deux tiers) est une description minutieuse de la mission plus ou moins suicide de l’escadron Raptor, sur lequel s’acharne bien entendu un sort contraire : escorte de Thunderbolts retirée au dernier moment, Rok en maraude à négocier en solo, rencontre inopinée avec une escadrille de chassa-bombas, cible protégée par une hénôrme batterie de lance-plasma… autant de petits riens qui font que la vie d’un pilote de Maraudeur vaut d’être vécue (et se termine de manière prématurée). Fort de son expertise dans le sujet, Thorpe réussit à faire de ce compte rendu une expérience plaisante, tant par son originalité que par son enthousiasme perceptible pour cette forme de combat, dont les règles diffèrent considérablement de la classique bataille rangée de fantassins et de véhicules à laquelle l’amateur de 40K a droit d’habitude.

Bon, ça reste du Thorpe, et du Thorpe « primitif » qui plus est, ce qui signifie que l’histoire en elle-même ne vole pas beaucoup plus haut qu’un plongeur de la mort ayant fait un six sur son jet d’incident de tir (ouais, j’ai pas peur des mélanges). En même temps, difficile de révolutionner l’art de la nouvelle de science-fiction avec un pitch aussi ingrat qu’une bataille spatiale vue depuis l’intérieur d’un cockpit de Maraudeur. On a donc le droit à une triple dose d’héroïsme désintéressé et de sacrifice pour la bonne cause, généreusement saupoudrés de « bon sang, c’était moins une »1 et de « mais où est notre écran de chasseurs ? » : une fois de temps en temps, pourquoi pas.

Bref, Thorpe réussit assez bien son coup avec Acceptable Losses, un de ses meilleurs courts formats pour la BL à date, et fait mieux que tenir la comparaison avec beaucoup des nouvelles plus récentes intégrées à On Wings of Blood.

1 : Appelons ça le syndrome de l’Etoile de la Mort.

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In the Belly of the Beast – W. King [40K] – #10 :

INTRIGUE :

40K_In the Belly of the BeastUne escouade de Griffes Sanglantes menée par un Garde Loup est envoyée explorer l’intérieur d’un vaisseau tyranide. Même si la Grande Dévoreuse a la tête dans le biomorphe après quelques éons passés à dériver dans la galaxie, les Loulous vont vite se rendre compte qu’entrer par effraction chez les cafards de l’espace est une très, très mauvaise idée.

AVIS :

In the Belly of the Beast est la nouvelle de type « et si ? » par excellence. Son principal intérêt est de permettre au lecteur de découvrir un pan jusqu’ici peu exploré du fluff, ici la structure et le fonctionnement d’un bio vaisseau tyranide. King accomplit cette mission avec sérieux et réussite, et parvient à décrire ce petit monde complétement alien (c’est le cas de le dire) à l’esprit humain de manière convaincante, insistant bien sur sa perfection organique et son aspect oppressant. Il enrichit en outre son propos en décrivant la progression des Space Wolves depuis le point de vue de chacune des Griffes Sanglantes, dont les réactions varient entre rage bestiale (Egil), prémonition funeste (Njal), légèreté feinte (Gunnar) ou encore crainte dissimulée (Sven). L’éveil progressif de l’écosystème tyranide en réponse à l’intrusion des marounes donne enfin l’occasion à l’auteur de relever son texte de quelques passages d’action tout à fait convenables, et d’une poignée de décès astucieusement gores (mention spéciale à la disparition de Njal).

On peut en revanche regretter le manque flagrant d’inspiration de King au moment d’insérer In the Belly of the Beast dans l’univers de 40K. Comment, en effet, justifier l’envoi d’une (seule) escouade de Space Marines inexpérimentés dans une mission aussi dangereuse que l’exploration d’un vaisseau tyranide, même inerte ? Réponse de l’intéressé : nos héros sont assignés à un navire marchand (et quand je dis assigné, c’est en mode larbin hein : à côté, la Wolfblade c’est une nomination honorifique), dont le capitaine, apparemment ignare au dernier stade, n’est pas foutu de repérer une bioconstruction tyranide quand il en croise une (manque évident de culture générale également partagé par le sergent Hakon, ceci dit). Le navigateur de bord – un homme cultivé, lui – a beau insister lourdement pour que ce mystérieux vaisseau soit détruit sur le champ, le capitaine envoie tout de même ses loulous de compagnie explorer ce dernier dans l’espoir de « découvrir quelque chose dont l’Imperium pourrait avoir l’utilité ». Pour un point de départ pourri, c’est un point de départ pourri. Dans la même veine, on ne peut que s’émerveiller de l’innocence des Space Wolves, qui ne réalisent qu’ils sont au cœur d’un vaisseau tyranide qu’au moment où ils débarquent dans la salle centrale et assistent au réveil d’une tripotée de guerriers. Allo nan mais allo quoi.

En dépit des quelques couleuvres que King tente de faire avaler au lecteur pour justifier les actions stupides de ses personnages, In the Belly of the Beast est une nouvelle honorable, dont l’ambiance d’horreur lovecraftienne détonne agréablement des productions classiques de la BL, où l’action omniprésente laisse peu de place au développement d’atmosphères oppressantes dignes de ce nom.

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The Affair of the Araby Exhibit (Buried Secrets) – G. Rennie [WFB] – #10 :

INTRIGUE :

La tranquille soirée de réflexion-chichon sur la théorie du Chaos1 de Zavant Konniger, érudit iconoclaste et détective privé de l’extrême, est interrompue par l’arrivée impromptue d’un émissaire du culte de Sigmar au domicile du Sage Enquêteur. Un cambriolage a eu lieu dans les archives de l’institution, et l’expertise de l’ancien prêtre est requise pour remonter la piste des ruffians, qui n’ont pas hésité à stranguler deux pauvres gardes qui ne faisaient que leur devoir pour faire main basse sur… quelque chose2. Sa propre demande d’accréditation à l’accès de la nouvelle exposition arabienne, où s’est déroulée ce regretable incident, lui ayant été refusée il y a quelques jours, Zavant saute sur l’occasion de mettre son nez, qu’il a prononcé et arqué, dans les réserves du culte, et part sur les lieux du crime en compagnie du factotum sigmarite et de son fidèle serviteur Halfling, Vido.

Sur place, les capacités d’observation et d’analyse du fin limier, doublées de sa prodigieuse culture générale, et de sa correspondance épistolaire avec le frère Wollen, jeune archiviste passionné de culture arabienne, et principal suspect du double meurtre du fait de sa disparition mystérieuse, permettent à Zavant d’identifier en quelques minutes les coupables de cet effroyable forfait : le culte d’Ishmail, des adorateurs de démons made in Arabie, contactés par le mal-avisé Wollen (retrouvé garroté au fond d’un sarcophage) pour la vente d’une des jarres démoniaques dans laquelle ont été scellés les sombres maîtres du culte, il y a fooooooort longtemps. Ce n’est pas la première transaction Le Bon Coin qui tourne mal, mais il convient désormais d’agir prestement pour empêcher les cultistes, qui ont profité des nombreux passages secrets reliant le district sigmarite d’Altdorf au reste de la cité, de profiter de leur bien mal acquis. Ayant repéré dans le registre fluvial, qu’il lit tous les matins avec son verre de lait de quinoa bio dynamique, l’arrivée d’une nef arabienne dans le port de la ville, c’est vers les quais que Konniger entraîne son monde et la cavalerie, espérant arraisonner les fuyards avant qu’ils n’aient pu se faire la malle.

Bien évidemment, les cultistes ne s’en laissent pas compter, et pendant que son patron les corrige bellement à grands coups de gaffe dans les gencives, Vido doit trouver un moyen de stopper le vaisseau avant qu’il ait passé les portes de la cité. Une heureuse réaction en chaîne (de cabestan) fera jeter l’ancre au navire avant la ligne d’arrivée, le ralentissant assez pour que les zélés zélotes de Sigmar y mettent le feu à grand renfort de flèches embrasées. Un plongeon dans les eaux saumâtres du Reik, et une quasi noyade dans le cas de Vido, plus tard, l’amphore maudite gît par le fond du fleuve, ce qui devrait la mettre à l’abri des attentions déplacées de cultistes chaotiques pendant quelques millénaires. Après tout, quelles sont les chances qu’une paire de Halflings aille pêcher le gros à cet endroit, le jour de l’anniversaire de celui qui s’appelle Smeagol ? Négligeable, très négligeable…

: Qui est moins funky que notre théorie du chaos. Sur l’axe Goldblum, on se rapproche plus de Seth Brundle que d’Ian Malcolm.
2 : Ces archives ne seraient pas dignes de ce nom si elles étaient correctement archivées, bien sûr.

AVIS :

Grand début du personnage de Zavant Konniger dans les pages d’Inferno !, et, par la même occasion, dans la GW-Fiction, ‘The Affair of the Araby Exhibit’ établit en une quinzaine de pages les prémisses de la série de Rennie, pastiche décomplexée du Sherlock Holmes de Conan Doyle à la sauce Warhammer, et mélange bien équilibré d’enquête policière et d’action frénétique, à haute teneur en fluff et comique de situation (ce qui n’empêche pas l’auteur d’insérer une bonne dose de grimdark à son propos de temps à autre, comme dans ‘The Scarlet Case’). La brieveté de la nouvelle ne permet pas à Gordon Rennie de développer un whodunit digne de ce nom, mais sa maîtrise de la narration et du rythme, provenant sant doute de ses compétences de scénariste de comics, compense largement cette absence de challenge intellectuel pour le lecteur (à vrai dire, la série des Konniger ne se positionnera jamais vraiment sur ce créneau). De la pulp fiction rondement écrite, et assez originale par rapport au reste des publications de la Black Library : en a-t-on jamais assez ?

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Sisters – N. Rutledge [NDA] – #10 :

INTRIGUE :

La dernière empoignade auquel son gang d’Eschers a participé s’est mal passé pour Blades : malgré la victoire sans conteste obtenue contre la patriarchie, les féministes du sous-monde ont perdu l’une des leurs, Katz, la sœur de leur bien-aimée leader.e. Et même pas aux mains de l’ennemi qui plus est, mais bêtement et salement, la jouvencelle ayant glissé sur une flaque d’huile et étant tombée dans une mare de boue toxique. Tout le monde n’étant pas Harley Queen, c’en fut fait de Katz, qui aurait pourtant pu et dû retomber sur ses patz. Monde cruel.

Après avoir tenté sans succès de noyer son chagrin dans l’alcool (impossible quand on ne tient pas ce dernier), Blades décide de partir en mission de nettoyage dans les environs d’Ashcliff, le village qu’elle et ses filles « protègent » des menaces extérieures. À la fois pour s’occuper l’esprit, mais également pour montrer à ses subordonnées qu’elle est toujours la patronne, et ne pas laisser croire que la place de Pacha Mama est à prendre. Au menu de ce soir (après le fameux ragoût de Licksy, le barman sénile mais gentil du seul rade d’Ashcliff), un Zombie égaré, comme il en vient de temps en temps dans le voisinage. Guidé par le scout Ratskin qui a repéré la créature décérébrée, Blades part en chasse avec son fidèle fusil à pompe et une paire de lunettes de vision nocturne.

En chemin, le duo s’arrête chez le prospecteur Jakey, fils de Jake, fils de Joe, dont un des oncles a eu la mauvaise idée de braver le couvre-feu sans attestation, et s’est fait salement esquinter par le Zombie pour sa peine. Bien que Ma Honka, sa sœur, semble déterminée à soigner le blessé, les règles sont les règles et Blades se fait un devoir de les appliquer et de planter un stylet dans le cœur de l’inconscient inconscient. Le respect des gestes barrières, on connaît la chanson. Ceci fait, l’Escher de garde emboîte le pas à son guide indigène, qui l’emmène dans les galeries de la mine où le mort vivant s’est enterré, et qui se trouve être l’endroit où Blades et Katz ont passé une bonne partie de leur enfance à chasser l’araignée géante et le rat mutant. Que de souvenirs…

Début spoiler…Comme vous vous en doutez si vous savez comment une intrigue de nouvelle fonctionne, le Zombie en question se trouve être Katz. #SansBlague Il n’y a que Blades que cela surprend, et choque fortement, à tel point que c’est au Ratskin que revient la tâche de mettre fin aux souffrances errances de la revenant d’un tir de mousquet bien placé. Cette bonne action ne sera cependant pas récompensée, Blades ne pouvant supporter la sale blague qu’elle croit que le Ratskin lui a fait (il savait que c’était Katz et qu’elles étaient sœurs, mais n’a rien dit), ni prendre le risque qu’il révèle à tout le monde que Blades a probablement tué un innocent par excès de zèle, Katz n’étant techniquement pas un Zombie, mais quelque chose comme The Toxic Avenger.e (et donc non contagieuse, en tout cas pas de cette façon). Un tir de fusil à pompe a l’arrière du crâne règle l’affaire de façon définitive à défaut d’être élégante, laissant enfin toute latitude à Blades pour commencer/terminer son deuil. La morale pourrait être quelque chose comme ‘Souvent femme (à fusil) varie, bien fol qui s’y fie (bouffi)’. En tout cas, c’est empowering.Fin spoiler

AVIS :

Neil Rutledge livre une histoire qui lorgne franchement du côté du Western (une inspiration assez évidente de Necromunda), et qui se laisse lire sans problème malgré le manque total de surprise au niveau de l’identité du Zombie. Cette déception est toutefois compensée par le soin qu’a pris l’auteur de soigner l’authenticité de son récit, par exemple en incluant du jargon local (worms pour les habitants d’Ashcliff, scragger pour être tué…), et par la conclusion glorieusement immorale (c’est le véritable héros de l’histoire qui se fait descendre par derrière et pour couvrir la bévue de sa partenaire), et donc tout à fait adaptée, de cette nouvelle sororitaire (?).

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Ulric’s Children – W. King [WFB] – #11 :

INTRIGUE :

WFB_Ulric's ChildrenUne nouvelle fois égarés dans une impénétrable forêt des moins accueillantes (décidément, c’est une constante), Gotrek et Felix, backpackers de l’extrême1, doivent braver la neige, le froid et la perspective d’une meute de loups affamés lorsque le rideau se lève sur Ulric’s Children. Quant aux fameux enfants d’Ulric qui ont donné leur nom à cette nouvelle, nous apprenons bientôt qu’il s’agit du nom populaire des loups-garous, considérés comme les descendants des relations tumultueuses du Dieu avec quelques accortes mortelles dans des temps très anciens. Figures légendaires du bestiaire impérial, leur existence paraît soudainement bien plus probable à Felix alors qu’il s’échine dans les congères à la suite du Tueur, des vocalises lupines plein les oreilles. Le grand blond à la cape rouge n’a toutefois guère le temps de ressasser son habituelle litanie misérabiliste que Gotrek, dont l’ouïe est aussi fine que son animal totem (l’acraga coa2), part en sprint dans les sous-bois en direction de la clameur d’une bataille toute proche… et disparaît corps et bien de notre histoire, tel un vulgaire PNJ de Skyrim, laissant Felix seul aux commandes de cette dernière.

Arrivé sur les lieux de l’esclandre, Felix se retrouve confronté à la méfiante hostilité d’une petite troupe de soldats, venant de repousser non sans mal les assauts d’une harde lupine. Prudence étant mère de sûreté, les survivants décident de faire prisonnier le bon samaritain, qui se retrouve menotté comme un vulgaire gilet jaune à l’arrière de la carriole des routiers – pas vraiment sympas pour le coup – où il fait la connaissance d’une autre prisonnière du comte Hrothgar, une dénommée Katarina dont le calme glacial et les remarques sibyllines semblent indiquer une inquiétante proximité avec la meute aux trousses de la soldatesque impériale. Pour ne rien arranger, Felix attire l’attention du sorcier de compagnie de son ravisseur, un certain Voorman dont ni l’haleine fétide, ni l’intérêt déplacé pour sa personne, ne sont au goût de notre héros, qui ne peut que maudire les oreilles aiguisées et les courtes jambes de son compagnon d’infortune.

Rendue quelques heures plus tard au pavillon de chasse de Hrothgar, la troupe investit les lieux et jette Felix et sa camarade dans une geôle sombre, froide mais pas vraiment bien fermée, ce qui se révélera assez utile par la suite, comme nous allons le voir. La visite de Voorman permet à Blondin d’en apprendre un peu plus sur sa situation, qui se révèle être assez précaire : le comte et son thaumaturge s’avèrent être des cultistes de Tzeentch, fomentant quelque obscur et indubitablement dangereux dessein, dont la réalisation nécessite l’implication du père de Katarina, loup-garou au pedigree impeccable. Ergo la capture de la gente demoiselle, ergo les attaques répétées de la part de la gent lupine que Hrothgar (du Nord) et ses sbires ont subi jusqu’ici. Si Felix ne souhaite pas ingérer dans les affaires des uns et des autres, il ne lui faut pas longtemps pour déterminer qu’il a davantage intérêt à coopérer avec Katarina que de faire cavalier seul. Profitant de l’étourderie manifeste de Voorman, qui repart sans verrouiller la porte, et de la confusion générale générée par l’intrusion de la meute dans l’enceinte fortifiée, la faute, une fois encore, à un verrou oublié, les gardés à vue se font la malle et se séparent rapidement.

Pendant que Katarina va faire ami ami avec les quadrupèdes, Felix erre dans les couloirs, et finit par surprendre une conversation entre Hrothgar et Voorman venant confirmer ses sombres pressentiments sur le dessein poursuivi par les deux crapules. Le sorcier parti euthanasier quelques clebards à grand coup de boules de feu, Felix sort de sa cachette, assomme Hrothgar et lui subtilise la dague magique avec laquelle le faquin avait menacé le mage quelques instants auparavant. Tout est alors prêt pour que le dénouement tant attendu (ou pas) prenne place. Un autre coup de chance (décidément, Felix n’a pas volé son nom) conduit le Baudelaire impérial dans une pièce où Voorman se confronte au grand méchant loup, que l’on devine être le père aimant de Katarina. Le triomphe du lycanthrope, qui décapite le sorcier d’un revers de patte, est toutefois de courte durée, l’esprit vengeur de l’arcaniste venant posséder son assassin quelques secondes après la décollation du premier par le second. C’était en effet l’objectif poursuivi par Voorman, qui souhaitait faire siennes l’immortalité et l’invulnérabilité supposées des loups-garous, et ainsi attendre pépouze la fin des temps. Bien entendu, sa rencontre avec Felix, et surtout, sa dague enchantée dérobée à Hrothgar, viendra mettre un terme définitif aux rêves de grandeur de notre ami le furry. Il reste alors 10 lignes à King pour terminer son histoire, ce qu’il fait en faisant arriver Gotrek (enfin !) et Katarina, la seconde prisonnière du premier. Quel sort le duo réservera-t-il à l’orpheline, pas vraiment innocente certes, mais qui ne leur a rien fait de mal à proprement parler ? Eh bien, on ne le saura pas (dans cette nouvelle en tout cas). Concluons sur ce constat, toujours d’actualité, que lorsqu’il y a un flou, c’est qu’il y a un loup. Et inversement.

1 : Dommage que la Fin des Temps ait pris place avant que le projet ‘J’irai occire chez vous’ se soit concrétisé. Je suis sûr que ça aurait fait un carton d’audience.
2 : D’où croyez-vous que la teinte orange de sa crète venait, enfin ? Et, oui, les mites font partie des espèces dotées de l’audition la plus performante du règne animal.

AVIS :

Il est assez dommage que Ulric’s Children laisse le lecteur sur sa faim (de loup, donc), car le récit brossé par King avait un potentiel certain, que la brieveté de l’histoire empêche de s’exprimer de manière aboutie. Je suis persuadé qu’une dizaine de pages supplémentaires après que Felix et Katarina soient sortis de leur cachot aurait pu permettre à cette nouvelle de se terminer de façon plus convaincante que l’enchaînement de non-péripéties qui mène au dénouement lapidaire et lacunaire qui est le sien. Pour tout dire, la dernière demi-page d’Ulric’s Children mérite la lecture afin de prendre la pleine mesure du caractère comiquement abrupt de sa conclusion. Il y avait pourtant beaucoup de pistes intéressantes à explorer avant de rayer la ligne « Tueur de Loup » de la bucket slaying list du petit rouquin teigneux, et notamment le personnage de Katarina, sorte d’Ulrika1 avant l’heure que King place au cœur de son récit avant de laisser totalement tomber. Un vrai loupé, si on me permet l’usage de cette tournure.

Si le choix de King de se passer de son personnage tutélaire pour cette soumission peut surprendre le lecteur, le pari aurait pu s’avérer payant si l’auteur avait permis à Herr Jaeger de s’illustrer de façon convaincante et spécifique : si Gotrek est une machine de guerre invincible, qui résout tous les problèmes auquel il est confronté à coup de hache, Felix aurait pu compenser par une approche un peu plus cérébrale et astucieuse de la situation. Ce n’est pas le cas ici, notre héros enchaînant les coups de chance critiques sans véritable réflexion de sa part. En cela, la comparaison avec l’élève Long n’est clairement pas à l’avantage du maître King, le premier faisant preuve d’une véritable aisance scénaristique, quand le second a davantage tendance à passer en maniaque automatique, les prouesses martiales du Nain disgracié venant meubler les intrigues simplistes concoctées par son auteur. Si la passation n’était pas encore proche au moment de la publication de Ulric’s Children (Mars 1999, soit 4 ans avant la sortie de Tueur de Géant, le dernier roman de King dans la série – à ce jour –), il est possible qu’une certaine lassitude ait déjà été à l’œuvre chez King à ce moment, ce qui expliquerait le caractère inachevé de cette nouvelle. Quoi qu’il en soit, cette dernière ne fait définitivement pas partie des bonnes pages de la saga de Gotrek et Felix, et sa lecture n’est indispensable qu’aux fans transis de la série.

1 : C’est-à-dire la jeune fille frappée d’une malédiction passible de mort dans les sociétés civilisées du Vieux Monde (la lycanthropie pour l’une, le vampirisme pour l’autre), mais dont les motivations ne sont pas intrinsèquement mauvaises, et qui demande juste à ce qu’on la laisse tranquille.

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Badlands Skelter’s Downhive Monster Show – M. Farrer [NDA] – #11 :

INTRIGUE :

NDA_Badlands Skelter's Downhive Monster ShowSkelter et sa bande de joyeux saltimbanques, acrobates et spécimens de foire voyagent de ville en ville dans la banlieue des ruches necromundiennes, garant leurs roulottes et dressant leur barnum sur les grand-places pour le bonheur des petits et des grands. De passage à Fever’s Break, la troupe ne va pas tarder à découvrir que cette charmante bourgade compte une forte proportion de résidents très, mais alors très conservateurs, que l’arrivée de baladins bariolés, basanés et écailleux (il y a un Scaly dans le lot) n’enchante pas le moins du monde. Et bien que la première confrontation avec l’éructant Jago, chef de la milice Cawdor locale, se solde par une victoire sans appel des visiteurs, grâce aux talents de pistolero de Skelter et à la charge de la brigade légère (des sump toads), ce n’est évidemment que partie remise pour l’affrontement entre carnavaleux et porteurs de masque. Une rivalité haute en couleurs et spectaculaire, s’il en est.

L’acte deux de cette bisbille se joue devant le tribunal local, quelques heures plus tard : le procédurier Jago a fait accuser les forains de ne pas respecter les diverses lois en vigueur à Necromunda en ce qui concerne le transport d’espèces menacées et menaçantes, le paiement des heures supplémentaires d’intermittents du spectacle, ou encore le contrôle de l’inertie psychique des sujets impériaux. Si le timing du dépôt de ces plaintes contraint Skelter à rembourser les billets de sa première représentation (un sort pire que la mort pour notre honnête bateleur), pour cause d’annulation de dernière minute, notre héros dispose bien de tous les permis et licenses nécessaires pour exercer sa noble et utile profession, ce qui rabat le clapet de son détracteur, dont l’éloquence ampoulée ne sauve pas du ridicule. Ce n’est toutefois pas la fin des ennuis pour les artistes persécutés, qui devront faire face à une attaque en bonne et due forme de la part du gang Cawdor au grand complet pendant leur représentation suivante, une bonne partie de leur public se révélant être des cultistes en civils n’attendant que le signal de leur chef pour mettre à bas les masques. Ou le contraire.

Dans la confusion qui s’en suit, nous emboîtons le pas à quelques personnages de la troupe (Skelter, le chasseur de primes retraité Kamusz, la dresseuse Tara, le Scaly Issig) alors qu’ils corrigent bellement les zélotes, plus doués pour chanter à la messe le dimanche que pour purger un cirque au lance-flamme. Pour des raisons qui m’ont échappé, les Cawdors semblent en avoir particulièrement contre les (nombreux) enfants de la troupe, ce qui n’est pas très gentil pour commencer, et met logiquement nos héros en rogne. Acculé à une roulotte avec le fils de Skelter comme otage, Jago rate sa sortie comme il a à peu près tout raté avant cela, et finit projeté dans l’enclos à ripper-jacks avec des conséquences aussi sanglantes que définitives, sans avoir pu mener à bien ses sombres desseins infanticides. Tout est donc bien qui finit bien, et la petite bande peut quitter sans regret Fever’s Break pour sa prochaine étape, qu’on leur souhaite moins agitée que celle-ci.

AVIS :

Farrer avait les cartes en main et le talent nécessaire pour faire de cette nouvelle au titre artistiquement alambiqué1 un petit OVNI drôlatique dans l’univers autrement plus violent et bas du front de Necromunda, mais force est de constater que la sauce n’a pas superbement pris dans ce ‘Badlands…’, et j’en suis le premier désolé. Si cette nouvelle a quelques moments de grâce comique, comme le trilogue de sourds entre Skelter, Kamusz et Tara dans l’antichambre du juge de Fever’s Break, elle semble hésiter entre un traitement au premier ou second degré de son sujet, avant de se terminer sur une scène d’action aux enjeux confus (pourquoi les Cawdors en ont-ils spécifiquement après la marmaille ?) et à l’exécution sans saveur. Pour les amateurs de GW-fiction loufoque mettant en vedette une troupe de baladins, leur ménagerie à la limite de la légalité et leurs déboires avec le bon peuple de la ville où ils ont planté leurs tentes, on conseillera donc l’ancien mais plus abouti ‘Pulg’s Grand Carnival’, preuve incontestable que la production littéraire commanditée par Games Workshop est d’une richesse insoupçonnée.

1 : En même temps, venant de l’auteur de ‘The Headstone and the Hammerstone Kings’, ce n’est pas très étonnant. Bon, il a écrit ‘Faces’ aussi, c’est donc qu’il sait faire simple quand il a envie.

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The Blessed Ones – R. Kellock [WFB] – #11 :

INTRIGUE :

Truand minable, Jurgen Kuhnslieb se voit forcer d’accepter une mission un peu particulière afin de pouvoir rembourser les nombreuses dettes de jeu qu’il a contractées. Chargé par un jeune noble décadent de voler un tableau dont son propriétaire ne souhaite pas se séparer, Jurgen va rapidement se rendre compte qu’il s’est empêtré dans une affaire aux proportions insoupçonnées, et que ses employeurs ne sont pas du genre à laisser un cambrioleur à la petite semaine se mettre en travers de leur chemin.

AVIS :

The Blessed Ones aurait sans doute gagné à être développé en « moyen format » (50 – 100 pages), plutôt que de se retrouver confiné à la vingtaine de pages de sa version définitive. La banalité de l’intrigue proposée par Rani Kellock, cousue de fil blanc et à la conclusion courue d’avance dès les premières lignes1, aurait pu ainsi être compensée par la mise en place d’une ambiance réellement oppressante, soulignant la traque impitoyable dont Jurgen fait l’objet de la part de ses clients. L’instillation d’une atmosphère de roman noir ne pouvant se faire que sur la durée, la relative brièveté de la nouvelle de Kellock ne lui a pas permis de parvenir à un résultat concluant, ce qui s’avère au final être assez dommageable.

1 : C’est bien simple, si un riche notable engage une petite frappe pour récupérer un artefact d’un genre un peu spécial, il y a environ 143,87% de chances que le commanditaire se révèle être un cultiste du Chaos/nécromancien/membre d’une organisation secrète.

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Ancient Lances – A. Hammond [40K] – #11 :

INTRIGUE :

40K_Ancient LancesDe retour sur son Attila natale après des années de bons et loyaux services, le commandeur Al’Kahan découvre avec stupeur que son monde et ses compatriotes se sont détournés de leur mode de vie ancestral, et se font exploiter sans vergogne par les marchands de l’Imperium. Outré par cette infamie, il rejoint ce qu’il reste de sa tribu, et l’entraine dans une vendetta sanglante contre des voisins indélicats, ayant fait leurs les pâturages et les troupeaux des clans environnants. La victoire acquise, il repart aussi sec dans le vaisseau par lequel il est arrivé, ayant visiblement décidé de passer sa retraite ailleurs que de ce bled paumé. Merde, ils n’ont même pas la wifi.

AVIS :

SAncient Lances s’avère plus consistant qu’Emperor’s Grace (dont le personnage principal, le Commissaire Streck, fait deux brèves apparitions en début et fin de nouvelle, sans qu’on comprenne trop ce qu’il vient faire dans cette histoire1), la seconde publication d’Alex Hammond comporte elle aussi son lot d’imperfections. On notera tout d’abord que l’auteur orthographie « Atilla » la planète d’Al’Kahan, ce qui laisse planer un gros doute aussi bien sur sa maitrise du background de la Garde Impériale que sur son niveau de culture générale. Deuxièmement, la meilleure progression narrative d’Ancient Lances par rapport à Emperor’s Grace (comprendre que la première se termine de manière un peu plus compréhensible que la seconde) n’empêche pas Hammond de perdre le lecteur par endroits, la faute à une absence de mise en exergue de points importants pour la compréhension de son propos.

Par exemple, lorsqu’Al’Kahan sort du vaisseau spatial qui l’a ramené sur Attila au début de la nouvelle, il se fait contrôler par deux Gardes Impériaux d’un autre régiment, qui lui demandent de présenter ses papiers. Notre héros s’exécute… et leur casse la gueule. Violence gratuite d’un vétéran psychotique ? Pas exactement, les victimes d’Al’Kahan appartenant au XIIIème régiment de Prakash, sauvé de la destruction quelques pages plus tôt par le sacrifice de la cavalerie Attilane. On peut donc comprendre que le vieux commandeur n’ait pas apprécié l’intervention des Prakashiens, et le leur ai fait savoir de manière appuyée. Seulement voilà, Hammond ne facilite pas ce travail de déduction, puisqu’il ne prend pas la peine de rappeler de manière explicite la cause de la rancune d’Al’Kahan envers ces deux pauvres bidasses, (trop) confiant qu’il est dans la capacité du lecteur à faire le lien entre les trois micro-passages où est mentionné le XIIIème Prakashien (dispersés sur neuf pages). Faut pas baisser la garde.

J’ai également eu du mal à accrocher au personnage d’Al’Kahan, vétéran couturé aux motivations aussi nébuleuses que son sens tactique2. Comme le fait remarquer le méchant de l’histoire juste avant de se faire trucider par le Zapata des grandes steppes, notre héros a beau gueuler contre les ravages de la galaxisation (c’est le même principe que la mondialisation, mais à l’échelle supérieure) sur Attila et se faire le défenseur des anciennes traditions de la planète, il ne se gêne pas pour utiliser l’arsenal de la Garde Impériale, beaucoup plus avancé que les armes de fer et de corne utilisées par ses compatriotes, afin de faire triompher sa cause. Bref, faîtes ce que je dis, mais ne regardez pas comment je le fais. On notera aussi qu’Al’kahan se barre juste après la victoire de son camp (abandonnant une deuxième fois sa femme et son – second – mari, mutilé par ses bons soins au passage), très probablement pour prendre possession de la province d’un autre monde lui ayant été promise en récompense de ses impeccables états de service. C’est ce qu’on appelle avoir de la suite dans les idées.

Toutefois, Ancient Lances est toutefois plus sympathique que pénible, en grande partie grâce aux détails de fluff apportés par un Hammond assez crédible dans son propos. Cette nouvelle a également le mérite de traiter des frictions pouvant naître de la rencontre de plusieurs cultures d’un niveau technologique très différent, sujet intéressant à aborder dans le cadre d’un empire galactique d’un million de mondes, où cette question doit évidemment se poser de manière récurrente sur pas mal de planètes. En conclusion, si vous ne deviez lire qu’un seul texte de Hammond, c’est celui-là que je vous recommande, et de loin.

1Ancient Lances se déroule un peu avant Emperor’s Grace, mais les deux nouvelles n’ont d’autre point commun que la présence de Streck dans l’un et l’autre. Je n’ai d’ailleurs pas bien compris pourquoi Ancient Lances figure après The Emperor’s Grace dans Into the Maelstrom, soit à l’inverse de l’ordre chronologique. Peut-être Hammond avait-il pour projet de développer une série dont Sterck serait le héros ? Malheureusement pour lui, Ibram Gaunt (et plus tard Ciaphas Cain) avait déjà pris la place du Commissaire héroïque au sein de la Black Library.
2« Salut tout le monde, c’est Al’Kahan ! Ça fait 30 ans que je vous ai quitté, mais maintenant que je suis revenu, vous allez tous faire exactement ce que je dis. »
« Et pourquoi ? »
« Parce que sinon, je vais devenir très méchant. Et comme presque tous les hommes en âge de se battre sont morts, je ne vois pas comment vous pourriez m’empêcher de devenir le nouveau chef de tribu. D’ailleurs, voilà la femme que j’ai épousée juste avant de partir me battre pour l’Empereur (je suis un vrai gentleman). Elle n’a pas l’air très contente de me voir, mais je vais lui offrir la main tranchée de son deuxième mari, ça lui fera plaisir. »
« Bon ok. On n’a pas le choix de toute façon. Mais on te prévient, on s’est fait volé tout notre cheptel par le clan d’à côté, dont le chef a construit une forteresse imprenable depuis laquelle il pille les terres alentours en toute impunité. »
« Pas de problème, j’en fais mon affaire. En ma qualité de soldat vétéran, je vous propose ce plan infaillible : nous allons charger les murs de son bastion à cheval, comme on le faisait à mon époque ! »
« C’est complètement con. »
« Et toi, à la prochaine remarque désobligeante, t’es complètement mort. Nan, mais en fait, je vous ai ramené quelques lances à têtes explosives, ça devrait faire de gros trous dans les murs, qui nous permettront de passer. »
« Ok, mais comment on arrive à s’approcher assez près pour utiliser ces armes fabuleuses ? La forteresse est entourée de pieux en acier, spécialement conçus pour briser une charge de cavalerie. »
« C’est pas un problème, j’ai également un fusil plasma, qui me permettra de détruire ces obstacles pendant notre glorieuse chevauchée ! »
« Heu, tu veux dire avant notre glorieuse chevauchée, non ? Genre on envoie un éclaireur préparer le terrain pour éviter les mauvaise surprises. »
« Pas du tout, on charge comme des débiles un ennemi bien retranché et mieux armé que nous, en faisant une confiance aveugle à mes talents de tireur. C’est non négociable. »
« C’est complètement c- »

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Daemonblood – B. Counter [40K] – #12 :

INTRIGUE :

DaemonbloodSur la planète (forcément bleeue) de Saafir, Papy Nurgle est sur le point de rafler le vote populaire, au grand dam des défenseurs impériaux dépéchés par Pépé (l’autre) pour passer la serpilière. Isolés par les aléas de la guerre, la Sœur de Bataille Aescarion et le Sergent Ultramarines Castus se retrouvent dans les souterrains de la capitale planétaire (éponyme), où se trouve s’étend une station d’épuration possédée par le Warp, forme physique imposante du Prince Démon Parmenides le Vil. Comme il est difficile de passer par l’épée, ou, dans le cas de cette brutale d’Aescarion par la hache énergétique, une flaque de morve et d’excréments couvrant plusieurs hectares, M. et Mme Meilleurs de l’Empereur sont bien embêtés. Profitant de leur désarroi, le vil Parmenides lave/salit le cerveau du Space Marine avec ses confidences crasseuses sur l’état de la galaxie, transformant le pauvre Castus en séide chaotique. Immunisée à cet insidieux virus par sa foi dévorante et absolue, Aescarion n’est cependant pas de taille à achever les souffrances et les errances métaphysiques de son compagnon, et ne doit son salut qu’à la robustesse de son jetpack, qui la ramène à la surface avant qu’elle ne se retrouve féminicidée par le renégat.

On n’échappe cependant pas aussi facilement à cette force puissante qu’est la Destinée au 41ème millénaire, et les routes d’Aescarion et de Castus se croiseront à deux nouvelles reprises pendant les décennies suivantes. La première fois lors de la purge d’un Space Hulk squaté par les suivants de Parmenides, dont Castus est devenu le porte-parole officiel. Castoche aurait pu se faire trouer les pores par un peloton de Sistas judicieusement gardé en réserve par Aescarion, n’eut été la compétence « corps de mouches » développée par le M. Impropre de Saafir, et qui lui permet de tirer sa révérence sans dommage. La seconde, et dernière fois, se déroule sur le vaisseau du Seigneur du Chaos, le Defixio1, et avec la bénédiction de l’Inquisition, qui souhaitait contenir l’expansion cancéreuse de l’empire spatial de Parmenides en envoyant un petit Exterminatus bien senti sur Saafir. Il fallait bien ça à la Canonnesse de l’Ordre du Calice d’Ebène, auquel Aescarion appartient, pour autoriser l’impulsive et revancharde vétérante à se mesurer une nouvelle fois avec sa Némésis. Les deux précédentes tentatives ayant eu un coût élevé en termes de vies de Sœurs de Bataille aguerries, on comprend sa réticence à permettre à sa sous-fifre de sortir à nouveau le karscher. La connaissance intime de notre héroïne de la mentalité et des forces et faiblesses de Castus en faisait toutefois la meilleure candidate pour mener l’expédition impériale jusqu’à bonne orbite, en dépit de la défense acharnée orchestrée par le fidèle Castus du pré de la décharge carrée de son seigneur et maître.

Ayant soigneusement préparé son combat en oignant sa hache de gel Harpic, Aescarion parvient assez facilement à vaincre son adversaire, mais ne l’achève pas immédiatement. Elle souhaite en effet le faire revenir du côté lumineux, et aseptisé, de la force avant qu’il ne soit trop tard, et parvient (assez facilement *2) à convaincre Castus de retourner sa veste énergétique. Cachant une balise de visée, ou quelque chose comme ça, entre deux bourrelets du champion déchu, elle envoie son ancien camarade apporter ses salutations les plus distinguées à Parmenides dans les profondeurs de Saafir, permettant à l’ex Ultramarine de partir avec les mains sales, certes, mais une ardoise propre2. C’est ce qu’on appelle passer l’éponge, grimdark style.

1 : Je précise car Counter a écrit une autre nouvelle portant ce nom, pour ceux que ça intéresse.
2 : Le fait que Parmenides ne se souvienne même pas du nom de son champion après toutes ces décennies de collaboration à également dû convaincre ce dernier d’envoyer tout balader.

AVIS :

Bien des années ont passé et bien des textes ont été écrits depuis, mais il faut se rappeler que c’est avec ‘Daemonblood’ qu’un tout jeune Ben Counter a fait ses débuts pour la Black Library, dans un numéro d’Inferno ! Si je ne placerais pas cette petite nouvelle parmi les meilleures soumissions de cet auteur, capable du moins convaincant1 comme du meilleur, cette première tentative a plutôt bien vieillie (notamment quand on la compare à certaines nouvelles publiées au début des années 2000), et s’avère assez solide dans sa réalisation, même si très peu originale dans son propos. Les milliards de Space Marinades qui nous ont été servies par la BL au cours des dernières décennies y sont sûrement pour quelque chose…

Ici, on peut tout de même mettre au crédit de Counter une conclusion un peu plus originale que le traditionnel « le-méchant-chaoteux-meurt-sur-un-gros-malentendu-avant-d’avoir-pu-mettre-son-plan-presque-infaillible-à-exécution », avec l’exploration d’un thème assez rare dans l’univers grimdark de 40K : la rédemption.  Cela compense largement à mes yeux les points techniques sur lesquels on pourrait venir lui chercher des noises, comme l’apparente facilité avec laquelle une « simple » Sœur de Bataille vétérante arrive à tailler des croupières à un Seigneur de la Peste. On apprendra d’ailleurs par la suite que la bonne Aescarion est une véritable héroïne d’action, ayant plus d’un Space Marine à son tableau de chasse, ce qui pourrait être perçu comme du féminisme de GW-Fiction avant-gardiste de la part de Ben Counter. Quel visionnaire alors…

1 : Vus les loustics qui ont bossé pour la BL, je ne peux pas décemment utiliser le qualificatif de pire pour la prose de Ben Counter. Il y a bien plus mauvais que lui.

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Deliverance – G. Thorpe [40K] – #12 :

INTRIGUE :

Sur la planète Georgia, ou un nom équivalent étant donné que sa « capitale » se nomme Deliverance et que ses habitants sont des rednecks tout ce qu’il y a de plus primitif, le hagard Araga, chasseur-cueilleur (de champignons hallucinogènes) de son état voit son trip roots tourner au psychédélique morbide lorsqu’une spore mycétique contenant un Lictor sautillant s’écrase à quelque distance de sa position. Trop stone pour faire autre chose que contempler le Xenos s’approcher en faisant des claquettes et agitant son chapeau haut de forme (il n’y a pas à dire, c’est de la bonne), notre brave McGuffin est sauvé d’une descente brutale et d’une mort certaine par l’arrivée à point nommé d’un peloton de Last Chancers, mené par notre ami et confident Kage, qui fait sa fête à l’immigrant clandestin avec une brutale efficacité qui aurait arraché des larmes de joie à Trump en personne.

Cette menue péripétie est le point de départ du récit de la défense de Deliverance par une force impériale regroupant, en plus des Légionnaires Pénaux de choc de l’impayable Colonel Schaeffer, une milice de braves indigènes et un contingent de Sœurs de Bataille, contre les hordes chitineuses du Grand Dévoreur. L’occasion pour Thorpe de confronter ses petits chouchous à une galerie de créatures sanguinaires et décérébrées, aux noms aussi étranges que Franx, Letts, Feonix, Truko et Kruzo, pour ne citer que quelques-unes de ces immondes formes de vie. Bref, la vie d’un organisme Tyranide n’est pas rose tous les jours, à supposer qu’il distingue la couleur. De son côté, le Lieutenant Kage narre avec son style inimitable la défense inspirée du périmètre impérial qu’il assure avec ses hommes. Et lui aussi est bon pour un passage en revue du bestiaire opposé, aux Gargouilles succédant des Termagaunts, Guerriers et même, Hormagaunt Ormahgard un petit Carnifex plutôt farouche. Il laisse toutefois le soin à son increvable autant qu’inflexible supérieur le soin de se farcir le Prince Tyranide qui mène l’assaut, ce que Schaeffer fait avec professionnalisme1 (et hors champ, ce qui est encore plus rapide). Bénéficiant de son armure en scenarium, même s’il finit la nouvelle à l’infirmerie, tout l’enjeu pour Kage est de conserver intacte la motivation fluctuante de sa mauvaise troupe, ce qu’il fait en alternant argumentaire pessimiste2, discours inspirant et mensonges éhontés, lorsqu’il aperçoit l’arrivée de transports de gardes impériaux et comprend que cette bonne nouvelle risque d’entrainer un coupable relâchement chez ses Légionnaires. Décidément, même au 41ème millénaire, le management reste un art délicat.

1 : Quel dommage qu’il n’ait pas été là sur Macragge pour baby-sitter cet empoté de Calgar contre le Maître des Essaims. Avec lui, ça n’aurait pas traîné.
2 : Top Ten Reasons of NOT Running Away From A Fight Against Tyranids (Number 3 Will SHOCK You ! – normal c’est un Trygon – ).

AVIS :

La défense d’un bastion quelconque contre une attaque de Tyranides est devenue au fil des années l’un des scénarios les plus communs dans le catalogue de la Black Library, et même si Deliverance1 peut se targuer d’être l’un des premiers textes couvrant le sujet publié par la BL, il y a fort à parier que le lecteur soit déjà familier de ce type de propos. L’approche méthodique que Thorpe utilise pour mener sa barque, en passant d’un type de bestiole hargneuse à l’autre et présentant pour chacune ses principales caractéristiques dans la foulée, à défaut d’être follement originale, remplit convenablement sa mission. La gouaille habituelle de Kage permet de faire passer plus facilement la pilule pour les lecteurs les plus blasés, et les insinuations du caractère paranormal de Schaeffer, qui donne également de sa personne lors des combats (chose assez rarement couverte dans les récits Last Chancers, généralement centrés sur Kage et les pauvres malheureux qui lui servent de réservoir à points de vie), apportent un supplément d’intérêt à Deliverance, même si cette piste intéressante n’est qu’à peine effleurée par Thorpe. Pour le reste, cette nouvelle est tout ce que l’on est en droit d’attendre de la part d’un affrontement entre la Garde Impériale et les cafards de l’espace, avec un body count des plus respectables et de l’héroïsme cheap à foison.

1 : On peut voir dans ce choix de nom un présage de la future relation particulière entretenue par Gav Thorpe et Corax. Nous étions au moment de la publication initiale de cette nouvelle huit ans avant le début de l’Hérésie d’Horus.

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The Doorway Between – R. Davidson [WFB] – #12 :

INTRIGUE :

WFB_The Doorway BetweenFrantz Heidel, chasseur de sorcières agoraphobe, est engagé par le baron von Kleist pour retrouver le pendentif qui lui a été dérobé par une bande de mutants sur la route de Bechafen. Escorté par un pisteur à tête de fouine du nom de Karl Sassen, notre héros se lance à la poursuite des voleurs dans l’arrière-pays de la capitale de l’Ostermark, sans se douter que son employeur ne lui pas dit toute la vérité au sujet de l’artefact qu’il doit récupérer.

AVIS :

The Doorway Between est un récit très classique (la quête d’un objet magique qui se révèle être maléfique), conduit d’une manière tout aussi classique par Rjurik Davidson. Sans être mauvaise, cette nouvelle est toutefois loin d’être mémorable, et ne mérite au mieux qu’une lecture rapide, tant il est possible de trouver mieux ailleurs dans le catalogue de la Black Library (pour les amateurs de chasseurs de sorcières, la trilogie Mathias Thulmann de C.L. Werner est à mon goût bien supérieure).

Lorgnant sur la fin vers la buddy story, lorsque Heidel et son rival Immanuel Mendelsohn sont contraints de faire équipe pour contrecarrer les plans de leur ennemi commun, The Doorway Between aurait sans doute gagné en intérêt si Davidson s’était davantage écarté des chemins battus de l’heroic-fantasy.

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Et voilà qui conclut ce voyage dans la memory lane infernale, plus de vingt ans après la publication initiale de ces nouvelles de l’An II d’Inferno!. À l’heure où le futur de cette revue devenue recueil est plus incertain que jamais1, revisiter ce glorieux et fantasque passé ne peut pas faire de mal. Rendez-vous prochainement ici-même pour le troisième volet de cette saga au long cours…

1 : Amazon nous informe (au moment où cette revue est postée) qu’un recueil thématique ‘Inferno! presents The Emperor’s Finest’, similaire à celui proposé l’année dernière (‘Inferno! presents The Inquisition’) sortira en Novembre 2022. Après ça, on ne peut plus qu’espérer…

INFERNABULUM! – HAMMERS & SLAYERS

Bonjour à tous et bienvenue dans ce cinquième numéro d’Infernabulum!, la revue des nouvelles les plus obscures jamais publiées par la Black Library dans les pages de la première version du magazine Inferno! Les plus observateurs parmi vous auront sans doute noté que l’existence même de ce nouveau numéro s’inscrit en faux de la conclusion du précédent (chroniqué ici), qui avait traité des derniers courts formats « introuvables » de cette auguste publication. Ce format de chronique m’a toutefois tellement plu que j’ai décidé de poursuivre un peu l’expérience, en incluant cette fois-ci des nouvelles certes un peu plus accessibles, mais pas non plus à la portée du premier courte-barbe venu, et en essayant de donner un thème à chaque nouveau numéro. Tout un programme.

Infernabulum! - Slayer &amp; Hammers

Ce cinquième volet sera ainsi consacré à deux franchises que l’on peut qualifier comme historiques de la BL, du fait de leur âge respectable. Leurs destinées ont toutefois été radicalement différentes: alors qu’on n’a guère besoin de présenter Gotrek (accompagné de Felix à l’époque), qui poursuit encore aujourd’hui ses massacres littéraux et littéraires après avoir été téléporté du Monde qui Fut aux Royaumes Mortels, il y a fort à parier que les lecteurs familiers avec les Chevaliers du Loup Blanc de Dan Abnett et du taciturne prêtre de Morr/détective privé Dieter Brossmann (James Wallis) soient beaucoup moins nombreux. Il faut dire que les uns comme l’autre n’ont pas connu de nouvelles aventures depuis la publication du roman choral ‘Hammers of Ulric‘ en 2000, ce qui fait tout de même un petit bout de temps. 

L’occasion est donc rêvée pour remettre ces héros oubliés de la Black Library sur le devant de la scène, ne serait-ce qu’à mon humble niveau. Qui sait, peut-être que cela créera des envies de lecture de l’autre côté de l’écran? Sans plus tarder, place à l’action!

Infernabulum!#5

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Ulric’s Children (Inferno! #11) – W. King [WFB]:

INTRIGUE:

WFB_Ulric's ChildrenUne nouvelle fois égarés dans une impénétrable forêt des moins accueillantes (décidément, c’est une constante), Gotrek et Felix, backpackers de l’extrême1, doivent braver la neige, le froid et la perspective d’une meute de loups affamés lorsque le rideau se lève sur Ulric’s Children. Quant aux fameux enfants d’Ulric qui ont donné leur nom à cette nouvelle, nous apprenons bientôt qu’il s’agit du nom populaire des loups-garous, considérés comme les descendants des relations tumultueuses du Dieu avec quelques accortes mortelles dans des temps très anciens. Figures légendaires du bestiaire impérial, leur existence paraît soudainement bien plus probable à Felix alors qu’il s’échine dans les congères à la suite du Tueur, des vocalises lupines plein les oreilles. Le grand blond à la cape rouge n’a toutefois guère le temps de ressasser son habituelle litanie misérabiliste que Gotrek, dont l’ouïe est aussi fine que son animal totem (l’acraga coa2), part en sprint dans les sous-bois en direction de la clameur d’une bataille toute proche… et disparaît corps et bien de notre histoire, tel un vulgaire PNJ de Skyrim, laissant Felix seul aux commandes de cette dernière.

Arrivé sur les lieux de l’esclandre, Felix se retrouve confronté à la méfiante hostilité d’une petite troupe de soldats, venant de repousser non sans mal les assauts d’une harde lupine. Prudence étant mère de sûreté, les survivants décident de faire prisonnier le bon samaritain, qui se retrouve menotté comme un vulgaire gilet jaune à l’arrière de la carriole des routiers – pas vraiment sympas pour le coup – où il fait la connaissance d’une autre prisonnière du comte Hrothgar, une dénommée Katarina dont le calme glacial et les remarques sibyllines semblent indiquer une inquiétante proximité avec la meute aux trousses de la soldatesque impériale. Pour ne rien arranger, Felix attire l’attention du sorcier de compagnie de son ravisseur, un certain Voorman dont ni l’haleine fétide, ni l’intérêt déplacé pour sa personne, ne sont au goût de notre héros, qui ne peut que maudire les oreilles aiguisées et les courtes jambes de son compagnon d’infortune.

Rendue quelques heures plus tard au pavillon de chasse de Hrothgar, la troupe investit les lieux et jette Felix et sa camarade dans une geôle sombre, froide mais pas vraiment bien fermée, ce qui se révélera assez utile par la suite, comme nous allons le voir. La visite de Voorman permet à Blondin d’en apprendre un peu plus sur sa situation, qui se révèle être assez précaire : le comte et son thaumaturge s’avèrent être des cultistes de Tzeentch, fomentant quelque obscur et indubitablement dangereux dessein, dont la réalisation nécessite l’implication du père de Katarina, loup-garou au pedigree impeccable. Ergo la capture de la gente demoiselle, ergo les attaques répétées de la part de la gent lupine que Hrothgar (du Nord) et ses sbires ont subi jusqu’ici. Si Felix ne souhaite pas ingérer dans les affaires des uns et des autres, il ne lui faut pas longtemps pour déterminer qu’il a davantage intérêt à coopérer avec Katarina que de faire cavalier seul. Profitant de l’étourderie manifeste de Voorman, qui repart sans verrouiller la porte, et de la confusion générale générée par l’intrusion de la meute dans l’enceinte fortifiée, la faute, une fois encore, à un verrou oublié, les gardés à vue se font la malle et se séparent rapidement.

Pendant que Katarina va faire ami ami avec les quadrupèdes, Felix erre dans les couloirs, et finit par surprendre une conversation entre Hrothgar et Voorman venant confirmer ses sombres pressentiments sur le dessein poursuivi par les deux crapules. Le sorcier parti euthanasier quelques clebards à grand coup de boules de feu, Felix sort de sa cachette, assomme Hrothgar et lui subtilise la dague magique avec laquelle le faquin avait menacé le mage quelques instants auparavant. Tout est alors prêt pour que le dénouement tant attendu (ou pas) prenne place. Un autre coup de chance (décidément, Felix n’a pas volé son nom) conduit le Baudelaire impérial dans une pièce où Voorman se confronte au grand méchant loup, que l’on devine être le père aimant de Katarina. Le triomphe du lycanthrope, qui décapite le sorcier d’un revers de patte, est toutefois de courte durée, l’esprit vengeur de l’arcaniste venant posséder son assassin quelques secondes après la décollation du premier par le second. C’était en effet l’objectif poursuivi par Voorman, qui souhaitait faire siennes l’immortalité et l’invulnérabilité supposées des loups-garous, et ainsi attendre pépouze la fin des temps. Bien entendu, sa rencontre avec Felix, et surtout, sa dague enchantée dérobée à Hrothgar, viendra mettre un terme définitif aux rêves de grandeur de notre ami le furry. Il reste alors 10 lignes à King pour terminer son histoire, ce qu’il fait en faisant arriver Gotrek (enfin !) et Katarina, la seconde prisonnière du premier. Quel sort le duo réservera-t-il à l’orpheline, pas vraiment innocente certes, mais qui ne leur a rien fait de mal à proprement parler ? Eh bien, on ne le saura pas (dans cette nouvelle en tout cas). Concluons sur ce constat, toujours d’actualité, que lorsqu’il y a un flou, c’est qu’il y a un loup. Et inversement.

1 : Dommage que la Fin des Temps ait pris place avant que le projet ‘J’irai occire chez vous’ se soit concrétisé. Je suis sûr que ça aurait fait un carton d’audience.
2 : D’où croyez-vous que la teinte orange de sa crête venait, enfin ? Et, oui, les mites font partie des espèces dotées de l’audition la plus performante du règne animal.

AVIS:

Il est assez dommage que Ulric’s Children laisse le lecteur sur sa faim (de loup, donc), car le récit brossé par King avait un potentiel certain, que la brieveté de l’histoire empêche de s’exprimer de manière aboutie. Je suis persuadé qu’une dizaine de pages supplémentaires après que Felix et Katarina soient sortis de leur cachot aurait pu permettre à cette nouvelle de se terminer de façon plus convaincante que l’enchaînement de non-péripéties qui mène au dénouement lapidaire et lacunaire qui est le sien. Pour tout dire, la dernière demi-page d’Ulric’s Children mérite la lecture afin de prendre la pleine mesure du caractère comiquement abrupt de sa conclusion. Il y avait pourtant beaucoup de pistes intéressantes à explorer avant de rayer la ligne « Tueur de Loup » de la bucket slaying list du petit rouquin teigneux, et notamment le personnage de Katarina, sorte d’Ulrika1 avant l’heure que King place au cœur de son récit avant de laisser totalement tomber. Un vrai loupé, si on me permet l’usage de cette tournure.

Si le choix de King de se passer de son personnage tutélaire pour cette soumission peut surprendre le lecteur, le pari aurait pu s’avérer payant si l’auteur avait permis à Herr Jaeger de s’illustrer de façon convaincante et spécifique : si Gotrek est une machine de guerre invincible, qui résout tous les problèmes auquel il est confronté à coup de hache, Felix aurait pu compenser par une approche un peu plus cérébrale et astucieuse de la situation. Ce n’est pas le cas ici, notre héros enchaînant les coups de chance critiques sans véritable réflexion de sa part. En cela, la comparaison avec l’élève Long n’est clairement pas à l’avantage du maître King, le premier faisant preuve d’une véritable aisance scénaristique, quand le second a davantage tendance à passer en maniaque automatique, les prouesses martiales du Nain disgracié venant meubler les intrigues simplistes concoctées par son auteur. Si la passation n’était pas encore proche au moment de la publication de Ulric’s Children (Mars 1999, soit 4 ans avant la sortie de Tueur de Géant, le dernier roman de King dans la série – à ce jour –), il est possible qu’une certaine lassitude ait déjà été à l’œuvre chez King à ce moment, ce qui expliquerait le caractère inachevé de cette nouvelle. Quoi qu’il en soit, cette dernière ne fait définitivement pas partie des bonnes pages de la saga de Gotrek et Felix, et sa lecture n’est indispensable qu’aux fans transis de la série.

1 : C’est-à-dire la jeune fille frappée d’une malédiction passible de mort dans les sociétés civilisées du Vieux Monde (la lycanthropie pour l’une, le vampirisme pour l’autre), mais dont les motivations ne sont pas intrinsèquement mauvaises, et qui demande juste à ce qu’on la laisse tranquille.

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Redhand’s Daughter (Inferno! #36) – W. King [WFB]:

INTRIGUE:

WFB_Redhand's DaughterAprès avoir fait les 400 coups (de hache runique) en Arabie, quelques temps après leur retour d’Albion (Tueur de Géants), Gotrek et Felix se retrouvent sur le cuirassé nain du Capitaine Ahabsson, croisant sur les eaux du golfe d’Arabie depuis la forteresse de Barak Varr. Toujours à la recherche d’une fin glorieuse, le célèbre Tueur doit ronger son frein pendant la croisière, ce qu’il fait en s’enfilant pinte sur pinte et en gueulant sur Ceniormeteo, le dieu elfique des dépressions, tandis que Felix préfère meubler ses journées en regardant les dauphins et entretenant des pensées sinistres, comme à son habitude. Nos plaisanciers ne tardent cependant pas à être mis à l’épreuve (autrement, cela aurait été la nouvelle de Gotrek & Felix la plus ch*ante du monde), d’abord par la survenue d’un grain sévère, qui endommage bellement le Storm Hammer, puis par la rencontre avec un navire de pirates Orcs, qu’Ahabsson décide, en corsaire assermenté, d’aller piller. L’enthousiasme fiévreux du capitaine se heurte toutefois à quelques dures réalités, à commencer par les projectiles enflammés projetés par la catapulte de proue du vaisseau adverse, qui cabossent suffisamment le steamer nain pour que ce dernier se retrouve à portée d’abordage par l’équipage peaux-vertes, beaucoup plus nombreux que ses vis-à-vis. La bataille qui s’en suit permet à Gotrek de se dégourdir les orteils (pas mieux à espérer contre de simples boyz), et à Felix de voler à la rescousse d’une prisonnière de l’infâme Capitaine Goldtusk, qu’il réussit à escorter jusqu’au Storm Hammer avant que ce dernier ne parvienne à se désengager.

Vainqueurs éprouvés de l’affrontement, les Nains décident d’aller mouiller l’ancre sur l’une des îles toutes proches, encouragés en cela par le récit fait par la rescapée (Katja Murillo) du légendaire trésor que le pirate Redhand, qui se trouve être son père, a dissimulé sur cette dernière. Elle-même capitaine au long cours, elle promet à ses sauveurs de partager les bénéfices de son héritage s’ils l’aident à mettre la main dessus. Capturée par Goldtusk alors qu’elle voguait vers le butin avec son propre équipage, Katja n’a dû son salut qu’à l’avidité de l’Orc, qui a épargné sa vie en échange d’un aller simple vers le magot familial. Jamais les derniers à se lancer dans la quête de richesses mal acquises, Ahabsson et ses gars acceptent la proposition qui leur est faite, et tout ce petit monde (plus deux humains) débarque sur une île volcanique couverte d’une épaisse forêt où est sensé se trouver la fortune de Redhand.

Bien que charmé par le ravissant minois de la donzelle (ce qui est la raison pour laquelle il s’est rué à son secours en premier lieu), Felix se montre assez suspect des motivations de cette dernière, et ne peut s’empêcher de penser que Katja dissimule quelque chose à ses partenaires. Gotrek de son côté s’avère plus intéressé par la perspective de se frotter au monstrueux gardien d’une gemme légendaire conservée dans l’un des temples en ruines de l’île (dixit Katja, toujours), ou a défaut, par la régulation de la population locale de peaux vertes. L’enthousiasme général est à peine entamé par la disparition mystérieuse de plusieurs membres d’équipage au fur et à mesure que l’expédition s’enfonce dans la jungle, énigme rapidement résolue par un Gotrek peu tolérant envers les facéties des Gobelins arboricoles du cru. Après un pittoresque trail tropical, les aventuriers parviennent jusque dans la cité abandonnée promise par leur guide, qui se trouve être un lieu de villégiature couru par la gent orcoïde (un club Mork, sans doute), forçant nos héros à la plus grande discrétion. Même Gotrek, dont le premier but était pourtant de tailler des croupières aux locaux, accepte de faire crête basse jusqu’à ce que ses camarades aient pu sécuriser le trésor, ce qui est fort urbain de sa part. En même temps, ils sont sortis de la forêt, donc…

Une fois rendu dans le temple où Redhand aurait déposé ses bagages, et après avoir négocié de façon soupçonneusement facile au goût de ce rabat-joie de Felix l’accès jusqu’au cœur de l’édifice, qui dispose d’une installation géothermique de pointe sous la forme de puits de lave intégrés à la structure du bâtiment (attention à ne pas se brûler en prenant sa douche, tout de même), l’expédition se retrouve confrontée à un défi de taille, en la présence d’un Elémental de lave qui surgit de son jaccuzzi pour empêcher les intrus de faire main basse sur le trésor du pirate ainsi que sur l’énorme gemme qui fait office de décoration d’intérieur. Au lieu de s’émerveiller de la culture du gardien des lieux, qui s’exprime en Reikspiel parfait alors que sa prise de fonction remonte à des millénaires (ce sont les Anciens qui ont signé son contrat de travail), l’esprit mesquin de Felix ne peut s’empêcher de se concentrer sur le fait que MagMan semble connaître Katja, qu’il qualifie de sorcière (ce qui n’est pas très sympathique). De son côté, Gotrek se contente de foncer dans le tas (de roches en fusion) avec son ardeur habituelle, distrayant la Chose assez longtemps pour que Katja réussisse à s’emparer de la gemme, avant de disparaître dans un éclat de rire sardonique. On comprend alors que la capitaine corsaire n’était pas la fille, mais la femme de Redhand, qu’elle a poussé à prendre d’assaut le temple pour récupérer le diam’s des années plus tôt, sans succès. On comprend aussi que le joyau en question n’avait pas qu’une utilité symbolique, mais servait surtout de régulateur de l’activité tellurique du volcan local, qui se réveille violemment une fois la gemme dérobée.

Ayant tout de même réussi à refroidir les ardeurs du gardien, puis à le(s lui) briser menu, Gotrek et Felix en sont quittes pour une session de hack’n’slash intense pour sortir du temple avant que ce dernier ne soit noyé par la lave. Laissant leurs camarades survivants se débrouiller tous seuls comme des grands petits, le duo se fraie un chemin sanglant à travers les hordes de Gobelins que Goldtusk, arrivé sur place après le naufrage de son navire, a recruté pour… visiter le temple également je suppose1. Cette louable idée de sortie culturelle prend donc un tour funeste lorsque le Tueur et son comparse décident de couper la file, résultant en des centaines de morts parmi les visiteurs, dont Goldtusk en personne, décapité par un Gotrek littéralement chauffé à blanc. Ceci fait, il ne reste plus à nos inséparables qu’à partir en petites foulées vers la plage où mouille le Storm Hammer, avant que l’éruption du Krakatorka ne mette un terme honteux et cendreux à la carrière du Tueur. Spoiler alert : Ils s’en sortent. Si si.

1 : King ne donnant aucun signe que les Nains aient été détectés par les peaux vertes à leur arrivée.

AVIS:

Cette aventure conséquente (28 pages) permet à William King de renouer avec les origines littéraires de Gotrek & Felix, héros de nouvelles conduits plus tard par le succès à évoluer dans de plus longs formats. Se déroulant après les événements relatés dans Tueur de Géants, dernier roman signé de la série signé par King (et le moins réussi du lot à mon humble avis, comme quoi il a bien fait d’arrêter), Redhand’s Daughter peut être considéré comme l’ultime tour de piste des deux troublions sous la plume de leur créateur, et un écho aux longues nouvelles originelles du duo (Wolf Riders, The Dark Beneath the World). Bénéficiant d’une localisation exotique (je ne pense pas que quiconque se soit aventuré dans la Chaîne Mégaleane – qui n’apparaît sur aucune carte à ma connaissance – depuis lors), de péripéties rythmées et, elles aussi, assez innovantes pour le lecteur, comme la bataille navale introductive entre corsaires Nains et pirates peaux vertes, Redhand’s Daughter a un petit goût de pastiche de The Queen of the Black Coast (a.k.a. Conan en croisière), avec Katja en Belit et Gotrek & Felix se partageant le rôle du ténébreux Cimmerien. Ces considérations évacuées, on se retrouve cependant avec une soumission assez classique du sous-genre créé par King, qui déroule son propos et coche les cases du cahier des charges avec aisance plus que maestria. On notera pour terminer que l’auteur n’a pas encore tenu sa promesse de faire remettre Katja Murillo sur le chemin de nos baroudeurs, et qu’avec la destruction du monde de Warhammer (et donc celle de Katja et Felix), il lui sera assez difficile de tenir sa parole…

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A Company of Wolves (Inferno! #7)- D. Abnett [WFB]:

INTRIGUE:

WFB_A Company of WolvesUne compagnie de Chevaliers du Loup Blanc plongée en plein doute existentielle à la suite de la mort de leur commandant au cours d’un raid mal négocié dans la Drakwald quelques mois plus tôt retourne en forêt pour une session de teambuilding mâtinée de skullbashing. Les problèmes affligeant nos héros, que l’on ne peut pas qualifier de sans peur (le vétéran Gruber a le trouillomètre à zéro depuis le décès tragique de son supérieur et ami Jurgen) ni de sans reproche (dans le désordre : Morgenstern a un gros problème d’alcool, Anspach est un parieur pathologique, Vandam une tête brûlée carriériste, et le nouveau chef, Ganz, a moins de charisme que la tête de loup qui orne son armure) sont nombreux, mais le Grand Maître de l’ordre a bon espoir que l’air pur, la nature préservée et les hordes de mutants assoifées de sang qui hantent la Drakwald parviendront à guérir la compagnie rouge de son spleen persistant. Preuve de sa confiance dans ses hommes, il leur a même confié le précieux étendard de Vess1 pour cette virée forestière, ce qui rélève un peu le moral des troupes.

Le plan de Ganz consistant à errer dans les bois jusqu’à tomber sur une bande de néfastes à massacrer au nom d’Ulric, notre petite bande baguenaude cavalièrement jusqu’à faire la rencontre de quelques Hommes-Bêtes venus se recueillir devant une idole païenne. L’escarmouche qui s’en suit, si elle ne dure pas longtemps et se termine par une victoire sans appel pour le camp impérial, révèle toutefois de façon criante les maux profonds qui affectent la compagnie. Gruber refuse ainsi de charger l’ennemi, prétextant la perte de fer de sa monture, Morgenstern est couché net par une branche basse qu’il n’a pas pu esquiver, Vandam fonce tête baissée à la poursuite des fuyards malgré les ordres de Ganz, et Von Glick, sommé de le faire revenir au bercail, se fait grièvement blesser par un Ungor embusqué sur le chemin du retour. Cette blessure force les templiers à monter le camp pour la nuit en plein cœur de la Drakwald, et à perdre un des leurs sous les flèches des Hommes-Bêtes (on peut saluer la prescience d’Abnett sur le sujet) pour couronner le tout.  

Alors que la compagnie semble sur le point de se désagréger, tel le premier boys band venu après un second album décevant, l’inspiration finit par frapper les loulous, qui décident de tenter le tout pour le tout. Faisant mine de laisser derrière eux leurs morts, blessés et étendard sous faible garde, les chevaliers tournent bride vers Middenheim, espérant ainsi attirer le reste de la harde à découvert. Ce qui ne manque évidemment pas d’arriver. La vaillante action d’arrière-garde conduite par Aric, Gruber et Von Glick permet de retenir les mutants assez longtemps pour que la cavalerie arrive revienne, et annihile les cornus d’une dévastatrice charge de flanc d’école. Bonus appréciable : il s’agissait de la même bande de fieffés violeurs de poules responsables de la mort de Jurgen, qui se trouve donc vengé de façon satisfaisante. Au final, et malgré la mort au combat de Vandam (sans doute en plein grand écart facial) et de Von Glick, nos héros peuvent prendre le chemin du retour unis comme jamais et à nouveau pleinement opérationnels. Une vraie fin de loup(s), en somme.

: Car Vess de Loup (blanc), évidemment. Je ne vois pas d’autres explications satisaisantes et n’accepterai pas de contestations.

AVIS:

Dans la foulée du lancement réussi de la série des Fantômes de Gaunt dans les pages d’Inferno!, Abnett se livre à un exercice similaire avec ce ‘A Company of Wolves’, introduisant au lecteur une confrérie de templiers du Loup Blanc, dont les exploits seront relatés dans une succession de nouvelles, puis compilées et conclues dans le roman ‘Hammers of Ulric’. Bien que cette péripétie inaugurale soit relatée avec l’aisance habituelle de la plume Alpha de la Black Library, j’ai trouvé le résultat final un peu moins réussi qu’à l’accoutumée. Parmi les raisons de ce (léger) coup de moins bien, j’identifie le nombre important de protagonistes et la « singularisation » moins aboutie de ces derniers (sauf pour Morgenstern, catalogué comic relief de façon outrageuse, ce qui est un autre défaut), une intrigue somme toute assez banale combinée à une mise en scène parfois complaisante1, ou encore la très nette sensation qu’Abnett avait déjà acté qu’il ferait vivre ses nouveaux héros sur plusieurs nouvelles, et a traité A Company… comme un chapitre introductif plutôt qu’un stand-alone (ce qui relève plus de la faute de goût que de la catastrophe industrielle, certes). Pour autant, on a tout de même droit à du Dan Abnett tout ce qu’il y a de plus solide, avec des personnages attachants dès lors qu’on arrive à les différencier les uns des autres, des scènes d’action prenantes où la mort frappe sans prévenir, et une exécution globalement propre. Rien de grave donc.

1 : La possibilité qu’un chevalier puisse se prendre une flèche dans le cou alors qu’il dort au milieu de ses frères d’armes, protégé par des sentinelles habituées des choses de la guerre, et n’être découvert qu’au petit matin, ne me semble pas des plus réalistes. À un autre niveau, le « tour de pâté de maisons » effectué par le gros des troupes (et je ne parle pas de Morgenstern) pour surprendre la harde d’Hommes-Bêtes… qui se trouve être la même que celle qui a tué Jurgen quelques mois plus tôt (#WIJH) est un expédient un peu trop facile à mon goût.  

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A Wolf in Sheep’s Clothing (Inferno! #9)- D. Abnett [WFB]:

INTRIGUE:

WFB_Wolf in Sheep's ClothingAprès le succès de leur session de team building dans la Drakwald (‘A Company of Wolves’), nous retrouvons les chevaliers de la Compagnie Blanche de l’ordre du Loup Blanc (the whitest of the white) alors qu’ils s’apprêtent à partir dans une nouvelle mission, beaucoup moins funky qu’ils ne l’espéraient de prime abord. Le Graf de Middenheim a en effet reçu une missive désespérée d’un de ses cousins, le Margrave Ganmark, dont le domaine a été attaqué et incendié par une bande de galapiats, et qui se retrouve donc SDF par la force des choses. Alors qu’il revient aux pompeux et hautains Chevaliers Panthères de traquer les coupables de cet abominable forfait, les Loups Blancs doivent se contenter d’escorter cousin Hubert, sa famille et ses gens, jusqu’à la sécurité de Middenheim. Autant dire que le Commandant Ganz doit essuyer une grogne bien compréhensible de la part de ses hommes, parmi lesquels on compte deux nouveaux : le bleu-bite Krieg Drakken, et le sang bleu Lowenhertz.

Après un aller sans embûches, nos templiers prennent en charge leurs protégés, et se consolent légèrement en constatant que la femme du Margrave, Gudrun, est vraiment bonnasse. Il n’y a que le jeune Drakken pour reluquer davantage la servante Lenya que la plantureuse maîtresse de maison, que le cousin Hub’ a épousé quelque temps après la mort de sa première femme. Les introductions étant faites et le barda chargé dans les chariots, la troupe repart vers la cité, pendant que les Panthères de Von Volk/t se lancent à la poursuite des mécréants. Bien évidemment, ces derniers éviteront facilement la confrontation avec leurs traqueurs, et se concentreront sur les loulous et les migrants. Surpris une première fois par un assaut de Nazguls puant la cannelle, qui laissera le pauvre Drakken tout estafilé, les chevaliers devront relever le plus difficile des défis : utiliser leurs neurones. Car, si pour le lecteur, il ne fait rapidement aucun doute que les stoners spectraux1 sont à la recherche de quelque chose ou de quelqu’un voyageant avec les templiers, pour ces derniers, le mystère est à la limite de l’insoluble. C’est d’ailleurs tout juste si Ganz ne condamne pas Lowenhertz au bûcher pour avoir émis l’hypothèse précédente, qui relevait pourtant du bon sens plus que de la mise en pratique de savoirs interdits…

Début spoiler…Au final, et après avoir essuyé une nouvelle vague de goons à la faveur d’un bivouac en pleine forêt, les Loups Blancs finiront par identifier la source de tous leurs maux, qui se trouve être, non pas l’exotique bimbo avec qui le Margrave a refait sa vie, comme le soupçonnait ce misogyne de Gruber, mais la vieille nourrice rom’ des enfants du pater familias, elle aussi arrivée récemment dans l’entourage de l’aristocrate. Plus particulièrement, l’aïeule trimballe avec elle un bijou en forme de griffe, qui lui porte apparemment chance mais que ses ancêtres ont certainement dérobé dans une tombe arabienne, et que ses propriétaires légitimes souhaitent vivement récupérer. Leurs adversaires pouvant respawner toutes les deux heures, Ganz, dans un éclair de génie inhabituel, réalise qu’il doit prendre des mesures drastiques pour arracher la victoire avant que ses hommes se fassent massacrer. Peu enclin à restituer la babiole avec un petit mot d’excuse, comme on le ferait de nos jours, le fier chevalier préfère réduire en poudre le colifichet sépulcral, bousillant le marteau de Lowenhertz dans la manœuvre (c’est du bizutage). Nazguls jusqu’au bout, les assaillants se dissipent alors dans un gémissement piteux, permettant à nos héros de reprendre leur route au matin sans plus d’interruptions. La nouvelle se termine sur leur retour triomphal à Middenheim, et sur la remise par Ganz à Lowenhertz du marteau de feu Von Glick, en dédommagement de l’arme perdue en chemin. Dans l’Empire plus qu’ailleurs, les bons comtes électeurs font les bons amis.Fin spoiler

1 : Ils ont les yeux rouges et ne s’expriment qu’en grognements inintelligibles.

AVIS:

Abnett poursuit sa série (louve) blanche sur des bases sensiblement similaires à celles posées dans ‘A Company of Wolves’, même si l’intrigue se montre un peu plus fouillée et complexe que lors des débuts de Ganz et Cie. Si la révélation de l’identité du responsable des malheurs du Margrave ne risque pas de surprendre grand-monde, on peut tout de même mettre au crédit de Dan Abnett l’inclusion d’une authentique et valable fausse piste dans sa nouvelle, ce qui, pour une soumission de 12 pages, est un accomplissement notable. Pour le reste, on se contentera d’un peu de character development pour nos vaillants chevaliers, qui gagnent deux nouvelles recrues dans ce second épisode, dont au moins une (Lowenhertz) semble tenir à cœur à l’auteur ; ainsi que quelques scènes d’actions très potables.  

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The Bretonnian Connection (Inferno! #13)- J. Wallis [WFB]:

INTRIGUE:

WFB_The Bretonnian ConnectionNous retrouvons l’homme qui tua Liberty Valance Frère Gilbertus (‘The Dead Among Us’), l’ex-marchand devenu Prêtre de Morr Dieter Brossmann, peu de temps après la conclusion de la première nouvelle dont il était le (sombre, taciturne et antisocial) héros. Alors que le temple dans lequel notre ecclésiastique est encore en réparation, et que le clergé survivant tente tant bien que mal de creuser des tombes dans la terre encore gelée du Morrspark, une nouvelle d’importance parvient à leurs oreilles rougies par le froid de ce début de printemps : la Comtesse Sophia d’Altdorf, représentante de Karl Franz auprès de la cour du Graf, et, accessoirement, femme séparée du Dauphin de Bretonnie, a été retrouvée morte dans ses appartements, et pas de causes naturelles. Sophia étant une figure populaire dans la Cité du Loup Blanc, les Prêtres se préparent à quelques jours d’intense activité, la populace de Middenheim se tournant en grand nombre vers les Croque-Morrs pour obtenir un réconfort spirituel dans cette période troublée.

Cette agitation ne concerne cependant que marginalement notre héros, que son nouveau supérieur, Père Ralf, envoie collecter un cadavre de mendiant dans un hospice de l’Altquartier au lieu de le mobiliser pour répondre aux atermoiements de la foule. Ceci est somme toute assez logique car Dieter déteste tout le monde, lui y compris, et manque donc de l’empathie nécessaire pour cette tâche. Nous suivons donc Didi alors qu’il se rend là où sa fonction l’appelle, en fredonnant sa chanson préférée. Sur place, il a la surprise de constater que le macchabée était connu de lui, du temps où il était un des marchands les plus en vue de Middenheim : c’est bien ce vieux Reinhold, homme à tout faire, et surtout les mauvais coups, qui gît raide comme une planche sur une des paillasses de l’hospice. Passée la vague nostalgie suscitée par cette découverte, Dieter se livre à un rapide examen du cadavre, et n’est pas long à découvrir que les causes de la mort sont loin d’être naturelles. Déterminé à démasquer le coupable du meurtre de son ancien sous-fifre, Brossmann repart de l’Altquartier à la recherche d’une certaine Louise, désignée par le propriétaire des lieux comme la bonne amie du défunt, et qui est la dernière personne avec laquelle Reinhold a été vu.

Une fois la donzelle localisée, Dieter apprend qu’un de ses vieux ennemis est de retour en ville, et certainement pas pour lui conter fleurette. Du temps où il était aux affaires, notre héros a en effet cru malin de piéger un concurrent potentiel, le marchand Claus Grubheimer, surnommé Grubworm, qui souhaitait ouvrir un comptoir d’herbes de Loren dans la cité. Sous ses abords bonnasses, Brossmann s’est arrangé pour faire trouver par la milice urbaine des substances illicites dans les quartiers du Middenheimer d’origine Bretonnienne (c’est important), provoquant sa disgrâce et sa fuite. On savait rire à l’époque. Reinhold ayant aidé Brossmann à réaliser ce tour pendable (littéralement, le recel de lotus noir étant puni de mort), il suppute fortement que le décès violent de son ex-associé implique Grubworm, et que ce dernier ne va pas tarder à lui rendre une visite de courtoisie. Une fois ces informations obtenues de Louise, qui, comme son nom l’indique, est également une Bretonnienne d’origine, le Prêtre repart vers le temple, où il compte bien réaliser une autopsie de la dépouille de Reinhold.

Ces nobles projets sont toutefois contrariés par le déplaisir manifeste du Père Ralf, qui trouve que l’empathie de son inférieur laisse singulièrement à désirer, et insiste donc pour le faire participer à la messe funèbre donnée en l’honneur de Sophia, en pénitence de sa froideur manifeste. Contraint par cet impondérable, et de plus en plus inquiet pour son intégrité physique, Dieter change de plan et s’en va se rencarder auprès d’une autre de ses vieilles et interlopes connaissance, le bien nommé Grizzly Bruno (Koala Bob était absent ce jour là), qui accepte d’envoyer un de ses hommes localiser Grubworm au bénéfice du Prêtre. Ceci fait, ce dernier retrouve Louise, qu’il a sèchement rabroué au cours de leur précédent échange, au moment même où elle s’apprêtait à lui donner une information importante. C’est ballot. Bien heureusement, Dieter est un crack, et parvient sans mal à connecter entre elles toutes les pièces du puzzle à la seconde tentative. Prenez note : c’est Reinhold, dont la connaissance des tunnels sous Middenheim et les compétences de crochetage rendaient très qualifié pour le job, qui a assassiné la Comtesse Sophia. Pourquoi ? Eh bien, il semblerait que ce mauvais garçon, ayant eu vent du retour de Grubworm et devinant que ses heures étaient comptées, ait agi pour tirer sa révérence de façon « glorieuse »1, tout en vengeant sa chère et tendre au passage, qui s’était faite lourdée sans ménagement par Sophia quelques années plus tôt. Des motifs très profonds, comme vous pouvez le voir. Ayant convaincu la « veuve » de Reinhold de lui remettre l’anneau de fiançailles de la Comtesse, dérobée par le coupe-gorge comme preuve de son crime et moyen pour lui de se faire une place dans l’histoire, Dieter repart dare dare vers le temple, où la messe doit commencer sous peu.

Les choses s’accélèrent à son arrivée sur place, trop tard pour prendre la sienne dans la cérémonie (au grand déplaisir de Père Ralf), mais pile au bon moment pour croiser Grubworm. Peu confiant en ses chances de sortir d’un vainqueur d’une confrontation avec sa Némésis (pour tabasser les Nécromanciens rachitiques, il y a du monde par contre), Dieter s’enfuit dans l’aile résidentielle du bâtiment, jusqu’à sa cellule où il trouve un sac de poudre de lotus noir placé bien en évidence. Comprenant que Grubworm cherche à lui refaire la bonne blague qu’il avait organisé à ses dépends quelques années plus tôt, notre héros se saisit de la bourse incriminante, et profite de l’arrivée impromptue d’un de ses collègues, Frère Jakob, pour lui refiler en douce le chichon. Bien lui en prend, car la paire se fait arrêter à la sortie du temple par une patrouille de miliciens, rencardés par Grubworm, comme Dieter s’y attendait. Notre héros va-t-il laisser son innocent coreligionnaire se faire alpaguer à sa place ? Que nenni. Tirant parti des tours de passe passe que Reinhold lui a enseigné, il fait mine de sortir l’anneau de la comtesse du pourpoint de son accusateur, en gueulant « OH MAIS REGARDEZ CE QU’IL A DANS LA POCHE-EUH » à la cantonnade. Cette preuve très incriminante, couplée aux origines Bretonniennes de Grubworm, placent ce dernier dans une situation des plus délicates, et entraînent une réaction malheureuse (surtout pour Jakob) de sa part : dégainant un couteau, il tente de se faire justice lui-même, mais c’est sans compter l’égoïsme patenté de Dieter, qui prend soin de placer son collègue dans la trajectoire. Bilan des courses : Grubworm se fait lui-même occire séance tenante par un quidam révolté (qui se trouve être le complice de Grizzly Bruno), Jakob passe du statut de Prêtre de Morr à celui de Prêtre mort (notez la subtile différence), mais Dieter a réussi à sauver sa tonsure, ce qui est bien tout ce qui lui importe. La guerre probable entre l’Empire et la Bretonnie causée par cet incident diplomatique n’est d’ailleurs que le cadet de ses soucis, tout comme le fait que, si on regarde bien, c’est lui le méchant de l’histoire. Que voulez-vous, le Vieux Monde est un endroit cruel…

1 : On a affaire au Mark David Chapman du Vieux Monde, ou en tout cas, à un sévère syndrome d’Erostrate.

AVIS:

James Wallis relève la barre (qui était déjà assez haute) de sa série consacrée à Dieter Brossmann, le Dexter de Middenheim, avec cet excellent ‘The Bretonnian Connection’. Le lecteur a droit à une transposition réussie du roman noir dans le monde de Warhammer, qui se révèle être naturellement assez glauque, injuste et immorale pour que cette adaptation fonctionne à plein régime. En plus de proposer un récit d’enquête tout à fait correct, cette nouvelle permet de placer le héros de Wallis sous un nouvel angle, dont il sort plus approfondi que grandi. Exit le Prêtre de Morr ayant adopté la chasuble pour pouvoir continuer ses investigations sur la disparition de sa femme et de son fils : Brossmann apparaît comme un authentique salopard, prêt à tout pour éliminer la concurrence et préserver sa précieuse personne. Malgré ces révélations peu ragoutantes, Wallis parvient à conserver un fond de sympathie dans son personnage, que le lecteur aura bien du mal à haïr en dépit du caractère trouble de son passé, son réseau et ses agissements. Intéressant à plus d’un titre, autant par la plongée dans le Middenheim profond et la géopolitique du Vieux Monde qu’il offre, que dans la mise en scène de personnages plus complexes que la moyenne (pour la Black Library), ‘The Bretonnian Connection’ est l’une des toutes meilleures soumissions de James Wallis, ainsi que l’une des tentatives les plus abouties de la BL en termes de récit policier (ce qui est un peu triste pour Warhammer Crime, mais bon).

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Voilà qui conclut ce premier numéro thématique d’Infernabulum! Je ne dirais pas qu’il en reste plein de là où il vient, mais j’ai assez de matériel pour poursuivre la série pendant quelques temps, donc à très bientôt pour une nouvelle plongée dans le monde (littéraire) qui fut.