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HAMMER & BOLTER [N°22]

Bonjour à tous et bienvenue dans la chronique du 22ème numéro de Hammer & Bolter ! Au programme ce mois-ci, le retour de Chris Dows (In the Shadow of the Emperor, H&B #14) et de Frank Cavallo (The Talon of Khorne, H&B #20), dans des adaptations « warhammerisées » d’Un pont trop loin pour le premier et de Contagion pour le second. Saluons également les grands débuts de Jordan Ellinger (une nouvelle de 27 pages) et les petits débuts de C Z Dunn (un extrait audio de trois minutes et une seconde) dans le webzine de la BL. Ce bon vieux Nick Kyme vient compléter le roster du numéro en signant un copieux court-format joignant l’horrible (une histoire de Salamanders1…) à l’insoutenable (…initialement publiée sous la forme d’un audio book2), mais chaque chose en son temps. Et Gilead’s Curse, me direz-vous ? Bien que cette question, sous des abords innocents, dissimule probablement un goût prononcé pour la souffrance humaine de la part de celui ou celle l’ayant formulée, je me dois d’y répondre et indique donc à ceux que ça intéresserait qu’aucun chapitre du surréaliste opus d’Abnett et Vincent ne figure au sommaire de ce numéro. La cause de ce hiatus (le 2ème en 6 mois tout de même) est peut-être à chercher dans la date de publication du présent objet d’étude (Juillet 2012), tout le monde ayant le droit de prendre des vacances. De mon côté, je dois avouer qu’un bref sursis avant de me replonger dans la prose débilitante du duo infernal n’est pas de refus non plus. Bref, tout le monde est content et c’est bien là l’essentiel.

1: Remember The Burning – H&B #14

2: Remember Thunder from Fenris – H&B #19

hammer-and-bolter-022.

The Mouth of Chaos – C. Dows [40K] :

Après un premier effort, très Rogue Trader-esque dans l’esprit, et assez moyen dans la réalisation, Chris Dows a opté pour une approche plus conventionnelle pour sa deuxième publication dans Hammer & Bolter.

Alors qu’une insurrection chaotique est sur le point de faire sortir le monde de Rysgah de l’ample giron de l’Imperium, la Garde Impériale lance une contre-attaque sur la capitale planétaire (éponyme) afin de calmer les velléités sécessionnistes de la milice locale. La topographie du théâtre d’action empêchant le Marteau de l’Empereur d’utiliser ses tactiques favorites (assaut massif de bidasses totalement sacrifiables et/ou bombardement à outrance de la position ennemie), le haut commandement impérial décide de la jouer fine et charge le 158ème régiment de parachutistes Elyséens de sécuriser une tête de pont dans la cité rebelle.

La nouvelle commence donc par une séance de chute libre synchronisée, qui voit nos skydivers de combat dessiner des symboles insultants envers les Rysgahans et les mères de ces derniers dans le ciel nocturne, déclenchant en représailles la mise en batterie d’une Hydre et la désintégration tragique d’une partie non négligeables de nos hardis paras. Fort heureusement pour les Elyséens, l’escouade de troupes de choc du Sergent Zachariah était inscrite sur la feuille de match, et ce dernier se fait une joie de descendre les trois servants du char ennemi, et ce alors qu’il n’a même pas encore touché terre. Vous avez bien lu, Zach’ snipe les faquins en pleine chute, de nuit et à une distance que l’on peut estimer à quelques centaines de mètres, si on en juge par le temps qui lui est nécessaire pour toucher terre après son triple headshot. C’est ce qu’on appelle une entrée en matière supercalifragilisticexpidélilicieuse (d’ailleurs le terme lui-même a été inventé par l’Empereur pendant la Grande Croisade après qu’il ait eu une vision de Zachariah réussir à décapsuler une bière depuis l’orbite haute avec un macro canon), qui a le mérite de camper d’emblée le personnage et donne au lecteur un avant-goût des capacités martiales du personnage principal et de sa fine équipe. Avec des gardes impériaux aussi balaises, qui a encore besoin de Space Marines ?

Ayant regagné le plancher des grox sans plus de péripéties, les Elyséens se mettent à creuser un tunnel à travers la paroi du cratère volcanique dans lequel Rysgah est bâtie afin de pouvoir apprendre la vie aux hérétiques faisant régner la terreur dans la cité. Il y a certainement une explication logique au fait que nos héros n’aient pas simplement opté pour atterrir directement sur zone (et donc du bon côté du cratère), au lieu de perdre du temps en de laborieux travaux d’excavation, mais Dows ne se donne pas la peine de la fournir, entamant sensiblement la crédibilité de son récit se faisant. Par chance, les ingénieurs Elyséens se révèlent avoir du sang squat dans les veines et ont vite fait de dégager un accès convenable pour le gros de la troupe, qui doit cependant essuyer un feu nourri de la part des sécessionnistes dès la sortie du tunnel. Soit exactement le genre de situation que des troupes aéroportées ne devraient pas rencontrer. L’officier en charge de cette opération doit être le beau-frère du Commandant Chenkov, ce n’est pas possible autrement.

Encore une fois, il revient à Zachariah et à ses spécialistes de sauver les miches de leurs petits camarades, ce qu’ils font avec un professionnalisme et une efficacité admirables, en bons Gardes Impériaux de film d’action qu’ils sont. L’épisode permet également à Dows d’introduire la fameuse Bouche du Chaos ayant donné son nom à la nouvelle, et qui se révèle être un vulgaire Difool chaotique dont les élucubrations prosélytes sont rapidement interrompues par un tir millimétré de lance-grenades venant détruire le haut-parleur relayant sa vile propagande (mais si, c’est possible). Même si le lascar reviendra taper sur les nerfs de nos héros à plusieurs reprises dans la suite de la nouvelle en lisant les dédicaces des auditeurs à l’antenne tentant de les faire basculer du côté obscur, son rôle dans l’intrigue restera très mineur, ce qui pose la question du choix effectué par Chris Dows au moment de nommer son travail1. Tant d’interrogations, et si peu de réponses, on se croirait dans Qui saura de Mike Brant.

De démonstration martiale en démonstration martiale, on comprend finalement que le but de Zach’ & Cie est de détruire un des trois ponts reliant le quartier où ils se trouvent avec le reste de la cité, ce qui permettrait aux forces impériales de sécuriser leur tête de pont et d’entamer la reconquête de Rysgah dans des conditions optimales. Secondées dans cette dangereuse mission par une escouade de gardes lambda, dont la seule utilité est de mourir sous les tirs ennemis à intervalles réguliers afin de montrer au lecteur que le risque est bien présent, les troupes de choc du 158ème réussiront bien sûr à dynamiter leur objectif malgré la présence du traditionnel boss-de-fin-que-le-briefing-tactique-n’avait-pas-prévu (tous des planqués au Strategium !), qui se trouve être ici une paire de tanks décatis, pour ceux que ça intéresse. Je laisse les lecteurs curieux découvrir la manière dont nos héros réussissent à se tirer de ce mauvais pas, la méthode utilisée étant trop absurde/épatante (c’est selon) pour être spoilée ici.

Dows marche très clairement sur les traces de Dan Abnett et des Fantômes de Gaunt avec ce The Mouth of Chaos. Au-delà des ressemblances évidentes entre les protagonistes de ces deux auteurs (une bande de Gardes Impériaux vétérans surclassant outrageusement tout ce qui a le malheur de croiser leur chemin), on peut également noter une certaine similarité de style, particulièrement dans les scènes d’action, décrites dans les deux cas à hauteur d’homme et parvenant de ce fait à rendre de manière convaincante l’intensité d’un affrontement en environnement urbain.

Si l’on peut tiquer devant la facilité avec laquelle les Elyséens de Chris Dows roulent sur les pauvres renégats leur faisant face, et déplorer la tendance de l’auteur à sortir ses héros du pétrin en leur permettant de réaliser des faits d’armes dignes d’un Primarque au pic de sa forme, on doit en revanche lui reconnaître un certain talent dans la description d’une opération des forces spéciales de la Garde Impériale, et plus particulièrement des paras Elyséens, dont le mode de déploiement par grav-chute est mis en scène de manière assez satisfaisante en ouverture de la nouvelle. Un autre bon point peut être attribué à Dows pour le soin qu’il a mis à doter chacun des six membres de l’escouade de Zachariah d’une (ébauche de) personnalité, permettant au lecteur de différencier les personnages sans trop de difficultés au bout de quelques pages. Mine de rien, un tel résultat nécessite un niveau certain en matière de character development, dont peu de contributeurs de Hammer & Bolter peuvent se targuer (d’ailleurs, In the Shadow of the Emperor pêchait dans ce domaine).

De façon plus marginale, on peut également reprocher à The Mouth of Chaos quelques incongruités scénaristiques (voir ci-dessus), ainsi qu’une entorse manifeste (et assez surprenante de la part d’un auteur apparemment au fait sur la question2) au background canon, l’un des hommes de Zachariah se déclarant en effet impatient de retourner sur Elysea pour chasser du pirate, ce qui n’arrivera selon toute probabilité jamais. Cette innocente remarque est d’ailleurs toute proche de déclencher une crise d’apoplexie chez Hawkeye, légitimement contrarié du manque de culture de son sous-fifre3, ce qui semble laisser la porte ouvert  à une possible sérialisation des aventures des cadors du 158ème dans le futur (futur pas encore réalisé à l’heure actuelle, si on croit la bibliographie du bonhomme), histoire de permettre à Dows de faire toute la lumière sur les causes profondes de cet incident.

Le solde final reste cependant assez largement positif, cette deuxième contribution à Hammer & Bolter s’avérant être de bien meilleure facture que la précédente, ce qui m’autorise à répondre de manière positive à la question posée en conclusion de la critique de In the Shadow of the Emperor quelques mois plus tôt. J’adore les histoires qui se terminent bien.

1 : Personnellement, je penche pour un titre suggéré par un éditeur pas franchement emballé par celui proposé initialement par Dows : Hey Chaos, Suck My Airborne Dick.

2 : Dows va même jusqu’à citer le nom d’un obscur Inquisiteur martyrisé par le Chaos (De Haan), créé par Graham McNeill dans Killing Ground.

3 : La vraie raison de la réaction épidermique de Zachariah à la bourde du première classe Beor n’est pas donnée, et cette relation apparemment compliquée avec la notion de retour au foyer est un autre point commun entre les Elyséens de Dows et les Tanith d’Abnett.

The Butcher’s Beast – J. Ellinger [WFB] :

Jordan Ellinger n’a semble-t-il pas fait carrière comme contributeur de la Black Library, la présente nouvelle représentant un quart de sa production pour la maison d’édition de Nottingham, si l’on en croit le site internet de cette dernière. Spécialisé dans l’univers de Warhammer Battle, Ellinger a ainsi signé trois courts formats mettant en scène Gotrek & Felix : The Contest, Kineater et The Reckoning.

La vie d’un Joueur d’Epée n’est pas de tout repos, comme Anton Erhardt, lieutenant au sein du glorieux régiment de Carroburg et accessoirement héros de The Butcher’s Beast, pourrait en témoigner. Incorporés à l’armée du général Schalbourg, les Carroburg commencent en effet leur journée par un sauvetage en règle des forces impériales, embusquées par un ost de Skaelings et d’Hommes-Bêtes pendant qu’elles traversaient la rivière Schilder. Bien loin de céder à la panique devant la brutalité de l’assaut des nordiques, les Joueurs d’Epée parviennent à tenir les hordes du Chaos en respect assez longtemps pour permettre à la cavalerie lourde impériale de prendre ces dernières à revers et les mettre en déroute. Leur commandant ayant été sévèrement blessé au cours de l’accrochage par une collision avec un Rhinox circulant sans permis, il revient à Anton de gérer les affaires courantes du régiment jusqu’au rétablissement (ou plus probablement, le décès rapide suivi du remplacement) de son supérieur.

Célébrés comme les héros qu’ils sont à leur retour au camp impérial, les Carroburg ont toutefois à peine le temps de s’en jeter un petit qu’ils doivent faire face aux ravages causées par une bête chaotique semblant se matérialiser comme par magie au milieu du campement à intervalles réguliers, avant de disparaître de façon tout aussi mystérieuse après avoir provoqué un boxon monstre dans le bivouac. L’affaire ayant logiquement attiré l’attention du Chasseur de Sorcières rattaché à l’armée du général Schalbourg, dont le départ en reconnaissance des forces ennemies empêche fort logiquement de garder sous contrôle les pulsions tortionnaires de l’implacable zélote, Anton décide de mener sa propre enquête afin de limiter les dégâts collatéraux autant que faire se peut. Parviendra-t-il à élucider l’énigme de la Bête du Boucher avant que cette dernière, ou les méthodes d’investigations radicales de l’Inquisition sigmarite, ne déciment l’armée impériale ?

Pourtant l’une des factions de Warhammer Fantasy dont le background a été le plus exploré, tant par les publications liées au jeu (Livres de Règles et d’Armée, Suppléments divers et variés) que par les romans et nouvelles de la BL, l’Empire n’a jamais été particulièrement gâté au niveau de la description de ce qui peut être considéré comme le socle de la littérature de wargame : la mise en scène de batailles rangées. Ce paradoxe repose en partie sur l’utilisation par les auteurs de la BL de héros impériaux opérant seuls (Gotrek & Felix, Brunner, Mathias Thulmann, la bande de Badenov) et/ou peu intéressés par la chose militaire (Zavant Konniger, Sam Warble), faisant en conséquence d’un affrontement de grande ampleur entre les forces impériales et un de leurs nombreux ennemis un évènement assez rare. Même si les dernières années ont vu cette tendance s’inverser avec la sortie de romans centrés sur les armées de l’Empereur (série des Sword of…, Iron Company, Grimblades, Warrior Priest, Reiksguard…), les courts formats de la BL n’ont pas été particulièrement impactés par ce changement de ligne éditoriale, ce qui fait de The Butcher’s Beast une nouvelle à part dans le « corpus impérial ».

La scène d’introduction de la nouvelle est à ce titre particulièrement intéressante, en ce qu’elle permet à Ellinger de confronter les fameux Joueurs d’Epée de Carroburg (sans doute le régiment nommé le plus fameux de tout l’Empire) à une horde de maraudeurs et d’Hommes-Bêtes dans un dernier carré héroïque. C’est typiquement le genre de scène que tous les joueurs impériaux se sont imaginés à la lecture du background de cette unité d’élite, et ont probablement essayé de recréer lors de leurs parties, avec plus ou moins de succès1. Il est également probable que ces mêmes joueurs se soient demandés comment diable de simples soldats humains, fussent-ils des vétérans couturés et équipés des meilleures armes et armures disponibles, puissent faire jeu égal avec, et même vaincre (parfois), des adversaires plus forts, plus rapides ou plus doués qu’eux au maniement des armes, ce qui est malheureusement (c’est le joueur de l’Empire qui parle) assez fréquent dans le monde de Warhammer. Coup de chance, Jordan Ellinger était apparemment taraudé par la même question, et y fournit une réponse somme toute assez logique : c’est leur discipline et leur capacité à se battre de manière coordonnée (couplées bien entendue avec leur moral supérieur, leur adresse au combat, leur armure de plates naine et leur zweihander de six pieds de long) qui permettent aux Joueurs d’Epée de tenir la ligne en toutes circonstances. Pour illustrer son point, l’auteur met d’ailleurs en scène les conséquences désastreuses de l’insubordination d’un des camarades d’Anton Erhardt, qui abandonne son poste pour tenter d’arracher son commandant aux griffes de l’ennemi et permet en conséquence à ce dernier de briser la cohésion de la formation des Joueurs d’Epée, ce qui conduit à leur quasi-annihilation. Ce souci de donner à l’univers fantastique de Warhammer des assises les plus crédibles et réalistes possibles est indubitablement l’une des forces d’Ellinger, et une des raisons principales de lire The Butcher’s Beast.

Une autre réussite à mettre au crédit de cette nouvelle est sa galerie de personnages, qui se révèlent être assez mémorables, en particulier le Chasseur de Sorcières et Templier de Sigmar Keller, un fanatique de premier ordre doublé d’un sadique dénué de tout scrupules, autant de « qualités » lui permettant de s’imposer sans problèmes parmi les antagonistes les plus haïssables de Hammer & Bolter. Sans être aussi marquants, le héros et son side-kick forment un duo à la Astérix & Obélix (comprendre que le petit réfléchit et le grand tabasse) assez efficace et tout à fait supportable, ce qui est déjà appréciable.

Cependant, tout n’est pas parfait non plus dans The Butcher’s Beast, le principal point faible du travail d’Ellinger étant son développement parfois artificiel, certaines décisions prises par les personnages et péripéties inclues dans le récit ne pouvant être justifiées autrement que par un bon gros « c’est le script qui veut ça » des familles. Résultat : des déductions un peu trop rapides pendant l’enquête menée par nos héros et un affrontement final avec la bête qui aurait vraisemblablement pu être évité avec une once de bon sens. D’ailleurs, cette fameuse bête n’est pas non plus au-dessus de tout reproche, les conditions de sa « création » étant assez capillotractées, ce qui est d’autant plus dommage que l’idée sous-jacente2 était encore une fois des plus crédibles. Rien de trop rédhibitoire donc, et des débuts incontestablement réussis pour Jordan Ellinger dans Hammer & Bolter.

1 : Surtout avant la V7 et l’arrivée d’une ténacité « inconditionnelle », mais je m’égare.

2 : Lors d’un affrontement contre des adversaires humains, il arrive que les médecins de campagne rattachés aux armées impériales soignent par erreur des combattants adverses, le chaos du champ de bataille ayant vite fait d’abolir tous les signes distinctifs permettant d’identifier l’allégeance des participants.  

Malediction (extrait audio) – C. Dunn [40K] :

MaledictionChristian Zoidberg Dunn, aka C Z Dunn, est généralement plus connu pour son rôle d’éditeur que d’auteur au sein de la BL. Si sa première casquette l’a conduit à être crédité sur de nombreux recueils de nouvelles (Way of the Dead, Swords of the Empire, Fear the Alien, Tales from the Dark Millenium, et plus récemment Age of Darkness  et Architect of Fate), sa seconde l’a mené à signer un certain nombre de courts formats, dont le script de l’audio book Malediction.

Les trois minutes et une seconde que durent l’extrait audio de Malediction n’apportant pas vraiment d’éléments propres à expliquer l’intrigue de l’histoire (pour faire court, c’est une description d’un assaut de cultistes et de mutants du Chaos sur la tranchée tenue par le héros et un de ses potes), j’ai complété l’écoute en récupérant l’extrait gratuit proposé sur le site de la BL (ici, pour ceux que ça intéresse). Dans ce qui doit être la scène d’introduction du récit, le Capitaine de la 6ème Compagnie des Dark Angels (Tigrane) interrompt le discours de remerciements donné par le Colonel Regan Antigone lors de la cérémonie d’hommage lui étant consacré en sa qualité de Héros de l’Imperium et seul survivant du régiment de Gardes Impériaux ayant contribué à stopper l’invasion du monde  de Procel par les forces du Chaos quelques décennies plus tôt. Titi a fait le déplacement pour honorer lui aussi Antigone, ayant combattu à ses côtés lors de cette fameuse campagne, mais également et surtout pour comprendre comment trois malheureux Gardes s’y sont pris pour repousser à eux seuls une offensive massive de soldats ennemis sur leur position, permettant ainsi aux défenseurs impériaux de se réorganiser et précipitant la défaite de l’Archennemi. Car on ne la fait pas au Capitaine Tigrane, que diantre (même s’il a mis un peu de temps pour se rendre compte que quelque chose clochait dans la version officielle). Antigone, visiblement fébrile devant la demande insistante de l’Ange de la Mort qui lui sert de voisin de table, se prépare donc à relater une fois de plus le récit de la journée la plus importante de sa vie, qui pourrait bien au final dissimuler quelque chose de pas très catholique ministoresque… Qui a dit Déchu ?

Difficile de se faire une religion sur la valeur de ce Malediction avec les quelques éléments mis à disposition par la BL et Hammer & Bolter. L’extrait audio couvre un passage d’action pure, et même si les bruitages sont assez sympas, le ton détaché avec lequel le narrateur raconte la lutte désespérée d’une nouvelle recrue de la Garde face à un mutant pas vraiment avenant empêche de se plonger dans le récit. L’extrait littéraire est plus intéressant, mais ne piquera sans doute que la curiosité des membres du Cercle Intérieur des Impardonnés, tant il s’avère évident que la miraculeuse survie d’Antigone a quelque chose à voir avec la présence de DA renégats (des renéDA quoi). D’ailleurs, quelle nouvelle mettant en scène des Dark Angels ne tourne pas autour de ce sujet ? À croire qu’ils n’ont fait que ça pendant 10.000 ans. Pour le lol, on retiendra la réplique pleine de bon sens de Maître Tigrane, un Space Marine ayant de la suite dans les idées.

Fireborn – N. Kyme [40K] :

FirebornTrois mois après avoir commis le très dispensable, si assez rigolo, Thunder from Fenris, Nick Kyme revient hanter les pages de Hammer & Bolter, tel l’assassin de retour sur les lieux de son crime. Cette fois-ci aux commandes de son chapitre de prédilection, j’ai nommé les Salamanders, on était en droit de s’attendre à un contenu (ne serait-ce qu’un peu) supérieur aux pataudes déambulations d’une poignée de cavaliers tonnerre dans la toundra pestiférée de Skorbad. Et, croyez-moi sur parole (vous pouvez aussi lire la suite de la chronique, hein), le bon Mr Kyme a fait précisément cela, en livrant une nouvelle bien supérieure à tout ce qu’il avait publié auparavant dans Hammer & Bolter… en matière de conneries. Quelle légende.

Notre histoire se déroule sur la planète Sepulchre IV, qui se trouve être un monde cardinal et en tant que tel, accueille bon nombre d’ordres de l’Ecclesiarchie, dont celui du Voile Ardent. Une des novices (Evangeline, et sa belle robe en crinoline) dudit ordre ayant reçu la vision d’un futur sanguinolent, elle fait part de cette épiphanie à sa hiérarchie, et se retrouve catapultée relique vivante pour sa peine (oui, la relation de causalité entre les deux évènements peut être discutée, et non, Kyme n’explique pas comment les bonnes sœurs sont parvenues à cette décision). On apprendra bien plus tard que le chtiote a reçu un grand pouvoir, celui d’apprendre instinctivement le nom véritable de tous les démons se situant dans sa périphérie immédiate, ce qui lui permettrait de les bannir dans le Warp sans faire un pli. J’utilise le subjonctif car, l’Empereur étant un troll (c’est connu), il a cru bon d’accorder ce don à une personne ayant fait vœu de silence (d’ailleurs, tous les membres de l’Ordre du Voile Ardent sont logés à la même enseigne), ce qui réduit drastiquement l’utilité de ce cadeau divin1. En l’état, les nouvelles facultés de sœur Evangeline sont à peu près aussi utiles que les moulages de tétons sur les cuirasses des Blood Angels, mais Kyme a bien évidemment un plan pour contourner le problème.

Les prévisions météo de la pythie silencieuse s’étant promptement réalisées (tellement promptement d’ailleurs – 20 minutes – qu’il est possible que la vision prophétique n’ait été induite que par un simple regard par le velux de l’abbatiale), Sepulchre IV doit faire face à une invasion en règle de la part de la Rage Rouge (Red Rage), armée chaotique très logiquement inféodée au Dieu du Sang et menée par Hagtah Dreghgor, seigneur de guerre semble-t-il plus intéressé par les travaux de terrassement (il a façonné une arène gladiatoriale de ses mains) que par la conduite de son armée. Sa seule utilité dans la nouvelle sera de présider à la création d’une machine démoniaque, que je ne peux décrire que comme un Goldorak de Khorne (appelons le Khornorak), possédant la particularité de se nourrir de la rage ambiante pour devenir plus gros et plus méchant, et de l’envoyer chercher sœur Evangeline, qui n’a semble-t-il pas daigner répondre aux centaines de textos enflammés qu’il lui a envoyé depuis son arrivée sur la planète. Le Khornorak étant bien entendu insensible à tout ce que les défenseurs impériaux peuvent lui envoyer sur le coin du museau, transformant les sœurs de bataille ayant le malheur de croiser sa route en pâté de foie et s’amusant à faire des jongles avec les Immolators chargés de le stopper, rien ne semble être en mesure d’empêcher la Rage Rouge de capturer la mascotte adverse, sauf peut-être… une escouade de Firedrakes Salamanders. Ça tombe bien dis-donc, il y en a justement une qui passait dans le coin, quel morceau de chance (ironie inside)2. Loué soit Pépé.

Le cadre étant planté, faisons donc connaissance avec nos héros. Question : qu’est-ce qui est très gros, très très vert et très très très énervé ? Tous ceux qui ont répondu Hulk ont gagné une séance d’initiation aux joies de l’arco-flagellation, ce qui leur permettra je l’espère de méditer sur l’importance de ne pas mélanger deux univers distincts. Les autres auront bien entendu pensé à Tsu’gan, le Salamanders le plus haineux, arrogant et indiscipliné ayant jamais existé, et rival habituel du « gentil » Da’kir (voir The Burning, Hammer & Bolter #14), personnage principal de la saga consacré par Nick Kyme aux descendants de Daddy Cool, alias Vulkan. Intégré à la prestigieuse Première Compagnie des (sur)hommes en vert depuis peu, Tsu’gan est décrit par Kyme comme pas encore totalement familiarisé avec sa nouvelle armure terminator, ce qui n’aura pas d’autre effet que de le faire marcher un peu plus lentement que ses comparses plus expérimentés, ce qui n’est pas la mort non plus. Ayant reçu l’email de détresse envoyé par l’Ordre du Voile Ardent, les Salamanders acceptent de venir au secours des bonnes sœurs, ou plutôt de sécuriser la relique convoitée par le Chaos en l’embarquant sur leur vaisseau avant de retourner sur Nocturne en laissant les sistas repousser la Rage Rouge toutes seules, ce qui, pour un Chapitre notablement décrit comme altruiste et protecteur envers les populations civiles dans le fluff, est un peu raide (même si assez logique au final).

C’est précisément à ce moment de l’histoire que Nick Kyme décide d’introduire un genre jusque-là non abordé par la Black Library (à raison), à savoir le vaudeville. Comment ? Eh bien, en mettant en place un savoureux quiproquo, les Salamanders se rendant à la surface de la planète en pensant devoir récupérer une relique des plus classiques (les rognures d’ongles de Ste Analgésine, le bong du Cardinal Aquarium, une liste de course manuscrite de Sebastian Thor du temps où il était étudiant en deuxième année de licence de mercatique sur Dimmamar…), et non pas une personne de chair et de sang. En conséquence, le plan du sergent Firedrake, l’illustre Herculon (silence dans les rangs ! Il ne l’a pas choisi) Praetor ne peut être mis en application, une téléportation directe sur le vaisseau des Salamanders ne pouvant avoir qu’une issue fatale pour un être humain non protégé par une armure terminator. Ho ho ho, comme c’est ballot. On ne saura jamais qui est coupable dans cette affaire, mais le ridicule engendré par cette réalisation tardive colle assez mal avec le professionnalisme à toute épreuve qui est normalement les marques de fabrique des Space Marines et des sœurs de bataille.

Au-delà de cette péripétie rocambolesque, c’est toute l’intervention des Salamanders sur Sepulchre IV qui se retrouve discréditée par un Nick Kyme en très grande forme. Les Firedrakes débarquent ainsi à la surface de la planète à 10 kilomètres de leur cible, distance qu’ils effectueront à pied. Raison de cette insertion « chirurgicale » : la supériorité aérienne dont dispose la Rage Rouge à ce moment de la campagne, et qui rend trop dangereux un déploiement sur zone en Thunderhawk. Soit. C’est vraiment dommage que les Space Marines n’aient pas à leur disposition une sorte de navette blindée qui « tomberait » littéralement à l’endroit désiré, avec une vélocité suffisante pour déjouer toute tentative d’interception ou de destruction par la DCA ennemie… Ou que les armures terminator ne soient pas fournies avec un équipement permettant une téléportation instantanée sur zone… Rappelle-nous comment les Firedrakes prévoyaient de quitter le couvent de l’Ordre du Voile Ardent déjà, Nick ?

Un peu plus tard, après que les Firedrakes survivants aient réalisés qu’ils se sont fait trollés par les sistas, et alors que le Khornorak frappe doucement à la porte du cloître où la fine équipe s’est réfugiée, Praetor met au point un plan de bataille aussi retors que stupide. Bien conscient que le plus important est d’empêcher le Chaos de s’emparer de sœur Evangéline, et prêt à la tuer de ses mains si nécessaire, l’astucieux sergent va décider de sacrifier la moitié de son escouade pour « ralentir » l’invincible machine-démon de la Rage Rouge (je mets des guillemets parce que ça n’a pas vraiment marché), afin de gagner du temps pour… ne rien faire du tout. Comme prévu, le Khornorak atomise l’arrière-garde des Salamanders et se rue sur les derniers défenseurs de la relique, mais pas avant que Praetor ait eu le temps de donner une dernière instruction à Tsu’gan : « si je n’arrive pas à coucher le Deceptikhorne en un contre un, arrange-toi pour buter la fille avant qu’il ne la chope, et on se téléportera peinard sur notre vaisseau ». Se pose alors la question de savoir pourquoi les Sala’ n’ont pas collé un bolt dans le crâne d’Evangeline quand il est clairement apparu qu’ils n’avaient aucune chance de stopper le Gundam de Dreghgor et activé leurs balises avec le sentiment du devoir accompli alors qu’ils n’avaient encore subi que des pertes mineures. Ou, quitte à la jouer plus chevaleresque, aient tenté de téléporter la novice avec eux, en comptant sur le fait qu’elle était visiblement une élue de l’Empereur et avait donc une petite chance de survivre au voyage. Au pire, elle serait morte pendant la translation, ce qui aurait été regrettable mais aurait tout de même compté comme une victoire de l’Imperium. Au lieu de ça, Praetor a préféré sacrifier la totalité d’une escouade de Space Marines d’élite, pour obtenir exactement le même résultat. C’est ce qui s’appelle une gestion fine des ressources.

Enfin, je ne peux résister à vous relater la manière dont notre imbuvable héros s’y prend pour défaire le mâââl alors que celui-ci était sur le point de l’emporter. En position de dernier défenseur suite à la transformation de l’insondable Herculon en bas-relief du sanctum après une pichenette amicale du Khornorak, Tsu’gan est sur le point de tordre le coup de sa protégée lorsqu’une illumination le frappe. Faisant fi du sacrifice de tous ses collègues de bureau ainsi que de celui de milliers de troupes de l’Ecclesiarchie afin d’empêcher la Rage Rouge de mettre les mains sur la relique vivante, il  jette  cette dernière dans les pattes du mécadémon et s’en va en loucedé en priant très fort pour que sa vague intuition3 se révèle être fondée (ce qui est évidemment le cas, il faut que ça se termine bien tout de même). Heureusement que son sergent lui avait spécifiquement ordonné d’empêcher cette situation de se produire à tout prix trente seconde plus tôt, hein. Je t’enverrais tout ça en conseil de guerre pour insubordination aggravée, moi. Toujours est-il que la petiote prononce le mot magique et renvoie le ressortissant du Warp dans sa contrée natale, perdant son pouvoir pour la peine (fallait pas briser ton vœu de silence cocotte) mais permettant à la nouvelle de se terminer sur un happy end. Enfin, c’est pas comme si la Rage Rouge était sur le point de balayer les dernières poches de résistance impériale, et n’avait invoqué le Khornorak que pour accélérer un peu les choses. Il faut savoir profiter des petits bonheurs de la vie.

Vous l’aurez compris à la lecture de la première partie de cette chronique, Fireborn peut être légitimement considérée comme la pire (ou la meilleure, c’est selon) contribution de Nick Kyme à Hammer & Bolter. Là où le bonhomme est fort, c’est qu’il arrive à se surpasser de soumission en soumission et à progresser dans le n’importe quoi à un rythme exponentiel. Si j’ai généralement tendance à passer assez facilement l’éponge sur les incohérences dans le scénario des nouvelles que je lis (un faux-raccord narratif est si rapidement arrivé), c’est ici impossible tant ces dernières sont nombreuses et centrales dans le déroulement de l’histoire. C’est bien simple, rien ne tient debout dans ce texte, mise à part la fine couche de fluff et de character development que Kyme a réussi à incorporer dans son récit. Il est ainsi possible de glaner quelques informations relatives au background des Salamanders à la lecture de Fireborn, ainsi que de suivre la quête de Tsu’gan pour tenter de contrôler la raaaaage qui semble menacer de l’engloutir à chaque instant4, ce qui est très loin de compenser toutes les absurdités, contre-sens et autres inanités que l’auteur débite à tour de plume au cours des 30 pages que compte la nouvelle. Je ne sais pas dans quelles conditions Nick Kyme a rédigé cette dernière, mais il paraît évident à la lecture qu’il n’a pas accordé à la relecture de son manuscrit le temps nécessaire, ce qui lui aurait permis de corriger les bévues les plus évidentes de son script, à commencer par les entorses faites au fluff canon (la randonnée des Firedrakes jusqu’au couvent, pour ne donner qu’un exemple) dont la présence est d’autant plus surprenante que le bonhomme est de fait responsable du développement de l’historique des Salamanders depuis qu’il a commencé à écrire The Tome of Fire.

Pour ma part, j’attribue l’échec patent qu’est Fireborn à la décision de Kyme de mettre en scène des scènes d’action les plus cinégéniques possible, sans prendre le soin de les intégrer de manière « intelligente » dans son schéma narratif. Pour reprendre l’exemple du trek de l’escouade de Praetor, cette marche d’approche n’avait pour but que de permettre une première rencontre entre les Firedrakes et le Khornorak, afin de faire ressortir toute la dangerosité de cet ennemi (un des terminators y laissera d’ailleurs sa peau ses écailles). Même logique pour le gag de l’uberisation non prévue dans le briefing de mission (forcer les Salamanders à se battre contre un adversaire apparemment impossible à vaincre) et l’approche du « chacun son tour » lors de l’affrontement final avec le T-888 (souligner l’héroïsme des géants verts et permettre à Praetor et à Tsu’gan de s’illustrer en un contre un). Cette primauté de l’épique sur la logique se retrouvait déjà dans Thunder from Fenris, autre audio book guère avare en situations assez peu crédibles dès lors qu’on y réfléchissait à deux fois. J’avais espéré que l’inclusion de ses chers urodèles de l’espace à l’intrigue pousserait Mr Kyme à donner le meilleur de lui-même, mais cela n’a malheureusement pas été le cas. Ou peut-être que si, allez savoir.

1 : C’est d’ailleurs ce que fera remarquer le sergent Salamanders au père supérieur en charge de la protection de la novice, lequel lui renverra un magnifique Ta Gueule, C’est l’Empereur dans les dents en retour. Tu sais que tu as des gros problèmes de cohérence quand même tes personnages les remarquent.

: Comme pour Thunder from Fenris, Kyme catapulte la crème de la crème d’un Chapitre Space Marines dans un conflit de grande échelle, sans aucun support, ce qui va à l’encontre de toute logique et laisse envisager que les Space Marines accomplissent leur mission de protection de l’Imperium comme une patrouille de police faisant des rondes dans son quartier. Manquerait plus qu’ils aient une ligne directe que les citoyens impériaux en détresse puissent appeler.

3 : Evangeline est techniquement capable de bannir le démon animant le Khornorak, si elle arrive à s’en rapprocher assez pour hacker son nom véritable. Dans l’esprit, cela ressemble assez fortement à la décision prise par le Colonel Straken dans Waiting Death (Hammer & Bolter #4), là aussi sur la base d’un obscur pressentiment qui avait toutes les chances de ne pas être fondé. Pourquoi s’embêter à mettre en scène des dénouements logiques et sensés lorsque l’on peut tout régler à coup d’illuminations géniales ?

4 : Sérieusement mec, prend un Sédatif PC et mets-toi au yoga, ou claque la porte du Chapitre et envoie une candidature spontanée à Angron, et arrête de faire perdre du temps à tout le monde.

Leechlord – F. Cavallo [WFB] :

Frank Cavallo, qui s’était déjà distingué lors de son baptême hammeretbolterien en mettant en scène un personnage nommé issu du bestiaire des Guerriers du Chaos (Assis là j’m’enfile des Grim’, Hammer and Bolter # 20), tape à nouveau dans l’escarcelle des Dieux Noirs pour sa deuxième tentative et s’essaie cette fois-ci au bon docteur Mamour de Warhammer, Festus la Sangsue1.

Chargée par le comte de l’Ostland, Valmir von Raukov, de trouver et d’annihiler l’armée responsable de la destruction du village de Salkalten, une petite force de soldats impériaux est embusquée et massacrée par une horde de skavens en maraude. Seul survivant de la catastrophe, le chevalier Jürgen von Sturm se réveille au milieu des cadavres de ses frères d’armes, sérieusement blessé et à moitié délirant de fièvre, conséquence de l’estafilade récoltée de la patte d’un skaven au cours d’une précédente ratonnade (c’est le cas de le dire). Malheureusement pour notre héros, son calvaire n’est pas passé inaperçu, et Festus en personne débarque afin de prodiguer ses bon soins au guerrier agonisant. Il serait en effet dommage de laisser se perdre l’immense potentiel de von Sturm, dont la résistance à la maladie fait un incubateur rêvé pour la dernière création de l’onctueux oncologue.

Retrouvé en train d’errer dans la Forêt des Ombres après avoir été vacciné contre la leptospirose par son nouveau médecin de famille (Hey, lui demande même comment vont ses enfants ! Dommage qu’ils soient morts), Jurgen parviendra-t-il à prévenir ses sauveteurs du terrible danger qu’ils courent à le ramener chez eux, ou se noiera-t-il dans ses glaires avant de parvenir à bon port ?

Cavallo signe avec Leechlord une petite nouvelle sympa, mais moins aboutie à mes yeux que sa précédente soumission pour Hammer & Bolter (The Talon of Khorne). En cause, l’absence de plus-value fluffique du texte, qui se « contente » de décrire le Mengele Nordlander faire mumuse avec les humeurs d’un brave chevalier impérial qui aurait bien aimé qu’on le laisse râler en paix. Là où The Talon of Khorne brillait par sa description de la vie et de la mentalité propres aux habitants de Norsca, toujours prêts à défendre leur place dans la queue à la boulangerie jusqu’à la mort, même (surtout) si un Ogre du Chaos décide de leur griller la politesse et de prendre la dernière Tradition pas trop cuite de la fournée du matin, Leechlord n’apporte pas grand-chose de comparable, se contentant de nommer un ordre de chevalerie impérial (encore un) et un neveu de von Raukov.

Le personnage de Festus pâtit également du service minimum effectué par Frank Cavallo, l’affable praticien collant parfaitement à l’image donnée de lui dans le Livre d’Armée Guerriers du Chaos, mais ne gagnant pas en profondeur pour autant. En bon personnage de Nurgle qui se respecte, Herr Egel se montre jovial et prolixe, mais il lui manque un petit quelque chose pour se démarquer du stéréotype du savant fou duquel il n’est que la déclinaison dans le monde de Warhammer. À titre personnel, j’aurais trouvé opportun de le doter d’une compassion dévoyée (c’est d’ailleurs son altruisme qui l’a damné en premier lieu), option que Cavallo semble d’ailleurs jauger à un moment du récit, lorsque von Sturm espère encore qu’en dépit de son apparence peu engageante et de sa réputation de croquemitaine, Festus va vraiment le remettre sur pied2 ; aurait apporté un supplément de personnalité au petit nouveau de la Chaos Academy. Ca et/ou forcer sur son approche résolument anti-spéciste de la création. Aymeric Caron, sort de ce corps.

Bref, une soumission passe-partout et loin d’être honteuse de l’ami Cavallo, mais qui aurait sans doute pu (et donc du) être supérieure. C’est pas beau se reposer sur ses acquis Frank.

1 : À ne pas confondre avec Fistus le Suçon, aspirant champion Slaaneshi dont la glorieuse carrière s’est arrêtée après une tentative malavisée d’initier un Maraudeur Skaeling peu compréhensif aux joies du bondage.

2 : Ce qu’il fait au final d’ailleurs, et c’est d’autant plus remarquable que son patient souffrait alors d’une double fracture du fémur, conséquence d’une roulade à cheval mal négociée.

Au final, un numéro assez robuste à défaut d’être totalement sexy, l’absence de Gilead’s Blood faisant logiquement remonter le niveau global et venant souligner l’assez grande homogénéité des styles des différents contributeurs, dans le plus pur esprit BL. Dows et Cavallo passent tous deux leur deuxième galop, sans génie particulier mais sans démériter non plus. Ellinger remporte facilement la palme avec un premier travail très bon sur certains aspects, mais perfectibles sur d’autres (dommage qu’il n’ait pas eu l’occasion de retenter sa chance avant le dépôt de bilan de Hammer & Bolter). Kyme… continue de construire sa légende noire (rien à voir avec la pigmentation des Salamanders) avec une application aussi admirable que suicidaire. Pour finir, Dunn, en bon éditeur de la Black Library qu’il est, réussi à placer son extrait dans l’exacte moyenne de la littérature produite par la maison d’édition de Nottingham : ni pour ni contre, bien au contraire. À la prochaine !

HAMMER & BOLTER [N°20]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette chronique du 20ème numéro de Hammer & Bolter ! Derrière la couverture illustrée par la photo de classe d’Angron (il venait de rentrer en grande section de maternelle à l’époque), 4 nouvelles dont une mignardise (6 pages à peine) de Sandy Mitchell, encadré sur la feuille de match par un trio de rookies (Clapham, Cavallo et Josh Reynolds), en plus du désormais habituel chapitre des aventures de Gilead. Après un 19ème numéro confié à des valeurs sûres établies de la Black Library, cette nouvelle parution fait donc le pari de la jeunesse, et l’on aurait bien tort de s’en plaindre. Il faut bien renouveler le stock de temps à autre.

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In Hrondir’s Tomb – M. Clapham [40K] :

In Hrondir's TombMark Clapham (ce qui peut se traduire par gifle-jambon, un patronyme intéressant s’il en est) signe ses débuts dans Hammer & Bolter avec cette nouvelle de loulous mâtinée d’Inquisition, un casting prometteur au vu des difficiles relations entretenues par ces deux factions dans le background de 40K. S’il ne récidivera pas avant l’arrêt de la publication du webzine, il a en revanche participé à quelques recueils de nouvelles mettant en scène le futur cauchemardesque imaginé par GW1, et a signé un roman, Iron Guard, évidemment centré sur la fameuse Garde de Fer de Mordian.

L’intrigue de In Hrondir’s Tomb (un bon point à l’élève Clapham pour ce choix de titre tout à fait lovecraftien dans l’esprit) se situe sur la planète de Beltrasse, enclave impériale convoitée par les Taus mais défendue avec acharnement par la Garde Impériale et au moins une escouade de Chasseurs Gris Space Wolves, menée par le très pragmatique (comme nous le verrons plus tard) Anvindr Godrichsson. La nouvelle s’ouvre en même temps que la cage thoracique du commandeur ennemi, proprement empalé par l’épée tronçonneuse d’Anvindr en dépit de la protection apportée par son exo-armure dernier cri (l’histoire ne dit pas si le malheureux gradé a eu le temps d’envoyer un mail au SAV de l’entreprise chargée de la production du modèle pour se plaindre des évidents défauts de qualité mis en relief par l’estocade du Space Wolf avant d’aller rejoindre le Bien Suprême). Pas vraiment beaux joueurs sur le coup, les Xenos décident de punir ce manque de savoir-vivre criant en railgun­-ant la cité où se déroulent les combats. L’un des membres de l’escouade SW ayant sans doute acheté un exemplaire de The Taros Campaign et mémorisé les stats de l’armement d’un Tiger Shark, nos héros décident rapidement de changer d’air, et parviennent à gagner l’abri de catacombes locales avant d’être réduits en rillettes.

Malheureusement pour les fils de Russ, la voie d’accès qu’ils ont empruntée pour accéder aux souterrains de Beltrasse se retrouve condamnée par quelques gigatonnes de gravats, les empêchant de revenir à la surface une fois le caca nerveux des rhinotmetosiens2 terminé. Comble de déveine, l’un d’entre eux s’est de plus débrouillé pour finir à moitié enseveli sous la caillasse, situation plus cocasse qu’autre chose pour les fiers Space Wolves, qui laissent donc leur malchanceux compagnon se gangréner en toute quiétude pour suivre le Garde Impérial venu s’enquérir de la source de tout ce raffut. Ils font alors la connaissance de l’Inquisiteur Montiyf et de l’Interrogateur Pranix (le gaulois), mandatés par l’Ordo Malleus pour étudier le tombeau de Hrondir, Space Marine du chapitre Exorcists ayant mené son dernier combat contre le démon qui menaçait d’asservir Beltrasse trois siècles plus tôt. Le hasard faisant bien les choses, nos loulous ont évidemment débarqué droit dans le mausolée de Hron’, et se retrouvent aux premières loges quand les civils ayant cherché refuge dans les catacombes commencent à tomber sous les coups d’un mystérieux tueur au micro-ondes (comprendre que les cadavres qu’il laisse derrière lui sont aussi brûlants qu’éparpillés). Assez indifférent au sort de bêtes humains incapables de voir dans le noir ni de flairer un paquet de cheetos à 300 mètres (autant de choses qu’un SW est capable de faire instinctivement), Anvindr se trouve forcé à agir quand son pote l’homme Jenga (Liufr de son petit nom) subit à son tour les assauts du kébabier dément. Se pourrait-il qu’une présence maléfique hante toujours la tombe de Hrondir ?

Copie moyenne pour Clapham, dont la démoniaque (mais non, c’est pas du spoil) nouvelle pâtit de personnages pas vraiment attrayants, d’une intrigue cousue de fil blanc et d’une mise en scène d’une platitude absolue.

Côté casting, le brave Anvindr se contente d’être un Space Wolf lambda, c’est-à-dire un SM plus impétueux, grognon et velu que la moyenne, sans d’autre caractéristique mémorable que sa capacité à parvenir à des conclusions (plus ou moins3) logiques un peu plus rapidement que le reste de sa meute. Ce n’est pas pour rien s’il a été élevé au rang de Capitaine (Obvious). De l’autre côté du ring, l’Inquisiteur Montiyf s’emploie fortement à jouer à l’éminence grise, mais son affligeant manque d’autorité (c’est le premier Inquisiteur que je croise au cours de mes lectures qui doit préciser son nom deux fois de suite à son interlocuteur, à croire que ce dernier ne l’écoutait pas la première fois4) et la totale désinvolture dont il fait preuve lorsqu’il se trouve confronté aux premières victimes de Gordon Ramsay5 le rabaissent au rang de sous-sous-sous Eisenhorn. Quant au démon qui fait office de boss de fin, il ne lui manquait que la parole pour voler la vedette aux Laurel et Hardy du 41ème millénaire, mais son mutisme permanent le relègue au simple rang de punching ball à tentacules.

Côté scénario, on ne saisit pas bien si Mark Clapham a tenté de nous faire le coup de maison (ou dans le cas présent, du caisson) hantée au premier ou au second degré. Les deux choix auraient pu marcher avec un peu plus de conviction de la part de l’auteur, au lieu de quoi son approche mi-figue mi-raisin laisse le lecteur sur sa faim (un comble). Il flotte sur In Hrondir’s Tomb une sorte de faux suspense sur l’identité du tueur, entretenu, sciemment ou non, par un Clapham qui ne se donne jamais les moyens de réussir sa sortie, ce qui est particulièrement embêtant quand on écrit des nouvelles.

Côté péripéties enfin, c’est service minimum à tous les étages. Les scènes d’action se révèlent d’une conformité ennuyeuse, les relations entre personnages superficielles et assez caricaturales6, et l’investigation laissée à sa portion congrue. L’affrontement final entre le familier de Hrondir et les impériaux est particulièrement caractéristique du traitement indigent de Clapham de son sujet, le grand méchant démon se faisant renvoyer dans le Warp comme un vulgaire mob, c’est-à-dire sans qu’aucune stratégie particulière ne soit en mise en place par les héros pour venir à bout de leur adversaire (il suffisait juste de lui taper dessus fort et longtemps), mise à part une rapide séance d’exorcisme torchée en deux trois mouvements en prologue à la baston. Blasant.

Au final, In Hrondir’s Tomb ne constitue pas une lecture des plus intéressantes pour l’habitué de la BL, qui a sans doute lu et relu le même type d’histoire une bonne dizaine de fois auparavant. On notera toutefois que Clapham a au moins le mérite de maîtriser un tant soit peu son sujet d’un point de vue fluff (il rappelle ainsi que le nom fenrisien des Space Wolves est Vlka Fenryka, détail que je ne pense pas être connu par la moitié des auteurs de la BL ayant trempé de loin ou de près dans l’univers de 40K), point fort qui gagnerait à être exploité par le newbie dans ses futurs travaux. Pour le reste, eh bien, il faudra bosser.

1 : L’un de ses textes, The Known Unknown, a le douteux privilège d’être accompagné par l’artwork le plus hideux jamais contemplé par votre serviteur, malgré plusieurs années à stalker le site de la BL. Si vous voulez vous venger de votre petit neveu de 5 ans qui a malencontreusement écartelé votre Mars Alpha Pattern Warlord Titan après l’avoir confondu avec Optimus Prime, voici un bon moyen de lui induire de beaux cauchemars made in 40K.

2 : C’est la beauté de la rédaction de chroniques littéraires pour des nouvelles se passant dans les univers de Games Workshop. Une minute vous êtes en train de chercher une expression originale pour désigner les Taus afin d’éviter les redites, la suivante vous découvrez qu’un empereur byzantin (Justinien II) a eu le nez tranché par ses rivaux politiques (toute forme de mutilation faciale étant apparemment disqualifiante pour le job)… et se l’est fait remplacer par une prothèse en or massif une fois rétabli sur le trône. C’est beau tout de même.

3 : Le héros de Clapham nous gratifie ainsi d’un magnifique syllogisme lors de « l’enquête » qui occupe le centre de la nouvelle. Le tueur est certainement un psyker, beaucoup d’Inquisiteurs sont des psykers, le tueur est donc l’Inquisiteur. Le chat de Socrate aurait adoré.

4 : Autre exemple lorsque nos héros finissent par établir que le démon banni par Hrondir 300 ans plus tôt est responsable des récents meurtres (bravo les gars !).

Anvindr : « … et j’en déduis donc que notre coupable est un démon. »

Montiyf : « Vous êtes sûr que ce n’est pas le Révérend Olive dans la véranda avec la clé à molette ? »

Anvindr : « Fous-toi de ma gueule, tiens. »

Montiyf : « … »

Anvindr : « D’ailleurs quand j’y pense, c’est vraiment étrange qu’un Inquisiteur de l’Ordo Malleus venu spécialement pour étudier la tombe d’un Space Marine du chapitre des Exorcists ne soit pas parvenu à cette conclusion plus tôt… »

Montiyf : « … »

Anvindr : « Oh, me dis pas que tu le savais depuis le début ! »

Montiyf : « Bien sûr que si, andouille. »

Anvindr : « Je devrais te graver le nom du camarade qui s’est fait braiser comme une banane plantain sur le bide avec mon épée tronçonneuse pour t’apprendre, mais j’imagine que ce serait mal perçu par l’Inquisition. »

Montiyf : « Certes. D’autant plus que mon autorité est absolue et que je n’ai pas à me justifier devant quiconque, excepté l’Empereur. C’est écrit sur ma fiche de poste. »

Anvindr : « Cause toujours Monty. En attendant, je vais tirer cette affaire au clair en ouvrant le tombeau de Hrondir pour voir si le démon s’y trouve. À moins que tu ne sois pas d’accord, bien sûr. »

Montiyf : « Je ne suis pas d’ac- »

Anvindr : « Rien à foutre. »

Montiyf : « Bon, ok. Mais ne dîtes pas que je ne vous aurais pas prévenu. »

5 : « Inquisiteur, il ne reste plus que de la pulpe des cinq personnes qui occupaient cette pièce ! Le meurtrier a agi tellement rapidement qu’aucun n’a eu le temps de crier… et il les a carrément carbonisés ! Que devons-nous faire ? »

« Bof, restez vigilants. Bye. »

6 : L’Inquisiteur sous-entendant lourdement aux loulous que ces derniers sont suspects à cause de la malédiction du Wulfen, à la suite de quoi Anvindr dégaine son magnifique sophisme sur les psykers. Hercule et Poirot sont à deux doigts de se foutre sur la gueule sur la seule base de leurs improbables déductions mutuelles lorsque la réapparition de Liufr (sous sa forme de papillote de bar) met fin à la confrontation.

Gilead’s Curse (ch. 7) – N. Vincent & D. Abnett [WFB] :

Gilead's CurseAprès 6 chapitres de Gilead’s Curse, je pensais, sans doute un peu naïvement, avoir pris la mesure du style d’écriture si particulier du duo (si tant est que l’on peut parler de collaboration) Vincent et Abnett. Mes espoirs de lire un roman feuilleton du calibre des précédentes soumissions Fantasy de Dan Abnett, seul (Les Cavaliers de la Mort, Fell Cargo) ou accompagné (Hammers of Ulric, Malus Darkblade) ayant été douchés dès les trois premières pages du premier chapitre de Gilead’s Curse, j’ai depuis oscillé entre consternation incrédule, fatalisme dépité et (mais ce fut plus rare) fugace espérance, dès lors que le niveau semblait décoller du moindre micron de l’abîme d’étrangeté pataude et punitive dans lequel cet OLNI (Objet Littéraire Non Identifiable) se complait la plupart du temps. Las, c’était oublier la loi de gravité universelle de cette bonne vieille pomme de Newton, dont l’influence, c’était couru d’avance, ne pouvait pas ne pas se faire sentir. À la relative accalmie des chapitres 5 et 6 devait donc succéder une nouvelle débauche de grand n’importe quoi, d’autant plus douloureuse et démotivante que je pensais vraiment (à tort) avoir aperçu le bout du tunnel au numéro précédent. Ma foi dans l’humanité finira par me tuer un de ces jours, tenez-le vous pour dit.

Pour rappel, le chapitre 6 s’était terminé par un double cliffhanger annonçant le dénouement prochain des deux axes narratifs majeurs de l’histoire, à savoir la confrontation finale entre Gilead et le Roi des Rats (d’une part) et entre Gilead et le Comte Vampire (d’autre part)1. Chose promise, chose due, notre épisode s’ouvre donc par le face à face tant attendu entre l’enfant chéri de Tor Anroc et le mâle alpha de la race skaven… et c’est à ce moment précis que tout commence à partir en sucette. Car si on pouvait encore mettre l’apathie manifeste dont nos deux personnages firent preuve l’un envers l’autre à la fin du chapitre précédent (bien qu’ils aient une liste de raisons longue comme la tronche de Gilou lors d’un bivouac sans rutabaga de se foutre sur le coin du museau) sur le compte d’une volonté de Vincent de renforcer la tension avant le règlement de comptes final, voir cet étrange statu quo se prolonger lors du chapitre 7 est par contre tout bonnement incompréhensible. Incompréhensible est d’ailleurs le qualificatif le plus approprié pour décrire le dialogue entre nos deux adeptes de la non-violence, dont le degré d’absurdité ferait passer La Cantatrice Chauve pour un drame bourgeois. En parallèle de cet échange de haut vol, Stuart Little prend littéralement un gros coup de vieux, son pelage passant soudainement au blanc (fatigue nerveuse sans doute), ce qui 1) permet au mot follicule de faire son apparition dans le champ lexical de la Black Library2, et 2) attise l’antipathie que notre Elfe éprouve pour lui à un niveau insoupçonné. Pourquoi ? On ne le saura jamais, mais Vincent se montre catégorique sur ce point.

Quelques étages plus bas, le trio des poursuivants se prépare à faire son entrée dans la grande salle du royaume skaven, où, une fois encore la race entière3 s’est réunie pour assister à un discours de son suprême leader. Malgré les atermoiements de Laban (le jeune elfe), qui rechigne à foncer dans le tas et à se tailler un chemin jusqu’à son grand cousin à la pointe de l’épée sans autre forme de préparation (option choisie par ses deux bourrins de compagnons), les membres fondateurs de l’Association des Amis de Gilead (AAG) optent malgré tout pour cette approche tout en subtilité et commencent à progresser vers le monticule servant de podium au Roi des Rats pour ses intervention publiques, laissant derrière eux les cadavres mutilés d’innombrables ratons. De son côté, notre héros choisit finalement de laisser la vie sauve à son ennemi, sans savoir pourquoi d’ailleurs, et pousse même l’urbanité jusqu’à défendre ce dernier des assauts de ses lieutenants. Sorti complètement exténué, tant sur le plan physique que mental, de ses cinq minutes d’entrevue avec son prisonnier, le fier despote murin des chapitres précédents n’est en effet plus qu’une loque impotente, tout juste bonne à marmonner des questions incongrues dans ses moustaches, faiblesse excitant logiquement la convoitise de ses nervis.

Long story short, les quatre protagonistes finissent par effectuer leur jonction, après avoir massacré les ¾ des skavens du Vieux Monde en quelques minutes, bien aidés il faut le dire par la gigantesque battle royal ayant éclaté après l’abdication de fait du Roi des Rats. Le tumulte engendré par cette mêlée dantesque ayant fragilisé cette partie de l’empire souterrain, Gilead entraîne ses nouveaux compagnons vers la surface, non sans avoir (enfin !) réglé son compte à sa Nemesis poilue, décapitée au ralenti par une Nik Vincent qui profite de l’occasion pour ajouter « derme » au lexique de la BL. Un de moins !

Si j’ai commencé cette revue en signalant d’emblée que ce 7ème chapitre constituait un nouveau jalon dans l’imbitabilité poisseuse qui caractéristique Gilead’s Curse, c’est parce qu’aux critiques déjà formulées au cours des précédentes chroniques vient s’ajouter une tare inédite. Passe encore que le style des Vabnett  soit ampoulé à l’extrême, que les personnages agissent de manière ou stupide ou incompréhensible, que le background de Warhammer ait été totalement vidé de sa substance ou encore que le récit soit déroulé d’une manière profondément ennuyeuse : ces défauts sont connus de longue de date et sont le lot des pauvres fous ayant choisis de persévérer dans leur lecture de cette œuvre profane. En revanche, il m’a été particulièrement pénible de constater que le binôme avait choisi d’innover dans l’innommable, en rebootant purement et simplement la personnalité d’un des personnages principaux (le Roi des Rats) en cours d’histoire. C’est bien simple, notre loustic perd subitement tout intérêt dans la quête d’immortalité qui constituait jusqu’ici son leitmotiv, se met à considérer Gilead comme son psychiatre et n’en finit plus de s’émerveiller sur son manque de connaissance sur les choses de la vie (sa dernière pensée – au moment où l’épée de Gilead lui tranche le col – sera d’ailleurs de noter que son sang est impur, même s’il ignore pourquoi). C’est un peu comme si Vincent avait oublié tout le character development précédemment mis en place et était reparti de zéro sur ce personnage. Avec le recul, on finit par en rire (on rit du roman dans son entièreté d’ailleurs), mais sur le coup, j’avoue avoir ressenti une véritable bouffée de colère devant cette nouvelle preuve de mépris adressée aux lecteurs de Gilead’s Curse. La lecture se serait faite sur une copie papier que cette dernière serait très certainement passée par la fenêtre ou aurait atterri dans la poubelle sans autre forme de procès. Heureusement que les ordinateurs et les tablettes sont moins facilement remplaçables.

Seule consolation à tirer de ce chapitre, la mort de super raton, qui ne viendra normalement plus polluer le récit de ses interventions délétères. On peut également espérer que le Comte rencontrera prochainement son destin sous la lame de Gilead, comme il le souhaite. Bien que doté d’un potentiel de nuisance moindre que l’autre antagoniste principal du roman, sa disparition permettrait de repartir sur des bases totalement nouvelles, qui ne pourront pas être pires que celles ayant soutenu cette première partie. En tout cas, je l’espère fortement.

1 : On notera à cette occasion que l’intrigue de Gilead’s Curse repose (jusqu’ici) entièrement sur un concours malheureux de circonstances. Si cette cruche de Brida ne s’était pas montée la tête sur la longueur de l’ombre du premier quidam venu dans le premier chapitre, Gilead n’aurait jamais fait la rencontre du Comte, ni ne se serait aventuré dans les tunnels des skavens. On peut légitimement parler d’un effet (tête de nœud) papillon.

2 : Je ne pense pas prendre un grand risque en affirmant que ce terme n’avait été jusqu’ici jamais utilisé par aucun auteur de cette noble maison d’édition.

3 : Ça doit être assez pénible pour les membres des clans Eshin et Pestilens de se taper l’aller-retour entre Nippon/la Lustrie et Skarogne tous les deux jours pour entendre grand-papi répéter sa litanie de longévité. D’un autre côté, ce n’est pas comme si ces clans existaient pour Nik Vincent. Problem (partly) solved.

The Talon of Khorne – F. Cavallo [WFB] :

Deuxième auteur à faire ses grands débuts dans ce numéro de Hammer & Bolter, Frank Cavallo n’a semble-t-il pas fait de vieux os au sein de la Black Library, sa seule autre contribution recensée étant une pige pour la franchise Gotrek & Felix, Into the Valley of Death. En même temps, se spécialiser dans Fantasy en 2012 n’était sans doute pas le choix le plus heureux avec le recul.

Notre récit s’ouvre par un petit matin frisquet d’automne dans le village de pêcheurs de Volfskul, quelque part sur le littoral de Norsca. Les habitants du lieu commencent à peine leur journée qu’ils se trouvent interrompus par l’arrivée d’une bande de maraudeurs, menée par le Seigneur du Chaos Vhorgath, fléau du Nord (ce qui en ferait de fait plutôt un allié des nations civilisées du Sud) et son second Ruaddon. Notre duo de choc est en effet à la recherche de guerriers dignes de ce nom pour renforcer leur petite armée, et leur Guide du Pillard – Norsca indique clairement que Volfskul est la communauté principale de la farouche tribu Peau de Fer, réputée pour sa férocité et les innombrables exactions qu’elle a commises lors de ses raids sur les terres des nations civilisées.

Manque de chance pour nos deux chasseurs de têtes, ils se rendent rapidement compte que le village est vide de tout homme capable manier les armes, comme le confirment rapidement les habitants du cru, guère impressionnés par l’arrivée d’une trentaine de maraudeurs surarmés et animés d’intentions pas vraiment charitables à leur porte (façon de parler, les maîtres d’œuvre locaux n’utilisant que des galets et du guano pour leurs constructions). Ce constat amer est confirmé par la version des Volfskullers, qui apprennent à nos wannabes Archaon que le lancement de la saison du pillage a été très retardé par une épidémie de varicelle, finalement enrayée par un sacrifice massif à ce coquin de Nurgle à la toute fin de l’été. Enfin libres de partir en mer après cette péripétie mineure, les derniers guerriers Peau de Fer ne sont pas encore revenus de leur transat Jacques Vabre au moment de l’arrivée du jury de la Nouvelle Star dans leur patelin. Légitimement déçus par la fin de non-recevoir leur ayant été adressée, Vhorgath et Ruaddon se passent les nerfs en mettant le village à sac, l’ombrageux Seigneur du Chaos n’ayant pas apprécié de se faire violemment clasher par la poissonnière pour sa peine.

Alors qu’ils s’apprêtent à repartir des ruines fumantes de Volfskul, les séides de Vhorgath tombent nez à nez avec l’ultime survivante de la tribu, qui s’avère être la fille du skald local. D’abord enclins à passer Assurancetourista au fil de l’épée comme le reste de ses petits copains, les maraudeurs décident finalement de la laisser en vie après qu’elle leur ait proposé de les mener jusqu’à la retraite du légendaire Scyla Anfingrimm, aussi connu sous le nom de Griffe de Khorne, illustre guerrier Peau de Fer s’il en est. Flairant l’opportunité de sauver les meubles en draftant au moins un nouveau suivant digne de ce nom, Vhorgath accepte le deal et ordonne à sa captive de le mener jusqu’au repaire de Scyla. Ce dernier s’étant établi à une journée de marche de ses concitoyens, la prisonnière en profite pour leur conter un épisode marquant de la saga d’Anfingrimm, à savoir la traque de Paul le Poulpe dans la baie des Lames1, malgré l’incrédulité hostile de Ruaddon face à l’awesomeness manifeste de Scyla. Arrivée à bon port, notre petite bande de super vilains paiera le prix fort pour son inculture2, laissant l’ultime survivante des Peaux de Fer libre d’aller exercer ses talents bardiques ailleurs.

The Talon of Khorne est une petite nouvelle comme je les aime, mettant en lumière un aspect du background canon superficiellement couvert par les Livres d’Armée pour le plus grand plaisir du fanboy de base. Figure chaotique bien connue, Scyla Anfingrimm est un des personnages nommés les plus intéressants de sa faction, sa déchéance finale étant symptomatique de la dangerosité intrinsèque des faveurs des Dieux du Chaos, pour qui la préservation physique et mentale des champions qu’ils récompensent n’est qu’un point de détail. Toutefois, ce n’est pas tant dans le récit de l’affrontement entre Scyla et le kraken de la Baie des Lames que se situe la principale plus-value du texte de Cavallo, mais bien dans sa description de la réalité « sociale » des Norscans. Sempiternellement envisagés sous le seul angle de la bande de maraudeurs ravageant les terres des nations civilisées dans le background, on en oublierait presque que derrière chaque Viking altéré de sang se cache une communauté de non-combattants, faisant de son mieux pour interagir de la manière la plus apaisée possible avec les bandes armées, créatures mutantes et manifestations démoniaques endémiques au Nord du monde.

En ce sens, la première partie de la nouvelle, où l’auteur décrit de manière assez crédible la genèse d’une armée chaotique (dont les guerriers ne se reproduisent pas par mitose, n’en déplaise aux plumes de la BL invoquant des centaines de milliers de combattants à chaque incursion dans les terres du Sud), est à mes yeux le meilleur passage de The Talon of Khorne, en ce qu’il dépeint de manière crédible les difficultés rencontrées par chaque chef de guerre au moment de mettre sur pied sa propre horde. De même, le stoïcisme hostile et effronté avec lequel les habitants de Volfskul accueillent l’arrivée d’un Seigneur du Chaos ne m’a pas semblé le moins du monde hors de propos, bien que l’on puisse être à première vue un peu surpris de voir un individu aussi dangereux et ombrageux qu’un Élu des Dieux Sombres se faire vertement rembarrer par la première matrone venue3 (avec des conséquences assez fâcheuses pour nos grandes gueules ceci dit). Cela colle en effet parfaitement avec l’image d’Épinal du fier nordique, exprimant le fond de sa pensée sans aucun détour même lorsqu’il aurait été plus intelligent de ménager la susceptibilité de son interlocuteur. Toujours dans la même veine, la conclusion de la nouvelle, qui voit le terrifiant Scyla se comporter en animal de compagnie protecteur envers la prisonnière de Vhorgath juste avant de réduire ce dernier et son escorte à l’état de protoplasme, est également intéressante, en ce qu’elle « humanise » légèrement l’Enfant du Chaos, qui malgré sa transformation et son exil, reste capable d’éprouver de la loyauté envers les membres de sa tribu (ce qui était d’ailleurs sous-entendu dans la partie background – La Bête de Firjgard – du Livre d’Armée Hordes du Chaos). Bref, merci à Mr Cavallo d’avoir normalisé un tant soit peu les habitants du Nord du Vieux Monde, qui ne diffèrent pas foncièrement de leurs congénères méridionaux dans la vie de tous les jours (on aurait tendance à l’oublier).

Seul léger bémol à signaler, le simili twist final venant conclure la nouvelle (Vhorgath et Ruaddon n’étant pas au courant de la déchéance de Scyla avant d’arriver dans son antre), dont on ne sait pas trop s’il était destiné au lecteur (probablement mieux informé que nos héros incultes sur la destinée d’Anfingrimm) ou bien ne concernait que les personnages de l’histoire. Vu le sans-faute réalisé par Cavallo par ailleurs, je pencherais davantage pour la seconde option, qui aurait alors gagné à être mieux mise en contexte afin de ne laisser aucun doute sur les intentions de l’auteur. Mais je pinaille.

1 : Vous ne vous êtes jamais comment un aquarium allemand avait récupéré un octopode marqué par Tzeentch en 2008 ? Maintenant vous savez.

2 : Scyla étant, comme chacun sait, un Enfant du Chaos à l’humeur mutine, et par là même assez insensible à la proposition d’embauche faite par un Vhorgath qui aurait mieux fait d’acheter le Livre d’Armée Guerriers du Chaos pour savoir à quoi s’en tenir plutôt que de claquer tout son fric dans un cimeterre enchanté. Morale de l’histoire : le savoir c’est le pouvoir.

3 : J’imagine que même Archaon a dû en passer par là au début de son parcours.

Archaon (niveau 5) : Ahem. Bonjour mes amis! Je m’appelle Archaon et je suis à la recherche de courageux guerriers pour intégrer ma garde personnelle, les Epées du Cha-

La grosse Hilda (PNJ) : Archaon, tête de fion !

Archaon (niveau 5) : O-ok. Je repasserai plus tard.

…Plus tard…

Archaon (niveau 88) : Nordiques ! Je suis de retour avec la bénédiction des Dieux du Chaos. Mon armée se prépare à noyer le monde dans le sang et le feu. Rejoignez-moi ou périss-

L’énorme Hilda (PNJ) : Ça fait longtemps que tu nous délaisseuh, vas-y Archie montre nous tes f-

Archaon (niveau 88) : Oh putain, c’est pas vrai.

Lords of the Marsh – J. Reynolds [WFB] :

Avec cette troisième nouvelle consacrée au templier Erkhart Dubnitz du Très Saint et Très Brutal Ordre de Manann en huit mois, Josh Reynolds s’impose indubitablement comme le Sarah Cawkwell de l’année 2 en terme de présence dans les pages de Hammer & Bolter, son jovial héros prenant (avantageusement, si vous demandez mon avis) la place du translucide Gileas Ur’Ten des Silver Skulls. Ça ne compense pas les exactions commises par Vincent et Abnett avec leur Gilead, mais ça équilibre au moins la situation. Je ne pense que le lectorat du webzine aurait survécu très longtemps à l’alliance des deux Gil’…

Une fois n’est pas coutume, Reynolds fait quitter à Dubnitz les bucoliques canaux de Marienburg et choisit de situer l’action de sa nouvelle dans les marais de l’estuaire du Reik. Envoyé par le Grand Maître Ogg en Averland afin de sécuriser un approvisionnement de destriers pour le compte de l’Ordre de Manann, notre héros est sur le chemin du retour en compagnie de deux représentants de la famille Sark, lignée de marchands ayant fait fortune dans l’élevage de chevaux. Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes si Erkhart ne s’était pas, avec l’enthousiasme qu’on lui connaît, compromis quelques jours auparavant avec la moitié la plus gironde des plénipotentiaires Sark, au grand outrage de l’autre émissaire Averlander (frère de la précédente), très décidé à faire goûter à ce fripon de Dubnitz l’acier de sa rapière à titre de dédommagement. L’incident trouvant rapidement une conclusion (presque) non-violente par le biais d’un amical coup de boule assené par le templier au marchand, l’agitation retombe peu à peu sur le pont de la barge transportant tout ce beau monde vers sa destination… en même temps qu’un brouillard à couper au braquemart, dont on devine rapidement qu’il n’a rien de naturel. Et en effet, c’est le moment que choisit une bande de pirates menée par le tristement célèbre Quintus Fulmeyer, aussi connu sous le nom de Chien des Marais, pour aborder le bateau et, après un bref mais sanglant combat se terminant par la victoire des assaillants et la chute de Dubnitz dans le Reik, faire main basse sur sa cargaison.

Un templier de Manann ne pouvant pas décemment finir sa carrière noyé, le coriace Dubnitz réussit malgré tout à rejoindre la terre (plus ou moins) ferme, et se lance à la poursuite de Fulmeyer et de ses captifs, guidé par un pirate pas vraiment enchanté de se retrouver au cœur des étendues sauvages du Pays Perdu en pleine nuit, et à la merci des mystérieux « Seigneurs des Marais » auxquels les prisonniers doivent être sacrifiés avant la venue du jour. Intrigué par le salmigondis de son compagnon, Dubnitz essaie de lui tirer les vers du nez au sujet des protecteurs de Fulmeyer, mais ne parvient à rien de très concluant avant que le flibustier ne fasse une Charles VIII (comprendre qu’il décède brusquement de s’être cogné très fort la tête) sur une des pierres levées qui parsèment cette partie des marais. Soupçonnant l’intervention d’une tierce partie dans cette mort pas vraiment naturelle, notre héros n’a pas le temps de pousser très loin son investigation, son errance dans les marécages l’ayant conduit tout droit sur le chemin du reste des pirates. Déterminé à vendre chèrement sa vie contre ces immondes fripouilles, Dubnitz n’a pas le temps de se lancer à l’assaut des adorateurs de Stromfels que Fulmeyer dégaine un cor un peu spécial, dont la sonnerie a pour effet immédiat de faire tomber une brume des plus épaisses, d’où émergent finalement ceux que le lecteur un tant soit peu informé attendait depuis le début de la nouvelle, j’ai nommé les Fimirs1.

Profitant de l’attitude pour le moins attentiste des fameux Seigneurs des Marais, apparemment très à cheval sur le fait que leurs prisonniers soient dépourvus de toute volonté belliqueuse, et qui voient donc d’un mauvais œil (haha) la mauvaise volonté manifeste dont fait preuve Dubnitz à l’idée d’être faceplanté de force contre une des pierres de sacrifice Fimir2, le templier passe à l’action et engage Fulmeyer au corps à corps pendant que les Sark et les marins survivants font de même avec les pirates. Après une brève échauffourée au cours de laquelle notre héros réussit à confisquer l’instrument de son adversaire et à congédier les mécènes de ce dernier en sonnant la fin de la récré (comme on l’a vu plus haut, les Fimirs sont procéduriers à l’extrême, et n’eurent donc pas d’autre choix que de repartir dans la brume même si cela ne les arrangeait pas vraiment), les rescapés du camp des gentils repartent clopin-clopant vers Marienburg, non sans avoir laissé Fulmeyer et ses nervis derrière eux en guise de compensation. Tout le monde est content (ou presque).

Josh Reynolds a beau être mon auteur préféré parmi la jeune génération de la BL, et Erkhart Dubnitz être un des personnages les plus agréables à suivre parmi la ménagerie de protagonistes de Warhammer Fantasy développée au fil des ans, j’ai trouvé son Lords of the Marsh franchement en deçà de ses précédentes contributions. Sans être indigente, sa nouvelle pâtit surtout des nombreuses zones d’ombres entourant les Fimirs, dont les motivations et la nature de l’arrangement qu’ils ont conclu avec Fulmeyer restent trop nébuleuses pour permettre au lecteur d’apprécier à sa juste valeur l’inclusion de mythiques démons des marais de GW à l’intrigue. On ne comprend ainsi pas pourquoi les bad Alfs refusent absolument de toucher à Dubnitz tant que ce dernier fait mine de se rebeller contre son sort, alors qu’ils n’ont eu aucun scrupule à fracasser le crâne de son guide quelques minutes plus tôt (lequel ne devait pas être non plus franchement emballé par l’idée de repeindre le menhir le plus proche avec son liquide céphalo-rachidien), ni de faire subir le même sort à Fulmeyer et au restant de sa bande de bras cassés après qu’ils aient été sommairement bannis par le chevalier de l’OM (Ordre de Manann, pour ceux qui ne suivraient pas). De même, l’intérêt pour nos batraciens photophobiques de recourir aux services d’hommes de main pour leur livrer leurs victimes à domicile (c’est du Deliveroo customisé) est loin d’être évident, puisque ces derniers disposent déjà de toutes les compétences nécessaires pour aborder les navires passant à proximité de leurs antres, et n’ont pas particulièrement besoin de mercenaires pour leur faciliter le boulot.

Au niveau de la forme, j’ai également pu noter quelques marques de relâchement de la part d’un auteur jusqu’à présent irréprochable de ce côté-là. Mots manquants dans certains passages (à moins que Reynolds n’ait utilisé des tournures anglaises dont je n’ai pas réussi à percer le sens, ce qui est à la portée de notre homme), personnages secondaires moins bien développés que précédemment, et construction du récit moins dynamique et fluide, furent autant de petites scories venant dégrader le plaisir de lecture, comme si Reynolds n’avait pas eu l’envie ou le loisir de livrer un texte aussi peaufiné qu’à son habitude. On se consolera toutefois en notant que la partie fluff est elle restée égale à elle-même, c’est-à-dire conséquente et pertinente, ce qui constitue une source de satisfaction certaine. On ne peut qu’espérer que ce (léger) coup de moins bien sera rapidement corrigé par un Josh Reynolds dont on peut légitimement attendre beaucoup, beaucoup mieux.

1 : On notera au passage qu’il s’agit de la deuxième nouvelle publiée dans Hammer & Bolter à intégrer ces sympathiques cyclopes à son casting (la première étant Marshlight de C.L. Werner – Hammer & Bolter #8). Pas mal pour une race délaissée par Games Workshop depuis la fin des années 80 !

2 : La méthode d’exécution employée par les Fimirs n’est en effet pas piquée des vers. Le prisonnier est hissé en haut de la pierre où une corde lui est passée autour du cou, puis est précipité en contrebas. La corde étant plus courte que la hauteur de la chute, le malheureux s’écrase tête la première à la surface du rocher, avec des conséquences généralement fatales. Les Fimirs de Reynolds ont l’air d’être passés maîtres dans cette technique, mais le mode opératoire me paraît toute de même très compliqué, pour une efficacité loin d’être garantie (ça doit tout de même faire très mal, je le reconnais). Josh Reynolds étant un des auteurs les plus calés en matière de fluff, je pensais qu’il avait tiré ce particularisme d’un ancien texte de background, mais n’ai rien trouvé à ce sujet.

A Mug of Recaff – S. Mitchell [40K] :

A Mug of RecaffOn termine ce numéro avec un petit digestif littéraire judicieusement nommé, commis par un Sandy Mitchell plus que jamais attaché à son personnage fétiche de Ciaphas Cain Ferik Jurgen. Ayant juste terminé la purge d’une maison de passe en compagnie de son bien-aimé supérieur, notre odoriférant héros se met en quête de la cuisine afin de procurer au Héros de l’Imperium une tasse de recaff bien méritée. Manque de pot pour Jurgen, la pièce est déjà occupée par un cultiste survivant, ayant quelques aptitudes en matière d’invocation de démon1.Manque de pot pour l’hérétique et son familier, Jurgen est un Paria, et n’a donc aucun mal à calmer les ardeurs homicidaires de Ringo et Sheila d’une rafale bien placée de son fidèle fusil laser. Bon, où est la cafetière maintenant ?

Le principal intérêt de A Mug of Recaff est de donner à Jurgen sa minute de gloire en le mettant aux commandes de sa propre nouvelle. Comme toujours avec Mitchell, le ton est assez léger et contraste fortement avec la sacro-sainte atmosphère gothique qui imprègne la majorité des écrits 40K. Le quatrième mur n’a jamais été plus fin que lorsque Sandy tient la plume…

1 : Sheyla de son petit nom. Véridique.

Au final, un numéro assez moyen mes pauvres amis. Le léger coup de moins bien (passager, espérons-le) de Reynolds permet à Cavallo de s’imposer comme le meilleur contributeur de cette fournée, même si sa nouvelle tape plus dans l’encourageant que dans l’enthousiasmant. Les débuts de Clapham s’avèrent quant à eux assez peu spectaculaires, mais laissons au bonhomme le bénéfice du doute. La soumission de Mitchell, pour sympathique qu’elle soit, tient plus du caméo qu’autre chose. Reste l’habituel chapitre de Gilead’s Curse, qui démontre avec force que le duo Vincent et Abnett est plus que jamais en roue libre et évoque plus une séance d’écriture automatique inspirée par une mauvaise série med-fan qu’un travail de professionnels. See you soon !