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SUMMER OF READING 2015 [40K-HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du Summer of Reading 2015, deuxième tentative de la Black Library d’égayer l’été de ses fidèles en leur proposant « quelques » nouvelles pendant les mois chauds. Si j’utilise ici des guillemets, c’est que la particularité du SoR 2015 se trouve dans la taille du corpus mis à disposition par les pontes de Nottingham. Alors que les autres SoR tournent entre cinq et sept histoires, celui qui nous intéresse aujourd’hui regroupe pas moins de 21 nouvelles, réunies en trois « livres ». On savait vivre à l’époque.

À y regarder de plus près cependant, les habitués ne manquèrent ni ne manqueront guère de remarquer que les livres 2 et 3 sont constitués en totalité par des nouvelles déjà publiées dans le cadre des webzines Hammer & Bolter (2010-12), rompant ainsi avec la tradition de la BL de ne proposer que des inédits dans le cadre de ses événements ponctuels. Ayant pour ma part déjà fait le tour du catalogue H&B (à retrouver ici), je me concentrerai ici sur les sept véritables nouveautés de cet été 2015, regroupées dans le livre premier du SoR.

Summer of Reading 2015

Au programme, six nouvelles siglées 40K pour une seule nous venant du 31ème millénaire, et rien à se mettre sous la dent pour les amateurs d’heroic fantasy. 2015 ayant été l’année de la mort de Warhammer Fantasy Battle et du lancement d’Age of Sigmar, cette lacune s’explique facilement avec le recul, même si un peu de variété n’aurait pas fait de mal. Côté contributeurs, on retrouve un intéressant mélange de vétérans (dont Annandale et French, déjà conviés au SoR 2014) et de petits nouveaux. Andy Clark fait ainsi ses débuts dans la carrière avec Whiteout, et Ray Harrison, pas encore dévouée à l’héroïque Commissaire Raine, fait une pige pour le compte des Black Templars dans Dishonoured. Les protagonistes étant (à peu près) présentés, il est temps d’ouvrir ce fameux livre 1, et de voir ce qu’il a dans la tranche…

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Summer of Reading 2015

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The Wreckage – D. Annandale [40K] :

INTRIGUE :

The WreckageOù il sera question des premières années de service de Sebastian Yarrick, avant qu’il ne devienne la légende acariâtre que l’Imperium connaît et adore redoute. Déjà engagé aux côtés de la Légion d’Acier d’Armaggedon, notre héros se retrouve en mauvaise posture lors de la traque d’une bande de pirates hérétiques ayant fait du vilain dans le secteur de Statheros, et qui semble avoir un coup d’avance sur ses adversaires impériaux. Débarqué à la surface d’Aionos, une lune servant de décharge à vaisseaux spatiaux en fin de vie, le 252ème Régiment de la Légion d’Acier tombe dans une embuscade qui le force à s’abriter derrière une épave (d’où le titre. Ça, c’est fait.), en attendant des jours meilleurs, ou un coup de génie militaire de la part du Capitaine Jeren Marsec, leader charismatique mais tête brûlée de l’expédition. Yarrick, bien moins dominateur que dans ses dernières années, se contente d’observer avec circonspection la tournure que prennent les événements, échangeant quelques remarques acerbes avec son pote Otto Hanoszek, Sergent expérimenté du 252ème, avec lequel il partage quelques doutes sur la qualité du Capitaine Marsec. Ce dernier, qui a vraiment la confiance, se permet de faire des blagues au sujet de son Commissaire, et propose en toute simplicité de charger en masse les lignes ennemies (situées en hauteur et mieux fortifiées que celles des impériaux) afin de forcer les hérétiques à se concentrer au même endroit pour repousser l’attaque, les transformant en cible facile pour la frégate d’Armaggedon (Castellan Belasco) qui stationne en orbite. Moyennement emballé par ce plan à 80% suicidaire, Yarrick accepte tout de même de marcher dans la combine, mais le coup de bluff de Marsec ne donne rien. Il semble en effet que le fourbe ennemi se soit fait la malle au lieu de tenir sa position, comme il était convenu qu’il le fasse.

Dépité autant que déboussolé par ce coup du sort, Marsec contacte la frégate pour annuler la frappe orbitale, mais réalise un peu tard qu’il vient de re-re-retomber dans un piège, les hérétiques ayant capturé le vaisseau et n’attendant que la confirmation du Capitaine que ses troupes forment un gros tas bien compact au sol pour donner du macrocanon. Le subtil accent nazillard de l’opérateur radio auquel Marsec s’adresse met toutefois la puce à l’oreille de Yarrick, qui parvient à sauver quelques meubles en ordonnant une dispersion stratégique quelques instants avant que la catastrophe ne frappe. La situation du 252ème est toutefois des plus précaires, réduit à quelques escouades éparses, mené par un officier totalement hébété par la tournure qu’on prit les événements, et confronté, en plus des pirates de l’espace, à une escouade de Space Marines du Chaos des tristement célèbres Harkanor’s Reavers (la Légion des Damnés, goût Hérésie).

Prenant en charge les opérations le temps que Marsec sorte de sa torpeur, Yarrick entraîne ses survivants dans un complexe de pyramides enfoui sous le sol de Aionos, et découvert par le bombardement spatial. Je ne vous ferai pas l’insulte de laisser planer l’ombre d’un suspens sur la présence de Necrons dans cette nécropole, car c’est évidement le cas. Pris entre le marteau du Chaos et l’enclume des Xenos, Yarrick parvient à feinter son monde en passant en mode furtif, laissant les hérétiques menés par leurs gros copains énergétiques se ruer sur les robots tueurs, avec des résultats concluants. Un bonheur n’arrivant jamais seul, nos héros apprennent que l’équipage du Castellan Belasco a réussi à se libérer et est sur le point de reprendre le contrôle du vaisseau, ce qui permettrait au 252ème de tirer sa révérence sur cette victoire mineure. Problème, le bombardement a séparé les Gardes Impériaux en deux, et le groupe mené par le Sergent Hanoszek est confronté à la même situation que celui de Yarrick (hérétiques, Space Marines du Chaos, pyramide…), sans bénéficier de la présence scénaristiquement salvatrice de ce dernier.

Conscient que la situation de ses camarades est sans espoir1, Yarrick essaie de convaincre Marsec, qui a enfin repris ses esprits, de ne pas jouer au héros en essayant de monter une opération de secours vouée à l’échec. En vain. Seb la Frite passe alors en mode Commissaire et colle un bolt dans la tête de l’officier, qui n’attendait que ça en fait, histoire de mourir en martyre au lieu de devoir justifier son incompétence auprès du haut commandement à son retour. Grand prince, Yarrick annonce lui-même à Hanoszek qu’il a été désigné volontaire pour mourir au nom de l’Empereur, ce que ce dernier accepte avec stoïcisme, et laisse sa radio ouverte jusqu’au bout pour recueillir les derniers râles des héroïques bidasses. Kelôm.

1 : Ils sont confrontés à 3 Astartes du Chaos. 3 ! C’est Gaunt qui doit doucement rigoler dans son coin.

AVIS :

Une nouvelle sur Yarrick où aucun Ork ne vient pointer le bout de son (absence de) nez, cela fait bizarre, tant cette race de Xenos est centrale dans la saga du vieux Commissaire. Le récit que fait Annandale du début de la carrière du héros d’Armaggedon, que l’on découvre déjà animé de puissantes convictions quant à la manière d’accomplir son devoir, même s’il se laisse ici marcher sur les pieds par cette fantoche de Marsec, ne s’avère pas vraiment mémorable, et je pense que le nombre très important de factions convoquées dans cette courte nouvelle joue un rôle important dans ce constat de bofitude. Était-il vraiment nécessaire de faire intervenir les Necrons (qui n’apparaissent même pas directement dans le récit d’ailleurs) dans cette péripétie mineure de la carrière de Yarrick ? Cela renforce en tout cas le running gag de la nécropole enfouie sous trois centimètres de sable, et qui se réveille dès que le chien du héros la déterre par inadvertance en creusant un trou pour son os. À vouloir jouer à la fois sur le tableau de la psychologie (Yarrick se retrouve confronté à un dilemme moral qui aura des conséquences sur la suite de sa vie) et de l’action (Yarrick doit mener ses hommes à la victoire en dépit des circonstances) en aussi peu de pages, Annandale score moyennement sur les deux dimensions, et ce faisant, ne rend pas vraiment service au héros qu’il est sensé glorifier.

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Hollow Beginnings – M. Clapham [40K] :

INTRIGUE :

Hollow BeginningsSur la planète Durrl du système Alixind, les efforts combinés de la Garde Impériale et de la 4ème Compagnie des Space Wolves sont sur le point de venir à bout des hordes d’Orks du Big Boss Stumpgutz. Le dernier bastion tenu par les peaux vertes a subi un bombardement en règle de la part des troupes impériales, et n’est plus qu’un amas de ruines embrasées. Ce n’est toutefois pas suffisant pour Anvindr Grodrichsson et sa meute, bien décidés à ramener la tête du tyran au bercail pour terminer la campagne avec panache.

L’arrivée sur site des cinq loulous écumants fait l’affaire de la Capitaine Anju Bayda et de sa petite patrouille de cavaliers légers, surpris par quelques Orks ayant réussi à s’extirper des décombres fumants de leur fort démoli. Malmenés par les Xenos, les Tallarn et leurs montures auraient sûrement finis en lasagnes Findus sans l’intervention désintéressée des Space Wolves, qui règlent leur compte aux faquins et poursuivent leur route sans s’arrêter1.

Les quelques pages qui suivent sont l’occasion pour le lecteur de se (re)familiariser avec les cinq surhommes poilus, dentus et rigolards qui font office de protagonistes à notre propos. En plus d’Anvindr le meneur bougon aux cœurs d’or, on retrouve Sindri le boute en train puéril2, Gulbandr le tireur d’élite impassible, Tormodr le gros balèze pyromane, et Hoenir le rouquin et pièce rapportée de la meute, ayant rejoint cette dernière après la disparition tragique de Liulfr sur Beltrasse (voir ‘In Hrondir’s Tomb’). Les Orks ont beau se présenter par dizaines devant eux, leurs capacités martiales et la coopération instinctive qu’ils ont développé sur des centaines de champs de bataille permettent à nos héros de s’acquitter sans grand mal de leur mission, seul Stumpgutz parvenant à envoyer un vicieux high kick dans la mâchoire de Gulbandr avant d’être mis au tapis et décapité sans autre forme de procès par les Astartes. Bien que sévère, la blessure n’est pas mortelle (celle de Gulbandr, évidemment), et la meute peut revenir dans ses pénates avec un effectif complet et une grosse tête verte pour ajouter à la collection du Croc.

Notre nouvelle n’est cependant pas tout à fait terminée. Le barbecue de la victoire est en effet interrompu par l’atterrissage d’un vaisseau inquisitorial à proximité du camp impérial, d’où s’extrait péniblement la Némésis d’Anvindr : Pranix3. Devenu Inquisiteur depuis les événements de Beltrasse, pendant lesquels il n’était qu’un simple Interrogateur, Pranix n’a que le temps d’annoncer à son comité d’accueil, pas vraiment ravi de le voir (les Space Wolves sont très rancuniers), qu’un mystérieux tyran s’est emparé de neuf mondes impériaux avant de tomber en syncope. Son honneur martial l’empêchant de frapper un homme chauve à terre, Anvindr retient son juste courroux et ordonne à ses hommes d’amener l’Inquisiteur éprouvé à l’infirmerie. La vengeance est un plat qui se mange froid…

1 : Badya et ses soldats n’ayant plus d’autre rôle dans ‘Hollow Beginnings’ à part la commande d’un Über pour le compte d’Anvindr et ses hommes une fois leur mission accomplie, je suppose que Clapham les a inclus dans la nouvelle en raison de leur présence dans ‘Tyrant of the Hollow Worlds’.  En tout cas je l’espère, car sinon c’est un beau fail narratif.
2 : Et ce n’est pas de sa faute car il est frappé du syndrome du poupon, ce qui doit être très pénalisant dans un Chapitre où le respect est proportionnel à l’épaisseur de la moustache.
3 : Anvindr considère que c’est l’absence de collaboration de Pranix qui a conduit à la mort de son camarade. Il est marrant de voir que l’Inquisiteur Montiyf, déjà absolument pas respecté dans ‘In Hrondir’s Tomb’, n’a pas même pas eu l’honneur d’être considéré par Anvindr comme le responsable de la mort de Liulfr.

AVIS :

Il est clair que ‘Hollow Beginnings’ a été écrit pour servir de trailer à ‘The Tyrant of the Hollow Worlds’, le roman que Mark Clapham a consacré aux Red Corsairs de Huron Sombrecoeur, et dans lequel on retrouve la meute d’Anvindr Godrichsson (même le titre de la nouvelle vend la mèche, c’est dire). Si certains auteurs de la Black Library arrivent à rendre en pareil cas des copies intéressantes, même pour les lecteurs qui ne liront pas le roman en question, Clapham ne fait malheureusement pas partie de ce cercle. Cette « nouvelle », que l’on pourrait sans mal requalifier de prologue ou de chapitre 0 de ‘The Tyrant…’ se révèle être une Space Marinade de très piètre qualité, tant sur le fond que sur la forme, et porte ainsi très bien son nom…

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Whiteout – A. Clark [40K] :

INTRIGUE :

WhiteoutLa première mission de Lothar Redfang, ambianceur Space Wolf envoyé servir dans la Deathwatch par ses supérieurs qui ne supportaient plus ses blagues honteuses, se passe relativement bien. Expédié à la surface d’Atrophon avec quatre comparses (un White Scar luddiste, un Iron Hand Asperger, un Raven Guard mutique et un Sergent Ultramarine1), le loubard énergétique a été chargé par l’Inquisition de supprimer un Gromek Ork dont les inventions mortelles font pencher la balance du côté des envahisseurs Xenos. Malheureusement pour notre fine équipe, leur Drop Pod se fait repérer et pilonner par un Dakkajet plutôt chanceux, et son insertion ne se fait pas au milieu de la zone industrielle où Badklaw a installé ses ateliers, mais du mauvais côté de la rivière Strakk, ligne de front entre les Orks et les forces éprouvées de la Garde Impériale.

Dans leur malheur, les chasseurs d’aliens ont toutefois la chance de tomber sur un pont intact, qui leur permettra de rejoindre à pinces leur cible. Ce pont aurait cependant dû être détruit par les forces impériales au moment de leur retraite stratégique, sa praticabilité exposant la Garde à une prise en revers par les verts, ce qui est loin d’être un scénario idéal pour le Marteau de l’Empereur. La tempête de neige qui s’abat sur l’ouvrage d’art rendant le signalement de ce léger détail au haut commandement impossible, les Space Marines décident de prendre les choses en main et de faire sauter le pont avant que les Orks n’aient eu le temps de débarquer en force.

En cela, ils sont aidés par la présence de quelques bombes à plasma posées sur les piliers du pont par une équipe de sapeurs Catachan malheureux, abattus dans l’accomplissement de leur mission par des éclaireurs ennemis. Pendant que Gorrvan l’Iron Hand reste au poste de contrôle pour geeker un peu et coordonner les actions de ses collègues, Lothar, Sor’khal, Kordus et Cantos partent enclencher les détonateurs à la mano. Bien entendu, ils devront composer avec l’arrivée des premières vagues d’Orks (et pour le furtif Kordus avec les caprices de son jet pack, qui tombe en rade au pire moment – et son porteur avec lui), ce qui nous donne quelques scènes de bagarre dont nos farouches héros se tireront plus ou moins bien. Personne ne meurt, rassurez-vous, sauf l’altruiste Gorrvan qui guide ses coéquipiers vers un conduit d’aération leur permettant d’éviter les Xenos en furie, mais reste à son poste pour appuyer sur le gros bouton rouge avec sa main de fer, le blizzard carabiné rendant incertain un déclenchement à distance. Bilan des courses : un pont détruit, des centaines d’Orks pulvérisés, un camarade tombé au combat… et une mission loin d’être bouclée, car la nouvelle s’arrête sur ces entrefaites. On a connu la Deathwatch plus décisive.

1 : Ce sont toujours les Ultramarines qui commandent, à croire qu’ils ont passé un pacte avec l’Inquisition.

AVIS :

Pour sa toute première nouvelle pour le compte de la Black Library1, Andy Clark signe une histoire Deathwatch très classique (une bande de Space Marines que tout oppose mais qui finissent par apprendre à opérer ensemble), reprenant de manière troublante l’intrigue de ‘Chains of Command’ (un pont à faire sauter pour empêcher l’ennemi de faire une percée fatale). À défaut d’être mémorable, ce premier travail est assez sérieux et il serait mesquin de reprocher à un jeune auteur de se raccrocher à des schémas narratifs éprouvés pour son entrée dans le grand bain de la GW-Fiction. Encourageant.

1 : Tellement ancienne qu’elle ne lui ait même pas attribuée lorsqu’on entre « Andy Clark » dans la barre de recherche du site de la BL.

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Monolith – C. Dows [40K] :

INTRIGUE :

MonolithOn retrouve le Sergent Zachariah et son escouade de Paras Elyséens, déjà croisés dans ‘The Mouth of Chaos’, alors qu’ils répondent à l’appel à l’aide d’une force de Cadiens stationnés sur le monde d’Ophel Minoris, et attaqués par un ennemi des plus terrifiants : une bande de Raptors chaotiques. Fidèles à leur doctrine, les Elysées commencent la nouvelle assis dans la soute de la Valkyrie qui les amène au-dessus de leur cible (un monolithe géant assez semblable aux pylônes noirs de Cadia), mais le calme relatif de ce déplacement professionnel est interrompu par un grand boum sur la carlingue de l’appareil. Ce n’est pas la DCA ennemie qui a repéré les engins impériaux, non non : c’est un Raptor qui a pris sur lui d’attaquer à la griffe énergétique le Blablavion de Zach et Cie, situation ubuesque mais aux conséquences tragiques, puisque seul notre héros et un de ses hommes (Adullam) survivront à cet assaut. Cela n’empêche pas Zachariah de s’illustrer par un exploit improbable dont il est coutumier, cette fois-ci en attrapant au vol un Cadien qui s’était fait balancer par-dessus-bord par les Astartes renégats, et en le ramenant sain et sauf sur le plancher des vaches. Prends des notes, Spiderman.

Après avoir pansé ses blessures, le trio (le Cadien s’appelle Pedazhur, by the way) décide de monter tout en haut du monolithe afin d’empêcher les Raptors de faire sauter l’espèce de temple en ruines qui se trouve au sommet de la structure. Personne ne sait trop à quoi cette dernière sert, mais dans le doute, faire de l’antijeu reste une tactique valable. S’en suit le récit d’une ascension pénible, aussi bien pour nos braves Gardes, qui doivent composer avec l’attaque d’un Raptor un peu trop stupide pour son propre bien et une infrastructure en très mauvais état, que pour le lecteur qui a bien du mal à comprendre ce dont il en retourne, tant Dows peine à rendre intelligible sa description des combats.

Sans surprise, la nouvelle se termine par un affrontement (littéralement) au sommet entre les teams Z (pour Zachariah) et S (pour Shamhuth). Chaque équipe comptant trois membres, et celle du Chaos n’étant composée que de Raptors frais et dispos, alors que l’Imperium est représenté par des Gardes blessés et épuisés par vingt étages montés à pied, on se dit que le match va être plié en deux-deux. Cependant, Pépé devait veiller sur ses ouailles à ce moment précis, car la Garde Impériale remporte une victoire probante par un score final de 3 morts à 1, seul Pet d’Azur succombant à un violent choc à la tête pendant la baston. La palme revient une fois de plus à l’insurpassable Zachariah, qui se paie le luxe de tuer Shamhuth en lui glissant une grenade dans le slip alors que les deux adversaires étaient en train de se faire des papouilles en chute libre, Gandalf & Balrog style, avant de lui piquer son jet pack, de le remettre en route, de repartir jusqu’en haut du monolithe (suspendu à bout de bras), et de se laisser choir dans les ruines du temple juste avant que le jet pack ne tombe à court d’énergie. Bien sûr, l’expérience le laisse un peu moulu, mais c’est un petit prix à payer pour se farcir une escouade de Raptors quasi en solo. Sly Marbo n’a qu’à bien se tenir…

AVIS :

Eh bien, ça faisait longtemps que je n’avais rien lu d’aussi nul. Le verdict peut paraître sévère (et il l’est), mais j’ai du mal à croire que Chris Dows se soit beaucoup foulé pour écrire cette nouvelle indigente, et surtout complètement incompréhensible par moments. Les scènes d’action en trois dimensions – assez fréquentes quand la plupart des participants ont un jet pack – sont en effet si mal mises en scène que j’ai rapidement cessé de tenter de me représenter ce qu’il se passait dans ces moments, confiant dans le fait que Zachariah finirait toujours par s’en sortir, peut-être imité par un de ses sous-fifres, et que ses adversaires mordraient au contraire la poussière d’une manière plus ou moins réaliste.

Et puisqu’on parle de réalisme, mon autre principal grief porte sur ce point précis. Lorsque j’ai lu le résumé de ‘Monolith’ au moment de son achat sur le site de la BL, j’étais curieux de voir comment Dows parviendrait à rendre de façon crédible une (probable) victoire de Paras Elyséens sur des adversaires leur étant supérieurs en tout point. Dan Abnett ayant été taxé d’infâme gros bill lorsque ses Tanith avaient corrigé quelques Astartes félons dans ‘A Blooding’ et ‘Traitor General’, je me doutais que la tâche ne serait pas aisée pour Dows, mais on assiste ici à un refus d’obstacle pur et simple. Pour le dire crûment, nos héros réussissent absolument tout ce qu’ils tentent et bénéficient d’une chance insolente, tandis que leurs adversaires, en plus d’être cons comme des balais, sont poursuivis par une déveine carabinée… quand ils n’oublient pas tout bêtement d’utiliser leur équipement. Dans ces conditions-là, même le physique avantageux, l’entraînement poussé et l’équipement de pointe d’un Space Marine ne peut rivaliser. Dommage que la vraisemblance du récit passe également à la trappe.

Bref, vous aurez compris que je ne recommande absolument pas ce ‘Monolith’, à moins d’être attiré par les entrées nanardesques du catalogue de la Black Library. Si c’est le cas, ruez-vous au contraire sur cette nouvelle.

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The Eagle’s Talon – J. French [HH] :

INTRIGUE :

The Eagle's TalonCent quatre-vingt-dix-sept jours, dix heures, dix-sept minutes et trente-et-une secondes après le début de la bataille de Tallarn, le macro-transport Eagle’s Talon (à ne pas confondre avec l’Achille Talon, vaisseau amiral de la 2nde Légion du temps de sa gloire) s’écrasa à la surface de la planète suppliciée. En plus de forcer les combats faisant rage sur l’hémisphère sud à s’interrompre pour quelques heures, cet événement priva les Iron Warriors de précieux renforts qui auraient pu faire basculer le conflit du côté des hérétiques. Bien des années après les faits, une série d’extraits audio captés par une sonde spatiale s’étant retrouvée à proximité de l’Eagle’s Talon permit de lever le voile sur les raisons de cet accident, qui n’en était en fait pas un.

À travers sept enregistrements successifs, nous suivons la dernière mission des escouades Gammus, Theophon et Arcad des Imperial Fists, alors qu’elles infiltrent le vaisseau ennemi avec pour objectif de… le détourner, j’imagine ? En tout cas, pas de le faire s’écraser sur Tallarn, comme cela finira par être le cas, car ces idéalistes de jaunards ne souhaitent pas causer des pertes parmi leurs alliés humains. Mais ces nobles sentiments ne font pas le poids face à l’adversité et les hordes de soldats et de membres d’équipage qui finissent par converger sur la position des loyalistes, une fois leur présence à bord découverte. L’escouade Arcad ayant échoué à s’emparer de la salle de contrôle de l’Eagle’s Talon, comme c’était pourtant son objectif, le pragmatique Theophon déclenche les charges qu’il avait posé en douce sur le conduit d’alimentation central du vaisseau (apparemment aussi sensible que le pot d’échappement thermique de l’Etoile Noire), après que Gammus ait refusé de le faire pour sauvegarder son précieux honneur. Heureusement qu’il y en a encore qui acceptent de faire le sale boulot…

AVIS :

Si le script de certains audio dramas peut se révéler indifférenciable d’une simple nouvelle, le doute n’est en revanche pas permis dans d’autres cas, et ‘The Eagle’s Talon’ appartient à la seconde catégorie. Il est très clair à sa lecture que cette histoire a été écrite pour être écoutée, étant composée à 90% de dialogues et de bruitages, qui doivent sans doute rendre très bien avec un casque sur les oreilles mais s’avèrent moins spectaculaires en mute. Autre indice probant, la très grande simplicité, pour ne pas dire vacuité, de l’intrigue déployée par French, parfaite pour qui n’a pas envie de dédier 100% de ses capacités cognitives à la compréhension des tenants et des aboutissants de cette mission d’infiltration. Là encore, le passage au format nouvelle n’est pas à l’avantage de ‘The Eagle’s Talon’, le lecteur moyen n’appréciant sans doute guère qu’on le prenne pour un abruti (ça a été mon ressenti, en tout cas). Sur ce coup-là, je subodore que l’élève French a été meilleur à l’oral qu’à l’écrit…

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Dishonoured – R. Harrison [40K] :

INTRIGUE :

DishonouredLa croisade lancée par le Sénéchal Helbrecht pour reprendre le monde minier de Schrödinger VII aux Nécrons ne se passe aussi bien qu’il l’espérait. Bien que les Black Templars combattent avec le zèle et la hargne qu’on leur connait, les robots tueurs sont trop nombreux pour permettre aux meilleurs de l’Empereur de saisir l’initiative, et les pertes s’accumulent du côté des über men in black (and white). Comble de l’infamie, un Cryptek curieux du nom de Khephrys se téléporte sans crier gare avec sa garde rapprochée de Factionnaires au contact de l’escouade de commandement d’Helbrecht, et repart avec l’étendard de ce dernier, ainsi que son porteur (Evrain). Pris au dépourvu par cette stratégie capture the flag, le Maréchal prend une décision radicale : pendant qu’il ira mener l’assaut des Black Templars sur la ville de Blight’s Edge, où l’ennemi s’est retranché en nombre, son champion personnel, Aergard, partira avec deux collègues (Garel et Thibaut) arracher le précieux drapeau aux sales griffes nécrones, et possiblement ramener Evrain au bercail, si cela est possible.

S’en suit une narration alternée entre la balade pédestre d’Helbrecht et de ses deux Frères d’Epée restants à travers la toundra de Schrödinger VII jusqu’au point de ralliement des croisés, et la mission d’infiltration de l’autre trio dans les galeries d’un complexe minier où Evrain, ou tout du moins son armure, semble être d’après la puce GPS logée dans la cuirasse. Bien évidemment, les deux groupes rencontreront quelques adversaires en chemin (un trio de Moissonneurs et un Deathmark pernicieux du côté d’Helbrecht, des Guerriers et un Spectre pernicieux aussi du côté d’Aergard), causant quelques pertes de part et d’autre. Leur fortune sera toutefois bien différente…

Début spoiler…Là où Aergard et Garel signeront un sans faute en parvenant à récupérer leur étendard ainsi que le pauvre Evrain (qui décèdera de ses blessures une fois revenu au camp, mais ça ne compte pas vraiment pas vrai), après avoir secouru une escouade de Black Templars et les civils protégés par ces derniers (qui se feront impitoyablement moléculiser par les Nécrons une fois les Astartes partis, mais ça ne compte pas non plus), assiégés depuis des heures par les implacables Xenos, Helbrecht se couvrira de honte et d’ecchymoses.

Ayant opté pour une approche plus subtile du problème que celle déployée par son bourrin de subalterne Jenovar, à savoir charger en force le pont reliant Blight’s Edge au reste du plateau et se faire repousser sans ménagement par les Necrons barricadés, le rusé Sénéchal enverra le gros de ses forces attaquer la position ennemie en passant par les souterrains, tandis que lui et quelques hommes resteront à la surface pour faire diversion. Fort bien. C’était sans compter la présence dans les rangs adverses d’un autre personnage nommé, Imotekh le Seigneur des Tempêtes, a.k.a. le Saigneur des Templiers. Désireux de croiser le fer avec son vis-à-vis, le Phaëron se téléporte à son tour devant Helbrecht en gueulant « Sénéchal me voilà », lui met une rouste monumentale, lui envoie une décharge de 100.000 volts dans les ratiches, le morigène longuement et lui coupe la main droite pour lui apprendre à se la jouer comme Sigismund, avant de le balancer dans une crevasse. BRUTAL. Rassurez-vous, Helbrecht survivra à cette déculottée honteuse, et la nouvelle se termine sur la pose de sa nouvelle main par un artificier du Chapitre, et sur le serment solennel fait par le manchot de l’Empereur de se venger de cette infâmie. La suite à Davatas…Fin spoiler

AVIS :

Rachel (qui signe ici Ray) Harrison donne une dimension romanesque à un épisode marquant de la carrière du Haut Sénéchal Helbrecht, sa première rencontre avec l’insaisissable Imotekh. Je ne sais pas si elle cherchait à rendre son héros plus sympathique au lecteur en dressant un portrait en clair-obscur (vu la livrée des Black Templars, c’est fluff) du tempétueux guerrier, mais je sors de ‘Dishonoured’ avec l’idée que le dévoué Aergard l’emporte sur son boss sur tous les tableaux. En plus de parvenir à remplir une mission impossible sur laquelle Helbrecht semble l’avoir mis pour garder la face après avoir perdu son étendard, il est présenté comme le stratège, conseiller et intendant sur lequel le Sénéchal s’appuie en permanence. De son côté, ce dernier brille surtout par son zèle irréprochable, qui ne lui sert pas à grand-chose face à un Imotekh qui le surclasse de la tête et des épaules.

Bien que le propos de cette nouvelle ne soit aucunement novateur, on peut mettre au crédit d’Harrison sa volonté de compenser la vacuité du fond par un travail formel intéressant, en dédoublant l’intrigue à partir du tiers du récit et déroulant les deux trajectoires sans faillir. Pas brillant, mais solide.

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The Cost of Command – S. Mitchell [40K] :

INTRIGUE :

The Cost of CommandDans la forteresse monastère des Astral Knights, sur le monde cristallin d’Obsidia, un duel d’honneur est sur le point de s’engager entre deux membres du Chapitre, Lanthus et Aldwyn. Cela n’aurait pas grand-chose d’étonnant pour cette confrérie aussi susceptible que portée sur les choses de l’honneur, n’eut été la décision du second de combattre jusqu’à la mort, la tradition étant plutôt d’aller seulement jusqu’au premier sang. Pour comprendre pourquoi Al(ec Bal)dwyn en veut autant à son Sergent, il faut remonter quelques semaines plus tôt, lors de la campagne de Summerfall.

Ayant répondu à l’appel à l’aide des autorités planétaires, submergées par une Waaagh ! Ork s’étant manifestée sans crier gare dans le système, la 3ème Compagnie du Capitane Galad se déploya à la surface du monde supplicié pour tenter d’endiguer la marée verte. Au cours des premiers engagements, l’escouade Caromort où servaient Lanthus et Aldwyn commit l’erreur d’engager le combat avec une tribu de peaux vertes au grand complet, pensant embusquer un convoi de quelques Truks à la place. Bien que l’engagement fût remporté par les Astral Knights, grâce à leur discipline de tir et l’usage magistral du lance-roquette par le frère Beves, le Sergent Caromort termina la journée dans le même état que le carreau de son patronyme. A la surprise générale, Galad choisit de promouvoir le taciturne et réfléchi Lanthus à la place du charismatique mais impétueux Aldwyn (pour la superbe raison que ce dernier aurait accepté tout de suite, alors que Lanthus a pris deux secondes pour réfléchir). Les voies du management sont souvent impénétrables.

Quelques jours après cette réorganisation, l’escouade Lanthus se vit confier une mission capitale pour le succès de la campagne : infiltrer la capitale planétaire par les égouts pour en ouvrir les portes et permettre au reste de la Compagnie d’attaquer en force le dernier bastion tenu par les Orks. Après avoir mené à bien la première partie de leur tâche en nageant littéralement dans un flot d’étrons pendant de longues minutes, les Space Marines se séparèrent en deux demi-escouades pour maximiser leurs chances de succès, la première menée par Lanthus et la seconde par Aldwyn.

Les styles de commandement très différents de nos deux héros eurent un impact non négligeable sur la suite des événements. Pendant que Lanthus rasait les murs et progressait dans les ombres pour se rapprocher de la salle de commandement, Aldwyn fonçait dans le tas tous flingues dehors, attirant logiquement à lui un nombre de plus en plus important d’Orks, toujours partants pour une bonne bagarre. Et bien que ses hommes lui reprochassent de laisser leurs camarades se débrouiller tout seuls contre les peaux vertes en furie, Lanthus choisit de prioriser l’accomplissement de sa mission, qu’il réussit à mener à bien, permettant aux renforts d’arriver sur les lieux et de reprendre la capitale au prix de durs combats, plutôt que d’aller secourir la team Aldwyn. Au final, seul ce dernier parvint à survivre à la fureur des Orks, et lors de leur debriefing d’après bataille, il jura à Lanthus qu’il se vengerait de sa mesquinerie. Fin du flashback et retour sur Obsidia.

Le duel s’engage entre les deux rivaux, et tourne assez rapidement en faveur de Lanthus, qui réussit à piéger son adversaire fou furieux et à lui planter son poignard de cristal dans la jugulaire, suscitant des remous dans l’auguste assemblée réunie pour assister au combat. Mortellement blessé, Aldwyn parvient tout de même à rendre la monnaie de sa pièce à son assassin, en le rendant hémiplégique d’un coup de surin dans l’aisselle. La nouvelle se termine avec le Maître de Chapitre Amhrad qui vient métaphoriquement remuer le couteau dans la plaie du pauvre Lanthus, qui après tout n’a fait que son devoir dans des circonstances difficiles, comme tout bon fils de Dorn est sensé le faire. Le karma galactique se chargera de te venger, gamin.

AVIS :

Ce n’est pas tous les jours que l’on à droit à autre chose que le récit des exploits de Ciaphas Cain lorsqu’on lit Sandy Mitchell, et ‘The Cost of Command’ est donc une rareté dans l’imposant catalogue que notre homme a produit pour le compte de la Black Library depuis vingt ans. Malheureusement, on ne retrouve pas la touche d’humour décalée qui fait tout le charme et l’originalité de sa prose dans cette Space Marinade tout à fait sérieuse, et qui se révèle dont être faite du même bois que les dizaines d’autres courts formats dédiés aux batailles menées par les héroïques Astartes. Mis à part quelques informations intéressantes sur les Astral Knights, on peut donc faire l’impasse sur cette histoire des plus classiques.

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Voilà qui conclut cette revue du Summer of Reading 2015, et si ce millésime remporte haut la main la palme de la quantité, il ne fait pas si bien en matière de qualité, ni de diversité (5 histoires de Marounes sur 7 nouvelles, cébokou). 2015 étant une année particulière pour la BL, on sera magnanime, mais on a connu des étés plus palpitants que celui-ci…

HAMMER & BOLTER [N°22]

Bonjour à tous et bienvenue dans la chronique du 22ème numéro de Hammer & Bolter ! Au programme ce mois-ci, le retour de Chris Dows (In the Shadow of the Emperor, H&B #14) et de Frank Cavallo (The Talon of Khorne, H&B #20), dans des adaptations « warhammerisées » d’Un pont trop loin pour le premier et de Contagion pour le second. Saluons également les grands débuts de Jordan Ellinger (une nouvelle de 27 pages) et les petits débuts de C Z Dunn (un extrait audio de trois minutes et une seconde) dans le webzine de la BL. Ce bon vieux Nick Kyme vient compléter le roster du numéro en signant un copieux court-format joignant l’horrible (une histoire de Salamanders1…) à l’insoutenable (…initialement publiée sous la forme d’un audio book2), mais chaque chose en son temps. Et Gilead’s Curse, me direz-vous ? Bien que cette question, sous des abords innocents, dissimule probablement un goût prononcé pour la souffrance humaine de la part de celui ou celle l’ayant formulée, je me dois d’y répondre et indique donc à ceux que ça intéresserait qu’aucun chapitre du surréaliste opus d’Abnett et Vincent ne figure au sommaire de ce numéro. La cause de ce hiatus (le 2ème en 6 mois tout de même) est peut-être à chercher dans la date de publication du présent objet d’étude (Juillet 2012), tout le monde ayant le droit de prendre des vacances. De mon côté, je dois avouer qu’un bref sursis avant de me replonger dans la prose débilitante du duo infernal n’est pas de refus non plus. Bref, tout le monde est content et c’est bien là l’essentiel.

1: Remember The Burning – H&B #14

2: Remember Thunder from Fenris – H&B #19

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The Mouth of Chaos – C. Dows [40K] :

Après un premier effort, très Rogue Trader-esque dans l’esprit, et assez moyen dans la réalisation, Chris Dows a opté pour une approche plus conventionnelle pour sa deuxième publication dans Hammer & Bolter.

Alors qu’une insurrection chaotique est sur le point de faire sortir le monde de Rysgah de l’ample giron de l’Imperium, la Garde Impériale lance une contre-attaque sur la capitale planétaire (éponyme) afin de calmer les velléités sécessionnistes de la milice locale. La topographie du théâtre d’action empêchant le Marteau de l’Empereur d’utiliser ses tactiques favorites (assaut massif de bidasses totalement sacrifiables et/ou bombardement à outrance de la position ennemie), le haut commandement impérial décide de la jouer fine et charge le 158ème régiment de parachutistes Elyséens de sécuriser une tête de pont dans la cité rebelle.

La nouvelle commence donc par une séance de chute libre synchronisée, qui voit nos skydivers de combat dessiner des symboles insultants envers les Rysgahans et les mères de ces derniers dans le ciel nocturne, déclenchant en représailles la mise en batterie d’une Hydre et la désintégration tragique d’une partie non négligeables de nos hardis paras. Fort heureusement pour les Elyséens, l’escouade de troupes de choc du Sergent Zachariah était inscrite sur la feuille de match, et ce dernier se fait une joie de descendre les trois servants du char ennemi, et ce alors qu’il n’a même pas encore touché terre. Vous avez bien lu, Zach’ snipe les faquins en pleine chute, de nuit et à une distance que l’on peut estimer à quelques centaines de mètres, si on en juge par le temps qui lui est nécessaire pour toucher terre après son triple headshot. C’est ce qu’on appelle une entrée en matière supercalifragilisticexpidélilicieuse (d’ailleurs le terme lui-même a été inventé par l’Empereur pendant la Grande Croisade après qu’il ait eu une vision de Zachariah réussir à décapsuler une bière depuis l’orbite haute avec un macro canon), qui a le mérite de camper d’emblée le personnage et donne au lecteur un avant-goût des capacités martiales du personnage principal et de sa fine équipe. Avec des gardes impériaux aussi balaises, qui a encore besoin de Space Marines ?

Ayant regagné le plancher des grox sans plus de péripéties, les Elyséens se mettent à creuser un tunnel à travers la paroi du cratère volcanique dans lequel Rysgah est bâtie afin de pouvoir apprendre la vie aux hérétiques faisant régner la terreur dans la cité. Il y a certainement une explication logique au fait que nos héros n’aient pas simplement opté pour atterrir directement sur zone (et donc du bon côté du cratère), au lieu de perdre du temps en de laborieux travaux d’excavation, mais Dows ne se donne pas la peine de la fournir, entamant sensiblement la crédibilité de son récit se faisant. Par chance, les ingénieurs Elyséens se révèlent avoir du sang squat dans les veines et ont vite fait de dégager un accès convenable pour le gros de la troupe, qui doit cependant essuyer un feu nourri de la part des sécessionnistes dès la sortie du tunnel. Soit exactement le genre de situation que des troupes aéroportées ne devraient pas rencontrer. L’officier en charge de cette opération doit être le beau-frère du Commandant Chenkov, ce n’est pas possible autrement.

Encore une fois, il revient à Zachariah et à ses spécialistes de sauver les miches de leurs petits camarades, ce qu’ils font avec un professionnalisme et une efficacité admirables, en bons Gardes Impériaux de film d’action qu’ils sont. L’épisode permet également à Dows d’introduire la fameuse Bouche du Chaos ayant donné son nom à la nouvelle, et qui se révèle être un vulgaire Difool chaotique dont les élucubrations prosélytes sont rapidement interrompues par un tir millimétré de lance-grenades venant détruire le haut-parleur relayant sa vile propagande (mais si, c’est possible). Même si le lascar reviendra taper sur les nerfs de nos héros à plusieurs reprises dans la suite de la nouvelle en lisant les dédicaces des auditeurs à l’antenne tentant de les faire basculer du côté obscur, son rôle dans l’intrigue restera très mineur, ce qui pose la question du choix effectué par Chris Dows au moment de nommer son travail1. Tant d’interrogations, et si peu de réponses, on se croirait dans Qui saura de Mike Brant.

De démonstration martiale en démonstration martiale, on comprend finalement que le but de Zach’ & Cie est de détruire un des trois ponts reliant le quartier où ils se trouvent avec le reste de la cité, ce qui permettrait aux forces impériales de sécuriser leur tête de pont et d’entamer la reconquête de Rysgah dans des conditions optimales. Secondées dans cette dangereuse mission par une escouade de gardes lambda, dont la seule utilité est de mourir sous les tirs ennemis à intervalles réguliers afin de montrer au lecteur que le risque est bien présent, les troupes de choc du 158ème réussiront bien sûr à dynamiter leur objectif malgré la présence du traditionnel boss-de-fin-que-le-briefing-tactique-n’avait-pas-prévu (tous des planqués au Strategium !), qui se trouve être ici une paire de tanks décatis, pour ceux que ça intéresse. Je laisse les lecteurs curieux découvrir la manière dont nos héros réussissent à se tirer de ce mauvais pas, la méthode utilisée étant trop absurde/épatante (c’est selon) pour être spoilée ici.

Dows marche très clairement sur les traces de Dan Abnett et des Fantômes de Gaunt avec ce The Mouth of Chaos. Au-delà des ressemblances évidentes entre les protagonistes de ces deux auteurs (une bande de Gardes Impériaux vétérans surclassant outrageusement tout ce qui a le malheur de croiser leur chemin), on peut également noter une certaine similarité de style, particulièrement dans les scènes d’action, décrites dans les deux cas à hauteur d’homme et parvenant de ce fait à rendre de manière convaincante l’intensité d’un affrontement en environnement urbain.

Si l’on peut tiquer devant la facilité avec laquelle les Elyséens de Chris Dows roulent sur les pauvres renégats leur faisant face, et déplorer la tendance de l’auteur à sortir ses héros du pétrin en leur permettant de réaliser des faits d’armes dignes d’un Primarque au pic de sa forme, on doit en revanche lui reconnaître un certain talent dans la description d’une opération des forces spéciales de la Garde Impériale, et plus particulièrement des paras Elyséens, dont le mode de déploiement par grav-chute est mis en scène de manière assez satisfaisante en ouverture de la nouvelle. Un autre bon point peut être attribué à Dows pour le soin qu’il a mis à doter chacun des six membres de l’escouade de Zachariah d’une (ébauche de) personnalité, permettant au lecteur de différencier les personnages sans trop de difficultés au bout de quelques pages. Mine de rien, un tel résultat nécessite un niveau certain en matière de character development, dont peu de contributeurs de Hammer & Bolter peuvent se targuer (d’ailleurs, In the Shadow of the Emperor pêchait dans ce domaine).

De façon plus marginale, on peut également reprocher à The Mouth of Chaos quelques incongruités scénaristiques (voir ci-dessus), ainsi qu’une entorse manifeste (et assez surprenante de la part d’un auteur apparemment au fait sur la question2) au background canon, l’un des hommes de Zachariah se déclarant en effet impatient de retourner sur Elysea pour chasser du pirate, ce qui n’arrivera selon toute probabilité jamais. Cette innocente remarque est d’ailleurs toute proche de déclencher une crise d’apoplexie chez Hawkeye, légitimement contrarié du manque de culture de son sous-fifre3, ce qui semble laisser la porte ouvert  à une possible sérialisation des aventures des cadors du 158ème dans le futur (futur pas encore réalisé à l’heure actuelle, si on croit la bibliographie du bonhomme), histoire de permettre à Dows de faire toute la lumière sur les causes profondes de cet incident.

Le solde final reste cependant assez largement positif, cette deuxième contribution à Hammer & Bolter s’avérant être de bien meilleure facture que la précédente, ce qui m’autorise à répondre de manière positive à la question posée en conclusion de la critique de In the Shadow of the Emperor quelques mois plus tôt. J’adore les histoires qui se terminent bien.

1 : Personnellement, je penche pour un titre suggéré par un éditeur pas franchement emballé par celui proposé initialement par Dows : Hey Chaos, Suck My Airborne Dick.

2 : Dows va même jusqu’à citer le nom d’un obscur Inquisiteur martyrisé par le Chaos (De Haan), créé par Graham McNeill dans Killing Ground.

3 : La vraie raison de la réaction épidermique de Zachariah à la bourde du première classe Beor n’est pas donnée, et cette relation apparemment compliquée avec la notion de retour au foyer est un autre point commun entre les Elyséens de Dows et les Tanith d’Abnett.

The Butcher’s Beast – J. Ellinger [WFB] :

Jordan Ellinger n’a semble-t-il pas fait carrière comme contributeur de la Black Library, la présente nouvelle représentant un quart de sa production pour la maison d’édition de Nottingham, si l’on en croit le site internet de cette dernière. Spécialisé dans l’univers de Warhammer Battle, Ellinger a ainsi signé trois courts formats mettant en scène Gotrek & Felix : The Contest, Kineater et The Reckoning.

La vie d’un Joueur d’Epée n’est pas de tout repos, comme Anton Erhardt, lieutenant au sein du glorieux régiment de Carroburg et accessoirement héros de The Butcher’s Beast, pourrait en témoigner. Incorporés à l’armée du général Schalbourg, les Carroburg commencent en effet leur journée par un sauvetage en règle des forces impériales, embusquées par un ost de Skaelings et d’Hommes-Bêtes pendant qu’elles traversaient la rivière Schilder. Bien loin de céder à la panique devant la brutalité de l’assaut des nordiques, les Joueurs d’Epée parviennent à tenir les hordes du Chaos en respect assez longtemps pour permettre à la cavalerie lourde impériale de prendre ces dernières à revers et les mettre en déroute. Leur commandant ayant été sévèrement blessé au cours de l’accrochage par une collision avec un Rhinox circulant sans permis, il revient à Anton de gérer les affaires courantes du régiment jusqu’au rétablissement (ou plus probablement, le décès rapide suivi du remplacement) de son supérieur.

Célébrés comme les héros qu’ils sont à leur retour au camp impérial, les Carroburg ont toutefois à peine le temps de s’en jeter un petit qu’ils doivent faire face aux ravages causées par une bête chaotique semblant se matérialiser comme par magie au milieu du campement à intervalles réguliers, avant de disparaître de façon tout aussi mystérieuse après avoir provoqué un boxon monstre dans le bivouac. L’affaire ayant logiquement attiré l’attention du Chasseur de Sorcières rattaché à l’armée du général Schalbourg, dont le départ en reconnaissance des forces ennemies empêche fort logiquement de garder sous contrôle les pulsions tortionnaires de l’implacable zélote, Anton décide de mener sa propre enquête afin de limiter les dégâts collatéraux autant que faire se peut. Parviendra-t-il à élucider l’énigme de la Bête du Boucher avant que cette dernière, ou les méthodes d’investigations radicales de l’Inquisition sigmarite, ne déciment l’armée impériale ?

Pourtant l’une des factions de Warhammer Fantasy dont le background a été le plus exploré, tant par les publications liées au jeu (Livres de Règles et d’Armée, Suppléments divers et variés) que par les romans et nouvelles de la BL, l’Empire n’a jamais été particulièrement gâté au niveau de la description de ce qui peut être considéré comme le socle de la littérature de wargame : la mise en scène de batailles rangées. Ce paradoxe repose en partie sur l’utilisation par les auteurs de la BL de héros impériaux opérant seuls (Gotrek & Felix, Brunner, Mathias Thulmann, la bande de Badenov) et/ou peu intéressés par la chose militaire (Zavant Konniger, Sam Warble), faisant en conséquence d’un affrontement de grande ampleur entre les forces impériales et un de leurs nombreux ennemis un évènement assez rare. Même si les dernières années ont vu cette tendance s’inverser avec la sortie de romans centrés sur les armées de l’Empereur (série des Sword of…, Iron Company, Grimblades, Warrior Priest, Reiksguard…), les courts formats de la BL n’ont pas été particulièrement impactés par ce changement de ligne éditoriale, ce qui fait de The Butcher’s Beast une nouvelle à part dans le « corpus impérial ».

La scène d’introduction de la nouvelle est à ce titre particulièrement intéressante, en ce qu’elle permet à Ellinger de confronter les fameux Joueurs d’Epée de Carroburg (sans doute le régiment nommé le plus fameux de tout l’Empire) à une horde de maraudeurs et d’Hommes-Bêtes dans un dernier carré héroïque. C’est typiquement le genre de scène que tous les joueurs impériaux se sont imaginés à la lecture du background de cette unité d’élite, et ont probablement essayé de recréer lors de leurs parties, avec plus ou moins de succès1. Il est également probable que ces mêmes joueurs se soient demandés comment diable de simples soldats humains, fussent-ils des vétérans couturés et équipés des meilleures armes et armures disponibles, puissent faire jeu égal avec, et même vaincre (parfois), des adversaires plus forts, plus rapides ou plus doués qu’eux au maniement des armes, ce qui est malheureusement (c’est le joueur de l’Empire qui parle) assez fréquent dans le monde de Warhammer. Coup de chance, Jordan Ellinger était apparemment taraudé par la même question, et y fournit une réponse somme toute assez logique : c’est leur discipline et leur capacité à se battre de manière coordonnée (couplées bien entendue avec leur moral supérieur, leur adresse au combat, leur armure de plates naine et leur zweihander de six pieds de long) qui permettent aux Joueurs d’Epée de tenir la ligne en toutes circonstances. Pour illustrer son point, l’auteur met d’ailleurs en scène les conséquences désastreuses de l’insubordination d’un des camarades d’Anton Erhardt, qui abandonne son poste pour tenter d’arracher son commandant aux griffes de l’ennemi et permet en conséquence à ce dernier de briser la cohésion de la formation des Joueurs d’Epée, ce qui conduit à leur quasi-annihilation. Ce souci de donner à l’univers fantastique de Warhammer des assises les plus crédibles et réalistes possibles est indubitablement l’une des forces d’Ellinger, et une des raisons principales de lire The Butcher’s Beast.

Une autre réussite à mettre au crédit de cette nouvelle est sa galerie de personnages, qui se révèlent être assez mémorables, en particulier le Chasseur de Sorcières et Templier de Sigmar Keller, un fanatique de premier ordre doublé d’un sadique dénué de tout scrupules, autant de « qualités » lui permettant de s’imposer sans problèmes parmi les antagonistes les plus haïssables de Hammer & Bolter. Sans être aussi marquants, le héros et son side-kick forment un duo à la Astérix & Obélix (comprendre que le petit réfléchit et le grand tabasse) assez efficace et tout à fait supportable, ce qui est déjà appréciable.

Cependant, tout n’est pas parfait non plus dans The Butcher’s Beast, le principal point faible du travail d’Ellinger étant son développement parfois artificiel, certaines décisions prises par les personnages et péripéties inclues dans le récit ne pouvant être justifiées autrement que par un bon gros « c’est le script qui veut ça » des familles. Résultat : des déductions un peu trop rapides pendant l’enquête menée par nos héros et un affrontement final avec la bête qui aurait vraisemblablement pu être évité avec une once de bon sens. D’ailleurs, cette fameuse bête n’est pas non plus au-dessus de tout reproche, les conditions de sa « création » étant assez capillotractées, ce qui est d’autant plus dommage que l’idée sous-jacente2 était encore une fois des plus crédibles. Rien de trop rédhibitoire donc, et des débuts incontestablement réussis pour Jordan Ellinger dans Hammer & Bolter.

1 : Surtout avant la V7 et l’arrivée d’une ténacité « inconditionnelle », mais je m’égare.

2 : Lors d’un affrontement contre des adversaires humains, il arrive que les médecins de campagne rattachés aux armées impériales soignent par erreur des combattants adverses, le chaos du champ de bataille ayant vite fait d’abolir tous les signes distinctifs permettant d’identifier l’allégeance des participants.  

Malediction (extrait audio) – C. Dunn [40K] :

MaledictionChristian Zoidberg Dunn, aka C Z Dunn, est généralement plus connu pour son rôle d’éditeur que d’auteur au sein de la BL. Si sa première casquette l’a conduit à être crédité sur de nombreux recueils de nouvelles (Way of the Dead, Swords of the Empire, Fear the Alien, Tales from the Dark Millenium, et plus récemment Age of Darkness  et Architect of Fate), sa seconde l’a mené à signer un certain nombre de courts formats, dont le script de l’audio book Malediction.

Les trois minutes et une seconde que durent l’extrait audio de Malediction n’apportant pas vraiment d’éléments propres à expliquer l’intrigue de l’histoire (pour faire court, c’est une description d’un assaut de cultistes et de mutants du Chaos sur la tranchée tenue par le héros et un de ses potes), j’ai complété l’écoute en récupérant l’extrait gratuit proposé sur le site de la BL (ici, pour ceux que ça intéresse). Dans ce qui doit être la scène d’introduction du récit, le Capitaine de la 6ème Compagnie des Dark Angels (Tigrane) interrompt le discours de remerciements donné par le Colonel Regan Antigone lors de la cérémonie d’hommage lui étant consacré en sa qualité de Héros de l’Imperium et seul survivant du régiment de Gardes Impériaux ayant contribué à stopper l’invasion du monde  de Procel par les forces du Chaos quelques décennies plus tôt. Titi a fait le déplacement pour honorer lui aussi Antigone, ayant combattu à ses côtés lors de cette fameuse campagne, mais également et surtout pour comprendre comment trois malheureux Gardes s’y sont pris pour repousser à eux seuls une offensive massive de soldats ennemis sur leur position, permettant ainsi aux défenseurs impériaux de se réorganiser et précipitant la défaite de l’Archennemi. Car on ne la fait pas au Capitaine Tigrane, que diantre (même s’il a mis un peu de temps pour se rendre compte que quelque chose clochait dans la version officielle). Antigone, visiblement fébrile devant la demande insistante de l’Ange de la Mort qui lui sert de voisin de table, se prépare donc à relater une fois de plus le récit de la journée la plus importante de sa vie, qui pourrait bien au final dissimuler quelque chose de pas très catholique ministoresque… Qui a dit Déchu ?

Difficile de se faire une religion sur la valeur de ce Malediction avec les quelques éléments mis à disposition par la BL et Hammer & Bolter. L’extrait audio couvre un passage d’action pure, et même si les bruitages sont assez sympas, le ton détaché avec lequel le narrateur raconte la lutte désespérée d’une nouvelle recrue de la Garde face à un mutant pas vraiment avenant empêche de se plonger dans le récit. L’extrait littéraire est plus intéressant, mais ne piquera sans doute que la curiosité des membres du Cercle Intérieur des Impardonnés, tant il s’avère évident que la miraculeuse survie d’Antigone a quelque chose à voir avec la présence de DA renégats (des renéDA quoi). D’ailleurs, quelle nouvelle mettant en scène des Dark Angels ne tourne pas autour de ce sujet ? À croire qu’ils n’ont fait que ça pendant 10.000 ans. Pour le lol, on retiendra la réplique pleine de bon sens de Maître Tigrane, un Space Marine ayant de la suite dans les idées.

Fireborn – N. Kyme [40K] :

FirebornTrois mois après avoir commis le très dispensable, si assez rigolo, Thunder from Fenris, Nick Kyme revient hanter les pages de Hammer & Bolter, tel l’assassin de retour sur les lieux de son crime. Cette fois-ci aux commandes de son chapitre de prédilection, j’ai nommé les Salamanders, on était en droit de s’attendre à un contenu (ne serait-ce qu’un peu) supérieur aux pataudes déambulations d’une poignée de cavaliers tonnerre dans la toundra pestiférée de Skorbad. Et, croyez-moi sur parole (vous pouvez aussi lire la suite de la chronique, hein), le bon Mr Kyme a fait précisément cela, en livrant une nouvelle bien supérieure à tout ce qu’il avait publié auparavant dans Hammer & Bolter… en matière de conneries. Quelle légende.

Notre histoire se déroule sur la planète Sepulchre IV, qui se trouve être un monde cardinal et en tant que tel, accueille bon nombre d’ordres de l’Ecclesiarchie, dont celui du Voile Ardent. Une des novices (Evangeline, et sa belle robe en crinoline) dudit ordre ayant reçu la vision d’un futur sanguinolent, elle fait part de cette épiphanie à sa hiérarchie, et se retrouve catapultée relique vivante pour sa peine (oui, la relation de causalité entre les deux évènements peut être discutée, et non, Kyme n’explique pas comment les bonnes sœurs sont parvenues à cette décision). On apprendra bien plus tard que le chtiote a reçu un grand pouvoir, celui d’apprendre instinctivement le nom véritable de tous les démons se situant dans sa périphérie immédiate, ce qui lui permettrait de les bannir dans le Warp sans faire un pli. J’utilise le subjonctif car, l’Empereur étant un troll (c’est connu), il a cru bon d’accorder ce don à une personne ayant fait vœu de silence (d’ailleurs, tous les membres de l’Ordre du Voile Ardent sont logés à la même enseigne), ce qui réduit drastiquement l’utilité de ce cadeau divin1. En l’état, les nouvelles facultés de sœur Evangeline sont à peu près aussi utiles que les moulages de tétons sur les cuirasses des Blood Angels, mais Kyme a bien évidemment un plan pour contourner le problème.

Les prévisions météo de la pythie silencieuse s’étant promptement réalisées (tellement promptement d’ailleurs – 20 minutes – qu’il est possible que la vision prophétique n’ait été induite que par un simple regard par le velux de l’abbatiale), Sepulchre IV doit faire face à une invasion en règle de la part de la Rage Rouge (Red Rage), armée chaotique très logiquement inféodée au Dieu du Sang et menée par Hagtah Dreghgor, seigneur de guerre semble-t-il plus intéressé par les travaux de terrassement (il a façonné une arène gladiatoriale de ses mains) que par la conduite de son armée. Sa seule utilité dans la nouvelle sera de présider à la création d’une machine démoniaque, que je ne peux décrire que comme un Goldorak de Khorne (appelons le Khornorak), possédant la particularité de se nourrir de la rage ambiante pour devenir plus gros et plus méchant, et de l’envoyer chercher sœur Evangeline, qui n’a semble-t-il pas daigner répondre aux centaines de textos enflammés qu’il lui a envoyé depuis son arrivée sur la planète. Le Khornorak étant bien entendu insensible à tout ce que les défenseurs impériaux peuvent lui envoyer sur le coin du museau, transformant les sœurs de bataille ayant le malheur de croiser sa route en pâté de foie et s’amusant à faire des jongles avec les Immolators chargés de le stopper, rien ne semble être en mesure d’empêcher la Rage Rouge de capturer la mascotte adverse, sauf peut-être… une escouade de Firedrakes Salamanders. Ça tombe bien dis-donc, il y en a justement une qui passait dans le coin, quel morceau de chance (ironie inside)2. Loué soit Pépé.

Le cadre étant planté, faisons donc connaissance avec nos héros. Question : qu’est-ce qui est très gros, très très vert et très très très énervé ? Tous ceux qui ont répondu Hulk ont gagné une séance d’initiation aux joies de l’arco-flagellation, ce qui leur permettra je l’espère de méditer sur l’importance de ne pas mélanger deux univers distincts. Les autres auront bien entendu pensé à Tsu’gan, le Salamanders le plus haineux, arrogant et indiscipliné ayant jamais existé, et rival habituel du « gentil » Da’kir (voir The Burning, Hammer & Bolter #14), personnage principal de la saga consacré par Nick Kyme aux descendants de Daddy Cool, alias Vulkan. Intégré à la prestigieuse Première Compagnie des (sur)hommes en vert depuis peu, Tsu’gan est décrit par Kyme comme pas encore totalement familiarisé avec sa nouvelle armure terminator, ce qui n’aura pas d’autre effet que de le faire marcher un peu plus lentement que ses comparses plus expérimentés, ce qui n’est pas la mort non plus. Ayant reçu l’email de détresse envoyé par l’Ordre du Voile Ardent, les Salamanders acceptent de venir au secours des bonnes sœurs, ou plutôt de sécuriser la relique convoitée par le Chaos en l’embarquant sur leur vaisseau avant de retourner sur Nocturne en laissant les sistas repousser la Rage Rouge toutes seules, ce qui, pour un Chapitre notablement décrit comme altruiste et protecteur envers les populations civiles dans le fluff, est un peu raide (même si assez logique au final).

C’est précisément à ce moment de l’histoire que Nick Kyme décide d’introduire un genre jusque-là non abordé par la Black Library (à raison), à savoir le vaudeville. Comment ? Eh bien, en mettant en place un savoureux quiproquo, les Salamanders se rendant à la surface de la planète en pensant devoir récupérer une relique des plus classiques (les rognures d’ongles de Ste Analgésine, le bong du Cardinal Aquarium, une liste de course manuscrite de Sebastian Thor du temps où il était étudiant en deuxième année de licence de mercatique sur Dimmamar…), et non pas une personne de chair et de sang. En conséquence, le plan du sergent Firedrake, l’illustre Herculon (silence dans les rangs ! Il ne l’a pas choisi) Praetor ne peut être mis en application, une téléportation directe sur le vaisseau des Salamanders ne pouvant avoir qu’une issue fatale pour un être humain non protégé par une armure terminator. Ho ho ho, comme c’est ballot. On ne saura jamais qui est coupable dans cette affaire, mais le ridicule engendré par cette réalisation tardive colle assez mal avec le professionnalisme à toute épreuve qui est normalement les marques de fabrique des Space Marines et des sœurs de bataille.

Au-delà de cette péripétie rocambolesque, c’est toute l’intervention des Salamanders sur Sepulchre IV qui se retrouve discréditée par un Nick Kyme en très grande forme. Les Firedrakes débarquent ainsi à la surface de la planète à 10 kilomètres de leur cible, distance qu’ils effectueront à pied. Raison de cette insertion « chirurgicale » : la supériorité aérienne dont dispose la Rage Rouge à ce moment de la campagne, et qui rend trop dangereux un déploiement sur zone en Thunderhawk. Soit. C’est vraiment dommage que les Space Marines n’aient pas à leur disposition une sorte de navette blindée qui « tomberait » littéralement à l’endroit désiré, avec une vélocité suffisante pour déjouer toute tentative d’interception ou de destruction par la DCA ennemie… Ou que les armures terminator ne soient pas fournies avec un équipement permettant une téléportation instantanée sur zone… Rappelle-nous comment les Firedrakes prévoyaient de quitter le couvent de l’Ordre du Voile Ardent déjà, Nick ?

Un peu plus tard, après que les Firedrakes survivants aient réalisés qu’ils se sont fait trollés par les sistas, et alors que le Khornorak frappe doucement à la porte du cloître où la fine équipe s’est réfugiée, Praetor met au point un plan de bataille aussi retors que stupide. Bien conscient que le plus important est d’empêcher le Chaos de s’emparer de sœur Evangéline, et prêt à la tuer de ses mains si nécessaire, l’astucieux sergent va décider de sacrifier la moitié de son escouade pour « ralentir » l’invincible machine-démon de la Rage Rouge (je mets des guillemets parce que ça n’a pas vraiment marché), afin de gagner du temps pour… ne rien faire du tout. Comme prévu, le Khornorak atomise l’arrière-garde des Salamanders et se rue sur les derniers défenseurs de la relique, mais pas avant que Praetor ait eu le temps de donner une dernière instruction à Tsu’gan : « si je n’arrive pas à coucher le Deceptikhorne en un contre un, arrange-toi pour buter la fille avant qu’il ne la chope, et on se téléportera peinard sur notre vaisseau ». Se pose alors la question de savoir pourquoi les Sala’ n’ont pas collé un bolt dans le crâne d’Evangeline quand il est clairement apparu qu’ils n’avaient aucune chance de stopper le Gundam de Dreghgor et activé leurs balises avec le sentiment du devoir accompli alors qu’ils n’avaient encore subi que des pertes mineures. Ou, quitte à la jouer plus chevaleresque, aient tenté de téléporter la novice avec eux, en comptant sur le fait qu’elle était visiblement une élue de l’Empereur et avait donc une petite chance de survivre au voyage. Au pire, elle serait morte pendant la translation, ce qui aurait été regrettable mais aurait tout de même compté comme une victoire de l’Imperium. Au lieu de ça, Praetor a préféré sacrifier la totalité d’une escouade de Space Marines d’élite, pour obtenir exactement le même résultat. C’est ce qui s’appelle une gestion fine des ressources.

Enfin, je ne peux résister à vous relater la manière dont notre imbuvable héros s’y prend pour défaire le mâââl alors que celui-ci était sur le point de l’emporter. En position de dernier défenseur suite à la transformation de l’insondable Herculon en bas-relief du sanctum après une pichenette amicale du Khornorak, Tsu’gan est sur le point de tordre le coup de sa protégée lorsqu’une illumination le frappe. Faisant fi du sacrifice de tous ses collègues de bureau ainsi que de celui de milliers de troupes de l’Ecclesiarchie afin d’empêcher la Rage Rouge de mettre les mains sur la relique vivante, il  jette  cette dernière dans les pattes du mécadémon et s’en va en loucedé en priant très fort pour que sa vague intuition3 se révèle être fondée (ce qui est évidemment le cas, il faut que ça se termine bien tout de même). Heureusement que son sergent lui avait spécifiquement ordonné d’empêcher cette situation de se produire à tout prix trente seconde plus tôt, hein. Je t’enverrais tout ça en conseil de guerre pour insubordination aggravée, moi. Toujours est-il que la petiote prononce le mot magique et renvoie le ressortissant du Warp dans sa contrée natale, perdant son pouvoir pour la peine (fallait pas briser ton vœu de silence cocotte) mais permettant à la nouvelle de se terminer sur un happy end. Enfin, c’est pas comme si la Rage Rouge était sur le point de balayer les dernières poches de résistance impériale, et n’avait invoqué le Khornorak que pour accélérer un peu les choses. Il faut savoir profiter des petits bonheurs de la vie.

Vous l’aurez compris à la lecture de la première partie de cette chronique, Fireborn peut être légitimement considérée comme la pire (ou la meilleure, c’est selon) contribution de Nick Kyme à Hammer & Bolter. Là où le bonhomme est fort, c’est qu’il arrive à se surpasser de soumission en soumission et à progresser dans le n’importe quoi à un rythme exponentiel. Si j’ai généralement tendance à passer assez facilement l’éponge sur les incohérences dans le scénario des nouvelles que je lis (un faux-raccord narratif est si rapidement arrivé), c’est ici impossible tant ces dernières sont nombreuses et centrales dans le déroulement de l’histoire. C’est bien simple, rien ne tient debout dans ce texte, mise à part la fine couche de fluff et de character development que Kyme a réussi à incorporer dans son récit. Il est ainsi possible de glaner quelques informations relatives au background des Salamanders à la lecture de Fireborn, ainsi que de suivre la quête de Tsu’gan pour tenter de contrôler la raaaaage qui semble menacer de l’engloutir à chaque instant4, ce qui est très loin de compenser toutes les absurdités, contre-sens et autres inanités que l’auteur débite à tour de plume au cours des 30 pages que compte la nouvelle. Je ne sais pas dans quelles conditions Nick Kyme a rédigé cette dernière, mais il paraît évident à la lecture qu’il n’a pas accordé à la relecture de son manuscrit le temps nécessaire, ce qui lui aurait permis de corriger les bévues les plus évidentes de son script, à commencer par les entorses faites au fluff canon (la randonnée des Firedrakes jusqu’au couvent, pour ne donner qu’un exemple) dont la présence est d’autant plus surprenante que le bonhomme est de fait responsable du développement de l’historique des Salamanders depuis qu’il a commencé à écrire The Tome of Fire.

Pour ma part, j’attribue l’échec patent qu’est Fireborn à la décision de Kyme de mettre en scène des scènes d’action les plus cinégéniques possible, sans prendre le soin de les intégrer de manière « intelligente » dans son schéma narratif. Pour reprendre l’exemple du trek de l’escouade de Praetor, cette marche d’approche n’avait pour but que de permettre une première rencontre entre les Firedrakes et le Khornorak, afin de faire ressortir toute la dangerosité de cet ennemi (un des terminators y laissera d’ailleurs sa peau ses écailles). Même logique pour le gag de l’uberisation non prévue dans le briefing de mission (forcer les Salamanders à se battre contre un adversaire apparemment impossible à vaincre) et l’approche du « chacun son tour » lors de l’affrontement final avec le T-888 (souligner l’héroïsme des géants verts et permettre à Praetor et à Tsu’gan de s’illustrer en un contre un). Cette primauté de l’épique sur la logique se retrouvait déjà dans Thunder from Fenris, autre audio book guère avare en situations assez peu crédibles dès lors qu’on y réfléchissait à deux fois. J’avais espéré que l’inclusion de ses chers urodèles de l’espace à l’intrigue pousserait Mr Kyme à donner le meilleur de lui-même, mais cela n’a malheureusement pas été le cas. Ou peut-être que si, allez savoir.

1 : C’est d’ailleurs ce que fera remarquer le sergent Salamanders au père supérieur en charge de la protection de la novice, lequel lui renverra un magnifique Ta Gueule, C’est l’Empereur dans les dents en retour. Tu sais que tu as des gros problèmes de cohérence quand même tes personnages les remarquent.

: Comme pour Thunder from Fenris, Kyme catapulte la crème de la crème d’un Chapitre Space Marines dans un conflit de grande échelle, sans aucun support, ce qui va à l’encontre de toute logique et laisse envisager que les Space Marines accomplissent leur mission de protection de l’Imperium comme une patrouille de police faisant des rondes dans son quartier. Manquerait plus qu’ils aient une ligne directe que les citoyens impériaux en détresse puissent appeler.

3 : Evangeline est techniquement capable de bannir le démon animant le Khornorak, si elle arrive à s’en rapprocher assez pour hacker son nom véritable. Dans l’esprit, cela ressemble assez fortement à la décision prise par le Colonel Straken dans Waiting Death (Hammer & Bolter #4), là aussi sur la base d’un obscur pressentiment qui avait toutes les chances de ne pas être fondé. Pourquoi s’embêter à mettre en scène des dénouements logiques et sensés lorsque l’on peut tout régler à coup d’illuminations géniales ?

4 : Sérieusement mec, prend un Sédatif PC et mets-toi au yoga, ou claque la porte du Chapitre et envoie une candidature spontanée à Angron, et arrête de faire perdre du temps à tout le monde.

Leechlord – F. Cavallo [WFB] :

Frank Cavallo, qui s’était déjà distingué lors de son baptême hammeretbolterien en mettant en scène un personnage nommé issu du bestiaire des Guerriers du Chaos (Assis là j’m’enfile des Grim’, Hammer and Bolter # 20), tape à nouveau dans l’escarcelle des Dieux Noirs pour sa deuxième tentative et s’essaie cette fois-ci au bon docteur Mamour de Warhammer, Festus la Sangsue1.

Chargée par le comte de l’Ostland, Valmir von Raukov, de trouver et d’annihiler l’armée responsable de la destruction du village de Salkalten, une petite force de soldats impériaux est embusquée et massacrée par une horde de skavens en maraude. Seul survivant de la catastrophe, le chevalier Jürgen von Sturm se réveille au milieu des cadavres de ses frères d’armes, sérieusement blessé et à moitié délirant de fièvre, conséquence de l’estafilade récoltée de la patte d’un skaven au cours d’une précédente ratonnade (c’est le cas de le dire). Malheureusement pour notre héros, son calvaire n’est pas passé inaperçu, et Festus en personne débarque afin de prodiguer ses bon soins au guerrier agonisant. Il serait en effet dommage de laisser se perdre l’immense potentiel de von Sturm, dont la résistance à la maladie fait un incubateur rêvé pour la dernière création de l’onctueux oncologue.

Retrouvé en train d’errer dans la Forêt des Ombres après avoir été vacciné contre la leptospirose par son nouveau médecin de famille (Hey, lui demande même comment vont ses enfants ! Dommage qu’ils soient morts), Jurgen parviendra-t-il à prévenir ses sauveteurs du terrible danger qu’ils courent à le ramener chez eux, ou se noiera-t-il dans ses glaires avant de parvenir à bon port ?

Cavallo signe avec Leechlord une petite nouvelle sympa, mais moins aboutie à mes yeux que sa précédente soumission pour Hammer & Bolter (The Talon of Khorne). En cause, l’absence de plus-value fluffique du texte, qui se « contente » de décrire le Mengele Nordlander faire mumuse avec les humeurs d’un brave chevalier impérial qui aurait bien aimé qu’on le laisse râler en paix. Là où The Talon of Khorne brillait par sa description de la vie et de la mentalité propres aux habitants de Norsca, toujours prêts à défendre leur place dans la queue à la boulangerie jusqu’à la mort, même (surtout) si un Ogre du Chaos décide de leur griller la politesse et de prendre la dernière Tradition pas trop cuite de la fournée du matin, Leechlord n’apporte pas grand-chose de comparable, se contentant de nommer un ordre de chevalerie impérial (encore un) et un neveu de von Raukov.

Le personnage de Festus pâtit également du service minimum effectué par Frank Cavallo, l’affable praticien collant parfaitement à l’image donnée de lui dans le Livre d’Armée Guerriers du Chaos, mais ne gagnant pas en profondeur pour autant. En bon personnage de Nurgle qui se respecte, Herr Egel se montre jovial et prolixe, mais il lui manque un petit quelque chose pour se démarquer du stéréotype du savant fou duquel il n’est que la déclinaison dans le monde de Warhammer. À titre personnel, j’aurais trouvé opportun de le doter d’une compassion dévoyée (c’est d’ailleurs son altruisme qui l’a damné en premier lieu), option que Cavallo semble d’ailleurs jauger à un moment du récit, lorsque von Sturm espère encore qu’en dépit de son apparence peu engageante et de sa réputation de croquemitaine, Festus va vraiment le remettre sur pied2 ; aurait apporté un supplément de personnalité au petit nouveau de la Chaos Academy. Ca et/ou forcer sur son approche résolument anti-spéciste de la création. Aymeric Caron, sort de ce corps.

Bref, une soumission passe-partout et loin d’être honteuse de l’ami Cavallo, mais qui aurait sans doute pu (et donc du) être supérieure. C’est pas beau se reposer sur ses acquis Frank.

1 : À ne pas confondre avec Fistus le Suçon, aspirant champion Slaaneshi dont la glorieuse carrière s’est arrêtée après une tentative malavisée d’initier un Maraudeur Skaeling peu compréhensif aux joies du bondage.

2 : Ce qu’il fait au final d’ailleurs, et c’est d’autant plus remarquable que son patient souffrait alors d’une double fracture du fémur, conséquence d’une roulade à cheval mal négociée.

Au final, un numéro assez robuste à défaut d’être totalement sexy, l’absence de Gilead’s Blood faisant logiquement remonter le niveau global et venant souligner l’assez grande homogénéité des styles des différents contributeurs, dans le plus pur esprit BL. Dows et Cavallo passent tous deux leur deuxième galop, sans génie particulier mais sans démériter non plus. Ellinger remporte facilement la palme avec un premier travail très bon sur certains aspects, mais perfectibles sur d’autres (dommage qu’il n’ait pas eu l’occasion de retenter sa chance avant le dépôt de bilan de Hammer & Bolter). Kyme… continue de construire sa légende noire (rien à voir avec la pigmentation des Salamanders) avec une application aussi admirable que suicidaire. Pour finir, Dunn, en bon éditeur de la Black Library qu’il est, réussi à placer son extrait dans l’exacte moyenne de la littérature produite par la maison d’édition de Nottingham : ni pour ni contre, bien au contraire. À la prochaine !

HAMMER & BOLTER [N°14]

Bonjour à tous et bienvenue dans la critique du 14ème numéro de Hammer & Bolter ! Au menu de cette chronique de fin d’année, trois nouvelles peu folichonnes et le deuxième chapitre de Gilead’s Curse, objet littéraire non identifié et pour le moment assez décevant. Ah, ça vend du rêve, je sais.

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Gilead’s Curse – ch.2 – D. Abnett & N. Vincent [WFB] :

Gilead's CurseNous avions laissé Gilead en plein combat avec un « mystérieux » chevalier à la fin du chapitre 1. Le deuxième épisode du roman-feuilleton commence donc logiquement par la conclusion de cet affrontement épique (quelques heures de baston non stop, tout de même) entre l’elfe dépressif et sa némésis vampirique, dont les performances se trouvent réduites par l’arrivée du jour nouveau. Le duel est toutefois interrompu par l’arrivée inopinée d’une foule de paysans en colère, bien décidés à cueillir des champignons se débarrasser du suceur du sang squattant la forêt municipale depuis quelques mois.

Bien évidemment, Vincent n’explique pas comment ces bouseux ont réussi à trouver leur proie (que Gilead a mis deux jours entiers à débusquer), ni pourquoi ils ne se sont décidés à agir que maintenant : ce serait beaucoup trop convenu et rationnel. Toujours est-il que, d’un commun accord, nos deux bretteurs décident de mettre le match en pause et de filer à l’albionnaise avant l’arrivée des hooligans. Oui oui, Gilead laisse tranquillement partir le vampire qu’il avait juré de neutraliser, confiant dans le fait que ce dernier soit trop mal en point pour poursuivre ses déprédations, même s’il reconnaît néanmoins qu’aucun humain normalement constitué n’est capable de lui tenir tête. J’aurais plutôt tendance à penser que les nombreuses blessures subies par le disciple d’Abhorash ne l’incitent au contraire à picoler quelques litres de rouge dans la ville la plus proche afin de se refaire une santé, mais passons.

Après quelques jours passés à récupérer de ce premier rendez-vous galant, pendant lequel il a gagné quelques bleus et bosses, notre héros reprend sa quête, et finit par déboucher dans un village qui semble abandonné. Flairant le mauvais coup, il poursuit son enquête jusque dans les souterrains du bourg, où il tombe très logiquement sur l’inévitable colonie skavens locale, ainsi que sur les survivants hagards de la malheureuse expédition de dératisation montée par les citoyens du cru. Ayant réussi son jet de compassion (5+ sur 1D6), Gilead se met donc en travers du chemin de la horde scrofuleuse et la taille en rondelles, gagnant par la même occasion un side kick humain maniant la bêche avec un talent inné. Et le vampire dans tout ça, me demanderez-vous ? Et bien le vampire apparaît derrière les skavens au moment où Gilou décide de passer en mode shadow-fast (une sorte de bullet time elfique pendant lequel notre héros se transforme en Flash Gordon), et les deux compères ont tôt fait de mettre les hommes rats en déroute. Ce premier ennemi vaincu, Gilead décide-t-il de poursuivre sur sa lancée et d’en finir avec le chevalier mort-vivant pendant qu’il est encore en forme super saiyan ? Non, bien sûr (je suppose qu’il a raté son test de stupidité) : il lui fait coucou avec son épée et les deux se séparent bons amis. Fin du chapitre.

Vous l’aurez compris, je n’ai que très moyennement goûté ce deuxième épisode, qui n’a fait que confirmer mes craintes quant à la qualité de ce roman feuilleton, à tel point qu’il me semble préférable de faire abstraction de la (non) présence de Dan Abnett au casting de ce dernier, et de juger les travaux de sa chère et tendre indépendamment de ses propres écrits. Dans cette optique, peut-être que le style, très distinct de celui que l’on retrouve habituellement dans les productions estampillés Black Library*, sera plus appréciable pour le lecteur déboussolé que je suis. Comme dit dans la critique du numéro précédent, Vincent lorgne du côté des nouvelles fantastiques de la première moitié du XXème siècle (beaucoup de descriptions pour retransmettre au mieux l’ambiance au lecteur, champ lexical très riche, peu de dialogues, rythme lent, scènes violentes assez rares), ce qui, en soit, n’a rien de condamnable. Je ne sais pas si je pourrais un jour lire des phrases telles que « What had happened to the food chain ? », « Gilead separated another rat from its life force » ou « He counted the torches and worked out how long they might burn for and at what temperatures. » dans une nouvelle BL sans avoir envie de jeter mon ordinateur par la fenêtre, mais je ferai de mon mieux.

Plus grave en revanche sont les nombreuses incongruités qui parsèment le récit, et peuvent être séparées en deux catégories. D’un côté, on retrouve les incohérences d’ordre pratique (par exemple, Gilead arrive à poignarder le chevalier vampire en plein cœur, ce qui fait tomber ce dernier à la renverse : au lieu de capitaliser sur cet avantage chèrement acquis et achever son adversaire mal en point, l’elfe préfère ramasser un morceau d’étoffe pour essuyer sa lame, laissant à son ennemi le temps de se ressaisir**) qui empêchent le lecteur de s’immerger totalement dans l’histoire. De l’autre, on a l’impression que Vincent n’a pas pris le temps de s’imprégner du background de Warhammer, ce qui lui fait commettre des bourdes impardonnables. Les skavens deviennent ainsi sous sa plume des adversaires pathétiques, aux attaques aussi faibles et désordonnées que celles d’un enfant de 5 ans. Pire, ses hommes rats sont tout bonnement incapables de se relever tous seuls quand ils tombent par terre, tant ils semblent manquer de coordination. Pour une race dont l’une des factions principales est constituée d’implacables assassins adeptes des arts martiaux, c’est tout bonnement risible.

En conclusion, un deuxième chapitre guère différent du premier, tant sur le fond que sur la forme. Si la seconde est plus déroutante par sa différence avec le style BL que véritablement mauvaise, le premier est en revanche d’un niveau trop faible pour satisfaire le lecteur, quel que soit niveau d’attachement ou de compassion pour la prose de Ms Vincent et le personnage de Gilead. Mais qu’allaient-ils donc faire dans cette galère ?

* : Exemple notable : la rareté des dialogues dans la narration, caractéristique particulièrement présente dans ce deuxième chapitre, où seulement 25 mots seront prononcés par les personnages en 18 pages.
** : Autre exemple marrant, Gilead est décrit comme étant incapable de frapper un adversaire ne lui faisant pas face (honneur elfique oblige), et doit donc se démener pour se placer dans l’arc de vision des skavens qu’il attaque, à plus forte raison car ces derniers font tout leur possible pour fuir ses coups.

The Burning – N. Kyme [40K] :

The BurningAprès Nik, Nick. Il s’agit cette fois de Mr Kyme, auteur de The Fall of Damnos, roman dont un chapitre avait eu le privilège de figurer au sommaire du quatrième numéro de Hammer & Bolter. Foin d’Ultramarrants, Nick nous revient cette année avec une nouvelle consacrée à son chapitre de prédilection*, les Good Guys Greg d’un lointain futur ravagé par la guerre, l’Armée du Salut du 41ème millénaire, les géants verts du Segmentum Ultima, je veux bien sûr parler des Salamanders.

En guise d’introduction, l’auteur nous prévient d’emblée que le texte en question relate des évènements ayant pris place entre Salamander et Firedrake, les deux premiers tomes de la série consacrée par Kyme aux fiers guerriers de Nocturne. Traduction : « si tu n’as pas lu ces deux bouquins, tu risques de ne rien comprendre à ce qui va suivre** ». Même pas peur Nick, même pas peur : j’ai survécu à Curse of the Necrarch et Forged Into Battle ; c’est pas une petite nouvelle de rien du tout qui va me faire peur. Bring it on boy.

De quoi est-il donc question dans cet interlude ? Eh bien, de ce que j’en ai compris, The Burning projette le lecteur dans l’inconscient de Da’kir, alors que ce dernier revit les derniers moments de Jeanne d’Arc/Jean Hus/une allumette au cours du concours de combustion spontanée faisant office chez les Salamanders de test de potentiel psychique. Dans son délire, Da’kir revit/imagine (ce n’est pas très clair) la résistance de son village contre une expédition d’Eldars Noirs en maraude sur Nocturne. Ramené à son statut de simple humain pour l’occasion, ce qui le perturbe fortement (Putain, où est mon armure ? Qui est l’andouille qui m’a chouré mon deuxième cœur ? Et pourquoi est-ce que j’ai la voix de Christophe Willem ?), Da’kir termine sa vision par un affrontement symbolique contre Kadai, feu (haha) le capitaine de la 3ème Compagnie des Salamanders, carbonisé par un tir de fuseur lors d’une campagne contre le Chaos. La nouvelle s’achève par un debriefing entre les deux Archivistes en charge de la supervision de l’épreuve, qui, comme de juste 1) n’ont jamais vu auparavant une recrue potentielle d’un tel niveau 2) se demandent s’il ne vaudrait pas mieux coller un bolt dans la tête, pour éviter les problèmes 3) décident finalement de laisser à Da’kir, qui grésille dans son coin, le bénéfice du doute, car le Tome de Feu contient une vague prophétie de deux lignes qui pourrait désigner ce dernier contre le sauveur du chapitre dans les années à venir.

Si je ne dispose pas du bagage nécessaire pour m’avancer sur la qualité de l’intrigue développée par Kyme dans cette nouvelle, la lecture de cette dernière m’a laissé plutôt froid (un comble). Passe encore le fait que le style de l’auteur soit aseptisé au plus haut point, et que ce dernier n’ait pas fait de grands efforts pour s’assurer que les lecteurs n’ayant aucune connaissance de ses ouvrages consacrés aux descendants de Vulkan puissent comprendre de quoi il en retournait (à la différence des nouvelles écrites par Abnett dans le cadre de ses séries Eisenhorn et Ravenor***) : à mes yeux, les principaux défauts de The Burning sont de deux ordres.

Le premier est son caractère, peut-être pas réel, mais en tout cas ressenti en ce qui me concerne, tout à fait dispensable dans l’arc narratif. C’est triste à dire, mais le récit de l’épreuve de Da’kir m’a immédiatement fait penser aux dispensables aventures de Gileas Ur’Ten, capitaine Silver Skulls favori de Sarah Cawkwell, productions littéraires tenant plus du développement du fluff de l’armée de l’auteur que de nouvelles SF à proprement parler****. On en sait certes un peu plus sur le passé du personnage de Da’kir à la fin de The Burning, mais je doute que ces éléments supplémentaires ne se révèlent particulièrement importants ou même intéressants pour la suite de l’histoire. En tant que lecteur et client, j’en attends plus.

Le deuxième reproche que je ferai à The Burning est le manque d’attention porté par Kyme à la cohérence de son propos. Le diable se cache peut-être dans les détails, mais quand je lis qu’une bande de guerriers humains armés d’arcs et d’arquebuses arrive à faire exploser un Raider et à massacrer son équipage de Cabalites en trente secondes, j’attends que l’auteur m’explique comment les indigènes s’y sont pris pour avoir le dessus sur un adversaire intrinsèquement et technologiquement bien supérieur. Même sans rentrer dans un niveau de détail démentiel, quelques lignes justificatives auraient été les bienvenues, en ce qu’elles auraient prouvé que Kyme était bien conscient du problème causé par ce résultat contre-intuitif. Au lieu de ça, on a plutôt l’impression d’assister à l’adaptation de la bataille d’Endor avec les Nocturniens dans le rôle des Ewoks et les Eldars Noirs dans celui des Storm Troopers.

Au final, The Burning n’est pas la nouvelle qui me réconciliera avec l’œuvre de Nick Kyme, même si son cycle Salamanders me semble de bien meilleure facture que The Fall of Damnos. Oui, le contraire eut été étonnant (et désolant), mais on se console comme on peut.

* : On ne peut qu’admirer la productivité de Nick Kyme, dont la série compte déjà quatre romans (Salamander, Firedrake, Nocturne et Rebirth) et une dizaine de nouvelles.
** : Blague à part, je ne peux qu’encourager ce genre de pratiques de la part des éditeurs de Hammer & Bolter, qui permettrait aux lecteurs de ne pas devoir attendre la moitié de la nouvelle avant de réaliser que cette dernière est connectée à une autre histoire précédemment publiée dans le webzine.
***: Thorn Wishes Talon, Backcloth For A Crown Additional, et mon préféré, Playing Patience.
****: Pour reprendre la définition donnée par Marc Gascoigne, éditeur chef de la Black Library de 1997 à 2008, dans son introduction du recueil Let The Galaxy Burn, les nouvelles BL doivent se concentrer sur la résolution d’un problème (quelqu’un sait-il comment on éteint un monolithe nécron ?) ou explorer des situations de type « et si… », non couvertes dans le reste du background (et si l’Empereur était en fait un corgi ?).

In the Shadow of the Emperor – C. Dows [40K] :

La première publication de Chris Dows dans Hammer & Bolter est assez déconcertante, en ce qu’elle semble s’inscrire dans un cycle narratif, qui, sauf erreur de ma part, n’a pas encore été publié par la Black Library. Plus habitué à évoluer dans l’univers de Star Trek que celui de Warhammer 40.000, Dows livre une nouvelle à l’intrigue et au déroulé assez opaques, et dont le propos peut être résumé comme suit.

Surpris par la matérialisation soudaine hors du Warp de deux Space Hulks infestés d’Orks, le capitaine Barrabas (aucun rapport explicite avec le lauréat du titre de Mister Jérusalem 33 – Jésus finissant, comme chacun sait, premier dauphin) emmène les rescapés du croiseur impérial Merciless Fist (dont il était le capitaine) sur la surface d’une planète voisine. Poursuivis par des peaux vertes désireux d’aller jusqu’au bout de leur démarche d’extermination, notre petit groupe de survivants tente tant bien que mal de distancer ses assaillants, survivre à la faune locale et empêcher le Commissaire Abdiel de vider son pistolet bolter sur le pauvre Barrabas, pour lequel il voue une haine aussi profonde que succinctement expliquée par l’auteur. Apparemment, le grand-père de Barrabas, sous les ordres duquel Abdiel servait, s’est débrouillé pour détruire son cuirassé Emperor au cours d’un affrontement, ce qui a précipité la disgrâce du Commissaire, accusé par sa hiérarchie d’avoir failli à son rôle en n’exécutant pas le faquin avant qu’il commette l’irréparable. Ayant survécu à l’explosion du vaisseau, Abdiel s’est depuis arrangé pour suivre les descendants de papi Barrabas (eux aussi commandants de vaisseau, comme c’est pratique*) comme leur ombre, prêt à se venger des errements de ce dernier sur sa progéniture.

Ces rapports compliqués – Abdiel passant l’essentiel de son temps à menacer Barrabas d’une exécution sommaire, sans qu’on sache trop pourquoi il se ravise à chaque fois – entre les deux personnages principaux de la nouvelle s’appuient donc sur une histoire commune sommairement brossée par Dows, qui oublie se faisant que le lecteur lambda n’a qu’une notion limitée de la rivalité existant entre ces deux personnages. Pour tirer un parallèle avec un autre duo de la BL aux relations ambigües, c’est un peu comme si on nous demandait de comprendre pourquoi le major Rawne décide de ne pas tuer Gaunt sur son lit d’hôpital à la fin de Necropolis, sans avoir rien lu de la série des Gaunt’s Ghosts auparavant.

Les autres personnages qui gravitent autour du duo central sont traités de la même façon, Dows laissant entrevoir au cours de son récit des bribes d’épisodes antérieurs pouvant justifier les comportements, autrement inexpliqués, de chacun. Par exemple, il n’est jamais clairement expliqué pourquoi l’un des survivants (Barat) prend systématiquement le parti d’Abdiel, alors que le reste du groupe est plutôt enclin à suivre Barrabas. Cet attachement est d’ailleurs mutuel, le Commissaire faisant demi-tour sous le feu de l’ennemi pour chercher un Barat blessé par un tir de mortier. Cette absence d’informations, assez frustrante, se retrouve tout au long du récit, obligeant le lecteur à meubler lui-même les vides laissés par l’auteur, ce qui, à la longue, est assez fatigant.

À ce premier manquement, que j’ai trouvé très rédhibitoire, vient se greffer une narration des plus heurtées, dans laquelle les séquences s’enchaînent sans véritables transitions, ce qui m’a plus d’une fois amené à revenir en arrière afin de m’assurer que je n’avais pas raté un élément essentiel à la compréhension du passage présent. La rareté des connecteurs logiques dans le récit est en grande partie responsable de cette pagaille, et le temps semble parfois s’accélérer ou au contraire ralentir au gré de la fantaisie de Dows. Ce dernier fait ainsi surgir des antagonistes avec la brusquerie de diables en boîtes, qu’ils s’agissent de « banshees », sortes de ptérodactyles à ailes laser (comprendre : capables de fracturer la pierre) chassant en meute**, ou de bandes d’Orks vraiment très furtives (à moins que ce soient les éclaireurs humains qui soient particulièrement nuls, ce qui est très possible).

Enfin, à l’instar des textes précédents de ce numéro (et de manière encore plus accentuée), on a vraiment l’impression que In The Shadow of the Emperor a été écrit au fil de l’eau, sans se soucier que les idées couchées par le papier fonctionnent à peu près correctement, ou même ne soient simplement vraisemblables. Dans la première catégorie, on retrouve par exemple un lieu à la topographie très particulière, invoqué par Dows afin de mettre en scène un dernier carré héroïque entre les hordes peaux vertes et la poignée de survivants impériaux. Imaginez une espèce de promontoire rocheux à la surface plane, uniquement relié à la falaise qui lui fait face par un pont naturel dont le milieu est plus fin que les deux extrémités (Khazad-dum like en quelque sorte). Vous y êtes ? Maintenant, imaginez que ce pont soit constitué de sables mouvants, et vous aurez une assez bonne représentation du décor dans lequel se joue la dernière scène de la nouvelle.

Dans la seconde catégorie, outre l’acharnement et les talents de pisteurs peu communs des Orks de Dows, dont une demie Waaaaaagh semble être aux trousses de la quarantaine de survivants de la bataille navale introductive, et arrive à retrouver la trace de ces derniers à travers marécages impénétrables et souterrains effondrés, on ne peut que soupirer devant la désinvolture de Barrabas, qui ne consent à allumer la balise de localisation bricolée par ses hommes qu’au moment où les Orks arrivent en vue du lieu où les impériaux sont retranchés, soit trois bonnes heures après la découverte du fameux promontoire, formant selon ses propres mots une piste d’atterrissage idéale pour un vaisseau de secours. Vaisseau de secours qui arrive évidemment juste après que les Orks aient été repoussés manu militari, soit quelques minutes seulement après l’allumage de la balise. Il n’est donc pas absurde de penser que Barrabas et ses copains auraient pu s’échapper en douce de la planète si seulement ce dernier avait pensé à allumer son cerveau. Evidemment, le dénouement aurait perdu en héroïsme ce qu’il aurait gagné en vraisemblance, mais à tout prendre, j’aurais préféré que la rationalité l’emporte (pour une fois…) sur l’instinct de bourrinisme bas du front qui pousse certains auteurs de la BL à inclure des scènes de baston dès qu’ils le peuvent dans leurs écrits. Certes, il paraît que dans les ténèbres d’un lointain futur, il n’y a que la guerre, mais tout de même.

Bref, ce ne fut pas le grand coup de foudre avec la prose de Dows, dont l’unique autre contribution aux univers franchisés de Games Workshop a été (pour le moment) une deuxième nouvelle, publiée dans le numéro 22 de Hammer & Bolter. Rendez-vous dans quelques mois pour voir si le bonhomme a progressé.

* : Ils auraient choisi de devenir fleuristes, il aurait eu l’air fin.
** : Autre idée brillante s’il en est. N’y avait-il personne au sein de la Black Library pour suggérer à Dows de choisir un autre nom pour ses bestioles indigènes ? Ce n’est pas comme si le terme « Banshee » n’était pas légèrement connoté dans l’univers de Warhammer 40.000…

The Tilean’s Talisman – D. Guymer [WFB] :

The Tilean's TalismanOn termine avec un petit caméo de deux figures bien connues de tous les fidèles de la Black Library, j’ai nommé les iconiques Gotrek et Felix. Mine de rien, cela faisait plus d’un an (et le A Place of Quiet Assembly de John Brunner) que les compères n’avaient pas été mis à l’honneur dans une nouvelle de Hammer & Bolter, et il est donc revenu au petit nouveau David Guymer de corriger cet état de fait en soumettant un texte de son cru. Même si ce dernier ne m’a pas entièrement convaincu, et reste sensiblement en deçà des productions de King et Long, je pense néanmoins que Guymer a un potentiel certain en tant que contributeur à la BL, et suis tout prêt à lui donner une seconde chance si l’occasion présente.

Commençons par les points positifs. En premier lieu, la décision de l’auteur de choisir pour personnage principal Siskritt, obscur skaven de son état et dernier propriétaire du fameux médaillon donnant son titre à l’histoire, est intéressante, en ce qu’elle contraste agréablement avec l’approche classique adoptée par la plupart de ses prédécesseurs, à savoir utiliser Felix comme narrateur. Ce souci d’originalité est de plus renforcé par la construction du récit, qui se divise en deux parties distinctes. Dans la première, Siskritt essaie désespérément de sortir en un seul morceau de l’auberge dans laquelle il a fait l’acquisition du médaillon tiléen, rutilante babiole donnant à son propriétaire l’équivalent d’une sauvegarde invulnérable à 4+, ce qui est toujours appréciable (mais pas toujours suffisant, comme nous allons le voir tout de suite). Malheureusement pour notre ami poilu, un Gotrek très en verve se tient entre lui et la sortie, ce qui ne manquera pas d’avoir des conséquences fâcheuses et définitives pour le pauvre raton, en dépit de la protection accordée par son collier fashion. Dans la deuxième partie, on suit l’infiltration du même Siskritt dans la même auberge, à la recherche du médaillon, juste avant que le reste de l’armée skaven ne passe à l’attaque de Sartosa, théâtre de la nouvelle de Guymer. C’est donc une sorte de Pulp Fiction warhammer-esque que nous offre ce dernier, parti pris audacieux et assez réussi je dois dire.

Autre point fort de Guymer, sa capacité à faire ressortir le mélange d’ambition démesurée et de couardise pathologique qui se trouve au cœur de la psyché skaven. Siskritt passe ainsi la moitié de la nouvelle à s’imaginer siégeant au Conseil des Treize, et l’autre à se cacher sous les meubles au moindre bruit suspect. Le passage où il soutire à son ancien propriétaire le talisman à la pointe de l’épée, tout en étant au moins aussi terrifié que sa victime qu’elle l’est par lui, est ainsi particulièrement bien rendu.

D’un autre côté, on peut regretter que l’auteur n’ait pas pris le temps de donner quelques informations supplémentaires au sujet de la quête de Siskritt, dont on ne saura jamais comment il a appris l’existence et la localisation précise du médaillon. Le récit compte également quelques longueurs, particulièrement dans sa deuxième partie, durant laquelle Guymer décrit avec force détails les atermoiements de son héros à chaque fois qu’il doit passer près d’un humain sans se faire repérer, ou ouvrir une porte sans savoir ce qui l’attend derrière. Même si ces descriptions poussées des hésitations continuelles de Siskritt, mégalomane aussi sadique que poltron, aident à comprendre le personnage, elles ralentissent également l’action à tel point que l’on peut à juste titre considérer qu’il ne se passe pas grand-chose dans The Tilean’s Talisman, les péripéties pouvant se résumer ainsi : Siskritt monte à l’étage, prend le talisman, descend et se fait tuer par Gotrek. Sachant que cette nouvelle est vendue trois euros sur le site de la BL, j’ai du mal à considérer que l’acheteur en aurait pour son argent à ce tarif-là.

En définitive, je pense que David Guymer a l’étoffe pour devenir un auteur (skaven) qui compte au sein de l’écurie de la Black Library. La manière dont ce petit gars a su s’approprier l’exercice de style somme toute peu évident que constitue la narration d’une aventure de Gotrek et Felix augure du meilleur pour la suite. À ce titre, il n’est guère surprenant que le premier roman de notre homme, Headtaker, ait été sélectionné dans la shortlist du David Gemmell Morningstar Award 2014*.

* : Le Morningstar Award récompense le meilleur premier roman de fantasy, et si le trophée 2014 a finalement échappé à Guymer, on peut noter que l’édition 2011 a été remportée par Darius Hinks avec Warrior Priest (comme quoi, on peut écrire de mauvaises nouvelles et signer de bons bouquins). En 2010, ce bon vieux Graham McNeill s’était déjà adjugé la récompense suprême (le Legend Award) pour Empire, et était venu chercher sa hache-trophée en kilt et smoking.

Au final, pas grand-chose à se mettre sous la dent dans ce numéro. Nik et Nick se révèlent égaux à eux-mêmes, et il n’y a pas de quoi de rire (sauf de « What had happened to the food chain ? », là c’est permis). On ne se relèvera pas la nuit pour reprendre une dose de Dows, c’est sûr et certain. Il n’y a que Guymer qui vienne jeter une lueur incertaine sur ce morne tableau, et encore. Encore un numéro comme ça et je vais commencer à regretter Phalanx les gars, alors mettez-y un peu du vôtre !