Archives du blog

BLACK LIBRARY 2023 ADVENT CALENDAR [40K – HH – AoS]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du Black Library 2023 Advent Calendar, notre traditionnel dernier rendez-vous de l’année civile, en ce qui concerne les critiques de sorties de la BL tout du moins. Comme c’est le cas depuis 2020, Nottingham met à notre disposition 12 nouvelles tirées des trois principales franchises de la GW-Fiction, avec une classique répartition en 6/3/3, la part du lion revenant à Warhammer 40.000 (ce qui est maintenant fluff en plus d’être logique, puisque le Lion est un personnage du 41ème millénaire). Pas de sorties en français cette année, et je crains qu’il ne faille faire définitivement notre deuil de cette brillante idée qui n’aura été qu’un one shot pour la Black Library. It was good while it lasted…

Black Library 2023 Advent Calendar

Parlons maintenant des contributeurs de cette ultime fournée du millésime 2023. Premier constat : aucun nouveau venu parmi les 11 auteurs sélectionnés par la BL, ce qui n’a pas été la norme ces dernières années. Même si on compte quelques jeunots dans le lot (Rich McCormick, Victoria Hayward), la balance penche nettement en faveur des habitués – plutôt que des vétérans – de la maison d’édition de Nottingham. Autre caractéristique notable, qui n’aura pas échappé aux plus observateurs d’entre vous, un auteur signe deux nouvelles (‘The One Road’ et ‘The Last Loyalist‘) du calendrier de l’avent 2023 : David Guymer. Espérons pour lui comme pour nous que quantité rime avec qualité. Pour terminer, accueillons au sein du cercle très fermé, et bientôt refermé, des contributeurs hérétiques le scribe émérite Justin D. Hill et le jeune loup Rich McCormick, qui signent respectivement avec ‘The Nine’ et ‘Visage‘ leurs premières (et sans doute dernière) soumissions made in M30. Mieux vaut tard que jamais, comme dit Guilliman à Dorn au lendemain du Siège de Terra…

Black Library 2023 Advent Calendar

.

The Long Promise – M. Brooks [40K] :

INTRIGUE :

The Long PromiseQuelques années après les événements relatés dans ‘The Brightest and the Best’, nous retrouvons le galopin Nazos Zernas en pleine puberté, ce qui n’est pas la période la plus facile de la vie d’un aspirant Astartes, comme on le sait. Allongé sur un bloc opératoire rouillé (ça renforce le système immunitaire, d’après ce gros crado de Kazadin Yallamagasa), l’ado plein d’hormones de croissance prend son mal en patience entre deux greffes d’organes et séances de chimiothérapie1. Il est rejoint par sa « marraine de guerre », l’ex Psyker Primaris Tulava Dayne, qui l’avait tiré des griffes de ses tuteurs de la Schola Progenium d’Antimos, et initié aux charmes des sorties périscolaires. Sentant que son jeune compagnon a bien besoin qu’on lui remonte le moral en cette période compliquée pour lui, Tulava engage la conversation et de fil en aiguille, en vient à raconter comment elle a basculé du côté obscur de l’Alpha Legion après des années de bons et loyaux services au sein de la Garde Impériale.

Si le passage à l’acte se fit pendant la campagne de Rakona, l’élément déclencheur fut la sanction d’Exterminatus infligée à la planète natale de la Psyker, Qasamah, par un Imperium trop près de ses sous pour monter une opération de déxenofication digne de ce nom sur ce monde mineur. Maîtrise des coûts, efficacité des méthodes, effet de ciseaux positif, tout ça tout ça, on connaît la chanson. Ayant compris que les insurgés de Rakona pouvaient compter sur l’aide de Space Marines renégats après avoir consulté quelques rapports soigneusement classés par le haut commandement, Tulava prit la poudre d’escampette en direction des positions ennemies, non sans avoir auparavant puni le Seigneur Général en charge des opérations de sa muflerie consommée en transformant son squelette en puzzle 3.000 pièces. Il ne fallut pas longtemps avant que sa route ne croise celle du ténébreux et charismatique Solomon Akurra, qui lui proposa le marché suivant : en échange de son allégeance, il trouverait et tuerait les Space Marines responsables de la destruction de Qasamah. La suite se devine facilement…

Dans un autre coin de la galaxie, l’escouade Deathwatch du Sergent Karhaz rencontre une situation alors qu’elle était en train de se ravitailler sur la base forcément secrète de Zamarius. L’arrivée impromptue d’une épave impériale arborant des marques claires d’attaque par des Tyranides dans le système où l’astéroïde de fonction des factotums de l’Ordo Xenos orbite gentiment pique la curiosité professionnelle de Karhaz et de ses hommes, qui décident d’aller faire une reconnaissance en Thunderhawk afin de voir si ce vaisseau abandonné présente un intérêt ou une menace quelconque.

Cette innocente virée entre potes (il y a un Black Shield, un Aurora Marine, un Storm Hawk, un Wolfspear et un Angel of Absolution, le quota diversité de la nouvelle est largement dépassé) prend rapidement un tour inquiétant lorsqu’un signal involontaire est envoyé par le Thunderhawk inquisitorial jusqu’à Zamarius alors que la Deathwatch arrivait à portée de l’épave. Flairant un coup de jarnac grâce à ses sens de surhomme, Karhaz décide de retourner au bercail dare dare, et à la douloureuse surprise de constater qu’un Storm Eagle aux couleurs de l’Alpha Legion s’est garé sur sa place de parking en son absence. LES MONSTRES. N’y at t-il aucune règle de bienséance que les hérétiques ne violeront pas ?

Après une brève délibération, la fine équipe décide de passer la station au peigne fin pour en déloger les nuisibles, qui se révèle être un nuisible : Solomon Akurra en personne. De sa voix de gravier mielleux (c’est mieux que miel graveleux, avouez-le), le Harrowmaster propose un marché à ses hôtes : l’accès à leur crypte afin d’y récupérer une babiole qu’il convoite et leur parole qu’il pourra s’en aller sans se faire molester, contre… son silence. Car dans un Imperium où les secrets honteux sont légion, il n’y a pas d’armes plus mortelles ou plus pernicieuses qu’une vérité sans filtre, livrée au moment opportun et pour un public soigneusement choisi…

Début spoilerLong story short, Solomon réussit à attirer l’Aurora Marine dans un piejàkon de sa création après avoir mis en question sa bravoure devant ses camarades (le Chapitre ayant été rossé par l’Alpha Legion quelques temps auparavant), puis crée une ambiance délétère parmi les survivants en appâtant Hemarc (Angels of Absolution) avec le nom et la localisation d’un authentique Déchu, et en révélant à tous que Dreyvor (Black Shields) a été envoyé à la Deathwatch après avoir été impliqué dans le massacre de civils innocents en grande quantité, ce qui chagrine fortement l’idéaliste Eldrök (Wolfspears). Avant que les loyalistes n’aient pu s’entretuer, Solomon apparaît finalement et entraîne ses traqueurs dans une course poursuite qui les mène directement devant les canons des Serviteurs de combat hackés par le Harrowmaster, avec des résultats aussi sanglants que définitifs. Avant de repartir, Solomon révèle à un Karhaz mourant qu’il n’y avait jamais eu de relique à subtiliser sur Zamarius, mais que le Sergent des Storm Hawks était simplement le dernier sur la liste des Space Marines ayant participé à l’Exterminatus de Qasamah, et qu’une promesse est une promesse…Fin spoiler

1 : Au moins, on peut se dire que l’Alpha Legion n’inflige pas en plus de psycho endoctrinement ni de cours du soir de pépéchisme à ses recrues, ce qui leur laisse un peu de temps pour jouer à Snake (évidemment) sur leur console.

AVIS :

Mike Brooks donne une suite à ‘The Brightest and the Best’ et à ‘Harrowmaster’ dans cette nouvelle croisée dynamique (ça ne marche pas que pour les tableaux Excel) qui ravira aussi bien les fans de Solomon Akurra et de sa clique que les amateurs de courts formats grimdark bien pensés et bien écrits. Brooks se fait en effet un plaisir de jouer sur les codes littéraires et fluffiques de l’Alpha Legion, faction retorse et « apolitique » par excellence, et dont la vision du 41ème millénaire est donc rafraichissante à bien des égards. On prend plaisir à voir le Harrowmaster dévoiler les petits secrets de ses nobles et vertueux cousins, et ces derniers se faire des nœuds au cerveau à force de surinterpréter chacun des indices de la présence de l’Alpha Legion dans leur garçonnière (la scène du Storm Eagle est très drôle en ce sens). La partie de la nouvelle consacrée à Tulava Dyne et Nazos Zernas m’a un peu moins intéressé, mais elle donne de la profondeur et de la sympathie à tous les protagonistes convoqués par Brooks (Solomon compris), et comme le character development n’est pas chose commune dans la GW-Fiction, je me garderai bien de cracher dessus. Un sans-faute.

.

Head of the Serpent – E. Dicken [AoS] :

INTRIGUE :

Head of the SerpentDisgraciée et quasi-exilée par le Conclave d’Hammerhal après qu’elle ait personnellement exécuté quatre de ses membres (des félons ennemis du bon peuple, bien sûr), la Première Maréchale Tahlia Vedra, plus connue sous son surnom de Lionne de l’Aride, a été mis sur une mission de second ordre par son supérieur le temps que les choses se tassent dans la cité. Elle doit ainsi localiser et neutraliser Dame Fade (c’est plus classe en anglais), une cheffe de guerre suspectée de vouloir confédérer les tribus Darkoath des Pics Caustiques à des fins anti-sigmarites. Elle peut compter pour cela sur quelques centaines de miliciens aguerris, deux antiques canons, et le support grincheux des éclaireurs de la Capitaine Jesha Fairweather, avec laquelle elle ne s’entend guère. Mais comme on dit, à la guère comme à la guerre.

L’Aride étant un territoire passablement étendu, vide et dangereux, Tahlia résout de ne pas éterniser son trekk dans les caldeiras autour de la Citadelle Coron(avir)us et demande à Fairweather de la mener jusqu’au campement de la tribu la plus proche, qui se trouve être les Chiens de Deuil-la-Barre (Hounds of Mourn-la-Barre en VO). Pas de bol pour l’expédition de reconnaissance punitive, le village en question se trouve être vidé de ses habitants, qui ont semble-t-il décidé de rejoindre en masse le campement de Dame Fade à la demande expresse des Guerriers du Chaos qui forment sa garde rapprochée1. Intriguée autant qu’inquiétée par cette relocalisation impromptue, Tahlia ordonne à sa colonne de suivre les traces des migrants, et les sigmarites ne tardent pas à tomber sur les restes d’un champ de bataille où l’arrière garde des Chiens du Deuil a été rituellement massacrée par un mystérieux adversaire.

Alors qu’elle était partie en reconnaissance sur sa fidèle Incarnadine (canard manticore de fonction) pour tenter d’identifier la cause de ce carnage, Tahlia fait la connaissance d’un louche individu répondant au nom de Vasyar, maître dans l’art du camouflage volcanique et de la plongée cendreuse. Vasyar informe la Lionne qu’elle n’a que quelques minutes pour se préparer à l’arrivée d’une cohorte de Chiens du Deuil, qui ne réfléchira sans doute pas à deux fois avant d’attaquer les sigmarites qui campent parmi les cadavres de leurs congénères, même si les miliciens ne sont pour rien dans la tuerie. Et en effet, deux mille guerriers Darkoath écumants de rage ne tardent pas à se présenter dans la passe où le contingent d’Hammerhal stationne, forçant Tahlia à faire preuve de ses capacités de stratège et de meneuse d’hommes.

La bataille se passe raisonnablement bien, mais c’est l’intervention de quelques centaines de margoulins arborant le même style vestimentaire que Vasyar et qui prennent à revers les Chiens du Deuil alors qu’ils étaient en train d’aboyer sur le carré castelite des sigmarites qui permet aux gentils urbains de remporter l’affrontement. C’est le début d’une collaboration teintée de méfiance mais sans coup fourré entre Tahlia et Vasyar, qui se révèle être un des chefs de la tribu des Vipères des Cendres (Ash Vipers), dernière peuplade indigène non affiliée au Chaos vivant de ce coin de l’Aride.

Ayant bien compris que la survie de sa tribu passait par la neutralisation de la menace représentée par Dame Fade, elle-même simple lieutenant de l’énigmatique seigneur Ebonpyre, Vasyar accepte de guider sa nouvelle amie jusqu’au camp chaotique, ce qui permet à la Première Maréchale de concocter un plan risqué mais pas désespéré pour décapiter la horde rassemblée par Fade. Pendant que le gros de ses troupes tiendra une position défensive à proximité du village de yourtes des maraudeurs, Tahlia, les éclaireurs de Fairweather et les Vipères des Cendres de Vasyar contourneront les combats pour aller assassiner Dame Fade, « seulement » protégée par quelques Guerriers du Chaos.

Comme on peut se l’imaginer, cette expédition plus qu’à moitié suicidaire est couronnée de succès, et malgré la magie aussi fumeuse que toxique de Dame Fade, qui manque de suffoquer notre casting trois étoiles, la ribaude se fait occire de haute lutte. De là, il suffit juste à Tahlia d’agiter le casque de la sorcière devant le nez de ses suivants pour que des luttes intestines viennent à bout de la fragile unité des guerriers tribaux, qui succombent à l’animosité et commencent à se castagner à qui mieux mieux, laissant les miliciens et leurs alliés s’éclipser sans demander leur reste.

La nouvelle se termine avec la proposition de Tahlia à Vasyar d’abandonner son mode de vie nomade pour rejoindre la sécurité et la civilisation de Hammerhal, comme le propre peuple de notre héroïne l’a fait il n’y a pas si longtemps que ça pour échapper aux déprédations du Chaos. « J’y penserai cocotte » répond le fier bédouin avant de repartir faire des pâtés de cendres dans la pampa. La suite au prochain épisode…

1 : Tahlia et Fairweather découvrent cela en remarquant les empreintes distinctives de crampons en forme d’étoile à huit branches dont les solerets des Guerriers du Chaos disposent tous. Il faut le savoir.  

AVIS :

Evan Dicken signe une nouvelle med-fan militaire assez classique et linéaire avec ce ‘Head of the Serpent’, qui introduit le personnage de Tahlia Vedra dans la GW-Fiction, ce qui n’est pas donné à toutes les entrées de Battletomes, il faut le reconnaître. Si l’intrigue de cette histoire peut être décrite comme d’une simplicité élégante, c’est dans le déroulé de cette dernière que Dicken s’illustre le plus à mon sens, prouvant qu’il est capable de « servir la soupe » de manière convenable, comme il l’avait déjà montré dans ‘The Path to Glory’ il y a quelques années. Cette dernière nouvelle s’était toutefois révélée bien plus riche en lore et rebondissements que celle qui nous occupe aujourd’hui, et garde donc ma préférence – quoi qu’il en soit ‘Head of the Serpent’ est une entrée sérieuse à mettre au crédit de cet auteur, et j’espère que le trio infernal cendreux Vedra/Fairweather/Vasyar reviendra courir la pamParch’ dans d’autres soumissions de la Black Library. Après tout, ce mystérieux Ebonpyre ne va pas s’éteindre tout seul…

.

Nightsider Imperialis – V. Hayward [40K] :

INTRIGUE :

Nightsider ImperialisSur le monde de Nectria, connu pour ses jungles exubérantes et ses nuits interminables, deux empires s’affrontent sans merci. Du côté des humains, le 903ème régiment de Catachan de la Major Wulf Khan (et plus précisément les trois bidasses qui survivent à la première page) nous servira d’escorte dans la moiteur obscure de cette planète contestée. Face à ces héros improbables (Khan, sa sidekick aryenne Adair, la jeune Green et le boudeur Bass), on retrouve les T’au et leurs auxiliaires Kroots, très à leur aise dans cet environnement riche en couvert et en nouvelles espèces à déguster.

Alors que la nuit est sur le point de tomber sur ce théâtre d’opération, Khan décide de faire un crochet pour secourir la pilote d’un Lightning s’étant écrasé à quelques centaines de mètres de sa position après avoir mis en fuite le bombardier T’au responsable de l’annihilation de la moitié de son escouade. On peut dire ce qu’on veut sur l’indiscipline des Catachan (Khan ignore les instructions du Général Mordian en charge des opérations et fait détruire sa radio pour être sûre de ne pas être embêtée par les planqués du commandement), mais au moins ils ne sont pas ingrats.

La pilote en question, Nirael Roth, se trouve être une Nightsider (ou Homo Sapiens Tenebris), comme ses yeux totalement noirs le prouvent, mutation des plus pratiques lorsqu’on se bat sur un monde où les nuits sont sombres et pleines de terreur. Elle révèle à ses sauveteurs que son appareil contient des relevés pris au-dessus d’une usine d’armement T’au, à ramener de toute urgence à l’état-major impérial afin d’apporter un avantage considérable à la Garde Impériale dans les prochaines phases de la campagne. Elle prouve également son utilité en identifiant un groupe de Kroots qui profitait des ténèbres pour approcher en catimini des Catachan, permettant à ces derniers de repousser les Xenos sans coup férir.

Ralentis par Roth et sa jambe esquintée dans le crash de son appareil, Khan et Cie progressent lentement en direction de leur base arrière, en composant avec la faune hostile de Nectria et le harcèlement de rue jungle de leurs poursuivants Kroots, qui salivent en arrière-plan à l’idée de s’enquiller un tartare Nightsider. C’est comme les carottes, c’est bon pour les yeux. Fort heureusement pour les Catachan, leurs adversaires ne décident jamais de passer à l’attaque (malgré un avantage numérique très conséquent), ce qui leur permet de rentrer au bercail sans prob- ah non, pardon. Le première classe Bass décide tout d’un coup que Khan est une très mauvaise chef, qui ne fait rien que de le rabrouer à tout bout de champ, et son insubordination coûte (indirectement) la vie à Green, lorsqu’il décide de la laisser en plan pour aller traquer un chef Kroot en solo sur un coup de tête.

Fort courroucée par ce mauvais sujet, Khan décide de l’exaucer et laisse prendre le commandement du petit groupe lorsqu’il la défie ouvertement… sauf que personne ne suit Bass quand il donne l’ordre d’avancer en laissant Roth se débrouiller toute seule (en plus d’être macho, il est raciste, c’est vraiment un gros beauf), et que le sac à dos qu’Adair lui a remis ne contient pas les boîtes noires du Lightning, comme il le croyait, mais des bandages saturés du sang de l’Abhumaine, qui attirent à lui une horde de Kroots affamés. Just a prank bro.

L’héroïque sacrifice, pas vraiment volontaire mais on s’en fout, de Bass permet finalement à Khan, Adair et Roth de rentrer au bercail sans problème, et la nouvelle se termine sur l’hommage que rend malgré tout la Major à son subordonné insubordonné : écrire son nom sur un post-it et le coller sur le mur du souvenir du régiment1. On a les mémoriaux qu’on mérite…

1 : Ce n’est peut-être pas volontaire de la part de Hayward, mais elle ne mentionne pas que les autres soldats de Khan reçoivent le même honneur de sa part, y compris la pauvre Green qui faisait pourtant partie des personnages principaux de la nouvelle. Elle doit vraiment avoir un faible pour les mauvais garçons.

AVIS :

Introduction au personnage de Wulf Khan et avant-goût du roman ‘Deathworlder’, ‘Nightsider Imperialis’ commence très classiquement (des Catachans dans une forêt primaire), explore quelques idées intéressantes (les Abhumains et leur acceptation relative par les institutions impériales, un monde jungle hostile et nocturne, l’opportunisme kroot), et se termine malheureusement de façon très incongrue (des centaines de Kroots qui ne parviennent ni à rattraper, ni à neutraliser cinq Gardes Impériaux dont deux sérieusement blessés, Bass qui décide de se rebeller… par jalousie ?). Si encore la fin avait été supérieure au début, on aurait pu terminer cette nouvelle sur un sentiment positif, mais c’est l’inverse qui se produit et me fait ranger ‘Nightsider Imperialis’ dans la catégorie – très fournie – des fillers moyens de la GW-Fiction.

.

Visage – R. McCormick [HH] :

INTRIGUE :

VisageCritiquer son patron est un petit plaisir de la vie professionnelle auquel bien peu peuvent résister, et il y a fort à parier que le temps, ou l’époque, ne fait rien à l’affaire : ce qui est vrai en M2 le sera aussi en M30. Il est cependant conseillé de le faire lorsque ledit patron n’est pas à portée de voix, surtout lorsqu’on a affaire à un Primarque Maître de Guerre devenu renégat et champion des Dieux Sombres dans le Materium (ce qui lui a fait perdre son sens de l’humour), comme c’est le cas pour Erebus. Malheureusement pour le Premier Chapelain des Word Bearers et grand architecte de l’Hérésie, sa saillie envers Big H. à propos du fiasco de la campagne de Signus Prime ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd, et Lupercal décide de littéralement refaire le portrait de son acolyte à grands coups d’athame, ce qui a pour conséquence d’envoyer Erebus aux urgences.

A son réveil, l’écorché vif réalise que sans ses tatouages faciaux runiques, il ne faudra pas longtemps avant qu’une armée de Démons mineurs viennent le racoler à cause de son statut de star du Warp (tout s’explique), ce qui est tout de même pénible. Sans compter que les blessures infligées par son coupe chou môôôdit ont peu de chances de cicatriser normalement, comme on peut s’en douter. Le premier réflexe d’Erebus est donc, tout naturellement, de faire écorcher son propre chirurgien et de greffer son visage pour couvrir sa face mutilée, au moins pour dépanner. Ce qui marche… cinq secondes, avant que les Dieux du Chaos ne manifestent leur déplaisir devant cette usurpation d’identité en transformant le wannabe Joker en lookalike Ghost Rider. Apparemment, DC Comics n’a toujours pas remonté la pente face à Marvel dans le lointain futur.

Le rejet total de cette greffe improvisée force le Chapelain défiguré à chercher refuge et réconfort dans la boisson, et plus particulièrement le sang des Space Marines loyalistes étant tombés sur Isstvan III, et qu’il gardait comme souvenir du début de l’Hérésie dans son bureau. Confiant dans sa capacité à négocier un deal en sa faveur avec les malheureux habitants de l’Immaterium qui écouteront son baratin, Erebus pique une tête dans son calice maudit et se retrouve dans le Warp.

C’est le début d’une quadruple quête que l’on peut qualifier d’exaltée ou de cauchemardesque, c’est selon, qui verra notre héros suppurant entrer en négociations avec des Démons représentant les quatre Dieux du Chaos, et parvenir à chaque fois à leur extorquer leur petit nom ainsi qu’un don « sensoriel » venant compenser une partie de son handicap.

Tout d’abord, Erebus plume une perruche de Tzeentch qui avait commis l’erreur d’accepter de lui montrer le chemin à travers le dédale infini du Warp, récupérant au passage des yeux pouvant voir le futur. Pratique. Ensuite, il est catapulté sur une Terra uchronique, ou un caribou de Khorne (Kharibou ?) l’accueille à coups de cornes dans un désert jonché des ossements des dix milliards de victimes d’un siège remporté par Horus. Entre deux impacts, Erebus parvient à convaincre le Démon de lui prêter une oreille attentive, dans tous les sens du terme, et il peut repartir avec un acouphène divin.

Le bilatéral suivant se tient en compagnie d’un serpent de Slaanesh, qui lui offre un coup à boire après qu’il ait noblement refusé de poignarder Horus avec son athame, comme il lui était pourtant proposé. Enfin, Erebus termine ses pérégrinations par une longue retraite dans un marécage bien putride, en compagnie d’une petite mamie aussi serviable que décatie. Après avoir farmé des crapauds géants pendant quelques semaines aux alentours de son Airbnb, le Chapelain désœuvré finit par retrouver un peu d’ambition et de volonté, et localise à l’odeur l’emplacement de la seule source d’eau non contaminée du marais. Après s’être convenablement réhydraté, il fait bénéficier son hôte de cette manne aquatique, ce qui lui redonne aussi la forme mais la plonge dans un état de détresse psychologique avancé (quoi de pire pour un Démon de Nurgle que de guérir, après tout). Après de longues séances de waterboarding, Mamie Bouse accepte finalement de donner son nom de jeune fille à ce galopin d’Erebus, qui garde aussi le flair développé qu’elle lui avait seulement « prêté » (c’est plus clair à la lecture de la nouvelle, soyez en sûr) quelques jours plus tôt.

S’étant rabiboché avec l’intégralité du panthéon chaotique (ou les grands pouvoirs, en tous cas), Erebus peut revenir dans le Materium avec une tête un peu plus présentable qu’auparavant, et quelques dons divins supplémentaires pour frimer dans les soirées. Déjà qu’il était insupportable avant…

AVIS :

Pour sa première incursion dans l’Hérésie d’Horus, Rich McCormick fait très fort en s’emparant d’un personnage nommé majeur de la franchise, et en mettant en scène un épisode important de son histoire qui n’avait jamais été couvert dans le détail auparavant : la pause fraicheur d’Erebus après le vigoureux gommage que lui a appliqué ce grand coquin d’Horus. Il le fait de plus avec la manière1, embarquant le lecteur dans une odyssée démoniaque très convaincante, dans la droite ligne de ce que Ben Counter et Guy Haley sont capables de nous proposer lorsqu’ils sont inspirés. J’ai beaucoup aimé cette soumission de Rich McCormick, et mon seul regret est qu’elle soit arrivée trop tard dans la production de l’Hérésie pour être exploitée par la suite…

1 : Et en s’inscrivant parfaitement dans la continuité des travaux de ses prédécesseurs, même les plus confidentiels : on a ainsi droit à une référence à la nouvelle ‘Child of Chaos’ (John French), que je considère comme faisant partie des œuvres de niche de la franchise.

.

Consecrated Ground – S. B. Fischer [40K] :

INTRIGUE :

Consecrated GroundEnvoyé sur le monde ruche de Serraq’s Reach avec quelques grouillots pour mater un début de rébellion à la demande de sa Gouverneure, le nouvellement nommé Castellan Emeric aborde cette mission des plus banales avec un enthousiasme très relatif. Le fait que son premier séjour sur Serraq’s Reach ne lui ait pas laissé un souvenir impérissable (mémoire eidétique ou pas) ne vient certes pas rebooster son moral, mais en soldat zélé – comme tout Black Templar qui se respecte – notre héros est bien décidé à mener à bien sa tâche et à repartir au plus vite rejoindre une croisade.

Après quelques semaines à visiter les lieux où le culte menaçant le règne bienveillant de la Gouverneure Agate a perpétré ses noirs méfaits, Emeric et ses frérots (dont le Chapelain Dant et l’Apothicaire Alvus, que je nomme par pure courtoisie et pas parce qu’ils joueront un rôle important pus tard) se retrouvent dans un temple impérial profané. Le cadavre écorché d’un prêtre a été attaché sur l’autel, et des imprécations chaotiques maculées sur les murs. Cela est certes regrettable, mais sans indice notable pour mener les surhommes vers les coupables de cet acte odieux, les Black Templars se seraient sans doute contenté d’incinérer la victime pour pouvoir reconsacrer le temple sans tarder – fort heureusement pour eux et pour nous, ils croisent alors la route du Vice-Régulateur Kendam Ranp, Arbites local dont la connaissance des bas-fonds de Serraq’s Reach va mettre (enfin) les surhommes en noir et blanc sur une piste.

Ayant formellement identifié le gang responsable de ces pratiques vandales, Ranp mène ses nouveaux copains jusqu’à leur QG, qui est pris sans coup férir par les Astartes. L’interrogatoire du dernier survivant de la fusillade entraîne les justiciers sur une autre piste, celle d’une congrégation de mutants réfugiés dans les profondeurs de la capitale planétaire. Quelques heures de spéléologie urbaine plus tard, Emeric et sa clique se jettent à l’assaut du campement adverse avec toute la hargne que l’on peut attendre de la part des Black Templars. C’est alors qu’un événement cocasse se produit…

Début spoiler…Au plus fort des combats, Emeric tombe nez à nez avec deux statues réalisées par un des mutants que ses hommes sont en train de massacrer énerg(ét)iquement, et représentant sans l’ombre d’un doute l’Empereur et un Black Templar. « OUETTE ŒUF MINUTE » s’exclame le Castellan, qui réalise alors qu’on lui a sans doute dissimulé la vérité entière. Et en effet, il ne faut que quelques minutes après que les combats aient été stoppés pour que le sagace Emeric, à peine aidé par ses seconds, par Ranp et par le chef des mutants (qui sont en fait de « bons » mutants, car leurs difformités ont été causées par une honnête radioactivité, et pas par le vilain Chaos), Ezekial, pour comprendre qu’il s’est fait balader par Agate dans les grandes longueurs, les épaisses largeurs et les insondables profondeurs. La perfide a cherché à utiliser les nobles Templiers pour annihiler de fidèles serviteurs de l’Empereur (pour des raisons qui ne seront jamais explicitées) ? Elle doit payer pour ce détournement criminel des super soldats impériaux !

Et pour payer, elle paie. Quelques heures/jours plus tard, Emeric mène un assaut en règle sur le palais d’Agate, et au bout de quelques pages de combat aussi intense qu’inintéressant, le Castellan rend son verdict d’un moulinet de son épée (après avoir enfoncé un champ de force grâce à son esprit borné). Laissant Ranp et ses collègues gérer la période de transition, Emeric déclare sa mission complétée et repart vers les étoiles où his people needs him, ou quelque chose comme ça… Fin spoiler

AVIS :

Fischer nous livre une histoire de Space Marines assez peu inspirée, et reprenant l’argument de l’antique nouvelle ‘Unthinking Justice’ (A. Millward), dans ce ‘Consecrated Ground’ dont le suspense est éventé dès la lecture de son 4ème de couverture virtuel sur le site de la Black Library. Passe encore que l’intrigue tienne en une demi-ligne1 : l’absence de personnages intéressants, une mise en scène des plus convenues, et la substituabilité totale des Space Marines qui nous servent de héros – alors qu’il aurait été intéressant de montrer les spécificités des Black Templars face à cette situation par rapport à d’autres Chapitres – achèvent de reléguer cette nouvelle dans les tréfonds du catalogue de la GW-Fiction.

1 : Mais soit aussi par endroit complètement insoluble. On ne sait pas ce qu’est « l’appareil » qui a été trouvé par les mineurs, pourquoi la Gouverneure a ordonné le massacre de ceux qui lui avaient remonté l’information, et pourquoi ces derniers se sont farouchement opposés à ce que cette source de radiations débilitantes leur soit retiré.

.

The One Road – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE :

The One RoadSur LA (il n’y en a qu’une, vraiment) route qui mène à Eaux Grises, le wagon conduit par le marchand itinérant Vogel Hornbroom a fait une sortie de piste et s’est retrouvé proprement enraciné dans un petit bosquet en contrebas de la voie carrossable. Ce qui n’aurait pu être dans d’autres Royaumes qu’un incident très mineur à mettre sur le compte de l’inattention d’un conducteur fatigué prend toutefois des proportions effrayantes en Ghyran, et plus précisément dans le très mal fréquenté Dreadwood que la route traverse. Les Sylvaneth qui peuplent ce bout de forêt ont en effet une dent – façon de parler – contre les colons azyrites, et malgré le cessez le feu très logiquement conclu entre Sigmar et Alarielle (cette dernière craignant l’incendie, comme on sait), les relations ne sont pas au beau fixe entre les deux factions de l’Ordre. L’Homme Arbre surnommé le Chêne Pâle mène d’ailleurs la vie dure aux forces détachées d’Eaux Grises, chargées de sécuriser comme elles le peuvent l’accès à la cité.

Un peu plus loin sur la même route, nous faisons la connaissance de trois hardis cavaliers de la milice locale, Elsworn, Tonan et Garvil. Interrompus dans leur partie de dés avec leur supérieure Vida par l’arrivée d’un wagon plus blindé qu’un Leman Russ devant leur fort routier, les compères apprennent de la bouche de la conductrice qu’elle a été témoin de la sortie de route de Vogel, mais s’est bien gardée de s’arrêter pour lui porter secours pour ne pas risquer le suraccident. Qui pourrait lui en vouloir ? N’écoutant que leur devoir, et certainement pas la pauvre Vida qui les enjoignait à l’inverse de rester au bercail, les trois pistoleros sellent leurs montures et partent à la rescousse du véhicule accidenté, sachant fort bien que lui laisser passer la nuit sans protection reviendrait à sceller le sort de son aurige.

Après un petit galop tranquille, le trio arrive à proximité de l’endroit de l’accident, à temps pour constater que Vogel a attiré l’attention malvenue d’un groupe de Dryades, bien décidées à venger leurs cousines transformées en planches de wagon en écharp/dant à mort le pauvre cocher. Ce dernier se défend comme il peut, et est très soulagé de voir de l’aide, même en faible effectif, poindre à l’horizon. Ce qu’il ne savait pas, au contraire du lecteur qui a contemplé la couverture de cette nouvelle, c’est qu’il n’avait pas vraiment à s’en faire, puisqu’il transportait, en plus de sacs de grain, l’arme fatale des Royaumes Mortels dans son compartiment à bagages. Un Gotrek Gurnisson rendu chafouin par un fort mal de crète et une gueule de bois (c’est approprié) carabinée s’extirpe en effet pesamment du wagon, sorti de sa torpeur par le vacarme des combats. Après avoir débité quelques Dryades trop entreprenantes, il décide d’aider son associé à remonter la pente et pousse l’attelage jusqu’à la route, ignorant royalement l’escarmouche échevelée qui prend place entre les trois cavaliers et la bande de Sylvaneth. Et en cela il fait bien, car il ne se passe rien de très intéressant dans cette empoignade : quelques Dryades anonymes se font plomber par les hussards, et le combat au sommet entre Elsworn et leur Matriarche se solde par une victoire par abandon de l’humaine, son adversaire lui laissant la vie sauve après avoir réalisé qu’elle avait elle-même été épargnée par Elsworn quelques minutes plus tôt. Un vrai gentlewomen agree(n)ment, ça.

Finalement, tant Vogel que Gotrek arrivent à bon port, et tandis que le premier se dépêche de vendre sa cargaison à un Aelf portant une tulipe flétrie en boutonnière pour pouvoir échapper à la pollution endémique d’Eaux Grises, le second s’en va pesamment vider la première taverne qui croise sa route. Ceci débouchera sans doute sur une autre histoire…

AVIS :

L’histoire nous dira si ‘The One Road’ est un prélude à un arc narratif Gotrekien plus conséquent que ces quelques pages1 (ça m’en a tout l’air), mais prise individuellement cette nouvelle ne tient pas vraiment la route, ce qui lui fait un point commun avec le wagon de Vogel Hornbroom. David Guymer passe en effet beaucoup de temps à nous présenter un trio de personnages dont le rôle dans l’histoire est finalement assez limité, et à mettre en scène un duel dont l’issue honorable et non violente m’a laissé songeur. Tout ça pour ça ? Gotrek en est relégué à faire de la figuration dans une histoire qui est pourtant marketée autour de lui, et si ses interventions sont appréciables de ronchonnerie, on n’en a pas vraiment pour notre argent. Je reconnais tout de même à Guymer qu’il a su nous insérer quelques détails fluff de bon aloi au fil de sa prose, ce qui aide à faire passer la pilule mais n’est pas suffisant pour sauver ‘The One Road’.

1 : Je n’ai pas assez pratiqué les dernières aventures de Gotrek dans les Royaumes Mortels pour savoir si la Prêtresse Guerrière qu’il envoie valdinguer à travers une table de taverne en début de nouvelle était sa sidekick de ‘Blightslayer’. Si c’est le cas, c’est probablement l’information la plus notable de la nouvelle.

.

Own Worst Enemy – D. Flowers [40K] :

INTRIGUE :

Own Worst EnemySur la planète Deighton, en proie aux affres de la guerre civile, nous retrouvons la pilote émérite et imbibée (à parts égales de promethium et d’alcool) Lucille von Shard, engagée dans la lutte pour le maintien de ce monde dans le giron boursouflé de l’Imperium. Si ses récentes retrouvailles familiales et la course Uber qu’elle a accepté de faire pour le compte de l’Inquisition (‘Starstruck’) ont aiguisé ses tendances misanthropes et cyniques, von Shard sait toutefois que sa destinée ne lui appartient plus et lorsque son agent propagandiste attitré, Esec, la convoque pour lui présenter la campagne marketing qu’il a concocté pour donner un peu de peps au rythme planplan de la guerre pour Deighton, elle n’a d’autres choix que de s’exécuter, accompagnée par la pilote junior Vagbon qu’elle avait engagée comme réveil matin/escorte diplomatique le jour précédent.

Esec a eu vent des exploits d’un pilote ennemi, tenu responsable de la destruction d’une demi-douzaine d’appareils impériaux au cours des derniers jours. Avec un peu de storytelling dont il a le secret, ce mystérieux as, surnommé le Vent du Désert en rapport au lieu de ses exploits guerriers, pourrait faire une Némésis des plus convenables pour le Griffon Noir1 de Lucille von Shard ! Ni cette dernière, ni Vagbon, ne partagent l’enthousiasme débridé du publicitaire de guerre, mais comme il a l’oreille du Colonel Surling, leur avis sur la question n’est que purement consultatif. Il est donc décidé d’organiser un shooting dans tous le sens du terme pour immortaliser le duel entre les deux champions aéroportés du conflit, duel dont von Shard sortira bien entendu vainqueure… Ou devrait, en tout cas. Alarmé par la petite mine de sa protégée, le pragmatique Esec suggère sous le manteau à Vagbon de devenir la prochaine poster girl du sous Segmentum, si jamais il devait arriver malheur à sa supérieure. À la guerre comme à la guerre…

Après un peu d’attente, le Vent du Désert est repéré par les radars espions du camp impérial et une escadrille menée par von Shard décolle pour rendre la justice de l’Empereur à ce mécréant. Le combat s’engage, et à la grande surprise des pilotes loyalistes, le terrifiant VdD se révèle être un ado effrayé, qui jure ses grands dieux par radio interposée que tout ceci n’est qu’un malentendu. Ce n’est pas lui qui a abattu les appareils impériaux, c’est la Lumière (avec une aile majuscule), sorte d’apparition fantasmagorique capable de faire tomber la foudre dans un ciel clair, dans le seul but d’attirer l’attention de la légendaire Lucille von Shard. Tout cela est bien mystérieux, et on n’en saura pas plus de la part du Voisin du Dessus, qui se fait foudroyer à son tour par un éclair tombé de nulle part, preuve que sa version des faits n’était pas aussi étrange qu’il y paraissait.

Notre propos se termine par une nouvelle discussion entre Vagbon et Esec, bien dégoûté de n’avoir pas de vidéo exploitable de l’affrontement entre von Shard et le Vent du Désert, et qui propose donc à notre sidestick de prendre les commandes d’une réplique du Griffon Noir pour tourner une reconstitution de ce duel déjà mythique. Malaise du côté de la loyale Vagbon, qui aurait l’impression de voler la vedette à sa commandante… qui n’en a de son côté absolument rien à faire (au contraire, ça lui fera moins de boulot). Pour tout vous dire, Lucille von Shard semble beaucoup plus intriguée et inquiète par les dernières images prises par un appareil de reconnaissance impérial avant de se faire abattre par la fameuse Lumière que par les états d’âmes de sa future doublure cascade. La suite au prochain épisode, sauf si Lulu s’étouffe dans son vomi après une nième murge, bien sûr…

1 : Ou Griffon de(s) Sable(s), si on utilise les termes héraldiques consacrés. Ça ferait un fil rouge (de gueule) avec le désert.

AVIS :

Troisième nouvelle pour Lucille von Shard, et les choses n’ont pas l’air de s’arranger beaucoup pour notre pilote d’élite, qui est ici dépeinte comme erratique, alcoolique et piégée dans son statut d’icône impériale par le maître propagandiste Esec. C’est d’ailleurs cette relation malsaine, et totalement compréhensible dans le contexte d’un Imperium militarisé jusqu’à la moelle et prêt à tout pour entretenir l’effort de guerre, qui fait le sel de ce ‘Own Worst Enemy’, plus que la mise en scène du « combat » contre le fort minable Vent du Désert. On dirait fort que Denny Flowers plante le décor pour un arc narratif plus ambitieux à travers ces quelques pages, et peut-être en saurons-nous plus sur cette mystérieuse et mortelle lumière dans un nouvel épisode…

.

The Nine – J. D. Hill [HH] :

INTRIGUE :

The NineAlors que Mars est déchiré par son schisme entre anciens et modernes légalistes et libéraux, nous suivons l’Adepte Sota, résolument engagée dans le camp du Mechanicus Noir, dans sa vendetta personnelle contre son ancien mentor, le maître de forge Rueon Villnarus. On ne saura pas exactement ce que le pauvre Vivi a fait pour encourir l’ire de sa stagiaire, mais la maîtrise consommée de cette dernière en matière d’armement bactériologique scelle rapidement, mais pas proprement, le destin du bastion de Villnarus après qu’une ogive chargée d’une souche de Covid tirée des glaires d’un Grand Immonde enrhumé ait pénétré la défense des loyalistes. Après avoir pataugé dans la bouillasse organique de ses douze millions de victimes pour aller récupérer la carte mère de son tuteur, Sota se hâte de rejoindre Magma City, théâtre d’un affrontement à grande échelle entre les forces de Kelbor-Hal et les fidèles de l’Empereur.

A son arrivée, elle ne peut que partager la peine de son suzerain quand elle apprend que le fidèle piston droit de Kelbor-Hal, Melgator, compte parmi les victimes de cette bataille majeure. Cette disparition fait toutefois les affaires de l’ambitieuse Sota, car malgré sous ses apparences de geek obsédé par la tech, Keke a un point commun avec la nature, en cela qu’il a horreur du vide. Il lui faut donc trouver un ou plusieurs remplaçants à Melgator pour aller porter la bonne parole à travers la galaxie et rallier le plus de mondes forges possible à sa cause. Après une entrevue tenant au moins au temps du porno soft (toutes ces mechadendrites qui se connectent à des ports haptiques… c’est très déluré) que de l’entretien d’embauche, Kelbor-Hal annonce à sa groupie frémissante qu’elle aura l’honneur et l’avantage de faire partie de son harem cénacle d’ambassadeurs, ce qui est Nul pour elle, bien sûr…

AVIS :

Pour sa première incursion dans l’Hérésie d’Horus, Justin D. Hill se paie un voyage aux origines de la série en prenant la suite des événements couverts par Graham McNeill dans son ‘Mechanicum’ (2008), et particulièrement la bataille de Magma City au cours de laquelle Melgator trouva la mort. Je ne suis pas sûr que le personnage de Sota (pas encore Nul) méritait une telle mise en avant, et comme il ne se passe pas grand-chose d’intéressant et/ou de clair dans ‘The Nine1, je sors de cette nouvelle dans un état de perplexité avancé. Que cherchait à faire Hill avec cette histoire, qui semble avoir été publiée quinze ans trop tard ? J’espère que de futures sorties permettront de réévaluer ma position, mais de prime abord, c’est une entrée plutôt ratée dans l’Hérésie pour cet auteur vétéran.

1 : Titre mensonger par ailleurs car la nouvelle n’évoque pas les autres lieutenants de Kelbor-Hal, et ne se donne même pas la peine d’expliquer ce que sont les Neuf.

.

The Price of Morkai – M. Collins [40K] :

INTRIGUE :

The Price of MorkaiLa fin est arrivée pour Fjolnir le sage de guerre, aussi appelé l’imbibé de mjod et l’ivrogne des batailles, meneur d’une meute de Chasseurs Gris Space Wolves. Tombé au combat contre un adversaire plus fort que lui, ses restes mortels sont apportés avec tout le respect qui leur est dû par ses camarades du rout, Vili, Jolfr, Orwandil et Hrungnir, jusqu’à la morgue du Prêtre Loup Ivar Krakenblood. Comme le veulent les rites des fils de Russ, ses frères d’armes s’empressent de raconter la saga du disparu à Ivar, pendant que ce dernier fait les prélèvements de rigueur sur le cadavre de Fjolnir.

On apprend ainsi que la fine équipe s’était mise en tête de faire un détour par l’Eperon aux Krakens, île mystérieuse et insaisissable du littoral de Fenris, puisqu’elle ne surgit des flots déchaînés de cette planète froidement hostile qu’une fois par génération. Comme son nom l’indique, l’Eperon est une réserve pour méga-faune marine du monde chapitral des Space Wolves, et sert notamment de cimetière pour les krakens en fin de vie dont les crânes jonchent ses rochers. Malheureusement pour Fjolnir, le spécimen qui gardait l’Eperon au moment de sa visite impromptue était un vieux ronchon, dont les coups de tentacules et de bec se sont révélés fatal pour le fier Loulou. Ce dernier peut toutefois revendiquer un match nul bien mérité, voire une victoire morale, puisque s’il n’a pas fini la journée entier, le poulpe géant la termine en tielle, ce qui n’est pas beaucoup mieux. On se console comme on peut.

De son côté, Ivar accomplit sa salissante mais indispensable besogne de prélèvement d’organes et de devoir de mémoire tout en se remémorant sa propre rencontre avec un kraken de fort beau gabarit, alors qu’il n’était alors qu’une Griffe Sanglante mal dégrossie, mis sur une mission « ramassage de coquillages » par ce farceur d’Ulrik en compagnie de quelques autres néophytes. Leur excursion sur l’Eperon aux Krakens avait tout aussi mal tourné que celle organisée par ce poivrot de Fjolnir, mais grâce au leadership inspiré d’Ivar, l’insistante bestiole gréviste (comprendre qu’elle était sur la grève de l’île, et pas qu’elle manifestait pour la retraite à 60 ans) avait fini par retourner à l’abysse, après avoir perdu tous ses yeux sauf un dans la bagarre. Cette démonstration de force avait favorablement impressionné Ulrik, qui était venu féliciter les rookies survivants et leur promettre un bel avenir dans les rangs indisciplinés des Space Wolves. Ah, c’était le bon temps !

Bien évidemment, on (en l’occurrence, Ivar) finit par se rendre compte à l’écoute de la dernière virée de Fjolnir que c’était le même Kraken qui lui a fait son affaire, ce qui démontre que ces bestioles sont bougrement casanières (surtout) et que y a pas de hasard ma pauvre Lucette (un peu). Une fois encaissé le poids de cette révélation in-cro-ya-ble, Ivar termine le rite de valorisation des déchets organiques en allant placer les glandes de Fjolnir dans le frigo situé au cœur de Croc, dans l’attente de l’aspirant digne de se les voir implantées. Le futur du Chapitre sera ainsi assuré, et c’est bien l’essentiel.

AVIS :

Une nouvelle de Space Wolves sans prétentions, comme Chris Wraight en a écrit quelques-unes, voilà comment on peut qualifier ‘The Price of Morkai’. On savait que Marc Collins était un amateur es-Fenris (‘The Shapers of Scars’, ‘Void Kings’, ‘The Martyr’s Tomb’), aussi cette sortie de rout n’est guère surprenante. J’aurais toutefois préféré qu’elle le soit un peu plus, car la concurrence sur ces micro-niches (loubard vs kraken d’un côté1, post mortem Space Wolf de l’autre2) est malgré tout suffisamment fournie pour que ‘The Price of Morkai’ présente un goût de déjà lu quelques heures seulement après sa publication. Il y avait sans doute moyen de faire mieux que ça.

1 : ‘Kraken’ (Wraight), ‘A Trick of the Light’ (Reynolds).
2 :  ‘Bjorn: Lone Wolf’, ‘Cargo’ (Wraight), ‘Even Unto Death’ (Lee).

.

Web of Ruin – A. Tchaikovsky [AoS] :

INTRIGUE :

Web of RuinAprès que le meneur (Oruthir) de la bande de Tarantulos dont il fait partie ait passé ses nombreuses armes (c’est ça quand on a quatre bras) à gauche après une rencontre musclée avec des maraudeurs Darkoath, le jeune et ambitieux Peter Parker Vexen décide de combler le vide managérial laissé par ce décès subit, et prend les rennes d’une troupe en grand manque de confiance en elle. Marqué par le Voyant Octuple, qui lui a changé un œil en ocelles à facettes du plus bel effet, Spiderboi se sent l’étoffe d’un grand meneur, mais sait qu’il lui faut à tout prix faire ses preuves auprès de ses camarades, faute de quoi il ne tardera pas à rejoindre son ancien boss dans l’au-delà.

Son plan initial consiste à traquer les Darkoath responsables de la mort du vieil Oruthir, idée logique et respectable qui lui permet de faire la connaissance du chamane Grot Kankrot, après que ce dernier se soit fait capturer par les Tarantulos suite à la mise en déroute de sa bande de Gloomspite Gitz, ayant eux-mêmes embusqués les Darkoath pistés par Vexen et Cie un peu plus tôt (faut suivre). Réalisant que Kankrot est aussi un grand fan des arachnides en tous genres, comme son pendentif à huit pattes et les bestioles grouillantes qui se cachent dans ses robes moisies le révèlent sans trop de surprise, notre héros l’interroge sur sa présence dans les Eightpoints au lieu de lui fendre le crâne sans sommation, et apprend que le chamane est venu assister la légendaire Arachnarok Garat-Ulm dans ses derniers moments. Tout à la fois monture et divinité mortelle pour Kankrot et ses ouailles, Garat-Ulm a été grièvement blessée lors d’un affrontement récent contre un ost de Sylvaneth mené par Alarielle et son scarabée de fonction, et s’est réfugiée dans ce Royaume pour y mourir.

Voyant dans cette révélation fortuite une preuve irréfutable de la bénédiction de sa propre divinité, Vexen épargne Kankrot pour que ce dernier le mène jusqu’à son animal de compagnie égaré, ce dont le serviable Grot se fait un plaisir. En chemin, les Tarantulos croisent la route d’un guerrier Splintered Fang esseulé (Pallas), dernier survivant de sa bande après que cette dernière ait eu la mauvaise idée de causer du raffut à proximité du repaire de Garat-Ulm en attaquant une colonne d’Iron Golems de corvée de lessive. Pallas conduit ses anciens presque alliés jusqu’au lieu de la bataille, où les cocons de soie laissés par une araignée gigantesque achèvent de lever les doutes de Vexen sur la sincérité de son prisonnier. Après avoir euthanasié par charité chaotique un Pallas dégoûté par sa propre couardise, les Tarantulos se remettent en marche.

Leur route les mène jusqu’à une caverne gigantesque, dans laquelle ils finissent enfin par rattraper Garat-Ulm… ainsi que la bande de maraudeurs Darkoath du début de l’histoire (toujours elle), bien décidée à poursuivre son œuvre arachnophobe en faisant son affaire à Shelob Jr. On n’a pas dû leur expliquer que les araignées permettaient de limiter les populations de moustiques, ou bien ils sont à deux doigts de se vouer à Nurgle (et ses mouches), je ne vois que ça. Pas plus bête que le premier venu, Vexen attend que ses ennemis aient chargé Garat-Ulm, qui malgré ses blessures reste toujours un monstre de corps à corps, avant de fondre sur les arrières des Darkoath, remportant facilement la victoire et achevant l’Arachnarok moribonde d’une javeline bien placée au passage.

Ceci fait, le premier réflexe de notre héros triomphant est d’aller piquer une tête dans les entrailles fumantes de sa gigantesque victime, avec quelques blocs de varanite en sus en guise de sels de bain, afin de devenir le réceptacle des dons chitineux du Voyant Octuple…

Début spoiler…Et ce dernier met la dose, et plutôt huit fois qu’une. A la sortie de son bain, Vexen est devenu une véritable araignée géante, mais a la mauvaise surprise de se trouver entouré par les cadavres de ses compagnons et une horde de Grots, les suivants survivants de Kankrot qui avaient pisté leur chamane captif à bonne distance. Outré par ce manque de bienséance, Vexen se rue sur Kankrot pour lui faire son affaire, mais plante ses crocs dans le champignon géant que le Grot dissimulait sous ses robes plutôt que dans le ventre de ce dernier. Le nuage de spores qui se répand alors dans la grotte achève de transformer Vexen en réincarnation de Garat-Ulm, promise à bel avenir en tant qu’utilitaire au service de Kankrot et de ses complices à capuche. Elle a peut-être plusieurs divinités, mais l’araignée reste un être bien singulier…Fin spoiler

AVIS :

Cela faisait un petit moment que la Black Library ne nous avait pas donné de nouvelles de/sur les Eightpoints, et cette absence est en partie comblée avec ce sympathique ‘Web of Ruin’, qui s’intègre parfaitement dans l’univers bigarré et sans pitié de Warcry. Adrian Tchaikovsky réussit brillamment son entrée dans cette franchise de niche, et plonge le lecteur dans le quotidien forcément violent d’une bande de Tarantulos de façon plus que convaincante, jouant avec malice sur les différences et points communs existant entre les factions arachnophiles d’Age of Sigmar au passage. Une histoire plaisante, prenante et bien conclue (on ne crache pas sur les twists finaux qui tiennent la route ici), qui je l’espère ne restera pas un one shot pour la littérature Warcry trop longtemps : après tout, il y a maintenant une vingtaine de bandes à couvrir…

.

One Million Years – N. Crowley [40K] :

INTRIGUE :

One Milllion YearsAlors que la barge solaire One Million Years (une référence à la durée moyenne de ses missions) se dirige lentement vers la surface de la géante bleue qu’elle a siphonné d’une partie de ses ressources pour le compte de la dynastie Thokt, elle se fait attaquer sans crier gare par le seul autre type de vaisseau capable d’opérer dans un environnement aussi hostile, un Space Hulk Ork peint en blanc pour réverbérer la chaleur un vaisseau ruche de la flotte Wendigo le Hrafnkel avec la clim à fond un Méga-Croiseur des Ligues de Votann, bien décidé à s’emparer du précieux chargement du super tanker Necron. Maudits pirates !

Junior éternelle sur le One Million Years (les perspectives d’emploi sont vraiment limitées dans une société où personne ne vieillit et où on peut télécharger son esprit dans une enveloppe corporelle à volonté), l’Apprentek Prae s’attend naturellement à ce que sa tutrice, la vénérable autant que grincheuse Cryptek Baknephet, règle ce problème en un tour de main, son génie stratégique n’ayant d’égal que son expérience millionnaire aux commandes de la barge. Seulement voilà, nul n’est à l’abri d’un coup de moins bien et Baknephet dévore consciencieusement la feuille de match, laissant le vaisseau Votann s’approcher assez près du One Million Years pour lancer un abordage, puis restant sourde aux voicemails répétés de Prae lui demandant humblement mais de manière insistante de guider l’équipage de la barge dans sa défense contre les nabots en armure.

Après avoir compris que tout reposait désormais sur ses frêles épaules suite à la bouderie sénile de sa supérieure, Prae prend les choses en main et, assistée par l’esprit de la machine du One Million Years (Mehennoth) et un Castellan (Rengan) nommé sur le pouce pour coordonner la contre-attaque Necron sur le terrain pendant qu’elle planifiera la stratégie globale de son côté, l’intrépide Apprentek mène la vie dure à ses hôtes non désirés, jusqu’au moment où le Capitaine du Méga-Croiseur en personne (Eynr), se rend dans la salle où le sarcophage de Baknephet est situé pour parlementer avec sa subalterne1. La féroce résistance des Necrons lui ayant déjà coûté plus qu’il n’était disposé à perdre dans l’aventure, Eynr propose à Prae de concéder une égalité, puis de lui remettre la moitié de sa cargaison en compensation des dommages subis, considérant à tort que le silence de l’Apprentek est une stratégie de négociation. Malheureusement pour lui, Prae cherchait juste la manière la plus élégante de l’envoyer paître, et accueille son offre généreuse d’une tirade pleine de morgue et d’un rayon d’hyper-matière, réduisant le Kin en cendres et provoquant la fuite du Méga-Croiseur dans les minutes qui suivent.

Enfin seule maîtresse à bord du One Million Years, Prae peut se pencher sur la troublante défection de Baknephet et lorsqu’elle ouvre le sarcophage de sa maîtresse, constate que cette dernière s’est décomposée depuis belle lurette et a fusionné avec Mehennoth au cours de ses éons de service. L’attaque du Méga-Croiseur, parce qu’il constituait un événement imprévu, a pris de court l’entité routinière qu’était devenue Baknephet/Mehennoth, expliquant l’absence de réaction de la Cryptek désincarnée lors des dernières heures. Si un semblable destin attend éventuellement Prae, elle a cependant quelques millions d’années avant que cela ne se produise, et elle compte bien faire bon usage de son capitainat du One Million Years dans l’intervalle. Sa première décision sera de pomper quelques quettawatts d’hydrogène en soute pour préparer un tir de lance en direction du vaisseau de feu Eynr le cuistre. Voilà qui devrait apprendre aux Kins les bonnes manières…

1 : Qui avait dû se rendre sur place en passant par l’extérieur du vaisseau à cause de la concentration de guerriers Hearthkyn dans les coursives. Je le notifie uniquement pour remettre à leur place les fans transis de Roboute Guilliman, qui doit remettre son titre de most badass space freediving session à Prae. À ceux qui considèreraient que la concurrence est rendue déloyale par l’absence de matière organique chez l’Apprentek, je rétorquerais que l’affrontement entre le One Million Years et le Méga-Croiseur Votann se passe à la surface d’une étoile.

AVIS :

On peut compter sur Nate Crowley pour trouver des angles d’approche intéressants pour explorer de nouveaux pans du 41ème millénaire (un talent appréciable et malheureusement pas aussi répandu que ça au sein de la Black Library), et il en fait la preuve à travers ce ‘One Million Years’, qui détonne franchement des traditionnels affrontements spatiaux que l’on peut retrouver dans les nouvelles et romans de la BL.

Aux commandes de ses chers Necrons, une faction dont il est sans doute l’un des meilleurs auteurs à l’heure actuelle, Crowley nous offre une plongée dans le spectaculaire quotidien de cette faction, que son avancement technologique et son goût consommé pour le transhumanisme (ou transnecrontyrisme, plus exactement) place à des années lumières des considérations bassement organiques du reste des espèces sentientes de la galaxie. De l’autre côté du ring, les Ligues de Votann, encore peu décrites dans la GW-Fiction au moment où cette nouvelle est parue, font des adversaires parfaits à Prae et son acariâtre tutrice, leur goût pour le minage galactique et le recours au clonage de masse les positionnant en miroirs « humanisés » de nos héros mécaniques.

J’ai également apprécié l’effort stylistique consenti par Crowley, dont le texte puise davantage aux sources du space opera que du grimdark et dont le découpage en micro-chapitres en font une originalité dans le reste du corpus des courts formats de 40K. ‘One Million Years’ peut donc être qualifiée de nouvelle de premier plan au sein de ce dernier, et mérite définitivement la lecture si vous êtes un amateur de cette franchise.   

.

The Last Loyalist – D. Guymer [HH] :

INTRIGUE :

The Last LoyalistSur la surface dévastée d’Isstvan III, un petit groupe de Space Marines loyalistes résiste encore et toujours à l’envahisseur. S’ils ne peuvent malheureusement pas compter sur la potion magique pour décupler leurs forces, comme leurs lointains ancêtres avant eux, Kloron Orbaddon des Sons of Horus, Pyramus des Emperor’s Children et Glaum de la Death Guard ont toutefois une arme secrète en réserve, en la figure de Zhukel Dror, aka l’Obélix1 de Ghenna, qui est tombé dans sur les clous du druide boucher quand il était petit. Bien que durement éprouvé par vingt-six jours de combats sans merci, Dror est toujours fidèle à l’Empereur – même si plus très lucide – et se fait un devoir, à défaut de plaisir, de jouer le rôle du marteau tronçonneur2 dans les embuscades que ses comparses tendent à ses anciens collègues de Légion.

Après avoir flanqué une bonne rouste à une escouade de World Eaters un peu trop confiants, le quatuor de choc se replie jusqu’à sa base d’opérations pour y prendre un peu de repos bien mérité. Chacun peut alors vaquer à ses occupations favorites : faire des cauchemars dans lesquels il rosse son frère (possiblement jumeau) dans la salle du trône de son père pour Dror, regarder amoureusement ce dernier dormir pour Orbaddon, récurer son matos pour Pyramus, et… essayer de reconstituer une statuette isstvanite avec de la colle faite maison pour Glaum. Les Death Guards sont vraiment pleins de surprises.

Ce tranquille interlude ne peut cependant pas durer longtemps, et est brisé en même temps que le plafond du bunker où Dror pionçait par l’arrivée d’une escouade de Marines d’assaut World Eaters, bien décidés à mater les irréductibles loyalistes. Une nouvelle baston s’engage, au cours de laquelle Pyramus fait une chute peut-être mortelle, Glaum termine peut-être son puzzle en 3D, et un nombre sans doute élevé d’Astartes passe l’arme à gauche. Ce qui est sûr, tout du moins, c’est que la bromance unilatérale entre Orbaddon et Dror se termine dans le sang et les larmes, après que les clous du boucher aient totalement sapé le self control tout relatif du second. Entraîné par son camarade vers une hypothétique issue, qui pourrait permettre au quatuor devenu duo de continuer hypothétiquement le combat auprès d’un autre groupe de loyalistes, Dror finit par vider son chargeur dans le torse du Son of Horus gnangnan dans un accès de folie, avant de rejoindre le combat avec un douloureux – pour lui et pour les autres – enthousiasme. Cela ne l’empêche pas de considérer qu’il est toujours fidèle à l’Empereur, notez bien : notre héros est un être principiel.

Quelques jours/semaines plus tard, la presque carcasse de Dror est déterrée par un « heureux » hasard par la patrouille recyclage et récupération du Sergent World Eaters Solax, alors qu’elle reposait sous quelques mètres cubes de gravats. Toujours partant pour une prise de tête au débotté, Dror tente de décapsuler son ancien camarade à mains nues, mais son organisme épuisé et son équipement délabré ne font pas le poids face à la patate de forain que Solax lui envoie dans la mâchoire pour calmer ses ardeurs. L’histoire tragique de Dror aurait pu s’arrêter là, mais c’était sans compter le sadisme du Capitaine Shâkha, pas encore rendu déperlant à ce stade de sa carrière, qui retient la main de son subalterne en lui indiquant qu’il a une meilleure et plus cruelle idée pour le surhomme des sables qu’ils viennent d’exhumer. Qu’est-ce qui est rouge et a deux haches énergétiques, une armure Terminator et un bouton on/off ?

1 : Pas un hasard si les couleurs originales des World Eaters étaient le bleu et le blanc.
2 : Une invention novatrice qu’Angron a tenté, sans succès, de faire homologuer par l’Adeptus Mechanicus pendant la Grande Croisade.

AVIS :

Isstvan III est une bataille tellement importante pour le déroulement de l’Hérésie d’Horus qu’on peut comprendre que les auteurs de cette franchise tiennent à y revenir, même des années après sa couverture dans ‘Galaxy in Flames’. David Guymer ne fait pas exception, et son récit de la déchéance terminale mais guère surprenante d’un des derniers loyalistes des World Eaters s’avère être une nouvelle assez solide, même si elle n’apporte rien de bien fondamental à la grande histoire qui se déroule après ce massacre fondateur.

On appréciera cependant la caractérisation des personnages principaux de ‘The Last Loyalist’, chacun d’eux incarnant bien les traits de sa Légion d’origine (mention spéciale à Pyramus, qui soule ses compagnons à force de leur affirmer que le flamboyant Fulgrim va arriver et rétablir la paix et l’harmonie d’un claquement de ses doigts parfumés, ainsi que les références faites par l’auteur à des événements et personnages connus des habitués de l’Hérésie, depuis Ghenna jusqu’à Ibram Ghreer.  Pour ceux que ça intéresse, le personnage de Zhukel Dror est également présent dans le livre ‘Retribution’ de Forge World, et on en apprend plus sur le sort qui l’attend après sa capture par Solax et Shâhka, que l’on retrouve quant à eux dans le roman ‘Angron: The Red Angel’ signé par le même Guymer1.

1 : Profiter d’une pige hérétique pour donner un peu de profondeur à ses personnages 40K étant un péché véniel, commis par d’autres auteurs (je pense à McNeill, Thorpe et Anthony Reynolds, en particulier) avant lui, on pardonnera à David Guymer ce petit kif personnel.

.

***

Et voilà qui conclut cette revue du Black Library 2023 Advent Calendar, une cuvée assez sympathique pour terminer une année riche en nouvelles de la part de la BL. Espérons que 2024 soit du même tonneau, et que le prochain calendrier de l’Avent contienne quelques histoires en provenance du Vieux Monde… En tout cas, moi j’y crois.

BLACK LIBRARY CHARACTER DAY 2023 [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du Black Library Character Day 2023, continuation logique (si on met de côté le titre…) des Character Weeks que la BL nous offre depuis l’été 2020. De manière assez classique, nous avons ici affaire à cinq nouvelles tirées des franchises majeures que sont Warhamme 40,000 et Age of Sigmar, et centrées sur quelques-uns des personnages nommés les plus populaires du moment.

Au menu de l’été 2022, nous retrouvons des têtes bien connues, tel que ce vieux ronchon de Gotrek Gurnisson (déjà mis à l’honneur dans la Character Week 2020 avec ‘Death on the Road to Svardheim’), ou encore l’infatigable Minka Lesk. Les Blacktalons seront également de la partie, ainsi que deux héroïnes impériales relativement confidentielles (pour le moment) : la Sniper cadienne Darya Nevic et la pilote de chasse Lucille von Shard.

Black Library Character Day 2023

Côté auteurs, Nottingham a choisi de s’appuyer sur des plumes déjà éprouvées (en tout bien tout honneur) en les personnes de Justin D. Hill, Darius Hinks et Denny Flowers. On peut également étendre ce qualificatif à Liane Merciel, qui n’a commencé à collaborer que récemment avec la Black Library mais est loin de son coup d’essai littéraire. Reste Rob Young, qui signe avec ‘Memories of Broken Glass’ sa troisième nouvelle pour le compte de la GW-Fiction, en attendant la sortie du roman ‘Longshot’ dans quelques mois. Le décor étant posé, il est temps de faire connaissance avec les VIP convoqués par la BL pour égayer notre été, en espérant qu’ils soient de bonne humeur…

Black Library Character Day 2023

.

Arcady Pride – J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE :

Arcady PrideLes troupes de choc cadiennes ont remporté la campagne de Malouri et repris le Roc du Traître à ce dernier (et à ses nombreux séides). Laissés à glander dans les décombres du champ de bataille en attendant que le devoir les appelle ailleurs, la Sergent Minka Lesk et quelques membres de sa garde rapprochée (Blanchez, Jaromir et Yedrin) décident d’aller tuer le temps en descendant quelques bouteilles dans un baraquement abandonné. C’est l’occasion pour les quatre frères et sœurs d’armes d’évoquer leurs expériences passées, de rendre hommage à leurs camarades défunts1, et de prendre une murge bien méritée, et pas nécessairement dans cet ordre.

Cette plaisante session de team squad building est toutefois interrompue par l’arrivée à l’improviste du Sergent-Chef Zarv, déjà fin bourré et ayant l’alcool assez mauvais. Alors que Minka abordait enfin le sujet, traumatique au possible pour elle, de la chute de Cadia, qu’elle a vécu aux premières loges, ce fieffé malotru ne trouve rien de plus approprié que de lui balbutier à la face qu’elle aurait dû mourir sur place, comme une bonne petite soldate. Rien d’étonnant à ce que notre héroïne au caractère bien trempé n’allonge un crochet ravageur à ce gougnafier, qu’elle aurait sans doute bellement corrigé sans l’intervention salutaire de ses camarades.

La tension étant un peu retombée, Minka consent finalement à partager son expérience de Bouclier Blanc sur une planète en sursis, et à narrer en détail le récit des derniers jours de Cadia, dans toute leur grandeur et leur horreur. Sans surprise, cette anecdote pas piquée des vers, comme la boutanche que les vétérans se partagent (la fameuse Fierté d’Arcadie dont il est question dans le titre), met tout le monde d’accord et nous offre un beau moment de communion entre Gardes Impériaux, Cadiens ou pas. Santé tout le monde, vous en aurez besoin par la suite…

1 : Dido pour Lesk, et une foule d’inconnus pour Jaromir, qu’un pet au casque au premier degré à rendu à moitié amnésique.

AVIS :

Justin D. Hill se frotte à un style de nouvelles de Gardes Impériaux un peu particulier, créé et perfectionné par nul autre que le maître Abnett (et plus tard repris par d’autres, comme Rachel Harrison) dans ses ‘Fantômes de Gaunt’ : l’entrecombat. Le concept est simple, mais difficile à maîtriser : il s’agit de mettre en scène des personnages taillés pour des scènes d’action dans des situations plus (exemple : ‘Family’) ou moins (exemple : ‘Vermilion Level)’ pacifiques et intéressantes à suivre pour le lecteur. Cela nécessite bien sûr d’avoir auparavant suffisamment développé la personnalité et les interactions entre les personnages en question pour que l’exercice n’apparaisse pas comme une perte de temps et un gaspillage d’encre et de papier, ce qui n’est pas à la portée du premier contributeur de la Black Library venu.

N’ayant lu de la série cadienne de Justin D. Hill que les nouvelles consacrées par ce dernier à son personnage fétiche de Minka Lesk, et n’ayant pas franchement accroché avec cette dernière, je ne me trouve pas dans une situation idéale pour porter un jugement un minimum objectif sur cet ‘Arcady Pride’. Je me cantonnerai à dire que le résultat ne m’a pas emballé (pour changer), mais que les personnages de Hill sont suffisamment ébauchés (Blanchez la groupie énamourée de sa chef, Jaromir le colosse amnésique et pas très malin, Yedrin… qui a le vertige) pour que l’expérience ne soit pas aussi fadasse qu’elle l’aurait pu être. Sans doute qu’un lecteur ayant pris la peine de s’enquiller ‘Cadian Honour’, ‘Traitor Rock’, et en bonus ‘Cadia Stands’ (que Lesk re-raconte de son point de vue dans la deuxième partie de la nouvelle) – dédicace @gilian – aura plus de plaisir à parcourir ces quelques pages, et appréciera la mention de personnages absents mais qu’on devine important (ici Dido, qui n’est sans doute pas la chanteuse).

On peut tout de même noter que la fin de cette nouvelle semble paver la voie à un futur roman où Lesk et ses âmes damnées retourneront sur Cadia pour retrouver le fumeur de cigares le plus badass de la galaxie, porté disparu mais pas formellement déclaré mort. Qui d’autre que Hill, qui a déjà mis sa plume au service de ce vieux briscard d’Ursarkar E. Creed, pour relever ce défi ?

.

The Crown of Karak-Khazhar – D. Hinks [AoS] :

INTRIGUE :

The Crown of Karak-KhazharLa cité de Sephyrum, siège du clan Pic de Fer et havre d’ordre et de stabilité pendant des centaines d’années, a été à moitié envahie par les hordes emplumées et encornées de Tzeentch, qui entre autres méfaits ont répandu du mercure mutagène partout dans les rues. Les monstres. Bien que quelques défenseurs aient décidé de vendre chèrement leur vie/leur progression (dans le cas des Stormcast Eternals) dans un dernier carré héroïque et futile, il ne fait aucun doute que le Chaos a remporté cette bataille, ne laissant que peu d’alternatives aux citadins survivants. L’une d’entre elles est la Brisefer Ulvgrid, qui a décidé après mûre réflexion que sa meilleure stratégie était de marchander son passage vers un environnement plus salubre en échange de la légendaire couronne de Karak-Khazhar, autrefois possession et emblème de son clan, et maintenant bibelot inutile depuis la mort du dernier roi et de la majorité de ses sujets au combat. Son commanditaire est un individu louche du nom de Pharasalus, dont l’arène gladiatoriale ne désemplit pas depuis le début du siège. Ce n’est pas parce qu’une armée chaotique a envahi la ville qu’il faut arrêter de sortir le soir, c’est vrai ça.

Le duo peut également compter sur la présence taciturne mais rassurante de l’impayable Gotrek, que les hasards de la vie ont amené dans Sephyrum en ce moment délicat, et qui semble satisfait de refaire le portrait des gladiateurs semi-pros et des barriques de bière que Pharasalus lui met à disposition. Il suffit toutefois à Ulvgrid de mentionner qu’un homme-bête d’une carrure hors normes a pris ses aises dans la chambre forte où la couronne est conservée pour que le Tueur old school se joigne à l’aventure.

Le chemin jusqu’à la salle du boss est l’occasion pour Gotrek et Ulvgrid de sympathiser en trucidant quelques Hurleurs de concert (c’est approprié me direz-vous), et en échangeant des banalités sur la qualité intrinsèque de l’infrastructure urbaine de Sephyrum, bâtie par le clan de la Brisefer freelance. Cette dernière ne comprend pas pourquoi Gotrek se laisse houspiller par Pharasalus. Gotrek voit d’un mauvais œil (le seul qui lui reste) l’abandon d’une relique duardin à un profiteur humain. Bref, la communication n’est pas facile entre les deux demi-portions, mais on s’en fout car voilà qu’arrive (enfin) le combat final.

Juste après avoir récupéré la couronne grâce à la connaissance qu’Ulvgrid avait des lieux et la clé de service qu’elle avait conservé1, Pharasalus se révèle être un pharasalaud (pretends to be shocked), abandonnant ses camarades du mauvais côté d’une flaque de mercurochrome carcinogène et reprotoxique, et s’apprêtant à déguerpir avec son loot dans un éclat de rire sardonique. Son hilarité s’interrompt toutefois lorsque le Myrmidon qu’Ulvgrid avait aperçu lors de sa reconnaissance des lieux finit par rentrer au bercail, et lui plante sa lance dans le torse pour lui apprendre à empiéter sur la propriété d’autrui. S’ensuit un combat « indécis » entre Gotrek et le monstre, au cours duquel Ulvgrid intervient (un peu) pour démontrer son utilité. Quand la poussière retombe et le plafond commence à s’effondrer, notre héroïne réalise qu’elle a perdu sa chance de s’exfiltrer hors de la ville déchue, mais se fait convaincre par Gotrek de garder la couronne en sa possession au lieu de la refourguer au premier marchand venu, et de l’utiliser pour redonner du baume au cœur et un semblant d’unité aux survivants de son clan. Le roi est mort, vive l’arène.

1 : Le prestige des Brisefer a vraiment beaucoup baissé entre le Monde qui Fut et les Royaumes Mortels. Ça avait plus de gueule de purger les souterrains des peaux vertes et des Skavens que de garder la salle des coffres du grand chef.  

AVIS :

Darius Hinks délaie considérablement son propos dans ce bien longuet ‘The Crown of Karak-Khazhar’, qui n’a pas grand-chose à nous apporter de nouveau depuis l’époque de ‘The Dark Beneath the World’ (1990…), autre nouvelle où un Gotrek ronchon et nihiliste accompagne des aventuriers dans des ruines naines – sur lesquelles il ne tarit pas d’éloges – pour récupérer une relique inestimable. Rien n’est surprenant dans cette histoire, depuis la trahison de Pharasalus (qui aurait pu croire que ce personnage de salaud cupide serait un… salaud cupide et fourbe ?) jusqu’au déroulé et à l’issue du combat contre le mini boss de fin. On n’apprend pas grand-chose non plus sur les Royaumes Mortels à sa lecture (ce qui est en fait la vraie valeur ajoutée des nouvelles mettant en scène Gotrek, à mes yeux), ce qui aurait été la moindre des choses.

Pour finir, Hinks reste criminellement vague sur le seul point qui a piqué mon intérêt dans ‘The Crown…’, à savoir les raisons qui ont poussé notre Tueur préféré à embrasser la carrière de gladiateur dans une arène souterraine alors qu’une cité remplie d’innocents est attaqué et envahie par les hordes de Tzeentch deux étages plus haut1. Si dans l’absolu, ce motif (un peu puéril, mais Gogo n’est pas le personnage le plus mature qui soit) peut tenir la route, l’auteur aurait pu se donner la peine de mieux le contextualiser pour les lecteurs qui, comme moi, voient le petit rouquin comme un parangon d’honneur martial depuis plus de trois décennies. Bref, copie très moyenne pour Darius Hinks, qui a bien fait de laisser un autre chroniqueur, on l’espère plus inspiré, reprendre en main la geste de l’increvable nabot.

1 : À croire que l’expérience de la défense de Praag ait été si éprouvante qu’il a choisi de faire l’impasse cette fois.

.

Memories of Broken Glass – R. Young [40K] :

INTRIGUE :

Memories of Broken GlassDéployé sur le monde pollué et désertique (au moins à l’équateur) de Kizmir pour combattre une insurrection chaotique, le 217ème Cadien a décidé de se la jouer sneaky et a envoyé un duo de Snipers (Darya Nevic – déjà croisée dans ‘Transplants’ – et Iago Ullaeus) camper à proximité d’une route où un haut gradé ennemi est sensé passé dans peu de temps soixante heures. Un moyen comme un autre d’accélérer la résolution du conflit, vous me direz. Comme l’attente en plein cagnard n’est pas des plus agréables, les deux Gardes échangent quelques anecdotes pour tuer le temps, en attendant de pouvoir faire de même avec leur cible. De fil en aiguille, nous voilà plongés dans le récit de la dernière mission réalisée par Darya pour le compte de son régiment d’origine, les Janissaires Coclerati…

Cela s’est passé sur la planète forestière de Graxis IV, soumise au pillage indiscriminé d’un régiment de Gardes Impériaux ayant tourné casaque et rejoint le camp des Fab Four. À l’époque, Darya servait déjà dans un corps d’élite, les Guides (Wayfinders), combinant les compétences d’éclaireurs, tireurs d’élite et agents de renseignement. La légende raconte même qu’ils faisaient le café, si on demandait gentiment. Alors qu’elle montait la garde aux abords du camp retranché de son unité, son Sergent (Mihail Ozeck) vint la brancher sur une mission aussi urgente que mystérieuse : aller enquêter sur les raisons du silence d’une famille de hardis bûcherons locaux, ayant accepté de collaborer avec les forces impériales en échange de quelques flacons d’antiseptique et paquets de pralines. Sur le chemin, Darya remarque vite que son supérieur se comporte d’une manière étrange, la laissant prendre toutes les décisions et semblant juger sa manière de procéder, comme si elle n’était qu’une aspirante en train de passer son grand oral d’infiltration. Machisme décomplexé ou agenda secret ? Il est trop tôt pour le dire.

Lorsque les deux soldats arrivent jusqu’à la petite maison dans la prairie clairière, c’est le choc et la consternation : l’humble cahute a été incendiée et criblée de tirs de laser, pendant que ses habitants se trouvaient à l’intérieur. Un tour pendable de ces fieffés Skjardi, qui ont souhaité faire un exemple des collabos1 ! L’émotive et vertueuse Darya souhaite ardemment venger ces morts cruelles en pourchassant la bande de maraudeurs responsables du massacre, mais lorsqu’Ozeck lui révèle que les Moisin étaient des informateurs, et que leur dernier rapport détaille l’emplacement d’une zone de ravitaillement skjardie où un haut gradé devrait se trouver, elle parvient à faire la part des choses et opte pour la poursuite de l’objectif stratégique, plutôt que le feel good kill. La marque des grands.

De retour au camp des Janissaires après avoir abattu un officier adverse et mis le camp retranché des Skjardi en ébullition d’un tir de laser dans une caisse d’obus, Darya et Ozeck sont reçus très froidement par le Capitaine Mugir, qui semble fulminer sous son masque doré. En cause, la décision du Sergent d’emmener sa protégée sur ce que l’on peut raisonnablement appeler un plan foireux, soi-disant pour lui donner une dernière leçon de philosophie martiale appliquée, alors qu’il était tout simplement chargé de lui annoncer qu’elle avait été affectée dans un prestigieux régiment cadien en manque d’effectifs qualifiés. Darya partira rejoindre le 217ème sans savoir si son mentor a échappé au bolt que la Commissaire attachée aux Janissaires semblait lui réserver pour le lourd crime de prise d’initiative, mais garde de cette journée particulière un souvenir impérissable, que l’environnement désertique de Kizmir lui a remis en tête.

Quelques minutes/heures/années plus tard, la décapotable du maréchal-général Hektor Ogier Talassan finit par emprunter la piste poussiéreuse surveillée par Darya et Iago, scellant le destin de l’officier félon (dont on ne connaîtra jamais les causses de la trahison, et ce n’est pas important dixit la pragmatique et disciplinée Darya) et de son chauffeur particulier. La campagne de Kizmir n’est pas terminée, mais sa conclusion se rapproche…

1 : Pas sûr que ça marche bien sur une planète où la densité démographique tutoie les 1 habitant par kilomètre carré. Les voisins ne passeront pas tout de suite.

AVIS :

Rob Young continue de planter le décor des aventures du 217ème Cadien, régiment recomposé par excellence, dans ce satisfaisant ‘Memories of Broken Glass’. Son sens du détail dans la présentation faite des Janissaires Coclerati et des sauvages Skjardi, dotés d’une identité forte en l’espace de quelques pages, fait mouche et donne envie de voir ce dont notre homme est capable dans un long format. Il manque encore un petit supplément de charisme à Darya Nevic pour s’imposer comme une protagoniste de premier plan, mais s’il continue sur cette lancée, Young ne devrait pas tarder à atteindre ce stade.

.

The Eyeless Mask – L. Merciel [AoS] :

INTRIGUE :

The Eyeless MaskNeave Blacktalon et ses guerriers (et mage) d’élite sont envoyés à la rescousse d’une expédition sigmarite, portée disparue dans la jungle ghyrane alors qu’elle cherchait à prendre possession des ruines de la cité d’Arphallos, réputée à travers les Royaumes Mortels pour deux spécialités locales. 1) elle contient des artefacts mystérieux d’une puissance incommensurable, et 2) elle finit par rendre fou tous ceux qui osent y pénétrer, à cause de vibrations inexpliquées retentissant en permanence dans la ville.

Une première exploration rapide du périmètre autour du camp où les soldats disparus étaient cantonnés n’ayant rien donné, les Blacktalons décident de partir en direction de la Piscine à Bulles Bosquet Bouillonnant mentionné dans les notes laissées par le Liberator Prime des Hallowed Knights qui accompagnaient les mortels dans leur expédition archéologique. On apprend aussi au passage que le vieux Hendrick a eu une vision d’un « masque jaune sans yeux chantant une chanson terrible alors qu’il s’abreuvait de sang et d’éclair », ce qui aurait décidé la compréhensive (à bien des égards) Neave à partir pour Arphallos. C’était ça ou interdire au vétéran de forcer sur la bouteille pendant le service, et quand on vient juste de prendre la place de son ancien boss sur décision managériale, comme cela a été le cas ici, il est important de ménager les susceptibilités.

Tout ça pour dire que nos héros finissent par déboucher sur un quartier d’Arphallos où des formations de pierre jaune semblent avoir pris au piège les Stormcast égarés, comme les reflets révélant la présence de colosses en sigmarite dans les anfractuosités de la roche permettent à l’instinctive Blacktalon de le deviner en un éclair. Quelques coups de masse plus tard, son intuition est confirmée et les Hallowed Knights éprouvés et drainés par l’épreuve s’extirpent des gravats, porteurs d’une bien mauvaise nouvelle : les sorciers de l’Ordre de la Nuit Brûlante, qui accompagnait l’expédition, ont été corrompus par Tzeentch et se sont retournés contre leurs alliés. C’est eux qui sont responsables de l’emprisonnement des meilleurs de Sigmar (ainsi que celles des miliciens des Cités Libres, mais comme ces derniers n’ont pas survécu à l’épreuve à cause de leurs armures en papier mâché, on n’en parlera plus), et eux qui serviront donc d’adversaires à Neave et Cie.

J’aurais bien aimé vous faire un compte rendu détaillé de cet affrontement titanesque, mais comme vous l’aurez peut-être déjà deviné à la lecture du paragraphe précédent, j’éprouve quelques difficultés à rendre justice à un combat où le grand méchant est un bloc de pierre avec des reflets étranges, et dites vous bien que ce n’était que l’échauffement pour Merciel. Pour faire simple, les sorciers corrompus sortent également des décombres et commencent à hurler « OOOOOHMMMM » tellement fort que les Blacktalons se sentent mal, ce qui ne les empêche pas de combattre, pour ceux qui savent le faire (sorry Lorai). Leur incantation provoque l’apparition d’un dôme tentaculaire, au sens premier du terme, qui cherche à siphonner l’énergie de tous les combattants présents en faisant du peau à pierre. Le dôme finit par se transformer en le fameux masque de la prémonition de Hendrick, puis utilise ses tentacules pour transformer les sorciers en amalgames chaotiques, après avoir piqué leurs yeux et leurs métacarpes pour s’en faire des colliers. Neave a alors une autre épiphanie salutaire, et comprend qu’il lui faut tuer les mini boss pour affaiblir leur gros copain, ce qu’elle réussit à faire grâce à sa super vitesse avant que les bad vibes des affreux ne la mettent en PLS. Ceci fait, il est facile aux Blacktalons de réduire en poudre the Masked Screamer, remportant ainsi une victoire aussi indéniable que foutraque pour le compte de Sigmar. Il y a des jours comme ça…

AVIS :

C’est au tour de Liane Merciel de se frotter aux Blacktalons, et je dois dire que je n’ai pas été emballé par le résultat. Si elle arrive fort bien à mettre en scène la cité perdue d’Arphallos et la jungle aussi exubérante que mortelle qui l’entoure, Merciel se retrouve en revanche embarrassée par le nombre important de personnages qu’elle doit faire intéragir1, et son idée de faire de l’antagoniste de la nouvelle une sorte d’horreur indicible à la Lovecraft fait long feu, pour un résultat plus proche de la description romancée d’un combat contre un boss d’Elden Ring, remporté grâce à la super vitesse de Neave The Flash Blacktalon. Autre déception, alors que les deux précédents « épisodes » de la série (signés par Gary Kloster et Chris Thursten) étaient parvenus à donner de la profondeur aux Blacktalons et à mettre en lumière leurs relations, parfois complexes et ambivalentes, ‘The Eyeless Mask’ ne nous apprend absolument rien de nouveau sur le sujet, mis à part que Rostus semble avoir une excellente mémoire et qu’Hendrick a des visions. Peu concluant.

1 : Au point de faire déclarer à Lorai son absolue inutilité pour la mission en cours. C’est révélateur.

.

Starstruck – D. Flowers [40K] :

INTRIGUE :

StarstruckAlors qu’elle était en train de tourner quelques images de propagande pour supporter l’effort de guerre impérial sur la planète de Shohi, la pilote de chasse devenue influenceuse galactique Lucille von Shard a le déplaisir de se faire réquisitionner comme le premier bidasse venu par un patron auquel on ne peut pas dire non : l’Inquisition. L’Inquisiteur Otis Atenbach souhaite en effet se faire livrer un paquet un peu spécial depuis la surface de Shohi jusqu’à son vaisseau personnel, et ce dans les meilleurs délais. La présence en orbite de la planète d’une vrille de la flotte ruche Leviathan venant compliquer l’équation, son bras droit (qui se trouve être Rile von Shard, frère de Lucille) a naturellement opté pour mettre l’as des as sur cette mission. Après des retrouvailles compliquées et acerbes, Lulu accepte finalement de jouer le jeu et passe derrière le manche de la Valkyrie custom d’Atenbach, dans la soute de laquelle Rile prend place en compagnie de quelques Scions, d’un Psyker assermenté qui ne tarde pas à exhiber des stigmates de mauvais augure, et d’un coffret de noctilithe à la surface fissurée. Vraiment pas de quoi s’inquiéter.

L’escadre inquisitoriale décolle, et croise bien vite la route de la plupart des entrées du Codex Tyranides possédant le mot clé « vol », depuis la nuée de Gargouilles jusqu’à l’imposante Harridan, en passant par quelques Harpies entreprenantes. Il semble assez certain que les Xenos sont attirés par la cargaison inquisitoriale, et les deux von Shard passent quelques pages pénibles à gérer les conséquences de cette attraction prononcée, Lucille en tenant à distance les entreprenantes créatures, Rile en allant littéralement repêcher le précieux colis après que des turbulences un peu trop fortes aient envoyé le coffret valdinguer dans le ciel nocturne de Shohi. Il a ainsi l’occasion de se rendre compte des pouvoirs que possèdent le colis de son patron, capable d’assommer tous les Tyranides à plusieurs mètres à la ronde après avoir été stimulé, capacité des plus utiles et qui pourrait évidemment aider l’Humanité dans sa lutte contre les flottes ruches.

Au bout du compte, Lucille parvient à poser la Valkyrie très esquintée d’Atenbach dans le hangar du vaisseau inquisitorial, sans avoir perdu ni son frère ni le précieux chargement de ce dernier, ce qui démontre une fois encore qu’elle est sans doute la meilleure pilote de ce côté de la Cicatrix Maledictum. L’alégresse éprouvée par Rile après cette survie miraculeuse est cependant tempérée par l’état pitoyable de sa sœur, dont la vie de poster girl du Munitorum n’est apparemment pas de tout repos. C’est toutefois une victoire indéniable pour l’Imperium, et toutes les occasions sont bonnes à Lucille pour lever le coude…

AVIS :

Lucille von Shard nous revient en pleine verve, à défaut de pleine forme (la fin de la nouvelle en est même un peu inquiétante…), dans cette histoire de livraison où rien ne se passe évidemment comme prévu. La grande force de Denny Flowers aura été de parvenir à jongler entre action tendue à la sauce grimdark et dialogues fendards entre le frère et la sœur von Shard, qui s’ils n’ont pas de réelle complicité, fonctionnent très bien en tant que duo comique, sur le modèle de Sherlock et Mycroft Holmes dans la série qui a révélé Buttercup Cumbersnacht au grand public. Il réussit aussi à nous intéresser aux agissements de l’irascible Lucille dans ses précédentes aventures (que j’imagine avoir été abordées dans ‘Outgunned’), ce qui est assez rare de la part d’un auteur de la BL pour que je le souligne ici. Pour terminer, le mystère qu’il laisse planer sur le contenu du mystérieux colis ramené à grand peine à l’Inquisiteur Atenbach donne également envie d’en savoir plus sur ce qui semble être une arme prometteuse pour lutter contre la Grande Dévoreuse. Bref, une addition parfaite à l’arc von Shard, que j’espère se voir se poursuivre dans les prochaines années.

.

***

Voilà qui conclut cette revue de la Black Library Character Day 2023, livraison assez décevante avec seulement deux nouvelles intéressantes (pour votre humble serviteur, bien sûr). On peut au moins se réconforter avec la confirmation que Rob Young et Denny Flowers, et à travers eux, leurs personnages fétiches, sont des valeurs sûres de la GW-Fiction. C’est tout pour le moment, bon été à tous !

BLACK LIBRARY CELEBRATION 2023 [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue des recueils gratuits1 de la Black Library Celebration 2023, proposés comme tous les ans par les généreux seigneurs de Nottingham à la mi-février. Pas de surprise en termes de format cette année (SCS, mon amour), puisqu’on retrouve des livrets contenant cinq nouvelles précédemment publiées – pas d’inédits ici, et c’est assez normal -, choisies pour introduire le lecteur aux franchises majeures de la BL… en tout cas dans la version anglaise. Les versions française et allemande sont en effet un peu moins diversifiées, comme on va le voir, mais ont au moins le grand mérite d’exister, ce qui semble indiquer que Games Workshop n’a pas encore tiré un trait sur son lectorat international. Pourvu que ça dure.

1 : Il faut tout de même acheter un petit quelque chose sur le site de Games Workshop pour recevoir une version papier, ou sur celui de la Black Library pour pouvoir télécharger toutes les versions numériques. Comme les contenus diffèrent en fonction de la langue, je ne saurais trop vous conseiller de passer par le site de la BL si vous voulez en avoir pour votre argent.

Black Library Celebration 2023

Au sommaire de ces offrandes littérales et littéraires, on retrouve donc un savant mélange d’univers, d’ambiances et d’auteurs. Comme indiqué plus haut, c’est la « version originale » qui bénéficie d’un traitement de faveur, puisqu’elle contient des histoires siglées 40K, Age of Sigmar, Hérésie d’Horus, Warhammer Horror et Warhammer Crime, alors que ces deux dernières franchises sont absentes des versions traduites (au profit de deux nouvelles 40K supplémentaires). Un peu dommage, car l’effort avait été fait l’année dernière. Tant qu’on est dans les griefs, notons que le choix d’illustration de couverture ne fait sens que pour le recueil VO, qui contient une nouvelle mettant en vedette Minka Leska (‘The Place of Pain and Healing’), alors que les livrets français et allemand font l’impasse sur la demoiselle. Il serait cependant injuste de judge a book by looking at its cover, comme on dit de l’autre côté de la Manche, et il est donc temps de nous plonger dans l’étude de ces petites anthologies.

Black Library Celebration 2023

.

.

The Place of Pain and Healing J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE :

The Place of Pain & HealingComme vous le savez peut-être, la dernière incursion d’Abaddon & friends sur Cadia ne s’est pas super bien terminée pour la planète. Aux dernières nouvelles, elle serait tombée sur le sol de la galaxie, ce qui fait tout de même une sacrée chute. Minka Lesk, jeune Bouclier Blanc aux débuts de ce que nous appellerons pudiquement « les événements », peut témoigner des derniers moments difficiles de la population locale : évacuée en compagnie du Capitaine Kasrkin Rath Sturm avant la victoire du Chaos (voir ‘Cadia Stands’), elle passe les premiers moments du voyage sur le croiseur Space Wolves qui convoie les deux Cadiens à délirer dans son sommeil. Les souvenirs de la défense contre la 13ème Croisade Noire se mélangent avec d’autres, plus anciens, de son enfance et son entraînement à devenir une bonne petite soldate. On apprend aussi que Minka est une Katherinette (même si elle ne porte pas de chapeau).

Cette transe enfiévrée est interrompue par le médecin de garde du Fang of Fenris, qu’un serviable hilote Space Wolves va quérir en catastrophe après avoir été témoin de la tachycardie suspecte de Minka. Une petite injection de stimms et ça repart comme en 40,000, cependant. Après une brève période de confusion, notre héroïne échange deux mots avec son camarade d’infortune, puis part errer dans les couloirs désertés et ténébreux du croiseur pour se changer les idées. Elle tombe sur Skarp-Hedin, le Space Marine qui l’a ramenée dans sa besace énergétique au moment de quitter Cadia (comme quoi on peut avoir un mono sourcil et bon(s) cœur(s), et parvient au terme d’un dialogue aussi profond que virtuose, mais en tout cas cathartique, à se réconcilier avec l’idée de la perte de sa planète natale, de ses milliards de compatriotes, et du fier héritage d’inflexibilité des centaines de générations précédentes. Le tout en deux minutes top chrono. A ce niveau, on ne dit pas tourner la page, mais désapprendre à lire.

Skarp-Hedin, qui a senti que son vaisseau était entré dans le Warp, et plus certainement que la fin de la nouvelle était imminente (c’est fou comme les Space Wolves ont le nez fin), trouve une excuse bidon pour partir dans l’arrière-plan narratif à petites foulées – mais en continuant le dialogue avec Minka, car c’est un gentleman. Cette dernière repart pioncer dans sa cellule, et sous son matelas, il faut le préciser, l’odeur et le poids de sa paillasse lui rappelant les jours heureux où elle faisait la nouba dans les dortoirs des premières années. You do you, girl, you do you.

AVIS :

Nouvelle de transition entre ‘Cadia Stands’ et ‘Cadian Honour’, ‘The Place…’ ne me semble pas être une addition très intéressante à la saga de Minka Lesk (que je ne considère pas comme étant très intéressante non plus, je dois dire). On n’apprend en effet pas grand-chose de nouveau sur l’héroïne aux yeux violets, qui a eu l’enfance stricte et militarisée que tous les Cadiens ont eu (aaaaaah), et a été traumatisée par la violence des combats de la Croisade Noire (oooooh). Comme les trois personnages principaux (Lesk, Sturm et Skarp-Hedin) ont un charisme cumulé proche de celui d’une huître comptable, il est dur de sympathiser un tant soit peu avec leur peine et leur déchirement.  J’ajoute que Hill se montre particulièrement peu inspiré dans l’écriture des quelques dialogues de sa nouvelle, qui sont si vides et grotesques que leur simple lecture vous sort immédiatement de l’histoire. À laisser sur Cadia.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

La Black Library n’a pas été très inspirée au moment de choisir ‘The Place of Pain and Healing‘ comme représentant de sa franchise phare pour la Black Library Celebration 2023. Outre le fait qu’il s’agit plus d’un connecteur logique (et assez inutile à l’arc en question) entre les deux romans que Hill a consacré à son égérie cadienne que d’une nouvelle autonome à proprement parler, la qualité de cette soumission est loin d’être irréprochable, ce qui est un comble pour un texte mettant à l’honneur des soldats aussi exigeants envers eux-mêmes que les Cadiens. Dur dur de passer de Ciaphas Cain à Minka Lesk, c’est moi qui vous le dit…

.

Monsters – N. Van Nguyen [AoS] :

INTRIGUE :

MonstersOù nous suivons la nouvelle1 chasseuse de monstres officielle de papa Sigmar dans l’une de ses traques dans les Royaumes Mortels, ici Shyish un soir de pluie et de brouillard. Déployée en soutien des Anvils of the Heldenhammer, occupés en contrebas à contenir une invasion de démons de Tzeentch, Yndrasta a fait le déplacement pour bannir un Duc du Changement si changeant qu’il n’a d’autre nom que l’Anomie. Super plan pour éviter d’être convoqué par des mortels ambitieux à tout bout de champ (et de chant), moi je dis. Ayant certainement compris qu’il était dans le viseur de la virago de Ziggy, l’Anomie se la joue cependant petit bras et se transforme en nuage de barbe à papa au lieu de livrer un honnête combat à la championne adverse. Sous cette forme, il se révèle aussi inoffensif qu’invulnérable, ce qui ne fait pas les affaires d’Yndrasta et de sa lance magique, Thengavar, qui disparaît corps et bien dans le protoplasme gazeux et ne revient pas dans la main de sa porteuse, comme c’est habituellement le cas.

Sigmar ayant pensé à lui fournir une arme de rechange, Yndie ne se laisse pas décontenancer par la tournure prise par les événements et se rue à l’assaut de sa Némésis pour finir les choses au corps à corps. Un nouveau shenanigan de l’Anomie l’envoie toutefois dans le décor, et l’intrépide héroïne fait une chute douloureuse mais pas mortelle jusque dans la piscine privée d’une grotte souterraine, Gandalf style. Elle serait repartie aussi sec (mais mouillée, je me comprends) castagner le démon si elle ne s’était pas rendu compte que son point de chute n’était pas aussi désert qu’il l’aurait dû être. Un vieil ermite d’une carrure peu commune et arborant une ‘stache de compétition a en effet assisté à sa culbute pas très légendaire, et comme le quidam exsude une aura mythique et possède une hache qui l’est tout autant (appelez ça l’intuition féminine si vous voulez), Yndrasta reste faire un brin de causette.

Il ne lui faut pas longtemps pour comprendre que cet inconnu n’est autre que Voyi. Si cela ne vous dit rien, c’est normal : Voyi, aussi connu sous les noms du Non Béni, du Traître et surtout de l’Oublié, était un héros de l’Âge de Mythes, élevé par Sigmar au rang de champion, mais qui choisit d’aller vivre sa vie en solitaire au lieu de défendre Sigmaron lorsque le besoin s’en fit sentir. Sigmar n’étant pas connu pour sa magnanimité envers ceux qui le déçoivent, et ayant un égo trop important pour reconnaître ses échecs, le nom de Voyi fut rayé de tous les registres officiels, et seuls une poignée d’Elus, dont Yndrasta fait partie, eut vent de l’existence de ce paria depuis lors. Dès lors, la chasseresse se trouve confronté à un dilemme peu évident : rapporter la tête du traître à son patron pour lui faire plaisir, ou tenter de négocier avec Voyi pour apprendre comment, il y a de cela des millénaires, il réussit à bannir l’Anomie…

Après un échange tendu, durant lequel Voyi se permit de comparer Yndrasta et les Stormcast Eternals aux monstres chassés par la première, ce qui n’est guère gentil, et ponctué par un duel rapidement conclu par un point de côté débilitant pour le champion grabataire, Yndrasta se résout à laisser l’ancêtre en paix rien que pour lui montrer qu’elle n’est pas si méchante que ça, et à retourner se battre contre l’Anomie, même s’en savoir comment le vaincre. Sa « générosité » est toutefois récompensée par Voyi, qui lui révèle avant qu’elle ne parte qu’il lui suffira de prélever un échantillon sur la forme blurbesque du démon pour l’exiler des Royaumes Mortels (et récupérer sa précieuse lance au passage). Armée de ce tuyau, Yndrasta peut enfin repartir au front, non sans promettre à son hôte de garder pour elle le secret de sa destinée. Ce sera la première fois qu’elle dissimulera des choses à Sigmar depuis sa Reforge : pourvu qu’il ne l’apprenne jamais…

1 : Eh oui, la position était déjà prise avant que la V3 ne fasse de Miss Yndrasta une des têtes d’affiche de la franchise. Remember Neave Blacktalon ?

AVIS :

Une très bonne entrée de la part de Noah Van Nguyen, qui part explorer l’une de mes facettes préférées du fluff des Royaumes Mortels : le côté sombre de Sigmar et de ses élus. Yndrasta en elle-même est très loin d’être une parangon de noblesse et d’humanité, puisqu’elle se décrit volontiers comme cruelle et intéressée uniquement par sa mission de chasseresse, ce qui en fait sans doute la première héroïne Stormcast Eternal de la BL ouvertement antipathique (un progrès, si vous me demandez). Sa confrontation avec Voyi m’a fortement rappelé la difficile transition entre Guerriers Tonnerre et Space Marines entre la fin de l’Unification de Terra et le début de la Grande Croisade, avec Sigmar dans le rôle de l’Empereur1, en plus de venir approfondir et complexifier le fluff de cette faction. Un choix très intéressant de la part de Van Nguyen (j’aurais moyennement apprécié me retrouver avec une nouvelle de Neave Blacktalon bis, pour être honnête), qui démontre ici qu’il est capable de sortir du manichéisme Stormcast Eternals = gentils // opposants des Stormcast Eternals = méchants dans lequel bon nombre de ses collègues ont donné. De bon augure pour son roman ‘Godeater’s Son’, qui traitera spécifiquement de ce thème, et pour la qualité et l’intérêt de la littérature AoS en général.

1 : On peut aussi faire un parallèle avec le ‘Misbegotten’ de Dan Abnett, où le savant fou Fo déclare à Horus qu’il considère les Primarques et les Space Marines comme beaucoup horribles que toutes créations.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une très bonne découverte de l’univers d’Age of Sigmar et de sa faction la plus iconique (à égalité avec les Gloomspite Gitz), à travers une histoire qui montre bien que personne n’a le monopole du coeur dans les Royaumes Mortels, et sûrement pas ce rancunier de Sigmar. De toutes les nouvelles de Stormcast Eternals que la BL nous a proposés depuis le lancement du jeu en 2015, celle-ci fait partie des plus réussies, et c’est donc une chance pour les nouveaux lecteurs de s’initier à cette franchise dans des conditions optimales.

.

Amor Fati – M. F. Haspil [HH] :

INTRIGUE :

Amor FatiRevenu d’entre les morts grâce aux talents nécromantiques de Fabius Bile, le Seigneur Commandeur Eidolon n’est cependant pas satisfait de son sort (pour changer). Son retour dans le Materium s’est en effet accompagné d’effets secondaires désagréables et disgracieux, ce qui lui a valu des critiques acerbes de la part de Fulgrim. Honteux de « se déplacer comme un Ork », dixit cette petite bi*tch de Fufu, Eidolon passe ses journées à la salle d’entraînement du Proudheart, à massacrer des esclaves gladiateurs sous le regard fatigué de Fabius (qui ne voit pas à quoi ça sert). Bien que l’opposition ne soit pas de taille à menacer un Astartes, même un Astartes dont la motricité fine est inférieure à celle d’un enfant de deux ans, les progrès ne sont pas au rendez-vous. Comprenant sans doute qu’il doit donner à son patron un os à ronger pour éviter de passer le reste de son existence à lui préparer des sparring partners qu’il dézingue en dix secondes, l’Araignée finit par révéler à Dondon qu’il connaît un moyen de le restaurer dans son état initial. Il lui faudrait pour cela disposer des glandes progénoïdes d’Emperor’s Children (ce qui est facile)… non-corrompu par le Chaos (ce qui l’est beaucoup moins). Et ça tombe bien, Fabius sait exactement où dégoter cet ingrédient devenu rarissime : l’Apothicaire a en effet pris soin d’envoyer une douzaine d’Astartes s’isoler du reste de la Légion pendant qu’il travaillait sur un remède à la dégénérescence qui affligeait les Emperor’s Children pendant la Grande Croisade. On a toujours besoin d’un groupe témoin pour tester l’efficacité d’un traitement, c’est bien vrai. Cela fait maintenant plusieurs années, et un début d’Hérésie, que ces exilés n’ont pas donné signe de vie, mais avec un peu de chance, il en reste encore un en vie, et il se fera un plaisiiiir de donner ses glandes pour la cause.

Eidolon part donc immédiatement à la cueillette aux loyalistes, bien conscient que son état de méforme actuel risque de lui être fatal la prochaine fois qu’il croisera la route de ce parvenu de Lucius (qui lui est revenu d’entre les morts sans séquelles, c’est vraiment trop injuste). Si les premières adresses données par Fabius se révèlent être des impasses, le destin finit par sourire au Seigneur Commandeur, dont le vaisseau sort sans crier gare du Warp à proximité de la planète où sont stationnés les derniers échantillons de la liste arachnéenne. Prenant avec lui une escouade de Kakophoni dont, je cite, « la disparition ne chagrinera personne » (ambiance ambiance), Eidolon atterrit à proximité de la forteresse solitaire tenue par ses frères d’armes, et se prépare à une émouvante réunion de famille.

Les hérétiques sont froidement accueillis par le Sergent Avram Rakomon, qui se présente comme le dernier des Emperor’s Children, et ses quelques potos des Légions Brisées. Dans la fusillade qui s’ensuit, Eidolon se découvre des capacités physiques insoupçonnées, qui font plus que compenser ses tics et ses tocs nerveux. Une preuve que Slaanesh ne l’a pas oublié, sans nul doute. Ayant perdu son escouade dans l’affrontement (notons tout de même qu’il tue lui-même le champion Kakophoni parce qu’il avait osé lui parler de Lucius), Eidolon engage Rakomon au corps à corps, et profite de son nouveau regain de forme pour marteler le loyaliste jusqu’à ce que mort s’en suive. Il ne lui reste plus qu’à décortiquer ce mollusque énergétique pour récupérer les précieuses glandes qui lui permettront de retrouver sa jeunesse…

Début spoiler…Mais à bien y réfléchir (car oui, ça lui arrive), Eidolon se rend compte qu’agir de la sorte serait commettre un fashion faux pas envers Slaanesh, qui lui a accordé des dons compensant les faiblesses causées par sa résurrection. Il ne faudrait pas fâcher le Prince du Chaos en redevenant un simple et boring Space Marine, tout de même. La nouvelle se termine donc avec un broyage à main nue des glandes du pauvre Rakomon, dont le sacrifice n’aura pas servi à grand-chose. Perdu pour perdu, je pense que Fabius aurait apprécié ce cadeau, mais il est vrai que l’altruisme n’est pas le premier trait des Emperor’s Children…Fin spoiler

AVIS :

Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, ou qu’on aime à le détester, Eidolon occupe une place particulière dans la galerie des personnages secondaires de l’Hérésie d’Horus, en cela qu’il ne laisse personne indifférent. Si ‘Amor Fati’ ne lui permettra pas de se refaire une réputation parmi les fans de cette franchise (il reste en effet parfaitement égal à lui-même), Michael F. Haspil réussit à donner à l’imbuvable Seigneur Commandant une profondeur inédite. En choisissant d’endurer son statut de créature de Frankenstein – avec bénéfices, tout de même – au lieu de chercher une régénération en bonne et due forme, Eidolon se pose pour la première fois en maître de son destin. Il démontre également une compréhension du crédo Slaaneshi (plus ça fait mal, plus c’est bon) digne d’un Elu du Prince du Chaos, ce qui renforce sa future candidature au commandement de la Légion (voir ‘The Soul, Severed’, qui se déroule peu après). De son côté, Haspil fait preuve d’une belle maîtrise de son sujet pour un newbie hérétique, et se paie même le luxe de venir enrichir le fluff de sa Légion d’adoption, audace que peu d’auteurs nouvellement venus se sont autorisés. Une nouvelle tout à fait honorable donc, et une lecture plus que recommandée aux amateurs de la IIIème Légion.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme tous les ans, je m’interroge sur la présence d’une nouvelle de l’Hérésie d’Horus, franchise réservée aux amateurs de fluff par excellence, dans un livret d’initiation à la BL tel que celui-ci. Il s’agit peut-être de la dernière fois que je remets ce débat sur la table (il ne reste plus qu’un bouquin à sortir pour que l’Hérésie se termine), mais en attendant, ‘Amor Fati‘ se révèle aussi plaisant pour les initiés que cryptique pour les débutants. On touche même au sublime (en termes d’erreur de casting) quand on réalise le nombre de pré-requis nécessaires à la bonne compréhension des tenants et aboutissants de cette nouvelle, à commencer par l’incontournable : « mais qui est donc Eidolon? » (et pourquoi est-il si méchant?). Je reste droit dans mes bottes et continue à prêcher pour l’inclusion de ‘The Lightning Tower‘ en lieu et place de tout autre nouvelle hérétique dans les recueils Black Library Celebration, et tant pis pour les redites. Commençons par le commencement, que diable.

.

The Vintage – D. Annandale [WHR] :

INTRIGUE :

The VintageIl y a des promotions qui valent un enterrement, et ce n’est pas Ullior Arkhant qui nous dira le contraire. Capitaine chevronné de l’armée de sigmarites s’étant ralliée aux Anvils of the Heldenhammer lors de leur campagne de libération de Shyish, Ullior caresse le secret espoir de devenir à son tour un des Elus du Grand Barbu, et a donc fait de son mieux pour soigner ses stats en combattant aux côtés des Stormcast Eternals. S’il s’est fixé cet ambitieux objectif, c’est parce qu’il est hanté depuis son enfance par le souvenir du jour où son village natal et tous ses habitants ont été passés au fil de la griffe et de la canine par une bande de vampires assoiffés, menés par nulle autre que la redoutable Anasta Malkorion. Ayant échappé au carnage par un gros coup de bol (il a été recouvert par un bout de charpente lorsqu’un Vargheist grognon a défoncé la hutte familiale), Ullior ne s’est jamais débarrassé de son complexe du survivant, et aspire donc à être reforgé pour laisser une bonne fois pour toute son passé derrière lui. Aussi, lorsque le Lord Celestant des Anvils of the Heldenhammer lui annonce qu’il l’a choisi pour garder la forteresse de Fovos, en grande partie parce qu’il est un natif de la région, pendant que les Stormcast poursuivront leur croisade dans le Royaume de la Mort, le brave Ullior présente une figure d’enterrement à son supérieur (qui ne relève pas, croyant sans doute qu’il s’agit de la manière dont les Shyishois marquent leur contentement). Il est toutefois trop obéissant et discipliné pour refuser cette mission, d’une importance vitale pour sécuriser les lignes d’approvisionnement des Stormcast Eternals.

Les premières semaines s’écoulent avec monotonie, rien ne venant perturber le calme mortuaire de Fovos, malgré les mauvais pressentiments qui pourchassent notre héros. Persuadé que le pire est à venir, ce dernier ne compte pas ses heures et prend si peu de repos que sa seconde finit par lui intimer d’aller piquer un roupillon pour reprendre du poil de la bête et convaincre ses hommes qu’il a confiance en eux. Ullior accepte et part faire un somme amplement mérité, mais est aussitôt assailli par un terrible cauchemar, et revient à lui dans une forteresse plongée dans un silence de mauvais augure…

Début spoiler…Et pour cause : la garnison a été massacrée par un ennemi sanguinaire, qui se révèle bien sûr être Anasta Malkorion en personne. On apprend alors que la survie d’Ullior ne devait rien au hasard ou à la chance, mais n’était qu’une manigance de la vampire pour créer un « grand cru de sang » à partir du traumatisme subi par notre héros, laissé à psychoter pendant quelques décennies comme on peut élever un vin de garde dans un (Monde qui) fût en chêne. Une telle patience ne peut que s’applaudir, et bien que l’issue de la nouvelle ne soit guère heureuse pour Ullior (qui mourra sans avoir été remarqué par Sigmar), il aura au moins la satisfaction de savoir que sa misérable existence a permis la création d’un fameux millésime. Boire ou périr, pourquoi choisir ?Fin spoiler

AVIS :

David Annandale et les personnages tourmentés, rattrapés et terminés par leur passé douloureux, c’est une des associations les plus pérennes de Warhammer Horror (‘A Deep and Steady Tread’, ‘The Hunt’, ‘From the Halls, the Silence’)… juste derrière David Annandale et les vampiresses manipulatrices et implacables (‘The Threshold’, ‘The Dance of the Skulls’, ‘The Gossip of Ravens’, ‘Obsidian’). Ici, notre homme réunit ses deux marottes avec une nouvelle d’ambiance assez bien construite, compensant son manque criant de suspens par la caractérisation réussie dont bénéficie Anasta Malkorion1, abomination morte-vivante alliant cruauté bestiale et raffinement aristocratique. Ca se laisse lire autant que le pauvre Ullior Arkhant se laisse boire, même s’il ne s’agit pas d’un chef d’œuvre horrifique.

1 : Le personnage nommé le plus énigmatique d’Age of Sigmar, puisqu’elle semble avoir été créée de toutes pièces lors du Warhammer Day 2021, et n’a plus jamais fait parler d’elle depuis. Cela n’a pas empêché la Black Library de sous-titrer ‘The Vintage’ comme étant « une histoire d’Anasta Malkorion », comme s’il s’agissait d’un personnage amené à bénéficier de sa propre série.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une petite nouvelle d’horreur (faut le dire vite) qui n’impressionne ni ne déplaît : le catalogue de Warhammer Horror est maintenant assez riche pour trouver mieux que ‘The Vintage‘ en guise de représentant de la franchise (mention spéciale au Black Library Celebration 2022, qui contenait deux très bonnes histoires : ‘The Reaper’s Gift‘ et ‘Les Réprouvés‘), mais il y avait aussi bien pire. Ca fait le taf.

.

Unnatural Causes – J. Reid [WCR] :

INTRIGUE :

Légiste de bas étage (elle travaille en sous-sol) dans le quartier défavorisé de Thronegate, à Varanguata, Martia Lyviska ne vit que pour son jeune fils Issak, malheureusement affecté par la maladie du poumon gris, sorte d’asthme grimdark à l’issue fatale pour les péquins de base n’ayant pas les moyens de se payer les traitements adéquats. Ayant déjà vendu la plupart de ses possessions de valeur pour offrir à son rejeton une cure temporaire grâce aux réseaux professionnels d’une ancienne copine de promo devenue directrice de l’Officio Medicae local (Emilia Vermannen), Martia supplie cette dernière de réinscrire Issak à la prochaine session, lui promettant de rassembler rapidement la somme nécessaire pour financer le traitement.

Le problème est que notre mère courage n’a aucune idée de la manière de rassembler le magot en question. Le destin va toutefois lui tendre une perche, sous la forme d’un cadavre livré au cœur de la nuit terne d’Alecto par un mystérieux homme de main très pointilleux quant au destinataire du sac à viande qu’il véhicule : le macchabée doit en effet être remis en main propre au verispex (le directeur du mortuarium), et à personne d’autre. Cette indication en manque pas de surprendre Martia, qui sait de source sûre que son big boss a raccroché la blouse depuis des années, et ne traite plus que des affaires administratives de son service. Une réaction étrange du cadavre au moment où elle le place dans un caisson réfrigéré la convainc de se livrer à une étude plus poussée de ce nouveau « patient », dont l’abdomen se trouve être rempli d’objets de valeur, à défaut d’organes. Comprenant qu’elle vient de mettre le doigt scalpel sur un trafic impliquant le verispex et une des nombreuses organisations criminelles opérant à Varanguata, Martia commence par paniquer, mais finit par réaliser qu’elle pourrait tirer profit de sa trouvaille pour payer le traitement de son fils, et emporte avec elle un anneau en or frappé d’une tête de corbeau avec l’intention de le revendre auprès d’une de ses connaissances.

La transaction avec sa receleuse de confiance (Mama Louhi) ne se passe toutefois pas comme espéré, la vieille bique refusant tout net de prendre la camelote après examen, et conseillant à sa cliente de se débarrasser au plus vite de la bagouse compromettante avant de s’attirer des ennuis. La sagace Mama a en effet identifié l’anneau comme était le signet d’un Libre Marchand, que son légitime propriétaire (ou héritier de ce dernier) voudra sans doute récupérer à tout prix. Comprenant qu’elle s’est embarquée dans une affaire qui la dépasse autant qu’un Titan toise un Grot, Martia se rue vers son lieu de travail pour remettre l’anneau de pouvoir dans le fondement du cadavrissimo avant que sa disparition ne soit remarquée, mais il est déjà trop tard, comme le cordon de Sanctioners autour de la morgue le révèle. Un planton plutôt bavard apprend à notre héroïne que le bâtiment a été attaqué par un mystérieux assaillant qui a froidement exécuté tout ceux qui ont eu le malheur de croiser sa route, verispex compris, et était visiblement à la recherche de quelque chose dans les locaux, à en juger par la dévastation qu’il ou elle a laissé sur place avant de s’éclipser.

Sachant fort bien que sa trace est facile à trouver pour quiconque serait au courant de l’heure d’arrivée du cadavre surprise de la veille, Martia repart aussi sec en direction de son appartement, où elle a laissé son fils aux bons soins d’une voisine à moitié aveugle, craignant que le traqueur d’anneau se soit rendu sur place pour avoir une petite explication avec la légiste de garde la nuit précédente.

Et une fois encore, elle arrive trop tard (sale habitude tout de même). Sa voisine lui explique qu’elle a remis Issak à une équipe du Medicae afin qu’il puisse reprendre son traitement, sans se douter qu’elle se faisait rouler dans la farine. De son côté, Martia ne met pas longtemps à trouver une note posée en évidence dans son salon, l’enjoignant à amener l’anneau au mortuarium, et de venir seule…

Début spoiler…Ayant reconnu son écriture, Martia n’est pas surprise de la présence d’Emilia Vermannen au rendez-vous. Comme la pimpante et rejuvenatée à mort directrice lui explique, elle accepte de temps à autre de rendre de menus services à de puissants et discrets amis en échange de généreuses donations au profit de l’Officio Medicae, et, si elle tient bien sûr à son amitié avec Martia, ne reculera devant rien pour mettre la main sur le précieux anneau. Fort heureusement pour cette dernière, sa copine est plus forte en duckface qu’en tir au pistolet laser, ce qui lui donne assez de temps pour activer le mini-fuseur camouflé dans la bague1, ce qui crée suffisamment de confusion pour lui permettre d’échapper momentanément à sa poursuivante et de récupérer son fils, qui dormait d’un sommeil profond dans une salle avoisinante. Le recadrage tant attendu entre les deux BFF n’aura cependant pas lieu, l’activation de l’anneau ayant permis à un homme de main du Libre Marchand lésé de repérer le gadget de son patron, et de se téléporter dans le mortarium pour reprendre possession de la relique, qu’Emilia a eu la mauvaise idée de ramasser dans les décombres. Un tir, bien ajusté cette fois, de pistolet à aiguille, et la directrice est envoyée ad patres, tandis que Martia et Issak sont royalement ignorés par l’agent du Rogue Trader. Tout est bien qui finit bien, et même mieux que ça, car Martia décide de suivre l’exemple d’Emilia et de reprendre le rôle laissé vacant par la mort tragique de son amie. Un dévoiement envers l’Empereur, certes, mais surtout un dévouement envers son fils, qui pourra désormais bénéficier des meilleurs traitements grâce au nouveau train de vie de sa mère. Qui pourrait l’en blâmer ?Fin spoiler

1 : Apparemment, tout le monde sait ce qu’est un Libre Marchand sur Alecto, et tout le monde sait aussi que ces individus se baladent avec des armes digitales. C’est un monde très cultivé, en fait.

AVIS :

Jude Reid rend une copie sérieuse avec ce ‘Unnatural Causes’, qui plonge le lecteur dans le déprimant quotidien d’une famille ordinaire d’un monde ruche lambda. Dans les ténèbres du lointain futur, il vaut mieux être très friqué pour espérer vivre une existence digne, ou à défaut, être prêt à marcher dans toutes les combines possibles pour sortir la tête de l’eau (ou ici, des particules fines). Reid démontre qu’elle maîtrise les codes du « grim-noir » (une expression gracieusement offerte par votre serviteur), en intégrant les thèmes du roman noir (corruption galopante, réseaux criminels, receleur louche et autre femme fatale) à l’univers de 40K, pour résultat aussi atmosphérique que convaincant. Je suis curieux de voir ce que cela pourrait donner sur un format plus conséquent.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une bonne introduction à la petite dernière des franchises de la Black Library, qui a l’énorme avantage par rapport au recueil de l’année dernière d’être une vraie nouvelle stand alone, et pas la bande-annonce littéraire d’un roman séparé. Le postulat de départ de Warhammer Crime n’étant pas le plus accessible (40K, mais sans tous les trucs épiques de 40K), heureusement que la BL a pris un peu plus de soin à choisir son produit d’appel cette année.

.

.

Prologue à Nikaea (Prologue to Nikaea) – D. Annandale [HH] :

INTRIGUE :

Prologue to NikaeaEnfermé dans sa chambre comme un ado rebelle, Malcador s’adonne à une de ses activités favorites : fouiller le Warp à la recherche de potins croustillants. Malgré les prodigieux pouvoirs psychiques dont dispose le Sigilite, et le fauteuil ergonomique premier cri que lui a offert son boss pour ménager ses lombaires et sa santé mentale (la qualité de vie au travail, c’est important), la tâche n’est pas sans danger pour Malcador1, qui finit cependant par ferrer un nom après avoir mis son bras dans l’œil d’une tempête Warp particulièrement vindicative : Thawra. Il semble que quelque chose de vilain soit en train de se passer sur cette planète impériale, et il est du devoir du Ma(l)c’ d’aller enquêter sur place.

Quelques temps plus tard, le noble vieillard fait son arrivée en orbite autour de la planète en question, escorté par une compagnie de Custodes menée par le Capitaine Bouclier Collatinus. Il semble bien que Thawra a connu des avanies récentes, comme les débris de sa flotte marchande et le remplacement soudain de la Gouverneur Vasra par sa conseillère Arkanasia en attestent. Rendus à la surface, les enquêteurs impériaux se font briefer par leur hôte : une faction de Psykers séditieux a lancé une attaque surprise sur le gouvernement planétaire, causant un beau bordel (et la mort de Vasra) avant que la contre attaque loyaliste ne les force à battre en retraite. Arkanasia attribue une bonne partie de cette remontada à l’emploi d’une force de Psykers fidèles à l’Empereur, qu’elle a personnellement entraîné pour combattre les félons. Etant elle-même une Psyker, elle est convaincue de tenir là une arme décisive pour la suite de la Grande Croisade, et meurt d’envie d’aller pitcher son idée sur Terra pour la prochaine saison de La Galaxie A Un Incroyable Talent. Malcador, en vieux reac’ qu’il est, nourrit de profonds doutes sur cette idée, qu’il garde cependant pour lui. Il faut avant toute chose s’assurer que l’insurrection de Thawra est définitivement matée, ce qui n’est pas encore chose faite. En effet, les derniers rebelles se sont retranchés dans des cavernes au Sud de la capitale, et on est sans nouvelles des forces envoyées par Arkanasia, dont sa brigade de X-Men, pour leur faire rendre gorge.

Lorsque Malcador, Arkanasia, Collatinus et ses Custodes arrivent sur le théâtre d’opérations, ils sont accueillis par une tempête psychique petite par la taille mais vicieuse de tempérament2. Sa cause ne fait pas de doutes pour un expert aussi calé en warperie que le Sigilite : l’affrontement entre Psykers indisciplinés a dégénéré en un mindfuck littéral (merci Slaanesh), et il est urgent d’agir pour refermer la brèche avec l’Immaterium avant que la tempête n’engouffre tout Thawra. Fort heureusement, Malcador est venu avec les outils appropriés pour cette tâche : sa mauvaise humeur légendaire et sa capacité à faire plusieurs choses en même temps (indispensable lorsqu’on doit gérer une bande de Primarques mal élevés), ici balancer des décharges de taser aux Psykers survivants tout en évitant de laisser traîner sa toge dans la boue warpienne. Et pour ceux qui se demandent, non, les Custodes ne servent pas à grand-chose, à part balancer des rafales de bolter au jugé au niveau des genoux avec un angle de tir de 45°C. Pour des raisons inexplicables, Arkanasia décide soudainement de partir en courant vers la tempête avant que le Régent n’ait fini de réger le problème. Les derniers Psykers en état décident alors de converger sur elle, ce qui aurait pu très mal se finir pour Malcador n’eut été la foi chevillée au corps d’Arkanasia pour l’Empereur. Au lieu de vaporiser le petit vieux pénible qui tchipait sans merci ses condisciples, la Gouverneur par intérim choisit noblement de gueuler un grand « POUR PEPE !!! » en direction du ciel, avant de se prendre une rafale de bolts dans le buffet (qui n’arrivent même pas à la tuer sur le coup, c’est dire si les Custodes sont surfaits).

Tout est bien qui finit quand même pour Malcador et Collatinus, qui, en gentlemen qu’ils sont, viennent assister aux dernières paroles d’Arkanasia. Cette aventure provoque un certain malaise chez le Sigilite, qui n’a dû son salut qu’à la foi de la Psyker, c’est-à-dire au concept que lui et son boss se sont jurés d’éradiquer. Se pose également la question du positionnement de l’Imperium envers les pouvoirs psychiques : sont-ils trop dangereux pour être utilisés, ou bien un juste milieu est-il atteignable ? Rendez-vous sur Nikaea dans quelques années pour reprendre cette discussion…

1 : On en déduit qu’en M30, il n’existe plus de bouton « j’ai de la chance » sur la barre de recherche Google. Cela aurait été plus confortable pour tout le monde.
2 : Il semble à Malcador que la tempête sait qu’il se trouve sur Thawra, et qu’elle cherche à l’humilier, comme les inscriptions insultantes sur sa mère qui apparaissent à la surface du maelstrom semblent l’indiquer.

AVIS :

David Annandale attire l’attention du lecteur sur une question intéressante de l’Imperium naissant : la formation et le contrôle des Psykers par les autorités impériales (in)compétentes. À l’époque, l’Empereur avait d’autres chats à fouetter que de mettre des œillères aux cohortes de mutants acheminés par les Vaisseaux Noirs jusqu’à Terra, tâche peu gratifiante mais indispensable à la survie de son empire galactique. Pendant la Grande Croisade, il y a fort à parier que le sujet était traité au cas par cas, avec des risques de débordement, parfois causé par un enthousiasme sincère mais dangereux, comme cela a été le cas sur Thawra. Si une des missions de Malcador consistait bien à gérer les crises de ce genre pendant que son patron localisait sa marmaille, on comprend mieux pourquoi il tenait temps à renforcer son équipe : à son âge, arpenter la galaxie pour mettre des glaçons psychiques dans le slip du moindre Psyker en rut n’est pas une activité conseillée.

Sur cette base intéressante, Annandale ne développe cependant pas grand-chose, à commencer par des connexions avec Nikaea, ce que le titre laissait pourtant envisager. Il aurait été approprié, à mon sens, de jouer des rapports compliqués que le Warp entretient avec notre continuum spatio-temporel pour faire voir à Malcador des indices du procès en sorcellerie intenté à Magnus et aux Librarius des Légions de l’Astartes, voire de la déchéance de l’humanité telle qu’annoncée par l’Hérésie d’Horus. Rien de tout ceci ici, seulement une nouvelle très « premier degré », saupoudrée d’une pincée de fluff et terminée par quelques remarques d’ordre général sur le rapport qualité-prix de l’Immaterium. Il y avait moyen de mieux faire, mais on sauvera ‘Prologue to Nikaea’ du pilori compte tenu de son absence de défauts majeurs, ce qui place cette œuvre hérétique parmi les plus abouties de son auteur.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Pas grand-chose à ajouter ici à ce que j’ai mis en avant un peu plus haut pour la nouvelle hérétique VO du recueil de cette année. Si vous savez qui est Malcador, et ce qu’est Nikaea, vous avez une chance d’apprécier cette nouvelle à sa juste valeur (j’ajoute que ‘Amor Fati‘ est intrinséquement supérieur à ‘Prologue to Nikaea‘, tant pis pour nous autres Frenchies)… et vous n’êtes sans doute pas le public cible de cette publication. Paradoxal.

.

Le Poing d’un Dieu Courroucé (The Fist of an Angry God)W. King [AoS] :

INTRIGUE :

The Fist of an Angry GodAssignés à la conquête de la forteresse d’Azumbard, dans le Royaume d’Aqshy, le Liberator-Prime Balthus1 et ses Knights Excelsior sont à la peine. Non seulement la décoration psychédélique et les relents d’encens bon marché de leurs adversaires Tzeentchiens sont un affront à leurs sur-sens de surhommes, mais, nombre sacré du Dieu Poulet oblige, ils ont passé des plombes à sécuriser les neuf tours du bastion adverse, ce qui pèsera lourdement sur leur rémunération variable de l’année, alors que les Hammers of Sigmar affectés au front Slaaneshi ont une charge de travail un tiers moindre. Saleté de numérologie cosmique. Faisant contre mauvaise fortune feu de tout bois, Balthus mène ses ouailles à l’assaut de l’ultime donjon adverse, sans réussir à se défaire d’une étrange sensation de déjà-vu, qui ne lui dit rien qui vaille. L’absence de résistance des disciples de Tzeentch lui semble en effet de mauvais augure, et cette sinistre prémonition se trouve vérifiée lorsque la petite force de Stormcast qu’il commande se retrouve embusquée et submergée par une horde d’emplumés vindicatifs. Ayant pris deux méchants coups sur l’occiput, notre héros tombe dans les bras de morphine, et se réveille enchaîné dans un laboratoire arcanique, où il fait la connaissance de la sorcière Aesha, qui à son grand étonnement, semble le connaître2.

Après quelques instants consacrés à tenter de se défaire de ses liens enchantés, sans grand succès (ces derniers se resserrant de plus en plus à chaque fois que Balthus force dessus, conséquence d’un puissant enchantement… ou de l’utilisation d’un simple demi-nœud), le Liberator prisonnier – ironie – accepte d’ouvrir le dialogue avec Aesha, qui, cornes et sabot mis à part, se révèle être une hôte plutôt décente, et se montre plus intéressée par la poursuite des examens initiés sur son sujet d’étude que sur le sacrifice de ce dernier. L’échange permet de comprendre que les motivations de la magus sont, en toute simplicité, de percer à jour les secrets ayant permis à Sigmar de créer les Stormcast Eternals, qu’Aesha considère comme la clé de la transcendance divine. Ayant appris, sans doute à la lecture des tomes de la Fin des Temps (trouvés en occasion sur e-bay), que beaucoup des membres du panthéon de l’Ordre et de la Mort ont commencé leur carrière comme de simples mortels dans le Monde qui Fut, notre ambitieuse sorcière ne voit pas de raison de ne pas tenter le coup à son tour. Horrifié par ce projet blasphématoire, et peut-être également par le résultat de l’IRM complet qu’Aesha lui a fait passé grâce à ses miroirs ensorcelés, Balthus décide de contrecarrer les plans de sa Némésis en… rage-quittant. Ou plutôt, en essayant de rage-quitter. Car sa tentative héroïque de se suicider en tirant à mort (littéralement) sur ses chaînes se fait contrecarrer par Aesha, qui le met en pause avant qu’il ne perde son dernier PV, et profite de son coma réparateur pour infiltrer ce rêve, étrange pénétrant, de la fin inconnue de Balthus.

En des temps très anciens, Balthus était en effet Leoric, prince héritier du royaume d’Asqualon. Son règne fut toutefois aussi court (3 minutes et 26 secondes) que sanglant, puisqu’il hérita de la couronne après la mort de son père pendant la défense du Temple de l’Orage, dernier bastion de l’Ordre face aux assauts du démon Arkatryx et de ses disciples indisciplinés. Garrotté par son adversaire, Leoric invoqua Sigmar pour venger son paternel, et fut exaucé lorsque le Dieu lui envoya un éclair salvateur, non pas directement sur le démon, ce qui aurait été trop simple, mais sur l’épée que notre héros brandissait toujours. Chargé à bloc, Leoric trouva la force d’électrocuter son adversaire d’un ultime horion, avant de partir en direction de la forge divine. Par un hasard qui n’en était sans doute pas un, Aesha était également présente ce jour là (après tout, c’est elle qui a coup fatalisé le roi Aldred), ce qui donne un nouveau sujet de discussion tout trouvé à nos deux personnages une fois Balthus émergé de sa torpeur. S’en suit une joute verbale digne d’un débat de la primaire démocrate, avec Aesha se posant en Bernie Sanders chaotique, en lutte contre le 1% asqualique ayant exploité le petit peuple et fait exécuter son père parce qu’il avait volé une miche de pain. Face à ce déferlement de progressisme, Balthus ne peut que se référer aux bullet points qui lui ont été inculqués pendant sa formation: « l’Ordre, c’est cool » et « Yes, Sig’ Can ».

Ce passionnant échange est toutefois écourté par la notification que reçoit Aesha sur son portable professionnel, l’informant de l’intrusion d’une meute de militants en sigmarite dans son QG, avanie qu’il lui faut gérer sans attendre. « Pas si vite poulette » lui répond Balthus, qui dégaine son special move et gueule « Par le pouvoir du <insert random stuff here> ancestral, je détiens la force toute puissante! », et parvient enfin à se défaire de ses chaînes par l’intervention du saint sigmarite esprit. La fin de la nouvelle voit nos deux protagonistes jouer au chat et à la souris dans le dédale du donjon d’Aesha, jusqu’à ce qu’ils arrivent dans la salle de téléportation aménagée par cette dernière, et qui se révèle être le Temple de l’Orage où ils se sont rencontrés pour la première fois il y a des millénaires. S’il ne parvient pas à stopper la bougresse avant qu’elle ne s’éclipse, Balthus a au moins la satisfaction de mettre la main sur son ancienne épée, qu’il était le seul à pouvoir retirer de la pierre dans laquelle il l’avait plantée en transperçant le démon (ça me dit vaguement quelque chose…). Un milliard de Tzaangors occis plus tard, notre héros est récupéré par ses frères d’armes, esquinté mais en vie, et ayant inscrit sur sa to do liste de caler un nouveau tête à tête avec Aesha pour discuter du bon vieux temps dès qu’elle se montrera disponible.

À ne pas confondre (je l’écris car je l’ai fait moi-même) avec Balthas Arum, la réincarnation de Balthazar Gelt dans les Royaumes Mortels. 
2 : Le plus étonnant pour le lecteur est surtout la question que pose Balthus à sa geôlière juste après qu’elle l’ait identifié. OSEF quoi mon grand.

AVIS :

King fait ses premiers pas dans les Royaumes Mortels de manière assez discrète avec The Fist of an Angry God. Comme on pouvait l’attendre, et peut-être l’espérer, son passif d’auteur historique pour Warhammer Fantasy Battle apparaît clairement dans cette nouvelle à travers le personnage d’Aesha, dont la connaissance du Monde Qui Fut apparaît comme un clin d’œil (je le vois comme ça en tout cas) au parcours de King. Ce dernier prend en marche le train du « Sigmar-bashing » qui sous-tend beaucoup des dernières publications mettant en scène des Stormcast Eternals, et dépeint les méthodes de recrutement du Dieu Roi sous un jour contrasté, tout en justifiant en partie le passage au Chaos d’Aesha. Pas de manichéisme ici donc, et c’est bien le moins qu’on attendait de la part d’un contributeur aussi expérimenté que Bill King, dont les écrits ont toujours mis en avant la « grisaille » ambiante des univers de GW.

À titre personnel, je suis toutefois déçu de l’articulation de la nouvelle, dont le début est finalement insignifiant (je m’attendais à ce que King fasse une révélation sur un stratagème spatio-temporel utilisé par les disciples de Tzeentch, ce qui aurait justifié la sensation de « déjà-combattu » de Balthus) et la fin hurle littéralement « À SUIVRE… » à la tête du lecteur1. Le fond étant, comme dit plus haut, assez intéressant à défaut d’être captivant (cela montre au moins que King a digéré le background de cette nouvelle franchise), je trouve dommage que la forme n’ait pas été plus pensée et soignée par l’auteur. Ceci dit, King ne s’est jamais montré très doué sur les très courts formats, ses meilleures nouvelles se situant sur la marque des 40/50 pages. Quoiqu’il en soit, il convient de suivre la suite des événements avec attention, et espérer que le King finisse par remettre la plume sur le fils spirituel ayant lui aussi réussi son passage de Warhammer Fantasy Battle à Age of Sigmar, un certain Mr G. Gurnisson…

1 : En plus de passer vraiment vite sur des éléments pas anodins du tout pour l’intrigue, comme la libération miraculeuse de Balthus.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une nouvelle de Stormcast Eternals dans leurs oeuvres principales, mais pas tellement intéressantes au final, à savoir le concassage d’ennemis de Sigmar. William King étant qui il est, le résultat est à la fois accessible et digeste, mais à moins que vous ne soyez très bon public, cela ne devrait pas vous donner l’irrépressible envie de partir à la découverte des Royaumes Mortels. La comparaison avec ‘Monsters’ fait assez mal…

.

Famille (Family) – D. Abnett [40K] :

INTRIGUE :

Repas de FamilleLa bataille de Salvation’s Reach a été remportée, et les Fantômes de Gaunt sont de retour dans leur transport de troupes, en transit pour le prochain théâtre d’opérations. À la faveur d’une cantine blindée et d’un échange de regards, le Major Gol Kolea se retrouve à déjeuner en face de son fils, le Garde Dalin (surnommé Dal, en hommage au plat de lentilles) Criid.

Il faut évidemment préciser ici, si besoin était, que les deux hommes ont une histoire commune aussi fragmentaire que compliquée. Croyant que toute sa famille avait été tuée lors du siège de Vervunhive (‘Necropolis’), Kolea avait découvert fortuitement quelques temps après avoir rejoint les Tanith que ses enfants avaient été recueillis par la ganger Tona Criid (également engagée dans la Garde) et son partenaire Caffran. Ne voulant pas ruiner le bonheur de cette famille recomposée en faisant valoir son droit à la Garde, Kolea avait vu ses enfants grandir de loin, avant qu’une blessure de guerre ne le rende amnésique pendant quelques temps, puis qu’il guérisse grâce à ce que l’on peut appeler un miracle sabbatique. Au final, et pour autant que je puisse le dire, Dal a fini par découvrir le pot aux roses après avoir embrassé la carrière militaire, comme les trois quarts de ses parents. Sa petite sœur Yoncy n’a elle pas été mise dans la confidence, et considère toujours Kolea comme « Tonton Gol ». Cette mise au point effectuée, reprenons le cours de notre récit et de notre repas.

Après avoir échangé quelques banalités de circonstance sur le caractère détestable de la nourriture servie, Gol et Dal essaient de (re)trouver un peu de leur complicité père-fils, le premier acceptant l’invitation du second de venir dîner dans le studio familial, après avoir un peu rechigné. La soirée se passe bien, jusqu’à ce que Yoncy, dont l’âge est obtenu en faisant la somme de 2D6 à chaque round de joueur1, demande à Gol entre la poire et le fromage s’il est son père, comme elle a entendu beaucoup de Gardes le dire autour d’elle. Kolea sort alors sa meilleure poker face pour lui répondre qu’ils n’ont aucun lien de parenté, et la gamine enchaine en allant lui chercher le bôdéssain qu’elle lui a fait avec ses craies colorées. Conclusion : c’est très moche, passablement confus et empeste le pouvoir psychique latent, car les « ombres méchantes » qui sont dessinées fortuitement, ça vaut tous les jours un bolt dans la tête si un Inquisiteur passe dans le coin.

Ce mystère restera cependant entier, tout comme celui entourant le fils (caché ?) de Gaunt, un certain Felyx Meritous Chass, auquel Dal a été affecté comme escorte, brièvement évoqué autour de la table. Gol repart le ventre plein, le cœur gonflé et les yeux humides, ce qui n’est jamais bon signe quand on est un personnage d’Abnett. Mais pas de spoil.

1 : Sans rigoler, Criid soutient que dans six mois, elle fera tourner la tête à tous les Gardes, alors qu’elle parle comme une enfant de sept ans et dessine comme une de trois. À moins que les Tanith ait des canons de beauté franchement dérangeants, je m’explique assez mal cette « incohérence ».

AVIS :

Au moment où j’écris cette chronique, ma connaissance de la série des Fantômes de Gaunt se termine à la fin de l’arc ‘The Lost’, ce qui laisse un vide conséquent entre la fin de cet arc et les événements relatés dans ce ‘Family’. Abnett étant à la baguette, le briefing ou la mise à niveau des lecteurs n’étant pas totalement au fait de l’intrigue se fait de façon efficace et sans accroc, même si j’éprouve quelques doutes sur la valeur ajoutée de cette nouvelle si on ne s’intéresse pas aux relations compliquées de la famille Kolea-Criid, et en particulier au personnage de Yoncy, dont l’étrangeté se trouve au cœur de ce qui tient à la fois du fan service (enfin une réunion entre Gol et ses marmots, après des centaines pages de rendez-vous manqués) et de la scène coupée. Il faut également souligner que si l’auteur se veut pédagogue, il n’est pas non plus totalement newbie-friendly, puisque certains événements et personnages sont évoqués de façon cryptique pour le non initié, et la mort de deux personnages secondaires importants de la série (trois si on compte C.) est rappelée au détour d’un paragraphe. Comme la plupart des nouvelles des Fantômes de Gaunt, il est donc conseillé de lire ‘Family’ dans la suite logique de la série, c’est-à-dire après ‘Salvation’s Reach’, et pas avant.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme dit ci-dessus, Abnett essaie de mettre les formes pour ne pas être trop abscons pour les nouveaux-venus, mais Abnett fait surtout du fan service dans ce ‘Famille‘ (qui s’appelait auparavant ‘Repas de Famille‘), et son public cible est constitué de vieux briscards s’étant enquillé à ce stade plusieurs milliers de pages de développements fantômatiques et familles recomposées. Il est clair que le but de la BL à travers l’inclusion de cette nouvelle dans le Black Library Celebration 2023 était de vendre ‘La Victoire‘ aux lecteurs s’étant arrêtés à la sortie des omnibus précédents (et j’en fais partie), plutôt que d’initier une nouvelle génération aux furtifs exploits du Premier et Unique de Tanith. C’est d’autant plus dommage car Abnett a écrit un paquet de nouvelles « introductives » à son oeuvre phare (‘Ghostmaker’,’A Blooding‘, ‘Vermilion Level‘, ‘In Remembrance‘…) , et elles auraient eu plus de sens ici.

.

Sauvage (Savage) – G. Haley [40K] :

INTRIGUE :

SavageNotre histoire s’ouvre sur un concert de ronflements remplissant une tente à l’atmosphère étouffante, alors que le soleil est sur le point de se lever sur Omdurman. Allongé sur son lit de camp, notre héros, Gollph, après avoir courageusement mais vainement tenté de faire abstraction du bruit et de l’odeur la chaleur, décide d’aller se dégourdir les jambes pendant que la température est encore supportable. Gollph, comme ses camarades de la 7ème Companie Motorisée Super-Lourde de Paragonian (ou quelque chose comme ça), est un tankiste, et fier de l’être. Rattaché au Baneblade Cortein’s Honour, où il exerce la noble profession de senior chargeur – ce qui est mieux que serial killer, même si, au fond, cela revient au même –, Gollph espère un jour devenir artilleur. Bien que disposant des aptitudes nécessaires pour occuper cette fonction, notre héros est toutefois handicapé par ses origines : il vient en effet du monde sauvage de Bosovar, qui rime trop avec Kosovar pour que ses ressortissants soient pris au sérieux par les impériaux venant de mondes civilisés. En plus de ça, les Bosovarois ont la peau rose, ce qui, dans le régiment de Paragon dans lequel les hasards de la vie et de la guerre l’ont fait atterrir, est une source de discrimination et de brimades. Que fait donc la HALDE ?

Pour l’heure, Gollph profite du calme ambiant pour aller saluer son char, qui n’a pas vu le moindre combat depuis le début de la campagne, et aller contempler le lever du soleil en marchant pieds nus dans les hautes herbes, comme le petit sauvageon qu’il est resté au fond de lui-même (il n’enlève pas sa chemise tout de même, car le Commissaire n’aimerait pas ça). C’est l’occasion pour lui de se remémorer son parcours depuis les plaines de Bosovar jusqu’aux collines d’Omdurman, en passant par son recrutement dans la Garde, où il a appris à vaincre sa peur des portes. On n’en parle pas assez, mais c’est une technologie des plus dangereuses. Après tout, personne ne s’est jamais coincé les doigt dans un rideau de perles. De retour au camp, et occupé à lustrer des obus pour passer le temps en compagnie de son supérieur ronfleur, le 1er Artilleur Meggen, Gollph est surpris dans son ouvrage par l’arrivée silencieuse, mais pas inodore, de Shoam, le pilote du Cortein’s Honour. Ce dernier a obtenu des nouvelles fraîches faisant état d’un redéploiement imminent de la Compagnie, et de son départ d’Omdurman. Il vient donc rappeler à Gollph et à Meggen le pacte secret que les trois hommes avaient conclu des mois plus tôt, et qu’il leur faut mettre à exécution avant qu’il ne soit trop tard. Si Meggen se montre très enthousiaste à cette idée, Gollph l’est beaucoup moins, s’étant engagé dans l’aventure sous l’emprise de la boisson. Toutefois, une promesse est une promesse, et nos trois conspirateurs se retrouvent donc le soir venu derrière un buisson odoriférant1 pour accomplir leur sinistre dessein…

Début spoiler 1…Si Gollph avait traîné des pieds pour marcher dans la combine, c’est d’abord parce qu’il doit se taper le sale boulot, c’est-à-dire distraire les sentinelles placées devant la tente contenant les réserves de la Compagnie, pendant que ses comparses se glisseront à l’intérieur pour dérober ce dont ils ont besoin pour l’étape suivante de leur machination. En plus d’être dangereuse, cette tâche est humiliante pour le fier Bosovarien, car elle l’oblige à jouer au sauvage pour parvenir à ses fins, alors qu’il se considère comme étant parfaitement intégré au sein de la Garde Impériale. On voit donc Gollph se présenter devant les plantons de service, affublé d’un plastron fait de roseaux tressés (ça fait exotique, dixit Meggen), avec un formulaire mal rempli en main et un affreux dialecte petit nègre à la bouche, et tenter de se faire remettre farine pour dîner Lieutenant, oui oui, s’il te plait Monsieur présentement là dis donc. Pendant que l’héroïque peau rose occupe les gardes, et se fait dérouiller par le plus mal embouché des deux, Meggen et Shoam dévalisent les stocks du régiment, le premier intervenant une fois le forfait commis pour interrompre la bastonnade à laquelle le pauvre Gollph avait droit, et repartir avec lui vers leurs quartiers. La mission a été accomplie, reste à savoir quelle en était le but…

Début spoiler 2…Eh bien, et je n’invente rien, il s’agissait simplement d’organiser une petite fête d’anniversaire pour le Capitaine Bannick, avant que le camp soit levé. Ce dernier est donc pris au dépourvu lorsque son équipage et quelques amis le surprennent à la cantine avec un buffet de pâtisseries paragoniennes et quelques bonnes bouteilles. Parce que ce n’est pas parce que la galaxie est sur le point de s’effondrer qu’il ne faut pas profiter des petits plaisirs de la vie et prendre un pot entre collègues de temps à autres. L’enthousiasme collectif peine toutefois à déteindre sur Gollph, encore un peu marqué par son implication dans le complot pâtissier auquel il a participé, et surtout honteux que trois de ses compatriotes de Bosovar aient été sévèrement punis par les autorités régimentaires pour la disparition des victuailles dérobées par Meggen et Shoam. Il n’y a pas à dire, le racisme anti-rose reste un des fléaux cachés du 41ème millénaire…Fin spoiler

1 : Il a certainement été utilisé par un tankiste pressé comme petit coin, comme Gollph a le plaisir de le découvrir.

AVIS :

Attention, OVNI. Guy Haley signe avec Savage ce qui restera sans doute comme l’une des nouvelles de Gardes Impériaux les plus surprenantes du corpus de la Black Library. Pas de Xenos, pas de mutants et pas d’hérétiques ici, et à peine un peu de combat à proprement parler (même si la mâchoire de Gollph pourrait contester ce constat), mais la description de la vie d’un camp impérial dans toute sa singulière normalité. Si le « complot » fomenté par nos héros a une dimension comique assumée, et permet à Haley de démontrer qu’il est capable de jouer sur le registre humoristique de façon convaincante, c’est la description que l’auteur fait de la réalité sociologique de ce microcosme, où les préjugés et les discriminations1 entre Gardes de différentes origines demeurent aussi vivaces qu’aujourd’hui malgré les milliers d’années écoulées et la découverte d’autres espèces intelligentes, qui donne tout son sel à cette histoire. Le cosmopolitisme de l’Imperium est une de ses caractéristiques les plus intéressantes, mais rarement mise en valeur par la BL autrement qu’à travers l’exemple extrême des abhumains, du fait de sa ligne éditoriale résolument militariste. Haley démontre ici que la GW-Fiction peut encore totalement surprendre, et en bien, le lecteur, et que si la guerre est éternelle au 41ème millénaire, les à côté de cette dernière valent également la peine d’être racontés.

1 : Autre exemple, Shoam est traité comme un paria par ses camarades car il vient de Savlar, réputée pour être peuplé de criminels.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une plongée surprenante et rafraichissante dans le grimdark pas si grimdark que ça du lointain futur, qui montre avec brio que l’on peut écrire des nouvelles 40K intéressantes sans qu’un seul coup de feu soit tiré. Le seul problème avec l’inclusion de ‘Sauvage‘ dans ce recueil est que certains lecteurs seront sans doute déçus de constater que le reste du corpus 40K est bien moins diversifié que cette nouvelle le laissait apparaître. À la guerre comme à la guerre, I guess.

.

La Mort d’Uriel Ventris (The Death of Uriel Ventris) – G. McNeill [40K] :

INTRIGUE :

La Mort d'Uriel VentrisCe qui ne devait être qu’un contrôle dentaire de routine est sur le point de prendre un vilain tour pour le Capitaine Uriel Ventris, de la 4ème Compagnie des Ultramarines. Allongé dans le fauteuil du praticien, le patricien écoute avec angoisse le servocrâne de service lui demander de prendre une grande respiration et de la bloquer, afin que l’anesthésie puisse être effectuée. Cela risque de piquer un peu. En repensant à toutes ses sucreries englouties avec Pasanius pendant la Guerre de la Peste, notre héros se dit que s’il s’en sort, il investira pour sûr dans une brosse à dents énergétique, qu’il usera énergétiquement1. Mais pour l’heure, il est temps pour le vaillant mais douillet Capitaine de tomber dans les pommes pour échapper au supplice de la fraise.

Se réveillant dans une espèce de caverne qui ressemble fort à sa Calth natale, Ventris comprend rapidement qu’il expérimente une vision lorsque sa sortie de la grotte se fait sous un grand soleil et devant un paysage bucolique, loin des plaines radioactives dont la véritable planète peut s’enorgueillir depuis 10.000 ans. Comme pour confirmer son délire, il se fait héler par un quidam assis sur un rocher, qui se révèle être ce bon vieux Idaeus, Capitaine de la 4ème Compagnie avant lui, et auquel il a succédé après le sacrifice héroïque du briscard sur Thracia. À peine le temps de détailler les nombreuses cicatrices qui parsèment le corps de l’auguste héros pour s’assurer de son identité que les deux surhommes se mettent à dévaler la pente en direction de la caserne Asigelus (qui n’est pas sur Calth mais sur Macragge, mais bon on s’en fout c’est un rêve), où les hallucinations de Ventris l’entraînent. En chemin, ils croisent la route d’un groupe de jeunes coureurs engagés dans une compétition acharnée pour être le premier à utiliser la douche au retour de leur session d’entraînement, et Uriel reconnaît sans mal Learchus, Cleander, Pasanius et lui-même, tels qu’ils étaient à l’adolescence. Il ne peut qu’assister à nouveau à la tentative malheureuse de dépassement de ce snob de Learchus que son jeune lui avait tenté il y a toutes ces années, et sentir, très douloureusement, le vicieux coup de coude que son rival devenu rival devenu balance devenu Capitaine par intérim devenu Sergent Vétéran lui avait balancé dans le pif pour calmer ces ardeurs. Cela fait toujours aussi mal, et même beaucoup plus mal que cela devrait, mais cette soudaine vulnérabilité attendra un peu, car voici nos deux vétérans rendus devant les portes de la caserne, qui sont, comme de juste, fermées.

Peu disposé à laisser quelques quintaux de fer et d’adamantium se mettre en travers de la route de son flashback, et constatant qu’Idaeus se dégrade à vue d’œil, Ventris pousse de toutes ses forces sur les lourds battants pour pouvoir entrer, là aussi déclenchant des douleurs sans doute excessives par rapport à l’effort consenti par un Space Marines en bonne santé. Enfin parvenu à ses fins, il finit par rentrer dans les baraquements, un Idaeus positivement cacochyme sur les talons. Là, il est témoin du rassemblement de la 4ème Compagnie dans son ensemble, spectacle grandiose même si esthétiquement critiquable2, qui fait battre très fort ses petits cœurs. Après avoir identifié pour le lecteur qui n’en demandait pas temps la moitié des guerriers assemblés en silence sur la place, il est pris à partie par cette vieille baderne de Learchus, qui vient lui reprocher de les avoir abandonnés. « Oui mais bon c’est un rêve buddy et t’étais pas obligé de me foutre la honte devant Idaeus en mentionnant que j’avais prêté un serment de mort petit galapiat » répond Uriel, un peu embarrassé. Qu’importe, Learchus répète à nouveau que Ventris est en train de les abandonner à l’instant même, et lui tourne le dos comme un prince, suivi par l’intégralité de la Compagnie. C’est moche de bouder les enfants. Lorsque le Capitaine abandonné cherche à raisonner le Sergent, ce dernier a de plus la mesquinerie de tomber en poussière, suivi par 99% des Ultra Schtroumpfs. Seul reste ce bon vieux Pasanius, qui en guise d’adieu lui applique une petite imposition des mains sur le torse, mais seulement après avoir passé son membre augmétique au micro-ondes. Bref, ça brûle très fort pour notre pauvre Uriel, qui commence sérieusement à regretter sa consommation irraisonnée de Chupa Chups.

Lorsqu’il reprend ses esprits, le voilà sur Medrengard, et Idaeus a laissé la place à ce fieffé filou de Honsou. Réagissant comme un vrai serviteur de l’Empereur, notre héros commence par corriger bellement cette canaille à mains nues, qui se laisse faire sans protester. Sur le point de commettre l’irréparable avec la propre hache démoniaque de sa Némésis, Ventris réalise au dernier moment que ça pourrait être une mauvaise idée, et suspend son geste. S’engage alors un dialogue Batman vs Joker like entre Force Bleue et Force Jaune avec Rayures Noires, les deux adversaires se balançant des amabilités pendant quelques minutes jusqu’à ce qu’un nuage de poussière ne se profile à l’horizon, annonçant l’arrivée prochaine des War Boys d’Immortan Joe (sans doute le dernier film visionné par Ventris avant son opération), ce qui ne présage rien de bon pour notre héros. Qu’importe, ce dernier se tient prêt à faire face à son destin, et à mourir bravement au combat si nécessaire. Après un dernier « Witness meeeeeee ! » envoyé à Honsou, Uriel se fait pulvériser par l’artillerie montée sur les machines hurlantes qui convergent sur sa position. Fin de l’histoire.

Début spoilerOu en tout cas fin du rêve. De retour dans le cabinet du dentiste, nous assistons à un court dialogue entre l’Apothicaire Selenus et le Chapelain Clausel, alors que l’enveloppe corporelle de Ventris décède sur la table d’opération. Bien que le premier se félicite de la réussite de l’opération3, il prévient son interlocuteur que le plus délicat reste à venir, le Capitaine devant maintenant trouver la force de traverser ce fameux Rubicon4Fin spoiler

1 : Pour sa défense, l’Empereur lui-même n’avait rien prévu de spécial dans ce département pour ses Space Marines. Et pourtant, avec une salive acide, ils auraient eu grand besoin d’un émail renforcé à l’adamantium.
2 : Vert + bleu + jaune, franchement, c’est moche.
3 : « Ça a marché ? »
« Oui, il est mort. »
« GG. »
4 : Qui doit maintenant être encombré de Space Marines de toutes origines, au grand déplaisir de la faune locale et des touristes.

AVIS :

Ayant laissé tomber la saga d’Uriel Ventris il y a bien des années et après avoir seulement lu la première trilogie consacrée par McNeill à sa figure tutélaire dans le futur grimdark, j’avoue que la lecture de The Death of Uriel Ventris ne m’a pas touché plus que ça, mais peut aisément comprendre qu’un fan plus impliqué que votre serviteur ait une toute autre opinion du texte en question. Si l’auteur ne prend pas grand soin pour dissimuler la véritable nature de l’épreuve que le Capitaine traverse en filigrane de cette nouvelle (toutes les douleurs ressenties par ce dernier au fil des pages étant la conséquence de sa Primarisation douloureuse), enlevant donc un peu de suspense à cette dernière, il a au moins l’amabilité de terminer son propos sur un cliffhanger convenable, justifiant le titre donné à l’histoire. Même si je ne doute pas une seconde que notre héros finira par émerger du Rubicon – il doit y avoir un service de ferry pour les personnalités Space Marines, car elles sont vraiment peu nombreuses à s’y être noyées – comme les lois du marketing le demandent expressément, on peut au moins accorder à McNeill une utilisation appropriée de la formule « mort d’Uriel Ventris », ce dernier finissant la nouvelle dans un état minéral (c’est plus grave que le végétatif). À titre personnel, j’aurais apprécié que McNeill précise ou rappelle pourquoi le fier Capitaine a choisi/subi cette opération « risquée », à part pour suivre la dernière mode chez l’Astartes, bien entendu.

Pour le reste, le passage en revue de la carrière et des connaissances les plus marquantes de notre personnage, s’il est cinématiquement mis en scène par l’auteur, risque fort de diviser le lectorat entre ceux qui comprennent qui est qui et a fait quoi, et les autres. En d’autres termes, si vous découvrez Uriel Ventris par l’intermédiaire de cette nouvelle, je ne suis pas convaincu que l’expérience vous semble très intéressante (mais ce n’est que mon avis). En tous les cas, sachez que le personnage dispose d’ores et déjà d’une abondante biographie signée de la main de Graham McNeill, et que ce dernier ne l’ayant certes pas fait « mourir » pour rien, il est à parier que d’autres ouvrages ou nouvelles suivront. Dans le second cas, rendez-vous ici dans quelques temps pour un retour positivement objectif sur la suite des aventures de ce vieux Vent Triste.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

L’inclusion par ce vieux roué de McNeill d’une sorte de best of des péripéties héroïques d’Uriel Ventris depuis le début de sa carrière jusqu’à son opération de chirurgie esthétique (un peu ratée, il faut le reconnaître) vient sauver ‘La Mort d’Uriel Ventris‘ du sort réservé aux nouvelles « pour initiés » figurant au sommaire du Black Library Celebration 2023. Je ne suis pas sûr que l’effort ait été suffisant pour embarquer un néophyte dans cette ode à la gloire d’un des premiers héros Space Marines de la Black Library, mais la nouvelle reste assez accessible malgré tout. En même temps, les Ultramarines sont loin d’être aussi cryptiques que les Angels Penitent (c’est là leur moindre défaut).

.

***

Contrairement à l’année précédente, la sélection 2023 est donc bien meilleure en version originale que dans la langue de Molière, ce qui est somme toute logique quand on compare la profondeur des catalogues. Du côté de la VO, il n’y a que la nouvelle de Justin D. Hill qui m’a semblée à la traîne d’un point de vue qualitatif, les autres textes choisis par la BL pour cette célébration remplissant bien leur rôle de produit d’appel pour leur franchise d’appartenance, et ce quelle que soit l’expérience du lecteur en matière de GW-Fiction. Le constat est moins heureux pour la VF, qui hérite d’histoires à mon avis impropres à ce type de publication exclusivement « grand public », car très difficiles à pleinement apprécier sans avoir une bonne connaissance des arcs narratifs (comprenant plusieurs milliers de pages pour ‘Les Fantômes de Gaunt‘ et ‘Les Chroniques d’Uriel Ventris‘) dans lesquels elles s’insèrent. Je salue toutefois l’inclusion du ‘Sauvage‘ de Guy Haley, qui vient montrer qu’il n’y a pas que la guerre dans les ténèbres du lointain futur (il y a des gâteaux aussi), et dans la GW-Fiction non plus, par conséquent. Rendez-vous très prochainement pour le deuxième volet de la Black Library Celebration 2023, j’ai nommé la Black Library Celebration Week !

ONLY WAR [40K]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue d’Only War, anthologie 40K publiée par la Black Library en Novembre 20221, et comportant pas moins de 24 nouvelles. Les nostalgiques et les spécialistes de la GW-Fiction auront identifié la référence faite à un précédent omnibus de courts formats se déroulant dans les ténèbres d’un lointain futur (et encore plus volumineux), ‘There Is Only War’ (2013). Rendez-vous en 2031 pour vérifier si la BL poursuit sa logique avec la sortie de ‘War’

Pensé comme une somme des nouvelles du 41ème millénaire publiées pour la première fois entre 2019 et maintenant (il y a deux inédits au sommaire) mais n’ayant jamais bénéficié d’une inclusion dans un recueil à proprement parler, ‘Only War’ est découpé en cinq sections principales, chacune dédiée à une faction, ou un regroupement de factions. A ce petit jeu, c’est clairement la Garde Impériale qui s’en sort le mieux, puisque les braves bidasses bénéficient à la fois de leur propre section (Hammer of the Emperor), du plus fort contingent de nouvelles (7), et des deux inédits précédemment signalés. The Emperor does provide, on dirait. L’Ecclésiarchie est également bien traitée, avec quatre nouvelles regroupées dans le chapitre Keepers of the Faith.

Les autres sections sont beaucoup moins homogènes, puisque toutes les races Xenos2 sont réunies dans The Alien Menace, les Space Marines et les Space Marines du Chaos doivent subir l’outrage littéraire de partager la section Angels of Death, et les nouvelles racontées d’un point de vue impérial mais ne rentrant pas dans les cases précédentes (Adeptus Mechanicus, Aeronautica Imperialis, Libres Marchands) se retrouvent dans le chapitre « pot pourri de Pépé », Servants of the Throne.

Only War

Du côté des contributeurs, on en dénombre pas moins de 21, dont certains nous soumettant ici leur toute première histoire (Adrian Southin, Maria Haskins, Cameron Johnston). On retrouve aussi des vétérans blanchis sous le harnais, à l’instar de Graham McNeill, Guy Haley, Steve Lyons et John French. Pour être tout à fait complet, précisons que les trois « doublonnants » sont Danie Ware, Marc Collins et Justin Woolley.

Les présentations étant faites et le décor posé, il est temps de partir à la découverte des histoires de ‘Only War’, en espérant que la qualité n’a pas été la première victime de ce conflit total…

1 : Pour les amateurs d’Age of Sigmar, je précise que cette sortie s’est accompagnée de celle de l’anthologie ‘Conquest Unbound’, regroupant 21 nouvelles fresh from les Royaumes Mortels, et critiquée ici.
2 : « Toutes » ne veut pas dire que chacune des factions Xenos bénéficie de sa nouvelle, mais seulement que cette section contient les nouvelles racontées d’un point de vue Xenos. Si vous êtes fans des Orks, des Eldars des Vaisseaux Monde et des T’au, c’est votre jour de chance. Pour les autres, il faudra repasser…

Only War

.

The Taste of Fire – S. B. Fischer :

INTRIGUE:

Retour sur Ourea, où nous retrouvons la Lieutenant Glavia Aerand toujours bien occupée par la purge des hérétiques qui hantent les cimes gelées de cette planète montagneuse. Bien que son régiment du 900ème Cadien ait vaincu le gros des forces ennemies lors d’une bataille rangée il y a quelques mois, l’issue n’a pas été assez décisive pour terminer la campagne une fois pour toutes. Depuis, Aerand et sa Compagnie passent le plus clair de leur temps à faire du trek dans le froid, la neige et une ambiance aussi pesante que la gravité d’Ourea, cherchant à mettre la moufle énergétique sur les cultistes survivants. Au commencement de la nouvelle, l’intrépide Lieutenant commande une attaque sur un réseau de souterrains où l’insaisissable ennemi serait peut-être barricadé, mais le trouve déserté, une fois encore. Seuls quelques cadavres de civils affamés et scarifiés sont débusqués par les Cadiens, ce qui n’aide pas le moral à remonter beaucoup plus haut que leurs chaussettes trempées. Un des corps trouvés par les Gardes conserve toutefois une étincelle de vie, et même un peu plus, comme le Medic de la Compagnie, Argos, manque de l’expérimenter. Seule la prémonition ressentie par Aerand une seconde avant que le quasi-macchabée ne vomisse un torrent de flammes bleues sur le toubib empêche ce dernier d’aller rejoindre l’Empereur. Car oui, notre héroïne est une Psyker en puissance, ce qui n’a pas l’air de choquer outre mesure ses soldats. C’est vrai qu’avoir un chef qui vous donne une sauvegarde invulnérable à 2+ est pratique quand on a qu’un PV et une veste flak pour le défendre…

Ramené à la base cadienne pour être interrogé, le civil piégé décède peu de temps après sans avoir révélé ses secrets, ou en tout cas, pas de vive voix. Entrent alors en scène le Psyker Primaris Kellipso et ses boules de Baoding, qui vont être amenés à jouer un rôle crucial par la suite. Bien que personne ne l’aime du fait de sa drôle de tête, ses regards insistants (car oui, Kellipso a des yeux fonctionnels, ce qui est assez rare pour un Psyker de la Garde Impériale… #FluffAlert) et sa manie de faire tourner ses bouboules à tout bout de champ, Keke fait le job comme le grand professionnel qu’il est. Il commence par siphonner le cerveau de l’homme chalumeau, et y trouve la localisation d’un temple où tous les cultistes d’Ourea se sont donnés rendez-vous pour cultister en secret. C’est suffisant pour que le Général Rusk ordonne à Aerand et sa Compagnie de repartir user leurs godillots pour débusquer les hostiles, malgré la journée bien remplie qu’ils ont déjà eue.

A leur arrivée devant le temple, les Cadiens ne seraient pas contre une bonne nuit de sommeil avant de lancer l’assaut, mais Kellipso a la certitude qu’il faut attaquer sans tarder, et comme les radios des bidasses ne fonctionnent bizarrement plus, il prend sur lui d’aller posséder un des aides de Rusk pour obtenir son go de quasi-visu. Cela n’est cependant pas assez pour la méfiante Aerand, qui a eu une vision de toute sa Compagnie morte, avec Kellipso planté au milieu des corps des Cadiens. Quand on connaît l’amour de ces derniers pour la station verticale1, on comprend que cette prémonition ne passe pas du côté de la Lieutenant. Elle convainc alors ses officiers d’aller régler son compte au potentiel traître, mais les conspirateurs se font démasquer et mettre hors d’état de nuire par le très balèze Calypso. Le Psyker utilise ensuite le pouvoir « VAR mental » pour repasser au ralenti et en gros plan sa vision à Aerand, qui s’aperçoit que Kellipso avait l’air triste. Donc ça ne peut pas être lui le responsable de ce massacre, pas vrai ? PAS VRAI ?

On rigole, mais ça fait l’affaire pour Aerand et le reste de la fine équipe, qui donnent enfin l’assaut du temple, protégés par le sort d’invisibilité (ou quelque chose s’approchant) que Kellipso lance sur eux pendant la phase d’approche. Le combat s’engage, et les Cadiens accompagnent le Psyker Primaris jusqu’à la salle où se trouve le cœur du réacteur, ou plutôt ses cerveaux. Les cultistes ont en effet bricolé une centrale Warp alimentée par le potentiel psychique d’une dizaine de prisonniers branchés par le cortex à un vortex bleuâtre tournoyant. Qui ne sert à rien qu’à éclairer le décor, cela dit en passant. La mise en scène fait toutefois forte impression sur Kellipso, qui manque de se prendre une balle en plein front pour sa peine, et est sauvé par une nouvelle prémonition d’Aerand. Il lui rend la pareille lorsqu’une marée de cultistes se jette sur les loyalistes depuis les coulisses, et manque de les submerger sous le nombre. Kellipso utilise ainsi le pouvoir « Couché !! » sur ses camarades, ce qui lui permet d’utiliser ses boules à fragmentation (un autre cool trick de Psyker) sans risquer de blesser ses alliés. Et qui explique mieux la vision d’Aerand : sa Compagnie n’était pas morte, elle était allongée sur le sol. Mind. B.L.O.W.N. Cet enchaînement draine toutefois dans les réserves de Kellipso, qui est bien heureux qu’Aerand et ses hommes se relèvent pour aller sauvagement débrancher les batteries psychiques de l’installation pirate avant qu’il ait une mauvaise idée, comme succomber au Chaos (ça peut arriver à tout le monde).

La nouvelle se termine avec le souhait exprimé par l’intègre Aerand d’aller se livrer à l’Inquisition, comme tout bon Psyker non sanctionné mais aimant son Empereur devrait le faire. Mieux vaut tard que jamais pas vrai ? Eh bien, ça ne se fera pas au final, car ce filou de Kellipso lui assène qu’elle serait plus utile à Pépé en guidant sa Compagnie sur le front plutôt qu’en partant en croisière sur un Vaisseau Noir. Et qu’il gardera un œil sur elle pour superviser son apprentissage du côté obscur de la Force de ses capacités psychiques. Que fait la lore police ?

1 : Après tout, c’est eux qui passent leur temps à hurler ‘Cadia stands’ à tout bout de champ.

AVIS:

Ce n’est pas la meilleure nouvelle « Garde Impériale » qui soit que Steven Fischer signe avec ‘The Taste of Fire’, suite du tout aussi oubliable ‘The Weight of Silver’. Beaucoup de personnages très peu charismatiques, de l’action très classique, une intrigue simple et sans enjeu ni tension (très franchement, on se fiche bien de savoir si Aerand et sa clique survivront à l’affrontement)… on trouve beaucoup mieux chez la concurrence, malheureusement1. Le clou dans le cercueil de cette nouvelle est la liberté que Fischer prend avec le background, et qui donne la singulière impression que l’auteur a pris la plume après avoir examiné la figurine du Psyker Primaris2 pendant cinq secondes, et lu les trois premières pages du Codex Garde Impériale. Pas suffisant pour sauver les palpitambolesques aventures de la Lieutenant Glavia Aerand3, j’en ai peur.

1 : Je recommande bien évidemment les ‘Fantômes de Gaunt’ de Dan Abnett, et plus proche de nous, les travaux de Rachel Harrison.
2 : Qui, pour sa défense, semble bien avoir des yeux fonctionnels.
3 : Qui se poursuivent dans le roman ‘Witchbringer’, que Glavia commence comme Psyker sanctionnée de la Garde Impériale, ce qui fait de ‘The Taste of Fire’ son prologue. Mais comme la BL ne s’est pas donnée la peine de préciser le lien entre la nouvelle et le roman dans ‘Only War’, il revenait au lecteur de faire la connection…

.

Refuge – S. Lyons :

INTRIGUE:

Si de l’avis général, les Mordians ont un look très rigolo, les soldats qui forment la Garde de Fer ne le sont, eux, pas du tout. Ils compensent ce gros défaut par une discipline, une dévotion et une ponctualité exemplaires, ce qui en fait le choix de troupes rêvé pour mener des opérations peu glamour mais nécessaires au bon fonctionnement de cette grande machine bien huilée qu’est l’Imperium. C’est ainsi que le soldat Lucius Myer et sa section sont envoyés purger un repaire de vils mutants dans les ténèbres d’un monde ruche quelconque (mais qui rappel à ce sentimental de Lucius sa chère patrie). Les Mordians sont accompagnés par des auxiliaires qui font grincer les dents de plus d’un Garde de Fer, une escouade de Psykers assermentés (les Wyrdvanes) même pas fichus de marcher en cadence, et irrémédiablement souillés par le grand méchant Warp. Leur présence est toutefois salutaire, d’abord pour localiser le camp où se terre le fourbe ennemi, puis pour déjouer ses tout aussi fourbes manigances.

Les Mordians ont en effet été mis sur une mission délicate : l’évacuation et la « valorisation » d’un camp de Psykers clandestins. Il est donc attendu d’eux qu’ils n’exécutent pas froidement tous les rebuts humains qui auront le malheur de leur passer devant la casquette, mais fassent au contraire preuve de retenue si les mutants choisissent de se rendre sans faire d’esclandre. Un briefing complexe pour Lucius et ses compères, qui ont la détestation du Psyker chevillée au corps, mais auquel notre héros tentera de se tenir du mieux qu’il peut. Lulu est en fait plutôt tolérant pour un Mordian, puisqu’il a un jour pris la défense des Navigateurs dans une discussion avec des camarades de régiments, les appelant un « mal nécessaire pour l’Imperium » (les Navigateurs, pas ses camarades, bien sûr). Ça fait de lui un horrible woke aux yeux de son entourage, je suis sûr.

L’affrontement s’engage et à la puissance de feu et l’implacable avance des Mordians s’opposent les tours pendables de leurs adversaires, qui peuvent se dissimuler aux yeux des Gardes de Fer, les griller avec des éclairs, ou encore se protéger derrière des boucliers kinétiques. Et je ne vous parle même pas de leur manie de faire disparaître des pièces en soufflant sur leur main, ou de faire apparaître des cartes derrière l’oreille des Mordians. Quel enfer. Lucius ne s’en sort pas trop mal grâce aux barrières mentales qu’il a réussi à édifier, mais il se rend également compte que les Wyrdvanes sont les hommes et femmes du match et de très loin, grâce à leurs propres pouvoirs, impies certes mais très pratiques.

La bataille étant sur le point d’être remportée par les impériaux, Lucius est réquisitionné par le Sergent Schtiel pour l’accompagner dans la fouille des bungalows crasseux occupés par les Psykers. Il tombe rapidement sur un jeune garçon, qui s’enfuit dans les profondeurs à l’arrivée des Mordians, et auquel il donne logiquement la chasse, conformément aux ordres. Le gamin n’est cependant pas un Psyker lambda, comme le troisième œil qu’il porte sur le front le laisse apparaître. Conformément à sa position établie plus haut de héraut (mordian) de la diversité et de l’inclusion, Lucius donne toutes les chances au galopin de coopérer avec lui pour préserver son intégrité physique, mais la petite fripouille ne joue pas le jeu, et finit par lui jeter un regard si malaisant que notre héros n’a guère d’autre choix que de le tabasser à grands coups de crosse de fusil pour lui apprendre à respecter l’uniforme (surtout quand il a des boutons dorés). Il épargne cependant la vie du baby Navigateur et le ramène avec lui à la surface, contribuant de façon significative à la réussite de la mission.

La nouvelle se termine sur un plan des Mordians (à l’heure comme toujours) en train d’attendre dans le spatioport l’arrivée de leur navette (en retard comme à chaque fois). Cet ennuyeux délai permet toutefois à Lucius de voir les Vaisseaux Noirs collecter leur butin humain, une vision qui renforce son dégoût et sa haine pour les Psykers en général. C’est donc un happy end incontestable, si vous êtes un Mordian, bien sûr.

AVIS:

Steve Lyons est une valeur sûre pour tout ce qui touche au Death Korps de Krieg, mais il n’est pas aussi à l’aise dès lors qu’il aborde d’autres régiments fameux de la Garde Impériale. Cette histoire de Mordians ne restera ainsi pas dans les annales du genre : malgré une teneur en grimdark appréciable (un Garde Impérial hyper-conditionné qui bastonne presque jusqu’à la mort un pauvre gosse qui cherchait juste à vivre tranquille), il n’y a pas grand-chose ici qui retiendra le troisième œil et l’attention du vétéran de la BL. On est toujours content de voir ces bons vieux Gardes de Fer et leurs uniformes impeccablement repassés reprendre du service dans la GW-Fiction – il n’y en a souvent que pour les Cadiens et les Catachan – mais ce n’est pas ‘Refuge1 qui vous donnera l’envie irrépressible de claquer votre PEL pour acheter 2.000 points de porteurs de képi.

On peut aussi souligner quelques bizarreries notables, à la fois au niveau de l’intrigue (on a l’impression pendant le combat contre les Psykers que Lucius dispose lui aussi de pouvoirs, qui lui permettent d’être le seul à détecter un ennemi caché, mais cette piste est tout de suite abandonnée par Lyons) et du background (il est indiqué de façon assez claire que Mordian a été perdue au Chaos, comme Cadia, ce qui n’est à ma connaissance pas le cas dans le fluff). Rien de rédhibitoire, mais Lyons nous a habitué à mieux, et plus intéressant.

1 : Fun fact, l’autre nouvelle consacrée par Steve Lyons aux Mordians à un nom similaire à celle-ci, puisque ‘Solace’ en anglais signifie ‘réconfort’.

.

Redemption Through Sacrifice – J. Woolley :

INTRIGUE:

Redemption Through SacrificeLe régiment de Légionnaires Pénaux des Meat Dogs est envoyé à la surface de la planète de Vandicius pour assister ses défenseurs dans la purge d’un culte hérétique s’étant répandu comme une trainée de poudre parmi sa populace. Nous suivons Marcus van Veenan, ancien Garde Impérial au sein du 51ème Talissian, alors qu’il tente de survivre à cette nouvelle affectation. Armé seulement d’une batterie de fusil laser (il n’y avait pas assez d’armes pour tout le monde), il permet cependant à son bataillon de résister à une charge de cultistes en leur apprenant l’astuce du tir sur trois rangs, ce qui permet aux Légionnaires de tenir la ligne et à l’Inquisitrice Mariette Nikova, qui a pris sur elle d’encadrer ces rebuts, d’identifier formellement la petite silhouette de l’homme responsable de tous les maux de Vandicius : Scaramouche Cal Corditus. Ni une ni deux, Nikova réquisitionne le bataillon de van Veenan, collant au passage un bolt dans la tête du Lieutenant techniquement en charge de ce dernier, et peu chaud pour partir en balade derrière les lignes ennemies, et élève notre héros au grade de Sergent en reconnaissance de sa valeur au combat.

La sortie des Meat Dogs ne se passe pas franchement bien, même en considérant la durée de vie très limitée d’un Légionnaire Pénal. Lorsqu’ils finissent enfin par atteindre le bout de la rue qu’a emprunté Cal Corditus pour retourner vers son QG, van Veenan et Nikova sont les seuls survivants de leur peloton. Cela ne décourage pas pour autant l’Inquisitrice de poursuivre sa proie, et comme van Veenan n’est pas vraiment en mesure de refuser de l’accompagner, la paire s’enfonce plus profondément en territoire inconnu et hostile. Il ne leur faut pas longtemps avant de se faire embusquer par Corditus et ses sbires cependant, le grand méchant de l’histoire étant un Psyker ayant tiré l’aptitude « Maître du Scénario » sur sa table de compétences en début de partie. Nikova se fait honteusement capturer par sa Némésis, tandis que van Veenan parvient à échapper à ce sort funeste en tentant et réussissant un saut de l’ange en mode Assassin Creed (la charrette de foin étant remplacée ici par un tas d’ordures).

Nous prenons d’abord des nouvelles de l’Inquisitrice, qui traque Corditus depuis trente ans car elle n’a pas supporté que cet ancien collègue passe au Chaos. La mobilité professionnelle est toujours un sujet délicat, c’est vrai. Après avoir prononcé pour le lolz son jugement de l’hérétique, elle s’attend à être exécutée par ce dernier, mais il se trouve que l’Ami Cordi a d’autres projets pour elle. Fort occupé à invoquer des Chiens de Khorne (à raison d’un par demi-heure, les défenseurs impériaux ont le temps de voir venir), il annonce à l’Inquisitrice qu’elle aura la chance d’assister aux premières loges à la création de son empire chaotique, Corditus voulant avoir le plaisir et la satisfaction de briser la résolution de sa prisonnière, qui avant de prendre rosette, était une Sœur de Bataille (donc double effet kiss cool s’il arrive à ses fins). Chacun ses fantasmes, j’imagine.

De son côté, van Veenan, une fois remis de ses émotions, décide d’aller secourir sa coéquipière et se dirige donc vers le mausolée où elle lui a dit que Corditus se terrait quelques minutes plus tôt. Le dieu du matos finit enfin par lui sourire, puisqu’en chemin il tombe sur un groupe de cultistes couvant une caisse de grenades krak (c’est moche la folie tout de même). Après avoir réglé leur compte aux faquins, il poursuit sa route avec suffisamment d’explosifs pour démolir le Palais Impérial, équipement qui lui sera fort utile par la suite comme vous pouvez vous en douter. Au terme d’un raid promptement et proprement mené sur le QG adverse1, van Veenan parvient à délivrer Nikova et à s’enfuir avec elle… mais seulement sur deux cents mètres. La belle, la traîtresse, se prend en effet un tir de laser fatal dans le bas du dos, et ordonne à son sous-fifre de porter un message codé à un autre Inquisiteur (Gorton), pendant qu’elle agonise tranquillement à l’arrière-plan. Bien brave, le Légionnaire accepte de se muer en messager, et parvient miraculeusement à rejoindre les lignes impériales, et tout aussi miraculeusement (il avait pris un bain de sang pour s’infiltrer parmi les groupies de Corditus) à ne pas se faire abattre à vue par ses camarades. Troisième coup de chance d’affilée, Gorton était justement en train d’attendre à proximité, et à l’écoute de la phrase codée de Nikova, il a une réaction sans appel…

Début spoiler…Il renvoie van Veenan au vestiaire, ce qui désole un peu ce dernier il faut dire, car il s’attendait à une remise de peine pour services rendus. Mais c’est toujours mieux que le sort réservé aux autres Légionnaires Pénaux, que Gorton fait exécuter par ses acolytes. La raison ? Ils ont été témoins de l’arrivée d’une escouade de Chevaliers Gris, chargée de mettre Cal Corditus hors d’état de nuire maintenant que l’Inquisition a la certitude que l’hérétique se trouve à proximité. C’était le sens caché du message de Nikova, et les règles étant les règles, l’existence de ces super Space Marines doit rester secrète. Dura lex, sed lex…Fin spoiler   

1 : Et Cal Corditus, me demanderez-vous ? Eh bien il se contente de gueuler psychiquement +Il est arrivé !+ à ses sbires, et repart aussi sec apprendre à ses toutous de Khorne à lui rapporter son journal, ou quelque chose comme ça.

AVIS:

Maintenant que l’on a plus Gav Thorpe pour nous apporter de temps à autres des nouvelles (héhé) de Légionnaires Pénaux, ce sous-genre est en voie d’extinction littéraire. On peut donc remercier Justin Woolley de ses bons offices avec ce classique mais appréciable ‘Redemption Through Sacrifice’, qui donne un bon aperçu de la (courte et violente) vie de ces soldats impériaux hauts en couleurs. Bien que van Veenan n’ait pas la gouaille d’un Kage, il s’avère être un protagoniste tout à fait correct, et la petite aventure déroulée par Woolley répond également aux attentes que l’on peut placer sur une nouvelle d’action de la Black Library, conclusion grimdark en prime (en même temps, une histoire de Légionnaires Pénaux qui ne se finit pas mal constituerait un crime de lèse-fluff). J’ai juste un peu tiqué sur quelques détails mineurs, comme le fait que Cal Corditus soit un Psyker de Khorne, mais rien qui ne vienne irrémédiablement gâcher la lecture. On en viendrait à souhaiter que Justin Woolley se réengage dans la Légion.

.

The Price of Duty – M. Smith :

INTRIGUE:

The Price of DutyLa première mission du Commissaire junior Jasper Nevin, fraîchement diplômé de la Schola Progenium et envoyé encadrer le 64ème Catachan sur le monde forestier de Verdine II, se passe assez mal pour notre héros. Outre le fait qu’il n’est pas parvenu à se faire accepter par ses soldats, dont la réticence à se plier aux injonctions de l’Officio Prefectus est bien connue, Nevin se trouve confronté à une opposition féroce de la part des insurgés locaux, bien mieux armés et équipés qu’une bande de bûcherons énervés n’a le droit de l’hêtre. La nouvelle commence d’ailleurs par une fusillade tendue à l’ombre des coloshênes qui recouvrent une bonne partie de la planète, à laquelle Nevin survit miraculeusement grâce à l’arrivée providentielle de la Capitaine Rosario ‘Viper’ Vargass et de son escouade de commandement. En inspectant les corps des insurgés, les deux officiers constatent que ces derniers sont armés de fusils laser flambant neufs, alors que les Catachan doivent combattre avec des pétoires reconditionnées et affectées par de gros problèmes de batterie. Saleté d’obsolescence programmée.

De retour au camp de base, Nevin obtient une audience auprès du Seigneur Commissaire Albrec Stone afin de lui partager sa découverte, pendant que Viper se fait refouler à l’entrée du QG par les Scions Tempestus qui en gardent l’accès. Stone n’est en effet pas un grand fan de l’esprit frondeur des Catachan, et les tient à distance dès qu’il en a la possibilité, les soupçonnant de vouloir attenter à sa précieuse vie. Malgré le rapport inquiétant de son subalterne et ex-étudiant, le Seigneur Commissaire semble prendre la nouvelle à la légère, et donne des instructions strictes pour que le matériel récupéré sur les rebelles soit mis sous clé, au lieu d’être distribué aux Gardes qui en auraient pourtant bien besoin.

Un peu plus tard, Nevin et Viper se rencontrent à nouveau, et la Capitaine emmène le Commissaire dans l’armurerie régimentaire, tenue par un vétéran grisonnant et bedonnant (Bron Hader). Hader explique à ses visiteurs que les fusils laser des Verdinites ont toutes les chances d’être ceux qu’il a commandé au Munitorum il y a quelques mois, et qui se sont perdus en chemin. Aucun convoi d’approvisionnement n’ayant été capturé par l’ennemi durant la campagne, cela ne peut signifier qu’une chose : quelqu’un de haut placé a couvert le trafic des fusils en question, et les soupçons de Viper se portent naturellement sur les deux officiers auxquels elle ne fait absolument pas confiance : Nevin et Stone. Le baby Commissaire jurant son grand Empereur qu’il n’y est pour rien, cela ne laisse plus qu’un suspect à confondre, mais la tâche ne sera pas aisée. Dans l’espoir que le Seigneur Commissaire ait dissimulé des preuves incriminantes dans un tiroir, Nevin profite des quelques minutes consacrées par son supérieur à déguster son bol de Nesquik matinal pour s’introduire dans son bureau et feuilleter les montagnes de paperasse dont Stone aime à s’entourer…

Début spoiler…Et cette recherche frénétique porte ses fruits. Un tiroir à double fond révèle en effet un classeur contenant, entre autres preuves de népotisme accablantes, le fameux bon de réception des fusils Catachan, signé de la main de Stone. Nevin a toutefois trop tardé et se fait pincer par le Seigneur Commissaire avant qu’il n’ait pu sortir du bureau. Tenu en joue par son supérieur, il n’a d’autre choix qu’écouter ce dernier lui raconter sa version de l’histoire : pour Stone, il s’agissait simplement d’aider un haut gradé de la Garde Impériale à préparer sa retraite prochaine en couvrant un lucratif détournement de matériel militaire. En échange, Stone bénéficierait d’une nouvelle affectation dans un régiment plus civilisé, et serait prêt à prendre Nevin avec lui, si le jeune Commissaire accepte de marcher dans la combine, bien sûr. Bien que les principes moraux de Nevin lui fassent condamner ces pratiques, Stone achève de le convaincre en lui révélant qu’il a dû une de ses plus fameuses victoires à un achat sous le manteau d’armes à plasma pour équiper ses soldats, opposés à des Space Marines chaotiques peu impressionnés par les fusils laser et lance-flammes que le Munitorum avait attribué au régiment. Stone remet d’ailleurs un des pistolets à plasma qu’il avait utilisé lors de cette campagne à son protégé, en guise de petit cadeau d’adieu.

Lorsque les rebelles lancent une attaque du camp retranché des Catachan à la nuit tombée, Nevin et Viper se retrouvent en première ligne, position peu confortable s’il en est, surtout quand l’ennemi est bien mieux armé que vous. Débordés par les assaillants, secondés par des Ogryns équipés de tronçonneuses géantes et dont le cuir épais les immunise aux décharges faiblardes de leurs fusils, les Gardes sont forcés au repli et contraints de se battre au couteau. Nevin dispose quant à lui de son nouveau joujou à plasma, qui s’il ne lui explose pas à la tête, surchauffe cependant suffisamment pour finir collé à sa main, ce qui n’est jamais agréable. Au moment où tout semble perdu, Stone et ses Scions finissent par arriver pour prendre l’ennemi à revers et le mettre en fuite. Cette intervention décisive sera-t-elle suffisante pour que Nevin tienne sa langue ?

Début spoiler 2…Eh bien non. Echauffé (et brûlé au troisième degré) par ce qu’il vient de vivre, le Commissaire expose les manigances de son supérieur devant témoins. Cependant, Stone n’est pas né de la dernière pluie, et a pris soin de maquiller toutes les preuves qui l’incriminaient pour qu’elles désignent désormais Nevin. Même le pistolet plasma qu’il lui a remis quelques heures plus tôt semble accréditer la thèse d’une complicité dans un trafic d’armes. On en revient donc à du parole contre parole, et à ce petit jeu, il est bon d’avoir une dizaine de Catachan sans scrupules en back up, comme Nevin le découvre bientôt. Convaincue de l’intégrité de ce dernier, Viper ordonne en effet à ses hommes de tomber sur le râble des Scions, laissant Nevin libre de faire un gros trou dans la poitrine de son mentor dévoyé. Justice a été rendue.Fin spoiler 

AVIS:

Une nouvelle mettant en scène un Commissaire et un régiment de Catachan, et dans laquelle se pose la question de la façon d’accomplir son devoir, surtout dans des conditions difficiles ? C’est ‘Emperor’s Grace’ qui bénéficie d’un reboot ! Je ne sais pas si Matt Smith avait en tête cette référence au moment d’écrire ‘The Price of Duty’, mais sa soumission est sensiblement du même niveau que celle de son grand aîné Alex Hammond, c’est-à-dire assez moyenne. Desservie par des personnages quelconques et très peu attachants, ainsi que par un rythme très pépère (malgré un généreux recours à des scènes d’action), l’intrigue de cette nouvelle ne captive jamais le lecteur. Je regrette également le choix de Smith de ne pas avoir terminé son propos avec une vraie conclusion grimdark, et d’avoir au contraire fait « triompher la justice », ce qui peut s’apparenter à une faute de goût pour de la GW-Fiction. Bref, ce n’est pas la bleusaille Jasper Nevin qui viendra contester la casquette de Commissaire le plus badass de la galaxie à ce vieux Sebastian Yarrick (quel que soit l’état dans lequel il se trouve), c’est moi qui vous le dit !

.

Anarchy’s End – R. J. Hayes :

INTRIGUE:

Anarchy's EndLa vie n’est pas facile pour Vi Madine, servante à tout faire à bord du Baneblade Anarchy’s End. Outre le fait que ses conditions de travail soient ingrates, pour dire le moins, et que ses collègues d’habitacle la considèrent très peu, malgré la foule de service qu’elle leur rend, il lui faut également composer avec le caractère acariâtre de l’esprit de la machine dans laquelle elle évolue. Anna (appelons la comme ça, car oui, c’est une lay-dee) tient en effet plus de Tatie Danielle que de Mamie Nova, et multiplie les coups fourrés à l’encontre des petits humains, tellement fragiles…, qui tentent tant bien que mal de la faire servir l’Imperium. Pour Vi, qui est la plus ancienne des opérateurs du super lourd, et tient un registre de tous les membres d’équipage morts en service (21 au total au début de la nouvelle), il s’agit simplement d’éviter de contrarier la vieille dame en oubliant de réciter les bons rites au bon moment. Pour les autres servants d’Anna, qui considèrent le tank comme… un tank, la leçon sera autrement plus rude, et la plupart du temps, définitive. L’histoire s’ouvre ainsi en même temps que la boîte crânienne du loader Jacob Waynee, victime d’un décrochage malheureux de plaque de blindage. Ce sont des choses qui arrivent… mais un peu trop souvent à bord de l’Anarchy’s End.

Il n’y a cependant pas de temps à consacrer à ce tragique incident, la bataille contre les hordes tyranides faisant rage à l’extérieur, et notre malicieux Baneblade ayant été chargé d’une mission vitale : localiser et éliminer le Prince dirigeant l’essaim. Bien que la majorité des bio-formes adverses soient trop chétives pour inquiéter Anna, il ne se passe guère cinq minutes sans qu’un Carnifex enthousiaste vienne offrir une valse à la vieille dame, réduisant drastiquement les capacités de l’équipage à rechercher sa proie. Pour ne rien arranger, Vi surprend un échange totalement séditieux entre l’opérateur Gee et un autre servant, annonçant une mutinerie prochaine dirigée envers le Lieutenant Hamad. Ayant compris qu’il avait été entendu, Gee essaie de réduire Vi au silence, mais par un curieux enchainement d’événements, se retrouve enfermé dans sa tourelle et incinéré par un court-circuit qui transforme cette dernière en brasier. Pour Vi, il ne fait aucun doute que c’est l’esprit de la machine qui est intervenu pour punir le factieux, et sauver sa vie par la même occasion. Il lui faut cependant alerter Hamad qu’au moins un autre membre d’équipage est un traître en puissance, et ce alors que le Baneblade essuie une pluie de plasma et une tempête de griffes chitineuses. Pas sûr que l’assurance prenne tout en charge.

Ayant renoncé à utiliser la radio pour passer son message (personne ne l’écoute de toute façon), Vi finit par arriver jusqu’au poste de commandement, après avoir vu ou entendu périr dans d’horribles souffrances une bonne moitié de ses camarades, victimes de l’arsenal peu ragoutant des Tyranides. En plus du Lieutenant Hamad, elle y retrouve l’officier tactique Makin (qui s’avère être le traître) et le canonnier Beadle. Makin a totalement perdu son sang froid et menace Hamad avec son pistolet laser, demandant à ce que le Baneblade abandonne sa mission suicide et batte en retraite. Lorsque Vi cherche à maîtriser le forcené, un tir perdu ricoche dans l’habitacle jusqu’à atteindre le pauvre Beadle (qui n’avait rien demandé), pendant que Hamad parvient à coller un bolt dans la tête du mutin pour lui apprendre à respecter la chaîne de commandement. L’ordre rétabli (ce qui est la moindre des choses pour un tank qui s’appelle Anarchy’s End, tout de même) à bord et sa cible finalement localisée, le super lourd semble être en bonne position pour mener sa mission à bout… mais perd 60% de son équipage en l’espace de trente secondes (la pilote se prend un tir de canon venin dans le buffet, Beadle finit par se vider de son sang, et Hamad est pris en stop par une harpie alors qu’il cherchait à localiser le Prince de visu). Ne restent plus que Vi et l’adepte Verman, trop occupée à poser des sparadraps en soute pour être d’une quelconque utilité dans la réalisation du tir fatidique….

Début spoiler…C’est alors qu’un nouveau miracle se produit, Vi assistant depuis la tourelle qu’elle défend contre les assauts des cafards de l’espace au one shot du Prince Tyranide. Un nouveau fait d’arme à mettre directement au crédit d’Anna, qui détestait les insectes encore plus que les humains, comme la plupart des vieilles dames il faut dire. La mort du cancrelat en chef désorganise ses troupes et permet aux forces impériales de remporter la bataille, en plus d’offrir à Vi et à Verman une pause bien méritée hors de l’épave du Banebalde (dont le cœur a lâché, et c’est bien triste mais c’est logique à son âge…). Ainsi va la Vi à bord du Redoutable de l’Anarchy’s EndFin spoiler

AVIS:

Avec ma sale manie de ne pas lire les nouvelles dans leur ordre de sortie, j’avais commencé par me dire que cet ‘Anarchy’s End’ ressemblait très fortement à l’Imperator Gladio’ de Richard Strachan (Destination Finale à bord d’un Baneblade, pour faire court). Il s’avère que l’inverse est plus exact, l’histoire de Hayes étant sortie initialement avant celle de son comparse de la BL (dans le recueil ‘The Accursed’, datant de 2021). Le procès en plagiarisme étant annulé, que peut-on dire sur la deuxième nouvelle proposée par Rob J. Hayes pour la Black Library ?

Eh bien, on peut commencer en notant qu’elle est sensiblement supérieure à ses débuts (‘No Quarter’), ce qui est franchement appréciable. On retrouve dans ces quelques pages l’ambiance poisseuse, violente, désespérée et nihiliste – en un mot, grimdark – qui faisait cruellement défaut à ‘No Quarter’, et même si on comprend assez vite où l’auteur veut nous emmener en termes d’intrigue et de conclusion, le résultat final est loin d’être honteux. L’idée de Hayes de transposer ‘Christine’ de Stephen King aux riants champs de bataille du 41ème millénaire est bonne, et vient apporter une touche de suspens et de mystère bienvenus au sous-genre de « la nouvelle Garde Impériale », beaucoup plus prosaïque dans son approche en règle générale (« pan pan t’es mort et moi aussi d’ailleurs »). Encourageant.

.

The Jagged Edge – M. Haskins :

INTRIGUE:

The Jagged EdgeLes retrouvailles familiales entre le Sergent Aurelia Shale et sa sœur aînée, Theodora, ne se passent pas comme la première l’aurait souhaité. Pour commencer, Theodora est devenue une Commissaire inflexible pendant les dix ans qui se sont écoulés depuis que les sœurs ont été séparées après la mort de leurs parents, et n’hésite pas à coller des taloches à sa cadette lorsque cette dernière fait mine de questionner les ordres. Deuxièmement, les circonstances ne sont pas favorables à de grands épanchements, l’escouade d’Aurelia étant chargée d’accompagner Theodora et le Capitaine Bain dans un mission à hauts risques : infiltrer la Manufactorum Primus de Kepler-Gamma, usine de production d’armes tombée aux mains du Chaos lors de la guerre civile qui enflamme la planète depuis maintenant quinze ans. Le plan des impériaux est élégamment simple : utiliser les tunnels qui courent sous le mont Dentelure (Jagged Edge en VO) pour pénétrer incognito dans le complexe, et poser quelques explosifs au niveau du réacteur pour réduire l’usine en cendres. Voilà pour le briefing.

Les choses ne tardent pas à se corser pour les Scrappers et leurs invités. À peine entrés dans une cavité souterraine, ils tombent sur un Bisounours1 mal léché, qui fait des misères au soldat Helvia mais permet surtout à Aurelia de montrer qu’elle maîtrise l’art du combat au couteau. Après des heures de tâtonnements et de reptations, la fine équipe parvient dans la Manufactorum Primus, que les hérétiques n’ont absolument pas pris soin d’entretenir depuis leur OPA hostile. Des cadavres mutilés jonchent les moindres recoins, sans parler des graffitis impies qui constellent les murs et de la tenace odeur de renfermé qu’exsude le lieu. Ce choix de décoration d’intérieur impressionne fortement les loyalistes, mais le vétéran Bain et la rigoriste Theodora ont tôt fait de leur faire reprendre leurs esprits, et les commandos parviennent sans problème jusqu’à la salle du réacteur, avant de commencer à poser leurs charges de démolition.

C’est le moment que choisissent les cultistes pour faire leur apparition, en des quantités trop importantes pour que les Gardes aient la moindre chance de tenir leur position. Aurelia surprend également un Word Bearer faire acte de présence au second plan, mais tel Bruce Willis dans un direct to video de la fin des années 2010, l’Astartes renégat se contentera de cette apparition fugitive avant de ressortir définitivement de l’histoire. Un problème de moins à gérer. Ayant déjà subi quelques pertes les Scrappers parviennent à se replier en bon ordre jusqu’à l’entrée du tunnel qu’ils avaient emprunté pour entrer dans le complexe. Cela aurait été l’endroit idéal pour utiliser leur détonateur… s’ils ne l’avaient pas oublié dans la salle du réacteur. Gag. Comprenant que ses alliés sont des gros nuls (alors que lui a réussi à tuer un Space Marine du Chaos en solo, d’après la légende), le grand Bain décide de repartir seul pour faire péter les charges, tandis que le reste des survivants devra faire diversion pour attirer l’ennemi ailleurs. Avant qu’il ne parte, Aurelia lui remet son couteau, ce qui est noble de sa part et ne servira à rien dans la suite de la nouvelle, puisque Bain n’y apparaitra plus non plus2.

La caméra reste en effet fixée sur les sœurs Shale, qui finissent par être les seules rescapées de leur petit groupe après que les autres Gardes aient passé l’arme à gauche dans des péripéties ma foi très classique. La franche discussion permise par cette intimité involontaire n’aura cependant pas lieu, Theodora écopant d’un pruneau dans l’artère fémorale alors que l’arrivée était toute proche (dommage), et se contentant de remettre à sa sœur son pistolet bolter ainsi que sa bénédiction avant de rejoindre à son tour l’Empereur. La nouvelle se termine avec le sprint d’Aurelia en direction de la sortie du tunnel, qu’un membre de son escouade avait heureusement piégé en skred au début de la mission parce que, je cite, « il n’aimait pas sa tête ». Ce délit de faciès minéral permet au moins à notre héroïne d’enfouir ses poursuivants sous des tonnes de gravats, et à notre histoire de se terminer sur une éclatante victoire impériale.

1 : Sans rire, le terme anglais utilisé est cudbear, qui peut se traduire par « ours câlin ».
2 : Je choisis de penser que le vaillant Capitaine solote sans problème le Space Marine une fois équipé du couteau, car ce n’est tout de même pas un Astartes qui va arrêter un Bainblade.

AVIS:

D’habitude, le choix d’utiliser des personnages avec un lien de parenté dans une histoire de GW-Fiction indique que nous sommes en présence d’une série au long cours, ce qui permettra à l’auteur d’explorer plus en détail les relations particulières qui unissent ses héros. Ici… non (à moins que Theodora n’ait survécu à hémorragie externe sévère et à un enfouissement prolongé, ce qui serait étonnant). Si le choix de Maria Haskins de déroger à la règle précédemment citée peut se comprendre dans le contexte de cette nouvelle (le devoir avant tout, etc…), il est emblématique des nombreux arcs narratifs que l’auteur met en place sans y donner suite, ce qui n’est jamais bon signe à mon humble avis. Ainsi, on apprend au début de l’histoire qu’Aurelia est une as au couteau… mais elle n’aura jamais l’occasion de mettre vraiment ce talent en œuvre après avoir fait la peau de Winnie l’Ourson. De même, Bain est auréolé par sa réputation de tueur de Space Marine, anecdote qui revient deux fois dans le cours du texte… mais il parviendra à faire exploser les charges hors champ, et on ne verra pas l’affrontement qui semblait pourtant inévitable entre le Capitaine vétéran et le Word Bearer entraperçu par Aurelia. Un peu dommage.

Ces considérations mises à part, on retrouve dans ‘The Jagged Edge’ les ingrédients d’une nouvelle d’action à la sauce Garde Impériale, mis en scène de façon efficace mais assez peu imaginative par Haskins. Malheureusement pour cette novice, le créneau est déjà trop encombré pour que la variation qu’elle propose sur la base de « Shale & Shale, Sergent & Commissaire » (je vois ça comme un crossover entre « Les Cordier, Juge et Flic » et « Alice Nevers, le juge est une femme », on a les références qu’on peut) ait la moindre chance de faire date. On a déjà Severina Raine et Minka Lesk dans la catégorie des imperial fighting girls de l’Imperium, pas besoin d’en rajouter, si ?

.

The Place of Pain and Healing – J. D. Hill :

INTRIGUE:

The Place of Pain &amp; HealingComme vous le savez peut-être, la dernière incursion d’Abaddon & friends sur Cadia ne s’est pas super bien terminée pour la planète. Aux dernières nouvelles, elle serait tombée sur le sol de la galaxie, ce qui fait tout de même une sacrée chute. Minka Lesk, jeune Bouclier Blanc aux débuts de ce que nous appellerons pudiquement « les événements », peut témoigner des derniers moments difficiles de la population locale : évacuée en compagnie du Capitaine Kasrkin Rath Sturm avant la victoire du Chaos (voir ‘Cadia Stands’), elle passe les premiers moments du voyage sur le croiseur Space Wolves qui convoie les deux Cadiens à délirer dans son sommeil. Les souvenirs de la défense contre la 13ème Croisade Noire se mélangent avec d’autres, plus anciens, de son enfance et son entraînement à devenir une bonne petite soldate. On apprend aussi que Minka est une Katherinette (même si elle ne porte pas de chapeau).

Cette transe enfiévrée est interrompue par le médecin de garde du Fang of Fenris, qu’un serviable hilote Space Wolves va quérir en catastrophe après avoir été témoin de la tachycardie suspecte de Minka. Une petite injection de stimms et ça repart comme en 40,000, cependant. Après une brève période de confusion, notre héroïne échange deux mots avec son camarade d’infortune, puis part errer dans les couloirs désertés et ténébreux du croiseur pour se changer les idées. Elle tombe sur Skarp-Hedin, le Space Marine qui l’a ramenée dans sa besace énergétique au moment de quitter Cadia (comme quoi on peut avoir un mono sourcil et bon(s) cœur(s), et parvient au terme d’un dialogue aussi profond que virtuose, mais en tout cas cathartique, à se réconcilier avec l’idée de la perte de sa planète natale, de ses milliards de compatriotes, et du fier héritage d’inflexibilité des centaines de générations précédentes. Le tout en deux minutes top chrono. A ce niveau, on ne dit pas tourner la page, mais désapprendre à lire.

Skarp-Hedin, qui a senti que son vaisseau était entré dans le Warp, et plus certainement que la fin de la nouvelle était imminente (c’est fou comme les Space Wolves ont le nez fin), trouve une excuse bidon pour partir dans l’arrière-plan narratif à petites foulées – mais en continuant le dialogue avec Minka, car c’est un gentleman. Cette dernière repart pioncer dans sa cellule, et sous son matelas, il faut le préciser, l’odeur et le poids de sa paillasse lui rappelant les jours heureux où elle faisait la nouba dans les dortoirs des premières années. You do you, girl, you do you.

AVIS:

Nouvelle de transition entre ‘Cadia Stands’ et ‘Cadian Honour’, ‘The Place…’ ne me semble pas être une addition très intéressante à la saga de Minka Lesk (que je ne considère pas comme étant très intéressante non plus, je dois dire). On n’apprend en effet pas grand-chose de nouveau sur l’héroïne aux yeux violets, qui a eu l’enfance stricte et militarisée que tous les Cadiens ont eu (aaaaaah), et a été traumatisée par la violence des combats de la Croisade Noire (oooooh). Comme les trois personnages principaux (Lesk, Sturm et Skarp-Hedin) ont un charisme cumulé proche de celui d’une huître comptable, il est dur de sympathiser un tant soit peu avec leur peine et leur déchirement.  J’ajoute que Hill se montre particulièrement peu inspiré dans l’écriture des quelques dialogues de sa nouvelle, qui sont si vides et grotesques que leur simple lecture vous sort immédiatement de l’histoire. À laisser sur Cadia.

.

The Labyrinth of Lost Souls – G. McNeill :

INTRIGUE:

The Labyrinth of Lost SoulsUn inconnu, peut-être illustre mais certainement pas lacustre, se réveille en sursaut d’un coma pas vraiment réparateur. Notre homme se retrouve en effet nu comme un ver, suturé comme la créature de Frankenstein, en proie à un féroce mal-être, et sans le moindre souvenir de qui il est et de comment il s’est retrouvé là. Seule consolation pour Jean Dupont, malgré l’impression tenace et désagréable que son pacemaker est en train de lui fondre dans la poitrine, il se découvre doté d’une force prodigieuse, ce qui lui sera sans aucun doute utile pour se tirer de ce mauvais pas…

Début spoiler 1…Je passe en mode spoiler ici pour épargner le suspense de cette soumission aux lecteurs de grande section de maternelle de cette chronique. Qui ne devraient pas être là, ni lire ce genre de contenu, mais d’une certaine manière, c’est grandement impressionnant. En tout cas, on ne m’accusera pas cette fois-ci de ruiner le dénouement d’une nouvelle, même si l’illustration de cette dernière devrait vous donne un énaurme indice sur qui est notre protagoniste. Deux si vous vous attachez également au fond de l’image et pas seulement à la Passion de Jean-Michel Blanquer au premier plan. Ajoutez à cela le nom de l’auteur et la date de sortie de cette nouvelle, et vous devriez être en mesure d’identifier le primate confus qui est en train de cavaler vers le « cœur du Labyrinthe1 », en fracassant tout ce qui a le malheur de se mettre sur sa route et/ou ne pas convenir à ses goûts esthétiques. Allez, je vous laisse une dernière chance de percer ce mystère par vous-même, en gentilhomme.e (je suis inclusif aussi) que je suis.

Début spoiler 2…Toujours là ? Bon, eh bien tranchons dans le vif de l’intrigue que Graham McNeill nous a amoureusement concocté et révélons sans plus tarder que l’énergumène qui vient juste de suspendre un Techmarine par les bretelles dans son propre atelier, parce qu’il avait une vague ressemblance avec l’homme taureau de la légende, n’est autre qu’Uriel Ventris. Le Capitaine de la 4ème Compagnie des Ultramarines, récemment primarisé (‘The Death of Uriel Ventris’), n’a donc pas passé le Rubicon avec la grâce et la fortitude des autre personnages nommés upgradés avant lui. D’ailleurs il a failli se noyer, ce con. Mais ce n’est pas vraiment de sa faute, notez. Comme l’Apothicaire Selenus le révèle à son supérieur (qui lui a fait une augmétique au beurre noir dans sa fuite éperdue) et au lecteur après que l’un comme l’autre aient digéré ce rebondissement digne de Hilfred Atchcock, c’est la fournaise bélisarienne implantée dans le thorax du néo-primarisé qui s’est mise en surchauffe et a provoqué son hyperactivité amnésique. Heureusement pour tout le monde, Ventris a retrouvé ses esprits avant de commettre l’irréparable (péter la vitre du réacteur plasmique du croiseur de bataille Vae Victus à coup de poing…because of reasons), et que l’irréparable soit commis sur sa précieuse personne (Petronius Nero était sur le point de lui donner le coup de grâce après avoir consulté la VAR pendant de longues minutes). Il aura fallu qu’on lui agite sous le nez le slip de Guilliman la bannière de sa Compagnie pour qu’il revienne à ses sens. La suite sera sans doute couverte dans ‘The Swords of Calth’, publié quelques jours après cette nouvelle. Trust me, I’m an expert.Fin spoiler

1 : Car la seule chose dont notre protagoniste se rappelle à ce stade, mis à part un goût immodéré pour la violence, est la légende de Thésée et du Minotaure, auquel il s’identifie totalement en sa qualité de gros bœuf ruminant de sombres pensées.

AVIS:

Graham McNeill joue au plus fin dans cette nouvelle à « « suspens » » (première fois que je mets des guillemets à mes guillemets), mais ne semble pas prendre au sérieux sa tentative, peu aidé il faut le dire par les choix iconographiques de la Black Library. Bref, la « « révélation » » que l’auteur prend temps de temps (à défaut de soin) à nous amener est tellement éculée que l’on pourrait s’en servir pour égoutter les pâtes. Dès l’instant où le caractère Primaris du protagoniste est fuité (d’une façon tellement subtile que c’est à peine si McNeill ne termine pas sa phrase avec un ;)), relativement tôt dans l’histoire, 99,9% du lectorat habituel de la BL aura identifié le Space Marine en goguette et en chaussette/claquette victime d’un very bad trip. Mais il faudra tout de même attendre les dernières pages pour que l’auteur ne nous donne le fin mot de l’histoire, de façon tellement ampoulée que l’on pourrait s’en servir pour égoutter les pâtes aussi. Vous n’avez jamais égoutté les pâtes avec une ampoule ? Dommage pour vous. Bref, le monde se divisera ici en deux catégories : ceux qui seront ravis d’avoir des nouvelles de Mister UV (comme le fait qu’il déteste son nom, ce qui corrobore une hypothèse longtemps partagée par les fans), et ceux qui trouveront que McNeill les prend un peu trop pour des neuneus. Si vous voulez une bonne histoire de 40K exploitant le trope du guerrier amnésique se réveillant en territoire hostile, je vous conseille ‘Hunted’ de John French, et surtout ‘Torment’ d’Anthony Reynolds, largement supérieur au gruau littéraire, à la limite du prétentieux (pourquoi ce titre ?) et bleuâtre que nous sert Graham McNeill.

.

Faith in Iron – C. Johnston :

INTRIGUE:

Faith inLe système d’Albarnan est à feu et à sang depuis que la Death Guard a montré un fort intérêt pour l’acquisition des planètes fertiles de ce petit bout d’Imperium. Très engagé contre la conversion des terres (#Biodiversité), Pépé a envoyé l’Adeptus Mechanicus et les Iron Hands contenir la menace purulente, mais cet appariement s’est révélé malheureux lorsque les Prouteux ont dégainé leur arme secrète, à savoir un malware particulièrement virulent et à même de corroder et/ou corrompre toute la tech’ que les nerds impériaux ont à leur disposition. Appelée Morbus Metallum, cette affliction a atteint le monde agricole de Dundas II, et mis HS la majorité des adeptes de l’Omnimessie qui y étaient stationnés. Fort heureusement, la Magos Biologis Viridan Shale a réussi à mettre au point un antidote, mais se trouve isolée dans la capitale planétaire (une cité ruche tout ce qu’il y a de plus classique, car oui, on peut apparemment en trouver sur des agri-mondes…), et à la merci des hordes de cultistes dérangés qui y ont élu domicile. Il est impératif pour l’effort de guerre impérial qu’elle soit ramenée en lieu sûr, et après un bref appel au numéro vert mis en place par l’Administratum depuis le laboratoire blindé où elle s’est réfugiée, elle a la satisfaction d’apprendre qu’un technicien lui a été dépêché1. Son nom : Rathkugan des Iron Hands.

Dans la capitale de Dundas II, les combats font rage pour empêcher ces grands malades de Nurglites de prendre la clé des champs, ce qui est pourtant leur souhait le plus sincère. Nous faisons la connaissance du Capitaine Lennox Winters de la Garde Impériale et de ses braves soldats, bien occupés à tenir la ligne dans l’attente illusoire de renforts. C’est toutefois leur jour de chance, car le drop pod contenant Rathkugan (et son Serviteur de combat) s’écrase à proximité de leur position, scellant le sort des malheureux cultistes présents dans ce périmètre. Rath’, qui aime visiblement avoir de la compagnie, ordonne aux mortels de l’assister dans sa mission, et après avoir compris qu’un non n’était pas une réponse acceptée par le colosse en céramite, Winters accepte de seconder l’Iron Father. Un job assez ingrat il faut le souligner, car l’Iron Hand ne semble avoir besoin des Gardes que comme instruments de diversion, et n’hésite pas à une seconde à tirer avec son bolter lourd d’épaule dans les mêlées, sans faire de cas de la pitoyable sauvegarde d’armure de ses petits camarades. Pour sa défense, Rathkugan est engagé dans un contre la montre aussi douloureux que débilitant, ses propres bioniques se faisant attaquer par le Morbus Metallum à vitesse grand V. Il s’agit de ne pas niaiser en route, comme on dit à Chicoutimi.

Quelques heures, mauvaises rencontres2, et pertes de bidasses plus tard, la fine équipe parvient jusqu’au laboratoire et fait sa liaison avec Viridan Shale, qui a la particularité d’être une bombasse. Rathkugan insiste pour repartir immédiatement en direction du point d’extraction malgré le fait qu’il soit déjà aux trois quarts rouillé et que son disque dur soit plus vérolé qu’un Portepeste. Un tel stoïcisme est normal de la part d’un descendant de Ferrus Manus, me direz-vous, sauf que l’Iron Father finit par s’effondrer comme une chochotte, forçant Winters et Shale à lui prodiguer les premiers soins le temps qu’il se remette de ses émotions. Grâce à l’antidote qu’elle peut synthétiser dans son sang, la Magos Biologis purge le système du Space Marine, et le Serviteur de ce dernier donne héroïquement ses composants à son patron pour lui permettre de redevenir opérationnel. Les précieuses minutes perdues à s’occuper de ce gros bébé permettent aux cultistes d’embusquer les loyalistes, ce qui se solde par de nouvelles morts de personnages secondaires. Au bout du compte, Rathkugan parvient tout de même à repartir de Dundas II avec Shale, qui pourra faire bénéficier de son Avast personnel aux Iron Hands frappés par le Morbus Metallum. Quant à Winters et ses derniers soldats, ils restent sur le théâtre d’opérations et reprennent leurs activités habituelles. Il serait cependant fort possible que le sympathique Capitaine reçoive bientôt un bras bionique tout neuf pour remplacer sa vieille prothèse actuelle, et que son régiment soit invité à participer à la reconquête du monde forge d’où vient Viridan Shale. C’est ça d’avoir des relations parmi les grands de ce monde cet Imperium…

1 : Si on peut admettre que les Space Marines sont suffisamment rares et puissants pour qu’un seul d’entre eux soit affecté à une mission suicide avec des chances de la mener à bien, je suis en revanche moins magnanime lorsque l’auteur fait comprendre que l’Ange de la Mort en question est expédié via croiseur d’attaque. Ça fait beaucoup de ressources mobilisées pour un seul pignouf, fut-il énergétique.  
2 : Dont un Death Guard, mais comme il ne joue absolument aucun rôle dans l’histoire à part se faire bolosser par Rathkugan au close, et finit aplati par une frappe d’artillerie dans l’anonymat le plus complet à la fin de la nouvelle, on ne s’étendra pas sur son cas.

AVIS:

Même si les Iron Hands ont une identité très forte, qui les différencie de la majorité des Chapitres Space Marines, et les rend techniquement plus faciles à mettre en scène par les auteurs de la Black Library que d’autres Astartes moins typés, tout le monde n’est pas capable de rendre justice à leur inflexibilité post-humaine. Le newbie Cameron Johnston le démontre ici, avec une histoire oscillant entre le polt born peu inspiré et la série B d’action piteusement mise à la sauce 40K (le background n’étant visiblement pas le point fort de notre homme). Même si elle est bien plus vieille, la nouvelle ‘Flesh’ de Chris Wraight, qui reprend à peu près les mêmes intrigue et conclusion, est supérieure en presque1 tous points à ce ‘Faith in Iron’ : si vous êtes aussi rationnel dans votre approche de vos loisirs (tant en temps qu’en argent) que les Iron Hands, vous ferez donc l’impasse sur la seconde pour vous concentrer sur la première.

1 : Je dois tout de même reconnaître que Cameron Johnston gère les munitions de manière plus réaliste que Chris Wraight.

.

A Coin for the Carrion Thieves – J. French :

INTRIGUE:

A Coin for the Carrion ThievesLe mauvais côté de l’éternité, c’est que l’on devient vite désabusé. Demandez à Ctesias par exemple : autrefois un fringant Thousand Sons passionné par la recherche de la vérité suprême et l’exploration de la nature de l’univers, quelques milliers d’années d’hérésie l’ont changé en vieux ronchon réactionnaire, passant le plus clair de son temps à marcher dans des coups foireux et le reste à regretter de l’avoir fait. C’est ainsi que notre ami s’est retrouvé en rade sur les Mondes Déchus, après que la tentative d’Ahriman de RE-lancer la Rubrique – ça avait tellement bien marché la première fois – se soit soldée, ô surprise, par un nouvel échec retentissant. Voilà ce qui arrive lorsque l’on suit les conseils d’un Duc du Changement qui se révèle être le Professeur Shadoko1 ! Encore 999.998 tentatives à rater et les résultats suivront, c’est certain.

Exilé avec quelques disciples dans la rase campagne de l’Œil de la Terreur, Ahri (un ami qui vous veut du bien) a besoin de se replumer. Par chance, les locaux sont assez conciliants : répondant aux noms divers et variés de Discordia, Fidèles Suivants de la Fausse Concordance Universelle, ou plus simplement, Voleurs de Charognes, cette bande de ferrailleurs de l’espace est prête à fournir des transports de seconde main (mais ayant passé le contrôle technique) aux Thousand Sons égarés… mais pas gratuitement. Comme le fait remarquer finement leur meneur, l’aptement nommé Premier Amasseur, dans l’Œil de la Terreur, le concret est une valeur refuge. Ce qui ne fait pas tellement les affaires d’Ahriman et de sa cabale, dont le fond de commerce réside plutôt dans les discours grandiloquents, les fausses promesses et les tours de passe passe. Fort heureusement, l’indispensable Ctesios pourra utiliser de sa spécialisation démoniaque (Monsieur est invocateur-lieur, ce qui est presque aussi bien que plombier-zingueur) pour tuner méchamment un vaisseau des Charognards, et ainsi fournir une monnaie d’échange acceptable par l’Amasseur.

Aussitôt dit, aussitôt fait : Ctesios se met à l’œuvre et repeint l’intérieur du vaisseau en question avec des litres de fluides pas vraiment ragoutants, tandis que son assistant Lycomedes saupoudre le sol de dents de lait, comme le veut la coutume. Déjà pas très jouasse de servir de bonniche au démonologue, Lycomedes devient carrément furax lorsque ce roué de Ctesios se sert de lui comme appât à démon pour son invocation, bien évidemment sans lui avoir demandé la permission avant. À la décharge de Ctesios, le lecteur un brin au fait des choses du Chaos avait compris que c’était le destin probable qui attendait ce sous fifre, ce qui est suffisant pour qualifier le manque de prescience du Thousand Sons de faute grourde (grave + lourde), passible de la damnation éternelle…

Début spoiler…Ceci dit, ce destin peu enviable sera épargné à Lyco’, Ctesios rabattant le capot sur le groin du démon juste avant que ce dernier ne passe à table. Piégé dans le véhicule consacré, qui pourrait très bien être une Fiat Panda pour ce que l’on en sait, l’habitant du Warp est condamné à servir d’ordinateur de bord et de mécanicien embarqué à la machine jusqu’à la fin des temps, pour le plus grand avantage de son nouveau et heureux propriétaire, Ah ma sœur (et la tienne ?). En échange, Ahriman récupère une petite armada de 14 navires, beaucoup plus qu’il n’en faut pour embarquer les reliquats de sa bande de guerre. Comme on peut s’en douter, le grand cornu a un plan à l’arrière du casque et ne compte pas passer les prochains siècles à se tourner les pouces. La suite au (peut-être) prochain épisode…Fin spoiler

AVIS:

John French pourrait ne pas en avoir tout à fait fini avec un de ses personnages fétiches, et donne avec ce ‘A Coin for the Carrion Thieves’ une suite aussi inattendue qu’intrigante à la trilogie consacrée au sorcier le plus talentueux et le moins efficace de la galaxie. Cette petite histoire permettra aux familiers de la série de retrouver, j’en gage, quelques vieilles connaissances – Ctesios et Lycomedes – qui tiennent les premiers rôles de ce récit de troc chaotique. Les nouveaux venus apprécieront quant à eux les efforts faits par French pour leur permettre d’apprécier pleinement cette nouvelle, dont ni l’intrigue ni le déroulement ne reposent sur des éléments inconnus du profane (ce que d’autres auteurs de la BL n’hésitent pas à faire). Au final, c’est assez sympathique, à l’image de ce bon vieux Ctesios, qui se contente de faire une sale blague à Lycomedes au lieu de le faire posséder par un démon majeur, comme on s’y attendait pourtant, et lui fait même la fleur de le prendre comme apprenti (comme quoi, l’allégeance « chaotique bon » existe bel et bien à 40K), et cela donne plutôt envie de découvrir cette série, ou de le voir se poursuivre.

.

Da Big Mouf – D. Ware :

INTRIGUE:

Da Big MoufDans les entrailles du Space Hulk Big Mouf, colonisé par les Deathskulls du Big Boss Zoldag Legmangla, nous suivons notre héros, le Nob Grimdak, alors qu’il s’adonne innocemment (ou aussi innocemment que sa nature de Xenos ultra violent le permet) à ses activités favorites: chercher du ​​​​​matos à récupérer pour kustomiser son équipement, tirer à droite et à gauche pour se convaincre de la mieutitude de son fling’, et se pavaner devant un public imaginaire comme s’il était un mannequin à la Fashion Week. L’arrivée d’une petite force de Sœurs de Bataille dans les coursives du Big Mouf, annoncée sans doute possible par le double bruit des bottes énergétiques et des cantiques consacrés1, est cependant suffisante pour renvoyer Grimdak, courageux mais pas téméraire (ou peut-être sujet aux acouphènes) jusqu’à la salle du trône de Legmangla.

Ce dernier, une montagne de muscles et de membres bioniques tout à fait conforme à l’image d’Epinal que l’on se fait du meneur peau-verte, allie la carrure d’un Ogryn avec la culture générale d’un Inquisiteur, puisqu’il a tôt fait de souligner que les harpies impériale sont forcément à la recherche d’une relique, puisque la recherche de ces objets constitue leur unique leitmotiv​​​​. Il l’a lu dans un vieux Codex Approved de Space McQuirk (le bien le plus précieux de son tas de loot), c’est donc que c’est vrai.​​​ Par un concours de circonstances tellement heureux qu’il a fallu à Tzeentch 999 ans pour le mettre en place, la relique en question est présente dans les alentours immédiats, puisqu’il s’agit d’une lance dont le bout du manche est un fémur humain, et dont un Nob quelconque se servait à l’instant comme d’un cure-croc2. Après avoir morigéné (je vous avais dit que c’était un érudit) son sous-fifre en lui faisant avaler son ustensile, Legmangla sonne la Waaagh! et emmène sa tribu à la rencontre des envahisseurs, guidé par le radar de recul que Grimdak a monté sur sa pétoire.

La confrontation initiale et finale (14 pages, c’est court), a lieu dans la salle du vortex, occupée par une sorte de trou noir anémique attirant mollement tout ce qui s’approche un peu trop près. C’est de là que le Space Hulk tire son nom de Big Mouf, et ça nous fait une belle jambe. Juste au moment où son chant de guerre se termine3, la vague verte tombe dans l’embuscade tendue par les filles de l’Empereur, qui avaient eu la lumineuse idée de la fermer pour surprendre l’adversaire. Vue par les yeux de Grimdak, l’attaque est d’une violence insoutenable et cause des ravages inouïs parmi les Xenos. Alors que le lecteur tente fébrilement de calculer combien d’Ordres Militants ont été rassemblés pour mener à bien cette mission périlleuse, et se prépare déjà à voir arriver Ste Celestine en personne pour un duel avec Legmangla, Ware balance un pain tellement brutal dans la mâchoire de l’Epique qu’elle en assomme du même coup le Réalisme, qui le suivait prudemment, comme à son habitude. Car le massacre des Deathskulls a été orchestré par une pauvre escouade de Sœurs de Bataille, soit 6 gougnafières en armure énergétique. Dans le chaos de la mêlée, les Orks parviennent tout de même à blesser gravement une Sista, grâce à l’intervention énergique de Legmangla en personne, mais c’est à peu près tout.

Après quelques pages confuses, Big Mouf se met en rogne et avale proprement tout ce qui n’a pas une coupe à frange (et Grimdak, qui parvient à s’échapper mais tout le monde s’en fout), permettant à Danie Ware de terminer son propos en révélant à son public que la miraculeuse escouade était menée par, mais en doutait-on encore à ce stade, l’injouable Augusta Santorus, qui avait très envie d’ajouter le fémur de Saint Finiang à son ossuaire personnel. Et il n’est pas permis de douter qu’elle a échoué dans cette tâche, bien que localiser l’emplacement de la relique dans un Space Hulk regorgeant d’Orks en ayant seulement une vague idée de la direction dans laquelle aller constitue un défi littéralement herculéen. Comme on dit, the Emperor provides.

1: Oui, nos braves Sistas abordent un vaisseau qui selon toute logique est infesté d’ennemis mortels en scandant les Parapluies de Cherbourg à plein volume. À moins qu’elles ne chantent horriblement mal, et comptent là-dessus pour faire fuir l’adversaire (une tactique tout droit piquée aux Emperor’s Children), on peine à comprendre l’intérêt de la manœuvre. 
2: Ce n’est pas comme si 1) un Space Hulk était un agglomérat de vaisseaux spatiaux d’une taille colossale, dont la cartographie et l’inventaire occuperait même le plus diligent des experts pendant des décennies; 2) les Orks étaient connus pour leur goût de l’exploration minutieuse et 3) une lance terminée par un bout d’os avait une quelconque valeur aux yeux d’un Ork, et avait donc une chance d’être présentée au Big Boss.
3: Et Ware s’est donnée à fond sur le livret, car le lecteur bénéficie de plusieurs couplets de pop-rork. 

AVIS:

Danie Ware enrichit moins sa gamme qu’elle étend ses déprédations en s’essayant à la littérature Ork, avec des résultats dans la droite ligne de ses premiers travaux. Si la première partie de la nouvelle, centrée sur Grimdak et Legmangla, pourrait à la rigueur faire illusion malgré son lot d’incongruités, la seconde en revanche reprend tous les codes de la SoB-erie1 dont Ware s’est faite la grande (et heureusement, seule) spécialiste au sein de la Black Library. C’est confus, incohérent et cela va à l’encontre des principes et des préceptes les plus basiques du lore1 : ayant déjà passé quelques chroniques à exposer mes griefs sur le sujet, je me contenterai ici de noter que le lecteur familier de ‘Mercy’, ‘Forsaken’ et ‘The Crystal Cathedral’ évoluera à nouveau en territoire connu. Le titre orkifié et la narration centrée sur un peau verte ne doivent pas faire illusion: il s’agit bien de la suite des aventures massacres d’Augusta Santorus, et les amateurs de POV Ork seraient mieux inspirés de se tourner vers les travaux de Mike Brooks et de Guy Haley. Contrairement aux balises laissées par l’Interex à proximité de Murder, j’espère que ces avertissements ne seront pas compris trop tard par ceux qui pourraient en avoir besoin…

1: Dédicace spéciale aux Blood Angels, pas foutu de purger un Space Hulk sans perdre 90% de leurs effectifs alors que Santorus et ses copines plient l’affaire en une demi-journée et une cheville foulée. 
2: Heureux, ou en tout cas fatidique, hasard, « sob » veut dire sangloter en anglais. C’est approprié.

.

Warsphere – D. Hinks :

INTRIGUE:

WarsphereL’Archonte Jean-Michel1 a emmené sa coterie de mauvais garçons et de femmes fatales (dont l’empoisonneuse Zhain) dans un rade paumé : une sphère de guerre Kroot s’étant écrasée à la surface d’une surface. Si le Drukhari s’est donné la peine de quitter son triplex de Commoragh, c’est parce que ses recherches lui ont permis d’identifier dans ce tas de rouille une information de tout premier ordre : les coordonnées d’une Enclume de Vaul, ou Forteresse Noire pour les mon-keigh. S’il parvient à faire l’occasion de cette relique millénaire, il pense pouvoir ravir à Asdrubael Vect la mainmise sur la cité pirate, ce qui est cool. Prévoyant autant qu’instruit, Jean-Michel a renforcé son expédition en recrutant des traqueurs Kroots, jugeant avec sagesse que l’appui de ces oiseaux de mauvais augure lui serait utile pour négocier l’intérieur de la sphère de guerre et mettre le gantelet éclateur sur les érudits qui détiennent le tuyau qu’il convoite.

Notre histoire commence par un petit massacre des sentinelles qui gardent la sphère contre les visiteurs importuns, les Kroots se faisant un plaisir et un devoir d’honorer leur double réputation de tueurs sans pitié et de gourmets sanguinolents en abattant puis dévorant les gardes. Bien entendu, ceci offense le raffinement exquis de Jean-Mich’ Mich’ et de Zhain, qui meublent ce buffet froid en échangeant des idées sur la meilleure façon de trahir et de torturer un Kroot, une fois que la mission sera accomplie. Souhaitant tout de même montrer qu’il est aux commandes de l’expédition, Jean-Michel va interrompre le casse-Kroot en appuyant là où ça fait mal : la fierté mal-placée des autruches de l’espace envers l(‘absence d)e goût artistique de leurs anciens. Si le chef de la troupe, l’impavide Grekh, ne tombe pas dans le panneau, son sous-fifre Khebab ne montre pas autant de self-control et tente de molester Jean-Mi après que celui-ci ait mis un coup de pied dans une statue aussi sainte que moche. Résultat des courses : Khebab se fait flinguer par son employeur, ce qui rend Grekh chafouin. Mais le rapport de force est trop déséquilibré pour que le placide palmipède ne fasse autre chose que jeter un regard froid à l’Archonte. Poursuivons.

Grâce aux talents de traqueur de Grekh et à l’étonnante technologie Kroot, qui semble consister en des petits tas de mégots, prospectus, vieux pneus et restes de junk food placés à des endroits stratégiques, nos héros parviennent à se rapprocher de la salle où sont sensés attendre les érudits, sans trop de casse. Ceci dit, l’abondance de piejakon que les dits érudits ont placé autour de leur planque rend le périple franchement aventureux, et lorsque les derniers survivants arrivent devant la salle des bosses des maths de fin (après une ultime rencontre avec des goons peu aimables, ici des goélands métalliques), il est clair que sans les bons services de Grekh, ce tombereau d’ordures deviendra leur tombeau…

Début spoiler…Ce qui rend la défection du Kroot problématique pour Jean-Michel, Zhain et Cie. Rusé comme pie, l’homme poulet a en effet fait charger son groupe dans une salle vide, et a profité de la confusion pour prendre son envol. Un départ en traître peu surprenant devant le peu de soin que l’Archonte a pris pour dissimuler ses intentions xenocides envers son sherpa jusqu’ici, mais qui pose toutefois la question du « pourquoi maintenant » ? C’est la vision d’une vieille video de surveillance de la sphère de guerre, restaurée grâce à la compétence native des Drukhari en hacking, qui permet d’y répondre. Contrairement à ce que Jean-Michel et ses caballeros pensaient, les sentinelles bestiales massacrées et boulotées par les Kroots ne gardaient pas les érudits, elles étaient les érudits2. Epiphanie finale pour nos héros : pendant qu’ils taillaient la bavette à l’arrière-plan, Grekh récupérait la localisation de la Forteresse Noire en… taillant la bavette aussi. Mais différemment. Coincés dans une situation qu’ils ne maîtrisent pas et en danger de mort, les Eldars Noirs font ce qu’ils savent faire de mieux : s’entretuer. C’est donc une fin de partie pour Jean-Michel, poignardé dans le dos par Zhain, qui ne risque cependant pas de faire de vieux os elle non plus. Moralité : ce n’est pas parce que ton grand-père était un dodo que tu ne peux pas pigeonner ceux qui te prennent pour un dindon.Fin spoiler

1 : L’histoire étant racontée depuis son point de vue et son statut social étant visiblement trop élevé pour qu’il daigne nous donner son petit nom, j’applique ici la loi de Lucy en l’affublant d’un sobriquet venant de la pop culture.
2 : Les Drukari s’en rendent compte en voyant l’un des gros lézards susnommés faire ses lacets tout seul. Si ça c’est pas une preuve d’intellect supérieur, je ne sais pas ce qu’il vous faut.

AVIS:

Darius Hinks n’en finit pas d’achever son cycle Blackstone Fortress, avec une nouvelle retraçant l’origin story de l’un des protagonistes du jeu et des romans/nouvelles associés à cette franchise : le traqueur Kroot Grekh. Si vous voulez savoir comment le gallinacé le plus badass du Segmentum est venu traîner ses quilles dans la Forteresse Noire, n’allez pas plus loin.

Pour les autres types de lecteurs, ce ‘Warsphere’ est également intéressant du fait du twist final assez bien pensé et exécuté que Hinks a incorporé à son intrigue. Cela ajoute une petite valeur ajoutée à une nouvelle autrement très classique dans le genre « exploration d’une ruine mystérieuse contenant un grand trésor mais recelant de dangers », dans lequel on retrouve 90% des vieilles histoires de Necrons… ainsi que 99% des histoires siglées Blackstone Fortress. Même à l’extérieur, on n’est donc pas dépaysé.

.

Path of Grief – A. Southin :

INTRIGUE:

Path of GriefSur le vaisseau monde de Saim-Hann, Itheíul porte le deuil de son frère Arsan. Cet épisode a tellement traumatisé notre héroïne qu’elle a abandonné ses chères études (BEP Shining Spear) pour emprunter la voie de la Hess, qui consiste à se lamenter H24 dans le temple de la Larme à l’Œil. On savait les Eldars très lacrymaux, mais c’est encore un niveau au-dessus. Alors qu’elle contemple la pierre esprit et la lance chantante (qui doit fredonner du Vincent Delerm, pour respecter l’ambiance) que son frère a laissées derrière lui, une voix se fait entendre dans son esprit. Sweet, sweet schizophrenia… sauf que non, bien sûr : il s’agit sans doute d’un Prescient défunt qui s’ennuyait dans le circuit d’infinité et a décidé de troller d’apporter ses sages conseils à une âme en peine. S’engage alors un dialogue psychique où l’invité mystère essaie de sortir Itheíul de sa torpeur en lui rappelant qu’il y a du bon dans ce monde, M. Frodon, et autres niaiseries optimistes. La pleureuse riposte avec des arguments bien sentis sur la futilité de se battre contre une galaxie hostile quand on est une fin de race, et la discussion se tourne vers la planète de Deniadol, où les Wild Riders sont récemment venus en aide aux Exodites après qu’une flotte ruche tyranide ait confondu le monde vierge avec un buffet garni.

Itheíul et Arsan faisaient partie du contingent dépêché par Yapadeuhazar Serpentard (le frère prescient de Salazar) pour sauver les meubles, c’est-à-dire permettre l’évacuation de bouseux locaux et de leurs dinosaures de compagnie (les petits seulement), avant que les hordes chitineuses ne dévorent les dernières poches de résistance eldars. Parce que les Saim-Hann ont beau être des rebelles, ils savent aussi reconnaître quand la situation est hors de contrôle, ce qui est tout à leur honneur. Cette tâche humanitaire (eldaritaire ?) ne pouvait être menée à bien que si le Prince commandant aux nuées tyranides était éliminé cependant, ce qui ne pouvait se faire qu’en localisant et éradiquant l’embêtante bestiole parmi sa masse de potes. Après un duel d’honneur entre les représentants des différents clans représentés sur Deniadol, c’est celui de nos deux héros (le clan Tyllach) qui remporte la mise, et part à fond de train castagner du cafard, juché sur ses motojets.

Après un premier engagement cathartique mais assez peu productif, Itheíul, Arsan et leurs cousins (on travaille en famille à Saim-Hann) firent une pause technique, pendant laquelle Arsan utilisa ses pouvoirs de Prescient pour faire tournoyer ses runes GPS, qui finirent par lui indiquer la direction où se trouvait la bioforme précédemment connue sous le nom de Prince. Bien qu’Itheíul lui conseilla d’attendre l’arrivée de renforts pour maximiser leurs chances, son frère n’écouta rien et mit les gaz en direction de sa proie, entraînant à sa suite le reste de la smala. Un combat aussi féroce qu’impossible à suivre à l’œil nu (à moins d’être fan de hockey sur glace) s’engagea entre les Xenos… et les Xenos, au cours duquel Astan tomba dans le piège tendu par le Prince, qui lui sortit une Neymar (se rouler par terre pour faire croire à une grave blessure, alors que pas du tout en fait), et finit les cervicales broyées par le neurofouet de son adversaire. Folle de rage, Itheíul ramassa la lance de son frère, lança « My Heart Will Go On » au volume maximal, et régla son affaire à la blatte fratricide, dont le trépas désorganisa suffisamment les Tyranides pour permettre une évacuation optimale des Exodites et de leurs alliés.

Retour sur Saim-Hann et à la discussion entre Itheíul et son conseiller spectral, qui se révèle être… Arsan. Shocking I know. En fin de compte, l’Eldar éplorée se range aux arguments de son frérot et sort du temple avec sa lance chantante, augurant sans doute d’une nouvelle reconversion professionnelle. La retraite, c’est pas pour tout de suite.

AVIS:

Pour ses débuts au sein de la Black Library, Adrian Southin livre une nouvelle à deux facettes. Côté face, vous avez le récit d’un affrontement entre les Eldars de Saim-Hann et une flotte ruche lambda. Rien de très innovant ici, mais comme le Grand Serpent ne fait pas partie des factions les plus couvertes par les auteurs de la Black Library, cela peut intéresser ceux qui suivent cette allégeance de près. Côté pile, on trouve une réflexion assez aboutie sur la condition des Eldars des vaisseaux mondes au 41ème millénaire, oscillant entre découragement nihiliste et volonté de perdurer quoi qu’il en coûte. On ne peut pas dire non plus que le sujet est totalement neuf, mais Southin réussit assez bien à mettre en avant les arguments majeurs de ces deux courants philosophiques, en faisant là encore ressortir la psychologie belliqueuse et bravache de Saim-Hann. Au final, c’est beaucoup mieux que ce que nous a donné Gav Thorpe ces dernières années, ce qui ne veut pas dire que c’est absolument génial, mais simplement que ‘The Path of Grief’ tient assez bien la route (l’inverse aurait été triste pour une nouvelle consacrée aux Wild Riders…).

.

Voice of Experience – J. C. Stearns :

INTRIGUE:

Voice of ExperienceDu rififi dans l’Atoll Nem’yar (rien à voir avec le joueur de futsal) : depuis plusieurs semaines, des accidents aussi regrettables que suspects viennent endeuiller avec régularité la station orbitale Suu’suamyth, arrachée par l’Empire T’au à l’Imperium pendant la cinquième sphère d’expansion. Bien que les autorités bienveillantes, à défaut d’être compétentes, aient minimisé les dégâts subis auprès de la population, l’affaire est devenue suffisamment sérieuse pour que le Conseil Elémentaire (l’Ethéré Aun’song et les quatre représentants les plus gradés des différentes castes) local charge la Lieutenant Kalice Arkady de prendre le dossier en main. Ancienne officier de la Garde Impériale ayant fait défection pour rejoindre le Bien Suprême il y a plusieurs années, Kalice s’est parfaitement intégrée à sa vie de collaboratrice citoyenne de l’Empire, et dispose des compétences et des connexions nécessaires pour identifier les membres de la cellule de terroristes impériaux soupçonnée d’être derrière les attentats. La confiance n’excluant pas le contrôle, le Conseil lui adjoint un Bleu comme partenaire, le chasseur de justice (c’est son titre officiel) Por’ui Fi’rios Kau’kartyr, ou Kartman pour les amis.

La paire commence son enquête par une petite visite à un ancien camarade de Kalice, le Sergent Treshom Lan. Reconverti en garagiste/ferrailleur après son abandon de poste, il serait sans doute en mesure de rencarder sa bonne amie sur d’éventuels clients récents de grandes quantités de palladium, un des composants principaux des bombes artisanales utilisées lors des récentes attaques. Les retrouvailles tournent court devant l’évident malaise de Treshom à la vue de Kartyr, et les réponses très vagues qu’il fournit convainquent rapidement Kalice que son frère d’armes ne joue pas cartes sur table avec elle, ce qui l’attriste fortement. Plus pragmatique, Kartyr a profité de l’échange pour cacher un drone avec micro dans l’échoppe de Treshom, ce qui permet aux enquêteurs de surprendre un échange entre ce dernier et un individu qui ne peut être que le cerveau derrière les derniers attentats. L’imminence d’une nouvelle attaque, dirigée contre un contingent d’ingénieurs humains récemment arrivés sur la station, force K&K à intervenir, et ils se rendent sans tarder jusqu’au domicile de Treshom avec une escouade de Guerriers de Feu pour arrêter le conspirateur. L’intervention se passe à la fois très bien et très mal, pour des raisons diverses. Du côté positif, le coup de filet permet de ramasser, outre Treshom, trois autres membres du réseau clandestin, dont l’instigateur des attentats en personne. Du côté négatif, deux des humains surpris chez le garagiste doublement renégat se révèlent être des hybrides Genestealers, et ne se laissent pas passer les menottes sans opposer une farouche résistance, qui résulte en de nouveaux morts du côté T’au. Ce sont les risques du métier.

Cette petite péripétie n’empêche pas Kalice et Kartyr de faire leur rapport au Conseil, mais à leur grand désarroi, Aun’song et ses séides ne semblent pas réaliser la gravité de la situation, et indiquent aux enquêteurs que leur mission a été accomplie. La chronologie des événements ne permettant pas de mettre au crédit de l’hybride récemment arrêté (et mort en prison quelques heures plus tard, un grand classique) les premiers attentats, et la preuve qu’un Culte Genestealers a infesté la station, sont autant de raisons poussant nos deux flics de choc à ignorer les consignes officielles et à poursuivre leur travail.

Kalice a alors la bonne idée de tourner son attention vers les auxiliaires Vespides présents sur Suu’suamyth, qui sont parmi les seuls occupants de la station n’ayant pas subi de check up médical à leur arrivée du fait de leur physiologie particulière. Il serait donc possible que l’infestation ait pris pied, ou plutôt griffe, sur place par ce biais. Convaincu par le raisonnement de sa collègue, Kartyr utilise son influence de membre de la Caste de l’Eau pour obtenir l’équivalent T’au d’un mandat de perquisition (ça doit s’appeler une Exhortation à l’Etincelante Transparence, je suis sûr) et aller rendre une visite au Ka’Bri’Dan Zchllchk et à ses camarades frelons…

Début spoiler…Vous allez rire, mais cette nouvelle intervention se passe également à la fois très bien et très mal, pour des raisons assez similaires à celles de la précédente opération. Les optimistes ne manqueront pas de souligner que la totalité du Culte Genestealers ayant infiltré Suu’suamyth, et comprenant outre des Humains et Vespides, le membre de la Caste de l’Air ayant accompagné nos héros et leur escorte de Guerriers de Feu sur place, s’est fait neutraliser dans l’intense fusillade qui s’engage peu de temps après l’arrivée des enquêteurs. Même le Patriarche que les cultistes avaient réussi à camoufler dans un recoin de la station finit en nature morte après que les renforts envoyés par le Conseil aient fait parler la poudre le plasma. Les pessimistes, dont Kalice et Kartyr font définitivement partie depuis leur lit d’hôpital, souligneront qu’Aun’song n’a pas vraiment été fair play sur ce coup. Le soutien très rapide dont ont bénéficié nos héros une fois le Culte démasqué était en effet une preuve éloquente de la connaissance de la gravité du problème dont l’Ethéré disposait. Certain que Kalice continuerait à suivre la piste des Genestealers, mais convaincu que lui permettre de monter une opération d’envergure ne ferait qu’attiser la méfiance des cultistes, il a donc fait exprès de clôturer le dossier de manière trop rapide, mettant en danger ses agents pour pouvoir surprendre le Culte. Tout n’est pas rose au pays des petits hommes bleus…Fin spoiler 

AVIS:

Bien que ‘Voice of Experience’ n’appartienne pas à la gamme Warhammer Crime, on retrouve dans cette histoire tous les éléments constitutifs d’une bonne nouvelle d’investigation, l’exotisme d’une station T’au (comparé à une cité ruche comme Varanguata) en plus. J. C. Stearns réussit à nous entraîner dans une enquête rythmée et prenante, ce qui est appréciable, et à approfondir les complexes mais fascinantes relations entretenues par les différentes races constituant l’empire T’au, ce qui est encore mieux et lui donne une superbe occasion de développer le background du Bien Suprême. Si vous êtes nostalgiques de la partie Xenos du Dark Coil de Peter Fehervari (‘The Greater Evil’, ‘Cast a Hungry Shadow’, ‘Fire and Ice’, ‘Fire Cast’, ‘Cult of the Spiral Dawn’), cette nouvelle devrait beaucoup vous plaire. Une vraie pépite comme on en trouve de temps en temps au hasard des recueils de la Black Library.

.

Road Rage – M. Brooks :

INTRIGUE:

Road RageNous retrouvons Ufthak Blackhawk, le Boss Ork le plus kool de ce côté-ci de la galaxie, après les événements couverts dans ‘Brutal Kunin’. Désormais lieutenant de Da Meklord, Ufthak est promis à un brillant avenir et gère sa propre bande de Boyz, mais les choses se compliquent lorsque son autorité est contestée par un Speed Freek du nom de Riptoof. Ce dernier reproche au Boss 1) de lui avoir piqué son dragsta pour réaliser la cascade qui l’a fait rentrer dans les annales1 (et ne pas lui avoir rendu après ça), mais surtout 2) de ne pas avoir trouvé une baston digne de ce nom pour occuper les troupes. La Tekwaaagh ! a en effet fait escale sur un monde Exodite, et massacré les Eldars et leurs diplodocus de compagnies en quelques jours. Depuis, c’est l’ennui. Jugeant Ufthak inapte au commandement, Riptoof le défie à la course (mécanisée, bien sûr), et notre héros est assez malin pour comprendre qu’il est dans son intérêt de jouer le jeu, étant entendu que « simplement » tabasser son rival ne lui fera pas gagner de points auprès des autres Speed Freeks qui forment le gros de sa bande.

Ne disposant que d’une journée pour se trouver une bécane digne de ce nom, Ufthak rend visite à son vieux complice, le Mek Da Boffin (toujours monté sur son solo wheel, comme la vraie légende qu’il est), qui lui promet un véhicule pour le lendemain. Et le brikolork tient parole, livrant un beau trukk (avec jantes alliage et roquettes de propulsion) à son Boss, alors que Riptoof concourt dans un nouveau dragsta kustom. L’épreuve consiste en un simple tour du pâté de maison, ou l’équivalent pour des Orks sur un monde vierge, le premier à revenir au bercail remportant la victoire. Lorsque le départ est donné, une dizaine de concurrents s’élance dans un concert de rugissements, Ufthak étant accompagne de son Daniel Elena personnel (le fidèle Mogrot Redtoof), mais également, et ce n’était pas prévu, par le tout aussi fidèle Grot Nizqwik, et le plus fidèle de tous, le Squig Princesse. C’est ça d’être un manager populaire.

Ce qui était encore moins prévu, c’est qu’une partie de chasse Drukhari fasse son apparition en milieu de parcours, et décide de se joindre à la course. Ne supportant pas le manque de respect des Eldars, qui commencent à drifter entre les buggies et les trukks Orks au lieu de simplement leur tirer dessus, Ufthak voit rouge et ouvre le feu sur les malotrus, déclenchant une bataille inter-espèce à 150 kilomètres/heure2. Le destin faisant bien les choses, notre héros se retrouve face au commandant adverse pour un duel au sommet (pendant ce temps-là, c’est Mogrot qui tient le manche), et bien qu’il en perde la main, Ufthak corrige son vis à vis avec l’aide providentielle et plongeante de Princesse, qui coûte un bras au leader Eldar Noir.

La ligne d’arrivée se rapprochant à vue d’œil, Ufthak a la clairvoyance d’utiliser le décor comme tremplin et les roquettes montées par Da Boffin comme booster, pour réaliser un saut qui réduit en compression de César le dernier Raider drukhari, et lui permet surtout de chiper la première place à Riptoof. Verstappen n’a plus qu’à bien se tenir ! Un bonheur n’arrivant jamais seul, la nouvelle se termine sur l’arrivée dans le camp Ork du reste de l’armée des Eldars Noirs, ce qui promet aux Boys désœuvrés une belle bagarre pour se remettre en jambe. Il faut savoir profiter des petits plaisirs de la vie.

1 : Détruire un Titan impérial au corps à corps.
2 : Il le fait en hurlant du Radiorkhead, ce qui est une raison supplémentaire de l’aimer.

AVIS:

Franche réussite que ce ‘Road Rage’ pour Mike Brooks, qui réussit le doublé que tous les auteurs d’œuvres feuilletonnées poursuivent : satisfaire à la fois les lecteurs familiers de la série (ici en prenant soin de faire apparaître presque tous les personnages secondaires de ‘Brutal Kunin’’) et ceux qui n’en ont rien lu avant cette nouvelle (en prenant bien soin de présenter les événements importants des épisodes précédents). Ca a l’air simple sur le papier, mais tout le monde n’y arrive pas, loin de là.

Ajoutons à cela que Brooks est très à l’aise dans l’écriture, là aussi faussement simple, de la littérature ork. On pourrait croire qu’il suffit d’écrire de manière outrageusement simplifiée pour donner le change, mais cela n’est pas suffisant : pour rester compréhensible, il faut au contraire faire attention aux tournures phonétiques utilisées, au point que je suis persuadé qu’il est plus long d’écrire en ork qu’en anglais (ou français) classique. Mike Brooks infuse également le reste de sa nouvelle de tournures et réflexions drolatiquement absurdes, ce qui change agréablement du grimdark auquel les œuvres de GW-Fiction nous ont habitué. Encore plus réussi que ‘Where Dere’s Da Warp Dere’s A Way’ (sauf pour le titre, évidemment), c’est dire !

.

Mad Dok – N. Crowley :

INTRIGUE:

Mad DokGhazghkull Mag Uruk Thraka est mort, éparpillé façon puzzle par les bons soins de Ragnar Crinière Noire et ses Space Wolves dans la cathédrale du monde de Krongar. Pour la plupart des autres personnages de Warhammer 40.000, cet état serait définitif, mais pour le prophète de Gork & Mork, il ne s’agit que d’un incident mineur, car l’inégalable Mad Dok Grotsnik a également fait le déplacement, et salive d’avance sur la possibilité qui lui est offerte de littéralement reconstruire Ghazgkull de la tête aux pieds, sans que ce dernier n’ait loisir de rechigner (ce qui peut être dangereux pour le bon Dok).

Cependant, Grotsnik doit composer avec la mauvaise volonté manifeste de ses infirmiers Grots, à commencer par le morveux mais intelligent Drippa, qui se demande bien si cela vaut la peine de sortir le jeu de limes, la perceuse à main et la superglu pour lancer une session de kitbashing de l’extrême alors que les Orks de Krongar sont en train de se faire botter énergétiquement l’arrière-train par les Space Marines encore présents sur la planète, et qu’il ne faudra pas attendre longtemps avant qu’un Nob pas trop bête décide que c’est son tour de devenir le Boss des Boss. Bien tenté de réduire l’impertinente créature en pièces détachées pour lui apprendre le respect, Grotsnik comprend qu’il ne pourra pas arriver à bon port sans l’aide de ses assistants, et choisit donc de résoudre le problème de façon pacifique. Il se met donc à raconter au parterre de Grots l’autre fois où il a réussi à ressusciter Ghazgkull, épisode connu de nul autre que lui.

Cela s’est passé lors du retour des Orks sur Armageddon, et plus précisément lors de l’assaut en sous-marin sur la cité ruche Tempestora. Alors que la côte se profilait à l’horizon (façon de parler lorsqu’on est passager d’un submersible, bien sûr), le soupe au lait Ghazgkull fit une attaque d’apoplexie si sévère lorsque son médecin traitant (toujours Grotsnik) lui annonça qu’il était nécessaire de lui ouvrir le crâne pour réparer les dégâts causés par une vie de guerre (un peu) et les expérimentations sadiques du Dok (surtout) qu’il s’en fit exploser le cerveau. La présence du leader suprême des peaux vertes sur les « plages » du débarquement n’étant pas optionnelle, Ghazgkull lui-même ayant juré qu’il mènerait l’assaut de ses troupes, Grotsnik a dû réaliser une opération d’urgence et dans des conditions loin d’être idéales pour remettre son patient sur pied. Grâce à la complicité de ce bon vieux Taktikus, mis au courant du pépin de santé du boss, et qui inventa un bon gros mensonge pour justifier son absence lors du briefing d’avant bataille (les Blood Axes sont bons pour ça), le Dok parvint in extremis à remettre le cerveau et le cœur (saleté de cholesterork) de Ghazgkull en état, et à réveiller le prophète au moment où quelques Space Marines firent intrusion dans la salle du trône du sous-marin échoué. La suite appartient à l’histoire…

Ce récit captivant fait toutefois remarquer au sagace Drippa que la résurrection de l’increvable Goff semble avoir été en partie causée, une nouvelle fois, par l’intervention providentielle du fidèle Makari. Grotsnik a en effet avoué qu’il a dû utiliser une hampe de bannière pour effectuer le triple pontage express qui a remis en marche le cœur de Ghazgkull dans le money time, et cette bannière n’était autre que le fameux bâton chanceux manié par le Grot porte-bonheur. Cette révélation fait comprendre à Grotsnik que cette nouvelle résurrection ne pourra réussir sans la participation de Makari, porté disparu lors de l’accrochage avec Ragnar. Qu’à cela ne tienne, le Dok connaît un cheat code efficace : une imposition des mains de Ghazgkull a déjà réussi à faire revenir la petite créature d’entre les morts. Et il n’y a pas de raison que ça ne marche pas même si le boss est techniquement mort lui aussi, pas vrai ?

AVIS:

Une nouvelle sympatoche, qui se concentre davantage sur la mentalité Ork (dont Grotsnik s’éloigne souvent, avec sa sale manie de considérer les choses de façon rassionel) que sur l’action à proprement parler. La première moitié de l’histoire est ainsi occupée par le Mad Dok se préparant mentalement à ressusciter sa plus grande création, les choses ne démarrant vraiment que dans la seconde partie, avec la confrontation initiée par le tout aussi rassionel Drippa, et le récit de la seconde revenue d’entre les morts de Ghazghkull lors de la troisième guerre pour Armageddon. On apprend beaucoup de choses sur la relation particulière qui unit Grotsnik et Ghazghkull d’une part (le premier passant son temps à empoisonner ou mutiler le second en douce pour tester sa résistance et se venger de ses sévices), et que Ghazghkull et son fidèle autant qu’immortel Makari d’autre part (il semblerait qu’aucun des deux ne peut vraiment mourir tant que l’autre est en vie). Une lecture tout à fait complémentaire du roman que le même Nate Crowley a consacré au prophète de Gork et Mork, et qui fera plaisir aux fans de la littérature orkoïde, dont Crowley est l’un des dignes représentants contemporains, avec son comparse Mike Brooks.

.

His Will – G. Haley :

INTRIGUE:

His WillDescente en rappel de l’épisode précédent, pour ceux qui avaient aqua-zumba ce jour là. Le Macragge’s Honour, vaisseau amiral des Ultramarines et véhicule de fonction de Roboute Guilliman a été capturé par les infâmes Red Corsairs alors qu’il ne faisait que vaquer à ses paisibles occupations. Parmi les membres de l’équipage passé au Chaos à l’insu de son plein gré, on trouve le Frater Mathieu, confident du Primarque et membre du saint ordre des Clochards Acronites. N’étant guère dans sa nature de se tourner les pouces en attendant qu’un stratagème salvateur se déclenche, Mathieu a résolu d’occuper sa clandestinité en célébrant des offices pour les matelots des ponts inférieurs, aidé en cela par le Frère Clydeus (porteur peureux) et le guide estropié Hiven. Malgré l’interdit qui frappe le culte de l’Empereur depuis que les Red Corsairs sont dans la place, et les patrouilles de gardes hérétiques qui sillonnent le Macragge’s Honour, le trio est parvenu à faire son office et à apporter un peu de réconfort moral et spirituel à ses paroissiens.

Alors qu’ils terminaient une messe donnée sous le regard bienveillant mais rendu torve par des lignes de moulage mal placée d’une statue en failcast de l’Empereur, Mathieu et Clydeus sont accostés par une jeune mère (Lyasona), très inquiète par l’état de son fils (Grent). Abandonnant le servo-crâne de Victor Hugo, Hubert Vedrine et/ou Horace Vernet dans sa mallette de transport, les deux hommes accompagnent la malheureuse jusqu’à sa coquette studette, transformée en chambre froide par les facéties du Warp. Comme on peut se l’imaginer, Grent s’est fait un nouvel ami imaginaire lorsque les fusibles de champs de Geller ont sauté, et le démon qui a pris possession du corps du garçonnet n’est pas disposé à vider les lieux. Saleté de squatteurs, décidément. Confiant dans sa capacité à réaliser un exorcisme en bonne et due forme, Mathieu demande à être conduit jusqu’à la chapelle impériale la plus proche, malgré le fait qu’elle ait été vandalisée par les renégats et reste surveillée par ces derniers.

N’écoutant que son courage et son statut de personnage apparaissant plus tard dans la série ‘Dark Imperium’, ce qui lui donne d’excellentes chances de survivre à l’aventure, Mathieu fait fi des conseils de prudence de son acolyte, et commence donc à invoquer son Grand Dieu pour chasser l’entité warpienne de son dernier lieu de villégiature. L’exorcisme suit à peu près le déroulé de la scène iconique du filme du même nom, jusqu’à ce que le démon décide qu’il en a assez entendu, se libère de ses liens et laisse libre cours à son imagination en termes de chirurgie plastique. On se dit alors que la procédure a échoué, et que Grent a passé l’â(r)me à gauche, mais que nenni : l’expérience de sa mort prochaine donne au froussard Clydeus un regain de piété, qui lui permet de couper la chique au démon assez longtemps pour que Mathieu et lui parviennent à le bannir une bonne fois pour toutes après une grande série de bourre-pifs karmiques.

Cerise sur le gâteau récompensant un enchaînement ayant été parfaitement exécuté, l’Empereur en personne apparaît pour s’en battre à l’arrière plan, et poser une main orgasmique sur l’épaule de son fidèle servant, qui tombe logiquement en pamoison. À Clydeus revient le lot de consolation, un peu pourri certes, de devenir martyr impérial en restant dans la chapelle pour permettre à Mathieu et à Grent de s’échapper. Mais il faut croire que Pépé a envoyé un clin d’œil langoureux au séminariste, car ce dernier accepte son sort avec un aplomb impressionnant et un entrain suspect. Notre histoire peut donc se terminer avec la remise du petit patient à sa mère éplorée, cependant que Mathieu devra désormais transporter tout seul son stuff dans les coursives du Macragge’s Honour, ou trouver une b/conne âme pour le faire à sa place. Le service de l’Empereur est sa propre récompense…

AVIS:

Guy Haley joue les prolongations du ‘Dark Imperium’ avec cette petite nouvelle venant s’intercaler entre les deux premiers romans de son arc (si j’ai bien tout suivi). Il va sans dire qu’avoir lu les œuvres en question permet de mieux comprendre, et donc apprécier ce ‘His Will’, mais le propos est suffisamment clair pour que même un novice puisse saisir de ce dont il retourne ici. Parmi les éléments intéressants de cette histoire, on peut retenir la destinée manifeste que Haley donne ou confirme à Frater Mathieu, qui a le privilège peu commun d’être approché par l’Empereur en personne. Le rapide panorama de la situation (presque) normale d’un équipage impérial de bas étage est également appréciable, et permet de réaliser que même sur le vaisseau amiral de Roboute Guilliman, les conditions de vie du serf moyen ne sont pas très Charlie. Le passage sur l’exorcisme permet à Haley de varier un peu le rythme de son récit en introduisant quelques paragraphes d’action, ce qui est une attention louable de sa part. Je nourris seulement quelques doutes sur la « réversibilité » physique d’une possession démoniaque, telle qu’elle nous est présentée ici. Grent se transforme en effet en Grishka Bogdanov l’espace d’un instant, avant de retourner à son état normal comme si de rien n’était. Ce point de détail mis à part, ‘His Will’ est donc une soumission égale à ce que l’on peut attendre de la part de Guy Haley (même si la touche humoristique de l’arc Cawl manque un peu) : solide et plaisante à lire.

.

Celestine: Revelation – A. Clark :

INTRIGUE:

RevelationIl n’est certes pas tous les jours facile d’être une idole, et ce n’est pas Sainte Célestine qui vous dira le contraire. Participant à la défense de la planète Machoria, assiégée par une horde de cultistes et démons de Khorne, notre héroïne a fort à faire pour maintenir le moral des troupes intact, mission qu’elle doit assurer seule depuis l’extermination totale1 du contingent de bonnes Sœurs qui l’accompagnaient par ces misogynes de Khorneux. Mais que fait Marlène Schiappa, on se le demande bien. Alors que la vague rouge se prépare à déferler une fois encore sur les positions impériales, Céloche se livre donc à un discours inspirant et à quelques poses martiales pour donner du cœur à l’ouvrage à ses bidasses (avec une conviction apparente qu’elle est loin de ressentir), avant d’enchainer sur quelques bannissements de Sanguinaires malchanceux à grand renfort de sa Lame Ardente.

C’est le moment que choisit son homologue et néanmoins ennemi mortel, Arnokh le Seigneur du Sang, pour lui proposer un duel à mort, histoire de faire un beau cadeau à sa divinité tutélaire. Cette dernière a en effet une sainte horreur des colombes, qui passent leur temps à larguer leurs fientes sur son bon trône de crânes. Voila qui coûte cher en entretien. Après s’être balancés quelques amabilités, le Prince Démon traitant la Sainte de vieille folle aux pigeons, et cette dernière ripostant en lui demandant s’il s’est mis à la musculation (il fait trois fois sa taille et X fois sa carrure) après s’être fait plaqué par Helga Pataki2, les deux adversaires commencent à se mettre sur la tronche, et Célestine a rapidement le dessous.

Malmenée par les horions hacheurs du démon, la Sainte perd du terrain, des points de vie et même un bout d’aile de jet pack, mais gagne en retour quelques visions de son lointain et brumeux passé, à commencer par sa transformation de Redemptia en pénitence en icône impériale. Pour vivaces que soient ces flashbacks, qui se manifestent à chaque fois que notre héroïne se prend une mandale un peu trop appuyée de la part de ce butor d’Arnokh (‘Célestine chine l’armure de Sainte Katherine aux puces’, ‘Célestine passe le kärcher à Aspiria3’), n’aident pas vraiment l’élue de Pépé à tenir en respect son tourmenteur. À deux doigts du renoncement et de la défaite, elle reçoit une dernière illumination/hallucination made in l’Empereur, où la petite part d’humanité qui lui reste lui demande expressément de jeter l’éponge pour arrêter de souffrir et mourir en paix. Cette proposition indigne outrage suffisamment notre égérie pour qu’elle reprenne du poil de la bête, passe en mode mégère pas du tout apprivoisée, réapprenne à voler (ça ne marche pas tout le temps apparemment) et vienne inscrire Arnokh sur le registre des hommes (ou équivalent) battus du Segmentum. Le bannissement du patron remettant en cause la présence des sous-fifres dans le Materium, et allant jusqu’à provoquer une belle éclaircie sur le champ de bataille, c’est une nouvelle victoire qui se profile pour l’Imperium. Merci qui ? Merci Titine !

1 : Cela inclut même les fidèles Geminae Superia lui servant de gardes du corset. Heureusement que leur régénération fait partie de l’abonnement souscrit auprès de Big E.
2 : De la série ‘Hé Arnokh !’ bien sûr. Référence peut-être datée.
3 : Le monde cathédrale dont est originaire Aspirine, la Sainte Patronne des Sœurs Hospitalières.

AVIS:

Je n’attendais pas grand-chose de cette nouvelle sur Sainte Celestine, personnage nommé qui ne m’inspire guère, et je n’ai pas été déçu (malheureusement). Andy Clark nous sert une histoire d’un classicisme absolu, où le.a brave héros.ïne se fait malmener par un méchant vraiment trétékosto, mais finit par l’emporter grâce à son mental à tout épreuve/un sursaut d’orgueil déclenché par un random event/une intervention mystico-divine, et, surtout, son armure de scenarium. Dans le rôle du heel, Arnokh l’armoire comtoise de Khorne accomplit sa tâche (ingrate) sans trop démériter. De son côté, Celestine peut vaguement intéresser le lecteur par ses états d’âme sur la toute puissance de l’Empereur, et ses quelques réminiscences, totalement gratuites en termes de fluff et/ou déjà couvertes ailleurs, ce qui ne fait pas lourd. Mon principal regret est qu’Andy Clark, qui pourtant est le biographe attitré de Madame au sein de la Black Library (‘Celestine : The Living Saint’, ‘Shroud of Night’), n’ait pas exploité le super pouvoir narratif de son personnage, à savoir la capacité de mourir et de revenir à la vie, qui lui aurait permis de donner un peu de suspens à son histoire. Bref, vraiment très peu à tirer de ce crêpage de chignon, ou plutôt, arrachage de frange, sur Machoria, ce qui est un peu triste pour une nouvelle sensée mettre en avant son personnage principal…

.

The Moon-Mines of Sciara Lone – D. Ware :

INTRIGUE:

The Moon Mines of Sciara LoneUn joint de culasse fendu force l’escouade de Sœurs de Bataille où sert cette bonne vieille jeune Augusta Santorus à évacuer en urgence le vaisseau qui les ramenait vers Ophelia VII. Coup de chance, la planète où le Heart of Devotion finit par s’écraser possède un satellite, et la flottille de capsules de sauvetage où les quelques survivants de l’accident ont trouvé refuge se pose bientôt à la surface de la lune de Sciara Lone. Accueillies par le Gouverneur Ido en personne, les sœurettes demandent à avoir accès à la chapelle et à l’Astropathe locaux, pendant que leurs vaisseaux sont révisés et leurs accompagnants envoyés à l’hospice pour récupérer. Si l’attitude serviable et débonnaire d’Ido semble mettre immédiatement la revêche Sœur Supérieure Veradis de mauvais poil (en même temps, c’est son état normal), c’est plutôt l’étonnement qui l’emporte du côté d’Augusta (et de sa pote Lucienne). Elle n’arrive en effet pas à croire que des colonies minières de 10.000 habitants puissent exister dans l’Imperium. Ses études ne l’avaient absolument pas préparé à ça, en tout cas, ce qui en dit long sur la qualité de l’enseignement que les novices de l’Ordre de la Rose Sanglante doivent recevoir, moi je dis.

L’ébahissement se change cependant rapidement en désarroi et en colère lorsque la fine équipe arrive à la chapelle, et se rend compte que cette dernière a été abandonnée depuis des lustres. Ce n’est toutefois pas une raison de ne pas rendre grâce à Pépé de ses bienfaits, et une fois la prière achevée, Veradis disperse ses ouailles à travers la colonie. Pendant qu’elle ira envoyer un compte rendu des derniers événements à l’Ordre, Augusta et Lucienne devront retourner au spatioport et garder un œil sur les navettes. Juste au cas où bien sûr. Notre héroïne sent bien que quelque chose préoccupe sa supérieure, mais comme on ne lui a pas donné le droit de poser des questions aujourd’hui, elle se contente d’obéir sans chercher à en savoir plus. « Béni soit l’esprit trop étroit…», toussa toussa…

Bien évidemment, les choses se compliquent rapidement une fois rendu sur place, le personnel du spatioport ne se montrant pas très coopératif malgré les cris stridents et les froncements de sourcil auxquels Augusta a recours pour tenter d’asseoir son autorité. Pire, les Sœurs se rendent compte qu’elles sont encerclées par leurs hôtes, ce qui n’augure rien de bon pour la suite. Avant que la distribution de bourre-pifs ne commence, Augusta a toutefois une révélation en contemplant un transport Aquila faire un créneau dans le lointain : le logo de l’Empereur est tout bonnement absent de tous les uniformes, bâtiments et véhicules de la colonie. Une preuve d’indépendance qui lui semble être encore plus grave qu’une simple hérésie, à tout prendre.

Cette incroyable révélation ayant été faite, la nouvelle passe en mode Smackdown, dans la plus pure tradition de la série. Augusta et Lucienne rossent bellement les nuées de goons qui tentent de les mobber, sans utiliser autre chose que leurs poings et leurs genoux énergisés (c’est beau jeu). A la conclusion d’une cascade osée, qui voit Augusta parvenir aux commandes d’un vaisseau bourré d’explosif menaçant d’ouvrir le feu sur le spatioport, avant de réaliser qu’elle ne sait absolument pas piloter ce genre d’appareil et le crasher en 10 secondes top chrono ; notre héroïne a la bonne idée de tomber dans les pommes, ce qui permet à Danie Ware de boucler son intrigue hors champ. A son réveil, Augusta apprend en effet de Veradis que le Gouverneur a été exécuté et que l’ordre règne désormais dans la colonie. Cette dernière, qui avait rejeté le règne bienveillant de l’Empereur pour miner du bitcoin de l’or et de l’argent et l’écouler sous le manteau, est désormais placée sous l’autorité de l’Ordre de la Rose Sanglante1. En attendant que l’intendance arrive et qu’elle se remette de ses émotions, Veradis donne à sa novice le soin de potasser le Traité de l’Epine pour rester au niveau pendant que le reste de l’escouade partira épurer les indigènes réfractaires. Merci qui ?

1 : Ça explique peut-être d’où vient la tendance d’Augusta à annexer des planètes (voir ‘Mercy’) par la suite de sa carrière.

AVIS:

The Moon Mines of Sciara Lone’ n’est pas l’épisode le plus désolant/distrayant de la série consacrée par Danie Ware à son héroïne fétiche, et se contente d’être assez quelconque tant sur le fond que sur la forme. S’il s’agit de votre première rencontre avec Augusta Santorus, nul doute que vous sortirez assez surpris de cette nouvelle, où on chante beaucoup, catche régulièrement, et où les personnages semblent en peine de prendre les décisions les plus évidentes (Veradis avait grillé depuis le début que quelque chose de louche se passait dans la colonie, mais a trouvé malin de ne pas prévenir le reste de son escouade). Mais si vous êtes un suiveur vétéran de l’Ordre de la Rose Sanglante, tout cela vous semblera bien ordinaire. A son crédit, je dois reconnaître à Ware que l’idée de mettre en scène une communauté humaine « indépendante » est intéressante, en partie parce que ce concept, qui n’est pourtant pas révolutionnaire pour un Imperium s’entendant à l’échelle galactique, n’a été jusque là que très rarement abordé dans la GW-Fiction. Avec seulement quelques pages à consacrer à ce sujet, et une maîtrise assez faible du lore, Danie Ware ne signe pas ici une nouvelle incontournable pour les amateurs de curiosités BLesques, mais démontre à tout le moins qu’elle est capable de sortir des tropes habituels que l’on retrouve à l’œuvre dans les nouvelles de 40K.

.

Martyr’s End – A. Worley :

INTRIGUE:

Martyr's EndMême si elle a réussi l’impensable et réintégré les rangs des Sœurs de Bataille (en même temps qu’une armure énergétique) après avoir servi comme Repentia en expiation de ses péchés, la Sœur Supérieure Adamanthea vit toujours avec un sévère syndrome de l’imposteuse (?), persuadée qu’elle est que ses fautes ne pourront lui être pardonnées que dans la mort. Cela ne l’empêche toutefois pas d’être une meneuse charismatique et efficace sur le champ de bataille, son statut de Viventem Miraculum transformant toutes les Sistas de moins de 25 ans dans un rayon de 12 pouces en groupies (ce qui leur donne l’indémoralisable). Déployée dans une campagne contre l’Empire T’au, dont les tactiques de lâche – l’utilisation d’armes de tir – la font tourner en bourrique, elle s’est illustrée par son zèle dans la traque de tous les Xenos passant dans son périmètre, que ces derniers soient les cibles qu’on lui a attribuées ou pas. La nouvelle commence ainsi par un débitage de Kroots en règle, l’Eviscerator qu’elle a conservé de son époque punk semant la mort parmi les pauvres gallinacés.

A faire trop de zèle (un comble pour une Sœur de Bataille), Adamanthea a cependant pris du retard sur l’accomplissement de la mission que lui a confiée la Canonesse Lydia, à savoir l’assassinat du commandant ennemi, qui en bon otaku ne se déplace jamais sans son Exo-armure Crisis. Si une escouade complète de Dominions menée par une psychopathe endurcie maniant une épée tronçonneuse aussi grande qu’elle suffisait logiquement à régler ce problème, la fâcheuse tendance de notre héroïne fâchée à farmer tous les mobs de la map a prélevé un lourd tribut sur ses suivantes, qui ne sont plus que huit au moment où Adamanthea décide d’aller faire la peau au sniper T’au qu’elle voit décamper dans le lointain. Elle venait pourtant de promettre à Lydia de rester concentrée sur son objectif et de se rendre sans délai sur le lieu de l’embuscade. On voit que le télétravail a quand même des effets pervers en termes de management des équipes.

Tout à sa haine pour les Xenos, Ada ne prend pas la peine de monter une stratégie sensée pour assaillir le T’au isolé, et perd la moitié de son escouade sous les tirs du sniper et de ses drones. Elle a toutefois la satisfaction de mettre la main sur le petit homme bleu et de le plaquer violemment sur la paroi de la caverne où il s’était réfugié en lui hurlant dessus « C’EST TOUT CE QUE TU PEUX FAIRE, LOPETTE !? », avant de l’étrangler à mains nues. Féminisme 3.0 ? Je vous laisse juger. Le voile de haine qui obscurcissait ses sens finit cependant par se dissiper, lui faisant réaliser à quel point sa conduite erratique et ses décisions irréfléchies ont causé du tort à ses Sœurs, trop contentes de côtoyer une presque sainte pour mettre en question son commandement incertain.

Pour ne rien arranger, Lydia rappelle Adamanthea pour l’informer que le commandant T’au a dépassé le point où elle était censée le prendre en embuscade, et a commencé à dégommer les aéronefs impériaux passant à sa portée. Une Valkyrie s’écrase à proximité pour illustrer les dires de la Canonesse, et plonger notre héroïne dans les abîmes du remords. Intimant l’ordre à ses dernières Dominions de retourner au bercail, elle se met en tête de réparer ses torts en solotant l’Exo-armure, ou, plus probablement, en mourant glorieusement dans la tentative. Et ça tombe bien, car qui arrive en voletant de rocher en rocher ? Le grand Schtroumpf en personne…

Début spoiler…Adamanthea n’avait cependant pas réalisé à quel point elle était populaire parmi les Sistas, puisque son escouade revient sur ses pas et ouvre le feu sur le Gundam de 40K, s’attirant ses foudres son plasma, mais permettant à la Sœur Supérieure d’arriver au contact de l’énervante machine. S’engage alors un combat physique aussi bien que mental, qui finit par une posture peu commune pour la littérature de la BL : Adamanthea, juchée à l’arrière de l’Exo-armure, et tentant de toute ses forces de lui arracher la tête à main nue, pendant que le commandant T’au enclenche le mode « taser de surface » pour griller l’insistante mais insaisissable furie collée à sa carlingue. A ce petit et stupide jeu, la foi absolue d’Adamanthea (et sa résistance à la douleur) finit par triompher, laissant la Crisis désorientée et son pilote à portée de gantelet. Un crochet du droit bien envoyé plus tard, le Xenos rejoint le Bien Suprême et Adamanthea est libre de se replier vers le QG impérial, emportant avec elle la Sœur Iris, qui a miraculeusement survécu à l’arsenal du leader T’au. Cela fait beaucoup de points de foi claqués d’un coup, mais cela en valait certainement la peine.Fin spoiler

AVIS:

Les Sœurs de Bataille se cherchaient depuis longtemps un auteur de la Black Library à même de rendre justice à leur zèle et leur ferveur incomparables, et leurs prières ont été entendues par l’Empereur (ou par Nottingham, ce qui revient au même). Alec Worley démontre en effet avec ‘Martyr’s End’ sa parfaite compréhension de la psyché particulière de cette faction, en mettant en scène une ex-Repentia dont la rage de vaincre donnerait des complexes à un Berserker de Khorne. Sœur Adamanthea est un savant mélange de brutalité maniaque1 et de découragement profond, et la dévotion totale qu’elle inspire à son escouade, quand bien même sa capacité à donner des ordres sensés est logiquement questionnée par ses ouailles, est pour moi une des représentations les plus inspirées que j’ai pu lire de l’état d’esprit des guerrières de l’Adeptus Sororitas. Pour ne rien gâcher, Worley parvient à garder un vrai suspens jusqu’au bout de son histoire, la recherche d’un glorieux martyre d’Adamanthea rendant plus que probable sa mort au combat. Une nouvelle d’action sans compromis et authentiquement grimdark, à conserver et vénérer comme une sainte relique par les fans des Sistas.

1 : Mais crédible d’un point de vue fluff, même quand elle décapsule une exo-armure T’au à mains nues. Une différence notable avec une certaine Augusta Santoris, je dois dire.

.

Ghosts of Iron – M. Collins :

INTRIGUE:

Ghosts of IronOù nous suivons la Magos Domina Calliope Vartothex, accompagnée par les Skitarii Tyr 4-2 et Kappa-Ix, dans sa tentative audacieuse de prendre possession d’un Titan Warlord tombé en rade sur la planète de Sareme, le Furore Martis, ou Fury of Mars en bon anglais. On ne saura jamais précisément ce qui est arrivé à ce monde forge à la suite de l’ouverture de la Cicatrix Maledictum, mais il est indéniable qu’une part significative de la population locale a cédé aux sirènes du Chaos, et sombré dans la pire des hérésies, la techno-hérésie. Calliope et ses deux side-kicks bien abîmés sont les seuls survivants de l’expédition montée par l’Archmagos Groal pour remettre en service le Fury, et il est certain, alors que les trois rescapés arrivent péniblement au pied du pied du Titan, qu’ils ont une bande d’héréteks sur les talons (et bientôt dans le talon, mouahaha). Le Warlord ne paie pas de mine, planté au milieu du désert comme un conifère sur un marché de Noël, mais ne semble pas en trop mauvais état de prime abord, ce qui donne une raison à Calliope d’espérer.

Cependant, on ne peut pas juger un Titan en inspectant sa carrosserie (une adaptation d’un vieux proverbe datant du Moyen-Âge technologique), comme le trio de mécanos ne tarde pas à le comprendre. Le premier à finir en pièces détachées, ou plutôt compressées, est le brave Kappa-Ix, écrasé par une porte blindée alors qu’il boîtait en direction de ses comparses. Sa disparition tragique attriste beaucoup (et c’est étonnant, au vu de la faction à laquelle il appartient) Tyr 4-2, mais les deux martiens n’ont pas de temps à perdre s’ils veulent tenter de sortir le Fury de sa léthargie… ou le détruire. Quitte à tout prendre, c’est toujours mieux que de laisser le Mechanicus Noir mettre ses sales pinces sur une machine de destruction de la taille d’un immeuble. Cherchant à jauger de l’humeur de l’esprit de la machine, Calliope se branche le cortex au premier port USB venu, mais n’arrive pas à voir autre chose qu’un Titan qui arpente des random champs de bataille en hurlant à tue-tête. Assez logique quand son prénom est Fury, vous me direz.

Un peu plus haut dans les étages, la Magos et son garde du corps tombent sur un Enfant du Chaos, qu’ils devinent être les restes fusionnés d’une partie de l’équipage. Un bref combat s’engage, au terme duquel la team bioniques vient à bout de la limace en rut. Jugeant inutile d’aller s’enquérir de l’état du Princeps et des ses Moderati, probablement tout aussi en forme que leurs petits camarades, Calliope décide que la meilleure chose à faire est de se rendre jusque dans l’Enginarium, où un diagnostic définitif du Fury pourra être réalisé (et une euthanasie mise en œuvre, si nécessaire).

En chemin, cette tête de linotte de Magos manque de pénétrer dans une salle piégée, ou son équivalent titanesque, et ne doit son salut qu’à l’intervention chevaleresque de Tyr 4-2, qui prend sa place au dernier moment et la pousse en dehors (me demandez pas comment c’est possible, j’ai fait ES au lycée, pas STI). Ce quiproquo permet à Collins de se débarrasser d’un nouveau personnage, Tyr tyrant sa révérence après que le caisson vitré dans lequel il s’est retrouvé enfermé se remplisse… d’un liquide très chaud. Je choisis de penser qu’il s’agit de fromage fondu, mais je vous laisse faire votre propre interprétation. Laissée seule aux commandes par la force des choses, Calliope décide qu’il n’est plus temps pour les demi-mesures et pénètre finalement dans l’Enginarium avec la ferme intention d’abréger les souffrances du Fury, et les siennes par la même occasion… mais le Titan n’est pas d’accord et refuse d’entrer en surchauffe, comme le lui a demandé.

Une héroïne organique aurait bêtement et stupidement pété un câble à la suite de cet échec (les héréteks sont en train de gratter à la porte de l’Enginarium à ce moment de l’histoire), mais la Magos Calliope est fait d’un autre bois, ou plutôt, métal. Elle se rebranche donc à l’esprit de la machine, et finit par crier plus fort que lui, jusqu’à le convaincre de coopérer pour empêcher les bad guys de remporter la partie. Ceci fait, elle relance le protocole de surchauffe du réacteur du Titan, et se paie même le luxe de corriger la horde de galapiats qui venait lui conter fleurette à grands coups de hache énergétique et de serpenta dans les augmétiques, jusqu’à ce que le Fury of Mars finisse par exploser. Victoire morale pour l’Omnimessie.

AVIS:

Pour sa première nouvelle pour la Black Library, Marc Collins s’attaque à un sujet casse-gu*ule s’il en est : l’Adeptus Mechanicus. Il n’est en effet pas facile de concilier le gloubi-boulga cryptotechnique qui se doit d’apparaître dans tous les récits où le protagoniste mange des Mars (askip) avec la clarté nécessaire à l’exposition convenable d’une intrigue digne de ce nom. Quelques auteurs de la BL sont arrivés à résoudre cette conjoncture du cercle, mais Collins n’en fait pas (encore) partie. On se retrouve donc avec une leeeeeeente exploration de l’intérieur d’un Titan Warlord corrompu, émaillé des pertes de personnages qui vont bien, de scènes d’action très classiques et de quelques passages en P.O.V. titanesque, idée intéressante de prime abord mais dont Collins ne fait rien de bien fifou (<JE SUIS PAS CONTEEEEEEEEEEENT :((( >). Le résultat n’est pas honteux, loin de là, mais il est très loin d’être enthousiasmant, et c’est tout de même problématique.

.

Last Flight – E. Albert :

INTRIGUE:

Last FlightLorsque le vaisseau amiral de la flotte chaotique (#ManoWar mon amour) sévissant sur la planète océanique de Sagaraya est forcé de voguer vers le Sud pour éviter une tempête qui pourrait lui être fatale, le haut commandement impérial n’hésite pas une seconde à envoyer une escadre de Maraudeurs torpiller cette cible stratégique. Le Commandant Baruch Neriah fait partie des heureux élus mis sur le coup, mais son enthousiasme est modéré par des considérations bien prosaïques lorsque le plan est révélé en salle de briefing. Le porte-avion chaotique se situe en effet à 7.000 kms de la flotte impériale, et un Maraudeur ne peut voler que 10.000 kms avant de tomber en rade de fuel. Si on fait les maths, cela signifie que les appareils loyalistes auront de bonnes chances de finir par le fond, et leurs équipages perdus en pleine mer avec l’espoir ténu d’être localisés par les auspex de la Navy.

Cela n’empêche bien sûr pas le Spirit of Ste Pascale1 et ses hommes de partir en mission, car tel est leur devoir. Après un vol d’approche pendant lequel l’épisode le plus dangereux fut la transe collective causée par la contemplation de l’infinie bleuté sagarayette, le brave petit Maraudeur arrive en vue de l’immensité métallique qu’est le porte-avion chaotique (pensez à une Arche Noire druchii, doublez la taille et vous aurez une bonne idée de la taille du bouzin), défendu par une nuée de chasseurs ainsi que par une flotte de vaisseaux trop contents d’intercepter les torpilles que l’escadre impériale destine à sa proie. Au terme de quelques acrobaties dont il a le secret, et grâce à l’héroïque sacrifice d’un autre Maraudeur kamikaze, Neriah parvient à loger sa torpille dans une voie d’eau de la coque du porte-avion, provoquant une explosion cataclysmique et le naufrage de ce dernier. Cette bonne chose étant faite, il est maintenant temps de rentrer au bercail…

…Comme prévu, cette partie de la mission ne se passe pas superbement. Amoché par les combats et victime d’un réservoir percé, le Spirit doit amerrir bien avant d’arriver en vue de la flotte, forçant l’équipage à troquer leur fier oiseau contre un bête canot pneumatique, équipé de deux rames et d’un transpondeur marchant sur piles. Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, les impériaux commencent à pagayer en direction du salut (et son fameux port), mais se font voir par une Valkyrie chaotique rendue SBF (Sans Base Fixe/Flottante) par le naufrage du porte-avion. Mauvais joueur, le pilote renégat descend au ras des flots pour abattre les impériaux à bout touchant, mais attire ce faisant l’attention d’un des grands carnassiers qui hantent les mers sagarayaises, et se fait gober sans sommation par le léviathan. Ce n’est toutefois pas la fin des ennuis pour Neriah et ses hommes, qui sont jetés par-dessus bord par la vague accompagnant la retombée du monstre marin. Ce dernier étant venu avec des potes, seul le Commandant finit par émerger, dans une situation encore pire que précédemment. Il faut cependant croire que l’Empereur existe et qu’il a apprécié le service rendu par Neriah, car le pilote fini par être localisé et récupéré par un appareil impérial, après qu’il ait dessiné une aquila avec le planton fluorescent qui vient s’égayer en surface durant les nuits sagarayiennes. Quelle poésie.

1 : Petite ref au Spirit of St Louis, l’avion utilisé par Lindbergh pour traverser l’Atlantique.

AVIS:

Edoardo Albert fait court mais efficace avec ‘Last Flight’, qui condense en quelques pages et à la sauce 40K la plupart des grands événements de la campagne pacifique de la 2nde Guerre Mondiale (à commencer par le raid Doolittle sur Tokyo). J’ai particulièrement apprécié que l’auteur n’ait pas cherché à nous survendre les phases de combats aériens1 – que je trouve assez incompréhensibles la plupart du temps – et se soit concentré sur « l’avant » et « l’après » du raid à proprement parler (une recette que Gav Thorpe avait aussi employée dans ‘Acceptable Losses’, une autre histoire de Maraudeurs). Cela permet de se familiariser avec les personnages avant qu’ils soient pris dans le feu de l’action (et meurent, la plupart du temps), et donne également un aperçu des dangers annexes d’une mission « océanique », à savoir la chance bien réelle de ne pas retrouver son point d’attache avant que les réservoirs ne soient vides, et les formes de vie peu sympathiques qui attendent les aviateurs en rade. Pas la plus 40K des nouvelles, j’en conviens, mais bien maîtrisée et donc plaisante à lire quoiqu’il en soit.

1 : Ce n’est à mon avis pas un hasard si je trouve les nouvelles de l’Aeronautica Imperialis qui mettent en scène des Maraudeurs (bombardiers) plutôt que des Thunderbolts (chasseurs) plus intéressantes à lire. Slow and steady win the race and the reader’s attention…

.

Night Shriekers – J. Woolley :

INTRIGUE:

Night ShriekersLe jour de gloire est arrivé pour les jeunes pilotes Marina Maranova et Alena Nazova. Après avoir brillamment fini leurs classes, elles vont rejoindre la 2.588ème escadre de combat de la Navy impériale, surnommée les Night Shriekers. Il ne s’agit pas une référence à un obscur film Terran du début du M3 (tristesse), mais un clin d’œil aux nocturnadons, une sorte de pterodactyles croisés avec des tarsiers, natifs de la planète de Raskova et plus grands prédateurs ailés de cette dernière. Depuis que l’Empire T’au a engagé une campagne d’annexion de Raskova quelques mois plus tôt, les forces impériales ont eu fort à faire pour repousser les infâmes peaux bleues, et les pertes ont été lourdes du côté de l’Aeronautica Imperialis. Cela n’empêche pas la commandante des Night Shriekers, Tamara Groneva, de faire tester toutes les nouvelles recrues par des pilotes expérimentées avant de les envoyer en mission. Par un heureux hasard, Marina et Alena sont sélectionnées par l’as des as Nina Yakleva pour faire leurs preuves lors du même exercice. Il s’agira pour chacune des recrues de seconder leur chaperon dans une simulation de deux contre deux, Marina et Nina étant opposées à Alena et Zina (une autre vétérane blanchie sous le harnais). Je vous promets que c’est tout pour les noms slaves pour cette nouvelle.

Ce qui n’aurait dû être qu’une innocente simulation prend cependant un tour détestable lorsque Marina décide d’ignorer les instructions de Nina lors de leur opération conjointe, et d’y aller au talent comme on dit par chez nous. La Lieutenant ne goûte que moyennement à l’insubordination de cette arrogante rookie et met immédiatement fin à l’exercice, mais la franche remontrance à laquelle Marina pouvait s’attendre une fois revenue à terre est remise à plus tard lorsque quelques Barracudas T’au décident de violer l’espace aérien impérial, et de prendre en chasse les quatre Thunderbolts. Surprises et surclassées par la technologie Xenos, les Night Shriekers sont contraintes de coopérer pour se sortir de ce guêpier, mais avec des résultats peu probants : Zina se fait incinérer dans l’explosion de son appareil, et Alena doit s’éjecter en catastrophe au-dessus du no man’s land après que le sien ait été endommagé par les chasseurs ennemis. Etant un peu responsable de ces deux tragédies à cause de sa tendance à vouloir prendre des shoots sans trop réfléchir, Marina est submergée par le remord après son retour à la base, mais Nina lui remet les idées en place d’une bonne baffe amicale #Sororité. C’est comme ça que le métier rentre.

Malgré l’annulation de la mission de secours d’Alena par un Colonel de la Garde Impériale trop pusillanime pour son propre bien, nos héroïnes ne sont pas du genre à se laisser abattre, ni à laisser des pilotes abattues à la merci de l’ennemi. Avec la complicité de Groneva, Marina et Nina profitent donc d’une enlèvement envahissement pour dérober une Valkyrie à leurs petits copains de la Garde et partir récupérer Alena sous le couvert de la nuit.

Pour ne rien arranger, cette dégourdie d’Alena a trouvé le moyen d’atterrir dans une zone de combats entre T’au et impériaux, ce qui oblige vite Nina à démontrer l’étendue de son talent de pilote. Malgré une rencontre tendue avec une escouade d’Exo-Armures Stealth (et son armement à plasma), les trois Banshees parviennent à rentrer à bon port – avec une jambe en moins pour Alena, cependant – et se paient même le luxe de secourir les forces impériales d’un largage de missiles Hellstrike bien senti. Bien évidemment, des sanctions disciplinaires sont prises à leur encontre, mais six semaines plus tard, Marina et Nina sont de nouveau prêtes à voler pour la plus grande gloire de l’Imperium. Take my breath awaaaaaaayyyyy…

AVIS:

Justin Woolley livre une nouvelle de pilotes de l’Aeronautica Imperialis très honnête, et plutôt crédible dans sa mise en scène des combats aériens (en plus de nous donner du Thunderbolt et de la Valkyrie) avec ce ‘Night Shriekers’. Malheureusement pour lui, je trouve ce genre de soumissions particulièrement insipide, et notre homme n’est pas assez bon conteur pour me faire changer d’avis. Si c’est votre came, allez-y les yeux fermés (ou peut-être pas, c’est dur de lire comme ça), mais c’est un « bof » sans appel de mon côté.

.

The Shapers of Scars – M. Collins :

INTRIGUE:

The Shapers of ScarsDans l’infirmerie du Wyrmslayer Queen, la Reine Guerrière de Fenris (surtout) et Capitaine Libre Marchand (un peu) Katla Helvintr passe un sale moment. Ayant fait l’erreur de tendre l’autre joue dans un concours de crachat d’acide, notre héroïne donne du fil à retordre et des points de suture à poser à son équipe médicale, qui s’affaire pour sauver ce qui peut l’être de sa carnation délicate et de sa chevelure luxuriante. La situation est tellement grave que la vieille Bodil (à ne pas confondre avec sa sœur, Bursul), gothi fenrissienne tout ce qu’il y a de moins scientifique, a été appelée à la rescousse. Entre deux jets de runes en os (non désinfectées, j’en suis sûr) et prophéties mystiques sur le destin de Katla, qui finira soit dévorée par les Tyranides, soit étranglée par un ver de terre – c’est écrit –, Bodil trouve le temps de sortir son matériel de tatouage et commence à gribouiller sur le visage de sa Jarl, soit disant pour lui donner la force de vaincre le mal qui la hante, mais plus sûrement pour se venger de la dernière demande d’augmentation refusée par cette pingre de Katla. On se console comme on peut.

Pendant que la Tin-Tin du 41ème millénaire dessine des élans sur le front de sa patiente, nous remontons le temps pour comprendre comment cette dernière s’est retrouvée dans cette position peu enviable. La série de flashbacks que Marc Collins intègre dans son récit nous permet de suivre Katla dans ses œuvres, qui consistent principalement à sillonner le vide à la recherche d’adversaires de valeur à combattre. Drôle d’activité pour un Libre Marchand, mais après tout, certains tiennent visiblement à jouir de leur liberté plus que de leurs marchandises, et comme ils ont un mot d’excuse signé par Pépé en personne, nous ne sommes pas en droit de leur demander des comptes sur l’usage qu’ils font des ressources de l’Imperium. La cible du Wyrmslayer Queen se trouve être un vaisseau tyranide esseulé par la dispersion de sa flotte ruche, mais que sa soudaine solitude ne dissuade pas le moins du monde d’attaquer son traqueur bil(l)e en tête. Bien aidée par le désir manifeste et palpable de la Jarl de Fenris de régler l’affaire au corps à corps plutôt que par salves de missiles interposées, la bioconstruction Xenos arrive à portée de tentacules, et envoie quelques nuées de cafards enragés à l’abordage de son tourmenteur. Voilà une situation bien engagée et tout à fait optimale pour les impériaux, comme chacun peut en juger.

Short story shorter, Katla emmène sa bande joyeux huscarls à la rencontre de l’infestation tyranide qui s’oublie sur la moquette du troisième pont, et finit par croiser le fer avec un Prince particulièrement caustique et affligé d’un gros problème d’acné. À trop faire la maline avec ses hachettes viking, elle finit par percer le bouton de trop, et se fait asperger d’un acide autrement plus corsé que celui qu’elle a pris avant de se ruer à la bataille. Cela ne l’empêche pas de finir l’impudente bestiole proprement avant de faire une petite pause coma bien méritée, et la suite nous est connue. L’histoire se termine par le réveil de Katla, qui trouve le tatouage tribal que la fidèle Bodil lui a fait sur la moitié de la tronche méchamment bath. C’est ce qui s’appelle faire contre mauvais profil bon cœur.

AVIS:

Petite histoire très simple (j’aurais pu résumer le propos en trois phrases sans omettre grand-chose d’important) au nom très compliqué, ce ‘The Shapers of Scars’ intrigue et déçoit à égales mesures. Pour commencer par les reproches, je me désespère de lire encore des affrontements spatiaux complètement stupides car physiquement abscons après 30 ans de publications 40K. Ici, nous rencontrons le cas d’école de l’auteur n’ayant pas intégré qu’une bataille spatiale se déroule à une échelle de centaines de milliers de kilomètres, et pas à portée de jet de chaussure (ou ici, de tentacules pour les Tyranides et de harpons pour les impériaux1), ce qui est à mon avis un héritage néfaste des derniers Star Wars. Reconnaissons au moins à Collins d’avoir de la suite dans les idées, car mettre en scène une héroïne tellement obnubilée par le pugilat qu’elle abandonne son rôle de commandante en pleine bataille pour aller jeter des javelots à la gu*ule de pauvres Gaunts dans les coursives de son propre navire, accompagnés d’hommes de main équipés comme des Burgondes du haut Moyen Âge, est d’une originalité rafraichissante par rapport au reste du corpus de la Black Library. Il faut de tout pour faire un Imperium, même des Fenrissiens bas du front et des auteurs en roue libre.

Si on est d’humeur plus charitable, on peut s’interroger sur les raisons qui ont poussées Collins à être si spécifique dans le choix de ses protagonistes, la rencontre entre « cultures » Rogue Trader et Space Wolves dans une nouvelle de quelques pages ne se justifiant à mes yeux que si ‘The Shapers of Scars’ est le prélude à une œuvre plus conséquente. Certains auteurs de la BL, Dan Abnett et Aaron Dembski Bowden en tête, ont déjà prouvé qu’il était possible de réaliser des fusions plus improbables que celle-là de façon convaincante, et au final à donner plus de substance et de saveur au gigantesque patchwork socio-culturo-politique qu’est l’Imperium. Il se pourrait donc que nous recroisions Katla Helvintr et la bonne Bodil dans un futur proche, hypothèse d’autant plus plausible que Marc Collins est toujours dans l’attente d’un premier roman pour la BL, et que les créneaux Rogue Trader et Space Wolves ne sont pris par personne en ce moment. Faîtes vos jeux.

1 : Imaginez un peu la longueur, donc la place et le poids, de la chaîne nécessaire pour qu’une telle arme puisse « ferrer » une cible et la ramener à bon port. Déjà que sur un Titan, c’est limite, mais sur une frégate…

.

***

Et voilà qui conclue cette revue de Only War, anthologie certes copieuse et ne manquant pas de nouvelles intéressantes, mais à mon sens trop desservie par le manque de contextualisation apportée par les éditeurs de la Black Library (et l’Empereur sait que certaines histoires auraient méritées qu’on précise qu’elles s’inscrivent dans un arc plus large) pour être pleinement satisfaisante. J’ai trouvé le recueil Conquest Unbound, sorti au même moment pour AoS, beaucoup plus abouti dans son approche éditoriale (et légèrement supérieur en termes de qualité moyenne), et la comparaison avec le dernier des Inferno!, au contenu 100% 40K, n’est pas non plus en faveur d’Only War. Ce recueil reste toutefois d’un rapport quantité-prix quasiment imbattable, et fera la joie des vétérans de la BL à l’affût de bonnes affaires pour garder le fil des derniers développements apportés à la franchise en matière de courts formats, mais il y a fort à parier que sa lecture fasse lever quelques sourcils chez les nouveaux-venus, et c’est fort dommage.

BLACK LIBRARY 2021 ADVENT CALENDAR [40K – HH – AoS]

Bonjour et bienvenue dans cette revue du 2021 Advent Calendar de la Black Library, réalisée avec un an de retard (ce qui explique pourquoi j’ai dû réaliser ma propre illustration, « l’officielle » ayant été retirée de la circulation depuis plusieurs mois), mais mieux vaut tard que jamais I guess. Profitant de la sortie du calendrier de l’Avent de 2022 (couvert ici), je me suis dit qu’il serait approprié de faire d’une pierre deux coups, et comme la BL a choisi de conserver le format « une nouvelle tous les deux jours », la combinaison de ces deux années permet d’obtenir les 24 histoires nécessaires à un véritable calendrier de l’Avent. Elle est pas belle la vie?Black Library 2021 Advent Calendar

Pot-pourri de nouvelles tirées des trois franchises majeures de la GW-Fiction, avec une saveur 40K plus fortement marquée (5 nouvelles, contre 4 pour Age of Sigmar et 3 pour l’Hérésie d’Horus), la sélection 2021 ratisse large. Au niveau des personnages notables que nous allons rencontrer dans les histoires ci-dessous, on peut noter la présence de vrais poids lourds du lore, comme Ghazghkull et Eidolon, ainsi que de personnages plus niches ou récents (Yndrasta, Cado Ezechiar, Augusta Santorus, Lazarus)1. Le même constat s’impose en ce qui concerne les auteurs réunis par la Black Library: à côté de valeurs sûres du calibre de C. L. Werner, John French et Guy Haley, on retrouve des figures déjà bien connues du lecteur régulier (Mike Brooks, Nate Crowley, Danie Ware), ainsi que des contributeurs faisant leurs premiers pas dans la carrière (Chris Forrester, Michael F. Haspil). Un joyeux mélange d’univers, de factions, de perspectives et de styles, pour résumer. Un beau « cadeau » (c’est tout de même pas gratuit, voire franchement cher) que nous a fait la BL? Voyons cela de plus près.

1 : On remarque d’ailleurs sur les couvertures des nouvelles que toutes sont explicitement liées à un personnage nommé (pas forcément très connu). Une sorte de Character Week à la sauce de Noël, en quelque sorte.

Black Library 2021 Advent Calendar

.

Road Rage – M. Brooks [40K] :

INTRIGUE:

Road RageNous retrouvons Ufthak Blackhawk, le Boss Ork le plus kool de ce côté-ci de la galaxie, après les événements couverts dans ‘Brutal Kunin’. Désormais lieutenant de Da Meklord, Ufthak est promis à un brillant avenir et gère sa propre bande de Boyz, mais les choses se compliquent lorsque son autorité est contestée par un Speed Freek du nom de Riptoof. Ce dernier reproche au Boss 1) de lui avoir piqué son dragsta pour réaliser la cascade qui l’a fait rentrer dans les annales1 (et ne pas lui avoir rendu après ça), mais surtout 2) de ne pas avoir trouvé une baston digne de ce nom pour occuper les troupes. La Tekwaaagh ! a en effet fait escale sur un monde Exodite, et massacré les Eldars et leurs diplodocus de compagnies en quelques jours. Depuis, c’est l’ennui. Jugeant Ufthak inapte au commandement, Riptoof le défie à la course (mécanisée, bien sûr), et notre héros est assez malin pour comprendre qu’il est dans son intérêt de jouer le jeu, étant entendu que « simplement » tabasser son rival ne lui fera pas gagner de points auprès des autres Speed Freeks qui forment le gros de sa bande.

Ne disposant que d’une journée pour se trouver une bécane digne de ce nom, Ufthak rend visite à son vieux complice, le Mek Da Boffin (toujours monté sur son solo wheel, comme la vraie légende qu’il est), qui lui promet un véhicule pour le lendemain. Et le brikolork tient parole, livrant un beau trukk (avec jantes alliage et roquettes de propulsion) à son Boss, alors que Riptoof concourt dans un nouveau dragsta kustom. L’épreuve consiste en un simple tour du pâté de maison, ou l’équivalent pour des Orks sur un monde vierge, le premier à revenir au bercail remportant la victoire. Lorsque le départ est donné, une dizaine de concurrents s’élance dans un concert de rugissements, Ufthak étant accompagne de son Daniel Elena personnel (le fidèle Mogrot Redtoof), mais également, et ce n’était pas prévu, par le tout aussi fidèle Grot Nizqwik, et le plus fidèle de tous, le Squig Princesse. C’est ça d’être un manager populaire.

Ce qui était encore moins prévu, c’est qu’une partie de chasse Drukhari fasse son apparition en milieu de parcours, et décide de se joindre à la course. Ne supportant pas le manque de respect des Eldars, qui commencent à drifter entre les buggies et les trukks Orks au lieu de simplement leur tirer dessus, Ufthak voit rouge et ouvre le feu sur les malotrus, déclenchant une bataille inter-espèce à 150 kilomètres/heure2. Le destin faisant bien les choses, notre héros se retrouve face au commandant adverse pour un duel au sommet (pendant ce temps-là, c’est Mogrot qui tient le manche), et bien qu’il en perde la main, Ufthak corrige son vis à vis avec l’aide providentielle et plongeante de Princesse, qui coûte un bras au leader Eldar Noir.

La ligne d’arrivée se rapprochant à vue d’œil, Ufthak a la clairvoyance d’utiliser le décor comme tremplin et les roquettes montées par Da Boffin comme booster, pour réaliser un saut qui réduit en compression de César le dernier Raider drukhari, et lui permet surtout de chiper la première place à Riptoof. Verstappen n’a plus qu’à bien se tenir ! Un bonheur n’arrivant jamais seul, la nouvelle se termine sur l’arrivée dans le camp Ork du reste de l’armée des Eldars Noirs, ce qui promet aux Boys désœuvrés une belle bagarre pour se remettre en jambe. Il faut savoir profiter des petits plaisirs de la vie.

1 : Détruire un Titan impérial au corps à corps.
2 : Il le fait en hurlant du Radiorkhead, ce qui est une raison supplémentaire de l’aimer.

AVIS:

Franche réussite que ce ‘Road Rage’ pour Mike Brooks, qui réussit le doublé que tous les auteurs d’œuvres feuilletonnées poursuivent : satisfaire à la fois les lecteurs familiers de la série (ici en prenant soin de faire apparaître presque tous les personnages secondaires de ‘Brutal Kunin’’) et ceux qui n’en ont rien lu avant cette nouvelle (en prenant bien soin de présenter les événements importants des épisodes précédents). Ca a l’air simple sur le papier, mais tout le monde n’y arrive pas, loin de là.

Ajoutons à cela que Brooks est très à l’aise dans l’écriture, là aussi faussement simple, de la littérature ork. On pourrait croire qu’il suffit d’écrire de manière outrageusement simplifiée pour donner le change, mais cela n’est pas suffisant : pour rester compréhensible, il faut au contraire faire attention aux tournures phonétiques utilisées, au point que je suis persuadé qu’il est plus long d’écrire en ork qu’en anglais (ou français) classique. Mike Brooks infuse également le reste de sa nouvelle de tournures et réflexions drolatiquement absurdes, ce qui change agréablement du grimdark auquel les œuvres de GW-Fiction nous ont habitué. Encore plus réussi que ‘Where Dere’s Da Warp Dere’s A Way’ (sauf pour le titre, évidemment), c’est dire !

.

The Wolf and the Rat – C. L. Werner [AoS] :

INTRIGUE:

The Wolf and the RatScandale à la cour de Radukar le Loup, sanguinaire car vampirique maître de la cité d’Ulfenkarn, en Shyish. Une précieuse relique a été dérobée dans la crypte où elle sommeillait depuis des lustres, plongeant notre atrabilaire héros dans une colère noire (logique) : on lui a volé son doudou !!! Ah, on me dit dans l’oreillette qu’il s’agit en fait de la pelisse du vampire qui lui donné le Baiser de Sang, ce qui est un peu plus classe, mais beaucoup moins drôle, que ma version des faits. Je m’incline de bonne grâce et reprends le cours de mon récit.

On apprend rapidement que le crime à peine commis est déjà revendiqué par une coterie de suceurs de sang ne goûtant pas au règne sans partage de Radukar sur son fief, et souhaitant, d’après les mots bredouillants de leur émissaire, le froussard Valac Chrobak, seulement remettre au goût du jour le conseil municipal, où Loulou aurait bien sûr un siège. Le messager ayant raté son test de charisme de façon critique, il est expédié dans la post non-vie par les gardes du corps Ogors de Radukar, qui décide de prendre les choses en main. Sachant que les ravisseurs de courtepointe lui ont donné rendez-vous dans le quartier des docks pour procéder à l’échange, il en prend le chemin sans tarder, confiant dans le fait que sa Sénéchale, l’ex-pirate tournée vampiresse (vive les reconversions professionnelles, franchement) Natasyia, sécurisera discrètement le périmètre avec les squelettes de la garde municipale, au cas où l’affaire s’envenimerait.

Sur place, il retrouve une vieille et funeste connaissance, le Prince des Rats Kritza, un noble dévoyé (vampire lui aussi, évidemment) qui a pris la tête de la cabale lupophobe après que Radukar l’ait laissé pour mort suite à un petit accrochage autour de la machine à café. Kritza et son corps de lâche ne sont évidemment pas venus seuls : une petite bande de petites frappes à canines pointues a fait le déplacement, afin d’équilibrer un peu les choses entre Rad’ the Chad et Kritza le Rat. Sans surprise, l’entrevue se passe moyennement, chacun campant sur ses positions, jusqu’à ce que Natasyia arrive avec les renforts promis pour précipiter la résolution du litige…

Début spoiler 1…Seulement, cette fourbe de flibustière repentie jouait en fait du côté de Kritza. C’est d’ailleurs elle qui a dérobé la peau du père de Radukar, et l’a remise aux conjurés. Les griefs de Nat’ sont simples : elle en veut à son boss de ne lui avoir pas dit qu’être un vampire créait un grand vide spirituel, ce qui était pourtant assez facile à prévoir en réfléchissant deux secondes au concept de non-vie. Heureusement qu’il n’y a pas de termes et conditions dans les Royaumes Mortels, ce serait un véritable carnage. Quoiqu’il en soit, Radukar se retrouve finalement isolé et encerclé au milieu des épaves pourries (je ne parle pas des vampires) du port, ce qui n’est pas une situation enviable. Le plan de Kritza est simple : mettre le feu à l’une d’entre elles et faire pousser le seigneur d’Ulfenkarn dans le brasier par le cordon de sécurité squelettique rameuté par Natasyia. Aussitôt dit, aussitôt fait. A moins que…

Début spoiler 2…A moins que ce rusé de Radukar ait flairé la combine à des kilomètre grâce à sa truffe de loup, et ait pris des mesures de contingence pour piéger les piégeurs. Il désactive ainsi les squelettes d’une simple commande vocale1, et fait signe à ses fidèles Ogors zombies de sortir des coulisses avec leurs pieux de fonction pour châtier les trublions. Ce retournement de situation pousse la clique de Kritza à tenter de rusher Radukar, avec des résultats… médiocres. Un peu plus réfléchie, Natasyia se saisit de la pelisse convoitée par son ex-patron, et fait mine de la jeter dans les flammes de l’épave s’il ne la laisse pas partir. Manque de bol, en tant que « fille » de Radukar, elle découvre bientôt que braver la volonté paternelle n’est pas une sinécure, et finit par apporter gentiment la fourrure au brasier, et elle avec par la même occasion, lorsque le pater familias lui ordonne. Reste Kritza, qui en tant que personnage nommé avec une figurine dispose d’une sauvegarde invulnérable en sigmarite, et se tire donc d’affaire avec son special move, l’effervescence murine. La nouvelle se termine sur ce tableau théâtral, Radukar jurant sur ses grands morts d’éradiquer la menace surmulote sans aucune merci. Prend des notes, Anne Hidalgo.Fin spoiler

1 : J’imagine que chacun squelette avait une dent bleue au fond de la mâchoire.

AVIS:

Nouvelle d’accompagnement du livre qu’il a consacré à la dynastie Vyrkos (‘Cursed City’), qui n’était lui-même qu’un produit dérivé de la boîte de jeu éponyme, ‘The Wolf and the Rat’ sent franchement le réchauffé. Les fortes contraintes scénaristiques avec lesquelles il a dû composer pour écrire cette nouvelle, dont tous les personnages nommés devaient réchapper, ont amené le vétéran Werner à nous servir de la soupe littéraire, qui n’intéressera à la rigueur que les lecteurs souhaitant creuser le lore d’Ulfenkarn, bourgade mineure de Shyish et bac(kground) à sable patenté. Mêmes les surprises que l’auteur souhaitait ménager en guise de twists finaux tombent à plat, faute d’alternatives crédibles à l’inénarrable trahison-du-bras-droit-secrètement-insatisfait, contrée aussi sec par la toute aussi fameuse prévoyance-de-vieux-briscard-qui-ne-faisait-que-donner-le-change-mais-qui-avait-tout-pigé-depuis-longtemps. C. L. Werner fait généralement beaucoup mieux quand on le laisse s’amuser avec des ratons, et on peut donc classer cette nouvelle parmi ses moins réussies pour le compte d’Age of Sigmar.

.

Eater of Dreams – M. Collins [HH] :

INTRIGUE:

Eater of DreamsPour ceux qui se demandaient ce qui était arrivé à ce vieil associal de Fel Zharost, ex-Archiviste en chef des Night Lords réfugié dans les bas-fonds d’Albia après avoir quiet quitted sa Légion lorsque cette dernière s’est mise à faire vraiment n’importe quoi (et pour dégoûter un Anglais, il faut le faire), l’attente se termine aujourd’hui. Emmené par le Chevalier Errant qui l’avait retrouvé dans les bas-fonds Terran jusque dans les appartements du Sigilite, le Psyker albinos découvre avec effroi que le Régent de Terra a recours aux cantrips les plus cringe du monde pour impressionner son monde. Ah là là, ces vieux qui veulent faire jeunes alors, quelle plaie. Maîtrisant sa révulsion, Zharost prête l’oreille à la proposition d’embauche formulée par Malcador, qui offre au Night Lord retraité d’aller régler ses comptes avec un autre Archiviste de la VIIIème, le dénommé Vathras Kell, dont il connaît la localisation exacte car, voyons, le vieux Mac’ a plus d’un tour dans son sac. Réalisant sans nul doute qu’un refus poli mais ferme ne mènerait à rien d’autre qu’un bolt entre les yeux, Zharost accepte, et est intégré sans plus de cérémonies parmi les Chevaliers Errants.

La confiance n’excluant pas le contrôle, le Sigilite prend soin de faire chaperonner sa nouvelle recrue par un Astartes de confiance, l’ex World Eater Macer Varren. Le newbie palichon et le vétéran barbu ne s’apprécient guère, mais cela ne les empêche pas de voyager sans trop d’anicroches jusqu’au monde de Malec’Nar, autour duquel flottent les débris de vaisseaux Night Lords. Cette planète insignifiante, conquise au début de la Grande Croisade et laissée à baigner dans son jus par la suite, a été prise par les forces du Maître de Guerre et corrompue à un tel point qu’elle résonne d’un cri psychique permanent, ce qui est assez pénible pour un Zharost qui peut maintenant réutiliser ses pouvoirs occultes. Si Malcador a envoyé le duo de choc sur ce plan foireux, c’est que c’est Kell qui est derrière la damnation de Malec’Nar. Après avoir expédié ad patres quelques locaux transformés en réceptacles Warp par les bons soins des sorciers Night Lords, Zharost et Varren se confrontent à la Némésis du premier. On apprend à cette occasion que le mauvais sang entre les deux Psykers remonte à l’époque où Zharost a commencé à douter du leadership de Konrad Curze, au contraire de son protégé (également issu des bas-fonds d’Albia) Kell. Ce dernier n’a jamais pardonné à son tuteur d’avoir déserté la Légion – faut dire que Sevatar ne lui avait pas trop laissé le choix – car cela n’a fait que précariser encore davantage la situation des Psykers Night Lords. Il est donc temps de vider cette vieille querelle.

Pendant que Varren se tape l’entourage de Kell, avec des résultats plus ou moins probants, les deux Archivistes engagent un combat autrement moins prosaïque que celui mené par cette brute de World Eater. Au bout du compte et de quelques visions du passé revisitées à la sauce prophétique (dont le grand classique : la destruction de Nostramo), Zharost fait respecter la hiérarchie et parler son ancienneté, et broie le crâne de son pupille à main nue grâce à ses super pouvoirs. Varren ayant déjà été booké sur Terra par Swallow dans le futur (‘The Buried Dagger’), il survit également et très logiquement à cette mini bataille, et les deux compères en sont quittes pour repartir vers Terra pour recevoir une nouvelle mission de la part de Malcador. La routine habituelle, quoi.

AVIS:

Si le titre de cette nouvelle vendait du rêve (mouahaha), son contenu se révèle malheureusement assez peu intéressant. On ne retrouve en effet dans ces quelques pages aucune information sur les cauchemars récurrents qui tourmentent Konrad Curze, et la manière originale dont il parvenait à réguler ses humeurs mutines, sujets que l’indispensable Aaron Dembski-Bowden avait introduit dans le fluff avec brio dans ses propres travaux (‘Prince of Crows’) il y a quelques années. Le Fel Zharost dont nous héritons ici n’est plus qu’un Archiviste tout à fait banal, embarqué dans une vendetta personnelle contre un ennemi créé de toute pièce par Collins, et secondé dans sa mission par un personnage protégé par une armure en scenarium brossé. On peut comprendre qu’un contributeur novice à l’Hérésie d’Horus comme Marc Collins ait cherché à calquer ses premiers pas dans ceux de Seigneurs de Terra, en prenant la suite du ‘Child of Night’ de John French, mais j’aurais apprécié qu’il vienne boucler un arc narratif, même mineur, plutôt que de dérouler une sous-sous-sous-péripétie totalement gratuite comme il le fait ici. On peut faire l’impasse sans problème.

.

The Moon Mines of Sciara Lone – D. Ware [40K] :

INTRIGUE:

The Moon Mines of Sciara LoneUn joint de culasse fendu force l’escouade de Sœurs de Bataille où sert cette bonne vieille jeune Augusta Santorus à évacuer en urgence le vaisseau qui les ramenait vers Ophelia VII. Coup de chance, la planète où le Heart of Devotion finit par s’écraser possède un satellite, et la flottille de capsules de sauvetage où les quelques survivants de l’accident ont trouvé refuge se pose bientôt à la surface de la lune de Sciara Lone. Accueillies par le Gouverneur Ido en personne, les sœurettes demandent à avoir accès à la chapelle et à l’Astropathe locaux, pendant que leurs vaisseaux sont révisés et leurs accompagnants envoyés à l’hospice pour récupérer. Si l’attitude serviable et débonnaire d’Ido semble mettre immédiatement la revêche Sœur Supérieure Veradis de mauvais poil (en même temps, c’est son état normal), c’est plutôt l’étonnement qui l’emporte du côté d’Augusta (et de sa pote Lucienne). Elle n’arrive en effet pas à croire que des colonies minières de 10.000 habitants puissent exister dans l’Imperium. Ses études ne l’avaient absolument pas préparé à ça, en tout cas, ce qui en dit long sur la qualité de l’enseignement que les novices de l’Ordre de la Rose Sanglante doivent recevoir, moi je dis.   

L’ébahissement se change cependant rapidement en désarroi et en colère lorsque la fine équipe arrive à la chapelle, et se rend compte que cette dernière a été abandonnée depuis des lustres. Ce n’est toutefois pas une raison de ne pas rendre grâce à Pépé de ses bienfaits, et une fois la prière achevée, Veradis disperse ses ouailles à travers la colonie. Pendant qu’elle ira envoyer un compte rendu des derniers événements à l’Ordre, Augusta et Lucienne devront retourner au spatioport et garder un œil sur les navettes. Juste au cas où bien sûr. Notre héroïne sent bien que quelque chose préoccupe sa supérieure, mais comme on ne lui a pas donné le droit de poser des questions aujourd’hui, elle se contente d’obéir sans chercher à en savoir plus. « Béni soit l’esprit trop étroit…», toussa toussa…

Bien évidemment, les choses se compliquent rapidement une fois rendu sur place, le personnel du spatioport ne se montrant pas très coopératif malgré les cris stridents et les froncements de sourcil auxquels Augusta a recours pour tenter d’asseoir son autorité. Pire, les Sœurs se rendent compte qu’elles sont encerclées par leurs hôtes, ce qui n’augure rien de bon pour la suite. Avant que la distribution de bourre-pifs ne commence, Augusta a toutefois une révélation en contemplant un transport Aquila faire un créneau dans le lointain : le logo de l’Empereur est tout bonnement absent de tous les uniformes, bâtiments et véhicules de la colonie. Une preuve d’indépendance qui lui semble être encore plus grave qu’une simple hérésie, à tout prendre.

Cette incroyable révélation ayant été faite, la nouvelle passe en mode Smackdown, dans la plus pure tradition de la série. Augusta et Lucienne rossent bellement les nuées de goons qui tentent de les mobber, sans utiliser autre chose que leurs poings et leurs genoux énergisés (c’est beau jeu). A la conclusion d’une cascade osée, qui voit Augusta parvenir aux commandes d’un vaisseau bourré d’explosif menaçant d’ouvrir le feu sur le spatioport, avant de réaliser qu’elle ne sait absolument pas piloter ce genre d’appareil et le crasher en 10 secondes top chrono ; notre héroïne a la bonne idée de tomber dans les pommes, ce qui permet à Danie Ware de boucler son intrigue hors champ. A son réveil, Augusta apprend en effet de Veradis que le Gouverneur a été exécuté et que l’ordre règne désormais dans la colonie. Cette dernière, qui avait rejeté le règne bienveillant de l’Empereur pour miner du bitcoin de l’or et de l’argent et l’écouler sous le manteau, est désormais placée sous l’autorité de l’Ordre de la Rose Sanglante1. En attendant que l’intendance arrive et qu’elle se remette de ses émotions, Veradis donne à sa novice le soin de potasser le Traité de l’Epine pour rester au niveau pendant que le reste de l’escouade partira épurer les indigènes réfractaires. Merci qui ?

1 : Ça explique peut-être d’où vient la tendance d’Augusta à annexer des planètes (voir ‘Mercy’) par la suite de sa carrière.

AVIS:

The Moon Mines of Sciara Lone’ n’est pas l’épisode le plus désolant/distrayant de la série consacrée par Danie Ware à son héroïne fétiche, et se contente d’être assez quelconque tant sur le fond que sur la forme. S’il s’agit de votre première rencontre avec Augusta Santorus, nul doute que vous sortirez assez surpris de cette nouvelle, où on chante beaucoup, catche régulièrement, et où les personnages semblent en peine de prendre les décisions les plus évidentes (Veradis avait grillé depuis le début que quelque chose de louche se passait dans la colonie, mais a trouvé malin de ne pas prévenir le reste de son escouade). Mais si vous êtes un suiveur vétéran de l’Ordre de la Rose Sanglante, tout cela vous semblera bien ordinaire. A son crédit, je dois reconnaître à Ware que l’idée de mettre en scène une communauté humaine « indépendante » est intéressante, en partie parce que ce concept, qui n’est pourtant pas révolutionnaire pour un Imperium s’entendant à l’échelle galactique, n’a été jusque là que très rarement abordé dans la GW-Fiction. Avec seulement quelques pages à consacrer à ce sujet, et une maîtrise assez faible du lore, Danie Ware ne signe pas ici une nouvelle incontournable pour les amateurs de curiosités BLesques, mais démontre à tout le moins qu’elle est capable de sortir des tropes habituels que l’on retrouve à l’œuvre dans les nouvelles de 40K.

.

The Lost Karak – G. Haley [AoS] :

INTRIGUE:

The Lost KarakAmbiance orageuse sur l’Aelsling. Lorsque le Maître des Runes Kedren Grunnbor, deuxième mascotte du navire (après le familier mécanique de Flynt, Trokwi), insiste lourdement pour faire une halte sur îlot rocheux insignifiant perdu au milieu des Bancs Célestes Adromite, le capitaine Kharadron commence par refuser. La Longue Barbe ne s’avoue toutefois pas vaincue, et commence à grommeler si fort que même le blagueur Flynt comprend que l’affaire est sérieuse. Si sérieuse que Kedren va jusqu’à utiliser le mot magique pour amadouer le capitaine, extrême extrémité à laquelle peu de Duardin sont prêts à se rabaisser (même s’ils ne sont pas grands). Intrigué par l’opiniâtreté de son vieux complice, Flynt finit par capituler, à la condition de pouvoir accompagner Kedren dans son escapade en terre inconnue.

Après une ascension éreintante à travers la forêt vierge qui recouvre l’île, le petit groupe (Flynt, Kedren, l’Ogor Gord et quelques Kharadrons additionnels) arrivent devant l’entrée d’un ancien Karak, ce qui explique l’intérêt que le Maître des Runes porte à ce caillou autrement dépourvu d’ather-or, et pique celui de Flynt. Après tout, les Dépossédés ne le sont que parce qu’ils ont oublié de prendre leur magot avec eux pendant l’Âge du Chaos : leurs anciennes demeures ont de bonnes chances d’être pleines de loot… Il faudra cependant faire attention, le flair infaillible du khemiste qui accompagne les explorateurs (Otherek Zhurafon) a décelé le puissant et musqué bouquet du Troggoth dans les galeries souterraines empruntées par la petite troupe.

Et cela ne rate pas, en effet. Un Dankhold Troggoth squatte les niveaux inférieurs de la forteresse, et malgré l’absence de trêve hivernale en Chamon (un Royaume plutôt chaud il faut le dire), personne n’a eu le cœur, ou le courage, de le faire déguerpir. Le combat s’engage entre les courts sur patte et le grand dadais, la régénération de ce dernier posant rapidement de gros problème aux barbus. Il faudra finalement une combinaison de tir de mitraille du tromblon runique de Kedren, et une ingestion d’aether-bombe provoquée par un shoot habile de Flynt, pour que l’ennuyeuse bestiole consente à décéder de manière définitive. Ceci fait, il est temps d’une franche explication de texte entre le Maître des Runes et ses invités involontaires : pourquoi par Grugni tenait-il tant à se rendre sur place ?

La réponse est toute bête, surtout pour des Kharadrons : rendre hommage à ses ancêtres. C’est en effet toute la famille de Kedren qui est enterrée dans ces cavernes, et cela n’a pas de prix pour un traditionaliste tel que lui. S’il tenait à s’y rendre seul, malgré les dangers évidents, c’est qu’il craignait que ses copains capitalistes ne profitent de la visite pour s’en mettre plein les poches… Crainte non dénuée de fondements, comme le renflement suspect dans la besace de Flynt à la fin de l’histoire le laisse apparaître, mais dans l’ensemble, l’équipage de l’Aelsling se comporte dignement. Ils ne sont pas si insortables que ça, finalement.

AVIS:

Les différences entre les factions Duardin d’Age of Sigmar ont beau être très visibles quand on compare les figurines des différentes gammes, il n’est jamais inutile de se pencher également sur ce qui les sépare de manière invisible, c’est-à-dire leurs cultures, croyances et traditions. C’est la piste que Guy Haley explore dans ‘The Lost Karak’, qui montre à quel point Dépossédés et Kharadrons diffèrent en matière de philosophie, mais aussi, et c’est intéressant, qu’ils restent liés par des valeurs communes. Sur cette idée simple mais riche, Haley ajoute un soupçon d’humour (sa marque de fabrique pour sa série arkanaute), un bon fond de fluff et un enrobage d’action, pour un résultat tout à fait correct.

.

The Place of Pain and Healing – J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE:

The Place of Pain &amp; HealingComme vous le savez peut-être, la dernière incursion d’Abaddon & friends sur Cadia ne s’est pas super bien terminée pour la planète. Aux dernières nouvelles, elle serait tombée sur le sol de la galaxie, ce qui fait tout de même une sacrée chute. Minka Lesk, jeune Bouclier Blanc aux débuts de ce que nous appellerons pudiquement « les événements », peut témoigner des derniers moments difficiles de la population locale : évacuée en compagnie du Capitaine Kasrkin Rath Sturm avant la victoire du Chaos (voir ‘Cadia Stands’), elle passe les premiers moments du voyage sur le croiseur Space Wolves qui convoie les deux Cadiens à délirer dans son sommeil. Les souvenirs de la défense contre la 13ème Croisade Noire se mélangent avec d’autres, plus anciens, de son enfance et son entraînement à devenir une bonne petite soldate. On apprend aussi que Minka est une Katherinette (même si elle ne porte pas de chapeau).

Cette transe enfiévrée est interrompue par le médecin de garde du Fang of Fenris, qu’un serviable hilote Space Wolves va quérir en catastrophe après avoir été témoin de la tachycardie suspecte de Minka. Une petite injection de stimms et ça repart comme en 40,000, cependant. Après une brève période de confusion, notre héroïne échange deux mots avec son camarade d’infortune, puis part errer dans les couloirs désertés et ténébreux du croiseur pour se changer les idées. Elle tombe sur Skarp-Hedin, le Space Marine qui l’a ramenée dans sa besace énergétique au moment de quitter Cadia (comme quoi on peut avoir un mono sourcil et bon(s) cœur(s), et parvient au terme d’un dialogue aussi profond que virtuose, mais en tout cas cathartique, à se réconcilier avec l’idée de la perte de sa planète natale, de ses milliards de compatriotes, et du fier héritage d’inflexibilité des centaines de générations précédentes. Le tout en deux minutes top chrono. A ce niveau, on ne dit pas tourner la page, mais désapprendre à lire.

Skarp-Hedin, qui a senti que son vaisseau était entré dans le Warp, et plus certainement que la fin de la nouvelle était imminente (c’est fou comme les Space Wolves ont le nez fin), trouve une excuse bidon pour partir dans l’arrière-plan narratif à petites foulées – mais en continuant le dialogue avec Minka, car c’est un gentleman. Cette dernière repart pioncer dans sa cellule, et sous son matelas, il faut le préciser, l’odeur et le poids de sa paillasse lui rappelant les jours heureux où elle faisait la nouba dans les dortoirs des premières années. You do you, girl, you do you.

AVIS:

Nouvelle de transition entre ‘Cadia Stands’ et ‘Cadian Honour’, ‘The Place…’ ne me semble pas être une addition très intéressante à la saga de Minka Lesk (que je ne considère pas comme étant très intéressante non plus, je dois dire). On n’apprend en effet pas grand-chose de nouveau sur l’héroïne aux yeux violets, qui a eu l’enfance stricte et militarisée que tous les Cadiens ont eu (aaaaaah), et a été traumatisée par la violence des combats de la Croisade Noire (oooooh). Comme les trois personnages principaux (Lesk, Sturm et Skarp-Hedin) ont un charisme cumulé proche de celui d’une huître comptable, il est dur de sympathiser un tant soit peu avec leur peine et leur déchirement.  J’ajoute que Hill se montre particulièrement peu inspiré dans l’écriture des quelques dialogues de sa nouvelle, qui sont si vides et grotesques que leur simple lecture vous sort immédiatement de l’histoire. À laisser sur Cadia.  

.

Bloodhowl – C. Forrester [HH] :

INTRIGUE:

BloodhowlQue faire quand sa faction a pris une telle rouste qu’elle a été virtuellement annihilée et n’aura plus aucun impact sur la conclusion de l’Hérésie ? Plutôt que de demander conseil aux Légions Brisées ou aux Custodes, qui les ont précédés au panthéon de la lose glorieuse, les Space Wolves ont décidé de laver leur linge sale en et de famille au sortir de la campagne de Trisolian. Nous suivons donc le Jarl de la 13ème Compagnie (Dekk-Tra), Jorin Bloodhowl, alors qu’il emmène ses vétérans grisonnants et grommelants sur la planète de Bloodfall, après qu’un Leman Russ totalement déprimé lui ait donné la permission de s’absenter. Le but de l’escapade est de localiser un des lieutenants de Bloodhowl, Gunnar Thorolfsson, AWOL depuis l’incendie de Prospero. Le Jarl, qui espère toujours que la 6ème Légion pourra se rendre utile dans la défense de Terra, a en effet grand besoin de regonfler ses effectifs, et compte bien convaincre Thorolfsson et ses 200 loulous de regagner le bercail de Morkai, de gré ou de force.

L’explication de texte entre les frères d’armes devra toutefois attendre un peu, Bloodfall se trouvant être contestée par une bande de Night Lords en goguette, menée par le Prince de Bel Air du Perif1 en personne. Ce sinistre individu, qui avait déjà montré une sale tendance à la sociopathie et aux crimes contre l’humanité pendant la Grande Croisade, est devenu l’ennemi juré de Thorolfsson, qui a passé une bonne partie de son congé sabbatique à le pourchasser à travers la galaxie. Jugeant avec sagesse que s’il arrive à mettre la patte sur le Prince, il n’aura pas de mal à localiser son subalterne, Bloodhowl emmène donc ses hommes à l’assaut des positions Night Lords… et réalise assez rapidement que Booba (a.k.a. le Duc de Boulogne) est grave chaud avec son sabre énergétique. Largement surclassé par son adversaire, il ne doit sa survie qu’à l’intervention opportune de Thorolfsson, qui envoie un tir de plasma dans le buffet de son Altesse Noctilienne, et permet à Bloodhowl de remporter son « duel ».

Ayant contraint les Night Lords à se replier, les Space Wolves sont enfin libres de palabrer entre gens de bonne compagnie. Le ton de la discussion monte assez vite, Thorolfsson refusant tout net de retourner se battre contre les hérétiques menaçant Terra, comme lui demande Bloodhowl, arguant que ses hommes et lui sont plus utiles aux péquins moyens de l’Imperium dans leur défense des planètes laissées à la merci des Légions renégates du fait de leur peu d’importance stratégique. Le Jarl n’est pas de cet avis, et rappelle à son subalterne et objecteur de conscience qu’il a prêté serment à Russ et à l’Empereur, et qu’il ne lui appartient pas de choisir les combats qui lui semblent être les plus nobles. Aucun des deux tribuns n’arrivant à convaincre son vis-à-vis, on se résout à régler la situation par un duel à mort, comme le veut la tradition.

Bloodhowl, bien amoché par son combat contre le Prince du Périf, refuse de se faire représenter par un champion, et se fait donc fort logiquement mettre en KO technique par son adversaire. Thorolfsson, beau joueur, laisse toutefois la vie sauve à son adversaire, prétextant qu’obéir aveuglement aux traditions est aussi néfaste qu’obéir aveuglement aux ordres (quel esprit libre, vraiment). Il en veut pour exemple l’incendie de Prospero, commis par les Space Wolves sur l’ordre d’un Horus qui avait déjà basculé du côté sombre, et qui aurait pu être évité si la 6ème Légion n’avait pas bêtement obéi au Maître de Guerre. « Hmm maintenant que tu le dis, ça a pas l’air débile » répond Bloodhowl du haut de son ultime PV, avant de repartir la queue entre les jambes. Moralité : Jorin est nul au close.

1 : Sans rire, le gus s’appelle ‘The Prince of the City’s Edge’ en V.O. Ma traduction est tout à fait legit.

AVIS:

Chris Forrester réalise un début sans faute dans l’Hérésie d’Horus avec ce ‘Bloodhowl’, mélange de Space Marinade d’action bien dosée et de réflexion sur la culture et l’histoire des Space Wolves pendant leur heure de doute (juste après les événements de ‘Wolfsbane’). Un travail soigné et bien documenté, puisqu’on y trouve des références à la campagne de Dulan ainsi qu’à celle de Prospero, pourtant couvertes par d’autres auteurs (respectivement Chris Wraight et Dan Abnett), et des personnages tirés de ces vénérables écrits (Ulbrandr Crowhame, Hjalmar Stormfist, sans oublier ce vieux Bulveye). Mon seul regret fut de constater l’absence totale de conséquence de ‘Bloodhowl’ sur la suite de l’Hérésie, Jorin Bloodhowl et ses loyalistes premier degré repartant écluser du mjød avec Leman Russ, tandis que Gunnar Thorolfsson et ses loyalistes rebelles restent s’occuper du cheptel de Bloodfall. Comme Thorolfsson était une création de Forrester, et ne disposait donc pas d’une armure en scenarium1, on aurait pu s’attendre à une conclusion un peu plus tranchante et tranchée. Maintenant qu’il a prouvé qu’il avait les bases nécessaires pour participer à cette complexe œuvre collective qu’est l’Hérésie d’Horus, j’espère que Chris Forrester aura l’occasion de prendre en main des arcs narratifs (ce qui veut parfois dire les conclure), avant que la BL ne sonne la fin de la récré.

1 : Armure toute relative pour Bloodhowl lui-même, puisque personne ne s’est donné la peine de le faire revenir au 41ème millénaire (à la différence de presque tous ses sous-fifres). Et n’oublions pas que Mike Lee avait placé Bulveye à sa place à la tête de la Dekk-Tra dans ‘Wolf at the Door’…

.

Monsters – N. V. Nguyen [AoS] :

INTRIGUE:

MonstersOù nous suivons la nouvelle1 chasseuse de monstres officielle de papa Sigmar dans l’une de ses traques dans les Royaumes Mortels, ici Shyish un soir de pluie et de brouillard. Déployée en soutien des Anvils of the Heldenhammer, occupés en contrebas à contenir une invasion de démons de Tzeentch, Yndrasta a fait le déplacement pour bannir un Duc du Changement si changeant qu’il n’a d’autre nom que l’Anomie. Super plan pour éviter d’être convoqué par des mortels ambitieux à tout bout de champ (et de chant), moi je dis. Ayant certainement compris qu’il était dans le viseur de la virago de Ziggy, l’Anomie se la joue cependant petit bras et se transforme en nuage de barbe à papa au lieu de livrer un honnête combat à la championne adverse. Sous cette forme, il se révèle aussi inoffensif qu’invulnérable, ce qui ne fait pas les affaires d’Yndrasta et de sa lance magique, Thengavar, qui disparaît corps et bien dans le protoplasme gazeux et ne revient pas dans la main de sa porteuse, comme c’est habituellement le cas.

Sigmar ayant pensé à lui fournir une arme de rechange, Yndie ne se laisse pas décontenancer par la tournure prise par les événements et se rue à l’assaut de sa Némésis pour finir les choses au corps à corps. Un nouveau shenanigan de l’Anomie l’envoie toutefois dans le décor, et l’intrépide héroïne fait une chute douloureuse mais pas mortelle jusque dans la piscine privée d’une grotte souterraine, Gandalf style. Elle serait repartie aussi sec (mais mouillée, je me comprends) castagner le démon si elle ne s’était pas rendu compte que son point de chute n’était pas aussi désert qu’il l’aurait dû être. Un vieil ermite d’une carrure peu commune et arborant une ‘stache de compétition a en effet assisté à sa culbute pas très légendaire, et comme le quidam exsude une aura mythique et possède une hache qui l’est tout autant (appelez ça l’intuition féminine si vous voulez), Yndrasta reste faire un brin de causette.

Il ne lui faut pas longtemps pour comprendre que cet inconnu n’est autre que Voyi. Si cela ne vous dit rien, c’est normal : Voyi, aussi connu sous les noms du Non Béni, du Traître et surtout de l’Oublié, était un héros de l’Âge de Mythes, élevé par Sigmar au rang de champion, mais qui choisit d’aller vivre sa vie en solitaire au lieu de défendre Sigmaron lorsque le besoin s’en fit sentir. Sigmar n’étant pas connu pour sa magnanimité envers ceux qui le déçoivent, et ayant un égo trop important pour reconnaître ses échecs, le nom de Voyi fut rayé de tous les registres officiels, et seuls une poignée d’Elus, dont Yndrasta fait partie, eut vent de l’existence de ce paria depuis lors. Dès lors, la chasseresse se trouve confronté à un dilemme peu évident : rapporter la tête du traître à son patron pour lui faire plaisir, ou tenter de négocier avec Voyi pour apprendre comment, il y a de cela des millénaires, il réussit à bannir l’Anomie…

Après un échange tendu, durant lequel Voyi se permit de comparer Yndrasta et les Stormcast Eternals aux monstres chassés par la première, ce qui n’est guère gentil, et ponctué par un duel rapidement conclu par un point de côté débilitant pour le champion grabataire, Yndrasta se résout à laisser l’ancêtre en paix rien que pour lui montrer qu’elle n’est pas si méchante que ça, et à retourner se battre contre l’Anomie, même s’en savoir comment le vaincre. Sa « générosité » est toutefois récompensée par Voyi, qui lui révèle avant qu’elle ne parte qu’il lui suffira de prélever un échantillon sur la forme blurbesque du démon pour l’exiler des Royaumes Mortels (et récupérer sa précieuse lance au passage). Armée de ce tuyau, Yndrasta peut enfin repartir au front, non sans promettre à son hôte de garder pour elle le secret de sa destinée. Ce sera la première fois qu’elle dissimulera des choses à Sigmar depuis sa Reforge : pourvu qu’il ne l’apprenne jamais…

1 : Eh oui, la position était déjà prise avant que la V3 ne fasse de Miss Yndrasta une des têtes d’affiche de la franchise. Remember Neave Blacktalon ?

AVIS:

Une très bonne entrée de la part de Noah Van Nguyen, qui part explorer l’une de mes facettes préférées du fluff des Royaumes Mortels : le côté sombre de Sigmar et de ses élus. Yndrasta en elle-même est très loin d’être une parangon de noblesse et d’humanité, puisqu’elle se décrit volontiers comme cruelle et intéressée uniquement par sa mission de chasseresse, ce qui en fait sans doute la première héroïne Stormcast Eternal de la BL ouvertement antipathique (un progrès, si vous me demandez). Sa confrontation avec Voyi m’a fortement rappelé la difficile transition entre Guerriers Tonnerre et Space Marines entre la fin de l’Unification de Terra et le début de la Grande Croisade, avec Sigmar dans le rôle de l’Empereur1, en plus de venir approfondir et complexifier le fluff de cette faction. Un choix très intéressant de la part de Van Nguyen (j’aurais moyennement apprécié me retrouver avec une nouvelle de Neave Blacktalon bis, pour être honnête), qui démontre ici qu’il est capable de sortir du manichéisme Stormcast Eternals = gentils // opposants des Stormcast Eternals = méchants dans lequel bon nombre de ses collègues ont donné. De bon augure pour son roman ‘Godeater’s Son’, qui traitera spécifiquement de ce thème, et pour la qualité et l’intérêt de la littérature AoS en général.

1 : On peut aussi faire un parallèle avec le ‘Misbegotten’ de Dan Abnett, où le savant fou Fo déclare à Horus qu’il considère les Primarques et les Space Marines comme beaucoup horribles que toutes créations.

.

The Buried Beast – G. Kloster [40K] :

INTRIGUE:

The Buried BeastTout le monde ne passe pas le Rubicon Primaris en sifflotant. Prenez par exemple ce vieux Lazarus, Maître de la 5ème Compagnie des Dark Angels, et accessoirement premier membre du Chapitre à avoir franchi le gué : bien que l’opération ait été un succès, et lui ait permis de reprendre son poste avec un corps encore plus perfectionné, il éprouve toujours des difficultés à considérer son nouvel organisme comme autre chose qu’une prison pour son cerveau. Une mentalité fâcheuse, qui le pousse à négliger ses devoirs de critique des vieilles histoires des Dark Angels (crime impardonnable pour un Impardonné), et à écouter en boucle les contes et légendes de Caliban en version Audible1. Il est aussi hanté par le souvenir de sa presque mort sur le monde de Rimenok, où il eut l’honneur d’incarner un chamallow dans la pièce « Le Feu de Joie », montée par l’amicale des cultistes de Cui. Voilà pour les présentations.

Le concept d’arrêt maladie n’existant pas chez l’Adeptus Astartes, Lazarus est chargé d’une mission top-secrète (le plus bas niveau de confidentialité des Dark Angels) par Gargamel Azrael en personne : des opérations de minage sur la lune de Cinero ont permis d’excaver le Lion’s Blade, un vaisseau de la 1ère Légion s’étant écrasé sur le satellite pendant l’Hérésie d’Horus. Toujours soucieux de défendre leur droit à l’oubli, les Dark Angels ne perdent pas une seconde pour envoyer une équipe de nettoyage sur place, afin de s’assurer qu’aucun fâcheux petit secret sur la potentielle allégeance de l’équipage ne tombe entre de mauvaises mains.

Petit problème : la Gouverneur locale, Catherine Ruus, refuse de coopérer avec le Lieutenant (Abad) que Lazarus envoie récupérer la localisation de l’épave. D’humeur très cordiale pour un Dark Angel, Abad accepte de transmettre les conditions de l’impudente mortelle à son boss (elle ne veut passer l’info qu’à Lazarus), qui tout aussi gracieusement obtempère. Elle serait tombée sur Asmodai, elle n’aurait pas fait longtemps la maline la Catty, moi je dis. Pendant l’entrevue, Ruus révèle au Maître de la 5ème que l’équipage du Lion’s Blade avait informé son arrière-arrière-arrière487 grand-père, lui aussi Gouverneur, qu’un démon s’était matérialisé sur le vaisseau. N’ayant pas réussi à le bannir, les héroïques Space Marines décidèrent de faire s’écraser le Lion’s Blade dans le cratère d’un des volcans de Cinero pour régler le problème une fois pour toutes, mais ratèrent leur cible et enfouirent à la place le vaisseau dans une galerie de mine. Ayant interdit au Gouverneur d’intervenir ni de révéler leur présence au reste de l’Imperium, de crainte de libérer le démon, les Dark Angels vendirent chèrement leur carapace noire avant de tomber dans un oubli quasi-complet pour les dix millénaires suivants. Pas franchement emballée par l’idée que quelqu’un aille mettre son nez, même aquilin, dans ce nid de corruption, Ruus finit tout de même par donner à Lazarus les coordonnées du site, et l’inflexible Maître emmène ses hommes faire un peu d’archéologie.

Le vaisseau en lui-même est vide, mis à part les cadavres desséchés et décapités de son équipage. Ne trouvant pas le démon dans les coursives, mais constatant qu’un tunnel s’enfonce depuis un trou dans la coque jusqu’aux profondeurs du volcan dans lequel le Lion’s Blade s’est écrasé, Lazarus enclenche le mode Bogoss et s’en va seul enquêter dans cette galerie, laissant le soin à son crew de ramener les dépouilles mortelles de leurs prédécesseurs en orbite.

Bien évidemment, le démon a trouvé le moyen de rester dans le Materium pendant toutes ses années (sans doute en prenant des bains de lave pour se détendre, d’ailleurs il sort de sa baignoire à l’arrivée de Lazarus), mais n’est pas contre un peu d’exercice et une nouvelle âme à engloutir pour recharger ses batteries. Malgré son statut de personnage nommé, Lazarus galère un peu au début de combat, mais finit par trouver en lui les ressources et la gniaque nécessaire pour renverser la vapeur et triompher de son adversaire. Tout cela est bien classique. Ceci fait, il a la bonté d’aller faire ses adieux à Ruus, et lui montrer la fin de son combat contre son adversaire démoniaque pour prouver qu’elle n’a plus à s’en faire. Car, oui, il a tout filmé2. Quels poseurs alors, ces Dark Angels…

1 : Même en mission.
: Ça ne m’étonne pas qu’un Chapitre aussi suspicieux et retors ait intégré des caméras dans les armures énergétiques de ses Frères de Bataille, mais de là à partager des clips de démons avec des civils ? C’est pas ça qui les grandirait dans l’opinion de l’Inquisition, si ça se savait…

AVIS:

Gary Kloster nous sert une authentique rareté avec ce ‘The Buried Beast’ : une nouvelle de Dark Angels qui ne tourne pas autour de la traque des Déchus. Rien que pour ça, cette histoire m’est sympathique, et même s’il ne s’agit au fond que d’une Space Marinade à la sauce Rubicon (un sous-genre qui se développe), le résultat est assez convenable, surtout pour un auteur qui, pour autant que le sache, ne s’était jusque là pas intéressé à ce type de nouvelle. On apprend même deux ou trois trucs au passage sur l’histoire et l’organisation du Chapitre, ce qui est toujours bon à prendre. La seule question que je me pose à la fin de ‘The Buried Beast’ est de savoir si Kloster n’a pas rendu les Dark Angels trop sympas par rapport à leurs standards habituels. C’est un peu ce qui fait leur charme, après tout…

.

Beasts – J. French [AoS] :

INTRIGUE:

BeastLes années et les siècles n’ont pas été tendres envers Cado Ezechiar : alors qu’il disposait de son propre petit royaume et gérait ses affaires dans son coin, le Chaos vint frapper à sa porte avec des gros sabots anarchiques, résultant en la ruine de son domaine et le massacre de ses sujets. Depuis, l’ex souverain immortel (c’est un Vampire) traque les huluberlus qu’il tient responsable de ce fiasco (un culte de Tzeentch nommé la Main Enflammée), ce qui l’a amené dans la cité de Glimmerheart, récemment reprise par les forces sigmarites.

Ayant massacré les trois sorciers de niveau 3 qui zonaient dans la ville sans penser à leur demander de le mettre sur une piste digne de ce nom pour poursuivre sa quête, Cado se retrouve dans une impasse, et obligé de faire profil bas pour éviter d’attirer l’attention des vertueux et peu tolérants Azyrites. Il accepte ainsi une mission d’escorte de prêtres chargés de contrôler la pureté d’une ancienne source sacrée, située à quelques heures de marche de Glimmerheart. De retour dans la cité, il fait la connaissance d’un mystérieux individu, Byrazan, qui semble en savoir beaucoup sur son tragique passé, et n’accepte pas « non » comme une réponse à sa demande de lui rendre un petit service en échange de renseignements. Avant qu’il n’ait pu expliquer au présomptueux mortel pourquoi il n’est pas conseillé de lui baver sur les rouleaux, Cado est mis KO de manière aussi rapide qu’inexpliquée, et se réveille quelques heures plus tard au plus profond d’une caverne humide, obscure et mal fréquentée.

Ayant repris ses esprits et réglé son compte à l’araignée géante qui avait des vues sur sa carcasse, notre héros se met en quête d’une sortie, mais ne parvient qu’à attirer l’attention du Troggoth affamé qui s’est établi dans ces tunnels. Bien que disposant d’aptitudes physiques bien supérieures à celles de l’humain moyen, et pouvant compter sur les esprits des membres de feu sa cour royale (ici, l’érudite Solia, qui ne peut malheureusement rester longtemps à cause de problèmes récurrents de connexion1) pour le conseiller, Cado n’est pas vraiment à son avantage. En cause, la constitution robuste et la résistance à la magie de son adversaire, ainsi que les nuages de spores hallucinogènes déversés par les champignons qui recouvrent les parois de la caverne. Fort heureusement, notre héros a la bonne idée d’utiliser le décor pour venir à bout de son poursuivant, et parvient à faire basculer le Troggoth dans un graaaaaaand trou dans le sol, qui se révèle être un abysse arcanique (encore un kit de décor qui sera vendu 50 balles par GW dans les années à venir, j’imagine), soit une sorte de trou de ver menant vers une dimension parallèle, et dont l’accès était entravé par la présence d’une locale hostile, comme l’explique posément Byrazan lorsque Cado sort enfin de son trou, quelques temps plus tard.

Logiquement outré par le traitement qu’il a subi, le Roi Vide doit cependant mettre sa colère en veilleuse car son interlocuteur révèle avoir sur lui une fiole contenant le sang d’un vampire de sa lignée, ce qui fonctionne basiquement comme une injonction d’éloignement/kryptonite/Xanax pour la gent à longues canines (ce qui explique le black out subi par Kad&O lors de sa première rencontre avec l’impudent mortel). En attendant d’identifier l’employeur de Byrazan et de comprendre l’intérêt qu’il lui porte, Cado récolte tout de même les fruits de son labeur, Byby lui indiquant d’aller visiter une tour de sorcier située dans les hauteurs de Glimmerheart pour faire progresser sa quête. Une tour invisible et inatteignable, certes, mais ce n’est pas vraiment son problème. Les PNJ donneurs de quête ne sont plus ce qu’ils étaient, c’est malheureux.  

1 : En même temps, l’histoire se passe dans un tunnel. What did you expect ?

AVIS:

John French pose proprement les bases de sa première série siglée Age of Sigmar avec ce ‘Beasts’, qui introduit de manière efficace le Roi Vide Cado Ezechiar, sa quête vengeresse dirigée vers les séides de la Main Enflammée, les anneaux de pouvoir qui constituent son équipement distinctif, et les relations troubles qu’il entretient avec ses mystérieux et puissants commanditaires. Toute cette exposition est faite de manière fluide, ce qui n’est pas donné à tous les contributeurs de la BL, et le combat/course-poursuite qui met notre immortel héros aux prises avec un Dankhold Troggoth jaloux de son intimité nous change agréablement de l’ordinaire des bastons mises en scène dans la littérature AoS. Un début prometteur dans les Royaumes Mortels, tant pour Cado que pour son créateur.    

.

Amor Fati – M. F. Haspil [HH] :

INTRIGUE:

Amor FatiRevenu d’entre les morts grâce aux talents nécromantiques de Fabius Bile, le Seigneur Commandeur Eidolon n’est cependant pas satisfait de son sort (pour changer). Son retour dans le Materium s’est en effet accompagné d’effets secondaires désagréables et disgracieux, ce qui lui a valu des critiques acerbes de la part de Fulgrim. Honteux de « se déplacer comme un Ork », dixit cette petite bi*tch de Fufu, Eidolon passe ses journées à la salle d’entraînement du Proudheart, à massacrer des esclaves gladiateurs sous le regard fatigué de Fabius (qui ne voit pas à quoi ça sert). Bien que l’opposition ne soit pas de taille à menacer un Astartes, même un Astartes dont la motricité fine est inférieure à celle d’un enfant de deux ans, les progrès ne sont pas au rendez-vous. Comprenant sans doute qu’il doit donner à son patron un os à ronger pour éviter de passer le reste de son existence à lui préparer des sparring partners qu’il dézingue en dix secondes, l’Araignée finit par révéler à Dondon qu’il connaît un moyen de le restaurer dans son état initial. Il lui faudrait pour cela disposer des glandes progénoïdes d’Emperor’s Children (ce qui est facile)… non-corrompu par le Chaos (ce qui l’est beaucoup moins). Et ça tombe bien, Fabius sait exactement où dégoter cet ingrédient devenu rarissime : l’Apothicaire a en effet pris soin d’envoyer une douzaine d’Astartes s’isoler du reste de la Légion pendant qu’il travaillait sur un remède à la dégénérescence qui affligeait les Emperor’s Children pendant la Grande Croisade. On a toujours besoin d’un groupe témoin pour tester l’efficacité d’un traitement, c’est bien vrai. Cela fait maintenant plusieurs années, et un début d’Hérésie, que ces exilés n’ont pas donné signe de vie, mais avec un peu de chance, il en reste encore un en vie, et il se fera un plaisiiiir de donner ses glandes pour la cause.

Eidolon part donc immédiatement à la cueillette aux loyalistes, bien conscient que son état de méforme actuel risque de lui être fatal la prochaine fois qu’il croisera la route de ce parvenu de Lucius (qui lui est revenu d’entre les morts sans séquelles, c’est vraiment trop injuste). Si les premières adresses données par Fabius se révèlent être des impasses, le destin finit par sourire au Seigneur Commandeur, dont le vaisseau sort sans crier gare du Warp à proximité de la planète où sont stationnés les derniers échantillons de la liste arachnéenne. Prenant avec lui une escouade de Kakophoni dont, je cite, « la disparition ne chagrinera personne » (ambiance ambiance), Eidolon atterrit à proximité de la forteresse solitaire tenue par ses frères d’armes, et se prépare à une émouvante réunion de famille.

Les hérétiques sont froidement accueillis par le Sergent Avram Rakomon, qui se présente comme le dernier des Emperor’s Children, et ses quelques potos des Légions Brisées. Dans la fusillade qui s’ensuit, Eidolon se découvre des capacités physiques insoupçonnées, qui font plus que compenser ses tics et ses tocs nerveux. Une preuve que Slaanesh ne l’a pas oublié, sans nul doute. Ayant perdu son escouade dans l’affrontement (notons tout de même qu’il tue lui-même le champion Kakophoni parce qu’il avait osé lui parler de Lucius), Eidolon engage Rakomon au corps à corps, et profite de son nouveau regain de forme pour marteler le loyaliste jusqu’à ce que mort s’en suive. Il ne lui reste plus qu’à décortiquer ce mollusque énergétique pour récupérer les précieuses glandes qui lui permettront de retrouver sa jeunesse…

Début spoiler…Mais à bien y réfléchir (car oui, ça lui arrive), Eidolon se rend compte qu’agir de la sorte serait commettre un fashion faux pas envers Slaanesh, qui lui a accordé des dons compensant les faiblesses causées par sa résurrection. Il ne faudrait pas fâcher le Prince du Chaos en redevenant un simple et boring Space Marine, tout de même. La nouvelle se termine donc avec un broyage à main nue des glandes du pauvre Rakomon, dont le sacrifice n’aura pas servi à grand-chose. Perdu pour perdu, je pense que Fabius aurait apprécié ce cadeau, mais il est vrai que l’altruisme n’est pas le premier trait des Emperor’s Children…Fin spoiler

AVIS:

Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, ou qu’on aime à le détester, Eidolon occupe une place particulière dans la galerie des personnages secondaires de l’Hérésie d’Horus, en cela qu’il ne laisse personne indifférent. Si ‘Amor Fati’ ne lui permettra pas de se refaire une réputation parmi les fans de cette franchise (il reste en effet parfaitement égal à lui-même), Michael F. Haspil réussit à donner à l’imbuvable Seigneur Commandant une profondeur inédite. En choisissant d’endurer son statut de créature de Frankenstein – avec bénéfices, tout de même – au lieu de chercher une régénération en bonne et due forme, Eidolon se pose pour la première fois en maître de son destin. Il démontre également une compréhension du crédo Slaaneshi (plus ça fait mal, plus c’est bon) digne d’un Elu du Prince du Chaos, ce qui renforce sa future candidature au commandement de la Légion (voir ‘The Soul, Severed’, qui se déroule peu après). De son côté, Haspil fait preuve d’une belle maîtrise de son sujet pour un newbie hérétique, et se paie même le luxe de venir enrichir le fluff de sa Légion d’adoption, audace que peu d’auteurs nouvellement venus se sont autorisés. Une nouvelle tout à fait honorable donc, et une lecture plus que recommandée aux amateurs de la IIIème Légion.

.

Mad Dok – N. Crowley [40K] :

INTRIGUE:

Mad DokGhazghkull Mag Uruk Thraka est mort, éparpillé façon puzzle par les bons soins de Ragnar Crinière Noire et ses Space Wolves dans la cathédrale du monde de Krongar. Pour la plupart des autres personnages de Warhammer 40.000, cet état serait définitif, mais pour le prophète de Gork & Mork, il ne s’agit que d’un incident mineur, car l’inégalable Mad Dok Grotsnik a également fait le déplacement, et salive d’avance sur la possibilité qui lui est offerte de littéralement reconstruire Ghazgkull de la tête aux pieds, sans que ce dernier n’ait loisir de rechigner (ce qui peut être dangereux pour le bon Dok).

Cependant, Grotsnik doit composer avec la mauvaise volonté manifeste de ses infirmiers Grots, à commencer par le morveux mais intelligent Drippa, qui se demande bien si cela vaut la peine de sortir le jeu de limes, la perceuse à main et la superglu pour lancer une session de kitbashing de l’extrême alors que les Orks de Krongar sont en train de se faire botter énergétiquement l’arrière-train par les Space Marines encore présents sur la planète, et qu’il ne faudra pas attendre longtemps avant qu’un Nob pas trop bête décide que c’est son tour de devenir le Boss des Boss. Bien tenté de réduire l’impertinente créature en pièces détachées pour lui apprendre le respect, Grotsnik comprend qu’il ne pourra pas arriver à bon port sans l’aide de ses assistants, et choisit donc de résoudre le problème de façon pacifique. Il se met donc à raconter au parterre de Grots l’autre fois où il a réussi à ressusciter Ghazgkull, épisode connu de nul autre que lui.

Cela s’est passé lors du retour des Orks sur Armageddon, et plus précisément lors de l’assaut en sous-marin sur la cité ruche Tempestora. Alors que la côte se profilait à l’horizon (façon de parler lorsqu’on est passager d’un submersible, bien sûr), le soupe au lait Ghazgkull fit une attaque d’apoplexie si sévère lorsque son médecin traitant (toujours Grotsnik) lui annonça qu’il était nécessaire de lui ouvrir le crâne pour réparer les dégâts causés par une vie de guerre (un peu) et les expérimentations sadiques du Dok (surtout) qu’il s’en fit exploser le cerveau. La présence du leader suprême des peaux vertes sur les « plages » du débarquement n’étant pas optionnelle, Ghazgkull lui-même ayant juré qu’il mènerait l’assaut de ses troupes, Grotsnik a dû réaliser une opération d’urgence et dans des conditions loin d’être idéales pour remettre son patient sur pied. Grâce à la complicité de ce bon vieux Taktikus, mis au courant du pépin de santé du boss, et qui inventa un bon gros mensonge pour justifier son absence lors du briefing d’avant bataille (les Blood Axes sont bons pour ça), le Dok parvint in extremis à remettre le cerveau et le cœur (saleté de cholesterork) de Ghazgkull en état, et à réveiller le prophète au moment où quelques Space Marines firent intrusion dans la salle du trône du sous-marin échoué. La suite appartient à l’histoire…

Ce récit captivant fait toutefois remarquer au sagace Drippa que la résurrection de l’increvable Goff semble avoir été en partie causée, une nouvelle fois, par l’intervention providentielle du fidèle Makari. Grotsnik a en effet avoué qu’il a dû utiliser une hampe de bannière pour effectuer le triple pontage express qui a remis en marche le cœur de Ghazgkull dans le money time, et cette bannière n’était autre que le fameux bâton chanceux manié par le Grot porte-bonheur. Cette révélation fait comprendre à Grotsnik que cette nouvelle résurrection ne pourra réussir sans la participation de Makari, porté disparu lors de l’accrochage avec Ragnar. Qu’à cela ne tienne, le Dok connaît un cheat code efficace : une imposition des mains de Ghazgkull a déjà réussi à faire revenir la petite créature d’entre les morts. Et il n’y a pas de raison que ça ne marche pas même si le boss est techniquement mort lui aussi, pas vrai ?

AVIS:

Une nouvelle sympatoche, qui se concentre davantage sur la mentalité Ork (dont Grotsnik s’éloigne souvent, avec sa sale manie de considérer les choses de façon rassionel) que sur l’action à proprement parler. La première moitié de l’histoire est ainsi occupée par le Mad Dok se préparant mentalement à ressusciter sa plus grande création, les choses ne démarrant vraiment que dans la seconde partie, avec la confrontation initiée par le tout aussi rassionel Drippa, et le récit de la seconde revenue d’entre les morts de Ghazghkull lors de la troisième guerre pour Armageddon. On apprend beaucoup de choses sur la relation particulière qui unit Grotsnik et Ghazghkull d’une part (le premier passant son temps à empoisonner ou mutiler le second en douce pour tester sa résistance et se venger de ses sévices), et que Ghazghkull et son fidèle autant qu’immortel Makari d’autre part (il semblerait qu’aucun des deux ne peut vraiment mourir tant que l’autre est en vie). Une lecture tout à fait complémentaire du roman que le même Nate Crowley a consacré au prophète de Gork et Mork, et qui fera plaisir aux fans de la littérature orkoïde, dont Crowley est l’un des dignes représentants contemporains, avec son comparse Mike Brooks.

.

***

Et voilà qui termine cette revue des 12 nouvelles du Nowel 2021. Une bonne petite sélection d’histoires, de personnages et d’ambiances, que l’on retrouvera dans quelques mois dans les anthologies Black Library. A bientôt pour l’exercice 2022, que j’espère chroniquer dans des délais plus raisonnables!

 

BLACK LIBRARY 2017 ADVENT CALENDAR [40K – AoS – HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans une chronique franchement opportuniste, mais qui n’est tout de même pas totalement gratuite. Il sera ici question des nouvelles intégrées par la Black Library à son calendrier de l’avent…2017. Soumission de première fraîcheur donc, mais j’avais plusieurs raisons de consacrer un post à ce cru particulier.

Black Library 2017 Advent Calendar

La première d’entre elle était, je l’avoue sans mal, franchement prosaïque. Je me suis aperçu en mettant à jour mes fichiers de suivi (#IAmAFunGuy) qu’il ne me manquait que la revue de ‘The Tainted Axe’ de Josh Reynolds pour avoir chroniqué toutes les nouvelles de cette sélection (les audio dramas étant naturellement sortis de l’équation, car je n’ai jamais pu me faire à ce format). Si vous avez suivi mes publications sur le Warfo, je vous conseille donc de vous concentrer sur cette section de l’article, et de passer à autre chose, car le reste n’est pas inédit. En revanche (et c’est la deuxième raison), si vous ne connaissez que ce blog, j’ai le bonheur et l’avantage de vous annoncer que les nouveautés sont un peu plus fournies, car les nouvelles de l’Hérésie d’Horus ‘Duty Waits‘ (Guy Haley), ‘Magisterium‘ (Chris Wraight), ‘Now Peals Midnight‘ (John French) et ‘Dreams of Unity‘ (Nick Kyme) n’avaient pas été couvertes dans de précédents posts. C’est votre jour de chance!

Ce sujet de nouveau contenu évacué, il est enfin intéressant de revenir cinq ans en arrière – une période de temps importante pour la Black Library, pensez donc: c’était avant Warhammer Crime, Warhammer Horror et la série L’Aube de Feu – afin de juger de la qualité de cette sélection hivernale. 2017, grand cru ou récolte famélique? On va bien voir.

Black Library Advent Calendar 2017

.

Endurance – C. Wraight [40K] :

INTRIGUE :

EnduranceSur le monde ruche de Lystra, l’escouade du frère Sarrien des Imperial Talons livre un combat d’arrière-garde aussi noble que vain contre les hordes innombrables des Zombies de la Peste ayant plus ou moins remplacées la population locale. Envoyés au casse-pipe pour permettre à un fonctionnaire de l’Adeptus Administratum obèse et tire au flanc (du moins, c’est comme ça que Sarrien se le représente) de maintenir son quota de dîme mensuel, ou autre raison purement technocratique, les braves Space Marines tiennent la ligne du mieux qu’ils peuvent, mais même leur constitution suprahumaine commence à donner d’inquiétants signes de fatigue. Pour ne rien arranger, les lignes de ravitaillement avec le reste de l’Imperium sont totalement coupées, ne laissant à nos fiers héros que la bonne vieille énergie cinétique pour défendre le domaine de l’immortel Empereur contre la corruption galopante titubante représentée par les Stumblers. Isolé de ses frères pour maximiser l’efficacité du soutien martial et moral que les Astartes représentent pour leurs alliés de la Garde, Sarrien débute la soirée comme toutes les autres auparavant : il chante chante chante ce rythme qui lui plaît (Endure ! For the Emperor ! Stand Fast ! Chihuahua !) et il tape tape tape (c’est sa façon d’aimer). On comprend cependant assez clairement que notre héros en a gros, et qu’il n’y a que son exemplaire éthique qui le pousse à suivre des ordres qui lui semblent totalement débiles.

À quelques encablures de cette planète condamnée, nous faisons la connaissance de notre deuxième protagoniste, le réfléchi (il ne court jamais) et hédoniste Dragan, Death Guard appartenant à la faction des Lords of Silence. Bénéficiant d’un quartier libre entre deux opérations de grande ampleur, Dragan a embarqué sa coterie sur son vaisseau personnel, l’Incaligant, et vogue là où le Warp le mène, massacrant tous les Impériaux qui lui tombent sous le moignon au passage. Les petits plaisirs de la vie, il n’y a que ça de vrai. Ayant fondu (dans tous les sens du terme) sur un transporteur de troupes de la Garde Impériale dépêché sans escorte en renforts de Lystra, Dragan décide sur un coup de tête, une fois le carnage expédié, d’emmener ses ouailles sur le monde en question, où il suppute (en même temps qu’il supure) qu’une distraction peut être trouvée.

Nous retrouvons ensuite Sarrien, toujours plus amer et toujours plus crevé, qui décide d’aller rôder derrière les lignes ennemies pour… le fun ? (étant donné que les défenseurs sont au bout du rouleau et s’attendent tous à crever, et que l’adversaire n’a aucune chaîne de commandement à décapiter ni de cibles stratégiques à prendre, l’utilité de la manœuvre me semble obscure). Bien que durement éprouvé par des semaines de combat sans répit, notre surhomme se révèle malgré tout capable de faire mordre la poussière à son poids en Stumblers, voire plus, jusqu’à ce qu’il tombe sur un Fatty dont l’odeur corporelle, ou l’aura de zenitude, c’est selon, est telle qu’il a bien du mal à lever la main sur lui. Malgré l’attitude résolument peace man du gros lard, Sarrien parvient à le décoller proprement, non sans que sa victime n’ait eu le temps de le prévenir 1) des dangers physiques et mentaux du surmenage (il devait être élu au CHSCT dans sa première vie), 2) de l’arrivée prochaine du Potencier (Gallowsman). Bien en peine de faire quelque chose de cette information, et sappé comme jamais, l’Imperial Talon décide de se rentrer, avec l’espoir futile de trouver un McDo encore ouvert sur le chemin pour s’envoyer un bon Coca bien frais.

De son côté, Dragan a fini par arriver en orbite autour de Lystra, et emmène sa bande sur les lieux du dernier conflit agitant encore la planète, dans l’espoir de trouver un adversaire de valeur. Escortés par quelques cohortes de die hard fans, les Lords of Silence progressent pondéreusement vers la ligne de front, où les attendent…

Spoiler Des Iron Warriors. Eh oui. Car en fait, Sarrien et Dragan ont visité Lystra à deux moments distincts, petite surprise savamment préparée par Wraight. Il est d’ailleurs fortement suggéré que Sarrien est devenu Glask (le second de Dragan, qui passe son temps à l’appeler Potencier – au grand ennui de son boss – et dont la jambe torse pourrait être la conséquence de la blessure subie par Sarrien au même endroit à la fin de la campagne) peu de temps après sa rencontre avec le gros plein de pus, lorsque, finalement submergé par le nombre de ses ennemis et l’amertume envers l’Imperium, il a décidé que sa survie était plus importante que son devoir. Ceci dit, le récit se termine sur un flou artistique et un amoncellement de Zombies affamés sur Sarrien, dont le salut final n’est pas garanti, ralliement à papa Nurgle bien acté par ce dernier ou pas. Quelques dizaines/centaines/milliers d’années plus tard, Dragan est quant à lui saisi d’une impression de déjà vu alors qu’il corrode les armures chromées de ces frimeurs de la IVème, ce qui ne fait que renforcer l’hypothèse de la défection de Mr Talon. Fin du spoiler

AVIS :

Mis à part le manque de clarté de sa conclusion (voir la partie spoiler ci-dessus), Endurance est une soumission solide de la part de l’ami Wraight, sans doute rédigée en accompagnement de son roman The Lords of Silence pour un galop d’essai littéraire. En quelques pages, Chris arrive ainsi à donner une véritable profondeur à ses répugnants héros, dont l’attitude chill, thrill & kill les distingue clairement des autres factions d’Astartes chaotiques et renégats de notre sombre galaxie, en plus de s’accorder parfaitement avec la philosophie débonnaire de Papa Nurgle, ce qui ne gâche rien. Sans rien galvauder de leur nature éminemment mauvaise, Wraight réussit également à rendre attachant (sans mauvais jeu de mots) le personnage de Dragan, dont le caractère égal et l’approche désinvolte de sa pestilentielle vocation le font apparaître comme éminemment plus sympathique que le Seigneur du Chaos lambda de la BL. De l’autre côté du ring, Sarrien s’avère moins mémorable, mais le récit que fait l’auteur de la lutte désespérée du loyaliste pour retarder l’inévitable, de part son caractère assez original (il combat en solo, et pas avec le reste de son escouade) et la bonne prise en compte des effets débilitants de la fatigue et des blessures sur la constitution d’un Space Marine – qui reste une machine de guerre insurpassable, mais peut se mettre dans le rouge s’il tire trop sur la corde – s’avère prenant et plaisant, sur les quelques pages qu’il dure. Une nouvelle SM comme je les aime donc : courte dans son propos, précise dans son dessein, efficace dans sa réalisation et à twist dans sa conclusion. Prenez-en de la graine, les rookies.

Gardant une nouvelle en fois en tête le but premier d’un recueil tel que celui dans lequel elle a été incluse, j’ajouterai pour conclure qu’Endurance fait un beau boulot de présentation d’une faction amenée à jouer un rôle important dans l’univers 40K (la Death Guard), en plus de donner assez envie de lire le long format mettant en vedette les Lords of Silence. Que l’exploration d’un concept central du fluff, le ralliement d’un Space Marine loyaliste au Chaos, soit également présente pour l’instruction des lecteurs novices ajoute encore a l’intérêt du propos, qui mérite donc largement sa place dans le Black Library Celebration 2019.

.

Duty Waits – G. Haley [HH] :

INTRIGUE :

Duty WaitsSur Terra, les loyaux défenseurs de l’Empereur ne savent plus quoi inventer pour tuer le temps. Nous suivons ainsi le quotidien à la fois morne et stressant de deux Astartes de la VIIème Légion, le Capitaine Maximus Thane de la 22ème Compagnie, et le poussin Kolo, fraîchement diplômé de la promotion Eltaune Jaune, alors qu’Horus n’en finit plus de faire traîner son quart d’heure d’impolitesse. Alors que Max’ a au moins le loisir de faire un peu d’exercice à la tête de ses hommes, qu’il emmène régulièrement faire des joggings sur le mur d’enceinte du Palais1, Kolo est assigné au support informatique de ce dernier, et, entre deux appels d’un certain M. Alcador, qui éprouve toutes les peines du monde à envoyer un mail ou à ouvrir une pièce jointe (et qui oublie une fois sur deux d’allumer son écran), doit gérer une bien pesante inactivité. Car, il faut bien le reconnaître : il ne se passe pas grand-chose d’intéressant sur Terra d’un point de vue strictement apocalyptique. Bref, les journées sont longues2.

À défaut de s’améliorer franchement, les choses évoluent un peu pour nos protagonistes après le départ de la flotte en destination de Beta-Garmon. Bien qu’ils n’aient pas eu la « chance » de faire partie des heureux élus envoyés au casse-pipe contre les renégats, Thane et Kolo ont en effet reçu de nouvelles affectations. Le Capitaine a ainsi la chance, la joie et l’avantage de faire le planton à 300 mètres au dessus d’un square fréquenté par les civils du Palais, afin de rassurer et d’inspirer ces derniers. Malheureusement, les cadences infernales de travail auxquelles sont soumises les masses laborieuses de Terra, les conditions météorologiques détestables de la région, et le manque d’intérêt du spectacle (les gars restent vraiment plantés comme des piquets pendant des heures, à tel point que son Lieutenant manque de déclencher une alerte jaune quand il voit Thane lever les yeux vers le ciel) viennent contrarier cette noble initiative de propagande. Ils auraient jonglé avec leurs bolters, ça aurait eu plus de gueule, moi je dis. Pour se distraire, Maximus imagine ce qu’il se passerait s’il se laissait tomber depuis le mur, et calcule les probabilités jusqu’à la 15ème décimale de sa survie en fonction de paramètres divers, comme l’écartement de ses bras pendant la chute, l’atterrissage sur un quidam, ou encore la vitesse de croisière d’un Stormbird (africain) non chargé. Il soupçonne que le développement d’un passe-temps tel que le suicide mental pourrait peut-être trahir un léger début de névrose, mais cela ne l’empêche évidemment pas de faire son devoir.

De son côté, Kolo participe à l’opération Sentinelle II (la première ayant pris place 28.000 ans plus tôt, même si personne ne s’en souvient), ce qui lui donne l’occasion d’interagir avec les civils que Thane ne voit que de loin. Entre deux contrôles d’identité et palpations aléatoires, le voilà sommé avec son escouade d’intervenir en support des forces de l’ordre, débordées par une foule hostile car affamée. La distribution du pain quotidien ayant en effet annulée sans prévenir, une poignée d’Arbites doivent calmer les velléités meurtrières de quelques milliers de mal-contents. L’arrivée des gilets plastrons jaunes n’a pas l’effet escompté, pas plus que les talents oratoires et diplomatiques, assez limités il faut bien le reconnaître, du Sergent Benedict ne permettent de désamorcer le conflit latent. Ce qui doit arriver arrive, et les manifestants commettent l’erreur de charger leurs protecteurs, qui répondent par une rafale de bolter dans le plus grand des calmes. 80 douilles très exactement plus tard, l’incident est clos, au prix d’un petit millier de morts seulement. Voilà qui mérite bien un honneur balistique, il me semble. Bref, sur Terra il n’y a pas que le temps qu’on tue.

1 : En revanche, pas question de traverser la route avant que le petit bonhomme ne passe au vert jaune. Sous peine de mort.
: Il est d’ailleurs murmuré dans les cercles autorisés que c’est la surutilisation de leur membrane cataleptique pour faire passer le temps plus vite pendant leur interminable garnison sur Terra qui a entraîné la dysfonction de cette dernière chez les Imperial Fists et leurs successeurs.

AVIS :

Dans la série des nouvelles de C.A.L.T.H.1 constituant une partie non négligeable du recueil Heralds of the Siege, Duty Waits se place en tête de peloton par ses importants apports en termes de fluff, ainsi que par la réussite de Haley à faire ressortir la torture mentale que représente cette attente interminable pour les défenseurs, fussent-ils des transhumains conditionnés et entraînés pour faire face à toute situation. Et les Space Marines ont beau ne pas connaître la peur, l’Empereur n’a rien dit ni prévu en ce qui concerne l’ennui, ce qui peut mener même les soldats les plus disciplinés à commettre quelques regrettables boulettes. Dans cette ambiance de Désert des Tartares, Thane et Kolo vivent chacun leur propre enfer, et se retrouvent, sans le savoir, complices d’une exaction qui ne manquera pas de venir les hanter après l’Hérésie. Sur le thème, déjà couvert de nombreuses fois mais tellement central pour la série qu’on pardonnera aisément cette nouvelle itération, du sacrifice des fins en faveur des moyens, Haley parvient à brosser un portrait singulier et sinistre du Monde Trône avant que l’apocalypse ne s’y déchaîne, et préfigurant sans le savoir la dictature brutale, liberticide et usine-à-gazesque que deviendra l’Imperium, autrefois « simple » despotisme éclairé et progressiste, une fois la guerre civile terminée. Et si la question du « mais comment en est-on arrivés là ? » est la plus importante à laquelle l’Hérésie d’Horus doit répondre, alors on peut considérer Duty Waits comme une vraie réussite.

1 : Calme Avant La Tempête Horusienne.

.

Gods’ Gift – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE :

Gods' GiftPrenant place après les évènements narrés dans Great Red et The Beasts of Cartha, pour ne citer que deux des précédentes aventures de notre fougueux héros, Gods’ Gift voit Hamilcar et quelques uns de ses potes des Astral Templars accomplir une mission d’intérêt général, sans doute pour avoir commis quelque tour pendable à une chambre rivale lors d’une permission à Hammerhall. Il s’agit en l’état de punir et faire stopper les exactions d’une bête monstrueuse s’amusant à disposer des hardis bûcherons d’un camp de colons récemment implanté dans les terres farouches de Ghur, tâche récréative pour des Stormcast Eternals de la trempe de nos gais lurons. Guidés par un local – Fage – qui malgré son âge vénérable semble tout émoustillé par la seule présence des Elus de Sigmar, Hamilcar & Cie s’embarquent donc dans une épopée aussi directe et rapide qu’une quête de zone de didacticiel de World of Warcraft.

Depuis le relevé de empreintes jusqu’à la constatation de l’heure du décès, ou plutôt, de l’abattage, il ne se passera ainsi qu’une petite journée, soit une vingtaine de pages pour le lecteur, juste le temps pour Ham’ de piquer un roupillon qui lui apportera un rêve plus ou moins prophétique, dans lequel un chêne vient lui chanter Je suis malade (ce qui est ‘achement dur pour un végétal, et mérite le respect), ce qui lui permettra de prendre une décision des plus inspirées quelques heures plus tard. La nouvelle se terminant pour un petit cliffhanger pas vraiment haletant, mais sans doute important pour la suite de la saga d’Hamilcar (Mark de son prénom), le lecteur en est quitte pour embrayer sur directement sur la première, ou plutôt le premier roman dédié à Guymer à sa coqueluche hirsute (Champion of the Gods), dans lequel il est presque certain que des réponses seront apportées aux questions laissées en suspens à la fin de Gods’ Gift.

: L’Homme Arbre qui s’était chargé de la besogne de déshumanisation – c’est comme la désinsectisation, mais avec des primates – servant de pied à terre racine à humus à une sylvaneth passablement enrhumée.

AVIS :

Malgré les dizaines de titres que compte sa bibliographie BL à l’heure actuelle, ce n’était que la deuxième soumission de Mr Guymer m’étant tombée sous la main depuis l’inaugural The Tilean Talisman, initialement publié en 2011. Et je dois dire que mon appréciation de l’œuvre du bonhomme est resté scrupuleusement identique, huit ans plus tard : des aptitudes certaines en terme de narration, avec des personnages au minimum distrayants, à défaut d’être immédiatement attachants (mention spéciale à Brouddican, l’Hillarion Lefuneste personnel de cette grande gueule d’Hamilcar), relevé par quelques notes boisées – c’est le cas de le dire – de fluff, plombées par une vacuité de l’intrigue assez rédhibitoire. C’est bien simple, celle de Gods’ Gift (d’ailleurs, on ne comprend pas vraiment quel est le don auquel Guymer fait référence dans le titre de sa nouvelle1) s’articule en deux temps trois mouvements, sans qu’on ait l’impression d’une quelconque progression entre le début et la fin de la nouvelle. Hamilcar traque un monstre. Hamilcar rêve d’un chêne. Hamilcar tombe dans une embuscade d’Hommes Bêtes (il faut bien qu’il montre qu’il est un cador du corps à corps). Hamilcar débouche sur un bosquet de chênes sacrés, gardé par… le monstre qu’il traquait. Coup de bol. Baston. Victoire. Fin.

Bref, rien de bien challengeant pour l’intellect du lecteur, qui aurait pu s’attendre à quelques liens de causalité entre les différents éléments constitutifs du propos de Guymer. Rien de tel ici, ou de manière tellement évidente et peu fine que les relever n’a pas grand intérêt. Comme dit plus haut, cela peut sans doute se justifier par le fait que Gods’ Gift est un rehaut littéraire à un travail plus conséquent, avec lequel l’auteur prend bien soin de faire la liaison. Telle la rondelle de tomate venant décorer une entrecôte frites, cette nouvelle peut être consommée si on a vraiment faim, mais ne remplira pas l’estomac pour autant. Et comme dit plus tôt (Décembre 2014, pour être précis), c’est plutôt cher payé pour ce que c’est. On me souffle dans l’oreillette que c’est fois ci, c’est gratuit. Bon. Mais avant cela, cela ne valait certes pas les 2,99€ demandés. Rem-bour-sez nos in-vi-tat-tions !

1 : Soit ce sont les visions vagues envoyées par Sigmar, soit c’est le photophore magique remis par icelui, et qui permettra à notre fier héros de venir à bout de Marylise Lebranchu. Au lecteur de décider s’il prend le messie ou la lanterne.

.

Magisterium – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE :

MagisteriumSortis très éprouvés de la Guerre dans la Toile, la première défaite qu’ils aient connu depuis leur fondation, et qui a réduit drastiquement leur nombre, les Custodes doivent à présent panser1 leurs plaies et se préparer pour l’arrivée prochaine d’Horus et ses Légions renégates. Nous suivons donc le Vestarios (soit littéralement, le préposé au vestiaire de la boîte de nuit, en grec ancien) Samonas, fidèle bras droit de imperturbable Constantin Valdor alors qu’il supervise la réhabilitation des gardes suisses de l’Empereur, qui, en plus d’avoir été nonagimés (mais si, mais si, c’est du haut gothique) par les hordes démoniaques, ont cabossé et égaré leur matériel dans des proportions abominables, ce qui force les services généraux de la custoderie à enquiller les heures sup’ sans compter. Au moins, le temps d’attente à la cantine et à la photocopieuse s’en trouve fortement réduit, et il n’y a plus de problème de place au parking des trottinettes électriques. C’est déjà ça.

Ayant obtenu une audience auprès de (son demi-frère ?) Rogal Dorn, avec lequel il entretient des relations aussi fraîches que le bloc Harpic qui orne ses toilettes personnelles, Valdor se rend dans les appartements du Seigneur Commandeur de l’Imperium, toujours escorté de son fidèle Samonas. Comme on peut s’y attendre, l’entrevue se passe assez mal, les deux surhommes se balançant des amabilités au visage sans prendre de gants, énergétiques ou pas. Tandis que le maître des Imperial Fists reproche à son interlocuteur sa roideur confinant parfois à l’autisme, dès lors qu’une directive lui ait été donnée par l’Empereur, ce qui a conduit les Custodiens à contenir seuls les brèches dans les niveaux inférieurs du Palais, alors qu’un retrait stratégique aurait permis d’épargner de nombreuses vies, Valdoche nous joue son air favori du « Oh-mais-vous-les-Primarques-vous-n-êtes-que-des-sales-gosses-pourris-gâtés-et-on-était-bien-mieux-avec-Pépé-avant-votre-naissance2 ». Le sentiment de supériorité de Darth Valdor est toutefois tout ce qui lui reste, Dorn soulignant avec à propos que les pertes subies par les 10.000 ont de facto condamnés ces derniers à jouer les seconds rôles dans le futur siège de Terra, et que le sort de l’Hérésie repose maintenant entre les gantelets des Legiones Astartes, qu’ils soient traîtres ou loyalistes. Bref, la garde aurique n’est plus bonne qu’à assurer le service d’ordre autour de la chaise d’affaires impériale, et doit laisser aux Space Marines la gestion des vrais dossiers.

La virulence des échanges entre la main droite et le poing gauche de l’Empereur n’est pas sans rappeler à Samonas, qui s’ennuie ferme pendant ce crêpage de chignon3, une conversation du même ordre qui avait pris place quelques années plus tôt sur Prospero, lorsque que les Custodiens étaient venus donner un coup de main aux Space Wolves dans le châtiment, que d’aucuns jugent mérités, de Magnus et ses Thousand Sons à la suite du poke un peu trop accentué que ce dernier avait envoyé à son paternel pour lui signaler le comportement déviant d’Horus. Bien que Leman Russ se soit révélé un tout autre animal (autant comparer un malamut à un poisson pierre), le zèle sanguinaire avec lequel le Fenrissien mena l’assaut sur Tizca, et sa volonté sans équivoque de ne pas faire de prisonnier, au mépris des instructions remises par l’Empereur au Capitaine-Général, ne furent pas sans générer des frictions entre les deux envoyés impériaux. Dans ce cas, comme plus tard avec Dorn, Valdor, en tant que Magisterium, disposait d’une autorité théoriquement absolue sur son vis à vis Primarque, mais cela n’a pas empêché ce dernier de n’en faire qu’à sa tête, avec des résultats spectaculaires, à défaut d’être satisfaisants. Et Constantin d’y aller de son petit « Primarque… » méprisant en voyant Russ hurler à la lune sur la grand-place de Tizca après la volatilisation du Cyclope. Décidément, ils n’ont pas les mêmes valeurs.

La nouvelle se termine sur une scène de remparts (comme beaucoup des histoires de Heralds of the Siege d’ailleurs), Valdor enjoignant son sous-fifre porte-cravate de ne pas désespérer que l’Empereur reprenne enfin contact avec ses Custodiens, malgré tous les travaux d’isolation des fondations du palais à terminer avant l’arrivée d’Horus, et qui l’occupent à plein temps depuis maintenant des mois. D’une manière ou d’une autre, la fin approche à grands pas…

1 : Et penser, ils ont tous passé l’agreg’ de philosophie après tout.
2 : Funfact : Sur les 1932 mots titres et qualificatifs gravés à l’intérieur de la cuirasse de Valdor, 93% sont des critiques adressées aux fistons du Patron.
3 : Dorn s’étant laissé pousser les tifs pendant ses sept années de permanence au domicile paternel, il y a largement de quoi faire un manbun.

AVIS :

Pure nouvelle de fluffiste, en ce qu’elle s’avère être beaucoup plus riche en petites révélations et lourdes insinuations de background qu’en action pure et dure, Magisterium est une soumission de qualité de la part de Chris Wraight. Son principal intérêt, et non des moindres pour les amateurs de grandes figures de l’Hérésie (c’est à dire la plupart des lecteurs de la série, soyons honnêtes), est d’apporter quelques os à ronger sur le discret mais crucial Constantin Valdor, et de le faire interagir avec d’autres VIP impériaux. Les bisbilles qui s’ensuivent permettent à Wraight de soumettre quelques concepts intéressants, et de soulever des questions l’étant tout autant, comme celles de l’origine de Valdor et du rôle que lui a attribué l’Empereur, qui semble dépasser celui de simple garde du corps et porte parole officiel de Son Altesse Suprêmissime (bien que la fonction de Magisterium, et les prérogatives qui vont avec, soient déjà une belle source de discussion). La rivalité latente entre l’aîné des surhommes de Pépé et la fratrie primarquielle, qui est venue après, ne sera pas sans susciter quelques folles hypothèses de la part du lecteur, et j’espère bien que l’auteur continuera sur cette prometteuse lancée dans le roman dédié à l’énigmatique Capitaine-Général. En sus, l’état des lieux dressé par Wraight du piteux état dans lequel la Guerre dans la Toile a laissé les Custodiens permet de faire le lien entre cet épisode bien couvert dans les dernières publications de l’Hérésie d’Horus et le Siège de Terra, ce qui est toujours bon à prendre. Bref, une lecture tout ce qu’il y a de plus conseillée pour celles et ceux qui prennent l’Hérésie à coeur.

.

Now Peals Midnight – J. French [HH] :

INTRIGUE :

Now Peals MidnightAlors que l’horloge de l’ApocalypseTM se rapproche furieusement de l’heure fatidique du début de la plus grande bataille de Warhammer 40K de l’histoire de la galaxie, le capitaine de l’équipe loyaliste décide de passer le temps avant le lancement de la clock en se dégourdissant les jambes sur le chemin de ronde qu’il a passé le dernier lustre à bâtir. Rogal Dorn, Prétorien de Terra, a beau se répéter que lui et ses gars (et filles) sont aussi prêts qu’ils puissent l’être, il est difficile d’être certain de rien alors que l’express d’Isstvan V est sur le point d’entrer en gare système, rempli jusqu’à la gueule de félons et de traîtres. Un calme de mauvais augure est d’ailleurs tombé sur Terra, comme si la planète tout entière retenait son souffle dans l’attente de l’arrivée d’Horus et de ses ruffians.

Alors que le Primarque des Imperial Fists boucle son parcours en écoutant le podcast des meilleures prédictions pessimistes et autres maximes déprimantes de l’Hérésie, depuis Malcador dans The Lightning Tower1 jusqu’à Solomon Voss dans The Last Remembrancer2, en passant par… lui-même (il le vaut bien) dans The Crimson Fist3, il fait plusieurs rencontres aussi vides de sens que lourdes d’intérêt, ou peut-être est-ce le contraire. Après avoir demandé à l’astropathe et secrétaire de direction Armina Fel d’organiser un dîner de travail avec ses frangins, il passe une tête au PC Sécurité jauger des conditions de circulation sur le périphérique solaire. Vison Buté voit noir foncé. Zut. Juste le temps de donner sa soirée à l’Amiral Su-Kassen (qui ferait bien d’en profiter pour bingewatcher la saison IV de Stranger Things, elle n’aura plus le temps après), et Jauni est déjà reparti.

Un petit aparté littéraire nous permet de faire la connaissance de Seplin Tu et de son paternel (Tur-Lu’tu), banlieusards impériaux enrôlés de force dans la milice terrane, et qui feront peut-être/sûrement une apparition dans une des prochaines soumissions de French dans cette franchise. Hello Yellow. Retour sur les remparts, où Archamus-3 et Andromeda-17 attendent l’arrivée du taulier en discutant anthropologie et philosophie. On s’occupe comme on peut. Dorn finissant par pointer ses guêtres, le Huscarl et la Devineresse lui emboîtent le pas jusqu’au lieu de rendez-vous avec Sanguinius et le Khan… qui savent déjà ce qu’il avait à leur annoncer, à savoir que la flotte du Maître de Guerre vient de se matérialiser aux confins du système solaire, prélude à la guerre du même nom. La prochaine fois, utilisez Whatsapp les gars, ça ira plus vite.

Enfin, en orbite, dans l’assiette de guerre sur laquelle il est posté, le Capitaine Katafalque reçoit un message privé signé d’un « RD » très peu protocolaire, mais qui n’en contient pas moins une information de (pierre de) taille : l’ennemi vient d’arriver. Corporate jusqu’au bout, Dorn insiste toutefois pour que l’ordre de mobilisation générale ne soit passé dans un premier temps qu’à la 7ème Légion, les White Scars et les Blood Angels bénéficiant d’un léger sursis avant d’être mis au parfum. Pourquoi ? Mystère. Mais comme on le disait chez les tribus Franc à la fin de M2 : « Avant l’heure, c’est pas l’heure… »

1 : ‘He saw this Heresy coming in his visions. That is the truth you fear. You wish you had listened…’
2 : ‘The future is dead, Rogal Dorn. It is ashes running through our hands…’ C’est moche l’auto-citation, John.
3 : ‘You’re no son, you’re no son of maïïïïïne !’ Bon c’est Genesis (We Can’t Dance), mais vous saisissez l’idée.

AVIS :

Je pense que l’apprécation de cette nouvellinette de French variera fortement selon le contexte dans lequel elle sera lue. Prise individuellement, il serait facile (et exact) de souligner qu’il ne se passe vraiment pas grand-chose dans Now Peals Midnight, Dorn se contentant de faire ce qu’il fait depuis les prémices de l’Hérésie d’Horus (The Lightning Tower, 2007) : regarder le ciel d’un air pénétré en fronçant très fort les sourcils. Cette fois-ci, c’est vréééééééééément la bonne, Rogal ! Bien sûr, il a gagné quelques souvenirs et connaissances dans l’intervalle, certains d’entre elles convoquées pour quelques lignes de dialogue, mais dans l’ensemble, rien de nouveau sous la plateforme de défense orbitale. D’un autre côté, si Now Peals Midnight est la culmination du corpus (entier ou partiel) de l’Hérésie, et que le lecteur sait que la prochaine fois qu’il recroisera la route des personnages de la nouvelle (qu’il a appris à connaître au cours de ses précédentes lectures), l’acte final de cette tragédie galactique aura débuté, il y a de bonnes chances qu’il éprouve quelques trépidations de bon aloi en parcourant ces quelques pages. Bref, comme souvent avec ce genre de production purement atmosphérique, time is the essence. J’appose donc la mention « à conserver dans un endroit frais et sec, à l’abri de la lumière, de la chaleur et de la précipitation » sur cette soumission. On connaissait la slow food, nous voilà avec du slow reading. Ce siècle est décidément étrange.

.

The Witch Takers – C. L. Werner [AoS] :

INTRIGUE :

The Witch TakersMis sur une sale histoire de meurtre dans la ruralité profonde du Khanat d’Arkl, en Chamon, les chasseurs de sorcières Esselt et Talorcan, unis à la scène comme à la ville, remontent une piste, forcément chaude, à travers les dunes du désert de Droost. De villages martyrs en tombes profanées et cadavres possédés il ne faut pas longtemps à notre fine équipe pour subodorer que quelque chose de pas sigmarite se cache au fond de ce dossier. Il semblerait que quelqu’un hante Droost avec pour seule mission de massacrer tout ceux ayant le malheur de croiser sa route. Quelqu’un… ou quelque chose, qui asservirait ses hôtes les uns après les autres, passant de main en main et ne laissant que les dépouilles de ses victimes et de ses porteurs derrière lui. Alors que les deux Répurgateurs approchent l’oasis de Tora Grae, miraculeusement épargnée par la folie environnante, il leur faudra agir rapidement et intelligemment pour empêcher le Tournetueur (pun intended) de commettre un nouveau carnage…

AVIS :

C.L. Werner qui met en scène un duo de Répurgateurs embarqués dans une quête qui les conduira dans quelque sinistre recoin de leur « circonscription » : du tout cuit pour l’auteur de la (plutôt bonne) série des Mathias Thulmann me direz-vous. C’est aussi ce que je pensais avant de commencer la lecture de ces Tueurs de Sorcières, et me suis donc surpris à reconsidérer légèrement ce postulat une fois passé le point final. Comme quoi, rien n’est gravé dans le marbre dans ce bas monde. La première divergence notable qui m’est apparue est la relation amoureuse unissant Esselt et Talorcan, ce qui n’a rien de rédhibitoire en soi (et est même suffisamment rare dans une publication de la Black Library pour qu’on puisse au contraire saluer l’audace de l’auteur), mais m’a semblé tellement éloignée des conventions usuelles de ce genre de littérature que mon expérience de lecture s’en est trouvée, pas polluée, le terme serait un peu fort, mais au moins perturbée par les roucoulades échangées par nos héros1. Passées ces considérations romantiques, l’intrigue que nous propose Werner ne s’avère pas être très haletante, la course poursuite par hôte interposé à laquelle se livrent Buffy, Xander et le bracelet perdu de Valkia la Sanglante suivant son cours avec une linéarité décevante, alors que la méconnaissance par nos héros de la nature et de la forme du mal qu’ils ont à combattre ouvrait la porte au développement de fausses pistes. Quant au binôme de choc proposé par l’auteur, il se révèle être d’une décevante platitude, Esselt et Talcoran ne s’écartant pas d’un pouce de leur stéréotype respectif (la paladine zélée et le rôdeur débrouillard), ce qui ne donne pas vraiment envie d’embrayer sur le roman que Werner leur a consacré (Le Cœur Corrompu//The Tainted Heart). Pour terminer, les apports fluff de cette nouvelle se comptent sur les doigts d’une main d’un Zombie de la Peste, le fait qu’elle se déroule dans un bout de désert perdu au milieu de nulle part ne jouant évidemment pas en la faveur d’inclusions significatives (même si ce genre de théâtre d’opérations n’est en rien rédhibitoire pour peu qu’on veuille s’en donner la peine, comme Guy Haley l’a prouvé avec Les Sables du Chagrin//The Sands of Grief). En conclusion, il ne reste guère que le métier de C. L. Werner pour faire tenir ces Tueurs de Sorcières debout, ce qui est suffisant pour une lecture rapide de l’ouvrage, mais à peine.

1 : Quand bien même ces dernières sont restées d’une sobriété bienvenue. C’est ainsi, j’ai du mal à voir des « Mon amour » apparaître dans une nouvelle de la Black Library.

.

Dreams of Unity – N. Kyme [HH] :

INTRIGUE :

Dreams of Unity« Démobilisé » comme ses camarades à la fin des Guerres d’Unification, l’ancien (dans tous les sens du terme) Légionnaire Tonnerre Dahren Heruk s’est reconverti dans le gladiatorat avec une poignée de comparses afin de joindre les deux bouts. L’Empereur n’ayant visiblement pas prévu de plan épargne retraite digne de ce nom en faveur de ses premiers prototypes de post-humains, la joyeuse bande vivote sur les maigres bénéfices des combats auxquels elle participe dans le Swathe, bidonville Terran s’étendant en périphérie du Palais de leur ancien patron. Pour ne rien arranger, les vétérans sont affligés de divers troubles physiques et psychologiques, dont une forme particulièrement vivace et handicapante de PTSD, poétiquement nommée les Rêves d’Unité, qui les mène à revivre leurs souvenirs de bataille comme s’ils y étaient, avec des conséquences généralement fâcheuses pour les quidams évoluant à proximité. Les Blood Angels n’ont vraiment rien inventés.

Ayant été témoin de la mort d’un de ses comparses (Kabe) sur le sable de l’arène, des mains d’un chrono-gladiateur au final desservi par son propre sadisme, Heruk commence sa journée par un peu de manutention, ramenant les restes mortels de son défunt collègue jusqu’au domicile de son dominus et imprésario (Tarrigata), afin de procéder au recyclage, puis à l’incinération de ces derniers. Il part ensuite à la recherche d’un autre gladiateur de l’écurie (Gairok) aux abonnés absents depuis quelques heures, ce qui n’augure rien de bon. Pris en chemin d’une crise de somnambulisme aiguë, il revient à lui dans un bar dévasté du Swathe, où Gairok1 semble avoir organisé une reconstitution hyper réaliste du siège d’Abyssna, avec les piliers de comptoir comme figurants (involontaires). Jugeant son camarade trop atteint pour qu’une autre issue soit possible, Heruk l’euthanasie la mort dans l’âme, et poursuit sa mission de porteur d’os en charriant le cadavre jusqu’au QG de la bande.

Ailleurs dans le Swathe, le SWAT impérial (see what I did there ?) se déploie à grand renfort de gadgets, sous les traits aquilins mais masqués du Custodien Tagiomalchian. Ce dernier a été chargé de trouver et de neutraliser des éléments séditieux opérant depuis les dédales mal famés du bidonville, et se montre très intéressé par le carnage commis par Gairok au café PMU du coin. Alors qu’il est occupé à faire quelques relevés en mode les Experts : Terra, il est violemment attaqué par un agresseur non identifié, ce qui coupe la transmission envers la Tour de l’Hegemon. Sus-pense.

Nous retrouvons Heruk et son poids mort alors qu’ils arrivent enfin en vue de la bicoque de Tarrigata, qui se trouve être en proie des flammes. Décidément, ce n’est pas la journée de notre heruk. Réussissant à extraire son patron des décombres au péril de sa vie, le Guerrier Tonnerre n’arrive pas à lui sous-tirer d’informations vraiment utiles quant à l’identité des petits gougnafiers responsables de cette destruction de propriété privée avant que Papy Tarri’ n’aille rejoindre la droite de l’Empereur. Supputant que l’incident ait pu être causé par une autre crise de delirium tremens du dernier de ses corelégionnaires vivants (Vezulah Vult), Heruk se met à nouveau en chasse, et parvient à débusquer Vivi dans les égouts du Swathe. Ce dernier, également à l’article de la mort, et aveuglé par un Bitch Betcher move réalisé par son assassin, refait le coup du « je meurs avant d’avoir donné la bonne info à mon pote pour préserver le suspens de l’histoire mouahaha- couic » à Heruk. Au moins, l’honneur des Guerriers Tonnerre est sauf, car ce n’est pas Vult qui a foutu le feu aux pénates de son patron. C’est déjà ça. Résolu à tirer ce mystère au clair, et désormais libre de toute obligation professionnelle du fait du décès de tous ses collègues, Heruk poursuit son avancée dans les niveaux inférieurs du Swathe…

Début spoiler…et arrive à temps pour filer un salutaire coup de main à Tagiomalchian, fort occupé à maîtriser un Alpha Légionnaire possédé et son culte de groupies, que l’on devine être responsables du saccage du Balto pendant que Gairok s’en jetait un petit, ce qui lui a fait péter les plombs, et de l’attaque des locaux de Tarrigata… parce qu’il leur devait de l’argent, peut-être ? Toujours est-il que ce sont les méchants de la nouvelle, les vrais, en plus d’avoir été impliqués dans la tentative d’infiltration du Palais Impérial quelque temps auparavant, bien sûr. Prudence étant mère de sûreté, Heruk commence par s’occuper des goons chaotiques pendant que Tag’ et Alpharius (car c’était lui… c’est toujours lui) se roulent par terre en bonne intelligence, écopant de quelques légères blessures mais se montrant si convaincant dans son approche qu’il arrive même à convaincre la meneuse adverse de se suicider plutôt que de l’affronter2. Ceci fait, il ne reste plus à notre increvable vétéran qu’à régler son compte au bossédé de fin, en partenariat avec l’Adeptus Custodes, et en écopant d’une déchirure mortelle au passage (si seulement il s’était souvenu qu’il avait piqué le pistolet à radiations de Tarrigata avant que d’engager le renégat au corps à corps… les ravages de la grande vieillesse). Herruïque jusqu’au bout, notre briscard peut ainsi tirer sa révérence la tête haute, ayant bien mérité un honorable coup de grâce de la part de son camarade de jeu. Dreams are my reality… (air connu).Fin spoiler

1 : Pour être honnête, on ne sait pas trop qui blâmer pour ces troubles de voisinage, Heruk ayant été tout aussi parti que son poto à son arrivée sur les lieux. Dans ces cas là, mieux vaut reporter le problème sur le type d’en face c’est vrai.
2 : Il faut dire que voir un colosse écumant perforer la cage thoracique de Roger de la compta’ à coup de pied ne donne pas en vie d’engager le dialogue.

AVIS :

Cette nouvelle de Kyme s’avère être assez satisfaisante, et plus qualitative que nombre de ses travaux précédents, ce qui est appréciable pour le lecteur et peut laisser à penser que notre homme s’améliore au fil du temps. Tant qu’il y a de la vie… En plus de la généreuse dose de fluff relative aux Guerriers Tonnerre dont nous bénéficions ici, le petit thriller mis en scène par Kyme quant à l’identité des proies traquées par Tagiomalchian tient plutôt bien la route, dès lors qu’on ne le regarde pas de trop près. À titre personnel, j’ai trouvé que l’auteur s’inspirait lourdement des travaux de certains collègues (le Custodes est un clone Kymesque du Tauromachian d’Abnett dans Blood Games, le crachat venimeux un emprunt au Talos d’ADB), ce qui peut peut-être expliquer pourquoi cette soumission est de meilleure facture que d’ordinaire. La tendance de Kyme à saboter l’exécution d’idées pourtant intéressantes par la non prise en compte de détails mineurs (affliction baptisée annandalisme par votre serviteur) vient toutefois fragiliser l’édifice1, ce qui est dommage mais pas surprenant. Mais on progresse, on progresse…

1 : Exemple gratuit, le chrono-gladiateur du début de la nouvelle est d’abord décrit d’une telle manière à ce que le lecteur croit qu’il s’agit d’un Custodien (ce qui ferait sens car ce sont eux qui ont massacrés les Guerriers Tonnerre sur l’ordre de l’Empereur). Ce quiproquo assez malin est affaibli par le choix de Kyme de faire de son antagoniste un tueur sadique, qui prend son temps pour tuer sa victime au lieu de l’achever efficacement. Pour un guerrier vivant littéralement sur du temps emprunté, une telle procrastination est en effet très improbable.

.

The Old Ways – N. Horth [AoS] :

INTRIGUE :

Callis and Toll_The Old WaysAffecté à la surveillance de la cité d’Excelsis, dans le royaume de Ghur, le répurgateur de l’Ordre d’Azyr Halliver Toll, escorté de son sidekick Armand Callis, est envoyé par ses supérieurs tirer au clair une sombre histoire de disparition à Marshpoint, une ville agricole située en périphérie de la Cité des Secrets. Le fils aîné de la puissante famille Junica n’a en effet plus donné signe de vie après avoir eu maille à partir avec quelques soldats de l’autre grande famille locale, les Dezraed, qui l’ont poursuivi jusque dans les profondeurs de la forêt d’Ulwhyr. L’entente entre Junica et Dezraed n’ayant jamais été cordiale, c’est une vendetta en bonne et due forme qui menace d’éclater entre les Capulet et les Montaigu de Ghur, gueguerre qui mettrait en péril l’approvisionnement des régiments d’Excelsis en précieuse soie d’acier, ressource collectée depuis les fermes arachnides de Marshpoint. Il va donc de l’interêt général que cette triste affaire soit réglée dans les meilleurs délais, et qui de plus qualifié qu’un répurgateur pour traiter ce problème ?

Nous suivons donc Thalys et Colle au cours de l’enquête à laquelle ils se livrent à leur arrivée dans le bourg miteux et boueux de Marshpoint. Après un interrogatoire croisé des patriciens des deux familles, l’énorme et suintant Fenrol var Dezraed, autoproclamé Gardien de Marshpoint du fait de sa capacité de bloquer à lui seul l’entrée de la ville s’il lui prenait l’envie de s’asseoir en travers du portail, et le sec et irritable Kiervaan Junica, nos experts se rendent sur les lieux de la disparition à proprement parler, escortés par l’homme de confiance du patricien Junica, un natif du nom de Ghedren, et par un trio de gardes Dezraed. Et s’il se pourrait bien que la rivalité larvée entre familles nobles ait bien fait couler le sang, les enquêteurs feraient bien de prendre au sérieux les rumeurs entourant la Sorcière Blanche d’Ulwyhr. Après tout, ils ont pénétré sur son domaine…

AVIS :

C’est avec enthousiasme que j’avais vu revenir la figure iconique du chasseur de sorcières/répurgateur dans le lore d’Age of Sigmar, que son inclinaison high fantasy aurait pu « immuniser » à l’introduction de ce type de personnage, très grimdark par nature. La lutte contre les cultes chaotiques gangrénant le nouvel ordre rutilant de Sigmar constitue en effet à mes yeux un axe de développement des plus intéressants, et une prise de recul bienvenue sur le manichéisme caractéristique des premières années d’AoS. Encore fallait-il que l’image d’Epinal Hammerhal de l’inquisiteur traquant le vice et la trahison parmi les sujets obéissants de l’autorité centrale (préférablement divine, c’est plus classe) soit convenablement adaptée dans cette nouvelle franchise, la profession en question exigeant une rigueur morale confinant à la psychose, ce qui n’est pas franchement la norme parmi la soldatesque sigmarite (ces martel-sans-rire de Celestial Vindicators mis à part), dépeinte à de nombreuses reprises comme adepte du compromis et de la tempérance. Qu’en est-il avec la paire Callis & Toll, promise à un bel avenir au sein de la BL à en juger de la façon dont leurs noms ressortent dans tous les ouvrages auxquels ils ont été inclus ? Eh bien, c’est plutôt pas mal, encore que pas spécialement pour les raisons détaillées ci-dessus. Je m’explique.

Si le fanatisme (dans le bon sens du terme, car, si si, dans la littérature med-fan, cela existe) de nos héros laisse à désirer, la retenue dont fait preuve Toll, sensé être le vrai bad guy du duo, dans le jugement qu’il délivre au coupable, le plaçant à un petit 2 sur l’échelle de Mathias Thulmann (le référentiel absolu de la maison à cet égard), Horth se rattrape néanmoins en glissant quelques remarques de bon aloi à propos d’un certain White Reaper (Cerrus Sentanus sur son état civil), Stormcast Eternal pas vraiment Charlie, à tel point que son nom est utilisé pour effrayer les enfants d’Excelsis. Voilà un type qui mérite que l’on suive, et j’espère bien que ça sera le cas dans un futur pas trop lointain. Celà étant dit, The Old Ways a d’autres qualités, la première étant de proposer une petite enquête policière pas trop mal troussée au vu du nombre de pages limité avec lequel elle doit composer1, l’atmosphère horrifique du passage « sylvestre » du récit étant une autre source de satisfaction. D’autre part, cette nouvelle présente également l’intérêt de creuser le background de la cité libre d’Excelsis, qui devrait normalement ne pas disparaître corps et bien dans les annales du fluff, au vu du nombre d’apparitions qu’elle a faite dans divers écrits depuis son introduction dans le background. En apprendre plus sur cette bourgade présente donc un intérêt pour le fluffiste, tellement bombardé d’informations géographiques par ailleurs qu’on ne peut lui reprocher de ne pas prendre note de tout ce qu’on lui soumet.

Enfin, de façon plus large, elle fait ressortir un concept intéressant : le fossé existant entre natifs d’Azyr et populations locales au sein des cités libres, les seconds étant généralement mal considérés, voire méprisés par les premiers, qui les qualifient « d’Amendés » (traduction personnelle de Reclaimed, qui peut aussi s’entendre comme « Récupéré ») ou de « Sang Maudit » (curseblood), ce qui n’est pas très sympathique, mais ajoute de la profondeur à la société sigmarite. Quand on lit que même un personnage « égalitariste » comme Toll n’aurait pas de problème à raser toutes les forêts de Ghur pour pouvoir accélérer la colonisation de ce Royaume, au grand désarroi des locaux qui ont appris à vivre dans les étendues sauvages et à les respecter, on se dit que la possibilité d’un soulèvement des indigènes contre la métropole et ses représentants est une possibilité réelle… et c’est tant mieux en termes de potentiel narratif ! Bref, une plongée satisfaisante dans l’arrière-pays d’Excelsis, et une nouvelle qui vaut le coup d’être lue pour qui s’intéresse au fluff des cités libres.

: On saluera également le twist proprement « meta » de Horth, qui fait dire à Toll qu’il avait identifié le coupable depuis belle lurette et attendait juste de voir combien de temps il faudrait à Callis (et donc au lecteur) pour faire de même. On ne me l’avait jamais faite celle-là.

.

The Battle for Markgraaf Hive – J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE :

The Battle of Markgraaf HiveComme les plus sagaces des lecteurs de cette chronique l’auront certainement deviné, la nouvelle du sieur Hill traite donc de la bataille pour la ruche Markgraaf1, opération de reconquête et pacification à laquelle l’unité de Minka Lensk, héroïne récurrente de l’auteur, à le plaisir et l’avantage de participer, en compagnie du \[|{™#{ème Cadien (comprendre qu’entre les pertes au combat non remplacées et les fusions régimentaires qui s’en suivent, les numéros défilent plus rapidement que lors d’une soirée bingo à l’Ehpad de Bois-Robert-sur-Veule).

Au menu de ce qui peut sans doute être considéré comme un séminaire annuel pour les derniers des Targaryen – cette manie de coller des yeux violets aux protagonistes pour les distinguer de la masse… –, une activité de team building dans les ténèbres des niveaux inférieurs de la ruche en question, avec les habituels cultistes hargneux-mais-bon-ça-va-on-a-vu-pire en lieu et place des assiettes en céramique à décorer, qui étaient à la mode en ce genre d’occasions quelques millénaires plus tôt. Une fois la séance initiale de laser game terminée, on enchaîne avec une découverte de la faune locale, qui consiste en des rats de la taille d’un rat et des asticots de la taille d’un chien (appelons-les maxticots), suivie par une session d’aqua-relax dans un bassin naturel, sous les ordres d’un Commissaire-Nageur un brin autoritaire.

À peine le temps de réaliser que les maxticots ne font pas de bons candidats au fish pédicure, à moins d’être un Ogryn peu chatouilleux, qu’il faut enchaîner avec une initiation à l’escrime médiévale/escape game sous la houlette de Philippe Chaos-therine (il coupe sa hache… et il rallume sa hache…), Space Marine renégat reconverti en coach de vie. Cette journée intense se termine par quelques longueurs de brasse coulée, un temps calme de 10 minutes devant une œuvre d’art moderne convenablement moche, et un ultime passage au hammam (mais habillé, ce qui est concept). Ce n’est pas tout le monde qui a la chance de vivre des séminaires aussi riches. Merci qui ? Merci Abby !

À ne pas confondre avec la ruche Steffigraaf, qui malgré quelques revers, est toujours au service de l’Empereur.

AVIS :

Propulsé directement dans le feu de l’action dès les premières lignes de The Battle… (au moins, le titre n’est pas mensonger), le lecteur aura sans doute quelques difficultés à comprendre les tenants et les aboutissants de cette successions de péripéties aussi guerrières que brouillonnes, expédiées sans tact, ni finesse, ni connecteurs logiques (ce qui surprend au début, irrite au milieu, et fait marrer à la fin) par un Justin Hill aussi maître de son propos qu’un élève de CM1 couchant par écrit le récit de ses vacances de printemps.

Si le début de la nouvelle fait illusion, tout se corse à l’arrivée sur la mare aux maxticots, théâtre d’une empoignade confuse, suivi de l’arrivée d’un groupe de survivants – dont un Valhallan, qui passait dans le coin – mené par un Commissaire, suivi de l’exécution d’un Garde qui trouvait l’eau trop froide, suivi de l’arrivée du random Chaotic Space Marine de base, suivi d’une ré-empoignade confuse, suivie d’une fuite éperdue de l’héroïne jusqu’au fond du bassin, suivi d’un questionnement philosophique sur la destinée des Cadiens survivants, suivi d’un séchage express, inexpliqué et interprété comme miraculeux par une Minka à laquelle il ne faut pas grand chose, des vêtements de nos héros, suivi de la fin du récit, qui s’achève donc davantage comme un chapitre de roman qu’un court format digne de ce nom, faute d’un dénouement digne de ce nom (sauf si être coincé à deux sans matos dans une caverne inondée peuplée de vers carnivores géants et squattée par des hordes d’hérétiques peu aimables et un Space Marine du Chaos altéré de sang constitue un explicit satisfaisant, bien sûr1).

Pauvre en termes de fluff, d’informations sur le passif de Mina Lensk, et d’une assez grande banalité dans son propos, The Battle… lorgnait peut-être du côté de la saga Gaunt’s Ghosts, et notamment du siège de Vervunhive couvert dans Necropolis, pour son inspiration, mais le fruit (plein d’asticots, donc) est tombé trèèèès loin de l’arbre. Pour laisser le mot de la fin, en même temps que du début, car j’aime bien boucler des boucles sur mon temps libre, à Hill en personne : « What the hell is happening ? »

1 : Si c’est le cas, vous êtes bizarre.

.

A Brother’s Confession – R. MacNiven [40K] :

INTRIGUE :

A Brother's ConfessionSur la barge de bataille Ultramarines Spear of Macragge, l’Apothicaire Primaris Polixis se rend à confesse pour expier le crime qui lui pèse sur la conscience depuis le dernier engagement auquel il a participé aux côtés de ses comparses de la Fulminata, contingent de Necmarines1 rattaché au Chapitre natal de ce bon Roboute. Et quel crime ! Rien de moins que le meurtre d’un de ses frères de bataille, l’infortuné Artimeus Tulio. Avant que le sévère Chapelain Kastor, qui se trouve être le véritable frère de Popol (d’où la subtile référence mythologique que le lecteur sagace n’aura pas manqué d’identifier) et auquel pleins pouvoirs sont laissés pour traiter cette affaire, ne délivre son jugement, un petit flashback explicatif des familles (et pour cause) s’impose…

Nous voilà donc sur Atari, planète renommée dans tout l’Ultima Segmentum pour la rectitude de ses arcades et la qualité de ses bornes, et plus précisément dans le manoir du gouverneur local, où les Fulminata sont engagés dans une furieuse partie de FPS contre des hordes de cultistes de Tzeentch. Le monde est en effet la proie à une rébellion caractérisée contre la sainte autorité de l’Empereur, et la situation est suffisamment mal engagée pour que les grands bleus se retrouvent engagés dans une course contre la montre pour mettre le gouverneur De La Sario en sécurité, ou a défaut, lui coller un bolt dans le caisson, afin d’empêcher les dissidents chaotiques d’activer les plateformes orbitales de la planète, verrouillées génétiquement sur le profil du dirigeant légitime d’Atari.

Accompagnant une escouade d’Intercessors sur place, Polixis se trouve confronté à un choix difficile : voler à la rescousse de ses frères, dont certains ont été grièvement blessés par un assaut de cultistes à la férocité imprévue, à l’autre bout du palais, ou battre en retraite en compagnie des hommes du Sergent Nerva, comme ce dernier, le bon sens, et jusqu’au Codex Astartes le préconisent. Confiant en l’épaisseur de son armure en scenarium renforcé, l’intrépide Apothicaire décide de taper un sprint jusqu’à la position des surhommes à terre, ce qu’il parvient à faire sans trop de difficultés. Il est cependant déjà trop tard pour le pauvre Scaevola, plus perforé qu’une copie double à la sortie de la presse, et dans un état trop désespéré pour que Polixis ne puisse lui accorder autre chose que la Paix de l’Emper- ah, non, visiblement il n’y a même pas le temps pour ça, et c’est donc à une ablation de ses glandes progénoïdes pre-mortem (en atteste le fait que Polixis ait besoin de clamper l’incision cervicale pour éviter que la plaie se referme trop vite) à laquelle le doublement malchanceux Scav’ a droit. Il y a des jours comme ça…

L’affaire réglée en moins d’une minute, qui a dû tout de même paraître très longue au patient opéré2, Polixis, décidément très joueur, opte pour une action d’arrière garde afin de s’enquérir de la santé du dernier membre de l’escouade, qui se trouve être le fameux Tulio. Pendant que ses petits copains, qui ne connaissent ni la peur, ni la témérité, se replient sagement vers le point d’extraction, notre héroïque Apothicaire se glisse jusqu’à la position de Tutu, qui git dans une mare de sang et un monceau de cultistes du mauvais côté d’un pas de tir chaotique. Pas de quoi arrêter Polixis, que son statut de personnage principal racontant un flashback rend confiant quant à sa capacité de braver la mort, n’eut été la présence im- ou o- pportune de la fille du gouverneur de l’autre côté de la pièce. Cette dernière pouvant tout autant que son pôpa donner aux Ultramarines l’accès à la plateforme orbitale, c’est à un nouveau dilemme que Polixis doit faire face. Il ne peut en effet secourir qu’un des deux individus susnommés, et c’est peu dire que ses cœurs balancent. Optant finalement pour la fille (chez les Ultras, c’est pas « bros before hoes » donc), il récupère le précieux colis et repart enfin vers la sécurité du Thunderhawk garé en double file à l’extérieur du palais, les quelques blessures qu’il récolte au passage n’étant pas assez graves pour l’empêcher de mener sa mission à bien.

Et nous voilà de retour sur le Spear of Macragge, où l’inflexible Kastor doit bien se demander ce qu’il a fait pour avoir un tel Mary Sue comme frangin. Car non, Polixis n’a pas tué Tulio. Son « crime » est d’avoir sciemment abandonné le patrimoine génétique d’un frère tombé au combat, pour accomplir une mission qui lui semblait plus importante sur le moment. Oh mon Empereur, mais c’est absolument terribleuh ! Et Kastor de broder une jolie parabole sur le sauvetage d’un chiot tombé dans la rivière quand lui et Polixis étaient gamins, afin de convaincre son fragile de frère qu’il n’a rien fait de rédhibitoire. À se demander comment il a réussi à gagner sa carapace noire avec cette sensibilité malvenue. Je te l’enverrais vers un stage d’endurcissement chez les Iron Hands ou les Marines Malevolent, moi. MauviBleuette, va.

1 : Car comme le dit l’expression : « Nec plus ultra ».
2 : D’autant plus que le Sergent décide une fois les glandes extraites de repartir avec le corps de Scaevola. Sauf perissabilité extrême des progénoïdes, ce qui serait étonnant vu la résilience généralisée d’un Space Marine, on peut donc plaider la cause de l’acharnement thérapeutique sur le pauvre bougre.

AVIS :

Malgré une introduction prometteuse, augurant d’un fratricide en bonne et due forme commis par le plus insoupçonnable des coupables (un Primaris Ultramarine : plus droit dans ses bottes que ça, c’est un chausse-pied), cette courte nouvelle de McNiven se révèle être au final composée à 50% de bolter porn, et à 50% de publicité pour les organes supplémentaires des Primaris. À croire que le déclenchement de la Fournaise Belisarienne du frère Posthumus constitue une information cruciale à transmettre lorsqu’on est sous le feu ennemi. L’occasion pour les fans de Bonnet Bleu et Bleu Bonnet, héros du roman Blood of Iax/Le Sang d’Iax de retrouver les frangins dans un contexte un peu différent, mais qui ne devrait, sauf erreur de ma part, pas fondamentalement changer la vision que le lecteur a de nos deux larrons. Pas désagréable, mais très loin d’être indispensable.

.

The Tainted Axe – J. Reynolds [AoS] :

INTRIGUE :

The Tainted AxePeu de temps après les événements relatés dans ‘Spear of Shadows’, nous retrouvons le chevalier – ou plutôt, demigryphier – Roggen de Ghyrwood March, de retour en Ghyran avec une main en moins et des souvenirs en plus. Ayant refusé l’offre de Grugni de remplacer son membre manquant par une réplique mécanique, au profit d’une solution plus naturelle, notre héros n’a toutefois pas trouvé chaussure à son pied ni prothèse à son moignon. Sa convalescence prend un tour particulier lorsqu’il se sent appelé une nuit dans le bosquet de ferbois consacré de son ordre, où l’attend une Branchwraith mutine, avec une nouvelle quête divine à lui confier.

Loin au Sud se trouve le Gaut Tors1, une forêt qui a cruellement souffert des déprédations de Nurgle et des ses séides au cours des dernières années. Un champion du Dieu des maladies y a jadis mené une expédition corruptrice, dont il n’est jamais revenu mais qui a résulté en l’abandon de sa hache maudite sous un tas de feuilles. Depuis lors, cette arme maléfique corrompt les bois aux alentours, comme une pile au mercure enterrée dans l’humus. La mission de Roggen consistera donc à localiser cette relique impie et à la ramener à sa commanditrice, qui en échange de ses bons et loyaux ordonnés services lui fera pousser une nouvelle menotte. Bien que notre héros ne soit pas né de la dernière pluie, et se méfie à juste titre des fantasques Sylvaneth, le serment d’allégeance à Alarielle qu’il a prêté en devenant chevalier, et l’attrait de retrouver la main, le convainquent rapidement d’accepter cette quête. Avant de retourner écouter pousser les fleurs, la Branchwraith a l’amabilité de lui adjoindre les services d’un sherpa forestier, en la personne compacte mais grincheuse d’un esprit de la forêt.

Nous suivons alors Roggen, son guide mal-luné (il passe son temps à appeler le chevalier « viande », ce qui n’est guère aimable) et sa farouche monture (Harrow) jusque dans les profondeurs mal famées du Gaut Tors. Bien que sa patronne lui a promis qu’il aurait un droit de passage auprès des Sylvaneth du cru, le fait que ces derniers soient perturbés par les émanations toxiques de la hache perdue d’une part, et leur allégeance à nulle autre que Drycha Hamadreth d’autre part (un petit détail que la Branchwraith avait omis de préciser à son prestataire pendant le briefing), n’incitent pas Roggen à la détente de son slip (en bois, comme le reste de sa garde-robe). Le trio finit toutefois par arriver dans une clairière, où un petit groupe de Rotbringers est à pied (gangréné) d’œuvre, et vient d’exhumer une sorte de cocon de racines calcifiées, qui ne peut être que le réceptacle de cette fameuse hache.

Confiant dans ses capacités de bretteur et l’effet de surprise, Roggen fonce dans le tas avec abandon, mais se retrouve rapidement en difficulté, notamment du fait que ses adversaires ont apporté avec eux des arbalètes, ce qui n’est pas très fluff tout de même. Avant que l’impétueux chevalier n’ait été transformé en hérisson manchot (ce qui vaut mieux qu’un échidné pingouin, qu’on se le dise), une voix tonitruante vient intimer aux Nurgoons de cesser le feu. Il s’agit du Blight Knight qui commande l’expédition des prouteux, et qui, en véritable chevalier de l’ordre de la mouche, propose à Roggen de régler l’affaire par un duel tout ce qu’il y a de plus honorable, et au gagnant le loot. N’ayant pas de meilleure option sous la main, notre héros accepte la proposition de son adversaire (Feculus), et les deux champions se mettent sans tarder à l’ouvrage.

Si sa monture parvient sans mal à vaincre le destrier démoniaque de sa Némésis, Roggen éprouve quant à lui les pires difficultés à tenir tête à cette dernière, qui est à la fois plus forte et plus résistante que lui. Au bout du compte, il faudra l’intervention, pas vraiment fair play mais très secourable, de son sidekick végétal (qui utilise l’attaque airbark) pour que Roggen parvienne à vaincre l’ignoble Feculus. La mort de leur patron libère toutefois les Rotbringers de leur serment de non-intervention, et le chevalier Dubois n’aurait pas fait long feu sans l’arrivée à point nommée des Sylvaneth du Gaut Tors, qui se font un plaisir d’offrir une démonstration de bio compostage express à leurs ennemis honnis. Cela laisse le temps à Roggen de repartir avec sa relique rouillée, et de se retrouver en bout du compte avec une greffe maniable. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.    

1 : Je ne sais pas si cette nouvelle a été traduite en français, mais je suis hyper fier de ma proposition (Writhing Weald en VO).

AVIS :

On ne le savait pas encore à l’époque de sa publication, mais ‘The Tainted Axe’ constituait la dernière apparition du chevalier Roggen de de Ghyrwood March, l’un des personnages attachants1 créés par Josh Reynolds dans le cadre de sa saga – laissée inachevée – des Lamentations de Khorne. Si cette péripétie mineure ne se place pas parmi les meilleures soumissions de notre homme, on y retrouve toutefois les points forts habituels de sa prose, à savoir des personnages intéressants (mention spéciale au jovial Feculus, que l’on retrouve cité dans les écrits consacrés par Reynolds à l’ordre de la mouche), une intrigue et un développement qui tiennent la route, et une généreuse dose de fluff pour napper le tout. Des nouvelles comme ça, je pourrais en lire 10 par jour sans me lasser. A mettre entre toutes les mains (haha).

1 : Notamment parce qu’il a pas mal de traits communs avec Erkhart Dubnitz, du très saint et très violent ordre de Manann, un des héros les plus hauts en couleurs de la Black Library.

.

Fireheart – G. Thorpe [40K] :

INTRIGUE :

FireheartEnvoyée par Yvraine comme émissaire auprès des Eldars du Saim Hann afin d’obtenir de l’aide dans la quête des mondes de Morai-Heg, la Céraste Druthkala Shadowspite (Drudru pour les intimes) a bien du mal à convaincre ses hôtes de prêter une oreille pointue attentive à ses doléances. Car étonnamment, les Zoneilles sont égoïstes et mesquins. Qui l’eut pensé, vraiment ? Alors que les Clans réunis en assemblés dans le bois de Vincennes du Vaisseau Monde n’en finissent plus de se crêper le chignon, et que Druthkala tue le temps, faute de mieux, en imaginant les sévices qu’elle pourrait infliger à ses lointains cousins, Nuadhu du Clan Fireheart fait son apparition, en retard comme à son habitude. Bien que seulement héritier putatif du Clan, l’état végétatif de son père lui donne le pouvoir de décider à sa place, et un seul regard sur les courbes généreuses et l’armure minimaliste de la diplomate Ynnari convainquent notre dalleux de héros qu’il doit lui venir en aide pour s’en faire bien voir, et plus si affinités. Le choix d’Yvraine d’envoyer une bombasse plutôt qu’un érudit fait tout d’un coup plus de sens…

La mission de Shadowspite et de ses nouveaux amis est assez simple : mener une reconnaissance sur le monde vierge d’Agarimethea, où un vaisseau Exodite patiente en double file orbitale depuis quelques semaines, ce qui indique que quelque chose ne tourne pas rond à la surface. Après un petit go fast dans la Toile, dans la plus pure tradition des Wild Riders, les bikers au serpent arrive sur place, où ils ne mettent pas longtemps à repérer un complexe Necron défigurant le paysage champêtre, comme un magasin Bricodépôt construit au milieu d’un parc naturel. La présence de l’ennemi primordial des Eldars sur une planète qui devrait pourtant être exempte de toute souillure provoque des réactions mitigées dans la compagnie. Ceux qui réfléchissent avec le cerveau (Caelledhin, la demi-sœur du héros) sont pour une retraite prudente, ceux qui réfléchissent avec un autre organe (Nuadhu, qui n’en finit plus de baver sur les jambes de Shadowspite) insistent pour aller jeter un œil sur site, afin de peut-être trouver une arme qui pourrait aider les Eldars dans leur lutte contre les Necrontyr. Nuadhu étant techniquement aux commandes (même si cet incapable a laissé le pilotage de sa Vyper à son chauffeur de fonction), l’expédition fait fi de toute prudence et va se garer devant la pyramide principale. Bien évidemment, le calme qui baigne les lieux n’est qu’apparent, et lorsque Nuadhu pose la main sur la surface inerte du monument aux des morts, une alarme se déclenche et le ciel se remplit bientôt de tirs de désintégrateurs et d’aéronefs Necrons.

La fuite éperdue qui s’en suit voit la disparition tragique d’un certain nombre de cousins Fireheart, victimes des tirs ennemis, du relief ou du troupeau de dinosaures local (obligatoire sur un monde vierge). J’imagine qu’il en reste encore plein de là où ils viennent, et on ne pleurera donc pas trop sur leur sort. Les Eldars, bien diminués par la tournure qu’ont pris les événements, et la stupidité crasse de leur chef, jurent toutefois de revenir pour rendre aux Necrons la monnaie de leur pièce, ce qui sera fait dans ‘Wild Rider’/’Le Cavalier Rebelle’, le deuxième bouquin consacré aux suivants d’Ynnead par Gav Thorpe.

AVIS :

Je dois avouer tout de suite que je n’ai pour le moment pas réussi à m’intéresser aux Ynnari, ce qui est un handicap pour qui veut effectuer une chronique impartiale d’une nouvelle consacrée à cette nouvelle faction de 40K. Toutefois, même si les cultistes d’Ynnead avaient bénéficié de ma légendaire bienveillante neutralité, je pense que mon jugement de ce ‘Fireheart’ serait resté sévère. Il n’y en a en effet pas grand-chose à tirer de cette histoire, mis à part quelques fragments de fluff sur l’organisation et la culture de Saim Hann, et le nom du canasson de Khaine, ce qui n’est pas lourd. Pour le reste, on assiste à un festival de gaffes, puis de baffes, provoqué par l’incompétence notoire de Nuadhu, dont la concupiscence irréfléchie mettra Saim Hann en danger, et, surtout, donnera à peu de frais à Thorpe le pitch d’un de ses bouquins. C’est à une nouvelle purement et crânement utilitaire que nous avons affaire ici, qu’il convient de lire à l’extrême limite en prologue de ‘Wild Rider’ et c’est bien tout.

.

The Dance of the Skulls – D. Annandale [AoS] :

INTRIGUE :

The Dance of the SkullsInvitée à honorer de sa présence un bal donné par la reine Ahalaset et le seigneur Nagen dans la cité de Mortannis, Nefarata se doute bien que cet évènement mondain n’est qu’un prétexte commode pour permettre à ces deux grandes lignées d’agir à ses dépends, ce qui ne l’empêche pas d’accepter gracieusement de se rendre sur place, n’ayant de toute façon rien d’autre de prévu ce soir là. Voyant d’un mauvais oeil le rapprochement s’étant récemment opéré entre Ahalaset et Nagen, la Mortarque de Sang suppute avec raison qu’un piège va lui être tendu, et se réjouit d’avance de cette (més)aventure, le quotidien de Nulahmia devant apparemment être assez terne.

Après avoir été accueillie avec tout le faste et la pompe liés à son r/sang (et infligé rateau sur rateau à ce pauvre Nagen, auquel elle promet toutefois une danse plus tard dans la soirée1), Neffie se voit proposer par son hôte une dégustation privée de crus tirés de l’hématothèque personnelle d’Ahalaset, ce qui ne se refuse pas. Guidée jusqu’à un salon lounge où l’attendent une dizaine d’esclaves qui s’appellent tous Mathusalem ou Réhoboam, notre rusée vampire à tôt fait d’identifier l’aiguille d’argent se terrant sous la roche, en l’occurrence un assassin assermenté doté d’une fourchette à escargot à la place du bras (c’est la mode à Hammerhal). Ayant raté son test d’Initiative, le faquin est toutefois aisément neutralisé par sa victime supposée, qui l’attache à son service d’un langoureux battement de cils. Satisfaite de la tournure prise par les évènements, et comme toute quinqua-millénaire de la bonne société après une dure journée de labeur, Neferata s’accorde un petit verre (et fracasse au passage toutes les « bouteilles », qui espéraient peut-être qu’on les laisse tranquille le temps qu’elles refassent le plein) aux frais de ses hôtes avant de revenir se joindre à la fête.

Là, il est temps pour la Lahmiane de porter l’estocade aux traîtres débusqués, et en musique s’il vous plaît, la danse des crânes consentie à ce benêt de Nagen donnant amplement le temps à notre héroïne de cimenter sa victoire en enchantant légèrement son cavalier, qui ne trouvera rien de plus malin lorsque l’assassin d’Ahalaset viendra sonner les douze coups de minuit à son ancienne patronne à l’aide de son argenterie intégrée, de lancer sa devise dans le silence de mort (héhé) qui s’ensuit. Cette dernière tombera à plat comme la totalité de ses blagues, et, mal comprise par la garde de la reine défunte, aura des conséquences tragiques pour notre pauvre Nagen. Un verre ça va, trois verres…

1 : En même temps, cette coquetterie de laisser dépasser une canine par dessus sa lèvre inférieure ne doit pas aider à lui donner un air très intelligent.

AVIS :

C’est peu de chose de dire que la prose de Herr Annandale n’était pas tenue en haute estime de ce côté du clavier, depuis la chronique de ses débuts pour la BL (The Carrion AnthemHammer & Bolter #11) jusqu’à aujourd’hui. Les choses ont légèrement évolué avec cette Danse des Crânes, qui s’affirme facilement comme la meilleure soumission de notre homme que j’ai pu lire à ce jour. Certes, on parle ici en progrès relatif plutôt qu’en performance absolue, cette courte nouvelle ne se comparant guère aux travaux d’auteurs que je considère être plus méritants que David Annandale, Abnett, Dembski-Bowden, Farrer et Fehervari en tête, pour n’en citer que quelques uns (la liste serait assez longue sinon), mais j’aurais trop beau jeu de ne pointer que les trous dans la cuirasse ou les défauts dans la raquette des travaux de ce régulier de la BL, si je ne soulignais pas également les sources de satisfaction à la lecture de ces derniers. L’Empereur sait qu’ils sont encore rares à cette heure.

Alors, quels sont les éléments positifs de La Danse des Crânes ? Pour commencer, une absence de ce que l’on peut presque appeler une « annandalerie », terme forgé par votre serviteur et désignant une mauvaise, grossière ou grotesque exploitation d’une idée de départ pourtant assez sympathique, pour des résultats évidemment décevants. Le huis-clos victorien qui nous est proposé ici ne pêche ainsi pas par excès de zèle ou manque de structuration, les péripéties s’enchaînant de façon tout à fait convenable et crédible, ce qui pourrait sembler aller de soi mais n’était pas gagné d’avance au vu du pedigree de l’auteur. On sent que ce dernier a réfléchi à la manière dont il devait dérouler son récit pour que le plan alambiqué de Nefarata puisse se dérouler sans (trop) d’accroc, et même si l’usage d’un petit TGCM en fin de nouvelle pour parfaire le triomphe de Mama Lahmia peut être noté, c’est finalement peu de chose comparé aux problèmes structurels émaillant quelques unes des précédentes soumissions de David Annandale.

Autre source de contentement, la description intéressante qui nous est faite de la haute société mort-vivante, nid de vipères aux crocs acérés et n’hésitant pas un instant à comploter pour précipiter la chute de leurs prochains, alors même que les ennemis extérieurs se comptent par milliers, et qu’un brin de solidarité entre macchabées ne serait pas de trop pour défendre le pré carré de Nagash. Le fait que cette société, mêlant vampires et humains à tous les échelons, apparaisse comme fonctionnelle et pérenne (en même temps, c’est bien le minimum quand on est immortel) est une autre réussite d’Annandale, qui parvient à donner un volume fort bienvenu à une faction qui jusque là se réduisait à des légions de squelettes traînant leur mélancolie dans des déserts violacés. On peut s’amuser aussi en Shyish, telle est la morale de cette petite histoire.

.

The Board is Set – G. Thorpe [HH] :

INTRIGUE :

The Board is SetSur le sol de cette bonne vieille Terra, les armées loyalistes se préparent à recevoir comme il se doit le retour du fils indigne et de sa bande de potes, dont on entend déjà les « boum boum boum » crachés par les enceintes de leurs Clio tunées résonner depuis le parking de la copropriété, brisant le calme légendaire du quartier1. Comme le petit vieux acariâtre qu’il est, Macaldor, après avoir balancé une ou deux références que les moins de 20.000 ans ne peuvent ni connaître, ni comprendre, s’en va en grommelant dans sa barbe psychique que Dorn est définitivement une grande et jaune godiche, et que son obsession pour les briquettes et les portails électriques n’est qu’une lubie de jeune crétin. Ca tombe bien, notez, c’est l’heure de la coinche à l’EHPAD Bon Séjour, et le Mac’ ne raterait pour rien au monde ce moment de la journée.

À peine a-t-il fini d’installer la table que son acolyte de jeu révèle (you see what I did there…) sa présence et engage sans plus tarder les hostilités. Dans les ténèbres mi-obscures du 31ème millénaire, l’antique jeu de belote se joue en effet à deux plutôt qu’à quatre, et sur un plateau de jeu avec figurines en plus du traditionnel paquet de cartes. En fait, ça ressemble furieusement à une version Shadespirée des échecs, et ça a l’air donc vachement cool, d’autant plus que toutes les pièces se trouvent être des représentations des Primarques engagés dans l’Hérésie d’Horus2. Comme à chaque partie depuis leur internement respectif, Pépé et… Mémé ? rejouent la bataille finale de l’Hérésie, avec l’Empereur dans son propre rôle et Malcador dans celui de ce fripon d’Horus. Et comme à chaque fois depuis le début de ces amicales sessions, le Sigillite constate que son adversaire passe son temps à tricher. Manipulation de la pioche, duplication de cartes, ajout de pièces non WYSIWYG en cours de jeu… s’il y avait un arbitre, celà ferait longtemps que le Maître de l’Humanité aurait mangé son ban. Malheureusement pour lui, Malky ne peut compter que sur lui même pour se faire justice, ce à quoi il s’emploie avec toute la rouerie et la malice qu’on lui connaît.

En face de lui, l’Empereur semble peu intéressé par le déroulé de la partie, et joue franchement comme une savate, seulement sauvé par sa capacité à top decker comme un porcasse avec une régularité des plus suspectes. Ajoutant l’insulte à l’outrage, il se permet même de tancer son partenaire sur son faible niveau de jeu, alors que Horus, lui, était un opposant digne de ce nom. Sans doute très fatigué par l’enchaînement des nuits blanches à pousser sur son trône (la constipation psychique est un problème commun chez les démiurges millénaires, tous les auxiliaires de vie vous le diront), Big E va même jusqu’à utiliser des mots très durs à l’encontre de son vieux comparse, au point d’arracher à ce dernier des larmes de collyre. Qu’à cela ne tienne, Malcador en a vu d’autres, et met à profit sa rogne pour sortir un enchaînement digne de Magnus Carlsen le Rouge, le laissant en position de remporter la partie au coup suivant. « Ha ha, tu l’avais pas vu venir celui-ci, bouffi » exulte notre vieillard échevelé, pas peu fier de tenir sa première victoire en 1.834.427 confrontations. Sauf que, sauf que… Sauf que l’Empereur est décidément un mauvais joueur à la main leste, et trouve le moyen de substituer à son Roi Empereur lui-même une nouvelle pièce, le Fou, qui va héroïquement se sacrifier pour lui permettre de gagner la partie. Comble de la bassesse, le Fou a la tête de Malcador, à qui il prend l’envie folle de fracasser l’échiquier sur le crâne de son suzerain.

Sur ces entrefaites, une estafette se présente à la porte, et vient apporter la nouvelle tant redoutée au Premier Seigneur de l’Impérium : la flotte d’Horus vient de se matérialiser dans le système solaire, et la plus grande bataille de l’Humanité est sur le point de s’engager. Cherchant du regard son boss, Malcador a la surprise de s’apercevoir qu’il est seul dans la pièce, et l’a apparemment toujours été, d’après le retour un peu honteux du messager, qui n’a pas osé déranger tout de suite l’aïeul vociférant qui faisait une tournante autour du plateau de jeu à son arrivée. Conclusion de l’histoire : la grande vieillesse est un naufrage, mais au moins, on ne s’ennuie pas.

1 : Et je ne rigole même pas, la nouvelle commence par un constat par Macaldor et le chef de l’Adeptus Astra Telepathica du tapage nocturne diurne warpurne généré par l’approche de la flotte traîtresse.
2 : On comprend mieux du coup pourquoi l’Empereur tenait absolument à avoir un nombre pair de rejetons. C’est mieux pour équilibrer les parties.

AVIS :

The Board is Set est une nouvelle intéressante, mais dont l’inclusion dans un BLC ne tombait pas, de mon point de vue, sous le sens. Parmi les qualités notables de cette soumission, on peut mettre en avant l’art consommé avec lequel Thorpe distille à la foi clins d’oeil aux évènements passés et à venir de l’Hérésie, à coups de manœuvres lourdes de sens des pièces sur l’échiquier et de remarques sibyllines soufflées par un Empereur plus que jamais omniscient au bras droit/fusible qu’il s’apprête à griller, mais également allusions fluffiques subtiles, sur lesquelles les fans hardlore passeront des pages et des pages à s’étriper, par les mêmes biais que ceux donnés ci-dessus. Même sans être un amateur transi du style du Gav, on peut lui reconnaître un certain talent de mise en scène de ces passages prophétiques, ce qui n’était pas gagné d’avance au vu du casting de monstres sacrés qu’il convoque.

À titre personnel, j’ai également apprécié la tirade que MoM (Master of Mankind) balance à son larbin dans le but de le mettre en rogne et de le forcer à la jouer comme Lupercal, qui est un condensé de remarques blessantes mettant en évidence que Malcador n’a été qu’un outil utilisé par l’Empereur pour arriver à ses fins, et qu’il n’aura absolument aucun scrupule à s’en débarrasser une fois qu’il n’en n’aura plus l’usage. Ce discours des plus cash trouve une résonnance particulière depuis Dark Imperium, où il est clairement indiqué la dualité de l’Empereur dans ses « sentiments » envers ses congénères : incapable d’aimer l’homme, mais absolument dévoué à l’Humanité. On peut alors se demander si les piques envoyées par Pépé ne sont pas simplement le fond de sa pensée, qu’il livre à un Malcador qui reste persuadé qu’il ne s’agit que de la manoeuvre d’un monarque bienveillant et attentionné pour lui faire donner le meilleur de lui-même. Chacun se fera sa religion sur le sujet, mais cette dualité d’interprétation est assez intéressante.

D’un autre côté, The Board is Set s’avère être l’antithèse absolue de la nouvelle à mettre dans les pattes d’un novice de la BL ! Regorgeant de sous-entendus et d’Easter eggs qui feront les gorges chaudes des lecteurs vétérans, pour peu qu’ils soient des fluffistes un minimum intéressés, cette soumission possède en effet une valeur ajoutée littéraire qui passera à 31.014 pieds au dessus de la tête du newbie. Il est plutôt probable que ce dernier ressorte du propos de Thorpe ou perplexe ou soulé par l’accumulation de mentions et notions « members only » qui lambrissent les pages d’un bout à l’autre du récit. D’une manière plus large, on peut considérer l’Hérésie d’Horus comme étant, de manière générale, une franchise trop spécialisée pour être incluse dans des ouvrages de « propagande » de la Black Library. Sans mettre en question l’intelligence et les capacités de déduction du novice moyen, je doute en effet qu’il ait la patience ou l’intérêt pour percer à jour les tenants et aboutissants de cette absconse partie de Cards against Humanity. Bref, la définition même de l’acquired taste, et en tant que tel, aussi surprenant qu’une douzaine d’huitres au fond d’un Happy Meal.

.

***

Au final, je dois reconnaître que la cuvée 2017 envoyait plutôt du bois, surtout du côté de l’Hérésie d’Horus, avec des soumissions assez mémorables (et kudos à la BL pour avoir placé ‘The Board is Set‘ en dernière position pour impact maximal). Age of Sigmar a également bien tenu son rang, et seul 40K s’est montré globalement décevant, avec uniquement ‘Endurance’ d’intéressant dans le lot (as far as I am concerned). Comme la plupart de ces nouvelles ont trouvé leur chemin dans des recueils et anthologies (certains gratuits) depuis leur première sortie, j’espère que cette revue tardive aura été tout de même utile, et je vous donne rendez-vous bientôt pour de nouvelles aventures.

THE ACCURSED [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de ‘The Accursed’, cinquième volume de nouvelles Warhammer Horror publié par la Black Library depuis le lancement de cette franchise en 2019. Pour les lecteurs qui ne seraient pas familiers avec le concept de cette gamme, le principe est simple : proposer des histoires plus effrayantes/glauques/sinistres que la moyenne, et généralement mettant l’accent sur le côté « civil » du 41ème millénaire et des Royaumes Mortels, quand les publications classiques de la BL se concentrent sur les choses militaires. Comme sous-entendu par la double mention ci-dessus, les recueils Warhammer Horror regroupent des nouvelles appartenant indifféremment à 40K et à Age of Sigmar, une variété qu’on ne retrouve que dans les numéros d’Inferno ! et l’omnibus tout public ‘The Hammer and the Eagle’ (chroniqué ici). Voilà pour les grandes lignes.

The Accursed

Au moment où ‘The Accursed’ a été publié (Novembre 2021), je m’étais mis en retrait de la Black Library et ai donc dû me livrer à un petit travail d’investigation au moment d’analyser le sommaire de cette anthologie, dont plus de la moitié est constitué de nouvelles ayant déjà été sorties par la Black Library sur la période 2019-2021. Si la pratique est très commune, on peut toutefois noter que les éditeurs de Nottingham ont procédé à des arbitrages particuliers, puisque certaines des histoires ayant fait partie de la Warhammer Horror Halloween Week 2020 ont été intégrées au recueil ‘The Harrowed Paths’ (chroniqué ici), alors que d’autres se retrouvent dans le présent recueil.

Au niveau des contributeurs de ‘The Accursed’, on retrouve des têtes bien connues de l’amateur de la BL (Kelly, Hill, Hinks), dont certains spécialistes du genre horrifique (Annandale, Ozga, Strachan). La seule nouvelle venue est Jude Reid, qui fait ici ses débuts avec ‘The Way of All Flesh’, même si on peut également remarquer que Peter Fehervari (‘Nightbleed’) peut également être considéré comme un débutant, puisqu’il s’agit de sa première nouvelle pour Warhammer Horror. Les termes du problème étant posés, passons maintenant à la dissection du sujet <fait claquer ses gants en latex et met en marche la scie circulaire>. Tchhhhh, ça va bien se passer…

The Accursed

.

Skull Throne – J. Ozga [AoS] :

INTRIGUE :

Skull ThronePrésence discrète dans le Royaume de Shyish, la narratrice de notre histoire, que nous appellerons Ninon faute de mieux (Ozga ne lui donnant pas de nom) évolue dans un univers cotonneux et incertain, où les choses ne semblent pas être ce qu’elles sont vraiment. Troublée par des rêves persistants dans lesquels elle se voit et se revoit être faite prisonnière, puis décapitée, par un trio de maraudeurs chaotiques adeptes de la prise de tête, Ninon ne sait plus très bien si elle est vivante ou morte, et consomme des quantités importantes de thé psychotrope pour tenter de chasser son mal-être existentiel. Cette routine macabre prend fin lorsque débarque un nouvel arrivant, se révélant être également un barbare assoiffé de sang, et tout aussi intéressé par le crâne de Ninon que les trois affreux précédemment évoqués. Son sinistre dessein, qu’il souhaitait mettre à exécution en chantant et dans la maison en ruines de notre héroïne – trop shootée pour prendre soin de son chez-elle – est toutefois contrarié par une traversée de plancher inopinée, permettant à Ninon d’échapper à une décollation sommaire. Prouvant qu’elle a bien gardé la tête sur les épaules, cette dernière ébouillante le rustre en lui déversant le contenu d’un chaudron d’eau bouillante sur le râble, avant de décider de partir en mission spéciale avec la tête du malotru sous le bras. Il s’avère en effet que le barbare était l’un des trois gredins l’ayant peut-être (it’s complicated) décapitée il y a quelque temps, et Ninon souhaite récupérer ce qui lui appartient de plein droit. On suppose à ce stade qu’elle considère un échange de caboches avec les envahisseurs de Shyish.

Après avoir un peu marché, et atteint une plage évoquant fortement le front de mer dunkerquois, Ninon finit par localiser les pillards, qui font bombance à côté du cadavre d’un léviathan à moitié dévoré par un banc d’anguilles1. Saisissant sa chance, elle se glisse jusqu’à la marmite dans laquelle les joyeux cannibales préparent leur rata, et y déverse ses réserves de racines de mhurghast. Le résultat ne se fait pas attendre, les maraudeurs sombrant dans ou succombant à la paralysie apportée par ce charmant condiment, ce qui permet à Ninon de chiller tranquillement dans le camp à son réveil. Identifiant son pseudo tueur parmi les cataleptiques à la hache monstrueuse qu’il porte à son côté, Ninon est frappée par l’inspiration : si elle veut récupérer la tête qu’on lui a prise, il lui faudra offrir un sacrifice digne de ce nom à la divinité compétente en la matière, cet entrôné de Khorne…

Début spoiler…Profitant du lag persistant de ses hôtes, qui ne peuvent que contempler leur fin arriver lorsqu’elle se présente avec la hache empruntée à leur champion pour leur offrir une coupe gratuite, Ninon passe sa journée à la plage à faire un château de crânes, n’oubliant pas au passage d’embrocher le meneur des maraudeurs avant que les effets débilitants de la racine de mhurghast ne s’estompent pour de bon. Ceci fait, elle propose un deal au Dieu du Sang, offrant le fruit de sa récolte en échange… de la tête de sa sœur jumelle. Ce qui explique pourquoi et comment Ninon a pu se voir se faire tuer en début de nouvelle. Seulement, Khorne est dur en affaires, et bien qu’il ne prononce pas un mot, la négociation finit par déboucher sur l’accord du Dieu pour que les sœurs se retrouvent dans l’au-delà, conduisant Ninon au suicide. Tout le monde n’a pas l’étoffe d’une Valkia.Fin spoiler

1 : Qui ne jouent aucun rôle dans l’intrigue à part ajouter un peu plus de glauque à une histoire qui n’en manquait pas. Un clin d’œil à A Cure for Wellness, peut-être ?

AVIS :

Soumission très atmosphérique de la part de Jake Ozga, ce Skull Throne joue habilement des caractéristiques uniques de Shyish pour dérouter le lecteur sur la condition de son héroïne, jusqu’à ce que sonne l’heure du dénouement, qui, s’il se révèle plus triste1 qu’horrifique, s’avère néanmoins réussi. Le choix de l’auteur de faire du Royaume de la Mort un endroit à la fois onirique, apaisé et sinistre, frappe l’imagination du lecteur, tout comme les zones d’ombre laissée à dessein par Ozga sur ce qu’il s’est vraiment passé lors de la rencontre entre blanche neige et les trois balourds. Ce manque orchestré de certitudes donne à Skull Throne un cachet particulier, très différent du standard habituel de la Black Library, mais aussi appréciable qu’intrigant. La première moitié de la nouvelle m’a ainsi faite penser à A Ghost Story, film dans lequel le personnage principal revient hanter (de manière plutôt passive) la maison qu’il habitait après son décès dans un accident de voiture. Ce film a reçu un accueil polarisé, et je pense que cette nouvelle pourra également dérouter le lecteur, mais pour ma part, je salue la prise de risque et l’exécution de Jake Ozga dans ce Skull Throne, qui se révèle au final bien moins sanglant que ce que son titre laissait envisager.

1 : C’est un peu la petite fille aux allumettes à la sauce Age of Sigmar.

.

The Child Foretold – N. Kaufmann [40K] :

INTRIGUE :

The Child ForetoldFermier alcoolique, misanthrope et passablement instable, du fait de la méchante prothèse remplaçant sa jambe droite perdue à la guerre, Kavel Trake survit péniblement de ses récoltes de nafar, occupant ses journées à trimer dans les champs et à parler à son épouvantail de compagnie, et ses nuits à picoler et à espérer ne pas se réveiller le lendemain. Bref, l’archétype du joyeux drille. À ses malheurs habituels est venu s’ajouter une invasion de warrior weed, sorte de chiendent Xenos qu’une politique de contrôle laxiste a permis de prendre pied, ou plutôt racine, sur la planète de Ballard’s Run. Cet excès de biodiversité n’occupe cependant pas longtemps notre héros, qui reçoit le soir même la visite d’une voyageuse passablement esquintée et mortellement poignardée, tenant dans ses bras un poupon qu’elle supplie Kavel de protéger de la vindicte populaire, avant de fatalement décéder. Notre péquenot, qui a servi dans la milice locale avant que son amputation ne le force à lever le pied (le gauche, évidemment), n’est pas un péquenot totalement rustre, et comprend assez vite que sa petite protégée, Oshi, a quelque chose de différent. Ou plusieurs choses, pour être exact : quelques petites bosses sur le front pour commencer1, et la capacité assez intrigante d’attirer des feuilles de nafar dans sa menotte pour s’auto-chatouiller lorsqu’elle en a envie, ce qui est pratique mais suspect.

La journée de bonheur paternel qu’il expérimente avec le poupon se termine toutefois brutalement avec l’arrivée d’un quintette hostile, menée par le capitaine de la milice et souhaitant ardemment que le bébé leur soit remis. La défense, assez minable, il faut le reconnaître2, convoquée par Kavel ne convaincant pas les ruffians de faire demi-tour, notre fermier n’a d’autre choix que de prendre les armes contre les intrus, qui, heureusement pour lui, s’avèrent avoir claqué tous leurs points de profil en impavidité, laissant peu de place à l’intelligence et à la compétence (comprendre qu’ils n’ont aucun problème à se laisser consumer par les flammes du cocktail molotov improvisé par Kavel, sans même pousser un cri, ni chercher à éteindre le brasier). Vainqueur de l’affrontement, José Bovin décide de tenter sa chance jusqu’à l’astroport tout proche, afin d’emmener Oshi dans la sécurité – toute relative – de l’espace. Malheureusement pour cette âme bien intentionnée, un comité d’accueil aussi déterminé et silencieux que les sbires qu’il a enflammés un peu plus tôt, l’intercepte sur la route, et lui enlève sa précieuse charge, non sans qu’il ait eu le temps de presque – son fusil lui étant mystérieusement arraché des mains par une force inconnue – vider son chargeur sur les marauds…

Début spoiler…À sa grande surprise et son soulagement non feint, les villageois, menés par un certain Drameon exhibant, lui aussi, une construction cranienne particulière, ne se montrent pas menaçants envers Oshi, et semblent au contraire l’accueillir comme unes des leurs. Préférant emmener leur prisonnier avec eux dans la caverne où ils se sont installés, les membres du culte Genestealer de Ballard’s Run (car j’espère que vous aviez compris de quoi il en retournait à ce stade) récompensent les bons et loyaux services de babysitting de Kavel en l’introduisant dans la famille, grand papa Mordephus roulant une galoche de bienvenue à sa nouvelle ouaille, sous les gazouillis approbateurs d’Oshi, dont la destinée est de devenir la Magus et porte-parole du clan. Tout est donc bien qui finit bien, ou en tout cas, mieux, pour notre héros déprimé, qui pourra jouir d’une vie sociale beaucoup plus riche jusqu’à la fin de ses jours, dans l’environnement préservé d’un agrimonde impérial. Pas loin d’être la meilleure chose qui puisse arriver à un citoyen impérial, quand on y réfléchit.Fin spoiler

1 : La réponse est oui. Ne dîtes rien aux autres.
2 : Jugez plutôt. Comme argument, c’est aussi convaincant que « cet hérétique n’a pas tout à fait tort », ou « cet Ork n’a encore rien fait de mal ».

AVIS :

Pour ses débuts au sein de la Black Library, Kaufmann choisit de livrer sa version d’un classique de la maison, pour un résultat assez honnête. On peut d’ailleurs saluer la bonne maîtrise générale que l’auteur démontre du background de 40K, ce dont d’autres contributeurs « extérieurs » recrutés par la BL pour Warhammer Horror ne peuvent pas se targuer. L’appropriation n’est toutefois pas totale, comme le montre la réaction très meh de Kavel devant la mutation apparente de sa protégée (qui peut à la limite s’expliquer par les pouvoirs psychiques de cette dernière), mais surtout, et c’est plus embêtant, l’absence de justification apportée à l’élément de déclencheur de la nouvelle, c’est à dire la remise du bébé à Kavel par une inconnue blessée… par qui ? Le fluff indique en effet que les membres vulnérables/trop moches des cultes Genestealers, comme les mères porteuses, les jeunes et papi/mamie Mougeot, sont gardés à l’abri des regards par le reste des membres. Partant, on voit mal comment la mère et la tante d’Oshi ont pu se faire embusquer par des villageois lambda de façon réaliste. De plus, le fait que Kaufmann décrive les cinq miliciens venus menacer Kavel comme faisant également partie du culte ne permet pas d’identifier une quelconque faction « hostile » dans la nouvelle (à moins que Ballard’s Run compte deux cultes Genestealers ennemis, ce qui serait vraiment pas de bol pour une planète aussi peuplée que Figeac). Pour terminer, on peut aussi s’interroger sur le choix de la BL d’incorporer cette nouvelle dans son segment horrifique, l’histoire présentée ici étant finalement assez gentillette et convenue pour un lecteur familier des « joyeusetés » de 40K.

.

Tithemarked – S. Sheil [AoS] :

INTRIGUE :

TithemarkedTout le monde n’a pas la chance d’être fils unique, ni orphelin. Ainsi songe sombrement Petras, notre héros, tandis qu’il essaie de se soustraire au grand projet que nourrissent pour lui ses chers frères (Grandon et Bron) et père (Gaston? Napoléon? Hachilthalon?), qui consiste à le mettre à contribution pour atteindre le quota d’os demandé par le collecteur Ossiarch Reaper venu démarcher leur village. Ayant déterré tous les cadavres du cimetière, et abréger les souffrances des vieillards, agonisants et enrhumés, sans pour autant remplir l’attaché case du patibulaire revenant, les bouseux se résolvent donc à sacrifier leurs éléments les moins utiles pour le bien de la communauté, et au petit jeu du hachoir musical, Petras se retrouve rapidement shortlisté. Ses vigoureuses dénégations n’y font rien: c’est bien à lui que revient l’honneur de mettre la dernière main, ou plus exactement, le dernier bras, à la collecte de déchets organiques organisée par le Nag’. Au moment où le couperet tombe, il se révèle brutalement, amputé certes, mais depuis un bail: cela fait douze ans que le bras lui en est tombé, et l’enfant mal aimé et chétif est devenu…un jeune homme mal aimé et chétif1.

Les relations avec sa famille ne s’étant guère arrangées depuis ce jour fatidique, Petras a depuis quitté le foyer paternel pour voler de sa propre aile, n’écopant malheureusement pas d’une grande sympathie de la part des ses concitoyens de Shyish. Et pour cause, ces derniers le considèrent comme un porte-malheur, lié à jamais aux terribles Ossiarch Reapers par sa manche vide, et ne lui réserve donc pas le meilleur accueil. Malgré cela, Petras tient le coup car il a un but et un rêve: se faire poser une prothèse. Il connaît même l’artisan idéal pour cette opération, un forgeron prodige nommé Helstane, vers l’atelier duquel il se dirige avec toutes ses économies. Croisant sur la route un marchand, qui a lui aussi bénéficié de la science du prothésiste (il a pris sa jambe à son coût), il apprend toutefois de la bouche du colporteur qu’Helstane est loin d’être conventionné, et que ses services ne sont pas donnés. Souhaitant malgré tout tenter sa chance, Petras arrive enfin jusqu’à la forge de son potentiel sauveur… qui lui sort un gros doigt2 pour sa peine. Flûtcke. Le désespoir de notre héros arrive toutefois à émouvoir quelque peu le bourru et pingre Helstane, qui promet à son visiteur d’accéder  sa requête et de lui forger un membre – en tout bien tout honneur -, s’il se met à son service sans rechigner, et pour une durée indéterminée. Ce que Petras accepte.

Après un an, un mois et une semaine de durs labeurs, de bastonnades régulières et de café dégueulasse (c’est le pire), Petras demande gentiment à son boss quand est-ce qu’il prévoit de lui passer la main (et le reste, tant qu’à faire), provoquant une nouveau geste mal élevé impliquant un doigt de la part du maître artisan. Ce dernier informe en effet sa bonniche qu’il n’a cotisé que pour l’équivalent d’un doigt, ce qui revient  dire qu’il a travaillé à l’œil. Mondes cruels que ces Royaumes Mortels, où le fléau de l’esclavage moderne est tout aussi présent que dans le nôtre. Sauf qu’au lieu de confisquer les papiers des travailleurs, on leur refuse leur ferraille. Inacceptable. Bref, Petras en a gros, et commence à désespérer d’être jamais appareillé, ce qui explique en partie pourquoi, lorsque son patron envoie paître un ferrailleur de grands chemins lui ayant proposé d’acheter un bras d’Ossiarch Reaper, après avoir échoué à lui refourguer un plastron bosselé, l’infirme suit discrètement le vendeur éconduit, et lui subtilise son bien à la faveur de la nuit…

Début spoilerFasciné par l’objet, qu’il garde en secret dans sa paillasse, Petras finit par réaliser son fantasme en « essayant » la camelote, ce qui fonctionne… mais surtout pour le reste d’animus complètement dément prisonnier à l’intérieur du triquetrum (dont on ne parle pas assez à mon goût) enchanté. Cette greffe instantanée a des conséquences fâcheuses pour Petras, dont le nouveau bras gauche, pour habile et fort qu’il soit, n’en fait qu’à sa tête – ce qui est conceptuellement compliqué pour un bras -, mais plus encore pour Helstane, dont l’imposante carrure tape dans l’œil dudit bras (restez concentrés), et qui finit donc sa carrière sous les coups de son propre marteau, confisqué par son boy possédé. Il l’avait un peu cherché tout de même. Ce n’est que le début d’un parcours sanglant et psychotique pour Petras, qui retourne à son village pour régler ses comptes avec ses proches, sous l’emprise du membre maudit. En plus de commettre de massacrer et de désosser les malheureux croisant sa route (ses frères, leurs familles, les voisins, la boulangère…), puis d’aller déterrer le cadavre de son père pour se faire un bonnet avec son crâne, Petras, devenu complètement barge, se cloue les meilleurs morceaux de ses victimes sur le corps, dans une tentative valeureuse mais malheureuse de cosplay Ossiarch Reaper. Malheureuse car, au moment de se présenter devant ses pairs, dans la forteresse hantée la plus proche, l’apprenti Squelettor se fait déposséder de son calcium par les factotums de garde, qui ne laissent que ses corps mous et son âme devant l’entrée. C’est ce qui s’appelle tomber sur un os.Fin spoiler

1En fait cette histoire, c’est ‘Cendrillon’ qui rencontre ‘Saw’. Moignillon.  
2En anglais on dit ‘he gave him the finger’, ce qui marche tout aussi bien.

AVIS :

Sheil signe une nouvelle très convaincante avec ce Tithemarked, qui parvient à marier efficacement deux types d’horreur: celle, psychologique, provoquée par la mise en scène de la déchéance morale inévitable d’un héros pathétique, qui finit par commettre l’irréparable dans la poursuite d’un objectif justifié, mais inatteignable (un peu comme Carrie dans le film du même nom), et une bonne dose de gore allant crescendo dans le sanguinolent et le macabre, ce qui fait toujours plaisir aux amateurs du genre. En outre, sa vision et description des Ossiarch Reapers, la nouvelle faction des Royaumes Mortels, sont plutôt réussies, et parviennent à donner de la profondeur (pas totalement négative, qui plus est) aux petits soldats de Nagash. Bref, une franche réussite à mettre à l’actif de ce rookie, qui je l’espère aura l’occasion de remettre le couvert dans les mois à venir.

.

Imperator Gladio – R. Strachan [40K] :

INTRIGUE :

Sur Valgaast, la ligne de front impériale se fait sérieusement bousculer par un assaut massif de l’Archennemi. L’un des régiments mobilisés au cours de cette campagne est le 77ème Dragon Blindé de Zentrale, qui a la chance de compter parmi ses châssis le Baneblade Imperator Gladio, une arme de destruction massive à même de renverser le cours de la bataille. En tous cas, c’est ce que l’état-major du régiment voudrait vous faire croire. Parmi les Zentraliens (qui doivent tous avoir un diplôme d’ingénieur avec un nom pareil), l’histoire est différente : le Gladio jouit d’une terrible réputation de tueur d’équipage, et c’est déjà la septième fois qu’il est remis en service après que tous ses servants aient trouvé la mort dans des conditions inexpliquées. Cette fois-ci, c’est au tour du Capitaine Becherovka et de son ramassis de bidasses (Kovar, Stijn, Palivo, Jezek, Zaj et Musil) de tenter leur chance.

Becherovka est un candidat tout trouvé pour ce poste de chef de tank maudit, car il a lui-même un lourd passif en la matière. Sa dernière affectation était un Shadowsword, dont tout l’équipage s’est noyé dans les eaux saumâtres qui recouvrent la surface de Valgaast (une sorte de Dagobah grimdark), tandis que lui a été secouru après 4 jours à respirer une bulle d’air coincée par la coque. Pas le temps pour lui de digérer ce traumatisme, il lui faut donc déjà reprendre du service pour faire son devoir de soldat de l’Imperium. Il peut cependant compter sur le bonus de Commandement que lui apporte la décoration intérieure du Gladio, constituée des 73 crânes des précédents membres d’équipage du Baneblade acariâtre. Un peu Khorny comme choix, mais l’ossement reste une valeur refuge au 41ème millénaire, tout le monde est d’accord sur ce point.

Alors que le vaillant petit tank prend le chemin du front, des événements variant du bizarre à l’inquiétant ne tardent pas à se produire, sans que personne à bord ne puisse en donner une explication claire, bien évidemment. Lorsque l’unité centrale du Gladio tombe soudainement en rade au milieu de la pampa du marais, les choses sérieuses peuvent commencer.

Comme son grade le demande, Becherovka court dans tous les sens pour tenter de comprendre ce qui arrive et établir un plan de contingence, mais ses vaillants efforts ne donnent pas grand-chose. Il faut dire qu’ils sont parasités par des manifestations frôlant le démoniaque (on ne verra rien, mais c’est tout comme), qui font perdre leur sang-froid, puis carrément la vie, à l’équipage du Gladio. Se retrouvant dans la position peu enviable de dernier défenseur Garde, et se sachant enfermé dans l’habitacle par des forces contre lesquelles il ne peut pas lutter, Bebert prend une décision radicale pour retrouver l’air libre…

Début spoiler…Tenter de ramper le long du canon Baneblade. Seulement, tout le monde n’est pas aussi souple qu’Ace Ventura, et sans doute que notre héros a eu tort de reprendre des frites à la cantine, car il se coince purement et simplement dans l’affût, et connaît une mort aussi atroce et ironique (sa plus grande hantise depuis son accident étant de mourir noyé… la suffocation c’est assez proche finalement) que singulière.

Cela n’empêchera évidemment pas les petites mains de la Garde Impériale de récupérer et de remettre en état l’Imperator Gladio après avoir localisé son emplacement. On peut même dire que le tank se bonifie avec le temps puisqu’il compte maintenant 80 crânes de décoration…Fin spoiler

AVIS :

Pour sa première soumission siglée 40K, Richard Strachan nous emmène sur Valgaast avec une histoire de vaisseau fantôme adapté pour notre univers futuriste en tank hanté. L’auteur arrive bien à marier deux sources d’angoisse distinctes (la claustrophobie d’une part, et les manifestations psychiques d’autre part) pour un résultat prenant et assez sordide pour mériter l’AOC Warhammer Horror. Le seul petit reproche que l’on pourrait être amené à lui faire est de ne pas avoir chercher à lever le voile sur la force maléfique qui hante l’Imperator Gladio : si ce dernier a été corrompu par le terrain particulier sur lequel il opère1, il faudrait expliquer pourquoi il est (apparemment) le seul tank affecté. À l’inverse, si c’est le Baneblade lui-même qui est mauvais (un clin d’œil à ‘Christine’ de Steven King ?), les adeptes du Mechanicus chargés des réparations auraient dû détecter que quelque chose clochait – si ce n’est la première fois, au moins la sixième…

Mis à part ce détail, qui n’enlève pas grand-chose au plaisir de lecture, ‘Imperator Gladio’ est une nouvelle d’ambiance des plus solides, à ranger aux côtés de ‘The Deep’, et qui démontre qu’on peut écrire une bonne histoire se déroulant exclusivement à l’intérieur d’un tank – ahem ‘Sarcophagus’ ahem -…

1 : Valgaast est la planète à laquelle toutes les soumissions Warhammer Horror de 40K font référence, souvent de manière anodine et détournée, comme Mhurgast pour Age of Sigmar.

.

The Terminus – D. Annandale [40K] :

INTRIGUE :

Notre histoire se déroule dans la cité de Carchera, sur la planète Ossorian, par une nuit sans lune (ça ne sert à rien dans l’histoire mais ça met l’ambiance). Un frère (Bakhin) et une sœur (Vazya) progressent en direction d’une gare abandonnée, dans le but de vérifier la véracité d’un mythe tenace : le train de Valgaast (wink wink). D’après la légende, ce convoi circule la nuit dans les gares désaffectées, et les passagers qui osent monter à son bord sont amenés jusqu’à l’emplacement d’un somptueux trésor. Si Vazya tient juste à fact checker ce racontar, son frère est lui beaucoup plus intéressé par les proverbiales richesses récompensant les audacieux voyageurs, ayant contracté de très lourdes dettes auprès de créditeurs pas franchement compréhensifs.

Ayant pris position dans l’une des nombreuses gares en ruines de la périphérie de Carchera, nos deux héros en sont quitte pour quelques heures d’attente1 avant que l’improbable se produise : un authentique train entre en station, et ouvre ses portes pour leur permettre de rentrer. Après les trois secondes d’hésitation contractuelles, Vazya et Bakhin sautent le pas (please mind the gap between the train and the station) et prennent place à bord, avant que la rame ne reprenne sa course. Ils ne tardent pas à découvrir qu’ils sont loin d’être seuls dans le train, et font ainsi la connaissance d’un trio de concitoyens (Darra, Krent et Nevi), eux aussi à la recherche du légendaire trésor du train de Valgaast, qui les aiderait à se sortir de leur situation difficile.

Pendant que leur Ouigo file à toute berzingue vers une destination inconnue, mais en tout cas hors de Carchera, le petit groupe décide d’explorer son environnement, et de remonter vers la tête du train à la recherche du chef de bord, qui pourrait peut-être leur donner plus d’informations sur les prochaines étapes du périple. Cette initiative louable est toutefois abandonnée à l’unanimité après que nos héros aient jeté un œil au wagon de tête, rempli à ras bord d’individus très louches (des chauves blafard en robe : sans doute des cosplayeurs de Matthieu Ricard). La première classe n’est plus ce qu’elle était…

Les options du club des cinq sont toutefois très limitées : après avoir essayé d’ouvrir les portes, et réalisé que sauter d’un train en marche sans voir en contrebas n’était pas une riche idée, ils conviennent de rejoindre les autres passagers « normaux » du Valgaast Express, et d’aviser à l’arrivée. Lorsque la rame s’arrête enfin, Vazya, Bakhin et compagnie descendent donc sans faire d’histoire, et décident de suivre à distance raisonnable le groupe de tête(s chauves), qui part en direction d’un complexe abandonné, en chantant d’étranges cantiques. Assez inquiétant, certes, mais pas menaçant à proprement parler, donc pourquoi pas. Et puis, pas question de rentrer à pied à Carchera…

Début spoiler…Ce comportement moutonnier se révèlera toutefois rapidement néfaste, car les arrivants se retrouvent encerclés par des centaines d’alopécistes en transe, et dirigés vers le centre de la congrégation, où les attend… un gros tyranide. J’aurais bien aimé dire que c’était un Patriarche Genestealer, comme les indices égrenés par Annandale le laissaient penser, mais la description qui en est faite par l’auteur me pousse plutôt à conclure à un Prince, ce qui n’est absolument pas logique, fluff wise. Quoiqu’il en soit, les malheureux chasseurs de trésor amateurs sont soit boulottés par le Xenos affamé, soit converti au culte de ce dernier, ce qui est le cas de Vazya. Après avoir subi la tonsure réglementaire, elle est donc renvoyée à Carchera pour répandre la rumeur d’Orléans de Valgaast dans la cité, et assurer ainsi un flux de snacks réguliers à son nouveau boss.Fin spoiler 

1 : Il faut croire que même les trains fantômes peuvent être victimes d’incidents de circulation de types « régulation du trafic » ou « mouvement de grève du personnel ».  

AVIS :

David Annandale adapte le thème du train fantôme à la sauce 40K, pour des résultats un peu décevants. Comme souvent avec notre homme, les débuts prometteurs débouchent sur une conclusion pas vraiment satisfaisante, ici à deux niveaux. Premièrement, j’ai trouvé que la révélation finale relevait de la faute de goût, en cela qu’une histoire exploitant les codes du surnaturel doit rester sur cette voie (haha) et ne pas bifurquer dans un autre type d’horreur (ici bien plus prosaïque) en fin de course. La suspension d’incrédulité en prend un grand coup dans les gencives, car tout ce qui aurait pu être accepté par le lecteur comme causé/expliqué par le Warp doit maintenant trouver une justification réaliste… ce que l’auteur se garde bien de faire ! Deuxièmement, le flou artistique laissé par Annandale, pourtant contributeur vétéran de la GW-Fiction, sur l’identité de son antagoniste est regrettable car elle a toutes les chances de blaser le lecteur un peu au fait du background de la faction convoquée. Il aurait suffi d’une petite rectification de la part du relecteur pour corriger ce défaut, mais cela n’a pas été le cas et je dois dire que cela m’ennuie profondément. OU EST LE RESPECT HEIN ? Verdict final : guère entraînant.

.

Nightbleed – P. Fehervari [40K] :

INTRIGUE :

NightbleedLes journées de Chel Jarrow, medicae disgraciée et névrosée de Sarastus, sont hantées par un cauchemar récurrent dans lequel elle se revoit faire l’erreur qui lui a coûté sa carrière, ainsi que la vie d’une de ses patientes. Epuisée par un enchaînement de gardes, elle a en effet confondu un Death Guard « XIV » avec un Son of Horus « XVI » et injecté de l’eau de javel à une malade du COVID-19K, ou une joyeuseté de cet ordre, ce qui ne pouvait pas bien se terminer. Renvoyée par son employeur, elle enchaîne depuis les petits boulots minables, le dernier en date consistant à servir de technicienne de laboratoire dans une usine agroalimentaire. Affectée à des cycles nocturnes pour ne pas entraver la production, Chel passe ses journées à dormir et ses soirées à éviter son mari Lyle, dont elle ne supporte plus la petitesse et la servilité1. Une bonne crise de la quarantaine comme on les aime, en somme.

Alors qu’elle prend le chemin du turbin, elle remarque en attendant que l’ascenseur monte (131ème étage, tout de même) que de nouveaux tags ont fait leur apparition sur les murs de son couloir. L’un d’eux représente l’homme aiguille (Needleman), une sorte de croquemitaine local vivant dans les ténèbres et cherchant sans relâche à saboter les dômes abritant les cités ruches de Sarastus pour permettre à la Nuit Véritable de régner sans partage sur la planète. Le trouillomètre commence à s’affoler lorsque Chel entend des bruits suspects dans l’obscurité du couloir, hors de portée de sa fidèle lampe torche. Ou plutôt, aurait dû s’affoler car notre héroïne n’éprouve pas le moindre émoi à la pensée qu’un prédateur la guette peut-être depuis les ténèbres. C’est l’avantage d’avoir une vie vraiment pourrie : on voit toujours le bon côté des choses. Ceci dit, il ne se passera rien de bien méchant avant que l’ascenseur ne finisse enfin par arriver, et emmène Chel jusqu’au rez de chaussée de la tour Barka.

Il est temps pour nous de faire la connaissance de notre second personnage principal, un jeune à problème s’étant rebaptisé Screech (cri perçant en français) après avoir entendu sa mère pousser un hurlement inhumain lorsqu’il lui a crevé les yeux à l’aide d’une fourchette. Il venait de tuer son père de la même façon, et avait 14 ans à l’époque des faits. Voilà voilà. Obsédé par le mythe de l’homme aiguille, qui l’a fait basculer dans la folie homicidaire, Screech est devenu un grapheur marginal, laissant des messages aussi inquiétants que mal orthographiés2 sur les murs de la cité. En plus de cela, il lui arrive d’enfiler son cosplay de Needleman pour aller trucider du prolo au gré de ses envies. Cette nuit lui semble d’ailleurs propice à un nouveau crime, et alors qu’il erre dans la cité à la recherche de la bonne cible, son chemin finit par croiser celui de Chel, qui a pris place dans son TER habituel pour aller bosser. Pas de doute possible pour Screech, c’est elle que le destin a choisi pour rapprocher Sarastus de la Nuit Véritable, un meurtre sanguinaire à la fois.

De son côté, Chel, qui en a vu d’autres et se balade avec un taser dans la poche, sent bien que l’ado tatoué et crasseux qui s’est assis par terre en tête de wagon et l’épie sans en avoir l’air n’est pas animé d’intentions charitables envers sa personne. Une poussée de mauvaise humeur manque de la faire aller au clash contre son stalker (pas vraiment discret) à la sortie du train, mais ce dernier est trop perdu dans ses pensées (il a dû sniffer le reste de sa bombe de rose pour passer le temps) pour prendre la mouche. Laissant à sa victime un peu d’avance, il finit par la suivre jusqu’à l’usine où elle travaille, après avoir enfilé son habit de non-lumière : un masque de métal et les griffes de Freddie. Ainsi paré, il se sent possédé par l’esprit de Noël du Needleman, que l’on devine être un peu plus qu’un simple fantasme d’achluophobe. Et en effet, lorsque Screech se retrouve attaqué par un cyber molosse après être entré par effraction dans le périmètre de l’usine de Potton Vitapax, il ne doit son salut qu’à sa possession temporaire par son esprit totem, dont l’un des pouvoirs consiste à pouvoir tordre ses bras dans tous les sens, ce qui est pratique pour venir à bout d’un mastiff énergétique qui vous cloué au sol après vous avoir déchiqueté la cuisse. Mal en point mais toujours opérationnel, notre héraut reprend sa traque en traînant la jambe.

Pendant ce temps, Chel s’est remise à travailler sur le dernier échantillon qui lui a été remis, et dont elle suspecte la nature maléfique, ou en tout cas néfaste, sans pouvoir le prouver. Les tests du VLG-01 n’ont en effet rien détecté de suspect, mais la consistance de goudron pervers de la substance rend son utilisation dans des produits cuisinés, même pour des travailleurs de la caste Delta, impensable. En désespoir de cause, et prise d’une inspiration subite, Chel a résolu la veille d’ingérer un peu de cette mixture, ce qui a semble-t-il renforcé ses cauchemars. N’y tenant plus, et sans doute en manque, la technicienne décide d’aller visiter le lieu de stockage du VLG-01, convainquant pour ce faire un des gardes de nuit de la conduire jusqu’à l’entrepôt (forcément abandonné jusqu’il y a peu car il avait mauvaise réputation). Là, deux choses horribles se produisent coup sur coup. Premièrement, Chel sombre dans la folie et se sert une grande rasade d’élixir de noirceur à même la cuve (pochtronne !), ce qui ne lui fait pas du bien comme on peut s’en douter. Deuxièmement, Screech finit par la rattraper, après avoir égorgé le garde au passage, et s’apprête à lui jouer son grand classique : le concerto d’Edouard aux Mains d’Argent en Scie Mineure…

Début spoiler…Seulement voilà, le Needleman s’est trouvé un avatar plus méritant que ce petit péteux de taggeur, et Chel se fait un plaisir de corriger son agresseur d’un grand coup de taser dans la glotte, ce qui lui fait fondre la mâchoire et couler les yeux sur les joues, entre autres effets secondaires sympathiques. Ayant récupéré le masque de fonction de Screech sur son presque cadavre, Chel retourne à son laboratoire pour valider définitivement l’échantillon de VLG-01, qui pourra donc être distribué largement à la populace de Sarastus, avant d’embrasser définitivement son nouveau statut de femme de l’ombre. Première étape : son appartement de la tour Barka, où elle aura une petite discussion avec ce butor de Lyle à propos des radiateurs…Fin spoiler

1 : Et également sa froideur coupable, car monsieur refuse obstinément de monter le chauffage, quand bien même la température de leur HLM se rapproche sensiblement de zéro.
2 : Dernier chef d’œuvre en date de notre Banksy sociopathe « C 1 MENSSONJE » au Hello Kitty Pink. Sans point d’exclamation à la fin, car ce n’était pas nécessaire.

AVIS :

Comme on pouvait s’en doute, Peter Fehervari réussit sans problème son entrée dans la gamme Warhammer Horror avec ‘Nightbleed’, un petit concentré de noirceur (haha) à la sauce Dark Coil. Notons à ce propos que les références aux autres textes et arcs narratifs du Fehervariverse ne sont pas légions dans cette nouvelle (à moins qu’elles soient trop subtiles pour votre serviteur, ce qui est tout à fait possible), ce qui facilite sa compréhension pour le lecteur non familier de l’approche de l’auteur. Ceci dit, il n’est guère besoin de pousser loin l’analyse pour comprendre que ‘Nightbleed’ n’est pas un stand-alone, mais contient des éléments qui s(er)ont explicités ailleurs, à commencer par le sens des lettres « VLG », sur lequel Fehervari fait plancher son lecteur de façon très explicite1. Parmi les autres réussites indéniables de cette soumission, on peut citer la facilité déconcertante avec laquelle l’auteur arrive à « planter » son décor en quelques phrases, et à faire de Sarastus un monde impérial plus tangible et réel que bien des planètes auxquelles GW et la BL ont consacré des dizaines de pages (Necromunda ? Armaggedon ? Cadia ?), ce qui est la marque des vrais conteurs. De la même manière, Fehervari instille à son récit un véritable malaise (angoisse serait un peu fort), amplifié par les bribes de comptines qu’il met dans la bouche et dans l’esprit de Screech. Will you won’t you meet the Needleman ?

1 : À titre personnel, je penche pour un acronyme en haut gothique (latin donc) glorifiant les ténèbres/le Chaos, mais cela peut être chose. Je suis simplement à peu près sûr qu’il est possible pour un lecteur attentif de percer ce mystère à jour avec les indices que Fehervari a laissé ici et là…

.

A Moment of Cruelty – P. Kelly [AoS] :

INTRIGUE :

A Moment of CrueltyHéritier jouisseur, couard et infect d’une lignée de notables Azyrites venus s’établir en Shyish à la suite de la reconquista initiée par Sigmar, Alabastian Valenth use son indolente jeunesse et de son statut de golden boy pour collectionner les conquêtes, les excès et les gueules de bois. La dernière en date, lorsqu’elle finit par le laisser émerger, le laisse cependant en mauvaise posture car notre héros réalise avec horreur qu’il a trois heures de retard au rendez-vous avec son costumier. Et quand votre vie ne tourne qu’autour du prochain bal masqué de la noblesse, et que votre influent et richissime meilleur ami a également été invité à l’essayage, c’est une tuile de premier ordre, croyez-moi.

Une clepsydre hors de prix fracassée au sol, une paire de gardes (Maltratt et Xarantine) rabrouées, et une galerie de clochards et d’infirmes rembarrés sur le chemin du tailleur plus tard, Alabastian arrive enfin présenter ses plus plates confuses à l’illustre Harratio d’Asbe (son BFF), qui l’a patiemment attendu en parfait gentleman. Quelques heures et verres de vin plus tard, les deux amis finissent par se séparer, et pendant que Bastian doit repasser rive droite (ou gauche d’ailleurs) de Mhurghast pour regagner son domicile, Harratio part contempler son gros pif dans un miroir un peu spécial, qui lui renvoie un reflet encore moins flatteur que ce que la prise au vent de son appendice nasal laisse à supposer…

Alabastian, qui a fait un détour par le pont des Ahres pour éviter de recroiser la route de la cour des miracles qui l’a tant importuné à l’aller, joue de malchance car il tombe sur à nouveau sur un lépreux particulièrement lacunaire, qui le supplie de lui donner une petite goutte. Pas de pinard, notez, mais d’aqua ghyranis, l’hydroxychloroquine/eau de javel des Royaumes Mortels, capable de remettre sur pied même un cul de jatte. Bien évidemment, notre snob de héros refuse, et pousse la petitesse jusqu’à cracher dans le dos du miséreux, avant de partir en courant dans un grand élan de bravoure. De retour dans son hôtel particulier, il narre sa mésaventure à des deux gardes du corps (Maltratt et Xarantine, si vous suivez), avant d’aller se passer les nerfs en montant au grenier pour vaquer à son occupation d’intérieur favorite : lorgner les passants de la place que surplombe son manoir. Mais même cet innocent plaisir lui est refusé car qui sort des brumes pour lui rendre son regard indiscret dès qu’il a pris place dans son fauteuil de mateur ? Le lépreux susmentionné, évidemment.

La paranoïa naturelle d’Alabastian atteint des niveaux cosmiques, et il envoie ses deux chiennes de garde régler son compte à Jo le Clodo sur le champ… sans qu’elles parviennent à lui mettre la main dessus, bien évidemment. Après une nuit agitée, la vue de l’empreinte d’une main amputée de trois doigts dégu*ulassant sa fenêtre, pourtant située à 10 mètres au dessus du sol, manque de faire tomber le nobliau en syncope, et Maltratt et Xarantine en sont quitte pour repartir traquer l’insaisissable estropié dans les ruelles brumeuses de Mhurghast…

Début spoiler…Leur rencontre avec Sally-du-Château, l’aliénée cryptique du quartier (il en faut bien une), permet toutefois aux deux comparses de comprendre que cette sortie était probablement ce que voulait le stalker d’Alabastian, qu’elles ont laissé en train des claquer des miches sous son lit à baldaquin. La carrure de Maltratt l’ayant taillée pour le lancer de Duardin plutôt que pour le sprint, Xarantine parvient à destination avec une avance confortable sur sa collègue, et a donc l’insigne honneur de mourir sous les coups et les crocs du lépreux le plus vivace de Shyish, après une une mauvaise chute dans l’escalier menant à la chambre du patron. Ce dernier ayant bravement laissé le personnel gérer l’intrus sans filer de coup de main, il se retrouve à devoir affronter le roide pelé en un contre un, avec des résultats prévisibles. Mis au tapis par son adversaire, qui lui plante les ratiches dans le coup pour lui apprendre à se moquer du malheur des autres, Alabastian a de la poisse dans son malheur car il constate bientôt que son assaillant lui refile ses plaies et ses bosses en même temps qu’il lui vole littéralement son look. Aussi, lorsque l’inexorable Maltratt finit enfin par pointer le bout de son nez, elle ne réalise pas que l’avorton scrofuleux qu’elle s’en va jeter dans la rivière Hisset pour venger sa camarade et à la demande expresse de son patron, est l’authentique Alabastian. Allez savoir, elle a peut-être gagné au change au final.Fin spoiler

AVIS :

Phil Kelly en dit trop ou pas assez dans ce ‘A Moment of Cruelty’, dont les pièces semblent former un tout cohérent mais sans s’emboîter parfaitement. En effet, si l’idée principale développée et révélée par l’auteur en conclusion de sa nouvelle fait écho à quelques indices égrénés plus tôt dans la narration, bien des questions demeurent, trop pour faire de cette soumission une réussite. Le rôle de Harratio d’Asbe dans l’intrigue, les pouvoirs du miroir qu’il utilise, la raison de sa visite chez Alabastian plus tôt dans la semaine, ou encore le sens à donner au rêve (prémonitoire ?) de ce dernier, sont autant de points laissés à la libre interprétation du lecteur. Et que penser de la motivation qui anime le persécuteur de notre froussard de héros ? Poursuit-il des desseins inconnus ou déteste-t-il simplement les gens qui ne font pas preuve de ponctualité ? Dommage pour Kelly, qui avait sinon exposé des idées intéressantes, comme ce jeu d’interprétation, difficilement traduisible en français, autour des sens de « Sally » (un prénom mais également un verbe, qui veut dire « faire route »), en plus de nous avoir offert une première visite de la fameuse Mhurghast. Je ne serais pas contre un peu de rab, afin de prendre totalement la mesure de la carrure AoSesque et horrifique de notre homme.

.

The Reaper’s Gift – R. Cluley [AoS] :

INTRIGUE :

Le milicien Rutger, confronté à une trop forte opposition lors de la dernière bataille livrée par sa compagnie franche à une bande d’Hommes Bêtes en maraude, a prudemment décidé de se faire porter pâle et quitté le champ de bataille pour le champ de maïs, laissant les copains se débrouiller sans lui. A sa décharge, notre héros courageux mais pas téméraire venait d’hériter d’une méchante estafilade sur le bedon, réduisant fortement son utilité au combat en même temps que son espérance de vie. Dans son malheur, Rutger a toutefois la chance de tomber sur une étable décrépite où il peut s’abriter de la pluie battante de Shyish, et recouvrer quelques forces avant de reprendre sa fuite éperdue. Dans cet abri de fortune, il fait la connaissance de Poll, le jeune fils d’une fermière du cru qui essaie tant bien que mal de survivre avec ses trois enfants et en l’absence de son mari, réquisitionné de force par l’armée locale il y a plusieurs mois. Ayant gagné la confiance du gamin grâce à ses talents de montreur d’ombres, Rutger parvient aussi à se mettre la mère (Maudeline) dans la poche, et est invité par cette dernière à dîner avec sa famille.

Pendant que le soldat se fait recoudre la bidoche et se gave de brouet, ses hôtes lui racontent la légende du Faucheur (Reaperman), un croquemitaine ayant l’apparence d’un épouvantail géant et venant punir les membres égoïstes de la communauté à grands coups de faux dans les gencives. Originellement, le Faucheur était un guérisseur dont le fils unique mourut écrasé par sa propre charrue, tragédie qui fit mourir sa femme de chagrin quelques semaines plus tard. Ses voisins n’ayant pas fait preuve d’une grande solidarité envers le pauvre homme dans ces moments difficiles, le désespoir et le ressentiment (et l’intervention de Nagash, aussi) le changèrent en spectre vengeur, que les paysans du coin tentent d’apaiser en se faisant des cadeaux entre eux, démontrant ainsi leur camaraderie. Il se trouve que Maudeline et Cie offrent des épouvantails, ce qui explique pourquoi l’étable où s’était réfugié Rutger était pleine de silhouettes tout à fait creepy. On est à Shyish, aussi.

Raccompagné par Maudeline jusqu’à la grange où elle accepte qu’il passe la nuit, Rutger réalise que la brave fermière dissimule en fait une ogresse en puissance, qui n’a pas hésité à tuer et découper les autres déserteurs amochés qui sont venus demander assistance au cours des derniers mois. Cela explique comment elle a pu confectionner autant d’épouvantails dans un endroit aussi reculé, où les fripes d’homme adulte sont rares. Pragmatique jusqu’au bout, Maudeline avoue que c’est l’infection qui commence à gagner sa plaie qui l’a convaincue de ne pas transformer Rutger en jambon, et qu’elle ne lui fera donc aucun mal. Cet échange de civilités est interrompu par l’arrivée d’un Ungor inquisiteur, qui se fait prestement occire par notre coriace agricultrice #LaMortEstDansLePré.

Il ne s’agit toutefois que d’un sursis pour la petite troupe, car il est certain que la disparition de l’éclaireur va donner l’idée au reste de la harde de passer une tête cornue dans le coin dans les prochaines heures. N’ayant aucun espoir de prendre de vitesse l’ennemi, Rutger propose de gagner du temps en utilisant la ruse…

Début spoiler 1…C’est-à-dire mettre à profit le stock d’épouvantails de ses hôtes pour donner l’impression à ces bêtes de Bêtes que la ferme est fortement gardée. Cela ne les trompera ni ralentira très longtemps, mais devrait permettre aux fuyards une chance d’atteindre les voisins les plus proches de Maudeline et sa marmaille. La journée qui s’en suit est donc tout entière consacrée à la préparation de ce musée Grévin hors les murs, mais alors l’après-midi avance, Rutger a une idée encore meilleure pour duper les Hommes-Bêtes en maraude…

Début spoiler 2…Laisser les femmes et les enfants derrière. Comme il se doute que Maudeline a peu de chance d’accepter, il lui colle un coup de hachette dans le crâne pour avoir les mains libres, et attache les orphelins avec les épouvantails pour donner l’illusion que son régiment de paille est bien vivant. A la guerre comme à la guerre, tout de même. C’est le culte de l’huître bleue qui avait raison, une fois de plus : don’t fear the reaper (fear the deserter).Fin spoiler

AVIS :

Pour sa deuxième contribution à la GW-Fiction (après ‘Flesh and Blood’), Ray Cluley corrige la mire et signe une histoire bien noire, et méritant tout à fait sa catégorisation dans la gamme Warhammer Horror. En distillant à petites touches les détails troublants, puis inquiétants, puis révoltants, l’auteur parvient à instiller une pure atmosphère de film de genre, où l’on comprend qu’il peut se passer quelque chose d’horrible à tout moment, et où tous les personnages, même (surtout) les protagonistes, peuvent partir en vrille sans crier gare. Il fait également preuve d’une maîtrise consommée de raconteur d’histoire en entraînant le lecteur sur la piste de l’épouvantail, figure horrifique s’il en est, pour au final donner à son récit un twist final bien plus prosaïque, mais d’autant plus marquant et efficace. Une vraie bonne soumission pour le sieur Cluley, qui remonte sensiblement dans mon estime.

.

The Way of All Flesh – J. Reid [40K] :

INTRIGUE :

Alors qu’il se réjouissait d’épouser prochainement la belle et riche Aurelie Langenbruik, Niklaas van Riedvelt reçoit une visite nocturne et imprévue de la part de son futur beau-frère, Konrad. Ce dernier est loin d’être enthousiasmé par le mariage de sa sœur avec un parti aussi minable et désargenté que le bon Nik, qui n’a que pour lui le fait de posséder le titre de Graaf. Ayant appris par des tiers que l’ascendance de Niklaas était soumise à caution (sa mère ayant eu tendance à faire beaucoup la fête avant sa naissance), Konrad vient donc intimider le futur marié dans son manoir décrépit dans l’espoir qu’il rompe ses fiançailles et laisse partir Aurelie. La proposition n’agrée guère notre héros, qui dans un mouvement d’humeur regrettable plante une dague dans la gorge du maître chanteur, avec des effets rapides et définitifs sur la santé de Konrad. D’abord totalement dépassé par la situation, Niklaas finit par faire jouer ses relations auprès d’une marraine du crime (Hanna Ullman) dont il tient les comptes, et qui lui envoie un duo de nettoyeurs pour faire disparaître l’encombrant cadavre.

Les choses semblant se tasser après ce regrettable incident, et malgré la détresse d’Aurelie devant la disparition inexpliquée de son petit frère, Niklaas a tout loisir de finir la préparation de son mariage, prévu dans quelques semaines. Cependant, la réception d’un faire-part signé de la main de Konrad, et annonçant que le macchabée assistera à la noce, plonge notre héros dans une psychose de plus en plus marquée. D’abord persuadé que Hanna Ullman cherche à le faire chanter, il décide d’aller lui rendre une visite de courtoisie pour tirer l’affaire au clair, mais découvre que le quartier général de la patronne de la pègre a été récemment dévasté par les flammes. Sur le chemin du retour, il est suivi puis rattrapé par un individu capuchonné portant à l’index l’anneau distinctif de Konrad, mais qui ne fait rien d’autre que pointer un doigt aussi pourri qu’accusateur sur le meurtrier avant de disparaître dans la nuit. Ambiance, ambiance.

Lorsque le jour des noces arrive, Niklaas est au bout du rouleau et commet quelques impairs pendant la cérémonie, comme arracher la capuche d’un adepte du Mechanicus qui assistait à l’office, pensant qu’il s’agissait encore une fois du fantôme de Konrad. Les formalités terminées et les invités repartis, il est temps pour nos tourtereaux de regagner leur nid d’amour pour leur première nuit comme mari et femme. Tout est bien qui finit bien… Sauf que non, bien sûr. Le manoir familial des van Riedvelt n’est pas épargné par les apparitions morbides, et Niklaas est à nouveau surpris par son stalker sépulcral, et cette fois avoue à haute voix que tout ça n’était qu’un accident, et qu’il n’a jamais voulu tuer Konrad. Cette confession fait disparaître l’invité mystère sans laisser de trace, laissant enfin loisir à notre héros d’aller retrouver sa femme au lit… et de s’endormir aussi sec. Ouf, moi qui pensais que la BL allait donner dans le torride, me voilà rassuré.

Le lendemain matin, tout semble aller pour le mieux pour Niklaas, qui pense innocemment avoir été libéré de sa culpabilité par sa confession d’hier. Alors qu’il sirote son premier recaff d’homme marié en attendant que sa femme vienne le rejoindre, il ferme brièvement les yeux pour savourer son bonheur retrouvé…

Début spoiler…Et se rend compte quand il les rouvre que rien n’est oublié ni pardonné. Aurelie a en effet invité Konrad, ou plutôt le Serviteur qu’elle a fait faire à partir du cadavre putréfié de son frère, après qu’elle l’ait repêché dans le canal où les hommes de main de Hanna Ullman l’avait jeté, à passer à la maison. Toutes les apparitions funestes faites à Niklaas n’avaient pour but que de le faire avouer sa culpabilité, afin d’obtenir sa condamnation par la justice, ce qui sera bientôt chose faite. La seule consolation que notre pauvre héros peut avoir est que son cadavre ne sera pas perdu pour tout le monde, et qu’il devrait rester proche de la femme qu’il aime même après son décès… sous une forme ou une autre.Fin spoiler

AVIS :

Ce n’était qu’une question de temps avant que le Fantôme du Commandeur ne soit adapté à la sauce Warhammer Horror, et la nouvelle venue Jude Reid se tire plutôt bien de cet exercice de style. On peut mettre à son crédit une narration efficace et atmosphérique, qui permet de suivre les tribulations du Graaf Niklaas van Riedvelt sans forcer son intérêt pour une histoire autrement assez classique. J’ai également apprécié ses efforts pour donner de l’épaisseur et de la consistance à la société dans laquelle se passe sa nouvelle (Etterdam), ce qui facilite l’immersion dans l’histoire. Pour finir, et à la différence d’autres histoires de Warhammer Horror (et du recueil ‘The Accursed’), le twist final est bien préparé et ne tombe pas à plat, ce qui est toujours agréable. Une nouvelle contributrice à suivre de près, donc.

.

Elloth IX – J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE :

Lorsque l’équipe de mineurs d’astéroïde qu’il dirige prend possession de la base stationnée sur Elloth IX, Alun ne tarde pas à remarquer que quelque chose cloche. Il faut dire que la disparition mystérieuse de la totalité de leurs prédécesseurs, sans que ces derniers se soient donné la peine de laisser un post it explicatif sur le comptoir, ou même de faire la vaisselle, n’a rien de rassurant. Mais il y a des choses plus urgentes à faire et des quotas d’extraction à atteindre pour obtenir la paie promise, ce qui fait passer ces débuts inquiétants au second plan. Toujours est-il que notre héros à crête (il porte un mohawk, ce qui est très approprié lorsqu’on passe toute la journée dans une combinaison spatiale) ramasse par pure curiosité une représentation de l’Empereur dont les yeux ont été crevés. Une décision lourde de conséquence, comme vous pouvez vous en douter, et que même le principal intéressé semble trouver louche. Il faut ce qu’il faut pour faire avancer l’intrigue.

Bien évidemment, la situation ne va aller que de mal en pis sur la station, et en particulier pour Alun, qui se met à attendre des battements inexpliqués, que les autres membres de son équipe ne perçoivent pas. La découverte d’un corps desséché dans un coin d’entrepôt par Alun et son second (Toyn) vient épaissir le mystère, d’autant plus que le macchabée semble avoir été victime d’une exécution rituelle. Afin de préserver le moral des troupes, Alun décide de balancer le corps dans l’espace sans ébruiter la nouvelle, ce qui ne met pas fin au problème car l’obstiné cadavre s’amuse à popper de manière régulière dans la station, malgré les efforts désespérés de notre héros pour se débarrasser de cette tache tenace.

Logiquement sur les nerfs à cause de ces manifestations inexplicables, Alun doit également composer avec un Serviteur suicidaire (death by s’éclater le pif sur une console toutes les cinq secondes – c’est assez salissant), puis sur la mort de Toyn dans un accident d’exploitation à la surface d’Elloth IX. En bonus, le cadavre récursif se met à prendre la forme de Toyn après son décès, ce qui en fait beaucoup pour un seul homme, vous le reconnaîtrez facilement. Finalement, Alun fait un burn out et décide d’aller voir si l’espace est plus profond chez le voisin après une nouvelle apparition macabre. Sans combinaison spatiale. Comme n’est pas Guilliman qui veut, l’expérience est fatale à notre héros surmené, qui a toutefois pris soin de laisser derrière lui le leaflet de Œdipe Roi Pépé Aveugle, ramassé aussi sec par un random dude, qui commence à son tour à entendre un battement en provenance du cœur de la station. Comme un petit air de déjà-vu…

AVIS :

Vouloir faire c’est bien, rester compréhensible d’un bout à l’autre de son propos, c’est mieux. Justin D. Hill sacrifie la cohérence de son intrigue pour nous donner une triple ration de scènes spooky, qui suffiraient peut-être à le sauver s’il avait tourné un film et pas écrit une nouvelle. On sort de ‘Elloth IX’ avec le sentiment d’avoir raté la page où l’auteur aurait expliqué, au moins en partie, la cause et la propagation du maléfice qui frappe la station, ce qui n’est jamais agréable, et ce n’est pas la mention de Valgaast au détour d’un paragraphe qui viendra sauver cette tambouille indigeste. A oublier.

.

The Cache – J. Brogden [40K] :

INTRIGUE :

The CacheLa vie de Lyse Urretzi, première fille du chef du clan du même nom, consiste à s’enduire de graisse pour aller récupérer de la tech perdue dans les niveaux souterrains du Spike, le dédale de coursives et de galeries qui constitue le seul monde qu’elle a jamais connu. C’est en effet aux Urretzi que revient la mission sacrée d’entretenir la barrière de Saint Geller, qui protège le Spike de l’Extérieur et des ses dangers innommables. En mission d’exploration dans le plus simple appareil, ou presque, Lyse manque de se faire alpaguer par un Crawler, charmante petite bestiole carnassière peuplant les bas fonds du Spike, et ne doit la vie sauve qu’à ses réflexes affutés et son fidèle pisto-grappin, qui arrête sa chute après que ses mains glissantes lui aient fait échapper quelques prises1.

Remise de ses émotions, et en quête d’un chemin vers les hauts, à défauts de beaux, quartiers où vivent ses congénères, elle tombe sur une sorte de petit théâtre de l’horreur où un épouvantail fait de barbaque humaine se trouve seul en scène, avec un médaillon brillant autour du cou. Bien que cette performance d’art post-contemporain ne lui évoque qu’un malaise des plus profonds, Lyse est trop excitée par l’idée de rapporter une authentique babiole technologique à son clan pour faire la fine louche, et récupère donc le colifichet. Après avoir un détour malheureux en coulisses, où elle se retrouve nez à nez avec une vision démente de l’Extérieur, peint avec de la bouse de vache et de la bave d’escargot, elle trouve enfin le chemin vers le haut du Spike, mais finit par déboucher dans le territoire des Jaax, les ennemis jurés des Urretzi. Urretzut.

On apprend alors que Lyse devait servir de monnaie d’échange et de mère porteuse au patriarche Jaax, Hadzor, afin de mettre un terme à la vendetta opposant leurs deux clans depuis des générations. Un mariage avait été négocié par la Prime Adjutant Galla Domitia, plus haute autorité du Spike, avec la bénédiction du père de Lyse, Sutomore. Il semblerait que les tourtereaux n’aient pu finalement convoler en justes noces, pour des raisons non précisées mais dont Lyse est sans doute (au moins un peu) responsable. Toujours est-il que notre héroïne ne tient guère à se faire pincer en territoire ennemi, surtout depuis qu’elle détient des preuves que les Jaax accueillent des adeptes de l’Extérieur parmi eux. Après une petite course poursuite rondement menée, elle parvient à regagner le bercail, mais le répit n’est que de courte durée. Hadzor Jaax vient en effet sonner à la porte en compagnie de Galla Domitia et de ses Arbites pour tirer au clair cette histoire d’empiètement de propriété privée. Sachant que c’est une discussion qu’elle ne pourra pas remporter, et peu emballée à l’idée de devoir remettre son nouveau médaillon à Hadzor en dédommagement, Lyse file à l’anglaise pour aller retrouver Cracius l’Er(e)mite, un dangereux hérétique selon la sagesse populaire, mais également un expert en matière de technologie oubliée…

Début spoiler 1…Après un voyage hallucinatoire jusqu’au rade de l’anachorète, qui se révèle être une sorte de techno-prêtre pas encore assez détaché des choses de la chair pour refuser de faire bonne chère (Lyse lui ramené des croûtes de lépreux, un mets raffiné), première révélation. Le médaillon qu’elle a récupéré n’est autre que le sceau du Cambusier, et indique l’emplacement des caches de nourritures du Spike, ou, comme il était précédemment appelé, du Spira Tenebris. Car Lyse et ses compaings ne sont pas des gangers d’une cité-ruche mal tenue, mais les descendants de l’équipage d’un vaisseau impérial qui s’est retrouvé encalminé dans le Warp il y a foooort longtemps. D’où l’importance de maintenir opérationnel la barrière de Saint Geller, et tout un tas d’autres détails qui font finalement plus de sens.

Le sceau indique l’emplacement d’une cache encore intacte, qui se trouve dans les niveaux inférieurs/arrière du Spike, en plein territoire des Crawlers. Ce n’est pas ça qui décourage Lyse de tenter le coup, les vivres commençant à se faire rare par chez elle. Avant que la cavalerie (Hadzor, Domitia et consorts) ne débarque, elle se met donc en route pour le frigo, grâce à l’auspex de fortune que lui a bricolé Cracius en échange de trois paquets de chips.

Au bout d’une longue descente qui se passe suspicieusement bien, Lyse arrive devant la porte blindée de la cache, qu’elle parvient à ouvrir sans encombre. Elle n’a cependant que le temps de s’enfiler une paire de Mars bien mérités que les Crawlers, qui n’attendaient que ça, prennent possession des lieux. Cela faisait en effet des plombes qu’ils attendaient que quelqu’un leur passe le code secret du garde manger, ce que Lyse a fait de façon purement involontaire. Tout cela aurait pu mal finir pour elle sans l’intervention à point nommé de la cavalerie (voir plus haut), qui met les faquins en fuite à grandes rafales de fusil laser. Ce n’est toutefois pas la fin des ennuis pour Lyse, car Hadzor se met soudainement en tête de la trucider, malgré les appels au calme de Domitia. Ces chamailleries se terminent lorsque le perfide Jaax se prend la porte, qui est suffisamment lourde et blindée pour avoir raison d’un être humain normal…

Début spoiler 2…Sauf que Hadzor n’est pas un simple pervers cannibale et polygame, mais bien possédé par un esprit de l’Extérieur, a.k.a. le Warp. Il n’a donc aucun mal à se dépétrer de ce menu embarras, puis de massacrer les Arbites jusqu’au dernier dans de grands hurlements de rire. Ce court laps de temps permet à Lyse de prendre une longueur d’avance sur son prétendant, qui rêve toujours de l’emmener en lune de miel sur Valgaast, et de l’attirer jusqu’en salle des générateurs. Là, une petite feinte de la pisto-moustache à grapin, enseignée dans toutes les écoles de rugby urbain, permet de faire basculer le gros lourd dans le brasier, ce qui met fin à ses déprédations.

Notre histoire se termine avec l’émancipation de Lyse, qui part squatter chez Cracius après que son clan ait commencé à la regarder de travers pour s’être trop approchée des feux djinns (les générateurs), qui sont, comme chacun sait, môôôôôdits. Au moment où le rideau tombe, elle part à la rencontre des Crawlers pour leur proposer un deal qu’ils ne pourront pas refuser. Comme dit le proverbe, plus il y a du riz à partager avec les fous, il y a de l’espoir.Fin spoiler

1 : Comme quoi le gras est peut-être la vie, mais la graisse est sûrement la mort. Médite là-dessus le jeune.

AVIS :

James Brogden soigne assez son entrée dans la BL avec ‘The Cache’, qui révèle quelques surprises bien senties à son lecteur… jusqu’à un certain point. Si les révélations amenées par Cracius font ainsi effet, et dénotent de la bonne vision qu’à l’auteur du background de 40K1 (et la petite mention de Valgaast, la planète « signature » des histoires futuristes de Warhammer Horror vient appuyer ce constat), tout comme l’ambiance à la ‘The Descent’ instillée dans les passages d’exploration des bas fonds du Spire se révèle être prenante, le grand final de la nouvelle n’est malheureusement pas au niveau des pages précédentes. Brogden laisse ainsi certaines questions importantes sans réponse satisfaisante, comme le passif de Hazdor Jaax (pourquoi et comment est-il devenu ce qu’il est ?) et le « statut » des Crawlers, que l’on devine être apparentés de façon inconfortablement proche aux humains du Spike, mais qui tiennent parfois de la faction peu fréquentable mais raisonnable, et parfois de la bande de prédateurs dégénérés. Malgré cette petite déception finale, James Brogden fait mieux ici que pas mal de nouveaux auteurs de la BL, et mérite donc à mon humble avis d’être suivi avec une bienveillante neutralité dans la suite de son parcours.

1 : Jouer de la similitude entre une cité ruche et un vaisseau impérial est plutôt malin.

.

The Bloody Kiss – D. Hinks [AoS] :

INTRIGUE :

Le trappeur Raziv se languit d’amour pour la belle Marya, et fait le mur de sa ville natale, Dravko, pour aller la rejoindre dans les ruines d’une ancienne forteresse perdue au milieu de la forêt. So romantic. Comme nous sommes dans les Royaumes Mortels, et plus précisément à Shyish, cette entreprise est très loin d’être sans risques, car la région est infestée de choses non-mortes et pas vraiment amicales, à commencer par les hag-kin, ou les petits-petits-petits-petits enfants de Belladamma Volga, la matriarche de la dynastie Vyrkos. Ces vampires mâtinés de loups-garous rôdent dans les halliers obscurs à la recherche de sang frais, et sont une menace à prendre très au sérieux même par un survivaliste aussi expérimenté que Raziv. Ce dernier a toutefois une botte secrète pour ne pas faire de mauvaises rencontres sur le chemin le menant à sa dulcinée : il connaît les voies secrètes qui traversent la forêt, dont la connaissance est transmise de génération en génération par les lignées de trappeurs de Shyish. Jusqu’à présent, aucun d’entre eux n’a mis Volga et sa clique au parfum, ce qui permet à notre héros de voyager sans se faire trop de soucis pour sa sécurité personnelle.

Les choses prennent cependant un tour funeste lorsque l’ardent Raziv, qui bout littéralement de rejoindre sa bien-aimée pour qu’elle lui parle poésie, peinture et voyages (ce que sa propre femme, la gentille et timide mais assez rustre Sanja est bien incapable de faire), se rend compte qu’il est épié, alors même qu’il a emprunté un des chemins secrets que ces lourdauds de hag-kin sont censés ignorer. Croyant d’abord à la présence d’un autre trappeur noctambule, il doit vite déchanter lorsque le collègue qu’il suspectait (Velizar) est retrouvé étripé et à moitié dévoré quelques centaines de mètre plus loin. Le doute n’est plus permis : un Vyrkos plus cultivé que la moyenne est de sortie, ce qui est une complication désagréable, mais pas rédhibitoire pour notre héros, qui a vraiment envie de voir Marya. Après quelques astuces de Castor Junior, comme remonter une rivière à pied pour dissimuler son odeur à ses poursuivants, et une rencontre assez glaciale avec un hag-kin plus chien fou que loup alpha, Raziv croit avoir semé ses poursuivants, et arrive enfin à l’endroit où sa belle l’attend…

Début spoiler…Seulement, quelqu’un est venu pour tenir la chandelle, et comme la troisième roue du carrosse est un gros buveur de rouge, notre Roméo en culotte de peau est horrifié de constater que sa chère et tendre a été goulument siphonnée par cet invité surprise. Ou plutôt, cette invitée, car le vampire responsable du worst Tinder date ever de Raziv n’est autre que sa femme, Sanja, qu’il reconnaît à sa ceinture plutôt qu’à son visage (assez logique, vu les circonstances de la rencontre). Non contente de l’avoir cockblocké sans pitié, Sanja la revancharde lui jette un maléfice de récursion, qui le condamne à revivre éternellement cette soirée dramatique. Notre malheureux héros se rend d’ailleurs compte pendant les cinq secondes de chargement du niveau qu’il n’est pas le fringant jeune homme plein de sève qu’il pensait être, mais un vieux croulant blanchi sous le harnais, preuve que cette mesquine vengeance se perpétue depuis déjà quelques décennies. Mais pas le temps pour ces considérations terre à terre, il faut aller rejoindre la belle Marya, qui attend au cœur de la forêt…Fin spoiler

AVIS :

Darius Hinks s’empare d’un classique de la littérature horrifique, le « vampire anonyme » (on sait qu’un des personnages est secrètement un vampire qui a réussi à camoufler son identité) et parvient à nous proposer une histoire avec des twists finaux tout à fait réussie, ce qui est une performance à part entière. Pour ne rien vous cacher, je m’attendais vraiment à ce que le résultat final soit totalement prévisible dès la lecture du titre et des premières pages, où tout suggère le vampire mais Hinks prend bien soin de ne pas mettre les pieds dans le plat, comme s’il essayait de ménager du suspens. Compte tenu de la tendance de la Black Library à vendre la mèche de la conclusion de ses histoires par pure négligence, et du fait que le sieur Hinks a déjà signé des nouvelles d’un tout petit niveau, je craignais le (vam)pire et fais donc amende honorable ici. ‘The Bloody Kiss’ est une soumission très solide pour Warhammer Horror, et sans doute le meilleur court-format de cet auteur dans le genre horrifique. Je commence à croire que Hinks est fait pour écrire pour Age of Sigmar plutôt que pour 40K…

.

***

Et voilà qui conclut cette revue de ‘The Accursed, qui comme les autres recueils Warhammer Horror publiés avant lui (et les recueils de nouvelles de la Black Library en général) contient du bon et du moins bon. Malheureusement pour cette anthologie, le fait que l’une de ses meilleures histoires (‘Nightbleed’) soit disponible gratuitement dans la Black Library Celebration Week 2022 fait baisser d’autant sa valeur marchande, même si elle contient quelques bonnes nouvelles que l’ont ne peut – pour le moment – pas trouver ailleurs. Avec « seulement » 250 pages et 12 courts-formats au compteur, ‘The Accursed’ n’est pas l’anthologie horrifique à choisir en priorité, si vous voulez mon avis, mais reste une addition tout à fait respectable à la collection d’un amateur de cette franchise. 

THE HAMMER AND THE EAGLE [40K/AoS]

Bonjour et bienvenue dans cette critique du nouvel ouvrage introductif publié par la Black Library, un beau pavé de 621 pages sobrement nommé ‘The Hammer & the Eagle‘ (ou ‘L’Aigle & le Marteau‘ en version française, que Nottingham a eu l’amabilité de sortir en même temps que la VO). Cette large couverture est due en partie au fait que les nouvelles qui sont proposées au lecteur sont presque toutes des rééditions, pour certaines de textes assez anciens. Comme l’indique Nick Kyme dans sa préface, ce type de publication « universelle(s) » est assez rare pour la BL, qui a pour habitude de séparer les serviettes des torchons, et les bolters et des arquebuses (voir ‘Sacrosaint & Autres Récits et ‘Croisade & Autres Récits pour s’en convaincre). Cette fois-ci cependant, la ligne éditoriale choisie par la maison d’édition était assez large pour permettre aux deux franchises majeures de Games Workshop d’être représentées dans un même opus, et pour cause: il n’y a pas grand-chose de plus commun à une histoire que la présence de personnages.

Sommaire The Hammer &amp; the Eagle (MIS)

Pour être tout à fait exact, ce sont bien les icônes de Warhammer 40.000 et d’Age of Sigmar qui sont ici mises en avant et célébrées, catégorie plus restrictive (encore que) que celle regroupant les myriades de héros et anti-héros peuplant les pages des romans et nouvelles de la Black Library. On devine sans mal que la sélection a dû être drastique1 pour déterminer qui méritait cette reconnaissance suprême, en particulier du côté des Royaumes Mortels, dont la relative jeunesse met ses protagonistes sur un pied d’égalité (les grands anciens Gotrek et Nefarata trichant un peu à ce titre). Si certains noms (Ibram Gaunt, Uriel Ventris, Gregor Eisenhorn, Abaddon2…) sonnent comme une évidence, d’autres seront sans doute moins familiers au lecteur, même chevronné. L’occasion de se familiariser avec de futures têtes d’affiche comme Severina Raine, Navradaran, Hamicar-Bear Eater et Callis & Toll. C’est en tout cas tout le mal qu’on leur souhaite.

Partons donc à la découverte de cette galerie de people haute en couleurs, et tentons de voir si la Black Library a réussi à son travail de sélection avec ces 27 nouvelles (pour 18 auteurs) et accouché d’un ouvrage digne d’intérêt. Sur le plan financier, c’est quasiment certain, mais sur le plan littéraire, cela reste à établir…

1 : Encore que je soupçonne Nick Kyme d’avoir pistonné les personnages dont il avait la charge, comme Cato Sicarius et Adrax Agatone. C’est en particulier vrai pour le second, dont le nom n’est pas (encore) universellement connu, et ne bénéficie que d’une couverture minime dans cette anthologie (nouvelle de 5 pages). Les ravages du népotisme…
2 : Bizarrement classé comme Space Marine, aux côtés de Mephiston et Astorath. Je penche pour une étourderie du maquettiste plutôt que pour une révélation sur la véritable allégeance du bonhomme. Mais ça pourrait expliquer pourquoi il lui a fallu 13 tentatives pour péter deux pylônes. 

The Hammer and the Eagle

.

Endurance – C. Wraight [40K] :

EnduranceICÔNE : DRAGAN, POTENCIER DE LA DEATH GUARD

INTRIGUE :

Sur le monde ruche de Lystra, l’escouade du frère Sarrien des Imperial Talons livre un combat d’arrière-garde aussi noble que vain contre les hordes innombrables des Zombies de la Peste ayant plus ou moins remplacées la population locale. Envoyés au casse-pipe pour permettre à un fonctionnaire de l’Adeptus Administratum obèse et tire au flanc (du moins, c’est comme ça que Sarrien se le représente) de maintenir son quota de dîme mensuel, ou autre raison purement technocratique, les braves Space Marines tiennent la ligne du mieux qu’ils peuvent, mais même leur constitution suprahumaine commence à donner d’inquiétants signes de fatigue. Pour ne rien arranger, les lignes de ravitaillement avec le reste de l’Imperium sont totalement coupées, ne laissant à nos fiers héros que la bonne vieille énergie cinétique pour défendre le domaine de l’immortel Empereur contre la corruption galopante titubante représentée par les Stumblers. Isolé de ses frères pour maximiser l’efficacité du soutien martial et moral que les Astartes représentent pour leurs alliés de la Garde, Sarrien débute la soirée comme toutes les autres auparavant : il chante chante chante ce rythme qui lui plaît (Endure ! For the Emperor ! Stand Fast ! Chihuahua !) et il tape tape tape (c’est sa façon d’aimer). On comprend cependant assez clairement que notre héros en a gros, et qu’il n’y a que son exemplaire éthique qui le pousse à suivre des ordres qui lui semblent totalement débiles.

À quelques encablures de cette planète condamnée, nous faisons la connaissance de notre deuxième protagoniste, le réfléchi (il ne court jamais) et hédoniste Dragan, Death Guard appartenant à la faction des Lords of Silence. Bénéficiant d’un quartier libre entre deux opérations de grande ampleur, Dragan a embarqué sa coterie sur son vaisseau personnel, l’Incaligant, et vogue là où le Warp le mène, massacrant tous les Impériaux qui lui tombent sous le moignon au passage. Les petits plaisirs de la vie, il n’y a que ça de vrai. Ayant fondu (dans tous les sens du terme) sur un transporteur de troupes de la Garde Impériale dépêché sans escorte en renforts de Lystra, Dragan décide sur un coup de tête, une fois le carnage expédié, d’emmener ses ouailles sur le monde en question, où il suppute (en même temps qu’il supure) qu’une distraction peut être trouvée.

Nous retrouvons ensuite Sarrien, toujours plus amer et toujours plus crevé, qui décide d’aller rôder derrière les lignes ennemies pour… le fun ? (étant donné que les défenseurs sont au bout du rouleau et s’attendent tous à crever, et que l’adversaire n’a aucune chaîne de commandement à décapiter ni de cibles stratégiques à prendre, l’utilité de la manœuvre me semble obscure). Bien que durement éprouvé par des semaines de combat sans répit, notre surhomme se révèle malgré tout capable de faire mordre la poussière à son poids en Stumblers, voire plus, jusqu’à ce qu’il tombe sur un Fatty dont l’odeur corporelle, ou l’aura de zenitude, c’est selon, est telle qu’il a bien du mal à lever la main sur lui. Malgré l’attitude résolument peace man du gros lard, Sarrien parvient à le décoller proprement, non sans que sa victime n’ait eu le temps de le prévenir 1) des dangers physiques et mentaux du surmenage (il devait être élu au CHSCT dans sa première vie), 2) de l’arrivée prochaine du Potencier (Gallowsman). Bien en peine de faire quelque chose de cette information, et sappé comme jamais, l’Imperial Talon décide de se rentrer, avec l’espoir futile de trouver un McDo encore ouvert sur le chemin pour s’envoyer un bon Coca bien frais.

De son côté, Dragan a fini par arriver en orbite autour de Lystra, et emmène sa bande sur les lieux du dernier conflit agitant encore la planète, dans l’espoir de trouver un adversaire de valeur. Escortés par quelques cohortes de die hard fans, les Lords of Silence progressent pondéreusement vers la ligne de front, où les attendent…

Spoiler Des Iron Warriors. Eh oui. Car en fait, Sarrien et Dragan ont visité Lystra à deux moments distincts, petite surprise savamment préparée par Wraight. Il est d’ailleurs fortement suggéré que Sarrien est devenu Glask (le second de Dragan, qui passe son temps à l’appeler Potencier – au grand ennui de son boss – et dont la jambe torse pourrait être la conséquence de la blessure subie par Sarrien au même endroit à la fin de la campagne) peu de temps après sa rencontre avec le gros plein de pus, lorsque, finalement submergé par le nombre de ses ennemis et l’amertume envers l’Imperium, il a décidé que sa survie était plus importante que son devoir. Ceci dit, le récit se termine sur un flou artistique et un amoncellement de Zombies affamés sur Sarrien, dont le salut final n’est pas garanti, ralliement à papa Nurgle bien acté par ce dernier ou pas. Quelques dizaines/centaines/milliers d’années plus tard, Dragan est quant à lui saisi d’une impression de déjà vu alors qu’il corrode les armures chromées de ces frimeurs de la IVème, ce qui ne fait que renforcer l’hypothèse de la défection de Mr Talon. Fin du spoiler

AVIS :

Mis à part le manque de clarté de sa conclusion (voir la partie spoiler ci-dessus), Endurance est une soumission solide de la part de l’ami Wraight, sans doute rédigée en accompagnement de son roman The Lords of Silence pour un galop d’essai littéraire. En quelques pages, Chris arrive ainsi à donner une véritable profondeur à ses répugnants héros, dont l’attitude chill, thrill & kill les distingue clairement des autres factions d’Astartes chaotiques et renégats de notre sombre galaxie, en plus de s’accorder parfaitement avec la philosophie débonnaire de Papa Nurgle, ce qui ne gâche rien. Sans rien galvauder de leur nature éminemment mauvaise, Wraight réussit également à rendre attachant (sans mauvais jeu de mots) le personnage de Dragan, dont le caractère égal et l’approche désinvolte de sa pestilentielle vocation le font apparaître comme éminemment plus sympathique que le Seigneur du Chaos lambda de la BL. De l’autre côté du ring, Sarrien s’avère moins mémorable, mais le récit que fait l’auteur de la lutte désespérée du loyaliste pour retarder l’inévitable, de part son caractère assez original (il combat en solo, et pas avec le reste de son escouade) et la bonne prise en compte des effets débilitants de la fatigue et des blessures sur la constitution d’un Space Marine – qui reste une machine de guerre insurpassable, mais peut se mettre dans le rouge s’il tire trop sur la corde – s’avère prenant et plaisant, sur les quelques pages qu’il dure. Une nouvelle SM comme je les aime donc : courte dans son propos, précise dans son dessein, efficace dans sa réalisation et à twist dans sa conclusion. Prenez-en de la graine, les rookies.

Gardant une nouvelle en fois en tête le but premier d’un recueil tel que celui dans lequel elle a été incluse, j’ajouterai pour conclure qu’Endurance fait un beau boulot de présentation d’une faction amenée à jouer un rôle important dans l’univers 40K (la Death Guard), en plus de donner assez envie de lire le long format mettant en vedette les Lords of Silence. Que l’exploration d’un concept central du fluff, le ralliement d’un Space Marine loyaliste au Chaos, soit également présente pour l’instruction des lecteurs novices ajoute encore a l’intérêt du propos, qui mérite donc largement sa place dans le Black Library Celebration 2019.

.

Execution – R. Harrison [40K] :

ExecutionICÔNE : SEVERINA RAINE, COMMISSAIRE

INTRIGUE :

Sur la morne plaine de Morne, surplombée par la forteresse du même nom, la Commissaire Severina Raine est confrontée à des problèmes d’autorité. Les gros flingues employés par les rebelles défendant le bastion convoité par le haut commandement impérial ont transformé les Fenwalkers du Sergent Keld en Bloodsplatters, ce qui a sérieusement entamé le moral de l’officier supérieur du 11ème Fusilier d’Antari, le Capitaine Tevar Lun. Pas de chance pour ce dernier, ses désirs de reconsidérer l’attaque sur les murs ennemis sont balayés d’un revers de main par Raine, qui n’a d’autre choix lorsque Lun persiste dans sa couardise que de lui coller un bolt entre les deux yeux devant le reste de ses troupes. Propulsée commandante de l’opération par la force (et l’impact) des choses, la première tâche de Raine sera de tourner la colère – légitime – de ses soldats vers les hérétiques Drastiens plutôt que son humble personne. Heureusement, les Antari sont des sujets pieux et disciplinés de l’Imperium, et la carrière de la Commissaire peut se poursuivre plus loin que la troisième page de sa première nouvelle, ce qui est un stade important pour cette classe de personnages. À propos de personnages, profitons-en pour faire un petit tour de table des VIP de la nouvelle, qui sont, histoire de Gardes Impériaux oblige, assez nombreux. Dans le désordre, nous faisons ainsi la connaissance du Capitaine Stormtrooper Andren Fel et ses Duskhounds, du Sergent Daven Wyck et ses Wyldfolk, de la Psyker sanctionnée Lydia Zane et de l’ingénieure militaire Yulia Crys, qui joueront tous un rôle dans la nouvelle.

Cette session de remotivation achevée, il faut maintenant négocier la prise des tranchées adverses pour arriver jusqu’au bouclier cinétique qui protège la forteresse du bombardement impérial, en exploitant les quelques minutes offertes par le rechargement des mitrailleuses lourdes ennemies. Inutile de dire que les Antari se sortent haut la main de cette épreuve, rencontrant quelques bidasses chaotiques en chemin, et perdant au passage une poignée de PNJ, comme le veut la tradition. Au contact de la muraille, Crys parvient à faire un beau trou dans la cloison des hérétiques, permettant aux Antari de pénétrer dans la place sans difficultés. Cette progression rondement menée est entrecoupée de passages en flashback remontant à la nuit précédant l’assaut, pendant laquelle Raine et Fel se sont livrés à leur rituel habituel de dégustation de thé et échange d’anecdotes. On en apprend ainsi plus sur le folklore d’Antari, très représenté dans les noms des escouades du régiment, et sur l’enfance, forcément difficile, de l’héroïne dans le Scholam de Gloam. Plus précisément, la fois où elle a mené deux de ses camarades dans une campagne de dératisation officieuse, s’étant soldée par un succès relatif (extermination du nid de vermine, mais début d’incendie du bâtiment et mort violente de ses comparses dans l’opération). L’occasion pour elle d’apprendre à assumer les conséquences de ses actes, comme elle continue à le faire à ce jour.

Retour à Morne, où les Antari doivent maintenant trouver un moyen de dissiper le bouclier cinétique qui protège toujours la forteresse pour permettre au reste des forces impériales de leur venir en aide. Pas grand-chose à dire sur cette section de combat urbain des plus classiques, qui verra nos personnages s’illustrer contre les hordes de cultistes (très semblables au Pacte du Sang, le masque en moins) et les renforts Ogryns de l’ennemi. L’indispensable Zane est au four et au moulin, protégeant ses camarades avec un bouclier psychique de son cru, et balançant des mandales mentales monumentales à quiconque a le malheur de la regarder de travers. Notons également le caractère sadique de Wyck, et son addiction aux drogues de combat, qui le placent à mi-chemin entre Rawne et Cuuh en matière d’équivalence Tanithienne. Il est déjà entendu que Raine aura à s’occuper de cet élément utile mais incontrôlable, et qui ne peut pas la blairer parce qu’elle n’est pas d’Antari, dans la suite de ses aventures.

Arrivés à l’étage où les rebelles ont stocké leurs munitions, les survivants de l’infiltration retiennent la contre-offensive adverse assez longtemps pour permettre à Crys d’installer un dispositif explosif qui devrait permettre la pacification expresse de ce théâtre, si employé correctement. Zane, dont les pouvoirs incluent la précognition, flaire le coup fourré de Raine, qui place le devoir avant des choses aussi triviales que le bien-être au travail ou la survie des troupes qu’elle a sous ses ordres, mais accepte tout de même de jouer le jeu, bien qu’elle révèle en aparté à la Commissaire que ses visions s’arrêtent après l’explosion de la poudrière de Morne. Raine ordonne alors la retraite jusqu’aux murs du bastion, avant que la situation des impériaux ne deviennent trop intenable, et les force à appuyer sur le bouton un peu plus tôt que prévu…

Début spoiler…S’en suit une explosion catastrophique, à la létalité exacerbée par l’effet couvercle du bouclier de Morne, qui empêche l’énergie dégagée de se diffuser aux alentours, et revient donc dans les dents et les tissus mous des troupes présentes dans la forteresse, qui n’ont d’autres choix que de tomber raides mortes. Cette fin renversante est toutefois épargnée au groupe de Raine, protégé par la MVP Zane, qui prend difficilement sur elle pour abriter ses collègues derrière son fameux bouclier psychique. L’effort consenti ruine toutefois irrémédiablement son rimmel et ses globes oculaires, qui lui coulent sur les joues dans la plus grande tradition des comédies romantiques hollywoodiennes. Voilà pourquoi elle ne voyait plus rien après cette détonation. Prix de la camaraderie pour Lydia Zane, vraiment. C’est toutefois une victoire indéniable pour l’Imperium qui se profile, accomplie grâce à la vaillance et au dévouement (en partie involontaire, Raine ayant menti à ses soldats en leur indiquant que les renforts étaient en chemin) du 11ème Fusilier d’Antari, qui n’a perdu que très peu de personnages nommés, et donc importants, dans la bagarre. C’est ce vieux Tevar Lun qui peut être fier de ses hommes (et femmes) depuis l’au-delà.Fin spoiler   

AVIS :

Si vous êtes familiers de la Black Library, il y a de bonnes chances que la lecture de cet ‘Execution’ vous fasse penser aux tribulations martiales du Premier et Unique de Tanith, ce qui n’est guère étonnant quand on compare les castings et les styles de Rachel Harrison et de Dan Abnett1. Etant donné le gouffre qui sépare ces deux séries en termes de publications, il faudra attendre un peu pour s’amuser à une analyse croisée de ces dernières, mais je dois dire que cette nouvelle introduit très proprement, et de façon satisfaisante, les personnages importants du 11ème Fusilier d’Antari, et constitue donc un point de départ tout indiqué pour qui souhaite suivre de plus près la trajectoire de ce nouveau régiment nommé de la GW-Fiction. Harrison présente bien sa galerie de protagonistes, souligne leurs affinités et inimitiés respectives, et ébauche quelques points saillants de leur histoire personnelle, qui sera sans doute au cœur de la suite de leurs aventures. On a également droit à une bone dose de fluff made in Antari, ce qui n’est certes pas essentiel pour la compréhension de Warhammer 40.000, mais dénote toutefois d’un sérieux travail de « caractérisation » de la part de l’auteur, et favorise l’immersion dans l’histoire et l’intérêt pour les personnages mis en scène dans cette dernière. Tant qu’on parle du background, je dois également souligner que cela fait plaisir de voir un.e Commissaire héroïque enfin faire son devoir, c’est-à-dire exécuter un officier refusant ses ordres, sans bénéficier de circonstances atténuantes. La disparition prématurée du Capitaine Lun, présenté comme un type bien et un bon soldat, est donc à savourer2 à sa juste valeur. Enfin, d’un point de vue purement narratif, Harrison rend une copie satisfaisante avec cette nouvelle de Gardes Impériaux de films d’action, nerveuse et sans temps morts. Rien d’exceptionnel ici, mais rien à jeter non plus. Pour boucler la boucle, je dirai que Rachel Harrison signe avec ‘Execution’ une nouvelle d’un meilleur niveau que ce que Dan Abnett avait publié au tout début des ‘Fantômes de Gaunt’. Reste à voir si la suite sera à la hauteur…

1 : Vu la manière dont le second remercie la première dans ses derniers bouquins, il y a de fortes chances que les deux aient l’habitude de travailler ensemble, et que Harrison ait voulu émuler le « maître » dans ses écrits. 
2 : Quelle belle remarque de psychopathe tout de même. Mais c’est vrai, toi-même tu le sais.

.

The Battle for Markgraaf Hive – J. Hill [40K] :

The Battle of Markgraaf HiveICÔNE : MINKA LESK, GARDE DU 101EME CADIEN

INTRIGUE :

Comme les plus sagaces des lecteurs de cette chronique l’auront certainement deviné, la nouvelle du sieur Hill traite donc de la bataille pour la ruche Markgraaf1, opération de reconquête et pacification à laquelle l’unité de Minka Lensk, héroïne récurrente de l’auteur, à le plaisir et l’avantage de participer, en compagnie du \[|{™#{ème Cadien (comprendre qu’entre les pertes au combat non remplacées et les fusions régimentaires qui s’en suivent, les numéros défilent plus rapidement que lors d’une soirée bingo à l’Ehpad de Bois-Robert-sur-Veule).

Au menu de ce qui peut sans doute être considéré comme un séminaire annuel pour les derniers des Targaryen – cette manie de coller des yeux violets aux protagonistes pour les distinguer de la masse… –, une activité de team building dans les ténèbres des niveaux inférieurs de la ruche en question, avec les habituels cultistes hargneux-mais-bon-ça-va-on-a-vu-pire en lieu et place des assiettes en céramique à décorer, qui étaient à la mode en ce genre d’occasions quelques millénaires plus tôt. Une fois la séance initiale de laser game terminée, on enchaîne avec une découverte de la faune locale, qui consiste en des rats de la taille d’un rat et des asticots de la taille d’un chien (appelons-les maxticots), suivie par une session d’aqua-relax dans un bassin naturel, sous les ordres d’un Commissaire-Nageur un brin autoritaire.

À peine le temps de réaliser que les maxticots ne font pas de bons candidats au fish pédicure, à moins d’être un Ogryn peu chatouilleux, qu’il faut enchaîner avec une initiation à l’escrime médiévale/escape game sous la houlette de Philippe Chaos-therine (il coupe sa hache… et il rallume sa hache…), Space Marine renégat reconverti en coach de vie. Cette journée intense se termine par quelques longueurs de brasse coulée, un temps calme de 10 minutes devant une œuvre d’art moderne convenablement moche, et un ultime passage au hammam (mais habillé, ce qui est concept). Ce n’est pas tout le monde qui a la chance de vivre des séminaires aussi riches. Merci qui ? Merci Abby !

À ne pas confondre avec la ruche Steffigraaf, qui malgré quelques revers, est toujours au service de l’Empereur.

AVIS :

Propulsé directement dans le feu de l’action dès les premières lignes de The Battle… (au moins, le titre n’est pas mensonger), le lecteur aura sans doute quelques difficultés à comprendre les tenants et les aboutissants de cette successions de péripéties aussi guerrières que brouillonnes, expédiées sans tact, ni finesse, ni connecteurs logiques (ce qui surprend au début, irrite au milieu, et fait marrer à la fin) par un Justin Hill aussi maître de son propos qu’un élève de CM1 couchant par écrit le récit de ses vacances de printemps.

Si le début de la nouvelle fait illusion, tout se corse à l’arrivée sur la mare aux maxticots, théâtre d’une empoignade confuse, suivi de l’arrivée d’un groupe de survivants – dont un Valhallan, qui passait dans le coin – mené par un Commissaire, suivi de l’exécution d’un Garde qui trouvait l’eau trop froide, suivi de l’arrivée du random Chaotic Space Marine de base, suivi d’une ré-empoignade confuse, suivie d’une fuite éperdue de l’héroïne jusqu’au fond du bassin, suivi d’un questionnement philosophique sur la destinée des Cadiens survivants, suivi d’un séchage express, inexpliqué et interprété comme miraculeux par une Minka à laquelle il ne faut pas grand chose, des vêtements de nos héros, suivi de la fin du récit, qui s’achève donc davantage comme un chapitre de roman qu’un court format digne de ce nom, faute d’un dénouement digne de ce nom (sauf si être coincé à deux sans matos dans une caverne inondée peuplée de vers carnivores géants et squattée par des hordes d’hérétiques peu aimables et un Space Marine du Chaos altéré de sang constitue un explicit satisfaisant, bien sûr1).

Pauvre en termes de fluff, d’informations sur le passif de Mina Lensk, et d’une assez grande banalité dans son propos, The Battle… lorgnait peut-être du côté de la saga Gaunt’s Ghosts, et notamment du siège de Vervunhive couvert dans Necropolis, pour son inspiration, mais le fruit (plein d’asticots, donc) est tombé trèèèès loin de l’arbre. Pour laisser le mot de la fin, en même temps que du début, car j’aime bien boucler des boucles sur mon temps libre, à Hill en personne : « What the hell is happening ? »

1 : Si c’est le cas, vous êtes bizarre.

.

The Smallest Detail – S. Mitchell [40K] :

The Smallest DetailICÔNE : CIAPHAS CAIN, COMMISSAIRE & HÉROS DE L’IMPERIUM

INTRIGUE :

À la recherche de petits extras pour égayer l’ordinaire de son cher Commissaire Cain, le brave Jurgen a pris sur lui de visiter les entrepôts de la milice de Helengon, monde banal sur lequel la Garde a été déployée pour écraser une insurrection l’étant tout autant. Usant de la considérable influence de son supérieur pour impressionner le responsable de l’entrepôt, un certain Sergent Merser, l’homme à tout faire du Héros de l’Imperium déambule longuement entre les travées et les étagères, emplissant sa musette des spécialités culinaires locales les plus appétissantes, à commencer par un saucisson d’anguille de sable tout simplement comestible, ce qui est déjà plus que ce que la majorité des rations du Ministorum peuvent revendiquer. Ces emplettes complétées, Jurgen se dirige tranquillement vers la sortie du site, mais remarque rapidement qu’il a été pris en filature par des amateurs, ce qui ne le trouble pas outre mesure1. Et en effet, l’embuscade dans laquelle il prend soin de tomber, et qu’il déjoue grâce à son entraînement et équipement supérieur, n’aurait pas cassé trois pattes à une Sentinelle. Seul petit problème, l’échange de tirs entre notre héros et son dernier adversaire a eu pour effet de déclencher un incendie (c’est ça que de s’abriter derrière des fûts de prométhéum), rendant l’identification des assaillants de Jurgen difficile.

Rejoint par la Prévôte Liana, qui se trouve en charge de l’enquête de cette tentative d’assassinat caractérisé, et par le Sergent Merser, qui accepte de jeter un œil sur les inventaires des autres entrepôts de la milice pour tenter de comprendre comment les tueurs en (im)puissance ont réussi à trouver uniformes et fusil laser2, Jurgen accepte de coopérer à l’investigation, mais seulement jusqu’au moment où il devra rentrer au camp pour préparer le jambon-purée de Cain. Très étrangement, l’étude des documents officiels ne donne rien, les inventaires inspectés par Merser étant trop mal tenus pour détecter des absences ou surplus de matériel (contrairement aux siens, d’une impeccable et implacable précision). Le dossier menaçant de piétiner, Jurgen prend congé, indiquant à ses comparses son intention de rentrer au bercail à pied, comme il est venu…

Début spoiler…Sauf qu’il était en fait venu en moto (une Salamander n’étant pas pratique dans une ville pas encore en ruines, et donc pleine de feux rouges, de livreurs Deliveroo et de petites mamies en déambulateur), et qu’il a fait exprès de mettre Merser sur une fausse piste, car il se doutait de la participation du Sergent dans la conspiration le visant. Aussi, lorsqu’il le voit sortir en courant de l’entrepôt quelques minutes après lui et sauter dans une camionnette qui part à fond de train pour rattraper le piéton qui n’en était pas un, Jurgen prévient Liana et se met en filature de la taupe, qu’il rattrape et immobilise au premier carrefour venu. Finalement, il s’avère que toute cette affaire n’a été qu’un énorme et regrettable (pour Merser, et plus encore pour ses complices) malentendu, le Sergent faisant partie d’un gang détournant de la nourriture pour la revendre à prix d’or sur le marché noir. Persuadé que Jurgen allait le dénoncer auprès de Cain (ce que l’aide de camp n’avait pas du tout l’intention de faire, car comme il le reconnaît lui-même, tout le monde fait ça), Merser a tenté de réduire le Valhallan odoriférant au silence, avec des résultats médiocres. Ironie de l’histoire, ce sont ses inventaires trop parfaits qui ont mis la puce à l’oreille de Jurgen, qui, en tant que Garde vétéran, sait bien que ce genre de documents sont par nature inexacts. Encore une fois, le mieux a été l’ennemi du bien !Fin spoiler

1 : Quand on est un vétéran ayant combattu les Tyranides et les Necrons à plusieurs reprises, plus grand-chose ne vous excite.
2 : L’absence de -s est volontaire, car sur les trois assaillants, un seul était convenablement armé.

AVIS :

Si cette petite nouvelle mettant à l’honneur le fidèle sidekick de Ciaphas Cain plutôt que ce dernier1 se laisse lire sans problème, et permet au lecteur non familier de l’approche particulière que Sandy Mitchell a du grimdark de découvrir cette dernière, je m’interroge sur la pertinence de l’intégrer dans un recueil dédié aux icônes de la GW-Fiction, dont Jurgen ne fait définitivement pas partie. Ce ne sont pourtant pas les courts formats où Cain tient la vedette qui manquent, et qui auraient à mes yeux bien mieux fait l’affaire ici. Je suis également un peu déçu que le titre équivoque de l’histoire n’ait au final débouché sur rien dans le dénouement de l’intrigue. Mitchell nous montre en effet Jurgen prendre en note mentale le nom d’un parfait inconnu, parce qu’on ne sait jamais, ça peut servir… sauf que ça n’a servi à rien ici. Le fusil de laser de Tchekov, ça te dit quelque chose ? Bref, ‘The Smallest Detail’ est loin d’être la meilleure, ni la plus adaptée, des nouvelles de Ciaphas Cain que l’on puisse parcourir, et je recommanderai donc au lecteur de retenter sa chance avec une autre soumission pour prendre la véritable mesure du Héros de l’Imperium.

1 : Ce n’est pas le premier texte de ce type, l’hyper court format ‘A Mug of Recaff’ étant également centré sur Jurgen.

.

Of Their Lives in the Ruins of Their Cities – D. Abnett [40K] :

Of Their Lives...ICÔNE : IBRAM GAUNT, COMMISSAIRE GÉNÉRAL DU PREMIER & UNIQUE DE TANITH

INTRIGUE :

Nous suivons le premier et unique Commissaire-Colonel Ibram Gaunt, en charge du régiment du même statut, dans les premiers temps – assez difficiles – de son affectation à la tête des Tanith. Encore inexpérimentés, bien qu’ayant déjà soufflé dans les naseaux des Sang Bleu de Volpone en prenant la ville de Voltis à leur place, les futurs de Fantômes ont subi la vengeance mesquine de Noches Sturm et ont été chargés de mener une mission de reconnaissance dans les ruines de la seconde cité de Voltemand, Kosdorf, pendant que le gros de la croisade partait vers d’autres théâtres d’opération. L’équivalent de « va voir là bas si j’y suis » en termes militaires, ce qui n’aide pas vraiment à motiver la troupe. Cette dernière, toujours traumatisée par la perte de son monde natal, en veut méchamment à Gaunt, et le Commissaire a bien du mal à briser la glace avec ses nouvelles troupes, dont il ne pense pas grand-chose de positif pour le moment. Il songe même sérieusement à accepter l’offre que lui avait faite son vieux copain Blenner, un petit piston bien placé pour remettre sa carrière sur les rails, et laisser ces tree huggers de Tanith derrière lui. Il conserve à cet effet la lettre que son camarade lui a écrite dans la poche de son uniforme, comme un joker à abattre en cas de besoin.

La nouvelle décrit l’opération de reconnaissance montée par Gaunt et Corbec pour explorer Kosdorf avant que le gros du contingent impérial soit prêt à avancer, et qui, ô surprise, se passe très mal. Il s’avère rapidement que l’Archennemi a conservé des amis séides dans la ville, des cohortes de forces de défense planétaire rendues folles par les maléfices du Chaos et le manque de nourriture. Voulant gérer la situation comme un grand, Gaunt opte pour une retraite combattante, afin de laisser le temps à Caffran, son adjudant intérimaire depuis la mort de Sym sur Tanith (et avant que Gaunt n’embauche Milo pour ne plus avoir à entendre les « steuplé msieur steuplééééééééééééééé » du gamin), de prévenir le reste du régiment du problème rencontré (comme d’habitude, la radio ne marche pas, sinon c’est pas drôle). Cette situation stressante (les Doskorfers étant adeptes de la guerre psychologique et se faisant passer pour les véritables fantômes de Tanith pour saper le moral de l’adversaire) lui permettra de prendre la mesure des hommes qui le servent, depuis le cordial Corbec jusqu’à l’instable Larkin, en passant par l’imprécis (mais pas cette fois) Bragg, le clairvoyant Domor ou l’insaisissable Mkoll. Lorsque les renforts finissent enfin par arriver, menés par l’au fond pas si méchant que ça Major Rawne et sa bande de vauriens1, tout est bien qui finit bien pour les Tanith, qui sortent un peu plus unis de cette escarmouche. Symbole de l’enterrement de la hache en nalwood de guerre entre Gaunt et ses bidasses, le premier brûle la lettre de Blenner2 à son retour au campement, liant ainsi son destin avec celui de ses Fantômes. La suite fait partie de l’histoire de la GW-Fiction…

1 : Qui s’étaient amusés à faire les poches de leur officier et lui avait soutiré la lettre de Blenner, au grand désarroi de Gaunt. Ils lui ont toutefois rendu à la fin de la nouvelle.
2 : On peut supposer que la missive contenait l’adresse mail et le numéro de téléphone de Blenner, que Gaunt n’avait pas enregistrés ailleurs. Sinon je ne vois pas en quoi ce geste incendiaire empêcherait notre héros de saisir sa chance de mutation.

AVIS :

Longue nouvelle (50 pages tout de même) se taillant la part du lion dans tous les recueils dans lesquels elle a été incluse (dont ‘The Hammer & the Eagle’), ‘Of Their Lives…’ est le récit d’introduction ultime aux Fantômes de Gaunt, écrit par Dan Abnett avec ce but particulier en tête, au moment où la saga avait déjà atteint son statut légendaire parmi la communauté. Il est intéressant à ce titre de la comparer à des travaux plus anciens, mais sensiblement similaires car relatant l’apprivoisement mutuel entre le Commissaire-Colonel et ses nouvelles recrues. Les contributions d’Abnett à la première mouture d’Inferno ! (‘Ghostmaker’ – la nouvelle – , ‘A Blooding’, ‘The Hollows of Hell’) traitent ainsi de ce sujet de manière fort logique, à fins de présentation et d’établissement de cette nouvelle (à l’époque) série. Un peu plus tard, Abnett se fendit d’un ‘In Remembrance’ prenant place après ‘Necropolis’, et donnant à nouveau au lecteur novice un échantillon représentatif en même temps qu’un tour de table des personnalités importantes, du Premier et Unique de Tanith. ‘Of Their Lives…’ est la version revue, corrigée et probablement définitive de ce didacticiel narratif, présentant une fois encore les personnages « initiaux1 » de la série, leurs personnalités, leurs motivations et leurs rapports les uns par rapport aux autres. Ce côté social est particulièrement exploré ici, et justifie bien plus les 50 pages de la nouvelle que l’intrigue, relativement simple, qui sous-tend cette dernière.

Si ‘Of Their Lives…’ est d’abord destinée à un public non familier avec les Fantômes de Gaunt, Abnett n’oublie pas ses vétérans et s’amuse à glisser de nombreux clins d’œil à la suite des événements, que seuls les connaisseurs pourront détecter. La destinée de certains Tanith est esquissée de façon prophétique (Caffran, Feygor, Beltayn…) parfois jusqu’à un stade avancé de la saga (dialogue « bon pied bon œil » entre Larkin et Gaunt), tout comme celle de Noches Sturm, à qui Milo promet un retour de bâton karmique que le Volpone recevra bien quelques années plus tard. Notons également la référence croisée aux travaux inquisitoriaux d’Abnett, nouvelle passerelle/easter egg à recenser dans le « Daniverse ». Au final, cette nouvelle accomplit parfaitement son objectif, de façon peut-être un peu transparente pour le lecteur avisé, mais Dan Abnett, égal à lui-même, signe un texte suffisamment solide pour que tout le monde y trouve son compte. Si vous voulez découvrir un des mythes fondateurs et structurants de la Black Library, ‘Of Their Lives…’ est donc le point de départ idéal pour se familiariser avec une saga aussi colossale que celle des Fantômes de Gaunt.

1 : Note à l’attention des lecteurs ne connaissant par les Fantômes de Gaunt : Abnett a pris un malin plaisir à rajouter des personnages non Tanith à son casting au fur et à mesure des campagnes du régiment. Si vous pensez qu’il y a une foule de noms à retenir ici, attendez un peu de lire ‘The Lost’ ou ‘The Victory’.

.

Mercy – D. Ware [40K] :

MercyICÔNE : AUGUSTA, SŒUR SUPÉRIEURE DE L’ORDRE DE LA ROSE DE SANG

INTRIGUE :

Sur le monde de Lautis, isolé dans l’arrière-pays de l’Ultima Segmentus, une escouade de Sœurs de Bataille de l’Ordre de la Rose de Sang menée par la Sœur Supérieure Augusta Santorus explore les ruines d’une cathédrale impériale, peut-être dédiée à Sainte Mina, et peut-être dédiée à Saint Maclou (qui peut dire ?), à la recherche de… quelque chose. Escortées par un missionnaire de l’Ecclésiarchie (Lysimachus Tanichus), ayant pris sur lui de ranimer la flame de la foi en l’Empereur parmi la plèbe locale après des siècles d’isolement et d’obscurantisme, l’Adeptus Sororita s’est en effet lancé dans une quête aussi pressante que floue pour une statue pouvant être liée aux origines de l’Ordre. On ne saura jamais pourquoi l’identification du patrimoine sacré constitue une priorité telle pour les membres de la Rose de Sang, mais toujours est-il que nos intrépides sistas se retrouvent fort dépourvues quand la Waaagh ! locale fut venue.

Coincées dans les ruines de la maison de Pépé (Question : peut-on considérer les temples impériaux comme des Ehpads, de ce fait ?), Santorus et ses sous-fifres optent alors pour un dernier carré héroïque et commencent à arroser les peaux vertes de bolts et d’imprécations en Haut Gothique, avec des effets spectaculaires, tant sur les effectifs de la horde ork que sur la culture générale du lecteur. Las, cela ne suffit pas à décourager les belliqueux Xenos de forcer l’entrée du lieu saint sous le seul poids du nombre, forçant les fifilles survivantes à, je vous le donne en mille, engager les brutes au corps à corps. Et pas n’importe comment, qui plus est : à mains nues. Oui, vous avez bien lu, ô incrédules lecteurs : c’est bien à coup de poing et de pied (pas de crépage de chignon possible avec les Orks malheureusement) que Santorus et consœurs tombent sur le râble, plutôt costaud, des aliens mécréants. Et le meilleur dans tout ça, c’est qu’elles leur mettent une énorme race, à l’image d’une Sœur Supérieure déchainée et tenant facilement tête à un Warboss Blood Axe, avec et sans arme. Pourquoi avoir des progénoïdes quand on peut avoir des stéroïdes ?

Les Orks finalement mis en déroute, et leur chef exécuté d’un bolt en pleine tête après un sommaire interrogatoire ayant permis de mettre à jour la duplicité de ce traître de Tanichus (c’est un nom de fourbe, je l’ai toujours dit), il est temps pour Augusta de (se) rendre justice afin des réparer les torts subis (une Soeur décédée d’allergie à la grenade, et quatre permanentes totalement ruinées). Guidée par une inspiration soudaine, et sans doute divine, elle décrète donc la mort du félon, ignorant ses piteuses justifications pseudo humanitaires, et l’annexion de Lautis au sein du protectorat de l’Ordre. Pourquoi ? Parce que. The end.

AVIS :

Que garder de Mercy, première soumission de la newbie Dannie Ware pour la Black Library ? Pas grand-chose, malheureusement. Sur le fond, l’intrigue proposée tient en une demi-ligne (attention, vous êtes prêts ? “Sistas versus Orks dans une cathédrale”. Ta-daaaaa!), et le “twist” final gardé en réserve par l’auteur tombe tellement à plat qu’on aurait même du mal à le considérer comme tel. Que Tanichus ait mené son escorte dans un piège, soit. Mais apprendre que la motivation profonde des Orks, et la raison pour laquelle ils ont accepté la proposition du missionnaire, est la récupération des armes d’une pauvre escouade de cinq Sororitas, no way. L’histoire a beau se dérouler dans l’Ultima profond, plus cheap que ça, c’est fouiller les poubelles des colons locaux pour récupérer les bouteilles d’amasec consignées au Simply Market du coin. Respectez-vous tout de même, Messieurs les peaux vertes.

Sur la forme, on aura bien du mal à pardonner à Ware les libertés qu’elle prend avec quelques principes fondateurs et porteurs du fluff de GW, au premier du rang duquel on trouve l’axiome : “Les Orks sont des forces de la nature”. Faire triompher une escouade de Space Marines d’Assaut vétérans d’une empoignade contre ce type d’adversaires, pourquoi pas (et encore). Mais une poignée de Sœurs de Bataille qui tatane comme qui rigole dix fois leur nombre et cent fois leur poids en géants verts, sans subir une seule perte dans le feu de l’action, et en recourant à des prises de catch histoire de faire kwioul, non merci. Ajoutez à cela un character development aux abonnés absents et quelques incongruités (comme une statue disposée de telle façon à ce qu’elle soit tournée vers Sainte Terra… donc vers l’Ouest-Sud-Ouest, c’est bien connu) sans conséquences pour le récit mais pas pour la crédibilité de ce dernier, et vous obtenez une nouvelle à remiser dans le fond des cartons du second choix de la BL. Mercy ? Sans façons.

.

Thorn Wishes Talon – D. Abnett [40K] :

Thorn Wishes TalonICÔNE : GREGOR EISENHORN & GIDEON RAVENOR, INQUISITEURS DE L’ORDO XENOS

INTRIGUE :

Par une sombre nuit d’orage, un petit groupe de mystérieux individus débarque sur la planète Malinter, et prend la direction d’une tour en ruines où un rendez-vous a été fixé avec une tierce partie anonyme. Voilà qui est bien brumeux, voire fumeux, vous en conviendrez. Sur le chemin, les marcheurs sont attaqués par 6/7 hostiles, donnant l’occasion à Abnett de présenter ses protagonistes de façon convenable. À tout seigneur container, tout honneur, commençons par le meneur de la bande, l’Inquisiteur Gideon Ravenor, puissant Psyker réduit à l’état de loque humaine lors d’un attentat chaotique il y a bien longtemps, et confiné dans un fauteuil flottant énergétique depuis lors. Il a amené avec lui quelques copains pour lui servir de garde de la carrosserie : l’Interrogateur Carl Thonius, incarnation parfaite du hacker nerd passant la moitié de son temps à se plaindre, et l’autre à balancer des vannes caustiques, les hommes et femmes de main Harlon Nayl, Kara Swole et Zeph Mathuin, et la télékine Patience Kys. Seul Gigi sait ce qui les attend sur Malinter, et il refuse obstinément de s’en ouvrir à ses collaborateurs, même après que cette première embuscade, prélude à de nombreuses autres, se soit terminée en faveur des visiteurs (grâce à la combo mortellement efficace lévitation forcée + canon d’assaut rotatif).

La progression de nos héros devient de plus en plus difficile au fur et à mesure qu’ils s’approchent du sommet de la tour, des hordes des cultistes chaotiques se mettant en travers de leur route dans le but d’empêcher la rencontre de haut niveau (à tout point de vue) de se produire. Laissant Thonius, Nayl et Mathuin retenir la plèbe et échanger des blagounettes, ce Dom Juan de Ravenor entraîne Kys et Swole à sa suite jusqu’au rooftop du gratte ciel, où les attend ce bon vieux Gregor Eisenhorn, mentor de Gideon et ex-employeur de Kara. Disparu de la circulation depuis des lustres, et présumé mort ou radical par l’Imperium (voir la trilogie ‘Eisenhorn’ d’Abnett à ce sujet), Greg le Grabataire est toujours actif dans le game et déterminé à s’opposer au Chaos par tous les moyens nécessaires, y compris en retournant ses armes et méthodes contre lui. Le seul équipier conservé par Eisenhorn dans sa lutte contre l’anarchie galactique est ainsi le possédé Cherubael, qui lui sert de gros bras mais également d’auxiliaire de vie (dur de monter en haut d’une tour de 500 mètres – sans ascenseur – quand on est invalide à 93%1). Ces retrouvailles émouvantes entre les deux invalides tournent rapidement à la réunion professionnelle, Eisenhorn ayant voulu prévenir son disciple de l’intérêt que lui portent les membres de la Divine Fraternité, un culte chaotique spécialisé dans les catastrophes à venir. D’après leurs dernières (pré)visions, Ravenor, ou quelqu’un de son entourage, jouera un rôle décisif dans l’incarnation du démon Sliite dans notre dimension, ce qui aura évidemment des conséquences néfastes pour l’Imperium. Une barquette avertie en valant deux, Eisenhorn tenait à faire passer le message à son ancien Interrogateur, qui décide naturellement de… continuer ses investigations sur Eustis Majoris, précisément là où le démon fera son entrée dans le Matérium. Mais attention, en faisant attention.

Un peu plus bas, le Supreme NTM (Nayl, Thonius & Mathuin) a bien du mal à gérer le Dreadnought que les cultistes ont fait venir en renfort. Ils parviennent cependant à le retenir suffisamment longtemps avec leurs grenades krak (un peu) et chamailleries (surtout) pour que les Inquisiteurs se traînent enfin à leur niveau, leur conciliabule achevé, et règlent son compte à la menaçante machine. Le reste n’est qu’une formalité, et après un joyeux massacre de chaoteux et un salut au club des anciens (Nayl et Swole ayant commencé par servir Gregor avant de rejoindre Gideon), Ravenor et Eisenhorn se séparent à nouveau, peut-être pour la dernière fois. La suite sera racontée dans ‘Ravenor Returned’, le deuxième tome de la trilogie consacrée par Abnett au Stephen Hawkins du 41ème millénaire.

1 : Ce qui pose la question : pourquoi Eisenhorn a-t-il donné rendez-vous à son pupille, à la mobilité également réduite, dans un endroit aussi difficile à atteindre ? Autrement que pour le côté grandiose, s’entend ?

AVIS :

Abnett trouve un prétexte assez quelconque pour réunifier le temps d’une nouvelle la team GG de l’Inquisition, et on peut lui en être gré. Il est clair à la lecture de ‘Thorn Wishes Talon’ que l’équilibre des forces penche en faveur de Ravenor (dont la saga était en cours d’écriture au moment de la première publication de cette nouvelle), Eisenhorn en étant réduit à faire un cameo plutôt qu’à participer réellement à l’intrigue. En ce sens, cette nouvelle donnera sans doute plus envie au lecteur de se pencher sur les aventures de Gideon le gai luron plutôt que sur celles de Gregor Trompe-la-Mort, même si les deux séries méritent définitivement la lecture. On prend plaisir à voir opérer une équipe d’agents de l’Inquisition, constituée d’individus au caractère bien trempé et aux compétences uniques, ce qui donne un cocktail savamment mixé d’action et de punchlines, saupoudré par quelques éléments de fluff dignes d’intérêt, dans le plus pur style d’Abnett. Je place ‘Thorn Wishes Talon’ en dessous des histoires policières/roman noir (‘Missing in Action’, ‘Backcloth for a Coin Additional’) et détaillant l’origine/la destinée de personnages secondaires importants des travaux inquisitoriaux de Dan Abnett (‘Playing Patience’, ‘The Strange Demise of Titus Endor’), mais vous pouvez tout de même y aller les yeux fermés (ou pas, c’est tout de même plus pratique pour lire un texte).

.

The Wreckage – D. Annandale [40K] :

The WreckageICÔNE : SEBASTIAN YARRICK, COMMISSAIRE

INTRIGUE :

Où il sera question des premières années de service de Sebastian Yarrick, avant qu’il ne devienne la légende acariâtre que l’Imperium connaît et adore redoute. Déjà engagé aux côtés de la Légion d’Acier d’Armaggedon, notre héros se retrouve en mauvaise posture lors de la traque d’une bande de pirates hérétiques ayant fait du vilain dans le secteur de Statheros, et qui semble avoir un coup d’avance sur ses adversaires impériaux. Débarqué à la surface d’Aionos, une lune servant de décharge à vaisseaux spatiaux en fin de vie, le 252ème Régiment de la Légion d’Acier tombe dans une embuscade qui le force à s’abriter derrière une épave (d’où le titre. Ça, c’est fait.), en attendant des jours meilleurs, ou un coup de génie militaire de la part du Capitaine Jeren Marsec, leader charismatique mais tête brûlée de l’expédition. Yarrick, bien moins dominateur que dans ses dernières années, se contente d’observer avec circonspection la tournure que prennent les événements, échangeant quelques remarques acerbes avec son pote Otto Hanoszek, Sergent expérimenté du 252ème, avec lequel il partage quelques doutes sur la qualité du Capitaine Marsec. Ce dernier, qui a vraiment la confiance, se permet de faire des blagues au sujet de son Commissaire, et propose en toute simplicité de charger en masse les lignes ennemies (situées en hauteur et mieux fortifiées que celles des impériaux) afin de forcer les hérétiques à se concentrer au même endroit pour repousser l’attaque, les transformant en cible facile pour la frégate d’Armaggedon (Castellan Belasco) qui stationne en orbite. Moyennement emballé par ce plan à 80% suicidaire, Yarrick accepte tout de même de marcher dans la combine, mais le coup de bluff de Marsec ne donne rien. Il semble en effet que le fourbe ennemi se soit fait la malle au lieu de tenir sa position, comme il était convenu qu’il le fasse.

Dépité autant que déboussolé par ce coup du sort, Marsec contacte la frégate pour annuler la frappe orbitale, mais réalise un peu tard qu’il vient de re-re-retomber dans un piège, les hérétiques ayant capturé le vaisseau et n’attendant que la confirmation du Capitaine que ses troupes forment un gros tas bien compact au sol pour donner du macrocanon. Le subtil accent nazillard de l’opérateur radio auquel Marsec s’adresse met toutefois la puce à l’oreille de Yarrick, qui parvient à sauver quelques meubles en ordonnant une dispersion stratégique quelques instants avant que la catastrophe ne frappe. La situation du 252ème est toutefois des plus précaires, réduit à quelques escouades éparses, mené par un officier totalement hébété par la tournure qu’on prit les événements, et confronté, en plus des pirates de l’espace, à une escouade de Space Marines du Chaos des tristement célèbres Harkanor’s Reavers (la Légion des Damnés, goût Hérésie).

Prenant en charge les opérations le temps que Marsec sorte de sa torpeur, Yarrick entraîne ses survivants dans un complexe de pyramides enfoui sous le sol de Aionos, et découvert par le bombardement spatial. Je ne vous ferai pas l’insulte de laisser planer l’ombre d’un suspens sur la présence de Necrons dans cette nécropole, car c’est évidement le cas. Pris entre le marteau du Chaos et l’enclume des Xenos, Yarrick parvient à feinter son monde en passant en mode furtif, laissant les hérétiques menés par leurs gros copains énergétiques se ruer sur les robots tueurs, avec des résultats concluants. Un bonheur n’arrivant jamais seul, nos héros apprennent que l’équipage du Castellan Belasco a réussi à se libérer et est sur le point de reprendre le contrôle du vaisseau, ce qui permettrait au 252ème de tirer sa révérence sur cette victoire mineure. Problème, le bombardement a séparé les Gardes Impériaux en deux, et le groupe mené par le Sergent Hanoszek est confronté à la même situation que celui de Yarrick (hérétiques, Space Marines du Chaos, pyramide…), sans bénéficier de la présence scénaristiquement salvatrice de ce dernier.

Conscient que la situation de ses camarades est sans espoir1, Yarrick essaie de convaincre Marsec, qui a enfin repris ses esprits, de ne pas jouer au héros en essayant de monter une opération de secours vouée à l’échec. En vain. Seb la Frite passe alors en mode Commissaire et colle un bolt dans la tête de l’officier, qui n’attendait que ça en fait, histoire de mourir en martyre au lieu de devoir justifier son incompétence auprès du haut commandement à son retour. Grand prince, Yarrick annonce lui-même à Hanoszek qu’il a été désigné volontaire pour mourir au nom de l’Empereur, ce que ce dernier accepte avec stoïcisme, et laisse sa radio ouverte jusqu’au bout pour recueillir les derniers râles des héroïques bidasses. Kelôm.

1 : Ils sont confrontés à 3 Astartes du Chaos. 3 ! C’est Gaunt qui doit doucement rigoler dans son coin.

AVIS :

Une nouvelle sur Yarrick où aucun Ork ne vient pointer le bout de son (absence de) nez, cela fait bizarre, tant cette race de Xenos est centrale dans la saga du vieux Commissaire. Le récit que fait Annandale du début de la carrière du héros d’Armaggedon, que l’on découvre déjà animé de puissantes convictions quant à la manière d’accomplir son devoir, même s’il se laisse ici marcher sur les pieds par cette fantoche de Marsec, ne s’avère pas vraiment mémorable, et je pense que le nombre très important de factions convoquées dans cette courte nouvelle joue un rôle important dans ce constat de bofitude. Était-il vraiment nécessaire de faire intervenir les Necrons (qui n’apparaissent même pas directement dans le récit d’ailleurs) dans cette péripétie mineure de la carrière de Yarrick ? Cela renforce en tout cas le running gag de la nécropole enfouie sous trois centimètres de sable, et qui se réveille dès que le chien du héros la déterre par inadvertance en creusant un trou pour son os. À vouloir jouer à la fois sur le tableau de la psychologie (Yarrick se retrouve confronté à un dilemme moral qui aura des conséquences sur la suite de sa vie) et de l’action (Yarrick doit mener ses hommes à la victoire en dépit des circonstances) en aussi peu de pages, Annandale score moyennement sur les deux dimensions, et ce faisant, ne rend pas vraiment service au héros qu’il est sensé glorifier.

.

Rite of Pain – N. Kyme [40K] :

Rite of PainICÔNE : ADRAX AGATONE, CAPITAINE DE LA TROISIÈME COMPAGNIE DES SALAMANDERS

INTRIGUE :

Malgré leur réputation de gros nounours, les Salamanders ne sont pas exempts de pratiques douteuses. La scène qui se déroule en ouverture de ‘Rite of Pain’ (une nouvelle qui ne traite pas de la manière de faire une Tradition à la mie moelleuse et à la croûte ferme, ce qui est, de l’avis général, très dommage) le démontre bien. Un trio de tortionnaires s’amuse en effet à pyrograver le torse d’un prisonnier enchaîné à une table d’opération, en lui recommandant de « sentir le moment » et « accueillir la souffrance », préceptes admirables en théorie mais dont l’individu se trouvant du mauvais côté du fer rouge a du mal à faire usage. Nos trois larrons sont le Capitaine Adrax Agatone, le Chapelain manchot Elysius, et Jean-Alphonse Diplodocus, prêtre tisonnier. Ils semblent avoir des difficultés à convaincre leur invité des vertus de leur philosophie masochiste, pour des raisons qui seront gardées sous silence par Nick Kyme. On apprendra juste que le gonze qui joue le rôle du steak sur le grill de la cafétéria des Salamanders est sauvage et dangereux, et a déjà occis sept collègues de Jean-Alphonse avant d’être appréhendé.

Aux grands maux les grands remèdes, Elysius demande et obtient un tête à tête avec le prisonnier pour lui apprendre une bonne leçon. Pendant qu’Adrax et Jean-Alphonse prennent une pause clope à l’extérieur, le Chapelain libère sa victime… et lui refait le portrait d’une main experte, tout en continuant à le poker avec son tisonnier, jusqu’à ce que le malappris demande grâce et récite son catéchisme comme il faut. Avant que le rideau ne tombe, nous faisons donc la connaissance de frère Zartath, qui semble avoir été confirmé comme Salamander après ce bizutage en règle, et malgré le fait qu’il soit capable de faire pousser des griffes d’os depuis ses avant-bras. Ils prennent des mutants maintenant sur Nocturne ?

AVIS :

J’avoue avoir un peu triché en préparant la critique de cette nouvellinette (5 pages) de Kyme, que son auteur a gardé volontairement obscure pour qui n’est pas familier des travaux nocturnes de l’auteur-éditeur de la BL. Il s’avère que ‘Rite of Pain’ se situe à la croisée des événements relatés dans ‘Nocturne’ et ‘Rebirth’, et a certainement été sélectionnée pour l’inclusion dans ‘The Hammer & the Eagle’ sur la base de la participation du Capitaine Adrax Agatone à cet épisode très mineur du ‘Tome du Feu’, nom de l’anthologie consacrée par Kyme à ses chers lézards. Nouvelle figure de proue du Chapitre depuis la sortie de sa figurine et de son profil dans le Codex Space Marines, Agatone n’est cependant qu’un second rôle lointain dans la saga vulcanisée de Nick Kyme, par rapport au duo Dak’ir et Tsu’Gan sur lequel l’essentiel de la série repose. Faut-il voir un nouveau départ pour les Salamanders au sein de la BL ? Sans doute, mais on leur souhaite des écrits plus intéressants et détaillés que ce min…uscule ‘Rite of Pain’, qui ne présente ni ne suscite guère d’intérêt pour le lecteur.

.

Chains of Command – G. McNeill [40K] :

Chains of CommandICÔNE : URIEL VENTRIS, CAPITAINE DE LA QUATRIÈME COMPAGNIE DES ULTRAMARINES

INTRIGUE :

Engagé dans la campagne de pacification de Thracia avec un contingent d’Ultramarines placé sous le commandement du Capitaine Idaeus, le Sergent Uriel Ventris a été chargé de mener l’assaut sur le pont 2-4, tenu par les rebelles ayant eu l’audace de se soulever contre le bienveillant Empereur, et qu’il convient de faire sauter pour éviter que la contre-attaque de la Garde Impériale en direction de la capitale planétaire ne soit prise de flanc. Après quelques paragraphes de « mes sens sont vraiment trop développés lolilol » #ImTheBest #YouCantWriteAstartesWithoutStar, qui expliquent en grande partie pourquoi personne n’aime les Ultramarines, Ventris accomplit sa mission, déclenchant un assaut en règle de ses petits copains bleu pervenche et vert sapin sur la position adverse. Désespérément surclassés, les défenseurs se font hacher menu, et les meilleurs de l’Empereur s’organisent pour tenir le pont assez longtemps pour permettre au vénérable Techmarine Tomasin de placer les explosifs qui permettront de faire écrouler l’ouvrage d’art dans la gorge en contrebas.

Nous faisons la connaissance du Capitaine Idaeus, un officier vétéran et proche de ses hommes, connu pour son approche distanciée du saint Codex Astartes, ce qui n’en finit pas de sidérer le rigoriste Ventris. Ce même Idaeus a d’ailleurs fait montre de ses tendances libertaires en menant la charge contre un nid de bolters lourds, au lieu d’attendre le soutien du reste de ses hommes, comme ce planqué de Guilliman l’avait pourtant préconisé dans ses écrits. Depuis cinquante ans qu’ils combattent ensemble, Idaeus n’a pas réussi à convaincre son bras droit de l’avantage de s’écarter de temps en temps du manuel d’utilisation de la guerre écrit par le Primarque, et ce n’est pas aujourd’hui que ça va ch… Ah, on me dit dans l’oreillette que c’est précisément l’objet de cette nouvelle. Bigre.

Comme tous les vétérans dignes de leurs médailles, Idaeus fait confiance à son instinct, et ce dernier lui hurle (il est un peu sourd) que quelque chose en tourne pas rond, malgré le fait que la mission se déroule jusqu’ici parfaitement comme prévu. Ce malaise le conduit à mener une mission d’inspection de l’autre côté du pont, Ventris à ses côtés, pour juger du boulot effectué par les Scouts déployés par les Ultramarines en territoire ennemi. Et, évidemment, il s’avère qu’une importante colonne blindée progressait discrètement (c’est possible si on met des patins sur les chenilles) en direction du pont, ce qui va devoir forcer le vénérable Tomasin à se bouger les vénérables miches, ce qui n’est pas facile quand on est plus refait qu’un Iron Hands en fin de carrière (souvenir d’une rencontre torride avec un Carnifex entreprenant sur Ichar IV). Tout aussi évidemment, rien ne se passe comme prévu à partir de ce moment, les Scouts, le Thunderhawk qui devait évacuer les Ultramarines, et le vénérable Tomasin tombant tous sous le feu de l’ennemi, ce qui force Idaeus et ses compagnons à monter une défense désespérée du pont, le temps que 1) un autre transport arrive, et 2) quelqu’un trouve une idée brillante pour faire péter la passerelle, ce qui reste tout de même l’objet principal de la mission de nos marsouins énergétiques.

Je vous passe les longues scènes de baston dont nous gratifie McNeill, et qui permettent à Ventris de montrer qu’il en a dans le slibard, pour aller directement au moment où notre futur héros réalise qu’il suffit de déclencher une charge de démolition à proximité des explosifs posés par l’irrécupérable Tomasin pour déclencher une réaction en chaîne qui devrait provoquer les résultats escomptés. Petit problème, l’escouade de Space Marines d’Assaut envoyés réaliser cette mission se fait pincer en chemin par les Night Lords qui coordonnent la rébellion chaotique, et les incapables finissent crucifiés sur le pare chocs des Rhinos des fils de Curze pour leur apprendre la vie. Devant ce spectacle insoutenable, Idaeus et Ventris sont très colère, et cette rage leur permet de repousser l’assaut des renégats au prix de lourdes pertes. Alors que le deuxième Thunderhawk approche de la position intenable des Ultramarines, l’heure des choix arrive pour la bleusaille…

Début spoiler…Le noble Idaeus décide de partir faire exploser le pont à la mano, malgré ses chances de réussite quasi nulles, et ordonne à Ventris de mener les quatre rescapés de cette folle nuit, ainsi que son épée énergétique de maître, jusqu’au point d’extraction. Les cœurs gros, le Sergent s’exécute, et est témoin de l’héroïque sacrifice de son mentor dans les poutrelles et les travées du pont 2-4, la bande de Raptors laissée en garnison par les Night Lords ne parvenant pas à lui régler son compte avant que le Capitaine fasse feu avec un pistolet plasma dérobé à l’ennemi sur une charge de démolition laissée négligemment sur place1. C’est donc une victoire indéniable pour l’Imperium, et le début de la saga d’Uriel Ventris, qui héritera du commandement de la 4ème Compagnie à la suite de la campagne de Thracia.Fin spoiler

1 : On pourrait aussi se demander pourquoi les Night Lords n’ont pas détaché les explosifs laissés par le vénérable Tomasin sur les piliers du pont quand ils en avaient l’occasion. Encore une preuve que l’abus de Chaos est mauvais pour le cerveau.

AVIS :

Si l’idée de lire une nouvelle d’action dont le héros est un Ultramarines peut sembler intrinsèquement barbante à un lecteur de 2020, qui a sans doute pu pratiquer l’exercice à de nombreuses reprises grâce/à cause de l’obsession de la Black Library pour ce genre de productions, il faut être juste avec Graham McNeill et Uriel Ventris, et rappeler que ‘Chains of Command’ a été à sa sortie (2001) une des premières et plus abouties Space Marinades (saveur vanille) qui soient. Les innombrables ersatz et proxys publiés depuis ne l’ont pas aidé à bien vieillir, ni le style de l’auteur, ni les personnages mis en scènes, ni l’intrigue exposée n’étant particulièrement dignes d’éloges, mais le résultat n’est pas indigne pour autant. À l’époque où il est attendu d’un héros Space Marines un peu plus qu’un grade de Capitaine et une vague tendance à se poser des questions existentielles (ce qui était suffisant il y a 15-20 ans), je laisse le soin au lecteur de décider si une figure comme Uriel Ventris est toujours pertinente, ou bien s’il est temps d’accorder une retraite bien méritée à l’aïeul de tous les héros d’action énergétique de la Black Library.

.

Eclipse of Hope – D. Hinks [40K] :

Eclipse of HopeICÔNE : MEPHISTON, CHEF ARCHIVISTE DES BLOOD ANGELS

INTRIGUE :

Appelés à l’aide par la Garde de Fer de Mordia, elle-même sollicitée par les habitants de Supplicium Secundus en leur heure de besoin, les Blood Angels ont répondu en envoyant Mephiston et quelques potes dans le système en question. Les vampires énergétiques arrivent toutefois trop tard à la surface de la planète, et ne peuvent que constater que la totalité de sa population, ainsi que les braves Mordian débarqués pour faire le service d’ordre, se sont entre tués dans une orgie de massacre à faire se pâmer un héraut de Khorne. Mephiston trouve le spectacle de la plaine jonchée de cadavres jusqu’à l’horizon plutôt poétique, mais se garde bien de partager cette réflexion pas très Charlie avec ses sous fifres. Les questions que les Astartes et le lecteur se posent sont en partie résolues par l’arrivée de l’ultime survivant de cette battle royale planétaire, un Colonel Mordian complètement ravagé du bulbe, qui agresse violemment le brave Sergent Gamigin en grognant comme une bête enragée. Courtois mais un peu rude, le surhomme dans la pampa finit par tordre le cou au minus qui lui salit ses plates avec ses grosses mains pleines de doigts, mais semble récupérer le mal qui tourmentait son assaillant au passage, et commence à montrer des signes d’énervement qui n’augurent rien de bon venant d’un colosse génétiquement modifié et armé jusqu’aux canines. Heureusement, Mephiston est là pour faire un peu d’hypnose suggestive, ce qui permet à Gamigin de décompresser sans avoir tué personne (à part le Mordian bien sûr, mais il ne compte pas vraiment).

De retour sur leur vaisseau, les Blood Angels découvrent la flotte de secours des Mordians, complètement désertée et remplie de cadavres. Les puissantes capacités déductives de Mephiston ne mettent pas longtemps à soupçonner que les transports de troupe ont été victimes de la même rage irrépressible que celle qui a décimé Supplicium Secundus, et la réception d’un nouvel appel à l’aide, celui-là venant de Supplicum Tertius, située un peu plus loin dans le système, vient confirmer les craintes de Seigneur de la Mort. Le virus du VENER-40.000 circule encore dans la zone, et il est du devoir des Blood Angels d’en trouver la cause et la cure.

Parti dare dare vers la planète souffrante, dont les masses laborieuses commencent à s’entre-tuer avec méthode et enthousiasme, le croiseur d’attaque Crimson Exhortation manque d’être percuté en chemin par un vaisseau non identifié, ce qui ne peut pas être une coïncidence dans un milieu aussi espacé que… l’espace. Et en effet, le nouveau venu se révèle être l’Eclipse of Hope, ou plutôt son portrait robot dessiné par un enfant de 6 ans (comprendre que les proportions ne sont pas très bien respectées), une barge de bataille perdue par le Chapitre pendant la 5ème Croisade Noire. L’étude de la trajectoire du vaisseau fantôme ne laisse aucun doute à Mephiston : c’est bien la cause de la folie meurtrière qui a infecté Supplicum Secundus et Tertius, et il doit être détruit en conséquence. Plus facile à dire qu’à faire cependant, l’Eclipse encaissant sans problème et sans dégâts apparents un tir direct de canon nova. Comprenant que le Warp est à l’œuvre, Mephiston décide d’aller régler le problème à l’ancienne, B.A. style, c’est-à-dire en envoyant une poignée de vétérans purger l’épave de l’intérieur, comme cela a si bien réussi au Chapitre par le passé (remember Secoris ?). En plus de notre souriant héros et du Sergent Gamigin, résolu à prouver à l’univers combien il est cool, on retrouve un Chapelain, un Techmarine, un Prêtre Sanguinien et un Épistolier dans l’équipe des rouges. Tout ce petit monde aborde l’Eclipse, qui est une sorte de fantasme semi-solide, se nourrissant des souvenirs de ses hôtes pour prendre une forme concrète, et se dirige vers la salle de commandement du vaisseau, où se situe probablement le nœud du problème.

En chemin, la rage instillée par l’épave est gardée sous contrôle par les Blood Angels, qui ont tous pris un Lexomil dans leur lait fraise avant de partir en mission, mais la manifestation d’un petit groupe de Sanguinaires à proximité de l’objectif des Astartes force ces derniers à passer en mode agressif, avec des résultats mitigés, la sainte colère des meilleurs de l’Empereur provoquant le spawnage de plus en plus rapide de leurs adversaires. Il revient à Mephiston, comme le héros qu’il est, de prendre les choses en main et de remettre ses compagnons sur la bonne route. Ses pouvoirs psychiques lui ayant permis de déterminer que la source du problème se trouvait dans le Librarium, et non sur le pont, il convoque un bouclier d’apathie, ou quelque chose comme ça, permettant à ses gardes du corps de s’extirper de la mêlée et de progresser jusqu’à la bibliothèque de l’Eclipse, où la messe devra être dite…

Début spoiler…Laissant les normies monter la garde devant la porte, Mephiston et l’Epistolier Stolas pénètrent dans le saint des saints, où se trouvent des bouquins démoniaques de fort belle taille, une carte du système de Pallevon, ainsi qu’une statue de Mephiston zieutant un des grimoires de façon insistante. Le signal est clair, et bien que le Seigneur de la Mort ait la discipline nécessaire pour s’arracher de la contemplation de l’ouvrage maudit, une fois les premières pages parcourues, Stolas se fait corrompre comme un bleu entre le sommaire et la préface. Il brûlera donc avec le reste du Librarium, purifié de manière définitive par un Mephiston qui ne transige pas avec ses principes. L’Eclipse dûment désinfecté de sa peste warpique, et la situation revenue sous contrôle sur Supplicium Tertius, Mephiston est libre de poursuivre sa quête de réponses en direction de Pallevon, où l’attend un autre revenant du Chapitre…Fin spoiler

AVIS :

Avant que Darius Hinks ne reprenne en main la carrière littéraire de Mephiston, c’était David Annandale qui avait la charge du Seigneur de la Mort, auquel il a consacré cette nouvelle et le roman ‘Lord of Death’. Ces deux histoires s’inscrivent dans le même arc narratif, ‘Eclipse of Hope’ faisant office de prologue à ‘Lord of Death’, et accomplissant bien cette fonction, donnant envie au lecteur de connaître la suite des aventures du grand blond avec une humeur noire. Je dois également reconnaître avoir été agréablement surpris par le style déployé par Annandale dans sa narration, d’un niveau nettement supérieur à sa propre moyenne. Cela contribue grandement au caractère digeste d’une nouvelle qui ne serait sans cela rien d’autre qu’une énième Space Marinade. Une des soumissions les plus abouties d’Annandale hors de son créneau horrifique de prédilection, et donc à lire de préférence aux (nombreux) autres textes moins convaincants signés par cet auteur.

.

Redeemer – G. Haley [40K] :

RedeemerICÔNE : ASTORATH, HAUT CHAPELAIN DES BLOOD ANGELS

INTRIGUE :

On a tous déjà été confronté à ce moment, plus ou moins long, pendant lequel une chanson – souvent débile, comme La Danse des Canards, T’Es Si Mignon ou Despacito – nous restait collée dans la tête malgré tous nos efforts pour forcer notre cerveau de passer à autre chose. Eh bien cette expérience abominable, c’est le quotidien d’Astorath l’Inflexible, Grand Chapelain des Blood Angels et Rédempteur des Égarés, dont il entend les fredaines pathétiques lui rabâcher les oreilles dès que l’un d’entre eux sombre totalement dans la Rage Noire. Il est alors de son devoir de rappliquer dare dare pour abréger les souffrances (les leurs et les siennes) à grands coups de hache, ce qui le conduit à passer sa vie dans l’espace, voyageant de zones de guerres en théâtres d’opérations dans son véhicule de fonction (l’Eminence Sanguis), accompagné de quelques fidèles acolytes. Aujourd’hui, direction Asque, d’où proviennent les échos lointains de Djadja joués à la flûte à bec par un Snotling asthmatique, ce qui est passablement désagréable, vous en conviendrez.

Laissant le fidèle Sergent Dolomen garder le vaisseau, comme il en a l’habitude1, Astorath part à la rencontre de l’escouade de Blood Angels affectés par le mâââl, escorté par le Prêtre Sanguinien Artemos et guidé par un trio de locaux, fortement impressionnés par la panoplie macabre de leur visiteur (qui fait moins le malin lorsque les ailes factices de son jet pack se prennent dans les branches sur le chemin, ceci dit). En chemin, les bouseux apprennent au Grand Chapelain que leur monde est victime depuis plusieurs décennies des attaques d’une race de Xenos peu sympathiques, baptisés les Silencieux par les pragmatiques Asquiens, et qui ont forcé ces derniers à abandonner leur cité ensoleillée pour se réfugier dans les forêts de champignons insalubres et humides recouvrant la majeure partie de la planète. Leurs appels à l’aide étant resté lettre morte pendant des décennies, l’ouverture de la Cicatrix n’aidant certainement pas, il leur a fallu prendre leur mal en patience et apprendre à vivre comme Yoda sur Dagobah, la Force en moins, le temps qu’une demi-escouade de Blood Angels soit dépêchée sur place pour botter le train aux Silencieux. Tout se passait très bien jusqu’à ce qu’un des Astartes ne pique une colère noire pour un motif indéterminé, et fausse compagnie à ses camarades pour aller baguenauder dans les sous-bois d’Asque.

Cette version est confirmée par le trio de Primaris qu’Astorath et Artemos rencontrent à leur retour de patrouille, et encore traumatisés par le pétage de plomb de leur mentor, le Sergent Erasmus, après que leurs hôtes leur aient apportés un steak d’ordes bien cuit au lieu de saignant. Détail important, Erasmus était un Space Marine de la vieille école, et pas un Primaris, dont la résistance à la Soif Rouge et à la Rage Noire relève encore de la théorie et des boniments de Belisarius Cawl. Ayant recueilli assez d’indices pour procéder à la traque et à la rédemption d’Erasmus, dont le séjour sur Asque sera le dernier échange culturel, Astorath se prépare à apporter la paix à la brebis énergétique égarée, siphonant un peu de rouge à la veine d’Artemos pour se donner du cœur à l’ouvrage, mais refusant catégoriquement que son acolyte vienne lui porter main forte dans sa mission sacrée. La confidentialité de la relation patient-thérapeute/confesseur/bourreau doit être respectée, que diable.

Après une petite partie de beat ‘em all sur le chemin de la ville abandonnée par les Asquais (les Silencieux trouvant malin de s’attaquer à Astorath à son passage, malgré leur corps de lâche et leur équipement rudimentaire), notre héros parvient enfin à localiser Erasmus, complètement enragé et donc persuadé de purger le Vengeful Spirit en lieu et place de son Primarque, alors qu’il massacre en fait la colonie de Silencieux ayant investi les habitations des colons après le départ de ces derniers. L’arrivée du Grand Chapelain fait définitivement pencher la balance en faveur de l’Imperium, et après que les derniers mobs aient été farmés, il est temps pour l’ultime séance de psychiatrie du Sergent Erasmus, administrée de main et de hache énergétique de maître par Astorath. Guidé par son amour fraternel et sa miséricorde absolue, le Rédempteur rédemptionne avec retenue, se contentant de saigner son patient pour saper sa force plutôt que de le décapiter sans sommation. Ah, il lui coupe une jambe aussi, mais seulement pour qu’Erasmus se tienne enfin tranquille, et qu’il puisse lui adresser une imposition des mains salutaire, permettant à l’égaré d’enfin refaire surface, et de mourir dans la lumière de Sanguinius et de l’Empereur. C’est presque une happy end, en fait. Ce problème résolu, et les glandes d’Erasmus récoltées, il est temps pour Astorath et Artemos de repartir sur les routes, la version de Bella exécutée au mirliton et à la scie musicale venant lui trotter dans la tête lui indiquant qu’un autre frère a besoin de ses bons offices…

1 : La planque ultime pour un Blood Angels tout de même. M’est avis que Dolomen a dû faire une remarque désobligeante lors du dernier vernissage de Dante pour avoir été affecté à une mission aussi chiante.

AVIS :

Guy Haley s’empare du personnage d’Astorath l’Inflexible (possiblement le Blood Angels doté du background au plus fort potentiel narratif) et nous sert une petite mise en situation dont il a le secret, soulignant à la fois les caractéristiques saillantes de son héros et levant le voile sur des aspects de sa personnalité et de son passé non abordés par les quelques paragraphes qui lui sont dédiés dans le Codex Blood Angels. Sur cette base éprouvée, Haley trouve également le moyen de faire le lien avec le lore avec un grand L (ce qui est approprié pour un personnage avec des grande ailes), en mentionnant l’ouverture de la Cicatrix et la dévastation de Baal, ainsi qu’en abordant la question fondamentale de la vulnérabilité potentielle des Primaris Blood Angels aux tares du matériel génétique de leur Primarque. Le résultat est très solide, à défaut d’être particulièrement original, et on se prend à espérer que la BL commissionne Haley pour d’autres travaux mettant l’Inspection Générale faite (sur)homme en vedette.

.

Extinction – A. Dembski-Bowden [40K] :

ExtinctionICÔNE : EZEKYLE ABADDON, MAÎTRE DE GUERRE DE LA BLACK LEGION

INTRIGUE :

On ne le sait que trop, les lendemains de cuite sont difficiles. Quand la tournée des bars en question a duré sept ans, impliqué des centaines de milliards de participants sur des milliers de planètes, dont quelques dizaines ont brûlé au passage, et s’est terminée par un projet X débridé dans la maison familiale avec le capitaine de soirée qui s’étouffe dans son vomi sur la banquette arrière de sa Kangoo défoncée, il est somme toute logique d’avoir, très, mais alors trèèèèèèèèèèèèèèès mal aux cheveux pendant quelques temps. Surtout quand on s’appelle Ezekyle Abaddon, et qu’on a un goût immodéré pour les manbuns en palmier1. Nous reviendrons sur le cas de ce mauvais sujet un peu plus tard.

Extinction place donc son propos dans la période trouble qui succède à l’Hérésie d’Horus, qui, si elle n’a pas été une partie de plaisir pour l’Imperium, n’a pas été de tout repos non plus pour les Astartes rebelles, réfugiés dans l’Œil de la Terreur et en proie à de bien compréhensibles dissensions internes en l’absence d’un grand chauve costaud pour claquer le beignet aux éléments perturbateurs. Mais, comme l’éructe Borge Grassens, Prince Démon poète à la moustache remplie de Nurglings : « Or sous les cieux sous vergogne//C’est un usage bien établi//Dès qu’il s’agit de rosser des Sons of Horus//Tout le monde se réconcilie2 ». Tel le chouchou de la maîtresse ayant rappelé à cette dernière qu’elle avait oublié de ramasser les expressions écrites de la classe deux minutes avant la sonnerie, les guerriers de feu le Maître de Guerre se retrouvent en butte à l’hostilité non dissimulée de leurs petits camarades de jeu, qui leur reprochent, non sans raison, d’être responsables de la galère dans laquelle ils se trouvent désormais.

Nous faisons donc la rencontre, pour beaucoup d’entre eux juste avant une capture infamante, un décès prématuré, ou pire, de quelques fistons d’importance, alors qu’ils se retrouvent entraînés dans des explications de texte sans fin avec leurs cousins issus de germain. Le Sergent Kallen Garax peine à trouver les mots justes (pas facile quand on parle Chtonien et le gonze d’en face Nostraman) pour apaiser un gang de bikers Night Lords. Le Techmarine Sovan Khayral insiste impuissant à l’incendie de son véhicule de fonction des mains huileuses d’une bande de Death Guard désœuvrés. Le Capitaine Nebuchar Desh finit par rendre l’âme après une séance un peu trop soutenue avec son/sa Dominatrice Emperor’s Children, qui devra se trouver d’autres chats à fouetter. L’humble frère Zarien Sharak, coursé par une meute de World Eaters souhaitant lui voler son goûter (quand on n’a pas de monde à manger, il faut bien compenser), signe un bail de sous-location mal avisé avec un Démon mal élevé qui le met fissa à la porte de son âme à son corps défendant (ou le contraire). Erekan Juric, Capitaine Reaver, se fait incendier par la bande à Kahotep sur le chemin de la maison. Même la fameuse Kangoo d’Horus traîne son mal-être depuis la disparition du patron, remisée qu’elle a été dans un quelconque parking sous-terrain de l’Œil par ce galopin d’Abaddon.

C’est par un aparté dévolu à ce diable d’Ezekyle que se termine Extinction. Ayant tout bonnement pris un congé proprement sabbatique pour se ressourcer et faire le point sur sa vie, et voyageant de planète en planète pour visiter les attractions touristiques qu’elles ont à proposer (une pyramide ici, un mausolée là, un temple plus loin… c’est une sortie culturelle), Abby regarde de loin ses anciens frères se faire mettre la tête dans la cuvette des toilettes chimiques de leurs Rhinos, guère intéressé par les déboires de sa Légion. Quelque chose me dit toutefois que cela ne durera pas éternellement…

1 : Ca irrite le cuir chevelu comme pas possible et c’est très mauvais pour le bulbe.
2 : La rime est pauvre mais l’argent ne fait pas le bonheur.

AVIS :

Prologue à sa saga consacrée aux origines de la Black Legion, cette Extinction permet à Dembski-Bowden d’afficher sa maîtrise de la nouvelle d’ambiance. Il ne se passe en effet pas grand-chose dans ce court format, la succession de vignettes illustrant les déboires de la marmaille horusienne permettant seulement de prendre la mesure de la mauvaise passe que cette dernière traverse, orpheline de Primarque, traumatisée par sa défaite sur Terra, n’ayant plus d’objectif autre que la survie et ciblée à outrance par ses partenaires de crime. Pour autant, Extinction reste l’une des lectures les plus agréables de Croisade & Autres Récits, la patte d’ADB rendant chaque passage intéressant, chaque personnage attachant, et préparant parfaitement le terrain pour le début de la geste Abaddonienne, que le lecteur aura envie d’approfondir après en avoir terminé avec cet amuse-gueule, je gage. Il est fort l’animal, il est fort.

.

Prodigal – J. Reynolds [40K] :

ProdigalICÔNE : FABIUS BILE, APOTHICAIRE DES EMPEROR’S CHILDREN

INTRIGUE :

Alors qu’il couve, quasi littéralement, sa nouvelle génération d’enfants-cobayes, spécimens de la nouvelle humanité qu’il appelle de ses vœux et crée de ses recherches, Fabius Bile reçoit la visite d’une présence démoniaque furtive et rigolarde, envoyée par l’un de ses nombreux ennemis pour mettre fin à ses expérimentations. Pas de chance pour le rejeton du Warp, Fab en a vu d’autres, et ordonne posément à l’esprit de la machine du Vesalius, son vaisseau amiral, de sceller son laboratorium pour lui permettre de localiser l’agent contaminateur importun et lui passer l’animus à l’eau de javel, comme la procédure le demande. Si la baston qui s’en suit ne fait de victimes que parmi la collection d’occulobes et de glandes de Betcher gardés par l’Apothicaire fou, les choses manquent de mal tourner pour ce dernier après que le premier démon assassin soit rejoint par un second. L’arrivée opportune de Melusine, la « fille » aînée de Bile, permet toutefois de mettre fin aux débats avant que le laboratoire ne soit complètement ravagé. Si Mel a pu intervenir en ce moment décisif, c’est parce qu’elle est elle-même plus qu’à moitié démoniaque, une orientation qui déçoit beaucoup son géniteur, mais qu’il accepte, en père modèle moderne et philosophe. S’en suit un dialogue entre les deux générations de Bile, qui génère plus de questions qu’il n’apporte de réponses, à commencer par les motivations ayant poussé Melusine à venir à la rescousse de son vieux, et à lui transmettre des avertissements à la demande de… Fantomas ? Jack l’Eventreur ? the masked singer ? Le suspens restera entier, en partie à cause de la folie manifeste de Fabienne (son vrai nom), qui a du mal à se situer entre le passé, le présent et le futur, et le choix de Fabius de ne pas poser la question qui pourtant le travaille autant que le lecteur. L’entrevue se termine sur le départ précipité de Melusine, qui « n’aime pas parler aux fantômes » (sic), et laisse donc son vieux pôpa méditer sur l’ingratitude de la jeunesse et sur l’inexorable passage des années, ou, dans son cas, des millénaires. Bile reste toutefois convaincu de l’intérêt et du caractère fondamental de ses recherches, qu’il continuera à mener en dépit de l’opposition d’une galaxie obscurantiste. C’est cela que d’être en avance sur son temps…

AVIS :

‘Prodigal’ apprend beaucoup de choses sur la vie et l’œuvre de Fabius Bile (et à travers lui sur les Emperor’s Children et les Légions renégates), ce qui en fait un bon point de départ pour quiconque souhaite se plonger dans le corpus que la Black Library a dédié à son charismatique et échevelé savant fou, écrit en bonne partie par le même Josh Reynolds. Je ne suis en revanche pas certain que les lecteurs familiers du personnage et de sa saga y trouvent de grandes sources de satisfaction, le retour de Melusine (la fille prodigue annoncée par le titre) ne faisant finalement pas progresser les relations entre les deux personnages d’un iota. Une bonne petite nouvelle d’ambiance/d’acclimatation donc, mais en rien essentielle à la bonne compréhension des chroniques bilieuses et billesques de Reynolds.

.

Veil of Darkness – N. Kyme [40K] :

Veil of DarknessICÔNE : CATO SICARIUS, CAPITAINE DE LA SECONDE COMPAGNIE DES ULTRAMARINES

INTRIGUE :

Vous souvenez vous de Damnos et de sa chute, amis lecteurs ? Si l’épisode fut malheureux pour l’Imperium, il eut au moins l’avantage de mettre l’insupportable Cato Sicarius, Capitaine de la Seconde Compagnie des Ultramarines, en face de sa nullité crasse et d’un adversaire qui lui apprit bellement la vie, le Seigneur Necron « Immortel » (Undying), qui lui planta sa faux dans le bidon au terme d’un duel épique (selon Sicarius)/de cinq secondes (selon les observateurs présents). Un souvenir à chérir en ce millénaire hostile…

Notre histoire commence quelques temps après cet affrontement fatidique, Cato revenant à lui dans une cuve de bacta et, fidèle à lui-même, commençant le premier jour du reste de sa vie1 en rabrouant le fidèle Apothicaire Venatio, qui a pourtant passé les derniers jours à le remettre en forme. Apprenant la défaite des Ultramarines et la perte du vénérable Agrippen, Sicarius pique sa crise et fracasse d’un coup de poing la vitre de sa cuve amniotique pour se passer les nerfs (et il aurait fait pire s’il avait eu son épée). Et dire que les World Eaters sont accusés d’être psychopathes. Avant qu’il n’ait pu détruire de fond en comble l’Apothicarion, l’arrivée soudaine de son rival devant l’éternel, Severus Agemman, contraint notre turbulent zéro à retrouver son calme. Le Capitaine de la Première Compagnie est venu informer son collègue et inférieur qu’il est convoqué devant Marneus Calgar dans six heures pour expliquer pourquoi et comment il a cru bon de déféquer dans la super glu lors de la campagne de Damnos. Sicarius, qui n’est pas passé en conseil de discipline depuis la fin de ses études, prend évidemment très mal la nouvelle, et fidèle à la légendaire équanimité de Guilliman, balance quelques réflexions désagréables à Agemman pour extérioriser sa frustration, manquant de peu de se ramasser une baffe énergétique pour sa peine.

Avec si peu de temps pour préparer son dossier, Sicarius n’a bien sûr rien de plus pressé que d’aller récupérer ses armes et armures à l’Armourium, où il a la désagréable surprise de constater que des bouts de Guerriers Necrons décomposés ont été stockés pour étude par les Techmarines du Chapitre. Flairant une combine de la part de l’ennemi, maître incontesté du leave no trace2, Sicarius ne peut cependant convaincre Vantor, le techos en faction, de mettre à la benne ces déchets dangereux. Il expérimente à cette occasion une vision plutôt inquiétante de sa Némésis métallique, le laissant littéralement sur les genoux (pendant que Vantor, qui n’a absolument pas trouvé anormal que son interlocuteur s’effondre au sol en suffoquant comme un poisson hors de l’eau, est retourné vaquer à ses occupations). De nouveau maître de lui-même, Sicarius repart donc rédiger son rapp- taper le carton en salle d’entraînement avec le Sergent Daceus, qui mérite une statue au sein du Temple de la Correction pour supporter un supérieur aussi imbuvable que lui. On apprend à l’occasion du duel amical entre les deux Ultramarines qu’en plus d’être prétentieux au possible, Sicarius est également mauvais perdant et vicieusement mesquin, puisqu’il enfreint volontairement les règles du combat pour pouvoir scorer une touche contre Daceus, qui était sur le point de le vaincre. Une nouvelle vision ténébreuse s’abat alors sur le Capitaine, qui manque de tuer le Sergent en pensant revivre son duel contre le Roi Necron (mais ne s’excuse pas le moins du monde lorsque l’illusion se dissipe, évidemment). Tout à sa paranoïa, Cat’ éventre un pauvre Serviteur de combat qui ne lui avait rien fait, juste pour être sûr que le soulèvement des machines n’était pas d’actualité, avant de se rappeler qu’il ne lui reste que 10 minutes avant de comparaître devant Calgar, et qu’il n’a rien préparé pour sa défense. Accompagné par le bien brave Daceus, Sicarius se présente à son audience, certain que sa belle gueule et ses états de service lui éviteront le blâme qu’il mérite pourtant de toute évidence…

Début spoiler 1La correctionnelle lui est  évitée par la tentative d’assassinat dont est victime le pauvre Marneus, décidément dans tous les mauvais coups, de la part d’un Deathmark Necron sorti de nulle part, comme cela est son droit le plus strict. Ce n’est que le prélude à une invasion en règle de la Forteresse de Hera par les fourbes Xenos, qui profitent du goût des Ultramarines pour les souvenirs de campagne pour pénétrer en masse dans l’Armourium, faisant sa fête à Vantor au passage, avant de se diriger vers l’Apothecarion pour en terminer avec le Grand Schtroumpf. Isolés de leurs frères de bataille par les artifices Necrons, Sicarius, Daceus, Agemman et les gardes d’honneur de Calgar tentent de renverser la situation en déphasant le Vizir porteur du Voile de Ténèbres, ce qu’ils parviennent à faire, mais cela n’empêche pas le Roi Necron de faire son entrée sur le champ de bataille, et de porter le coup de grâce au Maître de Chapitre, après que tous ses défenseurs aient été passés au fil du khopesh. À moins que…

Début spoiler 2…À moins qu’il ne s’agisse que d’un rêve, évidemment. Ou plutôt, d’une vision du futur. Retour donc à la cuve de biactol du début de la nouvelle, d’où Sicarius réémerge, sa légendaire mauvaise humeur remplacée par un sentiment de déjà vu irrépressible. Et en effet, il a connaissance de tout ce que ses interlocuteurs cherchent à lui dire, ainsi que du stockage des pièces détachés Necron dans l’arrière boutique de l’Armourium, qu’il se dépêche d’aller valoriser énergétiquement (pour une fois, c’est approprié) malgré les protestations de Vantor. Ceci fait, il est libre d’aller répondre de ses actes devant Marneus Calgar sans craindre pour la vie de ce dernier, qui souhaitait simplement le voir pour lui annoncer qu’il a lui aussi eu ce rêve étrange et pénétrant, dans lequel le Roi Necron se paie sa tête. Ce crime de lèse majesté ne pouvant rester impuni, Calgar autorise son Capitaine à jouer la belle, lorsque l’occasion se présentera. Comme on disait à l’époque, Delenda Necrono.Fin spoiler

1 : C’était la première fois qu’un adversaire le blessait gravement lors d’un duel. Lui, Cato Sicarius, Maître du Guet, Chevalier Champion de Macragge, GrAnD dUc De TaLaSsAr et HaUt SuZeRaIn D’uLtRaMaR !!! Il se serait plaint au directeur, s’il avait pu.
2 : On peut reprocher beaucoup de choses aux Necrons, mais au moins, ils ne polluent pas.

AVIS :

Je suis face à un paradoxe au moment de donner mon avis sur ce ‘Veil of Darkness’. Je ne saurai dire en effet si le dégoût profond que m’inspire Cato Sicarius, aussi connu sous le nom de « Everything Wrong with the Ultramarines », est à considérer comme une réussite ou comme un échec de la part de Nick Kyme. Il ne fait aucun doute que ce dernier a volontairement accentué le trait pour donner à son protagoniste une personnalité marquée, pour ne pas dire autre chose, comme il l’avait déjà fait avec le personnage de Tsu’Gan dans sa série sur les Salamanders. Cependant, à faire de Sicarius une tête à claque absolue, il prend le risque de dégoûter le lecteur de ce héros infect, ce qui n’est pas conseillé lorsque l’on souhaite vendre des bouquins. En tout cas, il ne faudra pas compter sur moi pour suivre avec intérêt les péripéties de la Mimi Geignarde de l’Ultima Segmentum, qui pâtit sans doute du grand nombre d’icônes du Chapitre ayant également eu les honneurs de la BL (Ventris, Calgar, Chronus, Tellion, Kastor & Polixis… et maintenant Guilliman, sans compter la ménagerie hérétique de la Légion), et dont il lui faut bien se démarquer. La stratégie du sale gosse de Kyme, pour efficace qu’elle soit, est donc à double tranchant.

Si on fait abstraction du caractère difficile de son héros, ‘Veil of Darkness’ est une honnête nouvelle d’action, bénéficiant d’un twist final convenable, à défaut d’être particulièrement efficace (évidemment que Calgar et Agemman ne peuvent pas finir leur carrière au détour d’un paragraphe d’une obscure nouvelle consacrée à Sicarius), et présentant de façon convenable le passif et les motivations de son héros. L’un dans l’autre, c’est donc une bonne introduction aux aventures de Cato Sicarius, si tant est que vous ayez l’envie de les suivre, ce dont je vous laisse décider en votre âme et conscience…

.

Fireheart – G. Thorpe [40K] :

FireheartICÔNE : YVRAINE, ÉMISSAIRE D’YNNEAD

INTRIGUE :

Envoyée par Yvraine comme émissaire auprès des Eldars du Saim Hann afin d’obtenir de l’aide dans la quête des mondes de Morai-Heg, la Céraste Druthkala Shadowspite (Drudru pour les intimes) a bien du mal à convaincre ses hôtes de prêter une oreille pointue attentive à ses doléances. Car étonnamment, les Zoneilles sont égoïstes et mesquins. Qui l’eut pensé, vraiment ? Alors que les Clans réunis en assemblés dans le bois de Vincennes du Vaisseau Monde n’en finissent plus de se crêper le chignon, et que Druthkala tue le temps, faute de mieux, en imaginant les sévices qu’elle pourrait infliger à ses lointains cousins, Nuadhu du Clan Fireheart fait son apparition, en retard comme à son habitude. Bien que seulement héritier putatif du Clan, l’état végétatif de son père lui donne le pouvoir de décider à sa place, et un seul regard sur les courbes généreuses et l’armure minimaliste de la diplomate Ynnari convainquent notre dalleux de héros qu’il doit lui venir en aide pour s’en faire bien voir, et plus si affinités. Le choix d’Yvraine d’envoyer une bombasse plutôt qu’un érudit fait tout d’un coup plus de sens…

La mission de Shadowspite et de ses nouveaux amis est assez simple : mener une reconnaissance sur le monde vierge d’Agarimethea, où un vaisseau Exodite patiente en double file orbitale depuis quelques semaines, ce qui indique que quelque chose ne tourne pas rond à la surface. Après un petit go fast dans la Toile, dans la plus pure tradition des Wild Riders, les bikers au serpent arrive sur place, où ils ne mettent pas longtemps à repérer un complexe Necron défigurant le paysage champêtre, comme un magasin Bricodépôt construit au milieu d’un parc naturel. La présence de l’ennemi primordial des Eldars sur une planète qui devrait pourtant être exempte de toute souillure provoque des réactions mitigées dans la compagnie. Ceux qui réfléchissent avec le cerveau (Caelledhin, la demi-sœur du héros) sont pour une retraite prudente, ceux qui réfléchissent avec un autre organe (Nuadhu, qui n’en finit plus de baver sur les jambes de Shadowspite) insistent pour aller jeter un œil sur site, afin de peut-être trouver une arme qui pourrait aider les Eldars dans leur lutte contre les Necrontyr. Nuadhu étant techniquement aux commandes (même si cet incapable a laissé le pilotage de sa Vyper à son chauffeur de fonction), l’expédition fait fi de toute prudence et va se garer devant la pyramide principale. Bien évidemment, le calme qui baigne les lieux n’est qu’apparent, et lorsque Nuadhu pose la main sur la surface inerte du monument aux des morts, une alarme se déclenche et le ciel se remplit bientôt de tirs de désintégrateurs et d’aéronefs Necrons.

La fuite éperdue qui s’en suit voit la disparition tragique d’un certain nombre de cousins Fireheart, victimes des tirs ennemis, du relief ou du troupeau de dinosaures local (obligatoire sur un monde vierge). J’imagine qu’il en reste encore plein de là où ils viennent, et on ne pleurera donc pas trop sur leur sort. Les Eldars, bien diminués par la tournure qu’ont pris les événements, et la stupidité crasse de leur chef, jurent toutefois de revenir pour rendre aux Necrons la monnaie de leur pièce, ce qui sera fait dans ‘Wild Rider’/’Le Cavalier Rebelle’, le deuxième bouquin consacré aux suivants d’Ynnead par Gav Thorpe.

AVIS :

Je dois avouer tout de suite que je n’ai pour le moment pas réussi à m’intéresser aux Ynnari, ce qui est un handicap pour qui veut effectuer une chronique impartiale d’une nouvelle consacrée à cette nouvelle faction de 40K. Toutefois, même si les cultistes d’Ynnead avaient bénéficié de ma légendaire bienveillante neutralité, je pense que mon jugement de ce ‘Fireheart’ serait resté sévère. Il n’y en a en effet pas grand-chose à tirer de cette histoire, mis à part quelques fragments de fluff sur l’organisation et la culture de Saim Hann, et le nom du canasson de Khaine, ce qui n’est pas lourd. Pour le reste, on assiste à un festival de gaffes, puis de baffes, provoqué par l’incompétence notoire de Nuadhu, dont la concupiscence irréfléchie mettra Saim Hann en danger, et, surtout, donnera à peu de frais à Thorpe le pitch d’un de ses bouquins. C’est à une nouvelle purement et crânement utilitaire que nous avons affaire ici, qu’il convient de lire à l’extrême limite en prologue de ‘Wild Rider’ et c’est bien tout.

.

Blood Guilt – C. Wraight [40K] :

ICÔNE : NAVRADARAN, EPHOROI DE L’ADEPTUS CUSTODES

INTRIGUE :

Notre nouvelle débute avec une petite mise en contexte de la fonction de Custodiens, qui a connu bien des évolutions depuis les jours dorés de la Grande Croisade. On apprend ainsi que les Über Super Dupper de l’Empereur vivent dans une maison sans balcon sans toiture, où il n’y a même pas d’abeilles sur les pots de confiture1, même pas d’oiseaux, même pas la nature, et c’est même pas une maison. Ce qui est logique, puisque c’est la tour de l’Hégémon. Tour avalée par l’urbanisation galopante qu’a connu le Monde Trône au cours des derniers dix millénaires, mais tour tout de même. Parmi les 10.000 hauts fonctionnaires que compte cette noble institution, une majorité est affectée à la recherche fondamentale ou à la garde du Trône d’Or, et seuls quelques rares individus, les Ephoroi, ont l’occasion de se dégourdir les spalières en traquant les suspects désignés par leurs collègues du bureau des légendes. C’est à l’une de ces opérations très spéciales que nous convie Chris Wraight, aux côtés de Navradaran, enquêteur très spécial au service exclusif de sa Majesté.

C’est toutefois sur la proie de Nanar, le Seigneur Sleox, que la caméra se braque, alors que le noble se hâte vers le garage de son manoir en compagnie de son assistante Ysica. On devine sans mal que Sleox a des choses à se reprocher, et souhaite de toute urgence quitter Terra pour des cieux plus cléments plutôt que de devoir répondre de ses actes. Les éternels embouteillages du périphérique terran manquent toutefois de permettre au notable en fuite de se faire pincer avant d’arriver jusqu’au spatioport, un aéronef à l’allure menaçante ayant pris en chasse la limousine de Sleox sur le chemin du terminal. Au prix d’un sprint échevelé dans les coursives du bâtiment jusqu’à sa navette privée, le grand ponte et la petite main parviennent toutefois à rejoindre leur objectif avant d’être appréhendé par les forces de l’ordre. Une fois le vaisseau décollé et en route vers l’orbite, Sleox commence à se détendre, et se dirige vers le minibar pour s’en jeter un petit bien mérité…

Début spoiler…Mais découvre avec stupéfaction qu’un colosse en auramite a déjà fait main basse sur ses réserves, et sirote un jus de tomate (pas d’alcool en service) accoudé au comptoir. Un bolt non explosif (donc, une balle, j’imagine) dans le caisson plus tard, Sleox passe de vie à trépas dans l’incompréhension la plus totale. Et pour cause, la vraie cible de Navradaran n’était pas ce pantouflard de Seigneur, mais bien son assistante personnelle, qui cache sous une apparence banale un pouvoir de nuisance considérable, aiguisé par des millénaires de planque dans la haute société terrane. Le temps que la navette ne vienne se poser dans le QG des Arbites le plus proche, le Custodien et l’intrigante chaotique discutent de tout et de rien, le premier cherchant à percer à jour les motivations de sa captive, et la seconde à endormir sa vigilance pour pouvoir se suicider avant d’être soumise à l’interrogatoire, ce qu’elle ne parviendra pas à faire, malheureusement pour elle. On apprendra tout de même qu’elle considère que les Custodiens ne sont pas prêts du tout à s’opposer à la prochaine attaque d’Abaddon le Fléau, toujours partant pour aller pousser Pépé dans les orties.

La nouvelle se termine avec le compte rendu de Navradaran à Valoris, ce qui nous vaut un nouvel échange de graves platitudes sur l’état de l’Imperium et le devoir des Custodiens, ainsi qu’un petit aperçu de ce que le futur réserve au Sombre Imperium : un retour des filles de l’Empereur, qui devra être favorisé et encouragé par les 10.000 dans la mesure de leurs capacités, qui ne sont tout de même pas minables.Fin spoiler

1 : Mais qui est toujours éclairée avec des bougies en cire d’abeille, ce qui est un luxe indécent au 41ème millénaire.

AVIS :

Comme beaucoup de ses camarades de jeu, Chris Wraight écrit des nouvelles de liaison entre les romans de ses séries de long cours, et ‘Blood Guilt’ se place dans cette catégorie de publications charnières (‘The Emperor’s Legion’ et ‘The Regent’s Shadow’). Comme peu de ses camarades de jeu, Chris Wraight, parvient souvent (mais pas toujours, cf ‘Argent’) à donner à ce type de courts formats un intérêt pour le lecteur opportuniste. Ici, on a le droit à un petit cours d’histoire sur la Tour de l’Hegemon au fin des millénaires, puis à une révélation savamment mise en scène à propos de l’identité de la cible de Navradaran, et pour finir, à quelques considérations stratégico-politiques (la spécialité de Wraight) entre deux personnages très au fait de la situation de l’Imperium, ce qui donne trois bonnes raisons de s’atteler à la lecture de cette petite histoire, et donne plutôt envie d’en apprendre en plus sur la vie trépidante de Nanar et Valoche, gardiens émérites de Papy Mougeot.

.

Argent – C. Wraight [40K] :

ArgentICÔNE : LUCE SPINOZA, INTERROGATRICE DE L’ORDO HERETICUS

INTRIGUE :

Je m’appelle Luce Spinoza, je suis Interrogatrice au service de l’Inquisiteur Joffen Tur, et ceci est mon histoire. Au moment où nous faisons connaissance, je gésis telle une loque sur le sommier de ma cellule, les deux bras dans le plâtre et la tête dans le Culexus. J’entends le pas lourd de mon tout aussi lourd (vous allez rapidement comprendre pourquoi) patron approcher dans le couloir, et je n’ai que le temps de me remémorer les événements qui m’ont conduit à l’état de grabataire que le voilà à mon chevet. Comme vous, il cherche à savoir comment diable Horus j’ai réussi à me mettre dans un tel état. Pour cela, un petit flashback s’impose. Je m’appelle Luce Spinoza, et ces dernières heures n’ont pas été de tout repos.

Tout avait pourtant commencé de manière très classique. Nous étions arrivés en orbite du monde ruche de Forfoda pour enquêter sur les raisons de la rébellion ayant mené la planète à entrer en sécession ouverte contre le règne éclairé et éclairant de notre bien-aimé Empereur. Tur avait insisté pour prendre son utilitaire de fonction plutôt que sa limousine, soi-disant pour faire passer le message auprès des autres forces impériales que ce théâtre d’opération l’intéressait à peine. Mouarf. Il était tout de même venu, et la seule conséquence pratique de cette démonstration de morgue cryptique fut que les copains et moi dûmes nous serrer sur les sièges arrière de sa Kangoo au lieu de chiller tranquille à côté du minibar, comme à notre habitude.

Lors du briefing de la mission, Tur nous avait fait part de son plan. Afin d’éviter que nos alliés Imperial Fists ne dessoudent les meneurs de la rébellion avant que nous n’ayons pu les cuisiner, il était impératif de leur griller la politesse là où c’était possible, ou de réfréner leurs ardeurs homicidaires lorsqu’ils étaient déjà à pied d’œuvre. Je m’attendais à être affectée à l’équipe du boss, comme c’est habituellement le cas, mais mes quinze minutes de retard au point équipe hebdomadaire du lundi précédent n’avaient de toute évidence été ni oublié, ni pardonné, car Tur m’a au contraire chargé de la supervision d’une opération annexe, en solo avec les Astartes. Ca m’apprendra à aller en boîte le dimanche soir.

Un peu plus tard, je fis connaissance avec la bande de surhommes que j’avais pour mission d’encadrer, afin d’assurer la capture de l’assistante de direction du gouverneur rebelle, une certaine Servia, localisée en haut d’une spire annexe de Forfoda (c’était sans doute son jour de télétravail – chanceuse –). Dès mon arrivée au Strategium, j’ai compris que la partie allait être tendue. Je n’ai en effet pas senti une grande sympathie envers ma personne de la part de mes collègues de bourreau (Jaune, Jaune d’Œuf, Jaune Trois, Jaune Quatre, Jaune Cinq, et un Chapelain, Erastus), confirmant les rumeurs insistantes dépeignant les Imperial Fists comme une bande de suprématistes meninistes. C’était bien ma veine. Heureusement que j’avais passé mon BAFA pour encadrer les pupilles de la Scholam lors des colonies pénales de vacances lorsque j’étais jeune fille au pair sur Dimmamar. J’ai donc remis en place ces butors dans le plus grand des calmes, et leur ai bien fait comprendre que c’était moi la boss. Non mais.

À partir de là, tout s’est enchaîné très rapidement. Notre taxi nous a déposé quelques étages en dessous du F3 de Servia, et mes gros copains souffrés faisant souffrir le service d’ordre des traîtres avec une brutalité consommée. J’aurais peut-être pu les aider à rentrer plus facilement (c’est comme en boîte, il vaut mieux laisser passer les filles devant quand on est une bande de mecs), mais ils étaient déterminés à finir la mission à temps pour ne pas rater le début de Dorna l’Exterminatrice, et je n’avançais visiblement pas assez vite pour eux. J’ai toutefois pu rattraper le groupe maillot jaune une fois l’appartement de Super Nanny investi, car cette dernière, ainsi que les amis qu’elle recevait à notre arrivée, étaient en pleine réunion Tupperware, avec des mutations pas vraiment ragoutantes à la place des contenants en plastique (de toutes façons, il vaut mieux utiliser du verre, c’est bien plus sain). La sain(t)e fureur des Mrs Propres, goût Paic Citron, eut beau s’abattre comme un ouragan de fraîcheur sur le taudis de Servia, l’issue du match restait incertaine, d’autant plus que le brave Erestus était franchement à la peine contre la maîtresse de maison, qui lui avait arraché sa mop énergétique des mains au moment où je suis arrivée sur place (rapide pause make up sur le pallier, pour ne pas rater ma première impression).

N’écoutant que mon courage, j’ai bondi entre le canapé et la table basse afin de récupérer l’instrument de travail de l’immaculé Chapelain. Par le pacemaker de l’Empereur, ce truc pesait le poids d’un grox mort ! Pas étonnant qu’ils soient aussi baraqués chez les Fists, s’ils n’utilisent que de la fonte pour réaliser leurs objets du quotidien. Voyant qu’Erestus était trop occupé à repousser les poisseuses avances de son hôte pour récupérer son hochet, j’ai pris le problème à bras le corps et ai assené à la maraude un horion digne de Jaune Henry en personne. Je me sentais trop fraîche… jusqu’à ce que je réalise que le champ disrupteur du bouzin était poussé au max, et que je n’avais ni l’armure, ni la musculature nécessaires pour encaisser le contrecoup de mon revers à deux mains. Résultat : un vol plané de trois mètres à travers le salon, une paire de radius concassée, une manucure ruinée, mais une victoire assurée pour l’Imperium, la résistance de Servia et Cie ayant été brisée en même temps que la colonne vertébrale de cette dernière. À peine le temps de m’assurer que les nettoyeurs de choc ne réglaient pas son compte à la grosse tache de gras (parce qu’en plus d’être misogynes, les Imperial Fists sont grossophobes : c’est la Ligue du Lol en fait) dans un excès de zèle, ce que j’aurais eu du mal à expliquer au boss, et j’ai sombré dans une salutaire et bien méritée inconscience, avec la satisfaction du devoir accompli. Vous savez tout.

Fondu au noir et lancement du générique, précédé du texte suivant :

L’Interrogratice Luce Spinoza poursuivit sa carrière au sein de l’Ordo Hereticus avec distinction, où elle sert désormais l’Inquisiteur Crawl sur Terra. Pendant sa convalescence, le Chapelain Erestus vint lui rendre visite afin de lui offrir le Crozius Arcanum avec lequel elle avait éreinté la vile Servia. Relique millénaire des Imperial Fists, cette arme nommée Argent ne pouvait être maniée que par des guerriers du Chapitre… jusqu’à ce que Spinoza ne vienne la looter en loucedé apparemment. Raccourci et allégé pour permettre à sa nouvelle porteuse de le manier sans risquer la PLS à chaque attaque, Argent continue à apporter le courroux de l’Empereur à Ses ennemis, et incarne la précieuse et indispensable collaboration entre les serviteurs du Maître de l’Humanité.

De son côté, Erestus fit une demande auprès des services généraux du Chapitre pour obtenir un modèle plus récent de Crozius, ce qui lui avait été précédemment refusé. Mis devant le fait accompli, le DRH du Phalanx n’eut d’autre choix que de s’exécuter. Tout le monde est gagnant.

AVIS :

Les habitués de ces chroniques savent quelle importance j’attache à la présence de twist final dans les nouvelles que je dissèque. Cet élément est en effet à mes yeux indissociable du genre en question, et c’est sur la présence et la pertinence de ce dernier que l’on peut souvent juger de la qualité d’un auteur et d’une soumission. La Black Library n’étant pas reconnue comme une maison d’édition aux standards très élevés (ce qui est logique au vu de sa mission première : fournir du fluff à foison pour faire rentrer des biffetons plutôt que de chercher à décrocher le Man Booker Prize), l’amateur de nouvelles devra souvent se résigner à des conclusions « plates », voire absconses s’il n’a vraiment pas de chance.

Le cas de cet Argent de Chris Wraight est un peu particulier, en ce que le twist final du récit s’avère être proprement méta, cas de figure que je n’avais rencontré jusqu’à présent. Tant la construction du récit à base de flashback que le pedigree respectable de l’auteur en matière de narration laissaient en effet entrevoir un dénouement un tant soit peu spectaculaire à cette nouvelle abordant le thème ma foi assez intéressant de la difficile coopération entre agents de l’Inquisition et guerriers de l’Adeptus Astartes. Le cadre posé, et l’incontournable séquence de Space Marines de films d’action évacuée, on se prépare à recevoir une conclusion édifiante de la part de Wraight, à même d’expliquer tant le titre que la finalité de la nouvelle… pour au final réaliser que nous sommes en présence d’une vulgaire digression n’ayant pour but que d’expliquer au lecteur comment Luce Spinoza, personnage récurrent de la série Vaults of Terra a reçu sa matraque de fonction (que l’on voit en couverture de The Hollow Mountain).

Pour une surprise, c’est une surprise, reconnaissons cela à Mr Wraight, qui nous avait cependant habitués à des soumissions un peu plus ambitieuses en termes de contenu. Drôle d’idée des éditeurs de la Black Library que d’avoir choisi de faire débuter le recueil Lords & Tyrants finalement très quelconque, et qui aurait eu davantage sa place en filler entre les tomes 1 et 2 de Vaults of Terra dans le futur omnibus de la série. Chris Wraight a beau avoir suffisamment de métier pour rendre l’expérience tout à fait supportable, on sort de cette dernière un rien blasé1, ce qui n’augure rien de bon pour les quinze nouvelles suivantes. Si plaie d’argent n’est pas mortelle (la preuve, Servia a survécu !), sa lecture, elle aussi, n’a rien de mortel. Et c’est bien le problème.

1 : Au risque de me répéter, tournons-nous une fois de plus vers l’étalon Abnett pour définir ce qu’une bonne nouvelle filler peut être. La comparaison la plus évidente à mes yeux est à faire avec Missing in Action (comment Eisenhorn a perdu la main, littéralement) et Playing Patience (comment Ravenor a recruté Miss Kys). Ces publications n’ont rien d’essentiel dans les arcs narratifs développé par Abnett pour ses personnages, mais sont suffisamment bien tournés pour pouvoir être lu par le tout venant, et non pas destinés uniquement aux plus dévots serviteurs des saints Ordos.

.

The Absolution of Swords – J. French [40K] :

The Absolution of SwordsICÔNE : COVENANT, INQUISITEUR DE L’ORDO MALLEUS

INTRIGUE :

Par une nuit frisquette dont Dominicus Prime a le secret, un trio de figures enrobées se dirige vers la forme imposante de la Haute Chapelle, dont l’accès a pourtant été interdit par le Prefectus Prior Gul. Lorsqu’une patrouille de gardes a la mauvaise idée de leur barrer la route, les marcheurs jettent à bas leurs masques (et chasubles), et forcent leur chemin jusqu’au bâtiment où les attendent – sans le savoir encore – Aristas Gul et son bedaud Lumn, qui se croient avoir été convoqués par leur contact au sein de la 10ème Voie pour un point d’avancement surprise. Nos trois compères sont l’Inquisiteur Covenant, la Sœur Repentia Severita (qui ajoute pieusement le KO des deux gardes qu’elle a molestés dans l’exercice de leurs fonctions à son ardoise de péchés), et le Prieur Josef, et s’ils ont fait le voyage dans ce trou perdu de la galaxie alors qu’un Conclave est sur le point de débuter sur Ero, c’est qu’ils ont de bonnes raisons.

Un peu plus loin, sur la même planète, deux autres agents de l’homme au catogan tentent d’obtenir leurs entrées dans le night club le plus privé de Dominicus Prime : la salle de pause de la 10ème Voie. Ils ont dû pour cela négocier leur passage à travers des kilomètres de couloirs, fumoirs et dortoirs, graissant les pattes des pèlerins de faction tout du long, jusqu’à faire la connaissance d’un gros malabar peu aimable, qui accepte toutefois de les mener à confesse après avoir vu les (faux) tatouages et entendu les (bonnes) réponses de ces visiteurs impromptus. Pour continuer les présentations, il s’agit du blasé Cleander Von Castellan, marchand libre-mais-pas-vraiment-en-fait, et de l’imperturbable Koleg, ex-soldat aussi mortel que morne. Seul petit problème, la brute fait du zèle dans son interrogatoire, et pose une dernière question à laquelle Cleander n’a pas la réponse. Son improvisation ne donnant rien, le rogue trader est contraint d’écourter l’entrevue en dégainant ses fidèles pistolets à aiguilles, ce qui règle le problème de façon élégante (plus qu’un bolter, en tout cas). Ceci fait, les deux agents sont libres de s’engager dans l’escalier qui les mènera jusqu’à leur destination, peut-être finale.

Retour dans la Haute Chapelle, où de foie jaune de Gul en est quitte pour une petite leçon de catéchisme. Car le bon Prior couvre depuis trois ans les agissements démoniaques de la 10ème Voie, depuis qu’il a reçu la visite d’un Inquisiteur radical ayant confirmé ses doutes athéistes sur la non-divinité de l’Empereur. Bon prince, Covenant est venu offrir une chance d’absolution au grox égaré, en échange de quelques tuyaux sur son commanditaire, ce que Gul est plutôt prêt à faire, mais ce que Lumn, moins moinillon muet que démon déguisé, n’est pas très chaud pour autoriser. L’inévitable baston qui fait suite à ce léger différend est remportée de haute lutte par l’Inquisition, mais creuse un gros trou dans la réserve de points de vie (et la couche de graisse protectrice) de Josef, en plus de mettre Severita sur les rotules. Heureusement que le boss et sa grande épée énergétique sont là, tout de même.

Sous terre, c’est à peu près le même topo pour Cleander et Koleg, après qu’ils soient parvenus à une crypte contenant un pédiluve, un Psyker enchaîné, une foule de cultistes enragés, et un démon d’intérieur qui n’a pas été nourri depuis longtemps. Pendant que Koleg maintient les hostiles à distance à grand renfort de gomme cogne et grenades de désencerclement, Cleander, qui a eu une bonne éducation et se charge donc de réfléchir pour deux, réalise que la situation se simplifierait sans doute beaucoup si le Psyker captif était sorti de l’équation, ce qu’il fait d’une petite torsion des cervicales, avec la bénédiction de l’intéressé. Et en effet, cette déconnexion warpique brutale renvoie le démon dans les limbes, ce qui est suffisant pour permettre à Koleg de terminer les hostiles tout seul comme un grand. Leur mission accomplie, et peu emballés à l’idée de faire le ménage, les deux hommes reprennent le chemin de la surface pour prendre un Champomy.

Notre nouvelle se termine avec la fin de l’interrogatoire psychique de Gul, mené d’esprit de maître par Mylasa, la Psyker de fonction de Covenant. Cette dernière offre à son sujet un départ apaisé, après quelques semaines de franches tortures dont elle a effacé la trace de sa mémoire, en reconnaissance du manque de bol colossal de Gul, coupable d’avoir obéi à un Inquisiteur soupçonné d’être tombé du mauvais côté de la barrière. Les souvenirs du Prior seront utiles à Covenant pour exposer la duplicité de son collègue lors du Conclave de guerre qui prendra place dans quelques semaines à Ero, et auquel les deux hommes participeront. Cela n’est cependant plus l’affaire de Gul, qui finit sa vie un verre à la main et sur le bord de mer, de façon purement psychique certes, mais plus agréablement que la grande majorité des citoyens de l’Imperium. C’est l’Inquisition qui régale.

AVIS :

John French signe une très bonne introduction à sa saga inquisitoriale avec ‘The Absolution of Swords’, qui se déroule juste avant les événements de ‘Resurrection’ et permet de se familiariser en douceur avec la galerie de personnages gravitant autour de Covenant, et découvrir la rivalité professionnelle qu’il entretient avec Talicto. Considérant que les duels fratricides au sein de l’Inquisition donnaient les intrigues les plus intéressantes de ce sous-genre de la GW-Fiction, ‘The Absolution…’ a piqué mon intérêt et donné sérieusement envie d’en savoir plus sur l’héritier présomptif d’Eisenhorn1 (qui a aussi eu affaire à un collègue radical en son jeune temps). Pour ne rien gâcher, le récit en lui-même est tout à fait digeste, mélangeant scènes d’action efficaces et atmosphère poisseusement grimdark, comme on est en droit de l’attendre de la part d’une soumission de ce type. Bref, si vous débutez avec Coco, voici la nouvelle qu’il vous faut, loin devant les « introspections » que French a dédié à chacun des serviteurs de Catogan-man (‘The Purity of Ignorance’, ‘The Spirit of Cogs’), qui sont à réserver aux lecteurs déjà familiers du bon Inquisiteur.

1 : Ou plutôt contemporain, car les deux personnages ont été créés pour le jeu Inquisitor, il y a fort longtemps.

.

Shadow Knight – A. Dembski-Bowden [40K] :

Shadow KnightICÔNE : TALOS VALCORAN, DIXIEME COMPAGNIE DES NIGHT LORDS

INTRIGUE :

À la recherche de matériel récupérable dans un Space Hulk, Talos et la première griffe de la dixième compagnie (Cyrion, Uzas, Xarl) tombent nez à nez avec une petite force de Blood Angels, bien décidés à reprendre l’épée que Talos a dérobée à un de leurs champions (cette obsession des Blood Angels pour Aurum – le nom de l’épée en question – constitue l’un des running gags de la saga, chaque tentative se soldant par un échec coûteux en vies d’Anges de la mort). Après avoir rapidement expédiés les pauvres scouts en combinaisons spatiales qui constituent la première vague des loyalistes, les quatre affreux se réunissent pour décider de la marche à suivre… et Talos est frappé par une vision, ce qui réduit drastiquement ses capacités de leader, et force ses acolytes à se débrouiller tout seuls. La narration restant malgré tout braquée sur le chef de la griffe, en dépit de son état comateux, la suite de l’accrochage entre Night Lords et Blood Angels est couverte en quelques lignes lapidaires, par le biais du compte rendu fait par Uzas et Xarl à Cyrion après les faits. Pareillement, la mini bataille spatiale entre les vaisseaux respectifs des deux forces est résumée en un paragraphe, ce qui est un peu court jeune homme.

AVIS :

Étrange nouvelle que ce Shadow Knight, commis par un Aaron Dembski-Bowden visiblement peu convaincu par son propos. Pour être honnête, ce texte semble être la réponse du berger à la bergère, cette dernière répondant au nom de Sarah Cawkwell et s’étant à de multiples reprises illustrée par la platitude navrante de ses écrits. Reprenant dans les grandes lignes le schéma narratif de Cause And Effect (à savoir, une sous-péripétie impliquant Gileas Ur’Ten, Space Marine du chapitre des Silver Skulls et héros récurrent de Miss Cawkwell – intérêt : nul – ), ADB livre ainsi un compte-rendu peu inspiré d’un épisode mineur de la vie de Talos, principal protagoniste de la (sinon) très bonne série des Night Lords.

Il va sans dire que la connaissance des personnages principaux de la série Night Lords ainsi que des événements relatés dans cette dernière constitue un prérequis appréciable (mais pas obligatoire) à la lecture de Shadow Knight, dont l’action se déroule peu avant l’attaque de la treizième croisade noire sur le système de Crythe, et constitue de fait une sorte d’avant-propos à la trilogie d’Aaron Dembski-Bowden. Au final, je pense que cette nouvelle aurait davantage eu sa place en introduction du (futur) omnibus Night Lords qu’en conclusion de ce onzième numéro de Hammer & Bolter, même si la lecture de ces quelques pages n’a absolument pas relevé du chemin de croix littéraire, le « pire » d’ADB surpassant allègrement le « meilleur » d’autres auteurs de la BL, il n’en demeure pas moins que Shadow Knight constitue à mes yeux la production la plus faible d’ADB à ce jour.

.

Ghosts of Demesnus – J. Reynolds [AoS] :

Ghosts of DemesnusICÔNE : GARDUS STEELSOUL, LORD-CASTELLANT DES HALLOWED KNIGHTS

INTRIGUE :

Profitant d’une permission bien méritée, le Lord-Celestant Gardus Steel Soul, tourmenté par des rêves le ramenant sans cesse à son passé de mortel, s’embarque pour une croisière bucolique jusqu’à la cité où il a vécu sa première existence, dans l’espoir de pouvoir mettre des mots sur sa soudaine mélancolie. Débarqué incognito (enfin, aussi incognito qu’une taille et une stature de Stormcast Eternal peuvent conférer) dans la riante Demesnus, port fluvial d’importance du royaume de Ghyran, Gardus, autrefois Garradan, baguenaude pensivement de ruelles en parcs, à la recherche des bribes d’un passé déjà lointain. À peine a-t-il le temps de rosser un trio de faquins cherchant des noises à une accorte damoiselle en représailles de la lépreuse compagnie qu’elle entretient, et d’échanger quelques platitudes avec son professeur de philosophie de terminale, que les voix qui le hantent l’amènent droit dans les ruines de son ancien hospice. Dans une autre vie, Gardus était en effet ostéopathe guérisseur, et avait dédié sa vie et ses économies à accueillir les nécessiteux des alentours, avec un dévouement ayant fini par attirer l’œil de Sigmar en personne, qui, à la faveur d’une attaque de Skineaters1, drafta le malheureux praticien dans sa team de surhommes. Sûrement qu’il avait besoin d’un massage, aussi. Malgré l’aspect décrépit du lieu, laissé à l’abandon depuis belle lurette, Gardus a la surprise de tomber sur une communauté de squatteurs, pas vraiment présentables et majoritairement scrofuleux, pestiférés, voire pire, mais persuadés que Saint Garradan les a appelés en ce lieu pour qu’hommage lui soit rendu.

Un peu gêné par la situation, qu’il n’a en aucune mesure orchestrée, le probe Gardus accepte l’hospitalité de ses nouveaux amis, dont fait partie la pauvresse qu’il a secourue sur les docks quelques heures plus tôt. Cette dernière, et le Prêtre Guerrier de Sigmar invalide à 134% qui sert d’autorité morale à la croûteuse congrégation, attendent le prochain signe de Gare du Nord avec un zèle admirable, totalement oublieux aux réalités les plus basiques, comme le droit de propriété. D’où la visite de courtoisie que vient leur rendre le possesseur du terrain en question, un maquignon à la retraite du nom de Sargo Wale, bien décidé à lancer les travaux de réhabilitation de l’ancien hospice dans les meilleurs délais, et par la force s’il le faut. Il faut reconnaître qu’il a la loi de son côté, la trêve hivernale ayant expiré et le conseil municipal lui ayant délégué tout pouvoir pour faire triompher l’intérêt commun. Entre l’alignement légaliste bon de Wale et celui chaotique (un comble pour un Stormcast Eternal) bon de Gardus, aucun compromis ne peut être trouvé, mais, confiant dans son bon droit à défaut de l’être dans les chances de sa bande de ruffians face à l’opposition ferme et polie (comme son épée runique de deux mètres) du colosse servant de videur aux éclopés de l’hospice, le diplomate propriétaire laisse une journée entière de réflexion à la partie adverse, et s’en va comme un prince.

Ce délai supplémentaire sera mis à fort bon usage par Gardus, qui n’a pas toute l’éternité pour régler le problème qui le tourmente, tout comme Reynolds n’a pas 300 pages pour conclure son propos. La nuit suivante verra donc un esprit Kaonashi geignard s’extirper du sol pour aller se repaître des humeurs (de manière littérale et figurée) des malades endormis. Surpris par le Gardus de garde et son sixième sens de preux paladin, la mystérieuse entité se fait rapidement la malle, mais reparaît quelques heures plus tard, trop affamée pour prêter beaucoup d’attention au demi-Primarque qui patiente dans sa zone de spawn, des questions plein la bouche et une épée enchantée à la main. Manque de bol pour notre héros, l’amalgame pleurnichard qui lui fait face est plus intéressée par la boustifaille que par la discussion, et l’attaque sans sommation, sous le regard bienveillant de Wale, qui se révèle être un cultiste de Nurgle. Après avoir constaté que ses gros muscles ne sont d’aucune utilité face aux assauts de suçons de son adversaire, Gardus dégaine son special move, c’est à dire son énorme… empathie, et sert donc le démon dans ses bras puissants en lui susurrant des mots de réconfort aux oreilles. Et ça marche. Touché par tant de compassion, et sans doute un peu par la pure lumière céleste que Gardus est capable d’exsuder sur commande, telle une luciole d’Azyrheim (séquelle plutôt kioul de sa seconde reforge), la vilaine bête fond comme un lépreux dans un pédiluve, libérant une à une les âmes des malheureux qui lui servaient d’ancrage. Ceci fait, Gardus n’a plus qu’à régler son compte au traître Wale, qui malgré sa force démoniaque et son épée rouillée, ne fait pas le poids face au double quintal de JUSTICE du Stormcast Eternal. Convaincu d’avoir accompli sa mission, et débarassé Demesnus d’un détestable faux jeton, Steel Soul peut reprendre le ferry de 06:39 pour regagner sa caserne et l’éternelle lutte contre les ennemis de Sigmar. Voilà un week-end productif.

1 : Le nom peut faire peur, c’est vrai, mais si on y réfléchit deux secondes, il inclut également les Garra Rufa (poissons docteurs), d’excellents auxiliaires de pédicure. Du coup, la légende du Garra Dan en prend un coup.

AVIS :

Les turpitudes psychologiques de Gardus Steel Soul, pour lequel la conciliation du moi, surmoi et ça ne relève pas de la sinécure, ne m’ont que moyennement intéressées, comme la plupart des soumissions mettant au premier plan des Stormcast Eternals je dois le reconnaître. Reynolds m’ayant habitué à des nouvelles bien plus travaillées en termes d’intrigue et de progression narrative, la grande simplicité avec laquelle notre Action Man blanchi sous le harnais résout le problème auquel il est confronté, m’a laissé un goût d’inachevé. Toutefois, je dois reconnaître que l’inclusion de The Ghosts of Demesnus dans cette anthologie introductive est un choix des plus pertinents de la part des éditeurs de la BL, puisqu’il permet aux nouveaux lecteurs de découvrir une facette intéressante de la faction reine de l’univers (la difficile conciliation entre leur passif de mortels et leur mission de soldats de Sigmar par les Stormcast Eternals), tout en les immergeant dans le quotidien d’une cité libre de Ghyran, loin des batailles contre les forces du Chaos déjà abondamment couvertes dans le jeu de figurines et les suppléments s’y rattachant.

Ajoutez à cela des personnages un brin complexes (en particulier Sargo Wale, qui est loin d’être un chef de culte à tendance mégalo-anarchique, comme c’est souvent le cas) et l’habituel nappage de fluff que Josh Reynolds se fait un point d’honneur à servir, et vous obtenez un récit d’une honnêteté insoupçonnable. On peut cependant reprocher à Ghosts…, même si dans une moindre mesure que pour God’s Gift, son manque de singularité, évidemment causé par le fait que Gardus est, comme Hamilcar, un héros récurrent de la BL, dont les aventures passées rejaillissent fatalement sur les évènements narrés dans la nouvelle. Ici, c’est l’inclusion du vieux sensei Yare, compagnon d’aventure d’une précédente épopée, qui fait figure de passage obligé à la valeur ajoutée assez limitée. Rien d’horripilant là non plus, mais pas l’idéal pour accrocher le lecteur novice ou indifférent. Bref, une première incursion honorable, à défaut d’être mémorable, dans le monde métallisé des meilleurs de Sigmar.

.

One, Untended – D. Guymer [AoS] :

One, UntendedICÔNE : GOTREK GURNISSON, TUEUR

INTRIGUE :

Une fois n’est pas rancune, nous retrouvons le Tueur préféré de ton Tueur préféré, Gotrek Gurnisson, dans le mal le plus complet au début de cette nouvelle aventure, qui sera sans aucun doute trépidante, mais qui commence par être vomissante. Notre héros est en effet pris d’un mal de ventre carabiné, ce qui, de son aveu même à son acolyte Maleneth, ne lui était jamais arrivé avant. Et si l’Aelfe sigmarite, en bonne compagnonne qu’elle est, prend soin de tenir la crête de Gotrek pour éviter que cette dernière ne prenne une couleur et une texture encore plus dégoûtantes qu’à l’accoutumée, elle n’est pas étrangère à cette gueule de bois subite. Bien au contraire, c’est elle-même qui en est la cause, ses tentatives d’empoisonner le Nain afin de lui dérober la rune majeure de Krag Marteau Noir pour la ramener à Azyrheim n’ayant eu pas d’autres effets qu’un émétique avarié sur la robuste constitution du Tueur1. Ses vaillants efforts de se débarrasser de Gotrek devront cependant attendre un peu, car les éructations du transfuge du Monde qui Fut sont dérangés par une scène de ménage entre plusieurs individus aussi louches qu’imbibés. La raison de ce tapage nocturne se fait bientôt jour : un jeune bambin du nom de Tambrin a échappé à la vigilance légère de ses parents (Junas et Magda), et s’est semble-t-il enfoncé dans les catacombes d’Hammerhal Ghyra, que l’on dit hantées par le spectre vengeur d’Hanberra (à ne pas confondre avec celui d’Harambe, même si ça lui donnerait une bonne raison de persécuter les garçonnets), un ancien héros local ayant renoncé à servir Sigmar sous la forme d’un Stormcast Eternal à sa mort, et à la recherche des enfants qu’il n’avait pas pu sauver de son vivant depuis lors. La perspective de se frotter à un spectre légendaire pique bien évidemment l’intérêt professionnel de Gotrek, qui insiste pour prendre la tête de l’expédition de secours mise sur pied par les habitués de la taverne où les deux compères ont passé la nuit. En plus de Junas, qui sert de videur à l’auguste établissement, on retrouve la Ranger retraitée Halik et le Prêtre d’Alarielle Alanaer, qui serviront donc de meatshields aux véritables héros de l’histoire. Dommage que personne ne les ait prévenus.

La descente s’engage donc, et après quelques heures de progression dans les boyaux insalubres de la cité, un premier ennemi pointe le bout de ses moustaches. Il ne s’agit pas de Philippe Martinez, mais d’une bande de Moines de la Peste, peut-être syndiqués, squattant le bas de la cage d’escalier comme un gang de trafiquants de la cité Péri. Et à propos de périr, laissez moi vous dire que les ratons ne font pas long feu face à la colère incandescente de Gotrek, qui peut désormais passer en mode super saiyan lorsqu’il est très énervé, et élever la température autour de lui à des niveaux insupportables. Sa nouvelle hache de fonction, si elle est sans doute un peu moins cheatée que l’ancienne (dur de battre une arme forgée par Grugni pour Grimnir, tout de même), s’avère également très efficace, et la menace murine est donc prestement éliminée par les aventuriers, qui peuvent poursuivre leur route sans autre dommage qu’un pif écrasé par un coup de matraque pour Junas.

Le moment tant attendu de la confrontation avec Hanberra finit enfin par arriver, l’esprit ayant bien dérobé/envoûté Tanbrin (qui dort comme un bienheureux) car il l’avait pris pour son propre fils, Hangharth. Némésis de Gotrek oblige, le combat est bien plus serré que précédemment, la pauvre Halik rendant les armes et l’âme au premier cri poussé par le poltergeist kidnappeur, qui prouve au monde entier qu’il existe des Banshees masculines. Non mais. L’évanescence intermittente du fantôme n’est pas sans poser quelque problème au Tueur, ce qui ferait plutôt les affaires de Maleneth, toujours déterminée à récupérer la rune majeure tant convoitée de sa dépouille, mais il lui faut pour cela donner une raison à Hanberra de se battre à fond, ce que sa main mise sur Tambrin l’empêche de faire. La cultiste de Khaine repentie puise donc au fond de sa sacoche un clou de ci-gît Rolf2, souverain contre les ectoplasmes tenaces (et les Mortarques collants), et le frotte vigoureusement sur le bras porteur d’Hanberra pour lui subtiliser son précieux. N’ayant plus rien à perdre, le spectre va certainement réduire Gotrek en bouillie…

Début spoiler…Eh bien non (quelle surprise). Mais le plus étonnant n’est pas tant le résultat final que le dénouement, non violent, de cet affrontement. Le Tueur parvient en effet à faire entendre raison à son adversaire par le dialogue au lieu de lui faire manger sa hache, et ce dernier se dissipe donc de lui-même, comme le malentendu qui l’avait mené à dérober les enfants des autres depuis quelques siècles. Tout est donc bien qui finit bien (sauf pour Halik et la bière que Gotrek avait laissé sur le comptoir3), mais Maleneth la malhonnête devra trouver une autre combine pour récupérer la précieuse broquille incrustée dans le plastron de son compagnon.Fin spoiler

1 : Maleneth ne sait pas que la glotte de sa cible est marquée de la rune majeure de Cubi, le dieu Nain de l’alcoolisme.
2 : Vous me pardonnerez le calembour, mais traduire ‘wightclove’ en français n’est pas facile.
3 : À ce propos, il est probable que ce soit elle qui ait donné son nom à la nouvelle (que l’on pourrait traduire par ‘Laissé(e) sans surveillance’) et non pas Tanbrin.

AVIS :

David Guymer, qui avait écrit les dernières aventures de Gotrek (et Felix) dans le Vieux Monde, signe avec ‘One, Untended’ un parfait récit de transition et d’acclimatation pour les lecteurs familiers du personnage mais pas des Royaumes Mortels. Au-delà du déroulé précis de cette quête, tout à fait classique sauf dans son dénouement, ce sont les informations que l’auteur donne sur ce nouvel univers, les changements subis par son héros (nouvelle arme, nouvelle rune, nouveau sidekick) depuis qu’il y a fait son entrée, et les motivations, pas vraiment charitables, de Maleneth, qui rendent cette lecture intéressante, et même indispensable pour qui voudrait reprendre la suite de la geste de Gotrek sans passer par la case romanesque (‘Realmslayer’). L’auteur parvient également à aborder des éléments de fluff relevant de la sociopolitique, comme l’acculturation progressive des habitants de Ghyran aux mœurs d’Azyr, qui donnent une profondeur et un réalisme très appréciables à une franchise qui en manquait (et en manque toujours) cruellement par rapport à Warhammer Fantasy Battle. Bref, c’est une transition très réussie que Gotrek Gurnisson doit à David Guymer, bien que le flambeau des rancunes soit passé peu de temps après à Darius Hinks.

.

Gods’ Gift – D. Guymer [AoS] :

Gods' GiftICÔNE : HAMILCAR BEAR-EATER, LORD-CASTELLANT DES ASTRAL TEMPLARS

INTRIGUE :

Prenant place après les évènements narrés dans Great Red et The Beasts of Cartha, pour ne citer que deux des précédentes aventures de notre fougueux héros, Gods’ Gift voit Hamilcar et quelques uns de ses potes des Astral Templars accomplir une mission d’intérêt général, sans doute pour avoir commis quelque tour pendable à une chambre rivale lors d’une permission à Hammerhall. Il s’agit en l’état de punir et faire stopper les exactions d’une bête monstrueuse s’amusant à disposer des hardis bûcherons d’un camp de colons récemment implanté dans les terres farouches de Ghur, tâche récréative pour des Stormcast Eternals de la trempe de nos gais lurons. Guidés par un local – Fage – qui malgré son âge vénérable semble tout émoustillé par la seule présence des Elus de Sigmar, Hamilcar & Cie s’embarquent donc dans une épopée aussi directe et rapide qu’une quête de zone de didacticiel de World of Warcraft.

Depuis le relevé de empreintes jusqu’à la constatation de l’heure du décès, ou plutôt, de l’abattage, il ne se passera ainsi qu’une petite journée, soit une vingtaine de pages pour le lecteur, juste le temps pour Ham’ de piquer un roupillon qui lui apportera un rêve plus ou moins prophétique, dans lequel un chêne vient lui chanter Je suis malade (ce qui est ‘achement dur pour un végétal, et mérite le respect), ce qui lui permettra de prendre une décision des plus inspirées quelques heures plus tard. La nouvelle se terminant pour un petit cliffhanger pas vraiment haletant, mais sans doute important pour la suite de la saga d’Hamilcar (Mark de son prénom), le lecteur en est quitte pour embrayer sur directement sur la première, ou plutôt le premier roman dédié à Guymer à sa coqueluche hirsute (Champion of the Gods), dans lequel il est presque certain que des réponses seront apportées aux questions laissées en suspens à la fin de Gods’ Gift.

: L’Homme Arbre qui s’était chargé de la besogne de déshumanisation – c’est comme la désinsectisation, mais avec des primates – servant de pied à terre racine à humus à une sylvaneth passablement enrhumée.

AVIS :

Malgré les dizaines de titres que compte sa bibliographie BL à l’heure actuelle, ce n’était que la deuxième soumission de Mr Guymer m’étant tombée sous la main depuis l’inaugural The Tilean Talisman, initialement publié en 2011. Et je dois dire que mon appréciation de l’œuvre du bonhomme est resté scrupuleusement identique, huit ans plus tard : des aptitudes certaines en terme de narration, avec des personnages au minimum distrayants, à défaut d’être immédiatement attachants (mention spéciale à Brouddican, l’Hillarion Lefuneste personnel de cette grande gueule d’Hamilcar), relevé par quelques notes boisées – c’est le cas de le dire – de fluff, plombées par une vacuité de l’intrigue assez rédhibitoire. C’est bien simple, celle de Gods’ Gift (d’ailleurs, on ne comprend pas vraiment quel est le don auquel Guymer fait référence dans le titre de sa nouvelle1) s’articule en deux temps trois mouvements, sans qu’on ait l’impression d’une quelconque progression entre le début et la fin de la nouvelle. Hamilcar traque un monstre. Hamilcar rêve d’un chêne. Hamilcar tombe dans une embuscade d’Hommes Bêtes (il faut bien qu’il montre qu’il est un cador du corps à corps). Hamilcar débouche sur un bosquet de chênes sacrés, gardé par… le monstre qu’il traquait. Coup de bol. Baston. Victoire. Fin.

Bref, rien de bien challengeant pour l’intellect du lecteur, qui aurait pu s’attendre à quelques liens de causalité entre les différents éléments constitutifs du propos de Guymer. Rien de tel ici, ou de manière tellement évidente et peu fine que les relever n’a pas grand intérêt. Comme dit plus haut, cela peut sans doute se justifier par le fait que Gods’ Gift est un rehaut littéraire à un travail plus conséquent, avec lequel l’auteur prend bien soin de faire la liaison. Telle la rondelle de tomate venant décorer une entrecôte frites, cette nouvelle peut être consommée si on a vraiment faim, mais ne remplira pas l’estomac pour autant. Et comme dit plus tôt (Décembre 2014, pour être précis), c’est plutôt cher payé pour ce que c’est. On me souffle dans l’oreillette que c’est fois ci, c’est gratuit. Bon. Mais avant cela, cela ne valait certes pas les 2,99€ demandés. Rem-bour-sez nos in-vi-tat-tions !

1 : Soit ce sont les visions vagues envoyées par Sigmar, soit c’est le photophore magique remis par icelui, et qui permettra à notre fier héros de venir à bout de Marylise Lebranchu. Au lecteur de décider s’il prend le messie ou la lanterne.

.

The Dance of the Skulls – D. Annandale [AoS] :

The Dance of the SkullsICÔNE : NEFERATA, MORTARQUE DU SANG

INTRIGUE :

Invitée à honorer de sa présence un bal donné par la reine Ahalaset et le seigneur Nagen dans la cité de Mortannis, Nefarata se doute bien que cet évènement mondain n’est qu’un prétexte commode pour permettre à ces deux grandes lignées d’agir à ses dépends, ce qui ne l’empêche pas d’accepter gracieusement de se rendre sur place, n’ayant de toute façon rien d’autre de prévu ce soir là. Voyant d’un mauvais oeil le rapprochement s’étant récemment opéré entre Ahalaset et Nagen, la Mortarque de Sang suppute avec raison qu’un piège va lui être tendu, et se réjouit d’avance de cette (més)aventure, le quotidien de Nulahmia devant apparemment être assez terne.

Après avoir été accueillie avec tout le faste et la pompe liés à son r/sang (et infligé rateau sur rateau à ce pauvre Nagen, auquel elle promet toutefois une danse plus tard dans la soirée1), Neffie se voit proposer par son hôte une dégustation privée de crus tirés de l’hématothèque personnelle d’Ahalaset, ce qui ne se refuse pas. Guidée jusqu’à un salon lounge où l’attendent une dizaine d’esclaves qui s’appellent tous Mathusalem ou Réhoboam, notre rusée vampire à tôt fait d’identifier l’aiguille d’argent se terrant sous la roche, en l’occurrence un assassin assermenté doté d’une fourchette à escargot à la place du bras (c’est la mode à Hammerhal). Ayant raté son test d’Initiative, le faquin est toutefois aisément neutralisé par sa victime supposée, qui l’attache à son service d’un langoureux battement de cils. Satisfaite de la tournure prise par les évènements, et comme toute quinqua-millénaire de la bonne société après une dure journée de labeur, Neferata s’accorde un petit verre (et fracasse au passage toutes les « bouteilles », qui espéraient peut-être qu’on les laisse tranquille le temps qu’elles refassent le plein) aux frais de ses hôtes avant de revenir se joindre à la fête.

Là, il est temps pour la Lahmiane de porter l’estocade aux traîtres débusqués, et en musique s’il vous plaît, la danse des crânes consentie à ce benêt de Nagen donnant amplement le temps à notre héroïne de cimenter sa victoire en enchantant légèrement son cavalier, qui ne trouvera rien de plus malin lorsque l’assassin d’Ahalaset viendra sonner les douze coups de minuit à son ancienne patronne à l’aide de son argenterie intégrée, de lancer sa devise dans le silence de mort (héhé) qui s’ensuit. Cette dernière tombera à plat comme la totalité de ses blagues, et, mal comprise par la garde de la reine défunte, aura des conséquences tragiques pour notre pauvre Nagen. Un verre ça va, trois verres…

1 : En même temps, cette coquetterie de laisser dépasser une canine par dessus sa lèvre inférieure ne doit pas aider à lui donner un air très intelligent.

AVIS :

C’est peu de chose de dire que la prose de Herr Annandale n’était pas tenue en haute estime de ce côté du clavier, depuis la chronique de ses débuts pour la BL (The Carrion AnthemHammer & Bolter #11) jusqu’à aujourd’hui. Les choses ont légèrement évolué avec cette Danse des Crânes, qui s’affirme facilement comme la meilleure soumission de notre homme que j’ai pu lire à ce jour. Certes, on parle ici en progrès relatif plutôt qu’en performance absolue, cette courte nouvelle ne se comparant guère aux travaux d’auteurs que je considère être plus méritants que David Annandale, Abnett, Dembski-Bowden, Farrer et Fehervari en tête, pour n’en citer que quelques uns (la liste serait assez longue sinon), mais j’aurais trop beau jeu de ne pointer que les trous dans la cuirasse ou les défauts dans la raquette des travaux de ce régulier de la BL, si je ne soulignais pas également les sources de satisfaction à la lecture de ces derniers. L’Empereur sait qu’ils sont encore rares à cette heure.

Alors, quels sont les éléments positifs de La Danse des Crânes ? Pour commencer, une absence de ce que l’on peut presque appeler une « annandalerie », terme forgé par votre serviteur et désignant une mauvaise, grossière ou grotesque exploitation d’une idée de départ pourtant assez sympathique, pour des résultats évidemment décevants. Le huis-clos victorien qui nous est proposé ici ne pêche ainsi pas par excès de zèle ou manque de structuration, les péripéties s’enchaînant de façon tout à fait convenable et crédible, ce qui pourrait sembler aller de soi mais n’était pas gagné d’avance au vu du pedigree de l’auteur. On sent que ce dernier a réfléchi à la manière dont il devait dérouler son récit pour que le plan alambiqué de Nefarata puisse se dérouler sans (trop) d’accroc, et même si l’usage d’un petit TGCM en fin de nouvelle pour parfaire le triomphe de Mama Lahmia peut être noté, c’est finalement peu de chose comparé aux problèmes structurels émaillant quelques unes des précédentes soumissions de David Annandale.

Autre source de contentement, la description intéressante qui nous est faite de la haute société mort-vivante, nid de vipères aux crocs acérés et n’hésitant pas un instant à comploter pour précipiter la chute de leurs prochains, alors même que les ennemis extérieurs se comptent par milliers, et qu’un brin de solidarité entre macchabées ne serait pas de trop pour défendre le pré carré de Nagash. Le fait que cette société, mêlant vampires et humains à tous les échelons, apparaisse comme fonctionnelle et pérenne (en même temps, c’est bien le minimum quand on est immortel) est une autre réussite d’Annandale, qui parvient à donner un volume fort bienvenu à une faction qui jusque là se réduisait à des légions de squelettes traînant leur mélancolie dans des déserts violacés. On peut s’amuser aussi en Shyish, telle est la morale de cette petite histoire.

.

The Old Ways – N. Horth [AoS] :

Callis and Toll_The Old WaysICÔNES : ARMAND CALLIS & HANNIVER TOLL, ORDRE DE SIGMAR

INTRIGUE :

Affecté à la surveillance de la cité d’Excelsis, dans le royaume de Ghur, le répurgateur de l’Ordre d’Azyr Halliver Toll, escorté de son sidekick Armand Callis, est envoyé par ses supérieurs tirer au clair une sombre histoire de disparition à Marshpoint, une ville agricole située en périphérie de la Cité des Secrets. Le fils aîné de la puissante famille Junica n’a en effet plus donné signe de vie après avoir eu maille à partir avec quelques soldats de l’autre grande famille locale, les Dezraed, qui l’ont poursuivi jusque dans les profondeurs de la forêt d’Ulwhyr. L’entente entre Junica et Dezraed n’ayant jamais été cordiale, c’est une vendetta en bonne et due forme qui menace d’éclater entre les Capulet et les Montaigu de Ghur, gueguerre qui mettrait en péril l’approvisionnement des régiments d’Excelsis en précieuse soie d’acier, ressource collectée depuis les fermes arachnides de Marshpoint. Il va donc de l’interêt général que cette triste affaire soit réglée dans les meilleurs délais, et qui de plus qualifié qu’un répurgateur pour traiter ce problème ?

Nous suivons donc Thalys et Colle au cours de l’enquête à laquelle ils se livrent à leur arrivée dans le bourg miteux et boueux de Marshpoint. Après un interrogatoire croisé des patriciens des deux familles, l’énorme et suintant Fenrol var Dezraed, autoproclamé Gardien de Marshpoint du fait de sa capacité de bloquer à lui seul l’entrée de la ville s’il lui prenait l’envie de s’asseoir en travers du portail, et le sec et irritable Kiervaan Junica, nos experts se rendent sur les lieux de la disparition à proprement parler, escortés par l’homme de confiance du patricien Junica, un natif du nom de Ghedren, et par un trio de gardes Dezraed. Et s’il se pourrait bien que la rivalité larvée entre familles nobles ait bien fait couler le sang, les enquêteurs feraient bien de prendre au sérieux les rumeurs entourant la Sorcière Blanche d’Ulwyhr. Après tout, ils ont pénétré sur son domaine…

AVIS:

C’est avec enthousiasme que j’avais vu revenir la figure iconique du chasseur de sorcières/répurgateur dans le lore d’Age of Sigmar, que son inclinaison high fantasy aurait pu « immuniser » à l’introduction de ce type de personnage, très grimdark par nature. La lutte contre les cultes chaotiques gangrénant le nouvel ordre rutilant de Sigmar constitue en effet à mes yeux un axe de développement des plus intéressants, et une prise de recul bienvenue sur le manichéisme caractéristique des premières années d’AoS. Encore fallait-il que l’image d’Epinal Hammerhal de l’inquisiteur traquant le vice et la trahison parmi les sujets obéissants de l’autorité centrale (préférablement divine, c’est plus classe) soit convenablement adaptée dans cette nouvelle franchise, la profession en question exigeant une rigueur morale confinant à la psychose, ce qui n’est pas franchement la norme parmi la soldatesque sigmarite (ces martel-sans-rire de Celestial Vindicators mis à part), dépeinte à de nombreuses reprises comme adepte du compromis et de la tempérance. Qu’en est-il avec la paire Callis & Toll, promise à un bel avenir au sein de la BL à en juger de la façon dont leurs noms ressortent dans tous les ouvrages auxquels ils ont été inclus ? Eh bien, c’est plutôt pas mal, encore que pas spécialement pour les raisons détaillées ci-dessus. Je m’explique.

Si le fanatisme (dans le bon sens du terme, car, si si, dans la littérature med-fan, cela existe) de nos héros laisse à désirer, la retenue dont fait preuve Toll, sensé être le vrai bad guy du duo, dans le jugement qu’il délivre au coupable, le plaçant à un petit 2 sur l’échelle de Mathias Thulmann (le référentiel absolu de la maison à cet égard), Horth se rattrape néanmoins en glissant quelques remarques de bon aloi à propos d’un certain White Reaper (Cerrus Sentanus sur son état civil), Stormcast Eternal pas vraiment Charlie, à tel point que son nom est utilisé pour effrayer les enfants d’Excelsis. Voilà un type qui mérite que l’on suive, et j’espère bien que ça sera le cas dans un futur pas trop lointain. Celà étant dit, The Old Ways a d’autres qualités, la première étant de proposer une petite enquête policière pas trop mal troussée au vu du nombre de pages limité avec lequel elle doit composer1, l’atmosphère horrifique du passage « sylvestre » du récit étant une autre source de satisfaction. D’autre part, cette nouvelle présente également l’intérêt de creuser le background de la cité libre d’Excelsis, qui devrait normalement ne pas disparaître corps et bien dans les annales du fluff, au vu du nombre d’apparitions qu’elle a faite dans divers écrits depuis son introduction dans le background. En apprendre plus sur cette bourgade présente donc un intérêt pour le fluffiste, tellement bombardé d’informations géographiques par ailleurs qu’on ne peut lui reprocher de ne pas prendre note de tout ce qu’on lui soumet.

Enfin, de façon plus large, elle fait ressortir un concept intéressant : le fossé existant entre natifs d’Azyr et populations locales au sein des cités libres, les seconds étant généralement mal considérés, voire méprisés par les premiers, qui les qualifient « d’Amendés » (traduction personnelle de Reclaimed, qui peut aussi s’entendre comme « Récupéré ») ou de « Sang Maudit » (curseblood), ce qui n’est pas très sympathique, mais ajoute de la profondeur à la société sigmarite. Quand on lit que même un personnage « égalitariste » comme Toll n’aurait pas de problème à raser toutes les forêts de Ghur pour pouvoir accélérer la colonisation de ce Royaume, au grand désarroi des locaux qui ont appris à vivre dans les étendues sauvages et à les respecter, on se dit que la possibilité d’un soulèvement des indigènes contre la métropole et ses représentants est une possibilité réelle… et c’est tant mieux en termes de potentiel narratif ! Bref, une plongée satisfaisante dans l’arrière-pays d’Excelsis, et une nouvelle qui vaut le coup d’être lue pour qui s’intéresse au fluff des cités libres.

On saluera également le twist proprement « meta » de Horth, qui fait dire à Toll qu’il avait identifié le coupable depuis belle lurette et attendait juste de voir combien de temps il faudrait à Callis (et donc au lecteur) pour faire de même. On ne me l’avait jamais faite celle-là.

.

Hunting Shadows – A. Clark [AoS] :

Hunting ShadowsICÔNE : NEAVE BLACKTALON, KNIGHT-ZEPHYROS

INTRIGUE :

Neave Blacktalon, Knight-Zephyros des Hammers of Sigmar et chasseuse de têtes personnelle du grand barbu, opère traditionnellement seule. La mission sur laquelle son divin boss l’a mise, et qui l’a conduite sur les terres désolées d’Ashy, s’avère cependant tellement délicate que les autorités compétentes ont jugé bon de lui adjoindre du renfort, sous la forme du Knight-Venator Tarion Arl (et son aigle étoilé Krien) et d’une unité de Vanguard-Palladors, menée par une vieille connaissance avec laquelle elle a déjà coopéré pour disperser une bande de hippies ayant monté une opération escargot1 dans les Royaumes Mortels, Kalparius Foerunner. Je sais, je sais, cela fait beaucoup de jargon sigmarite en peu de lignes, mais rassurez-vous, savoir qui fait quoi est moins important que de se souvenir de la hiérarchie héroïque à l’œuvre dans cette nouvelle, qui décidera qui devra mourir et à quel moment.

Blacktalon les traîne un peu à l’idée de devoir faire équipe avec des collègues, mais un ordre est un ordre, et si l’on en juge par les charniers calcinés que sa proie (qu’elle peut traquer avec l’espèce de GPS sensoriel peu précis dont Sigmar lui a fait don) a laissé derrière elle, un peu d’aide sera en effet utile. Passée les formalités d’usage, la petite bande part donc en courant/volant/transmutant dans la direction indiquée par la chasseresse, qui ressent de façon diffuse que sa cible possède un moyen de brouiller sa ΣG embarquée. En gros, si elle est toujours capable de savoir vers où se diriger, elle ne peut pas jauger de la distance qui la sépare de son gibier, ce qui aura son importance plus tard. Pour l’heure, la fine équipe, en retard sur l’abomination qu’elle pourchasse, doit faire un choix potentiellement lourd de conséquences à proximité de la ville de Sigenvale, qui a reçu la visite du monstre et a été réduite en miettes/cendres par ce dernier. Neave est plutôt partante pour se remettre en route sans tarder, mais Tarion parvient à la convaincre de faire un crochet rapide par les ruines, histoire de secourir d’éventuels survivants. Malheureusement pour l’altruiste voltigeur, la Marque ténébreuse n’en a laissé aucun, et bien que les chasseurs puissent se passer les nerfs sur un pauvre corpsejaw ne faisant que ce que la nature l’a équipé pour faire (c’est-à-dire bouffer les cadavres croisant sa route), il se fait vite jour que le mystérieux prédateur/incendiaire/décapiteur est déjà loin des lieux du crime. Il faut donc à nos héros repartir sans tarder, d’autant plus que le cogfort sensé participer à la traque semble être avoir fait une mauvaise rencontre quelques kilomètres plus loin, comme le bruit de ses canons l’atteste sans doute possible.

Bien évidemment, les traqueurs arrivent trop tard sur place pour secourir la machine de guerre (représentez vous le fruit des amours incestueux entre une Forteresse de la Rédemption et une Arachnarok), qui s’est faite éventrer et toute sa garnison massacrée par l’insaissable bestiole. Blacktalon est colère devant ce carnage dont elle impute en partie la responsabilité à ce gros sensible de Tarion, mais avant qu’elle puisse reprendre les choses en main et relancer la poursuite, une forme colossale émerge soudainement du lac de montagne à côté duquel reposait la carcasse du cogfort…

Début spoiler…Les pouvoirs de brouillage arcanique dont dispose la cible des chasseurs lui a en effet permis de tendre un piège à ces derniers, qui se retrouvent confronter à… pour faire simple, représentez vous Clifford le grand chien rouge, mais dont la maîtresse ne serait pas la gentille et aimante Emily, mais Valkhia la Sanglante. C’est donc à un pitbull mécanique de Khorne de fort belle taille (et crachant le feu) que les Stormcast Eternals doivent faire face, avec des résultats au début peu concluants, comme on peut s’en douter. Très étrangement, ce sont d’abord les Palladors qui sont envoyés pallader par le juggernaut, rapidement suivis par le brave Foerunner, ne laissant que Blacktalon et Tarion, tous les deux sévèrement blessés, pour tenter de renverser la situation. Ce n’est cependant pas chose facile car leur ennemi est très grand, très fort, très rapide, très costaud, et sans faiblesse apparente, mis à part l’écoutille chaînée qui lui sert de nombril.

Après quelques moments difficiles dans les décombres du cogfort où les deux héros ont trouvé un refuge précaire, le temps de décapsuler quelques potions de vie, le traditionnel plan de la dernière chance est conçu et immédiatement mis à exécution, permettant aux gardes chasses de Sigmar de remporter la victoire. Pour information, le haut fait en question nécessitera que Neave se déchaîne, et que son comparse loge un tir de l’aigle dans un cratère volcanique chatouilleux, ce qui aura pour effet final de noyer l’habitacle de la machine démon dans la lave. Statistiquement improbable je vous l’accorde, mais la high fantasy et les nouvelles d’action de la BL ne s’embarrassent pas de détails de ce genre. Ceci fait, les deux Knights-…, devenus bons copains dans l’adversité, peuvent reprendre le chemin d’Azyr, où ils pourront passer une convalescence bien méritée, ou se suicider pour être reforgés et ainsi redevenir opérationnels plus rapidement. Les politiques sociales sigmarites sont un peu particulières…Fin spoiler

1 : Organisée par l’incontournable Horticulous Slimux bien sûr.

AVIS :

Introduction au personnage de Neave Blacktalon (et à celui de son sidekick, Tarion Arl), ‘Hunting Shadows’ met particulièrement l’accent sur les caractéristiques de super héros des Stormcast Eternals (Blacktalon bénéficie en effet de sens ultra développés, et est capable de courir grotesquement vite – pensez Bip Bip et Vil Coyote), faisant de cette traque monstrueuse une sorte d’adaptation de comics Marvel dans les Royaumes Mortels. Je ne dis pas que c’est foncièrement désagréable, mais ça surprend tout de même un peu. Autre point saillant de cette nouvelle, son côté technique en matière de bestiaire et de hiérarchie Stormcast Eternals. C’est bien simple, on dirait qu’Andy Clark a fait exprès d’aller piocher dans les entrées les plus baroques du Battletome pour trouver ses protagonistes, ce qui peut aisément dérouter/saoûler le lecteur non averti. En cela, ‘Hunting Shadows’ n’est pas très newbie-friendly, même si l’intrigue reste relativement facile à suivre, du fait du schéma narratif très simple utilisé par l’auteur. En fait, le seul suspense de l’histoire repose dans l’identité de la proie traquée par Blacktalon et ses sous fifres, qui, manque de pot, se trouve être une création inédite de la part de Clark (à moins que la gamme chaotique d’Age of Sigmar comporte un modèle de chien de métal géant). Manque de pot car le lecteur ne peut même pas au final tenter de deviner qui est derrière ces exactions sanglantes et fumantes en se basant sur sa connaissance du fluff. Petite frustration, mais frustration quand même. Pour conclure, j’ai été très moyennement convaincue par cette démonstration de force de la Wonder Woman d’Azyrheim, héroïne certes très balaise mais assez peu attachante. Peut-être que cela est corrigé dans le roman qu’Andy Clark lui a consacré ?

.

Shiprats – C. L. Werner [AoS] :

ShipratsICÔNE : BROKRIN ULLISSONN, CAPITAINE KHARADRON

INTRIGUE :

La malchance légendaire qui colle à la carène du Dragon de Fer et la peau de son capitaine, le Kharadron Brokrin Ullisson s’abat une nouvelle fois sur le fier navire et son équipage. N’ayant pas trouvé de filon d’aether-or au cours de sa dernière campagne, le navire Duardin s’est résigné à se faire cargo de grain pour au moins rentrer dans ses frais, et a chargé une cargaison de blé dans la ville de Greypeak, qu’il espère vendre à bon prix de retour à Barak-Zilfin. Ce beau projet est toutefois menacé par la présence de passagers clandestins dans la cale du Dragon, une colonie de rats bien décidée à faire bombance sur les stocks des Arkanautes. Entre les petits barbus et les encore plus petits moustachus, il ne saurait y avoir de terrain d’entente, mais que faire pour débarrasser le vaisseau de l’infestation de vermine sans endommager ce dernier ? Alors que Brokrin et ses hommes se trouvent réduits à chasser les importuns à coups de pelle, avec des résultats peu concluants, comme on peut se l’imaginer, une bonne et potentiellement riche idée est soumise : pourquoi ne pas faire un détour par la Lamaserie de Kheitar, dont les moines ont par le passé rendu un fier service aux Kharadrons en débarassant le Dragon de la nuée de crapauds célestes (car apparemment, c’est un aléa climatique assez courant dans les Royaumes Mortels) qui avait élu domicile sur le navire à l’aide d’une fumigation un peu spéciale ? Aussi dit, aussitôt acté, la possibilité de soutirer aux bonzes une de leurs fameuses tapisseries pouvant même permettre d’espérer un profit au trésorier de la petite bande, passablement dépité par le tour pris par les évènements. Après tout, quoi de mieux qu’un lama pour venir à bout d’un rat1 ?

Arrivé sur place, Brokrin emmène une poignée de ses gars à la rencontre des paisibles habitants de Kheitar, dont les ancêtres étaient tellement zens qu’ils ont réussi à apprendre à un démon les bienfaits de la méditation. Brokrin, qui connaît personnellement le grand Lama (Serge), est bien étonné de voir apparaître à la place de son vieux pote un nouveau père supérieur (Bernard), qui a la peine de lui apprendre que Serge n’est pas simplement malade (comme on pouvait s’y attendre), mais a carrément atteint l’illumination en commettant le suicide rituel du tulku, un lent empoisonnement débouchant sur une momification graduelle de l’ascète. Malgré cette triste nouvelle, Bernard se montre particulièrement conciliant avec ses hôtes, acceptant non seulement de procéder à la dératisation demandée (sous réserve que les Duardins permettent aux rats de quitter le navire, car telle est le niveau d’antispécisme des bonzes), mais offrant même à leurs hôtes non pas une, mais cinq de leurs précieuses tapisseries, pour une contribution laissée à la discrétion des bénéficiaires. En celà, Bernard fait une grave erreur car cette générosité excessive ne manque de déclencher l’alerte piège à khon que tous les Kharadrons possèdent dans un coin de leur esprit. Suspectant une entourloupe, Brokrin charge donc un de ses matelots d’escorter les moines tapissiers jusqu’à bon port, tandis que lui et le reste de son khrew acceptent l’offre de Bernard de rendre visite à Serge, qui serait, contre toute évidence, encore vivant. Bernard commet alors sa deuxième boulette (pas aussi grave que celle du Bordeaux – Paris de 93, mais pas loin) : soucieux de faire respecter les traditions non-violentes de Kheitar (où même les démons fument du chichon), il somme ses visiteurs de déposer leurs lames avant d’entrer dans le saint des saints. Toujours un à lire les petites lignes du contrat et à trouver les failles dans les termes et conditions qui lui sont proposés, Brokrin fait remarquer à ses hommes que l’injonction du grand Lama ne couvre pas les armes à feu, et emboîte donc le pas à Bernard toujours armé de sa pétoire.

Un peu plus loin, les mirrifiques carpettes de Kheitar sont entreposées sans heurts dans la cale du Dragon de Fer, sous l’oeil attentif et circonspect d’un rattophobe déclaré, le sergent arquebusier Drumark, dont le paternel a été fauché dans la fleur de l’âge lors d’une bataille contre les Skavens. Souhaitant s’assurer que la vermine qui grignote son grain ne s’attaque pas aux précieux tapis, il laisse remonter ses comparses et attend dans la pénombre de voir comment les choses vont évoluer. Quelle n’est pas sa surprise de voir s’extraire des rouleaux apportés par les bonzes une demi-douzaine d’hommes-rats, qui comptaient sans doute s’infiltrer discrètement dans le navire en attendant de jouer un tour pendable à ses occupants légitimes ! Les plaisanteries les plus courtes étant les moins longues, Drumark a tôt fait de sonner la fin de la rat-cré, l’arsenal Kharadron ayant rapidement raison des manigances skavens. Tout celà n’augure toutefois rien de bon pour Brokrin et ses suivants, qui ne tardent pas non plus à découvrir le pot au rat, à la suite d’une performance misérable du Jeff Panacluc Skaven, un dénommé Kilvolt ayant « jeanmarquisé » le cadavre de Serge. Sommé de révéler au véritable maître de Kheitar les secrets de l’ingénierie Kharadron, Brokrin refuse avec noblesse, et met à profit la bévue de Bernard pour arroser les hommes rats venus à la rescousse de Kilvolt avec du Kharaplomb. L’algarade ne dure cependant pas longtemps, l’arrivée de Drumark et de ses arquebusiers convainquant définitivement les Skavens de la futilité de leur approche. Profitant de l’accalmie, Brokrin et Cie repartent ventre à terre sur le Dragon, non sans avoir pris soin de looter quelques tapisseries supplémentaires en guise de dédommagement. De voleur à vendeur de tapis, il n’y a que peu de choses au fond.

1 : Si vous répondez : un chat, sachez que le félin apporté à bord par les Duardins a fait acte de mutinerie peu de temps après sa prise de fonction. C’est ce qu s’appelle avoir un poil dans la patte.

AVIS:

Accompagnement au roman qu’il a consacré aux plus blindés des Duardins (Corsaires du Dragon de Fer//Overlords of the Iron Dragon), ce Rats de Cale de Werner s’avère être d’une lecture globalement satisfaisante. Notre homme retrouve avec bonheur ses victimes favorites (les Skavens), qu’il gratifie comme à son habitude d’une inventivité et d’une ambition proportionnellement inverse à leur compétence, pour un résultat aussi spectaculaire que dérangeant1. S’il y a un contributeur de la BL qui sait s’y prendre pour donner aux hommes rats leurs lettres de bassesse, c’est bien l’homme au chapeau, et on ne peut que souhaiter que Nottingham lui confie davantage de commandes portant sur les funestes et fumistes machinations des rejetons du Rat Cornu. On appréciera également l’exotisme du propos, la visite guidée de la Lamaserie de Kheitar permettant au lecteur de se remémorer l’immensité des Royaumes Mortels, où la présence d’une communauté de bonzes vénérant un démon du Chaos ayant trouvé la paix intérieure en téléchargeant Petit Bambou sur son portable est tout à fait possible. On peut regretter que l’accent ne soit pas davantage mis sur la culture des protagonistes, abordée assez succinctement à travers la mention des différentes fonctions des membres de l’équipage de l’Ang Drak et du fameux Code des Kharadron (qui sanctuarise les partenaires de commerce équitable, ce qui doit indiquer que les bananes et le chocolat sont tenus en haute estime par le Geldraad), mais que voulez-vous, on ne peut pas tout avoir dans une nouvelle de 25 pages. Le casting très développé des Arkanautes, conséquence logique de leur inclusion dans le roman cité plus haut, est un autre facteur pouvant diminuer (légèrement) le plaisir de lecture, mais, rassurez-vous, savoir qui est qui n’a que peu d’intérêt au final. Le plus important restant bien sûr de souquer les artimuses.

1 : Sérieusement, imaginer la transformation d’un cadavre de bonze en marionnette animée, c’est un coup à faire des cauchemars.

.

***

Vous êtes encore là ? Félicitations pour être venus à bout de cette copieuse chronique, qui vous a je l’espère préparé à la lecture de l’omnibus en question, si le cœur vous en dit. Essayons de rassembler nos pensées pour terminer sur une impression d’ensemble de ‘The Hammer & the Eagle’, après avoir passé tant de temps à disséquer chacune des nouvelles constituant ce pavé. La question qu’il convient de trancher est la suivante : cet ouvrage remplit il la mission que la Black Library lui a donnée, à savoir initier les nouveaux lecteurs aux icônes de Warhammer 40.000 et Age of Sigmar à travers une sélection de courts formats ? Comme vous pouvez vous en douter, si vous êtes familiers de ces critiques, la réponse est oui et non.

La force et l’attrait principal de ‘The Hammer & the Eagle’ est de proposer, clé en main et livre en poche (si vous arrivez à trouver une poche assez grande, ou avez opté pour un format digital), la couverture la plus complète qui soit de la GW-Fiction à l’heure actuelle. On peut reprocher à la BL de ne pas avoir inclus de textes pour Warhammer Fantasy Battle, qui compte également son lot de personnalités marquantes (Gotrek & Felix, Malus Darkblade, Tyrion & Teclis, Zavant Konniger, les Black Hearts…) et disposant de leurs propres séries de livres, ou, de façon plus pragmatique, d’avoir fait l’impasse sur l’Hérésie d’Horus, Necromunda et Blood Bowl, univers et sous univers riches en héros et vilains hauts en couleurs. On peut également s’interroger sur l’absence de certaines figures et auteurs de 40K au sommaire de ce recueil (Roboute Guiliman version Sombre Imperium, Ragnar Crinière Noire, Lukas, Ahriman, Khârn, Lucius, Honsou, Farsight, Peter Fehervari et son Dark Coil, Steve Parker et ses Deathwatch…), et sur la présence d’icônes mineures – à ce jour – dans ce qui semble être le catalogue des VIP de la Black Library. Mais si on passe outre ces considérations, on doit reconnaître que la base fournie ici est solide et, si ce n’est exhaustive, au moins très étoffée, le tout pour un prix très modeste au vu des tarifs habituels de la maison (on est proche des 50% de réduction par rapport à une anthologie classique).

Autre paramètre à considérer, la pertinence du choix des nouvelles collectées dans ‘The Hammer & the Eagle’, qui devraient dans l’idéal introduire le nouveau lecteur à un personnage marquant de 40K ou d’Age of Sigmar, et lui donner envie de poursuivre l’aventure en achetant le roman venant après le court format qu’il a pu lire ici. Sur ce point, c’est carrément le grand écart entre les textes qui ont été écrits avec cet objectif en tête par des auteurs de bon niveau (‘Of Their Lives…’, ‘Execution’, ‘The Absolution of Swords’, ‘One, Untended’…), et les courts formats mis au sommaire par pur pragmatisme, qui peuvent être obscurs pour qui n’est pas déjà familier de la série à laquelle ils se raccrochent (‘Rite of Pain’, ‘Prodigal’, ‘Shadow Knight’, ‘Gods’ Gift’), ne pas directement traiter des icônes qu’ils sont sensés introduire (‘The Smallest Detail’, ‘Fireheart’), ne pas aborder de façon satisfaisante le parcours, la personnalité et/ou les motivations de l’icône en question (‘The Wreckage’, ‘Argent’), ou être tout simplement mal écrits (‘The Battle for Markgraaf Hive’, ‘Mercy’). Pour faire court, si on m’avait demandé de soumettre une liste de nouvelles pour les icônes sélectionnées par la BL, la moitié des histoires rassemblées ici auraient été remplacées, pour une raison ou pour une autre. Il est in fine dommage que certains lecteurs décident d’ignorer des séries de qualité sur la base d’une erreur de casting de Nottingham, ce qui arrivera fatalement ici. J’invite donc à donner une deuxième chance à toutes les icônes ne sortant pas grandies de cet omnibus, pour s’assurer que la première impression a bien été la bonne. La tendance des auteurs de la BL à écrire des nouvelles semi-indépendantes (c’est-à-dire compréhensibles, mais pas vraiment autonomes) de leurs romans ne doit en effet pas être sous-estimée.

C’est sur ces mots de sagesse (?), ou en tout cas d’expérience, que se termine cette revue de ‘The Hammer & the Eagle’, ouvrage imparfait mais qui a tout pour devenir un incontournable de l’offre de la Black Library dans les mois et années à venir, et qui, j’en suis sûr, initiera bon nombre de lecteurs aux joies de la GW-Fiction.

ANATHEMAS [Recueil]

Jamais deux sans trois dit le proverbe, qui se trouve vérifié une fois encore par la sortie de ce troisième recueil de nouvelles de la gamme Warhammer Horror, faisant suite aux Maledictions et Invocations proférées quelques mois auparavant. Cette nouvelle publication démontre l’intérêt que la Black Library porte au segment horrifique, qui a bénéficié d’un suivi conséquent depuis le lancement de cette franchise l’année dernière. En ces temps de confinement où les distractions se font rares, un peu de lecture est la bienvenue, d’autant plus qu’il y a de fortes chances que les nouvelles contenues dans cette anthologie nous fassent relativiser notre situation. En matière de VDM, les Royaumes Mortels et le 41ème millénaire placent en effet la barre très haut, comme nous allons le voir plus loin.

Sommaire Anathemas (MIS)

Comportant 14 courts-formats, pour la plupart inédits à ce jour, Anathemas convoque quelques habitués de la gamme (Gray, Annandale, Werner, Strachan), qui signent avec ce volume une terrifiante passe de trois. D’autres figures connues (Hill, Hinks, Ozga) contribuent également à cet ouvrage collectif, mais, comme pour Maledictions et Invocations, l’attention du lecteur devrait se porter en premier lieu sur les nouveaux auteurs recrutés par la Black Library pour cette compilation, et en particulier sur les spécialistes du genre que sont Tim Waggoner et John Goodrich. Ce troisième volet s’affirmera-t-il comme le meilleur du lot? Nous n’allons pas tarder à le savoir, j’en ai bien peur.

Anathemas

.

Hab Fever Lockdown – J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE:

Arvid et Tarja, couple de prolos de la cité ruche de Panxir, vivent une vie relativement heureuse dans le futur dystopique du 41ème millénaire. Lui travaille comme mineur de détritus dans les sous-sols de la cité, elle fait les 35 heures (par jour) à l’usine. Ils crèchent dans un appartement presque neuf et pas trop moisi d’une nouvelle spire résidentielle, où les refoulements de canalisation ne sont pas encore quotidiens, et où l’ambiance entre voisins est bonne1. Bref, si on fait abstraction de leur oppression absolue par un système productiviste totalement inhumain, les choses vont plutôt bien pour notre couple. Malheureusement, cela ne va pas durer.

Rentrant du boulot après une rude journée de labeur à piocher dans les sacs poubelles et les cartons usagés, Arvid trouve Tarja alitée dans leur piaule, victime d’une morsure de rat bilieux. « Quelle gourde » pense notre héros, qui, gentleman, rassure toutefois sa chère et tendre sur l’issue heureuse de ce mal passager. Après tout, personne n’est jamais mort de ce genre de petit tracas. L’état de Tarja ne s’améliorant cependant pas pendant la nuit, Arvid résout d’aller chercher du désinfectant et de l’ibuprofène à la pharmacie du coin, même si cela va dangereusement grever le budget, extrêmement serré, du couple. Qu’importe, il fera une double rotation à la mine pendant quelques temps, et avec un peu de chance, tombera sur un objet de valeur qu’il pourra revendre sur le marché noir, comme une portière de Clio par exemple2. Malheureusement, cette course chevaleresque est tuée dans l’œuf par l’imposition par les autorités d’une quarantaine pour raisons sanitaires (si vous lisez cette chronique en Avril 2020, vous devez l’avoir mauvaise). En effet, des sujets porteurs d’une maladie infectieuse grave ont débarqués sur la planète il y a quelques jours, et contaminés la population locale malgré les mesures drastiques prises par le gouvernement3, comme la dépressurisation sauvage du spatioport affecté (20.000 morts tout de même). Devant la progression du virus, le confinement a été décrété, et les citoyens sommés de rejoindre leurs habitations dans les dix minutes, sous peine d’une amende de 135€ de mort. Simple, efficace.

Ayant réussi à regagner ses pénates en esquivant les balles, Arvid est néanmoins bien embêté. La fièvre de Tarja empire, et le frigo est déjà quasiment vide. Après un jour à piétiner dans son 8m2 sans fenêtre, il n’y tient plus et décide de sortir pour aller chercher un remède chez un revendeur de ses connaissances, deux étages plus haut. Si l’aller se passe sans problème, et que l’apothicaire/barman accepte de lui fournir de l’antiseptique sans rechigner, le retour est beaucoup plus compliqué. D’une, Arvid réalise avec horreur que son interlocuteur, ainsi que les clients du bar clandestin que ce dernier opère, ont tous attrapé la fameuse maladie dont les autorités font mention. De deux, il doit s’accrocher à une gouttière à 487 mètres au dessus du sol pour éviter de se faire repérer et abattre par une patrouille d’Enforcers faisant sa ronde dans le quartier. Lorsqu’il arrive enfin à bon port, il croit pouvoir profiter d’un peu de répit auprès de son aimée…

Début spoiler…Mais se rend compte rapidement que cette dernière n’est plus simplement fiévreuse, mais affamée, et qu’elle a des vues pas vraiment charitables sur son anatomie. You’ve lost that loving feeling, et tout ça. Ce rat bilieux devait avoir la rage. Un problème n’arrivant jamais seul, il réalise également qu’il a choppé la peste grise, ce qui devrait le condamner à plus ou moins court terme. Bien sûr, avant cela, il faudra qu’il survive aux attentions cannibales de Tarja, ce qui est loin d’être gagné. Il y a des jours comme ça…Fin spoiler

1 : La preuve, il y a toujours une bonne âme pour répandre du sable sur la chaussée pour éviter que les gens glissent. C’est ce genre de petits détails qui font le charme du quartier.
2 : 38 millénaires après l’arrêt de sa production, il s’agit toujours du modèle véhicule le plus volé dans l’Imperium. Une preuve indubitable de qualité.
3 : Pas assez sévèrement appliquées cependant, les nantis ayant pu se rendre dans leurs maisons de campagne avant que le confinement ne soit mis en place. Les leçons du lointain passé n’ont apparemment pas été retenues.

AVIS:

Petite nouvelle d’ambiance sympathique de la part de Justin D. Hill, qui parvient en quelques pages à brosser un tableau saisissant et désespéré de la vie dans une cité ruche… et ce avant même que l’horreur fasse son entrée dans son récit (ce qu’elle fait à travers le twist final de la nouvelle). Le lecteur ressort de Hab Fever Lockdown avec un rappel sans frais que, finalement, la vie « normale » des sujets de l’Imperium n’est guère éloignée d’un scénario de film d’horreur, particulièrement pour les masses laborieuses se tuant littéralement à la tâche dans les cauchemardesques cités-ruches du 41ème millénaire. Un job abrutissant et très dangereux, un proche qui tombe malade à la suite de la morsure d’un parasite, des forces de l’ordre qui imposent une quarantaine à coup de chevrotine, une maladie contagieuse et sans doute mortelle qui se répand de blocs en blocs… Pour nous, millenials fragiles, ce serait la descente dans la psychose assurée, alors que pour le stoïque Arvid, c’est simplement un jeudi1. Le style sans fioritures de Hill sert très bien son propos, et facilite l’entrée dans le quotidien sordide de nos héros, et si l’usage de la deuxième personne du singulier (déjà mis en œuvre par David Annandale dans The Hunt // La Traque) n’a ici pas de conséquences en termes d’intrigue, l’effet fonctionne efficacement et renforce encore l’impression du lecteur d’assister en direct à la scène. D’ailleurs, je vous conseille vivement de lire cette nouvelle pour vous en faire une idée, le résumé ci-dessus ne rendant pas vraiment justice à l’atmosphère que l’auteur parvient à insuffler à son récit. Bref, une soumission des plus solides de la part de Hill, qui démontre qu’il est aussi à l’aise avec les affaires civiles qu’avec les choses militaires (Cadia Tiendra, Cadian Honour…). Voire peut-être plus.

1 : Et je parie qu’après avoir réglé son problème conjugal, il est allé retourner bosser comme si de rien n’était à la levée du confinement. Ces factures d’eau ne vont pas se payer toutes seules !

.

Suffer the Vision – J. Ozga [AoS] :

INTRIGUE:

Dans les collines de Ghur, un chasseur de sorcières anonyme accompagné de trois mercenaires barbares locaux (Grar, No’Grok et Rhunkhal) tombe sur les restes mutilés de la bande de cultistes chaotiques qu’il traquait depuis quelques temps. Victimes d’une attaque d’ours ronchon, les proies de notre zélote masqué (il se balade avec un casque intégral imitant celui d’un Stormcast Eternal, en bon fanboy de Sigmar qu’il est1) ne sont plus en état de corrompre qui que soit, mais lorsque ce dernier détermine qu’un enfant les accompagnait, sans pouvoir trouver son cadavre dans le campement ravagé, sa conscience professionnelle le force à pousser les recherches jusqu’à un village tout proche. Arrivant dans un véritable havre de paix, dont les habitants vaquent paisiblement à leurs occupations sans crainte des déprédations des tribus chaotiques qui écument pourtant la région, nos pisteurs se persuadent rapidement que le tableau est bien trop idyllique pour ne pas dissimuler une vérité hideuse. Appliquant ce bon vieux principe de précaution persécution, le héros décide donc de réduire la paisible communauté en cendres. On n’est jamais trop prudent. Cette bonne résolution prise, il tombe en syncope, expérimente quelques visions fiévreuses, et revient finalement à lui au milieu d’une situation tendue.

Le moment de faiblesse de leur boss a en effet mis les mercenaires sur les dents (taillées en pointes), les menant à considérer la nourriture que leur avaient apporté les anciens du village comme empoisonnée. Ce possible malentendu (le héros ayant un passif de migraines débilitantes, qu’il considère comme la preuve que Sigmar s’intéresse à ses faits et gestes) a déclenché un affrontement en règle entre les locaux et les visiteurs, remportés de haute lutte par les seconds, mais au prix de la vie du fidèle Rhunkhal, abattu d’une flèche. Les villageois s’étant repliés dans les bois, le chasseur de sorcières a tout le temps de juger les trois anciens capturé par ses comparses. Et plutôt que de s’embêter à mener un interrogatoire serré des suspects (boring !), il préfère les paratonnerriser – c’est comme une crucifixion, sauf que les mains de la victime sont maintenues au-dessus de sa tête par un pieu métallique les traversant. Le principe est très simple : il suffit ensuite d’attendre qu’un orage se déclare, et qu’un éclair frappe la tige de métal. Si le foudroyé voit son âme confisquée par Sigmar, c’est qu’il était innocent. Sinon, il était coupable. Dans tous les cas, il est mort, mais on ne va pas s’arrêter à ce genre de petit détail, pas vrai ?

La nuit passe donc dans une ambiance électrique, les trois suppliciés étant tous reconnus coupables, l’un après l’autre, sans avoir cependant confessé grand-chose d’utile au Torquemada des Royaumes Mortels. Au moins, le spectacle est au rendez-vous car l’incendie qui s’étend depuis l’arbre où sont poinçonnés les suspects jusqu’aux maisons aux alentours produit des flammes de couleur pas vraiment réglementaires. Sans doute enragés de voir leurs aînés finir en marshmallow et leurs logis partir en fumée, les villageois font cependant une autre tentative pour chasser les intrus, sonnant méchamment notre héros et provoquant une commotion cérébrale sévère chez No’grok. Devant cette fronde et ces frondes, le vertueux trio décide de se replier dans la tour abandonnée qui se trouve à l’entrée du village, seul bâtiment en pierre et défendable aux alentours, grâce à la diversion procurée par la pétoire enchantée du héros. Le répit que lui et ses sbires trouvent à l’intérieur est toutefois de courte durée, les Primozoulinois en délire venant mettre le siège au refuge des vertueux défenseurs de la foi. Sans d’autres options à leur disposition, ces derniers en sont réduits à emprunter les escaliers menant vers les sous-sols, d’où le sorceleur masqué à cru entendre monter une voix d’enfant.

Laissant No’grok faire tampon dans une embrasure de couloir trop étroite pour sa carrure d’Ogor, Grar et son patron finissent par déboucher, après avoir parcouru des kilomètres de galeries, dans la tanière de l’ours responsable du massacre du début de la nouvelle. Tout est dans tout, et inversement2. Le plantigrade, aussi maussade que muté3, fait mauvais accueil aux intrus, blessant à mort Grar avant de tomber sous la balle (il ne lui restait plus qu’un tir) du héros. C’est alors que le récit, déjà assez obscur, atteint un nouveau niveau de cryptisme (certes assez poétique). Notre chasseur de sorcières découvre qu’une jeune fille – celle qu’il cherchait depuis le début de la nouvelle – cohabitait avec le monstre. Elle lui touche le front et son mal de crâne persistant disparaît miraculeusement. Après avoir réalisé que son père, qu’il tenait pour un saint homme, était un vrai salaud (il n’est jamais trop tard pour une petite thérapie), il décide de la prendre sous son aile, et les deux compagnons partent à travers un portail qui semble déboucher sur le Labyrinthe de Cristal de Tzeentch. The f*ck did I just read ? En tout cas, c’est sur cette image poético-tragico-nonsensique que se termine notre récit. Charge au lecteur de faire sens de tout ça.

1 : Son but dans la vie est d’ailleurs de devenir un Stormcast lui-même, en attirant le regard du Roi Dieu sur ses actions prosélytes et souvent meurtrières. Notice me Sigmar-senpai! 
2 : À ce stade, j’avais arrêté de me poser des questions, mais les principales sont listées dans le paragraphe ci-dessous, si vous le souhaitez.
3 : La description qu’Ozga en fait m’a rappelé la faune divine de ‘Princesse Mononoke’, influence que je n’ai pas retrouvé ailleurs dans la nouvelle.

AVIS:

Fidèle à son approche de la GW-Fiction, Jake Ozga livre à nouveau un récit envoûtant, mais loin d’être exempt de tous reproches d’un point de vue strictement narratif, ce qui affaiblit quelque peu ce Suffer the Vision. L’auteur convoque en effet plus d’éléments (potentiellement) importants pour l’intrigue qu’il ne se donne la peine d’en justifier la présence, laissant le lecteur combler les vides et les non-dits du scénario de la nouvelle. Quel est le rapport du narrateur avec ses parents et avec le chasseur de sorcières qui l’a recueilli (et qui semble être finalement un très sale type) ? Pourquoi ce dernier collectionnait-il les apprentis ? Cela a-t-il un lien avec les migraines sanglantes qui affligent le héros ? Et peut-il vraiment convoquer des orages pour rendre ses jugements (ou est-il l’esclave des bulletins météo pour faire son travail) ? Qui les habitants du village vénèrent-ils (il semble que cela soit Tzeentch, mais ce n’est confirmé nulle part) ? Sont-ils conscients/responsables de la création de l’ours-garou, qui semble les protéger du monde extérieur ? Quel usage font-ils des enfants qu’ils placent dans les souterrains ? La nouvelle se termine-t-elle sur le départ du héros et de son acolyte vers les Royaumes du Chaos (je l’interprète comme ça en tout cas) ? Bref, beaucoup de questions laissées sans réponses, ou de manière trop cryptique pour moi. C’est dommage car Ozga a vraiment du style, et que l’on suit avec plaisir les errements du chasseur de sorcières épileptique qui lui sert de héros. Mais si la forme est satisfaisante, il faudrait que le fond ne laisse pas trop à désirer non plus.

.

A Threnody for Kolchev – D. Hinks [40K] :

INTRIGUE:

Appelé à son chevet par le compositeur Johann Kolchev, interné d’office dans le sanatorium pour gens riches et puissants dont la famille n’a pas intérêt à ce qu’ils meurent trop vite du bon docteur Morfran, le musicien Varamis se rend sur place. Après quelques négociations avec le docteur en question, et une bonne heure de marche pour se rendre devant la cellule de son ancien mentor (pensez à installer des tapis roulants les gars !), il est – enfin – introduit en la présence du maestro. Ce dernier, sujet à une cure d’électrochocs sensés lui inculquer la crainte de l’Empereur, a été horriblement défiguré dans l’incendie de son domicile, événement ayant provoqué son internement. Tiré de son douloureux coma par Morfran, le compositeur déchu peut enfin délivrer son message à Varamis.

Il s’avère que Koko a très mal vécu la dernière représentation donnée par cet arriviste de Zelter au théâtre de Valgaast (wink wink), le génie manifeste de la composition de son jeune rival l’ayant douloureusement confronté à sa propre nullité (supposée). Pensez à Saliari découvrant Mozart dans le film de Milos Forman et vous aurez une bonne idée de la situation. Après s’être descendu trois fois de suite la spire de la soif – ce qui nécessite une certaine endurance – pour noyer son chagrin, Kolchev finit par atterrir dans la boutique d’un luthier minable, où il fait l’acquisition d’un dulcimer1 en argent à vil prix auprès d’un individu louche, après avoir été frappé par l’inspiration en jouant ‘Bali Balo’ sur l’instrument.

Rentré chez lui avec son précieux sous le bras, Kolchev passe les jours qui suivent à composer fiévreusement sur son dulcimer, persuadé d’avoir retrouver l’inspiration qui lui avait valu ses premiers lauriers. Satisfait de son œuvre, il finit par inviter Zelter à dîner pour lui jouer sa nouvelle création, à l’émerveillement non feint de son hôte. La joie de Kolchev à la suite de ce succès retombe cependant brutalement lorsque Zelter prend le micro les marteaux pour jouer à son tour un petit air, qui s’avère être bien supérieur à la ritournelle du vieux maître. Désespéré, ce dernier fait mine de jeter son dulcimer dans la cage d’escalier pour s’en débarrasser (les ravages de la jalousie), ce qui provoque la mort accidentelle de Zelter lorsqu’il tente de rattraper le précieux instrument au vol, et va s’écraser avec lui en contrebas. Au moins, le clavecin portatif n’a pas souffert de la chute.

Paniqué par la tournure tragique prise par les événements, Kolchev dissimule le cadavre dans une pièce secrète de son manoir, avant de recommencer à jouer sur l’instrument, pris d’une inspiration qu’il ne peut totalement expliquer. Ayant réalisé que le dulcimer avait mémorisé la composition de Zelter, il finit par suspecter que l’objet n’est pas ce qu’il semble être, mais se trouve dans l’incapacité de se soustraire à son emprise néfaste. Pire, comprenant que le dulcimer se nourrit du génie de qui en joue (et étant complètement à sec de ce côté depuis longtemps), il finit par inviter un autre compositeur reconnu, Demetrias, auquel il arrive également un fâcheux accident au moment du dessert.

Réalisant enfin qu’il se trouve sur une mauvaise pente, qu’aucune orchestration novatrice de Wonderwall ne pourra jamais justifier, Kolchev se résout à faire disparaître les corps et les cordes en y mettant le feu, mais s’y prend tellement mal qu’il finit lui-même en torche humaine, tandis que le dulcimer échappe au brasier grâce à ses pouvoirs démoniaques et ses propriétés ignifuges. Jugeant qu’il est de sa responsabilité que l’instrument maléfique soit détruit une fois pour toutes, Kolchev implore son ami d’aller finir le travail en se rendant à son domicile (ou plutôt celui de son père, Koko n’ayant toujours pas pris son indépendance malgré ses 60 ans bien tassés), ce que Varamis accepte…

Début spoiler…Bien évidemment, le pyromane virtuose faillira à sa mission, et commencera à jouer sur le dulcimer dans la cuisine du manoir, tombant à son tour sous la coupe de l’instrument. N’est pas Paul Simonon qui veut.Fin spoiler

1 : Ca ressemble à ça. Peut-être que Hinks a choisi cet instrument en raison de sa proximité avec ‘Lucifer’ ?

AVIS:

Hinks fait des débuts cultivés (pouce vert si toi aussi tu as dû googler « threnody » (thrène en français) pour savoir ce que ça voulait dire) et classiques dans la gamme Warhammer Horror avec cette nouvelle reprenant le thème bien connu de l’objet maléfique conférant à son possesseur des pouvoirs extraordinaires, mais au prix d’actes ou de conséquences maléfiques (La Patte de Singe, Le Veston Ensorcelé). En choisissant de décliner cette intrigue dans le registre musical, peu commun pour Warhammer 40.0001, Hinks donne à son propos un exotisme certain, et, même si la chute de la nouvelle ne surprendra pas grand monde, on doit tout de même reconnaître à l’auteur une soumission propre et nette, à défaut d’être originale et véritablement angoissante.

1 : On se souviendra de ‘The Carrion Anthem’ de David Annandale, qui a également exploré le sujet (et les dangers) de l’orchestration dans les ténèbres amusiques et amusées du futur lointain.

.

These Hands, These Wings – L. Gray [AoS] :

INTRIGUE:

Si vivre dans un donjon n’est pas facile quand on est une fille de onze ans qui a la pneumonie, vivre dans une ferme de Shyish quand on est un garçon de treize ans, orphelin de père et de mère et recueilli par un oncle sociopathe et alcoolique, n’est pas non plus aisé. Frappé par ce sort peu enviable, notre héros, Myles, essaie tant bien que mal de s’adapter à la dureté de son nouveau quotidien, entre brimades incessantes de la part de son tonton Ourii et conséquences, variant du morose au mortel, du dernier nécroséisme provoqué par ce fripon de Nagash.

Victime des conditions climatiques détestables des derniers mois et d’une pénurie de main d’œuvre inquiétante, Ourii envoie un beau violet matin son neveu faire mission d’épouvantail1 dans son champ de maïs, afin d’en éloigner les corbeaux qui picorent les maigres récoltes en devenir, les pièges installés aux alentours ne s’étant pas révélé très efficaces. Myles, qui de son propre aveu est encore un grand bébé, accepte la mission plus par peur de sévices corporels que par gaieté de cœur, et se découvre une certaine sympathie pour la gent emplumée, dont la solidarité collective contraste douloureusement avec sa situation de paria. Ayant passé la journée à observer et baptiser les membres de la volée de corbeaux contre laquelle Ourii l’avait envoyé, il finit même par partager avec eux son maigre déjeuner. Revenu à la ferme le soir venu, et dans l’attente que son oncle lui apporte les restes de son dîner, comme il en a l’habitude, Myles se perche sur une branche et se met à rêver de devenir Corax. Mal lui en prend car lorsqu’Ourii finit par sortir lui donner royalement la carcasse de poularde rôtie qu’il a englouti pour son souper, l’attitude proprement volage de l’adolescent lui vaut une bonne raclée, tellement sévèrement appliquée que Myles en perd une dent (qu’il garde toutefois contre son oncle).

Levé avant l’aube le lendemain pour aller retrouver ceux qu’il considère comme étant ses nouveaux amis (les drames de l’enfance malheureuse), Myles brave un brouillard de mauvais augure pour aller rejoindre son poste, et a la douleur de découvrir que le Vieux Borgne, patriarche protecteur de la volée, s’est pris l’aile dans un collet, et gît en piteux état à proximité du champ. Déterminé à intervenir, notre héros décide qu’un bon petit-déjeuner réglera sans doute le problème et va cueillir un épi pour nourrir l’oiseau blessé. Malheureusement, les rejets non contrôlés de magie nécromantique par la Nagash Corp. ont eu un effet délétère sur les cultures alentours, et au lieu de grains de maïs, ce sont des dents qui garnissent la rafle2. Cela ne décourage cependant pas le Vieux Borgne de déjeuner sur le pouce, ou la serre dans son cas, en béquetant l’intérieur de la tige qui lui est proposée, et se révèle être convenablement protéinée. Les vegans en rêvaient, Nagash l’a fait : de la viande végétale. Ça mérite un prix Nobel.

Collation et découverte sont cependant interrompues par l’arrivée impromptue d’Ourii et de sa fidèle pelle, qui scellent le sort du pauvre corbeau estropié, à la grande horreur de Myles. Guère touché par le souci que son oncle semblait se faire pour lui, l’ado rebelle attaque au contraire son tuteur après que ce dernier ait fracassé le crâne de l’oiseau. L’histoire se serait mal terminée pour notre héros, auquel le sanguin Ourii n’aurait pas hésité à rouler une pelle pour lui apprendre la vie, sans l’intervention du reste de la volée de corbeaux, qui fond sur le paysan furibard et commence à lui prélever des échantillons de tissus mous (mouchoirs, cravate, oreille et œil). Myles profite de cette distraction salutaire pour récupérer la bêche qu’Ourii a laissé bêtement tomber pour terminer proprement le travail, réduisant son oncle en engrais biodégradé en quelques minutes. Voilà qui devrait améliorer les rendements. Ceci fait, il ne reste plus à notre apprenti Raven Guard qu’à suivre sa famille d’adoption en battant des bras et en croassant à plein gorge, signe manifeste d’un équilibre mental parfaitement préservé. Comme quoi, les Anglais ne se sont pas trompé en appelant un rassemblement de corbeaux murder

1 : Les véritables épouvantails ayant une fâcheuse tendance à s’animer et à attaquer leurs propriétaires dans le merveilleux royaume de Shyish (particulièrement à proximité de Murghast, que Gray n’oublie pas de citer au détour d’un paragraphe), Ourii a pris la sage et luddiste décision de remplacer la machine, ou en tout cas l’artefact, par de la main d’œuvre.
2 : Un mal pour un bien vraiment. Ourii n’a plus qu’à devenir prothésiste dentaire, ou producteur d’ivoire, deux activités sans doute plus rentables que le maraîchage.  

AVIS:

Gray signe à nouveau une très satisfaisante nouvelle horrifique, se concentrant cette fois-ci sur l’atmosphère de sa pièce plutôt que sur son intrigue (comprendre que, contrairement à He Feasts Forever, le récit se termine sans grande surprise ou révélation pour le lecteur). À rapprocher de La Petite Marchande d’Allumettes d’Andersen, conte tragique avec lequel These Hands, These Wings (encore un titre d’une classe folle à mettre au crédit de Gray !) partage son schéma narratif : un héros innocent et en grande difficulté, et qui sera condamné plutôt que sauvé par les rares événements positifs se produisant au cours de l’histoire. Oui, cette nouvelle tire un peu sur la corde du pathos, mais une fois de temps en temps, on ne va pas s’en plaindre. Comme c’est le cas avec les nouvelles d’ambiance de la gamme Warhammer Horror, je ne peux que vous recommander de lire These Hands, These Wings (en espérant que la BL traduise le recueil un de ces jours/mois/années), auquel cette critique humoristico-factuelleTM ne fait pas honneur. Pas étonnant que les éditeurs d’Anathemas ait choisi de baser l’illustration de couverture de l’anthologie sur cette nouvelle, qui se révèle être l’une des plus abouties du lot.

.

Vox Daemonicus – J. Forster [40K] :

INTRIGUE:

Exerçant la noble et utile profession de boucher (ou groxier, 41ème millénaire oblige) sur un monde ruche, Josun rentre du travail avec son jeune fils Markus lorsque le système sono que l’Ecclésiarchie a installé dans les rues se fait soudainement hacker, provoquant la surprise des passants. Après quelques secondes du concerto d’épée tronçonneuse en si bémol, une voix sinistre salue les seigneurs de la nuit (Ave Dominus Nox) avant d’annoncer aux citoyens bouche-bée qu’ils arrivent. L’identité de ces « ils » n’apparaissant pas clairement à nos braves civils – tout le monde n’a pas la chance d’avoir accès à la Black Library – ces derniers décident sagement de déclencher une émeute pour retourner à leur domicile dans une fuite éperdue. Choisissant dans un premier temps de se planquer dans leur échoppe le temps que les choses se calment, et ayant échappé à une arrestation sommaire de la part d’un duo d’Enforcers1, s’étant miraculeusement trouvé des priorités plus pressantes que le coffrage de deux quidams coopératifs, comme aller au secours d’un collègue pris en embuscade par une bande de black blocks vindicatifs, père et fils laissent ainsi passer quelques jours, avant que le manque d’eau et de nourriture2 ne les contraigne à reprendre la route de leur appartement.

Malgré le soin pris par Josun pour éviter les mauvaises rencontres, nos deux héros se retrouvent pris malgré eux dans une opération de maintien de l’ordre brutalement exécutée par une patrouille d’Enforcers, qui n’hésitent pas à abattre les civils prisonniers d’une bande d’affreux casseurs après avoir réglé leur compte à ces derniers. Motif : l’Inquisition ne veut pas prendre de risque avec les auditeurs du Vox Daemonicus (le podcast pirate des Night Lords), dont la simple écoute peut suffire à corrompre même l’âme la plus vertueuse (un peu comme Despacito). Sans autre option que la légitime défense, Josun et Markus parviennent à se débarrasser des apprentis Judges Dredd, permettant au père de récupérer l’uniforme de l’un des officiers pour faciliter leur progression dans l’enfer urbain qu’est devenu la cité-ruche. Enfin arrivés devant leur tour d’immeuble, le duo doit encore négocier un trio de cambrioleurs occupés à fouiller leur F3, avec l’aide providentielle d’une Enforcer démissionnaire du nom d’Yronne Lam (celle-là même qui avait tenté de les arrêter quelques jours plus tôt). Les charognards refroidis, Josun, Markus et Yronne prennent le chemin de la Cathédrale de l’Aube, où la Chanoinesse Haunild organise une journée porte-ouverte au bénéfice des nombreux nécessiteux touchés par cette crise. Prévoyant un afflux d’indigents supérieur aux stocks constitués par les bonnes sœurs, Haunild a toutefois précisé dans son faire part radiophonique que l’offre ne s’adressait qu’aux familles avec enfant, ce que Markus est (à son grand agacement) encore…

Début spoiler…Introduits dans le saint lieu par une bande de vigiles patibulaires, les trois rescapés ne mettent pas longtemps avant de se rendre compte que l’église est un charnier, les corps suppliciés des membres de l’Ordre décorant les murs et les plafonds comme autant de guirlandes sanguinolentes. Avant qu’ils n’aient pu faire demi-tour, un Night Lord débarque depuis le confessionnal et met Josun et Yronne en PLS, avant d’entraîner Markus avec lui. Instruit par la speakerine chaotique ayant enregistré les messages en lieu et place de Haunild, afin d’enjoindre les locaux à amener leurs bambins dans la cathédrale, que son fils allait devenir un aspirant Astartes, Josun supplie la Denise Fabre du Maelstrom de le laisser accompagner Markus, ou au moins de le voir partir de la planète. Denise s’en foutant comme de l’an 40.000, notre héros, éborgné et édenté par le jab ravageur du colosse en céramite, se traîne donc jusqu’à l’extérieur du bâtiment, juste à temps pour voir le Thunderhawk emportant Markus disparaître dans le ciel. Quant au fameux Vox Daemonicus responsable du massacre préventif organisé par l’Inquisition, il ne s’agissait que d’un jingle un peu travaillé de la part des Night Lords pour mettre les saints Ordos sur les dents. Quelle bande de farceurs.Fin spoiler

1 : Au motif du non-respect de la « quarantaine intellectuelle », entre autres crimes haineux. C’est 25 ans de colonie pénitentiaire minimum, ça.
2 : Apparemment, on ne peut pas faire de tartare de grox, sinon ils auraient pu attendre M42 peinards.

AVIS:

Les débuts de James Forster dans la GW-Fiction ne sont malheureusement pas à marquer d’une pierre, ou plume, blanche. Bien que son idée de départ (les méthodes de recrutement particulières des Night Lords) soit intéressante1, sa mise en œuvre pêche sur plusieurs points, faisant de Vox Daemonicus une lecture dispensable. Premièrement, le duo de personnages principaux ne m’est pas apparu comme particulièrement attachant, ce qui est rédhibitoire pour le genre horrifique, où une certaine empathie doit être ressentie envers le héros.  Deuxièmement, la préparation de la conclusion de l’histoire est réalisée de façon assez grossière, la petite dédicace balancée par les Night Lords en début de nouvelle éventant une grande partie du suspens, et l’absence de participation active de ces maîtres de la guerre psychologique apparaissant comme une occasion manquée dans une histoire Warhammer Horror. Troisièmement, les péripéties occupant Josun et Markus entre le déclenchement de l’émeute et leur arrivée au couvent, si elles ont chacune leur utilité pour l’intrigue, m’ont semblé s’enchainer avec une certaine indolence, ce qui ne contribue pas à faire monter la pression pour le lecteur. Au final, Vox Daemonicus se termine sans avoir vraiment mis ce dernier mal à l’aise (en tout cas en ce qui me concerne), ce qui est dommage au vu du passif des forces en présence.

1 : À défaut d’être totalement originale, Peter Fehervari l’ayant déjà exploité dans son ‘Nightfall’ (‘Heroes of the Space Marines’).

.

Skin Man – T. Waggoner [40K] :

INTRIGUE:

La fraîche et accorte Marceline (oui, Marceline) se fait un sang d’encre pour son époux Cole, qui a déserté le logis depuis maintenant 6 jours, la laissant, elle et les deux jeunes enfants du couple, dans une situation précaire. Cole est en effet archéologue/ferrailleur/récupérateur de stuff dans la cité de Lowtown, et son métier le pousse à explorer les quartiers en ruines de la ville à la recherche d’objets de valeur qu’il pourra ensuite revendre sur le marché local. La planète sur laquelle Lowtown est située ayant été construite avec des cloisons (sur le Warp) très fines, l’occupation est des plus périlleuses, car une bonne partie de la cité est hantée par des entités démoniaques aux oreilles sensibles et au caractère grincheux. Cole ne s’étant jamais absenté plus de trois jours consécutifs dans ses virées de chinage, Marceline décide d’aller rendre une visite à l’acquéreur habituel – Darrick – des trouvailles de son époux à la Croisée des Chemins, le Carrefour de la communauté.

Sur place, elle ne reçoit malheureusement pas de nouvelles fraîches sur les faits et geste de son homme, mais seulement une proposition de mise en ménage brutalement honnête de la part du grossier grossiste, dont la réputation de tout régler cash n’est pas galvaudée. Cette situation gênante est toutefois interrompue par l’arrivée de la vieille folle du cru, qui met Marceline sur la piste de Cole. Ce dernier aurait en effet confié à la bigote édentée qu’il ne pouvait pas prendre deux minutes pour discuter de son seigneur et sauveur l’Empereur de l’Humanité1, car il avait une course à faire sur la Black Lane, soit littéralement l’endroit le plus mal famé et dangereux de tout Lowtown, où rôde notamment l’infâme Skin Man… Il en faut cependant plus pour décourager notre héroïne, qui décide d’aller tirer son mari du mauvais pas dans lequel il s’est très probablement fourré.

Une fois engagée sur la funeste rue, qui suinte tellement le vice que même le macadam en est tout chose, il ne faut pas longtemps pour que Marceline fasse une mauvaise rencontre, en l’occurrence une bande de petites goules faméliques, bien décidées à ne pas sauter leur quatre heures, comme elles ont dû le faire les 28 millénaires précédents. Au terme d’un sprint parfaitement négocié, elle parvient toutefois à les semer en se précipitant à l’intérieur d’une bâtisse décrépite, où est entreposé du matériel médical à la propreté douteuse. Et pour cause, elle vient d’entrer dans l’officine du Skin Man, qui, après l’avoir complimenté sur son chrono et son finish, s’approche doucement pour discuter affaire. À l’origine médecin militaire2 dans le conflit local ayant opposé l’Imperium au Chaos, il fut corrompu par les Puissances des Ténèbres pour devenir une créature démoniaque, combattant sa gangrène tenace en remplaçant les parties défectueuses de son organisme avec celles des malheureux lui tombant sous la main. Malheureusement pour Cole, sa séance de lèche vitrine sur Black Lane le mit nez à nez avec le Skin Man… qui lui en préleva un bout (c’est d’ailleurs comme ça que cette physionomiste de Marceline comprend ce qu’il est arrivé à son époux), ainsi qu’un œil, la lèvre supérieure, et peut-être la pommette gauche. Bref, Cole a été dispersé façon puzzle et ses bits mis à profit par l’ancienne entité, qui se montre toutefois ouverte à un marché : remettre le malheureux sur pied en échange d’une juste compensation, bien sûr.

Prête à tout pour voir revenir son épars époux, Marceline accepte le deal, et donne la main (gauche) à pépé patchwork, qui s’empresse de la lui arracher (les scies, c’est pour les lopettes) afin de remplacer son propre appendice, arrivé en bout de course. Une cautérisation au prométhéum plus tard, il n’y paraît presque plus rien. Se réveillant quelques minutes plus tard à la sortie de la Black Lane, Marceline doit maintenant ramener au Skin Man les composants nécessaires à la restitution des éléments constitutifs de Cole, ce qui revient à trouver une nouvelle victime au dépiauteur de Lowtown…

Début spoiler 1…Fort heureusement, c’est le moment que choisit Darrick pour venir s’enquérir de la santé de son love body interest, qu’il avait suivi de loin jusqu’à ce qu’elle s’aventure sur la Black Lane (il a la dalle, mais pas à ce point). Déjà dégoûtée par la muflerie du personnage, Marceline ne tarde pas à découvrir que ce dernier, en plus d’être lâche, a également monté la tête de Cole pour qu’il parte dans sa dernière mission impossible, afin d’avoir le champ libre pour courtiser sa veuve. Et par-dessus le marché, il tente de la violer quand elle a le culot de le mettre en face de ses responsabilités. C’est donc sans le moindre scrupule que Marceline règle son compte à ce malfaisant d’un coup de surin bien placé, avant de ramener le cadavre encore chaud à son client. Le Skin Man, bien que regrettant amèrement que le sang de Darrick ait été gaspillé (il comptait peut-être faire du boudin), accepte de tenir sa parole, et promet à la manchote que son mari reviendra au foyer dès le lendemain…

Début spoiler 2…Et c’est bien ce qui se passe, mais c’est un Cole avec la tête d’un Pinhead épilé et l’air éteint d’un mérou échoué qui rentre au domicile familial. Non pas qu’il s’en soit jeté un petit au club sadomasochiste local avant de se présenter au logis, mais plutôt que Skin Man ne s’est pas foulé pour remettre son généreux mécène en état. Après tout, comme il le fait remarquer à Marceline avant de rompre contact, elle lui a donné un cadavre, il lui rend la pareille. C’est honnête. Plutôt que de se formaliser outre mesure de l’état pitoyable dans lequel se trouve son mari, notre madone des temps futurs décide donc de faire contre mauvaise fortune bon cœur, et termine de préparer le petit déjeuner pour toute la famille pendant que son zombie domestique serre ses chers enfants dans ses bras. Ah, les miracles de l’amour…Fin spoiler

1 : Si vous vous étonnez du manque de considération que les Lowtowniens ont pour la chose religieuse, sachez qu’ils ont une bonne raison pour cela. Leurs ancêtres sont les colons malheureux laissés sur place par l’Imperium après que les démons de la planète se soient faits botter les fesses… malheureusement pas de façon définitive. Le syndic s’est montré injoignable depuis, Malcador ayant laissé un faux numéro.
2 : Médecin d’un genre un peu particulier, puisque chargé de rafistoler les blessés en prélevant des organes aux vivants (et non aux morts).

AVIS:

Très bons débuts de Tim Waggoner dans la GW-Fiction avec ce positivement malaisant Skin Man, qui permet à cet auteur établi de donner sa vision des (forcément) difficiles relations qu’entretiennent les habitants du Materium et de l’Immaterium. Il est plaisant de lire un récit d’horreur écrit par un spécialiste du genre, qui arrive en quelques lignes à instiller une atmosphère lourde et tendue à son histoire (mention spéciale à l’arrivée de Marceline dans la Black Lane, que j’ai trouvée vraiment bien mise en scène), en suggérant plus qu’en ne décrivant les périls guettant l’héroïne. Une autre bonne trouvaille de Waggoner aura été de faire du Skin Man, non pas une abomination décérébrée écumante de rage, mais un personnage, certes intrinsèquement dangereux et maléfique, doué de parole et de raison, avec lequel il est possible de marchander. La conclusion macabre de la nouvelle est également très bien trouvée, en ce qu’elle permet de remettre en question l’interprétation du lecteur de l’horreur de la situation de Marceline et de sa famille : au fond, ce n’est pas la mutilation qu’elle a subie, ou le retour de son mari sous forme de zombie qui est le plus terrible, mais sa décision de faire comme si tout cela était normal. Les enfants du couple en seront quitte pour des années de thérapie, s’ils survivent jusqu’à l’âge adulte, s’entend. Efficace, maîtrisé et bien intégré dans le lore de 40K (plus que les soumissions des autres auteurs spécialisés sollicités par la BL pour Warhammer Horror en tout cas), Skin Man mérite le détour et la lecture pour tous les amateurs de récits dérangeants.

.

A Deep and Steady Tread – D. Annandale [AoS] :

INTRIGUE:

C’est jour d’exécution publique à Everyth, ville de Ghyran où la vie ne gagne donc pas toujours à la fin. La liesse populaire, bien compréhensible, n’est cependant pas partagée par Velaya et Beretice Navaan, respectivement fille et femme de la victime de l’assassin qui répondra de ses crimes aujourd’hui. Le meurtre du brave Mr Navaan, retrouvé en train de barboter dans un caniveau quelques jours plus tôt, leur pèse en effet lourdement, bien que la veuve semble moins affectée que l’orpheline par cet odieux forfait. Coupable avoué de ce dernier, Jerek Holforn, scion d’une autre puissante famille de la ville avec laquelle les Navaan sont en bisbille depuis des temps immémoriaux, est amené au bloc par nul autre que Krentz Navaan, fils du défunt et bourreau de circonstance, après avoir servi de tortionnaire pour extorquer au scélérat ses aveux circonstanciés. Après tout, l’adage dit bien que quand on veut que les choses soient bien faites…

Sanglé dans une bride porcine l’empêchant de prêcher son innocence de façon intelligible, le malheureux Jerek finit la journée raccourci d’une bonne tête, après que Krentz ait accompli son sanglant office – il lui aura fallu deux tentatives tout de même, preuve que la décollation est un art délicat –. Plus sensible que sa parentèle, Velaya a bien du mal à se réjouir que justice ait été rendue, quand bien même le maire d’Everyth a promis à sa mère à la fin de la cérémonie de poursuivre les investigations portant sur le reste des Holforn. Une des clauses du jugement rendu dans cette affaire condamnant en outre les Holforn à céder leur manoir à la partie lésée, Velaya a toutefois l’occasion de se changer les idées en accompagnant son frère à la remise des clés, prévue le lendemain de l’exécution. Surprise : l’état des lieux révèle que les précédents propriétaires se sont tous entre-tués, servants compris, ce qui n’a pas l’air de toucher ni surprendre beaucoup l’impitoyable et imperturbable Krentz. Sa sœur se sentant indisposée par l’odeur de charnier se dégageant de la bâtisse, et prétendant de plus entendre des chuchotements de mauvais augure en provenance de la cave à vin, notre homme à tout faire accepte galamment de prendre en charge seul le nettoyage des locaux, prouvant ainsi qu’il est tout à fait bon à marier.

De retour dans le manoir familial, où l’attend la froide Beretice, Velaya attend une journée entière le retour de son frère, en vain. Inquiète par cette absence prolongée – Krentz est d’habitude le prince de la serpillière, il faut croire – elle finit par retourner chez les Horlorn, malgré le conseil appuyé du maire d’Everyth de ne rien en faire…

Début spoiler 1…Sur place, il est vrai que l’atmosphère ne s’est guère améliorée, malgré l’enlèvement des cadavres. De retour dans la cave bavarde après une visite non concluante du reste de la bâtisse, Velaya finit par trouver l’anneau d’argent de son frère, taché de sang, sous un tonneau de gros rouge. C’est à ce moment que quelque chose commence à faire des claquettes au premier étage de la baraque, provoquant la fuite éperdue de la jouvencelle.

Sa confrontation avec sa mère à propos de la disparition inquiétante de Krentz, si elle ne permet pas de lever ce mystère, jette cependant un nouvel éclairage sur les derniers événements. Il s’avère que Beretice et Krentz ont organisé le meurtre de leur mari et père pour pouvoir faire porter le chapeau (et le masque de cochon) à Jerek Holforn, et pouvoir se débarrasser du reste de la smala sans éveiller les soupçons dans la foulée. Ne jamais sous-estimer la ténacité de la rancune de vos voisins. Horrifiée par cette révélation, Velaya va s’enfermer dans sa chambre, et voit bientôt approcher la silhouette de son tueur de frère, transformé par la grâce de Nagash en Lord Executioner, entouré des crânes volants de ses innocentes victimes. Paralysée par la peur, elle ne peut que suivre de loin les ravages provoqués par le (doublement) revenant, qu’elle espère – égoïstement – se terminer avec la mort de sa mère. Après tout, elle n’a rien à voir dans toute cette combine, pas vrai ? Aussi, lorsqu’elle entend le pas pesant et posey du spectre1 monter jusqu’à elle, elle hurle de toutes ses forces « parle à ma main porte », ce qui, miracle !, stoppe le spectre…

Début spoiler 2…Jusqu’à ce qu’elle commette l’erreur de passer une tête en dehors de sa chambre après quelques minutes de silence. Krentz attendait poliment qu’elle lui ouvre, sans doute pour ne pas avoir à fracasser la porte. La nouvelle se termine sur le final cut du Lord Executioner, ayant enfin remis les pendules à l’heure entre Navaan et Holforn. Merci qui ? Merci Naggie !  Fin spoiler

1 : D’ailleurs, ce n’est pas très logique : les Nighthaunts sont tous des culs de jatte. J’imagine que Krentz frappe deux crânes l’un sur l’autre pour faire le bruitage, Monty Python style.

AVIS:

Le retour d’Annandale à Everyth (la ville où se déroulait La Traque, autre nouvelle Warhammer Horror signée de sa main) se passe malheureusement de façon mitigée. Plus classique dans sa construction, cette histoire de vendetta entre deux familles nobles manque de suspens, l’implication des Navaan dans la déchéance et l’anéantissement des Holforn ne faisant guère de doutes après quelques pages parcourues. Dès lors, la vengeance d’outre-tombe des innocents assassinés tient plus de la chronique factuelle, matinée de mise en avant commerciale1, que du récit d’angoisse, et le « pas lent et régulier » de justice divine se mue en pénible traînement des pieds2. Comme quoi, il ne suffit pas de convoquer l’esprit et la substance des morts sans repos pour accoucher d’une nouvelle d’horreur réussie.

1 : Sentiment particulièrement renforcé lorsque Annandale fait le choix d’identifier Krentz comme Lord Executioner (une entrée spécifique de l’armée Nighthaunt), ce qui fait basculer la nouvelle dans la publicité romancée plus que dans l’histoire d’horreur.
2 : Mention spéciale à Krentz qui attend poliment une heure devant la chambre de sa sœur qu’elle sorte, au lieu de se frayer un chemin à la hache comme il l’a fait précédemment… Quel farceur !

.

The Thing in the Woods – P. Kearney [40K] :

INTRIGUE:

Sur Carcanis, planète sauvage recouverte d’impénétrables forêts, la missionnaire Dynah, dernière survivante du groupe d’évangélistes envoyés par l’Ecclésiarchie apprendre les bonnes mœurs et le respect de Pépé aux farouches tribus locales, a depuis longtemps passé l’âge d’aller crapahuter par monts et par vaux. Retirée dans l’aptemment nommée Retraite dans laquelle sa congrégation s’était établie il y a des décennies, elle passe ses journées en prières, dégustation de thé (très important) préparé par sa dévouée servante Bruni – Carlos de son prénom – et menus travaux de calligraphie. Ayant été témoin de l’avènement, long, complexe et meurtrier, du culte impérial sur Carcanis, elle se remémore souvent l’existence de ses camarades de culte, dont peu d’entre eux ont eu la chance de mourir dans leur lit. La faute à l’animisme fondamentaliste qui constituait la religion dominante au moment où les prosélytes sont arrivés sur la planète, et le très mauvais œil avec lequel ses fidèles ont vu, non pas les efforts déployés par les nouveaux-venus pour les rallier à leur cause, mais bien le défrichage du terrain autour de Retraite. Car sur Carcanis, couper un arbre, c’est vraiment mal élevé1. Le premier qui en fit les frais fut d’ailleurs le jovial frère Gunnor, écorché vif (mais avec le sourire) par les khmers verts après un fâcheux malentendu ayant impliqué sa hache et un bosquet de feuillus.

Cependant, à force de persévérance, de sermons enflammés, et, parce que la même  la meilleure volonté de la galaxie a ses limites, de quelques massacres d’indécrottables païens, le culte végétal des indigènes fut souplement supplanté par la seule vraie foi, celle de l’Empereur. C’est la satisfaction que tire Dynah de son service de longue durée sur la planète, elle qui se trouve à présent reléguée au second plan par les seigneurs locaux, mais accepte tout de même de lire gentiment le courrier aux chefs de tribus locaux, tous complètement illettrés. Elle reçoit ainsi la visite du Hastman Trivos des Trevassi, venu avec trois enveloppes dans sa besace. Évacuées les factures et offres de marabouts, la nouvelle tombe : les margoulins de la tribu Gurun de Yar Godoris sont sur le pied de guerre, et il revient à Trivos de les bouter au-delà de la rivière Timari. Devant l’acceptation un peu trop enthousiaste de cette mission de pacification par son interlocuteur, qu’elle ne peut de toutes façons pas blairer, Dynah décide de rédiger un courrier de dénonciation au castellan d’Ab Suren, afin qu’il vienne mettre au pas le louche Trivos. Trop vieille pour aller porter elle-même la missive à qui de droit, l’aïeule charge sa brave Bruni de cette tâche, séparation douloureuse, et pas uniquement parce que Dynah n’aura plus personne pour lui préparer sa tisane le matin…

Début spoiler…Lorsque la nuit tombe sur Retraite, la désormais solitaire Dynah décide d’aller prendre l’air sur les remparts de son domicile (c’est classe tout de même), où elle entend résonner des tambours dans les profondeurs de la forêt. De très mauvais augure, car le culte de Pépé était censé avoir aboli cette pratique déplorable2 il y a des décennies de cela. Voyant une torche clignoter à l’orée des bois, Dydy comprend qu’on l’appelle et se met en route après s’être équipée de ses fidèles épée et pistolet laser. Arrivée devant le flambeau, elle a la douleur de voir qu’il signale un pieu sur lequel est fiché la tête de la pauvre Bruni. Le coupable ne met pas longtemps à se dénoncer, Trivos, déguisé en caribou, sortant du sous-bois pour revendiquer le crime. Dynah n’a pas le loisir de corriger le félon qu’elle est saisie par les suivants de ce dernier, qui a rejeté le culte impérial pour retourner aux us traditionnels de Carcanis, et emmenée manu militari jusqu’au cœur de la forêt primaire.

Face à un arbre proprement colossal, et en pleine zone nudiste (tout le monde s’est foutu à poil), la malheureuse missionnaire en pré-retraite est sommée par Trivos de pénétrer dans la caverne naturelle creusée dans le tronc du bonzaï géant. C’est là le temple et l’antre du Seigneur des Arbres, dieu endormi depuis des lustres mais finalement de nouveau réveillé. Alors qu’elle avance vers son destin, Dynah voit deux yeux rouges s’allumer dans les ténèbres de la caverne… Blaireau sorti d’hibernation ? I think not. Bref, vivement que Gaunt et ses Fantômes viennent s’installer : cette planète forestière est vraiment mal tenue.Fin spoiler

1 : Ce qui explique pourquoi la population de castors locaux est proche de zéro.
2 : Comme toutes les personnes âgées, l’Empereur supporte mal que l’on fasse le zouave devant ses fenêtres à des heures indues. Si vous n’arrêtez pas, il n’hésitera pas à envoyer les Custodiens.

AVIS:

Retour gagnant de Paul Kearney avec cette nouvelle bien construite et bien écrite, qui illustre parfaitement l’axiome bien connu de tous les amateurs d’horreur : ce qui fait le plus peur, c’est l’avant. En terminant son récit au moment où notre pauvre mémé commence à entrevoir sa Némésis, l’auteur laisse toute latitude à l’imagination de son public pour se représenter ce mystérieux dieu des arbres aux commandements si sanglants. Avant cela, Kearney avait réussi à entraîner le lecteur dans son histoire en dépeignant la situation de Dynah et de Carcanis de façon réaliste et prenante, ce qui lui permet en outre de mettre en avant la dureté de la fonction de missionnaire au sein de l’Imperium. Accepter de passer sa vie à convertir des foules pas forcément très jouasses à la vérité impériale, et se dans le meilleur des cas isolé sans espoir de secours sur des planètes de troisième ordre, voila qui nécessite un caractère bien trempé et une vie intérieure riche.

Au-delà des considérations d’ordre géo-politiques et des échanges doux-amers entre Dynah et sa bonniche, qui forment le gros de la première partie de la nouvelle, Kearney prend bien soin d’insérer des passages violents et crus (le triste destin de Gunnor, suivi de celui de Bruni), narrés de façon concise et percutante, pour une efficacité maximale. C’est là aussi une preuve de savoir-faire de la part de l’auteur que d’user de son « crédit gore » avec parcimonie, quand certains de ses collègues ne se gênent pas pour en tartiner leurs pages. Les tortures et mises à mort graphiques sont tellement fréquentes dans la GW-Fiction que le lecteur vétéran aura sans doute développé une résistance à ces dernières : croyez-moi, Kearney réussit bien à rappeler qu’il s’agit de pratiques barbares et choquantes, un exemple sanglant à la fois. Bref, The Thing in the Woods démontre de façon admirable qu’une bande de rednecks pagans peut être tout aussi flippante qu’une incursion démoniaque ou une invasion tyranide. Cette bonne vieille chaleur humaine…

.

Mud and Mist – J. Goodrich [40K] :

INTRIGUE:

Sur la planète boueuse de Forlorn Hope, le 33ème Hephaestus tient ses tranchées (boueuses aussi) contre la menace tyranide. Éprouvés par les assauts, pas incessants mais réguliers (15 en trois mois), des hordes chitineuses, les Gardes passent le temps comme ils peuvent dans l’attente de la prochaine attaque. Pour nos héros, les servants de lance-flamme lourd Constantine Panas et Dimitri Hiondros, cela revient à respectivement faire la liste des choses et gens qu’il déteste, et faire des blagues de mauvais goût, comme gueuler ‘Ils arrivent !!!’ alors qu’il ne s’est rien passé. Nos deux bidasses se retrouvent toutefois unies dans la crainte et la détestation commune du sadique Commissaire Heston1, toujours à la recherche d’une nouvelle victime à exécuter pour faillite morale. Dimitri s’étant racheté de sa bourde initiale en ne rapportant pas la saute d’humeur – compréhensible – à l’officier, l’ambiance se réchauffe quelque peu entre les deux partenaires, jusqu’à ce qu’un barrage d’artillerie se déclenche, annonciateur de l’assaut tant redouté.

Cependant, au lieu de nuées de biomorphes agressifs, c’est un épais nuage de brume2 qui se présente à l’horizon, ce qui ne rassure pas le moins du monde la première ligne impériale. Ayant raté leur test de stupidité, les Gardes ne réalisent cependant pas qu’il serait judicieux d’enfiler leur masque à gaz jusqu’à ce que l’appelé Padbol tire une bonne latte du brouillard suspect, et tombe raide mort (toujours dans la boue). Inspirés par son contre-exemple, ses camarades se hâtent de s’équiper, et c’est alors que Constantine réalise que son matos a été rendu défectueux par une fissure mal placée. La tuile. N’ayant pas le temps d’appeler Carglass, notre pyromane patenté prend la seule décision logique : apprendre à son camarade comment se servir de son ar– piquer le masque de Dimitri. La sélection naturelle à l’œuvre, dans toute sa tragique beauté ! Malheureusement, si son comparse a l’obligeance de mourir sans faire d’histoire ni essayer de récupérer son bien, le forfait de Constantine a attiré l’attention de Heston, qui se délecte d’avance du bolt qu’il va coller dans la nuque du camaricide. Mis à nouveau au pied du mur, et aidé par la diversion fournie par un tir de laser ami, ‘Tantine arrive toutefois à maîtriser son bourreau, et à le noyer dans la boue après une petite séance de pugilat.

Avec tout ça, on en aurait presque oublié que les cafards ont sonné la charge. Et c’est un paisible Toxicrene qui se présente finalement devant les fusils lasers de la Garde, qui ne donnent pas les résultats escomptés face à la carapace renforcée de la monstruosité. Bien que son brasier se révèle plus efficace contre la créature, Constantine se trouve fort dépourvu quand cette dernière arrive à portée de tentacules. La suite et la fin de la nouvelle voit notre malheureux survivant se faire violemment hentai-er et entailler par Toto, et balancer comme un sac de patates dans la… boue. Où il sombre à son tour après avoir eu la bonne idée de décéder. Eh, what did you expect ?

1 : Qui pour tous ses défauts, connaît tout de même ses hommes par leurs prénoms et noms.
2 : C’est une nouvelle technique Tyranide, qui nécessite de nourrir tous les Carnifex de l’essaim de fayots pendant une semaine.

AVIS:

Goodrich signe une nouvelle absolument classique de Gardes Impériaux engagés contre une flotte ruche tyranide (ici réduite à son plus simple élément, le gros monstre hentai), dont la valeur ajoutée en termes d’horreur reste franchement à démontrer. À titre personnel, j’aurais tendance à lier ce hors-sujet à l’absence de connaissance probable de l’auteur de la littérature 40K1, qui regorge de textes similaires2 et dont certains sont, assez ironiquement, bien plus angoissants que la soumission de John Goodrich (cette conclusion de The Fall of Malvolion, alors…). Si la Grande Dévoreuse est intrinsèquement terrifiante, son utilisation comme antagoniste identifié dès le départ retire toute sensation de surprise – un composant clé d’une bonne histoire d’horreur – aux propos de Goodrich, dont le lecteur n’a guère de difficulté à se représenter la fin de l’histoire à partir de ce moment. Les confrontations entre bidasses impériales et cafards galactiques sont en effet généralement à sens unique ! Ce constat posé, il ne reste plus que les relations entre Constantine, Dimitri et le Commissaire Heston pour mettre un peu de suspens dans cette nouvelle, et si l’auteur arrive à dépeindre les dilemmes de son héros, qui doit choisir à deux reprises entre sa vie et son devoir, le calvaire vécu par notre servant de lance-flamme lourd ne me l’a pas rendu très sympathique pour autant. Au final, Mud and Mist se révèle être une erreur de casting pure et simple, même pas sauvée par une intrigue ou une narration particulièrement réussies. Il faudra revoir cette copie.

1 : Sentiment renforcé par la mention en cours de nouvelle des regrets des personnages de ne plus revoir leurs familles… Mais c’est le lot de la Garde ça, les gars.
2 : ‘The Fall of Malvolion’ (Abnett), ‘Sector 13’ (Mitchell), ‘Voidsong’ (Zhou), ‘Fear Itself’ (McKenna), ‘The Enemy of my Enemy’ (Crowley)…

.

The Shadow Crown – C. L. Werner [AoS] :

INTRIGUE:

Sortie crépusculaire et secrète pour la Dame Cualli, qui brave la mauvaise foi réputation nocturne de sa cité de Maktlan, en Aqshy, pour aller écouter, non pas aux portes, mais aux fontaines. Faisant fi des rumeurs de monstres, de malades et de monstres malades sensés errer dans les rues désertées à la lune tombée pour se repaître des passants malchanceux, notre aristocrate a été dépêchée par son mentor et suggar daddy Ekurzakir, saint homme très bien en cour depuis qu’il a sauvé le fils du roi Tlanextli1, espionner la rencontre entre le chancelier disgracié Icnoyotl et un autre conspirateur, pour le moment inconnu. Bien qu’elle n’ait aucun scrupule à dénoncer le fourbe fonctionnaire pour s’attirer les faveurs de son influent patron, l’ambitieuse Cualli se retrouve confrontée à un dilemme cornélien lorsqu’elle s’aperçoit que le date d’Icnoyotl n’est autre que son propre frère Tochtli, le capitaine de la Garde Jaguar de Sang du roi. D’autant plus que ce dernier avoue qu’il n’a accepté de rencontrer le chancelier que pour tirer sa sœur de l’emprise d’Ekurzakir, qui l’inquiète au plus haut point.

Tiraillée entre sa carrière et sa famille (comme beaucoup de femmes, il faut le reconnaître), Cualli finit par trouver une solution tierce : balancer Icnogood et prétendre qu’elle n’a pas vu le visage de son interlocuteur. De retour dans les appartements du prêtre, que ce dernier a tapissé des plans du métro de Mhurghast – c’est un style – elle patiente un bon moment sur le canapé défraîchi de son hôte en se servant des petits coups à boire (malgré le malaise que lui provoque le regard fixe que lui jette le serviteur contrefait d’Ekurzakir2), jusqu’à ce que ce dernier finisse par faire son entrée depuis l’escalier de service. Et là, c’est le drame : ce fragile de chancelier a craqué sous la torture, et balancé tous ses complices, y compris Tochtli, qu’Ekurzakir a fait fissa arrêter à son tour. Peu content de la traîtrise de sa subalterne, le prêtre la punit en la mettant littéralement en face (via un miroir) de la décrépitude qui l’a gagnée. Victime de la même maladie que le prince, Cualli avait en effet jusqu’ici été épargnée de ses effets délétères et bubons disgracieux par la magie d’Ekurzakir, qui lui est désormais retirée. Chassée par son thérapeute, l’intrigante n’a plus qu’à aller se jeter dans la fontaine de lave la plus proche pour abréger ses souffrances.

La caméra se braque alors sur le malheureux Tochtli, jeté dans un cachot après une séance de torture plus intense qu’un WOD de crossfit. Résigné à mourir avec dignité, le capitaine a toutefois la surprise de voir la porte de sa prison s’ouvrir, et apparaître le visage amical de son second, le fidèle Xochipepe. Les Jaguars de Sang se sont en effet cotisés pour soudoyer le geôlier, et permettre à leur bien-aimé officier d’échapper à son triste destin. Touché par ce geste, Tochtli demande d’abord à ce qu’on l’autorise à aller chercher Cualli pour l’emmener avec lui, et apprend du même coup que this girl was on fire, toussa toussa. Tristesse. Déterminé à venger cette mort, dont il tient – à raison – Ekurzakir responsable, il convainc Pepe la grenouille jaguar de lui prêter son macuahuitl pour qu’il aille obsidienner la gu*ule du prêtre, et qu’importent les conséquences…

Fin spoiler…Trouvant les appartements du saint homme désertés, Tochtli erre quelques temps entre la cuisine et le salon, avant de se faire attaquer par derrière par le serviteur d’Ekurzakir. Mordu jusqu’au sang par le furtif bossu, le capitaine le coupe prestement en deux d’un coup de sa massue crantée. Surprise, le cadavre se révèle être celui d’un rat humanoïde, ce qui évoque à notre héros le souvenir de l’ancienne guerre des premiers habitants de Maktlan contre les mystérieux rampeurs de l’ombre. Avisant l’escalier par lequel le raton est entré, précédemment caché par une tapisserie décidément moche, Tochtli s’enfonce dans les souterrains, jusqu’à rencontrer le reste de la colonie Skavens locale. Sans blague. Le clan Pestilens a en effet envoyé quelques infectiologues experts contrôler l’impureté de l’aquifère local, et l’intrépide Jaguar voit avec horreur les ratons préparer une mixture innommable dans un grand chaudron. Tout s’explique. Comprenant qu’il est de son devoir de prévenir le roi de la situation, Tochtli rebrousse chemin, mais croise Ekurzakir en route. Surprise, le prêtre n’est pas non plus celui qu’il semble être, l’anneau enchanté qu’il porte au doigt camouflant son identité secrète de Prêtre de la Peste. Tout se re-explique. Malheureusement, comme ce rat d’Ekurzakir est venu avec quelques bedauds, notre héros n’aura pas l’occasion d’accomplir son destin de lanceur d’alerte. Poule jaguar au pot, ce n’est pas mal non plus, notez.Début spoiler

1 : Qui n’est pas un hommage à la cité gallosie de Llanelli. Je suis formel.
2 : Le bougre a du trop regarder de vidéos avec des filles sur des canapés.

AVIS:

Après le Japon (Last of the Blood, Reflections in Steel) et la Russie (A Sending from the Grave), Werner poursuit son œuvre « civilisatrice » des Royaumes Mortels en mettant en scène une histoire d’Incas dans la chaleur torride d’Aqshy. Il s’agit malheureusement du seul aspect mémorable de The Shadow Crown1, dont l’intrigue et le déroulé se révèlent d’une platitude décevante pour un contributeur de la trempe et de l’expérience de C. L. Werner. Signes révélateurs de cet échec, les deux partis pris narratifs forts (le changement de personnage principal en milieu de récit et la révélation de l’identité d’Ekurzakir2) de l’auteur desservent la nouvelle plutôt qu’ils ne la renforcent ; quant à la dimension horrifique de cette dernière, on peine à bien la discerner. Certes, l’histoire se termine mal pour les héros, qui ne parviennent pas à contrecarrer les manigances pustuleuses des Skavens, mais il y avait tellement moyen de faire plus trash avec ces antagonistes – ce que Werner a déjà fait par le passé – qu’on ne peut conclure qu’à une occasion manquée. Retenons simplement que les hommes rats sont apparemment capables d’infiltrer très facilement les sociétés humaines (et sans doute celles des autres races, il n’y a pas de raison3), ce qui écorne sérieusement au passage l’utilité du clan Eshin, et passons à autre chose.

1 : Dont je réalise après coup qu’elle n’a même pas été identifiée à coup sûr par l’auteur… Rien à voir avec la babiole d’Alith Anar, ceci dit.
2 : Chose (heureusement) rare, Werner prend limite son lecteur pour une buse à ce sujet. On avait compris, Clint.
3 : Après tout, on commence toujours par tester les nouvelles technologies sur les souris. Depuis le temps, ces dernières doivent maîtriser la transfiguration sur le bout des moustaches.

.

Runner – A. Bao [40K] :

INTRIGUE:

RunnerSur un monde ruche inconnu1, un peloton de Gardes Impériaux envoyé défendre une spire en avant du gros de son régiment est sur le point de se faire peloter jusqu’à ce que mort s’en suive par les hordes décérébrées de Papa Nurgle. Alors que Zombies de la Peste et autres Portepestes progressent, lentement mais sûrement, vers la dernière redoute tenue par l’Imperium, avec un bon gros reggae en fond sonore (avouez que ça le ferait), un vieux Sergent du nom de Vieux Sergent envoie notre héros, le Caporal Machinchose2, faire une course jusqu’au camp de base impérial, situé à quelques 200 miles de l’avant-poste pestiféré, afin de porter la mauvaise nouvelle au haut commandement. Car oui, le gros reggae des pesteux a brouillé les communications des bidasses jusqu’à les rendre inutilisables. Cette mission n’a pas été attribué au Caporal Petit Gars – c’est comme ça que l’appelait son copain de régiment Bullard, avant de disparaître à moitié en fumée (les cités ruches de grande solitude, tout ça…) – par hasard : notre homme est en effet connu sous (l’autre) surnom de Coureur, non pas à cause de son amour des jupons des autochtones, mais parce qu’il est doué d’une endurance peu commune. Le genre de type à finir un marathon en deux heures trente, et repartir aussi sec en sens inverse pour aller chercher sa voiture sur le parking du départ. Bref, Coureur prend ses jambes à son cou et commence à tracer la route, seulement chargé d’une gourde et de sa foi en l’Empereur (son fusil laser lui a été repris sur la ligne de départ, so-disant parce que ça pesait trop lourd).

Le terrain sur lequel il progresse, sorte de toundra gelée recouverte de cristaux aiguisés, pour bucolique qu’il soit, n’est pas sans poser de gros problèmes matériels à notre héros, dont les godillots n’ont pas été pensés pour résister à ce type d’environnement. Il ne faut donc pas longtemps avant que le brave Coureur se retrouve avec les pieds en lambeaux et les chaussures en sang (ou l’inverse), ce qui commence, lentement mais sûrement, à miner son enthousiasme jusqu’ici intact. Se raccrochant à son endoctrinement martial, il récite des prières pour se maintenir motivé, mais le poison du doute (et de la déshydratation) commence à le tenailler. Ajoutez à cela les voix de ses camarades défunts qu’il commence à entendre dans sa tête, et la méchanceté de la faune locale, qui refuse de se faire manger alors qu’il crève la dalle, et vous aurez une bonne idée de la situation peu brillante dans laquelle le Caporal Wanlek – au moins, il se souvient maintenant de son nom – se trouve…

Début spoiler…Alors que les heures de course/marche/quatre pattes se succèdent les unes aux autres, Wanlek se retrouve de plus en plus tenté d’écouter les murmures amicaux de ses anciens frères d’armes, qui lui promettent de le débarrasser de sa souffrance s’il consent à les attendre (malgré son état, il avance en effet plus vite que ces lambins de Zombies). Concomitamment, la mémoire de sa vie d’avant la Garde, quand il était encore le fils à sa maman sur une planète somme toute assez sympathique, lui revient de plus en plus distinctement, ce qui lui permet de réaliser que son service au sein des armées de cet impotent d’Empereur de l’Humanité ne lui a apporté que des emmerdes. Lorsqu’il commence à fredonner des refrains en heptasyllabes à la place des prières officielles du Ministorum, c’est la fin pour Petit Gars, qui embrasse le putride salut qui lui est offert par la team Nurgle, et sombre dans un sommeil réparateur, où il a la chance de retrouver tous ses potes et sa vieille môman, certes un peu pourris, mais de bonne et joyeuse composition.

À son réveil, il se découvre en pleine forme et peut doc terminer son trek sans difficulté, malgré un tir de fusil laser ami pris dans l’épaule pendant la dernière ligne droite. Amené devant ses supérieurs, le discours incohérent qu’il leur tient sur la raison de sa venue provoque la réaction classique du gradé en colère : un direct du droit en pleine poire. C’était malheureusement une mauvaise idée de la part du puncher, car du nez brisé de Wanlek s’échappe un nuage verdâtre, qui permettra aux armées du Grand-Père de prendre pied, ou pseudopode, dans le bastion impérial. La nouvelle se termine sans que nous ne sachions si le Coureur a reçu un pourboire de la part de ses camarades pour son service héroïque en temps de pandémie. Il ne l’aurait vraiment pas volé.Fin spoiler

1 : Et volontairement en plus, ce qui n’est tout de même pas commun. Ca vous pose le jemenfoutisme du héros.
2 : Vous allez rire, mais il commence vraiment la nouvelle en ne souvenant plus de son prénom. C’est plus du jemenfoutisme là, c’est un Alzheimer précoce.

AVIS:

Alan Bao signe un nouvelle inaugurale placée sous le double signe de Papa Nurgle et du respect du fluff, ce qui fait de The Runner une expérience de lecture doublement sympathique (wholesome, comme disent les Anglais), nonobstant sa conclusion sans grande surprise. C’est dommage car je pense qu’il aurait pu laisser planer un chouilla plus de suspens dans le dernier tiers de son récit, plutôt que de changer son héros en héraut sans aucune équivoque. Ceci dit, la bonne mise en contexte préalable du côté jovial et affectueux de Nurgle, mis en perspective de la dureté et vacuité (apparente) du credo impérial, permet à la nouvelle de se terminer de façon tout à fait satisfaisante, même si convenue. Bref, si vous avez apprécié l’approche « pus & love » de la faction telle que mise en scène par Chris Wraight (‘Les Seigneurs du Silence’, ‘Endurer’) et dans une moindre mesure Andy Clark (‘Croisade’), ne boudez pas votre plaisir et venez assister au dernier trail du Caporal Wanlek avant une retraite bien méritée.

.

Miracles – N. Wolff [40K] :

INTRIGUE:

Ouvrier dans une usine fabriquant des chargeurs de fusils laser sur le monde ruche d’Entorum, Jacen Hertz vit le rêve américain impérial dans son petit appartement de fonction, en compagnie de sa femme aimante (Myra) et de ses trois enfants (les jumeaux Markus et Arden et la petite Sophya). N’eut été son amour légèrement immodéré pour la dive bouteille, héritage d’une enfance traumatique qui le laissa orphelin de mère (évanouie dans la nature à la suite de visions psychotiques) et de père (mort de chagrin après le départ de cette dernière), et la fatigue chronique résultant de ses journées de travail de 16 heures, Jacen serait parfaitement heureux. Certes, les rumeurs insistantes de disparitions mystérieuses de citoyens de Praxis (la ruche où habite la famille Hertz) ont créé un climat de suspicion et de paranoïa parmi la population locale, en plus de multiplier les patrouilles – et donc les bavures – d’Enforcers, mais Entorum n’est pas sans connaître son lot de bonnes nouvelles, comme la guérison miraculeuse du mendiant et ex Garde Impérial Guryn Mansk, ayant retrouvé la vue un beau matin après qu’un ange lui ait rendu visite dans son sommeil. Loués soient Saint Jude et l’Empereur.

Un peu plus tard, nous retrouvons notre héros, un peu fatigué par le rythme de travail éreintant que nécessite la réalisation (où la limitation de la non-réalisation) des quotas de production fixés par l’Adeptus Terra, surtout depuis que les disparitions se sont multipliées, et ont forcé l’institution d’heures supplémentaires obligatoires pour compenser l’absentéisme galopant qui touche les forces vives de Praxis. Bref, Jacen a beau faire de son mieux pour produire ses batteries, il est lui-même presque à plat. Ces soucis de productivité deviennent cependant soudainement secondaires lorsqu’une surcharge critique du réacteur à plasma de l’usine se déclare, avec des conséquences catastrophiques pour cette dernière et ses milliers d’ouvriers. Pris dans le souffle de la conflagration, Jacen est visité par une vision, où un ange ayant pris les traits de sa mère lui annonce que l’Empereur l’a choisi pour mener à bien son dessein sur Entorum, et que sa vie sera donc préservée. En échange de cette protection divine, Jacen devra prouver sa dévotion à son Sauveur en sacrifiant sa petite dernière à la cause, seul moyen d’empêcher la planète de sombrer dans l’apocalypse. Les voies de l’Empereur sont décidément des plus impénétrables.

À son réveil dans les décombres de son lieu de travail, Jacen découvre que l’ange a tenu parole, lui seul ayant été épargné par l’explosion qui a réduit l’usine en ruines et ses collègues de chaîne d’assemblage en chiche-kebab. Cette exception statistique lui attire toutefois la suspicion des forces de l’ordre, qui l’interrogent sans ménagement afin de comprendre comment il a pu échapper au funeste destin de ses camarades. Peu convaincu par son explication angélique, l’Enforcer en chef laisse toutefois le bénéfice du doute au témoin assisté, et, au lieu de l’exécuter séance tenante comme son mandat impérial le lui permet (voilà qui doit désengorger les tribunaux et les prisons d’Entorum), le laisse partir avec la vie sauve. Notre héros se trouve toutefois en proie à un dilemme insoluble: exécuter la mission que lui a donné l’ange, dont les chuchotis motivateurs le suivent désormais où qu’il aille, ou prendre le risque de voir sa planète réduite en cendres, comme révélé dans le teaser visionnaire auquel il a assisté?

Début spoilerDe retour chez lui, Jacen prend la décision d’agir pour le bien commun, et, après avoir englouti une bouteille d’amasec pour se donner du courage, va border Sophya pour la dernière fois. Manque de pot, les protestations – fort légitimes – de cette dernière attirent l’attention de Myra, contraignant l’Abraham du 41ème millénaire à faire un tir, ou plutôt un prélèvement (l’ange ayant spécifiquement demandé s’il avait du cœur), groupé. Son sombre forfait accompli, Jacen demande un accusé de réception à son commanditaire, et la preuve qu’il a véritablement préservé Entorum de la catastrophe. À cela, l’ange répond qu’elle a une bonne et une mauvaise nouvelle. La mauvaise est qu’elle s’est jouée de la crédulité de notre héros, et que les meurtres commis par ce dernier, comme ceux perpétrés par les autres citoyens de Praxis auxquels elle a offert ses « services » (dont l’aveugle Guryn Mansk, qui s’est jeté sous un car scolaire, dévoré par le remords devant son acte monstrueux) ont au contraire servi les desseins génocidaires de l’entité démoniaque que l’ange se révèle être au final. Mais la bonne nouvelle est que Jacen a pu enfin reprendre contact avec sa chère maman, qui n’est autre que la psyker que le démon en question a possédé après que ses visions apocalyptiques l’aient mené à tuer son mari et à quitter le domicile familial. C’est sur ce triptyque Travail – Famille – Batterie (de fusil laser) que se termine l’histoire (et probablement la vie) de Jacen Hertz, l’homme qui en avait trop vu et bu.Fin spoiler

AVIS:

Fort belle soumission de la part de Nicholas Wolf que ce Miracles, qui parvient, à la différence de beaucoup d’autres histoires estampillées Warhammer Horror, à distiller une atmosphère réellement oppressante et angoissante, en exploitant quelques tropes du genre (la vision angélique dévoyée, les chuchotements/apparitions que seul le héros perçoit, le dilemme insoluble dont la résolution fait sombrer dans la folie…) de façon très efficace. De la même façon, le choix de l’auteur de choisir un citoyen lambda de l’Imperium comme protagoniste, et de le confronter à toute l’horreur gothique de Warhammer 40.000, donne des résultats convaincants. Cerise sur le gâteau, la petite révélation finale sur l’identité de l’entité qui a pris Jacen sous son aile permet de clôturer le récit de fort dérangeante manière, en plus de souligner l’un des concepts forts du fluff de la franchise, que Wolf maîtrise assez pour exploiter avec talent ses caractéristiques les plus dérangeantes et morbides. Bref, une vraie réussite que cette seconde nouvelle (la première étant Reborn1) du nouveau venu Wolf, qui mérite d’être suivi au cours des mois à venir.

1 : Et la troisième, encore une fois fuitée par la biographie de l’auteur à la fin de l’e-short, Negavolt.

.

Voices in the Glass – R. Strachan [AoS] :

INTRIGUE:

Envoyé prendre la relève et des nouvelles de son collègue et ami Yollin, Prêtre Guerrier sigmarite affecté à la difficile paroisse de Shadespire, en Hyish, Gilvar peine à prendre ses marques dans la cité des miroirs, malgré l’accueil enthousiaste qui lui a été réservé par l’amicale des fidèles. Travaillé par la disparition mystérieuse de l’ancien chargé de culte, et les notes intrigantes faisant état de voix sépulcrales et de verre maudit que son prédécesseur lui a laissé, notre héros ne tarde pas à être victime d’étranges et angoissants phénomènes auditifs, qui lui font également entendre les lamentations bruyantes d’âmes en peine non identifiées. N’ayant pas pensé à ramener ses boules quies depuis Hammerhal, Gilvar passe des nuits agitées, tombant à l’occasion de son lit, et a donc bien du mal à entraîner sa congrégation sur le chemin d’une foi pure et vertueuse, d’autant plus que les membres de son conseil d’ad…juration1 lui jurent leur grand dieu Sigmar qu’ils n’entendent absolument pas la moindre voix du tout

N’ayant pas désespéré de retrouver la trace de son compagnon d’armes, Gilvar se met à errer dans la banlieue littéralement morte de Shadespire pour mener son enquête et occuper ses soirées, loin du tapage qui semble affliger particulièrement sa résidence. Il a ainsi l’occasion d’échanger quelques banalités avec le jeune Prentiss, qui a choisi de s’installer dans un manoir lors de son arrivée dans la cité (qui a beaucoup de problèmes, mais où l’immobilier est apparemment donné). Malgré l’invitation de ce dernier d’aller prendre un dernier verre dans sa chambre, Gilvar, sans doute traumatisé par ces histoires de miroir, refuse tout net la proposition de son hôte. Sur le chemin du retour, cependant, il est de nouveau assailli par un barrage de plaintes tourmentées, dont celles d’une petite fille à laquelle on a manifestement refuser d’acheter un poney, si on en doit en juger par le caractère strident et insupportable de ses pleurs. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le bénitier pour Gigi, qui s’en fuit en courant pleurer dans sa chambre, comme le gros fragile qu’il est, en fait.

Le lendemain, mis très en colère par sa propre incapacité à mettre sa vie en ordre, il livre un sermon aussi bref (quatre phrases) que culpabilisant à ses ouailles, qui repartent de l’église la tête dans le culte. Cette crise de colère a au moins eu l’effet de débloquer la parole de la vieille Lizabet, la bonne de Gilvar, qui révèle à ce dernier que sous leurs airs nonchalants, les Shadespiriens sont également victimes des vocalises d’outre-tombe qui affligent le prêtre. Résolu à faire cesser ces nuisances sonores, ce dernier empoigne son marteau pour aller briser la glace, ce qui est un comportement tout  à fait pertinent en cas d’urgence, comme chacun peut en témoigner…

Début spoiler…Le plan de Gilvar est simple : ne pas laisser un carreau, une vitre ou une glace intacte dans toute la ville. Il soupçonne en effet que ces surfaces servent d’interface aux âmes damnées du coin, et, plutôt que d’aller consoler ces dernières, il préfère qu’elles aillent hanter ailleurs. Non mais. Guidé dans sa vendetta totalement éclatée par la voix de Yollin jusqu’au manoir de Prentiss, il se décide cette fois à y pénétrer, et découvre que le jeune homme a recréé la galerie des glaces dans toutes les pièces de la demeure. Outré par tant de narcissisme, Gilvar enfile sa salopette de Wreck It Ralph et démolit consciencieusement tous les miroirs passant à portée de son marteau, sourd aux lamentations des spectres qui tambourinent de l’autre côté de la paroi (et à celles de la femme de ménage qui devra se taper de tout balayer). La salle finale se révèle cependant être un défi bien plus coriace pour notre vertueux vandale : confronté à l’esprit de Yollin, piégé lui aussi dans un cadre enchanté, Gilvar n’entend pas venir le fourbe Prentiss, qui lui plante une dague dans le buffet et l’envoie fissa au tapis. À son réveil, il ne peut que constater qu’il est lui aussi passé de l’autre côté du miroir, à la vue de l’antiquaire en train de floss dance­-r sur son cadavre. C’est la fin de l’histoire pour notre zélote, qui pourra peut-être sortir de sa dimension parallèle une fois que ses 687.234634 années de malheur seront écoulées…Fin spoiler

1 : Le Duardin Dunnot, l’Aelf Amyrillis, le fat Dunceyn, le grabataire Brenton et le « normal » Prentiss.

AVIS:

Si Shadespire est un décor rêvé pour une histoire d’horreur se déroulant dans les Royaumes Mortels, Richard Strachan ne réussit malheureusement pas à tirer la substantifique moelle, ou glace, du potentiel angoissant de la cité des miroirs. La faute à une intrigue insuffisamment développée, qui consiste principalement en une virée destructrice du héros après que ce dernier ait fait les frais de quelques manifestions spectrales. Si l’imposante galerie de personnages présentée par l’auteur (pour une nouvelle de quinze pages) avait sans doute pour but de mener le lecteur sur une fausse piste quant à l’identité de l’antagoniste, ce but louable est toutefois contrarié par la mauvaise exposition du problème auquel Gilvar se retrouve confronté. Sans rire, je n’ai compris que ce dernier était engagé dans un scénario PvP que dans les dernières pages, étant auparavant persuadé que le caractère maléfique « natif » de Shadespire constituerait la Némésis de notre Prêtre Guerrier malchanceux. La conclusion du récit, pour attendue qu’elle soit, est pour finir amenée sans finesse par Strachan, qui fait one-shoter son héros, qui devrait pourtant être familier des choses de la guerre, par un antiquaire armé d’un coupe papier. L’entrainement des recrues laisse vraiment à désirer à Azyrheim. Il est en outre dommage que l’auteur n’ait pas choisi de développer davantage les aspects les plus intéressants (à mes yeux) de son histoire, comme la présence de non humains dans le culte de Sigmar, ou la raison qui pousse les paroissiens de Shadespire à faire comme si la situation était normale, alors qu’ils sont tout à fait au courant de la précarité de leur situation (comme la confession de Lyzabet le révèle). Bref, une soumission assez décevante compte tenu de ce qu’elle aurait pu être, et qui n’ajoute même pas un peu de guimauve shadespirienne à moudre au moulin du fluffiste acharné.

.

The Funeral – D. Hinks [40K] :

INTRIGUE:

L’Inquisiteur Rabbath est mort. Et, chose tragique, ce noble servant des Saints Ordos n’a pas rencontré son destin en luttant bravement contre les hérétiques, mais a été emporté par une démence sénile après avoir été excommunié pour faute déontologique grave. Qu’importe cependant la fin ignominieuse connue par son bien-aimé maître pour le fidèle Croisé Voconis ! Seul parmi les membres de la suite de Rabbath à l’avoir accompagné en exil, et à s’être occupé de lui pendant ses derniers jours, ce fonctionnaire et factotum modèle a décidé de marquer l’occasion en invitant tous ses anciens collègues à l’enterrement de l’Inquisiteur, qu’il a tenu à organiser dans la basilique d’Eremos, où la carrière de Rabbath s’est définitivement arrêtée.

Ne s’attendant pas à ce que quiconque fasse le déplacement pour honorer la mémoire et l’œuvre du héros disgracié, Voconis est surpris de voir arriver d’abord l’Interrogateur Tashk (qu’il n’aime pas vraiment), puis le Frater Arzen (qu’il ne peut pas tellement blairer non plus), suivis par tous les acolytes, prestataires, fournisseurs et vacataires employés par Rabbath de son vivant, Ogryns compris. Enchanté par le tour pris par les événements, notre Croisé prend alors la parole pour prononcer un panégyrique des plus émouvants, avant d’inviter ses hôtes à échanger leurs souvenirs de service. Attiré dans un groupe de parole par le sagace Arzen, Voconis est encouragé par ce dernier à raconter sa version du désastreux procès de Voldori, qui a coûté à Rabbath sa rosette, sa réputation et au final, sa vie. Le Croisé s’exécute volontiers, et, alcool1 aidant, retrace l’historique de ce cas peu banal…

Début spoilerVoldori était le fils du Gouverneur de Caria Prime, et suspecté par Rabbath d’être un hérétique. Ayant réussi à capturer en secret le noble (potentiellement) dévoyé, l’Inquisiteur l’avait fait amener dans cette même basilique, pour lui extirper la confession de ses crimes haineux contre l’Imperium. L’honnête Voconis ayant hérité de ce sale boulot, il s’était mis à pied d’œuvre avec enthousiasme, mais sans parvenir à ses fins. Il faut dire qu’à la base, il était Croisé, et pas Interrogateur. Pressé par le temps, Voconis avait commis l’erreur « d’oublier » son prisonnier dans la cellule où était conduit son interrogatoire, située en zone totalement inondable (il n’y a pas que sur Terra que la montée du niveau des mers pose problème). Au final, Voldori fut retrouvé noyé dans son cachot à la marée descendante, et bien que Voconis ait juré, d’abord à son boss, puis au procès de ce dernier, que le noble s’était confessé avant d’expirer, sa déposition ne fut pas suffisante pour éviter à Rabbath l’infamie d’une radiation. Rendu fou par la ruine de sa réputation, et ayant fini par comprendre que son serviteur lui avait menti, Rabbath avait fini sa vie dans un état déplorable, ce dont Voconis se sent coupable.

Ayant entraîné ses hôtes jusqu’à la cellule en question pour démontrer sa bonne foi, le Croisé est pris à part par Arzen, qui a bien senti que l’exposé véhément de son ancien collègue dissimule un problème de taille. Et en effet, Voconis finit par reconnaître que, non, Voldori n’a jamais avoués ses crimes, et est donc mort innocent. Soulagé d’avoir enfin partagé ce lourd secret avec une oreille compatissante, notre héros se perd dans une rêverie mélancolique, qui se trouve brutalement interrompue par le silence pesant qui l’entoure. Revenant à lui, il a la surprise de constater qu’il est seul dans le cachot, déjà en train de se remplir de flotte, comme lors du douloureux fiasco précédemment exposé. Seul l’attend sur le seuil de la porte l’affable Arzen… qui se révèle être Voldori, revenu d’entre les morts pour se venger de son bourreau. Comment ? Mystère. Il ne fait cependant aucun doute que le noyé était bien un psyker, qui a embrouillé les sens de Voconis en lui faisant croire que son invitation avait été honorée par la suite de Rabbath. C’est donc une victoire morale pour notre Croisé, qui pourra attendre la mort avec la certitude de l’homme juste, car Voldori l’enferme à son tour dans la cellule avant de retourner… faire un jacuzzi, j’imagine ? Moralité : il est très dangereux de boire dans des occasions professionnelles, tenez-le vous pour dit les enfants.Fin spoiler

1 : Un cépage des plus fins, en provenance des fameux terroirs de Valgaast…

AVIS:

Cet enterrement était pourtant si bien parti pour Darius Hinks… En quelques pages, l’auteur avait réussi à poser une atmosphère prenante et à exposer un sujet des plus intéressants : la difficile cohabitation des membres d’une suite inquisitoriale après la mort de leur patron. Le vertueux Voconis, d’abord persuadé du manque de gratitude de ses anciens collègues, se retrouvant agréablement surpris et sincèrement touché par leur venue inespérée, et commençant à révéler, fragment par fragment, les détails de la triste fin de Rabbath, dont la démence terminale a été en bonne partie causée par ses méthodes d’interrogatoire peu orthodoxes (on s’en fout) et peu efficaces (beaucoup plus grave). La descente dans la cellule où le présumé hérétique s’est noyé préparant la révélation finale qui ne pouvait manquer de conclure le récit… Et là, pouf, un TGCM de bas étage juste avant le rideau de fin. Quel dommage ! Si Hinks avait pris la peine d’expliquer comment le véritable interlocuteur de Voconis avait pu se trouver sur place, ou au moins suggérer un début d’explication plausible1, cette nouvelle aurait été la plus réussie signée de sa main. Au lieu de ça, le lecteur se trouve confronté à une impossibilité de premier ordre, qui vient sérieusement écorner la sacro-sainte suspension d’incrédulité qui permet à la GW-Fiction d’opérer normalement. Malgré ce final décevant, The Funeral demeure cependant une lecture agréable, qui, j’espère, servira de nouvelle référence aux productions de Darius Hinks.

1 : Bon, il y a bien cette micro mention de Rabbath ayant trempé dans l’occultisme et la nécromancie sur ses vieux jours, et qui aurait pu expliquer le retour de Mr. V., mais la piste est tellement ténue que j’ai du relire la nouvelle pour l’identifier.

.

***

Au final, Anathemas se positionne davantage comme un successeur de Maledictions que d’Invocations, en ceci que ma préférence globale reste au second tome de la série, le plus réussi des trois à mes yeux. Cela ne veut cependant pas dire que je déconseille la lecture de cet opus aux curieux et amateurs de Warhammer Horror, bien au contraire, mais s’il n’en fallait qu’en retenir qu’un, mon choix serait sans appel. Avec ses 14 nouvelles, Anathemas remporte cependant la palme de l’ouvrage le plus conséquent de cette (pour le moment) trilogie, et comporte quelques histoires méritant vraiment le détour, telles que Skin Man, The Thing in the Woods, Runner et surtout Miracle pour le 41ème millénaire1, et These Hands, These Wings pour les Royaumes Mortels. Le reste des soumissions, pour moins mémorable qu’il soit, est néanmoins fort correct, et il y a fort à parier que vous ne regretterez pas d’avoir passé quelques heures à vous plonger dans cette anthologie si vous êtes un habitué de la BL. À l’heure où je termine cette chronique, nous ne savons pas encore ce que l’avenir – et les éditeurs de Nottingham – réservera à Warhammer Horror, aucune nouvelle sortie n’étant annoncée pour le moment. Cela dit, si la BL donne une suite à sa Warhammer Horror Week au début du mois de Mai, il y aura sans doute matière à sortir au moins un nouveau recueil de nouvelles, comme cela a été le cas avec Invocations en fin d’année dernière. D’ici là, portez vous bien et, surtout, restez sur vos gardes…

1 : Cela tombe plutôt bien car ces deux dernières nouvelles sont disponibles à l’unité sur le site de la Black Library.

 

INVOCATIONS [Recueil]

Bonjour et bienvenue dans cette revue critique d’Invocations, le second1 recueil de nouvelles publié par la Black Library pour le compte de Warhammer Horror, segment horrifique de la GW-Fiction. Comme cela avait été le cas pour le premier ouvrage de ce genre (Maledictions), Invocations regroupe une douzaine de courts formats prenant aussi bien place dans les ténèbres du lointain futur que dans celles, tout aussi noires, des Royaumes Mortels. À titre personnel, j’espère bien voir l’Hérésie d’Horus et Blood Bowl faire leur entrée sur ce nouveau terrain de jeu dans les mois à venir, ces franchises n’étant après tout pas moins dérangeantes, glauques et effrayantes que les autres (surtout Blood Bowl, si vous voulez mon avis).

Sommaire Invocations

Un rapide coup d’œil à la liste des contributeurs de cette anthologie permet d’identifier un autre trait commun entre ce volume et le précédent, à savoir la participation d’habitués de la BL (Annandale – qui s’impose d’ailleurs comme le chef de file d’Invocations, avec pas moins de trois nouvelles à son actif – , Kyme et Werner), de représentants de la nouvelle vague de Nottingham (Hill et McLean), et d’un certain nombre de spécialistes du genre, dont les travaux pour la Black Library se sont pour le moment confinés à ce segment de la GW-Fiction (Gray, Strachan – qui ont tous deux eu une nouvelle publiée dans Maledictions – Sheil, Ozga et Cluley). Il est à noter que quatre des nouvelles incluses dans ce recueil ont été initialement publiées pendant la Warhammer Horror Week, le dernier événement DNC (daily new content) récurrent lancé par la BL, dans le cas présent sur la première semaine de Mai. On peut donc s’attendre à la sortie de nouveaux ouvrages similaires à celui-ci dans les années à venir si Nottingham maintient cette horrible semaine sur son calendrier.

Comme cela avait été le cas pour Maledictions, le but de cette revue sera d’identifier les soumissions les plus intéressantes et les plus réussies de ce second volume, en utilisant pour cela le cahier des charges, particulier et exigeant, de l’horreur en littérature. L’enthousiasme d’Annandale pour le genre est-il (enfin) récompensé à sa juste mesure ? McLean réussit-il à faire aussi malsain que son Predation of the Eagle ? Strachan a-t-il rectifié le tir de son trop gentillet The Widow Tide ? Sheil et Cluley ont ils une meilleure connaissance du lore de 40K et Age of Sigmar que Kane ? Autant de questions dont la réponse se trouve dans les pages d’Invocations. Lisez-donc, si vous l’osez…

1 : Troisième si on prend en compte la réédition du Silver Nails de Jack Yeovil.

Invocations

.

The Hunt – D. Annandale [AoS]:

.

The HuntINTRIGUE:

Il y a des réalisations qui peuvent déprimer même le plus optimiste et enthousiaste des individus. Dans notre morne quotidien grimdull, cela peut être le changement climatique, la corruption politique ou la 16ème place du DFCO1. Pour les hardis habitants des Royaumes Mortels, les raisons peuvent s’avérer un peu plus exotiques, comme c’est le cas pour notre héros, le Chasseur de Sorcières Bered Ravan. La déprime de notre fier Répurgateur est en effet causée par le constat implacable qu’une véritable marée de Spectres renfrognés, qu’il est le seul à voir et à entendre, se rapproche insensiblement de lui chaque nuit. À la tête de cet ost sépulcral, une Banshee fort en voix n’en finit plus de roucouler, empêchant Bered de jouir du sommeil réparateur auquel chaque honnête citoyen sigmarite a droit. Bien que notre homme ignore la raison pour laquelle Casper et sa famille élargie en ont après lui, il se doute qu’il a peu de chances de pouvoir plaider sa cause une fois que les ectoplasmes lui auront mis la main dessus, ou plutôt, au travers. Vivant sur du temps emprunté, et ne pouvant que constater à chaque crépuscule l’approche inexorable de ces hordes diaphanes, Bered tire logiquement une tête de six pieds de long, ce qui ne l’empêche pas de répondre à l’appel du devoir lorsque nécessaire.

C’est donc avec empressement que l’inquisiteur répond à la sollicitation de la marchande Thevana Pasala, une ancienne connaissance avec laquelle il a rompu toutes relations il y a de cela bien des années, et pour une excellente raison : alors que tous deux servaient dans la milice locale de leur cité natale, Everyth, soumise aux déprédations régulières des bandes chaotiques de la région avant que Sigmar ne lance sa fameuse royaumetada, Bered fit le choix de déserter son poste de défenseur de la forteresse de Grenholm, assiégée par les séides de Nurgle, pour aller rejoindre les Stormcast Eternals fraîchement matérialisés. Thevana, elle, fit honneur à son serment et combattit jusqu’à la chute du bastion, dont elle fut l’une des rares survivantes. Rongé par la honte et le remords, Bered s’est tenu à distance de son ancienne amie pendant des lustres, mais accepte volontiers d’aller lui rendre une visite professionnelle, découvrant avec un soulagement non feint par la même occasion que la belle ne lui tient pas rigueur de son parjure. Voila qui fait la journée de notre homme, la nuit étant, comme dit plus haut, une toute autre affaire.

Si Thevana l’a fait venir, toutefois, c’est avant tout parce qu’elle a des preuves de l’existence d’un culte chaotique local, comme l’illustrent les gravures profanes retrouvées au flanc des tonneaux de vivres qu’elle comptait expédier à Mhurghast pour soutenir l’effort de guerre. Comme on peut l’imaginer, ces dégradations païennes ont eu un effet délétère sur la nourriture contenue dans les fûts, et la catastrophe n’a été évitée que de justesse (on suppose que les procédures de rappel de marchandises sont aussi efficaces dans les Royaumes Mortels que dans notre bas monde). Sans piste sérieuse à exploiter, Bered décide de rendre une petite visite au tonnelier fournisseur de sa comparse, qui a la mauvaise idée de ne pas faire de discrimination à l’embauche, suscitant de fortes suspicions de la part de notre intolérant zélote. Ayant fait sortir tout le monde pour mieux pouvoir inspecter l’atelier, Bered se fait surprendre dans ses recherches par un cultiste empressé mais maladroit, que notre héros occit d’un bon coup de torche en pleine tête (le danger d’avoir des cheveux gras…). La fouille du corps révélant un double marquage de cultiste Slaaneshi et de milicien de la forteresse de Grenholm, c’est assez logiquement2 que le Répurgateur opte pour se rendre sur place, afin de se confronter à ce mystère en même temps qu’à son passé…

Début spoiler…Ayant convaincu Thevana de l’accompagner (ce qui l’arrange bien car il se sent un peu pétochard sur le coup), ou en tout cas, n’ayant pas fait grand-chose pour la persuader de rester en ville, Bered arrive dans les ruines de la forteresse à la tombée du jour, et réalise que le grand soir est arrivé : les Spectres ne sont plus qu’à quelques kilomètres de sa position, et l’auront rattrapé avant la levée du jour. Déterminé à clore cette enquête avant de partir conter fleurette à tonton Nag’, notre héros pénètre dans la forteresse, Thevana à ses côtés. Sentant l’écurie approcher, les fantômes rattrapent toutefois les aventuriers en quelques minutes, et Bered a au moins la satisfaction de constater que sa collègue peut elle aussi les voir, ce qui le fait se sentir moins seul. Toujours en danger de mort, mais moins seul. Thevana, qui connaît bien les lieux pour y avoir été enterrée vive lorsque la forteresse a été envahie par les Maggotkins, entraîne alors Bered vers une cachette de sa connaissance, qui se révèle être un trou à la base d’un mur. Hésitant à faire le grand saut, Bered est pris totalement au dépourvu lorsque Thevana lui tranche les jarrets et le précipite dans la fosse en question, la marchande se révélant être elle aussi une membre du culte Hédoniste… qui aura décidément attendu bien longtemps pour prendre sa revanche sur celui qui l’a trahi il y a toutes ses années, la poussant de ce fait dans les bras aimants et protecteurs du Prince des Excès, le seul qui ait répondu à ses prières lorsque les sbires de Nurgle ont commencé à déféquer dans tous les couloirs de la forteresse condamnée. Sans doute l’application du principe bien connu du « plus on attend, meilleur c’est ». Enfin, ce que j’en dis… Le triomphe de la cultiste est toutefois de courte durée, la Banshee qui pistait Bered depuis tout ce temps lui tombant sur le râble dans les secondes qui suivent, sans doute dégoûtée de s’être faite coiffée sur le poteau. On apprend par là même que la légion des morts n’en voulait pas à Bered, mais cherchait simplement à le prévenir du triste destin qui l’attendait. Doublement raté donc. Quant à notre héros, littéralement au fond du trou, il ne tardera pas à faire la connaissance du narrateur de l’histoire, qui se trouve être un Gardien des Secrets cataphile, et meurt d’envie de prendre en main son nouveau joujou…Fin spoiler

1 : Au moment de l’écriture de cette chronique.
2 : Je suis assez généreux avec Annandale ici. Bered saute quelques étapes à mon goût en décidant de délocaliser son enquête sur la foi d’une coïncidence somme toute assez facilement explicable.

AVIS:

Connaissez-vous Le K, amis lecteurs ? Cette nouvelle du grand Dino Buzzati met en scène un héros passant toute sa vie à fuir l’approche menaçante d’un gigantesque requin (le fameux K), pensant à tort que le squale cherche à le gober, mais réalisant dans ses derniers instants que ce dernier voulait juste lui remettre une perle de bonheur, dont il meurt avant de pouvoir faire usage. Un classique des classiques, que je ne peux trop vous recommander. Il ne vous aura donc pas échappé que The Hunt est la version aos-ée de ce texte fondateur, qu’Annadale adapte à sa sauce et avec malheureusement plus de bonnes intentions que de réussite.

Si l’idée de la marée de fantômes pourchassant le héros est ainsi excellente dans le cadre d’une nouvelle Warhammer Horror, car elle apporte une dimension indéniablement angoissante à l’histoire, le twist final est trop rapidement expédié pour que la révélation qui l’accompagne fasse vraiment effet. La faute à mes yeux au choix d’Annandale de rajouter un deuxième coup de théâtre, qui tient plus du coup d’épée dans l’eau, avec la trahison de Thevana, qui, elle faisait beaucoup moins mystère (mais avait été « préparée » de façon assez bancale également). Comme cela arrive parfois avec les auteurs de la BL, l’excès de bonnes choses, ou en tout cas d’idées intéressantes, est parfois un mal, et je pense sincèrement que The Hunt aurait été d’un tout autre calibre si Annadale avait simplifié sa copie. On retiendra également de cette nouvelle l’usage, assez rare mais très sympathique je trouve, de la seconde personne du singulier par le narrateur, qui décrit donc en direct toutes les actions du héros jusqu’à ce que ce dernier fasse sa connaissance. En définitive, et malgré les réserves exprimées plus haut, je crois que nous tenons le texte le plus marquant et abouti d’Annadale à ce jour, ce qui est somme toute logique au vu de l’attrait que notre homme a pour le genre horrifique. Il n’y a plus qu’à attendre le prochain recueil pour voir si les progrès se poursuivent…

.

The Confession of Convict Kline – J. Hill [40K]:

.

INTRIGUE:

Confesseur pénitentiaire rattaché à une prison de haute sécurité du monde ruche de Telken’s Rest, Thanaton passe ses journées à tenter d’extorquer des repentirs sincères de la part des condamnés les plus dépravés de la planète. Cette main tendue vers l’âme des misérables qu’il visite n’a beau pas être systématiquement saisie par ces derniers (en même temps, c’est ‘achement dur de saisir une main avec son âme, à moins d’être un psyker), et la pénibilité de sa fonction être chichement prise en compte par son régime de cotisation retraite, Thanaton sait que sa tâche est aussi noble qu’indispensable, la rédemption qu’il arrive (parfois/rarement) à offrir à ses charges faisant reculer d’autant le risque qu’un accident Warp ne se déclenche, la concentration de sociopathes meurtriers et de cultistes convaincus ayant tendance à fragiliser la frontière avec l’Immaterium. Accompagné de son Servo-Crâne Cithaeron et d’une paire de matons aussi amènes qu’une porte de leur lieu de travail, Thany enchaîne donc les visites privées, supervisant l’exécution sommaire des indécrottables païens et permettant aux pénitents convaincus d’embrasser l’utile et musicale carrière d’Arcoflagellants. Qu’il est beau de voir le monte-charge social à l’oeuvre.

Alors que nous suivons notre héros faire vaillamment son devoir au cours d’une journée classique, et traiter une cinquantaine de cas désespérés avec humanité et efficacité, nous arrivons à la dernière cellule du bloc Alpha, où attend un prisonnier particulier à deux égards. Premièrement, le condamné en question, Helleb Kline, est indubitablement et totalement rongé par le remords de ses crimes, et considère son châtiment comme totalement justifié – y compris l’amputation de ses mains et pieds et la fixation de ses moignons par des vis traversantes à sa chaise d’interrogatoire, c’est dire s’il l’a mauvaise. Deuxièmement, Kline, qui a terrorisé le quartier Ecclesiarchique de Telken’s Rest sous le nom du Nightkiller avant d’être appréhendé, servait sous les ordres, comme Thanaton, dont il désire ardemment recevoir le pardon.

Le confesseur, peu habitué à un tel accueil, se montre quelque peu soupçonneux envers le grox galeux qui lui fait face, et se livre à un interrogatoire serré du prisonnier afin de s’assurer de la sincérité du repenti. Ses demandes de précisions sur les meurtres commis par Kline, prêtre dévot ayant soudainement développé une hyperacousie psychotique qui l’a mené à massacrer ses bruyant voisins du dessous dans un accès de rage, puis, de portes qui claquent en acouphènes persistants, à devenir le roi de silence le plus tyrannique et sanguinaire jamais couronné ; mènent Thanaton à identifier des anomalies significatives dans le récit du prétendu Nightkiller. La preuve d’une monumentale erreur judiciaire, conduisant à la libération du malheureux mutilé ? Haha, bien sûr que non voyons. Simplement une nouvelle séance de torture pour Kline, qui se fait matraquer électriquement et consciencieusement par les argousins de Thanaton, afin de l’aider à mettre un peu d’ordre dans ses souvenirs. Cette méthode, pour douce qu’elle soit, ne donne pas les résultats escomptés, Kline s’obstinant à s’emmêler les pinceaux et à s’accuser de crimes plus vieux que lui. Son confesseur finit par perdre patience et menace l’hypocrite et/ou amnésique d’une euthanasie sommaire et damnatoire…

Début spoilerChangeant son fusil d’épaule, mais gardant son bolter à air comprimé braqué sur la tempe du Nightkiller, Thanaton pose la question de savoir qui est le Valgaast que Kline a cité plusieurs fois dans ses précédents interrogatoires, pour des résultats spectaculairement embarrassants. Le gardé à vue // vissé à chaise part en effet en syncope et trouve le moyen de se mordre la langue… alors que toutes ses dents ont été arrachées. Son empathie ayant atteint ses limites, Thany met fin au débat d’une pression sur la gâchette, envoyant l’âme tourmentée du prisonnier nourrir les démons. Bien fait. Ceci fait, le confesseur libère ses acolytes, s’en va pointer et rentre chez lui pour une nuit de sommeil bien méritée. Malheureusement pour lui, le raffut causé par les autres habitants de l’immeuble où se trouve son appartement de fonction viennent perturber le repos de l’aumônier, et lorsqu’il parvient enfin à s’endormir, de terribles rêves viennent le visiter. Ces cauchemars se révèlent toutefois être le cadet des soucis de Thanaton lorsqu’à son réveil il se découvre maculé de sang, le visage tuméfié, et expressément demandé par l’escouade d’Arbites tambourinant à sa porte. Il semblerait que le Silence des Agnostiques ait reçu une suite…Fin spoiler

AVIS:

Hill propose avec The Confession of Convict Kline une nouvelle plus inspirée et mieux réalisée que son seul autre travail précédemment lu par votre serviteur (The Battle for Markgraaf Hive), ce qui n’était, en soit, pas très difficile, mais démontre tout de même une dynamique positive. L’idée « horrifique » déclinée par l’auteur se révèle tout à fait valable et suffisamment clairement intégrée à la narration pour que le lecteur sorte de The Confession… avec une vision claire du but poursuivi par Hill. Comme tout le monde n’y arrive pas au sein de la BL, j’ai pensé qu’il était fair-play de ma part de le souligner ici. On pourrait à la limite regretter la manière un chouilla artificielle avec laquelle l’auteur prépare sa chute1, mais l’ambiance dérangeante propre au genre est bien au rendez-vous, et Hill fait étalage (à quelques reprises) d’une solide technique narrative – comme lors de la scène d’introduction, où la prisonnière que Thanaton finit par faire exécuter par ses gardes se révèle ne pas être Kline, malgré ce que le titre pouvait laisser penser au lecteur. Bref, je ressors de cette confession un peu plus rassuré par le potentiel de la recrue Justin Hill, à laquelle je pense pouvoir accorder, si ce n’est mon absolution, au moins une neutralité bienveillante pour ses prochaines soumissions. Use it well, dude.

1 : « Bon, sans transition aucune, qui est ce mystérieux Valgaast qui apparaît dans votre dossier, Mr Kline ? Vous fracasser la tête sur les montants de votre chaise en baragouinant en flamand n’est pas une réponse convenable, vous savez… ». À noter que le seul Valgaast qui apparaît dans la GW-Fiction à ce jour et à ma connaissance est la ville dans laquelle se trouve ‘The House of Night and Chain’ de David Annandale. Je penchais davantage pour une entité démoniaque, mais peut-être que tout est lié…

.

He Feasts Forever – L. Gray [AoS]:

.

He Feasts ForeverINTRIGUE:

Cuisinier employé à la cour du roi, Dedric mène une vie affairée mais heureuse dans le tumulte et la chaleur de sa brigade d’adoption. La seule ombre au tableau de son existence bien réglée est la relation tendue qu’il entretient avec son frère aîné, une sombre brute du nom de Hodge, qui sert sa majesté en qualité de chasseur. Alors que le roi et son armée, de retour d’une longue campagne, se préparent à faire bombance dans leur château, Hodge se présente avec une nouvelle prise, un jeune cerf que Dedric n’a d’autre choix que de caser tant bien que mal dans un garde-manger déjà plein à craquer, son frangin n’étant pas connu pour sa patience ou son empathie. Plus tard, alors qu’il prépare la carcasse (sur son temps libre), il est interrompu dans sa tâche par un garçonnet apparemment captivé par l’art de la marinade de jarret et de la préparation du bouillon à l’os. Les ravages de Top Chef. Intrigué par cet invité mystère, qu’il ne se souvient pas d’avoir croisé auparavant, Dedric s’entend dire par ce dernier qu’ils se sont pourtant déjà rencontrés sur la Route Orientale, ce qui dit vaguement quelque chose à notre héros. Cette conversion a au moins le mérite de faire réaliser au marmiton qu’il n’a bizarrement que peu de souvenirs de sa vie avant son arrivée dans le château. Les ravages d’Alzheimer.

Décidant d’en avoir le cœur net, Dedric s’ouvre à Hodge à ce sujet, récoltant une fraternelle clé de bras et une menace de mort pour sa peine (ce qui était à prévoir), mais également la confirmation tacite que ce dernier a également la mémoire qui flanche à propos de son origin story. Cette confrontation fait remonter d’autres souvenirs, assez déplaisants, à Dedric, qui revit des bribes d’une orgie de protéines crues, ingérées de manière contrainte en compagnie d’individus répugnants. Et, non, ce n’est pas d’une session de all you can eat dans un sushi shop miteux du 13ème arrondissement dont il est question ici… De retour dans sa cuisine, Dédé croise à nouveau le mystérieux garçon, qui se montre cette fois un peu plus prolixe dans sa conversation, et finit par cracher le morceau (ce qui est particulièrement dégoûtant dans un endroit où la nourriture est stockée) à son interlocuteur…

Début spoiler…Ils se sont bien croisés, et très récemment qui plus est. Le jeunot voyageait avec sa famille sur une route près du château, lorsqu’ils ont été embusqués par une bande de goules, qui ont massacré et dévoré (et pas forcément dans cet ordre) les voyageurs. Son cadavre a alors été ramené par Hodge jusqu’aux cuisines royales, où Dedric – qui a dû courir très vite reprendre son poste pour arriver avant son frère, et se prendre un sévère coup de louche de la part du chef pour avoir oublié cet événement aussi sec – l’a pris en charge, pensant avoir affaire à un cerf. Ce qui explique mieux l’intérêt du fantôme pour les petits plats de notre héros, qui sort totalement de la matrix et réalise qu’il n’est qu’un rat in a cage une goule dans une ruine. Ainsi décillé, et assez normalement horrifié par le tour grotesque qu’a pris sa vie depuis que sa propre famille se soit fait boulotter quelques années plus tôt, son frère et lui étant changés en mordants après avoir été gavés de barbaque humaine par leurs assaillants, Dedric s’enfuit de la cour cannibale qu’il fréquentait à son insu, jusqu’à croiser une charrette se rendant jusqu’à Mhurghast. Désireux de refaire sa vie, il demande aux occupants de cette dernière de le prendre à bord, proposant, en dédommagement pour son passage, de les faire bénéficier de ses extraordinaires talents de cuisinier…Fin spoiler

AVIS:

Lora Gray poursuit l’exploration des côtés sombres des factions d’Age of Sigmar avec une nouvelle bien pensée et tournée, tirant le meilleur parti de la cruelle et terrifiante illusion collective qui frappe les Flesh-Eaters Courts. Comme dans Crimson Snow, Gray ne se montre pas avare en détails macabres et gores, ce qui est ce que l’on attend d’une nouvelle de Warhammer Horror, et donc tout à fait approprié (mais bien dégueu tout de même…). On pourra seulement reprocher à cette solide soumission que sa révélation centrale, le soit justement de façon littérale. La mindblowing révélation qui frappe Dedric arrive en effet aux deux tiers du récit, débouchant sur une longue « conclusion » qui à mon sens n’apporte pas grand-chose à ce dernier. Je fais ma fine bouche, mais s’il y a bien une nouvelle où cela est approprié, c’est sans doute He Feasts Forever (superbe titre, au passage).

.

Stitches – N. Kyme [40K]:

.

StitchesINTRIGUE:

Bucher est un médecin militaire rattaché au 66ème Valgaast, et, de son propre aveu, plutôt mauvais dans l’exercice de ses fonctions. Confronté à un afflux constant de blessés et de mourants, le Doc’ fait de son mieux pour sauver les patients placés sous sa charge, mais les résultats sont loin d’être à la hauteur. En plus des déficiences professionnelles et de l’alcoolisme patent de notre héros, le fait que les braves Gardes Impériaux de Valgaast soient confrontés à des cultistes de Nurgle n’augmente évidemment par leurs chances de survie, en plus de nécessiter des désinfections régulières à coup de lance-flammes. Ayant été témoin d’un cas désespéré de parasitisme infectieux, Bucher reprend ses fonctions quelques jours plus tard, toujours marqué par cette expérience traumatisante, mais également anxieux d’arriver à améliorer ses statistiques de mortalité, qui sont, justement, un peu trop mortelles (ce qui est plutôt une mauvaise chose, convenons-en). Le médecin redoute en effet que son incapacité chronique à sauver la vie des ses camarades de régiment ne pousse sa hiérarchie à le muter en première ligne et à donner son poste à l’un de ses sous-fifres, ce qui constituerait une évolution professionnelle regrettable.

Malheureusement pour lui, et en dépit de ses meilleurs efforts, l’incompétent Bucher (ou le très compétent boucher) termine sa garde sur un 0/7 peu probant, aucun des blessés transférés dans son bloc n’ayant survécu. Ce terrible constat d’échec est interrompu par un bruit particulier, semblable à un poisson échoué se débattant sur le sol. Une brève inspection des locaux permet au Dr Mamort d’identifier la source du problème : un poumon égaré derrière un brancard, qui, extraordinairement, semble respirer. Pris d’une inspiration subite, et allant à l’encontre de toutes les règles d’hygiène les plus élémentaires ainsi (et c’est beaucoup plus grave au 41ème millénaire) que de tous les enseignements du culte impérial, Bucher ramasse l’organe, et décide de le greffer sur le cadavre de son dernier patient, dont le décès a justement été causée par une insuffisance respiratoire. Bien évidemment, l’opération est un succès, et le soldat Gruemann revient d’entre les morts quelques minutes après la fin de l’opération, et est renvoyé au front par un Bucher incrédule mais ravi.

Persuadé d’avoir été béni par l’Empereur, et bénéficiant d’une réserve conséquente d’organes dans laquelle piocher grâce aux nombreux Valgaastiens tombés au champ d’honneur depuis le début de la campagne, Bucher se mue en Dr Strange du Militarum, réussissant à remettre sur pied tous les cas, mêmes les plus désespérés, qui lui sont envoyés, grâce l’animation miraculeuse des pièces détachées organiques qu’il conserve dans son cabinet. Ces brillants états de service attirent l’attention du Colonel Rake, qui remercie Bucher en affectant à son service un aide soignant du nom de Renhaus… ce qui est bien la dernière chose que notre héros souhaitait. Sans doute conscient au fond de lui même que ses nouveaux talents sont un chouilla suspect, Bucher jalouse également Renhaus, qui, lui, est véritablement compétent. La cohabitation entre Jekyll et Hyde ne dure cependant pas longtemps, Bucher assassinant, puis découpant, Renhaus alors que ce dernier cherchait la source d’un bruit particulier, que le bon Docteur ne voulait absolument pas qu’il trouve.

Cet équarrissage frénétique et psychotique terminé, Bucher réalise que la base est devenue très calme, les canons du poste de commandement s’étant tus pour la première fois depuis le début des opérations. Cherchant à comprendre la cause de cet armistice, il sort de son bloc et monte à la surface, où il ne peut que constater que le régiment n’est plus constitué que de Zombies de la Peste, Colonel Rake compris. Réalisant que ses opérations miraculeuses ont permis la propagation de l’infection que le patient 0 – celui colonisé par un immonde ver solitaire, et incinéré par ses camarades en début de nouvelle – portait, Bucher finit sa carrière et sa vie entre les mains de ses anciens patients, décidés à se faire une petite partie de Dr Maboul pour passer le temps. Comme quoi, l’acharnement thérapeutique peut avoir des conséquences vraiment négatives…

AVIS:

That’s it folks ! Après des années et des dizaines de nouvelles variant du moyen au comiquement mauvais, je pense que nous tenons avec Stitches le meilleur court format de Nick Kyme à ce jour, et, chose appréciable, il est plutôt bon en plus d’être supérieur à ses autres soumissions (ce qui n’était pas un gage de qualité intrinsèque, comme exposé ci-dessus). Cet huis-clos macabre et sanglant bénéficie en effet d’une atmosphère glauque particulièrement efficace, faisant la part belle aux illusions de grandeur d’un héros minable mais de bonne foi, auquel on peut simplement reprocher d’avoir fait passer son intérêt personnel avant le bien commun. Sans défaut manifeste tant sur le fond que sur la forme, et beaucoup plus inspiré que la moyenne Kymesque, Stitches est sans aucun doute la nouvelle de cet auteur que je conseillerais à tous ceux qui voudraient découvrir ce dernier (avant de leur recommander de ne pas aller plus loin, sauf peut-être pour Blueblood). Qu’il soit donc solennellement acté que je n’aurais pas dit que du mal de la prose de Nick Kyme dans mes critiques, ce qui démontre bien que la persévérance (et la résilience) est toujours récompensée. J’espère bien que je n’aurais pas à attendre 2024 pour tresser d’autres lauriers à notre homme, même si je me garderai bien de le considérer comme tiré d’affaire d’un point de vue littéraire. Pour rester dans la continuité de cette nouvelle, le patient Kyme est sorti des soins intensifs et a été placé en observation, dans un état grave mais stable.

.

The Healer – S. Shiel [AoS]:

.

INTRIGUE:

Guérrisseuse itinérante, Mère Zinka traverse le Great Parch dans sa petite roulotte, prodiguant des soins aux nécessiteux des villages et hameaux isolés qui parsèment sa route. Lorsque son aide est demandée par la jeune Adirene, dont le père a contracté une méchante bubonite, Zinka n’hésite pas une seconde à faire halte chez les affligés, où elle parvient à chasser le mal tourmentant le brave homme d’une imposition des mains parfaitement exécutée. Tout à leur joie de constater la rémission inespérée du moribond, les villageois ne remarquent pas que la guérisseuse repart d’un pas las se reposer dans son mobil home après s’être dissimulé le visage sous un châle1.

Témoins de l’efficacité de l’infirmière libérale, les Aqshyiens n’hésitent pas à la solliciter pour qu’elle les guérisse de leurs propres maux, ce que Zinka ne peut refuser de faire. Seul le forgeron Konrath fait figure d’oiseau de mauvais augure, questionnant tout haut la source des pouvoirs de leur hôte, et prévenant ses concitoyens qu’ils auront à payer le prix de ces soi-disant miracles.  Le séjour de la bonne Mère s’éternise donc, chaque session de thaumaturgie laissant la praticienne affaiblie, et nécessitant une nuit de repos complet dans sa caravane, d’où elle ressort fraîche et dispose le lendemain matin, prête à soulager la misère du monde. Cet échange de bons procédés trouve toutefois une conclusion tragique lorsqu’une famille provenant d’un village voisin arrive sans crier gare pour exposer son cas à la Mère Zinka. Profitant de l’absence de cette dernière, Adirene, fascinée par le personnage et convaincue que sa vocation est de devenir l’apprentie de Zinka, se glisse jusque dans la roulotte de la voyageuse, où elle est persuadée de trouver le secret de ses pouvoirs…

Début spoiler…Et si c’est bien le cas, la vérité n’est toutefois pas très reluisante. Réveillée par l’intrusion d’Adirene, une créature cauchemardesque se lève pesamment et se dirige vers la fillette, dont le cri d’effroi attire tous les villageois des alentours, ainsi que Mère Zinka, qui avait sagement préféré se déclarer incompétente pour le dernier cas qui lui avait été présenté, une tourista Mhurghastienne de stade terminal2. Comprenant que son secret a été éventé, Zinka cherche à retenir Adirene, mais la fillette parvient à se dégager, avant d’aller se fracasser le crâne sur la borne kilométrique devant laquelle la guérisseuse avait garé son véhicule. La mort tragique d’Adirene passe cependant rapidement au second plan lorsque le fiston de Zinka émerge de la roulotte maternelle, provoquant une réaction extrême dans l’assistance.

Réceptacle de tous les maux que sa mère a extirpé de ses patients au fil des années, qu’elle prenait littéralement sur elle avant de les lui repasser, Zinko est l’incarnation même d’un centre de traitement de déchets nucléaires, et n’a donc vraiment pas une gueule de porte bonheur. Dans la confusion qui s’en suit, Zinka se fait poignarder à mort par le père d’Adirene – plutôt ingrat pour le coup – qui se fait lui-même ouvrir en deux par le mutant quelques secondes plus tard, comme la plupart des villageois ayant eu la mauvaise idée de se confronter à Zinko. Au cours de ses derniers instants, la guérisseuse mal inspirée (elle était persuadée que Sigmar les élèverait, elle et son fils, en Stormcast Eternals en récompense des services rendus) ne peut qu’assister au départ de son fils et de Konrath, qui se révèle être un cultiste de Nurgle (ce qui explique pourquoi il était si chafouin de l’arrivée de Zinka) dans la forêt toute proche, où le jeunot trouvera sans aucun doute une famille d’adoption un peu plus aimante. C’est tout le mal qu’on lui souhaite, en tout cas.Fin spoiler

: Cela aurait été gonflé de la part d’anti-vaxx de faire un procès en laïcité à leur sauveuse. Tous coupables aux yeux de la République vous êtes, mauvais citoyens.
: Le sujet commence à se dévorer lui-même, en commençant par les morceaux les plus tendres, tels que les yeux.

AVIS:

Débuts réussis de la part de Steven Shiel avec cette histoire de pacte méphistophélique à la sauce Age of Sigmar, suffisamment bien exécuté pour que la non-surprise de sa conclusion (il est rapidement évident que Mère Zinka dissimule un lourd secret) ne vienne pas ternir le plaisir de lecture. En particulier, j’ai trouvé l’idée de la foi dévoyée en Sigmar de la protagoniste être une très bonne inclusion de la part de Shiel : il est somme toute logique que des Sigmarites cherchent à gagner les bonnes grâces de leur divinité tutélaire pour devenir des Stormcast Eternals, qui ne sont rien de moins que des demi-dieux immortels (ce qui est un statut intrinsèquement supérieur à celui du péquenot moyen), et que certains prennent des décisions un peu trop extrêmes dans leur quête de reconnaissance. La figure de Mère Zinka, guérisseuse totalement dévouée à sa cause et objectivement bonne, sauf à l’encontre du fils qu’elle a choisi de sacrifier pour le bien commun1… mais pas seulement, est particulièrement réussie, et met parfaitement en lumière l’impossible manichéisme du culte de Sigmar.

1 : Le syndrome de Münchhausen par procuration peut prendre des proportions invraisemblables dans les Royaumes Mortels.

.

Blood Sacrifice – P. McLean [40K]:

.

Blood SacrificeINTRIGUE:

Après les événements traumatiques de Baphomet (Baphomet by Night, que votre serviteur n’a pas encore lu au moment où cette chronique est écrite), le Caporal Cully et le 45ème Reslian, respectivement héros et régiment préféré de McLean (No Hero, Predation of the Eagle) servent maintenant sur le monde ruche de Voltoth, où ils se préparent à défendre la ruche Lemegeton contre les assauts d’une Waaagh !. Pour le moment, et en attendant Godork, les braves bidasses s’occupent à creuser des latrines et autres activités réglementaires mais pas très fun, sous les ordres du Sergent Kallin, remplaçant (f)rigide du défunt Rachain. Au hasard d’une innocente discussion avec ce bon vieux Lopata, dans tous les bons plans (et pas uniquement parce qu’il est le trafiquant du régiment), et promu lui aussi au rang de Caporal, Cully se laisse embarquer dans une expédition clandestine à l’arrière des lignes impériales, où un contact de Loppy est prêt à mettre le prix pour obtenir la livraison à domicile d’un colis mystérieux. Notre héros endeuillé accepte donc de partir en balade après la fin de son service, en compagnie de quelques vétérans triés sur le volet, dont les têtes connues Varus (la scout la moins efficace du monde, aperçue dans No Hero) et Steeleye (la sniper défigurée et morveuse – mais ce n’est pas vraiment sa faute – de Predation of the Eagle).

Après une marche d’approche rapidement expédiée et sans grand intérêt, notre mauvaise troupe parvient sur les lieux du deal, qui se trouve être une sorte de clinique abandonnée, et donc absolument pas creepy pour commencer. Pas du tout. J’insiste. Prudence étant mère de sûreté, les livreurs Deliveroo approchent en formation de combat, et se font accueillir par un duo de Serviteurs aides soignants très possessifs de leur territoire. La rencontre se passe aussi mal que l’on peut l’espérer, et notre escouade subit ses premières pertes (dont le soldat Tarran, ce qui illustre bien le fait que le fluff est toujours la première perte à 40K), même si les coriaces Reslian parviennent à se débarrasser de leurs assaillants après une période de flottement initiale. Les choses ne se passant certes pas comme elles étaient sensées le faire, et avec déjà deux morts violentes à justifier auprès de l’état-major à leur retour, nos héros décident malgré tout de pousser leur chance un peu plus loin, et fouillent les ruines à la recherche du contact de Lopata. En chemin, alertés par des cris de souffrance déchirants, ils découvrent un malheureux citoyen de Legemeton en plein processus de transformation en Serviteur, sans lobotomie ni anesthésie préalables. Ayant mis fin au calvaire du quidam, les vertueux Gardes Impériaux décident de tirer cette sombre et sanglante affaire au clair, et de démanteler cette sinistre entreprise avant de repartir vers leur caserne. Des intentions louables, qui ne seront pas récompensées à leur juste valeur…

Début spoiler…La suite de la nouvelle voit la petite bande poursuivre sa plongée dans l’horreur médicale, perdant d’autres membres à chaque nouvelle rencontre avec les « infirmiers1 », jusqu’à rencontrer les véritables responsables de ce cauchemar hospitalier, et comprendre leurs motivations. Associée au ganger Dareus Vorn, la Magos Genetor Babette Vitzkowski a lancé son entreprise de fabrication de Serviteurs de combat à destination des riches ruchiers terrifiés par l’arrivée prochaine des Orks, et s’est mise à recruter des sujets de chair et de sang pour servir de base à ses créations sans se soucier de recueillir leur accord préalable. Se sentant, à juste titre, menacé par son imposante et implacable partenaire, Vorn s’est arrangé pour faire venir sur place Lopata et ses collègues sous prétexte d’une opération de contrebande, espérant que les Gardes Impériaux parviendront à régler son compte à la Genetor dans la foulée. Notre brave Babette, femme de science avant tout, s’est elle montrée intéressée par la possibilité d’expérimenter sur des sujets entraînés aux choses de la guerre, ce qu’elle avait déjà fait sur deux soldats Reslian (Sharrik et Ells), portés disparus quelque temps auparavant.

La rencontre finale entre les Pro-Life et les Pro-Choice se passe en trois temps, la première voyant Vorn lâcher les restes de Sharrik et Ells sur leurs anciens camarades, sans trop d’effet sur ces derniers, déjà réduits à un quartet de personnages nommés, et dont l’armure de scenarium s’avère trop épaisse pour les cyborgs expérimentaux. Cette armure ne sauvera cependant pas Steeleye d’un headshot fatal expédié par le fourbe Vorn, qui n’aura guère le temps de savourer ce tir avant que les trois derniers Reslian ne lui tombent dessus et le tabassent à mort. Le projet de Cully, Varus et Lopata de faire passer Babette à la casserole se heurteront toutefois à une fin de non recevoir ferme et définitive, la Genetor liquidant froidement chaudement (plasma oblige) l’homme qui murmurait à l’oreille des Orks, avant de lobotomiser la scout d’un piercing frontal express. Isolé et confronté à un adversaire beaucoup trop balèze pour lui, l’héroïque Cully fera son devoir de la manière la plus appropriée et naturelle pour un soldat de la Garde Impériale… C’est à dire qu’il se fera bolosser pendant la phase de corps à corps qui suivra, après avoir lamentablement raté son tir en état d’alerte. Comme le dit bien Babette avant de sceller le destin corporel du malheureux Caporal : « L’Empereur n’a pas de pitié ».Fin spoiler

: Dans ce contexte, comprendre qu’ils transforment leurs patients en infirmes.

AVIS:

Grimdark, vous avez dit grimdark ? Comme c’est put*in de grimdark ! McLean offre à ses personnages du 45ème Reslian une sortie de piste aussi brutale que sinistre, et donc tout à fait appropriée pour une soumission Warhammer Horror. On ne peut que compatir avec nos braves bidasses, dont la transition des aventures vers le nouveau segment horrifique de la BL, alors qu’elles avaient commencé classiquement par du 40K lambda, les a condamnés à un sort peu enviable. Leur auteur et bourreau met avec ce Blood Sacrifice un point final sanglant à ce petit arc narratif (sauf si Cully fait une apparition à la Agun Soric dans une prochaine soumission, ce que je ne lui souhaite pas), qui se sera révélé de bonne qualité et aura donné un contrepoint d’une noirceur et d’un nihilisme conséquents aux aventures, autrement plus héroïques, des Fantômes de Gaunt. Si on peut reprocher à Abnett de ne pas savoir tuer ses héros (une règle de base dans l’écriture romanesque), cette réprimande ne peut pas être adressé à McLean, preuve à l’appui. Je plains les futurs protagonistes de notre homme, en même temps qu’il me tarde de les connaître, car leurs vies ne risquent pas d’être de tout repos…

.

The Growing Seasons – R. Strachan [AoS]:

.

INTRIGUE:

Dans un coin perdu de Ghyran, au fond d’une vallée isolée du reste du Royaume, une petite communauté humaine vit dans une simplicité heureuse et le respect des commandements vitaux (et pas des commandements de Vitoo, qui sont un peu différents, mais restent dans l’esprit1). Nous faisons la connaissance de la famille du chef spirituel de nos braves péquenauds, Fletch, alors que ce dernier se prépare pour aller prendre sa place dans ce qui peut être décrit comme le carnaval local : la Procession Féconde. Déguisé en Grand Chasseur Vert, qui semble être un cosplay très poussé d’Orion, Fletch mène ainsi les fidèles dans une balade autour de la vallée, jusqu’à arriver devant l’Arbre des Libations, qui doit être dûment arrosé2 afin d’honorer les traditions centenaires assurant à la Vallée Cachée sa prospérité. La cérémonie est toutefois interrompue avant son terme par l’arrivée d’un individu titubant et nauséeux, qui se trouve être Eilert, le fils fugueur de Fletch, ayant précédemment quitté la maison familiale et son village natale pour explorer le vaste monde, à la grande honte de ses parents. Le voici donc revenu en ce moment décisif, et si certaines voix s’élèvent pour que le déserteur soit chassé séance tenante (on a la rancune tenace dans les campagnes), Fletch et Hedda (femme d’icelui) se laissent convaincre d’héberger le fils prodigue, au moins le temps qu’il se refasse une santé. Dans la confusion, les ruraux s’en retournent à leurs masures sans avoir uriné sur arrosé l’Arbre des Libations, ce que Fletch prend plutôt à la rigolade. Evidemment, cet oubli aura des conséquences fâcheuses, et notre héros s’en voudra longtemps de ne pas avoir pris les cinq minutes nécessaires au respect de la tradition (je parie que sa vessie était pleine à ce moment, en plus).

Quelques mois plus tard, et alors que les récoltes sont prêtes à être lancées, Fletch est appelé à conduire un nouveau rituel pour débuter la saison de la Ferveur : le sacrifice d’une chèvre au milieu des champs en grains de la vallée. Préoccupé par la réintégration, pourtant assez réussie, d’Eilert dans la communauté, notre héros doit également composer avec, oh comme c’est étonnant, quelques cas d’une nouvelle maladie dont ni l’origine, ni l’antidote, ne sont connues. La cérémonie se passe cependant très mal, et pas que pour la chèvre, qui déverse un torrent d’asticots au lieu du sang attendu lorsque Fletch lui fait rendre gorge. Ce très mauvais présage, confirmé quelques jours plus tard par la perte de l’intégralité de la récolte, qui pourrit sur pied et se fait dévorer par des nuées d’insectes, n’est pas sans provoquer des remous parmi les villageois, d’autant plus que les cas de maladies se déclarent de plus en plus rapidement. Dépassés et effrayés par la situation, les bouseux souhaitent s’en remettre aux bonnes vieilles méthodes, comme l’incinération de sorcières (ils sont moyen chauds pour s’en remettre à un bouc émissaire, après le foin causé par le dernier), ou à défaut, le lynchage d’étrangers, Eilert dans le cas présent. Ayant réussi à calmer, au moins pour un temps, les velléités sanguinaires de ses concitoyens, et convaincu ces derniers que la meilleure solution à leur problème était de se mettre en quarantaine et d’éviter de prendre des douches (ce qui est à la fois merveilleusement altruiste et parfaitement suicidaire), Fletch n’a plus qu’à espérer que la situation va s’améliorer.

Spoiler alert. La situation ne s’améliore pas. Au contraire, la riante petite vallée se transforme petit à petit en Zombieland, forçant les rescapés, de moins en moins nombreux et de plus en plus paranoïaques, à prendre des mesures drastiques, comme enfermer chez eux les villageois trop atteints par le mal en attendant qu’ils crament leurs derniers PV. Dans ce cauchemar permanent, Fletch a au moins le réconfort de pouvoir compter sur une famille unie, jusqu’à ce que son deuxième fils, Peer, fasse une poussée de Nurglisme aiguë, annoncée par une thelaziasis de mauvais augure. Pour ne rien arranger, un groupe de péquenauds désespérés décide de purger l’infection en bastonnant les individus suspectés d’avoir provoqué cette dernière, ce qui n’exclut pas grand monde au final. Flecht parvient tout juste à épargner le gourdin à Eilert, mais doit se résoudre à s’appliquer sa propre médecine et à s’enfermer avec ses proches dans leur maison…

Début spoiler…La fin n’est pas longue à venir à partir de ce moment. La santé des claquemurés se détériore rapidement, jusqu’à forcer le pater familias à confiner ses femmes et enfants à l’étage. Lui-même mal en point, il prend la décision de partir en beauté et met le feu à sa maison, en se gardant bien d’en sortir. Dans ses derniers moments, alors qu’il contemple la ruine qu’est devenue sa vallée bien-aimée, il a l’ultime douleur de voir Eilert, clairement marqué comme un Elu de Nurgle, repartir de la vallée avec son baluchon sur l’épaule. Comme quoi, on a bien tort de ne pas faire confiance au bon sens paysan.Fin spoiler

1 : Comme tromper son mari/sa femme avec 16 personnes différentes. Très bon pour le brassage génétique.
2 : Comme Strachan décrit le tronc comme marqué par des centaines d’années d’offrandes et que la procession s’arrête tous les cent mètres pour que ses participants boivent un coup, on ne m’ôtera pas l’esprit que la consécration de l’arbre passe simplement par un coup de goupillon (procédé tellement peu naturel).

AVIS:

Pour sa deuxième soumission pour le compte de la Black Library, cette fois dans un format un peu plus conséquent que son initial The Widow Tide, Richard Strachan livre une version pestiférée des Quatre Saisons, qui, si elle s’avère plus aboutie que son travail précédent, n’est pas non plus, à l’instar du mystérieux Eilert, exempt de tous soupçons. En sa faveur, retenons une narration maîtrisée, la descente dans l’horreur de la Vallée Cachée, vue à travers les yeux de Fletch, se déroulant avec une implacable logique, depuis les discrets signes avant coureurs négligés par les personnages jusqu’à l’annexion totale et définitive de ce coin de Ghyran par les promoteurs de Papy Nurgle. D’un autre côté, on peut se demander si tout cet espace était nécessaire – autrement que pour instiller au récit une ambiance désespérée, s’entend – à l’aune de l’intrigue simpliste qui sous-tend ce récit. Car, oui, celui que tout indique comme le coupable est coupable, et comme notre héros est trop borné pour remonter sa piste, cette pourriture d’Eilert aura la partie facile du début à la fin de la nouvelle. Cela aurait pu se comprendre si Strachan avait donné au lecteur autre chose d’intéressant, comme une explication sur la manière dont le cultiste s’y est pris pour contaminer toute la vallée, mais rien de tel ne sera explicité1. Bref, plus de forme certes, mais pour la substance, nous n’y sommes toujours pas.

1 : La relecture de la nouvelle m’a de plus fait noter que des fleurs aux formes suspectes étaient présentes dans l’écosystème local (et connues des villageois, puisque leur guérisseur recommande de les suspendre à la porte des maisons pour combattre l’infection) avant le retour d’Eilert. Du coup, une explication sur qui a fait quoi et comment n’aurait pas été de trop.

.

Supplication – J. Ozga [AoS]:

.

INTRIGUE:

Meet your hero, Jondo1 : esprit libre au sein d’une tribu de libres penseurs, il a rompu tous liens avec sa famille et ses amis pour aller vivre avec son crush dans une petite maison construite de leurs mains dans les profondeurs sauvages de Ghur. Protégés par les pouvoirs de dissimulation de la donzelle (Jando, du coup), le couple a vécu heureux pendant des décennies, jusqu’à ce que la maladie, puis la mort de sa femme entraîne chez Jon une crise existentielle bien compréhensible. Témoin des changements affectant la région, et de la progression d’une sorte de pourriture incurable, dont sa femme, plus sensible que lui à cette malédiction, n’est qu’une des victimes, notre héros décide d’aller rendre une visite de courtoisie à ses proches – qui ne le sont plus vraiment –, après avoir donné des funérailles dignes de ce nom à son aimée (il fout le feu à leur maison, égorge tous leurs animaux, et part avec le crâne de Jan à la ceinture : pretty brutal). Signe d’une démence déjà bien prononcée, ou des pouvoirs persistants de la défunte enchanteresse, Jon entend la voix de sa femme dans sa tête, et les deux peuvent dialoguer de temps à autre, comme au bon vieux temps.

Après quelques journées, et autant de pages, de trek bucolique dans un paysage de plus en plus marqué par ce que l’on ne peut qualifier que d’influence chaotique, Jon finit par rencontrer les premiers habitants de la vallée où le reste de sa tribu s’est installée, il y a de cela fort longtemps. Et, horreur et consternation, la procession qu’il voit déambuler sur la route est constituée de junkies Slaaneshi de la pire espèce, ce que notre hardi et vieux bûcheron ne peut supporter. Il faudra toute la diplomatie post-mortem de Jan pour le convaincre de ne pas foncer dans le tas avec sa cognée, combat qu’il aurait eu du mal à remporter malgré toute sa vaillance. Un peu plus tard, après avoir échappé à des arbres carnivores, Jon tombe sur une Démonette donnant une représentation du Lac des Cygnes au bord d’une rivière. Destiné à devenir le f*ckboy du démon et/ou à rejoindre son orchestre de choristes coralliens, il n’est sauvé que par l’intervention décisive (du crâne) de sa femme faisant comprendre à la petite débauchée démoniaque que Jon est déjà pris. La tentatrice laisse donc partir notre héros à regret et reprend ses entrechats, non sans lui avoir promis qu’un destin de toute beauté l’attendait. Mauvais cygne pour mauvais signe, si vous voulez mon avis…

Début spoiler…Finalement, Jon arrive au bled et le trouve déserté, ce qui n’est guère étonnant au vu des traces de la bataille ayant pris place à cet endroit entre les suppôts de Slaanesh et les habitants de la ville. Au centre de cette dernière se trouve un autel construit à partir des squelettes de la biodiversité locale, mais la visite touristique de Jon est rapidement interrompue par la survenue d’une foule de cultistes, qui l’amènent manu slaneshii jusqu’à la structure osseuse, après qu’il ait corrigé quelques uns de ces galapiats pour leur peine. De l’autel se matérialise un Prince Démon, avec lequel la perfide Jan a passé un marché en échange des soins palliatifs que son mari lui a refusé pendant les derniers mois de sa vie (ou quelque chose comme ça). Réalisant la trahison dont il a fait l’objet, Jon tente de mobiliser ses racines de Khorneux repenti, mais ne parvient à rien de concluant avant que le PD ne le balance dans le slime mutant qu’il a préparé avec les survivants de sa tribu, ce qui revient à un game over dans les Royaumes Mortels. Pas de morale à cette histoire, si ce n’est que l’euthanasie a parfois du bon… I guess ?Fin spoiler

1 : Par convention, Ozga ne révélant pas les patronymes de ses personnages.

AVIS:

Pour ses débuts au sein de la Black Library, Jake Ozga choisit de s’écarter des chemins battus stylistiques de la maison, et de livrer une copie un peu moins « terre à terre » que la moyenne. Depuis les personnages non nommés jusqu’à la large part dédiée aux descriptions par rapport à l’action, en passant par le rythme contemplatif de la narration, Supplication est à mon avis assez proche de ce que pourrait produire Brian Craig s’il débutait dans la GW-Fiction de nos jours. Ayant un faible pour les mises en scènes intrigantes des Royaumes du Chaos, j’ai été plutôt gâté avec cette nouvelle, qui n’est pas avare en manifestations démoniaques et dérangeantes, bien qu’elle se déroule en théorie en Ghur. Seule la conclusion, que j’ai trouvé un peu faible, de cette histoire est venue ternir une performance autrement très solide de la part du nouveau venu Ozga, qui semble bien parti pour apporter un peu de variété aux récits autrement assez standardisés de la BL.

.

From the Halls, the Silence – D. Annandale [40K]:

.

INTRIGUE:

Appelée au chevet du Prêcheur Tabin Garanthias, qui sent la mort arriver et souhaite faire une dernière confession avant rejoindre la droite de l’Empereur, l’Inquistrice Evenya Kaelstrop de l’Ordo Malleus parvient, après quelques difficultés1, à trouver la piaule du mourant. Cela est plutôt gentil de sa part, car, comme elle le fait remarquer à son hôte après être arrivée, ce n’est pas vraiment le boulot de la Sainte Inquisition d’écouter les auto-critiques des sujets impériaux, fussent-ils, comme pour notre ami Tabin, des saints en puissance. Mais Garanthias, après être passé par une phase de désorientation sévère relevant la gravité de son état2, a le bon goût de préciser que la confession qu’il a à faire est de celles qui intéressent les Ordos. Et notre homme sait de quoi il parle, ayant lui même servi comme acolyte inquisitorial au début de sa carrière.

Attaché à l’Inquisiteur Herod Nestyr de l’Ordo Malleus, dont toute trace a disparu de Winquipedia (le wiki spécialisé et ultra confidentiel de l’Inquisition), le Prêcheur accompagna son maître – dont il était le seul suivant, à croire que les restrictions budgétaires touchent aussi les hauts fonctionnaires impériaux – sur la planète de Solus afin d’investiguer sur des allégations anonymes de corruption de la famille régnante, les Strock. Une fois n’est pas coutume, Nestyr laissa son acolyte prendre connaissance du dossier afin qu’il se forge une opinion personnelle, donnant à Tabin une idée précise de l’affaire. À peine arrivés, les enquêteurs eurent la désagréable surprise d’être invités à dîner par une autre lignée locale influente, les Montfor, illustrant par là même que leur venue sur Solus n’avait pas été aussi discrète qu’ils souhaitaient qu’elle fût. Peu enclins à passer une soirée à discuter le bout de gras – qui est justement le plat typique de la planète, et une autre raison d’éviter les réceptions officielles de Solus – avec des hôtes à la réputation aussi sulfureuse que celle des Strock était immaculée, Nestyr et Tabin posèrent un lapin aux Montfor, et optèrent à la place pour un premier repérage de la demeure de leur suspect, la Gouverneur planétaire Garwinn Strock. Quand on sait que la bicoque en question s’appellait Malveil, et se situait dans la ville de Valgaast, on comprend rapidement que les choses vont mal se passer pour nos intrépides enquêteurs…

Les choses commencèrent en effet à tourner au vinaigre lorsque Nestyr, plus sensible, ou plus psychiquement affûté, que son sous-fifre, fût pris d’une crise d’angoisse au niveau du portail de la bâtisse. Revenu dans sa planque, il prit le parti de retourner seul à Malveil pour tenter d’y voir plus clair sur la nature du mal demeurant dans ces vieilles pierres, soupçonnant fortement une présence démoniaque de hanter la demeure. Et il ne parlait pas de Stéphane Plaza. Laissé seul comme un chihuahua dans le triplex de Paris Hilton, ou un enfant McCallister le lendemain d’un départ en vacances, Tab’ a attendu, attendu, mais Nestyr n’est jamais venu (il a pourtant sifflé tant qu’il a pu). Pour ne rien arranger, les affaires de son maître disparaissent subitement alors qu’il avait à son tour pris le chemin de Malveil (avant de réaliser que c’était complètement con de le faire à un moment où il ne pourrait pas dissimuler sa présence), et personne ne semble se souvenir que Nestyr ait été présent pour commencer…

Déterminé à retrouver la trace de son patron, Tabin finit par se rendre pour de bon à Malveil, où il réussit trois tests de Commandement successifs (un pour chaque signe flippant laissé par le démon domestique à son attention : un portail qui s’ouvre tout seul, la rosette, puis le manteau de Nestyr laissés en évidence sur son chemin) avant de craquer lamentablement et de s’enfuir en courant3. Cette fuite emmènera notre héros à quitter la planète, puis l’Ordo Malleus, sans tarder, et débuter une carrière dans le Ministorum à l’autre bout de la galaxie, sans jamais avoir la certitude que la présence maléfique de Malveil avait lâché sa piste pour de bon. D’ailleurs, la confession de Tabin n’est pas plutôt terminée que la porte du presbythère claque très fort, distrayant Kaelstrom juste assez longtemps pour que le vieil homme disparaisse corps et bien (il n’en avait qu’un : la rosette de Nestyr) à son tour dans un abominable hurlement d’effroi. À son retour dans la chambre du prêtre, plongée dans un silence de mort, l’Inquisitrice ne peut que constater la volatilisation de Tabin et de son badge de dresseur Pokémon, sans doute happés par un Fantominus made in Warp. Hello silence my old fiend…

1 : Il est probable que le monde de Caligo, où se déroule notre histoire, n’est pas encore passé à la 5G. En même temps, attendre une connexion rapide dans une ville qui se nomme Stagnum, c’est peut-être faire preuve d’un trop grand optimisme.
2 : Comment expliquer sinon qu’il s’inquiète que l’Inquisitrice ait des doutes à son égard… Alors qu’il est la personne qui l’a faite venir. Les ravages de la vieillesse
3 : En même temps, au vu de la tournure prise par les événements, les seules choses qui pouvaient attendre Tabin à l’intérieur étaient soit un démon sadique et assoiffé de sang, soit un Inquisiteur ayant terminé un strip tease intégral. Aucune option n’était tentante.

AVIS:

Annandale s’exerce à un nouveau type d’horreur avec ce From the Halls, the Silence (très bon titre d’ailleurs), et met en scène une présence démoniaque dont on ne saura finalement pas grand-chose, et que l’on ne verra jamais à l’oeuvre, dans une nouvelle empruntant à des classiques tels que Le Horla (l’antagoniste invisible et omnipotent). Et bien que le premier réflexe du lecteur habitué de la BL (le mien en tout cas) soit de regretter que la nature du persécuteur de Tabin ne soit pas explicitée, ce qui aurait été logique pour un récit prenant place dans un univers où les démons sont aussi précisément connus que Warhammer 40.000 (alors que les écrivains du 19ème siècle pouvaient s’en tirer avec une vague mention du diable), j’en suis venu à considérer avec un peu de recul que ce mystère sert le propos d’Annandale plus qu’il ne l’affaiblit. En tout état de cause, il donne envie de lire The House of Night and Chain, auquel From the Halls… est intimement lié, afin de savoir si le destin, sans aucun doute funeste, de l’Inquisiteur Nestyr est révélé, et d’en apprendre plus sur le mal qui rôde dans Malveil. Bref, une soumission solide de la part de David Annandale, et d’autant plus si on l’aborde avec des yeux « neufs ». À bas les augmétiques, pour une fois.

.

A Sending from the Grave – C. L. Werner [AoS]:

.

INTRIGUE:

La petite ville de Sigmarograd vit dans la terreur d’un tueur mystérieux, laissant derrière lui les cadavres de ses victimes complètement carbonisés. Isolée dans un marais fétide dont les eaux saumâtres attirent (de façon assez peu intuitive je dois dire) les comètes d’Azyr, ce qui a fait la prospérité de la cité, Sigmarograd se retrouve fort dépourvue maintenant que le light gheist s’en est (re)venu. Après avoir branché un honnête chercheur de fer pour se faire la main, le disjonctueur s’est mis à hanter les rues de la ville, avec un attrait particulier pour les membres de la famille Petrovovich. Nous suivons les événements se dérouler aux côtés d’Ivana, la testeuse de métal (assayer) municipale, dont l’affection, réciproque mais contrariée par des parents peu amènes, pour l’un des Petrovovich (Vassili), va placer malgré elle au cœur de l’intrigue. Espérant toujours le retour de son promis, engagé dans les armées de Sigmar depuis maintenant dix ans, Ivana semble être protégée des déprédations électriques de l’esprit vengeur, que ni la milice locale, ni les arquebusiers Duardin envoyés par la Guilde Ironweld protéger ses fournisseurs (et ses intérêts, par la même occasion), ne parviennent à mettre hors d’état de nuire.

Quand le Knight-Incantor Arnhault (déjà aperçu dans Sacrosaint, et donc reforgé de frais) arrive à son tour à Sigmarograd pour poursuivre son enquête sur les effets débilitants de la Reforge sur les Stormcast Eternals, les pièces du puzzle ne tardent pas à se mettre en place. Le sagace Arnhault parviendra-t-il à mettre fin aux ravages de son « ancien collègue », sans que ce dernier ne fasse de nouvelles victimes civiles, et en apprenant un peu plus sur la déperdition d’énergie et de mémoire qui frappe les Elus de Sigmar à chaque passage à la case l’enclume départ ? Pas évident… Pas évident du tout…

AVIS:

A Sending from the Grave m’a laissé avec un sentiment mitigé. Si Werner – à présent lancé dans une parenthèse russophone, après ses péripéties japonisantes – sait toujours comment embarquer le lecteur dans ses récits, cette nouvelle aurait à mon sens gagné à être plus courte et plus directe dans son approche. En premier lieu, la présence d’Arnault au casting ne tombait pas sous le sens, et tient plus du caméo raté1 que de l’arrivée du chevalier blanc. D’autre part, cela aurait donné une chance à la révélation finale sur laquelle Werner a bâti son récit de surprendre le lecteur. Au lieu de ça, le suspens est grandement éventé au fil des pages, et des révélations et supputations que les personnages émettent au fur et à mesure que le bodycount progresse. Si on ajoute à cela le fait que l’auteur n’apporte aucun nouvel élément fluff sur la malédiction de la Reforge, qui constituait, ou aurait dû constituer, si nous sommes honnêtes, la partie la plus intéressante de la nouvelle, la déception l’emporte largement.

1 : Peut-être encore marqué par sa propre Reforge, le Knight-Incantor se plante dans les grandes largeurs, le piège qu’il conçoit pour attirer le light gheist à lui ne fonctionnant pas des masses, et conduisant son « appât » à une mort peu enviable, juste avant que le Stormcast déformé – plutôt que réformé – n’aille se suicider sur un tas de caillou.

.

Flesh and Blood – R. Cluley [AoS]:

.

INTRIGUE:

La vie est dure pour les habitants de Broken Cove, ville portuaire des Iles Trois Fois Maudites (Thrice Cursed Islands) du Royaume de Shyish. En plus des émanations délétères qui recouvrent fréquemment la cité, et apportent la pourriture pulmonaire (lung-rot) aux malheureux qui les respirent, le voisinage est également un problème, les goules de l’Île Muette (Mute Island) toute proche considérant les dodus et juteux citoyens de Broken Cove avec un sinistre intérêt. C’est pour cela que les autorités municipales ont institué un système de redevance charnelle, à travers lequel les malades, infirmes et vieillards de Broken Cove sont envoyés en pension sur l’Île Muette afin d’apaiser les appétits carnassiers des Mordants qui y résident. Ce système, dont notre héros, Loukas, est une des chevilles ouvrières, du fait de son rôle de takerman, a fonctionné pour un temps, jusqu’à ce qu’un beau matin, les goules décident de partir en virée au supermarché d’en face (il y a de grandes chances qu’elles le voient de cette manière en tout cas), et débarquent au port de Broken Cove depuis le navire qui était censé leur apporter le dernier chargement d’invalides.

Surpris, comme tous ses concitoyens, de la tournure prise par les événements, Loukas n’a d’autre choix que de prendre ses jambes à son cou, s’il veut garder les unes comme l’autre intacts. Dans une reprise post-apocalyptique de « Oh ! J’cours tout seul » (William Sheller1), notre maton à mi-temps se battra (un peu, et autant avec des goules qu’avec une milicienne dont il a eu la mauvaise idée de « recruter » le paternel quelques semaines plus tôt) et se cachera (beaucoup), en essayant vaguement de trouver les deux seules personnes qui comptent à ses yeux : la vendeuse de fleurs Amberyn à laquelle il faisait du bringue, puis, par défaut, sa vieille môman malade, dont il a dissimulé l’état pour ne pas qu’elle soit elle aussi envoyée en cure sur l’Île Muette. Malheureusement pour eux, Loukas s’avère être plus doué en phrases de dragueur beauf qu’en maniement des armes, et l’arrivée d’un groupe de goules passablement affamées jusqu’à son appartement du second étage2 viendra mettre un terme à ces touchantes retrouvailles de façon définitive. They only hit until you die. // After that you don’t ask why… (cos u ded)

1 : S’il avait choisi « Je marche seul » (Jean-Jacques Goldman), la nouvelle aurait duré 3 pages.
2 : C’est forcément le second étage. La chanson est formelle.

AVIS:

Bizarre et inaboutie nouvelle que ce Flesh and Blood, avec lequel Ray Cluley signe des débuts contrastés pour la Black Library. Si le propos est indéniablement horrifique, dans la frange gore du concept, le lecteur se retrouve face à de nombreuses questions sans réponses après avoir fini cette soumission, qui tient plus de la course poursuite (perdue par le héros) dans The Walking Dead que du récit d’aventures dans les Royaumes Mortels. Ainsi, on ne saura pas pourquoi ni, surtout, comment (les cartes montrant bien la distance entre les Îles Trois Fois Maudite et l’Île Muette1) les goules se sont rendues à Broken Cove, qui est la Matriarche qui mène ses troupes, et pourquoi elle tient tant à allaiter un enfant humain (ce qui ne se passe pas très bien, comme on peut l’imaginer), ou plus généralement, quels sont les tenants et les aboutissants de l’intrigue. Mis à part Loukas, les autres personnages convoqués par Cluley apparaissent et disparaissent sans avoir d’impact sur l’histoire, à l’image de l’évanescente Amberyn, que l’on ne verra jamais vraiment de la nouvelle, ou la milicienne (non nommée) qui se fritte avec et contre le héros pendant un tiers du récit, avant de se faire boulotter hors champ par la random ghoul. Bref, et à moins que Cluley ne se décide à approfondir un peu plus son sujet avec ses prochaines soumissions – ce qui risque d’être difficile, tous ses personnages finissant Flesh and Blood littéralement estomaqués – je reste franchement sur ma faim. Un comble.

1 : À moins que Cluley ait confondu les cannibales dégénérés d’Age of Sigmar et les piratesses de Requiem.

.

The Summons of Shadows – D. Annandale [40K]:

.

INTRIGUE:

Hakob Maltenus est un adepte de bas niveau sur le monde ruche en déréliction de Fumus, vivant seul depuis vingt ans et le « recrutement » de sa femme (Velya) et de ses fils jumeaux (Ballan & Ulys) dans les rangs de… la Garde Impériale, je suppose – même si l’intérêt de cette dernière d’intégrer des gamins de 10 ans dans ses rangs reste à prouver – alors que lui a bénéficié d’une exemption en raison de son corps de lâche et sa santé fragile. Quand on vous disait que c’est tous des planqués à la fonction publique territoriale. Quoi qu’il en soit, 20 ans c’est long, et il ne se passe pas un jour pendant lequel Hakob ne pense à sa famille disparue (surtout à Velya pour être honnête, il n’arrive plus trop à différencier les jumeaux), entre deux compilations de rapports aussi inutiles qu’obsolètes. The Imperium Dream en quelque sorte.

Cette monotone mélancolie est interrompue de la pire des façons lorsque Hakob se met à ressentir la présence de ses êtres chers, et plutôt en mode Resident Evil que Casper. Distrait dans son travail par ces sinistres épiphanies à répétition, notre scribe asthmatique finit par mettre la main sur un document faisant état de la destruction du vaisseau dans lequel sa smala a embarqué il y a bien longtemps, victime d’une grossière erreur administrative ayant conduit à l’explosion de ses réacteurs plasma. Sans doute un travail bâclé par un vacataire peu concerné, moi je dis. En tout cas, cette réalisation laisse notre héros tout chose, puisqu’elle signifie que non seulement il ne reverra plus jamais ses femme et enfants (il continuait à espérer, le faible), mais en plus, que ces derniers sont morts de la façon la plus stupide et inutile possible, et pas en servant l’Immortel Empereur sur le champ de bataille, comme il se le représentait. Bref, grosse ambiance sur Fumus.

Alors qu’il rentre chez lui après avoir terminé son service, Hakob continue de voir apparaître ses chers disparus à l’angle des rues ou au détour d’un virage, toujours de manière vaguement menaçante et totalement angoissante. Les préliminaires s’arrêtent lorsqu’une présence indistincte mais indubitablement hostile commence à se rapprocher en grognant de notre héros, qui tape alors son meilleur sprint (ce qui ne doit pas être fameux) pour aller s’enfermer dans la chambre vide de sa maison vide, pas pour écouter une symphonie ou regarder passer les oiseaux servo-crânes, non, mais pour échapper à un destin qui finira pourtant par le rattraper… et le manger. Vous vous en doutez, le poursuivant de Hakob n’était autre que l’esprit vengeur de ses proches, fusionnés dans une triplette mutante assez grotesque, et assez peu satisfaite du pater familias. Les repas de famille alors, quelle corvée parfois…

AVIS:

Publiée à l’origine dans le White Dwarf de Mai 2019 (et traduite en français sous le nom de L’Appel des Ombres), The Summon of Shadows est un très court format (7 pages) où la forme prend assez logiquement le pas sur le fond. Pour une histoire d’horreur, cela veut surtout dire qu’Annandale a intégré à son texte le plus d’éléments creepy possibles, avec une thématique spectrale fortement mise en avant. Si on ajoute à cela l’auto-clin d’œil qu’il fait à The House of Night and Chain avec une mention de Valgaast, où se déroule l’intrigue de ce roman, il ne reste guère de place pour traiter des questions aussi importantes que : « Pourquoi/comment les esprits de la famille de Hakob lui apparaissent-ils subitement ? », « Pourquoi lui en veulent-ils, alors qu’il ne semble être responsable ni de leur conscription, ni de la destruction de leur vaisseau ? », ou encore « Si la « matérialisation » des esprits dans un corps matériel fait suite au souhait formulé par Hakob, cela veut-il dire qu’il est un psyker, ou bien y a-t-il une tierce partie maléfique (et un peu troll) à l’oeuvre ? ». En définitive, on peut sans doute affirmer qu’Annandale aurait mieux réussi son coup s’il avait disposé d’un peu plus d’espace pour cadrer son récit, le choix de la vague présente menaçante (From the Halls, the Silence) ayant ses limites. Petite consolation pour les anglophones, j’ai trouvé le texte un poil meilleur en VO, comparé à la VF proposée dans le White Dwarf en question, qui sonnait trop artificielle pour que l’ambiance dérangeante esquissée par l’auteur prenne vraiment. L’horreur est un genre délicat…

***

En guise de conclusion, reconnaissons à Invocations, et à travers lui, à la gamme Warhammer Horror, une progression nette par rapport au recueil initial (Maledictions). La qualité globale de cet opus m’a ainsi semblé sensiblement supérieure, et, si je dois confesser que J. C. Stearns détient toujours la palme de la nouvelle horrifique la plus réussie de la GW-Fiction avec The Maraudeur LivesInvocations contient de bien solides soumissions (He Feasts Forever, Stitches, Blood Sacrifice, The Healer, Supplication). Une autre qualité de ce second volet est l’absence de travaux « décevants », état de grâce dont son prédécesseur n’avait pas bénéficié. Ainsi, et contrairement à ce que le line up proposé me faisait craindre, Invocations n’inclut que des nouvelles variant du « respectable » au « réussi », et constitue de ce fait le choix le plus judicieux pour qui souhaite donner sa chance à la littérature d’horreur made in Black Library. Attendons de voir si le dernier tome de cette trilogie fondatrice (Anathemas, Mars 2020) relève encore davantage le niveau…

Autre signe d’une plus grande maturité, ou en tout cas, d’une plus grande ambition de la BL par rapport à son nouveau terrain de jeu, les liens, plus ou moins évidents, établis entre les histoires se déroulant dans l’univers de Warhammer 40.000 (les mentions faites à Vargaast, où se trouve The House of Dark and Chain de David Annandale) et celles prenant place dans les Royaumes Mortels (Mhurghast, le Castle of Blood de C. L. Werner). Il est trop tôt pour établir si nous en resterons au stade du simple clin d’œil, ou si un effort éditorial plus conséquent sera entrepris par la Black Library pour créer une sorte de « meta-univers » horrifique dans chacune de ses franchises majeures, mais nous sommes quoi qu’il en soit en présence d’une initiative que je trouve louable.

Plus solide sur le fond et doté d’une (pour le moment positivement) intrigante unicité, Invocations marque donc une progression nette par rapport à son prédécesseur. On ne peut qu’espérer que l’ouvrage fera lui aussi l’objet d’une traduction française dans les mois à venir, comme cela a été acté pour Maledictions, afin que le public francophone puisse poursuivre son immersion dans les eaux troubles et glauques de Warhammer Horror.