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BLACK LIBRARY CELEBRATION WEEK 2024 [Recueil]

Bonjour et bienvenue dans cette revue de la Black Library Celebration Week 2024, publiée par la BL à la fin du mois de février 2024 (pas de surprise jusqu’ici), deux semaines après le lancement des festivités annuelles de la maison d’édition de Nottingham (voir par exemple la revue du recueil gratuit de la Black Celebration 2024, ici). Pas de surprise au niveau du contenu proposé ici : cinq nouvelles inédites de 40K et d’Age of Sigmar – il faudra s’habituer à ne plus avoir de soumission pour l’Hérésie d’Horus désormais – mettant en scène des héros et des auteurs amenés à prendre de l’importance dans les mois à venir… ou tellement connus qu’on ne les présente même plus, comme l’indéboulonnable Gotrek Gurnisson, qui nous fait l’honneur d’un petit caméo dans ‘The Beast of Grey Gardens’.

Black Library Celebration Week 2024

On retrouve ainsi Mike Brooks et ses boyz (‘Painboyz’), John French et son vampire itinérant (‘Cannibal Gate’), et deux associations plus nouvelles pour le lecteur : R. S. Wilt et les Tempestus Scions (‘Eradicant’) et Jude Reid et Morvenn Vahl (‘The Reskard Purgation’). Si on sait déjà à l’heure où ces lignes sont écrites que Brooks, French et Reid ont un roman en stock pour leurs héros (respectivement ‘Da Big Dakka’ et ‘ Dead Kingdom’ et ‘Spear of Faith’), rien n’a circulé pour l’instant sur ce que le futur réserve à Gotrek (on peut juste parier sur le fait qu’il ne va pas mourir de sitôt) et aux fiers fantassins de l’Astra Militarum. Rendez-vous dans quelques temps pour refaire le point sur la situation, et en bas de cette ligne pour commencer la revue de cette semaine festive.

Black Library Celebration 2024 - Eshorts Week

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Painboyz– M. Brooks [40K] :

INTRIGUE :

PainboyzLe Painboy attitré d’Ufthak Blackhawk, Doc Drozfang, a emmené ses élèves, larbins et tous les Orks désœuvrés qui zonaient dans le coin dans une excursion à but pédagogique : la visite d’un authentique laboratoire d’Haemonculus drukhari, découvert à l’occasion de l’invasion par notre Waaagh ! préférée d’un repaire d’Eldars Noirs. Comme le professe volontiers un Drozfang philozof à ses heures perdues, rien de tel que d’entrer au cœur des choses pour mieux les comprendre, qu’il s’agisse d’un abdomen d’Ork ou d’une infirmerie zoneille. Là-dessus, nous sommes bien d’accord.

Cependant, les précédents occupants des lieux n’ont pas encore mis à exécution l’obligation de quitter le territoire laboratoire qu’une marée de Boyz belliqueux emporte systématiquement avec elle, et les Spikies commence à faire de la résistance, embusquant les trainards peaux-vertes et renvoyant leurs restes mutilés sur leurs camarades… ce qui fait bien rire ces derniers. Il en faut plus que ça pour effrayer un Ork, c’est certain (pour les Grots, ça se discute par contre), d’autant plus si la perspective d’une bonne bagarre se concrétisera s’il parvient à mettre la pogne sur ses tourmenteurs.

Au bout de quelques menus accrochages, une bande de Grotesques accompagnés par un Talos dessiccat(u)eur finit par donner l’assaut aux intrus, qui ne demandaient pas mieux et répondent au sadisme clinique des Drukharis par une violence débridée. Au plus fort de la mêlée, Drozfang aperçoit son vis-à-vis, qui commande ses troupes pusillanimement depuis l’arrière, et lui décoche une rafale de fling’ qui, à la surprise générale, atteint sa cible et détruit le générateur d’anti-gravité de l’Eldar Noir. Statistiquement, ce genre de dinguerie devait bien se produire un jour, et c’est maintenant le cas grâce à Mike Brooks.

Ni une ni deux, Drozafang profite de la détresse de l’Haemonculus pour lui mettre la griffe dessus et le ramener avec lui dans sa retraite stratégique jusqu’au vaisseau des Orks, jugeant avec sagesse qu’il est préférable d’avoir un local sous (et dans) la main pour négocier le dédale crépusculaire d’une base drukhari sans se perdre. La patience du praticien a cependant ses limites, et après avoir assisté au gonflement fatal du Nob Grubsnik, victime d’une hypertrophie musculaire subite après avoir été méchamment griffé par un Grotesque quelques instants plus tôt, le bon Dok décide de faire goûter au Spiky captif sa propre médecine et lui perfore la cage thoracique d’un revers de griffe énergétique, après avoir tranché la main qui était sur le point de le palper sans son autorisation. On ne saura pas si l’opération a été fatale à l’Haemonculus (une espèce notoirement dure au mal), mais elle permet en tout cas à Drozfang d’avoir le mal et le mot de la fin, ce qui est bien la moindre des choses…

AVIS :

Mike Brooks continue sa revue des personnages secondaires entourant le Big Boss Ufthak Blackhawk dans ce ‘Painboyz’, qui met en vedette le Dok Drozfang, responsable de la greffe de la tête de notre héros sur le corps de son précédent patron (‘Where dere’s the Warp, dere’s a way’), transition qui a joué un rôle non négligeable dans l’élévation de cette buse de Blackhawk dans la hiérarchie de sa Waaagh. Nous avons donc droit à une petite escapade dans le laboratoire d’un Haemonculus, qui se déroule de manière tout à fait classique et se termine sans que Brooks ne se soit donné la peine de nous expliquer si cette péripétie sert à faire avancer l’intrigue globale de son arc orkoïde1 (appelons ça un ark), ou a juste servi à donner à Drozfang ses quinze pages/minutes de gloire devant le lectorat de la Black Library. À titre personnel, je penche pour la seconde option et regrette la « gratuité » de cette soumission, rendue d’autant plus triste par l’intrigue vraiment minimaliste que nous propose Mike Brooks. Tous les auteurs ne sont pas égaux lorsqu’il s’agit d’écrire l’histoire d’un aller-retour…

1 : Peut-être que la main de l’Haemonculus que Drozfang garde en souvenir aura une importance par la suite (ou a servi à quelque chose dans un des romans que Brooks a déjà écrits), mais je suis incapable de vous éclairer sur ce sujet à l’heure actuelle.
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Cannibal Gate – J. French [AoS] :

INTRIGUE :

Cannibal GateToujours en quête de l’insaisissable Main Enflammée responsable de la chute de son royaume lors de l’Âge du Chaos, il y a de cela des éons, Cado Ezechiar a.k.a. le Roi Vide a pris la route de Lethis a.k.a. la Cité de la Corneille après avoir été rencardé sur la présence de sa Némésis dans cette humble bourgade. Sachant fort bien que sa proie risque de lui filer entre les doigts (ce qui est ballot pour une Main, mais celle-ci est peut-être moite), comme lors des 708.259 épisodes précédents de sa traque, Cado s’est risqué à prendre le chemin le plus direct, qui l’emmène dans une contrée plus mal famée que la moyenne puisqu’occupée par une colonie de goules.

Alors qu’il se prépare à passer le portail marquant l’entrée de leur domaine pour poursuivre sa route (malgré les sages conseils de sa mentor Solia, l’une des neuf âmes sauvées par notre héros lors de la déchéance de son royaume, et stockées dans les anneaux que Cado porte aux doigts), il est arrêté par un courtisan Flesh-Eater et son escorte de nécrophages, qui lui indiquent que la loi locale demande à ce que le passage soit payé par un tribut au roi. N’ayant pas d’autre choix que d’obtempérer, Cado rend visite au monarque en question (Azoquor), qui exige que cet étranger « bestial et ignoble » (venant d’une goule, c’est savoureux) aille terrasser les monstres qui hantent ses terres depuis quelques semaines, et dont ses armées affaiblies ne parviennent pas à se débarrasser. Après avoir juré sur l’épée rouillée du souverain d’accomplir sa volonté, Cado se met en chasse.

Pas plus bête que le lecteur moyen de la Black Library, notre héros se doute bien qu’il y a une chance non nulle pour que les « monstres » en question se révèlent être des mortels tout ce qu’il y a de plus banal, sans doute l’expédition de croisés azyrites dont il a détecté le passage quelques jours plus tôt, d’ailleurs. Si ce cas de figure devait se vérifier, Cado jure à une Solia horrifiée par la promesse hâtive1 faite par son patron à cette grande goule d’Azoquor qu’il reniera sa parole et tâchera de trouver un autre moyen de gagner Lethis, et tant pis si ça lui rallonge un peu le chemin. Il ne sera pas dit que le Roi Vide soit devenu complice de la folie collective de ses cousins Flesh-Eaters, allons !

Sur ces entrefaites, la route du vampire et de son spectre de compagnie croise celle d’un groupe d’humains nimbés d’une aura étrange et d’une lumière stroboscopique trop violente pour les sens délicats de Cado, qui tombe en pâmoison avant de n’avoir pu faire plus ample connaissance avec les nouveaux venus. A son réveil, il se découvre enchaîné par des fers enchantés (alors que lui pas du tout, mais ça se comprend), et à la merci d’un Mage-Forgeron qui ne s’appelle pas Valentin – faîtes ce que vous voulez de cette information. La situation est critique, mais une honnête conversation entre gens éduqués devrait permettre de tout tirer au clair, pas vrai ?

Début spoiler…Il s’avère en fait que Valentino et ses comparses ne sont pas les vertueux croisés azyrites dont ils ont dérobés les habits et armures (ce qui a un temps abusé Cado lorsqu’il a émergé de son coltar), mais bien un Sorcier de Slaanesh et sa bande de joyeux et pervers sycophantes, ce qui est à la fois une mauvaise et une bonne nouvelle pour notre héros. Certes, il se trouve en bien mauvaise posture, avec un tison enflammé qui s’approche dangereusement près de son anatomie, mais au moins les monstres qu’Azoquor l’a envoyé occire sont bel et bien des sales types, et leur mort n’entachera pas son absence de conscience. Comme quoi on peut être creux et principiel en même temps.

Comme lors de son affrontement contre Voltekar et sa clique de squelettes (‘Blood Bound’), Cado dégaine son arme secrète et cheat code digital en matérialisant son dragon zombie Herezai, dont l’arrivée impromptue et les grands claquements de mâchoire suffisent à distraire les Slaaneshis suffisamment longtemps pour que le Roi Vide se débarrasse de ses chaînes et de Valentino, dûment jugularisé par notre vampire assoiffé. La suite n’est qu’une formalité, les cultistes et Gors accompagnant le Sorcier exsangue ne faisant pas le poids contre le vampire et son dragon.

Retour chez Azoquor pour terminer la nouvelle, et remise au souverain de quelques cadavres frais en signe de respect et d’amitié. Bien que le monarque s’offusque du refus de Cado de participer au festin qu’il donnera pour marquer la fin de l’incursion des monstres sur son paisible domaine, il lui permet malgré tout de poursuivre sa route sans plus de condition, et lui offre même un cadeau (un éclat de fémur pointu) marquant Cado Ezechiar comme un hôte distingué par le roi cannibale. Nul doute que cette babiole d’un goût douteux servira par la suite…Fin spoiler

1 : C’est donc ça qu’on appelle un serment de l’instant ?

AVIS :

La route de Cado Ezechiar se poursuit dans cette nouvelle, continuation logique de celles écrites antérieurement par John French (et probablement du roman ‘The Hollow King’) à propos de la quête vengeresse de son personnage tourmenté. Le résultat est égal aux épisodes précédents : assez agréable à lire et donnant à voir la noblesse contrariée – et les armes digitales complètement fumées, à croire qu’il y a des Jokaeros dans les Royaumes Mortels – du Roi Vide, aux prises avec des alliés de circonstance et des ennemis peu fréquentables… ou peut-être est-ce l’inverse. Pas mal.

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Eradicant – R. S. Wilt [40K] :

INTRIGUE :

EradicantNous suivons une bande de hardis, ardents et ardus Scions Tempestus déployés avec leur régiment sur la planète Tecerriot pour tenter d’y rétablir un semblant d’ordre, alors qu’ils se préparent à mener à bien une mission de sauvetage à haut risque. Leur cible n’est autre que le Gouverneur Planétaire Marschesik, assiégé dans son palais par des hordes de rebelles renforcés et motivés par la présence de World Eaters, sans doute attirés par le penchant coupable de Tecerriot pour les arènes gladiatoriales (sans rire, il y en a des centaines sur la planète, dixit le personnage-qui-nous-resoort-le-biefing-pour-faire-un-peu-d-exposition). Le hic, c’est que si Marschesik devait décéder dans l’exercice de ses fonctions, la puce que lui a implanté l’Adeptus Mechanicus dans le torse au moment de son élévation à cette charge exaltée provoquerait un black out complet sur Tecerriot. Apparemment, c’était le seul moyen de s’assurer que la personne du Gouverneur reste sacrée aux yeux de son indocile populace : on vous laisse imaginer le nombre et l’intensité de mouvements de gilets jaunes que ce monde a connu pour en arriver à cette extrémité. C’est d’ailleurs peut-être ce qui nous pend au nez à force de balancer des œufs, des gifles et des sacs de farine à la tronche de nos élus, dans le fond.

L’objectif des fringants lascars du Tempestor Traxel (le vétéran Norroll, la pieuse Bissot, le radio Actis, le spécialiste en démolition et en tour de passe passe Durlo, et la medic et nouvelle recrue Daviland) est donc aussi simple que délicat : infiltrer le palais du Gouverneur, récupérer ce dernier et l’exfiltrer en direction du QG de la Garde Impériale, afin que sa mort ne vienne pas compliquer la pacification de Tecerriot. Dit comme ça, c’est tout bête, mais évidemment les choses ne vont pas dérouler sans accroc.

Après une marche d’approche dans les ruines de la capitale planétaire et l’ascension des étages du palais par les escaliers (il faut bien s’échauffer), la fine équipe finit par accéder à l’aile résidentielle de l’édifice, où elle rencontre ses premiers adversaires en la personne de quelques Jakhals (Jakhaux ?) s’amusant à faire du porte à porte avec les survivants terrifiés de l’attaque sur le complexe gouvernemental. Rien que notre fine équipe ne soit en mesure de gérer haut la main, bien sûr, et les Scions repartent même avec une nouvelle mascotte en la personne du jeune Tormod, fils d’un couple de hauts fonctionnaires sauvagement massacrés par les cultistes, et que Traxel insiste pour secourir malgré les réticences du reste de son escouade.

Cette générosité est récompensée quelques minutes plus tard, lorsque leur nouvelle recrue leur indique comment pénétrer dans l’arène du palais sans attirer l’attention, et ainsi être témoin du supplice du pauvre Marschesik, ligoté sur son trône et forcé d’assister au Mortal Kombat opposant les membres de sa maisonnée, sous les quolibets d’une troupe de Jakhals goguenards et l’imposant patronage d’un Maître des Exécutions World Eaters.

N’étant pas venus pour empiler des merles, les Scions passent à l’attaque et parviennent de haute lutte à remporter la victoire grâce à leur matos de pointe et leur entraînement supérieur, non sans avoir perdu l’un des leurs (Actis) et un membre (la main de Traxel) dans la bagarre. Il ne reste cependant plus qu’à appeler la cavalerie et à quitter les lieux, et la mission sera accomplie…

Début spoiler…Seulement voilà, Marschesik en a malheureusement trop vu, et est à deux doigts de se faire posséder par le Démon Kha’Dragh Bloodhunger (parce que Blooddrinker, c’est déjà pris tu vois) au moment de sa libération. Le bon sens de Trael lui permet cependant de faire le bon choix et de coller un bolt dans le crâne du Gouverneur avant sa désincarnation, au grand horreur de Daviland qui révèle alors qu’elle a été missionnée par le Commissaire Fennech (que tout le monde à part elle semble cordialement détester, pour des raisons non-explicitées) afin de déterminer la fiabilité de l’escouade.

Tout cela est fort haletant, mais la priorité reste malgré tout d’évacuer les lieux avant d’être submergé par les vagues de cultistes attirés par le bruit des combats et la mort de leur chef, et au bout d’une nouvelle baston homérique, les survivants éprouvés parviennent à embarquer dans une Valkyrie et à repartir en direction de leurs pénates (avec Tormod, dont le rôle dans cette nouvelle reste un chouilla cryptique1). Sur le chemin du retour, Traxel parvient à se justifier auprès de Daviland, qui se résout à laisser au charismatique officier une nouvelle chance plutôt que d’aller le balancer à ce renard de Fennech. Un peu de souplesse n’a jamais tué personne.Fin spoiler

: Nul doute que ça se décantera dans le futur. Et, oui, je voulais faire cette blague.

AVIS :

R. S. Wilt se frotte à l’un des genres rois de la GW-Fiction, version 40K, dans cet ‘Eradicant’ qui nous embarque dans une mission de Gardes Impériaux d’élite, dans la lignée des travaux de Dan Abnett avec ses Fantômes de Gaunt, et plus récemment de ceux de Rachel Harrison et ses Fusiliers d’Antari. Bien que cette nouvelle ne soit pas mémorable (ce qui n’est guère étonnant), Wilt livre une copie très convenable, puisqu’il parvient à singulariser chacun de ses personnages, met en scène d’action tout à fait correctes, et conclut son propos d’une manière un tant soit peu surprenante : difficile de demander plus que ça à une première incursion dans l’univers ultra-compétitif de la GI-Fiction. Vu les indices laissés par Wilt (le personnage de Tormod, la mention du Commissaire Fennech), il est fort probable que ce ne soit pas la dernière fois qu’on entende parler des Scions Tempestus de l’Eradicant One, et je suis à ce stade plutôt intéressé pour connaître la suite de leur histoire.

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The Beast of Grey Gardens – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE:

The Beast of Grey GardensArrivé à Eaux Grises après un voyage relativement sans encombre, en tout cas pour lui (‘The One Road’), Gotrek Gurnisson s’est engagé dans le premier gang d’égoutiers venu – les Loose Cannons de Sorrol Tun – afin de gagner sa croûte et son eau de vie (mais pas celle à laquelle il pensait, et ça a dû le mettre en rogne). Au sein de cette noble autant qu’utile profession, chargée entre autres travaux d’intérêt public de débarrasser la mégalopole ghyranite de son infestation récurrente de Zombies, les Loose Cannons font figure de parias, et héritent donc des missions les plus ingrates et dangereuses qui soient. Pas de quoi faire frémir notre Tueur préféré cependant, qui n’a pas besoin de forcer son talent ni d’utiliser ses deux mains ou de faire descendre son taux d’alcoolémie sous les trois grammes pour débiter les hordes de morts vivants qui hantent les égouts d’Eaux Grises. Il a vu (et tué) bien pire, en son jeune temps.

Enhardi par la réalisation que sa nouvelle recrue est une véritable machine de guerre, Tun décide d’aller se frotter à un plus gros morceau, à savoir la légendaire Cockatrice des Jardins Gris, figure du folklore local que peu ont vu mais dont la sinistre réputation n’est plus à faire. Un tel spécimen valant son poids volume en Aqua Ghyranis, la joyeuse bande se met en chasse du serpent à plumes/poulet à écailles avec un enthousiasme inversement proportionnel à ses capacités martiales.

Fort heureusement pour les Loose Cannons (sauf pour la pauvre Greenhilde, dont la fierté l’a empêché de baisser les yeux au moment opportun), avoir un clutch slayer est parfois suffisant pour remporter une escarmouche contre un monstre nommé. Au terme d’un combat poussiéreux et ténébreux, Gotrek met ainsu un terme aux déprédations de Bruno Cockatrice1 en lui plantant sa hache ébréchée dans le bréchet, à peine aidé par la diversion faite par ses camarades alors que le dindon chaotique était en train de le chicoter. Tout est bien qui finit bien (et à la taverne la plus proche), même si les Loose Cannons devraient sans doute apprendre à se défendre par leurs propres moyens, car leur égoutier star ne restera sans doute pas très longtemps parmi eux….

1 : Ce qui est au fond assez malheureux car la bestiole ne se nourrissait que de Goules et de Skavens, et rendait donc un service écosystémique à la population d’Eaux Grises.

AVIS:

David Guymer renoue avec les fondamentaux de la nouvelle de Gotrek avec ce ‘The Beast of Grey Gardens’, qui permet à notre rouquin teigneux de compléter son tableau de chasse avec une Cockatrice, et à l’auteur de contextualiser les aventures de son héros à crète dans l’enfer urbain qu’est Eaux Grises. Je n’ai pas grand-chose d’autre à dire sur cette soumission, qui est très loin d’être mémorable.

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The Reskard Purgation – J. Reid :

INTRIGUE :

The Reskard PurgationAlors qu’elle revient péniblement au camp de base de l’Ordre du Suaire d’Argent après une folle journée à se castagner contre cultistes et hérétiques dans les ruines embrasées de la planète Reskard Secundus, la Céleste Morvenn Vahl se fait alpaguer par sa supérieure, la Chanoinesse Ligaea sur le chemin des douches, et est envoyée sans délai rencontrer la délégation ecclésiarchique qui a pris possession de la cathédrale locale. Il est en effet très important que notre héroïne éprouvée apprenne séance tenante le nom de la nouvelle Abbesse Sanctorum des Ordres Militants, et ce n’est pas une concussion sévère, la perte de deux litres de sang et probablement quelques côtes fêlées qui empêcheront une fière Sista de faire son devoir. Non mais.

Obéissant à sa cheffe bien aimée (mais pas vraiment bien aimante), Morvenn se rend dans le saint lieu et apprend, je vous le donne en mille, que la nouvelle Abbesse Sanctorum, c’est elle. Ou plutôt, ce sera elle si elle y consent, ce qu’elle ne fait pas immédiatement, au grand désarroi de la sainte délégation, qui l’avait pourtant choisie du fait de sa jeunesse et de sa (théorique) docilité. Ebranlée par les déboires vécus pendant les dernières heures, Momo demande à se recueillir quelque temps dans la chapelle de Sainte Silvana, en compagnie des dépouilles des Sœurs tombées au combat sur Reskard, afin d’être sûre de prendre la bonne décision. Bien embêtés par ce délai imprévu1, mais ne pouvant pas revenir les mains vides, les pontes acceptent le caprice de la Céleste, et nous en sommes en quitte pour un petit flashback de la journée de Morvenn Vahl. C’est parti pour ‘24 heures dans la vie d’une femme’, version grimdark.

La journée commence par une déception pour Morvenn et son escouade de Célestes, qui comptaient coiffer sur le poteau ces chipies de l’escouade Avriella dans leur course commune jusqu’à l’Apôtre Noir Word Bearers localisé avec quelques cultistes dans les ruines d’un temple impérial. Alors qu’elles étaient idéalement placées pour mettre le grappin que l’hérétique en chef, la Chanoinesse Ligaea informe Morvenn que ses Sœurs et elles sont attendues quelques kilomètres plus loin, afin de récupérer et d’amener en lieu sûr le Pontifex-Urba Evaristo, une des huiles de cette planète en déréliction. Laissant leurs copines à frange avoir tout le fun, les Célestes plient bagage et se relocalisent sans tarder.

La nouvelle mission qui les attend est toutefois loin d’être une partie de plaisir, comme le nombre important de Possédés et de Warp Talons errant à proximité d’Evaristo et de sa seule garde du corps survivante, la taciturne Sœur Alektra, le révèle. A cela s’ajoute la lubie du Pontifex : récupérer une sainte relique, un maillon de la Chaîne de Dévotion de la mobylette de Sigismund, gardé dans une chambre forte située en plein territoire ennemi. Malgré l’opposition de ses camarades Célestes, Morvenn décide d’aider Evaristo à mener à bien sa quête, et même si ce petit détour coûte la vie à la majorité de son escouade, elle est toutefois couronnée de succès et permet à nos furies de croiser à nouveau la route de l’Apôtre Noir précédemment aperçu, qui a visiblement esquivé la vindicte de cette empotée d’Avriella. Un petit bonus appréciable, pas vrai ?

Début spoiler…Malheureusement, c’est une chose de mener une mission d’assassinat avec 50 copines armées jusqu’au dent, et une autre d’affronter un cadre d’Astartes hérétiques à trois et demi (Evaristo n’étant pas très doué pour le close). Une retraite stratégique s’impose, pendant laquelle Morvenn va encore perdre des camarades, des points de vie et des points de foi, lorsqu’elle se rend compte que son protégé n’a pas ramené avec lui de relique, mais des bijoux et du cash, afin de pouvoir refaire sa vie sur une planète un peu plus calme que Reskard. Bien que l’envie de châtier ce parasite ne lui manque pas, Morvenn le laisse s’enfuir et se faire décapiter à main nue par l’Apôtre Noir, décidément très collant au marquage. Tout est prêt pour le combat final entre la Céleste désabusée et le Word Bearer permanenté, que la première remporte d’extrême justesse après avoir fait s’effondrer le plafond de la tour dans laquelle l’affrontement a pris place sur les adversaires, et grâce au coup de main donné par l’unique survivante de son escouade, Ignatia la sans-dent. Une grande victoire pour l’Imperium !

Retour à la chapelle de Sainte Silvia, ou après trois jours de veille, Morvenn Vahl prend la décision d’accepter le poste pour tenter d’apporter un peu de rectitude et de droiture à une Ecclésiarchie un peu trop décadente et dévoyée à ses yeux. On lui souhaite bien du courage…Fin spoiler

1 : En même temps, je ne pense pas que ça compte beaucoup quand on doit traverser la galaxie pour rejoindre Terra sur le chemin du retour.

AVIS :

Il y a une symétrie plaisante entre le parcours de Morvenn Vahl dans le fluff et dans la GW-Fiction, la jeune Sœur Céleste se retrouvant mise en avant d’une manière surprenante (et pas franchement innocente) par les grands pontes de l’Imperium et de Nottingham. ‘The Reskard Purgation’, nouvelle d’introduction par excellence, permet à Jude Reid de nous faire faire connaissance avec cette nouvelle héroïne impériale, qui prendra peut-être la place de la coriace Augusta Santorus d’ici quelques mois comme la figure de proue littéraire de sa faction1. Le travail est accompli de façon sérieuse et grimdark au possible, Morvenn Vahl et le lecteur en étant quitte pour une plongée dans la violence d’un champ de bataille urbain et le cynisme de l’Imperium et de l’Ecclesiarchie, dont ni le corps ni l’esprit ne peuvent sortir indemne. S’il est trop tôt pour dire à ce stade si le duo Reid/Vahl parviendra à laisser sa trace – de façon positive, j’entends – dans les annales de la Black Library, ‘The Reskard Purgation’ s’avère être un début assez prometteur.

1 : Je ne sais pas comment je vivrais ce grand remplacement, si jamais il se produit… Des sentiments contraires et violents m’habitent à ce sujet.
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Et voilà qui clôture cette revue de la Black Library Celebration Week 2024, qui a apporté comme souvent son lot de bonnes surprises et de désappointements, y compris de la part d’auteurs qui ont prouvé par le passé qu’ils étaient capables de faire mieux que ça (Brooks et Guymer). D’un autre côté, je suis assez content du niveau affiché par les nouveaux venus Wilt et Reid, qui nous ont proposé des courts formats assez qualitatifs, augurant de bonnes choses pour la suite de leur parcours au sein de la Black Library. Place aux jeunes, donc.

BLACK LIBRARY 2023 ADVENT CALENDAR [40K – HH – AoS]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du Black Library 2023 Advent Calendar, notre traditionnel dernier rendez-vous de l’année civile, en ce qui concerne les critiques de sorties de la BL tout du moins. Comme c’est le cas depuis 2020, Nottingham met à notre disposition 12 nouvelles tirées des trois principales franchises de la GW-Fiction, avec une classique répartition en 6/3/3, la part du lion revenant à Warhammer 40.000 (ce qui est maintenant fluff en plus d’être logique, puisque le Lion est un personnage du 41ème millénaire). Pas de sorties en français cette année, et je crains qu’il ne faille faire définitivement notre deuil de cette brillante idée qui n’aura été qu’un one shot pour la Black Library. It was good while it lasted…

Black Library 2023 Advent Calendar

Parlons maintenant des contributeurs de cette ultime fournée du millésime 2023. Premier constat : aucun nouveau venu parmi les 11 auteurs sélectionnés par la BL, ce qui n’a pas été la norme ces dernières années. Même si on compte quelques jeunots dans le lot (Rich McCormick, Victoria Hayward), la balance penche nettement en faveur des habitués – plutôt que des vétérans – de la maison d’édition de Nottingham. Autre caractéristique notable, qui n’aura pas échappé aux plus observateurs d’entre vous, un auteur signe deux nouvelles (‘The One Road’ et ‘The Last Loyalist‘) du calendrier de l’avent 2023 : David Guymer. Espérons pour lui comme pour nous que quantité rime avec qualité. Pour terminer, accueillons au sein du cercle très fermé, et bientôt refermé, des contributeurs hérétiques le scribe émérite Justin D. Hill et le jeune loup Rich McCormick, qui signent respectivement avec ‘The Nine’ et ‘Visage‘ leurs premières (et sans doute dernière) soumissions made in M30. Mieux vaut tard que jamais, comme dit Guilliman à Dorn au lendemain du Siège de Terra…

Black Library 2023 Advent Calendar

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The Long Promise – M. Brooks [40K] :

INTRIGUE :

The Long PromiseQuelques années après les événements relatés dans ‘The Brightest and the Best’, nous retrouvons le galopin Nazos Zernas en pleine puberté, ce qui n’est pas la période la plus facile de la vie d’un aspirant Astartes, comme on le sait. Allongé sur un bloc opératoire rouillé (ça renforce le système immunitaire, d’après ce gros crado de Kazadin Yallamagasa), l’ado plein d’hormones de croissance prend son mal en patience entre deux greffes d’organes et séances de chimiothérapie1. Il est rejoint par sa « marraine de guerre », l’ex Psyker Primaris Tulava Dayne, qui l’avait tiré des griffes de ses tuteurs de la Schola Progenium d’Antimos, et initié aux charmes des sorties périscolaires. Sentant que son jeune compagnon a bien besoin qu’on lui remonte le moral en cette période compliquée pour lui, Tulava engage la conversation et de fil en aiguille, en vient à raconter comment elle a basculé du côté obscur de l’Alpha Legion après des années de bons et loyaux services au sein de la Garde Impériale.

Si le passage à l’acte se fit pendant la campagne de Rakona, l’élément déclencheur fut la sanction d’Exterminatus infligée à la planète natale de la Psyker, Qasamah, par un Imperium trop près de ses sous pour monter une opération de déxenofication digne de ce nom sur ce monde mineur. Maîtrise des coûts, efficacité des méthodes, effet de ciseaux positif, tout ça tout ça, on connaît la chanson. Ayant compris que les insurgés de Rakona pouvaient compter sur l’aide de Space Marines renégats après avoir consulté quelques rapports soigneusement classés par le haut commandement, Tulava prit la poudre d’escampette en direction des positions ennemies, non sans avoir auparavant puni le Seigneur Général en charge des opérations de sa muflerie consommée en transformant son squelette en puzzle 3.000 pièces. Il ne fallut pas longtemps avant que sa route ne croise celle du ténébreux et charismatique Solomon Akurra, qui lui proposa le marché suivant : en échange de son allégeance, il trouverait et tuerait les Space Marines responsables de la destruction de Qasamah. La suite se devine facilement…

Dans un autre coin de la galaxie, l’escouade Deathwatch du Sergent Karhaz rencontre une situation alors qu’elle était en train de se ravitailler sur la base forcément secrète de Zamarius. L’arrivée impromptue d’une épave impériale arborant des marques claires d’attaque par des Tyranides dans le système où l’astéroïde de fonction des factotums de l’Ordo Xenos orbite gentiment pique la curiosité professionnelle de Karhaz et de ses hommes, qui décident d’aller faire une reconnaissance en Thunderhawk afin de voir si ce vaisseau abandonné présente un intérêt ou une menace quelconque.

Cette innocente virée entre potes (il y a un Black Shield, un Aurora Marine, un Storm Hawk, un Wolfspear et un Angel of Absolution, le quota diversité de la nouvelle est largement dépassé) prend rapidement un tour inquiétant lorsqu’un signal involontaire est envoyé par le Thunderhawk inquisitorial jusqu’à Zamarius alors que la Deathwatch arrivait à portée de l’épave. Flairant un coup de jarnac grâce à ses sens de surhomme, Karhaz décide de retourner au bercail dare dare, et à la douloureuse surprise de constater qu’un Storm Eagle aux couleurs de l’Alpha Legion s’est garé sur sa place de parking en son absence. LES MONSTRES. N’y at t-il aucune règle de bienséance que les hérétiques ne violeront pas ?

Après une brève délibération, la fine équipe décide de passer la station au peigne fin pour en déloger les nuisibles, qui se révèle être un nuisible : Solomon Akurra en personne. De sa voix de gravier mielleux (c’est mieux que miel graveleux, avouez-le), le Harrowmaster propose un marché à ses hôtes : l’accès à leur crypte afin d’y récupérer une babiole qu’il convoite et leur parole qu’il pourra s’en aller sans se faire molester, contre… son silence. Car dans un Imperium où les secrets honteux sont légion, il n’y a pas d’armes plus mortelles ou plus pernicieuses qu’une vérité sans filtre, livrée au moment opportun et pour un public soigneusement choisi…

Début spoilerLong story short, Solomon réussit à attirer l’Aurora Marine dans un piejàkon de sa création après avoir mis en question sa bravoure devant ses camarades (le Chapitre ayant été rossé par l’Alpha Legion quelques temps auparavant), puis crée une ambiance délétère parmi les survivants en appâtant Hemarc (Angels of Absolution) avec le nom et la localisation d’un authentique Déchu, et en révélant à tous que Dreyvor (Black Shields) a été envoyé à la Deathwatch après avoir été impliqué dans le massacre de civils innocents en grande quantité, ce qui chagrine fortement l’idéaliste Eldrök (Wolfspears). Avant que les loyalistes n’aient pu s’entretuer, Solomon apparaît finalement et entraîne ses traqueurs dans une course poursuite qui les mène directement devant les canons des Serviteurs de combat hackés par le Harrowmaster, avec des résultats aussi sanglants que définitifs. Avant de repartir, Solomon révèle à un Karhaz mourant qu’il n’y avait jamais eu de relique à subtiliser sur Zamarius, mais que le Sergent des Storm Hawks était simplement le dernier sur la liste des Space Marines ayant participé à l’Exterminatus de Qasamah, et qu’une promesse est une promesse…Fin spoiler

1 : Au moins, on peut se dire que l’Alpha Legion n’inflige pas en plus de psycho endoctrinement ni de cours du soir de pépéchisme à ses recrues, ce qui leur laisse un peu de temps pour jouer à Snake (évidemment) sur leur console.

AVIS :

Mike Brooks donne une suite à ‘The Brightest and the Best’ et à ‘Harrowmaster’ dans cette nouvelle croisée dynamique (ça ne marche pas que pour les tableaux Excel) qui ravira aussi bien les fans de Solomon Akurra et de sa clique que les amateurs de courts formats grimdark bien pensés et bien écrits. Brooks se fait en effet un plaisir de jouer sur les codes littéraires et fluffiques de l’Alpha Legion, faction retorse et « apolitique » par excellence, et dont la vision du 41ème millénaire est donc rafraichissante à bien des égards. On prend plaisir à voir le Harrowmaster dévoiler les petits secrets de ses nobles et vertueux cousins, et ces derniers se faire des nœuds au cerveau à force de surinterpréter chacun des indices de la présence de l’Alpha Legion dans leur garçonnière (la scène du Storm Eagle est très drôle en ce sens). La partie de la nouvelle consacrée à Tulava Dyne et Nazos Zernas m’a un peu moins intéressé, mais elle donne de la profondeur et de la sympathie à tous les protagonistes convoqués par Brooks (Solomon compris), et comme le character development n’est pas chose commune dans la GW-Fiction, je me garderai bien de cracher dessus. Un sans-faute.

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Head of the Serpent – E. Dicken [AoS] :

INTRIGUE :

Head of the SerpentDisgraciée et quasi-exilée par le Conclave d’Hammerhal après qu’elle ait personnellement exécuté quatre de ses membres (des félons ennemis du bon peuple, bien sûr), la Première Maréchale Tahlia Vedra, plus connue sous son surnom de Lionne de l’Aride, a été mis sur une mission de second ordre par son supérieur le temps que les choses se tassent dans la cité. Elle doit ainsi localiser et neutraliser Dame Fade (c’est plus classe en anglais), une cheffe de guerre suspectée de vouloir confédérer les tribus Darkoath des Pics Caustiques à des fins anti-sigmarites. Elle peut compter pour cela sur quelques centaines de miliciens aguerris, deux antiques canons, et le support grincheux des éclaireurs de la Capitaine Jesha Fairweather, avec laquelle elle ne s’entend guère. Mais comme on dit, à la guère comme à la guerre.

L’Aride étant un territoire passablement étendu, vide et dangereux, Tahlia résout de ne pas éterniser son trekk dans les caldeiras autour de la Citadelle Coron(avir)us et demande à Fairweather de la mener jusqu’au campement de la tribu la plus proche, qui se trouve être les Chiens de Deuil-la-Barre (Hounds of Mourn-la-Barre en VO). Pas de bol pour l’expédition de reconnaissance punitive, le village en question se trouve être vidé de ses habitants, qui ont semble-t-il décidé de rejoindre en masse le campement de Dame Fade à la demande expresse des Guerriers du Chaos qui forment sa garde rapprochée1. Intriguée autant qu’inquiétée par cette relocalisation impromptue, Tahlia ordonne à sa colonne de suivre les traces des migrants, et les sigmarites ne tardent pas à tomber sur les restes d’un champ de bataille où l’arrière garde des Chiens du Deuil a été rituellement massacrée par un mystérieux adversaire.

Alors qu’elle était partie en reconnaissance sur sa fidèle Incarnadine (canard manticore de fonction) pour tenter d’identifier la cause de ce carnage, Tahlia fait la connaissance d’un louche individu répondant au nom de Vasyar, maître dans l’art du camouflage volcanique et de la plongée cendreuse. Vasyar informe la Lionne qu’elle n’a que quelques minutes pour se préparer à l’arrivée d’une cohorte de Chiens du Deuil, qui ne réfléchira sans doute pas à deux fois avant d’attaquer les sigmarites qui campent parmi les cadavres de leurs congénères, même si les miliciens ne sont pour rien dans la tuerie. Et en effet, deux mille guerriers Darkoath écumants de rage ne tardent pas à se présenter dans la passe où le contingent d’Hammerhal stationne, forçant Tahlia à faire preuve de ses capacités de stratège et de meneuse d’hommes.

La bataille se passe raisonnablement bien, mais c’est l’intervention de quelques centaines de margoulins arborant le même style vestimentaire que Vasyar et qui prennent à revers les Chiens du Deuil alors qu’ils étaient en train d’aboyer sur le carré castelite des sigmarites qui permet aux gentils urbains de remporter l’affrontement. C’est le début d’une collaboration teintée de méfiance mais sans coup fourré entre Tahlia et Vasyar, qui se révèle être un des chefs de la tribu des Vipères des Cendres (Ash Vipers), dernière peuplade indigène non affiliée au Chaos vivant de ce coin de l’Aride.

Ayant bien compris que la survie de sa tribu passait par la neutralisation de la menace représentée par Dame Fade, elle-même simple lieutenant de l’énigmatique seigneur Ebonpyre, Vasyar accepte de guider sa nouvelle amie jusqu’au camp chaotique, ce qui permet à la Première Maréchale de concocter un plan risqué mais pas désespéré pour décapiter la horde rassemblée par Fade. Pendant que le gros de ses troupes tiendra une position défensive à proximité du village de yourtes des maraudeurs, Tahlia, les éclaireurs de Fairweather et les Vipères des Cendres de Vasyar contourneront les combats pour aller assassiner Dame Fade, « seulement » protégée par quelques Guerriers du Chaos.

Comme on peut se l’imaginer, cette expédition plus qu’à moitié suicidaire est couronnée de succès, et malgré la magie aussi fumeuse que toxique de Dame Fade, qui manque de suffoquer notre casting trois étoiles, la ribaude se fait occire de haute lutte. De là, il suffit juste à Tahlia d’agiter le casque de la sorcière devant le nez de ses suivants pour que des luttes intestines viennent à bout de la fragile unité des guerriers tribaux, qui succombent à l’animosité et commencent à se castagner à qui mieux mieux, laissant les miliciens et leurs alliés s’éclipser sans demander leur reste.

La nouvelle se termine avec la proposition de Tahlia à Vasyar d’abandonner son mode de vie nomade pour rejoindre la sécurité et la civilisation de Hammerhal, comme le propre peuple de notre héroïne l’a fait il n’y a pas si longtemps que ça pour échapper aux déprédations du Chaos. « J’y penserai cocotte » répond le fier bédouin avant de repartir faire des pâtés de cendres dans la pampa. La suite au prochain épisode…

1 : Tahlia et Fairweather découvrent cela en remarquant les empreintes distinctives de crampons en forme d’étoile à huit branches dont les solerets des Guerriers du Chaos disposent tous. Il faut le savoir.  

AVIS :

Evan Dicken signe une nouvelle med-fan militaire assez classique et linéaire avec ce ‘Head of the Serpent’, qui introduit le personnage de Tahlia Vedra dans la GW-Fiction, ce qui n’est pas donné à toutes les entrées de Battletomes, il faut le reconnaître. Si l’intrigue de cette histoire peut être décrite comme d’une simplicité élégante, c’est dans le déroulé de cette dernière que Dicken s’illustre le plus à mon sens, prouvant qu’il est capable de « servir la soupe » de manière convenable, comme il l’avait déjà montré dans ‘The Path to Glory’ il y a quelques années. Cette dernière nouvelle s’était toutefois révélée bien plus riche en lore et rebondissements que celle qui nous occupe aujourd’hui, et garde donc ma préférence – quoi qu’il en soit ‘Head of the Serpent’ est une entrée sérieuse à mettre au crédit de cet auteur, et j’espère que le trio infernal cendreux Vedra/Fairweather/Vasyar reviendra courir la pamParch’ dans d’autres soumissions de la Black Library. Après tout, ce mystérieux Ebonpyre ne va pas s’éteindre tout seul…

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Nightsider Imperialis – V. Hayward [40K] :

INTRIGUE :

Nightsider ImperialisSur le monde de Nectria, connu pour ses jungles exubérantes et ses nuits interminables, deux empires s’affrontent sans merci. Du côté des humains, le 903ème régiment de Catachan de la Major Wulf Khan (et plus précisément les trois bidasses qui survivent à la première page) nous servira d’escorte dans la moiteur obscure de cette planète contestée. Face à ces héros improbables (Khan, sa sidekick aryenne Adair, la jeune Green et le boudeur Bass), on retrouve les T’au et leurs auxiliaires Kroots, très à leur aise dans cet environnement riche en couvert et en nouvelles espèces à déguster.

Alors que la nuit est sur le point de tomber sur ce théâtre d’opération, Khan décide de faire un crochet pour secourir la pilote d’un Lightning s’étant écrasé à quelques centaines de mètres de sa position après avoir mis en fuite le bombardier T’au responsable de l’annihilation de la moitié de son escouade. On peut dire ce qu’on veut sur l’indiscipline des Catachan (Khan ignore les instructions du Général Mordian en charge des opérations et fait détruire sa radio pour être sûre de ne pas être embêtée par les planqués du commandement), mais au moins ils ne sont pas ingrats.

La pilote en question, Nirael Roth, se trouve être une Nightsider (ou Homo Sapiens Tenebris), comme ses yeux totalement noirs le prouvent, mutation des plus pratiques lorsqu’on se bat sur un monde où les nuits sont sombres et pleines de terreur. Elle révèle à ses sauveteurs que son appareil contient des relevés pris au-dessus d’une usine d’armement T’au, à ramener de toute urgence à l’état-major impérial afin d’apporter un avantage considérable à la Garde Impériale dans les prochaines phases de la campagne. Elle prouve également son utilité en identifiant un groupe de Kroots qui profitait des ténèbres pour approcher en catimini des Catachan, permettant à ces derniers de repousser les Xenos sans coup férir.

Ralentis par Roth et sa jambe esquintée dans le crash de son appareil, Khan et Cie progressent lentement en direction de leur base arrière, en composant avec la faune hostile de Nectria et le harcèlement de rue jungle de leurs poursuivants Kroots, qui salivent en arrière-plan à l’idée de s’enquiller un tartare Nightsider. C’est comme les carottes, c’est bon pour les yeux. Fort heureusement pour les Catachan, leurs adversaires ne décident jamais de passer à l’attaque (malgré un avantage numérique très conséquent), ce qui leur permet de rentrer au bercail sans prob- ah non, pardon. Le première classe Bass décide tout d’un coup que Khan est une très mauvaise chef, qui ne fait rien que de le rabrouer à tout bout de champ, et son insubordination coûte (indirectement) la vie à Green, lorsqu’il décide de la laisser en plan pour aller traquer un chef Kroot en solo sur un coup de tête.

Fort courroucée par ce mauvais sujet, Khan décide de l’exaucer et laisse prendre le commandement du petit groupe lorsqu’il la défie ouvertement… sauf que personne ne suit Bass quand il donne l’ordre d’avancer en laissant Roth se débrouiller toute seule (en plus d’être macho, il est raciste, c’est vraiment un gros beauf), et que le sac à dos qu’Adair lui a remis ne contient pas les boîtes noires du Lightning, comme il le croyait, mais des bandages saturés du sang de l’Abhumaine, qui attirent à lui une horde de Kroots affamés. Just a prank bro.

L’héroïque sacrifice, pas vraiment volontaire mais on s’en fout, de Bass permet finalement à Khan, Adair et Roth de rentrer au bercail sans problème, et la nouvelle se termine sur l’hommage que rend malgré tout la Major à son subordonné insubordonné : écrire son nom sur un post-it et le coller sur le mur du souvenir du régiment1. On a les mémoriaux qu’on mérite…

1 : Ce n’est peut-être pas volontaire de la part de Hayward, mais elle ne mentionne pas que les autres soldats de Khan reçoivent le même honneur de sa part, y compris la pauvre Green qui faisait pourtant partie des personnages principaux de la nouvelle. Elle doit vraiment avoir un faible pour les mauvais garçons.

AVIS :

Introduction au personnage de Wulf Khan et avant-goût du roman ‘Deathworlder’, ‘Nightsider Imperialis’ commence très classiquement (des Catachans dans une forêt primaire), explore quelques idées intéressantes (les Abhumains et leur acceptation relative par les institutions impériales, un monde jungle hostile et nocturne, l’opportunisme kroot), et se termine malheureusement de façon très incongrue (des centaines de Kroots qui ne parviennent ni à rattraper, ni à neutraliser cinq Gardes Impériaux dont deux sérieusement blessés, Bass qui décide de se rebeller… par jalousie ?). Si encore la fin avait été supérieure au début, on aurait pu terminer cette nouvelle sur un sentiment positif, mais c’est l’inverse qui se produit et me fait ranger ‘Nightsider Imperialis’ dans la catégorie – très fournie – des fillers moyens de la GW-Fiction.

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Visage – R. McCormick [HH] :

INTRIGUE :

VisageCritiquer son patron est un petit plaisir de la vie professionnelle auquel bien peu peuvent résister, et il y a fort à parier que le temps, ou l’époque, ne fait rien à l’affaire : ce qui est vrai en M2 le sera aussi en M30. Il est cependant conseillé de le faire lorsque ledit patron n’est pas à portée de voix, surtout lorsqu’on a affaire à un Primarque Maître de Guerre devenu renégat et champion des Dieux Sombres dans le Materium (ce qui lui a fait perdre son sens de l’humour), comme c’est le cas pour Erebus. Malheureusement pour le Premier Chapelain des Word Bearers et grand architecte de l’Hérésie, sa saillie envers Big H. à propos du fiasco de la campagne de Signus Prime ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd, et Lupercal décide de littéralement refaire le portrait de son acolyte à grands coups d’athame, ce qui a pour conséquence d’envoyer Erebus aux urgences.

A son réveil, l’écorché vif réalise que sans ses tatouages faciaux runiques, il ne faudra pas longtemps avant qu’une armée de Démons mineurs viennent le racoler à cause de son statut de star du Warp (tout s’explique), ce qui est tout de même pénible. Sans compter que les blessures infligées par son coupe chou môôôdit ont peu de chances de cicatriser normalement, comme on peut s’en douter. Le premier réflexe d’Erebus est donc, tout naturellement, de faire écorcher son propre chirurgien et de greffer son visage pour couvrir sa face mutilée, au moins pour dépanner. Ce qui marche… cinq secondes, avant que les Dieux du Chaos ne manifestent leur déplaisir devant cette usurpation d’identité en transformant le wannabe Joker en lookalike Ghost Rider. Apparemment, DC Comics n’a toujours pas remonté la pente face à Marvel dans le lointain futur.

Le rejet total de cette greffe improvisée force le Chapelain défiguré à chercher refuge et réconfort dans la boisson, et plus particulièrement le sang des Space Marines loyalistes étant tombés sur Isstvan III, et qu’il gardait comme souvenir du début de l’Hérésie dans son bureau. Confiant dans sa capacité à négocier un deal en sa faveur avec les malheureux habitants de l’Immaterium qui écouteront son baratin, Erebus pique une tête dans son calice maudit et se retrouve dans le Warp.

C’est le début d’une quadruple quête que l’on peut qualifier d’exaltée ou de cauchemardesque, c’est selon, qui verra notre héros suppurant entrer en négociations avec des Démons représentant les quatre Dieux du Chaos, et parvenir à chaque fois à leur extorquer leur petit nom ainsi qu’un don « sensoriel » venant compenser une partie de son handicap.

Tout d’abord, Erebus plume une perruche de Tzeentch qui avait commis l’erreur d’accepter de lui montrer le chemin à travers le dédale infini du Warp, récupérant au passage des yeux pouvant voir le futur. Pratique. Ensuite, il est catapulté sur une Terra uchronique, ou un caribou de Khorne (Kharibou ?) l’accueille à coups de cornes dans un désert jonché des ossements des dix milliards de victimes d’un siège remporté par Horus. Entre deux impacts, Erebus parvient à convaincre le Démon de lui prêter une oreille attentive, dans tous les sens du terme, et il peut repartir avec un acouphène divin.

Le bilatéral suivant se tient en compagnie d’un serpent de Slaanesh, qui lui offre un coup à boire après qu’il ait noblement refusé de poignarder Horus avec son athame, comme il lui était pourtant proposé. Enfin, Erebus termine ses pérégrinations par une longue retraite dans un marécage bien putride, en compagnie d’une petite mamie aussi serviable que décatie. Après avoir farmé des crapauds géants pendant quelques semaines aux alentours de son Airbnb, le Chapelain désœuvré finit par retrouver un peu d’ambition et de volonté, et localise à l’odeur l’emplacement de la seule source d’eau non contaminée du marais. Après s’être convenablement réhydraté, il fait bénéficier son hôte de cette manne aquatique, ce qui lui redonne aussi la forme mais la plonge dans un état de détresse psychologique avancé (quoi de pire pour un Démon de Nurgle que de guérir, après tout). Après de longues séances de waterboarding, Mamie Bouse accepte finalement de donner son nom de jeune fille à ce galopin d’Erebus, qui garde aussi le flair développé qu’elle lui avait seulement « prêté » (c’est plus clair à la lecture de la nouvelle, soyez en sûr) quelques jours plus tôt.

S’étant rabiboché avec l’intégralité du panthéon chaotique (ou les grands pouvoirs, en tous cas), Erebus peut revenir dans le Materium avec une tête un peu plus présentable qu’auparavant, et quelques dons divins supplémentaires pour frimer dans les soirées. Déjà qu’il était insupportable avant…

AVIS :

Pour sa première incursion dans l’Hérésie d’Horus, Rich McCormick fait très fort en s’emparant d’un personnage nommé majeur de la franchise, et en mettant en scène un épisode important de son histoire qui n’avait jamais été couvert dans le détail auparavant : la pause fraicheur d’Erebus après le vigoureux gommage que lui a appliqué ce grand coquin d’Horus. Il le fait de plus avec la manière1, embarquant le lecteur dans une odyssée démoniaque très convaincante, dans la droite ligne de ce que Ben Counter et Guy Haley sont capables de nous proposer lorsqu’ils sont inspirés. J’ai beaucoup aimé cette soumission de Rich McCormick, et mon seul regret est qu’elle soit arrivée trop tard dans la production de l’Hérésie pour être exploitée par la suite…

1 : Et en s’inscrivant parfaitement dans la continuité des travaux de ses prédécesseurs, même les plus confidentiels : on a ainsi droit à une référence à la nouvelle ‘Child of Chaos’ (John French), que je considère comme faisant partie des œuvres de niche de la franchise.

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Consecrated Ground – S. B. Fischer [40K] :

INTRIGUE :

Consecrated GroundEnvoyé sur le monde ruche de Serraq’s Reach avec quelques grouillots pour mater un début de rébellion à la demande de sa Gouverneure, le nouvellement nommé Castellan Emeric aborde cette mission des plus banales avec un enthousiasme très relatif. Le fait que son premier séjour sur Serraq’s Reach ne lui ait pas laissé un souvenir impérissable (mémoire eidétique ou pas) ne vient certes pas rebooster son moral, mais en soldat zélé – comme tout Black Templar qui se respecte – notre héros est bien décidé à mener à bien sa tâche et à repartir au plus vite rejoindre une croisade.

Après quelques semaines à visiter les lieux où le culte menaçant le règne bienveillant de la Gouverneure Agate a perpétré ses noirs méfaits, Emeric et ses frérots (dont le Chapelain Dant et l’Apothicaire Alvus, que je nomme par pure courtoisie et pas parce qu’ils joueront un rôle important pus tard) se retrouvent dans un temple impérial profané. Le cadavre écorché d’un prêtre a été attaché sur l’autel, et des imprécations chaotiques maculées sur les murs. Cela est certes regrettable, mais sans indice notable pour mener les surhommes vers les coupables de cet acte odieux, les Black Templars se seraient sans doute contenté d’incinérer la victime pour pouvoir reconsacrer le temple sans tarder – fort heureusement pour eux et pour nous, ils croisent alors la route du Vice-Régulateur Kendam Ranp, Arbites local dont la connaissance des bas-fonds de Serraq’s Reach va mettre (enfin) les surhommes en noir et blanc sur une piste.

Ayant formellement identifié le gang responsable de ces pratiques vandales, Ranp mène ses nouveaux copains jusqu’à leur QG, qui est pris sans coup férir par les Astartes. L’interrogatoire du dernier survivant de la fusillade entraîne les justiciers sur une autre piste, celle d’une congrégation de mutants réfugiés dans les profondeurs de la capitale planétaire. Quelques heures de spéléologie urbaine plus tard, Emeric et sa clique se jettent à l’assaut du campement adverse avec toute la hargne que l’on peut attendre de la part des Black Templars. C’est alors qu’un événement cocasse se produit…

Début spoiler…Au plus fort des combats, Emeric tombe nez à nez avec deux statues réalisées par un des mutants que ses hommes sont en train de massacrer énerg(ét)iquement, et représentant sans l’ombre d’un doute l’Empereur et un Black Templar. « OUETTE ŒUF MINUTE » s’exclame le Castellan, qui réalise alors qu’on lui a sans doute dissimulé la vérité entière. Et en effet, il ne faut que quelques minutes après que les combats aient été stoppés pour que le sagace Emeric, à peine aidé par ses seconds, par Ranp et par le chef des mutants (qui sont en fait de « bons » mutants, car leurs difformités ont été causées par une honnête radioactivité, et pas par le vilain Chaos), Ezekial, pour comprendre qu’il s’est fait balader par Agate dans les grandes longueurs, les épaisses largeurs et les insondables profondeurs. La perfide a cherché à utiliser les nobles Templiers pour annihiler de fidèles serviteurs de l’Empereur (pour des raisons qui ne seront jamais explicitées) ? Elle doit payer pour ce détournement criminel des super soldats impériaux !

Et pour payer, elle paie. Quelques heures/jours plus tard, Emeric mène un assaut en règle sur le palais d’Agate, et au bout de quelques pages de combat aussi intense qu’inintéressant, le Castellan rend son verdict d’un moulinet de son épée (après avoir enfoncé un champ de force grâce à son esprit borné). Laissant Ranp et ses collègues gérer la période de transition, Emeric déclare sa mission complétée et repart vers les étoiles où his people needs him, ou quelque chose comme ça… Fin spoiler

AVIS :

Fischer nous livre une histoire de Space Marines assez peu inspirée, et reprenant l’argument de l’antique nouvelle ‘Unthinking Justice’ (A. Millward), dans ce ‘Consecrated Ground’ dont le suspense est éventé dès la lecture de son 4ème de couverture virtuel sur le site de la Black Library. Passe encore que l’intrigue tienne en une demi-ligne1 : l’absence de personnages intéressants, une mise en scène des plus convenues, et la substituabilité totale des Space Marines qui nous servent de héros – alors qu’il aurait été intéressant de montrer les spécificités des Black Templars face à cette situation par rapport à d’autres Chapitres – achèvent de reléguer cette nouvelle dans les tréfonds du catalogue de la GW-Fiction.

1 : Mais soit aussi par endroit complètement insoluble. On ne sait pas ce qu’est « l’appareil » qui a été trouvé par les mineurs, pourquoi la Gouverneure a ordonné le massacre de ceux qui lui avaient remonté l’information, et pourquoi ces derniers se sont farouchement opposés à ce que cette source de radiations débilitantes leur soit retiré.

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The One Road – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE :

The One RoadSur LA (il n’y en a qu’une, vraiment) route qui mène à Eaux Grises, le wagon conduit par le marchand itinérant Vogel Hornbroom a fait une sortie de piste et s’est retrouvé proprement enraciné dans un petit bosquet en contrebas de la voie carrossable. Ce qui n’aurait pu être dans d’autres Royaumes qu’un incident très mineur à mettre sur le compte de l’inattention d’un conducteur fatigué prend toutefois des proportions effrayantes en Ghyran, et plus précisément dans le très mal fréquenté Dreadwood que la route traverse. Les Sylvaneth qui peuplent ce bout de forêt ont en effet une dent – façon de parler – contre les colons azyrites, et malgré le cessez le feu très logiquement conclu entre Sigmar et Alarielle (cette dernière craignant l’incendie, comme on sait), les relations ne sont pas au beau fixe entre les deux factions de l’Ordre. L’Homme Arbre surnommé le Chêne Pâle mène d’ailleurs la vie dure aux forces détachées d’Eaux Grises, chargées de sécuriser comme elles le peuvent l’accès à la cité.

Un peu plus loin sur la même route, nous faisons la connaissance de trois hardis cavaliers de la milice locale, Elsworn, Tonan et Garvil. Interrompus dans leur partie de dés avec leur supérieure Vida par l’arrivée d’un wagon plus blindé qu’un Leman Russ devant leur fort routier, les compères apprennent de la bouche de la conductrice qu’elle a été témoin de la sortie de route de Vogel, mais s’est bien gardée de s’arrêter pour lui porter secours pour ne pas risquer le suraccident. Qui pourrait lui en vouloir ? N’écoutant que leur devoir, et certainement pas la pauvre Vida qui les enjoignait à l’inverse de rester au bercail, les trois pistoleros sellent leurs montures et partent à la rescousse du véhicule accidenté, sachant fort bien que lui laisser passer la nuit sans protection reviendrait à sceller le sort de son aurige.

Après un petit galop tranquille, le trio arrive à proximité de l’endroit de l’accident, à temps pour constater que Vogel a attiré l’attention malvenue d’un groupe de Dryades, bien décidées à venger leurs cousines transformées en planches de wagon en écharp/dant à mort le pauvre cocher. Ce dernier se défend comme il peut, et est très soulagé de voir de l’aide, même en faible effectif, poindre à l’horizon. Ce qu’il ne savait pas, au contraire du lecteur qui a contemplé la couverture de cette nouvelle, c’est qu’il n’avait pas vraiment à s’en faire, puisqu’il transportait, en plus de sacs de grain, l’arme fatale des Royaumes Mortels dans son compartiment à bagages. Un Gotrek Gurnisson rendu chafouin par un fort mal de crète et une gueule de bois (c’est approprié) carabinée s’extirpe en effet pesamment du wagon, sorti de sa torpeur par le vacarme des combats. Après avoir débité quelques Dryades trop entreprenantes, il décide d’aider son associé à remonter la pente et pousse l’attelage jusqu’à la route, ignorant royalement l’escarmouche échevelée qui prend place entre les trois cavaliers et la bande de Sylvaneth. Et en cela il fait bien, car il ne se passe rien de très intéressant dans cette empoignade : quelques Dryades anonymes se font plomber par les hussards, et le combat au sommet entre Elsworn et leur Matriarche se solde par une victoire par abandon de l’humaine, son adversaire lui laissant la vie sauve après avoir réalisé qu’elle avait elle-même été épargnée par Elsworn quelques minutes plus tôt. Un vrai gentlewomen agree(n)ment, ça.

Finalement, tant Vogel que Gotrek arrivent à bon port, et tandis que le premier se dépêche de vendre sa cargaison à un Aelf portant une tulipe flétrie en boutonnière pour pouvoir échapper à la pollution endémique d’Eaux Grises, le second s’en va pesamment vider la première taverne qui croise sa route. Ceci débouchera sans doute sur une autre histoire…

AVIS :

L’histoire nous dira si ‘The One Road’ est un prélude à un arc narratif Gotrekien plus conséquent que ces quelques pages1 (ça m’en a tout l’air), mais prise individuellement cette nouvelle ne tient pas vraiment la route, ce qui lui fait un point commun avec le wagon de Vogel Hornbroom. David Guymer passe en effet beaucoup de temps à nous présenter un trio de personnages dont le rôle dans l’histoire est finalement assez limité, et à mettre en scène un duel dont l’issue honorable et non violente m’a laissé songeur. Tout ça pour ça ? Gotrek en est relégué à faire de la figuration dans une histoire qui est pourtant marketée autour de lui, et si ses interventions sont appréciables de ronchonnerie, on n’en a pas vraiment pour notre argent. Je reconnais tout de même à Guymer qu’il a su nous insérer quelques détails fluff de bon aloi au fil de sa prose, ce qui aide à faire passer la pilule mais n’est pas suffisant pour sauver ‘The One Road’.

1 : Je n’ai pas assez pratiqué les dernières aventures de Gotrek dans les Royaumes Mortels pour savoir si la Prêtresse Guerrière qu’il envoie valdinguer à travers une table de taverne en début de nouvelle était sa sidekick de ‘Blightslayer’. Si c’est le cas, c’est probablement l’information la plus notable de la nouvelle.

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Own Worst Enemy – D. Flowers [40K] :

INTRIGUE :

Own Worst EnemySur la planète Deighton, en proie aux affres de la guerre civile, nous retrouvons la pilote émérite et imbibée (à parts égales de promethium et d’alcool) Lucille von Shard, engagée dans la lutte pour le maintien de ce monde dans le giron boursouflé de l’Imperium. Si ses récentes retrouvailles familiales et la course Uber qu’elle a accepté de faire pour le compte de l’Inquisition (‘Starstruck’) ont aiguisé ses tendances misanthropes et cyniques, von Shard sait toutefois que sa destinée ne lui appartient plus et lorsque son agent propagandiste attitré, Esec, la convoque pour lui présenter la campagne marketing qu’il a concocté pour donner un peu de peps au rythme planplan de la guerre pour Deighton, elle n’a d’autres choix que de s’exécuter, accompagnée par la pilote junior Vagbon qu’elle avait engagée comme réveil matin/escorte diplomatique le jour précédent.

Esec a eu vent des exploits d’un pilote ennemi, tenu responsable de la destruction d’une demi-douzaine d’appareils impériaux au cours des derniers jours. Avec un peu de storytelling dont il a le secret, ce mystérieux as, surnommé le Vent du Désert en rapport au lieu de ses exploits guerriers, pourrait faire une Némésis des plus convenables pour le Griffon Noir1 de Lucille von Shard ! Ni cette dernière, ni Vagbon, ne partagent l’enthousiasme débridé du publicitaire de guerre, mais comme il a l’oreille du Colonel Surling, leur avis sur la question n’est que purement consultatif. Il est donc décidé d’organiser un shooting dans tous le sens du terme pour immortaliser le duel entre les deux champions aéroportés du conflit, duel dont von Shard sortira bien entendu vainqueure… Ou devrait, en tout cas. Alarmé par la petite mine de sa protégée, le pragmatique Esec suggère sous le manteau à Vagbon de devenir la prochaine poster girl du sous Segmentum, si jamais il devait arriver malheur à sa supérieure. À la guerre comme à la guerre…

Après un peu d’attente, le Vent du Désert est repéré par les radars espions du camp impérial et une escadrille menée par von Shard décolle pour rendre la justice de l’Empereur à ce mécréant. Le combat s’engage, et à la grande surprise des pilotes loyalistes, le terrifiant VdD se révèle être un ado effrayé, qui jure ses grands dieux par radio interposée que tout ceci n’est qu’un malentendu. Ce n’est pas lui qui a abattu les appareils impériaux, c’est la Lumière (avec une aile majuscule), sorte d’apparition fantasmagorique capable de faire tomber la foudre dans un ciel clair, dans le seul but d’attirer l’attention de la légendaire Lucille von Shard. Tout cela est bien mystérieux, et on n’en saura pas plus de la part du Voisin du Dessus, qui se fait foudroyer à son tour par un éclair tombé de nulle part, preuve que sa version des faits n’était pas aussi étrange qu’il y paraissait.

Notre propos se termine par une nouvelle discussion entre Vagbon et Esec, bien dégoûté de n’avoir pas de vidéo exploitable de l’affrontement entre von Shard et le Vent du Désert, et qui propose donc à notre sidestick de prendre les commandes d’une réplique du Griffon Noir pour tourner une reconstitution de ce duel déjà mythique. Malaise du côté de la loyale Vagbon, qui aurait l’impression de voler la vedette à sa commandante… qui n’en a de son côté absolument rien à faire (au contraire, ça lui fera moins de boulot). Pour tout vous dire, Lucille von Shard semble beaucoup plus intriguée et inquiète par les dernières images prises par un appareil de reconnaissance impérial avant de se faire abattre par la fameuse Lumière que par les états d’âmes de sa future doublure cascade. La suite au prochain épisode, sauf si Lulu s’étouffe dans son vomi après une nième murge, bien sûr…

1 : Ou Griffon de(s) Sable(s), si on utilise les termes héraldiques consacrés. Ça ferait un fil rouge (de gueule) avec le désert.

AVIS :

Troisième nouvelle pour Lucille von Shard, et les choses n’ont pas l’air de s’arranger beaucoup pour notre pilote d’élite, qui est ici dépeinte comme erratique, alcoolique et piégée dans son statut d’icône impériale par le maître propagandiste Esec. C’est d’ailleurs cette relation malsaine, et totalement compréhensible dans le contexte d’un Imperium militarisé jusqu’à la moelle et prêt à tout pour entretenir l’effort de guerre, qui fait le sel de ce ‘Own Worst Enemy’, plus que la mise en scène du « combat » contre le fort minable Vent du Désert. On dirait fort que Denny Flowers plante le décor pour un arc narratif plus ambitieux à travers ces quelques pages, et peut-être en saurons-nous plus sur cette mystérieuse et mortelle lumière dans un nouvel épisode…

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The Nine – J. D. Hill [HH] :

INTRIGUE :

The NineAlors que Mars est déchiré par son schisme entre anciens et modernes légalistes et libéraux, nous suivons l’Adepte Sota, résolument engagée dans le camp du Mechanicus Noir, dans sa vendetta personnelle contre son ancien mentor, le maître de forge Rueon Villnarus. On ne saura pas exactement ce que le pauvre Vivi a fait pour encourir l’ire de sa stagiaire, mais la maîtrise consommée de cette dernière en matière d’armement bactériologique scelle rapidement, mais pas proprement, le destin du bastion de Villnarus après qu’une ogive chargée d’une souche de Covid tirée des glaires d’un Grand Immonde enrhumé ait pénétré la défense des loyalistes. Après avoir pataugé dans la bouillasse organique de ses douze millions de victimes pour aller récupérer la carte mère de son tuteur, Sota se hâte de rejoindre Magma City, théâtre d’un affrontement à grande échelle entre les forces de Kelbor-Hal et les fidèles de l’Empereur.

A son arrivée, elle ne peut que partager la peine de son suzerain quand elle apprend que le fidèle piston droit de Kelbor-Hal, Melgator, compte parmi les victimes de cette bataille majeure. Cette disparition fait toutefois les affaires de l’ambitieuse Sota, car malgré sous ses apparences de geek obsédé par la tech, Keke a un point commun avec la nature, en cela qu’il a horreur du vide. Il lui faut donc trouver un ou plusieurs remplaçants à Melgator pour aller porter la bonne parole à travers la galaxie et rallier le plus de mondes forges possible à sa cause. Après une entrevue tenant au moins au temps du porno soft (toutes ces mechadendrites qui se connectent à des ports haptiques… c’est très déluré) que de l’entretien d’embauche, Kelbor-Hal annonce à sa groupie frémissante qu’elle aura l’honneur et l’avantage de faire partie de son harem cénacle d’ambassadeurs, ce qui est Nul pour elle, bien sûr…

AVIS :

Pour sa première incursion dans l’Hérésie d’Horus, Justin D. Hill se paie un voyage aux origines de la série en prenant la suite des événements couverts par Graham McNeill dans son ‘Mechanicum’ (2008), et particulièrement la bataille de Magma City au cours de laquelle Melgator trouva la mort. Je ne suis pas sûr que le personnage de Sota (pas encore Nul) méritait une telle mise en avant, et comme il ne se passe pas grand-chose d’intéressant et/ou de clair dans ‘The Nine1, je sors de cette nouvelle dans un état de perplexité avancé. Que cherchait à faire Hill avec cette histoire, qui semble avoir été publiée quinze ans trop tard ? J’espère que de futures sorties permettront de réévaluer ma position, mais de prime abord, c’est une entrée plutôt ratée dans l’Hérésie pour cet auteur vétéran.

1 : Titre mensonger par ailleurs car la nouvelle n’évoque pas les autres lieutenants de Kelbor-Hal, et ne se donne même pas la peine d’expliquer ce que sont les Neuf.

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The Price of Morkai – M. Collins [40K] :

INTRIGUE :

The Price of MorkaiLa fin est arrivée pour Fjolnir le sage de guerre, aussi appelé l’imbibé de mjod et l’ivrogne des batailles, meneur d’une meute de Chasseurs Gris Space Wolves. Tombé au combat contre un adversaire plus fort que lui, ses restes mortels sont apportés avec tout le respect qui leur est dû par ses camarades du rout, Vili, Jolfr, Orwandil et Hrungnir, jusqu’à la morgue du Prêtre Loup Ivar Krakenblood. Comme le veulent les rites des fils de Russ, ses frères d’armes s’empressent de raconter la saga du disparu à Ivar, pendant que ce dernier fait les prélèvements de rigueur sur le cadavre de Fjolnir.

On apprend ainsi que la fine équipe s’était mise en tête de faire un détour par l’Eperon aux Krakens, île mystérieuse et insaisissable du littoral de Fenris, puisqu’elle ne surgit des flots déchaînés de cette planète froidement hostile qu’une fois par génération. Comme son nom l’indique, l’Eperon est une réserve pour méga-faune marine du monde chapitral des Space Wolves, et sert notamment de cimetière pour les krakens en fin de vie dont les crânes jonchent ses rochers. Malheureusement pour Fjolnir, le spécimen qui gardait l’Eperon au moment de sa visite impromptue était un vieux ronchon, dont les coups de tentacules et de bec se sont révélés fatal pour le fier Loulou. Ce dernier peut toutefois revendiquer un match nul bien mérité, voire une victoire morale, puisque s’il n’a pas fini la journée entier, le poulpe géant la termine en tielle, ce qui n’est pas beaucoup mieux. On se console comme on peut.

De son côté, Ivar accomplit sa salissante mais indispensable besogne de prélèvement d’organes et de devoir de mémoire tout en se remémorant sa propre rencontre avec un kraken de fort beau gabarit, alors qu’il n’était alors qu’une Griffe Sanglante mal dégrossie, mis sur une mission « ramassage de coquillages » par ce farceur d’Ulrik en compagnie de quelques autres néophytes. Leur excursion sur l’Eperon aux Krakens avait tout aussi mal tourné que celle organisée par ce poivrot de Fjolnir, mais grâce au leadership inspiré d’Ivar, l’insistante bestiole gréviste (comprendre qu’elle était sur la grève de l’île, et pas qu’elle manifestait pour la retraite à 60 ans) avait fini par retourner à l’abysse, après avoir perdu tous ses yeux sauf un dans la bagarre. Cette démonstration de force avait favorablement impressionné Ulrik, qui était venu féliciter les rookies survivants et leur promettre un bel avenir dans les rangs indisciplinés des Space Wolves. Ah, c’était le bon temps !

Bien évidemment, on (en l’occurrence, Ivar) finit par se rendre compte à l’écoute de la dernière virée de Fjolnir que c’était le même Kraken qui lui a fait son affaire, ce qui démontre que ces bestioles sont bougrement casanières (surtout) et que y a pas de hasard ma pauvre Lucette (un peu). Une fois encaissé le poids de cette révélation in-cro-ya-ble, Ivar termine le rite de valorisation des déchets organiques en allant placer les glandes de Fjolnir dans le frigo situé au cœur de Croc, dans l’attente de l’aspirant digne de se les voir implantées. Le futur du Chapitre sera ainsi assuré, et c’est bien l’essentiel.

AVIS :

Une nouvelle de Space Wolves sans prétentions, comme Chris Wraight en a écrit quelques-unes, voilà comment on peut qualifier ‘The Price of Morkai’. On savait que Marc Collins était un amateur es-Fenris (‘The Shapers of Scars’, ‘Void Kings’, ‘The Martyr’s Tomb’), aussi cette sortie de rout n’est guère surprenante. J’aurais toutefois préféré qu’elle le soit un peu plus, car la concurrence sur ces micro-niches (loubard vs kraken d’un côté1, post mortem Space Wolf de l’autre2) est malgré tout suffisamment fournie pour que ‘The Price of Morkai’ présente un goût de déjà lu quelques heures seulement après sa publication. Il y avait sans doute moyen de faire mieux que ça.

1 : ‘Kraken’ (Wraight), ‘A Trick of the Light’ (Reynolds).
2 :  ‘Bjorn: Lone Wolf’, ‘Cargo’ (Wraight), ‘Even Unto Death’ (Lee).

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Web of Ruin – A. Tchaikovsky [AoS] :

INTRIGUE :

Web of RuinAprès que le meneur (Oruthir) de la bande de Tarantulos dont il fait partie ait passé ses nombreuses armes (c’est ça quand on a quatre bras) à gauche après une rencontre musclée avec des maraudeurs Darkoath, le jeune et ambitieux Peter Parker Vexen décide de combler le vide managérial laissé par ce décès subit, et prend les rennes d’une troupe en grand manque de confiance en elle. Marqué par le Voyant Octuple, qui lui a changé un œil en ocelles à facettes du plus bel effet, Spiderboi se sent l’étoffe d’un grand meneur, mais sait qu’il lui faut à tout prix faire ses preuves auprès de ses camarades, faute de quoi il ne tardera pas à rejoindre son ancien boss dans l’au-delà.

Son plan initial consiste à traquer les Darkoath responsables de la mort du vieil Oruthir, idée logique et respectable qui lui permet de faire la connaissance du chamane Grot Kankrot, après que ce dernier se soit fait capturer par les Tarantulos suite à la mise en déroute de sa bande de Gloomspite Gitz, ayant eux-mêmes embusqués les Darkoath pistés par Vexen et Cie un peu plus tôt (faut suivre). Réalisant que Kankrot est aussi un grand fan des arachnides en tous genres, comme son pendentif à huit pattes et les bestioles grouillantes qui se cachent dans ses robes moisies le révèlent sans trop de surprise, notre héros l’interroge sur sa présence dans les Eightpoints au lieu de lui fendre le crâne sans sommation, et apprend que le chamane est venu assister la légendaire Arachnarok Garat-Ulm dans ses derniers moments. Tout à la fois monture et divinité mortelle pour Kankrot et ses ouailles, Garat-Ulm a été grièvement blessée lors d’un affrontement récent contre un ost de Sylvaneth mené par Alarielle et son scarabée de fonction, et s’est réfugiée dans ce Royaume pour y mourir.

Voyant dans cette révélation fortuite une preuve irréfutable de la bénédiction de sa propre divinité, Vexen épargne Kankrot pour que ce dernier le mène jusqu’à son animal de compagnie égaré, ce dont le serviable Grot se fait un plaisir. En chemin, les Tarantulos croisent la route d’un guerrier Splintered Fang esseulé (Pallas), dernier survivant de sa bande après que cette dernière ait eu la mauvaise idée de causer du raffut à proximité du repaire de Garat-Ulm en attaquant une colonne d’Iron Golems de corvée de lessive. Pallas conduit ses anciens presque alliés jusqu’au lieu de la bataille, où les cocons de soie laissés par une araignée gigantesque achèvent de lever les doutes de Vexen sur la sincérité de son prisonnier. Après avoir euthanasié par charité chaotique un Pallas dégoûté par sa propre couardise, les Tarantulos se remettent en marche.

Leur route les mène jusqu’à une caverne gigantesque, dans laquelle ils finissent enfin par rattraper Garat-Ulm… ainsi que la bande de maraudeurs Darkoath du début de l’histoire (toujours elle), bien décidée à poursuivre son œuvre arachnophobe en faisant son affaire à Shelob Jr. On n’a pas dû leur expliquer que les araignées permettaient de limiter les populations de moustiques, ou bien ils sont à deux doigts de se vouer à Nurgle (et ses mouches), je ne vois que ça. Pas plus bête que le premier venu, Vexen attend que ses ennemis aient chargé Garat-Ulm, qui malgré ses blessures reste toujours un monstre de corps à corps, avant de fondre sur les arrières des Darkoath, remportant facilement la victoire et achevant l’Arachnarok moribonde d’une javeline bien placée au passage.

Ceci fait, le premier réflexe de notre héros triomphant est d’aller piquer une tête dans les entrailles fumantes de sa gigantesque victime, avec quelques blocs de varanite en sus en guise de sels de bain, afin de devenir le réceptacle des dons chitineux du Voyant Octuple…

Début spoiler…Et ce dernier met la dose, et plutôt huit fois qu’une. A la sortie de son bain, Vexen est devenu une véritable araignée géante, mais a la mauvaise surprise de se trouver entouré par les cadavres de ses compagnons et une horde de Grots, les suivants survivants de Kankrot qui avaient pisté leur chamane captif à bonne distance. Outré par ce manque de bienséance, Vexen se rue sur Kankrot pour lui faire son affaire, mais plante ses crocs dans le champignon géant que le Grot dissimulait sous ses robes plutôt que dans le ventre de ce dernier. Le nuage de spores qui se répand alors dans la grotte achève de transformer Vexen en réincarnation de Garat-Ulm, promise à bel avenir en tant qu’utilitaire au service de Kankrot et de ses complices à capuche. Elle a peut-être plusieurs divinités, mais l’araignée reste un être bien singulier…Fin spoiler

AVIS :

Cela faisait un petit moment que la Black Library ne nous avait pas donné de nouvelles de/sur les Eightpoints, et cette absence est en partie comblée avec ce sympathique ‘Web of Ruin’, qui s’intègre parfaitement dans l’univers bigarré et sans pitié de Warcry. Adrian Tchaikovsky réussit brillamment son entrée dans cette franchise de niche, et plonge le lecteur dans le quotidien forcément violent d’une bande de Tarantulos de façon plus que convaincante, jouant avec malice sur les différences et points communs existant entre les factions arachnophiles d’Age of Sigmar au passage. Une histoire plaisante, prenante et bien conclue (on ne crache pas sur les twists finaux qui tiennent la route ici), qui je l’espère ne restera pas un one shot pour la littérature Warcry trop longtemps : après tout, il y a maintenant une vingtaine de bandes à couvrir…

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One Million Years – N. Crowley [40K] :

INTRIGUE :

One Milllion YearsAlors que la barge solaire One Million Years (une référence à la durée moyenne de ses missions) se dirige lentement vers la surface de la géante bleue qu’elle a siphonné d’une partie de ses ressources pour le compte de la dynastie Thokt, elle se fait attaquer sans crier gare par le seul autre type de vaisseau capable d’opérer dans un environnement aussi hostile, un Space Hulk Ork peint en blanc pour réverbérer la chaleur un vaisseau ruche de la flotte Wendigo le Hrafnkel avec la clim à fond un Méga-Croiseur des Ligues de Votann, bien décidé à s’emparer du précieux chargement du super tanker Necron. Maudits pirates !

Junior éternelle sur le One Million Years (les perspectives d’emploi sont vraiment limitées dans une société où personne ne vieillit et où on peut télécharger son esprit dans une enveloppe corporelle à volonté), l’Apprentek Prae s’attend naturellement à ce que sa tutrice, la vénérable autant que grincheuse Cryptek Baknephet, règle ce problème en un tour de main, son génie stratégique n’ayant d’égal que son expérience millionnaire aux commandes de la barge. Seulement voilà, nul n’est à l’abri d’un coup de moins bien et Baknephet dévore consciencieusement la feuille de match, laissant le vaisseau Votann s’approcher assez près du One Million Years pour lancer un abordage, puis restant sourde aux voicemails répétés de Prae lui demandant humblement mais de manière insistante de guider l’équipage de la barge dans sa défense contre les nabots en armure.

Après avoir compris que tout reposait désormais sur ses frêles épaules suite à la bouderie sénile de sa supérieure, Prae prend les choses en main et, assistée par l’esprit de la machine du One Million Years (Mehennoth) et un Castellan (Rengan) nommé sur le pouce pour coordonner la contre-attaque Necron sur le terrain pendant qu’elle planifiera la stratégie globale de son côté, l’intrépide Apprentek mène la vie dure à ses hôtes non désirés, jusqu’au moment où le Capitaine du Méga-Croiseur en personne (Eynr), se rend dans la salle où le sarcophage de Baknephet est situé pour parlementer avec sa subalterne1. La féroce résistance des Necrons lui ayant déjà coûté plus qu’il n’était disposé à perdre dans l’aventure, Eynr propose à Prae de concéder une égalité, puis de lui remettre la moitié de sa cargaison en compensation des dommages subis, considérant à tort que le silence de l’Apprentek est une stratégie de négociation. Malheureusement pour lui, Prae cherchait juste la manière la plus élégante de l’envoyer paître, et accueille son offre généreuse d’une tirade pleine de morgue et d’un rayon d’hyper-matière, réduisant le Kin en cendres et provoquant la fuite du Méga-Croiseur dans les minutes qui suivent.

Enfin seule maîtresse à bord du One Million Years, Prae peut se pencher sur la troublante défection de Baknephet et lorsqu’elle ouvre le sarcophage de sa maîtresse, constate que cette dernière s’est décomposée depuis belle lurette et a fusionné avec Mehennoth au cours de ses éons de service. L’attaque du Méga-Croiseur, parce qu’il constituait un événement imprévu, a pris de court l’entité routinière qu’était devenue Baknephet/Mehennoth, expliquant l’absence de réaction de la Cryptek désincarnée lors des dernières heures. Si un semblable destin attend éventuellement Prae, elle a cependant quelques millions d’années avant que cela ne se produise, et elle compte bien faire bon usage de son capitainat du One Million Years dans l’intervalle. Sa première décision sera de pomper quelques quettawatts d’hydrogène en soute pour préparer un tir de lance en direction du vaisseau de feu Eynr le cuistre. Voilà qui devrait apprendre aux Kins les bonnes manières…

1 : Qui avait dû se rendre sur place en passant par l’extérieur du vaisseau à cause de la concentration de guerriers Hearthkyn dans les coursives. Je le notifie uniquement pour remettre à leur place les fans transis de Roboute Guilliman, qui doit remettre son titre de most badass space freediving session à Prae. À ceux qui considèreraient que la concurrence est rendue déloyale par l’absence de matière organique chez l’Apprentek, je rétorquerais que l’affrontement entre le One Million Years et le Méga-Croiseur Votann se passe à la surface d’une étoile.

AVIS :

On peut compter sur Nate Crowley pour trouver des angles d’approche intéressants pour explorer de nouveaux pans du 41ème millénaire (un talent appréciable et malheureusement pas aussi répandu que ça au sein de la Black Library), et il en fait la preuve à travers ce ‘One Million Years’, qui détonne franchement des traditionnels affrontements spatiaux que l’on peut retrouver dans les nouvelles et romans de la BL.

Aux commandes de ses chers Necrons, une faction dont il est sans doute l’un des meilleurs auteurs à l’heure actuelle, Crowley nous offre une plongée dans le spectaculaire quotidien de cette faction, que son avancement technologique et son goût consommé pour le transhumanisme (ou transnecrontyrisme, plus exactement) place à des années lumières des considérations bassement organiques du reste des espèces sentientes de la galaxie. De l’autre côté du ring, les Ligues de Votann, encore peu décrites dans la GW-Fiction au moment où cette nouvelle est parue, font des adversaires parfaits à Prae et son acariâtre tutrice, leur goût pour le minage galactique et le recours au clonage de masse les positionnant en miroirs « humanisés » de nos héros mécaniques.

J’ai également apprécié l’effort stylistique consenti par Crowley, dont le texte puise davantage aux sources du space opera que du grimdark et dont le découpage en micro-chapitres en font une originalité dans le reste du corpus des courts formats de 40K. ‘One Million Years’ peut donc être qualifiée de nouvelle de premier plan au sein de ce dernier, et mérite définitivement la lecture si vous êtes un amateur de cette franchise.   

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The Last Loyalist – D. Guymer [HH] :

INTRIGUE :

The Last LoyalistSur la surface dévastée d’Isstvan III, un petit groupe de Space Marines loyalistes résiste encore et toujours à l’envahisseur. S’ils ne peuvent malheureusement pas compter sur la potion magique pour décupler leurs forces, comme leurs lointains ancêtres avant eux, Kloron Orbaddon des Sons of Horus, Pyramus des Emperor’s Children et Glaum de la Death Guard ont toutefois une arme secrète en réserve, en la figure de Zhukel Dror, aka l’Obélix1 de Ghenna, qui est tombé dans sur les clous du druide boucher quand il était petit. Bien que durement éprouvé par vingt-six jours de combats sans merci, Dror est toujours fidèle à l’Empereur – même si plus très lucide – et se fait un devoir, à défaut de plaisir, de jouer le rôle du marteau tronçonneur2 dans les embuscades que ses comparses tendent à ses anciens collègues de Légion.

Après avoir flanqué une bonne rouste à une escouade de World Eaters un peu trop confiants, le quatuor de choc se replie jusqu’à sa base d’opérations pour y prendre un peu de repos bien mérité. Chacun peut alors vaquer à ses occupations favorites : faire des cauchemars dans lesquels il rosse son frère (possiblement jumeau) dans la salle du trône de son père pour Dror, regarder amoureusement ce dernier dormir pour Orbaddon, récurer son matos pour Pyramus, et… essayer de reconstituer une statuette isstvanite avec de la colle faite maison pour Glaum. Les Death Guards sont vraiment pleins de surprises.

Ce tranquille interlude ne peut cependant pas durer longtemps, et est brisé en même temps que le plafond du bunker où Dror pionçait par l’arrivée d’une escouade de Marines d’assaut World Eaters, bien décidés à mater les irréductibles loyalistes. Une nouvelle baston s’engage, au cours de laquelle Pyramus fait une chute peut-être mortelle, Glaum termine peut-être son puzzle en 3D, et un nombre sans doute élevé d’Astartes passe l’arme à gauche. Ce qui est sûr, tout du moins, c’est que la bromance unilatérale entre Orbaddon et Dror se termine dans le sang et les larmes, après que les clous du boucher aient totalement sapé le self control tout relatif du second. Entraîné par son camarade vers une hypothétique issue, qui pourrait permettre au quatuor devenu duo de continuer hypothétiquement le combat auprès d’un autre groupe de loyalistes, Dror finit par vider son chargeur dans le torse du Son of Horus gnangnan dans un accès de folie, avant de rejoindre le combat avec un douloureux – pour lui et pour les autres – enthousiasme. Cela ne l’empêche pas de considérer qu’il est toujours fidèle à l’Empereur, notez bien : notre héros est un être principiel.

Quelques jours/semaines plus tard, la presque carcasse de Dror est déterrée par un « heureux » hasard par la patrouille recyclage et récupération du Sergent World Eaters Solax, alors qu’elle reposait sous quelques mètres cubes de gravats. Toujours partant pour une prise de tête au débotté, Dror tente de décapsuler son ancien camarade à mains nues, mais son organisme épuisé et son équipement délabré ne font pas le poids face à la patate de forain que Solax lui envoie dans la mâchoire pour calmer ses ardeurs. L’histoire tragique de Dror aurait pu s’arrêter là, mais c’était sans compter le sadisme du Capitaine Shâkha, pas encore rendu déperlant à ce stade de sa carrière, qui retient la main de son subalterne en lui indiquant qu’il a une meilleure et plus cruelle idée pour le surhomme des sables qu’ils viennent d’exhumer. Qu’est-ce qui est rouge et a deux haches énergétiques, une armure Terminator et un bouton on/off ?

1 : Pas un hasard si les couleurs originales des World Eaters étaient le bleu et le blanc.
2 : Une invention novatrice qu’Angron a tenté, sans succès, de faire homologuer par l’Adeptus Mechanicus pendant la Grande Croisade.

AVIS :

Isstvan III est une bataille tellement importante pour le déroulement de l’Hérésie d’Horus qu’on peut comprendre que les auteurs de cette franchise tiennent à y revenir, même des années après sa couverture dans ‘Galaxy in Flames’. David Guymer ne fait pas exception, et son récit de la déchéance terminale mais guère surprenante d’un des derniers loyalistes des World Eaters s’avère être une nouvelle assez solide, même si elle n’apporte rien de bien fondamental à la grande histoire qui se déroule après ce massacre fondateur.

On appréciera cependant la caractérisation des personnages principaux de ‘The Last Loyalist’, chacun d’eux incarnant bien les traits de sa Légion d’origine (mention spéciale à Pyramus, qui soule ses compagnons à force de leur affirmer que le flamboyant Fulgrim va arriver et rétablir la paix et l’harmonie d’un claquement de ses doigts parfumés, ainsi que les références faites par l’auteur à des événements et personnages connus des habitués de l’Hérésie, depuis Ghenna jusqu’à Ibram Ghreer.  Pour ceux que ça intéresse, le personnage de Zhukel Dror est également présent dans le livre ‘Retribution’ de Forge World, et on en apprend plus sur le sort qui l’attend après sa capture par Solax et Shâhka, que l’on retrouve quant à eux dans le roman ‘Angron: The Red Angel’ signé par le même Guymer1.

1 : Profiter d’une pige hérétique pour donner un peu de profondeur à ses personnages 40K étant un péché véniel, commis par d’autres auteurs (je pense à McNeill, Thorpe et Anthony Reynolds, en particulier) avant lui, on pardonnera à David Guymer ce petit kif personnel.

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Et voilà qui conclut cette revue du Black Library 2023 Advent Calendar, une cuvée assez sympathique pour terminer une année riche en nouvelles de la part de la BL. Espérons que 2024 soit du même tonneau, et que le prochain calendrier de l’Avent contienne quelques histoires en provenance du Vieux Monde… En tout cas, moi j’y crois.

BLACK LIBRARY CHARACTER DAY 2023 [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du Black Library Character Day 2023, continuation logique (si on met de côté le titre…) des Character Weeks que la BL nous offre depuis l’été 2020. De manière assez classique, nous avons ici affaire à cinq nouvelles tirées des franchises majeures que sont Warhamme 40,000 et Age of Sigmar, et centrées sur quelques-uns des personnages nommés les plus populaires du moment.

Au menu de l’été 2022, nous retrouvons des têtes bien connues, tel que ce vieux ronchon de Gotrek Gurnisson (déjà mis à l’honneur dans la Character Week 2020 avec ‘Death on the Road to Svardheim’), ou encore l’infatigable Minka Lesk. Les Blacktalons seront également de la partie, ainsi que deux héroïnes impériales relativement confidentielles (pour le moment) : la Sniper cadienne Darya Nevic et la pilote de chasse Lucille von Shard.

Black Library Character Day 2023

Côté auteurs, Nottingham a choisi de s’appuyer sur des plumes déjà éprouvées (en tout bien tout honneur) en les personnes de Justin D. Hill, Darius Hinks et Denny Flowers. On peut également étendre ce qualificatif à Liane Merciel, qui n’a commencé à collaborer que récemment avec la Black Library mais est loin de son coup d’essai littéraire. Reste Rob Young, qui signe avec ‘Memories of Broken Glass’ sa troisième nouvelle pour le compte de la GW-Fiction, en attendant la sortie du roman ‘Longshot’ dans quelques mois. Le décor étant posé, il est temps de faire connaissance avec les VIP convoqués par la BL pour égayer notre été, en espérant qu’ils soient de bonne humeur…

Black Library Character Day 2023

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Arcady Pride – J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE :

Arcady PrideLes troupes de choc cadiennes ont remporté la campagne de Malouri et repris le Roc du Traître à ce dernier (et à ses nombreux séides). Laissés à glander dans les décombres du champ de bataille en attendant que le devoir les appelle ailleurs, la Sergent Minka Lesk et quelques membres de sa garde rapprochée (Blanchez, Jaromir et Yedrin) décident d’aller tuer le temps en descendant quelques bouteilles dans un baraquement abandonné. C’est l’occasion pour les quatre frères et sœurs d’armes d’évoquer leurs expériences passées, de rendre hommage à leurs camarades défunts1, et de prendre une murge bien méritée, et pas nécessairement dans cet ordre.

Cette plaisante session de team squad building est toutefois interrompue par l’arrivée à l’improviste du Sergent-Chef Zarv, déjà fin bourré et ayant l’alcool assez mauvais. Alors que Minka abordait enfin le sujet, traumatique au possible pour elle, de la chute de Cadia, qu’elle a vécu aux premières loges, ce fieffé malotru ne trouve rien de plus approprié que de lui balbutier à la face qu’elle aurait dû mourir sur place, comme une bonne petite soldate. Rien d’étonnant à ce que notre héroïne au caractère bien trempé n’allonge un crochet ravageur à ce gougnafier, qu’elle aurait sans doute bellement corrigé sans l’intervention salutaire de ses camarades.

La tension étant un peu retombée, Minka consent finalement à partager son expérience de Bouclier Blanc sur une planète en sursis, et à narrer en détail le récit des derniers jours de Cadia, dans toute leur grandeur et leur horreur. Sans surprise, cette anecdote pas piquée des vers, comme la boutanche que les vétérans se partagent (la fameuse Fierté d’Arcadie dont il est question dans le titre), met tout le monde d’accord et nous offre un beau moment de communion entre Gardes Impériaux, Cadiens ou pas. Santé tout le monde, vous en aurez besoin par la suite…

1 : Dido pour Lesk, et une foule d’inconnus pour Jaromir, qu’un pet au casque au premier degré à rendu à moitié amnésique.

AVIS :

Justin D. Hill se frotte à un style de nouvelles de Gardes Impériaux un peu particulier, créé et perfectionné par nul autre que le maître Abnett (et plus tard repris par d’autres, comme Rachel Harrison) dans ses ‘Fantômes de Gaunt’ : l’entrecombat. Le concept est simple, mais difficile à maîtriser : il s’agit de mettre en scène des personnages taillés pour des scènes d’action dans des situations plus (exemple : ‘Family’) ou moins (exemple : ‘Vermilion Level)’ pacifiques et intéressantes à suivre pour le lecteur. Cela nécessite bien sûr d’avoir auparavant suffisamment développé la personnalité et les interactions entre les personnages en question pour que l’exercice n’apparaisse pas comme une perte de temps et un gaspillage d’encre et de papier, ce qui n’est pas à la portée du premier contributeur de la Black Library venu.

N’ayant lu de la série cadienne de Justin D. Hill que les nouvelles consacrées par ce dernier à son personnage fétiche de Minka Lesk, et n’ayant pas franchement accroché avec cette dernière, je ne me trouve pas dans une situation idéale pour porter un jugement un minimum objectif sur cet ‘Arcady Pride’. Je me cantonnerai à dire que le résultat ne m’a pas emballé (pour changer), mais que les personnages de Hill sont suffisamment ébauchés (Blanchez la groupie énamourée de sa chef, Jaromir le colosse amnésique et pas très malin, Yedrin… qui a le vertige) pour que l’expérience ne soit pas aussi fadasse qu’elle l’aurait pu être. Sans doute qu’un lecteur ayant pris la peine de s’enquiller ‘Cadian Honour’, ‘Traitor Rock’, et en bonus ‘Cadia Stands’ (que Lesk re-raconte de son point de vue dans la deuxième partie de la nouvelle) – dédicace @gilian – aura plus de plaisir à parcourir ces quelques pages, et appréciera la mention de personnages absents mais qu’on devine important (ici Dido, qui n’est sans doute pas la chanteuse).

On peut tout de même noter que la fin de cette nouvelle semble paver la voie à un futur roman où Lesk et ses âmes damnées retourneront sur Cadia pour retrouver le fumeur de cigares le plus badass de la galaxie, porté disparu mais pas formellement déclaré mort. Qui d’autre que Hill, qui a déjà mis sa plume au service de ce vieux briscard d’Ursarkar E. Creed, pour relever ce défi ?

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The Crown of Karak-Khazhar – D. Hinks [AoS] :

INTRIGUE :

The Crown of Karak-KhazharLa cité de Sephyrum, siège du clan Pic de Fer et havre d’ordre et de stabilité pendant des centaines d’années, a été à moitié envahie par les hordes emplumées et encornées de Tzeentch, qui entre autres méfaits ont répandu du mercure mutagène partout dans les rues. Les monstres. Bien que quelques défenseurs aient décidé de vendre chèrement leur vie/leur progression (dans le cas des Stormcast Eternals) dans un dernier carré héroïque et futile, il ne fait aucun doute que le Chaos a remporté cette bataille, ne laissant que peu d’alternatives aux citadins survivants. L’une d’entre elles est la Brisefer Ulvgrid, qui a décidé après mûre réflexion que sa meilleure stratégie était de marchander son passage vers un environnement plus salubre en échange de la légendaire couronne de Karak-Khazhar, autrefois possession et emblème de son clan, et maintenant bibelot inutile depuis la mort du dernier roi et de la majorité de ses sujets au combat. Son commanditaire est un individu louche du nom de Pharasalus, dont l’arène gladiatoriale ne désemplit pas depuis le début du siège. Ce n’est pas parce qu’une armée chaotique a envahi la ville qu’il faut arrêter de sortir le soir, c’est vrai ça.

Le duo peut également compter sur la présence taciturne mais rassurante de l’impayable Gotrek, que les hasards de la vie ont amené dans Sephyrum en ce moment délicat, et qui semble satisfait de refaire le portrait des gladiateurs semi-pros et des barriques de bière que Pharasalus lui met à disposition. Il suffit toutefois à Ulvgrid de mentionner qu’un homme-bête d’une carrure hors normes a pris ses aises dans la chambre forte où la couronne est conservée pour que le Tueur old school se joigne à l’aventure.

Le chemin jusqu’à la salle du boss est l’occasion pour Gotrek et Ulvgrid de sympathiser en trucidant quelques Hurleurs de concert (c’est approprié me direz-vous), et en échangeant des banalités sur la qualité intrinsèque de l’infrastructure urbaine de Sephyrum, bâtie par le clan de la Brisefer freelance. Cette dernière ne comprend pas pourquoi Gotrek se laisse houspiller par Pharasalus. Gotrek voit d’un mauvais œil (le seul qui lui reste) l’abandon d’une relique duardin à un profiteur humain. Bref, la communication n’est pas facile entre les deux demi-portions, mais on s’en fout car voilà qu’arrive (enfin) le combat final.

Juste après avoir récupéré la couronne grâce à la connaissance qu’Ulvgrid avait des lieux et la clé de service qu’elle avait conservé1, Pharasalus se révèle être un pharasalaud (pretends to be shocked), abandonnant ses camarades du mauvais côté d’une flaque de mercurochrome carcinogène et reprotoxique, et s’apprêtant à déguerpir avec son loot dans un éclat de rire sardonique. Son hilarité s’interrompt toutefois lorsque le Myrmidon qu’Ulvgrid avait aperçu lors de sa reconnaissance des lieux finit par rentrer au bercail, et lui plante sa lance dans le torse pour lui apprendre à empiéter sur la propriété d’autrui. S’ensuit un combat « indécis » entre Gotrek et le monstre, au cours duquel Ulvgrid intervient (un peu) pour démontrer son utilité. Quand la poussière retombe et le plafond commence à s’effondrer, notre héroïne réalise qu’elle a perdu sa chance de s’exfiltrer hors de la ville déchue, mais se fait convaincre par Gotrek de garder la couronne en sa possession au lieu de la refourguer au premier marchand venu, et de l’utiliser pour redonner du baume au cœur et un semblant d’unité aux survivants de son clan. Le roi est mort, vive l’arène.

1 : Le prestige des Brisefer a vraiment beaucoup baissé entre le Monde qui Fut et les Royaumes Mortels. Ça avait plus de gueule de purger les souterrains des peaux vertes et des Skavens que de garder la salle des coffres du grand chef.  

AVIS :

Darius Hinks délaie considérablement son propos dans ce bien longuet ‘The Crown of Karak-Khazhar’, qui n’a pas grand-chose à nous apporter de nouveau depuis l’époque de ‘The Dark Beneath the World’ (1990…), autre nouvelle où un Gotrek ronchon et nihiliste accompagne des aventuriers dans des ruines naines – sur lesquelles il ne tarit pas d’éloges – pour récupérer une relique inestimable. Rien n’est surprenant dans cette histoire, depuis la trahison de Pharasalus (qui aurait pu croire que ce personnage de salaud cupide serait un… salaud cupide et fourbe ?) jusqu’au déroulé et à l’issue du combat contre le mini boss de fin. On n’apprend pas grand-chose non plus sur les Royaumes Mortels à sa lecture (ce qui est en fait la vraie valeur ajoutée des nouvelles mettant en scène Gotrek, à mes yeux), ce qui aurait été la moindre des choses.

Pour finir, Hinks reste criminellement vague sur le seul point qui a piqué mon intérêt dans ‘The Crown…’, à savoir les raisons qui ont poussé notre Tueur préféré à embrasser la carrière de gladiateur dans une arène souterraine alors qu’une cité remplie d’innocents est attaqué et envahie par les hordes de Tzeentch deux étages plus haut1. Si dans l’absolu, ce motif (un peu puéril, mais Gogo n’est pas le personnage le plus mature qui soit) peut tenir la route, l’auteur aurait pu se donner la peine de mieux le contextualiser pour les lecteurs qui, comme moi, voient le petit rouquin comme un parangon d’honneur martial depuis plus de trois décennies. Bref, copie très moyenne pour Darius Hinks, qui a bien fait de laisser un autre chroniqueur, on l’espère plus inspiré, reprendre en main la geste de l’increvable nabot.

1 : À croire que l’expérience de la défense de Praag ait été si éprouvante qu’il a choisi de faire l’impasse cette fois.

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Memories of Broken Glass – R. Young [40K] :

INTRIGUE :

Memories of Broken GlassDéployé sur le monde pollué et désertique (au moins à l’équateur) de Kizmir pour combattre une insurrection chaotique, le 217ème Cadien a décidé de se la jouer sneaky et a envoyé un duo de Snipers (Darya Nevic – déjà croisée dans ‘Transplants’ – et Iago Ullaeus) camper à proximité d’une route où un haut gradé ennemi est sensé passé dans peu de temps soixante heures. Un moyen comme un autre d’accélérer la résolution du conflit, vous me direz. Comme l’attente en plein cagnard n’est pas des plus agréables, les deux Gardes échangent quelques anecdotes pour tuer le temps, en attendant de pouvoir faire de même avec leur cible. De fil en aiguille, nous voilà plongés dans le récit de la dernière mission réalisée par Darya pour le compte de son régiment d’origine, les Janissaires Coclerati…

Cela s’est passé sur la planète forestière de Graxis IV, soumise au pillage indiscriminé d’un régiment de Gardes Impériaux ayant tourné casaque et rejoint le camp des Fab Four. À l’époque, Darya servait déjà dans un corps d’élite, les Guides (Wayfinders), combinant les compétences d’éclaireurs, tireurs d’élite et agents de renseignement. La légende raconte même qu’ils faisaient le café, si on demandait gentiment. Alors qu’elle montait la garde aux abords du camp retranché de son unité, son Sergent (Mihail Ozeck) vint la brancher sur une mission aussi urgente que mystérieuse : aller enquêter sur les raisons du silence d’une famille de hardis bûcherons locaux, ayant accepté de collaborer avec les forces impériales en échange de quelques flacons d’antiseptique et paquets de pralines. Sur le chemin, Darya remarque vite que son supérieur se comporte d’une manière étrange, la laissant prendre toutes les décisions et semblant juger sa manière de procéder, comme si elle n’était qu’une aspirante en train de passer son grand oral d’infiltration. Machisme décomplexé ou agenda secret ? Il est trop tôt pour le dire.

Lorsque les deux soldats arrivent jusqu’à la petite maison dans la prairie clairière, c’est le choc et la consternation : l’humble cahute a été incendiée et criblée de tirs de laser, pendant que ses habitants se trouvaient à l’intérieur. Un tour pendable de ces fieffés Skjardi, qui ont souhaité faire un exemple des collabos1 ! L’émotive et vertueuse Darya souhaite ardemment venger ces morts cruelles en pourchassant la bande de maraudeurs responsables du massacre, mais lorsqu’Ozeck lui révèle que les Moisin étaient des informateurs, et que leur dernier rapport détaille l’emplacement d’une zone de ravitaillement skjardie où un haut gradé devrait se trouver, elle parvient à faire la part des choses et opte pour la poursuite de l’objectif stratégique, plutôt que le feel good kill. La marque des grands.

De retour au camp des Janissaires après avoir abattu un officier adverse et mis le camp retranché des Skjardi en ébullition d’un tir de laser dans une caisse d’obus, Darya et Ozeck sont reçus très froidement par le Capitaine Mugir, qui semble fulminer sous son masque doré. En cause, la décision du Sergent d’emmener sa protégée sur ce que l’on peut raisonnablement appeler un plan foireux, soi-disant pour lui donner une dernière leçon de philosophie martiale appliquée, alors qu’il était tout simplement chargé de lui annoncer qu’elle avait été affectée dans un prestigieux régiment cadien en manque d’effectifs qualifiés. Darya partira rejoindre le 217ème sans savoir si son mentor a échappé au bolt que la Commissaire attachée aux Janissaires semblait lui réserver pour le lourd crime de prise d’initiative, mais garde de cette journée particulière un souvenir impérissable, que l’environnement désertique de Kizmir lui a remis en tête.

Quelques minutes/heures/années plus tard, la décapotable du maréchal-général Hektor Ogier Talassan finit par emprunter la piste poussiéreuse surveillée par Darya et Iago, scellant le destin de l’officier félon (dont on ne connaîtra jamais les causses de la trahison, et ce n’est pas important dixit la pragmatique et disciplinée Darya) et de son chauffeur particulier. La campagne de Kizmir n’est pas terminée, mais sa conclusion se rapproche…

1 : Pas sûr que ça marche bien sur une planète où la densité démographique tutoie les 1 habitant par kilomètre carré. Les voisins ne passeront pas tout de suite.

AVIS :

Rob Young continue de planter le décor des aventures du 217ème Cadien, régiment recomposé par excellence, dans ce satisfaisant ‘Memories of Broken Glass’. Son sens du détail dans la présentation faite des Janissaires Coclerati et des sauvages Skjardi, dotés d’une identité forte en l’espace de quelques pages, fait mouche et donne envie de voir ce dont notre homme est capable dans un long format. Il manque encore un petit supplément de charisme à Darya Nevic pour s’imposer comme une protagoniste de premier plan, mais s’il continue sur cette lancée, Young ne devrait pas tarder à atteindre ce stade.

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The Eyeless Mask – L. Merciel [AoS] :

INTRIGUE :

The Eyeless MaskNeave Blacktalon et ses guerriers (et mage) d’élite sont envoyés à la rescousse d’une expédition sigmarite, portée disparue dans la jungle ghyrane alors qu’elle cherchait à prendre possession des ruines de la cité d’Arphallos, réputée à travers les Royaumes Mortels pour deux spécialités locales. 1) elle contient des artefacts mystérieux d’une puissance incommensurable, et 2) elle finit par rendre fou tous ceux qui osent y pénétrer, à cause de vibrations inexpliquées retentissant en permanence dans la ville.

Une première exploration rapide du périmètre autour du camp où les soldats disparus étaient cantonnés n’ayant rien donné, les Blacktalons décident de partir en direction de la Piscine à Bulles Bosquet Bouillonnant mentionné dans les notes laissées par le Liberator Prime des Hallowed Knights qui accompagnaient les mortels dans leur expédition archéologique. On apprend aussi au passage que le vieux Hendrick a eu une vision d’un « masque jaune sans yeux chantant une chanson terrible alors qu’il s’abreuvait de sang et d’éclair », ce qui aurait décidé la compréhensive (à bien des égards) Neave à partir pour Arphallos. C’était ça ou interdire au vétéran de forcer sur la bouteille pendant le service, et quand on vient juste de prendre la place de son ancien boss sur décision managériale, comme cela a été le cas ici, il est important de ménager les susceptibilités.

Tout ça pour dire que nos héros finissent par déboucher sur un quartier d’Arphallos où des formations de pierre jaune semblent avoir pris au piège les Stormcast égarés, comme les reflets révélant la présence de colosses en sigmarite dans les anfractuosités de la roche permettent à l’instinctive Blacktalon de le deviner en un éclair. Quelques coups de masse plus tard, son intuition est confirmée et les Hallowed Knights éprouvés et drainés par l’épreuve s’extirpent des gravats, porteurs d’une bien mauvaise nouvelle : les sorciers de l’Ordre de la Nuit Brûlante, qui accompagnait l’expédition, ont été corrompus par Tzeentch et se sont retournés contre leurs alliés. C’est eux qui sont responsables de l’emprisonnement des meilleurs de Sigmar (ainsi que celles des miliciens des Cités Libres, mais comme ces derniers n’ont pas survécu à l’épreuve à cause de leurs armures en papier mâché, on n’en parlera plus), et eux qui serviront donc d’adversaires à Neave et Cie.

J’aurais bien aimé vous faire un compte rendu détaillé de cet affrontement titanesque, mais comme vous l’aurez peut-être déjà deviné à la lecture du paragraphe précédent, j’éprouve quelques difficultés à rendre justice à un combat où le grand méchant est un bloc de pierre avec des reflets étranges, et dites vous bien que ce n’était que l’échauffement pour Merciel. Pour faire simple, les sorciers corrompus sortent également des décombres et commencent à hurler « OOOOOHMMMM » tellement fort que les Blacktalons se sentent mal, ce qui ne les empêche pas de combattre, pour ceux qui savent le faire (sorry Lorai). Leur incantation provoque l’apparition d’un dôme tentaculaire, au sens premier du terme, qui cherche à siphonner l’énergie de tous les combattants présents en faisant du peau à pierre. Le dôme finit par se transformer en le fameux masque de la prémonition de Hendrick, puis utilise ses tentacules pour transformer les sorciers en amalgames chaotiques, après avoir piqué leurs yeux et leurs métacarpes pour s’en faire des colliers. Neave a alors une autre épiphanie salutaire, et comprend qu’il lui faut tuer les mini boss pour affaiblir leur gros copain, ce qu’elle réussit à faire grâce à sa super vitesse avant que les bad vibes des affreux ne la mettent en PLS. Ceci fait, il est facile aux Blacktalons de réduire en poudre the Masked Screamer, remportant ainsi une victoire aussi indéniable que foutraque pour le compte de Sigmar. Il y a des jours comme ça…

AVIS :

C’est au tour de Liane Merciel de se frotter aux Blacktalons, et je dois dire que je n’ai pas été emballé par le résultat. Si elle arrive fort bien à mettre en scène la cité perdue d’Arphallos et la jungle aussi exubérante que mortelle qui l’entoure, Merciel se retrouve en revanche embarrassée par le nombre important de personnages qu’elle doit faire intéragir1, et son idée de faire de l’antagoniste de la nouvelle une sorte d’horreur indicible à la Lovecraft fait long feu, pour un résultat plus proche de la description romancée d’un combat contre un boss d’Elden Ring, remporté grâce à la super vitesse de Neave The Flash Blacktalon. Autre déception, alors que les deux précédents « épisodes » de la série (signés par Gary Kloster et Chris Thursten) étaient parvenus à donner de la profondeur aux Blacktalons et à mettre en lumière leurs relations, parfois complexes et ambivalentes, ‘The Eyeless Mask’ ne nous apprend absolument rien de nouveau sur le sujet, mis à part que Rostus semble avoir une excellente mémoire et qu’Hendrick a des visions. Peu concluant.

1 : Au point de faire déclarer à Lorai son absolue inutilité pour la mission en cours. C’est révélateur.

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Starstruck – D. Flowers [40K] :

INTRIGUE :

StarstruckAlors qu’elle était en train de tourner quelques images de propagande pour supporter l’effort de guerre impérial sur la planète de Shohi, la pilote de chasse devenue influenceuse galactique Lucille von Shard a le déplaisir de se faire réquisitionner comme le premier bidasse venu par un patron auquel on ne peut pas dire non : l’Inquisition. L’Inquisiteur Otis Atenbach souhaite en effet se faire livrer un paquet un peu spécial depuis la surface de Shohi jusqu’à son vaisseau personnel, et ce dans les meilleurs délais. La présence en orbite de la planète d’une vrille de la flotte ruche Leviathan venant compliquer l’équation, son bras droit (qui se trouve être Rile von Shard, frère de Lucille) a naturellement opté pour mettre l’as des as sur cette mission. Après des retrouvailles compliquées et acerbes, Lulu accepte finalement de jouer le jeu et passe derrière le manche de la Valkyrie custom d’Atenbach, dans la soute de laquelle Rile prend place en compagnie de quelques Scions, d’un Psyker assermenté qui ne tarde pas à exhiber des stigmates de mauvais augure, et d’un coffret de noctilithe à la surface fissurée. Vraiment pas de quoi s’inquiéter.

L’escadre inquisitoriale décolle, et croise bien vite la route de la plupart des entrées du Codex Tyranides possédant le mot clé « vol », depuis la nuée de Gargouilles jusqu’à l’imposante Harridan, en passant par quelques Harpies entreprenantes. Il semble assez certain que les Xenos sont attirés par la cargaison inquisitoriale, et les deux von Shard passent quelques pages pénibles à gérer les conséquences de cette attraction prononcée, Lucille en tenant à distance les entreprenantes créatures, Rile en allant littéralement repêcher le précieux colis après que des turbulences un peu trop fortes aient envoyé le coffret valdinguer dans le ciel nocturne de Shohi. Il a ainsi l’occasion de se rendre compte des pouvoirs que possèdent le colis de son patron, capable d’assommer tous les Tyranides à plusieurs mètres à la ronde après avoir été stimulé, capacité des plus utiles et qui pourrait évidemment aider l’Humanité dans sa lutte contre les flottes ruches.

Au bout du compte, Lucille parvient à poser la Valkyrie très esquintée d’Atenbach dans le hangar du vaisseau inquisitorial, sans avoir perdu ni son frère ni le précieux chargement de ce dernier, ce qui démontre une fois encore qu’elle est sans doute la meilleure pilote de ce côté de la Cicatrix Maledictum. L’alégresse éprouvée par Rile après cette survie miraculeuse est cependant tempérée par l’état pitoyable de sa sœur, dont la vie de poster girl du Munitorum n’est apparemment pas de tout repos. C’est toutefois une victoire indéniable pour l’Imperium, et toutes les occasions sont bonnes à Lucille pour lever le coude…

AVIS :

Lucille von Shard nous revient en pleine verve, à défaut de pleine forme (la fin de la nouvelle en est même un peu inquiétante…), dans cette histoire de livraison où rien ne se passe évidemment comme prévu. La grande force de Denny Flowers aura été de parvenir à jongler entre action tendue à la sauce grimdark et dialogues fendards entre le frère et la sœur von Shard, qui s’ils n’ont pas de réelle complicité, fonctionnent très bien en tant que duo comique, sur le modèle de Sherlock et Mycroft Holmes dans la série qui a révélé Buttercup Cumbersnacht au grand public. Il réussit aussi à nous intéresser aux agissements de l’irascible Lucille dans ses précédentes aventures (que j’imagine avoir été abordées dans ‘Outgunned’), ce qui est assez rare de la part d’un auteur de la BL pour que je le souligne ici. Pour terminer, le mystère qu’il laisse planer sur le contenu du mystérieux colis ramené à grand peine à l’Inquisiteur Atenbach donne également envie d’en savoir plus sur ce qui semble être une arme prometteuse pour lutter contre la Grande Dévoreuse. Bref, une addition parfaite à l’arc von Shard, que j’espère se voir se poursuivre dans les prochaines années.

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Voilà qui conclut cette revue de la Black Library Character Day 2023, livraison assez décevante avec seulement deux nouvelles intéressantes (pour votre humble serviteur, bien sûr). On peut au moins se réconforter avec la confirmation que Rob Young et Denny Flowers, et à travers eux, leurs personnages fétiches, sont des valeurs sûres de la GW-Fiction. C’est tout pour le moment, bon été à tous !

BLACK LIBRARY CELEBRATION 2022 [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue, un peu tardive je vous l’accorde, du recueil Black Library Celebration 2022. Véritable institution de la BL, cette petite anthologie a pour elle d’être gratuite, ce qui est bien, et désormais disponible dans les trois langages principaux de la GW-Fiction (celui de Shakespeare, de Molière et de Goethe). Diffusé comme chaque année en Février, à l’occasion des mirifiques festivités littéraires que la Black Library offre à ses hordes de disciples, le millésime 2022 comporte 5 nouvelles, représentatives de la fabuleuse diversité des franchises de Games Workshop.

Black Library Celebration 2022_EN

Black Library Celebration 2022_FR

Il est assez fréquent que les éditeurs de Nottingham, en bons hommes et femmes d’affaires qu’ils sont, bourrent ces produits d’appel de nouvelles déjà publiées, ce qui est de bonne guerre il faut le reconnaître. C’est une fois de plus le cas ici, puisque seule la soumission de C. L. Werner est un inédit, mais à grox donné, on ne regarde pas les crocs. Plus important que la fraîcheur du produit, c’est sa pertinence, c’est-à-dire sa capacité à donner envie aux primo-lecteurs de devenir des rats de bibliothèque Prophètes Gris, qui fera office de juge de paix Arbites ici. Alors, l’édition 2022 a-t-elle été à la hauteur de cette lourde tâche, aussi bien en anglais que in French ? Voyons cela sans tarder.  

Black Library Celebration 2022

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The Serpent’s Dance – M. Brooks [HH] :

INTRIGUE:

Désormais rattachée au service exclusif du Régent rageux de Terra, Malcador le Sigilite, l’ex Sœur du Silence Amendera Kendel participe à l’effort de guerre en menant à bien des missions de contre-espionnage pour identifier les traîtres à l’œuvre dans le système solaire. Une vraie mission de l’inspection générale comme on les aime. Son devoir la mène jusqu’à Jupiter, où elle infiltre incognito un événement mondain organisé pour l’élite locale, à la recherche de… n’importe quoi en fait, car on ne dirait pas qu’elle tient une piste très sérieuse au moment de faire son entrée sur le dancefloor jovien. Cette approche au pur talent verse de maigres dividendes, malgré les conseils avisés que lui glisse son associé, chaperon mondain et consultant en jet set Ruvier Dall, et la soirée progresse sans que sa patronne n’arrive à coincer le moindre petit hérétique. Kendel a beau dissimuler son aquila frontale sous un masque, son physique de tueuse sous des froufrous1 et son aura de Paria avec un torque de suppression, on ne s’improvise pas femme du monde. La spécialité de la maison serait plutôt de les détruire, d’ailleurs (remember Proxima Majoris).

Après une heure à échanger des platitudes avec le gratin jupitérien en pure perte, Kendel en a ras la queue de cheval et opte pour une tactique différente. Rencardée en douce sur les agissements suspects d’un convive, qui est le seul à se balader librement de groupes en groupes sans gardes du corps, notre héroïne fonce sur sa cible comme un missile à tête chercheuse (et à la grande horreur de Dall, offusqué par ce manque flagrant de savoir vivre), avec la ferme attention de… l’inviter à danser. Si si. Ma foi, pourquoi pas: peut-être que le DJ local avait eu la mauvaise idée de mettre ‘Cotton Eye Joe‘ pile à ce moment. Quoiqu’il en soit, la tentative de Kendel se heurte, non pas à un mur, mais au refus poli de l’assistante du nobliau en roue libre (Durian Jarandille), une jeunette timide du nom de Kristanna Moristat, qui fait remarquer à cette virago d’Amendera qu’on ne peut pas macarener les gens sans sommation et sans leur demander leur avis d’abord. Ne pouvant pas décemment lui mettre une manchette sans créer un scandale, la sista improvise et entraîne l’impétrante dans une carioca fougueuse. Faute de merles… Cette proximité lui permet de détecter que Kristanna est elle-même une Paria, constat dont va découler tout un tas de déductions qui, pour la faire courte, mène à la neutralisation de Jurandille, un affreux Psyker sous couverture dont les discussions avec l’élite jovienne ne pouvaient qu’avoir pour but de préparer subrepticement l’arrivée d’Horus dans le système solaire.

Alors qu’elle s’apprêtait à se mettre une claque dans le dos pour se féliciter d’une mission rondement menée (difficile de compter sur des marques de franche camaraderie de ce genre de la part d’autrui quand on donne la nausée aux gens à 10 mètres à la ronde), on souffle dans l’oreillette de Kendel que le deuxième compagnon de Jurandille, Jorud Gevaz, a filé à l’anglaise pendant qu’elle remportait sa battle de tektonik contre le Psyker infiltré. Comme l’homme en question est parti dans la direction générale des appartements du Haut Thane de Jupiter et qu’il laisse des cadavres de gardes derrière lui, il s’agit de le rattraper en vitesse afin d’éviter une gueulante de Sire Gilles l’Huître. Beaucoup plus à l’aise maintenant qu’elle a le droit de mettre des gros taquets dans les nougats, Kendel finit par confronter sa proie avant qu’elle ne pose ses sales pattes sur le nabab local, et parvient à la retarder suffisamment longtemps pour que l’indispensable Helig Gallor (Death Guard en disponibilité) arrive disperser l’importun d’une rafale de bolter bien placée. Pas assez vite cependant pour empêcher Gevaz, un agent de l’Alpha Legion, d’appuyer sur le détonateur caché dans la boucle de sa ceinture avant de passer de vice à trépas. Être lent et méthodique est parfois handicapant. Bilan des courses: deux tiers des invités du bal (ainsi que Ruvier Dall) finissent en carpaccio, victimes des bombinettes cachées par les cultistes dans les automates de service, ce qui n’est pas un superbe résultat pour notre espionne en herbe. Elle fera sans doute mieux la prochaine fois, si prochaine fois il y a.

1Notons au passage qu’elle a réussi à convaincre ce vieux pingre de Malcador de lui adjoindre les services de deux couturier.e.s. Deux fois le nombre de Space Marines de son équipe: on voit où vont ses priorités. 

AVIS:

Dans la série des « Que sont-ils devenus? » de l’Hérésie d’Horus, le cas d’Amendera Kendel méritait-il qu’on s’y attarde? Personnage récurrent de James Swallow, ses apparitions dans la série se sont logiquement espacées au fur et à mesure que celles de son auteur faisaient de même. À titre personnel, je vivais et lisais très bien sans mademoiselle Kendel, et je m’interroge sur les raisons qui ont poussées Mike Brooks à la choisir pour ses débuts dans l’Hérésie. Amendera ne m’apparaît en effet pas comme une figure brooksienne classique, n’étant ni trop sarcastique pour son propre bien, ni le détournement d’un archétype de 40K, ni particulièrement originale au niveau de ses pronoms1, ni un Ork. L’intrigue et la mise en scène, sans être indigentes, ne sont pas non plus mémorables, et, à moins d’un fantastique coup de théâtre, l’intégralité des événements narrés dans The Serpent’ Dance aura autant d’impact sur le reste de l’Hérésie d’Horus que la couleur des papiers peints du boudoir d’Eidolon, voire qu’Eidolon lui-même (c’est dire). Bref, c’est un double gâchis à mes yeux: des compétences et de l’originalité de l’auteur en premier lieu, et des possibilités scénaristiques (que ce soit en termes de développement ou de conclusion d’arcs narratifs) offertes par une saga aussi étoffée en second lieu. On appréciera tout de même le sérieux dont Brooks a fait preuve dans sa préparation, qui transparaît dans les références aux travaux de ses prédécesseurs (battlemark et thoughtmark, Lucifer Black…), mais également dans des clins d’œil un peu plus subtils, comme le choix de Kendel de prétendre être une aristocrate d’une certaine planète Mollita pour accéder au bal. En conclusion, je ne voue pas cette nouvelle aux gémonies mais j’affirme sans détour qu’il y a beaucoup mieux à lire de la part de Mike Brooks et de l’Hérésie d’Horus que cette danse serpentine.

1La danse entre Kendel et Kristanna est toutefois une péripétie que l’on n’aurait à mon avis pas pu trouver ailleurs que chez Brooks parmi les auteurs de la Black Library. Et on a bien un personnage non-genré dans l’histoire, mais c’est un garde tué hors champ dont Krendel récupère le fusil, donc ça ne compte pas vraiment.

ET POUR LES NOUVEAUX?

L’Hérésie d’Horus est la franchise “Experts” de la GW-Fiction, peu accessible par nature aux débutants du fait de la nécessité de maîtriser les bases du background de 40K et de 30K pour en tirer la substantifique moelle spectrale. Intégrer une nouvelle hérétique dans un recueil destiné aux nouveaux venus représente donc une gageure, et si la décision m’avait été confiée, ‘The Serpent’s Dance’ et ses personnages ultra niches embarqués dans une aventure pas du tout représentative du corpus de l’Hérésie (des Space Marines qui se tapent sur le coin du museau par paquets de mille, pour simplifier), aurait été mon avant-dernier choix, ou peu s’en faut. Jugement de valeur mis à part, il s’agit ici d’une histoire pour « faux-débutants », qui n’a donc rien à faire dans ce type d’anthologie.

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The Shapers of Scars – M. Collins [40K] :

INTRIGUE:

Dans l’infirmerie du Wyrmslayer Queen, la Reine Guerrière de Fenris (surtout) et Capitaine Libre Marchand (un peu) Katla Helvintr passe un sale moment. Ayant fait l’erreur de tendre l’autre joue dans un concours de crachat d’acide, notre héroïne donne du fil à retordre et des points de suture à poser à son équipe médicale, qui s’affaire pour sauver ce qui peut l’être de sa carnation délicate et de sa chevelure luxuriante. La situation est tellement grave que la vieille Bodil (à ne pas confondre avec sa sœur, Bursul), gothi fenrissienne tout ce qu’il y a de moins scientifique, a été appelée à la rescousse. Entre deux jets de runes en os (non désinfectées, j’en suis sûr) et prophéties mystiques sur le destin de Katla, qui finira soit dévorée par les Tyranides, soit étranglée par un ver de terre – c’est écrit –, Bodil trouve le temps de sortir son matériel de tatouage et commence à gribouiller sur le visage de sa Jarl, soit disant pour lui donner la force de vaincre le mal qui la hante, mais plus sûrement pour se venger de la dernière demande d’augmentation refusée par cette pingre de Katla. On se console comme on peut.

Pendant que la Tin-Tin du 41ème millénaire dessine des élans sur le front de sa patiente, nous remontons le temps pour comprendre comment cette dernière s’est retrouvée dans cette position peu enviable. La série de flashbacks que Marc Collins intègre dans son récit nous permet de suivre Katla dans ses œuvres, qui consistent principalement à sillonner le vide à la recherche d’adversaires de valeur à combattre. Drôle d’activité pour un Libre Marchand, mais après tout, certains tiennent visiblement à jouir de leur liberté plus que de leurs marchandises, et comme ils ont un mot d’excuse signé par Pépé en personne, nous ne sommes pas en droit de leur demander des comptes sur l’usage qu’ils font des ressources de l’Imperium. La cible du Wyrmslayer Queen se trouve être un vaisseau tyranide esseulé par la dispersion de sa flotte ruche, mais que sa soudaine solitude ne dissuade pas le moins du monde d’attaquer son traqueur bil(l)e en tête. Bien aidée par le désir manifeste et palpable de la Jarl de Fenris de régler l’affaire au corps à corps plutôt que par salves de missiles interposées, la bioconstruction Xenos arrive à portée de tentacules, et envoie quelques nuées de cafards enragés à l’abordage de son tourmenteur. Voilà une situation bien engagée et tout à fait optimale pour les impériaux, comme chacun peut en juger.

Short story shorter, Katla emmène sa bande joyeux huscarls à la rencontre de l’infestation tyranide qui s’oublie sur la moquette du troisième pont, et finit par croiser le fer avec un Prince particulièrement caustique et affligé d’un gros problème d’acné. À trop faire la maline avec ses hachettes viking, elle finit par percer le bouton de trop, et se fait asperger d’un acide autrement plus corsé que celui qu’elle a pris avant de se ruer à la bataille. Cela ne l’empêche pas de finir l’impudente bestiole proprement avant de faire une petite pause coma bien méritée, et la suite nous est connue. L’histoire se termine par le réveil de Katla, qui trouve le tatouage tribal que la fidèle Bodil lui a fait sur la moitié de la tronche méchamment bath. C’est ce qui s’appelle faire contre mauvais profil bon cœur.

AVIS:

Petite histoire très simple (j’aurais pu résumer le propos en trois phrases sans omettre grand-chose d’important) au nom très compliqué, ce ‘The Shapers of Scars’ intrigue et déçoit à égales mesures. Pour commencer par les reproches, je me désespère de lire encore des affrontements spatiaux complètement stupides car physiquement abscons après 30 ans de publications 40K. Ici, nous rencontrons le cas d’école de l’auteur n’ayant pas intégré qu’une bataille spatiale se déroule à une échelle de centaines de milliers de kilomètres, et pas à portée de jet de chaussure (ou ici, de tentacules pour les Tyranides et de harpons pour les impériaux1), ce qui est à mon avis un héritage néfaste des derniers Star Wars. Reconnaissons au moins à Collins d’avoir de la suite dans les idées, car mettre en scène une héroïne tellement obnubilée par le pugilat qu’elle abandonne son rôle de commandante en pleine bataille pour aller jeter des javelots à la gu*ule de pauvres Gaunts dans les coursives de son propre navire, accompagnés d’hommes de main équipés comme des Burgondes du haut Moyen Âge, est d’une originalité rafraichissante par rapport au reste du corpus de la Black Library. Il faut de tout pour faire un Imperium, même des Fenrissiens bas du front et des auteurs en roue libre.

Si on est d’humeur plus charitable, on peut s’interroger sur les raisons qui ont poussées Collins à être si spécifique dans le choix de ses protagonistes, la rencontre entre « cultures » Rogue Trader et Space Wolves dans une nouvelle de quelques pages ne se justifiant à mes yeux que si ‘The Shapers of Scars’ est le prélude à une œuvre plus conséquente. Certains auteurs de la BL, Dan Abnett et Aaron Dembski Bowden en tête, ont déjà prouvé qu’il était possible de réaliser des fusions plus improbables que celle-là de façon convaincante, et au final à donner plus de substance et de saveur au gigantesque patchwork socio-culturo-politique qu’est l’Imperium. Il se pourrait donc que nous recroisions Katla Helvintr et la bonne Bodil dans un futur proche, hypothèse d’autant plus plausible que Marc Collins est toujours dans l’attente d’un premier roman pour la BL, et que les créneaux Rogue Trader et Space Wolves ne sont pris par personne en ce moment. Faîtes vos jeux.

1 : Imaginez un peu la longueur, donc la place et le poids, de la chaîne nécessaire pour qu’une telle arme puisse « ferrer » une cible et la ramener à bon port. Déjà que sur un Titan, c’est limite, mais sur une frégate…

ET POUR LES NOUVEAUX?

Si on étudie la liste des cinq nouvelles sélectionnées par la Black Library pour constituer ce petit recueil introductif, on se rend compte que ‘The Shapers of Scars’ a la très lourde tâche de représenter la littérature 40K « classique » (c’est-à-dire hors franchises à part comme l’Hérésie d’Horus, Necromunda ou Warhammer Crime), qui constitue à l’heure actuelle et sans doute pour toujours le plus large corpus de la BL, soit des centaines de nouvelles publiées au cours des trois dernières décennies. Il aurait donc été logique, si ce n’est obligatoire, de choisir une Space Marinade – possiblement de bonne qualité car, oui, cela existe – en lieu et place du court format totalement random de Marc Collins. Imaginez un peu que cette lecture soit votre porte d’entrée dans le 41ème millénaire : vous penseriez sans doute que le puissant Imperium est une civilisation steampunkbarbarian ayant conquis les étoiles en jetant des javelines même pas énergétiques sur des cafards géants. Ce qui n’est pas l’image d’Epinal du grimdark, vous le reconnaîtrez. Bref, je ne valide absolument pas ce parti pris.  

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No Use for Good Men – G. Haley [40K] :

INTRIGUE:

Notre récit commence par un petit mail envoyé par l’humble et fidèle Probator Fyedor Blovast à l’honorable et exalté Chef Justicius Maksell Resk, annonçant des progrès notables dans le décryptage du journal intime d’un certain Symeon Dymaxion-Noctis, placé sous bonne garde pour une raison indéterminée par la maréchaussée du district de Nearsteel. La nouvelle qui suit est l’extrait traduit par le stagiaire Linguee du probatoriat, ce qui indique clairement qu’il ne faut pas s’attendre à un compte-rendu complet et exhaustif de la vie et de l’œuvre de Sym’. Et pour cause…

Les quelques pages que nous sert Guy Haley sont consacrées à la description d’une matinée assez banale de notre héros, un Probator plutôt nanti et qui ne s’en cache ni ne s’en plaint pas (il a eu sa phase « solidarité prolétaire », mais ça lui est passé), vivant dans un duplex en haut de spire, avec un felid et un bras augmétique. Il enquête posément sur la disparition de Xuliana Marchentska, fille idéaliste d’un notable local, supposée enlevée et probablement morte à l’heure qu’il est. Un suspect ayant été localisé dans une cité sensible toute proche, Symeon décide d’y faire un saut pour tenter de le cueillir, malgré le fait qu’une émeute de la faim est en train de couver dans le district, et que la riposte des gardiens de la paix l’épée se prépare de concert. Usant de son statut spécial pour négocier le cordon de Sanctioners qui s’apprête à casser du contestataire, le super flic arrive en vue du dernier domicile connu de sa proie (Yerzy Demedoi)… et se fait griller par ce dernier sur le pas de la porte. Pas de chance.

S’en suit une course poursuite haletante et mauvaise pour les rotules, alors qu’en arrière-plan les CRS de Varangantua commencent à bavurer dans les brancards, au terme de laquelle le bien portant Symeon (Haley insiste là dessus, alors moi aussi) rattrape presque Demedoi, mais décide finalement de lui coller une bastos dans la cuisse au lieu de couvrir les 10 derniers mètres et de tenter le placage cathédrale. Sa fainéantise lui jouera un sale tour, et plus encore au fugitif, car son tir au jugé perce l’artère fémorale du présumé coupable, qui décide de finir en beauté d’un saut de l’ange renversé plutôt que de se vider tranquillement de son sang en répondant aux questions de son meurtrier. C’est bien une ingratitude de pauvre, ça. Ce faisant, il passe de l’autre côté du voile de chaînes métalliques qui sépare le district civil de Nearsteel de l’enclave du Mechanicum de Steelmound, ce qui place son cadavre hors de la juridiction et de la portée de Symeon, qui n’a plus qu’à rentrer chez lui ouvrir une boîte de Ronron à son matou d’appartement. Et c’est tout. La suite dans ‘Flesh & Steel’, j’imagine…

AVIS:

Haley fait sa propre pub pour le roman ‘Flesh & Steel’, écrit également pour Warhammer Crime, et mettant en vedette l’Hercule Poivrot de Varangantua, Symeon Noctis. Je ne lui en aurais pas tenu rigueur si le message publicitaire en question (‘No Use for Good Men’) avait été une véritable nouvelle, avec une intrigue, un développement et une conclusion, ce qui n’est malheureusement pas le cas. À la place, on a le droit à vingt quatre heures dans la vie d’un fât, dans un récit mêlant description de la géopolitique de Nearsteel, considérations philosophiques du héros, course poursuite peu concluante et références appuyées à un passé/futur mystérieux qui seront explicitées dans le bouquin qui prendra la suite de ce teaser littéraire. Haley sachant tenir une plume, l’ensemble est très lisible, mais ça sent la grosse démotivation de sa part, ce qui se solde par une expérience décevante pour le lecteur. J’espère vraiment pour lui que la lecture de ce ‘No Use for Good Men’ jettera un éclairage nouveau sur ‘Flesh and Steel’ (ce qui pourrait à la rigueur justifier sa lecture), mais j’en doute assez fortement.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Je n’ai pas grand-chose à ajouter au retour fait plus haut sur l’intérêt de cette courte nouvelle, dont le seul but est d’hameçonner le lecteur et de lui faire acheter ‘Flesh & Steel’. Même si je comprends l’approche, le fait qu’il soit possible de télécharger gratuitement un extrait de ce roman sur le site de la Black Library me fait me questionner sur la nécessité pour cette dernière de commander ce genre de publication, à l’âge du post-papier. Comme ‘No Use for Good Men’ est assez sympathique à parcourir, on peut défendre son utilisation comme produit d’appel pour Warhammer Crime, mais il y avait mieux et plus respectueux à proposer au lecteur, à commencer par un véritable stand alone. Ça fait que ce soit gratuit, mais…

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The Reaper’s Gift – R. Cluley [AoS] :

INTRIGUE:

Le milicien Rutger, confronté à une trop forte opposition lors de la dernière bataille livrée par sa compagnie franche à une bande d’Hommes Bêtes en maraude, a prudemment décidé de se faire porter pâle et quitté le champ de bataille pour le champ de maïs, laissant les copains se débrouiller sans lui. A sa décharge, notre héros courageux mais pas téméraire venait d’hériter d’une méchante estafilade sur le bedon, réduisant fortement son utilité au combat en même temps que son espérance de vie. Dans son malheur, Rutger a toutefois la chance de tomber sur une étable décrépite où il peut s’abriter de la pluie battante de Shyish, et recouvrer quelques forces avant de reprendre sa fuite éperdue. Dans cet abri de fortune, il fait la connaissance de Poll, le jeune fils d’une fermière du cru qui essaie tant bien que mal de survivre avec ses trois enfants et en l’absence de son mari, réquisitionné de force par l’armée locale il y a plusieurs mois. Ayant gagné la confiance du gamin grâce à ses talents de montreur d’ombres, Rutger parvient aussi à se mettre la mère (Maudeline) dans la poche, et est invité par cette dernière à dîner avec sa famille.

Pendant que le soldat se fait recoudre la bidoche et se gave de brouet, ses hôtes lui racontent la légende du Faucheur (Reaperman), un croquemitaine ayant l’apparence d’un épouvantail géant et venant punir les membres égoïstes de la communauté à grands coups de faux dans les gencives. Originellement, le Faucheur était un guérisseur dont le fils unique mourut écrasé par sa propre charrue, tragédie qui fit mourir sa femme de chagrin quelques semaines plus tard. Ses voisins n’ayant pas fait preuve d’une grande solidarité envers le pauvre homme dans ces moments difficiles, le désespoir et le ressentiment (et l’intervention de Nagash, aussi) le changèrent en spectre vengeur, que les paysans du coin tentent d’apaiser en se faisant des cadeaux entre eux, démontrant ainsi leur camaraderie. Il se trouve que Maudeline et Cie offrent des épouvantails, ce qui explique pourquoi l’étable où s’était réfugié Rutger était pleine de silhouettes tout à fait creepy. On est à Shyish, aussi.

Raccompagné par Maudeline jusqu’à la grange où elle accepte qu’il passe la nuit, Rutger réalise que la brave fermière dissimule en fait une ogresse en puissance, qui n’a pas hésité à tuer et découper les autres déserteurs amochés qui sont venus demander assistance au cours des derniers mois. Cela explique comment elle a pu confectionner autant d’épouvantails dans un endroit aussi reculé, où les fripes d’homme adulte sont rares. Pragmatique jusqu’au bout, Maudeline avoue que c’est l’infection qui commence à gagner sa plaie qui l’a convaincue de ne pas transformer Rutger en jambon, et qu’elle ne lui fera donc aucun mal. Cet échange de civilités est interrompu par l’arrivée d’un Ungor inquisiteur, qui se fait prestement occire par notre coriace agricultrice #LaMortEstDansLePré.

Il ne s’agit toutefois que d’un sursis pour la petite troupe, car il est certain que la disparition de l’éclaireur va donner l’idée au reste de la harde de passer une tête cornue dans le coin dans les prochaines heures. N’ayant aucun espoir de prendre de vitesse l’ennemi, Rutger propose de gagner du temps en utilisant la ruse…

Début spoiler 1…C’est-à-dire mettre à profit le stock d’épouvantails de ses hôtes pour donner l’impression à ces bêtes de Bêtes que la ferme est fortement gardée. Cela ne les trompera ni ralentira très longtemps, mais devrait permettre aux fuyards une chance d’atteindre les voisins les plus proches de Maudeline et sa marmaille. La journée qui s’en suit est donc tout entière consacrée à la préparation de ce musée Grévin hors les murs, mais alors l’après-midi avance, Rutger a une idée encore meilleure pour duper les Hommes-Bêtes en maraude…

Début spoiler 2…Laisser les femmes et les enfants derrière. Comme il se doute que Maudeline a peu de chance d’accepter, il lui colle un coup de hachette dans le crâne pour avoir les mains libres, et attache les orphelins avec les épouvantails pour donner l’illusion que son régiment de paille est bien vivant. A la guerre comme à la guerre, tout de même. C’est le culte de l’huître bleue qui avait raison, une fois de plus : don’t fear the reaper (fear the deserter).Fin spoiler

AVIS:

Pour sa deuxième contribution à la GW-Fiction (après ‘Flesh and Blood’), Ray Cluley corrige la mire et signe une histoire bien noire, et méritant tout à fait sa catégorisation dans la gamme Warhammer Horror. En distillant à petites touches les détails troublants, puis inquiétants, puis révoltants, l’auteur parvient à instiller une pure atmosphère de film de genre, où l’on comprend qu’il peut se passer quelque chose d’horrible à tout moment, et où tous les personnages, même (surtout) les protagonistes, peuvent partir en vrille sans crier gare. Il fait également preuve d’une maîtrise consommée de raconteur d’histoire en entraînant le lecteur sur la piste de l’épouvantail, figure horrifique s’il en est, pour au final donner à son récit un twist final bien plus prosaïque, mais d’autant plus marquant et efficace. Une vraie bonne soumission pour le sieur Cluley, qui remonte sensiblement dans mon estime.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Ecrire une bonne nouvelle est difficile, et écrire une bonne nouvelle d’horreur l’est encore plus. Pour avoir lu quelques recueils siglés Warhammer Horror dans mon jeune temps, je peux témoigner du fait que ‘The Reaper’s Gift’ se place dans le haut du panier de ce que la BL peut proposer, et il est donc heureux que le choix des pontes de Nottingham se soit porté sur cette nouvelle comme représentante de la franchise horrifique de la GW-Fiction. Si cela ne donne pas envie aux nouveaux lecteurs d’explorer plus en détail cette collection de niche, c’est que cette dernière n’est pas faite pour eux. Il est aussi à mon sens approprié que ‘The Reaper’s Gift’ soit assez « dur » en termes de narration, là aussi pour permettre aux curieux d’acheter un recueil en toute connaissance de cause.

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The Wolf and the Rat – C. L. Werner [AoS] :

INTRIGUE:

The Wolf and the RatScandale à la cour de Radukar le Loup, sanguinaire car vampirique maître de la cité d’Ulfenkarn, en Shyish. Une précieuse relique a été dérobée dans la crypte où elle sommeillait depuis des lustres, plongeant notre atrabilaire héros dans une colère noire (logique) : on lui a volé son doudou !!! Ah, on me dit dans l’oreillette qu’il s’agit en fait de la pelisse du vampire qui lui donné le Baiser de Sang, ce qui est un peu plus classe, mais beaucoup moins drôle, que ma version des faits. Je m’incline de bonne grâce et reprends le cours de mon récit.

On apprend rapidement que le crime à peine commis est déjà revendiqué par une coterie de suceurs de sang ne goûtant pas au règne sans partage de Radukar sur son fief, et souhaitant, d’après les mots bredouillants de leur émissaire, le froussard Valac Chrobak, seulement remettre au goût du jour le conseil municipal, où Loulou aurait bien sûr un siège. Le messager ayant raté son test de charisme de façon critique, il est expédié dans la post non-vie par les gardes du corps Ogors de Radukar, qui décide de prendre les choses en main. Sachant que les ravisseurs de courtepointe lui ont donné rendez-vous dans le quartier des docks pour procéder à l’échange, il en prend le chemin sans tarder, confiant dans le fait que sa Sénéchale, l’ex-pirate tournée vampiresse (vive les reconversions professionnelles, franchement) Natasyia, sécurisera discrètement le périmètre avec les squelettes de la garde municipale, au cas où l’affaire s’envenimerait.

Sur place, il retrouve une vieille et funeste connaissance, le Prince des Rats Kritza, un noble dévoyé (vampire lui aussi, évidemment) qui a pris la tête de la cabale lupophobe après que Radukar l’ait laissé pour mort suite à un petit accrochage autour de la machine à café. Kritza et son corps de lâche ne sont évidemment pas venus seuls : une petite bande de petites frappes à canines pointues a fait le déplacement, afin d’équilibrer un peu les choses entre Rad’ the Chad et Kritza le Rat. Sans surprise, l’entrevue se passe moyennement, chacun campant sur ses positions, jusqu’à ce que Natasyia arrive avec les renforts promis pour précipiter la résolution du litige…

Début spoiler 1…Seulement, cette fourbe de flibustière repentie jouait en fait du côté de Kritza. C’est d’ailleurs elle qui a dérobé la peau du père de Radukar, et l’a remise aux conjurés. Les griefs de Nat’ sont simples : elle en veut à son boss de ne lui avoir pas dit qu’être un vampire créait un grand vide spirituel, ce qui était pourtant assez facile à prévoir en réfléchissant deux secondes au concept de non-vie. Heureusement qu’il n’y a pas de termes et conditions dans les Royaumes Mortels, ce serait un véritable carnage. Quoiqu’il en soit, Radukar se retrouve finalement isolé et encerclé au milieu des épaves pourries (je ne parle pas des vampires) du port, ce qui n’est pas une situation enviable. Le plan de Kritza est simple : mettre le feu à l’une d’entre elles et faire pousser le seigneur d’Ulfenkarn dans le brasier par le cordon de sécurité squelettique rameuté par Natasyia. Aussitôt dit, aussitôt fait. A moins que…

Début spoiler 2…A moins que ce rusé de Radukar ait flairé la combine à des kilomètre grâce à sa truffe de loup, et ait pris des mesures de contingence pour piéger les piégeurs. Il désactive ainsi les squelettes d’une simple commande vocale1, et fait signe à ses fidèles Ogors zombies de sortir des coulisses avec leurs pieux de fonction pour châtier les trublions. Ce retournement de situation pousse la clique de Kritza à tenter de rusher Radukar, avec des résultats… médiocres. Un peu plus réfléchie, Natasyia se saisit de la pelisse convoitée par son ex-patron, et fait mine de la jeter dans les flammes de l’épave s’il ne la laisse pas partir. Manque de bol, en tant que « fille » de Radukar, elle découvre bientôt que braver la volonté paternelle n’est pas une sinécure, et finit par apporter gentiment la fourrure au brasier, et elle avec par la même occasion, lorsque le pater familias lui ordonne. Reste Kritza, qui en tant que personnage nommé avec une figurine dispose d’une sauvegarde invulnérable en sigmarite, et se tire donc d’affaire avec son special move, l’effervescence murine. La nouvelle se termine sur ce tableau théâtral, Radukar jurant sur ses grands morts d’éradiquer la menace surmulote sans aucune merci. Prend des notes, Anne Hidalgo.Fin spoiler

1 : J’imagine que chacun squelette avait une dent bleue au fond de la mâchoire.

AVIS:

Nouvelle d’accompagnement du livre qu’il a consacré à la dynastie Vyrkos (‘Cursed City’), qui n’était lui-même qu’un produit dérivé de la boîte de jeu éponyme, ‘The Wolf and the Rat’ sent franchement le réchauffé. Les fortes contraintes scénaristiques avec lesquelles il a dû composer pour écrire cette nouvelle, dont tous les personnages nommés devaient réchapper, ont amené le vétéran Werner à nous servir de la soupe littéraire, qui n’intéressera à la rigueur que les lecteurs souhaitant creuser le lore d’Ulfenkarn, bourgade mineure de Shyish et bac(kground) à sable patenté. Mêmes les surprises que l’auteur souhaitait ménager en guise de twists finaux tombent à plat, faute d’alternatives crédibles à l’inénarrable trahison-du-bras-droit-secrètement-insatisfait, contrée aussi sec par la toute aussi fameuse prévoyance-de-vieux-briscard-qui-ne-faisait-que-donner-le-change-mais-qui-avait-tout-pigé-depuis-longtemps. C. L. Werner fait généralement beaucoup mieux quand on le laisse s’amuser avec des ratons, et on peut donc classer cette nouvelle parmi ses moins réussies pour le compte d’Age of Sigmar.

ET POUR LES NOUVEAUX?

En faisant porter son choix sur une nouvelle illustrant les bisbilles d’une micro-faction d’Age of Sigmar récemment mis à l’honneur dans une boîte de jeu, la BL fait passer le promotionnel avant le didactique, et c’est pour moi une faute grave au vu de la mission première des anthologies Black Library Celebration. Cela me brûle les doigts de l’écrire, mais dans ces circonstances, c’est la nouvelle de Stormcast Eternals basique(s) qui était à privilégier, afin de permettre aux primo-lecteurs la découverte des Royaumes Mortels à travers sa faction la plus iconique. Bien sûr, C. L. Werner a suffisamment de bouteille pour nous proposer un résultat acceptable, mais il y avait beaucoup plus évident (et mieux aussi). Hors sujet.

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L’Enfant du Chaos (Child of Chaos) – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE:

Le Siège de Terra approche méchamment et quelque part en orbite du Monde Trône, un Astartes en arrêt maladie contemple la planète de Pépé avec un œil torve et un visage couvert de biafine. Notre protagoniste est, vous l’aurez deviné, Erebus. Sauf que en fait, non, mais nous y viendrons un peu plus tard. Passé à la râpe à fromage par Horus et slam dunk-é dans le bac à ordures dangereuses par Lorgar, le surhomme par qui le scandale éclata n’a pas vraiment d’épaule sur laquelle suinter, mais il s’en fout royalement car son auguste compagnie lui suffit. Et comme dit son deuxième proverbe favori (on parlera de son premier un peu plus loin): « plus on est de fous, plus on rit, moi je suis tout seul parce que personne ne m’aime alors je compense en étant complétement ravagé du bulbe et pouvoir rigoler un bon coup ». Quel dommage que seule la version abrégée de cette maxime si profonde nous soit parvenue. Toujours est-il qu’Erebus est décidé à se parler à lui-même pour passer le temps, et il embarque donc le lecteur dans le récit de son origin story, qu’il considère comme étant édifiante. Voyons cela.

Première confession: Bubus a toujours été mauvais. Et surtout en dictée. Il ne s’en cache ni ne s’en excuse, et il n’y a pas d’élément déclencheur à chercher pour explique sa chute, à part peut-être le fait qu’il ne supporte pas la chaleur. Mais bon, se dire que l’Hérésie aurait été évitée par un malheureux climatiseur, ce n’est pas très glamour, donc restons sur l’hypothèse de la malignité incarnée. Déjà tout môme, son passetemps favori était d’arracher les pattes de scorpion de Colchis, ce qui n’est guère charitable. Issu d’une famille miséreuse, il se mit à lorgner du côté des khôl gris du Covenant après avoir constaté que les prêtres menaient une vie de patachon. Après quelques mois à apprendre par cœur des cantiques et à apprendre à lire sur des bouquins piqués en douce dans le temple local, notre zéro accomplit ses premières armes en garrotant de sang froid un jeune dévôt de son quartier, auquel sa mufle de mère le comparait à longueur de journée pour le rabaisser. L’individu en question témoignait de sa foi envers les Puissances en se peignant des mots sacrés sur le visage, habitude que son assassin reprit, tout comme il lui emprunta son nom: Erebus. MIND BLOWN. On est passé à ça d’avoir l’Hérésie manigancée par un gonze appelé Post Malone ou Tekashi69, ça fait froid dans le dos tout de même. Heureusement que Môman Bubus n’aimait pas le rap.

Ce premier assassinat permit toutefois à l’usurpateur d’entrer dans les ordres sans coup férir, et de commencer à tailler son chemin vers le pire, soit le Pouvoir, l’Influence, la Richesse et l’Efferalgan. Car Erebus n’est pas vraiment croyant à la base, et avoue volontiers s’être piqué d’intérêt pour la chose religieuse de la même manière que tu as pris goût aux endives au jambon: à l’usure. BLIND MOWN. Pendant qu’il faisait ses classes, un certain Prophète commençait à faire parler de lui dans l’arrière pays colchitique, et il ne fallut pas longtemps avant qu’Erebus ne pose les yeux sur celui qui allait devenir son père adoptif (Lorgar), accompagné par sa future marâtre (Kor Phaeron). Ce ne fut pas le coup de foudre mais le jeunot comprit qu’il fallait qu’il se rapproche de Mr Tête d’Œuf pour son propre bien, ce qu’il fit.

Une arrivée impériale et une transformation en Space Marine plus tard, notre désormais fringant héros part sillonner la galaxie à la recherche des Dieux du Chaos, envers qui il sent une attirance particulière. Rien de très intéressant ne se produit jusqu’à l’arrivée sur Davin, et la visite qu’Erebus rend à un temple décati que lui ont révélé ses visions. Sur place, il rencontra un vieux prêtre ridé et impoli, ce qui n’est pas très malin quand on s’adresse à un type qui fait deux fois sa taille et trois fois son poids. Parmi les tags effacés et les inscriptions désobligeantes, les sens de sorceleur du surhomme firent clignoter en rouge un dessin de l’Anathame (qui ne se trouvait pas sur place, ce serait trop simple) ce qui fut apparemment suffisant pour son bonheur immédiat. Il repartit donc avec une envie folle de farmer du Wither squelette1, en ordonnant au vioque de faction de retaper un peu la bicoque, et en donnant rendez-vous dans quelques décennies à une très jeune Akshub (qui ironie de l’histoire, lui donnera des cours en chaotique appliqué lorsqu’il reviendra… quel fumiste tu fais Bubus alors). La suite de l’histoire, sans être parfaitement connue, l’est toutefois suffisamment pour pouvoir laisser Erebus à ses divagations fiévreuses et purulentes. Mais tel est le destin de ceux qui manquent de peau.

1Mais sans accès au Nether, il dut se contenter de piller les collections permanentes du musée de la vie rurale de l’Interex, comme chacun sait.

AVIS:

Chris Wraight lève le voile sur l’origine d’un des personnages les plus importants de l’Hérésie n’étant pas Pépé ou un Primarque : bonne idée dans l’absolu, et assez bien réalisée même si ‘Child of Chaos’ tient plus de la lecture complémentaire intéressante que du must read définitif. Il y a certes quelques révélations bien senties de la part d’un auteur qui a trop de métier pour ne pas jeter quelques bouts de fluff anecdotiques (au sens littéral) en pâture à son public de fanboys dans une nouvelle telle que celle-ci, mais rien qui changera la face du lore. On apprend par exemple que c’est à Erebus que l’on doit la maxime « béni soit l’esprit trop étroit pour le doute », ce qui est utile à savoir pour briller dans un centre GW mais relève de la trivia hérétique au final. Notons également que Wraight se retrouve piégé par cet ennemi acharné de l’auteur de l’Hérésie d’Horus qu’est la continuité temporelle (à égalité avec la bonne vieille logique cartésienne): si Erebus a pu devenir un Word Bearers, c’est qu’il était très jeune à l’arrivée de l’Empereur. Or on sait (‘Lorgar: Bearer of the Word’) que Kor Phaeron avait déjà mis des pensées non euclidiennes dans la tête de son pupille bien avant que Bubus soit en mesure de susurrer des salaceries à l’oreille de son Primarque : l’image d’Epinal d’instigateur de l’Hérésie qui accompagne le Chapel-Un depuis quelques années en prend donc un sacré coup dans les ratiches.

Bref, on tient ici une lecture sympathique et qui permet à Wraight de mettre un peu d’ordre1 dans, et de faire quelques clins d’œil à la suite de, l’histoire d’Erebus, ce qui peut, ou non, justifier les 3,49€ demandés par la Black Library pour tuyauter le lecteur/fluffiste sur ce VIP chaotique.

1J’ai bien aimé le fait qu’il cherche à couvrir les traces de Thorpe en indiquant au détour d’une phrase que, oui, les Dieux du Chaos avaient bien un œil (mais juste un œil) sur Colchis et le Covenant, respectivement élus « Planète chaotique la plus calme du Materium » et « Secte chaotique hégémonique la moins efficace de la galaxie » 10.000 ans de suite. Il ne pouvait guère faire plus que cela sans réécrire l’histoire.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Comme pour ‘The Serpent’s Dance‘, on peut considérer que ‘L’Enfant du Chaos‘ n’est pas assez grand public dans son propos pour mériter sans contestation sa place dans une anthologie introductive. Ceci dit, comme Erebus est une figure incontournable de l’Hérésie, permettre à un nouveau lecteur de s’initier à cette dernière à travers cette nouvelle retraçant ses origines se défend, surtout quand le résultat est de bonne qualité (comme c’est le cas ici). De manière plus large, donner la vedette à un anti-héros tel que ce bon Chapelain est également un bon moyen d’illustrer l’approche grimdark de la GW-Fiction, univers impitoyable où la pureté de la cause et la noublesse des sentiments ne servent absolument à rien. Un choix pas évident, mais qui se défend, donc.

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Mort sur la Route de Svardheim (Death on the Road to Svardheim) – D. Hinks [AoS] :

INTRIGUE:

En route vers la cité de Svardheim pour une raison sans doute logique mais inconnue de l’auteur de ces lignes au moment de l’écriture de cette chronique, le duo le plus mal assorti des Royaumes Mortels1 passe le temps et les kilomètres sur la route 88 (c’est tout plat, désertique et décoré avec des monceaux de crânes) en discutant théologie, comme à leur habitude. Bien évidemment, la situation finit par gentiment dégénérer, l’anticléricalisme blasphématoire d’un Gotrek toujours chafouin de s’être fait rouler dans la farine par les Dieux du Monde Qui Fut mettant sur les dents, qu’elle a éclatante, la dévote Maleneth. À force d’enquiller les bornes, elle finit même par les dépasser, allant jusqu’à accuser son rusé et runé camarade de servir le Chaos, à l’aide de l’argument, bien connu de George W. Bush, du « si tu n’es pas avec moi (et Ziggie) tu es contre moi ». Avant que la situation ne dégénère trop franchement, et que le Tueur vétéran ne doive se trouver encore un nouveau sidekick, les comparses tombent sur le théâtre d’une embuscade ayant été fatale à une bande de prêtres sigmarites, dont les corps décapités jonchent les alentours d’une carriole incendiée.

Après une rapide enquête, il s’avère que les assaillants n’ont pas réussi le perfect en matière d’élimination de témoins, une pauvre nonne répondant au nom de Carmina se présentant à nos héros et leur expliquant que sa congrégation s’est fait dérober une relique irremplaçable, le Poing Incorruptible, dont elle avait la charge et promenait de ville en ville pour ranimer la foi des locaux. Avant que Gotrek n’ait pu marquer de nouveaux points d’athéisme hardcore en demandant à Carmina en quoi un poing pouvait être corrompu, pour commencer (il en serait capable le bougre), Maleneth se fait embringuer dans une mission de récupération du saint gantelet, qu’il s’agit simplement de reprendre des mains malpropres d’une petite vingtaine de bandits, retranchés dans une forteresse abandonnée à quelque distance de la route. Rien que de très banal pour notre Tueur, qui accepte toutefois de mettre les formes et de suivre un plan un minimum intelligent (attendre que Maleneth se soit mise en position derrière le bastion pour intercepter d’éventuels fuyards) avant d’aller toquer à la porte le plus naturellement du monde.

La prévoyance de l’Aelf paie rapidement car il se fait bientôt jour (enfin, nuit, mais je me comprends) que les brigands sont un peu plus qu’une bande de maraudeurs sanguinaires, mais bien une authentique secte de Khorne, en train d’invoquer un démon de fort belle taille à l’aide de leur collection bien mal acquise de grigris et talismans. Maleneth n’a pas le temps de signaler qu’il y a une courge dans le potage que Gotrek est cependant déjà en train de défoncer la porte et de se tailler un chemin à travers les mobs de bas niveau, jusqu’à poser l’œil sur une Némésis digne de lui, qu’il engage évidemment en combat singulier dans la plus pure tradition du genre. Etant un VIP incontournable du multivers, Gogo est reconnu par son adversaire, qui a la mauvaise idée d’insinuer que le Tueur a fui son monde au moment de la Fin des Temps au lieu de rester et de se battre pour le défendre. Cela met notre nabot en rogne, et les deux adversaires se balancent quelques baffes amicales, sans trop d’effet de part et d’autre, jusqu’à ce que Meleneth ait l’idée géniale de confisquer les reliques ayant été mise à profit pour invoquer le démon, et dont ce dernier a encore besoin pour maintenir sa présence dans les Royaumes Mortels. Au fur et à mesure que les héros shootent dans les breloques, leur adversaire perd en taille et en carrure, jusqu’à finir rachitique et malingre, et se faire décapiter sans cérémonie par un Gotrek enfin à la bonne taille pour jouer de la hache.

Ceci fait, le duo infernal n’a plus qu’à remettre le Poing Incorruptible à la brave (en fait pas trop) et reconnaissante Carmina, qui s’en va à cheval remettre le précieux héritage en sécurité, pendant que nos héros continuent à pied leur périple. Poing/t final de notre histoire ?

Début spoilerEh bien non (comme la balise spoiler ne le laissait pas du tout envisager), car lorsque nos voyageurs, fourbus (surtout pour Maleneth) et assoiffés (surtout pour Gotrek) tentent d’obtenir le gîte et le couvert d’un monastère sigmarite croisé un peu plus loin sur la route, se disant à juste titre que tous les culs bénis à la ronde leur sont redevables de leurs récents exploits, c’est pour entendre un son de cloche bien différent. Carmina était en fait une voleuse ayant mené sa bande, déguisée en prêtres, dérober le fameux Poing Incorruptible (mais pas Inatteignable) de la garde des vrais fidèles de Sigmar, en tuant quelques uns au passage. L’abbé outré qui fait ce récit aux voyageurs est persuadé que l’iconoclaste va briser la relique en mille morceaux pour revendre la Pierre de Royaume dont elle est faite au plus offrant, au mépris de tous les commandements de Sigmar. C’est donc une grosse boulette, sur laquelle Maleneth manque de s’étouffer, mais qui ne déclenche chez ce philosophe de Gotrek qu’un rire tonitruant. Il en a certes vu d’autres…Fin spoiler 

1 : Gotrek est un Nain (et pas un Duardin) roux exhibitionniste, et Maleneth est une Aelf brune gothique.

AVIS:

Eh bien ça y est : après avoir laissé Gotrek (et le regretté Felix) à leurs aventures dans le Monde Qui Fut, je renoue enfin avec ce héros mythique sous sa nouvelle incarnation, à travers ce court format signé du père adoptif #3 du Tueur de… trucs, Darius Hinks. Ce qui m’intéressait particulièrement dans ces retrouvailles était de voir ce qui avait changé, et ce qui était resté, des précédentes aventures de M. Gurnisson, qui constituaient un sous-genre de la littérature BL à elles seules. L’équilibre n’était pas facile à trouver entre respect servile du cahier des charges, forcément un peu obsolète, établi par King et Long en la matière, et innovations radicales, qui auraient enlevé tout le sel de ce come-back improbable. Et je dois dire que Darius Hinks s’en est plutôt bien sorti, tant sur le fond que sur la forme. On est bien en présence d’une aventure de Gotrek & Cie, avec notre petit rouquin teigneux, grincheux et pince sans rire s’embarquant dans un combat à haut risque contre un adversaire très balèze (sur le papier en tout cas), au grand désespoir de son partenaire attitré. Ce qui change ici est que Gotrek est devenu un mécréant militant, gardant sa dernière dent contre tout le panthéon divin (à commencer par Sigmar, qui s’en prend plein les tresses), alors que Maleneth est, sous ses abords de tueuse froide, une zélote du grand barbu, ce qui est à la fois surprenant (c’est le type qui la voyait comme une pseudo Assassin druchii qui parle) et intéressant. Notons également que Hinks ne se gêne pas pour glisser quelques références au passé proprement légendaire de son héros et donc à feu Warhammer Fantasy Battle, ce qui devrait faire plaisir autant qu’intriguer le lecteur historique de la saga. Bref, le contrat est bien rempli dans ce ‘Death on the Road to Svardheim’, qui tient son rang parmi les cohortes de nouvelles Gotrekesques publiées par la BL depuis des temps immémoriaux. Reste à savoir ce que cette dernière compte faire de son increvable héros sur le long terme, maintenant qu’il ne peut absolument plus mourir (ce serait un énorme fail), mais ceci est une autre histoire.

ET POUR LES NOUVEAUX?

On ne fait pas vraiment plus iconique que Gotrek parmi les personnages de la Black Library, aussi sa présence dans un recueil tel qu’un Black Library Celebration fait tout à fait sens. Cette nouvelle permet à la fois au lecteur de se familiariser avec cette figure tutélaire de la GW-Fiction, à travers une petite aventure représentative de l’esprit de la saga, et à la BL de faire le lien avec l’imposant catalogue de courts et longs formats qu’elle est toute prête à nous vendre en cas d’intérêt pour le petit rouquin teigneux. Tout le monde est content.

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Secteur 13 (Sector 13) – S. Mitchell [40K] :

INTRIGUE:

Après les événements de Desolatia (‘Fight or Flight’), le Commissaire Cain profite enfin de la vie et d’un théâtre d’opérations beaucoup plus calme sur l’agrimonde de Keffia, où une coalition de régiments impériaux est à pied d’œuvre pour purger une infestation de Genestealers. Son rattachement à une compagnie d’artilleurs et sa popularité naissante donnent en effet à notre héros beaucoup d’occasions de faire son devoir de façon plaisante : à des kilomètres de la ligne de front et/ou à proximité des hors d’œuvre du Gouverneur local. Une vraie sinécure en quelque sorte, que le talent de Cain pour se mettre tout seul dans de sales draps va bien sûr interrompre de la plus brutale des façons.

Au début de la nouvelle, le Commissaire pensait pourtant avoir finement joué en trouvant un prétexte en plasbéton de décliner l’invitation du Colonel Mostrue de participer à un briefing de haut niveau, honneur lui ayant certainement valu de finir en première ligne sur une quelconque offensive décisive. Très peu pour Cain, qui a donc fait remarquer à l’officier qu’il était de son devoir d’aller superviser le rapatriement d’une poignée de Gardes des Glaces mis au trou par l’Arbites local, à la suite de troubles du voisinage dans la ville de Pagus Parva. Une tâche ingrate, mais qu’il faut bien faire, surtout quand cela permet de passer du temps avec la plastique Sergent Wynetha Phu. L’Empereur le veut, toussa toussa.

Rendu sur place avec son fidèle Jurgen, Cain badine un peu avec l’accorte Arbites, tout en sortant son numéro de Commissaire c’est juste mais vert (et inversement) aux cinq pochtrons bagarreurs qui ont causé du grabuge la nuit dernière. Bien que peu intéressé par les accusations de ses charges envers les locaux, qui auraient mis des roofies dans leurs verres pour leur faire les poches en douce, Cain accepte d’aller faire une enquête de voisinage (avec Wynetha bien sûr) pour tirer les choses au clair. Ses pas le conduisent alors jusqu’au bar du Crescent Moon, où travaille la sculpturale Kamella, escort girl rurale et ultime souvenir que gardent les Gardes de leur dernière soirée. Confrontés à la méfiance du propriétaire, qui ne consent à ouvrir la porte que devant le risque élevé de se la faire enfoncer par les enforcers – un comble –, Cain, Wynetha et le planton qu’elle a amené avec elle pour faire le nombre et grimper le bodycount à peu de frais1 sont forcés de prendre leur grosse voix impériale pour convaincre l’habitant de les laisser accéder à la chambre de Kamella. Et c’est là que les choses se corsent pour nos héros, car les paumes de Cain se mettent à le chatouiller, super pouvoir indiquant de façon indubitable que quelque diablerie est à l’œuvre…

Début spoiler…Et en effet, Kamella se trahit en demandant au Commissaire s’il aime ce qu’il voit (elle était nue sous ses vêtements à ce moment là) en utilisant son patronyme, qu’elle n’avait aucun moyen de connaître. La seule explication logique (mises à part celles basées sur la relative célébrité de Cain ou une ouïe un peu plus fine que la moyenne) est que la donzelle est capable de communiquer par télépathie avec le barman, comme deux hybrides Genestealers peuvent le faire. C’est le début des ennuis pour nos héros, qui se retrouvent vite assaillis par un essaim entier de cultistes plus ou moins présentables. Laissant l’Arbites inconnu mourir au champ d’horreur, comme convenu, Cain et Wynetha parviennent à s’échapper de ce guêpier et à rejoindre le commissariat (pas le sien, le nôtre, enfin je me comprends), où les attendent Jurgen et les cinq Gardes biturés. Bien que la bâtisse soit solidement construite et capable de soutenir un siège, la situation des impériaux ne va pas en s’améliorant car il s’avère bientôt que deux des bidasses ont chopés une MST tyrannique à trop fricoter avec l’habitant.e, et sont tombés sous la coupe de l’essaim. Contraints de se replier sur le toit du bâtiment après que leurs collègues aient fait défection et ouverts la porte aux hordes baveuses et chitineuses de Pagus Parva, Cain et Cie ne doivent leur salut qu’à l’arrivée propice et totalement inespérée d’un régiment de Cadiens, qui venait sans doute prendre un peu de bon temps après une campagne éprouvante sur le front, le vrai, le dur, le velu. Pas de chance pour les troupes de choc, il faudra passer sur le corps des filles de joie locales avant de leur passer… C’est peu conseillé de toute façon.

L’histoire se termine triplement bien pour Cain, qui écope d’une médaille, d’une réputation héroïque encore grandie (alors qu’il a simplement et bêtement pété les plombs en plein combat), et d’un regard lascif de Wynetha lors de la soirée de remise des honneurs. Vu comme ça, on aurait presque envie de s’engager.Fin spoiler

1 : Mitchell ne se donne même pas la peine de le baptiser, c’est dire s’il était mal barré le garçon.

AVIS:

Comme l’illustration d’époque qui accompagne cette chronique le fait subtilement remarquer, ‘Sector 13’ (le nom de la zone autour de Pagus Parva) est une nouvelle collector, remontant aux tout premiers chapitres de la longue, troublée et caustique histoire de Ciaphas Cain. 2003, pour être précis. La recette est la même que pour toutes les autres soumissions de Sandy Mitchell pour cette série : une approche décomplexée (les Anglais ont la jolie formule de tongue-in-cheek) du background de Warhammer 40.000 avec un gros B, permettant au personnage de sitcom qu’est Cain de vivre des aventures palpitantes à son corps défendant. Après avoir enquillé de nombreuses itérations de cette formule consacrée, qui a offert une carrière respectable à Mitchell au sein de la Black Library, je dois reconnaître que certains épisodes sont plus réussis que d’autres, et ‘Sector 13’ fait partie du haut du panier. Il m’est difficile de quantifier précisément ce qui fait de cette nouvelle un succès, mais il me semble que le rythme est plus enjoué, et les blagues plus efficaces que pour d’autres courts formats de Sandy Mitchell. Bref, c’est une des (més)aventures les plus satisfaisantes de l’incorrigible et incorrigé Ciaphas Cain que nous tenons là, et un point d’entrée idéal pour tout novice cherchant à se frotter à cette légende de la Black Library.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Comme Gotrek, Ciaphas Cain est un incontournable de la Black Library. Mon jugement sur l’intégration de ‘Secteur 13‘ dans cette anthologie introductive sera donc aligné sur celui donné plus haut: c’est un grand oui. Le fait que nous bénéficions ici d’une « bonne » nouvelle du Commissaire le plus cool du 41ème millénaire ne gâche évidemment rien.

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Les Réprouvés (Nightbleed) – P. Fehervari [40K] :

INTRIGUE:

Les journées de Chel Jarrow, medicae disgraciée et névrosée de Sarastus, sont hantées par un cauchemar récurrent dans lequel elle se revoit faire l’erreur qui lui a coûté sa carrière, ainsi que la vie d’une de ses patientes. Epuisée par un enchaînement de gardes, elle a en effet confondu un Death Guard « XIV » avec un Son of Horus « XVI » et injecté de l’eau de javel à une malade du COVID-19K, ou une joyeuseté de cet ordre, ce qui ne pouvait pas bien se terminer. Renvoyée par son employeur, elle enchaîne depuis les petits boulots minables, le dernier en date consistant à servir de technicienne de laboratoire dans une usine agroalimentaire. Affectée à des cycles nocturnes pour ne pas entraver la production, Chel passe ses journées à dormir et ses soirées à éviter son mari Lyle, dont elle ne supporte plus la petitesse et la servilité1. Une bonne crise de la quarantaine comme on les aime, en somme.

Alors qu’elle prend le chemin du turbin, elle remarque en attendant que l’ascenseur monte (131ème étage, tout de même) que de nouveaux tags ont fait leur apparition sur les murs de son couloir. L’un d’eux représente l’homme aiguille (Needleman), une sorte de croquemitaine local vivant dans les ténèbres et cherchant sans relâche à saboter les dômes abritant les cités ruches de Sarastus pour permettre à la Nuit Véritable de régner sans partage sur la planète. Le trouillomètre commence à s’affoler lorsque Chel entend des bruits suspects dans l’obscurité du couloir, hors de portée de sa fidèle lampe torche. Ou plutôt, aurait dû s’affoler car notre héroïne n’éprouve pas le moindre émoi à la pensée qu’un prédateur la guette peut-être depuis les ténèbres. C’est l’avantage d’avoir une vie vraiment pourrie : on voit toujours le bon côté des choses. Ceci dit, il ne se passera rien de bien méchant avant que l’ascenseur ne finisse enfin par arriver, et emmène Chel jusqu’au rez de chaussée de la tour Barka.

Il est temps pour nous de faire la connaissance de notre second personnage principal, un jeune à problème s’étant rebaptisé Screech (cri perçant en français) après avoir entendu sa mère pousser un hurlement inhumain lorsqu’il lui a crevé les yeux à l’aide d’une fourchette. Il venait de tuer son père de la même façon, et avait 14 ans à l’époque des faits. Voilà voilà. Obsédé par le mythe de l’homme aiguille, qui l’a fait basculer dans la folie homicidaire, Screech est devenu un grapheur marginal, laissant des messages aussi inquiétants que mal orthographiés2 sur les murs de la cité. En plus de cela, il lui arrive d’enfiler son cosplay de Needleman pour aller trucider du prolo au gré de ses envies. Cette nuit lui semble d’ailleurs propice à un nouveau crime, et alors qu’il erre dans la cité à la recherche de la bonne cible, son chemin finit par croiser celui de Chel, qui a pris place dans son TER habituel pour aller bosser. Pas de doute possible pour Screech, c’est elle que le destin a choisi pour rapprocher Sarastus de la Nuit Véritable, un meurtre sanguinaire à la fois.

De son côté, Chel, qui en a vu d’autres et se balade avec un taser dans la poche, sent bien que l’ado tatoué et crasseux qui s’est assis par terre en tête de wagon et l’épie sans en avoir l’air n’est pas animé d’intentions charitables envers sa personne. Une poussée de mauvaise humeur manque de la faire aller au clash contre son stalker (pas vraiment discret) à la sortie du train, mais ce dernier est trop perdu dans ses pensées (il a dû sniffer le reste de sa bombe de rose pour passer le temps) pour prendre la mouche. Laissant à sa victime un peu d’avance, il finit par la suivre jusqu’à l’usine où elle travaille, après avoir enfilé son habit de non-lumière : un masque de métal et les griffes de Freddie. Ainsi paré, il se sent possédé par l’esprit de Noël du Needleman, que l’on devine être un peu plus qu’un simple fantasme d’achluophobe. Et en effet, lorsque Screech se retrouve attaqué par un cyber molosse après être entré par effraction dans le périmètre de l’usine de Potton Vitapax, il ne doit son salut qu’à sa possession temporaire par son esprit totem, dont l’un des pouvoirs consiste à pouvoir tordre ses bras dans tous les sens, ce qui est pratique pour venir à bout d’un mastiff énergétique qui vous cloué au sol après vous avoir déchiqueté la cuisse. Mal en point mais toujours opérationnel, notre héraut reprend sa traque en traînant la jambe.

Pendant ce temps, Chel s’est remise à travailler sur le dernier échantillon qui lui a été remis, et dont elle suspecte la nature maléfique, ou en tout cas néfaste, sans pouvoir le prouver. Les tests du VLG-01 n’ont en effet rien détecté de suspect, mais la consistance de goudron pervers de la substance rend son utilisation dans des produits cuisinés, même pour des travailleurs de la caste Delta, impensable. En désespoir de cause, et prise d’une inspiration subite, Chel a résolu la veille d’ingérer un peu de cette mixture, ce qui a semble-t-il renforcé ses cauchemars. N’y tenant plus, et sans doute en manque, la technicienne décide d’aller visiter le lieu de stockage du VLG-01, convainquant pour ce faire un des gardes de nuit de la conduire jusqu’à l’entrepôt (forcément abandonné jusqu’il y a peu car il avait mauvaise réputation). Là, deux choses horribles se produisent coup sur coup. Premièrement, Chel sombre dans la folie et se sert une grande rasade d’élixir de noirceur à même la cuve (pochtronne !), ce qui ne lui fait pas du bien comme on peut s’en douter. Deuxièmement, Screech finit par la rattraper, après avoir égorgé le garde au passage, et s’apprête à lui jouer son grand classique : le concerto d’Edouard aux Mains d’Argent en Scie Mineure…

Début spoiler…Seulement voilà, le Needleman s’est trouvé un avatar plus méritant que ce petit péteux de taggeur, et Chel se fait un plaisir de corriger son agresseur d’un grand coup de taser dans la glotte, ce qui lui fait fondre la mâchoire et couler les yeux sur les joues, entre autres effets secondaires sympathiques. Ayant récupéré le masque de fonction de Screech sur son presque cadavre, Chel retourne à son laboratoire pour valider définitivement l’échantillon de VLG-01, qui pourra donc être distribué largement à la populace de Sarastus, avant d’embrasser définitivement son nouveau statut de femme de l’ombre. Première étape : son appartement de la tour Barka, où elle aura une petite discussion avec ce butor de Lyle à propos des radiateurs…Fin spoiler

1 : Et également sa froideur coupable, car monsieur refuse obstinément de monter le chauffage, quand bien même la température de leur HLM se rapproche sensiblement de zéro.
2 : Dernier chef d’œuvre en date de notre Banksy sociopathe « C 1 MENSSONJE » au Hello Kitty Pink. Sans point d’exclamation à la fin, car ce n’était pas nécessaire.

AVIS:

Comme on pouvait s’en doute, Peter Fehervari réussit sans problème son entrée dans la gamme Warhammer Horror avec ‘Nightbleed’, un petit concentré de noirceur (haha) à la sauce Dark Coil. Notons à ce propos que les références aux autres textes et arcs narratifs du Fehervariverse ne sont pas légions dans cette nouvelle (à moins qu’elles soient trop subtiles pour votre serviteur, ce qui est tout à fait possible), ce qui facilite sa compréhension pour le lecteur non familier de l’approche de l’auteur. Ceci dit, il n’est guère besoin de pousser loin l’analyse pour comprendre que ‘Nightbleed’ n’est pas un stand-alone, mais contient des éléments qui s(er)ont explicités ailleurs, à commencer par le sens des lettres « VLG », sur lequel Fehervari fait plancher son lecteur de façon très explicite1. Parmi les autres réussites indéniables de cette soumission, on peut citer la facilité déconcertante avec laquelle l’auteur arrive à « planter » son décor en quelques phrases, et à faire de Sarastus un monde impérial plus tangible et réel que bien des planètes auxquelles GW et la BL ont consacré des dizaines de pages (Necromunda ? Armaggedon ? Cadia ?), ce qui est la marque des vrais conteurs. De la même manière, Fehervari instille à son récit un véritable malaise (angoisse serait un peu fort), amplifié par les bribes de comptines qu’il met dans la bouche et dans l’esprit de Screech. Will you won’t you meet the Needleman ?

1 : À titre personnel, je penche pour un acronyme en haut gothique (latin donc) glorifiant les ténèbres/le Chaos, mais cela peut être chose. Je suis simplement à peu près sûr qu’il est possible pour un lecteur attentif de percer ce mystère à jour avec les indices que Fehervari a laissé ici et là…

ET POUR LES NOUVEAUX?

Si vous êtes familiers de mes retours, vous savez que je porte à la prose de Peter Fehervari une affection toute particulière parmi les contributeurs de la Black Library. Aussi, permettre aux lecteurs francophones de s’initier aux joies glauques de Warhammer Horror à travers une (bonne, évidemment) histoire écrite par mon chouchou est évidemment un choix que je valide, et plutôt 41.000 fois qu’une. Le seul risque pour les nouveaux venus serait de considérer que toute la gamme est au niveau de ce ‘Les Réprouvés‘, ce qui n’est malheureusement pas le cas. Too much of a good thing…

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Aberrations (Aberrant) – C. Wraigth [40K] :

INTRIGUE:

Agusto Zidarov, Probator gras du bide, marié, un enfant, est mis sur un sale coup par un prêtre aussi influent qu’extrémiste, Yvgen Asparev. L’Ecclésiaste a en effet eut vent par son réseau de fidèles de la présence d’individus peu amènes, et probablement un peu mutés sur les bords, dans une zone industrielle d’Urgeyena. Bien que moins chaud que son indic’, qui lui brûle littéralement d’impatience, d’aller à la chasse aux mutants dans les bas-fonds de Varangantua, Zidarov se rend sur place pour faire sa contre-enquête, obtenant la confirmation de la part des témoins identifiés par Asparev que quelque chose de pas très impérial se trame dans l’entrepôt proche de la gare locale. À la nuit tombée, notre héros se glisse discrètement à l’intérieur du bâtiment en question, et ne met pas longtemps à tomber sur le « dortoir » de travailleurs détachés d’un genre un peu particulier. Très grands, très costauds, avec une peau diaphane, des yeux noirs et trois slips à se partager pour deux cents individus, les humanoïdes enchaînés dans le sous sol du site industriel répondent parfaitement au cahier des charges de l’abhumain de contrebande, venant voler les emplois et le slab des honnêtes Alectiens.

Cette découverte ethnologique majeure ne peut toutefois être reportée aux autorités compétentes et/ou incandescentes, car Zidarov se fait surprendre par une bande de gorilles bourrés de stimms, qui se montrent assez peu impressionnés par son badge d’office. Il faut l’intervention salvatrice de la directrice de l’usine, Alissya Gordova, pour empêcher que le Probator n’aille rejoindre le panier à salade de l’Empereur. Cette dernière explique posément à son « invité » que les opérations du site sont placées sous la protection et la direction du vladar Aista Fyodor Meleta, qui, en sa qualité de sous-gouverneur planétaire, se contrefiche royalement de l’avis et des principes d’un flicaillon comme Zidarov. Reconduit sans ménagement à l’entrée, avec ordre de ne pas revenir de sitôt, notre héros s’exécute de bonne grâce, et parvient à poser un mouchard sur un véhicule de transport qu’il devine justement servir à l’acheminement de la main d’œuvre spécialisée qui trime dans les profondeurs.

Cette intuition le mène jusque dans la juridiction voisine de Korsk, sur les traces du semi-remorque en question, qui se gare au milieu de la pampa pour réceptionner une cargaison livrée par une navette spatiale banalisée. Le doute n’est à ce stade plus permis, mais Zidarov fait du zèle en rendant une visite de courtoisie au gros lard ayant supervisé l’opération dans la cabane minable qu’il occupe à proximité du site d’atterrissage clandestin, une fois le convoi reparti. Ayant menotté et bâillonné son hôte pour pouvoir explorer sa piaule en paix, Zidarov a la surprise et l’horreur de découvrir une femelle de la race des abhumains entraperçus dans l’usine d’Urgeyena attachée sur un lit. Gras double est en effet un petit pervers, qui aime jouer du fouet pour se sentir puissant (ce qui est somme toute moins dégoûtant que d’autres explications à cette situation particulière). Dilemme profond pour notre héros, qui ne sait pas trop s’il doit tuer la mutante de sang-froid, ou la libérer de son tortionnaire. Pris de doute, il commence à dialoguer avec la grande godiche, et se rend vite compte qu’elle est plutôt à plaindre qu’à exterminer. En définitive, il décide de la remettre en liberté, scellant du même coup le sort de l’Indiana Jones en surpoids qui se dandine sur la moquette de la pièce d’à côté, et donnant à la rescapée les informations nécessaires pour qu’elle puisse tenter d’aller libérer ses congénères de leur camp de travail.

La nouvelle se termine par la confrontation entre Zidarov et Asparev, durant laquelle on apprend qu’un regrettable accident s’est déclaré récemment dans l’usine du vladar, la réduisant en cendres et provoquant la mort d’une bonne partie de ses ouvriers. On n’a par contre pas trouvé trace du moindre mutant sur les lieux du drame, et d’ailleurs les Probators n’ont même pas été mandatés pour enquêter sur l’origine du sinistre, ce qui est assez bizarre quand on y réfléchit… Voire même aberrant.

AVIS:

Chris Wraight nous sert une nouvelle bien pensée (et mettant en scène son héros de Warhammer Crime, Agusto Zidarov, également au sommaire de ‘Bloodlines’), explorant le thème du rapport à la mutation – et donc à la différence – d’un Imperium dont la diversité intrinsèque devrait pousser à la tolérance sur le sujet, mais qui se complaît au contraire dans son obscurantisme. Dans les ténèbres d’un lointain futur, on n’est pas à un paradoxe près. S’il n’a pas été le premier à exploiter cette ficelle (je pense en particulier à Barrington J. Bayley et à son ‘Children of the Emperor’ et à Gav Thorpe avec ‘Suffer Not the Unclean to Live’), Wraight est un des rares auteurs contemporains de la BL à remettre l’idée au goût du jour, y ajoutant de façon (à mon avis) délibérée et pertinente des similitudes avec la situation des migrants fuyant la misère et la guerre de leurs pays pour finir exploités en Europe ou aux Etats-Unis. La réalisation de Zidarov que les êtres qu’il considère comme des animaux sont en fait des humains, au même titre, voire davantage, que lui et ses concitoyens de Varangantua, pourrait amener le lecteur à réfléchir à son tour sur la gestion actuelle de la crise migratoire, si le cœur lui en dit. C’est en tout cas l’un des textes les plus actuels et « réalistes » publiés par la Black Library depuis un bout de temps, et il mérite à ce titre largement la lecture.

Autre point fort de cet ‘Aberrant’, la réussite de Wraight au moment de dépeindre son héros comme un individu moralement ambigu, et loin d’être exemplaire. Les protagonistes de l’anthologie ‘No Good Men’ ont en effet tendance à avoir plutôt un bon fond, malgré leurs tendances auto-destructrices/associales, alors que Zidarov est, lui, objectivement compromis. La difficile décision qu’il prend de libérer celle qui est, selon toute évidence, une victime d’une exploitation sans vergogne de la part de Varangantua au sens strict, et de l’Imperium au sens large, fait de ce personnage une véritable incarnation des « types pas bien » que nous promet le titre du recueil. À côté de cela, le fait que Zidarov ne soit pas le flic/détective privé solitaire et alcoolique qui revient avec d’infimes variantes dans les autres nouvelles de l’ouvrage, mais un citoyen assez normal, intégré, rationnel et avec une famille, renforce encore la ligne de faille entre ce qu’il apparaît être et ce qu’il faillit devenir. Bref, si le suspens n’est ici pas au rendez-vous, cette nouvelle a bien d’autres qualités à mettre en avant, et est sans doute l’un des premiers classiques de Warhammer Crime.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Une très bonne introduction à Warhammer Crime et à la réjouissante et complexe noirceur de la société civile impériale, ‘Aberrations‘ remplit sa mission didactique aussi proprement que Zidarov son enquête. Un choix tout à fait approprié de la part de la Black Library donc, qui aura réussi à très bien mettre en valeur ses nouvelles franchises dans cette anthologie francophone 2022, si vous voulez mon avis.

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Au final, et c’est assez rare pour le souligner, je peux affirmer sans détour que le recueil français du Black Library Celebration 2022 est supérieur à celui proposé en version originale, et ce malgré l’absence totale d’inédites dans le premier (par rapport au second). Si cela est dû en grande partie aux choix hasardeux de la BL en matière de sélection des nouvelles figurant au sommaire de ces ouvrages, je me permets de souligner en outre que la cuvée francophone de cette année est très solide ceteris paribus, et devrait à mon sens être privilégiée par les lecteurs débutants par rapport aux autres anthologies du même tonneau (comme elles sont toutes proposées en vrac en bas de la page My Download du site de la Black Library, cela vaut peut-être la peine de le préciser ici). Le mot de la fin consistera tout de même et avant tout à remercier Nottingham pour avoir reconduit une fois encore cette louable initiative, afin de permettre au tout venant de s’initier aux plaisirs (plus ou moins coupables) de la GW-Fiction à vil prix. Pourvu que ça dure!

BLACK LIBRARY CELEBRATION 2021 [Recueil]

Bonjour et bienvenue dans cette revue critique des recueils de la Black Library Celebration 2021. Et le pluriel est définitivement de mise cette année car la BL has gone full trilingual (and full digital), et nous gratifie de versions anglaise et française (et allemande, mais je ne m’aventurerai pas si loin) aux sommaires radicalement différents, seul l’indéboulonnable Guy Haley (‘To Speak As One’/‘Parler d’une Seule Voix’/’Mit Einer Stimme‘) faisant office de dénominateur commun entre les trois langues pratiquées par la Black Library. Pour le reste, la VO fait preuve d’un peu plus de variété que ses contreparties traduites, en incluant à son sommaire une nouvelle siglée Warhammer Horror (‘Skull Throne’), tandis que la VF se concentre sur les grandes figures de 40K (‘Hiérarchie‘, ‘Les Echos de la Tombe’). Notons enfin que l’Hérésie d’Horus est aux abonnés absents du cru 2021, ce qui dénote peut-être de la volonté de la BL de commencer à tourner cette longue et riche page de son histoire, et préparer la transition vers de nouveaux projets. Your guess is as good as mine…

Sommaire du recueil VF :

Sommaire du recueil VO :

Comme c’est l’usage, toutes les nouvelles incluses dans ces anthologies ont déjà été publiées (mais pas forcément traduites) auparavant. Pour peu que vous soyez familiers du catalogue de la Black Library, il se peut que vous ne trouviez rien de neuf à vous mettre sous les yeux. Ceci dit, les vétérans couturés ne sont pas vraiment le coeur de cible de ces petits recueils introductifs, et la BL ne les a pas abandonnés pour autant (Black Library Celebration Week 2021), on ne les plaindra donc pas. En effet, il faut plutôt rapprocher ces opuscules des anthologies de nouvelles « Start Here » proposées par la maison d’édition de Nottingham depuis maintenant quelques années, et qui sont clairement destinées, autant par leur contenu que par leur (vil) prix, à introduire les franchises de la BL auprès de potentiels nouveaux lecteurs. Pour refléter cette vocation didactique, j’ajouterai aux habituelles rubriques « Intrigue » et « Avis » une troisième entrée, pour donner mon avis sur l’intérêt de faire figurer la nouvelle en question dans ce type d’ouvrage tout public. Le cadre étant posé, il est temps de nous attaquer sans plus tarder aux neufs nouvelles sélectionnées par les pontes des Midlands pour ce millésime 2021. Je passe devant.

Black Library Celebration 2021  

To Speak as One // Parler d’une Seule Voix – G. Haley [40K] :

To Speak as OneINTRIGUE :

Alors qu’il attend l’arrivée prochaine d’un collègue de l’Ordo Xenos sur une station prison inquisitoriale abandonnée orbitant autour de la planète Otranti, l’Inquisiteur Cehen-qui reçoit une missive émanant de Belisarius Cawl en personne, lui intimant l’ordre de remettre le Xenos retenu prisonnier dans la station de correction investie par lui et son équipe. Peu habitué à recevoir des ordres, quand bien même ils proviendraient d’une sommité galactique telle que l’Archimagos Dominus, et aient été contresignés par Guilliman en personne, Cehen-qui informe sa fine équipe d’acolytes (l’être à tout faire Callow, le porte-flingues livre1 Valeneez, le Magos hipster – Frenk – Gamma et la serpentiforme et mal réveillée psyker ShoShonai) qu’il n’a aucune intention de coopérer, et qu’il défendra son bien jusqu’à la mort… de tous ses suivants, et même la sienne si on en arrive jusque là. L’arrivée soudaine d’un vaisseau de l’Adeptus Mechanicus va lui donner l’occasion de mettre à l’épreuve sa résolution farouche.

À bord du croiseur de l’Omnimessie, élégamment nommé 0-101-0, nous faisons la connaissance du reste du casting de la nouvelle, constitué de l’Archiviste Primaris Alpha Primus, qui déteste tout et tout le monde (mais a un faible pour la confiture d’albaricoque) et d’un clone de Cawl, Qvo-87. Chargés par leur patron de lui ramener le sujet de ses désirs afin qu’il puisse continuer ses expériences, les deux larrons cohabitent difficilement du fait de leur différence de caractère. Si Primus est gai comme une porte de prison qui viendrait de perdre sa famille dans un accident de voiture, Qvo-87 est gai comme un pinson (Cawl a dû intégrer le coffret collector des Grosses Têtes dans sa banque de données internes), et même si ses boutades tombent systématiquement à plat, il ne se départit jamais de sa bonne humeur, qui énerve Primus au plus haut point. Comme tout le reste d’ailleurs. Confiant dans la capacité de son vaisseau à sortir vainqueur d’un échange de tirs avec la station où est retranchée la suite inquisitoriale, mais souhaitant laisser un chance à son interlocuteur de régler l’affaire à l’amiable avant de passer aux choses sérieuses, Qvo opte pour une approche diplomatique, mais envoie tout de même son stoïque collègue aborder discrètement le complexe, ce qu’il fait à la Roboute (comprendre qu’il se jette dans le vide depuis son vaisseau et rejoint sa cible à la nage). Grand bien lui en fait car les négociations avec Cehen-qui se révèlent rapidement infructueuses, et l’inévitable bataille spatiale s’engage après que les deux camps aient conclu à un accord sur leur désaccord…

Début spoilerL’affrontement tourne, comme prévu par ce dernier, rapidement en faveur de Qvo, qui décide de pimenter les choses en percutant la station afin d’accélérer sa chute vers la surface d’Otranti. Surpris et condamné par cette manœuvre, Cehen-qui n’a d’autres choix que d’ordonner l’évacuation de sa planque, non sans avoir récupérer le psyker Aeldari qu’il pense être la cible du Mechanicus… Sauf qu’il y a eu un malentendu fâcheux au niveau du communiqué envoyé par Cawl: l’Archmagos n’est pas le moins du monde intéressé par les capacités cognitives des Zoneilles, mais convoite la crête d’un Cryptek, oublié dans une des cellules du complexe inquisitorial au moment de sa première évacuation. Cela n’empêche évidemment pas Primus de faire le coup de feu au bénéfice des malheureuses troupes de choc qui croisent sa route, mais facilite grandement le travail de collecte de l’inflexible Archiviste, jusqu’à ce qu’il se retrouve nez à nez avec ShoShonai, la psyker de compagnie de Cehen-qui. Alors que le Primaris se prépare à une partie sans pitié de Mastermind, il a la surprise d’entendre son vis à vis solliciter son aide, qui consisterait en une euthanasie rapide. Et pour cause, sous son grand chapeau, Tata Shosho ne cache pas un grelot, mais un symbiote tentaculaire fermement accroché à son occiput. Et là où ça devient intéressant, même pour le suprêmement blasé Primus, c’est que c’est le Xenos qui demande à ce que l’on mette fin à ses services (probablement de disque dur externe), car c’est lui qui a été réduit en esclavage par ce radical de Cehen-qui, malgré des apparences trompeuses. Toujours prêt à rendre service à son prochain, surtout si cela implique un peu de xenocide, Primus met à profit son Magnificat et ses tendons d’acier pour broyer à main nue le parasite exploité, avant de finir le travail d’une rafale de bolts lorsque ShoShonai fait mine de lui chercher des noises. Ceci fait, il se téléporte sur 0-101-0, et repart avec son crispant sidekick pour de nouvelles aventures, laissant Cehen-qui et ses sbires réaliser avec effroi et outrage qu’ils se sont faits balader comme des cadets par les envoyés spéciaux de Cawl. Y a plus de respect, que voulez-vous.Fin spoiler

J’en aurais bien dit plus à son sujet, mais il ne fait littéralement que ça d’utile au cours de la nouvelle.

AVIS :

Nouvelle intéressante de la part du vétéran Haley, non pas par son intrigue, mais bien par son ton, qui, à ma grande surprise, s’est révélé flirter sans complexe du côté de la pastiche. Qu’il s’agisse de l’Inquisiteur Cehen-qui, éminence grise foncée aussi hautaine que précieuse, et qui n’aurait pas détonné comme méchant dans un sous James Bond philippin, ou du binôme de choc Alpha Primus (Bourriquet dans un corps de psyker Primaris) et Qvo-87 (Kev Adams dans un corps d’Archimagos), les personnages de To Speak as One manient la petite blague aussi facilement que le bolter, ce qui place cette nouvelle à part de l’écrasante majorité du corpus de la Black Library. Le résultat final, s’il est assez plaisant, n’est donc pas à mettre entre toutes les mains. Passée cette remarque introductive, cette soumission de Guy Haley gagnerait peut-être à être mise en relation avec les autres écrits que notre homme a consacré au Dark Imperium, afin de pouvoir établir si les personnages présentés ici se retrouvent ailleurs. Si c’est le cas, cela pourrait expliquer pourquoi l’auteur ne se donne pas la peine d’introduire convenablement Primus et Qvo, que le lecteur ne pourra identifier comme mari et femme Primaris et Replicae qu’au bout de quelques paragraphes. Primus reste malgré tout assez mystérieux, ni son Chapitre d’appartenance, ni les raisons qui expliquent son rattachement au service de Cawl, n’étant abordés au cours du récit. Enfin, on peut (en tout cas, je le fais) reprocher à Haley la légèreté avec laquelle il met en scène son twist final « principal », qui est à mes yeux celui d’après lequel la nouvelle a été baptisée, ou en tout cas qui aurait dû l’être compte tenu de ce choix. Quand le lecteur apprendra le fin mot de l’histoire à propos de cette double parole (To speak as one: parler d’une seule voix), il sera en droit d’être un peu déçu par la micro révélation apportée par ce développement, le « vrai » retournement de situation étant tout autre. Pinaillage peut-être, mais on ne bâcle pas un choix de titre, Mr Haley.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Pour ceux qui ne le savent pas, Guy Haley est la plume principale de l’arc ‘Dark Imperium’, qui tente de faire avancer le fluff romancé de la BL au même rythme que celui détaillé dans les suppléments de jeu. Cette nouvelle est une bonne introduction à cette sous-franchise qui sera sans doute amenée à jouer un rôle central dans les années à venir, puisqu’elle met en scène quelques personnages récurrents et importants du grand oeuvre de Haley (Primus et Qvo-87). En plus de cela, ‘To Speak as One’ ne démérite pas d’un point de vue littéraire, puisqu’on y retrouve de l’action, de l’humour et un twist final digne de ce nom, ce qui est tout ce que l’on peut demander d’une nouvelle 40K. Une très bonne inclusion, donc.

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Hiérarchie // Chains of Command – G. McNeill [40K] :

Chains of CommandINTRIGUE :

Engagé dans la campagne de pacification de Thracia avec un contingent d’Ultramarines placé sous le commandement du Capitaine Idaeus, le Sergent Uriel Ventris a été chargé de mener l’assaut sur le pont 2-4, tenu par les rebelles ayant eu l’audace de se soulever contre le bienveillant Empereur, et qu’il convient de faire sauter pour éviter que la contre-attaque de la Garde Impériale en direction de la capitale planétaire ne soit prise de flanc. Après quelques paragraphes de « mes sens sont vraiment trop développés lolilol » #ImTheBest #YouCantWriteAstartesWithoutStar, qui expliquent en grande partie pourquoi personne n’aime les Ultramarines, Ventris accomplit sa mission, déclenchant un assaut en règle de ses petits copains bleu pervenche et vert sapin sur la position adverse. Désespérément surclassés, les défenseurs se font hacher menu, et les meilleurs de l’Empereur s’organisent pour tenir le pont assez longtemps pour permettre au vénérable Techmarine Tomasin de placer les explosifs qui permettront de faire écrouler l’ouvrage d’art dans la gorge en contrebas.

Nous faisons la connaissance du Capitaine Idaeus, un officier vétéran et proche de ses hommes, connu pour son approche distanciée du saint Codex Astartes, ce qui n’en finit pas de sidérer le rigoriste Ventris. Ce même Idaeus a d’ailleurs fait montre de ses tendances libertaires en menant la charge contre un nid de bolters lourds, au lieu d’attendre le soutien du reste de ses hommes, comme ce planqué de Guilliman l’avait pourtant préconisé dans ses écrits. Depuis cinquante ans qu’ils combattent ensemble, Idaeus n’a pas réussi à convaincre son bras droit de l’avantage de s’écarter de temps en temps du manuel d’utilisation de la guerre écrit par le Primarque, et ce n’est pas aujourd’hui que ça va ch… Ah, on me dit dans l’oreillette que c’est précisément l’objet de cette nouvelle. Bigre.

Comme tous les vétérans dignes de leurs médailles, Idaeus fait confiance à son instinct, et ce dernier lui hurle (il est un peu sourd) que quelque chose en tourne pas rond, malgré le fait que la mission se déroule jusqu’ici parfaitement comme prévu. Ce malaise le conduit à mener une mission d’inspection de l’autre côté du pont, Ventris à ses côtés, pour juger du boulot effectué par les Scouts déployés par les Ultramarines en territoire ennemi. Et, évidemment, il s’avère qu’une importante colonne blindée progressait discrètement (c’est possible si on met des patins sur les chenilles) en direction du pont, ce qui va devoir forcer le vénérable Tomasin à se bouger les vénérables miches, ce qui n’est pas facile quand on est plus refait qu’un Iron Hands en fin de carrière (souvenir d’une rencontre torride avec un Carnifex entreprenant sur Ichar IV). Tout aussi évidemment, rien ne se passe comme prévu à partir de ce moment, les Scouts, le Thunderhawk qui devait évacuer les Ultramarines, et le vénérable Tomasin tombant tous sous le feu de l’ennemi, ce qui force Idaeus et ses compagnons à monter une défense désespérée du pont, le temps que 1) un autre transport arrive, et 2) quelqu’un trouve une idée brillante pour faire péter la passerelle, ce qui reste tout de même l’objet principal de la mission de nos marsouins énergétiques.

Je vous passe les longues scènes de baston dont nous gratifie McNeill, et qui permettent à Ventris de montrer qu’il en a dans le slibard, pour aller directement au moment où notre futur héros réalise qu’il suffit de déclencher une charge de démolition à proximité des explosifs posés par l’irrécupérable Tomasin pour déclencher une réaction en chaîne qui devrait provoquer les résultats escomptés. Petit problème, l’escouade de Space Marines d’Assaut envoyés réaliser cette mission se fait pincer en chemin par les Night Lords qui coordonnent la rébellion chaotique, et les incapables finissent crucifiés sur le pare chocs des Rhinos des fils de Curze pour leur apprendre la vie. Devant ce spectacle insoutenable, Idaeus et Ventris sont très colère, et cette rage leur permet de repousser l’assaut des renégats au prix de lourdes pertes. Alors que le deuxième Thunderhawk approche de la position intenable des Ultramarines, l’heure des choix arrive pour la bleusaille…

Début spoiler…Le noble Idaeus décide de partir faire exploser le pont à la mano, malgré ses chances de réussite quasi nulles, et ordonne à Ventris de mener les quatre rescapés de cette folle nuit, ainsi que son épée énergétique de maître, jusqu’au point d’extraction. Les cœurs gros, le Sergent s’exécute, et est témoin de l’héroïque sacrifice de son mentor dans les poutrelles et les travées du pont 2-4, la bande de Raptors laissée en garnison par les Night Lords ne parvenant pas à lui régler son compte avant que le Capitaine fasse feu avec un pistolet plasma dérobé à l’ennemi sur une charge de démolition laissée négligemment sur place1. C’est donc une victoire indéniable pour l’Imperium, et le début de la saga d’Uriel Ventris, qui héritera du commandement de la 4ème Compagnie à la suite de la campagne de Thracia.Fin spoiler

1 : On pourrait aussi se demander pourquoi les Night Lords n’ont pas détaché les explosifs laissés par le vénérable Tomasin sur les piliers du pont quand ils en avaient l’occasion. Encore une preuve que l’abus de Chaos est mauvais pour le cerveau.

AVIS :

Si l’idée de lire une nouvelle d’action dont le héros est un Ultramarines peut sembler intrinsèquement barbante à un lecteur de 2020, qui a sans doute pu pratiquer l’exercice à de nombreuses reprises grâce/à cause de l’obsession de la Black Library pour ce genre de productions, il faut être juste avec Graham McNeill et Uriel Ventris, et rappeler que ‘Chains of Command’ a été à sa sortie (2001) une des premières et plus abouties Space Marinades (saveur vanille) qui soient. Les innombrables ersatz et proxys publiés depuis ne l’ont pas aidé à bien vieillir, ni le style de l’auteur, ni les personnages mis en scènes, ni l’intrigue exposée n’étant particulièrement dignes d’éloges, mais le résultat n’est pas indigne pour autant. À l’époque où il est attendu d’un héros Space Marines un peu plus qu’un grade de Capitaine et une vague tendance à se poser des questions existentielles (ce qui était suffisant il y a 15-20 ans), je laisse le soin au lecteur de décider si une figure comme Uriel Ventris est toujours pertinente, ou bien s’il est temps d’accorder une retraite bien méritée à l’aïeul de tous les héros d’action énergétique de la Black Library.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Il ne faut pas être Eldrad Ulthran pour comprendre que l’inclusion de cette nouvelle dans l’anthologie Black Library Celebration 2021 est due à la sortie du dernier roman de la série Uriel Ventris au cours du même événement. C’est de bonne guerre de la part de la BL que de chercher à intéresser des nouveaux lecteurs à une de ses séries phares, et au vu de la bibliographie « ventrisloque » du sieur McNeill, on aurait pu bien plus mal tomber. ‘Chains of Command’ a été pensée comme une nouvelle d’exposition du personnage de Ventris, et malgré son âge avancé, elle fait toujours le job aujourd’hui. Il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’une Space Marinade des plus classiques, mais si c’est votre première, vous ne vous en sortez pas trop mal amis lecteurs (croyez moi sur parole).

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Les Echos de la Tombe // Echoes of the Tomb – S. Mitchell [40K] :

40K_Echoes of the TombINTRIGUE :

Star montante du Commissariat après que les récits de ses premiers exploits se soient répandus dans le secteur, Ciaphas Cain a été muté contre son gré à l’échelon supérieur, et s’est retrouvé impliqué par ses admirateurs dans de nombreuses missions bien trop dangereuses et exposées à son goût. Appelez ça la rançon du succès. Aussi, lorsqu’il apprend que l’état-major a besoin d’un officier pour faire liaison avec la barge de bataille des Reclaimers, Chapitre Space Marines mobilisé dans une campagne de pacification dans le système de Veridia, il n’hésite pas à se porter bravement volontaire, jugeant l’entreprise moins périlleuse que de continuer à jouer les héros de service auprès de ses collègues de bureau.

Son taxi jusqu’au point de rendez-vous avec les meilleurs de l’Empereur sera un vaisseau du Mechanicus dirigé par le Magos Killian, qui a monté une expédition pour excaver des ruines prometteuses sur le monde mort d’Interitus Prime. Arrivés sur place avec quelques jours d’avance sur les Reclaimers, les tech-archéologues se mettent à pied d’œuvre avec enthousiasme, et Cain accepte de descendre à la surface, et même sous la surface, de la planète pour prodiguer ses conseils avisés au jeune et inexpérimenté Lieutenant Tarkus, en charge de la sécurité des cogboys. Je sais que cela va vous surprendre, mais Interitus Prime abritait une colonie de Necrons, qui se réveille sans tarder après que les envahissants humains aient cherché à recharger une innocente Mecarachnide qui s’était mise en veille prolongée après sa dernière mise à jour Windows. Bilan des courses : les Scarabées déferlent, les Spectres phasent et déphasent, les Guerriers se gaussent, et les Impériaux se font tailler en pièces, ne laissant que notre héros en un seul morceau après quelques pages de rencontre du 3ème type. Fort heureusement pour Cain, les Necrons d’Interitus Prime sont diablement woke car ils disposent d’un authentique et totalement legit… portail Warp, qui téléporte le Commissaire dans la soute d’un vaisseau spatial fraîchement abordé par ces lambins de Reclaimers. Et tout est bien qui finit bien.

AVIS :

Echoes of the Tomb’ n’est pas la meilleure nouvelle de Ciaphas Cain proposée par Sandy Mitchell, et la faute en revient principalement à un déroulé étrange (la première partie est consacrée aux diners fins et aux parties de solitaires de Cain, à l’exclusion du moindre élément vaguement 40Kesque) et à un dénouement tristement bâclé (en plus de ne pas respecter le fluff Necron tel qu’on le connaît). Cain reste un personnage sympathique et Mitchell un auteur compétent dans son style de prédilection, mais tous deux ont connu de meilleurs jours et pages.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Ciaphas Cain est une institution de la Black Library, qui bénéficie depuis quelques mois d’un sérieux dépoussiérage de la part de cette dernière: on a vu ainsi quelques titres de la série être traduit en français après des années d’attente, ce qui est évidemment positif. Il n’est donc pas surprenant de voir le Commissaire le moins grimdark de 40K figurer au sommaire d’un recueil de ce type. On regrettera cependant que le choix de la BL se soit porté sur une des nouvelles les plus faibles du catalogue de Sandy Mitchell, et j’invite les lecteurs qui découvriront cette icône pince-sans-rire via ‘Les Echos de la Tombe’ à ne pas juger trop vite cette saga, qui a beaucoup mieux à offrir.

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Un Hymne Funèbre de Poussière et d’Acier // A Dirge of Dust and Steel – J. Reynolds [AoS] :

A Dirge of Dust and SteelINTRIGUE :

À la recherche de la légendaire cité corbeau de Caddow et de son Portail des Royaumes reliant à Shyish à Azyr, une petite force de Stormcast Eternals de la Chambre Vanguard des Hallowed Knights (soyons précis) a conclu un pacte avec les Duardin de Gazul-Zagaz, seuls à connaître l’emplacement de cette ville mystérieuse1. En échange de leur aide contre les hordes du Gardien des Secrets Amin’Hrith, connu sous le nom d’Ecorchâme, les nabots dépressifs (leur royaume est en ruines, leur Dieu s’est fait bouffer par Nagash et l’âme de leur dernier prince sert de skin au démon de Slaanesh) mèneront les guerriers du Lord Aquilor Sathphren Swiftblade jusqu’à bon port. Jamais le dernier à rendre service à son prochain, notre héros accepte bien entendu cette généreuse proposition, et se fait fort d’entraîner ce fât d’Amin’Hrith dans un piège ingénieux.

Ayant réussi à capter l’attention des Hédonistes, probablement en leur faisant remarquer que leurs soieries avaient fait fureur à Ghur il y a trois saisons de celà (ce qui, pour une fashionista des Royaumes Mortels, est une insulte mortelle), les prestes cavaliers de Sigmar emmènent leur nouveaux amis dans une course éperdue à travers les dunes, jusque dans les ruines de Gazul-Zagaz, où les attendent de pied ferme (et depuis un petit moment apparemment, à en juger par l’épaisse couche de poussière qui les recouvre) les guerriers Duardin. S’en suit une bataille des plus classiques, illustrant de fort belle manière l’intérêt de se rendre au combat avec une armure de plates et non une combinaison en viscose, dont le point culminant sera le duel entre Swiftblade et Amin’Hrith dans le temple de Zagaz, où le rusé Stormcast s’emploiera à faire un boucan à réveiller les morts…

1 : On peut donc dire qu’ils ont une carte Caddow. Mouahahaha.

AVIS :

À l’heure où cette chronique est écrite, Josh Reynolds est probablement le contributeur principal de la BL en matière de contenus siglés Age of Sigmar. Une telle prodigalité ne pouvant évidemment pas être synonyme de qualité exceptionnelle à chaque soumission, il est en somme tout à fait logique que certaines des nouvelles rédigées par notre homme ne s’avèrent pas être d’une lecture des plus passionnantes. C’est le cas de ce A Dirge of Dust and Steel (on me passera l’usage du titre original, à la fois plus poétique et plus élégant que le monstre qu’il est devenu en VF), qui se trouve être une nième variation du topos le plus employé de cette nouvelle franchise : la baston de Stormcast Eternals contre les forces du Chaos1. On pourra certes m’opposer que cet épisode particulier se distingue des dizaines qui l’ont précédé par l’emploi d’une Chambre relativement nouvelle (Vanguard), d’un héros inédit (Sathphren Swiftblade) et d’un environnement exotique en diable (l’Oasis de Gazul, en Shyish). Ce à quoi je répondrai que les Vanguard ne sont « que » des Stormcast sur demi-gryffs, et ne conservent de fait que très peu de temps l’attrait de la nouveauté. Swiftblade a quant à lui l’originalité d’une boîte Barbie et son Cheval, même son côté grande gueule n’étant plus vraiment novateur depuis l’arrivée d’Hamilcar Bear-Eater sur le créneau « humoristique » des SE. Pour terminer, Gazul a depuis lors sans doute rejoint l’interminable liste des lieux des Royaumes Mortels dans lesquels plus personne ne reviendra jamais, et ne mérite donc pas que l’on s’y interesse plus que de mesure.

Non, pour ma part, la seule vraie valeur ajoutée de ce Dirge… tient en l’inclusion d’une faction Duardin sortant franchement du lot par sa vénération d’un Dieu de la Mort mort (combo !) et sa capacité à invoquer des esprits, ce qui constitue des variations intéressantes par rapport au stéréotype du guerrier nain que tout lecteur connaissant ses classiques se représente de façon plus ou moins inconsciente. Pour le reste, c’est de la qualité Reynolds (Josh), donc un récit bien structuré et rythmé, s’intégrant parfaitement dans les conventions définies pour Age of Sigmar en termes de fluff et d’atmosphère, et s’avérant dans l’ensemble plaisant à lire. Ne lui retirons pas ça.

1 : Comme les dernières années ont vu apparaître d’autres types d’adversaires, comme les morts-vivants de Nagash pendant la Tempête des Âmes ou les Orruks Ironjaws de manière collatérale à la traque de Mannfred von Carstein, j’attends avec impatience le moment où les vertueux Sigmarines commenceront à taper sur d’autres factions de l’Ordre, en attendant l’inévitable guerre civile que le passif de GW en la matière nous promet depuis que le premier Stormcast a dévoilé le bout de son masque de guerre. ‘La Vilainie de Vanus’, ça c’est un titre qui claque !

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Fut un temps, heureusement révolu, où le plus gros de la littérature Age of Sigmar consistait en des récits de Stormcast Eternals tapant sur tout ce qui avait le malheur de passer à porter de leurs marteaux. Comme on peut aisément le concevoir, le Stormporn n’était pas très intéressant à lire passer la deuxième nouvelle (si on est gentil), et la sortie d’autres factions des Royaumes Mortels a permis de salutairement diversifier les points de vue et les intrigues. ‘Un Hymne Funèbre…’ est une des reliques de ce premier âge littéraire, et l’est même à double titre puisque son auteur a depuis claqué la porte de la BL, au grand désespoir des fans. Très honnêtement, je ne vois pas qui peut être intéressé par ce genre d’histoire, et j’invite donc les lecteurs à considérer cette nouvelle comme un avertissement sans frais (c’est le cas de le dire) plutôt que comme un placement promotionel.

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Les Vieux Us // The Old Ways – N. Horth [AoS] :

Callis and Toll_The Old WaysINTRIGUE :

Affecté à la surveillance de la cité d’Excelsis, dans le royaume de Ghur, le répurgateur de l’Ordre d’Azyr Halliver Toll, escorté de son sidekick Armand Callis, est envoyé par ses supérieurs tirer au clair une sombre histoire de disparition à Marshpoint, une ville agricole située en périphérie de la Cité des Secrets. Le fils aîné de la puissante famille Junica n’a en effet plus donné signe de vie après avoir eu maille à partir avec quelques soldats de l’autre grande famille locale, les Dezraed, qui l’ont poursuivi jusque dans les profondeurs de la forêt d’Ulwhyr. L’entente entre Junica et Dezraed n’ayant jamais été cordiale, c’est une vendetta en bonne et due forme qui menace d’éclater entre les Capulet et les Montaigu de Ghur, gueguerre qui mettrait en péril l’approvisionnement des régiments d’Excelsis en précieuse soie d’acier, ressource collectée depuis les fermes arachnides de Marshpoint. Il va donc de l’interêt général que cette triste affaire soit réglée dans les meilleurs délais, et qui de plus qualifié qu’un répurgateur pour traiter ce problème ?

Nous suivons donc Thalys et Colle au cours de l’enquête à laquelle ils se livrent à leur arrivée dans le bourg miteux et boueux de Marshpoint. Après un interrogatoire croisé des patriciens des deux familles, l’énorme et suintant Fenrol var Dezraed, autoproclamé Gardien de Marshpoint du fait de sa capacité de bloquer à lui seul l’entrée de la ville s’il lui prenait l’envie de s’asseoir en travers du portail, et le sec et irritable Kiervaan Junica, nos experts se rendent sur les lieux de la disparition à proprement parler, escortés par l’homme de confiance du patricien Junica, un natif du nom de Ghedren, et par un trio de gardes Dezraed. Et s’il se pourrait bien que la rivalité larvée entre familles nobles ait bien fait couler le sang, les enquêteurs feraient bien de prendre au sérieux les rumeurs entourant la Sorcière Blanche d’Ulwyhr. Après tout, ils ont pénétré sur son domaine…

AVIS :

C’est avec enthousiasme que j’avais vu revenir la figure iconique du chasseur de sorcières/répurgateur dans le lore d’Age of Sigmar, que son inclinaison high fantasy aurait pu « immuniser » à l’introduction de ce type de personnage, très grimdark par nature. La lutte contre les cultes chaotiques gangrénant le nouvel ordre rutilant de Sigmar constitue en effet à mes yeux un axe de développement des plus intéressants, et une prise de recul bienvenue sur le manichéisme caractéristique des premières années d’AoS. Encore fallait-il que l’image d’Epinal Hammerhal de l’inquisiteur traquant le vice et la trahison parmi les sujets obéissants de l’autorité centrale (préférablement divine, c’est plus classe) soit convenablement adaptée dans cette nouvelle franchise, la profession en question exigeant une rigueur morale confinant à la psychose, ce qui n’est pas franchement la norme parmi la soldatesque sigmarite (ces martel-sans-rire de Celestial Vindicators mis à part), dépeinte à de nombreuses reprises comme adepte du compromis et de la tempérance. Qu’en est-il avec la paire Callis & Toll, promise à un bel avenir au sein de la BL à en juger de la façon dont leurs noms ressortent dans tous les ouvrages auxquels ils ont été inclus ? Eh bien, c’est plutôt pas mal, encore que pas spécialement pour les raisons détaillées ci-dessus. Je m’explique.

Si le fanatisme (dans le bon sens du terme, car, si si, dans la littérature med-fan, cela existe) de nos héros laisse à désirer, la retenue dont fait preuve Toll, sensé être le vrai bad guy du duo, dans le jugement qu’il délivre au coupable, le plaçant à un petit 2 sur l’échelle de Mathias Thulmann (le référentiel absolu de la maison à cet égard), Horth se rattrape néanmoins en glissant quelques remarques de bon aloi à propos d’un certain White Reaper (Cerrus Sentanus sur son état civil), Stormcast Eternal pas vraiment Charlie, à tel point que son nom est utilisé pour effrayer les enfants d’Excelsis. Voilà un type qui mérite que l’on suive, et j’espère bien que ça sera le cas dans un futur pas trop lointain. Celà étant dit, The Old Ways a d’autres qualités, la première étant de proposer une petite enquête policière pas trop mal troussée au vu du nombre de pages limité avec lequel elle doit composer1, l’atmosphère horrifique du passage « sylvestre » du récit étant une autre source de satisfaction. D’autre part, cette nouvelle présente également l’intérêt de creuser le background de la cité libre d’Excelsis, qui devrait normalement ne pas disparaître corps et bien dans les annales du fluff, au vu du nombre d’apparitions qu’elle a faite dans divers écrits depuis son introduction dans le background. En apprendre plus sur cette bourgade présente donc un intérêt pour le fluffiste, tellement bombardé d’informations géographiques par ailleurs qu’on ne peut lui reprocher de ne pas prendre note de tout ce qu’on lui soumet.

Enfin, de façon plus large, elle fait ressortir un concept intéressant : le fossé existant entre natifs d’Azyr et populations locales au sein des cités libres, les seconds étant généralement mal considérés, voire méprisés par les premiers, qui les qualifient « d’Amendés » (traduction personnelle de Reclaimed, qui peut aussi s’entendre comme « Récupéré ») ou de « Sang Maudit » (curseblood), ce qui n’est pas très sympathique, mais ajoute de la profondeur à la société sigmarite. Quand on lit que même un personnage « égalitariste » comme Toll n’aurait pas de problème à raser toutes les forêts de Ghur pour pouvoir accélérer la colonisation de ce Royaume, au grand désarroi des locaux qui ont appris à vivre dans les étendues sauvages et à les respecter, on se dit que la possibilité d’un soulèvement des indigènes contre la métropole et ses représentants est une possibilité réelle… et c’est tant mieux en termes de potentiel narratif ! Bref, une plongée satisfaisante dans l’arrière-pays d’Excelsis, et une nouvelle qui vaut le coup d’être lue pour qui s’intéresse au fluff des cités libres.

On saluera également le twist proprement « meta » de Horth, qui fait dire à Toll qu’il avait identifié le coupable depuis belle lurette et attendait juste de voir combien de temps il faudrait à Callis (et donc au lecteur) pour faire de même. On ne me l’avait jamais faite celle-là.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme dit plus haut, la littérature AoS s’est prgressivement diversifiée, et ‘Les Vieux Us’ en est un bon exemple. En tant que lecteur de med-fan, heroic fantasy ou SF, j’ai tendance à préférer les histoires qui décrivent l’ordinaire des habitants de l’univers abordé, et cette nouvelle de Nick Horth accomplit parfaitement cette mission. S’il est dommage que les éditeurs de la BL n’ait pas choisi d’inclure un court format siglé Warhammer Horror, comme c’est le cas dans la version originale, pour initier les lecteurs à ce genre particulier, ‘Les Vieux Us’ est un pis aller très acceptable, qui donne envie d’explorer plus amont les Royaumes Mortels.

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Death on the Road to Svardheim – D. Hinks [AoS] :

Death on the Road to SvardheimINTRIGUE :

En route vers la cité de Svardheim pour une raison sans doute logique mais inconnue de l’auteur de ces lignes au moment de l’écriture de cette chronique, le duo le plus mal assorti des Royaumes Mortels1 passe le temps et les kilomètres sur la route 88 (c’est tout plat, désertique et décoré avec des monceaux de crânes) en discutant théologie, comme à leur habitude. Bien évidemment, la situation finit par gentiment dégénérer, l’anticléricalisme blasphématoire d’un Gotrek toujours chafouin de s’être fait rouler dans la farine par les Dieux du Monde Qui Fut mettant sur les dents, qu’elle a éclatante, la dévote Maleneth. À force d’enquiller les bornes, elle finit même par les dépasser, allant jusqu’à accuser son rusé et runé camarade de servir le Chaos, à l’aide de l’argument, bien connu de George W. Bush, du « si tu n’es pas avec moi (et Ziggie) tu es contre moi ». Avant que la situation ne dégénère trop franchement, et que le Tueur vétéran ne doive se trouver encore un nouveau sidekick, les comparses tombent sur le théâtre d’une embuscade ayant été fatale à une bande de prêtres sigmarites, dont les corps décapités jonchent les alentours d’une carriole incendiée.

Après une rapide enquête, il s’avère que les assaillants n’ont pas réussi le perfect en matière d’élimination de témoins, une pauvre nonne répondant au nom de Carmina se présentant à nos héros et leur expliquant que sa congrégation s’est fait dérober une relique irremplaçable, le Poing Incorruptible, dont elle avait la charge et promenait de ville en ville pour ranimer la foi des locaux. Avant que Gotrek n’ait pu marquer de nouveaux points d’athéisme hardcore en demandant à Carmina en quoi un poing pouvait être corrompu, pour commencer (il en serait capable le bougre), Maleneth se fait embringuer dans une mission de récupération du saint gantelet, qu’il s’agit simplement de reprendre des mains malpropres d’une petite vingtaine de bandits, retranchés dans une forteresse abandonnée à quelque distance de la route. Rien que de très banal pour notre Tueur, qui accepte toutefois de mettre les formes et de suivre un plan un minimum intelligent (attendre que Maleneth se soit mise en position derrière le bastion pour intercepter d’éventuels fuyards) avant d’aller toquer à la porte le plus naturellement du monde.

La prévoyance de l’Aelf paie rapidement car il se fait bientôt jour (enfin, nuit, mais je me comprends) que les brigands sont un peu plus qu’une bande de maraudeurs sanguinaires, mais bien une authentique secte de Khorne, en train d’invoquer un démon de fort belle taille à l’aide de leur collection bien mal acquise de grigris et talismans. Maleneth n’a pas le temps de signaler qu’il y a une courge dans le potage que Gotrek est cependant déjà en train de défoncer la porte et de se tailler un chemin à travers les mobs de bas niveau, jusqu’à poser l’œil sur une Némésis digne de lui, qu’il engage évidemment en combat singulier dans la plus pure tradition du genre. Etant un VIP incontournable du multivers, Gogo est reconnu par son adversaire, qui a la mauvaise idée d’insinuer que le Tueur a fui son monde au moment de la Fin des Temps au lieu de rester et de se battre pour le défendre. Cela met notre nabot en rogne, et les deux adversaires se balancent quelques baffes amicales, sans trop d’effet de part et d’autre, jusqu’à ce que Meleneth ait l’idée géniale de confisquer les reliques ayant été mise à profit pour invoquer le démon, et dont ce dernier a encore besoin pour maintenir sa présence dans les Royaumes Mortels. Au fur et à mesure que les héros shootent dans les breloques, leur adversaire perd en taille et en carrure, jusqu’à finir rachitique et malingre, et se faire décapiter sans cérémonie par un Gotrek enfin à la bonne taille pour jouer de la hache.

Ceci fait, le duo infernal n’a plus qu’à remettre le Poing Incorruptible à la brave (en fait pas trop) et reconnaissante Carmina, qui s’en va à cheval remettre le précieux héritage en sécurité, pendant que nos héros continuent à pied leur périple. Poing/t final de notre histoire ?

Début spoilerEh bien non (comme la balise spoiler ne le laissait pas du tout envisager), car lorsque nos voyageurs, fourbus (surtout pour Maleneth) et assoiffés (surtout pour Gotrek) tentent d’obtenir le gîte et le couvert d’un monastère sigmarite croisé un peu plus loin sur la route, se disant à juste titre que tous les culs bénis à la ronde leur sont redevables de leurs récents exploits, c’est pour entendre un son de cloche bien différent. Carmina était en fait une voleuse ayant mené sa bande, déguisée en prêtres, dérober le fameux Poing Incorruptible (mais pas Inatteignable) de la garde des vrais fidèles de Sigmar, en tuant quelques uns au passage. L’abbé outré qui fait ce récit aux voyageurs est persuadé que l’iconoclaste va briser la relique en mille morceaux pour revendre la Pierre de Royaume dont elle est faite au plus offrant, au mépris de tous les commandements de Sigmar. C’est donc une grosse boulette, sur laquelle Maleneth manque de s’étouffer, mais qui ne déclenche chez ce philosophe de Gotrek qu’un rire tonitruant. Il en a certes vu d’autres…Fin spoiler 

1 : Gotrek est un Nain (et pas un Duardin) roux exhibitionniste, et Maleneth est une Aelf brune gothique.

AVIS :

Eh bien ça y est : après avoir laissé Gotrek (et le regretté Felix) à leurs aventures dans le Monde Qui Fut, je renoue enfin avec ce héros mythique sous sa nouvelle incarnation, à travers ce court format signé du père adoptif #3 du Tueur de… trucs, Darius Hinks. Ce qui m’intéressait particulièrement dans ces retrouvailles était de voir ce qui avait changé, et ce qui était resté, des précédentes aventures de M. Gurnisson, qui constituaient un sous-genre de la littérature BL à elles seules. L’équilibre n’était pas facile à trouver entre respect servile du cahier des charges, forcément un peu obsolète, établi par King et Long en la matière, et innovations radicales, qui auraient enlevé tout le sel de ce come-back improbable. Et je dois dire que Darius Hinks s’en est plutôt bien sorti, tant sur le fond que sur la forme. On est bien en présence d’une aventure de Gotrek & Cie, avec notre petit rouquin teigneux, grincheux et pince sans rire s’embarquant dans un combat à haut risque contre un adversaire très balèze (sur le papier en tout cas), au grand désespoir de son partenaire attitré. Ce qui change ici est que Gotrek est devenu un mécréant militant, gardant sa dernière dent contre tout le panthéon divin (à commencer par Sigmar, qui s’en prend plein les tresses), alors que Maleneth est, sous ses abords de tueuse froide, une zélote du grand barbu, ce qui est à la fois surprenant (c’est le type qui la voyait comme une pseudo Assassin druchii qui parle) et intéressant. Notons également que Hinks ne se gêne pas pour glisser quelques références au passé proprement légendaire de son héros et donc à feu Warhammer Fantasy Battle, ce qui devrait faire plaisir autant qu’intriguer le lecteur historique de la saga. Bref, le contrat est bien rempli dans ce ‘Death on the Road to Svardheim’, qui tient son rang parmi les cohortes de nouvelles Gotrekesques publiées par la BL depuis des temps immémoriaux. Reste à savoir ce que cette dernière compte faire de son increvable héros sur le long terme, maintenant qu’il ne peut absolument plus mourir (ce serait un énorme fail), mais ceci est une autre histoire.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Il me faudrait plus que quelques lignes pour parler du personnage de Gotrek Gurnisson et de l’importance qu’il a eu pour la Black Library (et même pour ses prédécésseurs!) depuis plus de trente ans. Je me contenterai de dire que sa résurrection dans les Royaumes Mortels a d’abord surpris tout le monde, tant il semblait logique que cet habitant du Monde qui Fut ait enfin rencontré son destin lors de la destruction de ce dernier. ‘Death…’ constitue une bonne introduction/(re)découverte du Gotrek à la sauce AoS, ainsi que du sous-genre à part entière que sont les nouvelles de Gotrek & Cie (autrefois Felix, désormais Maleneth). Si vous vous intéressez à la production de la BL, il y a de grandes chances pour que votre route finisse par croiser celle de ce petit rouquin teigneux, alors pourquoi ne pas commencer ici et maintenant (en plus, c’est gratuit)?

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Champions, All – M. Collins [40K] :

Champions, AllINTRIGUE :

Alors que la Croisade d’Edioch approche gentiment de son cinquantenaire, nous faisons la connaissance de l’un des vertueux guerriers combattant en Son Nom depuis 47 ans : le Champion de l’Empereur Cenric. Déployé avec ses frères de bataille à la surface du monde de Daronch, récemment tombé aux mains des Orks, par le Maréchal Adelbert1, Cenric mène les forces impériales à l’assaut d’une cathédrale investie par les Xenos. Fort heureusement pour les infatigables, mais pas innombrables Space Marines, durement éprouvés par les dernières décennies de croisade, l’Ordre du Cœur Valeureux de la Chanoinesse Aurea est également de la partie, et son contingent de Soeurs Repentia se montre très utile dans la persécution des infâmes squatteurs de Sa Maison. Pendant que Cenrich peaufine ses stats, en utilisant le pouvoir divin d’identification des meneurs adverses que l’Empereur lui a accordé après son élévation, les Orks jouent un mauvais tour aux croisés, et font s’écrouler le champ de bataille dans les niveaux inférieurs des souterrains creusés en dessous de la cathédrale, séparant le Champ’ de ses bros.

Revenant à lui dans un obscur tunnel, Cenric résout de se laisser guider par la volonté de Big E (on suppose que son système de liaison radio n’était plus opérationnel), et part droit devant lui. Il ne lui faut pas longtemps avant de faire la connaissance d’une autre survivante, la Repentia Penance, qu’il aide à se défaire d’un trio de peaux vertes ayant du mal à considérer « non » comme une réponse #BalanceTonPork. Pour nos deux dévôts, c’est le début d’une ascension – littérale autant que spirituelle – vers le destin que leur a réservé l’Empereur, les signes identifiant Penance comme l’ange vengeur de sa dernière vision redoublant le zèle de son frère d’arme. Leur chemin a beau se révéler semé d’embûches, de Squigs difformes2 et de berger Ork (Bergork ? Bergeork ? Borkger ?) quasi-invulnérable, Cenric et Penance finissent par arriver – avec beaucoup de chance, mais les conseils de navigation GPS de l’Empereur sont infaillibles autant qu’impénétrables – dans le Strategium ennemi, où les attend se trouve le Big Boss Grashbakh…

Début spoiler…L’affrontement qui s’en suit permettra à Penance de se racheter une vertu, son sacrifice altruiste à la grenade permettant à Cenric de venir à bout du monstrueux Xenos, qui l’avait littéralement déchaîné au début du combat (un sacrilège impardonnable pour les Black Templars, qui ont la fâcheuse tendance à perdre toutes leurs affaires sinon). Ayant décapité la chaîne de commandement adverse, le Champion se met ensuite à pied d’oeuvre pour exterminer le reste des Orks, jusqu’à ce que fasse la jonction avec les autres survivants de l’assaut impérial. La victoire acquise, et apprenant la mort héroïque d’Adelbert au cours de la bataille, Cenric s’autoproclame Maréchal à la place du Maréchal, et jure de parachever l’oeuvre des morts victorieux en boutant les peaux vertes de Daronch une fois pour toutes… avant d’aller demander l’asile politique et la réintégration tactique au sein de la Croisade Helicos. L’homme sage connaît ses limites.Fin spoiler

1 : À ne pas confondre avec Aldebert un barde Franc de M2. Il n’aurait pas été convenable qu’un Black Templar ait peur du noir, après tout.
2 : Les bestioles de Collins ont des cous et des bras, ce qui n’est pas courant pour cette espèce.

AVIS :

Soumission assez classique de la part de Collins, ce Champions, All n’a pas grand-chose de plus à proposer au lecteur que le récit des prouesses martiales et de la foi inébranlable d’une paire de servants de l’Empereur, réunis par les aléas de la guerre et, peut-être, sa volonté omnipotente. Marc Collins fait le job sans faillir ni briller, et si ses héros font honneur à leurs entrées Codex respectives, ils s’avèrent aussi attachants et intéressants que les personnages créés à l’occasion des rapports de bataille du White Dwarf : il n’y a guère que leur nom qui les singularise des masses anonymes de leurs confrères (et sœurs), le reste de leur personnalité étant pour ainsi dire inexistante. Il va donc sans dire que votre degré d’appréciation de cette nouvelle risque de dépendre à un très haut point du nombre de travaux similaires que vous aurez lu avant celle-ci. Si ce nombre est supérieur à 1, je ne pourrai pas vous blâmer si vous choisissez de faire l’impasse sur les insipides exploits de frère Cenric.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une Space Marinade comme la BL en a écoulé des hectolitres, aussi qualitative que la moyenne des soumissions du genre (c’est à dire franchement passable) : c’est peut-être peu intéressant à lire, mais ça a le mérite d’initier à l’un des sous-genres rois (ou impériaux) de la maison. Vous voilà prévenus…

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Skull Throne – J. Ozga [WHR-AoS] :

Skull ThroneINTRIGUE :

Présence discrète dans le Royaume de Shyish, la narratrice de notre histoire, que nous appellerons Ninon faute de mieux (Ozga ne lui donnant pas de nom) évolue dans un univers cotonneux et incertain, où les choses ne semblent pas être ce qu’elles sont vraiment. Troublée par des rêves persistants dans lesquels elle se voit et se revoit être faite prisonnière, puis décapitée, par un trio de maraudeurs chaotiques adeptes de la prise de tête, Ninon ne sait plus très bien si elle est vivante ou morte, et consomme des quantités importantes de thé psychotrope pour tenter de chasser son mal-être existentiel. Cette routine macabre prend fin lorsque débarque un nouvel arrivant, se révélant être également un barbare assoiffé de sang, et tout aussi intéressé par le crâne de Ninon que les trois affreux précédemment évoqués. Son sinistre dessein, qu’il souhaitait mettre à exécution en chantant et dans la maison en ruines de notre héroïne – trop shootée pour prendre soin de son chez-elle – est toutefois contrarié par une traversée de plancher inopinée, permettant à Ninon d’échapper à une décollation sommaire. Prouvant qu’elle a bien gardé la tête sur les épaules, cette dernière ébouillante le rustre en lui déversant le contenu d’un chaudron d’eau bouillante sur le râble, avant de décider de partir en mission spéciale avec la tête du malotru sous le bras. Il s’avère en effet que le barbare était l’un des trois gredins l’ayant peut-être (it’s complicated) décapitée il y a quelque temps, et Ninon souhaite récupérer ce qui lui appartient de plein droit. On suppose à ce stade qu’elle considère un échange de caboches avec les envahisseurs de Shyish.

Après avoir un peu marché, et atteint une plage évoquant fortement le front de mer dunkerquois, Ninon finit par localiser les pillards, qui font bombance à côté du cadavre d’un léviathan à moitié dévoré par un banc d’anguilles1. Saisissant sa chance, elle se glisse jusqu’à la marmite dans laquelle les joyeux cannibales préparent leur rata, et y déverse ses réserves de racines de mhurghast. Le résultat ne se fait pas attendre, les maraudeurs sombrant dans ou succombant à la paralysie apportée par ce charmant condiment, ce qui permet à Ninon de chiller tranquillement dans le camp à son réveil. Identifiant son pseudo tueur parmi les cataleptiques à la hache monstrueuse qu’il porte à son côté, Ninon est frappée par l’inspiration : si elle veut récupérer la tête qu’on lui a prise, il lui faudra offrir un sacrifice digne de ce nom à la divinité compétente en la matière, cet entrôné de Khorne…

Début spoiler…Profitant du lag persistant de ses hôtes, qui ne peuvent que contempler leur fin arriver lorsqu’elle se présente avec la hache empruntée à leur champion pour leur offrir une coupe gratuite, Ninon passe sa journée à la plage à faire un château de crânes, n’oubliant pas au passage d’embrocher le meneur des maraudeurs avant que les effets débilitants de la racine de mhurghast ne s’estompent pour de bon. Ceci fait, elle propose un deal au Dieu du Sang, offrant le fruit de sa récolte en échange… de la tête de sa sœur jumelle. Ce qui explique pourquoi et comment Ninon a pu se voir se faire tuer en début de nouvelle. Seulement, Khorne est dur en affaires, et bien qu’il ne prononce pas un mot, la négociation finit par déboucher sur l’accord du Dieu pour que les sœurs se retrouvent dans l’au-delà, conduisant Ninon au suicide. Tout le monde n’a pas l’étoffe d’une Valkia.Fin spoiler

1 : Qui ne jouent aucun rôle dans l’intrigue à part ajouter un peu plus de glauque à une histoire qui n’en manquait pas. Un clin d’œil à A Cure for Wellness, peut-être ?

AVIS :

Soumission très atmosphérique de la part de Jake Ozga, ce Skull Throne joue habilement des caractéristiques uniques de Shyish pour dérouter le lecteur sur la condition de son héroïne, jusqu’à ce que sonne l’heure du dénouement, qui, s’il se révèle plus triste1 qu’horrifique, s’avère néanmoins réussi. Le choix de l’auteur de faire du Royaume de la Mort un endroit à la fois onirique, apaisé et sinistre, frappe l’imagination du lecteur, tout comme les zones d’ombre laissée à dessein par Ozga sur ce qu’il s’est vraiment passé lors de la rencontre entre blanche neige et les trois balourds. Ce manque orchestré de certitudes donne à Skull Throne un cachet particulier, très différent du standard habituel de la Black Library, mais aussi appréciable qu’intrigant. La première moitié de la nouvelle m’a ainsi faite penser à A Ghost Story, film dans lequel le personnage principal revient hanter (de manière plutôt passive) la maison qu’il habitait après son décès dans un accident de voiture. Ce film a reçu un accueil polarisé, et je pense que cette nouvelle pourra également dérouter le lecteur, mais pour ma part, je salue la prise de risque et l’exécution de Jake Ozga dans ce Skull Throne, qui se révèle au final bien moins sanglant que ce que son titre laissait envisager.

1 : C’est un peu la petite fille aux allumettes à la sauce Age of Sigmar.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Contrepoint idéal du terne et convenu ‘Champions, All’, ‘Skull Throne‘ démontre que la BL sait aussi innover quand elle le veut. En créant des franchises de niche, comme Warhammer Horror par exemple, mais également en collaborant avec des auteurs ayant le bon goût de s’écarter du BL-style, comme Jake Ozga. Cette nouvelle est inhabituellement atmosphérique/cryptique pour de la GW-Fiction, mais on ne va pas s’en plaindre car le résultat en vaut la peine. Sans doute l’inclusion la moins évidente à un recueil d’initiation, mais également la plus intéressante à mes yeux.

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The Strong Among Us – S. Lyons [40K] :

INTRIGUE :

Tombé aux mains crochues et malpropres du Chaos, un monde forge spécialisé dans la production de matériel militaire pour la Garde Impériale est désormais assiégé par le Death Korps de Krieg, dont la réputation de spécialiste de ce genre d’affrontement n’est plus à faire. Piégé contre sa volonté du mauvais côté des murailles et de l’histoire, l’ouvrier non-spécialisé Jarrah tente tant bien que mal de survivre à cette épreuve, dissimulant sa loyauté en l’Empereur derrière une soumission de façade et un mutisme de circonstance. Assigné à l’opération d’un canon Trembleterre, Jarrah n’est pas vraiment heureux de contribuer à l’effort de guerre hérétique, mais la fin horrible rencontrée par les activistes impériaux dénoncés aux cultistes par leurs camarades ne l’incite pas vraiment à faire preuve d’héroïsme. Prudence étant mère de sûreté, il va même jusqu’à se scarifier une étoile à huit branches sur la joue pour convaincre ses nouveaux patrons de son enthousiasme pour la Chaose.

Fidèles à leur éthique professionnelle aussi impitoyable qu’efficace, les Krieg avancent toutefois de façon rapide à travers les lignes ennemies, incitant les hérétiques à envoyer des hordes d’ouvriers aussi peu armés que motivés en première ligne, afin d’enrayer la progression de la Garde. C’est ainsi que Jarrah se trouve pris dans un combat de hangar (une sous-spécialité du combat urbain) sans pitié, au cours duquel il frôle plusieurs fois la mort, des mains des DKK, de ses gardes chiourmes et suite à l’effondrement du bâtiment, et réalise surtout que l’Astra Militarum n’est pas venue ici pour rigoler, ou chercher à séparer le bon grain de l’ivraie. Les soldats de Krieg tiennent en effet autant de la machine à tuer sans état d’âme que le cultiste moyen, et notre héros doit même achever un Garde blessé après que ce dernier ait tenté de le tuer à la simple vue de son apparence débraillée1.

Début spoiler…Notre histoire se termine d’ailleurs par une reconversion idéologique totale et définitive de la part de Jarrah, qui épouse pleinement la cause chaotique et se met à haïr farouchement ceux qu’il considérait auparavant comme ses futurs sauveurs. Syndrome de Stockholm ou calcul rationnel sur ses chances de convaincre un Commissaire de Krieg que l’étoile tatouée sur son visage n’était qu’une habile couverture ? En tout cas, on ne prendra plus Jarrah à chanter les louanges de l’Empereur : en cette époque troublée, seuls les plus forts ont une chance de s’en sortir…Fin spoiler

1 : À la décharge du DKK, Jarrah s’est contenté de le regarder avec des yeux de merlan frit et un fusil laser pointé dans sa direction, ce qui n’est pas une attitude très constructive dans une zone de guerre.

AVIS :

Steve Lyons poursuit sa chronique en clair obscur des états de service et de l’idéologie particulière du Death Korps de Krieg, cette fois-ci en se plaçant du point de vue d’un de ses adversaires. Tout l’intérêt de cette nouvelle, plus psychologique que militaire, réside dans l’évolution que connaît le personnage de Jarrah, humble et insignifiant civil impérial contraint de naviguer en eaux troubles et à vue pour espérer survivre à un conflit qui le dépasse sans trahir (ou le moins possible) ses convictions, même dans des circonstances très difficiles. Grimdark oblige, on se doute bien que les louvoiements idéologiques du protagoniste risquent de mal finir pour lui, quelles que soient les intentions qu’il nourrit en son for intérieur, mais Lyons réussit à garder du suspens sur la destinée de son héros jusqu’à la fin de son récit, ce qui en fait une lecture intéressante à plus d’un titre, même si la mise en scène des prouesses martiales du DKK n’en fait pas vraiment partie (ce qui doit être précisé, au vu de la couverture).

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une nouvelle de Gardes Impériaux où on ne parle finalement que peu de Gardes Impériaux, voilà un choix intéressant pour un recueil Black Library Celebration. C’est d’autant plus surprenant de la part de la BL que Steve Lyons et son Death Korps de Krieg ne sont pas des pièces majeures de la stratégie éditoriale de la maison d’édition de Nottingham (même si Lyons a écrit d’autres nouvelles et roman sur les Gardes les plus entêtés de l’Imperium) : les places étant chères, j’aurais pensé que d’autres régiments/factions plus populaires seraient mis en avant dans cette anthologie. Au final, je suis plutôt satisfait de cette inclusion car elle montre que même des nouvelles de guerre (le coeur de publication de la BL) peuvent sortir des sentiers battus et proposer autre chose que des fusillades et des démembrements à tout va.

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Et voilà qui termine cette revue des recueils de l’édition 2021 de la Black Library Celebration. La conclusion étant l’endroit idéal pour émettre un jugement global, je dois souligner avant de vous laisser que le cru 2020 m’a paru un peu meilleur que celui-ci, notamment en termes de variété des franchises mises en avant. Ceci étant dit, il reste compliqué de se montrer critique d’un recueil proposé gratuitement (et en format numérique cette année), et je recommande donc sans réserve à tous les hobbyistes qui hésitent à passer le pas de la BL de se procurer cette ou ces anthologie(s), afin de se rendre compte par eux-mêmes de leur appétence pour ce type de littérature. Je ne sais pas si l’on peut dire qu’il y a forcément un genre ou une franchise de la GW-Fiction qui vous correspond, mais cette dernière est désormais plus riche qu’elle ne l’a jamais été. Le moment est donc idéal pour tenter sa chance et peut-être se découvrir une nouvelle passion (100% confinement compatible en plus)!

BLACK LIBRARY CELEBRATION WEEK 2021 [Recueil]

Bonjour et bienvenue dans cette revue de l’une des anthologies de nouvelles publiées par la Black Library en cette fin Février 2021 (la période est chargée1), que j’appellerai ici arbitrairement la Black Library Celebration Week 2021. Par rapport à ses concurrents, ce recueil présente l’avantage de ne contenir que des nouvelles inédites, et l’inconvénient de ne pas être donné (13,96€ les cinq nouvelles, ça pique toujours un peu le portefeuille… et encore, la maison offre une ristourne de 20% pour prix de groupe). On peut déjà évacuer la question du jeu et de la chandelle en répondant par un franc et massif « NON » à cette dernière : il sera beaucoup plus rentable d’attendre la republication des présentes histoires dans de futures anthologies, voire leur inclusion dans de futurs recueils gratuits. Heureusement qu’il y a des bonnes âmes aux poches larges qui se dévouent pour désosser les soumissions de la BL tout juste sorties de la presse. Heureusement oui.

Avant de nous jeter dans la mêlée, jetons un œil au programme des réjouissances, qui s’annonce très grimdark cette année, quatre nouvelles sur les cinq proposées se déroulant dans les ténèbres d’un lointain futur. On retrouve cependant une variété d’approches et de sous-franchise parmi ce court florilège, puisque Ciaphas Cain, la Blackstone Fortress et les Sœurs de Bataille de Danie Ware (un genre à lui seul) sont de la partie. Ainsi que Graham McNeill, qui fait ici ses grands retours dans le « 40K Vanille2 ». Le tableau est complété par deux nouveaux venus : Gary Kloster à l’écriture et Maleneth (la nouvelle +1 de Gotrek) à la dague de jet, qui auront la lourde tâche de défendre les couleurs de la high fantasy d’Age of Sigmar. Il n’y a plus qu’à.

1 : Jugez plutôt : en plus du quatrième recueil de Warhammer Horror, ‘The Harrowed Path’, et du présent ouvrage (virtuel), on a également droit aux versions anglaise, française et allemande du recueil gratuit ‘Black Library Celebration : 2021’. In short, lots of shorts.
2 : S’il y a de l’Ultramarines dans sa nouvelle, on corrigera en « Thon ».

Black Library Celebration Week 2021

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The Labyrinth of Lost Souls – G. McNeill [40K] :

The Labyrinth of Lost SoulsINTRIGUE :

Un inconnu, peut-être illustre mais certainement pas lacustre, se réveille en sursaut d’un coma pas vraiment réparateur. Notre homme se retrouve en effet nu comme un ver, suturé comme la créature de Frankenstein, en proie à un féroce mal-être, et sans le moindre souvenir de qui il est et de comment il s’est retrouvé là. Seule consolation pour Jean Dupont, malgré l’impression tenace et désagréable que son pacemaker est en train de lui fondre dans la poitrine, il se découvre doté d’une force prodigieuse, ce qui lui sera sans aucun doute utile pour se tirer de ce mauvais pas…

Début spoiler 1…Je passe en mode spoiler ici pour épargner le suspense de cette soumission aux lecteurs de grande section de maternelle de cette chronique. Qui ne devraient pas être là, ni lire ce genre de contenu, mais d’une certaine manière, c’est grandement impressionnant. En tout cas, on ne m’accusera pas cette fois-ci de ruiner le dénouement d’une nouvelle, même si l’illustration de cette dernière devrait vous donne un énaurme indice sur qui est notre protagoniste. Deux si vous vous attachez également au fond de l’image et pas seulement à la Passion de Jean-Michel Blanquer au premier plan. Ajoutez à cela le nom de l’auteur et la date de sortie de cette nouvelle, et vous devriez être en mesure d’identifier le primate confus qui est en train de cavaler vers le « cœur du Labyrinthe1 », en fracassant tout ce qui a le malheur de se mettre sur sa route et/ou ne pas convenir à ses goûts esthétiques. Allez, je vous laisse une dernière chance de percer ce mystère par vous-même, en gentilhomme.e (je suis inclusif aussi) que je suis.

Début spoiler 2…Toujours là ? Bon, eh bien tranchons dans le vif de l’intrigue que Graham McNeill nous a amoureusement concocté et révélons sans plus tarder que l’énergumène qui vient juste de suspendre un Techmarine par les bretelles dans son propre atelier, parce qu’il avait une vague ressemblance avec l’homme taureau de la légende, n’est autre qu’Uriel Ventris. Le Capitaine de la 4ème Compagnie des Ultramarines, récemment primarisé (‘The Death of Uriel Ventris’), n’a donc pas passé le Rubicon avec la grâce et la fortitude des autre personnages nommés upgradés avant lui. D’ailleurs il a failli se noyer, ce con. Mais ce n’est pas vraiment de sa faute, notez. Comme l’Apothicaire Selenus le révèle à son supérieur (qui lui a fait une augmétique au beurre noir dans sa fuite éperdue) et au lecteur après que l’un comme l’autre aient digéré ce rebondissement digne de Hilfred Atchcock, c’est la fournaise bélisarienne implantée dans le thorax du néo-primarisé qui s’est mise en surchauffe et a provoqué son hyperactivité amnésique. Heureusement pour tout le monde, Ventris a retrouvé ses esprits avant de commettre l’irréparable (péter la vitre du réacteur plasmique du croiseur de bataille Vae Victus à coup de poing…because of reasons), et que l’irréparable soit commis sur sa précieuse personne (Petronius Nero était sur le point de lui donner le coup de grâce après avoir consulté la VAR pendant de longues minutes). Il aura fallu qu’on lui agite sous le nez le slip de Guilliman la bannière de sa Compagnie pour qu’il revienne à ses sens. La suite sera sans doute couverte dans ‘The Swords of Calth’, publié quelques jours après cette nouvelle. Trust me, I’m an expert.Fin spoiler

1 : Car la seule chose dont notre protagoniste se rappelle à ce stade, mis à part un goût immodéré pour la violence, est la légende de Thésée et du Minotaure, auquel il s’identifie totalement en sa qualité de gros bœuf ruminant de sombres pensées.

AVIS :

Graham McNeill joue au plus fin dans cette nouvelle à « « suspens » » (première fois que je mets des guillemets à mes guillemets), mais ne semble pas prendre au sérieux sa tentative, peu aidé il faut le dire par les choix iconographiques de la Black Library. Bref, la « « révélation » » que l’auteur prend temps de temps (à défaut de soin) à nous amener est tellement éculée que l’on pourrait s’en servir pour égoutter les pâtes. Dès l’instant où le caractère Primaris du protagoniste est fuité (d’une façon tellement subtile que c’est à peine si McNeill ne termine pas sa phrase avec un ;)), relativement tôt dans l’histoire, 99,9% du lectorat habituel de la BL aura identifié le Space Marine en goguette et en chaussette/claquette victime d’un very bad trip. Mais il faudra tout de même attendre les dernières pages pour que l’auteur ne nous donne le fin mot de l’histoire, de façon tellement ampoulée que l’on pourrait s’en servir pour égoutter les pâtes aussi. Vous n’avez jamais égoutté les pâtes avec une ampoule ? Dommage pour vous. Bref, le monde se divisera ici en deux catégories : ceux qui seront ravis d’avoir des nouvelles de Mister UV (comme le fait qu’il déteste son nom, ce qui corrobore une hypothèse longtemps partagée par les fans), et ceux qui trouveront que McNeill les prend un peu trop pour des neuneus. Si vous voulez une bonne histoire de 40K exploitant le trope du guerrier amnésique se réveillant en territoire hostile, je vous conseille ‘Hunted’ de John French, et surtout ‘Torment’ d’Anthony Reynolds, largement supérieur au gruau littéraire, à la limite du prétentieux (pourquoi ce titre ?) et bleuâtre que nous sert Graham McNeill.

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Warsphere – D. Hinks [BSF] :

WarsphereINTRIGUE :

L’Archonte Jean-Michel1 a emmené sa côterie de mauvais garçons et de femmes fatales (dont l’empoisonneuse Zhain) dans un rade paumé : une sphère de guerre Kroot s’étant écrasée à la surface d’une surface. Si le Drukhari s’est donné la peine de quitter son triplex de Commoragh, c’est parce que ses recherches lui ont permis d’identifier dans ce tas de rouille une information de tout premier ordre : les coordonnées d’une Enclume de Vaul, ou Forteresse Noire pour les mon-keigh. S’il parvient à faire l’occasion de cette relique millénaire, il pense pouvoir ravir à Asdrubael Vect la mainmise sur la cité pirate, ce qui est cool. Prévoyant autant qu’instruit, Jean-Michel a renforcé son expédition en recrutant des traqueurs Kroots, jugeant avec sagesse que l’appui de ces oiseaux de mauvais augure lui serait utile pour négocier l’intérieur de la sphère de guerre et mettre le gantelet éclateur sur les érudits qui détiennent le tuyau qu’il convoite.

Notre histoire commence par un petit massacre des sentinelles qui gardent la sphère contre les visiteurs importuns, les Kroots se faisant un plaisir et un devoir d’honorer leur double réputation de tueurs sans pitié et de gourmets sanguinolents en abattant puis dévorant les gardes. Bien entendu, ceci offense le raffinement exquis de Jean-Mich’ Mich’ et de Zhain, qui meublent ce buffet froid en échangeant des idées sur la meilleure façon de trahir et de torturer un Kroot, une fois que la mission sera accomplie. Souhaitant tout de même montrer qu’il est aux commandes de l’expédition, Jean-Michel va interrompre le casse-Kroot en appuyant là où ça fait mal : la fierté mal-placée des autruches de l’espace envers l(‘absence d)e goût artistique de leurs anciens. Si le chef de la troupe, l’impavide Grekh, ne tombe pas dans le panneau, son sous-fifre Khebab ne montre pas autant de self-control et tente de molester Jean-Mi après que celui-ci ait mis un coup de pied dans une statue aussi sainte que moche. Résultat des courses : Khebab se fait flinguer par son employeur, ce qui rend Grekh chafouin. Mais le rapport de force est trop déséquilibré pour que le placide palmipède ne fasse autre chose que jeter un regard froid à l’Archonte. Poursuivons.

Grâce aux talents de traqueur de Grekh et à l’étonnante technologie Kroot, qui semble consister en des petits tas de mégots, prospectus, vieux pneus et restes de junk food placés à des endroits stratégiques, nos héros parviennent à se rapprocher de la salle où sont sensés attendre les érudits, sans trop de casse. Ceci dit, l’abondance de piejakon que les dits érudits ont placé autour de leur planque rend le périple franchement aventureux, et lorsque les derniers survivants arrivent devant la salle des bosses des maths de fin (après une ultime rencontre avec des goons peu aimables, ici des goélands métalliques), il est clair que sans les bons services de Grekh, ce tombereau d’ordures deviendra leur tombeau…

Début spoiler…Ce qui rend la défection du Kroot problématique pour Jean-Michel, Zhain et Cie. Rusé comme pie, l’homme poulet a en effet fait charger son groupe dans une salle vide, et a profité de la confusion pour prendre son envol. Un départ en traître peu surprenant devant le peu de soin que l’Archonte a pris pour dissimuler ses intentions xenocides envers son sherpa jusqu’ici, mais qui pose toutefois la question du « pourquoi maintenant » ? C’est la vision d’une vieille video de surveillance de la sphère de guerre, restaurée grâce à la compétence native des Drukhari en hacking, qui permet d’y répondre. Contrairement à ce que Jean-Michel et ses caballeros pensaient, les sentinelles bestiales massacrées et boulotées par les Kroots ne gardaient pas les érudits, elles étaient les érudits2. Epiphanie finale pour nos héros : pendant qu’ils taillaient la bavette à l’arrière-plan, Grekh récupérait la localisation de la Forteresse Noire en… taillant la bavette aussi. Mais différemment. Coincés dans une situation qu’ils ne maîtrisent pas et en danger de mort, les Eldars Noirs font ce qu’ils savent faire de mieux : s’entretuer. C’est donc une fin de partie pour Jean-Michel, poignardé dans le dos par Zhain, qui ne risque cependant pas de faire de vieux os elle non plus. Moralité : ce n’est pas parce que ton grand-père était un dodo que tu ne peux pas pigeonner ceux qui te prennent pour un dindon.Fin spoiler

1 : L’histoire étant racontée depuis son point de vue et son statut social étant visiblement trop élevé pour qu’il daigne nous donner son petit nom, j’applique ici la loi de Lucy en l’affublant d’un sobriquet venant de la pop culture.
2 : Les Drukari s’en rendent compte en voyant l’un des gros lézards susnommés faire ses lacets tout seul. Si ça c’est pas une preuve d’intellect supérieur, je ne sais pas ce qu’il vous faut.
AVIS :

Darius Hinks n’en finit pas d’achever son cycle Blackstone Fortress, avec une nouvelle retraçant l’origin story de l’un des protagonistes du jeu et des romans/nouvelles associés à cette franchise : le traqueur Kroot Grekh. Si vous voulez savoir comment le gallinacé le plus badass du Segmentum est venu traîner ses quilles dans la Forteresse Noire, n’allez pas plus loin.

Pour les autres types de lecteurs, ce ‘Warsphere’ est également intéressant du fait du twist final assez bien pensé et exécuté que Hinks a incorporé à son intrigue. Cela ajoute une petite valeur ajoutée à une nouvelle autrement très classique dans le genre « exploration d’une ruine mystérieuse contenant un grand trésor mais recelant de dangers », dans lequel on retrouve 90% des vieilles histoires de Necrons… ainsi que 99% des histoires siglées Blackstone Fortress. Même à l’extérieur, on n’est donc pas dépaysé.

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The Perfect Assassin – G. Kloster [AoS] :

The Perfect AssassinINTRIGUE :

Coincée dans le bourg décati de Losten, en Ulgu, Maleneth Witchblade tourne en rond comme une lionne en cage pendant que Gotrek s’amuse à lentement drainer de sa bière une taverne qui croyait malin de proposer une offre « boisson à volonté » à celui qui battrait le champion local (un Ogor) au bras de fer. Les Nains ayant la constitution robuste et la rancune tenace, il ne fait aucun doute que le Tueur réformé arrivera à son objectif, une pinte à la fois, mais à son rythme de sénateur alcoolique, il s’en faudra d’encore quelques jours avant que le duo ne puisse quitter Losten. Aussi, lorsqu’une aristocrate du nom de Talm et se revendiquant comme l’une des notables de la ville se présente à elle et met un contrat sur la tête d’un mystérieux Seigneur des Ombres, accusé d’avoir assassiné deux aristocrates en autant de jours nuits pénombres (dur à dire en Ulgu), la cultiste de Khaine repentie se pique au jeu et se met à suivre son employeuse à bonne distance, laissant Gotrek chanter Les Lacs du Kone Mharag seul dans son bouge.

Plus intéressée par le challenge de se frotter à un collègue assassin semble-t-il compétent que par l’accomplissement scrupuleux de sa mission de protection de Talm, Maleneth laisse cette dernière et ses gardes se faire écharper par un assaillant mystérieux, semblant se matérialiser depuis les ombres, en plus d’être protégé des coups par une chappe d’obscurité. Elle note cependant que le reître porte autour du coup un pendentif orné d’une pierre pourpre, assez semblable à celui, vert, qu’arborait feu Talm au moment de sa mort. Comme elle ne tarde pas à l’apprendre en rendant une petite visite à l’Office de Tourisme local (l’Aethaneaum1), ces colliers sont l’apanage des sept grandes familles de Losten, et la lignée des Verska était celle qui avait choisie le magenta comme couleur. Les Verska étaient des maîtres assassins réputés, et de ce fait, les véritables maîtres de la cité, jusqu’à ce que leur patriarche, Novim, pousse le bouchon et le stylet un peu trop loin, et se mette à massacrer sans discrimination ennemis, critiques et mécontents. À sa mort, son héritier se révéla ne pas être aussi doué en ninjutsu que son prédécesseur, et se fit donc neutraliser par ses pairs de manière préemptive. Ce qui aurait dû mettre fin à la lignée des Verska. Mais rien n’est aussi simple qu’il n’y paraît.

Ainsi rencardée, Maleneth décide logiquement de se rendre dans l’ancien manoir des Verska, où elle trouve facilement le dernier rejeton de la famille, un avorton nommé Arvis, fort occupé à essayer de récupérer sa cape que le sang de sa dernière victime a malencontreusement taché. Si Arvis est un bretteur assez quelconque, la breloque qu’il a piquée dans le mausolée de son grand-père, l’illustre autant qu’obscur Novim, compense largement son jeu de jambes médiocre et sa synchronisation déficiente. Capable de se matérialiser depuis les ombres, qui parent à sa place les coups assenés par l’Aelf, le dernier Seigneur des Ombres donne du fil à retordre à Witchblade, jusqu’à ce qu’elle identifie le point faible de son adversaire : une aversion pour les liquides. Un jet de cire brûlante à la figure plus tard, voilà l’apprenti surineur en PLS sur le sol, paralysé par le poison dont Maleneth a enduit sa dague et délesté de son précieux colifichet. Malheureusement pour notre héroïne, la relique ne peut-être palpée que par un membre de la lignée des Verska, et lui glisse entre les doigts comme la savonnette que Gotrek n’a jamais utilisé depuis qu’il a prêté le serment du Tueur. Dommage. Elle rend toutefois son calme à Losten en exécutant sans état d’âmes le jouvenceau vengeur, dont la vendetta était motivée par le meurtre de ses parents par les autres familles nobles de la ville, comme vu plus haut. Ceci fait, elle peut retourner à l’auberge que le Duardin n’a toujours pas fini de tarir, et sonner la fin de la beuverie en mettant le feu au local comme elle l’avait pour le manoir des Verska. C’est un Gotrek bougon mais philosophe qui finit par émerger du brasier, un dernier tonneau de bière sous le bras pour solde de toute ardoise. Le déicide est une activité déshydratante, c’est bien connu.

1 : Où Gotrek était venu chercher quelques jours plus tôt des informations sur la meilleure façon de tuer un dieu. Sans grand succès d’ailleurs (une autre raison pour se saouler).

AVIS :

Depuis sa renaissance dans les Royaumes Mortels, Gotrek Gurnisson est passé sous la plume de nombre d’auteurs, perpétuant une tradition datant du Monde Qui Fut, où le petit rouquin a été mis en scène par un aéropage de collaborateurs de la Black Library, depuis King, Long et Reynolds jusqu’à Brunner, Guymer ou Goulding, pour n’en citer que six. Gary Kloster s’attaque avec ce ‘The Perfect Assassin2à un sous-sous-genre particulier : la nouvelle de Gotrek & Felix sans Gotrek (ni Felix, pour des raisons évidentes), qui permet de développer un peu plus le compagnon du nabot irascible sans que ce dernier ne vienne résoudre l’intrigue à grands coups de hache. Tout le monde n’a pas réussi à mener à bien ce genre de projet de façon convaincante (je pense en particulier à ‘The Oberwald Ripper’), mais Kloster s’en sort de manière honorable. Cette petite virée en tête à tête avec Maleneth Witchblade permet ainsi d’en apprendre plus sur le passif et les motivations de l’Aelf au couteau, tout en insistant sur ses points communs et ses différences par rapport à Gotrek. Ainsi, si les deux comparses peuvent être qualifiés de tueurs chevronnés, là où le Duardin est honorable (à sa manière) et frustre, l’agente de l’Ordre d’Azyr est sans pitié (comme le montre son exécution sans complexe d’un antagoniste pas foncièrement mauvais et qui ne lui avait rien fait) et raffinée. La dynamique intéressante que l’auteur souligne entre ces protagonistes mal assortis mais complémentaires fonctionne bien, et donne envie de voir ce que Kloster pourrait faire du duo le plus iconique d’Age of Sigmar si l’occasion se représente.

1 : Un homonyme presque parfait d’une autre nouvelle de la Black Library, ‘Perfect Assassin’ de Nick Kyme. Un hommage à l’éditeur senior de la part du nouveau-venu Kloster, ou une simple coïncidence ?

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The Sisters of Death – D. Ware [40K] :

The Sisters of DeathINTRIGUE :

Augusta Santorus et ses Sistas de l’Ordre de la Rose Sanglante poursuivent leur mission de looting galactique1 en se rendant sur le monde cimetière de Letum, où le vaisseau Aeris s’est écrasé il y a quelques mois, victime de la tempête Warp qui isole la planète du reste de l’Imperium depuis une éternité. Si les dévotes tiennent tant à localiser l’épave, c’est que celle-ci contient, devinez quoi, une relique inestimable. Sans doute une liste de courses manuscrite de Sebastian Thor, ou une fan-fiction het A/B/O écrite par Sainte Mina, en tout cas un texte des plus précieux que Santorus doit absolument récupérer.

Cette œuvre littéralement littéraire est contrariée par l’étrange accueil que les Roses Sanglantes reçoivent de la part de l’Ordre mineur établit sur Letum, le Sépulcre Brisé a.k.a. les Sœurs de la Mort. Spécialisée dans l’entretien de pierres tombales, la conservation de grimoires anciens et la crémation par paratonnerre interposée, cette congrégation pacifiste est dirigée par une vieille Chanoinesse qui semble dissimuler un secret. Appelez ça de l’intuition féminine et/ou du commérage, mais toutes les Sororitas de Santorus se plaignent d’un mauvais pressentiment à propos de Letum et/ou de leurs hôtes pendant la première partie de la nouvelle, évidemment avec raison comme on le verra plus tard. Après une première tentative d’aller enquêter discrétos sur le site du crash, contrariée par l’intervention polie mais ferme d’un des Frateris au service des Sœurs de la Mort, les Roses sortent leurs épines et obtiennent la permission officielle de leur hôte de se rendre à l’endroit où l’auspex indique l’épave de l’Aeris.

Sur place, elles se rendent compte que le vaisseau a été méthodiquement désossé par les Frateris, sans que ces derniers jugent bon d’en informer leurs supérieures (qui ne savaient même pas que l’Aeris s’était écrasé à proximité de leur couvent2). « Pourquoi donc ? » me demanderez-vous. Eh bien cette question elle est vite mais confusément répondue par Danie Ware, et la solution se trouve être les Necrons. Qui ont réussi à se faire passer pour l’Empereur auprès du Frateris de garde en lui envoyant des visions, qui l’ont poussé à entasser du matériel informatique autour d’une gemme verte géante protégée par des Canopteks et des Scarabées, et à mettre triple dose de bêta-bloquants dans la camomille de toutes les Sœurs qui fouinaient un peu trop près de la crypte de ses protégés. Sans que ces dernières, qui ont fait également vœu d’aveuglement (à ne pas confondre avec la cécité) et de naïveté apparemment, ne s’en rendent compte. C’était vraiment pas de chance, ces arrêts cardiaques frappant des individus de moins de trente ans en parfaite condition physique, alors.

Après avoir fait le coup de feu réglementaire contre les Xenos, avec des résultats aussi incertains qu’indolores (Melia se fait un peu griffer par un Maraudeur Canoptek taquin), Santorus et ses sous-fifres retournent voir la Chanoinesse et lui dévoilent le pot aux Roses (Sanglantes). La vioque est colère de s’être faite embobiner par les Frateris, mais plutôt que de les condamner à mort, comme ils le désiraient – en accord avec leur tendance morbide développée – la gentille mémé les enferme à la cave sans goûter, jusqu’à ce qu’ils réalisent la méchanceté de leurs actions. Ce qui est soit la preuve d’une tolérance exceptionnelle, soit d’un sadisme exacerbé. La nouvelle se termine avec le choix de Santorus, qui n’a toujours pas trouver le saint post-it, de rester sur Lentum quelques temps encore, afin d’aider ses consœurs dans le besoin à mettre de l’ordre de leur ossuaire. Sisters Are Doin’ It For Themselves, comme on dit.

1 : Voir ‘Da Big Mouf’.
2 : On connaissait le vœu de silence, celui de surdité est moins connu.

AVIS :

Danie Ware change son trois fois béni bolter lourd d’épaule avec ‘The Sisters of Death’, qui s’éloigne heureusement de son genre de prédilection (le match de catch à la sauce 40K) pour donner dans le thriller horrifique. Si le dénouement de cette nouvelle ne brille pas par sa clarté et sa mise en scène, son absence de péripéties cartoonesques constitue une nette amélioration par rapport aux précédentes aventures d’Augusta Santorus et ses chipies de choc. Je n’irai pas jusqu’à dire que ‘The Sisters of Death’ mérite le détour et la lecture, car l’ensemble reste largement en deçà de la qualité minimum que je demande d’une nouvelle de la Black Library pour la considérer comme qualitative. À trop multiplier les pistes et les ébauches d’idées peu/pas développées par la suite, Danie Ware rend en effet une copie brouillonne et confuse, alors que le début de son propos était assez prometteur. Cependant, c’est la preuve irréfutable que Ware est capable de varier son approche – ce qui est toujours un point positif de la part d’un auteur – et une raison suffisante pour ne pas l’enfermer à jamais dans la catégorie des contributeurs parodiques (à dessein ou non) de la BL. J’attends donc sa prochaine soumission avec une curiosité non feinte et sans arrière pensée, ce que je n’aurais pas pensé écrire un jour.

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The Bigger They Are – S. Mitchell [40K] :

The Bigger They AreINTRIGUE :

Cain, Jurgen et le reste du 597ème régiment de Valhalla ont été envoyé sécuriser le monde de Traego après que la Gouverneur locale, Kerin, ait été visée par une insurrection montée par un de ses cousins. Les traîtres n’étant ni particulièrement bien préparés ou équipés, l’affaire est vite expédiée, ce qui laisse tout le temps à notre héros d’assister à quelques matchs du sport star de Traego : le nullball. Contrairement à ce que le nom peut inspirer à un lecteur francophone, le jeu n’a pas été nommé ainsi en raison de son manque d’intérêt1, mais à cause de l’utilisation de générateur d’antigravité sur le terrain, faisant du nullball une sorte de Quidditch SF. Content de pouvoir siroter son amasec dans un environnement calme et intact, ce qui le change agréablement de son ordinaire, Cain est cependant obligé de quitter le stade pour se rendre au QG régimentaire après que le Major Broklaw ait détecté un OVNI de belle taille venant de pénétrer l’atmosphère de la planète. Sans plus d’indication sur la nature de cet astéroïde, qui devrait s’abimer en pleine mer à proximité d’un archipel peu peuplé, les zélés Gardes Impériaux décident logiquement qu’il est urgent d’attendre. Grave erreur, comme vous vous en doutez.

Car en effet, un appel à l’aide provenant de l’archipel en question arrive au palais gouverneurial quelques jours plus tard. Par un malheureux concours de circonstance, Cain était sur place au moment où la nouvelle est reçue par l’impulsive et responsable Kerin, qui décide tout de go d’aller enquêter en personne avec sa navette personnelle (qu’elle conduit elle-même, dans la grande tradition des souverains taxis remontant à Elisabeth II de Terra, à la fin de M2). Galant homme et soucieux de préserver sa réputation de héros intrépide, Cain accompagne la Gouverneur et nos compères ne tardent pas à découvrir que les Kerguelen de Traego ont été totalement dévasté par une force hostile, inconnue et de fort belle taille. Une triangulation couplée à une consultation des archives militaires du système plus tard, le facteur X est identifié : il s’agit d’un bio-titan tyranide, rescapé de l’invasion infructueuse initiée par la flotte ruche Behemoth il y a deux siècles, et qui progresse maintenant en brasse coulée vers la capitale planétaire pour s’offrir un gueuleton bien mérité.

La suite de la nouvelle ne surprendra pas le moins du monde les amateurs de films de Kaijū, le Xenos en goguette faisant un Godzilla convaincant, que les Valhallans et les Forces de Défense de Planétaire tentent tant bien que mal de stopper pour permettre aux civils de s’échapper. Aucune arme impériale n’étant assez puissante pour blesser sérieusement le golgoth, la lutte semble bien mal engagée pour les défenseurs, mais c’est évidemment sans compter sans l’éclair de génie de Cain (bien aidé par les problèmes de cafetière de Jurgen), qui reprend à son compte l’idée de Kerin de piéger la bestiole dans le stade de nullball grâce à l’apesanteur artificielle du lieu. Là où l’inflexible Gouverneur proposait de déverser le feu et la fureur plasmique sur le bio-titan, rasant au passage la capitale et tous ses habitants de la carte, Cain suggère de pousser les accus jusqu’à 11, et de faire flotter le gros criquet à quelques centaines de mètres du sol avant de lui nuker la goule. Quel puissant génie alors. Ce plan génial se déroule sans accroc, mettant un terme à la seconde invasion tyranide de Traego ainsi qu’à la saison régulière de nullball. Il faut bien qu’il y ait des victimes collatérales.

1 : Il se se serait appelé « billard anglais » sinon.

AVIS :

Est-il encore besoin de présenter le concept des nouvelles de Ciaphas Cain ici ? Non, sans doute. Nous évoluons ici en terre connue avec une histoire venant s’intégrer dans l’arc principal de la série (Cain + le 597ème Valhallan), et où chacun tient son rôle avec application. À Cain le rôle du héros-faussement-brave-qui-ne-pense-qu-à-sauver-sa-peau, à Jurgen celui de l’idiot-puant-autant-qu-utile, à Kasteen et Broklaw celui des gradés-efficaces-mais-incapables-de-gérer-le-problème-sans-l-intervention-géniale-de-Cain. Seules véritables nouveautés dans ce schéma narratif rôdé et huilé, les « personnages » de Kerin et du bio-titan n’apportent à mon goût que peu de chose à l’intrigue, et le tout manque du petit grain de folie ou de l’inspiration bien sentie qui distingue les excellentes histoires de Ciaphas Cain des simplement correctes. ‘The Bigger They Are’ se place plutôt dans la seconde catégorie en ce qui me concerne, et est donc à réserver aux grands fans de Jurgen plutôt qu’aux lecteurs curieux de découvrir la légende mitchellienne, qui peuvent trouver plus mieux et plus drôle ailleurs.

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Et voilà qui conclut cette semaine de célébration de la Black Library à la sauce 2021. On peut dire avec le recul que ces 12 derniers moins ont été une belle mise en situation de ce que la vie sur une planète (pas trop autoritaire) de l’Imperium pouvait être, et j’espère sincèrement que l’édition de 2022 (comment ça, je me projette?) se fera sous de meilleurs auspices. Quoi qu’il en soit, ces cinq nouvelles inédites se sont révélées plutôt sympathiques, ce qui est toujours ça de pris, surtout au prix auquel on les paie. La comparaison avec 2020 est d’ailleurs assez douloureuse, financièrement parlant, puisque pour le même tarif, on avait eu droit à une nouvelle de plus, et à un sommaire à la fois plus équilibré (AoS*3, 40K*2, HH*1) et plus divers (avec une nouvelle Warhammer Horror). Mention spéciale tout de même à Gary Kloster, qui a réussi à m’intéresser un minimum au personnage de Maleneth Witchblade, le reste des soumissions oscillant du moyen au correct. Rendez-vous très bientôt pour l’autopsie d’un autre recueil de la BLC 2021, gratuit (ou presque) celui-là.

BLACK LIBRARY 2020 ADVENT CALENDAR

Bonjour à tous et bienvenue dans la traditionnelle chronique calendaire du mois de Décembre, consacrée au Black Library Advent Calendar. Le cru 2020 se distingue par rapport à ses prédécesseurs : aéré (une sortie tous les 2 jours, soit 12 au total contre les 24 habituelles), trilingue (le français et l’allemand s’invitent dans la veillée1) et totalement visuel (pas d’audio drama cette année), cet arrivage de nouvelles nouvelles (pour la VO tout du moins) est à l’image de l’année 2020 : très particulière. Souhaitons-lui et souhaitons nous cependant que cela soit dans un sens plus positif que ce à quoi les 11 derniers mois nous ont habitué.

Le sommaire du BLAC 2020 met particulièrement à l’honneur Warhammer 40.000, à qui revient la moitié des publications. Si en termes de personnages convoqués, et à première vue – des titres et des couvertures uniquement – , seul l’inusable Ciaphas Cain s’impose comme une valeur sûre, les auteurs mis à contribution sont quant à eux largement connus de la part des habitués de la Black Library. En plus de Sandy Mitchell, on retrouve ainsi les Seigneurs de Terra Guy Haley et John French, les confirmés Robert Rath et Danie Ware, et le « faux débutant » Marc Collins.

Les 6 autres nouvelles se répartissent également entre Age of Sigmar (la tête d’affiche étant ici tenue par le positivement immortel car intuable Gotrek Gurnison) et Hérésie d’Horus. Un certain mystère est ici laissé par la BL, en tout cas en matière picturale, puisque la couverture de la soumission du grand ancien sur le retour Graham McNeil n’a pas été révélée à l’heure où ses lignes sont écrites. On sait toutefois que l’histoire s’intitule ‘The Lightning Hall’, et je parie un petit crédit impérial qu’elle prendra place pendant le Siège de Terra et mettra en scène des Thousand Sons. Une intuition, comme ça. Notons également que pas moins de deux auteurs feront leurs premiers pas hérétiques à l’occasion du BLAC 2020: Mike Brooks et le bizut Brandon Easton, qui se paiera le luxe de signer ses débuts dans la Black Library par une publication dans la franchise la plus select de Nottingham.

1 : Avec comme d’habitude un contenu légèrement différent d’une langue à l’autre. J’ai toujours du mal à comprendre cette logique, étant donné que le nombre de lecteurs français de la Black Library capables de faire de l’achat d’impulsion en allemand pour compléter leur collection, et inversement, doit être marginal. Cette fois-ci, je pense que la team Croissant l’emporte sur la team Choucroute, car nous bénéficions d’un Fehervari alors que nos voisins écopent d’un Ware.

Sommaire Black Library Advent Calendar 2020 VF

Un mot sur le programme francophone pour terminer : il n’y a bien sûr pas d’inédits à attendre de ce côté-là, mais on peut saluer l’inclusion de pas moins de 8 nouvelles assez récentes dans les 12 proposées, et une variété notable en matière de contenu. En plus des incontournables Warhammer 40.000, Age of Sigmar et Hérésie d’Horus, le programme français inclue ainsi une nouvelle de Warhammer Horror et une autre de Warhammer Crime.

Comme la BL n’est pas la seule à innover, je conclue finalement cette introduction en indiquant que ce post sera mis à jour en cours de mois, idéalement quotidiennement mais à coup sûr plusieurs fois par semaine, au lieu d’être envoyé finalisé en fin de mois. Après Noël, c’est plus Noël.

12 Tales of Christmas

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Last Night at the Resplendent – S. Mitchell :

Last Night at the ResplendentINTRIGUE :

Où on apprend que le point commun caché entre Ciaphas Cain et Michel Sardou n’est pas d’avoir une mère qui a tourné dans un nanar de Philippe Clair, mais bien de ne pas aimer se souvenir dans l’ordre1. Derrière cette entrée en matière un peu tarabiscotée, je le reconnais, se cache un constat implacable: l’histoire qui nous occupe ici, pour récente qu’elle soit dans la production de Sandy Mitchell, remonte assez loin dans la geste épicomique de son héros d’opérette. Et pour cause, elle prend place juste après les événements narrés dans la nouvelle ‘Sector 13′, publiée en l’an de grâce 2003. Pour les béotiens et les oublieux, Cain et Cie avaient alors purgé, à la suite d’un malheureux concours de circonstances -comme toujours avec ce loustic-, un culte Genestealers planqué sur la planète agricole de Keffia. Nous retrouvons donc quelques têtes connues des habitués de la saga, en plus des incontournables et irrespirables figures que sont respectivement le Commissaire Cain et son aide de camp Jurgen, à commencer par le Lieutenant Toren Divas et, en arrière plan, le Colonel Mostrue2.

Notre propos débute par la proposition faite par Divas à son collègue de régiment, qui le considérerait presque comme un ami n’eut été sa détestable manie de l’appeler « ma caille » (ou Cai, en VO3), d’aller passer la soirée au théâtre. Cain, qui se sent un peu responsable de la frustration sexu…timentale de son comparse, car la fille avec laquelle ce dernier voulait à l’origine et véritablement passer un bon moment s’est révélée être un hybride Genestealer et a donc fini sur un bûcher, accepte l’offre et les deux soldats partent s’encanailler dans une salle de music-hall répondant au nom de Resplendent. Nous l’appellerons donc ici le Splendid, pour des raisons évidentes qui seront je l’espère reprises par le traducteur officiel de cette nouvelle, si un jour elle a cette chance. Arrivés sur place, les killer quilleurs sont rapidement reconnus par la plèbe locale comme l’illustre Commissaire Ken et son presque aussi illustre acolyte Bharbee, ce qui leur permet de récupérer, en plus de deux sachets de pralines gratuits à la caisse (ce qui représente déjà 800€ de gagné), un accès aux loges d’honneur de l’établissement en reconnaissance de leurs héroïques exploits. Accompagnés à leurs sièges par le propriétaire en personne, l’onctueux Erasmus Denovra (dont la calvitie naissante ne manquera pas de faire tiquer le lecteur attentif), Cain et Divas déclarent le mini bar objectif stratégique, et passent la soirée à boire des coups, tout en essayant de comprendre les vannes du Kev Adams de Keffia.

Tout cela aurait pu se finir très normalement, et donc ennuyeusement, si à la fin du spectacle Denovra n’était pas venu sur scène pour faire applaudir le sauveur de Keffia par la foule en délire, attention que le cabotin mais peu patient Cain n’apprécie pas le moins du monde. Se retrouver coincé par une horde de fanboys du tiers monde secteur, très peu pour lui, merci. Pour se tirer de ce mauvais pas, une seule solution: demander au brave Jurgen de rappliquer dare dare pour une évacuation par Salamandre interposée, et trouver un chemin jusqu’à l’entrée de service en passant par les sous-sols du Splendid, où entre un Père Noël en kloug massif et une bouteille d’amasec contenant un crapaud hurleur de Catachan, les fuyards tombent sur l’ouvreur du théâtre, Orris, venu refaire ses stocks de churros. Ayant fort besoin d’un guide pour naviguer le dédale, Cain et Divas acceptent le coup de main du factotum, mais ce dernier semble les mener toujours plus profond plutôt que vers la sortie…

Début spoiler…Et en effet, lorsqu’ils rencontrent par le plus grand des hasards Denovra au détour d’un couloir, le sagace Commissaire finit par comprendre devant l’air étonné de ce dernier qu’il y a baleine, ou plutôt Kraken, sous gravillon. Le placide Orris était lui aussi un hybride, qui cherchait à faire tomber le bourreau (involontaire) du culte dans les griffes de ses gros copains. Ni Denovra, ni Orris ne survivent longtemps à cette révélation, et la situation aurait pu très mal tourner pour nos deux héros, qui se retrouvent rapidement confrontés au Patriarche insaisissable de l’infestation, sans l’arrivée providentielle de Jurgen. Ce dernier n’hésite pas à fracasser un mur (il n’y avait pas de place pour se garer) pour cueillir son supérieur, et la combinaison du bolter lourd et du lance-flamme de coque du véhicule impérial a bientôt raison du gros cafard. Sur un malentendu, ça aurait pu dévorer. Seul petit problème, le Splendid devient la proie des flammes, mais comme c’était un nid de Xenos4, on ne va pas pleurer non plus. Tout est donc bien qui finit pas trop mal pour notre troupe d’impondérables, prête à repartir servir l’Empereur sur un autre… théâtre. M.O.U.A.H.A.H.A. Ce sera Perlia, et c’est couvert dans ‘Death or Glory’.Fin spoiler

1: Remember Olympia 95. Les vrais savent. 
2: Il est également fait mention d’une Sergent vétéran Wynetha Puh, pour laquelle Cain semble avoir une tendre concupiscence, mais j’avoue qu’elle ne me dit trop rien (et de toutes façons, elle n’intervient pas ici).
3: Ca fait beaucoup de renvois mais celui-ci vous sera peut-être utile (les autres non, on est d’accord). Ce surnom fait sens pour un lecteur anglophone car Ciaphas se prononce Kaïaphas en glaouiche. Si vous voulez un jour demander un autographe à Sandy Mitchell, ça vous évitera un moment de solitude.
4: Il faudrait penser à faire enquêter l’Ordo Xenos sur Michel Blanc pendant que j’y pense.

AVIS :

Les chroniques se suivent et se ressemblent pour Ciaphas Cain et Sandy Mitchell, qui ont fait leurs les principes de continuité et de persévérance. On a donc toujours droit aux mêmes ficelles, avec un Cain irrévérencieux qui se retrouve entraîné à son corps défendant dans des embrouilles mortelles, et ne doit son salut qu’à un heureux concours de circonstances, l’intervention énergique de son fidèle Jurgen, et ses compétences non nulles au pistolet bolter et à l’épée tronçonneuse. À la longue, je conçois que cela peut lasser, mais par petites doses, c’est tout à fait gouleyant. ‘Last Night at the Resplendent’ a également comme point fort, par rapport à d’autres nouvelles du même ordre commises par Mitchell, de mettre vraiment au premier plan sa figure de proue (pas comme ‘A Mug of Recaff’ et ‘The Smallest Detail’, qui propulsent Jurgen en vedette Valhallienne), et de venir compléter ou refermer des arcs narratifs existants, ce qui fera davantage plaisir aux fidèles du Commissaire Friseur que des pures et gratuites créations. En plus de ça, l’auteur nous réserve une petite surprise, ou un léger suspense, sur l’identité du fourbe traître de l’histoire, ce qui est toujours appréciable. Bref, pour les standards de la maison Mitchell, c’est plutôt de la qualité supérieure, et une façon agréable de (re)découvrir une des figures les plus excentriques, et donc attachantes, de la Black Library.

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L’Enfant du Chaos // Child of Chaos – C. Wraight :

Child of ChaosINTRIGUE :

Le Siège de Terra approche méchamment et quelque part en orbite du Monde Trône, un Astartes en arrêt maladie contemple la planète de Pépé avec un œil torve et un visage couvert de biafine. Notre protagoniste est, vous l’aurez deviné, Erebus. Sauf que en fait, non, mais nous y viendrons un peu plus tard. Passé à la râpe à fromage par Horus et slam dunk-é dans le bac à ordures dangereuses par Lorgar, le surhomme par qui le scandale éclata n’a pas vraiment d’épaule sur laquelle suinter, mais il s’en fout royalement car son auguste compagnie lui suffit. Et comme dit son deuxième proverbe favori (on parlera de son premier un peu plus loin): « plus on est de fous, plus on rit, moi je suis tout seul parce que personne ne m’aime alors je compense en étant complétement ravagé du bulbe et pouvoir rigoler un bon coup ». Quel dommage que seule la version abrégée de cette maxime si profonde nous soit parvenue. Toujours est-il qu’Erebus est décidé à se parler à lui-même pour passer le temps, et il embarque donc le lecteur dans le récit de son origin story, qu’il considère comme étant édifiante. Voyons cela.

Première confession: Bubus a toujours été mauvais. Et surtout en dictée. Il ne s’en cache ni ne s’en excuse, et il n’y a pas d’élément déclencheur à chercher pour explique sa chute, à part peut-être le fait qu’il ne supporte pas la chaleur. Mais bon, se dire que l’Hérésie aurait été évitée par un malheureux climatiseur, ce n’est pas très glamour, donc restons sur l’hypothèse de la malignité incarnée. Déjà tout môme, son passetemps favori était d’arracher les pattes de scorpion de Colchis, ce qui n’est guère charitable. Issu d’une famille miséreuse, il se mit à lorgner du côté des khôl gris du Covenant après avoir constaté que les prêtres menaient une vie de patachon. Après quelques mois à apprendre par cœur des cantiques et à apprendre à lire sur des bouquins piqués en douce dans le temple local, notre zéro accomplit ses premières armes en garrotant de sang froid un jeune dévôt de son quartier, auquel sa mufle de mère le comparait à longueur de journée pour le rabaisser. L’individu en question témoignait de sa foi envers les Puissances en se peignant des mots sacrés sur le visage, habitude que son assassin reprit, tout comme il lui emprunta son nom: Erebus. MIND BLOWN. On est passé à ça d’avoir l’Hérésie manigancée par un gonze appelé Post Malone ou Tekashi69, ça fait froid dans le dos tout de même. Heureusement que Môman Bubus n’aimait pas le rap.

Ce premier assassinat permit toutefois à l’usurpateur d’entrer dans les ordres sans coup férir, et de commencer à tailler son chemin vers le pire, soit le Pouvoir, l’Influence, la Richesse et l’Efferalgan. Car Erebus n’est pas vraiment croyant à la base, et avoue volontiers s’être piqué d’intérêt pour la chose religieuse de la même manière que tu as pris goût aux endives au jambon: à l’usure. BLIND MOWN. Pendant qu’il faisait ses classes, un certain Prophète commençait à faire parler de lui dans l’arrière pays colchitique, et il ne fallut pas longtemps avant qu’Erebus ne pose les yeux sur celui qui allait devenir son père adoptif (Lorgar), accompagné par sa future marâtre (Kor Phaeron). Ce ne fut pas le coup de foudre mais le jeunot comprit qu’il fallait qu’il se rapproche de Mr Tête d’Œuf pour son propre bien, ce qu’il fit.

Une arrivée impériale et une transformation en Space Marine plus tard, notre désormais fringant héros part sillonner la galaxie à la recherche des Dieux du Chaos, envers qui il sent une attirance particulière. Rien de très intéressant ne se produit jusqu’à l’arrivée sur Davin, et la visite qu’Erebus rend à un temple décati que lui ont révélé ses visions. Sur place, il rencontra un vieux prêtre ridé et impoli, ce qui n’est pas très malin quand on s’adresse à un type qui fait deux fois sa taille et trois fois son poids. Parmi les tags effacés et les inscriptions désobligeantes, les sens de sorceleur du surhomme firent clignoter en rouge un dessin de l’Anathame (qui ne se trouvait pas sur place, ce serait trop simple) ce qui fut apparemment suffisant pour son bonheur immédiat. Il repartit donc avec une envie folle de farmer du Wither squelette1, en ordonnant au vioque de faction de retaper un peu la bicoque, et en donnant rendez-vous dans quelques décennies à une très jeune Akshub (qui ironie de l’histoire, lui donnera des cours en chaotique appliqué lorsqu’il reviendra… quel fumiste tu fais Bubus alors). La suite de l’histoire, sans être parfaitement connue, l’est toutefois suffisamment pour pouvoir laisser Erebus à ses divagations fiévreuses et purulentes. Mais tel est le destin de ceux qui manquent de peau.

1Mais sans accès au Nether, il dut se contenter de piller les collections permanentes du musée de la vie rurale de l’Interex, comme chacun sait.

AVIS :

Chris Wraight lève le voile sur l’origine d’un des personnages les plus importants de l’Hérésie n’étant pas Pépé ou un Primarque : bonne idée dans l’absolu, et assez bien réalisée même si ‘Child of Chaos’ tient plus de la lecture complémentaire intéressante que du must read définitif. Il y a certes quelques révélations bien senties de la part d’un auteur qui a trop de métier pour ne pas jeter quelques bouts de fluff anecdotiques (au sens littéral) en pâture à son public de fanboys dans une nouvelle telle que celle-ci, mais rien qui changera la face du lore. On apprend par exemple que c’est à Erebus que l’on doit la maxime « béni soit l’esprit trop étroit pour le doute », ce qui est utile à savoir pour briller dans un centre GW mais relève de la trivia hérétique au final. Notons également que Wraight se retrouve piégé par cet ennemi acharné de l’auteur de l’Hérésie d’Horus qu’est la continuité temporelle (à égalité avec la bonne vieille logique cartésienne): si Erebus a pu devenir un Word Bearers, c’est qu’il était très jeune à l’arrivée de l’Empereur. Or on sait (‘Lorgar: Bearer of the Word’) que Kor Phaeron avait déjà mis des pensées non euclidiennes dans la tête de son pupille bien avant que Bubus soit en mesure de susurrer des salaceries à l’oreille de son Primarque : l’image d’Epinal d’instigateur de l’Hérésie qui accompagne le Chapel-Un depuis quelques années en prend donc un sacré coup dans les ratiches.

Bref, on tient ici une lecture sympathique et qui permet à Wraight de mettre un peu d’ordre1 dans, et de faire quelques clins d’œil à la suite de, l’histoire d’Erebus, ce qui peut, ou non, justifier les 3,49€ demandés par la Black Library pour tuyauter le lecteur/fluffiste sur ce VIP chaotique.

1J’ai bien aimé le fait qu’il cherche à couvrir les traces de Thorpe en indiquant au détour d’une phrase que, oui, les Dieux du Chaos avaient bien un œil (mais juste un œil) sur Colchis et le Covenant, respectivement élus « Planète chaotique la plus calme du Materium » et « Secte chaotique hégémonique la moins efficace de la galaxie » 10.000 ans de suite. Il ne pouvait guère faire plus que cela sans réécrire l’histoire.

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The Serpent’s Dance – M. Brooks :

The Serpent's DanceINTRIGUE :

Désormais rattachée au service exclusif du Régent rageux de Terra, Malcador le Sigilite, l’ex Sœur du Silence Amendera Kendel participe à l’effort de guerre en menant à bien des missions de contre-espionnage pour identifier les traîtres à l’œuvre dans le système solaire. Une vraie mission de l’inspection générale comme on les aime. Son devoir la mène jusqu’à Jupiter, où elle infiltre incognito un événement mondain organisé pour l’élite locale, à la recherche de… n’importe quoi en fait, car on ne dirait pas qu’elle tient une piste très sérieuse au moment de faire son entrée sur le dancefloor jovien. Cette approche au pur talent verse de maigres dividendes, malgré les conseils avisés que lui glisse son associé, chaperon mondain et consultant en jet set Ruvier Dall, et la soirée progresse sans que sa patronne n’arrive à coincer le moindre petit hérétique. Kendel a beau dissimuler son aquila frontale sous un masque, son physique de tueuse sous des froufrous1 et son aura de Paria avec un torque de suppression, on ne s’improvise pas femme du monde. La spécialité de la maison serait plutôt de les détruire, d’ailleurs (remember Proxima Majoris).

Après une heure à échanger des platitudes avec le gratin jupitérien en pure perte, Kendel en a ras la queue de cheval et opte pour une tactique différente. Rencardée en douce sur les agissements suspects d’un convive, qui est le seul à se balader librement de groupes en groupes sans gardes du corps, notre héroïne fonce sur sa cible comme un missile à tête chercheuse (et à la grande horreur de Dall, offusqué par ce manque flagrant de savoir vivre), avec la ferme attention de… l’inviter à danser. Si si. Ma foi, pourquoi pas: peut-être que le DJ local avait eu la mauvaise idée de mettre ‘Cotton Eye Joe‘ pile à ce moment. Quoiqu’il en soit, la tentative de Kendel se heurte, non pas à un mur, mais au refus poli de l’assistante du nobliau en roue libre (Durian Jarandille), une jeunette timide du nom de Kristanna Moristat, qui fait remarquer à cette virago d’Amendera qu’on ne peut pas macarener les gens sans sommation et sans leur demander leur avis d’abord. Ne pouvant pas décemment lui mettre une manchette sans créer un scandale, la sista improvise et entraîne l’impétrante dans une carioca fougueuse. Faute de merles… Cette proximité lui permet de détecter que Kristanna est elle-même une Paria, constat dont va découler tout un tas de déductions qui, pour la faire courte, mène à la neutralisation de Jurandille, un affreux Psyker sous couverture dont les discussions avec l’élite jovienne ne pouvaient qu’avoir pour but de préparer subrepticement l’arrivée d’Horus dans le système solaire.

Alors qu’elle s’apprêtait à se mettre une claque dans le dos pour se féliciter d’une mission rondement menée (difficile de compter sur des marques de franche camaraderie de ce genre de la part d’autrui quand on donne la nausée aux gens à 10 mètres à la ronde), on souffle dans l’oreillette de Kendel que le deuxième compagnon de Jurandille, Jorud Gevaz, a filé à l’anglaise pendant qu’elle remportait sa battle de tektonik contre le Psyker infiltré. Comme l’homme en question est parti dans la direction générale des appartements du Haut Thane de Jupiter et qu’il laisse des cadavres de gardes derrière lui, il s’agit de le rattraper en vitesse afin d’éviter une gueulante de Sire Gilles l’Huître. Beaucoup plus à l’aise maintenant qu’elle a le droit de mettre des gros taquets dans les nougats, Kendel finit par confronter sa proie avant qu’elle ne pose ses sales pattes sur le nabab local, et parvient à la retarder suffisamment longtemps pour que l’indispensable Helig Gallor (Death Guard en disponibilité) arrive disperser l’importun d’une rafale de bolter bien placée. Pas assez vite cependant pour empêcher Gevaz, un agent de l’Alpha Legion, d’appuyer sur le détonateur caché dans la boucle de sa ceinture avant de passer de vice à trépas. Être lent et méthodique est parfois handicapant. Bilan des courses: deux tiers des invités du bal (ainsi que Ruvier Dall) finissent en carpaccio, victimes des bombinettes cachées par les cultistes dans les automates de service, ce qui n’est pas un superbe résultat pour notre espionne en herbe. Elle fera sans doute mieux la prochaine fois, si prochaine fois il y a.

1: Notons au passage qu’elle a réussi à convaincre ce vieux pingre de Malcador de lui adjoindre les services de deux couturier.e.s. Deux fois le nombre de Space Marines de son équipe: on voit où vont ses priorités. 

AVIS :

Dans la série des « Que sont-ils devenus? » de l’Hérésie d’Horus, le cas d’Amendera Kendel méritait-il qu’on s’y attarde? Personnage récurrent de James Swallow, ses apparitions dans la série se sont logiquement espacées au fur et à mesure que celles de son auteur faisaient de même. À titre personnel, je vivais et lisais très bien sans mademoiselle Kendel, et je m’interroge sur les raisons qui ont poussées Mike Brooks à la choisir pour ses débuts dans l’Hérésie. Amendera ne m’apparaît en effet pas comme une figure brooksienne classique, n’étant ni trop sarcastique pour son propre bien, ni le détournement d’un archétype de 40K, ni particulièrement originale au niveau de ses pronoms1, ni un Ork. L’intrigue et la mise en scène, sans être indigentes, ne sont pas non plus mémorables, et, à moins d’un fantastique coup de théâtre, l’intégralité des événements narrés dans The Serpent’ Dance aura autant d’impact sur le reste de l’Hérésie d’Horus que la couleur des papiers peints du boudoir d’Eidolon, voire qu’Eidolon lui-même (c’est dire). Bref, c’est un double gâchis à mes yeux: des compétences et de l’originalité de l’auteur en premier lieu, et des possibilités scénaristiques (que ce soit en termes de développement ou de conclusion d’arcs narratifs) offertes par une saga aussi étoffée en second lieu. On appréciera tout de même le sérieux dont Brooks a fait preuve dans sa préparation, qui transparaît dans les références aux travaux de ses prédécesseurs (battlemark et thoughtmark, Lucifer Black…), mais également dans des clins d’œil un peu plus subtils, comme le choix de Kendel de prétendre être une aristocrate d’une certaine planète Mollita pour accéder au bal. En conclusion, je ne voue pas cette nouvelle aux gémonies mais j’affirme sans détour qu’il y a beaucoup mieux à lire de la part de Mike Brooks et de l »Hérésie d’Horus que cette danse serpentine.

1: La danse entre Kendel et Kristanna est toutefois une péripétie que l’on n’aurait à mon avis pas pu trouver ailleurs que chez Brooks parmi les auteurs de la Black Library. Et on a bien un personnage non-genré dans l’histoire, mais c’est un garde tué hors champ dont Krendel récupère le fusil, donc ça ne compte pas vraiment.

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Sauvage // Savage – G. Haley :

SavageINTRIGUE :

Notre histoire s’ouvre sur un concert de ronflements remplissant une tente à l’atmosphère étouffante, alors que le soleil est sur le point de se lever sur Omdurman. Allongé sur son lit de camp, notre héros, Gollph, après avoir courageusement mais vainement tenté de faire abstraction du bruit et de l’odeur la chaleur, décide d’aller se dégourdir les jambes pendant que la température est encore supportable. Gollph, comme ses camarades de la 7ème Companie Motorisée Super-Lourde de Paragonian (ou quelque chose comme ça), est un tankiste, et fier de l’être. Rattaché au Baneblade Cortein’s Honour, où il exerce la noble profession de senior chargeur – ce qui est mieux que serial killer, même si, au fond, cela revient au même –, Gollph espère un jour devenir artilleur. Bien que disposant des aptitudes nécessaires pour occuper cette fonction, notre héros est toutefois handicapé par ses origines : il vient en effet du monde sauvage de Bosovar, qui rime trop avec Kosovar pour que ses ressortissants soient pris au sérieux par les impériaux venant de mondes civilisés. En plus de ça, les Bosovarois ont la peau rose, ce qui, dans le régiment de Paragon dans lequel les hasards de la vie et de la guerre l’ont fait atterrir, est une source de discrimination et de brimades. Que fait donc la HALDE ?

Pour l’heure, Gollph profite du calme ambiant pour aller saluer son char, qui n’a pas vu le moindre combat depuis le début de la campagne, et aller contempler le lever du soleil en marchant pieds nus dans les hautes herbes, comme le petit sauvageon qu’il est resté au fond de lui-même (il n’enlève pas sa chemise tout de même, car le Commissaire n’aimerait pas ça). C’est l’occasion pour lui de se remémorer son parcours depuis les plaines de Bosovar jusqu’aux collines d’Omdurman, en passant par son recrutement dans la Garde, où il a appris à vaincre sa peur des portes. On n’en parle pas assez, mais c’est une technologie des plus dangereuses. Après tout, personne ne s’est jamais coincé les doigt dans un rideau de perles. De retour au camp, et occupé à lustrer des obus pour passer le temps en compagnie de son supérieur ronfleur, le 1er Artilleur Meggen, Gollph est surpris dans son ouvrage par l’arrivée silencieuse, mais pas inodore, de Shoam, le pilote du Cortein’s Honour. Ce dernier a obtenu des nouvelles fraîches faisant état d’un redéploiement imminent de la Compagnie, et de son départ d’Omdurman. Il vient donc rappeler à Gollph et à Meggen le pacte secret que les trois hommes avaient conclu des mois plus tôt, et qu’il leur faut mettre à exécution avant qu’il ne soit trop tard. Si Meggen se montre très enthousiaste à cette idée, Gollph l’est beaucoup moins, s’étant engagé dans l’aventure sous l’emprise de la boisson. Toutefois, une promesse est une promesse, et nos trois conspirateurs se retrouvent donc le soir venu derrière un buisson odoriférant1 pour accomplir leur sinistre dessein…

Début spoiler 1…Si Gollph avait traîné des pieds pour marcher dans la combine, c’est d’abord parce qu’il doit se taper le sale boulot, c’est-à-dire distraire les sentinelles placées devant la tente contenant les réserves de la Compagnie, pendant que ses comparses se glisseront à l’intérieur pour dérober ce dont ils ont besoin pour l’étape suivante de leur machination. En plus d’être dangereuse, cette tâche est humiliante pour le fier Bosovarien, car elle l’oblige à jouer au sauvage pour parvenir à ses fins, alors qu’il se considère comme étant parfaitement intégré au sein de la Garde Impériale. On voit donc Gollph se présenter devant les plantons de service, affublé d’un plastron fait de roseaux tressés (ça fait exotique, dixit Meggen), avec un formulaire mal rempli en main et un affreux dialecte petit nègre à la bouche, et tenter de se faire remettre farine pour dîner Lieutenant, oui oui, s’il te plait Monsieur présentement là dis donc. Pendant que l’héroïque peau rose occupe les gardes, et se fait dérouiller par le plus mal embouché des deux, Meggen et Shoam dévalisent les stocks du régiment, le premier intervenant une fois le forfait commis pour interrompre la bastonnade à laquelle le pauvre Gollph avait droit, et repartir avec lui vers leurs quartiers. La mission a été accomplie, reste à savoir quelle en était le but…

Début spoiler 2…Eh bien, et je n’invente rien, il s’agissait simplement d’organiser une petite fête d’anniversaire pour le Capitaine Bannick, avant que le camp soit levé. Ce dernier est donc pris au dépourvu lorsque son équipage et quelques amis le surprennent à la cantine avec un buffet de pâtisseries paragoniennes et quelques bonnes bouteilles. Parce que ce n’est pas parce que la galaxie est sur le point de s’effondrer qu’il ne faut pas profiter des petits plaisirs de la vie et prendre un pot entre collègues de temps à autres. L’enthousiasme collectif peine toutefois à déteindre sur Gollph, encore un peu marqué par son implication dans le complot pâtissier auquel il a participé, et surtout honteux que trois de ses compatriotes de Bosovar aient été sévèrement punis par les autorités régimentaires pour la disparition des victuailles dérobées par Meggen et Shoam. Il n’y a pas à dire, le racisme anti-rose reste un des fléaux cachés du 41ème millénaire…Fin spoiler

1 : Il a certainement été utilisé par un tankiste pressé comme petit coin, comme Gollph a le plaisir de le découvrir.

AVIS :

Attention, OVNI. Guy Haley signe avec Savage ce qui restera sans doute comme l’une des nouvelles de Gardes Impériaux les plus surprenantes du corpus de la Black Library. Pas de Xenos, pas de mutants et pas d’hérétiques ici, et à peine un peu de combat à proprement parler (même si la mâchoire de Gollph pourrait contester ce constat), mais la description de la vie d’un camp impérial dans toute sa singulière normalité. Si le « complot » fomenté par nos héros a une dimension comique assumée, et permet à Haley de démontrer qu’il est capable de jouer sur le registre humoristique de façon convaincante, c’est la description que l’auteur fait de la réalité sociologique de ce microcosme, où les préjugés et les discriminations1 entre Gardes de différentes origines demeurent aussi vivaces qu’aujourd’hui malgré les milliers d’années écoulées et la découverte d’autres espèces intelligentes, qui donne tout son sel à cette histoire. Le cosmopolitisme de l’Imperium est une de ses caractéristiques les plus intéressantes, mais rarement mise en valeur par la BL autrement qu’à travers l’exemple extrême des abhumains, du fait de sa ligne éditoriale résolument militariste. Haley démontre ici que la GW-Fiction peut encore totalement surprendre, et en bien, le lecteur, et que si la guerre est éternelle au 41ème millénaire, les à côté de cette dernière valent également la peine d’être racontés.

1 : Autre exemple, Shoam est traité comme un paria par ses camarades car il vient de Savlar, réputée pour être peuplé de criminels.

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Da Big Mouf – D. Ware :

Da Big MoufINTRIGUE :

Dans les entrailles du Space Hulk Big Mouf, colonisé par les Deathskulls du Big Boss Zoldag Legmangla, nous suivons notre héros, le Nob Grimdak, alors qu’il s’adonne innocemment (ou aussi innocemment que sa nature de Xenos ultra violent le permet) à ses activités favorites: chercher du ​​​​​matos à récupérer pour kustomiser son équipement, tirer à droite et à gauche pour se convaincre de la mieutitude de son fling’, et se pavaner devant un public imaginaire comme s’il était un mannequin à la Fashion Week. L’arrivée d’une petite force de Sœurs de Bataille dans les coursives du Big Mouf, annoncée sans doute possible par le double bruit des bottes énergétiques et des cantiques consacrés1, est cependant suffisante pour renvoyer Grimdak, courageux mais pas téméraire (ou peut-être sujet aux acouphènes) jusqu’à la salle du trône de Legmangla.

Ce dernier, une montagne de muscles et de membres bioniques tout à fait conforme à l’image d’Epinal que l’on se fait du meneur peau-verte, allie la carrure d’un Ogryn avec la culture générale d’un Inquisiteur, puisqu’il a tôt fait de souligner que les harpies impériale sont forcément à la recherche d’une relique, puisque la recherche de ces objets constitue leur unique leitmotiv​​​​. Il l’a lu dans un vieux Codex Approved de Space McQuirk (le bien le plus précieux de son tas de loot), c’est donc que c’est vrai.​​​ Par un concours de circonstances tellement heureux qu’il a fallu à Tzeentch 999 ans pour le mettre en place, la relique en question est présente dans les alentours immédiats, puisqu’il s’agit d’une lance dont le bout du manche est un fémur humain, et dont un Nob quelconque se servait à l’instant comme d’un cure-croc2. Après avoir morigéné (je vous avais dit que c’était un érudit) son sous-fifre en lui faisant avaler son ustensile, Legmangla sonne la Waaagh! et emmène sa tribu à la rencontre des envahisseurs, guidé par le radar de recul que Grimdak a monté sur sa pétoire.

La confrontation initiale et finale (14 pages, c’est court), a lieu dans la salle du vortex, occupée par une sorte de trou noir anémique attirant mollement tout ce qui s’approche un peu trop près. C’est de là que le Space Hulk tire son nom de Big Mouf, et ça nous fait une belle jambe. Juste au moment où son chant de guerre se termine3, la vague verte tombe dans l’embuscade tendue par les filles de l’Empereur, qui avaient eu la lumineuse idée de la fermer pour surprendre l’adversaire. Vue par les yeux de Grimdak, l’attaque est d’une violence insoutenable et cause des ravages inouïs parmi les Xenos. Alors que le lecteur tente fébrilement de calculer combien d’Ordres Militants ont été rassemblés pour mener à bien cette mission périlleuse, et se prépare déjà à voir arriver Ste Celestine en personne pour un duel avec Legmangla, Ware balance un pain tellement brutal dans la mâchoire de l’Epique qu’elle en assomme du même coup le Réalisme, qui le suivait prudemment, comme à son habitude. Car le massacre des Deathskulls a été orchestré par une pauvre escouade de Sœurs de Bataille, soit 6 gougnafières en armure énergétique. Dans le chaos de la mêlée, les Orks parviennent tout de même à blesser gravement une Sista, grâce à l’intervention énergique de Legmangla en personne, mais c’est à peu près tout.

Après quelques pages confuses, Big Mouf se met en rogne et avale proprement tout ce qui n’a pas une coupe à frange (et Grimdak, qui parvient à s’échapper mais tout le monde s’en fout), permettant à Danie Ware de terminer son propos en révélant à son public que la miraculeuse escouade était menée par, mais en doutait-on encore à ce stade, l’injouable Augusta Santorus, qui avait très envie d’ajouter le fémur de Saint Finiang à son ossuaire personnel. Et il n’est pas permis de douter qu’elle a échoué dans cette tâche, bien que localiser l’emplacement de la relique dans un Space Hulk regorgeant d’Orks en ayant seulement une vague idée de la direction dans laquelle aller constitue un défi littéralement herculéen. Comme on dit, the Emperor provides.

1: Oui, nos braves Sistas abordent un vaisseau qui selon toute logique est infesté d’ennemis mortels en scandant les Parapluies de Cherbourg à plein volume. À moins qu’elles ne chantent horriblement mal, et comptent là-dessus pour faire fuir l’adversaire (une tactique tout droit piquée aux Emperor’s Children), on peine à comprendre l’intérêt de la manœuvre. 
2: Ce n’est pas comme si 1) un Space Hulk était un agglomérat de vaisseaux spatiaux d’une taille colossale, dont la cartographie et l’inventaire occuperait même le plus diligent des experts pendant des décennies; 2) les Orks étaient connus pour leur goût de l’exploration minutieuse et 3) une lance terminée par un bout d’os avait une quelconque valeur aux yeux d’un Ork, et avait donc une chance d’être présentée au Big Boss.
3: Et Ware s’est donnée à fond sur le livret, car le lecteur bénéficie de plusieurs couplets de pop-rork. 

AVIS :

Danie Ware enrichit moins sa gamme qu’elle étend ses déprédations en s’essayant à la littérature Ork, avec des résultats dans la droite ligne de ses premiers travaux. Si la première partie de la nouvelle, centrée sur Grimdak et Legmangla, pourrait à la rigueur faire illusion malgré son lot d’incongruités, la seconde en revanche reprend tous les codes de la SoB-erie1 dont Ware s’est faite la grande (et heureusement, seule) spécialiste au sein de la Black Library. C’est confus, incohérent et cela va à l’encontre des principes et des préceptes les plus basiques du lore1 : ayant déjà passé quelques chroniques à exposer mes griefs sur le sujet, je me contenterai ici de noter que le lecteur familier de ‘Mercy’, ‘Forsaken’ et ‘The Crystal Cathedral’ évoluera à nouveau en territoire connu. Le titre orkifié et la narration centrée sur un peau verte ne doivent pas faire illusion: il s’agit bien de la suite des aventures massacres d’Augusta Santorus, et les amateurs de POV Ork seraient mieux inspirés de se tourner vers les travaux de Mike Brooks et de Guy Haley. Contrairement aux balises laissées par l’Interex à proximité de Murder, j’espère que ces avertissements ne seront pas compris trop tard par ceux qui pourraient en avoir besoin…

1: Dédicace spéciale aux Blood Angels, pas foutu de purger un Space Hulk sans perdre 90% de leurs effectifs alors que Santorus et ses copines plient l’affaire en une demi-journée et une cheville foulée. 
2: Heureux, ou en tout cas fatidique, hasard, « sob » veut dire sangloter en anglais. C’est approprié.

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Morts sur la Route de Svardheim // Death on the Road to Svardheim – D. Hinks :

INTRIGUE :

En route vers la cité de Svardheim pour une raison sans doute logique mais inconnue de l’auteur de ces lignes au moment de l’écriture de cette chronique, le duo le plus mal assorti des Royaumes Mortels1 passe le temps et les kilomètres sur la route 88 (c’est tout plat, désertique et décoré avec des monceaux de crânes) en discutant théologie, comme à leur habitude. Bien évidemment, la situation finit par gentiment dégénérer, l’anticléricalisme blasphématoire d’un Gotrek toujours chafouin de s’être fait rouler dans la farine par les Dieux du Monde Qui Fut mettant sur les dents, qu’elle a éclatante, la dévote Maleneth. À force d’enquiller les bornes, elle finit même par les dépasser, allant jusqu’à accuser son rusé et runé camarade de servir le Chaos, à l’aide de l’argument, bien connu de George W. Bush, du « si tu n’es pas avec moi (et Ziggie) tu es contre moi ». Avant que la situation ne dégénère trop franchement, et que le Tueur vétéran ne doive se trouver encore un nouveau sidekick, les comparses tombent sur le théâtre d’une embuscade ayant été fatale à une bande de prêtres sigmarites, dont les corps décapités jonchent les alentours d’une carriole incendiée.

Après une rapide enquête, il s’avère que les assaillants n’ont pas réussi le perfect en matière d’élimination de témoins, une pauvre nonne répondant au nom de Carmina se présentant à nos héros et leur expliquant que sa congrégation s’est fait dérober une relique irremplaçable, le Poing Incorruptible, dont elle avait la charge et promenait de ville en ville pour ranimer la foi des locaux. Avant que Gotrek n’ait pu marquer de nouveaux points d’athéisme hardcore en demandant à Carmina en quoi un poing pouvait être corrompu, pour commencer (il en serait capable le bougre), Maleneth se fait embringuer dans une mission de récupération du saint gantelet, qu’il s’agit simplement de reprendre des mains malpropres d’une petite vingtaine de bandits, retranchés dans une forteresse abandonnée à quelque distance de la route. Rien que de très banal pour notre Tueur, qui accepte toutefois de mettre les formes et de suivre un plan un minimum intelligent (attendre que Maleneth se soit mise en position derrière le bastion pour intercepter d’éventuels fuyards) avant d’aller toquer à la porte le plus naturellement du monde.

La prévoyance de l’Aelf paie rapidement car il se fait bientôt jour (enfin, nuit, mais je me comprends) que les brigands sont un peu plus qu’une bande de maraudeurs sanguinaires, mais bien une authentique secte de Khorne, en train d’invoquer un démon de fort belle taille à l’aide de leur collection bien mal acquise de grigris et talismans. Maleneth n’a pas le temps de signaler qu’il y a une courge dans le potage que Gotrek est cependant déjà en train de défoncer la porte et de se tailler un chemin à travers les mobs de bas niveau, jusqu’à poser l’œil sur une Némésis digne de lui, qu’il engage évidemment en combat singulier dans la plus pure tradition du genre. Etant un VIP incontournable du multivers, Gogo est reconnu par son adversaire, qui a la mauvaise idée d’insinuer que le Tueur a fui son monde au moment de la Fin des Temps au lieu de rester et de se battre pour le défendre. Cela met notre nabot en rogne, et les deux adversaires se balancent quelques baffes amicales, sans trop d’effet de part et d’autre, jusqu’à ce que Meleneth ait l’idée géniale de confisquer les reliques ayant été mise à profit pour invoquer le démon, et dont ce dernier a encore besoin pour maintenir sa présence dans les Royaumes Mortels. Au fur et à mesure que les héros shootent dans les breloques, leur adversaire perd en taille et en carrure, jusqu’à finir rachitique et malingre, et se faire décapiter sans cérémonie par un Gotrek enfin à la bonne taille pour jouer de la hache.

Ceci fait, le duo infernal n’a plus qu’à remettre le Poing Incorruptible à la brave (en fait pas trop) et reconnaissante Carmina, qui s’en va à cheval remettre le précieux héritage en sécurité, pendant que nos héros continuent à pied leur périple. Poing/t final de notre histoire ?

Début spoilerEh bien non (comme la balise spoiler ne le laissait pas du tout envisager), car lorsque nos voyageurs, fourbus (surtout pour Maleneth) et assoiffés (surtout pour Gotrek) tentent d’obtenir le gîte et le couvert d’un monastère sigmarite croisé un peu plus loin sur la route, se disant à juste titre que tous les culs bénis à la ronde leur sont redevables de leurs récents exploits, c’est pour entendre un son de cloche bien différent. Carmina était en fait une voleuse ayant mené sa bande, déguisée en prêtres, dérober le fameux Poing Incorruptible (mais pas Inatteignable) de la garde des vrais fidèles de Sigmar, en tuant quelques uns au passage. L’abbé outré qui fait ce récit aux voyageurs est persuadé que l’iconoclaste va briser la relique en mille morceaux pour revendre la Pierre de Royaume dont elle est faite au plus offrant, au mépris de tous les commandements de Sigmar. C’est donc une grosse boulette, sur laquelle Maleneth manque de s’étouffer, mais qui ne déclenche chez ce philosophe de Gotrek qu’un rire tonitruant. Il en a certes vu d’autres…Fin spoiler 

1 : Gotrek est un Nain (et pas un Duardin) roux exhibitionniste, et Maleneth est une Aelf brune gothique.

AVIS :

Eh bien ça y est : après avoir laissé Gotrek (et le regretté Felix) à leurs aventures dans le Monde Qui Fut, je renoue enfin avec ce héros mythique sous sa nouvelle incarnation, à travers ce court format signé du père adoptif #3 du Tueur de… trucs, Darius Hinks. Ce qui m’intéressait particulièrement dans ces retrouvailles était de voir ce qui avait changé, et ce qui était resté, des précédentes aventures de M. Gurnisson, qui constituaient un sous-genre de la littérature BL à elles seules. L’équilibre n’était pas facile à trouver entre respect servile du cahier des charges, forcément un peu obsolète, établi par King et Long en la matière, et innovations radicales, qui auraient enlevé tout le sel de ce come-back improbable. Et je dois dire que Darius Hinks s’en est plutôt bien sorti, tant sur le fond que sur la forme. On est bien en présence d’une aventure de Gotrek & Cie, avec notre petit rouquin teigneux, grincheux et pince sans rire s’embarquant dans un combat à haut risque contre un adversaire très balèze (sur le papier en tout cas), au grand désespoir de son partenaire attitré. Ce qui change ici est que Gotrek est devenu un mécréant militant, gardant sa dernière dent contre tout le panthéon divin (à commencer par Sigmar, qui s’en prend plein les tresses), alors que Maleneth est, sous ses abords de tueuse froide, une zélote du grand barbu, ce qui est à la fois surprenant (c’est le type qui la voyait comme une pseudo Assassin druchii qui parle) et intéressant. Notons également que Hinks ne se gêne pas pour glisser quelques références au passé proprement légendaire de son héros et donc à feu Warhammer Fantasy Battle, ce qui devrait faire plaisir autant qu’intriguer le lecteur historique de la saga. Bref, le contrat est bien rempli dans ce ‘Death on the Road to Svardheim’, qui tient son rang parmi les cohortes de nouvelles Gotrekesques publiées par la BL depuis des temps immémoriaux. Reste à savoir ce que cette dernière compte faire de son increvable héros sur le long terme, maintenant qu’il ne peut absolument plus mourir (ce serait un énorme fail), mais ceci est une autre histoire.

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Buyer Beware – G. Thorpe :

INTRIGUE :

Notre histoire commence par une descente de boardercross Kharadron, qui, comme chacun sait, se court en combinaison intégrale de laine de goret à poils longs de Chamon. Partis à cinq de la ligne de départ, située dans le nid d’une Maw-Crusha en attente d’un heureux événement, seuls quatre Duardin parviennent à boucler la course dans les temps impartis et en un seul morceau. On portera longtemps le deuil de Rogoth (casaque, culotte et barbe jaune poussin), dont les tendances gauchistes lui ont été fatales. Les Nains sont un peuple de (virage à) droite, c’est bien connu.

Parvenus jusqu’à la sécurité – toute relative – de leur vaisseau (Night’s Daughter), le capitaine Karazi ‘Fairgold’ Zaynson et ses acolytes n’ont pas besoin de signaler au reste de l’équipage qu’il serait de bon ton de souquer les aethertibuses, comme on dit à Barak-Mhornar : les rugissements tonitruants et les attaques en piqué de la mère poule dérangée dans sa retraite étant une motivation suffisante. Un tir de mitraille bien senti plus tard, l’affaire est réglée aux torts partagés : une gueule et une épaule chevrotinée pour le Maw-Crusha, ce qui l’oblige à rejoindre le plancher des Squigs, et une méchante estafilade de coque pour la Night’s Daughter. Pas assez pour amener le fier vaisseau par le sol, mais assez pour occuper l’endrineer de bord et son assistant pendant une bonne partie du voyage jusqu’à la destination fixée par Fairgold : un avant poste Orruk où l’attend le deal de sa vie. Car oui, à Age of Sigmar, les Nains et les Orques ne sont pas irrémédiablement et définitivement fâchés, et peuvent (apparemment) faire affaire quand la situation l’exige. En l’état, Fairgold a besoin de renflouer les caisses en exploitant un filon d’aether-or localisé par la tribu peau-verte avec laquelle il a rendez-vous, afin de financer une nouvelle expédition pour localiser l’épave d’un navire familial, le Night’s Gift. Une raison qui en vaut une autre, et se révèle donc assez impérieuse pour justifier les tractations contre nature dans lesquelles le capitaine entraîne ses matelots.

Arrivés à bon port après ne s’être que légèrement écrasés dans la forêt proche du village Orruk (équipage secoué + immobilisation), les Kharadron envoient une délégation réduite négocier l’accord avec la partie adverse, tandis que le reste de l’équipage s’emploie à remettre le châssis en état, sous les ordres de Verna (l’endrineer susnommée). À terre, Fairgold et ses compagnons rencontrent finalement le massif Orgaggarok, chef de la tribu du Poing qui Tombe, qui possède ce qu’ils désirent : une carte localisant l’emplacement précis du gisement d’aether-or convoité, flairé par les pouvoirs surnaturels du Wardancer local1.  Mais en échange, Orgaggarok veut les trois œufs de Maw Crusha que ses invités ont apportés avec eux, ce qu’un négociateur vétéran comme Fairgold ne peut laisser passer sans froncer de la moustache. Après un marchandage vindicatif et énergique, l’accord est sur le point de sans conclure sans le moindre sang versé sur la base de deux filons contre trois œufs, lorsque l’expert en ruralité profonde que le chef Orruk a amené à la table au tronc de négociation, lui hurle dans l’oreille qu’il est en train de se faire avoir comme un bleu. Les taches caractéristiques qui ornent la coquille des œufs montrent en effet de façon formelle que ces derniers viennent des Pics de Fer… qui sont sur le domaine des Poings qui Tombent. Oupsie.

Vendre un bien que l’acheteur possédait déjà étant une pratique universellement condamnée, le dialogue tourne court et les lames sortent des fourreaux (pour ceux qui en ont). Bien que tenus en respect par l’arsenal de leurs visiteurs, les Orruks sont tout prêts à foncer dans le tas pour apprendre les bonnes manières leurs visiteurs, mais l’arrivée de deux catastrophes aériennes coup sur coup va donner à Fairgold et ses matelots la distraction nécessaire pour se sortir de ce guêpier. D’abord, Mama-Crushaw débarque au village, guidé par son instinct maternel infaillible, ou la puce de géolocalisation qu’elle avait placé sur ses œufs (allez savoir, c’est de la high fantasy, je ne serais même pas surpris). Puis, c’est la Night’s Daughter, enfin réparée, qui arrive à son tour, abat pour de bon le lézard volant en rut, défonce la palissade Orruk, et maintient les sauvages en respect assez longtemps pour permettre aux VRP de remonter à bord. Bien entendu, Fairgold a trouvé le moyen de chiper la carte d’Orgaggarok au passage, et tout est bien qui finit donc bien pour nos petits gars et filles. Même mieux que bien, car ils ont gardé le dernier œuf de Maw Crusha pour eux, et que ce dernier vient d’éclore. Et une mascotte pour la Night’s Daughter, une !

1 : Spécialisé dans les souffles (ou pets, si on demande à ce diplomate né de Fairgold) de Mork, nom donné par les Orruks à ce type de filon.

AVIS :

Après des débuts discrets à Age of Sigmar (comparé à sa production soutenue pour Warhammer Fantasy Battle ; 40.000 et l’Hérésie d’Horus), Gav Thorpe signe une petite nouvelle posant tous les jalons d’une suite plus ambitieuse avec ce ‘Buyer Beware’. J’en vux pour preuves la galerie conséquente de personnages qu’il prend le temps de nous présenter, ainsi que les relations particulières qui unissent certains d’entre eux (Fairgold et Verna semblent très proches), mais également la mise en perspective de la quête inlassable de Fairgold pour le Night’s Gift, qui justifie tous les événements narrés dans ce court format. Il est encore trop tôt (au moment où cette chronique est écrite) pour acter de la véracité de cette intuition, d’autant plus que Thorpe a déjà une série de romans sur le feu – ça se passe à Aqshy après tout – pour AoS, avec ‘The Red Feast’ (et sa.es suite.s), mais il y a des signes qui ne trompent pas. Pour le reste, ‘Buyer Beware’ tient assez bien la route, sans originalité folle ni style flamboyant, mais avec un dosage correct d’action et d’humour, et surtout sans les incongruités regrettables dont Gav Thorpe parsème parfois ses soumissions à écrire sans se poser de questions. Qualité naine, dirons-nous.

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La Mort d’Uriel Ventris // The Death of Uriel Ventris  – G. McNeill :

INTRIGUE :

La Mort d'Uriel VentrisCe qui ne devait être qu’un contrôle dentaire de routine est sur le point de prendre un vilain tour pour le Capitaine Uriel Ventris, de la 4ème Compagnie des Ultramarines. Allongé dans le fauteuil du praticien, le patricien écoute avec angoisse le servocrâne de service lui demander de prendre une grande respiration et de la bloquer, afin que l’anesthésie puisse être effectuée. Cela risque de piquer un peu. En repensant à toutes ses sucreries englouties avec Pasanius pendant la Guerre de la Peste, notre héros se dit que s’il s’en sort, il investira pour sûr dans une brosse à dents énergétique, qu’il usera énergétiquement1. Mais pour l’heure, il est temps pour le vaillant mais douillet Capitaine de tomber dans les pommes pour échapper au supplice de la fraise.

Se réveillant dans une espèce de caverne qui ressemble fort à sa Calth natale, Ventris comprend rapidement qu’il expérimente une vision lorsque sa sortie de la grotte se fait sous un grand soleil et devant un paysage bucolique, loin des plaines radioactives dont la véritable planète peut s’enorgueillir depuis 10.000 ans. Comme pour confirmer son délire, il se fait héler par un quidam assis sur un rocher, qui se révèle être ce bon vieux Idaeus, Capitaine de la 4ème Compagnie avant lui, et auquel il a succédé après le sacrifice héroïque du briscard sur Thracia. À peine le temps de détailler les nombreuses cicatrices qui parsèment le corps de l’auguste héros pour s’assurer de son identité que les deux surhommes se mettent à dévaler la pente en direction de la caserne Asigelus (qui n’est pas sur Calth mais sur Macragge, mais bon on s’en fout c’est un rêve), où les hallucinations de Ventris l’entraînent. En chemin, ils croisent la route d’un groupe de jeunes coureurs engagés dans une compétition acharnée pour être le premier à utiliser la douche au retour de leur session d’entraînement, et Uriel reconnaît sans mal Learchus, Cleander, Pasanius et lui-même, tels qu’ils étaient à l’adolescence. Il ne peut qu’assister à nouveau à la tentative malheureuse de dépassement de ce snob de Learchus que son jeune lui avait tenté il y a toutes ces années, et sentir, très douloureusement, le vicieux coup de coude que son rival devenu rival devenu balance devenu Capitaine par intérim devenu Sergent Vétéran lui avait balancé dans le pif pour calmer ces ardeurs. Cela fait toujours aussi mal, et même beaucoup plus mal que cela devrait, mais cette soudaine vulnérabilité attendra un peu, car voici nos deux vétérans rendus devant les portes de la caserne, qui sont, comme de juste, fermées.

Peu disposé à laisser quelques quintaux de fer et d’adamantium se mettre en travers de la route de son flashback, et constatant qu’Idaeus se dégrade à vue d’œil, Ventris pousse de toutes ses forces sur les lourds battants pour pouvoir entrer, là aussi déclenchant des douleurs sans doute excessives par rapport à l’effort consenti par un Space Marines en bonne santé. Enfin parvenu à ses fins, il finit par rentrer dans les baraquements, un Idaeus positivement cacochyme sur les talons. Là, il est témoin du rassemblement de la 4ème Compagnie dans son ensemble, spectacle grandiose même si esthétiquement critiquable2, qui fait battre très fort ses petits cœurs. Après avoir identifié pour le lecteur qui n’en demandait pas temps la moitié des guerriers assemblés en silence sur la place, il est pris à partie par cette vieille baderne de Learchus, qui vient lui reprocher de les avoir abandonnés. « Oui mais bon c’est un rêve buddy et t’étais pas obligé de me foutre la honte devant Idaeus en mentionnant que j’avais prêté un serment de mort petit galapiat » répond Uriel, un peu embarrassé. Qu’importe, Learchus répète à nouveau que Ventris est en train de les abandonner à l’instant même, et lui tourne le dos comme un prince, suivi par l’intégralité de la Compagnie. C’est moche de bouder les enfants. Lorsque le Capitaine abandonné cherche à raisonner le Sergent, ce dernier a de plus la mesquinerie de tomber en poussière, suivi par 99% des Ultra Schtroumpfs. Seul reste ce bon vieux Pasanius, qui en guise d’adieu lui applique une petite imposition des mains sur le torse, mais seulement après avoir passé son membre augmétique au micro-ondes. Bref, ça brûle très fort pour notre pauvre Uriel, qui commence sérieusement à regretter sa consommation irraisonnée de Chupa Chups.

Lorsqu’il reprend ses esprits, le voilà sur Medrengard, et Idaeus a laissé la place à ce fieffé filou de Honsou. Réagissant comme un vrai serviteur de l’Empereur, notre héros commence par corriger bellement cette canaille à mains nues, qui se laisse faire sans protester. Sur le point de commettre l’irréparable avec la propre hache démoniaque de sa Némésis, Ventris réalise au dernier moment que ça pourrait être une mauvaise idée, et suspend son geste. S’engage alors un dialogue Batman vs Joker like entre Force Bleue et Force Jaune avec Rayures Noires, les deux adversaires se balançant des amabilités pendant quelques minutes jusqu’à ce qu’un nuage de poussière ne se profile à l’horizon, annonçant l’arrivée prochaine des War Boys d’Immortan Joe (sans doute le dernier film visionné par Ventris avant son opération), ce qui ne présage rien de bon pour notre héros. Qu’importe, ce dernier se tient prêt à faire face à son destin, et à mourir bravement au combat si nécessaire. Après un dernier « Witness meeeeeee ! » envoyé à Honsou, Uriel se fait pulvériser par l’artillerie montée sur les machines hurlantes qui convergent sur sa position. Fin de l’histoire.

Début spoilerOu en tout cas fin du rêve. De retour dans le cabinet du dentiste, nous assistons à un court dialogue entre l’Apothicaire Selenus et le Chapelain Clausel, alors que l’enveloppe corporelle de Ventris décède sur la table d’opération. Bien que le premier se félicite de la réussite de l’opération3, il prévient son interlocuteur que le plus délicat reste à venir, le Capitaine devant maintenant trouver la force de traverser ce fameux Rubicon4Fin spoiler

1 : Pour sa défense, l’Empereur lui-même n’avait rien prévu de spécial dans ce département pour ses Space Marines. Et pourtant, avec une salive acide, ils auraient eu grand besoin d’un émail renforcé à l’adamantium.
2 : Vert + bleu + jaune, franchement, c’est moche.
3 : « Ça a marché ? »
« Oui, il est mort. »
« GG. »
4 : Qui doit maintenant être encombré de Space Marines de toutes origines, au grand déplaisir de la faune locale et des touristes.

AVIS :

Ayant laissé tomber la saga d’Uriel Ventris il y a bien des années et après avoir seulement lu la première trilogie consacrée par McNeill à sa figure tutélaire dans le futur grimdark, j’avoue que la lecture de The Death of Uriel Ventris ne m’a pas touché plus que ça, mais peut aisément comprendre qu’un fan plus impliqué que votre serviteur ait une toute autre opinion du texte en question. Si l’auteur ne prend pas grand soin pour dissimuler la véritable nature de l’épreuve que le Capitaine traverse en filigrane de cette nouvelle (toutes les douleurs ressenties par ce dernier au fil des pages étant la conséquence de sa Primarisation douloureuse), enlevant donc un peu de suspense à cette dernière, il a au moins l’amabilité de terminer son propos sur un cliffhanger convenable, justifiant le titre donné à l’histoire. Même si je ne doute pas une seconde que notre héros finira par émerger du Rubicon – il doit y avoir un service de ferry pour les personnalités Space Marines, car elles sont vraiment peu nombreuses à s’y être noyées – comme les lois du marketing le demandent expressément, on peut au moins accorder à McNeill une utilisation appropriée de la formule « mort d’Uriel Ventris », ce dernier finissant la nouvelle dans un état minéral (c’est plus grave que le végétatif). À titre personnel, j’aurais apprécié que McNeill précise ou rappelle pourquoi le fier Capitaine a choisi/subi cette opération « risquée », à part pour suivre la dernière mode chez l’Astartes, bien entendu.

Pour le reste, le passage en revue de la carrière et des connaissances les plus marquantes de notre personnage, s’il est cinématiquement mis en scène par l’auteur, risque fort de diviser le lectorat entre ceux qui comprennent qui est qui et a fait quoi, et les autres. En d’autres termes, si vous découvrez Uriel Ventris par l’intermédiaire de cette nouvelle, je ne suis pas convaincu que l’expérience vous semble très intéressante (mais ce n’est que mon avis). En tous les cas, sachez que le personnage dispose d’ores et déjà d’une abondante biographie signée de la main de Graham McNeill, et que ce dernier ne l’ayant certes pas fait « mourir » pour rien, il est à parier que d’autres ouvrages ou nouvelles suivront. Dans le second cas, rendez-vous ici dans quelques temps pour un retour positivement objectif sur la suite des aventures de ce vieux Vent Triste.

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The Shapers of Scars – M. Collins :

The Shapers of ScarsINTRIGUE :

Dans l’infirmerie du Wyrmslayer Queen, la Reine Guerrière de Fenris (surtout) et Capitaine Libre Marchand (un peu) Katla Helvintr passe un sale moment. Ayant fait l’erreur de tendre l’autre joue dans un concours de crachat d’acide, notre héroïne donne du fil à retordre et des points de suture à poser à son équipe médicale, qui s’affaire pour sauver ce qui peut l’être de sa carnation délicate et de sa chevelure luxuriante. La situation est tellement grave que la vieille Bodil (à ne pas confondre avec sa sœur, Bursul), gothi fenrissienne tout ce qu’il y a de moins scientifique, a été appelée à la rescousse. Entre deux jets de runes en os (non désinfectées, j’en suis sûr) et prophéties mystiques sur le destin de Katla, qui finira soit dévorée par les Tyranides, soit étranglée par un ver de terre – c’est écrit –, Bodil trouve le temps de sortir son matériel de tatouage et commence à gribouiller sur le visage de sa Jarl, soit disant pour lui donner la force de vaincre le mal qui la hante, mais plus sûrement pour se venger de la dernière demande d’augmentation refusée par cette pingre de Katla. On se console comme on peut.

Pendant que la Tin-Tin du 41ème millénaire dessine des élans sur le front de sa patiente, nous remontons le temps pour comprendre comment cette dernière s’est retrouvée dans cette position peu enviable. La série de flashbacks que Marc Collins intègre dans son récit nous permet de suivre Katla dans ses œuvres, qui consistent principalement à sillonner le vide à la recherche d’adversaires de valeur à combattre. Drôle d’activité pour un Libre Marchand, mais après tout, certains tiennent visiblement à jouir de leur liberté plus que de leurs marchandises, et comme ils ont un mot d’excuse signé par Pépé en personne, nous ne sommes pas en droit de leur demander des comptes sur l’usage qu’ils font des ressources de l’Imperium. La cible du Wyrmslayer Queen se trouve être un vaisseau tyranide esseulé par la dispersion de sa flotte ruche, mais que sa soudaine solitude ne dissuade pas le moins du monde d’attaquer son traqueur bil(l)e en tête. Bien aidée par le désir manifeste et palpable de la Jarl de Fenris de régler l’affaire au corps à corps plutôt que par salves de missiles interposées, la bioconstruction Xenos arrive à portée de tentacules, et envoie quelques nuées de cafards enragés à l’abordage de son tourmenteur. Voilà une situation bien engagée et tout à fait optimale pour les impériaux, comme chacun peut en juger.

Short story shorter, Katla emmène sa bande joyeux huscarls à la rencontre de l’infestation tyranide qui s’oublie sur la moquette du troisième pont, et finit par croiser le fer avec un Prince particulièrement caustique et affligé d’un gros problème d’acné. À trop faire la maline avec ses hachettes viking, elle finit par percer le bouton de trop, et se fait asperger d’un acide autrement plus corsé que celui qu’elle a pris avant de se ruer à la bataille. Cela ne l’empêche pas de finir l’impudente bestiole proprement avant de faire une petite pause coma bien méritée, et la suite nous est connue. L’histoire se termine par le réveil de Katla, qui trouve le tatouage tribal que la fidèle Bodil lui a fait sur la moitié de la tronche méchamment bath. C’est ce qui s’appelle faire contre mauvais profil bon cœur.

AVIS :

Petite histoire très simple (j’aurais pu résumer le propos en trois phrases sans omettre grand-chose d’important) au nom très compliqué, ce ‘The Shapers of Scars’ intrigue et déçoit à égales mesures. Pour commencer par les reproches, je me désespère de lire encore des affrontements spatiaux complètement stupides car physiquement abscons après 30 ans de publications 40K. Ici, nous rencontrons le cas d’école de l’auteur n’ayant pas intégré qu’une bataille spatiale se déroule à une échelle de centaines de milliers de kilomètres, et pas à portée de jet de chaussure (ou ici, de tentacules pour les Tyranides et de harpons pour les impériaux1), ce qui est à mon avis un héritage néfaste des derniers Star Wars. Reconnaissons au moins à Collins d’avoir de la suite dans les idées, car mettre en scène une héroïne tellement obnubilée par le pugilat qu’elle abandonne son rôle de commandante en pleine bataille pour aller jeter des javelots à la gu*ule de pauvres Gaunts dans les coursives de son propre navire, accompagnés d’hommes de main équipés comme des Burgondes du haut Moyen Âge, est d’une originalité rafraichissante par rapport au reste du corpus de la Black Library. Il faut de tout pour faire un Imperium, même des Fenrissiens bas du front et des auteurs en roue libre.

Si on est d’humeur plus charitable, on peut s’interroger sur les raisons qui ont poussées Collins à être si spécifique dans le choix de ses protagonistes, la rencontre entre « cultures » Rogue Trader et Space Wolves dans une nouvelle de quelques pages ne se justifiant à mes yeux que si ‘The Shapers of Scars’ est le prélude à une œuvre plus conséquente. Certains auteurs de la BL, Dan Abnett et Aaron Dembski Bowden en tête, ont déjà prouvé qu’il était possible de réaliser des fusions plus improbables que celle-là de façon convaincante, et au final à donner plus de substance et de saveur au gigantesque patchwork socio-culturo-politique qu’est l’Imperium. Il se pourrait donc que nous recroisions Katla Helvintr et la bonne Bodil dans un futur proche, hypothèse d’autant plus plausible que Marc Collins est toujours dans l’attente d’un premier roman pour la BL, et que les créneaux Rogue Trader et Space Wolves ne sont pris par personne en ce moment. Faîtes vos jeux.

1 : Imaginez un peu la longueur, donc la place et le poids, de la chaîne nécessaire pour qu’une telle arme puisse « ferrer » une cible et la ramener à bon port. Déjà que sur un Titan, c’est limite, mais sur une frégate…

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À Vos Ordres // By Your Command – G. Thorpe :

By Your CommandINTRIGUE :

<surlaplanetenicomedua> + <ledatasmithundrasactivea> + <reveillerungroupederobotskastelan>… … … <reparamétrage_enclenché>. Ahem. Je disais donc que sur la planète Nicomedua, le Datasmith Undra s’active à réveiller un groupe de robots Kastelan. Plus lisible, clair et agréable ? Je m’en doutais. Mais il va pourtant falloir vous endurcir, amis lecteurs, car cette synthaxe aglutinée reviendra à plusieurs reprises dans notre nouvelle, trouvaille suicidaire1 de Gav Thorpe pour faire comprendre à son public qU’iL y A dEs RoBoTs DaNs SoN hIsToIrE. Mais revenons-en à nos moutons électriques. Nous faisons la connaissance d’Alpha 6-Terror, Kastelan en chef de l’escouade de six qu’Undra a sorti de sa torpeur pour aider l’équipage du Titan Casus Belli à repousser les assauts d’une bande de Space Marines du Chaos, dont les semelles boueuses et les goûts musicaux déplorables (ce sont des Emperor’s Children) menacent la sainteté de leur machine de guerre géante. Ayant reçu ses instructions (Détruire. Sécuriser. Protéger.) de la part du Datasmith, assorties d’une mise en garde formelle contre la puissance destructrice des armes soniques de ses ennemis, Alpha part au combat à la tête de ses hommes machines, le zélé Undra sur ses talons.

Bien que l’épaisseur de leur carapace protectrice et le prodigieux armement qu’ils trimbalent permettent à nos marcheurs de combat de repousser sans ménagement les quatre Astartes emperruqués qu’ils finissent par débusquer en train de faire des cochonneries dans un coin de l’akropoliz titanesque, l’échauffourée en question ne réussit pas le moins du monde à Undra, proprement tronçonné par un Space Marine revanchard avant que ce dernier ne se trouve contraint à la retraite. Dans son dernier souffle, l’adepte parvient toutefois à insérer sa clé USB personnelle dans un port du brave Alpha, transférant son esprit dans la machine. Bien que la perte de son enveloppe corporelle, et l’impossibilité pour le robot porteur de manipuler la délicate tablette de données de son garde chiourme avec ses gros doigts énergétiques, empêche notre duo de garder le contrôle du reste de l’escouade, qui s’en va pesamment DPS-er un peu plus loin, Undra réussit à ordonner à sa nouvelle monture de se rendre à la metempsykoza, où l’animus du défunt pourra être définitivement sauvegardé. Contraint par les trois lois de la robotique, c’est donc le chemin que prend cette terreur d’Alpha.

Evidemment, le parcours se révélera semé d’embûches, mais notre vaillant androïde, bien aidé par son copilote à certains moments, et par d’heureuses coïncidences à d’autres, parvient finalement à proximité de son objectif… pour se prendre un méchant riff de gratte bien saturé en plein cortex de la part d’un Noise Marine embusqué au deuxième balcon, incapacitant notre héros de façon terminale. Et pourtant, on lui avait dit que l’écoute prolongée à haut volume pouvait provoquer des lésions irréversibles ! Alors que ses systèmes se ferment les uns après les autres, présageant sa « mort » prochaine, Alpha a le temps d’échanger quelques questions métaphysiques avec son passager, condamné comme lui, sur la vie, la mort, l’âme et les pizzas hawaïennes avant que son système interne ne plante définitivement. Notre histoire se termine-t-elle sur ce constat d’échec ? Non ! Car Alpha 6-Terror finit par se réveiller, mais réalise qu’il n’est plus en possession de ses membres. Et pour cause, cette sangsue d’Undra, aussi intransférable que Lionel Messi, a échappé au trépas en parasitant son hôte et prenant le contrôle de ses fonctions motrices. Le 31ème millénaire a vu l’invention des Kastelans, le 41ème millénaire celui des Kastelans schizophrènes. Et on dit que l’Imperium ne sait plus innover…

1 : Je veux dire que jusqu’à présent, la seule chose qu’on ne pouvait pas retirer à Thorpe était que son style était lisible. Et voilà qu’il se met lui-même un bâton dans les roues. Quelle légende.

AVIS :

Même en lui faisant grâce de ses vaillants mais peu inspirés efforts calligraphiques, sensés représenter les communications de la sainte trinité du Mechanicus (l’homme, [lamachine] et {l’animus}), Gav Thorpe signe avec ce By Your Command une autre soumission des moins mémorables, car se concentrant quasi-exclusivement sur la mise en scène d’un affrontement insipide entre deux factions dont les particularités ne sont pas bien mises en valeur. Ainsi, la cohorte robotique d’Alpha 6-Terror, bientôt réduite à sa plus simple expression à cause d’un bête oubli de mot de passe (ou l’équivalent au 41ème millénaire), se contente d’errer de salles en salles en tentant de neutraliser quelques Emperor’s Children en maraude, tandis que ces derniers restent cantonnés au rôle de goons en armure à paillettes.

Ce manque d’inventivité de la part de Thorpe dans la nature des péripéties qu’il met sur la route du mâle robot Alpha est d’autant plus triste qu’il semblait avoir préparé le terrain à plusieurs endroits pour introduire un peu de variété à son propos. Undra met en garde son roomba blindé contre le potentiel dévastateur des armes soniques des Noise Marines ? Alpha se prend un tir, certes dévastateur, mais sans grande valeur ajoutée d’un point de vue narratif, d’éclateur sonique, point. Les membres de l’escouade Terror se « rebellent » contre l’autorité de leur chef ? Il les laisse partir sans rechigner1. L’über super duper Magos Dominus Exasas arrive avec ses troupes pour flinguer du traître ? Il repart tout de suite après, et on ne le reverra plus de la nouvelle. Bref, Thorpe a vraiment opté pour la ligne droite en termes d’intrigue et de déroulement de son histoire, ce qui lui permet certes de la boucler en quelques pages, mais n’incite pas vraiment le lecteur à l’enthousiasme délirant à propos de cette dernière.

On pourrait arguer que l’intérêt de ce By Your Command repose davantage dans les réflexions sur ce que la mort (et à travers elle, la conscience de son individualité) représente pour un adepte du Mechanicus (qui peut donc se « réincarner » dans un appareil électroménager à proximité de sa dépouille) et pour un robot conscient comme les modèles Kastelan, mais là encore, ça ne casse pas trois méchadendrites à un Servo-Crâne. Si le sujet peut être intéressant, et a donné à la Science-Fiction des chefs d’œuvre tels que Le Cycle des Robots (Asimov), ce ne sont pas les deux pages que Thorpe consacre à ce thème en conclusion de sa nouvelle qui viendront bouleverser la perception du lecteur sur cette thématique2. La somme de péripéties banales et d’une conclusion embryonnaire ne se révélant pas supérieure à ses parties constitutives, on sera donc pardonné de ranger cette nouvelle dans le dossier meh de la BL.

1 : Moi qui commençait à me hyper pour un duel de robots, j’ai dû prendre sur moi.
2 : Si vous voulez lire une adaptation plus réussie de cette dernière dans l’univers de 40K, je vous recommande ‘The Kaban Project’ de Graham McNeill.

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The Offering – A. Clark :

INTRIGUE :

C’est la belle sombre nuit de Noël Nost’rnight, ce qui signifie une chose pour les habitants de Breaker’s Vale, avant-poste minier de Chamon : leur offrande doit être livrée au pied de l’arbre du don sans tarder, sous peine de terribles représailles. Guidée par leur Aîné, une petite délégation de péquenauds chemine donc péniblement jusqu’au point de drop ‘n collect le plus proche, chargée des maigres richesses que les locaux ont mis de côté à cette fin au cours de l’année écoulée. Au moment de repartir se calfeutrer dans les chaumines, le jeune Narry choisit cependant d’initier sa crise d’adolescence en questionnant tout haut le choix de ses concitoyens de détourner une partie de la production de Breaker’s Vale pour payer un tribut à ce qu’il considère n’être que de vulgaires brigands. Le moment a beau être très mal choisi, l’Aîné prend sur lui de remettre le petit rebelle à sa place, en lui racontant ce qui s’est passé l’année où l’offrande n’a pas été faite…

À l’époque, Breaker’s Vale venait d’accueillir son nouveau maire, Gustav Thatcher, fils exilé pour détournement de fonds d’une grande famille azyrite. Ce châtiment n’avait cependant pas suffi pour guérir Gus de sa sale manie de truquer les registres et s’en mettre plein les poches (ou dans le cas précis, le coffre), l’édile malgré lui de Breaker’s Vale ne comptant pas rester toute sa vie à moisir rouiller dans l’arrière-pays chamoniard, et ayant besoin d’accumuler un petit pécule pour pouvoir faire son retour dans le game. Un amoureux des livres (de compte) comme lui ne pouvait donc pas manquer de rapidement remarquer les discrètes mais visibles modifications apportées par un quidam tout aussi filou que lui à son propre registre, preuve indiscutable que le PIB de Breaker’s Vale se faisait siphonner par de multiples fripouilles. On pourrait presque parler de république bananière si Sigmar n’était pas un despote (et plutôt foudroyant qu’éclairé, si vous voulez mon avis).

Guère soucieux de partager, et encore moins ravi d’avoir été pris par une andouille par ses administrés, Gustav remonta rapidement à l’origine du problème, et fit main basse sur le butin collecté par les locaux, malgré les supplications de son majordome (Saul) de laisser les habitants déposer leur offrande annuelle aux Grobbi Blackencap, sous peine de représailles. Croyant avoir affaire à une vulgaire superstition paysanne, Gustav refusa tout net, ce qui mena Breaker’s Vale à connaître une nuit très agitée, comme vous pouvez vous en douter. Mécontents de n’avoir pas reçu leur dû, les Gits locaux organisèrent une soirée à thème « Spores sur la ville », résultant en de multiples vomissements et purulences fatales parmi la population. Sauvé par le dévouement de ses gardes et le bon cœur de Saul, Gustav parvint à s’enfermer dans son coffre alors que les séides de la Mauvais Lune prenaient d’assaut son manoir, laissant son majordome s’expliquer avec les intrus. Ce fut toutefois la fourberie de trop pour l’arnaqueur de la métropole, qui se rendit compte un peu trop tard que Saul connaissait lui aussi le code de la chambre forte, et n’avait plus aucun scrupule à laisser son employeur s’expliquer en tête à tête avec la mafia gobelinoïde chamoniarde (et le Troggoth du parrain à capuche local).

Son récit terminé, l’Aîné (un Saul un peu décrépit par le poids des années) constate avec satisfaction que cette grande gueule de Norry n’a plus rien à redire au versement de la dîme, et enjoint son monde à regagner ses pénates métalliques en attendant que le soleil se lève. Comme on dit dans le coin, entre la caverne et le fungus, mieux vaut ne pas mettre le doigt.

AVIS :

Andy Clark retourne aux champignons avec ‘The Offering’, nouvelle mettant à nouveau en lumière (de la Mauvaise Lune) les déprédations micellaires des Gloomspite Gitz, quelques mois après la sortie de son roman ‘Gloomspite’. Ce court format se suffit à lui même1, et nous sert une variante AoSesque du récit classique du tribut versé par une communauté démunie à une force maléfique pour éviter les ennuis. Le déroulement de cette petite fable sera donc familier à la majorité des lecteurs, l’originalité et la valeur ajoutée de ‘The Offering’ résidant (un peu) dans les quelques descriptions graphiques des maléfices dont sont capables ces farceurs de Gitz, et (un peu aussi) dans la révélation de l’identité « secrète » de l’Aîné, qui aurait pu être aussi bien un Thatcher assagi par son accrochage avec la ruralité profonde de Chamon que le très évident Saul. À titre personnel, et ayant lu à de nombreuses reprises que Clark avait produit pour ‘Gloomspite’ des passages proprement nauséeux (ce qui est une bonne chose pour de la littérature gobeline, j’imagine), je suis resté sur ma faim : mis à part la classique mouche dans le potage – ici livrée sous sa variante d’asticot dans le pudding – et quelques inhalations de spores aux effets dermatologiques regrettables, rien n’est vraiment dégoutant. Un peu trop insipide à mon goût donc, même si l’ensemble reste très correct.

1 : On notera tout de même la présence d’un personnage nommé Saul dans les deux histoires. Comme quoi, en cas d’infestation gobeline, better call Saul.

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Prologue à Nikaea // Prologue to Nikaea – D. Annandale :

Prologue to NikaeaINTRIGUE :

Enfermé dans sa chambre comme un ado rebelle, Malcador s’adonne à une de ses activités favorites : fouiller le Warp à la recherche de potins croustillants. Malgré les prodigieux pouvoirs psychiques dont dispose le Sigilite, et le fauteuil ergonomique premier cri que lui a offert son boss pour ménager ses lombaires et sa santé mentale (la qualité de vie au travail, c’est important), la tâche n’est pas sans danger pour Malcador1, qui finit cependant par ferrer un nom après avoir mis son bras dans l’œil d’une tempête Warp particulièrement vindicative : Thawra. Il semble que quelque chose de vilain soit en train de se passer sur cette planète impériale, et il est du devoir du Ma(l)c’ d’aller enquêter sur place.

Quelques temps plus tard, le noble vieillard fait son arrivée en orbite autour de la planète en question, escorté par une compagnie de Custodes menée par le Capitaine Bouclier Collatinus. Il semble bien que Thawra a connu des avanies récentes, comme les débris de sa flotte marchande et le remplacement soudain de la Gouverneur Vasra par sa conseillère Arkanasia en attestent. Rendus à la surface, les enquêteurs impériaux se font briefer par leur hôte : une faction de Psykers séditieux a lancé une attaque surprise sur le gouvernement planétaire, causant un beau bordel (et la mort de Vasra) avant que la contre attaque loyaliste ne les force à battre en retraite. Arkanasia attribue une bonne partie de cette remontada à l’emploi d’une force de Psykers fidèles à l’Empereur, qu’elle a personnellement entraîné pour combattre les félons. Etant elle-même une Psyker, elle est convaincue de tenir là une arme décisive pour la suite de la Grande Croisade, et meurt d’envie d’aller pitcher son idée sur Terra pour la prochaine saison de La Galaxie A Un Incroyable Talent. Malcador, en vieux reac’ qu’il est, nourrit de profonds doutes sur cette idée, qu’il garde cependant pour lui. Il faut avant toute chose s’assurer que l’insurrection de Thawra est définitivement matée, ce qui n’est pas encore chose faite. En effet, les derniers rebelles se sont retranchés dans des cavernes au Sud de la capitale, et on est sans nouvelles des forces envoyées par Arkanasia, dont sa brigade de X-Men, pour leur faire rendre gorge.

Lorsque Malcador, Arkanasia, Collatinus et ses Custodes arrivent sur le théâtre d’opérations, ils sont accueillis par une tempête psychique petite par la taille mais vicieuse de tempérament2. Sa cause ne fait pas de doutes pour un expert aussi calé en warperie que le Sigilite : l’affrontement entre Psykers indisciplinés a dégénéré en un mindfuck littéral (merci Slaanesh), et il est urgent d’agir pour refermer la brèche avec l’Immaterium avant que la tempête n’engouffre tout Thawra. Fort heureusement, Malcador est venu avec les outils appropriés pour cette tâche : sa mauvaise humeur légendaire et sa capacité à faire plusieurs choses en même temps (indispensable lorsqu’on doit gérer une bande de Primarques mal élevés), ici balancer des décharges de taser aux Psykers survivants tout en évitant de laisser traîner sa toge dans la boue warpienne. Et pour ceux qui se demandent, non, les Custodes ne servent pas à grand-chose, à part balancer des rafales de bolter au jugé au niveau des genoux avec un angle de tir de 45°C. Pour des raisons inexplicables, Arkanasia décide soudainement de partir en courant vers la tempête avant que le Régent n’ait fini de réger le problème. Les derniers Psykers en état décident alors de converger sur elle, ce qui aurait pu très mal se finir pour Malcador n’eut été la foi chevillée au corps d’Arkanasia pour l’Empereur. Au lieu de vaporiser le petit vieux pénible qui tchipait sans merci ses condisciples, la Gouverneur par intérim choisit noblement de gueuler un grand « POUR PEPE !!! » en direction du ciel, avant de se prendre une rafale de bolts dans le buffet (qui n’arrivent même pas à la tuer sur le coup, c’est dire si les Custodes sont surfaits).

Tout est bien qui finit quand même pour Malcador et Collatinus, qui, en gentlemen qu’ils sont, viennent assister aux dernières paroles d’Arkanasia. Cette aventure provoque un certain malaise chez le Sigilite, qui n’a dû son salut qu’à la foi de la Psyker, c’est-à-dire au concept que lui et son boss se sont jurés d’éradiquer. Se pose également la question du positionnement de l’Imperium envers les pouvoirs psychiques : sont-ils trop dangereux pour être utilisés, ou bien un juste milieu est-il atteignable ? Rendez-vous sur Nikaea dans quelques années pour reprendre cette discussion…

1 : On en déduit qu’en M30, il n’existe plus de bouton « j’ai de la chance » sur la barre de recherche Google. Cela aurait été plus confortable pour tout le monde.
2 : Il semble à Malcador que la tempête sait qu’il se trouve sur Thawra, et qu’elle cherche à l’humilier, comme les inscriptions insultantes sur sa mère qui apparaissent à la surface du maelstrom semblent l’indiquer.

AVIS :

David Annandale attire l’attention du lecteur sur une question intéressante de l’Imperium naissant : la formation et le contrôle des Psykers par les autorités impériales (in)compétentes. À l’époque, l’Empereur avait d’autres chats à fouetter que de mettre des œillères aux cohortes de mutants acheminés par les Vaisseaux Noirs jusqu’à Terra, tâche peu gratifiante mais indispensable à la survie de son empire galactique. Pendant la Grande Croisade, il y a fort à parier que le sujet était traité au cas par cas, avec des risques de débordement, parfois causé par un enthousiasme sincère mais dangereux, comme cela a été le cas sur Thawra. Si une des missions de Malcador consistait bien à gérer les crises de ce genre pendant que son patron localisait sa marmaille, on comprend mieux pourquoi il tenait temps à renforcer son équipe : à son âge, arpenter la galaxie pour mettre des glaçons psychiques dans le slip du moindre Psyker en rut n’est pas une activité conseillée.

Sur cette base intéressante, Annandale ne développe cependant pas grand-chose, à commencer par des connexions avec Nikaea, ce que le titre laissait pourtant envisager. Il aurait été approprié, à mon sens, de jouer des rapports compliqués que le Warp entretient avec notre continuum spatio-temporel pour faire voir à Malcador des indices du procès en sorcellerie intenté à Magnus et aux Librarius des Légions de l’Astartes, voire de la déchéance de l’humanité telle qu’annoncée par l’Hérésie d’Horus. Rien de tout ceci ici, seulement une nouvelle très « premier degré », saupoudrée d’une pincée de fluff et terminée par quelques remarques d’ordre général sur le rapport qualité-prix de l’Immaterium. Il y avait moyen de mieux faire, mais on sauvera ‘Prologue to Nikaea’ du pilori compte tenu de son absence de défauts majeurs, ce qui place cette œuvre hérétique parmi les plus abouties de son auteur.

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A Coin for the Carrion Thieves – J. French :

A Coin for the Carrion ThievesINTRIGUE :

Le mauvais côté de l’éternité, c’est que l’on devient vite désabusé. Demandez à Ctesias par exemple : autrefois un fringant Thousand Sons passionné par la recherche de la vérité suprême et l’exploration de la nature de l’univers, quelques milliers d’années d’hérésie l’ont changé en vieux ronchon réactionnaire, passant le plus clair de son temps à marcher dans des coups foireux et le reste à regretter de l’avoir fait. C’est ainsi que notre ami s’est retrouvé en rade sur les Mondes Déchus, après que la tentative d’Ahriman de RE-lancer la Rubrique – ça avait tellement bien marché la première fois – se soit soldée, ô surprise, par un nouvel échec retentissant. Voilà ce qui arrive lorsque l’on suit les conseils d’un Duc du Changement qui se révèle être le Professeur Shadoko1 ! Encore 999.998 tentatives à rater et les résultats suivront, c’est certain.

Exilé avec quelques disciples dans la rase campagne de l’Œil de la Terreur, Ahri (un ami qui vous veut du bien) a besoin de se replumer. Par chance, les locaux sont assez conciliants : répondant aux noms divers et variés de Discordia, Fidèles Suivants de la Fausse Concordance Universelle, ou plus simplement, Voleurs de Charognes, cette bande de ferrailleurs de l’espace est prête à fournir des transports de seconde main (mais ayant passé le contrôle technique) aux Thousand Sons égarés… mais pas gratuitement. Comme le fait remarquer finement leur meneur, l’aptement nommé Premier Amasseur, dans l’Œil de la Terreur, le concret est une valeur refuge. Ce qui ne fait pas tellement les affaires d’Ahriman et de sa cabale, dont le fond de commerce réside plutôt dans les discours grandiloquents, les fausses promesses et les tours de passe passe. Fort heureusement, l’indispensable Ctesios pourra utiliser de sa spécialisation démoniaque (Monsieur est invocateur-lieur, ce qui est presque aussi bien que plombier-zingueur) pour tuner méchamment un vaisseau des Charognards, et ainsi fournir une monnaie d’échange acceptable par l’Amasseur.

Aussitôt dit, aussitôt fait : Ctesios se met à l’œuvre et repeint l’intérieur du vaisseau en question avec des litres de fluides pas vraiment ragoutants, tandis que son assistant Lycomedes saupoudre le sol de dents de lait, comme le veut la coutume. Déjà pas très jouasse de servir de bonniche au démonologue, Lycomedes devient carrément furax lorsque ce roué de Ctesios se sert de lui comme appât à démon pour son invocation, bien évidemment sans lui avoir demandé la permission avant. À la décharge de Ctesios, le lecteur un brin au fait des choses du Chaos avait compris que c’était le destin probable qui attendait ce sous fifre, ce qui est suffisant pour qualifier le manque de prescience du Thousand Sons de faute grourde (grave + lourde), passible de la damnation éternelle…

Début spoiler…Ceci dit, ce destin peu enviable sera épargné à Lyco’, Ctesios rabattant le capot sur le groin du démon juste avant que ce dernier ne passe à table. Piégé dans le véhicule consacré, qui pourrait très bien être une Fiat Panda pour ce que l’on en sait, l’habitant du Warp est condamné à servir d’ordinateur de bord et de mécanicien embarqué à la machine jusqu’à la fin des temps, pour le plus grand avantage de son nouveau et heureux propriétaire, Ah ma sœur (et la tienne ?). En échange, Ahriman récupère une petite armada de 14 navires, beaucoup plus qu’il n’en faut pour embarquer les reliquats de sa bande de guerre. Comme on peut s’en douter, le grand cornu a un plan à l’arrière du casque et ne compte pas passer les prochains siècles à se tourner les pouces. La suite au (peut-être) prochain épisode…Fin spoiler

AVIS :

John French pourrait ne pas en avoir tout à fait fini avec un de ses personnages fétiches, et donne avec ce ‘A Coin for the Carrion Thieves’ une suite aussi inattendue qu’intrigante à la trilogie consacrée au sorcier le plus talentueux et le moins efficace de la galaxie. Cette petite histoire permettra aux familiers de la série de retrouver, j’en gage, quelques vieilles connaissances – Ctesios et Lycomedes – qui tiennent les premiers rôles de ce récit de troc chaotique. Les nouveaux venus apprécieront quant à eux les efforts faits par French pour leur permettre d’apprécier pleinement cette nouvelle, dont ni l’intrigue ni le déroulement ne reposent sur des éléments inconnus du profane (ce que d’autres auteurs de la BL n’hésitent pas à faire). Au final, c’est assez sympathique, à l’image de ce bon vieux Ctesios, qui se contente de faire une sale blague à Lycomedes au lieu de le faire posséder par un démon majeur, comme on s’y attendait pourtant, et lui fait même la fleur de le prendre comme apprenti (comme quoi, l’allégeance « chaotique bon » existe bel et bien à 40K), et cela donne plutôt envie de découvrir cette série, ou de le voir se poursuivre.

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Secteur 13 // Sector 13 – S. Mitchell :

40K_Sector ThirteenINTRIGUE :

Après les événements de Desolatia (‘Fight or Flight’), le Commissaire Cain profite enfin de la vie et d’un théâtre d’opérations beaucoup plus calme sur l’agrimonde de Keffia, où une coalition de régiments impériaux est à pied d’œuvre pour purger une infestation de Genestealers. Son rattachement à une compagnie d’artilleurs et sa popularité naissante donnent en effet à notre héros beaucoup d’occasions de faire son devoir de façon plaisante : à des kilomètres de la ligne de front et/ou à proximité des hors d’œuvre du Gouverneur local. Une vraie sinécure en quelque sorte, que le talent de Cain pour se mettre tout seul dans de sales draps va bien sûr interrompre de la plus brutale des façons.

Au début de la nouvelle, le Commissaire pensait pourtant avoir finement joué en trouvant un prétexte en plasbéton de décliner l’invitation du Colonel Mostrue de participer à un briefing de haut niveau, honneur lui ayant certainement valu de finir en première ligne sur une quelconque offensive décisive. Très peu pour Cain, qui a donc fait remarquer à l’officier qu’il était de son devoir d’aller superviser le rapatriement d’une poignée de Gardes des Glaces mis au trou par l’Arbites local, à la suite de troubles du voisinage dans la ville de Pagus Parva. Une tâche ingrate, mais qu’il faut bien faire, surtout quand cela permet de passer du temps avec la plastique Sergent Wynetha Phu. L’Empereur le veut, toussa toussa.

Rendu sur place avec son fidèle Jurgen, Cain badine un peu avec l’accorte Arbites, tout en sortant son numéro de Commissaire c’est juste mais vert (et inversement) aux cinq pochtrons bagarreurs qui ont causé du grabuge la nuit dernière. Bien que peu intéressé par les accusations de ses charges envers les locaux, qui auraient mis des roofies dans leurs verres pour leur faire les poches en douce, Cain accepte d’aller faire une enquête de voisinage (avec Wynetha bien sûr) pour tirer les choses au clair. Ses pas le conduisent alors jusqu’au bar du Crescent Moon, où travaille la sculpturale Kamella, escort girl rurale et ultime souvenir que gardent les Gardes de leur dernière soirée. Confrontés à la méfiance du propriétaire, qui ne consent à ouvrir la porte que devant le risque élevé de se la faire enfoncer par les enforcers – un comble –, Cain, Wynetha et le planton qu’elle a amené avec elle pour faire le nombre et grimper le bodycount à peu de frais1 sont forcés de prendre leur grosse voix impériale pour convaincre l’habitant de les laisser accéder à la chambre de Kamella. Et c’est là que les choses se corsent pour nos héros, car les paumes de Cain se mettent à le chatouiller, super pouvoir indiquant de façon indubitable que quelque diablerie est à l’œuvre…

Début spoiler…Et en effet, Kamella se trahit en demandant au Commissaire s’il aime ce qu’il voit (elle était nue sous ses vêtements à ce moment là) en utilisant son patronyme, qu’elle n’avait aucun moyen de connaître. La seule explication logique (mises à part celles basées sur la relative célébrité de Cain ou une ouïe un peu plus fine que la moyenne) est que la donzelle est capable de communiquer par télépathie avec le barman, comme deux hybrides Genestealers peuvent le faire. C’est le début des ennuis pour nos héros, qui se retrouvent vite assaillis par un essaim entier de cultistes plus ou moins présentables. Laissant l’Arbites inconnu mourir au champ d’horreur, comme convenu, Cain et Wynetha parviennent à s’échapper de ce guêpier et à rejoindre le commissariat (pas le sien, le nôtre, enfin je me comprends), où les attendent Jurgen et les cinq Gardes biturés. Bien que la bâtisse soit solidement construite et capable de soutenir un siège, la situation des impériaux ne va pas en s’améliorant car il s’avère bientôt que deux des bidasses ont chopés une MST tyrannique à trop fricoter avec l’habitant.e, et sont tombés sous la coupe de l’essaim. Contraints de se replier sur le toit du bâtiment après que leurs collègues aient fait défection et ouverts la porte aux hordes baveuses et chitineuses de Pagus Parva, Cain et Cie ne doivent leur salut qu’à l’arrivée propice et totalement inespérée d’un régiment de Cadiens, qui venait sans doute prendre un peu de bon temps après une campagne éprouvante sur le front, le vrai, le dur, le velu. Pas de chance pour les troupes de choc, il faudra passer sur le corps des filles de joie locales avant de leur passer… C’est peu conseillé de toute façon.

L’histoire se termine triplement bien pour Cain, qui écope d’une médaille, d’une réputation héroïque encore grandie (alors qu’il a simplement et bêtement pété les plombs en plein combat), et d’un regard lascif de Wynetha lors de la soirée de remise des honneurs. Vu comme ça, on aurait presque envie de s’engager.Fin spoiler

1 : Mitchell ne se donne même pas la peine de le baptiser, c’est dire s’il était mal barré le garçon.

AVIS :

Comme l’illustration d’époque qui accompagne cette chronique le fait subtilement remarquer, ‘Sector Thirteen’ (le nom de la zone autour de Pagus Parva) est une nouvelle collector, remontant aux tout premiers chapitres de la longue, troublée et caustique histoire de Ciaphas Cain. 2003, pour être précis. La recette est la même que pour toutes les autres soumissions de Sandy Mitchell pour cette série : une approche décomplexée (les Anglais ont la jolie formule de tongue-in-cheek) du background de Warhammer 40.000 avec un gros B, permettant au personnage de sitcom qu’est Cain de vivre des aventures palpitantes à son corps défendant. Après avoir enquillé de nombreuses itérations de cette formule consacrée, qui a offert une carrière respectable à Mitchell au sein de la Black Library, je dois reconnaître que certains épisodes sont plus réussis que d’autres, et ‘Sector Thirteen’ fait partie du haut du panier. Il m’est difficile de quantifier précisément ce qui fait de cette nouvelle un succès, mais il me semble que le rythme est plus enjoué, et les blagues plus efficaces que pour d’autres courts formats de Sandy Mitchell. Bref, c’est une des (més)aventures les plus satisfaisantes de l’incorrigible et incorrigé Ciaphas Cain que nous tenons là, et un point d’entrée idéal pour tout novice cherchant à se frotter à cette légende de la Black Library.

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Embers of Extinction – B. Easton :

Embers of ExtinctionINTRIGUE :

Souvenez-vous de la bataille de Phall. En toute objectivité, Perturabo s’y était fait botter le joint de culasse par un Alexis Polux héroïque en défense, et qui aurait même pu remporter l’affrontement si son pôpa ne lui avait pas hurlé de rentrer tout de suite à la maison depuis la fenêtre du Palais Impérial au pire moment (‘The Crimson Fist’). Ce qui s’est passé immédiatement après cet épisode honteux pour les Iron Warriors, Brandon Easton propose au lecteur de le découvrir ici.

Notre récit commence sur les pondérations mathématiques et paléolithiques du Primarque de Fer alors que le Capitaine Vort de l’Iron Blood passe en revue les pertes subies par la Légion durant le tragique épisode phallique. Il ne faudra pas s’étonner si les Légionnaires développent des complexes à ce niveau et commencent à surcompenser. Bien loin de remettre en question le bien fondé de sa stratégie, dont l’implacable logique se contrefiche bien de quelques dizaines de milliers de morts et centaines de vaisseaux détruits ou endommagés, Perturabo cherche au contraire à maximiser les pertes chez les Imperial Fists, et ordonne donc la poursuite de trois croiseurs loyalistes jusque dans le système de Tarkovsky Epsilon. Une tâche bien triviale pour un vaisseau de type Gloriana, mais si on ne peut plus exercer ses penchants sadiques rigoler de temps en temps, où va la galaxie ma bonne dame ? Comme on peut s’y attendre, le Pylades, le Ramses et la Dévastation ne font pas de vieux os face à la fureur mathématiquement appliquée de l’Iron Blood. Avec un torpillage en règle, un écrasement provoqué sur une géante gazeuse et un éperonnage en bonne et due forme, Pervers Peper’ se paie même le luxe de marquer des points de style en offrant à chacune de ses victimes une fin personnalisée. S’il avait eu un nombre suffisant de victimes, on peut imaginer que l’un des vaisseaux de Dorn aurait été intégralement mastiqué, avalé, digéré et déféqué par son intraitable frangin afin de varier les plaisirs d’un côté et les insultes de l’autre. Et on ose dire que Perturabo n’a pas l’âme d’un artiste !

Cette sidequest rondement menée, le bourreau d’Olympia consent enfin à reprendre des activités normales, comme par exemple se rendre sur Hydra Cordatus, où l’attendent Fulgrim et ses Emperor’s Children, ainsi qu’un nouveau camp retranché romain Imperial Fists à raser de fond en comble, afin de prouver à l’Empereur qu’il est le plus brave de tous les peuples de la Gaule, ou quelque chose comme ça. Tout cela a été couvert dans ‘Angel Exterminatus’ et nous intéresse donc pas ici. En revanche, Easton se permet de meubler un autre « blanc » du parcours hérétique de son héros, précisément le moment qui suivit la remise de Forgebreaker à Perturabo par Horus en gage d’une bro-itude éternelle. L’épisode ayant eu lieu quelques semaines après la purge de sa planète d’adoption, il est somme toute logique que le Primarque se soit retrouvé avec un peu de temps à tuer, après avoir épuisé tout son stock d’Olympiens (à tuer également, pour ce qui ne suivent pas). Malgré la perfection manifeste de son cadeau, forgé par Fulgrim en personne, Perturabo ne put s’empêcher d’apporter de nombreuses modifications à l’arme, dont un changement de son centre d’équilibre afin d’en maximiser les dégâts1. Cette longue session de forge fut également l’occasion d’échanger quelques aphorismes impatients et acérés avec un de ses fistons, le pâle autant que curieux Arhalin, dont les questions lancinantes ne s’avèrèrent pas assez stupides pour que son père juge bon de l’utiliser comme sac de frappe pour tester son nouveau jouet. Cela ne s’est pas joué à grand-chose, ceci dit…

1 : Et également (et surtout) pour déconcerter et handicaper un éventuel adversaire qui tenterait de retourner Forgebreaker contre lui. Easton a tapé dans le mille avec ce mélange de paranoïa absurde et de rationalité implacable, tout à fait « perturabien » dans l’esprit.

AVIS :

Débuts solides et sérieux pour Brandon Easton, qui n’a pourtant pas choisi la facilité en documentant deux épisodes de la vie de Perturabo prenant place entre plusieurs périodes et événements déjà traités par d’autres auteurs avant lui (French, McNeill et Haley, pour n’en citer que trois). Le risque de faux raccord s’en trouvait logiquement accru, mais le rookie s’est fort bien acquitté de sa tâche, en inscrivant sa prose dans la droite ligne de celles de ses prédécesseurs. Au passage, il confirme et souligne le portrait psycho-rigide et surhumainement intransigeant de l’Homme de Fer à l’aide d’exemples et d’illustrations de son cru, ce qui permet d’envisager Perturabo sur un jour à la fois un peu différent et totalement cohérent avec le reste du corpus hérétique (que j’ai lu). Tous les Primarques et personnages de l’Hérésie n’ayant pas eu cette chance, pour diverses raisons (au rang desquelles le manque de recul et de préparation de nouveaux auteurs), je me devais de saluer le sans-faute d’Easton à cet endroit.

J’ai également bien aimé les raisons convoquées par l’auteur pour expliquer pourquoi un être aussi rationnel et résilient que le fils d’Olympia a fini par commettre l’inexplicable : trahir son Père et l’Imperium pour le Chaos. Selon Easton, ce serait – en partie – à cause de la trop grande tolérance de Pépé envers le mysticisme et les chicaneries en tout genre dans lesquelles le genre humain à tendance à se vautrer naturellement. Pour un progressiste hard boiled comme Perturabo, il aurait fallu guider l’humanité au forceps vers un idéal de perfection scientifique et technique, en extirpant au passage tous les corps et concepts « mous » venant freiner la transition. Ce à quoi on pourrait répondre que c’est justement ce à quoi l’Empereur tendait, comme sa tentative malheureuse d’excommunier le fait religieux l’a laissé apparaître. Sans doute était-ce trop peu et trop tard pour son intraitable fiston, dont la patience a fini par craquer à la suite de sa campagne cauchemardesque contre les Hruds et l’annonce de la trahison d’Olympia. Cette nouvelle nuance de gris sur la palette de la trahison de l’Iron Man vient enrichir le camaïeu de sa psyché (si si), sans jurer avec les touches déjà apportées par les biographes précédents de notre homme. Pas mal du tout. J’ai donc hâte de lire la suite des travaux de Mr Easton pour la BL, en espérant qu’il reste dans cette veine.

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Le Poing d’un Dieu Courroucé // The Fist of an Angry God – W. King :

The Fist of an Angry GodINTRIGUE :

Assignés à la conquête de la forteresse d’Azumbard, dans le Royaume d’Aqshy, le Liberator-Prime Balthus1 et ses Knights Excelsior sont à la peine. Non seulement la décoration psychédélique et les relents d’encens bon marché de leurs adversaires Tzeentchiens sont un affront à leurs sur-sens de surhommes, mais, nombre sacré du Dieu Poulet oblige, ils ont passé des plombes à sécuriser les neuf tours du bastion adverse, ce qui pèsera lourdement sur leur rémunération variable de l’année, alors que les Hammers of Sigmar affectés au front Slaaneshi ont une charge de travail un tiers moindre. Saleté de numérologie cosmique. Faisant contre mauvaise fortune feu de tout bois, Balthus mène ses ouailles à l’assaut de l’ultime donjon adverse, sans réussir à se défaire d’une étrange sensation de déjà-vu, qui ne lui dit rien qui vaille. L’absence de résistance des disciples de Tzeentch lui semble en effet de mauvais augure, et cette sinistre prémonition se trouve vérifiée lorsque la petite force de Stormcast qu’il commande se retrouve embusquée et submergée par une horde d’emplumés vindicatifs. Ayant pris deux méchants coups sur l’occiput, notre héros tombe dans les bras de morphine, et se réveille enchaîné dans un laboratoire arcanique, où il fait la connaissance de la sorcière Aesha, qui à son grand étonnement, semble le connaître2.

Après quelques instants consacrés à tenter de se défaire de ses liens enchantés, sans grand succès (ces derniers se resserrant de plus en plus à chaque fois que Balthus force dessus, conséquence d’un puissant enchantement… ou de l’utilisation d’un simple demi-nœud), le Liberator prisonnier – ironie – accepte d’ouvrir le dialogue avec Aesha, qui, cornes et sabot mis à part, se révèle être une hôte plutôt décente, et se montre plus intéressée par la poursuite des examens initiés sur son sujet d’étude que sur le sacrifice de ce dernier. L’échange permet de comprendre que les motivations de la magus sont, en toute simplicité, de percer à jour les secrets ayant permis à Sigmar de créer les Stormcast Eternals, qu’Aesha considère comme la clé de la transcendance divine. Ayant appris, sans doute à la lecture des tomes de la Fin des Temps (trouvés en occasion sur e-bay), que beaucoup des membres du panthéon de l’Ordre et de la Mort ont commencé leur carrière comme de simples mortels dans le Monde qui Fut, notre ambitieuse sorcière ne voit pas de raison de ne pas tenter le coup à son tour. Horrifié par ce projet blasphématoire, et peut-être également par le résultat de l’IRM complet qu’Aesha lui a fait passé grâce à ses miroirs ensorcelés, Balthus décide de contrecarrer les plans de sa Némésis en… rage-quittant. Ou plutôt, en essayant de rage-quitter. Car sa tentative héroïque de se suicider en tirant à mort (littéralement) sur ses chaînes se fait contrecarrer par Aesha, qui le met en pause avant qu’il ne perde son dernier PV, et profite de son coma réparateur pour infiltrer ce rêve, étrange pénétrant, de la fin inconnue de Balthus.

En des temps très anciens, Balthus était en effet Leoric, prince héritier du royaume d’Asqualon. Son règne fut toutefois aussi court (3 minutes et 26 secondes) que sanglant, puisqu’il hérita de la couronne après la mort de son père pendant la défense du Temple de l’Orage, dernier bastion de l’Ordre face aux assauts du démon Arkatryx et de ses disciples indisciplinés. Garrotté par son adversaire, Leoric invoqua Sigmar pour venger son paternel, et fut exaucé lorsque le Dieu lui envoya un éclair salvateur, non pas directement sur le démon, ce qui aurait été trop simple, mais sur l’épée que notre héros brandissait toujours. Chargé à bloc, Leoric trouva la force d’électrocuter son adversaire d’un ultime horion, avant de partir en direction de la forge divine. Par un hasard qui n’en était sans doute pas un, Aesha était également présente ce jour là (après tout, c’est elle qui a coup fatalisé le roi Aldred), ce qui donne un nouveau sujet de discussion tout trouvé à nos deux personnages une fois Balthus émergé de sa torpeur. S’en suit une joute verbale digne d’un débat de la primaire démocrate, avec Aesha se posant en Bernie Sanders chaotique, en lutte contre le 1% asqualique ayant exploité le petit peuple et fait exécuter son père parce qu’il avait volé une miche de pain. Face à ce déferlement de progressisme, Balthus ne peut que se référer aux bullet points qui lui ont été inculqués pendant sa formation: « l’Ordre, c’est cool » et « Yes, Sig’ Can ».

Ce passionnant échange est toutefois écourté par la notification que reçoit Aesha sur son portable professionnel, l’informant de l’intrusion d’une meute de militants en sigmarite dans son QG, avanie qu’il lui faut gérer sans attendre. « Pas si vite poulette » lui répond Balthus, qui dégaine son special move et gueule « Par le pouvoir du <insert random stuff here> ancestral, je détiens la force toute puissante! », et parvient enfin à se défaire de ses chaînes par l’intervention du saint sigmarite esprit. La fin de la nouvelle voit nos deux protagonistes jouer au chat et à la souris dans le dédale du donjon d’Aesha, jusqu’à ce qu’ils arrivent dans la salle de téléportation aménagée par cette dernière, et qui se révèle être le Temple de l’Orage où ils se sont rencontrés pour la première fois il y a des millénaires. S’il ne parvient pas à stopper la bougresse avant qu’elle ne s’éclipse, Balthus a au moins la satisfaction de mettre la main sur son ancienne épée, qu’il était le seul à pouvoir retirer de la pierre dans laquelle il l’avait plantée en transperçant le démon (ça me dit vaguement quelque chose…). Un milliard de Tzaangors occis plus tard, notre héros est récupéré par ses frères d’armes, esquinté mais en vie, et ayant inscrit sur sa to do liste de caler un nouveau tête à tête avec Aesha pour discuter du bon vieux temps dès qu’elle se montrera disponible.

À ne pas confondre (je l’écris car je l’ai fait moi-même) avec Balthas Arum, la réincarnation de Balthazar Gelt dans les Royaumes Mortels. 
2 : Le plus étonnant pour le lecteur est surtout la question que pose Balthus à sa geôlière juste après qu’elle l’ait identifié. OSEF quoi mon grand.

AVIS :

King fait ses premiers pas dans les Royaumes Mortels de manière assez discrète avec The Fist of an Angry God. Comme on pouvait l’attendre, et peut-être l’espérer, son passif d’auteur historique pour Warhammer Fantasy Battle apparaît clairement dans cette nouvelle à travers le personnage d’Aesha, dont la connaissance du Monde Qui Fut apparaît comme un clin d’œil (je le vois comme ça en tout cas) au parcours de King. Ce dernier prend en marche le train du « Sigmar-bashing » qui sous-tend beaucoup des dernières publications mettant en scène des Stormcast Eternals, et dépeint les méthodes de recrutement du Dieu Roi sous un jour contrasté, tout en justifiant en partie le passage au Chaos d’Aesha. Pas de manichéisme ici donc, et c’est bien le moins qu’on attendait de la part d’un contributeur aussi expérimenté que Bill King, dont les écrits ont toujours mis en avant la « grisaille » ambiante des univers de GW.

À titre personnel, je suis toutefois déçu de l’articulation de la nouvelle, dont le début est finalement insignifiant (je m’attendais à ce que King fasse une révélation sur un stratagème spatio-temporel utilisé par les disciples de Tzeentch, ce qui aurait justifié la sensation de « déjà-combattu » de Balthus) et la fin hurle littéralement « À SUIVRE… » à la tête du lecteur1. Le fond étant, comme dit plus haut, assez intéressant à défaut d’être captivant (cela montre au moins que King a digéré le background de cette nouvelle franchise), je trouve dommage que la forme n’ait pas été plus pensée et soignée par l’auteur. Ceci dit, King ne s’est jamais montré très doué sur les très courts formats, ses meilleures nouvelles se situant sur la marque des 40/50 pages. Quoiqu’il en soit, il convient de suivre la suite des événements avec attention, et espérer que le King finisse par remettre la plume sur le fils spirituel ayant lui aussi réussi son passage de Warhammer Fantasy Battle à Age of Sigmar, un certain Mr G. Gurnisson…

1 : En plus de passer vraiment vite sur des éléments pas anodins du tout pour l’intrigue, comme la libération miraculeuse de Balthus.

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The Dead Hours – D. Guymer :

The Dead HoursINTRIGUE :

Ereintés après une rude journée de tuerie en Shyish, Gotrek et Maneleth ont fait halte dans la petite ville de Skeltmorr pour se requinquer en attendant l’aube. Lorsque commence notre histoire, le Duardin a sombré dans le sommeil du juste après avoir vidé un tonneau de de bière et s’être fait un masque de beauté à base de jeune d’œuf et de bacon (c’est ça où il fait la vaisselle avec la langue et sans les mains). Maneleth s’est elle éclipsée pour prendre l’air, et, d’après la discussion entre les deux occupants de l’auberge investie par le vieux couple, aurait fait une mauvaise rencontre sur le chemin. Skeltmorr doit en effet un bon paquet d’os à Nagash, et les rares visiteurs sont donc invités à faire des donations en nature à l’œuvre de salut public municipale. Un tel destin attend également Gotrek, dont l’état comateux n’inspire pourtant pas confiance à Nieder Pedsen, le malabar chargé de l’amener, mort de préférence, jusqu’au repaire du redouté Tithekeeper.

La méfiance du reître était justifiée car le nabot émerge du coltard au moment où Pedsen s’apprête à lui faire tâter de son gourdin, et parvient à massacrer l’aubergiste (qui pour sa défense, venait de lui tirer dessus à la chevrotine) et à traîner son complice dans la rue malgré une gueule de bois carabinée. Sous ses abords bougons, Gotrek ne peut en effet laisser Maneleth dans les griffes des locaux, et demande donc à être conduit jusqu’à ce fameux Tithekeeper afin de plaider sa cause (un peu) et de planter sa hache (surtout). Sans doute nommé Lagardère sous sa cagoule de fonction, c’est le fonctionnaire tortionnaire qui vient toutefois à lui, en même temps que la moitié de la ville, réveillée par les beuglements imbibés du Duardin. Trop musclé/runé/ravagé pour être incapacité par les faibles attaques des Skeltmorriens, Gotrek massacre sans distinction tous ceux qui ont le malheur de croiser le chemin de sa hache, à commencer par le Tithekeeper. Le « boss final » de la nouvelle a donc mordu la poussière alors que nous n’en sommes qu’à la moitié du récit : comment Guymer va-t-il meubler la fin de ce dernier ?

La réponse est : avec des étagères Ikea et une petite visite dans la crypte du temple de Sigmar local, reconverti il y a quelques millénaires en entrepôt de stockage par les autorités de Skeltmorr. C’est en effet là qu’attend cette princesse de Maneleth que son chevalier servant vienne la secourir, ou plus précisément qu’un gentleman vienne lui rendre le couteau qu’elle a laissé planté dans la dépouille de son agresseur (ce sera Pedsen qui lui rendra ce service). Au passage, Gotrek réduira en cendres une meute de chiens issus de la filière de recyclage des déchets organiques de la ville, et que le Tithekeeper gardait pour lui tenir compagnie. Jamais à court de bonnes idées et toujours prêts à rendre service, les deux compagnons finissent la nouvelle en saccageant les stocks de cendres, d’os et d’âmes accumulés par leurs hôtes, actant par là leur « libération » de la tutelle de Nagash, mais signant plus certainement l’arrêt de mort des derniers habitants de Skeltmorr lorsque l’heure de la dîme aura sonné. Mais après tout, ils l’ont bien cherché.

AVIS :

Péripétie très mineure de la nième saison des aventures de Gotrek, ‘The Dead Hours’ est plus intéressant par les détails fournis sur la vie en Shyish que par ses péripéties combattantes, ni Gotrek ni Maneleth ne rencontrant ici un adversaire digne de ce nom1. Cela sent vraiment la panne d’inspiration devant un travail de commande pur et dur pour David Guymer, dont la tentative de s’écarter un peu du schéma classique de la nouvelle gotrekienne (embrouille, fessage de goons, gros monstre final) s’avère aussi peu concluante ici qu’elle l’avait été bien des années plus tôt avec ‘The Tilean Talisman’, son tout premier travail publié par Nottingham. Je sais bien qu’il est dur de faire des variations sur un thème usé jusqu’à la corde, mais une soumission classique mais sérieuse aurait été plus appréciable que cette improvisation assez peu concluante. Le mieux est l’ennemi du bien, du rien, et du Nain.

1 : Cela aurait été le cas si le Tithekeeper avait été la vieille qui se met à flécher Gotrek depuis sa fenêtre, avant de se faire fracasser les côtes d’un grand coup de boule. Sans doute le combat le plus mémorable de notre Nain depuis la Fin des Temps.

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La Forteresse de Vorago // The Vorago Fastness – D. Annandale :

The Vorago FastnessINTRIGUE :

C’est habité par un fort syndrome de l’imposteur que le Black Dragon et homme licorne Teiras fait son entrée dans la Deathwatch, sous le regard bleu cobalt d’un nième Capitaine Ultramarines1/portier de service. Et pour cause, il est logique qu’un frère de bataille d’un Chapitre au pedigree plus que borderline ne se sente pas très légitime à servir l’Inquisition. Cependant, notre héros ne tarde pas à découvrir que son nouveau maître, l’Inquisiteur Otto Dagover (une sorte de Mitch McConnell grimdark, d’après la description qu’en fait Annandale) a un goût prononcé pour les mauvais (sur)garçons. Ses camarades de jeu seront en effet le Son of Antaeus (Chapitre de la 21ème Fondation, maudite comme chacun sait2) Jern, le Flesh Tearer Utor, le Relictor Kyral et le trotro mystérieux Gherak, tous issus comme lui de confréries pas vraiment Charlie. Si Dagover les a réunis, c’est pour qu’ils l’aident à mettre la pince sur une arme cyranax, récemment excavée d’un site de fouilles par un collègue avec lequel il s’entend mal, un certain Salmenau. Ce n’est toutefois pour gérer cette rivalité professionnelle que la Deathwatch est requise, mais pour repousser l’assaut Nécron sur la planète où la découverte a été faite, Discidia. Cette dernière a deux particularités : un sous-sol riche en précieuse benthamite, et un centre pénitentiaire de la taille de l’Australie (la forteresse de Vorago), dont les détenus sont mis à contribution pour exploiter la pierre tant convoitée. Un système gagnant-gagnant donc, que les Xenos sont venus perturber avec leurs gros sabots métalliques.

Briefés sur leur mission avec un luxe de détails à faire l’envie de l’escouade Talon, Teiras et ses comparses se mettent à pied d’œuvre après avoir été téléportés à l’intérieur de la prison grâce une relique d’une précision incroyable… mais d’une portée limitée apparemment. Il leur faudra en effet se taper quelques heures de train depuis leur point de chute pour arriver jusqu’à la chambre où Salmenau et son équipe sont assiégés, ce qui leur permettra au moins d’apprendre à mieux se connaître, et au Flesh Tearer à faire de gros progrès en maîtrise de son humeur. Je vous épargne les combats à base de boum-boum et de pif-paf qui égayent le trajet de nos surhommes, il y a des déplacements sur la ligne 13 qui sont plus mouvementés que ça. Rendus sur place, les Deathwatch ont à peine le temps de constater que l’arme convoitée par Dagover n’est littéralement qu’un gros pistolet laser3, et à menacer légèrement Salmenau de les laisser jouer avec (Môssieur a des principes car Môssieur est un Amalathien) que les Nécrons repassent à l’attaque, menés par un Seigneur très très fâ(u)ché.

D’humeur inhabituellement magnanime pour un auteur de la BL, Annadale fait survivre tous les Astartes (même Utor ne succombe pas à la Rage Noire, c’est dire), se contenant de révéler que l’énigmatique Gherak était en fait un Flame Falcon, soit le Chapitre le plus maudit de la 21ème Fondation sensé avoir été Exterminatus-isé par l’Inquisition pour défaut majeur de fabrication il y a quelques siècles. Comme on pouvait s’y attendre, Teiras a finalement l’honneur de tirer son coup, ce qui a pour effet a) d’annihiler tous les Nécrons de la planète4 qui avaient eu la mauvaise idée de monter au combat en faisant la chenille derrière leur boss, b) de faire un gros trou dans le mur de la prison par lequel les prisonniers s’échappent, et c) de provoquer l’explosion de la centrale énergétique de la capitale planétaire, réduisant le gouvernement local en confettis. Teiras, qui sous ses airs de narval énergétique est un intellectuel, comprend à son retour sur le vaisseau de Dagover que ce dernier avait un objectif autre que celui de récupérer une grosse pétoire (plus vraiment fonctionnelle d’ailleurs). Et en effet, l’Inquisiteur avoue être un Recongrégateur, ce qui est peu commun – et consiste apparemment à désastibiliser les régimes d’obédience loyaliste mauvaise de l’Imperium… PARCE QUE C’EST NOTRE PROJEEEEEET !!! ou quelque chose comme ça – mais également un Schumpeterien, ce qui est proprement rarissime.

La nouvelle se termine sur le flou artistique des motivations et agenda de Dagover, rejoint discretos par une vieille amie dont le trait de Seigneur de Guerre est de se déguiser en statue pour espionner les conversations : la Chanoinesse Setheno. C’est elle qui a apparemment conseillé à Dagobert de recruter le Black Dragon, et elle part aussi mystérieusement qu’elle est arrivée pour la planète d’Anthagonis, où une Compagnie de ces braves guerriers est sur le point de recevoir la visite surprise de l’Inquisiteur Lettinger. Je suppose que l’on peut conclure avec une petite mention #BlackLivesMatter, à défaut d’une compréhension pleine et entière de l’intrigue d’Annandale.

1 : Ils se reproduisent tellement vite que Calgar les écoule en douce à l’Inquisition… Rusé.
2 : Même si les effets secondaires ne sont pas aussi graves pour tout le monde. Les Sons of Antaeus sont simplement plus grands que la moyenne des Space Marines. Pas pratique pour faire les boutiques, mais pas mortel non plus.
3 : Imaginez vous un canon de quinze mètres de long et une gachette à l’échelle, si bien qu’il faut à un Space Marine ses deux bras pour la presser.
4 : En tous cas, on n’entendra plus parler d’eux après ce moment. Tout comme Salmenau d’ailleurs.

AVIS :

Curieuse nouvelle que ce ‘The Vorago Fastness’, qui ne porte la patte distinctive du « maître », ni ne convoque ses factions favorites. Mis à part les quelques et légères bizarreries et omissions de l’intrigue, l’ensemble se laisse lire sans trop de problèmes, et se révèle être insipidement potable, ce qui serait presque un compliment. Point d’Annandalerie spectaculaire venant faire s’écraser la suspension d’incrédulité du lecteur avec perte et fracas (comme cela a été souvent le cas), seulement une histoire pas très passionnante, et que l’on comprend sans mal s’inscrire dans un arc narratif plus large1. C’est assez dommage au final car l’auteur avait ébauché des idées assez intéressantes, comme le regroupement de Space Marines peu fréquentables comme agents de l’Inquisition, ou une cité prison laissée en auto-gestion, sans que cela ne débouche sur quelque chose de concret ou de pertinent pour l’intrigue. À lire si vous voulez découvrir une autre facette de la prose de David Annandale, être absolument calé sur sa petite galerie de personnages récurrents, et/ou miner les quelques indications fluff que contient cette nouvelle, mais à laisser de côté sans regret sinon.

1 : On retrouvera les Black Dragons et Setheno dans ‘The Death of Anthagonis’, et la Chanoinesse croisera également la route de Yarrick.

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Live Wire – R. Rath :

Live WireINTRIGUE :

Faite prisonnière avec le reste de l’équipage du Theorem of Castillus, vaisseau de ligne de l’Adeptus Mechanicus, la maîtresse motoriste Jezette Vaal est amenée en classe de neige par ses ravisseurs, dont les plans machiavéliques incluent la corruption des cortex de leurs victimes par un malware particulièrement salace (il est plein de bits et d’octets, c’est dire), le heart_wyrm. Sur le point de se prendre un câble USB de fort belle taille à l’arrière du crâne sans son consentement1, ce qui est reconnu comme agression sexuelle caractérisée d’après le Code Pénal Impérial, Vaal est toutefois sauvée par l’intervention directe de Makov Quavarian, Magos renégat, hacker chaotique et cerveau de l’opération, venu s’enquérir de la chute impardonnable de la productivité de la station de mise à jour où notre héroïne était sur le point de passer à table. Car l’opérateur Slavigor, en charge de la manœuvre, n’a pas sa langue noire dans la poche et s’était permis d’échanger quelques banalités avec sa future victime, plus rebelle que le serf de base. Remis à sa place par le big boss, Slavi’ confie son plug occipital à un sous fifre et entraîne Vaal dans une salle à l’écart, pour aller s’expliquer au calme.

À la grande surprise de Vaal, Igor le Slave se révèle être un allié, qui lui remet un pistolet à fléchettes dernier cri, quelques conseils d’utilisation et une mission simple mais jouissive : foutre un boxon monstre dans la base de Quavarian. Si la motoriste s’exécute sans poser davantage de questions, et finit probablement par rejoindre l’Omnimessie après quelques minutes de fusillade intense (comprendre qu’elle sort de notre histoire en même temps que du local à balais dans lequel s’est déroulé son dernier entretien d’embauche), le lecteur averti comprend rapidement que Slavigor était en fait Sycorax, Assassin Callidus chargé.e de la neutralisation de Quavarian et de la destruction de ses recherches hérétiques. La sécurité renforcée mise en place par le Magos, et le contrôle poussé dont il bénéficie sur tous ses subalternes grâce à l’injection de son méchavirus, ont forcé l’agent de Terra a se faire implanter un spambot à l’intérieur du crâne pour donner le change de façon convaincante, et à progresser de façon très précautionneuse une fois arrivé.e sur place2. L’indépendance et la loyauté de Vaal lui ont donné une occasion inespérée de passer à l’étape suivante de son plan, la confusion provoquée par la dernière chevauchée de la motoriste lui permettant de se glisser jusqu’au centre de la base sans se faire repérer… Ou presque.

Car on ne saurait attendre d’une nouvelle mettant en scène l’Adeptus Assassinorum que tout se déroule sans accroc, ce qui ne serait pas très intéressant. Sycorax devra donc se prendre le bec avec une volée de Pteraxii télécommandés par Quavarian, se glisser comme un serpent (merci la polymorphine) jusqu’au lieu de stockage des banques de données du Magos, puis dégommer la garde rapprochée de ce dernier, avant de pouvoir se confronter à sa Némésis. Conformément à l’image d’Epinal du hacker, Quavarian se révèle être un petit gros complexé à l’hygiène douteuse, se croyant plus malin que tout le monde mais incapable de se douter que Sycorax avait anticipé sa potentielle capture, et avait donc paramétré son spambot avec des contre mesures. Dans une redite C++ de l’arroseur arrosé, Quavarian se mange ainsi à son tour un malware carabiné dans la carte-mère, ce qui lui est fatal. Même une tentative éteignage/rallumage ne pourra rien faire pour lui, c’est dire.

La nouvelle se termine, trois mois après les faits relatés plus haut3, par la visite d’un individu anonyme (merci NordVPN !) dans les ruines de l’installation de Quavarian. Guidé par le doigt obligeamment tendu par le cadavre du Magos, l’inconnu trekke jusqu’à une caverne où était conservée une version récente du Conqueror_Wyrm, démontrant une fois encore de l’intérêt de faire des sauvegardes régulières de son travail. L’Imperium n’est donc pas sauvé de la menace cyber, mais ceci est une autre histoire…

1 : Et au moins deux fois de suite, car comme on le sait bien, on n’insère jamais de cable USB dans le bon sens du premier coup.
2 : Fun fact, on apprend que Quavarian a dû interrompre ses premières recherches à cause des effets délétères du réchauffement climatique (très mauvais pour la surchauffe des banques de données). Le risque physique dans toute sa splendeur.
3 : On ne sait pas comment Sycorax termine la nouvelle, même si on peut supposer qu’iel s’en sort. Avec un nom pareil, j’espère qu’elle a rejoint sa navette en ski. Sur un malentendu…

AVIS :

Robert Rath poursuit sur sa lancée assassine en donnant des nouvelles de la Callidus Sycorax, que l’on avait déjà croisé dans ‘Divine Sanction’. Comme dans ce précédent court format, le lecteur a la nette impression d’un arc narratif beaucoup plus large (souligné ici par la conclusion très ouverte du récit), et je suis prêt à parier que la BL a passé commande d’un roman centré sur cette faction et ce personnage (mais peut-être également celui d’Absolom Raithe, le Vindicare de ‘Iron Sight’) à Rath. Dans l’attente de cette (probable) sortie, nous devrons nous contenter d’une nouvelle encore une fois bien maîtrisée par son auteur, tant sur les aspects narratif que fluffique. On peut ainsi apprécier le changement de perspective qui est opéré par Rath au premier tiers du récit, la caméra passant de Vaal à Slavigor/Sycorax de manière fluide et intéressante, tout comme l’utilisation pertinente et inventive par Rath des particularités de l’école Callidus dans le déroulé des péripéties (la partie de Snake de Sycorax à travers les canalisations de la base est particulièrement bien trouvée). Il se pourrait même que la description de l’opération subie par l’Assassin en préparation de sa mission soit un discret clin d’œil au texte de fiction de référence en matière de calliduseries (‘The Alien Beast Within’ d’Ian Watson), ce qui ne serait pas étonnant de la part d’un contributeur aussi féru de fluff que Rath, et ferait office de fan service de très haut niveau de la part de ce dernier. Quoi qu’il en soit, ‘Live Wire’ est un nouveau succès à mettre au crédit de M. Rath, que les Seigneurs de Terra devraient suivre de près

Les Réprouvés // Nightbleed – P. Fehervari :

NightbleedINTRIGUE :

Les journées de Chel Jarrow, medicae disgraciée et névrosée de Sarastus, sont hantées par un cauchemar récurrent dans lequel elle se revoit faire l’erreur qui lui a coûté sa carrière, ainsi que la vie d’une de ses patientes. Epuisée par un enchaînement de gardes, elle a en effet confondu un Death Guard « XIV » avec un Son of Horus « XVI » et injecté de l’eau de javel à une malade du COVID-19K, ou une joyeuseté de cet ordre, ce qui ne pouvait pas bien se terminer. Renvoyée par son employeur, elle enchaîne depuis les petits boulots minables, le dernier en date consistant à servir de technicienne de laboratoire dans une usine agroalimentaire. Affectée à des cycles nocturnes pour ne pas entraver la production, Chel passe ses journées à dormir et ses soirées à éviter son mari Lyle, dont elle ne supporte plus la petitesse et la servilité1. Une bonne crise de la quarantaine comme on les aime, en somme.

Alors qu’elle prend le chemin du turbin, elle remarque en attendant que l’ascenseur monte (131ème étage, tout de même) que de nouveaux tags ont fait leur apparition sur les murs de son couloir. L’un d’eux représente l’homme aiguille (Needleman), une sorte de croquemitaine local vivant dans les ténèbres et cherchant sans relâche à saboter les dômes abritant les cités ruches de Sarastus pour permettre à la Nuit Véritable de régner sans partage sur la planète. Le trouillomètre commence à s’affoler lorsque Chel entend des bruits suspects dans l’obscurité du couloir, hors de portée de sa fidèle lampe torche. Ou plutôt, aurait dû s’affoler car notre héroïne n’éprouve pas le moindre émoi à la pensée qu’un prédateur la guette peut-être depuis les ténèbres. C’est l’avantage d’avoir une vie vraiment pourrie : on voit toujours le bon côté des choses. Ceci dit, il ne se passera rien de bien méchant avant que l’ascenseur ne finisse enfin par arriver, et emmène Chel jusqu’au rez de chaussée de la tour Barka.

Il est temps pour nous de faire la connaissance de notre second personnage principal, un jeune à problème s’étant rebaptisé Screech (cri perçant en français) après avoir entendu sa mère pousser un hurlement inhumain lorsqu’il lui a crevé les yeux à l’aide d’une fourchette. Il venait de tuer son père de la même façon, et avait 14 ans à l’époque des faits. Voilà voilà. Obsédé par le mythe de l’homme aiguille, qui l’a fait basculer dans la folie homicidaire, Screech est devenu un grapheur marginal, laissant des messages aussi inquiétants que mal orthographiés2 sur les murs de la cité. En plus de cela, il lui arrive d’enfiler son cosplay de Needleman pour aller trucider du prolo au gré de ses envies. Cette nuit lui semble d’ailleurs propice à un nouveau crime, et alors qu’il erre dans la cité à la recherche de la bonne cible, son chemin finit par croiser celui de Chel, qui a pris place dans son TER habituel pour aller bosser. Pas de doute possible pour Screech, c’est elle que le destin a choisi pour rapprocher Sarastus de la Nuit Véritable, un meurtre sanguinaire à la fois.

De son côté, Chel, qui en a vu d’autres et se balade avec un taser dans la poche, sent bien que l’ado tatoué et crasseux qui s’est assis par terre en tête de wagon et l’épie sans en avoir l’air n’est pas animé d’intentions charitables envers sa personne. Une poussée de mauvaise humeur manque de la faire aller au clash contre son stalker (pas vraiment discret) à la sortie du train, mais ce dernier est trop perdu dans ses pensées (il a dû sniffer le reste de sa bombe de rose pour passer le temps) pour prendre la mouche. Laissant à sa victime un peu d’avance, il finit par la suivre jusqu’à l’usine où elle travaille, après avoir enfilé son habit de non-lumière : un masque de métal et les griffes de Freddie. Ainsi paré, il se sent possédé par l’esprit de Noël du Needleman, que l’on devine être un peu plus qu’un simple fantasme d’achluophobe. Et en effet, lorsque Screech se retrouve attaqué par un cyber molosse après être entré par effraction dans le périmètre de l’usine de Potton Vitapax, il ne doit son salut qu’à sa possession temporaire par son esprit totem, dont l’un des pouvoirs consiste à pouvoir tordre ses bras dans tous les sens, ce qui est pratique pour venir à bout d’un mastiff énergétique qui vous cloué au sol après vous avoir déchiqueté la cuisse. Mal en point mais toujours opérationnel, notre héraut reprend sa traque en traînant la jambe.

De son côté, Chel s’est remise à travailler sur le dernier échantillon qui lui a été remis, et dont elle suspecte la nature maléfique, ou en tout cas néfaste, sans pouvoir le prouver. Les tests du VLG-01 n’ont en effet rien détecté de suspect, mais la consistance de goudron pervers de la substance rend son utilisation dans des produits cuisinés, même pour des travailleurs de la caste Delta, impensable. En désespoir de cause, et prise d’une inspiration subite, Chel a résolu la veille d’ingérer un peu de cette mixture, ce qui a semble-t-il renforcé ses cauchemars. N’y tenant plus, et sans doute en manque, la technicienne décide d’aller visiter le lieu de stockage du VLG-01, convainquant pour ce faire un des gardes de nuit de la conduire jusqu’à l’entrepôt (forcément abandonné jusqu’il y a peu car il avait mauvaise réputation). Là, deux choses horribles se produisent coup sur coup. Premièrement, Chel sombre dans la folie et se sert une grande rasade d’élixir de noirceur à même la cuve (pochtronne !), ce qui ne lui fait pas du bien comme on peut s’en douter. Deuxièmement, Screech finit par la rattraper, après avoir égorgé le garde au passage, et s’apprête à lui jouer son grand classique : le concerto d’Edouard aux Mains d’Argent en Scie Mineure…

Début spoiler…Seulement voilà, le Needleman s’est trouvé un avatar plus méritant que ce petit péteux de taggeur, et Chel se fait un plaisir de corriger son agresseur d’un grand coup de taser dans la glotte, ce qui lui fait fondre la mâchoire et couler les yeux sur les joues, entre autres effets secondaires sympathiques. Ayant récupéré le masque de fonction de Screech sur son presque cadavre, Chel retourne à son laboratoire pour valider définitivement l’échantillon de VLG-01, qui pourra donc être distribué largement à la populace de Sarastus, avant d’embrasser définitivement son nouveau statut de femme de l’ombre. Première étape : son appartement de la tour Barka, où elle aura une petite discussion avec ce butor de Lyle à propos des radiateurs…Fin spoiler

1 : Et également sa froideur coupable, car monsieur refuse obstinément de monter le chauffage, quand bien même la température de leur HLM se rapproche sensiblement de zéro.
2 : Dernier chef d’œuvre en date de notre Banksy sociopathe « C 1 MENSSONJE » au Hello Kitty Pink. Sans point d’exclamation à la fin, car ce n’était pas nécessaire.

AVIS :

Comme on pouvait s’en doute, Peter Fehervari réussit sans problème son entrée dans la gamme Warhammer Horror avec ‘Nightbleed’, un petit concentré de noirceur (haha) à la sauce Dark Coil. Notons à ce propos que les références aux autres textes et arcs narratifs du Fehervariverse ne sont pas légions dans cette nouvelle (à moins qu’elles soient trop subtiles pour votre serviteur, ce qui est tout à fait possible), ce qui facilite sa compréhension pour le lecteur non familier de l’approche de l’auteur. Ceci dit, il n’est guère besoin de pousser loin l’analyse pour comprendre que ‘Nightbleed’ n’est pas un stand-alone, mais contient des éléments qui s(er)ont explicités ailleurs, à commencer par le sens des lettres « VLG », sur lequel Fehervari fait plancher son lecteur de façon très explicite1. Parmi les autres réussites indéniables de cette soumission, on peut citer la facilité déconcertante avec laquelle l’auteur arrive à « planter » son décor en quelques phrases, et à faire de Sarastus un monde impérial plus tangible et réel que bien des planètes auxquelles GW et la BL ont consacré des dizaines de pages (Necromunda ? Armaggedon ? Cadia ?), ce qui est la marque des vrais conteurs. De la même manière, Fehervari instille à son récit un véritable malaise (angoisse serait un peu fort), amplifié par les bribes de comptines qu’il met dans la bouche et dans l’esprit de Screech. Will you won’t you meet the Needleman ?

1 : À titre personnel, je penche pour un acronyme en haut gothique (latin donc) glorifiant les ténèbres/le Chaos, mais cela peut être chose. Je suis simplement à peu près sûr qu’il est possible pour un lecteur attentif de percer ce mystère à jour avec les indices que Fehervari a laissé ici et là…

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His Will – G. Haley :

His WillINTRIGUE :

Descente en rappel de l’épisode précédent, pour ceux qui avaient aqua-zumba ce jour là. Le Macragge’s Honour, vaisseau amiral des Ultramarines et véhicule de fonction de Roboute Guilliman a été capturé par les infâmes Red Corsairs alors qu’il ne faisait que vaquer à ses paisibles occupations. Parmi les membres de l’équipage passé au Chaos à l’insu de son plein gré, on trouve le Frater Mathieu, confident du Primarque et membre du saint ordre des Clochards Acronites. N’étant guère dans sa nature de se tourner les pouces en attendant qu’un stratagème salvateur se déclenche, Mathieu a résolu d’occuper sa clandestinité en célébrant des offices pour les matelots des ponts inférieurs, aidé en cela par le Frère Clydeus (porteur peureux) et le guide estropié Hiven. Malgré l’interdit qui frappe le culte de l’Empereur depuis que les Red Corsairs sont dans la place, et les patrouilles de gardes hérétiques qui sillonnent le Macragge’s Honour, le trio est parvenu à faire son office et à apporter un peu de réconfort moral et spirituel à ses paroissiens.

Alors qu’ils terminaient une messe donnée sous le regard bienveillant mais rendu torve par des lignes de moulage mal placée d’une statue en failcast de l’Empereur, Mathieu et Clydeus sont accostés par une jeune mère (Lyasona), très inquiète par l’état de son fils (Grent). Abandonnant le servo-crâne de Victor Hugo, Hubert Vedrine et/ou Horace Vernet dans sa mallette de transport, les deux hommes accompagnent la malheureuse jusqu’à sa coquette studette, transformée en chambre froide par les facéties du Warp. Comme on peut se l’imaginer, Grent s’est fait un nouvel ami imaginaire lorsque les fusibles de champs de Geller ont sauté, et le démon qui a pris possession du corps du garçonnet n’est pas disposé à vider les lieux. Saleté de squatteurs, décidément. Confiant dans sa capacité à réaliser un exorcisme en bonne et due forme, Mathieu demande à être conduit jusqu’à la chapelle impériale la plus proche, malgré le fait qu’elle ait été vandalisée par les renégats et reste surveillée par ces derniers.

N’écoutant que son courage et son statut de personnage apparaissant plus tard dans la série ‘Dark Imperium’, ce qui lui donne d’excellentes chances de survivre à l’aventure, Mathieu fait fi des conseils de prudence de son acolyte, et commence donc à invoquer son Grand Dieu pour chasser l’entité warpienne de son dernier lieu de villégiature. L’exorcisme suit à peu près le déroulé de la scène iconique du filme du même nom, jusqu’à ce que le démon décide qu’il en a assez entendu, se libère de ses liens et laisse libre cours à son imagination en termes de chirurgie plastique. On se dit alors que la procédure a échoué, et que Grent a passé l’â(r)me à gauche, mais que nenni : l’expérience de sa mort prochaine donne au froussard Clydeus un regain de piété, qui lui permet de couper la chique au démon assez longtemps pour que Mathieu et lui parviennent à le bannir une bonne fois pour toutes après une grande série de bourre-pifs karmiques.

Cerise sur le gâteau récompensant un enchaînement ayant été parfaitement exécuté, l’Empereur en personne apparaît pour s’en battre à l’arrière plan, et poser une main orgasmique sur l’épaule de son fidèle servant, qui tombe logiquement en pamoison. À Clydeus revient le lot de consolation, un peu pourri certes, de devenir martyr impérial en restant dans la chapelle pour permettre à Mathieu et à Grent de s’échapper. Mais il faut croire que Pépé a envoyé un clin d’œil langoureux au séminariste, car ce dernier accepte son sort avec un aplomb impressionnant et un entrain suspect. Notre histoire peut donc se terminer avec la remise du petit patient à sa mère éplorée, cependant que Mathieu devra désormais transporter tout seul son stuff dans les coursives du Macragge’s Honour, ou trouver une b/conne âme pour le faire à sa place. Le service de l’Empereur est sa propre récompense…

AVIS :

Guy Haley joue les prolongations du ‘Dark Imperium’ avec cette petite nouvelle venant s’intercaler entre les deux premiers romans de son arc (si j’ai bien tout suivi). Il va sans dire qu’avoir lu les œuvres en question permet de mieux comprendre, et donc apprécier ce ‘His Will’, mais le propos est suffisamment clair pour que même un novice puisse saisir de ce dont il retourne ici. Parmi les éléments intéressants de cette histoire, on peut retenir la destinée manifeste que Haley donne ou confirme à Frater Mathieu, qui a le privilège peu commun d’être approché par l’Empereur en personne. Le rapide panorama de la situation (presque) normale d’un équipage impérial de bas étage est également appréciable, et permet de réaliser que même sur le vaisseau amiral de Roboute Guilliman, les conditions de vie du serf moyen ne sont pas très Charlie. Le passage sur l’exorcisme permet à Haley de varier un peu le rythme de son récit en introduisant quelques paragraphes d’action, ce qui est une attention louable de sa part. Je nourris seulement quelques doutes sur la « réversibilité » physique d’une possession démoniaque, telle qu’elle nous est présentée ici. Grent se transforme en effet en Grishka Bogdanov l’espace d’un instant, avant de retourner à son état normal comme si de rien n’était. Ce point de détail mis à part, ‘His Will’ est donc une soumission égale à ce que l’on peut attendre de la part de Guy Haley (même si la touche humoristique de l’arc Cawl manque un peu) : solide et plaisante à lire.

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Repas de Famille // Family – D. Abnett :

Repas de FamilleINTRIGUE :

La bataille de Salvation’s Reach a été remportée, et les Fantômes de Gaunt sont de retour dans leur transport de troupes, en transit pour le prochain théâtre d’opérations. À la faveur d’une cantine blindée et d’un échange de regards, le Major Gol Kolea se retrouve à déjeuner en face de son fils, le Garde Dalin (surnommé Dal, en hommage au plat de lentilles) Criid.

Il faut évidemment préciser ici, si besoin était, que les deux hommes ont une histoire commune aussi fragmentaire que compliquée. Croyant que toute sa famille avait été tuée lors du siège de Vervunhive (‘Necropolis’), Kolea avait découvert fortuitement quelques temps après avoir rejoint les Tanith que ses enfants avaient été recueillis par la ganger Tona Criid (également engagée dans la Garde) et son partenaire Caffran. Ne voulant pas ruiner le bonheur de cette famille recomposée en faisant valoir son droit à la Garde, Kolea avait vu ses enfants grandir de loin, avant qu’une blessure de guerre ne le rende amnésique pendant quelques temps, puis qu’il guérisse grâce à ce que l’on peut appeler un miracle sabbatique. Au final, et pour autant que je puisse le dire, Dal a fini par découvrir le pot aux roses après avoir embrassé la carrière militaire, comme les trois quarts de ses parents. Sa petite sœur Yoncy n’a elle pas été mise dans la confidence, et considère toujours Kolea comme « Tonton Gol ». Cette mise au point effectuée, reprenons le cours de notre récit et de notre repas.

Après avoir échangé quelques banalités de circonstance sur le caractère détestable de la nourriture servie, Gol et Dal essaient de (re)trouver un peu de leur complicité père-fils, le premier acceptant l’invitation du second de venir dîner dans le studio familial, après avoir un peu rechigné. La soirée se passe bien, jusqu’à ce que Yoncy, dont l’âge est obtenu en faisant la somme de 2D6 à chaque round de joueur1, demande à Gol entre la poire et le fromage s’il est son père, comme elle a entendu beaucoup de Gardes le dire autour d’elle. Kolea sort alors sa meilleure poker face pour lui répondre qu’ils n’ont aucun lien de parenté, et la gamine enchaine en allant lui chercher le bôdéssain qu’elle lui a fait avec ses craies colorées. Conclusion : c’est très moche, passablement confus et empeste le pouvoir psychique latent, car les « ombres méchantes » qui sont dessinées fortuitement, ça vaut tous les jours un bolt dans la tête si un Inquisiteur passe dans le coin.

Ce mystère restera cependant entier, tout comme celui entourant le fils (caché ?) de Gaunt, un certain Felyx Meritous Chass, auquel Dal a été affecté comme escorte, brièvement évoqué autour de la table. Gol repart le ventre plein, le cœur gonflé et les yeux humides, ce qui n’est jamais bon signe quand on est un personnage d’Abnett. Mais pas de spoil.

1 : Sans rigoler, Criid soutient que dans six mois, elle fera tourner la tête à tous les Gardes, alors qu’elle parle comme une enfant de sept ans et dessine comme une de trois. À moins que les Tanith ait des canons de beauté franchement dérangeants, je m’explique assez mal cette « incohérence ».

AVIS :

Au moment où j’écris cette chronique, ma connaissance de la série des Fantômes de Gaunt se termine à la fin de l’arc ‘The Lost’, ce qui laisse un vide conséquent entre la fin de cet arc et les événements relatés dans ce ‘Family’. Abnett étant à la baguette, le briefing ou la mise à niveau des lecteurs n’étant pas totalement au fait de l’intrigue se fait de façon efficace et sans accroc, même si j’éprouve quelques doutes sur la valeur ajoutée de cette nouvelle si on ne s’intéresse pas aux relations compliquées de la famille Kolea-Criid, et en particulier au personnage de Yoncy, dont l’étrangeté se trouve au cœur de ce qui tient à la fois du fan service (enfin une réunion entre Gol et ses marmots, après des centaines pages de rendez-vous manqués) et de la scène coupée. Il faut également souligner que si l’auteur se veut pédagogue, il n’est pas non plus totalement newbie-friendly, puisque certains événements et personnages sont évoqués de façon cryptique pour le non initié, et la mort de deux personnages secondaires importants de la série (trois si on compte C.) est rappelée au détour d’un paragraphe. Comme la plupart des nouvelles des Fantômes de Gaunt, il est donc conseillé de lire ‘Family’ dans la suite logique de la série, c’est-à-dire après ‘Salvation’s Reach’, et pas avant.

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The Lightning Hall – G. McNeill :

INTRIGUE :

The Lightning HallRescapés de la Maison Taranis, dont l’indéfectible loyauté à l’Empereur a scellé le destin lorsque Mars a eu sa poussée indépendantiste, les chevaliers Raf Maven et Leopold Cronus ont passé les années suivant le schisme martien à trekker dans le désert de la planète rouge, rendant de menus services aux loyalistes et mettant de menus bâtons dans les rouages de Kelbor Hal lorsque l’occasion se présentait. Persuadés d’être les seuls survivants de leur chapitre, et habités par la honte de n’avoir pas été présents aux côtés de leurs frères et sœurs d’armes pour défendre leur forteresse, Raf et Leopold ont le moral dans les chaussettes1 et leur condition de fugitifs limite de façon drastique l’entretien de leur monture (et leur réserve d’antiseptiques), ce qui commence à être problématique. Lorsque l’esprit de la machine décide de partir chasser le dahut à la moindre perturbation du champ electromagnétique, les journées sont longues et les maux de crânes fréquents. Ceci dit, l’espoir demeure pour nos personnages, puisqu’ils ont capté une transmission radio leur donnant rendez-vous dans les ruines de leur ancien bastion. Presque totalement convaincus qu’il ne s’agit pas d’un piège, Rohff et Leo se rendent sur place, et posent enfin les senseurs sur le théâtre du dernier carré de leur chapitre.

Profitant de la hauteur sous plafond de la forteresse, nos héros n’ont pas besoin de laisser leur monture au parking et peuvent progresser sans problème jusqu’au hall de la foudre (Lightning Hall), lieu de rassemblement et de beuverie des Taranis depuis des temps immémoriaux. C’est notamment ici que le vieux seigneur Verticorda se plaisait à raconter sa rencontre avec l’Empereur, pendant le temps de l’Unification2, un souvenir qui ne va pas sans arracher une larme d’huile à ce gros fragile de Raf. Guidé par l’intuition et/ou le GPS embarqué de son Chevalier, le rétif et imprévisible Equitos Bellum, les deux rescapés sont confrontés à une scène d’horreur, le seul étant constellé de rebuts de machineries et de cadavres entremelés. C’est là la marque de l’infâmie réservée par Kerbor Hal à ceux qui ont osé lui résister, mais également un piège pas du tout évident dans lequel Raf et Leopold viennent de tomber…

Début spoiler…Car le Mechanicum Noir avait laissé des gardiens sur les lieux du crime. D’abord une horde de quelques centaines de Serviteurs corrompus et corrodés, représentant à peu près autant de danger pour les Chevaliers qu’une vague de hamsters pour un Space Marine. La suite est un peu plus relevée, sous la forme de six machines de tourment (Woe Machine) insectoïdes, qui tombent sur le châssis des Gundams loyalistes comme la vérole sur le bas clergé de Slaanesh. Poussés dans ses derniers retranchements, Raf est contraint à l’ultime sacrifice : faire surcharger son réacteur utiliser un cheat code, qui permet à l’esprit de la machine d’Equitos Bellum de prendre les commandes du Chevalier, et de poutrer la gu*ule des nuisibles en l’espace de 3 secondes. McNeill nous glisse dans l’oreillette que c’est une pratique proscrite par les gens comme il faut, et Raf douille salement lors du passage en pilote automatique, mais c’est tout de même con que personne ne se soit rendu compte qu’il était beaucoup plus efficace de combattre de cette façon que de laisser un clampin avec un permis poids lourd faire mumuse dans le cockpit. On en apprend tous les jours.

La partie n’est toutefois pas encore gagnée pour les Chevaliers, puisque la dernière machine de tourment est en train d’enlacer la carlingue de Leopold, et que Raf tire maintenant trop la jambe pour lui être d’une quelconque utilité. Heureusement, avant que l’infâme bestiole puisse mettre la langue, les portes de Fort le Cor s’ouvrent et un eored de Rohirrims menés par Aragorn tombe sur les arrières de l’ennemi. Ou quelque chose comme ça. Il s’agit en fait des survivants de la Maison Taranis, retranchés dans l’arrière-salle du Hall de la Foudre depuis des lustres, et qui sont venus secourir leurs visiteurs. Ce sont évidemment eux qui ont envoyé le message que Raf et Leopold ont reçu, à la demand expresse du Seigneur Caturix, laissé invalide à 93% lors du siège de la forteresse, et à la recherche d’un successeur digne de lui avant que la mort ne vienne. Avec l’arrivée des deux gusses susnommés, c’est maintenant chose faite : il leur reviendra de mener les reliquats de la Maison Taranis vers une grandeur retrouvée. Spoiler alert : ils y arriveront.Fin spoiler 

1 : Soit à 3 mètres au dessus du planche des servovaches pour un Chevalier impérial, donc tout de même assez haut.
2 : Une fois l’anecdote racontée, Verticorda passait ensuite à un strip tease intégral pendant que l’assistance chantait le générique de Bioman, mais McNeill a bizarrement choisi de couper le flashback avant ce point d’orgue.

AVIS :

McNeill boucle la boucle d’un arc mineur de ‘Mechanicus’ avec ‘The Lightning Hall’, qui permet de retrouver Raf Maven et Leopold Cronus dans leurs œuvres. S’il est tout à fait possible de lire cette nouvelle sans être familier du roman dont elle sert de chapitre supplémentaire, il est évidemment préférable de connaître les grandes lignes du bouquin en question et de ses personnages principaux (dont Dalia Cythera et ses yeux dorés), qui seront évoqués par l’auteur sans véritable mise en contexte. L’histoire en elle-même n’est guère compliquée ou complexe, puisqu’elle se décompose en une phase de randonnée, et une phase de MMA, durant lesquelles les deux Chevaliers se contentent de faire leur devoir, sans plus.

J’ai simplement tiqué sur le « super pouvoir » utilisé par Raf pour se défaire de ses adversaires, dont le potentiel fluffique me semble un peu trop énorme pour être intégré de la sorte par McNeill dans son histoire. Il se peut que ce soit ma méconnaissance du fluff Chevaliers qui me joue des tours, cette faction ne m’ayant jamais beaucoup intéressé, mais savoir qu’il est possible de décupler l’efficacité de ces machines en leur laissant prendre le contrôle de leurs actions, sans autre effets secondaires qu’un peu (beaucoup) de douleur pour leur pilote1, pose logiquement la question du non-recours systématique à cette pratique. Quoi qu’il en soit, c’est une soumission potable, mais pas mémorable, que nous propose Graham McNeill ici, avec ce qui sera peut-être sa dernière nouvelle pour l’Hérésie d’Horus…

1 : Je m’attendais à ce que ce dernier ne puisse plus reprendre le dessus sur l’Esprit de la Machine, ce qui aurait justifié la non-utilisation de ce trick, mais ce n’est même pas le cas.

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Aberrations // Aberrant – C. Wraight :

AberrationsINTRIGUE :

Agusto Zidarov, Probator gras du bide, marié, un enfant, est mis sur un sale coup par un prêtre aussi influent qu’extrémiste, Yvgen Asparev. L’Ecclésiaste a en effet eut vent par son réseau de fidèles de la présence d’individus peu amènes, et probablement un peu mutés sur les bords, dans une zone industrielle d’Urgeyena. Bien que moins chaud que son indic’, qui lui brûle littéralement d’impatience, d’aller à la chasse aux mutants dans les bas-fonds de Varangantua, Zidarov se rend sur place pour faire sa contre-enquête, obtenant la confirmation de la part des témoins identifiés par Asparev que quelque chose de pas très impérial se trame dans l’entrepôt proche de la gare locale. À la nuit tombée, notre héros se glisse discrètement à l’intérieur du bâtiment en question, et ne met pas longtemps à tomber sur le « dortoir » de travailleurs détachés d’un genre un peu particulier. Très grands, très costauds, avec une peau diaphane, des yeux noirs et trois slips à se partager pour deux cents individus, les humanoïdes enchaînés dans le sous sol du site industriel répondent parfaitement au cahier des charges de l’abhumain de contrebande, venant voler les emplois et le slab des honnêtes Alectiens.

Cette découverte ethnologique majeure ne peut toutefois être reportée aux autorités compétentes et/ou incandescentes, car Zidarov se fait surprendre par une bande de gorilles bourrés de stimms, qui se montrent assez peu impressionnés par son badge d’office. Il faut l’intervention salvatrice de la directrice de l’usine, Alissya Gordova, pour empêcher que le Probator n’aille rejoindre le panier à salade de l’Empereur. Cette dernière explique posément à son « invité » que les opérations du site sont placées sous la protection et la direction du vladar Aista Fyodor Meleta, qui, en sa qualité de sous-gouverneur planétaire, se contrefiche royalement de l’avis et des principes d’un flicaillon comme Zidarov. Reconduit sans ménagement à l’entrée, avec ordre de ne pas revenir de sitôt, notre héros s’exécute de bonne grâce, et parvient à poser un mouchard sur un véhicule de transport qu’il devine justement servir à l’acheminement de la main d’œuvre spécialisée qui trime dans les profondeurs.

Cette intuition le mène jusque dans la juridiction voisine de Korsk, sur les traces du semi-remorque en question, qui se gare au milieu de la pampa pour réceptionner une cargaison livrée par une navette spatiale banalisée. Le doute n’est à ce stade plus permis, mais Zidarov fait du zèle en rendant une visite de courtoisie au gros lard ayant supervisé l’opération dans la cabane minable qu’il occupe à proximité du site d’atterrissage clandestin, une fois le convoi reparti. Ayant menotté et bâillonné son hôte pour pouvoir explorer sa piaule en paix, Zidarov a la surprise et l’horreur de découvrir une femelle de la race des abhumains entraperçus dans l’usine d’Urgeyena attachée sur un lit. Gras double est en effet un petit pervers, qui aime jouer du fouet pour se sentir puissant (ce qui est somme toute moins dégoûtant que d’autres explications à cette situation particulière). Dilemme profond pour notre héros, qui ne sait pas trop s’il doit tuer la mutante de sang-froid, ou la libérer de son tortionnaire. Pris de doute, il commence à dialoguer avec la grande godiche, et se rend vite compte qu’elle est plutôt à plaindre qu’à exterminer. En définitive, il décide de la remettre en liberté, scellant du même coup le sort de l’Indiana Jones en surpoids qui se dandine sur la moquette de la pièce d’à côté, et donnant à la rescapée les informations nécessaires pour qu’elle puisse tenter d’aller libérer ses congénères de leur camp de travail.

La nouvelle se termine par la confrontation entre Zidarov et Asparev, durant laquelle on apprend qu’un regrettable accident s’est déclaré récemment dans l’usine du vladar, la réduisant en cendres et provoquant la mort d’une bonne partie de ses ouvriers. On n’a par contre pas trouvé trace du moindre mutant sur les lieux du drame, et d’ailleurs les Probators n’ont même pas été mandatés pour enquêter sur l’origine du sinistre, ce qui est assez bizarre quand on y réfléchit… Voire même aberrant.

AVIS :

Chris Wraight nous sert une nouvelle bien pensée (et mettant en scène son héros de Warhammer Crime, Agusto Zidarov, également au sommaire de ‘Bloodlines’), explorant le thème du rapport à la mutation – et donc à la différence – d’un Imperium dont la diversité intrinsèque devrait pousser à la tolérance sur le sujet, mais qui se complaît au contraire dans son obscurantisme. Dans les ténèbres d’un lointain futur, on n’est pas à un paradoxe près. S’il n’a pas été le premier à exploiter cette ficelle (je pense en particulier à Barrington J. Bayley et à son ‘Children of the Emperor’ et à Gav Thorpe avec ‘Suffer Not the Unclean to Live’), Wraight est un des rares auteurs contemporains de la BL à remettre l’idée au goût du jour, y ajoutant de façon (à mon avis) délibérée et pertinente des similitudes avec la situation des migrants fuyant la misère et la guerre de leurs pays pour finir exploités en Europe ou aux Etats-Unis. La réalisation de Zidarov que les êtres qu’il considère comme des animaux sont en fait des humains, au même titre, voire davantage, que lui et ses concitoyens de Varangantua, pourrait amener le lecteur à réfléchir à son tour sur la gestion actuelle de la crise migratoire, si le cœur lui en dit. C’est en tout cas l’un des textes les plus actuels et « réalistes » publiés par la Black Library depuis un bout de temps, et il mérite à ce titre largement la lecture.

Autre point fort de cet ‘Aberrant’, la réussite de Wraight au moment de dépeindre son héros comme un individu moralement ambigu, et loin d’être exemplaire. Les protagonistes de l’anthologie ‘No Good Men’ ont en effet tendance à avoir plutôt un bon fond, malgré leurs tendances auto-destructrices/associales, alors que Zidarov est, lui, objectivement compromis. La difficile décision qu’il prend de libérer celle qui est, selon toute évidence, une victime d’une exploitation sans vergogne de la part de Varangantua au sens strict, et de l’Imperium au sens large, fait de ce personnage une véritable incarnation des « types pas bien » que nous promet le titre du recueil. À côté de cela, le fait que Zidarov ne soit pas le flic/détective privé solitaire et alcoolique qui revient avec d’infimes variantes dans les autres nouvelles de l’ouvrage, mais un citoyen assez normal, intégré, rationnel et avec une famille, renforce encore la ligne de faille entre ce qu’il apparaît être et ce qu’il faillit devenir. Bref, si le suspens n’est ici pas au rendez-vous, cette nouvelle a bien d’autres qualités à mettre en avant, et est sans doute l’un des premiers classiques de Warhammer Crime.

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Et voilà qui termine cette double revue du Calendrier de l’Avent 2020 de la Black Library. À titre personnel, j’aurais préféré n’avoir que des nouvelles inédites pendant 24 jours, mais l’ajout d’une VF cette année fait de cette itération l’une des plus réussies de la BL depuis le début de l’exercice. Comme pour tous les recueils, les histoires proposées ne sont pas d’un niveau uniforme (cela doit sans doute se percevoir à la lecture des chroniques), mais (re)découvrir un court format chaque jour donne à ce calendrier une fraîcheur indéniable, et rend le tout plus ludique et digeste qu’il ne l’aurait été lu d’un bloc.

Si ne nous recroisons pas ici avant 2021, ce qui est franchement probable, je profite de cette conclusion pour vous souhaiter une excellente nouvelle année, que j’espère être un peu moins favorable à la lecture que 2020. Cela ne devrait pas nous empêcher de continuer à parcourir les mondes merveilleux de la GW Fiction ceci dit! See ya, punks.

THE HAMMER AND THE EAGLE [40K/AoS]

Bonjour et bienvenue dans cette critique du nouvel ouvrage introductif publié par la Black Library, un beau pavé de 621 pages sobrement nommé ‘The Hammer & the Eagle‘ (ou ‘L’Aigle & le Marteau‘ en version française, que Nottingham a eu l’amabilité de sortir en même temps que la VO). Cette large couverture est due en partie au fait que les nouvelles qui sont proposées au lecteur sont presque toutes des rééditions, pour certaines de textes assez anciens. Comme l’indique Nick Kyme dans sa préface, ce type de publication « universelle(s) » est assez rare pour la BL, qui a pour habitude de séparer les serviettes des torchons, et les bolters et des arquebuses (voir ‘Sacrosaint & Autres Récits et ‘Croisade & Autres Récits pour s’en convaincre). Cette fois-ci cependant, la ligne éditoriale choisie par la maison d’édition était assez large pour permettre aux deux franchises majeures de Games Workshop d’être représentées dans un même opus, et pour cause: il n’y a pas grand-chose de plus commun à une histoire que la présence de personnages.

Sommaire The Hammer &amp; the Eagle (MIS)

Pour être tout à fait exact, ce sont bien les icônes de Warhammer 40.000 et d’Age of Sigmar qui sont ici mises en avant et célébrées, catégorie plus restrictive (encore que) que celle regroupant les myriades de héros et anti-héros peuplant les pages des romans et nouvelles de la Black Library. On devine sans mal que la sélection a dû être drastique1 pour déterminer qui méritait cette reconnaissance suprême, en particulier du côté des Royaumes Mortels, dont la relative jeunesse met ses protagonistes sur un pied d’égalité (les grands anciens Gotrek et Nefarata trichant un peu à ce titre). Si certains noms (Ibram Gaunt, Uriel Ventris, Gregor Eisenhorn, Abaddon2…) sonnent comme une évidence, d’autres seront sans doute moins familiers au lecteur, même chevronné. L’occasion de se familiariser avec de futures têtes d’affiche comme Severina Raine, Navradaran, Hamicar-Bear Eater et Callis & Toll. C’est en tout cas tout le mal qu’on leur souhaite.

Partons donc à la découverte de cette galerie de people haute en couleurs, et tentons de voir si la Black Library a réussi à son travail de sélection avec ces 27 nouvelles (pour 18 auteurs) et accouché d’un ouvrage digne d’intérêt. Sur le plan financier, c’est quasiment certain, mais sur le plan littéraire, cela reste à établir…

1 : Encore que je soupçonne Nick Kyme d’avoir pistonné les personnages dont il avait la charge, comme Cato Sicarius et Adrax Agatone. C’est en particulier vrai pour le second, dont le nom n’est pas (encore) universellement connu, et ne bénéficie que d’une couverture minime dans cette anthologie (nouvelle de 5 pages). Les ravages du népotisme…
2 : Bizarrement classé comme Space Marine, aux côtés de Mephiston et Astorath. Je penche pour une étourderie du maquettiste plutôt que pour une révélation sur la véritable allégeance du bonhomme. Mais ça pourrait expliquer pourquoi il lui a fallu 13 tentatives pour péter deux pylônes. 

The Hammer and the Eagle

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Endurance – C. Wraight [40K] :

EnduranceICÔNE : DRAGAN, POTENCIER DE LA DEATH GUARD

INTRIGUE :

Sur le monde ruche de Lystra, l’escouade du frère Sarrien des Imperial Talons livre un combat d’arrière-garde aussi noble que vain contre les hordes innombrables des Zombies de la Peste ayant plus ou moins remplacées la population locale. Envoyés au casse-pipe pour permettre à un fonctionnaire de l’Adeptus Administratum obèse et tire au flanc (du moins, c’est comme ça que Sarrien se le représente) de maintenir son quota de dîme mensuel, ou autre raison purement technocratique, les braves Space Marines tiennent la ligne du mieux qu’ils peuvent, mais même leur constitution suprahumaine commence à donner d’inquiétants signes de fatigue. Pour ne rien arranger, les lignes de ravitaillement avec le reste de l’Imperium sont totalement coupées, ne laissant à nos fiers héros que la bonne vieille énergie cinétique pour défendre le domaine de l’immortel Empereur contre la corruption galopante titubante représentée par les Stumblers. Isolé de ses frères pour maximiser l’efficacité du soutien martial et moral que les Astartes représentent pour leurs alliés de la Garde, Sarrien débute la soirée comme toutes les autres auparavant : il chante chante chante ce rythme qui lui plaît (Endure ! For the Emperor ! Stand Fast ! Chihuahua !) et il tape tape tape (c’est sa façon d’aimer). On comprend cependant assez clairement que notre héros en a gros, et qu’il n’y a que son exemplaire éthique qui le pousse à suivre des ordres qui lui semblent totalement débiles.

À quelques encablures de cette planète condamnée, nous faisons la connaissance de notre deuxième protagoniste, le réfléchi (il ne court jamais) et hédoniste Dragan, Death Guard appartenant à la faction des Lords of Silence. Bénéficiant d’un quartier libre entre deux opérations de grande ampleur, Dragan a embarqué sa coterie sur son vaisseau personnel, l’Incaligant, et vogue là où le Warp le mène, massacrant tous les Impériaux qui lui tombent sous le moignon au passage. Les petits plaisirs de la vie, il n’y a que ça de vrai. Ayant fondu (dans tous les sens du terme) sur un transporteur de troupes de la Garde Impériale dépêché sans escorte en renforts de Lystra, Dragan décide sur un coup de tête, une fois le carnage expédié, d’emmener ses ouailles sur le monde en question, où il suppute (en même temps qu’il supure) qu’une distraction peut être trouvée.

Nous retrouvons ensuite Sarrien, toujours plus amer et toujours plus crevé, qui décide d’aller rôder derrière les lignes ennemies pour… le fun ? (étant donné que les défenseurs sont au bout du rouleau et s’attendent tous à crever, et que l’adversaire n’a aucune chaîne de commandement à décapiter ni de cibles stratégiques à prendre, l’utilité de la manœuvre me semble obscure). Bien que durement éprouvé par des semaines de combat sans répit, notre surhomme se révèle malgré tout capable de faire mordre la poussière à son poids en Stumblers, voire plus, jusqu’à ce qu’il tombe sur un Fatty dont l’odeur corporelle, ou l’aura de zenitude, c’est selon, est telle qu’il a bien du mal à lever la main sur lui. Malgré l’attitude résolument peace man du gros lard, Sarrien parvient à le décoller proprement, non sans que sa victime n’ait eu le temps de le prévenir 1) des dangers physiques et mentaux du surmenage (il devait être élu au CHSCT dans sa première vie), 2) de l’arrivée prochaine du Potencier (Gallowsman). Bien en peine de faire quelque chose de cette information, et sappé comme jamais, l’Imperial Talon décide de se rentrer, avec l’espoir futile de trouver un McDo encore ouvert sur le chemin pour s’envoyer un bon Coca bien frais.

De son côté, Dragan a fini par arriver en orbite autour de Lystra, et emmène sa bande sur les lieux du dernier conflit agitant encore la planète, dans l’espoir de trouver un adversaire de valeur. Escortés par quelques cohortes de die hard fans, les Lords of Silence progressent pondéreusement vers la ligne de front, où les attendent…

Spoiler Des Iron Warriors. Eh oui. Car en fait, Sarrien et Dragan ont visité Lystra à deux moments distincts, petite surprise savamment préparée par Wraight. Il est d’ailleurs fortement suggéré que Sarrien est devenu Glask (le second de Dragan, qui passe son temps à l’appeler Potencier – au grand ennui de son boss – et dont la jambe torse pourrait être la conséquence de la blessure subie par Sarrien au même endroit à la fin de la campagne) peu de temps après sa rencontre avec le gros plein de pus, lorsque, finalement submergé par le nombre de ses ennemis et l’amertume envers l’Imperium, il a décidé que sa survie était plus importante que son devoir. Ceci dit, le récit se termine sur un flou artistique et un amoncellement de Zombies affamés sur Sarrien, dont le salut final n’est pas garanti, ralliement à papa Nurgle bien acté par ce dernier ou pas. Quelques dizaines/centaines/milliers d’années plus tard, Dragan est quant à lui saisi d’une impression de déjà vu alors qu’il corrode les armures chromées de ces frimeurs de la IVème, ce qui ne fait que renforcer l’hypothèse de la défection de Mr Talon. Fin du spoiler

AVIS :

Mis à part le manque de clarté de sa conclusion (voir la partie spoiler ci-dessus), Endurance est une soumission solide de la part de l’ami Wraight, sans doute rédigée en accompagnement de son roman The Lords of Silence pour un galop d’essai littéraire. En quelques pages, Chris arrive ainsi à donner une véritable profondeur à ses répugnants héros, dont l’attitude chill, thrill & kill les distingue clairement des autres factions d’Astartes chaotiques et renégats de notre sombre galaxie, en plus de s’accorder parfaitement avec la philosophie débonnaire de Papa Nurgle, ce qui ne gâche rien. Sans rien galvauder de leur nature éminemment mauvaise, Wraight réussit également à rendre attachant (sans mauvais jeu de mots) le personnage de Dragan, dont le caractère égal et l’approche désinvolte de sa pestilentielle vocation le font apparaître comme éminemment plus sympathique que le Seigneur du Chaos lambda de la BL. De l’autre côté du ring, Sarrien s’avère moins mémorable, mais le récit que fait l’auteur de la lutte désespérée du loyaliste pour retarder l’inévitable, de part son caractère assez original (il combat en solo, et pas avec le reste de son escouade) et la bonne prise en compte des effets débilitants de la fatigue et des blessures sur la constitution d’un Space Marine – qui reste une machine de guerre insurpassable, mais peut se mettre dans le rouge s’il tire trop sur la corde – s’avère prenant et plaisant, sur les quelques pages qu’il dure. Une nouvelle SM comme je les aime donc : courte dans son propos, précise dans son dessein, efficace dans sa réalisation et à twist dans sa conclusion. Prenez-en de la graine, les rookies.

Gardant une nouvelle en fois en tête le but premier d’un recueil tel que celui dans lequel elle a été incluse, j’ajouterai pour conclure qu’Endurance fait un beau boulot de présentation d’une faction amenée à jouer un rôle important dans l’univers 40K (la Death Guard), en plus de donner assez envie de lire le long format mettant en vedette les Lords of Silence. Que l’exploration d’un concept central du fluff, le ralliement d’un Space Marine loyaliste au Chaos, soit également présente pour l’instruction des lecteurs novices ajoute encore a l’intérêt du propos, qui mérite donc largement sa place dans le Black Library Celebration 2019.

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Execution – R. Harrison [40K] :

ExecutionICÔNE : SEVERINA RAINE, COMMISSAIRE

INTRIGUE :

Sur la morne plaine de Morne, surplombée par la forteresse du même nom, la Commissaire Severina Raine est confrontée à des problèmes d’autorité. Les gros flingues employés par les rebelles défendant le bastion convoité par le haut commandement impérial ont transformé les Fenwalkers du Sergent Keld en Bloodsplatters, ce qui a sérieusement entamé le moral de l’officier supérieur du 11ème Fusilier d’Antari, le Capitaine Tevar Lun. Pas de chance pour ce dernier, ses désirs de reconsidérer l’attaque sur les murs ennemis sont balayés d’un revers de main par Raine, qui n’a d’autre choix lorsque Lun persiste dans sa couardise que de lui coller un bolt entre les deux yeux devant le reste de ses troupes. Propulsée commandante de l’opération par la force (et l’impact) des choses, la première tâche de Raine sera de tourner la colère – légitime – de ses soldats vers les hérétiques Drastiens plutôt que son humble personne. Heureusement, les Antari sont des sujets pieux et disciplinés de l’Imperium, et la carrière de la Commissaire peut se poursuivre plus loin que la troisième page de sa première nouvelle, ce qui est un stade important pour cette classe de personnages. À propos de personnages, profitons-en pour faire un petit tour de table des VIP de la nouvelle, qui sont, histoire de Gardes Impériaux oblige, assez nombreux. Dans le désordre, nous faisons ainsi la connaissance du Capitaine Stormtrooper Andren Fel et ses Duskhounds, du Sergent Daven Wyck et ses Wyldfolk, de la Psyker sanctionnée Lydia Zane et de l’ingénieure militaire Yulia Crys, qui joueront tous un rôle dans la nouvelle.

Cette session de remotivation achevée, il faut maintenant négocier la prise des tranchées adverses pour arriver jusqu’au bouclier cinétique qui protège la forteresse du bombardement impérial, en exploitant les quelques minutes offertes par le rechargement des mitrailleuses lourdes ennemies. Inutile de dire que les Antari se sortent haut la main de cette épreuve, rencontrant quelques bidasses chaotiques en chemin, et perdant au passage une poignée de PNJ, comme le veut la tradition. Au contact de la muraille, Crys parvient à faire un beau trou dans la cloison des hérétiques, permettant aux Antari de pénétrer dans la place sans difficultés. Cette progression rondement menée est entrecoupée de passages en flashback remontant à la nuit précédant l’assaut, pendant laquelle Raine et Fel se sont livrés à leur rituel habituel de dégustation de thé et échange d’anecdotes. On en apprend ainsi plus sur le folklore d’Antari, très représenté dans les noms des escouades du régiment, et sur l’enfance, forcément difficile, de l’héroïne dans le Scholam de Gloam. Plus précisément, la fois où elle a mené deux de ses camarades dans une campagne de dératisation officieuse, s’étant soldée par un succès relatif (extermination du nid de vermine, mais début d’incendie du bâtiment et mort violente de ses comparses dans l’opération). L’occasion pour elle d’apprendre à assumer les conséquences de ses actes, comme elle continue à le faire à ce jour.

Retour à Morne, où les Antari doivent maintenant trouver un moyen de dissiper le bouclier cinétique qui protège toujours la forteresse pour permettre au reste des forces impériales de leur venir en aide. Pas grand-chose à dire sur cette section de combat urbain des plus classiques, qui verra nos personnages s’illustrer contre les hordes de cultistes (très semblables au Pacte du Sang, le masque en moins) et les renforts Ogryns de l’ennemi. L’indispensable Zane est au four et au moulin, protégeant ses camarades avec un bouclier psychique de son cru, et balançant des mandales mentales monumentales à quiconque a le malheur de la regarder de travers. Notons également le caractère sadique de Wyck, et son addiction aux drogues de combat, qui le placent à mi-chemin entre Rawne et Cuuh en matière d’équivalence Tanithienne. Il est déjà entendu que Raine aura à s’occuper de cet élément utile mais incontrôlable, et qui ne peut pas la blairer parce qu’elle n’est pas d’Antari, dans la suite de ses aventures.

Arrivés à l’étage où les rebelles ont stocké leurs munitions, les survivants de l’infiltration retiennent la contre-offensive adverse assez longtemps pour permettre à Crys d’installer un dispositif explosif qui devrait permettre la pacification expresse de ce théâtre, si employé correctement. Zane, dont les pouvoirs incluent la précognition, flaire le coup fourré de Raine, qui place le devoir avant des choses aussi triviales que le bien-être au travail ou la survie des troupes qu’elle a sous ses ordres, mais accepte tout de même de jouer le jeu, bien qu’elle révèle en aparté à la Commissaire que ses visions s’arrêtent après l’explosion de la poudrière de Morne. Raine ordonne alors la retraite jusqu’aux murs du bastion, avant que la situation des impériaux ne deviennent trop intenable, et les force à appuyer sur le bouton un peu plus tôt que prévu…

Début spoiler…S’en suit une explosion catastrophique, à la létalité exacerbée par l’effet couvercle du bouclier de Morne, qui empêche l’énergie dégagée de se diffuser aux alentours, et revient donc dans les dents et les tissus mous des troupes présentes dans la forteresse, qui n’ont d’autres choix que de tomber raides mortes. Cette fin renversante est toutefois épargnée au groupe de Raine, protégé par la MVP Zane, qui prend difficilement sur elle pour abriter ses collègues derrière son fameux bouclier psychique. L’effort consenti ruine toutefois irrémédiablement son rimmel et ses globes oculaires, qui lui coulent sur les joues dans la plus grande tradition des comédies romantiques hollywoodiennes. Voilà pourquoi elle ne voyait plus rien après cette détonation. Prix de la camaraderie pour Lydia Zane, vraiment. C’est toutefois une victoire indéniable pour l’Imperium qui se profile, accomplie grâce à la vaillance et au dévouement (en partie involontaire, Raine ayant menti à ses soldats en leur indiquant que les renforts étaient en chemin) du 11ème Fusilier d’Antari, qui n’a perdu que très peu de personnages nommés, et donc importants, dans la bagarre. C’est ce vieux Tevar Lun qui peut être fier de ses hommes (et femmes) depuis l’au-delà.Fin spoiler   

AVIS :

Si vous êtes familiers de la Black Library, il y a de bonnes chances que la lecture de cet ‘Execution’ vous fasse penser aux tribulations martiales du Premier et Unique de Tanith, ce qui n’est guère étonnant quand on compare les castings et les styles de Rachel Harrison et de Dan Abnett1. Etant donné le gouffre qui sépare ces deux séries en termes de publications, il faudra attendre un peu pour s’amuser à une analyse croisée de ces dernières, mais je dois dire que cette nouvelle introduit très proprement, et de façon satisfaisante, les personnages importants du 11ème Fusilier d’Antari, et constitue donc un point de départ tout indiqué pour qui souhaite suivre de plus près la trajectoire de ce nouveau régiment nommé de la GW-Fiction. Harrison présente bien sa galerie de protagonistes, souligne leurs affinités et inimitiés respectives, et ébauche quelques points saillants de leur histoire personnelle, qui sera sans doute au cœur de la suite de leurs aventures. On a également droit à une bone dose de fluff made in Antari, ce qui n’est certes pas essentiel pour la compréhension de Warhammer 40.000, mais dénote toutefois d’un sérieux travail de « caractérisation » de la part de l’auteur, et favorise l’immersion dans l’histoire et l’intérêt pour les personnages mis en scène dans cette dernière. Tant qu’on parle du background, je dois également souligner que cela fait plaisir de voir un.e Commissaire héroïque enfin faire son devoir, c’est-à-dire exécuter un officier refusant ses ordres, sans bénéficier de circonstances atténuantes. La disparition prématurée du Capitaine Lun, présenté comme un type bien et un bon soldat, est donc à savourer2 à sa juste valeur. Enfin, d’un point de vue purement narratif, Harrison rend une copie satisfaisante avec cette nouvelle de Gardes Impériaux de films d’action, nerveuse et sans temps morts. Rien d’exceptionnel ici, mais rien à jeter non plus. Pour boucler la boucle, je dirai que Rachel Harrison signe avec ‘Execution’ une nouvelle d’un meilleur niveau que ce que Dan Abnett avait publié au tout début des ‘Fantômes de Gaunt’. Reste à voir si la suite sera à la hauteur…

1 : Vu la manière dont le second remercie la première dans ses derniers bouquins, il y a de fortes chances que les deux aient l’habitude de travailler ensemble, et que Harrison ait voulu émuler le « maître » dans ses écrits. 
2 : Quelle belle remarque de psychopathe tout de même. Mais c’est vrai, toi-même tu le sais.

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The Battle for Markgraaf Hive – J. Hill [40K] :

The Battle of Markgraaf HiveICÔNE : MINKA LESK, GARDE DU 101EME CADIEN

INTRIGUE :

Comme les plus sagaces des lecteurs de cette chronique l’auront certainement deviné, la nouvelle du sieur Hill traite donc de la bataille pour la ruche Markgraaf1, opération de reconquête et pacification à laquelle l’unité de Minka Lensk, héroïne récurrente de l’auteur, à le plaisir et l’avantage de participer, en compagnie du \[|{™#{ème Cadien (comprendre qu’entre les pertes au combat non remplacées et les fusions régimentaires qui s’en suivent, les numéros défilent plus rapidement que lors d’une soirée bingo à l’Ehpad de Bois-Robert-sur-Veule).

Au menu de ce qui peut sans doute être considéré comme un séminaire annuel pour les derniers des Targaryen – cette manie de coller des yeux violets aux protagonistes pour les distinguer de la masse… –, une activité de team building dans les ténèbres des niveaux inférieurs de la ruche en question, avec les habituels cultistes hargneux-mais-bon-ça-va-on-a-vu-pire en lieu et place des assiettes en céramique à décorer, qui étaient à la mode en ce genre d’occasions quelques millénaires plus tôt. Une fois la séance initiale de laser game terminée, on enchaîne avec une découverte de la faune locale, qui consiste en des rats de la taille d’un rat et des asticots de la taille d’un chien (appelons-les maxticots), suivie par une session d’aqua-relax dans un bassin naturel, sous les ordres d’un Commissaire-Nageur un brin autoritaire.

À peine le temps de réaliser que les maxticots ne font pas de bons candidats au fish pédicure, à moins d’être un Ogryn peu chatouilleux, qu’il faut enchaîner avec une initiation à l’escrime médiévale/escape game sous la houlette de Philippe Chaos-therine (il coupe sa hache… et il rallume sa hache…), Space Marine renégat reconverti en coach de vie. Cette journée intense se termine par quelques longueurs de brasse coulée, un temps calme de 10 minutes devant une œuvre d’art moderne convenablement moche, et un ultime passage au hammam (mais habillé, ce qui est concept). Ce n’est pas tout le monde qui a la chance de vivre des séminaires aussi riches. Merci qui ? Merci Abby !

À ne pas confondre avec la ruche Steffigraaf, qui malgré quelques revers, est toujours au service de l’Empereur.

AVIS :

Propulsé directement dans le feu de l’action dès les premières lignes de The Battle… (au moins, le titre n’est pas mensonger), le lecteur aura sans doute quelques difficultés à comprendre les tenants et les aboutissants de cette successions de péripéties aussi guerrières que brouillonnes, expédiées sans tact, ni finesse, ni connecteurs logiques (ce qui surprend au début, irrite au milieu, et fait marrer à la fin) par un Justin Hill aussi maître de son propos qu’un élève de CM1 couchant par écrit le récit de ses vacances de printemps.

Si le début de la nouvelle fait illusion, tout se corse à l’arrivée sur la mare aux maxticots, théâtre d’une empoignade confuse, suivi de l’arrivée d’un groupe de survivants – dont un Valhallan, qui passait dans le coin – mené par un Commissaire, suivi de l’exécution d’un Garde qui trouvait l’eau trop froide, suivi de l’arrivée du random Chaotic Space Marine de base, suivi d’une ré-empoignade confuse, suivie d’une fuite éperdue de l’héroïne jusqu’au fond du bassin, suivi d’un questionnement philosophique sur la destinée des Cadiens survivants, suivi d’un séchage express, inexpliqué et interprété comme miraculeux par une Minka à laquelle il ne faut pas grand chose, des vêtements de nos héros, suivi de la fin du récit, qui s’achève donc davantage comme un chapitre de roman qu’un court format digne de ce nom, faute d’un dénouement digne de ce nom (sauf si être coincé à deux sans matos dans une caverne inondée peuplée de vers carnivores géants et squattée par des hordes d’hérétiques peu aimables et un Space Marine du Chaos altéré de sang constitue un explicit satisfaisant, bien sûr1).

Pauvre en termes de fluff, d’informations sur le passif de Mina Lensk, et d’une assez grande banalité dans son propos, The Battle… lorgnait peut-être du côté de la saga Gaunt’s Ghosts, et notamment du siège de Vervunhive couvert dans Necropolis, pour son inspiration, mais le fruit (plein d’asticots, donc) est tombé trèèèès loin de l’arbre. Pour laisser le mot de la fin, en même temps que du début, car j’aime bien boucler des boucles sur mon temps libre, à Hill en personne : « What the hell is happening ? »

1 : Si c’est le cas, vous êtes bizarre.

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The Smallest Detail – S. Mitchell [40K] :

The Smallest DetailICÔNE : CIAPHAS CAIN, COMMISSAIRE & HÉROS DE L’IMPERIUM

INTRIGUE :

À la recherche de petits extras pour égayer l’ordinaire de son cher Commissaire Cain, le brave Jurgen a pris sur lui de visiter les entrepôts de la milice de Helengon, monde banal sur lequel la Garde a été déployée pour écraser une insurrection l’étant tout autant. Usant de la considérable influence de son supérieur pour impressionner le responsable de l’entrepôt, un certain Sergent Merser, l’homme à tout faire du Héros de l’Imperium déambule longuement entre les travées et les étagères, emplissant sa musette des spécialités culinaires locales les plus appétissantes, à commencer par un saucisson d’anguille de sable tout simplement comestible, ce qui est déjà plus que ce que la majorité des rations du Ministorum peuvent revendiquer. Ces emplettes complétées, Jurgen se dirige tranquillement vers la sortie du site, mais remarque rapidement qu’il a été pris en filature par des amateurs, ce qui ne le trouble pas outre mesure1. Et en effet, l’embuscade dans laquelle il prend soin de tomber, et qu’il déjoue grâce à son entraînement et équipement supérieur, n’aurait pas cassé trois pattes à une Sentinelle. Seul petit problème, l’échange de tirs entre notre héros et son dernier adversaire a eu pour effet de déclencher un incendie (c’est ça que de s’abriter derrière des fûts de prométhéum), rendant l’identification des assaillants de Jurgen difficile.

Rejoint par la Prévôte Liana, qui se trouve en charge de l’enquête de cette tentative d’assassinat caractérisé, et par le Sergent Merser, qui accepte de jeter un œil sur les inventaires des autres entrepôts de la milice pour tenter de comprendre comment les tueurs en (im)puissance ont réussi à trouver uniformes et fusil laser2, Jurgen accepte de coopérer à l’investigation, mais seulement jusqu’au moment où il devra rentrer au camp pour préparer le jambon-purée de Cain. Très étrangement, l’étude des documents officiels ne donne rien, les inventaires inspectés par Merser étant trop mal tenus pour détecter des absences ou surplus de matériel (contrairement aux siens, d’une impeccable et implacable précision). Le dossier menaçant de piétiner, Jurgen prend congé, indiquant à ses comparses son intention de rentrer au bercail à pied, comme il est venu…

Début spoiler…Sauf qu’il était en fait venu en moto (une Salamander n’étant pas pratique dans une ville pas encore en ruines, et donc pleine de feux rouges, de livreurs Deliveroo et de petites mamies en déambulateur), et qu’il a fait exprès de mettre Merser sur une fausse piste, car il se doutait de la participation du Sergent dans la conspiration le visant. Aussi, lorsqu’il le voit sortir en courant de l’entrepôt quelques minutes après lui et sauter dans une camionnette qui part à fond de train pour rattraper le piéton qui n’en était pas un, Jurgen prévient Liana et se met en filature de la taupe, qu’il rattrape et immobilise au premier carrefour venu. Finalement, il s’avère que toute cette affaire n’a été qu’un énorme et regrettable (pour Merser, et plus encore pour ses complices) malentendu, le Sergent faisant partie d’un gang détournant de la nourriture pour la revendre à prix d’or sur le marché noir. Persuadé que Jurgen allait le dénoncer auprès de Cain (ce que l’aide de camp n’avait pas du tout l’intention de faire, car comme il le reconnaît lui-même, tout le monde fait ça), Merser a tenté de réduire le Valhallan odoriférant au silence, avec des résultats médiocres. Ironie de l’histoire, ce sont ses inventaires trop parfaits qui ont mis la puce à l’oreille de Jurgen, qui, en tant que Garde vétéran, sait bien que ce genre de documents sont par nature inexacts. Encore une fois, le mieux a été l’ennemi du bien !Fin spoiler

1 : Quand on est un vétéran ayant combattu les Tyranides et les Necrons à plusieurs reprises, plus grand-chose ne vous excite.
2 : L’absence de -s est volontaire, car sur les trois assaillants, un seul était convenablement armé.

AVIS :

Si cette petite nouvelle mettant à l’honneur le fidèle sidekick de Ciaphas Cain plutôt que ce dernier1 se laisse lire sans problème, et permet au lecteur non familier de l’approche particulière que Sandy Mitchell a du grimdark de découvrir cette dernière, je m’interroge sur la pertinence de l’intégrer dans un recueil dédié aux icônes de la GW-Fiction, dont Jurgen ne fait définitivement pas partie. Ce ne sont pourtant pas les courts formats où Cain tient la vedette qui manquent, et qui auraient à mes yeux bien mieux fait l’affaire ici. Je suis également un peu déçu que le titre équivoque de l’histoire n’ait au final débouché sur rien dans le dénouement de l’intrigue. Mitchell nous montre en effet Jurgen prendre en note mentale le nom d’un parfait inconnu, parce qu’on ne sait jamais, ça peut servir… sauf que ça n’a servi à rien ici. Le fusil de laser de Tchekov, ça te dit quelque chose ? Bref, ‘The Smallest Detail’ est loin d’être la meilleure, ni la plus adaptée, des nouvelles de Ciaphas Cain que l’on puisse parcourir, et je recommanderai donc au lecteur de retenter sa chance avec une autre soumission pour prendre la véritable mesure du Héros de l’Imperium.

1 : Ce n’est pas le premier texte de ce type, l’hyper court format ‘A Mug of Recaff’ étant également centré sur Jurgen.

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Of Their Lives in the Ruins of Their Cities – D. Abnett [40K] :

Of Their Lives...ICÔNE : IBRAM GAUNT, COMMISSAIRE GÉNÉRAL DU PREMIER & UNIQUE DE TANITH

INTRIGUE :

Nous suivons le premier et unique Commissaire-Colonel Ibram Gaunt, en charge du régiment du même statut, dans les premiers temps – assez difficiles – de son affectation à la tête des Tanith. Encore inexpérimentés, bien qu’ayant déjà soufflé dans les naseaux des Sang Bleu de Volpone en prenant la ville de Voltis à leur place, les futurs de Fantômes ont subi la vengeance mesquine de Noches Sturm et ont été chargés de mener une mission de reconnaissance dans les ruines de la seconde cité de Voltemand, Kosdorf, pendant que le gros de la croisade partait vers d’autres théâtres d’opération. L’équivalent de « va voir là bas si j’y suis » en termes militaires, ce qui n’aide pas vraiment à motiver la troupe. Cette dernière, toujours traumatisée par la perte de son monde natal, en veut méchamment à Gaunt, et le Commissaire a bien du mal à briser la glace avec ses nouvelles troupes, dont il ne pense pas grand-chose de positif pour le moment. Il songe même sérieusement à accepter l’offre que lui avait faite son vieux copain Blenner, un petit piston bien placé pour remettre sa carrière sur les rails, et laisser ces tree huggers de Tanith derrière lui. Il conserve à cet effet la lettre que son camarade lui a écrite dans la poche de son uniforme, comme un joker à abattre en cas de besoin.

La nouvelle décrit l’opération de reconnaissance montée par Gaunt et Corbec pour explorer Kosdorf avant que le gros du contingent impérial soit prêt à avancer, et qui, ô surprise, se passe très mal. Il s’avère rapidement que l’Archennemi a conservé des amis séides dans la ville, des cohortes de forces de défense planétaire rendues folles par les maléfices du Chaos et le manque de nourriture. Voulant gérer la situation comme un grand, Gaunt opte pour une retraite combattante, afin de laisser le temps à Caffran, son adjudant intérimaire depuis la mort de Sym sur Tanith (et avant que Gaunt n’embauche Milo pour ne plus avoir à entendre les « steuplé msieur steuplééééééééééééééé » du gamin), de prévenir le reste du régiment du problème rencontré (comme d’habitude, la radio ne marche pas, sinon c’est pas drôle). Cette situation stressante (les Doskorfers étant adeptes de la guerre psychologique et se faisant passer pour les véritables fantômes de Tanith pour saper le moral de l’adversaire) lui permettra de prendre la mesure des hommes qui le servent, depuis le cordial Corbec jusqu’à l’instable Larkin, en passant par l’imprécis (mais pas cette fois) Bragg, le clairvoyant Domor ou l’insaisissable Mkoll. Lorsque les renforts finissent enfin par arriver, menés par l’au fond pas si méchant que ça Major Rawne et sa bande de vauriens1, tout est bien qui finit bien pour les Tanith, qui sortent un peu plus unis de cette escarmouche. Symbole de l’enterrement de la hache en nalwood de guerre entre Gaunt et ses bidasses, le premier brûle la lettre de Blenner2 à son retour au campement, liant ainsi son destin avec celui de ses Fantômes. La suite fait partie de l’histoire de la GW-Fiction…

1 : Qui s’étaient amusés à faire les poches de leur officier et lui avait soutiré la lettre de Blenner, au grand désarroi de Gaunt. Ils lui ont toutefois rendu à la fin de la nouvelle.
2 : On peut supposer que la missive contenait l’adresse mail et le numéro de téléphone de Blenner, que Gaunt n’avait pas enregistrés ailleurs. Sinon je ne vois pas en quoi ce geste incendiaire empêcherait notre héros de saisir sa chance de mutation.

AVIS :

Longue nouvelle (50 pages tout de même) se taillant la part du lion dans tous les recueils dans lesquels elle a été incluse (dont ‘The Hammer & the Eagle’), ‘Of Their Lives…’ est le récit d’introduction ultime aux Fantômes de Gaunt, écrit par Dan Abnett avec ce but particulier en tête, au moment où la saga avait déjà atteint son statut légendaire parmi la communauté. Il est intéressant à ce titre de la comparer à des travaux plus anciens, mais sensiblement similaires car relatant l’apprivoisement mutuel entre le Commissaire-Colonel et ses nouvelles recrues. Les contributions d’Abnett à la première mouture d’Inferno ! (‘Ghostmaker’ – la nouvelle – , ‘A Blooding’, ‘The Hollows of Hell’) traitent ainsi de ce sujet de manière fort logique, à fins de présentation et d’établissement de cette nouvelle (à l’époque) série. Un peu plus tard, Abnett se fendit d’un ‘In Remembrance’ prenant place après ‘Necropolis’, et donnant à nouveau au lecteur novice un échantillon représentatif en même temps qu’un tour de table des personnalités importantes, du Premier et Unique de Tanith. ‘Of Their Lives…’ est la version revue, corrigée et probablement définitive de ce didacticiel narratif, présentant une fois encore les personnages « initiaux1 » de la série, leurs personnalités, leurs motivations et leurs rapports les uns par rapport aux autres. Ce côté social est particulièrement exploré ici, et justifie bien plus les 50 pages de la nouvelle que l’intrigue, relativement simple, qui sous-tend cette dernière.

Si ‘Of Their Lives…’ est d’abord destinée à un public non familier avec les Fantômes de Gaunt, Abnett n’oublie pas ses vétérans et s’amuse à glisser de nombreux clins d’œil à la suite des événements, que seuls les connaisseurs pourront détecter. La destinée de certains Tanith est esquissée de façon prophétique (Caffran, Feygor, Beltayn…) parfois jusqu’à un stade avancé de la saga (dialogue « bon pied bon œil » entre Larkin et Gaunt), tout comme celle de Noches Sturm, à qui Milo promet un retour de bâton karmique que le Volpone recevra bien quelques années plus tard. Notons également la référence croisée aux travaux inquisitoriaux d’Abnett, nouvelle passerelle/easter egg à recenser dans le « Daniverse ». Au final, cette nouvelle accomplit parfaitement son objectif, de façon peut-être un peu transparente pour le lecteur avisé, mais Dan Abnett, égal à lui-même, signe un texte suffisamment solide pour que tout le monde y trouve son compte. Si vous voulez découvrir un des mythes fondateurs et structurants de la Black Library, ‘Of Their Lives…’ est donc le point de départ idéal pour se familiariser avec une saga aussi colossale que celle des Fantômes de Gaunt.

1 : Note à l’attention des lecteurs ne connaissant par les Fantômes de Gaunt : Abnett a pris un malin plaisir à rajouter des personnages non Tanith à son casting au fur et à mesure des campagnes du régiment. Si vous pensez qu’il y a une foule de noms à retenir ici, attendez un peu de lire ‘The Lost’ ou ‘The Victory’.

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Mercy – D. Ware [40K] :

MercyICÔNE : AUGUSTA, SŒUR SUPÉRIEURE DE L’ORDRE DE LA ROSE DE SANG

INTRIGUE :

Sur le monde de Lautis, isolé dans l’arrière-pays de l’Ultima Segmentus, une escouade de Sœurs de Bataille de l’Ordre de la Rose de Sang menée par la Sœur Supérieure Augusta Santorus explore les ruines d’une cathédrale impériale, peut-être dédiée à Sainte Mina, et peut-être dédiée à Saint Maclou (qui peut dire ?), à la recherche de… quelque chose. Escortées par un missionnaire de l’Ecclésiarchie (Lysimachus Tanichus), ayant pris sur lui de ranimer la flame de la foi en l’Empereur parmi la plèbe locale après des siècles d’isolement et d’obscurantisme, l’Adeptus Sororita s’est en effet lancé dans une quête aussi pressante que floue pour une statue pouvant être liée aux origines de l’Ordre. On ne saura jamais pourquoi l’identification du patrimoine sacré constitue une priorité telle pour les membres de la Rose de Sang, mais toujours est-il que nos intrépides sistas se retrouvent fort dépourvues quand la Waaagh ! locale fut venue.

Coincées dans les ruines de la maison de Pépé (Question : peut-on considérer les temples impériaux comme des Ehpads, de ce fait ?), Santorus et ses sous-fifres optent alors pour un dernier carré héroïque et commencent à arroser les peaux vertes de bolts et d’imprécations en Haut Gothique, avec des effets spectaculaires, tant sur les effectifs de la horde ork que sur la culture générale du lecteur. Las, cela ne suffit pas à décourager les belliqueux Xenos de forcer l’entrée du lieu saint sous le seul poids du nombre, forçant les fifilles survivantes à, je vous le donne en mille, engager les brutes au corps à corps. Et pas n’importe comment, qui plus est : à mains nues. Oui, vous avez bien lu, ô incrédules lecteurs : c’est bien à coup de poing et de pied (pas de crépage de chignon possible avec les Orks malheureusement) que Santorus et consœurs tombent sur le râble, plutôt costaud, des aliens mécréants. Et le meilleur dans tout ça, c’est qu’elles leur mettent une énorme race, à l’image d’une Sœur Supérieure déchainée et tenant facilement tête à un Warboss Blood Axe, avec et sans arme. Pourquoi avoir des progénoïdes quand on peut avoir des stéroïdes ?

Les Orks finalement mis en déroute, et leur chef exécuté d’un bolt en pleine tête après un sommaire interrogatoire ayant permis de mettre à jour la duplicité de ce traître de Tanichus (c’est un nom de fourbe, je l’ai toujours dit), il est temps pour Augusta de (se) rendre justice afin des réparer les torts subis (une Soeur décédée d’allergie à la grenade, et quatre permanentes totalement ruinées). Guidée par une inspiration soudaine, et sans doute divine, elle décrète donc la mort du félon, ignorant ses piteuses justifications pseudo humanitaires, et l’annexion de Lautis au sein du protectorat de l’Ordre. Pourquoi ? Parce que. The end.

AVIS :

Que garder de Mercy, première soumission de la newbie Dannie Ware pour la Black Library ? Pas grand-chose, malheureusement. Sur le fond, l’intrigue proposée tient en une demi-ligne (attention, vous êtes prêts ? “Sistas versus Orks dans une cathédrale”. Ta-daaaaa!), et le “twist” final gardé en réserve par l’auteur tombe tellement à plat qu’on aurait même du mal à le considérer comme tel. Que Tanichus ait mené son escorte dans un piège, soit. Mais apprendre que la motivation profonde des Orks, et la raison pour laquelle ils ont accepté la proposition du missionnaire, est la récupération des armes d’une pauvre escouade de cinq Sororitas, no way. L’histoire a beau se dérouler dans l’Ultima profond, plus cheap que ça, c’est fouiller les poubelles des colons locaux pour récupérer les bouteilles d’amasec consignées au Simply Market du coin. Respectez-vous tout de même, Messieurs les peaux vertes.

Sur la forme, on aura bien du mal à pardonner à Ware les libertés qu’elle prend avec quelques principes fondateurs et porteurs du fluff de GW, au premier du rang duquel on trouve l’axiome : “Les Orks sont des forces de la nature”. Faire triompher une escouade de Space Marines d’Assaut vétérans d’une empoignade contre ce type d’adversaires, pourquoi pas (et encore). Mais une poignée de Sœurs de Bataille qui tatane comme qui rigole dix fois leur nombre et cent fois leur poids en géants verts, sans subir une seule perte dans le feu de l’action, et en recourant à des prises de catch histoire de faire kwioul, non merci. Ajoutez à cela un character development aux abonnés absents et quelques incongruités (comme une statue disposée de telle façon à ce qu’elle soit tournée vers Sainte Terra… donc vers l’Ouest-Sud-Ouest, c’est bien connu) sans conséquences pour le récit mais pas pour la crédibilité de ce dernier, et vous obtenez une nouvelle à remiser dans le fond des cartons du second choix de la BL. Mercy ? Sans façons.

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Thorn Wishes Talon – D. Abnett [40K] :

Thorn Wishes TalonICÔNE : GREGOR EISENHORN & GIDEON RAVENOR, INQUISITEURS DE L’ORDO XENOS

INTRIGUE :

Par une sombre nuit d’orage, un petit groupe de mystérieux individus débarque sur la planète Malinter, et prend la direction d’une tour en ruines où un rendez-vous a été fixé avec une tierce partie anonyme. Voilà qui est bien brumeux, voire fumeux, vous en conviendrez. Sur le chemin, les marcheurs sont attaqués par 6/7 hostiles, donnant l’occasion à Abnett de présenter ses protagonistes de façon convenable. À tout seigneur container, tout honneur, commençons par le meneur de la bande, l’Inquisiteur Gideon Ravenor, puissant Psyker réduit à l’état de loque humaine lors d’un attentat chaotique il y a bien longtemps, et confiné dans un fauteuil flottant énergétique depuis lors. Il a amené avec lui quelques copains pour lui servir de garde de la carrosserie : l’Interrogateur Carl Thonius, incarnation parfaite du hacker nerd passant la moitié de son temps à se plaindre, et l’autre à balancer des vannes caustiques, les hommes et femmes de main Harlon Nayl, Kara Swole et Zeph Mathuin, et la télékine Patience Kys. Seul Gigi sait ce qui les attend sur Malinter, et il refuse obstinément de s’en ouvrir à ses collaborateurs, même après que cette première embuscade, prélude à de nombreuses autres, se soit terminée en faveur des visiteurs (grâce à la combo mortellement efficace lévitation forcée + canon d’assaut rotatif).

La progression de nos héros devient de plus en plus difficile au fur et à mesure qu’ils s’approchent du sommet de la tour, des hordes des cultistes chaotiques se mettant en travers de leur route dans le but d’empêcher la rencontre de haut niveau (à tout point de vue) de se produire. Laissant Thonius, Nayl et Mathuin retenir la plèbe et échanger des blagounettes, ce Dom Juan de Ravenor entraîne Kys et Swole à sa suite jusqu’au rooftop du gratte ciel, où les attend ce bon vieux Gregor Eisenhorn, mentor de Gideon et ex-employeur de Kara. Disparu de la circulation depuis des lustres, et présumé mort ou radical par l’Imperium (voir la trilogie ‘Eisenhorn’ d’Abnett à ce sujet), Greg le Grabataire est toujours actif dans le game et déterminé à s’opposer au Chaos par tous les moyens nécessaires, y compris en retournant ses armes et méthodes contre lui. Le seul équipier conservé par Eisenhorn dans sa lutte contre l’anarchie galactique est ainsi le possédé Cherubael, qui lui sert de gros bras mais également d’auxiliaire de vie (dur de monter en haut d’une tour de 500 mètres – sans ascenseur – quand on est invalide à 93%1). Ces retrouvailles émouvantes entre les deux invalides tournent rapidement à la réunion professionnelle, Eisenhorn ayant voulu prévenir son disciple de l’intérêt que lui portent les membres de la Divine Fraternité, un culte chaotique spécialisé dans les catastrophes à venir. D’après leurs dernières (pré)visions, Ravenor, ou quelqu’un de son entourage, jouera un rôle décisif dans l’incarnation du démon Sliite dans notre dimension, ce qui aura évidemment des conséquences néfastes pour l’Imperium. Une barquette avertie en valant deux, Eisenhorn tenait à faire passer le message à son ancien Interrogateur, qui décide naturellement de… continuer ses investigations sur Eustis Majoris, précisément là où le démon fera son entrée dans le Matérium. Mais attention, en faisant attention.

Un peu plus bas, le Supreme NTM (Nayl, Thonius & Mathuin) a bien du mal à gérer le Dreadnought que les cultistes ont fait venir en renfort. Ils parviennent cependant à le retenir suffisamment longtemps avec leurs grenades krak (un peu) et chamailleries (surtout) pour que les Inquisiteurs se traînent enfin à leur niveau, leur conciliabule achevé, et règlent son compte à la menaçante machine. Le reste n’est qu’une formalité, et après un joyeux massacre de chaoteux et un salut au club des anciens (Nayl et Swole ayant commencé par servir Gregor avant de rejoindre Gideon), Ravenor et Eisenhorn se séparent à nouveau, peut-être pour la dernière fois. La suite sera racontée dans ‘Ravenor Returned’, le deuxième tome de la trilogie consacrée par Abnett au Stephen Hawkins du 41ème millénaire.

1 : Ce qui pose la question : pourquoi Eisenhorn a-t-il donné rendez-vous à son pupille, à la mobilité également réduite, dans un endroit aussi difficile à atteindre ? Autrement que pour le côté grandiose, s’entend ?

AVIS :

Abnett trouve un prétexte assez quelconque pour réunifier le temps d’une nouvelle la team GG de l’Inquisition, et on peut lui en être gré. Il est clair à la lecture de ‘Thorn Wishes Talon’ que l’équilibre des forces penche en faveur de Ravenor (dont la saga était en cours d’écriture au moment de la première publication de cette nouvelle), Eisenhorn en étant réduit à faire un cameo plutôt qu’à participer réellement à l’intrigue. En ce sens, cette nouvelle donnera sans doute plus envie au lecteur de se pencher sur les aventures de Gideon le gai luron plutôt que sur celles de Gregor Trompe-la-Mort, même si les deux séries méritent définitivement la lecture. On prend plaisir à voir opérer une équipe d’agents de l’Inquisition, constituée d’individus au caractère bien trempé et aux compétences uniques, ce qui donne un cocktail savamment mixé d’action et de punchlines, saupoudré par quelques éléments de fluff dignes d’intérêt, dans le plus pur style d’Abnett. Je place ‘Thorn Wishes Talon’ en dessous des histoires policières/roman noir (‘Missing in Action’, ‘Backcloth for a Coin Additional’) et détaillant l’origine/la destinée de personnages secondaires importants des travaux inquisitoriaux de Dan Abnett (‘Playing Patience’, ‘The Strange Demise of Titus Endor’), mais vous pouvez tout de même y aller les yeux fermés (ou pas, c’est tout de même plus pratique pour lire un texte).

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The Wreckage – D. Annandale [40K] :

The WreckageICÔNE : SEBASTIAN YARRICK, COMMISSAIRE

INTRIGUE :

Où il sera question des premières années de service de Sebastian Yarrick, avant qu’il ne devienne la légende acariâtre que l’Imperium connaît et adore redoute. Déjà engagé aux côtés de la Légion d’Acier d’Armaggedon, notre héros se retrouve en mauvaise posture lors de la traque d’une bande de pirates hérétiques ayant fait du vilain dans le secteur de Statheros, et qui semble avoir un coup d’avance sur ses adversaires impériaux. Débarqué à la surface d’Aionos, une lune servant de décharge à vaisseaux spatiaux en fin de vie, le 252ème Régiment de la Légion d’Acier tombe dans une embuscade qui le force à s’abriter derrière une épave (d’où le titre. Ça, c’est fait.), en attendant des jours meilleurs, ou un coup de génie militaire de la part du Capitaine Jeren Marsec, leader charismatique mais tête brûlée de l’expédition. Yarrick, bien moins dominateur que dans ses dernières années, se contente d’observer avec circonspection la tournure que prennent les événements, échangeant quelques remarques acerbes avec son pote Otto Hanoszek, Sergent expérimenté du 252ème, avec lequel il partage quelques doutes sur la qualité du Capitaine Marsec. Ce dernier, qui a vraiment la confiance, se permet de faire des blagues au sujet de son Commissaire, et propose en toute simplicité de charger en masse les lignes ennemies (situées en hauteur et mieux fortifiées que celles des impériaux) afin de forcer les hérétiques à se concentrer au même endroit pour repousser l’attaque, les transformant en cible facile pour la frégate d’Armaggedon (Castellan Belasco) qui stationne en orbite. Moyennement emballé par ce plan à 80% suicidaire, Yarrick accepte tout de même de marcher dans la combine, mais le coup de bluff de Marsec ne donne rien. Il semble en effet que le fourbe ennemi se soit fait la malle au lieu de tenir sa position, comme il était convenu qu’il le fasse.

Dépité autant que déboussolé par ce coup du sort, Marsec contacte la frégate pour annuler la frappe orbitale, mais réalise un peu tard qu’il vient de re-re-retomber dans un piège, les hérétiques ayant capturé le vaisseau et n’attendant que la confirmation du Capitaine que ses troupes forment un gros tas bien compact au sol pour donner du macrocanon. Le subtil accent nazillard de l’opérateur radio auquel Marsec s’adresse met toutefois la puce à l’oreille de Yarrick, qui parvient à sauver quelques meubles en ordonnant une dispersion stratégique quelques instants avant que la catastrophe ne frappe. La situation du 252ème est toutefois des plus précaires, réduit à quelques escouades éparses, mené par un officier totalement hébété par la tournure qu’on prit les événements, et confronté, en plus des pirates de l’espace, à une escouade de Space Marines du Chaos des tristement célèbres Harkanor’s Reavers (la Légion des Damnés, goût Hérésie).

Prenant en charge les opérations le temps que Marsec sorte de sa torpeur, Yarrick entraîne ses survivants dans un complexe de pyramides enfoui sous le sol de Aionos, et découvert par le bombardement spatial. Je ne vous ferai pas l’insulte de laisser planer l’ombre d’un suspens sur la présence de Necrons dans cette nécropole, car c’est évidement le cas. Pris entre le marteau du Chaos et l’enclume des Xenos, Yarrick parvient à feinter son monde en passant en mode furtif, laissant les hérétiques menés par leurs gros copains énergétiques se ruer sur les robots tueurs, avec des résultats concluants. Un bonheur n’arrivant jamais seul, nos héros apprennent que l’équipage du Castellan Belasco a réussi à se libérer et est sur le point de reprendre le contrôle du vaisseau, ce qui permettrait au 252ème de tirer sa révérence sur cette victoire mineure. Problème, le bombardement a séparé les Gardes Impériaux en deux, et le groupe mené par le Sergent Hanoszek est confronté à la même situation que celui de Yarrick (hérétiques, Space Marines du Chaos, pyramide…), sans bénéficier de la présence scénaristiquement salvatrice de ce dernier.

Conscient que la situation de ses camarades est sans espoir1, Yarrick essaie de convaincre Marsec, qui a enfin repris ses esprits, de ne pas jouer au héros en essayant de monter une opération de secours vouée à l’échec. En vain. Seb la Frite passe alors en mode Commissaire et colle un bolt dans la tête de l’officier, qui n’attendait que ça en fait, histoire de mourir en martyre au lieu de devoir justifier son incompétence auprès du haut commandement à son retour. Grand prince, Yarrick annonce lui-même à Hanoszek qu’il a été désigné volontaire pour mourir au nom de l’Empereur, ce que ce dernier accepte avec stoïcisme, et laisse sa radio ouverte jusqu’au bout pour recueillir les derniers râles des héroïques bidasses. Kelôm.

1 : Ils sont confrontés à 3 Astartes du Chaos. 3 ! C’est Gaunt qui doit doucement rigoler dans son coin.

AVIS :

Une nouvelle sur Yarrick où aucun Ork ne vient pointer le bout de son (absence de) nez, cela fait bizarre, tant cette race de Xenos est centrale dans la saga du vieux Commissaire. Le récit que fait Annandale du début de la carrière du héros d’Armaggedon, que l’on découvre déjà animé de puissantes convictions quant à la manière d’accomplir son devoir, même s’il se laisse ici marcher sur les pieds par cette fantoche de Marsec, ne s’avère pas vraiment mémorable, et je pense que le nombre très important de factions convoquées dans cette courte nouvelle joue un rôle important dans ce constat de bofitude. Était-il vraiment nécessaire de faire intervenir les Necrons (qui n’apparaissent même pas directement dans le récit d’ailleurs) dans cette péripétie mineure de la carrière de Yarrick ? Cela renforce en tout cas le running gag de la nécropole enfouie sous trois centimètres de sable, et qui se réveille dès que le chien du héros la déterre par inadvertance en creusant un trou pour son os. À vouloir jouer à la fois sur le tableau de la psychologie (Yarrick se retrouve confronté à un dilemme moral qui aura des conséquences sur la suite de sa vie) et de l’action (Yarrick doit mener ses hommes à la victoire en dépit des circonstances) en aussi peu de pages, Annandale score moyennement sur les deux dimensions, et ce faisant, ne rend pas vraiment service au héros qu’il est sensé glorifier.

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Rite of Pain – N. Kyme [40K] :

Rite of PainICÔNE : ADRAX AGATONE, CAPITAINE DE LA TROISIÈME COMPAGNIE DES SALAMANDERS

INTRIGUE :

Malgré leur réputation de gros nounours, les Salamanders ne sont pas exempts de pratiques douteuses. La scène qui se déroule en ouverture de ‘Rite of Pain’ (une nouvelle qui ne traite pas de la manière de faire une Tradition à la mie moelleuse et à la croûte ferme, ce qui est, de l’avis général, très dommage) le démontre bien. Un trio de tortionnaires s’amuse en effet à pyrograver le torse d’un prisonnier enchaîné à une table d’opération, en lui recommandant de « sentir le moment » et « accueillir la souffrance », préceptes admirables en théorie mais dont l’individu se trouvant du mauvais côté du fer rouge a du mal à faire usage. Nos trois larrons sont le Capitaine Adrax Agatone, le Chapelain manchot Elysius, et Jean-Alphonse Diplodocus, prêtre tisonnier. Ils semblent avoir des difficultés à convaincre leur invité des vertus de leur philosophie masochiste, pour des raisons qui seront gardées sous silence par Nick Kyme. On apprendra juste que le gonze qui joue le rôle du steak sur le grill de la cafétéria des Salamanders est sauvage et dangereux, et a déjà occis sept collègues de Jean-Alphonse avant d’être appréhendé.

Aux grands maux les grands remèdes, Elysius demande et obtient un tête à tête avec le prisonnier pour lui apprendre une bonne leçon. Pendant qu’Adrax et Jean-Alphonse prennent une pause clope à l’extérieur, le Chapelain libère sa victime… et lui refait le portrait d’une main experte, tout en continuant à le poker avec son tisonnier, jusqu’à ce que le malappris demande grâce et récite son catéchisme comme il faut. Avant que le rideau ne tombe, nous faisons donc la connaissance de frère Zartath, qui semble avoir été confirmé comme Salamander après ce bizutage en règle, et malgré le fait qu’il soit capable de faire pousser des griffes d’os depuis ses avant-bras. Ils prennent des mutants maintenant sur Nocturne ?

AVIS :

J’avoue avoir un peu triché en préparant la critique de cette nouvellinette (5 pages) de Kyme, que son auteur a gardé volontairement obscure pour qui n’est pas familier des travaux nocturnes de l’auteur-éditeur de la BL. Il s’avère que ‘Rite of Pain’ se situe à la croisée des événements relatés dans ‘Nocturne’ et ‘Rebirth’, et a certainement été sélectionnée pour l’inclusion dans ‘The Hammer & the Eagle’ sur la base de la participation du Capitaine Adrax Agatone à cet épisode très mineur du ‘Tome du Feu’, nom de l’anthologie consacrée par Kyme à ses chers lézards. Nouvelle figure de proue du Chapitre depuis la sortie de sa figurine et de son profil dans le Codex Space Marines, Agatone n’est cependant qu’un second rôle lointain dans la saga vulcanisée de Nick Kyme, par rapport au duo Dak’ir et Tsu’Gan sur lequel l’essentiel de la série repose. Faut-il voir un nouveau départ pour les Salamanders au sein de la BL ? Sans doute, mais on leur souhaite des écrits plus intéressants et détaillés que ce min…uscule ‘Rite of Pain’, qui ne présente ni ne suscite guère d’intérêt pour le lecteur.

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Chains of Command – G. McNeill [40K] :

Chains of CommandICÔNE : URIEL VENTRIS, CAPITAINE DE LA QUATRIÈME COMPAGNIE DES ULTRAMARINES

INTRIGUE :

Engagé dans la campagne de pacification de Thracia avec un contingent d’Ultramarines placé sous le commandement du Capitaine Idaeus, le Sergent Uriel Ventris a été chargé de mener l’assaut sur le pont 2-4, tenu par les rebelles ayant eu l’audace de se soulever contre le bienveillant Empereur, et qu’il convient de faire sauter pour éviter que la contre-attaque de la Garde Impériale en direction de la capitale planétaire ne soit prise de flanc. Après quelques paragraphes de « mes sens sont vraiment trop développés lolilol » #ImTheBest #YouCantWriteAstartesWithoutStar, qui expliquent en grande partie pourquoi personne n’aime les Ultramarines, Ventris accomplit sa mission, déclenchant un assaut en règle de ses petits copains bleu pervenche et vert sapin sur la position adverse. Désespérément surclassés, les défenseurs se font hacher menu, et les meilleurs de l’Empereur s’organisent pour tenir le pont assez longtemps pour permettre au vénérable Techmarine Tomasin de placer les explosifs qui permettront de faire écrouler l’ouvrage d’art dans la gorge en contrebas.

Nous faisons la connaissance du Capitaine Idaeus, un officier vétéran et proche de ses hommes, connu pour son approche distanciée du saint Codex Astartes, ce qui n’en finit pas de sidérer le rigoriste Ventris. Ce même Idaeus a d’ailleurs fait montre de ses tendances libertaires en menant la charge contre un nid de bolters lourds, au lieu d’attendre le soutien du reste de ses hommes, comme ce planqué de Guilliman l’avait pourtant préconisé dans ses écrits. Depuis cinquante ans qu’ils combattent ensemble, Idaeus n’a pas réussi à convaincre son bras droit de l’avantage de s’écarter de temps en temps du manuel d’utilisation de la guerre écrit par le Primarque, et ce n’est pas aujourd’hui que ça va ch… Ah, on me dit dans l’oreillette que c’est précisément l’objet de cette nouvelle. Bigre.

Comme tous les vétérans dignes de leurs médailles, Idaeus fait confiance à son instinct, et ce dernier lui hurle (il est un peu sourd) que quelque chose en tourne pas rond, malgré le fait que la mission se déroule jusqu’ici parfaitement comme prévu. Ce malaise le conduit à mener une mission d’inspection de l’autre côté du pont, Ventris à ses côtés, pour juger du boulot effectué par les Scouts déployés par les Ultramarines en territoire ennemi. Et, évidemment, il s’avère qu’une importante colonne blindée progressait discrètement (c’est possible si on met des patins sur les chenilles) en direction du pont, ce qui va devoir forcer le vénérable Tomasin à se bouger les vénérables miches, ce qui n’est pas facile quand on est plus refait qu’un Iron Hands en fin de carrière (souvenir d’une rencontre torride avec un Carnifex entreprenant sur Ichar IV). Tout aussi évidemment, rien ne se passe comme prévu à partir de ce moment, les Scouts, le Thunderhawk qui devait évacuer les Ultramarines, et le vénérable Tomasin tombant tous sous le feu de l’ennemi, ce qui force Idaeus et ses compagnons à monter une défense désespérée du pont, le temps que 1) un autre transport arrive, et 2) quelqu’un trouve une idée brillante pour faire péter la passerelle, ce qui reste tout de même l’objet principal de la mission de nos marsouins énergétiques.

Je vous passe les longues scènes de baston dont nous gratifie McNeill, et qui permettent à Ventris de montrer qu’il en a dans le slibard, pour aller directement au moment où notre futur héros réalise qu’il suffit de déclencher une charge de démolition à proximité des explosifs posés par l’irrécupérable Tomasin pour déclencher une réaction en chaîne qui devrait provoquer les résultats escomptés. Petit problème, l’escouade de Space Marines d’Assaut envoyés réaliser cette mission se fait pincer en chemin par les Night Lords qui coordonnent la rébellion chaotique, et les incapables finissent crucifiés sur le pare chocs des Rhinos des fils de Curze pour leur apprendre la vie. Devant ce spectacle insoutenable, Idaeus et Ventris sont très colère, et cette rage leur permet de repousser l’assaut des renégats au prix de lourdes pertes. Alors que le deuxième Thunderhawk approche de la position intenable des Ultramarines, l’heure des choix arrive pour la bleusaille…

Début spoiler…Le noble Idaeus décide de partir faire exploser le pont à la mano, malgré ses chances de réussite quasi nulles, et ordonne à Ventris de mener les quatre rescapés de cette folle nuit, ainsi que son épée énergétique de maître, jusqu’au point d’extraction. Les cœurs gros, le Sergent s’exécute, et est témoin de l’héroïque sacrifice de son mentor dans les poutrelles et les travées du pont 2-4, la bande de Raptors laissée en garnison par les Night Lords ne parvenant pas à lui régler son compte avant que le Capitaine fasse feu avec un pistolet plasma dérobé à l’ennemi sur une charge de démolition laissée négligemment sur place1. C’est donc une victoire indéniable pour l’Imperium, et le début de la saga d’Uriel Ventris, qui héritera du commandement de la 4ème Compagnie à la suite de la campagne de Thracia.Fin spoiler

1 : On pourrait aussi se demander pourquoi les Night Lords n’ont pas détaché les explosifs laissés par le vénérable Tomasin sur les piliers du pont quand ils en avaient l’occasion. Encore une preuve que l’abus de Chaos est mauvais pour le cerveau.

AVIS :

Si l’idée de lire une nouvelle d’action dont le héros est un Ultramarines peut sembler intrinsèquement barbante à un lecteur de 2020, qui a sans doute pu pratiquer l’exercice à de nombreuses reprises grâce/à cause de l’obsession de la Black Library pour ce genre de productions, il faut être juste avec Graham McNeill et Uriel Ventris, et rappeler que ‘Chains of Command’ a été à sa sortie (2001) une des premières et plus abouties Space Marinades (saveur vanille) qui soient. Les innombrables ersatz et proxys publiés depuis ne l’ont pas aidé à bien vieillir, ni le style de l’auteur, ni les personnages mis en scènes, ni l’intrigue exposée n’étant particulièrement dignes d’éloges, mais le résultat n’est pas indigne pour autant. À l’époque où il est attendu d’un héros Space Marines un peu plus qu’un grade de Capitaine et une vague tendance à se poser des questions existentielles (ce qui était suffisant il y a 15-20 ans), je laisse le soin au lecteur de décider si une figure comme Uriel Ventris est toujours pertinente, ou bien s’il est temps d’accorder une retraite bien méritée à l’aïeul de tous les héros d’action énergétique de la Black Library.

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Eclipse of Hope – D. Hinks [40K] :

Eclipse of HopeICÔNE : MEPHISTON, CHEF ARCHIVISTE DES BLOOD ANGELS

INTRIGUE :

Appelés à l’aide par la Garde de Fer de Mordia, elle-même sollicitée par les habitants de Supplicium Secundus en leur heure de besoin, les Blood Angels ont répondu en envoyant Mephiston et quelques potes dans le système en question. Les vampires énergétiques arrivent toutefois trop tard à la surface de la planète, et ne peuvent que constater que la totalité de sa population, ainsi que les braves Mordian débarqués pour faire le service d’ordre, se sont entre tués dans une orgie de massacre à faire se pâmer un héraut de Khorne. Mephiston trouve le spectacle de la plaine jonchée de cadavres jusqu’à l’horizon plutôt poétique, mais se garde bien de partager cette réflexion pas très Charlie avec ses sous fifres. Les questions que les Astartes et le lecteur se posent sont en partie résolues par l’arrivée de l’ultime survivant de cette battle royale planétaire, un Colonel Mordian complètement ravagé du bulbe, qui agresse violemment le brave Sergent Gamigin en grognant comme une bête enragée. Courtois mais un peu rude, le surhomme dans la pampa finit par tordre le cou au minus qui lui salit ses plates avec ses grosses mains pleines de doigts, mais semble récupérer le mal qui tourmentait son assaillant au passage, et commence à montrer des signes d’énervement qui n’augurent rien de bon venant d’un colosse génétiquement modifié et armé jusqu’aux canines. Heureusement, Mephiston est là pour faire un peu d’hypnose suggestive, ce qui permet à Gamigin de décompresser sans avoir tué personne (à part le Mordian bien sûr, mais il ne compte pas vraiment).

De retour sur leur vaisseau, les Blood Angels découvrent la flotte de secours des Mordians, complètement désertée et remplie de cadavres. Les puissantes capacités déductives de Mephiston ne mettent pas longtemps à soupçonner que les transports de troupe ont été victimes de la même rage irrépressible que celle qui a décimé Supplicium Secundus, et la réception d’un nouvel appel à l’aide, celui-là venant de Supplicum Tertius, située un peu plus loin dans le système, vient confirmer les craintes de Seigneur de la Mort. Le virus du VENER-40.000 circule encore dans la zone, et il est du devoir des Blood Angels d’en trouver la cause et la cure.

Parti dare dare vers la planète souffrante, dont les masses laborieuses commencent à s’entre-tuer avec méthode et enthousiasme, le croiseur d’attaque Crimson Exhortation manque d’être percuté en chemin par un vaisseau non identifié, ce qui ne peut pas être une coïncidence dans un milieu aussi espacé que… l’espace. Et en effet, le nouveau venu se révèle être l’Eclipse of Hope, ou plutôt son portrait robot dessiné par un enfant de 6 ans (comprendre que les proportions ne sont pas très bien respectées), une barge de bataille perdue par le Chapitre pendant la 5ème Croisade Noire. L’étude de la trajectoire du vaisseau fantôme ne laisse aucun doute à Mephiston : c’est bien la cause de la folie meurtrière qui a infecté Supplicum Secundus et Tertius, et il doit être détruit en conséquence. Plus facile à dire qu’à faire cependant, l’Eclipse encaissant sans problème et sans dégâts apparents un tir direct de canon nova. Comprenant que le Warp est à l’œuvre, Mephiston décide d’aller régler le problème à l’ancienne, B.A. style, c’est-à-dire en envoyant une poignée de vétérans purger l’épave de l’intérieur, comme cela a si bien réussi au Chapitre par le passé (remember Secoris ?). En plus de notre souriant héros et du Sergent Gamigin, résolu à prouver à l’univers combien il est cool, on retrouve un Chapelain, un Techmarine, un Prêtre Sanguinien et un Épistolier dans l’équipe des rouges. Tout ce petit monde aborde l’Eclipse, qui est une sorte de fantasme semi-solide, se nourrissant des souvenirs de ses hôtes pour prendre une forme concrète, et se dirige vers la salle de commandement du vaisseau, où se situe probablement le nœud du problème.

En chemin, la rage instillée par l’épave est gardée sous contrôle par les Blood Angels, qui ont tous pris un Lexomil dans leur lait fraise avant de partir en mission, mais la manifestation d’un petit groupe de Sanguinaires à proximité de l’objectif des Astartes force ces derniers à passer en mode agressif, avec des résultats mitigés, la sainte colère des meilleurs de l’Empereur provoquant le spawnage de plus en plus rapide de leurs adversaires. Il revient à Mephiston, comme le héros qu’il est, de prendre les choses en main et de remettre ses compagnons sur la bonne route. Ses pouvoirs psychiques lui ayant permis de déterminer que la source du problème se trouvait dans le Librarium, et non sur le pont, il convoque un bouclier d’apathie, ou quelque chose comme ça, permettant à ses gardes du corps de s’extirper de la mêlée et de progresser jusqu’à la bibliothèque de l’Eclipse, où la messe devra être dite…

Début spoiler…Laissant les normies monter la garde devant la porte, Mephiston et l’Epistolier Stolas pénètrent dans le saint des saints, où se trouvent des bouquins démoniaques de fort belle taille, une carte du système de Pallevon, ainsi qu’une statue de Mephiston zieutant un des grimoires de façon insistante. Le signal est clair, et bien que le Seigneur de la Mort ait la discipline nécessaire pour s’arracher de la contemplation de l’ouvrage maudit, une fois les premières pages parcourues, Stolas se fait corrompre comme un bleu entre le sommaire et la préface. Il brûlera donc avec le reste du Librarium, purifié de manière définitive par un Mephiston qui ne transige pas avec ses principes. L’Eclipse dûment désinfecté de sa peste warpique, et la situation revenue sous contrôle sur Supplicium Tertius, Mephiston est libre de poursuivre sa quête de réponses en direction de Pallevon, où l’attend un autre revenant du Chapitre…Fin spoiler

AVIS :

Avant que Darius Hinks ne reprenne en main la carrière littéraire de Mephiston, c’était David Annandale qui avait la charge du Seigneur de la Mort, auquel il a consacré cette nouvelle et le roman ‘Lord of Death’. Ces deux histoires s’inscrivent dans le même arc narratif, ‘Eclipse of Hope’ faisant office de prologue à ‘Lord of Death’, et accomplissant bien cette fonction, donnant envie au lecteur de connaître la suite des aventures du grand blond avec une humeur noire. Je dois également reconnaître avoir été agréablement surpris par le style déployé par Annandale dans sa narration, d’un niveau nettement supérieur à sa propre moyenne. Cela contribue grandement au caractère digeste d’une nouvelle qui ne serait sans cela rien d’autre qu’une énième Space Marinade. Une des soumissions les plus abouties d’Annandale hors de son créneau horrifique de prédilection, et donc à lire de préférence aux (nombreux) autres textes moins convaincants signés par cet auteur.

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Redeemer – G. Haley [40K] :

RedeemerICÔNE : ASTORATH, HAUT CHAPELAIN DES BLOOD ANGELS

INTRIGUE :

On a tous déjà été confronté à ce moment, plus ou moins long, pendant lequel une chanson – souvent débile, comme La Danse des Canards, T’Es Si Mignon ou Despacito – nous restait collée dans la tête malgré tous nos efforts pour forcer notre cerveau de passer à autre chose. Eh bien cette expérience abominable, c’est le quotidien d’Astorath l’Inflexible, Grand Chapelain des Blood Angels et Rédempteur des Égarés, dont il entend les fredaines pathétiques lui rabâcher les oreilles dès que l’un d’entre eux sombre totalement dans la Rage Noire. Il est alors de son devoir de rappliquer dare dare pour abréger les souffrances (les leurs et les siennes) à grands coups de hache, ce qui le conduit à passer sa vie dans l’espace, voyageant de zones de guerres en théâtres d’opérations dans son véhicule de fonction (l’Eminence Sanguis), accompagné de quelques fidèles acolytes. Aujourd’hui, direction Asque, d’où proviennent les échos lointains de Djadja joués à la flûte à bec par un Snotling asthmatique, ce qui est passablement désagréable, vous en conviendrez.

Laissant le fidèle Sergent Dolomen garder le vaisseau, comme il en a l’habitude1, Astorath part à la rencontre de l’escouade de Blood Angels affectés par le mâââl, escorté par le Prêtre Sanguinien Artemos et guidé par un trio de locaux, fortement impressionnés par la panoplie macabre de leur visiteur (qui fait moins le malin lorsque les ailes factices de son jet pack se prennent dans les branches sur le chemin, ceci dit). En chemin, les bouseux apprennent au Grand Chapelain que leur monde est victime depuis plusieurs décennies des attaques d’une race de Xenos peu sympathiques, baptisés les Silencieux par les pragmatiques Asquiens, et qui ont forcé ces derniers à abandonner leur cité ensoleillée pour se réfugier dans les forêts de champignons insalubres et humides recouvrant la majeure partie de la planète. Leurs appels à l’aide étant resté lettre morte pendant des décennies, l’ouverture de la Cicatrix n’aidant certainement pas, il leur a fallu prendre leur mal en patience et apprendre à vivre comme Yoda sur Dagobah, la Force en moins, le temps qu’une demi-escouade de Blood Angels soit dépêchée sur place pour botter le train aux Silencieux. Tout se passait très bien jusqu’à ce qu’un des Astartes ne pique une colère noire pour un motif indéterminé, et fausse compagnie à ses camarades pour aller baguenauder dans les sous-bois d’Asque.

Cette version est confirmée par le trio de Primaris qu’Astorath et Artemos rencontrent à leur retour de patrouille, et encore traumatisés par le pétage de plomb de leur mentor, le Sergent Erasmus, après que leurs hôtes leur aient apportés un steak d’ordes bien cuit au lieu de saignant. Détail important, Erasmus était un Space Marine de la vieille école, et pas un Primaris, dont la résistance à la Soif Rouge et à la Rage Noire relève encore de la théorie et des boniments de Belisarius Cawl. Ayant recueilli assez d’indices pour procéder à la traque et à la rédemption d’Erasmus, dont le séjour sur Asque sera le dernier échange culturel, Astorath se prépare à apporter la paix à la brebis énergétique égarée, siphonant un peu de rouge à la veine d’Artemos pour se donner du cœur à l’ouvrage, mais refusant catégoriquement que son acolyte vienne lui porter main forte dans sa mission sacrée. La confidentialité de la relation patient-thérapeute/confesseur/bourreau doit être respectée, que diable.

Après une petite partie de beat ‘em all sur le chemin de la ville abandonnée par les Asquais (les Silencieux trouvant malin de s’attaquer à Astorath à son passage, malgré leur corps de lâche et leur équipement rudimentaire), notre héros parvient enfin à localiser Erasmus, complètement enragé et donc persuadé de purger le Vengeful Spirit en lieu et place de son Primarque, alors qu’il massacre en fait la colonie de Silencieux ayant investi les habitations des colons après le départ de ces derniers. L’arrivée du Grand Chapelain fait définitivement pencher la balance en faveur de l’Imperium, et après que les derniers mobs aient été farmés, il est temps pour l’ultime séance de psychiatrie du Sergent Erasmus, administrée de main et de hache énergétique de maître par Astorath. Guidé par son amour fraternel et sa miséricorde absolue, le Rédempteur rédemptionne avec retenue, se contentant de saigner son patient pour saper sa force plutôt que de le décapiter sans sommation. Ah, il lui coupe une jambe aussi, mais seulement pour qu’Erasmus se tienne enfin tranquille, et qu’il puisse lui adresser une imposition des mains salutaire, permettant à l’égaré d’enfin refaire surface, et de mourir dans la lumière de Sanguinius et de l’Empereur. C’est presque une happy end, en fait. Ce problème résolu, et les glandes d’Erasmus récoltées, il est temps pour Astorath et Artemos de repartir sur les routes, la version de Bella exécutée au mirliton et à la scie musicale venant lui trotter dans la tête lui indiquant qu’un autre frère a besoin de ses bons offices…

1 : La planque ultime pour un Blood Angels tout de même. M’est avis que Dolomen a dû faire une remarque désobligeante lors du dernier vernissage de Dante pour avoir été affecté à une mission aussi chiante.

AVIS :

Guy Haley s’empare du personnage d’Astorath l’Inflexible (possiblement le Blood Angels doté du background au plus fort potentiel narratif) et nous sert une petite mise en situation dont il a le secret, soulignant à la fois les caractéristiques saillantes de son héros et levant le voile sur des aspects de sa personnalité et de son passé non abordés par les quelques paragraphes qui lui sont dédiés dans le Codex Blood Angels. Sur cette base éprouvée, Haley trouve également le moyen de faire le lien avec le lore avec un grand L (ce qui est approprié pour un personnage avec des grande ailes), en mentionnant l’ouverture de la Cicatrix et la dévastation de Baal, ainsi qu’en abordant la question fondamentale de la vulnérabilité potentielle des Primaris Blood Angels aux tares du matériel génétique de leur Primarque. Le résultat est très solide, à défaut d’être particulièrement original, et on se prend à espérer que la BL commissionne Haley pour d’autres travaux mettant l’Inspection Générale faite (sur)homme en vedette.

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Extinction – A. Dembski-Bowden [40K] :

ExtinctionICÔNE : EZEKYLE ABADDON, MAÎTRE DE GUERRE DE LA BLACK LEGION

INTRIGUE :

On ne le sait que trop, les lendemains de cuite sont difficiles. Quand la tournée des bars en question a duré sept ans, impliqué des centaines de milliards de participants sur des milliers de planètes, dont quelques dizaines ont brûlé au passage, et s’est terminée par un projet X débridé dans la maison familiale avec le capitaine de soirée qui s’étouffe dans son vomi sur la banquette arrière de sa Kangoo défoncée, il est somme toute logique d’avoir, très, mais alors trèèèèèèèèèèèèèèès mal aux cheveux pendant quelques temps. Surtout quand on s’appelle Ezekyle Abaddon, et qu’on a un goût immodéré pour les manbuns en palmier1. Nous reviendrons sur le cas de ce mauvais sujet un peu plus tard.

Extinction place donc son propos dans la période trouble qui succède à l’Hérésie d’Horus, qui, si elle n’a pas été une partie de plaisir pour l’Imperium, n’a pas été de tout repos non plus pour les Astartes rebelles, réfugiés dans l’Œil de la Terreur et en proie à de bien compréhensibles dissensions internes en l’absence d’un grand chauve costaud pour claquer le beignet aux éléments perturbateurs. Mais, comme l’éructe Borge Grassens, Prince Démon poète à la moustache remplie de Nurglings : « Or sous les cieux sous vergogne//C’est un usage bien établi//Dès qu’il s’agit de rosser des Sons of Horus//Tout le monde se réconcilie2 ». Tel le chouchou de la maîtresse ayant rappelé à cette dernière qu’elle avait oublié de ramasser les expressions écrites de la classe deux minutes avant la sonnerie, les guerriers de feu le Maître de Guerre se retrouvent en butte à l’hostilité non dissimulée de leurs petits camarades de jeu, qui leur reprochent, non sans raison, d’être responsables de la galère dans laquelle ils se trouvent désormais.

Nous faisons donc la rencontre, pour beaucoup d’entre eux juste avant une capture infamante, un décès prématuré, ou pire, de quelques fistons d’importance, alors qu’ils se retrouvent entraînés dans des explications de texte sans fin avec leurs cousins issus de germain. Le Sergent Kallen Garax peine à trouver les mots justes (pas facile quand on parle Chtonien et le gonze d’en face Nostraman) pour apaiser un gang de bikers Night Lords. Le Techmarine Sovan Khayral insiste impuissant à l’incendie de son véhicule de fonction des mains huileuses d’une bande de Death Guard désœuvrés. Le Capitaine Nebuchar Desh finit par rendre l’âme après une séance un peu trop soutenue avec son/sa Dominatrice Emperor’s Children, qui devra se trouver d’autres chats à fouetter. L’humble frère Zarien Sharak, coursé par une meute de World Eaters souhaitant lui voler son goûter (quand on n’a pas de monde à manger, il faut bien compenser), signe un bail de sous-location mal avisé avec un Démon mal élevé qui le met fissa à la porte de son âme à son corps défendant (ou le contraire). Erekan Juric, Capitaine Reaver, se fait incendier par la bande à Kahotep sur le chemin de la maison. Même la fameuse Kangoo d’Horus traîne son mal-être depuis la disparition du patron, remisée qu’elle a été dans un quelconque parking sous-terrain de l’Œil par ce galopin d’Abaddon.

C’est par un aparté dévolu à ce diable d’Ezekyle que se termine Extinction. Ayant tout bonnement pris un congé proprement sabbatique pour se ressourcer et faire le point sur sa vie, et voyageant de planète en planète pour visiter les attractions touristiques qu’elles ont à proposer (une pyramide ici, un mausolée là, un temple plus loin… c’est une sortie culturelle), Abby regarde de loin ses anciens frères se faire mettre la tête dans la cuvette des toilettes chimiques de leurs Rhinos, guère intéressé par les déboires de sa Légion. Quelque chose me dit toutefois que cela ne durera pas éternellement…

1 : Ca irrite le cuir chevelu comme pas possible et c’est très mauvais pour le bulbe.
2 : La rime est pauvre mais l’argent ne fait pas le bonheur.

AVIS :

Prologue à sa saga consacrée aux origines de la Black Legion, cette Extinction permet à Dembski-Bowden d’afficher sa maîtrise de la nouvelle d’ambiance. Il ne se passe en effet pas grand-chose dans ce court format, la succession de vignettes illustrant les déboires de la marmaille horusienne permettant seulement de prendre la mesure de la mauvaise passe que cette dernière traverse, orpheline de Primarque, traumatisée par sa défaite sur Terra, n’ayant plus d’objectif autre que la survie et ciblée à outrance par ses partenaires de crime. Pour autant, Extinction reste l’une des lectures les plus agréables de Croisade & Autres Récits, la patte d’ADB rendant chaque passage intéressant, chaque personnage attachant, et préparant parfaitement le terrain pour le début de la geste Abaddonienne, que le lecteur aura envie d’approfondir après en avoir terminé avec cet amuse-gueule, je gage. Il est fort l’animal, il est fort.

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Prodigal – J. Reynolds [40K] :

ProdigalICÔNE : FABIUS BILE, APOTHICAIRE DES EMPEROR’S CHILDREN

INTRIGUE :

Alors qu’il couve, quasi littéralement, sa nouvelle génération d’enfants-cobayes, spécimens de la nouvelle humanité qu’il appelle de ses vœux et crée de ses recherches, Fabius Bile reçoit la visite d’une présence démoniaque furtive et rigolarde, envoyée par l’un de ses nombreux ennemis pour mettre fin à ses expérimentations. Pas de chance pour le rejeton du Warp, Fab en a vu d’autres, et ordonne posément à l’esprit de la machine du Vesalius, son vaisseau amiral, de sceller son laboratorium pour lui permettre de localiser l’agent contaminateur importun et lui passer l’animus à l’eau de javel, comme la procédure le demande. Si la baston qui s’en suit ne fait de victimes que parmi la collection d’occulobes et de glandes de Betcher gardés par l’Apothicaire fou, les choses manquent de mal tourner pour ce dernier après que le premier démon assassin soit rejoint par un second. L’arrivée opportune de Melusine, la « fille » aînée de Bile, permet toutefois de mettre fin aux débats avant que le laboratoire ne soit complètement ravagé. Si Mel a pu intervenir en ce moment décisif, c’est parce qu’elle est elle-même plus qu’à moitié démoniaque, une orientation qui déçoit beaucoup son géniteur, mais qu’il accepte, en père modèle moderne et philosophe. S’en suit un dialogue entre les deux générations de Bile, qui génère plus de questions qu’il n’apporte de réponses, à commencer par les motivations ayant poussé Melusine à venir à la rescousse de son vieux, et à lui transmettre des avertissements à la demande de… Fantomas ? Jack l’Eventreur ? the masked singer ? Le suspens restera entier, en partie à cause de la folie manifeste de Fabienne (son vrai nom), qui a du mal à se situer entre le passé, le présent et le futur, et le choix de Fabius de ne pas poser la question qui pourtant le travaille autant que le lecteur. L’entrevue se termine sur le départ précipité de Melusine, qui « n’aime pas parler aux fantômes » (sic), et laisse donc son vieux pôpa méditer sur l’ingratitude de la jeunesse et sur l’inexorable passage des années, ou, dans son cas, des millénaires. Bile reste toutefois convaincu de l’intérêt et du caractère fondamental de ses recherches, qu’il continuera à mener en dépit de l’opposition d’une galaxie obscurantiste. C’est cela que d’être en avance sur son temps…

AVIS :

‘Prodigal’ apprend beaucoup de choses sur la vie et l’œuvre de Fabius Bile (et à travers lui sur les Emperor’s Children et les Légions renégates), ce qui en fait un bon point de départ pour quiconque souhaite se plonger dans le corpus que la Black Library a dédié à son charismatique et échevelé savant fou, écrit en bonne partie par le même Josh Reynolds. Je ne suis en revanche pas certain que les lecteurs familiers du personnage et de sa saga y trouvent de grandes sources de satisfaction, le retour de Melusine (la fille prodigue annoncée par le titre) ne faisant finalement pas progresser les relations entre les deux personnages d’un iota. Une bonne petite nouvelle d’ambiance/d’acclimatation donc, mais en rien essentielle à la bonne compréhension des chroniques bilieuses et billesques de Reynolds.

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Veil of Darkness – N. Kyme [40K] :

Veil of DarknessICÔNE : CATO SICARIUS, CAPITAINE DE LA SECONDE COMPAGNIE DES ULTRAMARINES

INTRIGUE :

Vous souvenez vous de Damnos et de sa chute, amis lecteurs ? Si l’épisode fut malheureux pour l’Imperium, il eut au moins l’avantage de mettre l’insupportable Cato Sicarius, Capitaine de la Seconde Compagnie des Ultramarines, en face de sa nullité crasse et d’un adversaire qui lui apprit bellement la vie, le Seigneur Necron « Immortel » (Undying), qui lui planta sa faux dans le bidon au terme d’un duel épique (selon Sicarius)/de cinq secondes (selon les observateurs présents). Un souvenir à chérir en ce millénaire hostile…

Notre histoire commence quelques temps après cet affrontement fatidique, Cato revenant à lui dans une cuve de bacta et, fidèle à lui-même, commençant le premier jour du reste de sa vie1 en rabrouant le fidèle Apothicaire Venatio, qui a pourtant passé les derniers jours à le remettre en forme. Apprenant la défaite des Ultramarines et la perte du vénérable Agrippen, Sicarius pique sa crise et fracasse d’un coup de poing la vitre de sa cuve amniotique pour se passer les nerfs (et il aurait fait pire s’il avait eu son épée). Et dire que les World Eaters sont accusés d’être psychopathes. Avant qu’il n’ait pu détruire de fond en comble l’Apothicarion, l’arrivée soudaine de son rival devant l’éternel, Severus Agemman, contraint notre turbulent zéro à retrouver son calme. Le Capitaine de la Première Compagnie est venu informer son collègue et inférieur qu’il est convoqué devant Marneus Calgar dans six heures pour expliquer pourquoi et comment il a cru bon de déféquer dans la super glu lors de la campagne de Damnos. Sicarius, qui n’est pas passé en conseil de discipline depuis la fin de ses études, prend évidemment très mal la nouvelle, et fidèle à la légendaire équanimité de Guilliman, balance quelques réflexions désagréables à Agemman pour extérioriser sa frustration, manquant de peu de se ramasser une baffe énergétique pour sa peine.

Avec si peu de temps pour préparer son dossier, Sicarius n’a bien sûr rien de plus pressé que d’aller récupérer ses armes et armures à l’Armourium, où il a la désagréable surprise de constater que des bouts de Guerriers Necrons décomposés ont été stockés pour étude par les Techmarines du Chapitre. Flairant une combine de la part de l’ennemi, maître incontesté du leave no trace2, Sicarius ne peut cependant convaincre Vantor, le techos en faction, de mettre à la benne ces déchets dangereux. Il expérimente à cette occasion une vision plutôt inquiétante de sa Némésis métallique, le laissant littéralement sur les genoux (pendant que Vantor, qui n’a absolument pas trouvé anormal que son interlocuteur s’effondre au sol en suffoquant comme un poisson hors de l’eau, est retourné vaquer à ses occupations). De nouveau maître de lui-même, Sicarius repart donc rédiger son rapp- taper le carton en salle d’entraînement avec le Sergent Daceus, qui mérite une statue au sein du Temple de la Correction pour supporter un supérieur aussi imbuvable que lui. On apprend à l’occasion du duel amical entre les deux Ultramarines qu’en plus d’être prétentieux au possible, Sicarius est également mauvais perdant et vicieusement mesquin, puisqu’il enfreint volontairement les règles du combat pour pouvoir scorer une touche contre Daceus, qui était sur le point de le vaincre. Une nouvelle vision ténébreuse s’abat alors sur le Capitaine, qui manque de tuer le Sergent en pensant revivre son duel contre le Roi Necron (mais ne s’excuse pas le moins du monde lorsque l’illusion se dissipe, évidemment). Tout à sa paranoïa, Cat’ éventre un pauvre Serviteur de combat qui ne lui avait rien fait, juste pour être sûr que le soulèvement des machines n’était pas d’actualité, avant de se rappeler qu’il ne lui reste que 10 minutes avant de comparaître devant Calgar, et qu’il n’a rien préparé pour sa défense. Accompagné par le bien brave Daceus, Sicarius se présente à son audience, certain que sa belle gueule et ses états de service lui éviteront le blâme qu’il mérite pourtant de toute évidence…

Début spoiler 1La correctionnelle lui est  évitée par la tentative d’assassinat dont est victime le pauvre Marneus, décidément dans tous les mauvais coups, de la part d’un Deathmark Necron sorti de nulle part, comme cela est son droit le plus strict. Ce n’est que le prélude à une invasion en règle de la Forteresse de Hera par les fourbes Xenos, qui profitent du goût des Ultramarines pour les souvenirs de campagne pour pénétrer en masse dans l’Armourium, faisant sa fête à Vantor au passage, avant de se diriger vers l’Apothecarion pour en terminer avec le Grand Schtroumpf. Isolés de leurs frères de bataille par les artifices Necrons, Sicarius, Daceus, Agemman et les gardes d’honneur de Calgar tentent de renverser la situation en déphasant le Vizir porteur du Voile de Ténèbres, ce qu’ils parviennent à faire, mais cela n’empêche pas le Roi Necron de faire son entrée sur le champ de bataille, et de porter le coup de grâce au Maître de Chapitre, après que tous ses défenseurs aient été passés au fil du khopesh. À moins que…

Début spoiler 2…À moins qu’il ne s’agisse que d’un rêve, évidemment. Ou plutôt, d’une vision du futur. Retour donc à la cuve de biactol du début de la nouvelle, d’où Sicarius réémerge, sa légendaire mauvaise humeur remplacée par un sentiment de déjà vu irrépressible. Et en effet, il a connaissance de tout ce que ses interlocuteurs cherchent à lui dire, ainsi que du stockage des pièces détachés Necron dans l’arrière boutique de l’Armourium, qu’il se dépêche d’aller valoriser énergétiquement (pour une fois, c’est approprié) malgré les protestations de Vantor. Ceci fait, il est libre d’aller répondre de ses actes devant Marneus Calgar sans craindre pour la vie de ce dernier, qui souhaitait simplement le voir pour lui annoncer qu’il a lui aussi eu ce rêve étrange et pénétrant, dans lequel le Roi Necron se paie sa tête. Ce crime de lèse majesté ne pouvant rester impuni, Calgar autorise son Capitaine à jouer la belle, lorsque l’occasion se présentera. Comme on disait à l’époque, Delenda Necrono.Fin spoiler

1 : C’était la première fois qu’un adversaire le blessait gravement lors d’un duel. Lui, Cato Sicarius, Maître du Guet, Chevalier Champion de Macragge, GrAnD dUc De TaLaSsAr et HaUt SuZeRaIn D’uLtRaMaR !!! Il se serait plaint au directeur, s’il avait pu.
2 : On peut reprocher beaucoup de choses aux Necrons, mais au moins, ils ne polluent pas.

AVIS :

Je suis face à un paradoxe au moment de donner mon avis sur ce ‘Veil of Darkness’. Je ne saurai dire en effet si le dégoût profond que m’inspire Cato Sicarius, aussi connu sous le nom de « Everything Wrong with the Ultramarines », est à considérer comme une réussite ou comme un échec de la part de Nick Kyme. Il ne fait aucun doute que ce dernier a volontairement accentué le trait pour donner à son protagoniste une personnalité marquée, pour ne pas dire autre chose, comme il l’avait déjà fait avec le personnage de Tsu’Gan dans sa série sur les Salamanders. Cependant, à faire de Sicarius une tête à claque absolue, il prend le risque de dégoûter le lecteur de ce héros infect, ce qui n’est pas conseillé lorsque l’on souhaite vendre des bouquins. En tout cas, il ne faudra pas compter sur moi pour suivre avec intérêt les péripéties de la Mimi Geignarde de l’Ultima Segmentum, qui pâtit sans doute du grand nombre d’icônes du Chapitre ayant également eu les honneurs de la BL (Ventris, Calgar, Chronus, Tellion, Kastor & Polixis… et maintenant Guilliman, sans compter la ménagerie hérétique de la Légion), et dont il lui faut bien se démarquer. La stratégie du sale gosse de Kyme, pour efficace qu’elle soit, est donc à double tranchant.

Si on fait abstraction du caractère difficile de son héros, ‘Veil of Darkness’ est une honnête nouvelle d’action, bénéficiant d’un twist final convenable, à défaut d’être particulièrement efficace (évidemment que Calgar et Agemman ne peuvent pas finir leur carrière au détour d’un paragraphe d’une obscure nouvelle consacrée à Sicarius), et présentant de façon convenable le passif et les motivations de son héros. L’un dans l’autre, c’est donc une bonne introduction aux aventures de Cato Sicarius, si tant est que vous ayez l’envie de les suivre, ce dont je vous laisse décider en votre âme et conscience…

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Fireheart – G. Thorpe [40K] :

FireheartICÔNE : YVRAINE, ÉMISSAIRE D’YNNEAD

INTRIGUE :

Envoyée par Yvraine comme émissaire auprès des Eldars du Saim Hann afin d’obtenir de l’aide dans la quête des mondes de Morai-Heg, la Céraste Druthkala Shadowspite (Drudru pour les intimes) a bien du mal à convaincre ses hôtes de prêter une oreille pointue attentive à ses doléances. Car étonnamment, les Zoneilles sont égoïstes et mesquins. Qui l’eut pensé, vraiment ? Alors que les Clans réunis en assemblés dans le bois de Vincennes du Vaisseau Monde n’en finissent plus de se crêper le chignon, et que Druthkala tue le temps, faute de mieux, en imaginant les sévices qu’elle pourrait infliger à ses lointains cousins, Nuadhu du Clan Fireheart fait son apparition, en retard comme à son habitude. Bien que seulement héritier putatif du Clan, l’état végétatif de son père lui donne le pouvoir de décider à sa place, et un seul regard sur les courbes généreuses et l’armure minimaliste de la diplomate Ynnari convainquent notre dalleux de héros qu’il doit lui venir en aide pour s’en faire bien voir, et plus si affinités. Le choix d’Yvraine d’envoyer une bombasse plutôt qu’un érudit fait tout d’un coup plus de sens…

La mission de Shadowspite et de ses nouveaux amis est assez simple : mener une reconnaissance sur le monde vierge d’Agarimethea, où un vaisseau Exodite patiente en double file orbitale depuis quelques semaines, ce qui indique que quelque chose ne tourne pas rond à la surface. Après un petit go fast dans la Toile, dans la plus pure tradition des Wild Riders, les bikers au serpent arrive sur place, où ils ne mettent pas longtemps à repérer un complexe Necron défigurant le paysage champêtre, comme un magasin Bricodépôt construit au milieu d’un parc naturel. La présence de l’ennemi primordial des Eldars sur une planète qui devrait pourtant être exempte de toute souillure provoque des réactions mitigées dans la compagnie. Ceux qui réfléchissent avec le cerveau (Caelledhin, la demi-sœur du héros) sont pour une retraite prudente, ceux qui réfléchissent avec un autre organe (Nuadhu, qui n’en finit plus de baver sur les jambes de Shadowspite) insistent pour aller jeter un œil sur site, afin de peut-être trouver une arme qui pourrait aider les Eldars dans leur lutte contre les Necrontyr. Nuadhu étant techniquement aux commandes (même si cet incapable a laissé le pilotage de sa Vyper à son chauffeur de fonction), l’expédition fait fi de toute prudence et va se garer devant la pyramide principale. Bien évidemment, le calme qui baigne les lieux n’est qu’apparent, et lorsque Nuadhu pose la main sur la surface inerte du monument aux des morts, une alarme se déclenche et le ciel se remplit bientôt de tirs de désintégrateurs et d’aéronefs Necrons.

La fuite éperdue qui s’en suit voit la disparition tragique d’un certain nombre de cousins Fireheart, victimes des tirs ennemis, du relief ou du troupeau de dinosaures local (obligatoire sur un monde vierge). J’imagine qu’il en reste encore plein de là où ils viennent, et on ne pleurera donc pas trop sur leur sort. Les Eldars, bien diminués par la tournure qu’ont pris les événements, et la stupidité crasse de leur chef, jurent toutefois de revenir pour rendre aux Necrons la monnaie de leur pièce, ce qui sera fait dans ‘Wild Rider’/’Le Cavalier Rebelle’, le deuxième bouquin consacré aux suivants d’Ynnead par Gav Thorpe.

AVIS :

Je dois avouer tout de suite que je n’ai pour le moment pas réussi à m’intéresser aux Ynnari, ce qui est un handicap pour qui veut effectuer une chronique impartiale d’une nouvelle consacrée à cette nouvelle faction de 40K. Toutefois, même si les cultistes d’Ynnead avaient bénéficié de ma légendaire bienveillante neutralité, je pense que mon jugement de ce ‘Fireheart’ serait resté sévère. Il n’y en a en effet pas grand-chose à tirer de cette histoire, mis à part quelques fragments de fluff sur l’organisation et la culture de Saim Hann, et le nom du canasson de Khaine, ce qui n’est pas lourd. Pour le reste, on assiste à un festival de gaffes, puis de baffes, provoqué par l’incompétence notoire de Nuadhu, dont la concupiscence irréfléchie mettra Saim Hann en danger, et, surtout, donnera à peu de frais à Thorpe le pitch d’un de ses bouquins. C’est à une nouvelle purement et crânement utilitaire que nous avons affaire ici, qu’il convient de lire à l’extrême limite en prologue de ‘Wild Rider’ et c’est bien tout.

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Blood Guilt – C. Wraight [40K] :

ICÔNE : NAVRADARAN, EPHOROI DE L’ADEPTUS CUSTODES

INTRIGUE :

Notre nouvelle débute avec une petite mise en contexte de la fonction de Custodiens, qui a connu bien des évolutions depuis les jours dorés de la Grande Croisade. On apprend ainsi que les Über Super Dupper de l’Empereur vivent dans une maison sans balcon sans toiture, où il n’y a même pas d’abeilles sur les pots de confiture1, même pas d’oiseaux, même pas la nature, et c’est même pas une maison. Ce qui est logique, puisque c’est la tour de l’Hégémon. Tour avalée par l’urbanisation galopante qu’a connu le Monde Trône au cours des derniers dix millénaires, mais tour tout de même. Parmi les 10.000 hauts fonctionnaires que compte cette noble institution, une majorité est affectée à la recherche fondamentale ou à la garde du Trône d’Or, et seuls quelques rares individus, les Ephoroi, ont l’occasion de se dégourdir les spalières en traquant les suspects désignés par leurs collègues du bureau des légendes. C’est à l’une de ces opérations très spéciales que nous convie Chris Wraight, aux côtés de Navradaran, enquêteur très spécial au service exclusif de sa Majesté.

C’est toutefois sur la proie de Nanar, le Seigneur Sleox, que la caméra se braque, alors que le noble se hâte vers le garage de son manoir en compagnie de son assistante Ysica. On devine sans mal que Sleox a des choses à se reprocher, et souhaite de toute urgence quitter Terra pour des cieux plus cléments plutôt que de devoir répondre de ses actes. Les éternels embouteillages du périphérique terran manquent toutefois de permettre au notable en fuite de se faire pincer avant d’arriver jusqu’au spatioport, un aéronef à l’allure menaçante ayant pris en chasse la limousine de Sleox sur le chemin du terminal. Au prix d’un sprint échevelé dans les coursives du bâtiment jusqu’à sa navette privée, le grand ponte et la petite main parviennent toutefois à rejoindre leur objectif avant d’être appréhendé par les forces de l’ordre. Une fois le vaisseau décollé et en route vers l’orbite, Sleox commence à se détendre, et se dirige vers le minibar pour s’en jeter un petit bien mérité…

Début spoiler…Mais découvre avec stupéfaction qu’un colosse en auramite a déjà fait main basse sur ses réserves, et sirote un jus de tomate (pas d’alcool en service) accoudé au comptoir. Un bolt non explosif (donc, une balle, j’imagine) dans le caisson plus tard, Sleox passe de vie à trépas dans l’incompréhension la plus totale. Et pour cause, la vraie cible de Navradaran n’était pas ce pantouflard de Seigneur, mais bien son assistante personnelle, qui cache sous une apparence banale un pouvoir de nuisance considérable, aiguisé par des millénaires de planque dans la haute société terrane. Le temps que la navette ne vienne se poser dans le QG des Arbites le plus proche, le Custodien et l’intrigante chaotique discutent de tout et de rien, le premier cherchant à percer à jour les motivations de sa captive, et la seconde à endormir sa vigilance pour pouvoir se suicider avant d’être soumise à l’interrogatoire, ce qu’elle ne parviendra pas à faire, malheureusement pour elle. On apprendra tout de même qu’elle considère que les Custodiens ne sont pas prêts du tout à s’opposer à la prochaine attaque d’Abaddon le Fléau, toujours partant pour aller pousser Pépé dans les orties.

La nouvelle se termine avec le compte rendu de Navradaran à Valoris, ce qui nous vaut un nouvel échange de graves platitudes sur l’état de l’Imperium et le devoir des Custodiens, ainsi qu’un petit aperçu de ce que le futur réserve au Sombre Imperium : un retour des filles de l’Empereur, qui devra être favorisé et encouragé par les 10.000 dans la mesure de leurs capacités, qui ne sont tout de même pas minables.Fin spoiler

1 : Mais qui est toujours éclairée avec des bougies en cire d’abeille, ce qui est un luxe indécent au 41ème millénaire.

AVIS :

Comme beaucoup de ses camarades de jeu, Chris Wraight écrit des nouvelles de liaison entre les romans de ses séries de long cours, et ‘Blood Guilt’ se place dans cette catégorie de publications charnières (‘The Emperor’s Legion’ et ‘The Regent’s Shadow’). Comme peu de ses camarades de jeu, Chris Wraight, parvient souvent (mais pas toujours, cf ‘Argent’) à donner à ce type de courts formats un intérêt pour le lecteur opportuniste. Ici, on a le droit à un petit cours d’histoire sur la Tour de l’Hegemon au fin des millénaires, puis à une révélation savamment mise en scène à propos de l’identité de la cible de Navradaran, et pour finir, à quelques considérations stratégico-politiques (la spécialité de Wraight) entre deux personnages très au fait de la situation de l’Imperium, ce qui donne trois bonnes raisons de s’atteler à la lecture de cette petite histoire, et donne plutôt envie d’en apprendre en plus sur la vie trépidante de Nanar et Valoche, gardiens émérites de Papy Mougeot.

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Argent – C. Wraight [40K] :

ArgentICÔNE : LUCE SPINOZA, INTERROGATRICE DE L’ORDO HERETICUS

INTRIGUE :

Je m’appelle Luce Spinoza, je suis Interrogatrice au service de l’Inquisiteur Joffen Tur, et ceci est mon histoire. Au moment où nous faisons connaissance, je gésis telle une loque sur le sommier de ma cellule, les deux bras dans le plâtre et la tête dans le Culexus. J’entends le pas lourd de mon tout aussi lourd (vous allez rapidement comprendre pourquoi) patron approcher dans le couloir, et je n’ai que le temps de me remémorer les événements qui m’ont conduit à l’état de grabataire que le voilà à mon chevet. Comme vous, il cherche à savoir comment diable Horus j’ai réussi à me mettre dans un tel état. Pour cela, un petit flashback s’impose. Je m’appelle Luce Spinoza, et ces dernières heures n’ont pas été de tout repos.

Tout avait pourtant commencé de manière très classique. Nous étions arrivés en orbite du monde ruche de Forfoda pour enquêter sur les raisons de la rébellion ayant mené la planète à entrer en sécession ouverte contre le règne éclairé et éclairant de notre bien-aimé Empereur. Tur avait insisté pour prendre son utilitaire de fonction plutôt que sa limousine, soi-disant pour faire passer le message auprès des autres forces impériales que ce théâtre d’opération l’intéressait à peine. Mouarf. Il était tout de même venu, et la seule conséquence pratique de cette démonstration de morgue cryptique fut que les copains et moi dûmes nous serrer sur les sièges arrière de sa Kangoo au lieu de chiller tranquille à côté du minibar, comme à notre habitude.

Lors du briefing de la mission, Tur nous avait fait part de son plan. Afin d’éviter que nos alliés Imperial Fists ne dessoudent les meneurs de la rébellion avant que nous n’ayons pu les cuisiner, il était impératif de leur griller la politesse là où c’était possible, ou de réfréner leurs ardeurs homicidaires lorsqu’ils étaient déjà à pied d’œuvre. Je m’attendais à être affectée à l’équipe du boss, comme c’est habituellement le cas, mais mes quinze minutes de retard au point équipe hebdomadaire du lundi précédent n’avaient de toute évidence été ni oublié, ni pardonné, car Tur m’a au contraire chargé de la supervision d’une opération annexe, en solo avec les Astartes. Ca m’apprendra à aller en boîte le dimanche soir.

Un peu plus tard, je fis connaissance avec la bande de surhommes que j’avais pour mission d’encadrer, afin d’assurer la capture de l’assistante de direction du gouverneur rebelle, une certaine Servia, localisée en haut d’une spire annexe de Forfoda (c’était sans doute son jour de télétravail – chanceuse –). Dès mon arrivée au Strategium, j’ai compris que la partie allait être tendue. Je n’ai en effet pas senti une grande sympathie envers ma personne de la part de mes collègues de bourreau (Jaune, Jaune d’Œuf, Jaune Trois, Jaune Quatre, Jaune Cinq, et un Chapelain, Erastus), confirmant les rumeurs insistantes dépeignant les Imperial Fists comme une bande de suprématistes meninistes. C’était bien ma veine. Heureusement que j’avais passé mon BAFA pour encadrer les pupilles de la Scholam lors des colonies pénales de vacances lorsque j’étais jeune fille au pair sur Dimmamar. J’ai donc remis en place ces butors dans le plus grand des calmes, et leur ai bien fait comprendre que c’était moi la boss. Non mais.

À partir de là, tout s’est enchaîné très rapidement. Notre taxi nous a déposé quelques étages en dessous du F3 de Servia, et mes gros copains souffrés faisant souffrir le service d’ordre des traîtres avec une brutalité consommée. J’aurais peut-être pu les aider à rentrer plus facilement (c’est comme en boîte, il vaut mieux laisser passer les filles devant quand on est une bande de mecs), mais ils étaient déterminés à finir la mission à temps pour ne pas rater le début de Dorna l’Exterminatrice, et je n’avançais visiblement pas assez vite pour eux. J’ai toutefois pu rattraper le groupe maillot jaune une fois l’appartement de Super Nanny investi, car cette dernière, ainsi que les amis qu’elle recevait à notre arrivée, étaient en pleine réunion Tupperware, avec des mutations pas vraiment ragoutantes à la place des contenants en plastique (de toutes façons, il vaut mieux utiliser du verre, c’est bien plus sain). La sain(t)e fureur des Mrs Propres, goût Paic Citron, eut beau s’abattre comme un ouragan de fraîcheur sur le taudis de Servia, l’issue du match restait incertaine, d’autant plus que le brave Erestus était franchement à la peine contre la maîtresse de maison, qui lui avait arraché sa mop énergétique des mains au moment où je suis arrivée sur place (rapide pause make up sur le pallier, pour ne pas rater ma première impression).

N’écoutant que mon courage, j’ai bondi entre le canapé et la table basse afin de récupérer l’instrument de travail de l’immaculé Chapelain. Par le pacemaker de l’Empereur, ce truc pesait le poids d’un grox mort ! Pas étonnant qu’ils soient aussi baraqués chez les Fists, s’ils n’utilisent que de la fonte pour réaliser leurs objets du quotidien. Voyant qu’Erestus était trop occupé à repousser les poisseuses avances de son hôte pour récupérer son hochet, j’ai pris le problème à bras le corps et ai assené à la maraude un horion digne de Jaune Henry en personne. Je me sentais trop fraîche… jusqu’à ce que je réalise que le champ disrupteur du bouzin était poussé au max, et que je n’avais ni l’armure, ni la musculature nécessaires pour encaisser le contrecoup de mon revers à deux mains. Résultat : un vol plané de trois mètres à travers le salon, une paire de radius concassée, une manucure ruinée, mais une victoire assurée pour l’Imperium, la résistance de Servia et Cie ayant été brisée en même temps que la colonne vertébrale de cette dernière. À peine le temps de m’assurer que les nettoyeurs de choc ne réglaient pas son compte à la grosse tache de gras (parce qu’en plus d’être misogynes, les Imperial Fists sont grossophobes : c’est la Ligue du Lol en fait) dans un excès de zèle, ce que j’aurais eu du mal à expliquer au boss, et j’ai sombré dans une salutaire et bien méritée inconscience, avec la satisfaction du devoir accompli. Vous savez tout.

Fondu au noir et lancement du générique, précédé du texte suivant :

L’Interrogratice Luce Spinoza poursuivit sa carrière au sein de l’Ordo Hereticus avec distinction, où elle sert désormais l’Inquisiteur Crawl sur Terra. Pendant sa convalescence, le Chapelain Erestus vint lui rendre visite afin de lui offrir le Crozius Arcanum avec lequel elle avait éreinté la vile Servia. Relique millénaire des Imperial Fists, cette arme nommée Argent ne pouvait être maniée que par des guerriers du Chapitre… jusqu’à ce que Spinoza ne vienne la looter en loucedé apparemment. Raccourci et allégé pour permettre à sa nouvelle porteuse de le manier sans risquer la PLS à chaque attaque, Argent continue à apporter le courroux de l’Empereur à Ses ennemis, et incarne la précieuse et indispensable collaboration entre les serviteurs du Maître de l’Humanité.

De son côté, Erestus fit une demande auprès des services généraux du Chapitre pour obtenir un modèle plus récent de Crozius, ce qui lui avait été précédemment refusé. Mis devant le fait accompli, le DRH du Phalanx n’eut d’autre choix que de s’exécuter. Tout le monde est gagnant.

AVIS :

Les habitués de ces chroniques savent quelle importance j’attache à la présence de twist final dans les nouvelles que je dissèque. Cet élément est en effet à mes yeux indissociable du genre en question, et c’est sur la présence et la pertinence de ce dernier que l’on peut souvent juger de la qualité d’un auteur et d’une soumission. La Black Library n’étant pas reconnue comme une maison d’édition aux standards très élevés (ce qui est logique au vu de sa mission première : fournir du fluff à foison pour faire rentrer des biffetons plutôt que de chercher à décrocher le Man Booker Prize), l’amateur de nouvelles devra souvent se résigner à des conclusions « plates », voire absconses s’il n’a vraiment pas de chance.

Le cas de cet Argent de Chris Wraight est un peu particulier, en ce que le twist final du récit s’avère être proprement méta, cas de figure que je n’avais rencontré jusqu’à présent. Tant la construction du récit à base de flashback que le pedigree respectable de l’auteur en matière de narration laissaient en effet entrevoir un dénouement un tant soit peu spectaculaire à cette nouvelle abordant le thème ma foi assez intéressant de la difficile coopération entre agents de l’Inquisition et guerriers de l’Adeptus Astartes. Le cadre posé, et l’incontournable séquence de Space Marines de films d’action évacuée, on se prépare à recevoir une conclusion édifiante de la part de Wraight, à même d’expliquer tant le titre que la finalité de la nouvelle… pour au final réaliser que nous sommes en présence d’une vulgaire digression n’ayant pour but que d’expliquer au lecteur comment Luce Spinoza, personnage récurrent de la série Vaults of Terra a reçu sa matraque de fonction (que l’on voit en couverture de The Hollow Mountain).

Pour une surprise, c’est une surprise, reconnaissons cela à Mr Wraight, qui nous avait cependant habitués à des soumissions un peu plus ambitieuses en termes de contenu. Drôle d’idée des éditeurs de la Black Library que d’avoir choisi de faire débuter le recueil Lords & Tyrants finalement très quelconque, et qui aurait eu davantage sa place en filler entre les tomes 1 et 2 de Vaults of Terra dans le futur omnibus de la série. Chris Wraight a beau avoir suffisamment de métier pour rendre l’expérience tout à fait supportable, on sort de cette dernière un rien blasé1, ce qui n’augure rien de bon pour les quinze nouvelles suivantes. Si plaie d’argent n’est pas mortelle (la preuve, Servia a survécu !), sa lecture, elle aussi, n’a rien de mortel. Et c’est bien le problème.

1 : Au risque de me répéter, tournons-nous une fois de plus vers l’étalon Abnett pour définir ce qu’une bonne nouvelle filler peut être. La comparaison la plus évidente à mes yeux est à faire avec Missing in Action (comment Eisenhorn a perdu la main, littéralement) et Playing Patience (comment Ravenor a recruté Miss Kys). Ces publications n’ont rien d’essentiel dans les arcs narratifs développé par Abnett pour ses personnages, mais sont suffisamment bien tournés pour pouvoir être lu par le tout venant, et non pas destinés uniquement aux plus dévots serviteurs des saints Ordos.

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The Absolution of Swords – J. French [40K] :

The Absolution of SwordsICÔNE : COVENANT, INQUISITEUR DE L’ORDO MALLEUS

INTRIGUE :

Par une nuit frisquette dont Dominicus Prime a le secret, un trio de figures enrobées se dirige vers la forme imposante de la Haute Chapelle, dont l’accès a pourtant été interdit par le Prefectus Prior Gul. Lorsqu’une patrouille de gardes a la mauvaise idée de leur barrer la route, les marcheurs jettent à bas leurs masques (et chasubles), et forcent leur chemin jusqu’au bâtiment où les attendent – sans le savoir encore – Aristas Gul et son bedaud Lumn, qui se croient avoir été convoqués par leur contact au sein de la 10ème Voie pour un point d’avancement surprise. Nos trois compères sont l’Inquisiteur Covenant, la Sœur Repentia Severita (qui ajoute pieusement le KO des deux gardes qu’elle a molestés dans l’exercice de leurs fonctions à son ardoise de péchés), et le Prieur Josef, et s’ils ont fait le voyage dans ce trou perdu de la galaxie alors qu’un Conclave est sur le point de débuter sur Ero, c’est qu’ils ont de bonnes raisons.

Un peu plus loin, sur la même planète, deux autres agents de l’homme au catogan tentent d’obtenir leurs entrées dans le night club le plus privé de Dominicus Prime : la salle de pause de la 10ème Voie. Ils ont dû pour cela négocier leur passage à travers des kilomètres de couloirs, fumoirs et dortoirs, graissant les pattes des pèlerins de faction tout du long, jusqu’à faire la connaissance d’un gros malabar peu aimable, qui accepte toutefois de les mener à confesse après avoir vu les (faux) tatouages et entendu les (bonnes) réponses de ces visiteurs impromptus. Pour continuer les présentations, il s’agit du blasé Cleander Von Castellan, marchand libre-mais-pas-vraiment-en-fait, et de l’imperturbable Koleg, ex-soldat aussi mortel que morne. Seul petit problème, la brute fait du zèle dans son interrogatoire, et pose une dernière question à laquelle Cleander n’a pas la réponse. Son improvisation ne donnant rien, le rogue trader est contraint d’écourter l’entrevue en dégainant ses fidèles pistolets à aiguilles, ce qui règle le problème de façon élégante (plus qu’un bolter, en tout cas). Ceci fait, les deux agents sont libres de s’engager dans l’escalier qui les mènera jusqu’à leur destination, peut-être finale.

Retour dans la Haute Chapelle, où de foie jaune de Gul en est quitte pour une petite leçon de catéchisme. Car le bon Prior couvre depuis trois ans les agissements démoniaques de la 10ème Voie, depuis qu’il a reçu la visite d’un Inquisiteur radical ayant confirmé ses doutes athéistes sur la non-divinité de l’Empereur. Bon prince, Covenant est venu offrir une chance d’absolution au grox égaré, en échange de quelques tuyaux sur son commanditaire, ce que Gul est plutôt prêt à faire, mais ce que Lumn, moins moinillon muet que démon déguisé, n’est pas très chaud pour autoriser. L’inévitable baston qui fait suite à ce léger différend est remportée de haute lutte par l’Inquisition, mais creuse un gros trou dans la réserve de points de vie (et la couche de graisse protectrice) de Josef, en plus de mettre Severita sur les rotules. Heureusement que le boss et sa grande épée énergétique sont là, tout de même.

Sous terre, c’est à peu près le même topo pour Cleander et Koleg, après qu’ils soient parvenus à une crypte contenant un pédiluve, un Psyker enchaîné, une foule de cultistes enragés, et un démon d’intérieur qui n’a pas été nourri depuis longtemps. Pendant que Koleg maintient les hostiles à distance à grand renfort de gomme cogne et grenades de désencerclement, Cleander, qui a eu une bonne éducation et se charge donc de réfléchir pour deux, réalise que la situation se simplifierait sans doute beaucoup si le Psyker captif était sorti de l’équation, ce qu’il fait d’une petite torsion des cervicales, avec la bénédiction de l’intéressé. Et en effet, cette déconnexion warpique brutale renvoie le démon dans les limbes, ce qui est suffisant pour permettre à Koleg de terminer les hostiles tout seul comme un grand. Leur mission accomplie, et peu emballés à l’idée de faire le ménage, les deux hommes reprennent le chemin de la surface pour prendre un Champomy.

Notre nouvelle se termine avec la fin de l’interrogatoire psychique de Gul, mené d’esprit de maître par Mylasa, la Psyker de fonction de Covenant. Cette dernière offre à son sujet un départ apaisé, après quelques semaines de franches tortures dont elle a effacé la trace de sa mémoire, en reconnaissance du manque de bol colossal de Gul, coupable d’avoir obéi à un Inquisiteur soupçonné d’être tombé du mauvais côté de la barrière. Les souvenirs du Prior seront utiles à Covenant pour exposer la duplicité de son collègue lors du Conclave de guerre qui prendra place dans quelques semaines à Ero, et auquel les deux hommes participeront. Cela n’est cependant plus l’affaire de Gul, qui finit sa vie un verre à la main et sur le bord de mer, de façon purement psychique certes, mais plus agréablement que la grande majorité des citoyens de l’Imperium. C’est l’Inquisition qui régale.

AVIS :

John French signe une très bonne introduction à sa saga inquisitoriale avec ‘The Absolution of Swords’, qui se déroule juste avant les événements de ‘Resurrection’ et permet de se familiariser en douceur avec la galerie de personnages gravitant autour de Covenant, et découvrir la rivalité professionnelle qu’il entretient avec Talicto. Considérant que les duels fratricides au sein de l’Inquisition donnaient les intrigues les plus intéressantes de ce sous-genre de la GW-Fiction, ‘The Absolution…’ a piqué mon intérêt et donné sérieusement envie d’en savoir plus sur l’héritier présomptif d’Eisenhorn1 (qui a aussi eu affaire à un collègue radical en son jeune temps). Pour ne rien gâcher, le récit en lui-même est tout à fait digeste, mélangeant scènes d’action efficaces et atmosphère poisseusement grimdark, comme on est en droit de l’attendre de la part d’une soumission de ce type. Bref, si vous débutez avec Coco, voici la nouvelle qu’il vous faut, loin devant les « introspections » que French a dédié à chacun des serviteurs de Catogan-man (‘The Purity of Ignorance’, ‘The Spirit of Cogs’), qui sont à réserver aux lecteurs déjà familiers du bon Inquisiteur.

1 : Ou plutôt contemporain, car les deux personnages ont été créés pour le jeu Inquisitor, il y a fort longtemps.

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Shadow Knight – A. Dembski-Bowden [40K] :

Shadow KnightICÔNE : TALOS VALCORAN, DIXIEME COMPAGNIE DES NIGHT LORDS

INTRIGUE :

À la recherche de matériel récupérable dans un Space Hulk, Talos et la première griffe de la dixième compagnie (Cyrion, Uzas, Xarl) tombent nez à nez avec une petite force de Blood Angels, bien décidés à reprendre l’épée que Talos a dérobée à un de leurs champions (cette obsession des Blood Angels pour Aurum – le nom de l’épée en question – constitue l’un des running gags de la saga, chaque tentative se soldant par un échec coûteux en vies d’Anges de la mort). Après avoir rapidement expédiés les pauvres scouts en combinaisons spatiales qui constituent la première vague des loyalistes, les quatre affreux se réunissent pour décider de la marche à suivre… et Talos est frappé par une vision, ce qui réduit drastiquement ses capacités de leader, et force ses acolytes à se débrouiller tout seuls. La narration restant malgré tout braquée sur le chef de la griffe, en dépit de son état comateux, la suite de l’accrochage entre Night Lords et Blood Angels est couverte en quelques lignes lapidaires, par le biais du compte rendu fait par Uzas et Xarl à Cyrion après les faits. Pareillement, la mini bataille spatiale entre les vaisseaux respectifs des deux forces est résumée en un paragraphe, ce qui est un peu court jeune homme.

AVIS :

Étrange nouvelle que ce Shadow Knight, commis par un Aaron Dembski-Bowden visiblement peu convaincu par son propos. Pour être honnête, ce texte semble être la réponse du berger à la bergère, cette dernière répondant au nom de Sarah Cawkwell et s’étant à de multiples reprises illustrée par la platitude navrante de ses écrits. Reprenant dans les grandes lignes le schéma narratif de Cause And Effect (à savoir, une sous-péripétie impliquant Gileas Ur’Ten, Space Marine du chapitre des Silver Skulls et héros récurrent de Miss Cawkwell – intérêt : nul – ), ADB livre ainsi un compte-rendu peu inspiré d’un épisode mineur de la vie de Talos, principal protagoniste de la (sinon) très bonne série des Night Lords.

Il va sans dire que la connaissance des personnages principaux de la série Night Lords ainsi que des événements relatés dans cette dernière constitue un prérequis appréciable (mais pas obligatoire) à la lecture de Shadow Knight, dont l’action se déroule peu avant l’attaque de la treizième croisade noire sur le système de Crythe, et constitue de fait une sorte d’avant-propos à la trilogie d’Aaron Dembski-Bowden. Au final, je pense que cette nouvelle aurait davantage eu sa place en introduction du (futur) omnibus Night Lords qu’en conclusion de ce onzième numéro de Hammer & Bolter, même si la lecture de ces quelques pages n’a absolument pas relevé du chemin de croix littéraire, le « pire » d’ADB surpassant allègrement le « meilleur » d’autres auteurs de la BL, il n’en demeure pas moins que Shadow Knight constitue à mes yeux la production la plus faible d’ADB à ce jour.

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Ghosts of Demesnus – J. Reynolds [AoS] :

Ghosts of DemesnusICÔNE : GARDUS STEELSOUL, LORD-CASTELLANT DES HALLOWED KNIGHTS

INTRIGUE :

Profitant d’une permission bien méritée, le Lord-Celestant Gardus Steel Soul, tourmenté par des rêves le ramenant sans cesse à son passé de mortel, s’embarque pour une croisière bucolique jusqu’à la cité où il a vécu sa première existence, dans l’espoir de pouvoir mettre des mots sur sa soudaine mélancolie. Débarqué incognito (enfin, aussi incognito qu’une taille et une stature de Stormcast Eternal peuvent conférer) dans la riante Demesnus, port fluvial d’importance du royaume de Ghyran, Gardus, autrefois Garradan, baguenaude pensivement de ruelles en parcs, à la recherche des bribes d’un passé déjà lointain. À peine a-t-il le temps de rosser un trio de faquins cherchant des noises à une accorte damoiselle en représailles de la lépreuse compagnie qu’elle entretient, et d’échanger quelques platitudes avec son professeur de philosophie de terminale, que les voix qui le hantent l’amènent droit dans les ruines de son ancien hospice. Dans une autre vie, Gardus était en effet ostéopathe guérisseur, et avait dédié sa vie et ses économies à accueillir les nécessiteux des alentours, avec un dévouement ayant fini par attirer l’œil de Sigmar en personne, qui, à la faveur d’une attaque de Skineaters1, drafta le malheureux praticien dans sa team de surhommes. Sûrement qu’il avait besoin d’un massage, aussi. Malgré l’aspect décrépit du lieu, laissé à l’abandon depuis belle lurette, Gardus a la surprise de tomber sur une communauté de squatteurs, pas vraiment présentables et majoritairement scrofuleux, pestiférés, voire pire, mais persuadés que Saint Garradan les a appelés en ce lieu pour qu’hommage lui soit rendu.

Un peu gêné par la situation, qu’il n’a en aucune mesure orchestrée, le probe Gardus accepte l’hospitalité de ses nouveaux amis, dont fait partie la pauvresse qu’il a secourue sur les docks quelques heures plus tôt. Cette dernière, et le Prêtre Guerrier de Sigmar invalide à 134% qui sert d’autorité morale à la croûteuse congrégation, attendent le prochain signe de Gare du Nord avec un zèle admirable, totalement oublieux aux réalités les plus basiques, comme le droit de propriété. D’où la visite de courtoisie que vient leur rendre le possesseur du terrain en question, un maquignon à la retraite du nom de Sargo Wale, bien décidé à lancer les travaux de réhabilitation de l’ancien hospice dans les meilleurs délais, et par la force s’il le faut. Il faut reconnaître qu’il a la loi de son côté, la trêve hivernale ayant expiré et le conseil municipal lui ayant délégué tout pouvoir pour faire triompher l’intérêt commun. Entre l’alignement légaliste bon de Wale et celui chaotique (un comble pour un Stormcast Eternal) bon de Gardus, aucun compromis ne peut être trouvé, mais, confiant dans son bon droit à défaut de l’être dans les chances de sa bande de ruffians face à l’opposition ferme et polie (comme son épée runique de deux mètres) du colosse servant de videur aux éclopés de l’hospice, le diplomate propriétaire laisse une journée entière de réflexion à la partie adverse, et s’en va comme un prince.

Ce délai supplémentaire sera mis à fort bon usage par Gardus, qui n’a pas toute l’éternité pour régler le problème qui le tourmente, tout comme Reynolds n’a pas 300 pages pour conclure son propos. La nuit suivante verra donc un esprit Kaonashi geignard s’extirper du sol pour aller se repaître des humeurs (de manière littérale et figurée) des malades endormis. Surpris par le Gardus de garde et son sixième sens de preux paladin, la mystérieuse entité se fait rapidement la malle, mais reparaît quelques heures plus tard, trop affamée pour prêter beaucoup d’attention au demi-Primarque qui patiente dans sa zone de spawn, des questions plein la bouche et une épée enchantée à la main. Manque de bol pour notre héros, l’amalgame pleurnichard qui lui fait face est plus intéressée par la boustifaille que par la discussion, et l’attaque sans sommation, sous le regard bienveillant de Wale, qui se révèle être un cultiste de Nurgle. Après avoir constaté que ses gros muscles ne sont d’aucune utilité face aux assauts de suçons de son adversaire, Gardus dégaine son special move, c’est à dire son énorme… empathie, et sert donc le démon dans ses bras puissants en lui susurrant des mots de réconfort aux oreilles. Et ça marche. Touché par tant de compassion, et sans doute un peu par la pure lumière céleste que Gardus est capable d’exsuder sur commande, telle une luciole d’Azyrheim (séquelle plutôt kioul de sa seconde reforge), la vilaine bête fond comme un lépreux dans un pédiluve, libérant une à une les âmes des malheureux qui lui servaient d’ancrage. Ceci fait, Gardus n’a plus qu’à régler son compte au traître Wale, qui malgré sa force démoniaque et son épée rouillée, ne fait pas le poids face au double quintal de JUSTICE du Stormcast Eternal. Convaincu d’avoir accompli sa mission, et débarassé Demesnus d’un détestable faux jeton, Steel Soul peut reprendre le ferry de 06:39 pour regagner sa caserne et l’éternelle lutte contre les ennemis de Sigmar. Voilà un week-end productif.

1 : Le nom peut faire peur, c’est vrai, mais si on y réfléchit deux secondes, il inclut également les Garra Rufa (poissons docteurs), d’excellents auxiliaires de pédicure. Du coup, la légende du Garra Dan en prend un coup.

AVIS :

Les turpitudes psychologiques de Gardus Steel Soul, pour lequel la conciliation du moi, surmoi et ça ne relève pas de la sinécure, ne m’ont que moyennement intéressées, comme la plupart des soumissions mettant au premier plan des Stormcast Eternals je dois le reconnaître. Reynolds m’ayant habitué à des nouvelles bien plus travaillées en termes d’intrigue et de progression narrative, la grande simplicité avec laquelle notre Action Man blanchi sous le harnais résout le problème auquel il est confronté, m’a laissé un goût d’inachevé. Toutefois, je dois reconnaître que l’inclusion de The Ghosts of Demesnus dans cette anthologie introductive est un choix des plus pertinents de la part des éditeurs de la BL, puisqu’il permet aux nouveaux lecteurs de découvrir une facette intéressante de la faction reine de l’univers (la difficile conciliation entre leur passif de mortels et leur mission de soldats de Sigmar par les Stormcast Eternals), tout en les immergeant dans le quotidien d’une cité libre de Ghyran, loin des batailles contre les forces du Chaos déjà abondamment couvertes dans le jeu de figurines et les suppléments s’y rattachant.

Ajoutez à cela des personnages un brin complexes (en particulier Sargo Wale, qui est loin d’être un chef de culte à tendance mégalo-anarchique, comme c’est souvent le cas) et l’habituel nappage de fluff que Josh Reynolds se fait un point d’honneur à servir, et vous obtenez un récit d’une honnêteté insoupçonnable. On peut cependant reprocher à Ghosts…, même si dans une moindre mesure que pour God’s Gift, son manque de singularité, évidemment causé par le fait que Gardus est, comme Hamilcar, un héros récurrent de la BL, dont les aventures passées rejaillissent fatalement sur les évènements narrés dans la nouvelle. Ici, c’est l’inclusion du vieux sensei Yare, compagnon d’aventure d’une précédente épopée, qui fait figure de passage obligé à la valeur ajoutée assez limitée. Rien d’horripilant là non plus, mais pas l’idéal pour accrocher le lecteur novice ou indifférent. Bref, une première incursion honorable, à défaut d’être mémorable, dans le monde métallisé des meilleurs de Sigmar.

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One, Untended – D. Guymer [AoS] :

One, UntendedICÔNE : GOTREK GURNISSON, TUEUR

INTRIGUE :

Une fois n’est pas rancune, nous retrouvons le Tueur préféré de ton Tueur préféré, Gotrek Gurnisson, dans le mal le plus complet au début de cette nouvelle aventure, qui sera sans aucun doute trépidante, mais qui commence par être vomissante. Notre héros est en effet pris d’un mal de ventre carabiné, ce qui, de son aveu même à son acolyte Maleneth, ne lui était jamais arrivé avant. Et si l’Aelfe sigmarite, en bonne compagnonne qu’elle est, prend soin de tenir la crête de Gotrek pour éviter que cette dernière ne prenne une couleur et une texture encore plus dégoûtantes qu’à l’accoutumée, elle n’est pas étrangère à cette gueule de bois subite. Bien au contraire, c’est elle-même qui en est la cause, ses tentatives d’empoisonner le Nain afin de lui dérober la rune majeure de Krag Marteau Noir pour la ramener à Azyrheim n’ayant eu pas d’autres effets qu’un émétique avarié sur la robuste constitution du Tueur1. Ses vaillants efforts de se débarrasser de Gotrek devront cependant attendre un peu, car les éructations du transfuge du Monde qui Fut sont dérangés par une scène de ménage entre plusieurs individus aussi louches qu’imbibés. La raison de ce tapage nocturne se fait bientôt jour : un jeune bambin du nom de Tambrin a échappé à la vigilance légère de ses parents (Junas et Magda), et s’est semble-t-il enfoncé dans les catacombes d’Hammerhal Ghyra, que l’on dit hantées par le spectre vengeur d’Hanberra (à ne pas confondre avec celui d’Harambe, même si ça lui donnerait une bonne raison de persécuter les garçonnets), un ancien héros local ayant renoncé à servir Sigmar sous la forme d’un Stormcast Eternal à sa mort, et à la recherche des enfants qu’il n’avait pas pu sauver de son vivant depuis lors. La perspective de se frotter à un spectre légendaire pique bien évidemment l’intérêt professionnel de Gotrek, qui insiste pour prendre la tête de l’expédition de secours mise sur pied par les habitués de la taverne où les deux compères ont passé la nuit. En plus de Junas, qui sert de videur à l’auguste établissement, on retrouve la Ranger retraitée Halik et le Prêtre d’Alarielle Alanaer, qui serviront donc de meatshields aux véritables héros de l’histoire. Dommage que personne ne les ait prévenus.

La descente s’engage donc, et après quelques heures de progression dans les boyaux insalubres de la cité, un premier ennemi pointe le bout de ses moustaches. Il ne s’agit pas de Philippe Martinez, mais d’une bande de Moines de la Peste, peut-être syndiqués, squattant le bas de la cage d’escalier comme un gang de trafiquants de la cité Péri. Et à propos de périr, laissez moi vous dire que les ratons ne font pas long feu face à la colère incandescente de Gotrek, qui peut désormais passer en mode super saiyan lorsqu’il est très énervé, et élever la température autour de lui à des niveaux insupportables. Sa nouvelle hache de fonction, si elle est sans doute un peu moins cheatée que l’ancienne (dur de battre une arme forgée par Grugni pour Grimnir, tout de même), s’avère également très efficace, et la menace murine est donc prestement éliminée par les aventuriers, qui peuvent poursuivre leur route sans autre dommage qu’un pif écrasé par un coup de matraque pour Junas.

Le moment tant attendu de la confrontation avec Hanberra finit enfin par arriver, l’esprit ayant bien dérobé/envoûté Tanbrin (qui dort comme un bienheureux) car il l’avait pris pour son propre fils, Hangharth. Némésis de Gotrek oblige, le combat est bien plus serré que précédemment, la pauvre Halik rendant les armes et l’âme au premier cri poussé par le poltergeist kidnappeur, qui prouve au monde entier qu’il existe des Banshees masculines. Non mais. L’évanescence intermittente du fantôme n’est pas sans poser quelque problème au Tueur, ce qui ferait plutôt les affaires de Maleneth, toujours déterminée à récupérer la rune majeure tant convoitée de sa dépouille, mais il lui faut pour cela donner une raison à Hanberra de se battre à fond, ce que sa main mise sur Tambrin l’empêche de faire. La cultiste de Khaine repentie puise donc au fond de sa sacoche un clou de ci-gît Rolf2, souverain contre les ectoplasmes tenaces (et les Mortarques collants), et le frotte vigoureusement sur le bras porteur d’Hanberra pour lui subtiliser son précieux. N’ayant plus rien à perdre, le spectre va certainement réduire Gotrek en bouillie…

Début spoiler…Eh bien non (quelle surprise). Mais le plus étonnant n’est pas tant le résultat final que le dénouement, non violent, de cet affrontement. Le Tueur parvient en effet à faire entendre raison à son adversaire par le dialogue au lieu de lui faire manger sa hache, et ce dernier se dissipe donc de lui-même, comme le malentendu qui l’avait mené à dérober les enfants des autres depuis quelques siècles. Tout est donc bien qui finit bien (sauf pour Halik et la bière que Gotrek avait laissé sur le comptoir3), mais Maleneth la malhonnête devra trouver une autre combine pour récupérer la précieuse broquille incrustée dans le plastron de son compagnon.Fin spoiler

1 : Maleneth ne sait pas que la glotte de sa cible est marquée de la rune majeure de Cubi, le dieu Nain de l’alcoolisme.
2 : Vous me pardonnerez le calembour, mais traduire ‘wightclove’ en français n’est pas facile.
3 : À ce propos, il est probable que ce soit elle qui ait donné son nom à la nouvelle (que l’on pourrait traduire par ‘Laissé(e) sans surveillance’) et non pas Tanbrin.

AVIS :

David Guymer, qui avait écrit les dernières aventures de Gotrek (et Felix) dans le Vieux Monde, signe avec ‘One, Untended’ un parfait récit de transition et d’acclimatation pour les lecteurs familiers du personnage mais pas des Royaumes Mortels. Au-delà du déroulé précis de cette quête, tout à fait classique sauf dans son dénouement, ce sont les informations que l’auteur donne sur ce nouvel univers, les changements subis par son héros (nouvelle arme, nouvelle rune, nouveau sidekick) depuis qu’il y a fait son entrée, et les motivations, pas vraiment charitables, de Maleneth, qui rendent cette lecture intéressante, et même indispensable pour qui voudrait reprendre la suite de la geste de Gotrek sans passer par la case romanesque (‘Realmslayer’). L’auteur parvient également à aborder des éléments de fluff relevant de la sociopolitique, comme l’acculturation progressive des habitants de Ghyran aux mœurs d’Azyr, qui donnent une profondeur et un réalisme très appréciables à une franchise qui en manquait (et en manque toujours) cruellement par rapport à Warhammer Fantasy Battle. Bref, c’est une transition très réussie que Gotrek Gurnisson doit à David Guymer, bien que le flambeau des rancunes soit passé peu de temps après à Darius Hinks.

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Gods’ Gift – D. Guymer [AoS] :

Gods' GiftICÔNE : HAMILCAR BEAR-EATER, LORD-CASTELLANT DES ASTRAL TEMPLARS

INTRIGUE :

Prenant place après les évènements narrés dans Great Red et The Beasts of Cartha, pour ne citer que deux des précédentes aventures de notre fougueux héros, Gods’ Gift voit Hamilcar et quelques uns de ses potes des Astral Templars accomplir une mission d’intérêt général, sans doute pour avoir commis quelque tour pendable à une chambre rivale lors d’une permission à Hammerhall. Il s’agit en l’état de punir et faire stopper les exactions d’une bête monstrueuse s’amusant à disposer des hardis bûcherons d’un camp de colons récemment implanté dans les terres farouches de Ghur, tâche récréative pour des Stormcast Eternals de la trempe de nos gais lurons. Guidés par un local – Fage – qui malgré son âge vénérable semble tout émoustillé par la seule présence des Elus de Sigmar, Hamilcar & Cie s’embarquent donc dans une épopée aussi directe et rapide qu’une quête de zone de didacticiel de World of Warcraft.

Depuis le relevé de empreintes jusqu’à la constatation de l’heure du décès, ou plutôt, de l’abattage, il ne se passera ainsi qu’une petite journée, soit une vingtaine de pages pour le lecteur, juste le temps pour Ham’ de piquer un roupillon qui lui apportera un rêve plus ou moins prophétique, dans lequel un chêne vient lui chanter Je suis malade (ce qui est ‘achement dur pour un végétal, et mérite le respect), ce qui lui permettra de prendre une décision des plus inspirées quelques heures plus tard. La nouvelle se terminant pour un petit cliffhanger pas vraiment haletant, mais sans doute important pour la suite de la saga d’Hamilcar (Mark de son prénom), le lecteur en est quitte pour embrayer sur directement sur la première, ou plutôt le premier roman dédié à Guymer à sa coqueluche hirsute (Champion of the Gods), dans lequel il est presque certain que des réponses seront apportées aux questions laissées en suspens à la fin de Gods’ Gift.

: L’Homme Arbre qui s’était chargé de la besogne de déshumanisation – c’est comme la désinsectisation, mais avec des primates – servant de pied à terre racine à humus à une sylvaneth passablement enrhumée.

AVIS :

Malgré les dizaines de titres que compte sa bibliographie BL à l’heure actuelle, ce n’était que la deuxième soumission de Mr Guymer m’étant tombée sous la main depuis l’inaugural The Tilean Talisman, initialement publié en 2011. Et je dois dire que mon appréciation de l’œuvre du bonhomme est resté scrupuleusement identique, huit ans plus tard : des aptitudes certaines en terme de narration, avec des personnages au minimum distrayants, à défaut d’être immédiatement attachants (mention spéciale à Brouddican, l’Hillarion Lefuneste personnel de cette grande gueule d’Hamilcar), relevé par quelques notes boisées – c’est le cas de le dire – de fluff, plombées par une vacuité de l’intrigue assez rédhibitoire. C’est bien simple, celle de Gods’ Gift (d’ailleurs, on ne comprend pas vraiment quel est le don auquel Guymer fait référence dans le titre de sa nouvelle1) s’articule en deux temps trois mouvements, sans qu’on ait l’impression d’une quelconque progression entre le début et la fin de la nouvelle. Hamilcar traque un monstre. Hamilcar rêve d’un chêne. Hamilcar tombe dans une embuscade d’Hommes Bêtes (il faut bien qu’il montre qu’il est un cador du corps à corps). Hamilcar débouche sur un bosquet de chênes sacrés, gardé par… le monstre qu’il traquait. Coup de bol. Baston. Victoire. Fin.

Bref, rien de bien challengeant pour l’intellect du lecteur, qui aurait pu s’attendre à quelques liens de causalité entre les différents éléments constitutifs du propos de Guymer. Rien de tel ici, ou de manière tellement évidente et peu fine que les relever n’a pas grand intérêt. Comme dit plus haut, cela peut sans doute se justifier par le fait que Gods’ Gift est un rehaut littéraire à un travail plus conséquent, avec lequel l’auteur prend bien soin de faire la liaison. Telle la rondelle de tomate venant décorer une entrecôte frites, cette nouvelle peut être consommée si on a vraiment faim, mais ne remplira pas l’estomac pour autant. Et comme dit plus tôt (Décembre 2014, pour être précis), c’est plutôt cher payé pour ce que c’est. On me souffle dans l’oreillette que c’est fois ci, c’est gratuit. Bon. Mais avant cela, cela ne valait certes pas les 2,99€ demandés. Rem-bour-sez nos in-vi-tat-tions !

1 : Soit ce sont les visions vagues envoyées par Sigmar, soit c’est le photophore magique remis par icelui, et qui permettra à notre fier héros de venir à bout de Marylise Lebranchu. Au lecteur de décider s’il prend le messie ou la lanterne.

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The Dance of the Skulls – D. Annandale [AoS] :

The Dance of the SkullsICÔNE : NEFERATA, MORTARQUE DU SANG

INTRIGUE :

Invitée à honorer de sa présence un bal donné par la reine Ahalaset et le seigneur Nagen dans la cité de Mortannis, Nefarata se doute bien que cet évènement mondain n’est qu’un prétexte commode pour permettre à ces deux grandes lignées d’agir à ses dépends, ce qui ne l’empêche pas d’accepter gracieusement de se rendre sur place, n’ayant de toute façon rien d’autre de prévu ce soir là. Voyant d’un mauvais oeil le rapprochement s’étant récemment opéré entre Ahalaset et Nagen, la Mortarque de Sang suppute avec raison qu’un piège va lui être tendu, et se réjouit d’avance de cette (més)aventure, le quotidien de Nulahmia devant apparemment être assez terne.

Après avoir été accueillie avec tout le faste et la pompe liés à son r/sang (et infligé rateau sur rateau à ce pauvre Nagen, auquel elle promet toutefois une danse plus tard dans la soirée1), Neffie se voit proposer par son hôte une dégustation privée de crus tirés de l’hématothèque personnelle d’Ahalaset, ce qui ne se refuse pas. Guidée jusqu’à un salon lounge où l’attendent une dizaine d’esclaves qui s’appellent tous Mathusalem ou Réhoboam, notre rusée vampire à tôt fait d’identifier l’aiguille d’argent se terrant sous la roche, en l’occurrence un assassin assermenté doté d’une fourchette à escargot à la place du bras (c’est la mode à Hammerhal). Ayant raté son test d’Initiative, le faquin est toutefois aisément neutralisé par sa victime supposée, qui l’attache à son service d’un langoureux battement de cils. Satisfaite de la tournure prise par les évènements, et comme toute quinqua-millénaire de la bonne société après une dure journée de labeur, Neferata s’accorde un petit verre (et fracasse au passage toutes les « bouteilles », qui espéraient peut-être qu’on les laisse tranquille le temps qu’elles refassent le plein) aux frais de ses hôtes avant de revenir se joindre à la fête.

Là, il est temps pour la Lahmiane de porter l’estocade aux traîtres débusqués, et en musique s’il vous plaît, la danse des crânes consentie à ce benêt de Nagen donnant amplement le temps à notre héroïne de cimenter sa victoire en enchantant légèrement son cavalier, qui ne trouvera rien de plus malin lorsque l’assassin d’Ahalaset viendra sonner les douze coups de minuit à son ancienne patronne à l’aide de son argenterie intégrée, de lancer sa devise dans le silence de mort (héhé) qui s’ensuit. Cette dernière tombera à plat comme la totalité de ses blagues, et, mal comprise par la garde de la reine défunte, aura des conséquences tragiques pour notre pauvre Nagen. Un verre ça va, trois verres…

1 : En même temps, cette coquetterie de laisser dépasser une canine par dessus sa lèvre inférieure ne doit pas aider à lui donner un air très intelligent.

AVIS :

C’est peu de chose de dire que la prose de Herr Annandale n’était pas tenue en haute estime de ce côté du clavier, depuis la chronique de ses débuts pour la BL (The Carrion AnthemHammer & Bolter #11) jusqu’à aujourd’hui. Les choses ont légèrement évolué avec cette Danse des Crânes, qui s’affirme facilement comme la meilleure soumission de notre homme que j’ai pu lire à ce jour. Certes, on parle ici en progrès relatif plutôt qu’en performance absolue, cette courte nouvelle ne se comparant guère aux travaux d’auteurs que je considère être plus méritants que David Annandale, Abnett, Dembski-Bowden, Farrer et Fehervari en tête, pour n’en citer que quelques uns (la liste serait assez longue sinon), mais j’aurais trop beau jeu de ne pointer que les trous dans la cuirasse ou les défauts dans la raquette des travaux de ce régulier de la BL, si je ne soulignais pas également les sources de satisfaction à la lecture de ces derniers. L’Empereur sait qu’ils sont encore rares à cette heure.

Alors, quels sont les éléments positifs de La Danse des Crânes ? Pour commencer, une absence de ce que l’on peut presque appeler une « annandalerie », terme forgé par votre serviteur et désignant une mauvaise, grossière ou grotesque exploitation d’une idée de départ pourtant assez sympathique, pour des résultats évidemment décevants. Le huis-clos victorien qui nous est proposé ici ne pêche ainsi pas par excès de zèle ou manque de structuration, les péripéties s’enchaînant de façon tout à fait convenable et crédible, ce qui pourrait sembler aller de soi mais n’était pas gagné d’avance au vu du pedigree de l’auteur. On sent que ce dernier a réfléchi à la manière dont il devait dérouler son récit pour que le plan alambiqué de Nefarata puisse se dérouler sans (trop) d’accroc, et même si l’usage d’un petit TGCM en fin de nouvelle pour parfaire le triomphe de Mama Lahmia peut être noté, c’est finalement peu de chose comparé aux problèmes structurels émaillant quelques unes des précédentes soumissions de David Annandale.

Autre source de contentement, la description intéressante qui nous est faite de la haute société mort-vivante, nid de vipères aux crocs acérés et n’hésitant pas un instant à comploter pour précipiter la chute de leurs prochains, alors même que les ennemis extérieurs se comptent par milliers, et qu’un brin de solidarité entre macchabées ne serait pas de trop pour défendre le pré carré de Nagash. Le fait que cette société, mêlant vampires et humains à tous les échelons, apparaisse comme fonctionnelle et pérenne (en même temps, c’est bien le minimum quand on est immortel) est une autre réussite d’Annandale, qui parvient à donner un volume fort bienvenu à une faction qui jusque là se réduisait à des légions de squelettes traînant leur mélancolie dans des déserts violacés. On peut s’amuser aussi en Shyish, telle est la morale de cette petite histoire.

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The Old Ways – N. Horth [AoS] :

Callis and Toll_The Old WaysICÔNES : ARMAND CALLIS & HANNIVER TOLL, ORDRE DE SIGMAR

INTRIGUE :

Affecté à la surveillance de la cité d’Excelsis, dans le royaume de Ghur, le répurgateur de l’Ordre d’Azyr Halliver Toll, escorté de son sidekick Armand Callis, est envoyé par ses supérieurs tirer au clair une sombre histoire de disparition à Marshpoint, une ville agricole située en périphérie de la Cité des Secrets. Le fils aîné de la puissante famille Junica n’a en effet plus donné signe de vie après avoir eu maille à partir avec quelques soldats de l’autre grande famille locale, les Dezraed, qui l’ont poursuivi jusque dans les profondeurs de la forêt d’Ulwhyr. L’entente entre Junica et Dezraed n’ayant jamais été cordiale, c’est une vendetta en bonne et due forme qui menace d’éclater entre les Capulet et les Montaigu de Ghur, gueguerre qui mettrait en péril l’approvisionnement des régiments d’Excelsis en précieuse soie d’acier, ressource collectée depuis les fermes arachnides de Marshpoint. Il va donc de l’interêt général que cette triste affaire soit réglée dans les meilleurs délais, et qui de plus qualifié qu’un répurgateur pour traiter ce problème ?

Nous suivons donc Thalys et Colle au cours de l’enquête à laquelle ils se livrent à leur arrivée dans le bourg miteux et boueux de Marshpoint. Après un interrogatoire croisé des patriciens des deux familles, l’énorme et suintant Fenrol var Dezraed, autoproclamé Gardien de Marshpoint du fait de sa capacité de bloquer à lui seul l’entrée de la ville s’il lui prenait l’envie de s’asseoir en travers du portail, et le sec et irritable Kiervaan Junica, nos experts se rendent sur les lieux de la disparition à proprement parler, escortés par l’homme de confiance du patricien Junica, un natif du nom de Ghedren, et par un trio de gardes Dezraed. Et s’il se pourrait bien que la rivalité larvée entre familles nobles ait bien fait couler le sang, les enquêteurs feraient bien de prendre au sérieux les rumeurs entourant la Sorcière Blanche d’Ulwyhr. Après tout, ils ont pénétré sur son domaine…

AVIS:

C’est avec enthousiasme que j’avais vu revenir la figure iconique du chasseur de sorcières/répurgateur dans le lore d’Age of Sigmar, que son inclinaison high fantasy aurait pu « immuniser » à l’introduction de ce type de personnage, très grimdark par nature. La lutte contre les cultes chaotiques gangrénant le nouvel ordre rutilant de Sigmar constitue en effet à mes yeux un axe de développement des plus intéressants, et une prise de recul bienvenue sur le manichéisme caractéristique des premières années d’AoS. Encore fallait-il que l’image d’Epinal Hammerhal de l’inquisiteur traquant le vice et la trahison parmi les sujets obéissants de l’autorité centrale (préférablement divine, c’est plus classe) soit convenablement adaptée dans cette nouvelle franchise, la profession en question exigeant une rigueur morale confinant à la psychose, ce qui n’est pas franchement la norme parmi la soldatesque sigmarite (ces martel-sans-rire de Celestial Vindicators mis à part), dépeinte à de nombreuses reprises comme adepte du compromis et de la tempérance. Qu’en est-il avec la paire Callis & Toll, promise à un bel avenir au sein de la BL à en juger de la façon dont leurs noms ressortent dans tous les ouvrages auxquels ils ont été inclus ? Eh bien, c’est plutôt pas mal, encore que pas spécialement pour les raisons détaillées ci-dessus. Je m’explique.

Si le fanatisme (dans le bon sens du terme, car, si si, dans la littérature med-fan, cela existe) de nos héros laisse à désirer, la retenue dont fait preuve Toll, sensé être le vrai bad guy du duo, dans le jugement qu’il délivre au coupable, le plaçant à un petit 2 sur l’échelle de Mathias Thulmann (le référentiel absolu de la maison à cet égard), Horth se rattrape néanmoins en glissant quelques remarques de bon aloi à propos d’un certain White Reaper (Cerrus Sentanus sur son état civil), Stormcast Eternal pas vraiment Charlie, à tel point que son nom est utilisé pour effrayer les enfants d’Excelsis. Voilà un type qui mérite que l’on suive, et j’espère bien que ça sera le cas dans un futur pas trop lointain. Celà étant dit, The Old Ways a d’autres qualités, la première étant de proposer une petite enquête policière pas trop mal troussée au vu du nombre de pages limité avec lequel elle doit composer1, l’atmosphère horrifique du passage « sylvestre » du récit étant une autre source de satisfaction. D’autre part, cette nouvelle présente également l’intérêt de creuser le background de la cité libre d’Excelsis, qui devrait normalement ne pas disparaître corps et bien dans les annales du fluff, au vu du nombre d’apparitions qu’elle a faite dans divers écrits depuis son introduction dans le background. En apprendre plus sur cette bourgade présente donc un intérêt pour le fluffiste, tellement bombardé d’informations géographiques par ailleurs qu’on ne peut lui reprocher de ne pas prendre note de tout ce qu’on lui soumet.

Enfin, de façon plus large, elle fait ressortir un concept intéressant : le fossé existant entre natifs d’Azyr et populations locales au sein des cités libres, les seconds étant généralement mal considérés, voire méprisés par les premiers, qui les qualifient « d’Amendés » (traduction personnelle de Reclaimed, qui peut aussi s’entendre comme « Récupéré ») ou de « Sang Maudit » (curseblood), ce qui n’est pas très sympathique, mais ajoute de la profondeur à la société sigmarite. Quand on lit que même un personnage « égalitariste » comme Toll n’aurait pas de problème à raser toutes les forêts de Ghur pour pouvoir accélérer la colonisation de ce Royaume, au grand désarroi des locaux qui ont appris à vivre dans les étendues sauvages et à les respecter, on se dit que la possibilité d’un soulèvement des indigènes contre la métropole et ses représentants est une possibilité réelle… et c’est tant mieux en termes de potentiel narratif ! Bref, une plongée satisfaisante dans l’arrière-pays d’Excelsis, et une nouvelle qui vaut le coup d’être lue pour qui s’intéresse au fluff des cités libres.

On saluera également le twist proprement « meta » de Horth, qui fait dire à Toll qu’il avait identifié le coupable depuis belle lurette et attendait juste de voir combien de temps il faudrait à Callis (et donc au lecteur) pour faire de même. On ne me l’avait jamais faite celle-là.

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Hunting Shadows – A. Clark [AoS] :

Hunting ShadowsICÔNE : NEAVE BLACKTALON, KNIGHT-ZEPHYROS

INTRIGUE :

Neave Blacktalon, Knight-Zephyros des Hammers of Sigmar et chasseuse de têtes personnelle du grand barbu, opère traditionnellement seule. La mission sur laquelle son divin boss l’a mise, et qui l’a conduite sur les terres désolées d’Ashy, s’avère cependant tellement délicate que les autorités compétentes ont jugé bon de lui adjoindre du renfort, sous la forme du Knight-Venator Tarion Arl (et son aigle étoilé Krien) et d’une unité de Vanguard-Palladors, menée par une vieille connaissance avec laquelle elle a déjà coopéré pour disperser une bande de hippies ayant monté une opération escargot1 dans les Royaumes Mortels, Kalparius Foerunner. Je sais, je sais, cela fait beaucoup de jargon sigmarite en peu de lignes, mais rassurez-vous, savoir qui fait quoi est moins important que de se souvenir de la hiérarchie héroïque à l’œuvre dans cette nouvelle, qui décidera qui devra mourir et à quel moment.

Blacktalon les traîne un peu à l’idée de devoir faire équipe avec des collègues, mais un ordre est un ordre, et si l’on en juge par les charniers calcinés que sa proie (qu’elle peut traquer avec l’espèce de GPS sensoriel peu précis dont Sigmar lui a fait don) a laissé derrière elle, un peu d’aide sera en effet utile. Passée les formalités d’usage, la petite bande part donc en courant/volant/transmutant dans la direction indiquée par la chasseresse, qui ressent de façon diffuse que sa cible possède un moyen de brouiller sa ΣG embarquée. En gros, si elle est toujours capable de savoir vers où se diriger, elle ne peut pas jauger de la distance qui la sépare de son gibier, ce qui aura son importance plus tard. Pour l’heure, la fine équipe, en retard sur l’abomination qu’elle pourchasse, doit faire un choix potentiellement lourd de conséquences à proximité de la ville de Sigenvale, qui a reçu la visite du monstre et a été réduite en miettes/cendres par ce dernier. Neave est plutôt partante pour se remettre en route sans tarder, mais Tarion parvient à la convaincre de faire un crochet rapide par les ruines, histoire de secourir d’éventuels survivants. Malheureusement pour l’altruiste voltigeur, la Marque ténébreuse n’en a laissé aucun, et bien que les chasseurs puissent se passer les nerfs sur un pauvre corpsejaw ne faisant que ce que la nature l’a équipé pour faire (c’est-à-dire bouffer les cadavres croisant sa route), il se fait vite jour que le mystérieux prédateur/incendiaire/décapiteur est déjà loin des lieux du crime. Il faut donc à nos héros repartir sans tarder, d’autant plus que le cogfort sensé participer à la traque semble être avoir fait une mauvaise rencontre quelques kilomètres plus loin, comme le bruit de ses canons l’atteste sans doute possible.

Bien évidemment, les traqueurs arrivent trop tard sur place pour secourir la machine de guerre (représentez vous le fruit des amours incestueux entre une Forteresse de la Rédemption et une Arachnarok), qui s’est faite éventrer et toute sa garnison massacrée par l’insaissable bestiole. Blacktalon est colère devant ce carnage dont elle impute en partie la responsabilité à ce gros sensible de Tarion, mais avant qu’elle puisse reprendre les choses en main et relancer la poursuite, une forme colossale émerge soudainement du lac de montagne à côté duquel reposait la carcasse du cogfort…

Début spoiler…Les pouvoirs de brouillage arcanique dont dispose la cible des chasseurs lui a en effet permis de tendre un piège à ces derniers, qui se retrouvent confronter à… pour faire simple, représentez vous Clifford le grand chien rouge, mais dont la maîtresse ne serait pas la gentille et aimante Emily, mais Valkhia la Sanglante. C’est donc à un pitbull mécanique de Khorne de fort belle taille (et crachant le feu) que les Stormcast Eternals doivent faire face, avec des résultats au début peu concluants, comme on peut s’en douter. Très étrangement, ce sont d’abord les Palladors qui sont envoyés pallader par le juggernaut, rapidement suivis par le brave Foerunner, ne laissant que Blacktalon et Tarion, tous les deux sévèrement blessés, pour tenter de renverser la situation. Ce n’est cependant pas chose facile car leur ennemi est très grand, très fort, très rapide, très costaud, et sans faiblesse apparente, mis à part l’écoutille chaînée qui lui sert de nombril.

Après quelques moments difficiles dans les décombres du cogfort où les deux héros ont trouvé un refuge précaire, le temps de décapsuler quelques potions de vie, le traditionnel plan de la dernière chance est conçu et immédiatement mis à exécution, permettant aux gardes chasses de Sigmar de remporter la victoire. Pour information, le haut fait en question nécessitera que Neave se déchaîne, et que son comparse loge un tir de l’aigle dans un cratère volcanique chatouilleux, ce qui aura pour effet final de noyer l’habitacle de la machine démon dans la lave. Statistiquement improbable je vous l’accorde, mais la high fantasy et les nouvelles d’action de la BL ne s’embarrassent pas de détails de ce genre. Ceci fait, les deux Knights-…, devenus bons copains dans l’adversité, peuvent reprendre le chemin d’Azyr, où ils pourront passer une convalescence bien méritée, ou se suicider pour être reforgés et ainsi redevenir opérationnels plus rapidement. Les politiques sociales sigmarites sont un peu particulières…Fin spoiler

1 : Organisée par l’incontournable Horticulous Slimux bien sûr.

AVIS :

Introduction au personnage de Neave Blacktalon (et à celui de son sidekick, Tarion Arl), ‘Hunting Shadows’ met particulièrement l’accent sur les caractéristiques de super héros des Stormcast Eternals (Blacktalon bénéficie en effet de sens ultra développés, et est capable de courir grotesquement vite – pensez Bip Bip et Vil Coyote), faisant de cette traque monstrueuse une sorte d’adaptation de comics Marvel dans les Royaumes Mortels. Je ne dis pas que c’est foncièrement désagréable, mais ça surprend tout de même un peu. Autre point saillant de cette nouvelle, son côté technique en matière de bestiaire et de hiérarchie Stormcast Eternals. C’est bien simple, on dirait qu’Andy Clark a fait exprès d’aller piocher dans les entrées les plus baroques du Battletome pour trouver ses protagonistes, ce qui peut aisément dérouter/saoûler le lecteur non averti. En cela, ‘Hunting Shadows’ n’est pas très newbie-friendly, même si l’intrigue reste relativement facile à suivre, du fait du schéma narratif très simple utilisé par l’auteur. En fait, le seul suspense de l’histoire repose dans l’identité de la proie traquée par Blacktalon et ses sous fifres, qui, manque de pot, se trouve être une création inédite de la part de Clark (à moins que la gamme chaotique d’Age of Sigmar comporte un modèle de chien de métal géant). Manque de pot car le lecteur ne peut même pas au final tenter de deviner qui est derrière ces exactions sanglantes et fumantes en se basant sur sa connaissance du fluff. Petite frustration, mais frustration quand même. Pour conclure, j’ai été très moyennement convaincue par cette démonstration de force de la Wonder Woman d’Azyrheim, héroïne certes très balaise mais assez peu attachante. Peut-être que cela est corrigé dans le roman qu’Andy Clark lui a consacré ?

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Shiprats – C. L. Werner [AoS] :

ShipratsICÔNE : BROKRIN ULLISSONN, CAPITAINE KHARADRON

INTRIGUE :

La malchance légendaire qui colle à la carène du Dragon de Fer et la peau de son capitaine, le Kharadron Brokrin Ullisson s’abat une nouvelle fois sur le fier navire et son équipage. N’ayant pas trouvé de filon d’aether-or au cours de sa dernière campagne, le navire Duardin s’est résigné à se faire cargo de grain pour au moins rentrer dans ses frais, et a chargé une cargaison de blé dans la ville de Greypeak, qu’il espère vendre à bon prix de retour à Barak-Zilfin. Ce beau projet est toutefois menacé par la présence de passagers clandestins dans la cale du Dragon, une colonie de rats bien décidée à faire bombance sur les stocks des Arkanautes. Entre les petits barbus et les encore plus petits moustachus, il ne saurait y avoir de terrain d’entente, mais que faire pour débarrasser le vaisseau de l’infestation de vermine sans endommager ce dernier ? Alors que Brokrin et ses hommes se trouvent réduits à chasser les importuns à coups de pelle, avec des résultats peu concluants, comme on peut se l’imaginer, une bonne et potentiellement riche idée est soumise : pourquoi ne pas faire un détour par la Lamaserie de Kheitar, dont les moines ont par le passé rendu un fier service aux Kharadrons en débarassant le Dragon de la nuée de crapauds célestes (car apparemment, c’est un aléa climatique assez courant dans les Royaumes Mortels) qui avait élu domicile sur le navire à l’aide d’une fumigation un peu spéciale ? Aussi dit, aussitôt acté, la possibilité de soutirer aux bonzes une de leurs fameuses tapisseries pouvant même permettre d’espérer un profit au trésorier de la petite bande, passablement dépité par le tour pris par les évènements. Après tout, quoi de mieux qu’un lama pour venir à bout d’un rat1 ?

Arrivé sur place, Brokrin emmène une poignée de ses gars à la rencontre des paisibles habitants de Kheitar, dont les ancêtres étaient tellement zens qu’ils ont réussi à apprendre à un démon les bienfaits de la méditation. Brokrin, qui connaît personnellement le grand Lama (Serge), est bien étonné de voir apparaître à la place de son vieux pote un nouveau père supérieur (Bernard), qui a la peine de lui apprendre que Serge n’est pas simplement malade (comme on pouvait s’y attendre), mais a carrément atteint l’illumination en commettant le suicide rituel du tulku, un lent empoisonnement débouchant sur une momification graduelle de l’ascète. Malgré cette triste nouvelle, Bernard se montre particulièrement conciliant avec ses hôtes, acceptant non seulement de procéder à la dératisation demandée (sous réserve que les Duardins permettent aux rats de quitter le navire, car telle est le niveau d’antispécisme des bonzes), mais offrant même à leurs hôtes non pas une, mais cinq de leurs précieuses tapisseries, pour une contribution laissée à la discrétion des bénéficiaires. En celà, Bernard fait une grave erreur car cette générosité excessive ne manque de déclencher l’alerte piège à khon que tous les Kharadrons possèdent dans un coin de leur esprit. Suspectant une entourloupe, Brokrin charge donc un de ses matelots d’escorter les moines tapissiers jusqu’à bon port, tandis que lui et le reste de son khrew acceptent l’offre de Bernard de rendre visite à Serge, qui serait, contre toute évidence, encore vivant. Bernard commet alors sa deuxième boulette (pas aussi grave que celle du Bordeaux – Paris de 93, mais pas loin) : soucieux de faire respecter les traditions non-violentes de Kheitar (où même les démons fument du chichon), il somme ses visiteurs de déposer leurs lames avant d’entrer dans le saint des saints. Toujours un à lire les petites lignes du contrat et à trouver les failles dans les termes et conditions qui lui sont proposés, Brokrin fait remarquer à ses hommes que l’injonction du grand Lama ne couvre pas les armes à feu, et emboîte donc le pas à Bernard toujours armé de sa pétoire.

Un peu plus loin, les mirrifiques carpettes de Kheitar sont entreposées sans heurts dans la cale du Dragon de Fer, sous l’oeil attentif et circonspect d’un rattophobe déclaré, le sergent arquebusier Drumark, dont le paternel a été fauché dans la fleur de l’âge lors d’une bataille contre les Skavens. Souhaitant s’assurer que la vermine qui grignote son grain ne s’attaque pas aux précieux tapis, il laisse remonter ses comparses et attend dans la pénombre de voir comment les choses vont évoluer. Quelle n’est pas sa surprise de voir s’extraire des rouleaux apportés par les bonzes une demi-douzaine d’hommes-rats, qui comptaient sans doute s’infiltrer discrètement dans le navire en attendant de jouer un tour pendable à ses occupants légitimes ! Les plaisanteries les plus courtes étant les moins longues, Drumark a tôt fait de sonner la fin de la rat-cré, l’arsenal Kharadron ayant rapidement raison des manigances skavens. Tout celà n’augure toutefois rien de bon pour Brokrin et ses suivants, qui ne tardent pas non plus à découvrir le pot au rat, à la suite d’une performance misérable du Jeff Panacluc Skaven, un dénommé Kilvolt ayant « jeanmarquisé » le cadavre de Serge. Sommé de révéler au véritable maître de Kheitar les secrets de l’ingénierie Kharadron, Brokrin refuse avec noblesse, et met à profit la bévue de Bernard pour arroser les hommes rats venus à la rescousse de Kilvolt avec du Kharaplomb. L’algarade ne dure cependant pas longtemps, l’arrivée de Drumark et de ses arquebusiers convainquant définitivement les Skavens de la futilité de leur approche. Profitant de l’accalmie, Brokrin et Cie repartent ventre à terre sur le Dragon, non sans avoir pris soin de looter quelques tapisseries supplémentaires en guise de dédommagement. De voleur à vendeur de tapis, il n’y a que peu de choses au fond.

1 : Si vous répondez : un chat, sachez que le félin apporté à bord par les Duardins a fait acte de mutinerie peu de temps après sa prise de fonction. C’est ce qu s’appelle avoir un poil dans la patte.

AVIS:

Accompagnement au roman qu’il a consacré aux plus blindés des Duardins (Corsaires du Dragon de Fer//Overlords of the Iron Dragon), ce Rats de Cale de Werner s’avère être d’une lecture globalement satisfaisante. Notre homme retrouve avec bonheur ses victimes favorites (les Skavens), qu’il gratifie comme à son habitude d’une inventivité et d’une ambition proportionnellement inverse à leur compétence, pour un résultat aussi spectaculaire que dérangeant1. S’il y a un contributeur de la BL qui sait s’y prendre pour donner aux hommes rats leurs lettres de bassesse, c’est bien l’homme au chapeau, et on ne peut que souhaiter que Nottingham lui confie davantage de commandes portant sur les funestes et fumistes machinations des rejetons du Rat Cornu. On appréciera également l’exotisme du propos, la visite guidée de la Lamaserie de Kheitar permettant au lecteur de se remémorer l’immensité des Royaumes Mortels, où la présence d’une communauté de bonzes vénérant un démon du Chaos ayant trouvé la paix intérieure en téléchargeant Petit Bambou sur son portable est tout à fait possible. On peut regretter que l’accent ne soit pas davantage mis sur la culture des protagonistes, abordée assez succinctement à travers la mention des différentes fonctions des membres de l’équipage de l’Ang Drak et du fameux Code des Kharadron (qui sanctuarise les partenaires de commerce équitable, ce qui doit indiquer que les bananes et le chocolat sont tenus en haute estime par le Geldraad), mais que voulez-vous, on ne peut pas tout avoir dans une nouvelle de 25 pages. Le casting très développé des Arkanautes, conséquence logique de leur inclusion dans le roman cité plus haut, est un autre facteur pouvant diminuer (légèrement) le plaisir de lecture, mais, rassurez-vous, savoir qui est qui n’a que peu d’intérêt au final. Le plus important restant bien sûr de souquer les artimuses.

1 : Sérieusement, imaginer la transformation d’un cadavre de bonze en marionnette animée, c’est un coup à faire des cauchemars.

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Vous êtes encore là ? Félicitations pour être venus à bout de cette copieuse chronique, qui vous a je l’espère préparé à la lecture de l’omnibus en question, si le cœur vous en dit. Essayons de rassembler nos pensées pour terminer sur une impression d’ensemble de ‘The Hammer & the Eagle’, après avoir passé tant de temps à disséquer chacune des nouvelles constituant ce pavé. La question qu’il convient de trancher est la suivante : cet ouvrage remplit il la mission que la Black Library lui a donnée, à savoir initier les nouveaux lecteurs aux icônes de Warhammer 40.000 et Age of Sigmar à travers une sélection de courts formats ? Comme vous pouvez vous en douter, si vous êtes familiers de ces critiques, la réponse est oui et non.

La force et l’attrait principal de ‘The Hammer & the Eagle’ est de proposer, clé en main et livre en poche (si vous arrivez à trouver une poche assez grande, ou avez opté pour un format digital), la couverture la plus complète qui soit de la GW-Fiction à l’heure actuelle. On peut reprocher à la BL de ne pas avoir inclus de textes pour Warhammer Fantasy Battle, qui compte également son lot de personnalités marquantes (Gotrek & Felix, Malus Darkblade, Tyrion & Teclis, Zavant Konniger, les Black Hearts…) et disposant de leurs propres séries de livres, ou, de façon plus pragmatique, d’avoir fait l’impasse sur l’Hérésie d’Horus, Necromunda et Blood Bowl, univers et sous univers riches en héros et vilains hauts en couleurs. On peut également s’interroger sur l’absence de certaines figures et auteurs de 40K au sommaire de ce recueil (Roboute Guiliman version Sombre Imperium, Ragnar Crinière Noire, Lukas, Ahriman, Khârn, Lucius, Honsou, Farsight, Peter Fehervari et son Dark Coil, Steve Parker et ses Deathwatch…), et sur la présence d’icônes mineures – à ce jour – dans ce qui semble être le catalogue des VIP de la Black Library. Mais si on passe outre ces considérations, on doit reconnaître que la base fournie ici est solide et, si ce n’est exhaustive, au moins très étoffée, le tout pour un prix très modeste au vu des tarifs habituels de la maison (on est proche des 50% de réduction par rapport à une anthologie classique).

Autre paramètre à considérer, la pertinence du choix des nouvelles collectées dans ‘The Hammer & the Eagle’, qui devraient dans l’idéal introduire le nouveau lecteur à un personnage marquant de 40K ou d’Age of Sigmar, et lui donner envie de poursuivre l’aventure en achetant le roman venant après le court format qu’il a pu lire ici. Sur ce point, c’est carrément le grand écart entre les textes qui ont été écrits avec cet objectif en tête par des auteurs de bon niveau (‘Of Their Lives…’, ‘Execution’, ‘The Absolution of Swords’, ‘One, Untended’…), et les courts formats mis au sommaire par pur pragmatisme, qui peuvent être obscurs pour qui n’est pas déjà familier de la série à laquelle ils se raccrochent (‘Rite of Pain’, ‘Prodigal’, ‘Shadow Knight’, ‘Gods’ Gift’), ne pas directement traiter des icônes qu’ils sont sensés introduire (‘The Smallest Detail’, ‘Fireheart’), ne pas aborder de façon satisfaisante le parcours, la personnalité et/ou les motivations de l’icône en question (‘The Wreckage’, ‘Argent’), ou être tout simplement mal écrits (‘The Battle for Markgraaf Hive’, ‘Mercy’). Pour faire court, si on m’avait demandé de soumettre une liste de nouvelles pour les icônes sélectionnées par la BL, la moitié des histoires rassemblées ici auraient été remplacées, pour une raison ou pour une autre. Il est in fine dommage que certains lecteurs décident d’ignorer des séries de qualité sur la base d’une erreur de casting de Nottingham, ce qui arrivera fatalement ici. J’invite donc à donner une deuxième chance à toutes les icônes ne sortant pas grandies de cet omnibus, pour s’assurer que la première impression a bien été la bonne. La tendance des auteurs de la BL à écrire des nouvelles semi-indépendantes (c’est-à-dire compréhensibles, mais pas vraiment autonomes) de leurs romans ne doit en effet pas être sous-estimée.

C’est sur ces mots de sagesse (?), ou en tout cas d’expérience, que se termine cette revue de ‘The Hammer & the Eagle’, ouvrage imparfait mais qui a tout pour devenir un incontournable de l’offre de la Black Library dans les mois et années à venir, et qui, j’en suis sûr, initiera bon nombre de lecteurs aux joies de la GW-Fiction.

2020 CHARACTER WEEK

Ce n’est pas parce que les vacances battent leur plein pour beaucoup en ce début du mois d’Août que la GW Fiction est aux abonnés absents. Bien au contraire, cette période estivale se retrouve cette année meublée par un nouvel événement de la Black Library, sa toute première Character Week, consacrée comme le nom l’indique à la mise en avant des personnages les plus marquants des franchises de Games Workshop.

Character Week 2020 (MIS)

Au programme de la semaine, cinq histoires inédites proposant au lecteur de prendre des nouvelles des quelques unes des célébrités des Royaumes Mortels (Gotrek, Neferata) et du Sombre Imperium (Sainte Célestine et cette diablesse de Mad Donna). Robert Rath complète le line up avec un court format assassin consacré à un illustre inconnu, le Vindicare Absolom Raithe, qui deviendra peut-être le Jason Bourne du 41ème millénaire dans un futur proche, qui sait. Un apéritif littéraire conséquent avant de s’attaquer au pavé de résistance de la Character Week, l’anthologie ‘The Hammer and the Eagle’ qui sortira le samedi suivant. À table donc.

Character Week 2020

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Death on the Road to Svardheim – D. Hinks [AoS] :

INTRIGUE :

Death on the Road to Svardheim

En route vers la cité de Svardheim pour une raison sans doute logique mais inconnue de l’auteur de ces lignes au moment de l’écriture de cette chronique, le duo le plus mal assorti des Royaumes Mortels1 passe le temps et les kilomètres sur la route 88 (c’est tout plat, désertique et décoré avec des monceaux de crânes) en discutant théologie, comme à leur habitude. Bien évidemment, la situation finit par gentiment dégénérer, l’anticléricalisme blasphématoire d’un Gotrek toujours chafouin de s’être fait rouler dans la farine par les Dieux du Monde Qui Fut mettant sur les dents, qu’elle a éclatante, la dévote Maleneth. À force d’enquiller les bornes, elle finit même par les dépasser, allant jusqu’à accuser son rusé et runé camarade de servir le Chaos, à l’aide de l’argument, bien connu de George W. Bush, du « si tu n’es pas avec moi (et Ziggie) tu es contre moi ». Avant que la situation ne dégénère trop franchement, et que le Tueur vétéran ne doive se trouver encore un nouveau sidekick, les comparses tombent sur le théâtre d’une embuscade ayant été fatale à une bande de prêtres sigmarites, dont les corps décapités jonchent les alentours d’une carriole incendiée.

Après une rapide enquête, il s’avère que les assaillants n’ont pas réussi le perfect en matière d’élimination de témoins, une pauvre nonne répondant au nom de Carmina se présentant à nos héros et leur expliquant que sa congrégation s’est fait dérober une relique irremplaçable, le Poing Incorruptible, dont elle avait la charge et promenait de ville en ville pour ranimer la foi des locaux. Avant que Gotrek n’ait pu marquer de nouveaux points d’athéisme hardcore en demandant à Carmina en quoi un poing pouvait être corrompu, pour commencer (il en serait capable le bougre), Maleneth se fait embringuer dans une mission de récupération du saint gantelet, qu’il s’agit simplement de reprendre des mains malpropres d’une petite vingtaine de bandits, retranchés dans une forteresse abandonnée à quelque distance de la route. Rien que de très banal pour notre Tueur, qui accepte toutefois de mettre les formes et de suivre un plan un minimum intelligent (attendre que Maleneth se soit mise en position derrière le bastion pour intercepter d’éventuels fuyards) avant d’aller toquer à la porte le plus naturellement du monde.

La prévoyance de l’Aelf paie rapidement car il se fait bientôt jour (enfin, nuit, mais je me comprends) que les brigands sont un peu plus qu’une bande de maraudeurs sanguinaires, mais bien une authentique secte de Khorne, en train d’invoquer un démon de fort belle taille à l’aide de leur collection bien mal acquise de grigris et talismans. Maleneth n’a pas le temps de signaler qu’il y a une courge dans le potage que Gotrek est cependant déjà en train de défoncer la porte et de se tailler un chemin à travers les mobs de bas niveau, jusqu’à poser l’œil sur une Némésis digne de lui, qu’il engage évidemment en combat singulier dans la plus pure tradition du genre. Etant un VIP incontournable du multivers, Gogo est reconnu par son adversaire, qui a la mauvaise idée d’insinuer que le Tueur a fui son monde au moment de la Fin des Temps au lieu de rester et de se battre pour le défendre. Cela met notre nabot en rogne, et les deux adversaires se balancent quelques baffes amicales, sans trop d’effet de part et d’autre, jusqu’à ce que Meleneth ait l’idée géniale de confisquer les reliques ayant été mise à profit pour invoquer le démon, et dont ce dernier a encore besoin pour maintenir sa présence dans les Royaumes Mortels. Au fur et à mesure que les héros shootent dans les breloques, leur adversaire perd en taille et en carrure, jusqu’à finir rachitique et malingre, et se faire décapiter sans cérémonie par un Gotrek enfin à la bonne taille pour jouer de la hache.

Ceci fait, le duo infernal n’a plus qu’à remettre le Poing Incorruptible à la brave (en fait pas trop) et reconnaissante Carmina, qui s’en va à cheval remettre le précieux héritage en sécurité, pendant que nos héros continuent à pied leur périple. Poing/t final de notre histoire ?

Début spoilerEh bien non (comme la balise spoiler ne le laissait pas du tout envisager), car lorsque nos voyageurs, fourbus (surtout pour Maleneth) et assoiffés (surtout pour Gotrek) tentent d’obtenir le gîte et le couvert d’un monastère sigmarite croisé un peu plus loin sur la route, se disant à juste titre que tous les culs bénis à la ronde leur sont redevables de leurs récents exploits, c’est pour entendre un son de cloche bien différent. Carmina était en fait une voleuse ayant mené sa bande, déguisée en prêtres, dérober le fameux Poing Incorruptible (mais pas Inatteignable) de la garde des vrais fidèles de Sigmar, en tuant quelques uns au passage. L’abbé outré qui fait ce récit aux voyageurs est persuadé que l’iconoclaste va briser la relique en mille morceaux pour revendre la Pierre de Royaume dont elle est faite au plus offrant, au mépris de tous les commandements de Sigmar. C’est donc une grosse boulette, sur laquelle Maleneth manque de s’étouffer, mais qui ne déclenche chez ce philosophe de Gotrek qu’un rire tonitruant. Il en a certes vu d’autres…Fin spoiler 

1 : Gotrek est un Nain (et pas un Duardin) roux exhibitionniste, et Maleneth est une Aelf brune gothique.

AVIS :

Eh bien ça y est : après avoir laissé Gotrek (et le regretté Felix) à leurs aventures dans le Monde Qui Fut, je renoue enfin avec ce héros mythique sous sa nouvelle incarnation, à travers ce court format signé du père adoptif #3 du Tueur de… trucs, Darius Hinks. Ce qui m’intéressait particulièrement dans ces retrouvailles était de voir ce qui avait changé, et ce qui était resté, des précédentes aventures de M. Gurnisson, qui constituaient un sous-genre de la littérature BL à elles seules. L’équilibre n’était pas facile à trouver entre respect servile du cahier des charges, forcément un peu obsolète, établi par King et Long en la matière, et innovations radicales, qui auraient enlevé tout le sel de ce come-back improbable. Et je dois dire que Darius Hinks s’en est plutôt bien sorti, tant sur le fond que sur la forme. On est bien en présence d’une aventure de Gotrek & Cie, avec notre petit rouquin teigneux, grincheux et pince sans rire s’embarquant dans un combat à haut risque contre un adversaire très balèze (sur le papier en tout cas), au grand désespoir de son partenaire attitré. Ce qui change ici est que Gotrek est devenu un mécréant militant, gardant sa dernière dent contre tout le panthéon divin (à commencer par Sigmar, qui s’en prend plein les tresses), alors que Maleneth est, sous ses abords de tueuse froide, une zélote du grand barbu, ce qui est à la fois surprenant (c’est le type qui la voyait comme une pseudo Assassin druchii qui parle) et intéressant. Notons également que Hinks ne se gêne pas pour glisser quelques références au passé proprement légendaire de son héros et donc à feu Warhammer Fantasy Battle, ce qui devrait faire plaisir autant qu’intriguer le lecteur historique de la saga. Bref, le contrat est bien rempli dans ce ‘Death on the Road to Svardheim’, qui tient son rang parmi les cohortes de nouvelles Gotrekesques publiées par la BL depuis des temps immémoriaux. Reste à savoir ce que cette dernière compte faire de son increvable héros sur le long terme, maintenant qu’il ne peut absolument plus mourir (ce serait un énorme fail), mais ceci est une autre histoire.

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Celestine : Revelation – A. Clark [40K] :

INTRIGUE :Revelation

Il n’est certes pas tous les jours facile d’être une idole, et ce n’est pas Sainte Célestine qui vous dira le contraire. Participant à la défense de la planète Machoria, assiégée par une horde de cultistes et démons de Khorne, notre héroïne a fort à faire pour maintenir le moral des troupes intact, mission qu’elle doit assurer seule depuis l’extermination totale1 du contingent de bonnes Sœurs qui l’accompagnaient par ces misogynes de Khorneux. Mais que fait Marlène Schiappa, on se le demande bien. Alors que la vague rouge se prépare à déferler une fois encore sur les positions impériales, Céloche se livre donc à un discours inspirant et à quelques poses martiales pour donner du cœur à l’ouvrage à ses bidasses (avec une conviction apparente qu’elle est loin de ressentir), avant d’enchainer sur quelques bannissements de Sanguinaires malchanceux à grand renfort de sa Lame Ardente.

C’est le moment que choisit son homologue et néanmoins ennemi mortel, Arnokh le Seigneur du Sang, pour lui proposer un duel à mort, histoire de faire un beau cadeau à sa divinité tutélaire. Cette dernière a en effet une sainte horreur des colombes, qui passent leur temps à larguer leurs fientes sur son bon trône de crânes. Voila qui coûte cher en entretien. Après s’être balancés quelques amabilités, le Prince Démon traitant la Sainte de vieille folle aux pigeons, et cette dernière ripostant en lui demandant s’il s’est mis à la musculation (il fait trois fois sa taille et X fois sa carrure) après s’être fait plaqué par Helga Pataki2, les deux adversaires commencent à se mettre sur la tronche, et Célestine a rapidement le dessous.

Malmenée par les horions hacheurs du démon, la Sainte perd du terrain, des points de vie et même un bout d’aile de jet pack, mais gagne en retour quelques visions de son lointain et brumeux passé, à commencer par sa transformation de Redemptia en pénitence en icône impériale. Pour vivaces que soient ces flashbacks, qui se manifestent à chaque fois que notre héroïne se prend une mandale un peu trop appuyée de la part de ce butor d’Arnokh (‘Célestine chine l’armure de Sainte Katherine aux puces’, ‘Célestine passe le kärcher à Aspiria3’), n’aident pas vraiment l’élue de Pépé à tenir en respect son tourmenteur. À deux doigts du renoncement et de la défaite, elle reçoit une dernière illumination/hallucination made in l’Empereur, où la petite part d’humanité qui lui reste lui demande expressément de jeter l’éponge pour arrêter de souffrir et mourir en paix. Cette proposition indigne outrage suffisamment notre égérie pour qu’elle reprenne du poil de la bête, passe en mode mégère pas du tout apprivoisée, réapprenne à voler (ça ne marche pas tout le temps apparemment) et vienne inscrire Arnokh sur le registre des hommes (ou équivalent) battus du Segmentum. Le bannissement du patron remettant en cause la présence des sous-fifres dans le Materium, et allant jusqu’à provoquer une belle éclaircie sur le champ de bataille, c’est une nouvelle victoire qui se profile pour l’Imperium. Merci qui ? Merci Titine !

1 : Cela inclut même les fidèles Geminae Superia lui servant de gardes du corset. Heureusement que leur régénération fait partie de l’abonnement souscrit auprès de Big E.
2 : De la série ‘Hé Arnokh !’ bien sûr. Référence peut-être datée.
3 : Le monde cathédrale dont est originaire Aspirine, la Sainte Patronne des Sœurs Hospitalières.

AVIS :

Je n’attendais pas grand-chose de cette nouvelle sur Sainte Celestine, personnage nommé qui ne m’inspire guère, et je n’ai pas été déçu (malheureusement). Andy Clark nous sert une histoire d’un classicisme absolu, où le.a brave héros.ïne se fait malmener par un méchant vraiment trétékosto, mais finit par l’emporter grâce à son mental à tout épreuve/un sursaut d’orgueil déclenché par un random event/une intervention mystico-divine, et, surtout, son armure de scenarium. Dans le rôle du heel, Arnokh l’armoire comtoise de Khorne accomplit sa tâche (ingrate) sans trop démériter. De son côté, Celestine peut vaguement intéresser le lecteur par ses états d’âme sur la toute puissance de l’Empereur, et ses quelques réminiscences, totalement gratuites en termes de fluff et/ou déjà couvertes ailleurs, ce qui ne fait pas lourd. Mon principal regret est qu’Andy Clark, qui pourtant est le biographe attitré de Madame au sein de la Black Library (‘Celestine : The Living Saint’, ‘Shroud of Night’), n’ait pas exploité le super pouvoir narratif de son personnage, à savoir la capacité de mourir et de revenir à la vie, qui lui aurait permis de donner un peu de suspens à son histoire. Bref, vraiment très peu à tirer de ce crêpage de chignon, ou plutôt, arrachage de frange, sur Machoria, ce qui est un peu triste pour une nouvelle sensée mettre en avant son personnage principal…

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Iron Sight – R. Rath [40K] :

INTRIGUE :

Iron Sight

Envoyé sur Govii sauver les meubles et les gradés de l’Astra Militarum, décimés par les attentions touchantes et perforantes d’un Alphus du Culte Genestealer du Ver Brûlant, le Vindicare Absolom Raithe voit sa patience, pourtant presque infinie (c’est le métier qui veut ça), être mise à rude épreuve par le caractère insaisissable de sa proie. Au bout de 27 jours, pour trois tentatives ratées, de traque, notre sniper de choc croit enfin tenir le bon bout en poursuivant en 125, ou dirtcycle comme on dit à Nottingham, la bande de Jackals de sa Némésis entre les pompes à promotheum qui défigurent le morne horizon. C’est sans compter sur les compétences de l’Alphus, qui, conscient de se faire stalker par un agent impérial plus dégourdi que le chef de peloton moyen, a organisé le go fast dans lequel Absolom s’est lancé plein fer et plein gaz, pour pouvoir loger une balle dans le caisson de l’importun.

Fort heureusement pour notre héros, dont ce n’est que la cinquième mission officielle, et qui est donc encore un peu vert, son super matos d’agent secret le prévient au dernier moment qu’il est sur le point de se prendre un Match non désiré sur Tinder1, lui laissant une fraction de seconde pour braquer à gauche et ainsi éviter un mauvais coup. Une grenade écran et quelques enchaînements au sol plus tard, le franc tireur est prêt à rendre la monnaie de sa douille à son homologue, mais il se fait encore une fois surclasser par un tir presque parfait de ce dernier, qui lui bousille ses optiques perfectionnées et fissure méchamment la culasse de son précieux fusil Exitus. Réduit à devoir viser au guidon, comme le premier péquenaud venu, Absolom démontre tout de même qu’il n’a pas volé son diplôme en provoquant la fuite de sa cible d’un tir judicieux dans un nid de guêpes tout près de sa position, puis en faisant exploser la moto de cette dernière avant qu’elle ne puisse se perdre à nouveau dans le désert de Govii. Il ne lui reste plus donc qu’à sprinter jusqu’à bon port en esquivant les décharges de chevrotine, ce qui est largement dans ses cordes, pour terminer l’aventure avec l’Exitus minus (son pistolet), mais cela serait faire peu de cas des 3-11 Jackals en bécane et 1-3 Jackals en quad réglementaires escortant l’Alphus, qui rappliquent à toute berzingue pour protéger leur patron.

C’est l’occasion pour notre Vindicare de faire parler la poudre et de montrer à quel point il est balèze, souple et adroit, sa précision fourcadienne au tir, doublée de sa maîtrise legolasesque du jeté-épaulé lui permettant de faire le vide autour de lui et de réquisitionner un quad en quelques secondes. C’est toutefois tout le temps qu’il faut pour l’Alphus pour se refaire une beauté (car c’était une femme un individu dépourvu de chromosomes Y – je ne prends pas de risques avec les hybrides Genestealers), et loger une balle, puis deux, dans l’anatomie du kéké masqué qui pétarade dans la distance. Evidemment, c’était une ruse d’Absolom, qui a déguisé un cadavre de Jackal, bloqué le guidon et, surtout, caché quelques grenades sous le siège conducteur de son quad, pour tenter de faire exploser la pompe squattée par l’Alphus, et remporter la partie à la Jean-Claude Dusse, et donc sur un malentendu. Cela ne sera pas le cas, la précision balistique d’Alphette neutralisant la menace avant son exécution, mais le temps ainsi gagné permet au sniper impérial de fondre sur la position ennemie et de faire un sort aux derniers membres de la meute de sa cible2. C’est l’heure du dududududududududuuuuuuuuuuuuuueeeeeeeeeeellllllllllll !!!

Début spoilerLes deux adversaires ayant perdu leurs armes à feu dans la bagarre, l’histoire se réglera à l’ancienne et au couteau, en haut d’un derrick. Comme aurait dit Daniel Day Lewis, there will be blood. Face aux instincts (et aux dents) aiguisés et à la physiologie surhumaine d’une tueuse née, Absolom ne peut opposer que la discipline et la technique d’un tueur entraîné, et plutôt spécialisé dans le combat à distance que dans le corps au corps. Mais ce sera suffisant, la rage brouillonne de l’Alphus se faisant contenir nette par une manchette impeccable du Vindicare, qui finit le job d’une estocade à la carotide, comme on lui a appris à l’école. C’est un 5/5 bien mérité pour notre héros, qui gagne ainsi le pin’s tant convoité de journeyman, et à la clé, des missions un peu plus funky. Et SURTOUT, plus de rapport à envoyer au QG après chaque opération. Je comprends que l’on puisse tuer pour cela.Fin spoiler

1 : Je dirais même plus, une balle de match.
2 : En hurlant la réplique consacrée « Bande de Jackals, vous allez crever comme des Jackals! ».

AVIS :

Robert Rath poursuit sur sa veine assassine (‘Divine Sanction’) avec brio, équilibre et élégance dans ce ‘Iron Sight’, qui est sans doute la mission romancée d’un Vindicare la plus satisfaisante qu’il m’ait été donnée de lire. En plus d’insister sur les points forts connus de cette école, Rath a la bonne idée de montrer que ces tireurs d’élite sont loin d’être des manches sur le champ de bataille, et sont tout à fait capables de changer leur fusil d’épaule (OH ELLE BONNE CELLE-LA DITES DONC1) lorsque le besoin s’en fait sentir. C’est également l’occasion pour lui de donner quelques détails fluff sur ce temple, traitant à la fois de son organisation et sa culture, et du matériel utilisé par ses alumni. D’un point de vue narratif, l’auteur régale en mettant en scène une nouvelle de pure action, où les péripéties s’enchaînent et un salutaire suspens plane jusqu’au dernier paragraphe (notamment grâce à un renversement de perspective dans le dernier quart du récit, la caméra se braquant sur l’Alphus après qu’Absolom se soit mis au karting). C’est Stalingrad adapté en nouvelle et à la sauce grimdark, et on ne va pas s’en plaindre ! Je suis très curieux de voir si Rath se verra confier un long format sur l’Adeptus Assassinorum à moyen terme, et reprendre ainsi le flambeau d’Ian Watson et James Swallow. Quoiqu’il en soit, il démontre ici qu’il a ce qu’il faut pour rendre justice à cette énigmatique faction.

1 : Cinq points pour Poufsouffle.

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Underhive Apex – W. McDermott [NDA] :

INTRIGUE :

Underhive Apex

Dans les ténèbres éternelles du sous-monde de Necromunda, D’onne Astride Ge’Sylvanus, plus connue sous son nom de scène de Mad Donna, traque un gang de Cawdor ayant eu la mauvaise idée de recruter Lumpy Nox, un indic prisé grâce aux bons tuyaux que lui souffle l’entité non-définie qui a pris possession de la bosse qui lui déforme l’épaule. Sans doute un démon chassé du Warp à cause de l’augmentation démentielle des loyers, à mon avis. Le temps qu’elle explique à son garde du corps, l’imposant mais très malin Ogryn Dog, son plan machiavélique pour capturer sa cible et se débarrasser des gêneurs – ce qui prend une bonne minute car, si l’opération est simple, voire simpliste, et que Dog comprend vite, il faut tout de même lui expliquer longtemps –, D’onne se fait griller la politesse par une troupe de Goliaths, qui règle rapidement son compte aux zélotes et fait main basse sur le mutant.

Pas très chaud, pour des raisons qui resteront à jamais nébuleuses, à l’idée de mener ses nouveaux « protecteurs » jusqu’à la cache d’archeotech qu’il avait faite miroiter aux Cawdor, Lumpy suggère à la place au chef Goliath, Garg, de capturer Mad Donna, qu’il a réussi à repérer à l’arrière-plan après que Dog ait pesamment pris les escaliers pour se mettre en position. Plutôt partant, Garg emploie les grands moyens, à savoir un Prospect armé d’un storm welder, pour déloger et étourdir sa proie. C’est le début d’une traque couturée, plutôt que cousue, de fil barbelé blanc, et au cours de laquelle le lecteur aura tout loisir de se familiariser avec l’arsenal et les rangs hiérarchiques de la Maison des Chaînes, au fur et à mesure que les costauds de Garg (les Forge Brutes) se font éliminer un par un par les manigances de la Cicc(l)one. Je vous épargne les détails, qui ne sont guère passionnants, pour vous livrer la conclusion de l’histoire : D’onne tue/fait tuer tous les culturistes punks dans une débauche de girl power hystérique, récupère Lumpy (et Dog, qui n’était jusque là pas intervenu du tout, quand je vous disais qu’il était malin), et le convainc gentiment de l’amener jusqu’au grisbi. C’est qu’il faut bien trouver un peu de cash pour entretenir cette magnifique perruque.

AVIS :

Dans cette pièce d’accompagnement pour son ‘Soulless Fury’, également consacré à la NecroDiva, McDermott ne réussit pas grand-chose d’intéressant. L’intrigue est pour ainsi dire inexistante, et donne vraiment l’impression d’un rapport de bataille romancé entre la célèbre chasseuse de primes et une bande de goons malchanceux, tout justes bons à présenter leurs armes devant le lecteur pour lui donner (peut-être…) envie d’acheter quelques figurines supplémentaires pour son gang de Goliaths, avant de mourir dans d’atroces souffrances. C’est typiquement ce genre de prose insipide qui me détourne de Necromunda, et Will McDermott (un spécialise du sous-monde) ne rend pas service ni honneur à sa patrie d’adoption avec cette pièce d’une banalité crasse, qui convoque des personnages inutiles (à quoi sert Dog ?) et ne donne aucune information digne d’intérêt sur son héroïne, mis à part le nom de ses armes et le fait qu’elle est vraiment, mais alors vraiment, très rapide1. Ajoutons à cela qu’il a parfois tendance à décrire de façon aussi minutieuse que fastidieuse le déroulement de péripéties tout à fait mineures pour le déroulé de l’intrigue (comment Mad Donna piège une écoutille, ou comment elle court vers un adversaire en appuyant plus fort sur sa jambe gauche que sur sa jambe droite), sale manie qui lui passera je l’espère, et restons-en là. En définitive, c’est un flop.

1 : Ce qui n’est ni spécialement vrai (I 5), ni sa caractéristique la plus marquante. J’aurais mieux compris que McDermott s’attarde sur et illustre sa règle spéciale ‘Psycho-Bitch’.

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The Threshold – D. Annandale [AoS] :

INTRIGUE :

The Threshold

Bien qu’il lui en ait beaucoup coûté, aussi bien physiquement (bras gauche, œil droit, rotules…) que mentalement, le Seigneur Ormand a réussi à atteindre le but qu’il s’était fixé : libérer sa cité de Lugol de la domination de Nagash et de Neferata. Ce qui n’est pas un mince exploit quand on réside au cœur de Nefaratia (le royaume personnel de la Mortarque du Sang), et que l’on ne peut plus compter sur les Stormcast Eternals de l’affable Sigmar pour faire service d’Ordre. Au prix de mesures drastiques (interdiction des cimetières, crémation obligatoire en dehors de la ville le jour même du décès) et arcaniques (mise en place d’un sceau magique autour de la ville pour en interdire l’accès à tous les morts vivants), Lugol est devenu indépendant, et Ormand a la satisfaction de pouvoir passer ses derniers jours avec la satisfaction du devoir accompli.

Alors qu’il effectuait sa balade quotidienne jusqu’aux ruines de la passerelle qui reliait précédemment la forteresse de la cité à la passe de Blindhallow, détruite lors de l’ultime siège subi par la cité1, notre héros à la désagréable surprise de se faire héler par nulle autre que Nefarata, venue par Adevore express tailler le bout de gras avec celui qui a osé la défier. Assise posément de l’autre côté de l’abîme, la Mortarque ne semble pas nourrir, ou boire, de mauvaise intention envers Ormand, et se montre simplement curieuse à propos des ambitions poursuivies par le mortel à travers cette émancipation « amortelle ». D’abord suspicieux, et on le comprend, Ormand se laisse finalement convaincre de revenir dialoguer le lendemain, malgré les protestations de sa fille et héritière Kristane, qui flaire un coup fourré de la part de la vamp. La conversation reprend donc, et après avoir flirté un moment avec la haute philosophie (Nefarata demandant à son interlocuteur que valait une liberté achetée au prix d’une peur et d’une vigilance constante2), finit par porter sur le crépi (Nefarata trouve que l’extérieur de Lugol est tristounet) et les divertissements (Nefarata est convaincue que les Lugolois s’ennuient à – presque, vue que c’est interdit – mourir). Ormand n’a beau ne pas être d’accord, il peine à contredire son adversaire, et passe une très mauvaise nuit à imaginer des répliques percutantes qu’il aurait pu lui sortir pour lui rabattre le caquet.

À son réveil, cela va tellement peu fort qu’il se persuade rapidement que son heure est arrivée. N’ayant donc plus rien à perdre, ni à craindre, il tue le temps en attendant d’aller poursuivre son entretien avec une vampire en faisant un petit tour en ville, où, effectivement, ce n’est pas la joie qui étouffe ses sujets. Qu’importe pour Ormand, dont la thanatophobie militante s’accommode bien de quelques sacrifices. C’est donc le cœur léger mais le souffle très court que le vieil homme rejoint son siège près du pont, pour une ultime joute verbale avec la Reine des Mystères…

Début spoiler…Qui évidemment, ne s’est pas tapée le voyage depuis Nulahmia et deux nuits en camping sauvage au pied des murailles de Lugol pour repartir bredouille. Comme craint par la sagace Kristane, Nefie avait un plan pour reprendre le contrôle de la cité : donner à Ormand le baiser de sang pour en faire son serviteur. Sans blague. La vraie question est de savoir comment elle va s’y prendre, étant donné que l’accès de la ville lui est impossible, et que notre héros n’est pas assez bête pour l’inviter à entrer. Eh bien, par l’hypnose, pardi ! Nefarata baratine quelque peu son public sur la « joie du sang » et la « beauté de la mort », et quand elle claque des doigts, Ormand est devenu son vassal. Simple, basique. // Ta Gueule, C’est Magique. Pas la peine d’être plus précis, cette histoire est déjà finie. Ormand pète le sceau protecteur le soir même, convertit sa fille à l’hématophilie, et l’envoie ouvrir la porte à Neferata, qui prend possession de Lugol comme si de rien n’était. Une reconquête sans arme ni haine ni violence, ça se respecte.Fin spoiler

1 : Quand il dit qu’il coupe les ponts, il ne fait pas semblant.
2 : Ormand, qui a fait un bac pro et pense que Kierkegaard est une marque de baskets, ne sait pas trop quoi répondre.

AVIS :

David Annandale retombe dans ses travers passés de jemenfoucécool-iste décomplexé avec la conclusion de ‘The Threshold’, qui était pourtant assez plaisant jusqu’à ces fatidiques deux dernières pages. Les bonnes idées de l’auteur, telles que donner le beau rôle à l’adversaire de Neferata, ou privilégier la réflexion (pseudo) philosophie à l’action frénétique, se retrouvent en effet battues en brèche par le dénouement proprement scandaleux que l’auteur nous sort de son stylo, justifié par une pauvre phrase balancée par Nefarata au détour d’un paragraphe1, comme si de rien n’était. Au-delà du fait qu’il ne faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour cafards volages, et que ce qu’a fait Annandale correspond à annoncer « bombe nucléaire !!! » dans une partie de chifoumi, cela ouvre une longue et large faille de « mais si…, alors… » dans le background, ce qui est cher payé pour pouvoir offrir un twist final à une nouvelle de 12 pages. À moins qu’il soit de notoriété publique et fluffique que dans Age of Sigmar, on peut donner le baiser de sang par message vocal, auquel cas, je retire mon accusation d’opportunisme narratif envers Annandale. Mais on ne me retirera pas de l’esprit qu’il y avait moyen de faire, et surtout, de finir, mieux que ça.

1 : “VaMpIrIsM cAn TaKe MaNy FoRmS.

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Et voilà pour cette Character Week, initiative sympathique (même si pas vraiment intéressante d’un point de vue financier, puisque la BL n’a pas pas proposé de prix de groupe pour ces cinq nouvelles) qui sera je l’espère rééditée l’année prochaine. De manière assez ironique, je place la nouvelle de Robert Rath, et donc la moins fidèle au thème de l’événement, tout en haut de mon podium personnel. Le reste varie du sympathique au franchement bof, même si mon avis n’engage que moi, bien entendu. Rendez-vous dans quelques jours pour la dissection d’une oeuvre familiale…