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BLACK LIBRARY 2012 ADVENT CALENDAR [40K – WFB – HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du Black Library 2012 Advent Calendar, pot-pourri de 24 nouvelles et audio dramas proposé par la BL à ses afficionados pendant les semaines ayant précédé Noël 2012 (qui tomba un mardi, comme vous le savez). Si, plus de dix après, ce concept vous semblera sans doute des plus familiers, à l’époque il s’agissait d’un saut dans l’inconnu de la part de Nottingham, qui se cherchait encore en matière de publication numérique. Nous sommes donc en présence du tout premier Advent Calendar de la Black Library, ce qui peut expliquer pourquoi ce lointain ancêtre ne ressemble guère aux dernières moutures sorties par la BL.

Black Library 2012 Advent Calendar

Outre le fait que la sélection que nous allons explorer ci-dessous compte des nouvelles prenant place dans le Monde Qui Fut (ce qui ne se reproduira plus, même si la Fin des Temps ne prit place qu’en 20151), une autre différence majeure entre le millésime 2012 et ceux qui suivirent est le format des histoires publiées par la BL : croyez-le ou non, mais il fut une époque (heureusement révolue depuis lors) où les nouvelles de 1.000 mots (soit entre quatre et cinq pages) étaient vues comme un produit tout à fait valable par la Black Library. Vendues à 1,49€ l’unité2, ces ultra courts formats étaient certes rapides à écrire pour les auteurs de GW-Fiction, mais peu furent en mesure de proposer des histoires un tant soit peu intéressantes en respectant cette longueur limite. Tout le monde n’est pas Hemingway ou Monterroso.

Les 21 nouvelles et 3 audio dramas n’ont donc pas marqué l’imposant corpus de la GW-Fiction, mais doivent plus être vues comme des exercices de style de la part des plumes de la BL, et pas des moindres (Abnett, Reynolds, Wraight, Thorpe, McNeill, Werner, Counter, Mitchell, Fehervari…). Avant même de m’atteler à cette revue, je peux déjà vous dire que le rapport qualité/prix de cette sélection sera absolument exécrable (près de 90€ à débourser pour disposer de toute la série…), mais j’espère ne pas être l’abri d’une (ou deux, ou plus) bonne(s) surprise(s) dans le lot…

1 : Je pense que la décision de bazarder Warhammer Fantasy Battle a été prise par Games Workshop fin 2013, ce qui peut expliquer pourquoi la Black Library a progressivement arrêté de publier des inédits pour cette franchise historique à partir de ce moment.
2 : À l’époque. Au moment où cette critique est écrite, la BL ne s’est pas gênée pour harmoniser les prix de tous ses courts formats, et le lecteur curieux devra s’acquitter des 3,49€ réglementaires pour mettre la main sur ces quelques pages. Ça pourrait passer si la BL indiquait clairement la longueur des nouvelles sur son site, afin de ne pas piéger les fans croyant avoir affaire à des histoires plus consistantes, mais non (pas de manière systématique en tout cas). Pas très élégant.

Black Library 2012 Advent Calendar

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Born to Us – D. Abnett [40K] :

INTRIGUE :

Born to UsComme il aime bien le faire en ses vieux jours (depuis qu’il a passé son premier siècle, en tout cas), Gregor Eisenhorn, Inquisiteur vétéran ayant roulé sa bosse et son crâne chauve d’un bout à l’autre du Daniverse, se remémore les épisodes les plus marquants de sa longue carrière. Cette fois-ci, direction la planète Koradrum où Greg a enquêté sur la disparition d’un archéologiste de renom, Darred Lenhema, alors qu’il fouillait un ancien tumulus avec son équipe.

Les temps de transport au sein de l’Imperium étant ce qu’ils sont, Eisenhorn et son gros bras de service Harlon Nayl n’arrivèrent sur les lieux que deux ans après que Lenhema ait été déclaré AWOL. Il ne servait donc à rien de se ruer sur le site de fouille pour relever des empreintes, ce qui laissa un peu de temps à notre duo de choc pour se renseigner sur la culture et les croyances locales. Il s’avéra que les crédules Koradrumois considéraient l’arrivée dans le firmament d’une nouvelle étoile (en fait un simple passage en supernova d’un astre proche) comme le signe de la réincarnation prochaine d’un grand meneur, voire d’une figure divine, qui mènerait son peuple vers le salut, ou quelque chose comme ça. Eisenhorn, qui est très culturé et aime entendre le son de sa propre voix, s’empressa de faire un cours magistral au pauvre Nayl sur la récurrence du mythe de la figure – n’ayons pas peur des mots – christique au sein de l’Imperium, même si à l’approche du 41ème millénaire, peu de gens savaient d’où ce mythe provient. Et c’est bien triste, ma pauvre dame.

Sur ces entrefaites, l’Inquisiteur et son garde du corps arrivèrent à proximité du tumulus, où l’équipement de Lenhema et de son équipe gisait au sol. Il semblerait que la réponse de cette énigme se trouve à l’intérieur de l’ancienne tombe…

Début spoiler…Et comme Eisenhorn aime à le marteler, toutes les légendes, mêmes les plus farfelues, ont toujours un fond de vérité. Un messie s’était bien réveillé sur Koradrum après un sommeil millénaire, mais il s’agissait d’un Tétrarque Necron et pas d’un charpentier hippie ; et s’il a bien multiplié les pains, ce fut en direction des archéologues sans gêne ayant envahi son intimité. Nous quittons Eisenhorn et Nayl sur cette épiphanie grimdark, mais rassurez-vous, ils s’en sont tous les deux sortis…Fin spoiler

AVIS :

Des personnages populaires, un peu de fluff et une petite surprise finale pour relever le tout : Dan Abnett fait bon usage de son budget très serré de mots dans cet inconséquent mais sympathique ‘Born to Us’, qui nous permet de nous souvenir que le brave Gregor est à l’origine un membre de l’Ordo Xenos. Il y a évidemment des nouvelles bien supérieures à celle-ci dans le corpus inquisitorial d’Abnett, mais ‘Born to Us’ tient assez bien son rang, dans la catégorie poids plume.

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Binding – R. Harrison [40K] :

INTRIGUE :

BindingLe Sergent vétéran Leonen Kyarus des Imperial Fists se réveille brutalement pour constater que quelqu’un a laissé la vitre de toit de son Rhino de fonction ouverte, ce qui rafraichit considérablement l’habitacle. Ah là là, ces j- Wait a minute. La minute qui suit voit notre héros reprendre péniblement ses esprits et sortir de la ruine fumante du véhicule, constatant au passage qu’une de ses mains n’a pas survécu au crash. Plus inquiétant, le reste de son escouade manque à l’appel, alors qu’une voix désincarnée râle « frérooooot… » à la limite de sa perception auditive. La radio de son armure ne fonctionnant plus guère, Leonen en est réduit à partir à la recherche de l’homme qui murmurait à l’oreille de Lyman (hoarse whisperer, en V.O.), ce qui l’amène dans un bâtiment en ruines…

Début spoiler…Où l’attendent ses frères de bataille, qui s’étaient passés le mot pour lui faire une surprise pour son anniversaire sont tous morts autour d’un pilier de pierre trotrodark, servant de perchoir et de prison à un Démon ventriloque (sans doute un Duc du Changement, si on prend en compte ses plumes, son bec et son champ lexical de perroquet domestique). Leonen comprend en un éclair que cette abomination a attiré ses camarades jusqu’à lui pour leur voler leur âme et gagner ainsi en puissance pour se libérer de son emprisonnement, et qu’il est le prochain sur la liste. Comme le Démon lui fait doctement remarquer, ce n’est pas un combat qu’il est statistiquement en mesure de remporter, mais le brave Sergent rétorque qu’il n’est pas venu pour ça avant que le combat ne s’engage et que le rideau tombe sur notre histoire. On ne saura jamais s’il a pu utiliser les toilettes, du coup…Fin spoiler

AVIS :

Pour sa toute première histoire écrite pour le compte de la Black Library Rachel (Ray) Harrison signe une micro-fiction appliquée et assez atmosphérique (ce qui est bien), même si son dénouement tombe un peu à plat1 (ce qui l’est moins). Je pense qu’il y avait moyen de choisir un autre antagoniste pour se sortir de cette ornière, mais dans l’ensemble, c’est très honnête pour une nouvelle de 1.000 mots.

1 : Ou plutôt, suscite des questions que Harrison laisse sans réponse, faute d’espace pour les traiter. Comment le Démon a-t-il fait pour attirer un à un les Space Marines jusqu’à son pilier, alors qu’ils ont tous commencé la nouvelle dans l’épave du Rhino (et qu’on peut supposer qu’ils ne s’en seraient pas écartés aussi facilement que Leonen s’ils avaient vu que leurs camarades étaient blessés) ? Est-ce lui qui a enchainé le cadavre de Damanios à son pilier, et pourquoi ? Le Démon peut animer les cadavres de ses victimes, mais à quoi cela lui sert-il ?

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The Riddle of Scorpions – J. Reynolds [WFB] :

INTRIGUE :

The Riddle of ScorpionsZavant Konniger et son assistant Vido ont été appelés pour enquêter sur la mort suspecte d’un marchand d’Altdorf, dont le corps a été retrouvé dans la caverne d’Ali Baba qui lui servait de bureau. Jorge Mueller, car c’était son nom, s’était en effet fait une réputation dans l’importation et la vente d’artefacts rares provenant des quatre coins du Vieux Monde et au-delà, et était bien connu pour ne pas hésiter à employer des moyens douteux pour enrichir sa collection.

Comme souvent, Konniger questionne Vido pour (tenter de) développer les capacités déductives du Halfling, lui-même ayant bien sûr déjà établi sans l’ombre d’un doute le motif et le déroulé des événements ayant conduit Herr Mueller à passer l’arme à gauche. Guère intéressé par le cadavre affalé sur sa chaise, ou par les remarques de son employeur d’ailleurs, Vido préfère inspecter le bureau du défunt, et ramasse un tube finement ouvragé dont les extrémités sont occupées par une reproduction de scorpion en métal. Voilà qui ferait un presse papier de premier choix…

Mais ce que Vido prenait pour un simple objet décoratif se révèle être un piège-scorpion arabien, qui se referme sur ses doigts alors qu’il le manipule, et dont les dards se rapprochent rapidement de ses phalanges. Si l’expérience se révèle traumatisante pour le Halfling aux mains baladeuses, Konniger lui ne se départit pas de son calme et continue de tester la sagacité de son acolyte sur les causes du décès de Mueller, tout en l’informant qu’il lui suffit d’entrer le bon code sur le cadran du piège pour se libérer avant qu’il ne soit trop tard. Un vrai jeu d’enfant (d’ailleurs, c’est comme ça que les jeunes Arabiens se distraient, à ce qu’il paraît) !

Début spoiler…Au final, Vido ne parvient pas à résoudre l’énigme des scorpions avant de se faire piquer, mais comme les dards n’étaient pas empoisonnés, la seule victime à déplorer est son amour propre. Konniger entre la combinaison en un tour de main, et révèle à son serviteur éprouvé que c’est cette même mésaventure qui a causé la mort de Mueller, dont le cœur a lâché sous le stress lorsqu’il s’est trouvé par inadvertance prisonnier du piège. On peut appeler ça les risques du métier.Fin spoiler

AVIS :

Josh Reynolds ne choisit pas la facilité en tentant un whodunit dans un format 1.000 mots (1.014 ici, si on veut chipoter), mais on ne pouvait pas s’attendre à autre chose dans une nouvelle dont le héros est le légendaire Zavant Konniger. Cela fait toujours plaisir de revoir des personnages mythiques de la GW-Fiction reprendre du service sous la plume de nouveaux auteurs, et le Sage-Détective d’Altdorf est à ce titre bien tombé avec Reynolds, qui se sort honorablement de cette situation épineuse (bien mieux que Vido en tout cas). Bien sûr, le côté « énigme » de ce ‘The Riddle of Scorpions’ n’est pas très abouti, mais pour un très court format, c’est loin d’être indigent. Bravo pour le panache, M. Reynolds.

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Failure’s Reward – C. Wraight [40K] :

INTRIGUE :

Failure's RewardTarolf est ce qu’on peut considérer comme un loser du 41ème millénaire, ou plutôt, un lo(up)ser. Né sur la planète Fenris, il a tenté pendant sa jeunesse de rejoindre les fiers Guerriers Célestes (aussi connus sous le nom de Space Wolves par l’Administratum) mais quelque chose s’est mal passé pour lui pendant le sévère processus de sélections des aspirants du Chapitre le plus cabotin de l’Imperium. On ne saura jamais ce qui est parti en cacahouète pour le pauvre Mister T. mais toujours est-il qu’il s’est fait recaler. Heureusement, les Space Wolves ont une fibre sociale bien connue et ont proposé au candidat malheureux de servir l’Empereur d’une autre manière qu’en zlatanant ses ennemis à travers la galaxie, et Tarolf est donc devenu assistant armurier dans les forges du Croc.

Comme il nous le raconte avec ses propres mots (assez simples, car il est probable que les Prêtres Loups l’aient un peu lobotomisé sur les bords pour s’assurer de sa docilité1), sa tâche consiste à customiser des genouillères d’armures énergétiques, afin que les Space Wolves puissent guerroyer avec le style flamboyant pour lequel ils sont réputés à travers tout l’Imperium. Free hand de dragon, de wyrm, de troll ou de loup : Toralf est un as du poinçon, de la cire et de l’acide, et même s’il reconnait sans mal que le moindre boulot peut lui prendre des mois (ce qui est long tout de même quand on considère la taille de la pièce), l’important est d’assurer un rendu irréprochable. La qualité totale, que voilà une belle doctrine !

1 : Et fait stériliser pour les mêmes raisons, mais en cela il ne diffère sans doute pas des recrues confirmées du Chapitre…

AVIS :

Chris Wraight lorgne clairement du côté des encarts fluff des Codex et suppléments de jeu de rôle avec ce contemplatif ‘Failure’s Reward’, qui décrit avec un luxe de détails le quotidien d’un des milliers de serfs anonymes qui triment pour le compte des Space Wolves. Pas d’intrigue passionnante ou de conclusion tonitruante à attendre ici, seulement la réalité terne, assez triste et souvent violente du 41ème millénaire, « filmée » à hauteur d’homme (ou d’humanoïde, un aspirant Space Wolves n’ayant pas un physique ordinaire). Assez proche dans l’esprit du ‘Sacrifice’ de Ben Counter, qui était une autre bonne surprise du corpus de 40K.

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The Quickening – A. Smillie [40K] :

INTRIGUE :

The QuickeningL’Archiviste Balthiel des Flesh Tearers a choisi d’opérer seul derrière les lignes ennemies pour mener à bien l’assassinat du Gouverneur hérétique de Spheris, et nous le voyons faire usage de ses pouvoirs psychiques, dont son signature move : the quickening (une sorte de bullet time qui lui permet de ralentir l’écoulement du temps autour de lui), pour se débarrasser de la garde personnelle du félon. Bien que très efficace, l’abus du Warp est dangereux pour la santé mentale, et Balthiel finit la novelinette (3 pages !) en PLS, sa mission accomplie mais sa messagerie mentale submergée de spam de Démons cherchant à lui vendre des analgésiques miraculeux et/ou à lui faire rencontre des hot single spawns dans son voisinage. Bref, un jeudi ordinaire pour notre ami Flesh Pseaker.

AVIS :

Andy Smillie continue sa série consacrée à la mise en scène des pouvoirs psychiques des Blood Angels (et descendants) dans ses nouvelles Flesh Tearers avec cet insignifiant à tout point de vue ‘The Quickening’. Les amateurs de ce genre très particulier peuvent se tourner vers ‘From the Blood’ pour voir l’incroyable Balthiel utiliser le Bouclier de Sanguinius d’une manière fort peu orthodoxe (et tomber à nouveau dans les pommes, comme le gros bébé fragile qu’il est). Les autres économiseront les 3.49€ demandés pour ces quelques lignes peu mémorables1 et iront dépenser leur capital chèrement acquis ailleurs.

1 : Qui bénéficient malgré tout d’une recommandation de nul autre que James Swallow (« So visceral, you can taste the blood in your teeth »). Si ça ne vous donne pas une bonne raison supplémentaire de ne pas acheter ‘The Quickening’, vous allez vite apprendre…

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Never Forgive – G. Thorpe [WFB] :

INTRIGUE :

Never ForgivePeu de temps après la bataille de Maledor, durant laquelle le jeune (à l’époque) Malekith se fit bellement corriger par Caledor the Preums, nous faisons la connaissance d’un des lieutenants du Roi Prétendant Sorcier, Alandrian de Nagarythe. Elfe féru de grands espaces et de randonnées, il prit le parti de mener ses guerriers survivants dans le Val de Caerasin après la défaite de son camp plutôt que de se réfugier à Anlec avec le gros des troupes druchii, et eut la chance de se trouver en hauteur lorsque ce rigolo de Malekith ouvrit les vannes et noya la province sous une vague monstrueuse. Plutôt que de se lamenter sur son sort, comme il aurait été pourtant en droit de le faire, Alandrian décida de partir à la conquête de sa propre contrée submergée et marcha sur le premier village du vallon avec la ferme intention d’en faire sa base d’opérations. That’s the spirit, boy.

Malheureusement pour lui, et surtout pour ses cinq cents guerriers, le village en question était placé sous la protection de dangereux anar(chiste)s, menés par un jeune prince du nom d’Alice Alith. Bien que les Druchiis disposassent (eh oui) de l’avantage numérique, les flèches des Guerriers Fantômes ne tardèrent pas à mettre la cohorte d’Alandrian en déroute, et ce dernier ne se fit guère prier pour prendre également ses jambes à son cou. C’est alors qu’Alith Anar en personne se dressa devant sa route, lui colla une flèche dans le cuissot pour le mettre à terre, avant de lui balancer un grand coup de latte dans la tempe, remportant cet affrontement fratricide par un K.O. probant à la première reprise.

À son réveil, Alandrian se rend compte qu’il est encore en un morceau, et seulement attaché aux branches et aux racines d’un jeune arbre. Cette clémence étonne beaucoup le Druchii, qui est bien placé pour savoir qu’à Nagarythe, on ne fait pas de cadeau à l’ennemi. Alith Anar lui affirme cependant qu’il ne sera ni torturé, ni affamé ou assoiffé, comme il en avait l’intuition. Au contraire, des enfants du village qu’il avait cherché à conquérir lui apporteront de quoi boire et manger tous les jours pour le garder en bonne santé. Vraiment, ça a l’air cool d’être fait prisonnier par Alith Cooper !

Début spoiler…À court et moyen termes tout du moins. Le dessein d’Alith Anar est en effet de laisser l’arbre auquel Alandrian est attaché faire le sale boulot pour lui : dans quelques années ou décennies, les branches auront suffisamment poussé pour que l’Elfe Noir se trouve écartelé par la tension de la corde qui lie ses pieds aux racines de l’arbre. La vengeance est un plat qui se mangera quand les moules auront des gants, comme on dit à Athel Maranth…Fin spoiler

AVIS :

Continuation de son roman dédié au plus mystérieux et revanchard des Hauts Elfes (‘Shadow King’), ‘Never Forgive’ ne brille pas par la qualité de son intrigue, mais compense par les éléments fluff qu’il apporte à l’amateur de culture et d’histoire elfique, et par la fin grinçante que Thorpe a concoctée pour le pauvre Alandrian. C’est assez bien trouvé je dois dire, car cela donne une bonne idée du rapport particulier que les Elfes ont au temps, en plus d’illustrer le caractère impitoyable d’Alith Anar. C’est validé.

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Warmaster – J. French [HH] :

INTRIGUE :

WarmasterHorus profite d’un de ses rares moments de paix depuis qu’il a lancé son hérésie pour soliloquer sur le sort qui est le sien dans le confort ouaté marbré de la salle du trône du Vengeful Spirit. Comme il le dit lui-même, être Maître de Guerre n’est pas une sinécure, surtout lorsque le titre est décerné par un Empereur plus concerné par ce que le Primarque inter pares ne doit pas faire que par ce que le poste apporte comme avantages. De même, il n’est pas facile de mener à bien un coup d’état galactique quand on hérite de la moitié la plus dysfonctionnelle de la super fratrie pour jouer au régicide contre son Pépé. À tout prendre, Horus aurait bien aimé que Sanguinius, Roboute Guilliman et même Corax (un peu d’amour pour les corbeaux emo, ça fait du bien) le rejoignent, plutôt que de se coltiner les manigances tarabiscotées et inefficaces de Lorgar et d’Alpharius, les bouderies de Mortarion et la cyclothymie de Perturabo. Comme on disait à la fin de M1, if you can’t be with the ones you love, love the ones you’re with.

Qu’importe ces menus désagréments et la nullité crasse des bras cassés qui l’accompagnent, Horus sait qu’il est le surhomme pour le job, et que chaque bataille, chaque massacre, chaque désastre, sert sa cause. C’est ça l’avantage de servir le Chaos : on est autorisé à se réjouir lorsque tout part à vau l’eau, car après tout c’est ce que les patrons désirent, pas vrai ? Notre histoire se termine avec la révélation de l’identité du bienheureux individu à qui Horus a déballé ses profondes réflexions sur la conjoncture, car non, il n’est pas (encore) assez fou pour parler tout seul…

Début spoiler…Et il s’agit du psychiatre préféré des Primarques félons, Ferrus Manus en personne1. Ou son crâne, en tout cas, que le Maître de Guerre a gardé comme souvenir du bon vieux temps. Qui pourrait se lasser de prendre la tête de la Gorgone, aussi, hein ?Fin spoiler

1 : Fulgrim aussi apprécie beaucoup faire des confidences à son frère favori (‘Imperfect’).

AVIS :

Un seul en scène d’Horus, sur un livret de John French, franchement, ça se prend. Mine de rien, recueillir les états d’âme du protagoniste (et antagoniste) de l’Hérésie, c’est toujours appréciable d’autant plus que ça n’arrive pas si souvent que ça au cours de la série. French nous livre un Horus encore fréquentable, toujours charismatique, et sans langue de bois sur ses alliés aussi bien que sur ses adversaires : voilà un Primarque tel qu’on aime en voir dans les pages de la GW-Fiction. Solide.

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Dust – G. McNeill [40K] :

INTRIGUE :

DustSur la Planète des Sorciers, le plus éminent et vaniteux d’entre eux (il parle de lui à la troisième personne tout de même) a rendu une petite visite à l’un de ses collègues, le bellâtre Hegazha. Ahzek Ahriman, car c’était bien sûr lui, est venu lui faire une offre qu’il ne peut pas refuser : rejoindre son projet top secret de boys band cabale (c’est techniquement la même chose, on est d’accord) afin de trouver une cure à l’épidémie de mutation qui décime les rangs des Thousand Sons, déjà clairsemés par la dérouillée infligée par Leman Russ et ses loubards sur Prospero. Après tout, qui ne souhaiterait pas participer à une mission de bien commun comme celle-ci, hein ?

Tout naturellement, Hegazha refuse et envoie son bureau fait en volonté (c’est ‘achement rare, ça doit coûter une blinde) dans la tête de son invité. Il a de bonnes raisons pour faire la sourde oreille au plaidoyer d’Ahriman, notez : déjà frappé par la malédiction de Tzeentch, qui a changé ses mains en serres d’oiseau, Hegazha s’est engagé à fond dans la voie du body positivism, et considère ces mutations comme une bénédiction plutôt que comme un fléau. Cependant, Ahri’ n’a jamais accepté non pour réponse, et s’il doit mettre les mains dans le cambouis pour mettre sur pied sa fine équipe, ainsi soit-il. Les deux rivaux échangent donc des sorts destructeurs en haut de la tour de Hegazha, jusqu’à ce que ce dernier saute à la gorge de son visiteur et que les deux basculent dans le vide et tombent comme des pierres vers le sol, quelques centaines de mètres plus bas…

Début spoiler…Cela ne trouble pas outre mesure Ahriman, qui en tant que Corvidae a vu son avenir et sait qu’il survivra à la chute. Et en effet, avant que la collision fatale ne se produise, le wingman que l’Archiviste en chef avait missionné pour lui donner un coup de main utilise ses propres pouvoirs pour amortir l’impact, et placer Hegazha en stase. C’est ce vieil Hathor Maat qui rend ce fier service à Ahriman, et bien que ses capacités de télékine laissent encore un peu à désirer, comme les lombaires douloureuses de notre héros peuvent en témoigner, il réussit par contre parfaitement à geler Heghaza sur pied, ce qui permettra aux cabalites de l’utiliser comme ingrédient pour leur futur grand œuvre, à défaut de pouvoir compter sur sa coopération active. Waste not, want change not, comme on disait à Tizca…Fin spoiler

AVIS :

Guère plus qu’une scène coupée dans l’épopée consacrée par Graham McNeill à Ahriman et Magnus le Rouge, ‘Dust’ fait partie de ces nouvelles irritantes qui n’apportent rien aux connaisseurs, tout en étant relativement cryptiques pour le néophyte. Si vous n’êtes pas familier des cultes Thousand Sons (Corvidae et Pavoni) ou ne savez pas qui sont Hathor Maat et Phosis T’kar, ne comptez pas sur McNeill pour vous briefer sur ces sujets, ce qui est dommage car ces détails sont au centre de son propos.

Si cette histoire est donc assez décevante, il est en revanche intéressant de noter que lors de sa sortie en 2012, elle fut rattachée au corpus 40K et non Hérésie d’Horus par la Black Library, ce qui était chronologiquement possible à ce moment. Cinq ans plus tard, McNeill fit mourir Hathor Maat avant la fin de l’Hérésie dans ‘The Crimson King’, plaçant une fois pour toute ‘Dust’ dans cette franchise. Cette nouvelle peut donc être considérée comme la secret track de l’Hérésie d’Horus (et comme beaucoup de secret tracks, elle n’est pas incontournable).

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Last Watch – L. Goulding [40K] :

INTRIGUE :

Last WatchSur la planète jungle de Phirus, le frère Felgir, Space Wolf rattaché à la Death Watch, a juré de traquer et de tuer en solo le dernier1 xénomorphe tyranide souillant de son infecte présence le domaine de l’Empereur. Bien qu’il soit parmi les chasseurs les plus mortels et discrets de la galaxie, le fier Loulou se fait toutefois surprendre comme un perdreau de l’année par sa proie, et un féroce combat s’engage entre le représentant de l’humanité et celui de la Grande Dévoreuse.

Malgré ses meilleurs efforts, récompensés par un poignet douloureux pour son adversaire chitineux, Felgir se fait surclasser par la vitesse et la férocité du Lictor, mais surtout par ses fléchettes thoraciques empoisonnées (et pourtant, c’est kikoolol, on est d’accord), dont la toxicité menace de transformer la Space Watch en Death Wolf. Terrassé par les toxines xenos, Fergy développe une gueule de bois express plus carabinée que s’il avait fait un cul sec de tonneau de mjød. Il se voit mourir et le lecteur aussi : cette histoire va-t-elle se conclure dans le sang et les larmes ?

Début spoilerRéponse : oui, mais pour le Lictor. Il s’avère que le Sergent de l’escouade de Felgir n’a finalement pas permis à cette tête brûlée de soloter le dernier boss de Phirus, mais a utilisé l’imprudent Space Wolf comme appât pour débusquer l’insaisissable bestiole et lui coller un bolt au mercure dans les cervicales pendant qu’elle était occupée à martyriser notre ami velu. Tout est bien qui finit bien (sauf pour le Lictor, encore une fois), et Marek Angeloi envoie un rapport confirmant le succès de la purge de Phirus à ses maîtres de l’Ordo Xenos, et demandant à être sorti du service actif de la Death Watch pour poursuivre ses xenocides sous les couleurs de son Chapitre d’origine. Et on peut compter sur un(e) Scythe of the Emperor pour continuer à moissonner du tyty…Fin spoiler

1 : Je sais ce que vous vous dîtes : comment peut-on être sûr que c’est le dernier ? Eh bien, il semble qu’il existe une technologie impériale très précise d’identification des Lictors, puisqu’il s’agit de la seconde histoire de la Black Library (après ‘13th Legion’) où le héros piste l’ultime Tyranide de la planète. TGCBL !

AVIS :

Goulding signe une petite histoire reprenant la trame classique du « chasseur/chassé », relevée par un coup de théâtre final relativement efficace (bien aidé en cela par le fait que dans un univers aussi grimdark que Warhammer 40,000, la nouvelle aurait très bien pu se terminer par la mort de Felgir). Il donne également des nouvelles de l’un de ses personnages SotE récurrents, la forte tête Marek Angeloi, dont on ne sait pas encore à ce stade si la demande de réaffectation a été acceptée par l’Inquisition. La bureaucratie génère des délais incompressibles, c’est connu…

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Thanquol Triumphant – C. L. Werner [WFB] :

INTRIGUE :

Thanquol TriumphantServir la volonté de l’Hérésiarque Kritislik n’est pas tous les jours chose facile, et ce n’est pas Thanquol qui dira le contraire. Chargé par son boss de détruire le Clan Krawl, dont l’alliance potentielle avec le Clan Mors pourrait déséquilibrer les rapports de force à Skarogne et réduire l’influence des Prophètes Gris sur la société skaven, notre machiavélique héros a réussi à convaincre le seigneur Fissk d’emmener son armée à l’assaut du camp orque le plus proche, en lui faisant le coup de la panne de la vision prophétique (en même temps, c’est dans sa fiche de poste).

Les combats font rage et ne tournent pas franchement en faveur des hommes rats, qui se font concasser par les brutes vertes au corps à corps et bombarder de rochers à distance. Cette situation compromise fait toutefois les affaires de Thanquol, qui n’attend que l’inévitable débâcle générale de l’armée skaven pour faire une belle plus-value. Le Prophète Gris s’est en effet arrangé avec le Clan Skully (on ne peut pas toujours compter sur le Clan Moulder) pour organiser un comité d’accueil dans les galeries du Clan Krawl, et réduire en esclavage les survivants de cette bataille. Cette fortune future ne lui sera toutefois d’aucune utilité s’il ne survit pas à la mêlée, et bien qu’il ait pris le soin de se positionner dans les lignes arrière, comme il sied à son rang, l’artillerie peau verte se révèle un peu trop précise à son goût. Après avoir manqué de finir en rat-prenade deux fois de suite en l’espace de quelques minutes, Thanquol décide que la plaisanterie a assez duré et envoie une bonne malefoudre carboniser l’irritant lance-roc. Problème réglé !

Début spoiler…Mais Thanquol ne serait pas Thanquol s’il arrivait tranquillement à ses fins, bien sûr. Il y a des gens qui ont de la chance dans leur malheur, Mr T. lui a de la poisse dans son bonheur. Avant de partir en fumée, le lance-roc a le temps d’expédier une ultime cartouche dans la boîte, qui dévie franchement et écrase le seigneur de guerre orque et sa garde rapprochée, paniquant le reste de sa Waaagh ! et renforçant le moral des Skavens. Voilà qui s’appelle arracher la victoire des mâchoires de la défaite, et si ce n’était pas ce qui avait été prévu par Thanquol, ce dernier a suffisamment de métier et de vice pour tirer profit de ce résultat improbable. Après tout, n’est-il pas le génial stratège ayant guidé le Clan Krawl vers une victoire éclatante sur la vermine orque grâce à ses visions, hein ?Fin spoiler

AVIS :

Thanquol, comme ses Némésis habituelles que sont Gotrek & Felix, fait partie des personnages de la Black Library dont les apparitions sont scriptées. On sait dès la première ligne que l’ingénieux Skaven va preeeeeeeeeesque réussir à mettre en exécution un plan aussi génial que retors, échouer de la manière la plus improbable qui soit, mais réussir malgré tout à se tirer d’affaire, souvent à un poil de moustache près. Ce petit ‘Thanquol Triumphant’ peut donc être vu comme un échantillon représentatif de ce (sous) genre, dont C. L. Werner est le principal représentant. Je pense qu’il aurait pu faire preuve d’un peu plus d’inventivité dans le déroulé de ces quelques pages, qui parviennent à être répétitives en dépit de leur nombre très limité, et la fin est un peu trop cousue de fil blanc à mon goût, mais ça reste tout à fait lisible.

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The Emperor’s Chosen – M. Lee [40K] :

INTRIGUE :

The Emperor's ChosenAlors qu’il se préparait studieusement avec ses frères au prochain assaut sur Sepharis Ultra, un jeune initié Black Templar du nom de Reinhardt est frappé par une vision de l’Empereur, lui annonçant qu’il est son 100,000,000,000,000ème sujet à lui adresser une prière aujourd’hui, et qu’il a donc gagné un iphone 7 ainsi que le droit de devenir son Champion dans la prochaine campagne. Quelle chance.

Reinhardt court au Reclusiam vider son sac auprès du Chapelain Karst, qui a tôt fait d’établir la véracité de l’expérience transcendantale vécue par le frère de bataille, et fait donc mander la panoplie du parfait petit Champion dans l’arsenal de la Barge de Bataille qui amène les Black Templars jusqu’à Sepharis Ultra. Protégé par l’Armure de la Foi et équipé de l’Epée Noire1, Reinhardt aura pour mission d’abattre le meneur des Seigneurs de la Désolation, une bande de Space Marines renégats ayant conquis cette planète impériale pour accomplir leurs sombres desseins. Du succès de ce duel avec le sorcier Word Bearers X’hal Urus dépendra le destin de ce monde, mais heureusement, l’Empereur a donné ses meilleurs conseils de bretteur à Son Champion, et Reinhardt débarque donc sur le champ de bataille avec une confiance inébranlable dans ses capacités…

Début spoiler…Malheureusement pour notre fringant héros, il sait aussi que son triomphe sera de courte durée, et que X’hal Urus lui portera un coup fatal avant de mourir. Un peu comme le duel entre l’Empereur et Horus, vous me direz. C’est tellement fluff que l’on peut supposer que ce fan transi de Reinhardt n’espérait pas meilleure destinée, et si le rideau tombe sur l’affrontement entre loyalistes et hérétiques avant que ce duel fatidique n’ait vraiment débuté, on peut tout de même considérer que cette nouvelle se termine par une happy end.Fin spoiler

1 : Enfin, une des Armures de la Foi, et une des Epées Noires du Chapitre (celle-ci avait tout de même plus de 9 400 ans au moment de la campagne, c’était un vieux modèle). Il faut bien faire des compromis sur l’originalité des reliques si on veut guerroyer à travers la galaxie.

AVIS :

Plus connu pour ses travaux Crimson Fists que Black Templars, Mike Lee s’empare d’un des mythes centraux de cette fière fraternité des fils de Dorn et en tire une micro-nouvelle illustrant le fanatisme fataliste des surhommes en noir et blanc. Sans être mauvais, le résultat est assez quelconque.

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Voyage of the Sunspear – B. Counter [WFB] :

INTRIGUE :

Voyage of the SunspearLorsqu’une flotte pirate mal inspirée décide de piller le littoral d’Ulthuan, la réaction des fiers Hauts Elfes ne se fait pas attendre, et une véritable armada prend la mer pour châtier les humains qui ont cru malin de titiller Doughnut Land. Menée par la grande amirale Caladoria depuis la barre de son catamaran de combat, le Sunspear, c’est une escadre entière de navires tous plus wahou les uns que les autres qui a pris la mer et franchi les portes de Lothern pour cingler vers le Vieux Monde. Bateau-tour pour l’Archimage Galindorm, yacht cristallin pour le Prince Keldorim, navire à menhirs envoyé par la cour de la Reine Éternelle, galère à feu grégeois de Caledor, sans compter la douzaine de vaisseaux classiques et les frégates-dagues qui escortent tout ce beau monde… c’est un spectacle époustouflant qui s’offre à la vue du lecteur (et des mouettes de Lothern), et on se dit que les malheureux adversaires de cette flotte bariolée ont vraiment du souci à se faire…

Début spoiler…Enfin ça, c’est si le Sunspear et ses camarades arrivent à bon port, ce qui est loin d’être certain. La nouvelle se termine en effet dans l’habitacle enfumé du Grimnir Revenge, un sous-marin nain dont le capitaine n’hésite pas longtemps avant d’ordonner un torpillage en règle de la flotte elfique. On ne saura pas ce qui a provoqué cette réaction belliqueuse, les Hauts Elfes n’en ayant pas après les Nains à ce stade, mais faut-il une raison à ces deux races pour se tirer dans les pattes (et les coques) depuis la Guerre de la Barbe, hein ? Fin spoiler

AVIS :

Ben Counter fait un crochet par le Monde qui Fut et nous livre une nouvelle maritime que l’on devine construite autour de son twist final, ce qui se conçoit tout à fait même si pour ma part, j’ai du mal à considérer qu’un vaisseau nain ferait acte de guerre envers une flotte haut elfe sans aucune provocation, rancune ou pas rancune. La décision fatidique du capitaine Granitebrow aurait pu être motivée dans une éventuelle suite à ce (dernier) ‘Voyage of the Sunspear’, mais à ma connaissance, on en est resté là.

Chose étonnante pour un habitué de 40K, et qui n’aura (à ma connaissance) signé qu’un roman et deux nouvelles – dont celle-ci – pour la franchise medfan de la GW-Fiction, Counter ne se gêne pas pour nous balancer des tonnes de fluff au détour de ces quelques pages, et nous livrer la description la plus fouillée de la marine de guerre des Hauts Elfes qui soit1. Cela rend la lecture de ‘Voyage of the Sunspear’ indispensable pour tout amateur de lore warhammeresque devant l’éternel.

1 : Il faut tout de même noter que Dread Fleet était sorti en 2011, l’année précédent la publication de cette nouvelle. Et la page du site de la Black Library où ‘Voyage of the Sunspear’ est offert à la vente fait encore la pub pour Man O ’War Corsair (mais que font leurs stagiaires ?)…

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The Third Wise Man – N. Vincent [40K] :

INTRIGUE :

The Third Wise ManPour le frère Constantine du Chapitre des Iron Snakes, l’heure du grand oral a sonné. Notre ami ambitionne de devenir Chapelain, mais pour cela il doit convaincre trois Capitaines (Didymos, Pheus et Cules) qu’il est le surhomme pour ce poste stratégique1. Prostré au sol dans la position du supplicateur ithakien (c’est-à-dire front contre sol, bras écarté et probablement en petite tenue – on sait s’amuser chez les Chapitres d’obédience hellénique), Constantine se fait fraîchement recevoir par son jury, chacun des Capitaines y allant de sa petite anecdote honteuse sur la carrière de l’impétrant.

Didymos ouvre les hostilités en lui rappelant qu’il a perdu trois hommes de son escouade lors de la mission sur Manolis. Cules renchérit en notant qu’il a fait pire sur Hrystalla, où il a été le seul survivant de son escouade, et a pantouflé pendant sept longues saisons sur Ithaka le temps de se refaire une santé après cela. Pheus enfonce enfin le clou en évoquant son refus d’obtempérer lors de la campagne de Baltasar, durant laquelle il n’a pas daigné participer à l’assaut en drop pod sur cette planète, qui fut finalement conquise par l’ennemi et arrachée du giron de l’Empereur. Ça fait tout de même beaucoup, vous le reconnaitrez, et ce ne sont pas les plus plates contritions de Constantine, qui « endure la douleur atroce de la perte de <insert boulette here>, depuis ce jour fatidique jusqu’à aujourd’hui, les cœurs lourds », qui changeront quelque chose à cette litanie d’échecs.

Toutefois, si Constantine n’a pas toujours brillé sur le champ de bataille, il a en revanche su cultiver de solides relations, et trois d’entre elles viennent prendre sa défense. Le premier à parler n’est autre que l’incontournable Sergent Priad, qui rappelle à l’auguste assemblée que Manolis s’est terminé par une victoire impériale, et que cinq milliards de loyaux sujets de l’Empereur ont été sauvés par l’action de Constantine et de ses hommes2. Et pour marquer le coup, Priad humecte délicatement le crâne chauve et les mains tendues de son poto, dans le respect des traditions aquatiques d’Ithaka.

Le deuxième avocat de Constantine est le frère Kater Holofurnace, fraîchement revenu de la Croisade de Sabbat, qui souligne que son camarade, dont Hrystalla était la première véritable mission, a réussi à ramener avec lui les glandes progénoïdes de toute son escouade, ce qui a permis au Chapitre de reconstituer ses forces. Ça n’excuse pas tout mais c’est tout de même honorable. Et Holofurnace de dégainer à son tour sa gourde pour une petit goutte à goutte rituel.

Enfin, c’est le Maître de Chapitre Seydon qui débarque en grande pompe dans la salle d’examen, et, conscient d’être en retard, se contente de micro waterboarder Constantine comme la tradition le veut, avant de le relever et de le féliciter pour son élévation au rang de Chapelain. Ce n’est qu’un peu plus tard que nous avons le fin mot de l’histoire à propos des opérations de Baltasar. Seydon, qui n’était que Capitaine à l’époque, a pris la décision d’un assaut en drop pod contre l’avis de Constantine, et le résultat désastreux de cette initiative montra avec le recul qui était le plus malin des deux. Mais ça n’a pas empêché Seydon de faire carrière, et c’est bien la morale de cette histoire : chez les Iron Snakes, la séniorité prend toujours le pas sur la sagesse. And I think it’s beautiful…

1 : Il doit aussi leur apporter des cadeaux (deux lances et un caleçon en cuir de wyrm marin), dans la plus grande tradition du népotisme impérial.
2 : Et puis Priad ne peut pas vraiment se permettre de juger sévèrement un collègue Sergent qui a perdu des hommes au combat, lui-même n’étant pas exempt de toute critique de ce point de vue là…

AVIS :

On croyait en avoir fini avec les Iron Snakes après ‘Brothers of the Snake’, mais ces Space Marines ont la peau dure et la sympathie d’un certain nombre d’auteurs de la Black Library (en plus de celle de Dan Abnett, bien sûr), ce qui explique leur persistance discrète dans la GW-Fiction. Cette petite histoire nous en apprend un peu plus sur les rites, décidément très fétichistes (tous ces échanges de fluides en gros balèzes en petite tenue, c’est suspect), de cette confrérie écailleuse, et de passer en revue une grande partie des têtes nommées de cet auguste Chapitre. Si vous êtes fans de ce dernier, c’est donc un must read absolu, sinon, vous pourrez tout de même apprécier une histoire de Space Marines où personne ne meurt et qui se finit bien (ce qui est assez rare).

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Strike and Fade – G. Haley [HH] :

INTRIGUE :

Strike and FadeAu lendemain de la monumentale trahison d’Isstvan V, un groupe de quatre Légionnaires Salamanders (Jo’phor, Hae’Phast, Go’sol et Donak) essaie tant bien que mal de survivre dans les désolations désolantes et désolées de cette planète désormais maudite. Bien que le moral soit bas, les loyalistes peuvent compter sur des activités de team building cathartique pour tenir le coup, comme par exemple embusquer des bikers Night Lords s’étant aventurés dans la pampa pour pratiquer la chasse à courre nostramane. C’est exactement comme celle que l’on connaît, sauf qu’il faut remplacer le renard par un Raven Guard à poil (si on n’en a pas, une autre Légion fait aussi l’affaire), et les chevaux par des motos. On peut utiliser une meute si on en a une sous la main, ce qui n’était pas le cas de nos amis de la 8ème. On ne peut pas toujours tout prévoir.

Comme on peut s’y attendre, les gentils lézards règlent leur affaire aux affreux jojos avec une efficacité consommée, et en profitent pour piquer le matos et les rations de leurs victimes afin d’alimenter leur effort de guérilla. Comme on dit, les petits ruisseaux font les grandes rafales de bolter. Malheureusement, leur camarade corbeau hérite d’une blessure thoracique mortelle au cours de l’échange de tir, et meurt dans les bras du noble Joe Fort, non sans avoir exprimé sa gratitude éternelle (plus que lui en tout cas) à ses frères de bataille pour l’avoir sauvé des griffes des Night Lords. Victoire tactique et victoire morale pour les Salamanders. Qu’ils en profitent, il n’y en aura plus beaucoup d’autres d’ici à la fin de l’Hérésie…

AVIS :

Si en 2012 tout le monde connaissait déjà la grande histoire d’Isstvan V (racontée dans ‘Galaxy in Flames’ par Ben Counter dès 2006), le sort des quelques survivants épars des Légions loyalistes étant tombées dans le piège de ce fieffé fripon d’Horus n’avait pas encore été couvert par grand-monde au sein de la Black Library. Guy Haley fut donc parmi les premiers à (re)donner leurs lettres de noblesse aux losers magnifiques des Légions Brisées, bien avant que Nottingham ne leur consacre un recueil de nouvelles (2017). Cette parenthèse historique mise à part, il n’y a pas grand-chose à dire de ce ‘Strike and Fade’, qui présente les Salamanders sous l’angle favorable qu’on leur connaît, mais ne développe pas assez son quatuor de personnages pour qu’on s’attache à eux. Potable.

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Honours – J. Swallow [40K] :

INTRIGUE :

HonoursLe Capitaine de la 1ère Compagnie des Blood Angels nous fait l’honneur d’expliquer comment il a gagné ses cicatrices, armes et emblèmes au cours de sa longue carrière. Il perdit un œil dans sa jeunesse, après avoir cru pouvoir se débarrasser en solo d’un Psyker finalement plus coriace que prévu. Son Maître de Chapitre lui remit l’épée énergétique Challenger après qu’il eut gagné un tournoi de tennis, et il l’utilisa pour bannir le Prince Démon de Tzeentch Sethselameth. Après être venu au secours d’une poignée d’Imperial Fists piégés pendant deux cents ans dans le siège d’une station spatiale (le rêve absolu pour eux), les fils de Dorn lui firent cadeau d’un bolter jaune poussin. Enfin, la gemme bleue ornant l’aquila de son plastron lui est revenue après des années de bons et loyaux services1.

On apprend pour terminer que le Capichef est en fait mort au combat, tout son stuff légendaire n’ayant pas fait le poids face à une horde de peaux vertes motivés à faire du vilain sur le monde ruche de Levion Gamma. Ce sont les risques du métier.

1 : Swallow ne devait plus avoir d’idées à ce moment là de l’écriture.

AVIS :

Swallow tire le maximum du format compliqué du 1.000 mots en troussant en décrivant par ses faits d’armes notables (avec un peu de fluff dedans, c’est appréciable) d’un héros méconnu du Chapitre des Blood Angels, ce qui est tout de même plus sympa à lire qu’une micro-baston entre deux tondus et trois pelés. Il y a même un micro-twist à la fin, attention appréciable de la part de l’auteur. Toujours trop cher pour ce que c’est, mais il y a bien pire que cet ‘Honours’, soyez-en certains.

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Deliverance Detail – D. Guymer [40K] :

INTRIGUE :

Deliverance DetailLa nouvelle commence mal pour Callan, membre des Forces de Défense Planétaire d’une planète tout juste conquise par un envahisseur extraterrestre. Emmené avec ses milliers de compagnons d’infortune dans une base militaire tenue par les vainqueurs, il attend, menotté et aveuglé, que son sort soit décidé. Malgré ces circonstances difficiles, il peut au moins compter sur sa foi en l’Empereur pour tenir le coup, à condition de rester discret pendant ses prières : ses gardes ont formellement interdit aux captifs de mentionner Son nom. Qu’importe : Callan est fier d’avoir fait son devoir et de s’être battu trois longues années contre les assauts des hordes chaotiques qui se sont abattues sur sa planète…

Début spoiler…En tout cas, c’est ce qu’il (et ses camarades) croyaient, jusqu’à ce que les assaillants soient rejoints par d’authentiques Space Marines. En plus de plier la campagne avec leur efficacité légendaire, les Astartes firent réaliser à Callan et ses comparses qu’ils s’étaient battus du mauvais côté de l’histoire, la faute à la corruption des dirigeants de la planète et à leur effort de propagande plutôt efficace.

Bien que notre héros dupé se soit aussitôt rendu après avoir réalisé sa méprise, la légendaire bienveillance impériale le mena tout droit au peloton d’exécution. On ne saura pas si la Garde Impériale réserva le même sort aux quinze millions de FDP hérétiques à l’insu de leur plein gré, mais ça ne m’étonnerait qu’à moitié…Fin spoiler

AVIS :

David Guymer livre une micro-histoire tout à fait grimdark dans ce ‘Deliverance Detail’, qui illustre à merveille que l’Imperium, lui, ne fait dedans (le détail, si vous ne suivez pas) lorsqu’il s’agit de pacifier une zone de guerre. Tant pis si vous avez été victime des circonstances ou d’un tour pendable du destin, la morale de l’histoire est qu’il y en a suffisamment comme vous à travers la galaxie pour que votre injuste disparition ne chagrine personne. Personne d’important en tout cas.

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The Contest – J. Ellinger [WFB] :

INTRIGUE :

The ContestLorsque Gotrek et Felix pénètrent dans une auberge minable comme le glorieux Empire en compte tant, après s’être tiré d’une embuscade perpétrée par des bandits locaux peu de temps auparavant, ils ne s’attendaient sans doute pas à ce que leur repos bien mérité soit interrompu par de belliqueux piliers de comptoir. Le récit de leur mésaventure par un Felix encore tout encrassé par cette algarade attire en effet l’attention hostile d’un certain Boxen, dont l’un des cousins a choisi l’honnête carrière de malandrin, et qui a sans doute payé de sa vie sa rencontre malavisée avec le power duo le plus mortel du Vieux Monde. Les risques du métier.

Boxen, qui bénéficie de l’avantage numérique grâce à la présence de quatre compagnons tout aussi interlopes que lui, est tout prêt à lancer une bagarre générale pour réparer l’honneur familial, mais l’aubergiste le convainc que ce n’est pas dans son intérêt d’attirer l’attention de la milice locale sur son gang de petites frappes : aussi, l’affaire sera résolue d’une manière beaucoup plus civile. Un concours de descente de pintes est lancé sans plus tarder, le perdant se retrouvant à la merci du gagnant pour une explication de texte dans un coin tranquille et à l’abri des regards.

Gotrek, sûr de la force de son bras (et de son foie) accepte sans broncher ni réfléchir les conditions défavorables formulées par le retors Boxen avant que l’épreuve ne commence. Alors que le Nain lèvera le coude seul, Boxen et ses hommes picoleront en équipe et se partageront les pintes, rapport de force qui alerte Felix malgré les solides atouts dont le Tueur dispose en matière de picole.

Au final, et après plusieurs heures et tonneaux vidés sans pitié, le concours se termine avant que Boxen et Gotrek n’aient rendu les armes, faute de liquide alcoolisé à ingérer. Très déçu par ce match nul, Gotrek décide de se passer les nerfs sur le dernier ruffian encore debout et éclate donc le pif de Boxen pour la forme, dont le coma éthylique doit se poursuivre encore aujourd’hui…

AVIS :

Une aventure de Gotrek et Felix où personne ne meurt (ou en tout cas, pas face caméra), c’est assez rare pour le souligner. Ceci dit, j’aurais bien aimé que Jordan Ellinger relève le défi d’adapter le plus fidèlement possible le schéma narratif classique de ce sous-genre emblématique de la GW-Fiction dans un format micro-fiction, pour pouvoir juger sur pièce si le concept tient la route (franchement, il y a moyen de faire quelque chose je pense). Cela aurait rendu ‘The Contest’ plus mémorable que ces quelques pages alcoolisées, sans nul doute.

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The Little Things – S. Mitchell [40K] :

INTRIGUE :

The Little THingsDe passage sur une station orbitale très touristique entre deux affections sur le front, le Commissaire Ciaphas Cain profite de la relâche pour rendre une visite de courtoisie à sa bonne amie l’Inquisitrice Amberley Veil, qui réside dans une suite de luxe sous une de ses identités d’emprunt. En gentleman qu’il est, Cain prend soin d’acheter en chemin un bouquet d’heganthas car comme il le dit très bien en aparté quelques lignes plus loin : sur le champ de bataille comme dans un rendez-vous galant, c’est l’attention aux petits détails qui sépare les victimes des vainqueurs.

Accueilli chez sa chère et tendre par sa suivante Zemelda pendant qu’Amberley vocalise sous la douche, Cain a à peine le temps de saluer sa sculpturale hôtesse à la sortie de sa toilette qu’un domestique indélicat vient tambouriner à la porte. Cette impolitesse s’explique par le fait que le nouveau venu n’est pas vraiment venu pour monter des clubs sandwiches aux tourtereaux, comme il le prétend, mais pour tenter de kidnapper Amberley a.k.a. la riche duchesse Trucmuche de la planète de Cétréloin afin de demander une rançon à sa famille. Les pauvres jaloux des riches, vraiment, quelle plaie.

Malheureusement pour le ruffian et ses deux comparses, il faut plus qu’une arrivée au débotté pour mettre en difficulté un héros de la trempe de Cain, surtout s’il peut compter sur l’aide d’Amberley qui n’hésite pas un instant à reconvertir sa serviette drap en fouet, désarmant le dernier larron au moment où il allait donner au Commissaire un nouveau trou de balle et permettant à ce dernier de lui rendre la pareille de manière préventive. Comme Cain le fait remarquer avant que le rideau ne tombe définitivement sur cette soirée entre adultes consentants, le malfrat aura au moins eu la chance d’emporter avec lui une dernière vision beaucoup plus plaisante que la majorité des tués du 41ème millénaire. Ce n’est pas grand-chose c’est vrai, mais comme dit plus haut, ce sont les petites choses qui comptent…

AVIS :

Aventure plus grivoise que musclée de Ciaphas Cain, ‘The Little Things’ ne fait rien d’autre que montrer au lectorat de l’héroïque Commissaire que ce dernier sait prendre du bon temps lorsque le devoir ne l’appelle pas, même si sa capacité surnaturelle à créer du drama autour de lui peut générer quelques menus désagréments de temps à autre. Rien que les habitués de la saga ne connaissent pas déjà.

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On the Heels of Morkai – N. Kyme [40K] :

INTRIGUE :

On the Heels of MorkaiÀ la surface de Fenris, un humain solitaire est poursuivi par deux des loups géants pour lesquels la planète est célèbre à travers l’Imperium. Sa course échevelée (tous les locaux portent la moumoute, c’est une coutume immémoriale) le mène à travers un lac gelé, où il réveille par mégarde un kraken endormi sous la surface. N’étant équipé que de sa biht1 et de son couteau, cette rencontre aurait pu très mal se terminer pour notre marathonien de l’extrême, qui parvient toutefois à regagner la terre ferme avant de se faire tentaculer par le poulpe d’eau douce.

Pas le temps de reprendre son souffle, cependant : il faut à notre coureur isolé traverser une forêt pleine d’arbres en bois, puis s’atteler à l’ascension en solo d’une falaise de 400 mètres de haut, toujours poursuivi par les infatigables prédateurs de la toundra de Fenris (qui ont certainement trouvé un chemin pour monter en haut du pic, ce qui pose la question de pourquoi notre athlète n’a pas fait la même chose au lieu de risquer sa vie de la sorte…). Enfin arrivé au sommet, il fait face à la figure imposante d’un Prêtre des Runes Space Wolf, et se prépare à être jugé par cet austère guerrier…

Début spoiler…Enfin ça, c’est si notre héros avait été un simple impétrant au Chapitre. Canis Wolfborn, car c’était lui, a passé cette épreuve depuis belle lurette, et le gonze qui l’attend en haut de la montagne est simplement venu le rappeler à ses devoirs. Un appel à l’aide est parvenu jusqu’au Croc, et en l’absence probable de Harald Deathwolf, il revient à son champion de décider si le rout y donnera suite. Comme on peut s’y attendre, Canis accepte avec joie de relever ce défi, promettant à ses loups de compagnie Timba et Mia (avec lesquels il faisait la course, et n’était pas chassé par ces derniers comme on en avait l’impression) qu’il leur accordera une revanche à son retour. Mais le travail avant tout. Fin spoiler

1 : Un mot fenrisien dont le sens a malheureusement été perdu. C’est dommage.

AVIS :

Mine de rien, les nouvelles de la Black Library où un Space Wolf court comme un dératé à travers la toundra en essayant de survivre aux conditions extrêmes dans lesquelles il évolue sont suffisamment nombreuses pour constituer un sous-genre de la littérature grimdark. Même si la concurrence n’est pas pléthorique, ‘On the Heels of Morkai’ peine à s’imposer comme un modèle du genre, la surprise finale réservée au lecteur par Nick Kyme ne s’avérant (à mon sens) guère crédible. Voir un Prêtre Rune attendre patiemment en haut d’une falaise que son boss termine sa morning routine (et venir sur place avec Fangir1 pour encore plus de fun) au lieu de cueillir Canis en plein milieu de la pampa avec un Stormfang me semble vraiment peu correspondre au lore de 40K. Dispensable.

1 : Ici orthographié Fregir, probablement parce que Kyme est trop haut placé à la BL pour que ses textes soient relus et édités.

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The Last Little Bit – R. Earl [WFB] :

INTRIGUE :

The Last Little BitIl est temps pour Gofg Dent d’Or Tyran de sa tribu depuis plus de quarante ans, de se choisir un héritier. Il se fait vieux (même pour un Ogre), et a déjà dû refroidir les ardeurs parricides de deux de ses fils d’une manière définitive par le passé : il est grand temps de passer la main. Pour ce faire, il a convié le reste de sa marmaille à un gueuleton de compétition, où les règles sont simples : qui mange gagne.

Après trois jours à banqueter sans interruption, ils ne sont plus que trois à la table : Papa Gofg, Grond et Graissus. Bien que les trois Ogres soient depuis longtemps passés dans le dur, aucun n’est prêt à baisser la garde ni à jeter la serviette, et le Boucher de la tribu continue à les régaler de ses spécialités carnées (et plus ou moins faisandées, ça rajoute du goût), jusqu’à ce que le drame se produise : le garde-manger a été vidé, il ne reste plus rien à ingérer pour nos fins gourmets.

Bien que Père Castor Dent d’Or soit en faveur de déclarer un match nul, quitte à recommencer plus tard (le temps de digérer un peu, et de passer au petit coin – je plains le service de ménage Gnoblar…), Graissus ne peut se résoudre à interrompre son effort si près de la victoire. Il attrape donc une chaise, et la fracasse péniblement sur le crâne paternel, envoyant ad patres le vieux Tyran. Dès lors, la suite est toute tracée : le Boucher découpe prestement le cadavre du macchabée en deux parts égales (de 250 kilos chacune, tout de même), et le concours d’ingestion peut reprendre de plus belle.

Malgré les conséquences terribles pour son système digestif, poussé dans ses derniers retranchements par cette boulimie cannibale, Graissus parvient en premier à terminer sa moitié alors que Grond démontre des signes manifestes de calage. Enfin, presque terminer. Il lui reste en effet sa part du « dernier petit bout1 » paternel à ingurgiter, et lorsque le Boucher fait son office et tranche l’ultime portion en deux, Grond se met à dégobiller le contenu de sa panse boursoufflée. Qui a dit que les Ogres n’étaient pas sensibles ? Ce déluge de vomi, dont il prend quelques litres en pleine figure, ne perturbe pas le moins du monde Graissus, qui avale sans faiblir le dernier morceau et devient par la même occasion Tyran incontesté de la tribu Dent d’Or. La suite appartient à l’histoire (et à la cuvette des toilettes…).

1 : Que Robert Earl se contente d’appeler de cette manière, comme s’il s’agissait d’une expression consacrée (après quelques recherches, je n’ai rien trouvé de tel). Vous pouvez donc vous représentez ce que vous voulez, et pas seulement l’option la plus salace qui soit (pervers).

AVIS :

Robert Earl, grand spécialiste des Ogres devant l’éternel, développe en quelques pages l’origin story du plus grand – et gras – des Tyrans des Montagnes des Larmes, présentée de manière succincte dans les Livres d’Armée de cette noble race. Même si on sait d’avance comment l’histoire se termine, notre homme est assez bon conteur pour que le récit de ce banquet proprement pantagruélique, voire même carrément gargantuesque, mérite la lecture. C’est gore, c’est glauque, mais ça reste malgré tout assez drôle tellement c’est over the top en matière d’ingestion de protéines. À consommer jusqu’au dernier petit bout, comme il se doit.

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Like Father, Like Son – M. Latham [WFB] :

INTRIGUE :

Like Father, Like SonUn homme (Jens) et son jeune fils de cinq ans s’aventurent en pleine nuit à travers les terres sauvages et pas vraiment hospitalières de l’arrière-pays du Middenland. En chemin, Jens prend soin d’inculquer à son rejeton tous les trucs et astuces de trappeur trotro balèze qu’il a lui-même appris de ses aïeux ou développé au cours de sa longue et ardue existence, comme ne jamais utiliser l’autoroute (c’est cher et c’est mal fréquenté), ou encore éviter la compagnie des étrangers. Un gai luron ce Jens, vraiment.

Leur road trip nocturne emmène les deux marcheurs à travers les ténèbres de la Drakwald, et sur le territoire des multiples prédateurs qui y rôdent. Après avoir repoussé l’attaque d’une meute de loups un peu trop entreprenante, et évité les toiles d’araignées de fort belle taille, la destination que Jens cherchait à atteindre apparaît enfin au détour du sentier. Nul doute que ça valait le déplacement…

Début spoiler…Et en effet, on ne trouve pas plus chaude ambiance à des lieues à la ronde que le campement d’Hommes Bêtes où le vieil excentrique a amenés son fiston. Jens n’est pourtant pas un adepte du Chaos, seulement un père lucide : son petit gars est un mutant dont les difformités sont trop visibles pour lui permettre de vivre normalement parmi ses semblables, et le seul moyen pour lui d’échapper au bûcher des Répurgateurs est de partir en pension dans une harde de Gors plus ouverts d’esprit que le péquin impérial moyen. La nouvelle se termine alors que le Chamane de la tribu s’en va accueillir la nouvelle recrue de cette dernière, laissant Jens partir sain et sauf mais le cœur gros d’abandonner son enfant. Le placement est parfois la seule solution qui vaille…Fin spoiler

AVIS :

Même si on se doute rapidement à la lecture de ‘Like Father, Like Son’ que Mark Latham nous réserve une surprise finale, ce dernier mène bien sa barque et parvient à accomplir son objectif avec cette petite nouvelle qui explore de manière assez touchante les liens ténus mais pas absents entre humains « normaux » et mutants dans le monde de Warhammer. A classer à proximité de ‘The Hunter’ (G. Lyon), tant pour la longueur que pour les protagonistes, mais à placer au-dessus de cette autre microfiction.

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Out Caste – P. Fehervari [40K] :

INTRIGUE :

Out CasteUne vétérane (et c’est assez rare pour le souligner) couturée de la Caste de Feu se souvient de ses débuts au service du Bien Suprême, du temps où elle était une jeune recrue charismatique et déterminée à s’élever dans les rangs. Baptisée J’kaara (miroir) en raison de sa nature altruiste et de sa capacité à tirer le meilleur de ses camarades, elle commença sa carrière lors de campagnes mineures contre la menace Ork. Le vrai test fut cependant l’invasion de la planète Oba’rai, monde impérial isolé et défendu par un seul régiment de Gardes Impériaux, des adversaires bien plus nobles que les peaux vertes aux yeux de l’idéaliste Kaaren.

La campagne se déroula parfaitement du point de vue du haut commandement, les humains se faisant surclasser par les tactiques de frappes éclair et la supériorité technologique de leurs adversaires. Lorsque la capitale planétaire tomba sous les bombardements, des auxiliaires Kroots furent envoyés faire le sale boulot (et casser la croûte) dans les décombres de la cité pour éliminer les dernières poches de résistance, plutôt que de risquer la vie de braves, mais pas téméraires, T’au. Ce choix raisonnable ne satisfit cependant pas J’Kaara, qui désobéit aux ordres et emmena son escouade faire un peu de tourisme en zone de guerre urbaine afin d’assouvir ses penchants héroïco-morbides.

Mal lui en prit toutefois, car elle croisa en route un Commissaire impérial brûlé au 8ème degré mais dont la vue d’une peau bleue le sortit de l’état catatonique dans laquelle la tempête de feu déchaînée par les T’au l’avait placé. Bien que ses camarades ionisèrent le faquin avant qu’il n’ait pu régler son affaire à la pauvre J’kaara, cette dernière sortit de cette rencontre fortuite avec une énorme balafre, l’épée tronçonneuse de l’officier gue’la ayant transpercé son casque sans coup férir. Cette mésaventure ne fractura pas seulement le crâne de notre héroïne, mais également son sentiment de fraternité avec ses camarades, qui se mirent à appeler la shas’ui Jhi’kaara, ou miroir brisé. Sometimes, it’s better not to say hi, you know…

AVIS :

Peter Fehervari nous entraîne dans les premières vrilles de son Dark Coil1 avec cet ‘Out Caste’, qui met en scène le premier personnage récurrent de cette série iconique de la Black Library, la gueule cassée Jhi’kaara (que l’on retrouve dans ‘A Sanctuary of Wyrms’ et ‘Altar of Maws’), dont on apprend en quelques pages l’histoire traumatisante – dans tous les sens du terme. Ce n’est pas aussi inventif dans le propos ou virtuose dans l’exécution que les nouvelles et romans qui ont suivi, mais ça reste malgré tout une très bonne entrée de GW-Fiction.

1 : Sa première nouvelle (‘Nightfall’) pour la Black Library date de 2011, et bien qu’elle se déroule techniquement dans le même coin de galaxie que le reste du corpus Fehervariesque, les liens avec ce dernier sont assez ténus, comme si notre homme n’avait pas encore décidé de se lancer dans une véritable œuvre au long cours à ce stade.

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Czevak to the Dark Tower Came – R. Sanders [40K] :

INTRIGUE :

Czevak to the Dark Tower CameLe calme profond de la lune Savignor, centre de recherche et de formation réputé parmi l’élite du Segmentum Obscurus, est brutalement brisé par l’arrivée pétaradante de l’Inquisiteur Bronislaw Czevak, qui franchit l’un des portails de la Toile aux manettes d’une motojet sans nul doute « empruntée » à une connaissance Eldar.

Si les universitaires qui composent la majorité des habitants de ce petit havre de paix et d’ordre dans une galaxie tourmentée s’offusquent de cette arrivée bruyante autant qu’inattendue, ils n’en donnent pas signe. Ils ont pour cela une bonne raison, comme Czevak ne tarde pas à le découvrir une fois qu’il a terminé des faire des burn dans les pelouses de son ancien QG (il a étudié sur Savignor en son jeune temps) : ils sont tous morts. Un suicide de masse semble avoir été décrété sur la lune il y a quelques heures, et les Savignoriens, en bons sujets de l’Imperium, se sont pliés à cette injonction morbide sans rechigner. Comme c’est gentil de leur part.

Enquêter sur les raisons de cet acte de folie collective aurait sans doute pris des plombes, mais heureusement notre héros a de bonnes raisons de suspecter que ce fieffé coquin d’Ahzek Ahriman est derrière tout ça (comme il était derrière Tizca). Czevak part donc à fond de train en direction de la fameuse Tour Sombre de Savignor, où sont enfermés les reliques et tomes les plus dangereux de la collection planétaire afin de préserver l’Imperium de leur sinistre influence tout en permettant aux quelques esprits assez aiguisés pour cette tâche de consulter ces archives interdites. Si le concept ressemble furieusement à la Bibliothèque Interdite des Eldars, où Czevak a finalement réussi à obtenir sa carte (‘Atlas Infernal’), ce n’est absolument pas une coïncidence. Malheureusement pour les gardiens de la Tour Sombre, le Materium est beaucoup trop accessible aux ruffians de tout espèce, et le petit contingent de Gardes Impériaux (en robe !) stationné sur la lune pour en assurer la sécurité n’a rien pu faire contre la fureur méthodique des Rubric Marines d’Ahriman, comme les impacts de bolter parsemant les murs et les corps croisés par Czevak le montrent bien.

Après une ascension éprouvante et capacitiste (il n’y a aucun ascenseur dans la Tour Sombre, soi-disant pour permettre aux visiteurs de discuter et débattre entre eux sur le chemin de la connaissance), notre héros arrive à l’épicentre du drame qui s’est joué sur Savignor. Dans un hall d’exposition comme la Tour en compte des dizaines, les éclats épars d’une statue de cristal jonchent le sol. Cette statue, un jeune Czevak l’avait contemplée un jour qu’il était entré par effraction dans la Tour Sombre (dont le niveau de protection laisse vraiment à désirer), sans comprendre qu’il s’agissait des restes d’un Prophète Eldar trèèèèèèèèès âgé. Ce n’est que des années plus tard, et grâce aux connaissances glanées au contact des Prophètes Blancs de la Bibliothèque Interdite, que l’Inquisiteur a réalisé que cette statue kitschissime était une relique psychique d’une valeur incommensurable, dont l’un des nombreux usages pouvait être un catalyseur de prophétie, ou quelque chose comme ça (vous voyez l’idée).

On ne saura pas comment Ahriman eut vent de l’existence et de la localisation de cette statue, mais force est de constater qu’il a réussi son coup, comme les fragments cristallins et la très lourde ambiance planant sur les décombres le laissent constater. L’esprit endurci de Czevak et la protection apportée par l’Atlas Infernal lui permettent de ne pas succomber à la même sinistrose terminale que celle qui a déferlé sur les pauvres Savignorais lorsque que le Sorcier suédois s’est offert une latte de crystal meth, mais les nouvelles ne sont pas bonnes pour autant. Il semble qu’Ahriman ait localisé un fil de destinée qui lui permettrait d’atteindre son but : être élevé au rang de divinité (mineure, faut pas déconner) du Chaos. À Bronislaw Czevak d’empêcher cette ascension s’il le peut : le sort de l’Imperium pourrait bien en dépendre…

AVIS :

Rob Sanders poursuit sa biographie de l’Inquisiteur Czevak dans ce court (sauf le titre) ‘Czevak to the Dark Tower Came1’, publié après la sortie du roman ‘Atlas Infernal’, déjà consacré à ce membre iconoclaste des Saints Ordos. On sent une volonté de l’auteur de remettre une pièce dans la machine, et de redonner un but à son héros bariolé après les événements narrés dans le long format précédemment cité. Le résultat est convenable, les miettes de fluff relatifs à Czevak et au Segmentum Obscurus que contiennent ces quelques pages venant agréablement compléter une intrigue simple mais bien alignée avec les canons du grimdark (il n’y a qu’à 40K que des millions de personnes peuvent se suicider après qu’une babiole en cristal de roche ait été fracassée au sol). Ayant déjà lu le reste des travaux Czevakiens de Sanders au moment où je m’attèle à cette revue, je peux malheureusement vous assurer qu’il est mieux de laisser définitivement le bon Inquisiteur sur ce relatif succès narratif, plutôt que de s’affliger les péripéties pataudes que Sanders et la BL crurent bon de développer dans ‘Necessary Evil’ et ‘Shadow Play’.

1 : Une référence au poème de ‘Childe Roland to the Dark Tower Came’ Robert Browning, lui-même inspiré d’une tirade du ‘Roi Lear’ de Shakespeare. C’est la même « tour sombre » qui inspira également les œuvres de C. S. Lewis (le papa des ‘Chroniques de Narnia’) et de Stephen King.

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Veritas Ferrum – D. Annandale [HH] :

INTRIGUE :

Veritas FerrumIl est des événements auxquels il vaut mieux arriver tôt pour être certain de les expérimenter dans les meilleures conditions. Qu’il s’agisse de se retrouver au 78ème rang d’un concert à la sono capricieuse, ou de découvrir que le bar ne sert plus que des soft, on a tous connu des grands moments de solitude de temps à autres. Fort heureusement (?) pour le Capitaine Durun Atticus et son contingent d’Iron Hands embarqués sur le Veritas Ferrum, le massacre d’Isstvan V ne se déroula pas selon la règle du « premier arrivé, premier servi ». Bien que relégués dans la seconde vague medusane à cause de l’empressement de Ferrus Manus d’aller mettre une taloche à ses frangins rebelles, et ainsi gagner la gratitude (à défaut de l’amour, ce serait trop demander) paternelle, Atticus et ses Space Marines arrivent dans le système à temps pour bénéficier de la légendaire hospitalité des légions renégates, et le Veritas Ferrum se retrouve engagé par deux croiseurs des Night Lords et de l’Alpha Legion à peine sorti du point de Mandeville. On peut dire ce qu’on veut de lui, mais Horus a toujours été un hôte prévenant.

Trop pragmatique et désincarné pour se ronger les ongles (par absence de dents et d’ongles) devant ce coup du sort, Atticus passe en mode MathHammer et prend les décisions qui s’imposent pour sortir victorieux de ce threesome non désiré. Rencardé sur la situation désastreuse des loyalistes à la surface d’Isstvan V et le probable décès de son Primarque par les extraits de communication entre unités Iron Hands captés par le pont du Veritas Ferrum, le pragmatique Capitaine ordonne la retraite, conscient qu’il est de sa responsabilité de sauver ce qui peut l’être de sa Légion de cette débâcle.

C’est le moment que choisissent deux Thunderhawks Salamanders pour se joindre aux réjouissances, talonnés par une escadre de vaisseaux Sons of Horus et Emperor’s Children. À leur bord, le Sergent Khi’dem contacte le Veritas Ferrum pour l’implorer de les prendre en stop avant qu’il ne leur arrive malheur, et parvient à toucher une des rares cordes sensibles d’Atticus lorsqu’il révèle que des Iron Hands font partie des survivants ramassés par les altruistes fils de Vulkan avant leur départ en catastrophe. Atticus se ravise donc, et le Veritas Ferrum se jette dans la gueule du loup lunaire1 pour prendre à son bord les Thunderhawks durement éprouvés, héritant au passage de quelques dommages supplémentaires dont une brèche critique sur un flanc.

Au final, l’acte chevaleresque d’Atticus lui coûte plus de vies d’Astartes qu’il n’en rapporte (c’est ce qui s’appelle se faire ratio au 31ème millénaire), et le saut Warp que le Veritas Ferrum s’apprête à faire pour semer ses poursuivants s’avère des plus risqués, les dommages de coque subis lors de la dernière canonnade ayant compromis son intégrité. Les mains de fer et leurs amis à écailles et à plumes parviendront-ils à s’en sortir ? La réponse au prochain épisode…

1 : Enfin plus vraiment à ce stade, mais si vous avez compris la référence, vous excuserez la blague (ou l’inverse).

AVIS :

Prologue du plus mauvais (ou en tout cas, le moins bien accueilli par la communauté, comme sa note de 3.23 – aux dernières nouvelles – sur GoodReads le montre) roman de l’Hérésie d’Horus, ‘Veritas Ferrum’ n’est pas aussi mauvais que son infâme filiation pourrait le laisser craindre. Cette petite nouvelle permet ainsi d’illustrer le côté sans concession des Iron Hands, prêts à abandonner leurs frères et leur Primarque sur le champ de bataille si cela leur permet de maximiser leurs chances de remporter la campagne. Pas mémorable, mais pas abominable non plus.

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Et voilà qui conclut cette revue, tardive mais pas inutile (en tout cas je l’espère) du Black Library 2012 Advent Calendar. Je dois reconnaître que j’ai été favorablement surpris par la qualité des soumissions proposées par les 24 auteurs rassemblés par les pontes de Nottingham pour cette expérimentation festive, malgré un format peu évident à négocier et une offre commerciale réservée à la clientèle la plus aisée de ce hobby de riches qui est le nôtre. Rien que pour ce dernier facteur, je ne regrette pas d’avoir fait l’impasse sur ce bundle à sa sortie, tout comme je ne regrette pas d’avoir parcouru cette sélection de microfictions écrites par quelques-unes de meilleures plumes de la GW-Fiction. Vous parlez d’un paradoxe. Rendez-vous dans un futur incertain mais sans doute pas trop lointain pour la suite de la série, dont vous pouvez déjà deviner l’année, sans nul doute…

INFERNO! – ANNEE 3

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue des nouvelles publiées dans les numéros #13 à #18 d’Inferno!, troisième année de publication du bimensuel couvrant la période allant de juillet 1999 à mai 2000). Feeling old yet ?

Même si Abnett n’est pas aussi omniprésent que pendant la saison précédente, il reste un des contributeurs principaux de la série étudiée aussi avec pas moins de trois soumissions, tout comme Gav Thorpe, Robert Earl et Gordon Rennie. Cette troisième année est également marquée sous le sceau de Neil Rutledge, qui en profita pour signer ses deux seules nouvelles pour le compte de la Black Library avant de partir vers d’autres cieux, et du grand revenant Brian Craig, qui avait fait les riches heures de la GW-Fiction des années avant que la BL ne soit lancée. Really not feeling old yet ?

Inferno!_Année 3

Cette année 3 voit les débuts de deux séries mineures dans l’univers de Warhammer 40.000 : celle des Iron Snakes (Black Gold, White Heat), soit rien de moins que le Chapitre Space Marines personnel de Dan Abnett, et celle d’Execution Hour (Baptism of FireMatters of Honour), décrivant de manière assez originale le déroulé de la guerre gothique depuis le point de vue du capitaine du Lord Solar Macharius. Il faut dire qu’à l’époque, Games Workshop venait juste de sortir le jeu Battlefleet Gothic, et si cela ne vous fait pas sentir le poids des années, vous êtes probablement un être immortel… Ah, et tant qu’on y est, et puisque je suis d’une humeur charitable, le Tybalt’s Quest de Gav Thorpe peut aussi être considéré comme l’épisode fondateur d’un arc narratif, puisque le brave Tybalt nous reviendra quelques mois plus tard dans Tybalt’s Battle1.

Le cadre étant posé, il est temps de partir à la (re)découverte des 23 nouvelles qui forment le corpus de cette troisième année infernale, afin d’établir si le presque quart de siècle qui nous sépare de leur publication initiale se fait sentir à la lecture. Accrochez-vous à votre siège, on va changer de millénaire…

1 : Et bien des années plus tard, Dan Abnett rachètera l’honneur de tous les Tybalt en donnant ce nom à l’un de ses seconds couteaux de l’Hérésie d’Horus. Un acte miséricordieux.

Inferno! Année 3

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Gilead’s Test – D. Abnett [WFB] – #13 :

INTRIGUE :

WFB_Gilead's TestCette fois-ci, c’est la bonne. Après s’être vengé de la mort de son frère jumeau (‘Gilead’s Wake’), puis sombré dans la dépression et finalement choisi de consacrer sa vie à combattre le mââââl sous toutes ses formes (‘Gilead’s Fate’), notre héros a enfin opéré sa pleine mue et atteint sa forme finale, celle de VHS (Vigilante Hagard et Sociopathe). Nous retrouvons donc l’autre duo G&F légendaire de Warhammer Fantasy Battle à la sortie d’un accrochage disputé contre une bande d’Elfes mutants (eh oui, ça existe), alors que nos amis cherchaient le chemin de la Tour de Talthos Elios afin d’aller rendre visite à leurs lointains cousins…

Les aléas de la guerre ont séparé le couple fusionnel (c’est pas moi qui le dit, c’est Abnett), laissant Fithvael émerger difficilement d’un KO sans graves conséquences pour sa vieille personne, mais désespéremment seul parmi les cadavres de ses adversaires. Petite consolation, sa fidèle jument ne l’a pas déserté, et le dévoué serviteur peut se lancer sur les traces de son maître disparu sans tarder (même si sa méthode d’investigation est tellement scrupuleuse qu’il lui faut une journée entière avant de décider par où partir). Gilead, de son côté, s’est fait piteusement assommer par la dernière de ses victimes, et a été récupéré par un des quelques survivants de son épisode shadow fast, qui l’a amené à la fameuse Tour. Si les Elfes pervertis qui occupent les lieux n’ont pas occis le fier héros, c’est qu’ils souhaitent le rallier à leur cause, ce qu’ils font en lui jetant un sort pendant qu’il est inconscient : à son réveil, il perçoit ses hôtes et leur domaine comme parfaitement hauts elfiques, et se remet donc doucement de son trauma crânien en bonne compagnie, pendant que son brave Fithvael s’enquille des nuits humides à sa recherche. Il n’y a pas de justice, décidément.

Fifi peut toutefois compter sur l’apparition fortuite d’un Mutelfe (appelons les comme ça) pour le remettre sur une piste qui menaçait de se refroidir salement (à son image). Pour vous refaire le topo : Fithvael est réveillé en sursaut par l’arrivée du maraud, sans doute trahi par sa mauvaise odeur, et lui pourrave le gu*ule – sans grands effets il faut bien le reconnaîte – jusqu’à ce que son placide adversaire décide de repartir. Pas né de la dernière pluie, l’ancêtre décide de laisser à sa proie une longueur d’avance, pensant – à juste titre – qu’elle finira par le mener jusqu’au lieu où Gilead est retenu. Tout fonctionne plutôt bien jusqu’à ce que le lièvre de Fithvael, sérieusement esquinté, s’effondre au sol et se fasse rattraper par son poursuivant. S’en suit alors une scène grotesque (qui est la raison pour laquelle je suis descendu dans ce niveau de détail, je l’avoue), au cours de laquelle Fithvael fait du bruit de façon menaçante à proximité de son gibier, dans l’espoir de le faire sortir de son coma, et pouvoir ainsi continuer sa traque. C’est complètement con, je vous l’accorde… et ça ne marche pas. Il y a bien une justice, finalement (cf paragraphe précédent).

De son côté, Gilead, qui a bien récupéré, et est tombé à moitié sous le charme de la fille de son hôte, la ravissante Gudula (WTF Dan ?), se dit qu’il est temps de se remettre en forme après avoir passé tout ce temps (le sort qui lui a été jeté transforme les jours en semaines) allité comme une grosse feignasse. Quelques sessions de salle plus tard, Gigi se met à en faire (du sale), sa redécouverte du shadow fast envoyant trois de ses sparring partners à l’infirmerie, sans que notre psychopate aux oreilles pointues ne s’en émeuve. Quel héros, vraiment. Il est temps que cette sinistre histoire arrive à son terme, ce qui se passe lorsque Fithvael, qui, par miracle, a fini par trouver la Trump Tower de la Drakwald, se fait chopper comme un bleu par la patrouille, et assommer à son tour sans sommation. Trop cléments, les Eliossiens le ramènent à l’intérieur pour tenter de le recruter à son tour, mais c’est sans compter sur Gilead, qui reconnaît son vieux compaing, et, ne se posant absolument pas la question de savoir pourquoi il est amené à la Tour comme un sac à patates, le fait monter dans ses quartiers pour lui prodiguer des soins. Se réveillant sans avoir été enchanté à son tour, Fithvael se rend compte que quelque chose cloche devant le choquant manque de réaction de son maître devant l’intérieur décrépit et l’aspect dégoulinant de ses hôtes. Le vieil Elfe fait toutefois comme si de rien n’était, jusqu’à ce que, grâce au pouvoir de l’amour (ou quelque chose comme ça), il arrive à lever le sort qui touchait Gilead, juste avant que ce dernier ne bascule totalement du côté moisi de la Force.

Si la sortie de la Matrix est douloureuse pour notre héros (notamment parce qu’il se rend compte qu’il a littéralement bouffé de la m*rde pendant des semaines), elle l’est incomparablement plus pour les perfides Mutelfes, qui se font tronçonner sans délai par la paire infernale. Ce n’est toutefois que la première étape de la nouvelle vendetta entreprise par Gigi, qui se dirige à grande hâte vers le fameux Tertre ayant perverti Talthos Elios, pour exercer une saine et cathartique vengeance sur le mââââl qui y rôde…

AVIS :

Péripétie franchement bizarre de la geste Gileadesque (encore que, on est très loin des niveaux de ‘Gilead’s Curse’), ce ‘Gilead’s Test’ comporte plusieurs étrangetés scénaristiques assez déplacées pour une soumission de Dan Abnett. Alors que les deux épisodes précédents s’étaient révélés être de courtes nouvelles robustement construites à la lecture agréable, ce plus long format, qui se termine d’ailleurs sur la promesse d’un grand nettoyage de printemps du fameux Tertre de Talthos Elios (jamais couvert dans Inferno!, ce Gilead’s Test étant le dernier épisode de la sage publié dans le magasine), se révèle une succession d’événements abscons et/ou inintéressants, emmenant le lecteur jusqu’au bout de ses 13 pages avec la grâce et la cadence du pauvre Mutelfe trucidé par Fithvael en chemin. Serait-ce le début de la fin pour le héros de Dan Abnett et Nik Vincent ? Ce n’est pas en lisant Inferno! que nous le saurons, mais le dernier passage de Fifi et Gigi dans les pages infernales ne fait pas vraiment plaisir à lire…

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Nightmare – G. Thorpe [40K] – #13 :

INTRIGUE :

Nous suivons les péripéties oniriques du jeune Joshua, dont l’adolescence a pris un sale tour depuis que sa famille et ses amis l’ont rejeté pour crime de sorcellerie, forçant le jeune homme à vivre seul dans le désert inhospitalier de la planète de Sha’ul. Seul ? Pas tout à fait. Une mystérieuse voix, que l’on appellera donc Daniel, lui tient compagnie et lui prodigue des conseils dans son exil, sans que le peu curieux Joshua s’interroge beaucoup sur l’origine de ce phénomène. Pour la première fois depuis que son ami imaginaire lui rend visite, la Voix a retentit dans son esprit alors qu’il était endormi, et lui propose rien de moins que de participer à une grande aventure, comme quand il était enfant et jouait au Space Marine, ainsi que font les bambins de l’Imperium.

Sur les indications de The Voice, Joshua part donc en vadrouille et commence à farmer du mob démoniaque de bas étage, grâce aux pouvoirs merveilleux de son esprit, capable de matérialiser des armes et des armures à volonté pour affronter toutes les épreuves de ce qui ressemble fort à un RPG en réalité virtuelle (ça doit être commun au 41ème millénaire). Bien que Joshua ne soit pas plus violent que la moyenne, l’aspect répugnant des créatures qu’il rencontre et l’assurance maintes fois répétées par la Voix que tout ça n’est qu’un rêve, conduisent notre héros à commettre un véritable massacre grâce à ses pouvoirs psychiques fantasmés.

Guidé par son GPS intégré, Joshua finit par arriver devant un bâtiment dont l’entrée est gardée par une grille de fer, dont il tort aisément les barreaux avant de se glisser dans un étroit tunnel en prenant la forme d’un serpent. Au bout du compte, il parvient dans une salle obscure où l’attend le « boss de fin », un tas de saindoux à tentacules que la Voix l’incite à tuer pour terminer sa quête. Bien fatigué par ses aventures et lassé de ces tueries incessantes, Joshua fait mine de refuser mais son compagnon excite son amertume et sa rage d’avoir été abandonné par ses proches à cause de sa différence jusqu’à ce que le jeune homme pète les plombs et étrangle à mains nues sa victime dans un accès de colère. Ceci fait, la Voix lui annonce qu’il n’a qu’à imaginer qu’il est de retour à son point de départ pour sortir de ce rêve étrange et pénétrant, et lui promet de le laisser désormais tranquille…

Début spoiler…A son réveil, Joshua a la surprise de découvrir qu’il n’est pas dans sa cahutte du désert, mais dans un jardin luxuriant qui ne peut être que celui du Gouverneur Planétaire Ree en personne. Surprenant la conversation de passants alors qu’il se cache dans les fourrés, il comprend alors qu’un mystérieux assassin a réussi à s’infiltrer dans le palais, massacrant les gardes et les sentinelles au cours de sa progression, défonçant tous les obstacles et se glissant dans les moindres interstices, jusqu’à parvenir dans la chambre du Gouverneur, retrouvé étranglé dans son lit au petit matin. La nouvelle se termine avec l’horrible réalisation par Joshua qu’il s’est fait grandiosement balader par celui qu’il considérait comme son seul ami, pendant que dans le Warp, un démon mineur de Tzeentch ricane follement en se tenant la bedaine…Fin spoiler

AVIS :

Gav Thorpe tenait une idée de nouvelle assez intéressante avec ce ‘Nightmare’ (Adventure Times à la sauce 40K, rien que ça), mais il pêche un peu par son exécution, qui ne laisse pas assez planer de mystère sur les actions accomplies par Joshua lors de sa virée nocturne à mon goût. Dès lors que Thorpe nous révèle que son héros a été chassé de son village après avoir été accusé d’être un sorcier (donc un Psyker en puissance), n’importe quel lecteur au fait de son fluff prendra le ‘it’s just a dream bro’ que la Voix sert à Joshua à toutes les sauces avec les pincettes de rigueur. J’ajoute que ‘Nightmare’ exploite le même filon qu’une vieille nouvelle de 40K, autrement plus mémorable car joyeusement foutraque (normal pour une soumission d’Ian Watson, vous me direz) : ‘Warped Stars’. L’imitation est la forme la plus sincère de flatterie, et on peut pardonner à un auteur – à l’époque – aussi vert que Gav Thorpe de vouloir s’inspirer d’un auteur vétéran et célébré comme Watson, mais cela ne vient pas non plus jouer en faveur de son travail. Bref, une petite nouvelle fort convenable mais absolument pas mémorable.

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Angels – R. Earl [40K] – #13 :

INTRIGUE :

Alors que la fin approche pour lui, après une longue vie de près de 50 ans (ce qui est apparemment respectable sur la planète féodale sur laquelle il vit), Bobby1 se remémore l’événement le plus marquant de son existence, un souvenir tellement puissant qu’il l’a guidé dans les moments charnières de sa vie, depuis l’accouchement de sa femme jusqu’à l’extermination d’une meute de loups un peu trop familiers. Cela s’est passé il y a bien longtemps, lorsqu’il n’était qu’un petit nenfant…

Né dans le petit village de Pasternach, Bobby connut une enfance rude mais heureuse dans ce hameau fort éloigné du tumulte grimdark d’une galaxie hostile, jusqu’à ce que des signes inquiétants se multiplient dans les environs immédiats du bourg. Les méthodes traditionnelles (envoyer une patrouille faire mumuse dans la forêt voisine) n’ayant, pour une fois, pas donné les résultats escomptés, une douce psychose commence à s’abattre sur Pasternach au fur et à mesure que des événements sinistres se produisent dans le voisinage (meurtre sauvage d’un vieil ermite qui résidait un peu en retrait du village, disparition de l’expédition de volontaires envoyés quérir de l’aide dans la ville la plus proche, incendie probable de cette dernière en pleine nuit). Décidés à se défendre contre les forces maléfiques qui crapahutent dans les sous-bois, les villageois transforment leur communauté en fort retranché, mais cela ne décourage pas la bande de mutants assoiffés de sang et de chair fraîche qui constitue la cause de leurs tracas de passer à l’attaque, au cœur d’une sombre nuit d’automne.

Malgré leur vaillance et leurs outils de ferme soigneusement affutés, tout aurait pu et dû très mal se finir pour les Pasternachois, très démunis face à la férocité et au nombre de leurs assaillants. Au moment où tout semblait perdu, cependant, quatre « anges » (d’après les mots du narrateur) font leur apparition sur la palissade ceignant le village, et commencent à tailler des croupières à la horde impie, avec une terrible efficacité qui ne manque pas d’impressionner le jeune Bobby. Ce qu’il ne peut pas savoir, en pauvre inculte qu’il est, c’est que les nouveaux arrivants sont des Space Marines2, et que le massacre d’une bande d’Hommes Bêtes en maraude n’est probablement qu’un échauffement avant leur tournoi de bière pong énergétique. Toujours est il que la bogossitude absolue de l’Astartes fait une très forte impression sur Bobby, qui tirera de ce souvenir impérissable la fortitude nécessaire pour affronter tous les aléas de sa morne vie de péquenot. Merci Pépé.

1 : Comme il n’a pas de nom, je lui en donne un.
2 : Robert Earl ne donne pas d’indication quant à leur allégeance, et comme leur livrée est bleue et verte, il est permis de penser qu’il ne s’agit pas nécessairement de loyalistes

AVIS :

Avant le lancement des gammes Warhammer Horror et Crime, rares étaient les nouvelles de 40K s’intéressant au point de vue des humbles sujets de l’Imperium, et à ce titre, ‘Angels’ est une œuvre intéressante et résolument précurseuse (?), puisqu’écrite plus de vingt ans avant que la Black Library fasse le pari de la diversification. Bien sûr, il y a bien des Space Marines au casting de cette courte nouvelle, mais Robert Earl garde volontairement et astucieusement la caméra braquée au niveau de son jeune et impressionnable héros, qui est au fond assez proche de la grande majorité des habitants de l’Imperium dans sa méconnaissance absolue de qui sont les Elus de l’Empereur. Ajoutez à cette bonne idée de positionnement narratif le talent de conteur d’Earl, et vous obtenez une des nouvelles courtes (10 pages ou moins) les plus efficaces du catalogue de la BL à mon humble avis. Un vrai masterclass en GW-Fiction.

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The Bretonnian Connection – J. Wallis [WFB] – #13 :

INTRIGUE :

WFB_The Bretonnian ConnectionNous retrouvons l’homme qui tua Liberty Valance Frère Gilbertus (‘The Dead Among Us’), l’ex-marchand devenu Prêtre de Morr Dieter Brossmann, peu de temps après la conclusion de la première nouvelle dont il était le (sombre, taciturne et antisocial) héros. Alors que le temple dans lequel notre ecclésiastique sert est encore en réparation, et que le clergé survivant tente tant bien que mal de creuser des tombes dans la terre encore gelée du Morrspark, une nouvelle d’importance parvient à leurs oreilles rougies par le froid de ce début de printemps : la Comtesse Sophia d’Altdorf, représentante de Karl Franz auprès de la cour du Graf, et, accessoirement, femme séparée du Dauphin de Bretonnie, a été retrouvée morte dans ses appartements, et pas de causes naturelles. Sophia étant une figure populaire dans la Cité du Loup Blanc, les Prêtres se préparent à quelques jours d’intense activité, la populace de Middenheim se tournant en grand nombre vers les Croque-Morrs pour obtenir un réconfort spirituel dans cette période troublée.

Cette agitation ne concerne cependant que marginalement notre héros, que son nouveau supérieur, Père Ralf, envoie collecter un cadavre de mendiant dans un hospice de l’Altquartier au lieu de le mobiliser pour répondre aux atermoiements de la foule. Ceci est somme toute assez logique car Dieter déteste tout le monde, lui y compris, et manque donc de l’empathie nécessaire pour cette tâche. Nous suivons donc Didi alors qu’il se rend là où sa fonction l’appelle, en fredonnant sa chanson préférée. Sur place, il a la surprise de constater que le macchabée était connu de lui, du temps où il était un des marchands les plus en vue de Middenheim : c’est bien ce vieux Reinhold, homme à tout faire, et surtout les mauvais coups, qui gît raide comme une planche sur une des paillasses de l’hospice. Passée la vague nostalgie suscitée par cette découverte, Dieter se livre à un rapide examen du cadavre, et n’est pas long à découvrir que les causes de la mort sont loin d’être naturelles. Déterminé à démasquer le coupable du meurtre de son ancien sous-fifre, Brossmann repart de l’Altquartier à la recherche d’une certaine Louise, désignée par le propriétaire des lieux comme la bonne amie du défunt, et qui est la dernière personne avec laquelle Reinhold a été vu.

Une fois la donzelle localisée, Dieter apprend qu’un de ses vieux ennemis est de retour en ville, et certainement pas pour lui conter fleurette. Du temps où il était aux affaires, notre héros a en effet cru malin de piéger un concurrent potentiel, le marchand Claus Grubheimer, surnommé Grubworm, qui souhaitait ouvrir un comptoir d’herbes de Loren dans la cité. Sous ses abords bonnasses, Brossmann s’est arrangé pour faire trouver par la milice urbaine des substances illicites dans les quartiers du Middenheimer d’origine Bretonnienne (c’est important), provoquant sa disgrâce et sa fuite. On savait rire à l’époque. Reinhold ayant aidé Brossmann à réaliser ce tour pendable (littéralement, le recel de lotus noir étant puni de mort), il suppute fortement que le décès violent de son ex-associé implique Grubworm, et que ce dernier ne va pas tarder à lui rendre une visite de courtoisie. Une fois ces informations obtenues de Louise, qui, comme son nom l’indique, est également une Bretonnienne d’origine, le Prêtre repart vers le temple, où il compte bien réaliser une autopsie de la dépouille de Reinhold.

Ces nobles projets sont toutefois contrariés par le déplaisir manifeste du Père Ralf, qui trouve que l’empathie de son inférieur laisse singulièrement à désirer, et insiste donc pour le faire participer à la messe funèbre donnée en l’honneur de Sophia, en pénitence de sa froideur manifeste. Contraint par cet impondérable, et de plus en plus inquiet pour son intégrité physique, Dieter change de plan et s’en va se rencarder auprès d’une autre de ses vieilles et interlopes connaissance, le bien nommé Grizzly Bruno (Koala Bob était absent ce jour là), qui accepte d’envoyer un de ses hommes localiser Grubworm au bénéfice du Prêtre. Ceci fait, ce dernier retrouve Louise, qu’il a sèchement rabroué au cours de leur précédent échange, au moment même où elle s’apprêtait à lui donner une information importante. C’est ballot. Bien heureusement, Dieter est un crack, et parvient sans mal à connecter entre elles toutes les pièces du puzzle à la seconde tentative. Prenez note : c’est Reinhold, dont la connaissance des tunnels sous Middenheim et les compétences de crochetage rendaient très qualifié pour le job, qui a assassiné la Comtesse Sophia. Pourquoi ? Eh bien, il semblerait que ce mauvais garçon, ayant eu vent du retour de Grubworm et devinant que ses heures étaient comptées, ait agi pour tirer sa révérence de façon « glorieuse »1, tout en vengeant sa chère et tendre au passage, qui s’était faite lourdée sans ménagement par Sophia quelques années plus tôt. Des motifs très profonds, comme vous pouvez le voir. Ayant convaincu la « veuve » de Reinhold de lui remettre l’anneau de fiançailles de la Comtesse, dérobée par le coupe-gorge comme preuve de son crime et moyen pour lui de se faire une place dans l’histoire, Dieter repart dare dare vers le temple, où la messe doit commencer sous peu.

Les choses s’accélèrent à son arrivée sur place, trop tard pour prendre la sienne dans la cérémonie (au grand déplaisir de Père Ralf), mais pile au bon moment pour croiser Grubworm. Peu confiant en ses chances de sortir d’un vainqueur d’une confrontation avec sa Némésis (pour tabasser les Nécromanciens rachitiques, il y a du monde par contre), Dieter s’enfuit dans l’aile résidentielle du bâtiment, jusqu’à sa cellule où il trouve un sac de poudre de lotus noir placé bien en évidence. Comprenant que Grubworm cherche à lui refaire la bonne blague qu’il avait organisé à ses dépends quelques années plus tôt, notre héros se saisit de la bourse incriminante, et profite de l’arrivée impromptue d’un de ses collègues, Frère Jakob, pour lui refiler en douce le chichon. Bien lui en prend, car la paire se fait arrêter à la sortie du temple par une patrouille de miliciens, rencardés par Grubworm, comme Dieter s’y attendait. Notre héros va-t-il laisser son innocent coreligionnaire se faire alpaguer à sa place ? Que nenni. Tirant parti des tours de passe passe que Reinhold lui a enseigné, il fait mine de sortir l’anneau de la comtesse du pourpoint de son accusateur, en gueulant « OH MAIS REGARDEZ CE QU’IL A DANS LA POCHE-EUH » à la cantonnade. Cette preuve très incriminante, couplée aux origines Bretonniennes de Grubworm, placent ce dernier dans une situation des plus délicates, et entraînent une réaction malheureuse (surtout pour Jakob) de sa part : dégainant un couteau, il tente de se faire justice lui-même, mais c’est sans compter l’égoïsme patenté de Dieter, qui prend soin de placer son collègue dans la trajectoire. Bilan des courses : Grubworm se fait lui-même occire séance tenante par un quidam révolté (qui se trouve être le complice de Grizzly Bruno), Jakob passe du statut de Prêtre de Morr à celui de Prêtre mort (notez la subtile différence), mais Dieter a réussi à sauver sa tonsure, ce qui est bien tout ce qui lui importe. La guerre probable entre l’Empire et la Bretonnie causée par cet incident diplomatique n’est d’ailleurs que le cadet de ses soucis, tout comme le fait que, si on regarde bien, c’est lui le méchant de l’histoire. Que voulez-vous, le Vieux Monde est un endroit cruel…

1 : On a affaire au Mark David Chapman du Vieux Monde, ou en tout cas, à un sévère syndrome d’Erostrate.

AVIS :

James Wallis relève la barre (qui était déjà assez haute) de sa série consacrée à Dieter Brossmann, le Dexter de Middenheim, avec cet excellent ‘The Bretonnian Connection’. Le lecteur a droit à une transposition réussie du roman noir dans le monde de Warhammer, qui se révèle être naturellement assez glauque, injuste et immorale pour que cette adaptation fonctionne à plein régime. En plus de proposer un récit d’enquête tout à fait correct, cette nouvelle permet de placer le héros de Wallis sous un nouvel angle, dont il sort plus approfondi que grandi. Exit le Prêtre de Morr ayant adopté la chasuble pour pouvoir continuer ses investigations sur la disparition de sa femme et de son fils : Brossmann apparaît comme un authentique salopard, prêt à tout pour éliminer la concurrence et préserver sa précieuse personne. Malgré ces révélations peu ragoutantes, Wallis parvient à conserver un fond de sympathie dans son personnage, que le lecteur aura bien du mal à haïr en dépit du caractère trouble de son passé, son réseau et ses agissements. Intéressant à plus d’un titre, autant par la plongée dans le Middenheim profond et la géopolitique du Vieux Monde qu’il offre, que dans la mise en scène de personnages plus complexes que la moyenne (pour la Black Library), ‘The Bretonnian Connection’ est l’une des toutes meilleures soumissions de James Wallis, ainsi que l’une des tentatives les plus abouties de la BL en termes de récit policier (ce qui est un peu triste pour Warhammer Crime, mais bon).

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Know Thine Enemy – G. Thorpe [40K] – #14 :

INTRIGUE :

40K_Know Thine EnemyLorsque la planète Slato et ses deux cent mille colons se trouvent menacés par les perfides Eldars, il incombe à la 4ème Compagnie des Salamanders de voler à la rescousse de cet agri-monde guère capable de se défendre seul contre les insaisissables Xenos. Nous suivons donc le Chapelain Ramesis et les trois escouades qu’il chaperonne alors que ce beau monde se dirige en Thunderhawk vers le portail Warp où se concentre la majorité des combats. Après avoir conduit les rites appropriés, formellement accueilli un frère de bataille novice (Xavier1) au sein de la Compagnie, et surtout briefé ses hommes – et le lecteur avec eux – sur les tenants et les aboutissants de leur mission, Ramesis est sauvé de l’indignité de devoir se lancer dans le stand up pour meubler la nouvelle par l’attaque d’un vaisseau eldar, qui force le Thunderhawk à se poser en catastrophe dans la pampa. Rien de très grave pour nos fiers surhommes, qui partent en petites foulées en direction du champ de bataille, après s’être rapidement coordonnés avec le reste du contingent Salamanders, sous les ordres du Capitaine Nubean et de l’Archiviste Zambias.

La session de décrassage des verts les amène à traverser un bois, où les attendaient quelques Rangers pas très dégourdis, et qui se font vite laminer par les intraitables (mais pas beaucoup plus malins2) Astartes. Cette échauffourée donne l’occasion à Thorpe de nous resservir une nouvelle tournée de dialogues ciselés, avant que les détachements de Ramesis et de Nubean n’accomplissent leur jonction, ce qui mène évidemment à plus de palabres entre les trois officiers. Moment de grâce absolu où les lignes défilent sans que les mots prononcés n’aient le plus traître intérêt : c’est un peu comme si on avait demandé à ChatGPT d’écrire un rapport de bataille 40K depuis le point de vue d’un mauvais commentateur sportif. Après avoir débattu pendant à peu près trois mille ans, notre fine équipe repart, toujours en courant, vers le portail Warp tant attendu (par le lecteur en tout cas) afin d’aider la Garde Impériale à défendre cette mystérieuse relique contre les attaques incessantes des Eldars. On apprend aussi qu’un Techno-Prêtre de l’Adeptus Mechanicus (Simeniz) a été dépêché sur place pour étudier la machinerie Xenos, qui doit donc être impérativement défendue et non détruite de manière préventive (ce qui serait tout de même ’achement plus pratique). ‘Ach !’ fait Ramesis, que son dédain pour les disciples de l’Omnimessie transforme soudainement en germanophone. On est plus à un cliché près, à ce stade.

Après avoir complété leur marathon, les Salamanders se positionnent autour du portail, confiants dans la tactique du camping éhonté pour remporter la victoire à la clock. Après tout, c’est ce qu’à fait l’Empereur pendant le Siège de Terra, et ça lui a bien réussi. Nouvelle scène de baston, nocturne cette fois-ci (sans doute un hommage à la planète natale de nos héros), pendant laquelle Thorpe finit d’égrener laborieusement les entrées du Codex Eldars V3, et où rien de bien intéressant ne se passe. Hors champ, Nubean décide d’aller taquiner le goujon avec son escouade de commandement et revient après quelques temps accompagné d’un Prophète et de deux Archontes. Stupéfaction chez Ramesis, qui ne comprend pas comment le Capitaine a pu parlementer avec l’ennemi, et manque de commettre une boulette en décochant un coup de crozius aux invités de son supérieur. En même temps, la haine est son métier, on ne peut pas lui reprocher d’être un peu intolérant sur les bords.

Revenus devant le portail pour, je vous le donne en mille, tailler le bout de gras, Salamanders et Eldars parviennent presque à se mettre d’accord sur la marche à suivre pour coopérer et ainsi empêcher la cabale du redoutable Kha-rehk d’activer la porte afin de piller Slato. C’était d’ailleurs l’objectif initial des Zoneilles, dont la tranquillité du Vaisseau Monde se serait retrouvée menacée à plus ou moins long terme en cas d’incursion réussie de la part de leurs méchants cousins sur la colonie impériale. Je dis « presque » car au moment où le Prophète commence à incanter pour désactiver la wifi, le portail commence à s’ouvrir et Ramesis a une réaction malheureuse : coller un pain au Xenos le plus proche. Après tout, il y a une bonne chance que ce soit de sa faute, pas vrai ? La situation dégénère totalement et les trois Eldars finissent en salami, Xavier s’illustrant particulièrement en assénant le coup de grâce au Prophète avec le crozius de Ramesis…

Début spoiler…Toutefois, cela n’empêche pas la nouvelle de se terminer sur une défaite critique de l’Imperium, la décision hâtive et xénophobe du Chapelain ayant permis aux Eldars Noirs d’ouvrir le portail et de déferler en masse sur les positions impériales. Ramesis a le temps de réaliser qu’il a vraiment chier dans la colle, l’alliance des Space Marines, Gardes Impériaux et Eldars ayant pu permettre de repousser les Drukharis, avant de se faire ôter son dernier point de vie par une foultitude de cabalites surexcités. Dans la vie, il faut savoir choisir ses combats.Fin spoiler

1 : Oui, LE Xav’ en personne. Gav Thorpe n’a jamais pu résister à un caméo de personnage nommé, c’est son péché mignon.
2 : Ramesis décide en effet de couper à travers bois alors que 1) son second lui avait fait part d’un fort risque d’embuscade, et 2) l’auspex de ce dernier avait confirmé la présence d’humanoïdes embusqués dans le bosquet.

AVIS :

Un jeune Gav Thorpe se frotte à la nouvelle de taille intermédiaire (32 pages), pour un résultat comiquement laborieux. C’est bien simple, plus de la moitié du texte de ce ‘Know Thine Enemy’ est constituée de passages de remplissage, alternant entre passages fluff (ne respectant d’ailleurs pas du tout le background1), expositions sans honte et dialogues creux. Ah, et de remise de casque aussi. Parmi les rares éléments rédempteurs de cette bouillie littéraire, citons tout de même l’idée de terminer la nouvelle sur une défaite sans appel des protagonistes (pas si fréquent dans la GW-Fiction), et l’enrichissement de l’historique du (pas encore) Chapelain Xavier. Pour le reste, nous qualifierons poliment cette nouvelle de travail de jeunesse assez peu abouti, et passerons à autre chose. Ça vaut mieux pour tout le monde.

1 : Entre les Space Marines qui considèrent l’Empereur comme un dieu, les 10 Compagnies de Salamanders (au lieu de sept) dénombrées par Thorpe, et le mépris total dont ces derniers font preuve pour la vie de leurs alliés humains, le fluffiste souffle fort à la lecture. L’auteur a fini maître du background chez GW, donc il s’est rattrapé après cela.

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Rat in the Walls – A. Hammond [NDA] – #14 :

INTRIGUE :

NDA_Rat in the WallsNous retrouvons Knife-Edge Liz, l’héroïne vengeresse de ‘A World Above’ dans un état comparable à celui dans lequel elle a passé la majeure partie de cette précédente nouvelle : pissant le sang, trop faible pour tenir debout et sujette à des évanouissements fréquents. La constance, c’est la marque des plus grand.e.s. Ayant troqué ses frusques d’Escher pour une exo-armure Spyrienne aussi fatiguée qu’elle-même, et les profondeurs rassurantes du sous monde pour les tuyaux d’aération de la haute ruche, Liz sévit depuis plusieurs jours parmi les rupins de Primus, cherchant à faire payer l’élite necromundienne la mort tragique du reste de son gang. Une quête des plus nobles, mais dont on se demande bien comment elle est mise en œuvre par l’intéressée, qui ne dispose que d’informations très limitées sur l’identité du responsable de ses malheurs, le puissant et mystérieux Terrak Ran’Lo. On supposera que l’intermédiaire avec lequel ce dernier organisait des virées sanglantes dans le sous monde, et que Liz a proprement massacré hors champ à la fin de ‘A World Above’ (Aldus Harkon), lui a donné quelques tuyaux avant de passer l’arme à gauche. Mais la piste reste assez mince pour une sauvageonne comme notre Lison, que son existence de ganger n’a pas préparée à opérer chez les bourges.

Après quelques pénibles reptations, Liz finit par entrer par effraction dans une résidence de haut standing, et s’effondre dans la salle de bains avant d’avoir pu déboucher le flacon de mercurochrome. Elle a toutefois de la chance de sa torpeur : au lieu de se faire sommairement exécuter par le propriétaire des lieux en plein coma, ou simplement abandonner dehors sur un tas d’ordures (biologiques, car on fait le tri sélectif en haut de spire), son hôte entreprend de la remettre sur pied avec bienveillance et diligence, se permettant même de lui effacer la plupart de ses disgracieuses cicatrices au passage. Bien évidemment, notre bon samaritain, qui se présente comme Kassat Ran’Lo, n’est en rien désintéressé. Rival de son parent Terrak, qui occupe un siège au conseil familial sur lequel il lorgne avec insistance, Kassat souhaite faire assassiner son encombrant cousin par Liz, à la faveur d’un bal qu’il organisera prochainement. Après avoir d’abord refuser de marcher de la combine, notre Escher convalescente finit par comprendre qu’elle n’a guère le choix, et qu’accepter cette mission lui donnera l’occasion d’expliquer sa manière de penser à Terrak, ce qui serait joindre l’utile à l’agressable.

Au bout de nombreuses leçons d’élocution et de menuet, Liz est fin prête à l’action. Le plan de son commanditaire est simple : faire entrer son assassin sur les lieux des réjouissances grâce à ses relations éloignées pour brouiller les pistes, et cacher un pistolet dans la sculpture de glace trônant au milieu du buffet pour contourner la sécurité. Cela aurait été presque intelligent si Kassat et Liz n’avaient cru bon d’aller discuter pendant le bal (sans que rien de très important ne le justifie en plus de cela), ce qui aurait donné une magnifique piste à exploiter aux enquêteurs si la nouvelle avait été une novella ou un roman. Ayant laissé Kassat s’eclipser de la petite sauterie, Liz passe enfin à l’action, faisant diversion en libérant un duo de gladiateurs à la fois enchaînés et déchaînés afin de pouvoir briser la glace avec Terrak Ran’Lo, et pas nécessairement dans cet ordre. Petite complication au programme, un Chasseur de Sorcières importun s’est joint aux réjouissances sans prévenir, mais un test de sauvegarde d’armure réussi de la part de notre tueuse lui permettra de remporter le duel de tir avec le servant des Ordos. Dès lors, régler son compte à ce vieux croulant de Terrak n’est qu’une formalité, comme échapper à une horde de gardes armés jusqu’aux dents pour rejoindre la planque de Kassat. La magie des ellipses…

Début spoiler…Sa mission accomplie, Liz aurait dû se douter que son employeur se retournerait contre elle, mais c’était sans compter son bon cœur et/ou sa tête vide. Si la fourberie de Kassat ne s’avère guère surprenante, la révélation de son identité secrète l’est davantage. C’est bien Terrak Ran’Lo qui a commandité son propre meurtre, ou plutôt celui d’un rival de la maison Ulantis, qui militait ironiquement pour l’interdiction des safaris urbains de la jeunesse syprienne. Le pistolet en sa possession ne fonctionnant évidemment pas contre son commanditaire, Liz fait ce qu’elle sait faire de mieux dans ces cas là, à savoir l’improvisation explosive. Un tir dans le velux du bureau de Terrak, sans doute situé très haut dans la stratosphère, provoque en effet une aspiration telle que les deux larrons se retrouvent en mauvaise posture, Liz accrochée à la rembarde et Terrak cramponné aux basques de la première1. Malgré les jérémiades de Ran’Lo, moins faraud depuis qu’il fait la planche à 10.000 mètres au dessus du sol, Liz préfère tout envoyer balader, sacrifiant ainsi sa vie pour accomplir sa vengeance. La légende raconte qu’elle plâne encore autour de la spire de Hive Primus à ce jour…Fin spoiler

1 : Car les rembardes n’ont pas de basques, c’est connu.

AVIS :

Conclusion de l’arc narratif débuté avec ‘A World Above’, ce ‘Rat in the Walls’ (clin d’œil à Lovecraft ?) cumule comme son prédécesseur bonnes idées et mise en œuvre poussive. Les points forts de cette nouvelle (révélation bien amenée de l’identité de Kassat, conclusion tragico-poétique pas si courante pour une soumission de la Black Library) passent malheureusement au second plan, masqués derrière manquements d’une intrigue (trop) visiblement au service de l’idée générale que Hammond avait de son histoire : le choc des civilisations entre une ganger Escher mal dégrossie mais droite dans ses bottes, et un notable de la spire, aussi raffiné que retors. Outre les questions de pure logique que le récit passe avantageusement sous silence1, le simple fait que Liz puisse faire illusion comme courtisane spyrienne en l’espace de quelques jours/semaines me semble très peu vraisemblable. On peut aussi regretter que la longueur limitée de ce texte n’ait pas permis à Hammond de développer un peu plus certains passages, comme l’apprivoisement de Smeagol Liz ou l’assassinat de Terrak Ran’Lo, ce qui aurait pu fluidifier/épicer davantage son propos. En résumé, un potentiel certain mais une exécution mal maîtrisée.

1 : Ou le monstrueux coup de chance de Terrak que sa Némésis vienne roter du sang sur le lino de sa salle de bain et nulle part ailleurs dans une cité ruche de milliards d’habitants…

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The Lives of Ferag Lion Wolf – B. J. Bayley [40K] – #14 :

INTRIGUE :

WFB_The Lives of Ferag Lion-WolfC’est une belle journée qui commence dans le palais de Ferag Lion-Wolf, Champion de Tzeentch ayant bien réussi dans la vie. Après avoir servi comme Space Marine dans les rangs des Purple Stars, notre héros a décidé d’aller relever de nouveaux défis en passant de l’autre côté du périph’ et de l’Œil de la Terreur, où il s’est taillé un petit empire. Aujourd’hui, il accueille un visiteur de marque, en la personne du Seigneur Quillilil (eh oui), autre Elu du Dieu du Changement dont il convoite le domaine (et réciproquement, comme on peut s’y attendre la part de disciples de Tzeentch).

Après avoir galamment secouru son hôte alors qu’il se faisait attaquer par des terroristes1 disques-jockeys pendant la descente vers son palais, Ferag ne peut résister à la tentation de faire une démonstration de ses pouvoirs de… maître Lego, aussitôt imité – mais en moins bien, évidemment – par Quillilil. Passées ces aménités, il est temps pour Fefe d’emmener son invité jusqu’à la table du festin qu’il a organisé pour lui, mais surtout de lui narrer par le menu les épisodes les plus mémorables de sa longue et épique vie.

On apprend ainsi que notre héros a reçu son nom si particulier après avoir vengé son père, sauvagement tué par un gigantesque lion-loup alors qu’il n’avait que huit ans (Ferag, pas son père), en réglant son compte en solo à la pénible bestiole, d’un coup d’épieu bien placé. Bien des années plus tard, Ferag s’est distingué en menant ses frères de bataille Purple Stars dans l’abordage inspiré d’un vaisseau ruche tyranide, d’une manière si convaincante que le Codex Astartes fut revu et corrigé pour l’occasion (nous dit-il). Enfin, ce fut le triomphe tactique de la bataille pour la planète-bol (si si), brillamment remportée contre les hordes énervées de Khorne et pestilentes de Nurgle, pour la plus grande gloire de Tzeentch. La régalade aurait pu continuer longtemps si un bloc de maçonnerie ne s’était pas décroché alors que les deux Elus passaient en contrebas, frappant Ferag en pleine tête et le faisant sombrer dans l’inconscience…

Début spoiler…Et à son réveil, les choses ne sont plus les mêmes pour notre héros. Exit sa vie rêvée de Champion du Chaos, et bonjour à la triste réalité : Ferag n’est en fait qu’Ulf Rampe-Bouse, un avorton ayant intégré un culte de Tzeentch pour tenter de gagner de l’influence, mais ayant manqué du courage nécessaire pour assassiner un rival politique, malgré les ordres clairs donnés par son Magister. Condamné à être transformé en Enfant du Chaos en punition de son échec, Ulf a été victime d’une ultime cruauté de la part de sa déité, qui n’est pas connue comme étant le Maître du Mensonge pour rien : un aperçu de la vie qu’il aurait pu avoir, si les étoiles avaient été alignées différemment, ou quelque chose comme ça. Alors que son corps se transforme en amas informe et que son esprit sombre dans la folie, nous laissons Ferag/Ulf se débattre avec l’épineuse question de ce qui est réel et de ce qui ne l’est pas. Critique de la raison pure, Kant tu nous tiens…Fin spoiler

1 : Comme quoi, on peut être un Seigneur du Chaos et détester l’anarchie.

AVIS :

Les nouvelles dont le twist final consiste à révéler que le protagoniste a rêvé ou halluciné tout ce qui nous a été présenté au cours des pages précédentes sont assez rare au sein du corpus de la Black Library1, aussi ‘The Lives of Ferag Lion-Wolf’ n’est pas aussi inimaginatif dans son intrigue que ce que le lecteur non familier avec la GW-Fiction pourrait en penser2. Avec son style flamboyant/ampoulé (c’est selon) assez unique parmi les auteurs de la Black Library, et sa vision quelque peu surannée – justifiable au vu de l’ancienneté de la nouvelle – du fluff, Barrington J. Bayley trousse une petite histoire tenant plus de la fable fantasy cruelle que du bolter porn qui était, et est toujours, la norme pour les courts formats 40K. Un acquired taste, comme disent nos amis anglais, qui peut ne pas convenir à tout le monde mais qui mérite le détour à mon avis.

1 : Mais de manière assez drôle, deux d’entre elles se suivent dans le recueil ‘Dark Imperium’, le ‘Nightmares’ de Gav Thorpe exploitant la même idée.
2 : Je dois indiquer ici que même Lovecraft a cédé à cette tentation, dans ce qui peut être considéré comme la moins lovecraftienne de ses nouvelles : ‘The Dream-Quest of Unknown Kadath’.

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Red Moon Over Altdorf – G. Rennie [WFB] – #14 :

INTRIGUE :

WFB_Red Moon Over AltdorfMorrslieb est de sortie au dessus de l’Empire, et plus précisément d’Altdorf où se déroule notre histoire. Comme on peut s’y attendre de la part d’une lune faite de malepierre, l’influence qu’elle fait planer sur la ville n’est pas très propice au calme et à la détente, ce qui fait les affaires du loup-garou millénaire (il a vu Sigmar revenir de la chasse au sanglier il y a fort longtemps) aux côtés duquel nous commençons la nouvelle. Loulou est revenu, comme tous les siècles environ, chasser dans la capitale impériale et grâce à ses super pouvoirs de vision du destin (en mode ultra violet après une tape sur la truffe), il peut choisir ses prochaines cibles en toute connaissance de cause. Et il a une idée très précise de ce qu’il cherche pour son retour aux affaires…

Dans un autre quartier de la ville, Zavant Konniger se réveille en sursaut, habité par la prémonition d’une convocation imminente à la cour impériale, et pas du tout par le réveil qu’il a oublié de décaler après le changement d’heure. Et en effet, il est mandé séance tenante par la Garde Civile qui s’est retrouvée avec un cadavre encombrant sur les bras : un riche marchand à la gorge déchiquetée et la tête à moitié arrachée, mais dont la bourse et les protubérances comestibles ont été ignorées par son assassin, ce qui disqualifie les pistes du crime crapuleux et de l’attaque de chiens errants. Chose inhabituelle, Konniger n’est pas le seul « consultant » employé par la maréchaussée d’Altdorf, puisque le Chasseur de Sorcières Marius van Sandt est également sur les lieux du crime quand le Sage Détective et son valet dissipé (Vido) arrivent. Van Sandt a été autorisé par le Dir’ Cab’ de Karl Franz, Otto von Bitternach, à enquêter sur ce cas et sur les six autres très similaires s’étant produit au cours des nuits précédentes, car le traqueur est sur la piste d’un loup garou qu’il soupçonne être responsable des récentes tueries. Les deux hommes acceptent de collaborer sur l’affaire afin de tenter de la résoudre le plus rapidement et discrètement possible, et pendant que van Sandt reste sur le terrain, Konniger décide d’aller rendre une petite visite à l’un de ses informants particuliers, le poète bretonnien Valois de Simone.

Ce dernier, dont les écrits enfiévrés n’ont pas été compris par la critique et injustement taxés de subversion chaotique, a gagné une résidence permanente dans l’asile municipal d’Altdorf, et continue son œuvre d’avant-garde en gravant les murs de sa cellule avec cure-dent rouillé. Si la discussion entre le dément et celui qui fut son avocat lors de son procès en hérésie ne semble pas voler bien haut pour le brave Vido, Konniger sort de l’entrevue avec sa tête des bons jours, certain d’avoir acquis une information capitale pour la suite des événements. Et c’est heureux car le loup garou en maraude n’a pas relâché ses efforts carnassiers : les deux compères sont donc sommés de se rendre sur une nouvelle scène de crime, hautement symbolique, la Konigsplatz. Ils y retrouvent van Sandt, qui trépigne d’impatience à l’idée de mettre la main au collet de sa proie, et entraine rapidement Konniger vers une rue adjacente où d’autres cadavres, plus récents, ont également été trouvés par la milice. Avant de partir avec le Chasseur de Sorcières, le Sherlock Holmes du Vieux Monde glisse une note manuscrite à son halfling de compagnie, et lui intime de la délivrer sans tarder à qui de droit, sans quoi il pourrait fort bien lui en cuire (à Zavant, pas à Vido)…

Début spoiler…Et en effet, le Sage Détective se retrouve rapidement dans de beaux draps lorsqu’il s’avère que van Sandt était le loup garou en question (ou plutôt, qu’il avait pris l’identité du Chasseur de Sorcières après lui avoir fait la peau dans la Drakwald1, quelques mois plus tôt). Le plan du lycanthrope était de prendre la place du fameux Konniger afin de pouvoir rendre une visite de courtoisie à Karl Franz – Loulou en veut encore à l’Empire de cette journée où il a perdu un duel de regard avec Ziggie, vingt cinq siècles plus tôt – et plaider à sa manière pour la condition animale bestiale. Un bien sombre dessein, heureusement contrecarré par la prévoyance légendaire de notre héros, qui ne se balade jamais sans sa petite bourse de poudre d’argent, dont il souffle le contenu dans le groin de son assaillant, avant de lui envoyer un Naubya Ka d’école (il a appris le bama lethwei auprès d’un maître cathayen). Tout cela aurait pu cependant très mal finir sans l’intervention providentielle et ridiculement efficace de Vaul Steiner, l’assassin officiel de l’Empereur, au moment où le loup garou reprenait ses esprits. Un lancer de dague en argent dans le cœur, et pouf malette pour Albert Lupin. L’arrivée de Steiner ne devait cependant rien au hasard, car c’est vers lui que Konniger avait envoyé Vido quelques minutes auparavant. Reste que si Loulou avait fait preuve d’originalité et entraîné sa cible sur la piste de danse du Macumba ou dans une galerie d’art contemporain au lieu d’opter pour l’ultra cliché cimetière abandonné, Konniger l’aurait eu dans le baba. Comme quoi, le conformisme est une maladie mortelle, tenez-le vous pour dit ! Fin spoiler

: Les loups garous auraient selon Rennie le pouvoir de prendre l’apparence de leurs victimes, en plus de s’accaparer leurs souvenirs et connaissances.

AVIS :

Gordon Rennie trousse une petite aventure à haute teneur en suspens et en fluff pour sa longueur modeste (13 pages), ce qui témoigne à la fois d’une bonne maîtrise narrative et scénaristique (logique de la part d’un auteur de comics) et d’un intérêt fort pour le background de Warhammer Fantasy Battle. Le mystère planant sur l’identité du loup garou n’est certes pas à l’épreuve de la sagacité d’un lecteur attentif et habitué aux codes du genre, même à la première lecture, mais l’œuvre reste d’une facture tout à fait remarquable quand on la compare aux standards, passés et actuels, de la Black Library. A ranger dans la même catégorie que ‘The Case of the Scarlet Cell’ : si vous avez aimé l’une, vous apprécierez l’autre.

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Black Gold – D. Abnett [40K] – #15 :

INTRIGUE :

40K_Black GoldSur la planète Rosetta, qui n’est ni petite, ni verte, une congrégation de 10 Space Marines du Chapitre des Iron Snakes est sur le point de débuter une mission de la plus haute importance : reprendre le contrôle d’un champ pétrolifère1, approvisionnant en carburant les forces motorisées de la Garde Impériale sur une douzaine de théâtres aux alentours. Ça en fait des comédies musicales, je sais. Avant que les choses sérieuses ne commencent, il convient cependant de céder à la tradition ancestrale du Chapitre, qui consiste à… humecter un rocher. Mais attention, pas avec n’importe quelle eau, malheureux. Seulement avec celle issue des océans d’Ithaka, où les Iron Snakes coulent des jours heureux (et c’est bien normal, le fer ne flotte pas). Ceci fait, l’escouade du Sergent Raphon2 (font font font les petites marionnetteuuuuh), accompagnée de l’Apothicaire/porteur de gourde Memnes, part à pinces à travers le désert de sel qui recouvre Rosetta en direction de sa cible. Comme l’a expliqué l’illustre Petrok lui-même pendant le briefing, cette mission requiert un sens du timing impeccable, en raison d’une particularité que nous pourrions qualifier de systémique. Rosetta orbite en effet autour de trois soleils, et la triple aube produit pendant un court laps de temps un jeu d’ombres et de lumières idéal pour lancer un assaut sans attirer l’attention des défenseurs. Dont acte.

Le début de l’opération se passe aussi bien que possible, l’attaque sneaky des Snakes prenant les quelques cultistes de faction – car c’est le vilain Chaos qui responsable de ce détournement de ressources capitales à l’effort de guerre impérial – totalement au dépourvu. Ça flingue et ça démembre dans la joie et la bonne humeur, jusqu’à ce que le frère Chilles perde son chill, puis sa vie, d’un tir de bolt en plein torse. It’s all fun and games until someone loses an eye(ron snake), comme dit le proverbe. Le responsable n’est autre qu’un crasseux et dégoûtant Dark Tusk, un cadre de Space Marines du Chaos inféodé à Nurgle3. Bien que le faquin se fasse prestement corriger par les camarades du défunt serpent, l’ambiance retombe d’un coup, et les actes d’humeur se multiplient du côté impérial. Bien que cela débloque le stratagème de bataille STRIKE hard pour nos héros, Raphon a besoin de recadrer ses ouailles avant qu’elles oublient pourquoi elles sont là, ce qui est tout de même inquiétant de la part de Space Marines loyalistes. Au bout du compte, les Iron Snakes parviennent à s’emparer des lieux, mais perdent encore deux des leurs dans la mêlée, dont ce fragile Raphon, qui réussit l’exploit de mourir d’une hémorragie consécutive à un bête empalement (et l’organe de Larraman, c’est pour les grox ?). Avant de décédey, il a toutefois le temps de faire don de sa griffe éclair au frère Priad – a.k.a. the Big Lebowlski – le désignant comme le nouvel officier de l’escouade, et de sa glande progénoïde à Memnes, qui achève littéralement le vétéran pendant l’extraction de la précieuse vésicule. Et pas avec son narthecium, hein : le bougre fait un arrêt cardiaque pendant l’opération. C’est bien la peine d’avoir deux cœurs, franchement.

Devenu manager dans des circonstances difficiles, Priad se fait également trahir par le scénario. Une analyse rapide de la qualité du pétrole extrait du champ révèle en effet que l’hydrocarbure est pollué par le Chaos (???), ce qui le rend évidemment impropre à l’utilisation. Raison de plus pour passer aux énergies renouvelables, moi je dis. Il faut se rendre à l’évidence : cette mission ne sera pas le succès escompté, et la mort de Chilles, Maced et Raphon est encore plus dure à avaler. Philosophe, le vénérable Apothicaire Memnes réconforte toutefois son jeune collègue en lui rappelant que l’important, c’est de particiPépé. Il ne reste plus qu’aux survivants à saboter la station pour empêcher le Chaos de mettre le tentacule sur ce qu’il cherchait à récupérer en capturant le champ pétrolifère, avant de se faire extraire en Thunderhawk. L’ambiance est logiquement morose de retour en orbite, mais comme les traditions sont importantes, les Iron Snakes se réconfortent en faisant tourner une flasque d’amasec eau de mer (toujours d’Ithaka, évidemment). On comprend mieux pourquoi ils ont mauvaise humeur…

1 : La nouvelle est tellement vieille que le promotheum n’existait pas encore à l’époque.
2 : À ne pas confondre avec le Sergent Rafen bien sûr. Another hard to swallow pill, I know.
3 : Ce qui est bizarre car les cultistes humains ont les couleurs de Tzeentch…

AVIS :

Black Gold’ a été la première confrontation entre deux monstres sacrés de 40K : Dan Abnett d’un côté, et la figure du Space Marines de l’autre. Bien que le premier ait réussi à maîtriser un sujet qui, de son propre aveu, ne le passionnait pas à l’origine du fait de son absence de failles, on perçoit effectivement dans cette courte nouvelle des lourdeurs inhabituelles de la part d’un cador tel que lui. La caractérisation des personnages est ainsi très limitée, ce qui tranche avec l’aisance avec laquelle Abnett parvient en temps normal à donner vie à ses protagonistes ; l’intrigue ne présente aucune surprise, et je me suis même surpris à déceler quelques faux raccords/incohérences fluffiques au détour des lignes, signe révélateur du peu d’investissement de l’auteur dans ce qui a sûrement été une commande de la BL pour voir si le (à l’époque) jeune prodige était aussi capable avec l’Astartes qu’avec le Garde Impérial classique. Comme quatre autres nouvelles consacrées aux Ails-Rhône Shnecks ont suivi, et qu’un recueil plus conséquent leur a même été dédié, j’en déduis qu’il a réussi son coup, mais je sors tout de même déçu de cette lecture.

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A Gentleman’s War – N. Rutledge [WFB] – #15 :

INTRIGUE :

WFB_A Gentleman's WarLa première campagne militaire d’Otto von Eisenkopf, jeune noble impérial à la tête farcie de glorieuses batailles et d’affrontements chevaleresques, ne se passe pas comme il l’avait prévu. Assigné à un contingent de Pistoliers mercenaires, menés par un vétéran à la barbe douteuse et à l’accent suspect (Molders), Otto fait ses classes d’une manière un peu trop terre à terre (comprendre qu’il rampe beaucoup dans les broussailles) à son goût. Chargé par le Graf von Eisenkopf, père de notre héros, de repérer l’avance d’une colonne de Bretonniens en vadrouille au bord de la frontière entre les deux nations, les tireurs montés ont tendu une embuscade à leurs adversaires, mais Otto, faisant mentir son patronyme, n’arrive pas à garder la tête froide et se plante soudainement au milieu du chemin pour annoncer aux éclaireurs du Duc de Boncenne qu’ils sont en état d’arrestation. Plus honorable, certes, mais beaucoup moins efficace. Fort heureusement pour les impériaux, Molders et ses hommes ne sont pas nés de la dernière pluie et parviennent à refermer leur piège sans trop de mal, tandis qu’Otto a l’occasion de rayer une ligne de sa bucket list en vainquant le chevalier menant les troupes bretoniennes en duel honorable, après un affrontement épique d’au moins deux secondes. Faisant honneur au code de la guerre entre gens riches, von Eisenkopf traite son prisonnier, Guillaume de Montvert, avec tous les égards dus à son rang, allant même jusqu’à lui laisser sa tente et son écuyer lors de son retour au campement du Graf. Un vrai gentilhomme.

Cette prévenance lui joue toutefois des tours car elle l’empêche de faire son rapport à son père avant que le Pistolier lui servant de nounou, une brute dénommée Lutyens, le fasse, et bitche méchamment sur le comportement inadapté du nobliau. Otto n’a pas le temps de s’appesantir sur le sujet toutefois, ni de déguster quelques cuisses de grenouille avec de Montvert au dîner, comme il l’avait prévu, car le Graf renvoie aussi sec les Pistoliers reconnaître la voie probable de l’arrivée des troupes du Duc, dont les vues sur les mines de charbon impériales ne font de mystère pour personne. C’est une petite victoire pour Otto, qui soutenait contre l’avis de Molders que les nobles et honnêtes Bretonniens passeraient forcément par la grand-route, en jouant du luth et déclamant des quatrains à la gloire de la Dame, avec un béret et une baguette pas trop cuite sous le bras. Mais avant de crier victoire (pas trop fort pour ne pas se faire repérer, évidemment), il faut galoper pendant une nuit depuis le camp impérial, une expérience qui laisse Toto un peu déconfit.

La déconvenue ne s’arrête pas là toutefois, puisqu’il s’avère rapidement que les Bretonniens ne sont pas en dessous du recours à de basses manœuvres, comme le cosplay de chevaliers pour faire croire à leurs ennemis que leur force principale passe bien par la grand-route. Cette supercherie ne résiste cependant pas à la longue-vue de facture naine de Molders, qui repart aussi sec vers le camp pour prévenir le Graf de la combine, un Otto bien penaud et de plus en plus fatigué à la traîne. Pour ne rien arranger, ce dernier apprend à son retour que le fourbe de Montvert a abusé de son hospitalité en volant un cheval et (probablement) assassinant son écuyer au passage, contre toutes les règles de la chevalerie. Et il faut déjà se remettre en selle, car il reste une chance aux impériaux de contrecarrer les plans de de Boncenne en tendant une embuscade à ses troupes alors que ces dernières progressent vers l’Empire.

Quelques heures de canasson plus tard, l’avant-garde du Graf débusque un site parfait pour un guet apens, et en attendant que l’ennemi daigne pointer le bout de ses chausses, Otto peut enfin se reposer un peu et méditer sur la réalité de la guerre, qui diffère beaucoup de ce à quoi il s’attendait, et pas en bien. Notre héros est toutefois suffisamment lucide et intègre pour réaliser que cette remise en question lui a été salutaire, en lui permettant de réévaluer la piètre opinion qu’il avait de Molders, des Pistoliers, des mercenaires, des Pistoliers mercenaires, et des tactiques de son père (dans le désordre). Lorsque la bataille finit par éclater, le jeune premier a finalement l’occasion de s’illustrer, en sauvant la vie de son capitaine, puis en vainquant à nouveau le meneur ennemi (de Boncenne) en combat singulier, au terme d’un duel bien plus accroché (et plus mortel aussi, le Duc perdant la tête à la fin du troisième round) que celui contre ce poseur de Guillaume de Montvert. Tout est bien qui finit bien en Karlfrancie, et Otto von Eisenkopf aura appris une bonne leçon au cours de cette première campagne : mieux vaut éviter de s’allonger sur une fourmilière, quand on peut éviter.

AVIS :

Neil Rutledge nous sert une nouvelle de campagne militaire/initiation d’un blanc bec à la vie assez convaincante, dans la même veine que ce Dan Abnett avait fait dans ‘Les Cavaliers de la Mort’, en un peu plus léger toutefois. Je pense que j’aurais davantage aimé ce ‘A Gentleman’s War’ si l’auteur avait choisi d’être un peu plus grimdark dans son approche, les Bretonniens de Rutledge tenant plus du stéréotype de Français moyen-âgeux à la sauce Monty Python que d’authentiques fidèles de la Dame du Lac, même si l’ensemble est encore une fois très correct. Un autre petit regret porte sur le choix de Rutledge de laisser tomber le personnage de Guillaume de Montvert, traître en puissance dont la duplicité ne faisait pas de doute, après l’arrivée au camp impérial, c’est-à-dire avant qu’il ait pu exprimer son véritable potentiel dramatique. Quelques petits détails que Neil Rutledge, et/ou son éditeur au sein de la BL, auraient pu travailler davantage, mais rien de rédhibitoire non plus.

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Hellbreak – B. Counter [40K] – #15 :

INTRIGUE :

40K_HellbreakLe Commissaire von Klas a eu la mauvaise idée d’être capturé vivant par les Eldars Noirs lorsque ces derniers ont annihilé son régiment, et son séjour à Commoragh se passe aussi bien, ou mal (c’est selon), que l’on peut l’imaginer. Identifié par ses tortionnaires comme officier, il a la chance douteuse de participer aux jeux donnés par la cabale de l’Échine Rompue (Broken Spine) en l’honneur de son maître, le positivement ancien Archon Kypselon. Rustre jusqu’au bout des ongles, von Klas a l’outrecuidance de remporter son duel face à une Céraste au style trop chargé pour son propre bien, et d’une manière si peu élégante (il lui pète le pif avant de l’empaler sur sa propre hallebarde… honteux) qu’il est prestement condamné à être écorché vif par l’Haemonculus personnel de Kypselon.

Survivre aux Intervilles1 de Commoragh a toutefois boosté le moral, déjà naturellement élevé, de notre brave Commissaire. Lorsque son tortionnaire (Verredaek) fait l’erreur de se présenter à lui sans l’avoir attaché au préalable, confiant qu’il est dans son aura de terreur pour figer sur place son nouveau sujet d’expérimentation, von Klas ne tarde pas à lui faire goûter à sa propre médecine, et s’échappe après lui avoir fauché sa main rasoir et son pistolet à aiguille, recrutant dans des geôles adjacentes quatre autres Gardes Impériaux malchanceux gardés en réserve par Verredaek. L’Haemonculus agressé n’aura guère le temps de s’excuser de sa nullité crasse auprès de son impitoyable employeur, qui le fait exécuter par sa Succube de compagnie (Yae) pour faute lourde, avant d’ordonner à cette dernière d’aller mettre un terme à l’excursion des Mon-keigh dans son territoire. Après tout, il a un rival ambitieux (Uergax de la cabale du Fil de la Lame) à mater, et ne peut se permettre qu’une bande de primates mal dégrossis sèment la pagaille à domicile.

Malheureusement pour Kyky, Yae ne sera pas très efficace dans sa traque, à tel point que von Klas et sa petite escouade parviennent à s’emparer de l’usine du Sybarite Laeveq, et des deux mille esclaves humains utilisés par ce dernier comme main d’œuvre, multipliant leur potentiel de nuisance. Pire, les mutins choisissent de se réfugier dans le temple que l’Archonte a fait élever à sa gloire (c’est un gars simple), ce qui constitue un crime de lèse-majesté impardonnable. Tant pis pour la prudence, Kypselon réunit le ban et l’arrière-ban de sa cabale et envoie ses pillards reprendre possession de la basilique gothique (elle est construite uniquement en os) aux zadistes en furie. Il commet toutefois l’erreur de sous-estimer la résolution du meneur adverse, trop content de faire s’effondrer le plafond de l’édifice sur les combattants au plus fort de la bataille, même si cela précipite l’écrasement de son insurrection raciale. Écrasé pour écrasé, autant que les Eldars Noirs participent à cette soirée crêpes, pas vrai ?

Début spoiler…La nouvelle se termine dans une cellule de la cabale, où un von Klas en bien piteux état après son coup d’éclat languit des jours durant, jusqu’à ce que ses geôliers lui amènent un compagnon d’infortune, qui se révèle être Kypselon en personne. Comme l’Archonte l’apprend à son valeureux adversaire, sa rébellion a coûté très cher à l’Echine Rompue, aussi bien en ressources qu’en cabalites, et ses rivaux du Fil de la Lame ont profité de ce moment de faiblesse pour attaquer et annihiler ce qu’il lui restait de suivants. Bien que von Klas sache qu’il ne lui reste plus longtemps à vivre, il peut toutefois savourer l’indéniable victoire qu’il a remporté sur son adversaire, qui n’aura certainement pas la chance de bénéficier de la mort rapide dont le Commissaire agonisant héritera…Fin spoiler

1 : Je m’interroge sur la pertinence de mettre un -s, la cité drukhari n’ayant pas d’équivalent.

AVIS :

Ben Counter nous plonge dans l’enfer de Commoragh avec maestria dans cette variation sur le thème de Spartacus, qui illustre parfaitement la cruauté des Eldars Noirs et la défiance de la Garde Impériale face à l’adversité. Au final, ces deux factions sortent grandies de ce ‘Hellbreak’, et le lecteur bénéficie d’une histoire purement grimdark, comme sa conclusion aussi satisfaisante que nihiliste le démontre pleinement. De la nouvelle 40K comme on aime.

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The Judas Goat – R. Earl [WFB] – #15 :

INTRIGUE :

Le Capitaine Gustav Mollens, vétéran blanchi sous le harnais mais un peu trop appréciatif de la dive bouteille, a écopé de la peu glorieuse mais nécessaire mission de ramener de nouvelles recrues depuis l’arrière-pays de Nuln jusqu’à la cité. À en juger par son besoin de poignarder à mort les blancs becs pris par des envies de rebellions, et par le taux élevé de désertion qui frappe son contingent, il ne doit pas faire un super boulot. Dans son malheur, Mollens a toutefois la chance d’avoir trouvé dans l’un de ses sous-fifres, un dénommé Gevalt, un second secourable et digne de confiance, qui l’aide à maintenir un peu d’ordre dans les rangs et qui ne rechigne pas à partager les tours de garde pour éviter que les volontaires démotivés par leurs six heures de marche quotidienne, avec paquetage complet sur le dos et chaussures à taille et forme unique (pied groit, 42 ¾), ne prenne la poudre d’escampette. Ce partage des tâches permet à Mollens de faire des insomnies plus longues sur son lit de camp, encore traumatisé qu’il est par sa rencontre tragique avec les Skavens dans les égouts de Nuln, cinq ans plus tôt. Seul survivant de son unité, il a depuis fait des pieds et des mains pour éviter de croiser de nouveau un raton de près ou de loin, et l’alcoolisme thérapeutique aidant, a fini par être relégué à cette affectation de second ordre, mais au moins au grand air.

Alors qu’il était en train de remonter un peu la pente, en tirant joie et fierté de l’application avec laquelle ses hommes apprennent le maniement de la lance sous sa férule, un événement fortuit et traumatique vient remettre la tête enfarinée de notre héros au fond de son havresac. Ayant surpris Gevalt s’enfoncer seul dans la forêt bordant le bivouac alors qu’il était de garde, Mollens prit le parti de suivre discrètement son faux jeton de second pour lui apprendre à décevoir les attentes d’un ivrogne gradé. Cependant, la petite bastonnade pour l’exemple qu’il prévoyait d’infliger au tire au flanc doit être remise à plus tard : si Gevalt a éprouvé le besoin de s’absenter, c’est pour s’entretenir avec son patron, qui se trouve être un Skaven, accompagné d’un Rat Ogre de fort beau gabarit. Tétanisé par l’apparition impromptue de sa Némésis, Mollens assiste à la scène et comprend qu’en fait de déserteurs, c’était Gevalt qui s’arrangeait pour envoyer des camarades drogués se faire cueillir comme des champignons au milieu de la nuit. La duplicité de Gege étant établie, il lui faut maintenant trouver un motif suffisant et irréfutable pour passer à l’action et le mettre hors d’état de nuire.

L’occasion se présente le lendemain, lorsque Mollens surprend Gevalt en train de faire boire du GHB à un camarade autour du feu de camp. Ayant feint le sommeil pour forcer la main du traître, Mo’ se « réveille » juste à temps pour contrecarrer le plan de ce dernier, mais lorsqu’il le confronte devant le reste de ses hommes, qu’il a fait réveiller pour l’occasion, le Capitaine manque de se faire arracher la jugulaire par l’agent double, qui avait décidément les dents longues. Mis KO par son adversaire1, lui-même maitrisé et ligoté par le reste des recrues après qu’il eut mis au tapis l’officier, Mollens émerge péniblement de sa torpeur, et décide qu’il est grand temps pour lui d’affronter sa peur. Il part donc seul dans la forêt, jouant le rôle de l’innocente brebis jetée en pâture aux souris, et indique à ses hommes de le suivre cinq minutes plus tard pour prendre les ratons à leur propre piège. Comme il le dit lui-même, un plan aussi simple n’a aucune chance d’échouer. Béni soit l’esprit trop étroit pour le doute, tout de même.

Et en effet, Mollens a un long (4 minutes 58 secondes précisément, il a même le temps d’observer les manucures de l’adversaire avec un soin particulier) moment de solitude lorsque les hommes, les rats et les Hommes Rats finissent par lui tomber dessus. Car les désertés n’ont pas été expédiés dans les galeries du Sous Monde, ou transformés en croquettes pour Vermines de Choc, mais changés en sorte de Zombies commandés par le Maître de Meute/Prophète Gris/Assassin2, toujours accompagné de son garde du corps bodybuildé. Ce combat peut paraître inégal, mais ce n’est pas bien connaître Gustav Mollens, qui one-shot le Rat Ogre d’un coup de lance bien placé… puis rate toutes ses attaques contre son propriétaire, et se fait à nouveau sauver par l’intervention de ses camarades, dont l’arrivée contraint le raton à se téléporter en sécurité. Après avoir achevé les souffrances des Zombifiés, Momo et ses ouailles rentrent au camp où les attendent le cadavre désarticulé et défiguré de Gevalt, sans aucun doute victime de la vengeance de son rat-pia de boss. Qu’importe, le complot a été contrecarré, et Mollens se sent désormais d’attaque à repartir casser du mutant dans les égouts, en souvenir des camarades, anciens et nouveaux, qu’il a perdus sous les griffes des Skavens. Best redemption arc ever since il y a 13 14 minutes, tbh.

1 : La honte tout de même quand on est sensé avoir 4 d’Endurance et 2 PV, face à un mec à 1 Attaque de Force 3 !
2 : Mickey a un Rat Ogre de compagnie, un bâton magique rétroéclairé et manie une dague empoisonnée avec la queue. Ca fait beaucoup pour un seul rat.

AVIS :

Robert Earl a prouvé qu’il savait écrire pour les Skavens (‘The Barbed Wire Cat’), mais cette maîtrise n’était apparemment pas innée chez lui, comme ce mollasson et fluffiquement improbable ‘The Judas Goat1 l’atteste. Cela ne se perçoit pas dans la chronique ci-dessus, mais le plus clair de la nouvelle est consacrée aux sensations et sentiments éprouvés par Mollens, qui varient assez fortement en fonction de son alcoolémie, ses heures de sommeil, ses syndromes post-traumatiques, ou encore le nombre de pifs de recrues fracassés pour l’exemple. Et là où ça coince, c’est qu’Earl n’est pas l’auteur de la BL le plus doué pour rendre ses personnages, si ce n’est sympathiques, au moins intéressants : la vie et l’œuvre de Gus’ Mollens, poivrot ratophobe, deviennent donc rapidement soûlantes. Sans autres personnages un tant soit peu développés pour servir de contrepoint au pas si brave que ça Capitaine (Gevalt n’est guère qu’une présence en arrière plan, et le Sergent que Mollens nomme pour prendre sa place après que sa traîtrise ait été révélé est tellement inutile que je n’ai même pas jugé bon d’en parler), le soliloque narratif de notre héros tourne au bide, et on pousse un soupir de soulagement lorsque le rideau tombe finalement. La Black Library comporte suffisamment de variations sur le thème Empire vs Skavens pour se contenter de l’avorton de la litière, m’est avis.

1 : Au cas où vous vous demanderiez, il s’agit d’une expression consacrée, désignant les animaux d’élevage dressés pour emmener leurs semblables à l’abattoir.

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Apothecary’s Honour – S. Jowett [40K] – #16 :

INTRIGUE :

40K_Apothecary's HonnorDéployée sur le monde d’Antillis IV pour aider les autorités locales à se défaire d’une invasion chaotique plus grave qu’anticipée, la Seconde Compagnie du Chapitre des Avenging Sons, menée par le Capitaine Selleus, s’est battue vaillamment mais cela n’a pas suffi. Isolé au milieu des bourrasques de cendres humaines conjurées par un géo-ingénieur plus ravagé du bulbe que la moyenne pour combattre les effets du changement climatique (eh, c’est un aérosol comme un autre), l’Apothicaire Korpus se consacre toutefois sans faiblir à son sacerdoce : récupérer les glandes progénoïdes de ses camarades tombés au combat. Il sait en effet qu’il s’agit d’une partie vitale de l’effort de guerre de l’Adeptus Astartes, qui se retrouverait rapidement réduit à peau carapace noire de chagrin sans la récolte et la réimplantation dans de nouveaux hôtes de ces précieux kystes. On le suit ainsi jusqu’au quasi-cadavre du Sergent Pereus, blessé à mort1 lors d’une escarmouche contre une bande de Space Marines du Chaos, qu’il accompagne pieusement dans ses derniers instants et déleste de ses mirifiques glandes, stockées dans le petit frigo personnel qu’il trimballe sur son armure. À la guerre comme à la guerre.

Sur le chemin du retour vers le QG château (en français dans le texte) de sa Compagnie, Korpus reçoit un message alarmant de la part de Selleus, lui annonçant que la campagne est perdue et lui ordonnant de se diriger sans tarder vers le spatioport où sont garés les Thunderhawks des Avenging Sons, et de les utiliser pour rejoindre leur vaisseau amiral. Il est en effet capital de renvoyer les Avenging Glandes jusqu’à l’Apothicarium chapitral, on a bien compris. De son côté, le Capitaine et ses derniers hommes préfèrent se faire exploser dans leur bastion plutôt que de s’offrir un dernier carré digne de ce nom, ce qui surprend fortement Korpus. Cela dit, un ordre est un ordre, et le zélé Apothicaire part donc en petites foulées en direction du hangar à aéronefs mis à disposition par les autorités d’Antillis IV, en espérant que ce dernier n’ait pas déjà été conquis par l’ennemi.

En chemin, notre héros tombe par hasard sur une escouade de Scouts dont on était sans nouvelles depuis plus d’une journée et que tout le monde avait donc considéré comme perdue corps et biens (faut pas se retrouver en zone blanche au 41ème millénaire). Coincés dans une friche industrielle par une horde de World Eaters ricanant à défaut d’être très doués, les novices auraient rapidement perdus la tête sans l’intervention décisive de Korpus, dont le poing énergétique – un choix d’équipement un peu bizarre pour quelqu’un sensé effectuer des actions chirurgicales sur le champ de bataille, mais passons – et l’effroyable mauvaise humeur, appelée Cœur Vengeur par les initiés, règlent rapidement leur compte aux affreux.

Au bout d’un voyage sans trop d’encombres, les survivants finissent par arriver jusqu’au spatioport et commencent à retaper le Thunderhawk le moins amoché du lot afin de pouvoir s’éclipser de la planète condamnée au nez et à la barbe énergétique des Khorneux. Bien évidemment, ils n’auront pas loisir de mener à bien cette mission d’extraction furtive, une nouvelle vague de renégats leur tombant dessus sans crier gare (en même temps, il n’y avait pas de train sur place) avant que Korpus et les Scouts n’aient eu le temps de boucher tous les trous de la carlingue avec du chewing-gum. Comble de malchance, les World Eaters sont menés par un Dreadnought équipé d’un canon laser, dont la portée risque d’être fatale au coucou déglingué des Avenging Sons. L’Apothicaire décide alors de mener une charge suicide avec les novices afin de permettre au Thunderhawk piloté par le seul Scout ayant passé son permis ULM de s’échapper, après avoir déposé ses précieuses glandes dans le minibar de l’appareil, bien sûr.

Cette contre-attaque inspirée est couronnée de succès, Korpus faisant entrer son poing énergétique en surchauffe après l’avoir coincé sous un piston du Dreadnought adverse, vaporisant la machine impie ainsi qu’une bonne partie de ses suivants, au modique prix d’un évanouissement pour notre viril héros (tous les Scouts meurent dans la bagarre par contre, mais on s’en fout un peu). Il a toutefois accompli brillamment sa mission, pas vrai ?

Début spoiler…Eh bien, non. La mauvaise nouvelle lui est transmise par un Space Marine hérétique ayant autrefois servi comme Apothicaire et qui a fermement attaché Korpus sur un chevalet d’opération dans l’attente de son réveil. Une légende noire parmi l’Adeptus Astartes, responsable de la création de nombreux monstres génétiquement modifiés se battant dans les rangs des Légions renégates. Je veux bien sûr parler de Fab…rikus. Si, si. Toute ressemblance avec un personnage nommé serait évidemment totalement fortuite. Fab’ révèle à son collègue et néanmoins prisonnier qu’il a été chargé par ses patrons chaotiques de trouver un moyen de recruter en masse de nouveaux Space Marines, ce qui n’est pas facile du fait de l’influence corruptrice du Warp sur les glandes progénoïdes des Astartes vétérans. Une seule solution pour contourner ce problème : aller taper dans les stocks de ces saintes nitouches de loyalistes, et c’était bien le but de la campagne d’Antillis IV. Cependant, les dernières actions du Capitaine Selleus ont fait capoter ce plan machiavélique, et l’entière opération se serait terminée par un fiasco retentissant pour les traîtres sans l’étourderie de Korpus, qui a « oublié » de prélever ses propres glandes et de les déposer dans le frigo du Thunderhawk avant de foncer dans le tas comme un demeuré. La boulette. Notre histoire se termine sur la scène pénible de l’opération sans anesthésie pratiquée sur ce glandu – et c’est bien le problème – d’Apothicaire, qui se désole en son for intérieur de sa propre stupidité. Charité bien ordonnée...Fin spoiler

1 : Je tique un peu du fait que Pereus se soit auto-diagnostiqué perdu pour la cause, sans que Korpus juge bon de faire son boulot de medic et de vérifier par lui-même la gravité de l’état de son camarade. Après tout, qu’est-ce qu’une paraplégie quand on possède la technologie nécessaire pour créer des Dreadnoughts ?

AVIS :

Simon Jowett signe une nouvelle franchement vintage pour le lecteur contemporain (qui sera peut-être surpris que le nom de Roboute Guilliman n’apparaisse pas une seule fois dans une histoire qui parle des Avenging Sons), explorant une des particularités du background des Space Marines : le rôle crucial des glandes progénoïdes dans leur organisation et leur culture.

Si l’idée est bonne, la réalisation n’est toutefois pas au-dessus de tout reproche : on passe à mes yeux beaucoup trop de temps à voir voler les bolts dans cette nouvelle, sans que l’auteur se consacre à faire monter la pression autour de Korpus, ni ne le confronte à des décisions véritablement difficiles, où il aurait eu à choisir entre son fameux honneur d’Apothicaire, et la mission vitale confiée par son supérieur. A cela viennent s’ajouter des petits irritants sans conséquence pour la structure de l’histoire, mais pénible à lire quoi qu’il en soit, comme la nullité crasse des World Eaters qui servent d’opposition aux vertueux Avenging Sons, pas foutus de régler leur compte à cinq Scouts et un Apothicaire mouflé même avec l’avantage du nombre.

On peut toutefois mettre au crédit de Jowett un twist final pas trop mal fichu (même si Korpus et Fabrikus ont vraiment une haute idée d’eux-mêmes pour penser que ce micro-événement risque de faire basculer le rapport de forces entre Imperium et Chaos) et quelques infos fluff relevant plus de la curiosité académique que de la source canonique1, cependant.

1 : C’est le même Jowett qui a doté le Chapitre des Iron Hearts de casque de VR pour s’entraîner au combat, et baptisé d’autorité un des Primarques disparus (voir ‘Hell in a Bottle’) : ses contributions au fluff Space Marine doivent être pris avec 72 pas de recul.

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The Ultimate Ritual – N. Jones & W. King [WFB] – #16 :

INTRIGUE :

Sur le campus de l’université de Nuln, deux hommes s’apprêtent à tenter une expérience à haut risque pour faire progresser les connaissances arcaniques de l’Empire. L’enthousiasme n’est pas égal entre le jeune Lothar von Diehl, qui piaffe littéralement d’impatience, et son ancien professeur Gerhardt Kleinhoffer, dont le trouillomètre se rapproche dangereusement de zéro au fur et à mesure que les préparatifs s’achèvent. C’est pourtant lui qui a traduit ‘Le Livre des Changements’ d’où von Diehl a tiré la formule de l’ultime rituel, promettant rien de moins qu’un aller-retour jusqu’à la Mer des Âmes, cette dimension parallèle où se trouve le loft des Dieux du Chaos. Mais de la théorie à la pratique, il y a un monde, et il faut toute la force de persuasion (et la superbe éloquence) de son disciple pour que Kleinhoffer accepte de jouer son rôle dans la suite des événements.

Si von Diehl a autant insisté pour avoir un témoin, c’est que son billet pour le néant est un Pass Duo, et que le Disque de Tzeentch qu’il invoque pour partir en vadrouille ne consent à partir qu’à plein, c’est à dire avec deux personnes sur le dos. Je peux comprendre que lorsqu’on vient d’aussi loin que le Warp, on apprécie de ne pas faire le voyage à vide, ceci dit. Une fois les usagers installés et les ceintures bouclées, le sous-boc volant fend l’air et l’espace, et part en direction du pôle Nord pour passer sur le périphérique cosmique. Le go fast qui s’en suit n’est pas de tout repos, car le Démon se fait prendre en chasse par des congénères affamés et attirés par l’âme de ses passagers. Fort heureusement, le Disque s’avère être un as du volant, qui parvient à semer ses poursuivants en faisant des sauts de puce de l’Immaterium au Materium, visitant quelques planètes très 40K dans l’esprit au passage. Enfin, nos héros arrivent devant la chambre du Grand Architecte, qui, coup de chance, accepte de les recevoir sans tarder.

Tzeentch est toutefois une divinité surbookée, qui n’a pas le temps de donner dans les mondanités. Il demande donc à ses visiteurs ce qui les amène et ce qu’il peut faire pour eux, et le manque de préparation (et la terreur panique) de Kleinhoffer lui joue un vilain tour. Comptant sur son acolyte pour meubler le blanc malaisant qui s’installe après la demande divine, il se fait avoir dans les grandes largeurs lorsque von Diehl explique candidement que l’estimé professeur est à la recherche de savoir. « OK » répond Tzeentch, qui, un peu troll sur les bords, débute un transfert de 999 Eo en direction du cerveau du pauvre prof, dont le cerveau entre en surchauffe au 3,963,635,619ème meme de Pepe the Frog qu’il reçoit en l’espace d’une demi-seconde. Von Diehl, qui a lancé un sort de streaming en pirate de la base de données de son acolyte, peut quant à lui déguster cette dankness avec plus de confort, même s’il doit cependant jurer allégeance à Tzeentch pour pouvoir repartir jusque dans le Monde Qui Etait Encore. C’était son projet depuis le début toutefois, et il n’a aucune difficulté à se délester de son âme en échange d’un apport infini de contenu Reddit. Revenu dans sa piaule universitaire, avec un Kleinhoffer rempli jusqu’au lorgnon d’infos confidentielles, et à peu près aussi incontinent que Wikileaks, von Diehl peut désormais se consacrer à préparer la Fin des Temps… ou à devenir une légende de 9Gag. Au choix.

AVIS :

Petite nouvelle d’ambiance et de fluff écrite à quatre mains, ‘The Ultimate Ritual’ multiplie les clins d’œil (à l’œuvre de King1 mais également à Warhammer 40.000) et offre au lecteur une visite romancée inédite (à ma connaissance) de la Mer des Âmes, ainsi qu’un authentique dialogue entre de simples mortels et un Dieu du Chaos, ce qui n’est pas banal. Par contre en termes d’intrigue, c’est aussi terne et sans surprise qu’un tronçon d’autoroute hors heures de pointe et vacances scolaires : peu étonnant pour une nouvelle de seulement treize pages, mais certains contributeurs de la BL ont prouvé qu’ils étaient capables de faire plus rythmé que ça sur ce genre de format, donc on peut légitimement reprocher à messieurs Jones et King de ne pas s’être trop foulés sur ce coup là.

1 : Les von Diehl sont la lignée récurrente de l’auteur, puisqu’on croise Kurt dans ‘The Laughter of Dark Gods’ et Gottfried et Manfred dans ‘Wolf Riders’. Famille assez malchanceuse au final car tous ses membres ont connu une mort violente et souvent chaotique (pas nécessairement dans cet ordre).

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Baptism of Fire – G. Rennie [40K] – #16 :

INTRIGUE :

40K_Baptism of FireLa guerre gothique vient d’être lancée par Abaddon (période emo), et le secteur éponyme a été salement amoché par les préliminaires rugueux de l’élu du Chaos. La période n’a pas que des mauvais côtés, notez, car le vide laissé par les nombreux morts et blessés que la Flotte Impériale déplore permet à de « jeunes » méritants, comme notre héros Leoten Semper, d’arriver aux affaires et de faire leurs preuves. Issu d’une longue et illustre1 lignée de marins de l’espace (à ne pas confondre avec vous savez qui), Leo n’est pas un perdreau de l’année mais c’est la première fois qu’il assume le capitanat d’un vaisseau de la taille du Lord Solar Macharius (trois kilomètres tout de même, il faut maîtriser les créneaux). Il espère donc faire bonne impression à son équipage, dont Rennie nous présente un échantillon assez représentatif, depuis le second necromundien jusqu’au bagnard recruté d’office, en passant par les Commissaire, Techno-prêtre et Navigateur de bord. Tout ce petit monde ne servant à rien pas grand-chose lors de ce Baptism of Fire, je fais donc une croix sur le tour de table.

LS a reçu pour mission de rejoindre un trio de destroyers dans un système Dolorosa afin de monter une force de combat opérationnelle et tenter de rendre la monnaie de sa pièce à ce faquin d’Abbie. Ce qu’il ne sait pas, c’est que le destin cruel a mis sur son chemin un adversaire redoutable, en la présence de Hendrik Morrau, capitaine fusionnel (et fusionné) du Contagion, autrefois connu sous le nom de Princ- Vexis. Six siècles plus tôt en effet, Morrau était un loyal sujet de l’Empereur, mais une quarantaine Warp s’étant éternisée l’a poussé, ainsi que son équipage, dans les bras gluants mais aimants de Nurgle. Depuis, il roule pour le Big 4 et s’amuse à martyriser les arrières-arrières-arrières-arrières-arrières petits-enfants de ses collègues de Flotte, grâce à son génie naturel et son expérience incomparable. Il est tellement méchant qu’il a un sidekick dénommé Adolph(us), c’est dire ! Lorsque nous faisons sa connaissance, il vient d’éparpiller façon puzzle l’escorte du LS Maki, et décide de rester tapi dans un coin du système pour surprendre un potentiel arrivant. C’est ce qui s’appelle avoir le nez creux.

Inconscient du danger, Leo Sans Papa finit par déboucher de la bretelle d’autoroute warpesque dans le secteur Dolorosa, et manque de se faire coller un poisson d’avril dans le dos par ce coquin de Morrau (qui utilise des torpilles plasma au lieu de bêtes poissons en papier, c’est plus original). Fort heureusement, le capitaine est un rookie prudent, et un regard opportun dans le rétroviseur lui permet de contrecarrer la manœuvre grâce à un super dérapage frein à main (c’est encore plus classe dans l’espace). Impressionné par les skills de son adversaire, Momo s’approche pour se présenter en bonnes et dues formes, et informer le camp adverse que la partie de chat et souris est officiellement lancée. Et en effet, le cache cache inter-dimensionnel va durer plusieurs jours, pendant lesquels le Macharius se fait malmener par son puissant et insaisissable adversaire, du Materium à l’Immaterium en passant par le Transmaterium. C’est parfois agréable de s’acharner sur plus petit que soit.

Dépassé par la situation, Leoten finit par comprendre qu’il lui faut tenter un coup de bluff pour espérer triompher de cet adversaire chevronné mais pas infaillible. Sa technique consistera à effectuer un strip tease gellerien (baisser à dessein l’intensité du champ de Geller de son vaisseau – qui est dans le Warp évidemment – pour simuler une avarie grave) afin d’attirer le Contagion à se rapprocher pour contempler son agonie… pour au final lui envoyer une volée de torpilles à bout touchant, ou presque. C’est complètement stupide comme plan ? Oui mais ça marche ici. Tel un vieux pervers incapable de se contrôler à la vue d’une culotte de lycéenne (#TortueGéniale), Morrauvash fonce dans le pruneau et se mange un panneau. Ou l’inverse. Quoi qu’il en soit, c’est une victoire nette et sans bavure pour la Flotte Impériale, et une première mission menée à bien par Leoten Semper-Et-Sans-Reproche. D’autres suivront, bien sûr…

1 : Et illustrée, en témoigne la monumentale galerie de portraits que les S conservent dans le manoir familial de <PLANETE>.

AVIS :

Gordon Rennie se frotte à l’exercice périlleux du « chapitre 01 », ou comment concilier beaucoup d’exposition et d’introduction (dans le but de mettre en place une intrigue de roman) dans un format de stand-alone. Bien que les auteurs de la Black Library se soient souvent essayés à ce tour de force narratif, peu y sont parvenus de façon convaincante, et je ne placerai pas Rennie dans cette catégorie à la lecture de ‘Baptism of Fire’. Le travail est fait de façon sérieuse, avec un soin de caractérisation de la future galerie de personnages récurrents du roman à mettre au crédit de l’auteur, mais l’amateur de nouvelles sortira lésé de ces treize pages dont plus de la moitié ne sert au final à rien dans la résolution de la mini-intrigue de ce mini-format.

L’opposition entre l’inexpérimenté Leoten et sa Nemesis corrompue est réduite à peau de chagrin (comme l’épiderme du second), et se résume à un demi-tour express – pompeusement renommé manœuvre d’Immerman ici – et à une partie de cache cache honteusement conclue en une demi-page, ce qui ne rendre pas dans ma définition de passionnant. Pire, Rennie semble avoir une compréhension très limitée de ce qu’est le Warp, en considérant cette dimension incompréhensible comme un simple filtre fuschia, dans laquelle il serait tout à fait possible pour deux vaisseaux d’échanger des volées et de se tourner autour, comme dans le Materium. J’aurais pu accepter que le Contagion soit plus à l’aise que sa proie dans cet environnement proprement démoniaque, mais le fait que le vaisseau impérial se débrouille sans trop de problème non plus, au point de baisser volontairement son champ de Geller pour appâter l’ennemi (sans conséquences néfastes pour l’équipage autre qu’un coup de colère du Techno-prêtre de garde), est disqualifiante. J’ai lu beaucoup plus de commentaires positifs que négatifs sur le dyptique gothique de Rennie, et m’attendait donc à mieux de sa part pour ce premier jet. J’espère qu’il a corrigé le tir par la suite.

1 : Ou techniquement chapitre 1 ici, puisque ‘Baptism of Fire’ sera placée au début de ‘Execution Hour’.

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Snares and Delusions – M. Farrer [40K] – #16 :

INTRIGUE :

40K_Snares &amp; DelusionsC’est un jour très spécial pour l’Apôtre Noir De Haan (Dan de son prénom) : après des millénaires passés à traquer le Vaisseau Monde de Varantha à travers la galaxie, tous les signes prédisent que l’heure de la confrontation finale est arrivée entre Word Bearers rancuniers et Eldars élusifs. Débarqué à la surface d’un monde vierge peuplé d’Exodites (rapidement matés) avec l’avant-garde de son ost, De Haan supervise la consécration du bâtiment offert par la Légion hérétique à la seule ville de la planète : la Cathédrale de la 5ème Bénédiction. Les styles jurent un peu mais c’est une attention touchante, il faut le reconnaître. Notre zélé héros est persuadé que ce monde minable dissimule des portails Warp reliés à Varantha, qu’il hait du plus profond de ses cœurs depuis le moment où les Eldars de ce Vaisseau Monde ont fait échouer dans le sang l’opération tractage et prosélytisme montée par le mentor de De Haan sur Sahch-V, contraignant les fils de Lorgar à une honteuse retraite. Depuis, l’Apôtre Noir a consacré sa vie à la traque de cette faction eldar, parvenant progressivement à resserrer l’étau autour du Vaisseau Monde honni. Preuve de l’inimitié tenace l’opposant à Varantha, il a même reçu une prédiction personnalisée de la bouche de l’un de ses Prophètes, juste avant que le crozius protéiforme1 de De Haan ne le réduise en bouillie : « lorsque tu poseras les yeux sur le cœur de Varantha, la messe sera dite2 ».

Les travaux avancent bien, les Exodites sont en voie avancée d’extermination, et les renforts qui patientent dans la barge de bataille en orbite de la planète ne vont pas tarder à descendre renforcer l’avant-garde : tout va pour le mieux dans la plus grimdark des galaxies, mais un événement troublant vient perturber la bonne humeur de De Haan. Au moment de prononcer son sermon de Haine o’clock, il a eu une panne d’inspiration subite. Son second Meer a beau lui répéter que ça peut arriver à tout le monde, le fier Apôtre est aussi gêné que perplexe après cet incident, mais finit par décider que c’est encore un signe que sa quête arrive à son terme, avant d’imaginer toutes les choses horribles qu’il fera subir à Varantha et à ses habitants une fois qu’il aura craqué le digicode. Positive thinking here. Après tout, les choses se déroulent tellement bien que ce n’est pas un petit blanc passager qui va faire dérailler l’Omphalos Daemonium, pas vrai ?

Début spoiler…Eh bien (et vous vous en doutiez, sagaces lecteurs que vous êtes), si. Surgissant de l’ombre et/ou de la banlieue pourrie de la ville Exodite – ça dépend des versions – les forces de Varantha attaquent la Cathédrale sans crier gare, avec la redoutable efficacité et le haut potentiel disruptif3 qui sont la marque des Eldars des Vaisseaux Mondes. Coupé de ses renforts et bientôt laissé seul survivant de son ost, De Haan a un peu de temps pour songer à la prophétie qui lui a été révélée, et surtout à l’interprétation très optimiste qu’il en a eu jusque-là. Car toutes les fins ne sont pas heureuses, comme l’Apôtre Noir ne tarde pas à le découvrir lorsque le cœur de Varantha, alias son Avatar de Khaine, entre dans la Cathédrale pour demander un petit tête à tête au confessionnel… Ite, missa est.Fin spoiler

1 : Il a le superpouvoir de changer de tête à chaque fois que De Haan pose les yeux dessus, ce qui est… cool.
2 : Ok, c’est pas la traduction littérale mais bon, avouez que c’est approprié pour un Word Bearers.
3 : Tous leurs points de commandement ont été claqués dans le stratagème « pièges à c*n », qui colle des blessures mortelles à toute figure s’approchant à 6 pas ou moins des 10 pions « râteau » placés par le joueur Eldar.

AVIS :

Une nouvelle moins intéressante par son intrigue (dont on devine la fin pratiquement dès le début, la faute aussi à un titre qui vend un peu trop la mèche) et ses personnages (assez quelconques) que par l’aisance stylistique dont fait preuve Matthew Farrer et surtout la bonne rasade de fluff qu’il nous sert au fil des pages, et qu’il a la bonne idée de répartir entre Word Bearers et Eldars. Pas sa meilleure, pour sûr, mais tout de même d’un très solide niveau.

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Faith – R. Earl [WFB] – #17 :

INTRIGUE :

WFB_FaithLe chevalier Gilles de Moreaux et son vieil écuyer perclus de rhumatismes, Claude Blanquette1, campent à la dure dans le massif d’Orquemont alors que l’automne est déjà bien avancé. Si les deux hommes s’obstinent à barouder hors saison, c’est que Gillou est à la recherche d’un trophée digne de ce nom pour l’armoire familiale. Notre héros l’a en effet un peu mauvaise que son frérot Léon ait bouclé sa quête du Graal et emballé la Dame du Lac en deux semaines chrono (on a connu la déesse plus minaudière), et soit revenu au château paternel avec une tête de Troll de fort beau gabarit. De son côté, il n’a eu que des bêtes Orques à se mettre sous la lame, et désespère de trouver un adversaire digne de lui attirer la bénédiction de la Dame. Claude, plus prosaïquement, désespère de ne pas être rentré se mettre au chaud alors que l’hiver approche à grands pas, mais doit se contenter pour le moment de siroter son thé au coin du feu, enroulé dans sa fidèle courtepointe. Dans son malheur, le gueux doit reconnaître qu’il a de la chance, car Gilles est le premier de Moreaux qu’il sert à entretenir lui-même ses armes, et il a même poussé la sollicitude jusqu’à réaliser des cataplasmes pour les articulations douloureuses de son serviteur. C’est Martrud de Monfort qui serait fier.

Lorsque le duo rencontre par hasard un paysan envoyé par l’ancien de son village (Celliers) trouver de l’aide pour débarrasser la communauté d’un monstre responsable de la disparition d’une dizaine d’habitants, Gilles se dit qu’il tient sa chance de prouver sa bretonnitude autrement qu’en vidant des bouteilles de chouchen et en jouant du biniou, ce qui est appréciable. Ayant terminé les trois Witchers en mode hardcore lorsqu’il était ado, le chevalier n’a aucun mal à identifier le fléau de Celliers après une entrevue avec l’ancien du village, François. Il s’agit bien sûr d’un Vampire, because of reasons, et il n’aura qu’à attendre la bête à proximité de la crypte locale pour lui faire sa fête et enfin taper dans l’œil de cette mijaurée de Dame. Ayant laissé comme instructions à ses hôtes de rester groupés et de ne pas se séparer, même pour aller aux latrines, le temps qu’il règle leur problème, Gilles s’installe pour une veillée sépulcrale à côté du cimetière local, toujours accompagné par son fidèle Claude. Ce dernier, qui n’est plus tout jeune, finit par s’endormir avec la bénédiction de son maître, qui dispose quant à lui de la vertu de mise en veille de longue durée pour rester alerte toute la nuit durant.

Lorsque Claude se réveille, il se découvre seul à côté des cendres du feu de la veille, et craint d’abord qu’il soit arrivé malheur à son maître pendant qu’il sciait des bûches. Cependant, Gilles était seulement parti constater le décès d’une nouvelle victime de la bête, mordillée à mort par des mâchoires humaines. Comme les bouseux ont respecté les consignes du noble noble, et que le compagnon qui escortait le pauvre Jules au petit coin a disparu sans laisser de traces, Gilles en conclut que c’est ce fieffé coquin de Jacques qui est responsable des morts de Celliers, et jure sur son honneur de traquer le maraud. C’était surtout une ruse pour s’en aller au plus vite du village, maintenant que l’affaire semble être tirée au clair. Bien que satisfait d’avoir accompli son devoir, Gilles n’a toujours pas trouvé d’adversaires à sa valeur, et pense sérieusement à hiverner à Orquemont pour accélérer sa quête. Dans son infinie mansuétude, il renvoie Claude à Celliers pour lui éviter des engelures qui pourraient lui être fatales… et se fait rappeler sur place par son serviteur, car quelque chose d’inattendu se passe au village.

En effet, les paysans sont sur le départ, car la découverte du corps mutilé de Jacques peu après que Gilles et Claude se soient mis en chasse de ce dernier ne laisse que peu de doutes sur le fait que le monstre est toujours dans les parages. Touché dans son honneur et dans son amour propre par la réalisation de sa propre nullité, Gilles supplie François et ses gens de rester encore une nuit sur place, afin qu’il ait une ultime chance de se rattraper. Ne pouvant pas décemment dire non à un psychopathe en armure lourde, l’ancien accepte de surseoir son départ, et le chevalier décide d’aller prier à une mare toute proche pour trouver l’inspi’ qui lui manque tant…

Début spoiler…Lorsque Claude rejoint son maître après avoir ordonné aux péquenauds de se constituer en milice civile et de ne se déplacer que par packs de douze, une vision peu commune vient s’offrir à ses yeux fatigués : la Dame du Lac en personne vient crever la surface de l’étang devant lequel Gilles s’est agenouillé en prière, et s’approche langoureusement du chevalier pour lui rouler un bon gros patin. Déesse ou pas déesse, ce sont toutefois des manières de prédateur/rice sexuel.le, et Gilles décapite l’entreprenante couguar en hurlant « Mitou, hache dague balance ta gorre ! ». Claude, beaucoup plus vieux jeu que son maître, est d’abord horrifié de ce qu’il considère comme une horrible méprise, mais la transformation rapide qui frappe le cadavre de la « Dame », et révèle qu’elle tenait plus de la guenaude aquatique que de la pucelle romantique, le convainc bientôt que Gilles était dans son bon droit. Le mystère de Celliers est résolu pour de bon, et les deux compagnons peuvent prendre la route de Moreaux pour ajouter ce nouveau trophée au mur de la salle de billard du château. Lorsque Claude demande à son boss ce qui lui a fait comprendre qu’il y avait anguille sous roche, le chevalier répond que cette Dame n’avait pas les yeux marrons qu’une pure beauté bretonienne se doit d’avoir, comme toutes les légendes et chansons l’attestent. Ce qui est une raison valable, jusqu’à ce que l’écuyer rappelle à son maître que la Dame qui est apparue à son frère Léon avait les yeux verts, d’après les dires de ce dernier. Bref, c’est pas demain la veille qu’edgy Gilles va rencontrer son idole, moi je vous le dis…Fin spoiler

1 : En fait il n’a pas de nom de famille comme tous les paysans qui se respectent, mais comme son kif ultime c’est de se faire des capes de superhéros avec des couvertures, je crois qu’on peut l’appeler Blanket Man.

AVIS :

Robert Earl revisite le mythe du chevalier de la Quête avec une petite nouvelle qui montre que tout ce brille n’est pas forcément or. Si l’auteur nous gratifie d’un twist final digne de ce nom, il aurait à mon sens été bien inspiré de chercher à l’intégrer de manière convaincante dans le reste de son histoire. En l’état, la rencontre entre Gilles et la Dame de la Mare tient plus de la péripétie accidentelle que de la conclusion logique d’une intrigue bien construite, et tout ce qu’il s’est passé avant ce moment fatidique n’a, scénaristiquement parlant, servi à rien, ou à pas grand-chose. Je reconnais que les Bretonniens ne sont pas les protagonistes les plus faciles à mettre en scène de façon intéressante, leur noblesse et droiture intrinsèques ne laissant que peu d’opportunités à un auteur pour complexifier un peu le tableau de façon cohérente avec le fluff de la faction. On en a ici un bon exemple avec good guy Gilles, qui fait un protagoniste aussi mémorable que le Moxostoma anisurum moyen. Comme pour la quête du Graal, beaucoup d’appelés, mais peu d’élus.

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Who Mourns a Necromancer? – B. Craig [WFB] – #17 :

INTRIGUE :

WFB_Who Mourns a NecromancerC’est jour d’enterrement à Gisoreux, mais le défunt qui est emporté jusqu’à sa tombe, dans le cimetière de Colaincourt, ne peut se targuer de laisser une foule éplorée derrière lui. Et pour cause, seul un homme est venu rendre un dernier hommage à Lanfranc Chazal, Magister au sein de l’université locale : son vieil ami et collègue (et accessoirement Haut Prêtre de Verena), Alpheus Kalispera. Si ce dernier se retrouve seul à souffler comme un phoque – il a pas de cardio – sur la colline, devant une tombe anonyme et un prêtre de Morr pas franchement ravi d’officier, c’est à cause de la détestable réputation que se traînait le clerc Chazal sur ses vieux jours, celle d’un Nécromancien. Bien qu’il tienne à faire bonne figure dans cette situation à la fois tragique et humiliante, Kalispera est désolé de constater que ces petites biatches de l’université, qui n’avaient pourtant rien à reprocher à Chazal de son vivant, se soient faites toutes porter pâles plutôt que de l’accompagner. Aussi est il sincèrement ému lorsque surgit au milieu de l’office un jeune cavalier, certes en retard, mais décidé lui aussi à assister à la mise en terre du macchabée.

Le nouveau venu, du nom de Cesar Barbier, a été l’élève des deux Magisters il y a quelques années, avant de repartir sur le domaine de son père se préparer à prendre la succession du noble. Il avoue à Kalispera avoir gardé contact avec Chazal après sa diplomation, considérant le professeur comme un mentor ainsi que comme le père qu’il aurait bien aimé avoir, son géniteur étant l’archétype de l’homme de guerre totalement insensible aux sentiments et à la notion de respect de ses inférieurs. N’ayant pas d’autres choses à faire une fois la tombe rebouchée, Barbier et Kalispera se rendent chez le second pour poursuivre leur deuil autour d’un petit verre et d’un bon feu. L’ancien étudiant en profite pour faire une révélation lourde de sens à son hôte : contrairement à ce qu’il pensait, Lanfranc Chazal était bien un Nécromancien (comme son teint macabre et ses yeux enfoncés le laissaient pourtant à deviner). Mais, attention, un gentil Nécromancien. Ce qui change tout, ou en tout cas ouvre le débat.

Barbier se lance alors dans une chronique de sa vie tumultueuse depuis son retour dans sa famille, et de son mariage clandestin avec une charmante roturière du nom de Siri. Qui évidemment tomba enceinte1. Les deux tourtereaux avaient pour projet de tout plaquer et d’aller passer quelques années en exil dans l’Empire, le temps que la colère de papa Barbier (Christophe, sans doute) retombe, mais mirent trop longtemps à faire leurs bagages. Ramené au château paternel sous bonne garde, Cesar ne put qu’assister au meurtre de sang froid de sa bien aimée par son salopard de père, qui ne voyait vraiment pas le problème. Fort heureusement, le nobliau éploré parvint à convaincre Chazal, qui lui avait confié travailler de façon tout à fait théorique sur la Nécromancie afin de prouver que cette forme de magie n’était pas naturellement mauvaise, de passer à la pratique pour dépanner un pote dans le mal. Résultat des courses : le fantôme de Siri accepta de venir hanter la petite maison dans laquelle les jeunes mariés s’étaient installés, grâce un rituel certes interdit, et qui laissa des stigmates visibles sur la tronche et la santé du pauvre Chazal, mais parfaitement exécuté (et avec des extras sympas).

Troublé par la réalisation que son bon ami était finalement un pratiquant des arts sombres, et peut-être aussi surtout qu’il a été le dindon de la farce pendant toutes ces années, Kalispera ne sait trop quoi penser de la situation décrite pas son invité, qui se fait un devoir de lui sortir un discours sur l’injustice du monde digne d’un tracteur Solidaires Etudiant-e-s pour le persuader que, en vrai, la nécrophilie, c’est pas si pire (#ngl #tmtc). Le vieux maître n’en est pas si convaincu, mais il n’est pas d’humeur à débattre pendant des plombes avec Barbier, à qui il souhaite simplement de rester éternellement amoureux de son fantôme de femme, et de commencer dès à présent à réfléchir à l’organisation de la succession de son père (maintenant qu’il n’a plus de Nécropoto pour installer sa petite famille dans un autre bled). Pour le reste, les deux comparses tombent d’accord que Chazal était un vrai type bien, et on peut supposer qu’ils finissent la soirée ronds comme des queues de pelle, ainsi que de vrais Bretonniens le doivent en cette occasion particulière.

1 : Et dire que si j’avais chroniqué ‘Lords of Valour’ au moment de ma première lecture, je n’aurais pas pu sortir cette vanne. Je ne sais pas Dieu existe, mais Loec oui.

AVIS :

Nouvelle craigesque par excellence, ‘Who Mourns a Necromancer ?’ apporte au lecteur une perspective neuve sur un aspect notable et éminemment fantastique du monde de Warhammer, d’une manière que l’on peut qualifier de posée ou de planplan, selon ses goûts personnels1. Après avoir traité du Chaos dans ses précédents courts formats, Brian Craig s’attaque ici à la non-vie, mais c’est surtout l’occasion pour lui de poser la question du respect des normes, et du caractère artificiel, voire inique, de ces dernières dès lors que l’on y réfléchit un peu. Lanfranc Chazal doit il être condamné parce qu’il a pratiqué la Nécromancie, même s’il l’a fait de la manière la plus éthique qui soit ? Et que dire du père de Cesar Barbier, qui était dans son droit d’assassiner sa bru d’après les lois de Bretonnie, mais n’en demeure pas moins un meurtrier et un sale type en puissance ? On peut regretter que Craig n’ait pas choisi de mettre un peu plus en avant ce qui à mes yeux rendait cette incitation à la réflexion plus palpitante qu’une version romancée d’une conf’ sur Kelsen : la présence dans le monde de Warhammer Fantasy Battle de divinités et de magie (ce qui est la même chose au final). Alors que dans notre bête monde aseptisé, la réponse restera purement théorique, Craig aurait pu conclure que le mal existe réellement et dans l’absolu dans le Monde Qui Fut, comme en témoigne le spectaculaire glow down du plus gentil Nécromancien ever (ou le développement de maladies honteuses chez Barbier ?). Il ne l’a pas fait, tant pis : à chacun de se faire une opinion.

1 : Apparemment, l’artiste engagé par Inferno ! pour faire l’illustration de la nouvelle (John Wigley) ne savait pas à qui il avait affaire, et/ou n’a pas jugé bon de lire autre chose que le titre. 

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Small Cogs – N. Rutledge [40K] – #17 :

INTRIGUE :

40K_Small CogsSeule la mort met fin au devoir nous dit le proverbe, et ce n’est pas le Colonel Soth du 8ème Ulbaran qui viendra s’en plaindre. Ayant participé à la reprise de la planète de Luxoris Beta, confisquée par les Orks pendant des siècles, le régiment se retrouve mobilisé pour défendre la station d’épuration le Temple de l’Eau local contre une excursion eldar repérée au dernier moment par ces planqués du Haut Commandement. Malgré le fait que ses hommes doivent combattre en uniforme d’apparat, leur mission première étant de participer au défilé du 14 juillet local, Soth fait contre mauvaise fortune veste qui gratte bon cœur et organise un périmètre défensif autour du bâtiment visé par les Xenos. Le Temple de l’Eau contrôle en effet le système d’irrigation de la planète, en faisant une cible de choix pour les Eldars : inonder les basses terres de Luxoris Beta priverait en effet les défenseurs impérieux de la possibilité de déployer leurs véhicules blindés dans ce conflit.

Après avoir échangé quelques banalités avec le prêtre Jarendar, tout à fait confiant dans la protection qu’apportera l’Empereur à ses fidèles, Soth est appelé à son poste de commandement par son second (Hoddish) lorsque les Eldars lancent leur assaut. S’en suit une bataille urbaine tout à fait classique entre les deux factions, à la ténacité et la discipline des Gardes Impériaux s’opposant la vitesse et la technologie avancée des Xenos. En bon commandant, Soth met les mains dans le cambouis et mène une charge au fuseur contre un Falcon trop confiant, héritant d’une blessure à la cuisse mais permettant aux lignes impériales de tenir.

Un moment de répit entre deux attaques permet à notre héros d’inspecter le périmètre… et de manquer de tomber sous les tirs d’un Ranger isolé, finalement localisé et abattu sur un gros coup de chance par Soth. Il ne faut pas longtemps au sagace officier pour réaliser que le sniper n’a pas fait le déplacement seul, et que ses petits copains sont certainement en train de converger vers le Temple pendant que le reste des forces eldars fait diversion. Ne pouvant mobiliser un peloton entier sous peine de laisser ses lignes dangereusement dégarnies, Soth ordonne à Hoddish de lui envoyer trois Gardes pour tenter d’intercepter les infiltrateurs ennemis avant qu’il ne soit trop tard.

Je vous la fais courte : au prix d’une progression sanglante et de la perte de tous ses sidekicks, Soth parvient jusque dans la salle des machines du Temple, où il surprend le dernier Ranger en pleine lutte avec Jarendar. Le prêtre étant plus doué en parabole qu’en krav-maga, il ne tarde pas à rejoindre la droite de l’Empereur, tandis que Soth hérite pour sa part de quelques shurikens dans le thorax, lui faisant perdre la règle Objectif Sécurisé et lui donnant l’impression de voir les esprits de ses camarades défunts danser le harlem shuffle autour de lui. Ces hallucinations dissimulaient cependant l’arrivée d’un clutch player de chair et de sang : le novice de Jarendar – et son chandelier – qui règle son compte au pénible Xenos alors qu’il trifouillait les panneaux de commandes en fredonnant ‘Here comes the flood’. Bien fait. La nouvelle se termine sur la victoire des impériaux et l’évacuation de Soth vers l’hôpital le plus proche, mais pas avant qu’il n’ait bredouillé au Medic qui l’a stabilisé de faire passer à Hoddish la morale de cette histoire : prêter attention au moindre détail (small cogs). Que voilà une édifiante conclusion.

AVIS :

Pour sa seule incursion dans le 41ème millénaire (si on ne considère pas la nouvelle ‘Sisters’, écrite pour Necromunda), Neil Rutledge livre une bonne histoire de « Gardes Impériaux d’action », dans la droite lignée de ce que nous propose le légendaire Dan Abnett avec ses Fantômes de Gaunt. Chose appréciable, on a le droit en seulement 26 pages à une bataille rangée, suivie par une mission d’infiltration tournant au duel de snipers, ce qui est une variété tout à fait appréciable pour un court format. Les affrontements entre Garde Impériale et Eldars des Vaisseaux Mondes étant de plus assez rare dans la GW-Fiction, on appréciera d’autant plus ce ‘Small Cogs’ à sa juste valeur. Je valide.

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White Heat – D. Abnett [40K] – #18 :

INTRIGUE :

40K_White HeatNous retrouvons les Iron Snakes d’Ithaka sur une nouvelle mission colorée, quelques temps après les événements couverts dans ‘Black Gold’. Les serpents perçants sont cette fois chargés de reprendre la capitale planétaire d’Eidon, monde impérial squatté depuis quelques mois par les Eldars Noirs. Comme les 300.000 Gardes Impériaux budgétés par les autorités sectorielles ont failli à leur mission, il est plus que temps que les bidasses laissent place à de véritables professionnels de la guerre, j’ai nommé le Capitaine Héros (c’est vraiment son titre) Phobor et sa Compagnie de joyeux drilles, dont l’escouade Damocles, présentée dans ‘Black Gold’ fait partie. Nous rencontrons également l’illustre Petrok, Archiviste assisté de son état1 et légende vivante du Chapitre (et au-delà, puisque même les officiers de la Garde fangirl en sa présence). Pète-roc, qui a été retardé par un bombardement orbital, arrive sur le théâtre d’opération alors que Phobor a déjà lancé son attaque, et contrairement aux instructions laissées par le Capitaine, il décide d’aller dire bonjour à l’escouade laissée en réserve de l’autre côté d’Eidon City, dans le but d’intercepter les fuyards Drukharis. Comme vous le devinez, sagaces lecteurs, il s’agit évidemment de Priad et de ses bois, dont la mission ne relève finalement pas du tout de la sinécure.

Un curieux hasard a en effet voulu qu’un contingent significatif d’Eldars garde la section des murailles de la ville que l’escouade Damocles a été chargée d’attaquer. Le feu nourri subi par ses hommes force donc le Sergent Priad à réaliser un pro player move… faire tirer au lance plasma sur un mur afin de l’effondrer. Mais à se ruer dans la brèche avant de l’avoir ouverte, on se met à risque de se retrouver Sébastien gros-jean comme devant si (quand…) le jet pour blesser donne 1. Ce qui est le cas ici. Nos braves Iron Snakes se retrouvent donc en fâcheuse posture, à poil énergétique dans la pampa et sous un feu nourri, quand le salut arrive sous la forme baraquée de Petrok. Utilisant son awesomeness comme couvert lourd, l’Archiviste entame une bromance ultra lourde avec Priad, mais lui donne aussi un précieux conseil démontrant la profondeur insondable de sa sagesse : quand ça marche pas du premier coup, recommence. Et, ô miracle, le mur fâcheux finit par tomber en poussière, permettant aux Space Marines de pénétrer dans la cité martyr.

La suite n’est qu’un carnage sans nom ni intérêt, pendant lequel nos dix Astartes parviennent à massacrer des centaines (!!!) de Drukharis, sans subir aucune perte en retour. La partie la plus délicate de leur soirée sera finalement consacrée au déplacement des bombes laissées par les Xenos sur les conduits à phosphore d’Eidon City, sorte de course à la cuillère dont les Serpenfer se sortent encore une fois haut la main. Ceci fait, ils rentrent au bercail participer au traditionnel banquet de la victoire, où l’ombrageux Phobor les attend avec un air grognon (il voulait que Petrok le rejoigne pendant la bataille et lui dise à quel point il était génial). Le debrief sera peut-être un peu froid…

1 : Il se promène avec pas moins de 9 grouillots pour lui porter ses affaires, sans doute pour relancer l’emploi sur Ithaka, mais tout de même. Notons pour sa défense qu’il ne s’entoure pas des esprits les plus brillants, ce qui peut justifier de compenser la qualité par la quantité.

AVIS :

J’espérais qu’Abnett élève le niveau par rapport à ‘Black Gold’ dans ce deuxième épisode de sa série consacrée aux Iron Snakes, et j’ai été très déçu. Non seulement on se retrouve à nouveau avec une Space Marinade totalement insipide (voire caricaturale, quand on constate la facilité déconcertante avec laquelle l’escouade Damocles annihile 40.000 fois son coût en points en l’espace de vingt minutes), mais l’auteur des ‘Fantômes de Gaunt’ passe totalement à côté de son sujet en matière de caractérisation, ce qui est pourtant un de ses points forts reconnus. Entre Phobor le boudeur, Petrok le lover et Rodos l’abruti, le transparent Sergent Priad passerait presque pour un modèle. On a également droit à des petits irritants, sans conséquence pour l’histoire en tant que telle, mais révélateur d’un haut niveau de je m’en foutisme de la part d’Abnett et de son éditeur, comme la mention du Primarque (au lieu de Maître de Chapitre) Seydon, ou encore un échange d’arme involontaire en plein combat (Petrok hérite de la griffe énergétique de Priad le temps d’un paragraphe). Ce résultat est d’autant plus décevant que Dan Abnett avait rendu une copie autrement plus propre quelques mois auparavant avec ‘A Blooding’ (Inferno ! #6), autre nouvelle mettant en scène l’assaut d’une ville du point de vue de troupes impériales. La motivation a clairement péché ici, et les Iron Snakes ne marquent pas de points avec ce ‘White Heat’.

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Tybalt’s Quest – G. Thorpe [WFB] – #18 :

INTRIGUE :

WFB_Tybalt's QuestDans le brouillard brumeux d’une nuit nocturne, le noble chevalier Tybalt se rend en direction d’un cimetière de tombes, accomplissant ainsi le désir de volonté d’un fantôme spectral lui étant apparu dans ses rêves oniriques… Hum. Je pourrais continuer longtemps comme ça, mais les plaisanteries les plus courtes étant les moins longues, nous allons repasser sur une narration un peu moins lourdement pesante. Merci Gav. Ayant passé plusieurs longues minutes, et autant de pages, à attacher son cheval à un piquet, ouvrir la grille du cimetière, trébucher sur un rat, et occire un pauvre sanglier innocent qui passait seulement dans le coin1, Tyty finit enfin par arriver jusqu’à la crypte où repose le Duc de Laroche, qui lui a demandé d’accourir en toute hâte pour combattre un terrible danger s’étant manifesté dans le cimetière de Moreux. Mais évidemment, ce gros troll de Laroche n’a pas pensé à se présenter ni à donner les coordonnées GPS de son mausolée au pauvre Tybalt, vous pensez bien. Un coup d’œil sur son blason a fait l’affaire, évidemment. Ce qui a conduit notre héros à perdre quatre mois à éplucher tous les registres d’héraldique à sa disposition pour finalement identifier les armes du brave (c’était un Graaleux, tout de même) Pierrot et localiser sa dernière demeure. Moi je dis que le fantôme aurait dû apparaître à un gueux livreur Deliveroo, l’affaire était pliée en 25 minutes. Menfin.

Une fois sur place, Tybalt est à nouveau visité par Laroche, posay comme jamay dans son petit pied à terre. Mis à part des tournures de phrases un peu rigolotes, le vioque se révèle être un hôte affable et charmant, qui avait juste besoin de trouver un champion de ce nom pour contrecarrer les plans d’un Nécromancien de bas niveau (puisqu’il n’a pas été foutu de lever une armée depuis l’envoi du SOS (du) fantôme…). Toujours cette histoire de quatre mois de latence, ça ne devrait pas mais ça m’énerve. Le cimetière de Moreux est en effet très spécial. En plus de servir d’ossuaire depuis des temps immémoriaux, il s’agit de l’endroit très précis où Gilles le Breton a reçu sa première vision de la Dame. On pouvait se demander ce qu’il faisait à camper dans un tel endroit pour commencer, mais ce serait une autre histoire. Toujours est-il que l’honneur de la Bretonnie impose que Tybalt empêche un pratiquant des arts noirs de souiller de sa présence et de sa nullité crasse ce monument historique classé au patrimoine imputrescible de l’humanité. Le jouvenceau n’est franchement pas chaud à l’idée de partir à la chasse d’un sorcier capable de relever les morts, seul dans un cimetière, mais Laroche ne lui laisse pas le choix. Il lui prête cependant son heaume enchanté et sa mirifique Résistance à la Magie (3) pour lui faciliter un peu la tâche.

La suite, cela ne vous surprendra guère, est consacrée à la « traque » du Nécromancien par Tybalt. Après une première rencontre pendant laquelle on a tout loisir d’admirer que la camelote de Laroche works just fine, et de réaliser que Tybalt est vraiment pathétique (il se fait sonner par un coup de bâton sur son heaume, donné par un vieillard boiteux d’un mètre cinquante), le preux chevalier erre un peu entre les tombes, repasse en mode facile avec une petite prière à la Dame (qui lui permet soudainement d’entendre les incantations du Nécromancien à 300 mètres), rencontre quatre squelettes animés dont il a le plus grand mal à se défaire, et finit par confronter enfin son affreuse Némésis, protégée par une puissante escorte de… six squelettes. Qui tombent en morceaux dès que Tybalt s’approche. On peut se demander pourquoi ça n’a pas fait la même chose pour les morts vivants précédents, mais la réponse est « on s’en fout ». S’en suit un dialogue relativement interminable (quand on le compare à la longueur de la nouvelle et à son intérêt intrinsèque), pendant lequel on apprend que si le Nécromancien était si méchant, c’est parce qu’il avait lui-même peur de la mort. On s’en fout là aussi, merci. Au bout du suspense, Tybalt finit par décapiter le maraud, ramener l’équilibre dans la Force et la paix dans le voisinage, et la nouvelle se termine avec l’ajout d’une nouvelle corvée d’utilité publique sur la to do list des vilains de Moreux : entretenir un peu mieux leur cimetière, décidément très mal fréquenté. Voilà qui ne va pas arranger le déficit des collectivités locales, c’est moi qui vous le dit.

1 : Il a aussi essayé de voir des sons. Sans succès.

AVIS :

Gav Thorpe se cherche comme auteur de nouvelles fantastiques dans ce ‘Tybalt’s Quest’, et malheureusement pour tout le monde, il ne se trouve pas. Le style est aussi pâteux et cartonné qu’un mauvais pudding, l’intrigue tient en une demi-ligne (police 54), les péripéties sont sont plus dignes d’un nanar fauché que d’une production littéraire libérée de la prosaïque contrainte d’un budget à respecter : si on veut être aussi miséricordieux que l’aimable Duc de Laroche, on accordera quelque point à Thorpe pour les bouts de fluff (pas vraiment reluisants) qu’il a glissé dans sa copie. Pour le reste, le seul point fort de ‘Tybalt’s Quest’ est de faire moins de vingt pages, ce qui rend sa lecture, à défaut d’agréable, courte. Un mauvais moment de et à passé/er.

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Battle of the Archeosaurs – B. J. Bayley [40K] – #18 :

INTRIGUE :

40K_Battle of the ArcheosaursLa planète ABL 1034, colonisée par l’humanité en des temps forts lointains puis laissée à mariner dans son jus pendant la Longue Nuit, a été redécouverte par l’Imperium. Idéalement situé pour devenir une capitale sous-sectorielle, comme Mont de Marsan avant lui, ce monde primitif aurait dû être conquis ou reconquis par le régiment de Gardes Impériaux dépêché sur place sans le moindre effort, mais voilà : les bidasses ont été toutes massacrées par la population locale, malgré le très faible niveau technologique de cette dernière. Une deuxième expédition, mécanisée celle-là, n’a pas connu un sort plus favorable, faisant d’ABL 1034 une sorte de village gaulois galactique, résistant vaillamment contre l’envahisseur romain impérial. Foin de druide à la faucille en or ou de potion magique ici : la raison de cette défiance étonnante se trouve dans la présence d’une mégafaune domestiquée par les natifs, et baptisée archéosaures par les Magos Biologis en raison de la ressemblance des dites bestioles avec les lézards géants qui peuplaient Terra il y a des millions d’années.

Comme on le sait bien ici, ni la patience ni la bienveillance de Pépé ne sont sans limite, au contraire de ses armées, qui sont elles proprement inextinguibles. La troisième fois sera donc la bonne pour l’Imperium, qui décide de mettre le paquet pour s’assurer d’une victoire probante et envoie pas un, mais deux Titans Warlord mettre de l’ordre sur ABL 1034. Bien que les Princeps des machines envoyées sur place (Gaerius et Efferim) doutent fortement que l’ennemi soit en mesure de les inquiéter, la discipline légendaire de l’Adeptus Titanicus les empêche de livrer le fond de leur pensée aux gradés de la Flotte et de la Garde avec lesquels ils partagent la séance de briefing pré-déploiement. Et puisqu’ils sont sur place, autant faire le job, pas vrai ?

Cette belle confiance est rapidement, même si temporairement, ébranlée par la vision qui attend les Princeps lors de leur descente à la surface de la planète : pas moins de cinq épaves de Gargants ork jonchant la plaine choisie par le commandement impérial pour déployer ses forces. Bien que Gaerius choisisse de croire qu’il s’agit d’une conséquence de la nature belliqueuse des Xenos, tout prêts à se battre en eux en absence d’ennemis valables, plutôt que d’un fait d’armes des indigènes, son aveuglement béat ne va pas durer longtemps. L’arrivée de la troisième vague d’assaillants n’est en effet pas passée inaperçue chez les locaux (en même temps, on parle de marcheurs d’assaut de plus de trente mètres de haut, c’est voyant), et la tribu la plus proche n’est pas longue à envoyer ses guerriers et deux archéosaures livrer bataille aux nouveaux venus. On apprend à l’occasion d’un petit passage raconté depuis le point de vue de l’un des deux seuls survivants de la deuxième vague impériale, et reconverti en étendard vivant par les autochtones, que ces derniers arrivent à contrôler leurs montures grâce à des pieux métalliques fichés dans le crâne des archéosaures à des endroits précis, et dont les vibrations permettent d’activer certaines zones du cerveau de ces grosses bestioles. C’est tout simple, mais il fallait y penser (et surtout, trouver un moyen de mettre l’idée en pratique…).

Le combat s’engage donc entre les Titans et les Kaijus, et le petit rictus de suffisance qui flottait sur les lèvres du Princeps Gaerius est rapidement remplacé par une grimace d’incrédulité devant la résistance incroyable de ses adversaires, puis par de la panique pure et simple lorsque les archéosaures déclenchent leur combo spéciale « jet de flammes/cabrage/coup de queue », mettant au tapis le Warlord d’Efferim et laissant la machine rescapée composer seule avec les deux dinosaures énervés qui lui font face. L’entraînement et la discipline de l’équipage du Titan survivant (et les gros flingues dont il dispose) permettent toutefois à Gaerius d’arracher une victoire mineure en abattant les lézards géants à bout portant avant qu’ils n’aient pu lui faire des papouilles. C’était moins une pour la crème de la crème de l’Omnimessie…

Début spoiler…Et ce n’est surtout que partie remise pour la tribu vaincue, dont le nouveau chef décide que l’heure n’est plus aux combats honorables en 2 contre 2. Ayant bien compris que les armées impériales ne reculeraient devant rien pour s’emparer de la planète, il envoie dès le lendemain l’intégralité de son cheptel, soit une centaine d’archéosaures, piétiner les positions adverses. Le Titan mal en point de Gaerius ne peut pas s’opposer à une telle démonstration de force, et la troisième campagne se termine aussi ignominieusement que les précédentes.

Notre nouvelle quant à elle se conclut sur la décision prise par des gros bonnets de l’Imperium de régler une fois pour toutes cet ennuyeux, coûteux et humiliant problème en déchainant un petit Exterminatus sur la planète rebelle, quand bien même ça l’abimerait un peu, au moins à moyen terme. Un constat partagé à grand cri par notre ami Gaerius, qui a survécu à la débâcle et a été « adopté » par la tribu d’ABL 1034, où il sert maintenant de décoration frontale d’archéosaure. Voilà une reconversion réussie. Fin spoiler

AVIS :

Une nouvelle « et si ? » par excellence, ‘Battle of the Archeosaurs’ permet à une des plumes les plus libres de la première époque de la Black Library de mettre en scène une bataille assez improbable et donc totalement savoureuse entre Titans Warlord et dinosaures géants, le tout avec un respect du fluff que l’on ne peut qu’admirer. On ne verra probablement plus rien de tel dans le catalogue de la BL (tant pis ou tant mieux, je vous laisse seuls juges), ce qui est une autre raison pour les amateurs de GW-Fiction de prendre connaissance de cet OVNI de la littérature 40K.

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Matters of Honour – G. Rennie [40K] – #18 :

INTRIGUE :

40K_Matters of HonourQuelque temps après les événements relatés dans ‘Baptism of Fire’, nous retrouvons le Lord Solar Macharius, son capitaine Leo Semper et son équipage foultitudineux, dans une nouvelle mission à haut ris- en fait non. Les aléas de la guerre gothique, dans laquelle le Macharius sert avec distinction comme escorteur de vaisseaux civils (pas très funky mais il faut bien que quelqu’un le fasse), mènent les autorités compétentes à mettre nos héros sur une mission un peu plus intéressante : intercepter le Bellerophon, un croiseur dont l’équipage est récemment passé au Chaos et cherche désormais à rejoindre l’espace ennemi pour remettre à Abaddon des informations top moumoute (et Pépé sait qu’Abaddon aime les perruques). L’honneur de la Flotte Impériale (surtout) et l’équilibre des forces (un peu) sont en jeu, il faudra donc servir sans faillir une fois encore.

Grâce à des prévisions très précises de l’itinéraire poursuivi par le Bellerophon et un Warp assez calme en cette saison, le Macharius parvient à intercepter sa proie dans le système de Delphi. L’affrontement est assez déséquilibré, mais dans le « bon » sens pour changer : ce sont en effet les Impériaux qui ont l’avantage de la taille et de la puissance de feu sur les affreux renégats, menés par le Lieutenant Magell (ça se prononce comme ça en VO, je veux rien savoir). Ce dernier avait d’abord espéré pouvoir distancer ses poursuivants, mais un raid de Maraudeurs rondement mené désempare totalement Bebel, prouvant au passage que l’on a toujours besoin d’un plus petit que soi, surtout si le petit en question vole vite et peut larguer des missiles à tête chercheuse. L’ennemi étant à sa merci, le Capitaine Semper décide de laisser son second, le capable mais sanguin (il a occupé les premières pages de la nouvelle à tuer en duel un officier qui l’avait mal regardé) Hito Ulanti, choisir la manière dont le coup fatal doit être porté. Désireux de faire ses preuves, ce dernier choisit l’option la plus exposée : aborder le Bellerophon et le reprendre aux traîtres par les armes, afin d’épargner le vaisseau et de récupérer les précieuses informations dérobées par les Magell et compagnie. Dont acte.

L’assaut en question, s’il ne présente guère de suspens quant à son issue (même Rennie le dit), permet toutefois à un autre personnage rapidement croisé dans ‘Baptism of Fire’, le conscrit un brin psychotique Maxim Borusa, de se mettre en valeur à son tour. Envoyé en première ligne armé de sa fidèle clé à molette porte-bonheur, tel le Gérard Lambert du 41ème millénaire, Max réussit à nouveau à friendly firer son supérieur hiérarchique dans le feu de l’action, mais aussi et surtout, à sauver les miches d’Ulanti pendant son duel avec son homologue1, sécurisant par là-même un transfert dans des quartiers un peu plus sympathiques que le fond de cale du Macharius. Ça c’est un petit gars qui ira loin.

La nouvelle se termine avec un peu plus d’information sur la documentation qu’Abaddon tenait tant à récupérer. Il s’agit de plans des mystérieuses Forteresses Noires, clés de voûte de la flotte gothique et cibles principales de la 12ème Croisade Noire, comme nous le savons désormais. Pour l’heure, Leo et ses comparses ne savent pas trop quoi faire de cette révélation, et Aby se console de l’interception inopportune du Macharius en contemplant son futur véhicule de fonction sortir de l’usine : rien de moins que le Planet Killer, et avec les sièges chauffants et le radar de recul s’il vous plait…

1 : Il arrive à temps pour fermer le clapet de Magell, c’est approprié je pense.

AVIS :

Après des débuts poussifs, Rennie fait bien mieux dans cette seconde nouvelle consacrée à l’univers si particulier de la guerre dans l’espaaaaaace. Exit les introductions à rallonge qui au final ne servent à rien à l’intrigue, et bonjour les descriptions des aspects pratiques de cette forme de combat fascinante et injustement ignorée par la BL. Qu’il s’agisse de contextualiser le rôle des Astropathes, de décrire une mission de Maraudeurs, de dépeindre les complexes relations de pouvoir et traditions qui sous-tendent l’institution Flotte Impériale, ou encore de mettre en scène la brutalité d’un abordage, même « basique » (péquins contre péquins, pas de Space Marines ou de démons pour jouer les trouble-fêtes), Gordon Rennie répond présent. Son choix de poursuivre la caractérisation des personnages passés en revue dans ‘Baptism of Fire’ de manière plus sélective – seuls Ulanti et Borusa sont traités ici – est également payant, et permet à ces deux figures de gagner une profondeur assez intéressante. Seuls quelques erreurs d’étourderie sans gravité (explosions dans l’espace, confusion entre Adeptus Arbites et Astartes), et un suspens des plus limités (le doute est très rapidement levé sur le fait que la mission du Macharius sera un succès) sont à lui reprocher, mais rien qui ne viennent sérieusement entraver le plaisir de lecture. Dommage qu’il se soit arrêté d’écrire des nouvelles pour cette série après ce ‘Matters of Honour’, car il avait atteint un niveau intéressant… Restent évidemment les deux romans1 qu’il a signé avant de voguer vers d’autres cieux à se mettre sous la dent, pour les fans éperdus de Leo ‘the G.O.A.T.E.E.’ Semper.

1 : ‘Execution Hour’ et ‘Shadowpoint’.

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Et voilà qui termine cette revue de la troisième année d’Inferno!, où grandeur et décadence se sont une nouvelle fois mélangées. À l’heure où cette chronique est mise en ligne, il semble que la Black Library ait à nouveau mis le concept au frigo car aucune nouvelle publication siglée de l’iconique appellation n’est à prévoir dans les mois qui viennent. J’en suis le premier désolé, mais comme Inferno! a déjà prouvé qu’il pouvait rejaillir de ses cendres (ce qui est approprié, avec un tel nom), il faut espérer que nous aurons l’occasion de nous pencher sur autre chose que des rétrospectives à plus de vingt ans dans les prochaines années. D’ici là, il me reste encore quelques numéros à passer en revue…

INFERNO! – ANNEE 2

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue des nouvelles publiées dans les numéros #7 à #12 d’Inferno !, soit la seconde année de publication de cet auguste et vénérable bimensuel (Juillet 98 à Mai 99). Si l’on jette un œil sur les auteurs mis à contribution pour ces six numéros, on constate qu’Abnett le jeune caracole en tête des charts avec pas moins de quatre soumissions à son nom, en majorité consacrée à Warhammer Fantasy Battle. Il est suivi d’assez loin (2 nouvelles) par deux autres figures de la Black Library : l’inoxydable Gav Thorpe et l’immarcescible Bill King. Notons enfin l’arrivée pendant cette période de plusieurs plumes notables : Matthew Farrer (‘Badlands Skelter’s Downhive Monster Show’) et Ben Counter (‘Daemonblood’), Hall of Famers de la BL, et Barrington J. Bayley (‘Children of the Emperor’) comme invité de marque et caution SF de ce jeune magazine.

Inferno!_Année 2

Les 21 nouvelles regroupées ici présentent la GW-Fiction dans toute sa foisonnante diversité, explorant les recoins les plus reculés du Monde qui Fut et du 41ème millénaire (y compris Necromunda) avec une liberté et une inventivité qui laisseront progressivement la place à plus de contrôle de la part des maîtres du fluff de Nottingham. Que vous soyez à la recherche d’une romance avec un loup-garou (‘Wolf in the Fold’), ou de Space Marines se frottant à la réalité virtuelle (‘Hell in a Bottle’), il n’y a qu’ici que vous trouverez quelque chose tout ce qu’il y a de plus officiel à vous mettre sous la dent.

On trouve également dans cette anthologie de vrais classiques, qui peuvent se comparer favorablement avec des nouvelles écrites plus de vingt ans plus tard, comme ‘In the Belly of the Beast’ (King) ou ‘Acceptable Losses’ (Thorpe). C’est également en cette fin de millénaire que l’indispensable Zavant Konniger fit ses premiers pas et savantes déductions sous la plume de Gordon Rennie (‘The Affair of the Araby Exhibit’). Vous l’aurez compris, cette deuxième année infernale mérite le coup d’œil pour tous les amateurs de GW-Fiction, qu’ils soient nostalgiques de ce passé mythique ou pas. En selle pour un petit tour du propriétaire bibliothécaire.

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A Company of Wolves – D. Abnett [WFB] – #7 :

INTRIGUE :

WFB_A Company of WolvesUne compagnie de Chevaliers du Loup Blanc plongée en plein doute existentielle à la suite de la mort de leur commandant au cours d’un raid mal négocié dans la Drakwald quelques mois plus tôt retourne en forêt pour une session de teambuilding mâtinée de skullbashing. Les problèmes affligeant nos héros, que l’on ne peut pas qualifier de sans peur (le vétéran Gruber a le trouillomètre à zéro depuis le décès tragique de son supérieur et ami Jurgen) ni de sans reproche (dans le désordre : Morgenstern a un gros problème d’alcool, Anspach est un parieur pathologique, Vandam une tête brûlée carriériste, et le nouveau chef, Ganz, a moins de charisme que la tête de loup qui orne son armure) sont nombreux, mais le Grand Maître de l’ordre a bon espoir que l’air pur, la nature préservée et les hordes de mutants assoifées de sang qui hantent la Drakwald parviendront à guérir la compagnie rouge de son spleen persistant. Preuve de sa confiance dans ses hommes, il leur a même confié le précieux étendard de Vess1 pour cette virée forestière, ce qui relève un peu le moral des troupes.

Le plan de Ganz consistant à errer dans les bois jusqu’à tomber sur une bande de néfastes à massacrer au nom d’Ulric, notre petite bande baguenaude cavalièrement jusqu’à faire la rencontre de quelques Hommes-Bêtes venus se recueillir devant une idole païenne. L’escarmouche qui s’en suit, si elle ne dure pas longtemps et se termine par une victoire sans appel pour le camp impérial, révèle toutefois de façon criante les maux profonds qui affectent la compagnie. Gruber refuse ainsi de charger l’ennemi, prétextant la perte de fer de sa monture, Morgenstern est couché net par une branche basse qu’il n’a pas pu esquiver, Vandam fonce tête baissée à la poursuite des fuyards malgré les ordres de Ganz, et Von Glick, sommé de le faire revenir au bercail, se fait grièvement blesser par un Ungor embusqué sur le chemin du retour. Cette blessure force les templiers à monter le camp pour la nuit en plein cœur de la Drakwald, et à perdre un des leurs sous les flèches des Hommes-Bêtes (on peut saluer la prescience d’Abnett sur le sujet) pour couronner le tout.

Alors que la compagnie semble sur le point de se désagréger, tel le premier boys band venu après un second album décevant, l’inspiration finit par frapper les loulous, qui décident de tenter le tout pour le tout. Faisant mine de laisser derrière eux leurs morts, blessés et étendard sous faible garde, les chevaliers tournent bride vers Middenheim, espérant ainsi attirer le reste de la harde à découvert. Ce qui ne manque évidemment pas d’arriver. La vaillante action d’arrière-garde conduite par Aric, Gruber et Von Glick permet de retenir les mutants assez longtemps pour que la cavalerie arrive revienne, et annihile les cornus d’une dévastatrice charge de flanc d’école. Bonus appréciable : il s’agissait de la même bande de fieffés violeurs de poules responsables de la mort de Jurgen, qui se trouve donc vengé de façon satisfaisante. Au final, et malgré la mort au combat de Vandam (sans doute en plein grand écart facial) et de Von Glick, nos héros peuvent prendre le chemin du retour unis comme jamais et à nouveau pleinement opérationnels. Une vraie fin de loup(s), en somme.

: Car Vess de Loup (blanc), évidemment. Je ne vois pas d’autres explications satisfaisantes et n’accepterai pas de contestations.

AVIS :

Dans la foulée du lancement réussi de la série des Fantômes de Gaunt dans les pages d’Inferno!, Abnett se livre à un exercice similaire avec ce ‘A Company of Wolves’, introduisant au lecteur une confrérie de templiers du Loup Blanc, dont les exploits seront relatés dans une succession de nouvelles, puis compilées et conclues dans le roman ‘Hammers of Ulric’. Bien que cette péripétie inaugurale soit relatée avec l’aisance habituelle de la plume Alpha de la Black Library, j’ai trouvé le résultat final un peu moins réussi qu’à l’accoutumée. Parmi les raisons de ce (léger) coup de moins bien, j’identifie le nombre important de protagonistes et la « singularisation » moins aboutie de ces derniers (sauf pour Morgenstern, catalogué comic relief de façon outrageuse, ce qui est un autre défaut), une intrigue somme toute assez banale combinée à une mise en scène parfois complaisante1, ou encore la très nette sensation qu’Abnett avait déjà acté qu’il ferait vivre ses nouveaux héros sur plusieurs nouvelles, et a traité A Company… comme un chapitre introductif plutôt qu’un stand-alone (ce qui relève plus de la faute de goût que de la catastrophe industrielle, certes). Pour autant, on a tout de même droit à du Dan Abnett tout ce qu’il y a de plus solide, avec des personnages attachants dès lors qu’on arrive à les différencier les uns des autres, des scènes d’action prenantes où la mort frappe sans prévenir, et une exécution globalement propre. Rien de grave donc.

1 : La possibilité qu’un chevalier puisse se prendre une flèche dans le cou alors qu’il dort au milieu de ses frères d’armes, protégé par des sentinelles habituées des choses de la guerre, et n’être découvert qu’au petit matin, ne me semble pas des plus réalistes. À un autre niveau, le « tour de pâté de maisons » effectué par le gros des troupes (et je ne parle pas de Morgenstern) pour surprendre la harde d’Hommes-Bêtes… qui se trouve être la même que celle qui a tué Jurgen quelques mois plus tôt (#WIJH) est un expédient un peu trop facile à mon goût.  

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Children of the Emperor – B. J. Bayley [40K] – #7 :

INTRIGUE :

Ayant échappé de justesse à la destruction du vaisseau qui transportait son régiment jusqu’à sa nouvelle affectation, le Garde Impérial Floscan Hartoum n’a d’autre choix que de faire atterrir sa capsule de sauvetage à la surface d’une planète mystérieuse dans l’attente d’être secouru. Recueilli par une tribu d’abhumains (deux paires de jambes) dont la mutation a été volontairement déclenchée par leurs ancêtres colons afin de lutter contre la forte gravité de leur monde d’adoption, Hartoum verra son courage et sa vision de l’Imperium sérieusement testés au cours de son séjour chez les enfants perdus de l’Empereur.

AVIS :

Children of the Emperor est une petite gemme, et sa lecture est fortement conseillée à tous les esprits curieux familiers des publications de la Black Library. Cette nouvelle jette en effet un éclairage particulier et très dépaysant sur l’univers de Warhammer 40.000, en prenant toutefois garde de bien respecter le background qui existait à l’époque, attention aussi délicate que louable de la part d’un auteur aussi établi que Barrington J Bayley. L’un des charmes de Children of the Emperor est ainsi son absence d’aberrations fluffiques, preuve indubitable du sérieux travail de « documentation » effectué par Bayley avant la rédaction de ce texte1 (tous les contributeurs de la BL ne peuvent en dire autant, pas vrai Nik Vincent ?).

Mais les principales plus-values apportées par la plume experte de Bayley restent son style, affirmé, maîtrisé et très différent des canons de la BL (ce qui fait tout son intérêt), ainsi que son expérience d’écrivain de SF vétéran, qui lui permet d’attirer l’attention du lecteur sur des points jamais soulevés jusqu’ici par les autres auteurs de la maison (comme les variations de gravité d’une planète à l’autre, et les conséquences de ce changement sur un organisme humain normal) ; mais également d’amener son public à réfléchir sur des questions aussi centrales que celle de la tolérance envers la mutation (et donc du droit à la différence de manière plus large) au sein d’un Imperium dont la psychorigidité sur ce sujet – personnifiée par le personnage du Commissaire Leminkanen, zélote écumant et pas très futé – apparaît comme assez grotesque, eut égard à son histoire millénaire et au million de planètes qui le compose. Bref, on peut remercier Barrington J Bayley pour l’amical coup de pied dans la fourmilière qu’il a mis dans le background de Warhammer 40.000, qui n’était (et n’est toujours) pas au-dessus de tous reproches à l’époque, malgré le soin que lui a apporté Priestley et Cie au moment de son élaboration.

1 : Il va même jusqu’à faire mention d’éléments de background un peu avancés, tels que les fameux Schémas de Construction Standardisés. Chapeau l’artiste.

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The Chaos Beneath – M. Brendan [WFB] – #7 :

INTRIGUE :

WFB_The Chaos BeneathÀ la suite d’une cérémonie d’invocation quelque peu salopée par des cultistes amateurs, un Prince Démon de Tzeentch se retrouve coincé dans le corps d’un hôte mort. Assumant l’identité du cadavre qu’il habite, c’est-à-dire celle d’Obediah Cain, chasseur de sorcières un brin malchanceux, le démon convainc Michael de La Lune (si si), apprenti sorcier fraîchement renvoyé du Collège de Magie de Marienburg pour manque d’aptitudes à l’exercice des arts occultes, de lui rapporter une copie du 3ème Tome du Liber Nagash. Cette dernière repose en effet dans une bibliothèque du Collège, protégée par de puissants enchantements que le Prince Démon n’est pas en mesure de briser en son état actuel. Michael va-t-il s’apercevoir des noirs desseins poursuivis par son acolyte avant qu’il ne soit trop tard ?

AVIS :

Encore une déclinaison sur le thème de l’objet magique maléfique que le héros doit rapporter au méchant à son insu. The Chaos Beneath n’est donc pas la nouvelle la plus originale de la Black Library, ni la mieux écrite d’ailleurs : que peut-on donc avancer afin de justifier sa lecture ? Pour être tout à fait honnête, pas grand-chose si ce n’est le ton assez léger employé par Brendan, transformant du même coup le Prince Démon en méchant de cartoon plutôt qu’en implacable antagoniste. Ajoutez une pincée de fluff, et vous aurez fait le tour de tous les points forts de The Chaos Beneath. Ce qui ne fait pas lourd, je vous l’accorde.

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The Hollows of Hell – D. Abnett [40K] – #8 :

INTRIGUE :

The Hollows of HellNouvel épisode de La Croisade s’amuse et nouveau théâtre d’opérations pour Gaunt et ses Fantômes, qui participent à l’invasion du monde ruche de Caligula, en compagnie de millions d’autres Gardes Impériaux. Déployés par navettes à la surface de la planète depuis le transporteur Navarre, les Tanith doivent essuyer une DCA nourrie (ce qui était attendu), ainsi qu’une tempête psychique conjurée au pire moment par les assiégés (ce qui est plus surprenant). Résultat des courses : le transport de Gaunt, où se trouvaient également le Major Rawne, Bragg, Caffran et Milo (pour ne citer que les têtes d’affiche fantômatiques), dévie fortement de son cap, et s’écrase dans l’une des cuvettes parsemant la planète, qui se trouve être colonisée par une forêt tropicale. Protégés par leur invincibilité scénaristique, nos héros émergent crânement des décombres de l’appareil et se préparent au long trekk jusqu’aux lignes amies qui les attend, le crochet imprévu initié par le blow-out de leur Astropathe1 les ayant conduits trente miles au nord de leur cible, en plein territoire ennemi. Cette réalisation inspirera à Bragg cette phrase immortelle, qui constitue la meilleure citation de toute la série, point à la ligne. Pas de quoi perturber l’inflexible Commissaire cependant, qui entraîne les survivants dans une excursion verte vers une base isolée située à proximité du crash.

Cette avanie technique laisse Corbec seul en charge des Tanith ayant réussi à atterrir sans problèmes, et le Colonel se tire fort honnêtement de sa mission. Confrontés à une atmosphère oppressante et teintée de corruption psychique, les braves forestiers progressent du mieux qu’ils peuvent dans la jungle urbaine que constitue la banlieue de la ruche Nero, jusqu’à ce que leur rencontre avec un polyplacophore démoniaque, heureusement mis en fuite par une crise de nerfs de Larkin (qui sort de ses gonds après avoir vu des Furbies crucifiés par les cultistes – des poupées d’accord, mais des Furbies, c’est trop – ), ne force Corbec à faire une pause technique. Se sentant dépassée par la situation, notre barbouze barbue décide d’utiliser un de ses jokers pour progresser dans la partie, et passe donc un coup de fil à un ami, qui se trouve être officier sur le Navarre. Usant de ses influences, ce dernier parvient à mettre en application le plan de Maître Corbec : la macro cannonisation de la cité sensible où les Fantômes sont embourbés, opération peu régulière mais couronnée de succès, comme la fin brutale de la tempête psychique suite à l’arasement de la ZUS le démontre. Problem solved.

De son côté, Gaunt finit par arriver en vue de l’installation convoitée, défendue à son grand dam par quelques Serviteurs de combat un peu trop zélés. Ce regrettable malentendu sera toutefois rapidement réglé, sans qu’aucune perte ne soit à déplorer parmi les forces en présences disposant d’un cerveau intégral. À l’intérieur, le Commissaire a la surprise de découvrir une de ses vieilles connaissances, l’agent de renseignement Rael Tagore, qui, quand il n’essaie pas d’entre en contact avec les Elohim, enquête sur le réseau d’espions mis en place par le très paranoïaque Maccaroth depuis sa prise de fonctions. Soupçonnant beaucoup de choses mais sans l’ombre d’une preuve tangible (un point commun avec notre Raël), Tagore accepte toutefois de ramener ses hôtes sur le front grâce à la navette qu’il avait utilisée pour se mettre au vert peu avant le début de l’offensive impériale. La nouvelle se termine ainsi par une heureuse réunification régimentaire, et la conjuration par Gaunt et Tagore du bon vieux temps sur Estragon Prime. Ah, Estragon Prime. Il y aurait beaucoup à dire sur cette singulière planète, mais ceci est une autre histoire…

1 : Maladresse ou mauvaise appréciation fluffique de la part d’Abnett, la présence dudit Astropathe dans une navette de déploiement de troupes de la Garde Impériale laisse à penser que l’opération a mobilisé quelques centaines de milliers de psykers assermentés du côté impérial.

AVIS :

Pour la première fois depuis le début de sa série, Abnett marque le coup avec une soumission sensiblement inférieure à ce dont il nous avait habitués précédemment. En plus de se révéler d’un intérêt assez quelconque en termes d’intrigue, que soit côté cour (Corbec et ses hommes jouent à la guéguerre avec quelques cultistes, avant d’appeler l’artillerie spatiale et revendiquer une victoire assez mesquine) ou jardin (Gaunt fait de la randonnée et s’inscrit sur Copains d’Avant), l’auteur prend des libertés assez grandes avec le fluff de 40K, tendance que l’on avait déjà vu à l’œuvre dans de précédentes nouvelles – notamment à travers les World Eaters gérés en 2-2 par les Fantômes dans ‘A Blooding’ – mais qui prend une autre dimension dans ‘The Hollows of Hell’. En plus de l’intégration malheureuse d’un Astropathe à l’histoire, l’identification immédiate par l’impayable Varl du caractère démoniaque du mollusque géant rencontré par les Tanith, et l’absence de censure inquisitoriale suite à cette entrevue malaisante au possible, interrogent. N’ayant que de vagues souvenirs de ‘Ghostmaker’, second tome de la série des ‘Fantômes de Gaunt’ dans lequel Abnett a collecté toutes les nouvelles publiées dans Inferno ! avant l’écriture de ‘Premier & Unique’, je ne pourrais dire si ‘The Hollows of Hell’ a été retravaillée par son auteur avant la sortie de ce roman-recueil. Toujours est-il que nous tenons ici l’un des maillons les plus faibles d’une saga autrement plus robuste.

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Gilead’s Fate – D. Abnett [WFB] – #8 :

INTRIGUE :

WFB_GIlead's FateRevenus de leur quête de vengeance décennale (‘Gilead’s Wake’), Gilead et Fithvael ont réinvesti le domaine de Tor Anrok, propriété légitime autant que décatie du premier. La traque du tueur de Galeth, le jumeau de notre héros, a en effet porté un coup fatal à la lignée déjà périclitante de Lothain, dont Gilou est le dernier représentant, et Fithvael l’unique suivant encore vivant. Alors que son majordome préfère camper en forêt et se consacrer à l’entretien de ses domaines horticoles, Gilead a lui sombré dans la dépression et l’alcoolisme, et attend la cirrhose fatale qui aura raison de son spleen (ainsi que de son foie) et de son Endurance de 3. Un événement imprévu va toutefois forcer notre héros dépravé à sortir de sa stupeur…

Entre ainsi en scène Betsen Corpath (Serge de son prénom1), qui, comme Gilead, se trouve être la dernière survivante de sa lignée. Fille de marchands de Munzig, Betsen a perdu toute sa famille au cours d’une terrible soirée, où l’intégralité des Corpath ainsi que tous leurs servants ont été massacré dans leur maison par un meurtrier inconnu. La jeune fille n’a dû son salut qu’à son absence du domaine familial au moment des faits, ses parents l’ayant envoyé faire un stage de demoiselle de compagnie à la cour de Middenheim. Eprouvée par cette tragédie, mais résolue à obtenir justice, Betsen s’est livrée au cours des deux années qui suivirent le Munzig Zweihander Massacre, comme le crime aurait été surnommé par les locaux si j’en avais fait partie, à une investigation fouillée, lui ayant permis de concentrer ses soupçons sur la personne de Lugos, autre marchand de Munzig à la réputation sulfureuse. Malheureusement pour la teenager vengeresse, ses capacités à confronter Lulu sont pratiquement inexistantes, le bougre ayant l’influence et la richesse nécessaires pour entretenir une garde personnelle rivalisant avec la milice locale. En désespoir de cause, Betsen décide donc d’utiliser les bonnes vieilles méthodes de sa défunte (elle aussi) nourrice, à savoir aller déposer plainte au tribunal elfique local, qui se trouve être à côté de la source d’Eilonthay. Les légendes populaires veulent en effet que les habitants de la Tour de Tor Anrok portent secours aux malheureux qui établissent une main courante en ce lieu, à supposer qu’ils le trouvent – ce qui n’est pas facile – et que leur cause soit juste.

Ayant localisé cette fameuse source après des mois de trekking dans les Principautés Frontalières, et ouvert 4 GR Pays dans la foulée, Betsen s’en retourne fréquemment plaider sa cause auprès de l’onde aussi amère qu’elle-même, et finit par émouvoir (ou importuner, c’est selon) Fithvael, qui élaguait à proximité. Notre bonelfe décide d’aller informer son patron de la doléance de la jeune fille, à laquelle il serait de son devoir et de son honneur de répondre. Malheureusement pour le majordome au grand cœur, Gilead, qui a bu trois dés à coudre de cidre brut la soirée précédente, a horriblement mal aux cheveux (qu’il a longs) et ne se montre ni empathique, ni coopératif, en dépit du heroshaming éhonté auquel se livre Fithvael. Ayant échappé aux jets de boutanche de son maître furibard, Fifi décide d’aller régler lui-même le problème… et échoue comme une bouse. Ramassé à l’article de la mort devant l’entrée de Tor Anrok par un Gilead un peu plus sobre le lendemain matin, le vieillard se retrouve cloué au lit, mais peut au moins se réconforter en réalisant qu’il a atteint son but, le calvaire de son meilleur ami ayant donné à Gilead, comme à Rocky Balboa, John Wick et Robert McCall avant/après lui, la motivation nécessaire pour botter quelques fesses.

Après avoir pris contact avec Betsen et reçu un briefing sommaire de la situation, notre vigilante titubant se met en chasse, emmenant sa commanditaire avec lui pour… le fun on dirait, son aide n’étant absolument pas nécessaire. Plutôt que de s’embêter à corroborer les allégations de Miss Corpath, qui, après tout, aurait pu faire fausse route du haut de ses quinze ans, Gilou opte pour une approche radicale, et se fraye un chemin sanglant dans la demeure de sa cible, jusqu’à faire intrusion dans sa salle à manger en plein milieu de son dîner, ce qui n’est pas très poli. S’en suit une séquence d’action frénétique, où la shadowfasttitude de Gilead en fait voir de toutes les couleurs – mais surtout du rouge sang – aux sbires de Lugos. Détail marrant, ce n’est qu’après avoir occis la majorité du personnel du marchand, qui n’avait sans doute rien à voir avec les meurtres des Corpath, que notre héros demande la confirmation qu’il est bien chez Mr Lugos, qui a alors la meilleure réaction possible au vu de la situation : 1) balancer une réplique badass, 2) gagner du temps en confessant ses crimes jusqu’à l’arrivée de son garde du corps personnel, une montagne de muscles chaotiques (ou une montagne chaotique de muscles, ça marche aussi) du nom de Siddroc.

Confronté à un adversaire un peu plus coriace, et sans aucun doute responsable de la triste et graphique fin de la famille Corpath, Gilead fait moins le malin, et casse même son épée sur l’armure de plates du Sid. Il faudra une attaque suicidaire, dans tous les sens du terme, pour tromper la vigilance et la protection quasi-intégrale du colosse, provoquant la fuite éperdue mais d’assez courte durée de Lugos, dégommé en pleine course par une Betsen planquée avec son arbalète à la sortie du manoir. Détail marrant bis, cette dernière (la fille, pas l’arbalète hein) demandera elle aussi une confirmation qu’elle a bien descendu la bonne personne après avoir appuyé sur la détente. Dans les Principautés Frontalières, on tire d’abord, on pose les questions après (#MutantLivesMatter).

Cette quête vengeresse terminée, Gilead laisse Betsen gérer les indélébiles traumatismes et névroses provoqués par la perte de sa famille et le meurtre du responsable de cette dernière à sa convenance (easy peasy quand on a quinze ans, personne sur qui compter, et bientôt soupçonné du meurtre d’un notable et de tout son personnel) et repart au chevet de son domestique. Une fois remis sur pied, les deux compères décident de repartir à l’aventure, non sans avoir mis le feu à la Tour de Tor Anrok afin de tirer un trait définitif sur leur passé2. Le destin de Gilead (et donc de Fithvael) sera d’écumer le Vieux Monde en quête d’innocents à secourir, de torts à venger, et de couteaux à remouler. Il n’y a pas de sottes professions.

1 : Ce n’est pas vrai et il y a des chances que les plus jeunes des lecteurs ne comprennent pas la référence, mais je trouve ça fendard d’imaginer une frêle donzelle de 15 ans sous les traits du French Reaper.
2 : En fait, c’était une arnaque à l’assurance. Mais ça ferait mauvais genre dans une saga épique.

AVIS :

Après avoir posé ses personnages dans l’introductif et probablement pensé comme un one shotGilead’s Wake’, Abnett remet Gilead et Fithvael sur le devant de la scène dans une petite nouvelle plus intéressante dans ce qu’elle dit de la déchéance morale et physique d’un héros dont la race pouvait laisser penser qu’il serait immunisé à ce genre de désagréments, que dans la narration de la revanche prise par Betsen sur les meurtriers de sa famille. Cela ne veut pas dire pour autant que cette soumission ne mérite pas le détour (ne serait-ce que pour la réalisation que Gilead est en fait le Batman du Vieux Monde – ou au moins de Munzig – et Fithvael son Alfred), mais plutôt que ses points forts (à mes yeux) sont plus « périphériques », si l’on me passe l’expression, que d’habitude pour un récit de Dan Abnett. Ainsi la scène d’ouverture, qui débute sur la charmante description d’une fratrie de jeunes enfants régalés de contes par leur nourrice, et qui bascule en un éclair sur la description bien gore de leur cadavre, illustre la maestria de l’auteur en termes de narration. Pour le reste, Abnett prend soin de préparer la suite, et l’on sait d’ores et déjà que l’on aura des nouvelles des deux comparses à l’avenir. On the road again

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The Raven’s Claw – J. Curran [40K] – #8 :

INTRIGUE :

Début de journée difficile pour Veronique Sanson, le héros de The Raven’s Claw (nouvelle au titre potterien s’il en est). Tiré d’une gueule de bois carabinée par le quasi-crash de son vaisseau en plein cœur d’une zone de guerre urbaine, notre protagoniste se rend rapidement compte que 1) il n’a absolument aucun souvenir de qui il est, et 2) il fait visiblement partie d’un régiment de Légionnaires Pénaux. Vivement le week-end.

AVIS :

Jouant honnêtement de cette ficelle narrative bien connue qu’est l’amnésie du héros, Curran trousse une petite nouvelle ma foi fort potable, si on la replace dans son contexte (c’est-à-dire 1999, une époque où les contributeurs de la BL n’étaient pas tenus d’être docteurs -es fluff pour proposer leur travail1). Le background est en effet quelque peu malmené au cours du récit, en particulier au moment de la conclusion de l’histoire, qui aurait pu être mieux négociée, surtout au vu du choix effectué par l’auteur à son endroit2. Ce manque de maîtrise du background de Warhammer 40.000 est d’autant plus gênant que Curran termine son histoire avec un exposé bancal sur la nature de l’Imperium, dont il donne une image biaisée, et finalement assez fausse3. Bref, une mention passable bien méritée.

1 : Non pas que ce soit actuellement le cas aujourd’hui d’ailleurs (l’espoir fait vivre).
2 : Vero se révèle être un (et non pas une – d’après le fluff, c’est rare mais pas impossible – ) assassin Callidus, envoyé sur le terrain afin de faire la peau à un Gouverneur planétaire félon. Sauf que l’utilisation faite par Vero (Averius de son vrai nom) de la fameuse polymorphine est complètement marginale (« Et hop, je passe de L à M en taille de veste ! Ils ne me reconnaîtront jamais ! »), ce qui est tout de même dommage étant donné que c’est cette dernière qui fait tout le charme de cette caste particulière. Étant donné les spécificités de cette mission (à savoir, la présence d’un psyker prescient aux côtés du Gouverneur), un Culexus aurait à mon sens bien mieux fait l’affaire. Quant à la Raven’s Claw qui donne son titre à la nouvelle, il s’agit d’une sorte de neuro-gantelet subdermal, arme appartenant davantage à l’arsenal des assassins Eversor qu’à leurs consœurs Callidus.
3 : Selon Curran, l’Imperium a envoyé Vero recueillir la confession du Gouverneur renégat, car, ayant trahi la confiance de l’Empereur, ce dernier se trouve être un hérétique (nié ?), et tout hérétique doit se repentir avant de recevoir sa punition (nié ?). Et Vero d’expliquer que la rébellion aurait pu être matée en deux deux, et qu’une force d’intervention constituée de plusieurs régiments de Gardes Impériaux ainsi que d’un contingent de White Scars attend tranquillement en orbite son feu vert avant de débarquer sur la planète remettre un peu d’ordre dans tout ce bordel. Et tout ce temps gâché, toutes ces ressources dépensées, toutes ces vies perdues, pour quoi ? Pour permettre à Vero d’absoudre sa cible de ses pêchés. Amen.

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Hell in a Bottle – S. Jowett [40K] – #8 :

INTRIGUE :

40K_Hell in a BottleLe Sergent Instructeur Tydaeus des Iron Hearts doit faire face à une situation inédite: la machine Mimesis, simulateur de conflits utilisé pour l’entraînement des recrues du Chapitre, a été envahie par un ost démoniaque, mené par le prince démon Kargon. N’ayant pas réalisés que leur dernière conquête était un monde virtuel, les démons se retrouvent bloqués dans la réalité numérique de la machine, à la merci d’un Tydaeus qui doit maintenant décider s’il préfère la jouer safe (débrancher Mimesis et l’envoyer à l’incinérateur) ou héroïque (débuter une « partie » et aller botter les fesses calleuses de Kargon en live).

AVIS :

Hell in a Bottle est sans doute la nouvelle la plus étrange d’Into the Maelstrom, voire de toutes les publications 40K de la Black Library. L’argument du récit, déjà très peu banal en lui-même (« et si les Space Marines s’entraînaient sur des bornes de shoot ‘em up ? »), se combine en effet à une interprétation pour le moins libérale du fluff de la part de Simon Jowett, qui n’hésite pas à nommer un des Primarques inconnus dans le cours du récit, ou encore à dépeindre son héros en employé de bureau désabusé plutôt qu’en inflexible moine-guerrier. Il faut dire que Tydaeus n’est, à proprement parler, pas vraiment un Space Marines, son corps ayant rejeté les implants génétiques lui étant destiné au cours de son initiation. Le Chapitre des Iron Hearts étant néanmoins très humain (malgré ce que laisse penser leur nom), notre héros a été reclassé à un poste de non-combattant au lieu d’être transformé en serviteur, ou pire. Dans les ténèbres d’un lointain futur, la loi handicap de 2005 est toujours en vigueur. Bravo.

De l’autre côté de la matrice, le prince démon Kargon n’est pas vraiment reste, sa diction sifflante et ses pratiques sexuelles peu banales (ce n’est pas pour rien qu’on l’appelle Seed-Bearer, monsieur inséminant personnellement les planètes qu’il a conquis avec des spermatozoïdes chaotiques) faisant de lui une Nemesis pittoresque pour Tydaeus, qui, bien sûr, ne résistera pas à l’envie d’aller casser du démon, pensant (à tort) qu’il ne pourrait rien lui arriver de plus fâcheux que d’être déconnecté du serveur une fois tous ses points de vie envolés.

Parenthèse parodique (volontaire ou non) de l’univers gothique de Warhammer 40.000, Hell in a Bottle est un souvenir d’une époque révolue de l’histoire de la Black Library, pendant laquelle les contributeurs pouvaient se permettre d’écrire tout ce qui leur passait par la tête. Et, rien que pour ça, cette nouvelle mérite d’être lue.

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A Wolf in Sheep’s Clothing – D. Abnett [WFB] – #9 :

INTRIGUE :

WFB_Wolf in Sheep's ClothingAprès le succès de leur session de team building dans la Drakwald (‘A Company of Wolves’), nous retrouvons les chevaliers de la Compagnie Blanche de l’ordre du Loup Blanc (the whitest of the white) alors qu’ils s’apprêtent à partir dans une nouvelle mission, beaucoup moins funky qu’ils ne l’espéraient de prime abord. Le Graf de Middenheim a en effet reçu une missive désespérée d’un de ses cousins, le Margrave Ganmark, dont le domaine a été attaqué et incendié par une bande de galapiats, et qui se retrouve donc SDF par la force des choses. Alors qu’il revient aux pompeux et hautains Chevaliers Panthères de traquer les coupables de cet abominable forfait, les Loups Blancs doivent se contenter d’escorter cousin Hubert, sa famille et ses gens, jusqu’à la sécurité de Middenheim. Autant dire que le Commandant Ganz doit essuyer une grogne bien compréhensible de la part de ses hommes, parmi lesquels on compte deux nouveaux : le bleu-bite Krieg Drakken, et le sang bleu Lowenhertz.

Après un aller sans embûches, nos templiers prennent en charge leurs protégés, et se consolent légèrement en constatant que la femme du Margrave, Gudrun, est vraiment bonnasse. Il n’y a que le jeune Drakken pour reluquer davantage la servante Lenya que la plantureuse maîtresse de maison, que le cousin Hub’ a épousé quelque temps après la mort de sa première femme. Les introductions étant faites et le barda chargé dans les chariots, la troupe repart vers la cité, pendant que les Panthères de Von Volk/t se lancent à la poursuite des mécréants. Bien évidemment, ces derniers éviteront facilement la confrontation avec leurs traqueurs, et se concentreront sur les loulous et les migrants. Surpris une première fois par un assaut de Nazguls puant la cannelle, qui laissera le pauvre Drakken tout estafilé, les chevaliers devront relever le plus difficile des défis : utiliser leurs neurones. Car, si pour le lecteur, il ne fait rapidement aucun doute que les stoners spectraux1 sont à la recherche de quelque chose ou de quelqu’un voyageant avec les templiers, pour ces derniers, le mystère est à la limite de l’insoluble. C’est d’ailleurs tout juste si Ganz ne condamne pas Lowenhertz au bûcher pour avoir émis l’hypothèse précédente, qui relevait pourtant du bon sens plus que de la mise en pratique de savoirs interdits…

Début spoilerAu final, et après avoir essuyé une nouvelle vague de goons à la faveur d’un bivouac en pleine forêt, les Loups Blancs finiront par identifier la source de tous leurs maux, qui se trouve être, non pas l’exotique bimbo avec qui le Margrave a refait sa vie, comme le soupçonnait ce misogyne de Gruber, mais la vieille nourrice rom’ des enfants du pater familias, elle aussi arrivée récemment dans l’entourage de l’aristocrate. Plus particulièrement, l’aïeule trimballe avec elle un bijou en forme de griffe, qui lui porte apparemment chance mais que ses ancêtres ont certainement dérobé dans une tombe arabienne, et que ses propriétaires légitimes souhaitent vivement récupérer. Leurs adversaires pouvant respawner toutes les deux heures, Ganz, dans un éclair de génie inhabituel, réalise qu’il doit prendre des mesures drastiques pour arracher la victoire avant que ses hommes se fassent massacrer. Peu enclin à restituer la babiole avec un petit mot d’excuse, comme on le ferait de nos jours, le fier chevalier préfère réduire en poudre le colifichet sépulcral, bousillant le marteau de Lowenhertz dans la manœuvre (c’est du bizutage). Nazguls jusqu’au bout, les assaillants se dissipent alors dans un gémissement piteux, permettant à nos héros de reprendre leur route au matin sans plus d’interruptions. La nouvelle se termine sur leur retour triomphal à Middenheim, et sur la remise par Ganz à Lowenhertz du marteau de feu Von Glick, en dédommagement de l’arme perdue en chemin. Dans l’Empire plus qu’ailleurs, les bons comtes électeurs font les bons amis.Fin spoiler

1 : Ils ont les yeux rouges et ne s’expriment qu’en grognements inintelligibles.

AVIS :

Abnett poursuit sa série (louve) blanche sur des bases sensiblement similaires à celles posées dans ‘A Company of Wolves’, même si l’intrigue se montre un peu plus fouillée et complexe que lors des débuts de Ganz et Cie. Si la révélation de l’identité du responsable des malheurs du Margrave ne risque pas de surprendre grand-monde, on peut tout de même mettre au crédit de Dan Abnett l’inclusion d’une authentique et valable fausse piste dans sa nouvelle, ce qui, pour une soumission de 12 pages, est un accomplissement notable. Pour le reste, on se contentera d’un peu de character development pour nos vaillants chevaliers, qui gagnent deux nouvelles recrues dans ce second épisode, dont au moins une (Lowenhertz) semble tenir à cœur à l’auteur ; ainsi que quelques scènes d’actions très potables.

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Wolf in the Fold – B. Chessell [WFB] – #9 :

INTRIGUE :

WFB_Wolf in the FoldLe sommeil de l’Archidiacre Kaslain de Nuln est interrompu en pleine nuit par l’arrivée impromptue d’un visiteur de marque, venu chercher l’absolution que seul un haut prêtre de Sigmar peut conférer. Mortellement blessé, l’assassin légendaire connu comme la Guêpe Tiléenne (Tilean Wasp) se vide de son sang dans les appartements privés du prélat, dédiant ses derniers instants au récit du seul crime de sa longue carrière pour lequel il éprouve le besoin de se confesser : l’assassinat d’un prêtre.

AVIS :

Si l’histoire narrée par Ben Chessell dans Wolf in the Fold n’est pas aussi aboutie que son Hatred, et que la conclusion de cette courte nouvelle ne s’avère pas être une grande surprise, sa lecture n’en est pas moins agréable, et ce pour deux raisons principales.

La première, c’est l’audace manifestée par ce novice de la Black Library, qui pour sa deuxième soumission, s’offre le privilège de tuer un personnage nommé (l’archilecteur Kaslain, abordé dans les Livres Armées de l’Empire – c’est était un électeur impérial – et dans quelques suppléments du jeu de rôle). Bon, d’accord, il ne s’agissait pas vraiment d’une figure de premier plan du fluff, mais tout de même.

La seconde, et la plus importante à mes yeux, c’est le complet changement de style opéré par Chessell entre Hatred et Wolf in the Fold, sans que ses talents de conteur ne pâtissent de cette transformation. La grande majorité des auteurs de la BL ayant une patte facilement identifiable (pour le meilleur ou le pire) et abordant toujours leur sujet avec le même angle d’attaque, il est remarquable qu’une plume de cette auguste maison soit d’une « agilité » littéraire suffisante pour proposer deux récits si différents l’un de l’autre que l’on aurait pu sans mal les attribuer à deux contributeurs distincts. Si Hatred possédait une ambiance mélancolique et désincarnée, Wolf in the Fold se caractérise au contraire par un style riche et un goût prononcé pour le détail, assez proche dans l’esprit de celui de Brian Craig.

En conclusion, une autre excellente livraison de la part de Ben Chessell, dont la très courte carrière au sein de la Black Library apparaît décidément comme une de ces injustices dont la vie a le secret.

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The Lake – T. R. Summers [NDA] – #9 :

INTRIGUE :

Les dernières semaines ont été dures pour le gang des Brassers de Lord Orl, meneur Orlock qui se rêvait seigneur éboueur du sous-monde. Affaibli par une guerre territoriale constante contre les Goliaths de la Main Noire (encore eux1), les Orlocks ont de plus perdu leur précieux puits lors d’un récent tremblement de ruche, les laissant à la merci d’individus peu scrupuleux pour se sortir de ce mauvais pas. D’individus comme le Guilder Rorget Ahn, par exemple, qui a proposé à Lord Orl de s’associer dans une affaire a priori juteuse : la chasse aux mulk spiders infestant un petit lac souterrain que le même séisme qui a enfoui le puits des Brassers a rendu accessible, après des siècles coupé du reste de Necromunda. Les yeux de ces bestioles, semblables à des gemmes, sont très recherchés par les riches du haut de ruche, et leur vente devrait permettre aux Orlock de se remettre d’aplomb. Bien entendu, chasser des argyronètes géantes ayant colonisé une mare hautement toxique monté sur un pédalo fatigué (le semi rigide proposé par Rorget coûtait trop cher à la location) n’est pas une entreprise de tout repos, mais il en faut plus pour décourager nos hardis Gangers, qui jettent donc leurs lignes sur le plan d’eau de liquide sans tarder.

Les péripéties violentes et humides ne tarderont pas à leur tomber dessus comme un mange-visage de Catachan sur l’arrière-arrière-arrière374 petit fils de Logan Paul2, aux inévitables morts causées par l’agressive faune locale venant s’ajouter celles provoquée par l’épique bataille navale entre Brassers et Main Noire, également embauchés par ce traître de Rorget Ahn pour cette mission lacustre. Lord Orl, en bon leader, n’hésite pas une seconde à mouiller le maillot, mais sans doute plus qu’il ne l’avait prévu. Une baignade involontaire dans les boues de vidange violacées faisant office de lac lui est en effet imposée à la suite de l’explosion de son canoë, et s’il parvient à regagner son QG avec ses quelques hommes restants et un sac d’yeux de mulk spiders pour leur peine, il ne tarde pas à développer une forte fièvre et une purulence de mauvais aloi, que les bons soins du Dokker Hack’n’Slash ne parviennent pas à traiter. Comble de déveine, les précieuses gemmes collectées lors de la mémorable partie de pêche ne tardent pas à fondre comme neige radioactive au soleil, laissant les Brassers dans une situation encore plus désespérée que précédemment.

Fort heureusement, il reste encore sa légitime vengeance contre Rorget Ahn pour motiver Lord Orl, de moins en moins présentable à mesure que les jours passent et que les mutations causées par sa baignade impromptue se manifestent. S’étant surpris à boulotter goulument un bras gardé par Dokker comme pièce détachée dans son officine (on ne sait jamais de quoi on aura besoin pour rafistoler un Ganger de passage), Orl décide de s’isoler du reste de ses hommes pour leur propre bien, et retourne vers le lac, inexplicablement attiré par une pulsion inconsciente… ou peut-être par le secret espoir de retrouver l’Apple Watch qu’il a perdue sur place lors de sa dernière visite…

Début spoiler…Une nouvelle séquence de baignade, suivie d’une épiphanie aussi totale que brutale et non expliquée (il arrive sur une île au milieu du lac et paf, l’illumination le frappe), mènent assez logiquement à la réalisation par Lord Orl et le lecteur que les mulk spiders qui vivent dans cet écosystème unique en son genre ne sont autres que les formes mutées des malheureux qui ont bu la tasse et la crasse mutagène, cancérigène et reprotoxique de cette onde véritablement amère3. D’ailleurs, notre héros reconnaît son bras droit R’daff, emporté par le fond par une araignée entreprenante lors de la première expédition, parmi le comité d’accueil qui s’est réuni pour lui souhaiter la bienvenue dans sa nouvelle communauté. Acceptant son sort sans se plaindre, Lord Orl a toutefois une dernière virée dans le monde civilisé à faire avant de prendre définitivement sa retraite et d’aller faire des bulles dans l’eau avec ses petits copains. Sa cible : ce bougre de Rorget Ahn, à qui il offre gracieusement le pot de l’amitié pour solde de tout compte. Je vous laisse deviner ce qu’il y avait dans le verre…Fin spoiler

1 : Déjà croisés dans ‘The Day of Thirst’, du même auteur. Comme on le verra plus loin, les Goliaths de Krug n’arrivent pas à prendre les points à l’extérieur, ce qui est embêtant quand on lutte pour le maintien la survie.
2 : Youtuber trololol comme son aïeul.
3 : Les mystérieux « Gene Lords », et leur sale manie de collecter et stocker l’ADN des formes de vie croisant leur route dans la cuve recherche qui est devenue ce fameux lac après des millénaires d’abandon, sont à blâmer ici.

AVIS :

Summers mène assez bien sa barque (mouahaha) avec ‘The Lake’, qui présente les deux qualités appréciables pour une nouvelle d’une intrigue n’étant pas prévisible des pages à l’avance – au moins dans la première moitié du récit – et d’une construction bien fichue, où la boucle se retrouve bouclée à la fin du récit. On appréciera également le cadre assez original de cette histoire pour une soumission siglée Necromunda, sans doute l’une des franchises de la GW-Fiction où l’on s’attend le moins à ce qu’un « lac » serve de décor. Le seul reproche que je ferai à Summers est relatif à son inclusion très artificielle, et à mes yeux inutile, des « Gene Lords » dans son propos. Pourquoi faire entrer une faction de démiurges mystérieux et une réalisation proprement miraculeuse de leur implication par Orl dans ses déboires, quand un bon vieux recours au Chaos (après tout, il est question de mutation ici) aurait pu faire l’affaire plus simplement et « proprement » ? Comme le mieux, le tarabiscoté est l’ennemi du bien, et je pense que ‘The Lake’ aurait gagné à rester en terrain fluffique connu. Mais le résultat reste tout de même satisfaisant.

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Acceptable Losses – G. Thorpe [40K] – #9 :

INTRIGUE :

40K_Acceptable LossesNommé à la tête du tristement célèbre escadron de Maraudeurs Raptor, le commandant Jaeger a l’occasion de prouver la valeur de ses hommes au cours d’une mission aussi vitale que périlleuse : la destruction des réacteurs d’un Space Hulk grouillant d’orks. Livrés à eux-mêmes dans l’immensité hostile de l’espace, les Raptors se rendront rapidement compte qu’il n’y a pas d’ennemi plus mortel que l’ami dans lequel on a placé (à tort) sa confiance.

AVIS :

Après les Nains et les Hauts Elfes, Battlefleet Gothic est l’une des lubies du bon Gav Thorpe, qui ne manque jamais une occasion de mettre en scène une petite bataille spatiale dans ses écrits futuristes. Sachant qu’Into the Maelstrom (et donc Acceptable Losses, par la même occasion) a été publié en 1999, soit l’année de sortie du livre de règles BFG, il était inévitable que cette nouvelle fasse la part belle à des héros maîtrisant l’art subtil de la guerre dans l’espace.

Cette nouvelle conséquente (33 pages, ce qui en fait la plus longue du recueil) se divise ainsi en deux parties distinctes. La première (un tiers) voit Jaeger et ses hommes faire connaissance, les premières impressions mitigées faisant rapidement place à une véritable camaraderie entre un commandant sévère-mais-humain et des équipages indisciplinés-mais-courageux-et-loyaux (et l’Oscar du meilleur scénario original est attribué à…). Thorpe sait qu’il doit en passer par là pour que la suite de son récit tienne la route et s’exécute de bonne grâce, son style passe-partout lui permettant d’expédier cette introduction sans trop lasser le lecteur (en partie grâce à la partie « contes et légendes de l’Imperium »).

La deuxième partie (deux tiers) est une description minutieuse de la mission plus ou moins suicide de l’escadron Raptor, sur lequel s’acharne bien entendu un sort contraire : escorte de Thunderbolts retirée au dernier moment, Rok en maraude à négocier en solo, rencontre inopinée avec une escadrille de chassa-bombas, cible protégée par une hénôrme batterie de lance-plasma… autant de petits riens qui font que la vie d’un pilote de Maraudeur vaut d’être vécue (et se termine de manière prématurée). Fort de son expertise dans le sujet, Thorpe réussit à faire de ce compte rendu une expérience plaisante, tant par son originalité que par son enthousiasme perceptible pour cette forme de combat, dont les règles diffèrent considérablement de la classique bataille rangée de fantassins et de véhicules à laquelle l’amateur de 40K a droit d’habitude.

Bon, ça reste du Thorpe, et du Thorpe « primitif » qui plus est, ce qui signifie que l’histoire en elle-même ne vole pas beaucoup plus haut qu’un plongeur de la mort ayant fait un six sur son jet d’incident de tir (ouais, j’ai pas peur des mélanges). En même temps, difficile de révolutionner l’art de la nouvelle de science-fiction avec un pitch aussi ingrat qu’une bataille spatiale vue depuis l’intérieur d’un cockpit de Maraudeur. On a donc le droit à une triple dose d’héroïsme désintéressé et de sacrifice pour la bonne cause, généreusement saupoudrés de « bon sang, c’était moins une »1 et de « mais où est notre écran de chasseurs ? » : une fois de temps en temps, pourquoi pas.

Bref, Thorpe réussit assez bien son coup avec Acceptable Losses, un de ses meilleurs courts formats pour la BL à date, et fait mieux que tenir la comparaison avec beaucoup des nouvelles plus récentes intégrées à On Wings of Blood.

1 : Appelons ça le syndrome de l’Etoile de la Mort.

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In the Belly of the Beast – W. King [40K] – #10 :

INTRIGUE :

40K_In the Belly of the BeastUne escouade de Griffes Sanglantes menée par un Garde Loup est envoyée explorer l’intérieur d’un vaisseau tyranide. Même si la Grande Dévoreuse a la tête dans le biomorphe après quelques éons passés à dériver dans la galaxie, les Loulous vont vite se rendre compte qu’entrer par effraction chez les cafards de l’espace est une très, très mauvaise idée.

AVIS :

In the Belly of the Beast est la nouvelle de type « et si ? » par excellence. Son principal intérêt est de permettre au lecteur de découvrir un pan jusqu’ici peu exploré du fluff, ici la structure et le fonctionnement d’un bio vaisseau tyranide. King accomplit cette mission avec sérieux et réussite, et parvient à décrire ce petit monde complétement alien (c’est le cas de le dire) à l’esprit humain de manière convaincante, insistant bien sur sa perfection organique et son aspect oppressant. Il enrichit en outre son propos en décrivant la progression des Space Wolves depuis le point de vue de chacune des Griffes Sanglantes, dont les réactions varient entre rage bestiale (Egil), prémonition funeste (Njal), légèreté feinte (Gunnar) ou encore crainte dissimulée (Sven). L’éveil progressif de l’écosystème tyranide en réponse à l’intrusion des marounes donne enfin l’occasion à l’auteur de relever son texte de quelques passages d’action tout à fait convenables, et d’une poignée de décès astucieusement gores (mention spéciale à la disparition de Njal).

On peut en revanche regretter le manque flagrant d’inspiration de King au moment d’insérer In the Belly of the Beast dans l’univers de 40K. Comment, en effet, justifier l’envoi d’une (seule) escouade de Space Marines inexpérimentés dans une mission aussi dangereuse que l’exploration d’un vaisseau tyranide, même inerte ? Réponse de l’intéressé : nos héros sont assignés à un navire marchand (et quand je dis assigné, c’est en mode larbin hein : à côté, la Wolfblade c’est une nomination honorifique), dont le capitaine, apparemment ignare au dernier stade, n’est pas foutu de repérer une bioconstruction tyranide quand il en croise une (manque évident de culture générale également partagé par le sergent Hakon, ceci dit). Le navigateur de bord – un homme cultivé, lui – a beau insister lourdement pour que ce mystérieux vaisseau soit détruit sur le champ, le capitaine envoie tout de même ses loulous de compagnie explorer ce dernier dans l’espoir de « découvrir quelque chose dont l’Imperium pourrait avoir l’utilité ». Pour un point de départ pourri, c’est un point de départ pourri. Dans la même veine, on ne peut que s’émerveiller de l’innocence des Space Wolves, qui ne réalisent qu’ils sont au cœur d’un vaisseau tyranide qu’au moment où ils débarquent dans la salle centrale et assistent au réveil d’une tripotée de guerriers. Allo nan mais allo quoi.

En dépit des quelques couleuvres que King tente de faire avaler au lecteur pour justifier les actions stupides de ses personnages, In the Belly of the Beast est une nouvelle honorable, dont l’ambiance d’horreur lovecraftienne détonne agréablement des productions classiques de la BL, où l’action omniprésente laisse peu de place au développement d’atmosphères oppressantes dignes de ce nom.

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The Affair of the Araby Exhibit (Buried Secrets) – G. Rennie [WFB] – #10 :

INTRIGUE :

La tranquille soirée de réflexion-chichon sur la théorie du Chaos1 de Zavant Konniger, érudit iconoclaste et détective privé de l’extrême, est interrompue par l’arrivée impromptue d’un émissaire du culte de Sigmar au domicile du Sage Enquêteur. Un cambriolage a eu lieu dans les archives de l’institution, et l’expertise de l’ancien prêtre est requise pour remonter la piste des ruffians, qui n’ont pas hésité à stranguler deux pauvres gardes qui ne faisaient que leur devoir pour faire main basse sur… quelque chose2. Sa propre demande d’accréditation à l’accès de la nouvelle exposition arabienne, où s’est déroulée ce regretable incident, lui ayant été refusée il y a quelques jours, Zavant saute sur l’occasion de mettre son nez, qu’il a prononcé et arqué, dans les réserves du culte, et part sur les lieux du crime en compagnie du factotum sigmarite et de son fidèle serviteur Halfling, Vido.

Sur place, les capacités d’observation et d’analyse du fin limier, doublées de sa prodigieuse culture générale, et de sa correspondance épistolaire avec le frère Wollen, jeune archiviste passionné de culture arabienne, et principal suspect du double meurtre du fait de sa disparition mystérieuse, permettent à Zavant d’identifier en quelques minutes les coupables de cet effroyable forfait : le culte d’Ishmail, des adorateurs de démons made in Arabie, contactés par le mal-avisé Wollen (retrouvé garroté au fond d’un sarcophage) pour la vente d’une des jarres démoniaques dans laquelle ont été scellés les sombres maîtres du culte, il y a fooooooort longtemps. Ce n’est pas la première transaction Le Bon Coin qui tourne mal, mais il convient désormais d’agir prestement pour empêcher les cultistes, qui ont profité des nombreux passages secrets reliant le district sigmarite d’Altdorf au reste de la cité, de profiter de leur bien mal acquis. Ayant repéré dans le registre fluvial, qu’il lit tous les matins avec son verre de lait de quinoa bio dynamique, l’arrivée d’une nef arabienne dans le port de la ville, c’est vers les quais que Konniger entraîne son monde et la cavalerie, espérant arraisonner les fuyards avant qu’ils n’aient pu se faire la malle.

Bien évidemment, les cultistes ne s’en laissent pas compter, et pendant que son patron les corrige bellement à grands coups de gaffe dans les gencives, Vido doit trouver un moyen de stopper le vaisseau avant qu’il ait passé les portes de la cité. Une heureuse réaction en chaîne (de cabestan) fera jeter l’ancre au navire avant la ligne d’arrivée, le ralentissant assez pour que les zélés zélotes de Sigmar y mettent le feu à grand renfort de flèches embrasées. Un plongeon dans les eaux saumâtres du Reik, et une quasi noyade dans le cas de Vido, plus tard, l’amphore maudite gît par le fond du fleuve, ce qui devrait la mettre à l’abri des attentions déplacées de cultistes chaotiques pendant quelques millénaires. Après tout, quelles sont les chances qu’une paire de Halflings aille pêcher le gros à cet endroit, le jour de l’anniversaire de celui qui s’appelle Smeagol ? Négligeable, très négligeable…

: Qui est moins funky que notre théorie du chaos. Sur l’axe Goldblum, on se rapproche plus de Seth Brundle que d’Ian Malcolm.
2 : Ces archives ne seraient pas dignes de ce nom si elles étaient correctement archivées, bien sûr.

AVIS :

Grand début du personnage de Zavant Konniger dans les pages d’Inferno !, et, par la même occasion, dans la GW-Fiction, ‘The Affair of the Araby Exhibit’ établit en une quinzaine de pages les prémisses de la série de Rennie, pastiche décomplexée du Sherlock Holmes de Conan Doyle à la sauce Warhammer, et mélange bien équilibré d’enquête policière et d’action frénétique, à haute teneur en fluff et comique de situation (ce qui n’empêche pas l’auteur d’insérer une bonne dose de grimdark à son propos de temps à autre, comme dans ‘The Scarlet Case’). La brieveté de la nouvelle ne permet pas à Gordon Rennie de développer un whodunit digne de ce nom, mais sa maîtrise de la narration et du rythme, provenant sant doute de ses compétences de scénariste de comics, compense largement cette absence de challenge intellectuel pour le lecteur (à vrai dire, la série des Konniger ne se positionnera jamais vraiment sur ce créneau). De la pulp fiction rondement écrite, et assez originale par rapport au reste des publications de la Black Library : en a-t-on jamais assez ?

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Sisters – N. Rutledge [NDA] – #10 :

INTRIGUE :

La dernière empoignade auquel son gang d’Eschers a participé s’est mal passé pour Blades : malgré la victoire sans conteste obtenue contre la patriarchie, les féministes du sous-monde ont perdu l’une des leurs, Katz, la sœur de leur bien-aimée leader.e. Et même pas aux mains de l’ennemi qui plus est, mais bêtement et salement, la jouvencelle ayant glissé sur une flaque d’huile et étant tombée dans une mare de boue toxique. Tout le monde n’étant pas Harley Queen, c’en fut fait de Katz, qui aurait pourtant pu et dû retomber sur ses patz. Monde cruel.

Après avoir tenté sans succès de noyer son chagrin dans l’alcool (impossible quand on ne tient pas ce dernier), Blades décide de partir en mission de nettoyage dans les environs d’Ashcliff, le village qu’elle et ses filles « protègent » des menaces extérieures. À la fois pour s’occuper l’esprit, mais également pour montrer à ses subordonnées qu’elle est toujours la patronne, et ne pas laisser croire que la place de Pacha Mama est à prendre. Au menu de ce soir (après le fameux ragoût de Licksy, le barman sénile mais gentil du seul rade d’Ashcliff), un Zombie égaré, comme il en vient de temps en temps dans le voisinage. Guidé par le scout Ratskin qui a repéré la créature décérébrée, Blades part en chasse avec son fidèle fusil à pompe et une paire de lunettes de vision nocturne.

En chemin, le duo s’arrête chez le prospecteur Jakey, fils de Jake, fils de Joe, dont un des oncles a eu la mauvaise idée de braver le couvre-feu sans attestation, et s’est fait salement esquinter par le Zombie pour sa peine. Bien que Ma Honka, sa sœur, semble déterminée à soigner le blessé, les règles sont les règles et Blades se fait un devoir de les appliquer et de planter un stylet dans le cœur de l’inconscient inconscient. Le respect des gestes barrières, on connaît la chanson. Ceci fait, l’Escher de garde emboîte le pas à son guide indigène, qui l’emmène dans les galeries de la mine où le mort vivant s’est enterré, et qui se trouve être l’endroit où Blades et Katz ont passé une bonne partie de leur enfance à chasser l’araignée géante et le rat mutant. Que de souvenirs…

Début spoiler…Comme vous vous en doutez si vous savez comment une intrigue de nouvelle fonctionne, le Zombie en question se trouve être Katz. #SansBlague Il n’y a que Blades que cela surprend, et choque fortement, à tel point que c’est au Ratskin que revient la tâche de mettre fin aux souffrances errances de la revenant d’un tir de mousquet bien placé. Cette bonne action ne sera cependant pas récompensée, Blades ne pouvant supporter la sale blague qu’elle croit que le Ratskin lui a fait (il savait que c’était Katz et qu’elles étaient sœurs, mais n’a rien dit), ni prendre le risque qu’il révèle à tout le monde que Blades a probablement tué un innocent par excès de zèle, Katz n’étant techniquement pas un Zombie, mais quelque chose comme The Toxic Avenger.e (et donc non contagieuse, en tout cas pas de cette façon). Un tir de fusil à pompe a l’arrière du crâne règle l’affaire de façon définitive à défaut d’être élégante, laissant enfin toute latitude à Blades pour commencer/terminer son deuil. La morale pourrait être quelque chose comme ‘Souvent femme (à fusil) varie, bien fol qui s’y fie (bouffi)’. En tout cas, c’est empowering.Fin spoiler

AVIS :

Neil Rutledge livre une histoire qui lorgne franchement du côté du Western (une inspiration assez évidente de Necromunda), et qui se laisse lire sans problème malgré le manque total de surprise au niveau de l’identité du Zombie. Cette déception est toutefois compensée par le soin qu’a pris l’auteur de soigner l’authenticité de son récit, par exemple en incluant du jargon local (worms pour les habitants d’Ashcliff, scragger pour être tué…), et par la conclusion glorieusement immorale (c’est le véritable héros de l’histoire qui se fait descendre par derrière et pour couvrir la bévue de sa partenaire), et donc tout à fait adaptée, de cette nouvelle sororitaire (?).

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Ulric’s Children – W. King [WFB] – #11 :

INTRIGUE :

WFB_Ulric's ChildrenUne nouvelle fois égarés dans une impénétrable forêt des moins accueillantes (décidément, c’est une constante), Gotrek et Felix, backpackers de l’extrême1, doivent braver la neige, le froid et la perspective d’une meute de loups affamés lorsque le rideau se lève sur Ulric’s Children. Quant aux fameux enfants d’Ulric qui ont donné leur nom à cette nouvelle, nous apprenons bientôt qu’il s’agit du nom populaire des loups-garous, considérés comme les descendants des relations tumultueuses du Dieu avec quelques accortes mortelles dans des temps très anciens. Figures légendaires du bestiaire impérial, leur existence paraît soudainement bien plus probable à Felix alors qu’il s’échine dans les congères à la suite du Tueur, des vocalises lupines plein les oreilles. Le grand blond à la cape rouge n’a toutefois guère le temps de ressasser son habituelle litanie misérabiliste que Gotrek, dont l’ouïe est aussi fine que son animal totem (l’acraga coa2), part en sprint dans les sous-bois en direction de la clameur d’une bataille toute proche… et disparaît corps et bien de notre histoire, tel un vulgaire PNJ de Skyrim, laissant Felix seul aux commandes de cette dernière.

Arrivé sur les lieux de l’esclandre, Felix se retrouve confronté à la méfiante hostilité d’une petite troupe de soldats, venant de repousser non sans mal les assauts d’une harde lupine. Prudence étant mère de sûreté, les survivants décident de faire prisonnier le bon samaritain, qui se retrouve menotté comme un vulgaire gilet jaune à l’arrière de la carriole des routiers – pas vraiment sympas pour le coup – où il fait la connaissance d’une autre prisonnière du comte Hrothgar, une dénommée Katarina dont le calme glacial et les remarques sibyllines semblent indiquer une inquiétante proximité avec la meute aux trousses de la soldatesque impériale. Pour ne rien arranger, Felix attire l’attention du sorcier de compagnie de son ravisseur, un certain Voorman dont ni l’haleine fétide, ni l’intérêt déplacé pour sa personne, ne sont au goût de notre héros, qui ne peut que maudire les oreilles aiguisées et les courtes jambes de son compagnon d’infortune.

Rendue quelques heures plus tard au pavillon de chasse de Hrothgar, la troupe investit les lieux et jette Felix et sa camarade dans une geôle sombre, froide mais pas vraiment bien fermée, ce qui se révélera assez utile par la suite, comme nous allons le voir. La visite de Voorman permet à Blondin d’en apprendre un peu plus sur sa situation, qui se révèle être assez précaire : le comte et son thaumaturge s’avèrent être des cultistes de Tzeentch, fomentant quelque obscur et indubitablement dangereux dessein, dont la réalisation nécessite l’implication du père de Katarina, loup-garou au pedigree impeccable. Ergo la capture de la gente demoiselle, ergo les attaques répétées de la part de la gent lupine que Hrothgar (du Nord) et ses sbires ont subi jusqu’ici. Si Felix ne souhaite pas ingérer dans les affaires des uns et des autres, il ne lui faut pas longtemps pour déterminer qu’il a davantage intérêt à coopérer avec Katarina que de faire cavalier seul. Profitant de l’étourderie manifeste de Voorman, qui repart sans verrouiller la porte, et de la confusion générale générée par l’intrusion de la meute dans l’enceinte fortifiée, la faute, une fois encore, à un verrou oublié, les gardés à vue se font la malle et se séparent rapidement.

Pendant que Katarina va faire ami ami avec les quadrupèdes, Felix erre dans les couloirs, et finit par surprendre une conversation entre Hrothgar et Voorman venant confirmer ses sombres pressentiments sur le dessein poursuivi par les deux crapules. Le sorcier parti euthanasier quelques clebards à grand coup de boules de feu, Felix sort de sa cachette, assomme Hrothgar et lui subtilise la dague magique avec laquelle le faquin avait menacé le mage quelques instants auparavant. Tout est alors prêt pour que le dénouement tant attendu (ou pas) prenne place. Un autre coup de chance (décidément, Felix n’a pas volé son nom) conduit le Baudelaire impérial dans une pièce où Voorman se confronte au grand méchant loup, que l’on devine être le père aimant de Katarina. Le triomphe du lycanthrope, qui décapite le sorcier d’un revers de patte, est toutefois de courte durée, l’esprit vengeur de l’arcaniste venant posséder son assassin quelques secondes après la décollation du premier par le second. C’était en effet l’objectif poursuivi par Voorman, qui souhaitait faire siennes l’immortalité et l’invulnérabilité supposées des loups-garous, et ainsi attendre pépouze la fin des temps. Bien entendu, sa rencontre avec Felix, et surtout, sa dague enchantée dérobée à Hrothgar, viendra mettre un terme définitif aux rêves de grandeur de notre ami le furry. Il reste alors 10 lignes à King pour terminer son histoire, ce qu’il fait en faisant arriver Gotrek (enfin !) et Katarina, la seconde prisonnière du premier. Quel sort le duo réservera-t-il à l’orpheline, pas vraiment innocente certes, mais qui ne leur a rien fait de mal à proprement parler ? Eh bien, on ne le saura pas (dans cette nouvelle en tout cas). Concluons sur ce constat, toujours d’actualité, que lorsqu’il y a un flou, c’est qu’il y a un loup. Et inversement.

1 : Dommage que la Fin des Temps ait pris place avant que le projet ‘J’irai occire chez vous’ se soit concrétisé. Je suis sûr que ça aurait fait un carton d’audience.
2 : D’où croyez-vous que la teinte orange de sa crète venait, enfin ? Et, oui, les mites font partie des espèces dotées de l’audition la plus performante du règne animal.

AVIS :

Il est assez dommage que Ulric’s Children laisse le lecteur sur sa faim (de loup, donc), car le récit brossé par King avait un potentiel certain, que la brieveté de l’histoire empêche de s’exprimer de manière aboutie. Je suis persuadé qu’une dizaine de pages supplémentaires après que Felix et Katarina soient sortis de leur cachot aurait pu permettre à cette nouvelle de se terminer de façon plus convaincante que l’enchaînement de non-péripéties qui mène au dénouement lapidaire et lacunaire qui est le sien. Pour tout dire, la dernière demi-page d’Ulric’s Children mérite la lecture afin de prendre la pleine mesure du caractère comiquement abrupt de sa conclusion. Il y avait pourtant beaucoup de pistes intéressantes à explorer avant de rayer la ligne « Tueur de Loup » de la bucket slaying list du petit rouquin teigneux, et notamment le personnage de Katarina, sorte d’Ulrika1 avant l’heure que King place au cœur de son récit avant de laisser totalement tomber. Un vrai loupé, si on me permet l’usage de cette tournure.

Si le choix de King de se passer de son personnage tutélaire pour cette soumission peut surprendre le lecteur, le pari aurait pu s’avérer payant si l’auteur avait permis à Herr Jaeger de s’illustrer de façon convaincante et spécifique : si Gotrek est une machine de guerre invincible, qui résout tous les problèmes auquel il est confronté à coup de hache, Felix aurait pu compenser par une approche un peu plus cérébrale et astucieuse de la situation. Ce n’est pas le cas ici, notre héros enchaînant les coups de chance critiques sans véritable réflexion de sa part. En cela, la comparaison avec l’élève Long n’est clairement pas à l’avantage du maître King, le premier faisant preuve d’une véritable aisance scénaristique, quand le second a davantage tendance à passer en maniaque automatique, les prouesses martiales du Nain disgracié venant meubler les intrigues simplistes concoctées par son auteur. Si la passation n’était pas encore proche au moment de la publication de Ulric’s Children (Mars 1999, soit 4 ans avant la sortie de Tueur de Géant, le dernier roman de King dans la série – à ce jour –), il est possible qu’une certaine lassitude ait déjà été à l’œuvre chez King à ce moment, ce qui expliquerait le caractère inachevé de cette nouvelle. Quoi qu’il en soit, cette dernière ne fait définitivement pas partie des bonnes pages de la saga de Gotrek et Felix, et sa lecture n’est indispensable qu’aux fans transis de la série.

1 : C’est-à-dire la jeune fille frappée d’une malédiction passible de mort dans les sociétés civilisées du Vieux Monde (la lycanthropie pour l’une, le vampirisme pour l’autre), mais dont les motivations ne sont pas intrinsèquement mauvaises, et qui demande juste à ce qu’on la laisse tranquille.

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Badlands Skelter’s Downhive Monster Show – M. Farrer [NDA] – #11 :

INTRIGUE :

NDA_Badlands Skelter's Downhive Monster ShowSkelter et sa bande de joyeux saltimbanques, acrobates et spécimens de foire voyagent de ville en ville dans la banlieue des ruches necromundiennes, garant leurs roulottes et dressant leur barnum sur les grand-places pour le bonheur des petits et des grands. De passage à Fever’s Break, la troupe ne va pas tarder à découvrir que cette charmante bourgade compte une forte proportion de résidents très, mais alors très conservateurs, que l’arrivée de baladins bariolés, basanés et écailleux (il y a un Scaly dans le lot) n’enchante pas le moins du monde. Et bien que la première confrontation avec l’éructant Jago, chef de la milice Cawdor locale, se solde par une victoire sans appel des visiteurs, grâce aux talents de pistolero de Skelter et à la charge de la brigade légère (des sump toads), ce n’est évidemment que partie remise pour l’affrontement entre carnavaleux et porteurs de masque. Une rivalité haute en couleurs et spectaculaire, s’il en est.

L’acte deux de cette bisbille se joue devant le tribunal local, quelques heures plus tard : le procédurier Jago a fait accuser les forains de ne pas respecter les diverses lois en vigueur à Necromunda en ce qui concerne le transport d’espèces menacées et menaçantes, le paiement des heures supplémentaires d’intermittents du spectacle, ou encore le contrôle de l’inertie psychique des sujets impériaux. Si le timing du dépôt de ces plaintes contraint Skelter à rembourser les billets de sa première représentation (un sort pire que la mort pour notre honnête bateleur), pour cause d’annulation de dernière minute, notre héros dispose bien de tous les permis et licenses nécessaires pour exercer sa noble et utile profession, ce qui rabat le clapet de son détracteur, dont l’éloquence ampoulée ne sauve pas du ridicule. Ce n’est toutefois pas la fin des ennuis pour les artistes persécutés, qui devront faire face à une attaque en bonne et due forme de la part du gang Cawdor au grand complet pendant leur représentation suivante, une bonne partie de leur public se révélant être des cultistes en civils n’attendant que le signal de leur chef pour mettre à bas les masques. Ou le contraire.

Dans la confusion qui s’en suit, nous emboîtons le pas à quelques personnages de la troupe (Skelter, le chasseur de primes retraité Kamusz, la dresseuse Tara, le Scaly Issig) alors qu’ils corrigent bellement les zélotes, plus doués pour chanter à la messe le dimanche que pour purger un cirque au lance-flamme. Pour des raisons qui m’ont échappé, les Cawdors semblent en avoir particulièrement contre les (nombreux) enfants de la troupe, ce qui n’est pas très gentil pour commencer, et met logiquement nos héros en rogne. Acculé à une roulotte avec le fils de Skelter comme otage, Jago rate sa sortie comme il a à peu près tout raté avant cela, et finit projeté dans l’enclos à ripper-jacks avec des conséquences aussi sanglantes que définitives, sans avoir pu mener à bien ses sombres desseins infanticides. Tout est donc bien qui finit bien, et la petite bande peut quitter sans regret Fever’s Break pour sa prochaine étape, qu’on leur souhaite moins agitée que celle-ci.

AVIS :

Farrer avait les cartes en main et le talent nécessaire pour faire de cette nouvelle au titre artistiquement alambiqué1 un petit OVNI drôlatique dans l’univers autrement plus violent et bas du front de Necromunda, mais force est de constater que la sauce n’a pas superbement pris dans ce ‘Badlands…’, et j’en suis le premier désolé. Si cette nouvelle a quelques moments de grâce comique, comme le trilogue de sourds entre Skelter, Kamusz et Tara dans l’antichambre du juge de Fever’s Break, elle semble hésiter entre un traitement au premier ou second degré de son sujet, avant de se terminer sur une scène d’action aux enjeux confus (pourquoi les Cawdors en ont-ils spécifiquement après la marmaille ?) et à l’exécution sans saveur. Pour les amateurs de GW-fiction loufoque mettant en vedette une troupe de baladins, leur ménagerie à la limite de la légalité et leurs déboires avec le bon peuple de la ville où ils ont planté leurs tentes, on conseillera donc l’ancien mais plus abouti ‘Pulg’s Grand Carnival’, preuve incontestable que la production littéraire commanditée par Games Workshop est d’une richesse insoupçonnée.

1 : En même temps, venant de l’auteur de ‘The Headstone and the Hammerstone Kings’, ce n’est pas très étonnant. Bon, il a écrit ‘Faces’ aussi, c’est donc qu’il sait faire simple quand il a envie.

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The Blessed Ones – R. Kellock [WFB] – #11 :

INTRIGUE :

Truand minable, Jurgen Kuhnslieb se voit forcer d’accepter une mission un peu particulière afin de pouvoir rembourser les nombreuses dettes de jeu qu’il a contractées. Chargé par un jeune noble décadent de voler un tableau dont son propriétaire ne souhaite pas se séparer, Jurgen va rapidement se rendre compte qu’il s’est empêtré dans une affaire aux proportions insoupçonnées, et que ses employeurs ne sont pas du genre à laisser un cambrioleur à la petite semaine se mettre en travers de leur chemin.

AVIS :

The Blessed Ones aurait sans doute gagné à être développé en « moyen format » (50 – 100 pages), plutôt que de se retrouver confiné à la vingtaine de pages de sa version définitive. La banalité de l’intrigue proposée par Rani Kellock, cousue de fil blanc et à la conclusion courue d’avance dès les premières lignes1, aurait pu ainsi être compensée par la mise en place d’une ambiance réellement oppressante, soulignant la traque impitoyable dont Jurgen fait l’objet de la part de ses clients. L’instillation d’une atmosphère de roman noir ne pouvant se faire que sur la durée, la relative brièveté de la nouvelle de Kellock ne lui a pas permis de parvenir à un résultat concluant, ce qui s’avère au final être assez dommageable.

1 : C’est bien simple, si un riche notable engage une petite frappe pour récupérer un artefact d’un genre un peu spécial, il y a environ 143,87% de chances que le commanditaire se révèle être un cultiste du Chaos/nécromancien/membre d’une organisation secrète.

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Ancient Lances – A. Hammond [40K] – #11 :

INTRIGUE :

40K_Ancient LancesDe retour sur son Attila natale après des années de bons et loyaux services, le commandeur Al’Kahan découvre avec stupeur que son monde et ses compatriotes se sont détournés de leur mode de vie ancestral, et se font exploiter sans vergogne par les marchands de l’Imperium. Outré par cette infamie, il rejoint ce qu’il reste de sa tribu, et l’entraine dans une vendetta sanglante contre des voisins indélicats, ayant fait leurs les pâturages et les troupeaux des clans environnants. La victoire acquise, il repart aussi sec dans le vaisseau par lequel il est arrivé, ayant visiblement décidé de passer sa retraite ailleurs que de ce bled paumé. Merde, ils n’ont même pas la wifi.

AVIS :

SAncient Lances s’avère plus consistant qu’Emperor’s Grace (dont le personnage principal, le Commissaire Streck, fait deux brèves apparitions en début et fin de nouvelle, sans qu’on comprenne trop ce qu’il vient faire dans cette histoire1), la seconde publication d’Alex Hammond comporte elle aussi son lot d’imperfections. On notera tout d’abord que l’auteur orthographie « Atilla » la planète d’Al’Kahan, ce qui laisse planer un gros doute aussi bien sur sa maitrise du background de la Garde Impériale que sur son niveau de culture générale. Deuxièmement, la meilleure progression narrative d’Ancient Lances par rapport à Emperor’s Grace (comprendre que la première se termine de manière un peu plus compréhensible que la seconde) n’empêche pas Hammond de perdre le lecteur par endroits, la faute à une absence de mise en exergue de points importants pour la compréhension de son propos.

Par exemple, lorsqu’Al’Kahan sort du vaisseau spatial qui l’a ramené sur Attila au début de la nouvelle, il se fait contrôler par deux Gardes Impériaux d’un autre régiment, qui lui demandent de présenter ses papiers. Notre héros s’exécute… et leur casse la gueule. Violence gratuite d’un vétéran psychotique ? Pas exactement, les victimes d’Al’Kahan appartenant au XIIIème régiment de Prakash, sauvé de la destruction quelques pages plus tôt par le sacrifice de la cavalerie Attilane. On peut donc comprendre que le vieux commandeur n’ait pas apprécié l’intervention des Prakashiens, et le leur ai fait savoir de manière appuyée. Seulement voilà, Hammond ne facilite pas ce travail de déduction, puisqu’il ne prend pas la peine de rappeler de manière explicite la cause de la rancune d’Al’Kahan envers ces deux pauvres bidasses, (trop) confiant qu’il est dans la capacité du lecteur à faire le lien entre les trois micro-passages où est mentionné le XIIIème Prakashien (dispersés sur neuf pages). Faut pas baisser la garde.

J’ai également eu du mal à accrocher au personnage d’Al’Kahan, vétéran couturé aux motivations aussi nébuleuses que son sens tactique2. Comme le fait remarquer le méchant de l’histoire juste avant de se faire trucider par le Zapata des grandes steppes, notre héros a beau gueuler contre les ravages de la galaxisation (c’est le même principe que la mondialisation, mais à l’échelle supérieure) sur Attila et se faire le défenseur des anciennes traditions de la planète, il ne se gêne pas pour utiliser l’arsenal de la Garde Impériale, beaucoup plus avancé que les armes de fer et de corne utilisées par ses compatriotes, afin de faire triompher sa cause. Bref, faîtes ce que je dis, mais ne regardez pas comment je le fais. On notera aussi qu’Al’kahan se barre juste après la victoire de son camp (abandonnant une deuxième fois sa femme et son – second – mari, mutilé par ses bons soins au passage), très probablement pour prendre possession de la province d’un autre monde lui ayant été promise en récompense de ses impeccables états de service. C’est ce qu’on appelle avoir de la suite dans les idées.

Toutefois, Ancient Lances est toutefois plus sympathique que pénible, en grande partie grâce aux détails de fluff apportés par un Hammond assez crédible dans son propos. Cette nouvelle a également le mérite de traiter des frictions pouvant naître de la rencontre de plusieurs cultures d’un niveau technologique très différent, sujet intéressant à aborder dans le cadre d’un empire galactique d’un million de mondes, où cette question doit évidemment se poser de manière récurrente sur pas mal de planètes. En conclusion, si vous ne deviez lire qu’un seul texte de Hammond, c’est celui-là que je vous recommande, et de loin.

1Ancient Lances se déroule un peu avant Emperor’s Grace, mais les deux nouvelles n’ont d’autre point commun que la présence de Streck dans l’un et l’autre. Je n’ai d’ailleurs pas bien compris pourquoi Ancient Lances figure après The Emperor’s Grace dans Into the Maelstrom, soit à l’inverse de l’ordre chronologique. Peut-être Hammond avait-il pour projet de développer une série dont Sterck serait le héros ? Malheureusement pour lui, Ibram Gaunt (et plus tard Ciaphas Cain) avait déjà pris la place du Commissaire héroïque au sein de la Black Library.
2« Salut tout le monde, c’est Al’Kahan ! Ça fait 30 ans que je vous ai quitté, mais maintenant que je suis revenu, vous allez tous faire exactement ce que je dis. »
« Et pourquoi ? »
« Parce que sinon, je vais devenir très méchant. Et comme presque tous les hommes en âge de se battre sont morts, je ne vois pas comment vous pourriez m’empêcher de devenir le nouveau chef de tribu. D’ailleurs, voilà la femme que j’ai épousée juste avant de partir me battre pour l’Empereur (je suis un vrai gentleman). Elle n’a pas l’air très contente de me voir, mais je vais lui offrir la main tranchée de son deuxième mari, ça lui fera plaisir. »
« Bon ok. On n’a pas le choix de toute façon. Mais on te prévient, on s’est fait volé tout notre cheptel par le clan d’à côté, dont le chef a construit une forteresse imprenable depuis laquelle il pille les terres alentours en toute impunité. »
« Pas de problème, j’en fais mon affaire. En ma qualité de soldat vétéran, je vous propose ce plan infaillible : nous allons charger les murs de son bastion à cheval, comme on le faisait à mon époque ! »
« C’est complètement con. »
« Et toi, à la prochaine remarque désobligeante, t’es complètement mort. Nan, mais en fait, je vous ai ramené quelques lances à têtes explosives, ça devrait faire de gros trous dans les murs, qui nous permettront de passer. »
« Ok, mais comment on arrive à s’approcher assez près pour utiliser ces armes fabuleuses ? La forteresse est entourée de pieux en acier, spécialement conçus pour briser une charge de cavalerie. »
« C’est pas un problème, j’ai également un fusil plasma, qui me permettra de détruire ces obstacles pendant notre glorieuse chevauchée ! »
« Heu, tu veux dire avant notre glorieuse chevauchée, non ? Genre on envoie un éclaireur préparer le terrain pour éviter les mauvaise surprises. »
« Pas du tout, on charge comme des débiles un ennemi bien retranché et mieux armé que nous, en faisant une confiance aveugle à mes talents de tireur. C’est non négociable. »
« C’est complètement c- »

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Daemonblood – B. Counter [40K] – #12 :

INTRIGUE :

DaemonbloodSur la planète (forcément bleeue) de Saafir, Papy Nurgle est sur le point de rafler le vote populaire, au grand dam des défenseurs impériaux dépéchés par Pépé (l’autre) pour passer la serpilière. Isolés par les aléas de la guerre, la Sœur de Bataille Aescarion et le Sergent Ultramarines Castus se retrouvent dans les souterrains de la capitale planétaire (éponyme), où se trouve s’étend une station d’épuration possédée par le Warp, forme physique imposante du Prince Démon Parmenides le Vil. Comme il est difficile de passer par l’épée, ou, dans le cas de cette brutale d’Aescarion par la hache énergétique, une flaque de morve et d’excréments couvrant plusieurs hectares, M. et Mme Meilleurs de l’Empereur sont bien embêtés. Profitant de leur désarroi, le vil Parmenides lave/salit le cerveau du Space Marine avec ses confidences crasseuses sur l’état de la galaxie, transformant le pauvre Castus en séide chaotique. Immunisée à cet insidieux virus par sa foi dévorante et absolue, Aescarion n’est cependant pas de taille à achever les souffrances et les errances métaphysiques de son compagnon, et ne doit son salut qu’à la robustesse de son jetpack, qui la ramène à la surface avant qu’elle ne se retrouve féminicidée par le renégat.

On n’échappe cependant pas aussi facilement à cette force puissante qu’est la Destinée au 41ème millénaire, et les routes d’Aescarion et de Castus se croiseront à deux nouvelles reprises pendant les décennies suivantes. La première fois lors de la purge d’un Space Hulk squaté par les suivants de Parmenides, dont Castus est devenu le porte-parole officiel. Castoche aurait pu se faire trouer les pores par un peloton de Sistas judicieusement gardé en réserve par Aescarion, n’eut été la compétence « corps de mouches » développée par le M. Impropre de Saafir, et qui lui permet de tirer sa révérence sans dommage. La seconde, et dernière fois, se déroule sur le vaisseau du Seigneur du Chaos, le Defixio1, et avec la bénédiction de l’Inquisition, qui souhaitait contenir l’expansion cancéreuse de l’empire spatial de Parmenides en envoyant un petit Exterminatus bien senti sur Saafir. Il fallait bien ça à la Canonnesse de l’Ordre du Calice d’Ebène, auquel Aescarion appartient, pour autoriser l’impulsive et revancharde vétérante à se mesurer une nouvelle fois avec sa Némésis. Les deux précédentes tentatives ayant eu un coût élevé en termes de vies de Sœurs de Bataille aguerries, on comprend sa réticence à permettre à sa sous-fifre de sortir à nouveau le karscher. La connaissance intime de notre héroïne de la mentalité et des forces et faiblesses de Castus en faisait toutefois la meilleure candidate pour mener l’expédition impériale jusqu’à bonne orbite, en dépit de la défense acharnée orchestrée par le fidèle Castus du pré de la décharge carrée de son seigneur et maître.

Ayant soigneusement préparé son combat en oignant sa hache de gel Harpic, Aescarion parvient assez facilement à vaincre son adversaire, mais ne l’achève pas immédiatement. Elle souhaite en effet le faire revenir du côté lumineux, et aseptisé, de la force avant qu’il ne soit trop tard, et parvient (assez facilement *2) à convaincre Castus de retourner sa veste énergétique. Cachant une balise de visée, ou quelque chose comme ça, entre deux bourrelets du champion déchu, elle envoie son ancien camarade apporter ses salutations les plus distinguées à Parmenides dans les profondeurs de Saafir, permettant à l’ex Ultramarine de partir avec les mains sales, certes, mais une ardoise propre2. C’est ce qu’on appelle passer l’éponge, grimdark style.

1 : Je précise car Counter a écrit une autre nouvelle portant ce nom, pour ceux que ça intéresse.
2 : Le fait que Parmenides ne se souvienne même pas du nom de son champion après toutes ces décennies de collaboration à également dû convaincre ce dernier d’envoyer tout balader.

AVIS :

Bien des années ont passé et bien des textes ont été écrits depuis, mais il faut se rappeler que c’est avec ‘Daemonblood’ qu’un tout jeune Ben Counter a fait ses débuts pour la Black Library, dans un numéro d’Inferno ! Si je ne placerais pas cette petite nouvelle parmi les meilleures soumissions de cet auteur, capable du moins convaincant1 comme du meilleur, cette première tentative a plutôt bien vieillie (notamment quand on la compare à certaines nouvelles publiées au début des années 2000), et s’avère assez solide dans sa réalisation, même si très peu originale dans son propos. Les milliards de Space Marinades qui nous ont été servies par la BL au cours des dernières décennies y sont sûrement pour quelque chose…

Ici, on peut tout de même mettre au crédit de Counter une conclusion un peu plus originale que le traditionnel « le-méchant-chaoteux-meurt-sur-un-gros-malentendu-avant-d’avoir-pu-mettre-son-plan-presque-infaillible-à-exécution », avec l’exploration d’un thème assez rare dans l’univers grimdark de 40K : la rédemption.  Cela compense largement à mes yeux les points techniques sur lesquels on pourrait venir lui chercher des noises, comme l’apparente facilité avec laquelle une « simple » Sœur de Bataille vétérante arrive à tailler des croupières à un Seigneur de la Peste. On apprendra d’ailleurs par la suite que la bonne Aescarion est une véritable héroïne d’action, ayant plus d’un Space Marine à son tableau de chasse, ce qui pourrait être perçu comme du féminisme de GW-Fiction avant-gardiste de la part de Ben Counter. Quel visionnaire alors…

1 : Vus les loustics qui ont bossé pour la BL, je ne peux pas décemment utiliser le qualificatif de pire pour la prose de Ben Counter. Il y a bien plus mauvais que lui.

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Deliverance – G. Thorpe [40K] – #12 :

INTRIGUE :

Sur la planète Georgia, ou un nom équivalent étant donné que sa « capitale » se nomme Deliverance et que ses habitants sont des rednecks tout ce qu’il y a de plus primitif, le hagard Araga, chasseur-cueilleur (de champignons hallucinogènes) de son état voit son trip roots tourner au psychédélique morbide lorsqu’une spore mycétique contenant un Lictor sautillant s’écrase à quelque distance de sa position. Trop stone pour faire autre chose que contempler le Xenos s’approcher en faisant des claquettes et agitant son chapeau haut de forme (il n’y a pas à dire, c’est de la bonne), notre brave McGuffin est sauvé d’une descente brutale et d’une mort certaine par l’arrivée à point nommé d’un peloton de Last Chancers, mené par notre ami et confident Kage, qui fait sa fête à l’immigrant clandestin avec une brutale efficacité qui aurait arraché des larmes de joie à Trump en personne.

Cette menue péripétie est le point de départ du récit de la défense de Deliverance par une force impériale regroupant, en plus des Légionnaires Pénaux de choc de l’impayable Colonel Schaeffer, une milice de braves indigènes et un contingent de Sœurs de Bataille, contre les hordes chitineuses du Grand Dévoreur. L’occasion pour Thorpe de confronter ses petits chouchous à une galerie de créatures sanguinaires et décérébrées, aux noms aussi étranges que Franx, Letts, Feonix, Truko et Kruzo, pour ne citer que quelques-unes de ces immondes formes de vie. Bref, la vie d’un organisme Tyranide n’est pas rose tous les jours, à supposer qu’il distingue la couleur. De son côté, le Lieutenant Kage narre avec son style inimitable la défense inspirée du périmètre impérial qu’il assure avec ses hommes. Et lui aussi est bon pour un passage en revue du bestiaire opposé, aux Gargouilles succédant des Termagaunts, Guerriers et même, Hormagaunt Ormahgard un petit Carnifex plutôt farouche. Il laisse toutefois le soin à son increvable autant qu’inflexible supérieur le soin de se farcir le Prince Tyranide qui mène l’assaut, ce que Schaeffer fait avec professionnalisme1 (et hors champ, ce qui est encore plus rapide). Bénéficiant de son armure en scenarium, même s’il finit la nouvelle à l’infirmerie, tout l’enjeu pour Kage est de conserver intacte la motivation fluctuante de sa mauvaise troupe, ce qu’il fait en alternant argumentaire pessimiste2, discours inspirant et mensonges éhontés, lorsqu’il aperçoit l’arrivée de transports de gardes impériaux et comprend que cette bonne nouvelle risque d’entrainer un coupable relâchement chez ses Légionnaires. Décidément, même au 41ème millénaire, le management reste un art délicat.

1 : Quel dommage qu’il n’ait pas été là sur Macragge pour baby-sitter cet empoté de Calgar contre le Maître des Essaims. Avec lui, ça n’aurait pas traîné.
2 : Top Ten Reasons of NOT Running Away From A Fight Against Tyranids (Number 3 Will SHOCK You ! – normal c’est un Trygon – ).

AVIS :

La défense d’un bastion quelconque contre une attaque de Tyranides est devenue au fil des années l’un des scénarios les plus communs dans le catalogue de la Black Library, et même si Deliverance1 peut se targuer d’être l’un des premiers textes couvrant le sujet publié par la BL, il y a fort à parier que le lecteur soit déjà familier de ce type de propos. L’approche méthodique que Thorpe utilise pour mener sa barque, en passant d’un type de bestiole hargneuse à l’autre et présentant pour chacune ses principales caractéristiques dans la foulée, à défaut d’être follement originale, remplit convenablement sa mission. La gouaille habituelle de Kage permet de faire passer plus facilement la pilule pour les lecteurs les plus blasés, et les insinuations du caractère paranormal de Schaeffer, qui donne également de sa personne lors des combats (chose assez rarement couverte dans les récits Last Chancers, généralement centrés sur Kage et les pauvres malheureux qui lui servent de réservoir à points de vie), apportent un supplément d’intérêt à Deliverance, même si cette piste intéressante n’est qu’à peine effleurée par Thorpe. Pour le reste, cette nouvelle est tout ce que l’on est en droit d’attendre de la part d’un affrontement entre la Garde Impériale et les cafards de l’espace, avec un body count des plus respectables et de l’héroïsme cheap à foison.

1 : On peut voir dans ce choix de nom un présage de la future relation particulière entretenue par Gav Thorpe et Corax. Nous étions au moment de la publication initiale de cette nouvelle huit ans avant le début de l’Hérésie d’Horus.

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The Doorway Between – R. Davidson [WFB] – #12 :

INTRIGUE :

WFB_The Doorway BetweenFrantz Heidel, chasseur de sorcières agoraphobe, est engagé par le baron von Kleist pour retrouver le pendentif qui lui a été dérobé par une bande de mutants sur la route de Bechafen. Escorté par un pisteur à tête de fouine du nom de Karl Sassen, notre héros se lance à la poursuite des voleurs dans l’arrière-pays de la capitale de l’Ostermark, sans se douter que son employeur ne lui pas dit toute la vérité au sujet de l’artefact qu’il doit récupérer.

AVIS :

The Doorway Between est un récit très classique (la quête d’un objet magique qui se révèle être maléfique), conduit d’une manière tout aussi classique par Rjurik Davidson. Sans être mauvaise, cette nouvelle est toutefois loin d’être mémorable, et ne mérite au mieux qu’une lecture rapide, tant il est possible de trouver mieux ailleurs dans le catalogue de la Black Library (pour les amateurs de chasseurs de sorcières, la trilogie Mathias Thulmann de C.L. Werner est à mon goût bien supérieure).

Lorgnant sur la fin vers la buddy story, lorsque Heidel et son rival Immanuel Mendelsohn sont contraints de faire équipe pour contrecarrer les plans de leur ennemi commun, The Doorway Between aurait sans doute gagné en intérêt si Davidson s’était davantage écarté des chemins battus de l’heroic-fantasy.

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Et voilà qui conclut ce voyage dans la memory lane infernale, plus de vingt ans après la publication initiale de ces nouvelles de l’An II d’Inferno!. À l’heure où le futur de cette revue devenue recueil est plus incertain que jamais1, revisiter ce glorieux et fantasque passé ne peut pas faire de mal. Rendez-vous prochainement ici-même pour le troisième volet de cette saga au long cours…

1 : Amazon nous informe (au moment où cette revue est postée) qu’un recueil thématique ‘Inferno! presents The Emperor’s Finest’, similaire à celui proposé l’année dernière (‘Inferno! presents The Inquisition’) sortira en Novembre 2022. Après ça, on ne peut plus qu’espérer…

EMPIRE AT WAR [WFB]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de ‘Empire at War’, une copieuse anthologie fleurant bon le Monde qui Fut et Warhammer Fantasy Battle, ce qui se fait de plus en plus rare de la part de la Black Library ces temps-ci (pour des raisons valables, il est vrai). Comme le titre et la couverture de cet opus l’indiquent, nous sommes en présence d’un ouvrage thématique, se concentrant sur une seule faction. Je ne vous ferai pas l’affront de vous révéler laquelle.

Empire at War

Bien que trois noms de contributeurs (Dan Abnett, Nick Kyme et Darius Hinks) soient mis en avant, ‘Empire at War’ brasse plus large que les trois romans qui constituent la plus grande partie de son contenu, et dont il ne sera pas question ici1 en application stricte de ma ligne éditoriale (que du court format). Ce ne sont en effet pas moins de 11 nouvelles, écrites par 8 auteurs (en plus de nos trois premiers larrons, on retrouve C. L. Werner, Robert Earl, Gordon Rennie, James Wallis et Jonathan Green), qui viennent compléter cette triade, et offrir au lecteur une vision complémentaire de la plus grande nation du Vieux Monde. C’est tout à fait mérité si vous me demandez, et en tant qu’ancien et inconsolable joueur de l’Empire, je suis d’une impartialité à toute épreuve.

Si la liste de ces courts formats additionnels vous semble étrangement familière, c’est parce que les pontes de Nottingham se sont livrés à un peu de repackaging opportuniste, et ont carrément recyclés l’antique anthologie ‘Swords of the Empire‘, sortie en 2004 et contenant 6 des 11 nouvelles de ‘Empire at War‘. Au prix où ce nouvel ouvrage est vendu (15.99€ en format numérique), on peut toutefois considérer qu’on rentre tout de même largement dans nos frais, surtout quand on compare ‘Empire at War‘ avec son prédécesseur impérial (nommé très logiquement ‘The Empire’), et qui pour le même prix ne comportait que 6 nouvelles. Il faut également noter que parmi les 5 nouvelles qui ne faisaient pas partie du sommaire de ‘Swords of the Empire‘, on trouve quelques raretés comme ‘Shyi-Zar‘ de Dan Abnett, à ma connaissance uniquement publié dans le mega-mnibus WFB ‘Tales of the Old World‘. 

Tout cela fait de ‘Empire at War’ une acquisition de prix pour tout enthousiaste de la GW-Fiction qui se respecte, au moins sur le papier (héhé). Il est temps de rentrer dans le fond des choses et déterminer si l’offre est effectivement aussi intéressante qu’elle en a l’air. Heureusement pour vous, vous avez un expert sous la main pour vous épauler dans ce travail. Up and at’ em, lads!

1 : Je peux tout de même vous recommander chaudement ‘Riders of the Dead’, un classique absolu de la première ère de la Black Library, et qui me fait rêver à ce qu’aurait pu être la GW-Fiction si Abnett avait tranché en faveur de WFB au lieu de 40K au début des années 2000…

Empire at War

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The Vampire Hunters – R. Earl :

INTRIGUE:

Bienvenue à Novograd, petit village kislevite blotti dans la nature sauvage de cette contrée septentrionale. Nous arrivons juste à temps pour surprendre un trio de natifs confinés dans l’auberge locale, absorbés par l’activité reine de la mauvaise saison : écouter la tempête secouer les maisons tout en fantasmant sur sa mort prochaine et se cuitant à la vodka pour passer le temps. Voilà bien toute l’âme indomptable du Kislev résumée en quelques mots. Plongés dans cette introspection profonde et alcoolisée, nos personnages sont surpris par les coups donnés sur la porte de leur gîte par une force mystérieuse. Délaissant un instant la mastication de sa moustache, autre passe-temps très populaire dans le pays, l’aubergiste Grigori1 va s’enquérir de la cause de ce raffut pendant que ses compagnons dégainent leurs couteaux à saucisson, dès fois que ce serait Peppa Pig qui viendrait demander l’hospitalité. À l’extérieur, ce sont deux voyageurs assez bien mis, Calixte Lesec et son valet Viento, qui demandent à s’abriter de la tempête. Après avoir hésité un moment, car, comme tout homme civilisé, Grigori à entendu parler de la déplorable réputation des Lesec (remontant jusqu’à leur patriarche, Noisy), le tavernier finit par laisser les visiteurs entrer après qu’ils aient prononcé le mot magique : « nous avons croisé Petrokov sur la route ». Car Petrokov est le fils de Grigori, et s’il est parti en direction de la capitale au cœur de l’hiver, c’est pour y chercher de l’aide. En effet, Novograd a un problème. Un gros, vorace et nudiste problème.

Une fois à l’intérieur, les nouveaux venus confirment qu’ils sont bien venus pour aider les locaux à se débarrasser de leur nuisance vampirique, car c’est bien de cela dont il s’agit, avec une confiance et une désinvolture qui ne leur attire pas les faveurs de Grigori. Pressé de questions par les mercenaires, il donne une description de l’individu suspect collant parfaitement avec le portrait type d’un Stryge (grand, baraqué, naturiste, avec une tête de chauve-souris), et accepte de mener ses hôtes dans les cavernes servant de repaire à la bête dès le lendemain. Sur la route dès potron minet – mais pas avant que Grigori ait pris son petit-déjeuner complet à base de porridge et de thé au miel (de Lustrie), car c’est le repas le plus important de la journée – les trois hommes progressent dans la poudreuse toute la matinée, et finissent par arriver devant les Dents de l’Ours, percées par un réseau de grottes dans lesquelles les locaux ont vu disparaître le vampire avec une proie sous le bras il y a quelques semaines…

Début spoiler…Une fois la partie lancée en indoor, c’est au tour de Grigori de se retrouver à la peine, les rapides et athlétiques Calixte et Viento redoublant de yamakaseries pour coller deux bonnes longueurs d’avance à leur « guide », laissant ce dernier former l’arrière-garde du groupe avec sa phlébite et son couteau. Guère rassuré par la situation, et seulement éclairée par la lueur tremblotante de sa torche, Grigori a beau se répéter que tout est sous contrôle, le bruit d’une cavalcade de griffes sur la roche, se rapprochant de plus en plus de sa position, n’a rien de très rassurant. Et lorsqu’un vieux réflexe de victime de film d’horreur le pousse à lever les yeux vers le plafond de la grotte, il ne peut que constater que la situation est compromise, ce coquinou de Stryge ayant opté pour une approche verticale et se trouvant à quelques centimètres de la tête de notre héros. Paralysé par une abjecte terreur, ce dernier en vient à lâcher son fidèle surin, mais, lorsque la bête se met en tête de lui fouailler la carotide, il a le bon réflexe de lui balancer un bon gros « parle à ma main » pour lui mettre un stop. Comme la main en question portait sa torche, le vampire en est quitte pour une bouchée de braise, ce qui n’est jamais agréable.

C’est le moment choisi par Calixte et Viento pour passer à l’attaque, de façon aussi coordonnée qu’acrobatique, les mercenaires prenant leur proie à son petit jeu de varappe en sautant eux aussi de prise en prise avec l’habileté d’un Alex Honnold sous speed. Sentant que l’on n’a plus vraiment besoin de lui, et plus qu’un peu dégoûté par la BO de la bataille et l’averse de sang qui commence à l’arroser, Grigori opte pour un petit évanouissement réparateur. À son réveil, et après avoir laborieusement retrouvé et rallumé sa torche, il peut constater que le Stryge a été vaincu, mais que ses problèmes, loin de disparaître, ont doublé. Car Calixte et Viento étaient eux aussi des vampires, que leur bataille contre leur lointain cousin skinhead a mis en appétit. Ils somment donc leur hôte de les ramener à Novograd, afin qu’ils puissent bénéficier du gîte et du couvert promis pendant une saison complète que l’offre d’embauche transmise par le délicieux Petrokov mentionnait. Ayant réalisé que son fils était très probablement mort, et que le reste du village ne tarderait pas à les suivre, Grigori, logiquement abattu par le tour qu’ont pris les événements, se met toutefois en route avec diligence, entraînant derrière lui les deux tueurs hémophiles.

Derrière son air de désespoir abêti, Grigori a toutefois un plan, et part au diable vau vert en compagnie des parasites, profitant de la tempête de neige s’étant levée entre temps pour les éloigner de Novograd. Lorsque Calixte finit par se rendre compte de la situation, il est trop tard pour les deux vamps, et la fringale qui travaille Viento pousse ce dernier à attaquer le Kislévite sans réfléchir aux conséquences de son geste, lorsque ce dernier lui balance quelques insultes savamment choisies. En plus de saigner à mort leur seul lien avec la civilisation, l’assoiffé ne s’est pas rendu compte que ce dernier se tenait à dessein sur le bord d’une corniche surplombant un abîme, et les trois randonneurs finissent donc par basculer dans le ravin après que Calixte ait tenté, sans résultat, de calmer les ardeurs de son séide. Ce n’est toutefois pas la fin pour Grigori, qui parvient à regagner la route quelques heures plus tard, malgré des blessures plus graves les unes que les autres, et la perte de 4 litres de sang. Réalisant qu’il est sur le point de devenir un vampire à son tour2, le dévoué aubergiste décide de se sacrifier pour la cause, et sort son meilleur saut de l’ange pour allez à nouveau s’écraser en contrebas. C’en est cette fois fini du petit Grigori, dont on retrouvera le cadavre flottant dans la rivière locale au dégel. Encore un mystère non éclairci…Fin spoiler

1 : Qui a contracté cette sale habitude il y a quarante ans, et qui en a quarante-deux. On vieillit vite à Kislev, c’est connu.
2 : On suppose que Viento a mis la langue pendant leur séance de base jumping en amoureux ?

AVIS:

Soumission solide de la part d’un Robert Earl pas encore obnubilé par les aventures de Florin et Lorenzo (bien que la paire Calixte – Viento s’avère assez semblable à son équivalente bretonienne dans ses relations maître – serviteur), ce Chasseurs de Vampire permet au lecteur de découvrir le Vieux Monde dans toute sa dureté, tant climatique que « sociologique », et de prendre la mesure du fameux tempérament kislévite, garant de la survie de ce peuple plus exposé que les autres aux déprédations des forces du mâââââl. Bénéficiant d’une intrigue bien trouvée et mise en scène, notamment le passage de la grotte et l’approche angoissante du Stryge, qui n’aurait pas dépareillée dans une nouvelle de Warhammer Horror, cette histoire met à profit les éléments constitutifs de la GW-Fiction que sont l’action, le suspense et le grimdark, pour un résultat des plus convaincants. À placer parmi les modèles du genre.

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Meat Wagon – C. L. Werner :

INTRIGUE:

Votre attention s’il vous plaît. La nouvelle qui va suivre comprenant un nombre élevé de personnages nommés (plus ou moins) importants pour notre intrigue, nous vous remercions par avance de suivre attentivement les présentations qui vont vous être faites de notre casting. Vous aurez été prévenus.

Et nous voici donc catapultés dans un relais routier minable sur la route reliant Erengrad à Zandri en passant par Nuln, où une belle bande de personnages attend que leur personnel de bord ait fait le plein et chargé les plateaux repas. Les écouter un instant suffit au lecteur sagace pour deviner où chacun se positionne sur l’organigramme de la nouvelle d’action med-fan1. Nous avons ainsi, par ordre d’apparition : le joueur de cartes (en os, because why not2)/escroc/joli cœur Feldherrn, le gras, riche, désagréable et xénophobe marchand de vodka Emil Steinmetz, sa « fiancée »/chaufferette achetée en soldes à son vieux père Lydia, et son garde du corps couturé et patibulaire, Ravna (surnommé un demi car il utilise une épée bâtarde). À cela, nous nous devons d’ajouter la Baronne von Raeder, vieille fille maniérée et hautaine, mais se baladant avec une rapière au côté, et le jeune ingénieur Nain Fergrim Pointefer, transportant avec lui des caisses frappées de runes auxquelles il tient comme à la prunelle de ses yeux. Pour finir, un mot sur les chauffeurs de ces messieurs-dames : l’Ostlander au fouet et aux chicots pourris, Ocker, et son comparse Strigani à tête de fouine et à moustache pleine de miettes (un signe sûr que c’est un filou… ou une fouine qui vient de tomber sur une baguette), Bresh. Pfiou, une bonne chose de faite.

Tout ce petit monde se dirige donc vers Nuln et doit cohabiter pour quelques heures, même si des tensions se manifestent déjà au sein du groupe. Le voyage du coche est cependant interrompu avant son terme par un fiacre-stopper planté au bord de la route. Reconnaissant un Répurgateur à la forme de son chapeau, les deux gredins tenant les rênes, et que le lecteur avait surpris quelques temps auparavant à échanger des remarques lourdes de sens hors d’écoute de leurs passagers, sont d’abord tentés de l’écraser, mais Mathias Thulmann (car c’était lui) avait habilement prévu le coup en demandant à son homme de main et tortionnaire particulier, Streng, de se positionner stratégiquement avec une arbalète chargée à proximité. Si Thulmann joue du pouce sur les grands chemins, c’est que son cheval à perdu un fer et qu’il a donc besoin d’être dépanné jusqu’à la forge la plus proche. Ne prenant pas les dénégations polies des conducteurs pour argent comptant, il s’installe donc posément dans la diligence, laissant son acolyte suivre cette dernière avec leurs chevaux, et propose un tour de table amical pour briser la glace entre les compagnons de voyage. Venant d’un type qui peut vous condamner au bûcher si vous éternuez de façon bizarre, pas sûr que cela fonctionne beaucoup.

En tous cas, cette rencontre fortuite n’empêche pas Ocker & Bresh de dérouler la suite de leur plan, et donc d’amener leur véhicule jusqu’au charmant petit village de Mureiste, Sylvanie. « Dites donc, c’est étrange que nous fûmes allâtes en direction du Nord-Est alors que la logique voullasse que nous nous dirigeassionnèrent vers le Sud-Ouest » commente ce finaud de Thulmann, à qui on a appris le Reikspiel littéraire et la géographie au Temple de Sigmar. Il ne faut donc pas s’étonner que notre héros dégaine une de ses pétoires de service lorsque l’équipage annonce une pause de quelques minutes à ses passagers, et interdise en des termes non incertains aux ruffians de bouger de leur siège. Cette situation des plus tendues (Streng étant venu appuyer les dires de son employeur avec sa propre arbalète) dégénère cependant tout à fait lorsque les habitants de Mureiste arrivent en masse taper au carreau du fiacre, et pas pour demander s’ils peuvent laver le pare-brise, non non. Car les locaux sont des goules, elles ont faim, et de bien mauvaises manières. Dans le tumulte qui s’en suit, notre compteur de mort horrible se déclenche enfin, grâce à la participation active d’Ocker, qui prend un carreau dans le bide de la part de Streng en tentant de dégainer son tromblon, tombe de son siège, se fait rouler dessus par la voiture qui s’emballe, et dévorer vivant par les relations professionnelles des son collègue. Pas mal pour un début. Bresh, de son côté, réussit à faire décrire des cercles à l’attelage devenu fou jusqu’à ce que le poison des cannibales fasse effet et terrasse les chevaux3. Le coche se renverse, manquant d’écraser Pointefer, mais ne faisant pas d’autres victimes que les chausses de Steinmetz, dont le transit intestinal est accéléré par la vue des goules. Toutefois, tous nos personnages, y compris Bresh, que Thulmann amène manu militari avec lui pour qu’il s’explique, réussissent à se réfugier dans le temple de Sigmar local, et à en barricader les portes.

Dès lors, il s’agit pour nos héros de s’organiser. Pendant que ses camarades fortifient leur position ou sanglotent dans leur coin, le Répurgateur torture un peu son suspect, arrivant à tirer de ce dernier la promesse d’une mort abominable délivrée d’une main de Maître par ce dernier. Il ne faut pas longtemps à Thulmann pour comprendre que les goules ne sont qu’un avant-goût d’une nuit très agitée qui s’annonce, et le zélote va donc prêter main-forte à ses acolytes, qu’il positionne à des endroits stratégiques dans l’attente du prochain assaut. À la tombée du jour, une chauve-souris géante vient déverser des litres de guano sur la grand-place où patientent les Muriestois, avant de se poser et de se changer en, je vous le donne en mille, Ozzy Osbourne. Ou presque. En vampire Stryge. Après s’être fait briefer sur les derniers événements, et avoir repris quelques forces en sirotant le messager4, il lance ses ouailles à l’attaque du monument, en leur indiquant de penser à faire le tour, cette fois-ci. Si la marée de viande écumante (voir « ils l’ont écrit ») ne parvient pas à faire autre chose que trembler les portes dans un premier temps, les nerfs fragiles de cette fiotte de Steinmetz manquent de condamner la team Sigmar lorsque le pleutre décide d’aller libérer Bresh dans l’espoir que ce dernier parvienne à le sauver. Malheureusement pour lui, et pour son nouvel obligé, Lydia donne l’alerte à Thulmann avant que le Strigani n’ait eu le temps de lui planter un couteau dans le dos. Privé de l’avantage de la surprise, les vingt centimètres d’acier du ruffian ne font pas le poids ni la longueur face à l’épée bénite du Répurgateur5, et le malappris se fait posément transpercer la gorge par son adversaire, qui peut aller redonner un coup de main très bienvenu à ses comparses.

C’est le moment que choisit le Stryge pour faire son entrée dans la place, par la fenêtre s’il vous plaît. Chemin faisant, il charcute horriblement la pauvre Baronne von Raeder6, pulvérise un banc et éventre Steinmetz, faisant un peu de ménage dans notre casting. Ses tentatives de griffer à mort Thumann sont cependant mises en échec par le jet d’eau bénite qu’il se prend dans la figure (ça brûle), et par les gros débuffs de zone que lui inflige le sol consacré du lieu saint dans lequel il se trouve. C’est ça aussi de ne pas demander à ses goules de raser le temple de Sigmar du village en temps et en heure. Devant tant de diableries, ou peut-être l’inverse, le vampire décide d’aller prendre l’air, entraînant avec lui ses hordes de groupies décérébrés. L’occasion pour les défenseurs de souffler un peu et de faire leurs comptes, le pauvre Ravna, méchamment tailladé par un ongle sale de goule, n’en ayant plus pour très longtemps…

C’est alors que Pointefer se souvient que le contenu de ses caisses n’est autre que de la poudre à canon. Gag. Jouant leur va-tout, les survivants envoient donc le Nain et le mourant poser une mèche dans les décombres de la diligence, pendant que Thulmann tente de distraire le Stryge. Cela marche tellement bien que, lorsque l’héroïque Ravna se sacrifie pour mettre le feu aux poudres, le buveur de sang est encore occupé à envoyer des gros doigts, ou griffes dans son cas , au Répurgateur depuis le sommet de la diligence. Bilan des courses : un centre ville dévasté, une vingtaine de goules déchiquetées, et un vampire en piteux état, que Thulmann achève d’un coup d’épée en plein cœur en punition de son tapage nocturne7. Ici s’achève notre histoire, les deux chasseurs de sorcières décidant de repartir avec leurs montures (habilement garées dans le temple par Streng un peu plus tôt), même déferrées, plutôt que de s’éterniser plus longtemps dans ce patelin paumé qu’est Mureiste. Et Thulmann de donner ce conseil avisé aux trois survivants de notre échappée belle (voyez si vous pouvez les identifier) : « je suis sûr que ça va marcher ».

1 : Et dans une certaine mesure, de déterminer qui a le plus de chances de mourir dans d’atroces souffrances au cours des prochaines pages.
2 : Même si le matériau utilisé me semble un peu saugrenu. Sans compter de la taille du squelette nécessaire pour tailler des cartes d’une taille suffisante. Sans doute un moyen pour les forces impériales de monétiser les cadavres d’Orques qui s’accumulent comme des feuilles mortes en automne après la Waaagh ! hebdomadaire.
3 : Qui n’ont pas reçu de nom et que je n’inclue donc pas à ma liste, à grand regret.
4 : Don’t shoot the runner, but drink them? Yes you can.
5 : Annule les sauvegardes invulnérables des Démons, coup fatal sur les sorciers à cœur noir.
6 : Dont le tort fut d’être une femme répudiée indépendante, et donc indigne de confiance pour ce misogyne de Thulmann.
7 : Non sans avoir balancé la petite réplique qui va bien juste avant, ici librement empruntée à ‘Le Bon, La Brute et le Truand’ (déjà pastiché par Werner dans sa série ‘Brunner, Bounty Hunter’.

AVIS:

On savait Werner particulièrement à son aise pour la mise en scène de nouvelles d’actions sérialisées, qu’il s’agisse pour lui de suivre une traque du chasseur de primes Brunner, ou une purification expresse dispensée par le zélé Mathias Thulmann. Cette réputation n’est pas usurpée ici, car cette Charcuterie Ambulante tient beaucoup mieux la route, et c’est heureux, que la diligence empruntée par nos héros pour se rendre à Nuln. En plus de bénéficier d’une atmosphère tendue tout à fait appréciable, en grande partie grâce au rythme soutenu imposé par l’auteur, et les quelques descriptions gore à souhait qu’il glisse au fil des pages, cette nouvelle parvient également à faire « vivre » (et mourir, dans beaucoup de cas) sa belle brochette de personnages de façon naturelle et équilibrée, et emprunte avec bonheur au genre du western, dont Werner est un fan assumé. La fameuse scène de l’attaque de la diligence par les Indiens, ou, plus proche de nous, l’attente tendue des 8 Salopards, partagent ainsi des similarités fortes avec le siège de temple de Sigmar par un Stryge et ses goules, preuve que dans la pop culture, tout est dans tout et inversement. Au final, encore une nouvelle solide à mettre au crédit d’un des chasseurs de lignes les plus réputés du Vieux Monde plutôt que du Far West, et une très bonne introduction du personnage de Mathias Thulmann aux non-initiés, si nécessaire.

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The Case of the Scarlet Cell – G. Rennie :

INTRIGUE:

Les temps sont rudes à Altdorf pour la devineresse décrépite Varra, qui peine à extorquer de quoi payer son loyer et acheter du mou à son chat à la populace locale. En cause, l’absence de la moindre petite catastrophe depuis quelques temps, qu’il s’agisse d’une Waaagh ! Orque ravageant l’arrière-pays, d’une invasion des hordes chaotiques depuis le Nord, ou même une épidémie de peste noire, comme au bon vieux temps de Mandred. Ce sont des événements de ce genre qui donne l’envie aux braves quidams de claquer quelques pièces dans la lecture de leur avenir, et la paix relative dont bénéficie l’Empire au moment où notre histoire prend place ne fait donc pas les affaires de notre pythie au rabais. Aussi, lorsque le traditionnel rideau de perles marquant l’entrée de son cabinet se met à bruire, annonçant l’arrivée d’un gogo client en puissance, Varra se dépêche de prendre un air pénétré et de scruter les profondeurs mystérieuses de sa boule de verre (le cristal, c’est cher). À défaut d’avoir de vrais pouvoirs de divination, un simple coup d’œil au nouveau venu aurait peut-être pu sauver la voyante amateur du triste destin qui l’attend. Lorsque Varra daigne en effet lever les yeux sur son visiteur pour s’enquérir de la raison des ses grognements courroucés, il est trop tard pour elle. Fondu au rouge…

Quelques heures plus tard, c’est l’impeccable Zavant Konniger, Sage-Détective (c’est écrit sur sa carte de visite) qui se rend sur le lieu de ce qui s’est avéré être un crime (sans blagues), suivi de son fidèle serviteur halfling Vido. Si l’illustre personnage a daigné descendre dans la rue des Pythonisses, c’est qu’il réfléchit à prendre l’affaire que lui propose le marchand Gustav von Hassen, fondateur du Comité de vigilance des citoyens d’Altdorf, initiative populaire mise sur pied il y a quelques mois pour aider les autorités incompétentes à mettre fin aux déprédations d’un tueur en série sanguinaire connu sous le nom du Boucher de Reikerbahn (le quartier le plus mal famé d’Altdorf). Bien que le charcutier en question ait fini par être appréhendé, envoyé en prison, jugé et exécuté, von Hassen semble prêt à payer les coquets émoluments demandés par Konniger pour bénéficier de sa légendaire gnose. Dès lors, ce dernier se fait un devoir de visiter les quartiers de la pauvre Varra, éparpillée façon puzzle dans son F3. Le regard acéré de notre enquêteur ne met pas longtemps à remarquer que la victime n’a ni les yeux, ni la langue dans sa poche, ni à leurs emplacements habituels d’ailleurs, et conclut donc que le meurtrier devait avoir des motivations bien spécifiques. En effet, voler les yeux et la langue d’une devineresse semble obéir à une logique particulière.

Sur le chemin du retour, dans le fiacre que Konniger et Vido partagent avec von Hassen et son jouvenceau de neveu, Sigmund, le Sage-Détective n’a pas longtemps à attendre pour tirer les vers du nez de son nouvel employeur, qui révèle deux faits très intéressants à l’enquêteur. Le premier est que le meurtre de Varra n’est que le dernier d’une série en cours, ayant vu un Archilecteur salace perdre cœur (et la vie) dans le lit d’une prostituée de luxe, et pas moins de trois sorciers des collèges de magie perdre la tête (et le contenu de leur boîte crânienne) au cours des dernières semaines. La seconde est relative au fameux Boucher de Reikerbahn, dont la population a été privée de l’exécution publique pour la simple est bonne raison que le suspect était un cultiste de Khorne déjà bien avancé sur le chemin de la mutation (professionnelle ou pas), plus semblable à une bête qu’à un homme, et doué d’une capacité de régénération extraordinaire. Pensez à Wolverine croisé avec Jack l’Éventreur et vous aurez une bonne représentation du joyeux drille. N’ayant rien pu tirer de lui, ni aveu, ni confession, ni parole intelligible, les autorités décidèrent de le brûler dans l’enceinte de sa prison pour clore l’affaire une fois pour toutes.

Une fois rendu à son domicile, Konniger commence à phosphorer avec son efficacité habituelle, faisant remarquer à son domestique que von Hassen, pour concerné qu’il ait l’air d’être par le salut du petit peuple, dissimule sans doute ses véritables motivations, comme l’indique… l’absence de chevalière à sa main droite. Imparable. Cela dit, il faut à notre héros amasser davantage d’indices et de preuves sur cette affaire, et la paire part bientôt en direction de la Kaiserplatz à la rencontre d’une vieille connaissance, travaillant comme geôlier en chef dans la prison municipale de Mundsen, où le Boucher a passé ses dernières heures. Bien aidé par la corruption quasi-totale de son interlocuteur, et pendant qu’il déguste une savoureuse saucisse dans la taverne de la Robuste Matraque, Konniger ne met pas longtemps à convaincre le maton qu’il est dans son meilleur intérêt de lui faire faire une visite guidée de la cellule où était enfermé Boubou, même si les Répurgateurs de Sigmar ont formellement interdit à quiconque d’y pénétrer depuis l’exécution…

Début spoiler…Et pour cause, car exécution il n’y a pas eu. La nuit précédent la mise à mort, le Boucher s’est en effet découvert des talents de scream queen, et lorsque la garde a fini par venir s’enquérir des causes de ce raffut, elle ne put que s’apercevoir que le gonze était également un as de la maroufle. Résultat, des murs (et un plafond) de cellule refaits de neuf avec une épaisse couche de sang, et une disparition totale du détestable artisan. La cellule écarlate continuant à suinter de l’hémoglobine fraîche depuis cette nuit fatidique1, l’Inquisition avait logiquement décidé de noyer l’affaire en faisant croire que tout s’était déroulé normalement, ce qui n’est évidemment pas le cas. Qui peut dire ce qu’il est advenu du Roucher de Beikerbahn ? La visite terminée, Konniger insiste pour ne pas rentrer chez lui directement mais se rendre discrètement au domicile de von Hassen, qu’il soupçonne fortement d’être un disciple de Slaanesh, engagé dans une vendetta très intéressée contre le tueur Khornu qu’il a contribué à faire arrêter la première fois.

Et, effectivement, il ne faut pas longtemps aux deux détectives pour filer Gustav et Sigmund jusqu’à un entrepôt du quartier marchand, qui se révèle être un lieu de débauche des plus païennes. Le temps que Konniger et Vido parviennent à crocheter une serrure et accéder au lieu de la petite sauterie, cependant, il est déjà trop tard, car le Boucher, que Khorne a récompensé de ses bons et loyaux services en lui donnant le pouvoir « brumisateur de sang », ce qui lui a permis de s’extirper de sa cellule, et plus tard, de contourner les mécanismes de protection mis en place par ses proies2, s’est matérialisé en pleine orgie en montant depuis les égouts à travers le sol, que ces crétins de cultistes n’avaient pas pensé à isoler. Et pourtant, tous les chauffagistes vous diront que c’est important. Cette aérosolisation réussie, le tueur a repris forme presque humaine et s’est mis à débiter de l’aristocrate corrompu et du notable concupiscent à tour de griffes, jusqu’à ce que Sigmund, qui se trouvait être la démonette de compagnie de Gustav (en sa qualité de Magister du culte), tombe les masques (de Slaanesh, évidemment) et engage la brutasse au corps à corps. Son intervention courageuse n’est cependant pas suffisante pour arrêter les ravages du fidèle du Dieu du Sang, même si elle permet d’affaiblir ce dernier et donne une chance à Konniger de régler le problème en solo. Saisissant le bâton corrompu encore étreint par la main de Gustav, chairàpâtis-é juste avant son escort démoniaque, Zavant commence à zlataner l’Élu de Khorne de belle manière, parvenant finalement à l’empaler avec le symbole de l’ennemi juré de son Dieu, sur l’autel de l’ennemi juré de son Dieu. C’est la combo fatale pour le Boucher, qui se fait déboucher pour de bon et repart dans les royaumes du Chaos se faire prendre la tête par son suzerain.

À Altdorf, c’est l’incendie opportun de l’entrepôt, suivi d’une opération de nettoyage très poussée menée par les Templiers de Sigmar, et la prise de vacances pour durée indéterminée d’un certain nombre de sommités locales, qui permet à la vie de retrouver une certaine normalité. On espère en tous cas que Konniger s’est fait payer par avance pour cette affaire, car quelque chose me dit que sinon, il l’aura dans l’os…Fin spoiler

1 : Ce qui est certes dégoûtant (en plus d’être dégouttant) mais très utile pour les banques de sang d’Altdorf.
2 : Insaisissabilité renforcée par les dons « anti-magiques » accordés à la suite de la consommation du cœur, cerveaux, yeux et langue de ses victimes précédentes.

AVIS:

Adaptation très convaincante d’une enquête de polar bien noir dans l’univers de Warhammer, L’Affaire de la Cellule Écarlate permet à Gordon Rennie d’entraîner son lecteur dans le tumulte d’Altdorf, depuis ses tavernes animées et son riche quartier marchand jusqu’aux prisons les plus glauques et au tristement célèbre Reikerbahn, ce qui en fait une nouvelle incontournable pour tout amateur de fluff qui se respecte, ainsi que pour les rôlistes à l’affût d’informations (quasi) officielles pour enrichir leurs parties. Mettant à profit son aisance narrative pour plonger son public dans son propos, par exemple en alternant les passages suivants Konniger et Vido avec ceux racontés du point de vue du tueur (ce qui permet de comprendre son douloureux parcours et ses motivations) ou des ses victimes, convoquant avec maestria des descriptions de la vie d’Altdorf, dialogues efficaces (à défaut d’être savoureux) et scènes d’actions rythmées, le tout parsemé de quelques trouvailles gores et saillies humoristiques, Rennie livre ici l’une des toutes meilleures aventures de son héros fétiche, qui tombera malheureusement dans un relatif anonymat1 lorsque son auteur décidera d’arrêter sa collaboration avec la Black Library. Donc, profitez-en car il y en pas des milliers, ni des centaines, ni même des dizaines comme celle-là2 !

1 : Même si le brave Josh Reynolds sortira Zavant de sa pré-retraite le temps de quelques nouvelles au cours des années 2010.
2 : Et en français, je pense que c’est même l’une des seules.

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Rest for the Wicked – J. Wallis :

INTRIGUE:

Altdorf, et ses rues bruissantes de vie, ses marchés bien achalandés, ses honnêtes citoyens faisant leurs courses… Et, bien entendu, ses forces de police luttant au jour le jour contre les déprédations des mauvais sujets de l’Empereur, ou, dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, celles de dangereux immigrants, comme ce Kislévite à moustache de Kislévite (ok) et aux yeux de Kislévite (plus dur), qui se fait courser comme un lapin par nos héros, les officiers des Lices Dirk Grenner (aka Astérix) et Karl Johansen (aka Lucky Luke1), qui cherchent ainsi à boucler une enquête de trois mois de façon probante. Manque de bol pour les Starsky et Hutch impériaux, leur course poursuite les amène jusqu’aux portes de la ville, où le cortège de Leopold von Bildhofen, Comte Électeur du Middenland, fait son entrée en grande pompe. Le périmètre de sécurité étant strictement maintenu par la garde civile, nos héros ne peuvent que constater la disparition de leur proie dans la foule massée pour l’occasion… jusqu’à ce que le suspect moustachu trouve intelligent de passer en courant devant le cheval de l’Électeur, pile au moment où ce dernier reçoit un carreau en pleine encolure (le cheval, pas le bonhomme). La suite est assez facile à prédire : la bête s’emballe et part au triple galop dans les rues pavées d’Altdorf, en direction de la Königplatz (à ne pas confondre avec la Kaiserplatz) et de son marché bondé. Serait-ce la fin de ce bon vieux Leopold ? NON, car les héroïques Johansen et Grenner subtilisent deux montures à leurs balourds de collègues, piquent des deux et parviennent in extremis à se saisir de l’aristocrate avant que son destrier n’aille s’emboutir dans un food truck, avec des résultats dévastateurs. Malgré leur intervention salutaire, ce snob de von Bildhofen remercie à peine ses sauveurs, et repart avec sa troupe jusqu’à son Air BnB.

De retour au poste, les officiers doivent à présent amadouer la colère de leur patron et chef des Lices d’Altdorf, le Général Hoffmann, devant le capotage complet de l’opération Kosachok. Ce fiasco a toutefois libéré le duo, qui peut enquêter sur la tentative d’assassinat dont l’influent aristocrate vient de faire les frais. Ayant déjà reçu le résultat des expertises du laboratoire alchémico-légal avec lequel les Lices travaillent, qui a établi que le carreau était d’origine tiléenne, Johansen et Grenner partent en direction de la petite Tilée pour creuser la piste d’un assassin étranger engagé par un mystérieux commanditaire pour se débarasser de von Bildhofen. L’héritier du Comte étant son frère Siegfried, marié à une Tiléenne, c’est donc vers ce dernier que les premiers soupçons se portent. Après une rencontre fructueuse avec le signor Argentari, parrain de la pègre italienne tiléenne locale, les deux équipiers filent jusqu’à la Marianstrasse, où leur indic leur a confié que se trouvait le tireur d’élite recruté pour effectuer ce sale boulot. Bien qu’ils parviennent sur place avant que ce dernier n’ait pu retenter sa chance, profitant du passage du Comte Électeur à la sortie de la messe, ils perdent l’élément de surprise lorsque Grenner ne parvient pas à enfoncer la porte de la planque du premier coup. S’en suit un face à face tendu entre les officiers et leur suspect, qui se prend la dague de jet de Johansen dans l’estomac pour commencer, mais riposte en logeant un carreau dans la poitrine de ce dernier. Ce tilean stand-off, qui aurait pu durer longtemps vu la stupidité des participants2, est toutefois interrompu par une boule de feu impromptue, qui ravage la piaule et réduit le sniper en cendres. Comprenant que cette intervention enflammée était probablement celle du commanditaire, peu soucieux de laisser les enquêteurs interroger le tueur à gages, Johansen indique à son partenaire qu’il serait judicieux qu’il aille rendre une visite de courtoisie à la DGSI impériale, une cellule de la Reiksguard (en civil) enquêtant sur les complots et manigances agitant l’entourage de l’Empereur. Cette organisation moyennement secrète (puisque un simple officier des Lices sait qu’elle existe et où elle opère3), du nom d’Untersuchung, s’est faite une spécialité d’enquêter sur les mages renégats, et pourrait donc aider l’enquête à progresser. Pendant que son collègue passe aux urgences se faire recoudre, Grenner se rend donc sur place.

Là, il se fait poliment mais fermement éconduire par ses interlocuteurs, qui ont l’air d’en savoir beaucoup plus qu’ils ne veulent bien en dire sur cette affaire, et ne consentent qu’à lui expliquer la différence entre une boule de feu et une explosion flamboyante. Car non, ce n’est pas la même chose. De retour au poste, Johansen est toutefois briefé par Hoffmann, qui a reçu les infos refusées à son sous fifre par fax pigeon voyageur, sur la situation très délicate dans laquelle ils doivent opérer. La sorcière pyromane se révèle être une certaine Emilie Trautt, mage flamboyante passée libérale depuis quelques années et concubine notoire du fils de Leopold von Bildhofen, Udo, qui passe du coup suspect #1 de l’enquête. Cependant, l’Untersuchung a formellement interdit à ses collègues d’intenter quoi que ce soit envers Trautt, qui pourrait mener le Bureau des Légendes d’Altdorf à de plus gros poissons. Cela n’empêche toutefois pas les Lices de monter un plan audacieux pour protéger le mal-aimé Leopold de ses persécuteurs…

Début spoiler…Et notre duo infernal, maintenu sur l’affaire par un Hoffmann très peu progressiste quand au concept d’ITT et de congés maladie, de se rendre à la place de leur boss au rendez-vous organisé par Udo afin de discuter des mesures de protection prises par les Lices envers le Comte Électeur. Tout aussi odieux que son paternel, Udo gobe toutefois sans broncher les bobards débités par un Johansen imperturbable, qui lui fait croire que les suspects principaux sont les Kislévites (décidément, il ne les aime pas), et lui révèle les dispositions super secrètes prises par son équipe pour protéger le convoi qui amènera le Comte et sa famille à la réception organisée par l’Empereur en leur honneur le soir même, lorsqu’Udo se met à flipper des tables pour exprimer son mécontentement d’être tenu hors de la confidence. Le piège étant tendu, il est maintenant temps de voir si le poisson va mordre…

Aussi, lorsque les rusés officiers changent l’ordre des carrosses banalisés transportant les huiles Middenlander, positionnant celui d’Udo en deuxième position, à la place de celui de Leopold et Siegfried, c’est sans surprise qu’ils constatent la combustion spontanée mais peu naturelle du fiacre. C’est ce qui s’appelle un retour de flamme, je suppose. Bravant les ordres, l’intenable Johansen s’élance ensuite à la poursuite de Trautt sur les toits, ne parvenant pas à refaire son retard (et pourtant, elle était en robe longue) avant que la magicienne utilise ses pouvoirs enflammés pour… partir en lévitation et franchir le mur d’enceinte de la ville, évitant facilement la dague de jet que Johansen lui avait lancée sans sommation. C’en est fini de notre enquête, mais pas du boulot de notre paire de choc, qui devra dès le lendemain faire porter le chapeau de ces tentatives d’assassinat répétées aux, je vous le donne en mille, Kislévites. Comme on dit par chez nous, pas de pitié pour les croissants Cosaques.Fin spoiler

1 : Comprendre que le premier est un petit blond raleur, et le second un grand brun à la gâchette facile.
2 : Ainsi, l’assassin parvient à se surprendre lui-même lorsque sa manœuvre de diversion à l’encontre de Johansen le mène à regarder également dans la direction vers laquelle il pointait son arbalète, permettant à l’officier de lui balancer un pied de chaise dans la tronche en toute impunité.
3 : Rendant son utilisation de mot de passe alambiqué à l’entrée un peu ridicule.

AVIS:

Pastiche assez transparent de la série policière classique des années 80, mettant en scène des flics débrouillards aux méthodes non conventionnelles mais efficaces pour combattre le crime, Pas de Répit pour les Braves souffre des grosses ficelles parodiques utilisées par l’auteur, d’un duo de héros pas vraiment attachants, et de l’intégration assez grossière de l’Untersuchung (que Wallis mettra au centre de son roman La Marque de la Damnation) à l’intrigue pour des raisons relevant selon moi du teasing pur et simple. Si on peut reconnaître à cette nouvelle un rythme enlevé et une enquête potable, même si pas vraiment spectaculaire en termes de rebondissements1, ainsi que quelques détails fluffiques sur Altdorf et ses forces de po-Lices, à prendre avec des pincettes car reprises par personne d’autre depuis, la Black Library a beaucoup mieux à offrir en termes de nouvelles « policières » se déroulant dans le Vieux Monde, à commencer par L’Affaire de la Cellule Écarlate dans la même anthologie, supérieure sur tous les points à Pas de Répit pour les Braves.

1 : En même temps, avec deux suspects identifiés en tout et pour tout, difficile de faire planer longtemps un suspens étouffant. Wallis avait fait beaucoup mieux ceci dit avec sa série Dieter Brossmann (‘The Dead Among Us’ et ‘The Bretonnian Connection’).

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The Nagenhof Bell – J. Green :

INTRIGUE:

Notre histoire commence avec un paragraphe descriptif expliquant en quelques lignes aussi imagées qu’un mur de classe maternelle1 que, par une nuit sombre et sinistre, frappée par un temps sombre sinistre, et digne du sombre et sinistre dieu de la mort (qui est sombre et sinistre) Morr, un bâtiment sombre et sinistre – le temple de Morr de Nagenhof – est sur le point d’être témoins d’évènements… sinistres et sombres. Ha ! Vous ne l’avez pas vu venir, celui là ! Et, de fait, un trio de ruffians est surpris par le lecteur déjà un petit peu blasé par les effets stylistiques sombres et sinistres de Jonathan Green, très à l’aise dans son rôle de MJ pour CE2, en train de hisser une cloche en haut du beffroi du temple. Le groupe est mené par la figure contrefaite mais très musclée du bossu Otto, recueilli à sa naissance par le prêtre local, Ludwik, après que sa bohémienne de mère soit venue mourir en couches dans son presbytère. En même temps, what did you expect d’un temple de Morr ? Moi je dis que ce n’est pas du tout un fail, à l’inverse de la tentative de Green de pomper discrètement des idées dans des classiques de la littérature. Mais revenons-en à nos bourdons. Otto et ses comparses sont parvenus à installer la nouvelle cloche, qui luit d’un éclat verdâtre peu engageant, à la place de l’ancienne, et le bossu a tôt fait de se débarrasser de ses complices désormais inutiles, dont il empile les cadavres dans la crypte de son lieu de travail. Voilà qui termine le prélude de notre histoire, qui sera, comme vous l’avez compris, sombre et sinistre.

Trois jours plus tard, la bande de mercenaires du charismatique (c’est lui qui le pense en tout cas) Torben Badenov est à pied d’œuvre dans la taverne de la Main de Gloire de Nagenhof, tenue par un de leurs anciens frères d’armes, le manchot Dietrich Hassner. Rangé des voitures depuis dix ans, date à laquelle il a perdu la main, Dietrich se voit malgré tout proposer par Badenov de reprendre du service pour aller faire les quatre cents coups dans le Vieux Monde, comme à la bonne époque. Autour de lui, ses compagnons se pintent généreusement à la bière, et il me faut vous les présenter sans plus attendre, par ordre de participation active à la suite de la nouvelle. Commençons par le nobliau maussade mais futé Pieter Valburg, recruté dans la bande à la suite des événements relatés dans Heart of Darkness, qui l’ont vu venger la perte de sa fiancée. Nous avons ensuite le Kislévite à tête de fouine Oran Scarfen, le jeune et incertain Stanislav Hagar, et le colossal trappeur Yuri Gorsk (qui ne servira à rien, vous pouvez donc l’oublier). Ces plaisantes retrouvailles sont toutefois interrompues par un angélus d’un genre un peu particulier, à la fois lancé à l’heure indue de 9h53, et sonné par une cloche à la sonorité…euh…clivante. Sortis hors de la taverne pour s’enquérir de la source de ce raffut, les ivrognes décident, l’alcool aidant, d’aller jeter un œil dans le temple de Morr d’où provient ce vacarme.

Dans le temple en question, Otto vient d’avoir une petite discussion avec son père et Père, Ludwik, tout juste rentré d’une veille mortuaire dans l’arrière-pays. Le vieil homme était sur le point de filer une trempe de tous les diables à son fils adoptif pour avoir oublié ses corvées de taillage des cierges, balayage des feuilles et exterminage des rats, qui semblent avoir pullulé en son absence, lorsque le lancement du carillon funeste l’a averti d’un problème bien plus pressant. Un rapide coup d’œil à la crypte, grouillante de vermine et contenant deux cadavres bien mâchonnés par cette dernière, lui a en effet permis de constater que la cloche que les habitants de la ville avaient conservé comme souvenir de leur victoire contre les Skavens il y a dix ans, avait disparu. Pas plus bête que le lecteur de la BL moyen, Ludwik a compris que c’est elle qui sonne désormais, et que c’est son infernal bedeau qui tire sur la corde, dans tous les sens du terme. L’explication de texte entre les deux hommes ne s’est toutefois pas passée aussi bien que le prêtre l’avait espéré, le bossu ayant finalement compris que l’ecclésiastique était son vrai père (qui avait abusé de sa mère), et réglé son complexe d’Œdipe de façon littérale en balançant Ludwik du haut du beffroi, dans un remake essoufflé (le contraire d’inspiré) de Notre Dame de Paris. Car Otto a décidé qu’il était un furry, et compte bien se faire adopter par une nouvelle famille aimante de Skavens, qu’il convoque en faisant sonner la cloche hurlante municipale. Question : pourquoi ? Réponse : La Mer Noire. En tous cas, les ratons ont l’ouïe fine, et la marée murine qui a empli les rues de Nagenhof fait présager du pire pour les braves péquenauds.

Nous faisons alors un crochet dans les égouts de la ville, où une cohorte de Skavens menée par le chef de meute Nikkit Skar se dirige vers la crypte du temple, emportant avec elle le Rat Ogre Mâchecrâne. Vous pouvez oublier ces noms dès à présent, car ils ne reviendront plus de la nouvelle, Skar ayant bouclé son cameo et Mâchecrâne redevenant un Rat Ogre anonyme après cela. Contentons nous de nous préparer à un peu de baston sombre et sinistre.

Du côté des gentils, la bande de Badenov, suivie par Dietrich, est arrivée devant le temple, a constaté l’heure du décès de Ludwik, écrasé sur le pavé, ainsi que l’infestation ratière dont semble souffrir le lieu de culte. Prouvant à nouveau que son supérieur est une andouille, Pieter a la bonne réaction de monter dans le beffroi pour faire cesser le carillon, alors que Badenov souhaitait simplement poursuivre l’état des lieux. Toutefois, l’arrivée de l’avant-garde Skavens met un terme définitif à son projet, et il résout à la place de retenir les hommes rats à l’intérieur du temple en compagnie de Dietrich, pendant qu’Oran, Stanislas et Yuri y mettront le feu pour empêcher les mutants d’envahir la cité. Aussitôt dit… pas tout de suite fait. D’une part car les Nagenhofer ne se laissent pas immédiatement convaincre de la nécessité d’incendier leur patrimoine culturel, et qu’il faut un beau discours inspirant de la part de Stanislas pour les y pousser (l’approche injurieuse d’Oran ayant bizarrement donné des résultats contrastés). D’autre part car, après avoir contenu à grand-peine les premières vagues Skavens, Badenov et Dietrich se retrouvent confrontés à un Rat-Ogre très en colère, ce qui les pousse à une prudente retraite dans le beffroi. Heureusement pour eux, les assaillants sont aussi abrutis que notre héros, et ne profitent pas de l’occasion pour s’échapper du bâtiment en flammes, et préfèrent lancer leur monstre sur les talons des mercenaires. Un escalier qui s’effondre plus tard, Badenov est contraint de laisser Dietrich s’expliquer en tête à tête avec Mâchecrâne pendant que lui essaie de se rendre utile en s’enquérant du silence radio de Pieter. Ce dernier, d’abord surpris et presque garrotté à mort par Otto, a toutefois fini par prendre le dessus sur son assaillant, et l’a pendu par le cou jusqu’à ce que mort s’en suive, mettant fin à ses projets d’adoption. Aidé par son incapable de boss, il parvient à décrocher la cloche infernale de sa poutre porteuse, l’envoyant écraser le Rat Ogre en contrebas juste avant qu’il ne puisse donner le coup de grâce à Dietrich, qui mourra avec la satisfaction du devoir accompli. Ceci fait, il ne reste plus à nos deux loustics qu’à effectuer un petit saut de la foi dans une charrette de foin astucieusement positionnée par leurs comparses pour compléter leur mission, et la ruine totale du temple. Il serait cependant litigieux de revendiquer une victoire totale pour l’Empire, la cloche hurlante ayant cassé les oreilles (et pas que) de Nagenhof n’étant pas retrouvée dans les décombres fumantes le lendemain…

1 : Comprendre qu’il y a beaucoup d’images mais qu’elles sont vraiment pas terribles.

AVIS:

Tristement égal à lui-même, Jonathan Green livre avec La Cloche de Nagenhof une nouvelle aventure des plus insipides de sa bande de mercenaires fétiche. Pénalisée par le manque d’inspiration de l’auteur, qui recycle péniblement un classique de la littérature pour meubler son intrigue, ainsi que par le style lourd de Green (champion du monde des « comme (si) » et « eh bien »), l’histoire ne brille ni par le fond (mais pourquoi est-ce qu’Otto pensait qu’il serait accueilli à pattes ouvertes par les Skavens ?) ni par la forme (mais pourquoi est-ce que Green informe le lecteur que Dieter a perdu sa main en combattant Mâchecrâne dix ans plus tôt seulement deux lignes avant que les deux personnages ne se rencontrent à nouveau1 ?). Comme à son habitude, Badenov se révèle être un abruti fini, guidé par la sagacité de l’indispensable Pieter Valburg plutôt que par ses propres réflexions brumeuses, et quant au reste de sa bande, elle sert essentiellement de décor humain au drame qui se noue à Nagenhof, démontrant les lacunes qu’a l’auteur à faire évoluer un groupe de personnages de façon crédible et intéressante. Tout le monde n’est pas Dan Abnett ou C. L. Werner. En définitive, on retiendra simplement que Jonathan Green pourrait poursuivre Assassin’s Creed en justice pour plagiat du saut de la foi2, et que le titre de l’omnibus collectant les nouvelles de la bande de Badenov, « les damnés et les morts » tire son origine de la remarque que se fait son leader minimo à la fin de La Cloche de Nagenhof. Ce qui n’est pas lourd, certes.

1 : C’était pourtant un moyen facile et efficace de faire monter un peu la tension avant l’affrontement. Si Green avait écrit l’Hérésie d’Horus, on aurait appris que l’Empereur était le père de ce dernier au livre 59, pendant une discussion anodine entre Pépé et ses Primarques dans l’ascenseur les menant au téléporteur du Palais Impérial.
2 : La nouvelle ayant été publiée en 2001, 6 ans avant la première édition du jeu.

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Swords of the Empire – D. Abnett :

INTRIGUE:

« Cher journalle en pô de shèvre, si je prens la plume aujour dui, bien ke je ne soyes pa un skribhe, mésun chevalié de la Reiksguard, cé ke j’en nai greau et ke le monde doigt savoir. »  Ainsi commence l’histoire narrée par velin caprin interposé par notre narrateur, Jozef von Kassen, qui, pour tromper les longs mois de l’hiver kislévite, s’est mis en tête de chroniquer par le menu les aventures l’ayant amené à squatter avec ses hommes la stanitsa de Kzarla. C’est donc à la chronique d’une chronique, exercice meta en diable, que l’auteur de ces lignes se prête ici, sur un support bien moins classe qu’un parchemin de biquette je le reconnais, mais nécessité fera loi.

Notre récit débute à Altdorf, où von Kassen est chargé par ses supérieurs d’escorter la vadrouille d’Udo Jochrund, maître sorcier du Collège Lumineux et spécialiste de la magie tribale kislévite, sur son terrain de prédilection. Accompagnés d’une vingtaine d’hommes d’armes, notre héros doit assurer la sécurité de sa charge pendant qu’elle recensera les fascinantes traditions chamaniques des peuplades du grand Nord, entreprise qui semble occuper la plus grande partie des étés de Jochrund. Von Kassen, qui est une âme simple, se méfie d’abord des pouvoirs occultes dont son compagnon de voyage dispose, mais la pédagogie dont ce dernier fait usage pour convaincre son protecteur un peu concon qu’il n’a rien à craindre, et la gentillesse manifeste de l’érudit1, finissent par gagner la confiance du soldat. Commence alors un périple long de plusieurs mois, permettant à l’expédition de visiter quantité de communautés kislévites, au lecteur d’apprendre pas mal de choses sur nos personnages (à commencer par l’intérêt fort et sincère que porte von Kassen à tout ce qui à trait aux chèvres2) et sur la culture locale, à Jochrund de collecter des tonnes d’échantillons et de témoignages, et à Abnett de remplir facilement une vingtaine de pages, ou une peau de chèvre entière dans le cas de son héros. Ceci dit, le périple n’est pas sans rencontrer quelques difficultés occasionnelles, comme la fois où les aventuriers ont dû batailler pendant une heure pour repousser l’assaut de brigands locaux, pour un résultat sans appel – mais un peu surprenant si on prend compte la longueur de l’affrontement – de quatre morts à zéro3.

Les choses deviennent un peu plus sérieuses lorsque la petite troupe atteint le village septentrional de Svedora, nommé ainsi à cause du chapeau traditionnel que tous les hommes célibataires avec collier de barbe portent. Eprouvés par des mois de marche à travers les plaine du Kislev, les impériaux ont une allure plutôt miteuse, ce qui mène le krug local à leur barrer la route d’un air menaçant. Von Kassen parvient toutefois à dissiper ce fâcheux malentendu, gagnant la confiance de son homologue, un beau gosse à l’armure et l’épée étincelantes, et à la moustache soyeuse, du nom de Subarin. Accueillis en grande pompe par leurs hôtes, les voyageurs savent qu’il ne leur reste que peu de temps pour faire demi-tour, l’arrivée prochaine de l’automne menaçant de les isoler pour la mauvaise saison dans une stanitsa de troisième ordre. Aussi, c’est avec une lassitude non feinte que von Kassen s’entend réclamer par le sorcier un nouveau délai, pour aller visiter une ultime communauté située à quelques jours de voyage au Nord de Svedora.

Guidés par un trio de guerriers locaux, dont Subarin qui souhaite apparemment concrétiser sa bromance naissante avec von Kassen, les impériaux parviennent à leur destination, Kzarla, mais non sans avoir essuyé une embuscade de la part d’une bande de Kuls agressifs, et perdus quelques membres de l’équipée au passage. Après avoir à nouveau négocié leur entrée dans le village auprès du krug local, les riders de l’extrême sont envoyés crécher dans une yourte à l’extérieur de la communauté, qui est sur le point de célébrer un rituel important pendant lequel aucun étranger n’est toléré intra muros, exception faite de Jochrund et de son assistant, Sigert. Le comportement maniaque de sorcier a cependant alerté von Kassen, et lorsqu’il assiste à ce qui ressemble beaucoup à une procession sacrificielle emmenant une accorte damoiselle locale jusqu’à l’île où se situe le temple local, le preux chevalier ne peut rester dans sa tente à se saoûler au koumiss, comme ses camarades. Faisant fi de l’interdit, il se précipite donc dans le village, épée à la main…

Début spoiler…Ses suspicions se trouvent confirmées lorsqu’il aperçoit Jochrund et Sigert en train d’assister le chamane de Kzarla dans ce qui ne peut être qu’un sacrifice païen de la pauvre vierge droguée. Sans chercher à réfléchir, et comme le vrai GOAT qu’il est, von Kassen interrompt la cérémonie, se saisit de la fille et repart dare-dare vers sa yourte, ayant poussé le chamane dans la flotte gelée et décapité ce fourbe de Sigert au passage, lorsque l’acolyte lui avait planté une dague dans la cuisse. Quant à Jochrund, dont la manie de toujours porter des gants a trouvé une explication logique mais chaotique pendant ce tohu-bohu (les mains du sorcier étaient en fait des griffes), il a écopé d’une javeline de la part de l’estimable Subarin dans la hanche pour sa peine.

La perfidie du sorcier est confirmée par le recueil du témoignage de la donzelle (Mariya), une fois redescendue de son bad trip. Von Kassen apprend ainsi que ce jocrisse de Jochrund a convaincu le chamane local de procéder à un véritable sacrifice – auparavant, les Kislévites se contentaient d’en mimer un, n’étant pas les brutes épaisses pour lesquelles von Kassen les tenait – afin de s’assurer de la réussite d’un rituel de clémence météorologique. Ce qui n’a l’air de rien dit comme ça, mais aurait permis aux hordes de cet obscur chef de guerre du nom d’Arcachon, ou quelque chose comme ça, d’envahir le Kislev et l’Empire plus tôt que normalement possible. Avant de pouvoir alerter ses supérieurs de la duplicité du mage et du grave péril dans lequel le Vieux Monde se trouve, von Kassen doit toutefois négocier un ultime contretemps : l’arrivée d’une large bande de Kurgans convoqués par Jochrund, qui compte bien laver Mariya de tous ses péchés d’un coup de surin enchanté, pour offrir un hiver clément à son boss. Se battant à plus de un contre quatre, le krug local ayant été envoyé chasser le dahut par les manigances de Jochrund quelques jours plus tôt, nos vaillants héros livrent toutefois bataille avec bravoure, perdant la majorité des leurs sous les coups des maraudeurs mais prélevant un lourd tribut parmi leurs assaillants. Alors que tout semblait perdu, le retour inespéré de lanciers ailés de Kzarla scelle la déroute des chaoteux, tandis que Jochrund se fait occire par l’incontournable Subarin d’un revers de sa prodigieuse épée. Il est toutefois trop tard pour que von Kassen et ses survivants puissent faire demi-tour, et c’est ce qui explique le zèle littéraire de notre héros, déterminé à laisser une trace de son passage même s’il devait périr de la grippe saisonnière avant le retour des beaux jours. Voilà un dévouement digne d’éloges.Fin spoiler

1 : Ne jamais sous-estimer le pouvoir du mystérieux sourire de (la) Jochrund.
2 : Ainsi, il prend bien soin de préciser que le départ s’est fait à la St Talve, le patron de l’agnelage, information notable sans aucun doute. Après tout, comme il le dit lui-même : « tout ce qui compte aujourd’hui pour moi peut se mesurer en chèvres ».
3 : À moins que le différent n’ait été réglé par une partie de Blood Bowl, ce qui reste une possibilité.

AVIS:

Dan Abnett poursuit sur la lancée (et les lanciers) des Cavaliers de la Mort avec Les Epées de l’Empire, récit d’aventures dans les steppes du Kislev mettant un noble héros aux prises avec les infâmes forces du Chaos, qui peuvent parfois revêtir des traits familiers. Parvenant à nouveau à embarquer le lecteur dans l’exotisme de cette civilisation méconnue sous bien des aspects, l’auteur combine avec maestria action trépidante, intrigue satisfaisante et immersion fluffique poussée. C’est propre, c’est net, c’est Abnett à son meilleur en matière de nouvelles siglées Warhammer Fantasy Battle, et en plus, c’est traduit en français : que demande le peuple ?

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Shyi-Zar – D. Abnett :

INTRIGUE:

La Fin des Temps se prépare doucement mais sûrement dans le grand Nord du Vieux Monde, et les clans des tribus nomades se rassemblent dans la steppe au sortir de l’hiver afin de descendre souffler dans les bronches de Karlito France, sous la houlette du Haut Zar Surtha Lenk. Si participer à une invasion chaotique est déjà une chance et un privilège pour tous les Kurgans, Dolgans et autres Gospodars vivants à cette époque remarquable, certains visent encore plus haut, et tant pis pour l’adage de Pierre de Coubertin. C’est le cas du Zar Karthos, qui malgré son nombre limité de followers (dix guerriers, un sorcier et une chèvre), décide après avoir reçu le feu vert de son chaman, de déposer sa candidature au The Voice chaotique : l’élévation au rang de Shyi-Zar.

Sur le chemin de la cérémonie, présidée par Lenk en personne, Karthos croise la route de vieilles connaissances, certaines amicales et d’autres hostiles, comme le Zar Blayda et son tempérament de petite frappe. Ce blédard de Blayda a aussi mis son nom dans le Gobelet de Feu, ce qui en fait un rival officiel de notre héros. L’épreuve qui est proposée aux candidats est d’une simplicité élégante : Surtha Lenk sort une griffe de fort belle taille de sa boîte à rabiots, et promet le job à quiconque parviendra à lui ramener une copie conforme (sans doute pour terminer une conversion ambitieuse en vue du prochain Golden Demon). Sans plus d’indications sur quoi et où chercher, les impétrants s’égaient du campement principal dans toutes les directions, à la recherche d’indices ou d’inspiration.

Suivant les conseils de son sorcier (la chèvre était encore plus smart, mais elle n’est plus en état d’aider quiconque maintenant), Karthos entraîne sa bande de maraudeurs en direction du campement de Tehun Dudek, occupé par une communauté d’oracles. Ces derniers devraient être en mesure de donner aux baroudeurs de la pampa quelques tuyaux bien juteux et ainsi faciliter l’accomplissement de la quête de Surtha Lenk. Il s’avère rapidement que notre petite bande n’a pas été la seule à avoir cette idée, et comme elle a fait la grasse matinée au lieu de partir au petit jour, elle a été devancée par une partie de Dolgans dont le chef est un des candidats au titre de Shyi-Zar. Comme les Dolgans sont en train de massacrer les oracles au lieu de leur poser des questions, Karthos ordonne immédiatement la charge de la brigade légère, qui se solde par un 20 – 0 des familles. Si ce n’est pas un signe que Tzeentch favorise notre héros, je ne sais pas ce que c’est.

Après une longue et fumeuse discussion avec les oracles survivants, le mystère sur l’origine de la bête recherchée par les traqueurs est levé. Il s’agit d’une griffe de… griffon (ça donne mieux en anglais, faut le reconnaître). Le hic est que cette créature, aussi appelée annonciateur par les Kurgans, qui croient que sa venue présage de grands événements, est tenue pour sacrée par les tribus du grand Nord, ce qui fait d’abord craindre à Karthos que ses suivants crient au blasphème et refusent de l’épauler. Fort heureusement, le chef réussit son jet de charisme et aucun de ses guerriers ne fait défection, ce qui lui permet d’accéder au niveau final de sa quête avec une équipe complète.

Et ce support n’est pas de trop, car le spécimen sur lequel nos braves barbares tombent présente un fort beau gabarit ainsi qu’un caractère peu facile. Au terme d’un combat bien plus accroché que l’empoignade avec les Dolgans (quatre morts dans la Karteam tout de même), les maraudeurs terrassent l’acariâtre volatile, ce qui permet à Karthos de repartir en direction du campement tribal avec la griffe tant désirée. Les survivants croisent Blayda et ses loubards sur le chemin du retour, mais le rival de notre héros est suffisamment fair play pour ne pas tirer parti des plaies et des bosses de ses concurrents pour leur arracher le vif d’or. C’est tout à son honneur. Une fois rendu sur place, Karthos se présente devant Surtha Lenk et demande à ce que la récompense promise lui soit remise…

Début spoiler…Ce qui consiste à être sacrifié avec sa bande pour servir de wingmen au Haut Zar auprès des Dieux du Chaos, au cas où l’invasion de l’Empire se passerait mal pour lui. Et il paraît que c’est un grand honneur chez les Kurgan ? Très peu pour moi. La nouvelle se termine donc sur la vision du cadavre Karthos et de ses hommes, disposés comme s’ils partaient à cheval en direction de l’Est, afin de préparer l’arrivée de Surtha Lenk dans l’au-delà. J’espère qu’on leur paie les heures sup’.Fin spoiler

AVIS:

Vous reprendrez bien un peu de ‘Riders of the Dead’ ? ‘Shyi-Zar’ se présente en effet comme un complément et préquel (comme la présence de ce bon vieux Blayda, également présent dans le roman susnommé) du bouquin consacré par Dan Abnett aux prémisses de la Tempête du Chaos, et la magie de conteur de Papa Gaunt agit encore une fois. C’est tout à la fois prenant, exotique, violent, cruel et mystique, généreusement garni en fluff et très bien construit d’un point de vue narratif : bref une masterclass en bonne et due forme de la part d’Abnett, pour ce qui a été l’un des derniers textes qu’il ait écrit pour Warhammer Fantasy Battle. On peut s’accorder à dire qu’il a réussi sa sortie.

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As Dead as Flesh – N. Kyme :

INTRIGUE:

WFB_As Dead as FleshAlors qu’ils purgeaient tranquillement1 sereinement quelques Zombies dans une localité non identifiée mais définitivement mal famée de l’Empire, la bande de Templiers de Morr du Capitaine Reiner doit composer avec les blessures assez sévères de quelques-uns de ses membres, forçant la sinistre compagnie à faire grand train vers la bourgade la plus proche (Hochsleben) afin de confier ces derniers aux bons soins de l’hospice de Shallya qui s’y trouve. L’ambiance n’est toutefois pas rose dans le patelin, comme le rapporte le diacre alcoolique (Dolmoth) qui tient la permanence morrienne du lieu. Notre homme a des raisons de forcer sur la piquette en effet : tous les jours depuis plusieurs mois, un cadavre frais, et la plupart du temps, délesté d’une partie de son épiderme, est déposé sur les marches de son office, ce qui lui fait faire des heures supplémentaires excessives. N’ayant rien d’autre à faire en attendant que leurs blessés soient remis ou rejoignent le big boss, Reiner et ses sbires (Mikael, Halbranc, Kalten) offrent leur aide afin de débusquer le sinistre Reaper qui tourmente la cité.

L’enquête commence par une autopsie en bonne et due forme, réalisée au sous-sol du temple de Morr par un acolyte dénommé Merrick, qui s’est trouvé un bon petit business au vu du taux de criminalité de Hochsleben. Le malheur des uns… Notre homme n’a toutefois pas grand-chose de neuf à apporter aux investigations, le cadavre présentant toutes les marques habituelles de ce farceur de Reaper. On apprend toutefois au détour de la conversation, que le doc’ a récemment perdu son fils, piétiné par la brigade montée impériale pendant une manifestation de surcôts flaves s’étant mal terminée. Triste. Tout le monde ne s’appelle Felix Jaeger et ne dispose pas d’un pote Tueur Nain imbutable et imbitable pour lui servir de garde du corps. Utilisant les quelques indices glanés au cours des mois précédents et de leur solide bon sens, les Templiers procèdent à quelques interrogatoires de suspects, dont le tanneur de la ville (Lothmar), qui vit reclus dans son échoppe et arbore un masque de cuir pour camoufler les graves brûlures que ses activités professionnelles lui ont valu. Le délit de faciès n’étant pas combattu dans l’Empire, le vaillant petit tanneur est à deux doigts de finir en coupable tout désigné, lorsque de nouveaux évènements viennent relancer l’enquête.

Alors qu’ils se détendaient à l’auberge après cette rude journée, les chevaliers de Morr sont alertés par les cris perçants d’une honnête péripatéticienne, qui a croisé un individu portant ce qui lui a semblé être un cadavre sur son dos. Comme quoi, si on n’est pas très malin à Hochsleben, on est au moins ponctuel. La course poursuite qui s’en suit, mettant aux prises Mikael et Halbranc avec le mystérieux portefaix, se solde toutefois par un échec complet pour les nobles Templiers, le second s’écroulant par la faute d’un point de côté après quelques pas, et le premier faisant de même lorsque sa proie réussit à le poignarder au détour d’une allée, ce qui le met KO pour quelques temps. Il a toutefois la présence d’esprit d’arracher à son agresseur une partie de ses effets, qui se révèlent être un masque très similaire à celui porté par le tanneur. L’enquête progresse ! Se réveillant à la taverne (à croire que l’hospice local était bondé), Mik’ dégaine toutefois l’arme fatale des guerriers de Morr et des auteurs peu inspirés, une bonne vision prophétique des familles, qui lui a montré toute sa compagnie zombifiée. C’est plus qu’il n’en faut pour convaincre notre héros, accompagné du prêtre de la bande (Sigson), de se lancer à la poursuite de leurs frères d’armes afin de s’enquérir de leur bonne forme (en commençant évidemment par les valides, parce que les comateux peuvent se défendre tous seuls, c’est bien connu)…

Début spoiler…Pendant ce temps, Reiner et Cie se sont rendus chez le fameux Lothmar pour une petite explication de texte, mais encore une fois, l’entreprise s’est terminée par des plaies et des bosses, l’intraitable Capitaine mordant à son tour la poussière sous les horions d’un guignol maléfique. Rattrapé par Mikael et Sigson, qui ont croisé Halbranc en compagnie de Merrick sur le chemin (mais non, c’est pas compliqué), Reiner explique à ses hommes que Lothmar était déjà mort à son arrivée, ce qui le retire de la liste des suspects2. Cependant, la disparition de Kalten, qui accompagnait son supérieur sur les lieux, constitue une nouvelle énigme que les Maures doivent résoudre. Heureusement, Sigson connaît un rituel qui permet aux enquêteurs de mener un interrogatoire express de feu Lothar, révélant un indice capital : son tueur puait. Aha.

Sur ces entrefaites, débarquent de nouveaux personnages (comme si l’intrigue n’était déjà pas assez embrouillée comme ça), un Prêtre Guerrier de Sigmar (Rathorne) et son sidekick renifleur Vislen. Il s’avère que Rathorne est également sur la piste du Reaper, et, plutôt que de se présenter à ses confrères de culte, a préféré suivre leurs progrès du coin de l’œil, jusqu’à maintenant. Son aide, ou plutôt celle de son larbin, s’avère toutefois précieuse car elle permet d’identifier l’odeur qui colle aux habits de Mikael comme celle de liquides d’embaumement. Bref, c’est Merrick le coupable, comme tout lecteur avec deux neurones fonctionnels l’avait compris dès l’instant où Kyme avait révélé la mort tragique du fils de ce dernier.

La nouvelle peut enfin entrer dans sa phase finale, avec les héros en état de combattre faisant s’abattre leur juste colère sur le repaire du malfaisant. Pour équilibrer un peu les choses, le doc’ peut compter sur l’appui de l’entité maléfique qu’il a réussi, on ne sait trop comment, à ramener depuis les morts, et qui lui a promis son aide pour ressusciter son fils en échange de cadavres frais (mais jamais assez, si cela fait trois mois que Merrick surine à tout va). La baston qui s’engage se termine comme de juste par un incendie généralisé du temple de Morr, qui a raison de l’hôte de Voldemorr (ce pauvre Kalten), et permet donc à Hochsleben de refermer cette page douloureuse de son histoire. Cependant, l’absence du cadavre de Merrick dans les décombres du lieu saint, et la vision fugace de ce dernier respirant une mystérieuse fumée noire3 exhalée par un Kalten possédé, fait craindre le pire à nos zélés Templiers…Fin spoiler

1 : Difficile d’être tranquille quand on se bat contre des adversaires capables de percer l’acier d’une cuirasse à main nue. Les Zombies de Kyme ont pris des stéroïdes, ce n’est pas possible autrement.
2 : En fait, le tanneur était albinos, ce qui explique pourquoi il ne sortait pas le jour. On s’en fout au final mais Kyme tenait à ce détail, donc autant le préciser ici.
3 : Le qualificatif est important, car au milieu d’un incendie, des fumées noires classiques, ce n’est pas ce qui manque.

AVIS:

Avec ce As Dead as Flesh, Kyme livre une nouvelle réussissant l’exploit d’être à la fois trop simple et inutilement complexe dans son intrigue. D’un côté, l’enquête à laquelle se livrent les héros se trouve être résolue par le lecteur un minimum familier des techniques narratives du genre (« oh, un personnage secondaire sur lequel l’auteur nos donne des précisions nous permettant de l’identifier facilement par la suite, et disposant d’une bonne raison d’en vouloir à ses concitoyens… ») moins d’une page après avoir été commencée. De l’autre, les allers et venues de la galerie conséquente de personnages convoqués par Nick Kyme pour soutenir son propos brassent de l’air et des pages, et leurs chassés croisés occupent la majeure partie du propos. Si on ajoute à cela le fait que les personnages en question n’ont pas grand-chose d’intéressant ou d’attachant (même si la pusillanimité de Mikael, qui a peur de beaucoup de choses depuis le jugement de Reiner jusqu’à la grosse voix du tavernier, se révèle être une caractéristique « mémorable »), on se retrouve avec une sorte de mauvaise pièce de théâtre de boulevard tragico-fantastique, mélange assez indigeste et surtout, très peu intéressant. Je ne peux donc pas assez conseiller aux amateurs du genre de se pencher sur les travaux, assez similaires dans l’esprit mais beaucoup plus aboutis dans la forme, que Josh Reynolds a consacré au très saint et très violent Ordre de Manann, afin de plonger dans le quotidien trépidant de Templiers impériaux. Malheureusement pour Kyme, less is Morr…

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Dead Man’s Hand – N. Kyme :

INTRIGUE:

Dans une geôle humide et froide d’une forteresse du Stirland profond, un prisonnier patibulaire parvient à fausser compagnie à ses gardes en s’échappant par les égouts. Bien que se sachant recherché, notre homme prend le temps de marquer les cadavres des infortunés matons ayant croisé sa route avec un signe de scarabée, ce qui ne lui sert absolument à rien mais permettra à l’intrigue de tenir à peu près la route, donc merci bonhomme (Krieger de son patronyme), tu gères. Ce sinistre individu prend la route de la ville de Galstadt, où Kyme nous apprend qu’il va pouvoir mettre à exécution sa VENGEANCE vengeresse. Quel suspens mes aïeux.

On passe ensuite à l’introduction de nos héros, la bande de Templiers de Morr du Capitaine Reiner, déjà croisée dans ‘As Dead as Flesh’. Les chevaliers ont été chargés par leur hiérarchie de seconder un Chasseur de Sorcières sigmarite (Dieter Lenchard) dans une mission dont la teneur est restée secrète. On peut dire que le respect est Morr. Lenchard était chargé d’interroger puis d’exécuter Krieger pour hérésie, mais sa disparition prématurée vient plomber le mood de la journée. L’ambiance était de toute façon assez lourde chez les Men in Black, Reiner détestant tout le monde de base et soupçonnant sa plus jeune recrue, Mikael, de lui avoir caché les visions prophétiques que ce dernier a effectivement eu au précédent épisode. Après une petite séance de spiritisme menée par le prêtre guerrier de la bande (Sigson), qui fait office de légiste et medium, la troupe prend elle aussi le chemin de Galstadt sur l’ordre de Lenchard, qui semble avoir une idée précise de ce que recherche le fugitif, mais sans évidemment juger bon de s’en ouvrir à ses gardes du corps.

Dans la cité en question, deux événements majeurs prennent place en simultané : uno, le Comte local, Gunther Halstein, revient d’une expédition menée au Pays des Morts (aussi appelé Nehekhara) en compagnie des chevaliers du Cœur Ardent, d’où il a ramené une mystérieuse relique qu’il s’empresse de faire mettre sous clé, ainsi qu’une sale blessure non cicatrisée et probablement mortelle à moyen terme, héritée de ce gredin de Krieger. Deuzio, la rivière locale menace d’entrer en crue, ce qui ne sert pas à grand-chose au final à part permettre à Kyme de faire courir sa petite ménagerie de personnages entre la caserne et le lieu où les PNJ cherchent à endiguer l’impétueux torrent. Parler des risques physiques dès 2007, il fallait être précurseur. Bravo Nick Kyme.

Comme on pouvait s’en douter, les Templiers de Morr ne mettent pas longtemps à rencontrer Halstein et sa clique, et le résultat fait des étincelles. Non pas que cette assemblée d’augustes personnages parviennent à faire la lumière sur les agissements de Krieger, qui s’amuse à trucider des troufions pendant que les vrais héros vaquent à leurs occupations, mais plutôt que les deux factions manquent de se mettre sur le heaume dès qu’ils s’adressent la parole. Je ne savais pas que les ordres de chevalerie de l’Empire souffraient d’Animosité, mais on en apprend tous les jours.

Après quelques péripéties très dispensables, on finit par y voir un peu plus clair : la relique ramenée par Gunther Halstein n’est autre que Falken Halstein, son propre père, qui disparut dans le grand Sud il y a des années après avoir occis le Roi des Tombes Setti-Ra (rien à voir avec Settra, bien sûr). Le hic est que 7-I avait des fans, le culte des Scarabées (appelé ainsi parce que ses membres fondateurs se nomment John, Paul, George et Ringo), persuadés que leur idole peut être ressuscitée par un rituel qui nécessite le cœur du vainqueur du grand roi. Ou à défaut, celui de son héritier. Donc Gunther. Sauf que Setti-Ra a pris les devants, et possédé le cadavre de Falken Halstein. Et c’est en fait lui qui est responsable des morts suspectes qui s’accumulent depuis le retour de l’expédition, et pas ce gredin de Krieger (lui aussi un petit Scarabée), qui d’ailleurs se fait étrangler par son patron sur un affreux malentendu et sans que Kyme se donne la peine de mettre la mort de son personnage principal (jusqu’ici) en scène. Tout cela est d’une limpidité absolue.

Au final, et comme attendu, l’histoire se règle par une baston classique entre les Templiers de Morr, Lenchard et Halstein d’un côté, et Setti-Ra Halstein de l’autre. Pour équilibrer un peu les débats, Kyme donne à la momie 7 en Force et 8 en Endurance, ce qui permet de faire durer le match quelques pages, jusqu’à ce qu’une habile combinaison tapisserie enrouleuse + torche enflammée vienne à bout du revenant. Tout est bien qui finit bien ?

Début spoiler…EH NON. Je ne sais pas pourquoi j’utilise un spoiler pour ça, c’est faire trop d’honneur à cette histoire navrante, mais comme il s’agit techniquement d’un twist final, je vais jouer le jeu. Il s’avère donc que les Scarabées étaient venus au nombre démentiel de deux, dont un gus qui s’était déguisé en prêtre mendiant aveugle, et qui profite de la crédulité et de la dévotion du Comte Halstein pour lui tomber sur le râble et lui voler le cœur après s’être proposé de bénir les cendres paternelles. Ce qui veut dire que Setti-Ra va pouvoir être ressuscité <gasp>. Comme Lenchard ne veut absolument pas que cela se produise pour une raison qui ne sera jamais révélée ici, la nouvelle se termine sur le départ en trombe des Morrons de Galstadt, dans l’espoir de rattraper le dernier cultiste avant qu’il ne soit trop tard. C’est ce qui s’appelle prendre sa mission très à cœur. Mouarf.Fin spoiler

AVIS:

Dans la droite lignée de ‘As Dead as Flesh’, dont cette nouvelle prend la suite directe, Nick Kyme nous sert une nouvelle se voulant être un whodunit à la sauce impériale, mais qui se révèle être un enchaînement de péripéties oscillant entre le suranné et l’incohérence. Une fois encore, le propos pâtit d’un trop grand nombre de personnages, dont seuls quelques-uns parviennent à faire suffisamment impression au lecteur pour que ce dernier parvienne à les resituer dans le récit au fil de leur apparition, et souvent pour des mauvaises raisons. Entre Reiner et Lenchard qui se disputent le titre de Mister Connard, Mikael qui a toujours peur de son ombre et essaie de son mieux d’imiter Brin Milo1 sans susciter autre chose que de la crispation, Gunther et son armée de chevaliers interchangeables, ou les Templiers de Morr qui pourraient aussi bien s’appeler « Grokosto », « Jumeaux » et « Vieussage » sans perdre une once de personnalité, c’est un festival de têtes à claque auquel on a droit ici. Et quand l’intrigue part en roue libre (j’ai un antagoniste qui est le personnage le plus important de l’histoire… jusqu’à ce qu’il se fasse buter hors champ et qu’on en parle plus jamais) et que l’action devient confuse (baston dans la crypte où tout le monde sort/entre/tombe/court en même temps), difficile d’éprouver de la bienveillance pour la prose du (à l’époque) jeune Kyme. Comme notre homme a fait encore pire en son temps, et que ces travaux-là avaient au moins le bon goût d’être totalement nanaresques (et donc beaucoup plus drôle), on peut tout à fait s’épargner la lecture de ‘Dead Man’s Hand’ et se concentrer sur le meilleur du pire (ou l’inverse) de cet auteur. Ou lire des bons bouquins. Ça marche aussi ?

1 : Un personnage des ‘Fantômes de Gaunt’ (Dan Abnett, 40K), qui se découvre lui aussi des pouvoirs de divination bien utiles pour l’intrigue, mais dangereux pour sa survie.

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Sanctity – N. Kyme :

INTRIGUE:

Alors qu’on les avait laissés en compagnie d’un Chasseur de Sorcières à traquer une secte dédiée à la résurrection d’un Roi des Tombes au cœur du Stirland à la fin de l’épisode précédent (‘Dead Man’s Hand’), nous retrouvons la compagnie de Templiers de Morr de ce joyeux drille de Reiner 1) sans chaperon, 2) dans la Drakwald, 3) à la recherche d’un mage de feu appartenant au culte de la Main Enflammée, et 4) renforcée par un chevalier inconnu au bataillon (Köller), dont la particularité est de partir en courant dans une direction aléatoire à la poursuite d’une mystérieuse apparition qu’il est le seul à voir toutes les deux pages et demi. La continuité, c’est surfait1. On retrouve à part cela les têtes de Morr renfrognées mais connues de cette fine équipe, à savoir le visionnaire et pusillanime Mikael, le stoïque et robuste Halbranc, le sagace et chenu Sigson, et les jumeaux Valen et Vaust.

La chasse à l’homme engagée par les chevaliers est vite oubliée lorsque Köller tape son meilleur sprint sans crier gare et amène tout ce beau monde jusqu’au village de Hochenheim, dont l’aspect décati indique qu’il a connu des jours meilleurs. Et en effet, la bourgade a récemment fait l’erreur de laisser entrer en son sein un Carnaval du Chaos, qui eut tôt fait de convertir les honnêtes villageois au charme discret de la bourgeoisie Nurgle. Avant que Köller n’ait pu s’expliquer sur les raisons de sa course folle auprès de son supérieur, les clameurs d’un combat retentissent un peu plus loin dans le village, ce qui pousse les Templiers à aller s’enquérir de la situation. Constatant qu’une petite force de chevaliers impériaux se fait malmener par les hordes putrides de Nurgle, nos héros n’hésitent pas longtemps avant de prendre fait et cause pour leurs collègues, mais se font finalement repousser par le nombre jusqu’au temple local, que les défenseurs barricadent pour tenir en respect les prouteux.

Profitant d’un temps Morr dans les hostilités, les deux confréries se présentent officiellement, et on apprend ainsi que les nouveaux venus sont des chevaliers de Krugedorf, un noble local dont le blason figure (c’est important pour la suite) deux cerfs barbus (?) se faisant face. Bien bien. Ils ont été envoyés par leur seigneur récupérer une sainte relique dans le temple dans lequel la troupe a trouvé refuge, mais l’opération s’est trouvée retardée par la présence d’une sorcière capable d’invoquer des spectres dans la salle du tabernacle. Si si. Qu’à cela ne tienne, Reiner envoie le brave Sigson exorciser tout ça dans le plus grand des calmes, pendant que le reste de la compagnie défend la position contre les intermittents du spectacle. Il faut cependant croire que ces derniers sont partis manifester pour leur retraite pendant l’après-midi, car il ne se passe rien pendant suffisamment longtemps pour que Mikael s’endorme et, je vous le donne en mille, ait une vision dans laquelle il voit deux cerfs barbus s’affronter. Je ne suis pas expert mais je pense que Nick Kyme nous donne un indice sur la suite des événements ici.

Finalement, les hostilités finissent par reprendre et les covidés repartent à l’assaut des cervidés et de leurs alliés. Une vaillante défense de ces derniers permet de gagner un court répit, mais les survivants décident de se replier jusque dans la salle des reliques, où Sigson est occupé à bannir les esprits sans repos. Il parvient à ses fins juste au moment où les Nurgleux repartent à l’attaque, ce qui va déclencher une perfect storm narrative…

Début spoiler…Pour commencer, le chef des chevaliers de Krugedorf (Heinrich), abandonne le combat pour se ruer vers le saint des saints, juste au moment où Mikael réalise en pliant un bout de tissu qu’il avait ramassé pour lui servir de bandage quelques heures plus tôt que l’emblème de ses nouveaux copains n’est pas deux cerfs barbus, mais une main enflammée2. Car oui, les Krugedorfer étaient en fait des MECHANTS. Et pour prouver leur vilénie, il leur pousse soudainement des mutations très visibles (crocs, langue serpentine, armure fusionnée au corps…), que personne n’avait jusqu’à présent remarqué. Heinrich se met ensuite à supplier un certain Dormamu (avec un seul -m) de le suivre sur Instagram, pendant qu’un free for all bordelique à souhait s’engage entre les Templiers de Morr, les chevaliers du Chaos, les cultistes de Nurgle, et les spectres que la sorcière-qui-était-en-fait-une-enchanteresse parvient à réinvoquer après trente secondes de cool down. Quand la poussière retombe, un paragraphe et demi plus tard, tous les affreux ont été miraculeusement tués/bannis/incinérés, ne laissant plus que les gentils dans le temple.

Il est alors temps pour Kyme de tenter de clore son propos avec un peu de dignité en donnant quelques explications salutaires à son lectorat. L’enchanteresse révèle qu’elle est la dernière d’une longue lignée de gardiens de ce lieu, sacré pour une raison pas vraiment claire, et qui est attaqué tous les cent ans par des vilains très vilains (Mikael avait eu un rêve de cet ordre en début de nouvelle). Fort heureusement, à chaque fois des nobles paladins sont venus défendre la relique et son gardien, et l’un d’entre eux a toujours endossé le rôle du protecteur de ce lieu consacré après la bataille. « Ah je crois que c’est de moi dont on parle » annonce Mikael… sauf que non. Enorme râteau et gros moment de solitude : c’est en fait Köller qui est chargé de ramener l’équilibre dans la Force. Ouh la gênance. La rustine narrative étant posée, l’enchanteresse meurt de vieillesse, Kökö la remplace poste pour poste, et les Templiers de Morr repartent faire un rapport à la commanderie la plus proche. La légende raconte qu’ils y sont toujours.Fin spoiler

1 : J’ai tout de même poussé le vice jusqu’à faire quelques recherches pour m’assurer que je n’avais rien raté dans l’ordre de publication de cette série, mais il semble bien que non.
2 : Il est à peu près certain que Kyme a dû faire des dessins pour construire ce retournement de situation, et je paierais cher pour les voir.

AVIS:

Cette dernière soumission Morresque de Kyme s’avère encore plus confuse que les deux précédentes, ce qui constitue un authentique exploit. Un exploit en nullité mais un exploit quand même. C’est bien simple, absolument rien n’est logique1 ni bien amené dans les choix opérés par l’auteur, et si on arrive tout de même à suivre à peu près où il souhaite en venir, l’expérience est très loin d’être agréable2. Il est tout de même surprenant qu’aucun éditeur de la BL n’ait intimé à ce contributeur dont les ambitions dépassaient de très loin les capacités de mettre en scène une intrigue simple mais robuste, plutôt que de le laisser divaguer sur trente pages et signer un gloubiboulga de nouvelle dont on sort écœuré et/ou sardonique. C’est très dommage pour les Templiers de Morr, qui étaient pourtant taillés pour faire des héros très intéressants de la GW-Fiction, et pour le Carnival du Chaos, qui avait aussi un gros potentiel que Kyme n’a pas su révéler. La vie est injuste, c’est ainsi.

1 : Kyme consacre ainsi la première dizaine de pages de sa nouvelle à présenter le meneur du Carnaval de Nurgle (Zanikoff) et son animal de compagnie (Molmoth) pour ne plus jamais les mentionner nommément par la suite.  
2 : Hasard de la littérature, un concept d’histoire très similaire a été exploré par un autre contributeur de la Black Library (Robert Allan, dans ‘Son of the Empire’). C’est autrement plus réussi et restera la référence du genre « chevalier(s) défendant un temple ».

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The Miracle at Berlau – D. Hinks :

INTRIGUE:

The Miracles at BerlauDuel au sommet assommant entre un Prêtre-Guerrier de Sigmar hanté par son passé (Jakob Wolff) et le chef d’une bande de maraudeurs du Chaos (the Reaver) dans un temple abandonné. Entre deux échanges de mandales et de French kisses – the Reaver se battant principalement à coup de suçons – le mystère des origines de Wolff est également (partiellement) levé, sans que cela ait le moindre impact sur le reste de la nouvelle d’ailleurs.

AVIS:

Il n’y a pas grand-chose à sauver de cette soumission de Darius Hinks, qui a décidément du mal à faire sien le genre du court format1. Schéma narratif bancal, développements sans liens avec l’intrigue principale, progression hachée, conclusion tronquée : les 13 pages de ‘The Miracle at Berlau’ sont davantage une succession de passages de pulp fantasy agglomérés les uns aux autres pour essayer de donner l’illusion d’un tout cohérent (en vain) qu’une nouvelle digne de ce nom. On en aurait presque l’impression que l’auteur a volontairement amputé des passages de son texte, afin d’obtenir le manuscrit le plus compact possible (dans quel but, mystère).

Autre explication possible : les évènements relatés dans ‘The Miracle at Berlau’ pourraient s’inscrire dans un arc narratif plus développé (ce qui, après vérification, semble être le cas, puisque le protagoniste de ‘Warrior Priest’ se nomme également Jakob Wolff), sans que Hinks ne fasse beaucoup d’efforts pour faciliter la compréhension de ses lecteurs. Bref, ce teaser – puisqu’il semble bien que ce soit le but premier de ce texte – tombe lamentablement à plat, et ne donnera envie qu’aux bibliophiles les plus acharnés et/ou déviants de se plonger plus avant dans les chroniques de la famille Wolff. Bouh.

1 : Étant donné que son roman ‘Warrior Priest’ a remporté le Gemmell Morningstar Award (meilleur première publication fantasy) en 2011, on peut supposer que Darius se débrouille mieux en mode no limit. Ne comptez pas sur moi pour vérifier ceci dit.

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Ainsi se termine cette revue de ‘Empire at War‘, qui contient de l’excellent et du beaucoup moins bon. Le rapport quantité/prix et la présence de quelques gemmes signées Abnett, Werner, Rennie et Earl justifie pour moi l’achat de cette anthologie pour tout fan du Monde qui Fut à la sauce de la Black Library, mais il reste vrai qu’une sélection un peu plus exigeante aurait pu transformer cette honnête anthologie en classique des classiques. Comme la BL adore repackager ses vieilleries, peut-être que le prochain recueil de ce style sera de cet ordre? Rendez-vous dans quelques années pour le savoir…

 

LES ÉPÉES DE L’EMPIRE // SWORDS OF THE EMPIRE [WFB]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette chronique du recueil de nouvelles Swords of the Empire, traduit (ce qui est rare pour une anthologie de courts formats) et publié en nos vertes contrées par feu la Bibliothèque Interdite sous le titre Les Épées de l’Empire, en l’an de grâce 2006. Près de quinze ans plus tard, nous voilà à discuter – enfin surtout moi – d’un ouvrage traitant d’un univers disparu, sortie par une émanation de la BL l’étant tout autant. Voilà qui ne nous rajeunit pas.

Dans l’attente de contenu « frais » à critiquer, et dans l’espérance que la Black Library donne une suite à la Warhammer Horror Week qui avait marqué la première semaine de Mai 2019, je me suis donné pour objectif de passer enfin le cap des 100 nouvelles critiquées pour Warhammer Fantasy Battle, si possible à temps pour réagir rapidement en cas de prévision exacte de sortie de la WHW II. En repassant en revue les candidats possibles pour ce middle speed reviewing, je me suis souvenu, avec une émotion non feinte, de ce petit recueil que j’avais récupéré dans une Fnac quelconque au milieu des années 2000. Et je dois avouer que ces Épées de l’Empire1 se situent à part du reste des recueils et ouvrages de GW-Fiction lus depuis mon début dans la carrière, car il s’agit du premier livre de ce genre sur lequel j’ai posé la main. Si l’expérience ne m’avait pas plu, je doute que la question de la 100ème revue se poserait aujourd’hui, et je dois donc beaucoup aux six histoires rassemblées sous cette couverture magnifiquement évocatrice pour le joueur de l’Empire que j’étais et demeure2.

Sommaire Les Epées de l'Empire [WFB]

Au programme de cet épisode, nous nous retrouvons donc avec de longues nouvelles ayant toutes pour point commun de se dérouler dans l’Empire, ou de mettre en scène des personnages venant de la plus grande nation du Vieux Monde. La condition n’est certes pas très contraignante à remplir, mais donne une certaine uniformité à cet ouvrage. Les contributeurs à ce dernier s’avéreront plus ou moins connus de la part du lecteur, des têtes d’affiche comme Dan Abnett (du temps où il écrivait encore pour WfB), Jonathan Green et C. L. Werner, aux plus confidentiels Robert Earl, James Wallis et Gordon Rennie. Notons tout de même que tous ces auteurs ont eu plusieurs romans publiés par la BL au cours des années 2000, ce qui permettra aux intéressés de creuser plus amont si le cœur leur en dit. Pour ma part, je me contenterai de leur relater, au meilleur de mes capacités limitées, de quoi retournent les histoires compilées dans ce livre. Il serait de bon goût qu’elles soient toutes impériales de maîtrise et d’inventivité, mais seul l’avenir nous le dira…

: Comme j’ai lu ce titre en français, il restera à jamais ‘Les Epées de l’Empire’, alors que j’ai tendance à désigner les autres ouvrages publiés par la BL sous leurs titres originaux. Cela dit, la connaissance de ces derniers permet de réaliser la présence de jeux de mots pas forcément traduits dans la langue de Molière, comme ce ‘Rest for the Wicked’ qui est devenu ‘Pas de Répit pour les Braves’.
2 Cadia Nebelheim stands.

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Les Epées de l'Empire

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Les Chasseurs de Vampires // The Vampire Hunters – R. Earl :

INTRIGUE:

Bienvenue à Novograd, petit village kislevite blotti dans la nature sauvage de cette contrée septentrionale. Nous arrivons juste à temps pour surprendre un trio de natifs confinés dans l’auberge locale, absorbés par l’activité reine de la mauvaise saison : écouter la tempête secouer les maisons tout en fantasmant sur sa mort prochaine et se cuitant à la vodka pour passer le temps. Voilà bien toute l’âme indomptable du Kislev résumée en quelques mots. Plongés dans cette introspection profonde et alcoolisée, nos personnages sont surpris par les coups donnés sur la porte de leur gîte par une force mystérieuse. Délaissant un instant la mastication de sa moustache, autre passe-temps très populaire dans le pays, l’aubergiste Grigori1 va s’enquérir de la cause de ce raffut pendant que ses compagnons dégainent leurs couteaux à saucisson, dès fois que ce serait Peppa Pig qui viendrait demander l’hospitalité. À l’extérieur, ce sont deux voyageurs assez bien mis, Calixte Lesec et son valet Viento, qui demandent à s’abriter de la tempête. Après avoir hésité un moment, car, comme tout homme civilisé, Grigori à entendu parler de la déplorable réputation des Lesec (remontant jusqu’à leur patriarche, Noisy), le tavernier finit par laisser les visiteurs entrer après qu’ils aient prononcé le mot magique : « nous avons croisé Petrokov sur la route ». Car Petrokov est le fils de Grigori, et s’il est parti en direction de la capitale au cœur de l’hiver, c’est pour y chercher de l’aide. En effet, Novograd a un problème. Un gros, vorace et nudiste problème.

Une fois à l’intérieur, les nouveaux venus confirment qu’ils sont bien venus pour aider les locaux à se débarrasser de leur nuisance vampirique, car c’est bien de cela dont il s’agit, avec une confiance et une désinvolture qui ne leur attire pas les faveurs de Grigori. Pressé de questions par les mercenaires, il donne une description de l’individu suspect collant parfaitement avec le portrait type d’un Stryge (grand, baraqué, naturiste, avec une tête de chauve-souris), et accepte de mener ses hôtes dans les cavernes servant de repaire à la bête dès le lendemain. Sur la route dès potron minet – mais pas avant que Grigori ait pris son petit-déjeuner complet à base de porridge et de thé au miel (de Lustrie), car c’est le repas le plus important de la journée – les trois hommes progressent dans la poudreuse toute la matinée, et finissent par arriver devant les Dents de l’Ours, percées par un réseau de grottes dans lesquelles les locaux ont vu disparaître le vampire avec une proie sous le bras il y a quelques semaines…

Début spoiler…Une fois la partie lancée en indoor, c’est au tour de Grigori de se retrouver à la peine, les rapides et athlétiques Calixte et Viento redoublant de yamakaseries pour coller deux bonnes longueurs d’avance à leur « guide », laissant ce dernier former l’arrière-garde du groupe avec sa phlébite et son couteau. Guère rassuré par la situation, et seulement éclairée par la lueur tremblotante de sa torche, Grigori a beau se répéter que tout est sous contrôle, le bruit d’une cavalcade de griffes sur la roche, se rapprochant de plus en plus de sa position, n’a rien de très rassurant. Et lorsqu’un vieux réflexe de victime de film d’horreur le pousse à lever les yeux vers le plafond de la grotte, il ne peut que constater que la situation est compromise, ce coquinou de Stryge ayant opté pour une approche verticale et se trouvant à quelques centimètres de la tête de notre héros. Paralysé par une abjecte terreur, ce dernier en vient à lâcher son fidèle surin, mais, lorsque la bête se met en tête de lui fouailler la carotide, il a le bon réflexe de lui balancer un bon gros « parle à ma main » pour lui mettre un stop. Comme la main en question portait sa torche, le vampire en est quitte pour une bouchée de braise, ce qui n’est jamais agréable.

C’est le moment choisi par Calixte et Viento pour passer à l’attaque, de façon aussi coordonnée qu’acrobatique, les mercenaires prenant leur proie à son petit jeu de varappe en sautant eux aussi de prise en prise avec l’habileté d’un Alex Honnold sous speed. Sentant que l’on n’a plus vraiment besoin de lui, et plus qu’un peu dégoûté par la BO de la bataille et l’averse de sang qui commence à l’arroser, Grigori opte pour un petit évanouissement réparateur. À son réveil, et après avoir laborieusement retrouvé et rallumé sa torche, il peut constater que le Stryge a été vaincu, mais que ses problèmes, loin de disparaître, ont doublé. Car Calixte et Viento étaient eux aussi des vampires, que leur bataille contre leur lointain cousin skinhead a mis en appétit. Ils somment donc leur hôte de les ramener à Novograd, afin qu’ils puissent bénéficier du gîte et du couvert promis pendant une saison complète que l’offre d’embauche transmise par le délicieux Petrokov mentionnait. Ayant réalisé que son fils était très probablement mort, et que le reste du village ne tarderait pas à les suivre, Grigori, logiquement abattu par le tour qu’ont pris les événements, se met toutefois en route avec diligence, entraînant derrière lui les deux tueurs hémophiles.

Derrière son air de désespoir abêti, Grigori a toutefois un plan, et part au diable vau vert en compagnie des parasites, profitant de la tempête de neige s’étant levée entre temps pour les éloigner de Novograd. Lorsque Calixte finit par se rendre compte de la situation, il est trop tard pour les deux vamps, et la fringale qui travaille Viento pousse ce dernier à attaquer le Kislévite sans réfléchir aux conséquences de son geste, lorsque ce dernier lui balance quelques insultes savamment choisies. En plus de saigner à mort leur seul lien avec la civilisation, l’assoiffé ne s’est pas rendu compte que ce dernier se tenait à dessein sur le bord d’une corniche surplombant un abîme, et les trois randonneurs finissent donc par basculer dans le ravin après que Calixte ait tenté, sans résultat, de calmer les ardeurs de son séide. Ce n’est toutefois pas la fin pour Grigori, qui parvient à regagner la route quelques heures plus tard, malgré des blessures plus graves les unes que les autres, et la perte de 4 litres de sang. Réalisant qu’il est sur le point de devenir un vampire à son tour2, le dévoué aubergiste décide de se sacrifier pour la cause, et sort son meilleur saut de l’ange pour allez à nouveau s’écraser en contrebas. C’en est cette fois fini du petit Grigori, dont on retrouvera le cadavre flottant dans la rivière locale au dégel. Encore un mystère non éclairci…Fin spoiler

1 : Qui a contracté cette sale habitude il y a quarante ans, et qui en a quarante-deux. On vieillit vite à Kislev, c’est connu.
2 : On suppose que Viento a mis la langue pendant leur séance de base jumping en amoureux ?

AVIS:

Soumission solide de la part d’un Robert Earl pas encore obnubilé par les aventures de Florin et Lorenzo (bien que la paire Calixte – Viento s’avère assez semblable à son équivalente bretonienne dans ses relations maître – serviteur), ce Chasseurs de Vampire permet au lecteur de découvrir le Vieux Monde dans toute sa dureté, tant climatique que « sociologique », et de prendre la mesure du fameux tempérament kislévite, garant de la survie de ce peuple plus exposé que les autres aux déprédations des forces du mâââââl. Bénéficiant d’une intrigue bien trouvée et mise en scène, notamment le passage de la grotte et l’approche angoissante du Stryge, qui n’aurait pas dépareillée dans une nouvelle de Warhammer Horror, cette histoire met à profit les éléments constitutifs de la GW-Fiction que sont l’action, le suspense et le grimdark, pour un résultat des plus convaincants. À placer parmi les modèles du genre.

ILS L’ONT ECRIT:

Les Chasseurs de Vampires_Nuff said

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Charcuterie Ambulante // Meat Wagon – C. L. Werner :

INTRIGUE:

Votre attention s’il vous plaît. La nouvelle qui va suivre comprenant un nombre élevé de personnages nommés (plus ou moins) importants pour notre intrigue, nous vous remercions par avance de suivre attentivement les présentations qui vont vous être faites de notre casting. Vous aurez été prévenus.

Et nous voici donc catapultés dans un relais routier minable sur la route reliant Erengrad à Zandri en passant par Nuln, où une belle bande de personnages attend que leur personnel de bord ait fait le plein et chargé les plateaux repas. Les écouter un instant suffit au lecteur sagace pour deviner où chacun se positionne sur l’organigramme de la nouvelle d’action med-fan1. Nous avons ainsi, par ordre d’apparition : le joueur de cartes (en os, because why not2)/escroc/joli cœur Feldherrn, le gras, riche, désagréable et xénophobe marchand de vodka Emil Steinmetz, sa « fiancée »/chaufferette achetée en soldes à son vieux père Lydia, et son garde du corps couturé et patibulaire, Ravna (surnommé un demi car il utilise une épée bâtarde). À cela, nous nous devons d’ajouter la Baronne von Raeder, vieille fille maniérée et hautaine, mais se baladant avec une rapière au côté, et le jeune ingénieur Nain Fergrim Pointefer, transportant avec lui des caisses frappées de runes auxquelles il tient comme à la prunelle de ses yeux. Pour finir, un mot sur les chauffeurs de ces messieurs-dames : l’Ostlander au fouet et aux chicots pourris, Ocker, et son comparse Strigani à tête de fouine et à moustache pleine de miettes (un signe sûr que c’est un filou… ou une fouine qui vient de tomber sur une baguette), Bresh. Pfiou, une bonne chose de faite.

Tout ce petit monde se dirige donc vers Nuln et doit cohabiter pour quelques heures, même si des tensions se manifestent déjà au sein du groupe. Le voyage du coche est cependant interrompu avant son terme par un fiacre-stopper planté au bord de la route. Reconnaissant un Répurgateur à la forme de son chapeau, les deux gredins tenant les rênes, et que le lecteur avait surpris quelques temps auparavant à échanger des remarques lourdes de sens hors d’écoute de leurs passagers, sont d’abord tentés de l’écraser, mais Mathias Thulmann (car c’était lui) avait habilement prévu le coup en demandant à son homme de main et tortionnaire particulier, Streng, de se positionner stratégiquement avec une arbalète chargée à proximité. Si Thulmann joue du pouce sur les grands chemins, c’est que son cheval à perdu un fer et qu’il a donc besoin d’être dépanné jusqu’à la forge la plus proche. Ne prenant pas les dénégations polies des conducteurs pour argent comptant, il s’installe donc posément dans la diligence, laissant son acolyte suivre cette dernière avec leurs chevaux, et propose un tour de table amical pour briser la glace entre les compagnons de voyage. Venant d’un type qui peut vous condamner au bûcher si vous éternuez de façon bizarre, pas sûr que cela fonctionne beaucoup.

En tous cas, cette rencontre fortuite n’empêche pas Ocker & Bresh de dérouler la suite de leur plan, et donc d’amener leur véhicule jusqu’au charmant petit village de Mureiste, Sylvanie. « Dites donc, c’est étrange que nous fûmes allâtes en direction du Nord-Est alors que la logique voullasse que nous nous dirigeassionnèrent vers le Sud-Ouest » commente ce finaud de Thulmann, à qui on a appris le Reikspiel littéraire et la géographie au Temple de Sigmar. Il ne faut donc pas s’étonner que notre héros dégaine une de ses pétoires de service lorsque l’équipage annonce une pause de quelques minutes à ses passagers, et interdise en des termes non incertains aux ruffians de bouger de leur siège. Cette situation des plus tendues (Streng étant venu appuyer les dires de son employeur avec sa propre arbalète) dégénère cependant tout à fait lorsque les habitants de Mureiste arrivent en masse taper au carreau du fiacre, et pas pour demander s’ils peuvent laver le pare-brise, non non. Car les locaux sont des goules, elles ont faim, et de bien mauvaises manières. Dans le tumulte qui s’en suit, notre compteur de mort horrible se déclenche enfin, grâce à la participation active d’Ocker, qui prend un carreau dans le bide de la part de Streng en tentant de dégainer son tromblon, tombe de son siège, se fait rouler dessus par la voiture qui s’emballe, et dévorer vivant par les relations professionnelles des son collègue. Pas mal pour un début. Bresh, de son côté, réussit à faire décrire des cercles à l’attelage devenu fou jusqu’à ce que le poison des cannibales fasse effet et terrasse les chevaux3. Le coche se renverse, manquant d’écraser Pointefer, mais ne faisant pas d’autres victimes que les chausses de Steinmetz, dont le transit intestinal est accéléré par la vue des goules. Toutefois, tous nos personnages, y compris Bresh, que Thulmann amène manu militari avec lui pour qu’il s’explique, réussissent à se réfugier dans le temple de Sigmar local, et à en barricader les portes.

Dès lors, il s’agit pour nos héros de s’organiser. Pendant que ses camarades fortifient leur position ou sanglotent dans leur coin, le Répurgateur torture un peu son suspect, arrivant à tirer de ce dernier la promesse d’une mort abominable délivrée d’une main de Maître par ce dernier. Il ne faut pas longtemps à Thulmann pour comprendre que les goules ne sont qu’un avant-goût d’une nuit très agitée qui s’annonce, et le zélote va donc prêter main-forte à ses acolytes, qu’il positionne à des endroits stratégiques dans l’attente du prochain assaut. À la tombée du jour, une chauve-souris géante vient déverser des litres de guano sur la grand-place où patientent les Muriestois, avant de se poser et de se changer en, je vous le donne en mille, Ozzy Osbourne. Ou presque. En vampire Stryge. Après s’être fait briefer sur les derniers événements, et avoir repris quelques forces en sirotant le messager4, il lance ses ouailles à l’attaque du monument, en leur indiquant de penser à faire le tour, cette fois-ci. Si la marée de viande écumante (voir « ils l’ont écrit ») ne parvient pas à faire autre chose que trembler les portes dans un premier temps, les nerfs fragiles de cette fiotte de Steinmetz manquent de condamner la team Sigmar lorsque le pleutre décide d’aller libérer Bresh dans l’espoir que ce dernier parvienne à le sauver. Malheureusement pour lui, et pour son nouvel obligé, Lydia donne l’alerte à Thulmann avant que le Strigani n’ait eu le temps de lui planter un couteau dans le dos. Privé de l’avantage de la surprise, les vingt centimètres d’acier du ruffian ne font pas le poids ni la longueur face à l’épée bénite du Répurgateur5, et le malappris se fait posément transpercer la gorge par son adversaire, qui peut aller redonner un coup de main très bienvenu à ses comparses.

C’est le moment que choisit le Stryge pour faire son entrée dans la place, par la fenêtre s’il vous plaît. Chemin faisant, il charcute horriblement la pauvre Baronne von Raeder6, pulvérise un banc et éventre Steinmetz, faisant un peu de ménage dans notre casting. Ses tentatives de griffer à mort Thumann sont cependant mises en échec par le jet d’eau bénite qu’il se prend dans la figure (ça brûle), et par les gros débuffs de zone que lui inflige le sol consacré du lieu saint dans lequel il se trouve. C’est ça aussi de ne pas demander à ses goules de raser le temple de Sigmar du village en temps et en heure. Devant tant de diableries, ou peut-être l’inverse, le vampire décide d’aller prendre l’air, entraînant avec lui ses hordes de groupies décérébrés. L’occasion pour les défenseurs de souffler un peu et de faire leurs comptes, le pauvre Ravna, méchamment tailladé par un ongle sale de goule, n’en ayant plus pour très longtemps…

C’est alors que Pointefer se souvient que le contenu de ses caisses n’est autre que de la poudre à canon. Gag. Jouant leur va-tout, les survivants envoient donc le Nain et le mourant poser une mèche dans les décombres de la diligence, pendant que Thulmann tente de distraire le Stryge. Cela marche tellement bien que, lorsque l’héroïque Ravna se sacrifie pour mettre le feu aux poudres, le buveur de sang est encore occupé à envoyer des gros doigts, ou griffes dans son cas , au Répurgateur depuis le sommet de la diligence. Bilan des courses : un centre ville dévasté, une vingtaine de goules déchiquetées, et un vampire en piteux état, que Thulmann achève d’un coup d’épée en plein cœur en punition de son tapage nocturne7. Ici s’achève notre histoire, les deux chasseurs de sorcières décidant de repartir avec leurs montures (habilement garées dans le temple par Streng un peu plus tôt), même déferrées, plutôt que de s’éterniser plus longtemps dans ce patelin paumé qu’est Mureiste. Et Thulmann de donner ce conseil avisé aux trois survivants de notre échappée belle (voyez si vous pouvez les identifier) : « je suis sûr que ça va marcher ».

1 : Et dans une certaine mesure, de déterminer qui a le plus de chances de mourir dans d’atroces souffrances au cours des prochaines pages.
2 : Même si le matériau utilisé me semble un peu saugrenu. Sans compter de la taille du squelette nécessaire pour tailler des cartes d’une taille suffisante. Sans doute un moyen pour les forces impériales de monétiser les cadavres d’Orques qui s’accumulent comme des feuilles mortes en automne après la Waaagh ! hebdomadaire.
3 : Qui n’ont pas reçu de nom et que je n’inclue donc pas à ma liste, à grand regret.
4 : Don’t shoot the runner, but drink them? Yes you can.
5 : Annule les sauvegardes invulnérables des Démons, coup fatal sur les sorciers à cœur noir.
6 : Dont le tort fut d’être une femme répudiée indépendante, et donc indigne de confiance pour ce misogyne de Thulmann.
7 : Non sans avoir balancé la petite réplique qui va bien juste avant, ici librement empruntée à ‘Le Bon, La Brute et le Truand’ (déjà pastiché par Werner dans sa série ‘Brunner, Bounty Hunter’.

AVIS:

On savait Werner particulièrement à son aise pour la mise en scène de nouvelles d’actions sérialisées, qu’il s’agisse pour lui de suivre une traque du chasseur de primes Brunner, ou une purification expresse dispensée par le zélé Mathias Thulmann. Cette réputation n’est pas usurpée ici, car cette Charcuterie Ambulante tient beaucoup mieux la route, et c’est heureux, que la diligence empruntée par nos héros pour se rendre à Nuln. En plus de bénéficier d’une atmosphère tendue tout à fait appréciable, en grande partie grâce au rythme soutenu imposé par l’auteur, et les quelques descriptions gore à souhait qu’il glisse au fil des pages, cette nouvelle parvient également à faire « vivre » (et mourir, dans beaucoup de cas) sa belle brochette de personnages de façon naturelle et équilibrée, et emprunte avec bonheur au genre du western, dont Werner est un fan assumé. La fameuse scène de l’attaque de la diligence par les Indiens, ou, plus proche de nous, l’attente tendue des 8 Salopards, partagent ainsi des similarités fortes avec le siège de temple de Sigmar par un Stryge et ses goules, preuve que dans la pop culture, tout est dans tout et inversement. Au final, encore une nouvelle solide à mettre au crédit d’un des chasseurs de lignes les plus réputés du Vieux Monde plutôt que du Far West, et une très bonne introduction du personnage de Mathias Thulmann aux non-initiés, si nécessaire.

ILS L’ONT ECRIT:

Charcuterie Ambulante_Nuff said

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L’Affaire de la Cellule Écarlate // The Case of the Scarlet Cell – G. Rennie :

INTRIGUE:

Les temps sont rudes à Altdorf pour la devineresse décrépite Varra, qui peine à extorquer de quoi payer son loyer et acheter du mou à son chat à la populace locale. En cause, l’absence de la moindre petite catastrophe depuis quelques temps, qu’il s’agisse d’une Waaagh ! Orque ravageant l’arrière-pays, d’une invasion des hordes chaotiques depuis le Nord, ou même une épidémie de peste noire, comme au bon vieux temps de Mandred. Ce sont des événements de ce genre qui donne l’envie aux braves quidams de claquer quelques pièces dans la lecture de leur avenir, et la paix relative dont bénéficie l’Empire au moment où notre histoire prend place ne fait donc pas les affaires de notre pythie au rabais. Aussi, lorsque le traditionnel rideau de perles marquant l’entrée de son cabinet se met à bruire, annonçant l’arrivée d’un gogo client en puissance, Varra se dépêche de prendre un air pénétré et de scruter les profondeurs mystérieuses de sa boule de verre (le cristal, c’est cher). À défaut d’avoir de vrais pouvoirs de divination, un simple coup d’œil au nouveau venu aurait peut-être pu sauver la voyante amateur du triste destin qui l’attend. Lorsque Varra daigne en effet lever les yeux sur son visiteur pour s’enquérir de la raison des ses grognements courroucés, il est trop tard pour elle. Fondu au rouge…

Quelques heures plus tard, c’est l’impeccable Zavant Konniger, Sage-Détective (c’est écrit sur sa carte de visite) qui se rend sur le lieu de ce qui s’est avéré être un crime (sans blagues), suivi de son fidèle serviteur halfling Vido. Si l’illustre personnage a daigné descendre dans la rue des Pythonisses, c’est qu’il réfléchit à prendre l’affaire que lui propose le marchand Gustav von Hassen, fondateur du Comité de vigilance des citoyens d’Altdorf, initiative populaire mise sur pied il y a quelques mois pour aider les autorités incompétentes à mettre fin aux déprédations d’un tueur en série sanguinaire connu sous le nom du Boucher de Reikerbahn (le quartier le plus mal famé d’Altdorf). Bien que le charcutier en question ait fini par être appréhendé, envoyé en prison, jugé et exécuté, von Hassen semble prêt à payer les coquets émoluments demandés par Konniger pour bénéficier de sa légendaire gnose. Dès lors, ce dernier se fait un devoir de visiter les quartiers de la pauvre Varra, éparpillée façon puzzle dans son F3. Le regard acéré de notre enquêteur ne met pas longtemps à remarquer que la victime n’a ni les yeux, ni la langue dans sa poche, ni à leurs emplacements habituels d’ailleurs, et conclut donc que le meurtrier devait avoir des motivations bien spécifiques. En effet, voler les yeux et la langue d’une devineresse semble obéir à une logique particulière.

Sur le chemin du retour, dans le fiacre que Konniger et Vido partagent avec von Hassen et son jouvenceau de neveu, Sigmund, le Sage-Détective n’a pas longtemps à attendre pour tirer les vers du nez de son nouvel employeur, qui révèle deux faits très intéressants à l’enquêteur. Le premier est que le meurtre de Varra n’est que le dernier d’une série en cours, ayant vu un Archilecteur salace perdre cœur (et la vie) dans le lit d’une prostituée de luxe, et pas moins de trois sorciers des collèges de magie perdre la tête (et le contenu de leur boîte crânienne) au cours des dernières semaines. La seconde est relative au fameux Boucher de Reikerbahn, dont la population a été privée de l’exécution publique pour la simple est bonne raison que le suspect était un cultiste de Khorne déjà bien avancé sur le chemin de la mutation (professionnelle ou pas), plus semblable à une bête qu’à un homme, et doué d’une capacité de régénération extraordinaire. Pensez à Wolverine croisé avec Jack l’Éventreur et vous aurez une bonne représentation du joyeux drille. N’ayant rien pu tirer de lui, ni aveu, ni confession, ni parole intelligible, les autorités décidèrent de le brûler dans l’enceinte de sa prison pour clore l’affaire une fois pour toutes.

Une fois rendu à son domicile, Konniger commence à phosphorer avec son efficacité habituelle, faisant remarquer à son domestique que von Hassen, pour concerné qu’il ait l’air d’être par le salut du petit peuple, dissimule sans doute ses véritables motivations, comme l’indique… l’absence de chevalière à sa main droite. Imparable. Cela dit, il faut à notre héros amasser davantage d’indices et de preuves sur cette affaire, et la paire part bientôt en direction de la Kaiserplatz à la rencontre d’une vieille connaissance, travaillant comme geôlier en chef dans la prison municipale de Mundsen, où le Boucher a passé ses dernières heures. Bien aidé par la corruption quasi-totale de son interlocuteur, et pendant qu’il déguste une savoureuse saucisse dans la taverne de la Robuste Matraque, Konniger ne met pas longtemps à convaincre le maton qu’il est dans son meilleur intérêt de lui faire faire une visite guidée de la cellule où était enfermé Boubou, même si les Répurgateurs de Sigmar ont formellement interdit à quiconque d’y pénétrer depuis l’exécution…

Début spoiler…Et pour cause, car exécution il n’y a pas eu. La nuit précédent la mise à mort, le Boucher s’est en effet découvert des talents de scream queen, et lorsque la garde a fini par venir s’enquérir des causes de ce raffut, elle ne put que s’apercevoir que le gonze était également un as de la maroufle. Résultat, des murs (et un plafond) de cellule refaits de neuf avec une épaisse couche de sang, et une disparition totale du détestable artisan. La cellule écarlate continuant à suinter de l’hémoglobine fraîche depuis cette nuit fatidique1, l’Inquisition avait logiquement décidé de noyer l’affaire en faisant croire que tout s’était déroulé normalement, ce qui n’est évidemment pas le cas. Qui peut dire ce qu’il est advenu du Roucher de Beikerbahn ? La visite terminée, Konniger insiste pour ne pas rentrer chez lui directement mais se rendre discrètement au domicile de von Hassen, qu’il soupçonne fortement d’être un disciple de Slaanesh, engagé dans une vendetta très intéressée contre le tueur Khornu qu’il a contribué à faire arrêter la première fois.

Et, effectivement, il ne faut pas longtemps aux deux détectives pour filer Gustav et Sigmund jusqu’à un entrepôt du quartier marchand, qui se révèle être un lieu de débauche des plus païennes. Le temps que Konniger et Vido parviennent à crocheter une serrure et accéder au lieu de la petite sauterie, cependant, il est déjà trop tard, car le Boucher, que Khorne a récompensé de ses bons et loyaux services en lui donnant le pouvoir « brumisateur de sang », ce qui lui a permis de s’extirper de sa cellule, et plus tard, de contourner les mécanismes de protection mis en place par ses proies2, s’est matérialisé en pleine orgie en montant depuis les égouts à travers le sol, que ces crétins de cultistes n’avaient pas pensé à isoler. Et pourtant, tous les chauffagistes vous diront que c’est important. Cette aérosolisation réussie, le tueur a repris forme presque humaine et s’est mis à débiter de l’aristocrate corrompu et du notable concupiscent à tour de griffes, jusqu’à ce que Sigmund, qui se trouvait être la démonette de compagnie de Gustav (en sa qualité de Magister du culte), tombe les masques (de Slaanesh, évidemment) et engage la brutasse au corps à corps. Son intervention courageuse n’est cependant pas suffisante pour arrêter les ravages du fidèle du Dieu du Sang, même si elle permet d’affaiblir ce dernier et donne une chance à Konniger de régler le problème en solo. Saisissant le bâton corrompu encore étreint par la main de Gustav, chairàpâtis-é juste avant son escort démoniaque, Zavant commence à zlataner l’Élu de Khorne de belle manière, parvenant finalement à l’empaler avec le symbole de l’ennemi juré de son Dieu, sur l’autel de l’ennemi juré de son Dieu. C’est la combo fatale pour le Boucher, qui se fait déboucher pour de bon et repart dans les royaumes du Chaos se faire prendre la tête par son suzerain.

À Altdorf, c’est l’incendie opportun de l’entrepôt, suivi d’une opération de nettoyage très poussée menée par les Templiers de Sigmar, et la prise de vacances pour durée indéterminée d’un certain nombre de sommités locales, qui permet à la vie de retrouver une certaine normalité. On espère en tous cas que Konniger s’est fait payer par avance pour cette affaire, car quelque chose me dit que sinon, il l’aura dans l’os…Fin spoiler

1 : Ce qui est certes dégoûtant (en plus d’être dégouttant) mais très utile pour les banques de sang d’Altdorf.
2 : Insaisissabilité renforcée par les dons « anti-magiques » accordés à la suite de la consommation du cœur, cerveaux, yeux et langue de ses victimes précédentes.

AVIS:

Adaptation très convaincante d’une enquête de polar bien noir dans l’univers de Warhammer, L’Affaire de la Cellule Écarlate permet à Gordon Rennie d’entraîner son lecteur dans le tumulte d’Altdorf, depuis ses tavernes animées et son riche quartier marchand jusqu’aux prisons les plus glauques et au tristement célèbre Reikerbahn, ce qui en fait une nouvelle incontournable pour tout amateur de fluff qui se respecte, ainsi que pour les rôlistes à l’affût d’informations (quasi) officielles pour enrichir leurs parties. Mettant à profit son aisance narrative pour plonger son public dans son propos, par exemple en alternant les passages suivants Konniger et Vido avec ceux racontés du point de vue du tueur (ce qui permet de comprendre son douloureux parcours et ses motivations) ou des ses victimes, convoquant avec maestria des descriptions de la vie d’Altdorf, dialogues efficaces (à défaut d’être savoureux) et scènes d’actions rythmées, le tout parsemé de quelques trouvailles gores et saillies humoristiques, Rennie livre ici l’une des toutes meilleures aventures de son héros fétiche, qui tombera malheureusement dans un relatif anonymat1 lorsque son auteur décidera d’arrêter sa collaboration avec la Black Library. Donc, profitez-en car il y en pas des milliers, ni des centaines, ni même des dizaines comme celle-là2 !

1 : Même si le brave Josh Reynolds sortira Zavant de sa pré-retraite le temps de quelques nouvelles au cours des années 2010.
2 : Et en français, je pense que c’est même l’une des seules.

ILS L’ONT ECRIT:

L'Affaire de la Cellule Ecarlate_Nuff said

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Pas de Répit pour les Braves // Rest for the Wicked – J. Wallis :

INTRIGUE:

Altdorf, et ses rues bruissantes de vie, ses marchés bien achalandés, ses honnêtes citoyens faisant leurs courses… Et, bien entendu, ses forces de police luttant au jour le jour contre les déprédations des mauvais sujets de l’Empereur, ou, dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, celles de dangereux immigrants, comme ce Kislévite à moustache de Kislévite (ok) et aux yeux de Kislévite (plus dur), qui se fait courser comme un lapin par nos héros, les officiers des Lices Dirk Grenner (aka Astérix) et Karl Johansen (aka Lucky Luke1), qui cherchent ainsi à boucler une enquête de trois mois de façon probante. Manque de bol pour les Starsky et Hutch impériaux, leur course poursuite les amène jusqu’aux portes de la ville, où le cortège de Leopold von Bildhofen, Comte Électeur du Middenland, fait son entrée en grande pompe. Le périmètre de sécurité étant strictement maintenu par la garde civile, nos héros ne peuvent que constater la disparition de leur proie dans la foule massée pour l’occasion… jusqu’à ce que le suspect moustachu trouve intelligent de passer en courant devant le cheval de l’Électeur, pile au moment où ce dernier reçoit un carreau en pleine encolure (le cheval, pas le bonhomme). La suite est assez facile à prédire : la bête s’emballe et part au triple galop dans les rues pavées d’Altdorf, en direction de la Königplatz (à ne pas confondre avec la Kaiserplatz) et de son marché bondé. Serait-ce la fin de ce bon vieux Leopold ? NON, car les héroïques Johansen et Grenner subtilisent deux montures à leurs balourds de collègues, piquent des deux et parviennent in extremis à se saisir de l’aristocrate avant que son destrier n’aille s’emboutir dans un food truck, avec des résultats dévastateurs. Malgré leur intervention salutaire, ce snob de von Bildhofen remercie à peine ses sauveurs, et repart avec sa troupe jusqu’à son Air BnB.

De retour au poste, les officiers doivent à présent amadouer la colère de leur patron et chef des Lices d’Altdorf, le Général Hoffmann, devant le capotage complet de l’opération Kosachok. Ce fiasco a toutefois libéré le duo, qui peut enquêter sur la tentative d’assassinat dont l’influent aristocrate vient de faire les frais. Ayant déjà reçu le résultat des expertises du laboratoire alchémico-légal avec lequel les Lices travaillent, qui a établi que le carreau était d’origine tiléenne, Johansen et Grenner partent en direction de la petite Tilée pour creuser la piste d’un assassin étranger engagé par un mystérieux commanditaire pour se débarasser de von Bildhofen. L’héritier du Comte étant son frère Siegfried, marié à une Tiléenne, c’est donc vers ce dernier que les premiers soupçons se portent. Après une rencontre fructueuse avec le signor Argentari, parrain de la pègre italienne tiléenne locale, les deux équipiers filent jusqu’à la Marianstrasse, où leur indic leur a confié que se trouvait le tireur d’élite recruté pour effectuer ce sale boulot. Bien qu’ils parviennent sur place avant que ce dernier n’ait pu retenter sa chance, profitant du passage du Comte Électeur à la sortie de la messe, ils perdent l’élément de surprise lorsque Grenner ne parvient pas à enfoncer la porte de la planque du premier coup. S’en suit un face à face tendu entre les officiers et leur suspect, qui se prend la dague de jet de Johansen dans l’estomac pour commencer, mais riposte en logeant un carreau dans la poitrine de ce dernier. Ce tilean stand-off, qui aurait pu durer longtemps vu la stupidité des participants2, est toutefois interrompu par une boule de feu impromptue, qui ravage la piaule et réduit le sniper en cendres. Comprenant que cette intervention enflammée était probablement celle du commanditaire, peu soucieux de laisser les enquêteurs interroger le tueur à gages, Johansen indique à son partenaire qu’il serait judicieux qu’il aille rendre une visite de courtoisie à la DGSI impériale, une cellule de la Reiksguard (en civil) enquêtant sur les complots et manigances agitant l’entourage de l’Empereur. Cette organisation moyennement secrète (puisque un simple officier des Lices sait qu’elle existe et où elle opère3), du nom d’Untersuchung, s’est faite une spécialité d’enquêter sur les mages renégats, et pourrait donc aider l’enquête à progresser. Pendant que son collègue passe aux urgences se faire recoudre, Grenner se rend donc sur place.

Là, il se fait poliment mais fermement éconduire par ses interlocuteurs, qui ont l’air d’en savoir beaucoup plus qu’ils ne veulent bien en dire sur cette affaire, et ne consentent qu’à lui expliquer la différence entre une boule de feu et une explosion flamboyante. Car non, ce n’est pas la même chose. De retour au poste, Johansen est toutefois briefé par Hoffmann, qui a reçu les infos refusées à son sous fifre par fax pigeon voyageur, sur la situation très délicate dans laquelle ils doivent opérer. La sorcière pyromane se révèle être une certaine Emilie Trautt, mage flamboyante passée libérale depuis quelques années et concubine notoire du fils de Leopold von Bildhofen, Udo, qui passe du coup suspect #1 de l’enquête. Cependant, l’Untersuchung a formellement interdit à ses collègues d’intenter quoi que ce soit envers Trautt, qui pourrait mener le Bureau des Légendes d’Altdorf à de plus gros poissons. Cela n’empêche toutefois pas les Lices de monter un plan audacieux pour protéger le mal-aimé Leopold de ses persécuteurs…

Début spoiler…Et notre duo infernal, maintenu sur l’affaire par un Hoffmann très peu progressiste quand au concept d’ITT et de congés maladie, de se rendre à la place de leur boss au rendez-vous organisé par Udo afin de discuter des mesures de protection prises par les Lices envers le Comte Électeur. Tout aussi odieux que son paternel, Udo gobe toutefois sans broncher les bobards débités par un Johansen imperturbable, qui lui fait croire que les suspects principaux sont les Kislévites (décidément, il ne les aime pas), et lui révèle les dispositions super secrètes prises par son équipe pour protéger le convoi qui amènera le Comte et sa famille à la réception organisée par l’Empereur en leur honneur le soir même, lorsqu’Udo se met à flipper des tables pour exprimer son mécontentement d’être tenu hors de la confidence. Le piège étant tendu, il est maintenant temps de voir si le poisson va mordre…

Aussi, lorsque les rusés officiers changent l’ordre des carrosses banalisés transportant les huiles Middenlander, positionnant celui d’Udo en deuxième position, à la place de celui de Leopold et Siegfried, c’est sans surprise qu’ils constatent la combustion spontanée mais peu naturelle du fiacre. C’est ce qui s’appelle un retour de flamme, je suppose. Bravant les ordres, l’intenable Johansen s’élance ensuite à la poursuite de Trautt sur les toits, ne parvenant pas à refaire son retard (et pourtant, elle était en robe longue) avant que la magicienne utilise ses pouvoirs enflammés pour… partir en lévitation et franchir le mur d’enceinte de la ville, évitant facilement la dague de jet que Johansen lui avait lancée sans sommation. C’en est fini de notre enquête, mais pas du boulot de notre paire de choc, qui devra dès le lendemain faire porter le chapeau de ces tentatives d’assassinat répétées aux, je vous le donne en mille, Kislévites. Comme on dit par chez nous, pas de pitié pour les croissants Cosaques.Fin spoiler

1 : Comprendre que le premier est un petit blond raleur, et le second un grand brun à la gâchette facile.
2 : Ainsi, l’assassin parvient à se surprendre lui-même lorsque sa manœuvre de diversion à l’encontre de Johansen le mène à regarder également dans la direction vers laquelle il pointait son arbalète, permettant à l’officier de lui balancer un pied de chaise dans la tronche en toute impunité.
3 : Rendant son utilisation de mot de passe alambiqué à l’entrée un peu ridicule.

AVIS:

Pastiche assez transparente de la série policière classique des années 80, mettant en scène des flics débrouillards aux méthodes non conventionnelles mais efficaces pour combattre le crime, Pas de Répit pour les Braves souffre des grosses ficelles parodiques utilisées par l’auteur, d’un duo de héros pas vraiment attachants, et de l’intégration assez grossière de l’Untersuchung (que Wallis mettra au centre de son roman La Marque de la Damnation) à l’intrigue pour des raisons relevant selon moi du teasing pur et simple. Si on peut reconnaître à cette nouvelle un rythme enlevé et une enquête potable, même si pas vraiment spectaculaire en termes de rebondissements1, ainsi que quelques détails fluffiques sur Altdorf et ses forces de po-Lices, à prendre avec des pincettes car reprises par personne d’autre depuis, la Black Library a beaucoup mieux à offrir en termes de nouvelles « policières » se déroulant dans le Vieux Monde, à commencer par L’Affaire de la Cellule Écarlate dans la même anthologie, supérieure sur tous les points à Pas de Répit pour les Braves.

1 : En même temps, avec deux suspects identifiés en tout et pour tout, difficile de faire planer longtemps un suspens étouffant. Wallis avait fait beaucoup mieux ceci dit avec sa série Dieter Brossmann (‘The Dead Among Us’ et ‘The Bretonnian Connection’).

ILS L’ONT ECRIT:

Pas de Répit pour les Braves_Nuff said

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La Cloche de Nagenhof // The Nagenhof Bell – J. Green :

INTRIGUE:

Notre histoire commence avec un paragraphe descriptif expliquant en quelques lignes aussi imagées qu’un mur de classe maternelle1 que, par une nuit sombre et sinistre, frappée par un temps sombre sinistre, et digne du sombre et sinistre dieu de la mort (qui est sombre et sinistre) Morr, un bâtiment sombre et sinistre – le temple de Morr de Nagenhof – est sur le point d’être témoins d’évènements… sinistres et sombres. Ha ! Vous ne l’avez pas vu venir, celui là ! Et, de fait, un trio de ruffians est surpris par le lecteur déjà un petit peu blasé par les effets stylistiques sombres et sinistres de Jonathan Green, très à l’aise dans son rôle de MJ pour CE2, en train de hisser une cloche en haut du beffroi du temple. Le groupe est mené par la figure contrefaite mais très musclée du bossu Otto, recueilli à sa naissance par le prêtre local, Ludwik, après que sa bohémienne de mère soit venue mourir en couches dans son presbytère. En même temps, what did you expect d’un temple de Morr ? Moi je dis que ce n’est pas du tout un fail, à l’inverse de la tentative de Green de pomper discrètement des idées dans des classiques de la littérature. Mais revenons-en à nos bourdons. Otto et ses comparses sont parvenus à installer la nouvelle cloche, qui luit d’un éclat verdâtre peu engageant, à la place de l’ancienne, et le bossu a tôt fait de se débarrasser de ses complices désormais inutiles, dont il empile les cadavres dans la crypte de son lieu de travail. Voilà qui termine le prélude de notre histoire, qui sera, comme vous l’avez compris, sombre et sinistre.

Trois jours plus tard, la bande de mercenaires du charismatique (c’est lui qui le pense en tout cas) Torben Badenov est à pied d’œuvre dans la taverne de la Main de Gloire de Nagenhof, tenue par un de leurs anciens frères d’armes, le manchot Dietrich Hassner. Rangé des voitures depuis dix ans, date à laquelle il a perdu la main, Dietrich se voit malgré tout proposer par Badenov de reprendre du service pour aller faire les quatre cents coups dans le Vieux Monde, comme à la bonne époque. Autour de lui, ses compagnons se pintent généreusement à la bière, et il me faut vous les présenter sans plus attendre, par ordre de participation active à la suite de la nouvelle. Commençons par le nobliau maussade mais futé Pieter Valburg, recruté dans la bande à la suite des événements relatés dans Heart of Darkness, qui l’ont vu venger la perte de sa fiancée. Nous avons ensuite le Kislévite à tête de fouine Oran Scarfen, le jeune et incertain Stanislav Hagar, et le colossal trappeur Yuri Gorsk (qui ne servira à rien, vous pouvez donc l’oublier). Ces plaisantes retrouvailles sont toutefois interrompues par un angélus d’un genre un peu particulier, à la fois lancé à l’heure indue de 9h53, et sonné par une cloche à la sonorité…euh…clivante. Sortis hors de la taverne pour s’enquérir de la source de ce raffut, les ivrognes décident, l’alcool aidant, d’aller jeter un œil dans le temple de Morr d’où provient ce vacarme.

Dans le temple en question, Otto vient d’avoir une petite discussion avec son père et Père, Ludwik, tout juste rentré d’une veille mortuaire dans l’arrière-pays. Le vieil homme était sur le point de filer une trempe de tous les diables à son fils adoptif pour avoir oublié ses corvées de taillage des cierges, balayage des feuilles et exterminage des rats, qui semblent avoir pullulé en son absence, lorsque le lancement du carillon funeste l’a averti d’un problème bien plus pressant. Un rapide coup d’œil à la crypte, grouillante de vermine et contenant deux cadavres bien mâchonnés par cette dernière, lui a en effet permis de constater que la cloche que les habitants de la ville avaient conservé comme souvenir de leur victoire contre les Skavens il y a dix ans, avait disparu. Pas plus bête que le lecteur de la BL moyen, Ludwik a compris que c’est elle qui sonne désormais, et que c’est son infernal bedeau qui tire sur la corde, dans tous les sens du terme. L’explication de texte entre les deux hommes ne s’est toutefois pas passée aussi bien que le prêtre l’avait espéré, le bossu ayant finalement compris que l’ecclésiastique était son vrai père (qui avait abusé de sa mère), et réglé son complexe d’Œdipe de façon littérale en balançant Ludwik du haut du beffroi, dans un remake essoufflé (le contraire d’inspiré) de Notre Dame de Paris. Car Otto a décidé qu’il était un furry, et compte bien se faire adopter par une nouvelle famille aimante de Skavens, qu’il convoque en faisant sonner la cloche hurlante municipale. Question : pourquoi ? Réponse : La Mer Noire. En tous cas, les ratons ont l’ouïe fine, et la marée murine qui a empli les rues de Nagenhof fait présager du pire pour les braves péquenauds.

Nous faisons alors un crochet dans les égouts de la ville, où une cohorte de Skavens menée par le chef de meute Nikkit Skar se dirige vers la crypte du temple, emportant avec elle le Rat Ogre Mâchecrâne. Vous pouvez oublier ces noms dès à présent, car ils ne reviendront plus de la nouvelle, Skar ayant bouclé son cameo et Mâchecrâne redevenant un Rat Ogre anonyme après cela. Contentons nous de nous préparer à un peu de baston sombre et sinistre.

Du côté des gentils, la bande de Badenov, suivie par Dietrich, est arrivée devant le temple, a constaté l’heure du décès de Ludwik, écrasé sur le pavé, ainsi que l’infestation ratière dont semble souffrir le lieu de culte. Prouvant à nouveau que son supérieur est une andouille, Pieter a la bonne réaction de monter dans le beffroi pour faire cesser le carillon, alors que Badenov souhaitait simplement poursuivre l’état des lieux. Toutefois, l’arrivée de l’avant-garde Skavens met un terme définitif à son projet, et il résout à la place de retenir les hommes rats à l’intérieur du temple en compagnie de Dietrich, pendant qu’Oran, Stanislas et Yuri y mettront le feu pour empêcher les mutants d’envahir la cité. Aussitôt dit… pas tout de suite fait. D’une part car les Nagenhofer ne se laissent pas immédiatement convaincre de la nécessité d’incendier leur patrimoine culturel, et qu’il faut un beau discours inspirant de la part de Stanislas pour les y pousser (l’approche injurieuse d’Oran ayant bizarrement donné des résultats contrastés). D’autre part car, après avoir contenu à grand-peine les premières vagues Skavens, Badenov et Dietrich se retrouvent confrontés à un Rat-Ogre très en colère, ce qui les pousse à une prudente retraite dans le beffroi. Heureusement pour eux, les assaillants sont aussi abrutis que notre héros, et ne profitent pas de l’occasion pour s’échapper du bâtiment en flammes, et préfèrent lancer leur monstre sur les talons des mercenaires. Un escalier qui s’effondre plus tard, Badenov est contraint de laisser Dietrich s’expliquer en tête à tête avec Mâchecrâne pendant que lui essaie de se rendre utile en s’enquérant du silence radio de Pieter. Ce dernier, d’abord surpris et presque garrotté à mort par Otto, a toutefois fini par prendre le dessus sur son assaillant, et l’a pendu par le cou jusqu’à ce que mort s’en suive, mettant fin à ses projets d’adoption. Aidé par son incapable de boss, il parvient à décrocher la cloche infernale de sa poutre porteuse, l’envoyant écraser le Rat Ogre en contrebas juste avant qu’il ne puisse donner le coup de grâce à Dietrich, qui mourra avec la satisfaction du devoir accompli. Ceci fait, il ne reste plus à nos deux loustics qu’à effectuer un petit saut de la foi dans une charrette de foin astucieusement positionnée par leurs comparses pour compléter leur mission, et la ruine totale du temple. Il serait cependant litigieux de revendiquer une victoire totale pour l’Empire, la cloche hurlante ayant cassé les oreilles (et pas que) de Nagenhof n’étant pas retrouvée dans les décombres fumantes le lendemain…

1 : Comprendre qu’il y a beaucoup d’images mais qu’elles sont vraiment pas terribles.

AVIS:

Tristement égal à lui-même, Jonathan Green livre avec La Cloche de Nagenhof une nouvelle aventure des plus insipides de sa bande de mercenaires fétiche. Pénalisée par le manque d’inspiration de l’auteur, qui recycle péniblement un classique de la littérature pour meubler son intrigue, ainsi que par le style lourd de Green (champion du monde des « comme (si) » et « eh bien »), l’histoire ne brille ni par le fond (mais pourquoi est-ce qu’Otto pensait qu’il serait accueilli à pattes ouvertes par les Skavens ?) ni par la forme (mais pourquoi est-ce que Green informe le lecteur que Dieter a perdu sa main en combattant Mâchecrâne dix ans plus tôt seulement deux lignes avant que les deux personnages ne se rencontrent à nouveau1 ?). Comme à son habitude, Badenov se révèle être un abruti fini, guidé par la sagacité de l’indispensable Pieter Valburg plutôt que par ses propres réflexions brumeuses, et quant au reste de sa bande, elle sert essentiellement de décor humain au drame qui se noue à Nagenhof, démontrant les lacunes qu’a l’auteur à faire évoluer un groupe de personnages de façon crédible et intéressante. Tout le monde n’est pas Dan Abnett ou C. L. Werner. En définitive, on retiendra simplement que Jonathan Green pourrait poursuivre Assassin’s Creed en justice pour plagiat du saut de la foi2, et que le titre de l’omnibus collectant les nouvelles de la bande de Badenov, « les damnés et les morts » tire son origine de la remarque que se fait son leader minimo à la fin de La Cloche de Nagenhof. Ce qui n’est pas lourd, certes.

1 : C’était pourtant un moyen facile et efficace de faire monter un peu la tension avant l’affrontement. Si Green avait écrit l’Hérésie d’Horus, on aurait appris que l’Empereur était le père de ce dernier au livre 59, pendant une discussion anodine entre Pépé et ses Primarques dans l’ascenseur les menant au téléporteur du Palais Impérial.
2 : La nouvelle ayant été publiée en 2001, 6 ans avant la première édition du jeu.

ILS L’ONT ECRIT:

La Cloche de Nagenhof_Nuff said

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Les Épées de l’Empire // Swords of the Empire – D. Abnett :

INTRIGUE:

« Cher journalle en pô de shèvre, si je prens la plume aujour dui, bien ke je ne soyes pa un skribhe, mésun chevalié de la Reiksguard, cé ke j’en nai greau et ke le monde doigt savoir. »  Ainsi commence l’histoire narrée par velin caprin interposé par notre narrateur, Jozef von Kassen, qui, pour tromper les longs mois de l’hiver kislévite, s’est mis en tête de chroniquer par le menu les aventures l’ayant amené à squatter avec ses hommes la stanitsa de Kzarla. C’est donc à la chronique d’une chronique, exercice meta en diable, que l’auteur de ces lignes se prête ici, sur un support bien moins classe qu’un parchemin de biquette je le reconnais, mais nécessité fera loi.

Notre récit débute à Altdorf, où von Kassen est chargé par ses supérieurs d’escorter la vadrouille d’Udo Jochrund, maître sorcier du Collège Lumineux et spécialiste de la magie tribale kislévite, sur son terrain de prédilection. Accompagnés d’une vingtaine d’hommes d’armes, notre héros doit assurer la sécurité de sa charge pendant qu’elle recensera les fascinantes traditions chamaniques des peuplades du grand Nord, entreprise qui semble occuper la plus grande partie des étés de Jochrund. Von Kassen, qui est une âme simple, se méfie d’abord des pouvoirs occultes dont son compagnon de voyage dispose, mais la pédagogie dont ce dernier fait usage pour convaincre son protecteur un peu concon qu’il n’a rien à craindre, et la gentillesse manifeste de l’érudit1, finissent par gagner la confiance du soldat. Commence alors un périple long de plusieurs mois, permettant à l’expédition de visiter quantité de communautés kislévites, au lecteur d’apprendre pas mal de choses sur nos personnages (à commencer par l’intérêt fort et sincère que porte von Kassen à tout ce qui à trait aux chèvres2) et sur la culture locale, à Jochrund de collecter des tonnes d’échantillons et de témoignages, et à Abnett de remplir facilement une vingtaine de pages, ou une peau de chèvre entière dans le cas de son héros. Ceci dit, le périple n’est pas sans rencontrer quelques difficultés occasionnelles, comme la fois où les aventuriers ont dû batailler pendant une heure pour repousser l’assaut de brigands locaux, pour un résultat sans appel – mais un peu surprenant si on prend compte la longueur de l’affrontement – de quatre morts à zéro3.

Les choses deviennent un peu plus sérieuses lorsque la petite troupe atteint le village septentrional de Svedora, nommé ainsi à cause du chapeau traditionnel que tous les hommes célibataires avec collier de barbe portent. Eprouvés par des mois de marche à travers les plaine du Kislev, les impériaux ont une allure plutôt miteuse, ce qui mène le krug local à leur barrer la route d’un air menaçant. Von Kassen parvient toutefois à dissiper ce fâcheux malentendu, gagnant la confiance de son homologue, un beau gosse à l’armure et l’épée étincelantes, et à la moustache soyeuse, du nom de Subarin. Accueillis en grande pompe par leurs hôtes, les voyageurs savent qu’il ne leur reste que peu de temps pour faire demi-tour, l’arrivée prochaine de l’automne menaçant de les isoler pour la mauvaise saison dans une stanitsa de troisième ordre. Aussi, c’est avec une lassitude non feinte que von Kassen s’entend réclamer par le sorcier un nouveau délai, pour aller visiter une ultime communauté située à quelques jours de voyage au Nord de Svedora.

Guidés par un trio de guerriers locaux, dont Subarin qui souhaite apparemment concrétiser sa bromance naissante avec von Kassen, les impériaux parviennent à leur destination, Kzarla, mais non sans avoir essuyé une embuscade de la part d’une bande de Kuls agressifs, et perdus quelques membres de l’équipée au passage. Après avoir à nouveau négocié leur entrée dans le village auprès du krug local, les riders de l’extrême sont envoyés crécher dans une yourte à l’extérieur de la communauté, qui est sur le point de célébrer un rituel important pendant lequel aucun étranger n’est toléré intra muros, exception faite de Jochrund et de son assistant, Sigert. Le comportement maniaque de sorcier a cependant alerté von Kassen, et lorsqu’il assiste à ce qui ressemble beaucoup à une procession sacrificielle emmenant une accorte damoiselle locale jusqu’à l’île où se situe le temple local, le preux chevalier ne peut rester dans sa tente à se saoûler au koumiss, comme ses camarades. Faisant fi de l’interdit, il se précipite donc dans le village, épée à la main…

Début spoiler…Ses suspicions se trouvent confirmées lorsqu’il aperçoit Jochrund et Sigert en train d’assister le chamane de Kzarla dans ce qui ne peut être qu’un sacrifice païen de la pauvre vierge droguée. Sans chercher à réfléchir, et comme le vrai GOAT qu’il est, von Kassen interrompt la cérémonie, se saisit de la fille et repart dare-dare vers sa yourte, ayant poussé le chamane dans la flotte gelée et décapité ce fourbe de Sigert au passage, lorsque l’acolyte lui avait planté une dague dans la cuisse. Quant à Jochrund, dont la manie de toujours porter des gants a trouvé une explication logique mais chaotique pendant ce tohu-bohu (les mains du sorcier étaient en fait des griffes), il a écopé d’une javeline de la part de l’estimable Subarin dans la hanche pour sa peine.

La perfidie du sorcier est confirmée par le recueil du témoignage de la donzelle (Mariya), une fois redescendue de son bad trip. Von Kassen apprend ainsi que ce jocrisse de Jochrund a convaincu le chamane local de procéder à un véritable sacrifice – auparavant, les Kislévites se contentaient d’en mimer un, n’étant pas les brutes épaisses pour lesquelles von Kassen les tenait – afin de s’assurer de la réussite d’un rituel de clémence météorologique. Ce qui n’a l’air de rien dit comme ça, mais aurait permis aux hordes de cet obscur chef de guerre du nom d’Arcachon, ou quelque chose comme ça, d’envahir le Kislev et l’Empire plus tôt que normalement possible. Avant de pouvoir alerter ses supérieurs de la duplicité du mage et du grave péril dans lequel le Vieux Monde se trouve, von Kassen doit toutefois négocier un ultime contretemps : l’arrivée d’une large bande de Kurgans convoqués par Jochrund, qui compte bien laver Mariya de tous ses péchés d’un coup de surin enchanté, pour offrir un hiver clément à son boss. Se battant à plus de un contre quatre, le krug local ayant été envoyé chasser le dahut par les manigances de Jochrund quelques jours plus tôt, nos vaillants héros livrent toutefois bataille avec bravoure, perdant la majorité des leurs sous les coups des maraudeurs mais prélevant un lourd tribut parmi leurs assaillants. Alors que tout semblait perdu, le retour inespéré de lanciers ailés de Kzarla scelle la déroute des chaoteux, tandis que Jochrund se fait occire par l’incontournable Subarin d’un revers de sa prodigieuse épée. Il est toutefois trop tard pour que von Kassen et ses survivants puissent faire demi-tour, et c’est ce qui explique le zèle littéraire de notre héros, déterminé à laisser une trace de son passage même s’il devait périr de la grippe saisonnière avant le retour des beaux jours. Voilà un dévouement digne d’éloges.Fin spoiler

1 : Ne jamais sous-estimer le pouvoir du mystérieux sourire de (la) Jochrund.
2 : Ainsi, il prend bien soin de préciser que le départ s’est fait à la St Talve, le patron de l’agnelage, information notable sans aucun doute. Après tout, comme il le dit lui-même : « tout ce qui compte aujourd’hui pour moi peut se mesurer en chèvres ».
3 : À moins que le différent n’ait été réglé par une partie de Blood Bowl, ce qui reste une possibilité.

AVIS:

Dan Abnett poursuit sur la lancée (et les lanciers) des Cavaliers de la Mort avec Les Epées de l’Empire, récit d’aventures dans les steppes du Kislev mettant un noble héros aux prises avec les infâmes forces du Chaos, qui peuvent parfois revêtir des traits familiers. Parvenant à nouveau à embarquer le lecteur dans l’exotisme de cette civilisation méconnue sous bien des aspects, l’auteur combine avec maestria action trépidante, intrigue satisfaisante et immersion fluffique poussée. C’est propre, c’est net, c’est Abnett à son meilleur en matière de nouvelles siglées Warhammer Fantasy Battle, et en plus, c’est traduit en français : que demande le peuple ?

ILS L’ONT ECRIT:

Les Epées de l'Empire_Nuff said

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Voilà qui conclut cette chronique long overdue, comme disent nos amis anglais, d’un recueil historique de nouvelles WFB, qui a plutôt bien accusé le passage des années, si vous voulez mon avis. Passée l’adaptation que nécessite le « retour » à la VF, j’ai trouvé la traduction d’un niveau satisfaisant, bien loin des scories et coquilles fréquentes dans les ouvrages contemporains. Merci à la Bibliothèque Interdite1 d’avoir réalisé un travail sérieux à ce niveau, le contraire ayant pu avoir des conséquences fâcheuses pour le plaisir de lecture. Quant aux nouvelles en elles-mêmes, elles sont majoritairement d’un bon niveau (je vous laisse soin d’identifier les deux exceptions), et permettent de découvrir ou s’immerger dans l’univers sauvage, sombre et malgré tout héroïque, du Monde qui Fut à travers la prose de quelques uns des auteurs les plus doués de la Black Library de l’époque, et aux côtés des têtes relativement connues du Vieux Monde que sont Mathias Thulmann, Zavant Konniger et la bande de Badenov. Si vous êtes nostalgiques du fluff du premier jeu de batailles fantastiques de Games Workshop, et que vous souhaitez vous payer une petite virée dans cet attachant panier de crabes (chaotiques, pour certains), ce petit opus vaut définitivement les quelques euros pour lesquels on peut le trouver d’occasion. Et si vous êtes nouveau sur l’axe Altdorf-Talabheim, Les Epées de l’Empire peut constituer une bonne introduction à la production littéraire dont le Vieux Monde a bénéficié avant sa fin malheureuse, et vous donner envie d’aller plus loin avec vos auteurs favoris de l’anthologie2. Bref, une vieillerie comme on les aime, qui s’est bonnifiée avec le temps et la destruction de sa franchise d’origine pour gagner une délicate patine de nostalgie. Vous m’en lirez des nouvelles !

1 : Ou plutôt Kaneda, créditée pour la traduction de cet ouvrage sur la page de garde.
2 : Malheureusement, si vous ne lisez pas l’Anglais, le choix se réduira à ‘La Marque de la Damnation’ de James Wallis, ‘Mort ou Damné’ de Jonathan Green, et/ou ‘Les Cavaliers de la Mort’ de Dan Abnett. Le dernier est un vrai classique ceci dit.

 

INFERNO! [N°1]

Bonjour et bienvenue à tous dans la critique de ce premier numéro d’Inferno!, nouvelle mouture! On peut parler de retour aux sources pour la Black Library, qui reboote le magasine avec lequel tout a commencé pour elle, il y a un peu plus de vingt ans maintenant. Plus costaud que son petit frère en termes de contenu, un peu comme le Primaris à gode-ceinture de la couverture l’est pour le Space Marine lambda, cette version d’Inferno! joue également uniquement la carte de la prose: pas de comics, cosplay, carte, croquis ou chronique (c’est la maison qui régale sur ce dernier point, ne vous inquiétez pas) au menu cette fois, rien que de la nouvelle, mais par paquet de douze (onze en fait), excusez du peu. Dans la série des interdits littéraires, notons également l’absence de soumissions rattachées à l’Hérésie d’Horus, qui confirme par ce fait son statut de franchise d’exception dans le portefeuille de la BL.

Ces différences évoquées, il convient également de s’attarder un peu sur une caractéristique majeure de l’Inferno! initial, que l’on retrouve à nouveau dans la séquelle (et c’est heureux, si vous voulez mon avis): la publication de textes proposés par d’illustres inconnus, pour peu que la BL les juge d’un assez bon standing. L’occasion de découvrir les talents de demain, et, parfois, de faire de plaisantes et rafraichissantes lectures, bien éloignées des canons stylistiques de la maison (le fameux TGCM, c’est à dire Thorpe-Green-Counter-McNeill). Là où Hammer & Bolter et ses Hot New Talents s’était montré finalement assez conservateur dans son approche, privilégiant généralement les valeurs sûres par rapport aux impétrants, Inferno! joue lui franchement la carte de la nouveauté, avec pas moins de sept rookies crédités au sommaire, encadrés par les confirmés David Annandale, Josh Reynolds et Guy Haley. Alors, lecteur, que peux-tu attendre pour tes dix balles d’écot? Bien des choses, bien des choses en effet…

#1 - Cover

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The Unsung War –  Annandale :

The Unsung WarAnnandale propose un huis clos entre trois factions de 40K dans les entrailles du vaisseau impérial Summons of Faith. À ma droite, l’équipage du cargo, partageant tous une élégante calvitie et hébergeant gracieusement un gang de voleurs de Gênes. À ma gauche, une cabale Drukhari qui faisait du stop le long de l’Immaterium et a sournoisement investi les lieux quand le pilote du SoF a dû ralentir pour négocier un virage en épingle (tout est possible dans le Warp). Et au milieu de ce conflit latent entre propriétaires et locataires, trois honnêtes citoyens de l’Imperium, auxquels il reviendra la lourde tâche de calmer les ardeurs belliqueuses de leurs compagnons de croisière : Sebastia Hoven, alias le Rat (ou la Rat(t)e, l’anglais n’est pas clair à ce sujet), SDF kleptomane dont le plan de carrière a jusqu’ici consisté à passer incognito de vaisseau en vaisseau en volant et revendant des cure dents et du papier toilette au passage, et les frères Bogdanov du 41ème millénaire, c’est-à-dire le sergent Primaris Ultramarines Aetius et son sous-fifre Calenus, derniers rescapés d’une escouade d’Intercessors ayant eu le malheur de se lancer dans la purge du Summons of Faith au moment de l’arrivée impromptue des Eldars Noirs, et s’étant retrouvée dépassée par la tournure des évènements.

Notre histoire commence par la libération des deux Über Schtroumpfs par une Hoven dont la capacité à ouvrir des portes et à se matérialiser à côté des consoles de contrôle de manière aussi infaillible qu’instantanée jouera un grand rôle tout au long de la nouvelle. Terrifiée à égales mesures par les groupies de la Grande Dévoreuse et ceux de la Grande Avaleuse, la Rate, qui a assisté à la défaite et la capture des Ultramarines, décide en effet de la jouer comme Guilliman, comptant sur les gros biscotos de Cubitus et Jean-Claude Dusse pour la tirer d’affaire. Sitôt libérés de la cale où leurs geôliers les avaient remisés, et ayant repris possession de leurs fidèles carabolters (obligeamment localisés par une Rate décidément très bien informée), Rambo et son frère mettent au point une stratégie pour triompher de leurs adversaires malgré le très net désavantage numérique avec lequel ils doivent composer. Leur plan, d’une imparable simplicité, consiste à libérer l’équipage et leurs mascottes Xenos, eux aussi confinés dans la soute après le putsch des Drukhari, et de profiter de l’explication de texte qui ne manquera pas de s’en suivre pour achever les survivants de l’algarade.

Joignant l’action à la réflexion, Olibrius et Cirque Arlette Grüss pètent quelques cloisons à coups de bombes à fusion et partent s’embusquer à proximité de la salle de commandement. Ils n’ont pas à attendre longtemps avant qu’une horde de chauves, pas vraiment souriants, ne fasse son arrivée sur les lieux, insulte à la lèvre et acte d’expulsion à la main. En face, les scions de Commoragh, guère disposés à quitter leur Blablacar avant d’être arrivés à bon port, ont d’abord la partie facile, mais l’arrivée opportune de Château Petrus et Canal + et leur ciblage exclusif des Drukhari, ont tôt fait de rétablir l’équilibre des forces. Experts consommés du micromanagement en STR, sans doute grâce à toutes ces soirées passées en LAN sur Starcraft III, nos héros s’assurent qu’aucun camp ne prenne un trop grand ascendant sur l’autre, et retournent leurs vestes (énergétiques) avec un art consommé, ce qui ne les empêche pas de se retrouver en difficulté lorsque Papi Eugène Stiller (beaucoup moins sympa que son arrière-grand-père Ben) décide de passer une tête, puis un bras, puis deux, puis tous, à travers l’intégrité physique des galopins qui tourmentent sa smala. Littéralement éreinté par les fougueuses attentions du One-Man Chauve, Aetius doit se résoudre à jouer son joker (énergétique) pour mettre fin à la partie : à son appel plein de mâles accents, la Rate se téléporte sur le pont, et appuie sur le bouton « toit ouvrant » de la console. Même si on peut se demander pourquoi une option aussi incongrue avait été prise par le commanditaire du Summons of Faith (sans doute une petite mamie du Segmentum Obscurus abusée par un télévendeur peu scrupuleux), force est de constater que le résultat est des plus spectaculaires : comme dans la conclusion de la moitié des films de la série Alien, les odieux antagonistes sont catapultés dans les profondeurs stygiennes et glacées de l’espace infini, laissant nos héros seuls maîtres de la situation1. Hosanna, Magnificat et Biscopea, loué soit Lampe Erreur.

Les hasards de la vie ont fait que The Unsung War a été ma première rencontre littéraire avec les Space Marines Primaris. Après des dizaines de romans et nouvelles à la gloire du « simple » Space Marine lus au fil des ans, j’étais curieux de découvrir le traitement réservé par la Black Library au grand cousin de la tête de gondole de Games Workshop. Tout l’enjeu, de mon point de vue, était de montrer à la fois la proximité et l’altérité de ces deux versions du même modèle, comme cela avait été fait (parfois) entre Astartes « trentistes » et « quarantistes » via les publications de l’Hérésie d’Horus (voir par exemple Bloodline de James Swallow). Présentés dans les Codex et suppléments comme des Super Marines, plus grands, plus forts, plus résistants, mieux armés et équipés que leurs petits frères, les Primaris ne seraient-ils qu’un simple upgrade de ces derniers, ou une différence peut-elle également se percevoir au niveau psychologique (ce qui serait beaucoup plus intéressant que trois organes surnuméraires et un bolter qui tire plus loin, dans l’absolu) ? Dire que je préfère réserver mon jugement définitif sur la question après avoir pu lire d’autres travaux que celui du sieur Annandale suffit je pense à vous donner une idée de ce que j’ai pensé de sa soumission. Comment expliquer ces débuts poussifs ?

À mon sens, c’est la compréhension même d’Annandale de ce qu’est un Astartes (goût vanille ou goût stéroïdes) qui a pêché, état de fait à partir duquel il n’était tout simplement pas possible de bâtir quelque chose de correct. Sans connaître à fond le corpus du bonhomme (mis à part The Carrion Anthem Hammer & Bolter #11, guère folichon il faut le reconnaître, et au cours duquel il s’était déjà illustré par une utilisation assez contrintuitive du fluff établi), ce que j’ai pu lire dans The Unsung War ne le qualifie pas comme docteur es Spacemarinologie. D’un point de vue physique, tout d’abord, les héros d’Annadale se révèlent assez inconstants, capables de tenir tête à un Patriarche Genestealer à un moment, et infoutu de tenir en respect une doublette de Cérastes sans se faire perforer les poumons (et même s’ils en ont trois, ce n’est jamais agréable) à un autre. Leur plus haut fait d’armes de la nouvelle restera d’ailleurs le massacre de quelques serviteurs de réparation lobotomisés, seuls ennemis contre lesquels un clean sheet sera préservé. On remarquera également la non-utilisation des glandes de Betcher par Aetius et Calenus en début de récit, pourtant placés par l’auteur dans une situation (enfermés, désarmés mais laissés sans surveillance) où le recours à cet organe kikoolol était tout indiqué par le Codex.

C’est cependant au niveau mental que les Primaris d’Annadale détonnent le plus. Leur manque cruellement le fanatisme propre aux Astartes, qui aurait pu être moindre que celui des Space Marines classiques, formatés par dix millénaires de lutte implacable pour la survie de l’humanité, quand une certaine « candeur » de la part des nouveaux-venus Primaris n’aurait pas été déplacée, mais pas totalement absent tel qu’il semble l’être dans The Unsung War. Car c’est bien simple, à aucun moment Annandale ne parvient à faire transparaître un tant soit peu de zèle chez ses protagonistes, préférant l’approche scientifique (« il y a trop de variables en jeu pour pouvoir calculer nos chances de succès »), pince sans rire (« ils n’ont pas aimé ça » « alors ils aimeront encore moins ça ») ou fataliste (« laissons-nous mourir de froid dans l’espace au lieu de chercher à rejoindre la capsule d’évacuation et nous mettre en catalepsie pour ralentir l’action des toxines Drukhari, dans l’espoir que nous soyons retrouvés par le Chapitre »). Ajoutez à cela une nette propension de l’auteur de faire parler ses Ultras pour ne rien leur faire dire d’intéressant, et vous obtenez un honnête script de série B d’action, ce qui est un franc gâchis du potentiel intrinsèque de 40K en termes de construction narrative. Finalement, il n’y a que la Rate qui vienne (un peu) relever le niveau du casting, et encore, seulement lors de son introduction par Annandale, qui met en lumière un aspect intéressant, mais assez peu exploité par les auteurs de la BL (Ancient History d’Andy Chambers étant l’une des rares – à ma connaissance – exception à cette règle) du 41ème millénaire : la vie des milliards de serfs navaux (à ne pas confondre avec les cerfs-volants) nécessaires au bon fonctionnement de la flotte impériale. Malheureusement, une fois la libération des Primaris acquise, notre sympathique rongeur sortira largement du cadre, et ne fera plus office que de Deus Rattus ex Machina1 par la suite.

Enfin, on peut aussi s’amuser à relever quelques bourdes éparses de la part d’un Annandale qui faute tantôt par manque de cohérence (comme ces cultistes qu’il présente comme soucieux de reprendre le pont sans l’endommager… et qui arrosent les Drukhari au lance-missile), tantôt par manque de connaissance nerdique (c’est bien beau de mentionner les points de Geller, mais si c’est pour permettre l’abordage d’un vaisseau par un autre pendant qu’ils sont dans le Warp, ça ne relève pas vraiment le niveau). Parfois, tirer sur l’ambulance est le meilleur moyen d’abréger les souffrances d’un patient condamné.

Finalement, The Unsung War n’a pas grand-chose à apporter au lecteur que quelques scènes d’actions potables dans lesquelles figurent des Space Marines, qui se trouvent être des Primaris. Comme ce type de littérature se ramasse à la pelle dans les publications BL, on ne peut pas dire que cette soumission ait un quelconque intérêt, aficionados d’Annandale exceptés. Vous valez mieux que ça, ami lecteur.

1 : Grâce à leurs semelles magnétiques pour Carte à Puce et Ingérence Russe, et grâce à un trou de ver scénaristique pour la Rate, qui s’est glissée dans des passages bien plus étroits dans sa jeunesse, merci pour elle.

2 : On peut se demander, si on veut vraiment pousser le Dav’ dans ses retranchements de scénariste, pourquoi les Primaris se sont embêtés à participer à la baston sur le pont du Summons of Faith, une fois les cultistes sortis de leur quarantaine forcée. Il leur suffisait d’attendre que la Battle Royale soit engagée pour envoyer Hamtaro appuyer sur le bon bouton, au plus fort des combats.

No Hero – McLean :

Engagé dans une campagne désastreuse contre les Orks sur le monde jungle de Vardan IV, le 45ème Reslian reçoit l’ordre tant attendu de l’évacuation du redéploiement de la part du haut commandement, au grand soulagement de notre narrateur (surnommé Boy par ses camarades, peut-être à cause de son jeune âge – 19 ans – mais plus sûrement parce qu’il doit s’appeler Georges) et de ses comparses de la compagnie D. Cette dernière joue cependant de malchance lorsque la Valkyrie-taxi qui devait les transporter jusqu’au spatioport survole une bande de Frimeurs peu fans de Wagner, qui ont tôt fait de transformée la chevauchée en concassée. Ayant survécu au crash avec une poignée d’autres Gardes, Georges entame sans grand enthousiasme son « Rendez-Vous en Terre Inconnue » personnel, les petits aléas de ce genre de trek (chaleur étouffante, pluie constante, boue omniprésente, faune agressive, pièges à cons à base de grenades, scouts incompétents, blagues lourdingues de Frédéric Lopez…) ayant tôt fait de lui courir sur le haricot. Le comble est atteint lorsque nos Mike Horn en herbe se retrouvent embusqués par quelques éclaireurs Orks, rencontre pas vraiment amicale, qui verra toutefois la brute du groupe (Lopata) s’illustrer en un contre un face à un adversaire de son gabarit. Après toutes ces avanies, c’est avec un soulagement non feint que l’ultime quatuor de survivants finit par débouler, de manière totalement fortuite, sur un village humain perdu au milieu de rien. Joie. Ayant abandonné tout espoir d’être secouru par leurs frères d’armes (car la Garde meurt mais ne se rend pas à Ban Kha – en même temps, c’est loin –), les Reslians décident de défendre leurs hôtes jusqu’à la mort… avant de changer d’avis lorsqu’une Valkyrie se décide à pointer le bout de son fuselage. À quoi tient l’héroïsme désintéressé de nos jours, je vous jure. Alerté par un tir de fusée de détresse, l’appareil se pose et repart aussi sec avec nos héros. Tous ? Non. Tel l’irréductible gaulois qui fut peut-être son lointain aïeul, Georges a décidé d’honorer son serment, et est donc resté sur place, prêt à donner sa vie pour la défense de cette insignifiante communauté humaine. En tant que Garde Impérial, pouvait-il faire autrement1 ?

No Hero est une publication intéressante à plus d’un titre. Le choix de McLean d’utiliser la première personne pour relater son récit, choix assez peu usité par les auteurs de la BL, apporte une fraîcheur indéniable à l’exercice, et son style dénote également assez fortement des canons habituels, sans qu’il me soit possible de mettre le doigt sur une caractéristique particulièrement distinctive de ce dernier. C’est tout simplement différent à la lecture, sans que cette variation soit rédhibitoire, et c’est donc assez appréciable. Logique, me direz-vous, pour une revue comme Inferno!, qui publie les travaux de nouveaux venus, pas forcément imprégné (encore) du « BL-style » que l’on retrouve assez largement dans le corpus de la maison d’édition. D’autant plus logique que Peter McLean, présenté dans l’introduction de No Hero comme un auteur établi, dispose d’un pedigree déjà assez fourni (séries War for the Rose Throne et Burned Man). Ce n’est pas de l’Asimov ou du Lovecraft, certes, mais ce n’est pas du McNeill ou du Kyme non plus, et c’est déjà pas mal.

On peut également créditer McLean de quelques efforts en matière de character development, en particulier pour le personnage de Lopata, dont la dualité, progressivement révélée (il commence comme un pseudo Bragg, il finit comme lookalike Gilbear) ajoute du piment à l’intrigue. Sur un format aussi court, l’effet ne joue certes pas à plein, mais cette capacité à approfondir ses personnages est un bon point indéniable pour McLean, à garder en tête si le sieur se lance dans des travaux plus conséquents pour le compte de la Black Library.

À côté de cela, le propos couvert dans cette nouvelle est d’une banalité assez consommée, et donc guère mémorable pour lui-même. Le canevas du groupe de Gardes Impériaux en perdition sur un monde jungle hostile n’est en rien inédit (et on peut remonter jusqu’au Devil’s Marauders de Bill King – 1990, tout de même – pour s’en convaincre), et si l’approche « Platoonesque » choisie par McLean ajoute un peu de singularité à l’ensemble, un scénario un peu plus original n’aurait pas desservi la nouvelle, loin de là. Bref, une première soumission respectable, mais perfectible, qui m’a donné l’envie de pratiquer à nouveau le bonhomme à l’occasion, afin de voir comment il a transformé l’essai.

1 : Ce n’est pas pour jouer les rabat-joie, mais il est quasiment certain qu’il est plus bénéfique pour l’Imperium de récupérer un soldat, qui pourra être redéployé sur un autre champ de bataille et contribuer de cette façon à l’effort de guerre, plutôt que de retarder de 0,0000000000001% l’avancée d’une horde Orks grâce au sacrifice dudit soldat. Comme quoi Georges aurait dû accepter de retaper sa 3ème SEGPA et persévérer dans ses études plutôt que de s’engager dans la Garde. Stay in school kiddos.

The Path to Glory – Dicken :

Il y a des nouvelles dont la lecture vous dépayse plus que d’autres, et The Path to Glory d’Evan Dicken fait définitivement partie de ce genre de soumissions qui tirent le lecteur de sa zone de confort narratif. Bienvenue dans l’empire Lantique, au moment où ce dernier livre la plus grande bataille de son histoire contre les hordes assoiffées de sang d’Azakul the Winnower (soit, très littéralement, Azakul le Vanneur, ça c’est un patronyme à potentiel). Comment, qu’entends-je ? Vous n’avez pas la moindre idée de ce qu’est l’empire Lantique, et le nom d’Azakul ne vous évoque qu’une vague sensation de déjà lu (spoiler alert, vous confondez avec Asavar Kul) ? Cuistres que vous êtes. Les gens de bonne société savent tous que Lantia ( ?) était un royaume humain du plan de Chamon, dont l’avance technologique et la maîtrise de la metallarcanie (you know what I mean) ne furent pas suffisants pour résister aux assauts chaotiques, bien aidés il faut le reconnaître par la défection des Fyreslayers alliés de l’Empire et la destruction par ces derniers de la Ceinture d’Orvapeur (Gilded Steamgrid), qui avait défendu le domaine des humains pendant des siècles. Allez donc, maroufles, tout le monde sait ça.

Nous suivons donc, au cours de cette longue nouvelle (52 pages tout de même, soit le format novella de la BL), les dernières heures du malheureux empire, tel que vécues par trois de ses sujets. Honneur aux dames, nous commencerons donc par présenter le capitaine Sulla, officier dans les Légions Lantiques, et propulsée commandante des dernières forces armées de l’Empire à la suite du tragique décès de tous ses supérieurs, impératrice Xerastia comprise1. Survivante éprouvée par les combats, mais déterminée à faire son devoir jusqu’au bout, Sulla mène les restes de l’armée Lantique jusqu’à Uliashtai, cité du stuff et de l’embrayage (City of Gear), bastion de l’ordre doré, dont les sortilèges millimétrés ont réussi à maintenir en respect les suivants du Vanneur (car c’est bien connu, les métalleux n’ont pas d’humour).

À Uliashtai, soumise à un siège interminable par Skayne Bloodtongue et sa cabale de sorciers, nous faisons la rencontre du mage Kaslon, courageux mais pas téméraire, et prompt de ce fait à déserter le champ de bataille lorsque la savante géométrie arcanique de l’ordre est prise en défaut par un nouveau maléfice de Bloodtongue, avec des résultats pour le moins corrosifs. Unique survivant du carnage, Kaslon passe en coup de vent à la Tour d’Argent, QG des mages dorés, et prend connaissance du dernier message reçu par les maîtres de l’ordre, les alertant de la chute de l’Empire et les enjoignant à fuir avec leurs concitoyens jusqu’au portail menant à Azyr, pour se mettre sous la protection de Sigmar. Abasourdi par la nouvelle, Kaslon se ressaisit cependant vite et pense à aller looter la réserve d’artefacts trotrokwioul des métalleux, dont il ressort avec un magnifaïk bâton de cristal, aussi mystérieux que badass. Lui aussi mis par le destin à la tête de son peuple, il réussit à organiser l’évacuation rapide de la cité condamnée en direction du palais de l’Autarque, siège du pouvoir temporel d’Uliashtai et unique accès au tunnel menant à ce fameux portail. Il peut en cela compter sur le précieux soutien de Sulla et de ses troupes, arrivées juste à temps pour claquer le beignet de l’avant-garde chaotique, et la porte de la ville au nez crochu de Skayne.

C’est enfin dans le palais de l’Autarque, ravagé par une peste à l’efficacité toute biactolique (comprendre qu’elle a éliminé 99,9% de la population) que s’éveille notre troisième protagoniste, répondant au nom de Livius. Fils indigne d’une famille noble disgraciée, Livius peut toutefois se targuer d’être l’Empereur légitime d’Uliashtai, le décès impromptu du monarque précédent et des 1298 prétendants mieux placés que lui à la succession au trône de fer/bronze/plomb/palladium brossé ayant laissé le chemin vers le pouvoir grand ouvert. Ayant également hérité d’un sabre enchanté, Fléau des Veuves2 (Widowbane) suite au décès de ses chers ascendants, dont une mère castratrice dont il ne pourra s’empêcher de mutiler le cadavre au passage (hmmmm… okay), Livius se montrera rapidement utile à la progression de l’intrigue en ouvrant les portes du palais de l’Autarque à son peuple, chose que seul l’Empereur régnant peut accomplir, pour des raisons mystico-logiques. Soit. Laissé durement éprouvé par ce fait (que je ne qualifierai pas de haut, car faut pas déconner non plus), Livius est ramené à la vie par Kaslon et Sulla, et tous trois finissent par conclure que la seule option qui s’offre aux ultimes survivants de l’empire est de fuir vers le portail d’Azyr, en refermant les portes du palais pour gagner un peu de temps, même si cela revient à condamner les derniers réfugiés à un tête à tête avec Skayne et Sbarbie. Comme on dit chez les Papous, Fosse quille faux.

La suite de l’histoire verra nos trois héros mener leur colonne de survivants jusqu’au (possible) salut représenté par ce fameux portail vers Azyr, alors même que les forces de Skayne et d’Azakul se rapprochent pour la curée. Pour ne pas spoiler la fin de cet épique The Path to Glory, je m’arrêterai ici, mais sachez tout de même que vous risquez de finir le récit avec une image un peu différent de ce cher Sigmar, qui n’apparaît pas ici sous son meilleur profil (qu’il a aquilin), ce qui est tant mieux, si vous voulez mon avis.

Pour un début, c’est un beau début. Le newbie Dicken fait plus que servir la soupe ou se compromettre avec une Space Marinade réchauffée au micro-ondes, tenez-le-vous pour dit. Le choix de s’embarquer dès son galop d’essai dans une saga mêlant batailles, magie, exploration du background des Royaumes Mortels au temps de l’Âge du Chaos, et réflexion, certes classique, mais pas mal menée, sur le thème « l’enfer (ou en Chamon, l’en fer) est pavé de bonnes intentions », aurait pu se solder par un pataquès littéraire, boursoufflé et incohérent, mais force est de constater que le gars Evan réussit à mener sa barque avec un talent consommé. On ne s’ennuie pas à la lecture de The Path to Glory, que ce soit en découvrant la civilisation Lantique à travers le prisme de sa chute sous les assauts chaotiques, ou en suivant le cheminement de nos héros vers leur destinée, qui pourrait être tout autre que celle qu’ils envisageaient. Rien de bien neuf sous le soleil de ce point de vue, mais du moment que l’exécution est bonne, et ne sombre ni dans la caricature, ni dans la vacuité, il n’y a pas à bouder son plaisir. On pourrait même prêter à Dicken une finesse supplémentaire dans sa construction du récit, en plaçant la trajectoire de chacun de nos protagonistes sous le patronage de l’un des trois Dieux du Chaos « survivants », les aptitudes, tempéraments et péripéties vécues par Sulla, Kaslon et Livius – personnages d’une richesse appréciable, tout comme leurs némésis Skayne (a.k.a. Bad Santa) et Azakul (« Jonah Hill, sort de cette armure du Chaos ») – permettant d’établir ce genre de passerelles sans trop de difficultés. Il serait intéressant que l’auteur donne une suite à cette novella pour constater si cette hypothèse se vérifie. Bref, un coup d’essai de fort belle facture pour Evan Dicken, et un nom qui mérite d’être suivi dans les mois à venir, si j’en suis juge.

1 : Cette dernière, vainqueur du concours d’hardcore limbo improvisé par Azakul en plein champ de bataille, gagna un billet pour le monde merveilleux d’Azyr et un beau masque doré pour sa peine.

2 : Ça tombe plutôt bien, l’alcoolisme mondain de Livius lui avait également gagné le surnom de Fléau des Veuves Clicquot, ce qui est presque pareil, reconnaissez-le.

A Common Ground – Brooks :

Quelque part dans l’immensité bétonnée de Necromunda, dans l’arène gladiatoriale tenue par nul autre que le tristement célèbre Drost Khouren, un free for all suit son cours sous les ovations et rugissements d’un public conquis. Parfaitement dans son élément, notre héros, le combattant Goliath Jaxx, livre un masterclass de MMA et se débarrasse de ses adversaires les uns après les autres avec un talent consommé, dans l’espoir de cimenter son statut de challenger incontournable à Graw Hammerhand, champion en titre de l’arène, que Jaxx aimerait délester de sa ceinture (si tant est qu’on utilise des ceintures pour marquer les titres au 41ème millénaire, mais c’est un autre débat). Ayant réussi à mettre aux tapis ses petits camarades de jeu sans recourir à sa précieuse dose de stimms, Jaxx se prépare à en finir avec sa dernière adversaire, Malady Kaw, en passant à son tour en bullet mode. Malheureusement pour notre champion, c’est en boulet mode qu’il finit après avoir lancé l’injection, la faute à la dose frelatée remise par un Khouren préférant de loin faire durer la rivalité entre Jaxx et Graw pendant encore quelques mois plutôt que de laisser Big J. s’expliquer en tête à tête avec l’autre Gros.

De boulet à boulette, il n’y a qu’un pas (et deux lettres), et c’est dans l’état de cette fameuse spécialité suédoise que Jaxx s’éveille dans l’infirmerie de l’arène. Encore sonné par son bad trip et les touchantes attentions de Miss Kaw, il reçoit la visite d’une mystérieuse inconnue, qu’il avait aperçu aux côtés de son bon ami Khouren dans la loge présidentielle gouvernementale. Cette dernière, une Navigatrice répondant au nom de Chettamandey Vula Brobantis (Chetta pour les intimes et les Goliaths mous du bulbe comme Jaxx), vient proposer un marché au philistin déconfit: combattre dès le lendemain, et s’arranger pour faire mordre la moquette à son cher mari, en malheureuse victime collatérale du meurtre du fourbe Khouren par un Jaxx ivre de revanche et une balustrade trop basse pour empêcher ce dernier de lui tomber sur le râble comme la Pourriture de Nurgle sur Espandor, en échange de la prise en charge de la famille du berserker par la commanditaire du regrettable incident après l’inévitable décès du gladiateur. Ayant pesé ses options et conclus qu’il n’avait plus grand chose à perdre, Jaxx le Fataliste accepte le deal. Mais a-t-il raison de faire confiance à sa nouvelle meilleure amie ?

Mike Brooks livre avec A Common Ground une nouvelle dont l’intrigue minimaliste est contrebalancée par une exécution parfaitement maîtrisée, tant au niveau de la narration que du respect du fluff, assez spécifique sur certains aspects, de Necromunda et de 40K. En plus de décrire de manière à la fois prenante et “intellectualisée” le chaos d’une battle royale gladiatoriale, où tous les coups sont permis mais où la stratégie est également de mise de la part des combattants qui veulent avoir une chance de triompher, il se paie le luxe de mettre en relief de façon intéressante la condition du Goliath moyen (2m07 pour 136 kgs, donc), colosse cultivé en cuve et destiné à un prompt trépas, et cherchant par tous les moyens à donner un sens à sa courte existence. Pas mal du tout pour une première incursion dans les ténèbres de notre lointain futur, donc.

The Emperor’s Wrath – Fischer :

Sur l’agrimonde d’Halcyon, Caius et ses jeunes frère et sœur Remus et Rhea, laissés orphelins par le meurtre de leurs parents dix ans plus tôt par une milice pas très Charlie baptisée la Fureur de l’Empereur (The Emperor’s Wrath), cherchent à s’exfiltrer discrètement à la suite de l’arrivée en orbite d’une flotte impériale. Animé, et c’est compréhensible, d’une haine farouche envers l’Imperium, qu’il tient responsable de ses malheurs, Caius compte sur ses relations avec un trafiquant notoire possédant un vaisseau à même de percer le blocus impérial (non, ce n’est pas Han Solo) pour fausser une fois pour toute compagnie aux sbires de Pépé. Manque de bol, le trio arrive trop tard dans la planque du contrebandier, et est accueilli par le cadavre de ce dernier et de son équipage, avant que Caius ne fasse connaissance avec la crosse d’un fusil laser et se réveille attaché à une caisse et tout prêt à subir lui-aussi la fureur2 de l’Empereur.

Sauvé par l’arrivée opportune d’une escouade de survivants du 1109ème Cadien, qui a tôt fait de renvoyer les amateurs de la FdE à leurs chères études, Caius, d’abord franchement hostile envers ses bienfaiteurs du fait de leur allégeance au Trône de Terra, a la surprise d’apprendre que ces derniers sont des frères d’armes de son défunt paternel (l’Imperium est un village, vraiment), et qu’ils sont sur place pour reprendre la planète aux vilains Furieux, qui malgré leur nom ne sont autres qu’une faction chaotique. 30 ans de thérapie en perspective pour notre héros, qui réalise que l’Empereur est finalement le gentil de l’histoire, en contradiction avec ce qu’il avait cru pendant toute sa vie. Heckin bamboozled. Par solidarité envers les rejetons d’un ancien camarade, les Cadiens acceptent obligeamment de prendre la marmaille sous leur aile et de les accompagner jusqu’au spatioport d’Halcyon, où ils pourront être évacués vers une planète plus funky. Cependant, la route jusqu’à la fin du niveau ne sera pas une promenade de santé, d’autant plus que l’Empereur semble être bel et bien présent sur Halcyon, et qu’il est effectivement plutôt énervé…

Introduite comme une réflexion habile sur la manière dont les croyances et idéaux d’un individu peuvent et doivent être mis en perspective de la compréhension, parfois limitée, que ce dernier a de sa situation (tournure alambiquée #1), The Emperor’s Wrath rencontre beaucoup de difficultés à honorer cette promesse, et se contente pour la majeure part d’être une banale nouvelle de GI Joe(s) vs cultistes pas bô. Le mètre étalon en la matière restant le gars Abnett et ses Fantômes de Gaunt, dont Fischer s’inspire de façon peu inspirée (un comble), le lecteur vétéran de la BL ne trouvera guère d’intérêt dans cette nième resucée d’un topos éculé de la littérature 40Kesque (tournure alambiquée #2). Il aurait été à mon avis plus intéressant de limiter la partie action pure et dure de la nouvelle à sa portion congrue, et dédier le gros de cette dernière à la confrontation de points de vue entre un Caius méprisant l’Imperium pour les mauvaises raisons, et découvrant peut-être de meilleurs motifs d’ire au contact des survivants de Cadia, et le prosélytisme impérial, peut-être un peu ébranlé par le destin de leur monde, mais toujours chevillé au corps, de ces derniers (ouaaaaais, le hat trick des tournures alambiquées!). McNeill avait, de l’opinion générale (je n’ai pas, au moment de l’écriture de ces lignes, lu le bouzin) plutôt réussi son coup avec cette approche “intellectuelle” dans The Last Church, développement d’une idée somme toute assez proche de celle servant d’argument à The Emperor’s Wrath: il y avait à mon avis largement la place pour Fischer de s’inscrire dans cette logique. Ce n’a pas été le cas, tant pis.

Waking the Dragon – J. Reynolds :

Qui eut cru trouver une nouvelle se passant dans le Monde qui fut dans la nouvelle version d’Inferno! ? Certainement pas moi, qui m’attendait à une répartition entre travaux 40K et AoS (avec peut-être un peu de Blood Bowl pour épicer l’affaire), du fait de la disparition de WFB des tablettes de GW depuis plus de 3 ans au moment de la publication de ce numéro. C’était cependant sans compter sur le zèle nécrophile de Josh Reynolds, auteur Battle des plus dévoués à sa franchise de cœur, dont il a porté haut les couleurs depuis son introduction dans l’écurie BL, via ses piges (nombreuses et de bonne qualité) pour Hammer & Bolter, avant de lourdement contribuer à la destruction du Vieux Monde en tant que rédacteur de deux des tomes The End Times (dont le dernier de la série, The Lord of End Times, ultime clou dans le cercueil de WFB). Brûle ce que tu as adoré, etc… C’est d’ailleurs justement dans la tempête avant le dernier des calmes que Josh nous replonge, avec un inédit The End Times consacré au duo burlesque et billesque le plus en vue des Montagnes Grises : Heinrich Kemmler et Krell.

Notre propos débute par une nuit froide dans les ruines du village bretonnien de Blenois, où K&K ont organisé une petite réception à destination de cet empêcheur de réanimer en rond de Tancred, duc de Quenelles de son état et harceleur de nécromancien par passion. S’étant employé à massacrer la populace (pour Krell) et à construire des gibets où les cadavres de cette dernière ont été accrochés comme autant de lampions (pour… Kemmler, I guess ?), notre binôme attend l’arrivée de leur Némésis avec un enthousiasme non feint, mais qui finit par retomber (pour Kemmler, sans aucun doute possible) lorsqu’il s’avère que malgré toute leur bonne volonté, pièges à la con et autres moulinets de Hache Noire, Duduche ne passera pas l’arme à gauche ce jour. Réussissant à grand peine à rappeler un Krell tout prêt à faire des (mal)heures sup’, le Lichmeister prend la poudre d’escampette, désespérant de trouver un moyen de venir à bout du stalker qui le pourchasse depuis le regrettable incident de l’Abbaye de Maisontaal. Et puis, soudain, surgit l’illumination : pourquoi ne pas faire un crochet par le Fort du Sang, histoire de restocker de l’osselet ? L’endroit n’est qu’à quelques heures de trajet, et la richesse de son sous-sol pourrait permettre à Kemmler de mettre un point final à sa relation compliquée avec la noblesse bretonnienne.

Une fois sur place, nos deux loustics doivent toutefois se rendre à l’évidence qu’ils ne sont ni les premiers à avoir eu l’idée, ni très bienvenus aux yeux de leurs prédécesseurs. Goules, Stryges, squelettes, et finalement Dragons de Sang : le comité d’accueil est à la hauteur de la réputation du fameux duo, qui doit s’employer pour mettre un peu d’ordre dans cette cohue, à grand renfort de conjuration, décapitation et éclatage-de-tête-à-coup-de-talon (le Krell special). Ayant enfin pu se frayer un chemin jusqu’au manager Kastellan de garde, auquel il demande à (pour)parler, le rusé Heinrich parvient à convaincre les orgueilleux vampires d’affronter son revenant de compagnie en duel plutôt que de se prendre une charge de Chevaliers de Sang dans le buffet. Après quelques passes peu à l’avantage de la team canine, les perfides buveurs de sang abandonnent leur étiquette guerrière et se ruent sur l’invincible champion d’un commun accord, sans que ce dernier ne s’en émeuve plus que cela. En périphérie de la distribution de beignes, Kemmler et le Kastellan commencent à tailler le bout de gras, avant que le premier ne tente un bitch move en lançant les hordes de squelettes réanimés sous le manteau (qu’il a large et couvrant) sur son interlocuteur. Loin d’être pris au dépourvu par la manœuvre, ce dernier finit tout de même par tomber le masque, histoire de montrer au Lichemeister qu’il a trouvé à qui incanter : car le Kastellan n’était autre que Mannfred von Carstein, sans doute en tournage de Patron Incognito au moment de l’arrivée de Kemmler, et donc assez peu impressionné par les tours de passe-passe de Tonton Yoyo (keskya sous son graaaand chaaapôôô ?). Alors que les rutabagas semblent être bel et bien bouillis pour Kemmler, à la merci d’un adversaire bien trop coriace pour lui et sans possibilité de compter sur l’aide immédiate d’un Krell toujours occupé à faire du sashimi de Dragons de Sang, il se voit proposer une alliance par un Mannfred mandaté par le Nag’ à la mise sur pied d’une armée digne de la Fin des Temps qui s’annonce. Devant le peu d’options qui s’offrent à lui, le nécromancien accepte, et rejoint les rangs de l’armée de Daddy Death (pas pour longtemps ceci dit, cf The End Times).

Si ce texte de Reynolds s’avère, comme à son habitude, plaisant à lire tant pour l’amateur de hack & slash que pour le fluffiste amateur d’Easter eggs, il apparaît toutefois clairement que Waking the Dragon n’est pas grand-chose de plus qu’un fond de tiroir du matériel développé par Josh pour The End Times. Peut-être était-il prévu d’intégrer cette péripétie, assez mineure il faut le reconnaître, dans le premier tome de la série, avant que les éditeurs de la BL n’en décident autrement ? Toujours est-il que cette soumission aura bien du mal à être considérée autrement que comme un side-event, distrayant mais assez creux, d’évènements autrement plus épiques et capitaux pour le monde de Warhammer. Dans un genre assez similaire et du même auteur, The Fangs of the Asp, ultime nouvelle publiée dans la cadre de Hammer & Bolter, s’était révélé d’un niveau et d’une ambition littéraire significativement supérieurs. Mettons l’inclusion de Waking the Dragon dans ce premier numéro d’Inferno ! au crédit d’une BL peu encline à laisser se perdre des nouvelles déjà écrites, et intéressons-nous aux nouveaux travaux de Josh Reynolds pour voir s’il a réussi sa transition vers le nouveau monde (un comble pour un auteur américain travaillant pour une maison d’édition anglaise !).

The Enemy of my Enemy – Crowley :

Embourbé, dans tous les sens du terme, dans une guerre de positions stérile contre une pugnace Waaagh ! ork, le VIIIème régiment de Mystras, commandé par le général Nestor Pyrrhus, doit composer avec l’arrivée imminente d’une flotte ruche tyranide sur la planète minière de Cavernam Tertius. Ne pouvant compter sur aucun renfort impérial pour l’aider à défendre son caillou de troisième ordre, Pyrrhus décide d’offrir une alliance à son homologue, le colonel Taktikus, dans l’espoir que la combinaison du génie tactique et technologique des humains et de la sauvagerie et des innombrables effectifs des peaux vertes se révèle suffisante pour repousser les funestes locustes. Ayant convaincu Taktikus de coopérer, ce qui est déjà une victoire en tant que tel, Pyrrhus s’emploie ensuite à coordonner l’action de la coalition, qui, malgré des pertes importantes, parvient à tenir en respect les essaims de criquets jusqu’à ce qu’une chance de victoire se dessine à l’horizon. Ayant pris soin de laisser ses alliés encaisser les plus féroces assauts tyranides, le roué Pyrrhus subodore, à juste à titre, avoir la possibilité de joindre l’utile à l’agréable et de porter son xenocide au carré, en laissant les dernières forces orks et tyranides se compter fleurette sur le pré pendant que la Garde compterait, elle, les points. Mais ce faisant, ne sous-estimerait-il pas dangereusement la ruse bestiale de son allié de fortune ?

L’école « humoristique » de la BL compte désormais un nouvel adepte, le rookie Nate Crowley, dont la première publication s’inscrit dans la droite ligne des travaux d’Andy Jones et Sandy Mitchell, pour citer deux des figures de ce groupuscule. Jamais les derniers dès qu’il s’agit d’apporter un peu de gaudriole au futur nihilistico-millitariste de GW, ces boutes en train d’Orks étaient une valeur sûre à inclure au casting. Face à eux, et porteurs d’un autre style de comique, les nervis du général Nestor Pyhrrus cherchent à se convaincre qu’ils ne sont pas le squigon de la farce, la soudaine coopération d’un ennemi décennal, et totalement Xenos qui plus est, étant perçue comme hautement suspecte par les plus zélés des Mystrasiens. Pour le reste, The Enemy of my Enemy ne changera pas votre vision de 40K, la forme l’emportant assez nettement sur le fond.

How Vido Learned the Trick – J. Reynolds :

Deuxième soumission du numéro pour un Josh Reynolds qui, décidément, sait se rendre indispensable auprès des pontes de la Black Library, How Vido… remet en vedette américaine Naggarothi ( ?) les Sherlock Holmes et Dr Watson d’Altdorf, déjà convoqués par le même Reynolds dans une des ultimes parutions de Hammer & Bolter (The Problem of Three-Toll Bridge, H&B #25) : Zavant Konniger et son valet Vido.

Surpris dans l’exercice de ses fonctions, qui consistent, entre autres choses, à ravitailler son maître en fagots et en saucisse, Vido se retrouve nez à arbalète de poing cathayenne dans les appartements de Konniger, et pressé de questions par un assassin bretonnien aussi languide que déterminé, répondant au doux nom de Brochet (Pike en anglais – vous avouerez que Gardon ou Tanche n’auraient pas eu le même effet -). Exploitant l’indolence du reître, apparemment bien fatigué par l’escalade jusqu’à la fenêtre du Sage Détective et peu enclin à passer les lieux au peigne fin pour débusquer sa proie s’il peut exploiter le travail d’autrui à la place, Vido tente tant bien que mal de retracer le parcours de son maître au cours des dernières heures, autant afin d’empêcher le Bro’ d’utiliser son atout carreau que pour tenter de prévenir Konniger du péril en la demeure (c’est le cas de le dire). Pour ce faire, il faudra à notre cérébral Halfling mettre à profit tous les trucs et astuces glanés au contact de son infaillible employeur… sans oublier son propre bagage de compétences de mauvais sujet repenti, lorsque les choses commenceront à dégénérer. Pas étonnant que les métiers d’aide à la personne aient du mal à trouver preneur, si vous voulez mon avis.

Drôle d’exercice de style que cette courte nouvelle, qui oscille entre énigme « policière » (où est Konniger ?) et course poursuite sur les toits entre Vido et le Capitaine Brochet. Si le style de Josh Reynolds et sa familiarité avec les personnages qu’il met en scène lui assurent une soumission tout ce qu’il y a de plus correct, ce mash-up de partis pris littéraires n’apparaît pas comme l’œuvre la plus aboutie de l’auteur, d’autant plus que ce dernier ne se donne même pas la peine de révéler de façon claire le fin mot de l’histoire à propos du mystère posé en introduction. Mis à part l’utilisation de what mille miroirs par un Zavant adepte de la réflexion (ha ha), on ne ressort guère instruit de la lecture de How Vido Learned the Trick1 quant aux moyens utilisés par le célèbre détective pour tromper la vigilance de son assassin. C’est d’autant plus dommage car un twist final, ou en tout cas, l’exposition par l’auteur du raisonnement logique qui aurait pu/dû conduire le lecteur à résoudre le mystère auquel il a été confronté, fait clairement partie du cahier des charges de ce genre de nouvelle, ce qu’un auteur du standard de Josh Reynolds ne pouvait pas ne pas savoir. Bref, un nouveau fond de tiroir exhumé par la BL, dont la persistance à publier des histoires se déroulant dans feu le Monde qui Fut s’apparente plus à de l’opportunisme qu’à de la nostalgie. Espérons juste que Konniger et Vido ne tirent pas leur révérence sur ce demi-flop, et que l’on permettra à JR de corriger le tir avec une conclusion digne du statut de ces personnages dans un futur pas trop lointain. Ce serait bien la moindre des choses.

1 : Un clin d’oeil à une véritable nouvelle de Conan Doyle : How Watson Learned the Trick.

The First Daughter – Wiltgren :

Dans les ténèbres d’un lointain futur, la misogynie reste un fléau persistant, comme peut en témoigner la Lieutenant Ekaterina Idra, officier au sein du 86ème Vostroyan. Aînée d’un voyarin n’ayant eu que de filles, et trop d’amour propre pour accepter la disgrâce que constituerait une non-participation de sa lignée à la levée impériale, Kat, telle une Mulan steam-punk de Sibérie, s’est engagée dans la Garde Impériale, et a enduré depuis des tombereaux de mufleries. La campagne de Tovoga va toutefois lui changer agréablement de son morne, si dangereux, quotidien, en lui donnant l’occasion de combattre aux côtés d’un de ses héros, le Major Jorun Haskel en personne. Encore plus alpha que Vladimir Poutine chevauchant un ours dans le soleil couchant, Haskel est l’incarnation même de l’âme indomptable de Vostroya, un guerrier accompli maniant une relique clinquante et auréolé d’innombrables hauts faits guerriers, en plus de touffes de cheveux gras sous un chako pelé (ce qui ne fait que renforcer son charisme). Les hasards de la guerre ayant voulu que la section motorisée de Kat soit dans le coin au moment où le 262ème de Haskel enquillait une attaque en règle des traîtres Tovogans, c’est à Idra que revient l’insigne honneur de secourir les survivants de l’assaut, ce qu’elle fait avec compétence et distinction.

Elle ne tarde cependant pas à découvrir que son idole n’est pas sans avoir ses propres défauts, à commencer par une légère, mais néanmoins fâcheuse, tendance à fOnCeR dAnS lE tAs CoMmE uN ImMoNdE bOuRrIn, sans guère de considération pour les plus élémentaires notions de stratégie, ou pour les chances de survie de ses hommes. Ditto cette attaque frontale contre un adversaire plus nombreux et mieux armé que les Vostroyens, victoire coûteuse en vies impériales, mais victoire tout de même, arrachée de haute lutte par Haskel et son indomptable pénis foi en l’Empereur. Plus tard, alors qu’elle rumine sa déception de retour au campement, elle apprend que sa section, déjà bien affaiblie par la rigueur des combats, est réquisitionnée pour une opération des plus risquées : attirer une compagnie de rebelles dans la cité de Dolemino, et la tenir en respect assez longtemps pour permettre au reste du régiment de prendre les hérétiques en tenailles. Idée géniale, signée J.H. Résignée à faire son devoir, Kat mène donc ses hommes au contact de l’ennemi… qui se révèle être bien plus nombreux que prévu, ce qui ne fait évidemment pas les affaires de nos flegmatiques ruskoffs. Dans la mêlée qui s’ensuit, notre héroïne parvient une nouvelle fois à sauver les meubles, perdant au passage la majeure partie de ses soldats, tandis qu’un Haskel totalement berserk et de plus en plus dentu (si si) se charge de remporter la bataille sous le poids de sa paire de c……. du nombre. Kelôm.

Survivante bien amochée d’une nuit de combat intense, Idra sort du coltar à temps pour recevoir un sinistre debriefing de la part de son second : le régiment réduit à mi-force, la quasi-totalité du cadre de commandement passée en pertes et profits, Haskel seul aux commandes et bien décidé à finir le job sans pitié, sans support et sans attendre. Le temps de re-sombrer à nouveau dans un coma réparateur, la voilà réveillée par son officier de liaison, porteur de mauvaises nouvelles (c’est une constante, décidément) : les Vostroyens ont été trahis et sont piégés dans les ruines de Dolemino, sans espoir de renforts dans les heures à venir. Ni один, ni два, Idra embarque les plus mobiles des invalides de l’infirmerie au secours de leurs frères d’armes. Moults combats. Beaucoup violence. Très héroïsme. Wow. Finalement, arrive ce qui doit arriver, c’est à dire l’ultime combat entre Kat et Haskel, qui se révèle possédé par un démon de Khorne à la dentition de Fernandel et à la répartie d’Eric Zemmour, combinaison mortelle s’il en est, ce qui n’empêche pas notre héroïne de prévaloir, pour la plus grande gloire du camarade Staline et de l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques de Pépé. Nous quittons le Lieutenant Idra sur un dernier échange avec son mentor, le sage et équitable Capitaine Twarienko, qui se met à rêver, non pas d’une galaxie en paix, ce serait hérétique, mais d’un âge prochain où les femmes de Vostroya auraient tout autant le droit que les hommes d’aller se faire tuer au service de l’Imperium. Après tout, avec des exemples positifs comme celui de Kat, tout est possible. Bref, osez le féminisme.

Copie plus que convenable pour la recrue Wiltgren, guère novatrice dans son approche mais solidement bâtie. L’ajout de passages en flashback, entrecoupant l’intrigue principale et éclairant le lecteur sur le passif, assez chargé, de Miss Idra avant les évènements de Tovoga, relève The First Daughter de façon sympathique, en plus de démontrer que le petit Filip est capable de manier sa barque, ou plutôt son stylo, de manière plus aboutie que bien des aspirants à la BL. Allons jusqu’à reconnaître que le gars Abnett était d’un niveau sensiblement similaire lors de ses premiers travaux Ghostiens, et vous aurez une idée du potentiel que je choisis de placer sur les frêles épaules de ce newbie. Reste à voir si l’approche Social Justice Warrior (assez peu courante au pays des bolters) de Mister Wilgren relevait du one-shot ou est un trait caractéristique de son style. Je ne juge pas, hein, je constate, et je m’interroge. Critico ergo sum.

Mercy – Ware :

Sur le monde de Lautis, isolé dans l’arrière-pays de l’Ultima Segmentus, une escouade de Sœurs de Bataille de l’Ordre de la Rose de Sang menée par la Sœur Supérieure Augusta Santorus explore les ruines d’une cathédrale impériale, peut-être dédiée à Sainte Mina, et peut-être dédiée à Saint Maclou (qui peut dire ?), à la recherche de… quelque chose. Escortées par un missionnaire de l’Ecclésiarchie (Lysimachus Tanichus), ayant pris sur lui de ranimer la flame de la foi en l’Empereur parmi la plèbe locale après des siècles d’isolement et d’obscurantisme, l’Adeptus Sororita s’est en effet lancé dans une quête aussi pressante que floue pour une statue pouvant être liée aux origines de l’Ordre. On ne saura jamais pourquoi l’identification du patrimoine sacré constitue une priorité telle pour les membres de la Rose de Sang, mais toujours est-il que nos intrépides sistas se retrouvent fort dépourvues quand la Waaagh ! locale fut venue.

Coincées dans les ruines de la maison de Pépé (Question : peut-on considérer les temples impériaux comme des Ehpads, de ce fait ?), Santorus et ses sous-fifres optent alors pour un dernier carré héroïque et commencent à arroser les peaux vertes de bolts et d’imprécations en Haut Gothique, avec des effets spectaculaires, tant sur les effectifs de la horde ork que sur la culture générale du lecteur. Las, cela ne suffit pas à décourager les belliqueux Xenos de forcer l’entrée du lieu saint sous le seul poids du nombre, forçant les fifilles survivantes à, je vous le donne en mille, engager les brutes au corps à corps. Et pas n’importe comment, qui plus est : à mains nues. Oui, vous avez bien lu, ô incrédules lecteurs : c’est bien à coup de poing et de pied (pas de crépage de chignon possible avec les Orks malheureusement) que Santorus et consœurs tombent sur le râble, plutôt costaud, des aliens mécréants. Et le meilleur dans tout ça, c’est qu’elles leur mettent une énorme race, à l’image d’une Sœur Supérieure déchainée et tenant facilement tête à un Warboss Blood Axe, avec et sans arme. Pourquoi avoir des progénoïdes quand on peut avoir des stéroïdes ?

Les Orks finalement mis en déroute, et leur chef exécuté d’un bolt en pleine tête après un sommaire interrogatoire ayant permis de mettre à jour la duplicité de ce traître de Tanichus (c’est un nom de fourbe, je l’ai toujours dit), il est temps pour Augusta de (se) rendre justice afin des réparer les torts subis (une Soeur décédée d’allergie à la grenade, et quatre permanentes totalement ruinées). Guidée par une inspiration soudaine, et sans doute divine, elle décrète donc la mort du félon, ignorant ses piteuses justifications pseudo humanitaires, et l’annexion de Lautis au sein du protectorat de l’Ordre. Pourquoi ? Parce que. The end.

Que garder de Mercy, première soumission de la newbie Dannie Ware pour la Black Library ? Pas grand-chose, malheureusement. Sur le fond, l’intrigue proposée tient en une demi-ligne (attention, vous êtes prêts ? “Sistas versus Orks dans une cathédrale”. Ta-daaaaa!), et le “twist” final gardé en réserve par l’auteur tombe tellement à plat qu’on aurait même du mal à le considérer comme tel. Que Tanichus ait mené son escorte dans un piège, soit. Mais apprendre que la motivation profonde des Orks, et la raison pour laquelle ils ont accepté la proposition du missionnaire, est la récupération des armes d’une pauvre escouade de cinq Sororitas, no way. L’histoire a beau se dérouler dans l’Ultima profond, plus cheap que ça, c’est fouiller les poubelles des colons locaux pour récupérer les bouteilles d’amasec consignées au Simply Market du coin. Respectez-vous tout de même, Messieurs les peaux vertes.

Sur la forme, on aura bien du mal à pardonner à Ware les libertés qu’elle prend avec quelques principes fondateurs et porteurs du fluff de GW, au premier du rang duquel on trouve l’axiome : “Les Orks sont des forces de la nature”. Faire triompher une escouade de Space Marines d’Assaut vétérans d’une empoignade contre ce type d’adversaires, pourquoi pas (et encore). Mais une poignée de Sœurs de Bataille qui tatane comme qui rigole dix fois leur nombre et cent fois leur poids en géants verts, sans subir une seule perte dans le feu de l’action, et en recourant à des prises de catch histoire de faire kwioul, non merci. Ajoutez à cela un character development aux abonnés absents et quelques incongruités (comme une statue disposée de telle façon à ce qu’elle soit tournée vers Sainte Terra… donc vers l’Ouest-Sud-Ouest, c’est bien connu) sans conséquences pour le récit mais pas pour la crédibilité de ce dernier, et vous obtenez une nouvelle à remiser dans le fond des cartons du second choix de la BL. Mercy ? Sans façons.

At the Sign of the Brazen Claw – Haley :

Dans la droite ligne des romans feuilletons des années I et II de Hammer & Bolter, la nouvelle version d’Inferno! propose à son tour un long format récurrent, tourné sous la forme d’une pastiche des Mille et Une Nuits par le quasi-vétéran Guy Haley.

Prise dans une tempête d’une sévérité peu commune, l’auberge de la Griffe Hardie se trouve être le théâtre d’une veillée forcée entre les tenanciers de l’établissement (Horrin, sa femme Ninian et leur palefrenier/fils adoptif Barnabas), un vénérable nain amateur de pipe (Idenkor Stonbrak), un quidam à l’air louche, aux manières nerveuses et au nom recélant sans doute une contrepèterie grivoise (Pludu Quasque), et, finalement, arrivant en dernier comme le prince qu’il est, l’elfe Maesa du Monde, nouvelle icône de la BL pour Age of Sigmar, accompagné comme de juste par son sidekick de bourse1, le farfadet Shattercap. Le dirigeable permettant de rejoindre Ghyran par le portail le plus proche ne s’étant pas éternisé pour éviter la drache (qui sur le plan de Shyish, s’appelle la Nagadrash), les hôtes décident de tuer le temps en se racontant à tour de rôle une histoire, activité tout ce qu’il y a de plus classique quand on est un personnage d’un univers médiéval-fantastique (c’est tout de même plus classe que se taper un Blanc Manger Coco édition Slaves of Darkness). Ayant initié l’idée, c’est tout naturellement que Horrin, fils de Juvamin, démarre le tour de table, en racontant la façon dont il est devenu l’aubergiste de la Griffe.

Jeune homme aventureux et peu tenté par la perspective de reprendre l’honorable charge de croque mort détenue par son paternel, Horrin partit donc voir ailleurs si l’herbe était plus violette (Shyish oblige) lorsque ce dernier voulut lui imposer son choix de carrière. Peu familier des immensités sauvages de cette morte plaine, notre héros ne tarda cependant pas à se perdre, jusqu’à arriver en vue de la fameuse Griffe Hardie, éminence rocheuse ayant la forme d’une main gigantesque, aux doigts tendus vers le ciel. Ayant trouvé une chaumière, habitée par une vieille femme (Michèle), à la base du monolithe, et passé la nuit au chaud et au sec grâce à l’hospitalité offerte par cette dernière, Horrin ne put refuser de lui rendre un petit service en reconnaissance de l’Air BnB gracieusement offert : apporter à son mari (Jacky), occupé au sommet de la Griffe, un panier de vivres et quelques fagots. Embrassant sa vocation de coursier Uber Eat avec diligence, Horrin s’exécuta, et fit la rencontre de son hôte, dont l’activité consistait en l’entretien du feu flambant dans une cheminée taillée à même la roche de la Griffe. “Ce brasier ne doit jamais s’éteindre” l’avertit le vieil homme pendant qu’ils cassaient la croute, “faute de quoi le géant dans la main duquel nous nous trouvons se réveillera (il est frileux), avec des conséquences des plus fâcheuses !” Moyennement convaincu par cette histoire, mais d’une politesse et/ou d’une crédulité incommensurable, Horrin accepta ensuite de relayer son comparse, en poste depuis trois ans sans interruption d’après ses dires, le temps d’une sieste crapuleuse (no joke) avec bobonne.

Je vous donne la suite, que vous aurez déjà deviné, gros malins que vous êtes, en mille : Jacques Cheminée (à ne pas confondre avec Jacques Cheminade) ne remonta jamais, laissant le trop bon et trop con…ciliant Horrin jouer du tisonnier en solo à sa place. Ayant bien tenté de prendre la poudre d’escampette à son tour après quelques nuits de camping plutôt frisquettes, Horrin réalisa cependant avec horreur que la légende du géant endormi avait plus qu’un fond de vérité, et résolut de tenir la baraque sans tenter le diable le temps de trouver un suppléant. De fil en aiguille, à force de patience et de troc fructueux, notre assigné à cheminée réussit toutefois à devenir assigné à résidence, puis finalement à auberge, gagnant une femme aimante et un garçon d’étable sans doute sous payé dans l’opération. Merci qui ? Merci Jacky et Michèle ! 

Ce premier épisode d’At the Sign of the Brazen Claw permet à Guy Haley de faire ronronner sa machine à débiter de la high fantasy impeccablement proprette, et très, mais alors très, proche dans l’esprit de ce que peut proposer World of Warcraft en termes d’atmosphère. Entre l’aubergiste très affable, le nain très ronchon, le haut elfe très noble, fourni avec monture stylée (un grand cerf) et mascotte collector, le gredin en puissance dont on flaire la duplicité à travers la tablette (c’est dire si l’odeur est forte), le système de zeppelin qui fait la jonction entre les différents royaumes, et l’aventure PEGI 13 (personne ne meurt, merde !) narrée par Horrin, on s’attendrait presque à voir débarquer Malfurion et Thrall dans le rade pour s’en jeter un petit. Alors que WFB se distinguait par son côté glauque et décadent, l’Age of Sigmar propose par Haley prend le contre-pied de son prédécesseur. Ce n’est pas mal fait pour autant, le gars Guy sachant tourner son propos de manière plutôt agréable, mais cela risqué de surprendre, et pas forcément en bien, les lecteurs nostalgiques du med-fan nihiliste qui était la marque de fabrique du Vieux Monde. Rendez-vous au prochain numéro pour voir si le sieur Haley a réussi à mettre un peu de malepierre dans son lait grenadine.

1 : C’est la même chose qu’un familier de poche, mais comme chacun sait, celles des jeans extra skinny des Elfes sont cousues. Question de style.

En conclusion de cette première revue critique, je dois dire que cette nouvelle offre récurrente de courts formats de la Black Library s’avère tout d’abord d’un très bon rapport quantité-prix, si les tarifs proposés n’évoluent pas. Alors que la nouvelle individuelle se facture désormais aux alentours des 4€, un recueil de la longueur de cet Inferno! est franchement donné pour ses 10€. Ce premier numéro fut de plus assez honnête d’un point de vue qualitatif, seuls les textes de Fischer et Ware se révélant peu convaincants. À l’opposé, Dicken, et dans une moindre mesure, McLean, Brooks et Wiltgren, méritent d’être surveillés à l’avenir. Bref, un retour concluant et gagnant de mon côté. Il n’y a plus qu’à prier l’Empereur pour qu’Inferno! bis ait la longévité de son aïeul, et se plonger dans le numéro 2, d’ores et déjà paru. I’m on it.

HAMMER & BOLTER [N°25]

Bonjour à tous, et bienvenue dans cette chronique du 25ème numéro de Hammer & Bolter ! 25, c’est un beau chiffre, qui l’aurait été encore plus s’il ne s’était s’agi de la pénultième publication de feu le webzine de la Black Library (Inferno ! avait fait 20 de mieux, en tenant jusqu’au numéro 461). Un mal pour un bien me direz-vous, car cela nous rapproche fortement de la fin de cette épopée chroniqueuse, initiée il y a déjà quelques années par l’auteur de ces lignes. Encore un petit coup de collier à donner, et la boucle sera bouclée.

Au menu du dolce de H&B, les débuts (à ma connaissance) de Phil Kelly dans la fiction narrative, après une grosse dizaine de Codices 40K et rien de moins que deux GBN, et croyez-le ou non, cela se passe chez les techno-barbares d’un monde féodal. Shocking. On assistera également au retour d’une autre figure bien connue du studio GW, Andy « Peroxide » Hoare, qui fera le chemin inverse de son comparse en délaissant les vaches rousses, blanches et noires et les pommiers dans la prairie made in Normandie Bretonnie pour longer les bordures de l’Imperium en compagnie de la Brienne (à prononcer comme Stallone dans Rocky), figure centrale de ses écrits Rogue Trader-esques. En parlant de retour, ce sera à Josh Reynolds de revenir dire bonjour à Hammer & Bolter, avec un cross over encore plus ambitieux que celui d’Infinity War. Pas de spoil, pas de spoil, lisez plutôt. Enfin, ce sera double (ou 1,5, selon comment on calcule) dose d’Abnett, à la fois à cause du chapitre de Gilead’s Curse de rigueur (et le terme est approprié) mais également grâce à un extrait de son (à l’époque) nouveau roman, Pariah. Bonne lecture !

1: Et de ce que j’ai pu voir en baguenaudant récemment sur le site de la Black Library, l’illustre aïeul de Hammer & Bolter a rejailli de ses cendres, au moins de manière ponctuelle, sous un format totalement numérique. Je sais ce qu’il me reste à faire…

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The Court Beneath – P. Kelly [WFB] :

Comme un grand nombre de ses condisciples du studio de création de Games Workshop, Phil Kelly a, après la longue et honorable carrière qu’on lui connaît en tant que game designer,  cédé aux sirènes du fluff et contribué de sa modeste pierre à l’édifice du background des univers GW. Spécialiste du Bien Suprême (Blood Oath, Blades of Damocles, Farsight), et ayant récemment couvert la (forcément) difficile intégration des Primaris au sein des Dark Angels (War of Secrets), il a également quelques travaux med-fan à son actif, dont rien de moins que le déclenchement de la Fin des Temps (Sigmar’s Blood).

Notre histoire débute sur une route boueuse des Hauts de Bretonnie, en compagnie de notre tout aussi boueux héros. Bien que noble, ce dernier fait pâle figure, des années de quête infructueuse du Graal l’ayant durement marqué. Couturé de cicatrices, marque par la teigne, quelques dents et son destrier en moins, Loulou (appelons comme ça pour le moment) est l’incarnation parfaite du chti chevalier errant, et bien qu’il lui en coûte de se présenter sous ce jour défavorable à la cour, la survenue d’une menace de grande ampleur (un Nécromant du nom de Myldeon ratisse le nord des terres du Roy à la recherche de followers) le pousse à venir quémander une armée auprès des autorités locales afin de mettre un terme aux déprédations du sorcier. Arrivé à Marcq en Baroeul Couronne, Loulou se fait d’abord gentiment mais fermement enjoindre par le service d’ordre (Iron Eye et le Joker, rien que ça) d’aller se faire ausculter chez les Tiléens, avant que notre héros ne se sorte de ce mauvais pas en rappelant qu’il est le fils du taulier, et mérite donc un peu plus de respect. Car Loulou, notre chouchou foufou, est Louen de Couronne, et The Court Beneath n’est rien de moins que le How I Got My Moniker du futur souverain Breton.

Quelques heures plus tard, c’est escorté de quinze chevaliers et des écuyers de ces derniers que Louen ressort de Couronne, guère enchanté de la pingrerie paternelle (il semblerait que la parabole du retour du fils prodigue n’ait pas atteint les lointaines latitudes bretoniennes) mais déjà mieux mis qu’à son arrivée. Ayant pu tout du moins compter sur le soutien de son ami Brocard, réputé à des lieues à la ronde pour sa maîtrise du pop shove-it et du heelflip (les fameuses figures de Brocard1), Louen fait contre mauvaise fortune bon cœur et finit par rattraper les hordes chancelantes de Myldeon à proximité d’un lac. Après la traditionnelle causerie d’avant-match, le XV de Couronne se met en branle pour mettre sa branlée aux groupies de Mymie M’a tuer. Et là, grossière erreur : sans doute peu familier des arcanes du Livre d’Armée Bretonnien, Louen ordonne l’attaque sans chercher la bénédiction de la Dame, ce qui est particulièrement con lorsque l’ennemi n’aligne aucune machine de guerre ni arme de tir, a une caractéristique de Mouvement inférieure à la vôtre et ne peut pas faire de marche forcée à plus de 12 pas de son général. Stay in school, kiddos. La suite, vous la devinez : la magnifique fléchette bretonnienne s’enfonce sans mal dans le ventre mou de l’armée adverse (de façon littérale et figurée), mais arrive la phase de corps à corps fatidique où les chevaux ont un coup de moins bien, et qui se solde par une défaite sans appel de nos preux paladins, dont les moulinets enthousiastes ne font pas le poids face aux imposants bonus fixes de l’adversaire. Sentant la situation mal engagée, Brocard tente de rentrer un boardslide sur le nez crochu de Myldeon, mais un regard (désapprobateur) de Nagash suffit à faire avorter la tentative, et à griller la street credibility de LeBroc James, en même temps que l’enveloppe corporelle de ce dernier. Isolé au milieu de la mer morte, Louen tente à son tour de rallier sa Némésis, mais ne parvient qu’à se faire acculer (acculer, j’ai dit) sur la rive du lac, dans lequel il finit par sombrer corps et bien.

Piégé par son armure, notre héros s’enfonce dans les profondeurs stygiennes du plan d’eau, et découvre avec surprise qu’il reste capable de respirer dans cet environnement peu familier. Son soulagement est toutefois de courte durée, son arrivée n’étant pas passée inaperçue parmi les résidents des abysses, comme le confirme l’attaque soudaine d’un Leviator sauvage. Un instant pris au dépourvu par ce choc de franchise, Louen se ressaisit rapidement, et lance l’Archéomire qui lui servait jusque-là de bouclier au combat2, avec des résultats plutôt probants. Asticoté with extreme prejudice, l’assaillant de Louen finit par passer l’arme à gauche, ce qui vaut à Loulou l’insigne honneur d’être invité au banquet que donnait à quelques encablures de là, je vous le donne en mille, la Dame du Lac. Entourée d’une cour résolument United Colors of Tête de Thon, cette dernière réserve d’abord un accueil assez froid à son pauvre champion, avant de consentir à lui faire boire au Graal (ce qui était attendu), de lui rouler une pelle (ce qui est un à-côté appréciable) et de le renvoyer à la surface en compagnie d’une armée digne de ce nom (ce qui fait toujours plaisir), constituée des jeunes hommes doués de capacités magiques que cette cougar de Dame enlève à leurs parents sans le moindre scrupule.

Transcendé par l’expérience, notre nouveau Chevalier du Graal se rue à l’assaut de la cohorte mort-vivante, qui ne s’était guère éloignée du lac en raison de ses minables capacités motrices. Bien aidé par le vigoureux concours de ses nouveaux amis aquatiques, Louen se fraie un chemin jusqu’à Myldeon, en passant sur le corps des anciens camarades ranimés par le Nécromant au passage, et, en hommage à Brocard, met un point final aux manigances de ce dernier d’un superbe anhyzer décapitant, démontrant ainsi sa maîtrise de la vertu de bogossitude et ajoutant un nouveau chapitre à sa légende. Loué soit Louen.

Les lecteurs réguliers de ces chroniques connaissent mon intérêt pour la mise en scène d’épisodes importants, ou au moins significatifs, du fluff de WHB jusque-là seulement évoqués dans les Livres d’Armées. En plus de mettre au premier plan des personnages bien connus du Vieux Monde (ou d’ailleurs), ces récits enrichissent souvent le background et donnent du grain à moudre à tous les fluffistes acharnés, prêts à vendre père et mère pour connaître la pointure de Nagash ou l’émission de radio préférée d’Aenarion. Encore faut-il pour cela que l’auteur à la manœuvre ait pris la mesure du « matériel narratif » mis à sa disposition, et parvienne à exploiter les qualités intrinsèques de ce dernier sans donner dans la timidité ou dans l’excès. Fort heureusement, Phil Kelly parvient à tirer son épingle du jeu de manière convaincante, et rend une copie sérieuse, d’un niveau similaire à Feast of Horrors (Wraight – Hammer & Bolter #5), et juste en deçà de The Gods Demand (J. Reynolds – Hammer & Bolter #11). Rythmée, prenante et généreusement dotée en termes de détails fluff (notamment le devenir des garçons enlevés par la Dame du Lac, et qui contrairement à leurs homologues féminines, ne retournent jamais parmi les hommes), The Court Beneath est une nouvelle très honorable, ce qui n’est pas rien pour une première soumission, et est d’autant plus méritoire que la Bretonnie est une des factions de WFB les moins gâtées par les publications BL en règle générale (Tybalt’s Quest, Faith, The Last Charge, Rest Eternal, Questing Knight).

1: Essayez de faire ça avec un destrier caparaçonné bretonnien en lieu et place d’un skateboard. Ça vous place le niveau du bonhomme.

2: Fun fact : J’ai découvert qu’il existait bien un Pokémon en forme de bouclier au moment de l’écriture de cette chronique. Le pire étant que ce dernier appartient à la 4ème génération, et que nous en sommes maintenant à la 7ème. À quand les Pokémons Tupperware, Balais à Chiotte et Ephéméride ?

Gilead’s Curse (ch. 11) – N. Vincent & D. Abnett [WFB] :

Gilead's CurseAlors que la fin s’approche à grands pas pour Glilead’s Curse, petit retour sur la situation à l’ouverture de cet avant-dernier chapitre : arrivé à Nuln sur la seule base d’une expertise torchée en 5 secondes par un ancien stagiaire chez Drouot devenu Vampire Dragon de Sang par la suite, et un vieux souvenir de Gilead dont le principal intéressé a reconnu lui-même qu’il n’avait qu’une très faible chance de se montrer utile à sa quête, notre trio d’Elfes kidnappe un professeur caduque, cacochyme et un peu troll sur les bords, séquestre et torture l’honnête aubergiste chez lequel ils ont trouvé refuge en compagnie de leur otage, puis se dispersent dans la cité impériale à la recherche de nouveaux méfaits à commettre. Pendant ce temps-là, la charrette des méchants de l’histoire (car cela ne peut être qu’eux, même les Vabnett n’oseraient pas tirer un nouvel antagoniste de leur chapeau à deux chapitres de la fin) arrive en mode pépouze à Nuln, passe l’octroi sans (presque) éveiller l’attention et s’enfonce dans le dédale de la vieille ville vers sa destination ultime, suivie de loin par the only living boy in New York, Tom Surn Strallan. Pour rappel, au même moment de son année de « feuilletonage », le brave Ben Counter faisait s’abattre une horde de Démons sur le Phalanx, en même temps que le feu et la fureur de Sarpedon sur Iktinos, deux climax dignes de ce nom et préparant la conclusion d’une saga épique. L’année II d’ Hammer & Bolter se révèle donc légèrement moins-disante en termes d’intensité scénaristique, la partie de Mario Kart auquelle s’adonne notre intrépide SS étant, et de loin, la péripétie la plus haletante dont a bénéficié Gilead’s Curse depuis quelques chapitres maintenant. Comme la voix off nous l’indique dans son laïus introductif, ce récit est vraiment maudit, et cela aurait dû finir avec des skavens. Truer words have never been spoken.

Les lecteurs attentifs se souviendront que le chapitre précédent s’était conclu par une répartition des tâches incombant à chacun de nos héros, ficelle narrative un peu épaisse mais ayant au moins le mérite de structurer un tant soit peu un récit dont l’absence de colonne vertébrale l’apparentait jusqu’ici au gracieux, vivace et versatile lombric, dont la capacité à transformer de la boue en étron fait l’envie du règne animal. Las, à peine entré de quelques pages dans notre propos, force fut de constater que cette bonne résolution était restée lettre morte, Gilou n’ayant rien de trouvé de plus malin que de rester avec Mondelblatt et Laban (alors qu’il aurait dû être partout, dixit lui-même), ce qui a pour conséquence de faire passer le jeune elfe de la catégorie des personnages à celui des décors1, le droit d’aînesse de Gilou lui donnant la priorité pour tenir le crachoir aux divagations de Mondelblatt, destin pire que la mort certes, mais permettant au moins de justifier l’inclusion de l’intéressé au casting du roman.

De son côté, Fithvael, lui, essaie très dur de se rendre utile et de coller au script (brave petit vieux). D’abord en allant chercher une carte détaillée de Nuln chez le buraliste le plus proche, à laquelle il ajoute le plan des caves de la cité sur un coup de tête (un réflexe que je devine utile pour la conclusion de notre récit, et sans doute hérité de nombreuses sessions de Diablo II). Ensuite en identifiant un à un tous les signes révélateurs de la présence des Rois des Tombes dans la ville, qu’il s’agisse de scarabées, araignées ou de scolopendres, ce qui l’occupe un certain temps et lui permet de remplir sa master map de gribouillis. Enfin en capturant à l’improviste, tel le pedobear qu’il est, le jeune et vigoureux Surn Strallan, qui avait commis l’imprudence de prendre en filature l’entomologiste amateur après avoir échoué à attirer la bienveillante attention des autorités compétentes sur la mystérieuse charrette sableuse. Ramené chez Mondelblatt par son nouvel éraste, il a tôt fait de révéler ses tendances scientologues scientophobes, et a le privilège de constater, en même temps que ses nouveaux copains, la transformation des carreaux de la fenêtre de l’universitaire en sable, ce qui, en plus de constituer un vice de forme évident, annonce de manière indubitable qu’ « ils » ont commencé leur sinistre besogne (qui pour le moment, consiste en petite activité de livraison à domicile de mobilier encombrant, type sarcophage). Et voici qui plante le décor du grand dénouement de Gilead’s Curse. Je dirai bien que ça va déménager, mais ce serait mensonger, à double titre.

Chapitre dans la droite ligne des deux précédents (c’est-à-dire assez quelconque, mais beaucoup plus lisible que les premiers épisodes de la saga), cette mise en place du grand final du roman feuilleton de l’année II de Hammer & Bolter manque du souffle épique que l’on était en droit d’attendre pour une saga mettant un Haut Elfe aux prises avec une malédiction civilisationnelle. A contrario, l’épisode onze est sans doute le plus scatologique du lot (deux mentions de fèces, une de défécation, qui qui qui dit mieux ?), ce qui va sans doute à l’encontre de l’effet recherché. Ça me fait mal aux doigts de l’écrire, mais n’a pas l’emphase ampoulée d’un Gav Thorpe qui veut, et c’est peut-être ce qui aurait été utile à Gilead’s Curse en ce moment décisif. Rendez-vous au prochain numéro pour connaître le fin mot de l’histoire.

1: Décor qui parle, tout de même (un mot, ce qui il y a encore quelques chapitres, aurait été le summum de l’éloquence).

Cold Trade – A. Hoare [40K] :

Bien qu’on ne puisse pas vraiment le considérer comme un contributeur régulier de la Black Library, Andy Hoare trace sa route de free-lance avec persévérance et singularité, en témoigne l’hétérogénéité manifeste que l’on constate quant aux thèmes et factions qu’il a choisi de traiter au cours de sa carrière d’écrivain semi-pro : des White Scars aux Bretonniens, de la Lustrie aux colonies pénitentiaires1, c’est une palette pour le moins contrastée qui s’offre aux regards curieux. Néanmoins, on ne peut nier un penchant plus marqué pour une de ses créations littéraires en particulier, cette dernière se trouvant être Brielle Gerrit, fille de Lucian Gerrit, qui constitue avec son demi-frère Korvane et son papounet chéri le trio de protagonistes du plus important effort narratif du sieur Hoare : la saga (osons le terme, à défaut du féminisme) du clan Rogue Trader Arcadius. Outre les deux tomes consacrés à la petite entreprise qui connaît bien la crise de Lulu et Cie (Rogue Star et Star of Damocles), Hoare a en effet poussé le bouchon jusqu’à remettre Brielle sur le devant de la scène dans deux nouvelles : Ambition Knows No Bounds (pas terrible, et qui sera sans doute chroniquée un de ces jours ici), et plus récemment le présent Cold Trade.

Tout commence par une approche simple, basique, de la navette contenant la Brielle susnommée, ainsi que le pilote privé d’icelle (le clan Arcadius a beau être dans la dèche, ils ont tenu à garder leur petit personnel, c’est tout à leur honneur) en direction de la capitale d’un monde marais situé en périphérie de l’Impérium, et pas franchement bien tenu. Nullement intimidée par l’accueil un peu froid qu’elle reçoit de la part de la tour de contrôle locale, dont le lance-pierres reste braqué sur son vaisseau pendant la durée de sa descente, Brielle a tôt fait d’entraîner son larbin (Ganna) ainsi que deux serviteurs portant une énaûrme caisse dans l’effervescence animée de Quagtown, renommée dans tout le sous-secteur pour le cabaret sauvage qu’elle abrite. C’est vers ce dernier que l’héritière des Arcadius se dirige d’un pas décidé, et finit par parvenir après s’être jouée d’un trio de Blood Axes pas vraiment physionomistes ainsi qu’un piquet de plantons assez impressionnables.

Arrivé à bon port, notre quatuor a à peine le temps de se commander à boire auprès d’une serveuse si vicieuse qu’elle a dû venir directement de Paris intramuros (du Marais aux marais, c’est le karma) et de jeter un œil au show barnumesque faisant office d’animation que le propriétaire des lieux fait son entrée et convie menonctueusement  (mais si, vous avez compris) nos héros à s’isoler avec lui pour parler affaire. Tant que nous y sommes, présentons un peu notre bonhomme car il vaut certainement le détour : le Baron Gussy est en effet un homme patchwork, constitué de petits bouts d’autres personnes patiemment assemblés pour obtenir un individu totalement flamboyant2, comme son titre et son nom l’auront déjà révélé aux plus anglophones de nos lecteurs. BG étant un bg, il commence par tailler le bout de gras avec la plantureuse Brielle, après avoir séparée cette dernière de son escorte, dont le rusé personnage a supposé, non sans justesse, qu’elle ne servait qu’à détourner l’attention des faquins du vrai trésor apporté par Voyelle, et qui se trouve être un anneau de transmutation. De son côté, notre héroïne insiste également pour reluquer la camelote, et Gussy s’exécute en déballant le grand jeu : un phallus chromatique porte-clé collector (sans doute le Tamagotchi McDonalds de 1997, il coûtait déjà 20 balles 20 ans après, alors imaginez 38.000 ans plus tard…), qu’un fan die-hard est prêt à acquérir pour la coquette somme d’un monde vierge.

Comme on peut se l’imaginer, les négociations qui s’engagent immédiatement ne sont badines qu’en apparence, Gus’ ayant la mauvaise idée de vouloir prendre Brielle en otage pour obtenir le beurre, l’argent du beurre et le c…ourire de la crémière, en extorquant au clan Arcadius quelques-unes de ses possessions terrestres (littéralement) en échange d’un retour de la fille chérie du patriarche en un seul morceau. Malheureusement pour lui, la donzelle dissimulait un gadget joakero dans l’une de ses dread, et la fatuité satisfaite de l’homme coupon se mue rapidement en rage impuissante lorsque Bridelle donne l’ordre à son vaisseau en orbite de dégommer une à une les pieds à terre quagesques de l’aristo mégalo. N’ayant pas les nerfs nécessaires pour rester dans la partie, et peu aidé il est vrai par le niveau d’amateurisme profond de ses nervis, Gussy, pris à son tour en otage par Brielle, ne peut qu’assister au départ triomphale de cette dernière, qui repart de Quag avec anneau, babiole et sans avoir payé sa consommation, ce qui est la porte ouverte à toutes les fenêtres et la mort assurée du petit commerce. Rouges (et pour une fois, ce n’est pas une faute d’accord, vu le pedigree du bonhomme) de colère et de honte, l’infortuné Baron rentre au bercail pour s’en jeter un petit, et découvre le dernier cadeau que lui a fait son invitée avant de partir : la caisse apportée par les deux serviteurs briellois n’était en effet pas vide du tout, mais contenait une charge plasma au bord de la surcharge et astucieusement mis sous stase, jusqu’à récemment. Bilan des courses : une déco d’intérieur complètement refaite, même s’il faudra attendre quelques millénaires que la peinture sèche. Rendez-vous en 45K.

Pour être tout à fait honnête, j’ai entamé Cold Trade avec un manque d’enthousiasme non dissimulé, la précédente tentative d’Andy Hoare de faire vivre à Dame Brielle de trépidantes aventures s’étant soldée par un ratage dans les grandes longueurs3. Toutefois, au fur et à mesure que s’enchaînaient les pages, je dus reconnaître que ce deuxième jet était bien plus abouti que le premier, à mon grand plaisir. Outre le fait que le casting réduit contribue grandement à dynamiser l’action, le propos assez novateur, ou en tout cas peu fréquemment utilisé (et quand c’est le cas, généralement par des auteurs de bon niveau, Abnett en tête) de la rencontre professionnelle entre gens louches de l’Impérium, sans que la baston soit – nécessairement – à l’ordre du jour, constitue une bouffée d’air frais dans une littérature BL-esque n’ayant jamais eu ni honte ni assez de distribuer bourre-pifs et bolts nuit et jour, à tout venant. Personnellement, je suis fort aise que Hoare ait opté pour l’approche diplomatique dans Cold Trade, d’autant plus qu’il arrive à dérouler son propos avec aisance et cadence, les péripéties et descriptions (arrivée sur Quag, recrutement de mercenaires, confrontation avec les Orks, puis avec les gardes, freak show, négo’, évasion, conclusion) s’enchaînant sans temps morts. Je le félicite également pour avoir donné à sa nouvelle un méchant digne de l’univers baroque et dépravé qu’est Warhammer 40K, la particularité physique du Baron Gussy étant suffisamment plastique et mémorable (même si le mérite en revient, encore une fois, en grande partie à Abnett) pour lui gagner une place dans le panthéon des trognes les plus singulières de la cosmogonie du 40ème millénaire. On en regretterait presque qu’Andy ait (jusqu’à présent) cessé de mettre en scène son héroïne, qu’il commençait à manier avec quelque chose approchant l’habileté. L’Empereur m’en soit témoin, c’est loin d’être donné à tout le monde au sein de la BL.

1: Dans l’ordre: Savage Scars, The Last Charge, Tomb of the Golden Idol et Commissar. Ca rimerait presque.

2: Et à peiiiiiiine inspiré d’Armand Wessaen (Ravenor : Renaissance), mais on ne pique que les bonnes idées, c’est bien connu.

3: Il y a toujours des attractions touristiques qui semblent bien sur le papier et qui se révèlent être d’horribles attrape-nigauds au final. Dans l’univers des nouvelles 40K, ce sont les tombes nécrons.

The Problem of Three-Toll Bridge – J. Reynolds [WFB] :

Considérez-moi comme un excentrique patenté si vous le devez, mais il m’arrive de temps à autre d’éprouver des bouffées de fanboy-isme aigu à la lecture de certaines publications, pourtant guère folichonnes dans leur immense majorité, de la Black Library. Pour limitée que soit la portée de cette dernière, et (relativement) étroite la bibliographie qui s’y rapporte, on ne peut passer plusieurs années de sa vie à baigner dans le zhobby sans développer des marottes et attachements incompréhensibles au commun des mortels, pouvant déboucher dans les bonnes conditions en des crises d’enthousiasme aussi jubilatoires qu’injustifiables, à moins de se trouver en compagnie d’individus pareillement affligés. Pour ma part, cela a pu s’exprimer lors de l’apparition de l’Empereur et des Primarques au cours des premiers romans de l’Hérésie d’Horus, ou encore par le discret caméo de Mkvenner dans The Armour of Contempt (eh oui, un rien m’émeut). Cela faisait bien longtemps cependant qu’une telle occasion ne s’était plus produite, et je dois donc créditer Josh Reynolds pour le petit frisson d’excitation causé par la seule lecture de l’incipit de The Problem…, signifiant le retour d’une figure mythique de la BL : Zavant Konniger.

Créé par Gordon Rennie il y a maintenant presque 20 ans, le personnage de Konniger a connu son heure de gloire au début des années 2000, période à laquelle il eut droit à son propre recueil de nouvelles (sombrement appelé Zavant – 2002) ainsi qu’à une figuration dans une autre anthologie, assez connue du public francophone car traduite par la BI peu de temps après sa publication : Swords of the Empire/Les Epées de l’Empire (2001). Adaptation/pastiche de Sherlock Holmes à la sauce WFB, Zavant Konniger s’inscrit dans la lignée des héros de la BL pour qui le recours à la violence constitue un échec plutôt qu’une raison de vivre ou un passe-temps agréable, cénacle très restreint dans lequel on retrouve les grands anciens Sam Warble et Orfeo, ainsi que le trublion Ciaphas Cain pour le riant univers de 40K. Cette inclinaison « pacifiste » s’inscrivant en faux de la ligne éditoriale prise par la BL depuis maintenant une bonne quinzaine d’années, il est somme toute normal, même si regrettable, que les représentants de cette école non-violentes aient (presque) tous disparus des radars du lecteur de la Black Library. L’apparition de cette vieille ganache de Konniger, dix ans après sa dernière pige, constituait donc un surprise de taille, heureuse cela va de soi, et à savourer comme il se doit car n’ayant débouché sur rien de concret, un deuxième court format commis par le même Reynolds dans la foulée de The Problem… (The Riddle of Scorpions) mis à part. Les lecteurs souhaitant approfondir cette petite note de cadrage sont invités à consulter la chronique détaillée que leur serviteur a dédiée au bouquin Zavant il y a quelques années, et les autres peuvent enchaîner de suite avec la suite de cette analyse.

Nous retrouvons donc notre duo (car Konniger est toujours accompagné de son serviteur halfling, Vido) de héros dans une chambre froide d’Altdorf, occupé à inspecter le cadavre d’un duelliste malheureux répondant au nom de Wolfgang Krassner. Ce dernier a en effet récemment croisé le chemin d’un adversaire apparemment meilleur que lui au maniement des armes, un dénommé Felix Jaeger, étudiant à tendance révolutionnaire, aspirant poète et pas encore commémorateur du fameux Gotrek, qui languit depuis dans une cellule en attendant son exécution prochaine. Alors que tous la observateurs s’attendaient à ce que Krassner, duelliste semi-professionnel et tueur à sang froid homologué, ne fasse qu’une bouchée du novice Jager, l’impensable s’est produit, conduisant au final le père de Felix à louer les services de Zavant pour tenter de sauver son fiston de la potence (spoiler alert qui n’en est pas une : il va réussir).

Suivant le schéma classique d’une investigation criminelle, The Problem… nous entraîne à la suite du grand Zavant et du petit Vido sur les différents lieux de l’enquête, depuis la morgue improvisée de Luitpolstrasse jusqu’aux bouges mal famés du vieil Altdorf, en passant par la cellule de Felix dans un pilier du fameux Three-Toll Bridge, à la rencontre des témoins clés de cette sinistre affaire et à la recherche des indices qui permettront à Konniger et son énorme cerveau (il doit surcompenser quelque chose, c’est évident) de tirer les choses au clair. Alors que l’agitation gronde dans la capitale impériale et qu’une nuit d’émeutes se prépare dans une tension palpable1, notre duo de choc parviendra-t-il à faire éclater la vérité, et à résoudre le problème (fiscal en même temps que policier, car trois taxes sur un seul bâtiment, c’est vraiment excessif) du pont tri-péagé ?

Ayant déjà pu dire tout le bien que je pensais (en règle générale) de Josh Reynolds à l’occasion des critiques de ses précédentes soumissions dans Hammer & Bolter, je vais essayer d’innover en abordant un aspect de son style qui n’avait jusqu’alors eu peu de place pour s’exprimer, et que The Problem… a permis de mettre sur le devant de la scène : sa miscibilité avec l’œuvre de ses petits camarades de jeu. Par ce terme barbare, je souhaite mettre l’accent sur la capacité assez rare parmi les auteurs de la BL de tirer parti des publications de leurs camarades dans leurs propres récits (ce qui conduit généralement à un « cloisonnement » de ces derniers les uns par rapport aux autres, les seules passerelles étant les informations générales données dans les GBR/N et les Livres d’Armée ou Codex), et au-delà, d’emprunter de manière non empruntée (c’est là l’enjeu) les personnages d’un tiers. Outre une solide connaissance du background établi, et ce dans le sens le plus large qui soit, cela nécessite également un pouvoir d’assimilation des caractéristiques essentielles des personnages en questions, doublé d’un remarquable talent de restitution, afin de pouvoir « donner le change » de manière convaincante. On aurait pu penser que le lancement de l’Hérésie d’Horus aurait naturellement poussé les auteurs de la BL à perfectionner cette facette de leur talent, mais l’expérience (et quelques dizaines de bouquins) ont amplement démontré que c’était loin d’être le cas pour tout le monde. Principales victimes de cette inégale répartition des compétences, les guest stars de l’HH (Pépé & Sons), qui louvoient entre brillance surhumaine et imbécilité crasse selon qu’ils aient la chance ou le malheur d’être mis en scène par un cador ou un tâcheron.

Si on repasse du côté med-fan, il n’y a guère que Nathan Long qui a su faire ses preuves dans l’exercice, en redonnant à Gotrek et Felix un peu de leur lustre d’antan, après que Bill King se soit consciencieusement savonné la planche en sombrant, tome après tome, dans les bas-fonds du hack & slash. Il est d’ailleurs instructif de pousser un peu plus cet exemple en se remémorant les tentatives, unanimement peu concluantes, d’autres auteurs de se frotter au couple le plus iconique de la BL dans les pages de Hammer & Bolter. Que l’on considère A Place of Quiet Assembly de John Brunner (H&B #1), The Tilean’s Talisman de David Guymer (H&B #14) ou The Oberwald Ripper de Laurie Goulding (H&B 18), aucun ne correspond vraiment au cahier des charges G&F, tel qu’il a été posé, nouvelle après roman (et vice versa), par King et Long. Cela ne veut pas dire que toutes ces tentatives aient été mauvaises, mais il est flagrant qu’elles ont été écrites par des auteurs ne maîtrisant pas totalement leur sujet, pour une raison ou pour une autre. Là où Reynolds fait fort, c’est qu’il réussit un exercice de double appropriation, puisqu’il se saisit à la fois de la moitié blonde et pimbêche de la paire tueuse, mais également de l’impayable Zavant Konniger de Gordon Rennie, avec des résultats franchement convaincants. Et je ne m’attarderai même pas sur les easter eggs fluffiques que Josh a glissé dans ses lignes à destination des lecteurs les plus assidus de la BL, et qui dénotent encore une fois d’une solide, très solide, culture warhammeristique. Je ne sais pas si c’est bien sur un CV, mais en tout cas, c’est plaisant à lire.

Afin de ne pas passer pour un flagorneur éhonté, je reprocherai tout de même à The Problem… le peu d’effort investi par l’auteur pour livrer une enquête un tant soit peu challengeante  au lecteur. En d’autres termes, il ne sert à rien de lire avec le plus grand soin cette nouvelle à la recherche d’indices cachés annonçant de manière discrète un dénouement spectaculaire mais soigneusement préparé, car il n’en est rien. Vous identifierez sans mal la faction responsable des problèmes du pauvre Felix si vous avez des connaissances rudimentaires de fluff et quatre sous de bon sens, mais ne pourrez en faire autant avec le malfaiteur en lui-même, à moins d’être incollable sur la petite galerie de personnages gravitant autour de Konniger dans les nouvelles de Rennie. Ce n’est pas ça qui ternira le plaisir de lecture d’une nouvelle qui, rien que pour la balade à laquelle Reynolds nous convie dans l’Altdorf du fraîchement élu Karl Franz, encore loin des heures sombres de la Fin des Temps2 mérite amplement le détour, mais après tout ce que le bonhomme a démontré comme talent, je ne peux m’empêcher de penser que ce dernier aurait pu soigner cet aspect avec des résultats satisfaisants, voire superlatifs. Que voulez-vous que je vous dise, je m’habitue vite à la compétence…

1: Sans rire, c’est les Gilets Jaunes (Surcôts d’Or ?) à Warhammer cette histoire. Des bandes de manifestants énervés contre les taxes décrétées par le nouvel Empereur, et prêts à tout péter pour se faire entendre, ça ne vous évoque rien ? Méfions-nous du parallèle ceci dit, car le Vieux Monde n’était plus qu’à un quart de siècle de sa destruction à partir de ce moment…

2: Ironie de l’histoire, ces dernières étaient sûrement en train d’être ébauchées par le même homme au moment de la publication de The Problem…

Pariah (extrait) – D. Abnett [40K] :

PariahOn termine le numéro avec une petite mignardise qui en réjouira plus d’un : un extrait du Pariah de Dan Abnett, un habitué du teasing chez Hammer & Bolter puisque ce n’est rien de moins que la troisième fois qu’il bénéficie de ce traitement de faveur. Cette soumission aura toutefois une saveur et un attrait particuliers pour bien des lecteurs, puisqu’elle a été emprunté à la dernière publication d’une série des plus mythiques de la Black Library, j’ai nommé la saga Inquisitioriale du bon Dan, commencée en 2001 avec la trilogie des Eisenhorn (le père), poursuivie par un triptyque dévolu à son disciple Ravenor (le fils), et à présent complétée par le cycle Bequin (la simple d’esprit – littéralement – ), encore en cours d’écriture à l’heure actuelle. Familier des premiers tomes de cette œuvre fondatrice de la BL, et considérée à bien des égards, et à mon avis à juste titre, comme un des travaux de meilleure qualité de la maison d’édition de GW, je n’ai pas (encore) lu ce fameux Pariah, précédé par un Perihelion augurant sans doute d’un fil rouge allitératif en –p et –r pour les prochains titres du cycle, ce qui est certes charmant mais ne fait guère avancer le schmilblick.

Introduisant le lecteur directement au cœur du propos (le chapitre 8 du roman, en d’autres termes), cet extrait permet de renouer avec l’Abnett que l’on aime et respecte, c’est-à-dire le formidable conteur d’histoires ayant trouvé le juste milieu entre humanisation (capacité à faire apparaître les personnages comme crédibles et donc à amplifier l’empathie du lecteur à leur égard) et singularisation (le petit détail sympathique qui transforme le stéréotype/archétype classique de 40K en personnage unique et instantanément reconnaissable par le lecteur), fond, forme et style, et respect de l’univers et inventivité, pour passer les caractéristiques les plus marquantes de sa patte narrative. Mais l’une des choses que j’apprécie le plus chez Abnett, c’est la familiarité avec laquelle il traite son public, en ce qu’il ne se donne presque jamais la peine d’introduire de manière évidente et graduelle son propos, y compris les éléments importants à la bonne compréhension de ces derniers. Le postulat de départ est (et demeure) que le lecteur est suffisamment malin et informé pour relier de lui-même les éléments de contexte disséminés par ce farceur de Dan dans ses écrits, qui finissent par faire sens de la manière la plus naturelle qui soit, après quelques lignes, pages ou chapitres de rodage. Bien sûr, derrière cette idée simple mais efficace en diable se cache une maîtrise technique et stylistique bien supérieure à la moyenne, sans quoi ses textes resteraient abscons de la première à la dernière page. Bien des émules de Papa Gaunt se sont brulés les ailes en se frottant à l’exercice, et n’ont réussi qu’à passer pour des billes auprès de leur lectorat. Il est donc bon que Dan se livre à un petit masterclass de temps à autre, afin de rappeler à tous qu’en matière de bille, l’important est de toucher la sienne, ce qu’il fait assurément.

Pour rentrer plus précisément dans l’intrigue, nous suivons une soirée peu ordinaire pour le personnage de Beta (à rapprocher d’Alpha plutôt que de Simplet, si on m’autorise un avis), qui a de fortes chances d’être Alizabeth Bequin herself. Cette dernière, paria de son état, appartient à une école très spéciale (the Maze Undue), chargée d’éduquer les individus disposant de cette caractéristique génétique très rare et très utile, même si assez handicapante pour la vie sociale de ses porteurs, le plus souvent afin qu’ils puissent se rendre utiles auprès d’agents de l’Inquisition. C’est justement le retour d’un des anciens diplômés du Maze, évènement inédit dans l’histoire de ce vénérable établissement, qui va faire basculer ce crépuscule jusque-là ordinaire en aventure trépidante. Ayant à peine eu le temps de se remettre de l’émotion causée par la réapparition, elle aussi indue, de son ancien crush, Beta se retrouve à investiguer les combles de l’école à la recherche d’une fenêtre laissée ouverte, ce qui, en plus de faire grimper la note de chauffage pour rien (et vu le prix du loyer, ce n’est pas négligeable), dénote de l’intrusion d’un externe forcément animé d’intentions peu amicales dans le Labyrinthe, dont l’existence est censée rester secrète pour sa propre sécurité.

Ayant finalement mis la main sur le maraudeur, Beta va vite découvrir pourquoi il reste une très mauvaise idée de se retrouver seul(e) avec un(e) ecclésiastique trop entreprenant(e) dans un endroit où personne ne peut vous entendre appeler à l’aide. Que voulez-vous, il y a des vérités qui se conservent, quel que soit le millénaire. Fort heureusement, être un paria n’a pas que des inconvénients, surtout quand Sœur Sourire se révèle être une psyker de haut niveau, et même si Beta doit composer avec un gros bêta (son ancien coup de foudre, dont la rosette d’Interrogateur est apparemment mal ajustée et bloque l’afflux sanguin au cerveau, car le bellâtre pêche sérieusement en matière stratégique), ses propres ressources et la colonie de termites ayant élu domicile dans le grenier dans un premier temps, puis l’arrivée du professeur Xavier1 pour un bon gros cliffhanger des familles dans un deuxième, achève cet extrait en beauté et donne définitivement envie d’en savoir plus. C’était le but, je suppose.

1: Chez Abnett, cela se dénote par des dialogues plus gras plus. +Tu es un psyker, Harry.+ Visuellement impactant et efficace en matière de storytelling.

En conclusion, tout simplement un des meilleurs, si ce n’est le meilleur numéro Hammer & Bolter depuis le très sympathique #1. Kelly, Hoare et Reynolds livrent tous une prestation fluctuant du très honorable au franchement sympathique, un sans-faute qualitatif qui n’avait jamais été atteint jusqu’ici, ou en tout cas, pas à ce niveau. Ajoutez à cela un extrait yummy  en diable commis par un Abnett enfin égal à lui-même, et il n’y a guère que le chapitre de Gilead co-signé avec sa moitié qui vient jeter une ombre au tableau. Et quand on considère que même ce relatif coup de moins bien s’avère être sensiblement meilleur que les chapitres « primitifs » de Gilead’s Curse, on peut se laisser aller à un élan de munificence, qualité qui ne s’exprime vraiment que dans la profondeur et l’infini, comme chacun sait. Ce numéro 25 est-il pour autant le meilleur du lot ? Pour avoir la réponse à cette question, rendez-vous prochainement pour le grand final de cette chronique. J’ai hâte.

ZAVANT KONNIGER by GORDON RENNIE

Bonjour à tous! Première chronique pseudo littéraire d’une série de la BL, dédiée à la collection de nouvelles mettant en scène la figure, assez atypique dans notre monde de brutes assoiffées de sang et de mages mâââléfiques, de Zavant Konniger, auto-déclaré « sage-détective » d’Altdorf. Oui, je sais, la référence est digne d’une blague d’Anroumanork, le peau-verte le plus drôle de ce côté des Montagnes Noires, mais il faudra s’y faire, Gordon Rennie, l’auteur, ayant absolument tenu à mettre à profit dans son bouquin les trente minutes d’écoute de la vieille cassette « Impress your friends with cool French sounding names » piquée à sa grand-mère sénile.Pour certains d’entre vous, le nom de Konniger et de son serviteur halfling Vido ne manquera pas d’évoquer de lointains souvenirs. La paire figure en effet dans une des nouvelles du recueil Les Épées de l’Empire, ouvrage bien plus facile à dénicher que le recueil consacré par Rennie à son héros (épuisé par la BL et jamais ré-imprimé, non traduit en français à ma connaissance). ‘ere we go.

Les couvertures:

L’intrigue:

Recueil de nouvelles (décidément, je dois être dans un cycle) plutôt que roman d’un seul tenant, le livre présente quelques unes des enquêtes de Konniger. Bon, autant le dire tout de suite pour les moins attentifs d’entre vous (ça m’évitera de le répéter par la suite), Gordon Rennie a volontairement calqué son héros sur le personnage bien connu de… de… alors? Oui, au fond? Non madame, je ne pensais pas à Casimir, même si la ressemblance est frappante, maintenant que vous le dîtes… Vraiment personne? Oui au premier rang, le petit monsieur malingre avec les énormes lunettes? Oui, c’est bien ça, Sherlock Holmes. Merci le geek.

Bref, Konniger est un vieil excentrique vivant reclus dans sa maison avec son serviteur Vido, et auquel les autorités font appel quand elles se retrouvent confrontées à des énigmes insolubles (c’est à dire la plupart du temps, parce que dans un monde saturé de magie noire et de démons, faire le tour des voisins se révèle souvent insuffisant pour trouver le coupable). Il ne joue pas du violon, ne porte pas de deerstalker, mais Rennie a cru bon de faire de son personnage un opiomane (ou l’équivalent de cette addiction dans le monde de Warhammer) ainsi qu’un expert en arts martiaux (on se souviendra qu’Holmes est lui-même un adepte du baritsu). On aime ou pas la lourdeur du clin d’oeil, mais force est de constater qu’en raison du milieu extrêmement encombré qu’est celui des détectives-trop-trop-intelligents, se raccrocher à corps perdu à un modèle reconnu, quitte à faire de son propre personnage un clone d’une de ces icônes, est une position probablement plus intelligente que d’essayer à tout prix de créer une figure originale. Au moins, on ne peut pas reprocher à Rennie de pomper en douce sur Conan Doyle: lui revendique haut et fort son « plagiat ». Et quand on connaît l’esprit tortueux et acerbe du lecteur moyen de la BL/BI, on peut considérer que Gordon Rennie a eu plutôt raison d’en rajouter une couche, histoire que tout le monde comprenne qu’il s’agissait d’un pastiche, même les plus obtus. D’ailleurs, un simple regard à la couverture d’Adrian Smith ne fait que renforcer cette impression.

Le livre, assez court, couvre 4 enquêtes de Zavant, la longueur de ces nouvelles allant croissant (la dernière faisant la moitié du bouquin). Au cours de ces affaires, Konniger se frottera à des cultistes dépravés, morts-vivants déchaînés, démons échevelés, hommes-bêtes syndiqués et autres mutants hélitreuillés, tous bad guys habituels de ce genre de littérature. Évidemment, le gros de l’action se concentre sur l’enquête menée par le « sage-détective » (sic, autre preuve que Rennie trouve la langue de Molière pratique pour donner du mystère et de l’exotisme à ses histoires) plutôt que sur le cassage de crânes qui sont le pain et le sel de la majorité des personnages et des auteurs de la BL. Cependant, les coupables n’étant pas vraiment du genre à se jeter à genoux et à demander un avocat une fois démasqués, Konniger et ses alliés auront de nombreuses occasions de rétablir la loi et l’ordre dans les rues animées d’Altdorf.

Le style:

Je dois avouer que j’aime assez la manière dont Rennie mène son affaire. C’est tout à fait typé « BL », avec un mélange équilibré de descriptions « coules » des détails les plus sordides du monde trotrodark de Warhammer, des « rebondissements », ou au moins, une relance de l’intrigue, toutes les deux pages en moyenne, des traits d’esprits et autres blagounettes que l’on peut trouver divertissants ou lamentables selon son état d’esprit et la journée que l’on vient de passer, des combats réguliers et un léger nappage de fluff par dessus pour solidifier le tout. Lire ce roman, c’est un peu comme manger un Big-Mac: on ne savoure pas chaque bouchée dans un silence religieux, mais le goût est agréable et on finit sans problème. Si la BL demandait à ses auteurs d’atteindre ce niveau comme le minimum acceptable avant toute publication, nul doute qu’elle ne s’en porterait que mieux.

Ceci étant dit, Rennie a les défauts de ses qualités: à vouloir mettre en scène des personnages hauts en couleur de manière flamboyante, en soulignant au marqueur noir indélébile ô combien son héros est intelligent et ô combien les ennemis de ce dernier sont vilains et machiavéliques, il s’embourbe parfois dans des situations saugrenues: comment expliquer par exemple que le « meilleur » chasseur de vampires du Vieux Monde, vétéran blanchi sous le harnais et à qui on ne la fait pas, se retrouve à traquer une Lahmiane dans les égouts d’Altdorf (!) sans soupçonner un instant qu’il s’agit d’un piège (!!) jusqu’au moment où une meute de goules lui tombe dessus, situation qu’il n’avait apparemment pas le moins du monde prévu. Konniger n’est pas épargné, sa manie de donner des conférences sur les us et coutumes des peuples du Vieux Monde aux moments les plus improbables frôlant parfois le grotesque à force de « la-situation-est-désespérée-mais-prenons-ça-avec-décontraction-voulez-vous » (le summum étant atteint lorsqu’il trouve le temps d’expliquer à ses potes templiers pourquoi les homme-bêtes de Slaanesh et de Khorne sont placés sur les deux ailes de l’armée adverse avant que cette dernière ne se lance à l’assaut). Le personnage de Vaul Steiner (voir en dessous) est également pas mal dans le genre « too much ».

Dernier point, déjà un peu abordé plus haut, le goût de Rennie pour les expressions et les noms « francisés ». Pour des lecteurs anglais un peu mou du bulbe, ça peut sembler exotique, mais pour nous autres froggies, le résultat est moins concluant: Valois de Simone (?), poète bretonnien aliéné désigné par Konniger comme un « savant fou » (sic) alors que le pauvre bougre n’a rien du docteur Frankenstein, Marcel Volpaire (??) dramaturge en vue à Gisoreux, ou, mon préféré, Flaubert de Maupassant (?!?) le rival bretonnien de Zavant… autant de franches rigolades en perspective.

Les personnages:

N’ayant pas le goût de certains de ses collaborateurs de la BI pour les intrigues à tiroir et les come-back fracassants de vieux ennemis que l’on croyait morts et enterrés, procédés nécessitant évidemment une panoplie de personnages récurrents, Rennie ne multiplie pas les figures marquantes.

Zavant Konniger: Le héros, véritable Sherlock Holmes d’Altdorf, doté d’un intellect supérieur et d’un caractère excentrique. Ancien membre de l’Église Sigmarite, il a failli finir sur le bûcher à force de jouer au con avec la tolérance toute relative du crédo officiel. Grâce à son réseau d’informateurs, il est au courant de tout ce qui passe dans la capitale impériale, connaissances qu’il utilise au cours de ses enquêtes. Travaillant à son grand œuvre, une sorte de Liber Chaotica exhaustif (bonjour le travail sain et relaxant), il a recours à des substances illicites pour maintenir son équilibre mental. Niveau castagne, il se défend pas mal grâce à sa formation en arts martiaux (comment ça, c’est pas crédible? il a appris auprès d’un cathayen exilé!).

Vido: Serviteur de Konniger, Vido est un ex-voleur halfling que Zavant a sauvé de la potence en échange de ses faveurs sexuelles ses services. Sérieusement, les relations entre les deux personnages sont, à la seconde lecture, assez ambiguës (ou alors j’ai l’esprit mal tourné). Amusez-vous à compter les fois où Konniger « pose une main rassurante sur l’épaule de son serviteur » (texto), pourtant sensé avoir été le meilleur cambrioleur d’Altdorf, et en tant que tel, plutôt capable de se débrouiller seul face à la vermine des bas-fonds. Spécialiste du lancer de dagues et du sombre pressentiment, il fait office de « docteur Watson » court sur pattes, permettant par ses questions plus ou moins rhétoriques à son boss d’étaler sa science.

Vaul Steiner: À mes yeux, une des plus grosses erreurs de Rennie. Steiner est l’assassin personnel de Karl Franz. Oui, je sais ce que vous pensez, un monarque aussi éclairé et bienveillant que Karlie (en tout cas, le fluff actuel le présente comme tel) ne devrait pas avoir recours à un tel personnage, mais Gordon n’est pas de cet avis, parce qu’un assassin, c’est trop kioul. Et pour être kioul, il est kioul le petit Vaul! Dans le genre type-mystérieux-et-sinistre-capable-de-retourner-n’importe-qui, il se pose là (et dans son cas, « là » désigne un point indéfini entre le bourrinisme mono-neural et le ridicule consommé). Merde quoi, je veux bien qu’il s’agisse d’un vrai dur à cuire, mais c’est juste un homme, pas un vampire dragon de sang! Je soupçonne Rennie de l’avoir inclus uniquement pour pouvoir finir ses histoires rapidement, car lorsque le bon Steiner pointe le bout de sa capuche, les méchants n’ont plus qu’un paragraphe à vivre (parfois moins, et c’est franchement la loose: la fin de la deuxième enquête voit même l’auteur se moquer de ses propres méthodes billesques). SPOILER: « The dagger flew through the air, burying itself into the wolf-thing’s chest, piercing it’s heart. The Chaos creature fell without a sound, a life that could be measured in millenia ignominiously snuffed out in the blink of an eye. » Trofor Steiner. FIN SPOILER

Le fluff:

Sur ce point, je suis partagé. Les descriptions d’Altdorf faites par Rennie sont une mine d’informations pour le fluffiste (surtout sur le nom et la « spécialisation » des quartiers), et sont plutôt en accord avec les textes canoniques, ce qui rend les quelques incohérences que j’ai remarqué encore plus flagrantes. Par exemple, la distinction que Rennie fait entre Ungors et Gors est des plus nébuleuses (le chef d’une bande de Gors étant par exemple qualifié d’Ungor), chose très étonnante puisque l’auteur parle quelques pages plus tard de brays et turnskins, catégories encore plus précises d’hommes-bêtes abandonnée par GW. Erreur de relecture, embrouillamini causé par une volonté de bien faire, fainéantise crasse? Je vous laisse seuls juges. Globalement cependant, les conneries de background sont rares, même si le caractère « intimiste » des enquêtes de Zavant, en prévenant Rennie de trop s’aventurer dans le fluff couvert dans les livres d’armées et suppléments, a sans doute fait beaucoup pour limiter les bourdes.

Mon avis (que je partage):

La série des Zavant Konniger, parce qu’elle s’éloigne sensiblement des aventures habituelles des héros du monde de Warhammer, apporte un peu de fraîcheur dans la bourrinitude ambiante de la BL. Pastiches ma foi pas désagréables à lire des tribulations du résident de Baker Street, les enquêtes du sage-détective souffrent parfois du zèle de leur auteur à construire un climax que, bizarrement, il se complaît souvent à faire retomber comme un soufflet. Rennie n’étant pas Conan Doyle, et le Vieux Monde n’étant pas tenu aux mêmes impératifs de logique et de vraisemblance que le notre quant à l’explication des crimes commis (on aura quand même droit au meurtre perpétré dans une cellule fermée de l’intérieur), le lecteur ne doit pas s’attendre à se faire balader par le bout du nez, mais je ne pense de toute façon pas qu’il s’agissait là du but de l’auteur. En conclusion, un petit bouquin pas transcendant mais tout à fait honnête, avec assez d’originalité (si on peut dire) pour laisser un souvenir dans la mémoire du lecteur assidu de ce genre de littérature (alors que bizarrement, j’ai presque tout oublié de la série des Von Carstein’s Wars).

Haha