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LET THE GALAXY BURN [40K]

Bonjour et bienvenue dans cette revue de ‘Let the Galaxy Burn’, anthologie gargantuesque de nouvelles de Warhammer 40,000 publiée en 2006 par la Black Library. Avec pas moins de 38 histoires au compteur1 et 765 pages, cette vénérable brique fut en son temps l’un des ouvrages les plus volumineux jamais sorti par la BL, comme son équivalent de Warhammer Fantasy Battle (chroniqué ici), ‘Tales of the Old Word’. Il servit également de chapitre final à la première mouture du magazine bimensuel Inferno!, dont il compila une bonne moitié des nouvelles 40K initialement publiées dans ces pages légendaires (du numéro 1 au numéro 28, pour être précis). Cette distinction nette entre la période 1997 – 2002 et 2002 – 2005 me laisse à penser que Nottingham avait prévu de sortir un deuxième recueil sur le modèle de ‘Let the Galaxy Burn’, mais n’a pas concrétisé la deuxième phase de ce diptyque. Encore un mystère propre à la GW-Fiction, qui n’en manque décidément pas.

1 : Si vous vous dîtes qu’il aurait été plus stylé d’arrondir à 40, ne vous inquiétez pas les éditeurs avaient eu la même idée, et réaliseront leur objectif dans le recueil ‘There Is Only War’, comptant 41 entrées en hommage aux 41 millénaires de la franchise.

Let the Galaxy Burn [40K]

Divisé en sept sous-parties plus ou moins thématiques (je comprends ce qui a été fait pour ‘We are the Space Marines…’, beaucoup moins pour ‘Kill Them All!’), ‘Let the Galaxy Burn’ propose un panorama quasi-complet du 41ème millénaire tel qu’il était couché sur le papier par les auteurs recrutés par la BL au tournant du 3ème (millénaire). On a donc droit à du « BL-Style » chimiquement pur et en grande quantité, grâce aux efforts enthousiastes mais pas toujours aboutis des 18 contributeurs ayant prêté leur plume et leurs idées à ce regroupement hétéroclite de courts formats assez nerveux en règle générale. Avec pas moins de cinq piges à son actif, c’est l’aujourd’hui vénérable Gav Thorpe qui fait office de pyromane galactique en chef, suivi de Ben Counter et Dan Abnett (4 chacun). On peut toutefois décerner à ce dernier le titre de MVP, car ‘Let the Galaxy Burn’ contient deux inédits du futur Maître du Millénaire Sombre et Se/aigneur de Terra : ‘Playing Patience1 et ‘The Fall of Malvolion’. A son niveau, C. S. Goto fit de même avec ‘The Tower’, et remporte ainsi le prix de la confidentialité car cette nouvelle ne bénéficié (à ce jour, et je ne pense pas que ça change de sitôt) d’aucune réédition depuis lors. Faîtes ce que vous voulez de ces informations.

Avant de conclure cette introduction et de passer aux choses sérieuses, je tiens à prévenir le lecteur que les chroniques qui suivent constituent aussi une plongée dans mes travaux critiques de la dernière décennie (dit comme ça, ça me fout un coup de vieux). La différence entre les nouvelles que j’ai couvertes au début de ma « carrière », comme ‘The Raven’s Claw’ ou ‘Ancient Lances’ et celles que j’ai abordées bien plus tard (‘Playing Patience’) ne manquera pas de sauter aux yeux du lecteur, qui se trouvera en présence d’un patchwork de revues. Je me suis brièvement demandé s’il ne serait pas nécessaire de reprendre mes premiers travaux pour uniformiser le tout, mais comme je ne renie ces modestes débuts, je me suis contenté d’éditer à la marge les références n’ayant plus lieu d’être dans les chroniques. J’espère que le résultat vous satisfera !

1 : Ce que je trouve assez étrange car la BL a soigneusement gardé hors de l’anthologie les autres nouvelles inquisitrices d’Abnett.

Let the Galaxy Burn

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We are the Space Marines, the Champions of Humanity

Words of Blood – B. Counter :

INTRIGUE :

40K_Words of BloodSur la planète quasiment abandonnée d’Empyrion IX, le Commandeur Athellenas des Black Templars doit relever un défi de taille : empêcher une armée de 6.000 cultistes de Khorne de s’emparer du seul spatioport de ce monde minable, ce qui permettrait aux hordes dépravées et mal fringuées du terrible Manskinner de fondre sur Macharia pour y commettre un génocide. Le tout avec seulement trente Space Marines à disposition. Le rapport de force n’est pas en faveur de l’Astartes, mais Athellenas a… un plan (et pour un Black Templar, c’est déjà beaucoup). Le seul problème, c’est que ses frères risquent de ne pas l’apprécier du tout, ce qui va le contraindre à jouer très finement la partie1.

Du côté adverse, les préparatifs vont bon train pour ce qui ne devrait être qu’un massacre en bonne et due forme entre deux factions peu réputées pour leur tactique d’évitement. Le Manskinner, qui a reçu de sa divinité tutélaire le don démoniaque « parole de sang », ce qui lui permet de plonger son audimat dans une folie furieuse (et non pas de se mordre la langue à chaque fois qu’il prononce une phrase), prononce une petite causerie d’avant-match qui met ses ouailles de bonne humeur, et envoie sa cavalerie (si si) à l’assaut des positions retranchées des Marines. Il se doute que les fringants hussards ne feront pas long feu face à l’arsenal des Black Templars, mais cela devrait laisser le temps nécessaire au gros de ses forces d’arriver à portée de charge.

Conformément à ses pronostics, la brigade légère du bien nommé Die(ss) tombe glorieusement au champ d’honneur, sur le score sans appel de 210 morts à trois doigts tranchés. C’est alors que le rusé Athellenas dévoile la profondeur insondable de son génie stratégique, en ordonnant la retraite. Stupeur et bégaiements chez les meilleurs de l’Empereur, qui n’ont pas pour habitude d’abandonner du terrain à l’ennemi, à plus forte raison un temple millénaire à la gloire de Pépé, comme celui qu’ils occupent actuellement. Il faut donc claquer quelques PC au Commandeur pour passer le stratagème « Y a pas de mais », permettant un repli en bon ordre jusqu’à la ville voisine où une nouvelle position défensive est installée sans tarder.

Si cette manœuvre n’a pas fait consensus chez les Black Templars, elle a cependant compliqué la situation du Manskinner, dont l’emprise sur les éléments les plus foufous de son armée commence à s’effilocher. Malgré son éloquence sans pareille – en même temps, la plupart de ses suivants ont perdu l’usage de la parole, donc la compétition n’est pas féroce – Manski’ ne parvient pas à empêcher un de ses lieutenants, le Caporal Recoba, de partir à la chasse aux Marounes sans attendre les retardataires. L’ennui est que le charismatique officier embarque avec lui deux mille copains, divisant l’armée des cultistes en deux. Comme on peut s’y attendre, cet empressement à porter le combat à l’ennemi sera fatal pour Recoba et ses suivants, qui tomberont sous les bolts et les coups des Space Marines lors d’une embuscade savamment orchestrée par Athellenas et ses Sergents.

Cette nouvelle victoire est cependant rapidement ternie par la décision de Big A. de battre à nouveau en retraite, cette fois-ci pour une défense sur la ligne (ici le spatioport d’Empyrion IX). Cette annonce dévaste le Devastator Valerian, qui menace de se faire renégat plutôt que de commettre la forfaiture de la marche arrière, et n’accepte finalement de se plier aux instructions de son supérieur qu’après s’être fait menacer de sanctions disciplinaires dans cette vie et dans la suivante.

De son côté, le Manskinner enrage (comme d’hab’ vous me direz) de la couardise manifeste de ses adversaires, qui rend son armée sevrée de violence de plus en plus difficile à contrôler. Ayant compris qu’il s’agit d’un stratagème pour désorganiser ses forces, il tente de calmer les ardeurs de ses cultistes en exaltant les valeurs de la vengeance et de la patience, mais se fait brutalement interrompre par son dernier sous-fifre (Kireeah) avant d’avoir pu terminer son sermon. Bien que l’impoli paie son impudence de sa tête, proprement séparée de son corps par la paire de ciseaux géants que le Manskinner arbore à la place de son bras droit – c’est pratique pour inaugurer les bâtiments, je me demande pourquoi Charles III ne s’en est pas déjà équipé – le mal est fait et les Khorneux se lancent dans un sprint éperdu en direction du spatioport. Après avoir tenté de remettre un semblant d’ordre dans la horde en cisaillant de droite et de gauche, Manski’ décide de se joindre à la fête car après tout, les Marines n’ont plus nulle part où aller et l’avantage numérique est toujours largement en faveur des rouges…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur le besoin pathologique des Khorneux de cogner sur quelque chose ou quelqu’un dans les plus brefs délais, qui va jouer un bien mauvais tour aux hérétiques. Alors qu’ils ne sont plus qu’à quelques dizaines de mètres de leurs cibles, leur soif de sang finit par se retourner contre eux et l’armée du Manskinner se transforme en battle royal géante, de laquelle seuls quelques survivants confus et blessés émergent à la fin des combats pour tomber aussitôt sous les coups des Marines. C’était ce sur quoi comptait Athellenas, qui a interdit à ses frères d’ouvrir le feu pour ne pas permettre aux cultistes de se reconcentrer sur leurs priorités. Malin. Ce qu’il l’aurait été encore plus, ce serait d’avoir partagé son plan avec ses hommes pour s’assurer que tout se déroule bien, plutôt que de compter aveuglément sur la discipline et la loyauté vacillante de ces derniers. Mais comme Athellenas l’explique doctement à Valerian une fois la bataille remportée, les meneurs n’ont pas à se justifier auprès des exécutants. Ce n’est pas avec une telle mentalité que notre héros gagnera le prix de camaraderie, mais les résultats parlent d’eux-mêmes, et c’est plus qu’assez au 41ème millénaire…Fin spoiler

1 : Je choisis de penser qu’il s’est équipé d’un poing énergétique (qu’il n’utilisera pas une fois de la nouvelle, malgré ce que l’illustration grimdark à souhait laisse penser) pour donner l’impression à ses bourrins de collègues qu’il serait le premier à sauter dans la mêlée. Mais la moufle ne fait pas le moine de l’espace…

AVIS :

Words of Blood’ fait partie des nouvelles écrites pour explorer une situation paradoxale ou problématique si on se réfère au background canon de univers de Games Workshop1, ici : « que se passerait-il si le seul moyen pour des Black Templars de remporter une bataille était de battre en retraite ? ». Je précise qu’à l’époque où cette histoire a été écrite, les zélés fils de Dorn prenaient leur serment de défense de l’Imperium de manière beaucoup plus littérale – certains esprits chagrins pourraient dire « basse du front », mais il ne faut pas écouter ces vils persifleurs – que maintenant. Sur ces prémisses intéressantes, en tout cas plus qu’une vulgaire empoignade entre Space Marounes et mutants/hérétiques/Xenos (rayer la ou les mentions inutiles), Ben Counter développe un propos qui, s’il accuse aujourd’hui sérieusement son âge, mérite encore la lecture à mon sens.

En effet, si on fait abstraction des quelques éléments surannés de ‘Words of Blood’ (le serment de non-reculade des Black Templars, les attaques de cavalerie…), la trame de l’histoire reste solide. Mieux encore, cette nouvelle présente un parallélisme aussi élégant que satisfaisant entre les dilemmes tactiques et managériaux auxquels sont confrontés les deux commandants ennemis. Tant Athellenas que le Manskinner doivent en effet réfréner les penchants naturels de leurs troupes pour espérer l’emporter, et composer avec la mauvaise volonté de ces dernières à obéir à des ordres avec lesquels elles ne sont pas en phase. À ce petit jeu, la discipline naturelle des Space Marines finit par l’emporter (mais de très peu), provoquant la fin des hordes hérétiques de la manière la plus Khorneuse qui soit. Le vieux fluffiste qui sommeille en moi a d’ailleurs failli verser une larme (de sang) en lisant la harangue de la dernière chance faite par le Manskinner à ses troupes indisciplinées juste avant qu’elles ne piquent leur sprint fatal vers le spatioport d’Empyrion IX. Car oui, Khorne était dans l’archéofluff une divinité plus complexe que l’immonde bourrin qu’il est devenu au fil des versions2, et Counter mérite une accolade pour avoir reflété ces fifty shades of red dans sa nouvelle.

Boni appréciables, il s’est également donné la peine de développer un minimum sa galerie de personnages (les plus intéressants étant le Manskinner philosophe et ses lieutenants exaltés), et se révèle plutôt généreux en termes de fluff Black Templar, même s’il est permis de douter de la validité de ces informations plus de vingt ans après l’écriture de cette nouvelle (à l’époque, cette faction ne disposait pas de son propre Codex, et on pouvait donc y aller franco sur leur background). Pour ne rien gâcher, la nouvelle se termine par un petit twist final, un peu ruiné par le TGJSUO (Ta Gu*ule Je Suis Un Officier) que l’aimable Athellenas décoche au pauvre Valerian, mais on n’en tiendra pas rigueur à l’auteur. Bref, même si ‘Words of Blood’ a un peu vieilli depuis sa sortie (en 2000, on peut être miséricordieux), il elle ça se laisse lire sans problème encore aujourd’hui.

1 : Marc Gascoigne indique dans son introduction de l’anthologie ‘Let the Galaxy Burn’ que la Black Library a été (au moins en partie) créée à cette fin. C’est dire si ce « genre » est important.
2 : Quand on voit les dernières entrées du Codex World Eaters, on ne s’étonne pas que le mot « subtilité » s’écrive avec neuf lettres, et non pas huit…

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The Black Pearl – C. Pramas :

INTRIGUE :

The Black PearlFraîchement nommé Chapelain Interrogateur, Uzziel des Dark Angels emmène ses frères sur le monde exodite de Lughnasa, afin de vérifier une information obtenue du premier Déchu qu’il a capturé. Selon la confession du traître, la mythique épée du Lion, maniée par le Primarque de la première Légion au cours de la Grande Croisade, et perdue au cours de la destruction de Caliban, reposerait en effet dans un temple de cette planète.

AVIS :

Une nouvelle rythmée et assez bien construite, dans la droite lignée d’Into the Maelstrom’. Comme cette dernière histoire, ‘The Black Pearl’ se termine par un petit twist1 qui, sans être transcendant, conclut le récit de manière opportune et démontre que Pramas a bien intégré les codes de 40K (Praaaaa-maaaaaaaaas…ton univers impitoyaaaa-aaa-bleuh).

Reste qu’utiliser les Dark Angels comme protagonistes est un exercice périlleux, les multiples couches de secrets et de rumeurs entourant les Impardonnés obligeant l’auteur à procéder avec prudence. Malgré sa maîtrise du background (mention est faite de Moloc(h)ia, Chapelain Interrogateur détenteur du highest score en matière de confessions de Déchus), Pramas se prend les pieds dans le tapis pelucheux du fluff des Anges de la Mort à quelques reprises. Rien de très grave, je vous rassure, mais il fallait tout de même que le signale. Paradoxalement cependant, ce sont les (petites) révélations sur le passé des Dark Angels glissées par Pramas dans ‘The Black Pearl’2 qui constituent l’intérêt principal de la nouvelle. Les vieux de la vieille apprécieront aussi la présence de chevaliers dragons Exodites en tant qu’antagonistes, même si l’auteur se contente de les balancer sur les Space Marines dans une reconstitution futuriste de la charge de la brigade légère (si tant est qu’un chevaucheur de megadon puisse être considéré comme un cavalier léger) à la bataille de la Balaklava, et ne s’attarde donc guère sur la culture de ces fiers guerriers tribaux.

Honnête mais finalement assez terne, en ce qu’elle n’explore pas assez à mon goût la psyché si particulière des Dark Angels (une joyeuse bande de zélotes psychorigides et intolérants au plus haut point, à la fois arrogants à l’extrême et terrifiés à l’idée que le reste de l’Imperium apprenne leur honteux petit secret), ‘The Black Pearl’ constitue une lecture assez dispensable, sauf si vous êtes un amateur inconditionnel de Lionel et de ses fistons.

1L’épée du Lion se révèle au final être l’épée de Luther.
2 : Référence à la perle noire que les Chapelains Interrogateurs des chapitres Impardonnés ajoutent à leur Rosarius pour chaque Déchu qu’ils « convainquent » de se confesser.

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Angels – R. Earl :

INTRIGUE :

Alors que la fin approche pour lui, après une longue vie de près de 50 ans (ce qui est apparemment respectable sur la planète féodale sur laquelle il vit), Bobby1 se remémore l’événement le plus marquant de son existence, un souvenir tellement puissant qu’il l’a guidé dans les moments charnières de sa vie, depuis l’accouchement de sa femme jusqu’à l’extermination d’une meute de loups un peu trop familiers. Cela s’est passé il y a bien longtemps, lorsqu’il n’était qu’un petit nenfant…

Né dans le petit village de Pasternach, Bobby connut une enfance rude mais heureuse dans ce hameau fort éloigné du tumulte grimdark d’une galaxie hostile, jusqu’à ce que des signes inquiétants se multiplient dans les environs immédiats du bourg. Les méthodes traditionnelles (envoyer une patrouille faire mumuse dans la forêt voisine) n’ayant, pour une fois, pas donné les résultats escomptés, une douce psychose commence à s’abattre sur Pasternach au fur et à mesure que des événements sinistres se produisent dans le voisinage (meurtre sauvage d’un vieil ermite qui résidait un peu en retrait du village, disparition de l’expédition de volontaires envoyés quérir de l’aide dans la ville la plus proche, incendie probable de cette dernière en pleine nuit). Décidés à se défendre contre les forces maléfiques qui crapahutent dans les sous-bois, les villageois transforment leur communauté en fort retranché, mais cela ne décourage pas la bande de mutants assoiffés de sang et de chair fraîche qui constitue la cause de leurs tracas de passer à l’attaque, au cœur d’une sombre nuit d’automne.

Malgré leur vaillance et leurs outils de ferme soigneusement affutés, tout aurait pu et dû très mal se finir pour les Pasternachois, très démunis face à la férocité et au nombre de leurs assaillants. Au moment où tout semblait perdu, cependant, quatre « anges » (d’après les mots du narrateur) font leur apparition sur la palissade ceignant le village, et commencent à tailler des croupières à la horde impie, avec une terrible efficacité qui ne manque pas d’impressionner le jeune Bobby. Ce qu’il ne peut pas savoir, en pauvre inculte qu’il est, c’est que les nouveaux arrivants sont des Space Marines2, et que le massacre d’une bande d’Hommes Bêtes en maraude n’est probablement qu’un échauffement avant leur tournoi de bière pong énergétique. Toujours est il que la bogossitude absolue de l’Astartes fait une très forte impression sur Bobby, qui tirera de ce souvenir impérissable la fortitude nécessaire pour affronter tous les aléas de sa morne vie de péquenot. Merci Pépé.

1 : Comme il n’a pas de nom, je lui en donne un.
2 : Robert Earl ne donne pas d’indication quant à leur allégeance, et comme leur livrée est bleue et verte, il est permis de penser qu’il ne s’agit pas nécessairement de loyalistes

AVIS :

Avant le lancement des gammes Warhammer Horror et Crime, rares étaient les nouvelles de 40K s’intéressant au point de vue des humbles sujets de l’Imperium, et à ce titre, ‘Angels’ est une œuvre intéressante et résolument précurseuse (?), puisqu’écrite plus de vingt ans avant que la Black Library fasse le pari de la diversification. Bien sûr, il y a bien des Space Marines au casting de cette courte nouvelle, mais Robert Earl garde volontairement et astucieusement la caméra braquée au niveau de son jeune et impressionnable héros, qui est au fond assez proche de la grande majorité des habitants de l’Imperium dans sa méconnaissance absolue de qui sont les Élus de l’Empereur. Ajoutez à cette bonne idée de positionnement narratif le talent de conteur d’Earl, et vous obtenez une des nouvelles courtes (10 pages ou moins) les plus efficaces du catalogue de la BL à mon humble avis. Un vrai masterclass en GW-Fiction.

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Unforgiven – G. McNeill :

INTRIGUE :

40K_UnforgivenMission classique pour le Sergent Dark Angels Kaelen et son escouade de marsouins vert bouteille. Largués sur leur cible, une cathédrale quelconque1, par Thunderhawk furtif, les angles eud’la muerta se posent sans encombre sur une place grouillante d’ennemis, qui ne tardent pas à goûter à la colère des meilleurs de l’Empereur. Chargés d’accompagner le Chapelain Interrogateur2 Bareus jusqu’au mystérieux prophète ayant fait basculer la jusque là paisible Valedor dans l’hérésie la plus totale, Kaelen et ses hommes sont surpris d’entendre l’officier leur annoncer, après avoir regardé sous les jupes des filles cultistes comme un gros père vert (ce qu’il est), que le QG ennemi doit être capturé, et non pas exécuté, comme c’était jusqu’ici le plan. En privé, ce grand meneur d’homme de Bareus avoue sans détour à son sous-fifre qu’il s’attend à ce que tous les bidasses de l’escouade rejoignent la droite de l’Empereur au cours des prochaines minutes, ce qui énerve un peu notre Sergent, qui aurait bien aimé qu’on lui annonce sa participation à une mission suicide en temps et en heure. Histoire d’avoir pu demander à un camarade de dortoir de supprimer son historique de navigation avant de partir, sans doute. Quoi qu’il en soit, la prédiction funeste du Chapelain ne met pas longtemps avant de commencer à se réaliser, le pauvre frère Lucius payant de sa vie son ultime double screwgie de grenade à travers les vitraux de la cathédrale, mais permettant tout de même au reste de l’escouade de pénétrer à l’intérieur du bâtiment sans trop de casse3.

À l’intérieur, la résistance va croissante au fur et à mesure que nos braves héros se rapprochent de la dernière position connue de leur cible. Cette dernière profite que quelques apartés dans l’action frénétique de cette nouvelle endiablée pour commencer à se faire connaître, et, ô surprise, c’est très probablement peut-être certainement sans doute un Déchu. Mais on n’est pas sûr. En tout cas, si Bareus a des grands projets pour sa verdâtre Némésis, cette dernière n’est pas en reste, puisqu’elle instruit spécifiquement son second, Casta, de lui laisser s’occuper du Chapelain. Le reste des Space Marines peut cependant être massacré sans arrière-pensée, quelque chose que le mystérieux Ange des Lames, que le prophète charge son side kick de réveiller, devrait être capable de faire sans problème.

Un peu plus loin, Kaelan commence à se douter qu’il y a Luther sous Roc et qu’on ne lui a pas tout dit, lorsqu’il constate que la décoration d’intérieur de l’église a été refaite à base d’anges en feu, de planète qui explosent et de têtes de lion empaillées. En plus de cela, les vagues de cultistes qui s’abattent sur lui et ses frères, de moins en moins nombreux au fur et à mesure que McNeill les zigouille, sont habillés comme des cosplayers d’Impardonnés, ce qui est impardonnable. Malgré cela, Bareus ne consent pas à lui donner plus d’infos sur la nature véritable de sa mission, bien que notre balourd de Chapelain soit très fort pour mettre les pieds dans le plat. Devant tant de cachotteries, le Sergent Garcia se rabat sur les fondamentaux pour tenter d’atteindre un objectif qui paraît de plus en plus inatteignable, au fur et à mesure que les Astartes mordent la poussière. Heureusement pour lui, sa foi en l’Empereur et sa haine de l’onanisme l’aident à venir à bout de ses adversaires, jusqu’à ce que les survivants parviennent dans la salle du mini-boss de fin. C’est en effet là qu’il se trouvent confrontés à rien de moins que le premier Metabrutus de l’histoire, soit un Dreadnought muté monté sur crampons et exhibant fièrement son grillz et ses tablettes de chocolat aux alentours. Le pire dans tout ça, c’est que le fameux Ange des Lames est également un ex-Dark Angels, comme le symbole de son caisson le montre bien. Pas le temps de tergiverser pour nos héros cependant, il faut décarcasser le Père Ducroc.

Dans la bagarre qui s’ensuit, la plupart des survivants loyalistes se font écharper par Lââm, ne laissant en vie que Bas Rhésus, Koala et le pauvre frère Persus, qui commence à se douter qu’il ne finira pas la nouvelle en un seul morceau. À raison. Car c’est au tour du grand méchant de faire son entrée, qui se révèle être…

Début spoiler…Un Déchu. Et si. Incroyable. Je suis siégé de ma tombe. Le sinistre individu en question s’appelle Cephesus, et il a trouvé un hobby passionnant pour s’occuper depuis 10.000 ans : collectionner les Lames de la Raison des Chapelains Dark Angels qui cherchent à le capturer. La quincaillerie de Bareus lui permettra d’arriver à douze goodies, ce qui est score respectable sachant que même Molochia n’avait que dix perles sur son Rosarius. Le combat s’engage, et le Déchu parvient sans mal à trucider Persus, qui meurt en gueulant « Je le savaiiiiiiiis !!! », et à égorger Bareus avec son trousseau de clés énergétiques. La suffisance dont il fait preuve lui sera cependant fatale, car elle permettra à Kaelan, blessé mais pas vaincu, de lui arracher son Rosarius et sa précieuse sauvegarde invulnérable, avant de lui décocher un direct au foie et à la foi ravageur avec sa moufle. Traversé par un mal-être profond et le bras armé de son adversaire, Cephesus tombe raide mort au sol, et avec lui la rébellion de Valedor. Kaelan reçoit ensuite les clés du camion de la part du Chapelain mourant, qui lui vomit le mot « Deathwing » au visage dans un dernier souffle. C’est une nouvelle carrière qui s’ouvre pour notre Sergent, comme il l’annonce fièrement au Terminator de la Deathwing qui arrive peinard devant la cathédrale quelques minutes plus tard. À croire qu’on n’avait pas besoin de lui plus tôt. La relève est assurée.Fin spoiler

1 : Car nous sommes sur un monde cathédrale. Donc pour l’originalité, on repassera.
2 : Ca m’est venu comme ça mais… C’est tout de même ballot que les Dark Angels aient donné un titre spécial aux types chargés d’une mission top secrète que personne ne doit connaître. Parce que moi, si on me dit que Gérard Duchmol n’est pas comptable, mais « Comptable-Investigateur », je vais fatalement me demander ce qu’il cherche à investiguer. Et probablement me prendre un bolt dans la tête. Ou un contrôle fiscal.
3 : Le frère Marius se fracturant toutefois la hanche en glissant sur une peau de banane traîtreusement jetée par les hérétiques. Pas de quoi l’arrêter ceci dit.  

AVIS :

McNeill, qui ne devait pas être vieux à l’époque, signe une nouvelle Dark Angels des plus classiques avec ce ‘Unforgiven’, mettant évidemment en scène la traque d’un ennemi mystérieux se révélant au final être un Déchu. À croire que les lionceaux ne font que ça de leurs journées. À défaut de surprise et de suspens, il y a au moins de l’action dans cette histoire, mais pas grand-chose en termes de fluff, ce qui est dommage pour un Chapitre au passé aussi riche. On passera généreusement sur les quelques approximations et incongruités du récit, comme la disparition mystérieuse des jet-packs de l’escouade une fois rendue sur place (ça aurait pourtant pratique pour avancer jusqu’à la cible), ou le Chapelain le moins tenu au secret professionnel de l’univers, à mettre sur le compte d’une volonté manifeste de divertir le fanboy plutôt que de satisfaire le lecteur. Si vous voulez mon avis, ‘The Falls of Marakross’ de Steve Parker est en tous points supérieurs à cet ‘Unforgiven’, qui à défaut d’être pardonné, peut être oublié.

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In the Belly of the Beast – W. King :

INTRIGUE :

40K_In the Belly of the BeastUne escouade de Griffes Sanglantes menée par un Garde Loup est envoyée explorer l’intérieur d’un vaisseau tyranide. Même si la Grande Dévoreuse a la tête dans le biomorphe après quelques éons passés à dériver dans la galaxie, les Loulous vont vite se rendre compte qu’entrer par effraction chez les cafards de l’espace est une très, très mauvaise idée.

AVIS :

‘In the Belly of the Beast’ est la nouvelle de type « et si ? » par excellence. Son principal intérêt est de permettre au lecteur de découvrir un pan jusqu’ici peu exploré du fluff, ici la structure et le fonctionnement d’un bio vaisseau tyranide. King accomplit cette mission avec sérieux et réussite, et parvient à décrire ce petit monde complétement alien (c’est le cas de le dire) à l’esprit humain de manière convaincante, insistant bien sur sa perfection organique et son aspect oppressant. Il enrichit en outre son propos en décrivant la progression des Space Wolves depuis le point de vue de chacune des Griffes Sanglantes, dont les réactions varient entre rage bestiale (Egil), prémonition funeste (Njal), légèreté feinte (Gunnar) ou encore crainte dissimulée (Sven). L’éveil progressif de l’écosystème tyranide en réponse à l’intrusion des marounes donne enfin l’occasion à l’auteur de relever son texte de quelques passages d’action tout à fait convenables, et d’une poignée de décès astucieusement gores (mention spéciale à la disparition de Njal).

On peut en revanche regretter le manque flagrant d’inspiration de King au moment d’insérer ‘In the Belly of the Beast’ dans l’univers de 40K. Comment, en effet, justifier l’envoi d’une (seule) escouade de Space Marines inexpérimentés dans une mission aussi dangereuse que l’exploration d’un vaisseau tyranide, même inerte ? Réponse de l’intéressé : nos héros sont assignés à un navire marchand (et quand je dis assigné, c’est en mode larbin hein : à côté, la Wolfblade c’est une nomination honorifique), dont le capitaine, apparemment ignare au dernier stade, n’est pas foutu de repérer une bioconstruction tyranide quand il en croise une (manque évident de culture générale également partagé par le sergent Hakon, ceci dit). Le navigateur de bord – un homme cultivé, lui – a beau insister lourdement pour que ce mystérieux vaisseau soit détruit sur le champ, le capitaine envoie tout de même ses loulous de compagnie explorer ce dernier dans l’espoir de « découvrir quelque chose dont l’Imperium pourrait avoir l’utilité ». Pour un point de départ pourri, c’est un point de départ pourri. Dans la même veine, on ne peut que s’émerveiller de l’innocence des Space Wolves, qui ne réalisent qu’ils sont au cœur d’un vaisseau tyranide qu’au moment où ils débarquent dans la salle centrale et assistent au réveil d’une tripotée de guerriers. Allo nan mais allo quoi.

En dépit des quelques couleuvres que King tente de faire avaler au lecteur pour justifier les actions stupides de ses personnages, ‘In the Belly of the Beast’ est une nouvelle honorable, dont l’ambiance d’horreur lovecraftienne détonne agréablement des productions classiques de la BL, où l’action omniprésente laisse peu de place au développement d’atmosphères oppressantes dignes de ce nom.

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Suffer not the Alien to Live

Hellbreak – B. Counter :

INTRIGUE :

40K_HellbreakLe Commissaire von Klas a eu la mauvaise idée d’être capturé vivant par les Eldars Noirs lorsque ces derniers ont annihilé son régiment, et son séjour à Commoragh se passe aussi bien, ou mal (c’est selon), que l’on peut l’imaginer. Identifié par ses tortionnaires comme officier, il a la chance douteuse de participer aux jeux donnés par la cabale de l’Échine Rompue (Broken Spine) en l’honneur de son maître, le positivement ancien Archon Kypselon. Rustre jusqu’au bout des ongles, von Klas a l’outrecuidance de remporter son duel face à une Céraste au style trop chargé pour son propre bien, et d’une manière si peu élégante (il lui pète le pif avant de l’empaler sur sa propre hallebarde… honteux) qu’il est prestement condamné à être écorché vif par l’Haemonculus personnel de Kypselon.

Survivre aux Intervilles1 de Commoragh a toutefois boosté le moral, déjà naturellement élevé, de notre brave Commissaire. Lorsque son tortionnaire (Verredaek) fait l’erreur de se présenter à lui sans l’avoir attaché au préalable, confiant qu’il est dans son aura de terreur pour figer sur place son nouveau sujet d’expérimentation, von Klas ne tarde pas à lui faire goûter à sa propre médecine, et s’échappe après lui avoir fauché sa main rasoir et son pistolet à aiguille, recrutant dans des geôles adjacentes quatre autres Gardes Impériaux malchanceux gardés en réserve par Verredaek. L’Haemonculus agressé n’aura guère le temps de s’excuser de sa nullité crasse auprès de son impitoyable employeur, qui le fait exécuter par sa Succube de compagnie (Yae) pour faute lourde, avant d’ordonner à cette dernière d’aller mettre un terme à l’excursion des Mon-keigh dans son territoire. Après tout, il a un rival ambitieux (Uergax de la cabale du Fil de la Lame) à mater, et ne peut se permettre qu’une bande de primates mal dégrossis sèment la pagaille à domicile.

Malheureusement pour Kyky, Yae ne sera pas très efficace dans sa traque, à tel point que von Klas et sa petite escouade parviennent à s’emparer de l’usine du Sybarite Laeveq, et des deux mille esclaves humains utilisés par ce dernier comme main d’œuvre, multipliant leur potentiel de nuisance. Pire, les mutins choisissent de se réfugier dans le temple que l’Archonte a fait élever à sa gloire (c’est un gars simple), ce qui constitue un crime de lèse-majesté impardonnable. Tant pis pour la prudence, Kypselon réunit le ban et l’arrière-ban de sa cabale et envoie ses pillards reprendre possession de la basilique gothique (elle est construite uniquement en os) aux zadistes en furie. Il commet toutefois l’erreur de sous-estimer la résolution du meneur adverse, trop content de faire s’effondrer le plafond de l’édifice sur les combattants au plus fort de la bataille, même si cela précipite l’écrasement de son insurrection raciale. Écrasé pour écrasé, autant que les Eldars Noirs participent à cette soirée crêpes, pas vrai ?

Début spoiler…La nouvelle se termine dans une cellule de la cabale, où un von Klas en bien piteux état après son coup d’éclat languit des jours durant, jusqu’à ce que ses geôliers lui amènent un compagnon d’infortune, qui se révèle être Kypselon en personne. Comme l’Archonte l’apprend à son valeureux adversaire, sa rébellion a coûté très cher à l’Echine Rompue, aussi bien en ressources qu’en cabalites, et ses rivaux du Fil de la Lame ont profité de ce moment de faiblesse pour attaquer et annihiler ce qu’il lui restait de suivants. Bien que von Klas sache qu’il ne lui reste plus longtemps à vivre, il peut toutefois savourer l’indéniable victoire qu’il a remporté sur son adversaire, qui n’aura certainement pas la chance de bénéficier de la mort rapide dont le Commissaire agonisant héritera…Fin spoiler

1 : Je m’interroge sur la pertinence de mettre un -s, la cité drukhari n’ayant pas d’équivalent.

AVIS :

Ben Counter nous plonge dans l’enfer de Commoragh avec maestria dans cette variation sur le thème de Spartacus, qui illustre parfaitement la cruauté des Eldars Noirs et la défiance de la Garde Impériale face à l’adversité. Au final, ces deux factions sortent grandies de ce ‘Hellbreak’, et le lecteur bénéficie d’une histoire purement grimdark, comme sa conclusion aussi satisfaisante que nihiliste le démontre pleinement. De la nouvelle 40K comme on aime.

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Small Cogs – N. Rutledge :

INTRIGUE :

40K_Small CogsSeule la mort met fin au devoir nous dit le proverbe, et ce n’est pas le Colonel Soth du 8ème Ulbaran qui viendra s’en plaindre. Ayant participé à la reprise de la planète de Luxoris Beta, confisquée par les Orks pendant des siècles, le régiment se retrouve mobilisé pour défendre la station d’épuration le Temple de l’Eau local contre une excursion eldar repérée au dernier moment par ces planqués du Haut Commandement. Malgré le fait que ses hommes doivent combattre en uniforme d’apparat, leur mission première étant de participer au défilé du 14 juillet local, Soth fait contre mauvaise fortune veste qui gratte bon cœur et organise un périmètre défensif autour du bâtiment visé par les Xenos. Le Temple de l’Eau contrôle en effet le système d’irrigation de la planète, en faisant une cible de choix pour les Eldars : inonder les basses terres de Luxoris Beta priverait en effet les défenseurs impérieux de la possibilité de déployer leurs véhicules blindés dans ce conflit.

Après avoir échangé quelques banalités avec le prêtre Jarendar, tout à fait confiant dans la protection qu’apportera l’Empereur à ses fidèles, Soth est appelé à son poste de commandement par son second (Hoddish) lorsque les Eldars lancent leur assaut. S’en suit une bataille urbaine tout à fait classique entre les deux factions, à la ténacité et la discipline des Gardes Impériaux s’opposant la vitesse et la technologie avancée des Xenos. En bon commandant, Soth met les mains dans le cambouis et mène une charge au fuseur contre un Falcon trop confiant, héritant d’une blessure à la cuisse mais permettant aux lignes impériales de tenir.

Un moment de répit entre deux attaques permet à notre héros d’inspecter le périmètre… et de manquer de tomber sous les tirs d’un Ranger isolé, finalement localisé et abattu sur un gros coup de chance par Soth. Il ne faut pas longtemps au sagace officier pour réaliser que le sniper n’a pas fait le déplacement seul, et que ses petits copains sont certainement en train de converger vers le Temple pendant que le reste des forces eldars fait diversion. Ne pouvant mobiliser un peloton entier sous peine de laisser ses lignes dangereusement dégarnies, Soth ordonne à Hoddish de lui envoyer trois Gardes pour tenter d’intercepter les infiltrateurs ennemis avant qu’il ne soit trop tard.

Je vous la fais courte : au prix d’une progression sanglante et de la perte de tous ses sidekicks, Soth parvient jusque dans la salle des machines du Temple, où il surprend le dernier Ranger en pleine lutte avec Jarendar. Le prêtre étant plus doué en parabole qu’en krav-maga, il ne tarde pas à rejoindre la droite de l’Empereur, tandis que Soth hérite pour sa part de quelques shurikens dans le thorax, lui faisant perdre la règle Objectif Sécurisé et lui donnant l’impression de voir les esprits de ses camarades défunts danser le harlem shuffle autour de lui. Ces hallucinations dissimulaient cependant l’arrivée d’un clutch player de chair et de sang : le novice de Jarendar – et son chandelier – qui règle son compte au pénible Xenos alors qu’il trifouillait les panneaux de commandes en fredonnant ‘Here comes the flood’. Bien fait. La nouvelle se termine sur la victoire des impériaux et l’évacuation de Soth vers l’hôpital le plus proche, mais pas avant qu’il n’ait bredouillé au Medic qui l’a stabilisé de faire passer à Hoddish la morale de cette histoire : prêter attention au moindre détail (small cogs). Que voilà une édifiante conclusion.

AVIS :

Pour sa seule incursion dans le 41ème millénaire (si on ne considère pas la nouvelle ‘Sisters’, écrite pour Necromunda), Neil Rutledge livre une bonne histoire de « Gardes Impériaux d’action », dans la droite lignée de ce que nous propose le légendaire Dan Abnett avec ses Fantômes de Gaunt. Chose appréciable, on a le droit en seulement 26 pages à une bataille rangée, suivie par une mission d’infiltration tournant au duel de snipers, ce qui est une variété tout à fait appréciable pour un court format. Les affrontements entre Garde Impériale et Eldars des Vaisseaux Mondes étant de plus assez rare dans la GW-Fiction, on appréciera d’autant plus ce ‘Small Cogs’ à sa juste valeur. Je valide.

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The Fall of Malvolion – D. Abnett :

INTRIGUE :

The Fall of MalvolionLa mission de garnison du Garde de Fer Karl Grauss et de ses copains Mordiens sur la planète de Malvolion prend un tour très désagréable après que les signes avant-coureurs d’une infestation Genestealers aient été détectés dans une station d’épuration jusqu’ici sans histoire (comme la majorité des stations d’épuration vous me direz). Rescapé de la malheureuse mission de reconnaissance qui a permis de se rendre compte de l’existence de Xenos affamés et acérés sur ce monde agricole, Grauss couve un petit choc post-traumatique carabiné et demande donc à être réaffecté en service actif pour se changer les idées. Compréhensif, son supérieur lui donne les clés d’un camion de transport et l’ordre de mener un convoi de paysans du cru jusqu’à la zone d’extraction la plus proche : comprenant que la Grande Dévoreuse n’allait pas tarder à pointer le bout de son museau, l’Imperium a préféré la jouer safe et abandonner Malvolion à ses appétits voraces. Il faut choisir ses combats.

Un peu plus loin, nous faisons la connaissance d’un bataillon du 4ème régiment de Phyrus et du Sergent Gallo, qui auront l’honneur douteux d’être les premières victimes de la véritable attaque tyranide sur Malvolion, perpétrés par un essaim de Genestealers et quelques Lictors en vadrouille. Hachés menu comme chair à pâté, les Phyrus auront toutefois le temps de prévenir le haut commandement de la gravité de la situation, ce qui permet au Général Caen de… se faire totalement déborder par un barrage de spores mycétiques larguées par les premiers bio-vaisseaux de la flotte ruche. Même punition pour le Colonel Grizmund et sa colonne blindée Paladiane, culbutée par les hordes de Hormagaunts et Carnifex alors qu’elle allait renforcer les positions impériales plus au sud. Il y a des jours comme ça…

Retour à Grauss et à son tacot, qui nous rejouent ‘Le Salaire de la Peur’ à la sauce ‘Alien’ et parviennent tant bien que mal à se frayer un chemin vers la sécurité illusoire et très distante de la cité ruche de Malvo Height… jusqu’à un certain point. Harcelés par les Gargouilles, ralentis par les conditions météorologiques et une flore aussi exubérante qu’hostile, talonnés par les essaims ennemis, les Gardes de Fer finissent par se résoudre à un dernier combat aussi héroïque que vain pour vendre chèrement leurs vies. C’est alors qu’un petit point brillant, puis deux, puis dix, apparaissent dans le ciel tourmenté et se précipitent vers le convoi arrêté. Seraient-ce des oiseaux ? Seraient-ce des avions ?

Début spoiler…Non, ce sont des Drop Pods de SPESS MEHRINZ ! Grauss assiste émerveillé au déploiement d’une Compagnie de ces surhommes en armure, qui moissonnent les Xenos à grands renforts de rafales de bolters, de gerbes de prometheum enflammé et de tirs de plasma. L’espoir renait et la horde chitineuse semble sur le point de refluer, mais c’est alors que notre héros remarque la magnifique couleur jaune et le petit cœur trop kawaiiii sur l’armure de ses sauveurs, et se rend compte avec effroi qu’il s’agit de Lamenters. Ce qui ne peut signifier qu’une chose : l’Imperium ne peut pas gagner cette bataille (c’est écrit dans le lore). Et en effet, les braves mais maudits Astartes finissent par se faire dépecer à leur tour, et moins de quarante minutes après leur arrivée tonitruante, Grauss se résout à avaler le canon de son fusil laser pour en finir avec cette chienne de vie de la manière la plus digne et la plus indolore possible. J’aurais fait pareil à sa place. Fin spoiler

AVIS :

Dan Abnett a maintes fois prouvé qu’il était un maître dans la mise en scène de personnages humains dans l’univers cruellement absurde de Warhammer 40.000, mais n’a que peu pratiqué les autres races majeures de la franchise grimdark : ‘The Fall of Malvolion’ est seulement la seconde nouvelle qu’il a signée dans lesquels les Tyranides apparaissent1. Malgré ce manque de pratique, Abnett livre malgré tout une histoire très correcte, et une adaptation littéraire convaincante du topos bien connu des fans de 40K : l’invasion d’une planète impériale par des hordes inarrêtables de Xenomorphes affamés. Si vous cherchez le mètre étalon de ce type de récit, ‘The Fall of Malvolion’ est un candidat très crédible.

Malgré cela, cette soumission n’est pas exempte de tout défaut et accuse parfois franchement son âge. Ainsi, on se retrouve confronté à des personnages étrangement peu détaillés, et donc peu attachants, pour une nouvelle d’Abnett. Bien que son choix de multiplier les protagonistes pour les faire mourir de façon horrible quelques pages plus tard soit compréhensible, et que les Mordiens qui lui servent de chair à canon Voraces ne sont pas les Gardes Impériaux les plus intéressants qui soient pour commencer (avis purement personnel, mais que j’assume totalement), notre homme a démontré par le passé et depuis qu’il lui suffisait de quelques lignes pour rendre appréciable un personnage lambda2. Il ne s’est pas donné ce mal ici, et c’est évidemment dommage. A cela s’ajoute un schéma narratif sans beaucoup de surprises, plombé en sus par un titre qui retire tout suspens à la conclusion du récit (même si le massacre des Lamenters est une pépite grimdark comme on en a peu fait), là encore assez indignes d’un auteur du calibre d’Abnett. A croire que ‘The Fall of Malvolion’ n’était qu’une commande à honorer pour la BL, et qu’il n’était pas très emballé par cette perspective.

D’un point de vue fluff aussi, la nouvelle ne fait pas un sans-faute. Si je donne crédit à Abnett pour avoir pensé à intégrer à son propos les armes météorologiques et botaniques des flottes ruches, que je n’ai pas souvent retrouvé dans les histoires de ses confrères et sœurs malgré leur existence dans le lore et leur grand potentiel en termes d’atmosphère (sans jeu de mots), il sombre dans la facilité en déclenchant une attaque depuis l’orbite « par surprise ». Même si l’Ombre dans le Warp est mentionnée, cela ne suffit pas à expliquer comment une flotte peut arriver en basse orbite d’une planète en alerte et disposant de vaisseaux spatiaux de manière si furtive et rapide qu’elle prend de court le haut commandement adverse.

Cependant, les points positifs l’emportent largement sur les points négatifs ici, et même si je sors de ma relecture de ‘The Fall of Malvolion’ avec moins de satisfaction que lors de ma découverte de cette histoire, nous sommes bien en présence d’une nouvelle de qualité.

1 : Et ils avaient été réduits à portion congrue dans ‘The Curiosity’.
2 : Et plus encore, un Garde Impérial lambda. Je suis toujours étonné par le nombre de membres du Premier et Unique de Tanith dont je me souviens sans avoir besoin de réfléchir, et des années après ma dernière lecture de la série.

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Children of the Emperor – B. J. Bayley :

INTRIGUE :

Ayant échappé de justesse à la destruction du vaisseau qui transportait son régiment jusqu’à sa nouvelle affectation, le Garde Impérial Floscan Hartoum n’a d’autre choix que de faire atterrir sa capsule de sauvetage à la surface d’une planète mystérieuse dans l’attente d’être secouru. Recueilli par une tribu d’abhumains (deux paires de jambes) dont la mutation a été volontairement déclenchée par leurs ancêtres colons afin de lutter contre la forte gravité de leur monde d’adoption, Hartoum verra son courage et sa vision de l’Imperium sérieusement testés au cours de son séjour chez les enfants perdus de l’Empereur.

AVIS :

‘Children of the Emperor’ est une petite gemme, et sa lecture est fortement conseillée à tous les esprits curieux familiers des publications de la Black Library. Cette nouvelle jette en effet un éclairage particulier et très dépaysant sur l’univers de Warhammer 40.000, en prenant toutefois garde de bien respecter le background qui existait à l’époque, attention aussi délicate que louable de la part d’un auteur aussi établi que Barrington J Bayley. L’un des charmes de ‘Children of the Emperor’ est ainsi son absence d’aberrations fluffiques, preuve indubitable du sérieux travail de « documentation » effectué par Bayley avant la rédaction de ce texte1 (tous les contributeurs de la BL ne peuvent en dire autant, pas vrai Nik Vincent ?).

Mais les principales plus-values apportées par la plume experte de Bayley restent son style, affirmé, maîtrisé et très différent des canons de la BL (ce qui fait tout son intérêt), ainsi que son expérience d’écrivain de SF vétéran, qui lui permet d’attirer l’attention du lecteur sur des points jamais soulevés jusqu’ici par les autres auteurs de la maison (comme les variations de gravité d’une planète à l’autre, et les conséquences de ce changement sur un organisme humain normal) ; mais également d’amener son public à réfléchir sur des questions aussi centrales que celle de la tolérance envers la mutation (et donc du droit à la différence de manière plus large) au sein d’un Imperium dont la psychorigidité sur ce sujet – personnifiée par le personnage du Commissaire Leminkanen, zélote écumant et pas très futé – apparaît comme assez grotesque, eut égard à son histoire millénaire et au million de planètes qui le compose. Bref, on peut remercier Barrington J Bayley pour l’amical coup de pied dans la fourmilière qu’il a mis dans le background de Warhammer 40.000, qui n’était (et n’est toujours) pas au-dessus de tous reproches à l’époque, malgré le soin que lui a apporté Priestley et Cie au moment de son élaboration.

1 : Il va même jusqu’à faire mention d’éléments de background un peu avancés, tels que les fameux Schémas de Construction Standardisés. Chapeau l’artiste.

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Deus ex Mechanicus – A. Chambers :

INTRIGUE :

Deus Ex MechanicusL’arrivée sur Naogeddon, monde mort et terne par excellence, de l’ingénieur et Techno-Prêtre (double cursus, t’as vu) Lakius Danzager et de son acolyte Osil manque de très mal se finir pour nos deux personnages, embarqué à bord d’un vaisseau à l’autopilote très bas de gamme. En chute libre depuis l’atmosphère haute de la planète, la navette occupée par les envoyés du Mechanicus est rebootée à temps par le dégourdi Lakius pour éviter un crash mortel à la surface désertique de ce roc sans vie, mais accueillant des ruines très anciennes qu’un Magos Explorator (Egal) souhaite étudier. En tant que spécialiste de la cryo-stase, Lakius dispose d’une expertise précieuse en matière de compréhension de technologie Necron (à ce stade, vous aviez sans doute déjà deviné qu’on prenait ce chemin…), et Egal l’a donc réquisitionné pour assister sa petite équipe de super geeks.

A peine remis de leur atterrissage mouvementé, Lakius et Osil doivent encaisser une nouvelle expérience traumatisante : l’attaque du camp du Mechanicus par quelques escouades de Guerriers Necrons, vomies comme toutes les six heures par la Nécropole encore endormie qu’Egal a commencé à explorer. Bien que l’effet de surprise ne soit pas de leur côté, et que les servants de l’Omnimessie puissent compter sur une cohorte de Prétoriens ainsi que de solides fortifications pour les défendre, les robots squelettiques vendent chèrement leur châssis, forçant les adeptes à partir à la découverte de la crypte exhumée par le Magos avec une protection réduite.

De manière très prévisible, la progression du petit groupe (Egal, Lakius, Osil et quelques personnages secondaires à l’espérance de vie très limitée) rencontre une résistance qui va croissant, depuis des marches très hautes qui obligent les Prétoriens à rouler à deux à l’heure, jusqu’à des champs magnétiques générateurs de trouille, ou plus prosaïquement des vagues de Scarabées kamikazes. Au bout du compte, Lakius et Egal se retrouvent seuls dans la salle des bornes de chargement sarcophages de la Nécropole, tandis qu’Osil, qui s’est pris quelques échardes dans la fesse gauche pendant l’expédition indoor, a été ramené au campement de base par le dernier Pretorien pour désinfection et pose de pansement. La tension est à son comble…

Début spoiler…Commençons par évoquer le destin d’Osil, que son maître a chargé d’une mission simple mais capitale : réveiller au plus vite l’Assassin Eversor qui végète dans la soute de leur vaisseau. Lakius soupçonne en effet que la Necropole est en train de se réveiller, et que seule l’intervention d’une machine à tuer bourrée de Red Bull a une chance d’enrayer cette trajectoire menaçante. Malheureusement, la navette du Techno-Prêtre s’est fait coloniser par une nuée de… barnacles (vous croyiez que les Necrons s’en étaient tenus aux scarabées ? erreur) métalliques pendant l’absence de ses propriétaires, empêchant l’acolyte de sortir le tueur de sa torpeur. Voilà qui est dommage.

De leur côté, Lakius et Egal récupèrent un « Bâton de Lumière » dans le sarcophage (vide) du probable Phaëron du lieu, avant de prendre à leur tour le chemin de la sortie. Bien que le Magos assure à son compagnon que cette relique a le pouvoir de tenir à distance les gardiens de la Nécropole, Lakius décide de jouer la carte de la sécurité et de détruire le générateur de phase qui a ouvert le portail permettant d’accéder à l’intérieur du complexe, une fois les deux explorateurs sortis de ce dernier. Egal n’est pas d’accord, et la dispute académique dégénère rapidement en duel de carabine laser, au cours duquel Lakius colle un tir à pleine puissance en pleine tête de son estimé confrère, avant de réduire le générateur en cendres. Une conclusion regrettable, mais la fin justifie les moyens…

Début spoiler 2…Sauf qu’Egal refuse de rester au sol, et pour cause. Sous le fond de teint soigneusement appliqué, c’était un C’tan qui avait revêtu les robes écarlates du Mechanicus. On ne saura jamais ce qu’il cherchait à faire sur Naogeddon, à part troller quelques pauvres adeptes qui n’avaient rien demandé, bien sûr, mais comme on peut s’y attendre, les tirs désespérés de Lakius le font doucement rigoler. Beau joueur, il laisse ce dernier s’enfermer avec Osil dans le laboratoire installé par les chercheurs, avant de frapper doucement à la porte pour essayer de leur vendre des boîtes de biscuits pour financer sa classe de neige et/ou des bons du trésor moldave. Lorsque la paroi finit par céder sous ses coups, le C’tan s’aperçoit que ses proies n’ont pas été oisives, et ont bricolé une étrange machine avec les composants qu’ils avaient sous la main. That’s cute, but too little, too late

Début spoiler 3…Eh non. La machine en question était un générateur de stase, qui emprisonne fissa la truculente Echarde dans une bulle atemporelle. Fin. Comment, vous trouvez ça un peu tiré par les cheveux ? Mais qu’attendiez vous d’une histoire qui s’appelle presque Deus ex Machina, enfin ? Fin spoiler

AVIS :

Les nouvelles d’exploration de Nécropoles Necron, un sous-genre assez populaire de la littérature 40K, ne sont pas vraiment ma tasse de thé. J’ai toujours l’impression de lire la même histoire, basée autour d’un faux suspens (« eh non, ils ne dormaient pas en fait… SHOCKING ») et finissant généralement par une course effrénée vers la sortie de la petite bande de héros ayant eu la mauvaise idée de faire de l’archéologie chez les grands anciens galactiques. Ce ‘Deus Ex Mechanicus’ a pour lui de proposer des variations assez intéressantes à cette base éculée (l’intervention d’un C’tan transformiste1, la presque intervention d’un Assassin Eversor), ce dont je sais gré à Andy Chambers.

Malheureusement pour ce dernier, il ne suffit pas d’avoir des idées innovantes pour accoucher d’une nouvelle réussie : encore faut il les intégrer à l’intrigue et en soutenir le développement de manière un tant soit peu crédible, ce qui n’est pas le cas ici. On ne saura donc pas comment un Techno Adepte du Mechanicus a pu se retrouver en possession d’un Eversor (l’Adeptus Assassinarum n’étant pas vraiment connu pour sa générosité), comment le C’tan transformiste a pris la place d’Egal (ou pourquoi il s’est donné le mal de revenir sur sa planète natale avec des acolytes humains, si le Magos n’a toujours été qu’une couverture), ou ce qu’il se passe après que cette divinité en vadrouille se soit retrouvée piégée dans un champ de stase (ce qui pourrait sans doute intéresser l’Inquisition, et impacter fortement le fluff de Warhammer 40,000… mais je dis ça comme ça). Ou même à quoi sert la scène initiale de la nouvelle (le quasi-crash du vaisseau de nos deux lurons), dont il ne sera plus jamais fait mention par la suite et qui aurait pu être remplacée par une arrivée sur site des plus classiques sans que cela ne change rien à la suite. Trop brouillon.

1 : Qui avec le recul ressemble fortement à Trazyn l’Infini, dans le genre boute en train avide de connaissances. Vu l’âge canonique de cette nouvelle, cette similitude ne peut être autre chose qu’une coïncidence troublante…

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Business as Usual – G. McNeill :

INTRIGUE :

40K_Business as UsualTrois mois après la victoire de l’Imperium sur la Flotte Ruche Leviathan sur le monde de Tarsis Ultra, la vie a retrouvé un cours plus ou moins normal dans la capitale planétaire, Erebus (rien à voir avec l’affreux vieillard ridé et son couteau tout chelou). Pour Snowdog et son gang de trafiquants de drogue, cela signifie la reprise d’activités illicites dans la zone tampon séparant le sous-monde de cette cité ruchette1 et la banlieue mal famée où rôde une faune aussi sauvage que mortelle. Et je ne parle pas uniquement des essaims tyranides qui squattent l’endroit à la suite de la destruction de leur vaisseau mère. La nouvelle débute ainsi sur une rencontre business assez tendue entre notre héros peroxydé et trois de ses acolytes (Lex, Silver et Tigerlily), et une bande de Jackboys cherchant à écouler une grande quantité de Kalma, sorte d’ecstasy grimdark.

Bien que la came soit de qualité, comme le trip cosmique du brave Lex, ayant pris sur lui de goûter le produit, le révèle sans ambages, le sixième sens de Snowdog le titille méchamment. Il se doute que ses interlocuteurs vont essayer de la lui faire à l’envers, et lorsque les Jackboys dégainent leurs pétoires pour piquer les crédits durement gagnés du Malamut, ce dernier ne se laisse pas faire. L’échange de tirs entre les deux gangs finit par tourner en faveur de celui composé à 100% de personnages nommés (comme c’est étrange), mais attire également l’attention de la patrouille d’Arbites du Capitaine Jakob Gunderson. Ce dernier voue une détestation cordiale à Snowdog, coupable de l’impardonnable crime de vente de dope dans son périmètre, et n’est que trop heureux d’entraîner ses hommes sur les lieux de l’échauffourée après que quelques bribes d’échanges radio entre Jackboys lui aient permis de connaître l’identité de leur adversaire.

L’arrivée de cette troisième faction rebat les cartes, et scelle surtout le destin du pauvre Lex, utilisé par un Snowdog loyal sans excès envers ses hommes comme bouclier humain contre les balles à guidage laser de Gunderson. L’utilisation judicieuse d’un chapelet de grenades artisanales récupérées sur le cadavre d’un Jackboy permet toutefois aux trois survivants de se ménager une sortie explosive (et de tuer une grande partie des camarades de Gunderson, qui étaient pourtant à deux jours de la retraite), mais leur course effrénée les amène en territoire tyranide, ce qui n’est pas l’idée du siècle, et encore moins du millénaire. Rattrapés par les deux Arbites survivants alors qu’ils contemplaient les cadavres récurés de quelques gangers malheureux dans le boyau des égouts qu’ils avaient empruntés pour filer à l’anglaise, Snowdog, Silver et Tigerlily se retrouvent en mauvaise posture. Gendarmes et voleurs se réconcilient cependant en un éclair lorsqu’une horde d’Hormagaunts interrompt leur règlement de comptes, et les humains décident sagement de se carapater le plus loin possible de la menace Xenos, à plus forte raison lorsque le Guerrier Tyranide qui manage la horde chitineuse arrive à son tour pour profiter des calories faciles que représentent nos héros.

La poursuite tunnelière qui s’ensuit n’est pas sans causer quelques pertes déchirantes (dans tous les sens du terme) parmi les hominidés, le dernier collègue de Gunderson gagnant une séance d’acupuncture tyran(n)ique, avant que la pauvre Tigerlily n’aille rejoindre Peter Pan, Sanguinius et Geneviève de Fontenay dans le pays imaginaire. Lorsque l’affreuse bestiole assomme Gundy et met la griffe broyeuse sur la veste gifesque (c’est beau le 41ème millénaire tout de même) de Snowdog, la messe semble dite pour nos héros…

Début spoiler…C’était toutefois sans compter sur le pouvoir de l’amitié la foi la Force la DROOOOOOGUE. En désespoir de cause, Snowdog balance en effet sans s’en rendre compte la totalité du stock de Kalma piqué aux Jackboys dans le gosier du Guerrier, provoquant un KO technique suivi d’une overdose fatale en moins de vingt secondes. Magnanime, El Doggo décide d’épargner la vie de Gunderson au lieu de profiter de son piteux état pour lui faire passer la matraque énergétique à gauche, et les deux gangers survivants s’en repartent vers d’autres aventures. Ils ne savaient pas encore qu’ils vivaient sur du temps empruntéFin spoiler

Tarsis Ultra n’était censé avoir que 60 millions d’habitants avant de se prendre un enchaînement fatal Tyranides-Iron Warriors dans la biosphère, ce qui est positivement clairsemé à l’aune des standards impériaux.

AVIS :

Graham McNeill n’a jamais (pour autant que je le sache et au moment où cette chronique est publiée) écrit pour Necromunda, mais les amateurs de ce monde-ruche si bucolique ne seront pas dépaysés par ce ‘Business as Usual’. Des gangs ennemis qui s’étripent pour de la dope dans des usines en ruines et des terrains vagues toxiques, avant qu’une escouade d’Arbites nommée bavure et quelques bestioles atrabilaires ne viennent se mêler aux réjouissances : on est ici en terrain connu (mais dangereux tout de même, relancez vos 1 si vous pouvez). À titre personnel, il n’y a pas grand-chose qui me fasse vibrer dans cette nouvelle qui ne détonne absolument pas du mètre étalon de la GW-Fiction, et qui a plutôt mal vieilli sur certains aspects, notamment l’argot utilisé par Snowdog et ses acolytes, qui sonne aujourd’hui terriblement daté. À chacun son sale goût.

Pour la petite histoire de cette petite histoire, ‘Business as Usual’ a en fait été écrite avant ‘Warriors of Ultramar’, dans laquelle Snowdog fait également une apparition au côté d’Uriel Ventris et des héroïques défenseurs de Tarsis Ultra, même si elle prend place après les événements relatés dans ce roman. Voilà de quoi briller en société, sans nul doute.

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Only in Death Does Duty End

Salvation – J. Green :

INTRIGUE :

40K_Salvation‘Salvation’ suit la laborieuse épopée de frère Rius (André de son prénom), Terminator de son état au sein de la première compagnie des Ultramarines. Envoyés défendre le monde de Jaroth contre un car de tyranides s’étant perdu sur la route d’Ichar IV, Rius et ses petits camarades tombent dans une embuscade tendue par des Genestealers, au cours de laquelle notre héros prend un vilain coup sur le crâne, et se réveille en conséquence totalement amnésique. Recueilli par la population indigène, Rius fera-t-il triompher son village d’adoption aux Intervilles locales, ou renouera-t-il avec son passé de meilleur de l’Empereur ?

AVIS :

Comme dit en introduction, se frotter aux descendants de Guiliman s’apparente plus un à exercice de haute voltige qu’à une promenade de santé, l’abondante littérature leur ayant été consacrée au fil du temps obligeant l’auteur chargé de cette délicate mission à se livrer à un véritable travail de recherche afin de respecter le background établi par ses prédécesseurs. Certes, le fluff des Schtroumpfs énergétiques n’était pas aussi fouillé à l’époque de l’écriture de ‘Salvation’ qu’il ne l’est aujourd’hui (où l’on connaît jusqu’au nom du cousin de la belle-sœur du professeur de piano d’Uriel Ventris), mais cela n’a pas empêché Green de pêcher, par nonchalance ou ignorance crasse, comme un bleu.

C’est en effet à un festival d’approximations, de contre-sens et absurdités en tous genres que Jonathan Green se livre dans ‘Salvation’, témoignage douloureux (pour les zygomatiques et les fluffistes acharnés) de ses lacunes en matière de 41ème millénaire. Cela commence très fort dès la deuxième ligne du récit, avec la mention de « vétérans de la Première Compagnie d’Ultramar », illustres guerriers n’existant que dans la représentation confuse que se fait l’auteur du Chapitre des Ultramarines. Quelques pages plus loin, Green fait mention de « cette vieille Terre » (Old Earth), ignorant sans doute que les gens respectables parlent plutôt de Terra. L’inclusion de la nouvelle dans la chronologie de Warhammer 40.000 ne m’a également pas semblé au-dessus de tous soupçons, Rius étant présenté comme un vétéran d’Ichar IV alors que les tyranides qu’il affronte semblent plutôt appartenir à la flotte ruche Béhémoth (corps rouges/violets), annihilée 200 ans avant l’arrivée de Léviathan dans l’espace impérial. On lui laissera cependant le bénéfice du doute, d’autres critiques plus franches, et celles-là indiscutables, pouvant lui être adressées.

Car la plus grande atteinte au fluff commise par Green très peu documenté ne vient pas tant du manque de connaissances de ce dernier sur les Ultramarines, mais bien de son manque de connaissances sur les Space Marines en général, décrits par l’auteur comme de vulgaires super-soldats disposant d’un équipement de pointe, tableau ultra (haha) réducteur et sensiblement erroné de la condition d’Ange de la Mort. Par exemple, Green affirme sans broncher que la présence des Ultramarines sur le monde de Jaroth s’explique par la présence du Gauntlet of Macragge (présenté comme rien de moins que le vaisseau amiral de la flotte Ultra – inutile de préciser que c’est la seule fois où il est fait mention de ce nom dans un texte de la BL1– ) à proximité de la planète suite à une « visite de routine dans l’Est de l’Ultima Segmentum ». Et les Space Marines, bien braves, de voler à la rescousse d’un monde tribal ne faisant même pas partie de l’Imperium, et d’envoyer la crème de leurs vétérans (qui n’avaient rien d’autre à faire que de participer à cette patrouille, sans doute) castagner la Grande Dévoreuse pour sauver trois poules et deux cochons, au lieu de lui balancer un petit Exterminatus sur le coin du museau depuis la sécurité de l’orbite haute. Bref, les Ultramarines de Jonathan Green tiennent plus des casques bleus galactiques (c’est la couleur qui l’a induit en erreur je pense) que des moines-soldats cherchant avant tout à sauvegarder leur empire personnel d’une galaxie hostile et méchante.

Beaucoup plus grave, Green fait reposer son intrigue sur une aberration, que dis-je, une hérésie pure et simple, qui ne manquera pas d’arracher un sanglot de rage à tous ceux n’ayant ne serait-ce que feuilletés distraitement un Codex Space Marines au cours de leur vie. Au moment de l’embuscade qui laisse Rius amnésique, son escouade était en effet engagée dans une opération de nettoyage des dernières poches de résistance tyranides de la planète (oui, de la planète, ils avaient visiblement un peu de temps devant eux), mission perturbée comme dit plus haut par une bande de Genestealers adeptes du « coucou qui c’est ? ». Résultats des courses : l’épave de Thunderhawk qui servait de décor à l’embuscade en question explose suite à une utilisation peu finaude du lance-flammes par frère Hastus, projetant notre héros contre un arbre à l’écorce visiblement plus dure que son crâne, vus les résultats désastreux sur ses facultés mnémoniques. Le paragraphe suivant nous apprend que Rius se réveille, seul, dans la maison du couple qui l’a recueilli2 suite à sa funeste rencontre avec un tronc (Georges de son prénom), ce qui signifie (accrochez-vous) que les Ultramarines sont repartis de Jaroth sans chercher à s’enquérir du destin d’une entière escouade de Terminators, faute de quoi ils auraient fatalement retrouvés Rius, qui n’a pas dû atterrir bien loin du lieu de l’explosion.

Je veux bien que les Ultra soient un Chapitre pétés de thunes, mais de là à « oublier » cinq armures Terminators sur une planète de huitième ordre (sans parler de la valeur intrinsèque des bonhommes occupant lesdites armures : ce n’est pas comme si la Première Compagnie des Ultramarines s’était faite massacrée jusqu’au dernier pignouf quelques années plus tôt, hein), il y a une sacrée marge tout de même. Dans la catégorie relique à la valeur incommensurable, une Crux Terminatus (avec un vrai morceau de l’armure de l’Empereur dedans !) ça se pose là tout de même, alors cinq… Malheureusement pour tout le monde, et surtout pour lui, Green ne voit cependant aucun problème à faire disparaître totalement le reste des Marines de ‘Salvation’ passé ce moment, ce qui donne au lecteur la furieuse envie d’emboîter le pas de ces derniers, et de tourner la page (dans tous les sens du terme) de cette piètre nouvelle.

Avec tout ça, on en oublierait presque que Green n’est pas, même lorsqu’il maîtrise un tant soit peu son sujet, un écrivain des plus intéressants, son absence de style le rendant parfait pour pondre des encadrés d’ambiance génériques dans les Codices GW, mais beaucoup moins convaincant dès qu’il s’agit de garder le lecteur en haleine plus de trois paragraphes d’affilée. Seul personnage un tant soit peu développé de ‘Salvation’, Rius (du latin rius, ce qui veut dire rillettes) pâtit particulièrement du manque d’inspiration de son créateur, et justifie à lui seul l’image de fadeur bleuâtre ayant poursuivi les Ultramarines depuis la création de Warhammer 40.000. Pour être honnête, le personnage le plus charismatique de la nouvelle reste à mes yeux, et de loin, le brave Carnifex faisant office de boss de fin, talonné de près par le Prince tyranide nain3 dézingué hors champ quelques pages plus tôt par la bleusaille en colère.

Imparfait sur le fond comme sur la forme, ‘Salvation’ est la preuve irréfutable que la BL publiait vraiment n’importe quoi à ses débuts, sale habitude dont elle n’est malheureusement toujours pas guérie à l’heure actuelle.

1 : On notera tout de même le fétichisme des Ultramarines (ou de leurs auteurs) en matière de « gantelets » quand on en vient au baptême de leurs vaisseaux. À l’hypothétique Gauntlet of Macragge viennent ainsi s’ajouter le Gauntlet of Victory et le Gauntlet of Glory, ce qui nous fait trois moufles et ouvre des perspectives intéressantes quant à un hypothétique « troisième bras » de Roboute Guilliman. Moi je dis que si Fulgrim s’est enquiquiné à venir égorger son frangin bien après la fin de l’Hérésie d’Horus, c’est qu’il avait ses raisons.
2 : « Chérie, j’ai une surprise pour toi ! »
« Tu m’as ramené des fleurs ? C’est trop ge- »
« Euh, non, pas exactement des fleurs. »
3 : « The hive tyrant was a truly terrifying figure to behold. The monster stood over two metres tall […] »
Sachant qu’un Space Marine normal taille dans les deux mètres cinquante, et qu’engoncé dans une armure Terminator, il frôle les trois mètres, je ne vois pas pourquoi il souillerait son slip à la vue d’un gros criquet.

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Hell in a Bottle – S. Jowett :

INTRIGUE :

40K_Hell in a BottleLe Sergent Instructeur Tydaeus des Iron Hearts doit faire face à une situation inédite: la machine Mimesis, simulateur de conflits utilisé pour l’entraînement des recrues du Chapitre, a été envahie par un ost démoniaque, mené par le prince démon Kargon. N’ayant pas réalisés que leur dernière conquête était un monde virtuel, les démons se retrouvent bloqués dans la réalité numérique de la machine, à la merci d’un Tydaeus qui doit maintenant décider s’il préfère la jouer safe (débrancher Mimesis et l’envoyer à l’incinérateur) ou héroïque (débuter une « partie » et aller botter les fesses calleuses de Kargon en live).

AVIS :

‘Hell in a Bottle’ est sans doute la nouvelle la plus étrange d’Into the Maelstrom’ (où cette nouvelle a été publiée pour la première fois), voire de toutes les publications 40K de la Black Library. L’argument du récit, déjà très peu banal en lui-même (« et si les Space Marines s’entraînaient sur des bornes de shoot ‘em up ? »), se combine en effet à une interprétation pour le moins libérale du fluff de la part de Simon Jowett, qui n’hésite pas à nommer un des Primarques inconnus dans le cours du récit, ou encore à dépeindre son héros en employé de bureau désabusé plutôt qu’en inflexible moine-guerrier. Il faut dire que Tydaeus n’est, à proprement parler, pas vraiment un Space Marines, son corps ayant rejeté les implants génétiques lui étant destiné au cours de son initiation. Le Chapitre des Iron Hearts étant néanmoins très humain (malgré ce que laisse penser leur nom), notre héros a été reclassé à un poste de non-combattant au lieu d’être transformé en serviteur, ou pire. Dans les ténèbres d’un lointain futur, la loi handicap de 2005 est toujours en vigueur. Bravo.

De l’autre côté de la matrice, le prince démon Kargon n’est pas vraiment reste, sa diction sifflante et ses pratiques sexuelles peu banales (ce n’est pas pour rien qu’on l’appelle Seed-Bearer, monsieur inséminant personnellement les planètes qu’il a conquis avec des spermatozoïdes chaotiques) faisant de lui une Nemesis pittoresque pour Tydaeus, qui, bien sûr, ne résistera pas à l’envie d’aller casser du démon, pensant (à tort) qu’il ne pourrait rien lui arriver de plus fâcheux que d’être déconnecté du serveur une fois tous ses points de vie envolés.

Parenthèse parodique (volontaire ou non) de l’univers gothique de Warhammer 40.000, ‘Hell in a Bottle’ est un souvenir d’une époque révolue de l’histoire de la Black Library, pendant laquelle les contributeurs pouvaient se permettre d’écrire tout ce qui leur passait par la tête. Et, rien que pour ça, cette nouvelle mérite d’être lue.

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Tenebrae – M. Brendan :

INTRIGUE :

‘Tenebrae’ relate les derniers moments du gouverneur planétaire Dane Cortez, alors qu’il contemple les forces du Chaos prendre d’assaut la capitale de son monde. Seul dans sa chambre de commandement, Cortez se remémore les évènements ayant conduits à la débâcle actuelle, et assiste à l’arrivée du général des hordes chaotiques, Lord Vog des Word Bearers, sur la place centrale de la capitale. Le réquisitoire sans concession qu’il dresse de ses errements et erreurs en tant que régent de Tenebrae (le nom de la planète qu’il dirige), et la colère qu’il éprouve envers l’Imperium pour avoir abandonné cette dernière dans son heure de besoin finissent par ouvrir un portail Warp dans son sanctuaire, duquel s’extirpent une poignée de Sanguinaires en goguette. Cortez aura alors un ultime choix à faire : au nom de qui, ou de quoi, donner sa vie ?

AVIS :

Mark Brendan (dont c’est la seule contribution connue à la Black Library) signe avec ‘Tenebrae’ un texte assez étrange. L’approche adoptée à beau être originale, privilégiant l’examen de conscience de Cortez à une banale scène de guerre urbaine, on ne peut s’empêcher de se demander « et alors ? » à la fin de la lecture de cette courte nouvelle (15 pages). Il ne se passe en effet pas grand-chose dans ‘Tenebrae’, si l’on met de côté les atermoiements et imprécations de notre héros, entrecoupés de quelques flashbacks explicatifs (où l’on comprend comment Cortez est arrivé à la tête de la planète, en récompense de ses bons services dans la Garde Impériale) et rapports sur l’avancée des troupes adverses dans Wormwood (la capitale de Tenebrae, tu parles d’un nom). Malgré sa bonne volonté, Brendan n’a pas le talent de Brian Craig pour tenir son lecteur en haleine de manière non-violente, ni le souci du détail d’un Abnett ou d’un Dembski-Bowden, lacunes faisant de ‘Tenebrae’ une curiosité assez fade au final. Rideau.

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Daemonblood – B. Counter :

INTRIGUE :

DaemonbloodSur la planète (forcément bleeue) de Saafir, Papy Nurgle est sur le point de rafler le vote populaire, au grand dam des défenseurs impériaux dépéchés par Pépé (l’autre) pour passer la serpilière. Isolés par les aléas de la guerre, la Sœur de Bataille Aescarion et le Sergent Ultramarines Castus se retrouvent dans les souterrains de la capitale planétaire (éponyme), où se trouve s’étend une station d’épuration possédée par le Warp, forme physique imposante du Prince Démon Parmenides le Vil. Comme il est difficile de passer par l’épée, ou, dans le cas de cette brutale d’Aescarion par la hache énergétique, une flaque de morve et d’excréments couvrant plusieurs hectares, M. et Mme Meilleurs de l’Empereur sont bien embêtés. Profitant de leur désarroi, le vil Parmenides lave/salit le cerveau du Space Marine avec ses confidences crasseuses sur l’état de la galaxie, transformant le pauvre Castus en séide chaotique. Immunisée à cet insidieux virus par sa foi dévorante et absolue, Aescarion n’est cependant pas de taille à achever les souffrances et les errances métaphysiques de son compagnon, et ne doit son salut qu’à la robustesse de son jetpack, qui la ramène à la surface avant qu’elle ne se retrouve féminicidée par le renégat.

On n’échappe cependant pas aussi facilement à cette force puissante qu’est la Destinée au 41ème millénaire, et les routes d’Aescarion et de Castus se croiseront à deux nouvelles reprises pendant les décennies suivantes. La première fois lors de la purge d’un Space Hulk squaté par les suivants de Parmenides, dont Castus est devenu le porte-parole officiel. Castoche aurait pu se faire trouer les pores par un peloton de Sistas judicieusement gardé en réserve par Aescarion, n’eut été la compétence « corps de mouches » développée par le M. Impropre de Saafir, et qui lui permet de tirer sa révérence sans dommage. La seconde, et dernière fois, se déroule sur le vaisseau du Seigneur du Chaos, le Defixio1, et avec la bénédiction de l’Inquisition, qui souhaitait contenir l’expansion cancéreuse de l’empire spatial de Parmenides en envoyant un petit Exterminatus bien senti sur Saafir. Il fallait bien ça à la Canonnesse de l’Ordre du Calice d’Ebène, auquel Aescarion appartient, pour autoriser l’impulsive et revancharde vétérante à se mesurer une nouvelle fois avec sa Némésis. Les deux précédentes tentatives ayant eu un coût élevé en termes de vies de Sœurs de Bataille aguerries, on comprend sa réticence à permettre à sa sous-fifre de sortir à nouveau le karscher. La connaissance intime de notre héroïne de la mentalité et des forces et faiblesses de Castus en faisait toutefois la meilleure candidate pour mener l’expédition impériale jusqu’à bonne orbite, en dépit de la défense acharnée orchestrée par le fidèle Castus du pré de la décharge carrée de son seigneur et maître.

Ayant soigneusement préparé son combat en oignant sa hache de gel Harpic, Aescarion parvient assez facilement à vaincre son adversaire, mais ne l’achève pas immédiatement. Elle souhaite en effet le faire revenir du côté lumineux, et aseptisé, de la force avant qu’il ne soit trop tard, et parvient (assez facilement *2) à convaincre Castus de retourner sa veste énergétique. Cachant une balise de visée, ou quelque chose comme ça, entre deux bourrelets du champion déchu, elle envoie son ancien camarade apporter ses salutations les plus distinguées à Parmenides dans les profondeurs de Saafir, permettant à l’ex Ultramarine de partir avec les mains sales, certes, mais une ardoise propre2. C’est ce qu’on appelle passer l’éponge, grimdark style.

1 : Je précise car Counter a écrit une autre nouvelle portant ce nom, pour ceux que ça intéresse.
2 : Le fait que Parmenides ne se souvienne même pas du nom de son champion après toutes ces décennies de collaboration à également dû convaincre ce dernier d’envoyer tout balader.

AVIS :

Bien des années ont passé et bien des textes ont été écrits depuis, mais il faut se rappeler que c’est avec ‘Daemonblood’ qu’un tout jeune Ben Counter a fait ses débuts pour la Black Library, dans un numéro d’Inferno ! Si je ne placerais pas cette petite nouvelle parmi les meilleures soumissions de cet auteur, capable du moins convaincant1 comme du meilleur, cette première tentative a plutôt bien vieillie (notamment quand on la compare à certaines nouvelles publiées au début des années 2000), et s’avère assez solide dans sa réalisation, même si très peu originale dans son propos. Les milliards de Space Marinades qui nous ont été servies par la BL au cours des dernières décennies y sont sûrement pour quelque chose…

Ici, on peut tout de même mettre au crédit de Counter une conclusion un peu plus originale que le traditionnel « le-méchant-chaoteux-meurt-sur-un-gros-malentendu-avant-d’avoir-pu-mettre-son-plan-presque-infaillible-à-exécution», avec l’exploration d’un thème assez rare dans l’univers grimdark de 40K : la rédemption.  Cela compense largement à mes yeux les points techniques sur lesquels on pourrait venir lui chercher des noises, comme l’apparente facilité avec laquelle une « simple » Sœur de Bataille vétérante arrive à tailler des croupières à un Seigneur de la Peste. On apprendra d’ailleurs par la suite que la bonne Aescarion est une véritable héroïne d’action, ayant plus d’un Space Marine à son tableau de chasse, ce qui pourrait être perçu comme du féminisme de GW-Fiction avant-gardiste de la part de Ben Counter. Quel visionnaire alors…

1 : Vus les loustics qui ont bossé pour la BL, je ne peux pas décemment utiliser le qualificatif de pire pour la prose de Ben Counter. Il y a bien plus mauvais que lui.

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Know Thine Enemy – G. Thorpe :

INTRIGUE :

40K_Know Thine EnemyLorsque la planète Slato et ses deux cent mille colons se trouvent menacés par les perfides Eldars, il incombe à la 4ème Compagnie des Salamanders de voler à la rescousse de cet agri-monde guère capable de se défendre seul contre les insaisissables Xenos. Nous suivons donc le Chapelain Ramesis et les trois escouades qu’il chaperonne alors que ce beau monde se dirige en Thunderhawk vers le portail Warp où se concentre la majorité des combats. Après avoir conduit les rites appropriés, formellement accueilli un frère de bataille novice (Xavier1) au sein de la Compagnie, et surtout briefé ses hommes – et le lecteur avec eux – sur les tenants et les aboutissants de leur mission, Ramesis est sauvé de l’indignité de devoir se lancer dans le stand up pour meubler la nouvelle par l’attaque d’un vaisseau eldar, qui force le Thunderhawk à se poser en catastrophe dans la pampa. Rien de très grave pour nos fiers surhommes, qui partent en petites foulées en direction du champ de bataille, après s’être rapidement coordonnés avec le reste du contingent Salamanders, sous les ordres du Capitaine Nubean et de l’Archiviste Zambias.

La session de décrassage des verts les amène à traverser un bois, où les attendaient quelques Rangers pas très dégourdis, et qui se font vite laminer par les intraitables (mais pas beaucoup plus malins2) Astartes. Cette échauffourée donne l’occasion à Thorpe de nous resservir une nouvelle tournée de dialogues ciselés, avant que les détachements de Ramesis et de Nubean n’accomplissent leur jonction, ce qui mène évidemment à plus de palabres entre les trois officiers. Moment de grâce absolu où les lignes défilent sans que les mots prononcés n’aient le plus traître intérêt : c’est un peu comme si on avait demandé à ChatGPT d’écrire un rapport de bataille 40K depuis le point de vue d’un mauvais commentateur sportif. Après avoir débattu pendant à peu près trois mille ans, notre fine équipe repart, toujours en courant, vers le portail Warp tant attendu (par le lecteur en tout cas) afin d’aider la Garde Impériale à défendre cette mystérieuse relique contre les attaques incessantes des Eldars. On apprend aussi qu’un Techno-Prêtre de l’Adeptus Mechanicus (Simeniz) a été dépêché sur place pour étudier la machinerie Xenos, qui doit donc être impérativement défendue et non détruite de manière préventive (ce qui serait tout de même ’achement plus pratique). ‘Ach !’ fait Ramesis, que son dédain pour les disciples de l’Omnimessie transforme soudainement en germanophone. On est plus à un cliché près, à ce stade.

Après avoir complété leur marathon, les Salamanders se positionnent autour du portail, confiants dans la tactique du camping éhonté pour remporter la victoire à la clock. Après tout, c’est ce qu’à fait l’Empereur pendant le Siège de Terra, et ça lui a bien réussi. Nouvelle scène de baston, nocturne cette fois-ci (sans doute un hommage à la planète natale de nos héros), pendant laquelle Thorpe finit d’égrener laborieusement les entrées du Codex Eldars V3, et où rien de bien intéressant ne se passe. Hors champ, Nubean décide d’aller taquiner le goujon avec son escouade de commandement et revient après quelques temps accompagné d’un Prophète et de deux Archontes. Stupéfaction chez Ramesis, qui ne comprend pas comment le Capitaine a pu parlementer avec l’ennemi, et manque de commettre une boulette en décochant un coup de crozius aux invités de son supérieur. En même temps, la haine est son métier, on ne peut pas lui reprocher d’être un peu intolérant sur les bords.

Revenus devant le portail pour, je vous le donne en mille, tailler le bout de gras, Salamanders et Eldars parviennent presque à se mettre d’accord sur la marche à suivre pour coopérer et ainsi empêcher la cabale du redoutable Kha-rehk d’activer la porte afin de piller Slato. C’était d’ailleurs l’objectif initial des Zoneilles, dont la tranquillité du Vaisseau Monde se serait retrouvée menacée à plus ou moins long terme en cas d’incursion réussie de la part de leurs méchants cousins sur la colonie impériale. Je dis « presque » car au moment où le Prophète commence à incanter pour désactiver la wifi, le portail commence à s’ouvrir et Ramesis a une réaction malheureuse : coller un pain au Xenos le plus proche. Après tout, il y a une bonne chance que ce soit de sa faute, pas vrai ? La situation dégénère totalement et les trois Eldars finissent en salami, Xavier s’illustrant particulièrement en assénant le coup de grâce au Prophète avec le crozius de Ramesis…

Début spoiler…Toutefois, cela n’empêche pas la nouvelle de se terminer sur une défaite critique de l’Imperium, la décision hâtive et xénophobe du Chapelain ayant permis aux Eldars Noirs d’ouvrir le portail et de déferler en masse sur les positions impériales. Ramesis a le temps de réaliser qu’il a vraiment chier dans la colle, l’alliance des Space Marines, Gardes Impériaux et Eldars ayant pu permettre de repousser les Drukharis, avant de se faire ôter son dernier point de vie par une foultitude de cabalites surexcités. Dans la vie, il faut savoir choisir ses combats.Fin spoiler

1 : Oui, LE Xav’ en personne. Gav Thorpe n’a jamais pu résister à un caméo de personnage nommé, c’est son péché mignon.
2 : Ramesis décide en effet de couper à travers bois alors que 1) son second lui avait fait part d’un fort risque d’embuscade, et 2) l’auspex de ce dernier avait confirmé la présence d’humanoïdes embusqués dans le bosquet.

AVIS :

Un jeune Gav Thorpe se frotte à la nouvelle de taille intermédiaire (32 pages), pour un résultat comiquement laborieux. C’est bien simple, plus de la moitié du texte de ce ‘Know Thine Enemy’ est constituée de passages de remplissage, alternant entre passages fluff (ne respectant d’ailleurs pas du tout le background1), expositions sans honte et dialogues creux. Ah, et de remise de casque aussi. Parmi les rares éléments rédempteurs de cette bouillie littéraire, citons tout de même l’idée de terminer la nouvelle sur une défaite sans appel des protagonistes (pas si fréquent dans la GW-Fiction), et l’enrichissement de l’historique du (pas encore) Chapelain Xavier. Pour le reste, nous qualifierons poliment cette nouvelle de travail de jeunesse assez peu abouti, et passerons à autre chose. Ça vaut mieux pour tout le monde.

1 : Entre les Space Marines qui considèrent l’Empereur comme un dieu, les 10 Compagnies de Salamanders (au lieu de sept) dénombrées par Thorpe, et le mépris total dont ces derniers font preuve pour la vie de leurs alliés humains, le fluffiste souffle fort à la lecture. L’auteur a fini maître du background chez GW, donc il s’est rattrapé après cela.

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Innocence Proves Nothing

Nightmare – G. Thorpe :

INTRIGUE :

Nous suivons les péripéties oniriques du jeune Joshua, dont l’adolescence a pris un sale tour depuis que sa famille et ses amis l’ont rejeté pour crime de sorcellerie, forçant le jeune homme à vivre seul dans le désert inhospitalier de la planète de Sha’ul. Seul ? Pas tout à fait. Une mystérieuse voix, que l’on appellera donc Daniel, lui tient compagnie et lui prodigue des conseils dans son exil, sans que le peu curieux Joshua s’interroge beaucoup sur l’origine de ce phénomène. Pour la première fois depuis que son ami imaginaire lui rend visite, la Voix a retentit dans son esprit alors qu’il était endormi, et lui propose rien de moins que de participer à une grande aventure, comme quand il était enfant et jouait au Space Marine, ainsi que font les bambins de l’Imperium.

Sur les indications de The Voice, Joshua part donc en vadrouille et commence à farmer du mob démoniaque de bas étage, grâce aux pouvoirs merveilleux de son esprit, capable de matérialiser des armes et des armures à volonté pour affronter toutes les épreuves de ce qui ressemble fort à un RPG en réalité virtuelle (ça doit être commun au 41ème millénaire). Bien que Joshua ne soit pas plus violent que la moyenne, l’aspect répugnant des créatures qu’il rencontre et l’assurance maintes fois répétées par la Voix que tout ça n’est qu’un rêve, conduisent notre héros à commettre un véritable massacre grâce à ses pouvoirs psychiques fantasmés.

Guidé par son GPS intégré, Joshua finit par arriver devant un bâtiment dont l’entrée est gardée par une grille de fer, dont il tort aisément les barreaux avant de se glisser dans un étroit tunnel en prenant la forme d’un serpent. Au bout du compte, il parvient dans une salle obscure où l’attend le « boss de fin », un tas de saindoux à tentacules que la Voix l’incite à tuer pour terminer sa quête. Bien fatigué par ses aventures et lassé de ces tueries incessantes, Joshua fait mine de refuser mais son compagnon excite son amertume et sa rage d’avoir été abandonné par ses proches à cause de sa différence jusqu’à ce que le jeune homme pète les plombs et étrangle à mains nues sa victime dans un accès de colère. Ceci fait, la Voix lui annonce qu’il n’a qu’à imaginer qu’il est de retour à son point de départ pour sortir de ce rêve étrange et pénétrant, et lui promet de le laisser désormais tranquille…

Début spoiler…A son réveil, Joshua a la surprise de découvrir qu’il n’est pas dans sa cahutte du désert, mais dans un jardin luxuriant qui ne peut être que celui du Gouverneur Planétaire Ree en personne. Surprenant la conversation de passants alors qu’il se cache dans les fourrés, il comprend alors qu’un mystérieux assassin a réussi à s’infiltrer dans le palais, massacrant les gardes et les sentinelles au cours de sa progression, défonçant tous les obstacles et se glissant dans les moindres interstices, jusqu’à parvenir dans la chambre du Gouverneur, retrouvé étranglé dans son lit au petit matin. La nouvelle se termine avec l’horrible réalisation par Joshua qu’il s’est fait grandiosement balader par celui qu’il considérait comme son seul ami, pendant que dans le Warp, un démon mineur de Tzeentch ricane follement en se tenant la bedaine…Fin spoiler

AVIS :

Gav Thorpe tenait une idée de nouvelle assez intéressante avec ce ‘Nightmare’ (Adventure Times à la sauce 40K, rien que ça), mais il pêche un peu par son exécution, qui ne laisse pas assez planer de mystère sur les actions accomplies par Joshua lors de sa virée nocturne à mon goût. Dès lors que Thorpe nous révèle que son héros a été chassé de son village après avoir été accusé d’être un sorcier (donc un Psyker en puissance), n’importe quel lecteur au fait de son fluff prendra le ‘it’s just a dream bro’ que la Voix sert à Joshua à toutes les sauces avec les pincettes de rigueur. J’ajoute que ‘Nightmare’ exploite le même filon qu’une vieille nouvelle de 40K, autrement plus mémorable car joyeusement foutraque (normal pour une soumission d’Ian Watson, vous me direz) : ‘Warped Stars’. L’imitation est la forme la plus sincère de flatterie, et on peut pardonner à un auteur – à l’époque – aussi vert que Gav Thorpe de vouloir s’inspirer d’un auteur vétéran et célébré comme Watson, mais cela ne vient pas non plus jouer en faveur de son travail. Bref, une petite nouvelle fort convenable mais absolument pas mémorable.

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Ancient History – A. Chambers :

INTRIGUE :

40K_Ancient HistoryRecruté contre son gré comme équipier polyvalent du Retribution, fier vaisseau de la flotte impériale à rade de personnel, à l’issue d’une opération porte fermée (traduction : une fois qu’on est rentré, on ne peut plus sortir), Nathan, notre héros, découvre progressivement les joies et les peines de la vie de canonnier de marine, noble et utile occupation qu’il projette toutefois d’abandonner dès qu’une occasion de déserter se présentera à lui. Cette frilosité à s’engager sur le long terme dans une institution impériale pourtant aussi respectable que la Navy1 s’explique en partie par la présence d’un nuisible connu de Nathan, Kendrikson, dans l’équipage de Balthasar (le nom du macrocanon auquel notre homme a été affecté). Les deux forçats se sont quittés fâchés au cours d’une précédente collaboration, et bien que Nath’ ne serait pas contre une petite vendetta pour régler ses comptes avec son ex-nouveau collègue, il préférerait à tout prendre mettre quelques années lumières entre eux, un « accident » du travail étant si vite arrivé… En plus de ces problèmes relationnels, le Warp ne s’avère pas être un long fleuve tranquille, et sa traversée pèse lourdement sur l’estomac et la psyché des rats de cale. En témoigne le coup de sang passager d’un passager, Fetchin, qui succombe à une crise de claustrophobie démoniaque, puis à une décharge de fusil à pompe à bout portant, non sans avoir envoyé quelques badauds à l’hôpital et à la morgue auparavant.

Nathan a toutefois la chance de pouvoir compter sur le patronage bienveillant de Kron, canonnier vétéran dont l’accent chantant, les histoires passionnantes, les relations privilégiées avec le management et la connaissance intime des coursives du Retribution permettent au bizut d’acquérir des connaissances et compétences précieuses, monter dans la hiérarchie balthasaresque et, accessoirement, échapper à la tentative d’assassinat dont il fait les frais de la part de ce mauvais sujet de Kendrikson, qui se révèle être un Luminen2 infiltré.

Cette prise de fonction mouvementée culmine avec la toute première bataille spatiale à laquelle Nathan participe, baptême du feu à plus d’un titre au cours duquel il aura l’occasion de se frotter à l’ennemi de plus près que prévu sur sa fiche de poste, le crash d’une torpille d’abordage à proximité de son espace de co-working le forçant à prendre les armes pour défendre la vertu et l’intégrité de Balthasar contre les assauts païens de vils cultistes chaotiques, dont l’encadrant se trouve être un Space Marine renégat. Il faudra une nouvelle fois l’intervention décisive de Kron, qui sous ses abords décatis, se révèle être un individu décidément plein de ressources et d’énergie (il se relève d’un tir de pistolet bolter à bout portant et tase l’Astartes à mains nues), pour permettre à notre héros de se sortir de ce coup de Trafalgar. Les mystères de l’origine et des motivations du mentor de Nathan ne seront pas levés par Chambers avant la conclusion de cet ‘Ancient History3′, mais une chose est sûre, quand on est Kron, on est Kron.

1 : Sécurité de l’emploi, gîte et couvert offerts, destinations variées, activités physiques régulières… Ça c’est un job de rêve.
2 : Plus de quinze ans avant la sortie du Codex Adeptus Mechanicus, Chambers convoquait déjà des électro-prêtres dans ses nouvelles.
3 : Qui a peut-être été suivi d’une autre nouvelle, et aurait dû l’être ? Je suis sur le coup les aminches.

AVIS :

Nouvelle protéiforme et un peu foutraque, ‘Ancient History’ est une soumission plutôt hétérodoxe, mais loin d’être inintéressante de la part d’Andy Chambers. En multipliant les partis pris narratifs (cela commence comme un récit d’évasion, avant d’intégrer un passage « mythes et légendes », puis d’embrayer sur une révélation plutôt étrange sur un des personnages principaux, et de tourner à l’action pure et dure, pour se terminer sur un mystère vraiment mystérieux) et les péripéties, le grand méchant joueur n’a pas choisi la facilité, et son propos en paraît en conséquence décousu et incertain dans sa finalité. Pour autant, le simple fait de mettre sur le devant de la scène des personnages très peu abordés par la BL mais au moins aussi caractéristiques du grimdark de 40K que les Space Marines ou l’Inquisition (les « marins » de la Flotte Impériale) ne manquera pas d’attirer la curiosité bienveillante des lecteurs avides d’en apprendre plus sur la vie des travailleurs de la mer l’espace, ce en quoi Chambers se montre plutôt généreux. En outre, l’inclusion de la Complainte du Vieux Marin à la sauce 40K dans le récit s’avère être un interlude des plus intéressants entre deux scènes d’action, et ne manquera pas de susciter les hypothèses les plus radicales de la part des exégètes de tout poil qui constituent une part non négligeable du lectorat de la Black Library. La balance est donc plus que positive pour ‘Ancient History’ dont les apports fluff et l’originalité compensent largement les tâtonnements et… l’originalité (aussi)

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The Tower – C. S. Goto :

INTRIGUE :

La routine habituelle du cipher (à ne pas confondre avec Cypher, sinon vous serez déchu) Lexio, employé comme ses aïeux avant lui au service de l’Historicus de la Tour des Idoles, sur Terra, est interrompue de manière brutale alors qu’il se rendait comme tous les jours à son travail. Il n’est pas rançonné par un gang local ou piétiné par un mouvement de foule, comme cela arrive sans aucun doute très souvent à la surface du Monde Trône, mais le choc est néanmoins total pour notre héros, homme d’habitude et de rituel, lorsqu’il remarque une ombre inhabituelle être projetée sur le marbre de l’allée qu’il emprunte quotidiennement. C’est peut-être un détail pour vous, mais pour lui ça veut dire beaucoup.

Ayant recruté un des nombreux agents d’entretien de cette institution vénérable (mais pas immaculée pour autant, car le traditionnel tour de vis budgétaire a mené au gel des embauches et par conséquent au nettoyage exclusif des zones ouvertes au public de la Tour) pour investiguer sur cette anomalie proprement terrifiante, Lexio finit par se retrouver en possession d’un petit tube de métal contenant un bout de parchemin sur lequel sont gribouillés des signes qu’il n’est pas en mesure de déchiffrer. C’est ce tube qui, posé derrière la tête d’une gargouille située sous une rosace exposée à la lumière du jour, avait causé ce jeu d’ombre perturbateur. Tout peut maintenant rentrer dans l’ordre, même si l’enquête de terrain menée par l’homme de ménage missionné par Lexio s’est soldée par une échelle renversée et un pauvre bougre suspendu à bout de bras à quinze mètres du sol. Ce sont des choses qui arrivent.

Arrivé à son poste avec onze minutes de retard, Lexio se fait houspiller comme il se doit par son supérieur hiérarchique, le Prefectus secondus Kayle, et ne peut que lui tendre sa trouvaille matinale pour expliquer cette prise de poste tardive. Guère impressionné par le tube récolté par son sous-fifre, le pragmatique Kayle envoie tout de même ce dernier solliciter l’un des nombreux traducteurs travaillant dans la Tour pour décrypter le message y étant renfermé. C’est ainsi que Lexio se retrouve à grimper 47 étages (à pied, très probablement) jusqu’au bureau de l’adepte Thucydia, grande spécialiste du Vindracum dans lequel la brève a été écrite1.

Faisons ici une pause pour nous téléporter jusque dans les ténèbres du Temple Vindicare, où l’Assassin Nyjia a été convoquée par le Grand Maître en personne pour recevoir une mission. Après un parcours du combattant digne de la version hardcore de Ninja Warrior, que cette athlète incomparable accomplit en chantonnant, elle est dûment briefée par cette figure mystérieuse et repart sans tarder afin d’accomplir la volonté de son sensei.

Retour à la Tour des Idoles, où Lexio accomplit sa propre mission en demandant humblement à Thucydia de lui traduire le texte qu’il lui apporte, afin qu’il puisse en transmettre la substantifique moelle à Kayle. Ce qu’il ne sait pas, mais nous oui grâce à la magie de l’exposition narrative, c’est que Thucydia enquête de longue date sur le Temple Vindicare, et sa mystérieuse absence des archives impériales (quand on y réfléchit deux minutes, c’est pas surprenant qu’une organisation d’assassins cherche à éviter qu’on parle d’elle, mais bon…). Et le message que lui a délivré Lexio la plonge dans une fébrilité intense, car après examen, il s’agit de la pièce manquante du puzzle permettant de tracer la quadrature du cercle, ou quelque chose comme ça. ENCORE UN P*TAIN DE COUP DE CHANCE DITES MOI. Professionnelle malgré tout, Thucydia livre à Lexio ses conclusions, mais comme ce dernier est formaté pour se souvenir parfaitement des messages qu’on lui dicte sans les comprendre, on n’en saura pas plus pour le moment.

Lexio retourne donc jusqu’à son point de départ, et attend au pied du trône de l’Historicus, à qui Kayle est parti faire son rapport matinal, l’occasion de transmettre à son boss la traduction qu’il avait demandé. Cette journée commence de manière bien étrange, mais ce sont des choses qui arrivent (bis)…

Début spoiler…Ce qui arrive en revanche de manière beaucoup plus rare, c’est que l’Historicus se prenne un tir de sniper en pleine tête, provoquant la consternation compréhensible de son personnel. Comme on s’en doute, c’est Nyjia qui a fait le coup, et les raisons en sont simples (enfin bon, je vous laisse seuls juges) : l’Historicus était sur le point de recevoir des informations compromettantes sur les agissements du Temple Vindicare, et devait être supprimé pour préserver l’anonymat de cette institution. Les informations en question étaient le message traduit par Thucydia, et que Lexio délivre automatiquement à un Kayle éclaboussé de sang et de cervelle quelques secondes plus tard : « Vous devez tuer l’Historicus aujourd’hui. Ils en savent trop » (sic). Si cela vous paraît logique, vous avez bien de la chance… Fin spoiler

1 : On pourrait faire remarquer que c’est tout de même beaucoup de chance que Kayle ait assez de connaissance dans cette langue morte quasiment oubliée pour diriger Lexio vers la bonne personne pour le job, mais je choisis de croire qu’on ne devient pas Prefectus secundus par hasard.

AVIS :

Singulière nouvelle que ce ‘The Tower’, qui se démarque du reste du corpus 40K « classique » tant sur le fond que sur la forme. Sur ce second point, on ne peut que constater que C. S. Goto a choisi de prendre à contre-pied la tendance au bolter porn très présente dans les travaux de ses collègues (surtout à l’époque où cette nouvelle a été écrite, c’est-à-dire au milieu des années 2000) en se livrant au récit scrupuleux du fonctionnement d’un service de l’Adeptus Administratum, ce qui est beaucoup moins épique que la Space Marinade de base, on en conviendra. Pour autant, cette prise de liberté stylistique est loin d’être désagréable, et illustre de manière appropriée « l’envers » de l’Imperium de l’Humanité, c’est-à-dire la vie morne des milliards de fonctionnaires totalement aliénés par la bureaucratie d’un empire s’étendant sur un million de planètes et vieux de plus de dix mille ans. Les passages consacrés à Lexio et Thucydia constituent donc à mes yeux les points forts de la nouvelle, compensant leur manque d’action (et encore, on assiste à une remarquable cascade à un moment) par leur caractère inédit, ou presque1.

En revanche, les acrobaties de Nyjia ne m’ont que moyennement intéressées, sans doute parce que je m’attendais à ce qu’un Assassin soit capable de faire ce genre de dingueries et que Goto n’est pas le premier (ni le plus inspiré) à avoir intégré des membres de cette discrète et mortelle faction dans ses écrits. Ceci dit, ‘The Tower’ est de ce fait une source importante de fluff sur le Temple Vindicare, ce qui est appréciable, même si les informations relayées par Goto sont à prendre avec des pincettes. Notre homme n’a en effet pas fait long feu au sein de la Black Library et n’a pas quitté cette dernière avec une réputation d’amoureux du background.

Sur le fond, j’ai malheureusement moins de choses positives à relayer car le dénouement de la nouvelle m’a laissé profondément perplexe. Je n’arrive en effet pas à faire de lien entre la découverte fortuite par Lexio d’un document compromettant (oublié là par un Vindicare ? mais si c’est le cas, pourquoi ?) et la mission accomplie par Nyjia. Il aurait fallu que Goto se donne plus de mal pour relier ces deux intrigues, qui se percutent sans grâce et sans génie à la fin de son histoire. Il y a une petite chance que ce mystère soit levé ou en partie éclairci dans ses autres textes de GW-Fiction (que je n’ai pas lu), et je lui laisse donc le bénéfice du doute à hauteur de 5%, mais il y avait moyen de livrer une copie plus aboutie de ce point de vue-là.

: On peut penser à ‘A Good Man’ de Sandy Mitchell, qui place aussi sa caméra au niveau d’un clerc de l’Administratum. Et bien des années plus tard, Warhammer Crime viendra donner vie au grimBAU (Business As Usual) de 40K.

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Loyalty’s Reward – S. Jowett :

INTRIGUE :

40K_Loyalty's RewardNotre histoire commence par une scène tendue à l’arrière de l’honorable établissement du Cochon PFendu, taverne située à proximité du spatioport de Praxis, cité prospère d’Equus III. Mikhail Kravi, jeune loup à l’ambition féroce et bras droit d’un des Protektors affiliés à la puissante Maison Gaudi, est venu avec quelques gros bras de ses amis « persuader » le marchand Leon Kleist, un peu trop porté sur la dive bouteille pour son propre bien, d’offrir un superbe présent au nouveau Graf Gaudi lors de son intronisation prochaine. Cela serait un moyen judicieux de faire oublier à ce dernier les mots un peu lestes qu’un Leon rond comme une queue de pelle a eu à son égard il y a quelques jours, et dans une cité mise en coupe réglée par de puissants gangs depuis des siècles, s’attirer l’inimitié d’un Graf n’est pas une perspective attrayante. Convaincu par l’argumentaire de Mikhail autant que par son solide crochet du gauche, Leon le Persiffleur se fait un honneur de remettre à Viktor Gaudi une babiole hors de prix dès le surlendemain, lors de la cérémonie durant laquelle le jeune héritier prend officiellement le titre et la place de feu son grand-père Bruno.

Alors que Papi Gaudi préférait maintenir des relations cordiales et éviter les affrontements larvés avec les autres Maisons de Praxis, Viktor nourrit des rêves de conquêtes urbaines. Bien que sa faction compte parmi les plus puissantes de la ruche, elle n’est pas de taille à affronter frontalement tous ses rivaux… jusqu’à ce qu’un marchand (Brek) se présente avec une occasion en or : une cargaison de catapultes shuriken reconditionnées, qu’il est prêt à céder à vil prix au Graf ambitieux. C’est le début d’une OPA agressive sur les territoires des autres Maisons, dans laquelle Mikhail s’illustre particulièrement en organisant l’assassinat du Graf Reisiger, abattu avec ses conseillers les plus proches alors qu’ils dînaient dans un kebab de luxe. Récompensé par l’élévation au rang de Protektor, Mikhail est convié avec tous ses collègues à une petite soirée au manoir Gaudi, et se réveille le lendemain matin dans son appartement, nu comme un ver, couvert de sang et pris d’une gerbe carabinée. La nuit a dû être bonne !

Début spoiler…Les quelques souvenirs qui finissent par lui revenir après s’être envoyé une demi-bouteille de cointreau pour se remettre les idées en place ne sont cependant pas très sympathiques. Il a de vagues réminiscences de litanies prononcées dans une langue inconnue, en direction d’un bloc d’obsidienne couvert de runes bizarres. N’ayant pas atteint sa position en étant complètement obtus, et étant un croyant convaincu et pratiquant du culte impérial (comme la plupart des habitants de la pieuse Equus III), Mikhail comprend vite qu’il a assisté à des activités encore plus prohibées que la moyenne, et qu’il est de son devoir d’en alerter les autorités compétentes l’Ecclesiarchie. Il sèche donc le nouvel afterwork organisé par Viktor Gaudi et son pote Brek pour aller se confesser dans le temple le plus proche, espérant que sa coopération désintéressée (en partie tout du moins) lui permettra d’échapper au jugement réservé aux cultistes, même involontaires.

Le hasard faisant bien les choses, un Inquisiteur de l’Ordo Malleus (Belael) passait dans le coin, en même temps qu’un contingent de Chevaliers Gris. Tout ce petit monde débarque fissa à la casa Gaudi, et pas pour causer modernisme catalan, croyez-le bien. Au terme d’une opération rondement et prestement menée, tous les membres de la cabale de Tzeentch sont passés par le bolter, scellant la fin de la Maison Gaudi. Et la balance Mikhail, me direz-vous ?

Début spoiler 2…Bien qu’il se voie déjà pardonné, ordonné Prêtre et oint Cardinal sur un monde très lointain en reconnaissance de son impeccable probité, Belael avait d’autres idées en tête lorsqu’il lui a promis une « juste récompense » en échange de sa collaboration totale. Ayant été infecté par une présence démoniaque pendant sa soirée blackout chez Totor, comme tous les Protektors invités, Mikhail n’héritera donc que d’un rituel de purification (privé, c’est déjà appréciable) et d’un bolt dans la tête. Ce n’est pas pour rien qu’on parle du fardeau et non du bonheur de la loyauté…Fin spoiler

AVIS :

Bien des années avant le lancement de Warhammer Crime et de son approche résolument urbaine et quotidienne du 41ème millénaire, Simon Jowett signait avec ‘Loyalty’s Reward’ une très bonne nouvelle dans ce registre low-key. Librement inspirée du Parrain de Coppola, et relevée d’un zeste de conspiration chaotique à la Eisenhorn dans sa seconde moitié, cette histoire démontre qu’il est tout à fait possible d’intéresser le lecteur sans avoir besoin de mettre en scène des batailles gigantesques ou des machinations à l’échelle galactique. L’immersion est réussie, l’intrigue se déroule de manière fluide et parfois assez inventive pour de la GW-Fiction (petit Mcguffin réussi avec le tabassage du pauvre Leon en introduction) : c’est un travail soigné auquel on a droit. Mon seul petit regret porte sur le choix de Jowett du Chaos comme antagoniste, alors que les symptômes éprouvés par Mikhail le lendemain de sa « cuite » faisaient plutôt penser à une infestation Genestealer, ce qui aurait été (à mes yeux) encore plus viscéral – à tous niveaux. Top qualité.

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Raptor Down – G. Thorpe :

INTRIGUE :

40K_Raptor DownNous retrouvons le Commandant Jacques Jaeger de l’escadron Raptor, après les évènements couverts dans ‘Acceptable Losses’, et la prise de fonction compliquée et sanglante de notre héros à l’occasion d’une bataille spatiale contre un Rok Ork. 18 mois plus tard, le Divine Justice, croiseur impérial auquel les Raptors sont rattachés, est passé à autre chose, et fait partie de la flotte d’invasion du système de Mearopyis, que l’Imperium cherche à reprendre aux Noctal après quelques millénaires d’atermoiements (saleté de bureaucratie). Ayant eu largement le temps de se familiariser avec son nouveau poste, de se faire accepter par ses hommes et de terroriser les nouvelles recrues venues remplacer les pertes subies au cours de  la campagne précédente, Jacques le Fataliste1 supervise les opérations de soutien du déploiement de la Garde Impériale au sol, qui consistent surtout à aller bombarder les cibles les plus juteuses à la surface de la planète capitale du système, tâche grandement facilitée par l’absence de chasseurs à capacité de projection spatiale dans le camp d’en face, ce qui permet aux Maraudeurs de frapper avec une impunité assez totale.

Chargés d’une nouvelle mission de démolition de l’infrastructure militaire locale, les escadrons Raptor et Storm, accompagnés  de leurs écrans de chasseurs (pour une fois qu’ils sont là, ces vole au flanc) quittent leur vaisseau mère pour ce qui ne semble être qu’une formalité pour ces pilotes aguerris. Malgré la tentative malheureuse d’interception de la part des Noctal, prestement contrecarrée par le professionnalisme et les gros flingues impériaux, tout semble baigner dans l’huile de moteur pour Jaeger et ses hommes, jusqu’à ce que ce dernier ait la malheureuse et déplorable idée de… prendre une initiative. Ahlàlà. Pour sa défense, son projet d’attaque d’une colonne blindée Noctal, repérée par l’esprit de la machine d’un missile2, et dont l’utilisation fourbe de la géographie locale avait permis d’échapper aux scanners de la flotte jusqu’ici, partait d’une bonne intention : protéger l’avance des bidasses de la Garde et les empêcher d’être pris en tenaille par les défenseurs. Malheureusement, les grands projets de canyoning de Jaeger, pour prometteurs qu’ils aient semblé sur le papier (en voilà une activité de team building qu’elle est bonne !), se trouvent rapidement et violemment contrariés par la puissance de feu des assaillis. Et même si Thorpe ne se donne pas vraiment la peine de décrire la manière dont les Noctal parviennent à dégommer l’invincible armada de manière aussi brutale, le résultat de l’accrochage n’est pas franchement en faveur des Impériaux. Bien que ces derniers aient pu larguer quelques missiles sur zone, le bilan est très lourd, et même Jaeger ne s’en sort pas indemne, son appareil étant lui aussi abattu en plein vol, forçant l’impulsif et inconstant Commandant3 à évacuer la carlingue en compagnie de ses hommes. Se réveillant avec une jambe cassée dans le désert de Mearopyis, Jacquou le Croqueur de feuille de match doit maintenant digérer les conséquences humaines et matérielles de son coup de sang : avec deux tiers de ses Maraudeurs et la moitié des Thunderhawks passés en perte et profit, le bilan est lourd pour Herr Jaeger. Cela en valait-il la peine ? C’est sur cette question lourde de sens que nous quittons notre héros, qui pourra attendre d’être secouru en dessinant des faucons. C’est ça d’être une buse

AVIS :

Suite de l’acceptable ‘Acceptable Losses’, ‘Raptor Down’ donne l’occasion à Gav Thorpe de nous tenir au courant de l’évolution de carrière ce bon vieux commandant Jaeger, et met l’escadron de ce dernier aux prises avec un nouvel ennemi et sur un nouveau théâtre d’opérations. Après l’espace froid et mortel qui a vu les Raptors aller au casse-pipe contre un Rok, nous sommes donc témoins d’une excursion atmosphérique dans les déserts de Mearopyis, ce qui illustre bien la versatilité des Maraudeurs impériaux. Sur la forme, la nouvelle de Thorpe se révèle être d’un niveau sensiblement égal à ses œuvres « spatiales » précédentes, c’est-à-dire très correct. Si on peut critiquer la prose de notre homme à bien des égards, il faut lui reconnaître une capacité à dépeindre un engagement aéronautique/spatial de manière convaincante et intéressante, beaucoup mieux que la plupart de ses collègues en tout cas. Sa maîtrise des unités (tant spatiales4 que temporelles5) et des facteurs propres à ce type de combat, comme la vitesse et la direction du vent, ou le niveau de carburant et des munitions embarqués rendent la lecture des péripéties aériennes de l’escadron Raptor plutôt prenante. Thorpe fait même du zèle en intégrant en début de récit une retransmission d’un affrontement spatial entre la flotte impériale et son homologue Noctal, que le supérieur de Jaeger se  repasse en boucle comme d’autres matent un top 10 NBA. Petit plaisir coupable, que nous lui pardonnons sans mal puisque le résultat est là aussi assez qualitatif.

L’intrigue et la construction de ‘Raptor Down’, en revanche, s’avèrent être moins satisfaisantes. La première est une variation sans originalité du scenario d’Acceptable Losses’ (un escadron de Maraudeurs chargé d’une mission où rien ne se passe comme prévu), ce qui n’est en soit pas un gros problème puisque la possibilité de Thorpe d’innover sur le sujet est passablement limitée (un Maraudeur, ça maraude, poingue). Ce qui est moins acceptable à mes yeux est la manière dont l’auteur fait passer Jaeger de Mr Baillezeubouque à Dr Folamour en l’espace de deux paragraphes, le chef d’escadre précautionneux se muant en tête brûlée sans qu’aucun élément préalablement établi par Thorpe sur le caractère de son personnage ne puisse laisser augurer ce changement radical de tempérament. Autre point plutôt mal géré par le Gav, le raid des Maraudeurs sur la colonne blindée, torché en même pas une page, et qui tient plus du tir au pigeon que de l’attaque en rase-motte. Le fait qu’on ne voit même pas à qui les impériaux sont confrontés, ce qui ne permet pas de comprendre pourquoi ils se font ainsi décimer par un adversaire totalement à leur merci sur le papier (à moins que les Raptors aient eu la malchance de tomber sur un convoi DCA Noctal), annihile toute tension narrative, les (bol)os des as se faisant canarder (un comble pour des raptors6) en l’espace de quelques secondes. Finalement, la conclusion même de la nouvelle ne m’est pas apparue comme particulièrement maîtrisée, les états d’âme douloureux de Jaeger alors qu’il se retrouve isolé avec ses hommes en territoire ennemi, ne suscitant qu’un distrait « so what ? » chez votre serviteur. À titre personnel, je pense que Thorpe a laissé ainsi la porte ouverte à un nouvel épisode (à ma connaissance jamais écrit), et que cette fin n’en était en fait pas vraiment une. Pas de chance, cela n’a débouché sur rien, et la dernière image que le lecteur emportera du commandant Jaeger sera celle du matelot du radeau de la Méduse fixant l’horizon d’un œil torve, le menton dans la main. Ce qui n’est pas commun, avouons-le.

1 : Il reconnaît lui-même qu’il n’est jamais heureux. Sauf quand il vole. Et encore, il stresse tellement que j’ai du mal à voir quel plaisir il tire de l’expérience. Pauvre bonhomme.
2 : On peut remercier le Techno-Adepte Ferrix, l’homme qui murmurait à l’oreille des (AGM-119) Pingouins.
3 : Pour un gars qui avait passé la nouvelle à ressasser son amour des plans qui se déroulent sans accrocs et la nécessité de se conformer aux règles établies, surtout quand elles touchent à la Santé & Sécurité, décider de se la jouer berzerk à la première colonne blindée, c’est assez surprenant.
4 : Quand on est un pilote de Maraudeur, 150 kilomètres, c’est proche.
5 : Quand on est un pilote de Maraudeur, 3 minutes, c’est long.
6 : ‘Rapace’ en anglais. Rien à voir avec les dinosaures donc.

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For the Emperor!

Defixio – B. Counter :

INTRIGUE :

40K_DefixioNous embarquons à bord du Leman Russ Exterminator Defixio, rattaché à un contingent de Chem-Dogs de Savlar, au cours de la campagne menée par la Garde Impériale contre une Waaagh ! Ork sur le monde de Jaegersweld. Parmi les membres d’équipage, le jeune Samiel peine à se faire une place pour une raison aussi simple que stupide : ayant survécu par miracle à la destruction de son précédent véhicule de fonction, ses nouveaux camarades (Karra-Vrass, Graek, Damrid, Dniep et Kallin) considèrent qu’il a « consommé » toutes ses réserves de chance, et que cela va porter la poisse au Defixio. Un accrochage rugueux avec une bande de Bikers Orks, pendant lequel le tank hérite d’une belle balafre de coque et l’horrible Graek d’une balle perdue fatale, ne fait pas grand-chose pour les convaincre de réviser leur jugement.

Isolé en territoire ennemi, le Leman Russ déglingué doit maintenant se frayer un chemin jusqu’au camp impérial le plus proche, tenu par le 24ème régiment de Cadia. Cela représente près de trois jours de route dans un environnement hostile, mais, sans autre perspective, les Chem-Dogs se lancent à corps perdu et à tombeau ouvert dans ce raid de tous les dangers. Alors qu’ils avançaient à bon rythme, un champ de mines posées par des Orks farceurs les force à faire une halte dans la pampa, le temps que Samiel leur ouvre un passage en identifiant les explosifs, permettant au bricoleur Dniep de les désamorcer plus rapidement dans un second temps. Cet arrêt au stand prend une tournure funeste lorsqu’un autre Kult’ de la Vitess’ tombe sans crier gare sur le Defixio alors qu’il patientait en double file que Samiel ait fini sa petite affaire. Assistant de loin à l’attaque, ce dernier décide d’aider ses camarades par une action aussi brave que suicidaire : utiliser le pistolet lance-fusée qu’on lui avait remis pour attirer l’attention des peaux vertes. Et ça marche. Intrigué par la belle rouge tirée par notre héros, les Orks se ruent sur sa position, ne réalisant que trop tard qu’ils s’engagent littéralement en terrain miné. Le bouquet final qui s’en suit permet à la fois de se débarrasser des motards indésirables, et d’accélérer le processus de déminage débuté par Samiel (qui survit encore une fois miraculeusement à une situation improbable). C’est ce qu’on appelle un win-win.

Sans d’autres difficultés techniques ou autochtones grognons pour les empêcher de reprendre leur route, les hardis tankistes filent à toute berzingue vers la terre promise, et finissent par arriver à proximité du camp de leurs camarades de lutte. Encore une colline à passer, et ce sera la quille…

Début spoiler…Qui se transforme toutefois en tuile lorsque nos héros découvrent que le QG Cadien a été attaqué et squatté par une tribu d’Orks. Pour une culture qui s’enorgueillit tellement de tenir la ligne, c’est une faute professionnelle autant qu’éthique, si vous voulez mon avis. C’est surtout une cruelle désillusion pour les Chem-Dogs, qui se voyaient déjà engloutir leur pâtée bien méritée et se lover dans leur coucouche panier. Il faut toute la fortitude du chef de char Karra-Vrass pour remobiliser ses hommes et leur rappeler que leur devoir en tant que soldats impériaux est de mourir au combat en emportant le plus possible de Xenos avec eux dans la tombe. N’ayant c’est vrai rien de mieux à faire, les servants du Defixio reprennent du poil de la bête et livrent un combat homérique contre la patrouille d’Orks qui finit par les localiser. Submergé par les vagues vertes, le brave petit châssis finit par rompre sous les coups de boutoirs des Boyz, mais pas avant d’avoir clairsemé leurs rangs de manière drastique. Une fin honorable pour de telles crapules (et je ne parle pas des Orks)…

Début spoiler 2…Enfin, presque pour tout le monde. Fidèle à sa réputation de catalyseur de chatte, Samiel se débrouille une fois encore pour survivre à la baston, alors que tout le monde meurt autour de lui. Récupéré quelques heures plus tard sous l’épave carbonisée du Defixio par un bataillon de Cadiens qui passait dans le coin, le chien chimique le plus chanceux de l’univers en est quitte pour quelques semaines chez le véto, le temps que ses pattes brûlées cicatrisent. Il se fait la réflexion qu’il aura encore plus de mal à trouver une nouvelle unité de rattachement avec un casier aussi chargé que le sien, mais ce sera une préoccupation pour plus tard…Fin spoiler

AVIS :

Sans doute une des premières nouvelles « embarquées » (c’est-à-dire prenant place dans un char ou un aéronef) de la GW-Fiction, mais loin d’être la plus marquante ou intéressante de ce sous-genre, ‘Defixio’ permet au moins d’en apprendre un peu plus sur les Chem-Dogs de Savlar, l’un des régiments de Gardes Impériaux à l’histoire la plus particulière qui soit. Pour le reste, c’est de l’action très classique, avec un peu de camaraderie virile et quelques gros coups de chance pour napper le tout. Counter a fait mieux.

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Ancient Lances – A. Hammond :

INTRIGUE :

40K_Ancient LancesDe retour sur son Attila natale après des années de bons et loyaux services, le commandeur Al’Kahan découvre avec stupeur que son monde et ses compatriotes se sont détournés de leur mode de vie ancestral, et se font exploiter sans vergogne par les marchands de l’Imperium. Outré par cette infamie, il rejoint ce qu’il reste de sa tribu, et l’entraine dans une vendetta sanglante contre des voisins indélicats, ayant fait leurs les pâturages et les troupeaux des clans environnants. La victoire acquise, il repart aussi sec dans le vaisseau par lequel il est arrivé, ayant visiblement décidé de passer sa retraite ailleurs que de ce bled paumé. Merde, ils n’ont même pas la wifi.

AVIS :

Si ‘Ancient Lances’ s’avère plus consistant qu’Emperor’s Grace’ (dont le personnage principal, le Commissaire Streck, fait deux brèves apparitions en début et fin de nouvelle, sans qu’on comprenne trop ce qu’il vient faire dans cette histoire1), la seconde publication d’Alex Hammond comporte elle aussi son lot d’imperfections. On notera tout d’abord que l’auteur orthographie « Atilla » la planète d’Al’Kahan, ce qui laisse planer un gros doute aussi bien sur sa maitrise du background de la Garde Impériale que sur son niveau de culture générale. Deuxièmement, la meilleure progression narrative d’Ancient Lances’ par rapport à ‘Emperor’s Grace’ (comprendre que la première se termine de manière un peu plus compréhensible que la seconde) n’empêche pas Hammond de perdre le lecteur par endroits, la faute à une absence de mise en exergue de points importants pour la compréhension de son propos.

Par exemple, lorsqu’Al’Kahan sort du vaisseau spatial qui l’a ramené sur Attila au début de la nouvelle, il se fait contrôler par deux Gardes Impériaux d’un autre régiment, qui lui demandent de présenter ses papiers. Notre héros s’exécute… et leur casse la gueule. Violence gratuite d’un vétéran psychotique ? Pas exactement, les victimes d’Al’Kahan appartenant au XIIIème régiment de Prakash, sauvé de la destruction quelques pages plus tôt par le sacrifice de la cavalerie Attilane. On peut donc comprendre que le vieux commandeur n’ait pas apprécié l’intervention des Prakashiens, et le leur ai fait savoir de manière appuyée. Seulement voilà, Hammond ne facilite pas ce travail de déduction, puisqu’il ne prend pas la peine de rappeler de manière explicite la cause de la rancune d’Al’Kahan envers ces deux pauvres bidasses, (trop) confiant qu’il est dans la capacité du lecteur à faire le lien entre les trois micro-passages où est mentionné le XIIIème Prakashien (dispersés sur neuf pages). Faut pas baisser la garde.

J’ai également eu du mal à accrocher au personnage d’Al’Kahan, vétéran couturé aux motivations aussi nébuleuses que son sens tactique2. Comme le fait remarquer le méchant de l’histoire juste avant de se faire trucider par le Zapata des grandes steppes, notre héros a beau gueuler contre les ravages de la galaxisation (c’est le même principe que la mondialisation, mais à l’échelle supérieure) sur Attila et se faire le défenseur des anciennes traditions de la planète, il ne se gêne pas pour utiliser l’arsenal de la Garde Impériale, beaucoup plus avancé que les armes de fer et de corne utilisées par ses compatriotes, afin de faire triompher sa cause. Bref, faîtes ce que je dis, mais ne regardez pas comment je le fais. On notera aussi qu’Al’kahan se barre juste après la victoire de son camp (abandonnant une deuxième fois sa femme et son – second – mari, mutilé par ses bons soins au passage), très probablement pour prendre possession de la province d’un autre monde lui ayant été promise en récompense de ses impeccables états de service. C’est ce qu’on appelle avoir de la suite dans les idées.

Toutefois, ‘Ancient Lances’ est toutefois plus sympathique que pénible, en grande partie grâce aux détails de fluff apportés par un Hammond assez crédible dans son propos. Cette nouvelle a également le mérite de traiter des frictions pouvant naître de la rencontre de plusieurs cultures d’un niveau technologique très différent, sujet intéressant à aborder dans le cadre d’un empire galactique d’un million de mondes, où cette question doit évidemment se poser de manière récurrente sur pas mal de planètes. En conclusion, si vous ne deviez lire qu’un seul texte de Hammond, c’est celui-là que je vous recommande, et de loin.

1 : ‘Ancient Lances’ se déroule un peu avant ‘Emperor’s Grace’, mais les deux nouvelles n’ont d’autre point commun que la présence de Streck dans l’un et l’autre. Peut-être Hammond avait-il pour projet de développer une série dont Sterck serait le héros ? Malheureusement pour lui, Ibram Gaunt (et plus tard Ciaphas Cain) avait déjà pris la place du Commissaire héroïque au sein de la Black Library.
2 : « Salut tout le monde, c’est Al’Kahan ! Ça fait 30 ans que je vous ai quitté, mais maintenant que je suis revenu, vous allez tous faire exactement ce que je dis. »
« Et pourquoi ? »
« Parce que sinon, je vais devenir très méchant. Et comme presque tous les hommes en âge de se battre sont morts, je ne vois pas comment vous pourriez m’empêcher de devenir le nouveau chef de tribu. D’ailleurs, voilà la femme que j’ai épousée juste avant de partir me battre pour l’Empereur (je suis un vrai gentleman). Elle n’a pas l’air très contente de me voir, mais je vais lui offrir la main tranchée de son deuxième mari, ça lui fera plaisir. »
« Bon ok. On n’a pas le choix de toute façon. Mais on te prévient, on s’est fait volé tout notre cheptel par le clan d’à côté, dont le chef a construit une forteresse imprenable depuis laquelle il pille les terres alentours en toute impunité. »
« Pas de problème, j’en fais mon affaire. En ma qualité de soldat vétéran, je vous propose ce plan infaillible : nous allons charger les murs de son bastion à cheval, comme on le faisait à mon époque ! »
« C’est complètement con. »
« Et toi, à la prochaine remarque désobligeante, t’es complètement mort. Nan, mais en fait, je vous ai ramené quelques lances à têtes explosives, ça devrait faire de gros trous dans les murs, qui nous permettront de passer. »
« Ok, mais comment on arrive à s’approcher assez près pour utiliser ces armes fabuleuses ? La forteresse est entourée de pieux en acier, spécialement conçus pour briser une charge de cavalerie. »
« C’est pas un problème, j’ai également un fusil plasma, qui me permettra de détruire ces obstacles pendant notre glorieuse chevauchée ! »
« Heu, tu veux dire avant notre glorieuse chevauchée, non ? Genre on envoie un éclaireur préparer le terrain pour éviter les mauvaise surprises. »
« Pas du tout, on charge comme des débiles un ennemi bien retranché et mieux armé que nous, en faisant une confiance aveugle à mes talents de tireur. C’est non négociable. »
« C’est complètement c- »

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Ork Hunter – D. Abnett :

INTRIGUE :

Ork HunterLa première mission de l’unité du Caporal Ondy Scalber dans la ceinture équatoriale d’Armageddon se passe assez mal. Déployés avec les Chasseurs d’Orks vétérans du Boss Keyser (les Ecorcheurs), les propres sur eux Jopalliens comprennent rapidement que leurs alliés ne les voient au mieux comme des appâts à peaux vertes, au pire comme des poids morts dont ils n’hésiteront pas une seconde à se débarrasser si la situation l’impose. Le Capitaine Lorit lui-même en fait l’amère expérience lors d’une pause en pleine jungle, le non-respect de la consigne de silence absolu donnée par Keyser lui valant d’abord un étranglement de la part d’un Ecorcheur, puis un direct dans la gorge décoché par Keyser en personne lorsqu’il fait mine de se plaindre de cette agression.

Les méthodes des Ecorcheurs ne manquent cependant pas d’efficacité, et leur affinité avec l’enfer vert dans lequel ils évoluent depuis des années leur permet de surprendre une colonie d’Orks sauvages s’étant acclimatée aux mangroves étouffantes d’Armageddon1. L’affrontement est aussi violent et sanglant que l’on peut se l’imaginer, et bien qu’Ondy gagne le respect, ainsi que le surnom de Bon Œil (et un véritable œil d’Ork en trophée), des Ecorcheurs grâce à son engagement total dans cette lutte sans merci, la plupart de ses camarades de Jopall ne passent pas l’épreuve du feu2, ou commencent à le regarder bizarrement. Qu’importe pour Ondy Bon Œil, qui speedrun son passage de Garde Impérial BCBG à vétéran psychotique en l’espace d’un après-midi, terminé par un combat singulier entre Keyser et le Boss Ork de la colonie décimée par les Ecorcheurs. Vous parlez d’une expérience marquante…

1 : On peut considérer que Dan Abnett a prophétisé l’arrivée des Kruleboyz près de vingt ans avant que la première figurine de cette faction ne soit commercialisée. Quel cador.
2 : Ou se font euthanasier de manière préventive par leurs chaperons au premier signe de détresse psychologique venu. C’est ainsi que le pauvre (Mishell) Rokar se prend une dague dans le sternum après avoir initié une partie de chat perché au mauvais moment. En même temps, il était plus taillé pour la banquise que pour la jungle…

AVIS :

Dan Abnett qui écrit une histoire de Gardes Impériaux, c’est assez banal. Dan Abnett qui écrit une histoire de Gardes Impériaux qui ne soient pas des Fantômes de Gaunt1, en revanche, c’est plutôt rare (il y a eu ‘The Fall of Malvolion’ et je crois que c’est à peu près tout). On sent tout de même que notre homme évolue en territoire connu dans ce sympathique ‘Ork Hunter’, qui semble être un petit exercice de style pour cet auteur vétéran : mettre en scène des Gardes d’élite, mais complètement antipathiques (alors que Gaunt et ses ouailles sont – à part Rawne, et encore, et Lijah Cuu – des crèmes). Le pari est réussi, et donne même envie de suivre la descente aux enfers (verts) du Caporal Scalber sur le long terme. Et comme Abnett ne rechigne jamais à relier a posteriori ses vieux one-shots avec le reste du Daniverse (de manière plus ou moins naturelle et élégante, il est vrai) il se pourrait que cela se produise un jour…

1 : Mais qui se déplacent tout de même comme des éclaireurs de Tanith, parce que certaines habitudes ont la vie dure.

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The Raven’s Claw – J. Curran :

INTRIGUE :

Début de journée difficile pour Veronique Sanson, le héros de ‘The Raven’s Claw’ (nouvelle au titre potterien s’il en est). Tiré d’une gueule de bois carabinée par le quasi-crash de son vaisseau en plein cœur d’une zone de guerre urbaine, notre protagoniste se rend rapidement compte que 1) il n’a absolument aucun souvenir de qui il est, et 2) il fait visiblement partie d’un régiment de Légionnaires Pénaux. Vivement le week-end.

AVIS :

Jouant honnêtement de cette ficelle narrative bien connue qu’est l’amnésie du héros, Curran trousse une petite nouvelle ma foi fort potable, si on la replace dans son contexte (c’est-à-dire 1999, une époque où les contributeurs de la BL n’étaient pas tenus d’être docteurs -es fluff pour proposer leur travail1). Le background est en effet quelque peu malmené au cours du récit, en particulier au moment de la conclusion de l’histoire, qui aurait pu être mieux négociée, surtout au vu du choix effectué par l’auteur à son endroit2. Ce manque de maîtrise du background de Warhammer 40.000 est d’autant plus gênant que Curran termine son histoire avec un exposé bancal sur la nature de l’Imperium, dont il donne une image biaisée, et finalement assez fausse3. Bref, une mention passable bien méritée.

1 : Non pas que ce soit actuellement le cas aujourd’hui d’ailleurs (l’espoir fait vivre).
2 : Vero se révèle être un (et non pas une – d’après le fluff, c’est rare mais pas impossible – ) assassin Callidus, envoyé sur le terrain afin de faire la peau à un Gouverneur planétaire félon. Sauf que l’utilisation faite par Vero (Averius de son vrai nom) de la fameuse polymorphine est complètement marginale (« Et hop, je passe de L à M en taille de veste ! Ils ne me reconnaîtront jamais ! »), ce qui est tout de même dommage étant donné que c’est cette dernière qui fait tout le charme de cette caste particulière. Étant donné les spécificités de cette mission (à savoir, la présence d’un psyker prescient aux côtés du Gouverneur), un Culexus aurait à mon sens bien mieux fait l’affaire. Quant à la Raven’s Claw qui donne son titre à la nouvelle, il s’agit d’une sorte de neuro-gantelet subdermal, arme appartenant davantage à l’arsenal des assassins Eversor qu’à leurs consœurs Callidus.
3 : Selon Curran, l’Imperium a envoyé Vero recueillir la confession du Gouverneur renégat, car, ayant trahi la confiance de l’Empereur, ce dernier se trouve être un hérétique (nié ?), et tout hérétique doit se repentir avant de recevoir sa punition (nié ?). Et Vero d’expliquer que la rébellion aurait pu être matée en deux deux, et qu’une force d’intervention constituée de plusieurs régiments de Gardes Impériaux ainsi que d’un contingent de White Scars attend tranquillement en orbite son feu vert avant de débarquer sur la planète remettre un peu d’ordre dans tout ce bordel. Et tout ce temps gâché, toutes ces ressources dépensées, toutes ces vies perdues, pour quoi ? Pour permettre à Vero d’absoudre sa cible de ses pêchés. Amen.

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Emperor’s Grace – A. Hammond :

INTRIGUE :

Hammond propose au lecteur de suivre la lutte pour la possession de la planète d’Olstar Prime entre Impériaux et Eldars par les yeux de deux personnages aux vues radicalement divergentes sur la question. Au zèle fanatique du Commissaire Streck s’oppose en effet le pragmatisme du Lieutenant Catachan Lownes, et alors que le premier se tient prêt à sacrifier jusqu’au dernier soldat pour repousser les Xenos, le second serait plutôt du genre à filer à l’anglaise avec les survivants de son unité avant que les zoneilles ne massacrent tout le monde. Pressé par le temps et surveillé de près par un Streck ayant mal digéré le retrait stratégique ordonné par Lownes, notre Lieutenant tire au flanc arrivera-t-il à mener son projet de désertion à bien ?

AVIS :

À y regarder de plus près, ‘Emperor’s Grace’ n’est pas tant une nouvelle que le développement sur une vingtaine de pages par Hammond du dilemme classique du Garde Impérial : est-il vraiment condamnable de chercher à sauver sa peau plutôt que de voir sa vie sacrifiée par des officiers indifférents pour la défense d’une planète insignifiante ? Ce parti pris aurait pu être payant si l’auteur avait réussi à répondre à cette question, somme toute centrale dans l’univers violent et totalitaire de Warhammer 40.000, de manière convaincante et/ou originale. Au lieu de ça, Hammond termine son propos avec un piteux WIJH1, laissant un fort goût d’inachevé au lecteur à la fin d’Emperor’s Grace’ (dans la même veine, mais pour Warhammer Battle, on retrouve ‘The Last Charge’ d’Andy Hoare). À oublier.

1: Well, It Just Happened que la personne qui devait permettre à Lownes et ses hommes de quitter la planète s’est pris un missile Eldar dans le buffet, ce qui condamne les Catachans à se battre aux côtés des défenseurs d’Olstar Prime.

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Acceptable Losses – G. Thorpe :

INTRIGUE :

40K_Acceptable LossesNommé à la tête du tristement célèbre escadron de Maraudeurs Raptor, le commandant Jaeger a l’occasion de prouver la valeur de ses hommes au cours d’une mission aussi vitale que périlleuse : la destruction des réacteurs d’un Space Hulk grouillant d’orks. Livrés à eux-mêmes dans l’immensité hostile de l’espace, les Raptors se rendront rapidement compte qu’il n’y a pas d’ennemi plus mortel que l’ami dans lequel on a placé (à tort) sa confiance.

AVIS :

Après les Nains et les Hauts Elfes, Battlefleet Gothic est l’une des lubies du bon Gav Thorpe, qui ne manque jamais une occasion de mettre en scène une petite bataille spatiale dans ses écrits futuristes. Sachant que le recueil ’Into the Maelstrom’ (et donc ‘Acceptable Losses’, où cette nouvelle figure) a été publié en 1999, soit l’année de sortie du livre de règles BFG, il était inévitable que cette nouvelle fasse la part belle à des héros maîtrisant l’art subtil de la guerre dans l’espace.

Cette nouvelle conséquente (33 pages) se divise ainsi en deux parties distinctes. La première (un tiers) voit Jaeger et ses hommes faire connaissance, les premières impressions mitigées faisant rapidement place à une véritable camaraderie entre un commandant sévère-mais-humain et des équipages indisciplinés-mais-courageux-et-loyaux (et l’Oscar du meilleur scénario original est attribué à…). Thorpe sait qu’il doit en passer par là pour que la suite de son récit tienne la route et s’exécute de bonne grâce, son style passepartout lui permettant d’expédier cette introduction sans trop lasser le lecteur (en partie grâce à la partie « contes et légendes de l’Imperium »).

La deuxième partie (deux tiers) est une description minutieuse de la mission plus ou moins suicide de l’escadron Raptor, sur lequel s’acharne bien entendu un sort contraire : escorte de Thunderbolts retirée au dernier moment, Rok en maraude à négocier en solo, rencontre inopinée avec une escadrille de chassa-bombas, cible protégée par une hénôrme batterie de lance-plasma… autant de petits riens qui font que la vie d’un pilote de Maraudeur vaut d’être vécue (et se termine de manière prématurée). Fort de son expertise dans le sujet, Thorpe réussit à faire de ce compte rendu une expérience plaisante, tant par son originalité que par son enthousiasme perceptible pour cette forme de combat, dont les règles diffèrent considérablement de la classique bataille rangée de fantassins et de véhicules à laquelle l’amateur de 40K a droit d’habitude.

Bon, ça reste du Thorpe, et du Thorpe « primitif » qui plus est, ce qui signifie que l’histoire en elle-même ne vole pas beaucoup plus haut qu’un plongeur de la mort ayant fait un six sur son jet d’incident de tir (ouais, j’ai pas peur des mélanges). En même temps, difficile de révolutionner l’art de la nouvelle de science-fiction avec un pitch aussi ingrat qu’une bataille spatiale vue depuis l’intérieur d’un cockpit de Maraudeur. On a donc le droit à une triple dose d’héroïsme désintéressé et de sacrifice pour la bonne cause, généreusement saupoudrés de « bon sang, c’était moins une »1 et de « mais où est notre écran de chasseurs ? » : une fois de temps en temps, pourquoi pas.

Bref, Thorpe réussit assez bien son coup avec ‘Acceptable Losses’, un de ses meilleurs courts formats pour la BL à date.

1 : Appelons ça le syndrome de l’Etoile de la Mort.

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Burn the Heretic, Kill the Mutant, Purge the Unclean

Pestilence – D. Abnett :

INTRIGUE :

40K_PestilenceLorsque les forces impériales lancées à la conquête de Genovingia commencent à tomber comme des mouches sous les coups et les miasmes de la Peste d’Uhlren, les autorités compétentes agissent sans tarder. Et, une fois n’est pas coutume, leur réaction n’est ni brutale, ni sanglante, ni stupide, ou en tout cas pas tout de suite. Car c’est bien à Lemual Sark et à ses collègues érudits que le Maître de Guerre Rhyngold s’adresse, chargeant notre héros et ses homologues de fouiller les archives à la recherche de toute information qui pourrait s’avérer utile à l’endiguement du fléau.

Sark est, pour résumer grossièrement, un archiviste épidémiologique, double spécialisation très rare proposée uniquement par le centre universitaire Du Guesclin de Béziers. Il passe donc ses journées à enquêter sur les épidémies du passé, dans le but d’aider ses contemporains à se prémunir contre les joyeusetés concoctées à tour de chaudron par papy Nurgle. Après une harassante recherche Doctossimo durant laquelle il a appris à vingt-huit reprises qu’il avait contracté un cancer généralisé des cuticules, Sark finit par trouver une piste digne d’intérêt, qui l’emmène sur Symbal Iota, planète marine où tout le monde se déplace en catamaran et où Kevin Costner a été élevé au statut de saint impérial. C’est en effet là le dernier domicile connu de Fege Ebhoe, Général émérite du 23ème Régiment de Lanciers de Lammark, et survivant de la vague de varicelle carabinée qui a décimé ses hommes sur Pirody, il y a de cela bien des années. Avec un peu de chance, Sark pourra tirer au vétéran quelques confessions utiles pour les victimes de la Peste d’Uhlren, pour lesquelles ni l’homéopathie, ni l’hydroxychloroquine, ni l’ingestion d’eau de javel n’ont été efficaces.

Arrivé sur place avec son Serviteur Kalibane et un chapeau tellement ridicule qu’il manque de le faire interner d’office, Sark expose son cas au très relax frère Baptrice, qui s’occupe de l’administration de l’Hospice Saint Bastian, spécialisé dans l’accueil et le traitement de vétérans de la Garde Impériale complètement traumatisés par leur expérience du front. C’est en effet dans cette maison de repos d’un genre un peu spécial que Ebhoe a passé les trente-quatre dernières années, plongé dans le noir le plus total (une séquelle neurologique de son expérience sur Pirody). Après s’être un peu fait désirer, le patient finit par accepter de répondre aux questions de son visiteur, bien que cela semble manifestement beaucoup l’éprouver. Et pour cause, Pirody n’a pas vraiment été une partie de plaisir.

Envoyé au front contre des hordes de cultistes du Chaos, en plein été polaire et sans masques de sommeil (ce qui n’a pas dû aider), le 23ème Lanciers de Lammark s’est vite retrouvé débordé par la situation et assiégé sans espoir de secours par l’ennemi. Fort heureusement, une Compagnie de Space Marines des Doom Eagles (toujours dans les bons coups) était également présente pour leur prêter main forte, et empêcher la cité de tomber aux mains purulentes et malpropres des séides de Nurgle. Les Astartes ne purent en revanche pas faire grand-chose pour empêcher un mal aussi mortel que contagieux, sobrement baptisé le Tourment, de s’abattre sur la garnison et les civils, faisant des centaines puis des milliers de morts du côté loyaliste. Malgré tous les efforts de l’Apothicaire Subjunctus Valis, la situation continua de dégénérer jusqu’à… la coupure pub, déclenchée par la prononciation par Ebhoe d’un mot tellement sââââle que son voisin de cellule passe en mode berzerk et fait mine de sauter sur Sark, sauvé par l’intervention altruiste mais inefficace de son Serviteur, et surtout par les matraques énergétiques du personnel soignant de Saint Bastian. L’incident clos, Sark apprend qu’il lui sera demandé de quitter les lieux au matin pour éviter de perturber plus encore la vie jusqu’ici tranquille de l’hospice. Cela ne fait évidemment pas les affaires de notre détective, qui profite de la nuit pour rendre la visite de la dernière chance à Ebhoe…

Début spoiler…Déterminé à obtenir le fin mot de l’histoire, quitte à menacer son interlocuteur avec une lampe torche1, Lark apprend que la situation désespérée de Pirody a été sauvée au dernier moment par la découverte par Ebhoe que le vertueux et altruiste Valis était lui aussi totalement Tourmenté, et avait œuvré en sous-main pour propager le virus parmi les défenseurs (Space Marines compris) à l’aide de « vaccins » pas vraiment homologués par l’OGS. Trahi par un bubon disgracieux juste en dessous de son oreille, Valis fut promptement incinéré par le lance-flamme d’Ebhoe, qui paya chèrement son acte héroïque, l’incendie du laboratoire de l’Apothicaire corrompu lui ravageant le corps. Les hurlements du vétéran ont également comme effets secondaires pas très Charlie de plonger à nouveau l’asile dans la folie, menant à quelques morts parmi le personnel et les pensionnaires de Saint Bastian. Tout est cependant bien qui finit (presque) bien pour Sark, qui peut rentrer au bercail avec sa précieuse info, dont le Haut Commandement de la campagne de Genovingia se servira pour faire exécuter quelques dizaines de médecins, juste au cas où. Ebhoe, de son côté, est parti rejoindre l’Empereur, sa dernière crise d’hystérie ayant fait lâcher son cœur fragile. On pourra dire de lui qu’il a donné son corps à la science, au moins.Fin spoiler  

1 : « Nous affons les moyens de fous faire parler, Herr Ebhoe… »

AVIS :

Dan Abnett a plutôt réussi son coup avec ‘Pestilence’, courte nouvelle d’ambiance et de suspens à haute teneur en grimdark. On peut rapprocher ce one-shot des travaux inquisitoriaux de notre homme, ainsi que de la mini-série des aventures animalières de Valentin Drusher, où Abnett se fait un malin plaisir de plonger dans la vie quotidienne de l’Imperium, loin derrière les lignes de front et les combats sanguinaires illustrés dans le jeu de figurines, mais qui comporte son lot de caractéristiques allant du dérangeant à l’insoutenable. L’enquête de notre héros à la recherche d’une cure pour un mal surnaturel dans un asile pour aliénés est naturellement riche en glauquerie, ce qui permet à Abnett de jouer avec les préjugés de son lecteur : finalement, les bons samaritains de l’hospice ne sont pas une secte de cultistes chaotiques sous couverture, mais bien d’authentiques philanthropes cherchant véritablement à soulager la détresse de leurs patients (de manière très 40Kesque, certes). Il s’agit à mes yeux de la réussite la plus franche de ‘Pestilence’, sa révélation sur l’identité du patient 0 du Tourment n’étant pas vraiment renversante (dur de maintenir le suspens quand on a qu’un seul suspect aussi). Bref, une petite histoire assez sympathique mais pas mémorable, comme Dan Abnett en a écrit beaucoup au début de sa carrière au sein de la BL.

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Barathrum – J. Curran :

INTRIGUE :

40K_BarathrumLorsque l’Inquisiteur Anselm est appelé par un vieil ami sur la planète de Barathrum pour élucider la série de morts violentes ayant endeuillé l’expédition de l’Adeptus Mechanicus en charge de l’excavation de la cité souterraine découverte à la surface de ce monde mort, il ne s’attendait pas à recroiser la route de son ancien mentor, Grogan. Les deux hommes se sont séparés en mauvais terme après une enquête bâclée sur Tantalus il y a bien des années de cela, à la suite de laquelle le puritain Grogan a déclaré un Exterminatus que son élève trouvait bien précipité. Guère enchanté par la présence de son collègue et néanmoins rival sur cette affaire sordide (rapport aux cadavres horriblement mutilés laissés par le tueur) et poussiéreuse (rapport aux interminables tunnels que nos héros passent la moitié de la nouvelle à parcourir), Anselm fait contre mauvaise fortune bon cœur et collabore en bonne intelligence avec Grogan, que le passage du temps n’a pas du tout adouci.

Une analyse poussée des victimes permet à Anselm, dont l’une des spécialités semble être la médecine légale, d’établir que ces dernières ont toutes été amputées d’un membre ou d’un organe différent, avec une précision chirurgicale qui plus est. Cette conclusion des plus sinistres passe au second plan lorsque les deux fins limiers des Ordos sont alertés par le Magos Explorator en charge de l’expédition (Eremet) qu’un portail gigantesque a été découvert par ses équipes. Scellé et couvert d’inscriptions écrites dans une langue indéchiffrable (à court terme tout du moins), l’édifice est également protégé par un champ électrique qui carbonise le premier Technoprêtre ayant eu la mauvaise idée d’y poser la méchadendrite. Pour le bouillant Grogan, cet incident est la preuve irréfutable que le Chaos est à l’œuvre sur Barathrum, et il s’empresse de suspendre les fouilles, au grand désespoir d’Eremet. Connaissant les méthodes employées par son ancien boss, Anselm se doute que les malheureux archéologistes ne tarderont pas à être soumis à un interrogatoire serré dont pas un ne sortira indemne. Cherchant à éviter à son vieil ami Cantor ce sort peu enviable, il poursuit donc les recherches de son côté… en piquant un somme. Dans un rêve que l’on peut qualifier de prémonitoire, il est mis en présence de l’Empereur en personne, fièrement juché sur sa chaise percée plaquée or, mais les traits aquilins du Maître de l’Humanité se transforment en ceux d’une hyène, et très mauvaise actrice avec cela1.

Ce pénible cauchemar est heureusement interrompu par l’arrivée d’Eremet, qui apporte à son hôte le résultat de l’expertise (expresse) réalisée par les savants de l’Inquisition sur le texte mystérieux gravé sur le portail récemment mis à jour. Comme on peut s’en douter, ce n’est pas la recette de l’aligot que les précédents habitants de Barathrum ont tenu à transmettre aux générations futures, mais un avertissement sans frais sur l’indicible (et illisible) menace dormant dans la crypte ainsi condamnée. Car ce n’est rien de moins que le Prince Démon Szarach’il qui patiente dans la cité morte, enfermé dans ce tombeau par les efforts de l’Inquisiteur Amaril il y a des milliers d’années. Grogan avait donc raison ! Mais d’ailleurs, où est-il ?

Eh bien, sur les lieux du crime pardi. Ayant surpris Cantor bravant le couvre-feu qu’il avait déclaré, l’Inquisiteur a suivi discrètement le Technoprêtre réfractaire jusqu’au portail interdit, et l’a chopé en train de se livrer à un rituel passablement chaotique. Il s’avère que le servant du Dieu Machine s’est fait hacker par l’esprit néfaste de Szarach’il, qui compte bien profiter de l’arrivée de l’expédition pour se faire la malle. Mais notre démon est très exigeant : alors qu’il aurait pu se contenter de posséder le premier humain passant à sa portée, comme le pauvre Cantor, il cherche également à se venger d’Amaril en infiltrant les rangs de l’Inquisition, et a pour cela besoin qu’un représentant des saints Ordos tombe sous son influence. Et tant qu’à faire, Anselm, qui est plus jeune et plus swag (il ne porte pas de moustaches) que ce vieux tromblon de Grogan, serait le candidat idéal. Tout cela nous est longuement raconté par un Szarach’il dont la passion pour le monologue de grand méchant ne présage rien de bon pour le succès de son entreprise…

Pour l’heure, Grogan croise le fer avec la terrible créature que Cantor a mis sur pied avec les organes de ses collègues… et l’abat sans trop de difficulté. Ce n’était toutefois qu’une diversion, permettant à un Cantor lévitant de desceller le portail et de libérer le terrible Démon… ou en tout cas son essence, qui s’empresse de posséder Grogan (Cantor s’écrase sur le sol comme une bouse et meurt après avoir présenté ses plus plates excuses). Sur ces entrefaites, Anselm arrive in da club et un (court) duel s’engage entre les deux Inquisiteurs. Ayant réussi à reprendre le contrôle de son corps pour un instant, Grogan décharge son hellgun sur le plafond en lave mi-cuite de la crypte, provoquant son enfouissement en même temps qu’incinération sous quelques tonnes/mètres cube de magma coagulé. Son sacrifice altruiste autant que le coup de moins bien de Szarach’il, qui ne parvient plus à sauter d’hôte en hôte comme il l’avait fait précédemment, permet de mettre un terme à cette escapade démoniaque, et de préserver l’Imperium d’une (sans doute) terrible menace.

1 : N’ayant qu’une version papier de cette nouvelle à disposition, je ne peux pas faire de capture d’écran pour prouver mes dires, mais sachez que l’apparition démoniaque interpelle notre héros somnolent de la sorte : “Anselm ! Anselm my servant, you have come to me. Anselm ! Anselm, Anselm ! Open the door!”

AVIS :

La tentative de Jonathan Curran de dépeindre les activités inquisitoriales ne s’avère guère probantes dans ce ‘Barathrum’ très moyen, qui explore plusieurs ambiances (slasherthriller, roman noir, horreur…) sans réussir à s’en approprier aucune. Cette base bancale est de plus handicapée par le manque de maîtrise du lore de 40K par Curran, qui semble considérer les Inquisiteurs comme des détectives privés de choc, envoyés par leur hiérarchie enquêter en solitaire sur des affaires étranges. Pour ne rien arranger, les machinations de l’antagoniste sont inutilement complexes, et l’auteur ne semble même pas avoir pris le soin de se relire1. Ça fait beaucoup de problèmes pour une nouvelle qui peut être mis en comparaison avec les travaux inquisitoriaux, autrement plus réussis, de Dan Abnett, publiés pour les premiers d’entre eux à la même époque que ‘Barathrum’. Comme la nécropole d’où elle tire son nom, cette histoire mérite l’oubli profond dans lequel elle a été plongée depuis des millénaires.

1 : “The Inquisition is a tool” (Grogan, p. 9). “The Inquisition is not a tool” (Grogan, p. 23).

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Suffer not the Unclean to Live – G. Thorpe :

INTRIGUE :

40K_Suffer not the Unclean to LiveC’est sur la planète de Karis Cephalon que les ambitions carriéristes du prêcheur Yakov ont été brutalement stoppées. Il faut dire que l’amour du bling-bling (Yakov est un Armormant) de notre héros lui ont attiré la morgue et la défiance du Cardinal Kodaczka, d’obédience Lucide, et donc bien moins porté sur la pompe et le clinquant que son subalterne. Ceci explique probablement que Yakov ait reçu la charge d’une paroisse située en territoire mutant, classe laborieuse et opprimée de Karis Cephalon, qui doit sûrement se spécialiser dans l’élevage de crevettes, la fabrication de briques et le tissage de tapis. Dans cette épreuve, tant pour son amour propre que pour son odorat, Yakov peut toutefois compter sur sa foi sincère en l’Empereur, et sur la dévotion véritable de ses ouailles, qui acceptent leur condition servile avec une constance admirable. Ou plutôt, acceptaient.

Car, comme le prêcheur ne tarde pas à le découvrir lors de son retour dans le bidonville qui lui sert de QG, une fois son cours de yoga du mercredi soir achevé, une épidémie s’est déclarée parmi les mutants, et ces derniers montrent des signes aisément compréhensibles d’énervement devant le manque à peu près total de réaction des autorités compétentes. Sachant qu’aller gueuler « On en a gros » devant la préfecture n’aura que des effets limités, et probablement déplaisants, Yakov convainc ses fidèles de prendre leur mal en patience, mais accepte tout de même, à la demande insistante de Lathesia, une jeune hors-la-loi altruiste dont la mutation consiste à être gothique, de faire doléance d’aspirine et de gel hydroalcoolique auprès de Kodaczka… qui refuse bien évidemment de consacrer le moindre kopeck à ce problème de santé publique. Et puis quoi encore. Laissant le prélat sur une maigre promesse de prière en faveur des nécessiteux, Yakov retourne dans sa banlieue, calme une nouvelle émeute naissante, et va se coucher. Il est toutefois réveillé en plein milieu de la nuit par Lathesia et son complice Byzanthus, qui ont remis une pièce dans la machine et réussi à générer une foule en colère digne de ce nom, après que le fossoyeur de la communauté ait été retrouvé égorgé. Malgré ses meilleurs efforts et son implication physique sans faille, Yakov ne parvient pas à dissiper la manif sauvage avant qu’elle se fasse disperser à coups de chevrotine laser par les forces de l’ordre. Et pas la peine d’attendre une contre-enquête de l’IGS.

La situation commence alors à échapper à notre héros, qui tente le lendemain de l’émeute matée dans le sang de convaincre Lathesia et sa bande d’arrêter leurs bêtises avant qu’il ne soit trop tard, mais ne parvient qu’à les intéresser à enquêter sur le meurtre du fossoyeur. Une visite au cimetière municipal plus tard, la bande fait l’acquisition d’un cercueil en métal, dont la particularité est d’être couvert de chaînes, comme pour empêcher son occupant d’en sortir. Pas le temps toutefois de percer ce mystère, car la planque des mutants est attaquée par les Enforcers. Byzanthus et les autres figurants vendent alors chèrement leur vie pour permettre à leur meneuse et au prêcheur de s’enfuir. Vous trouvez que ça va vite ? Accrochez-vous car Thorpe lâche les freins.

Toujours déterminés à tirer les choses au clair, Yakov et Lathesia décident de retourner dans le squat de cette dernière le jour suivant, pour enfin déterminer ce qui se cache dans le cercueil verrouillé qu’ils ont abandonné sur place. Ils font alors la connaissance d’un type louche qui se présente comme un free lance inquisitorial (il bosse pour l’Inquisition… sans en faire partie), lui aussi intéressé par ce mystérieux sarcophage. Et comme jamais deux sans trois est resté un proverbe très populaire au 41ème millénaire, les deux complices acceptent d’intégrer le nouveau-venu dans leur raid, sans lui demander plus de précisions sur ses motivations. À l’intérieur, la petite bande a la surprise de tomber en plein milieu d’un rituel manifestement chaotique, auquel participe rien de moins que le Gouverneur de Karis Cephalon. Parce qu’on peut être l’individu le plus puissant d’une planète et ne pas trouver un livreur pour amener un colis un peu encombrant jusqu’à son palais depuis une ZUS toute proche. Le problème des no go zones s’est manifestement perpétué dans le lointain futur. Bref, la fainéantise des uns (le Gouverneur et Thorpe) faisant le bonheur des autres (Yakov, Lathesia et leur invité mystère), la petite cérémonie païenne est interrompue par le mitraillage en règle des libertins, laissant le cercueil (et le Gouverneur) en possession du trio. Il reste alors une page et demie à Thorpe pour conclure, ce qui n’est pas suffisant pour trouver et utiliser une pince monseigneur, ni faire des présentations dignes de ce nom, mais assez pour que la tierce partie de confiance de notre histoire explique à ses compagnons que Keris Cephalon est sur le point de vivre cinq années très difficiles, que le Gouverneur a organisé la révolte de mutants pour pouvoir les sacrifier aux Dieux du Chaos, et qu’il pourrait tirer quelques ficelles pour permettre à Yakov d’être muté sur une planète plus tranquille. Noblement, notre héros décline cette offre, prétextant que ses chers mutants auront besoin de son aide dans l’épreuve à venir, mais quelque chose me dit qu’il n’en a pas fini avec l’Inquisition1

1 : Cette illustration vient du livre de règles Inquisitor et représente Yakov (le grand type) et l’investigateur Malovich (le hippie renfrogné), surplombant quelques Gilets Jaunes très colère.

AVIS :

Ça partait bien pour Thorpe avec cette plongée atmosphérique dans les bas fonds de Keris Cephalon, ‘Suffer…’ bénéficiant, une fois n’est pas coutume, d’un personnage principal et d’un contexte étonnement complexes et fouillés (aux vues des standards de l’auteur). Malheureusement, ce dernier a vu trop grand, ou plutôt trop long (ou pas assez, ça dépend du point de vue) avec son intrigue, qui se retrouve bâclée, estropiée et finalement catapultée à un prochain et hypothétique épisode au lieu de s’achever avec un peu de tenue et de dignité. La raison, comme dit ci-dessus, tient sans doute à la volonté de GW et de la BL de soutenir le lancement d’Inquisitor avec un peu de background romancé, comme d’autres auteurs (McNeill et ‘Payback’, par exemple) le firent également à la même époque. Mais si le motif est tout à fait compréhensible, l’exécution laisse franchement à désirer, et transforme ‘Suffer…’ en objet littéraire finalement aussi contrefait et difforme que les mutants dont le héros s’occupe. Vous parlez d’une mise en abyme ! J’espère franchement que Thorpe a fini son cycle Yakovien ailleurs, ne serait-ce que dans un rapport de bataille ou une nouvelle du White Dwarf, mais je n’en suis pas absolument convaincu…

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The Lives of Ferag Lion-Wolf – B. J. Bayley :

INTRIGUE :

WFB_The Lives of Ferag Lion-WolfC’est une belle journée qui commence dans le palais de Ferag Lion-Wolf, Champion de Tzeentch ayant bien réussi dans la vie. Après avoir servi comme Space Marine dans les rangs des Purple Stars, notre héros a décidé d’aller relever de nouveaux défis en passant de l’autre côté du périph’ et de l’Œil de la Terreur, où il s’est taillé un petit empire. Aujourd’hui, il accueille un visiteur de marque, en la personne du Seigneur Quillilil (eh oui), autre Elu du Dieu du Changement dont il convoite le domaine (et réciproquement, comme on peut s’y attendre la part de disciples de Tzeentch).

Après avoir galamment secouru son hôte alors qu’il se faisait attaquer par des terroristes1 disques-jockeys pendant la descente vers son palais, Ferag ne peut résister à la tentation de faire une démonstration de ses pouvoirs de… maître Lego, aussitôt imité – mais en moins bien, évidemment – par Quillilil. Passées ces aménités, il est temps pour Fefe d’emmener son invité jusqu’à la table du festin qu’il a organisé pour lui, mais surtout de lui narrer par le menu les épisodes les plus mémorables de sa longue et épique vie.

On apprend ainsi que notre héros a reçu son nom si particulier après avoir vengé son père, sauvagement tué par un gigantesque lion-loup alors qu’il n’avait que huit ans (Ferag, pas son père), en réglant son compte en solo à la pénible bestiole, d’un coup d’épieu bien placé. Bien des années plus tard, Ferag s’est distingué en menant ses frères de bataille Purple Stars dans l’abordage inspiré d’un vaisseau ruche tyranide, d’une manière si convaincante que le Codex Astartes fut revu et corrigé pour l’occasion (nous dit-il). Enfin, ce fut le triomphe tactique de la bataille pour la planète-bol (si si), brillamment remportée contre les hordes énervées de Khorne et pestilentes de Nurgle, pour la plus grande gloire de Tzeentch. La régalade aurait pu continuer longtemps si un bloc de maçonnerie ne s’était pas décroché alors que les deux Elus passaient en contrebas, frappant Ferag en pleine tête et le faisant sombrer dans l’inconscience…

Début spoiler…Et à son réveil, les choses ne sont plus les mêmes pour notre héros. Exit sa vie rêvée de Champion du Chaos, et bonjour à la triste réalité : Ferag n’est en fait qu’Ulf Rampe-Bouse, un avorton ayant intégré un culte de Tzeentch pour tenter de gagner de l’influence, mais ayant manqué du courage nécessaire pour assassiner un rival politique, malgré les ordres clairs donnés par son Magister. Condamné à être transformé en Enfant du Chaos en punition de son échec, Ulf a été victime d’une ultime cruauté de la part de sa déité, qui n’est pas connue comme étant le Maître du Mensonge pour rien : un aperçu de la vie qu’il aurait pu avoir, si les étoiles avaient été alignées différemment, ou quelque chose comme ça. Alors que son corps se transforme en amas informe et que son esprit sombre dans la folie, nous laissons Ferag/Ulf se débattre avec l’épineuse question de ce qui est réel et de ce qui ne l’est pas. Critique de la raison pure, Kant tu nous tiens…Fin spoiler

1 : Comme quoi, on peut être un Seigneur du Chaos et détester l’anarchie.

AVIS :

Les nouvelles dont le twist final consiste à révéler que le protagoniste a rêvé ou halluciné tout ce qui nous a été présenté au cours des pages précédentes sont assez rare au sein du corpus de la Black Library1, aussi ‘The Lives of Ferag Lion-Wolf’ n’est pas aussi inimaginatif dans son intrigue que ce que le lecteur non familier avec la GW-Fiction pourrait en penser2. Avec son style flamboyant/ampoulé (c’est selon) assez unique parmi les auteurs de la Black Library, et sa vision quelque peu surannée – justifiable au vu de l’ancienneté de la nouvelle – du fluff, Barrington J. Bayley trousse une petite histoire tenant plus de la fable fantasy cruelle que du bolter porn qui était, et est toujours, la norme pour les courts formats 40K. Un acquired taste, comme disent nos amis anglais, qui peut ne pas convenir à tout le monde mais qui mérite le détour à mon avis.

1 : Mais de manière assez drôle, deux d’entre elles se suivent dans le recueil ‘Dark Imperium’, le ‘Nightmares’ de Gav Thorpe exploitant la même idée.
2 : Je dois indiquer ici que même Lovecraft a cédé à cette tentation, dans ce qui peut être considéré comme la moins lovecraftienne de ses nouvelles : ‘The Dream-Quest of Unknown Kadath’.

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Playing Patience – D. Abnett :

INTRIGUE :

Playing PatienceLe monde de second ordre de Sameter reçoit la visite inespérée autant que désespérée de l’Inquisiteur Gideon ‘Barquette’ Ravenor et des quelques survivants de sa suite (Harlon Nayl, Kara Swole, Carl Thonius, Wystan Frauka), après que cette fine équipe se soit faite piégée et bellement rossée par ce diaaaaable de Zygmunt Molotch lors de son assaut sur l’Hinterlight1. Ayant perdu plusieurs des leurs ainsi que leur vaisseau spatial de fonction, Gigi et Cie n’ont plus que leurs yeux pour pleurer (et encore, pour Ravenor ce n’est plus le cas) et une piste aussi froide que ténue pour tenter de débusquer l’insaisissable génie du crime qu’est Molotch. Après tout, on parle d’un major de promo de la Cognitae, soit l’équivalent du MIT en études chaotiques du sous-secteur. Pas n’importe qui, donc.

Sameter, et plus précisément la cité ruche d’Urbitane, intéresse nos amis car c’est de là que venaient trois des hommes de main recrutés par Molotch pour son embuscade. C’est un bien maigre début, mais n’ayant pas d’alternatives, les limiers se mettent en chasse et parviennent à localiser un trafiquant local ayant employé l’un des gros bras en question quelque temps avant son départ de la planète. L’interrogatoire, mené par l’intraitable et peu diplomate Nayl, débouche assez logiquement sur une bagarre générale, pendant laquelle les acolytes de Ravenor peuvent démontrer leur talent indéniable dans toutes les formes de combat… et leur regrettable tendance à s’emporter au pire moment. Nayl envoie en effet la cible de son patron au 50ème sous-sol d’un tir malheureux de son fidèle Hecuter 10, et éteint la piste de Morpal Who Moves (and Falls, donc) par la même occasion. Voilà qui est fâcheux. Heureusement, le petit génie dandy qu’est Carl Thonius vient sauver les miches de son comparse en mettant le Giddy Gang sur un autre bail, bien plus prometteur celui-là : la Kindred Youth Scholam.

Établissement de bienfaisance recueillant et éduquant les orphelins des rues d’Urbitane, la Kindred Youth Scholam dissimule sous ses apparences très honorables, si un peu décaties, de bien sombres secrets. Grâce à ses talents consommés de hacker et d’analyste extra-financier, Thonius a découvert que les trois Stooges au service de Molotch étaient passés par cette noble institution, coïncidence fort improbable s’il en est. En creusant un peu, et en faisant des due diligences un chouilla plus longues que celles des clercs de l’Administratum (qui n’ont juste pas le time, les pauvres), l’Interrogateur a trouvé des preuves que la Scholam avait des liens avec la Cognitae, à commencer par son directeur Berto Cyrus a.k.a. Ludovic Kyro, un autre alumnus de cette sulfureuse institution. Il n’en fallait évidemment pas autant pour que Ravenor décide qu’une visite de terrain s’impose dans les plus brefs délais, et envoie ses hommes (et sa femme) de main sur place pour tirer les vers du nez à ce botoxé de Kyro.

Après un nouvel échange de tir (la couverture de trafiquant d’enfants utilisée par Thonius n’ayant pas fonctionné), Ravenor débarque en majesté accompagné d’un bataillon d’Arbites afin de procéder à l’interrogation de l’onctueux directeur de la Scholam et de ses associés survivants. Ce succès est toutefois terni par une absence regrettable de Thonius, trop occupé à se boucher les oreilles en gémissant pendant la baston pour remarquer que Kyro avait sur lui un détonateur de données, ce qui lui a permis de faire Ctrl+A/Ctrl+X/Ctrl+S sur le serveur de l’école, détruisant la grande majorité des archives de cette dernière. C’est la tuile.

Un peu dégoûté par l’amateurisme crasse de son bras droit, Ravenor décide de se passer les nerfs en se lançant dans une quête secondaire, réflexe naturel quand on est coincé sur la quête primaire, vous le reconnaîtrez. Ayant (psychiquement) senti lors de son arrivée dans la Scholam qu’un Psyker y avait séjourné pendant des années, et n’en est parti qu’il y a quelques jours, il décide qu’il est de son devoir d’Inquisiteur de mettre hors d’état de nuire cette menace manifeste à l’ordre impérial. Pendant qu’un Thonius très contrit essaie de récupérer les quelques infos encore stockés sur le C:\ du PC de Kyro, le Charles Xavier de 40K se livre à un interrogatoire serré, stressé et secoué de ce dernier, parvenant à lui arracher le nom de Loketter, narco baron auquel il a vendu une certaine Patience la veille au soir pour qu’elle serve de proie à l’une des chasses à l’homme que ce sombre individu organise pour le compte de quelques-uns de ses amis.

Si Patience a retenu son attention, c’est qu’il s’agit d’une telekine dont les talents sont devenus manifestes après qu’elle ait appris que Kyro avait remis ses deux jeunes sœurs (Prudence et Providence, ça ne s’invente pas) à un tiers, sans la consulter auparavant. Comme Patience avait choisi de rester à la Scholam malgré son âge avancé (21 ans) afin de pouvoir veiller sur ses cadettes le temps qu’elles soient à leur tour majeures, l’annonce de ce coup de Jarnac a naturellement eu raison d’elle-même (de sa patience, si vous trouvez que la phrase est déjà trop longue), et ses pouvoirs longtemps dissimulés se sont déchaînés sur le personnel éducatif de la Kindred Youth, jusqu’à ce que le Paria qui accompagnait Loketter ne siffle la fin de la récré.

Apprenant la tragic back story de Patience, Ravenor passe de chasseur inflexible de mutants à chevalier blanc au secours de la veuve et de l’orpheline et entraîne ses larbins dans un raid en terrain très mal famé pour localiser et secourir la pauvre enfant pourchassée aussi bien par les gangers locaux que par les tueurs à gage des amis de Loketter. Malgré sa volonté farouche de s’en sortir et son usage déjà mortel de ses pouvoirs, Patience aurait en effet fini comme ses anciens camarades de Scholam sans l’intervention décisive du bon Inquisiteur, qui n’hésite pas à posséder Kara Swole pour pouvoir utiliser sa voix suave à la place de la sienne, et convaincre une Patience traumatisée par les quarantenaires toxiques de coopérer à son sauvetage.

Au final, presque tout est bien qui ne se finit pas trop mal : même si Loketter parvint à s’enfuir avant d’être attrapé par la maréchaussée, et que tous les efforts pour localiser Prudence et Providence se révèlent vains, Kyro finit par remettre Ravenor sur la piste de Molotch, aucun acolyte de l’Inquisiteur n’est mort dans l’opération, et il convainc même Patience de rejoindre sa suite (en même temps c’était ça où le Vaisseau Noir, le choix était facile). Avant de partir, cette dernière se donne le nom de Kys, non pas en hommage au groupe favori de sa défunte môman, mais en référence à l’institution où elle a passé de longues et belles années avec ses sœurs. Eh oui, ça vient de là !

1 : Si cet épisode vous évoque de quelques vagues et brumeux souvenirs, c’est parce qu’Abnett ne l’a pas vraiment couvert dans sa trilogie ‘Ravenor’, mais y fait référence pour justifier la haine que l’Inquisiteur éprouve envers sa Némésis.

AVIS :

Au cours de ses séries inquisitoriales, Dan Abnett a signé de nombreuses nouvelles dévouées à l’enrichissement et à l’approfondissement des personnages accompagnant ses protagonistes, et ‘Playing Patience’ est sans doute l’œuvre la plus aboutie qu’il ait soumis en la matière. Tout à la fois thriller, polar, horreur et buddy movie1, bien desservi par son format deluxe (une cinquantaine de pages, ce qui permet à Abnett de donner du volume à son intrigue et à ses personnages) et ses points de vue alternés entre Patience et Ravenor et Cie, cette longue nouvelle est un excellent prologue à la trilogie ‘Ravenor’, même si elle a été écrite après la sortie du premier tome de cette dernière. On en ressort avec la ferme intention d’embrayer avec la suite de la traque de l’infâme Zygmunt Molotch – qui n’apparaît pourtant pas du tout dans la nouvelle – et un attachement sincère envers Ravenor et sa clique. Du bel et propre ouvrage.

1 : L’interaction entre Frauka et Thonius à la fin de la nouvelle est vraiment drôle, et sert de contre point parfait à l’ambiance pesante du reste de l’histoire.

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Kill Them All!

Snares and Delusions – M. Farrer :

INTRIGUE :

40K_Snares & DelusionsC’est un jour très spécial pour l’Apôtre Noir De Haan (Dan de son prénom) : après des millénaires passés à traquer le Vaisseau Monde de Varantha à travers la galaxie, tous les signes prédisent que l’heure de la confrontation finale est arrivée entre Word Bearers rancuniers et Eldars élusifs. Débarqué à la surface d’un monde vierge peuplé d’Exodites (rapidement matés) avec l’avant-garde de son ost, De Haan supervise la consécration du bâtiment offert par la Légion hérétique à la seule ville de la planète : la Cathédrale de la 5ème Bénédiction. Les styles jurent un peu mais c’est une attention touchante, il faut le reconnaître. Notre zélé héros est persuadé que ce monde minable dissimule des portails Warp reliés à Varantha, qu’il hait du plus profond de ses cœurs depuis le moment où les Eldars de ce Vaisseau Monde ont fait échouer dans le sang l’opération tractage et prosélytisme montée par le mentor de De Haan sur Sahch-V, contraignant les fils de Lorgar à une honteuse retraite. Depuis, l’Apôtre Noir a consacré sa vie à la traque de cette faction eldar, parvenant progressivement à resserrer l’étau autour du Vaisseau Monde honni. Preuve de l’inimitié tenace l’opposant à Varantha, il a même reçu une prédiction personnalisée de la bouche de l’un de ses Prophètes, juste avant que le crozius protéiforme1 de De Haan ne le réduise en bouillie : « lorsque tu poseras les yeux sur le cœur de Varantha, la messe sera dite2 ».

Les travaux avancent bien, les Exodites sont en voie avancée d’extermination, et les renforts qui patientent dans la barge de bataille en orbite de la planète ne vont pas tarder à descendre renforcer l’avant-garde : tout va pour le mieux dans la plus grimdark des galaxies, mais un événement troublant vient perturber la bonne humeur de De Haan. Au moment de prononcer son sermon de Haine o’clock, il a eu une panne d’inspiration subite. Son second Meer a beau lui répéter que ça peut arriver à tout le monde, le fier Apôtre est aussi gêné que perplexe après cet incident, mais finit par décider que c’est encore un signe que sa quête arrive à son terme, avant d’imaginer toutes les choses horribles qu’il fera subir à Varantha et à ses habitants une fois qu’il aura craqué le digicode. Positive thinking here. Après tout, les choses se déroulent tellement bien que ce n’est pas un petit blanc passager qui va faire dérailler l’Omphalos Daemonium, pas vrai ?

Début spoiler…Eh bien (et vous vous en doutiez, sagaces lecteurs que vous êtes), si. Surgissant de l’ombre et/ou de la banlieue pourrie de la ville Exodite – ça dépend des versions – les forces de Varantha attaquent la Cathédrale sans crier gare, avec la redoutable efficacité et le haut potentiel disruptif3 qui sont la marque des Eldars des Vaisseaux Mondes. Coupé de ses renforts et bientôt laissé seul survivant de son ost, De Haan a un peu de temps pour songer à la prophétie qui lui a été révélée, et surtout à l’interprétation très optimiste qu’il en a eu jusque-là. Car toutes les fins ne sont pas heureuses, comme l’Apôtre Noir ne tarde pas à le découvrir lorsque le cœur de Varantha, alias son Avatar de Khaine, entre dans la Cathédrale pour demander un petit tête à tête au confessionnel… Ite, missa est.Fin spoiler

1 : Il a le superpouvoir de changer de tête à chaque fois que De Haan pose les yeux dessus, ce qui est… cool.
2 : Ok, c’est pas la traduction littérale mais bon, avouez que c’est approprié pour un Word Bearers.
3 : Tous leurs points de commandement ont été claqués dans le stratagème « pièges à c*n », qui colle des blessures mortelles à toute figure s’approchant à 6 pas ou moins des 10 pions « râteau » placés par le joueur Eldar.

AVIS :

Une nouvelle moins intéressante par son intrigue (dont on devine la fin pratiquement dès le début, la faute aussi à un titre qui vend un peu trop la mèche) et ses personnages (assez quelconques) que par l’aisance stylistique dont fait preuve Matthew Farrer et surtout la bonne rasade de fluff qu’il nous sert au fil des pages, et qu’il a la bonne idée de répartir entre Word Bearers et Eldars. Pas sa meilleure, pour sûr, mais tout de même d’un très solide niveau.

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Apothecary’s Honour – S. Jowett :

INTRIGUE :

40K_Apothecary's HonnorDéployée sur le monde d’Antillis IV pour aider les autorités locales à se défaire d’une invasion chaotique plus grave qu’anticipée, la Seconde Compagnie du Chapitre des Avenging Sons, menée par le Capitaine Selleus, s’est battue vaillamment mais cela n’a pas suffi. Isolé au milieu des bourrasques de cendres humaines conjurées par un géo-ingénieur plus ravagé du bulbe que la moyenne pour combattre les effets du changement climatique (eh, c’est un aérosol comme un autre), l’Apothicaire Korpus se consacre toutefois sans faiblir à son sacerdoce : récupérer les glandes progénoïdes de ses camarades tombés au combat. Il sait en effet qu’il s’agit d’une partie vitale de l’effort de guerre de l’Adeptus Astartes, qui se retrouverait rapidement réduit à peau carapace noire de chagrin sans la récolte et la réimplantation dans de nouveaux hôtes de ces précieux kystes. On le suit ainsi jusqu’au quasi-cadavre du Sergent Pereus, blessé à mort1 lors d’une escarmouche contre une bande de Space Marines du Chaos, qu’il accompagne pieusement dans ses derniers instants et déleste de ses mirifiques glandes, stockées dans le petit frigo personnel qu’il trimballe sur son armure. À la guerre comme à la guerre.

Sur le chemin du retour vers le QG château (en français dans le texte) de sa Compagnie, Korpus reçoit un message alarmant de la part de Selleus, lui annonçant que la campagne est perdue et lui ordonnant de se diriger sans tarder vers le spatioport où sont garés les Thunderhawks des Avenging Sons, et de les utiliser pour rejoindre leur vaisseau amiral. Il est en effet capital de renvoyer les Avenging Glandes jusqu’à l’Apothicarium chapitral, on a bien compris. De son côté, le Capitaine et ses derniers hommes préfèrent se faire exploser dans leur bastion plutôt que de s’offrir un dernier carré digne de ce nom, ce qui surprend fortement Korpus. Cela dit, un ordre est un ordre, et le zélé Apothicaire part donc en petites foulées en direction du hangar à aéronefs mis à disposition par les autorités d’Antillis IV, en espérant que ce dernier n’ait pas déjà été conquis par l’ennemi.

En chemin, notre héros tombe par hasard sur une escouade de Scouts dont on était sans nouvelles depuis plus d’une journée et que tout le monde avait donc considéré comme perdue corps et biens (faut pas se retrouver en zone blanche au 41ème millénaire). Coincés dans une friche industrielle par une horde de World Eaters ricanant à défaut d’être très doués, les novices auraient rapidement perdus la tête sans l’intervention décisive de Korpus, dont le poing énergétique – un choix d’équipement un peu bizarre pour quelqu’un sensé effectuer des actions chirurgicales sur le champ de bataille, mais passons – et l’effroyable mauvaise humeur, appelée Cœur Vengeur par les initiés, règlent rapidement leur compte aux affreux.

Au bout d’un voyage sans trop d’encombres, les survivants finissent par arriver jusqu’au spatioport et commencent à retaper le Thunderhawk le moins amoché du lot afin de pouvoir s’éclipser de la planète condamnée au nez et à la barbe énergétique des Khorneux. Bien évidemment, ils n’auront pas loisir de mener à bien cette mission d’extraction furtive, une nouvelle vague de renégats leur tombant dessus sans crier gare (en même temps, il n’y avait pas de train sur place) avant que Korpus et les Scouts n’aient eu le temps de boucher tous les trous de la carlingue avec du chewing-gum. Comble de malchance, les World Eaters sont menés par un Dreadnought équipé d’un canon laser, dont la portée risque d’être fatale au coucou déglingué des Avenging Sons. L’Apothicaire décide alors de mener une charge suicide avec les novices afin de permettre au Thunderhawk piloté par le seul Scout ayant passé son permis ULM de s’échapper, après avoir déposé ses précieuses glandes dans le minibar de l’appareil, bien sûr.

Cette contre-attaque inspirée est couronnée de succès, Korpus faisant entrer son poing énergétique en surchauffe après l’avoir coincé sous un piston du Dreadnought adverse, vaporisant la machine impie ainsi qu’une bonne partie de ses suivants, au modique prix d’un évanouissement pour notre viril héros (tous les Scouts meurent dans la bagarre par contre, mais on s’en fout un peu). Il a toutefois accompli brillamment sa mission, pas vrai ?

Début spoiler…Eh bien, non. La mauvaise nouvelle lui est transmise par un Space Marine hérétique ayant autrefois servi comme Apothicaire et qui a fermement attaché Korpus sur un chevalet d’opération dans l’attente de son réveil. Une légende noire parmi l’Adeptus Astartes, responsable de la création de nombreux monstres génétiquement modifiés se battant dans les rangs des Légions renégates. Je veux bien sûr parler de Fab…rikus. Si si. Toute ressemblance avec un personnage nommé serait évidemment totalement fortuite. Fab’ révèle à son collègue et néanmoins prisonnier qu’il a été chargé par ses patrons chaotiques de trouver un moyen de recruter en masse de nouveaux Space Marines, ce qui n’est pas facile du fait de l’influence corruptrice du Warp sur les glandes progénoïdes des Astartes vétérans. Une seule solution pour contourner ce problème : aller taper dans les stocks de ces saintes nitouches de loyalistes, et c’était bien le but de la campagne d’Antillis IV. Cependant, les dernières actions du Capitaine Selleus ont fait capoter ce plan machiavélique, et l’entière opération se serait terminée par un fiasco retentissant pour les traîtres sans l’étourderie de Korpus, qui a « oublié » de prélever ses propres glandes et de les déposer dans le frigo du Thunderhawk avant de foncer dans le tas comme un demeuré. La boulette. Notre histoire se termine sur la scène pénible de l’opération sans anesthésie pratiquée sur ce glandu – et c’est bien le problème – d’Apothicaire, qui se désole en son for intérieur de sa propre stupidité. Charité bien ordonnée…Fin spoiler

1 : Je tique un peu du fait que Pereus se soit auto-diagnostiqué perdu pour la cause, sans que Korpus juge bon de faire son boulot de medic et de vérifier par lui-même la gravité de l’état de son camarade. Après tout, qu’est-ce qu’une paraplégie quand on possède la technologie nécessaire pour créer des Dreadnoughts ?

AVIS:

Simon Jowett signe une nouvelle franchement vintage pour le lecteur contemporain (qui sera peut-être surpris que le nom de Roboute Guilliman n’apparaisse pas une seule fois dans une histoire qui parle des Avenging Sons), explorant une des particularités du background des Space Marines : le rôle crucial des glandes progénoïdes dans leur organisation et leur culture.

Si l’idée est bonne, la réalisation n’est toutefois pas au-dessus de tout reproche : on passe à mes yeux beaucoup trop de temps à voir voler les bolts dans cette nouvelle, sans que l’auteur se consacre à faire monter la pression autour de Korpus, ni ne le confronte à des décisions véritablement difficiles, où il aurait eu à choisir entre son fameux honneur d’Apothicaire, et la mission vitale confiée par son supérieur. A cela viennent s’ajouter des petits irritants sans conséquence pour la structure de l’histoire, mais pénible à lire quoi qu’il en soit, comme la nullité crasse des World Eaters qui servent d’opposition aux vertueux Avenging Sons, pas foutus de régler leur compte à cinq Scouts et un Apothicaire mouflé même avec l’avantage du nombre.

On peut toutefois mettre au crédit de Jowett un twist final pas trop mal fichu (même si Korpus et Fabrikus ont vraiment une haute idée d’eux-mêmes pour penser que ce micro-événement risque de faire basculer le rapport de forces entre Imperium et Chaos) et quelques infos fluff relevant plus de la curiosité académique que de la source canonique1, cependant.

1 : C’est le même Jowett qui a doté le Chapitre des Iron Hearts de casque de VR pour s’entraîner au combat, et baptisé d’autorité un des Primarques disparus (voir ‘Hell in a Bottle’) : ses contributions au fluff Space Marine doivent être pris avec 72 pas de recul.

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Unthinking Justice – A. Millward :

INTRIGUE :

40K_Unthinking JusticeUne force de Black Consuls est envoyée sur la planète Suracto, en rébellion ouverte contre l’Imperium. Au fur et à mesure du déroulement de la mission, il apparaît toutefois que les traîtres ne sont pas forcément ceux auxquels on pense.

AVIS :

Une petite nouvelle sympatoche, qui commence comme une histoire de marounes classique, puis se corse salutairement grâce à la mise en scène d’un (léger1) doute quant à la nature de l’ennemi véritable des Black Consuls. On est très loin de l’Elucidium’ de Simon Spurrier et du ‘We Are One’ de John French, mais on ne peut que saluer l’intention d’Andras Millward de donner au lecteur davantage qu’une Cawkwell-erie lambda. La conclusion de l’histoire est toutefois assez nébuleuse, ce qui affaiblit un peu le twist final concocté par l’auteur.

1 : « Alors vermine, pourquoi t’es-tu rebellé contre l’Empereur ?»
« Monseigneur Marine, il y a malentendu. Les copains et moi nous sommes soulevés contre l’administration planétaire parce qu’elle cherche à faire tomber la planète aux mains du Chaos. Nous avons des preuves solides de son implication dans un compl- »
« BAM BAM BAM »
« Administrateur ! C’est le cinquième prisonnier que vous exécutez en plein interrogatoire, juste au moment où il allait vous mettre en cause dans cette triste histoire. Je commence à croire que vous nous cachez quelque chose… »
« Veuillez me pardonner, ça n’arrivera plus. J’ai tendance à sur réagir quand ma fidélité envers l’Imperium est mise en doute. Héhé. »
« Bon, d’accord. Mais que je ne vous y reprenne pas une sixième fois, hein ! »

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Battle of the Archaeosaurs – B. J. Bayley :

INTRIGUE :

40K_Battle of the ArcheosaursLa planète ABL 1034, colonisée par l’humanité en des temps forts lointains puis laissée à mariner dans son jus pendant la Longue Nuit, a été redécouverte par l’Imperium. Idéalement situé pour devenir une capitale sous-sectorielle, comme Mont de Marsan avant lui, ce monde primitif aurait dû être conquis ou reconquis par le régiment de Gardes Impériaux dépêché sur place sans le moindre effort, mais voilà : les bidasses ont été toutes massacrées par la population locale, malgré le très faible niveau technologique de cette dernière. Une deuxième expédition, mécanisée celle-là, n’a pas connu un sort plus favorable, faisant d’ABL 1034 une sorte de village gaulois galactique, résistant vaillamment contre l’envahisseur romain impérial. Foin de druide à la faucille en or ou de potion magique ici : la raison de cette défiance étonnante se trouve dans la présence d’une mégafaune domestiquée par les natifs, et baptisée archéosaures par les Magos Biologis en raison de la ressemblance des dites bestioles avec les lézards géants qui peuplaient Terra il y a des millions d’années.

Comme on le sait bien ici, ni la patience ni la bienveillance de Pépé ne sont sans limite, au contraire de ses armées, qui sont elles proprement inextinguibles. La troisième fois sera donc la bonne pour l’Imperium, qui décide de mettre le paquet pour s’assurer d’une victoire probante et envoie pas un, mais deux Titans Warlord mettre de l’ordre sur ABL 1034. Bien que les Princeps des machines envoyées sur place (Gaerius et Efferim) doutent fortement que l’ennemi soit en mesure de les inquiéter, la discipline légendaire de l’Adeptus Titanicus les empêche de livrer le fond de leur pensée aux gradés de la Flotte et de la Garde avec lesquels ils partagent la séance de briefing pré-déploiement. Et puisqu’ils sont sur place, autant faire le job, pas vrai ?

Cette belle confiance est rapidement, même si temporairement, ébranlée par la vision qui attend les Princeps lors de leur descente à la surface de la planète : pas moins de cinq épaves de Gargants ork jonchant la plaine choisie par le commandement impérial pour déployer ses forces. Bien que Gaerius choisisse de croire qu’il s’agit d’une conséquence de la nature belliqueuse des Xenos, tout prêts à se battre en eux en absence d’ennemis valables, plutôt que d’un fait d’armes des indigènes, son aveuglement béat ne va pas durer longtemps. L’arrivée de la troisième vague d’assaillants n’est en effet pas passée inaperçue chez les locaux (en même temps, on parle de marcheurs d’assaut de plus de trente mètres de haut, c’est voyant), et la tribu la plus proche n’est pas longue à envoyer ses guerriers et deux archéosaures livrer bataille aux nouveaux venus. On apprend à l’occasion d’un petit passage raconté depuis le point de vue de l’un des deux seuls survivants de la deuxième vague impériale, et reconverti en étendard vivant par les autochtones, que ces derniers arrivent à contrôler leurs montures grâce à des pieux métalliques fichés dans le crâne des archéosaures à des endroits précis, et dont les vibrations permettent d’activer certaines zones du cerveau de ces grosses bestioles. C’est tout simple, mais il fallait y penser (et surtout, trouver un moyen de mettre l’idée en pratique…).

Le combat s’engage donc entre les Titans et les Kaijus, et le petit rictus de suffisance qui flottait sur les lèvres du Princeps Gaerius est rapidement remplacé par une grimace d’incrédulité devant la résistance incroyable de ses adversaires, puis par de la panique pure et simple lorsque les archéosaures déclenchent leur combo spéciale « jet de flammes/cabrage/coup de queue », mettant au tapis le Warlord d’Efferim et laissant la machine rescapée composer seule avec les deux dinosaures énervés qui lui font face. L’entraînement et la discipline de l’équipage du Titan survivant (et les gros flingues dont il dispose) permettent toutefois à Gaerius d’arracher une victoire mineure en abattant les lézards géants à bout portant avant qu’ils n’aient pu lui faire des papouilles. C’était moins une pour la crème de la crème de l’Omnimessie…

Début spoiler…Et ce n’est surtout que partie remise pour la tribu vaincue, dont le nouveau chef décide que l’heure n’est plus aux combats honorables en 2 contre 2. Ayant bien compris que les armées impériales ne reculeraient devant rien pour s’emparer de la planète, il envoie dès le lendemain l’intégralité de son cheptel, soit une centaine d’archéosaures, piétiner les positions adverses. Le Titan mal en point de Gaerius ne peut pas s’opposer à une telle démonstration de force, et la troisième campagne se termine aussi ignominieusement que les précédentes.

Notre nouvelle quant à elle se conclut sur la décision prise par des gros bonnets de l’Imperium de régler une fois pour toutes cet ennuyeux, coûteux et humiliant problème en déchainant un petit Exterminatus sur la planète rebelle, quand bien même ça l’abimerait un peu, au moins à moyen terme. Un constat partagé à grand cri par notre ami Gaerius, qui a survécu à la débâcle et a été « adopté » par la tribu d’ABL 1034, où il sert maintenant de décoration frontale d’archéosaure. Voilà une reconversion réussie.Fin spoiler  

AVIS :

Une nouvelle « et si ? » par excellence, ‘Battle of the Archeosaurs’ permet à une des plumes les plus libres de la première époque de la Black Library de mettre en scène une bataille assez improbable et donc totalement savoureuse entre Titans Warlord et dinosaures géants, le tout avec un respect du fluff que l’on ne peut qu’admirer. On ne verra probablement plus rien de tel dans le catalogue de la BL (tant pis ou tant mieux, je vous laisse seuls juges), ce qui est une autre raison pour les amateurs de GW-Fiction de prendre connaissance de cet OVNI de la littérature 40K.

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The Wrath of Khârn – W. King :

INTRIGUE :

The Wrath of KhârnLa régularité, c’est la clé de la longévité. Il suffit de regarder Khârn (10.000 printemps et 2.243 meurtres – pour cette campagne – au compteur au début de notre histoire) pour s’en convaincre : le bougre aime toujours autant ce qu’il fait depuis dix millénaires, et cela lui a permis de garder la vigueur d’un jeune homme malgré une existence aventureuse et une hygiène de vie questionnable. Un véritable exemple pour la jeunesse, moi je dis. Nous cueillons le petit chaperon rouge sang au détour d’un champ de bataille situé sur un monde démon dédié à Slaanesh, sur lequel Mr Félon mène une attaque avec ses enthousiastes Berzerkers pour détruire une relique impie gardée au sein du Temple de l’Indulgence Superlative (tout un programme) : le Cœur du Désir.

Comme on peut s’en douter, il n’y a personne dans la team duckface qui soit capable de rivaliser avec notre héros dans le noble art du combat rapproché, et Khârn ne met que quelques pages à enfoncer les défenses ennemies, détruisant l’intégrité physique et ruinant les justaucorps moulants de tous ceux qui ont le malheur de croiser sa route. Il finit par parvenir avec quelques copains jusqu’à la salle principale du Temple, où les attendait le chef des Slaaneshi, alangui comme il se doit sur un trône enfermant l’essence d’un Démon Majeur : le fameux Cœur du Désir !

Si l’aura de sensualité et de concupiscence qui émane de la chaise démoniaque pique un peu les yeux de notre farouche champion, ses effets sont décuplés sur ses humbles suivants, qui à sa grande colère succombent tous à l’étreinte lascive du Prince des Plaisirs. Juste le temps de corriger de manière définitive ces gougnafiers, et Khârn peut se concentrer sur le cas du cultiste en chef, dont l’inqualifiable familiarité1 n’est pas le moindre de ses péchés. Encore une fois, l’affaire est vite expédiée, quelques moulinets de Gorechild ayant vite fait d’apprendre la bienséance à ce hippie dévergondé, et ce malgré son intéressante capacité à continuer à contrôler ses membres après qu’ils aient été tranchés.

Le boss final de notre récit s’avère être le Cœur du Désir, ou plus précisément l’entité démoniaque qui y est prisonnière. Cette dernière commet l’impardonnable erreur de suggérer à Khârn qu’un type qui s’appelle « le Félon » peut sans problème s’asseoir sur sa loyauté à Khorne (et sur le trône de Slaanesh par la même occasion), alors que notre héros est justement fier de sa loyauté exclusive au dieu du Sang. S’il a trahi ses camarades World Eaters, c’est justement parce qu’il considérait qu’ils s’étaient détournés des commandements de Khorne ! Cette bévue sera lourde de conséquence pour le Cœur du Désir, qui se prend un grand coup de hache tronçonneuse dans le dossier et termine la nouvelle en pièces détachées. Si vous tendez bien l’oreille, vous pourrez entendre Khârn fredonner I’m still standing alors qu’il regagne son vaisseau avec la satisfaction du devoir accompli…

1 : Il appelle Khârn « vieille branche », ce qui n’est pas très pro.

AVIS :

Nous sommes en présence de la toute première apparition de Khârn dans la GW-Fiction, et c’est peu de choses que de dire que de l’eau – ou peut-être du sang – a coulé sous les ponts depuis ces débuts brut(aux) de décoffrage signés de la main de William King. Ce personnage iconique a en effet gagné une profondeur très intéressante à travers son traitement dans l’Hérésie d’Horus, et que l’on ne retrouve absolument pas dans ‘The Wrath of Khârn1, mais il serait assez injuste de le reprocher à King à mon avis. Ici, nous sommes en présence du champion de Khorne altéré de sang dans sa plus pure forme, et dont la plus grande force est son inextinguible soif de combat et de meurtre ; c’est d’ailleurs la « morale » de l’histoire servie par un William King qui n’a pas franchement poussé son talent de scénariste. Cette nouvelle pourrait être qualifiée de simpliste et d’indigente au vu des standards actuels de la Black Library, mais si on la considère dans le contexte de sa première publication (en 2001, et dans un White Dwarf), un peu de mansuétude est tolérable. À lire si vous êtes un aficionado dévoué du Félon, très dispensable sinon.

1 : Un jeu de mots typiquement anglo-saxon, car faisant référence au film ‘The Wrath of Khan’ de la série Star Trek.

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Into the Maelstrom – C. Pramas :

INTRIGUE :

40K_Into the MaelstromCapturé après l’abordage malheureux d’un croiseur White Scars par ses camarades Red Corsairs, l’archiviste Sartak doit prouver sa loyauté retrouvée envers l’Empereur (car la vue d’une dizaine de bolters braqués sur sa tête l’a aisément convaincu de retourner sa veste énergétique, étonnant non ?) en informant ses nouveaux copains de la destination du prochain raid de Huron Sombrecoeur hors du Maelstrom. Notre héros repentant arrivera-t-il à abuser le paranoïaque ex Tyran de Badab assez longtemps pour accomplir sa périlleuse mission ?

AVIS :

Si on met de côté les zones d’ombre1 de l’argument d’Into the Maelstrom’, que l’on peut imputer à la plus grande permissivité qui régnait à cette époque (voir ‘Hell in a Bottle’ de Simon Jowett pour s’en convaincre), cette nouvelle se révèle être très convenable. La force de l’écriture de Pramas est d’arriver à retranscrire la course contre la montre dans laquelle est engagée son héros, et l’étau qui se resserre de plus en plus autour de lui au fur et à mesure des pages. ‘Into the Maelstrom’ peut également se targuer de bénéficier d’un final réussi, autant du point de vue de la construction narrative que du respect de l’ambiance nihiliste de Warhammer 40.000, et de la participation du Huron Sombrecœur convaincant en psychopathe retors et flamboyant.

1 : « Seigneur Subotai Khan, le Red Corsair que nous avons fait prisonnier après l’attaque de notre barge de bataille (au lieu de lui coller un bolt dans le crâne, comme il aurait été normal) est réveillé et attend votre bon plaisir. »
« Faîtes le entrer. »
« Qui a été un vilain garnement, hum ? »
« Je dois reconnaître que j’ai commis quelques erreurs ces dernières années votre honneur, mais depuis que vous m’avez capturé et me tenez à votre merci, j’ai très envie que nous devenions copains. Vive l’Imperium donc. »
« Merveilleux. Maintenant que tu as miraculeusement retrouvé foi en l’Empereur, tu es libre de retourner chez les Red Corsairs. Essaie juste de nous dire où Huron dirigera sa prochaine attaque, de manière à nous permettre de le prendre en embuscade. »
« Vous ne préférez pas plutôt que je vous mène directement jusqu’à la flotte des Red Corsairs, chose dont je suis capable selon l’auteur de la nouvelle ? »
« Nan. »
« Euh, d’accord, c’est comme vous voulez… Mais imaginons – je dis bien imaginons – que mon repentir ne soit pas sincère, et qu’une fois de retour dans le Maelstrom, je vous fasse parvenir des informations erronées, permettant à Huron d’attaquer une planète sans défense, ou pire, de retourner l’embuscade des White Scars contre eux. Vous avez prévu quelque chose pour ce cas de figure ? »
« Bien sûr ! Le fidèle Arghun ici présent t’accompagnera dans ta mission, et s’assurera que tu mènes à bien cette dernière. »
« Vous êtes bien conscient que Huron risque de le faire tuer à la minute où il posera les yeux sur lui, hein ? Et que même dans le cas où il survivrait à son bizutage, il n’aurait aucun moyen de vous avertir de mon hypothétique trahison, étant donné que je serai celui qui vous transmettra les coordonnées du prochain objectif de Huron grâce à mes pouvoirs psychiques ? »
« Tu as raison Sartak, mon plan repose entièrement sur ta pleine et entière coopération. Mais j’ai tout à fait confiance en toi, car nos trente secondes d’entretien m’ont convaincu qu’en dépit des actes monstrueux que tu as commis en tant que Red Corsairs, tu es quelqu’un de bien. Pars avec ma bénédiction. »
« Merci Subotai Con, heu Khan. »

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Et voilà qui conclue cette revue de ‘Let the Galaxy Burn’, et clôture définitivement la partie grimdark de mon aventure infernale ! Je ne pense pas avoir besoin d’émettre de jugement final sur cette anthologie, qui présente la variété stylistique et qualitative propre à la plupart des recueils de la BL. Si vous êtes fans de cette époque mythique et fondatrice de la GW-Fiction, nul doute que vous trouverez plaisir à parcourir ces pages aujourd’hui un peu jaunies. Sinon, il y a énormément d’autres ouvrages qui vous attendent dans les rayons de la Bibliothèque Interdite, et vous y trouverez sans doute votre bonheur… je vous le souhaite en tout cas !

INFERNO! – ANNEE 8

Bonjour et bienvenue dans cette revue de la huitième et dernière année d’Inferno!, le magazine de fictions bimensuel de la Black Library. Cette fois-ci ça y est, nous voilà arrivés à la fin de la route, qui se termina brutalement en janvier 2005 sur un 46ème numéro à la couverture démoniaque. Si on peut arguer que le Duc du Changement choisi par la BL pour orner la revue apparaissait comme un signe prémonitoire de rupture, le traditionnel édito signé par le rédacteur en chef (Christian Dunn à l’époque) ne laissait pas du tout apercevoir une fin de cycle, et se terminait même par un « rendez-vous dans deux mois ! » des plus enthousiastes. A ce jour, j’ignore ce qui a poussé Games Workshop à débrancher sa feuille de chou aussi précipitamment, et si vous avez des informations à partager sur le sujet, je suis preneur1.

1 : En relisant ce fameux édito, je me suis rendu compte que Christian Dunn y expliquait que l’équipe rédactionnelle avait choisi de faire figurer ‘Menshad Korum’ (C. S. Goto) dans le numéro à la place d’une autre histoire d’Eldars Noirs intitulée ‘Power, Corruption and Lies’ (jamais publiée, ou en tout cas pas sous ce titre, à ma connaissance. Il est possible que ce choix ait offensé un esprit maléfique fan de New Order, qui aurait maudit Inferno! en punition de cette outrecuidance. En tout cas, c’est une théorie.

Inferno!_Année 8

Cette année huit, en plus d’être la dernière du lot, est également la plus courte (4 numéros pour 14 nouvelles). Ce fut toutefois suffisant pour y faire figurer une aventure du chasseur de primes Brunner (‘Sickhouse, qui par le jeu de la mise en page se trouve être l’ultime nouvelle infernale), une enquête de terrain de Valentin Drusher2 (‘Gardens of Tycho’, avant-dernière nouvelle infernale), et une Space Marinade, sauce au bleu, d’Uriel Ventris (‘Consequences’). Nous ferons également la connaissance de Gabriel Angelos, transposé sur papier après avoir commencé sa carrière sur PC, et du malchanceux trublion Reiner Hetzau, protagoniste de (l’excellente) trilogie des Dark Hearts.

Parlons enfin des auteurs rassemblés pour ce grand final un peu tronqué. On retrouve évidemment Dan Abnett, mais c’est Graham McNeill qui lui chipe le titre de premier contributeur (deux nouvelles), aidé en grande partie par le numéro consacré aux Ultramarines (#44) dont il fut le seul auteur. L’année 8 vit également le retour de Brian Maycock (‘To Guard the Dead’), C. S. Goto (‘Menshad Korum’) et James Peaty (‘The Cuckoo of Hammerbildt’), ainsi que les débuts de Lee Lightner (‘Engage the Enemy’), Lucien Soulban (‘Altar of Cyrene’) et Nathan Long (‘Hetzau’s Follies’). Voyons ce que ça a donné…

2 : Drusher fera un comeback très inattendu treize ans plus tard en devenant le protagoniste de ‘The Magos’. Comme quoi il ne faut jamais désespérer de rien (surtout avec Abnett).

Inferno! Année 8

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The Seventh Boon – M. Scanlon [WFB] – #43 :

INTRIGUE :

WFB_The Seventh BoonL’ambiance est pesante dans l’orphelinat Notre Dame Shallya du Cœur Béni de Marienburg, dont les petits pensionnaires sont amenés par douzaines devant un couple de riches notables, Herr et Frau Forst, à la recherche d’un petit animal de compagnie mignon pour bien paraître en société. C’est toutefois l’avis de la brave sœur Altruda après plusieurs heures de « casting » infructueuses, la jeune Madame Forst (Greta) se montrant aussi exigeante que vague sur les qualités recherchées de son futur héritier. Son mari étant un des bienfaiteurs principaux de l’établissement depuis de nombreuses années, Altruda est toutefois toute disposée à laisser Greta épuiser ses stocks d’enfants abandonnés, jusqu’à ce que, miracle, elle jette son dévolu sur un garçon de huit ans aussi mutique qu’innocent. L’affaire étant entendue, les époux Frost repartent en calèche avec leur acquisition artistiquement emballée dans une pochette cadeau, petit geste commercial réservé aux membres du club Platinum.

Il s’avère rapidement que cette adoption n’a pas grand-chose de désintéressée, et que si Gunther Forst a laissé sa femme jouer le premier rôle auprès de Sœur Altruda, c’est bien lui qui a planifié l’opération Marine1. Notre homme est en effet sous ses abords respectables un cultiste chaotique accompli, dont les activités interlopes nécessiteront dans un futur très proche un être à la pureté irréprochable, et certainement pas pour répondre à des questions de Steve Harvey, croyez-moi. Comme même à Marienburg, un homme célibataire de quarante ans ne peut pas adopter un gamin des rues sans que cela ne fasse jaser, et que Gunther tient absolument à ne pas attirer l’attention sur sa précieuse personne, il a embauché les services de Greta, prosti…sane de son état, pour jouer le rôle de sa tendre moitié et ainsi détourner les soupçons des nonnes. Cette mascarade tarifée prend brutalement fin lorsque le fiacre dans lequel le trio a pris place est arrêté par deux malfrats, dont l’un se révèle être le souteneur de Greta. Ayant compris que l’enfant soigneusement sélectionné par sa complice avait une valeur certaine sur le marché noir, le dénommé Ruprecht ne reculera pas devant un meurtre de sang froid pour s’emparer de la marchandise, mais c’est sans compter les talents de Gunther au couteau. Aussi efficace avec sa lame, tant au corps à corps qu’à distance, que Filthy Harald en personne, Herr Forst règle leur affaire aux malfrats, avant de repartir en petites foulées vers sa destination, son sidekick sur le dos. Une fin méritée pour ces trafiquants d’êtres humains en puissance, si vous voulez mon avis.

La caméra se braque ensuite sur les décombres des Six Couronnes, autrefois taverne fréquentée par les individus les plus louches de Marienburg et des environs, et désormais ruines abandonnées à la suite d’un malheureux incendie. Alors que Gunther se prépare à réaliser un rituel à l’importance cruciale tandis que son petit compagnon se gave de bonbons bourrés de somnifères (ça vaut mieux pour lui), on en apprend plus sur le passif et les motivations de notre héros.

Il y a de cela 150 ans, Gunther se rendit à un rencard très particulier à ce même endroit, et fit la rencontre de Samael, Prince Démon de Slaanesh undercover et collectionneur d’âmes patenté. Obsédé par l’atteinte de l’immortalité, Gunther était prêt à se séparer de son essence en échange de la vie éternelle que seul un puissant Démon tel que Samael était en mesure de lui accorder. Au bout d’une négociation serrée, les deux larrons tombèrent d’accord sur un deal satisfaisant tout le monde : à Gunther sept fois 25 ans de non-sénescence2, à Samael l’exaucement de sept faveurs pas trop compliquées par son associé mortel, et la pleine propriété de l’âme de ce dernier une fois le contrat terminé3. Ce petit arrangement tint pendant de nombreuses années, mais à l’approche de son septième et ultime rendez-vous intermédiaire avec son protecteur, le prudent Gunther se rendit compte que ce dernier allait probablement essayer de l’empapaouter dès la réalisation de sa septième requête, et récupérer ainsi son dû avant que les vingt-cinq dernières années prévues au contrat ne s’écoulent. Après tout, les Démons ne sont pas connus pour être les créatures les plus réglos qui soient (à l’exception de ceux de Solkan bien sûr).

Fort heureusement, un siècle et demi est plus que suffisant pour peaufiner ses connaissances ésotériques, et Gunther a eu tout loisir de dénicher dans d’antiques grimoires une solution à son problème existantiel (littéralement). Pour la faire simple, son plan consiste à piéger Samael entre deux cercles de conjuration, et à renvoyer le Démon patienter mille ans dans le Warp grâce à une balle enchantée et ointe du sang d’un être à la pureté absolue (pléonasme, vous me direz). Lorsque le ponctuel Samael se présente sur le lieu du rendez-vous à minuit précise, Gunther est prêt à le recevoir comme il se doit…

Début spoiler…Si la première partie de son stratagème se réalise sans anicroche, Sam se retrouvant coincé entre un graffiti magique et une mini douve d’eau bénite, le sacrifice du frêle enfançon ne se passe pas comme prévu. L’orphelin mutique était en effet une Démonette déguisée, un être à la pureté irréprochable si l’on se réfère au 2) de la définition du Petit Larousse, et pas au 3) comme Gunther l’a fait. Le tête à tête entre le cultiste dupé et le Démon mineur se termine de façon expéditive et définitive pour le pauvre M. Forst, qui aurait dû se douter qu’on n’arnaque pas si facilement une créature millénaire. Son grand œuvre ne reste toutefois pas inachevé, Samael utilisant le sang de sa créature pour terminer la réalisation de la balle dem-dem, car après tout, ce genre de munition peut s’avérer précieuse…Fin spoiler

1 : Comme Marine Lorphelin. J’espère que vous l’aviez.
2 : Comme le fait remarquer justement Samael, des cas de forces majeures peuvent s’appliquer.
3 : Je sais ce que vous vous dîtes : ça aurait été plus fluff pour un Prince Démon de Slaanesh de partir sur une base six plutôt qu’une base sept. Mais les temps sont durs, ma pauvre dame…

AVIS :

De toutes les nouvelles mettant en scène un pacte ou une invocation démoniaque (et les conséquences souvent hilarantes, salissantes et/ou catastrophiques qui en découlent) que la GW-Fiction nous a proposé au fil des années, ‘The Seventh Boon’ est sans doute l’une des plus réussies. Mitchel Scanlon met en scène de manière habile ce jeu de dupes entre un homme prêt à tout et un Démon faussement débonnaire, avec suffisamment de rebondissements (mention spéciale à cet échange, qui joue habilement avec les codes du pacte démoniaque) et de suspens1 pour garder l’intérêt du lecteur du début jusqu’à la fin. Chose appréciable, Scanlon se permet également quelques ajouts fluffiques qui, s’ils ne révolutionneront pas la face du Vieux Monde, méritent la lecture pour quiconque s’intéresse à ce genre de choses. A real boon.

1 : Et de mots savants pour enrichir le vocabulaire de son public. Je ne savais pas ce qu’était un trocart jusqu’à aujourd’hui, je le reconnais humblement.

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Relics – J. Swallow [40K] – #43 :

INTRIGUE :

40K_RelicsEn mission d’entraînement sur le monde mort de Setrek, le Sergent Vétéran Tarikus et ses hommes sont confrontés à des phénomènes inquiétants autant qu’inédits, la planète bac à sable (de basalte) des Doom Eagles étant sensée être dépourvue de toute forme de vie depuis des millénaires. Témoin de la disparition brutale du Novice Doramaca1 au cours d’une patrouille de routine, son camarade de promotion Colius donne l’alerte, et opte pour attendre prudemment l’arrivée des renforts depuis un escarpement rocheux plutôt que de s’hasarder dans les sables qui ont aspiré le malheureux aspirant. Les doutes nourris par l’inflexible Tarikus quant à la possibilité que quelque chose puisse en avoir après les meilleurs de l’Empereur sont rapidement dissipés lorsque, arrivé sur place, il se rend compte en visitant le Rok Ork (à portière papillon, comme quoi les peaux vertes ne sont pas aussi nuls que l’on le dit souvent en termes de design) englouti par les sables qui a servi de refuge à son couard de Novice que quelque chose ne tourne effectivement par rond, les cadavres desséchés des occupants de l’astéroïde ayant tous été soigneusement dépouillés de leurs composants métalliques. L’arrivée honteuse du reste des Doom Doom Boys, menés par le flegmatique2 Vétéran Korica, délesté d’un bras après que la caverne utilisée comme base arrière par les Astartes se soit révélée être remplie de vermine ferrophage, apporte la confirmation que les Space Marines partagent la planète avec des voisins pas très compréhensifs. L’heure est grave et il faut agir sans tarder.

Plutôt que de tenter de contacter leur vaisseau pour regagner la sécurité de l’orbite, Tarikus entraîne les survivants dans une exploration des souterrains sur lesquels donne le Rok, ce qui permet aux Doom Eagles d’en apprendre plus sur l’histoire mouvementée de leur terrain d’entraînement favori. Le visionnage d’une vidéo datant de quelques milliers d’années (on utilisait du matos performant à l’époque) permet d’établir sans équivoque possible que Setrek a été victime du réveil de sa colonie de Necrons, incident géré de main de maître par les habitants de la planète, qui ont préféré s’auto-nuker la gueule plutôt que de laisser les goules de métal avoir le dernier mot. That’s the spirit, guys. Harcelés par un nombre croissant de scarabées et de Mecharachnides Canopteks, rejoints rapidement par un Seigneur Necron au corps upcyclé, les Doom Eagles réalisent que la situation est sur le point de leur échapper et décident donc de finir ce que leurs lointains prédécesseurs avaient commencé, en faisant détonner les ogives nucléaires enfouies à proximité des lignes tectoniques de la planète. Une fois le final countdown lancé, Tarikus sonne la retraite générale et téléporte tout son petit monde dans la Kangoo chapitrale, au nez (peut-être) et à la barbe (sans doute) de Junkyard Man et de ses nuisibles. Voilà encore un conflit de voisinage réglé avec professionnalisme et efficacité par la team Pépé.

1 : Ce qui n’est pas une grosse perte, au vu de l’incapacité de ce dernier à se mettre à couvert sans ridiculiser son Primarque.
2 : Décider de piquer un roupillon alors qu’un camarade vient de disparaître dans des conditions suspectes, voilà bien une réaction impavide. Ou alors, la nuit précédente a été courte.

AVIS :

Avant de dédier sa plume aux Blood Angels, James Swallow s’est exercé à la littérature génétiquement modifiée en se frottant aux Doom Eagles, Chapitre dont la nature fataliste et résignée faisait une victime expiatoire parfaite pour ce genre d’ébauche1. Relics ne peut prétendre ni à une intrigue originale – comme la plupart des travaux mettant en scène des Necrons, d’ailleurs – ni à une exécution irréprochable, les tribulations de Tarikus et consorts suscitant leur lot de haussements et/ou de froncements de sourcils de la part du lecteur. Ces considérations évacuées, mon sentiment dominant à la suite de la lecture de Relics demeure un grand et massif so what ?, l’absence totale d’originalité de cette soumission de Swallow s’inscrivant en faux avec le cahier des charges de la Black Library, dont les publications sont censées étoffer et enrichir le fluff des franchises de GW. Rien de tel ici, et donc rien qui ne fasse de cette nouvelle une lecture obligatoire conseillée intéressante. Passez votre chemin, braves gens.

1 : Il semble d’ailleurs  que les Doom Eagles aient été « le » Chapitre d’Inferno !, un nombre important de nouvelles ayant été consacré aux natifs de Gathis II par les contributeurs du magazine, avec des résultats plus ou moins probants.

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The Cuckoo of Hammerbild – J. Peaty [WFB] – #43 :

INTRIGUE :

La paisible ville d’Hammerbildt voit son quotidien bouleversé lorsqu’un matin, la fermière Gudrun trouve un homme blessé gisant dans la rivière communale. Ce dernier, Kahn, venait juste de dérober à un trio de soldats du Stirland les sacs d’or qu’ils transportaient en vue du paiement d’une rançon de guerre, et profite de l’hospitalité qui lui est généreusement offerte par les Hammerbildter pour se présenter comme une honnête estafette, dépouillée et blessée par des bandits de grand chemin portant l’uniforme du comte du Stirland (#ISeeWhatYouDidThere). Si les résidents de la ville acceptent la version de Kahn sans sourciller, le milicien Tobias, qui poursuit Gudrun de ses ardeurs tenaces et intrusives, prend le rescapé en grippe du seul fait qu’il se trouve hébergé par sa sauveuse le temps de reprendre des forces, ce qui ne manque pas d’exciter la jalousie du prétendant malheureux1. La popularité du nouveau-venu atteint cependant des sommets après qu’il ait contribué à repousser la (petite : 3 mutants seulement) attaque d’Hommes Bêtes sur Hammerbildt peu après son arrivée, ce qui est d’autant plus injuste que Tobias a également donné de sa personne dans l’escarmouche, et terrassé un des assaillants bestiaux à coups de lyre, ce qui aurait dû lui rapporter des points de style, tout de même. Le monde est vraiment injuste.

Le lendemain de cette nuit agitée, la ville reçoit la visite des trois Stirlanders précédemment entraperçus, qui demandent à ce que Kahn ainsi que ses biens mal-acquis leur soient remis, sous peine de représailles sanglantes. Hammerbildt tenant toutefois son héros local, le chef de la milice refuse catégoriquement d’obtempérer, et serait allé au clash avec les forces de l’ordre, n’eut été le départ précipité de Kahn (préférant aller écouler ses couronnes en toute quiétude plutôt que de refaire le coup de feu avec ses groupies), qui croise Tobias à la sortie de la ville. La grande gueule du ruffian lui joue alors un tour pendable, ce dernier se vantant d’avoir roulé son monde dans la farine, et avouant avoir levé la main sur Gudrun alors qu’elle cherchait à le convaincre de rester. Tremblant de rage dans son collier de barbe et sous son fedora qu’un rustre ait osé violenter m’lady, ‘Nice Guy’ Tobias tombe à bras raccourcis sur son rival, et les deux dégringolent la colline jusqu’à atterrir dans le jardin de la donzelle en question. Cette dernière, rancunière, embroche son ex d’un coup de fourche bien placé, permettant au final à Hammerbildt d’éviter le courroux de la soldatesque Stirlander, le corps du gredin et la quasi-totalité de l’or dérobé lui étant remis avec les plus plates confuses du conseil de la ville et la démission du chef de la milice en sus. La quasi-totalité, donc, Gudrun et Tobias détournant un petit sac de couronnes à leur profit, afin de financer leur déménagement dans la grande ville la plus proche. Une autre forme de prélèvement à la source, somme toute.

1 : À raison d’ailleurs car Kahn ne mettra pas longtemps avant d’emballer son hôtesse. Le charme canaille du baroudeur, sans doute.

AVIS :

Avant de commencer à lire cette nouvelle, j’étais à peu près certain que cette dernière tournerait autour d’une horloge maudite, dont les maléfices scelleraient le sort de la malheureuse bourgade d’Hammerbildt. Ma surprise a donc été non feinte lorsque je me suis rendu compte que Peaty avait choisi l’autre sens de « cuckoo1 » comme ressort narratif de son histoire, qui s’en est avérée du même coup être bien plus terre-à-terre. Sans être dépourvu d’intérêt, ‘The Cuckoo of Hammerbildt’ tient plus de la fable sociale, la survenue d’un évènement extraordinaire dans le microcosme figé d’une petite ville impériale permettant à chaque protagoniste de révéler sa nature profonde, que du récit med-fan, seul le trio d’Hommes-Bêtes en maraude prestement euthanasié par les Hammerbildter en furie ancrant de façon indéniable le propos de James Peaty dans l’univers de WFB. À titre de comparaison, le ‘Hatred’ de Ben Chessell (‘Inferno!’ #2 ; ‘Realm of Chaos’), s’il partage un argument sensiblement similaire (un mystérieux étranger blessé arrive dans une communauté reculée et se fait passer pour quelqu’un d’autre auprès des villageois qui le recueillent) avec ‘The Cuckoo…’ intégrait à son intrigue une réflexion typiquement ‘Warhammeresque’ en abordant le thème du statut de mutant au sein des sociétés civilisées du Vieux Monde. La « banalité » du propos de la soumission de Peaty dessert donc fortement cette dernière, et même s’il est parfois bon de constater que les habitants de l’Empire ont une vie à peu près normale entre deux invasions chaotiques, Waaagh ! orque ou épidémie de pourriture de Nurgle, il y a fort à parier que le lecteur sorte blasé de cette historiette d’usurpation d’identité à fins bassement crapuleuses, sur fond d’idylle pastorale contrariée. Du sang pour le Dieu du Sang fanboy !

1 : Imposteur, comme dans l’expression ‘cuckoo in the nest’, qui tire son origine du comportement opportuniste de cet oiseau en période de nidification.

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To Guard the Dead – B. Maycock [WFB] – #43 :

INTRIGUE :

WFB_To Guard the DeadTémoins du suicide de Lord Brecker, qui s’est jeté du haut de sa tour de manière dramatique, les paysans Max et Werner Karlin s’empressent de colporter la nouvelle jusqu’à la taverne du village voisin, où elle tombe dans des oreilles intéressées. Les premières sont celles de Marcus, un étranger arrivé récemment sur place et décidé à avoir une discussion privée avec Brecker, ou à défaut, son cadavre, pour des raisons non révélées. Les secondes appartiennent à Walther Balg et Kurt Halder, deux anciens miliciens s’étant établis dans le village où se passe notre récit après une vie de campagnes et de pillages dans les armées impériales. Lorsque le vieux servant de Brecker, Josef, vient s’enquérir de la disponibilité de gardes pour assurer la protection de la jeune veuve de son maître, Lady Margarethe, et la quiétude de son manoir, nos deux ruffians sont prompts à saisir l’opportunité qui s’offre à eux, et s’installent rapidement sur le domaine dont ils sont maintenant les protecteurs attitrés.

Leur vigilance est toutefois mise en défaut par Marcus, qui parvient à se glisser jusque dans le mausolée des Brecker et à soulever le couvercle du sarcophage renfermant la dépouille mortelle de l’homme glaviot (un oiseau, ça vole, tout le monde sait ça). Ce qu’il voit semble confirmer les soupçons qu’il entretenait avant son arrivée, mais cette découverte ne lui ait que peu d’utilité, un faux mouvement le conduisant à traverser le plancher vermoulu de la crypte, et à se retrouver coincé au sous-sol sous une poutre de fort beau gabarit. Un peu plus loin, les deux gros bras de Lady Margarethe reçoivent l’occasion de mettre ces derniers en action, une bande de paysans fins saouls progressant bruyamment vers le manoir seigneurial, et certainement pas pour présenter leurs condoléances à la châtelaine éplorée. Prompts à l’action, Walther et Kurt massacrent la majorité des bouseux, en laissant quelques-uns repartir pour transmettre leur message de fermeté au reste du village, et s’en vont collecter la récompense de leurs bons et loyaux services auprès de Josef.

Il ne faut cependant pas longtemps à nos deux compères, logés dehors comme de vulgaires molosses, pour décider d’aller jeter un œil dans les appartements de leur employeuse, beaucoup plus confortables et bien mieux chauffés que leur cabane au fond du jardin. Là, pendant que Kurt se contente de s’endormir devant la cheminée, comme l’honnête squatteur qu’il est, Walther se décide à rôder un peu dans les coursives, et aperçoit de loin passer la jeune et jolie châtelaine, pudiquement voilée par un crêpe de deuil, accompagné par son serviteur. Se décidant à tenter sa chance dans l’espoir de devenir à son tour seigneur, notre homme file en ville avec l’argent gagné par la paire quelques heures plus tôt afin de s’acheter une respectabilité et pouvoir demander sa main à Lady Margarethe…

Début spoilerDe retour au manoir, il se prépare à devoir expliquer à Kurt pourquoi il a claqué en fringues et en alliance l’intégralité de leurs gages sans lui demander sa permission, lorsque des cris stridents attirent les comparses jusque dans le mausolée tout proche. C’est là qu’ils trouvent et libèrent Marcus, qui se révèle être un Chasseur de Sorcières, soupçonnant à l’origine Lord Brecker d’être de mèche avec les puissances de la ruine, mais convaincu à la vision du cadavre exsangue de ce dernier que l’ennemie #1 des bons sigmarites se trouve être Lady Margarethe, qui ne peut être qu’un Vampire ! Sollicitant l’aide de ses sauveurs pour mettre un terme au règne sanglant de la morte vivante, il a la surprise de voir ces derniers s’enfuir ventre à terre, la réalisation d’avoir assassiné des villageois pour le compte d’une goule les incitant à ne pas rester dans les parages d’un Répurgateur, espèce d’homme peu réputée pour sa compréhension et sa compassion.

Pendant que Marcus retourne au village et arrive à rameuter assez de partisans pour mener une expédition purificatrice dans le château des Brecker, qui se terminera de façon peu concluante en général, et assez douloureuse pour lui, les deux jambes broyées par les roues du carrosse qui parvient à s’échapper du domaine à l’arrivée des péquenauds, Walther et Kurt ont une franche explication de texte, qui se solde par la mort du premier de la main du second, peu convaincu par ses grands projets d’ascension sociale, et guère compréhensif quant à l’usage un peu trop cavalier fait par son ami des ressources communes. Déterminé à empocher son dû, Kurt emporte la main de son camarade contenant l’anneau d’or qu’il proposait d’offrir à Lady Margarethe, jusqu’au marchand le plus proche afin de l’échanger contre des espèces sonnantes et trébuchantes.

Début spoiler 2Quelle n’est pas la (mauvaise, croyez-moi) surprise de Kurt lorsqu’il croise le cadavre de son frère d’armes au détour d’une rue, alors qu’il était sur le point de laisser village et manoir derrière lui ! Trop surpris pour réagir aussi promptement que la situation l’exigeait, le fratricide est mis KO par une gauche (la droite n’étant plus disponible) de Walther, et se réveille dans le fameux fiacre des Brecker, où lui font face la belle endeuillée, son serviteur, et le champion continental des poids wealter, dont le regard noir et vide laisse peu de doute quant à son état de zombification avancé. Kurt s’attend à subir le même sort de la part de Lady Margarethe, mais lorsque Josef soulève son voile, c’est pour révéler un autre zombie, bien moins frais que Walther. Et le serviteur de révéler que Margarethe est sa femme, qu’il a surprise en train de se compromettre avec un autre homme, et accidentellement tuée dans la dispute qui s’en est suivi. Praticien des arts occultes, Lord Brecker, car c’était lui, a réussi à faire revenir d’entre les morts sa chère et tendre, et s’est débarrassé du servant qui l’avait trompé, mort sous la torture, en précipitant son cadavre habillé des  vêtements de son maître depuis la tour du manoir sous les yeux de ses paysans. Débusqué par les Répurgateurs, il n’a guère eu le choix que de prendre la fuite avec son épouse pour aller poursuivre ses études nécromantiques dans un environnement plus apaisé, mais n’aura pas trop de deux fidèles serviteurs pour l’aider à s’installer sous des cieux plus cléments…Fin spoiler

AVIS :

Deuxième et ultime contribution de Brian Maycock à la Black Library, ce ‘To Guard the Dead’ confirme les débuts prometteurs que constituait ‘A Fool’s Bargain’. Comme en témoigne la longueur inhabituelle de la section Intrigue ci-dessus, l’auteur délivre un récit complexe et palpitant, digne d’éloges tant dans la forme (une succession de vignettes, dont certaines en prolepse – ce que l’on comprendra plus tard -, endossant les points de vue des divers protagonistes, et volontairement schématisée pour l’établissement de ce résumé) que sur le fond, avec non pas un, mais deux retournements de situation artistement amenés, ce qui dénote d’une maîtrise consommée quand on se souvient que le récit ne fait que 12 pages ! Si elle apporte peu de choses en termes de background, cette nouvelle est une des plus aboutie qu’il m’ait été donné de lire au niveau de sa construction, et mérite de ce fait amplement le détour. Il est vraiment dommage que la BL n’ait pas jugé bon de republier un travail de cette qualité, qui aurait eu sa place dans toutes les anthologies WFB éditées au cours des 15 dernières années. J’espère que ces quelques lignes enthousiastes vous donneront l’envie de vous plonger dans cette courte mais satisfaisante histoire (sous réserve que vous n’ayez pas déjà appris le fin mot de cette dernière, ce qui serait dommage), c’est bien le moins que je puisse faire pour réparer l’injustice littéraire qui a été faite à l’intriguant1, mais fort doué, Mr Maycock.

1 : Dont je n’ai pas retrouvé la trace sur internet, mis à part en tant que contributeur du recueil ‘Visionary Tongue’, édité par Storm Constantine, une (très) ancienne contributrice de Warhammer Books – la proto BL – avec ‘Lacrymata’.

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Consequences – G. McNeill [40K] – #44 :

INTRIGUE :

40K_ConsequencesL’année est 999.M40, nous sommes sur Macragge, et Uriel Ventris est en tôle. Ainsi commence la présente nouvelle, qui prend la suite immédiate des événements relatés dans ‘Warriors of Ultramar’ (et la nouvelle ‘Leviathan’), qui avaient vu les héroiques Space Schtroumpfs de la 4ème Compagnie tenir tête à la Grande Dévoreuse au côté de leurs cousins éloignés et plus qu’un peu creepy des Mortifactors sur Tarsis Ultra. Si la victoire avait souri aux Impériaux, deux problèmes de taille attendaient Ventris à son retour à la base.

Premièrement, et très littéralement, graver le nom des soixante-dix-huit (78 !!!) Frères de Bataille tombés au champ d’honneur pendant le conflit contre les Tyranides, sur les murs du Temple de la Correction. Soit un taux de perte de <prend une calculette> 78%. Pas mal du tout pour une deuxième campagne je dois dire. Après plus de trois jours passés à buriner du marbre, le hardi Capitaine se fait alpaguer par son collègue Pythea, en charge de la 2nde Compagnie, et un duo de Terminators, alors qu’il était en train de chanter innocemment « Guilli reviens » avec les pèlerins présents dans la Chapelle du Primarque. Pas qu’il chantait si mal que ça, notez bien, mais surtout en conséquence des terribles accusations portées sur lui par le Sergent Vétéran et balai psychorigide Learchus : des déviations répétées aux enseignements du Codex Astartes. Comme les Ultramarines prennent ces choses là très aus sérieux, Ventris est escorté sans autre cérémonie dans une cellule froide et humide, en attendant de passer en jugement accéléré devant Marneus Calgar et les Capitaines présents sur Macragge. Voilà pour le deuxièe problème.

Après avoir tué le temps en faisant comme tout prisonnier de film d’action qui se respecte dans l’intimité de sa cellule, c’est-à-dire de la musculation, Ventris est amené devant ses juges en compagnie de son vieux complice Pasanius, dont le tort aura sans doute été d’être un peu trop proche de son supérieur hiérarchique (et pas du tout d’avoir un bras en métal sentient, comme on pourrait l’imaginer). S’en suit un interrogatoire/réquisitoire serré du fantasque Capitaine, qui donne l’occasion à Graham McNeill de livrer une version condensée de la nouvelle ‘Chains of Command’, pour ceux qui n’avaient pas eu le bonheur de la lire auparavant ; et aux lecteurs celle de réaliser que les Ultramarines des années 2000 étaient vraiment des chochottes1. Cette première phase du procès ayant pris toute la journée, les accusés sont ramenés à leur cellule pour passer la nuit et préparer leur plaidoyer de défense, la parole devant leur être donnée le lendemain.

Bien que très fâché par les accusations le ciblant, qui, si elles sont exactes, ne font pas honneur au sens du devoir et du sacrifice que Ventris tient particulièrement au cœur, notre susceptible héros est bien décidé à balancer leurs quatre vérités à ses détracteurs, mais la visite nocturne et secrète du Capitaine Agemman (à la demande expresse de Calgar en personne, ou du moins le dit-il) vient le convaincre de n’en rien faire. Car pour les Ultramarines, le respect de l’institution passe avant toute chose (ils auraient fait de bons fans de football quelques millénaires plus tôt, en ce sens) et malgré le fait que le procès ne soit pas public, il ne faudrait pas que Ventris entame la confiance absolue que les Frères de Bataille ont dans leurs supérieurs en s’opposant au verdict de ses pairs. Corporates jusqu’au bout, Ventris et Pasanius acceptent donc de se taire et d’accepter le jugement de Calgar, qui les remercie en… les condamnant à mort. Sympa, le Grand Schtroumpf.

Mais attention, pas n’importe quelle mort. Plutôt que de les balancer du haut des falaises formant les chutes de l’Hera, comme la tradition le dicte, le Maître de Chapitre ordonne aux deux brebis galeuses d’aller voir ailleurs s’il y est, dans le cas présent, dans l’Œil de la Terreur, où Tigurius a vu dans un de ses rêves une fabrique à bébés Space Marines du Chaos, qu’il serait opportun de détruire dans les plus brefs délais. Une fois tous les symboles chapitraux enlevés de leurs armures et de leurs personnes, Ventris et Pasanius prennent donc le chemin de l’exil, pour une mission suicide dont ils ne sont pas sensés revenir (mais reviendrons quand même, évidemment).

1 : Voici leur (les plus hauts gradés de ce Chapitre de la Première Fondation, je précise à nouveau) réaction lorsque le terme « Night Lords » est prononcé devant eux.

AVIS :

Nouvelle de transition entre ‘Warriors of Ultramar’ et ‘Dead Sky, Black Sun’, ‘Consequences’ est un épisode assez important de la saga d’Uriel Ventris, car elle explique ce qu’il arrive au Capitaine de la 4ème Compagnie à son retour sur Macragge et le déshonneur subi par ce dernier pour avoir été un libre penseur. En cela, cette histoire est un must read pour tous les lecteurs intéressés par les aventures de Ventris, devant toutes les autres nouvelles (franchement dispensables) que McNeill a consacré à son héros.

Un autre facteur à mettre au crédit de ‘Consequences’ est sa haute teneur en fluff ultramarin, son déroulé sur Macragge et la présence du grand nombre de sommités du Chapitre au casting lui donnant un avantage certain sur la concurrence. Certes, toutes les informations véhiculées dans ces quelques pages n’ont pas survécu au passage des années (qui se souvient encore du Capitaine Pythea ?), mais les détails donnés sur la Forteresse de Hera méritent toujours le détour, si vous êtes friands de ce type de littérature.

Cela dit, tant le déroulé que le style de cette nouvelle se révèlent être des plus classiques, pour ne pas dire quelconques, et McNeill rate son objectif de faire apparaître les deux camps comme étant dans leur bon droit, malgré des vues diamétralement opposées. La rigidité absolue des Ultramarines sur leur précieux Codex, dont la moindre déviation est punissable de mort, paraît bien exagérée (tant aujourd’hui qu’à l’époque, c’est-à-dire avant la résurrection de Guilliman et les révélations qui sont allées avec sur la vision qu’avait le grand homme de ces principes), et les manigances de Calgar pour faire taire Ventris et ainsi préserver l’harmonie de façade du Chapitre, assez indignes du meneur sage et humain qu’il est sensé être. Je pense que McNeill aurait pu trouver un moyen plus vraisemblable de faire bannir son héros dans l’Œil de la Terreur, mais comme partout en ce bas monde, la fin justifie les moyens…

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The Enemy of my Enemy – G. McNeill [40K] – #44 :

INTRIGUE :

40K_The Enemy of my EnemyRescapés malheureux du second siège d’Hydra Cordatus, qui a vu les Iron Warriors du Warsmith (à l’époque où la Légion était si peu abordée par le fluff BL qu’il n’y avait pas besoin de préciser duquel il est question) s’emparer des réserves de glandes progénoïdes stockées dans la forteresse, le Lieutenant-Colonel Mikhail Leonid et le Sergent Ellard du 383ème Jouran Dragoons éprouvent quelques difficultés à s’adapter à leur nouvelle vie d’esclaves sur Medrengard, la planète forteresse de Perturabo et ses cronies. Affectés à la forge d’Obax Zakayo, les Gardes Impériaux triment comme des bêtes dans un environnement de travail difficile, et certainement pas certifié OHSAS 18001. Déjà que nos deux vétérans devraient disposer d’un mi-temps thérapeutique pour traiter le cancer obligeamment refilé par les pilules magiques de l’Adeptus Terra pendant leur garnison sur Hydra Cordatus (portant à un nouveau niveau l’assertion maintes fois vérifiées que la cantine, ce n’est pas bon), la non application par Zakayo des règles les plus élémentaires de Santé & Sécurité résultent logiquement en de nombreux accidents du travail, ce qui ne fait jamais bien dans le rapport annuel. Pour ne rien arranger, les prisonniers profitent d’un relâchement de leur contremaître1 pour fomenter une petite mutinerie, certes très mal organisée et donc condamnée à échouer, mais qui fout un bordel monstre dans l’atelier, et vient définitivement enterrer les objectifs de productivité mensuelle établis par le haut commandement. Comble de déveine, les démons emprisonnés dans les hauts fourneaux sont libérés dans la bagarre, ce qui rend la forge impropre à toute production pendant au moins quelque temps. Avec de tels bras cassés comme fournisseurs, il n’est pas étonnant qu’Abaddon ait dû attendre des siècles entre chaque Croisade Noire, si vous voulez mon avis.

Faisant contre mauvaise fortune cœur de fer (et main de fer), Zakayo emmène les larbins ayant survécu au piquet de grève et à la répression sanglante de ce dernier en randonnée à travers les plaines monochromes de Medrengard, afin de mettre ses esclaves à disposition de Honsou, nouveau commandant de la Grande Compagnie après la promotion de Mr Smith (Zeewähr de son prénom), ancien CEO de la branche. Après quelques jours de marche, les survivants arrivent dans une gare un peu spéciale, et encore plus mal famée que Marseille St Charles, où ne les attend rien de moins que l’Omphalos Daemonium, le Poudlard Express de l’Oeil de la Terreur2. Problème, les esclaves n’ont pas de tickets, et les contrôleurs du bord, une huitaine de démons cousins de Lompal l’Homme Pâle du Labyrinthe de Pan, ne sont guère conciliants. Après avoir dévoré quelques menus morceaux (surtout les cancers, parce que c’est bon les cancers), le gang accepte toutefois de prendre en charge les migrants, qu’ils entassent dans un wagon de deuxième classe tandis que Zakayo va chiller au bar de la première.

Serrés comme des sardines au fond de leur compartiment, Leonid et Ellard se disent qu’il serait judicieux de monter une évasion avant d’arriver à destination, et sont exaucés de manière inattendue par l’attaque du train maléfique, non pas par une bande de peaux-rouges sanguinaires, mais par des Space Marines renégats menés par Ardaric Vaanes, ex Raven Guard, ex Red Corsairs, et désormais tueur en fin de droit sur Medrengard. À peine le temps de faire les présentations et d’ouvrir les portes du wagon que le chevalier albinos est pris à parti par Zakayo, guère satisfait de son intervention. Pendant qu’il règle ce différend, Vaanes enjoint les deux Gardes de stopper l’Horreur Express avant qu’il n’arrive à mauvais port, ce que nos bidasses s’empressent d’entreprendre. Arrivés en tête de train, après avoir évité les contrôleurs avec l’expertise d’un resquilleur du RER B, Leonid et Ellard font la connaissance d’Ivor the Engine Driver, aussi connu sous le nom de Slaughterman, qui prend assez mal leur intervention et refuse tout net de stopper la machine. Il faudra à nos héros toute leur habileté et motivation pour mener à bien la mission qu’ils ont reçue de leur sauveur, et couper les gaz  de la locomotive après que cette dernière ait goulument avalée son malheureux pilote. Seuls rescapés des usagers de la ligne Hell, les Dragoons acceptent l’offre de Vaness’  de rejoindre sa petite bande de parasites, ce qui est toujours mieux que de s’oblitérer la santé dans un métier àlakon pour un patron indifférent. La suite de l’histoire est contée dans à Soleil Noir, Ciel Mort.  It was time for Thomas to leave, he had seen everything…

1 : Lequel est pris d’un coup de barre (de fer) passager, permettant à ses charges de prendre une pause syndicale bien méritée. Pour un Space Marine, se faire sonner par une attaque d’un simple humain malade, affamé et épuisé, ce n’est pas vraiment glorieux.
2 : Oui, McNeill a créé un train démoniaque dans ses romans. Il a dû avoir la révélation après être resté bloqué 30 minutes entre deux stations dans un petit gris transilien non climatisé et complètement bondé pendant ses vacances d’été à Paris.

AVIS :

Passage bonus de la saga centrale de McNeill, mettant aux prises les frères cousins éloignés ennemis Uriel Ventris et Honsou, The Enemy of my Enemy détaille la manière dont les rescapés impériaux de Déluge d’Acier ont été recrutés par les maquisards de Medrengard, peu avant l’arrivée fracassante du Capitaine Ultramarines disgracié et de son sidekick disgracieux sur la planète des Iron Warriors. Comme souvent pour des travaux de jonction de ce type, l’intrigue ne se révèle pas être des plus palpitantes, le principal intérêt de cette nouvelle résidant en la présence de personnages (normalement/peut-être) connus du lecteur, et que ce dernier aura (peut-être/normalement) plaisir à retrouver. Pour le reste, McNeill fait le job de manière correcte et livre un avant ou arrière-goût de l’enfer baroque et industriel des ZAE et réseaux ferrés de la Blagnac de l’Œil de la Terreur. Pas indispensable, mais loin d’être désagréable, donc.

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Altar of Cyrene – L. Soulban [40K] – #45 :

INTRIGUE :

40K_Altar of CyreneVous êtes-vous jamais demandé ce qui s’était passé juste avant les évènements de la campagne de Tartarus, relatée dans le premier jeu de la série Dawn of War ? C’est à cette question que répond ‘Altar of Cyrene’, et, croyez-moi, ça vaut plutôt le détour. Nous nous retrouvons donc à la surface de cette planète suppliciée, alors que son Exterminatus va bon train. Comme l’Inquisition n’aime rien laisser au hasard1, et que les crimes des citoyens de Cyrene étaient apparemment très très haineux (pensez-vous, ils ont voulu devenir indépendants, les monstres), une simple torpille cyclonique ne saurait faire l’affaire, et alors que les vaisseaux de l’Ordo Malleus font pleuvoir la mort sur le monde condamné, des forces issues des troupes de choc inquisitoriales, des Grey Knights et des Blood Ravens passent les cités de Cyrene au fil de l’épée tronçonneuse2. C’est toujours bon d’avoir un contrôle qualité pour s’assurer qu’on ne tue que des morts.

La caméra zoome sur deux personnages bien connus du hobbyiste, le Capitaine Gabriel Angelos et l’Archiviste Akios. Le premier est très colère (au point d’enfoncer des portes à coups de pied alors qu’il y a un trou dans le mur juste à côté, ce qui attire l’attention de Khorne en personne, vous pouvez en être certains), pour une raison mal définie mais qui porte le nom d’Esmond, et que l’officier Blood Ravens souhaite absolument trouver. Habitué aux coups de sang de son ami, Akios tente de calmer la fureur d’Angelos et de convaincre ce dernier d’évacuer sans tarder la zone, qui deviendra récipiendaire du feu et de la fureur impériaux dans quelques minutes. Rien à faire cependant, Gaby veut absolument mettre la main sur l’objet de son désir, et l’Archiviste accepte de lui servir de chauffeur privé (c’est pratique la prescience quand il y a du brouillard sur la route) pour faciliter sa quête, que l’on devine être de vengeance.

Suivent quelques péripéties martiales, qui verront Carlos et Kyrgios massacrer une bande de psykers mutants (avec toucher gracieux et subtil d’oreillette en prime – osef mais c’est dans le récit, alors profitons-en –), taper la discute avec une escouade de Chevaliers Gris entre deux exécutions sommaires de masse, perdre leur Land Speeder d’un tir de missile bien ajusté, décimer une foule de citoyens (loyaux à l’Empereur, je précise) en colère devant la destruction de leur monde, et finalement rallier à pied le lieu où le fameux Esmond a été localisé par un groupe de Blood Ravens (dont un 2ème Akios, parce que c’était visiblement trop compliqué de varier les noms quand on a un casting de plus de quatre Blood Ravens). Là, Angelos donne son après-midi à son chauffeur, et pénètre seul dans le mémorial de Saint Bellstus, où il trouve sa cible en train de prier3. Et là, mes amis, nous passons en mode psychanalyse car Esmond n’est autre que le père de Gabriel Angelos. Si si.

Nous assistons donc à un dialogue de sourds entre les deux vieillards (Angelos a déjà quelques siècles de service à son actif), le fils reprochant au père, que l’on comprend être le Gouverneur Planétaire de Cyrene, d’avoir mené son peuple à la catastrophe, tandis que de l’autre côté du filet, Papa tance son fiston d’avoir attiré l’attention de l’Inquisition sur l’entreprise familiale. Malgré l’apparente justesse de sa cause (on a vu que les insurgés comptaient quelques mutants bien chaotiques dans leurs rangs un peu plus tôt), Gab’ ressort perdant de cette joute verbale à cause de sa sale manie de ramener tout à lui-même, et de se lamenter en premier lieu de la honte que lui apporte la trahison de sa planète, avant de regretter le massacre de quelques milliards de ses ex-concitoyens. Se souvenant subitement que la zone est sur le point de se faire thermoformer depuis l’orbite, Angelos coupe court au débat et réalise un tour de magie qui serait génial s’il n’était pas nul. Saisissant son pistolet bolter, dans lequel il ne reste plus qu’un bolt, il le tend à son père en lui proposant de se suicider pour mettre fin à sa disgrâce. Ce dernier refuse. Angelos reprend alors son arme, y insère son dernier bolt (parce qu’il était en fait moyennement sûr que son pôpa ne cherche pas à le flinguer plutôt que de s’envoyer en l’air, pas folle la buse), et met fin à la réunion de famille d’une pression de l’index, non sans avoir eu la délicate attention de rappeler le bon souvenir de sa mère, qui, elle, a eu le bon goût de s’euthanasier avec l’arme de son fiston, comme il le lui avait intimé. Le truc jaune se roule par terre en bavant à l’arrière-plan, ça doit être le complexe d’Œdipe de la famille Angelos.

Une fois cette formalité accomplie, le bien nommé dernier fils de Cyrene rejoint son vaisseau, où il est rapidement lavé de toute suspicion par le Grand Maître Grey Knights qui supervisait l’opération. On apprend également que cette petite fouine d’Angelos, une fois le problème de sédition de sa planète connu, ne s’est pas contentée de demander un audit inquisitorial, mais a bel et bien requis la destruction de son monde. Avec des ressortissants pareils, pas besoin d’Arch-ennemi. Laissé un poil songeur par les derniers évènements, Gaby sans famille apprend enfin que l’aide de sa Compagnie a été sollicitée sur Tartarus, monde sanctuaire situé à proximité de l’Oeil de la Terreur et victime d’une invasion Ork en verte et pleine forme. La suite ne sera qu’un jeu d’enfant…

: Et a un goût tout à fait merveilleux. Les bombes qu’elle déverse sur Cyrene ont ainsi la forme de statues de l’Empereur (encore plus classe qu’un âne en béton !). Je suis sûr qu’ils ont dû apprécier en bas.
2 : Et laissez-moi vous dire que les pauvres Cyrenois dégustent plutôt salement. Entre les champs de crucifixion et les grenades à acide, ceux qui ont la chance de se prendre un bolt dans le crâne peuvent s’estimer heureux.
3 : Prier qui, on ne sait pas, car il s’est tout de même détourné de l’Empereur, le bougre.

AVIS :

Lucian Soulban est un personnage mystérieux au sein de la cosmogonie BL, qu’il n’a fréquenté que quelques mois vers le milieu des années 2000. Saoudien d’origine (ce qui ne tombe pas sous le sens avec un tel patronyme), notre homme est une figure du monde du jeu vidéo, qui lui doit quelques scripts de blockbusters tels que Far Cry 3 & 4 et Watch Dogs 2.

Les origin stories ont souvent tendance à être convenues et ennuyeuses, en se contentant de souligner les traits saillants d’un personnage connu et cherchant à les expliquer par quelque évènement traumatisant ayant pris place pendant leur enfance. Celle du Capitaine Gabriel Angelos ne rencontre pas ce type de problème, c’est le moins que l’on puisse dire. Et, dans le cas (peu probable je l’avoue) où le lecteur serait un fan transi de la tête de gondole de l’Adeptus Astartes en version PC, le nom de Lucian Soulban pourrait attirer quelques jurons et malédictions bien sentis, tant l’auteur parvient à faire de son héros un énaurme c*nnard, ce qu’il n’était certes pas dans la campagne de Tartarus. Tour à tour dépeint comme colérique, impulsif, sadique, fourbe et mesquin, Angelos est loin d’être un ange, ce qui en soit n’a rien de répréhensible (la compassion est une faiblesse mortelle à 40K), mais s’inscrit tellement en faux avec le personnage de la série Dawn of War que l’on peut légitiment crier au faux raccord. À côté de son supérieur et ami, Akios apparaît comme un sage et un saint, ce qui rend sa déchéance et l’abnégation de cette tête à claque de Gabriel, d’autant plus contre-intuitive. Le lecteur d’’Altar of Cyrene’ n’ayant pas joué la campagne de Tartarus et auquel on demanderait qui des deux larrons a le plus de chance de passer à l’ennemi pourrait légitimement opter pour le fiston d’Esmond, qu’on ne lui en tiendrait pas rigueur. Bref, la characterisation de Mr Soulban ne m’a pas semblé optimale.

Autre source de mécontentement, la maîtrise du fluff assez hasardeuse dont l’auteur fait preuve au cours de son récit. Qu’il s’agisse d’un Exterminatus lancé alors que des forces impériales (non sacrifiables) sont encore au sol, de la présence de Grey Knights en vulgaires Waffen SS inquisitoriaux alors qu’aucun démon ne pointe le bout de sa corne de toute la nouvelle, de la captation en live du massacre des citoyens de Cyrene1, ou encore la mémoire eidétique défectueuse de notre (anti) héros, le cadre d’Altar of Cyrene’ semble être un ersatz un peu grossier de Warhammer 40.000, résultant d’une vague familiarité de l’auteur avec le lore plutôt que d’une véritable appropriation du second par le premier. L’élément le plus problématique de la nouvelle reste toutefois la relation filiale entretenue par Esmond et Angelos, que le psycho-endoctrinement subi par toutes les recrues Space Marines devrait rendre impossible. Bref, si cette soumission s’avère être indéniablement distrayante pour le lecteur, elle l’est majoritairement pour des raisons peu recommandables, et ne présente donc pas un intérêt des plus marqués.

1 : Soit disant pour effet de propagande et instruction des populations d’autres mondes… Ce qui supposerait que l’Imperium reconnaisse que certaines de ses planètes sont tombées aux mains du Chaos et ont dû être intégralement purgées. Pas terrible pour le moral des troupes. Je pense que c’est un Inquisiteur un peu tordu qui souhaitait réaliser un Top 10 des meilleures hécatombes du Segmentum Terra pour animer le séminaire annuel de son Ordos.

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Rattenkrieg – R. Earl [WFB] – #45 :

INTRIGUE :

WFB_RattenkriegUn vieux Prêtre de Morr fan de jardinage et ami des petits oiseaux voit sa paisible retraite interrompue en pleine nuit par l’arrivée d’un visiteur imprévu. Sous ses abords de clochard odoriférant et plus qu’à moitié fou, le nouveau venu se révèle être un Capitaine mercenaire du nom d’Otto van Delft, ayant fait de la dératisation sa spécialité et son gagne-pain. Ereinté par les épreuves qu’il a traversé au cours des derniers jours, le chien de guerre accepte volontiers la soirée boutanche et anecdotes que lui propose l’aimable ecclésiastique pour apaiser son âme troublée. Nous voilà donc plongés dans le Rattenkrieg, ou guerre contre les rats pour ceux qui n’ont ni fait allemand au collège, ni joué à Return to Castle Wolfenstein, menée par la cité impériale de Magdeburg contre ses voisins du dessous.

La casus belli était tout à fait respectable, reconnaissons-le, la jeune et blonde fille du Bourgmestre de la ville, Freda (son papa s’appelle Gottlieb, by the way) s’étant fait enlever par une bande de Coureurs d’Egouts ayant creusé un tunnel jusqu’à dans l’armoire de sa chambre, au nez et à la barbe moustache de son paternel, trop occupé à s’envoyer la jeune fille au pair pour prêter attention aux crises de terreur nocturne de sa chérubine. Déterminé à la retrouver, Gottlieb engagea un expert en dératisation pour aider sa milice à purger les terriers des envahissantes bestioles, ce qui se passa plutôt bien au début. Avec le recul, Otto réalise que cela aurait dû lui mettre la puce à l’oreille, mais pour une fois qu’une expédition dans les souterrains ne se termine pas en eau de boudin au bout de deux heures, pourquoi s’en plaindre, hein ?

D’autres indices incriminants a posteriori furent les cartes très détaillées des galeries Skaven que Gottlieb parvint on ne sait trop comment à fournir à ses hommes, leur permettant de nettoyer plusieurs colonies mineures avec une facilité insolente. Confrontés à rien de plus méchant qu’une meute d’Esclaves à moitié moribonds, Otto et ses miliciens remportèrent leurs premières escarmouches sans coup férir, mais ce n’était malheureusement qu’un gigantesque traquenard mis en place par un ennemi beaucoup trop sournois pour notre brave Capitaine. La bascule eut lieu lorsqu’un de ses lieutenants, Krinvaller, fut retrouvé seul et à l’agonie dans une galerie, serrant dans ses poings une des précieuses cartes utilisées par les impériaux. Le corps dévoré par les poisons utilisés par les Assassins lui ayant planté un surin entre les côtes quelques instants plus tôt, Krinvaller délivra un message incohérent à son supérieur, l’avertissant de l’échec de leur mini croisade et le suppliant d’empêcher Gottlieb de consulter ces fameuses cartes. Otto n’eut pas le temps de se creuser la tête sur ce message cryptique avant qu’une nouvelle attaque ne se produise, celle-ci menée par des Vermines de Choc. Malgré les ravages causés par le tromblon custom de notre héros (affectueusement surnommé Gudrun), l’affrontement se transforma rapidement en débandade échevelée, les humains étant canalisés par leurs adversaires jusqu’à une chambre souterraine afin de permettre l’utilisation de lance-feu dans des conditions optimales.

Fort heureusement, le joueur Skaven fit une série d’incidents de tir au moment de lancer les dés de touche, causant plus de dégâts parmi les Guerriers des Clans amassés pour le son et lumière promis par leur Technomage et à la structure de la caverne qu’aux quelques miliciens encore debout à ce stade avancé de la déroute impériale. L’éboulement qui s’en suivit força les deux camps à stopper les hostilités, au moins temporairement, et si Otto parvint à s’extirper par miracle des décombres et à regagner la surface, aucun de ses compagnons ne fut aussi chanceux.

Cela n’empêche pas le Capitaine déterré et déterminé de repartir aussi sec vers Magdeburg une fois son récit et la bouteille de gnôle du Prêtre terminés. Bien que sa réputation soit aussi ruinée que sa garde-robe, nous avons affaire à un professionnel, qui utilisera toutes ses ressources et ses dernières forces à mener à bien sa mission. C’est beau. La détestation qu’il voue à la noble race anthropomurine n’a en outre qu’été renforcée par la réalisation de la manipulation dont il a fait l’objet, les cartes lui ayant été remises ayant guidé ses forces vers trois clans mineurs, dont l’extermination a fait les affaires d’un quatrième clan, ayant probablement tout manigancé depuis le départ. Et à ce propos…

Début spoiler…Le vieux Prêtre ne tarde pas à comprendre pourquoi son hôte lui a laissé ses cartes au moment de partir. Un examen approfondi de ces dernières permet en effet d’établir sans l’ombre d’un doute qu’elles ont été faites avec de la peau humaine, et très probablement celle de la pauvre Freda, dont l’enlèvement a déclenché la malheureuse Rattenkrieg. Ou comment joindre l’utile à l’agréable, Skaven style…Fin spoiler

AVIS :

Robert Earl fait partie des auteurs de la BL maîtrisant particulièrement bien la mise en scène de l’insidieuse menace Skaven dans leurs écrits (je place C. L. Werner dans cette même catégorie), et il le démontre dans ce ‘Rattenkrieg’ efficace et atmosphérique. Plutôt que de nous abreuver d’une litanie de scènes d’actions sanguinolentes, il fait le choix de relater cette campagne condamnée dès sa première heure à travers une série de flashbacks, ce qui lui permet de couvrir tous les événements marquants de cet affrontement souterrain d’une manière concise et prenante. La petite révélation finale, si elle n’approche pas grand-chose à l’intrigue à ce stade, est une addition narrative bien trouvée, soulignant avec à propos à quel point les Skavens sont infréquentables. La seule chose que je peux reprocher à cette histoire est l’importance un peu trop grande accordée à des personnages qui finalement ne servent pas à grand-chose dans le déroulé du récit, qu’il s’agisse du Prêtre de Morr (qui bénéficie de sa petite scène d’introduction « au jardin », pas très utile à mes yeux) ou du lieutenant Gunter, qui disparait purement et simplement de la nouvelle à un certain moment.

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As Dead as Flesh – N. Kyme [WFB] – #45 :

INTRIGUE :

WFB_As Dead as FleshAlors qu’ils purgeaient tranquillement1 sereinement quelques Zombies dans une localité non identifiée mais définitivement mal famée de l’Empire, la bande de Templiers de Morr du Capitaine Reiner doit composer avec les blessures assez sévères de quelques-uns de ses membres, forçant la sinistre compagnie à faire grand train vers la bourgade la plus proche (Hochsleben) afin de confier ces derniers aux bons soins de l’hospice de Shallya qui s’y trouve. L’ambiance n’est toutefois pas rose dans le patelin, comme le rapporte le diacre alcoolique (Dolmoth) qui tient la permanence morrienne du lieu. Notre homme a des raisons de forcer sur la piquette en effet : tous les jours depuis plusieurs mois, un cadavre frais, et la plupart du temps, délesté d’une partie de son épiderme, est déposé sur les marches de son office, ce qui lui fait faire des heures supplémentaires excessives. N’ayant rien d’autre à faire en attendant que leurs blessés soient remis ou rejoignent le big boss, Reiner et ses sbires (Mikael, Halbranc, Kalten) offrent leur aide afin de débusquer le sinistre Reaper qui tourmente la cité.

L’enquête commence par une autopsie en bonne et due forme, réalisée au sous-sol du temple de Morr par un acolyte dénommé Merrick, qui s’est trouvé un bon petit business au vu du taux de criminalité de Hochsleben. Le malheur des uns… Notre homme n’a toutefois pas grand-chose de neuf à apporter aux investigations, le cadavre présentant toutes les marques habituelles de ce farceur de Reaper. On apprend toutefois au détour de la conversation, que le doc’ a récemment perdu son fils, piétiné par la brigade montée impériale pendant une manifestation de surcôts flaves s’étant mal terminée. Triste. Tout le monde ne s’appelle Felix Jaeger et ne dispose pas d’un pote Tueur Nain imbutable et imbitable pour lui servir de garde du corps. Utilisant les quelques indices glanés au cours des mois précédents et de leur solide bon sens, les Templiers procèdent à quelques interrogatoires de suspects, dont le tanneur de la ville (Lothmar), qui vit reclus dans son échoppe et arbore un masque de cuir pour camoufler les graves brûlures que ses activités professionnelles lui ont valu. Le délit de faciès n’étant pas combattu dans l’Empire, le vaillant petit tanneur est à deux doigts de finir en coupable tout désigné, lorsque de nouveaux évènements viennent relancer l’enquête.

Alors qu’ils se détendaient à l’auberge après cette rude journée, les chevaliers de Morr sont alertés par les cris perçants d’une honnête péripatéticienne, qui a croisé un individu portant ce qui lui a semblé être un cadavre sur son dos. Comme quoi, si on n’est pas très malin à Hochsleben, on est au moins ponctuel. La course poursuite qui s’en suit, mettant aux prises Mikael et Halbranc avec le mystérieux portefaix, se solde toutefois par un échec complet pour les nobles Templiers, le second s’écroulant par la faute d’un point de côté après quelques pas, et le premier faisant de même lorsque sa proie réussit à le poignarder au détour d’une allée, ce qui le met KO pour quelques temps. Il a toutefois la présence d’esprit d’arracher à son agresseur une partie de ses effets, qui se révèlent être un masque très similaire à celui porté par le tanneur. L’enquête progresse ! Se réveillant à la taverne (à croire que l’hospice local était bondé), Mik’ dégaine toutefois l’arme fatale des guerriers de Morr et des auteurs peu inspirés, une bonne vision prophétique des familles, qui lui a montré toute sa compagnie zombifiée. C’est plus qu’il n’en faut pour convaincre notre héros, accompagné du prêtre de la bande (Sigson), de se lancer à la poursuite de leurs frères d’armes afin de s’enquérir de leur bonne forme (en commençant évidemment par les valides, parce que les comateux peuvent se défendre tous seuls, c’est bien connu)…

Début spoiler…Pendant ce temps, Reiner et Cie se sont rendus chez le fameux Lothmar pour une petite explication de texte, mais encore une fois, l’entreprise s’est terminée par des plaies et des bosses, l’intraitable Capitaine mordant à son tour la poussière sous les horions d’un guignol maléfique. Rattrapé par Mikael et Sigson, qui ont croisé Halbranc en compagnie de Merrick sur le chemin (mais non, c’est pas compliqué), Reiner explique à ses hommes que Lothmar était déjà mort à son arrivée, ce qui le retire de la liste des suspects2. Cependant, la disparition de Kalten, qui accompagnait son supérieur sur les lieux, constitue une nouvelle énigme que les Maures doivent résoudre. Heureusement, Sigson connaît un rituel qui permet aux enquêteurs de mener un interrogatoire express de feu Lothar, révélant un indice capital : son tueur puait. Aha.

Sur ces entrefaites, débarquent de nouveaux personnages (comme si l’intrigue n’était déjà pas assez embrouillée comme ça), un Prêtre Guerrier de Sigmar (Rathorne) et son sidekick renifleur Vislen. Il s’avère que Rathorne est également sur la piste du Reaper, et, plutôt que de se présenter à ses confrères de culte, a préféré suivre leurs progrès du coin de l’œil, jusqu’à maintenant. Son aide, ou plutôt celle de son larbin, s’avère toutefois précieuse car elle permet d’identifier l’odeur qui colle aux habits de Mikael comme celle de liquides d’embaumement. Bref, c’est Merrick le coupable, comme tout lecteur avec deux neurones fonctionnels l’avait compris dès l’instant où Kyme avait révélé la mort tragique du fils de ce dernier.

La nouvelle peut enfin entrer dans sa phase finale, avec les héros en état de combattre faisant s’abattre leur juste colère sur le repaire du malfaisant. Pour équilibrer un peu les choses, le doc’ peut compter sur l’appui de l’entité maléfique qu’il a réussi, on ne sait trop comment, à ramener depuis les morts, et qui lui a promis son aide pour ressusciter son fils en échange de cadavres frais (mais jamais assez, si cela fait trois mois que Merrick surine à tout va). La baston qui s’engage se termine comme de juste par un incendie généralisé du temple de Morr, qui a raison de l’hôte de Voldemorr (ce pauvre Kalten), et permet donc à Hochsleben de refermer cette page douloureuse de son histoire. Cependant, l’absence du cadavre de Merrick dans les décombres du lieu saint, et la vision fugace de ce dernier respirant une mystérieuse fumée noire3 exhalée par un Kalten possédé, fait craindre le pire à nos zélés Templiers…Fin spoiler

1 : Difficile d’être tranquille quand on se bat contre des adversaires capables de percer l’acier d’une cuirasse à main nue. Les Zombies de Kyme ont pris des stéroïdes, ce n’est pas possible autrement.
2 : En fait, le tanneur était albinos, ce qui explique pourquoi il ne sortait pas le jour. On s’en fout au final mais Kyme tenait à ce détail, donc autant le préciser ici.
3 : Le qualificatif est important, car au milieu d’un incendie, des fumées noires classiques, ce n’est pas ce qui manque.

AVIS :

Avec ce As Dead as Flesh, Kyme livre une nouvelle réussissant l’exploit d’être à la fois trop simple et inutilement complexe dans son intrigue. D’un côté, l’enquête à laquelle se livrent les héros se trouve être résolue par le lecteur un minimum familier des techniques narratives du genre (« oh, un personnage secondaire sur lequel l’auteur nos donne des précisions nous permettant de l’identifier facilement par la suite, et disposant d’une bonne raison d’en vouloir à ses concitoyens… ») moins d’une page après avoir été commencée. De l’autre, les allers et venues de la galerie conséquente de personnages convoqués par Nick Kyme pour soutenir son propos brassent de l’air et des pages, et leurs chassés croisés occupent la majeure partie du propos. Si on ajoute à cela le fait que les personnages en question n’ont pas grand-chose d’intéressant ou d’attachant (même si la pusillanimité de Mikael, qui a peur de beaucoup de choses depuis le jugement de Reiner jusqu’à la grosse voix du tavernier, se révèle être une caractéristique « mémorable »), on se retrouve avec une sorte de mauvaise pièce de théâtre de boulevard tragico-fantastique, mélange assez indigeste et surtout, très peu intéressant. Je ne peux donc pas assez conseiller aux amateurs du genre de se pencher sur les travaux, assez similaires dans l’esprit mais beaucoup plus aboutis dans la forme, que Josh Reynolds a consacré au très saint et très violent Ordre de Manann, afin de plonger dans le quotidien trépidant de Templiers impériaux. Malheureusement pour Kyme, less is Morr…

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Engage the Enemy – J. Smith & H. Heckel [40K] – #45 :

INTRIGUE :

40K_Engage the EnemyThokar, Prêtre Loup des Space Wolves, emmène une petite force de fils de Russ à la surface d’un monde jungle où l’Imperium livre bataille aux hordes chaotiques d’Abaddon. S’attendant à une forte résistance de la part des Iron Warriors auxquels il souhaite contester le champ de bataille, Toto s’étonne de ne trouver que des cadavres de renégats, autour desquels flotte une odeur fauve bien caractéristique. S’il apparaît rapidement que des Wulfens trempent dans ce mystère (c’est bien la seule chose dans laquelle ces chiens fous acceptent de s’immerger), un rapide décompte des Astartes présent sur le terrain permet d’établir sans doute possible qu’aucune des charges de Thokar n’a perdu les pédales. Après avoir relevé des éclats de peinture d’un gris très particulier (c’est Les Experts : Fenris, cette nouvelle), le Prêtre Loup finit par comprendre que c’est la légendaire 13ème Compagnie qui est responsable des malheurs des Irons Warriors. Et un petit coup de patte de la part de leurs lointains cousins ne sera pas de trop lorsque les Marines chaotiques lanceront leur contre-attaque…

AVIS :

Petite nouvelle sans prétention ayant presque plus sa place dans un encadré fluff du Codex Eye of Terror que dans un numéro d’Inferno !, ‘Engage the Enemy’ se révèle être un compte-rendu romancé d’un accrochage sans enjeu (ce qui est tolérable) ni tension narrative (ce qui l’est moins) entre une bande d’Iron Warriors totalement à côté de leurs augmétiques1 et une force de Space Wolves dont le meneur tient plus du chien renifleur que du loup alpha. De là à dire que Thokar est en un, il n’y a qu’un pas que je laisse à chacun le soin de franchir en son âme et conscience. Sur la forme, la première soumission de Lee Lightner (l’incarnation littéraire de Harry Heckel et Jeff Smith) n’est guère plus remarquable, ou alors pas à son avantage, le style parfois répétitif (Wolf lord, vous avez dit wolf lord ? Comme c’est wolf lord), parfois abrupt du duo ne contribuant guère à hameçonner le lecteur. Passe encore que ça ne dure que 8 pages, plus (et notamment ‘Sons of Fenris’ et ‘Wolf’s Honour’) aurait sans doute été déplacé. De l’habitude naît l’ennui, mais de l’hébétude naît l’inuit. Ce qui ne veut rien dire. Comme cette nouvelle.

1 : Mentions spéciales jumelées aux Champions Dalloc et Kurnos, le premier pour s’être montré plus captivé par les jeux de lumière sur sa griffe énergétique que son environnement immédiat – ce qui lui fit perdre la tête –, le second pour avoir sagement attendu que la mort vienne le prendre dès l’instant où il a croisé la route des loubards du Warp.

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Menshad Korum – C. S. Goto [40K] – #46 :

INTRIGUE :

40K_Menshad KorumL’Exarque Vlalmerch du clan Saeemrar a été assassiné dans son sanctuaire de Saim-Hann, et sa pierre d’âme volée. Le défunt n’était pas seulement un seigneur de guerre respecté, mais également le Menshad Korum, ou Guerrier Perdu, statut honorifique autant qu’horrifique, car reflétant les irrépressibles penchants meurtriers du bonhomme. Pratique pour mener ses troupes à la victoire et mettre le feu (Vlalmerch a fait trois siècles de service dans le temple Dragon de Feu avant de retourner au bercail) au dancefloor, moins adapté en revanche à une paisible retraite dans le réseau d’infinité servant d’EHPAD aux Eldars canés. C’est pourtant ce que ses assassins, l’Exarque Guerrier Scorpion Arbariar et l’Arccube (mi-Archonte, mi-Succube, c’est une Guerrière Concept) Bureea, ont derrière la tête1, et elles se hâtent lentement vers le cœur du Vaisseau Monde pour aller plugger la babiole sur le disque dur de Saim-Hann. Pourquoi me direz-vous ? Eh bien, c’est compliqué et nébuleux, mais j’ai cru comprendre que c’était l’option la moins pire se présentant aux conjurés, averties par des visions troubles de la corruption totale de Vlalmerch et donc du danger de 1) le laisser vivre et 2) laisser sa pierre d’âme enchâssée dans son armure rituelle, où elle pervertirait à coup sûr son successeur. Les clans Chevaucheurs Sauvages étant fondamentalement opposés à la décharge sauvage de déchets dans l’espace, l’option de balancer discretos le caillou par un hublot ne fut pas retenue, déclenchant au bout du compte une guerre civile entre Saeemrar et Scorpionidas (Arbariar et Bureea ayant eu l’excellente idée de partir en mission commando avec des shurikens en forme de scorpion, permettant aux suivants de Vlalmerch d’identifier les coupables en deux secondes).

Avant de commencer la vendetta que le meurtre de V’la l’Merch impose, il faut toutefois offrir au défunt des obsèques dignes de son rang, et surtout, choisir son successeur parmi les guerriers du clan. Cette prérogative revient normalement à un Prescient, mais voyant que personne n’écoute ses mises en garde, ce dernier lâche rapidement l’affaire et se désintéresse du sujet, faisant de Quereshir, fils de Vlalmerch, l’heureux nouveau possesseur de l’armure paternelle. Après une session d’essayage compliquée, relevant plus de l’enfilage de camisole de force enduite de poil à gratter que du subtil alignement des pierres esprits des anciens porteurs avec l’esprit de l’impétrant, c’est enfin l’heure de la revanche, et Quereshir emmène ses forces toquer à la porte du temple des Scorpionidas pour une petite explication de texte. S’en suit une boucherie sans nom ni subtilité, au cours de laquelle tombent un grand nombre d’Eldars, y compris Bureea (la Psyker au mental le plus fragile qui soit) et Lureeal (le second de Quereshir) qui le valait bien alors que son armure ne valait, elle, rien.

Au bout du suspense, ou en tout cas de la dernière ligne droite vers le port USB central, Quereshir et Arbariar finissent par s’affronter (quand je vous disais que cette dernière n’avait pas une grosse pointe de vitesse, je n’exagérais pas2), et le Menshad Korum sort logiquement vainqueur de ce duel inégal. Il faut dire que quand il n’y a pas de piliers pour renvoyer les shurikens, c’est tout de suite plus dur pour Arbie. Malgré les supplications de cette dernière, Quereshir récupère la pierre paternelle et la replace sur son armure, ignorant sa noirceur de mauvais aloi…

Début spoiler…Et, ô surprise, il se fait immédiatement souljacker par la présence dérangée de Vlalmerch, confirmant les craintes de la désormais défunte Arbariar. À l’autre bout de la galaxie, cette bonne vieille Lelith Hesperax, qui avait été vaincue il y a un siècle de cela par l’alliance des clans Saeemrar et Scorpionidas, s’interrompt un instant entre deux décapitations de Succubes (une pratique sadomasochiste extrême mais courante chez les Drukharis) et réception de brouillard parfumé au terreau pour partir d’un grand rire machiavélique. ‘Twas her all along, bien sûr, et la corruption de Vlalmerch autant que la guerre civile ayant endeuillée Saim-Hann sont de son fait. Demandez pas comment par contre, car la bougresse s’est contentée de se faire fesser en beauté face caméra par Vlalmerch et Arbariar lors de leur précédent affrontement, ce qui n’explique pas comment son plan diabolique a pu se mettre en place. À moins que le pacte qu’elle a conclu avec Slaanesh y soit pour quelque chose. Wait… Les Eldars Noirs n’ont peut-être pas de Psykers (enfin si, ils ont Lelith WAIT…), mais ils maîtrisent l’art cryptique du TGCM. Ca se vaut, moi je dis.Fin spoiler

1 : Vlalmerch ayant lui derrière la sienne un éclat de shuriken lui ayant été fatal, la redoutable technique du ricochet sur pilier de moelle spectrale étant venue à bout de ce guerrier suprême, mais joueur de billard médiocre.
2 : Les Saeemrar ont tout de même eu le temps d’organiser les funérailles de leur chef, les essayages de son successeur, et l’assaut sur le temple Scorpionidas, sans qu’Arbariar soit foutue de voyager jusqu’au cœur de Saim Hann avec sa bécane à vitesse sonique. Je la vois comme ça hein.

AVIS :

Goto s’embourbe dans des facilités scénaristiques aussi inexplicables que regrettables avec ce ‘Menshad Korum’, venant ruiner les sincères efforts qu’il déploie en introduction pour dépeindre la culture eldar (fonctionnement de la Voie et des temples aspects, importance du psychisme, géopolitique des clans de Saim-Hann…). On est en droit de considérer cette tentative comme pas très subtile, les personnages se balançant des vagues d’émotions dans les gencives comme nous autres pauvres Mon-keigh nous enverrions des seaux d’eau à la figure, mais on doit au moins reconnaître que Goto a essayé de dépayser son lectorat (sans respecter le background établi, certes). Malheureusement, tant l’intrigue que son déroulé s’avèrent rapidement problématiques, empêchant de prendre longtemps au sérieux cette histoire à la fois bêtement simple et stupidement complexe. Le tout donne l’impression de servir d’introduction à un arc narratif qui aurait été développé ailleurs par l’auteur (histoire de comprendre le rôle d’Hesperax dans la choukhroute et l’identité de la mystérieuse divinité avec laquelle elle a conclu un pacte1), et à en croire certains retours de fans, ce serait plus ou moins le cas2. Bref, une nouvelle qui ne viendra pas relever la réputation de notre homme parmi les amateurs de GW-Fiction, ce qui est dommage car il y avait un potentiel assez intéressant dans cette histoire.

1 : D’instinct, j’aurais dit Slaanesh, mais la description qu’en fait Goto laisse plutôt penser à Nurgle.
2 : Il semblerait que ‘Menshad Korum’ ait été intégré, au moins en partie, dans le roman ‘Warrior Coven’ (en piste pour le prix du roman de la BL à la couverture la plus moche).

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Hetzau’s Follies – N. Long [WFB] – #46 :

INTRIGUE :

Stationné dans la petite ville de Vulsk, à la frontière du Kislev, après avoir été glorieusement et légèrement blessé lors d’un affrontement contre les hordes nordiques, le Pistolier Reiner Hetzau, rat de taverne devant l’éternel, s’ennuie ferme pendant sa convalescence. Accompagné de son stagiaire (Karl Hennig), qu’il se fait un point d’honneur d’initier aux joies et plaisirs de la vie de soldat en campagne, notre héros doit de plus composer avec des problèmes de trésorerie conséquents, la paie promise par le Comte Jurgen ayant été perdue corps et bien dans l’attaque du wagon du trésorier payeur par une bande de Maraudeurs, qui auront bien mérités leur qualification pour le coup. Désespérant de pouvoir mener le train que son sang (bleu) lui réclame mais que sa bourse (plate) lui refuse, Hetzau voit l’arrivée en ville d’un convoi de grands blessés, mené par une frêle et plutôt mignonne sœur de Shallya, comme l’occasion de joindre l’utile le vertueux à l’agréable, et propose donc à la pauvre Anyaka son aide après que l’accès à Vulk lui ait été refusé par un butor de Sergent, plus préoccupé par la santé publique du campement impérial que par le malheur de quelques moribonds.

Ayant négocié auprès d’une mère maquerelle de sa connaissance la sous-location des étables de sa taverne, Hetzau supervise l’installation d’Anyaka et de ses charges dans les locaux réquisitionnés, empochant au passage, en plus de la reconnaissance émue de la pauvresse, une partie non négligeable du contenu de la cassette qu’elle a prise avec elle au moment du sac de son hospice par les Kurgans. Dépensant rapidement leur pécule en spiritueux et accorte compagnie, les deux Pistoliers reviennent rapidement s’enquérir du bien-être de leur connaissance (un peu) et trouver un nouveau moyen de la délester de ses espèces (surtout). Coup de bol, Anyaka semble toute disposée à écouler son magot en récompense de menus services que les deux compères sont heureux de lui rendre, comme faire accepter un Kislevite très abîmé à l’hôpital de campagne impérial ou l’approvisionner en simples auprès de la guérisseuse locale. La suspicion d’Hetzau est toutefois attisée lorsque la naturopathe kislevite l’informe que la liste de courses remise par Anyaka n’est composée que de substances très toxiques, et donc plutôt impropres à la consommation, sans parler de leurs vertus curatives des plus discutables. De plus, la crise que Baba Yaga pique quand l’affable impérial cherche à la payer avec un anneau hérité d’Anyaka, et que la mégère reconnaît comme étant la possession d’un Boyar local, tombé au combat contre le Chaos et enterré avec son bien il y a quelques temps, achève de convaincre notre fin limier que quelque chose ne tourne pas rond…

Début spoiler…De retour à l’étable/mouroir d’Anyaka, Hetzau cherche à confronter cette dernière, mais la promesse d’une récompense en nature de ses bons et loyaux services susurrée au creux de son oreille suffit à rediriger suffisamment de sang du cerveau au… de notre héros pour qu’il oublie soudainement toutes ses réserves envers la sœur de Shallya, et accepte à nouveau de lui rendre service. Il s’agit cette fois-ci de charrier deux cadavres vers le lieu de leur dernier repos, la décharge morricipale pour le premier, et le cimetière local pour le second. Si le début de la mission se déroule sans coup férir, les deux croque-morts amateurs sont témoins sur le chemin de l’ossuaire d’un spectacle inquiétant : le repêchage du puits de la ville du cadavre putréfié et ballonné d’un des soldats qu’Anyaka avait sous sa garde, ce qui ravive aussi sec les soupçons de ce galant d’Hetzau. Faisant volte-face pour aller demander des explications à leur commanditaire, les Pistoliers sont ralentis sur le chemin du retour par l’explosion de leur dernier macchabée, qui répand une nuée de Nurglings aux alentours.

Tout à fait convaincu de s’être fait rouler, ce qui le chagrine beaucoup, Hetzau arrive finalement aux écuries, où il trouve l’ingénue Anyaka en pleine séance de naturisme hardcore, à concocter une tisane un peu spéciale sur son brasero en rendant hommage à Nurgle. Bref, c’est la mouise. Désireux de corriger le tir, ce qui pour des Pistoliers est une qualité première, Hetzau et Hennig se lancent à l’assaut de la bougresse, mais l’invocation massive de Nurglings que cette dernière fait passer en irrésistible (on est à Warhammer Fantasy Battle, notez bien) a bientôt raison du sidekick, grignoté à mort par les Schtroumpfs du Chaos, et retarde suffisamment Hetzau pour permettre à la cultiste de s’échapper de l’écurie et aller emmener sa marmaille s’encanailler dans la taverne toute proche, avec des résultats déplaisants pour les clients de cette dernière. Suivant malgré tout de près, notre héros arrive presque à acculer (le préfixe est important) Anyaka dans une alcôve, mais cette garce arrive à se faire passer pour la pauvre sœur de Shallya qu’elle prétend être auprès d’une paire de chevaliers en maraude, qui voient donc d’un mauvais œil les velléités féminicides entretenues par Hetzau envers sa presque ex.

Finalement, après quelques péripéties et passes d’armes effrénées, le Pistolier arrive à neutraliser la sorcière en la pendant haut et court à une poutre de l’étable en feu. Malheureusement pour lui, ce haut fait se révèle être difficile à justifier auprès des autorités compétentes, le corps d’Anyaka disparaissant dans les flammes avec toutes les preuves matérielles de sa duplicité, et faisant d’Hetzau le coupable tout désigné des forfaits perpétrés par cette dernière. La nouvelle se termine donc sur la vision morose de notre héros attendant dans sa cellule sa prochaine exécution pour crime de haute trahison et propagation épidémique. Ceci dit, Hetzau est un vrai disciple de Ranald, et il n’y a pas de mauvais pas duquel il ne saurait se tirer si on lui autorise un jet de persuasion. Et ça tombe bien, son geôlier est une vieille connaissance…Fin spoiler

AVIS :

Introduction de fort bon aloi livrée par un Nathan Long, alors nouveau contributeur de la Black Library, à son personnage fétiche de Reiner Hetzau et à la série des Black Hearts, Hetzau’s Follies est un modèle de nouvelle d’action et d’aventure prenant place dans le Vieux Monde. Long parvient en effet à cocher toutes les cases du genre avec bonheur et panache, combinant une présentation de son héros et de la situation qui l’a mené à rejoindre les Black Hearts, avec une investigation mâtinée de combats menée tambour battant dans l’univers sinistre et envoûtant de Warhammer Fantasy Battle. Qui plus est, Hetzau’s Follies fonctionne réellement comme une soumission indépendante, et, bien que la nouvelle ait été intégrée comme chapitre introductif du premier tome de la série des Black Hearts, Valmir’s Bane, peut être lue indépendamment de ce dernier sans donner l’impression d’avoir été brutalement arrachée à une œuvre plus conséquente, ce qui arrive malheureusement assez souvent quand on considère les nouvelles « introductives » de la BL.  Cela n’a peut-être l’air de rien pour le lecteur non familier des standards habituels de cette dernière, mais laissez-moi vous dire que cette maîtrise narrative place notre homme dans le haut du panier des contributeurs de la maison d’édition de Nottingham, et vous tenez avec ce Hetzau’s Follies un échantillon tout à fait représentatif de sa prose efficace autant qu’inspirée. À consommer sans modération (comme sa série Black Hearts d’ailleurs), mais soyez prévenus que le retour à l’ordinaire de la Black Library risque d’être difficile…

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Gardens of Tycho – D. Abnett [40K] – #46 :

INTRIGUE :

40K_Gardens of TychoLa morne vie du Magos Biologis désoeuvré (maintenant qu’il a terminé la taxonomie de Gershom depuis belle lurette, voir ‘The Curiosity’) Valentin Drusher est interrompue un soir par l’arrivée imprévue d’un agent de l’Arbites dans son humble logement. Croyant que ce sont ses activités illicites de professeur particulier d’aquarelle de la fille d’un maffieux local – alors que l’Administratum l’emploie déjà et interdit formellement le cumul des emplois ! – qui lui valent cette visite, le timide Drusher se voit déjà condamné à perpétuité en punition de ce crime odieux, et suit sans broncher l’officier Falken jusqu’au poste, situé dans la ville en ruines de Tycho. C’est très dommage car son protecteur lui avait donné un beau bout de brisket en extra cette fois-ci, mais que voulez-vous, nul ne peut échapper à la loi.

Il s’avère au final que notre héros a été appelé en renforts par une ancienne connaissance commune (de lui et de vous, lecteur instruit) : Germaine Macks. Simple adjointe au moment des faits de ‘The Curiosity’, sept ans plus tôt, Macks a pris du galon depuis et est maintenant en charge du maintien de l’ordre à Tycho, cité ravagée par les affres de la guerre civile. Depuis quelques temps, des cadavres portant des blessures similaires et ayant été en partie consommés s’accumulent dans la morgue locale, et Macks soupçonne un des pensionnaires exotiques du zoo de Tycho, tombé en deshérence pendant le conflit, d’être responsable de ces meurtres. Pour vérifier cette intuition, elle a jugé bon de faire appel à son vieux copain Drusher, sommité incontestable en matière de grands prédateurs. Bien que le Magos ne soit d’abord pas emballé par la proposition, la perspective d’arrondir un peu ses fins de mois et de passer du temps avec son lointain crush germain le convainquent rapidement de mettre ses compétences spéciales au service de l’oie et du jars de l’ordre.

Après un rapide examen du cadavre le plus frais du lot, littéralement défiguré par une blessure à la précision chirurgicale, Drusher et Macks enchaînent les visites au zoo abadonné (so romantic), les inspections de scènes de crime (even more romantic), et les nuits sur le canapé défoncé du poste (marry me already), jusqu’à ce qu’enfin se présente une occasion de coincer l’insaisissable tueur (possiblement un carnodon de Gudrun), après qu’un junky terrorisé ait appelé les Arbites à l’aide suite à des bruits suspects à l’étage du dessus de son squat…

Début spoiler…L’arrivée des forces de l’ordre est toutefois trop tardive pour permettre à la victime, une femme âgée qui vivait seule, de s’en tirer en un morceau. Si le cadavre porte bien la trace de consommation par un grand carnivore comme le carnodon, Drusher remarque cependant des divergences majeures avec les corps précédemment inspectés. Son travail est toutefois interrompu par le meurtre brutal d’un des Arbites qui était parti inspecter les alentours, proprement découpé à son tour par le tueur en série. Par chance, Drusher parvient à apercevoir ce dernier au moment où il prend la fuite, et conclut de manière définitive que ce n’est pas grumpy cat le coupable, mais bien un individu humanoïde, qu’il convient maintenant d’empêcher de nuire.

Cette réalisation tombe au plus mal, car Falken – malgré son alcoolisme notoire – réussit à abattre le fameux carnodon (qui avait vu de meilleurs jours) échappé du zoo lors d’une patrouille de routine. Convaincus qu’ils sont venus à bout du meurtrier, les Arbites ne sont guère intéressés par les doutes de leur expert animalier, jusqu’à ce Drusher démontre à Macks que les victimes peuvent être classées en deux catégories : une minorité a bien été tuée, ou au moins dévorée, par le carnodon grabataire et opportuniste que Falken a changé en descente de lit ; mais la majorité, dont les corps ont été laissé intacts mis à part leur défiguration clinique, peut être attribuée au mystérieux rôdeur entraperçu par Drusher. Une fois les victimes de Diego sortis de l’équation, on se rend compte que le second tueur opère sur un périmètre parfaitement circulaire, comme s’il était programmé pour le faire…

Début spoiler 2…Et c’est en effet le cas, car c’est un Serviteur de combat détraqué qui se trouve être responsable des assassinats, commis avec les deux tronçonneuses qu’il a montées au bout des bras. Chargé de protéger le bâtiment central de l’Administratum pendant la guerre civile, et oublié là par les belligérants après la fin de cette dernière, le brave cyborg a continué à châtier les misérables pénétrant dans son périmètre assigné. Qui peut le blâmer pour cela ? Au terme d’une traque stressante et mortelle pour la moitié des collègues de Macks, l’homme machine est enfin mis hors service, mettant un terme à ses déprédations… et signant le début de la romance qu’on attendait tous entre le distingué Magos et la flic dure à cuire. Ils se marièrent (brièvement) et eurent beaucoup d’enfants emmerdes…Fin spoiler

AVIS :

Dan Abnett fait reprendre du service au Magos Biologis Valentin Drusher et à sa coriace partenaire Germaine Macks dans ce ‘Gardens of Tycho’, qui reprend la recette du succès de ‘The Curiosity’ et nous livre une nouvelle enquête animalière-mais-en-fait-c-est-plus-compliqué-que-ça, ma foi fort réussie. Comme précédemment, Abnett parvient à mélanger savamment investigations policières un peu gore, mise en scène du quotidien d’une planète lambda de l’Imperium, et interactions entre personnages aussi désabusés qu’attachants, pour un cocktail final d’une très grande efficacité. On ne saura jamais si l’arrêt brutal de la publication d’Inferno! au numéro #46 (où cette nouvelle figurait) est venu mettre un terme prématuré aux plans que Dan Abnett avait pour cette paire mal assortie mais détonnante, mais il convient en tout état de cause de savourer la courte1 carrière de Magos Valentin Drusher comme héros de la Black Library. C’est de la bonne.

1 : Bien des années plus tard, Abnett remettra Drusher et Macks sur le devant du Daniverse dans ‘The Magos’, où ils se feront recruter par un Eisenhorn très très rogue pour enquêter sur une série de disparitions impliquant des ursidés grognons.   

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Sickhouse – C. L. Werner [WFB] – #46 :

INTRIGUE :

WFB_SickhouseSur la piste du voleur Riano, parti se planquer dans l’arrière-pays de Mirigliano après ses derniers exploits, Brunner se retrouve contraint de coopérer avec un collègue chasseur de primes (Sabarra), lui aussi à la recherche du fugitif. Frappée de plein fouet par une épidémie de varicelle fièvre rouge, la région grouille en effet de cultistes de Nurgle menés par leur zozotant champion Pulstlitz, bien décidé à raser l’hospice de Shallya local pour la plus grande gloire de papy Prout.

Un peu barbouillé suite à un échange de fluides avec un Pestigor très entreprenant, Brunner n’a d’autre choix que de se rendre lui aussi à l’hospice en question, où il tombe sur une vieille connaissance (Elisia), lui tenant toujours un peu rigueur de l’avoir utilisée pour mener à bien un contrat précédent. L’inflexible chasseur de primes réussira-t-il à vaincre Ebola à temps pour empêcher les cultistes de pourrir la moquette du lieu saint avec leurs gros pieds boueux ? Parviendra-t-il à recoller les morceaux avec Elisia ? Le lance-harpon utilisé par Sabarra sert-il vraiment à quelque chose ? Pulstlitz est-il seulement capable de prononcer son nom correctement ? Autant de questions dont les réponses peuvent être trouvées dans la suite de ‘Sickhouse’.

AVIS :

Werner prouve une nouvelle fois qu’il maîtrise parfaitement le genre de la nouvelle sérialisée, en faisant vivre à son héros une aventure finement menée et impeccablement rythmée. Il prend en outre le temps de développer le caractère et la psychologie de ses personnages, qui se distinguent en conséquence des légions de stéréotypes à peine nommés qui constituent une part importante des protagonistes des publications de la BL. L’auteur justifie également les actions et les choix de ses personnages de manière claire et cohérente1, ce qui est toujours appréciable et dénote un savoir-faire consommé, l’abus de TGCM/WIJH2 étant une autre tare récurrente dans les écrits de ses petits camarades de jeu. Enfin, dans la catégorie « writer skills », on notera le soin avec lequel Werner replace Sickhouse dans le contexte de la série Brunner, Bounty Hunter (en relatant par exemple la précédente rencontre entre BBH et la douce Elisia), ce qui permet de profiter de cette nouvelle sans avoir nécessairement lu les précédentes. Certains considèreront que les bons points distribués dans ce paragraphe devraient aller de soi (sans doute à raison), mais le niveau des contributeurs de la Black Library est si hétérogène qu’il est toujours bon de saluer le travail d’un vrai professionnel.

Par ailleurs, j’ai apprécié les références faites par ce matois de C.L. Werner à l’univers du western dans sa nouvelle, en particulier aux deux derniers films de la Trilogie des Dollars (Et pour quelques dollars de plus – Le Bon, la Brute et le Truand). Sabarra est ainsi décrit comme une sorte de Lee Van Cleef tiléen, tandis que Brunner joue les Clint Eastwood de service, les dialogues entre les deux se révélant tout à fait dans le ton de ceux du film de Sergio Leone. Le passage où Sabarra est contraint d’amener Brunner à l’hospice de Shallya afin que ce dernier consente à lui dire où se cache le voleur en fuite est également une réjouissante pastiche de la traversée du désert de Blondin et Tuco3.

Nerveux, crédible, sombre et caustique, ‘Sickhouse’ est le genre de nouvelle pour lequel on s’obstine à lire des bouquins de la Black Library, le genre de nouvelle que Warhammer Fantasy mérite.

1 : Par exemple, il prend bien soin d’expliquer pourquoi Elisia, qui déteste Brunner, décide de donner à ce dernier un peu de l’incommensurablement précieuse « eau de vie » (au premier degré) de Shallya, normalement réservée à l’usage exclusif des membres du clergé de la déesse. Qui plus est, il donne une raison bassement terre à terre pour justifier cet acte, ce qui ne le rend que plus crédible. Elisia est en effet consciente que laisser mourir Brunner alors qu’elle a la possibilité de le sauver, uniquement parce qu’elle lui en veut, irait à l’encontre des enseignements de Shallya. C’est donc pour éviter d’être hantée jusqu’à la fin de ses jours par cette « mauvaise action » qu’Elisia décide de sauver la vie du chasseur de primes. Comme elle le dit elle-même : « I am too selfish to let you die ».
2 : TGCM = Ta Gueule, C’est Magique. Ou comment utiliser la nature « magique » de la fantasy pour masquer le fait qu’on n’a jamais réfléchi à certains problèmes (généralement très prosaïques).
Exemple :
« Comment les Hordes du Chaos peuvent-elles être aussi nombreuses, alors qu’elles viennent de steppes désolées et glacées peuplées de créatures monstrueuses et de démons, et passent leur temps à se battre entre elles ? »
« TGCM »
WIJH = Well, It Just Happened. Ruse scénaristique utilisée par les auteurs médiocres pour insérer des péripéties rocambolesques dans leurs histoires sans se soucier de leur vraisemblance.
Exemple :
« WIJH qu’un ordre entier de chevaliers impériaux passait à proximité de (ou plutôt, s’est matérialisé dans) Helmstrumburg pile au moment où la ville était sur le point de tomber aux mains des Hommes-Bêtes. »
3 : Original : “I’ll sleep better knowing my good friend is by my side to protect me.” Hommage: “You should start praying again. Pray now that I recover.”

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Et voilà qui conclut, à la fois cette revue de l’ultime année de publication de la série initiale d’Inferno!, mais également mes critiques sur les 173 nouvelles qui constituent ce corpus fondateur de la Black Library. Même si j’ai commencé cette activité, il y a maintenant plus d’une décennie, avec un tout autre but que celui-ci, ces histoires ont rapidement eu une place centrale dans mes chroniques, que ce soit à travers la revue des nombreux recueils que la BL a sorti pour les remettre au goût du jour, ou plus tard, par l’étude directe des numéros d’Inferno! Ce n’est donc pas sans une certaine émotion que je tourne cette looooooongue mais fondamentale page, en espérant que ma passion (parfois un peu vache, je l’avoue) pour la GW-Fiction ait été perceptible de l’autre côté de l’écran. Bien qu’au moment où ces lignes sont écrites, la Black Library a l’air d’avoir re-remisé le concept d’Inferno! au placard, je reste persuadé que ce n’est pas la dernière fois que nous croiserons ce nom légendaire ici. On a déjà eu droit à un come back inespéré, alors pourquoi pas à nouveau ?

BLACK LIBRARY EVENTS ANTHOLOGY 2018/19 [Recueil]

Bienvenue dans cette revue de la Black Library Events Anthology 2018/19, petit livret distribué par la BL à la fin des années 2010 lors des événements de Games Workshop où elle était présente. Le concept est simple : proposer en avant-première quelques nouvelles écrites par des plumes établies de la GW-Fiction, qui seront republiées plus tard de manière plus accessible au grand public. Pour la petite histoire, il aura tout de même fallu attendre 2022 et la sortie de ‘Lupercal’s War‘ pour pouvoir lire le ‘Champion of Oaths’ de John French.

Black Library Events Anthology 2018_19

Bien évidemment, la différence principale avec la première « saison » des Events Anthology (2011-14) est le remplacement de Warhammer Fantasy Battle par Age of Sigmar, et le millésime 2018/19 nous propose donc deux nouvelles tirées tout droit des Royaumes Mortels. Pour le reste, c’est du classique et de l’éprouvé, avec un trio de nouvelles 40K et un duo de textes hérétiques. Comme l’illustration de couverture le révèle aux hobbyistes vétérans, le Capitaine Ultramarine Uriel Ventris est de retour aux affaires après quelques années de hiatus, et rassurez-vous il va très bien. Le contexte étant planté, il est temps de passer aux choses sérieuses et voir si cette nouvelle saison est du niveau des précédentes…

BLACK LIBRARY EVENTS ANTHOLOGY 2018_19

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Champion of Oaths – J. French [HH] :

INTRIGUE :

Il y a des entretiens d’embauche plus facile que d’autres. Alors que la majorité d’entre nous a juste à savoir nommer trois qualités et trois défauts pour convaincre le recruteur, Sigismund des Imperial Fists va vraiment devoir donner de sa personne pour obtenir son dream job, lui. Notre homme candidate pour devenir le Maître du Temple, fonction honorifique s’il en est au sein de la VIIème Légion puisque les Templiers en question gardent le… temple du Phalanx où les Frères de Bataille jurent fidélité à l’Empereur et à Rogal Dorn. Pour obtenir ce poste convoité, l’impétrant doit vaincre en combat singulier la totalité de ses camarades, soit 199 Astartes vétérans à se farcir les uns après les autres. Même pour un guerrier de la trempe de Ziggy Jaune d’Œuf, l’épreuve est difficile, et notre héros encaisse les coups et les bosses au fur et à mesure que les duels se succèdent.

Cet affrontement au long cours est entrecoupé de flashbacks nous renseignant sur la trajectoire de Sigismund, depuis son enfance malheureuse dans les camps de réfugiés de Turquie (rebaptisée plateau ionien en M31), où il vit sa protectrice se faire tabasser à mort par une bande de wesh sanguinaires, jusqu’à son entraînement sous la conduite du maître d’armes Appius, alors qu’il n’était encore qu’un jeune et prometteur jaunard. L’occasion pour nous d’en apprendre plus sur la motivation profonde de Sigismund, qui va toujours de l’avant parce qu’il sait que les Space Marines ont le devoir de se battre à la place de ceux qui ne le peuvent pas. C’est beau, c’est noble, c’est grand, c’est corporate. Ce petit gars aurait pu faire Miss France, s’il n’avait pas choisi une autre voie.

Retour au Temple, et au boss de fin de la série infernale du Zig. Après avoir fisté sans répit et écopé de quelques bleus au passage, ne reste plus que ce bon vieil Appius en personne à maraver. Le problème, c’est que le vétéran a assez mal vieilli, et s’est fait enfermer dans un Dreadnought depuis l’époque où il refaisait le portrait de son padawan à grands coups d’espadon. Le combat n’est pas des plus équitables, mais les Imperial Fists sont du genre exigeant. Malgré un coup de moins bien passager, et un revers de bouclier énergétique en pleine face, Sigismund vient à bout de cet ultime adversaire en lui coupant le câble (ce qui est cruel quand on est confiné à un réservoir de liquide amiotique, tout de même). Félicité par Rogal Dorn en personne, qui était là incognito pour suivre l’épreuve pratique de son fiston favori, Sigismund devient officiellement le Maître des Serments, et reçoit l’épée de fonction qui va bien en reconnaissance de son nouveau statut. Un petit passage à l’infirmerie pour mettre de l’arnica (eh, c’est jaune aussi) sera sans doute nécessaire après cela…

AVIS :

John French se fait plaisir en retraçant en quelques pages bien senties la trajectoire de l’un des personnages les plus marquants des Imperial Fists pendant la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus (et même après cela), depuis ses humbles débuts jusqu’à sa prise de fonction comme Enfant de Juron. On peut y voir un avant-goût et un condensé du roman qu’il écrira un peu plus tard sur le même personnage, car tout est déjà bien en place à la conclusion de ces douze pages. L’exemple-type de la petite nouvelle à vocation fluffique, sans ambition particulière en matière d’intrigue mais très satisfaisante tout de même pour les amoureux de background, et grâce à la maîtrise consommée que l’auteur a de son sujet. Bref, un incontournable si vous êtes fan des Imperial Fists et/ou des Black Templars, ou tout simplement de l’Hérésie d’Horus en tant que telle.

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Child of Chaos – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE :

Child of ChaosLe Siège de Terra approche méchamment et quelque part en orbite du Monde Trône, un Astartes en arrêt maladie contemple la planète de Pépé avec un œil torve et un visage couvert de biafine. Notre protagoniste est, vous l’aurez deviné, Erebus. Sauf que en fait, non, mais nous y viendrons un peu plus tard. Passé à la râpe à fromage par Horus et slam dunk-é dans le bac à ordures dangereuses par Lorgar, le surhomme par qui le scandale éclata n’a pas vraiment d’épaule sur laquelle suinter, mais il s’en fout royalement car son auguste compagnie lui suffit. Et comme dit son deuxième proverbe favori (on parlera de son premier un peu plus loin): « plus on est de fous, plus on rit, moi je suis tout seul parce que personne ne m’aime alors je compense en étant complétement ravagé du bulbe et pouvoir rigoler un bon coup ». Quel dommage que seule la version abrégée de cette maxime si profonde nous soit parvenue. Toujours est-il qu’Erebus est décidé à se parler à lui-même pour passer le temps, et il embarque donc le lecteur dans le récit de son origin story, qu’il considère comme étant édifiante. Voyons cela.

Première confession: Bubus a toujours été mauvais. Et surtout en dictée. Il ne s’en cache ni ne s’en excuse, et il n’y a pas d’élément déclencheur à chercher pour explique sa chute, à part peut-être le fait qu’il ne supporte pas la chaleur. Mais bon, se dire que l’Hérésie aurait été évitée par un malheureux climatiseur, ce n’est pas très glamour, donc restons sur l’hypothèse de la malignité incarnée. Déjà tout môme, son passetemps favori était d’arracher les pattes de scorpion de Colchis, ce qui n’est guère charitable. Issu d’une famille miséreuse, il se mit à lorgner du côté des khôl gris du Covenant après avoir constaté que les prêtres menaient une vie de patachon. Après quelques mois à apprendre par cœur des cantiques et à apprendre à lire sur des bouquins piqués en douce dans le temple local, notre zéro accomplit ses premières armes en garrotant de sang froid un jeune dévôt de son quartier, auquel sa mufle de mère le comparait à longueur de journée pour le rabaisser. L’individu en question témoignait de sa foi envers les Puissances en se peignant des mots sacrés sur le visage, habitude que son assassin reprit, tout comme il lui emprunta son nom: Erebus. MIND BLOWN. On est passé à ça d’avoir l’Hérésie manigancée par un gonze appelé Post Malone ou Tekashi69, ça fait froid dans le dos tout de même. Heureusement que Môman Bubus n’aimait pas le rap.

Ce premier assassinat permit toutefois à l’usurpateur d’entrer dans les ordres sans coup férir, et de commencer à tailler son chemin vers le pire, soit le Pouvoir, l’Influence, la Richesse et l’Efferalgan. Car Erebus n’est pas vraiment croyant à la base, et avoue volontiers s’être piqué d’intérêt pour la chose religieuse de la même manière que tu as pris goût aux endives au jambon: à l’usure. BLIND MOWN. Pendant qu’il faisait ses classes, un certain Prophète commençait à faire parler de lui dans l’arrière pays colchitique, et il ne fallut pas longtemps avant qu’Erebus ne pose les yeux sur celui qui allait devenir son père adoptif (Lorgar), accompagné par sa future marâtre (Kor Phaeron). Ce ne fut pas le coup de foudre mais le jeunot comprit qu’il fallait qu’il se rapproche de Mr Tête d’Œuf pour son propre bien, ce qu’il fit.

Une arrivée impériale et une transformation en Space Marine plus tard, notre désormais fringant héros part sillonner la galaxie à la recherche des Dieux du Chaos, envers qui il sent une attirance particulière. Rien de très intéressant ne se produit jusqu’à l’arrivée sur Davin, et la visite qu’Erebus rend à un temple décati que lui ont révélé ses visions. Sur place, il rencontra un vieux prêtre ridé et impoli, ce qui n’est pas très malin quand on s’adresse à un type qui fait deux fois sa taille et trois fois son poids. Parmi les tags effacés et les inscriptions désobligeantes, les sens de sorceleur du surhomme firent clignoter en rouge un dessin de l’Anathame (qui ne se trouvait pas sur place, ce serait trop simple) ce qui fut apparemment suffisant pour son bonheur immédiat. Il repartit donc avec une envie folle de farmer du Wither squelette1, en ordonnant au vioque de faction de retaper un peu la bicoque, et en donnant rendez-vous dans quelques décennies à une très jeune Akshub (qui ironie de l’histoire, lui donnera des cours en chaotique appliqué lorsqu’il reviendra… quel fumiste tu fais Bubus alors). La suite de l’histoire, sans être parfaitement connue, l’est toutefois suffisamment pour pouvoir laisser Erebus à ses divagations fiévreuses et purulentes. Mais tel est le destin de ceux qui manquent de peau.

1Mais sans accès au Nether, il dut se contenter de piller les collections permanentes du musée de la vie rurale de l’Interex, comme chacun sait.

AVIS :

Chris Wraight lève le voile sur l’origine d’un des personnages les plus importants de l’Hérésie n’étant pas Pépé ou un Primarque : bonne idée dans l’absolu, et assez bien réalisée même si ‘Child of Chaos’ tient plus de la lecture complémentaire intéressante que du must read définitif. Il y a certes quelques révélations bien senties de la part d’un auteur qui a trop de métier pour ne pas jeter quelques bouts de fluff anecdotiques (au sens littéral) en pâture à son public de fanboys dans une nouvelle telle que celle-ci, mais rien qui changera la face du lore. On apprend par exemple que c’est à Erebus que l’on doit la maxime « béni soit l’esprit trop étroit pour le doute », ce qui est utile à savoir pour briller dans un centre GW mais relève de la trivia hérétique au final. Notons également que Wraight se retrouve piégé par cet ennemi acharné de l’auteur de l’Hérésie d’Horus qu’est la continuité temporelle (à égalité avec la bonne vieille logique cartésienne): si Erebus a pu devenir un Word Bearers, c’est qu’il était très jeune à l’arrivée de l’Empereur. Or on sait (‘Lorgar: Bearer of the Word’) que Kor Phaeron avait déjà mis des pensées non euclidiennes dans la tête de son pupille bien avant que Bubus soit en mesure de susurrer des salaceries à l’oreille de son Primarque : l’image d’Epinal d’instigateur de l’Hérésie qui accompagne le Chapel-Un depuis quelques années en prend donc un sacré coup dans les ratiches.

Bref, on tient ici une lecture sympathique et qui permet à Wraight de mettre un peu d’ordre1 dans, et de faire quelques clins d’œil à la suite de, l’histoire d’Erebus, ce qui peut, ou non, justifier les 3,49€ demandés par la Black Library pour tuyauter le lecteur/fluffiste sur ce VIP chaotique.

1J’ai bien aimé le fait qu’il cherche à couvrir les traces de Thorpe en indiquant au détour d’une phrase que, oui, les Dieux du Chaos avaient bien un œil (mais juste un œil) sur Colchis et le Covenant, respectivement élus « Planète chaotique la plus calme du Materium » et « Secte chaotique hégémonique la moins efficace de la galaxie » 10.000 ans de suite. Il ne pouvait guère faire plus que cela sans réécrire l’histoire.

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Savage – G. Haley [40K] :

INTRIGUE :

SavageNotre histoire s’ouvre sur un concert de ronflements remplissant une tente à l’atmosphère étouffante, alors que le soleil est sur le point de se lever sur Omdurman. Allongé sur son lit de camp, notre héros, Gollph, après avoir courageusement mais vainement tenté de faire abstraction du bruit et de l’odeur la chaleur, décide d’aller se dégourdir les jambes pendant que la température est encore supportable. Gollph, comme ses camarades de la 7ème Companie Motorisée Super-Lourde de Paragonian (ou quelque chose comme ça), est un tankiste, et fier de l’être. Rattaché au Baneblade Cortein’s Honour, où il exerce la noble profession de senior chargeur – ce qui est mieux que serial killer, même si, au fond, cela revient au même –, Gollph espère un jour devenir artilleur. Bien que disposant des aptitudes nécessaires pour occuper cette fonction, notre héros est toutefois handicapé par ses origines : il vient en effet du monde sauvage de Bosovar, qui rime trop avec Kosovar pour que ses ressortissants soient pris au sérieux par les impériaux venant de mondes civilisés. En plus de ça, les Bosovarois ont la peau rose, ce qui, dans le régiment de Paragon dans lequel les hasards de la vie et de la guerre l’ont fait atterrir, est une source de discrimination et de brimades. Que fait donc la HALDE ?

Pour l’heure, Gollph profite du calme ambiant pour aller saluer son char, qui n’a pas vu le moindre combat depuis le début de la campagne, et aller contempler le lever du soleil en marchant pieds nus dans les hautes herbes, comme le petit sauvageon qu’il est resté au fond de lui-même (il n’enlève pas sa chemise tout de même, car le Commissaire n’aimerait pas ça). C’est l’occasion pour lui de se remémorer son parcours depuis les plaines de Bosovar jusqu’aux collines d’Omdurman, en passant par son recrutement dans la Garde, où il a appris à vaincre sa peur des portes. On n’en parle pas assez, mais c’est une technologie des plus dangereuses. Après tout, personne ne s’est jamais coincé les doigt dans un rideau de perles. De retour au camp, et occupé à lustrer des obus pour passer le temps en compagnie de son supérieur ronfleur, le 1er Artilleur Meggen, Gollph est surpris dans son ouvrage par l’arrivée silencieuse, mais pas inodore, de Shoam, le pilote du Cortein’s Honour. Ce dernier a obtenu des nouvelles fraîches faisant état d’un redéploiement imminent de la Compagnie, et de son départ d’Omdurman. Il vient donc rappeler à Gollph et à Meggen le pacte secret que les trois hommes avaient conclu des mois plus tôt, et qu’il leur faut mettre à exécution avant qu’il ne soit trop tard. Si Meggen se montre très enthousiaste à cette idée, Gollph l’est beaucoup moins, s’étant engagé dans l’aventure sous l’emprise de la boisson. Toutefois, une promesse est une promesse, et nos trois conspirateurs se retrouvent donc le soir venu derrière un buisson odoriférant1 pour accomplir leur sinistre dessein…

Début spoiler 1…Si Gollph avait traîné des pieds pour marcher dans la combine, c’est d’abord parce qu’il doit se taper le sale boulot, c’est-à-dire distraire les sentinelles placées devant la tente contenant les réserves de la Compagnie, pendant que ses comparses se glisseront à l’intérieur pour dérober ce dont ils ont besoin pour l’étape suivante de leur machination. En plus d’être dangereuse, cette tâche est humiliante pour le fier Bosovarien, car elle l’oblige à jouer au sauvage pour parvenir à ses fins, alors qu’il se considère comme étant parfaitement intégré au sein de la Garde Impériale. On voit donc Gollph se présenter devant les plantons de service, affublé d’un plastron fait de roseaux tressés (ça fait exotique, dixit Meggen), avec un formulaire mal rempli en main et un affreux dialecte petit nègre à la bouche, et tenter de se faire remettre farine pour dîner Lieutenant, oui oui, s’il te plait Monsieur présentement là dis donc. Pendant que l’héroïque peau rose occupe les gardes, et se fait dérouiller par le plus mal embouché des deux, Meggen et Shoam dévalisent les stocks du régiment, le premier intervenant une fois le forfait commis pour interrompre la bastonnade à laquelle le pauvre Gollph avait droit, et repartir avec lui vers leurs quartiers. La mission a été accomplie, reste à savoir quelle en était le but…

Début spoiler 2…Eh bien, et je n’invente rien, il s’agissait simplement d’organiser une petite fête d’anniversaire pour le Capitaine Bannick, avant que le camp soit levé. Ce dernier est donc pris au dépourvu lorsque son équipage et quelques amis le surprennent à la cantine avec un buffet de pâtisseries paragoniennes et quelques bonnes bouteilles. Parce que ce n’est pas parce que la galaxie est sur le point de s’effondrer qu’il ne faut pas profiter des petits plaisirs de la vie et prendre un pot entre collègues de temps à autres. L’enthousiasme collectif peine toutefois à déteindre sur Gollph, encore un peu marqué par son implication dans le complot pâtissier auquel il a participé, et surtout honteux que trois de ses compatriotes de Bosovar aient été sévèrement punis par les autorités régimentaires pour la disparition des victuailles dérobées par Meggen et Shoam. Il n’y a pas à dire, le racisme anti-rose reste un des fléaux cachés du 41ème millénaire…Fin spoiler

1 : Il a certainement été utilisé par un tankiste pressé comme petit coin, comme Gollph a le plaisir de le découvrir.

AVIS :

Attention, OVNI. Guy Haley signe avec Savage ce qui restera sans doute comme l’une des nouvelles de Gardes Impériaux les plus surprenantes du corpus de la Black Library. Pas de Xenos, pas de mutants et pas d’hérétiques ici, et à peine un peu de combat à proprement parler (même si la mâchoire de Gollph pourrait contester ce constat), mais la description de la vie d’un camp impérial dans toute sa singulière normalité. Si le « complot » fomenté par nos héros a une dimension comique assumée, et permet à Haley de démontrer qu’il est capable de jouer sur le registre humoristique de façon convaincante, c’est la description que l’auteur fait de la réalité sociologique de ce microcosme, où les préjugés et les discriminations1 entre Gardes de différentes origines demeurent aussi vivaces qu’aujourd’hui malgré les milliers d’années écoulées et la découverte d’autres espèces intelligentes, qui donne tout son sel à cette histoire. Le cosmopolitisme de l’Imperium est une de ses caractéristiques les plus intéressantes, mais rarement mise en valeur par la BL autrement qu’à travers l’exemple extrême des abhumains, du fait de sa ligne éditoriale résolument militariste. Haley démontre ici que la GW-Fiction peut encore totalement surprendre, et en bien, le lecteur, et que si la guerre est éternelle au 41ème millénaire, les à côté de cette dernière valent également la peine d’être racontés.

1 : Autre exemple, Shoam est traité comme un paria par ses camarades car il vient de Savlar, réputée pour être peuplé de criminels.

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The Darkling Hours – R. Harrison [40K] :

INTRIGUE :

The Darkling HoursÀ peine remis de leur escapade ghollienne (‘A Company of Shadows’), la Commissaire Severina Raine et le Capitaine Storm Trooper Andren Fel, que l’on devine être au bord de la liaison amoureuse assumée (ils discutent en buvant du thé sur leur temps libre, ce qui est le niveau de tension érotique maximal pour une nouvelle de Gardes Impériaux), sont convoqués par le haut commandement du 11ème Fusilier d’Antari. La Générale Juna Keene a en effet besoin que quelqu’un débloque la situation dans la mine Iota, que les forces du Chaos refusent obstinément d’abandonner à l’Imperium. Les efforts de la Garde se sont jusqu’ici soldés par des échecs cuisants, en raison de la présence d’un Psyker renégat capable de provoquer une peur panique à des kilomètres à la ronde. Là où une attaque en masse a échoué, une frappe chirurgicale menée par une poignée de vétérans endurcis et chaperonnés par une Commissaire inflexible aura peut-être plus de chances de réussir, et c’est ainsi que Raine part en Valkyrie avec les Duskhounds de Fel, sauter en grav-chute au dessus de l’inexpugnable cratère. Ce brave Andren se fait un peu de mouron pour son love interest, car la lecture des marcs de thé de sa tasse la nuit précédente (encore une métaphore torride, pour qui sait lire entre les lignes) lui a révélé la figure de mauvais augure du Duskhound, symbole de mort sur Antar. Mais le devoir est le devoir.

Le vol d’approche est l’occasion de faire la connaissance de l’escouade d’élite escortée par Raine, dont les quatre membres ont des noms aussi courts (Tyl, Rol, Jeth, Myre) que leur intérêt est limité. Après avoir donné le conseil-bullshit-qui-sauvera-tout-de-même-les-héros (« faire confiance à son instinct ») à ses troupes, la Commissaire fait le grand saut… et manque de s’éclater sur la paroi de la mine. C’est bien sûr l’influence du Psyker chaotique qu’il faut blâmer, et pas du tout sa mauvaise lecture de l’altimètre. Evidemment. S’en suit une rapide progression dans les boyaux souterrains, entrecoupée de quelques meurtres de cultistes, qui malgré leur statut de Vus (Sighted), se montrent incapables de détecter les Duskhounds avant qu’il ne soit trop tard. Cette promenade de presque santé permet également de comprendre pourquoi les forces du Chaos n’ont pas cédé de terrain malgré l’avance de l’Imperium : c’est en effet dans les galeries d’Iota que sont récoltées les pierres de vue dont les… Vus raffolent (en porte-clés, boucles d’oreille et remplacement de leurs globes oculaires). Remontant le courant de leur pétoche grandissante, preuve indéniable qu’ils sont sur la bonne piste, les commandos finissent par débusquer le sorcier dans son antre.

Le combat final/duel de volonté peut alors commencer, la verroterie du Psyker et les miroirs à facettes installées dans son pied à terre compliquant la vie et troublant la raison des Duskhounds et de leur garde chiourme. La caméra se braque en alternance sur Fel et sur Raine, qui doivent chacun livrer leur propre bataille : l’Antari voit ses camarades et, pire, sa chère Severina, se faire déchiqueter par des molosses spectraux, tandis que cette dernière est confrontée au fantôme de sa sœur (sans doute jumelle) Lucia, morte dans des circonstances troubles auxquelles l’inflexible officier pourrait bien ne pas être étrangère. Nos deux têtes de lard refusent toutefois de capituler devant les effets de manche du mentaliste, qui finit par se manger trois bolts dans le caisson (ce qui le déplume littéralement) pour sa peine. Bilan des courses : une cible abattue, une offensive qui peut reprendre, et aucune perte pour l’élite impériale, qui peut repartir en direction du baraquement pour se prendre une tisane bien méritée.

AVIS :

Petite nouvelle d’accompagnement de l’arc narratif de Severina Raine, ‘The Darkling Hours’ permet d’en apprendre plus sur le passé trouble de l’héroïne de Rachel Harrison, d’étoffer le background propre au 11ème Fusilier d’Antari, et d’approfondir la relation particulière entre le Capitaine Storm Trooper et la Commissaire. Bien que cette histoire soit dans l’absolu beaucoup plus dispensable que ‘A Company of Shadows’ et ‘Execution’, elle suffisamment bien racontée pour mériter la lecture, surtout si on apprécie les récits de Gardes Impériaux « à la Gaunt ».

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The Death of Uriel Ventris – G. McNeill [40K] :

INTRIGUE :

La Mort d'Uriel VentrisCe qui ne devait être qu’un contrôle dentaire de routine est sur le point de prendre un vilain tour pour le Capitaine Uriel Ventris, de la 4ème Compagnie des Ultramarines. Allongé dans le fauteuil du praticien, le patricien écoute avec angoisse le servocrâne de service lui demander de prendre une grande respiration et de la bloquer, afin que l’anesthésie puisse être effectuée. Cela risque de piquer un peu. En repensant à toutes ses sucreries englouties avec Pasanius pendant la Guerre de la Peste, notre héros se dit que s’il s’en sort, il investira pour sûr dans une brosse à dents énergétique, qu’il usera énergétiquement1. Mais pour l’heure, il est temps pour le vaillant mais douillet Capitaine de tomber dans les pommes pour échapper au supplice de la fraise.

Se réveillant dans une espèce de caverne qui ressemble fort à sa Calth natale, Ventris comprend rapidement qu’il expérimente une vision lorsque sa sortie de la grotte se fait sous un grand soleil et devant un paysage bucolique, loin des plaines radioactives dont la véritable planète peut s’enorgueillir depuis 10.000 ans. Comme pour confirmer son délire, il se fait héler par un quidam assis sur un rocher, qui se révèle être ce bon vieux Idaeus, Capitaine de la 4ème Compagnie avant lui, et auquel il a succédé après le sacrifice héroïque du briscard sur Thracia. À peine le temps de détailler les nombreuses cicatrices qui parsèment le corps de l’auguste héros pour s’assurer de son identité que les deux surhommes se mettent à dévaler la pente en direction de la caserne Asigelus (qui n’est pas sur Calth mais sur Macragge, mais bon on s’en fout c’est un rêve), où les hallucinations de Ventris l’entraînent. En chemin, ils croisent la route d’un groupe de jeunes coureurs engagés dans une compétition acharnée pour être le premier à utiliser la douche au retour de leur session d’entraînement, et Uriel reconnaît sans mal Learchus, Cleander, Pasanius et lui-même, tels qu’ils étaient à l’adolescence. Il ne peut qu’assister à nouveau à la tentative malheureuse de dépassement de ce snob de Learchus que son jeune lui avait tenté il y a toutes ces années, et sentir, très douloureusement, le vicieux coup de coude que son rival devenu rival devenu balance devenu Capitaine par intérim devenu Sergent Vétéran lui avait balancé dans le pif pour calmer ces ardeurs. Cela fait toujours aussi mal, et même beaucoup plus mal que cela devrait, mais cette soudaine vulnérabilité attendra un peu, car voici nos deux vétérans rendus devant les portes de la caserne, qui sont, comme de juste, fermées.

Peu disposé à laisser quelques quintaux de fer et d’adamantium se mettre en travers de la route de son flashback, et constatant qu’Idaeus se dégrade à vue d’œil, Ventris pousse de toutes ses forces sur les lourds battants pour pouvoir entrer, là aussi déclenchant des douleurs sans doute excessives par rapport à l’effort consenti par un Space Marines en bonne santé. Enfin parvenu à ses fins, il finit par rentrer dans les baraquements, un Idaeus positivement cacochyme sur les talons. Là, il est témoin du rassemblement de la 4ème Compagnie dans son ensemble, spectacle grandiose même si esthétiquement critiquable2, qui fait battre très fort ses petits cœurs. Après avoir identifié pour le lecteur qui n’en demandait pas temps la moitié des guerriers assemblés en silence sur la place, il est pris à partie par cette vieille baderne de Learchus, qui vient lui reprocher de les avoir abandonnés. « Oui mais bon c’est un rêve buddy et t’étais pas obligé de me foutre la honte devant Idaeus en mentionnant que j’avais prêté un serment de mort petit galapiat » répond Uriel, un peu embarrassé. Qu’importe, Learchus répète à nouveau que Ventris est en train de les abandonner à l’instant même, et lui tourne le dos comme un prince, suivi par l’intégralité de la Compagnie. C’est moche de bouder les enfants. Lorsque le Capitaine abandonné cherche à raisonner le Sergent, ce dernier a de plus la mesquinerie de tomber en poussière, suivi par 99% des Ultra Schtroumpfs. Seul reste ce bon vieux Pasanius, qui en guise d’adieu lui applique une petite imposition des mains sur le torse, mais seulement après avoir passé son membre augmétique au micro-ondes. Bref, ça brûle très fort pour notre pauvre Uriel, qui commence sérieusement à regretter sa consommation irraisonnée de Chupa Chups.

Lorsqu’il reprend ses esprits, le voilà sur Medrengard, et Idaeus a laissé la place à ce fieffé filou de Honsou. Réagissant comme un vrai serviteur de l’Empereur, notre héros commence par corriger bellement cette canaille à mains nues, qui se laisse faire sans protester. Sur le point de commettre l’irréparable avec la propre hache démoniaque de sa Némésis, Ventris réalise au dernier moment que ça pourrait être une mauvaise idée, et suspend son geste. S’engage alors un dialogue Batman vs Joker like entre Force Bleue et Force Jaune avec Rayures Noires, les deux adversaires se balançant des amabilités pendant quelques minutes jusqu’à ce qu’un nuage de poussière ne se profile à l’horizon, annonçant l’arrivée prochaine des War Boys d’Immortan Joe (sans doute le dernier film visionné par Ventris avant son opération), ce qui ne présage rien de bon pour notre héros. Qu’importe, ce dernier se tient prêt à faire face à son destin, et à mourir bravement au combat si nécessaire. Après un dernier « Witness meeeeeee ! » envoyé à Honsou, Uriel se fait pulvériser par l’artillerie montée sur les machines hurlantes qui convergent sur sa position. Fin de l’histoire.

Début spoilerOu en tout cas fin du rêve. De retour dans le cabinet du dentiste, nous assistons à un court dialogue entre l’Apothicaire Selenus et le Chapelain Clausel, alors que l’enveloppe corporelle de Ventris décède sur la table d’opération. Bien que le premier se félicite de la réussite de l’opération3, il prévient son interlocuteur que le plus délicat reste à venir, le Capitaine devant maintenant trouver la force de traverser ce fameux Rubicon4Fin spoiler

1 : Pour sa défense, l’Empereur lui-même n’avait rien prévu de spécial dans ce département pour ses Space Marines. Et pourtant, avec une salive acide, ils auraient eu grand besoin d’un émail renforcé à l’adamantium.
2 : Vert + bleu + jaune, franchement, c’est moche.
3 : « Ça a marché ? »
« Oui, il est mort. »
« GG. »
4 : Qui doit maintenant être encombré de Space Marines de toutes origines, au grand déplaisir de la faune locale et des touristes.

AVIS :

Ayant laissé tomber la saga d’Uriel Ventris il y a bien des années et après avoir seulement lu la première trilogie consacrée par McNeill à sa figure tutélaire dans le futur grimdark, j’avoue que la lecture de The Death of Uriel Ventris ne m’a pas touché plus que ça, mais peut aisément comprendre qu’un fan plus impliqué que votre serviteur ait une toute autre opinion du texte en question. Si l’auteur ne prend pas grand soin pour dissimuler la véritable nature de l’épreuve que le Capitaine traverse en filigrane de cette nouvelle (toutes les douleurs ressenties par ce dernier au fil des pages étant la conséquence de sa Primarisation douloureuse), enlevant donc un peu de suspense à cette dernière, il a au moins l’amabilité de terminer son propos sur un cliffhanger convenable, justifiant le titre donné à l’histoire. Même si je ne doute pas une seconde que notre héros finira par émerger du Rubicon – il doit y avoir un service de ferry pour les personnalités Space Marines, car elles sont vraiment peu nombreuses à s’y être noyées – comme les lois du marketing le demandent expressément, on peut au moins accorder à McNeill une utilisation appropriée de la formule « mort d’Uriel Ventris », ce dernier finissant la nouvelle dans un état minéral (c’est plus grave que le végétatif). À titre personnel, j’aurais apprécié que McNeill précise ou rappelle pourquoi le fier Capitaine a choisi/subi cette opération « risquée », à part pour suivre la dernière mode chez l’Astartes, bien entendu.

Pour le reste, le passage en revue de la carrière et des connaissances les plus marquantes de notre personnage, s’il est cinématiquement mis en scène par l’auteur, risque fort de diviser le lectorat entre ceux qui comprennent qui est qui et a fait quoi, et les autres. En d’autres termes, si vous découvrez Uriel Ventris par l’intermédiaire de cette nouvelle, je ne suis pas convaincu que l’expérience vous semble très intéressante (mais ce n’est que mon avis). En tous les cas, sachez que le personnage dispose d’ores et déjà d’une abondante biographie signée de la main de Graham McNeill, et que ce dernier ne l’ayant certes pas fait « mourir » pour rien, il est à parier que d’autres ouvrages ou nouvelles suivront. Dans le second cas, rendez-vous ici dans quelques temps pour un retour positivement objectif sur la suite des aventures de ce vieux Vent Triste.

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The Neverspike – D. Hinks [AoS] :

INTRIGUE :

The NeverspikeTrachos, Lord-Ordinator des Celestial Vindicators, revient en Aqshy après une mission mouvementée dans le sous-monde de Shyish, où il a « égaré » son escorte de Hammers of Sigmar dans quelque échauffourée intolérante avec la population locale, ce dont notre bonhomme semble être coutumier. Sigmar ayant apparemment trouvé d’autres qualités à ce chic type que l’amour de son prochain, la camaraderie et le sens des responsabilités, cette vendetta sanglante n’affecte pas le moins du monde notre héros, qui souhaite simplement faire son rapport à la forteresse la plus proche et repartir concasser de l’hérétique en paix. Cependant, la voix accusatrice qui résonne et raisonne dans sa tête n’est pas d’accord avec sa position bien tranchée sur le sujet, mais cela est le moindre souci de notre héros lorsque sa route le met sur le chemin d’un affrontement peu commun entre un drake pierreux d’Aqshy et un drôle du duo : Gotrek et Maneleth en personne.

Bien qu’étant à première vue convaincu que les deux bipèdes n’ont plus que quelques secondes à vivre face à un monstre à la peau aussi épaisse, Trachos assiste in fine à une slaying masterclass de la part du petit rouquin aussi costaud qu’odoriférant, qui ne tarde pas à remettre de la viande au menu. Peu fréquentable mais tout de même poli, le Stormcast vient saluer les deux voyageurs et apprend de la bouche de l’Aelf qu’il s’agit du sixième drake massacré par Gotrek depuis qu’il s’est mis en tête de localiser le Neverspike, une montagne magique dont la direction peut être connue grâce au savant art de lecture dans les entrailles de draconoïde. Et si le nabot souhaite tant visiter ce lieu à la sinistre réputation, c’est parce qu’il a appris qu’il s’agissait de la prison du Prince d’Améthyste, un héros des temps jadis condamné à une agonie éternelle par ce vieil acariâtre de Nagash.

Tout ceci n’intéresse que moyennement Trachos, mais quand il apprend que Maleneth accompagne Gotrek pour récupérer la rune majeure logée dans la poitrine du Tueur, il décide de participer à son tour à cette opération « recyclage et valorisation », jugeant comme l’Aelf qu’un tel trésor mérite meilleur écrin que le corsage velu d’un ivrogne édenté, et, pire, athée. Car Gogo ne se prive pas pour expliquer à sa nouvelle connaissance à quel point il déteste les dieux, ce qui peut se comprendre quand on comptait sur eux pour s’offrir une mort digne de ce nom et qu’on se retrouve à la place propulsé dans un autre monde de manière totalement gratuite. Cette ouverture d’esprit déplaît bien entendu à Trachos, qui accepte toutefois d’aider le duo mal assorti à rejoindre bon port grâce à ses capacités d’ingénieur arcanique et son matériel de pointe, qui semble beaucoup intéresser Gotrek sans que le méprisant Lord-Ordinator n’y fasse grande attention. Sachant fort bien que la magie de mort baignant le Prince d’Améthyste consumera Gotrek dès qu’il y fera mine d’y planter la hache, Trachos se dit qu’il n’aura qu’à ramasser la rune sur le cadavre du Tueur une fois qu’un regrettable accident lui sera arrivé.

Cependant, le Stormcast Eternal commet l’erreur fatale d’accepter le défi de lever de coude que propose Gotrek lors du bivouac de fin de journée, confiant dans sa physiologie surhumaine pour annuler les effets de l’alcool. Cela aurait sans doute marché avec n’importe qui d’autre, mais on ne couche pas un Tueur (de Bière) comme ça, et Trachos finit par sombrer dans un sommeil hébété, penndant lequel il dévoile à son insu ses sinistres intentions à son compagnon. Lorsque le trio arrive au Neverspike le lendemain et commence à se frayer un passage dans la horde de revenants qui garde la montagne, Gotrek se retourne brusquement contre le félon, et lui subtilise un de ses gadgets pour accomplir son véritable plan…

Début spoiler…Au lieu de chercher à tuer le Prince d’Améthyste, comme Trachos le pensait, Gotrek inverse en effet la polarité des courants éthériques pour transformer la malédiction de Nagash en portail vers Shyish, bannissant tous les morts vivants à la ronde dans l’opération, dont le Prince en question. Car comme il le révèle à Trachos avant que le rideau ne tombe sur notre histoire, sa rancune ne porte pas sur un vulgaire héros de second ordre, mais bien sur Nagash en personne. Et pourquoi se taper des mois de route pour accéder au Grand Nécromancien quand on peut utiliser un raccourci ? C’est donc un retour à la case départ qui échoit à Trachos, aspiré dans le Royaume de la Mort par le vortex ouvert par Gotrek pour son speed run personnel. Il n’est pas toujours bon de fréquenter des VIP…Fin spoiler

AVIS :

Le Tueur le plus et le moins accompli du Monde qui Fut revient aux affaires dans ce très sympathique ‘The Neverspike’, dans lequel Darius Hinks deux éléments capitaux : une bonne contextualisation de ce personnage légendaire de la GW-Fiction, d’une manière très appropriée (une bonne couverture du passif du héros et de ses nouvelles motivations, sans trop d’exposition) d’abord, et un personnnage très intéressant en la figure de Trachos, premier Stormcast Eternal positivement mauvais que nous rencontrons dans le cadre d’une histoire d’Age of Sigmar1. Trachos semble en effet avoir un certain nombre de problèmes psychologiques, ainsi que quelques crimes de guerre sur la conscience, ce qui en fait un protagoniste (?) plus passionnant à suivre que l’immense majorité des good guys en sigmarite que la Black Library nous a refourgués jusqu’ici. On peut le voir comme le chaînon manquant entre les vertueux paladins de Sigmar et les guerriers déchus d’Archaon, et une étape importante dans le cheminement qui finira par nous mener aux Stormcast du Chaos (j’y crois). C’est dommage qu’il semble ne pas survivre à la fin de la nouvelle, mais peut-être refait-il une apparition dans ‘Ghoulslayer’ (dont ‘The Neverspike’ est l’introduction littérale), ce qui donnerait une raison supplémentaire pour partir à la découverte des premières aventures de Gotrek dans des Royaumes d’autant plus mortels du fait de sa présence…

1 : À ma connaissance, qui est loin d’être exhaustive. Mention honorable à ce bon vieux White Reaper, mais je ne l’ai pas vraiment vu en action.

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The Claw of Memory – D. Annandale [AoS] :

INTRIGUE :

Neferata tient conclave dans sa capitale de Nulahmia, et a rassemblé les plus fins esprits de son royaume pour discourir de sujets d’importance, comme l’opposition entre mémoire et histoire (oui, c’est chiant). Parmi l’auguste assemblée, un érudit mortel du nom d’Alrecht Verdurin s’éclipse discrètement pour faire une pause technique, ou du moins veut-il le faire croire à son hôtesse. Une fois sorti de l’hémicycle, il se dirige en effet dans une tout autre direction que celle des toilettes, et s’enfonce dans les couloirs labyrinthiques du Palais des Sept Vautours.

Cette expédition très peu protocolaire est motivée par un besoin tout aussi pressant qu’une vessie trop pleine pour Alrecht : accomplir une quête familiale. Notre homme est en effet le lointain descendant d’un certain Karlet Verdurin, invité en son temps à un autre café phil-os par Neferata, et qui profita de sa visite pour voler une page d’un grimoire de la bibliothèque personnelle de la Necrarque du Sang. Ecrite dans une langue inconnue, et restée non traduite à ce jour malgré les diligents efforts de ses héritiers, cette page (sans doute jaune) a joué un rôle majeur dans la vie des Verdurin, et Alrecht compte bien être celui qui égalera l’exploit de son grand-pépé, en retrouvant le chemin de la bibliothèque secrète, et en ramenant à son tour un petit souvenir. Pour mettre toutes les chances de son côté, il a décidé d’amener la page en question avec lui, et grand bien lui en a pris car cette dernière agit comme un GPS et le guide dans le dédale souterrain, jusqu’à ce qu’il finisse par arriver à bon port.

Il aurait cependant dû se douter que tout cela était bien trop facile, et Neferata en personne ne tarde pas à venir lui tenir compagnie, escortée par un Glaivewraith Stalker avec gravé « To Verdurin, with love, XXX » sur le crâne. Très possessive de ses effets personnels, la monarque vampirique n’avait manqué de remarquer le vol dont elle avait été la victime il y a plusieurs siècles, et se montre enchantée de pouvoir enfin remettre la main sur la page manquante (qui devait l’empêcher de terminer sa liste d’armée à AoS, nul doute). Alrecht, quant à lui, devine qu’il va devoir expier le crime de son ancêtre, et décampe sans demander son reste, laissant derrière lui le précieux vélin. Ne se faisant pas d’illusion sur sa capacité à distancer ou à terrasser un Glaivewraith Stalker, il chevauche à bride abattue vers sa demeure, et prend la plume dès son retour pour consigner par écrit sa triste histoire, afin que son jeune fils Lorron puisse en prendre connaissance lorsqu’il sera devenu adulte.

Malheureusement, son assassin spectral défonce la porte avant qu’il n’ait terminé son premier jet, et ramasse sa copie (et son âme avec) sans cérémonie. Neferata, qui avait décidément beaucoup de temps libre en ce moment, a également fait le déplacement, et va s’entretenir avec un Lorron réveillé en sursaut par le meurtre sauvage de son père et les lamentations de sa mère. En visiteuse aimable, elle n’a pas manqué de ramener un petit cadeau à ses hôtes…

Début spoiler…En l’occurrence, une nouvelle page tirée de sa bibliothèque secrète, qu’elle confie à Lorron en lui enjoignant de la déchiffrer lorsqu’il aura grandi, et de venir ensuite lui rendre visite. Ce que l’enfant ne peut pas savoir, c’est que la page a été écrite avec des emojis nehekhariens, et ne veut donc strictement rien dire. Cette peste de Neferata compte ainsi pourrir la vie de Lorron et de ses descendants avec cette énigme insoluble et blague d’un goût douteux, afin de se venger pour de bon du vol de Karlet. La mesquinerie des vampires ne connaît pas de limite…Fin spoiler

AVIS :

On savait que Neferata était très très très rusée et très très très manipulatrice (cf toutes les autres nouvelles que lui a consacré David Annandale), mais on ne l’avait pas encore vue être très très très revancharde. C’est maintenant chose faite avec cette petite nouvelle, qui comme d’habitude apporte un peu de fluff sur Neferatia… et pas grand-chose d’autre. La question est : était-ce vraiment nécessaire, ou cela était-il suffisamment clairement induit par le reste du corpus neferatesque pour être parfaitement inutile ? Je ne crois pas avoir besoin de répondre.

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Et voilà qui conclut cette revue de la Black Library Events Anthology 2018/19, qui s’est révélée d’un niveau assez satisfaisant. On conclut la série prochainement ici même avec la saison 2019/20, la dernière avoir été sortie par la Black Library pour des raisons évidentes (dur de faire des événements publics en période de pandémie).

INFERNO! – ANNEE 6

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de la 6ème année d’Inferno!, le magazine bi-mensuel publié par la Black Library entre 1997 et 2005, et dédié à la GW-Fiction sous toutes ses formes. Les six numéros dont il sera fait mention ici sont sortis entre juillet 2002 et mai 2003, et regroupent entre eux pas moins de 21 nouvelles, tirées de façon quasi paritaire des franchises Warhammer Fantasy Battle (11 histoires) et Warhammer 40.000 (10 histoires). Pour les plus attentifs et/ou fidèles d’entre vous, l’absence de nouvelles Necromundesques, qui ont pourtant fait partie du périmètre infernal depuis le premier numéro (‘The Demon Bottle’) s’explique à mes yeux par la concurrence faite par un autre jeu « spécialistes » futuriste, et qui venait de sortir à l’époque : Inquisitor1. Un clou chasse l’autre, comme on dit.

1 : J’en veux pour preuve la nouvelle ‘Payback’ de Graham McNeill, qui prend place sur Karis Cephalon, la planète où se déroulent les événements du livret de campagne ‘Death of an Angel’ (2003).

Inferno!_Année 6

Que les admirateurs éperdus de Nathan Creed et de Kal Jericho se consolent, s’ils le peuvent, avec la promesse d’une très haute concentration de personnages nommés (et parfois fameux) dans les numéros qui nous intéressent aujourd’hui. En plus de Gotrek & Felix (‘Redhand’s Daughter’), qui bénéficient, comme les Fantômes de Gaunt avant eux, d’un numéro (#36) à leur gloire, cette année sixième vit le retour d’Uriel Ventris (‘Leviathan’), Mathias Thulmann (‘Meat Wagon’), Angeika Fleischer (‘Head Hunting’), le Sergent Priad (‘Blue Blood’), Torben Badenov (‘Mark of the Beast’), sans oublier l’affable Gregor Eisenhorn (‘Backcloth for a Crown Additional’). Le millésime 2002/2003 vit également la création de figures importantes de la GW-Fiction, à commencer par l’impayable Ciaphas Cain (‘Fight or Flight’, ‘The Beguiling’) et l’efficace Brunner (‘What Price Vengeance?’). Moins gâtés par le passage des ans, mais méritants tout de même une mention spéciale, signalons enfin la présence des agents des lices Dirk Grenner et Karl Johansen (‘Rest for the Wicked’), du Magos Biologis Valentin Drusher (‘The Curiosity’) et du flamboyant corsaire Luka Silvaro (‘A Ship Called Rumour’), que nous aurons l’occasion de recroiser plus tard.

En ce qui concerne les contributeurs de cette année 6, il ne surprendra sans doute personne d’apprendre que ce fut une fois de plus Dan Abnett qui se révéla être le primo plumo (ouais je parle italien) de cette série, avec pas moins de quatre nouvelles à son nom. Suivent les sieurs McNeill, Werner, Mitchell et Spurrier (dont il s’agit pour les deux derniers des premières collaborations avec la Black Library), avec deux contributions par têtes de pipe. Et puisque nous avons commencé notre propos par un rappel de la disparition de Necromunda des pages infernales, terminons par une accolade aux auteurs qui ne reviendront plus nous faire bénéficier de leur talent dans le futur (du passé, mais je me comprends) : Brian Craig et Neil McIntosh. Mention spectrale à Robin D. Laws et Simon Jowett, qui poursuiveront encore quelque temps leur collaboration avec la BL, mais qui n’écriront plus pour Inferno!  par la suite.

Le cadre étant, je le pense, suffisamment planté, il est temps de passer aux choses sérieuses et de partir à la découverte de cette année slaaneshi (allez directement à ‘The Beguiling’ si vous voulez rester dans le thème)…

Inferno! Année 6

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Backcloth for a Crown Additional – D. Abnett [40K] – #31 :

INTRIGUE :

40K_Backcloth for a Crown AdditionalEn villégiature dans son domaine de Gudrun, l’Inquisiteur Gregor Eisehorn doit interrompre ses vacances pour enquêter sur la mort suspecte d’un de ses amis notables. Le seigneur Froigre a en effet passé l’arme à gauche à la suite de la fête organisée pour le retour de son fils sur la planète, à l’âge déçu de 82 ans. Par considération pour la famille, Eisenhorn accepte de jeter un œil au dossier, même si l’affaire lui semble d’une banalité consommée. Pourtant, au fur et à mesure que les indices s’accumulent, Greg va devoir admettre que ce cas n’est peut-être pas aussi éloigné de ses enquêtes habituelles. Le Chaos ne respecte rien, pas même les RTT des fonctionnaires de l’Ordo Xenos. Vilain Chaos, vilain.

AVIS :

Backcloth for a Crown Additional est la réponse d’Abnett à la question que nous nous sommes tous posés un jour : « mais que font les Inquisiteurs pendant leurs congés ? ». Plutôt que de partir à la pêche à la mouche ou faire des paniers en rotin, Gregor Eisenhorn joue donc au Cluedo avec quelques-unes de ses connaissances, ce qui ne doit pas vraiment le changer du boulot. Pour le lecteur, c’est toutefois l’occasion de découvrir l’iconique héros d’Abnett et ses plus proches collaborateurs (Bequin et Aemos) dans un cadre de quasi normalité.

La « gratuité » de cette nouvelle1, qui relate une anecdote assez inconséquente de la longue et difficile carrière d’Eisenhorn, permet à l’auteur de faire la démonstration de sa maîtrise du tempo romanesque : le rythme posé des vingt premières pages, au cours desquelles Abnett fait siens tous les codes du polar d’enquête, s’accélère brusquement et débouche sur un final enlevé, pendant lequel le bon Gregorbotte le cul calleux d’une bouteille de mercure possédée. 

Si la Black Library compte des contributeurs capables d’écrire de bons textes d’action pure, et (mais c’est plus rare) de bons textes « contemplatifs », ils sont en revanche très peu nombreux à savoir marier les deux approches de manière convaincante, ce qui est une autre raison de placer Dan Abnett en tête de peloton.

1 : Comprendre que, contrairement aux autres courts formats prenant place dans la saga inquisitoriale d’Abnett, Backcloth… n’a aucune incidence sur le reste de la série (Thorn Wishes Talon), ni ne révèle d’éléments intéressants sur le passé (Missing in Action, Playing Patience) ou le destin (The Strange Demise of Titus Endor) d’un personnage important de cette dernière.

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Head Hunting – R. D. Laws [WFB] – #31 :

INTRIGUE :

WFB_Head HuntingRetour au Col du Feu Noir (car c’est là que ça se Passe… mouéhéhé) en compagnie d’Angelika Fleischer et de son protecteur (ce qu’il pense) /stalker (ce qu’elle pense), Franziskus. C’est une journée normale pour Angie, qui exerce l’utile profession de récupératrice des champs de bataille, et a localisé le site d’une embuscade grâce aux croassements des corbeaux faisant bombance sur les cadavres abandonnés. Bien que Franziskus, en aristocrate principiel qu’il est, trouve la pratique dégradante, il faut bien que quelqu’un se charge de remettre sur le marché les biens et espèces qui resteraient sinon à prendre la pluie sur leurs défunts propriétaires, au lieu de créer du PIB, comme Baltazar Gelt le voudrait. La moisson du jour est plutôt bonne (un anneau nain pouvant servir de bracelet – les Dawi ont des doigts boudinés – et quelques pièces pour s’acheter un Sub’ en rentrant), mais se fait interrompre par un bruit caractéristique et de mauvais augure : celui d’une hache taillant de la barbaque. Prudents, les deux looters se cachent sur le bord de la route et surprennent peu de temps après un voyageur marchant avec une hache sur l’épaule et un sac suspect à la ceinture.

L’explication de texte entre les trois larrons permet au nouvel arrivant, qui se présente comme le professeur Victor Schreber, de dissiper tout malentendu quant à son accoutrement. Certes, il se balade avec un sac de têtes tranchées, et certes, c’est lui qui les a séparées de leurs précédents propriétaires, mais il l’a fait pour la science. Schreber est en effet un expert en phrénologie, et collectionne les crânes afin de percer le mystère des humeurs et des sentiments de ses semblables. Voyant que le bougre est seulement un gros nerd, et pas un psychopathe en puissance, Angelika et Franziskus ne le retiennent pas plus, mais à leur grande surprise, le prof a eu proposition à leur faire. Il revient en effet du petit village de Verldorf, situé en amont du Col, où il espérait pouvoir collecter un spécimen unique : le crâne du malandrin notoire appelé Potocki, récemment capturé et exécuté pour ses mauvaises actions par les Verldorfer. Ces derniers n’ont pas accepté l’offre, pourtant généreuse, de Schreber de leur prendre la tête (on les comprend), et l’ont chassé à coup de pierres lorsqu’il a insisté. Déterminé à agrandir sa collection, il propose donc deux cents shillings à nos héros en l’échange du crâne tant convoité, à collecter après livraison du paquet à son domicile. Il leur remet également une boîte rembourrée pour faciliter le transport et éviter toute casse pendant le voyage. La présence d’un cadenas pour fermer ladite boîte ne manque par contre pas d’interroger Franziskus…

Après un voyage sans encombre, Angie et Frankie arrivent à Verldorf, hameau misérable dont la principale attraction est le gibet où croupit un cadavre bien amoché, suspendu dans une cage en fer. Malgré son état décati, Potocki terrifie visiblement les locaux, qui refusent de parler de lui en dépit des perches que leur tend une Angelika preneuse d’informations pour faciliter son futur larcin. Ce n’est pas grave, elle fera sans, en bonne professionnelle qu’elle est. Ayant pris résidence dans l’auberge locale, les deux Bonereapers avant l’heure se glissent dehors au cœur de la nuit pour aller perpétrer leur forfait, neutralisant au passage l’alarme que l’aubergiste avait installé à sa fenêtre pour empêcher les mauvais payeurs de s’échapper sans régler l’addition. C’est du moins ce qu’Angelika et son side kick supputent, jusqu’à que l’horrible vérité leur saute littéralement à la figure…

Début spoiler…Potocki n’était en fait pas aussi mort qu’il n’y paraissait, et lorsqu’Angelika fait mine de le raser à l’œil, le cadavre s’anime et l’attaque furieusement. Bien qu’elle s’en sorte sans dommage, le raffut causé par l’affrontement réveille Verldorf, forçant notre héroïne à sortir une masterclass d’improvisation. Elle n’a pas été prise la main dans le sac en train d’attenter à l’intégrité d’un cadavre, non non : elle a été prise d’une crise de somnambulisme causée par l’influence maligne de la goule locale, dont personne, absolument personne ne l’a mis au courant. SKANDHAL !!! Totalement mystifiés par la prestation de leur hôte, les Verldorfer retournent se coucher sans faire d’esclandres, après avoir expliqué que la situation actuelle est le seul moyen qu’ils ont trouvé pour tenir à l’œil l’increvable et intenable Potocki, qui les tourmente depuis des générations et dont la vitalité maléfique défie l’imagination. Faute avouée étant à demi pardonnée, Angelika et Franziskus retournent également se pieuter…

…Et refont une sortie sans tarder, utilisant cette fois-ci la clé qu’Angelika a dérobé à l’aubergiste pendant qu’il lui présentait ses plus plates excuses, ce qui simplifie grandement l’opération « Louis XVI » planifiée par nos héros. Bien que Potocki ne se laisse pas faire, et que le bruit attire à nouveau les villageois hors de leurs masures, la tête finit par être collectée, et les deux gredins peuvent s’enfuir à toutes jambes en direction du manoir de Schreber.

Comme on pouvait s’y attendre de la part d’un employeur ayant omis de préciser ce « petit » détail au moment du briefing, Schreber se révèle être un mauvais payeur, qui sort un pistolet de son armoire au lieu des deux cents shillings promis. Angie avait toutefois prévu le coup, et se contente d’ouvrir la boîte contenant la tête de Potocki en direction de l’érudit félon. Pris au dépourvu par la manœuvre et par le crâne pourrissant qui lui saute à la jugulaire, Schreber est rapidement hors du coup (et hors de cou), ce qui laisse à Angelika et Franziskus toute latitude pour fouiller son domicile à la recherche d’un dédommagement, une fois qu’ils ont pris soin de réduire la tête enragée en bouillie, bien sûr. Au final, les deux comparses repartent avec un nouveau pistolet, ce qui n’est pas beaucoup mais déjà mieux que rien. Ils constatent d’un air détaché que la traînée informe qui était la tête de Potocki semble également être sur le départ, mais à la vitesse où elle progresse, le bougre ne devrait pas faire parler de lui avant cent vingt cinq ans. La Fin des Temps n’attend pour personne…Fin spoiler

AVIS :

Seconde (et à ma connaissance dernière) nouvelle consacrée par Laws à son personnage fétiche d’Angelika Fleischer, ‘Head Hunting’ semble tout droit sorti de l’imagination d’un DM facétieux, et peut se lire comme tel. Malgré l’horreur que représente un cadavre animé (de mauvais sentiments) et apparemment invulnérable, le ton léger avec lequel Robin D. Laws narre cette histoire la fait basculer dans le royaume de la comic fantasy, mais pas dans la parodie pure et simple de Warhammer Fantasy Battle, ce qui est appréciable. Un sympathique interlude entre deux lectures plus sombres.

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Liberation Day – M. Farrer & E. Rusk [40K] – #31 :

INTRIGUE :

40K_Liberation's DayFarrer et Rusk nous plongent dans les entrailles d’un Space Hulk colonisés par les orks, et dans lequel une communauté d’esclaves humains en fuite tente tant bien que mal de survivre. Profitant de la taille cyclopéenne du vaisseau et de la nature paresseuse des peaux vertes, nos héros ont en effet réussi à installer un camp de fortune dans le dédale de coursives et de ponts abandonnés du Hulk.

Les orks étant, comme chacun sait, des voisins abominables (tapage nocturne, poubelles renversées, murs taggés, voitures volées, crottes de squigs non ramassées…), la petite bande de survivants se venge comme elle peut en organisant des raids réguliers en territoire xenos, à la recherche de matériel utile et d’esclaves pas trop esquintés à libérer. Un de ces derniers ayant réussi à convaincre le leader des évadés (Challis) que le Space Hulk convergeait vers la Waaagh ! la plus proche, nos guérilleros décident de monter une expédition jusqu’à la salle des communications1 afin de faire connaître leur situation au reste de l’Imperium.

Coup de chance, ils arrivent à contacter l’astropathe de garde du Ragnarok, une barge de bataille Space Marines, et à convaincre le commandant de cette dernière de leur venir en aide. Mais pour cela, il faudra que Challis et ses potes réussissent à faire taire les défenses du Hulk, faute de quoi la libération tant espérée ne pourra avoir lieu.

1 : Ou plus exactement, l’enclos à bizarboys.

AVIS :

Liberation Day est une nouvelle intéressante à plus d’un titre. D’un point de vue strictement narratif, tout d’abord, elle présente une construction impeccable, les deux auteurs étant parvenus à optimiser leur séquençage du récit avec brio, permettant à l’intrigue de suivre son cours sans temps mort ni faux raccords. Le découpage du texte en cinq parties distinctes, relatant chacune un évènement important ayant pris place avant le fameux jour de la libération1, laisse ainsi apparaître la trame de la nouvelle2. Le résultat aurait pu être scolaire et décousu, mais Farrer et Rusk ont assez de métier pour éviter cet écueil et agrémenter l’ossature du récit de péripéties plaisantes à lire.

Deuxièmement, le fluff de 40K est non seulement respecté, mais également mis en perspective de manière intéressante. C’est indéniablement l’une des forces de Matthew Farrer (je ne me prononcerai pas sur le cas d’Edward Rusk, dont c’est la seule contribution à la Black Library) que de proposer un angle de vue à la fois original et pertinent de l’univers de Warhammer 40.000. Ici, il rappelle ainsi au lecteur que l’écrasante majorité des citoyens de l’Imperium n’a qu’une compréhension très limitée de la technologie et de l’organisation de ce dernier, ce qui n’est pas sans poser des problèmes que la plupart des autres auteurs de la BL auraient balayés d’un revers de plume, en conférant à leurs héros la confortable (quasi3) omniscience qui est la leur. Ainsi, le héros de Liberation Day a beau venir d’un monde assez développé, il n’a aucune connaissance en matière de voyage spatial (et n’a donc pas la moindre idée de la manière dont faire parvenir un SOS au reste de l’Imperium depuis le Space Hulk qu’il squatte), et rit carrément au nez de l’intello du groupe lorsque ce dernier lui affirme que les Space Marines existent bel et bien. Ça fait bizarre au début, tant l’Astartes est une figure centrale de la Black Library, mais c’est tout à fait cohérent d’un point de vue fluff, et je remercie Farrer de placer (pour une fois) la caméra au niveau du Mr Tout le monde de l’Imperium. C’est tellement rare4.

Troisièmement, la nouvelle se termine par un twist final pas trop mal introduit.

Au final, Liberation Day est une livraison plus que correcte de la part d’un des tout meilleurs (à mes yeux) contributeurs de la Black Library. On est assez loin du niveau de Faces, le must read absolu de Matthew Farrer, mais c’est tout de même suffisant pour faire passer un bon moment au lecteur gavé de Thorperies, Cawkwelleries et autres Swalloweries qui désespère en chacun de nous. C’est déjà pas mal. .

1 : Le premier chapitre s’intitule ainsi « 115 jours avant la libération », le deuxième « 112 jours avant la libération », et le dernier « Jour de libération ».
2 : Passage 1 : Challis libère un petit groupe d’esclaves.
Passage 2 : Un des nouveaux membres de la bande informe Challis que le Space Hulk approche d’une zone de guerre, et qu’il sera donc potentiellement possible d’envoyer un SOS à l’Imperium. Problème : comment s’y prendre ?
Passage 3 : Découverte d’un stock d’armes et de l’emplacement de la salle des communications du Space Hulk. Problème du passage 2 résolu.
Passage 4 : Raid chez les bizarboys, communication avec les Space Marines.
Passage 5 : Attaque des défenses orques afin de permettre la téléportation des Space Marines dans le Hulk. Pas de chance, c’étaient des Iron Warriors. C’est ballot.
3 : Il n’y a guère que les trois choses que le héros moyen de la Black Library découvre par lui-même au cours de ses aventures : 1) Le KO cé vrément pa kool 2) Ne jamais faire confiance à l’Inquisition 3) Ce n’est pas une bonne idée de partir en randonnée dans une mystérieuse nécropole peuplée de statues en métal à l’air patibulaire.
4 : Sur les 102 nouvelles 40K lues jusqu’à présent par votre serviteur (rq : c’était il y a bien longtemps, et surtout avant le lancement de Warhammer Horror et Warhammer Crime, mais j’ai la flemme de remettre à jour, donc ça restera comme ça) , seules 8 ont été écrites depuis le point de vue du sujet de l’Imperium lambda :  Liberation Day donc, mais aussi Warped Stars (Ian Watson), Nightmare (Gavin Thorpe), Angels (Robert Earl), Ancient History (Andy Chambers), Faces (Matthew Farrer), Survivor (Steve Parker) et The Shadow in the Glass (Steve Lyons). Les trois dernières sont des pépites que je recommande à tout le monde.

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A Matter of Evidence – B. Craig [WFB] – #31 :

INTRIGUE :

WFB_A Matter of EvidenceL’hiver est long et la vie est courte dans le grand Nord de Kislev, et de ces deux constats irréfutables vient peut-être l’attrait que Danila, cousine de la Reine des Glaces en personne et Electrice de la cité de Volkolamsk, éprouve pour les beaux jeunes hommes. Incarnation même de la noblesse guerrière de cette contrée inhospitalière, adulée de ses troupes pour sa bravoure au combat, qui lui a valu une cicatrices d’étoile sous l’œil gauche à la suite d’un accrochage avec une bande de chevaucheurs de loup Gobelins1, Danila a porté son dévolu sur Ivan Skavinsky, un modeste archer de la ville ayant pour particularité de posséder des yeux presque entièrement noirs. Et alors, me demandez-vous ? Et alors, ces yeux de chiot lui permettent de mentir avec aplomb, car ils rendent toute détection de ses bobards quasi-impossible, personne ne pouvant affirmer que la pupille de notre homme grossit ou diminue, signes indéniables de la véracité, ou non, d’un propos.

Les premiers temps de la passion entre nos deux tourtereaux se passent splendidement, mais Ivan commence bientôt à tourner autour d’une autre femme, plus de son âge que cette cougar de Danila. Cette dernière, informée de l’infidélité de son amant, lui laisse toutefois une chance de renoncer à sa folie, en lui faisant jurer sur ses yeux qu’il n’aime qu’elle, ce que le jeune freluquet, un peu trop confiant dans la noirceur de ses quinquets, accepte sans ciller. Arrive ce qui doit arriver, Danila surprend un peu plus tard un regard lourd de sens entre son rigolo de gigolo et une servante du nom de Natasha, et les bâtonnets de carotte sont cuits pour Ivan. Rancunière mais inventive dans sa jalousie, l’Electrice fait arracher les yeux du parjure, avant de les remplacer par des billes de bois qu’elle enchante pour que notre homme ne voit plus qu’elle, jour et nuit (en fait elle a inventé le FaceTime du Vieux Monde).

Ayant appris sa leçon sur les serments un peu trop hâtifs, et se disant sans doute qu’il n’a plus rien à perdre, Ivan décide de passer en mode mari honnête – même s’il n’est qu’un amant, bien sûr – et ne cherche plus à dissimuler la vérité à sa Dominatrice. Cette dernière peut ainsi jouir d’un sursis d’affection avant que l’archer aveugle (très utile à la défense de la ville donc) ne retombe amoureux des doux roucoulements de Natasha, et se permette même de lui balancer un « so what ? (bitch) » lorsqu’il est pris sur le fait. Déçue mais pas surprise, et au-dessus de ces petites mesquineries, Danila se contente de lui faire casser les doigts et arracher les ongles, et jeter en prison jusqu’à la fin de ses jours, où il pourra entendre jacasser les commères qu’elle envoie à dessein raconter les anecdotes croustillantes sur les coucheries de Volkolamsk, les siennes et celles de Natasha en priorité bien entendue. Moralité : mieux vaut garder ses yeux dans ses poches, pour ne pas finir comme tel.

 1 : Ils semblent toujours viser au même endroit, comme peut en témoigner Gotrek.

AVIS :

Brian Craig déroule une histoire d’amour, de jalousie et de vengeance, bâtie sur une caractéristique physique des plus spécifiques (la rétractation pupillaire, rien que ça) dans le monde impitoyable de Warhammer Fantasy Battle. Il aurait pu le faire n’importe où ailleurs que cela aurait marché, son talent de conteur entraînant sans mal le lecteur à sa suite, et pour ma part, j’ai plutôt apprécié ce petit texte à valeur de conte, avertissant des dangers de se faire de ses amis puissants des ennemis l’étant tout autant. On peut toutefois reprocher à ce A Matter of Evidence de ne pas vraiment remplir le cahier des charges d’une publication de la Black Library, l’utilisation du Vieux Monde comme trame d’une histoire d’amour dysfonctionnelle apparaissant comme un détournement, plutôt qualitatif il faut dire, de la mission première du contributeur de la maison d’édition de Nottingham : donner vie et enrichir le background des franchises de GW, sans trop s’éloigner des choses de la guerre qui constituent le cœur du sujet quand on donne dans le wargame. Peut-être ne faut-il donc pas trop s’étonner de constater que cette nouvelle fut la dernière de Brian Craig publiée dans Inferno! (à ce jour), tout comme sa non inclusion dans les recueils et anthologies de la Black Library tombe naturellement sous le sens. Les Liaisons Dangereuses ne s’accordent en effet pas facilement au hack’n’slash et au sword and sorcery, et la BL a choisi son camp depuis longtemps.

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On Mournful Wings – S. Spurrier [40K] – #32 :

INTRIGUE :

40K_On Mournful WingsLes jumeaux Ica et Delus1, seuls membres de leur tribu ayant survécu à l’ouragan qui a frappé leur village, voyagent jusqu’à la capitale de Gathis II afin de participer au processus de sélection des aspirants du Chapitre des Doom Eagles. Shortlistés par l’Archiviste faisant office de DRH en raison de leur imperturbable pessimisme, les deux adolescents se retrouvent engagés dans une course contre la montre, la mort et le désespoir ;  leur parcours d’initiation consistant à s’échapper de l’intérieur d’un volcan sur le point d’entrer en éruption afin de rejoindre la forteresse monastère du Chapitre.

Alors que leurs condisciples périssent les uns après les autres, victime des nombreux dangers parsemant la voie menant vers le salut et l’honneur de rejoindre les meilleurs consommateurs de Prozac de l’Empereur, Ica et Dalus triomphent de toutes leurs épreuves et se présentent ensemble devant les portes de l’Aire des Doom Eagles. Un ultime test les attend toutefois avant de pénétrer dans le sanctuaire des Astartes, qui fera ressortir l’unique, mais crucial, point de divergence entre les deux frères.

1 : Un exemplaire dédicacé de La Mythologie Grecque pour les Nuls à celui qui identifie la légende à laquelle ces noms font référence. Exemplaire remporté.

AVIS :

En choisissant de centrer son récit sur la psyché si particulière des Doom Eagles, le plus emo des Chapitres loyalistes, Simon Spurrier n’a pas opté pour la facilité. Il est en effet assez compliqué de rendre justice au mélange de fatalisme et de résolution qui caractérise les locataires de Ghostmountain, et dont l’état d’esprit morbide se révèle être une force (il n’y a pas grand-chose qui puisse effrayer un Space Marine qui se considère comme étant déjà mort) plutôt qu’un handicap. Si la force de la foi et le psycho-conditionnement des surhommes du 41ème millénaire constituent des pistes crédibles pour expliquer ce paradoxe, ces justificatifs bien pratiques ne peuvent pas être avancés pour les recrues du Chapitre, qui, en tant qu’êtres humains normaux, ont la fâcheuse tendance à se noyer dans leur désespoir au lieu de s’en servir comme bouclier.

Bref, Spurrier marchait écrivait sur des œufs, et je trouve qu’il s’en est remarquablement tiré. Outre le fait que sa présentation des Doom Eagles rend hommage à ces derniers (plus que le portrait qu’en a fait Ben Counter dans son Phalanx) en faisant ressortir à la fois leur singularité et leur noblesse, la rivalité latente des deux héros de la nouvelle est rendue avec justesse et suffisamment bien mise en contexte pour que la conclusion d’On Mournful Wings (même le titre a grave la classe) fasse mouche1. On appréciera également l’art consommé avec lequel Spurrier entremêle scènes d’actions, flashbacks et contemplations d’Ica sur son sort, pour un résultat aussi digeste qu’élégant. Inspirée, conséquente et bien construite, On Mournful Wings est définitivement l’une de ces nouvelles justifiant à elles seules l’achat du recueil (‘Crucible of War’) entier2.

1 : Arrivés devant l’entrée de la forteresse des Doom Eagles, les jumeaux sont sondés psychiquement par l’Archiviste en charge du recrutement des novices du Chapitre. Ica a la mentalité nécessaire pour devenir un Doom Eagle, mais Dalus, qui toute sa vie n’a cherché qu’à sortir de l’ombre de son frère en surpassant ce dernier à la moindre occasion (en pure perte, Ica restant le favori des parents des jumeaux, à cause de sa – relative – aînesse), est jugé trop amer et torturé pour être introduit dans l’Aire…et est donc condamné à mourir de faim, de froid et d’épuisement au pied du portail que seul son frère a eu le droit de franchir.
2 : Et au prix dudit recueil (Crucible of War) sur le marché de l’occasion, on aurait tort de se priver.

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A Good Thief – S. Jowett [WFB] – #32 :

INTRIGUE :

A Good ThiefFrançois Villon est un poète (naaaaaan ???) à l’esprit vif et à la langue bien pendue, ce qui lui cause autant de problèmes que d’opportunités. Forcé à l’exil de sa Marienburg natale après que les vers qu’il a composés sur les activités extra-maritales de la femme de l’un des princes marchands de la cité soient parvenus aux oreilles du mari cocu, il a trouvé refuge dans la petite ville de Wallenholt, et est devenu le poète de cour du Graf local. Une occupation indigne de ses talents, qui sont de son avis de spécialiste, superlatifs, mais qui lui permet de vivoter tranquillement aux crochets de son mécène.

La situation de Villon se complique lorsque le Graf de Wallenholt reçoit la visite d’une délégation de notables impériaux, dans laquelle se trouve un parent de la Frau von Klacht, dont les frasques libertines ont été mises en vers (et contre tous) par notre poète. Reconnu par le visiteur, Villon est fissa envoyé à la case prison par son employeur, qui préfère logiquement se séparer de son flagorneur licencié plutôt que d’hériter d’une guerre commerciale avec l’un des marchands les plus influents du Vieux Monde. Par chance pour Villon, la petite soirée pendant laquelle son destin s’est joué s’est déroulée devant un autre témoin, d’opinion plus favorable envers le rimailleur de cour. Le Magister (puisqu’on ne le connaîtra pas sous d’autres noms) organise l’évasion de notre héros pendant son transfert vers Marienburg, et lui remet une mission très spéciale en échange de ce coup de pouce inespéré : il doit se rendre dans un village du Reikwald tombé sous la coupe du bandit Gerhard Kraus, et mettre la main sur un artefact magique que le même Kraus a acquis pour le compte du Magister, avant de décider de le garder pour lui. Tout cela est bien mystérieux.

A son arrivée à Krausberg, Villon ne perd pas de temps à s’encanailler avec les hommes du seigneur brigand, qui reste lui complètement reclus dans ses quartiers. Il lui faudra attendre une nuit de beuverie pendant laquelle son public lui demande de réciter pour la énième fois son ode épique sur Frau von Klacht pour que Kraus daigne faire son apparition, et défie Villon à un duel… de poésie. Original, n’est-ce pas ? Le brigand n’est cependant pas un adepte du free style, et se contente de réciter les strophes tirées d’un petit livre qu’il a amené avec lui, et dont la nature arcanique ne fait rapidement pas de doute à Villon, qui se fait happer par la déclamation de Kraus au même titre que le reste de l’assemblée. Il est évident que c’est l’objet que le Magister l’a envoyé reprendre au mercenaire indélicat, et Villon décide d’agir la nuit même, profitant du gros coup de mou subi par Kraus après la fin de sa prestation. L’art est épuisant, c’est vrai.

Voleur avant d’être poète, Villon n’a aucun mal à se glisser dans la chambre du bandit et à mettre la main sur le livre en question, dont l’influence néfaste n’est pas à sous-estimer. Ne pouvant corrompre directement notre héros (qui est analphabète, et c’est bien pour cela que le Magister l’a choisi en premier lieu) comme il l’a fait pour Kraus, le grimoire possède ce dernier et un combat féroce s’engage entre les deux chineurs d’antiquités pour la possession du grimoire. Villon finit par remporter le match et s’enfuit par la fenêtre avec son butin sous le bras, laissant Kraus éborgné et exposé comme fraude littéraire (une double sanction bien sévère, si vous voulez mon avis). Après un voyage vers Altdorf, où le Magister lui a donné rendez-vous, le poète remet le bouquin tant convoité à son commanditaire, qui le jette immédiatement dans le feu, OPA Gandalf-style. Contrairement à l’Anneau Unique, le parchemin est inflammable et l’ouvrage maudit (askip) finit en fumée. Voilà une nouvelle menace qui planait insidieusement sur l’Empire écartée pour de bon…

Début spoiler…Enfin presque. Villon a en effet jugé malin de donner au Magister un livre dérobé au hasard dans la bibliothèque municipale la plus proche, préférant trouver un riche gogo pour lui acheter le vrai grimoire un peu plus tard. A malin, malin et demi cependant : le Magister ne met pas longtemps à se rendre compte qu’il a été dupé, et se fait un plaisir de faire arrêter Villon pour lui apprendre à jouer des tours aux puissants de ce monde. Par chance pour notre poète-escroc, M a une nouvelle mission à lui confier, ce qui est toujours mieux que danser la gigue des pendus (en attendant d’en composer la ballade, bien sûr)…Fin spoiler

AVIS :

Simon Jowett prend son temps et déroule une histoire originale de poète-voleur missionné pour dérober un grimoire de sonnets à un seigneur bandit trop cultivé pour son propre bien (je vous défie de trouver une intrigue comparable dans tout le corpus de la GW-Fiction) dans ce ‘A Good Thief’, dont la moitié des pages est finalement consacrée à la présentation du héros. Jowett est suffisamment doué avec sa plume pour que le lecteur n’ait pas l’impression de se faire flouer dans la manœuvre, mais il ne reste pas moins que cette nouvelle ressemble plus à l’introduction d’un roman, qui n’aura au final pas été écrit1, qu’à une œuvre indépendante. Une sympathique curiosité.

1 : Un puissant et mystérieux commanditaire œuvrant en secret pour le bien de l’Empire recrute des agents doués de talents particuliers parmi le gibier de potence impérial ? Ça me dit vaguement quelque chose

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Payback – G. McNeill [40K] – #32 :

INTRIGUE :

40K_PaybackLe trafiquant d’armes Cornelius Barden se retrouve dans une situation difficile après qu’une transaction avec des activistes de la cause mutante ait été interrompue par l’arrivée impromptue du baron du crime local (« Red » Ivan Constantine) et de ses hommes, pas très jouasses à l’idée de laisser Barden marcher sur leurs plates-bandes en écoulant sa came sur leur territoire. Blessé dans la fusillade qui s’en suit, trahi par son partenaire qui s’enfuit avec le magot, et recherché à la fois par Constantine et par les mutants, Barden va devoir la jouer fine pour espérer sortir entier du pétrin dans lequel il s’est fourré.

AVIS :

Ecrite à la suite de la sortie du jeu Inquisitor (dont le background est en grande partie centré sur la planète Karis Cephalon, où se déroule également la nouvelle de McNeill), Payback est selon son auteur1 un hommage au style de James Ellroy (le pape du roman noir moderne, auteur notamment du Dahlia Noir et de L.A. Confidential), arrangé à la sauce Warhammer 40.000.

À l’image de son anti-héros violent et cynique mais droit dans ses bottes, Payback est un agrégat de clichés mis en forme de manière très cinématique par un McNeill égal à lui-même, c’est-à-dire sensiblement meilleur que la moyenne des contributeurs de la BL, mais pas mémorable non plus. Il manque ainsi une véritable profondeur à ses personnages, que le lecteur cerne totalement à leur première réplique, ce qui n’est certes pas vraiment un problème pour une nouvelle « one-shot », mais aurait pu se transformer en handicap si Payback n’avait été que le prélude d’un travail plus conséquent (comme Kinstrife a préfiguré le diptyque Defenders of Ulthuan et Sons of Ellyrion par exemple).

S’il n’est pas exclu que Cornelius Barden revienne faire un petit tour de piste dans les années à venir, j’espère sincèrement que McNeill parviendra à développer son Harlon Naye (le gros bras des séries Eisenhorn et Ravenor) personnel de manière un peu plus poussée que dans ce premier jet.

1 : Le site de Graham McNeill comporte une partie « short story », dans laquelle chaque publication est commentée et resituée dans son contexte d’écriture.

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Rest for the Wicked – J. Wallis [WFB] – #32 :

INTRIGUE :

WFB_Rest for the WickedAltdorf, et ses rues bruissantes de vie, ses marchés bien achalandés, ses honnêtes citoyens faisant leurs courses… Et, bien entendu, ses forces de police luttant au jour le jour contre les déprédations des mauvais sujets de l’Empereur, ou, dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, celles de dangereux immigrants, comme ce Kislévite à moustache de Kislévite (ok) et aux yeux de Kislévite (plus dur), qui se fait courser comme un lapin par nos héros, les officiers des Lices Dirk Grenner (aka Astérix) et Karl Johansen (aka Lucky Luke1), qui cherchent ainsi à boucler une enquête de trois mois de façon probante. Manque de bol pour les Starsky et Hutch impériaux, leur course poursuite les amène jusqu’aux portes de la ville, où le cortège de Leopold von Bildhofen, Comte Électeur du Middenland, fait son entrée en grande pompe. Le périmètre de sécurité étant strictement maintenu par la garde civile, nos héros ne peuvent que constater la disparition de leur proie dans la foule massée pour l’occasion… jusqu’à ce que le suspect moustachu trouve intelligent de passer en courant devant le cheval de l’Électeur, pile au moment où ce dernier reçoit un carreau en pleine encolure (le cheval, pas le bonhomme). La suite est assez facile à prédire : la bête s’emballe et part au triple galop dans les rues pavées d’Altdorf, en direction de la Königplatz (à ne pas confondre avec la Kaiserplatz) et de son marché bondé. Serait-ce la fin de ce bon vieux Leopold ? NON, car les héroïques Johansen et Grenner subtilisent deux montures à leurs balourds de collègues, piquent des deux et parviennent in extremis à se saisir de l’aristocrate avant que son destrier n’aille s’emboutir dans un food truck, avec des résultats dévastateurs. Malgré leur intervention salutaire, ce snob de von Bildhofen remercie à peine ses sauveurs, et repart avec sa troupe jusqu’à son Air BnB.

De retour au poste, les officiers doivent à présent amadouer la colère de leur patron et chef des Lices d’Altdorf, le Général Hoffmann, devant le capotage complet de l’opération Kosachok. Ce fiasco a toutefois libéré le duo, qui peut enquêter sur la tentative d’assassinat dont l’influent aristocrate vient de faire les frais. Ayant déjà reçu le résultat des expertises du laboratoire alchémico-légal avec lequel les Lices travaillent, qui a établi que le carreau était d’origine tiléenne, Johansen et Grenner partent en direction de la petite Tilée pour creuser la piste d’un assassin étranger engagé par un mystérieux commanditaire pour se débarasser de von Bildhofen. L’héritier du Comte étant son frère Siegfried, marié à une Tiléenne, c’est donc vers ce dernier que les premiers soupçons se portent. Après une rencontre fructueuse avec le signor Argentari, parrain de la pègre italienne tiléenne locale, les deux équipiers filent jusqu’à la Marianstrasse, où leur indic leur a confié que se trouvait le tireur d’élite recruté pour effectuer ce sale boulot. Bien qu’ils parviennent sur place avant que ce dernier n’ait pu retenter sa chance, profitant du passage du Comte Électeur à la sortie de la messe, ils perdent l’élément de surprise lorsque Grenner ne parvient pas à enfoncer la porte de la planque du premier coup. S’en suit un face à face tendu entre les officiers et leur suspect, qui se prend la dague de jet de Johansen dans l’estomac pour commencer, mais riposte en logeant un carreau dans la poitrine de ce dernier. Ce tilean stand-off, qui aurait pu durer longtemps vu la stupidité des participants2, est toutefois interrompu par une boule de feu impromptue, qui ravage la piaule et réduit le sniper en cendres. Comprenant que cette intervention enflammée était probablement celle du commanditaire, peu soucieux de laisser les enquêteurs interroger le tueur à gages, Johansen indique à son partenaire qu’il serait judicieux qu’il aille rendre une visite de courtoisie à la DGSI impériale, une cellule de la Reiksguard (en civil) enquêtant sur les complots et manigances agitant l’entourage de l’Empereur. Cette organisation moyennement secrète (puisque un simple officier des Lices sait qu’elle existe et où elle opère3), du nom d’Untersuchung, s’est faite une spécialité d’enquêter sur les mages renégats, et pourrait donc aider l’enquête à progresser. Pendant que son collègue passe aux urgences se faire recoudre, Grenner se rend donc sur place.

Là, il se fait poliment mais fermement éconduire par ses interlocuteurs, qui ont l’air d’en savoir beaucoup plus qu’ils ne veulent bien en dire sur cette affaire, et ne consentent qu’à lui expliquer la différence entre une boule de feu et une explosion flamboyante. Car non, ce n’est pas la même chose. De retour au poste, Johansen est toutefois briefé par Hoffmann, qui a reçu les infos refusées à son sous fifre par fax pigeon voyageur, sur la situation très délicate dans laquelle ils doivent opérer. La sorcière pyromane se révèle être une certaine Emilie Trautt, mage flamboyante passée libérale depuis quelques années et concubine notoire du fils de Leopold von Bildhofen, Udo, qui passe du coup suspect #1 de l’enquête. Cependant, l’Untersuchung a formellement interdit à ses collègues d’intenter quoi que ce soit envers Trautt, qui pourrait mener le Bureau des Légendes d’Altdorf à de plus gros poissons. Cela n’empêche toutefois pas les Lices de monter un plan audacieux pour protéger le mal-aimé Leopold de ses persécuteurs…

Début spoiler…Et notre duo infernal, maintenu sur l’affaire par un Hoffmann très peu progressiste quand au concept d’ITT et de congés maladie, de se rendre à la place de leur boss au rendez-vous organisé par Udo afin de discuter des mesures de protection prises par les Lices envers le Comte Électeur. Tout aussi odieux que son paternel, Udo gobe toutefois sans broncher les bobards débités par un Johansen imperturbable, qui lui fait croire que les suspects principaux sont les Kislévites (décidément, il ne les aime pas), et lui révèle les dispositions super secrètes prises par son équipe pour protéger le convoi qui amènera le Comte et sa famille à la réception organisée par l’Empereur en leur honneur le soir même, lorsqu’Udo se met à flipper des tables pour exprimer son mécontentement d’être tenu hors de la confidence. Le piège étant tendu, il est maintenant temps de voir si le poisson va mordre…

Aussi, lorsque les rusés officiers changent l’ordre des carrosses banalisés transportant les huiles Middenlander, positionnant celui d’Udo en deuxième position, à la place de celui de Leopold et Siegfried, c’est sans surprise qu’ils constatent la combustion spontanée mais peu naturelle du fiacre. C’est ce qui s’appelle un retour de flamme, je suppose. Bravant les ordres, l’intenable Johansen s’élance ensuite à la poursuite de Trautt sur les toits, ne parvenant pas à refaire son retard (et pourtant, elle était en robe longue) avant que la magicienne utilise ses pouvoirs enflammés pour… partir en lévitation et franchir le mur d’enceinte de la ville, évitant facilement la dague de jet que Johansen lui avait lancée sans sommation. C’en est fini de notre enquête, mais pas du boulot de notre paire de choc, qui devra dès le lendemain faire porter le chapeau de ces tentatives d’assassinat répétées aux, je vous le donne en mille, Kislévites. Comme on dit par chez nous, pas de pitié pour les croissants Cosaques.Fin spoiler

1 : Comprendre que le premier est un petit blond raleur, et le second un grand brun à la gâchette facile.
2 : Ainsi, l’assassin parvient à se surprendre lui-même lorsque sa manœuvre de diversion à l’encontre de Johansen le mène à regarder également dans la direction vers laquelle il pointait son arbalète, permettant à l’officier de lui balancer un pied de chaise dans la tronche en toute impunité.
3 : Rendant son utilisation de mot de passe alambiqué à l’entrée un peu ridicule.

AVIS :

Pastiche assez transparente de la série policière classique des années 80, mettant en scène des flics débrouillards aux méthodes non conventionnelles mais efficaces pour combattre le crime, Pas de Répit pour les Braves souffre des grosses ficelles parodiques utilisées par l’auteur, d’un duo de héros pas vraiment attachants, et de l’intégration assez grossière de l’Untersuchung (que Wallis mettra au centre de son roman La Marque de la Damnation) à l’intrigue pour des raisons relevant selon moi du teasing pur et simple. Si on peut reconnaître à cette nouvelle un rythme enlevé et une enquête potable, même si pas vraiment spectaculaire en termes de rebondissements1, ainsi que quelques détails fluffiques sur Altdorf et ses forces de po-Lices, à prendre avec des pincettes car reprises par personne d’autre depuis, la Black Library a beaucoup mieux à offrir en termes de nouvelles « policières » se déroulant dans le Vieux Monde, à commencer par L’Affaire de la Cellule Écarlate dans la même anthologie, supérieure sur tous les points à Pas de Répit pour les Braves.

1 : En même temps, avec deux suspects identifiés en tout et pour tout, difficile de faire planer longtemps un suspens étouffant. Wallis avait fait beaucoup mieux ceci dit avec sa série Dieter Brossmann (‘The Dead Among Us’ et ‘The Bretonnian Connection’).

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Blue Blood – D. Abnett [40K] – #33 :

INTRIGUE :

40K_Blue BloodLa nouvelle affectation de l’escouade Damocles, fraîchement de retour à plein effectif après son passage au stand sur Ithaka (‘Crimson Storm’) ne ravit guère le Sergent Priad. Il s’agit en effet de faire de la figuration protocolaire lors des cérémonies de couronnement du nouveau souverain d’Iorgu, planète d’importance des mondes récifs dont les Iron Snakes sont les défenseurs attitrés. Priad et ses hommes espéraient faire un peu de team building sur le front, histoire que les grands nouveaux et les petits anciens1 puissent sympathiser en situation de travail, mais les ordres sont les ordres. Bien que l’accueil réservé par leurs hôtes soit impeccable, et permette à nos spartiates (haha) héros de découvrir des concepts d’une opulence inouïe – comme celui du lit – l’ennui guette rapidement les Space Marines, qui commencent à développer des TOC à force de banquets et de processions.

Fort heureusement, cette festive monotonie est brisée par l’arrivée d’une tête connue, celle de l’Inquisiteur Mabuse (‘Red Rain’). King Mab est présent sur Iorgu incognito, car il soupçonne que la disparition de la vieille reine n’était pas due à son âge avancé, mais bien à une conspiration dont il doit percer à jour les tenants et aboutissants. La suite des événements lui donne rapidement raison : la ferveur bon enfant d’Iorgu City tourne vite au vinaigre et à l’émeute alors qu’une pluie diluvienne se met à tomber sur la ville. C’est peut-être un détail pour vous, mais comme Iargu connaît un léger crachin une fois tous les vingt ans, on peut comprendre que les citoyens commencent à paniquer à l’idée de devoir acheter des bottes en caoutchouc pour marcher dans rue. La situation dégénère tellement rapidement que la jet set ayant fait le déplacement décide de quitter les lieux sans tarder, et Priad se trouve noyé sous les demandes d’escorte émanant des plus hautes sphères, sollicitations que même son psycho-endoctrinement rigoureux ne l’a pas préparé à encaisser.

Le salut vient, une fois de plus, de Mabuse, qui envoie un doigt aux Iron Snakes afin de solliciter leur assistance immédiate sur le Mont Sacré, où les reliques les plus anciennes d’Iorgu (dont les regalia utilisés pour le couronnement) sont gardées. Cette bonne excuse permet à Priad d’envoyer balader un Lord Militant irritant et de réquisitionner la limousine d’une princesse royale pourrie gâtée, ce qui est tout de même satisfaisant. Les Iron Snakes rejoignent l’Inquisiteur après avoir été témoins de phénomènes paranormaux, une sûre indication que le Warp est de la partie. Le briefing qu’ils reçoivent est simple : escorter Mabuse dans la crypte du Mont Sacré où les regalia sont conservés, et les remettre à leur place. Ces objets ne sont en effet pas uniquement des symboles un peu kitsch, mais font partie intégrante du dispositif de stase que les premiers habitants d’Iorgu ont installé pour exiler un démon local, peu après leur arrivée. Les cultistes du Chaos que l’escouade Damocles doit affronter en cours de route cherchent évidemment à réveiller celui que Mabuse appelle le Dormeur (sans doute un crabe gigantesque), et cela aurait des conséquences assez graves pour la Pax Imperialis, donc autant éviter.

Après moultes péripéties, le crypt rush se solde par une victoire sur le gong pour le camp impérial, qui n’a à déplorer que la perte de l’Inquisiteur, criblé de balles lors d’un accrochage sur le chemin. Dans son dernier souffle, il a cependant l’amabilité d’enregistrer un vlog élogieux sur le dévouement de Damocles à destination du Maître de Chapitre des Iron Snakes, permettant de contrebalancer la shit storm de revues négatives laissées par les pontes que les Space Marines ont ignoré/rudoyé/spolié lors de leur intervention urgente. L’image de marque, ça reste important au 41ème millénaire.

1 : Les Space Marines de Dan Abnett ont la morphologie d’une équipe de rugby des années 80, ça doit être pratique lors des essayages de matériel.

AVIS :

Il lui aura fallu cinq tentatives et une soixantaine de pages, mais Dan Abnett a finalement réussi à faire sortir les Iron Snakes de l’océan de médiocrité littéraire dans lequel les fiers fils de la fière Ithaka pataugeaient (fièrement, sans nul doute) depuis ‘White Heat’. On retrouve ici les talents de conteur d’histoires et de distillateur d’atmosphère et d’univers1 de l’Abnett des séries Eisenhorn et Ravenor (et le retour gagnant – sauf pour lui – de l’Inquisiteur Mabuse y est sans doute pour quelque chose), capable de camper un monde impérial et sa culture propre en l’espace de quelques paragraphes bien sentis. Je ne pouvais donc pas aborder cette critique sans remettre à ‘Blue Blood’ les lauriers de meilleure nouvelle de la pentalogie chromatique reptilienne (vous êtes au 3ème millénaire, moi je suis déjà au 30ème) de Dan Abnett. Pas que la concurrence ait été très rude, notez bien, mais cette soumission n’est pas seulement la moins pire du lot, elle est objectivement satisfaisante, ce qui change agréablement.

Malheureusement, et c’est très ironique, cette amélioration notable se fait aux dépends des Iron Snakes eux-mêmes, qui sont ici relégués au rang de simples super soldats sans personnalité2. Inutile donc de s’être enfilé les quatre épisodes précédents, et surtout le Space Marines-onlyCrimson Storm’ pour apprécier à sa juste valeur cette nouvelle. L’escouade Damocles est juste une escouade tactique classique, et son Sergent n’a rien de particulier qui le distingue des milliers d’autres officiers Astartes de la Black Library. C’est comme si Abnett avait finalement décidé de ne pas écrire une histoire de Space Marines – ce qu’il ne sait, ou savait en tous cas, pas vraiment faire – mais une histoire avec des Space Marines – ce qui ne lui pose aucun problème. Le résultat est convaincant, mais on ne retrouvera plus trace des Iron Snakes dans Inferno ! après ‘Blue Blood’, alors que le magazine sera encore publié pendant deux ans à la suite de ce numéro #33. On peut expliquer cet abandon par de multiples raisons, mais je choisis de penser qu’Abnett a gagné son bras de fer avec la BL sur ce sujet, et est parvenu à démontrer par l’absurde qu’il ne servait à rien de s’acharner dans cette direction. ‘Blue Blood’ a donc une saveur particulière, et mérite donc la lecture à plus d’un titre.

1 : La description de l’intérieur du Mont Sacré m’a également fait penser à ce qu’on pourrait lire quelques années plus tard dans ‘Legion’, lorsque sont décrits les pouvoirs d’invocation et d’illusion des cultistes du Chaos de Nurth.
2 : Il est donc assez savoureux de lire dans la nouvelle que Priad s’insurge contre ce même constat, qui est appliqué à l’escouade Damocles par le nouveau roi d’Iorgu. Eh oui mon pauvre choupinet, ce n’est pas la carrure ou la taille qui sont d’une grande utilité sur ce plan…

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What Price Vengeance? – C. L. Werner [WFB] – #33 :

INTRIGUE :

What Price VengeanceLa bande de mercenaires tiléens du Capitaine Ursio a connu de meilleurs jours : engagée par le rusé Vicomte Augustine de Chegney pour brigander en son nom sur les terres de ses voisins, elle a failli à sa mission et a en conséquence essuyé une attaque meurtrière de la part d’autres sbires de l’implacable Bretonien, peu enclin à laisser des témoins de sa vilénie ternir sa réputation. Il paraît que les chevaliers du Royaume sont h.o.n.o.r.a.b.l.e.s après tout. Malheureusement pour Gus, les reitres ont survécu, et sont maintenant assoiffés de vengeance. Profitant de la bonté de Claudan de Chegney (fils du premier), ils investissent donc la place forte que ce dernier occupe au nom de son père – et qu’il a dérobé à un autre voisin, impérial celui-ci – en prétextant chercher à s’abriter des terribles orages des Montagnes Grises… et passent tous les habitants du château par le fil de l’épée pour se passer les nerfs. Tous ? Pas tout à fait. À malin, malin à demi : Ursio repart donc se cacher dans la campagne avoisinante avec le jeune fils de feu Claudan et sa nourrice, et charge le gouverneur du noble trucidé d’aller porter sa demande de rançon à Augustine.

Bien que n’étant pas vraiment un enfant de chœur, comme on a pu le voir plus haut, le Vicomte est un family man, ne serait-ce que parce qu’il est trop bête d’agrandir le fief familial uniquement pour le voir disparaître à sa mort, faute d’héritiers. N’ayant plus que Claudan Junior (que nous appellerons Cloclo) de ce côté-là, il est prêt à dépenser sans compter pour retrouver l’usufruit de son petit-fils, mais est convaincu par son conseiller (Plaisant) de ne pas négocier avec des terroristes, et de recruter à la place un tueur professionnel pour aller récupérer le bébé à ses ravisseurs. Cela tombe bien, Plaisant a justement un nom à souffler à son patron : celui du redoutable Brunner, un impérial que l’on dit de noble ascendance (ça compte pour les Bretonniens), et n’ayant jamais failli à la tâche. Augustine envoie donc son sénéchal recruter le chasseur de primes… qui refuse de prendre la mission, malgré les 200 couronnes d’or sonnantes et trébuchantes que le bon Plaise lui fait miroiter. Enfin, il fait mine de refuser plutôt, le temps de laisser un Plaisant très colère repartir de la taverne dans laquelle le rendez-vous a pris place, et se faire embusquer quelques mètres plus loin par un groupe de truands de bas étage, qui n’ont pas pu résister à la grosse bourse (au singulier ça va) du sénéchal. Cette avidité leur sera fatale, Brunner sortant des ombres au moment fatidique pour leur régler leur compte avec une efficacité consumée, et empocher au passage les quelques pièces d’argent que la mort de ces soudards lui rapporteront. Y a pas de petits profits.

Un peu plus tard, nous retrouvons le taciturne mercenaire sur les terres du Vicomte, qu’il semble très bien connaître. Ayant joué le rôle de l’innocent (mais tout de même très bien armé) voyageur pour attirer trois des hommes d’Ursio à se montrer auprès de son feu de camp, il a tôt fait d’en envoyer deux chez Morio (le Morr tiléen), gardant le troisième en vie pour qu’il lui indique où se sont cachés ses petits camarades. Et si la tour de guet abandonnée que les kidnappeurs ont choisi comme repaire semblait être un endroit parfait pour surveiller les environs, on s’aperçoit bien vite que Brunner joue vraiment à domicile, puisqu’il pénètre dans le donjon au nez et à la barbe des sentinelles grâce à sa connaissance du passage secret reliant l’édifice à un tunnel à proximité. Cet avantage lui permet de neutraliser discrètement (au début) les hommes d’Ursio, laissant ce dernier seulement accompagné de ses deux derniers lieutenants, et de ce cher Cloclo (la nourrice ayant été étranglée par un mercenaire nerveux après que Brunner ait arrêté le mode silencieux, et commencé à castagner du sbire sans retenue), dans la salle principale de la tour.

Ce remake Battle de ‘Trois Hommes et un Couffin’ ne se termine pas aussi bien que l’œuvre originale pour le trio en question. Les compagnons d’Ursio tombent rapidement sous les balles et les lames du chasseur de primes, ce qui laisse leur Capitaine s’échapper en courant avec le bébé dans les bras… jusqu’à ce qu’il fasse la rencontre des chausse-trapes que Brunner a pris soin de semer en bas de l’escalier de la tour, ce qui ruine ses sneakers et l’envoie au tapis (et le pauvre Cloclo avec, encore un drame des bébés secoués). Lorsque le Tiléen voit sa Némésis apparaître sur le pallier, il tente de le convaincre de le ramener avec lui chez de Chegney, ce que Brunner accepte… partiellement. Comme il le révèle à sa victime, le Vicomte n’a en effet payé que pour sa tête, le reste de son anatomie peut donc rester sur place.

La nouvelle se termine avec un face à face entre Brunner et de Chegney, le premier annonçant à son employeur que, malheureusement, Cloclo n’a pas survécu à sa capture. Dévasté par la nouvelle, le noble accepte tout de même d’honorer sa part du contrat et remet à son chasseur de tête (qui n’est pas revenu les mains vides) la moitié restante de la somme convenue, avant de lui donner congé…

Début spoiler…Mais la scène « post-credit » (si je puis dire) révèle que Brunner a menti, et gardé le bébé avec lui. Ne pouvant l’élever seul, il le confie à un couple de marchands, auxquels il remet également la prime versée par de Chegney. On comprend quand il présente Cloclo comme étant également son petit-fils que le chasseur de primes était en fait le Graf Von Drakenburg dont de Chegney a usurpé le domaine, marié de force la fille à son fils, et vendu à des esclavagistes pour s’en débarrasser. Cela explique la connaissance approfondie des terres des Von Drakenburg dont Brunner dispose, et son peu d’empressement à rendre Cloclo à Gus. La garde partagée est un plat qui se mange froid.Fin spoiler

AVIS :

Après nous avoir fait don de Mathias Thulmann quelques infernaux numéros plus tôt, C. L. Werner remet le couvert avec ‘What Price Vengeance?’, nouvelle introductive de l’un de ses personnages les plus marquants, le chasseur de primes Brunner. Le charme opère immédiatement dans cette histoire de prise d’otage (violente) et d’opération de libération (tout aussi violente), l’auteur parvenant à nous embarquer d’un tour de plume dans les bas-fonds du Vieux Monde en compagnie de brigands sanguinaires, de nobles cauteleux et de mercenaires impitoyables. L’intrigue est très solide, le déroulé plaisant à lire et idéalement dosé (Werner fait partie de ces bons écrivains qui savent prendre leur temps sans qu’on ait l’impression qu’ils meublent, qualité trop souvent absente des écrits de la Black Library à mon goût), la conclusion apporte sa petite révélation bien sentie et finement préparée par Werner au cours des pages précédentes, il y a du fluff et des one liners bien sentis… Que demande le peuple ?

Le seul petit défaut qu’on pourrait reprocher à cette masterclass med-fan est la tonne de descriptions vestimentaires dont Werner nous abreuve dès lors qu’un personnage important nous est introduit pour la première fois, une excentricité qu’on ne retrouve chez personne d’autre au sein de la BL à ma connaissance. A part ça, on a affaire à une nouvelle de très haute volée, tout comme l’anti-héros qu’elle nous présente.

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Fight or Flight – S. Mitchell [40K] – #33 :

INTRIGUE :

40K_Fight or FlightAyant récemment achevé ses classes de Commissaire, Ciaphas Cain intègre le 12ème régiment d’artillerie de campagne de Valhalla. Cette affectation sied tout à fait au futur Héros de l’Imperium, sensible aux nombreux avantages procurés par le fait que sa nouvelle unité contribue à l’effort de guerre depuis une distance confortable du front et de ses dangers. Malheureusement pour Cain, ses grands projets de pré-retraite avant l’heure vont être contrariés par l’arrivée inopinée d’un fragment de la flotte ruche Kraken en orbite de la planète Desolatia IV. L’occasion pour notre anti-héros de commencer à écrire sa légende, tout à fait malgré lui bien sûr.

AVIS :

Fight or Flight est la première consacrée par Sandy Mitchell à son personnage fétiche de Ciaphas Cain, le Commissaire le plus cool de la Garde Impérial. Même si le concept du petit rigolo perdu dans l’univers gothique du 41ème millénaire a fini par s’épuiser au fil des publications, cette introduction conserve encore aujourd’hui une indéniable fraîcheur, résultant de l’approche mesurée qu’à Mitchell de son sujet : même s’il s’agit pour lui de divertir le lecteur en usant des ressorts comiques de Cain (« mais non, je n’étais pas en train de m’enfuir ! ») et de son fidèle Jurgen (« mon odeur corporelle est une arme de destruction massive), et plus tard de l’Inquisitrice Amberley « girl next door » Vail, il prend en effet soin de ne pas sombrer dans la caricature, ce qui ne rend que plus attachant la bande de bras cassés qui lui sert de héros.

Pour résumer, si la lecture de la saga de Ciaphas Cain (neuf romans à date) n’est pas recommandée aux inconditionnels de la science-fiction « premier degré » de la Black Library, celle de Fight or Flight, parce qu’elle permet justement de se faire une religion sur les travaux du trublion Sandy Mitchell, est elle fortement conseillée par l’auteur de ces lignes.

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The Path of Warriors – N. McIntosh [WFB] – #33 :

INTRIGUE :

WFB_The Path of WarriorsOn le sait, la vie en Kislev n’est pas de tout repos. En plus du rude climat et de l’isolement qui frappe la plupart des communautés éparpillées sur ces vastes steppes, la menace d’une visite de « courtoisie » rendue par des voisins nordiques avides de pillage plane en permanence au-dessus des chapkas des braves sujets du Tsar. C’est donc avec plus de fatalisme que d’appréhension que Fedor Kumansky, pêcheur buriné par ses années à taquiner la tanche dans l’estuaire du Lynsk, voit approcher une flotille de maraudeurs venus tout droit de la Mer des Griffes. Il a même reçu un songe prémonitoire de la tuile qui n’allait pas tarder à tomber sur le petit village d’Odensk la nuit passée, c’est dire s’il est au fait des événements.

Accompagné par son fils aîné, Stefan, il se hâte de porter la mauvaise nouvelle à ses concitoyens, et prend la tête de la milice de farouches péquenauds bien décidée à repousser les Norscans s’ils leur venaient l’idée de s’arrêter à Odensk avant de remonter jusqu’à Erengrad. Il laisse son autre fils, Mikhal, aux bons soins de l’aîné, et fait promettre à ce dernier de protéger son cadet comme il l’avait lui-même juré à sa défunte femme sur son lit de mort. À ce stade, vous devez sans doute vous dire qu’un tel comportement ne peut signifier qu’une chose pour le brave Fedor : une mort prématurée d’ici à la fin de la nouvelle. Et vous avez raison, futés que vous êtes. Sans beaucoup de surprise, mais tout de même hors champ (donc il s’est peut-être simplement empalé sur son épée en trébuchant sur un caillou, laissons le bénéfice du doute aux maraudeurs), Papa Kumansky ne passe pas la nuit, vaincu avec ses camarades par la furie sanguinaire des hommes du Nord.

De leur côté, les fistons Kumansky s’en sortent beaucoup mieux. Planqués dans la maison familiale, ils commettent l’erreur de quitter leur refuge au premier bruit de bottes venu, confondant en cela la démarche chaloupée des Kislevites avec celle, chaloupée aussi à leur décharge, des Norscans. Livrés à eux-mêmes dans la scène de chaos (c’est fluff) que constitue le pillage d’Odensk, les frérots parviennent à échapper aux sales pattes d’un duo de maraudeurs mal-intentionnés, dont un se fait éborgner par le petit couteau de Stefan au passage. S’étant tapis au fond d’une barrique remplie de tripes de poissons (on ne jette rien à Kislev), le temps que le jour se lève et que la poussière retombe, Stefan et Mikhal sortent de leur cachette une fois le calme revenu à Odensk, et se rendent compte qu’ils sont probablement les seuls survivants de cette terrible nuit. Sans autre recours, les orphelins prennent le chemin de la terrible et dangereuse civilisation (sans doute Erengrad, tbh), empruntant par là-même le chemin des guerriers (wink wink), qui les mènera des années plus tard à exercer leur VENGEANCE sur les méchants qui leur ont fait du tort et navré à mort leur pauvre papounet. Sans doute que les chemins des mages et des voleurs étaient en travaux, à ce moment.

AVIS :

Neil McIntosh lève le voile sur la tragic origin story des frères Kumansky, qui servent de héros à la trilogie ‘Star of Erengrad’/’Tainted Faith’/’Keeper of the Faith’ que cet auteur a signé pour la Black Library en des temps très anciens ; dans ce très honnête ‘The Path of Warriors’. Si le déroulé des événements ne surprendra pas grand-monde, et que le cameo du maraudeur éborgné (que l’on retrouve plus tard dans les bouquins, mais dont le nom m’échappe au moment d’écrire cette chronique) risque de ne résonner qu’auprès de la toute petite communauté des fans hardcore de cette série aujourd’hui tombée dans l’anonymat le plus complet, on peut apprécier d’être enfin en présence de personnages un minimum complexe et sympathique, ce qui n’est pas le cas dans la majeure partie des Kumanskynneries que j’ai pu lire avant. La meilleure nouvelle de la trilogie de courts formats que McIntosh a écrit pour accompagner les romans, à mon humble avis.

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Leviathan – G. McNeill [40K] – #34 :

INTRIGUE :

40K_LeviathanLeviathan prend place entre les deux premiers tomes de la saga d’Uriel Vent Triste, Nightbringer et Warriors of Ultramar. La sorte de prologue qui ouvre la nouvelle voit le nouveau capitaine de la 4ème compagnie des Ultramarines se forger une épée pour remplacer l’arme dont il a hérité à la mort d’Idaeus, son prédécesseur à la tête des schtroumpfs verts. Euh… soit. La suite est plus classique, Uriel menant ses hommes dans le Space Hulk Death of Virtue dans le but de détruire ce dernier en posant quelques bombes à des endroits clés. Bien évidemment, les Space Marines vont rencontrer une opposition aussi féroce que prévisible, d’abord sous la forme d’Orks poltrons, puis de Genestealers grognons. Ce qui ne les empêchera pas de compléter leur mission, bien entendu. Le texte se termine par la détection de l’ombre dans le Warp par les astropathes du croiseur d’attaque Vae Victus, ce qui permet à McNeill de faire le lien avec la campagne de Tarsis Ultra. Ils arrivent…

AVIS :

Il y a des nouvelles dont on se demande à quoi elles servent, et Leviathan fait indéniablement partie de ces travaux à l’intérêt des moins évidents. Selon les mots mêmes de l’auteur, il s’agit d’une histoire « très simple », ce qui ne suffit pas à excuser le profond sentiment d’ennui qui émane de la quarantaine de pages consacrée par McNeill à cet épisode de transition, qui, s’il n’aurait sans doute pas pu être intégré au corps de Warriors of Ultramar sans ralentir considérablement le rythme de ce dernier, ne méritait pas franchement non plus de se voir dédier une nouvelle entière (et une nouvelle assez longue qui plus est). Pour résumer le fond de ma pensée, Leviathan est du proto-Cawkwell, ce qui est loin d’être un compliment.

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Glow – S. Spurrier [WFB] – #34 :

INTRIGUE :

GlowC’est la fin de l’automne à Talabheim, et le Temple de Sigmar local, dirigé par le capitaine Richt ‘Hmm’ Karver, enquête sur une addiction d’un nouvel ordre qui s’étend dans les bas-fonds de la cité. Le Glow, une poudre verte de composition inconnue, fait en effet des ravages parmi les déshérités de la métropole cratérisée. Très addictif, il a en outre comme fâcheux effet secondaire de provoquer des mutations spontanées chez ses utilisateurs réguliers, ce qui n’est pas du tout du goût de ce gentleman de Karver. Après avoir mené un raid dans un taudis dont l’adresse lui avait été donnée par un suspect, l’impeccable capitaine repart avec un cadavre frais de junkie agressif ainsi qu’une petite réserve de la substance en question, qu’il choisit d’ajouter à la diète du rat géant skaven qu’il a adopté comme animal de compagnie après une purge des souterrains de Talabheim l’année passée. Le savoir fait le pouvoir, c’est bien connu.

Les mois passent et l’hiver arrive sur l’Empire, sans que la filière locale de Glow soit démantelée malgré les meilleurs efforts de Karver et de ses hommes (Kubler, Holst et Spielmunn). L’épidémie ne fait au contraire que progresser, ce qui force les chasseurs de sorcières crackheads à muscler leurs méthodes, déjà assez viriles. Interrogatoires menés au tison, menaces d’envoyer leurs indics au bûcher s’ils ne s’activent pas et autres descentes dans la ville tous flingues dehors se multiplient. C’est au cours de l’une d’entre elles que Karver commet une bavure : surpris par la réaction de l’occupant d’un laboratoire clandestin où le Glow était produit, il déchargea sa pétoire sur ce qui se révéla être, après inspection post mortem, une fillette réduite en esclavage par le maître du cartel pour la confection des tablettes inondant la cité. Enchaînée dans son local et ayant été privée de langue par son tortionnaire, elle cherchait seulement à expliquer pourquoi elle n’était pas en capacité d’obtempérer aux ordres des Templiers lorsqu’un Karver sur les nerfs lui envoya un pruneau dans le caisson pour slow play. Ce sont des choses qui arrivent…

L’opération ne fut cependant pas un total échec, notre héros mettant le gant sur la poudre entrant dans la composition du Glow en fouillant le laboratoire. Ayant fait pression sur un sorcier de Jade pour obtenir une expertise express, il reçut la confirmation de ses soupçons : l’ingrédient actif du Glow était bien de la malepierre. Une erreur de manipulation de la part du thaumaturge lui permit de recevoir une autre information utile : la substance toxique se trouvait à la fois dans le gant utilisé pour recueillir la poudre dans le laboratoire, mais également à l’extérieur de ce dernier, indiquant sans équivoque que Karver avait manipulé de la malepierre peu de temps auparavant. Un résultat étrange, à moins que…

Début spoiler…À moins que la broche ornée d’une pierre verte que son meilleur disciple, Kubler, portait à la boutonnière ce jour-là n’ait pas été montée d’une émeraude, comme il le pensait, mais d’un minéral bien plus sinistre. La confrontation entre les deux hommes prend place dans la chambre froide creusée sous le Temple de Sigmar, dans lequel les répurgateurs stockent leurs cadavres contaminés dans l’attente du dégel. Ayant participé à la purge des terriers skavens en compagnie de son mentor, Kubler avait eu la mauvaise idée de s’intéresser à la malepierre utilisée comme monnaie d’échange par ces derniers, et qui le transforma rapidement en méchant de série B.

Ayant dupé la vigilance de son supérieur jusqu’à son fashion faux pas en matière d’accessorisation de sa tenue, Kubler est pris au dépourvu lorsque Karver le trouve en train de faire les poches des corps de Guerriers des Clans gardés en réserve par les Templiers à la recherche de cailloux verts. La surprise change toutefois de camp après qu’un Kubler gravement blessé par le tir de son patron passe en mode Technomage et avale d’un seul coup tous les éclats de malepierre qu’il trimballait sur lui, se transformant en mutant à la force et à la rapidité décuplés. C’est au tour de Karver de se retrouver dans les cordes, mais notre héros avait gardé un atout dans sa manche, ou plutôt au bout d’une chaîne : son rat de compagnie. Transformé en abomination (et pas Abomination, ça ne serait pas rentré dans son bureau) poilue par sa consommation régulière de Glow, Ratatouille est libéré par son maître et ne perd pas une seconde pour creuser un terrier dans la bedaine de Kubler afin d’accéder à la malepierre récemment consommée par le ruffian. Cet affrontement sans merci résulte en la mort simultanée des deux adversaires, laissant Karver le seul survivant de ce truel chaotique. Il faudra penser à passer un coup de mop, tout de même.Fin spoiler

AVIS :

Spurrier transpose avec succès une enquête des stups dans le monde de Warhammer Fantasy Battle avec ce ‘Glow’, qui illustre le sombre mais palpitant quotidien des Templiers de Sigmar lorsqu’ils n’ont pas de sorcières à se mettre sous la dent. Ambiance poisseuse, action rythmée, twist final bien amené… Simon Spurrier démontre l’étendue de ses talents de scénariste et sa valeur comme contributeur à la GW-Fiction avec cette nouvelle, qui sera malheureusement sa seule incursion dans le Monde qui Fut. Comme le hamster adoptif de Richt Karver, on aurait bien aimé avoir du rab’.

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The Curiosity – D. Abnett [40K] – #34 :

INTRIGUE :

40K_The CuriosityChargé par le gouverneur de Gershom d’établir la taxinomie complète des espèces animales de la planète, le magos biologis Valentin Drusher est sur le point de remettre son rapport lorsqu’il a vent des ravages causés par un mystérieux prédateur dans la région reculée de l’Udar Extérieur. Ayant consacré les sept dernières années à étudier la faune locale sans jamais rencontrer une créature pouvant être tenue responsable des attaques, la curiosité et l’orgueil professionnel de Drusher sont piqués au vif par ces échos lointains, et il décide en conséquence de répondre à l’invitation du baron du cru afin de tirer les choses au clair.

Associé à une Arbites (Germaine Macks) et à un chasseur de gros gibier (Fernal Skoh1), Drusher va rapidement se rendre compte que la « curiosité » de l’Udar est une réalité tangible, et que ses exploits sanglants et son élusivité ne doivent pas grand-chose au hasard. Quelqu’un se sert de la bête pour faire passer un message, mais qui, et pourquoi ?

1 : On retrouve d’autres membres de la famille Skoh (Feaver et Fernan, tous deux impliqués dans le juteux business de l’import de créatures exotiques destinées à combattre dans les arènes impériales) mêlés à l’intrigue de la trilogie Ravenor. Car-car-carnivora !

AVIS :

Si vous avez vu le film Le Pacte des Loups1, ni l’intrigue ni la conclusion de The Curiosity ne vous sembleront très originales, ce qui ne devrait pas vous empêcher de goûter malgré tout à cette première enquête de Valentin Drusher (que l’on retrouve également dans Gardens of Tycho, toujours en compagnie de Germaine Macks).

Très à son aise pour dépeindre la vie quotidienne des sujets de l’Imperium, à la fois dans sa normalité (Drusher étant l’incarnation même du fonctionnaire désabusé par son travail, et Macks celle du flic de province à qui on ne la fait pas) et son anormalité2, Abnett prouve qu’il maîtrise les codes du polar et est capable de les transposer dans l’univers gothique de 40K. Merci à Dan de démontrer sans équivoque que l’envers de l’Imperium (le côté civil) est au moins aussi passionnant que l’endroit (le côté militaire), et qu’il est possible de satisfaire le lecteur de la Black Library sans impliquer la moindre faction de Warhammer 40.000 au récit3. Avis aux autorités compétentes…

1 : Le long métrage de Christophe Gans étant sorti en 2001 et le recueil Crucible of War en 2003, il n’est pas interdit de voir en The Curiosity un pastiche volontaire de ce gros succès du box-office français.
2 : La bête du Gévaudan d’Abnett se révèle être un bête hormagaunt (bien qu’il nous l’ait plutôt vendu comme la Mort Bondissante en personne), ramené en sous-main par un membre de l’Ecclésiarchie cherchant à assurer la fidélité de ses ouailles aux offices dominicales (ou leur équivalent du 41ème millénaire), et auquel on a implanté une sorte de puce électronique dans le crâne afin de réguler son humeur mutine.
3 : Bon, ok, il y 1 hormagaunt qui vient contredire cette affirmation. Mais cette affectueuse bestiole est ici utilisée dans un rôle à contre-emploi (on est très loin des hordes chitineuses noircissant l’horizon), ce qui justifie à mon sens le fait qu’on ne puisse pas parler d’histoire de tyranides pour The Curiosity.

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Mark of the Beast – J. Green [WFB] – #34 :

INTRIGUE :

Mark of the BeastSoldat de carrière dans l’armée du Tzar de Kislev, Torben Badenov a gravi les échelons jusqu’à devenir le commandant d’une unité d’éclaireurs montés (15 exactement, et tous présentés par Green dès la première page de la nouvelle1). Pour son grand malheur, il sert sous le Capitaine Arman Yasharov, un noble kislevite aussi incompétent que méprisant, et bien décidé à faire tout ce qui est en son pouvoir pour revenir le plus tôt possible vidanger le samovar de la Reine des Glaces (en tout bien tout honneur, bien sûr). La bande d’Hommes Bêtes que son armée poursuit, et qui signe ses méfaits en apposant la titulaire « marque de la bête » dans les décombres des villages qu’elle a rasée2, bénéficie donc d’un avantage certain sur ses adversaires humains, et le pauvre Badenov en est réduit à limiter les dégâts causés par le leadership exécrable de son officier.

Envoyés par Yasharov pister la trace de la harde, qui semble avoir fait des prisonniers lors de sa dernière attaque, comme le faible nombre de cadavres trouvés dans les ruines du hameau où la nouvelle débute le laisse à penser, Badenov et ses scouts se font surprendre en rase taïga par une bande d’Ungors dépêchés par le Seigneur des Bêtes Gashrakk Blackhoof pour faire le service d’ordre à proximité de son campement. Gashrakk est en effet un visionnaire, dont le grand dessein est de réveiller le Seigneur du Dawa (Lord of Misrule en V.O.), une déité 100% chaotique que les légendes des Bêtes du Chaos font reposer en dessous de la pierre des hardes de la tribu de la Corne Noire. Pour permettre au Dawaster de sortir de son trou et de régner à nouveau sur son « royaume de confusion » (sicoù on n’écoute que du Genesis à fond les ballons, j’imagine), le big G. a un plan : sacrifier un nombre suffisant de prisonniers au Chaos, en mettant le feu à une effigie géante d’Homme Bête construit avec des cages en bois. Et moi qui pensait qu’ils ne savaient rien faire de leurs dix (?) doigts (?), me voilà corrigé. L’approche peu subtile de Yasharov ayant alerté le chamane Cathbad, Gashrakk sait que son projet X risque d’être interrompu par des Kislevites en maraude, et a donc envoyé quelques bandes désœuvrées contrecarrer la manœuvre. Il a aussi envoyé une doublette de chars à sangleboucs, malheureusement pour les cavaliers légers de Badenov, qui sont contraints à se replier en désordre après l’intervention des panzers adverses, abandonnant quelques morts et blessés sur le champ de bataille.

De retour au campement kislévite, Badenov réussit à obtenir de son Capitaine l’autorisation de lancer une mission d’infiltration de la base adverse (repérée par d’autres scouts, plus doués, eux) pour tenter de libérer ses camarades prisonniers, et peut-être secourir quelques civils au passage. Yasharov n’est absolument pas convaincu par la menace posée par un rituel sacrificiel qu’il s’agirait d’empêcher avant que l’attaque de son armée ne débute, mais il laisse tout de même à son sous-fifre jusqu’à la tombée de la nuit pour mettre à exécution son plan, après quoi il donnera l’assaut. Réduits à mi-effectifs à ce stade de la nouvelle, les Badenov’s Baddies profitent d’un coup de pouce de la part du script pour progresser vers leur objectif : le campement des Hommes Bêtes a été établi sur un ancien oppidum ungol, et compte bien entendu un souterrain secret reliant le centre de la place forte à l’extérieur. Haaa. Et nos héros trouvent bien sûr ce souterrain secret en l’espace de trois minutes. Hooo. Leur chance tourne cependant lorsqu’ils découvrent que les Gors ont décidé d’installer leurs latrines à l’endroit où le tunnel émerge dans leur campement. Un petit prix à payer pour speed runner cette quête, cependant.

De son côté, Gashrakk ne s’est pas tourné les sabots et a entamé le rite de réveil démoniaque/feu de joie païen avec Cathbad. L’arrivée imminente de l’armée kislevite, que sa bande d’Ungors n’a manifestement pas arrêtée (comme c’est bizarre) force toutefois le Seigneur des Hardes à accélérer le protocole, et à balancer une torche sur son bonhomme (bête) carnaval avant que le chamane n’ait pu terminer de réciter « je te tiens par la barbichette » 666 fois de suite. C’est le moment que choisissent Badenov et ses hommes pour lancer leur attaque sur les mutants, confiants dans le fait qu’il ne leur faudra tenir que quelques minutes avant que le reste de leurs forces n’arrivent en renfort, pas vrai ? PAS VRAI ? En cela, ils ont sous-estimé le jemenfoutisme de Yasharov, qui se contente d’envoyer quelques cavaliers barricader les portes du campement (?) pour empêcher les Hommes Bêtes de sortir. Car apparemment, ces derniers savent construire des statues en bois de 10 mètres de haut, mais le concept de distance de sécurité par rapport à un foyer de combustion leur est inconnu. La magie du scénario…

Toujours est-il que cette défection de dernière minute ne fait pas les affaires de nos héros. Si Cathbad se fait assez facilement soloter par Arnwolf le Norse, Badenov n’a pas la partie facile contre Gashrakk. Finalement, un anneau nasal trop solidement fixé, un crochet attaché à une chaîne elle-même fixée à la pierre des hardes, et surtout un positionnement malheureux du Seigneur des Blettes vis-à-vis de l’angle de chute de son effigie enflammée, auront raison du pauvre Blackhoof. C’est ce qu’on appelle un bûcher des vanités, vraiment. S’il ne réussit pas à réveiller le Dawaster et perd toute sa tribu en même temps que sa vie dans cette folle soirée (les Hommes Bêtes le sont vraiment, faut croire), il peut au moins se réconforter en songeant que tous les villageois capturés ont également fini en marshmallow (donc je ne comprends pas pourquoi son plan n’a pas marché… à moins que les invocations de Cathbad soient vraiment capitales), ainsi que la plupart des hommes de Badenov. En comptant l’évasion miraculeuse d’Oran et de Manfred, qui avaient été faits prisonniers par les Ungors, nos héros ne sont plus que six, et c’est assez naturellement qu’ils décident de déserter pour devenir des mercenaires, loin de l’incompétente brutalité des officiers placés là par leur famille. D’ailleurs, à ce propos…

Début spoiler…Il n’est jamais trop tard pour se venger de mauvais traitements, surtout quand on n’a plus rien à perdre. Badenov et Oran rendent donc visite à Yasharov au cœur de la nuit, et procèdent à un échange du meilleur goût : ils laissent la tête calcinée de Gashrakk dans le lit de l’aristocrate, Le Parrain-style, et vont planter la sienne sur une pique à l’extérieur du camp kislévite, avant de partir voir ailleurs s’ils y sont. On connaît la suite…Fin spoiler

1 : Et si vous pensez que je n’ai pas la patience ou la mesquinerie nécessaire pour relayer l’information, vous devez être nouveau ici : Torben Badenov, Oran Scarfen, Vladimir Grozny, Alexi, Arkady et Andrei Tolyev, Manfred, Oleg Chenkov, Arnwolf, Zabrov, Mikhail Polenko, Yuri Gorsk Kiryl, Evgenii, Cheslav, Stefan. Il n’en resteraque six  à la fin, ne vous attachez pas trop.
2 : Parfois en utilisant des matériaux… plus biodégradables que d’autres.

AVIS :

S’il ne s’agit pas de la première nouvelle écrite par Jonathan Green pour sa bande de mercenaires préférés, ‘Mark of the Beast’ peut au moins se prévaloir d’être le premier épisode de la série qui donnera au final le recueil ‘The Dead and the Damned’. Le résultat n’est pas aussi navrant qu’il a pu être dans d’autres péripéties badenoviennes, la haute teneur en action (bas du front) injectée par Green dans cette aventure l’empêchant de trop s’empêtrer dans son scénario, même si ce dernier apparaît tout de même très fragile dès lors qu’on a le malheur de s’intéresser un peu trop à lui. Si le héros s’appelle Badenov, l’auteur a pour sa part bien mérité le nom de Good Enough… De la cheap fantasy très peu intéressante, à moins que vous ne cherchiez à voir ce que le BL style a produit de plus suranné.

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A Ship Called Rumour – D. Abnett [WFB] – #35 :

INTRIGUE :

WFB_A Ship Called RumourDe retour à Sartosa, la cité pirate du Vieux Monde, après avoir effectué un séjour dans les geôles tilléennes, Luka Silvaro compte bien reprendre en main sa petite affaire familiale, récupérée par son demi-frère Guido après sa malheureuse incarcération. Très originalement pour l’endroit, Luka est un capitaine pirate, et pour rentrer en possession de ses biens (et personnes), il lui faut vaincre en « duel » – lui doit se battre seul, son adversaire non – son fourbe de parent. Ce qu’il fait avec les formes, dans le cadre bucolique d’une taverne enfumée, et sous les yeux d’un compagnon (Sesto) qui l’a suivi depuis Luccini pour s’assurer qu’il mettrait à profit sa liberté retrouvée pour accomplir une mission d’importance : traquer et couler le Butcher’s Ship, un vaisseau pirate semant la terreur sur le Grand Océan. Gentleman jusqu’au bout, Luka se contente d’amputer son gredin de frérot de sa main gauche (de toute façon, il ne lui restait plus que deux doigts de ce côté-là) plutôt que de l’achever, comme il en avait pourtant le droit et l’envie.

La suite de la nouvelle suit la préparation du capitaine abandonné réhabilité et de ses principaux lieutenants pour partir en chasse, sur les deux vaisseaux (la Rumeur et le Saphir) que compte la petite flotte de Silvaro. Les coques calfatées et les cambuses remplies, il est temps pour ce beau monde de cingler les voiles afin de… trouver un tuyau sur la localisation du Bucher’s Ship. Car malgré toute sa bonne volonté, Luka n’a pas la moindre idée d’où se cache sa proie, ce qui ne va pas faciliter la levée de sa probation et le versement des mille couronnes promises par Luccini en échange de l’accomplissement de sa mission. Il croit que sa chance a tourné lorsque se présente au loin les galères du collègue pirate arabien Ru’Af, mais ce qui devait n’être qu’une discussion informelle entre gens de mer se transforme soudainement et sans crier gare en bataille navale rangée. En cause : encore ce maudit Boucher, qui a tellement vidé les eaux internationales de leur trafic habituel que les pirates en sont réduits à s’attaquer les uns les autres pour tenter de survivre. Quelle époque mes pauvres amis.

Cueilli à froid par la traîtrise de Ru’Af, il faut bien quelques pages de féroces combats, et la perte d’un membre du casting, pour que Luka Silvaro parvienne à se tirer de cette mauvaise passe. La nouvelle se termine sur l’annonce officielle faite à son équipage de la mission qui lui a été confiée par ses employeurs tiléens, et sur un peu de name dropping de bon aloi. Il se pourrait que ce soit ce triste sire d’Henri le Breton qui se cache derrière la barre du Butcher’s Ship. Encore les Bretons (pourquoi ne suis-je pas surpris, sans déconner ?). Quelle mafia alors.

AVIS :

Comme il sait si bien le faire (lire ‘Les Cavaliers de la Mort’ pour s’en convaincre), Dan Abnett donne souffle et vie à un petit bout du Vieux Monde de manière aussi convaincante que prenante dans ce ‘A Ship Call Rumor’. On se fait rapidement happer par cette histoire de flibustiers au long cours, aussi exotique que fascinante pour l’habitué de la GW-Fiction, et suffisamment bien écrite pour être à la portée des nouveaux venus (après tout, tout le monde sait ce qu’est un pirate). Si on peut reprocher à ces quinze pages d’être très chargées en personnages, qui ne font pas forcément grand-chose d’intéressant une fois les présentations effectuées, et à l’action en elle-même de traîner en longueur, il s’agit d’un petit et logique prix à payer pour poser les fondations d’une serie feuilleton, qui semble avoir été pensée dès sa conception par Abnett et la BL comme publiable à terme comme un roman dont les chapitres seraient les nouvelles1 (ce qui sera le cas au final : ‘Fell Cargo’). On termine ce segment introductif avec une intrigue bien mise en place et une envie certaine de connaître la suite des aventures de Luka Silvaro et de ses hommes : c’est donc mission accomplie par Dan Abnett.

1 : Une pratique très courante à cette époque pour la Black Library, dont une bonne partie du catalogue lors de ses premières années était constitué de romans patchworks, aussi bien pour Warhammer Fantasy Battle (‘Tueur de Trolls’, ‘Hammers of Ulric’, ‘Gilead’s Blood’) que pour 40K (‘Ghostmaker’, ‘Brothers of the Snake’). On constate qu’Abnett a contribué à quatre de ces cinq exemples, ce qui en fait le champion du repackaging littéraire !

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The Beguiling – S. Mitchell [40K] – #35 :

INTRIGUE :

Nous retrouvons le Commissaire préféré de ton Garde Impérial préféré peu de temps après la campagne de Keffia (‘Sector 13’), sur la planète de Slawkenberg et engagé, aux côtés du 12ème Régiment d’artillerie de campagne de Valhalla (Jurgen, Divas et Mostrue sont de la partie), dans la purge du culte chaotique ayant déclenché une insurrection sur ce monde autrement paisible. Ou plutôt, des cultes chaotiques, comme nous allons le voir. Après quelques mois de routine agréable, passés à bombarder les positions ennemies à 71,99 pouces de la ligne de front le matin, déjeuner dans des petits bistrots sympathiques, et déguster de l’amasec vintage en charmante compagnie l’après-midi, notre fringant mais prudent héros se rend compte qu’il s’ennuie quelque peu, et décide de suivre une patrouille d’observateurs avancés de son régiment, accompagné de son fidèle Jurgen, pour voir du paysage et soigner sa réputation d’officier héroïque et proche de ses hommes.

Ce qui ne devait être qu’une simple balade en Salamander va bien sûr mal tourner, d’abord en raison d’une météo capricieuse et de l’absence de capote (livrée en option sur ce type de véhicule), puis à cause d’une embuscade maladroitement commise par un groupe de Prouteux en vadrouille, forçant les Valhallans à s’enfoncer dans une forêt profonde sur un petit chemin au lieu de rester sur la route (détruite par leur botte secrète : l’appel à un ami qui a une batterie de Basilisks sous ses ordres). Au bout de quatre heures de rallye pluvieux, Cain et ses charges retournent enfin à la civilisation, représentée par un manoir isolé mais apparemment occupé, comme son illumination l’atteste.

Ayant garé leur Salamander à quelque distance de la bâtisse afin de pouvoir la reconnaître discrètement, les Gardes sont surpris par l’arrivée désespérée d’une jeune fille affolée et fort peu vêtue, poursuivie par un petit groupe de cultistes de Nurgle. Si les maraudeurs pestiférés sont rapidement mis hors d’état de nuire, à défaut de puire, par les bidasses en goguette, et que la demoiselle en détresse, rapidement rejointe par quelques accortes amies, tombe dans les bras de ses sauveurs, Cain éprouve un vague mal-être (et une démangeaison palmaire de mauvais augure) devant la tournure prise par les événements. Quelque chose ne sent pas bon dans cette affaire, et ce n’est pas Jurgen (pas que, en tous cas)…

Début spoiler…Et en effet, la petite soirée que nos quatre militaires passent à l’Académie pour jeunes filles du monde de St Trynia, si elle s’avère mémorable, ne l’est pas pour les bonnes raisons, et se révèle aussi être la dernière pour deux des camarades de Cain. Alors que ce dernier se retrouve dans les quartiers privés de la directrice pour une séance de tantrisme extra-curriculum, l’ambiance retombe brutalement lorsque la voluptueuse Mademoiselle Duboir confie à son coup d’un soir qu’elle l’a tout de suite identifié comme un fidèle de Slaanesh. Ce que Cain ne pense pas qu’il est (encore1), merci pour lui. Il prend d’ailleurs la mouche au point d’abattre sans sommation son hôte après cette petite confidence. Et à propos de mouche, voici les Nurgleux qui reviennent à la charge, et prennent d’assaut le manoir et ses habitantes, offrant à Cain et à Jurgen (mis très mal à l’aise par le rentre dedans qu’il a subi toute la soirée de la part des prêtresses du plaisir sous camouflage) la couverture parfaite pour s’éclipser discrètement, laissant les dépouilles de leurs camarades malheureux au milieu du champ de bataille. Un petit coup de fil au Colonel Mostrue et un bombardement de la Chaos Star Academy plus tard, tout est bien qui finit bien pour le Héros de l’Imperium, qui décide suite à cette aventure de reprendre en main son hygiène de vie afin de ne plus être pris pour sex addict par la première cultiste venue. Non mais.Fin spoiler

1 : D’ailleurs à l’époque, Cain ne sait même pas trop qui sont les Dieux du Chaos (il l’apprendra plus tard en traînant avec l’Inquisitrice Vail). Mais comme Mitchell est partisan de la théorie des signes chaotiques (les noms et symboles des Dieux du Chaos sont tellement horribles que les entendre ou les voir provoque une réaction épidermique même chez les profanes), la confidence sur l’oreiller de Miss Duboir suffit à convaincre notre héros qu’il y a slaanguille sous resh.

AVIS :

Mitchell livre une nouvelle Cainesque tout ce qu’il y a de plus classique avec ce ‘The Beguiling’, qui mélange action, humour, grimdark et second degré avec un goût certain. Si l’expérience de lecture est assez plaisante, comme souvent avec les aventures du Commissaire le plus cool1 et coulant de tout le Segmentum, je regrette toutefois que Sandy Mitchell n’ait fait aucun effort pour ménager un peu de suspens sur l’opposition entre les deux factions antagonistes (Prout vs Meuh), qui nous est annoncée dès la première page, puis est mise en scène de façon très directe dès l’arrivée de Cain et ses hommes dans le manoir de Duboir. Etant certain de la capacité de Mitchell, en tant que scénariste et narrateur, à obtenir un résultat plus palpitant que ce très et trop convenu ‘The Beguiling’ (comme il a pu le montrer dans ‘Last Night at the Resplendent’ par exemple) s’il avait voulu s’en donner la peine, je reste un peu sur ma faim avec cette nouvelle, et ne la place donc pas parmi les tout meilleurs épisodes de la saga de Ciaphas Cain. Peut mieux faire et a mieux fait.

1 : Logique pour un officier rattaché à un régime de Valhalla, vous me direz.

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Meat Wagon – C. L. Werner [WFB] – #35 :

INTRIGUE :

WFB_Meat WagonVotre attention s’il vous plaît. La nouvelle qui va suivre comprenant un nombre élevé de personnages nommés (plus ou moins) importants pour notre intrigue, nous vous remercions par avance de suivre attentivement les présentations qui vont vous être faites de notre casting. Vous aurez été prévenus.

Et nous voici donc catapultés dans un relais routier minable sur la route reliant Erengrad à Zandri en passant par Nuln, où une belle bande de personnages attend que leur personnel de bord ait fait le plein et chargé les plateaux repas. Les écouter un instant suffit au lecteur sagace pour deviner où chacun se positionne sur l’organigramme de la nouvelle d’action med-fan1. Nous avons ainsi, par ordre d’apparition : le joueur de cartes (en os, because why not2)/escroc/joli cœur Feldherrn, le gras, riche, désagréable et xénophobe marchand de vodka Emil Steinmetz, sa « fiancée »/chaufferette achetée en soldes à son vieux père Lydia, et son garde du corps couturé et patibulaire, Ravna (surnommé un demi car il utilise une épée bâtarde). À cela, nous nous devons d’ajouter la Baronne von Raeder, vieille fille maniérée et hautaine, mais se baladant avec une rapière au côté, et le jeune ingénieur Nain Fergrim Pointefer, transportant avec lui des caisses frappées de runes auxquelles il tient comme à la prunelle de ses yeux. Pour finir, un mot sur les chauffeurs de ces messieurs-dames : l’Ostlander au fouet et aux chicots pourris, Ocker, et son comparse Strigani à tête de fouine et à moustache pleine de miettes (un signe sûr que c’est un filou… ou une fouine qui vient de tomber sur une baguette), Bresh. Pfiou, une bonne chose de faite.

Tout ce petit monde se dirige donc vers Nuln et doit cohabiter pour quelques heures, même si des tensions se manifestent déjà au sein du groupe. Le voyage du coche est cependant interrompu avant son terme par un fiacre-stopper planté au bord de la route. Reconnaissant un Répurgateur à la forme de son chapeau, les deux gredins tenant les rênes, et que le lecteur avait surpris quelques temps auparavant à échanger des remarques lourdes de sens hors d’écoute de leurs passagers, sont d’abord tentés de l’écraser, mais Mathias Thulmann (car c’était lui) avait habilement prévu le coup en demandant à son homme de main et tortionnaire particulier, Streng, de se positionner stratégiquement avec une arbalète chargée à proximité. Si Thulmann joue du pouce sur les grands chemins, c’est que son cheval à perdu un fer et qu’il a donc besoin d’être dépanné jusqu’à la forge la plus proche. Ne prenant pas les dénégations polies des conducteurs pour argent comptant, il s’installe donc posément dans la diligence, laissant son acolyte suivre cette dernière avec leurs chevaux, et propose un tour de table amical pour briser la glace entre les compagnons de voyage. Venant d’un type qui peut vous condamner au bûcher si vous éternuez de façon bizarre, pas sûr que cela fonctionne beaucoup.

En tous cas, cette rencontre fortuite n’empêche pas Ocker & Bresh de dérouler la suite de leur plan, et donc d’amener leur véhicule jusqu’au charmant petit village de Mureiste, Sylvanie. « Dites donc, c’est étrange que nous fûmes allâtes en direction du Nord-Est alors que la logique voullasse que nous nous dirigeassionnèrent vers le Sud-Ouest » commente ce finaud de Thulmann, à qui on a appris le Reikspiel littéraire et la géographie au Temple de Sigmar. Il ne faut donc pas s’étonner que notre héros dégaine une de ses pétoires de service lorsque l’équipage annonce une pause de quelques minutes à ses passagers, et interdise en des termes non incertains aux ruffians de bouger de leur siège. Cette situation des plus tendues (Streng étant venu appuyer les dires de son employeur avec sa propre arbalète) dégénère cependant tout à fait lorsque les habitants de Mureiste arrivent en masse taper au carreau du fiacre, et pas pour demander s’ils peuvent laver le pare-brise, non non. Car les locaux sont des goules, elles ont faim, et de bien mauvaises manières. Dans le tumulte qui s’en suit, notre compteur de mort horrible se déclenche enfin, grâce à la participation active d’Ocker, qui prend un carreau dans le bide de la part de Streng en tentant de dégainer son tromblon, tombe de son siège, se fait rouler dessus par la voiture qui s’emballe, et dévorer vivant par les relations professionnelles des son collègue. Pas mal pour un début. Bresh, de son côté, réussit à faire décrire des cercles à l’attelage devenu fou jusqu’à ce que le poison des cannibales fasse effet et terrasse les chevaux3. Le coche se renverse, manquant d’écraser Pointefer, mais ne faisant pas d’autres victimes que les chausses de Steinmetz, dont le transit intestinal est accéléré par la vue des goules. Toutefois, tous nos personnages, y compris Bresh, que Thulmann amène manu militari avec lui pour qu’il s’explique, réussissent à se réfugier dans le temple de Sigmar local, et à en barricader les portes.

Dès lors, il s’agit pour nos héros de s’organiser. Pendant que ses camarades fortifient leur position ou sanglotent dans leur coin, le Répurgateur torture un peu son suspect, arrivant à tirer de ce dernier la promesse d’une mort abominable délivrée d’une main de Maître par ce dernier. Il ne faut pas longtemps à Thulmann pour comprendre que les goules ne sont qu’un avant-goût d’une nuit très agitée qui s’annonce, et le zélote va donc prêter main-forte à ses acolytes, qu’il positionne à des endroits stratégiques dans l’attente du prochain assaut. À la tombée du jour, une chauve-souris géante vient déverser des litres de guano sur la grand-place où patientent les Muriestois, avant de se poser et de se changer en, je vous le donne en mille, Ozzy Osbourne. Ou presque. En vampire Stryge. Après s’être fait briefer sur les derniers événements, et avoir repris quelques forces en sirotant le messager4, il lance ses ouailles à l’attaque du monument, en leur indiquant de penser à faire le tour, cette fois-ci. Si la marée de viande écumante (voir « ils l’ont écrit ») ne parvient pas à faire autre chose que trembler les portes dans un premier temps, les nerfs fragiles de cette fiotte de Steinmetz manquent de condamner la team Sigmar lorsque le pleutre décide d’aller libérer Bresh dans l’espoir que ce dernier parvienne à le sauver. Malheureusement pour lui, et pour son nouvel obligé, Lydia donne l’alerte à Thulmann avant que le Strigani n’ait eu le temps de lui planter un couteau dans le dos. Privé de l’avantage de la surprise, les vingt centimètres d’acier du ruffian ne font pas le poids ni la longueur face à l’épée bénite du Répurgateur5, et le malappris se fait posément transpercer la gorge par son adversaire, qui peut aller redonner un coup de main très bienvenu à ses comparses.

C’est le moment que choisit le Stryge pour faire son entrée dans la place, par la fenêtre s’il vous plaît. Chemin faisant, il charcute horriblement la pauvre Baronne von Raeder6, pulvérise un banc et éventre Steinmetz, faisant un peu de ménage dans notre casting. Ses tentatives de griffer à mort Thumann sont cependant mises en échec par le jet d’eau bénite qu’il se prend dans la figure (ça brûle), et par les gros débuffs de zone que lui inflige le sol consacré du lieu saint dans lequel il se trouve. C’est ça aussi de ne pas demander à ses goules de raser le temple de Sigmar du village en temps et en heure. Devant tant de diableries, ou peut-être l’inverse, le vampire décide d’aller prendre l’air, entraînant avec lui ses hordes de groupies décérébrés. L’occasion pour les défenseurs de souffler un peu et de faire leurs comptes, le pauvre Ravna, méchamment tailladé par un ongle sale de goule, n’en ayant plus pour très longtemps…

C’est alors que Pointefer se souvient que le contenu de ses caisses n’est autre que de la poudre à canon. Gag. Jouant leur va-tout, les survivants envoient donc le Nain et le mourant poser une mèche dans les décombres de la diligence, pendant que Thulmann tente de distraire le Stryge. Cela marche tellement bien que, lorsque l’héroïque Ravna se sacrifie pour mettre le feu aux poudres, le buveur de sang est encore occupé à envoyer des gros doigts, ou griffes dans son cas , au Répurgateur depuis le sommet de la diligence. Bilan des courses : un centre ville dévasté, une vingtaine de goules déchiquetées, et un vampire en piteux état, que Thulmann achève d’un coup d’épée en plein cœur en punition de son tapage nocturne7. Ici s’achève notre histoire, les deux chasseurs de sorcières décidant de repartir avec leurs montures (habilement garées dans le temple par Streng un peu plus tôt), même déferrées, plutôt que de s’éterniser plus longtemps dans ce patelin paumé qu’est Mureiste. Et Thulmann de donner ce conseil avisé aux trois survivants de notre échappée belle (voyez si vous pouvez les identifier) : « je suis sûr que ça va marcher ».

1 : Et dans une certaine mesure, de déterminer qui a le plus de chances de mourir dans d’atroces souffrances au cours des prochaines pages.
2 : Même si le matériau utilisé me semble un peu saugrenu. Sans compter de la taille du squelette nécessaire pour tailler des cartes d’une taille suffisante. Sans doute un moyen pour les forces impériales de monétiser les cadavres d’Orques qui s’accumulent comme des feuilles mortes en automne après la Waaagh ! hebdomadaire.
3 : Qui n’ont pas reçu de nom et que je n’inclue donc pas à ma liste, à grand regret.
4 : Don’t shoot the runner, but drink them? Yes you can.
5 : Annule les sauvegardes invulnérables des Démons, coup fatal sur les sorciers à cœur noir.
6 : Dont le tort fut d’être une femme répudiée indépendante, et donc indigne de confiance pour ce misogyne de Thulmann.
7 : Non sans avoir balancé la petite réplique qui va bien juste avant, ici librement empruntée à ‘Le Bon, La Brute et le Truand’ (déjà pastiché par Werner dans sa série ‘Brunner, Bounty Hunter’.

AVIS :

On savait Werner particulièrement à son aise pour la mise en scène de nouvelles d’actions sérialisées, qu’il s’agisse pour lui de suivre une traque du chasseur de primes Brunner, ou une purification expresse dispensée par le zélé Mathias Thulmann. Cette réputation n’est pas usurpée ici, car cette Charcuterie Ambulante tient beaucoup mieux la route, et c’est heureux, que la diligence empruntée par nos héros pour se rendre à Nuln. En plus de bénéficier d’une atmosphère tendue tout à fait appréciable, en grande partie grâce au rythme soutenu imposé par l’auteur, et les quelques descriptions gore à souhait qu’il glisse au fil des pages, cette nouvelle parvient également à faire « vivre » (et mourir, dans beaucoup de cas) sa belle brochette de personnages de façon naturelle et équilibrée, et emprunte avec bonheur au genre du western, dont Werner est un fan assumé. La fameuse scène de l’attaque de la diligence par les Indiens, ou, plus proche de nous, l’attente tendue des 8 Salopards, partagent ainsi des similarités fortes avec le siège de temple de Sigmar par un Stryge et ses goules, preuve que dans la pop culture, tout est dans tout et inversement. Au final, encore une nouvelle solide à mettre au crédit d’un des chasseurs de lignes les plus réputés du Vieux Monde plutôt que du Far West, et une très bonne introduction du personnage de Mathias Thulmann aux non-initiés, si nécessaire.

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Warp Spawn – M. Ralphs [40K] – #35 :

INTRIGUE :

Ayant accepté à son bord un couple de clandestins et leur petite fille qui cherchaient à quitter la planète Vrantis III, le capitaine Matteus du transporteur Sable Bess ne se doute pas qu’il est sur le point de vivre la traversée la plus éprouvante de sa carrière. La famille idéale se révèle être un couple d’adorateurs du Chaos, et leur enfant la BFF des jumelles Apex, volontairement droguée par ses parents aimants afin de l’empêcher de jouer avec son ami imaginaire (je ne sais pas pour vous, mais ça m’évoque Marie Frisson et Gros Chat), un peu soupe au lait il faut bien le reconnaître. Loi de Murphy oblige, la maléfique fillette est bien sûr réanimée par l’équipage, dont la majeure partie ne vivra pas assez longtemps pour regretter cette décision. Dans le Warp, personne ne vous entend crier…

AVIS :

L’univers de Warhammer 40.000 est tellement vaste qu’il peut – en théorie – servir de cadre n’importe quel type de récit, même ceux les plus éloignés du standard de la Black Library (SF d’action). Partant, la décision de Matt Ralphs de signer une pure nouvelle d’horreur avec son Warp Spawn est loin d’être incongrue, d’autant plus que le bonhomme sait s’y prendre pour narrer des scènes cinégéniques en diable (oups). Le calvaire vécu part Matteus et ses comparses a beau ne pas être bien original, Ralphs parvient à instiller une atmosphère de slasher mâtiné d’épouvante surnaturelle à son propos, qui retombe malheureusement bien avant la conclusion (assez bancale) de la nouvelle.

Au final, si les deux premiers tiers de Warp Spawn sont un régal, le dernier tiers est franchement décevant, et aurait gagné à être plus développé par un auteur à court de place, de patience et/ou d’inspiration pour donner à son récit un final digne de ce nom. Dommage.

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Redhand’s Daughter – W. King [WFB] – #36 :

INTRIGUE :

WFB_Redhand's DaughterAprès avoir fait les 400 coups (de hache runique) en Arabie, quelques temps après leur retour d’Albion (Tueur de Géants), Gotrek et Felix se retrouvent sur le cuirassé nain du Capitaine Ahabsson, croisant sur les eaux du golfe d’Arabie depuis la forteresse de Barak Varr. Toujours à la recherche d’une fin glorieuse, le célèbre Tueur doit ronger son frein pendant la croisière, ce qu’il fait en s’enfilant pinte sur pinte et en gueulant sur Ceniormeteo, le dieu elfique des dépressions, tandis que Felix préfère meubler ses journées en regardant les dauphins et entretenant des pensées sinistres, comme à son habitude. Nos plaisanciers ne tardent cependant pas à être mis à l’épreuve (autrement, cela aurait été la nouvelle de Gotrek & Felix la plus ch*ante du monde), d’abord par la survenue d’un grain sévère, qui endommage bellement le Storm Hammer, puis par la rencontre avec un navire de pirates Orcs, qu’Ahabsson décide, en corsaire assermenté, d’aller piller. L’enthousiasme fiévreux du capitaine se heurte toutefois à quelques dures réalités, à commencer par les projectiles enflammés projetés par la catapulte de proue du vaisseau adverse, qui cabossent suffisamment le steamer nain pour que ce dernier se retrouve à portée d’abordage par l’équipage peaux-vertes, beaucoup plus nombreux que ses vis-à-vis. La bataille qui s’en suit permet à Gotrek de se dégourdir les orteils (pas mieux à espérer contre de simples boyz), et à Felix de voler à la rescousse d’une prisonnière de l’infâme Capitaine Goldtusk, qu’il réussit à escorter jusqu’au Storm Hammer avant que ce dernier ne parvienne à se désengager.

Vainqueurs éprouvés de l’affrontement, les Nains décident d’aller mouiller l’ancre sur l’une des îles toutes proches, encouragés en cela par le récit fait par la rescapée (Katja Murillo) du légendaire trésor que le pirate Redhand, qui se trouve être son père, a dissimulé sur cette dernière. Elle-même capitaine au long cours, elle promet à ses sauveurs de partager les bénéfices de son héritage s’ils l’aident à mettre la main dessus. Capturée par Goldtusk alors qu’elle voguait vers le butin avec son propre équipage, Katja n’a dû son salut qu’à l’avidité de l’Orc, qui a épargné sa vie en échange d’un aller simple vers le magot familial. Jamais les derniers à se lancer dans la quête de richesses mal acquises, Ahabsson et ses gars acceptent la proposition qui leur est faite, et tout ce petit monde (plus deux humains) débarque sur une île volcanique couverte d’une épaisse forêt où est sensé se trouver la fortune de Redhand.

Bien que charmé par le ravissant minois de la donzelle (ce qui est la raison pour laquelle il s’est rué à son secours en premier lieu), Felix se montre assez suspect des motivations de cette dernière, et ne peut s’empêcher de penser que Katja dissimule quelque chose à ses partenaires. Gotrek de son côté s’avère plus intéressé par la perspective de se frotter au monstrueux gardien d’une gemme légendaire conservée dans l’un des temples en ruines de l’île (dixit Katja, toujours), ou a défaut, par la régulation de la population locale de peaux vertes. L’enthousiasme général est à peine entamé par la disparition mystérieuse de plusieurs membres d’équipage au fur et à mesure que l’expédition s’enfonce dans la jungle, énigme rapidement résolue par un Gotrek peu tolérant envers les facéties des Gobelins arboricoles du cru. Après un pittoresque trail tropical, les aventuriers parviennent jusque dans la cité abandonnée promise par leur guide, qui se trouve être un lieu de villégiature couru par la gent orcoïde (un club Mork, sans doute), forçant nos héros à la plus grande discrétion. Même Gotrek, dont le premier but était pourtant de tailler des croupières aux locaux, accepte de faire crête basse jusqu’à ce que ses camarades aient pu sécuriser le trésor, ce qui est fort urbain de sa part. En même temps, ils sont sortis de la forêt, donc…

Une fois rendu dans le temple où Redhand aurait déposé ses bagages, et après avoir négocié de façon soupçonneusement facile au goût de ce rabat-joie de Felix l’accès jusqu’au cœur de l’édifice, qui dispose d’une installation géothermique de pointe sous la forme de puits de lave intégrés à la structure du bâtiment (attention à ne pas se brûler en prenant sa douche, tout de même), l’expédition se retrouve confrontée à un défi de taille, en la présence d’un Elémental de lave qui surgit de son jaccuzzi pour empêcher les intrus de faire main basse sur le trésor du pirate ainsi que sur l’énorme gemme qui fait office de décoration d’intérieur. Au lieu de s’émerveiller de la culture du gardien des lieux, qui s’exprime en Reikspiel parfait alors que sa prise de fonction remonte à des millénaires (ce sont les Anciens qui ont signé son contrat de travail), l’esprit mesquin de Felix ne peut s’empêcher de se concentrer sur le fait que MagMan semble connaître Katja, qu’il qualifie de sorcière (ce qui n’est pas très sympathique). De son côté, Gotrek se contente de foncer dans le tas (de roches en fusion) avec son ardeur habituelle, distrayant la Chose assez longtemps pour que Katja réussisse à s’emparer de la gemme, avant de disparaître dans un éclat de rire sardonique. On comprend alors que la capitaine corsaire n’était pas la fille, mais la femme de Redhand, qu’elle a poussé à prendre d’assaut le temple pour récupérer le diam’s des années plus tôt, sans succès. On comprend aussi que le joyau en question n’avait pas qu’une utilité symbolique, mais servait surtout de régulateur de l’activité tellurique du volcan local, qui se réveille violemment une fois la gemme dérobée.

Ayant tout de même réussi à refroidir les ardeurs du gardien, puis à le(s lui) briser menu, Gotrek et Felix en sont quittes pour une session de hack’n’slash intense pour sortir du temple avant que ce dernier ne soit noyé par la lave. Laissant leurs camarades survivants se débrouiller tous seuls comme des grands petits, le duo se fraie un chemin sanglant à travers les hordes de Gobelins que Goldtusk, arrivé sur place après le naufrage de son navire, a recruté pour… visiter le temple également je suppose1. Cette louable idée de sortie culturelle prend donc un tour funeste lorsque le Tueur et son comparse décident de couper la file, résultant en des centaines de morts parmi les visiteurs, dont Goldtusk en personne, décapité par un Gotrek littéralement chauffé à blanc. Ceci fait, il ne reste plus à nos inséparables qu’à partir en petites foulées vers la plage où mouille le Storm Hammer, avant que l’éruption du Krakatorka ne mette un terme honteux et cendreux à la carrière du Tueur. Spoiler alert : Ils s’en sortent. Si si.

1 : King ne donnant aucun signe que les Nains aient été détectés par les peaux vertes à leur arrivée.

AVIS :

Cette aventure conséquente (28 pages) permet à William King de renouer avec les origines littéraires de Gotrek & Felix, héros de nouvelles conduits plus tard par le succès à évoluer dans de plus longs formats. Se déroulant après les événements relatés dans Tueur de Géants, dernier roman signé de la série signé par King (et le moins réussi du lot à mon humble avis, comme quoi il a bien fait d’arrêter), Redhand’s Daughter peut être considéré comme l’ultime tour de piste des deux troublions sous la plume de leur créateur, et un écho aux longues nouvelles originelles du duo (Wolf Riders, The Dark Beneath the World). Bénéficiant d’une localisation exotique (je ne pense pas que quiconque se soit aventuré dans la Chaîne Mégaleane – qui n’apparaît sur aucune carte à ma connaissance – depuis lors), de péripéties rythmées et, elles aussi, assez innovantes pour le lecteur, comme la bataille navale introductive entre corsaires Nains et pirates peaux vertes, Redhand’s Daughter a un petit goût de pastiche de The Queen of the Black Coast (a.k.a. Conan en croisière), avec Katja en Belit et Gotrek & Felix se partageant le rôle du ténébreux Cimmerien. Ces considérations évacuées, on se retrouve cependant avec une soumission assez classique du sous-genre créé par King, qui déroule son propos et coche les cases du cahier des charges avec aisance plus que maestria. On notera pour terminer que l’auteur n’a pas encore tenu sa promesse de faire remettre Katja Murillo sur le chemin de nos baroudeurs, et qu’avec la destruction du monde de Warhammer (et donc celle de Katja et Felix), il lui sera assez difficile de tenir sa parole…

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Et voilà qui conclut cette revue de l’année 6 d’Inferno! Que dire d’autre à part qu’il reste deux années à couvrir et que ce sera bientôt le cas ? Stay tuned (and hydrated) et à la prochaine !

BLACK LIBRARY EVENTS ANTHOLOGY 2017/18 [Recueil]

Bonjour à tous, et bienvenue dans cette revue (tardive) d’un nouveau recueil de nouvelles sorti par la Black Library pour un public restreint, ici le Black Library Events Anthology 2017/18. Si vous suivez cette série depuis le début, il n’y a rien de particulier à noter en introduction, outre le fait qu’il faut reconnaître une certaine audace de la par de la BL pour choisir un Duardin en calbute comme illustration d’un bouquin destiné à servir de porte-étendard au reste du catalogue. Si ce n’est pas le cas, un rapide briefing s’impose : pendant quelques années, la Black Library a publié des recueils de quelques nouvelles (inédites à l’époque), destinés à être diffusés uniquement pendant des événements tels que les Games Days et les Black Library Weekenders. Celui qui nous intéresse aujourd’hui a été mis sur le marché entre 2017 et 2018, comme le titre vous l’aura certainement déjà appris (mais j’aime bien être pédagogue).

Black Library Events Anthology 2017_18

Issues des franchises Age of Sigmar, 40K et Horus Heresy, les six nouvelles qui seront chroniquées ci-dessous ont pour la plupart été réutilisées quelques mois plus tard lors du Black Library Advent Calendar 18 (passé en revu ici). Si vous êtes un habitué de ce blog (merci !), vous n’aurez donc rien de nouveau à vous mettre sous la dent. Sinon, vous en serez quitte pour une plongée rapide mais rafraichissante – en tout cas, on vous le souhaite – dans les hauts profondes de la GW-Fiction d’il y a quelques années, en compagnie d’auteurs habitués à mettre leur muse (et leur stylo) au service de la maison d’édition de Nottingham. Josh Reynolds (parce qu’évidemment, il était là, il était tout le temps là), C. L. Werner, le Seigneur de Terra John French, Phil Kelly, et les deux David principaux (Annandale et Guymer) : voilà pour le casting de cette anthologie. Et tout de suite… la suite.

BLACK LIBRARY EVENTS ANTHOLOGY 2017_18

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A Dirge of Dust and Steel – J. Reynolds [AoS] :

INTRIGUE :

A Dirge of Dust and SteelÀ la recherche de la légendaire cité corbeau de Caddow et de son Portail des Royaumes reliant à Shyish à Azyr, une petite force de Stormcast Eternals de la Chambre Vanguard des Hallowed Knights (soyons précis) a conclu un pacte avec les Duardin de Gazul-Zagaz, seuls à connaître l’emplacement de cette ville mystérieuse1. En échange de leur aide contre les hordes du Gardien des Secrets Amin’Hrith, connu sous le nom d’Ecorchâme, les nabots dépressifs (leur royaume est en ruines, leur Dieu s’est fait bouffer par Nagash et l’âme de leur dernier prince sert de skin au démon de Slaanesh) mèneront les guerriers du Lord Aquilor Sathphren Swiftblade jusqu’à bon port. Jamais le dernier à rendre service à son prochain, notre héros accepte bien entendu cette généreuse proposition, et se fait fort d’entraîner ce fât d’Amin’Hrith dans un piège ingénieux.

Ayant réussi à capter l’attention des Hédonistes, probablement en leur faisant remarquer que leurs soieries avaient fait fureur à Ghur il y a trois saisons de celà (ce qui, pour une fashionista des Royaumes Mortels, est une insulte mortelle), les prestes cavaliers de Sigmar emmènent leur nouveaux amis dans une course éperdue à travers les dunes, jusque dans les ruines de Gazul-Zagaz, où les attendent de pied ferme (et depuis un petit moment apparemment, à en juger par l’épaisse couche de poussière qui les recouvre) les guerriers Duardin. S’en suit une bataille des plus classiques, illustrant de fort belle manière l’intérêt de se rendre au combat avec une armure de plates et non une combinaison en viscose, dont le point culminant sera le duel entre Swiftblade et Amin’Hrith dans le temple de Zagaz, où le rusé Stormcast s’emploiera à faire un boucan à réveiller les morts…

1 : On peut donc dire qu’ils ont une carte Caddow. Mouahahaha.

AVIS :

À l’heure où cette chronique est écrite, Josh Reynolds est probablement le contributeur principal de la BL en matière de contenus siglés Age of Sigmar. Une telle prodigalité ne pouvant évidemment pas être synonyme de qualité exceptionnelle à chaque soumission, il est en somme tout à fait logique que certaines des nouvelles rédigées par notre homme ne s’avèrent pas être d’une lecture des plus passionnantes. C’est le cas de ce ‘A Dirge of Dust and Steel’ (on me passera l’usage du titre original, à la fois plus poétique et plus élégant que le monstre qu’il est devenu en VF), qui se trouve être une nième variation du topos le plus employé de cette nouvelle franchise : la baston de Stormcast Eternals contre les forces du Chaos1. On pourra certes m’opposer que cet épisode particulier se distingue des dizaines qui l’ont précédé par l’emploi d’une Chambre relativement nouvelle (Vanguard), d’un héros inédit (Sathphren Swiftblade) et d’un environnement exotique en diable (l’Oasis de Gazul, en Shyish). Ce à quoi je répondrai que les Vanguard ne sont « que » des Stormcast sur demi-gryffs, et ne conservent de fait que très peu de temps l’attrait de la nouveauté. Swiftblade a quant à lui l’originalité d’une boîte Barbie et son Cheval, même son côté grande gueule n’étant plus vraiment novateur depuis l’arrivée d’Hamilcar Bear-Eater sur le créneau « humoristique » des SE. Pour terminer, Gazul a depuis lors sans doute rejoint l’interminable liste des lieux des Royaumes Mortels dans lesquels plus personne ne reviendra jamais, et ne mérite donc pas que l’on s’yn interesse plus que de mesure.

Non, pour ma part, la seule vraie valeur ajoutée de ce ‘Dirge…’ tient en l’inclusion d’une faction Duardin sortant franchement du lot par sa vénération d’un Dieu de la Mort mort (combo !) et sa capacité à invoquer des esprits, ce qui constitue des variations intéressantes par rapport au stéréotype du guerrier nain que tout lecteur connaissant ses classiques se représente de façon plus ou moins inconsciente. Pour le reste, c’est de la qualité Reynolds (Josh), donc un récit bien structuré et rythmé, s’intégrant parfaitement dans les conventions définies pour Age of Sigmar en termes de fluff et d’atmosphère, et s’avérant dans l’ensemble plaisant à lire. Ne lui retirons pas ça.

1 : Comme les dernières années ont vu apparaître d’autres types d’adversaires, comme les morts-vivants de Nagash pendant la Tempête des Âmes ou les Orruks Ironjaws de manière collatérale à la traque de Mannfred von Carstein, j’attends avec impatience le moment où les vertueux Sigmarines commenceront à taper sur d’autres factions de l’Ordre, en attendant l’inévitable guerre civile que le passif de GW en la matière nous promet depuis que le premier Stormcast a dévoilé le bout de son masque de guerre. ‘La Vilainie de Vanus’, ça c’est un titre qui claque !

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Shiprats – C. L. Werner [AoS] :

INTRIGUE :

ShipratsLa malchance légendaire qui colle à la carène du Dragon de Fer et la peau de son capitaine, le Kharadron Brokrin Ullisson s’abat une nouvelle fois sur le fier navire et son équipage. N’ayant pas trouvé de filon d’aether-or au cours de sa dernière campagne, le navire Duardin s’est résigné à se faire cargo de grain pour au moins rentrer dans ses frais, et a chargé une cargaison de blé dans la ville de Greypeak, qu’il espère vendre à bon prix de retour à Barak-Zilfin. Ce beau projet est toutefois menacé par la présence de passagers clandestins dans la cale du Dragon, une colonie de rats bien décidée à faire bombance sur les stocks des Arkanautes. Entre les petits barbus et les encore plus petits moustachus, il ne saurait y avoir de terrain d’entente, mais que faire pour débarrasser le vaisseau de l’infestation de vermine sans endommager ce dernier ? Alors que Brokrin et ses hommes se trouvent réduits à chasser les importuns à coups de pelle, avec des résultats peu concluants, comme on peut se l’imaginer, une bonne et potentiellement riche idée est soumise : pourquoi ne pas faire un détour par la Lamaserie de Kheitar, dont les moines ont par le passé rendu un fier service aux Kharadrons en débarassant le Dragon de la nuée de crapauds célestes (car apparemment, c’est un aléa climatique assez courant dans les Royaumes Mortels) qui avait élu domicile sur le navire à l’aide d’une fumigation un peu spéciale ? Aussi dit, aussitôt acté, la possibilité de soutirer aux bonzes une de leurs fameuses tapisseries pouvant même permettre d’espérer un profit au trésorier de la petite bande, passablement dépité par le tour pris par les évènements. Après tout, quoi de mieux qu’un lama pour venir à bout d’un rat1 ?

Arrivé sur place, Brokrin emmène une poignée de ses gars à la rencontre des paisibles habitants de Kheitar, dont les ancêtres étaient tellement zens qu’ils ont réussi à apprendre à un démon les bienfaits de la méditation. Brokrin, qui connaît personnellement le grand Lama (Serge), est bien étonné de voir apparaître à la place de son vieux pote un nouveau père supérieur (Bernard), qui a la peine de lui apprendre que Serge n’est pas simplement malade (comme on pouvait s’y attendre), mais a carrément atteint l’illumination en commettant le suicide rituel du tulku, un lent empoisonnement débouchant sur une momification graduelle de l’ascète. Malgré cette triste nouvelle, Bernard se montre particulièrement conciliant avec ses hôtes, acceptant non seulement de procéder à la dératisation demandée (sous réserve que les Duardins permettent aux rats de quitter le navire, car telle est le niveau d’antispécisme des bonzes), mais offrant même à leurs hôtes non pas une, mais cinq de leurs précieuses tapisseries, pour une contribution laissée à la discrétion des bénéficiaires. En celà, Bernard fait une grave erreur car cette générosité excessive ne manque de déclencher l’alerte piège à khon que tous les Kharadrons possèdent dans un coin de leur esprit. Suspectant une entourloupe, Brokrin charge donc un de ses matelots d’escorter les moines tapissiers jusqu’à bon port, tandis que lui et le reste de son khrew acceptent l’offre de Bernard de rendre visite à Serge, qui serait, contre toute évidence, encore vivant. Bernard commet alors sa deuxième boulette (pas aussi grave que celle du Bordeaux – Paris de 93, mais pas loin) : soucieux de faire respecter les traditions non-violentes de Kheitar (où même les démons fument du chichon), il somme ses visiteurs de déposer leurs lames avant d’entrer dans le saint des saints. Toujours un à lire les petites lignes du contrat et à trouver les failles dans les termes et conditions qui lui sont proposés, Brokrin fait remarquer à ses hommes que l’injonction du grand Lama ne couvre pas les armes à feu, et emboîte donc le pas à Bernard toujours armé de sa pétoire.

Un peu plus loin, les mirifiques carpettes de Kheitar sont entreposées sans heurts dans la cale du Dragon de Fer, sous l’œil attentif et circonspect d’un rattophobe déclaré, le sergent arquebusier Drumark, dont le paternel a été fauché dans la fleur de l’âge lors d’une bataille contre les Skavens. Souhaitant s’assurer que la vermine qui grignote son grain ne s’attaque pas aux précieux tapis, il laisse remonter ses comparses et attend dans la pénombre de voir comment les choses vont évoluer. Quelle n’est pas sa surprise de voir s’extraire des rouleaux apportés par les bonzes une demi-douzaine d’hommes-rats, qui comptaient sans doute s’infiltrer discrètement dans le navire en attendant de jouer un tour pendable à ses occupants légitimes ! Les plaisanteries les plus courtes étant les moins longues, Drumark a tôt fait de sonner la fin de la rat-cré, l’arsenal Kharadron ayant rapidement raison des manigances skavens. Tout celà n’augure toutefois rien de bon pour Brokrin et ses suivants, qui ne tardent pas non plus à découvrir le pot au rat, à la suite d’une performance misérable du Jeff Panacluc Skaven, un dénommé Kilvolt ayant « jeanmarquisé » le cadavre de Serge. Sommé de révéler au véritable maître de Kheitar les secrets de l’ingénierie Kharadron, Brokrin refuse avec noblesse, et met à profit la bévue de Bernard pour arroser les hommes rats venus à la rescousse de Kilvolt avec du Kharaplomb. L’algarade ne dure cependant pas longtemps, l’arrivée de Drumark et de ses arquebusiers convainquant définitivement les Skavens de la futilité de leur approche. Profitant de l’accalmie, Brokrin et Cie repartent ventre à terre sur le Dragon, non sans avoir pris soin de looter quelques tapisseries supplémentaires en guise de dédommagement. De voleur à vendeur de tapis, il n’y a que peu de choses au fond.

1 : Si vous répondez : un chat, sachez que le félin apporté à bord par les Duardins a fait acte de mutinerie peu de temps après sa prise de fonction. C’est ce qu s’appelle avoir un poil dans la patte.

AVIS :

Accompagnement au roman qu’il a consacré aux plus blindés des Duardins (Corsaires du Dragon de Fer//Overlords of the Iron Dragon), ce Rats de Cale de Werner s’avère être d’une lecture globalement satisfaisante. Notre homme retrouve avec bonheur ses victimes favorites (les Skavens), qu’il gratifie comme à son habitude d’une inventivité et d’une ambition proportionnellement inverse à leur compétence, pour un résultat aussi spectaculaire que dérangeant1. S’il y a un contributeur de la BL qui sait s’y prendre pour donner aux hommes rats leurs lettres de bassesse, c’est bien l’homme au chapeau, et on ne peut que souhaiter que Nottingham lui confie davantage de commandes portant sur les funestes et fumistes machinations des rejetons du Rat Cornu. On appréciera également l’exotisme du propos, la visite guidée de la Lamaserie de Kheitar permettant au lecteur de se remémorer l’immensité des Royaumes Mortels, où la présence d’une communauté de bonzes vénérant un démon du Chaos ayant trouvé la paix intérieure en téléchargeant Petit Bambou sur son portable est tout à fait possible. On peut regretter que l’accent ne soit pas davantage mis sur la culture des protagonistes, abordée assez succinctement à travers la mention des différentes fonctions des membres de l’équipage de l’Ang Drak et du fameux Code des Kharadron (qui sanctuarise les partenaires de commerce équitable, ce qui doit indiquer que les bananes et le chocolat sont tenus en haute estime par le Geldraad), mais que voulez-vous, on ne peut pas tout avoir dans une nouvelle de 25 pages. Le casting très développé des Arkanautes, conséquence logique de leur inclusion dans le roman cité plus haut, est un autre facteur pouvant diminuer (légèrement) le plaisir de lecture, mais, rassurez-vous, savoir qui est qui n’a que peu d’intérêt au final. Le plus important restant bien sûr de souquer les artimuses.

1 : Sérieusement, imaginer la transformation d’un cadavre de bonze en marionnette animée, c’est un coup à faire des cauchemars.

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The Son of Sorrows – J. French [40K] :

INTRIGUE :

The Son of SorrowsSur une planète banale, une secte impériale l’étant tout autant a commis la singulière et fatale erreur de franchir une des lignes rouges de l’Inquisition : capturer des Psykers (ok) et les torturer (ok) pour obtenir des bouts de prophéties (HERESIIIIIIE !!!). Mettez vous bien ça dans la tête, mécréants : le loto doit rester un jeu de hasard, sinon comment voulez vous que les Seigneurs de Terra financent les opérations de la Garde Impériale, hein ? L’affaire ayant été remontée jusqu’à l’Inquisiteur Covenant, ce dernier décide d’envoyer une de ses nouvelles recrues, l’ex Sergent des forces spéciales Koleg, faire un exemple des Chercheurs de la Vérité Incandescente (le petit nom de la secte), sur le lieu même où ils ont monté leur sinistre opération : la cathédrale Saint Raymond des Charentaises.

On suit donc Koleg depuis sa préparation méthodique dans la cellule qui lui sert de chambre, après que la brave Viola von Castellan, qui entre autres tâches s’occupe des ressources humaines pour le compte de son patron, lui ait transmis le briefing de la mission, jusqu’à l’exécution de cette dernière. Déployé comme la one man army qu’il est, Koleg sait qu’il doit faire un exemple des pécheurs et utilise pour ça un armement bien spécifique : un lance grenade balançant des bombinettes à fumée saturée de LSD et d’agent phobique (pour faire littéralement halluciner ses victimes et les mener à se retourner les unes contre les autres) d’une part, et un pistolet à chevrotine d’autre part (ça sert toujours). Ah, il utilise aussi une sorte de porte manteaux rétractable à un moment, mais je serai bien infoutu de vous dire à quoi ça lui a servi1. Toujours est il que le K. nettoie la place avec l’efficacité des grands professionnels, même lorsque l’un des Psykers gardés au frigo par les hérétiques s’invite à la fête après qu’une grenade ait défoncé son aquarium amniotique.

En parallèle, nous avons droit à quelques flashbacks retraçant les événements ayant mené notre héros à rejoindre la team Covenant. On apprend ainsi que Koleg avait un frère (Kesh) avec lequel il partageait la passion de la fauconnerie, et qui est mort tragiquement après qu’une bombe au napalm soit tombé sur leur maison. Bien des années plus tard, un Koleg adulte et engagé dans la Garde Impériale battit son Capitaine comme plâtre après que ce dernier se soit trompé dans les coordonnées d’un raid incendiaire, ayant sans doute fait des victimes civiles et triggered Koko. Un tel crime ne pouvant rester impuni, Koleg s’attendait à être exécuté sans sommation par le Commissaire le plus proche, mais par un heureux hasard, un homme de main de Covenant (peut-être Josef) passait dans le coin et proposa au soldat dépressif de rejoindre l’Inquisition. Koleg accepta à la condition d’être débarrassé de son spleen persistant, et comme une psychothérapie coûte apparemment trop cher pour l’Inquisition, il fut à moitié lobotomisé par ses nouveaux copains à la place. Résultat : il n’est plus capable de ressentir aucune émotion, ce qui peut avoir ses bons côtés je suppose. Comme dit le proverbe, keep calm and purge on

1 : Et je ne suis pas le seul apparemment.

AVIS :

Parmi la foultitude de suivants de l’Inquisiteur Covenant, le taciturne Koleg est sans doute le moins remarquable, son statut de simple gros bras chargé des basses besognes ne lui permettant pas de voler la vedette aux seconds couteaux les plus fantasques, stylés ou particuliers du Francis Lalanne de l’Ordo Malleus. Cela n’a pas empêché l’aimable John French de donner à cet humble personnage un début d’origin story, convenablement mystérieux1 et résolument tragique, ce qui est approprié pour un type évoluant dans un univers grimdark. À vrai dire, ce sont les flashbacks retraçant le parcours de Koleg qui m’ont le plus intéressé, le récit de sa mission « Épouvantail » dans la cathédrale squattée par les cultistes ne révolutionnant pas le genre du bolt porn, et j’aurais donc apprécié que French passe plus de temps à détailler le passif du pseudo Space Marine (après tout, lui non plus ne connaîtra plus la peur) plutôt qu’à le décrire en train de gazer de l’hérétique. Pas la meilleure nouvelle horusienne de notre homme, mais tout de même sympathique. Tous avec moi : Heeeeee’s a maaaaaan of constant sooooorrooooooow…

1 : J’ai compris qu’il a tabassé son Capitaine parce que l’erreur que ce dernier a commise lui a rappelé le tragique destin de sa propre famille, mais peut-être qu’il s’agit du même accident.

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The Battle of Blackthunder Mesa – P. Kelly [40K] :

INTRIGUE :

The Battle of Blackthunder MesaLa situation des défenseurs T’au de la planète Dal’yth, et plus particulièrement, de l’académie militaire située sur cette dernière, est positivement catastrophique. Isolés par le retrait des troupes de cette fayotte de Shadowsun, qui s’est repliée sans coup férir au lieu de se battre jusqu’au bout, comme le préconisait Farsight, les derniers guerriers de la caste du feu en sont réduits à livrer de coûteux et futiles combats d’arrière-garde pour ralentir l’avancée des impériaux, et permettre, peut-être, d’évacuer les survivants de la Star Academy locale. Placés sous l’autorité du Commander Bravestorm, adepte convaincu de la vision hypermétrope de la guerre de Farsight (et pour cause), nos héros viennent cependant de recevoir du matos un peu spécial, commandé auprès des grosses têtes de la caste de la terre il y a peu et livré sous forme encore expérimentale : des gants de boxe énergétiques. En effet, poussés par l’épuisement de leurs munitions et la puissance de feu de leur adversaire, Farsight et Bravestorm ont changé leur fusil à impulsion d’épaule, et monté une opération osée pour engager les tanks ennemis au corps à corps. Cela n’est certes pas très conventionnel, comme le fait remarquer la pimbêche (Furuja) du groupe1, mais nécessité faisant loi, Bravestorm emmène donc son cadre de cadets à l’assaut de la tristement célèbre Blackthunder Mesa, transformée en drive-in pour Leman Russ et Basilisks par l’Imperium depuis quelques semaines, avec des conséquences architecturales dramatiques pour la ville universitaire de Dal’Ryu, située en contrebas.

Si le déploiement de notre petite force d’Iron Men ne pose pas de problèmes, grâce à la maîtrise du vol furtif et à la technologie avancée du Bien Suprême, les choses se compliquent toutefois assez rapidement pour les concasseurs de tôle. Bien que Bravestorm ait pris soin d’indiquer à ses élèves qu’il fallait mieux rester au cœur de la mêlée pour gêner les tanks dans leur utilisation de leurs armes de défense, le poids du nombre, le comportement kikoulol de certains, et l’arrivée importune d’un Stormhammer, font lentement grimper les pertes du côté des punchers, bien que leurs maniques custom prélèvent un lourd tribut parmi les colonnes blindées de l’ennemi. L’équilibre des forces se renverse cependant brutalement lorsque, non pas un, mais deux Titans Warlord viennent se joindre aux festivités. L’apparition « subite » de ces discrètes et furtives machines de guerre en dit long sur le degré de préparation de l’opération, mais cela sera une discussion pour une autre fois. De toute façon, Bravestorm est certain que les nouveaux-venus n’oseront pas tirer sur les T’au, qui sont toujours engagés dans une partie d’auto-tamponneuse hardcore avec les blindés impériaux. Sa suffisance de Xenos idéaliste se trouve donc méchamment battue en brèche lorsque le turbo-laser du Titan de tête ouvre le feu sur les empêcheurs de bombarder en rond, réduisant le cadre de Bravestorm en confettis et cuisant ce dernier dans son armure.

Ce n’est cependant pas la fin pour notre héros trop confiant, qui trouve les ressources intérieures nécessaires pour faire abstraction de ses blessures et partir à l’assaut de la machine meurtrière. Son dernier fait d’arme consistera donc à « égorger » son adversaire en lui arrachant le câble d’alimentation, « fier comme un dindon », euh, tendon, courant le long du « cou » de la machine. À quoi cela a-t-il servi ? À rien en fait, puisque Bravestorm se prend à son tour une baffe monumentale – on saluera la dextérité de l’équipage impérial pour arriver à atteindre une cible aussi petite – s’écrase au sol comme une bouse, et sombre dans une inconscience logique. Certes, il a le temps de voir les forces impériales, dont le Titan trachéotomisé, se retirer de la mesa avant de tomber dans le coma, mais la victoire stratégique qu’il revendique au nom du Bien Suprême me semble un peu tirée par les cheveux (lui n’en a pas, je vous l’accorde). Après tout, c’était peut-être seulement l’heure de la cantine du côté adverse ?  En tout cas, notre increvable héros n’a pas dit son dernier mot, puisque sa carcasse mutilée finit par être récupérée sur le champ de bataille par les éboueurs de la caste de la terre. Pas encore tout à fait mort, il entend ses sauveteurs discuter des conséquences positives de son coup d’éclat quasiment fatal, qui a au moins permis de préserver les derniers quartiers de Dal’Ryu des déprédations impériales. La nouvelle se termine sur la réalisation que Bravestorm sera bien sauvé, mais au prix d’un enfermement perpétuel dans son Exo-armure, ses blessures étant trop graves pour espérer une véritable guérison. Assez ironique pour un personnage ouvertement Dreadnoughtophobe2

1 : Qui remonte toutefois dans mon estime grâce au magnifique « OK Gooder » (l’équivalent de notre OK Boomer) expédié à son supérieur un peu plus loin.
2 : Ce n’est pas qu’il en ait peur, mais la vue des pilotes Space Marines mutilés le dégoûte. Il en fait même des cauchemars.

AVIS :

Kelly retourne une fois encore sur la planète Dal’yth (Redemption on… Dal’yth) pour livrer un compte rendu romancé de la première utilisation d’une arme expérimentale T’au, le fameux gantelet Onagre. Si j’ai pu deviner à la lecture de cette nouvelle qu’elle mettait en scène des personnages déjà présentés dans d’autres textes qu’il a consacré à la couverture de la campagne de Damocles, l’immersion dans la galerie de seconds couteaux (rituels) gravitant autour de Farsight ne s’est pas faite sans difficultés de mon côté. En cause, le nombre de personnages convoqués par l’auteur1, et la complexité naturelle des patronymes T’au, qui se sont conjugués pour rendre difficile l’identification, et à travers elle, l’intérêt, de votre serviteur envers les pioupious de l’académie que Bravestorm a pris sous son aile. Cette difficulté évacuée, le récit de la fameuse bataille de Blackthunder Mesa ne m’a pas collé à mon siège, du fait du caractère binaire de l’affrontement en question. Si les Exo-armures commencent par faire des gros trous dans les tanks impériaux, sans vraiment être mises en danger par leurs proies (plutôt qu’adversaires), l’arrivée du titan renverse totalement la situation en un seul tir (merci Bravestorm), éparpillant le maigre suspens agencé jusqu’ici par Kelly aussi facilement que les assaillants Xenos venus souffler dans les chenilles des blindés de l’Empereur. On saluera tout de même la bonne « préparation » faite par l’auteur de la destinée claustrophobie de Bravestorm, qui après la Voie de la Lame Courte suivra celle de la Boîte de Conserve, sort ironique eut égard à l’effroi que lui inspirait les Dreadnoughts Space Marines. Au final, une lecture qui pourra intéresser les familiers de la prose suprêmiste de Kelly, mais qui n’a pas grand-chose à apporter au tout venant à la recherche d’un récit de bataille prenant.

1 : Ironie du sort, ils y passeront presque tous avant la fin de la nouvelle. C’était bien la peine de faire des efforts.

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The Atonement of Fire – D. Annandale [HH] :

INTRIGUE :

The Atonement of FireNous sommes dans la dernière ligne droite de l’Hérésie, quelques mois avant que le Siège de Terra ne débute. Roboute Guilliman a fini par réaliser que lancer sa petite entreprise personnelle alors qu’il est toujours techniquement employé par Pépé Corp., et en piquant dans la caisse de Big E. en profitant d’une panne généralisée d’internet pour ne pas se faire prendre, c’était assez craignos tout de même. Pétri de remords, Roro est désormais à la recherche d’un moyen de se faire pardonner ses errements passés. En sortant de sa séance hebdomadaire avec le Chapelain/Psychiatre Volusius, lui vient une idée toute simple pour expier son énorme hubris : aider Sanguinius à rejoindre Terra en détruisant les flottes hérétiques qui se mettront sans nul doute sur la route de l’Ange à la Moumoute.

Après une petite séance de triangulation avec les poteaux dans le strategium de l’Ultima Mundi, les Ultras de l’Empereur décident d’aller au secours de la planète Diavanos, d’où est arrivé un message astropathique implorant de l’assistance pour gérer une invasion de World Eaters mal-lunés. Diavanos est de plus un monde que les Ultramarines ont rattaché à l’Imperium il y a plusieurs décennies, et dont la technique de vitraux teintés a grandement impressionné le Primarque lorsqu’il flânait dans les rues de la capitale Ecstasia à la recherche d’inspiration pour son dernier roman. Pour toutes ces raisons, ainsi que pour celle, plus prosaïque, de se venger des ravages commis par les séides d’Angron et de Lorgar dans leur pré carré, les gars de la XIIIème se ruent au secours de Diavanos, et tombent à bras raccourcis sur leurs frères ennemis alors que ces derniers s’apprêtaient à repartir pour embusquer la flotte des Blood Angels.

La bataille spatiale qui s’en suit, si elle n’est guère équilibrée (les Ultramarines sont deux fois plus nombreux, sérieux, hargneux, farineux et bleus que leurs adversaires), permet à nos héros de relâcher la pression après tous ces mois à écouter les podcasts interminables du triumvirat de l’Imperium Secundus. Alors que les derniers vaisseaux renégats sont méthodiquement désintégrés par la froide fureur ultramarine, le cuirassé Gladiator profite de la confusion pour repartir en direction de Diavanos, et certainement pas pour une visite de politesse. Guilliman comprend que les World Eaters ont un petit creux, et que s’il n’intervient pas rapidement, la planète qu’il est venu sauver va s’en prendre plein la face. Mais arrivera-t-il à temps pour empêcher les fils d’Angron de commettre l’irréparable ?

Début spoiler…Après de multiples péripéties dans les coursives du Gladiator, que les World Eaters ont faites effondrer pour gêner la progression de leurs ennemis, Roboute et ses hommes (en grande partie des Destroyers, wink wink The Lord of Ultramar’) parviennent jusqu’à la salle des torpilles où les hérétiques se sont barricadés. La mêlée désespérée et surtout très sale qui s’ensuit tourne logiquement en faveur des surhommes en bleu, mais les World Eaters sont proches de réaliser leur objectif secret (faire péter une torpille à l’intérieur du vaisseau afin d’emporter Guilliman avec eux). Seule l’habilité du Grand Schtroumpf avec son combi-bolter customisé permet d’éviter la catastrophe, mais la victoire morale revient tout de même aux groupies d’Horus. Il est en effet trop tard pour prévenir le crash du Gladiator à la surface de Diavanos, et l’onde de choc qui s’en suit rase la capitale et dévaste une grande partie de la planète. Bien évidemment, les Ultramarines ont eu le temps de regagner leurs 22 avant que cette tragédie n’arrive, mais Guilliman finit la nouvelle avec le blues. Approprié, vous me direz.Fin spoiler

AVIS :

Vu le passif peu glorieux de David Annandale avec la XIIIème Légion (‘Lord of Ultramar’…), j’ai attaqué cette nouvelle dans un état d’esprit assez peu favorable à cette dernière, et j’ai été surpris de constater que cet ‘Atonement of Fire’ tenait tout à fait la route. Nous sommes en présence d’un court format siglé HH de facture assez classique (un peu de réflexion, beaucoup d’action, et en bonus une belle tranche de Primarque), mais débarrassé de tous les défauts que l’on pouvait trouver dans les autres soumissions de notre homme (personnages stupides/inintéressants, intrigue bancale, rythme chaotique)1. Ça pourrait et devrait être considéré comme le strict minimum, mais nous savons tous que la BL ne croit pas dans des concepts aussi restrictifs que le contrôle qualité. Enfin, pas tout le temps.

Surtout, et c’est assez rare dans une publication de la Black Library (quel que soit la franchise ou l’auteur) pour le souligner, Annandale parvient à ménager un vrai suspens jusqu’au bout de son propos. Guilliman et ses Schtroumpfs destructeurs arriveront-ils à sauver Diavanos des déprédations suicidaires des World Eaters ? Même si la planète a été créée de toute pièce pour l’occasion, l’auteur arrive à nous intéresser à la conclusion de cet accrochage mineur de la fin de l’Hérésie en appuyant de façon intelligente sur les remords éprouvés par Guilliman au sujet de son Imperium Secondus et son besoin de se faire pardonner de ce petit caprice. Annandale nous ressert également la vieille rengaine du « I am never going to financially recover from this », 30K style, déjà bien exploitée par d’autres avant lui, mais qui fait toujours son petit effet quand utilisée à dessein, ce qui est le cas ici. Bref, une vraie bonne surprise pour ma part, et une des meilleures soumissions de David Annandale pour le compte de cette franchise, si vous demandez mon avis.

1 : On pourrait lui reprocher de ne toujours pas maîtriser les bases spatio-temporelles d’une bataille spatiale (exemple gratuit : la course poursuite entre l’Ultimus Mundi et le Gladiator ne semble durer que quelques minutes, alors qu’elle s’engage à proximité du point de Mandeville du système et se termine dans l’atmosphère d’une planète habitable (donc proche de son soleil), ce qui devrait prendre au bas mot quelques jours), mais dans mon infinie générosité, je passe l’éponge là-dessus.

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A Lesson in Iron – D. Guymer [HH] :

INTRIGUE :

A Lesson in IronS’il y a une chose que Ferrus Manus, paix à son âne, détestait, c’était bien perdre du temps. Aussi, sitôt réuni avec sa Légion, engagée dans le démantèlement de l’empire de rouille ork, le Primarque tint à imposer sa marque sur ses Légionnaires. Nous rejoignons ainsi l’impulsif M. Manus alors qu’il fait la chasse de quelques vaisseaux peaux vertes ayant survécu à la colère de l’Imperium, et qu’il compte bien détruire afin d’obtenir la complétion à 100% de sa mission, et ainsi prouver à l’univers qu’il vaut mieux que ces poseurs d’Horus et de Russ1. Et tant pis si ces couards d’Orks décident de foncer coque baissée dans une faille Warp qui flottait par là pour échapper au courroux de l’Astartes, et que personne n’a jamais été assez timbré du côté impérial pour se risquer dans ce genre d’environnement chelou. Ferrus, et son Fist of Iron, seront les premiers à tenter le coup. Encore un record à mettre au crédit du Primarque qui en voulait.

Ferrus n’est pas seul sur le pont de son vaisseau amiral alors que ce dernier réalise le premier fistage d’une faille Warp. Il est accompagné de deux Sergents vétérans, le Terran Harik Morn et le Medusan Gabriel Santar, tous deux pressentis pour devenir son bras droit. Alors que le Fist of Iron s’enfonce dans le trans Materium comme s’il s’agissait de caramel mou, avec des effets funky sur les appareils de navigation, comme on peut l’imaginer, les auspex détectent soudain des silhouettes de vaisseaux à proximité. Il s’agit des kroiseurs orks, mais également d’un nouvel arrivant, qui n’avait pas été identifié pendant la poursuite dans l’espace réel. Point commun : tous ont été réduits à l’état d’épave, et dans un passé lointain qui plus est. À la grande surprise des impériaux, il semble que le vaisseau en question appartienne à la 10ème Légion, ce qui hautement improbable mais pas totalement impossible. Pragmatique comme toujours, Ferrus Manus décide d’aller y jeter un œil.

Alors que les pauvres grunts qui forment son escorte découvrent avec émoi 1) l’existence de Démons et 2) s’il y a une vie après la mort, le Primarque et ses comparses arrivent jusqu’au pont du vaisseau mystère, où les attend un cadavre desséché de Space Marine. Ce dernier porte les marquages d’un Iron Hands, mais, au grand dégoût de FM, il semble avoir terminé sa carrière plus machine que (sur)homme, au vu de toutes les augmétiques et bioniques que la dépouille arbore. C’est le Tech-adepte qui accompagne la fine équipe qui finit par proposer l’hypothèse la plus intéressante pour expliquer ce répugnant mystère : l’épave sur laquelle ils se trouvent est un vaisseau des Iron Hands provenant du futur, transporté dans le passé par les caprices du Warp.

Avant que la nouvelle n’ait pu être digérée par l’assemblée, une palanquée de Démons se manifeste (dans tous les sens du terme) sur le pont, et forcent nos héros à – enfin – faire usage de la force. Si ce bogoss de Ferrus s’illustre à grands coups de marteau, ses subalternes sont plus à la peine. Surpris par les nouveaux arrivants, Santar se fait ainsi arracher le bras gauche par une Bête de Nurgle joueuse, tandis que Morn est submergé par des Horreurs rigolardes. Le premier réussit toutefois à marquer des points auprès du Primarque en retournant dans la mêlée sitôt ses esprits recouvrés, tandis que le Terran se contente de haleter comme un bébé phoque sur la banquise. Avant d’ordonner une retraite tactique vers le Fist of Iron, ignorant les avis de ses sous-fifres de rester pour looter de la technologie futuriste, et/ou défendre une relique de la Légion, Ferrus tranche en son for intérieur : ce sera Gaby qui deviendra son Écuyer et 1er Capitaine. C’est dit.

1 : C’était l’époque de la Grande Croisade où tous les Primarques avaient un nom qui rimait avec « platypus », l’animal préféré de Pépé.

AVIS :

Petite nouvelle fort sympathique consacrée par leur spécialiste incontesté, David Guymer, aux Iron Hands et à leur Primarque caractériel, ‘A Lesson in Iron’ se paie le luxe de nous présenter en quelques lignes la prise de fonction de Ferrus Manus au sein de sa Légion (choix du 1er Capitaine, et autres révélations fluffiques intéressantes incluses), combiné avec une savoureuse mise en abîme du futur qui attend le Chapitre dans quelques millénaires. Le fait que les améliorations bioniques répugnent au plus haut point l’homme aux mains de fer n’est pas une nouveauté à ce stade, mais Guymer parvient tout de même à surfer sur cette iron-ie de façon tout à fait satisfaisante. Le pauvre Ferrus Manus aura soupé de prémonitions malheureuses car jamais utilisées pour modifier la destinée pas vraiment enviable attend ses fils et lui-même à la sortie de la Grande Croisade, et on en a encore un exemple ici. Ça reste plus distrayant à lire que la moyenne des soumissions de la BL, donc pourquoi cracher dans soupe ?

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Et voilà pour cette revue expresse (en tout cas de mon côté) de ce petit livret de 2017. Sympathique sans plus, mais sans défaut flagrant non plus, franchement on a vu pire.

INFERNO! – ANNEE 5

Bonjour à tous et bienvenue dans cette rétrospective de l’année 5 d’Inferno!, dont vous devez très certainement savoir à ce stade qu’il s’agissait d’un bimensuel publié par la Black Library au premier et au second millénaire de notre ère (peu de revues ont eu une telle longévité, vous le reconnaitrez). Les six numéros qui seront disséqués ci-dessous sont toutefois fermement ancrés dans les années 2000, puisqu’ils couvrent la période allant de juillet 2001 à mai 2002. Une époque riche en événements, comme vous vous en souvenez sûrement ou l’avez probablement appris à l’école (dur de suivre le contenu des programmes scolaires ces temps-ci).

Inferno!_Année 5

Si cette année se révèle moins riche que la précédente en termes de soumissions, avec seulement 21 nouvelles, elle présente quelques innovations intéressantes, comme le premier numéro « mono-franchise » (#25, avec seulement du Battle), et le premier numéro thématique d’Inferno! (#30), consacré exclusivement aux Fantômes de Gaunt. Elle s’avère également assez généreuse en matière d’aventures de personnages amenés à marquer de leur empreinte l’histoire de la GW-Fiction. Le pistolero de Necromunda, Nathan Creed, revient faire parler la poudre à deux reprises (‘Firestarter’ et ‘Bad Medicine’), tout comme le Sergent Priad des Iron Snakes (‘Crimson Storm’), Torben Badenov et sa bande de mercenaires débraillés (‘The Nagenhof Bell’), et l’incorrigible et impardonné Kage de la 13ème Légion Pénale (‘Liberty’). Cette année 5 voit aussi les premières armes en format réduit d’Uriel Ventris (‘Chains of Command’), Gregor Eisenhorn (‘Missing in Action’) et Angelika Fleischer (‘Meat and Bone’).

Une autre caractéristique notable de cette tranche infernale est son homogénéité au niveau des auteurs sollicités. Avec « seulement » dix plumes différentes sur l’année, on commence à percevoir que la Black Library a constitué un groupe de contributeurs principaux, auxquels viennent s’ajouter quelques nouveaux arrivants et free-lance occasionnels. L’exubérante diversité des débuts d’Inferno! se police quelque peu, et laisse place à une approche plus uniforme et conventionnelle : le « BL Style » venait de naître. Sans surprise, c’est à nouveau Dan Abnett qui remporte la coupe du premier contributeur de cette cinquième année (comme sur les années 1, 2 et 3) avec pas moins de quatre nouvelles à son nom. Il est suivi de près par Graham McNeill et Jonathan Green (3 soumissions), et Brian Craig, C. L. Werner et Gav Thorpe (2 soumissions).

On ne le savait pas encore à l’époque, mais cette auguste revue avait déjà passé son zénith et était plus proche de sa fin que de son début. C’est sur cette remarque funeste et totalement gratuite que je vous propose de clore cette introduction et de passer sans plus attendre à la revue à proprement parler. Ça nous changera les idées.

Inferno! Année 5

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The Ambassador – G. McNeill [WFB] – #25 :

INTRIGUE :

WFB_The AmbassadorFraîchement nommé ambassadeur impérial à la cour de la Tsarine de Kislev, le général à la retraite Kaspar von Velten enchaîne les déconvenues à peine arrivé sur le lieu de son affectation. Accompagné d’un vieux serviteur manchot un peu trop familier (Stefan) et d’une escorte de Chevaliers Panthères frileux (à croire que ces pelisses ne sont pas de bons isolants thermiques), l’apprenti diplomate commence par déloger son prédécesseur, l’incompétent et corrompu Andreas Teugenheim (ça veut littéralement dire « taverne » en reikspiel, faut pas s’étonner que le type soit un jouisseur) de l’ambassade saccagée que ce dernier occupait, s’attirant du même coup l’hostilité goguenarde du parrain de la Bratva locale, un colosse bedonnant répondant au nom de Vassily Chekatilo, très occupé à fumer des cigares avec son bon ami Teugenheim dans le boudoir de ce dernier à l’arrivée de la relève.

Réalisant qu’il est bon pour quelques jours de ménage et de chinage intensifs s’il souhaite redonner à son nouveau chez-lui le faste et le cachet qu’on est en droit d’attendre d’une ambassade impériale (sans compter la formation du service d’ordre local, qui aurait fort à faire à repousser les assauts de  Gnoblars hémiplégiques), von Velten est sauvé de la corvée de mob par l’arrivée impromptue d’une de ses anciennes connaissances, l’ex-Lancier Ailé Pavel Korovic, compagnon d’armes fidèle et alcoolique notoire, qui insiste bruyamment pour que les retrouvailles soient célébrée à grand renfort de kvas. Acceptant l’invitation, Kaspar se rend au domicile de son comparse et s’embarque dans une soirée arrosée suivie d’une nuit enfumée, son repos réparateur se trouvant interrompu par le début d’incendie allumé par un trio de brutes pyromanes, auxquelles von Velten règle leurs comptes sans penser qu’il aurait été pertinent de garder un séide en vie pour pouvoir lui soutirer des informations sur son commanditaire. Erreur de débutant.

C’est donc à une prise de fonction des plus mouvementées qu’a droit celui qui passera à la postérité sous le nom d’Ambassadeur, ses premières heures kislevites lui ayant en outre permis de se familiariser avec le sinistre parcours du tueur en série cannibale local, simplement nommé le Boucher (les Kislevites sont des gens pratiques et peu imaginatifs), et avec lequel on devine que Kaspar aura rapidement maille à partir. Ajoutez à cela une ambiance plutôt morose du fait de la tenue prochaine de la traditionnelle invasion chaotique, le froid, la neige et le mal du pays, et vous avez le début d’un séjour qui s’annonce mémorable pour notre pré-retraité. Everrrrytting fill bi olrrrraïtt, da ?

AVIS :

Mes souvenirs nébuleux de la duologie (L’Ambassadeur//The Ambassador et Les Dents d’Ursun//Ursun’s Teeth) consacrée par Graham McNeill aux jeux complexes de la realpolitik entre l’Empire et le Kislev1 me font écrire avec une certitude assez grande que cette nouvelle est en fait le chapitre introductif du premier de ces deux romans, avec lequel elle partage son nom. Nous sommes clairement en face d’une introduction à une intrigue destinée à être traitée sur des centaines de pages, et les douze que constituent ce The Ambassador sont toutes entières consacrées à l’exposition de la situation dans laquelle Kaspar von Velten trouve Kislev à son arrivée et la présentation des protagonistes et antagonistes principaux du roman. En cela, il serait petit bras de critiquer le caractère inachevé de ce texte, qui n’est pas, comme annoncé par Inferno ! une nouvelle en tant que tel, mais l’extrait d’un ouvrage que McNeill n’avait pas encore finalisé à l’époque. La vraie question est donc de savoir si ces quelques pages donnent envie d’en savoir plus sur le long format qu’elles introduisent, et la réponse est plutôt positive. Graham McNeill brasse suffisamment large pour que la grande majorité de ses lecteurs trouve au moins une raison de suivre les aventures de son héros grisonnant au pays de l’alcoolisme morbide et des moustaches en fer à cheval. Thriller gore, péripéties med-fan, intrigues politiciennes, pourvoyeur de fluff, The Ambassador coche toutes ces cases, et probablement d’autres (il faudrait que je relise les bouquins), et est une lecture conseillée2 pour tous les hobbyistes s’intéressant au traitement réservé au Monde qui Fut par la Black Library. Je sais qu’il en reste.

1 : Et à la pratique du jogging par les chevaliers impériaux. Les vieux s’en souviendront.
Ce n’est pas pour rien que l’ouvrage a été élevé au Black Library Hall of Fame en 2016. Une distinction d’assez peu de poids, je vous l’accorde, mais méritée quoi qu’il en soit.

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Tybalt’s Battle – G. Thorpe [WFB] – #25 :

INTRIGUE :

WFB_Tybalt's BattleLe brave (dans tous les sens du terme) Tybalt, Chevalier bretonnien de son état, a répondu à l’appel du fantôme du Duc Laroche, et mis le cap sur le distant archipel d’Albion avec une petite armée pour y combattre le Mââââl. Si vous trouvez que c’est un ordre de mission un peu succinct, je suis d’accord avec vous1, mais en Bretonnie, on n’est pas du genre à avoir besoin de beaucoup plus que trois lignes de texte débitées par le PNJ le moins précis du monde pour partir en croisade. A croire que les nobles n’ont littéralement que ça à faire de leurs journées.

Après une traversée des plus banales, le bataillon débarque à grand-peine sur l’île principal de cette terre aussi mystique qu’humide, perdant quelques hommes lorsqu’un de ses canots se renverse pendant le transbahutage. Rien de trop grave (enfin, pour les survivants évidemment), mais alors que le navire qui les amené jusqu’à bon port s’éloigne pour se mettre à l’abri, Tybalt réalise brutalement qu’il n’a absolument aucune idée de ce qui lui est demandé d’accomplir sur cette lande aussi lugubre que l’arrière-pays brestois en février. C’est la boulette.

Fort heureusement, un nouveau PNJ donneur de quêtes du nom royal de Charl se présente au nobliau désorienté une fois la nuit tombée et le camp des Bretonniens installé dans la partie la moins spongieuse du marais qu’ils ont passé la journée à traverser (dans le doute, autant marcher tout droit dans une direction générée au dé de déviation, c’est vrai). Charlie est un authentique Oracle d’Albion, comme sa coupe de cheveux improbable, sa musculature imposante, sa lance custom et surtout, sa déperlance absolue (les Oracles sont immergés dans un bain de Teflon pendant leur apprentissage, ce qui leur donne une longévité et une imperméabilité exceptionnelle) le démontrent sans appel. Il connaît aussi ce vieux brigand de Laroche, qu’il a convaincu de lui envoyer le premier pigeon aventurier venu pour l’aider dans son combat contre Bebe’lakor et ses Emissaires Noirs. Grâce à sa maîtrise approximative du bretonnien (un peu) et au caractère très influençable de Tybalt (surtout), Charl entraîne ses nouveaux copains dans une vendetta dirigée contre… un autre seigneur bretonnien, dont l’erreur aura été de se ranger du côté d’un Emissaire Noir. C’est limite du racisme présenté comme ça, mais je m’égare.

Dès le lendemain, l’Oracle utilise ses pouvoirs de druide météorologue guide local pour emmener ses alliés sur un raccourci leur permettant de couvrir des centaines de kilomètres en une seule journée2. Perdant à nouveaux quelques hommes (et un poney) aux pittoresques conditions locales – ici un selfie malavisé avec un troupeau de vaches Highland mal disposées – les croisés finissent par arriver en face de l’armée adverse alors que le jour est sur le point de tomber, ce qui est évidemment le meilleur moment pour mener une bataille. Pendant que ses troupes se préparent à défendre le bloc de tourbe le moins humide du périmètre (un grand avantage quand on se bat sur Albion), Tybalt va s’entretenir avec son vis-à-vis, le redoutable Morlant, accompagné par l’Emissaire Noir qui l’a recruté. Sa proposition de régler l’affaire par un duel d’honneur étant refusée, la bataille fratricide peut alors s’engager, au cours de laquelle, ô surprise, les gentils bretonniens collent une rouste aux méchants bretonniens, malgré le clair avantage numérique de ces derniers. Au plus fort de la mêlée, et en dépit de la malédiction de malaise cardiaque que l’Emissaire Noir lui jette en douce (le domaine de l’hypocondrie, cette petite pépite de la V6), Tybalt vainc honorablement Morlant et lui intime de se rendre. Malheureusement pour lui, le contrat signé par le mercenaire Bretonnien3 contenait une clause de non-défection passible de mort, et le pauvre Morlant se fait dessecher par la plus noire des magies avant d’avoir pu s’exécuter. Outragé par ce coup du sort, Tybalt part à la poursuite de l’Emissaire Noir qui s’était discrètement eclipsé lorsqu’il a réalisé que la bataille était perdue, et lui fait son affaire est à nouveau victime d’une crise de tachycardie ventriculaire, laissant la responsabilité du kill à son fidèle destrier. Exactement comme à Warhammer.

Tout est bien qui finit bien dans les marais du bout du monde, mais lorsque Tybalt fait mine de donner l’ordre de se diriger vers la plage où le navire de retour les attend, Charl prend un air tellement misérable que son nouvel associé décide de prolonger un peu son séjour sur la perfide et pluvieuse Albion, afin d’aider à mettre en échec les manigances de Be’lakor. Et en pro bono, encore une fois. Quelle noblesse, vraiment.

1 : Et encore, c’est pas le pire. Ce troll ectoplasmique de Laroche et son amour consommé des paraphrases ont fait perdre des mois à son obligé, le temps qu’il localise avec précision la fameuse « île des tempêtes » que son oublieux mentor lui a demandé d’explorer. Si la vieillesse est un naufrage, la non-vie est une épave…
2 : Enfin ça, c’est lui qui le dit. Comme Tybalt et compagnie n’ont jamais mis les pieds en Albion et que la route se fait dans un tunnel de brouillard à couper au couteau, on peut aussi considérer que l’armée ennemie se trouvait à trois kilomètres, mais que Charl a passé son temps à se perdre.
3 : On peut en rigoler, mais ça veut dire que lui au moins se battait contre rémunération. Alors que cet idéaliste de Tybalt a pris la mer avec ses hommes sans demander aucune contrepartie (c’est peut-être pour ça que Laroche a tendance à se dissiper si rapidement une fois qu’il a donné sa quête…).

AVIS :

Gav Thorpe remet en selle son personnage de Tybalt « Dieudonné » de Quenelles, déjà croisé dans l’abysmal ‘Tybalt’s Quest’, à l’occasion de la campagne Shadows over Albion, qui prit place pendant l’été 2001. Contrairement au premier épisode de cette geste bretonienne très peu inspirée, le véritable héros de ‘Tybalt’s Battle’ n’est pas le nobliau hanté et froussard qui a donné son nom au titre de cette histoire, mais les terres sauvages (et humides, trèèèèès humides) d’Albion, ce qui constitue une amélioration notable si vous voulez mon avis.

Si on passe sur le caractère très artificiel de l’intrigue, le manque de profondeur des personnages et le caractère très convenu des péripéties (ce qui fait beaucoup, je l’avoue), cette nouvelle nous offre une petite balade dans un coin iconique et mystérieux du Monde Qui Fut, et comme la concurrence est loin d’être féroce sur ce créneau1, on pourra – si on est d’humeur magnanime – apprécier l’effort fait par Thorpe pour dépayser son lectorat. Notons pour conclure qu’il s’agit de la seconde et dernière apparition du jeune Tybalt (pour autant que je le sache) sous la plume d’un auteur de la Black Library, à moins que l’omniscient Josh Reynolds ne l’ait mentionné (et fait mourir d’une manière appropriée) dans sa chronique de la Fin des Temps. Je me plais à croire qu’après avoir épuisé la patience de ses hommes en menant des campagnes sans fin dans l’arrière-pays albionais, Tybalt ouvrit un petit fish & chips en compagnie de Charl. Un vrai exemple d’assimilation réussie.

1 : À moins de se tourner vers le pas terrible du tout ‘Giantslayer’, commis par un Bill King moins motivé que jamais (ce fut d’ailleurs son dernier bouquin pour la série), ou de remonter aux origines de la GW-Fiction avec le très ancien ‘Storm Warriors’ de Brian Craig.

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A Fool’s Bargain – B. Maycock [WFB] – #25 :

INTRIGUE :

WFB_A Fool's BargainAlfredo Landi Naddeo est un marchand de curiosités prospère, son vaste achalandage de biens merveilleux autant qu’utiles (et parfois efficaces), sa science du négoce et le trio de gardes du corps mutants qui empêchent les clients potentiels de sortir de son échoppe avant d’avoir acheté un petit quelque chose lui ayant permis de vivre confortablement depuis la regrettable mise à sac de son précédent commerce. Lorsqu’un mercenaire ayant connu de meilleurs jours pousse la porte de sa boutique à la recherche d’une arme magique qui lui permettrait de se tailler un chemin sanglant dans la hiérarchie des condottiere tiléens, Alfredo se fait une joie de proposer à sa nouvelle victime connaissance d’acquérir la légendaire épée du Seigneur Mobach, une lame enchantée qu’il vient justement d’intégrer à sa collection…

AVIS :

À la question, des plus légitimes ici, de savoir combien de pages sont nécessaires à l’écriture d’une nouvelle à twist (la catégorie reine du genre) se déroulant dans l’une des franchises de la Black Library, Brian Maycock répond posément « 5 », et délivre une véritable masterclass de construction narrative avec A Fool’s Bargain. Ne négligeant aucun aspect de sa prose, qu’il s’agisse de l’instillation d’une atmosphère distinctive ou le développement du caractère de ses personnages, Maycock agence avec talent les multiples éléments nécessaires au récit d’une histoire digne de ce nom, pour un résultat simplement satisfaisant. Cela peut paraître peu, mais, je vous l’assure, c’est une des plus hautes distinctions que je puisse accorder à une nouvelle.

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The Deep – R. Davidson [WFB] – #25 :

INTRIGUE :

WFB_The DeepAlors qu’ils venaient de quitter le port de Luccini à bord d’un sous-marin de leur conception afin d’explorer les légendaires ruines de Thantis Tor, Hundri et ses compagnons de la Guilde des Ingénieurs sont envoyés par le fond à la suite de l’explosion de la chaudière du submersible. Échoué par grand fond à proximité d’une fosse océanique et à moitié enseveli par les rochers qui ont freiné sa chute, le vaisseau des Dawi est en piteux état, mais pourrait tout de même les ramener à la surface s’il est convenablement dégagé et réparé. Alors que les survivants s’activent pour se tirer de ce mauvais pas et qu’une ambiance délétère s’installe dans l’équipage1, les disparitions suspectes et les incidents malheureux s’enchaînent à un rythme inquiétant. Hundri en est convaincu, un saboteur est présent à bord, mais qui est-il, et quels objectifs poursuit-il ? Se pourrait-il vraiment que les mystérieux gardiens de Thantis Tor soient responsables des déboires de l’équipage du Beardy McBeardface ?

1 : Davidson propose une version grimdark des 7 Nains (on ne sait pas qui est Blanche-Neige par contre), avec un casting du tonnerre : Hundri, Cramé, Noyé, Suicidé, Tabassé, Fou à Lier et… Thon. Oui, Thon. Pour un sous-marinier, avouez qu’il a le nom de l’emploi. 

AVIS :

Un thriller mâtiné d’horreur se déroulant dans l’environnement claustrophobique à souhait d’un sous-marin nain échoué au fond de l’océan à proximité d’un temple englouti ? Relisez cette phrase lentement et essayez de trouver un seul élément qui ne soit pas super cool. Franchement, les contributeurs de la BL savaient pitcher des idées géniales à l’époque, et on ne peut que s’interroger sur le choix de cette dernière de ne pas inclure The Deep dans un des nombreux recueils ou anthologies de nouvelles publiés au fil des ans, où il aurait eu tout à fait sa place. En plus de proposer au lecteur une plongée (wink wink) des plus originales dans le background, voire carrément l’underground de WFB, Davidson tient le lecteur en haleine en mettant en scène avec brio la descente aux enfers des passagers du sous-marin, alors que la suspicion, la dépression et l’aliénation s’abattent sur eux au fur et à mesure que leur nombre décroît. Thantis Tor et ses mystérieux gardiens ajoutent une couche de surnaturel très bienvenue aux tribulations désespérées de l’équipage du sous-marin, dans une adaptation libre et réussie des 10 Petits Nègres (ou peut-être devrait-on parler des 7 Petits Nains ?) à la sauce Abyss. Seule la conclusion de l’histoire laisse un peu à désirer, les motivations du coupable n’étant jamais vraiment explicitées, ni suggérées. Il serait toutefois dommage de bouder son plaisir devant cette authentique pépite du corpus de la Black Library, une de celles qui vous motive à persévérer dans cette occupation, qui peut se révéler assez frustrante à la longue. Seven little dwarves playing hide-and-seek. One was never found and then there were…

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The Winter Wind – B. Craig [WFB] – #26 :

INTRIGUE :

WFB_The Winter WindLe petit village de Sezrach, blotti haut dans les hauteurs des Monts du Milieu, est la proie d’un prédateur aussi mystérieux que persistant, venant enlever les enfants de la communauté au plus fort de l’hiver et les emportant au cœur d’un glacier voisin, où ses traces s’arrêtent brutalement. Jeune maire dynamique de Szerach ayant pris la relève de son père, qui, comme ses aïeux avant lui, prenait ces rapts récurrents avec un fatalisme paysan, Heinz von Aist décide de mettre fin à ce fléau quoi qu’il en coûte, pour améliorer la qualité de vie de ses chers administrés. Voyageant jusqu’à la ville de Leiswitz pour rencontrer l’érudit controversé Eric Zemmour Dietmar Fichte, il se fait prescrire des verres correctifs (le gonze est opticien arcanique, c’est très pointu comme spécialité) d’un genre un peu particulier, qui lui permettront de pister le démon des glaces (car c’est bien de cela qu’il s’agit) jusqu’à son repaire souterrain, là où ses seuls yeux se révéleraient insuffisants pour la tâche. Fichte prévient toutefois son visiteur que ces lunettes lui révéleront bien plus que sa proie et ses empreintes, et qu’il pourra s’avérer difficile de les retirer une fois mises.

Il faut toutefois bien plus que la menace de marques de bronzage disgracieuses pour décourager notre héros de mener à bien sa mission, et von Aist réussit, après quelques tentatives peu concluantes, à façonner ces fameux culs de bouteilles selon les caractéristiques fournies par Fichte, en utilisant de la glace extraite du glacier voisin. Grand bien lui en fait, car, peu de temps après, c’est la jeune Gretchen qui disparaît de son lit douillet, forçant notre justicier appareillé à l’action. Emmenant les hommes du village jusqu’à l’entrée du fameux glacier démoniaque, il s’aventure seul dans la galerie des glaces, n’emportant avec lui que son épée et sa lanterne. Sur le chemin vers sa destination finale, ses lunettes 5D (il faut au moins ça pour voir le Warp) lui révèlent tout un paquet de scènes plus ou moins dérangeantes, depuis le classique reflet multiplié à l’infini *2 de lui-même (avec murmures plus défaitistes que maléfiques en option) jusqu’aux armées de thérianthropes courant de droite et de gauche, en passant par des bancs de Channichthyidae peu amènes, et même la 782ème rediffusion de Sur la Terre des Dinosaures (avec la voix off de Zavant Konniger à la place de notre André Dussolier national).

Concentré sur son objectif, Heinz trace cependant sa route et finit par parvenir dans le duplex du rôdeur des glaces, où il trouve Gretchen allongée sur la table du salon en état d’hypothermie sévère. Sommant son ennemi de venir voir de quel bois il se chauffe, notre traqueur a la surprise de voir émerger des ténèbres son jumeau de glace, qui ne se fait pas prier pour engager le combat. Problème pour von Aist, la ressemblance avec son assaillant n’est que superficielle, et ce dernier a apparemment suivi des cours du soir en escrime médiévale sur son temps libre. Résultat des courses, le brave édile de Szerach se trouve rapidement en mauvaise posture, et il a beau rappeler à son assaillant qu’on ne frappe pas les gens à lunettes, ce dernier n’en continue pas moins à molester son visiteur. Une idée bizarre mais efficace traverse cependant l’esprit du héros avant que le pseudo Marcheur Blanc ne l’embroche sur son épée stalactite (ou peut-être stalagmite) : acceptant de se faire désarmer suite à une parade mal négociée à dessein, von Aist met à profit les deux secondes d’incompréhension de son adversaire pour asperger ce dernier d’huile et lui mettre le feu à l’aide de sa lanterne, ce qui a raison du Roi de la Nuit (regrets éternels, Michou).

Le reste n’est qu’une formalité pour Heinz, qui repart au petit trot avec Gretchen sur l’épaule et parvient à retrouver le chemin de la sortie sans trop de difficulté, tout comme il n’a aucun mal à enlever ses lunettes de vue en chemin, malgré les avertissements de Fichte. Célébré comme le héros qu’il est par son village, Heinz von Aist vivra encore de longues années (au moins 5 ans, ce qui est vieux pour le Hochland), traînant avec lui la malédiction du démon qu’il a vaincu, aussi mineure que ce dernier au final : pour le reste de ses jours, il aura très froid aux mains l’hiver. Dur. Plus insidieuse est l’expérience d’une fatalité profonde quant au caractère éphémère de la civilisation que le maire de Szerach développe en sus de ce menu problème. C’était sans doute ça que Fichte voulait dire quand il parlait de lunettes difficiles à enlever… J’ai toujours été nul en prophétie.

AVIS :

Auteur accompli au style reconnaissable entre cent contributeurs de la Black Library, Craig est un incontournable pour qui s’intéresse à la fiction produite par Games Workshop, et, même si son approche détonne largement des canons de la maison d’édition de Nottingham (déjà à l’époque et encore plus aujourd’hui), tout lecteur devrait donner sa chance à la prose de Mr Stableford, et partir à la (re)découverte du monde de Warhammer avec lui comme guide. À la clé, une vision un peu différente du grimdark généralisé qui teinte, voire imbibe, la plupart des publications de la BL, et que j’aurais bien du mal à décrire, sans parler de lui rendre justice, en quelques mots. Pour vous donner malgré tout une idée, je dirais que c’est à la fois différent de, et littérairement supérieur à, l’écrasante majorité des soumissions BL.

Ce Wind of Winter ne fait pas exception, le récit de la quête quasi initiatique de Heinz von Aist dans les glaces éternelles des Monts du Milieu donnant l’occasion à Craig de peindre le Chaos et la menace qu’il représente d’une façon bien particulière, mais loin d’être déplacée. La métaphore des lunettes de glace, qui peut sembler étrange de prime abord, fait passer son message d’une façon visuelle et poétique, et on ne peut douter à la lecture des descriptions hallucinées qui hantent le héros sur le chemin de sa destinée que l’auteur a bien assimilé ce concept fondamental des univers de Games Workshop. Le combat du héros contre sa Némésis peut certes sembler un peu ampoulé dans sa mise en scène (et à raison, le hack & slash n’étant pas du goût de Craig en règle générale), et le rythme de narration, bien long et « mou » pour les habitués de l’action frénétique qui caractérise généralement les œuvres de la BL, mais on aurait à mon avis tort de rejeter d’un bloc le corpus proprement « exotique » rédigé par Brian Craig dans les âges reculés où il prenait les commissions de vendeurs de figurines en métal blanc. Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans…

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Firestarter – J. Green [NDA] – #26 :

INTRIGUE :

NDA_FirestarterNecromunda. Quelque part dans le sous-monde, le redouté Antrobus Vecht voit ses plans de promotion sociale1 contrariés par le capotage complet d’une opération qu’il préparait depuis des mois. Cherchant à se venger des responsables de ce fiasco, il charge son larbin (Gravalax Mune) de faire parler le chef du gang Delaque (Sisken) qui a tuyauté ses ennemis sur le lieu et la date de la livraison, condition sine qua non à toute représaille envers ces derniers. Anticipant le manque de coopération de Sisken, Mune engage deux « libéraux » pour le seconder sur ce coup : le chasseur de primes Nathan Creed est chargé de ramener le Delaque, de gré ou de force, et le docteur Haze de pratiquer une opération chirurgicale afin de soutirer au ganger l’identité de son client. Vous suivez? Très bien, nous allons pouvoir entrer dans le vif du sujet.

Haze, qui n’a pas trop le choix, accepte de collaborer avec Mune, sans savoir que son futur patient n’est autre que Sisken, qui l’a rencardé au sujet de la venue de l’ork de Vecht. C’est en effet le doc qui est responsable de l’échec des plans du parrain du crime et qui a prévenu les autorités de l’arrivée du colis spécial de Vecht2. Lorsque Creed arrive avec Sisken, Haze réalise qu’il est dans de très sales draps, et n’est sauvé que par l’attaque du reste du gang Delaque sur le QG de Mune, ce qui lui donne l’occasion de saboter les résultats de l’opération d’extraction de souvenirs de Sisken, sans que son employeur ne s’en rende compte. Simple, non ?

Manque de pot pour les associés du bon docteur, les Delaque ont également fait appel à un spécialiste pour les épauler dans la libération de leur leader, à présent plus qu’à moitié lobotomisé. Il s’agit d’un psyker mercenaire répondant au nom d’Ignus Mander, dont le pouvoir consiste à envoyer des boules de feu sur les gens dont la tête ne lui revient pas. Mander est un ancien patient de Haze, dont les infructueuses tentatives de lui retirer une balle du cerveau ont eu la conséquence inattendue de développer le potentiel psychique, jusque-là inactif, de Mander, au prix d’une souffrance permanente pour ce dernier. C’est donc animé des pires intentions que le psyker pyromane fait irruption dans la salle d’opération installée par Mune (qui se fait la malle par une issue secrète avec une fiole remplie de ce qu’il croit être le liquide cérébral de Sisken), bien décidé qu’il est à faire payer Haze pour sa condition actuelle. Toujours là ? Ok, on continue.

Mander ayant empêché Creed et Haze de s’échapper en même temps que Mune d’une boule de feu bien placée, les deux compères sont forcés de s’enfuir à travers les niveaux inférieurs de la ruche, poursuivis par le psyker incendiaire. Après quelques péripéties diverses, le prévisible face à face final entre les deux camps a lieu, et Creed règle son compte à Mander grâce à une feinte indigne même de la pire bisserie d’action. Merci Jonathan. De son côté, Mune va faire son rapport à Vecht, qui injecte le contenu de la fiole ramenée par son séide dans le cerveau de ce dernier. Au final, Mune avoue à son patron que c’est lui qui a mis les Arbites sur le coup3, et tout le monde est content (sauf Mune bien sûr). Fin.

1 : Vecht voulait offrir un Ork au zoo privé du gouverneur Helmawr afin de mettre un pied dans la haute société de Necromunda. C’est sûr que c’est plus original qu’une boîte de chocolats.
: Haze voulait étudier le spécimen importé par Vecht afin de mieux comprendre le fonctionnement des capacités régénératrices supérieures de cette race xenos, et pouvoir ainsi mieux se vendre auprès des gangs locaux.
: Je ne comprends toujours pas comment Green a pu arriver à une telle conclusion, qui va à l’encontre des éléments exposés plus tôt. Et c’est la troisième fois que je relis Firestarter.

AVIS :

Je ne m’attendais pas à ce que Green (dont le patronyme a été changé à Jonathon pour l’occasion), qui ne s’était jusqu’ici pas vraiment illustré par la complexité de ses scénarii, donne à Firestarter une intrigue aussi sinueuse. Dans un sens, il s’agit d’une plaisante surprise, démontrant que même un auteur que je croyais incapable de livrer autre chose que des nouvelles d’une morne et fade simplicité peut accoucher de projets plus ambitieux. Cependant, n’est pas Nathan Long qui veut, et le texte de Green présente au final trop d’incohérences pour susciter autre chose qu’un froncement de sourcils perplexe de la part du lecteur.

Outre le fait que la « confession » finale de Mune n’est étayée par aucun élément concret, j’ai par exemple du mal à comprendre pourquoi Sisken n’a pas balancé à Mune que le responsable du fiasco de l’opération de Vecht était Haze, au lieu de se laisser sagement ponctionner par ce dernier, ni pourquoi le même Haze a décidé de changer d’air immédiatement après avoir opéré Mander, alors qu’il ne savait pas que ce dernier avait développé des pouvoirs psychiques ainsi qu’une migraine persistante à la suite de ses bons soins. Bref, il y a de sacrés trous dans ta raquette, Jon.

D’autre part, je n’ai pas de grande affinité avec le personnage de Nathan Creed, qui de l’aveu même de son créateur, n’est rien d’autre qu’une transposition du « cool badass shooter » dans l’univers de Necromunda1. Stéréotype sans saveur ni épaisseur, Creed n’arrive pas à la cheville du Brunner de CL Werner, et se fait facilement voler la vedette par Mander, qui n’est pourtant pas vraiment original non plus.

Firestarter est donc au final une Greenerie des plus classiques, avec toutes les conséquences habituelles de cette appellation pas vraiment flatteuse pour la nouvelle qui en est affublée. À oublier, comme son héros.

1: Pour les anglophones, Green retrace la genèse et le parcours de Nathan Creed sur son site personnelOutre les jolis dessins illustrant l’article, et établissant de façon irréfutable le total manque de profondeur du personnage (Lee Van Cleef avec des sceaux de pureté et des crânes, my gosh), le principal intérêt de cette chronique fut d’apprendre que les éditeurs de la BL ont refusé plusieurs drafts soumis par Green pour de nouveaux épisodes, n’ont republié que deux des cinq nouvelles mettant Creed en vedette, et ont carrément refusé que le personnage apparaisse dans les textes d’ambiance du livre de règles de la seconde édition de Necromunda. De la part d’une maison d’éditions qui a publié sans sourciller des bouquins du calibre de Forged in Battle et Curse of the Necrarch, c’est une rebuffade qui en dit long sur la qualité du travail de Jonathan Green.

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The Small Ones – C. L. Werner [WFB] – #26 :

INTRIGUE :

WFB_The Small OnesLa vie paisible du village de Marburg, perdu au milieu du Stirland profond (aussi appelé Stirland), est bouleversée par l’arrivée impromptue d’un Sorcier du Chaos mal en point (Thyssen Krotzigk), en fuite après que sa congrégation ait été passée par l’épée par la Garde Noire de Morr du Capitaine Ernst Ditmarr. Prêtre de Morr à l’esprit mal tourné, Thyssen avait profité de sa nomination dans une paroisse reculée pour se vouer à l’étude et à la vénération des Dieux du Chaos avec une totale impunité, jusqu’à ce que le rectorat lui envoie un inspecteur (auquel il arriva un regrettable accident), puis un bataillon de Templiers. La bataille qui fit rage entre cultistes et gothiques se solda par la victoire de ces derniers, mais Thyssen parvint malgré tout à s’enfuir (en clopinant, du fait d’une jambe cassée), laissant Ditmarr avec une manche vide (le feu, ça brûle) et un désir de vengeance inextinguible.

Les Fab Four faisant bien les choses, Thyssen est découvert par une bande d’enfants du coin alors qu’ils jouaient dans la forêt. Ayant tiré le don « sosie d’Alf, mais en grimdark » sur le tableau de l’Œil des Dieux (comprendre qu’il ressemble au fruit des relations incestueuses entre un Gamorréen et un Ewok), le petit Sorcier se fait instantanément adopter par Keren, fille du meunier de Marburg, fan de furries et forme non évoluée de Karen, qui convainc tout aussi rapidement ses camarades (Paul, Therese et Kurt) de cacher celui qu’elle considère comme un prince victime d’une malédiction dans le moulin abandonné du rival de son père (auquel il arriva un regrettable accident, bis). C’est le jackpot pour Thyssen, qui peut se rétablir tranquillement et confortablement grâce aux victuailles que les enfants de Marburg prélèvent dans le garde-manger familial pour son bénéfice, tout en commençant à corrompre son jeune public grâce aux contes séditieux sur Sigmar et les Quatre Princes dont il les abreuve. Après tout, c’est vrai qu’il ressemble beaucoup à Père Castor.

La situation de Thyssen est toutefois précaire, les Marburgeois ne restant pas les bras croisés devant la disparition d’un nombre croissant de leurs rejetons, qui préfèrent squatter dans le moulin de leur copain porcin plutôt que de trimer sang et eau pour leurs vieux (on les comprend). Ils commencent par engager un pisteur pour remonter la trace des disparus… auquel il arrive un regrettable accident, ter. Un peu plus tard, Thyssen mène une vendetta contre le vieux prêtre de Sigmar Hackl, proche de convaincre le conseil municipal de mettre des Répurgateurs sur le coup. Bien que le combat reste longtemps indécis entre le vieillard chétif et l’avorton boiteux (un match d’une violence insoutenable, retransmis à travers les Royaumes du Chaos), Thyssen finit par avoir raison du sigmarite, et met en scène son cadavre pour que, vous l’avez deviné, cela ait l’air d’un regrettable accident. Je ne sais pas si le concept de l’assurance-vie existait dans l’Empire avant la Fin des Temps, mais si c’est le cas, l’activité devait être implantée dans le Stirland.

C’est le moment que choisissent Ditmarr et sa gueule de porte-bonheur pour arriver à Marburg. Toujours sur la piste de sa Némésis poilue, le Garde de Morr disgracié (il s’est fait virer par l’ordre pour abandon de poste) n’est pas contre donner un coup de la seule main qu’il lui reste aux bouseux du coin dans leur problème de fugues infantiles. De son côté, Thyssen considère la venue fortuite de son persécuteur comme un nouveau cadeau des Dieux Noirs, et envoie donc l’un de ses enfants perdus attirer le Templier jusqu’à son QG, pendant qu’il réfléchit à la mise en scène d’un nouvel accident regrettable. Cependant, le messager en culottes courtes sous-estime la méfiance du Garde Noir, qui comprend rapidement que quelque chose ne tourne pas rond dans l’histoire qu’on lui sert, et ne se rend pas seul sur les lieux, comme il aurait dû le faire. En effet, il ordonne aux placides Marburgeois de mettre le feu au moulin au moindre bruit suspect, et, bien qu’ils aient conscience que la plupart de leurs rejetons soient présents dans l’édifice, ils suivent à la lettre les consignes de Ditmarr après que ce dernier se soit fait submerger par ses petits adversaires. Encore une arnaque à l’assurance, ça.

Dans le chaos qui s’ensuit, le Templier ne parvient qu’à crever un œil à Thyssen avant que ce dernier ne prenne à nouveau la poudre d’escampette, laissant ses cultistes puérils faire le coup de feu. L’un d’eux se fait d’ailleurs brièvement posséder par un Buveur de Sang (c’est les hormones) alors qu’il était sur le point de sacrifier Ditmarr pour la plus grande gloire de Khorne, et bastonne le Garde Noir comme plâtre pendant les trente secondes que durent son feat. Bien que le coriace chevalier parvienne à se sortir du brasier après cette tannée surprise, il décède de ses blessures le lendemain, après que les villageois lui aient fait croire que le corps de Thyssen avait été retrouvé dans les décombres du moulin…

Début spoiler…Alors qu’en fait, le Sorcier de poche était déjà loin de Marburg, mais pas dans une situation idéale. La nouvelle se termine en effet sur sa rencontre avec une bande de Gors qui semblent plus emballés par une dégustation de saucisson que par l’accueil d’un nouveau mutant. On ne peut pas leur en vouloir cela dit : le Pumbagor ne faisait pas encore partie du bestiaire des Bêtes du Chaos au moment où cette nouvelle a été écrite…Fin spoiler

AVIS :

Si on ne compte plus les nouvelles de GW-Fiction où des guerriers surhumains s’affrontent pour faire triompher leurs idéaux, celles mettant en scène leurs exacts opposés sont en revanche beaucoup plus rares. On peut donc remercier C. L. Werner d’avoir livré sa version de ‘Sa Majesté des Mouches1 pour Warhammer Fantasy Battle avec ce ‘The Little Ones’, sorte de huis-clos psychologique où le potentiel malaisant d’une bande d’enfants manipulés par un être maléfique est exploité de bien belle façon. Je mets aussi au crédit de l’auteur un séquençage impeccable du récit, qui alterne entre Thyssen, ses petits protégés, et Ditmarr, ainsi que les contes de Sigmar et des Quatre Princes, sorte d’histoire dans l’histoire qui aurait mérité d’être racontée dans une nouvelle séparée. Seul petit bémol : une conclusion un peu bâclée, qui ne donne pas d’indication sur le sort des enfants de Marburg (si Ditmarr a réussi à s’échapper du moulin après avoir boxé deux rounds contre un Sanguinaire, la marmaille chaotique a de bonnes chances de s’en être tirée) et laisse le destin de Thyssen en suspens. On reste cependant en présence d’une très bonne soumission de la part de Werner, dont l’originalité se doit d’être reconnue.

1 : Une comparaison d’autant plus apte que le grand méchant de l’histoire a/est dans les deux cas une tête de cochon.

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Chains of Command – G. McNeill [40K] – #26 :

INTRIGUE :

Chains of CommandEngagé dans la campagne de pacification de Thracia avec un contingent d’Ultramarines placé sous le commandement du Capitaine Idaeus, le Sergent Uriel Ventris a été chargé de mener l’assaut sur le pont 2-4, tenu par les rebelles ayant eu l’audace de se soulever contre le bienveillant Empereur, et qu’il convient de faire sauter pour éviter que la contre-attaque de la Garde Impériale en direction de la capitale planétaire ne soit prise de flanc. Après quelques paragraphes de « mes sens sont vraiment trop développés lolilol » #ImTheBest #YouCantWriteAstartesWithoutStar, qui expliquent en grande partie pourquoi personne n’aime les Ultramarines, Ventris accomplit sa mission, déclenchant un assaut en règle de ses petits copains bleu pervenche et vert sapin sur la position adverse. Désespérément surclassés, les défenseurs se font hacher menu, et les meilleurs de l’Empereur s’organisent pour tenir le pont assez longtemps pour permettre au vénérable Techmarine Tomasin de placer les explosifs qui permettront de faire écrouler l’ouvrage d’art dans la gorge en contrebas.

Nous faisons la connaissance du Capitaine Idaeus, un officier vétéran et proche de ses hommes, connu pour son approche distanciée du saint Codex Astartes, ce qui n’en finit pas de sidérer le rigoriste Ventris. Ce même Idaeus a d’ailleurs fait montre de ses tendances libertaires en menant la charge contre un nid de bolters lourds, au lieu d’attendre le soutien du reste de ses hommes, comme ce planqué de Guilliman l’avait pourtant préconisé dans ses écrits. Depuis cinquante ans qu’ils combattent ensemble, Idaeus n’a pas réussi à convaincre son bras droit de l’avantage de s’écarter de temps en temps du manuel d’utilisation de la guerre écrit par le Primarque, et ce n’est pas aujourd’hui que ça va ch… Ah, on me dit dans l’oreillette que c’est précisément l’objet de cette nouvelle. Bigre.

Comme tous les vétérans dignes de leurs médailles, Idaeus fait confiance à son instinct, et ce dernier lui hurle (il est un peu sourd) que quelque chose en tourne pas rond, malgré le fait que la mission se déroule jusqu’ici parfaitement comme prévu. Ce malaise le conduit à mener une mission d’inspection de l’autre côté du pont, Ventris à ses côtés, pour juger du boulot effectué par les Scouts déployés par les Ultramarines en territoire ennemi. Et, évidemment, il s’avère qu’une importante colonne blindée progressait discrètement (c’est possible si on met des patins sur les chenilles) en direction du pont, ce qui va devoir forcer le vénérable Tomasin à se bouger les vénérables miches, ce qui n’est pas facile quand on est plus refait qu’un Iron Hands en fin de carrière (souvenir d’une rencontre torride avec un Carnifex entreprenant sur Ichar IV). Tout aussi évidemment, rien ne se passe comme prévu à partir de ce moment, les Scouts, le Thunderhawk qui devait évacuer les Ultramarines, et le vénérable Tomasin tombant tous sous le feu de l’ennemi, ce qui force Idaeus et ses compagnons à monter une défense désespérée du pont, le temps que 1) un autre transport arrive, et 2) quelqu’un trouve une idée brillante pour faire péter la passerelle, ce qui reste tout de même l’objet principal de la mission de nos marsouins énergétiques.

Je vous passe les longues scènes de baston dont nous gratifie McNeill, et qui permettent à Ventris de montrer qu’il en a dans le slibard, pour aller directement au moment où notre futur héros réalise qu’il suffit de déclencher une charge de démolition à proximité des explosifs posés par l’irrécupérable Tomasin pour déclencher une réaction en chaîne qui devrait provoquer les résultats escomptés. Petit problème, l’escouade de Space Marines d’Assaut envoyés réaliser cette mission se fait pincer en chemin par les Night Lords qui coordonnent la rébellion chaotique, et les incapables finissent crucifiés sur le pare chocs des Rhinos des fils de Curze pour leur apprendre la vie. Devant ce spectacle insoutenable, Idaeus et Ventris sont très colère, et cette rage leur permet de repousser l’assaut des renégats au prix de lourdes pertes. Alors que le deuxième Thunderhawk approche de la position intenable des Ultramarines, l’heure des choix arrive pour la bleusaille…

Début spoiler…Le noble Idaeus décide de partir faire exploser le pont à la mano, malgré ses chances de réussite quasi nulles, et ordonne à Ventris de mener les quatre rescapés de cette folle nuit, ainsi que son épée énergétique de maître, jusqu’au point d’extraction. Les cœurs gros, le Sergent s’exécute, et est témoin de l’héroïque sacrifice de son mentor dans les poutrelles et les travées du pont 2-4, la bande de Raptors laissée en garnison par les Night Lords ne parvenant pas à lui régler son compte avant que le Capitaine fasse feu avec un pistolet plasma dérobé à l’ennemi sur une charge de démolition laissée négligemment sur place1. C’est donc une victoire indéniable pour l’Imperium, et le début de la saga d’Uriel Ventris, qui héritera du commandement de la 4ème Compagnie à la suite de la campagne de Thracia.Fin spoiler

1 : On pourrait aussi se demander pourquoi les Night Lords n’ont pas détaché les explosifs laissés par le vénérable Tomasin sur les piliers du pont quand ils en avaient l’occasion. Encore une preuve que l’abus de Chaos est mauvais pour le cerveau.

AVIS :

Si l’idée de lire une nouvelle d’action dont le héros est un Ultramarines peut sembler intrinsèquement barbante à un lecteur de 2020, qui a sans doute pu pratiquer l’exercice à de nombreuses reprises grâce/à cause de l’obsession de la Black Library pour ce genre de productions, il faut être juste avec Graham McNeill et Uriel Ventris, et rappeler que ‘Chains of Command’ a été à sa sortie (2001) une des premières et plus abouties Space Marinades (saveur vanille) qui soient. Les innombrables ersatz et proxys publiés depuis ne l’ont pas aidé à bien vieillir, ni le style de l’auteur, ni les personnages mis en scènes, ni l’intrigue exposée n’étant particulièrement dignes d’éloges, mais le résultat n’est pas indigne pour autant. À l’époque où il est attendu d’un héros Space Marines un peu plus qu’un grade de Capitaine et une vague tendance à se poser des questions existentielles (ce qui était suffisant il y a 15-20 ans), je laisse le soin au lecteur de décider si une figure comme Uriel Ventris est toujours pertinente, ou bien s’il est temps d’accorder une retraite bien méritée à l’aïeul de tous les héros d’action énergétique de la Black Library.

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Missing in Action – D. Abnett [40K] – #27 :

INTRIGUE :

40K_Missing in ActionÀ peu près remis de son aventureuse traque du Necroteuch (‘Xenos’), au cours de laquelle il a débloqué le skin exclusif Buster Keaton, Gregor Eisenhorn a été remis en service actif par les Saints Ordos, qui lui ont donné une mission bidon sur Sameter pour lui remettre le pied à l’étrier en douceur. Comme quoi, on peut ordonner des Exterminatus sans sourciller et gérer ses subalternes avec une profonde humanité. L’affaire n’ayant rien donné, les enquêteurs s’apprêtent à plier bagage lorsqu’un ministre du gouverneur sollicite une audience pour avoir l’avis d’un expert reconnu sur une série de meurtres qui ont tout l’air d’être l’œuvre d’un culte chaotique. Les quatre victimes identifiées à ce jour ont en effet toutes eu les mains, les yeux et la langue enlevés (voire plus si affinités). Flairant un défi digne de ses talents, Greg’ accepte de reprendre le dossier, et commence sa petite enquête de voisinage en compagnie de ses associés (la Paria fashion victim Bequin, l’ex-Arbites Fischig, le pilote Betancore et le Savant Aemos).

Les interrogatoires des voisins, l’examen des cadavres des victimes et d’un suspect trop lent, les informations déterrées par Aemos et le flair éprouvé d’Eisenhorn ne mettent que quelques heures/pages à identifier une piste prometteuse, qui mène nos héros sur les traces d’un régiment de Sameter ayant combattu sur Surealis il y a une vingtaine d’années. Marqués autant par les horreurs du Chaos que par les rayons UV des soleils de ce système, les vétérans qui ont regagné leurs pénates lorsque le régiment a été débandé auraient basculé dans la psychose et se seraient mis à fliquer en douce leurs compatriotes, en faisant disparaître les individus suspectés d’hérésie. C’est l’hypothèse qui reçoit les faveurs grimaçantes d’Eisenhorn en tout cas, et qui le mène jusqu’au lieu de conscription du régiment en question, laissé depuis longtemps à l’abandon…

Début spoiler…Et où une trentaine de vétérans, se sachant traqués à titre préventif par les Arbites locaux après que l’Inquisiteur se soit ouvert de ses soupçons, se sont regroupés pour se rappeler le bon vieux temps. Le petit cœur sensible de Greg saigne devant le spectacle des délaissés de Sameter, abandonnés comme des vieilles chaussettes par l’Imperium à la fin de leur service, sans même une réserve de biaffine suffisante pour traiter leur peau carbonisée. Beau joueur, notre héros décide donc de raisonner ces brebis égarées et trop bronzées, mais fait un jet critique sur son jet de persuasion et l’affaire tourne rapidement au méchoui. Trop coriace pour être mis en difficulté par une bande de mobs de bas étage, Eisenhorn perd tout de même sa main gauche dans la bagarre, victime d’un tir de sniper à gros doigts malhabiles. L’affaire est toutefois résolue, et l’Inquisiteur peut retourner sur Gudrun avec la satisfaction du devoir accompli, et un sale goût de grimdark au fond du gosier.Fin spoiler

AVIS :

Petit interlude inquisitorial comme Abnett en a signé quelques uns au cours de l’écriture des trilogies ‘Eisenhorn’ et ‘Ravenor’, ‘Missing In Action’ voit Greg le missionnaire mener une enquête en deux temps trois mouvements en compagnie d’une bonne partie de sa clique (il manque Harlon Nayl et Kara Swolle, sans compter la barquette Ravenor), dans une ambiance empruntant plus au film noir qu’à la SF « spectaculaire » (pouvoirs psychiques et Xenos en folie). C’est simple, on pourrait assez facilement adapter cette histoire à notre époque, pour en faire un récit policier tel que Grange, Vargas ou Cohen pourraient en écrire. Tout cela est plus sympathique qu’essentiel, et permet de constater, si besoin était, que Dan Abnett est un auteur plus accompli que la plupart des auteurs de la BL, et est tout à fait capable de signer une nouvelle à la fois sans prétention et de très bon standing. À savourer sans modération pour les lecteurs familiers de la série, et à découvrir sans réserve par ceux qui ne le sont pas (encore).

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The Nagenhof Bell – J. Green [WFB] – #27 :

INTRIGUE :

WFB_The Nagenhof BellNotre histoire commence avec un paragraphe descriptif expliquant en quelques lignes aussi imagées qu’un mur de classe maternelle1 que, par une nuit sombre et sinistre, frappée par un temps sombre sinistre, et digne du sombre et sinistre dieu de la mort (qui est sombre et sinistre) Morr, un bâtiment sombre et sinistre – le temple de Morr de Nagenhof – est sur le point d’être témoins d’évènements… sinistres et sombres. Ha ! Vous ne l’avez pas vu venir, celui là ! Et, de fait, un trio de ruffians est surpris par le lecteur déjà un petit peu blasé par les effets stylistiques sombres et sinistres de Jonathan Green, très à l’aise dans son rôle de MJ pour CE2, en train de hisser une cloche en haut du beffroi du temple. Le groupe est mené par la figure contrefaite mais très musclée du bossu Otto, recueilli à sa naissance par le prêtre local, Ludwik, après que sa bohémienne de mère soit venue mourir en couches dans son presbytère. En même temps, what did you expect d’un temple de Morr ? Moi je dis que ce n’est pas du tout un fail, à l’inverse de la tentative de Green de pomper discrètement des idées dans des classiques de la littérature. Mais revenons-en à nos bourdons. Otto et ses comparses sont parvenus à installer la nouvelle cloche, qui luit d’un éclat verdâtre peu engageant, à la place de l’ancienne, et le bossu a tôt fait de se débarrasser de ses complices désormais inutiles, dont il empile les cadavres dans la crypte de son lieu de travail. Voilà qui termine le prélude de notre histoire, qui sera, comme vous l’avez compris, sombre et sinistre.

Trois jours plus tard, la bande de mercenaires du charismatique (c’est lui qui le pense en tout cas) Torben Badenov est à pied d’œuvre dans la taverne de la Main de Gloire de Nagenhof, tenue par un de leurs anciens frères d’armes, le manchot Dietrich Hassner. Rangé des voitures depuis dix ans, date à laquelle il a perdu la main, Dietrich se voit malgré tout proposer par Badenov de reprendre du service pour aller faire les quatre cents coups dans le Vieux Monde, comme à la bonne époque. Autour de lui, ses compagnons se pintent généreusement à la bière, et il me faut vous les présenter sans plus attendre, par ordre de participation active à la suite de la nouvelle. Commençons par le nobliau maussade mais futé Pieter Valburg, recruté dans la bande à la suite des événements relatés dans Heart of Darkness, qui l’ont vu venger la perte de sa fiancée. Nous avons ensuite le Kislévite à tête de fouine Oran Scarfen, le jeune et incertain Stanislav Hagar, et le colossal trappeur Yuri Gorsk (qui ne servira à rien, vous pouvez donc l’oublier). Ces plaisantes retrouvailles sont toutefois interrompues par un angélus d’un genre un peu particulier, à la fois lancé à l’heure indue de 9h53, et sonné par une cloche à la sonorité…euh…clivante. Sortis hors de la taverne pour s’enquérir de la source de ce raffut, les ivrognes décident, l’alcool aidant, d’aller jeter un œil dans le temple de Morr d’où provient ce vacarme.

Dans le temple en question, Otto vient d’avoir une petite discussion avec son père et Père, Ludwik, tout juste rentré d’une veille mortuaire dans l’arrière-pays. Le vieil homme était sur le point de filer une trempe de tous les diables à son fils adoptif pour avoir oublié ses corvées de taillage des cierges, balayage des feuilles et exterminage des rats, qui semblent avoir pullulé en son absence, lorsque le lancement du carillon funeste l’a averti d’un problème bien plus pressant. Un rapide coup d’œil à la crypte, grouillante de vermine et contenant deux cadavres bien mâchonnés par cette dernière, lui a en effet permis de constater que la cloche que les habitants de la ville avaient conservé comme souvenir de leur victoire contre les Skavens il y a dix ans, avait disparu. Pas plus bête que le lecteur de la BL moyen, Ludwik a compris que c’est elle qui sonne désormais, et que c’est son infernal bedeau qui tire sur la corde, dans tous les sens du terme. L’explication de texte entre les deux hommes ne s’est toutefois pas passée aussi bien que le prêtre l’avait espéré, le bossu ayant finalement compris que l’ecclésiastique était son vrai père (qui avait abusé de sa mère), et réglé son complexe d’Œdipe de façon littérale en balançant Ludwik du haut du beffroi, dans un remake essoufflé (le contraire d’inspiré) de Notre Dame de Paris. Car Otto a décidé qu’il était un furry, et compte bien se faire adopter par une nouvelle famille aimante de Skavens, qu’il convoque en faisant sonner la cloche hurlante municipale. Question : pourquoi ? Réponse : La Mer Noire. En tous cas, les ratons ont l’ouïe fine, et la marée murine qui a empli les rues de Nagenhof fait présager du pire pour les braves péquenauds.

Nous faisons alors un crochet dans les égouts de la ville, où une cohorte de Skavens menée par le chef de meute Nikkit Skar se dirige vers la crypte du temple, emportant avec elle le Rat Ogre Mâchecrâne. Vous pouvez oublier ces noms dès à présent, car ils ne reviendront plus de la nouvelle, Skar ayant bouclé son cameo et Mâchecrâne redevenant un Rat Ogre anonyme après cela. Contentons nous de nous préparer à un peu de baston sombre et sinistre.

Du côté des gentils, la bande de Badenov, suivie par Dietrich, est arrivée devant le temple, a constaté l’heure du décès de Ludwik, écrasé sur le pavé, ainsi que l’infestation ratière dont semble souffrir le lieu de culte. Prouvant à nouveau que son supérieur est une andouille, Pieter a la bonne réaction de monter dans le beffroi pour faire cesser le carillon, alors que Badenov souhaitait simplement poursuivre l’état des lieux. Toutefois, l’arrivée de l’avant-garde Skavens met un terme définitif à son projet, et il résout à la place de retenir les hommes rats à l’intérieur du temple en compagnie de Dietrich, pendant qu’Oran, Stanislas et Yuri y mettront le feu pour empêcher les mutants d’envahir la cité. Aussitôt dit… pas tout de suite fait. D’une part car les Nagenhofer ne se laissent pas immédiatement convaincre de la nécessité d’incendier leur patrimoine culturel, et qu’il faut un beau discours inspirant de la part de Stanislas pour les y pousser (l’approche injurieuse d’Oran ayant bizarrement donné des résultats contrastés). D’autre part car, après avoir contenu à grand-peine les premières vagues Skavens, Badenov et Dietrich se retrouvent confrontés à un Rat-Ogre très en colère, ce qui les pousse à une prudente retraite dans le beffroi. Heureusement pour eux, les assaillants sont aussi abrutis que notre héros, et ne profitent pas de l’occasion pour s’échapper du bâtiment en flammes, et préfèrent lancer leur monstre sur les talons des mercenaires. Un escalier qui s’effondre plus tard, Badenov est contraint de laisser Dietrich s’expliquer en tête à tête avec Mâchecrâne pendant que lui essaie de se rendre utile en s’enquérant du silence radio de Pieter. Ce dernier, d’abord surpris et presque garrotté à mort par Otto, a toutefois fini par prendre le dessus sur son assaillant, et l’a pendu par le cou jusqu’à ce que mort s’en suive, mettant fin à ses projets d’adoption. Aidé par son incapable de boss, il parvient à décrocher la cloche infernale de sa poutre porteuse, l’envoyant écraser le Rat Ogre en contrebas juste avant qu’il ne puisse donner le coup de grâce à Dietrich, qui mourra avec la satisfaction du devoir accompli. Ceci fait, il ne reste plus à nos deux loustics qu’à effectuer un petit saut de la foi dans une charrette de foin astucieusement positionnée par leurs comparses pour compléter leur mission, et la ruine totale du temple. Il serait cependant litigieux de revendiquer une victoire totale pour l’Empire, la cloche hurlante ayant cassé les oreilles (et pas que) de Nagenhof n’étant pas retrouvée dans les décombres fumantes le lendemain…

1 : Comprendre qu’il y a beaucoup d’images mais qu’elles sont vraiment pas terribles.

AVIS :

Tristement égal à lui-même, Jonathan Green livre avec La Cloche de Nagenhof une nouvelle aventure des plus insipides de sa bande de mercenaires fétiche. Pénalisée par le manque d’inspiration de l’auteur, qui recycle péniblement un classique de la littérature pour meubler son intrigue, ainsi que par le style lourd de Green (champion du monde des « comme (si) » et « eh bien »), l’histoire ne brille ni par le fond (mais pourquoi est-ce qu’Otto pensait qu’il serait accueilli à pattes ouvertes par les Skavens ?) ni par la forme (mais pourquoi est-ce que Green informe le lecteur que Dieter a perdu sa main en combattant Mâchecrâne dix ans plus tôt seulement deux lignes avant que les deux personnages ne se rencontrent à nouveau1 ?). Comme à son habitude, Badenov se révèle être un abruti fini, guidé par la sagacité de l’indispensable Pieter Valburg plutôt que par ses propres réflexions brumeuses, et quant au reste de sa bande, elle sert essentiellement de décor humain au drame qui se noue à Nagenhof, démontrant les lacunes qu’a l’auteur à faire évoluer un groupe de personnages de façon crédible et intéressante. Tout le monde n’est pas Dan Abnett ou C. L. Werner. En définitive, on retiendra simplement que Jonathan Green pourrait poursuivre Assassin’s Creed en justice pour plagiat du saut de la foi2, et que le titre de l’omnibus collectant les nouvelles de la bande de Badenov, « les damnés et les morts » tire son origine de la remarque que se fait son leader minimo à la fin de La Cloche de Nagenhof. Ce qui n’est pas lourd, certes.

1 : C’était pourtant un moyen facile et efficace de faire monter un peu la tension avant l’affrontement. Si Green avait écrit l’Hérésie d’Horus, on aurait appris que l’Empereur était le père de ce dernier au livre 59, pendant une discussion anodine entre Pépé et ses Primarques dans l’ascenseur les menant au téléporteur du Palais Impérial.
2 : La nouvelle ayant été publiée en 2001, 6 ans avant la première édition du jeu.

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Liberty – G. Thorpe [40K] – #27 :

INTRIGUE :

40K_LibertyÀ la suite des événements couverts dans le premier tome de la saga des Last Chancers (‘13th Legion’), le Colonel Schaeffer passe en coup de vent sur la planète prison de Ghovul pour y mettre au frais le seul survivant du concours de survie organisé par l’intraitable et intuable officier ces trois dernières années : Kage. Ce dernier, officiellement pardonné à la fin du roman mais ayant raté sa réinsertion en trucidant quelques officiers un soir de beuverie, s’est vu accordé une Lastest Chance par Schaeffer, bien conscient du potentiel de cette machine à tuer. Comme on peut s’en douter, cet épisode carcéral ne va pas se dérouler sans anicroche.

Outre le fait que la tour que partage Kage avec 200 autres gibiers de potence n’a rien à envier à la Talaudière, et que son compagnon de cellule, le velu et vorace Marn1, ronfle comme un Squig enrhumé, c’est surtout le manque d’activité physique et le sentiment d’abandon qu’il ressent au bout de quelques semaines qui fait péter les plombs à notre héros. Quand un de ses codétenus insiste lourdement pour avoir son tour avec le sac de frappe que l’ex-Légionnaire Pénal martyrise depuis trente minutes à grands coups de latte, Kage saute à la gorge du faquin et lui administre une correction terminale, fracassant quelques os chez les matons qui essaient de s’interposer au passage. L’administration pénitentiaire tenant à conserver le monopole de la violence (pas forcément légitime) dans son établissement, ce déchainement de violence vaut à Kage seulement quelques coups de knout, Schaeffer ayant explicitement ordonné au gouverneur Skandlegrist de trop endommager cet élément prometteur pendant son absence.

Cela ne décourage pourtant pas le K. de persévérer dans ses comportements séditieux. Dès que son dos en lambeaux a suffisamment cicatrisé pour lui permettre de regagner sa cellule, il commence à organiser une tentative d’évasion. Ayant récupéré une cuillère laissée sans surveillance à la cantine, il passe quelques nuits à l’aiguiser en secret sur les murs de sa cellule, avant de passer à l’action d’une façon aussi brutale que court-termiste (sa signature). Après avoir à moitié étouffé Marn avec son oreiller (bien fait) et perforé le poumon avec son scalpel de fortune pour faire croire aux matons que son compagnon de cellule faisait un œdème pulmonaire, Kage se fraie un chemin sanglant à travers les malheureux gardiens dépêchés dans sa cellule, puis grimpe jusqu’en haut de la tour en faisant monter son body count à un niveau stratosphérique. Seul point d’échappatoire du vincularum, le sommet est l’endroit idéal pour passer à l’étape suivant de cette grande évasion un peu improvisée, et fausser compagnie aux sbires de Schaeffer…

Début spoiler…Sauf que dans un Impérium d’un million de mondes, il est tout à fait possible de construire des prisons sur des planètes absolument vides. C’est ce dont Kage se rend compte lorsqu’il contemple le paysage lunaire et désolé de Ghovul qui s’étend jusqu’à l’horizon. N’ayant littéralement nulle part où aller, il se rend sans faire d’histoires lorsque la huitième vague de gardes chiourmes le met en joue, et se met à espérer du fond du cœur que Schaeffer vienne lui rendre visite sans tarder. Putain qu’il est blême, le HLM…Fin spoiler

1 : Qui s’appelle comme ça car il engloutit ses repas en trente secondes montre en main. D’où l’expression « Marn l’a avalé ».

AVIS :

Petite nouvelle de transition entre ‘13th Legion’ et ‘Annihilation Squad’, ‘Liberty’ nous offre une sorte de seul en scène de Kage, qui démontre de manière probante qu’il est vraiment un très sale type. La narration à la première personne et le ton décalé utilisés par Thorpe rendent toutefois son anti-héros assez sympathique, et le récit de ses mésaventures carcérales se lit sans problème. La conclusion de l’histoire ne surprendra pas les lecteurs familiers de la série, mais Thorpe garde son propos suffisamment court et rythmé pour que cette absence de suspens ne soit pas rédhibitoire. Ça passe.

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Totentanz – B. Craig [WFB] – #27 :

INTRIGUE :

WFB_TotentanzCapturé par le despote osseux mais éclairé Cimejez à l’issue d’une campagne en Arabie, l’émir Amaimon se retrouve entraîné dans un débat des plus étranges alors que son vainqueur lui fait l’honneur de sa collection personnelle d’antiquités (car Cimejez aime bien parler philosophie avec les vivants éduqués sur lesquels il peut poser la main) : qui des vivants ou des morts sont les meilleurs danseurs ? Chaque camp étant convaincu de la supériorité de sa race faction situation, un concours est organisé pour tirer les choses au clair une bonne fois pour toutes. Côté chair, Amaimon, qui s’y connaît un peu en magie, réanime la statue de la danseuse (Celome) dont la contemplation a mené à la dispute entre son hôte et lui. Côté os, Cimejez se fait représenter par un danseur macabre confirmé (mais anonyme).

Celome a l’honneur de commencer, et livre une interprétation flamboyante de la danse des sept voiles, représentation stylisée et burlesque de la lutte incessante de l’humanité contre les sept fléaux qui sont la faim, le froid, la maladie, la solitude, le deuil, la stérilité et Juul la mort. Bien que le public de Squelettes et de Zombies qui assiste à la représentation ne montre pas le moindre intérêt devant les contorsions dénudées de Celome, Amaimon reste confiant dans l’issue du duel. Après tout, c’est la danseuse elle-même qui fera office de jury, Cimejez lui ayant promis de prolonger sa vie (car le sort d’Amaimon ne marche qu’une seule heure) ou de la transformer en morte-vivante en fonction de son jugement final. Devant une telle alternative, il est évident que le choix est tout tracé, pas vrai ?

Début spoiler…Cependant, lorsque le champion du Roi des Tombes pénètre à son tour sur le dance floor, et malgré le caractère minimaliste de sa prestation (il fait le tour de la piste à tout petits pas pendant qu’un de ses potes joue une chamade au djembé), Amaimon réalise avec effroi que personne ne peut résister à ce tempo chaloupé. Tous les vivants assistant au concours, y compris Celome, se retrouvent bientôt engagés dans cette macarena macabre, et écopent d’un coup de faux fatal pour leur peine. Seul Amaimon, que Cimejez a maintenu de force sur son siège, survit à cette démonstration implacable de la supériorité chorégraphique des légions de Nagash, et sera donc condamné à servir ce nouveau maître dans cette vie et dans la suivante. Un pari est un pari.Fin spoiler

AVIS :

Pour son avant-dernière soumission à la GW-Fiction (à ce jour), Brian Craig marque définitivement sa sigularité par rapport au reste de ses co-auteurs en signant une courte nouvelle/fable/essai philosophique à la sauce med-fan, d’une violence stylistique absolue pour qui est habitué aux canons de la Black Library. Les premières pages en particulier, qui pourraient être tirées d’une dissertation dont le sujet serait « Existe-t-il une éthique de la mort ? », sont tellement différentes de ce à quoi on s’attend en lisant ce genre de prose qu’il est étonnant que les pontes de Nottingham n’aient pas tout bonnement refusé de publier cette nouvelle. Même si j’ai abordé ‘Totentanz’ en connaissance de cause, ce début sans concession m’a fait forte (si ce n’est bonne, car Craig a été plus « pédagogue » dans son approche par le passé, et je pense qu’il aurait pu faire plus d’efforts ici) impression.

La suite, si elle se révèle plus classique – encore que les concours de danse entre vivants et morts ne sont pas le sujet le plus fréquent de la GW-Fiction –, reste très marquée de la patte Craigesque, et permet à l’auteur d’illustrer avec son style si particulier l’opposition entre vivants ignorants et morts impassibles. Je ne suis pas sûr d’avoir compris la morale profonde de cette histoire (à part de ne jamais défier les Rois des Tombes à une battle), mais le déroulé du duel chorégraphique entre la pauvre Celome, qui aurait peut-être préférée rester statue, et Benjamin Milletarse est décrit avec suffisamment de détails par Craig pour que l’on sache de quoi il en retourne. À réserver aux fans les plus insatiables du vieux maître, et à (sans doute) laisser de côté pour les autres.

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Defixio – B. Counter [40K] – #28 :

INTRIGUE :

40K_DefixioNous embarquons à bord du Leman Russ Exterminator Defixio, rattaché à un contingent de Chem-Dogs de Savlar, au cours de la campagne menée par la Garde Impériale contre une Waaagh ! Ork sur le monde de Jaegersweld. Parmi les membres d’équipage, le jeune Samiel peine à se faire une place pour une raison aussi simple que stupide : ayant survécu par miracle à la destruction de son précédent véhicule de fonction, ses nouveaux camarades (Karra-Vrass, Graek, Damrid, Dniep et Kallin) considèrent qu’il a « consommé » toutes ses réserves de chance, et que cela va porter la poisse au Defixio. Un accrochage rugueux avec une bande de Bikers Orks, pendant lequel le tank hérite d’une belle balafre de coque et l’horrible Graek d’une balle perdue fatale, ne fait pas grand-chose pour les convaincre de réviser leur jugement.

Isolé en territoire ennemi, le Leman Russ déglingué doit maintenant se frayer un chemin jusqu’au camp impérial le plus proche, tenu par le 24ème régiment de Cadia. Cela représente près de trois jours de route dans un environnement hostile, mais, sans autre perspective, les Chem-Dogs se lancent à corps perdu et à tombeau ouvert dans ce raid de tous les dangers. Alors qu’ils avançaient à bon rythme, un champ de mines posées par des Orks farceurs les force à faire une halte dans la pampa, le temps que Samiel leur ouvre un passage en identifiant les explosifs, permettant au bricoleur Dniep de les désamorcer plus rapidement dans un second temps. Cet arrêt au stand prend une tournure funeste lorsqu’un autre Kult’ de la Vitess’ tombe sans crier gare sur le Defixio alors qu’il patientait en double file que Samiel ait fini sa petite affaire. Assistant de loin à l’attaque, ce dernier décide d’aider ses camarades par une action aussi brave que suicidaire : utiliser le pistolet lance-fusée qu’on lui avait remis pour attirer l’attention des peaux vertes. Et ça marche. Intrigué par la belle rouge tirée par notre héros, les Orks se ruent sur sa position, ne réalisant que trop tard qu’ils s’engagent littéralement en terrain miné. Le bouquet final qui s’en suit permet à la fois de se débarrasser des motards indésirables, et d’accélérer le processus de déminage débuté par Samiel (qui survit encore une fois miraculeusement à une situation improbable). C’est ce qu’on appelle un win-win.

Sans d’autres difficultés techniques ou autochtones grognons pour les empêcher de reprendre leur route, les hardis tankistes filent à toute berzingue vers la terre promise, et finissent par arriver à proximité du camp de leurs camarades de lutte. Encore une colline à passer, et ce sera la quille…

Début spoiler…Qui se transforme toutefois en tuile lorsque nos héros découvrent que le QG Cadien a été attaqué et squatté par une tribu d’Orks. Pour une culture qui s’enorgueillit tellement de tenir la ligne, c’est une faute professionnelle autant qu’éthique, si vous voulez mon avis. C’est surtout une cruelle désillusion pour les Chem-Dogs, qui se voyaient déjà engloutir leur pâtée bien méritée et se lover dans leur coucouche panier. Il faut toute la fortitude du chef de char Karra-Vrass pour remobiliser ses hommes et leur rappeler que leur devoir en tant que soldats impériaux est de mourir au combat en emportant le plus possible de Xenos avec eux dans la tombe. N’ayant c’est vrai rien de mieux à faire, les servants du Defixio reprennent du poil de la bête et livrent un combat homérique contre la patrouille d’Orks qui finit par les localiser. Submergé par les vagues vertes, le brave petit châssis finit par rompre sous les coups de boutoirs des Boyz, mais pas avant d’avoir clairsemé leurs rangs de manière drastique. Une fin honorable pour de telles crapules (et je ne parle pas des Orks)…

Début spoiler 2…Enfin, presque pour tout le monde. Fidèle à sa réputation de catalyseur de chatte, Samiel se débrouille une fois encore pour survivre à la baston, alors que tout le monde meurt autour de lui. Récupéré quelques heures plus tard sous l’épave carbonisée du Defixio par un bataillon de Cadiens qui passait dans le coin, le chien chimique le plus chanceux de l’univers en est quitte pour quelques semaines chez le véto, le temps que ses pattes brûlées cicatrisent. Il se fait la réflexion qu’il aura encore plus de mal à trouver une nouvelle unité de rattachement avec un casier aussi chargé que le sien, mais ce sera une préoccupation pour plus tard…Fin spoiler

AVIS :

Sans doute une des premières nouvelles « embarquées » (c’est-à-dire prenant place dans un char ou un aéronef) de la GW-Fiction, mais loin d’être la plus marquante ou intéressante de ce sous-genre, ‘Defixio’ permet au moins d’en apprendre un peu plus sur les Chem-Dogs de Savlar, l’un des régiments de Gardes Impériaux à l’histoire la plus particulière qui soit. Pour le reste, c’est de l’action très classique, avec un peu de camaraderie virile et quelques gros coups de chance pour napper le tout. Counter a fait mieux.

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Meat & Bone – R. D. Laws [WFB] – #28 :

INTRIGUE :

WFB_Meat &amp; BoneQuelles que soient les latitudes sous lesquelles on vit, une constante demeure : la nécessité de gagner sa croûte. Le Vieux Monde de Warhammer Fantasy Battle ne fait pas exception, et parmi les choix de carrière s’offrant à ses habitants, certains sont plus exotiques que d’autres. Prenez le cas d’Angelika Fleischer par exemple : eh bien, notre héroïne a embrassé la voie de la pilleuse de champ de bataille, profession que l’on ne peut pas qualifier de noble, mais qui est tout à la fois nécessaire (le recyclage, c’est l’avenir1) et suffisamment lucrative pour permettre à Angie de subvenir à ses besoins. Et dans un univers aussi violent que WFB, le travail ne manque pas, la proximité du Col du Feu Noir fournissant à notre récupératrice experte de nombreuses opportunités de valoriser les possessions mortelles des malheureux cadavres jonchant l’arrière-pays du Reikland.

Alors qu’elle vaque tranquillement à ses occupations, Angelika est distraite par des appels à l’aide émanant d’un tas de cadavres soigneusement empilé par les Orques qui en sont responsables (quoi de plus logique pour des peaux vertes que d’avoir une fibre de même couleur ?). Pas tellement encline à aider son prochain du fait de sa nature éminemment pessimiste et d’une première expérience malheureuse avec un survivant peu reconnaissant aux débuts de sa carrière, elle décide tout de même d’aller s’enquérir de la source de cette nuisance sonore, ne serait-ce que pour être en capacité de la faire cesser, dusse-t-elle menacer de faire rappliquer les Orques qui rôdent dans les parages. Nous faisons alors la connaissance du malheureux Franziskus, d’une car son patronyme est d’un ridicule consommé2, et de deux à cause de son enfouissement quasi complet sous une montagne de barbaque en voie de décomposition, mauvais pas dont il ne peut se tirer sans la main secourable d’Angelika. Problème, cette dernière refuse tout net d’accéder à sa requête, préférant jouer la sûreté qu’améliorer son karma. Leur discussion, qui finit par déboucher sur des hautes considérations éthiques, est toutefois interrompue par l’arrivée d’une bande de peaux-vertes, déterminés à trouver un survivant impérial pour des raisons obscures. Surprise à découvert, Angelika n’a que le temps de se cacher sous une charrette retournée et se préparer à vendre chèrement sa vie, sûre qu’elle est que Franziskus indiquera à ses futurs collecteurs l’emplacement de la garce qui lui a refusé son aide. Elle est donc (agréablement) surprise par la fortitude et la bravitude du soldat, qui se laisse empaqueter par les Orques sans piper mot, permettant à notre héroïne de rester incognito.

L’histoire aurait pu s’arrêter là si Angelika était aussi dure qu’elle voulait le faire croire, mais bien évidemment, Miss Fleischer, sans doute tenaillée par sa conscience, dirige ses pas sur la piste des ravisseurs de Franziskus et assiste alors à un spectacle peu banal. En contrebas de la vallée, un char de fort belle taille est tracté par une foule de peaux-vertes enthousiastes. Sur la plateforme de ce véhicule, une colossale statue représentant un chef de guerre Orque a été placée, et cette dernière dispose, preuve des capacités cognitives, souvent sous-estimées, des peaux-vertes, d’un bras articulé terminé par un tout aussi imposant marteau. Le tableau est complété par un Big Boss patibulaire, dont le pied repose nonchalamment sur le sac contenant Franziskus. Pas plus bête que le lecteur moyen de la BL, ce qui veut tout dire, Angelika comprend que le malheureux prisonnier va être purée-ifié au cours d’une cérémonie marquant la prise de pouvoir du nouveau chef sur la horde de son prédécesseur. Ce qui est déplaisant, je vous l’accorde.

À son corps défendant, Fleischer finit par se rapprocher suffisamment du transpalette orkoïde pour pouvoir se dissimuler sous l’essieu de ce dernier, position inconfortable mais qui lui permet d’assister aux premières loges aux rites funéraires, particulièrement méconnus je dois dire, des peaux vertes. L’occasion pour le nouveau PDG de faire un petit discours très émouvant en la mémoire du défunt, de lui rouler une pelle, et de balancer son cadavre dans la foule enthousiaste, pour une ultime session de crowd surfing très orque dans l’esprit, puisque la dépouille du Big Boss sera consciencieusement démembrée par ses fans éplorés, chacun souhaitant conserver une relique du Lider Maximork. Alors que la cérémonie de passation est sur le point d’atteindre son parorksisme, avec Franziskus dans le rôle de la bouteille de champagne que l’on fracasse sur la coque d’un bateau lors de son baptême, Angelika croise le regard du Big Boss et n’a d’autre choix que de monter à son tour sur scène pour un interlude impromptu mais hautement comique, pendant lequel elle utilisera à bon escient le décor et la suffisance de son adversaire pour lui remettre les idées, et le crâne par la même occasion, bien à plat.

Dans la cohue monstre qui suit cette péripétie non prévue au programme, les deux humains parviennent à s’échapper sans se faire remarquer par la foule en délire, peu motivés à l’idée de mourir sur scène, comme leur infortuné partenaire d’impro. C’est le début d’une relation fusionnelle entre la Lara Croft des charniers et celui qui se considère désormais comme son obligé, qui ne sera pas sans rappeler celle du Capitaine Haddock avec son morceau de sparadrap ou du Loup avec Droopy. Méfiez-vous des gens qui veulent vous rendre service…

1 : On remarquera le caractère précurseur de Robin D. Laws, qui dès le tournant du 21ème siècle, souligna l’importance cruciale de l’économie circulaire. Angelika Fleischer, c’est la Greta Thunberg de l’Empire, en fait.
2 : Etant le 4ème enfant de ses parents, on supposera que ces derniers n’avaient plus d’idée de prénom convenable à sa naissance.

AVIS :

Personnage historique, mais discret, de la Black Library, Angelika Fleischer (bientôt rejointe par son sidekick Franziskus) fait ses débuts dans la carrière avec une petite nouvelle ma foi fort respectable. Cela peut sembler peu novateur aujourd’hui, où la représentation féminine, et des minorités en général, s’est considérablement développée dans les franchises de Games Workshop, et donc dans les publications de la BL, mais au moment de la publication initiale de cette histoire, au début des années 2000, Miss Fleischer était une création doublement originale, voire triplement si on prend en compte la profession très particulière que son auteur lui a dégoté. Le simple intérêt de lire une nouvelle sortant de l’ordinaire peut convaincre le lecteur de donner sa chance à cette héroïne d’un nouveau genre, mais l’intrigue en elle-même est suffisamment distrayante (même si on pourrait arguer que les Orques de Laws sont un peu datés de par la dimension comique qui ne les quitte pas vraiment d’un bout à l’autre du récit), à défaut d’être spectaculairement complexe ou épique, pour ajouter une autre raison de s’enquiller ce ‘Meat & Bone’.

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Barathrum – J. Curran [40K] – #28 :

INTRIGUE :

40K_BarathrumLorsque l’Inquisiteur Anselm est appelé par un vieil ami sur la planète de Barathrum pour élucider la série de morts violentes ayant endeuillé l’expédition de l’Adeptus Mechanicus en charge de l’excavation de la cité souterraine découverte à la surface de ce monde mort, il ne s’attendait pas à recroiser la route de son ancien mentor, Grogan. Les deux hommes se sont séparés en mauvais terme après une enquête bâclée sur Tantalus il y a bien des années de cela, à la suite de laquelle le puritain Grogan a déclaré un Exterminatus que son élève trouvait bien précipité. Guère enchanté par la présence de son collègue et néanmoins rival sur cette affaire sordide (rapport aux cadavres horriblement mutilés laissés par le tueur) et poussiéreuse (rapport aux interminables tunnels que nos héros passent la moitié de la nouvelle à parcourir), Anselm fait contre mauvaise fortune bon cœur et collabore en bonne intelligence avec Grogan, que le passage du temps n’a pas du tout adouci.

Une analyse poussée des victimes permet à Anselm, dont l’une des spécialités semble être la médecine légale, d’établir que ces dernières ont toutes été amputées d’un membre ou d’un organe différent, avec une précision chirurgicale qui plus est. Cette conclusion des plus sinistres passe au second plan lorsque les deux fins limiers des Ordos sont alertés par le Magos Explorator en charge de l’expédition (Eremet) qu’un portail gigantesque a été découvert par ses équipes. Scellé et couvert d’inscriptions écrites dans une langue indéchiffrable (à court terme tout du moins), l’édifice est également protégé par un champ électrique qui carbonise le premier Technoprêtre ayant eu la mauvaise idée d’y poser la méchadendrite. Pour le bouillant Grogan, cet incident est la preuve irréfutable que le Chaos est à l’œuvre sur Barathrum, et il s’empresse de suspendre les fouilles, au grand désespoir d’Eremet. Connaissant les méthodes employées par son ancien boss, Anselm se doute que les malheureux archéologistes ne tarderont pas à être soumis à un interrogatoire serré dont pas un ne sortira indemne. Cherchant à éviter à son vieil ami Cantor ce sort peu enviable, il poursuit donc les recherches de son côté… en piquant un somme. Dans un rêve que l’on peut qualifier de prémonitoire, il est mis en présence de l’Empereur en personne, fièrement juché sur sa chaise percée plaquée or, mais les traits aquilins du Maître de l’Humanité se transforment en ceux d’une hyène, et très mauvaise actrice avec cela1.

Ce pénible cauchemar est heureusement interrompu par l’arrivée d’Eremet, qui apporte à son hôte le résultat de l’expertise (expresse) réalisée par les savants de l’Inquisition sur le texte mystérieux gravé sur le portail récemment mis à jour. Comme on peut s’en douter, ce n’est pas la recette de l’aligot que les précédents habitants de Barathrum ont tenu à transmettre aux générations futures, mais un avertissement sans frais sur l’indicible (et illisible) menace dormant dans la crypte ainsi condamnée. Car ce n’est rien de moins que le Prince Démon Szarach’il qui patiente dans la cité morte, enfermé dans ce tombeau par les efforts de l’Inquisiteur Amaril il y a des milliers d’années. Grogan avait donc raison ! Mais d’ailleurs, où est-il ?

Eh bien, sur les lieux du crime pardi. Ayant surpris Cantor bravant le couvre-feu qu’il avait déclaré, l’Inquisiteur a suivi discrètement le Technoprêtre réfractaire jusqu’au portail interdit, et l’a chopé en train de se livrer à un rituel passablement chaotique. Il s’avère que le servant du Dieu Machine s’est fait hacker par l’esprit néfaste de Szarach’il, qui compte bien profiter de l’arrivée de l’expédition pour se faire la malle. Mais notre démon est très exigeant : alors qu’il aurait pu se contenter de posséder le premier humain passant à sa portée, comme le pauvre Cantor, il cherche également à se venger d’Amaril en infiltrant les rangs de l’Inquisition, et a pour cela besoin qu’un représentant des saints Ordos tombe sous son influence. Et tant qu’à faire, Anselm, qui est plus jeune et plus swag (il ne porte pas de moustaches) que ce vieux tromblon de Grogan, serait le candidat idéal. Tout cela nous est longuement raconté par un Szarach’il dont la passion pour le monologue de grand méchant ne présage rien de bon pour le succès de son entreprise…

Pour l’heure, Grogan croise le fer avec la terrible créature que Cantor a mis sur pied avec les organes de ses collègues… et l’abat sans trop de difficulté. Ce n’était toutefois qu’une diversion, permettant à un Cantor lévitant de desceller le portail et de libérer le terrible Démon… ou en tout cas son essence, qui s’empresse de posséder Grogan (Cantor s’écrase sur le sol comme une bouse et meurt après avoir présenté ses plus plates excuses). Sur ces entrefaites, Anselm arrive in da club et un (court) duel s’engage entre les deux Inquisiteurs. Ayant réussi à reprendre le contrôle de son corps pour un instant, Grogan décharge son hellgun sur le plafond en lave mi-cuite de la crypte, provoquant son enfouissement en même temps qu’incinération sous quelques tonnes/mètres cube de magma coagulé. Son sacrifice altruiste autant que le coup de moins bien de Szarach’il, qui ne parvient plus à sauter d’hôte en hôte comme il l’avait fait précédemment, permet de mettre un terme à cette escapade démoniaque, et de préserver l’Imperium d’une (sans doute) terrible menace.

1 : N’ayant qu’une version papier de cette nouvelle à disposition, je ne peux pas faire de capture d’écran pour prouver mes dires, mais sachez que l’apparition démoniaque interpelle notre héros somnolent de la sorte : “Anselm ! Anselm my servant, you have come to me. Anselm ! Anselm, Anselm ! Open the door!”

AVIS :

La tentative de Jonathan Curran de dépeindre les activités inquisitoriales ne s’avère guère probantes dans ce ‘Barathrum’ très moyen, qui explore plusieurs ambiances (slasher, thriller, roman noir, horreur…) sans réussir à s’en approprier aucune. Cette base bancale est de plus handicapée par le manque de maîtrise du lore de 40K par Curran, qui semble considérer les Inquisiteurs comme des détectives privés de choc, envoyés par leur hiérarchie enquêter en solitaire sur des affaires étranges. Pour ne rien arranger, les machinations de l’antagoniste sont inutilement complexes, et l’auteur ne semble même pas avoir pris le soin de se relire1. Ça fait beaucoup de problèmes pour une nouvelle qui peut être mis en comparaison avec les travaux inquisitoriaux, autrement plus réussis, de Dan Abnett, publiés pour les premiers d’entre eux à la même époque que ‘Barathrum’. Comme la nécropole d’où elle tire son nom, cette histoire mérite l’oubli profond dans lequel elle a été plongée depuis des millénaires.

1 : “The Inquisition is a tool” (Grogan, p. 9). “The Inquisition is not a tool” (Grogan, p. 23).

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Crimson Storm – D. Abnett [40K] – #29 :

INTRIGUE :

40K_Crimson StormAprès des années de conflits l’ayant menée à travers le Segmentum, l’escouade Damocles est enfin de retour sur la fière Ithaka afin de faire le plein de recrues pour regonfler ses effectifs sévèrement diminués. La vue de son monde natal suffit à arracher des larmes de tendresse au Sergent Priad, qui sous son allure de gros dur cache des petits cœurs sensibles, et le vivifiant air iodé qui baigne cette planète marine amène avec lui des effluves familières et chéries, comme le parfum si délicat de la bave de moule. Si si. Nos héros ne peuvent pas s’attarder trop longtemps cependant, car ils sont attendus dans la forteresse monastère du Chapitre, qui se situe – et c’est important pour la suite de l’hisoire – à la surface de la lune Karybdis, et non sur Ithaka même. Après avoir rituellement vidés leurs gourdes de potion magique (les Iron Snakes ne voyagent jamais sans une flasque d’eau de mer ithakienne) et confiés les cendres de leurs chers disparus au vent du large, les Damocles repartent en direction de l’orbite.

En tant qu’officier, il revient à Priad de se charger de tout l’administratif et il confère donc avec le Lexicanium Phrastus, qui sert l’Empereur comme chargé de support staffing (un champ de bataille des plus traîtres), au sujet des potentiels candidats qui pourraient renforcer son escouade. Si le sergent n’a aucune objection à ce que les meilleurs aspirants du Chapitre lui soit présenté pour qu’il jauge lui-même de leur qualité, il a en revanche une idée très précise de qui il souhaite recruter pour remplacer l’Apothicaire Memnes, mort au combat sur Ceres. Ayant appris que l’escouade Ridates avait été exterminée lors d’une campagne récente contre les forces du Chaos, ne laissant que l’expérimenté Khiron en vie, Priad comptait bien drafter ce dernier pendant le merkhato. Phrastus lui fait cependant comprendre à mots couverts que Khiron est intransférable, et qu’il devra se rabattre sur d’autres candidats. Notre héros reçoit le même son de cloche de la part du Maître de Chapitre Seydon, qui semble passer ses journées à errer dans les couloirs de sa forteresse à la recherche d’un public auquel raconter ses anecdotes sur le moindre Iron Snake ayant servi sous ses ordres au cours du dernier millénaire1. Il lui faudra cependant papoter avec son vieux poto Strabo pour avoir le fin mot de l’histoire : Khiron a eu un coup de folie et a mis un bolt dans la tête d’un frère de bataille qui se remettait de ses blessures dans l’infirmerie de la forteresse, sans aucune raison valable. Il languit depuis en prison dans l’attente de son jugement.

Cet étrange coup de folie de la part d’un vétéran chevronné comme Khiron intrigue Priad, qui décide d’aller lui rendre visite dans sa cellule pour avoir sa version de l’histoire. L’Apothicaire lui révèle alors qu’il a agi de la sorte car il était convaincu que le frère Krates avait été, à son insu, possédé par le démon responsable de la mort de l’escouade Ridates après que son ost ait été vaincu par les Iron Snakes. Khiron indique à Priad que la créature en question a une odeur particulière, et que c’est ainsi qu’il a acquis la certitude de la corruption de Krates. Le seul regret de l’Apothicaire est de ne pas avoir utilisé le feu purificateur pour « purger » son frère, car cela a permis au démon de s’échapper après la mort de son hôte et d’infecter un autre Iron Snake. Résigné à son sort, Khiron a demandé à être jugé par oethanar, une tradition du Chapitre à laquelle il n’y a pas d’issue heureuse : soit le suspect est dévoré par les grands wyrms d’Ithaka, auquel cas il est innocenté à titre posthume, soit il survit pendant six heures et est exécuté par ses frères à la fin de l’épreuve. Priad ressort de cet entretien troublé, mais ses obligations lui laissent peu de temps pour réfléchir à cette épineuse situation. Notons juste qu’il manque de se faire noyer dans la piscine chapitrale par les membres de l’escouade Phocis, à laquelle appartenait le défunt Krates, pour avoir osé discuter avec Khiron. Il faut l’intervention du Capitaine Skander, à laquelle Phocis est rattachée, pour empêcher Priad de finir avec la tête au fond du maillot de bain. Le harcèlement au travail, ce fléau qui n’épargne aucune organisation.

Le lendemain, alors que l’escouade Damocles supervise l’entraînement de ses nouvelles recrues au gymnase chapitral, Priad se fait éclater le pif par le bizut Dyognes au cours d’un duel au bâton. Pas de quoi perturber un Space Marine bien sûr, même si l’orgueil et le profil de notre héros sortent affectés de cet incident. A toute chose malheur est bon cependant, car cette péripétie ouvre grand les chakras (et les narines) de Priad, qui sent une odeur particulière flotter dans le dojo. Pas de la sueur transhumaine (encore que), mais quelque chose d’autre, qui ne peut être que le parfum démoniaque auquel Khiron a fait référence ! N’écoutant que son instinct et son blaze ensanglanté, Priad se rue sur l’individu dont émane l’horrible fumet, et qui se révèle être le Capitaine Skander. Pas le temps d’expliquer ce qui ne serait de toute façon pas compris par le tout-venant, notre impulsif héros compte sur l’esprit de corps de son escouade pour ne pas se retrouver seul contre dix, et finit par tout bonnement immoler le pauvre Skander sans autre forme de procès (on s’entraîne au lance-flammes en indoor chez les Iron Snakes). Stupeur et terrassement chez les serpents de fer, estomaqués par le coup de folie de Priad. Fort heureusement pour ce dernier, le démon qui possédait bien Skander a l’obligeance de se matérialiser lors de la combustion de son hôte, ce qui permet de blanchir rapidement le Sergent homicidaire. L’un est cuit, l’autre cru, c’est beau tout de même.

Le happy end devra toutefois attendre, car la situation de Khiron reste des plus précaires. Le jugement de l’Apothicaire a en effet été avancé sur l’ordre de Skander, et le condamné est déjà en train de se morfondre sur son roc en pleine mer, tel un Andromède du 41ème millénaire. L’affaire est tellement urgente que l’escouade Damocles ne prend même pas le temps de se changer, et part donc pour Ithaka en yoga pants et marcel sauver les miches de Khiron. Pourquoi passer un coup de fil pour régler une question de vie ou de mort quand on peut faire la route soit même, hein ? Autre détail amusant, le vaisseau qui emmène notre bande de gais lurons sur Ithaka est apparemment infoutu de faire du vol stationnaire à proximité de l’îlot où Khiron poireaute. Trop de vent, pas assez de visibilité, la totale. Qu’à cela ne tienne, Priad saute dans son zodiac de fonction et fend la houle pour collecter son loot secourir son camarade. Vous vous en doutez, les grands serpents de mer d’Ithaka se joignent aux réjouissances pour offrir un final à suspens à cette aventure. Malgré des dimensions fort respectables (et parfois assez rigolotes…), les wyrms ont la politesse de ne boulotter que des personnages non nommés, et de perdre la moitié de leur HP à chaque fois qu’un harpon les touche, ce qui permet à Khiron d’échapper à son funeste destin. Cette andouille manque de mourir lors de son plongeon pour rejoindre l’embarcation de Priad, mais c’est une autre histoire.

Au final, l’escouade Damocles peut repartir pacifier la galaxie au nom de l’Empereur à pleine capacité, ce qui est bien, et des gourdes remplies à ras bord d’eau de mer made in Ithaka, ce qui est encore mieux.

1 : On apprend au cours du dialogue entre Priad et Seydon que c’est ce dernier qui a permis à Damocles de former l’escouade qui porte son nom. Dans ‘Red Rain’, Priad se rememore la lignée de sergents ayant porté la griffe éclair de Damocles depuis cette époque, une liste qui comprend au moins une dizaine de noms et remonte à plusieurs générations !

AVIS :

Si, en toute objectivité, Dan Abnett s’améliore sensiblement dans sa saga Iron Snakes avec cette quatrième nouvelle, je dois avouer qu’il était déjà trop tard pour moi à ce stade, et je n’arrive pas/plus à prendre les héroïques aventures du Sergent Priad et de l’escouade Damocles au sérieux, comme la teneur de résumé ci-dessus vous l’a peut-être fait remarquer. Entre les rites débiles, les informations fluffiques grotesques et les personnages hors sol, difficile de prendre ce ‘Crimson Storm’ au premier degré, et cela même avant de se pencher sur les défauts plus structurels de cette nouvelle, comme l’identification totalement WIJH du possédé1, ou les prises de liberté avec le background quand cela sert l’intrigue (il n’y avait pas de Land Speeders disponibles pour évacuer Khyron de son rocher, plutôt que de jouer un remake philippin de ‘Moby Dick’ ?). Dans l’absolu, Abnett arrive à condenser en une quinzaine de pages une mini-enquête policière avec un final à spectacle, relevés par une dose généreuse de character development et saupoudrés de fluff, ce qui n’est pas à la portée de n’importe quel contributeur de la Black Library. S’il s’était donné la peine de soigner son travail, cette ossature solide aurait pu déboucher sur une de ses toutes meilleures soumissions… mais ce n’a pas été le cas ici, pour les raisons évoquées plus haut. La preuve que même les meilleurs peuvent avoir des coups de moins bien, ou une motivation défaillante.

1 : Et pourtant Abnett sait comment construire des nouvelles de type polar beaucoup plus abouties, comme ses travaux inquisitoriaux le démontrent. Je reste persuadé qu’il n’avait juste pas envie de se donner à fond sur cette série, et l’a fait clairement sentir à ses commanditaires… qui n’ont rien vu, ou rien voulu voir.

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The Doom That Came to Wulfhafen – C. L. Werner [WFB] – #29 :

INTRIGUE :

WFB_The Doom that Came to WulfhafenC’est une nuit particulière qui commence pour le jeune Karel, pêcheur comme son père (et la chaîne entière de ses aïeux) avant lui. Ayant atteint l’âge de la majorité dans le coin paumé de l’Empire où il habite, il lui est demandé de participer pour la première fois à un rituel très important dans la vie du village de Wulfhafen : la chasse à la galinette cendrée le naufrageage de navires passant le long du cap où le hameau a été fondé, il y a de cela bien des siècles, par le pirate Wulfaert. Pour Karel, conscient des activités illicites des hommes de Wulfhafen depuis sa prime enfance, mais dont le quotidien consistait jusqu’ici à ramener des casiers de homards (l’autre spécialité locale) à la surface, le changement est brutal. Accompagné par son vieux papa (Gastoen), il vient donc donner un coup de main à l’entretien du feu de joie géant que les villageois ont allumé sur la plage, sous le regard sévère de Vetyman, chef naufrageur en fonction du fait de son ascendance (il est le petit-petit-petit-fillot de Wulfaert) et de la rapière de belle facture qui pend à sa ceinture. Le stuff, c’est important.

Pour cette première nuit de la saison, les attentes de nos hardis pêcheurs sont assez faibles, mais Manann leur sourit toutefois en leur envoyant un navire au capitaine un peu trop naïf pour espérer triompher des eaux et des mœurs traitresses du coin. Attirée sur les brisants par ce qu’il croyait être la lumière et la corne de brume d’un phare, l’embarcation finit promptement éventrée par les récifs affleurants, et le vrai boulot des naufrageurs peut commencer. Par petits groupes, ils parcourent la grève à la recherche d’objets de valeur rejetés par les vagues, et n’hésitent pas à mettre fin aux souffrances des quelques survivants trempés jusqu’aux os qui ont la malchance d’arriver jusqu’à la plage avec un pouls. C’est ainsi que Karel est témoin du meurtre de sang froid d’un jeune homme échoué sur les galets en compagnie de son livre de croquis, commis par Gastoen et son vieux pote Emil à grand coups de hache et de gourdin. Ne pleurez pas trop sur son sort, car le bougre arborait un médaillon à la gloire de Tzeentch autour du cou. Le carnet contient des dessins de la faune et de la flore de ce qui semble être la Lustrie, et comme des specimens de plantes inconnues finissent par trouver leur chemin jusqu’au rivage, il ne faut pas longtemps au sagace mais traumatisé Karel pour établir que le navire coulé ce soir ramenait des specimens locaux à fin d’études sur le Vieux Monde.

La bonne humeur générale qui règne autour du brasier est toutefois mise à mal lorsque le dénommé Bernard arrive en hurlant auprès de ses comparses, et leur annonce que son frère Claeis, avec lequel il inspectait la ligne de marée, a été happé par un monstre sorti des vagues. Paranoïaque comme tout bon chef de bande de criminels se respectant, Vetyman ne croit pas un mot de ce récit et se convainc au contraire d’une magouille entre frangins afin de dérober une trouvaille digne de ce nom au partage collectif. Les patrouilles envoyées sur place pour vérifier la version de Bernard ne donnant rien, il décide d’aller interroger le lanceur d’alerte de manière serrée dans la maison commune du village, afin de lui faire cracher la vérité. Peine perdue, car Bernie n’en démord pas, même sous la torture : un démon est apparu à Wulfhafen…

Début spoiler…Sa version est corroborée par un autre témoin, hélas pas plus crédible que lui aux yeux de Vetyman : la femme alcoolique et mythomane du pêcheur (et philosophe) Enghel, Una. La vieille débarque comme une furie en plein interrogatoire pour annoncer à la cantonade que son mari a été attaqué et estourbi par un monstre de la taille d’une maison. Ses déboires avec de mystérieux Gobelins invisibles, une fois qu’elle avait forcé sur le rhum, étant encore dans toutes les mémoires, les hommes de Wulfhafen ne la prenne pas vraiment au sérieux, et seul un naufrageur consent à aller inspecter les lieux de la disparition d’Enghel pour établir la réalité des faits. Lorsqu’il revient, l’assistance ne peut manquer de remarquer les profondes entailles qui lui déchirent le dos, ainsi que son décès soudain après qu’il ait fait trois pas dans la salle commune. Il semblerait bien que les versions de Bernard et d’Una aient un fond de vérité, après tout.

C’est le branle bas de combat dans le village, et la petite armurerie constituée au fil des saisons de naufrage de navires est vidée pour l’occasion. Menée par Vetyman, la foule en colère retourne sur les lieux de la disparition présumée d’Enghel, et se retrouve confrontée à un authentique Kroxigor, que la météo locale, bien plus frisquette que la chaleur lustrienne, a rendu très soupe au lait. Il semblerait que le navire envoyé par le fond n’avait pas que des échantillons de plantes dans sa cale… Bien que les humains disposent de l’avantage du nombre et de l’intelligence, la force brute et la vitesse de pointe du gros lézard sont suffisantes pour remporter ce match d’une manière éclatante et passablement sanglante. Les survivants se replient en panique dans la salle commune, où est conservée l’huile utilisée pour allumer les brasiers naufrageurs : il s’agit sans doute de la dernière chance de terrasser ce monstre, insensible aux attaques perçantes et contendantes des locaux.

Malheureusement pour les Wulfhafenois, Kroxy vient toquer à la porte avant que les préparations ne soient terminées, et le massacre reprend de plus belle. Karel voit mourir son père sous ses yeux, rapidement suivi par Vetyman, éventré d’un coup de griffe après avoir aspergé le lézard d’huile. Dans la confusion, le jeunot a le temps de balancer une torche sur la bestiole enragée avant de s’eclipser en barricadant la porte de la salle, condamnant le Kroxigor à une combustion fatale. Cet épisode traumatisant a toutefois eu raison du poids de la tradition chez Karel, qui décide de partir dès le lendemain pour Marienburg afin de rejoindre le temple de Manann et d’expier les crimes de son village. Ou peut-être ne tenait-il pas à tout nettoyer (presque tout seul) après cette nuit de folie ? L’histoire reste silencieuse sur ce point…Fin spoiler

AVIS :

C. L. Werner nous offre une petite déclinaison med-fan du thème classique du village de naufrageurs, punis de leurs mauvaises actions par l’arrivée d’un monstre sanguinaire (ici Bob le Kroxigor). Si l’intrigue suit un chemin assez convenu, j’ai particulièrement apprécié la complexité que Werner a donné à ses personnages principaux, à commencer par Vetyman qui se révèle être un véritable anti-héros, à la fois détestable par ses actions (perpétuer la tradition de ses naufrageurs d’ancêtres, torturer un de ses camarades parce qu’il ne croit pas à ses histoires) et meneur courageux, charismatique et plein de ressources de sa bande de ruffians. On appréciera également les références faites par l’auteur à la geek culture dans son récit, depuis le nom de la nouvelle (un clin d’œil à ‘The Doom That Came To Sarnath’ de H. P. Lovecraft1) jusqu’aux dialogues entre personnages. Une soumission très solide de la part de l’homme au chapeau2.

1 : On peut d’ailleurs noter que le choix de Werner de faire d’un Kroxigor échoué la Némésis des villageois de Wulfhafen est en cohérence avec le « grand lézard d’eau », le qualificatif du dieu Bokrug qui détruit Sarnath dans la nouvelle de Lovecraft.
2 : Ma seule remarque négative portera sur la mention, inexpliquée pour autant que je puisse le dire, du médaillon marqué du symbole de Tzeentch que le dessinateur massacré par Gastoen et Emil arborait autour du cou. Un petit Easter egg destiné à souligner que de grands changements n’allaient pas tarder à se produire à Wulfhafen ?

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Bad Medicine – J. Green [NDA] – #29 :

INTRIGUE :

NDA_Bad MedicineDans les ténèbres – forcément très sombre – du sous monde de Necromunda, un agent de Nurgle a conclu un marché avec un bonimenteur de grand chemin, le « docteur » Ludvan Marvo, afin de propager la redoutée peste neuronale parmi la population locale. Le moyen de diffusion est redoutablement efficace, puisque c’est dans l’elixir miracle que Marvo propose aux foules crédules de ce Far West urbain que des probiotiques assez carabinés ont été injectés. Trois communautés ont déjà été ravagées par le mal, et leurs habitants transformés en Zombies de la Peste, mais le Porteur de Mort a.k.a. le Faiseur de Cadavres a.k.a. le Seigneur des Os a.k.a. le Roi de la Peste a.k.a. le Marchemort a.k.a. le Preneur d’Âmes a.k.a. Joe le Pilier ne compte pas s’arrête en si bon chemin. Il donne donc un refill à son sbire, et lui donne carte blanche pour la suite des opérations.

Heureusement pour la lie necromundesque, les manigances du vilain prouteux vont se trouver contrecarrées par l’intervention du seul et unique Nathan Creed, qui débute la nouvelle en charmante compagnie à l’étage du saloon de Tunner Town, avec sa bonne amie Maisy-Lou. La torpeur post-coïtale du pistolero des bas fonds est alors brutalement interrompue par une fusillade nourrie au rez de chaussée. N’écoutant que son instinct de héros de bas étage, c’est donc très logiquement que Creed quitte son lit d’amour et se rue en contrebas, où sa maestria pistolière a tôt fait de refroidir définitivement les ardeurs homicidaires de l’ahuri au lance-plasma qui arrosait le voisinage. Après identification, il s’avère que le coupable était un marginal sans feu ni lieu, et l’examen de sa dernière planque permet à notre héros de mettre la main sur une bouteille à moitié vide portant la mention de Panacée Patentée du Dr Marvo. Une discussion avec ce bon vieux Doc Haze (‘Firestarter, ‘Boyz in the Hive’), opérant comme coroner local le temps de se faire oublier, révèle également que le forcené (Plaz Tyburn) était en train de se transformer en Zombie de la Peste, précisément à cause de son ingestion répétée du cordial miraculeux. Jamais le dernier à investiguer des affaires louches, Creed décide de remonter la piste en se rendant jusqu’à Ferro’s Gulch, ville dont Tyburn revenait après avoir travaillé dans une ferme de fungis locale.

Comme on peut l’imaginer, la visite de courtoisie tourne vite à la foire d’empoigne. La faute au succès retentissant du bon docteur Marvo lors de son dernier passage dans la bourgade, qui a eu pour conséquence de transformer la totalité de la population en figurants de Zombicide : Dead or Alive. Creed s’amuse comme un petit fou avec ses pétoires, ses grenades et sa moto (les chevaux sont rares à Necromunda), et après avoir « sécurisé » le périmètre dans la mesure du possible, il décide de rattraper Marvo avant que ce dernier n’ait pu écouler sa came(lote) dans une autre ville, en suivant pour cela les traces laissées par son chariot. Notre héros arrive à point nommé pour ruiner le groove de l’empoisonneur, qui venait de miraculeusement faire remarcher un paralytique devant une foule ébahie. Quelques tirs de sommation font fuir les badauds, laissant Creed faire face à Marvo et sa bande de sbires, qui ne tient évidemment pas longtemps face aux prouesses ballistiques de notre héros. Assez toutefois pour laisser le temps au Docteur Maboul de s’enfuir à bord de sa carriole, ce qui permet à notre nouvelle de se terminer par une course poursuite trépidante et pétaradante. Au final, et comme on peut s’y attendre, Creed parvient à stopper sa proie d’une acrobatie taumekrouzienne, et Marvo finit empalé sur l’aiguille de la seringue qu’il réservait à son poursuivant. Comme la seringue en question contenait un concentré du poison dilué dans sa pernicieuse panacée, Marvo se décompose littéralement sur pied avant que le gunslinger n’ait pu lui mettre la main au collet et le morigéner bellement sur la mauvaiseté de ses actions. He got a taste of his own medicine, comme on dit à Nottingham. Notre propos s’achève sur un plan fixe sur l’horrible Joe le Pilier, qui jure intérieurement vengeance contre cet empêcheur de polluer en rond de Creed. Nul doute que ces deux là finiront par se croiser pour mettre les poings sur les scies…

AVIS :

Je ne m’attendais pas à grand-chose avec ce ‘Bad Medicine’, nouvelle de Nathan Creed oblige, mais je dois reconnaître que cette pilule là a été assez facile à avaler (see what I did here ?). Le scénario tient plutôt la route et n’est pas défiguré par des plot holes de la taille d’un cratère d’obus, le rythme est soutenu sans virer dans le frénétique, Green arrive à positionner cette petite aventure dans la chronologie creedienne à travers un cameo du bon docteur Haze et un rappel des épisodes précédents, les personnages sont toujours aussi clichés mais font illusion pendant les dix pages que dure la nouvelle, et on a même le droit à un peu de fluff en bonus. Si tous les épisodes de la geste du deuxième pistolero (sur deux, derrière Kal Jerico) le plus célèbre de Necromunda était du même acabit, l’humanité en serait sortie grandie. Contentons-nous de faire de ‘Bad Medicine’ le prime du chasseur d’icelles (celle-là est plus dure, je l’avoue), et restons-en là.

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Three Knights – G. McNeill [WFB] – #29 :

INTRIGUE :

WFB_Three KnightsLes trois frères Massone, Luc, Fontaine (?) et Belmonde (!?!), ont entrepris une quête d’aucuns considèreraient comme ambitieuse, pour le dire poliment : purger à eux seuls les ruines du Fort du Sang, autrefois bastion des tristement célèbres Vampires Dragons de Sang, et soigneusement évité par tous les voyageurs sains d’esprit depuis sa destruction il y a des décennies. Cette idée chevaleresquement stupide est celle de l’aîné du trio, Luc, qui s’est taillé une réputation de bretteur sans égal d’un bout à l’autre du Vieux Monde. Ses cadets (et par vertu de leur noms débiles, side kicks) ont accepté de lui prêter main forte dans son entreprise hardie, bien que ne disposant pas d’un pedigree aussi ronflant que Lulu. D’ailleurs, Belmonde n’est même pas encore un véritable chevalier du Royaume, ce qui vous situe le niveau moyen de la fine équipe.

Après avoir fait leur arrêt réglementaire dans le village bretonnien puant et boueux (Gugarde) situé sur la route du Fort, et avoir tout aussi réglementairement refusé d’écouter les sages conseils du vétéran couturé qui picolait à la taverne locale, et avait pu en son jeune temps se rendre compte par lui-même qu’un Vampire n’était pas un adversaire à prendre à la légère1, les frangins repartent le lendemain avec un guide en direction de la forteresse maudite. Les choses sérieuses et mortelles commencent réellement à la tombée de la nuit, lorsque les quatre montagnards amateurs se font attaquer par une meute de loups funestes, qui croquent prestement le guide et la mule de bât de l’équipe. Une nuit passée à prélever de la biodiversité pourrissante, et une journée à peiner dans la neige et le froid plus tard, c’est enfin le Fort du Sang qui se présente devant nos héros, qui entrent prestement se mettre au sec et se remettre de leurs émotions.

Guidés par Luc jusqu’à la salle des festins de la bâtisse abandonnée, les frères Massone se font cueillir comme des bleus par une vague de squelettes s’étant animés à la nuit tombée, et qui voient d’une mauvaise orbite trois punks à cheval venir squatter chez leurs ex-patrons. La quantité venant toujours à bout de la qualité, les chevaliers se font acculer dans un coin de la salle, et Fontaine finit embroché comme un döner kebab, au grand désarroi de ses frérots. Luc prend alors sa grosse voix et exige à parler au(x) directeur(s)… ce qui fait battre en retraite les squelettes et arriver un trio de Dragons de Sang, plus intrigués par la déclaration du paladin qu’il a réussi à tuer l’un des leurs qu’animés de chrétiennes (et pour cause, c’est pas le bon univers) intentions envers leurs hôtes du soir…

Début spoiler 1…Ayant prouvé ses dires en solotant une des brutes qui lui avait mal parlé, Luc abat ensuite ses cartes en décapitant en traître Belmonde, afin de prouver aux Dragons de Sang qu’il possède à la fois le talent martial et la fibre morale, ou plutôt son absence, nécessaires pour rejoindre leur ordre. En effet, le chevalier désire bénéficier de la vie éternelle dont disposent les Vampires, et ses grands discours de purge du Fort du Sang n’étaient en fait qu’une ruse pour attirer ses idéalistes de frangins jusqu’au repaire des fils de Harkon. Interloqué par cette demande excentrique, le Kastellan finit par s’exécuter et s’approche de Luc pour lui donner le baiser de sang…

Début spoiler 2…Ou plutôt lui cracher dans la jugulaire, car on se rend compte lors de l’attaque punitive sur Gugarde qui termine la nouvelle que le fier et brave chevalier s’est reconverti, contre sa volonté sans doute, en nécrophage ahuri. Pas le plan de carrière auquel Luc aspirait, mais une salutaire, si définitive, leçon de modestie inculquée à ce dernier par les très select Dragons de Sang. Après tout, le Roy dit nous voulons…Fin spoiler

1 : En bonus, Fontaine et Belmonde participent à la soirée open mic’ en reprenant leurs rôles de plus mauvais duo d’acteurs du Monde qui Fut.

AVIS :

Nouvelle très solide de la part de Graham McNeill, ‘Three Knights’ offre un concentré de grimdark à la sauce WFB à son lecteur à travers les péripéties plus ou moins chevaleresques de ses héros. En plus de mettre en perspective la proverbiale droiture des paladins de Bretonnie, qui tient finalement assez souvent de la légende urbaine rurale, cette nouvelle dispose d’une intrigue bien pensée et mise en place (une deuxième lecture de ‘Three Knights’ permet de repérer les jalons laissés par McNeill au cours des premières pages pour préparer sa conclusion), ainsi que d’une chute impeccable en termes d’exécution. Peut-être le meilleur court format de cet auteur pour Warhammer Fantasy Battle.

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In Remembrance – D. Abnett [40K] – #30 :

INTRIGUE :

40K_In RemembranceCommissionné par la Maison Chass de Vervunhive pour réaliser une statue commémorant l’héroïsme des Gardes Impériaux du Premier & Unique de Tanith (et seulement eux, feth les Narmeniens), le sculpteur Jeshua Thoru débarque dans les ruines de la ruche de Vervunhive peu de temps après la défaite des cultistes de Ferrozoica et la levée du siège de la spire. Autorisé à cotoyer les farouches et odoriférants Fantômes afin de prendre la mesure de ses sujets, notre artiste en sera quitte pour une plongée des plus réalistes dans la dureté de la guerre urbaine.

Accueilli à son arrivée par nul autre que le Colonel Corbec et quelques troupiers, Thoru commence son immersion par une visite à l’hopital militaire où Gaunt se remet péniblement de son tête à tête intense avec l’Héritier Asphodel. Sur le chemin, il commence à percevoir la grandeur d’âme des Tanith sous leurs abords débraillés, lorsque Corbec se met à lui parler de « ses vieux » avec des trémolos dans la voix tandis que Varl distribue altruistement des barres de ration aux orphelins de guerre. Let this man give his cookies, ou quelque chose comme ça. Un peu plus tard, le sculpteur est placé sous la large et poilue aile de Bragg, le temps d’une patrouille de routine dans le no man’s land de Vervunhive, dont le but est de traquer les derniers survivants de l’ost chaotique. Une activité tout à fait appropriée pour un commémorateur (qui s’ignore), et parfaitement sans danger, bien évidemment1.

Bien évidemment, l’escouade tombe dans une embuscade fomentée par les perfides Ferrozoicans, et, bien que Thoru prouve son utilité à deux reprises, d’abord en identifiant la position initiale de l’ennemi (pas aussi doué que les Tanith pour camoufler leur présence), puis en réparant sur le pouce le lance-flammes de Brostin, il ressort durablement marqué par l’expérience, et notamment la mort tragique d’une des seules victimes possibles d’Abnett, qui ne tuait pas encore ses personnages nommés à l’époque où prend place cet épisode2. Cette découverte sans filtre de la brutalité de l’existence des Gardes Impériaux plonge notre innocent Pygmalion dans les affres des PTSD, dont il parvient cependant à s’extraire en deux deux devant le magnifique esprit de corps dont font preuve les Tanith, et la dévotion manifeste qu’inspire le Commissaire Gaunt, veillé par une foule de fans transis de Verhunhive venant tout juste de s’engager sous les drapeaux pour ses beaux yeux3… qu’il ouvre d’ailleurs au moment même où Rawne vient lui faire une déclaration d’amour toute chimènique4. Cette brève immersion sera suffisante pour lui permettre de créer ce qui deviendra son chef d’œuvre, une statue de Garde Impériale coulée dans le métal des armes des béligérants de la batailled de Vervunhive, empruntant à chacun des Fantômes rencontrés par l’artiste durant son stage ouvrier. Passant, va dire à Terra que nous gisons ici pour avoir obéi aux ordres…

1 : Sauf pour les pauvres troupiers participant à la patrouille n’ayant pas la chance d’être des personnages nommés. Voyons voir… Bragg (non), Larkin (non), Milo (non), Brostin (non), Domor (non), Feygor (non), Baffels (non), Doyl (non), Yael (possible) et Mktag (possible). Et, guess what ?
2 : Mais qui avait déjà commencé à le faire au moment de l’écriture de cette nouvelle, comme il le fait perfidement remarquer au détour d’une phrase.
: Du temps où il en avait encore, mais je m’égare…
4 : « Va, je ne te hais point » devenant « Guéris crevard, que je puisse te tuer moi-même ». C’est beau tout de même.

AVIS :

Dans la saga des ‘Fantômes de Gaunt’, la défense de Vervunhive (‘Necropolis’) constitue l’un des épisodes les plus marquants, notamment parce qu’elle se traduit par une injection de sang neuf dans le régiment : Kolea, Soric, Daur, Criid, Curth… Autant de personnages faisant leur entrée dans le 1er et Unique à l’occasion de cette épique bataille urbaine, et considérés par de nombreux lecteurs comme aussi importants que les natifs de Tanith. Par ailleurs, ce roman, ainsi que celui qui le suit (‘Garde d’Honneur’) constituent ce que je considère comme étant l’Âge d’Or des Fantômes, ou la période bénie où toute notre petite galerie de bidasses vécut heureuse et (relativement) tranquille, avant qu’Abnett ne se mette à assassiner ses créations, choix compréhensible mais traumatique pour les fans que nous sommes.

‘In Remembrance’, parce qu’il se situe dans la droite ligne de Necropolis, est donc à considérer à la fois comme un épilogue de cet affrontement mémorable, et une préparation du second arc narratif de la série, au casting enrichi de quelques solides Vervunhivers. Abnett semble faire le bilan de son œuvre fantômatique, et prend soin de présenter de manière quasi exhaustive (il ne doit manquer que Caffran à l’appel) les têtes d’affiche de la série, depuis le convalescent Gaunt (dont la seule action sera d’ouvrir les yeux) jusqu’aux nouvelles recrues de Vervunhive, en passant par les bien connus Major Rawne, Try Again Bragg, Mad Larkin et autre Brin Milo. Performance notable, ce passage en revue n’est ni rébarbatif pour le lecteur vétéran (petites private jokes et autres références cachées à l’appui), ni cryptique pour le nouveau-venu, ce qui démontre encore une fois les solides compétences de Dan Abnett en matière de narration. Bien qu’assez classique dans son « intrigue » de nouvelle de Gardes  Impériaux, qui, bien sûr, devront faire le coup de feu face à une opposition musclée, ‘In Remembrance’ se laisse lire sans problème, et, malgré son caractère sérieux, voire  tragique à certains moments, adopte un ton singulièrement léger de temps à autres, comme lors du numéro de stand up improvisé de just joking Feygor, ou la conjuration farfelue de l’arrivée de l’Empereur sur une chèvre par le narrateur.

Présentant les Fantômes (privés de Gaunt pour cette fois) sous leur meilleur jour, peu de temps avant que ne s’engage la sanglante mais palpitante fuite en avant de ‘The Saint’, ‘The Lost’ et ‘The Victory’, ‘In Remembrance’ continue encore aujourd’hui à faire honneur à son titre, et reste dans doute la nouvelle qui concluerait le mieux la saga de Tanith, si une anthologie de cette dernière est un jour réalisée. En attendant, elle rappelera aux aficionados du Premier et Unique le « bon vieux temps », où les Fantômes n’en voyaient pas encore… I’m not crying, you’re crying.

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Vermilion Level – D. Abnett [40K] – #30 :

INTRIGUE :

40K_Gaunt's GhostsGoûtant d’un repos bien mérité de quatre jours à Cracia, centre de club Med de la taille d’une cité-ruche sur la planète de Pyrites, Gaunt et ses Fantômes s’occupent comme ils le peuvent, chacun trouvant un moyen original et potentiellement dangereux d’enfreindre les consignes données par les autorités militaires à propos de ce bref interlude dans leur vie de bidasses galactiques. Pour Bragg, Larkin, Varl, Caffran et consorts, cela consiste simplement en une petite excursion buissonnière en dehors du périmètre alloué aux braves permissionnaires, les activités récréatives proposées par les G.O. de Cracia n’étant semble-t-il pas à la hauteur des attentes des Tanith1. Tout ce beau monde est donc parti s’enjailler en zone froide, ou, bizarrement, l’ambiance semble plus chaude qu’à la soirée karaoké de leur hôtel.

Pour Rawne et son âme damnée de Feygor, vite rejoints par l’omniprésent Corbec, l’objectif est de constituer un stock de produits de contrebande à écouler par la suite à leurs camarades contre crédits sonnants et trébuchants. N’ayant pas les moyens de leurs ambitions, nos deux crapules optent pour la manière forte et descendent de sang-froid le parrain local qui leur avait obligeamment mis à disposition les denrées demandées. Comme quoi, on a bien raison de se méfier des émigrants, surtout quand on est un honnête mafieux. Pris en chasse par les gros bras du caïd décédé, le trio parvient à attirer ses poursuivants dans un hangar désaffecté, où leurs talents meurtriers d’experts infiltrateurs jouent à plein et leur permettent de ressortir de cette session d’escape game matinée de laser quest avec un score parfait de 20/20 (gangsters tués/coups tirés).

Gaunt, quant à lui, est arraché de l’enfer mondain que constitue une soirée entre gradés de la Garde par un message urgent et mystérieux transmis par une ancienne connaissance2. Accompagné de son fidèle Milo, coursier et chauffeur à ses heures, et d’un vieux camarade de la Scholam, le Commissaire Blenner, Gaunt débarque dans les bas-fonds de Cracia, et n’a que le temps récupérer un cristal contenant une information ultra confidentielle et potentiellement incriminante pour les plus hauts échelons du commandement de la Croisade de Sabbat, qu’une bande de commandos intente lâchement à sa vie, en plus de réduire son informateur en carpaccio. Il en faut cependant plus pour arrêter Ibra(m), qui réussit sans trop de peine, et avec l’aide de ses complices, à refroidir les ardeurs homicidaires du GIGN local.

Sur le chemin de retour, les rescapés croisent la route de cette vieille baderne de Gilead, huilé comme jamais et bien décidé, à l’aide de quelques-uns de ses braves compaings, à bastonner tous les fantômes sur lesquels ils arriveront à poser le gourdin, en punition d’une offense faite à l’honneur des sourcilleux Blue Blood de Volpone au cours d’une campagne précédente. Déclinant poliment mais fermement cette invitation, Gaunt, Milo et Blenner démarrent sur les chapeaux de roue et atteignent le lieu de la contre soirée régimentaire, où Corbec soigne sa popularité en distribuant largement le butin de ses propres aventures, sous le regard abattu de Rawne et Feygor. Courageaires mais pas témereux, Gilbear et ses nervis décident de passer leur tour, permettant à la petite fête de battre son plein jusqu’au bout de la nuit. Une fois encore, les Fantômes s’en sont sortis, mais Gaunt possède désormais une information qui risque fort de lui attirer quelques puissants ennemis…

 1 : En même temps, quand on doit gérer 500.000 Gardes le temps d’un gros week-end, j’imagine qu’on a d’autres chats à fouetter.
2 : Avec laquelle il a fait les 400 coups sur le monde d’Estragon Prime. Ca ne devait pas manquer de piment.

AVIS :

Il est de notoriété publique que Gaunt et ses ectoplasmes ont commencé leur illustre carrière dans les pages d’Inferno! à la faveur de nouvelles soumises par un tout jeune Dan Abnett, et qui furent plus tard collectées dans le deuxième opus de la série éponyme, Ghostmaker. Ce Vermilion Level est, comme expliqué en introduction du texte, une « victime collatérale » du succès rencontré par les martiales péripéties de l’héroïque Commissaire et de ses sbires, ayant été rédigé par Abnett juste avant que la commande du premier roman en bonne et due forme de la saga par la Black Library1 ne tombe. Conséquence de ce succès d’estime, qui se transformera bientôt en succès d’édition (à l’échelle du Hobby, s’entend), les événements couverts dans les 12 pages de Vermilion Level furent largement recyclés dans l’intrigue de First and Only. On peut toutefois noter une différence majeure, et potentiellement riche en conséquences pour la suite de la saga, entre la version originale et son héritière « romancée », en la personne du grand méchant cherchant désespérément à mettre la main sur le message confisqué par les amis de Gaunt, et remis à ce dernier en désespoir de cause. Alors que c’est le Lord High Militant General Dravere qui endosse la défroque de l’intrigant dans la Vdef, c’est bien Macaroth lui-même qui est soupçonné de pensées séditieuses dans le premier draft, ce qui ouvrait la porte à rien de moins qu’une séquelle de l’Hérésie d’Horus dans le Segmentum Pacificus. A-t-on gagné, ou perdu, au change, le lecteur en sera seul juge.

Ce contexte établi, on trouve en Vermillion Level une petite nouvelle d’action assez bien fichue, et démontrant pleinement le talent d’Abnett dans le « petit périmètre ». En l’espace de 12 pages, notre homme arrive en effet à articuler trois sous-intrigues distinctes de façon complète et convaincante, en utilisant de façon inspirée et appropriée des éléments antérieurs au récit (notamment Gilpanda et ses Cordons Bleus) pour enrichir ce dernier sans perdre le nouveau lecteur, et terminant son propos de façon nette et satisfaisante, en plus de laisser envisager les palpitants lendemains (qui saignent plutôt qu’ils ne chantent, mais c’est comme ça qu’on les aime) attendant Gaunt et Cie. Et quand je dis 12 pages, vous pouvez en retrancher les 3 pages introductives retraçant les derniers instants des vaisseaux impériaux ayant reçu le MMS crypté, contrepoint appréciable à la suite de l’action. Bref, si Abnett n’avait pas déjà validé son ticket de hot new talent avant la sortie de Vermilion Level, nul doute que cette nouvelle lui aurait obtenu le précieux sésame, étant une soumission objectivement supérieure, car plus riche, à ses précédents courts formats. Et, connaissant la suite des événements, on aurait tort de s’en plaindre.

1 :  Premier roman à plus d’un titre car First and Only a constitué l’une des toutes premières publications de la récemment fondée maison d’édition, en Août 1999. Cela ne nous rajeunit pas.

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Et voilà qui termine cette revue de l’année cinquième d’Inferno!, qui a présenté une agréable diversité de contenu tout au long de sa vingtaine de nouvelles, et permis de découvrir ou redécouvrir bon nombre de figures marquantes de cette époque flamboyante et révolue de la GW-Fiction. Rendez-vous dans quelques temps pour la suite de cette escapade infernale, avec l’année 6 !

WORDS OF BLOOD [40K]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du recueil ‘Words of Blood, publié par la Black Library en 2002 et consacré au côté 40K de la GW-Fiction. Comme la plupart des anthologies de cette époque, celle-ci est constituée en majorité de nouvelles éditées quelques années plus tôt dans les pages du bimensuel Inferno! (entre les numéros #19 et #28, pour être précis). La proverbiale exception venant confirmer la règle se trouve être ‘Ork Hunter’, petite abnetterie inédite venant compléter le sommaire.

Words of Blood

En plus de ce célèbre (à l’échelle du Zhobby, tout du moins) contributeur, on retrouve un trio d’auteurs vétérans signant comme Papa Gaunt – même si c’est plutôt Gregor Eisenhorn qui est de sortie cette fois-ci – deux entrées chacun dans ce ‘Words of Blood’ : Ben Counter, à qui nous devons la nouvelle éponyme, Gav Thorpe et Graham McNeill. Le line up est renforcé par trois noms qui évoqueront peut-être des souvenirs aux connoisseurs ou aux plus anciens des lecteurs de cette chronique : Andy Chambers, Simon Jowett et Jonathan Curran (ici rebaptisé Curren). Côté personnage majeur de la GW-Fiction, mis à part le grumpysitor précédemment nommé, on remarque la présence d’un jeune et prometteur Sergent Ultramarines dénommé Uriel Ventris, qui aura peut-être la chance de faire une carrière littéraire dans les années qui suivent, et celle du taulard au cœur d’or (non) Kage… Le cadre étant planté et les protagonistes introduits, il est temps de saisir l’objet du délit à bras le corps et de commencer à numéroter ses abattis. Ça va saigner.

Words of Blood

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Words of Blood – B. Counter :

INTRIGUE :

40K_Words of BloodSur la planète quasiment abandonnée d’Empyrion IX, le Commandeur Athellenas des Black Templars doit relever un défi de taille : empêcher une armée de 6.000 cultistes de Khorne de s’emparer du seul spatioport de ce monde minable, ce qui permettrait aux hordes dépravées et mal fringuées du terrible Manskinner de fondre sur Macharia pour y commettre un génocide. Le tout avec seulement trente Space Marines à disposition. Le rapport de force n’est pas en faveur de l’Astartes, mais Athellenas a… un plan (et pour un Black Templar, c’est déjà beaucoup). Le seul problème, c’est que ses frères risquent de ne pas l’apprécier du tout, ce qui va le contraindre à jouer très finement la partie1.

Du côté adverse, les préparatifs vont bon train pour ce qui ne devrait être qu’un massacre en bonne et due forme entre deux factions peu réputées pour leur tactique d’évitement. Le Manskinner, qui a reçu de sa divinité tutélaire le don démoniaque « parole de sang », ce qui lui permet de plonger son audimat dans une folie furieuse (et non pas de se mordre la langue à chaque fois qu’il prononce une phrase), prononce une petite causerie d’avant-match qui met ses ouailles de bonne humeur, et envoie sa cavalerie (si si) à l’assaut des positions retranchées des Marines. Il se doute que les fringants hussards ne feront pas long feu face à l’arsenal des Black Templars, mais cela devrait laisser le temps nécessaire au gros de ses forces d’arriver à portée de charge.

Conformément à ses pronostics, la brigade légère du bien nommé Die(ss) tombe glorieusement au champ d’honneur, sur le score sans appel de 210 morts à trois doigts tranchés. C’est alors que le rusé Athellenas dévoile la profondeur insondable de son génie stratégique, en ordonnant la retraite. Stupeur et bégaiements chez les meilleurs de l’Empereur, qui n’ont pas pour habitude d’abandonner du terrain à l’ennemi, à plus forte raison un temple millénaire à la gloire de Pépé, comme celui qu’ils occupent actuellement. Il faut donc claquer quelques PC au Commandeur pour passer le stratagème « Y a pas de mais », permettant un repli en bon ordre jusqu’à la ville voisine où une nouvelle position défensive est installée sans tarder.

Si cette manœuvre n’a pas fait consensus chez les Black Templars, elle a cependant compliqué la situation du Manskinner, dont l’emprise sur les éléments les plus foufous de son armée commence à s’effilocher. Malgré son éloquence sans pareille – en même temps, la plupart de ses suivants ont perdu l’usage de la parole, donc la compétition n’est pas féroce – Manski’ ne parvient pas à empêcher un de ses lieutenants, le Caporal Recoba, de partir à la chasse aux Marounes sans attendre les retardataires. L’ennui est que le charismatique officier embarque avec lui deux mille copains, divisant l’armée des cultistes en deux. Comme on peut s’y attendre, cet empressement à porter le combat à l’ennemi sera fatal pour Recoba et ses suivants, qui tomberont sous les bolts et les coups des Space Marines lors d’une embuscade savamment orchestrée par Athellenas et ses Sergents.

Cette nouvelle victoire est cependant rapidement ternie par la décision de Big A. de battre à nouveau en retraite, cette fois-ci pour une défense sur la ligne (ici le spatioport d’Empyrion IX). Cette annonce dévaste le Devastator Valerian, qui menace de se faire renégat plutôt que de commettre la forfaiture de la marche arrière, et n’accepte finalement de se plier aux instructions de son supérieur qu’après s’être fait menacer de sanctions disciplinaires dans cette vie et dans la suivante.

De son côté, le Manskinner enrage (comme d’hab’ vous me direz) de la couardise manifeste de ses adversaires, qui rend son armée sevrée de violence de plus en plus difficile à contrôler. Ayant compris qu’il s’agit d’un stratagème pour désorganiser ses forces, il tente de calmer les ardeurs de ses cultistes en exaltant les valeurs de la vengeance et de la patience, mais se fait brutalement interrompre par son dernier sous-fifre (Kireeah) avant d’avoir pu terminer son sermon. Bien que l’impoli paie son impudence de sa tête, proprement séparée de son corps par la paire de ciseaux géants que le Manskinner arbore à la place de son bras droit – c’est pratique pour inaugurer les bâtiments, je me demande pourquoi Charles III ne s’en est pas déjà équipé – le mal est fait et les Khorneux se lancent dans un sprint éperdu en direction du spatioport. Après avoir tenté de remettre un semblant d’ordre dans la horde en cisaillant de droite et de gauche, Manski’ décide de se joindre à la fête car après tout, les Marines n’ont plus nulle part où aller et l’avantage numérique est toujours largement en faveur des rouges…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur le besoin pathologique des Khorneux de cogner sur quelque chose ou quelqu’un dans les plus brefs délais, qui va jouer un bien mauvais tour aux hérétiques. Alors qu’ils ne sont plus qu’à quelques dizaines de mètres de leurs cibles, leur soif de sang finit par se retourner contre eux et l’armée du Manskinner se transforme en battle royal géante, de laquelle seuls quelques survivants confus et blessés émergent à la fin des combats pour tomber aussitôt sous les coups des Marines. C’était ce sur quoi comptait Athellenas, qui a interdit à ses frères d’ouvrir le feu pour ne pas permettre aux cultistes de se reconcentrer sur leurs priorités. Malin. Ce qu’il l’aurait été encore plus, ce serait d’avoir partagé son plan avec ses hommes pour s’assurer que tout se déroule bien, plutôt que de compter aveuglément sur la discipline et la loyauté vacillante de ces derniers. Mais comme Athellenas l’explique doctement à Valerian une fois la bataille remportée, les meneurs n’ont pas à se justifier auprès des exécutants. Ce n’est pas avec une telle mentalité que notre héros gagnera le prix de camaraderie, mais les résultats parlent d’eux-mêmes, et c’est plus qu’assez au 41ème millénaire…Fin spoiler

1 : Je choisis de penser qu’il s’est équipé d’un poing énergétique (qu’il n’utilisera pas une fois de la nouvelle, malgré ce que l’illustration grimdark à souhait laisse penser) pour donner l’impression à ses bourrins de collègues qu’il serait le premier à sauter dans la mêlée. Mais la moufle ne fait pas le moine de l’espace…

AVIS :

Words of Blood’ fait partie des nouvelles écrites pour explorer une situation paradoxale ou problématique si on se réfère au background canon de univers de Games Workshop1, ici : « que se passerait-il si le seul moyen pour des Black Templars de remporter une bataille était de battre en retraite ? ». Je précise qu’à l’époque où cette histoire a été écrite, les zélés fils de Dorn prenaient leur serment de défense de l’Imperium de manière beaucoup plus littérale – certains esprits chagrins pourraient dire « basse du front », mais il ne faut pas écouter ces vils persifleurs – que maintenant. Sur ces prémisses intéressantes, en tout cas plus qu’une vulgaire empoignade entre Space Marounes et mutants/hérétiques/Xenos (rayer la ou les mentions inutiles), Ben Counter développe un propos qui, s’il accuse aujourd’hui sérieusement son âge, mérite encore la lecture à mon sens.

En effet, si on fait abstraction des quelques éléments surannés de ‘Words of Blood’ (le serment de non-reculade des Black Templars, les attaques de cavalerie…), la trame de l’histoire reste solide. Mieux encore, cette nouvelle présente un parallélisme aussi élégant que satisfaisant entre les dilemmes tactiques et managériaux auxquels sont confrontés les deux commandants ennemis. Tant Athellenas que le Manskinner doivent en effet réfréner les penchants naturels de leurs troupes pour espérer l’emporter, et composer avec la mauvaise volonté de ces dernières à obéir à des ordres avec lesquels elles ne sont pas en phase. À ce petit jeu, la discipline naturelle des Space Marines finit par l’emporter (mais de très peu), provoquant la fin des hordes hérétiques de la manière la plus Khorneuse qui soit. Le vieux fluffiste qui sommeille en moi a d’ailleurs failli verser une larme (de sang) en lisant la harangue de la dernière chance faite par le Manskinner à ses troupes indisciplinées juste avant qu’elles ne piquent leur sprint fatal vers le spatioport d’Empyrion IX. Car oui, Khorne était dans l’archéofluff une divinité plus complexe que l’immonde bourrin qu’il est devenu au fil des versions2, et Counter mérite une accolade pour avoir reflété ces fifty shades of red dans sa nouvelle.

Boni appréciables, il s’est également donné la peine de développer un minimum sa galerie de personnages (les plus intéressants étant le Manskinner philosophe et ses lieutenants exaltés), et se révèle plutôt généreux en termes de fluff Black Templar, même s’il est permis de douter de la validité de ces informations plus de vingt ans après l’écriture de cette nouvelle (à l’époque, cette faction ne disposait pas de son propre Codex, et on pouvait donc y aller franco sur leur background). Pour ne rien gâcher, la nouvelle se termine par un petit twist final, un peu ruiné par le TGJSUO (Ta Gu*ule Je Suis Un Officier) que l’aimable Athellenas décoche au pauvre Valerian, mais on n’en tiendra pas rigueur à l’auteur. Bref, même si ‘Words of Blood’ a un peu vieilli depuis sa sortie (en 2000, on peut être miséricordieux), il elle ça se laisse lire sans problème encore aujourd’hui.

1 : Marc Gascoigne indique dans son introduction de l’anthologie ‘Let the Galaxy Burn’ que la Black Library a été (au moins en partie) créée à cette fin. C’est dire si ce « genre » est important.
2 : Quand on voit les dernières entrées du Codex World Eaters, on ne s’étonne pas que le mot « subtilité » s’écrive avec neuf lettres, et non pas huit…

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Raptor Down – G. Thorpe :

INTRIGUE :

40K_Raptor DownNous retrouvons le Commandant Jacques Jaeger de l’escadron Raptor, après les évènements couverts dans ‘Acceptable Losses’, et la prise de fonction compliquée et sanglante de notre héros à l’occasion d’une bataille spatiale contre un Rok Ork. 18 mois plus tard, le Divine Justice, croiseur impérial auquel les Raptors sont rattachés, est passé à autre chose, et fait partie de la flotte d’invasion du système de Mearopyis, que l’Imperium cherche à reprendre aux Noctal après quelques millénaires d’atermoiements (saleté de bureaucratie). Ayant eu largement le temps de se familiariser avec son nouveau poste, de se faire accepter par ses hommes et de terroriser les nouvelles recrues venues remplacer les pertes subies au cours de  la campagne précédente, Jacques le Fataliste1 supervise les opérations de soutien du déploiement de la Garde Impériale au sol, qui consistent surtout à aller bombarder les cibles les plus juteuses à la surface de la planète capitale du système, tâche grandement facilitée par l’absence de chasseurs à capacité de projection spatiale dans le camp d’en face, ce qui permet aux Maraudeurs de frapper avec une impunité assez totale.

Chargés d’une nouvelle mission de démolition de l’infrastructure militaire locale, les escadrons Raptor et Storm, accompagnés  de leurs écrans de chasseurs (pour une fois qu’ils sont là, ces vole au flanc) quittent leur vaisseau mère pour ce qui ne semble être qu’une formalité pour ces pilotes aguerris. Malgré la tentative malheureuse d’interception de la part des Noctal, prestement contrecarrée par le professionnalisme et les gros flingues impériaux, tout semble baigner dans l’huile de moteur pour Jaeger et ses hommes, jusqu’à ce que ce dernier ait la malheureuse et déplorable idée de… prendre une initiative. Ahlàlà. Pour sa défense, son projet d’attaque d’une colonne blindée Noctal, repérée par l’esprit de la machine d’un missile2, et dont l’utilisation fourbe de la géographie locale avait permis d’échapper aux scanners de la flotte jusqu’ici, partait d’une bonne intention : protéger l’avance des bidasses de la Garde et les empêcher d’être pris en tenaille par les défenseurs. Malheureusement, les grands projets de canyoning de Jaeger, pour prometteurs qu’ils aient semblé sur le papier (en voilà une activité de team building qu’elle est bonne !), se trouvent rapidement et violemment contrariés par la puissance de feu des assaillis. Et même si Thorpe ne se donne pas vraiment la peine de décrire la manière dont les Noctal parviennent à dégommer l’invincible armada de manière aussi brutale, le résultat de l’accrochage n’est pas franchement en faveur des Impériaux. Bien que ces derniers aient pu larguer quelques missiles sur zone, le bilan est très lourd, et même Jaeger ne s’en sort pas indemne, son appareil étant lui aussi abattu en plein vol, forçant l’impulsif et inconstant Commandant3 à évacuer la carlingue en compagnie de ses hommes. Se réveillant avec une jambe cassée dans le désert de Mearopyis, Jacquou le Croqueur de feuille de match doit maintenant digérer les conséquences humaines et matérielles de son coup de sang : avec deux tiers de ses Maraudeurs et la moitié des Thunderhawks passés en perte et profit, le bilan est lourd pour Herr Jaeger. Cela en valait-il la peine ? C’est sur cette question lourde de sens que nous quittons notre héros, qui pourra attendre d’être secouru en dessinant des faucons. C’est ça d’être une buse.

AVIS :

Suite de l’acceptable Acceptable Losses, Raptor Down donne l’occasion à Gav Thorpe de nous tenir au courant de l’évolution de carrière ce bon vieux commandant Jaeger, et met l’escadron de ce dernier aux prises avec un nouvel ennemi et sur un nouveau théâtre d’opérations. Après l’espace froid et mortel qui a vu les Raptors aller au casse-pipe contre un Rok, nous sommes donc témoins d’une excursion atmosphérique dans les déserts de Mearopyis, ce qui illustre bien la versatilité des Maraudeurs impériaux. Sur la forme, la nouvelle de Thorpe se révèle être d’un niveau sensiblement égal à ses œuvres « spatiales » précédentes, c’est-à-dire très correct. Si on peut critiquer la prose de notre homme à bien des égards, il faut lui reconnaître une capacité à dépeindre un engagement aéronautique/spatial de manière convaincante et intéressante, beaucoup mieux que la plupart de ses collègues en tout cas. Sa maîtrise des unités (tant spatiales4 que temporelles5) et des facteurs propres à ce type de combat, comme la vitesse et la direction du vent, ou le niveau de carburant et des munitions embarqués rendent la lecture des péripéties aériennes de l’escadron Raptor plutôt prenante. Thorpe fait même du zèle en intégrant en début de récit une retransmission d’un affrontement spatial entre la flotte impériale et son homologue Noctal, que le supérieur de Jaeger se  repasse en boucle comme d’autres matent un top 10 NBA. Petit plaisir coupable, que nous lui pardonnons sans mal puisque le résultat est là aussi assez qualitatif.

L’intrigue et la construction de Raptor Down, en revanche, s’avèrent être moins satisfaisantes. La première est une variation sans originalité du scenario d’Acceptable Losses (un escadron de Maraudeurs chargé d’une mission où rien ne se passe comme prévu), ce qui n’est en soit pas un gros problème puisque la possibilité de Thorpe d’innover sur le sujet est passablement limitée (un Maraudeur, ça maraude, poingue). Ce qui est moins acceptable à mes yeux est la manière dont l’auteur fait passer Jaeger de Mr Baillezeubouque à Dr Folamour en l’espace de deux paragraphes, le chef d’escadre précautionneux se muant en tête brûlée sans qu’aucun élément préalablement établi par Thorpe sur le caractère de son personnage ne puisse laisser augurer ce changement radical de tempérament. Autre point plutôt mal géré par le Gav, le raid des Maraudeurs sur la colonne blindée, torché en même pas une page, et qui tient plus du tir au pigeon que de l’attaque en rase-motte. Le fait qu’on ne voit même pas à qui les impériaux sont confrontés, ce qui ne permet pas de comprendre pourquoi ils se font ainsi décimer par un adversaire totalement à leur merci sur le papier (à moins que les Raptors aient eu la malchance de tomber sur un convoi DCA Noctal), annihile toute tension narrative, les (bol)os des as se faisant canarder (un comble pour des raptors6) en l’espace de quelques secondes. Finalement, la conclusion même de la nouvelle ne m’est pas apparue comme particulièrement maîtrisée, les états d’âme douloureux de Jaeger alors qu’il se retrouve isolé avec ses hommes en territoire ennemi, ne suscitant qu’un distrait « so what ? » chez votre serviteur. À titre personnel, je pense que Thorpe a laissé ainsi la porte ouverte à un nouvel épisode (à ma connaissance jamais écrit), et que cette fin n’en était en fait pas vraiment une. Pas de chance, cela n’a débouché sur rien, et la dernière image que le lecteur emportera du commandant Jaeger sera celle du matelot du radeau de la Méduse fixant l’horizon d’un œil torve, le menton dans la main. Ce qui n’est pas commun, avouons-le.

1 : Il reconnaît lui-même qu’il n’est jamais heureux. Sauf quand il vole. Et encore, il stresse tellement que j’ai du mal à voir quel plaisir il tire de l’expérience. Pauvre bonhomme.
2 : On peut remercier le Techno-Adepte Ferrix, l’homme qui murmurait à l’oreille des (AGM-119) Pingouins.
3 : Pour un gars qui avait passé la nouvelle à ressasser son amour des plans qui se déroulent sans accrocs et la nécessité de se conformer aux règles établies, surtout quand elles touchent à la Santé & Sécurité, décider de se la jouer berzerk à la première colonne blindée, c’est assez surprenant.
4 : Quand on est un pilote de Maraudeur, 150 kilomètres, c’est proche.
5 : Quand on est un pilote de Maraudeur, 3 minutes, c’est long.
6 : ‘Rapace’ en anglais. Rien à voir avec les dinosaures donc.

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Chains of Command – G. McNeill :

INTRIGUE :

Chains of CommandEngagé dans la campagne de pacification de Thracia avec un contingent d’Ultramarines placé sous le commandement du Capitaine Idaeus, le Sergent Uriel Ventris a été chargé de mener l’assaut sur le pont 2-4, tenu par les rebelles ayant eu l’audace de se soulever contre le bienveillant Empereur, et qu’il convient de faire sauter pour éviter que la contre-attaque de la Garde Impériale en direction de la capitale planétaire ne soit prise de flanc. Après quelques paragraphes de « mes sens sont vraiment trop développés lolilol » #ImTheBest #YouCantWriteAstartesWithoutStar, qui expliquent en grande partie pourquoi personne n’aime les Ultramarines, Ventris accomplit sa mission, déclenchant un assaut en règle de ses petits copains bleu pervenche et vert sapin sur la position adverse. Désespérément surclassés, les défenseurs se font hacher menu, et les meilleurs de l’Empereur s’organisent pour tenir le pont assez longtemps pour permettre au vénérable Techmarine Tomasin de placer les explosifs qui permettront de faire écrouler l’ouvrage d’art dans la gorge en contrebas.

Nous faisons la connaissance du Capitaine Idaeus, un officier vétéran et proche de ses hommes, connu pour son approche distanciée du saint Codex Astartes, ce qui n’en finit pas de sidérer le rigoriste Ventris. Ce même Idaeus a d’ailleurs fait montre de ses tendances libertaires en menant la charge contre un nid de bolters lourds, au lieu d’attendre le soutien du reste de ses hommes, comme ce planqué de Guilliman l’avait pourtant préconisé dans ses écrits. Depuis cinquante ans qu’ils combattent ensemble, Idaeus n’a pas réussi à convaincre son bras droit de l’avantage de s’écarter de temps en temps du manuel d’utilisation de la guerre écrit par le Primarque, et ce n’est pas aujourd’hui que ça va ch… Ah, on me dit dans l’oreillette que c’est précisément l’objet de cette nouvelle. Bigre.

Comme tous les vétérans dignes de leurs médailles, Idaeus fait confiance à son instinct, et ce dernier lui hurle (il est un peu sourd) que quelque chose en tourne pas rond, malgré le fait que la mission se déroule jusqu’ici parfaitement comme prévu. Ce malaise le conduit à mener une mission d’inspection de l’autre côté du pont, Ventris à ses côtés, pour juger du boulot effectué par les Scouts déployés par les Ultramarines en territoire ennemi. Et, évidemment, il s’avère qu’une importante colonne blindée progressait discrètement (c’est possible si on met des patins sur les chenilles) en direction du pont, ce qui va devoir forcer le vénérable Tomasin à se bouger les vénérables miches, ce qui n’est pas facile quand on est plus refait qu’un Iron Hands en fin de carrière (souvenir d’une rencontre torride avec un Carnifex entreprenant sur Ichar IV). Tout aussi évidemment, rien ne se passe comme prévu à partir de ce moment, les Scouts, le Thunderhawk qui devait évacuer les Ultramarines, et le vénérable Tomasin tombant tous sous le feu de l’ennemi, ce qui force Idaeus et ses compagnons à monter une défense désespérée du pont, le temps que 1) un autre transport arrive, et 2) quelqu’un trouve une idée brillante pour faire péter la passerelle, ce qui reste tout de même l’objet principal de la mission de nos marsouins énergétiques.

Je vous passe les longues scènes de baston dont nous gratifie McNeill, et qui permettent à Ventris de montrer qu’il en a dans le slibard, pour aller directement au moment où notre futur héros réalise qu’il suffit de déclencher une charge de démolition à proximité des explosifs posés par l’irrécupérable Tomasin pour déclencher une réaction en chaîne qui devrait provoquer les résultats escomptés. Petit problème, l’escouade de Space Marines d’Assaut envoyés réaliser cette mission se fait pincer en chemin par les Night Lords qui coordonnent la rébellion chaotique, et les incapables finissent crucifiés sur le pare chocs des Rhinos des fils de Curze pour leur apprendre la vie. Devant ce spectacle insoutenable, Idaeus et Ventris sont très colère, et cette rage leur permet de repousser l’assaut des renégats au prix de lourdes pertes. Alors que le deuxième Thunderhawk approche de la position intenable des Ultramarines, l’heure des choix arrive pour la bleusaille…

Début spoiler…Le noble Idaeus décide de partir faire exploser le pont à la mano, malgré ses chances de réussite quasi nulles, et ordonne à Ventris de mener les quatre rescapés de cette folle nuit, ainsi que son épée énergétique de maître, jusqu’au point d’extraction. Les cœurs gros, le Sergent s’exécute, et est témoin de l’héroïque sacrifice de son mentor dans les poutrelles et les travées du pont 2-4, la bande de Raptors laissée en garnison par les Night Lords ne parvenant pas à lui régler son compte avant que le Capitaine fasse feu avec un pistolet plasma dérobé à l’ennemi sur une charge de démolition laissée négligemment sur place1. C’est donc une victoire indéniable pour l’Imperium, et le début de la saga d’Uriel Ventris, qui héritera du commandement de la 4ème Compagnie à la suite de la campagne de Thracia.Fin spoiler

1 : On pourrait aussi se demander pourquoi les Night Lords n’ont pas détaché les explosifs laissés par le vénérable Tomasin sur les piliers du pont quand ils en avaient l’occasion. Encore une preuve que l’abus de Chaos est mauvais pour le cerveau.

AVIS :

Si l’idée de lire une nouvelle d’action dont le héros est un Ultramarines peut sembler intrinsèquement barbante à un lecteur de 2020, qui a sans doute pu pratiquer l’exercice à de nombreuses reprises grâce/à cause de l’obsession de la Black Library pour ce genre de productions, il faut être juste avec Graham McNeill et Uriel Ventris, et rappeler que ‘Chains of Command’ a été à sa sortie (2001) une des premières et plus abouties Space Marinades (saveur vanille) qui soient. Les innombrables ersatz et proxys publiés depuis ne l’ont pas aidé à bien vieillir, ni le style de l’auteur, ni les personnages mis en scènes, ni l’intrigue exposée n’étant particulièrement dignes d’éloges, mais le résultat n’est pas indigne pour autant. À l’époque où il est attendu d’un héros Space Marines un peu plus qu’un grade de Capitaine et une vague tendance à se poser des questions existentielles (ce qui était suffisant il y a 15-20 ans), je laisse le soin au lecteur de décider si une figure comme Uriel Ventris est toujours pertinente, ou bien s’il est temps d’accorder une retraite bien méritée à l’aïeul de tous les héros d’action énergétique de la Black Library.

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Loyalty’s Reward – S. Jowett :

INTRIGUE :

40K_Loyalty's RewardNotre histoire commence par une scène tendue à l’arrière de l’honorable établissement du Cochon PFendu, taverne située à proximité du spatioport de Praxis, cité prospère d’Equus III. Mikhail Kravi, jeune loup à l’ambition féroce et bras droit d’un des Protektors affiliés à la puissante Maison Gaudi, est venu avec quelques gros bras de ses amis « persuader » le marchand Leon Kleist, un peu trop porté sur la dive bouteille pour son propre bien, d’offrir un superbe présent au nouveau Graf Gaudi lors de son intronisation prochaine. Cela serait un moyen judicieux de faire oublier à ce dernier les mots un peu lestes qu’un Leon rond comme une queue de pelle a eu à son égard il y a quelques jours, et dans une cité mise en coupe réglée par de puissants gangs depuis des siècles, s’attirer l’inimitié d’un Graf n’est pas une perspective attrayante. Convaincu par l’argumentaire de Mikhail autant que par son solide crochet du gauche, Leon le Persiffleur se fait un honneur de remettre à Viktor Gaudi une babiole hors de prix dès le surlendemain, lors de la cérémonie durant laquelle le jeune héritier prend officiellement le titre et la place de feu son grand-père Bruno.

Alors que Papi Gaudi préférait maintenir des relations cordiales et éviter les affrontements larvés avec les autres Maisons de Praxis, Viktor nourrit des rêves de conquêtes urbaines. Bien que sa faction compte parmi les plus puissantes de la ruche, elle n’est pas de taille à affronter frontalement tous ses rivaux… jusqu’à ce qu’un marchand (Brek) se présente avec une occasion en or : une cargaison de catapultes shuriken reconditionnées, qu’il est prêt à céder à vil prix au Graf ambitieux. C’est le début d’une OPA agressive sur les territoires des autres Maisons, dans laquelle Mikhail s’illustre particulièrement en organisant l’assassinat du Graf Reisiger, abattu avec ses conseillers les plus proches alors qu’ils dînaient dans un kebab de luxe. Récompensé par l’élévation au rang de Protektor, Mikhail est convié avec tous ses collègues à une petite soirée au manoir Gaudi, et se réveille le lendemain matin dans son appartement, nu comme un ver, couvert de sang et pris d’une gerbe carabinée. La nuit a dû être bonne !

Début spoiler…Les quelques souvenirs qui finissent par lui revenir après s’être envoyé une demi-bouteille de cointreau pour se remettre les idées en place ne sont cependant pas très sympathiques. Il a de vagues réminiscences de litanies prononcées dans une langue inconnue, en direction d’un bloc d’obsidienne couvert de runes bizarres. N’ayant pas atteint sa position en étant complètement obtus, et étant un croyant convaincu et pratiquant du culte impérial (comme la plupart des habitants de la pieuse Equus III), Mikhail comprend vite qu’il a assisté à des activités encore plus prohibées que la moyenne, et qu’il est de son devoir d’en alerter les autorités compétentes l’Ecclesiarchie. Il sèche donc le nouvel afterwork organisé par Viktor Gaudi et son pote Brek pour aller se confesser dans le temple le plus proche, espérant que sa coopération désintéressée (en partie tout du moins) lui permettra d’échapper au jugement réservé aux cultistes, même involontaires.

Le hasard faisant bien les choses, un Inquisiteur de l’Ordo Malleus (Belael) passait dans le coin, en même temps qu’un contingent de Chevaliers Gris. Tout ce petit monde débarque fissa à la casa Gaudi, et pas pour causer modernisme catalan, croyez-le bien. Au terme d’une opération rondement et prestement menée, tous les membres de la cabale de Tzeentch sont passés par le bolter, scellant la fin de la Maison Gaudi. Et la balance Mikhail, me direz-vous ?

Début spoiler 2…Bien qu’il se voie déjà pardonné, ordonné Prêtre et oint Cardinal sur un monde très lointain en reconnaissance de son impeccable probité, Belael avait d’autres idées en tête lorsqu’il lui a promis une « juste récompense » en échange de sa collaboration totale. Ayant été infecté par une présence démoniaque pendant sa soirée blackout chez Totor, comme tous les Protektors invités, Mikhail n’héritera donc que d’un rituel de purification (privé, c’est déjà appréciable) et d’un bolt dans la tête. Ce n’est pas pour rien qu’on parle du fardeau et non du bonheur de la loyauté…Fin spoiler

AVIS :

Bien des années avant le lancement de Warhammer Crime et de son approche résolument urbaine et quotidienne du 41ème millénaire, Simon Jowett signait avec ‘Loyalty’s Reward’ une très bonne nouvelle dans ce registre low-key. Librement inspirée du Parrain de Coppola, et relevée d’un zeste de conspiration chaotique à la Eisenhorn dans sa seconde moitié, cette histoire démontre qu’il est tout à fait possible d’intéresser le lecteur sans avoir besoin de mettre en scène des batailles gigantesques ou des machinations à l’échelle galactique. L’immersion est réussie, l’intrigue se déroule de manière fluide et parfois assez inventive pour de la GW-Fiction (petit Mcguffin réussi avec le tabassage du pauvre Leon en introduction) : c’est un travail soigné auquel on a droit. Mon seul petit regret porte sur le choix de Jowett du Chaos comme antagoniste, alors que les symptômes éprouvés par Mikhail le lendemain de sa « cuite » faisaient plutôt penser à une infestation Genestealer, ce qui aurait été (à mes yeux) encore plus viscéral – à tous niveaux. Top qualité.

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Deus Ex Mechanicus – A. Chambers :

INTRIGUE :

Deus Ex MechanicusL’arrivée sur Naogeddon, monde mort et terne par excellence, de l’ingénieur et Techno-Prêtre (double cursus, t’as vu) Lakius Danzager et de son acolyte Osil manque de très mal se finir pour nos deux personnages, embarqué à bord d’un vaisseau à l’autopilote très bas de gamme. En chute libre depuis l’atmosphère haute de la planète, la navette occupée par les envoyés du Mechanicus est rebootée à temps par le dégourdi Lakius pour éviter un crash mortel à la surface désertique de ce roc sans vie, mais accueillant des ruines très anciennes qu’un Magos Explorator (Egal) souhaite étudier. En tant que spécialiste de la cryo-stase, Lakius dispose d’une expertise précieuse en matière de compréhension de technologie Necron (à ce stade, vous aviez sans doute déjà deviné qu’on prenait ce chemin…), et Egal l’a donc réquisitionné pour assister sa petite équipe de super geeks.

A peine remis de leur atterrissage mouvementé, Lakius et Osil doivent encaisser une nouvelle expérience traumatisante : l’attaque du camp du Mechanicus par quelques escouades de Guerriers Necrons, vomies comme toutes les six heures par la Necropole encore endormie qu’Egal a commencé à explorer. Bien que l’effet de surprise ne soit pas de leur côté, et que les servants de l’Omnimessie puissent compter sur une cohorte de Prétoriens ainsi que de solides fortifications pour les défendre, les robots squelettiques vendent chèrement leur châssis, forçant les adeptes à partir à la découverte de la crypte exhumée par le Magos avec une protection réduite.

De manière très prévisible, la progression du petit groupe (Egal, Lakius, Osil et quelques personnages secondaires à l’espérance de vie très limitée) rencontre une résistance qui va croissant, depuis des marches très hautes qui obligent les Prétoriens à rouler à deux à l’heure, jusqu’à des champs magnétiques générateurs de trouille, ou plus prosaïquement des vagues de Scarabées kamikazes. Au bout du compte, Lakius et Egal se retrouvent seuls dans la salle des bornes de chargement sarcophages de la Nécropole, tandis qu’Osil, qui s’est pris quelques échardes dans la fesse gauche pendant l’expédition indoor, a été ramené au campement de base par le dernier Pretorien pour désinfection et pose de pansement. La tension est à son comble…

Début spoiler…Commençons par évoquer le destin d’Osil, que son maître a chargé d’une mission simple mais capitale : réveiller au plus vite l’Assassin Eversor qui végète dans la soute de leur vaisseau. Lakius soupçonne en effet que la Necropole est en train de se réveiller, et que seule l’intervention d’une machine à tuer bourrée de Red Bull a une chance d’enrayer cette trajectoire menaçante. Malheureusement, la navette du Techno-Prêtre s’est fait coloniser par une nuée de… barnacles (vous croyiez que les Necrons s’en étaient tenus aux scarabées ? erreur) métalliques pendant l’absence de ses propriétaires, empêchant l’acolyte de sortir le tueur de sa torpeur. Voilà qui est dommage.

De leur côté, Lakius et Egal récupèrent un « Bâton de Lumière » dans le sarcophage (vide) du probable Phaëron du lieu, avant de prendre à leur tour le chemin de la sortie. Bien que le Magos assure à son compagnon que cette relique a le pouvoir de tenir à distance les gardiens de la Nécropole, Lakius décide de jouer la carte de la sécurité et de détruire le générateur de phase qui a ouvert le portail permettant d’accéder à l’intérieur du complexe, une fois les deux explorateurs sortis de ce dernier. Egal n’est pas d’accord, et la dispute académique dégénère rapidement en duel de carabine laser, au cours duquel Lakius colle un tir à pleine puissance en pleine tête de son estimé confrère, avant de réduire le générateur en cendres. Une conclusion regrettable, mais la fin justifie les moyens…

Début spoiler 2…Sauf qu’Egal refuse de rester au sol, et pour cause. Sous le fond de teint soigneusement appliqué, c’était un C’tan qui avait revêtu les robes écarlates du Mechanicus. On ne saura jamais ce qu’il cherchait à faire sur Naogeddon, à part troller quelques pauvres adeptes qui n’avaient rien demandé, bien sûr, mais comme on peut s’y attendre, les tirs désespérés de Lakius le font doucement rigoler. Beau joueur, il laisse ce dernier s’enfermer avec Osil dans le laboratoire installé par les chercheurs, avant de frapper doucement à la porte pour essayer de leur vendre des boîtes de biscuits pour financer sa classe de neige et/ou des bons du trésor moldave. Lorsque la paroi finit par céder sous ses coups, le C’tan s’aperçoit que ses proies n’ont pas été oisives, et ont bricolé une étrange machine avec les composants qu’ils avaient sous la main. That’s cute, but too little, too late

Début spoiler 3…Eh non. La machine en question était un générateur de stase, qui emprisonne fissa la truculente Echarde dans une bulle atemporelle. Fin. Comment, vous trouvez ça un peu tiré par les cheveux ? Mais qu’attendiez vous d’une histoire qui s’appelle presque Deus ex Machina, enfin ? Fin spoiler

AVIS :

Les nouvelles d’exploration de Nécropoles Necron, un sous-genre assez populaire de la littérature 40K, ne sont pas vraiment ma tasse de thé. J’ai toujours l’impression de lire la même histoire, basée autour d’un faux suspens (« eh non, ils ne dormaient pas en fait… SHOCKING ») et finissant généralement par une course effrénée vers la sortie de la petite bande de héros ayant eu la mauvaise idée de faire de l’archéologie chez les grands anciens galactiques. Ce ‘Deus Ex Mechanicus’ a pour lui de proposer des variations assez intéressantes à cette base éculée (l’intervention d’un C’tan transformiste1, la presque intervention d’un Assassin Eversor), ce dont je sais gré à Andy Chambers.

Malheureusement pour ce dernier, il ne suffit pas d’avoir des idées innovantes pour accoucher d’une nouvelle réussie : encore faut il les intégrer à l’intrigue et en soutenir le développement de manière un tant soit peu crédible, ce qui n’est pas le cas ici. On ne saura donc pas comment un Techno Adepte du Mechanicus a pu se retrouver en possession d’un Eversor (l’Adeptus Assassinarum n’étant pas vraiment connu pour sa générosité), comment le C’tan transformiste a pris la place d’Egal (ou pourquoi il s’est donné le mal de revenir sur sa planète natale avec des acolytes humains, si le Magos n’a toujours été qu’une couverture), ou ce qu’il se passe après que cette divinité en vadrouille se soit retrouvée piégée dans un champ de stase (ce qui pourrait sans doute intéresser l’Inquisition, et impacter fortement le fluff de Warhammer 40,000… mais je dis ça comme ça). Ou même à quoi sert la scène initiale de la nouvelle (le quasi-crash du vaisseau de nos deux lurons), dont il ne sera plus jamais fait mention par la suite et qui aurait pu être remplacée par une arrivée sur site des plus classiques sans que cela ne change rien à la suite. Trop brouillon.

1 : Qui avec le recul ressemble fortement à Trazyn l’Infini, dans le genre boute en train avide de connaissances. Vu l’âge canonique de cette nouvelle, cette similitude ne peut être autre chose qu’une coïncidence troublante…

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Barathrum – J. Curran :

INTRIGUE :

40K_BarathrumLorsque l’Inquisiteur Anselm est appelé par un vieil ami sur la planète de Barathrum pour élucider la série de morts violentes ayant endeuillé l’expédition de l’Adeptus Mechanicus en charge de l’excavation de la cité souterraine découverte à la surface de ce monde mort, il ne s’attendait pas à recroiser la route de son ancien mentor, Grogan. Les deux hommes se sont séparés en mauvais terme après une enquête bâclée sur Tantalus il y a bien des années de cela, à la suite de laquelle le puritain Grogan a déclaré un Exterminatus que son élève trouvait bien précipité. Guère enchanté par la présence de son collègue et néanmoins rival sur cette affaire sordide (rapport aux cadavres horriblement mutilés laissés par le tueur) et poussiéreuse (rapport aux interminables tunnels que nos héros passent la moitié de la nouvelle à parcourir), Anselm fait contre mauvaise fortune bon cœur et collabore en bonne intelligence avec Grogan, que le passage du temps n’a pas du tout adouci.

Une analyse poussée des victimes permet à Anselm, dont l’une des spécialités semble être la médecine légale, d’établir que ces dernières ont toutes été amputées d’un membre ou d’un organe différent, avec une précision chirurgicale qui plus est. Cette conclusion des plus sinistres passe au second plan lorsque les deux fins limiers des Ordos sont alertés par le Magos Explorator en charge de l’expédition (Eremet) qu’un portail gigantesque a été découvert par ses équipes. Scellé et couvert d’inscriptions écrites dans une langue indéchiffrable (à court terme tout du moins), l’édifice est également protégé par un champ électrique qui carbonise le premier Technoprêtre ayant eu la mauvaise idée d’y poser la méchadendrite. Pour le bouillant Grogan, cet incident est la preuve irréfutable que le Chaos est à l’œuvre sur Barathrum, et il s’empresse de suspendre les fouilles, au grand désespoir d’Eremet. Connaissant les méthodes employées par son ancien boss, Anselm se doute que les malheureux archéologistes ne tarderont pas à être soumis à un interrogatoire serré dont pas un ne sortira indemne. Cherchant à éviter à son vieil ami Cantor ce sort peu enviable, il poursuit donc les recherches de son côté… en piquant un somme. Dans un rêve que l’on peut qualifier de prémonitoire, il est mis en présence de l’Empereur en personne, fièrement juché sur sa chaise percée plaquée or, mais les traits aquilins du Maître de l’Humanité se transforment en ceux d’une hyène, et très mauvaise actrice avec cela1.

Ce pénible cauchemar est heureusement interrompu par l’arrivée d’Eremet, qui apporte à son hôte le résultat de l’expertise (expresse) réalisée par les savants de l’Inquisition sur le texte mystérieux gravé sur le portail récemment mis à jour. Comme on peut s’en douter, ce n’est pas la recette de l’aligot que les précédents habitants de Barathrum ont tenu à transmettre aux générations futures, mais un avertissement sans frais sur l’indicible (et illisible) menace dormant dans la crypte ainsi condamnée. Car ce n’est rien de moins que le Prince Démon Szarach’il qui patiente dans la cité morte, enfermé dans ce tombeau par les efforts de l’Inquisiteur Amaril il y a des milliers d’années. Grogan avait donc raison ! Mais d’ailleurs, où est-il ?

Eh bien, sur les lieux du crime pardi. Ayant surpris Cantor bravant le couvre-feu qu’il avait déclaré, l’Inquisiteur a suivi discrètement le Technoprêtre réfractaire jusqu’au portail interdit, et l’a chopé en train de se livrer à un rituel passablement chaotique. Il s’avère que le servant du Dieu Machine s’est fait hacker par l’esprit néfaste de Szarach’il, qui compte bien profiter de l’arrivée de l’expédition pour se faire la malle. Mais notre démon est très exigeant : alors qu’il aurait pu se contenter de posséder le premier humain passant à sa portée, comme le pauvre Cantor, il cherche également à se venger d’Amaril en infiltrant les rangs de l’Inquisition, et a pour cela besoin qu’un représentant des saints Ordos tombe sous son influence. Et tant qu’à faire, Anselm, qui est plus jeune et plus swag (il ne porte pas de moustaches) que ce vieux tromblon de Grogan, serait le candidat idéal. Tout cela nous est longuement raconté par un Szarach’il dont la passion pour le monologue de grand méchant ne présage rien de bon pour le succès de son entreprise…

Pour l’heure, Grogan croise le fer avec la terrible créature que Cantor a mis sur pied avec les organes de ses collègues… et l’abat sans trop de difficulté. Ce n’était toutefois qu’une diversion, permettant à un Cantor lévitant de desceller le portail et de libérer le terrible Démon… ou en tout cas son essence, qui s’empresse de posséder Grogan (Cantor s’écrase sur le sol comme une bouse et meurt après avoir présenté ses plus plates excuses). Sur ces entrefaites, Anselm arrive in da club et un (court) duel s’engage entre les deux Inquisiteurs. Ayant réussi à reprendre le contrôle de son corps pour un instant, Grogan décharge son hellgun sur le plafond en lave mi-cuite de la crypte, provoquant son enfouissement en même temps qu’incinération sous quelques tonnes/mètres cube de magma coagulé. Son sacrifice altruiste autant que le coup de moins bien de Szarach’il, qui ne parvient plus à sauter d’hôte en hôte comme il l’avait fait précédemment, permet de mettre un terme à cette escapade démoniaque, et de préserver l’Imperium d’une (sans doute) terrible menace.

1 : N’ayant qu’une version papier de cette nouvelle à disposition, je ne peux pas faire de capture d’écran pour prouver mes dires, mais sachez que l’apparition démoniaque interpelle notre héros somnolent de la sorte : “Anselm ! Anselm my servant, you have come to me. Anselm ! Anselm, Anselm ! Open the door!”

AVIS :

La tentative de Jonathan Curran de dépeindre les activités inquisitoriales ne s’avère guère probantes dans ce ‘Barathrum’ très moyen, qui explore plusieurs ambiances (slasher, thriller, roman noir, horreur…) sans réussir à s’en approprier aucune. Cette base bancale est de plus handicapée par le manque de maîtrise du lore de 40K par Curran, qui semble considérer les Inquisiteurs comme des détectives privés de choc, envoyés par leur hiérarchie enquêter en solitaire sur des affaires étranges. Pour ne rien arranger, les machinations de l’antagoniste sont inutilement complexes, et l’auteur ne semble même pas avoir pris le soin de se relire1. Ça fait beaucoup de problèmes pour une nouvelle qui peut être mis en comparaison avec les travaux inquisitoriaux, autrement plus réussis, de Dan Abnett, publiés pour les premiers d’entre eux à la même époque que ‘Barathrum’. Comme la nécropole d’où elle tire son nom, cette histoire mérite l’oubli profond dans lequel elle a été plongée depuis des millénaires.

1 : “The Inquisition is a tool” (Grogan, p. 9). “The Inquisition is not a tool” (Grogan, p. 23).

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Missing in Action – D. Abnett :

INTRIGUE :

40K_Missing in ActionÀ peu près remis de son aventureuse traque du Necroteuch (‘Xenos’), au cours de laquelle il a débloqué le skin exclusif Buster Keaton, Gregor Eisenhorn a été remis en service actif par les Saints Ordos, qui lui ont donné une mission bidon sur Sameter pour lui remettre le pied à l’étrier en douceur. Comme quoi, on peut ordonner des Exterminatus sans sourciller et gérer ses subalternes avec une profonde humanité. L’affaire n’ayant rien donné, les enquêteurs s’apprêtent à plier bagage lorsqu’un ministre du gouverneur sollicite une audience pour avoir l’avis d’un expert reconnu sur une série de meurtres qui ont tout l’air d’être l’œuvre d’un culte chaotique. Les quatre victimes identifiées à ce jour ont en effet toutes eu les mains, les yeux et la langue enlevés (voire plus si affinités). Flairant un défi digne de ses talents, Greg’ accepte de reprendre le dossier, et commence sa petite enquête de voisinage en compagnie de ses associés (la Paria fashion victim Bequin, l’ex-Arbites Fischig, le pilote Betancore et le Savant Aemos).

Les interrogatoires des voisins, l’examen des cadavres des victimes et d’un suspect trop lent, les informations déterrées par Aemos et le flair éprouvé d’Eisenhorn ne mettent que quelques heures/pages à identifier une piste prometteuse, qui mène nos héros sur les traces d’un régiment de Sameter ayant combattu sur Surealis il y a une vingtaine d’années. Marqués autant par les horreurs du Chaos que par les rayons UV des soleils de ce système, les vétérans qui ont regagné leurs pénates lorsque le régiment a été débandé auraient basculé dans la psychose et se seraient mis à fliquer en douce leurs compatriotes, en faisant disparaître les individus suspectés d’hérésie. C’est l’hypothèse qui reçoit les faveurs grimaçantes d’Eisenhorn en tout cas, et qui le mène jusqu’au lieu de conscription du régiment en question, laissé depuis longtemps à l’abandon…

Début spoiler…Et où une trentaine de vétérans, se sachant traqués à titre préventif par les Arbites locaux après que l’Inquisiteur se soit ouvert de ses soupçons, se sont regroupés pour se rappeler le bon vieux temps. Le petit cœur sensible de Greg saigne devant le spectacle des délaissés de Sameter, abandonnés comme des vieilles chaussettes par l’Imperium à la fin de leur service, sans même une réserve de biaffine suffisante pour traiter leur peau carbonisée. Beau joueur, notre héros décide donc de raisonner ces brebis égarées et trop bronzées, mais fait un jet critique sur son jet de persuasion et l’affaire tourne rapidement au méchoui. Trop coriace pour être mis en difficulté par une bande de mobs de bas étage, Eisenhorn perd tout de même sa main gauche dans la bagarre, victime d’un tir de sniper à gros doigts malhabiles. L’affaire est toutefois résolue, et l’Inquisiteur peut retourner sur Gudrun avec la satisfaction du devoir accompli, et un sale goût de grimdark au fond du gosier.Fin spoiler

AVIS :

Petit interlude inquisitorial comme Abnett en a signé quelques uns au cours de l’écriture des trilogies ‘Eisenhorn’ et ‘Ravenor’, ‘Missing In Action’ voit Greg le missionnaire mener une enquête en deux temps trois mouvements en compagnie d’une bonne partie de sa clique (il manque Harlon Nayl et Kara Swolle, sans compter la barquette Ravenor), dans une ambiance empruntant plus au film noir qu’à la SF « spectaculaire » (pouvoirs psychiques et Xenos en folie). C’est simple, on pourrait assez facilement adapter cette histoire à notre époque, pour en faire un récit policier tel que Grange, Vargas ou Cohen pourraient en écrire. Tout cela est plus sympathique qu’essentiel, et permet de constater, si besoin était, que Dan Abnett est un auteur plus accompli que la plupart des auteurs de la BL, et est tout à fait capable de signer une nouvelle à la fois sans prétention et de très bon standing. À savourer sans modération pour les lecteurs familiers de la série, et à découvrir sans réserve par ceux qui ne le sont pas (encore).

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Liberty – G. Thorpe :

INTRIGUE :

40K_LibertyÀ la suite des événements couverts dans le premier tome de la saga des Last Chancers (‘13th Legion’), le Colonel Schaeffer passe en coup de vent sur la planète prison de Ghovul pour y mettre au frais le seul survivant du concours de survie organisé par l’intraitable et intuable officier ces trois dernières années : Kage. Ce dernier, officiellement pardonné à la fin du roman mais ayant raté sa réinsertion en trucidant quelques officiers un soir de beuverie, s’est vu accordé une Lastest Chance par Schaeffer, bien conscient du potentiel de cette machine à tuer. Comme on peut s’en douter, cet épisode carcéral ne va pas se dérouler sans anicroche.

Outre le fait que la tour que partage Kage avec 200 autres gibiers de potence n’a rien à envier à la Talaudière, et que son compagnon de cellule, le velu et vorace Marn1, ronfle comme un Squig enrhumé, c’est surtout le manque d’activité physique et le sentiment d’abandon qu’il ressent au bout de quelques semaines qui fait péter les plombs à notre héros. Quand un de ses codétenus insiste lourdement pour avoir son tour avec le sac de frappe que l’ex-Légionnaire Pénal martyrise depuis trente minutes à grands coups de latte, Kage saute à la gorge du faquin et lui administre une correction terminale, fracassant quelques os chez les matons qui essaient de s’interposer au passage. L’administration pénitentiaire tenant à conserver le monopole de la violence (pas forcément légitime) dans son établissement, ce déchainement de violence vaut à Kage seulement quelques coups de knout, Schaeffer ayant explicitement ordonné au gouverneur Skandlegrist de trop endommager cet élément prometteur pendant son absence.

Cela ne décourage pourtant pas le K. de persévérer dans ses comportements séditieux. Dès que son dos en lambeaux a suffisamment cicatrisé pour lui permettre de regagner sa cellule, il commence à organiser une tentative d’évasion. Ayant récupéré une cuillère laissée sans surveillance à la cantine, il passe quelques nuits à l’aiguiser en secret sur les murs de sa cellule, avant de passer à l’action d’une façon aussi brutale que court-termiste (sa signature). Après avoir à moitié étouffé Marn avec son oreiller (bien fait) et perforé le poumon avec son scalpel de fortune pour faire croire aux matons que son compagnon de cellule faisait un œdème pulmonaire, Kage se fraie un chemin sanglant à travers les malheureux gardiens dépêchés dans sa cellule, puis grimpe jusqu’en haut de la tour en faisant monter son body count à un niveau stratosphérique. Seul point d’échappatoire du vincularum, le sommet est l’endroit idéal pour passer à l’étape suivant de cette grande évasion un peu improvisée, et fausser compagnie aux sbires de Schaeffer…

Début spoiler…Sauf que dans un Impérium d’un million de mondes, il est tout à fait possible de construire des prisons sur des planètes absolument vides. C’est ce dont Kage se rend compte lorsqu’il contemple le paysage lunaire et désolé de Ghovul qui s’étend jusqu’à l’horizon. N’ayant littéralement nulle part où aller, il se rend sans faire d’histoires lorsque la huitième vague de gardes chiourmes le met en joue, et se met à espérer du fond du cœur que Schaeffer vienne lui rendre visite sans tarder. Putain qu’il est blême, le HLM…Fin spoiler

1 : Qui s’appelle comme ça car il engloutit ses repas en trente secondes montre en main. D’où l’expression « Marn l’a avalé ».

AVIS :

Petite nouvelle de transition entre ‘13th Legion’ et ‘Annihilation Squad’, ‘Liberty’ nous offre une sorte de seul en scène de Kage, qui démontre de manière probante qu’il est vraiment un très sale type. La narration à la première personne et le ton décalé utilisés par Thorpe rendent toutefois son anti-héros assez sympathique, et le récit de ses mésaventures carcérales se lit sans problème. La conclusion de l’histoire ne surprendra pas les lecteurs familiers de la série, mais Thorpe garde son propos suffisamment court et rythmé pour que cette absence de suspens ne soit pas rédhibitoire. Ça passe.

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Ork Hunter – D. Abnett :

INTRIGUE :

Ork HunterLa première mission de l’unité du Caporal Ondy Scalber dans la ceinture équatoriale d’Armageddon se passe assez mal. Déployés avec les Chasseurs d’Orks vétérans du Boss Keyser (les Ecorcheurs), les propres sur eux Jopalliens comprennent rapidement que leurs alliés ne les voient au mieux comme des appâts à peaux vertes, au pire comme des poids morts dont ils n’hésiteront pas une seconde à se débarrasser si la situation l’impose. Le Capitaine Lorit lui-même en fait l’amère expérience lors d’une pause en pleine jungle, le non-respect de la consigne de silence absolu donnée par Keyser lui valant d’abord un étranglement de la part d’un Ecorcheur, puis un direct dans la gorge décoché par Keyser en personne lorsqu’il fait mine de se plaindre de cette agression.

Les méthodes des Ecorcheurs ne manquent cependant pas d’efficacité, et leur affinité avec l’enfer vert dans lequel ils évoluent depuis des années leur permet de surprendre une colonie d’Orks sauvages s’étant acclimatée aux mangroves étouffantes d’Armageddon1. L’affrontement est aussi violent et sanglant que l’on peut se l’imaginer, et bien qu’Ondy gagne le respect, ainsi que le surnom de Bon Œil (et un véritable œil d’Ork en trophée), des Ecorcheurs grâce à son engagement total dans cette lutte sans merci, la plupart de ses camarades de Jopall ne passent pas l’épreuve du feu2, ou commencent à le regarder bizarrement. Qu’importe pour Ondy Bon Œil, qui speedrun son passage de Garde Impérial BCBG à vétéran psychotique en l’espace d’un après-midi, terminé par un combat singulier entre Keyser et le Boss Ork de la colonie décimée par les Ecorcheurs. Vous parlez d’une expérience marquante…

1 : On peut considérer que Dan Abnett a prophétisé l’arrivée des Kruleboyz près de vingt ans avant que la première figurine de cette faction ne soit commercialisée. Quel cador.
2 : Ou se font euthanasier de manière préventive par leurs chaperons au premier signe de détresse psychologique venu. C’est ainsi que le pauvre (Mishell) Rokar se prend une dague dans le sternum après avoir initié une partie de chat perché au mauvais moment. En même temps, il était plus taillé pour la banquise que pour la jungle…

AVIS :

Dan Abnett qui écrit une histoire de Gardes Impériaux, c’est assez banal. Dan Abnett qui écrit une histoire de Gardes Impériaux qui ne soient pas des Fantômes de Gaunt1, en revanche, c’est plutôt rare (il y a eu ‘The Fall of Malvolion’ et je crois que c’est à peu près tout). On sent tout de même que notre homme évolue en territoire connu dans ce sympathique ‘Ork Hunter’, qui semble être un petit exercice de style pour cet auteur vétéran : mettre en scène des Gardes d’élite, mais complètement antipathiques (alors que Gaunt et ses ouailles sont – à part Rawne, et encore, et Lijah Cuu – des crèmes). Le pari est réussi, et donne même envie de suivre la descente aux enfers (verts) du Caporal Scalber sur le long terme. Et comme Abnett ne rechigne jamais à relier a posteriori ses vieux one-shots avec le reste du Daniverse (de manière plus ou moins naturelle et élégante, il est vrai) il se pourrait que cela se produise un jour…

1 : Mais qui se déplacent tout de même comme des éclaireurs de Tanith, parce que certaines habitudes ont la vie dure.

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Business as Usual – G. McNeill :

INTRIGUE :

40K_Business as UsualTrois mois après la victoire de l’Imperium sur la Flotte Ruche Leviathan sur le monde de Tarsis Ultra, la vie a retrouvé un cours plus ou moins normal dans la capitale planétaire, Erebus (rien à voir avec l’affreux vieillard ridé et son couteau tout chelou). Pour Snowdog et son gang de trafiquants de drogue, cela signifie la reprise d’activités illicites dans la zone tampon séparant le sous-monde de cette cité ruchette1 et la banlieue mal famée où rôde une faune aussi sauvage que mortelle. Et je ne parle pas uniquement des essaims tyranides qui squattent l’endroit à la suite de la destruction de leur vaisseau mère. La nouvelle débute ainsi sur une rencontre business assez tendue entre notre héros peroxydé et trois de ses acolytes (Lex, Silver et Tigerlily), et une bande de Jackboys cherchant à écouler une grande quantité de Kalma, sorte d’ecstasy grimdark.

Bien que la came soit de qualité, comme le trip cosmique du brave Lex, ayant pris sur lui de goûter le produit, le révèle sans ambages, le sixième sens de Snowdog le titille méchamment. Il se doute que ses interlocuteurs vont essayer de la lui faire à l’envers, et lorsque les Jackboys dégainent leurs pétoires pour piquer les crédits durement gagnés du Malamut, ce dernier ne se laisse pas faire. L’échange de tirs entre les deux gangs finit par tourner en faveur de celui composé à 100% de personnages nommés (comme c’est étrange), mais attire également l’attention de la patrouille d’Arbites du Capitaine Jakob Gunderson. Ce dernier voue une détestation cordiale à Snowdog, coupable de l’impardonnable crime de vente de dope dans son périmètre, et n’est que trop heureux d’entraîner ses hommes sur les lieux de l’échauffourée après que quelques bribes d’échanges radio entre Jackboys lui aient permis de connaître l’identité de leur adversaire.

L’arrivée de cette troisième faction rebat les cartes, et scelle surtout le destin du pauvre Lex, utilisé par un Snowdog loyal sans excès envers ses hommes comme bouclier humain contre les balles à guidage laser de Gunderson. L’utilisation judicieuse d’un chapelet de grenades artisanales récupérées sur le cadavre d’un Jackboy permet toutefois aux trois survivants de se ménager une sortie explosive (et de tuer une grande partie des camarades de Gunderson, qui étaient pourtant à deux jours de la retraite), mais leur course effrénée les amène en territoire tyranide, ce qui n’est pas l’idée du siècle, et encore moins du millénaire. Rattrapés par les deux Arbites survivants alors qu’ils contemplaient les cadavres récurés de quelques gangers malheureux dans le boyau des égouts qu’ils avaient empruntés pour filer à l’anglaise, Snowdog, Silver et Tigerlily se retrouvent en mauvaise posture. Gendarmes et voleurs se réconcilient cependant en un éclair lorsqu’une horde d’Hormagaunts interrompt leur règlement de comptes, et les humains décident sagement de se carapater le plus loin possible de la menace Xenos, à plus forte raison lorsque le Guerrier Tyranide qui manage la horde chitineuse arrive à son tour pour profiter des calories faciles que représentent nos héros.

La poursuite tunnelière qui s’ensuit n’est pas sans causer quelques pertes déchirantes (dans tous les sens du terme) parmi les hominidés, le dernier collègue de Gunderson gagnant une séance d’acupuncture tyran(n)ique, avant que la pauvre Tigerlily n’aille rejoindre Peter Pan, Sanguinius et Geneviève de Fontenay dans le pays imaginaire. Lorsque l’affreuse bestiole assomme Gundy et met la griffe broyeuse sur la veste gifesque (c’est beau le 41ème millénaire tout de même) de Snowdog, la messe semble dite pour nos héros…

Début spoiler…C’était toutefois sans compter sur le pouvoir de l’amitié la foi la Force la DROOOOOOGUE. En désespoir de cause, Snowdog balance en effet sans s’en rendre compte la totalité du stock de Kalma piqué aux Jackboys dans le gosier du Guerrier, provoquant un KO technique suivi d’une overdose fatale en moins de vingt secondes. Magnanime, El Doggo décide d’épargner la vie de Gunderson au lieu de profiter de son piteux état pour lui faire passer la matraque énergétique à gauche, et les deux gangers survivants s’en repartent vers d’autres aventures. Ils ne savaient pas encore qu’ils vivaient sur du temps empruntéFin spoiler

: Tarsis Ultra n’était censé avoir que 60 millions d’habitants avant de se prendre un enchaînement fatal Tyranides-Iron Warriors dans la biosphère, ce qui est positivement clairsemé à l’aune des standards impériaux.

AVIS :

Graham McNeill n’a jamais (pour autant que je le sache et au moment où cette chronique est publiée) écrit pour Necromunda, mais les amateurs de ce monde-ruche si bucolique ne seront pas dépaysés par ce ‘Business as Usual’. Des gangs ennemis qui s’étripent pour de la dope dans des usines en ruines et des terrains vagues toxiques, avant qu’une escouade d’Arbites nommée bavure et quelques bestioles atrabilaires ne viennent se mêler aux réjouissances : on est ici en terrain connu (mais dangereux tout de même, relancez vos 1 si vous pouvez). À titre personnel, il n’y a pas grand-chose qui me fasse vibrer dans cette nouvelle qui ne détonne absolument pas du mètre étalon de la GW-Fiction, et qui a plutôt mal vieilli sur certains aspects, notamment l’argot utilisé par Snowdog et ses acolytes, qui sonne aujourd’hui terriblement daté. À chacun son sale goût.

Pour la petite histoire de cette petite histoire, ‘Business as Usual’ a en fait été écrite avant ‘Warriors of Ultramar’, dans laquelle Snowdog fait également une apparition au côté d’Uriel Ventris et des héroïques défenseurs de Tarsis Ultra, même si elle prend place après les événements relatés dans ce roman. Voilà de quoi briller en société, sans nul doute.

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Defixio – B. Counter :

INTRIGUE :

40K_DefixioNous embarquons à bord du Leman Russ Exterminator Defixio, rattaché à un contingent de Chem-Dogs de Savlar, au cours de la campagne menée par la Garde Impériale contre une Waaagh ! Ork sur le monde de Jaegersweld. Parmi les membres d’équipage, le jeune Samiel peine à se faire une place pour une raison aussi simple que stupide : ayant survécu par miracle à la destruction de son précédent véhicule de fonction, ses nouveaux camarades (Karra-Vrass, Graek, Damrid, Dniep et Kallin) considèrent qu’il a « consommé » toutes ses réserves de chance, et que cela va porter la poisse au Defixio. Un accrochage rugueux avec une bande de Bikers Orks, pendant lequel le tank hérite d’une belle balafre de coque et l’horrible Graek d’une balle perdue fatale, ne fait pas grand-chose pour les convaincre de réviser leur jugement.

Isolé en territoire ennemi, le Leman Russ déglingué doit maintenant se frayer un chemin jusqu’au camp impérial le plus proche, tenu par le 24ème régiment de Cadia. Cela représente près de trois jours de route dans un environnement hostile, mais, sans autre perspective, les Chem-Dogs se lancent à corps perdu et à tombeau ouvert dans ce raid de tous les dangers. Alors qu’ils avançaient à bon rythme, un champ de mines posées par des Orks farceurs les force à faire une halte dans la pampa, le temps que Samiel leur ouvre un passage en identifiant les explosifs, permettant au bricoleur Dniep de les désamorcer plus rapidement dans un second temps. Cet arrêt au stand prend une tournure funeste lorsqu’un autre Kult’ de la Vitess’ tombe sans crier gare sur le Defixio alors qu’il patientait en double file que Samiel ait fini sa petite affaire. Assistant de loin à l’attaque, ce dernier décide d’aider ses camarades par une action aussi brave que suicidaire : utiliser le pistolet lance-fusée qu’on lui avait remis pour attirer l’attention des peaux vertes. Et ça marche. Intrigué par la belle rouge tirée par notre héros, les Orks se ruent sur sa position, ne réalisant que trop tard qu’ils s’engagent littéralement en terrain miné. Le bouquet final qui s’en suit permet à la fois de se débarrasser des motards indésirables, et d’accélérer le processus de déminage débuté par Samiel (qui survit encore une fois miraculeusement à une situation improbable). C’est ce qu’on appelle un win-win.

Sans d’autres difficultés techniques ou autochtones grognons pour les empêcher de reprendre leur route, les hardis tankistes filent à toute berzingue vers la terre promise, et finissent par arriver à proximité du camp de leurs camarades de lutte. Encore une colline à passer, et ce sera la quille…

Début spoiler…Qui se transforme toutefois en tuile lorsque nos héros découvrent que le QG Cadien a été attaqué et squatté par une tribu d’Orks. Pour une culture qui s’enorgueillit tellement de tenir la ligne, c’est une faute professionnelle autant qu’éthique, si vous voulez mon avis. C’est surtout une cruelle désillusion pour les Chem-Dogs, qui se voyaient déjà engloutir leur pâtée bien méritée et se lover dans leur coucouche panier. Il faut toute la fortitude du chef de char Karra-Vrass pour remobiliser ses hommes et leur rappeler que leur devoir en tant que soldats impériaux est de mourir au combat en emportant le plus possible de Xenos avec eux dans la tombe. N’ayant c’est vrai rien de mieux à faire, les servants du Defixio reprennent du poil de la bête et livrent un combat homérique contre la patrouille d’Orks qui finit par les localiser. Submergé par les vagues vertes, le brave petit châssis finit par rompre sous les coups de boutoirs des Boyz, mais pas avant d’avoir clairsemé leurs rangs de manière drastique. Une fin honorable pour de telles crapules (et je ne parle pas des Orks)…

Début spoiler 2…Enfin, presque pour tout le monde. Fidèle à sa réputation de catalyseur de chatte, Samiel se débrouille une fois encore pour survivre à la baston, alors que tout le monde meurt autour de lui. Récupéré quelques heures plus tard sous l’épave carbonisée du Defixio par un bataillon de Cadiens qui passait dans le coin, le chien chimique le plus chanceux de l’univers en est quitte pour quelques semaines chez le véto, le temps que ses pattes brûlées cicatrisent. Il se fait la réflexion qu’il aura encore plus de mal à trouver une nouvelle unité de rattachement avec un casier aussi chargé que le sien, mais ce sera une préoccupation pour plus tard…Fin spoiler

AVIS :

Sans doute une des premières nouvelles « embarquées » (c’est-à-dire prenant place dans un char ou un aéronef) de la GW-Fiction, mais loin d’être la plus marquante ou intéressante de ce sous-genre, ‘Defixio’ permet au moins d’en apprendre un peu plus sur les Chem-Dogs de Savlar, l’un des régiments de Gardes Impériaux à l’histoire la plus particulière qui soit. Pour le reste, c’est de l’action très classique, avec un peu de camaraderie virile et quelques gros coups de chance pour napper le tout. Counter a fait mieux.

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Et c’est tout pour cette revue de ‘Words of Blood‘, anthologie dont on sent le poids des années à la lecture. Si vous êtes indulgents, ou intéressés par la GW-Fiction d’un autre temps, ce recueil peut mériter le détour. Sinon, il vous est loisible de passer votre chemin sans rater grand-chose de marquant.

SUMMER OF READING 2018 [40K-AoS-HH]

Bonjour et bienvenue dans cette revue du Summer of Reading 2018 de la Black Library, dont je vous ne ferai pas l’affront de préciser l’année et la saison de sortie. Si vous n’êtes pas familier avec les SoR, il s’agissait de petits recueils de nouvelles publiés par la BL au cœur de l’été, période creuse de l’année par excellence, pour donner aux fans quelque chose à se mettre sous la dent, ou plutôt sous la rétine, en attendant la rentrée. Lancé en 2014, le concept perdura jusqu’à l’été 2019, après quoi il fut de facto remplacé par des semaines thématiques comme la Character Week (2020) ou la Gods & Monsters Week (2021), pour ne citer que deux exemples.

Summer of Reading 2018

L’été 2018 nous apporta un contingent de sept nouvelles, tirées des franchises majeures de la GW-Fiction que sont Warhammer 40,000, Age of Sigmar et l’Hérésie d’Horus, dont deux toujours non republiées à ce jour (‘Two Metaphysical Blades’ et ‘The Armour of Fate’). Au niveau des contributeurs de cette pause estivale, on retrouve une majorité de têtes connues (Haley, Wraight, Clark, Guyme et Annandale), seuls les noms de Rachel Harrison et de Peter McLean (qui semblent avoir cessé leur collaboration avec la BL au moment où cette chronique est publiée) pouvant se révéler inconnus aux nouveaux lecteurs. On se souvient tous que cet été fut chaud d’un point de vue météorologique : il est temps de voir ce qu’il a donné d’un point de vue littéraire…

Summer of Reading 2018

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Two Metaphysical Blades – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE :

Two Metaphysical BladesOù il sera question de deux lances forgées de la main même de l’Empereur, du temps où il n’était encore qu’un pouvoir mineur sur une Terra en proies aux affres de la Longue Nuit (c’était juste avant que l’heure d’hiver soit enfin abandonnée, après 25.000 de report), et squattait la cave de son vieux pote Malcador. Appelées Apollonienne et Dionysiaque, soit des références comprises par moins de dix personnes à l’époque (que snob ce Pépé), ces armes étaient à la fois des opposées polaires et unies par une connexion profonde. La première fut attribuée à nul autre que Constantin Valdor, qui la mania à de nombreuses reprises lors de sa longue et distinguée carrière. La deuxième revint à Leman Russ en lot de consolation après qu’il eut perdu une bonne partie de sa Légion à exterminer les Orks de la Roue de Feu, une région galactique conquise par l’Imperium pendant la Grande Croisade1. Un cadeau qui fut apprécié à sa juste valeur par le caractériel Roi Loup, et jamais utilisé par ce dernier, jusqu’au moment où il décida d’aller soloter le Maître de Guerre félon au plus fort de l’Hérésie, avec les résultats que l’on sait.

En plus d’être des armes incomparables, Apollonienne et Dionysiaque étaient imbues de capacités psychiques (certains diront métaphysiques) uniques, permettant dans le cas de la première à son porteur de connaître les vérités profondes2 de ses victimes au moment de leur mort, et dans le cas de la seconde, d’ouvrir les yeux de tout individu blessé par cette dernière sur sa situation. On ne saura jamais pourquoi l’Empereur n’a pas jugé bon d’appeler ses créations « Contrôle Fiscal » et « Psychothérapie », mais ça aurait été beaucoup plus approprié, à mon humble avis. Si Chris Wraight a la bonté de nous fournir une petite démonstration du fonctionnement d’Apo’ à la faveur du massacre d’une bande de bikers dégénérés par Valdor et une vingtaine de ses collègues pendant l’Unification de Terra, il faudra vous munir d’une copie de ‘Wolfsbane’ pour découvrir l’effet kiss cool de l’écouvillon de la mère Denis.

Cette nouvelle examine également les relations peu simples, mais pas si froides que ça, entre Valdor et Russ, avant et après l’Hérésie. De son propre aveu, le Custodien apprécie assez le Roi Loup, qui le déteste cordialement en retour. Vous parlez d’une relation asymétrique. Ces bisbilles persistantes n’empêcheront toutefois pas les deux compères d’être frappés par une révélation mystique au même moment, les conduisant à abandonner leur poste et leurs subordonnés pour s’embarquer dans une quête mystérieuse dont ils ne reviendront jamais (pour le moment…). Bien qu’ils aient également laissés leur arme derrière eux, il y a fort à parier que l’histoire de ces deux reliques ne se terminera pas dans les tréfonds d’une armurerie poussiéreuse, mais ceci est une autre histoire…

1 : L’Empereur lui promit aussi une forteresse mastoc sur Fenris (le Croc), car il n’était pas chien envers les loulous. Mais comme cela allait prendre trois plombes, j’aime à penser qu’il a refilé la lance à Son fiston pour marquer le coup, un peu comme une boîte de chocolats oubliée au fond d’un placard quand la belle-famille débarque.
2 : Ou, pour utiliser le lexique de ce rabat-joie de Valdor, leurs défauts.

AVIS :

Chris Wraight est un des auteurs de la Black Library qui maîtrise le mieux le genre cryptique, qui est l’un des plus complexes à utiliser : trop, et on ne comprend plus de quoi il en retourne ; pas assez, et l’effet mystérieux est perdu. ‘Two Metaphysical Blades’ est un très bon exemple du savoir-faire déployé par Wraight, puisqu’à travers les différentes vignettes qu’il nous propose d’examiner, depuis les prémices de l’Imperium (qui comme toutes les start-up vouées à transformer l’humanité, a commencé dans un garage) jusqu’à la purge post-hérétique et la disparition des grandes figures de la Grande Croisade (Leman Russ et Constantin Valdor en tête), on a la nette impression d’être initié à des vérités importantes sur le grand dessein de l’Empereur, qui comme chacun sait n’a jamais rien fait au hasard. La destinée liant les porteurs originaux des lances Apollonienne et Dionysiaque sera-t-elle un jour révélée ? Rien n’est moins sûr (même si à notre époque, les Primarques courent de nouveau les rues), mais cela n’empêche pas de savourer cette nouvelle à sa juste valeur, et c’est là tout le talent de conteur de Chris Wraight. Un must read absolu si vous vous sentez une âme d’exégète, si vous vous êtes fixés comme objectifs de lire toutes les histoires consacrées à des armes1 de la Black Library, ou, tout simplement, que vous avez envie de variété et de qualité après une overdose de bolter porn.

1 : Ne pas oublier ‘Athame’ de John French et ‘Les Fragments d’Erebus’ de Guy Haley.

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Blacktalon: When Cornered – A. Clark [AoS] :

INTRIGUE :

When CorneredJe suis sûr que vous vous êtes déjà retrouvé dans une situation où vous avez été coiffé sur le poteau par un quidam quelconque (à la caisse du Super U par une petite mamie, ou pour l’accès à une place de parking par un automobiliste sans vergogne). On peut tous admettre ici que, malgré le fait que ce soit très pénible et qu’il faille prendre sur soi pour ne pas créer un esclandre, il serait malvenu de laisser ses penchants de primate territorial s’exprimer. C’est à peu près la situation dans laquelle se retrouve la Knight-Zepyhros et chasseresse en chef de Sigmar, Neave Blacktalon, après que la proie après laquelle elle courrait depuis six mois, le sorcier de Tzeentch Xelkyn Xerkanos, se soit fait alpaguer par l’armée du Thane Halgrimmsson, alors qu’il rôdait dans l’arrière-pays chamoniard (il préparait l’UTMB, sans doute).

On pourrait penser que la coopération serait naturelle entre la Stormcast et les Duardin, mais comme les deux camps ont choisi de miser sur les raisons de détester Xerkanos (il a tué le roi Halgrimm, père du Thane, ainsi que bon nombre de ses guerriers du côté des petits barbus, et a commis une litanie de massacres et de déprédations qui ont conduit le grand barbu à le mettre sur sa to kill list du côté de Blacktalon) plutôt que de développer leurs talents de diplomate au moment d’établir leur fiche de personnage, le problème est loin d’être résolu pour les forces de l’Ordre. Un fragile accord a été négocié de haute lutte, selon lequel Xerkanos sera ramené à la forteresse des Duardin pour être formellement jugé, mais il reviendra à Blacktalon d’exécuter le sorcier une fois la sentence prononcée. Comme personne n’est dans le fond satisfait de cette négociation, les premières pages de la nouvelle voient Halgrimmsson et Blacktalon palabrer comme des marchands de tapis sur la route qui ramène l’armée du Thane en direction de la petite ville de Lightsdawn, étape obligatoire avant d’arriver au karak du clan. N’ayant pas réussi à convaincre son interlocuteur de régler une bonne fois pour toute son compte au mage à tête de libellule qui se lamente dans une charriote en queue de peloton, l’opiniâtre Stormcast décide d’aller se passer les nerfs en allant se moquer du prisonnier (pas très classe, mais elle ne l’est pas). Avant de se faire gentiment jeter par les Brise Fer qui gardent la roulotte, agacés à juste titre par les jurons démoniaques que Blacktalon fait pousser à Xerkanos à force de punchlines, notre héroïne acquiert la certitude grâce à ses sens trop trop aiguisés que le sorcier fomente une tentative d’évasion. D’ailleurs, elle l’a vu cacher une écharde de bois dans ses robes, ce qui lui sera sans doute utile pour forcer ses chaînes… ou se curer les dents. En tous cas, elle décide très intelligemment de garder cette information pour elle et de ne pas intervenir sur le moment, certaine de sa capacité à vaincre le faquin s’il devait avoir la bonne idée de sortir de sa cage un peu trop tôt…

Lorsque la colonne éprouvée finit par arriver en vue de Lightsdawn, les super pouvoirs sensoriels de Blacktalon lui permettent à nouveau de déceler que quelque chose ne tourne pas rond chez les miliciens qui patientent sur le chemin de ronde pendant que les Duardin approchent par la route. Cette fois-ci, elle juge bon de prévenir Halgrimmsson, mais ce dernier a décidé de faire sa mauvaise tête, sûrement fâché qu’elle soit toujours plus grande que lui alors qu’il se déplace sur un bouclier porté par ses Longues Barbes, Abraracourcix-style. Il ne claque donc pas de PC pour donner une défense en règle à ses troupes alors qu’elles entrent dans la ville, ce qui a bien sûr des conséquences tragiques à très court terme. Un terrible cri se fait entendre alors que l’armée chemine sur la grand rue, d’une puissance telle qu’il incapacite les Duardin (et leurs tympans fragiles) pendant quelques instants, permettant aux cultistes (avec boules Quies) qui avaient pris la place des véritables gardes de Lightsdawn de passer à l’attaque sans rencontrer de résistance.

Grâce à sa constitution supérieure, Blacktalon récupère plus vite que ses alliés, et se rue en direction du wagon où est retenu Xerkanos afin de l’empêcher de s’enfuir à nouveau, jugeant assez logiquement que l’embuscade a été montée par des disciples du sorcier. À sa grande surprise, comme à celle de sa proie, il s’avère en fait qu’une nouvelle faction s’est jointe aux réjouissances : le culte slaaneshi du Sixième Tourment. Cette bande de chercheurs (nerds) menée par le supersonique Achylla – et sa grande gu*ule – en a après le sang de Xernakos, ingrédient indispensable à la conclusion d’un rituel qui leur permettrait de localiser enfin leur divinité disparue. Blacktalon se retrouve alors confrontée à un dilemme épineux : faire la peau à sa cible en profitant de la confusion ambiante, mais courir le risque de permettre aux hédonistes de parvenir à leurs fins (la Knight Zephyros ne se berçant pas d’illusions sur sa capacité à empêcher les cultistes à récupérer le cadavre du sorcier), ou agir comme babysitter de son ennemi mortel, afin de mettre en échec les sinistres plans d’Achylla ?

C’est finalement la deuxième option qui s’impose lorsque ce rusé de Xernakos décide de filer en mode kamikaze jusqu’au temple de Sigmar où il sait que ses disciples ont caché une amulette de téléportation. Protégé bon an mal an par Blacktalon, qui lui court après et laisse les Duardin se débrouiller tout seul, le sorcier parvient jusqu’au saint édifice, où l’attend Achylla et sa garde rapprochée. Big Mouth avait mis une de ses six mains sur l’amulette planquée par les suivants de Xernakos, mais son air suffisant est rapidement effacé par l’énorme uppercut que lui colle Blacktalon après qu’il ait commencé à monologuer comme un méchant de série B. Dans la cohue qui s’en suit, le facteur X parvient à récupérer son bien et à fausser compagnie à tous ses haters, laissant Blackie de trèèèès mauvaise humeur. On souhaite bon courage à Achylla et à ses mauvais bougres dans leur future explication de texte avec une Stormcast Eternal en rogne…

AVIS :

Nous tenons avec ce ‘Blacktalon : When Cornered’ une solide introduction au roman ‘First Mark’ consacré par le même Andy Clark à la (suite de la) traque du sorcier XX par l’infatigable chasseresse. Combinant une bonne présentation, tant sur le plan physique (sens super développés, vitesse éclair, force colossale) que mental (obsession pour ses missions, jusqu’à la mise en danger d’elle-même et d’autrui pour arriver à ses fins) de son héroïne avec quelques scènes d’action bien mises en scène, et un peu de tourisme dans un coin bucolique de Chamon1, ce prequel donne plutôt envie de lire la suite, ce qui est bien tout ce que lui demande. Le seul léger grief que je ferai à Clark est le manque de développement dont il fait bénéficier son antagoniste dans ces quelques pages : mis à part son look d’insecte et son côté savonnette, on n’apprend pas grand-chose sur Xernakos et n’avons donc pas de raison de nous attacher particulièrement à lui. J’espère qu’il apparaît plus à son avantage dans ‘First Mark’.

1 : Je suis un peu triste que les mystérieux croquemitaines nocturnes locaux n’ait joué aucun rôle dans la nouvelle, mais peut-être qu’ils apparaissent dans le roman…

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A Company of Shadows – R. Harrison [40K] :

INTRIGUE :

A Company of ShadowsLes choses ne se passent pas tout à fait comme prévu sur le front de Gholl pour la Commissaire Severina Raine et ses Fusilières du 11ème régiment d’Antari, forcés d’effectuer un redéploiement stratégique depuis la cité de l’Arrête de Caulder suite à la poussée de ces diables de Clairvoyants. Escortant un officier impérial aussi important pour la suite de la campagne qu’insupportable de morgue, l’escouade de Raine embarque dans une Valkyrie, promptement descendue par un missile qui lui a grillé la priorité à droite, avec des conséquences variant du dommageable au définitif pour notre petite bande de personnages, qui se trouve encore réduite une fois le sol atteint. Perdus au milieu des contreforts escarpés et sous contrôle ennemi connus sous le nom de la Gueule, ralentis par leurs blessés et ne pouvant décemment laisser tomber leur charge entre les mains des cultistes, qui ont déjà démontré de manière graphique qu’ils faisaient grand et bon usage des gradés impériaux, Raine et ses hommes décident de tenter un bluff pour priver les Clairvoyants de leur proie. L’intrépide Commissaire endosse donc l’uniforme de la Tacticae Principal, et organise un dernier carré ne pouvant se terminer par autre chose que sa capture, mais permettant, l’Empereur aidant, au colis d’être récupéré ni vu ni connu par les renforts de la Garde. Téméraire mais pas suicidaire, Raine prend soin de confier au Sergent Wyck (Daven de son nom malheureusement, et pas Jöhn) sa montre de gousset, dont l’imprégnation psychique devrait permettre à un psyker digne de Lui de la retrouver jusque dans le bastion des chaotiques.

Le succès quasi total de la première partie de ce plan audacieux laisse donc nos héros séparés. D’un côté, un commando d’Antaris, incluant, outre les Farouches de Wyck, une escouade de Storm Troopers menée par le Capitaine Andren Fel, âme damnée et probable love interest de Miss Raine, ainsi que la psyker sanctionnée Lydia Zane, se lance dans une course contre la montre (mais avec le concours de cette dernière également, if you see what I mean) pour extraire leur petite camarade des griffes des Clairvoyants. De l’autre, cette dernière a la désagréable surprise d’apprendre que les cultistes ne sont absolument pas tombés dans le panneau, mais qu’ils voulaient la capturer depuis le début. C’est ce que lui apprend le magos en charge des opérations, un charmant individu répondant au nom d’Arcadius Verastus, alias 9/9. Il a en effet perçu dans l’âme de sa prisonnière un potentiel des plus alléchants, qu’il compte offrir à Tzeentch pour favoriser son avancement. Ayant manifestement un peu de temps à tuer avant Severina, il prend plaisir à soumettre l’inflexible Commissaire à un interrogatoire poussé, s’insinuant sans gène dans son esprit pour tenter de lui dérober ses secrets les plus honteux1. Même si ces introspections malpolies permettent au lecteur d’en apprendre un peu plus sur le passé de Raine, et notamment le fait qu’elle a repris le nom de sa mère (la Raine-Mère donc), Lord-General Militant de carrière, et choisi d’enterrer celui de son père, sommairement exécuté pour couardise, elles coûtent cher au psyker indélicat, qui se prend une mandale mentale dans les gencives pour sa peine. Victoire morale de l’Imperium.

Pendant ce temps, les intrépides sauveteurs en terre et Antari réussissent à franchir les cordons de sentinelles (pas si) Clairvoyantes (que ça) grâce à leur badasserie naturelle, et à pénétrer dans le bastion ennemi grâce au traqueur GPS de Zane, qui voit clair à travers les illusions tissées par les sorciers ennemis et emmène ses camarades dans la gueule du loup sous couvert d’un tour de passe-passe de son propre cru. Juste à temps pour empêcher l’énucléation et égorgement sauvage de Purple Raine (interrogatoire musclé oblige) par 9/9, qui apprécie moyennement l’intervention non scriptée des bidasses en folie, et se met à leur tailler des croupières psychiques pour la peine. Malheureusement pour Arcadius, Zane détient un MBA de Stanford en occultisme, alors que lui a à grand peine bouclé sa première année de BTS au Lycée Professionnel Ohrmuzd Ahriman de Vaulx-en-Velin, et la confrontation qui s’en suit est à sens unique. Bien que jurant son grand dieu que tout ça faisait partie de son plan, Arcadius a donc l’obligeance de décéder de mort violente quelques secondes plus tard, après que sa prisonnière lui ait mis un peu de plomb dans la cervelle.

Dès lors, il ne s’agit plus pour nos hardis Antaris (Anthardis donc) que d’évacuer les lieux avant que le Haut Commandement ne déclenche le bombardement orbital de la Gueule, ce qui n’est bien sûr qu’une formalité pour ces soldats d’élite. Voilà comment transformer une honteuse défaite en glorieuse victoire, et arracher l’initiative aux hordes damnées contestant la mainmise de Pépé sur la belle planète de Gholl. Comme on dit chez les Ogryns : Go Gholl !

1 : Comme le nom du Primarque sur lequel elle a écrit des fan fictions torrides pendant ses années à la Schola Progenium. On a tous été jeunes !

AVIS :

Nouvelle conséquente dédiée à la nouvelle égérie de la BL, catégorie Commissaire, A Company of Shadows permet à Rachel Harrison de donner du relief à son imposante galerie de personnages, ainsi que de situer le cadre dans lequel ils évoluent. Tout cela est fait de manière fort capable, et dénote d’une belle ambition en terme de construction d’intrigue , mais le grand nombre de points communs avec la saga Gaunt’s Ghosts (une Commissaire héroïque avec un lourd secret de famille et ses relations tantôt amicales – Fel = Corbec – tantôt à couteaux tirés – Wyck = Rawne – avec les officiers de son régiment, qui sont des super soldats venant d’un monde recouvert de forêts, et engagée dans une vaste campagne contre une faction chaotique…) ne risque-t-il pas d’être rédhibitoire à la dernière née de la Black Library ? Même s’il est plus que probable qu’Abnett approche de la toute fin de sa propre série, à supposer qu’il démarre un nouveau cycle après celui de La Victoire, et laissera donc le champ libre à d’autres auteurs dans un futur plus ou moins proche, il est loin d’être évident que les lecteurs de la BL adhèrent en masse à ce qui sera toujours perçu, plus ou moins consciemment, comme la resucée de la saga phare 40K. Le succès du premier roman de cette nouvelle série en puissance, Honourbound, sera sans doute déterminant pour le futur de Raine et de ses Antari, comme First and Only l’a été, en son temps, pour Gaunt et ses Tanith.

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The Armour of Fate – G. Haley [40K] :

INTRIGUE :

The Armour of FateSorti de ses dix mille ans de stase par les bons soins d’Yvraine lors de la 13ème Croisade Noire, Roboute Guilliman, Primarque des Ultramarines et nouvelle person in charge d’un Imperium passablement délabré, consacre ses formidables talents à une tâche d’une technicité insondable : aller prendre une douche. Harnaché comme il l’est dans l’Armure du Destin depuis son miraculeux reboot, Roboute supporte en effet de moins en moins les contraintes de cette carapace providentielle, mais qui malgré tous ses avantages, reste un exosquelette bruyant, encombrant et peu précis. Parfait pour mener ses Bleus sur le champ de bataille et en ressortir indemne, certes, mais inadapté pour réaliser des choses aussi banales que tenir un stylo ou ramasser une fiche bristol (deux des activités favorites de M. Codex Astartes, on s’en rappelle). Et ne parlons pas de l’humiliation de devoir se nourrir à la paille, et du supplice de ne pas pouvoir se gratter le bas du dos. Aussi, bien qu’Yvraine lui ait formellement interdit de se dessaper sous peine de mort après son réveil millénaire, Roro est bien décidé à tenter The Full Monty, ne serait-ce que pour voir la tête de cette andouille de Sicarius, revenu de ses périples dans le Warp avec autant de second degré qu’un thermomètre en panne, et qui lui sert de nounou depuis plusieurs semaines.

S’étant documenté autant que possible sur les armures énergétiques à travers les âges et complété une thèse de recherche appliquée sur ce sujet auprès de l’académie de Thalassar pendant qu’il y était, Guilliman se sent prêt pour tenter l’opération ‘Dépiautage du Homard’ (le nom de code qu’il lui a donné1), mais tient avant ça à obtenir une confirmation qu’il ne va pas faire une grosse couennerie auprès de l’entité la plus savante de l’Imperium – après lui, bien sûr – ChatGPT l’Inferior Cawl, que le véritable Cawl lui a laissé sur le Macragge’s Honour pour répondre à toutes ses questions pressantes et/ou stupides sur le 41ème millénaire. Après avoir réveillé la capricieuse machine, le Primarque s’entretient brièvement avec le chatbot le plus blasé de la galaxie, qui refuse posément de répondre à sa question en plaidant l’incompétence. Il y a des jours comme ça où la technologie décide de faire des siennes. Un rage quit plus tard, Guilliman passe au plan B (car évidemment, il en avait un) : faire appel à un ami. On verra si cela lui portera davantage chance que le 50/50.

Nous partons alors sur Westeros une planète dont la principale caractéristique est d’abriter une falaise de glace, où le Grand Schtroumpf a le souvenir d’un petit bar peinard, accessible seulement après avoir creusé une galerie de dix mètres à un endroit bien précis, et connu de lui seul. Laissant l’impayable Sicarius et son escouade de Vitrixificateurs faire le pied de grue à l’entrée, Guilliman pénètre seul dans la caverne dégagée par ses hommes, et arrive dans une ville eldar complètement désertée. L’attend toutefois sur place une projection d’Eldrad Ulthuan, plus insupportable que jamais2, mais disposé à répondre à la question qui tourmente tant le Primarque convalescent.. mais eldar style, c’est-à-dire de la façon la moins tranchée et honnête possible. Si notre sagace héros semble se satisfaire de la réponse de normand que lui donne son interlocuteur avant que la communication soit coupée, nous pauvres lecteurs apprenons au moins que l’Armure du Destin permet entre autres choses au vague à l’âme que la blessure infligée par Fulgrim a provoqué chez son frère de ne pas s’étendre, ce qui pourrait avoir des conséquences potentiellement fatales pour Ultraman à long terme.

Mais comme le disait un certain économiste quelques millénaires plus tôt, « à long terme, on sera tous morts ». Définitivement tenté par l’idée de se faire tatouer « I love my Pépé » sur la fesse gauche, Roboute Guilliman convoque la fine fleur de l’Apothicarion et de l’Adeptus Mechanicus du Macragge’s Honour à son retour sur le vaisseau, et leur ordonne de procéder au strip tease le plus lourd de conséquences de l’histoire de l’humanité…

1 : On se rappellera que les homards sont bleus lorsqu’ils sont en pleine forme.
2 : Genre tu fais un effort pour t’exprimer dans sa langue, que tu es l’un des seuls êtres humains à maîtriser, et lui te balance ça. Tu sais où tu peux te les carrer, tes runes ?

AVIS :

Guy Haley est un des auteurs de la Black Library les plus doués pour rendre sympathiques et accessibles les personnages glorifiés par le background officiel, et c’est ici Roboute Guilliman qui bénéficie de ses bonnes œuvres (par contre, le pauvre Cato Sicarius ne sort pas vraiment grandi de cette nouvelle). Bien que la tension dramatique de ‘The Armour of Fate’ soit assez inexistante, en raison de l’autre armure, en scenarium celle-ci, portée par le Primarque sur le retour, on lit avec intérêt cette petite digression « vestimentaire », qui montre que même les individus les plus puissants et intelligents qui soient ne sont pas au-dessus de considérations bassement prosaïques, ou de comportements semblables à celui du premier quidam venu. Ça change agréablement des nouvelles d’action effrénée qui constituent le régime de base du lecteur de littérature 40K, et ce ne sera certainement pas moi qui m’en plaindrait.

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The Learning – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE :

The LearningNous suivons l’apprentissage difficile d’Ubraich, un jeune Idoneth ayant gagné à la loterie des profondeurs et étant né avec une âme (et des yeux), et placé par sa mère en internat au temple isharann le plus proche après que son potentiel de mage ait été découvert. Ayant tapé dans l’œil d’un Embailleur (ce qui est délicieusement ironique) du nom de Giléan aux Six Yeux pendant ses études, Ubraich se fait rituellement taillader le visage par son futur tuteur pendant la journée porte ouverte organisée par Giléan dans la piaule de son futur apprenti. Car chez les Idoneth, on ne choisit pas de faire des études, ce sont les études qui débarquent chez vous par effraction et animées de mauvaises intentions. Peine de mort pour les redoublants, je suis sûr. Le vieux maître est une peau de vache de mer, mais parvient tout de même à former son apprenti de manière convenable avant qu’un tragique accident de domptage de deepmare rétive (comme toutes les deepmares) ne vienne mettre un terme sanglant et définitif à sa carrière. Son sacrifice permettra toutefois à Ubraich de terminer de mater l’acariâtre bestiole, pour le compte de la tout aussi acariâtre Dame Sithilien, qui désirait une monture digne de ce nom pour frimer parmi la jet set des profondeurs.

20 ans plus tard, nous retrouvons Ubraich, devenu maître Embailleur à son tour et formant trois apprentis (Irimé, Flowain et Valhanir) alors qu’il se masse une cuisse douloureuse dans le confort de sa moule de compagnie. Il s’agit d’une des séquelles que notre héros a hérité lors de sa confrontation avec la deepmare de Sithilien, et qui n’a jamais guéri (fun fact : les Idoneth cicatrisent très mal). Alors qu’il regarde du coin de l’œil ses pupilles (ça aussi, c’est pas mal comme calembour) tabasser un pauvre allopex avec les matraques électriques qui sont l’outil principal des Embailleurs, il est surpris par l’arrivée de sa vieille amie with benefits (fun fact : les Idoneth sont libertins), qui lui apporte des nouvelles intéressantes du vaste monde. Une deepmare d’une taille prodigieuse aurait été aperçue près de l’enclave de Dwy-Hor, et comme Ubraich s’est donné pour but de devenir la référence absolue de la profession, il ne peut pas passer à côté de cette occasion de surpasser son maître en capturant ce léviathan. Dwy-Hor n’étant pas la porte d’à côté, une telle expédition ne pourra se faire sans l’appui d’un patron influent, et Sithilien accepte noblement de prêter sa petite armée de Namasti à son concessionnaire favori. Tout ce beau monde se met en route, et au bout d’un voyage éprouvant, parvient à l’endroit où la bête fabuleuse a été repérée.

Grâce aux pouvoirs mystiques des Embailleurs, qui peuvent pister une âme à partir de la morsure laissée dans un bout de bidoche (c’est fort), les chasseurs ne mettent guère de temps à localiser l’antre de la deepmare, qui se révèle être en effet d’un fort beau gabarit (trois fois la taille de la monture de Sithilien). L’opération de capture commence, et comme prévu, un grand nombre de Namasti connaît une mort horrible en détournant l’attention de la bête pour le compte de leurs patrons. Confiant dans sa maîtrise du bâton de berger, Ubraich nage en douce jusqu’à la tête du monstre et lui assène un coup bien placé qui lui réduit un œil en bouillie (ce qui fait partie du protocole classique de domptage chez les Idoneth, je vous rassure). Encore un, et l’affaire sera dans le sac…

Début spoiler…Sauf que la deepmare en question dispose d’un système nerveux particulier, qui la rend insensible à la vague de douleur indicible qui incapacite en temps normal les êtres vivants frappés par une crosse d’Embailleur. Elle est seulement très mécontente d’avoir été éborgnée par l’Aelf en calbute qui essaie maintenant de s’éloigner frénétiquement en brasse coulée, et on peut la comprendre. Ubraich essaie bien d’appeler à l’aide son apprentie la plus proche pour qu’elle utilise ses pouvoirs pour empapaouter la bestiole vengeresse le temps qu’il se mette à l’abri, mais cette fourbe d’Irimé, aussi avide de gloire qu’Ubraich l’était à son âge, ignore malencontreusement les instructions de son maître et ce dernier se fait promptement déchiqueter par la deepmare. Moralité de l’histoire : le dialogue intergénérationnel est vraiment rompu chez les Idoneth…Fin spoiler

AVIS :

Je ne sais pas pour vous, mais de toutes les factions développées par Games Workshop à ce jour, j’ai trouvé les Idoneth Deepkin les plus complexes à comprendre (mes avocats me disent que je dois préciser ici que je n’ai pas lu le Battle Tome de cette armée). Outre le fait que leur existence sous-marine me fait poser un tas de question pratico-pratique qui sont rarement évoquées dans la GW-Fiction, le lexique qu’il faut maitriser pour ne rien rater de leurs pérégrinations aquatiques est particulièrement riche. Certes, il est souvent possible de laisser sa curiosité insatisfaite devant un mot incongru écrit en italiques (on peut vivre sans savoir comme les Idoneth appellent leurs pinces à bigorneau), mais il est au contraire parfois essentiel de faire de la recherche appliquée pour ne pas passer à côté d’un élément important de la résolution d’une intrigue.

Je me suis fendu de ce paragraphe de contexte pour pouvoir décerner à ‘The Learning’ la palme (de plongée) de la nouvelle Idoneth Deepkin la plus accessible – ce qui est bien – et la plus didactique – ce qui est mieux – du catalogue de la BL à ce jour. Avec un titre et un sujet pareils, vous me direz que c’est assez logique, et vous aurez raison, mais les contributeurs de la Black Library ne sont pas tous égaux au moment de prendre la plume, et je suis sûr que d’autres que David Guymer auraient sombré dans les abysses sombres et glacées du « cf le Battle Tome » s’ils avaient écrit cette histoire. Rien de tout ça ici, la culture si particulière de cette faction étant présentée avec le bon niveau d’immersion (lol) et de pédagogie, ce qui permet d’en apprendre beaucoup sur les Aelfs des mers en l’espace de quelques pages. C’est là la première qualité de ‘The Learning’, mais l’histoire en elle-même est loin d’être mauvaise (on a le droit à un twist final bien senti, c’est déjà ça), même si son intrigue est d’une simplicité consommée. Bref, j’en recommande la lecture à tous ceux qui veulent découvrir les ID dans les meilleures conditions.

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Lightning Run – P. McLean [40K] :

INTRIGUE :

Lightning RoadSur la planète d’Elijan III, les forces du glorieux Empereur de l’Humanité sont en train de se faire mettre minable par le culte chaotique local, menaçant de priver l’Imperium des précieuses ressources de prométheum de cette colonie. Affectée au transport d’un général de la Flotte, la pilote Salvatoria Grant patiente dans le cockpit de sa bien-aimée Valkyrieen attendant l’arrivée du colis, et tue le temps en murmurant à l’oreille du tableau de bord de son oiseau de fer, s’attirant des remarques acerbes de son co-pilote, le fumiste et fumeur Herrion. Avant que Grant n’ait eu le loisir de mettre sa menace de flinguer l’irrespectueux à bout portant (grosse ambiance), le général Gobrecht arrive avec son escorte, et enjoint son chauffeur Uber de l’amener à la base Patroclus en moins de huit heures, ce qui ferait la différence entre la victoire et la défaite pour cette campagne. Si un raccourci est techniquement faisable pour tenir ces délais serrés, ce dernier force toutefois la Valkyrie à chevaucher au dessus du territoire ennemi, ce qui, je vous le donne en mille, ne se termine pas super bien pour le fringant appareil. Heureusement pour nous d’ailleurs, sinon la nouvelle aurait fait cinq pages. Bref, le coucou se prend un missile en pleine queue, Sal’ fait du sale, et crashe son appareil dans un bout de forêt bien loin derrière la ligne de front, avant de sombrer dans l’inconscience avec la satisfaction du devoir presque bien accompli1.

À son réveil, elle a tôt fait de réaliser qu’elle est la seule survivante de son atterrissage sauvage, le général Gobrecht s’accrochant à son ultime point de vie juste assez longtemps pour lui remettre un anneau de pouvoir qu’elle devra aller jeter au cœur de la Montagne du Destin, et… euh, pardon, erreur d’univers. L’anneau que le gradé blessé à mort lui remet est un décodeur de niveau vermillon, dont le haut commandement de la base Patroclus aura besoin pour décrypter les plans de bataille de l’ennemi, envoyés par mail sécurisé quelques heures plus tôt. À cela s’ajoute un mot de passe en haut gothique, parce que ça fait classe, qui permettra à la coursière commise d’office d’accéder jusqu’à la base en question sans se faire abattre en cours de route. Ceci fait, il ne reste plus qu’à notre héroïne qu’à troquer sa licence de Kaptain pour celle de Deliveroo, ce qui ne fait pas grande différence, il faut bien le reconnaître. Un rapide coup d’œil sur le temps qui lui reste et sa position sur la carte l’amène toutefois à une conclusion logique : il lui faudra piquer un avion aux hérétiques pour tenir les délais. Coup de chance, une base aérienne chaotique ne se trouve qu’à quelques kilomètres du lieu du crash, permettant à la débrouillarde Grant de hijacker un Lightning laissé à l’abandon sur le tarmac. Quelques tirs de pistolet laser plus tard, et grâce à la magie de la standardisation de la technologie impériale, notre pilote est donc de retour dans les nuages, dans un cockpit détrempé de sang certes, mais nécessité fait loi.

Ce n’est cependant pas la fin des problèmes pour Grant, qui doit maintenant trouver un moyen de se poser sans se faire dégommer par un tir ami, l’aspect proto-punk de son avion incitant les forces impériales de tirer à vue. Ces petits rigolos de cultistes ayant piraté la radio de bord, elle a ainsi toutes les difficultés du monde à se faire comprendre de la part de la tour de contrôle locale, et ne réussit à négocier une autorisation d’atterrir qu’après avoir été forcée d’abattre quelques missiles et détruire quelques Hydres en dessinant l’aquila dans le ciel. Ce léger malentendu, ayant toutefois fait 29 morts du côté loyaliste et réduit l’épaule de notre héroïne en steak haché, dissipé, Grant peut enfin remettre sa précieuse bagouze à la colonel Shrake (baptisée en hommage à l’Ogryn philosophe, avec lequel elle partage une certaine ressemblance physique), et recevoir quelques soins. S’attendant à finir devant le peloton d’exécution à cause du carnage – certes involontaire – qu’elle a provoqué sur la base à son arrivée, elle est cependant la première surprise de se retrouver catapultée héroïne de l’Impérium pour son action décisive dans la campagne d’Elijan III, prestement remportée par le camp des gentils une fois leur décodeur installé.

Ce n’est cependant pas tout à fait la fin pour Grant, dont l’élévation au statut d’outil de propagande ne fait pas grand-chose pour combattre la profonde dépression dans laquelle ses actes désespérés l’ont fait sombrer. Devenue alcoolique, et utilisée sans vergogne par le haut commandement comme motivation speaker, ou quelque chose comme ça, à destination des bidasses des Flotte et Garde impériaux, Grant réalise amèrement qu’il n’est décidément pas facile de faire son devoir pour l’Impérium, que l’on soit simple pilote ou tête de gondole. Espérons qu’elle puisse bénéficier des sages conseils de Ciaphas Cain sur le sujet avant de commettre l’irréparable…

1 : Il y a une leçon à tirer de cet accident. Si tu es un personnage de McLean et que l’on te propose de faire un tour de Valkyrie, run (‘No Hero’).

AVIS :

McLean livre avec Lightning Run une nouvelle d’action pure, qui n’aurait pas dépareillée au sommaire de l’anthologie Wings of Blood, se terminant avec un twist final d’un genre un peu particulier et faisant à mes yeux tout l’intérêt d’une soumission autrement très classique (mais efficacement mise en scène et déroulée quoi qu’il en soit). En effet, en suivant Grant pendant les quelques semaines venant après son sauvetage de la campagne d’Elijan III, l’auteur montre à quel point le statut d’héros de l’Imperium peut être dur à porter malgré les apparences, et comment l’appareil de propagande impérial a tôt fait de mettre à profit les individus méritants, sans grande considération pour leur bien-être ou leur santé mentale. Cet aspect de l’effort de guerre, peu abordé jusqu’ici dans la GW-Fiction, permet de conclure la nouvelle sur une touche un peu plus originale, même si bien sombre1, que ce que le déroulement des événements ne nous le laissait pressentir. La marque d’un auteur qui ne se contente pas de servir la soupe, mais cherche à faire sortir ses écrits du lot, ce qui n’est jamais un mal dès lors que les idées sont intéressantes et l’exécution convenable.

1 : Et encore, je pense que McLean aurait pu faire bien pire dans ce registre. Après tout, Grant finit l’histoire vivante, non ?

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Prologue to Nikaea – D. Annandale [HH] :

INTRIGUE :

Prologue to NikaeaEnfermé dans sa chambre comme un ado rebelle, Malcador s’adonne à une de ses activités favorites : fouiller le Warp à la recherche de potins croustillants. Malgré les prodigieux pouvoirs psychiques dont dispose le Sigilite, et le fauteuil ergonomique premier cri que lui a offert son boss pour ménager ses lombaires et sa santé mentale (la qualité de vie au travail, c’est important), la tâche n’est pas sans danger pour Malcador1, qui finit cependant par ferrer un nom après avoir mis son bras dans l’œil d’une tempête Warp particulièrement vindicative : Thawra. Il semble que quelque chose de vilain soit en train de se passer sur cette planète impériale, et il est du devoir du Ma(l)c’ d’aller enquêter sur place.

Quelques temps plus tard, le noble vieillard fait son arrivée en orbite autour de la planète en question, escorté par une compagnie de Custodes menée par le Capitaine Bouclier Collatinus. Il semble bien que Thawra a connu des avanies récentes, comme les débris de sa flotte marchande et le remplacement soudain de la Gouverneur Vasra par sa conseillère Arkanasia en attestent. Rendus à la surface, les enquêteurs impériaux se font briefer par leur hôte : une faction de Psykers séditieux a lancé une attaque surprise sur le gouvernement planétaire, causant un beau bordel (et la mort de Vasra) avant que la contre attaque loyaliste ne les force à battre en retraite. Arkanasia attribue une bonne partie de cette remontada à l’emploi d’une force de Psykers fidèles à l’Empereur, qu’elle a personnellement entraîné pour combattre les félons. Etant elle-même une Psyker, elle est convaincue de tenir là une arme décisive pour la suite de la Grande Croisade, et meurt d’envie d’aller pitcher son idée sur Terra pour la prochaine saison de La Galaxie A Un Incroyable Talent. Malcador, en vieux reac’ qu’il est, nourrit de profonds doutes sur cette idée, qu’il garde cependant pour lui. Il faut avant toute chose s’assurer que l’insurrection de Thawra est définitivement matée, ce qui n’est pas encore chose faite. En effet, les derniers rebelles se sont retranchés dans des cavernes au Sud de la capitale, et on est sans nouvelles des forces envoyées par Arkanasia, dont sa brigade de X-Men, pour leur faire rendre gorge.

Lorsque Malcador, Arkanasia, Collatinus et ses Custodes arrivent sur le théâtre d’opérations, ils sont accueillis par une tempête psychique petite par la taille mais vicieuse de tempérament2. Sa cause ne fait pas de doutes pour un expert aussi calé en warperie que le Sigilite : l’affrontement entre Psykers indisciplinés a dégénéré en un mindfuck littéral (merci Slaanesh), et il est urgent d’agir pour refermer la brèche avec l’Immaterium avant que la tempête n’engouffre tout Thawra. Fort heureusement, Malcador est venu avec les outils appropriés pour cette tâche : sa mauvaise humeur légendaire et sa capacité à faire plusieurs choses en même temps (indispensable lorsqu’on doit gérer une bande de Primarques mal élevés), ici balancer des décharges de taser aux Psykers survivants tout en évitant de laisser traîner sa toge dans la boue warpienne. Et pour ceux qui se demandent, non, les Custodes ne servent pas à grand-chose, à part balancer des rafales de bolter au jugé au niveau des genoux avec un angle de tir de 45°C. Pour des raisons inexplicables, Arkanasia décide soudainement de partir en courant vers la tempête avant que le Régent n’ait fini de réger le problème. Les derniers Psykers en état décident alors de converger sur elle, ce qui aurait pu très mal se finir pour Malcador n’eut été la foi chevillée au corps d’Arkanasia pour l’Empereur. Au lieu de vaporiser le petit vieux pénible qui tchipait sans merci ses condisciples, la Gouverneur par intérim choisit noblement de gueuler un grand « POUR PEPE !!! » en direction du ciel, avant de se prendre une rafale de bolts dans le buffet (qui n’arrivent même pas à la tuer sur le coup, c’est dire si les Custodes sont surfaits).

Tout est bien qui finit quand même pour Malcador et Collatinus, qui, en gentlemen qu’ils sont, viennent assister aux dernières paroles d’Arkanasia. Cette aventure provoque un certain malaise chez le Sigilite, qui n’a dû son salut qu’à la foi de la Psyker, c’est-à-dire au concept que lui et son boss se sont jurés d’éradiquer. Se pose également la question du positionnement de l’Imperium envers les pouvoirs psychiques : sont-ils trop dangereux pour être utilisés, ou bien un juste milieu est-il atteignable ? Rendez-vous sur Nikaea dans quelques années pour reprendre cette discussion…

1 : On en déduit qu’en M30, il n’existe plus de bouton « j’ai de la chance » sur la barre de recherche Google. Cela aurait été plus confortable pour tout le monde.
2 : Il semble à Malcador que la tempête sait qu’il se trouve sur Thawra, et qu’elle cherche à l’humilier, comme les inscriptions insultantes sur sa mère qui apparaissent à la surface du maelstrom semblent l’indiquer.

AVIS :

David Annandale attire l’attention du lecteur sur une question intéressante de l’Imperium naissant : la formation et le contrôle des Psykers par les autorités impériales (in)compétentes. À l’époque, l’Empereur avait d’autres chats à fouetter que de mettre des œillères aux cohortes de mutants acheminés par les Vaisseaux Noirs jusqu’à Terra, tâche peu gratifiante mais indispensable à la survie de son empire galactique. Pendant la Grande Croisade, il y a fort à parier que le sujet était traité au cas par cas, avec des risques de débordement, parfois causé par un enthousiasme sincère mais dangereux, comme cela a été le cas sur Thawra. Si une des missions de Malcador consistait bien à gérer les crises de ce genre pendant que son patron localisait sa marmaille, on comprend mieux pourquoi il tenait temps à renforcer son équipe : à son âge, arpenter la galaxie pour mettre des glaçons psychiques dans le slip du moindre Psyker en rut n’est pas une activité conseillée.

Sur cette base intéressante, Annandale ne développe cependant pas grand-chose, à commencer par des connexions avec Nikaea, ce que le titre laissait pourtant envisager. Il aurait été approprié, à mon sens, de jouer des rapports compliqués que le Warp entretient avec notre continuum spatio-temporel pour faire voir à Malcador des indices du procès en sorcellerie intenté à Magnus et aux Librarius des Légions de l’Astartes, voire de la déchéance de l’humanité telle qu’annoncée par l’Hérésie d’Horus. Rien de tout ceci ici, seulement une nouvelle très « premier degré », saupoudrée d’une pincée de fluff et terminée par quelques remarques d’ordre général sur le rapport qualité-prix de l’Immaterium. Il y avait moyen de mieux faire, mais on sauvera ‘Prologue to Nikaea’ du pilori compte tenu de son absence de défauts majeurs, ce qui place cette œuvre hérétique parmi les plus abouties de son auteur.

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Voilà qui termine cette revue du Summer of Reading 2018, une remarquable fournée de nouvelles à mon avis, aussi bien en ce qui concerne la qualité littéraire des soumissions (ce qui est bien) que des ajouts fluffiques que ces dernières apportent aux univers de la GW-Fiction (ce qui est assez rare). Bien qu’il soit relativement coûteux de se procurer cette mini anthologie à l’heure actuelle (pas de regroupement dans un recueil proposé à prix avantageux par la BL), elle contient des nouvelles qui méritent vraiment le détour si vous êtes un amateur de ce type de littérature. Rendez-vous ici même et sous peu pour continuer cette œuvre de (re)découverte des listes de lecture estivales de la Black Library.

ILLYRIUM [HH]

Une fois n’est pas coutume, la critique qui suit ne sera pas consacrée à une nouvelle ou novella, mais à un format que je n’ai guère pratiqué depuis mes débuts dans la GW-Fiction : l’audio drama. Ce n’est pas vraiment ma tasse de thé, mais comme nous avons ici affaire à l’une des dernières pièces de l’Hérésie d’Horus non chroniquées par la communauté francophone (à ma connaissance), je me suis attelé à la tâche pour que le 100% tant espéré puisse être atteint (si la BL arrête de délayer la fin du Siege of Terra, bien sûr…).

Illyrium

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INTRIGUE :

Le Macragge’s Honour est attaqué (sans doute un coup de ces fripons de Word Bearers), et pendant que ses camarades luttent héroïquement pour repousser les assaillants, il échoit au Sergent Ammon (rien à voir avec cet Amon ou cet Amon) d’aller jouer la nourrice auprès du Chambellan Tarasha Euten, dont les quartiers privés se trouvent en plein milieu de la zone de combat. Euten, aussi appelée M’am (rien à voir avec MoM) par le brave Ammon, est la mère adoptive de Guilliman, et il serait donc dommage qu’elle se fasse enlever ou pire par les hordes de ruffians errants dans les couloirs aseptisés du vaisseau amiral de la XIIIème Légion. Le Sergent arrive cependant trop tard sur les lieux pour pouvoir évacuer le précieux colis hors de ses appartements, déjà à moitié envahis par les flammes. Dans l’attente de l’arrivée des renforts promis par la hotline ultramarine, il se réfugie avec la frêle Euten, qui commence déjà à cracher ses poumons, dans une sorte de débarras où la vioque stocke sa collection de bibelots et de napperons, ainsi que les centaines de livres dédicacés que son fils adoptif lui a offert au cours des dernières décennies1.

Las d’entendre M’am veuve Guilliman se féliciter de sa mort prochaine (apparemment, être la mère adoptive d’un Primarque donne des envies suicidaires), Ammon détourne la conversation en interrogeant sa protégée sur l’histoire d’une des reliques gardées dans son cagibi. Il s’agit du Torque d’Ardan, dont l’histoire remonte aux premières armes de super Roro sur Macragge, alors qu’il n’était encore qu’un enfant prodige dont, je cite, la froideur et l’automatisme faisaient penser à ses parents qu’il était un HPI psychopathe. C’est pour tester la nature profonde de leur fiston que Konor et Euten décidèrent d’un commun accord de le mettre sur une mission particulière : la pacification de l’Illyrium.

Peuplé par des tribus rebelles à toute tentative d’alliance ou d’assimilation avec la « civilisation » représentée par le consulat, l’Illyrium constituait une épine dans le pied des autorités de Macragge City. Le jeune Roboute fut envoyé avec quelques cohortes mettre au pas ces voisins turbulents, et comme Konor avait golf ce jour-là, c’est à Euten que revint la tâche de superviser leur rejeton dans sa première action de mise en conformité, des décennies avant sa participation à la Grande Croisade. Ayant potassé son sujet en écumant toutes les bibliothèques de la capitale, Roboute savait que les tribus illyriennes tenaient particulièrement à un temple situé en périphérie de leur forteresse de Cassium. C’est donc là qu’il attaqua en force, massacrant prêtres et gardes avec une détermination qui manqua de faire défaillir la sensible Euten2. Ce n’était toutefois qu’un expédient pratique pour forcer les défenseurs à sortir de leurs murs, et à les contraindre à accepter le combat dans des conditions plus favorables. Une fois les deux armées face à face, un Guilliman désarmé sortit des lignes pour défier le chef adverse en combat singulier, sachant pertinemment que l’honneur des Illyriens les empêcheraient de le cribler de balles, comme ils avaient pourtant tout intérêt à le faire. Un illustre inconnu accepta de relever le défi, et le duel qui s’ensuivit se passa à peu près aussi bien qu’on pouvait s’y attendre. Troll dans l’âme, Guilliman ne leva pas la main sur son adversaire, mais sa maîtrise du kung fu macraggais lui permit de l’envoyer s’exploser le nez dans les rochers qui jonchaient le champ de bataille, humiliation terrible pour le fier chef tribal.

Lorsqu’il fut clair pour tout le monde que le combat ne pouvait pas être remporté par l’Illyrien, Roboute Guilliman fit preuve de son incomparable génie en épargnant la vie de son ennemi, et lui offrant le Torque d’Ardan en reconnaissance de sa bravoure. Relique confisquée en des temps très anciens par un Consul chapardeur (c’est un peu la Stone of Scone de Macragge), le Torque était un symbole d’unité pour les tribus d’Illyrium, et ce cadeau intéressé assura à Guilliman la fidélité (relative, comme démontré dans ‘Angels of Caliban’) des nobles barbares. Cette résolution économe en vies humaines de ce conflit larvé rassura également M’am sur la nature profonde de son fiston, qui n’était après tout pas dénué de sentiments. Pour une raison mystérieuse, le déroulé exact de cette campagne ne fut pas consigné par écrit, ce qui explique la surprise d’Ammon, qui se considérait pourtant comme un fan hardcore du Guillilore, à la conclusion de l’exposé du Chambellan3.

La nouvelle se termine sur l’arrivée fracassante d’un groupe non-identifié dans les appartements d’Euten. Loyalistes ou hérétiques, le suspens reste entier, et le destin d’Ammon et de M’am avec lui…

1 : Vous croyez vraiment que Roboute était du genre à faire un simple dessin pour la fête des mères ?
2 : Qui se retrouva apparemment au cœur des combats, puisqu’elle put assister aux premières loges aux exploits sanglants de son rejeton. Elle ne devait pas être commode, même à l’époque…
3 : Pour ceux que ça intéresse, le Torque entra finalement en possession d’Euten après que les tribus illyriennes aient été si complètement assimilées dans la culture impériale que cette relique tomba dans l’oubli.

AVIS :

Plongée dans la vie pré-impériale de Roboute Guilliman, ‘Illyrium’ est plus intéressant par l’image qu’elle donne du surhomme en bleu à travers les yeux de sa mère adoptive (qui n’est pas loin de le considérer comme un sociopathe/lunatique/abruti avant qu’il ne démontre son « profond » humanisme) que par le récit de cet épisode mineur et guère surprenant de la geste du Primarque ultramarin. Ni Ammon ni Euten n’apparaissant plus par la suite dans le corpus hérétique, et l’importance de ces deux personnages dans cet événement cataclysmique étant très relative, on peut faire l’impasse sans problème.  

On peut aussi remarquer que l’histoire se déroule suffisamment longtemps après le bref Imperium Secundus pour que la rencontre mémorable entre Euten et Konrad Curze soit déjà racontée dans les livres d’histoire (dixit Euten). Cela voudrait dire que cet épisode se passe après la conclusion de l’Hérésie d’Horus (qui après tout n’a duré que sept ans), et avant la mise en stase de Roboute Guilliman, période dont on ne sait pas grand-chose à l’heure où cette chronique est écrite. Darius Hinks s’est il volontairement embarqué en terrain inconnu, ou s’est-il emmêlé les pinceaux dans l’écriture d’une histoire très mineure ? Je vous laisse seuls juges…

BLACK LIBRARY 2018 ADVENT CALENDAR [40K – HH – AoS]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue des nouvelles du Black Library 2018 Advent Calendar, que je reconnais volontiers entreprendre bien tardivement (mais j’ai fait pire). Comme pour les autres chroniques du genre, il s’agira de passer au crible les histoires proposées par la BL, à raison d’une par jour, du 1er au 24 Décembre. On peut d’ores et déjà constater que le millésime 2018 était assez bien doté, avec pas moins de 18 nouvelles (complétées par six audio dramas, qui ne seront pas traités ici), provenant de quatre franchises de la GW-Fiction : 40K, Age of Sigmar et l’Hérésie d’Horus, bien sûr, mais également Blackstone Fortress1.

1 : Le panorama aurait pu être encore plus complet si les trois soumissions se déroulant à Necromunda n’avaient pas été des audio dramas.

Black Library 2018 Advent Calendar

Les auteurs mis à contribution pour cette fournée hivernale ne surprendront pas des masses les lecteurs vétérans, puisque l’on retrouvera ici des noms aussi connus que Graham McNeill, Gav Thorpe, David Annandale ou encore C. L. Werner. Pour la nostalgie, signalons également que cette série compte l’une des dernières productions du regretté Josh Reynolds pour la Black Library. Dernier détail notable avant d’entrer dans le dur, c’est à partir de ce moment que la BL a cessé (pour l’heure) de republier les nouvelles siglées Hérésie d’Horus dans des recueils tels que ‘Heralds of the Siege’ ou ‘The Burden of Loyalty’, ce qui rend la lecture de ce pot-pourri littéraire incontournable pour le fan hardcore. Voyons maintenant s’il ce dernier n’a pas perdu son temps et son argent…

Black Library 2018 Advent Calendar

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Old Wounds, New Scars – G. McNeill [HH] :

INTRIGUE :

Old Wounds, New ScarsAprès s’être échappée de Molech avec homme et enfants, la pépée (Perpétuelle et Psyker) Alivia Sureka a patienté de longs mois dans des conditions de promiscuité inconfortables que le Molech’s Enlightenment traverse la galaxie pour rejoindre Terra. Alors que ça commence à sentir bon l’écurie (ou bien est-ce simplement une conséquence de mettre 30.000 personnes en vase clos pendant deux an), les nuits de celle que ses co-passagers appellent Sainte Liv – à son grand agacement, elle aurait préféré Liv Tyler – se font de plus en plus agitées. Elle rêve ainsi de sa vie passée sur ce qui n’était alors que la Terre, il y a plusieurs millénaires de cela, le tout entrecoupé de métaphores animalières où l’Empereur lui apparaît comme cerf (ce qui est toujours mieux qu’un gnou) pourchassé par une meute de loups. Pour ne rien arranger, une voix mystérieuse s’invite à intervalles de plus en plus réguliers dans sa tête, et émet des jugements de valeur tout à fait déplacés sur la qualité de ses visions. C’est beaucoup pour une seule femme, reconnaissons-le.

Pour se changer les idées et prendre des nouvelles fraîches de l’avancée du périple du Molech’s Enlightenment, Alivia décide d’aller rendre une visite de courtoisie au capitaine du vaisseau (Sulaiman). Ce dernier lui apprend que le destroyer n’est plus qu’à quelques encâblures du la porte élyséenne, un des accès principaux du système solaire, ce qui est certes appréciable, mais aussi et surtout très dangereux. Alivia doute en effet qu’un vaisseau en provenance d’un système tombé entre les griffes du Maître de Guerre soit accueilli les bras ouverts par la flotte solaire, quand bien même il ne serait occupé que par des fidèles sujets de l’Empereur, comme c’est ici le cas. Son argumentaire ne parvient toutefois pas à convaincre Sulaiman, qui la fait gentiment mais fermement mettre à la porte par son service de sécurité après que la donzelle ait aggravé son cas en engueulant tout fort la voix qui continue à geindre dans sa tête, ce qui est une chose très rassurante de la part d’un Psyker en train de traverser le Warp, comme on s’en doute.

N’ayant rien de plus urgent à faire, Alivia finit par s’isoler dans un coin pour percer à jour le mystère de la voix (sans doute bulgare, du coup), et il s’avère que c’est son ex, lui aussi Perpétuel et Psyker, John Grammaticus, qui cherchait à la recontacter. Comme la dernière fois qu’ils se sont vus, Monsieur l’a laissé enfouie sous les décombres du bar de Kaboul où le couple avait ses habitudes après qu’un malheureux tir d’artillerie ait atteint le rade, les premiers échanges sont un peu tendus. Toutefois, après avoir évoqué le bon vieux temps, et notamment ces vacances mémorables à Béziers, Grammaticus finit par cracher le morceau : il a absolument besoin de retrouver Oll Persson, qu’il a « perdu de vue » depuis les événements de Calth, et doit pourtant amener jusqu’à Terra pour servir de botte secrète à Pépé. Le perpétualisme étant un milieu assez fermé, sans doute que sa bonne amie Alivia pourra lui fournir un tuyau utile ?

À cela, la réponse simple est « non », car notre héroïne n’a pas la moindre idée d’où ce vieux Persson s’est planqué depuis Béziers (ils sont partis à trois). Mais comme Madame est une chicaneuse, elle fait croire à Grammaticus qu’elle sait où le troisième larron se trouve, mais n’est pas disposée à lui passer cette info, na. Ceci fait, elle met fin à l’échange télépathique et trouve un moyen de se représenter devant Sulaiman pour plaider à nouveau sa cause et obtenir que le retour dans le système solaire se fasse par l’entrée de service plutôt que par la grande porte. Elle arrive cependant trop tard pour empêcher le Molech’s Enlightenment de se jeter dans la gueule du loup, et, lorsqu’à peu près 78,439 vaisseaux de guerre attendant l’arrivée d’Horus et de sa flotte avec le doigt sur la gâchette du macrocanon leur balancent une volée de missiles en guise de salutation, elle se rend compte qu’elle ne tient pas tant que ça à savoir ce qu’il arrive à un Perpétuel qui se ferait réduire en cendres dans l’espace (une expérience fascinante). Fort heureusement, Johnny Grammy a le bras long maintenant qu’il est revenu aider son Pépé, et grâce à un coup de fil tête urgent et en échange de la localisation de Persson (un problème pour future her), il parvient à stopper le feu d’artifice avant qu’il ne soit trop tard.

La nouvelle se termine avec l’arrivée de la petite famille recomposée d’Alivia dans le spatioport de la Porte du Lion, et le rembarrage ferme mais poli du larbin (Khalid Hassan) envoyé par Malcador servir de taxi à la smala. Quoi de plus normal que de faire un peu de tourisme de l’apocalypse en toute liberté avant que l’état de siège soit déclaré, pas vrai ?

AVIS :

Graham McNeill se frotte à l’exercice délicat de l’arc mineur feuilletonné (ça fait classe dit comme ça), sur le modèle de ce que l’incomparable Dan Abnett a tenté, et en grande partie réussi, avec Oll Persson et John Grammaticus dans cette même Hérésie. Cela est peut-être dû à mon ignorance crasse de qui était Alivia Sureka au moment où j’ai lu pour la première fois ‘Old Wounds, New Scars’, mais je n’ai pas trouvé le résultat très réussi. McNeill nous balance certes quelques bribes sur le passé (aussi bien proche que trèèèèès lointain) de son héroïne, mais il n’a pas l’élégance ou l’efficacité d’Abnett pour aider le tout venant à raccrocher les wagons des épisodes précédents. Si on passe outre ces considérations séquentielles, l’intrigue de la nouvelle n’est pas non plus exempte de tout reproche, ou, dit autrement, est d’une simplicité et d’une linéarité absolue. On comprend à la conclusion de l’histoire qu’il s’agissait surtout pour l’auteur de positionner un de ses personnages perpétuels récurrents au bon endroit et au bon moment pour faire avancer son arc narratif1, mais je ne suis pas convaincu que dédier une nouvelle entière à cette péripétie très moyenne d’un rôle secondaire (pour le dire poliment) était absolument nécessaire.

1 : Ce qui semble avoir été le cas, Alivia Sureka reprenant du service dans ‘Fury of Magnus’.

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Blood Gold – G. Thorpe [AoS] :

INTRIGUE :

Blood GoldUn ost de Lames de Khorne se dirige dans le chaos et l’anarchie (logique) vers la forme imposante du Mont Vostargi, le méga-volcan du Royaume d’Aqshy ayant servi de berceau enflammé aux robustes Fyreslayers. L’arrivée des maniaques n’étant pas passée inaperçue, une armée de petits rouquins a pris position devant la Porte de la Défiance Eternelle pour leur barrer la route, sous le commandement du Père des Runes Ungrimmsson Drakkazak. Alors que les Duardin patientent avant que la mêlée ne s’engage, Ungrimmsson décide de raconter à un jeune et nerveux Vulkite les origines de la malédiction qui frappe les membres de sa Loge, et a changé la peau de ses fiers guerriers en roche en fusion (ce qui n’est pas banal, reconnaissons-le).

Durant l’Âge des Mythes, la Loge Ironfist était dirigée par un Père des Runes aussi acariâtre que déterminé, Brynnson Drakkazak. Alors que les autres Loges se satisfaisaient d’exploiter les ressources minérales de leurs montagnes natales, les Ironfists n’hésitait pas à monter des raids à travers Aqshy, et plus (loin) si affinités, afin de récupérer le plus possible du précieux ur-or disséminé à travers les Royaumes. Après tout, la reconstitution de l’intégrité physique de Grimnir ne pouvait pas être retardée par des considérations aussi terre à terre que le respect des traités et le consentement libre, informé et préalable des populations locales, pas vrai ? Cette attitude belliqueuse n’était pas appréciée des autres Pères des Runes, mais Brynnson n’étant pas du genre à écouter les jérémiades de ses pairs, les Ironfists ne restaient jamais longtemps au Mont Vostargi à se tourner les pouces.

Un beau jour, ou peut-être une nuit, se présenta un émissaire humain du nom d’Ologhor Shenk, qui annonça à l’assemblée des Pépères (un nom approprié pour cette instance suprême, à mon humble avis) venir forger une alliance avec les Fyreslayers. En échange d’une grande quantité d’ur-gold, d’une qualité particulière mais reconnue comme legit par le Seigneur des Runes de fonction, il était à la recherche d’alliés prêts à se salir les mains pour le débarrasser d’une tribu rivale, les Direbrands. Ces derniers étant des sigmarites invétérés, et donc protégés par l’alliance établie entre Sigmar et Grimnir avant que ce dernier parte en safari, l’offre fut refusée par tous les Pères des Runes présents… à l’exception bien sûr de Brynnson.

L’enthousiasme du maître des Ironfists ne tarda pas à redescendre lorsqu’il se rendit compte que Shenk n’était pas le type le plus honnête de l’univers, et que sa haine des Direbrands était sans limite. Après avoir guidé les Fyreslayers jusqu’au camp d’été de la tribu, où les guerriers humains surpris en pleine bombance se battirent vaillamment mais se firent massacrer jusqu’au dernier par les implacables Duardin, Shenk exigea de ses alliés qu’ils fassent subir le même sort à la colonie de vacances établie pour les enfants Direbrands à quelques encablures du camp des adultes. Mercenaire avec des principes, Brynnson refusa de tourner full Anakin Skywalker, et repartit vers le Mont Vostargi avec son ur-or salement gagné, laissant Shenk se débrouiller avec sa marmaille.

Cette décision ne fut pas sans conséquence, car lorsque les membres de la Loge se livrèrent au rituel de runification corporelle pour lequel les Fyreslayers sont bien connus, les effets secondaires ne tardèrent pas à se manifester. Comme vous pouvez vous en douter, le métal mystique remis par Shenk, qui était coupé avec du bronze provenant de la forteresse de Khorne, causa la peau des Duardin à se transformer en roche fondue, conséquence du déplaisir de la divinité tutélaire du fourbe émissaire devant un job bâclé par les Ironfists. Bien que l’ur-or ait gardé ses propriétés de renforcement musculaire, les Fyreslayers Ironfists furent marqués à jamais par leur association douteuse – mais involontaire, il faut leur reconnaitre au moins ça – avec une divinité chaotique.

Retour au temps présent et au périphérique vostargien, Ungrimmsson ayant terminé son histoire et les Khorneux ayant fini leur marche d’approche. Lorsque son jeune interlocuteur lui fait remarquer qu’il a narré cette légende comme s’il y avait pris part, le Père des Rune a un petit sourire triste, et révèle au Vulkite que c’est bien le cas. Ungrimmsson, ce qui signifie briseur de serment en whatever la langue des Duardin is called these days, a pris ce nom après que la malédiction se soit abattue sur sa Loge, et attribue sa trèèèèès longue vie au sens de l’humour très particulier de Khorne, qui s’est plu à prolonger les jours de celui qui a osé le défier il y a tous ces millénaires. La nouvelle se termine sur une nouvelle transaction à l’amiable entre chaotiques et Fyreslayers, la meneuse des maraudeurs balançant une bourse d’ur-or aux pieds de la (mini) Chose. On ne saura pas pourquoi les deux généraux ont trouvé malin de déranger leurs armées pour cet échange trivial, mais pour une fois que les choses ne dégénèrent pas dans les Royaumes Mortels, on ne va pas s’en plaindre.

AVIS :

Gav Thorpe reprend du service comme aède épique (l’un des rôles dans lesquels il est le plus à l’aise, et le plus « performant ») dans ce ‘Blood Gold’, et nous sert une petite histoire tout à fait satisfaisante sur la géopolitique complexe du Royaume d’Aqshy aux temps jadis. Il en profite pour faire le lien avec ses travaux chaotiques initiés dans ‘The Red Feast’, ce qui fera sans doute plaisir aux lecteurs de ce bouquin. J’ai particulièrement apprécié le portrait nuancé que fait Thorpe des Fyreslayers, qui apparaissent comme les véritables mercenaires que le background établit, et n’ont donc aucun problème à massacrer sans crier gare de lointains alliés pour peu qu’ils aient été payés au juste prix. Cela les différencie très nettement des honorables Tueurs du Monde qui Fut dont ils sont les héritiers, ce qui est une bonne chose, et donne à cette faction une complexité qui est la bienvenue dans le monde de high fantasy d’Age of Sigmar. Une réussite.

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Fire and Thunder – R. Harrison [40K] :

INTRIGUE :

Fire and ThunderNous sommes sur Balfar, monde impérial contesté par ces mauvais sujets de Clairvoyants, et les forces impériales chargées de tenir la cité cathédrale de Whend sont en train de se faire botter les fesses de belle manière. Un début de mission ma foi fort classique pour la Commissaire Severina Raine et son régiment d’adoption (le 11ème Fusilier d’Antari), qui aiment laisser l’initiative à leurs adversaires pour mieux le contrer dans le money time. Faut croire. En tout cas, la situation ne cesse de se détériorer pour les braves soldats de la Compagnie Grise du Capitaine Yuri Hale : après avoir réussi à battre en retraite jusqu’au dernier pont tenu par les forces impériales permettant de sortir de la cité, malgré la poursuite acharnée – mais rigolarde, car les Clairvoyants passent leur temps à se gondoler comme des baleines, ce qui est doit être un peu crispant pour leurs adversaires – menée par les cultistes, nos héros sont frappés par la poisse et par un barrage d’artillerie suivi par un raid de chasseurs ennemis, qui détruit le pont, blesse une bonne partie du casting, et piège Raine et ses ouailles du mauvais côté du périphérique.

Après s’être terrés quelques temps dans une caserne abandonnée, ce qui permet au Medic de la fine équipe (Nuria Lye) de traiter les petits et gros bobos subis par ses collègues de travail, à commencer par la Psyker sanctionnée Lydia Zane, qui a payé très cher ses dernières interventions kinétiques et s’est pris quelques shrapnels dans le buffet pour ne rien arranger, les Antaris parviennent à joindre le Tacticae par radio, mais se font sèchement rembarrer par leur interlocuteur (Logun) lorsqu’ils demandent une extraction. Motif : ils ne sont plus assez nombreux (23) pour que le jeu en vaille la chandelle, et ils n’ont pas pris l’assurance dépannage premier kilomètre, en plus (grosse erreur). La Garde Impériale, toujours à mettre en avant les ressources dans « ressources humaines ». Qu’à cela ne tienne, les hardis fusiliers s’en sortiront par leurs propres moyens, et après avoir soigneusement étudié la carte de Whend, les officiers décident de tenter leur chance du côté de Deadways, soit l’ossuaire de la cité. C’est en effet ici qu’un aqueduc traverse la gorge qui ceinture la ville pour apporter de l’eau aux quartiers ouest, et il y a donc de bonnes chances pour que les Clairvoyants ne l’aient pas fait sauter (tout le monde a besoin de boire, même les cultistes de Tzeentch).

Démarre alors une excursion en terrain ennemi qui mettra à rude épreuve le moral, la discipline et les capacités martiales des rescapés. En plus des attaques récurrentes des Clairvoyants, à négocier avec des blessés de plus nombreux (et blessés) et un stock de munitions qui baisse à vue d’œil, le spectacle des exactions commises par les Clairvoyants sur les habitants de Whend et sur les malheureux Gardes qui sont tombés entre leurs mains refroidit considérablement l’enthousiasme de nos bidasses. Pour ne rien arranger, le Sergent Daven Wyck lutte contre une addiction dévorante aux drogues de combat, et lorsque sa dernière dose se brise malencontreusement alors que les réjouissances viennent de commencer, il en est quitte pour une descente très malaisante. À tel point qu’il manque d’en venir aux mains avec le Capitaine Hale après avoir perdu un jeune membre de son escouade sur un booby trap qu’il n’a vu que trop tard, et dont il se reproche donc le décès tragique. Ce sont des choses qui arrivent, mais quand Severina Raine regarde, seulement une fois. Se sachant en sursis, Wyck se tiendra à carreau pour le reste de la mission, et sauvera même ses petits camarades lors de l’arrivée du boss de fin (un Thunderbolt chaotique) grâce à un tir exceptionnel avec le fusil de sniper qu’il a looté sur un cadavre d’officier, quelques heures plus tôt1.

Au terme d’un parcours éprouvant, la fine équipe parvient à rejoindre ses pénates, avec des effectifs très réduits (13/23), mais sans avoir perdu un seul personnage important dans l’affaire. Même l’increvable Zane s’est courageusement accrochée à son dernier point de vie, et pourra donc être remise sur pied pour servir à nouveau l’Empereur. Ce n’est toutefois pas la fin de la journée de l’infatigable Raine, qui sitôt sortie de l’hopital de campagne, se rend au Tacticae pour faire son rapport…

Début spoiler…Et surtout pour confronter notre ami Logun, qui, après vérification de la part de l’exacte Commissaire, a donné l’ordre de bombarder la zone où se trouvait Raine et ses troupes en début de nouvelle. Mis devant ses responsabilités, l’officier reconnaît ses fautes2 mais plaide l’honnête boulette (honestus bulletius en Haut Gothique) consécutive à des longues heures de travail et une climatisation défaillante – il fait chaud sur Balfar, car la planète a deux soleils. Cela fait doucement rigoler Raine, mais elle se contente de demander à Logun de lui lire la liste des Antaris tués par sa faute, avant de laisser son interlocuteur méditer sur sa tragique erreur. Une preuve de mansuétude ? Pas vraiment, Raine ayant pris soin de passer l’information à ses collègues du Commissariat rattaché au haut commandement des opérations sur Balfar. Il n’y a plus qu’à laisser la justice faire son trav- BANG.Fin spoiler

1 : Même si le nom de l’officier en question n’est pas donné, je parie ma paie qu’elle s’appelait Tchekov.
2 : Ce qui est toujours plus classe que ce qu’a fait le Général Sturm aux Fantômes de Gaunt pendant le siège de Voltis City.  

AVIS :

Rachel Harrison s’impose plus que jamais comme la nouvelle référence en matière de littérature de guerre (spécialité : Garde Impériale) avec ce très complet ‘Fire and Thunder’, qui place l’inflexible Commissaire Raine et une poignée de personnages secondaires (Wyck, Hale, Zale, Cris, Lye) dans un beau pétrin, et laisse ce beau monde se débrouiller pour retrouver le chemin du baraquement, ce qui ne tient évidemment pas du parcours de santé. En plus de regorger de scènes d’actions nerveuses et violentes, ce qui permet de maintenir une tension narrative optimale1, cette nouvelle fait gagner une belle profondeur au Sergent Daven Wyck, dont la lutte contre ses démons personnels (don’t do drugs, kids) constitue une intrigue secondaire tout aussi prenante que la mission d’exfiltration par les catacombes qui occupe le cœur de notre propos. Harrison parvient également à développer/rendre attachants quelques autres membres de la garde (impériale) rapprochée de Miss Raine, à commencer par la Psyker hémophile Zane – qui s’en prend vraiment plein la tronche d’un bout à l’autre de l’histoire – mais également la Medic Nuria Lye (et ses rapports complexes avec Wyck) ou encore la rigolarde mais explosive ingénieure Yulia Crys. On termine ‘Fire and Thunder’ avec une envie pressante de connaître la suite des arcs savamment mis en lumière par Rachel Harrison, ce qui est une marque indéniable de réussite. Un très bon cru.

1 : Un peu amoindrie quand on sait que plusieurs personnages disposent d’une armure en scenarium, mais Harrison réussit tout de même à nous intéresser au sort des seconds couteaux de cette petite escapade en terrain ennemi, ce qui est la marque d’un auteur compétent.

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Man of Iron – G. Haley [40K] :

INTRIGUE :

Man of IronAlors qu’il se reposait rechargeait tranquillement dans la soute du vaisseau qu’il partage avec les jumeaux Ratlings Raus et Rein, UR-025 est réveillé mis en marche par l’intrusion d’un de ces petits parasites, lui annonçant l’arrivée de visiteurs souhaitant s’entretenir avec lui. Dont acte. Les individus en question se révèlent être un trio d’adeptes du Mechanicus de rang minable et d’intentions peu charitables, escortés par un vieux modèle de Kastelan pour faire bonne mesure. Ayant appris l’existence d’UR-025, et n’avalant qu’à moitié son histoire de contrôle à distance par un Magos surdoué (comme la plupart des gens à qui le robot a livré cette expédition, pour être honnête), les trois desperadeptes ne souhaitent rien de moins que kidnapper le mystérieux cyborg pour leur propre profit. Il ne faut pas longtemps à UR-025 et ses systèmes perfectionnés d’homme de fer pour comprendre de quoi il en retourne, mais problématiquement, il ne peut pas refuser de but en (métal) blanc d’accompagner ses visiteurs dans leur projet d’escapade dans la Forteresse Noire. Il est censé être après tout un robot dénué de libre arbitre, et les accords liant les mondes forges de Ryza (où vit le Magos imaginaire que notre héros s’est donné comme patron) et Metallica (planète d’origine des forbans) ne lui laissent pas d’autres choix que de s’exécuter.

Fort heureusement, UR-025 a plus d’un programme dans sa banque de données, et entraîne ses nouveaux amis dans une partie tranquille de la Forteresse, sous couvert de les mener sur un filon de xenotech, où une franche explication sera plus facile que dans l’agitation de Precipice. Les cris stridents annonçant l’arrivée prochaine d’une meute d’ur-ghuls affamés, et les effets que ces signes avant-coureurs ont sur les nerfs fragiles des renégats, signalent à l’androïde que la récré est terminée. Profitant de la confiance mal placée que ses kidnappeurs lui accordent, UR-025 descend froidement ses compagnons les uns après les autres, révélant sa véritable identité au dernier survivant de la bande avant de le terminer à son tour. Ceci fait, il ne reste plus à notre indéboulonnable homme de fer qu’à prendre le chemin du retour, afin de pouvoir continuer sa mise en charge bien méritée. Moralité : Metallica, ce n’est pas toujours plus fort que toi.

AVIS :

Petite nouvelle sans prétention de la part de Haley, ce Man of Iron n’en est pas moins sympathique, la maîtrise narrative de l’auteur se doublant d’une mise en scène intéressante de son protagoniste, qui peut sans doute prétendre au titre de « personnage de Blackstone Fortress au fluff le plus intéressant ». Diantre, ce n’est pas tous les jours que l’on a affaire à un authentique homme de fer, même si « l’aventure » à laquelle il participe tient plus de l’esquive de démarcheur de rue que de la fresque épique révélant les origines de cette relique ambulante (qui se vante d’avoir rencontré le véritable Omnimessie – c’est à dire pas l’Empereur – aux cours de ses pérégrinations). Guy Haley arrive à insuffler à UR-025 une personnalité de vieux ronchon désespéré par la tournure prise par les événements au cours des derniers millénaires, et forcé de jouer au robot stupide – ce qui est souvent assez drôle – pour éviter d’attirer les soupçons sur qui il est vraiment. Le résultat, à défaut d’être mémorable, est tout à fait correct, et on se prend à rêver d’une éventuelle rencontre entre UR-025 et Bellisarius Cawl, et du dialogue qui s’en suivrait…

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The Deeper Shade – C. L. Werner [AoS] :

INTRIGUE :

The Deeper ShadeQuelque part sur le littoral luxuriant de Ghyran, la bande d’affreux du sorcier Thalinosh de Charr se prépare à explorer un donjon un peu particulier. La cible des cultistes est en effet la Griffe de Mermedus, une aiguille rocheuse fermement plantée dans une baie isolée de la côte ghyranite, et que les locaux évitent avec soin du fait de son effroyable réputation. Comme le confirme le vieux prêtre de Sigmar que Thalinosh a capturé pour lui servir de guide, un fantôme assoiffé de sang moelle hante les lieux et attaque tant les hommes que les navires ayant la mauvaise idée de s’aventurer sur son territoire. Il en faut cependant plus pour décourager notre héros, car c’est ici-même que son apprenti fugueur (Gratz) a perdu une relique que le sorcier souhaite absolument récupérer, spectre grognon ou pas.

Accéder à la grotte où le monstre, que Thalinosh suppose avec raison être désormais l’heureux détenteur de son bien, se prélasse ne sera pas chose facile, la caverne se situant à la base de la Griffe et étant donc submergée par les eaux. Il en faut toutefois plus pour décourager le sorcier, qui grâce à un ingénieux dispositif de digue (magique) et de pompage (magique aussi), parvient à mettre la base de l’aiguille en cale sèche, au modique prix de la vie du prêtre et de son chenapan d’apprenti. Ceci fait, il emmène ses fidèles suivants, commandés par l’homme-bête Sharga et la guerrière Borir, faire un peu de spéléologie marine.

Au bout d’une marche d’approche sans autres désagréments qu’un pantalon trempé et une persistante odeur de limon, la fine équipe arrive au cœur de la Griffe, où tout semble indiquer que le mystérieux fantôme a pris ses quartiers. Le sol est en effet jonché d’ossements rongés et de trésors boueux, et lorsque le trio de goons qu’il a envoyé à l’avant-garde est attiré sous la surface par un invisible assaillant, il est temps pour que le boss fight que l’on devinait se profiler à l’horizon se déclenche. Envoyez la musique…

Début spoiler 1…L’adversaire auquel Thalinosh et Cie font face se révèle être un Krakigon adulte, soit le fruit des amours interdits entre un kraken et un caméléon. Si les capacités mimétiques de la bête compliquent dans un premier temps son ciblage par nos aventuriers trempés jusqu’à l’os, la magie de Thalinosh permet de jeter une lumière crue sur l’ennuyeuse bestiole, et de révéler que dans grande coquetterie, elle porte l’éclat de shadeglass dérobé par Gratz à son tuteur en sautoir. Au bout d’un combat éreintant au cours duquel tous les personnages non nommés finissent éclatés sur les parois de la grotte ou dévorés par la bête, l’intrépide Sharga parvient à arracher le précieux du maître au caractériel calamar, avant que ce dernier ne se fasse écraser par un pan de falaise que ses tentaculaires gesticulations avaient dérangé. Voilà une affaire rondement menée…

Début spoiler 2…Mais cela est sans compter la perfidie naturelle des Disciples de Tzeentch, bien sûr. Borir trahit donc ses comparses et arrache le précieux éclat des doigts raidis par la mort du pauvre Sharga après lui avoir planté sa dague rituelle dans le cœur. Elle révèle à Thalinosh avoir fait un pacte avec le rival de ce dernier, l’infâme Carradras (qui s’est enfin réveillé, il faut croire), et, confiante dans l’état de fatigue avancé de son ancien patron après les efforts consentis pour venir à bout du Krakigon, lui expédie sa dague en pleine poitrine pour faire bonne mesure. En cela, elle commet une grave erreur, comme lui souffle ce rusé de Thalinosh, car c’est le sortilège du sorcier qui empêche les eaux d’engloutir la grotte où ils se trouvent. Réalisant sa boulette, Borir se lance dans un sprint éperdu en direction de la sortie, laissant Thalinosh seul dans la caverne, mais moins mal en point qu’il n’y paraissait. La dague avec laquelle la traitresse l’a frappé étant un athame qu’il a lui-même confectionné, il ne pouvait être blessé par ce projectile. Mouahahaha. Trop fatigué pour donner la chasse à son acolyte, il claque ses dernières réserves de mana dans un sort de vol afin de sortir de la Griffe par le trou dans le plafond obligeamment aménagé par le Krakigon dans son agonie, et a la satisfaction de voir Borir se faire submerger par les vagues lorsqu’il met fin à son enchantement. Qui sait, peut-être qu’il trouvera ce qu’il cherche lors de la prochaine marée basse ?Fin spoiler  

AVIS :

C. L. Werner revisite l’archétype de la nouvelle d’heroic fantasy, la bande d’aventuriers en quête d’un artefact mystique gardé par un monstre patibulaire, en mettant en scène une bande de cultistes de Tzeentch plutôt qu’un groupe à l’allégeance plus neutre. Le résultat est tout à fait satisfaisant, même si assez convenu, Werner ayant assez de métier pour rendre une copie de qualité. Un filler très honnête.

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Abyssal – D. Annandale [HH] :

INTRIGUE :

AbyssalOù il sera question du Psyker Aveth Vairon, cueilli comme la rosée du matin par l’équipage d’un Vaisseau Noir alors qu’il cherchait à évacuer sa planète natale (Kithnos) avant l’arrivée d’Horus et de ses renégats. N’ayant pas perdu tout fighting spirit malgré les conditions de détention épouvantables qui sont les siennes, et persuadé que le destin (qui se manifeste dans son cas particulier par l’apparition d’une rune bien particulière dans son champ de vision) finira par lui sourire, Vairon convainc deux de ses co-détenus de monter une insurrection contre l’équipage de l’Irkalla, initiative généreuse mais mise en échec par l’arrivée de la première Sœur du Silence venue. Saleté de Parias.

Jeté au mitard en punition de son rôle d’objecteur de conscience, Vairon est toutefois rapidement tiré de sa cellule par ses complices, après que le Vaisseau Noir ait été attaqué par un ennemi inconnu, permettant au trio d’échapper à l’attention des gardes et de libérer une autre détenue placée à l’isolement en raison de sa dangerosité. Celle que nous surnommerons la cantatrice chauve du fait de son physique particulier et de sa voix de stentor doit servir de ticket de sortie à Vairon et ses camarades (Cassina et Harvus), d’après le pressentiment confus que le premier éprouve en sa présence. Bien aidé par ses pouvoirs de Banshee (elle hurle dès qu’elle se sent menacée, avec des effets radicaux sur les malheureux qui lui font face) et le GPS psychique de Vairon, le petit groupe parvient à naviguer dans le dédale des coursives, et se rapproche de la section du vaisseau où sont stockés les modules de survie. Une stratégie de court terme, certes, mais on ne peut pas reprocher à des Psykers de vouloir quitter un Vaisseau Noir par tous les moyens, et de réfléchir à la suite des opérations plus tard.

Manque de bol, Vairon and friends croisent la route d’une Sœur du Silence solitaire alors qu’ils touchaient au but, et l’aura anti-psy couplée au pistolet bolter de la nouvelle arrivante se révèlent être fatals à Cassina, Harvus et à Miss Grandgousier. Miraculeusement épargné par les bolts, Vairon ne donne toutefois pas cher de sa chère personne, et aurait sans nul doute fini éparpillé façon puzzle à son tour n’eut été l’intervention décisive de mystérieux sauveurs…

Début spoiler…Une escouade de Word Bearers débarque en effet sur les lieux du cri(me), et règle rapidement son compte à la Sœurette isolée. Vairon réalise alors avec horreur que la fameuse rune qui a guidé sa vie pendant toutes ces années n’était en fait qu’une décoration de l’armure du frère Jean-Firmin, 734ème Compagnie, et qu’il s’est fait des plans sur la place que la DESTINEE lui avait réservé dans le grand ordre des choses. Une chose est sûre, ses talents vont être utilisés à plein potentiel, mais sans doute pas d’une manière qui le satisfasse beaucoup…Fin spoiler

AVIS :

Onze pages, c’est un format exigeant pour écrire une nouvelle intéressante, et ayant pratiqué la prose de David Annandale plus qu’à mon tour, j’avais inconsciemment placé la barre assez basse sur cet ‘Abyssal’ dès la réalisation qu’il s’agissait d’un très court format. Et je n’ai pas été déçu (et donc j’ai été déçu). S’il serait mesquin de ma part de pointer la simplicité de l’intrigue, qui est directement reliée au nombre de pages que l’auteur peut consacrer à étoffer son histoire, je serai en revanche moins conciliant sur le choix d’Annandale de mettre en avant un personnage (la femme sans visage), pour au final le bazarder comme un malpropre et sans que le soin consacré à le faire ressortir du lot ne serve à grand-chose. De plus, et c’est assez ironique pour un texte aussi court, j’ai trouvé la préparation du (mini) twist final trop longue, ce qui amène le lecteur à deviner ce qu’Annandale avait derrière la tête deux paragraphes avant qu’il révèle le fin mot de l’histoire. ‘Abyssal’ n’est pas abysmal (je reste mesuré, même si le jeu de mots était tentant), mais il ne mérite pas vraiment le détour.

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Acts of Sacrifice – E. Dicken [AoS] :

INTRIGUE :

Acts of SacrificeLa situation n’est pas fameuse pour les templiers de l’ordre de l’Étoile Ardente, dédié à cette bonne vieille Myrmidia. Assiégés dans leur forteresse par la horde de Sulkotha Godspite, championne de Khorne au physique impressionnant, ils ont résisté avec vaillance pendant des semaines mais la sauvagerie et le nombre de leurs adversaires ne laissent que peu d’espoir aux derniers rescapés quant à la conclusion de cet affrontement. Leur Grand Maître (Vaskar) tombé au champ d’honneur la veille, et sans aucune nouvelle de l’émissaire dépêché en début de siège quérir l’aide des Fyreslayers de la Loge Hermdar, la commandante par intérim Anaea se résout à tenter le tout pour le tout et à monter une sortie pour rejoindre le Drakemount, un autre bastion de l’ordre situé à quelques jours de voyage sur le plateau de Flamescar. Malgré la réticence de son second Karon, un chevalier old school tout prêt à donner sa vie pour l’honneur et la gloire dans un dernier carré futile, Anaea convainc ses troupes d’abandonner aux Khorneux la possession du terrain, et les Myrmidions se lancent à l’assaut des barbares braillards, juchés sur leurs fidèles demidroths.

Au prix d’une mêlée furieuse pendant laquelle Karon et Godspite croisent le fer et l’indispensable Anaea récupère la bannière de l’ordre au moment où elle allait tomber 1) par terre et 2) à l’ennemi, les templiers parviennent à transpercer les lignes ennemies et à s’enfuir dans le Désert de Verre, gardant l’accès au Drakemount. Le voyage est éprouvant pour les chevaliers lézardiers, plus d’un succombant à ses blessures ou à l’impitoyable soleil d’Aqshy, tandis que les meutes de molosses mutants (check l’allitération) que Godspite utilise comme éclaireurs harcèlent les rescapés. Lorsque la forteresse tant attendue se profile enfin à l’horizon, Anaea entraîne ses troupes dans un dernier élan vers la sécurité du bastion allié, où ils pourront enfin se reposer avant que les hostilités recommencent…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur l’omniprésence de l’ennemi (on ne l’appelle pas Chaos universel pour rien), qui a attaqué la forteresse et passé sa garnison par l’épée il y a de cela plusieurs mois, à en juger par l’état des cadavres que les templiers découvrent sur place. La horde de Godspite n’étant qu’à quelques heures de marche du Drakemount, et sans autre plan de rechange à disposition, c’est au tour de Karon de faire valoir ses arguments, et de résoudre ses compagnons d’armes de vendre chèrement leur vie dans les ruines de la citadelle. Cette décision suicidaire n’est toutefois pas du goût d’Anaea, déterminée à faire survivre son ordre à tout prix, et en solitaire s’il le faut. Cette traditionaliste acharnée s’éclipse donc par une poterne (toujours avec sa précieuse bannière, parce que why not) avant l’arrivée des Khorneux, et bien qu’elle doive rabrouer quelques vilains doggos en route vers sa prochaine destination, elle parvient à nouveau à s’échapper de la nasse chaotique. La nouvelle s’achève sur sa contemplation, forcément morne et déchirante, de l’ultime bataille livrée par son ordre, avant qu’elle ne reparte en direction d’un nouveau foyer. Que font les Stormcast Eternals quand on a besoin d’eux ?Fin spoiler

AVIS :

Acts of Sacrifice’ fait partie de ces nouvelles qui se terminent et laissent un fort goût d’inachevé à leurs lecteurs. C’est d’autant plus dommage qu’Evan Dicken avait réussi à rendre intéressant son histoire de dernier carré désespéré, notamment grâce à une personnification réussie des personnages principaux. La terrible Sulkotha Godspite (et sa chaîne magique) n’aura donc pas le droit au combat épique auquel elle semblait pourtant promise, ce qui est particulièrement dommage. Même si l’histoire racontée par Dicken tient la route, et offre même une variété bienvenue par rapport aux happy/glorious endings qui forment la majorité du corpus de la GW-Fiction, je reste convaincu que la conclusion aurait pu et dû être plus soignée, pour un résultat plus satisfaisant1.

1 : À moins qu’il ne s’agisse d’une sorte de prologue à un arc plus large, au cours duquel Anaea aurait la chance de se venger de sa Némésis. Mais pour le moment, rien de tel n’a été publié ou annoncé par la Black Library.

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The Son of Sorrows – J. French [40K] :

INTRIGUE :

The Son of SorrowsSur une planète banale, une secte impériale l’étant tout autant a commis la singulière et fatale erreur de franchir une des lignes rouges de l’Inquisition : capturer des Psykers (ok) et les torturer (ok) pour obtenir des bouts de prophéties (HERESIIIIIIE !!!). Mettez vous bien ça dans la tête, mécréants : le loto doit rester un jeu de hasard, sinon comment voulez vous que les Seigneurs de Terra financent les opérations de la Garde Impériale, hein ? L’affaire ayant été remontée jusqu’à l’Inquisiteur Covenant, ce dernier décide d’envoyer une de ses nouvelles recrues, l’ex Sergent des forces spéciales Koleg, faire un exemple des Chercheurs de la Vérité Incandescente (le petit nom de la secte), sur le lieu même où ils ont monté leur sinistre opération : la cathédrale Saint Raymond des Charentaises.

On suit donc Koleg depuis sa préparation méthodique dans la cellule qui lui sert de chambre, après que la brave Viola von Castellan, qui entre autres tâches s’occupe des ressources humaines pour le compte de son patron, lui ait transmis le briefing de la mission, jusqu’à l’exécution de cette dernière. Déployé comme la one man army qu’il est, Koleg sait qu’il doit faire un exemple des pécheurs et utilise pour ça un armement bien spécifique : un lance grenade balançant des bombinettes à fumée saturée de LSD et d’agent phobique (pour faire littéralement halluciner ses victimes et les mener à se retourner les unes contre les autres) d’une part, et un pistolet à chevrotine d’autre part (ça sert toujours). Ah, il utilise aussi une sorte de porte manteaux rétractable à un moment, mais je serai bien infoutu de vous dire à quoi ça lui a servi1. Toujours est il que le K. nettoie la place avec l’efficacité des grands professionnels, même lorsque l’un des Psykers gardés au frigo par les hérétiques s’invite à la fête après qu’une grenade ait défoncé son aquarium amniotique.

En parallèle, nous avons droit à quelques flashbacks retraçant les événements ayant mené notre héros à rejoindre la team Covenant. On apprend ainsi que Koleg avait un frère (Kesh) avec lequel il partageait la passion de la fauconnerie, et qui est mort tragiquement après qu’une bombe au napalm soit tombé sur leur maison. Bien des années plus tard, un Koleg adulte et engagé dans la Garde Impériale battit son Capitaine comme plâtre après que ce dernier se soit trompé dans les coordonnées d’un raid incendiaire, ayant sans doute fait des victimes civiles et triggered Koko. Un tel crime ne pouvant rester impuni, Koleg s’attendait à être exécuté sans sommation par le Commissaire le plus proche, mais par un heureux hasard, un homme de main de Covenant (peut-être Josef) passait dans le coin et proposa au soldat dépressif de rejoindre l’Inquisition. Koleg accepta à la condition d’être débarrassé de son spleen persistant, et comme une psychothérapie coûte apparemment trop cher pour l’Inquisition, il fut à moitié lobotomisé par ses nouveaux copains à la place. Résultat : il n’est plus capable de ressentir aucune émotion, ce qui peut avoir ses bons côtés je suppose. Comme dit le proverbe, keep calm and purge on

1 : Et je ne suis pas le seul apparemment.

AVIS :

Parmi la foultitude de suivants de l’Inquisiteur Covenant, le taciturne Koleg est sans doute le moins remarquable, son statut de simple gros bras chargé des basses besognes ne lui permettant pas de voler la vedette aux seconds couteaux les plus fantasques, stylés ou particuliers du Francis Lalanne de l’Ordo Malleus. Cela n’a pas empêché l’aimable John French de donner à cet humble personnage un début d’origin story, convenablement mystérieux1 et résolument tragique, ce qui est approprié pour un type évoluant dans un univers grimdark. À vrai dire, ce sont les flashbacks retraçant le parcours de Koleg qui m’ont le plus intéressé, le récit de sa mission « Epouvantail » dans la cathédrale squattée par les cultistes ne révolutionnant pas le genre du bolt porn, et j’aurais donc apprécié que French passe plus de temps à détailler le passif du pseudo Space Marine (après tout, lui non plus ne connaîtra plus la peur) plutôt qu’à le décrire en train de gazer de l’hérétique. Pas la meilleure nouvelle horusienne de notre homme, mais tout de même sympathique. Tous avec moi : Heeeeee’s a maaaaaan of constant sooooorrooooooow…

1 : J’ai compris qu’il a tabassé son Capitaine parce que l’erreur que ce dernier a commise lui a rappelé le tragique destin de sa propre famille, mais peut-être qu’il s’agit du même accident.

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A Lesson in Iron – D. Guymer [HH] :

INTRIGUE :

A Lesson in IronS’il y a une chose que Ferrus Manus, paix à son âne, détestait, c’était bien perdre du temps. Aussi, sitôt réuni avec sa Légion, engagée dans le démantèlement de l’empire de rouille ork, le Primarque tint à imposer sa marque sur ses Légionnaires. Nous rejoignons ainsi l’impulsif M. Manus alors qu’il fait la chasse de quelques vaisseaux peaux vertes ayant survécu à la colère de l’Imperium, et qu’il compte bien détruire afin d’obtenir la complétion à 100% de sa mission, et ainsi prouver à l’univers qu’il vaut mieux que ces poseurs d’Horus et de Russ1. Et tant pis si ces couards d’Orks décident de foncer coque baissée dans une faille Warp qui flottait par là pour échapper au courroux de l’Astartes, et que personne n’a jamais été assez timbré du côté impérial pour se risquer dans ce genre d’environnement chelou. Ferrus, et son Fist of Iron, seront les premiers à tenter le coup. Encore un record à mettre au crédit du Primarque qui en voulait.

Ferrus n’est pas seul sur le pont de son vaisseau amiral alors que ce dernier réalise le premier fistage d’une faille Warp. Il est accompagné de deux Sergents vétérans, le Terran Harik Morn et le Medusan Gabriel Santar, tous deux pressentis pour devenir son bras droit. Alors que le Fist of Iron s’enfonce dans le trans Materium comme s’il s’agissait de caramel mou, avec des effets funky sur les appareils de navigation, comme on peut l’imaginer, les auspex détectent soudain des silhouettes de vaisseaux à proximité. Il s’agit des kroiseurs orks, mais également d’un nouvel arrivant, qui n’avait pas été identifié pendant la poursuite dans l’espace réel. Point commun : tous ont été réduits à l’état d’épave, et dans un passé lointain qui plus est. À la grande surprise des impériaux, il semble que le vaisseau en question appartienne à la 10ème Légion, ce qui hautement improbable mais pas totalement impossible. Pragmatique comme toujours, Ferrus Manus décide d’aller y jeter un œil.

Alors que les pauvres grunts qui forment son escorte découvrent avec émoi 1) l’existence de Démons et 2) s’il y a une vie après la mort, le Primarque et ses comparses arrivent jusqu’au pont du vaisseau mystère, où les attend un cadavre desséché de Space Marine. Ce dernier porte les marquages d’un Iron Hands, mais, au grand dégoût de FM, il semble avoir terminé sa carrière plus machine que (sur)homme, au vu de toutes les augmétiques et bioniques que la dépouille arbore. C’est le Tech-adepte qui accompagne la fine équipe qui finit par proposer l’hypothèse la plus intéressante pour expliquer ce répugnant mystère : l’épave sur laquelle ils se trouvent est un vaisseau des Iron Hands provenant du futur, transporté dans le passé par les caprices du Warp.

Avant que la nouvelle n’ait pu être digérée par l’assemblée, une palanquée de Démons se manifeste (dans tous les sens du terme) sur le pont, et forcent nos héros à – enfin – faire usage de la force. Si ce bogoss de Ferrus s’illustre à grands coups de marteau, ses subalternes sont plus à la peine. Surpris par les nouveaux arrivants, Santar se fait ainsi arracher le bras gauche par une Bête de Nurgle joueuse, tandis que Morn est submergé par des Horreurs rigolardes. Le premier réussit toutefois à marquer des points auprès du Primarque en retournant dans la mêlée sitôt ses esprits recouvrés, tandis que le Terran se contente de haleter comme un bébé phoque sur la banquise. Avant d’ordonner une retraite tactique vers le Fist of Iron, ignorant les avis de ses sous-fifres de rester pour looter de la technologie futuriste, et/ou défendre une relique de la Légion, Ferrus tranche en son for intérieur : ce sera Gaby qui deviendra son Ecuyer et 1er Capitaine. C’est dit.

1 : C’était l’époque de la Grande Croisade où tous les Primarques avaient un nom qui rimait avec « platypus », l’animal préféré de Pépé.

AVIS :

Petite nouvelle fort sympathique consacrée par leur spécialiste incontesté, David Guymer, aux Iron Hands et à leur Primarque caractériel, ‘A Lesson in Iron’ se paie le luxe de nous présenter en quelques lignes la prise de fonction de Ferrus Manus au sein de sa Légion (choix du 1er Capitaine, et autres révélations fluffiques intéressantes incluses), combiné avec une savoureuse mise en abîme du futur qui attend le Chapitre dans quelques millénaires. Le fait que les améliorations bioniques répugnent au plus haut point l’homme aux mains de fer n’est pas une nouveauté à ce stade, mais Guymer parvient tout de même à surfer sur cette iron-ie de façon tout à fait satisfaisante. Le pauvre Ferrus Manus aura soupé de prémonitions malheureuses car jamais utilisées pour modifier la destinée pas vraiment enviable attend ses fils et lui-même à la sortie de la Grande Croisade, et on en a encore un exemple ici. Ca reste plus distrayant à lire que la moyenne des soumissions de la BL, donc pourquoi cracher dans soupe ?

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A Dirge of Dust and Steel  – J. Reynolds [AoS] :

INTRIGUE :

A Dirge of Dust and SteelÀ la recherche de la légendaire cité corbeau de Caddow et de son Portail des Royaumes reliant à Shyish à Azyr, une petite force de Stormcast Eternals de la Chambre Vanguard des Hallowed Knights (soyons précis) a conclu un pacte avec les Duardin de Gazul-Zagaz, seuls à connaître l’emplacement de cette ville mystérieuse1. En échange de leur aide contre les hordes du Gardien des Secrets Amin’Hrith, connu sous le nom d’Ecorchâme, les nabots dépressifs (leur royaume est en ruines, leur Dieu s’est fait bouffer par Nagash et l’âme de leur dernier prince sert de skin au démon de Slaanesh) mèneront les guerriers du Lord Aquilor Sathphren Swiftblade jusqu’à bon port. Jamais le dernier à rendre service à son prochain, notre héros accepte bien entendu cette généreuse proposition, et se fait fort d’entraîner ce fât d’Amin’Hrith dans un piège ingénieux.

Ayant réussi à capter l’attention des Hédonistes, probablement en leur faisant remarquer que leurs soieries avaient fait fureur à Ghur il y a trois saisons de celà (ce qui, pour une fashionista des Royaumes Mortels, est une insulte mortelle), les prestes cavaliers de Sigmar emmènent leur nouveaux amis dans une course éperdue à travers les dunes, jusque dans les ruines de Gazul-Zagaz, où les attendent de pied ferme (et depuis un petit moment apparemment, à en juger par l’épaisse couche de poussière qui les recouvre) les guerriers Duardin. S’en suit une bataille des plus classiques, illustrant de fort belle manière l’intérêt de se rendre au combat avec une armure de plates et non une combinaison en viscose, dont le point culminant sera le duel entre Swiftblade et Amin’Hrith dans le temple de Zagaz, où le rusé Stormcast s’emploiera à faire un boucan à réveiller les morts…

1 : On peut donc dire qu’ils ont une carte Caddow. Mouahahaha.

AVIS :

À l’heure où cette chronique est écrite, Josh Reynolds est probablement le contributeur principal de la BL en matière de contenus siglés Age of Sigmar. Une telle prodigalité ne pouvant évidemment pas être synonyme de qualité exceptionnelle à chaque soumission, il est en somme tout à fait logique que certaines des nouvelles rédigées par notre homme ne s’avèrent pas être d’une lecture des plus passionnantes. C’est le cas de ce A Dirge of Dust and Steel (on me passera l’usage du titre original, à la fois plus poétique et plus élégant que le monstre qu’il est devenu en VF), qui se trouve être une nième variation du topos le plus employé de cette nouvelle franchise : la baston de Stormcast Eternals contre les forces du Chaos1. On pourra certes m’opposer que cet épisode particulier se distingue des dizaines qui l’ont précédé par l’emploi d’une Chambre relativement nouvelle (Vanguard), d’un héros inédit (Sathphren Swiftblade) et d’un environnement exotique en diable (l’Oasis de Gazul, en Shyish). Ce à quoi je répondrai que les Vanguard ne sont « que » des Stormcast sur demi-gryffs, et ne conservent de fait que très peu de temps l’attrait de la nouveauté. Swiftblade a quant à lui l’originalité d’une boîte Barbie et son Cheval, même son côté grande gueule n’étant plus vraiment novateur depuis l’arrivée d’Hamilcar Bear-Eater sur le créneau « humoristique » des SE. Pour terminer, Gazul a depuis lors sans doute rejoint l’interminable liste des lieux des Royaumes Mortels dans lesquels plus personne ne reviendra jamais, et ne mérite donc pas que l’on s’y intéresse plus que de mesure.

Non, pour ma part, la seule vraie valeur ajoutée de ce Dirge… tient en l’inclusion d’une faction Duardin sortant franchement du lot par sa vénération d’un Dieu de la Mort mort (combo !) et sa capacité à invoquer des esprits, ce qui constitue des variations intéressantes par rapport au stéréotype du guerrier nain que tout lecteur connaissant ses classiques se représente de façon plus ou moins inconsciente. Pour le reste, c’est de la qualité Reynolds (Josh), donc un récit bien structuré et rythmé, s’intégrant parfaitement dans les conventions définies pour Age of Sigmar en termes de fluff et d’atmosphère, et s’avérant dans l’ensemble plaisant à lire. Ne lui retirons pas ça.

1 : Comme les dernières années ont vu apparaître d’autres types d’adversaires, comme les morts-vivants de Nagash pendant la Tempête des Âmes ou les Orruks Ironjaws de manière collatérale à la traque de Mannfred von Carstein, j’attends avec impatience le moment où les vertueux Sigmarines commenceront à taper sur d’autres factions de l’Ordre, en attendant l’inévitable guerre civile que le passif de GW en la matière nous promet depuis que le premier Stormcast a dévoilé le bout de son masque de guerre. ‘La Vilainie de Vanus’, ça c’est un titre qui claque !

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The Last Council – L. J. Goulding [HH] :

INTRIGUE :

The Last CouncilPendant que Pépé emmenait ses fils à la conquête d’une galaxie qui n’avait rien demandé, l’ingrat mais nécessaire boulot de gestion de son Imperium naissant fut confié à un conseil de technocrates et autres représentants (parfois élus) du peuple, placé sur l’autorité chillax mais absolue de Malcador le Sigilite. Ce dernier réussit à faire reconnaître la pénibilité de sa tâche après le Triomphe d’Ullanor, l’Empereur ayant eu la grâce d’envoyer le mème ‘Vu et s’en tape’ lorsque son Régent lui proposa de passer officiellement la conduite des affaires civiles au Conseil de Terra. Cette situation perdura pendant dix ans, jusqu’à ce que l’arrivée d’un Horus plus rebelle que jamais à la porte du Monde Trône force les Hauts Seigneurs de Terra à repasser la main aux autorités militaires afin de préparer au mieux le futur siège.

Nous suivons ce qui se trouva être la dernière session du Conseil présidée par Malcador, et assistons à des débats passionnés entre les représentants des institutions majeures d’un Imperium en crise (Administratum, Adeptus Arbites, Adeptus Mechanicus, Libres Marchands, Navigateurs, Influenceurs, Furries…), sur des sujets aussi importants que la quarantaine des vaisseaux spatiaux entrant dans le système solaire, la fortification du commissariat central de l’Arbites, ou encore le déplacement de quelques millions de réfugiés demandés par l’inflexible Dorn pour fortifier comme il se doit la cabane au fond du jardin du Palais Impérial, qu’on ne saurait laisser tomber au main des traîtres sans sourciller.

Suivant les discussions d’une seule oreille, Malcador voit son regard attiré par la petite imperfection qui marque la surface de la grande table du Conseil autour de laquelle les Hauts Seigneurs palabrent. Cela lui remet en tête le souvenir du moment où l’impérial guéridon (qui fait neuf mètres de diamètre, parce qu’on ne fait pas les choses normalement sur Terra) a été irrémédiablement « défiguré », et est resté comme tel malgré les efforts diligents des moyens généraux du Palais.

À l’époque, l’Empereur était déjà parti depuis longtemps faire la tournée des bars de la galaxie, et tous les Primarques avaient finalement été retrouvés. L’un d’entre eux avait toutefois trouvé malin de commettre un crime tellement grave que son nom fut frappé d’anathème, sa Légion dissoute et sa statue géante en marbre dans la galerie de l’Investiaire discrètement retirée de sa plinthe et destinée à être concassée pour faire une allée zen dans le jardin du Palais. Ce crime monstrueux parvint cependant aux oreilles de cette fouine d’Alpharius, qui alla tout cafter à son grand frère Horus, dont la nature généreuse ne put supporter une telle infamie. Accompagné par Alphie et par Jaghatai (dont la principale occupation pendant la Grande Croisade consistait apparemment à zoner autour du canapé du Vengeful Spirit), celui qui n’était pas encore le Maître de Guerre s’en vint piquer un scandale en pleine session du Conseil de Terra, provoquant une belle pagaille au sein de l’auguste assemblée.

Habitué aux caprices de ces enfants gâtés de Primarques, Malcador géra le débordement avec son efficacité habituelle, mais dut cependant montrer à ce kéké d’Horus qu’il devait respecter son oncle en l’absence de Son père, en lui infligeant une soumission mentale qui envoya le grand chauve baraqué inspecter la poussière en dessous de la table du Conseil. Il faut dire qu’Horus avait menacé de prononcer le nom de son frère disgracié, ce qui aurait constitué un crime absolument impardonnable (l’Imperium est bizarre). Avant de partir en claquant la porte, Horus trouva malin de planter son épée dans la pauvre table pour montrer qu’il était très en colère, nous donnant l’explication derrière le détail ayant attiré le regard de Malcador.

Réalisant qu’il était en train de bailler aux corneilles ravens, le Sigilite prit sur lui et prononça la fin de cette ultime séance, laissant le soin aux Primarques présents sur Terra de reprendre le fardeau de la gestion des affaires courantes. Grand prince, il mit à profit son agenda désormais un peu plus libre pour faire du bénévolat pendant l’opération d’évacuation des squatteurs de la périphérie du Palais Impérial (hébergés dans la salle du Conseil de Terra, qui ne servait de toutes façons plus à rien), donnant quelques nouveaux cheveux blancs à un Rogal Dorn soucieux de la sécurité du Régent1.

Jagathai Khan, qui passait évidemment par-là, demanda à avoir un mot à part avec Malcador pour 1) s’excuser d’avoir contemplé béatement ce dernier mettre une rouste psychique à Horus sans intervenir d’une quelconque façon, et 2) lui révéler qu’il est au courant du terrible secret autour de l’identité du Régent de Terra… qui se révèle être d’une innocuité assez absolue, en tout cas pour l’époque de crise de cette fin d’Hérésie. Malcador s’appelait à l’origine Brahm Al-Kadour (soit), est un Perpétuel (you don’t say), le dernier membre de l’organisation des Sigilites (c’est comme le Port Salut, c’était écrit dessus), et a été responsable d’actions pas très charitables pendant la Longue Nuit (comme tout le monde, j’ai envie de dire). Jagathai a alors un moment de naïveté touchante, en se demandant sincèrement si l’Empereur est au courant du passé trouble de son bras droit, prêtant à Son impérial père une droiture morale qu’il est très loin d’avoir. Comme Pépé est introuvable et injoignable de toutes façons, l’origin story de Malcador restera dans les cartons pour le moment, mais le passé finira peut-être par ressortir2

1 : Alors que cette bonne pâte de Sanguinius, qui ne voyait le mal nulle part, trouva l’idée trop kawai.
2 : Non.

AVIS :

Laurie Goulding signe une nouvelle très intéressante sur le complexe fonctionnement des instances dirigeantes l’Imperium, où toutes les bonnes volontés et les nobles aspirations viennent mourir. En plus de nous rassasier de fluff et de faire monter le cœur des fanboys & girls dans les tours avec sa mention habile du sort d’un des Primarques disparus (on était à ça de connaître son nom !), ce qui suffit déjà à placer ‘The Last Council’ parmi les courts formats les plus satisfaisants de tout le catalogue hérétique, Goulding démontre avec un talent consommé que l’Imperium est un concept chimérique, ne pouvant être construit et maintenu que sur la base de mensonges et d’actions brutalement pragmatiques, et dont il vaut mieux que la connaissance soit perdue ou ignorée par les quelques rares individus capables de garder les yeux sur l’idéal irréalisable, mais pourtant nécessaire, fixé par l’Empereur. L’Hérésie d’Horus est le cadre parfait pour ce genre de réflexions, et on peut remercier Goulding d’avoir tenté (et réussi) quelque chose de très différent des habituelles batailles de Légionnaires que l’on retrouve dans beaucoup des travaux des autres auteurs de cette franchise.

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Motherlode – N. Kyme [40K] :

INTRIGUE :

MotherlodeRaus & Rein Gaffar, jumeaux Ratlings, déserteurs de la Garde Impériale et duo comique doublement troupier, vivent une journée particulièrement agitée de leur vie d’explorateurs de la Forteresse Noire. Ayant échappés de peu au sadisme proactif d’un concurrent Drukhari alors qu’ils étaient en maraude sur leur terrain de chasse, les tireurs pointeurs (ça marche aussi bien pour la pétanque que pour le tir de précision) regagnent leur vaisseau avec une caisse mystérieuse contenant un butin mirobolant, sans réaliser que leur Némésis, Akrahel Drek, a survécu à la bastos expédiée par Rein, et prévoit logiquement de se venger de ces petites pestes, dans un éclat de rire ronronnement (si si) maléfique. * Purrr purrr purrrr puuuuuuuuurrrr *

Un peu plus tard, nous retrouvons nos abhumains, également traqués par un Commissaire amnésique et son escouade de vétérans couturés, sans doute pour quelques tours pendables et plaisanteries de mauvais goût, au bazar de Nadir, où ils ont rendez-vous avec une vieille et morbidement obèse connaissance, le receleur et trafiquant Ogryn Murlock, auquel ils souhaiteraient vendre leur dernière trouvaille. Petit problème, il n’y a pas que le Commissaire – Vudus Mettik de son petit nom – qui a des problèmes de mémoire, les twins ayant semble-t-il complètement oublié qu’ils ont tuyauté les Arbites sur le petit commerce de Murlock quelque temps auparavant, avec des conséquences logiques et néfastes pour sa modeste échoppe, et que Murlock est au courant de ce cafardage. Evidemment, cet historique compliqué ne facilite pas les négociations, et Raus & Rein doivent à nouveau se tirer d’un beau guêpier, ce qu’ils font en dégoupillant quelques grenades de la bandoulière de leur hôte, après que ce dernier ait tenté de les hacher encore plus menu qu’ils ne le sont.

Nullement découragés par cette déconvenue, les Ratlings utilisent le carnet d’adresses de leur dernière victime pour contacter directement un acheteur potentiel, qu’ils trouvent raide mort à son domicile, et pas de causes naturelles (à moins que les Kroots aient la jugulaire clipsable, ce qui doit arriver s’ils consomment trop de distributeurs de Pez). Poursuivis jusque dans les égouts par Mettik et ses hommes, responsables du krooticide et déterminés à capturer les déserteurs, les frérots sont contraints de se séparer, Raus choisissant la capture pendant que Rein se carapate… pour mieux revenir avec son fusil de sniper de rechange (toujours utile), et la fameuse boîte mystère, juste à temps pour secourir son bro’, que se disputent Mettik et Akrahel, qui a fini par retrouver la trace de ses tourmenteurs. L’impasse mexicaine qui se profile à l’horizon trouve toutefois une fin précipitée (c’est fluff) lorsque Rein lâche la précieuse caisse au milieu de la scène, qui se révèle contenir la tête d’une matriarche ur-ghul. Et alors, me demanderez-vous ? Et alors, la famille élargie de la défunte a trouvé les moyens de sortir de la Forteresse (en Ur-bher, sans doute) pour rapatrier la relique, et investit les lieux de la confrontation à ce moment précis, avec des résultats salissants. Encore une fois, les Ratlings sont les seuls à se sortir indemnes de cette péripétie, mais peuvent au moins terminer la journée en passant deux de leurs ennemis mortels en perte et profit. C’est déjà ça.

AVIS :

On (en tout cas, je) savait déjà que Kyme avait une fâcheuse tendance à pondre des histoires mal ficelées, sacrifiant avec une constance consternante la moindre prétention de crédibilité narrative pour se concentrer sur une agglutination de scènes « cinégéniques ». Rassurez-vous, c’est bien le cas ici, même si l’absence de Space Marines (et donc de Salamanders, les victimes préférées de l’auteur) et la brièveté de l’objet du délit ne permettent pas à ce dernier de rivaliser avec ses records personnels de WTF. On se contentera de souligner que beaucoup de choses arrivent au bon moment, et/ou sans mise en contexte, dans ce Motherlode (jeu de mots !1), ce qui est la marque des auteurs fainéants.

Là où Kyme innove et fait fort, c’est dans la veine scatologique qu’il choisit de pousser fortement d’un bout à l’autre de son récit. C’est simple, tout pue dans ces 20 pages : les héros, les méchants, les lieux, la nouvelle elle-même ; c’est le royal flush de l’infamie, et tant qu’à parler de flush, autant tirer la chasse. J’ai fini la lecture de ce… texte légèrement hébété par l’aplomb ou le jemenfoutisme complet revendiqué par son auteur, qui réussit le tour de force de faire passer 40K de grimdark à off-colour avec son inimitable (et j’espère inimitée) prose. Motherlode est à ranger parmi les rebuts honteux de la Black Library, et à oublier le plus vite possible.

1 : Motherlode se traduisant par filon (au sens premier ou figuré) en anglais, la relique récupérée par Alain et Alex Térieur étant à la fois une richesse et ayant une connotation maternelle.

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One, Untended – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE :

One, UntendedUne fois n’est pas rancune, nous retrouvons le Tueur préféré de ton Tueur préféré, Gotrek Gurnisson, dans le mal le plus complet au début de cette nouvelle aventure, qui sera sans aucun doute trépidante, mais qui commence par être vomissante. Notre héros est en effet pris d’un mal de ventre carabiné, ce qui, de son aveu même à son acolyte Maleneth, ne lui était jamais arrivé avant. Et si l’Aelfe sigmarite, en bonne compagnonne qu’elle est, prend soin de tenir la crête de Gotrek pour éviter que cette dernière ne prenne une couleur et une texture encore plus dégoûtantes qu’à l’accoutumée, elle n’est pas étrangère à cette gueule de bois subite. Bien au contraire, c’est elle-même qui en est la cause, ses tentatives d’empoisonner le Nain afin de lui dérober la rune majeure de Krag Marteau Noir pour la ramener à Azyrheim n’ayant eu pas d’autres effets qu’un émétique avarié sur la robuste constitution du Tueur1. Ses vaillants efforts de se débarrasser de Gotrek devront cependant attendre un peu, car les éructations du transfuge du Monde qui Fut sont dérangés par une scène de ménage entre plusieurs individus aussi louches qu’imbibés. La raison de ce tapage nocturne se fait bientôt jour : un jeune bambin du nom de Tambrin a échappé à la vigilance légère de ses parents (Junas et Magda), et s’est semble-t-il enfoncé dans les catacombes d’Hammerhal Ghyra, que l’on dit hantées par le spectre vengeur d’Hanberra (à ne pas confondre avec celui d’Harambe, même si ça lui donnerait une bonne raison de persécuter les garçonnets), un ancien héros local ayant renoncé à servir Sigmar sous la forme d’un Stormcast Eternal à sa mort, et à la recherche des enfants qu’il n’avait pas pu sauver de son vivant depuis lors. La perspective de se frotter à un spectre légendaire pique bien évidemment l’intérêt professionnel de Gotrek, qui insiste pour prendre la tête de l’expédition de secours mise sur pied par les habitués de la taverne où les deux compères ont passé la nuit. En plus de Junas, qui sert de videur à l’auguste établissement, on retrouve la Ranger retraitée Halik et le Prêtre d’Alarielle Alanaer, qui serviront donc de meatshields aux véritables héros de l’histoire. Dommage que personne ne les ait prévenus.

La descente s’engage donc, et après quelques heures de progression dans les boyaux insalubres de la cité, un premier ennemi pointe le bout de ses moustaches. Il ne s’agit pas de Philippe Martinez, mais d’une bande de Moines de la Peste, peut-être syndiqués, squattant le bas de la cage d’escalier comme un gang de trafiquants de la cité Péri. Et à propos de périr, laissez moi vous dire que les ratons ne font pas long feu face à la colère incandescente de Gotrek, qui peut désormais passer en mode super saiyan lorsqu’il est très énervé, et élever la température autour de lui à des niveaux insupportables. Sa nouvelle hache de fonction, si elle est sans doute un peu moins cheatée que l’ancienne (dur de battre une arme forgée par Grugni pour Grimnir, tout de même), s’avère également très efficace, et la menace murine est donc prestement éliminée par les aventuriers, qui peuvent poursuivre leur route sans autre dommage qu’un pif écrasé par un coup de matraque pour Junas.

Le moment tant attendu de la confrontation avec Hanberra finit enfin par arriver, l’esprit ayant bien dérobé/envoûté Tanbrin (qui dort comme un bienheureux) car il l’avait pris pour son propre fils, Hangharth. Némésis de Gotrek oblige, le combat est bien plus serré que précédemment, la pauvre Halik rendant les armes et l’âme au premier cri poussé par le poltergeist kidnappeur, qui prouve au monde entier qu’il existe des Banshees masculines. Non mais. L’évanescence intermittente du fantôme n’est pas sans poser quelque problème au Tueur, ce qui ferait plutôt les affaires de Maleneth, toujours déterminée à récupérer la rune majeure tant convoitée de sa dépouille, mais il lui faut pour cela donner une raison à Hanberra de se battre à fond, ce que sa main mise sur Tambrin l’empêche de faire. La cultiste de Khaine repentie puise donc au fond de sa sacoche un clou de ci-gît Rolf2, souverain contre les ectoplasmes tenaces (et les Mortarques collants), et le frotte vigoureusement sur le bras porteur d’Hanberra pour lui subtiliser son précieux. N’ayant plus rien à perdre, le spectre va certainement réduire Gotrek en bouillie…

Début spoiler…Eh bien non (quelle surprise). Mais le plus étonnant n’est pas tant le résultat final que le dénouement, non violent, de cet affrontement. Le Tueur parvient en effet à faire entendre raison à son adversaire par le dialogue au lieu de lui faire manger sa hache, et ce dernier se dissipe donc de lui-même, comme le malentendu qui l’avait mené à dérober les enfants des autres depuis quelques siècles. Tout est donc bien qui finit bien (sauf pour Halik et la bière que Gotrek avait laissé sur le comptoir3), mais Maleneth la malhonnête devra trouver une autre combine pour récupérer la précieuse broquille incrustée dans le plastron de son compagnon.Fin spoiler

1 : Maleneth ne sait pas que la glotte de sa cible est marquée de la rune majeure de Cubi, le dieu Nain de l’alcoolisme.
2 : Vous me pardonnerez le calembour, mais traduire ‘wightclove’ en français n’est pas facile.
3 : À ce propos, il est probable que ce soit elle qui ait donné son nom à la nouvelle (que l’on pourrait traduire par ‘Laissé(e) sans surveillance’) et non pas Tanbrin.

AVIS :

David Guymer, qui avait écrit les dernières aventures de Gotrek (et Felix) dans le Vieux Monde, signe avec ‘One, Untended’ un parfait récit de transition et d’acclimatation pour les lecteurs familiers du personnage mais pas des Royaumes Mortels. Au-delà du déroulé précis de cette quête, tout à fait classique sauf dans son dénouement, ce sont les informations que l’auteur donne sur ce nouvel univers, les changements subis par son héros (nouvelle arme, nouvelle rune, nouveau sidekick) depuis qu’il y a fait son entrée, et les motivations, pas vraiment charitables, de Maleneth, qui rendent cette lecture intéressante, et même indispensable pour qui voudrait reprendre la suite de la geste de Gotrek sans passer par la case romanesque (‘Realmslayer’). L’auteur parvient également à aborder des éléments de fluff relevant de la sociopolitique, comme l’acculturation progressive des habitants de Ghyran aux mœurs d’Azyr, qui donnent une profondeur et un réalisme très appréciables à une franchise qui en manquait (et en manque toujours) cruellement par rapport à Warhammer Fantasy Battle. Bref, c’est une transition très réussie que Gotrek Gurnisson doit à David Guymer, bien que le flambeau des rancunes soit passé peu de temps après à Darius Hinks.

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The Battle of Blackthunder Mesa – P. Kelly [40K] :

INTRIGUE :

The Battle of Blackthunder MesaLa situation des défenseurs T’au de la planète Dal’yth, et plus particulièrement, de l’académie militaire située sur cette dernière, est positivement catastrophique. Isolés par le retrait des troupes de cette fayotte de Shadowsun, qui s’est repliée sans coup férir au lieu de se battre jusqu’au bout, comme le préconisait Farsight, les derniers guerriers de la caste du feu en sont réduits à livrer de coûteux et futiles combats d’arrière-garde pour ralentir l’avancée des impériaux, et permettre, peut-être, d’évacuer les survivants de la Star Academy locale. Placés sous l’autorité du Commander Bravestorm, adepte convaincu de la vision hypermétrope de la guerre de Farsight (et pour cause), nos héros viennent cependant de recevoir du matos un peu spécial, commandé auprès des grosses têtes de la caste de la terre il y a peu et livré sous forme encore expérimentale : des gants de boxe énergétiques. En effet, poussés par l’épuisement de leurs munitions et la puissance de feu de leur adversaire, Farsight et Bravestorm ont changé leur fusil à impulsion d’épaule, et monté une opération osée pour engager les tanks ennemis au corps à corps. Cela n’est certes pas très conventionnel, comme le fait remarquer la pimbêche (Furuja) du groupe1, mais nécessité faisant loi, Bravestorm emmène donc son cadre de cadets à l’assaut de la tristement célèbre Blackthunder Mesa, transformée en drive-in pour Leman Russ et Basilisks par l’Imperium depuis quelques semaines, avec des conséquences architecturales dramatiques pour la ville universitaire de Dal’Ryu, située en contrebas.

Si le déploiement de notre petite force d’Iron Men ne pose pas de problèmes, grâce à la maîtrise du vol furtif et à la technologie avancée du Bien Suprême, les choses se compliquent toutefois assez rapidement pour les concasseurs de tôle. Bien que Bravestorm ait pris soin d’indiquer à ses élèves qu’il fallait mieux rester au cœur de la mêlée pour gêner les tanks dans leur utilisation de leurs armes de défense, le poids du nombre, le comportement kikoulol de certains, et l’arrivée importune d’un Stormhammer, font lentement grimper les pertes du côté des punchers, bien que leurs maniques custom prélèvent un lourd tribut parmi les colonnes blindées de l’ennemi. L’équilibre des forces se renverse cependant brutalement lorsque, non pas un, mais deux Titans Warlord viennent se joindre aux festivités. L’apparition « subite » de ces discrètes et furtives machines de guerre en dit long sur le degré de préparation de l’opération, mais cela sera une discussion pour une autre fois. De toute façon, Bravestorm est certain que les nouveaux-venus n’oseront pas tirer sur les T’au, qui sont toujours engagés dans une partie d’auto-tamponneuse hardcore avec les blindés impériaux. Sa suffisance de Xenos idéaliste se trouve donc méchamment battue en brèche lorsque le turbo-laser du Titan de tête ouvre le feu sur les empêcheurs de bombarder en rond, réduisant le cadre de Bravestorm en confettis et cuisant ce dernier dans son armure.

Ce n’est cependant pas la fin pour notre héros trop confiant, qui trouve les ressources intérieures nécessaires pour faire abstraction de ses blessures et partir à l’assaut de la machine meurtrière. Son dernier fait d’arme consistera donc à « égorger » son adversaire en lui arrachant le câble d’alimentation, « fier comme un dindon », euh, tendon, courant le long du « cou » de la machine. À quoi cela a-t-il servi ? À rien en fait, puisque Bravestorm se prend à son tour une baffe monumentale – on saluera la dextérité de l’équipage impérial pour arriver à atteindre une cible aussi petite – s’écrase au sol comme une bouse, et sombre dans une inconscience logique. Certes, il a le temps de voir les forces impériales, dont le Titan trachéotomisé, se retirer de la mesa avant de tomber dans le coma, mais la victoire stratégique qu’il revendique au nom du Bien Suprême me semble un peu tirée par les cheveux (lui n’en a pas, je vous l’accorde). Après tout, c’était peut-être seulement l’heure de la cantine du côté adverse ?  En tout cas, notre increvable héros n’a pas dit son dernier mot, puisque sa carcasse mutilée finit par être récupérée sur le champ de bataille par les éboueurs de la caste de la terre. Pas encore tout à fait mort, il entend ses sauveteurs discuter des conséquences positives de son coup d’éclat quasiment fatal, qui a au moins permis de préserver les derniers quartiers de Dal’Ryu des déprédations impériales. La nouvelle se termine sur la réalisation que Bravestorm sera bien sauvé, mais au prix d’un enfermement perpétuel dans son Exo-armure, ses blessures étant trop graves pour espérer une véritable guérison. Assez ironique pour un personnage ouvertement Dreadnoughtophobe2

1 : Qui remonte toutefois dans mon estime grâce au magnifique « OK Gooder » (l’équivalent de notre OK Boomer) expédié à son supérieur un peu plus loin.
2 : Ce n’est pas qu’il en ait peur, mais la vue des pilotes Space Marines mutilés le dégoûte. Il en fait même des cauchemars.

AVIS :

Kelly retourne une fois encore sur la planète Dal’yth (Redemption on… Dal’yth) pour livrer un compte rendu romancé de la première utilisation d’une arme expérimentale T’au, le fameux gantelet Onagre. Si j’ai pu deviner à la lecture de cette nouvelle qu’elle mettait en scène des personnages déjà présentés dans d’autres textes qu’il a consacré à la couverture de la campagne de Damocles, l’immersion dans la galerie de seconds couteaux (rituels) gravitant autour de Farsight ne s’est pas faite sans difficultés de mon côté. En cause, le nombre de personnages convoqués par l’auteur1, et la complexité naturelle des patronymes T’au, qui se sont conjugués pour rendre difficile l’identification, et à travers elle, l’intérêt, de votre serviteur envers les pioupious de l’académie que Bravestorm a pris sous son aile. Cette difficulté évacuée, le récit de la fameuse bataille de Blackthunder Mesa ne m’a pas collé à mon siège, du fait du caractère binaire de l’affrontement en question. Si les Exo-armures commencent par faire des gros trous dans les tanks impériaux, sans vraiment être mises en danger par leurs proies (plutôt qu’adversaires), l’arrivée du titan renverse totalement la situation en un seul tir (merci Bravestorm), éparpillant le maigre suspens agencé jusqu’ici par Kelly aussi facilement que les assaillants Xenos venus souffler dans les chenilles des blindés de l’Empereur. On saluera tout de même la bonne « préparation » faite par l’auteur de la destinée claustrophobie de Bravestorm, qui après la Voie de la Lame Courte suivra celle de la Boîte de Conserve, sort ironique eut égard à l’effroi que lui inspirait les Dreadnoughts Space Marines. Au final, une lecture qui pourra intéresser les familiers de la prose suprêmiste de Kelly, mais qui n’a pas grand-chose à apporter au tout venant à la recherche d’un récit de bataille prenant.

1 : Ironie du sort, ils y passeront presque tous avant la fin de la nouvelle. C’était bien la peine de faire des efforts.

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The Atonement of Fire – D. Annandale [HH] :

INTRIGUE :

The Atonement of FireNous sommes dans la dernière ligne droite de l’Hérésie, quelques mois avant que le Siège de Terra ne débute. Roboute Guilliman a fini par réaliser que lancer sa petite entreprise personnelle alors qu’il est toujours techniquement employé par Pépé Corp., et en piquant dans la caisse de Big E. en profitant d’une panne généralisée d’internet pour ne pas se faire prendre, c’était assez craignos tout de même. Pétri de remords, Roro est désormais à la recherche d’un moyen de se faire pardonner ses errements passés. En sortant de sa séance hebdomadaire avec le Chapelain/Psychiatre Volusius, lui vient une idée toute simple pour expier son énorme hubris : aider Sanguinius à rejoindre Terra en détruisant les flottes hérétiques qui se mettront sans nul doute sur la route de l’Ange à la Moumoute.

Après une petite séance de triangulation avec les poteaux dans le strategium de l’Ultima Mundi, les Ultras de l’Empereur décident d’aller au secours de la planète Diavanos, d’où est arrivé un message astropathique implorant de l’assistance pour gérer une invasion de World Eaters mal-lunés. Diavanos est de plus un monde que les Ultramarines ont rattaché à l’Imperium il y a plusieurs décennies, et dont la technique de vitraux teintés a grandement impressionné le Primarque lorsqu’il flânait dans les rues de la capitale Ecstasia à la recherche d’inspiration pour son dernier roman. Pour toutes ces raisons, ainsi que pour celle, plus prosaïque, de se venger des ravages commis par les séides d’Angron et de Lorgar dans leur pré carré, les gars de la XIIIème se ruent au secours de Diavanos, et tombent à bras raccourcis sur leurs frères ennemis alors que ces derniers s’apprêtaient à repartir pour embusquer la flotte des Blood Angels.

La bataille spatiale qui s’en suit, si elle n’est guère équilibrée (les Ultramarines sont deux fois plus nombreux, sérieux, hargneux, farineux et bleus que leurs adversaires), permet à nos héros de relâcher la pression après tous ces mois à écouter les podcasts interminables du triumvirat de l’Imperium Secundus. Alors que les derniers vaisseaux renégats sont méthodiquement désintégrés par la froide fureur ultramarine, le cuirassé Gladiator profite de la confusion pour repartir en direction de Diavanos, et certainement pas pour une visite de politesse. Guilliman comprend que les World Eaters ont un petit creux, et que s’il n’intervient pas rapidement, la planète qu’il est venu sauver va s’en prendre plein la face. Mais arrivera-t-il à temps pour empêcher les fils d’Angron de commettre l’irréparable ?

Début spoiler…Après de multiples péripéties dans les coursives du Gladiator, que les World Eaters ont faites effondrer pour gêner la progression de leurs ennemis, Roboute et ses hommes (en grande partie des Destroyers, wink wink The Lord of Ultramar’) parviennent jusqu’à la salle des torpilles où les hérétiques se sont barricadés. La mêlée désespérée et surtout très sale qui s’ensuit tourne logiquement en faveur des surhommes en bleu, mais les World Eaters sont proches de réaliser leur objectif secret (faire péter une torpille à l’intérieur du vaisseau afin d’emporter Guilliman avec eux). Seule l’habilité du Grand Schtroumpf avec son combi-bolter customisé permet d’éviter la catastrophe, mais la victoire morale revient tout de même aux groupies d’Horus. Il est en effet trop tard pour prévenir le crash du Gladiator à la surface de Diavanos, et l’onde de choc qui s’en suit rase la capitale et dévaste une grande partie de la planète. Bien évidemment, les Ultramarines ont eu le temps de regagner leurs 22 avant que cette tragédie n’arrive, mais Guilliman finit la nouvelle avec le blues. Approprié, vous me direz.Fin spoiler

AVIS :

Vu le passif peu glorieux de David Annandale avec la XIIIème Légion (‘Lord of Ultramar’…), j’ai attaqué cette nouvelle dans un état d’esprit assez peu favorable à cette dernière, et j’ai été surpris de constater que cet ‘Atonement of Fire’ tenait tout à fait la route. Nous sommes en présence d’un court format siglé HH de facture assez classique (un peu de réflexion, beaucoup d’action, et en bonus une belle tranche de Primarque), mais débarrassé de tous les défauts que l’on pouvait trouver dans les autres soumissions de notre homme (personnages stupides/inintéressants, intrigue bancale, rythme chaotique)1. Ça pourrait et devrait être considéré comme le strict minimum, mais nous savons tous que la BL ne croit pas dans des concepts aussi restrictifs que le contrôle qualité. Enfin, pas tout le temps.

Surtout, et c’est assez rare dans une publication de la Black Library (quel que soit la franchise ou l’auteur) pour le souligner, Annandale parvient à ménager un vrai suspens jusqu’au bout de son propos. Guilliman et ses Schtroumpfs destructeurs arriveront-ils à sauver Diavanos des déprédations suicidaires des World Eaters ? Même si la planète a été créée de toute pièce pour l’occasion, l’auteur arrive à nous intéresser à la conclusion de cet accrochage mineur de la fin de l’Hérésie en appuyant de façon intelligente sur les remords éprouvés par Guilliman au sujet de son Imperium Secondus et son besoin de se faire pardonner de ce petit caprice. Annandale nous ressert également la vieille rengaine du « I am never going to financially recover from this », 30K style, déjà bien exploitée par d’autres avant lui, mais qui fait toujours son petit effet quand utilisée à dessein, ce qui est le cas ici. Bref, une vraie bonne surprise pour ma part, et une des meilleures soumissions de David Annandale pour le compte de cette franchise, si vous demandez mon avis.

1 : On pourrait lui reprocher de ne toujours pas maîtriser les bases spatio-temporelles d’une bataille spatiale (exemple gratuit : la course poursuite entre l’Ultimus Mundi et le Gladiator ne semble durer que quelques minutes, alors qu’elle s’engage à proximité du point de Mandeville du système et se termine dans l’atmosphère d’une planète habitable (donc proche de son soleil), ce qui devrait prendre au bas mot quelques jours), mais dans mon infinie générosité, je passe l’éponge là-dessus.

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Purity is a Lie – G. Thorpe [40K] :

INTRIGUE :

Purity is a LieTaddeus le Purificateur, zélote du Ministorum, carafe Brita faite homme, Donald Trump du 41ème millénaire. Arrivé à Precipice en compagnie de sa fidèle Pious Vorne, à la suite de vision envoyée par l’Empereur (et d’une confidence déplacée d’un sous-officier de la Navy), notre Prêtre peine à se faire accepter par la faune bigarrée et profane peuplant la cité, et n’a donc pas réussi à rejoindre une expédition d’exploration de la Blackstone Fortress, en dépit de ses meilleurs efforts et ses plus sincères prières. Sa chance tourne toutefois lorsqu’il reçoit une invitation de la part de Janus Draik, qui a flashé sur son énorme mitre, à le rencontrer au Looter’s Den afin de discuter affaire. Après avoir détendu l’ambiance, qui s’était refroidie comme un Roboute Guilliman faisant de l’apnée dans l’espace à l’arrivée du prélat, le Rogue Trader annonce à son hôte qu’il a besoin d’un coup de main pour tenter une descente jusqu’au Labyrinthe de la Mort (Deathmaze), et que Taddeus est sur sa shortlist. Pourquoi ? Eh bien, parce qu’il a l’air honnête et courageux. That’s it. Comme quoi, on peut être un aventurier sans foi ni loi évoluant dans une cour des miracles traîtresse et meurtrière, et donner sa chance au premier venu, parce qu’on a un bon feeling. Merci qui ? Merci Gav Thorpe.

Après avoir un peu tergiversé, Taddeus accepte, et retrouve son nouveau collègue à l’entrée de la Forteresse, laissant Vorne dans le vaisseau (c’est un raid de 4 personnes, le maglev a une capacité limitée) avec un bol d’eau fraîche, la climatisation et l’autoradio allumée. L’exigeant ecclésiastique n’est guère enchanté de voir que Draik a recruté une Eldar (Amallyn Shadowguide) et un mutant (le Navigateur Espern Locarno) pour compléter son équipe, mais, nécessité faisant loi, à défaut de foi, il accepte tout de même de partir en vadrouille avec ces compagnons particuliers. La suite est, pour autant que je puisse le dire, le compte rendu romancé d’une partie de Blackstone Fortress, interrompue avant la fin par un quelconque événement (peut-être que Thorpe a dû partir plus tôt pour aller faire des courses ou passer au pressing). Ainsi, notre bande se coltine d’abord une escouade de Gardes renégats, puis quelques drones, avant de terminer par un quintette de cultistes Negavolts, et un psyker chaotique pour faire passer le tout. Entre deux coups de massue énergétique et blessures de guerre héroïquement glanée au combat, Taddeus réalise à quel point la coopération avec ses camarades est nécessaire, et perd donc un point en xénophobie (il est sauvé par et sauve la Ranger) et un demi-point en mutophobie (Locarno le prévient de l’arrivée du psyker). Kawaiiiii. On ne saura en revanche pas ce qui attend nos héros dans ce fameux « Labyrinthe de la Mort », que ces derniers n’atteindront même pas avant que Thorpe ne décide qu’il a bien assez bossé comme ça et mette un point final à sa nouvelle. Non. Si.

AVIS :

Gav Thorpe prouve avec ‘Purity is a Lie’ qu’il maîtrise parfaitement l’art complexe et délicat de la courte nouvelle de 40K où rien d’intéressant ne se passe. Un peu comme le haïku suivant : Forty forty kay//Forty forty forty kay//Forty forty kay. Oui, c’est du sarcasme. Malgré toute la sympathie que j’éprouve pour ce collaborateur historique et figure mythique de GW, la plupart des nouvelles qu’il a soumis à la BL ces dernières années se sont avérées très décevantes, et celle-ci ne fait malheureusement pas exception. Ne disposant même pas d’une conclusion digne de ce nom, et développant de façon inimaginative au possible une idée absolument banale du background de Warhammer 40.000 (« il faut savoir mettre de côté ses principes pour atteindre ses objectifs »), le seul mérite de cette soumission est d’intégrer cinq personnages nommés de Blackstone Fortress (même si la plupart font papier peint) dans son casting, dont deux (Vorne et Locarno) dont ce sera la seule apparition dans le recueil Vaults of Obsidian. Ce n’est pas lourd, mais c’est vraiment tout le bien que je peux dire de ce texte, qui aurait mérité d’apparaître sous son titre complet : Purity is a Lie, Story is a Bore, Not Inspired at all, Send Help.

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Sand Lords – P. McLean [40K] :

INTRIGUE :

Sand LordsOù il sera question du Capitaine Amareo Thrax et de sa colonne blindée du 236ème Régiment des Tallarn Desert Raiders, engagés dans une course éperdue vers la sécurité des lignes impériales. Si Thrax et ses hommes (et femmes, pas de sexisme chez les Tallarn) sont si pressés de rentrer au bercail, c’est d’abord qu’ils ne sont plus très nombreux (un Leman Russ et trois Chimères, sur vingt-huit véhicules initialement engagés), ensuite que les réserves d’eau et de carburant commencent à baisser dangereusement, et enfin que quelque chose de gros, menaçant et très énervé les poursuit sans relâche à travers les dunes de Marbas II. Quelque chose contre lequel même le courage et les ressources de ces légendaires guerriers des sables ne peuvent espérer prévaloir. Mais pour mieux comprendre de quoi il en retourne, il nous faut faire un petit crochet vers le passé récent, pendant que nous laissons Thrax porter un toast à l’urine en l’honneur de la Chimère qui vient de perforer son joint de culasse de façon irrémédiable…

Si notre vaillant Capitaine se trouvait dans le désert de cette planète pour commencer, c’est parce qu’il avait reçu la mission de la part d’un Colonel1 de se rendre dans les ruines de la ville d’Iblis Amrargh, prise par les envahisseurs Orks dont la présence a justifié le déploiement des Tallarn sur Marbas II, pour récupérer le khalig (cimeterre) du Général Al-Fallan, héros des Desert Raiders, dérobé après sa mort par le Big Boss Gorebrakah Urlakk. Une telle relique ne pouvant pas rester entre les griffes des Xenos, qui n’en auraient de toute façon aucune utilité si ce n’est pour émincer des Squigs, le haut commandement du 236ème a donc donné à Thrax l’ordre de reprendre le légendaire coupe papier, localisé dans la cathédrale de la ville, investie par la vermine verte. L’officier a également reçu un briefing plus complet de la part de son boss sur les tenants et aboutissants de la mission, mais ne le partagera pas avec de simples lecteurs tels que nous. Ou en tout cas, pas tout de suite.

Si les premiers temps de l’assaut donné par la colonne blindée sur Iblis Amargh se passent sans soucis, l’armement, le blindage et la vitesse des tanks impériaux leur permettant de forcer sans coup férir les barrages mis en place par les fonctionnaires Grots délégués à la surveillance du camp Ork, un tir de plasma bien senti, pulvérisant une Chimère dans le plus grand des calmes, marque le début des ennuis pour Thrax, qui ne s’attendait pas à rencontrer une résistance si forte si tôt dans la mission. Ayant perdu un peu de temps et beaucoup de munitions à canarder les alentours dans le vain espoir d’abattre le faquin plasmique qui lui a fait des misères et vaporisé son vieux copain Al-Nasir, Thrax finit par donner l’ordre de repartir, perdant de plus en plus de châssis et de personnel au fur et à mesure que les Orks réalisent qu’ils sont attaqués, et que l’insaisissable franc-tireur continue à dégommer les SUV de l’Empereur sans se faire voir. Il en faut cependant plus pour décourager nos héros, qui finissent par pénétrer (en char, sinon c’est pas drôle) dans la cathédrale, où les attend le fameux khalig du nom moins célèbre Al-Fallan, ainsi que des hordes de peaux vertes pas vraiment jouasses…

Début spoiler 1…Victimes de mines dissimulées, et embusqués par des centaines d’Orks gardés en réserve par ce ruzé de Gorebrakah, les Tallarn se battent comme des lions fennecs, parvenant à récupérer le précieux cimeterre à l’absence de nez et au manque de barbe du Big Boss, qui daigne enfin se joindre aux réjouissances après que les assaillants soient parvenus à se défaire de ses deux mini-boss (un Kommando mastoc avec lance-plasma, et un Nob en Mega-armure). Et là, surprise : Gorebrakah a cassé sa tirelire (ou la figure de tous ses rivaux pour leur piquer leurs dents) depuis la dernière fois qu’il a croisé les Desert Raiders, et est maintenant plus machine que champignon, sa parenté avec un Dred Eud’la mort lui permettant  de désosser sans mal les malheureux tanks lui tombant sous la pince. Pour Thrax cependant, l’objectif primaire consiste seulement à repartir avec le coupe-chou d’Al-Fallan, ce qu’il a fait sans hésiter, laissant derrière lui la plus grande partie de ses soldats.

De retour dans le désert, nous apprenons/comprenons donc que le traqueur des Tallarn n’est autre que Gorebrakah, dont l’amour-propre et le statut contraignent à récupérer son bien sous peine de se faire défier par l’ensemble de ses Nobs-1, et que c’est bien sur cela que comptait le Colonel qui a monté le raid de Thrax. Ce dernier doit donc trouver un moyen de franchir la ligne d’arrivée (bleue) avec le colis pour permettre aux forces impériales de régler son compte à cet illustre ennemi. Les Tallarn sont en effet sport, et se sont contentés d’installer une batterie de Basilisks à plusieurs heures/jours de distance d’Iblis Amrargh pour faire sa fête au Big Boss plutôt que, je ne sais pas moi, réquisitionner des appareils de la Flotte qui les amenés sur place ? Gorebrakah est également sport, notez, puisqu’il poursuit les voleurs de loot tout seul. A gentleman’s war, really.

Ce fair-play ne fait cependant pas les affaires de Thrax et de ses survivants, qui se font insensiblement rattraper par leur poursuivant, condamnant d’abord les malheureux n’ayant pas trouvé place dans les Chimères, puis ces dernières et leur équipage (malgré une héroïque action d’arrière-garde de la Duf’Adar Al-Maddon), ne laissant plus que le Leman Russ du Capitaine, à court de munitions et à bout de nerfs (un des servants se suicidera d’ailleurs plutôt que de se faire éplucher par le Big Boss), tenter d’arracher la victoire…

Début spoiler 2…Ce qui sera finalement cas (ouf), Thrax parvenant à passer la ligne en un morceau, avant que le bombardement déclenché par ses petits copains ne vienne sonner le glas de Gorebrakah, qui aurait dû investir dans un Gargant plutôt que dans un Deff’Dread. Tiré de l’inconscience dans laquelle le barrage ami l’avait plongé par la seule autre survivante de la mission, la pilote Kalan, rendue borgne et folle par les événements (ce qui ne lui a pas retiré son sens de l’humour), Thrax n’a plus qu’à attendre l’arrivée des secours, en espérant que la perte de sa jambe dans l’accident ne lui soit pas fatale. La routine, quoi…Fin spoiler

1 : Qui ne sera jamais nommé (j’ai vérifié). McLean devait être tombé en rade de nom à consonance arabe (on peut d’ailleurs s’interroger sur « Amareo Thrax », au passage…).

AVIS :

Pour sa première virée avec un régiment nommé de la Garde Impériale, Peter McLean livre une nouvelle aboutie, généreuse en termes de fluff et consistante en termes d’intrigue, grâce à sa progression alternée entre le Paris-Dakkar extrême auxquels se livrent Thrax et ses survivants, et les flashbacks de leur mission suicide dans la cathédrale d’Iblis Amargh. L’auteur a suffisamment de maîtrise pour prendre son lecteur au jeu des devinettes quant à l’identité de la chose qui traque les valeureux guerriers des sables dans leur retraite éperdue, et aux véritables objectifs poursuivis par la colonne blindée Tallarn, ce qui rend l’expérience assez plaisante, même si les deux révélations en question ne s’avéreront pas renversantes. Autre point appréciable, McLean applique à ses nouveaux souffre-douleur sujets l’approche sans concession qu’il l’avait vu massacrer les uns après les autres ses personnages du 45ème Reslian (‘No Hero’, ‘Baphomet by Night’, ‘Predation of the Eagle’, ‘Blood Sacrifice’), laissant les deux seuls survivants du carnage perpétré par le ruzé mais brutal (et surtout blindé) Gorebrakah profiter du calme après la tempête dans un piteux état, tant physique que mental. À la guerre comme à la guerre, après tout, et McLean fait partie des contributeurs de la BL qui n’a pas peur d’être graphique dans son approche, ce qui est plutôt un trait positif dans ce genre de littérature, à mon humble avis.

Les seuls reproches que j’adresserai à cette soumission seraient relatifs au choix de l’auteur de ne pas expliquer pourquoi le sous-sol de la cathédrale semble regorger d’armes de pointe d’une part, et de faire se terminer son épreuve d’enduro sous un déluge d’obus plutôt que sous les lasers d’un escadron de Vendettas, ce qui aurait certainement permis aux Tallarn de sauver leur chèche, d’autre part. On me dira que leur mort était de toute façon nécessaire pour le déroulement de l’histoire, et on aura raison, mais je trouve tout de même que le plan du Colonel X – et par extension, celui de McLean – n’est pas au dessus de tout reproche. Il y avait certainement moyen de faire mieux, sans épargner pour autant aux soldats de Thrax leur glorieux sacrifice. Après tout, qui peut dire à quelle vitesse un Ork en Giga-armure peut courir, quand il est recouvert du sang de ses ennemis, et qu’on lui a volé son présssssieux ?

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A Rose Watered with Blood – A. Dembski-Bowden [HH] :

INTRIGUE :

A Rose Watered with BloodLes choses ne s’améliorent pas vraiment sur le Conqueror, qui se traîne péniblement à travers la galaxie pour livrer l’Angron démoniaque commandé par Horus jusqu’à son ancienne adresse sur Terra, du temps où il habitait encore chez son Pépé. La vie à bord est devenue dangereusement morne (comprendre que tout le monde s’est habitué à la possibilité de se faire tuer d’une manière horrible et roll with it), et bien que les problèmes d’intendance dont le vaisseau était affligé – depuis le miracle du changement de l’eau en sang, jusqu’à l’infestation de puces de Khorne – ait été en partie résolus par un arrêt au stand en orbite de la planète Heshimar, le Conqueror n’en finit plus de faire des blagues potaches et souvent mortelles à son équipage. Dans le cas de Lotara Sarrin, capitaine du Gloriana polisson et figure respectée au sein de la Légion, cela a consisté à recevoir en pleine nuit la visite galante de l’officier Ivar Tobin… alors que ce dernier avait été tué par Khârn dans un accès de fureur il y a plusieurs mois. Quand l’esprit de la machine se comporte comme un chat rapportant à son maître le cadavre de sa dernière proie, il est permis de s’inquiéter de sa survie.

Cette ambiance des plus lourdes a assez logiquement conduit certains passagers à caresser des projets d’évasion du vaisseau maudit, et Lotara est introduite dans le cercle des mutins par le Sergent Skane, un Destroyer ravagé de corps et d’esprit, après qu’il ait machinalement massacré l’escorte du capitaine afin de préserver le secret des échanges (les World Eaters ne croient pas vraiment aux NDA). Après avoir hésité, Lotara accepte de participer aux réunions des déserteurs en puissance, et pousse même l’amabilité jusqu’à prendre en charge les opérations d’évacuation, qui ne pourront se produire qu’une fois le Conqueror de retour dans le Materium. La plus grande crainte de ses conjurés, dont fait partie le Capitaine Maruuk, est que l’inflexible Khârn ait vent de leur projet de mise au vert, mais Lotara promet de gérer ce petit problème le cas échéant, et comme le mâle alpha qu’il est, Maruuk est bien content de laisser la charge mentale associée à cette tâche complexe à une femme. Après tout, il est trop occupé à faire des duels à mort dans les arènes du Conqueror pour traiter ce genre de détail trivial.

Après un long et pénible voyage (Angron s’est piqué de devenir chanteur d’opéra et danseur de claquettes pendant la traversée, ce qui est venu perturber le sommeil du reste des passagers), le vaisseau émerge enfin du Warp, et Lotara envoie les ordres codés mettant en branle l’opération SOS (Save Our Skulls) parmi les conjurés. Lorsque la frégate Bestiarius approche du vaisseau amiral pour récupérer des vivres, cinq navettes sont envoyées pour la ravitailler : rien de plus normal de prime abord, mais ces navettes sont en fait le ticket de sortie des mutins hors des entrailles viciées du Conqueror. En bonne capitaine, Lotara attend le dernier moment pour s’exfiltrer à son tour, et rejoint discrètement la cinquième navette en compagnie de Skane et Maruuk…

Début spoiler…C’est le moment que choisit Khârn pour débarquer en mugissant comme un veau, mis au courant par un traître des velléités d’évasion de Lotara and friends. Si Maruuk décide bravement de sauter dans la navette sans attendre personne et de mettre les gaz pour rejoindre le Bestiarius, le noble mais moche Skane reste en arrière garde pour « ralentir » l’Ecuyer d’Angron et faire gagner du temps à ses camarades. Les guillemets sont ici de rigueur, car le Sergent irradié ne tient pas trois secondes avant que Khârn ne lui fasse avaler son dentier en duracier. Un peu lente à la détente, Lotara n’a pas eu le temps de suivre ce mufle de Maruuk avant qu’il passe la seconde, la laissant dans une position très délicate…

Début spoiler 2…Si elle avait vraiment voulu quitter le Conqueror. Car, comme le pauvre Skane le comprend avant qu’elle ne l’envoie sauter sur les genoux de Khorne d’un tir de pistolet laser bien placé, Lotara, à l’instar de Khârn, s’est résignée à son sort et n’avait aucune intention de faire faux bond à Angron. Et on traite les World Eaters de renégats ? Laissez-moi rire. Si elle a accepté de marcher dans la combine des mutins (outre le fait que Skane l’aurait certainement tuée sur place si elle lui avait mis un vent lorsqu’il est venu lui demander son aide), c’était pour débarrasser le Conqueror de ses mauvais éléments et séparer le bon grain ( ?) de l’ivraie. De retour à son poste de commandement, la Rose baignée de sang (le surnom que lui avait donné un Commémorateur poète un peu fleur bleue – et mort depuis) prend grand plaisir à vaporiser les navettes des déserteurs avant qu’elles n’aient pu rejoindre le Bestiairius, et en particulier celle de Maruuk. Il ne l’avait pas volé, reconnaissons-le.Fin spoiler

AVIS :

Aaron Dembski-Bowden déroule une nouvelle histoire très plaisante à lire (ce sens de la formule, tout de même…) mettant en scène deux de ses personnages les plus attachants (Lotara Sarrin et le Conqueror), avec un petit caméo de Khârn pour ne rien gâcher en sus. Même si l’arc World Eaters de cet auteur n’avance pas beaucoup au cours de cette nouvelle, le suspens que Dembski-Bowden parvint à instiller dans son propos, couplé avec son génie de la caractérisation – c’est bien simple, quand ADB tient la plume, tous les personnages nommés se transforment en protagonistes1 – suffisent à faire de cet ‘A Rose Watered with Blood’ une soumission de qualité au corpus hérétique.

1 : Sauf Maruuk, qui reste détestable.

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Voilà qui termine la revue de cette fournée de nouvelles de l’an de grâce 2018, et même si la qualité est encore une fois variable, je peux écrire avec sincérité que ce millésime se place parmi les meilleurs que j’ai pu lire (‘Fire and Thunder’, qui n’a pas encore été réédité au moment où cette chronique est écrite, méritant particulièrement le détour). Je me dois de souligner également que le choix de la BL de varier les plaisirs en diversifiant les franchises représentées dans ce calendrier de l’avent est très appréciable, et j’espère que cette idée simple mais de bon goût sera reprise dans les futures itérations du concept. Réponse dans quelques mois !