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BLACK LIBRARY CELEBRATION 2023 [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue des recueils gratuits1 de la Black Library Celebration 2023, proposés comme tous les ans par les généreux seigneurs de Nottingham à la mi-février. Pas de surprise en termes de format cette année (SCS, mon amour), puisqu’on retrouve des livrets contenant cinq nouvelles précédemment publiées – pas d’inédits ici, et c’est assez normal -, choisies pour introduire le lecteur aux franchises majeures de la BL… en tout cas dans la version anglaise. Les versions française et allemande sont en effet un peu moins diversifiées, comme on va le voir, mais ont au moins le grand mérite d’exister, ce qui semble indiquer que Games Workshop n’a pas encore tiré un trait sur son lectorat international. Pourvu que ça dure.

1 : Il faut tout de même acheter un petit quelque chose sur le site de Games Workshop pour recevoir une version papier, ou sur celui de la Black Library pour pouvoir télécharger toutes les versions numériques. Comme les contenus diffèrent en fonction de la langue, je ne saurais trop vous conseiller de passer par le site de la BL si vous voulez en avoir pour votre argent.

Black Library Celebration 2023

Au sommaire de ces offrandes littérales et littéraires, on retrouve donc un savant mélange d’univers, d’ambiances et d’auteurs. Comme indiqué plus haut, c’est la « version originale » qui bénéficie d’un traitement de faveur, puisqu’elle contient des histoires siglées 40K, Age of Sigmar, Hérésie d’Horus, Warhammer Horror et Warhammer Crime, alors que ces deux dernières franchises sont absentes des versions traduites (au profit de deux nouvelles 40K supplémentaires). Un peu dommage, car l’effort avait été fait l’année dernière. Tant qu’on est dans les griefs, notons que le choix d’illustration de couverture ne fait sens que pour le recueil VO, qui contient une nouvelle mettant en vedette Minka Leska (‘The Place of Pain and Healing’), alors que les livrets français et allemand font l’impasse sur la demoiselle. Il serait cependant injuste de judge a book by looking at its cover, comme on dit de l’autre côté de la Manche, et il est donc temps de nous plonger dans l’étude de ces petites anthologies.

Black Library Celebration 2023

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The Place of Pain and Healing J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE :

The Place of Pain & HealingComme vous le savez peut-être, la dernière incursion d’Abaddon & friends sur Cadia ne s’est pas super bien terminée pour la planète. Aux dernières nouvelles, elle serait tombée sur le sol de la galaxie, ce qui fait tout de même une sacrée chute. Minka Lesk, jeune Bouclier Blanc aux débuts de ce que nous appellerons pudiquement « les événements », peut témoigner des derniers moments difficiles de la population locale : évacuée en compagnie du Capitaine Kasrkin Rath Sturm avant la victoire du Chaos (voir ‘Cadia Stands’), elle passe les premiers moments du voyage sur le croiseur Space Wolves qui convoie les deux Cadiens à délirer dans son sommeil. Les souvenirs de la défense contre la 13ème Croisade Noire se mélangent avec d’autres, plus anciens, de son enfance et son entraînement à devenir une bonne petite soldate. On apprend aussi que Minka est une Katherinette (même si elle ne porte pas de chapeau).

Cette transe enfiévrée est interrompue par le médecin de garde du Fang of Fenris, qu’un serviable hilote Space Wolves va quérir en catastrophe après avoir été témoin de la tachycardie suspecte de Minka. Une petite injection de stimms et ça repart comme en 40,000, cependant. Après une brève période de confusion, notre héroïne échange deux mots avec son camarade d’infortune, puis part errer dans les couloirs désertés et ténébreux du croiseur pour se changer les idées. Elle tombe sur Skarp-Hedin, le Space Marine qui l’a ramenée dans sa besace énergétique au moment de quitter Cadia (comme quoi on peut avoir un mono sourcil et bon(s) cœur(s), et parvient au terme d’un dialogue aussi profond que virtuose, mais en tout cas cathartique, à se réconcilier avec l’idée de la perte de sa planète natale, de ses milliards de compatriotes, et du fier héritage d’inflexibilité des centaines de générations précédentes. Le tout en deux minutes top chrono. A ce niveau, on ne dit pas tourner la page, mais désapprendre à lire.

Skarp-Hedin, qui a senti que son vaisseau était entré dans le Warp, et plus certainement que la fin de la nouvelle était imminente (c’est fou comme les Space Wolves ont le nez fin), trouve une excuse bidon pour partir dans l’arrière-plan narratif à petites foulées – mais en continuant le dialogue avec Minka, car c’est un gentleman. Cette dernière repart pioncer dans sa cellule, et sous son matelas, il faut le préciser, l’odeur et le poids de sa paillasse lui rappelant les jours heureux où elle faisait la nouba dans les dortoirs des premières années. You do you, girl, you do you.

AVIS :

Nouvelle de transition entre ‘Cadia Stands’ et ‘Cadian Honour’, ‘The Place…’ ne me semble pas être une addition très intéressante à la saga de Minka Lesk (que je ne considère pas comme étant très intéressante non plus, je dois dire). On n’apprend en effet pas grand-chose de nouveau sur l’héroïne aux yeux violets, qui a eu l’enfance stricte et militarisée que tous les Cadiens ont eu (aaaaaah), et a été traumatisée par la violence des combats de la Croisade Noire (oooooh). Comme les trois personnages principaux (Lesk, Sturm et Skarp-Hedin) ont un charisme cumulé proche de celui d’une huître comptable, il est dur de sympathiser un tant soit peu avec leur peine et leur déchirement.  J’ajoute que Hill se montre particulièrement peu inspiré dans l’écriture des quelques dialogues de sa nouvelle, qui sont si vides et grotesques que leur simple lecture vous sort immédiatement de l’histoire. À laisser sur Cadia.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

La Black Library n’a pas été très inspirée au moment de choisir ‘The Place of Pain and Healing‘ comme représentant de sa franchise phare pour la Black Library Celebration 2023. Outre le fait qu’il s’agit plus d’un connecteur logique (et assez inutile à l’arc en question) entre les deux romans que Hill a consacré à son égérie cadienne que d’une nouvelle autonome à proprement parler, la qualité de cette soumission est loin d’être irréprochable, ce qui est un comble pour un texte mettant à l’honneur des soldats aussi exigeants envers eux-mêmes que les Cadiens. Dur dur de passer de Ciaphas Cain à Minka Lesk, c’est moi qui vous le dit…

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Monsters – N. Van Nguyen [AoS] :

INTRIGUE :

MonstersOù nous suivons la nouvelle1 chasseuse de monstres officielle de papa Sigmar dans l’une de ses traques dans les Royaumes Mortels, ici Shyish un soir de pluie et de brouillard. Déployée en soutien des Anvils of the Heldenhammer, occupés en contrebas à contenir une invasion de démons de Tzeentch, Yndrasta a fait le déplacement pour bannir un Duc du Changement si changeant qu’il n’a d’autre nom que l’Anomie. Super plan pour éviter d’être convoqué par des mortels ambitieux à tout bout de champ (et de chant), moi je dis. Ayant certainement compris qu’il était dans le viseur de la virago de Ziggy, l’Anomie se la joue cependant petit bras et se transforme en nuage de barbe à papa au lieu de livrer un honnête combat à la championne adverse. Sous cette forme, il se révèle aussi inoffensif qu’invulnérable, ce qui ne fait pas les affaires d’Yndrasta et de sa lance magique, Thengavar, qui disparaît corps et bien dans le protoplasme gazeux et ne revient pas dans la main de sa porteuse, comme c’est habituellement le cas.

Sigmar ayant pensé à lui fournir une arme de rechange, Yndie ne se laisse pas décontenancer par la tournure prise par les événements et se rue à l’assaut de sa Némésis pour finir les choses au corps à corps. Un nouveau shenanigan de l’Anomie l’envoie toutefois dans le décor, et l’intrépide héroïne fait une chute douloureuse mais pas mortelle jusque dans la piscine privée d’une grotte souterraine, Gandalf style. Elle serait repartie aussi sec (mais mouillée, je me comprends) castagner le démon si elle ne s’était pas rendu compte que son point de chute n’était pas aussi désert qu’il l’aurait dû être. Un vieil ermite d’une carrure peu commune et arborant une ‘stache de compétition a en effet assisté à sa culbute pas très légendaire, et comme le quidam exsude une aura mythique et possède une hache qui l’est tout autant (appelez ça l’intuition féminine si vous voulez), Yndrasta reste faire un brin de causette.

Il ne lui faut pas longtemps pour comprendre que cet inconnu n’est autre que Voyi. Si cela ne vous dit rien, c’est normal : Voyi, aussi connu sous les noms du Non Béni, du Traître et surtout de l’Oublié, était un héros de l’Âge de Mythes, élevé par Sigmar au rang de champion, mais qui choisit d’aller vivre sa vie en solitaire au lieu de défendre Sigmaron lorsque le besoin s’en fit sentir. Sigmar n’étant pas connu pour sa magnanimité envers ceux qui le déçoivent, et ayant un égo trop important pour reconnaître ses échecs, le nom de Voyi fut rayé de tous les registres officiels, et seuls une poignée d’Elus, dont Yndrasta fait partie, eut vent de l’existence de ce paria depuis lors. Dès lors, la chasseresse se trouve confronté à un dilemme peu évident : rapporter la tête du traître à son patron pour lui faire plaisir, ou tenter de négocier avec Voyi pour apprendre comment, il y a de cela des millénaires, il réussit à bannir l’Anomie…

Après un échange tendu, durant lequel Voyi se permit de comparer Yndrasta et les Stormcast Eternals aux monstres chassés par la première, ce qui n’est guère gentil, et ponctué par un duel rapidement conclu par un point de côté débilitant pour le champion grabataire, Yndrasta se résout à laisser l’ancêtre en paix rien que pour lui montrer qu’elle n’est pas si méchante que ça, et à retourner se battre contre l’Anomie, même s’en savoir comment le vaincre. Sa « générosité » est toutefois récompensée par Voyi, qui lui révèle avant qu’elle ne parte qu’il lui suffira de prélever un échantillon sur la forme blurbesque du démon pour l’exiler des Royaumes Mortels (et récupérer sa précieuse lance au passage). Armée de ce tuyau, Yndrasta peut enfin repartir au front, non sans promettre à son hôte de garder pour elle le secret de sa destinée. Ce sera la première fois qu’elle dissimulera des choses à Sigmar depuis sa Reforge : pourvu qu’il ne l’apprenne jamais…

1 : Eh oui, la position était déjà prise avant que la V3 ne fasse de Miss Yndrasta une des têtes d’affiche de la franchise. Remember Neave Blacktalon ?

AVIS :

Une très bonne entrée de la part de Noah Van Nguyen, qui part explorer l’une de mes facettes préférées du fluff des Royaumes Mortels : le côté sombre de Sigmar et de ses élus. Yndrasta en elle-même est très loin d’être une parangon de noblesse et d’humanité, puisqu’elle se décrit volontiers comme cruelle et intéressée uniquement par sa mission de chasseresse, ce qui en fait sans doute la première héroïne Stormcast Eternal de la BL ouvertement antipathique (un progrès, si vous me demandez). Sa confrontation avec Voyi m’a fortement rappelé la difficile transition entre Guerriers Tonnerre et Space Marines entre la fin de l’Unification de Terra et le début de la Grande Croisade, avec Sigmar dans le rôle de l’Empereur1, en plus de venir approfondir et complexifier le fluff de cette faction. Un choix très intéressant de la part de Van Nguyen (j’aurais moyennement apprécié me retrouver avec une nouvelle de Neave Blacktalon bis, pour être honnête), qui démontre ici qu’il est capable de sortir du manichéisme Stormcast Eternals = gentils // opposants des Stormcast Eternals = méchants dans lequel bon nombre de ses collègues ont donné. De bon augure pour son roman ‘Godeater’s Son’, qui traitera spécifiquement de ce thème, et pour la qualité et l’intérêt de la littérature AoS en général.

1 : On peut aussi faire un parallèle avec le ‘Misbegotten’ de Dan Abnett, où le savant fou Fo déclare à Horus qu’il considère les Primarques et les Space Marines comme beaucoup horribles que toutes créations.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une très bonne découverte de l’univers d’Age of Sigmar et de sa faction la plus iconique (à égalité avec les Gloomspite Gitz), à travers une histoire qui montre bien que personne n’a le monopole du coeur dans les Royaumes Mortels, et sûrement pas ce rancunier de Sigmar. De toutes les nouvelles de Stormcast Eternals que la BL nous a proposés depuis le lancement du jeu en 2015, celle-ci fait partie des plus réussies, et c’est donc une chance pour les nouveaux lecteurs de s’initier à cette franchise dans des conditions optimales.

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Amor Fati – M. F. Haspil [HH] :

INTRIGUE :

Amor FatiRevenu d’entre les morts grâce aux talents nécromantiques de Fabius Bile, le Seigneur Commandeur Eidolon n’est cependant pas satisfait de son sort (pour changer). Son retour dans le Materium s’est en effet accompagné d’effets secondaires désagréables et disgracieux, ce qui lui a valu des critiques acerbes de la part de Fulgrim. Honteux de « se déplacer comme un Ork », dixit cette petite bi*tch de Fufu, Eidolon passe ses journées à la salle d’entraînement du Proudheart, à massacrer des esclaves gladiateurs sous le regard fatigué de Fabius (qui ne voit pas à quoi ça sert). Bien que l’opposition ne soit pas de taille à menacer un Astartes, même un Astartes dont la motricité fine est inférieure à celle d’un enfant de deux ans, les progrès ne sont pas au rendez-vous. Comprenant sans doute qu’il doit donner à son patron un os à ronger pour éviter de passer le reste de son existence à lui préparer des sparring partners qu’il dézingue en dix secondes, l’Araignée finit par révéler à Dondon qu’il connaît un moyen de le restaurer dans son état initial. Il lui faudrait pour cela disposer des glandes progénoïdes d’Emperor’s Children (ce qui est facile)… non-corrompu par le Chaos (ce qui l’est beaucoup moins). Et ça tombe bien, Fabius sait exactement où dégoter cet ingrédient devenu rarissime : l’Apothicaire a en effet pris soin d’envoyer une douzaine d’Astartes s’isoler du reste de la Légion pendant qu’il travaillait sur un remède à la dégénérescence qui affligeait les Emperor’s Children pendant la Grande Croisade. On a toujours besoin d’un groupe témoin pour tester l’efficacité d’un traitement, c’est bien vrai. Cela fait maintenant plusieurs années, et un début d’Hérésie, que ces exilés n’ont pas donné signe de vie, mais avec un peu de chance, il en reste encore un en vie, et il se fera un plaisiiiir de donner ses glandes pour la cause.

Eidolon part donc immédiatement à la cueillette aux loyalistes, bien conscient que son état de méforme actuel risque de lui être fatal la prochaine fois qu’il croisera la route de ce parvenu de Lucius (qui lui est revenu d’entre les morts sans séquelles, c’est vraiment trop injuste). Si les premières adresses données par Fabius se révèlent être des impasses, le destin finit par sourire au Seigneur Commandeur, dont le vaisseau sort sans crier gare du Warp à proximité de la planète où sont stationnés les derniers échantillons de la liste arachnéenne. Prenant avec lui une escouade de Kakophoni dont, je cite, « la disparition ne chagrinera personne » (ambiance ambiance), Eidolon atterrit à proximité de la forteresse solitaire tenue par ses frères d’armes, et se prépare à une émouvante réunion de famille.

Les hérétiques sont froidement accueillis par le Sergent Avram Rakomon, qui se présente comme le dernier des Emperor’s Children, et ses quelques potos des Légions Brisées. Dans la fusillade qui s’ensuit, Eidolon se découvre des capacités physiques insoupçonnées, qui font plus que compenser ses tics et ses tocs nerveux. Une preuve que Slaanesh ne l’a pas oublié, sans nul doute. Ayant perdu son escouade dans l’affrontement (notons tout de même qu’il tue lui-même le champion Kakophoni parce qu’il avait osé lui parler de Lucius), Eidolon engage Rakomon au corps à corps, et profite de son nouveau regain de forme pour marteler le loyaliste jusqu’à ce que mort s’en suive. Il ne lui reste plus qu’à décortiquer ce mollusque énergétique pour récupérer les précieuses glandes qui lui permettront de retrouver sa jeunesse…

Début spoiler…Mais à bien y réfléchir (car oui, ça lui arrive), Eidolon se rend compte qu’agir de la sorte serait commettre un fashion faux pas envers Slaanesh, qui lui a accordé des dons compensant les faiblesses causées par sa résurrection. Il ne faudrait pas fâcher le Prince du Chaos en redevenant un simple et boring Space Marine, tout de même. La nouvelle se termine donc avec un broyage à main nue des glandes du pauvre Rakomon, dont le sacrifice n’aura pas servi à grand-chose. Perdu pour perdu, je pense que Fabius aurait apprécié ce cadeau, mais il est vrai que l’altruisme n’est pas le premier trait des Emperor’s Children…Fin spoiler

AVIS :

Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, ou qu’on aime à le détester, Eidolon occupe une place particulière dans la galerie des personnages secondaires de l’Hérésie d’Horus, en cela qu’il ne laisse personne indifférent. Si ‘Amor Fati’ ne lui permettra pas de se refaire une réputation parmi les fans de cette franchise (il reste en effet parfaitement égal à lui-même), Michael F. Haspil réussit à donner à l’imbuvable Seigneur Commandant une profondeur inédite. En choisissant d’endurer son statut de créature de Frankenstein – avec bénéfices, tout de même – au lieu de chercher une régénération en bonne et due forme, Eidolon se pose pour la première fois en maître de son destin. Il démontre également une compréhension du crédo Slaaneshi (plus ça fait mal, plus c’est bon) digne d’un Elu du Prince du Chaos, ce qui renforce sa future candidature au commandement de la Légion (voir ‘The Soul, Severed’, qui se déroule peu après). De son côté, Haspil fait preuve d’une belle maîtrise de son sujet pour un newbie hérétique, et se paie même le luxe de venir enrichir le fluff de sa Légion d’adoption, audace que peu d’auteurs nouvellement venus se sont autorisés. Une nouvelle tout à fait honorable donc, et une lecture plus que recommandée aux amateurs de la IIIème Légion.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme tous les ans, je m’interroge sur la présence d’une nouvelle de l’Hérésie d’Horus, franchise réservée aux amateurs de fluff par excellence, dans un livret d’initiation à la BL tel que celui-ci. Il s’agit peut-être de la dernière fois que je remets ce débat sur la table (il ne reste plus qu’un bouquin à sortir pour que l’Hérésie se termine), mais en attendant, ‘Amor Fati‘ se révèle aussi plaisant pour les initiés que cryptique pour les débutants. On touche même au sublime (en termes d’erreur de casting) quand on réalise le nombre de pré-requis nécessaires à la bonne compréhension des tenants et aboutissants de cette nouvelle, à commencer par l’incontournable : « mais qui est donc Eidolon? » (et pourquoi est-il si méchant?). Je reste droit dans mes bottes et continue à prêcher pour l’inclusion de ‘The Lightning Tower‘ en lieu et place de tout autre nouvelle hérétique dans les recueils Black Library Celebration, et tant pis pour les redites. Commençons par le commencement, que diable.

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The Vintage – D. Annandale [WHR] :

INTRIGUE :

The VintageIl y a des promotions qui valent un enterrement, et ce n’est pas Ullior Arkhant qui nous dira le contraire. Capitaine chevronné de l’armée de sigmarites s’étant ralliée aux Anvils of the Heldenhammer lors de leur campagne de libération de Shyish, Ullior caresse le secret espoir de devenir à son tour un des Elus du Grand Barbu, et a donc fait de son mieux pour soigner ses stats en combattant aux côtés des Stormcast Eternals. S’il s’est fixé cet ambitieux objectif, c’est parce qu’il est hanté depuis son enfance par le souvenir du jour où son village natal et tous ses habitants ont été passés au fil de la griffe et de la canine par une bande de vampires assoiffés, menés par nulle autre que la redoutable Anasta Malkorion. Ayant échappé au carnage par un gros coup de bol (il a été recouvert par un bout de charpente lorsqu’un Vargheist grognon a défoncé la hutte familiale), Ullior ne s’est jamais débarrassé de son complexe du survivant, et aspire donc à être reforgé pour laisser une bonne fois pour toute son passé derrière lui. Aussi, lorsque le Lord Celestant des Anvils of the Heldenhammer lui annonce qu’il l’a choisi pour garder la forteresse de Fovos, en grande partie parce qu’il est un natif de la région, pendant que les Stormcast poursuivront leur croisade dans le Royaume de la Mort, le brave Ullior présente une figure d’enterrement à son supérieur (qui ne relève pas, croyant sans doute qu’il s’agit de la manière dont les Shyishois marquent leur contentement). Il est toutefois trop obéissant et discipliné pour refuser cette mission, d’une importance vitale pour sécuriser les lignes d’approvisionnement des Stormcast Eternals.

Les premières semaines s’écoulent avec monotonie, rien ne venant perturber le calme mortuaire de Fovos, malgré les mauvais pressentiments qui pourchassent notre héros. Persuadé que le pire est à venir, ce dernier ne compte pas ses heures et prend si peu de repos que sa seconde finit par lui intimer d’aller piquer un roupillon pour reprendre du poil de la bête et convaincre ses hommes qu’il a confiance en eux. Ullior accepte et part faire un somme amplement mérité, mais est aussitôt assailli par un terrible cauchemar, et revient à lui dans une forteresse plongée dans un silence de mauvais augure…

Début spoiler…Et pour cause : la garnison a été massacrée par un ennemi sanguinaire, qui se révèle bien sûr être Anasta Malkorion en personne. On apprend alors que la survie d’Ullior ne devait rien au hasard ou à la chance, mais n’était qu’une manigance de la vampire pour créer un « grand cru de sang » à partir du traumatisme subi par notre héros, laissé à psychoter pendant quelques décennies comme on peut élever un vin de garde dans un (Monde qui) fût en chêne. Une telle patience ne peut que s’applaudir, et bien que l’issue de la nouvelle ne soit guère heureuse pour Ullior (qui mourra sans avoir été remarqué par Sigmar), il aura au moins la satisfaction de savoir que sa misérable existence a permis la création d’un fameux millésime. Boire ou périr, pourquoi choisir ?Fin spoiler

AVIS :

David Annandale et les personnages tourmentés, rattrapés et terminés par leur passé douloureux, c’est une des associations les plus pérennes de Warhammer Horror (‘A Deep and Steady Tread’, ‘The Hunt’, ‘From the Halls, the Silence’)… juste derrière David Annandale et les vampiresses manipulatrices et implacables (‘The Threshold’, ‘The Dance of the Skulls’, ‘The Gossip of Ravens’, ‘Obsidian’). Ici, notre homme réunit ses deux marottes avec une nouvelle d’ambiance assez bien construite, compensant son manque criant de suspens par la caractérisation réussie dont bénéficie Anasta Malkorion1, abomination morte-vivante alliant cruauté bestiale et raffinement aristocratique. Ca se laisse lire autant que le pauvre Ullior Arkhant se laisse boire, même s’il ne s’agit pas d’un chef d’œuvre horrifique.

1 : Le personnage nommé le plus énigmatique d’Age of Sigmar, puisqu’elle semble avoir été créée de toutes pièces lors du Warhammer Day 2021, et n’a plus jamais fait parler d’elle depuis. Cela n’a pas empêché la Black Library de sous-titrer ‘The Vintage’ comme étant « une histoire d’Anasta Malkorion », comme s’il s’agissait d’un personnage amené à bénéficier de sa propre série.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une petite nouvelle d’horreur (faut le dire vite) qui n’impressionne ni ne déplaît : le catalogue de Warhammer Horror est maintenant assez riche pour trouver mieux que ‘The Vintage‘ en guise de représentant de la franchise (mention spéciale au Black Library Celebration 2022, qui contenait deux très bonnes histoires : ‘The Reaper’s Gift‘ et ‘Les Réprouvés‘), mais il y avait aussi bien pire. Ca fait le taf.

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Unnatural Causes – J. Reid [WCR] :

INTRIGUE :

Légiste de bas étage (elle travaille en sous-sol) dans le quartier défavorisé de Thronegate, à Varanguata, Martia Lyviska ne vit que pour son jeune fils Issak, malheureusement affecté par la maladie du poumon gris, sorte d’asthme grimdark à l’issue fatale pour les péquins de base n’ayant pas les moyens de se payer les traitements adéquats. Ayant déjà vendu la plupart de ses possessions de valeur pour offrir à son rejeton une cure temporaire grâce aux réseaux professionnels d’une ancienne copine de promo devenue directrice de l’Officio Medicae local (Emilia Vermannen), Martia supplie cette dernière de réinscrire Issak à la prochaine session, lui promettant de rassembler rapidement la somme nécessaire pour financer le traitement.

Le problème est que notre mère courage n’a aucune idée de la manière de rassembler le magot en question. Le destin va toutefois lui tendre une perche, sous la forme d’un cadavre livré au cœur de la nuit terne d’Alecto par un mystérieux homme de main très pointilleux quant au destinataire du sac à viande qu’il véhicule : le macchabée doit en effet être remis en main propre au verispex (le directeur du mortuarium), et à personne d’autre. Cette indication en manque pas de surprendre Martia, qui sait de source sûre que son big boss a raccroché la blouse depuis des années, et ne traite plus que des affaires administratives de son service. Une réaction étrange du cadavre au moment où elle le place dans un caisson réfrigéré la convainc de se livrer à une étude plus poussée de ce nouveau « patient », dont l’abdomen se trouve être rempli d’objets de valeur, à défaut d’organes. Comprenant qu’elle vient de mettre le doigt scalpel sur un trafic impliquant le verispex et une des nombreuses organisations criminelles opérant à Varanguata, Martia commence par paniquer, mais finit par réaliser qu’elle pourrait tirer profit de sa trouvaille pour payer le traitement de son fils, et emporte avec elle un anneau en or frappé d’une tête de corbeau avec l’intention de le revendre auprès d’une de ses connaissances.

La transaction avec sa receleuse de confiance (Mama Louhi) ne se passe toutefois pas comme espéré, la vieille bique refusant tout net de prendre la camelote après examen, et conseillant à sa cliente de se débarrasser au plus vite de la bagouse compromettante avant de s’attirer des ennuis. La sagace Mama a en effet identifié l’anneau comme était le signet d’un Libre Marchand, que son légitime propriétaire (ou héritier de ce dernier) voudra sans doute récupérer à tout prix. Comprenant qu’elle s’est embarquée dans une affaire qui la dépasse autant qu’un Titan toise un Grot, Martia se rue vers son lieu de travail pour remettre l’anneau de pouvoir dans le fondement du cadavrissimo avant que sa disparition ne soit remarquée, mais il est déjà trop tard, comme le cordon de Sanctioners autour de la morgue le révèle. Un planton plutôt bavard apprend à notre héroïne que le bâtiment a été attaqué par un mystérieux assaillant qui a froidement exécuté tout ceux qui ont eu le malheur de croiser sa route, verispex compris, et était visiblement à la recherche de quelque chose dans les locaux, à en juger par la dévastation qu’il ou elle a laissé sur place avant de s’éclipser.

Sachant fort bien que sa trace est facile à trouver pour quiconque serait au courant de l’heure d’arrivée du cadavre surprise de la veille, Martia repart aussi sec en direction de son appartement, où elle a laissé son fils aux bons soins d’une voisine à moitié aveugle, craignant que le traqueur d’anneau se soit rendu sur place pour avoir une petite explication avec la légiste de garde la nuit précédente.

Et une fois encore, elle arrive trop tard (sale habitude tout de même). Sa voisine lui explique qu’elle a remis Issak à une équipe du Medicae afin qu’il puisse reprendre son traitement, sans se douter qu’elle se faisait rouler dans la farine. De son côté, Martia ne met pas longtemps à trouver une note posée en évidence dans son salon, l’enjoignant à amener l’anneau au mortuarium, et de venir seule…

Début spoiler…Ayant reconnu son écriture, Martia n’est pas surprise de la présence d’Emilia Vermannen au rendez-vous. Comme la pimpante et rejuvenatée à mort directrice lui explique, elle accepte de temps à autre de rendre de menus services à de puissants et discrets amis en échange de généreuses donations au profit de l’Officio Medicae, et, si elle tient bien sûr à son amitié avec Martia, ne reculera devant rien pour mettre la main sur le précieux anneau. Fort heureusement pour cette dernière, sa copine est plus forte en duckface qu’en tir au pistolet laser, ce qui lui donne assez de temps pour activer le mini-fuseur camouflé dans la bague1, ce qui crée suffisamment de confusion pour lui permettre d’échapper momentanément à sa poursuivante et de récupérer son fils, qui dormait d’un sommeil profond dans une salle avoisinante. Le recadrage tant attendu entre les deux BFF n’aura cependant pas lieu, l’activation de l’anneau ayant permis à un homme de main du Libre Marchand lésé de repérer le gadget de son patron, et de se téléporter dans le mortarium pour reprendre possession de la relique, qu’Emilia a eu la mauvaise idée de ramasser dans les décombres. Un tir, bien ajusté cette fois, de pistolet à aiguille, et la directrice est envoyée ad patres, tandis que Martia et Issak sont royalement ignorés par l’agent du Rogue Trader. Tout est bien qui finit bien, et même mieux que ça, car Martia décide de suivre l’exemple d’Emilia et de reprendre le rôle laissé vacant par la mort tragique de son amie. Un dévoiement envers l’Empereur, certes, mais surtout un dévouement envers son fils, qui pourra désormais bénéficier des meilleurs traitements grâce au nouveau train de vie de sa mère. Qui pourrait l’en blâmer ?Fin spoiler

1 : Apparemment, tout le monde sait ce qu’est un Libre Marchand sur Alecto, et tout le monde sait aussi que ces individus se baladent avec des armes digitales. C’est un monde très cultivé, en fait.

AVIS :

Jude Reid rend une copie sérieuse avec ce ‘Unnatural Causes’, qui plonge le lecteur dans le déprimant quotidien d’une famille ordinaire d’un monde ruche lambda. Dans les ténèbres du lointain futur, il vaut mieux être très friqué pour espérer vivre une existence digne, ou à défaut, être prêt à marcher dans toutes les combines possibles pour sortir la tête de l’eau (ou ici, des particules fines). Reid démontre qu’elle maîtrise les codes du « grim-noir » (une expression gracieusement offerte par votre serviteur), en intégrant les thèmes du roman noir (corruption galopante, réseaux criminels, receleur louche et autre femme fatale) à l’univers de 40K, pour résultat aussi atmosphérique que convaincant. Je suis curieux de voir ce que cela pourrait donner sur un format plus conséquent.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une bonne introduction à la petite dernière des franchises de la Black Library, qui a l’énorme avantage par rapport au recueil de l’année dernière d’être une vraie nouvelle stand alone, et pas la bande-annonce littéraire d’un roman séparé. Le postulat de départ de Warhammer Crime n’étant pas le plus accessible (40K, mais sans tous les trucs épiques de 40K), heureusement que la BL a pris un peu plus de soin à choisir son produit d’appel cette année.

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Prologue à Nikaea (Prologue to Nikaea) – D. Annandale [HH] :

INTRIGUE :

Prologue to NikaeaEnfermé dans sa chambre comme un ado rebelle, Malcador s’adonne à une de ses activités favorites : fouiller le Warp à la recherche de potins croustillants. Malgré les prodigieux pouvoirs psychiques dont dispose le Sigilite, et le fauteuil ergonomique premier cri que lui a offert son boss pour ménager ses lombaires et sa santé mentale (la qualité de vie au travail, c’est important), la tâche n’est pas sans danger pour Malcador1, qui finit cependant par ferrer un nom après avoir mis son bras dans l’œil d’une tempête Warp particulièrement vindicative : Thawra. Il semble que quelque chose de vilain soit en train de se passer sur cette planète impériale, et il est du devoir du Ma(l)c’ d’aller enquêter sur place.

Quelques temps plus tard, le noble vieillard fait son arrivée en orbite autour de la planète en question, escorté par une compagnie de Custodes menée par le Capitaine Bouclier Collatinus. Il semble bien que Thawra a connu des avanies récentes, comme les débris de sa flotte marchande et le remplacement soudain de la Gouverneur Vasra par sa conseillère Arkanasia en attestent. Rendus à la surface, les enquêteurs impériaux se font briefer par leur hôte : une faction de Psykers séditieux a lancé une attaque surprise sur le gouvernement planétaire, causant un beau bordel (et la mort de Vasra) avant que la contre attaque loyaliste ne les force à battre en retraite. Arkanasia attribue une bonne partie de cette remontada à l’emploi d’une force de Psykers fidèles à l’Empereur, qu’elle a personnellement entraîné pour combattre les félons. Etant elle-même une Psyker, elle est convaincue de tenir là une arme décisive pour la suite de la Grande Croisade, et meurt d’envie d’aller pitcher son idée sur Terra pour la prochaine saison de La Galaxie A Un Incroyable Talent. Malcador, en vieux reac’ qu’il est, nourrit de profonds doutes sur cette idée, qu’il garde cependant pour lui. Il faut avant toute chose s’assurer que l’insurrection de Thawra est définitivement matée, ce qui n’est pas encore chose faite. En effet, les derniers rebelles se sont retranchés dans des cavernes au Sud de la capitale, et on est sans nouvelles des forces envoyées par Arkanasia, dont sa brigade de X-Men, pour leur faire rendre gorge.

Lorsque Malcador, Arkanasia, Collatinus et ses Custodes arrivent sur le théâtre d’opérations, ils sont accueillis par une tempête psychique petite par la taille mais vicieuse de tempérament2. Sa cause ne fait pas de doutes pour un expert aussi calé en warperie que le Sigilite : l’affrontement entre Psykers indisciplinés a dégénéré en un mindfuck littéral (merci Slaanesh), et il est urgent d’agir pour refermer la brèche avec l’Immaterium avant que la tempête n’engouffre tout Thawra. Fort heureusement, Malcador est venu avec les outils appropriés pour cette tâche : sa mauvaise humeur légendaire et sa capacité à faire plusieurs choses en même temps (indispensable lorsqu’on doit gérer une bande de Primarques mal élevés), ici balancer des décharges de taser aux Psykers survivants tout en évitant de laisser traîner sa toge dans la boue warpienne. Et pour ceux qui se demandent, non, les Custodes ne servent pas à grand-chose, à part balancer des rafales de bolter au jugé au niveau des genoux avec un angle de tir de 45°C. Pour des raisons inexplicables, Arkanasia décide soudainement de partir en courant vers la tempête avant que le Régent n’ait fini de réger le problème. Les derniers Psykers en état décident alors de converger sur elle, ce qui aurait pu très mal se finir pour Malcador n’eut été la foi chevillée au corps d’Arkanasia pour l’Empereur. Au lieu de vaporiser le petit vieux pénible qui tchipait sans merci ses condisciples, la Gouverneur par intérim choisit noblement de gueuler un grand « POUR PEPE !!! » en direction du ciel, avant de se prendre une rafale de bolts dans le buffet (qui n’arrivent même pas à la tuer sur le coup, c’est dire si les Custodes sont surfaits).

Tout est bien qui finit quand même pour Malcador et Collatinus, qui, en gentlemen qu’ils sont, viennent assister aux dernières paroles d’Arkanasia. Cette aventure provoque un certain malaise chez le Sigilite, qui n’a dû son salut qu’à la foi de la Psyker, c’est-à-dire au concept que lui et son boss se sont jurés d’éradiquer. Se pose également la question du positionnement de l’Imperium envers les pouvoirs psychiques : sont-ils trop dangereux pour être utilisés, ou bien un juste milieu est-il atteignable ? Rendez-vous sur Nikaea dans quelques années pour reprendre cette discussion…

1 : On en déduit qu’en M30, il n’existe plus de bouton « j’ai de la chance » sur la barre de recherche Google. Cela aurait été plus confortable pour tout le monde.
2 : Il semble à Malcador que la tempête sait qu’il se trouve sur Thawra, et qu’elle cherche à l’humilier, comme les inscriptions insultantes sur sa mère qui apparaissent à la surface du maelstrom semblent l’indiquer.

AVIS :

David Annandale attire l’attention du lecteur sur une question intéressante de l’Imperium naissant : la formation et le contrôle des Psykers par les autorités impériales (in)compétentes. À l’époque, l’Empereur avait d’autres chats à fouetter que de mettre des œillères aux cohortes de mutants acheminés par les Vaisseaux Noirs jusqu’à Terra, tâche peu gratifiante mais indispensable à la survie de son empire galactique. Pendant la Grande Croisade, il y a fort à parier que le sujet était traité au cas par cas, avec des risques de débordement, parfois causé par un enthousiasme sincère mais dangereux, comme cela a été le cas sur Thawra. Si une des missions de Malcador consistait bien à gérer les crises de ce genre pendant que son patron localisait sa marmaille, on comprend mieux pourquoi il tenait temps à renforcer son équipe : à son âge, arpenter la galaxie pour mettre des glaçons psychiques dans le slip du moindre Psyker en rut n’est pas une activité conseillée.

Sur cette base intéressante, Annandale ne développe cependant pas grand-chose, à commencer par des connexions avec Nikaea, ce que le titre laissait pourtant envisager. Il aurait été approprié, à mon sens, de jouer des rapports compliqués que le Warp entretient avec notre continuum spatio-temporel pour faire voir à Malcador des indices du procès en sorcellerie intenté à Magnus et aux Librarius des Légions de l’Astartes, voire de la déchéance de l’humanité telle qu’annoncée par l’Hérésie d’Horus. Rien de tout ceci ici, seulement une nouvelle très « premier degré », saupoudrée d’une pincée de fluff et terminée par quelques remarques d’ordre général sur le rapport qualité-prix de l’Immaterium. Il y avait moyen de mieux faire, mais on sauvera ‘Prologue to Nikaea’ du pilori compte tenu de son absence de défauts majeurs, ce qui place cette œuvre hérétique parmi les plus abouties de son auteur.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Pas grand-chose à ajouter ici à ce que j’ai mis en avant un peu plus haut pour la nouvelle hérétique VO du recueil de cette année. Si vous savez qui est Malcador, et ce qu’est Nikaea, vous avez une chance d’apprécier cette nouvelle à sa juste valeur (j’ajoute que ‘Amor Fati‘ est intrinséquement supérieur à ‘Prologue to Nikaea‘, tant pis pour nous autres Frenchies)… et vous n’êtes sans doute pas le public cible de cette publication. Paradoxal.

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Le Poing d’un Dieu Courroucé (The Fist of an Angry God)W. King [AoS] :

INTRIGUE :

The Fist of an Angry GodAssignés à la conquête de la forteresse d’Azumbard, dans le Royaume d’Aqshy, le Liberator-Prime Balthus1 et ses Knights Excelsior sont à la peine. Non seulement la décoration psychédélique et les relents d’encens bon marché de leurs adversaires Tzeentchiens sont un affront à leurs sur-sens de surhommes, mais, nombre sacré du Dieu Poulet oblige, ils ont passé des plombes à sécuriser les neuf tours du bastion adverse, ce qui pèsera lourdement sur leur rémunération variable de l’année, alors que les Hammers of Sigmar affectés au front Slaaneshi ont une charge de travail un tiers moindre. Saleté de numérologie cosmique. Faisant contre mauvaise fortune feu de tout bois, Balthus mène ses ouailles à l’assaut de l’ultime donjon adverse, sans réussir à se défaire d’une étrange sensation de déjà-vu, qui ne lui dit rien qui vaille. L’absence de résistance des disciples de Tzeentch lui semble en effet de mauvais augure, et cette sinistre prémonition se trouve vérifiée lorsque la petite force de Stormcast qu’il commande se retrouve embusquée et submergée par une horde d’emplumés vindicatifs. Ayant pris deux méchants coups sur l’occiput, notre héros tombe dans les bras de morphine, et se réveille enchaîné dans un laboratoire arcanique, où il fait la connaissance de la sorcière Aesha, qui à son grand étonnement, semble le connaître2.

Après quelques instants consacrés à tenter de se défaire de ses liens enchantés, sans grand succès (ces derniers se resserrant de plus en plus à chaque fois que Balthus force dessus, conséquence d’un puissant enchantement… ou de l’utilisation d’un simple demi-nœud), le Liberator prisonnier – ironie – accepte d’ouvrir le dialogue avec Aesha, qui, cornes et sabot mis à part, se révèle être une hôte plutôt décente, et se montre plus intéressée par la poursuite des examens initiés sur son sujet d’étude que sur le sacrifice de ce dernier. L’échange permet de comprendre que les motivations de la magus sont, en toute simplicité, de percer à jour les secrets ayant permis à Sigmar de créer les Stormcast Eternals, qu’Aesha considère comme la clé de la transcendance divine. Ayant appris, sans doute à la lecture des tomes de la Fin des Temps (trouvés en occasion sur e-bay), que beaucoup des membres du panthéon de l’Ordre et de la Mort ont commencé leur carrière comme de simples mortels dans le Monde qui Fut, notre ambitieuse sorcière ne voit pas de raison de ne pas tenter le coup à son tour. Horrifié par ce projet blasphématoire, et peut-être également par le résultat de l’IRM complet qu’Aesha lui a fait passé grâce à ses miroirs ensorcelés, Balthus décide de contrecarrer les plans de sa Némésis en… rage-quittant. Ou plutôt, en essayant de rage-quitter. Car sa tentative héroïque de se suicider en tirant à mort (littéralement) sur ses chaînes se fait contrecarrer par Aesha, qui le met en pause avant qu’il ne perde son dernier PV, et profite de son coma réparateur pour infiltrer ce rêve, étrange pénétrant, de la fin inconnue de Balthus.

En des temps très anciens, Balthus était en effet Leoric, prince héritier du royaume d’Asqualon. Son règne fut toutefois aussi court (3 minutes et 26 secondes) que sanglant, puisqu’il hérita de la couronne après la mort de son père pendant la défense du Temple de l’Orage, dernier bastion de l’Ordre face aux assauts du démon Arkatryx et de ses disciples indisciplinés. Garrotté par son adversaire, Leoric invoqua Sigmar pour venger son paternel, et fut exaucé lorsque le Dieu lui envoya un éclair salvateur, non pas directement sur le démon, ce qui aurait été trop simple, mais sur l’épée que notre héros brandissait toujours. Chargé à bloc, Leoric trouva la force d’électrocuter son adversaire d’un ultime horion, avant de partir en direction de la forge divine. Par un hasard qui n’en était sans doute pas un, Aesha était également présente ce jour là (après tout, c’est elle qui a coup fatalisé le roi Aldred), ce qui donne un nouveau sujet de discussion tout trouvé à nos deux personnages une fois Balthus émergé de sa torpeur. S’en suit une joute verbale digne d’un débat de la primaire démocrate, avec Aesha se posant en Bernie Sanders chaotique, en lutte contre le 1% asqualique ayant exploité le petit peuple et fait exécuter son père parce qu’il avait volé une miche de pain. Face à ce déferlement de progressisme, Balthus ne peut que se référer aux bullet points qui lui ont été inculqués pendant sa formation: « l’Ordre, c’est cool » et « Yes, Sig’ Can ».

Ce passionnant échange est toutefois écourté par la notification que reçoit Aesha sur son portable professionnel, l’informant de l’intrusion d’une meute de militants en sigmarite dans son QG, avanie qu’il lui faut gérer sans attendre. « Pas si vite poulette » lui répond Balthus, qui dégaine son special move et gueule « Par le pouvoir du <insert random stuff here> ancestral, je détiens la force toute puissante! », et parvient enfin à se défaire de ses chaînes par l’intervention du saint sigmarite esprit. La fin de la nouvelle voit nos deux protagonistes jouer au chat et à la souris dans le dédale du donjon d’Aesha, jusqu’à ce qu’ils arrivent dans la salle de téléportation aménagée par cette dernière, et qui se révèle être le Temple de l’Orage où ils se sont rencontrés pour la première fois il y a des millénaires. S’il ne parvient pas à stopper la bougresse avant qu’elle ne s’éclipse, Balthus a au moins la satisfaction de mettre la main sur son ancienne épée, qu’il était le seul à pouvoir retirer de la pierre dans laquelle il l’avait plantée en transperçant le démon (ça me dit vaguement quelque chose…). Un milliard de Tzaangors occis plus tard, notre héros est récupéré par ses frères d’armes, esquinté mais en vie, et ayant inscrit sur sa to do liste de caler un nouveau tête à tête avec Aesha pour discuter du bon vieux temps dès qu’elle se montrera disponible.

À ne pas confondre (je l’écris car je l’ai fait moi-même) avec Balthas Arum, la réincarnation de Balthazar Gelt dans les Royaumes Mortels. 
2 : Le plus étonnant pour le lecteur est surtout la question que pose Balthus à sa geôlière juste après qu’elle l’ait identifié. OSEF quoi mon grand.

AVIS :

King fait ses premiers pas dans les Royaumes Mortels de manière assez discrète avec The Fist of an Angry God. Comme on pouvait l’attendre, et peut-être l’espérer, son passif d’auteur historique pour Warhammer Fantasy Battle apparaît clairement dans cette nouvelle à travers le personnage d’Aesha, dont la connaissance du Monde Qui Fut apparaît comme un clin d’œil (je le vois comme ça en tout cas) au parcours de King. Ce dernier prend en marche le train du « Sigmar-bashing » qui sous-tend beaucoup des dernières publications mettant en scène des Stormcast Eternals, et dépeint les méthodes de recrutement du Dieu Roi sous un jour contrasté, tout en justifiant en partie le passage au Chaos d’Aesha. Pas de manichéisme ici donc, et c’est bien le moins qu’on attendait de la part d’un contributeur aussi expérimenté que Bill King, dont les écrits ont toujours mis en avant la « grisaille » ambiante des univers de GW.

À titre personnel, je suis toutefois déçu de l’articulation de la nouvelle, dont le début est finalement insignifiant (je m’attendais à ce que King fasse une révélation sur un stratagème spatio-temporel utilisé par les disciples de Tzeentch, ce qui aurait justifié la sensation de « déjà-combattu » de Balthus) et la fin hurle littéralement « À SUIVRE… » à la tête du lecteur1. Le fond étant, comme dit plus haut, assez intéressant à défaut d’être captivant (cela montre au moins que King a digéré le background de cette nouvelle franchise), je trouve dommage que la forme n’ait pas été plus pensée et soignée par l’auteur. Ceci dit, King ne s’est jamais montré très doué sur les très courts formats, ses meilleures nouvelles se situant sur la marque des 40/50 pages. Quoiqu’il en soit, il convient de suivre la suite des événements avec attention, et espérer que le King finisse par remettre la plume sur le fils spirituel ayant lui aussi réussi son passage de Warhammer Fantasy Battle à Age of Sigmar, un certain Mr G. Gurnisson…

1 : En plus de passer vraiment vite sur des éléments pas anodins du tout pour l’intrigue, comme la libération miraculeuse de Balthus.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une nouvelle de Stormcast Eternals dans leurs oeuvres principales, mais pas tellement intéressantes au final, à savoir le concassage d’ennemis de Sigmar. William King étant qui il est, le résultat est à la fois accessible et digeste, mais à moins que vous ne soyez très bon public, cela ne devrait pas vous donner l’irrépressible envie de partir à la découverte des Royaumes Mortels. La comparaison avec ‘Monsters’ fait assez mal…

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Famille (Family) – D. Abnett [40K] :

INTRIGUE :

Repas de FamilleLa bataille de Salvation’s Reach a été remportée, et les Fantômes de Gaunt sont de retour dans leur transport de troupes, en transit pour le prochain théâtre d’opérations. À la faveur d’une cantine blindée et d’un échange de regards, le Major Gol Kolea se retrouve à déjeuner en face de son fils, le Garde Dalin (surnommé Dal, en hommage au plat de lentilles) Criid.

Il faut évidemment préciser ici, si besoin était, que les deux hommes ont une histoire commune aussi fragmentaire que compliquée. Croyant que toute sa famille avait été tuée lors du siège de Vervunhive (‘Necropolis’), Kolea avait découvert fortuitement quelques temps après avoir rejoint les Tanith que ses enfants avaient été recueillis par la ganger Tona Criid (également engagée dans la Garde) et son partenaire Caffran. Ne voulant pas ruiner le bonheur de cette famille recomposée en faisant valoir son droit à la Garde, Kolea avait vu ses enfants grandir de loin, avant qu’une blessure de guerre ne le rende amnésique pendant quelques temps, puis qu’il guérisse grâce à ce que l’on peut appeler un miracle sabbatique. Au final, et pour autant que je puisse le dire, Dal a fini par découvrir le pot aux roses après avoir embrassé la carrière militaire, comme les trois quarts de ses parents. Sa petite sœur Yoncy n’a elle pas été mise dans la confidence, et considère toujours Kolea comme « Tonton Gol ». Cette mise au point effectuée, reprenons le cours de notre récit et de notre repas.

Après avoir échangé quelques banalités de circonstance sur le caractère détestable de la nourriture servie, Gol et Dal essaient de (re)trouver un peu de leur complicité père-fils, le premier acceptant l’invitation du second de venir dîner dans le studio familial, après avoir un peu rechigné. La soirée se passe bien, jusqu’à ce que Yoncy, dont l’âge est obtenu en faisant la somme de 2D6 à chaque round de joueur1, demande à Gol entre la poire et le fromage s’il est son père, comme elle a entendu beaucoup de Gardes le dire autour d’elle. Kolea sort alors sa meilleure poker face pour lui répondre qu’ils n’ont aucun lien de parenté, et la gamine enchaine en allant lui chercher le bôdéssain qu’elle lui a fait avec ses craies colorées. Conclusion : c’est très moche, passablement confus et empeste le pouvoir psychique latent, car les « ombres méchantes » qui sont dessinées fortuitement, ça vaut tous les jours un bolt dans la tête si un Inquisiteur passe dans le coin.

Ce mystère restera cependant entier, tout comme celui entourant le fils (caché ?) de Gaunt, un certain Felyx Meritous Chass, auquel Dal a été affecté comme escorte, brièvement évoqué autour de la table. Gol repart le ventre plein, le cœur gonflé et les yeux humides, ce qui n’est jamais bon signe quand on est un personnage d’Abnett. Mais pas de spoil.

1 : Sans rigoler, Criid soutient que dans six mois, elle fera tourner la tête à tous les Gardes, alors qu’elle parle comme une enfant de sept ans et dessine comme une de trois. À moins que les Tanith ait des canons de beauté franchement dérangeants, je m’explique assez mal cette « incohérence ».

AVIS :

Au moment où j’écris cette chronique, ma connaissance de la série des Fantômes de Gaunt se termine à la fin de l’arc ‘The Lost’, ce qui laisse un vide conséquent entre la fin de cet arc et les événements relatés dans ce ‘Family’. Abnett étant à la baguette, le briefing ou la mise à niveau des lecteurs n’étant pas totalement au fait de l’intrigue se fait de façon efficace et sans accroc, même si j’éprouve quelques doutes sur la valeur ajoutée de cette nouvelle si on ne s’intéresse pas aux relations compliquées de la famille Kolea-Criid, et en particulier au personnage de Yoncy, dont l’étrangeté se trouve au cœur de ce qui tient à la fois du fan service (enfin une réunion entre Gol et ses marmots, après des centaines pages de rendez-vous manqués) et de la scène coupée. Il faut également souligner que si l’auteur se veut pédagogue, il n’est pas non plus totalement newbie-friendly, puisque certains événements et personnages sont évoqués de façon cryptique pour le non initié, et la mort de deux personnages secondaires importants de la série (trois si on compte C.) est rappelée au détour d’un paragraphe. Comme la plupart des nouvelles des Fantômes de Gaunt, il est donc conseillé de lire ‘Family’ dans la suite logique de la série, c’est-à-dire après ‘Salvation’s Reach’, et pas avant.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme dit ci-dessus, Abnett essaie de mettre les formes pour ne pas être trop abscons pour les nouveaux-venus, mais Abnett fait surtout du fan service dans ce ‘Famille‘ (qui s’appelait auparavant ‘Repas de Famille‘), et son public cible est constitué de vieux briscards s’étant enquillé à ce stade plusieurs milliers de pages de développements fantômatiques et familles recomposées. Il est clair que le but de la BL à travers l’inclusion de cette nouvelle dans le Black Library Celebration 2023 était de vendre ‘La Victoire‘ aux lecteurs s’étant arrêtés à la sortie des omnibus précédents (et j’en fais partie), plutôt que d’initier une nouvelle génération aux furtifs exploits du Premier et Unique de Tanith. C’est d’autant plus dommage car Abnett a écrit un paquet de nouvelles « introductives » à son oeuvre phare (‘Ghostmaker’,’A Blooding‘, ‘Vermilion Level‘, ‘In Remembrance‘…) , et elles auraient eu plus de sens ici.

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Sauvage (Savage) – G. Haley [40K] :

INTRIGUE :

SavageNotre histoire s’ouvre sur un concert de ronflements remplissant une tente à l’atmosphère étouffante, alors que le soleil est sur le point de se lever sur Omdurman. Allongé sur son lit de camp, notre héros, Gollph, après avoir courageusement mais vainement tenté de faire abstraction du bruit et de l’odeur la chaleur, décide d’aller se dégourdir les jambes pendant que la température est encore supportable. Gollph, comme ses camarades de la 7ème Companie Motorisée Super-Lourde de Paragonian (ou quelque chose comme ça), est un tankiste, et fier de l’être. Rattaché au Baneblade Cortein’s Honour, où il exerce la noble profession de senior chargeur – ce qui est mieux que serial killer, même si, au fond, cela revient au même –, Gollph espère un jour devenir artilleur. Bien que disposant des aptitudes nécessaires pour occuper cette fonction, notre héros est toutefois handicapé par ses origines : il vient en effet du monde sauvage de Bosovar, qui rime trop avec Kosovar pour que ses ressortissants soient pris au sérieux par les impériaux venant de mondes civilisés. En plus de ça, les Bosovarois ont la peau rose, ce qui, dans le régiment de Paragon dans lequel les hasards de la vie et de la guerre l’ont fait atterrir, est une source de discrimination et de brimades. Que fait donc la HALDE ?

Pour l’heure, Gollph profite du calme ambiant pour aller saluer son char, qui n’a pas vu le moindre combat depuis le début de la campagne, et aller contempler le lever du soleil en marchant pieds nus dans les hautes herbes, comme le petit sauvageon qu’il est resté au fond de lui-même (il n’enlève pas sa chemise tout de même, car le Commissaire n’aimerait pas ça). C’est l’occasion pour lui de se remémorer son parcours depuis les plaines de Bosovar jusqu’aux collines d’Omdurman, en passant par son recrutement dans la Garde, où il a appris à vaincre sa peur des portes. On n’en parle pas assez, mais c’est une technologie des plus dangereuses. Après tout, personne ne s’est jamais coincé les doigt dans un rideau de perles. De retour au camp, et occupé à lustrer des obus pour passer le temps en compagnie de son supérieur ronfleur, le 1er Artilleur Meggen, Gollph est surpris dans son ouvrage par l’arrivée silencieuse, mais pas inodore, de Shoam, le pilote du Cortein’s Honour. Ce dernier a obtenu des nouvelles fraîches faisant état d’un redéploiement imminent de la Compagnie, et de son départ d’Omdurman. Il vient donc rappeler à Gollph et à Meggen le pacte secret que les trois hommes avaient conclu des mois plus tôt, et qu’il leur faut mettre à exécution avant qu’il ne soit trop tard. Si Meggen se montre très enthousiaste à cette idée, Gollph l’est beaucoup moins, s’étant engagé dans l’aventure sous l’emprise de la boisson. Toutefois, une promesse est une promesse, et nos trois conspirateurs se retrouvent donc le soir venu derrière un buisson odoriférant1 pour accomplir leur sinistre dessein…

Début spoiler 1…Si Gollph avait traîné des pieds pour marcher dans la combine, c’est d’abord parce qu’il doit se taper le sale boulot, c’est-à-dire distraire les sentinelles placées devant la tente contenant les réserves de la Compagnie, pendant que ses comparses se glisseront à l’intérieur pour dérober ce dont ils ont besoin pour l’étape suivante de leur machination. En plus d’être dangereuse, cette tâche est humiliante pour le fier Bosovarien, car elle l’oblige à jouer au sauvage pour parvenir à ses fins, alors qu’il se considère comme étant parfaitement intégré au sein de la Garde Impériale. On voit donc Gollph se présenter devant les plantons de service, affublé d’un plastron fait de roseaux tressés (ça fait exotique, dixit Meggen), avec un formulaire mal rempli en main et un affreux dialecte petit nègre à la bouche, et tenter de se faire remettre farine pour dîner Lieutenant, oui oui, s’il te plait Monsieur présentement là dis donc. Pendant que l’héroïque peau rose occupe les gardes, et se fait dérouiller par le plus mal embouché des deux, Meggen et Shoam dévalisent les stocks du régiment, le premier intervenant une fois le forfait commis pour interrompre la bastonnade à laquelle le pauvre Gollph avait droit, et repartir avec lui vers leurs quartiers. La mission a été accomplie, reste à savoir quelle en était le but…

Début spoiler 2…Eh bien, et je n’invente rien, il s’agissait simplement d’organiser une petite fête d’anniversaire pour le Capitaine Bannick, avant que le camp soit levé. Ce dernier est donc pris au dépourvu lorsque son équipage et quelques amis le surprennent à la cantine avec un buffet de pâtisseries paragoniennes et quelques bonnes bouteilles. Parce que ce n’est pas parce que la galaxie est sur le point de s’effondrer qu’il ne faut pas profiter des petits plaisirs de la vie et prendre un pot entre collègues de temps à autres. L’enthousiasme collectif peine toutefois à déteindre sur Gollph, encore un peu marqué par son implication dans le complot pâtissier auquel il a participé, et surtout honteux que trois de ses compatriotes de Bosovar aient été sévèrement punis par les autorités régimentaires pour la disparition des victuailles dérobées par Meggen et Shoam. Il n’y a pas à dire, le racisme anti-rose reste un des fléaux cachés du 41ème millénaire…Fin spoiler

1 : Il a certainement été utilisé par un tankiste pressé comme petit coin, comme Gollph a le plaisir de le découvrir.

AVIS :

Attention, OVNI. Guy Haley signe avec Savage ce qui restera sans doute comme l’une des nouvelles de Gardes Impériaux les plus surprenantes du corpus de la Black Library. Pas de Xenos, pas de mutants et pas d’hérétiques ici, et à peine un peu de combat à proprement parler (même si la mâchoire de Gollph pourrait contester ce constat), mais la description de la vie d’un camp impérial dans toute sa singulière normalité. Si le « complot » fomenté par nos héros a une dimension comique assumée, et permet à Haley de démontrer qu’il est capable de jouer sur le registre humoristique de façon convaincante, c’est la description que l’auteur fait de la réalité sociologique de ce microcosme, où les préjugés et les discriminations1 entre Gardes de différentes origines demeurent aussi vivaces qu’aujourd’hui malgré les milliers d’années écoulées et la découverte d’autres espèces intelligentes, qui donne tout son sel à cette histoire. Le cosmopolitisme de l’Imperium est une de ses caractéristiques les plus intéressantes, mais rarement mise en valeur par la BL autrement qu’à travers l’exemple extrême des abhumains, du fait de sa ligne éditoriale résolument militariste. Haley démontre ici que la GW-Fiction peut encore totalement surprendre, et en bien, le lecteur, et que si la guerre est éternelle au 41ème millénaire, les à côté de cette dernière valent également la peine d’être racontés.

1 : Autre exemple, Shoam est traité comme un paria par ses camarades car il vient de Savlar, réputée pour être peuplé de criminels.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une plongée surprenante et rafraichissante dans le grimdark pas si grimdark que ça du lointain futur, qui montre avec brio que l’on peut écrire des nouvelles 40K intéressantes sans qu’un seul coup de feu soit tiré. Le seul problème avec l’inclusion de ‘Sauvage‘ dans ce recueil est que certains lecteurs seront sans doute déçus de constater que le reste du corpus 40K est bien moins diversifié que cette nouvelle le laissait apparaître. À la guerre comme à la guerre, I guess.

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La Mort d’Uriel Ventris (The Death of Uriel Ventris) – G. McNeill [40K] :

INTRIGUE :

La Mort d'Uriel VentrisCe qui ne devait être qu’un contrôle dentaire de routine est sur le point de prendre un vilain tour pour le Capitaine Uriel Ventris, de la 4ème Compagnie des Ultramarines. Allongé dans le fauteuil du praticien, le patricien écoute avec angoisse le servocrâne de service lui demander de prendre une grande respiration et de la bloquer, afin que l’anesthésie puisse être effectuée. Cela risque de piquer un peu. En repensant à toutes ses sucreries englouties avec Pasanius pendant la Guerre de la Peste, notre héros se dit que s’il s’en sort, il investira pour sûr dans une brosse à dents énergétique, qu’il usera énergétiquement1. Mais pour l’heure, il est temps pour le vaillant mais douillet Capitaine de tomber dans les pommes pour échapper au supplice de la fraise.

Se réveillant dans une espèce de caverne qui ressemble fort à sa Calth natale, Ventris comprend rapidement qu’il expérimente une vision lorsque sa sortie de la grotte se fait sous un grand soleil et devant un paysage bucolique, loin des plaines radioactives dont la véritable planète peut s’enorgueillir depuis 10.000 ans. Comme pour confirmer son délire, il se fait héler par un quidam assis sur un rocher, qui se révèle être ce bon vieux Idaeus, Capitaine de la 4ème Compagnie avant lui, et auquel il a succédé après le sacrifice héroïque du briscard sur Thracia. À peine le temps de détailler les nombreuses cicatrices qui parsèment le corps de l’auguste héros pour s’assurer de son identité que les deux surhommes se mettent à dévaler la pente en direction de la caserne Asigelus (qui n’est pas sur Calth mais sur Macragge, mais bon on s’en fout c’est un rêve), où les hallucinations de Ventris l’entraînent. En chemin, ils croisent la route d’un groupe de jeunes coureurs engagés dans une compétition acharnée pour être le premier à utiliser la douche au retour de leur session d’entraînement, et Uriel reconnaît sans mal Learchus, Cleander, Pasanius et lui-même, tels qu’ils étaient à l’adolescence. Il ne peut qu’assister à nouveau à la tentative malheureuse de dépassement de ce snob de Learchus que son jeune lui avait tenté il y a toutes ces années, et sentir, très douloureusement, le vicieux coup de coude que son rival devenu rival devenu balance devenu Capitaine par intérim devenu Sergent Vétéran lui avait balancé dans le pif pour calmer ces ardeurs. Cela fait toujours aussi mal, et même beaucoup plus mal que cela devrait, mais cette soudaine vulnérabilité attendra un peu, car voici nos deux vétérans rendus devant les portes de la caserne, qui sont, comme de juste, fermées.

Peu disposé à laisser quelques quintaux de fer et d’adamantium se mettre en travers de la route de son flashback, et constatant qu’Idaeus se dégrade à vue d’œil, Ventris pousse de toutes ses forces sur les lourds battants pour pouvoir entrer, là aussi déclenchant des douleurs sans doute excessives par rapport à l’effort consenti par un Space Marines en bonne santé. Enfin parvenu à ses fins, il finit par rentrer dans les baraquements, un Idaeus positivement cacochyme sur les talons. Là, il est témoin du rassemblement de la 4ème Compagnie dans son ensemble, spectacle grandiose même si esthétiquement critiquable2, qui fait battre très fort ses petits cœurs. Après avoir identifié pour le lecteur qui n’en demandait pas temps la moitié des guerriers assemblés en silence sur la place, il est pris à partie par cette vieille baderne de Learchus, qui vient lui reprocher de les avoir abandonnés. « Oui mais bon c’est un rêve buddy et t’étais pas obligé de me foutre la honte devant Idaeus en mentionnant que j’avais prêté un serment de mort petit galapiat » répond Uriel, un peu embarrassé. Qu’importe, Learchus répète à nouveau que Ventris est en train de les abandonner à l’instant même, et lui tourne le dos comme un prince, suivi par l’intégralité de la Compagnie. C’est moche de bouder les enfants. Lorsque le Capitaine abandonné cherche à raisonner le Sergent, ce dernier a de plus la mesquinerie de tomber en poussière, suivi par 99% des Ultra Schtroumpfs. Seul reste ce bon vieux Pasanius, qui en guise d’adieu lui applique une petite imposition des mains sur le torse, mais seulement après avoir passé son membre augmétique au micro-ondes. Bref, ça brûle très fort pour notre pauvre Uriel, qui commence sérieusement à regretter sa consommation irraisonnée de Chupa Chups.

Lorsqu’il reprend ses esprits, le voilà sur Medrengard, et Idaeus a laissé la place à ce fieffé filou de Honsou. Réagissant comme un vrai serviteur de l’Empereur, notre héros commence par corriger bellement cette canaille à mains nues, qui se laisse faire sans protester. Sur le point de commettre l’irréparable avec la propre hache démoniaque de sa Némésis, Ventris réalise au dernier moment que ça pourrait être une mauvaise idée, et suspend son geste. S’engage alors un dialogue Batman vs Joker like entre Force Bleue et Force Jaune avec Rayures Noires, les deux adversaires se balançant des amabilités pendant quelques minutes jusqu’à ce qu’un nuage de poussière ne se profile à l’horizon, annonçant l’arrivée prochaine des War Boys d’Immortan Joe (sans doute le dernier film visionné par Ventris avant son opération), ce qui ne présage rien de bon pour notre héros. Qu’importe, ce dernier se tient prêt à faire face à son destin, et à mourir bravement au combat si nécessaire. Après un dernier « Witness meeeeeee ! » envoyé à Honsou, Uriel se fait pulvériser par l’artillerie montée sur les machines hurlantes qui convergent sur sa position. Fin de l’histoire.

Début spoilerOu en tout cas fin du rêve. De retour dans le cabinet du dentiste, nous assistons à un court dialogue entre l’Apothicaire Selenus et le Chapelain Clausel, alors que l’enveloppe corporelle de Ventris décède sur la table d’opération. Bien que le premier se félicite de la réussite de l’opération3, il prévient son interlocuteur que le plus délicat reste à venir, le Capitaine devant maintenant trouver la force de traverser ce fameux Rubicon4Fin spoiler

1 : Pour sa défense, l’Empereur lui-même n’avait rien prévu de spécial dans ce département pour ses Space Marines. Et pourtant, avec une salive acide, ils auraient eu grand besoin d’un émail renforcé à l’adamantium.
2 : Vert + bleu + jaune, franchement, c’est moche.
3 : « Ça a marché ? »
« Oui, il est mort. »
« GG. »
4 : Qui doit maintenant être encombré de Space Marines de toutes origines, au grand déplaisir de la faune locale et des touristes.

AVIS :

Ayant laissé tomber la saga d’Uriel Ventris il y a bien des années et après avoir seulement lu la première trilogie consacrée par McNeill à sa figure tutélaire dans le futur grimdark, j’avoue que la lecture de The Death of Uriel Ventris ne m’a pas touché plus que ça, mais peut aisément comprendre qu’un fan plus impliqué que votre serviteur ait une toute autre opinion du texte en question. Si l’auteur ne prend pas grand soin pour dissimuler la véritable nature de l’épreuve que le Capitaine traverse en filigrane de cette nouvelle (toutes les douleurs ressenties par ce dernier au fil des pages étant la conséquence de sa Primarisation douloureuse), enlevant donc un peu de suspense à cette dernière, il a au moins l’amabilité de terminer son propos sur un cliffhanger convenable, justifiant le titre donné à l’histoire. Même si je ne doute pas une seconde que notre héros finira par émerger du Rubicon – il doit y avoir un service de ferry pour les personnalités Space Marines, car elles sont vraiment peu nombreuses à s’y être noyées – comme les lois du marketing le demandent expressément, on peut au moins accorder à McNeill une utilisation appropriée de la formule « mort d’Uriel Ventris », ce dernier finissant la nouvelle dans un état minéral (c’est plus grave que le végétatif). À titre personnel, j’aurais apprécié que McNeill précise ou rappelle pourquoi le fier Capitaine a choisi/subi cette opération « risquée », à part pour suivre la dernière mode chez l’Astartes, bien entendu.

Pour le reste, le passage en revue de la carrière et des connaissances les plus marquantes de notre personnage, s’il est cinématiquement mis en scène par l’auteur, risque fort de diviser le lectorat entre ceux qui comprennent qui est qui et a fait quoi, et les autres. En d’autres termes, si vous découvrez Uriel Ventris par l’intermédiaire de cette nouvelle, je ne suis pas convaincu que l’expérience vous semble très intéressante (mais ce n’est que mon avis). En tous les cas, sachez que le personnage dispose d’ores et déjà d’une abondante biographie signée de la main de Graham McNeill, et que ce dernier ne l’ayant certes pas fait « mourir » pour rien, il est à parier que d’autres ouvrages ou nouvelles suivront. Dans le second cas, rendez-vous ici dans quelques temps pour un retour positivement objectif sur la suite des aventures de ce vieux Vent Triste.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

L’inclusion par ce vieux roué de McNeill d’une sorte de best of des péripéties héroïques d’Uriel Ventris depuis le début de sa carrière jusqu’à son opération de chirurgie esthétique (un peu ratée, il faut le reconnaître) vient sauver ‘La Mort d’Uriel Ventris‘ du sort réservé aux nouvelles « pour initiés » figurant au sommaire du Black Library Celebration 2023. Je ne suis pas sûr que l’effort ait été suffisant pour embarquer un néophyte dans cette ode à la gloire d’un des premiers héros Space Marines de la Black Library, mais la nouvelle reste assez accessible malgré tout. En même temps, les Ultramarines sont loin d’être aussi cryptiques que les Angels Penitent (c’est là leur moindre défaut).

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Contrairement à l’année précédente, la sélection 2023 est donc bien meilleure en version originale que dans la langue de Molière, ce qui est somme toute logique quand on compare la profondeur des catalogues. Du côté de la VO, il n’y a que la nouvelle de Justin D. Hill qui m’a semblée à la traîne d’un point de vue qualitatif, les autres textes choisis par la BL pour cette célébration remplissant bien leur rôle de produit d’appel pour leur franchise d’appartenance, et ce quelle que soit l’expérience du lecteur en matière de GW-Fiction. Le constat est moins heureux pour la VF, qui hérite d’histoires à mon avis impropres à ce type de publication exclusivement « grand public », car très difficiles à pleinement apprécier sans avoir une bonne connaissance des arcs narratifs (comprenant plusieurs milliers de pages pour ‘Les Fantômes de Gaunt‘ et ‘Les Chroniques d’Uriel Ventris‘) dans lesquels elles s’insèrent. Je salue toutefois l’inclusion du ‘Sauvage‘ de Guy Haley, qui vient montrer qu’il n’y a pas que la guerre dans les ténèbres du lointain futur (il y a des gâteaux aussi), et dans la GW-Fiction non plus, par conséquent. Rendez-vous très prochainement pour le deuxième volet de la Black Library Celebration 2023, j’ai nommé la Black Library Celebration Week !

ONLY WAR [40K]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue d’Only War, anthologie 40K publiée par la Black Library en Novembre 20221, et comportant pas moins de 24 nouvelles. Les nostalgiques et les spécialistes de la GW-Fiction auront identifié la référence faite à un précédent omnibus de courts formats se déroulant dans les ténèbres d’un lointain futur (et encore plus volumineux), ‘There Is Only War’ (2013). Rendez-vous en 2031 pour vérifier si la BL poursuit sa logique avec la sortie de ‘War’

Pensé comme une somme des nouvelles du 41ème millénaire publiées pour la première fois entre 2019 et maintenant (il y a deux inédits au sommaire) mais n’ayant jamais bénéficié d’une inclusion dans un recueil à proprement parler, ‘Only War’ est découpé en cinq sections principales, chacune dédiée à une faction, ou un regroupement de factions. A ce petit jeu, c’est clairement la Garde Impériale qui s’en sort le mieux, puisque les braves bidasses bénéficient à la fois de leur propre section (Hammer of the Emperor), du plus fort contingent de nouvelles (7), et des deux inédits précédemment signalés. The Emperor does provide, on dirait. L’Ecclésiarchie est également bien traitée, avec quatre nouvelles regroupées dans le chapitre Keepers of the Faith.

Les autres sections sont beaucoup moins homogènes, puisque toutes les races Xenos2 sont réunies dans The Alien Menace, les Space Marines et les Space Marines du Chaos doivent subir l’outrage littéraire de partager la section Angels of Death, et les nouvelles racontées d’un point de vue impérial mais ne rentrant pas dans les cases précédentes (Adeptus Mechanicus, Aeronautica Imperialis, Libres Marchands) se retrouvent dans le chapitre « pot pourri de Pépé », Servants of the Throne.

Only War

Du côté des contributeurs, on en dénombre pas moins de 21, dont certains nous soumettant ici leur toute première histoire (Adrian Southin, Maria Haskins, Cameron Johnston). On retrouve aussi des vétérans blanchis sous le harnais, à l’instar de Graham McNeill, Guy Haley, Steve Lyons et John French. Pour être tout à fait complet, précisons que les trois « doublonnants » sont Danie Ware, Marc Collins et Justin Woolley.

Les présentations étant faites et le décor posé, il est temps de partir à la découverte des histoires de ‘Only War’, en espérant que la qualité n’a pas été la première victime de ce conflit total…

1 : Pour les amateurs d’Age of Sigmar, je précise que cette sortie s’est accompagnée de celle de l’anthologie ‘Conquest Unbound’, regroupant 21 nouvelles fresh from les Royaumes Mortels, et critiquée ici.
2 : « Toutes » ne veut pas dire que chacune des factions Xenos bénéficie de sa nouvelle, mais seulement que cette section contient les nouvelles racontées d’un point de vue Xenos. Si vous êtes fans des Orks, des Eldars des Vaisseaux Monde et des T’au, c’est votre jour de chance. Pour les autres, il faudra repasser…

Only War

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The Taste of Fire – S. B. Fischer :

INTRIGUE:

Retour sur Ourea, où nous retrouvons la Lieutenant Glavia Aerand toujours bien occupée par la purge des hérétiques qui hantent les cimes gelées de cette planète montagneuse. Bien que son régiment du 900ème Cadien ait vaincu le gros des forces ennemies lors d’une bataille rangée il y a quelques mois, l’issue n’a pas été assez décisive pour terminer la campagne une fois pour toutes. Depuis, Aerand et sa Compagnie passent le plus clair de leur temps à faire du trek dans le froid, la neige et une ambiance aussi pesante que la gravité d’Ourea, cherchant à mettre la moufle énergétique sur les cultistes survivants. Au commencement de la nouvelle, l’intrépide Lieutenant commande une attaque sur un réseau de souterrains où l’insaisissable ennemi serait peut-être barricadé, mais le trouve déserté, une fois encore. Seuls quelques cadavres de civils affamés et scarifiés sont débusqués par les Cadiens, ce qui n’aide pas le moral à remonter beaucoup plus haut que leurs chaussettes trempées. Un des corps trouvés par les Gardes conserve toutefois une étincelle de vie, et même un peu plus, comme le Medic de la Compagnie, Argos, manque de l’expérimenter. Seule la prémonition ressentie par Aerand une seconde avant que le quasi-macchabée ne vomisse un torrent de flammes bleues sur le toubib empêche ce dernier d’aller rejoindre l’Empereur. Car oui, notre héroïne est une Psyker en puissance, ce qui n’a pas l’air de choquer outre mesure ses soldats. C’est vrai qu’avoir un chef qui vous donne une sauvegarde invulnérable à 2+ est pratique quand on a qu’un PV et une veste flak pour le défendre…

Ramené à la base cadienne pour être interrogé, le civil piégé décède peu de temps après sans avoir révélé ses secrets, ou en tout cas, pas de vive voix. Entrent alors en scène le Psyker Primaris Kellipso et ses boules de Baoding, qui vont être amenés à jouer un rôle crucial par la suite. Bien que personne ne l’aime du fait de sa drôle de tête, ses regards insistants (car oui, Kellipso a des yeux fonctionnels, ce qui est assez rare pour un Psyker de la Garde Impériale… #FluffAlert) et sa manie de faire tourner ses bouboules à tout bout de champ, Keke fait le job comme le grand professionnel qu’il est. Il commence par siphonner le cerveau de l’homme chalumeau, et y trouve la localisation d’un temple où tous les cultistes d’Ourea se sont donnés rendez-vous pour cultister en secret. C’est suffisant pour que le Général Rusk ordonne à Aerand et sa Compagnie de repartir user leurs godillots pour débusquer les hostiles, malgré la journée bien remplie qu’ils ont déjà eue.

A leur arrivée devant le temple, les Cadiens ne seraient pas contre une bonne nuit de sommeil avant de lancer l’assaut, mais Kellipso a la certitude qu’il faut attaquer sans tarder, et comme les radios des bidasses ne fonctionnent bizarrement plus, il prend sur lui d’aller posséder un des aides de Rusk pour obtenir son go de quasi-visu. Cela n’est cependant pas assez pour la méfiante Aerand, qui a eu une vision de toute sa Compagnie morte, avec Kellipso planté au milieu des corps des Cadiens. Quand on connaît l’amour de ces derniers pour la station verticale1, on comprend que cette prémonition ne passe pas du côté de la Lieutenant. Elle convainc alors ses officiers d’aller régler son compte au potentiel traître, mais les conspirateurs se font démasquer et mettre hors d’état de nuire par le très balèze Calypso. Le Psyker utilise ensuite le pouvoir « VAR mental » pour repasser au ralenti et en gros plan sa vision à Aerand, qui s’aperçoit que Kellipso avait l’air triste. Donc ça ne peut pas être lui le responsable de ce massacre, pas vrai ? PAS VRAI ?

On rigole, mais ça fait l’affaire pour Aerand et le reste de la fine équipe, qui donnent enfin l’assaut du temple, protégés par le sort d’invisibilité (ou quelque chose s’approchant) que Kellipso lance sur eux pendant la phase d’approche. Le combat s’engage, et les Cadiens accompagnent le Psyker Primaris jusqu’à la salle où se trouve le cœur du réacteur, ou plutôt ses cerveaux. Les cultistes ont en effet bricolé une centrale Warp alimentée par le potentiel psychique d’une dizaine de prisonniers branchés par le cortex à un vortex bleuâtre tournoyant. Qui ne sert à rien qu’à éclairer le décor, cela dit en passant. La mise en scène fait toutefois forte impression sur Kellipso, qui manque de se prendre une balle en plein front pour sa peine, et est sauvé par une nouvelle prémonition d’Aerand. Il lui rend la pareille lorsqu’une marée de cultistes se jette sur les loyalistes depuis les coulisses, et manque de les submerger sous le nombre. Kellipso utilise ainsi le pouvoir « Couché !! » sur ses camarades, ce qui lui permet d’utiliser ses boules à fragmentation (un autre cool trick de Psyker) sans risquer de blesser ses alliés. Et qui explique mieux la vision d’Aerand : sa Compagnie n’était pas morte, elle était allongée sur le sol. Mind. B.L.O.W.N. Cet enchaînement draine toutefois dans les réserves de Kellipso, qui est bien heureux qu’Aerand et ses hommes se relèvent pour aller sauvagement débrancher les batteries psychiques de l’installation pirate avant qu’il ait une mauvaise idée, comme succomber au Chaos (ça peut arriver à tout le monde).

La nouvelle se termine avec le souhait exprimé par l’intègre Aerand d’aller se livrer à l’Inquisition, comme tout bon Psyker non sanctionné mais aimant son Empereur devrait le faire. Mieux vaut tard que jamais pas vrai ? Eh bien, ça ne se fera pas au final, car ce filou de Kellipso lui assène qu’elle serait plus utile à Pépé en guidant sa Compagnie sur le front plutôt qu’en partant en croisière sur un Vaisseau Noir. Et qu’il gardera un œil sur elle pour superviser son apprentissage du côté obscur de la Force de ses capacités psychiques. Que fait la lore police ?

1 : Après tout, c’est eux qui passent leur temps à hurler ‘Cadia stands’ à tout bout de champ.

AVIS:

Ce n’est pas la meilleure nouvelle « Garde Impériale » qui soit que Steven Fischer signe avec ‘The Taste of Fire’, suite du tout aussi oubliable ‘The Weight of Silver’. Beaucoup de personnages très peu charismatiques, de l’action très classique, une intrigue simple et sans enjeu ni tension (très franchement, on se fiche bien de savoir si Aerand et sa clique survivront à l’affrontement)… on trouve beaucoup mieux chez la concurrence, malheureusement1. Le clou dans le cercueil de cette nouvelle est la liberté que Fischer prend avec le background, et qui donne la singulière impression que l’auteur a pris la plume après avoir examiné la figurine du Psyker Primaris2 pendant cinq secondes, et lu les trois premières pages du Codex Garde Impériale. Pas suffisant pour sauver les palpitambolesques aventures de la Lieutenant Glavia Aerand3, j’en ai peur.

1 : Je recommande bien évidemment les ‘Fantômes de Gaunt’ de Dan Abnett, et plus proche de nous, les travaux de Rachel Harrison.
2 : Qui, pour sa défense, semble bien avoir des yeux fonctionnels.
3 : Qui se poursuivent dans le roman ‘Witchbringer’, que Glavia commence comme Psyker sanctionnée de la Garde Impériale, ce qui fait de ‘The Taste of Fire’ son prologue. Mais comme la BL ne s’est pas donnée la peine de préciser le lien entre la nouvelle et le roman dans ‘Only War’, il revenait au lecteur de faire la connection…

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Refuge – S. Lyons :

INTRIGUE:

Si de l’avis général, les Mordians ont un look très rigolo, les soldats qui forment la Garde de Fer ne le sont, eux, pas du tout. Ils compensent ce gros défaut par une discipline, une dévotion et une ponctualité exemplaires, ce qui en fait le choix de troupes rêvé pour mener des opérations peu glamour mais nécessaires au bon fonctionnement de cette grande machine bien huilée qu’est l’Imperium. C’est ainsi que le soldat Lucius Myer et sa section sont envoyés purger un repaire de vils mutants dans les ténèbres d’un monde ruche quelconque (mais qui rappel à ce sentimental de Lucius sa chère patrie). Les Mordians sont accompagnés par des auxiliaires qui font grincer les dents de plus d’un Garde de Fer, une escouade de Psykers assermentés (les Wyrdvanes) même pas fichus de marcher en cadence, et irrémédiablement souillés par le grand méchant Warp. Leur présence est toutefois salutaire, d’abord pour localiser le camp où se terre le fourbe ennemi, puis pour déjouer ses tout aussi fourbes manigances.

Les Mordians ont en effet été mis sur une mission délicate : l’évacuation et la « valorisation » d’un camp de Psykers clandestins. Il est donc attendu d’eux qu’ils n’exécutent pas froidement tous les rebuts humains qui auront le malheur de leur passer devant la casquette, mais fassent au contraire preuve de retenue si les mutants choisissent de se rendre sans faire d’esclandre. Un briefing complexe pour Lucius et ses compères, qui ont la détestation du Psyker chevillée au corps, mais auquel notre héros tentera de se tenir du mieux qu’il peut. Lulu est en fait plutôt tolérant pour un Mordian, puisqu’il a un jour pris la défense des Navigateurs dans une discussion avec des camarades de régiments, les appelant un « mal nécessaire pour l’Imperium » (les Navigateurs, pas ses camarades, bien sûr). Ça fait de lui un horrible woke aux yeux de son entourage, je suis sûr.

L’affrontement s’engage et à la puissance de feu et l’implacable avance des Mordians s’opposent les tours pendables de leurs adversaires, qui peuvent se dissimuler aux yeux des Gardes de Fer, les griller avec des éclairs, ou encore se protéger derrière des boucliers kinétiques. Et je ne vous parle même pas de leur manie de faire disparaître des pièces en soufflant sur leur main, ou de faire apparaître des cartes derrière l’oreille des Mordians. Quel enfer. Lucius ne s’en sort pas trop mal grâce aux barrières mentales qu’il a réussi à édifier, mais il se rend également compte que les Wyrdvanes sont les hommes et femmes du match et de très loin, grâce à leurs propres pouvoirs, impies certes mais très pratiques.

La bataille étant sur le point d’être remportée par les impériaux, Lucius est réquisitionné par le Sergent Schtiel pour l’accompagner dans la fouille des bungalows crasseux occupés par les Psykers. Il tombe rapidement sur un jeune garçon, qui s’enfuit dans les profondeurs à l’arrivée des Mordians, et auquel il donne logiquement la chasse, conformément aux ordres. Le gamin n’est cependant pas un Psyker lambda, comme le troisième œil qu’il porte sur le front le laisse apparaître. Conformément à sa position établie plus haut de héraut (mordian) de la diversité et de l’inclusion, Lucius donne toutes les chances au galopin de coopérer avec lui pour préserver son intégrité physique, mais la petite fripouille ne joue pas le jeu, et finit par lui jeter un regard si malaisant que notre héros n’a guère d’autre choix que de le tabasser à grands coups de crosse de fusil pour lui apprendre à respecter l’uniforme (surtout quand il a des boutons dorés). Il épargne cependant la vie du baby Navigateur et le ramène avec lui à la surface, contribuant de façon significative à la réussite de la mission.

La nouvelle se termine sur un plan des Mordians (à l’heure comme toujours) en train d’attendre dans le spatioport l’arrivée de leur navette (en retard comme à chaque fois). Cet ennuyeux délai permet toutefois à Lucius de voir les Vaisseaux Noirs collecter leur butin humain, une vision qui renforce son dégoût et sa haine pour les Psykers en général. C’est donc un happy end incontestable, si vous êtes un Mordian, bien sûr.

AVIS:

Steve Lyons est une valeur sûre pour tout ce qui touche au Death Korps de Krieg, mais il n’est pas aussi à l’aise dès lors qu’il aborde d’autres régiments fameux de la Garde Impériale. Cette histoire de Mordians ne restera ainsi pas dans les annales du genre : malgré une teneur en grimdark appréciable (un Garde Impérial hyper-conditionné qui bastonne presque jusqu’à la mort un pauvre gosse qui cherchait juste à vivre tranquille), il n’y a pas grand-chose ici qui retiendra le troisième œil et l’attention du vétéran de la BL. On est toujours content de voir ces bons vieux Gardes de Fer et leurs uniformes impeccablement repassés reprendre du service dans la GW-Fiction – il n’y en a souvent que pour les Cadiens et les Catachan – mais ce n’est pas ‘Refuge1 qui vous donnera l’envie irrépressible de claquer votre PEL pour acheter 2.000 points de porteurs de képi.

On peut aussi souligner quelques bizarreries notables, à la fois au niveau de l’intrigue (on a l’impression pendant le combat contre les Psykers que Lucius dispose lui aussi de pouvoirs, qui lui permettent d’être le seul à détecter un ennemi caché, mais cette piste est tout de suite abandonnée par Lyons) et du background (il est indiqué de façon assez claire que Mordian a été perdue au Chaos, comme Cadia, ce qui n’est à ma connaissance pas le cas dans le fluff). Rien de rédhibitoire, mais Lyons nous a habitué à mieux, et plus intéressant.

1 : Fun fact, l’autre nouvelle consacrée par Steve Lyons aux Mordians à un nom similaire à celle-ci, puisque ‘Solace’ en anglais signifie ‘réconfort’.

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Redemption Through Sacrifice – J. Woolley :

INTRIGUE:

Redemption Through SacrificeLe régiment de Légionnaires Pénaux des Meat Dogs est envoyé à la surface de la planète de Vandicius pour assister ses défenseurs dans la purge d’un culte hérétique s’étant répandu comme une trainée de poudre parmi sa populace. Nous suivons Marcus van Veenan, ancien Garde Impérial au sein du 51ème Talissian, alors qu’il tente de survivre à cette nouvelle affectation. Armé seulement d’une batterie de fusil laser (il n’y avait pas assez d’armes pour tout le monde), il permet cependant à son bataillon de résister à une charge de cultistes en leur apprenant l’astuce du tir sur trois rangs, ce qui permet aux Légionnaires de tenir la ligne et à l’Inquisitrice Mariette Nikova, qui a pris sur elle d’encadrer ces rebuts, d’identifier formellement la petite silhouette de l’homme responsable de tous les maux de Vandicius : Scaramouche Cal Corditus. Ni une ni deux, Nikova réquisitionne le bataillon de van Veenan, collant au passage un bolt dans la tête du Lieutenant techniquement en charge de ce dernier, et peu chaud pour partir en balade derrière les lignes ennemies, et élève notre héros au grade de Sergent en reconnaissance de sa valeur au combat.

La sortie des Meat Dogs ne se passe pas franchement bien, même en considérant la durée de vie très limitée d’un Légionnaire Pénal. Lorsqu’ils finissent enfin par atteindre le bout de la rue qu’a emprunté Cal Corditus pour retourner vers son QG, van Veenan et Nikova sont les seuls survivants de leur peloton. Cela ne décourage pas pour autant l’Inquisitrice de poursuivre sa proie, et comme van Veenan n’est pas vraiment en mesure de refuser de l’accompagner, la paire s’enfonce plus profondément en territoire inconnu et hostile. Il ne leur faut pas longtemps avant de se faire embusquer par Corditus et ses sbires cependant, le grand méchant de l’histoire étant un Psyker ayant tiré l’aptitude « Maître du Scénario » sur sa table de compétences en début de partie. Nikova se fait honteusement capturer par sa Némésis, tandis que van Veenan parvient à échapper à ce sort funeste en tentant et réussissant un saut de l’ange en mode Assassin Creed (la charrette de foin étant remplacée ici par un tas d’ordures).

Nous prenons d’abord des nouvelles de l’Inquisitrice, qui traque Corditus depuis trente ans car elle n’a pas supporté que cet ancien collègue passe au Chaos. La mobilité professionnelle est toujours un sujet délicat, c’est vrai. Après avoir prononcé pour le lolz son jugement de l’hérétique, elle s’attend à être exécutée par ce dernier, mais il se trouve que l’Ami Cordi a d’autres projets pour elle. Fort occupé à invoquer des Chiens de Khorne (à raison d’un par demi-heure, les défenseurs impériaux ont le temps de voir venir), il annonce à l’Inquisitrice qu’elle aura la chance d’assister aux premières loges à la création de son empire chaotique, Corditus voulant avoir le plaisir et la satisfaction de briser la résolution de sa prisonnière, qui avant de prendre rosette, était une Sœur de Bataille (donc double effet kiss cool s’il arrive à ses fins). Chacun ses fantasmes, j’imagine.

De son côté, van Veenan, une fois remis de ses émotions, décide d’aller secourir sa coéquipière et se dirige donc vers le mausolée où elle lui a dit que Corditus se terrait quelques minutes plus tôt. Le dieu du matos finit enfin par lui sourire, puisqu’en chemin il tombe sur un groupe de cultistes couvant une caisse de grenades krak (c’est moche la folie tout de même). Après avoir réglé leur compte aux faquins, il poursuit sa route avec suffisamment d’explosifs pour démolir le Palais Impérial, équipement qui lui sera fort utile par la suite comme vous pouvez vous en douter. Au terme d’un raid promptement et proprement mené sur le QG adverse1, van Veenan parvient à délivrer Nikova et à s’enfuir avec elle… mais seulement sur deux cents mètres. La belle, la traîtresse, se prend en effet un tir de laser fatal dans le bas du dos, et ordonne à son sous-fifre de porter un message codé à un autre Inquisiteur (Gorton), pendant qu’elle agonise tranquillement à l’arrière-plan. Bien brave, le Légionnaire accepte de se muer en messager, et parvient miraculeusement à rejoindre les lignes impériales, et tout aussi miraculeusement (il avait pris un bain de sang pour s’infiltrer parmi les groupies de Corditus) à ne pas se faire abattre à vue par ses camarades. Troisième coup de chance d’affilée, Gorton était justement en train d’attendre à proximité, et à l’écoute de la phrase codée de Nikova, il a une réaction sans appel…

Début spoiler…Il renvoie van Veenan au vestiaire, ce qui désole un peu ce dernier il faut dire, car il s’attendait à une remise de peine pour services rendus. Mais c’est toujours mieux que le sort réservé aux autres Légionnaires Pénaux, que Gorton fait exécuter par ses acolytes. La raison ? Ils ont été témoins de l’arrivée d’une escouade de Chevaliers Gris, chargée de mettre Cal Corditus hors d’état de nuire maintenant que l’Inquisition a la certitude que l’hérétique se trouve à proximité. C’était le sens caché du message de Nikova, et les règles étant les règles, l’existence de ces super Space Marines doit rester secrète. Dura lex, sed lex…Fin spoiler   

1 : Et Cal Corditus, me demanderez-vous ? Eh bien il se contente de gueuler psychiquement +Il est arrivé !+ à ses sbires, et repart aussi sec apprendre à ses toutous de Khorne à lui rapporter son journal, ou quelque chose comme ça.

AVIS:

Maintenant que l’on a plus Gav Thorpe pour nous apporter de temps à autres des nouvelles (héhé) de Légionnaires Pénaux, ce sous-genre est en voie d’extinction littéraire. On peut donc remercier Justin Woolley de ses bons offices avec ce classique mais appréciable ‘Redemption Through Sacrifice’, qui donne un bon aperçu de la (courte et violente) vie de ces soldats impériaux hauts en couleurs. Bien que van Veenan n’ait pas la gouaille d’un Kage, il s’avère être un protagoniste tout à fait correct, et la petite aventure déroulée par Woolley répond également aux attentes que l’on peut placer sur une nouvelle d’action de la Black Library, conclusion grimdark en prime (en même temps, une histoire de Légionnaires Pénaux qui ne se finit pas mal constituerait un crime de lèse-fluff). J’ai juste un peu tiqué sur quelques détails mineurs, comme le fait que Cal Corditus soit un Psyker de Khorne, mais rien qui ne vienne irrémédiablement gâcher la lecture. On en viendrait à souhaiter que Justin Woolley se réengage dans la Légion.

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The Price of Duty – M. Smith :

INTRIGUE:

The Price of DutyLa première mission du Commissaire junior Jasper Nevin, fraîchement diplômé de la Schola Progenium et envoyé encadrer le 64ème Catachan sur le monde forestier de Verdine II, se passe assez mal pour notre héros. Outre le fait qu’il n’est pas parvenu à se faire accepter par ses soldats, dont la réticence à se plier aux injonctions de l’Officio Prefectus est bien connue, Nevin se trouve confronté à une opposition féroce de la part des insurgés locaux, bien mieux armés et équipés qu’une bande de bûcherons énervés n’a le droit de l’hêtre. La nouvelle commence d’ailleurs par une fusillade tendue à l’ombre des coloshênes qui recouvrent une bonne partie de la planète, à laquelle Nevin survit miraculeusement grâce à l’arrivée providentielle de la Capitaine Rosario ‘Viper’ Vargass et de son escouade de commandement. En inspectant les corps des insurgés, les deux officiers constatent que ces derniers sont armés de fusils laser flambant neufs, alors que les Catachan doivent combattre avec des pétoires reconditionnées et affectées par de gros problèmes de batterie. Saleté d’obsolescence programmée.

De retour au camp de base, Nevin obtient une audience auprès du Seigneur Commissaire Albrec Stone afin de lui partager sa découverte, pendant que Viper se fait refouler à l’entrée du QG par les Scions Tempestus qui en gardent l’accès. Stone n’est en effet pas un grand fan de l’esprit frondeur des Catachan, et les tient à distance dès qu’il en a la possibilité, les soupçonnant de vouloir attenter à sa précieuse vie. Malgré le rapport inquiétant de son subalterne et ex-étudiant, le Seigneur Commissaire semble prendre la nouvelle à la légère, et donne des instructions strictes pour que le matériel récupéré sur les rebelles soit mis sous clé, au lieu d’être distribué aux Gardes qui en auraient pourtant bien besoin.

Un peu plus tard, Nevin et Viper se rencontrent à nouveau, et la Capitaine emmène le Commissaire dans l’armurerie régimentaire, tenue par un vétéran grisonnant et bedonnant (Bron Hader). Hader explique à ses visiteurs que les fusils laser des Verdinites ont toutes les chances d’être ceux qu’il a commandé au Munitorum il y a quelques mois, et qui se sont perdus en chemin. Aucun convoi d’approvisionnement n’ayant été capturé par l’ennemi durant la campagne, cela ne peut signifier qu’une chose : quelqu’un de haut placé a couvert le trafic des fusils en question, et les soupçons de Viper se portent naturellement sur les deux officiers auxquels elle ne fait absolument pas confiance : Nevin et Stone. Le baby Commissaire jurant son grand Empereur qu’il n’y est pour rien, cela ne laisse plus qu’un suspect à confondre, mais la tâche ne sera pas aisée. Dans l’espoir que le Seigneur Commissaire ait dissimulé des preuves incriminantes dans un tiroir, Nevin profite des quelques minutes consacrées par son supérieur à déguster son bol de Nesquik matinal pour s’introduire dans son bureau et feuilleter les montagnes de paperasse dont Stone aime à s’entourer…

Début spoiler…Et cette recherche frénétique porte ses fruits. Un tiroir à double fond révèle en effet un classeur contenant, entre autres preuves de népotisme accablantes, le fameux bon de réception des fusils Catachan, signé de la main de Stone. Nevin a toutefois trop tardé et se fait pincer par le Seigneur Commissaire avant qu’il n’ait pu sortir du bureau. Tenu en joue par son supérieur, il n’a d’autre choix qu’écouter ce dernier lui raconter sa version de l’histoire : pour Stone, il s’agissait simplement d’aider un haut gradé de la Garde Impériale à préparer sa retraite prochaine en couvrant un lucratif détournement de matériel militaire. En échange, Stone bénéficierait d’une nouvelle affectation dans un régiment plus civilisé, et serait prêt à prendre Nevin avec lui, si le jeune Commissaire accepte de marcher dans la combine, bien sûr. Bien que les principes moraux de Nevin lui fassent condamner ces pratiques, Stone achève de le convaincre en lui révélant qu’il a dû une de ses plus fameuses victoires à un achat sous le manteau d’armes à plasma pour équiper ses soldats, opposés à des Space Marines chaotiques peu impressionnés par les fusils laser et lance-flammes que le Munitorum avait attribué au régiment. Stone remet d’ailleurs un des pistolets à plasma qu’il avait utilisé lors de cette campagne à son protégé, en guise de petit cadeau d’adieu.

Lorsque les rebelles lancent une attaque du camp retranché des Catachan à la nuit tombée, Nevin et Viper se retrouvent en première ligne, position peu confortable s’il en est, surtout quand l’ennemi est bien mieux armé que vous. Débordés par les assaillants, secondés par des Ogryns équipés de tronçonneuses géantes et dont le cuir épais les immunise aux décharges faiblardes de leurs fusils, les Gardes sont forcés au repli et contraints de se battre au couteau. Nevin dispose quant à lui de son nouveau joujou à plasma, qui s’il ne lui explose pas à la tête, surchauffe cependant suffisamment pour finir collé à sa main, ce qui n’est jamais agréable. Au moment où tout semble perdu, Stone et ses Scions finissent par arriver pour prendre l’ennemi à revers et le mettre en fuite. Cette intervention décisive sera-t-elle suffisante pour que Nevin tienne sa langue ?

Début spoiler 2…Eh bien non. Echauffé (et brûlé au troisième degré) par ce qu’il vient de vivre, le Commissaire expose les manigances de son supérieur devant témoins. Cependant, Stone n’est pas né de la dernière pluie, et a pris soin de maquiller toutes les preuves qui l’incriminaient pour qu’elles désignent désormais Nevin. Même le pistolet plasma qu’il lui a remis quelques heures plus tôt semble accréditer la thèse d’une complicité dans un trafic d’armes. On en revient donc à du parole contre parole, et à ce petit jeu, il est bon d’avoir une dizaine de Catachan sans scrupules en back up, comme Nevin le découvre bientôt. Convaincue de l’intégrité de ce dernier, Viper ordonne en effet à ses hommes de tomber sur le râble des Scions, laissant Nevin libre de faire un gros trou dans la poitrine de son mentor dévoyé. Justice a été rendue.Fin spoiler 

AVIS:

Une nouvelle mettant en scène un Commissaire et un régiment de Catachan, et dans laquelle se pose la question de la façon d’accomplir son devoir, surtout dans des conditions difficiles ? C’est ‘Emperor’s Grace’ qui bénéficie d’un reboot ! Je ne sais pas si Matt Smith avait en tête cette référence au moment d’écrire ‘The Price of Duty’, mais sa soumission est sensiblement du même niveau que celle de son grand aîné Alex Hammond, c’est-à-dire assez moyenne. Desservie par des personnages quelconques et très peu attachants, ainsi que par un rythme très pépère (malgré un généreux recours à des scènes d’action), l’intrigue de cette nouvelle ne captive jamais le lecteur. Je regrette également le choix de Smith de ne pas avoir terminé son propos avec une vraie conclusion grimdark, et d’avoir au contraire fait « triompher la justice », ce qui peut s’apparenter à une faute de goût pour de la GW-Fiction. Bref, ce n’est pas la bleusaille Jasper Nevin qui viendra contester la casquette de Commissaire le plus badass de la galaxie à ce vieux Sebastian Yarrick (quel que soit l’état dans lequel il se trouve), c’est moi qui vous le dit !

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Anarchy’s End – R. J. Hayes :

INTRIGUE:

Anarchy's EndLa vie n’est pas facile pour Vi Madine, servante à tout faire à bord du Baneblade Anarchy’s End. Outre le fait que ses conditions de travail soient ingrates, pour dire le moins, et que ses collègues d’habitacle la considèrent très peu, malgré la foule de service qu’elle leur rend, il lui faut également composer avec le caractère acariâtre de l’esprit de la machine dans laquelle elle évolue. Anna (appelons la comme ça, car oui, c’est une lay-dee) tient en effet plus de Tatie Danielle que de Mamie Nova, et multiplie les coups fourrés à l’encontre des petits humains, tellement fragiles…, qui tentent tant bien que mal de la faire servir l’Imperium. Pour Vi, qui est la plus ancienne des opérateurs du super lourd, et tient un registre de tous les membres d’équipage morts en service (21 au total au début de la nouvelle), il s’agit simplement d’éviter de contrarier la vieille dame en oubliant de réciter les bons rites au bon moment. Pour les autres servants d’Anna, qui considèrent le tank comme… un tank, la leçon sera autrement plus rude, et la plupart du temps, définitive. L’histoire s’ouvre ainsi en même temps que la boîte crânienne du loader Jacob Waynee, victime d’un décrochage malheureux de plaque de blindage. Ce sont des choses qui arrivent… mais un peu trop souvent à bord de l’Anarchy’s End.

Il n’y a cependant pas de temps à consacrer à ce tragique incident, la bataille contre les hordes tyranides faisant rage à l’extérieur, et notre malicieux Baneblade ayant été chargé d’une mission vitale : localiser et éliminer le Prince dirigeant l’essaim. Bien que la majorité des bio-formes adverses soient trop chétives pour inquiéter Anna, il ne se passe guère cinq minutes sans qu’un Carnifex enthousiaste vienne offrir une valse à la vieille dame, réduisant drastiquement les capacités de l’équipage à rechercher sa proie. Pour ne rien arranger, Vi surprend un échange totalement séditieux entre l’opérateur Gee et un autre servant, annonçant une mutinerie prochaine dirigée envers le Lieutenant Hamad. Ayant compris qu’il avait été entendu, Gee essaie de réduire Vi au silence, mais par un curieux enchainement d’événements, se retrouve enfermé dans sa tourelle et incinéré par un court-circuit qui transforme cette dernière en brasier. Pour Vi, il ne fait aucun doute que c’est l’esprit de la machine qui est intervenu pour punir le factieux, et sauver sa vie par la même occasion. Il lui faut cependant alerter Hamad qu’au moins un autre membre d’équipage est un traître en puissance, et ce alors que le Baneblade essuie une pluie de plasma et une tempête de griffes chitineuses. Pas sûr que l’assurance prenne tout en charge.

Ayant renoncé à utiliser la radio pour passer son message (personne ne l’écoute de toute façon), Vi finit par arriver jusqu’au poste de commandement, après avoir vu ou entendu périr dans d’horribles souffrances une bonne moitié de ses camarades, victimes de l’arsenal peu ragoutant des Tyranides. En plus du Lieutenant Hamad, elle y retrouve l’officier tactique Makin (qui s’avère être le traître) et le canonnier Beadle. Makin a totalement perdu son sang froid et menace Hamad avec son pistolet laser, demandant à ce que le Baneblade abandonne sa mission suicide et batte en retraite. Lorsque Vi cherche à maîtriser le forcené, un tir perdu ricoche dans l’habitacle jusqu’à atteindre le pauvre Beadle (qui n’avait rien demandé), pendant que Hamad parvient à coller un bolt dans la tête du mutin pour lui apprendre à respecter la chaîne de commandement. L’ordre rétabli (ce qui est la moindre des choses pour un tank qui s’appelle Anarchy’s End, tout de même) à bord et sa cible finalement localisée, le super lourd semble être en bonne position pour mener sa mission à bout… mais perd 60% de son équipage en l’espace de trente secondes (la pilote se prend un tir de canon venin dans le buffet, Beadle finit par se vider de son sang, et Hamad est pris en stop par une harpie alors qu’il cherchait à localiser le Prince de visu). Ne restent plus que Vi et l’adepte Verman, trop occupée à poser des sparadraps en soute pour être d’une quelconque utilité dans la réalisation du tir fatidique….

Début spoiler…C’est alors qu’un nouveau miracle se produit, Vi assistant depuis la tourelle qu’elle défend contre les assauts des cafards de l’espace au one shot du Prince Tyranide. Un nouveau fait d’arme à mettre directement au crédit d’Anna, qui détestait les insectes encore plus que les humains, comme la plupart des vieilles dames il faut dire. La mort du cancrelat en chef désorganise ses troupes et permet aux forces impériales de remporter la bataille, en plus d’offrir à Vi et à Verman une pause bien méritée hors de l’épave du Banebalde (dont le cœur a lâché, et c’est bien triste mais c’est logique à son âge…). Ainsi va la Vi à bord du Redoutable de l’Anarchy’s EndFin spoiler

AVIS:

Avec ma sale manie de ne pas lire les nouvelles dans leur ordre de sortie, j’avais commencé par me dire que cet ‘Anarchy’s End’ ressemblait très fortement à l’Imperator Gladio’ de Richard Strachan (Destination Finale à bord d’un Baneblade, pour faire court). Il s’avère que l’inverse est plus exact, l’histoire de Hayes étant sortie initialement avant celle de son comparse de la BL (dans le recueil ‘The Accursed’, datant de 2021). Le procès en plagiarisme étant annulé, que peut-on dire sur la deuxième nouvelle proposée par Rob J. Hayes pour la Black Library ?

Eh bien, on peut commencer en notant qu’elle est sensiblement supérieure à ses débuts (‘No Quarter’), ce qui est franchement appréciable. On retrouve dans ces quelques pages l’ambiance poisseuse, violente, désespérée et nihiliste – en un mot, grimdark – qui faisait cruellement défaut à ‘No Quarter’, et même si on comprend assez vite où l’auteur veut nous emmener en termes d’intrigue et de conclusion, le résultat final est loin d’être honteux. L’idée de Hayes de transposer ‘Christine’ de Stephen King aux riants champs de bataille du 41ème millénaire est bonne, et vient apporter une touche de suspens et de mystère bienvenus au sous-genre de « la nouvelle Garde Impériale », beaucoup plus prosaïque dans son approche en règle générale (« pan pan t’es mort et moi aussi d’ailleurs »). Encourageant.

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The Jagged Edge – M. Haskins :

INTRIGUE:

The Jagged EdgeLes retrouvailles familiales entre le Sergent Aurelia Shale et sa sœur aînée, Theodora, ne se passent pas comme la première l’aurait souhaité. Pour commencer, Theodora est devenue une Commissaire inflexible pendant les dix ans qui se sont écoulés depuis que les sœurs ont été séparées après la mort de leurs parents, et n’hésite pas à coller des taloches à sa cadette lorsque cette dernière fait mine de questionner les ordres. Deuxièmement, les circonstances ne sont pas favorables à de grands épanchements, l’escouade d’Aurelia étant chargée d’accompagner Theodora et le Capitaine Bain dans un mission à hauts risques : infiltrer la Manufactorum Primus de Kepler-Gamma, usine de production d’armes tombée aux mains du Chaos lors de la guerre civile qui enflamme la planète depuis maintenant quinze ans. Le plan des impériaux est élégamment simple : utiliser les tunnels qui courent sous le mont Dentelure (Jagged Edge en VO) pour pénétrer incognito dans le complexe, et poser quelques explosifs au niveau du réacteur pour réduire l’usine en cendres. Voilà pour le briefing.

Les choses ne tardent pas à se corser pour les Scrappers et leurs invités. À peine entrés dans une cavité souterraine, ils tombent sur un Bisounours1 mal léché, qui fait des misères au soldat Helvia mais permet surtout à Aurelia de montrer qu’elle maîtrise l’art du combat au couteau. Après des heures de tâtonnements et de reptations, la fine équipe parvient dans la Manufactorum Primus, que les hérétiques n’ont absolument pas pris soin d’entretenir depuis leur OPA hostile. Des cadavres mutilés jonchent les moindres recoins, sans parler des graffitis impies qui constellent les murs et de la tenace odeur de renfermé qu’exsude le lieu. Ce choix de décoration d’intérieur impressionne fortement les loyalistes, mais le vétéran Bain et la rigoriste Theodora ont tôt fait de leur faire reprendre leurs esprits, et les commandos parviennent sans problème jusqu’à la salle du réacteur, avant de commencer à poser leurs charges de démolition.

C’est le moment que choisissent les cultistes pour faire leur apparition, en des quantités trop importantes pour que les Gardes aient la moindre chance de tenir leur position. Aurelia surprend également un Word Bearer faire acte de présence au second plan, mais tel Bruce Willis dans un direct to video de la fin des années 2010, l’Astartes renégat se contentera de cette apparition fugitive avant de ressortir définitivement de l’histoire. Un problème de moins à gérer. Ayant déjà subi quelques pertes les Scrappers parviennent à se replier en bon ordre jusqu’à l’entrée du tunnel qu’ils avaient emprunté pour entrer dans le complexe. Cela aurait été l’endroit idéal pour utiliser leur détonateur… s’ils ne l’avaient pas oublié dans la salle du réacteur. Gag. Comprenant que ses alliés sont des gros nuls (alors que lui a réussi à tuer un Space Marine du Chaos en solo, d’après la légende), le grand Bain décide de repartir seul pour faire péter les charges, tandis que le reste des survivants devra faire diversion pour attirer l’ennemi ailleurs. Avant qu’il ne parte, Aurelia lui remet son couteau, ce qui est noble de sa part et ne servira à rien dans la suite de la nouvelle, puisque Bain n’y apparaitra plus non plus2.

La caméra reste en effet fixée sur les sœurs Shale, qui finissent par être les seules rescapées de leur petit groupe après que les autres Gardes aient passé l’arme à gauche dans des péripéties ma foi très classique. La franche discussion permise par cette intimité involontaire n’aura cependant pas lieu, Theodora écopant d’un pruneau dans l’artère fémorale alors que l’arrivée était toute proche (dommage), et se contentant de remettre à sa sœur son pistolet bolter ainsi que sa bénédiction avant de rejoindre à son tour l’Empereur. La nouvelle se termine avec le sprint d’Aurelia en direction de la sortie du tunnel, qu’un membre de son escouade avait heureusement piégé en skred au début de la mission parce que, je cite, « il n’aimait pas sa tête ». Ce délit de faciès minéral permet au moins à notre héroïne d’enfouir ses poursuivants sous des tonnes de gravats, et à notre histoire de se terminer sur une éclatante victoire impériale.

1 : Sans rire, le terme anglais utilisé est cudbear, qui peut se traduire par « ours câlin ».
2 : Je choisis de penser que le vaillant Capitaine solote sans problème le Space Marine une fois équipé du couteau, car ce n’est tout de même pas un Astartes qui va arrêter un Bainblade.

AVIS:

D’habitude, le choix d’utiliser des personnages avec un lien de parenté dans une histoire de GW-Fiction indique que nous sommes en présence d’une série au long cours, ce qui permettra à l’auteur d’explorer plus en détail les relations particulières qui unissent ses héros. Ici… non (à moins que Theodora n’ait survécu à hémorragie externe sévère et à un enfouissement prolongé, ce qui serait étonnant). Si le choix de Maria Haskins de déroger à la règle précédemment citée peut se comprendre dans le contexte de cette nouvelle (le devoir avant tout, etc…), il est emblématique des nombreux arcs narratifs que l’auteur met en place sans y donner suite, ce qui n’est jamais bon signe à mon humble avis. Ainsi, on apprend au début de l’histoire qu’Aurelia est une as au couteau… mais elle n’aura jamais l’occasion de mettre vraiment ce talent en œuvre après avoir fait la peau de Winnie l’Ourson. De même, Bain est auréolé par sa réputation de tueur de Space Marine, anecdote qui revient deux fois dans le cours du texte… mais il parviendra à faire exploser les charges hors champ, et on ne verra pas l’affrontement qui semblait pourtant inévitable entre le Capitaine vétéran et le Word Bearer entraperçu par Aurelia. Un peu dommage.

Ces considérations mises à part, on retrouve dans ‘The Jagged Edge’ les ingrédients d’une nouvelle d’action à la sauce Garde Impériale, mis en scène de façon efficace mais assez peu imaginative par Haskins. Malheureusement pour cette novice, le créneau est déjà trop encombré pour que la variation qu’elle propose sur la base de « Shale & Shale, Sergent & Commissaire » (je vois ça comme un crossover entre « Les Cordier, Juge et Flic » et « Alice Nevers, le juge est une femme », on a les références qu’on peut) ait la moindre chance de faire date. On a déjà Severina Raine et Minka Lesk dans la catégorie des imperial fighting girls de l’Imperium, pas besoin d’en rajouter, si ?

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The Place of Pain and Healing – J. D. Hill :

INTRIGUE:

The Place of Pain &amp; HealingComme vous le savez peut-être, la dernière incursion d’Abaddon & friends sur Cadia ne s’est pas super bien terminée pour la planète. Aux dernières nouvelles, elle serait tombée sur le sol de la galaxie, ce qui fait tout de même une sacrée chute. Minka Lesk, jeune Bouclier Blanc aux débuts de ce que nous appellerons pudiquement « les événements », peut témoigner des derniers moments difficiles de la population locale : évacuée en compagnie du Capitaine Kasrkin Rath Sturm avant la victoire du Chaos (voir ‘Cadia Stands’), elle passe les premiers moments du voyage sur le croiseur Space Wolves qui convoie les deux Cadiens à délirer dans son sommeil. Les souvenirs de la défense contre la 13ème Croisade Noire se mélangent avec d’autres, plus anciens, de son enfance et son entraînement à devenir une bonne petite soldate. On apprend aussi que Minka est une Katherinette (même si elle ne porte pas de chapeau).

Cette transe enfiévrée est interrompue par le médecin de garde du Fang of Fenris, qu’un serviable hilote Space Wolves va quérir en catastrophe après avoir été témoin de la tachycardie suspecte de Minka. Une petite injection de stimms et ça repart comme en 40,000, cependant. Après une brève période de confusion, notre héroïne échange deux mots avec son camarade d’infortune, puis part errer dans les couloirs désertés et ténébreux du croiseur pour se changer les idées. Elle tombe sur Skarp-Hedin, le Space Marine qui l’a ramenée dans sa besace énergétique au moment de quitter Cadia (comme quoi on peut avoir un mono sourcil et bon(s) cœur(s), et parvient au terme d’un dialogue aussi profond que virtuose, mais en tout cas cathartique, à se réconcilier avec l’idée de la perte de sa planète natale, de ses milliards de compatriotes, et du fier héritage d’inflexibilité des centaines de générations précédentes. Le tout en deux minutes top chrono. A ce niveau, on ne dit pas tourner la page, mais désapprendre à lire.

Skarp-Hedin, qui a senti que son vaisseau était entré dans le Warp, et plus certainement que la fin de la nouvelle était imminente (c’est fou comme les Space Wolves ont le nez fin), trouve une excuse bidon pour partir dans l’arrière-plan narratif à petites foulées – mais en continuant le dialogue avec Minka, car c’est un gentleman. Cette dernière repart pioncer dans sa cellule, et sous son matelas, il faut le préciser, l’odeur et le poids de sa paillasse lui rappelant les jours heureux où elle faisait la nouba dans les dortoirs des premières années. You do you, girl, you do you.

AVIS:

Nouvelle de transition entre ‘Cadia Stands’ et ‘Cadian Honour’, ‘The Place…’ ne me semble pas être une addition très intéressante à la saga de Minka Lesk (que je ne considère pas comme étant très intéressante non plus, je dois dire). On n’apprend en effet pas grand-chose de nouveau sur l’héroïne aux yeux violets, qui a eu l’enfance stricte et militarisée que tous les Cadiens ont eu (aaaaaah), et a été traumatisée par la violence des combats de la Croisade Noire (oooooh). Comme les trois personnages principaux (Lesk, Sturm et Skarp-Hedin) ont un charisme cumulé proche de celui d’une huître comptable, il est dur de sympathiser un tant soit peu avec leur peine et leur déchirement.  J’ajoute que Hill se montre particulièrement peu inspiré dans l’écriture des quelques dialogues de sa nouvelle, qui sont si vides et grotesques que leur simple lecture vous sort immédiatement de l’histoire. À laisser sur Cadia.

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The Labyrinth of Lost Souls – G. McNeill :

INTRIGUE:

The Labyrinth of Lost SoulsUn inconnu, peut-être illustre mais certainement pas lacustre, se réveille en sursaut d’un coma pas vraiment réparateur. Notre homme se retrouve en effet nu comme un ver, suturé comme la créature de Frankenstein, en proie à un féroce mal-être, et sans le moindre souvenir de qui il est et de comment il s’est retrouvé là. Seule consolation pour Jean Dupont, malgré l’impression tenace et désagréable que son pacemaker est en train de lui fondre dans la poitrine, il se découvre doté d’une force prodigieuse, ce qui lui sera sans aucun doute utile pour se tirer de ce mauvais pas…

Début spoiler 1…Je passe en mode spoiler ici pour épargner le suspense de cette soumission aux lecteurs de grande section de maternelle de cette chronique. Qui ne devraient pas être là, ni lire ce genre de contenu, mais d’une certaine manière, c’est grandement impressionnant. En tout cas, on ne m’accusera pas cette fois-ci de ruiner le dénouement d’une nouvelle, même si l’illustration de cette dernière devrait vous donne un énaurme indice sur qui est notre protagoniste. Deux si vous vous attachez également au fond de l’image et pas seulement à la Passion de Jean-Michel Blanquer au premier plan. Ajoutez à cela le nom de l’auteur et la date de sortie de cette nouvelle, et vous devriez être en mesure d’identifier le primate confus qui est en train de cavaler vers le « cœur du Labyrinthe1 », en fracassant tout ce qui a le malheur de se mettre sur sa route et/ou ne pas convenir à ses goûts esthétiques. Allez, je vous laisse une dernière chance de percer ce mystère par vous-même, en gentilhomme.e (je suis inclusif aussi) que je suis.

Début spoiler 2…Toujours là ? Bon, eh bien tranchons dans le vif de l’intrigue que Graham McNeill nous a amoureusement concocté et révélons sans plus tarder que l’énergumène qui vient juste de suspendre un Techmarine par les bretelles dans son propre atelier, parce qu’il avait une vague ressemblance avec l’homme taureau de la légende, n’est autre qu’Uriel Ventris. Le Capitaine de la 4ème Compagnie des Ultramarines, récemment primarisé (‘The Death of Uriel Ventris’), n’a donc pas passé le Rubicon avec la grâce et la fortitude des autre personnages nommés upgradés avant lui. D’ailleurs il a failli se noyer, ce con. Mais ce n’est pas vraiment de sa faute, notez. Comme l’Apothicaire Selenus le révèle à son supérieur (qui lui a fait une augmétique au beurre noir dans sa fuite éperdue) et au lecteur après que l’un comme l’autre aient digéré ce rebondissement digne de Hilfred Atchcock, c’est la fournaise bélisarienne implantée dans le thorax du néo-primarisé qui s’est mise en surchauffe et a provoqué son hyperactivité amnésique. Heureusement pour tout le monde, Ventris a retrouvé ses esprits avant de commettre l’irréparable (péter la vitre du réacteur plasmique du croiseur de bataille Vae Victus à coup de poing…because of reasons), et que l’irréparable soit commis sur sa précieuse personne (Petronius Nero était sur le point de lui donner le coup de grâce après avoir consulté la VAR pendant de longues minutes). Il aura fallu qu’on lui agite sous le nez le slip de Guilliman la bannière de sa Compagnie pour qu’il revienne à ses sens. La suite sera sans doute couverte dans ‘The Swords of Calth’, publié quelques jours après cette nouvelle. Trust me, I’m an expert.Fin spoiler

1 : Car la seule chose dont notre protagoniste se rappelle à ce stade, mis à part un goût immodéré pour la violence, est la légende de Thésée et du Minotaure, auquel il s’identifie totalement en sa qualité de gros bœuf ruminant de sombres pensées.

AVIS:

Graham McNeill joue au plus fin dans cette nouvelle à « « suspens » » (première fois que je mets des guillemets à mes guillemets), mais ne semble pas prendre au sérieux sa tentative, peu aidé il faut le dire par les choix iconographiques de la Black Library. Bref, la « « révélation » » que l’auteur prend temps de temps (à défaut de soin) à nous amener est tellement éculée que l’on pourrait s’en servir pour égoutter les pâtes. Dès l’instant où le caractère Primaris du protagoniste est fuité (d’une façon tellement subtile que c’est à peine si McNeill ne termine pas sa phrase avec un ;)), relativement tôt dans l’histoire, 99,9% du lectorat habituel de la BL aura identifié le Space Marine en goguette et en chaussette/claquette victime d’un very bad trip. Mais il faudra tout de même attendre les dernières pages pour que l’auteur ne nous donne le fin mot de l’histoire, de façon tellement ampoulée que l’on pourrait s’en servir pour égoutter les pâtes aussi. Vous n’avez jamais égoutté les pâtes avec une ampoule ? Dommage pour vous. Bref, le monde se divisera ici en deux catégories : ceux qui seront ravis d’avoir des nouvelles de Mister UV (comme le fait qu’il déteste son nom, ce qui corrobore une hypothèse longtemps partagée par les fans), et ceux qui trouveront que McNeill les prend un peu trop pour des neuneus. Si vous voulez une bonne histoire de 40K exploitant le trope du guerrier amnésique se réveillant en territoire hostile, je vous conseille ‘Hunted’ de John French, et surtout ‘Torment’ d’Anthony Reynolds, largement supérieur au gruau littéraire, à la limite du prétentieux (pourquoi ce titre ?) et bleuâtre que nous sert Graham McNeill.

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Faith in Iron – C. Johnston :

INTRIGUE:

Faith inLe système d’Albarnan est à feu et à sang depuis que la Death Guard a montré un fort intérêt pour l’acquisition des planètes fertiles de ce petit bout d’Imperium. Très engagé contre la conversion des terres (#Biodiversité), Pépé a envoyé l’Adeptus Mechanicus et les Iron Hands contenir la menace purulente, mais cet appariement s’est révélé malheureux lorsque les Prouteux ont dégainé leur arme secrète, à savoir un malware particulièrement virulent et à même de corroder et/ou corrompre toute la tech’ que les nerds impériaux ont à leur disposition. Appelée Morbus Metallum, cette affliction a atteint le monde agricole de Dundas II, et mis HS la majorité des adeptes de l’Omnimessie qui y étaient stationnés. Fort heureusement, la Magos Biologis Viridan Shale a réussi à mettre au point un antidote, mais se trouve isolée dans la capitale planétaire (une cité ruche tout ce qu’il y a de plus classique, car oui, on peut apparemment en trouver sur des agri-mondes…), et à la merci des hordes de cultistes dérangés qui y ont élu domicile. Il est impératif pour l’effort de guerre impérial qu’elle soit ramenée en lieu sûr, et après un bref appel au numéro vert mis en place par l’Administratum depuis le laboratoire blindé où elle s’est réfugiée, elle a la satisfaction d’apprendre qu’un technicien lui a été dépêché1. Son nom : Rathkugan des Iron Hands.

Dans la capitale de Dundas II, les combats font rage pour empêcher ces grands malades de Nurglites de prendre la clé des champs, ce qui est pourtant leur souhait le plus sincère. Nous faisons la connaissance du Capitaine Lennox Winters de la Garde Impériale et de ses braves soldats, bien occupés à tenir la ligne dans l’attente illusoire de renforts. C’est toutefois leur jour de chance, car le drop pod contenant Rathkugan (et son Serviteur de combat) s’écrase à proximité de leur position, scellant le sort des malheureux cultistes présents dans ce périmètre. Rath’, qui aime visiblement avoir de la compagnie, ordonne aux mortels de l’assister dans sa mission, et après avoir compris qu’un non n’était pas une réponse acceptée par le colosse en céramite, Winters accepte de seconder l’Iron Father. Un job assez ingrat il faut le souligner, car l’Iron Hand ne semble avoir besoin des Gardes que comme instruments de diversion, et n’hésite pas à une seconde à tirer avec son bolter lourd d’épaule dans les mêlées, sans faire de cas de la pitoyable sauvegarde d’armure de ses petits camarades. Pour sa défense, Rathkugan est engagé dans un contre la montre aussi douloureux que débilitant, ses propres bioniques se faisant attaquer par le Morbus Metallum à vitesse grand V. Il s’agit de ne pas niaiser en route, comme on dit à Chicoutimi.

Quelques heures, mauvaises rencontres2, et pertes de bidasses plus tard, la fine équipe parvient jusqu’au laboratoire et fait sa liaison avec Viridan Shale, qui a la particularité d’être une bombasse. Rathkugan insiste pour repartir immédiatement en direction du point d’extraction malgré le fait qu’il soit déjà aux trois quarts rouillé et que son disque dur soit plus vérolé qu’un Portepeste. Un tel stoïcisme est normal de la part d’un descendant de Ferrus Manus, me direz-vous, sauf que l’Iron Father finit par s’effondrer comme une chochotte, forçant Winters et Shale à lui prodiguer les premiers soins le temps qu’il se remette de ses émotions. Grâce à l’antidote qu’elle peut synthétiser dans son sang, la Magos Biologis purge le système du Space Marine, et le Serviteur de ce dernier donne héroïquement ses composants à son patron pour lui permettre de redevenir opérationnel. Les précieuses minutes perdues à s’occuper de ce gros bébé permettent aux cultistes d’embusquer les loyalistes, ce qui se solde par de nouvelles morts de personnages secondaires. Au bout du compte, Rathkugan parvient tout de même à repartir de Dundas II avec Shale, qui pourra faire bénéficier de son Avast personnel aux Iron Hands frappés par le Morbus Metallum. Quant à Winters et ses derniers soldats, ils restent sur le théâtre d’opérations et reprennent leurs activités habituelles. Il serait cependant fort possible que le sympathique Capitaine reçoive bientôt un bras bionique tout neuf pour remplacer sa vieille prothèse actuelle, et que son régiment soit invité à participer à la reconquête du monde forge d’où vient Viridan Shale. C’est ça d’avoir des relations parmi les grands de ce monde cet Imperium…

1 : Si on peut admettre que les Space Marines sont suffisamment rares et puissants pour qu’un seul d’entre eux soit affecté à une mission suicide avec des chances de la mener à bien, je suis en revanche moins magnanime lorsque l’auteur fait comprendre que l’Ange de la Mort en question est expédié via croiseur d’attaque. Ça fait beaucoup de ressources mobilisées pour un seul pignouf, fut-il énergétique.  
2 : Dont un Death Guard, mais comme il ne joue absolument aucun rôle dans l’histoire à part se faire bolosser par Rathkugan au close, et finit aplati par une frappe d’artillerie dans l’anonymat le plus complet à la fin de la nouvelle, on ne s’étendra pas sur son cas.

AVIS:

Même si les Iron Hands ont une identité très forte, qui les différencie de la majorité des Chapitres Space Marines, et les rend techniquement plus faciles à mettre en scène par les auteurs de la Black Library que d’autres Astartes moins typés, tout le monde n’est pas capable de rendre justice à leur inflexibilité post-humaine. Le newbie Cameron Johnston le démontre ici, avec une histoire oscillant entre le polt born peu inspiré et la série B d’action piteusement mise à la sauce 40K (le background n’étant visiblement pas le point fort de notre homme). Même si elle est bien plus vieille, la nouvelle ‘Flesh’ de Chris Wraight, qui reprend à peu près les mêmes intrigue et conclusion, est supérieure en presque1 tous points à ce ‘Faith in Iron’ : si vous êtes aussi rationnel dans votre approche de vos loisirs (tant en temps qu’en argent) que les Iron Hands, vous ferez donc l’impasse sur la seconde pour vous concentrer sur la première.

1 : Je dois tout de même reconnaître que Cameron Johnston gère les munitions de manière plus réaliste que Chris Wraight.

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A Coin for the Carrion Thieves – J. French :

INTRIGUE:

A Coin for the Carrion ThievesLe mauvais côté de l’éternité, c’est que l’on devient vite désabusé. Demandez à Ctesias par exemple : autrefois un fringant Thousand Sons passionné par la recherche de la vérité suprême et l’exploration de la nature de l’univers, quelques milliers d’années d’hérésie l’ont changé en vieux ronchon réactionnaire, passant le plus clair de son temps à marcher dans des coups foireux et le reste à regretter de l’avoir fait. C’est ainsi que notre ami s’est retrouvé en rade sur les Mondes Déchus, après que la tentative d’Ahriman de RE-lancer la Rubrique – ça avait tellement bien marché la première fois – se soit soldée, ô surprise, par un nouvel échec retentissant. Voilà ce qui arrive lorsque l’on suit les conseils d’un Duc du Changement qui se révèle être le Professeur Shadoko1 ! Encore 999.998 tentatives à rater et les résultats suivront, c’est certain.

Exilé avec quelques disciples dans la rase campagne de l’Œil de la Terreur, Ahri (un ami qui vous veut du bien) a besoin de se replumer. Par chance, les locaux sont assez conciliants : répondant aux noms divers et variés de Discordia, Fidèles Suivants de la Fausse Concordance Universelle, ou plus simplement, Voleurs de Charognes, cette bande de ferrailleurs de l’espace est prête à fournir des transports de seconde main (mais ayant passé le contrôle technique) aux Thousand Sons égarés… mais pas gratuitement. Comme le fait remarquer finement leur meneur, l’aptement nommé Premier Amasseur, dans l’Œil de la Terreur, le concret est une valeur refuge. Ce qui ne fait pas tellement les affaires d’Ahriman et de sa cabale, dont le fond de commerce réside plutôt dans les discours grandiloquents, les fausses promesses et les tours de passe passe. Fort heureusement, l’indispensable Ctesios pourra utiliser de sa spécialisation démoniaque (Monsieur est invocateur-lieur, ce qui est presque aussi bien que plombier-zingueur) pour tuner méchamment un vaisseau des Charognards, et ainsi fournir une monnaie d’échange acceptable par l’Amasseur.

Aussitôt dit, aussitôt fait : Ctesios se met à l’œuvre et repeint l’intérieur du vaisseau en question avec des litres de fluides pas vraiment ragoutants, tandis que son assistant Lycomedes saupoudre le sol de dents de lait, comme le veut la coutume. Déjà pas très jouasse de servir de bonniche au démonologue, Lycomedes devient carrément furax lorsque ce roué de Ctesios se sert de lui comme appât à démon pour son invocation, bien évidemment sans lui avoir demandé la permission avant. À la décharge de Ctesios, le lecteur un brin au fait des choses du Chaos avait compris que c’était le destin probable qui attendait ce sous fifre, ce qui est suffisant pour qualifier le manque de prescience du Thousand Sons de faute grourde (grave + lourde), passible de la damnation éternelle…

Début spoiler…Ceci dit, ce destin peu enviable sera épargné à Lyco’, Ctesios rabattant le capot sur le groin du démon juste avant que ce dernier ne passe à table. Piégé dans le véhicule consacré, qui pourrait très bien être une Fiat Panda pour ce que l’on en sait, l’habitant du Warp est condamné à servir d’ordinateur de bord et de mécanicien embarqué à la machine jusqu’à la fin des temps, pour le plus grand avantage de son nouveau et heureux propriétaire, Ah ma sœur (et la tienne ?). En échange, Ahriman récupère une petite armada de 14 navires, beaucoup plus qu’il n’en faut pour embarquer les reliquats de sa bande de guerre. Comme on peut s’en douter, le grand cornu a un plan à l’arrière du casque et ne compte pas passer les prochains siècles à se tourner les pouces. La suite au (peut-être) prochain épisode…Fin spoiler

AVIS:

John French pourrait ne pas en avoir tout à fait fini avec un de ses personnages fétiches, et donne avec ce ‘A Coin for the Carrion Thieves’ une suite aussi inattendue qu’intrigante à la trilogie consacrée au sorcier le plus talentueux et le moins efficace de la galaxie. Cette petite histoire permettra aux familiers de la série de retrouver, j’en gage, quelques vieilles connaissances – Ctesios et Lycomedes – qui tiennent les premiers rôles de ce récit de troc chaotique. Les nouveaux venus apprécieront quant à eux les efforts faits par French pour leur permettre d’apprécier pleinement cette nouvelle, dont ni l’intrigue ni le déroulement ne reposent sur des éléments inconnus du profane (ce que d’autres auteurs de la BL n’hésitent pas à faire). Au final, c’est assez sympathique, à l’image de ce bon vieux Ctesios, qui se contente de faire une sale blague à Lycomedes au lieu de le faire posséder par un démon majeur, comme on s’y attendait pourtant, et lui fait même la fleur de le prendre comme apprenti (comme quoi, l’allégeance « chaotique bon » existe bel et bien à 40K), et cela donne plutôt envie de découvrir cette série, ou de le voir se poursuivre.

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Da Big Mouf – D. Ware :

INTRIGUE:

Da Big MoufDans les entrailles du Space Hulk Big Mouf, colonisé par les Deathskulls du Big Boss Zoldag Legmangla, nous suivons notre héros, le Nob Grimdak, alors qu’il s’adonne innocemment (ou aussi innocemment que sa nature de Xenos ultra violent le permet) à ses activités favorites: chercher du ​​​​​matos à récupérer pour kustomiser son équipement, tirer à droite et à gauche pour se convaincre de la mieutitude de son fling’, et se pavaner devant un public imaginaire comme s’il était un mannequin à la Fashion Week. L’arrivée d’une petite force de Sœurs de Bataille dans les coursives du Big Mouf, annoncée sans doute possible par le double bruit des bottes énergétiques et des cantiques consacrés1, est cependant suffisante pour renvoyer Grimdak, courageux mais pas téméraire (ou peut-être sujet aux acouphènes) jusqu’à la salle du trône de Legmangla.

Ce dernier, une montagne de muscles et de membres bioniques tout à fait conforme à l’image d’Epinal que l’on se fait du meneur peau-verte, allie la carrure d’un Ogryn avec la culture générale d’un Inquisiteur, puisqu’il a tôt fait de souligner que les harpies impériale sont forcément à la recherche d’une relique, puisque la recherche de ces objets constitue leur unique leitmotiv​​​​. Il l’a lu dans un vieux Codex Approved de Space McQuirk (le bien le plus précieux de son tas de loot), c’est donc que c’est vrai.​​​ Par un concours de circonstances tellement heureux qu’il a fallu à Tzeentch 999 ans pour le mettre en place, la relique en question est présente dans les alentours immédiats, puisqu’il s’agit d’une lance dont le bout du manche est un fémur humain, et dont un Nob quelconque se servait à l’instant comme d’un cure-croc2. Après avoir morigéné (je vous avais dit que c’était un érudit) son sous-fifre en lui faisant avaler son ustensile, Legmangla sonne la Waaagh! et emmène sa tribu à la rencontre des envahisseurs, guidé par le radar de recul que Grimdak a monté sur sa pétoire.

La confrontation initiale et finale (14 pages, c’est court), a lieu dans la salle du vortex, occupée par une sorte de trou noir anémique attirant mollement tout ce qui s’approche un peu trop près. C’est de là que le Space Hulk tire son nom de Big Mouf, et ça nous fait une belle jambe. Juste au moment où son chant de guerre se termine3, la vague verte tombe dans l’embuscade tendue par les filles de l’Empereur, qui avaient eu la lumineuse idée de la fermer pour surprendre l’adversaire. Vue par les yeux de Grimdak, l’attaque est d’une violence insoutenable et cause des ravages inouïs parmi les Xenos. Alors que le lecteur tente fébrilement de calculer combien d’Ordres Militants ont été rassemblés pour mener à bien cette mission périlleuse, et se prépare déjà à voir arriver Ste Celestine en personne pour un duel avec Legmangla, Ware balance un pain tellement brutal dans la mâchoire de l’Epique qu’elle en assomme du même coup le Réalisme, qui le suivait prudemment, comme à son habitude. Car le massacre des Deathskulls a été orchestré par une pauvre escouade de Sœurs de Bataille, soit 6 gougnafières en armure énergétique. Dans le chaos de la mêlée, les Orks parviennent tout de même à blesser gravement une Sista, grâce à l’intervention énergique de Legmangla en personne, mais c’est à peu près tout.

Après quelques pages confuses, Big Mouf se met en rogne et avale proprement tout ce qui n’a pas une coupe à frange (et Grimdak, qui parvient à s’échapper mais tout le monde s’en fout), permettant à Danie Ware de terminer son propos en révélant à son public que la miraculeuse escouade était menée par, mais en doutait-on encore à ce stade, l’injouable Augusta Santorus, qui avait très envie d’ajouter le fémur de Saint Finiang à son ossuaire personnel. Et il n’est pas permis de douter qu’elle a échoué dans cette tâche, bien que localiser l’emplacement de la relique dans un Space Hulk regorgeant d’Orks en ayant seulement une vague idée de la direction dans laquelle aller constitue un défi littéralement herculéen. Comme on dit, the Emperor provides.

1: Oui, nos braves Sistas abordent un vaisseau qui selon toute logique est infesté d’ennemis mortels en scandant les Parapluies de Cherbourg à plein volume. À moins qu’elles ne chantent horriblement mal, et comptent là-dessus pour faire fuir l’adversaire (une tactique tout droit piquée aux Emperor’s Children), on peine à comprendre l’intérêt de la manœuvre. 
2: Ce n’est pas comme si 1) un Space Hulk était un agglomérat de vaisseaux spatiaux d’une taille colossale, dont la cartographie et l’inventaire occuperait même le plus diligent des experts pendant des décennies; 2) les Orks étaient connus pour leur goût de l’exploration minutieuse et 3) une lance terminée par un bout d’os avait une quelconque valeur aux yeux d’un Ork, et avait donc une chance d’être présentée au Big Boss.
3: Et Ware s’est donnée à fond sur le livret, car le lecteur bénéficie de plusieurs couplets de pop-rork. 

AVIS:

Danie Ware enrichit moins sa gamme qu’elle étend ses déprédations en s’essayant à la littérature Ork, avec des résultats dans la droite ligne de ses premiers travaux. Si la première partie de la nouvelle, centrée sur Grimdak et Legmangla, pourrait à la rigueur faire illusion malgré son lot d’incongruités, la seconde en revanche reprend tous les codes de la SoB-erie1 dont Ware s’est faite la grande (et heureusement, seule) spécialiste au sein de la Black Library. C’est confus, incohérent et cela va à l’encontre des principes et des préceptes les plus basiques du lore1 : ayant déjà passé quelques chroniques à exposer mes griefs sur le sujet, je me contenterai ici de noter que le lecteur familier de ‘Mercy’, ‘Forsaken’ et ‘The Crystal Cathedral’ évoluera à nouveau en territoire connu. Le titre orkifié et la narration centrée sur un peau verte ne doivent pas faire illusion: il s’agit bien de la suite des aventures massacres d’Augusta Santorus, et les amateurs de POV Ork seraient mieux inspirés de se tourner vers les travaux de Mike Brooks et de Guy Haley. Contrairement aux balises laissées par l’Interex à proximité de Murder, j’espère que ces avertissements ne seront pas compris trop tard par ceux qui pourraient en avoir besoin…

1: Dédicace spéciale aux Blood Angels, pas foutu de purger un Space Hulk sans perdre 90% de leurs effectifs alors que Santorus et ses copines plient l’affaire en une demi-journée et une cheville foulée. 
2: Heureux, ou en tout cas fatidique, hasard, « sob » veut dire sangloter en anglais. C’est approprié.

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Warsphere – D. Hinks :

INTRIGUE:

WarsphereL’Archonte Jean-Michel1 a emmené sa coterie de mauvais garçons et de femmes fatales (dont l’empoisonneuse Zhain) dans un rade paumé : une sphère de guerre Kroot s’étant écrasée à la surface d’une surface. Si le Drukhari s’est donné la peine de quitter son triplex de Commoragh, c’est parce que ses recherches lui ont permis d’identifier dans ce tas de rouille une information de tout premier ordre : les coordonnées d’une Enclume de Vaul, ou Forteresse Noire pour les mon-keigh. S’il parvient à faire l’occasion de cette relique millénaire, il pense pouvoir ravir à Asdrubael Vect la mainmise sur la cité pirate, ce qui est cool. Prévoyant autant qu’instruit, Jean-Michel a renforcé son expédition en recrutant des traqueurs Kroots, jugeant avec sagesse que l’appui de ces oiseaux de mauvais augure lui serait utile pour négocier l’intérieur de la sphère de guerre et mettre le gantelet éclateur sur les érudits qui détiennent le tuyau qu’il convoite.

Notre histoire commence par un petit massacre des sentinelles qui gardent la sphère contre les visiteurs importuns, les Kroots se faisant un plaisir et un devoir d’honorer leur double réputation de tueurs sans pitié et de gourmets sanguinolents en abattant puis dévorant les gardes. Bien entendu, ceci offense le raffinement exquis de Jean-Mich’ Mich’ et de Zhain, qui meublent ce buffet froid en échangeant des idées sur la meilleure façon de trahir et de torturer un Kroot, une fois que la mission sera accomplie. Souhaitant tout de même montrer qu’il est aux commandes de l’expédition, Jean-Michel va interrompre le casse-Kroot en appuyant là où ça fait mal : la fierté mal-placée des autruches de l’espace envers l(‘absence d)e goût artistique de leurs anciens. Si le chef de la troupe, l’impavide Grekh, ne tombe pas dans le panneau, son sous-fifre Khebab ne montre pas autant de self-control et tente de molester Jean-Mi après que celui-ci ait mis un coup de pied dans une statue aussi sainte que moche. Résultat des courses : Khebab se fait flinguer par son employeur, ce qui rend Grekh chafouin. Mais le rapport de force est trop déséquilibré pour que le placide palmipède ne fasse autre chose que jeter un regard froid à l’Archonte. Poursuivons.

Grâce aux talents de traqueur de Grekh et à l’étonnante technologie Kroot, qui semble consister en des petits tas de mégots, prospectus, vieux pneus et restes de junk food placés à des endroits stratégiques, nos héros parviennent à se rapprocher de la salle où sont sensés attendre les érudits, sans trop de casse. Ceci dit, l’abondance de piejakon que les dits érudits ont placé autour de leur planque rend le périple franchement aventureux, et lorsque les derniers survivants arrivent devant la salle des bosses des maths de fin (après une ultime rencontre avec des goons peu aimables, ici des goélands métalliques), il est clair que sans les bons services de Grekh, ce tombereau d’ordures deviendra leur tombeau…

Début spoiler…Ce qui rend la défection du Kroot problématique pour Jean-Michel, Zhain et Cie. Rusé comme pie, l’homme poulet a en effet fait charger son groupe dans une salle vide, et a profité de la confusion pour prendre son envol. Un départ en traître peu surprenant devant le peu de soin que l’Archonte a pris pour dissimuler ses intentions xenocides envers son sherpa jusqu’ici, mais qui pose toutefois la question du « pourquoi maintenant » ? C’est la vision d’une vieille video de surveillance de la sphère de guerre, restaurée grâce à la compétence native des Drukhari en hacking, qui permet d’y répondre. Contrairement à ce que Jean-Michel et ses caballeros pensaient, les sentinelles bestiales massacrées et boulotées par les Kroots ne gardaient pas les érudits, elles étaient les érudits2. Epiphanie finale pour nos héros : pendant qu’ils taillaient la bavette à l’arrière-plan, Grekh récupérait la localisation de la Forteresse Noire en… taillant la bavette aussi. Mais différemment. Coincés dans une situation qu’ils ne maîtrisent pas et en danger de mort, les Eldars Noirs font ce qu’ils savent faire de mieux : s’entretuer. C’est donc une fin de partie pour Jean-Michel, poignardé dans le dos par Zhain, qui ne risque cependant pas de faire de vieux os elle non plus. Moralité : ce n’est pas parce que ton grand-père était un dodo que tu ne peux pas pigeonner ceux qui te prennent pour un dindon.Fin spoiler

1 : L’histoire étant racontée depuis son point de vue et son statut social étant visiblement trop élevé pour qu’il daigne nous donner son petit nom, j’applique ici la loi de Lucy en l’affublant d’un sobriquet venant de la pop culture.
2 : Les Drukari s’en rendent compte en voyant l’un des gros lézards susnommés faire ses lacets tout seul. Si ça c’est pas une preuve d’intellect supérieur, je ne sais pas ce qu’il vous faut.

AVIS:

Darius Hinks n’en finit pas d’achever son cycle Blackstone Fortress, avec une nouvelle retraçant l’origin story de l’un des protagonistes du jeu et des romans/nouvelles associés à cette franchise : le traqueur Kroot Grekh. Si vous voulez savoir comment le gallinacé le plus badass du Segmentum est venu traîner ses quilles dans la Forteresse Noire, n’allez pas plus loin.

Pour les autres types de lecteurs, ce ‘Warsphere’ est également intéressant du fait du twist final assez bien pensé et exécuté que Hinks a incorporé à son intrigue. Cela ajoute une petite valeur ajoutée à une nouvelle autrement très classique dans le genre « exploration d’une ruine mystérieuse contenant un grand trésor mais recelant de dangers », dans lequel on retrouve 90% des vieilles histoires de Necrons… ainsi que 99% des histoires siglées Blackstone Fortress. Même à l’extérieur, on n’est donc pas dépaysé.

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Path of Grief – A. Southin :

INTRIGUE:

Path of GriefSur le vaisseau monde de Saim-Hann, Itheíul porte le deuil de son frère Arsan. Cet épisode a tellement traumatisé notre héroïne qu’elle a abandonné ses chères études (BEP Shining Spear) pour emprunter la voie de la Hess, qui consiste à se lamenter H24 dans le temple de la Larme à l’Œil. On savait les Eldars très lacrymaux, mais c’est encore un niveau au-dessus. Alors qu’elle contemple la pierre esprit et la lance chantante (qui doit fredonner du Vincent Delerm, pour respecter l’ambiance) que son frère a laissées derrière lui, une voix se fait entendre dans son esprit. Sweet, sweet schizophrenia… sauf que non, bien sûr : il s’agit sans doute d’un Prescient défunt qui s’ennuyait dans le circuit d’infinité et a décidé de troller d’apporter ses sages conseils à une âme en peine. S’engage alors un dialogue psychique où l’invité mystère essaie de sortir Itheíul de sa torpeur en lui rappelant qu’il y a du bon dans ce monde, M. Frodon, et autres niaiseries optimistes. La pleureuse riposte avec des arguments bien sentis sur la futilité de se battre contre une galaxie hostile quand on est une fin de race, et la discussion se tourne vers la planète de Deniadol, où les Wild Riders sont récemment venus en aide aux Exodites après qu’une flotte ruche tyranide ait confondu le monde vierge avec un buffet garni.

Itheíul et Arsan faisaient partie du contingent dépêché par Yapadeuhazar Serpentard (le frère prescient de Salazar) pour sauver les meubles, c’est-à-dire permettre l’évacuation de bouseux locaux et de leurs dinosaures de compagnie (les petits seulement), avant que les hordes chitineuses ne dévorent les dernières poches de résistance eldars. Parce que les Saim-Hann ont beau être des rebelles, ils savent aussi reconnaître quand la situation est hors de contrôle, ce qui est tout à leur honneur. Cette tâche humanitaire (eldaritaire ?) ne pouvait être menée à bien que si le Prince commandant aux nuées tyranides était éliminé cependant, ce qui ne pouvait se faire qu’en localisant et éradiquant l’embêtante bestiole parmi sa masse de potes. Après un duel d’honneur entre les représentants des différents clans représentés sur Deniadol, c’est celui de nos deux héros (le clan Tyllach) qui remporte la mise, et part à fond de train castagner du cafard, juché sur ses motojets.

Après un premier engagement cathartique mais assez peu productif, Itheíul, Arsan et leurs cousins (on travaille en famille à Saim-Hann) firent une pause technique, pendant laquelle Arsan utilisa ses pouvoirs de Prescient pour faire tournoyer ses runes GPS, qui finirent par lui indiquer la direction où se trouvait la bioforme précédemment connue sous le nom de Prince. Bien qu’Itheíul lui conseilla d’attendre l’arrivée de renforts pour maximiser leurs chances, son frère n’écouta rien et mit les gaz en direction de sa proie, entraînant à sa suite le reste de la smala. Un combat aussi féroce qu’impossible à suivre à l’œil nu (à moins d’être fan de hockey sur glace) s’engagea entre les Xenos… et les Xenos, au cours duquel Astan tomba dans le piège tendu par le Prince, qui lui sortit une Neymar (se rouler par terre pour faire croire à une grave blessure, alors que pas du tout en fait), et finit les cervicales broyées par le neurofouet de son adversaire. Folle de rage, Itheíul ramassa la lance de son frère, lança « My Heart Will Go On » au volume maximal, et régla son affaire à la blatte fratricide, dont le trépas désorganisa suffisamment les Tyranides pour permettre une évacuation optimale des Exodites et de leurs alliés.

Retour sur Saim-Hann et à la discussion entre Itheíul et son conseiller spectral, qui se révèle être… Arsan. Shocking I know. En fin de compte, l’Eldar éplorée se range aux arguments de son frérot et sort du temple avec sa lance chantante, augurant sans doute d’une nouvelle reconversion professionnelle. La retraite, c’est pas pour tout de suite.

AVIS:

Pour ses débuts au sein de la Black Library, Adrian Southin livre une nouvelle à deux facettes. Côté face, vous avez le récit d’un affrontement entre les Eldars de Saim-Hann et une flotte ruche lambda. Rien de très innovant ici, mais comme le Grand Serpent ne fait pas partie des factions les plus couvertes par les auteurs de la Black Library, cela peut intéresser ceux qui suivent cette allégeance de près. Côté pile, on trouve une réflexion assez aboutie sur la condition des Eldars des vaisseaux mondes au 41ème millénaire, oscillant entre découragement nihiliste et volonté de perdurer quoi qu’il en coûte. On ne peut pas dire non plus que le sujet est totalement neuf, mais Southin réussit assez bien à mettre en avant les arguments majeurs de ces deux courants philosophiques, en faisant là encore ressortir la psychologie belliqueuse et bravache de Saim-Hann. Au final, c’est beaucoup mieux que ce que nous a donné Gav Thorpe ces dernières années, ce qui ne veut pas dire que c’est absolument génial, mais simplement que ‘The Path of Grief’ tient assez bien la route (l’inverse aurait été triste pour une nouvelle consacrée aux Wild Riders…).

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Voice of Experience – J. C. Stearns :

INTRIGUE:

Voice of ExperienceDu rififi dans l’Atoll Nem’yar (rien à voir avec le joueur de futsal) : depuis plusieurs semaines, des accidents aussi regrettables que suspects viennent endeuiller avec régularité la station orbitale Suu’suamyth, arrachée par l’Empire T’au à l’Imperium pendant la cinquième sphère d’expansion. Bien que les autorités bienveillantes, à défaut d’être compétentes, aient minimisé les dégâts subis auprès de la population, l’affaire est devenue suffisamment sérieuse pour que le Conseil Elémentaire (l’Ethéré Aun’song et les quatre représentants les plus gradés des différentes castes) local charge la Lieutenant Kalice Arkady de prendre le dossier en main. Ancienne officier de la Garde Impériale ayant fait défection pour rejoindre le Bien Suprême il y a plusieurs années, Kalice s’est parfaitement intégrée à sa vie de collaboratrice citoyenne de l’Empire, et dispose des compétences et des connexions nécessaires pour identifier les membres de la cellule de terroristes impériaux soupçonnée d’être derrière les attentats. La confiance n’excluant pas le contrôle, le Conseil lui adjoint un Bleu comme partenaire, le chasseur de justice (c’est son titre officiel) Por’ui Fi’rios Kau’kartyr, ou Kartman pour les amis.

La paire commence son enquête par une petite visite à un ancien camarade de Kalice, le Sergent Treshom Lan. Reconverti en garagiste/ferrailleur après son abandon de poste, il serait sans doute en mesure de rencarder sa bonne amie sur d’éventuels clients récents de grandes quantités de palladium, un des composants principaux des bombes artisanales utilisées lors des récentes attaques. Les retrouvailles tournent court devant l’évident malaise de Treshom à la vue de Kartyr, et les réponses très vagues qu’il fournit convainquent rapidement Kalice que son frère d’armes ne joue pas cartes sur table avec elle, ce qui l’attriste fortement. Plus pragmatique, Kartyr a profité de l’échange pour cacher un drone avec micro dans l’échoppe de Treshom, ce qui permet aux enquêteurs de surprendre un échange entre ce dernier et un individu qui ne peut être que le cerveau derrière les derniers attentats. L’imminence d’une nouvelle attaque, dirigée contre un contingent d’ingénieurs humains récemment arrivés sur la station, force K&K à intervenir, et ils se rendent sans tarder jusqu’au domicile de Treshom avec une escouade de Guerriers de Feu pour arrêter le conspirateur. L’intervention se passe à la fois très bien et très mal, pour des raisons diverses. Du côté positif, le coup de filet permet de ramasser, outre Treshom, trois autres membres du réseau clandestin, dont l’instigateur des attentats en personne. Du côté négatif, deux des humains surpris chez le garagiste doublement renégat se révèlent être des hybrides Genestealers, et ne se laissent pas passer les menottes sans opposer une farouche résistance, qui résulte en de nouveaux morts du côté T’au. Ce sont les risques du métier.

Cette petite péripétie n’empêche pas Kalice et Kartyr de faire leur rapport au Conseil, mais à leur grand désarroi, Aun’song et ses séides ne semblent pas réaliser la gravité de la situation, et indiquent aux enquêteurs que leur mission a été accomplie. La chronologie des événements ne permettant pas de mettre au crédit de l’hybride récemment arrêté (et mort en prison quelques heures plus tard, un grand classique) les premiers attentats, et la preuve qu’un Culte Genestealers a infesté la station, sont autant de raisons poussant nos deux flics de choc à ignorer les consignes officielles et à poursuivre leur travail.

Kalice a alors la bonne idée de tourner son attention vers les auxiliaires Vespides présents sur Suu’suamyth, qui sont parmi les seuls occupants de la station n’ayant pas subi de check up médical à leur arrivée du fait de leur physiologie particulière. Il serait donc possible que l’infestation ait pris pied, ou plutôt griffe, sur place par ce biais. Convaincu par le raisonnement de sa collègue, Kartyr utilise son influence de membre de la Caste de l’Eau pour obtenir l’équivalent T’au d’un mandat de perquisition (ça doit s’appeler une Exhortation à l’Etincelante Transparence, je suis sûr) et aller rendre une visite au Ka’Bri’Dan Zchllchk et à ses camarades frelons…

Début spoiler…Vous allez rire, mais cette nouvelle intervention se passe également à la fois très bien et très mal, pour des raisons assez similaires à celles de la précédente opération. Les optimistes ne manqueront pas de souligner que la totalité du Culte Genestealers ayant infiltré Suu’suamyth, et comprenant outre des Humains et Vespides, le membre de la Caste de l’Air ayant accompagné nos héros et leur escorte de Guerriers de Feu sur place, s’est fait neutraliser dans l’intense fusillade qui s’engage peu de temps après l’arrivée des enquêteurs. Même le Patriarche que les cultistes avaient réussi à camoufler dans un recoin de la station finit en nature morte après que les renforts envoyés par le Conseil aient fait parler la poudre le plasma. Les pessimistes, dont Kalice et Kartyr font définitivement partie depuis leur lit d’hôpital, souligneront qu’Aun’song n’a pas vraiment été fair play sur ce coup. Le soutien très rapide dont ont bénéficié nos héros une fois le Culte démasqué était en effet une preuve éloquente de la connaissance de la gravité du problème dont l’Ethéré disposait. Certain que Kalice continuerait à suivre la piste des Genestealers, mais convaincu que lui permettre de monter une opération d’envergure ne ferait qu’attiser la méfiance des cultistes, il a donc fait exprès de clôturer le dossier de manière trop rapide, mettant en danger ses agents pour pouvoir surprendre le Culte. Tout n’est pas rose au pays des petits hommes bleus…Fin spoiler 

AVIS:

Bien que ‘Voice of Experience’ n’appartienne pas à la gamme Warhammer Crime, on retrouve dans cette histoire tous les éléments constitutifs d’une bonne nouvelle d’investigation, l’exotisme d’une station T’au (comparé à une cité ruche comme Varanguata) en plus. J. C. Stearns réussit à nous entraîner dans une enquête rythmée et prenante, ce qui est appréciable, et à approfondir les complexes mais fascinantes relations entretenues par les différentes races constituant l’empire T’au, ce qui est encore mieux et lui donne une superbe occasion de développer le background du Bien Suprême. Si vous êtes nostalgiques de la partie Xenos du Dark Coil de Peter Fehervari (‘The Greater Evil’, ‘Cast a Hungry Shadow’, ‘Fire and Ice’, ‘Fire Cast’, ‘Cult of the Spiral Dawn’), cette nouvelle devrait beaucoup vous plaire. Une vraie pépite comme on en trouve de temps en temps au hasard des recueils de la Black Library.

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Road Rage – M. Brooks :

INTRIGUE:

Road RageNous retrouvons Ufthak Blackhawk, le Boss Ork le plus kool de ce côté-ci de la galaxie, après les événements couverts dans ‘Brutal Kunin’. Désormais lieutenant de Da Meklord, Ufthak est promis à un brillant avenir et gère sa propre bande de Boyz, mais les choses se compliquent lorsque son autorité est contestée par un Speed Freek du nom de Riptoof. Ce dernier reproche au Boss 1) de lui avoir piqué son dragsta pour réaliser la cascade qui l’a fait rentrer dans les annales1 (et ne pas lui avoir rendu après ça), mais surtout 2) de ne pas avoir trouvé une baston digne de ce nom pour occuper les troupes. La Tekwaaagh ! a en effet fait escale sur un monde Exodite, et massacré les Eldars et leurs diplodocus de compagnies en quelques jours. Depuis, c’est l’ennui. Jugeant Ufthak inapte au commandement, Riptoof le défie à la course (mécanisée, bien sûr), et notre héros est assez malin pour comprendre qu’il est dans son intérêt de jouer le jeu, étant entendu que « simplement » tabasser son rival ne lui fera pas gagner de points auprès des autres Speed Freeks qui forment le gros de sa bande.

Ne disposant que d’une journée pour se trouver une bécane digne de ce nom, Ufthak rend visite à son vieux complice, le Mek Da Boffin (toujours monté sur son solo wheel, comme la vraie légende qu’il est), qui lui promet un véhicule pour le lendemain. Et le brikolork tient parole, livrant un beau trukk (avec jantes alliage et roquettes de propulsion) à son Boss, alors que Riptoof concourt dans un nouveau dragsta kustom. L’épreuve consiste en un simple tour du pâté de maison, ou l’équivalent pour des Orks sur un monde vierge, le premier à revenir au bercail remportant la victoire. Lorsque le départ est donné, une dizaine de concurrents s’élance dans un concert de rugissements, Ufthak étant accompagne de son Daniel Elena personnel (le fidèle Mogrot Redtoof), mais également, et ce n’était pas prévu, par le tout aussi fidèle Grot Nizqwik, et le plus fidèle de tous, le Squig Princesse. C’est ça d’être un manager populaire.

Ce qui était encore moins prévu, c’est qu’une partie de chasse Drukhari fasse son apparition en milieu de parcours, et décide de se joindre à la course. Ne supportant pas le manque de respect des Eldars, qui commencent à drifter entre les buggies et les trukks Orks au lieu de simplement leur tirer dessus, Ufthak voit rouge et ouvre le feu sur les malotrus, déclenchant une bataille inter-espèce à 150 kilomètres/heure2. Le destin faisant bien les choses, notre héros se retrouve face au commandant adverse pour un duel au sommet (pendant ce temps-là, c’est Mogrot qui tient le manche), et bien qu’il en perde la main, Ufthak corrige son vis à vis avec l’aide providentielle et plongeante de Princesse, qui coûte un bras au leader Eldar Noir.

La ligne d’arrivée se rapprochant à vue d’œil, Ufthak a la clairvoyance d’utiliser le décor comme tremplin et les roquettes montées par Da Boffin comme booster, pour réaliser un saut qui réduit en compression de César le dernier Raider drukhari, et lui permet surtout de chiper la première place à Riptoof. Verstappen n’a plus qu’à bien se tenir ! Un bonheur n’arrivant jamais seul, la nouvelle se termine sur l’arrivée dans le camp Ork du reste de l’armée des Eldars Noirs, ce qui promet aux Boys désœuvrés une belle bagarre pour se remettre en jambe. Il faut savoir profiter des petits plaisirs de la vie.

1 : Détruire un Titan impérial au corps à corps.
2 : Il le fait en hurlant du Radiorkhead, ce qui est une raison supplémentaire de l’aimer.

AVIS:

Franche réussite que ce ‘Road Rage’ pour Mike Brooks, qui réussit le doublé que tous les auteurs d’œuvres feuilletonnées poursuivent : satisfaire à la fois les lecteurs familiers de la série (ici en prenant soin de faire apparaître presque tous les personnages secondaires de ‘Brutal Kunin’’) et ceux qui n’en ont rien lu avant cette nouvelle (en prenant bien soin de présenter les événements importants des épisodes précédents). Ca a l’air simple sur le papier, mais tout le monde n’y arrive pas, loin de là.

Ajoutons à cela que Brooks est très à l’aise dans l’écriture, là aussi faussement simple, de la littérature ork. On pourrait croire qu’il suffit d’écrire de manière outrageusement simplifiée pour donner le change, mais cela n’est pas suffisant : pour rester compréhensible, il faut au contraire faire attention aux tournures phonétiques utilisées, au point que je suis persuadé qu’il est plus long d’écrire en ork qu’en anglais (ou français) classique. Mike Brooks infuse également le reste de sa nouvelle de tournures et réflexions drolatiquement absurdes, ce qui change agréablement du grimdark auquel les œuvres de GW-Fiction nous ont habitué. Encore plus réussi que ‘Where Dere’s Da Warp Dere’s A Way’ (sauf pour le titre, évidemment), c’est dire !

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Mad Dok – N. Crowley :

INTRIGUE:

Mad DokGhazghkull Mag Uruk Thraka est mort, éparpillé façon puzzle par les bons soins de Ragnar Crinière Noire et ses Space Wolves dans la cathédrale du monde de Krongar. Pour la plupart des autres personnages de Warhammer 40.000, cet état serait définitif, mais pour le prophète de Gork & Mork, il ne s’agit que d’un incident mineur, car l’inégalable Mad Dok Grotsnik a également fait le déplacement, et salive d’avance sur la possibilité qui lui est offerte de littéralement reconstruire Ghazgkull de la tête aux pieds, sans que ce dernier n’ait loisir de rechigner (ce qui peut être dangereux pour le bon Dok).

Cependant, Grotsnik doit composer avec la mauvaise volonté manifeste de ses infirmiers Grots, à commencer par le morveux mais intelligent Drippa, qui se demande bien si cela vaut la peine de sortir le jeu de limes, la perceuse à main et la superglu pour lancer une session de kitbashing de l’extrême alors que les Orks de Krongar sont en train de se faire botter énergétiquement l’arrière-train par les Space Marines encore présents sur la planète, et qu’il ne faudra pas attendre longtemps avant qu’un Nob pas trop bête décide que c’est son tour de devenir le Boss des Boss. Bien tenté de réduire l’impertinente créature en pièces détachées pour lui apprendre le respect, Grotsnik comprend qu’il ne pourra pas arriver à bon port sans l’aide de ses assistants, et choisit donc de résoudre le problème de façon pacifique. Il se met donc à raconter au parterre de Grots l’autre fois où il a réussi à ressusciter Ghazgkull, épisode connu de nul autre que lui.

Cela s’est passé lors du retour des Orks sur Armageddon, et plus précisément lors de l’assaut en sous-marin sur la cité ruche Tempestora. Alors que la côte se profilait à l’horizon (façon de parler lorsqu’on est passager d’un submersible, bien sûr), le soupe au lait Ghazgkull fit une attaque d’apoplexie si sévère lorsque son médecin traitant (toujours Grotsnik) lui annonça qu’il était nécessaire de lui ouvrir le crâne pour réparer les dégâts causés par une vie de guerre (un peu) et les expérimentations sadiques du Dok (surtout) qu’il s’en fit exploser le cerveau. La présence du leader suprême des peaux vertes sur les « plages » du débarquement n’étant pas optionnelle, Ghazgkull lui-même ayant juré qu’il mènerait l’assaut de ses troupes, Grotsnik a dû réaliser une opération d’urgence et dans des conditions loin d’être idéales pour remettre son patient sur pied. Grâce à la complicité de ce bon vieux Taktikus, mis au courant du pépin de santé du boss, et qui inventa un bon gros mensonge pour justifier son absence lors du briefing d’avant bataille (les Blood Axes sont bons pour ça), le Dok parvint in extremis à remettre le cerveau et le cœur (saleté de cholesterork) de Ghazgkull en état, et à réveiller le prophète au moment où quelques Space Marines firent intrusion dans la salle du trône du sous-marin échoué. La suite appartient à l’histoire…

Ce récit captivant fait toutefois remarquer au sagace Drippa que la résurrection de l’increvable Goff semble avoir été en partie causée, une nouvelle fois, par l’intervention providentielle du fidèle Makari. Grotsnik a en effet avoué qu’il a dû utiliser une hampe de bannière pour effectuer le triple pontage express qui a remis en marche le cœur de Ghazgkull dans le money time, et cette bannière n’était autre que le fameux bâton chanceux manié par le Grot porte-bonheur. Cette révélation fait comprendre à Grotsnik que cette nouvelle résurrection ne pourra réussir sans la participation de Makari, porté disparu lors de l’accrochage avec Ragnar. Qu’à cela ne tienne, le Dok connaît un cheat code efficace : une imposition des mains de Ghazgkull a déjà réussi à faire revenir la petite créature d’entre les morts. Et il n’y a pas de raison que ça ne marche pas même si le boss est techniquement mort lui aussi, pas vrai ?

AVIS:

Une nouvelle sympatoche, qui se concentre davantage sur la mentalité Ork (dont Grotsnik s’éloigne souvent, avec sa sale manie de considérer les choses de façon rassionel) que sur l’action à proprement parler. La première moitié de l’histoire est ainsi occupée par le Mad Dok se préparant mentalement à ressusciter sa plus grande création, les choses ne démarrant vraiment que dans la seconde partie, avec la confrontation initiée par le tout aussi rassionel Drippa, et le récit de la seconde revenue d’entre les morts de Ghazghkull lors de la troisième guerre pour Armageddon. On apprend beaucoup de choses sur la relation particulière qui unit Grotsnik et Ghazghkull d’une part (le premier passant son temps à empoisonner ou mutiler le second en douce pour tester sa résistance et se venger de ses sévices), et que Ghazghkull et son fidèle autant qu’immortel Makari d’autre part (il semblerait qu’aucun des deux ne peut vraiment mourir tant que l’autre est en vie). Une lecture tout à fait complémentaire du roman que le même Nate Crowley a consacré au prophète de Gork et Mork, et qui fera plaisir aux fans de la littérature orkoïde, dont Crowley est l’un des dignes représentants contemporains, avec son comparse Mike Brooks.

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His Will – G. Haley :

INTRIGUE:

His WillDescente en rappel de l’épisode précédent, pour ceux qui avaient aqua-zumba ce jour là. Le Macragge’s Honour, vaisseau amiral des Ultramarines et véhicule de fonction de Roboute Guilliman a été capturé par les infâmes Red Corsairs alors qu’il ne faisait que vaquer à ses paisibles occupations. Parmi les membres de l’équipage passé au Chaos à l’insu de son plein gré, on trouve le Frater Mathieu, confident du Primarque et membre du saint ordre des Clochards Acronites. N’étant guère dans sa nature de se tourner les pouces en attendant qu’un stratagème salvateur se déclenche, Mathieu a résolu d’occuper sa clandestinité en célébrant des offices pour les matelots des ponts inférieurs, aidé en cela par le Frère Clydeus (porteur peureux) et le guide estropié Hiven. Malgré l’interdit qui frappe le culte de l’Empereur depuis que les Red Corsairs sont dans la place, et les patrouilles de gardes hérétiques qui sillonnent le Macragge’s Honour, le trio est parvenu à faire son office et à apporter un peu de réconfort moral et spirituel à ses paroissiens.

Alors qu’ils terminaient une messe donnée sous le regard bienveillant mais rendu torve par des lignes de moulage mal placée d’une statue en failcast de l’Empereur, Mathieu et Clydeus sont accostés par une jeune mère (Lyasona), très inquiète par l’état de son fils (Grent). Abandonnant le servo-crâne de Victor Hugo, Hubert Vedrine et/ou Horace Vernet dans sa mallette de transport, les deux hommes accompagnent la malheureuse jusqu’à sa coquette studette, transformée en chambre froide par les facéties du Warp. Comme on peut se l’imaginer, Grent s’est fait un nouvel ami imaginaire lorsque les fusibles de champs de Geller ont sauté, et le démon qui a pris possession du corps du garçonnet n’est pas disposé à vider les lieux. Saleté de squatteurs, décidément. Confiant dans sa capacité à réaliser un exorcisme en bonne et due forme, Mathieu demande à être conduit jusqu’à la chapelle impériale la plus proche, malgré le fait qu’elle ait été vandalisée par les renégats et reste surveillée par ces derniers.

N’écoutant que son courage et son statut de personnage apparaissant plus tard dans la série ‘Dark Imperium’, ce qui lui donne d’excellentes chances de survivre à l’aventure, Mathieu fait fi des conseils de prudence de son acolyte, et commence donc à invoquer son Grand Dieu pour chasser l’entité warpienne de son dernier lieu de villégiature. L’exorcisme suit à peu près le déroulé de la scène iconique du filme du même nom, jusqu’à ce que le démon décide qu’il en a assez entendu, se libère de ses liens et laisse libre cours à son imagination en termes de chirurgie plastique. On se dit alors que la procédure a échoué, et que Grent a passé l’â(r)me à gauche, mais que nenni : l’expérience de sa mort prochaine donne au froussard Clydeus un regain de piété, qui lui permet de couper la chique au démon assez longtemps pour que Mathieu et lui parviennent à le bannir une bonne fois pour toutes après une grande série de bourre-pifs karmiques.

Cerise sur le gâteau récompensant un enchaînement ayant été parfaitement exécuté, l’Empereur en personne apparaît pour s’en battre à l’arrière plan, et poser une main orgasmique sur l’épaule de son fidèle servant, qui tombe logiquement en pamoison. À Clydeus revient le lot de consolation, un peu pourri certes, de devenir martyr impérial en restant dans la chapelle pour permettre à Mathieu et à Grent de s’échapper. Mais il faut croire que Pépé a envoyé un clin d’œil langoureux au séminariste, car ce dernier accepte son sort avec un aplomb impressionnant et un entrain suspect. Notre histoire peut donc se terminer avec la remise du petit patient à sa mère éplorée, cependant que Mathieu devra désormais transporter tout seul son stuff dans les coursives du Macragge’s Honour, ou trouver une b/conne âme pour le faire à sa place. Le service de l’Empereur est sa propre récompense…

AVIS:

Guy Haley joue les prolongations du ‘Dark Imperium’ avec cette petite nouvelle venant s’intercaler entre les deux premiers romans de son arc (si j’ai bien tout suivi). Il va sans dire qu’avoir lu les œuvres en question permet de mieux comprendre, et donc apprécier ce ‘His Will’, mais le propos est suffisamment clair pour que même un novice puisse saisir de ce dont il retourne ici. Parmi les éléments intéressants de cette histoire, on peut retenir la destinée manifeste que Haley donne ou confirme à Frater Mathieu, qui a le privilège peu commun d’être approché par l’Empereur en personne. Le rapide panorama de la situation (presque) normale d’un équipage impérial de bas étage est également appréciable, et permet de réaliser que même sur le vaisseau amiral de Roboute Guilliman, les conditions de vie du serf moyen ne sont pas très Charlie. Le passage sur l’exorcisme permet à Haley de varier un peu le rythme de son récit en introduisant quelques paragraphes d’action, ce qui est une attention louable de sa part. Je nourris seulement quelques doutes sur la « réversibilité » physique d’une possession démoniaque, telle qu’elle nous est présentée ici. Grent se transforme en effet en Grishka Bogdanov l’espace d’un instant, avant de retourner à son état normal comme si de rien n’était. Ce point de détail mis à part, ‘His Will’ est donc une soumission égale à ce que l’on peut attendre de la part de Guy Haley (même si la touche humoristique de l’arc Cawl manque un peu) : solide et plaisante à lire.

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Celestine: Revelation – A. Clark :

INTRIGUE:

RevelationIl n’est certes pas tous les jours facile d’être une idole, et ce n’est pas Sainte Célestine qui vous dira le contraire. Participant à la défense de la planète Machoria, assiégée par une horde de cultistes et démons de Khorne, notre héroïne a fort à faire pour maintenir le moral des troupes intact, mission qu’elle doit assurer seule depuis l’extermination totale1 du contingent de bonnes Sœurs qui l’accompagnaient par ces misogynes de Khorneux. Mais que fait Marlène Schiappa, on se le demande bien. Alors que la vague rouge se prépare à déferler une fois encore sur les positions impériales, Céloche se livre donc à un discours inspirant et à quelques poses martiales pour donner du cœur à l’ouvrage à ses bidasses (avec une conviction apparente qu’elle est loin de ressentir), avant d’enchainer sur quelques bannissements de Sanguinaires malchanceux à grand renfort de sa Lame Ardente.

C’est le moment que choisit son homologue et néanmoins ennemi mortel, Arnokh le Seigneur du Sang, pour lui proposer un duel à mort, histoire de faire un beau cadeau à sa divinité tutélaire. Cette dernière a en effet une sainte horreur des colombes, qui passent leur temps à larguer leurs fientes sur son bon trône de crânes. Voila qui coûte cher en entretien. Après s’être balancés quelques amabilités, le Prince Démon traitant la Sainte de vieille folle aux pigeons, et cette dernière ripostant en lui demandant s’il s’est mis à la musculation (il fait trois fois sa taille et X fois sa carrure) après s’être fait plaqué par Helga Pataki2, les deux adversaires commencent à se mettre sur la tronche, et Célestine a rapidement le dessous.

Malmenée par les horions hacheurs du démon, la Sainte perd du terrain, des points de vie et même un bout d’aile de jet pack, mais gagne en retour quelques visions de son lointain et brumeux passé, à commencer par sa transformation de Redemptia en pénitence en icône impériale. Pour vivaces que soient ces flashbacks, qui se manifestent à chaque fois que notre héroïne se prend une mandale un peu trop appuyée de la part de ce butor d’Arnokh (‘Célestine chine l’armure de Sainte Katherine aux puces’, ‘Célestine passe le kärcher à Aspiria3’), n’aident pas vraiment l’élue de Pépé à tenir en respect son tourmenteur. À deux doigts du renoncement et de la défaite, elle reçoit une dernière illumination/hallucination made in l’Empereur, où la petite part d’humanité qui lui reste lui demande expressément de jeter l’éponge pour arrêter de souffrir et mourir en paix. Cette proposition indigne outrage suffisamment notre égérie pour qu’elle reprenne du poil de la bête, passe en mode mégère pas du tout apprivoisée, réapprenne à voler (ça ne marche pas tout le temps apparemment) et vienne inscrire Arnokh sur le registre des hommes (ou équivalent) battus du Segmentum. Le bannissement du patron remettant en cause la présence des sous-fifres dans le Materium, et allant jusqu’à provoquer une belle éclaircie sur le champ de bataille, c’est une nouvelle victoire qui se profile pour l’Imperium. Merci qui ? Merci Titine !

1 : Cela inclut même les fidèles Geminae Superia lui servant de gardes du corset. Heureusement que leur régénération fait partie de l’abonnement souscrit auprès de Big E.
2 : De la série ‘Hé Arnokh !’ bien sûr. Référence peut-être datée.
3 : Le monde cathédrale dont est originaire Aspirine, la Sainte Patronne des Sœurs Hospitalières.

AVIS:

Je n’attendais pas grand-chose de cette nouvelle sur Sainte Celestine, personnage nommé qui ne m’inspire guère, et je n’ai pas été déçu (malheureusement). Andy Clark nous sert une histoire d’un classicisme absolu, où le.a brave héros.ïne se fait malmener par un méchant vraiment trétékosto, mais finit par l’emporter grâce à son mental à tout épreuve/un sursaut d’orgueil déclenché par un random event/une intervention mystico-divine, et, surtout, son armure de scenarium. Dans le rôle du heel, Arnokh l’armoire comtoise de Khorne accomplit sa tâche (ingrate) sans trop démériter. De son côté, Celestine peut vaguement intéresser le lecteur par ses états d’âme sur la toute puissance de l’Empereur, et ses quelques réminiscences, totalement gratuites en termes de fluff et/ou déjà couvertes ailleurs, ce qui ne fait pas lourd. Mon principal regret est qu’Andy Clark, qui pourtant est le biographe attitré de Madame au sein de la Black Library (‘Celestine : The Living Saint’, ‘Shroud of Night’), n’ait pas exploité le super pouvoir narratif de son personnage, à savoir la capacité de mourir et de revenir à la vie, qui lui aurait permis de donner un peu de suspens à son histoire. Bref, vraiment très peu à tirer de ce crêpage de chignon, ou plutôt, arrachage de frange, sur Machoria, ce qui est un peu triste pour une nouvelle sensée mettre en avant son personnage principal…

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The Moon-Mines of Sciara Lone – D. Ware :

INTRIGUE:

The Moon Mines of Sciara LoneUn joint de culasse fendu force l’escouade de Sœurs de Bataille où sert cette bonne vieille jeune Augusta Santorus à évacuer en urgence le vaisseau qui les ramenait vers Ophelia VII. Coup de chance, la planète où le Heart of Devotion finit par s’écraser possède un satellite, et la flottille de capsules de sauvetage où les quelques survivants de l’accident ont trouvé refuge se pose bientôt à la surface de la lune de Sciara Lone. Accueillies par le Gouverneur Ido en personne, les sœurettes demandent à avoir accès à la chapelle et à l’Astropathe locaux, pendant que leurs vaisseaux sont révisés et leurs accompagnants envoyés à l’hospice pour récupérer. Si l’attitude serviable et débonnaire d’Ido semble mettre immédiatement la revêche Sœur Supérieure Veradis de mauvais poil (en même temps, c’est son état normal), c’est plutôt l’étonnement qui l’emporte du côté d’Augusta (et de sa pote Lucienne). Elle n’arrive en effet pas à croire que des colonies minières de 10.000 habitants puissent exister dans l’Imperium. Ses études ne l’avaient absolument pas préparé à ça, en tout cas, ce qui en dit long sur la qualité de l’enseignement que les novices de l’Ordre de la Rose Sanglante doivent recevoir, moi je dis.

L’ébahissement se change cependant rapidement en désarroi et en colère lorsque la fine équipe arrive à la chapelle, et se rend compte que cette dernière a été abandonnée depuis des lustres. Ce n’est toutefois pas une raison de ne pas rendre grâce à Pépé de ses bienfaits, et une fois la prière achevée, Veradis disperse ses ouailles à travers la colonie. Pendant qu’elle ira envoyer un compte rendu des derniers événements à l’Ordre, Augusta et Lucienne devront retourner au spatioport et garder un œil sur les navettes. Juste au cas où bien sûr. Notre héroïne sent bien que quelque chose préoccupe sa supérieure, mais comme on ne lui a pas donné le droit de poser des questions aujourd’hui, elle se contente d’obéir sans chercher à en savoir plus. « Béni soit l’esprit trop étroit…», toussa toussa…

Bien évidemment, les choses se compliquent rapidement une fois rendu sur place, le personnel du spatioport ne se montrant pas très coopératif malgré les cris stridents et les froncements de sourcil auxquels Augusta a recours pour tenter d’asseoir son autorité. Pire, les Sœurs se rendent compte qu’elles sont encerclées par leurs hôtes, ce qui n’augure rien de bon pour la suite. Avant que la distribution de bourre-pifs ne commence, Augusta a toutefois une révélation en contemplant un transport Aquila faire un créneau dans le lointain : le logo de l’Empereur est tout bonnement absent de tous les uniformes, bâtiments et véhicules de la colonie. Une preuve d’indépendance qui lui semble être encore plus grave qu’une simple hérésie, à tout prendre.

Cette incroyable révélation ayant été faite, la nouvelle passe en mode Smackdown, dans la plus pure tradition de la série. Augusta et Lucienne rossent bellement les nuées de goons qui tentent de les mobber, sans utiliser autre chose que leurs poings et leurs genoux énergisés (c’est beau jeu). A la conclusion d’une cascade osée, qui voit Augusta parvenir aux commandes d’un vaisseau bourré d’explosif menaçant d’ouvrir le feu sur le spatioport, avant de réaliser qu’elle ne sait absolument pas piloter ce genre d’appareil et le crasher en 10 secondes top chrono ; notre héroïne a la bonne idée de tomber dans les pommes, ce qui permet à Danie Ware de boucler son intrigue hors champ. A son réveil, Augusta apprend en effet de Veradis que le Gouverneur a été exécuté et que l’ordre règne désormais dans la colonie. Cette dernière, qui avait rejeté le règne bienveillant de l’Empereur pour miner du bitcoin de l’or et de l’argent et l’écouler sous le manteau, est désormais placée sous l’autorité de l’Ordre de la Rose Sanglante1. En attendant que l’intendance arrive et qu’elle se remette de ses émotions, Veradis donne à sa novice le soin de potasser le Traité de l’Epine pour rester au niveau pendant que le reste de l’escouade partira épurer les indigènes réfractaires. Merci qui ?

1 : Ça explique peut-être d’où vient la tendance d’Augusta à annexer des planètes (voir ‘Mercy’) par la suite de sa carrière.

AVIS:

The Moon Mines of Sciara Lone’ n’est pas l’épisode le plus désolant/distrayant de la série consacrée par Danie Ware à son héroïne fétiche, et se contente d’être assez quelconque tant sur le fond que sur la forme. S’il s’agit de votre première rencontre avec Augusta Santorus, nul doute que vous sortirez assez surpris de cette nouvelle, où on chante beaucoup, catche régulièrement, et où les personnages semblent en peine de prendre les décisions les plus évidentes (Veradis avait grillé depuis le début que quelque chose de louche se passait dans la colonie, mais a trouvé malin de ne pas prévenir le reste de son escouade). Mais si vous êtes un suiveur vétéran de l’Ordre de la Rose Sanglante, tout cela vous semblera bien ordinaire. A son crédit, je dois reconnaître à Ware que l’idée de mettre en scène une communauté humaine « indépendante » est intéressante, en partie parce que ce concept, qui n’est pourtant pas révolutionnaire pour un Imperium s’entendant à l’échelle galactique, n’a été jusque là que très rarement abordé dans la GW-Fiction. Avec seulement quelques pages à consacrer à ce sujet, et une maîtrise assez faible du lore, Danie Ware ne signe pas ici une nouvelle incontournable pour les amateurs de curiosités BLesques, mais démontre à tout le moins qu’elle est capable de sortir des tropes habituels que l’on retrouve à l’œuvre dans les nouvelles de 40K.

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Martyr’s End – A. Worley :

INTRIGUE:

Martyr's EndMême si elle a réussi l’impensable et réintégré les rangs des Sœurs de Bataille (en même temps qu’une armure énergétique) après avoir servi comme Repentia en expiation de ses péchés, la Sœur Supérieure Adamanthea vit toujours avec un sévère syndrome de l’imposteuse (?), persuadée qu’elle est que ses fautes ne pourront lui être pardonnées que dans la mort. Cela ne l’empêche toutefois pas d’être une meneuse charismatique et efficace sur le champ de bataille, son statut de Viventem Miraculum transformant toutes les Sistas de moins de 25 ans dans un rayon de 12 pouces en groupies (ce qui leur donne l’indémoralisable). Déployée dans une campagne contre l’Empire T’au, dont les tactiques de lâche – l’utilisation d’armes de tir – la font tourner en bourrique, elle s’est illustrée par son zèle dans la traque de tous les Xenos passant dans son périmètre, que ces derniers soient les cibles qu’on lui a attribuées ou pas. La nouvelle commence ainsi par un débitage de Kroots en règle, l’Eviscerator qu’elle a conservé de son époque punk semant la mort parmi les pauvres gallinacés.

A faire trop de zèle (un comble pour une Sœur de Bataille), Adamanthea a cependant pris du retard sur l’accomplissement de la mission que lui a confiée la Canonesse Lydia, à savoir l’assassinat du commandant ennemi, qui en bon otaku ne se déplace jamais sans son Exo-armure Crisis. Si une escouade complète de Dominions menée par une psychopathe endurcie maniant une épée tronçonneuse aussi grande qu’elle suffisait logiquement à régler ce problème, la fâcheuse tendance de notre héroïne fâchée à farmer tous les mobs de la map a prélevé un lourd tribut sur ses suivantes, qui ne sont plus que huit au moment où Adamanthea décide d’aller faire la peau au sniper T’au qu’elle voit décamper dans le lointain. Elle venait pourtant de promettre à Lydia de rester concentrée sur son objectif et de se rendre sans délai sur le lieu de l’embuscade. On voit que le télétravail a quand même des effets pervers en termes de management des équipes.

Tout à sa haine pour les Xenos, Ada ne prend pas la peine de monter une stratégie sensée pour assaillir le T’au isolé, et perd la moitié de son escouade sous les tirs du sniper et de ses drones. Elle a toutefois la satisfaction de mettre la main sur le petit homme bleu et de le plaquer violemment sur la paroi de la caverne où il s’était réfugié en lui hurlant dessus « C’EST TOUT CE QUE TU PEUX FAIRE, LOPETTE !? », avant de l’étrangler à mains nues. Féminisme 3.0 ? Je vous laisse juger. Le voile de haine qui obscurcissait ses sens finit cependant par se dissiper, lui faisant réaliser à quel point sa conduite erratique et ses décisions irréfléchies ont causé du tort à ses Sœurs, trop contentes de côtoyer une presque sainte pour mettre en question son commandement incertain.

Pour ne rien arranger, Lydia rappelle Adamanthea pour l’informer que le commandant T’au a dépassé le point où elle était censée le prendre en embuscade, et a commencé à dégommer les aéronefs impériaux passant à sa portée. Une Valkyrie s’écrase à proximité pour illustrer les dires de la Canonesse, et plonger notre héroïne dans les abîmes du remords. Intimant l’ordre à ses dernières Dominions de retourner au bercail, elle se met en tête de réparer ses torts en solotant l’Exo-armure, ou, plus probablement, en mourant glorieusement dans la tentative. Et ça tombe bien, car qui arrive en voletant de rocher en rocher ? Le grand Schtroumpf en personne…

Début spoiler…Adamanthea n’avait cependant pas réalisé à quel point elle était populaire parmi les Sistas, puisque son escouade revient sur ses pas et ouvre le feu sur le Gundam de 40K, s’attirant ses foudres son plasma, mais permettant à la Sœur Supérieure d’arriver au contact de l’énervante machine. S’engage alors un combat physique aussi bien que mental, qui finit par une posture peu commune pour la littérature de la BL : Adamanthea, juchée à l’arrière de l’Exo-armure, et tentant de toute ses forces de lui arracher la tête à main nue, pendant que le commandant T’au enclenche le mode « taser de surface » pour griller l’insistante mais insaisissable furie collée à sa carlingue. A ce petit et stupide jeu, la foi absolue d’Adamanthea (et sa résistance à la douleur) finit par triompher, laissant la Crisis désorientée et son pilote à portée de gantelet. Un crochet du droit bien envoyé plus tard, le Xenos rejoint le Bien Suprême et Adamanthea est libre de se replier vers le QG impérial, emportant avec elle la Sœur Iris, qui a miraculeusement survécu à l’arsenal du leader T’au. Cela fait beaucoup de points de foi claqués d’un coup, mais cela en valait certainement la peine.Fin spoiler

AVIS:

Les Sœurs de Bataille se cherchaient depuis longtemps un auteur de la Black Library à même de rendre justice à leur zèle et leur ferveur incomparables, et leurs prières ont été entendues par l’Empereur (ou par Nottingham, ce qui revient au même). Alec Worley démontre en effet avec ‘Martyr’s End’ sa parfaite compréhension de la psyché particulière de cette faction, en mettant en scène une ex-Repentia dont la rage de vaincre donnerait des complexes à un Berserker de Khorne. Sœur Adamanthea est un savant mélange de brutalité maniaque1 et de découragement profond, et la dévotion totale qu’elle inspire à son escouade, quand bien même sa capacité à donner des ordres sensés est logiquement questionnée par ses ouailles, est pour moi une des représentations les plus inspirées que j’ai pu lire de l’état d’esprit des guerrières de l’Adeptus Sororitas. Pour ne rien gâcher, Worley parvient à garder un vrai suspens jusqu’au bout de son histoire, la recherche d’un glorieux martyre d’Adamanthea rendant plus que probable sa mort au combat. Une nouvelle d’action sans compromis et authentiquement grimdark, à conserver et vénérer comme une sainte relique par les fans des Sistas.

1 : Mais crédible d’un point de vue fluff, même quand elle décapsule une exo-armure T’au à mains nues. Une différence notable avec une certaine Augusta Santoris, je dois dire.

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Ghosts of Iron – M. Collins :

INTRIGUE:

Ghosts of IronOù nous suivons la Magos Domina Calliope Vartothex, accompagnée par les Skitarii Tyr 4-2 et Kappa-Ix, dans sa tentative audacieuse de prendre possession d’un Titan Warlord tombé en rade sur la planète de Sareme, le Furore Martis, ou Fury of Mars en bon anglais. On ne saura jamais précisément ce qui est arrivé à ce monde forge à la suite de l’ouverture de la Cicatrix Maledictum, mais il est indéniable qu’une part significative de la population locale a cédé aux sirènes du Chaos, et sombré dans la pire des hérésies, la techno-hérésie. Calliope et ses deux side-kicks bien abîmés sont les seuls survivants de l’expédition montée par l’Archmagos Groal pour remettre en service le Fury, et il est certain, alors que les trois rescapés arrivent péniblement au pied du pied du Titan, qu’ils ont une bande d’héréteks sur les talons (et bientôt dans le talon, mouahaha). Le Warlord ne paie pas de mine, planté au milieu du désert comme un conifère sur un marché de Noël, mais ne semble pas en trop mauvais état de prime abord, ce qui donne une raison à Calliope d’espérer.

Cependant, on ne peut pas juger un Titan en inspectant sa carrosserie (une adaptation d’un vieux proverbe datant du Moyen-Âge technologique), comme le trio de mécanos ne tarde pas à le comprendre. Le premier à finir en pièces détachées, ou plutôt compressées, est le brave Kappa-Ix, écrasé par une porte blindée alors qu’il boîtait en direction de ses comparses. Sa disparition tragique attriste beaucoup (et c’est étonnant, au vu de la faction à laquelle il appartient) Tyr 4-2, mais les deux martiens n’ont pas de temps à perdre s’ils veulent tenter de sortir le Fury de sa léthargie… ou le détruire. Quitte à tout prendre, c’est toujours mieux que de laisser le Mechanicus Noir mettre ses sales pinces sur une machine de destruction de la taille d’un immeuble. Cherchant à jauger de l’humeur de l’esprit de la machine, Calliope se branche le cortex au premier port USB venu, mais n’arrive pas à voir autre chose qu’un Titan qui arpente des random champs de bataille en hurlant à tue-tête. Assez logique quand son prénom est Fury, vous me direz.

Un peu plus haut dans les étages, la Magos et son garde du corps tombent sur un Enfant du Chaos, qu’ils devinent être les restes fusionnés d’une partie de l’équipage. Un bref combat s’engage, au terme duquel la team bioniques vient à bout de la limace en rut. Jugeant inutile d’aller s’enquérir de l’état du Princeps et des ses Moderati, probablement tout aussi en forme que leurs petits camarades, Calliope décide que la meilleure chose à faire est de se rendre jusque dans l’Enginarium, où un diagnostic définitif du Fury pourra être réalisé (et une euthanasie mise en œuvre, si nécessaire).

En chemin, cette tête de linotte de Magos manque de pénétrer dans une salle piégée, ou son équivalent titanesque, et ne doit son salut qu’à l’intervention chevaleresque de Tyr 4-2, qui prend sa place au dernier moment et la pousse en dehors (me demandez pas comment c’est possible, j’ai fait ES au lycée, pas STI). Ce quiproquo permet à Collins de se débarrasser d’un nouveau personnage, Tyr tyrant sa révérence après que le caisson vitré dans lequel il s’est retrouvé enfermé se remplisse… d’un liquide très chaud. Je choisis de penser qu’il s’agit de fromage fondu, mais je vous laisse faire votre propre interprétation. Laissée seule aux commandes par la force des choses, Calliope décide qu’il n’est plus temps pour les demi-mesures et pénètre finalement dans l’Enginarium avec la ferme intention d’abréger les souffrances du Fury, et les siennes par la même occasion… mais le Titan n’est pas d’accord et refuse d’entrer en surchauffe, comme le lui a demandé.

Une héroïne organique aurait bêtement et stupidement pété un câble à la suite de cet échec (les héréteks sont en train de gratter à la porte de l’Enginarium à ce moment de l’histoire), mais la Magos Calliope est fait d’un autre bois, ou plutôt, métal. Elle se rebranche donc à l’esprit de la machine, et finit par crier plus fort que lui, jusqu’à le convaincre de coopérer pour empêcher les bad guys de remporter la partie. Ceci fait, elle relance le protocole de surchauffe du réacteur du Titan, et se paie même le luxe de corriger la horde de galapiats qui venait lui conter fleurette à grands coups de hache énergétique et de serpenta dans les augmétiques, jusqu’à ce que le Fury of Mars finisse par exploser. Victoire morale pour l’Omnimessie.

AVIS:

Pour sa première nouvelle pour la Black Library, Marc Collins s’attaque à un sujet casse-gu*ule s’il en est : l’Adeptus Mechanicus. Il n’est en effet pas facile de concilier le gloubi-boulga cryptotechnique qui se doit d’apparaître dans tous les récits où le protagoniste mange des Mars (askip) avec la clarté nécessaire à l’exposition convenable d’une intrigue digne de ce nom. Quelques auteurs de la BL sont arrivés à résoudre cette conjoncture du cercle, mais Collins n’en fait pas (encore) partie. On se retrouve donc avec une leeeeeeente exploration de l’intérieur d’un Titan Warlord corrompu, émaillé des pertes de personnages qui vont bien, de scènes d’action très classiques et de quelques passages en P.O.V. titanesque, idée intéressante de prime abord mais dont Collins ne fait rien de bien fifou (<JE SUIS PAS CONTEEEEEEEEEEENT :((( >). Le résultat n’est pas honteux, loin de là, mais il est très loin d’être enthousiasmant, et c’est tout de même problématique.

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Last Flight – E. Albert :

INTRIGUE:

Last FlightLorsque le vaisseau amiral de la flotte chaotique (#ManoWar mon amour) sévissant sur la planète océanique de Sagaraya est forcé de voguer vers le Sud pour éviter une tempête qui pourrait lui être fatale, le haut commandement impérial n’hésite pas une seconde à envoyer une escadre de Maraudeurs torpiller cette cible stratégique. Le Commandant Baruch Neriah fait partie des heureux élus mis sur le coup, mais son enthousiasme est modéré par des considérations bien prosaïques lorsque le plan est révélé en salle de briefing. Le porte-avion chaotique se situe en effet à 7.000 kms de la flotte impériale, et un Maraudeur ne peut voler que 10.000 kms avant de tomber en rade de fuel. Si on fait les maths, cela signifie que les appareils loyalistes auront de bonnes chances de finir par le fond, et leurs équipages perdus en pleine mer avec l’espoir ténu d’être localisés par les auspex de la Navy.

Cela n’empêche bien sûr pas le Spirit of Ste Pascale1 et ses hommes de partir en mission, car tel est leur devoir. Après un vol d’approche pendant lequel l’épisode le plus dangereux fut la transe collective causée par la contemplation de l’infinie bleuté sagarayette, le brave petit Maraudeur arrive en vue de l’immensité métallique qu’est le porte-avion chaotique (pensez à une Arche Noire druchii, doublez la taille et vous aurez une bonne idée de la taille du bouzin), défendu par une nuée de chasseurs ainsi que par une flotte de vaisseaux trop contents d’intercepter les torpilles que l’escadre impériale destine à sa proie. Au terme de quelques acrobaties dont il a le secret, et grâce à l’héroïque sacrifice d’un autre Maraudeur kamikaze, Neriah parvient à loger sa torpille dans une voie d’eau de la coque du porte-avion, provoquant une explosion cataclysmique et le naufrage de ce dernier. Cette bonne chose étant faite, il est maintenant temps de rentrer au bercail…

…Comme prévu, cette partie de la mission ne se passe pas superbement. Amoché par les combats et victime d’un réservoir percé, le Spirit doit amerrir bien avant d’arriver en vue de la flotte, forçant l’équipage à troquer leur fier oiseau contre un bête canot pneumatique, équipé de deux rames et d’un transpondeur marchant sur piles. Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, les impériaux commencent à pagayer en direction du salut (et son fameux port), mais se font voir par une Valkyrie chaotique rendue SBF (Sans Base Fixe/Flottante) par le naufrage du porte-avion. Mauvais joueur, le pilote renégat descend au ras des flots pour abattre les impériaux à bout touchant, mais attire ce faisant l’attention d’un des grands carnassiers qui hantent les mers sagarayaises, et se fait gober sans sommation par le léviathan. Ce n’est toutefois pas la fin des ennuis pour Neriah et ses hommes, qui sont jetés par-dessus bord par la vague accompagnant la retombée du monstre marin. Ce dernier étant venu avec des potes, seul le Commandant finit par émerger, dans une situation encore pire que précédemment. Il faut cependant croire que l’Empereur existe et qu’il a apprécié le service rendu par Neriah, car le pilote fini par être localisé et récupéré par un appareil impérial, après qu’il ait dessiné une aquila avec le planton fluorescent qui vient s’égayer en surface durant les nuits sagarayiennes. Quelle poésie.

1 : Petite ref au Spirit of St Louis, l’avion utilisé par Lindbergh pour traverser l’Atlantique.

AVIS:

Edoardo Albert fait court mais efficace avec ‘Last Flight’, qui condense en quelques pages et à la sauce 40K la plupart des grands événements de la campagne pacifique de la 2nde Guerre Mondiale (à commencer par le raid Doolittle sur Tokyo). J’ai particulièrement apprécié que l’auteur n’ait pas cherché à nous survendre les phases de combats aériens1 – que je trouve assez incompréhensibles la plupart du temps – et se soit concentré sur « l’avant » et « l’après » du raid à proprement parler (une recette que Gav Thorpe avait aussi employée dans ‘Acceptable Losses’, une autre histoire de Maraudeurs). Cela permet de se familiariser avec les personnages avant qu’ils soient pris dans le feu de l’action (et meurent, la plupart du temps), et donne également un aperçu des dangers annexes d’une mission « océanique », à savoir la chance bien réelle de ne pas retrouver son point d’attache avant que les réservoirs ne soient vides, et les formes de vie peu sympathiques qui attendent les aviateurs en rade. Pas la plus 40K des nouvelles, j’en conviens, mais bien maîtrisée et donc plaisante à lire quoiqu’il en soit.

1 : Ce n’est à mon avis pas un hasard si je trouve les nouvelles de l’Aeronautica Imperialis qui mettent en scène des Maraudeurs (bombardiers) plutôt que des Thunderbolts (chasseurs) plus intéressantes à lire. Slow and steady win the race and the reader’s attention…

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Night Shriekers – J. Woolley :

INTRIGUE:

Night ShriekersLe jour de gloire est arrivé pour les jeunes pilotes Marina Maranova et Alena Nazova. Après avoir brillamment fini leurs classes, elles vont rejoindre la 2.588ème escadre de combat de la Navy impériale, surnommée les Night Shriekers. Il ne s’agit pas une référence à un obscur film Terran du début du M3 (tristesse), mais un clin d’œil aux nocturnadons, une sorte de pterodactyles croisés avec des tarsiers, natifs de la planète de Raskova et plus grands prédateurs ailés de cette dernière. Depuis que l’Empire T’au a engagé une campagne d’annexion de Raskova quelques mois plus tôt, les forces impériales ont eu fort à faire pour repousser les infâmes peaux bleues, et les pertes ont été lourdes du côté de l’Aeronautica Imperialis. Cela n’empêche pas la commandante des Night Shriekers, Tamara Groneva, de faire tester toutes les nouvelles recrues par des pilotes expérimentées avant de les envoyer en mission. Par un heureux hasard, Marina et Alena sont sélectionnées par l’as des as Nina Yakleva pour faire leurs preuves lors du même exercice. Il s’agira pour chacune des recrues de seconder leur chaperon dans une simulation de deux contre deux, Marina et Nina étant opposées à Alena et Zina (une autre vétérane blanchie sous le harnais). Je vous promets que c’est tout pour les noms slaves pour cette nouvelle.

Ce qui n’aurait dû être qu’une innocente simulation prend cependant un tour détestable lorsque Marina décide d’ignorer les instructions de Nina lors de leur opération conjointe, et d’y aller au talent comme on dit par chez nous. La Lieutenant ne goûte que moyennement à l’insubordination de cette arrogante rookie et met immédiatement fin à l’exercice, mais la franche remontrance à laquelle Marina pouvait s’attendre une fois revenue à terre est remise à plus tard lorsque quelques Barracudas T’au décident de violer l’espace aérien impérial, et de prendre en chasse les quatre Thunderbolts. Surprises et surclassées par la technologie Xenos, les Night Shriekers sont contraintes de coopérer pour se sortir de ce guêpier, mais avec des résultats peu probants : Zina se fait incinérer dans l’explosion de son appareil, et Alena doit s’éjecter en catastrophe au-dessus du no man’s land après que le sien ait été endommagé par les chasseurs ennemis. Etant un peu responsable de ces deux tragédies à cause de sa tendance à vouloir prendre des shoots sans trop réfléchir, Marina est submergée par le remord après son retour à la base, mais Nina lui remet les idées en place d’une bonne baffe amicale #Sororité. C’est comme ça que le métier rentre.

Malgré l’annulation de la mission de secours d’Alena par un Colonel de la Garde Impériale trop pusillanime pour son propre bien, nos héroïnes ne sont pas du genre à se laisser abattre, ni à laisser des pilotes abattues à la merci de l’ennemi. Avec la complicité de Groneva, Marina et Nina profitent donc d’une enlèvement envahissement pour dérober une Valkyrie à leurs petits copains de la Garde et partir récupérer Alena sous le couvert de la nuit.

Pour ne rien arranger, cette dégourdie d’Alena a trouvé le moyen d’atterrir dans une zone de combats entre T’au et impériaux, ce qui oblige vite Nina à démontrer l’étendue de son talent de pilote. Malgré une rencontre tendue avec une escouade d’Exo-Armures Stealth (et son armement à plasma), les trois Banshees parviennent à rentrer à bon port – avec une jambe en moins pour Alena, cependant – et se paient même le luxe de secourir les forces impériales d’un largage de missiles Hellstrike bien senti. Bien évidemment, des sanctions disciplinaires sont prises à leur encontre, mais six semaines plus tard, Marina et Nina sont de nouveau prêtes à voler pour la plus grande gloire de l’Imperium. Take my breath awaaaaaaayyyyy…

AVIS:

Justin Woolley livre une nouvelle de pilotes de l’Aeronautica Imperialis très honnête, et plutôt crédible dans sa mise en scène des combats aériens (en plus de nous donner du Thunderbolt et de la Valkyrie) avec ce ‘Night Shriekers’. Malheureusement pour lui, je trouve ce genre de soumissions particulièrement insipide, et notre homme n’est pas assez bon conteur pour me faire changer d’avis. Si c’est votre came, allez-y les yeux fermés (ou peut-être pas, c’est dur de lire comme ça), mais c’est un « bof » sans appel de mon côté.

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The Shapers of Scars – M. Collins :

INTRIGUE:

The Shapers of ScarsDans l’infirmerie du Wyrmslayer Queen, la Reine Guerrière de Fenris (surtout) et Capitaine Libre Marchand (un peu) Katla Helvintr passe un sale moment. Ayant fait l’erreur de tendre l’autre joue dans un concours de crachat d’acide, notre héroïne donne du fil à retordre et des points de suture à poser à son équipe médicale, qui s’affaire pour sauver ce qui peut l’être de sa carnation délicate et de sa chevelure luxuriante. La situation est tellement grave que la vieille Bodil (à ne pas confondre avec sa sœur, Bursul), gothi fenrissienne tout ce qu’il y a de moins scientifique, a été appelée à la rescousse. Entre deux jets de runes en os (non désinfectées, j’en suis sûr) et prophéties mystiques sur le destin de Katla, qui finira soit dévorée par les Tyranides, soit étranglée par un ver de terre – c’est écrit –, Bodil trouve le temps de sortir son matériel de tatouage et commence à gribouiller sur le visage de sa Jarl, soit disant pour lui donner la force de vaincre le mal qui la hante, mais plus sûrement pour se venger de la dernière demande d’augmentation refusée par cette pingre de Katla. On se console comme on peut.

Pendant que la Tin-Tin du 41ème millénaire dessine des élans sur le front de sa patiente, nous remontons le temps pour comprendre comment cette dernière s’est retrouvée dans cette position peu enviable. La série de flashbacks que Marc Collins intègre dans son récit nous permet de suivre Katla dans ses œuvres, qui consistent principalement à sillonner le vide à la recherche d’adversaires de valeur à combattre. Drôle d’activité pour un Libre Marchand, mais après tout, certains tiennent visiblement à jouir de leur liberté plus que de leurs marchandises, et comme ils ont un mot d’excuse signé par Pépé en personne, nous ne sommes pas en droit de leur demander des comptes sur l’usage qu’ils font des ressources de l’Imperium. La cible du Wyrmslayer Queen se trouve être un vaisseau tyranide esseulé par la dispersion de sa flotte ruche, mais que sa soudaine solitude ne dissuade pas le moins du monde d’attaquer son traqueur bil(l)e en tête. Bien aidée par le désir manifeste et palpable de la Jarl de Fenris de régler l’affaire au corps à corps plutôt que par salves de missiles interposées, la bioconstruction Xenos arrive à portée de tentacules, et envoie quelques nuées de cafards enragés à l’abordage de son tourmenteur. Voilà une situation bien engagée et tout à fait optimale pour les impériaux, comme chacun peut en juger.

Short story shorter, Katla emmène sa bande joyeux huscarls à la rencontre de l’infestation tyranide qui s’oublie sur la moquette du troisième pont, et finit par croiser le fer avec un Prince particulièrement caustique et affligé d’un gros problème d’acné. À trop faire la maline avec ses hachettes viking, elle finit par percer le bouton de trop, et se fait asperger d’un acide autrement plus corsé que celui qu’elle a pris avant de se ruer à la bataille. Cela ne l’empêche pas de finir l’impudente bestiole proprement avant de faire une petite pause coma bien méritée, et la suite nous est connue. L’histoire se termine par le réveil de Katla, qui trouve le tatouage tribal que la fidèle Bodil lui a fait sur la moitié de la tronche méchamment bath. C’est ce qui s’appelle faire contre mauvais profil bon cœur.

AVIS:

Petite histoire très simple (j’aurais pu résumer le propos en trois phrases sans omettre grand-chose d’important) au nom très compliqué, ce ‘The Shapers of Scars’ intrigue et déçoit à égales mesures. Pour commencer par les reproches, je me désespère de lire encore des affrontements spatiaux complètement stupides car physiquement abscons après 30 ans de publications 40K. Ici, nous rencontrons le cas d’école de l’auteur n’ayant pas intégré qu’une bataille spatiale se déroule à une échelle de centaines de milliers de kilomètres, et pas à portée de jet de chaussure (ou ici, de tentacules pour les Tyranides et de harpons pour les impériaux1), ce qui est à mon avis un héritage néfaste des derniers Star Wars. Reconnaissons au moins à Collins d’avoir de la suite dans les idées, car mettre en scène une héroïne tellement obnubilée par le pugilat qu’elle abandonne son rôle de commandante en pleine bataille pour aller jeter des javelots à la gu*ule de pauvres Gaunts dans les coursives de son propre navire, accompagnés d’hommes de main équipés comme des Burgondes du haut Moyen Âge, est d’une originalité rafraichissante par rapport au reste du corpus de la Black Library. Il faut de tout pour faire un Imperium, même des Fenrissiens bas du front et des auteurs en roue libre.

Si on est d’humeur plus charitable, on peut s’interroger sur les raisons qui ont poussées Collins à être si spécifique dans le choix de ses protagonistes, la rencontre entre « cultures » Rogue Trader et Space Wolves dans une nouvelle de quelques pages ne se justifiant à mes yeux que si ‘The Shapers of Scars’ est le prélude à une œuvre plus conséquente. Certains auteurs de la BL, Dan Abnett et Aaron Dembski Bowden en tête, ont déjà prouvé qu’il était possible de réaliser des fusions plus improbables que celle-là de façon convaincante, et au final à donner plus de substance et de saveur au gigantesque patchwork socio-culturo-politique qu’est l’Imperium. Il se pourrait donc que nous recroisions Katla Helvintr et la bonne Bodil dans un futur proche, hypothèse d’autant plus plausible que Marc Collins est toujours dans l’attente d’un premier roman pour la BL, et que les créneaux Rogue Trader et Space Wolves ne sont pris par personne en ce moment. Faîtes vos jeux.

1 : Imaginez un peu la longueur, donc la place et le poids, de la chaîne nécessaire pour qu’une telle arme puisse « ferrer » une cible et la ramener à bon port. Déjà que sur un Titan, c’est limite, mais sur une frégate…

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Et voilà qui conclue cette revue de Only War, anthologie certes copieuse et ne manquant pas de nouvelles intéressantes, mais à mon sens trop desservie par le manque de contextualisation apportée par les éditeurs de la Black Library (et l’Empereur sait que certaines histoires auraient méritées qu’on précise qu’elles s’inscrivent dans un arc plus large) pour être pleinement satisfaisante. J’ai trouvé le recueil Conquest Unbound, sorti au même moment pour AoS, beaucoup plus abouti dans son approche éditoriale (et légèrement supérieur en termes de qualité moyenne), et la comparaison avec le dernier des Inferno!, au contenu 100% 40K, n’est pas non plus en faveur d’Only War. Ce recueil reste toutefois d’un rapport quantité-prix quasiment imbattable, et fera la joie des vétérans de la BL à l’affût de bonnes affaires pour garder le fil des derniers développements apportés à la franchise en matière de courts formats, mais il y a fort à parier que sa lecture fasse lever quelques sourcils chez les nouveaux-venus, et c’est fort dommage.

INFERNO! PRESENTS THE EMPEROR’S FINEST [40K]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue d’un nouveau format infernal!, consacré comme le nom l’indique aux meilleurs plus fins de l’Empereur. Les plus observateurs parmi vous auront reconnu que ce titre ressemble fortement à celui de la précédente publication infernale, dédiée aux saints ordos (critique ici), et cette comparaison est en effet appropriée. Les douze nouvelles qui composent cette anthologie sont liées par un thème commun, mais assez large il faut le reconnaître: elles sont consacrées en premier lieu aux forces d’élite1 de l’Imperium (donc – presque – pas d’Astra Militarum ici).

Inferno! presents the Emperor's Finest

Là où ‘The Emperor’s Finest’ diffère de son prédécesseur inquisitorial est dans la (presque2) totale nouveauté de son contenu (alors que la Black Library avait refourgué les nouvelles de l’Inquisition Week dans le sommaire de ‘The Inquisition‘), ce qui fait du présent objet une bien meilleure affaire d’un point de vue purement financier. Les deux bouquins étant vendus au même prix (11.99€), il est logique de préférer douze nouvelles inédites à onze nouvelles ne l’étant pas toutes. J’ajoute que cette ligne éditoriale rapproche ‘The Emperor’s Finest’ de l’esprit des premiers Inferno!, dont le but était de permettre à de nouveaux talents de faire leurs débuts dans le monde impitoyable de la GW-Fiction. Même si nous sommes passés d’un bimensuel contenant des comics et du fluff en plus de quelques nouvelles à d’authentiques recueils de courts formats (et uniquement cela), publiés à un rythme irrégulier par la maison d’édition de Nottingham, il est réconfortant de constater que cette primauté à la nouveauté semble être de nouveau la philosophie dominante pour les Inferno!3.

Le même constat domine à la lecture du sommaire, où l’on retrouve une majorité de contributeurs peu ou pas connus à l’heure actuelle, dont quelques uns (Collyer, Bridgeman, Teintze, Modine) qui font, si je ne m’abuse, leurs premières armes dans cette anthologie. Cela étant dit, on retrouve aussi des pointures du calibre de Wraight, Stearns et Kelly, ce qui fait de ‘The Emperor’s Finest’ un bel échantillon de la large communauté des auteurs travaillant pour la BL. Maintenant que le décor est planté, allons voir si Pépé avait la qualité littéraire en tête lorsqu’il a établi la liste de ses meilleurs serviteurs…

1 : Comme Richard Garton-Wills, l’éditeur de la BL en charge de l’avant-propos du présent ouvrage, le souligne bien. Désolé pour les Gardes Impériaux.
2 : ‘The Last Word’ ayant éta publié dans l’anthologie ‘The Long Vigil’.
3 : Je vous que j’ai eu peur lorsque j’ai vu que la BL avait flaggé le mythique « Inferno ! » sur deux anthologies constituées à 100% de rééditions. Certes, ces nouvelles venaient de numéros d’Inferno !, mais come on dudes, respectez-vous.  

Inferno_The Emperor's Finest

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Blighted Sun – M. Collins :

INTRIGUE:

Le Frère d’Epée Adhemar emmène l’escouade de Black Templars qu’il a recueilli à la sortie de la cantine dans une mission pas loin d’être suicide à la surface de la planète Nyadus, située dans le système de Mytra. Orbitant inconfortablement près de son soleil, Nyadus est un désert hostile à toute vie, mais que l’Imperium a tout de même colonisé pour y miner du bitcoin des minéraux. Pendant que le reste de la croisade dont ils dépendent se bat ailleurs dans le système contre les forces du Chaos, Adhemar et les boyz cherchent à mettre la main sur la Némésis du premier, le sorcier Ilicus. On ne saura jamais vraiment ce que ce triste sire a fait de terrible pour mériter tant d’attention de la part de notre héros, mais Adhemar n’en démord pas : Delenda Ilicus illico presto.

Si le Frérot de la Rapière est hyper motivé à corriger du faquin, il est cependant un peu moins bon en lecture de carte. Il ordonne ainsi au pilote du Thunderhawk qui véhiculait sa fine équipe (Osgar, Alberic, Godric, Holdt et le novice Sigurd) de se poser en plein désert… parce qu’il a senti que ça chauffait. Si si, c’est vrai. Une bonne idée sur le papier – on sait que les Black Templars ont un instinct très développé – mais qui ne tarde pas à se retourner contre les hardis Space Marines, surpris à découvert par l’aube torride de Nyadus. A partir de là, la nouvelle se transforme en course d’arcade, notre haineuse bande de psychopathes étant obligée de foncer droit devant elle pour rester dans l’ombre et ne pas finir carbonisée par la lumière de ce môôôôdit soleil (d’où le titre, pour info), coûte que coûte. Le hic, c’est que le Warp est à l’œuvre à la surface de ce caillou minable, et Adhemar et Cie en sont quitte pour se coltiner un affrontement avec les démons des Quatre Affreux, en commençant par Khorne et en terminant par Tzeentch. Pas de quoi effrayer les templiers énergétiques cependant, qui ne perdent qu’un seul des leurs (Holdt) pendant les préliminaires.

Quelques pages et kilomètres plus loin, les survivants essoufflés tombent enfin sur Ilicus, occupé à compter des grains de sable entouré des cadavres torturés des mineurs de Nyadus. Il ne s’agissait cependant que de la cinématique de lancement au combat de boss, le fourbe sorcier disparaissant dans un éclat de rire machiavélique, et envoyant deux miniboss démoniaques (une sorte de bête de Nurgle avec des ailes de condor, et un Prince Démon ayant tiré le don « couinement porcin » sur le tableau d’apothéose) attendrir les loyalistes. Le combat qui s’en suit voit deux Black Templars rejoindre l’Empereur, ne laissant qu’Adhemar, Sigurd et Godric prêts à finalement affronter Ilicus. Malheureusement pour le Chaos, son champion préfère lancer un sort d’effacement littéraire sur Godric (qui disparaît purement et simplement de la nouvelle) que de renforcer son aura de paralysie. Il paiera cette grossière erreur de son bras, puis de sa tête, après que les deux Space Marines rescapés se soient mis suffisamment en colère pour retrouver le contrôle de leurs membres. Petite surprise : c’est le jeune Sigurd qui s’illustre particulièrement dans ce dernier combat, ce qui lui vaut une recommandation enthousiaste de la part d’Adhemar pour passer au grade d’initié. THE EEEEEEND (et c’est pas trop tôt).

AVIS:

Marc Collins a un faible pour les Black Templars1, mais malheureusement, c’est un point faible. Il n’y a pas grand-chose à sauver de cette nouvelle de bolt (et sword, soyons honnêtes) porn, très peu inspirée dans l’ensemble mais qui parvient tout de même à surprendre – en mal – au détour d’une péripétie fade et/ou téléphonée. Je reste convaincu que les paragraphes entiers consacrés par l’auteur à relater les émotions de son héros, ou à nous servir des dialogues fleurant bon la série B(lack Templars) auraient été mieux utilisé à contextualiser davantage la mission entreprise par Adhemar, et la haine tenace qu’il voue à Ilicus. Certes, il ne faut pas grand-chose à un descendant de Sigismund pour détester un sorcier du Chaos, mais il aurait été de bon ton de nous expliquer pourquoi cette traque méritait absolument d’être couchée par écrit. La lecture de ce ‘Blighted Sun’ m’a fait regretter l’époque où les auteurs de la BL cherchaient à proposer quelque chose à leur lectorat lorsqu’ils choisissaient de mettre en avant les zélés Templiers : le ‘Words of Blood’ de Ben Counter reste à ce jour la référence de ce point de vue.

1 : Il a déjà consacré une nouvelle avant ‘Blighted Sun’ à ce Chapitre, ‘Champions, All’.

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Fidelis Ad Mortem – J. Reid :

INTRIGUE:

Nouvellement promue Sœur Supérieure, Zillah de l’Ordre de la Rose de Sang1 emmène son escouade essuyer les plâtres dans une mission d’exploration d’un vaisseau pensé perdu dans le Warp, et redécouvert il y a quelques semaines à proximité d’un point de Mandeville. Le but de cette escapade sera de retrouver une précieuse relique, précédemment sous la garde de la mentor de Zillah, Hélène (avec les bons accents, c’est assez rare pour le noter), et qu’elle ramenait vers la forteresse de l’Ordre lorsque le Fidelis a disparu. Rendue nerveuse par ses nouvelles responsabilités, Zillah regrette de n’avoir pas eu le temps de faire un peu de team building avec ses hommes, euh, femmes, enfin on se comprend, avant ce premier déploiement. Elle peut toutefois compter sur la présence de son amie de noviciat, Adelphia, qui a sans doute raté son propre grand oral pour désormais se retrouver sous les ordres de sa camarade. Le casting est complété par la vétérane Medina (experte du lance-flammes), et les trois novices Amrit, Nicaea et Rosslyn.

Après avoir marché un bout de temps dans les coursives désertes et ténébreuses du Fidelis en direction de la cathédrale où la relique est, en toute logique, sensée se trouver, nos braves Jeannettes se retrouvent face à une intersection qui n’a pas lieu d’être, d’après les plans du vaisseau que Nicaea a téléchargé sur son auspex. Avant que qui que ce soit ait eu le temps de faire une blague sur la capacité de la gent féminine à lire une carte, l’attention de la petite troupe est attirée par les râles sonores d’un individu non identifié, à proximité du carrefour fatidique. Après inspection, il s’avère que le responsable de ce vacarme est le Navigateur du bord (Octavian Lunaro), qui confirme aux Sistas leurs craintes : le Fidelis a été victime d’une invasion démoniaque et tous ses passagers ont été emportés dans le Warp pour danser la macarena, sauf lui. En guise de lot de consolation, Elle lui a tout de même arraché tous les yeux (les trois), ce qui a l’air de lui faire plaisir, mais dégoûte suffisamment Zillah pour qu’elle euthanasie l’éclopé sans autre forme de procès.

Il était de toutes façons temps de passer aux choses sérieuses, et une première vague de démons, ici des Démonettes, s’abat sur l’escouade. Si cette dernière arrive à gérer sans trop de problème les escort girls du Prince du Chaos, l’arrivée d’une Bête de Slaanesh vient compliquer les choses. Bilan des courses : une blessée (Medina) et une morte (Nicaea), qui réussit tout de même à emporter avec elle l’abomination, en la nourrissant d’une grenade krak de sa blanche main.

Un petit tour à l’infirmerie pour poser des pansements et boire du mercurochrome (c’est comme ça qu’on s’en sert au 41ème millénaire), et les survivantes repartent en direction de la cathédrale. Arrivées devant les portes closes, le son lointain d’un cantique angélique met les Sœurs sur leur garde. Cela pourrait être une fourberie de l’ennemi… ou une playlist restée en mode repeat. Qui peut dire ? Dans le doute, Amrit parvient à convaincre sa supérieure d’emprunter les coursives qui passent en dessous de la nef pour arriver directement devant l’autel, et ainsi éviter d’éventuels ennemis. Tactique lâche et pas très héroïque (il faut s’imaginer l’escouade progresser à quatre pattes dans l’entresol), et qui ne sert au final à rien puisque personne ne les attendait, mais qui permet tout de même à la fine équipe d’arriver dans le saint des saints.

A première vue, il n’y a qu’un tas de cadavres impériaux ayant chèrement vendus leur vie contre des vagues de démons, mais ni relique, ni Hélène. Cette futée de Zillah a toutefois la bonne idée d’ouvrir la porte de la chapelle adjacente, où se trouve…

Début spoiler…Hélène en train d’utiliser la relique pour maintenir à distance une… Gardienne des Secrets (?), qui se présente comme étant la Dame des Vides (avec un -s, oui oui2), et profite de l’intervention généreuse mais mal avisée – Hélène arrivait très bien à gérer les choses jusqu’ici – de Zillah et de ses Sœurs pour faire du vilain. Au bout d’un combat littéralement assourdissant (la Dame hurle si fort que tout le monde perd 30% d’audition), et au cours duquel la belle vieille Hélène se fera perforer par une pince démoniaque, la Giga Démonette s’empale le bedon sur l’épée de la statue de l’Empereur qui veillait à l’arrière-plan, apportant la victoire à Son équipe. Zillah a juste le temps de dire adieu à sa chère tutrice, et se faire rabrouer deux fois de trois secondes pour sa peine, que le rideau tombe sur Hélène, et peu de temps après sur la nouvelle. Je ne sais pas si a star is born, mais Augusta Santorus a trouvé à qui parler chanter…Fin spoiler

1 : Eh oui, c’est une collègue de la renommée Augusta Santorus…
2 : Conceptuellement, c’est étrange : est-ce qu’il peut exister plusieurs vides différents ? Je suis sûr que Tzeentch a rigolé au nez de Slaanesh quand il lui a soumis l’idée.

AVIS:

A l’aune des standards fixés par Danie Ware, cette nouvelle de Sœurs de Bataille de l’Ordre de la Rose de Sang est plutôt qualitative, en cela qu’il ne s’y passe rien de susceptible de faire défaillir un lecteur un tant soit peut attaché au fluff et à la vraisemblance1. C’est tout de même un niveau d’exigence assez bas, quand on y pense. Malheureusement, Jude Reid ne parvient pas à faire beaucoup mieux que ça, son récit initiatico-exploratorio-démoniaque ne cassant pas trois pattes à une colombe (un volatile plus approprié à notre propos que le classique canard). Reste à voir si Zillah aura une carrière comparable à celle de sa (tristement) célèbre camarade…

1 : Si on veut chipoter, on peut se demander comment Hélène a réussi à tenir

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Knife’s Edge – B. Teintze :

INTRIGUE:

Equita Myles est une agente de l’Officio Assassinarum, avec une spécialisation plus originale que la moyenne1 : elle est rattachée à la clade Venenum, et accomplit donc ses missions en empoisonnant ses cibles. Envoyée sur le monde minable de Galu IV pour unsuscribe to life le meneur d’une faction sécessioniste seulement connu sous le nom du Recteur, elle se tient particulièrement sur ses gardes malgré la facilité avec laquelle elle infiltre la ville où est censée se trouver sa cible. En cause, le fait que le Temple Callidus a envoyé un de ses agents (Nirra) régler son compte au Recteur il y a cinq ans, et que sa collègue a disparu sans laisser de traces ni accomplir son forfait…

La petite cité de Kerheim n’est pas sans avoir ses particularités, comme elle le découvre bientôt. La principale est sa taxe d’eau potable, dont tous les citoyens doivent s’affranchir pour pouvoir puiser à la fontaine locale (sculptée pour représenter un Empereur2 en train de pleurer toutes les larmes de son corps, probablement après que Malcador l’ait battu au rami), la seule dispensant une eau propre à la consommation. Equita remarque tout de suite que le précieux liquide est infusé d’un puissant tranquillisant, utilisé par le Recteur et ses sbires pour garder la population sous contrôle. Son prochain arrêt est la cathédrale de Kerheim, où doit se tenir un festival présidé par le Recteur le soir même. Cherchant à approcher sa cible pour pouvoir glisser des roofies dans son eco cup, Equita a la surprise de voir sa mission lui être littéralement tendue sur un plateau, un vieil intendant lui ordonnant d’aller porter le thé de son excellence à l’étage. C’est un petit peu trop facile, tout de même…

Début spoiler 1…Et en effet, l’Alfred de Kerheim était en fait Nirra (sous polymorphine, évidemment), qui n’était pas au courant de l’arrivée d’une concurrente sur Galu IV, et essaie donc de régler son compte à Equita, ayant bien vu que la mystérieuse petite vieille dont elle avait pris l’apparence cachait quelque chose sous ses jupons. Au bout d’un combat engagé, le malentendu est levé et les deux agentes décident de coopérer pour mener à bien leur mission commune. C’est tout du moins ce qu’Equita veut faire croire à Nirra, le manque d’efficacité dont la Callidus a fait preuve la faisant apparaître comme suspecte aux yeux de l’intègre Venenum.

Pour sa défense, Nirra a bien supprimé le Recteur, mais elle s’est aperçue que sa mort n’allait pas être suffisante pour ramener Galu IV dans le droit chemin. Elle a donc endossé son identité, et cherche depuis lors un moyen pour assassiner tous les fidèles du défunt, afin de mettre fin à cette rébellion de bas étage. L’arrivée d’Equita est une aubaine pour elle, la maîtrise des poisons de sa nouvelle meilleure amie permettant d’opérer plus rapidement qu’un coup d’épée C’tan à la fois. Elle emmène donc la Venenum jusqu’à la citerne de la fontaine de Kerheim, l’endroit parfait pour planquer des pastilles de mort au Grox…

Début spoiler 2…Seulement, Equita n’est pas d’accord. A ses yeux, Nirra a outrepassé ses ordres et sa fonction en demeurant sur place au lieu de se contenter de tuer le Recteur. Un désaccord professionnel entre Assassins ne se terminant généralement pas par une engueulade devant la machine à café, mais bien par un duel à mort (possiblement devant la machine à café), on a le droit à un crêpage de chignon en règle entre Equita et Nirra. Bien qu’ayant initialement la main haute dans le combat grâce à ses talents d’acrobate, cette dernière oublie que les Venenum ont les dents longues et les canines creuses, et se fait mordre à la gorge alors qu’elle venait narguer sa compétitrice, après lui avoir broyé le bras dans une machine.

Le poison injecté par Equita paralyse Nirra, avant de la placer sous son contrôle, et notre héroïne profite de la situation pour faire d’une pierre deux coups : obligeant la Callidus à reprendre l’apparence du Recteur, elle l’envoie faire de la figuration à sa petite fête, puis lui injecte une deuxième dose dont les effets secondaires incluent une combustion spontanée et explosive, rasant la cathédrale de la carte, et tous ceux qui s’y trouvaient avec. Voilà qui vérifie une nouvelle fois l’adage : surtout ne jamais prendre d’initiative.Fin spoiler 

1 : Et une attitude vraiment très cool vis-à-vis de son job. Elle affirme ainsi dans le plus grand des calmes qu’elle ne se souvient de pas grand-chose de son entraînement.
2 : Rebaptisé Seigneur Peacemaker par les habitants du cru. C’est John Cena qui doit être content.

AVIS:

On peut remercier Breanna Teintze pour avoir signé ce qui est, sauf erreur de ma part, la première nouvelle mettant en vedette un Assassin du culte Venenum. Et on en a ici pour notre argent, les modes opératoires et les gadgets propres à cette sous-faction étant mis au centre de l’histoire, ce qui est à mon sens ce à quoi doit ressembler une nouvelle centrée sur ce type de personnage. Ma seule doléance concerne le « pourquoi » plutôt que le « comment » de ‘Knife’s Edge’, les « explications » données par Nirra sur les raisons qui l’ont poussée à prolonger sa mission pendant cinq ans et le contre-argumentaire mobilisé par Equita pour faire cavalier seul ne me semblant pas d’une limpidité totale. Le solde reste toutefois positif pour Teintze.

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Suffer not a Human to Live – G. G. Smith :

INTRIGUE:

Le Navigateur Espern Locarno a manifestement fâché quelqu’un d’influent dans la petite affaire familiale. Catapulté commercial en chef (de lui-même) à Precipice, et chargé de trouver des nouveaux partenaires commerciaux pour exploiter la Forteresse Noire attenante, il doit affronter l’hostilité non déguisée, et carrément phlegmatique dans certains cas, des représentants de l’Ecclésiarchie locale, guère amicaux envers un mutant tel que lui.

Alors qu’il était parti se changer les idées en dégustant un thé au Starbucks du coin (il y a et il y aura toujours un Starbucks dans le centre-ville, c’est un choix de civilisation), il est abordé par la capitaine Lavitica et son garde du corps Lorkan, chargés par ce qui tient de conseil municipal à Precipice de faire la lumière sur une série de meurtres perpétrés dans la cité. Les victimes étant toutes des humains, la suspicion de nos fins limiers repose logiquement sur l’importante diaspora Xenos tolérée à Precipice, mais ils ne seraient pas contre une contre-expertise réalisée par un authentique Psyker pour creuser le dossier. Après avoir expliqué qu’il n’avait pas vraiment ce type de pouvoir (mais en fait un peu si quand même), Espern accepte d’accompagner L&L jusqu’au lieu de la dernière attaque, et de jeter un œil au cadavre mutilé qui s’y trouve encore. Lorsque Lavitica lui remet la griffe de guerre qui a été utilisée pour accomplir ce noir forfait, le Navigateur a la vision de l’assaillant au moment où le crime a été commis. Surprise : l’individu semble avoir des tentacules, ce qui devrait normalement innocenter les Kroots (qui utilisent les griffes de guerre). Autre signe distinctif : la haine absolue qui s’émane de l’assaillant, et qui manque de faire vomir notre héros dans son casque. Un sort pire que la mort si vous voulez mon avis.  

S’étant piqué d’intérêt pour l’affaire, Espern décide d’aller visiter Krootown, ou quelque chose s’approchant, afin de rassembler de nouveaux indices. Sur le chemin, il est invectivé deux fois. La première par le prêcheur Matteus Seppault, qui malgré son aversion pour les mutants, cherche à avoir davantage d’informations sur les attaques ayant visé ce qu’il considère être sa congrégation. Fin de non recevoir polie mais ferme (comme son heaume) de la part d’Espern. La seconde, qui peut être considérée comme une authentique agression, par le traqueur Kroot Grekh, que quelqu’un a alerté qu’un sorcier allait venir faire du vilain dans son quartier. Après avoir calmé l’ardent palmipède, Espern lui donne à voir la griffe de guerre qui a servi pour tuer la troisième victime, et reçoit la confirmation qu’il s’agit d’une contrefaçon vendue aux (rares) touristes de Precipice, et pas une authentique arme kroot. Voilà qui devient intéressant…

Début spoiler…Alors que l’ambiance dans la ville se rapproche doucement mais sûrement du pogrom xenophobe, Espern décide d’aller rendre une visite de courtoisie à Seppault. Grâce à ses pouvoirs psychiques, il parvient à leurrer les gardes qui interdisent l’accès aux appartements du prêcheur, et profite de l’absence de ce dernier pour faire main basse sur ses tiroirs. Il ne lui faut pas longtemps avant de trouver d’autres griffes de guerre planquées sous ses caleçons, ce qui prouve de manière irréfutable, en tout cas pour notre héros, que c’est l’Ecclésiarchie qui est derrière cette série de crimes. Le motif en est simple : pouvoir utiliser ces meurtres pour justifier une purge de Precipice de sa population Xenos.

Bien évidemment, Seppault et sa bande de goons se pointent avant que le Navigateur ait pu s’éclipser, et le prêcheur décide de faire participer le fouineur à sa combine en le transformant en la quatrième victime du griffeur des bas-fonds. N’étant pas homme à se salir les mains avec la basse besogne, Seppault a eu recours aux services d’un arco-flagellant pour la partie opérationnelle de son plan (ce qui explique les « tentacules » et la HAINE ressentie par Espern dans sa vision), qu’il garde enfermé dans sa chambre d’amis, et qu’il invite à entrer pour faire plus ample connaissance avec son nouveau copain.

C’est à ce moment que Lavitica et Lorkan débarquent tous flingues dehors, et sauvent les miches du Navigateur en descendant l’arco-flagellant et l’escorte du prêcheur. Ce dernier aurait subi le même sort sans l’intervention d’Espern, qui convainc ses acolytes de ne pas faire du prêcheur un martyr. A la place, le Psyker utilise ses pouvoirs, décidément nombreux et variés, pour laver le cerveau du zélote et le convaincre de réorienter sa croisade moraliste : plutôt que les Xenos, ce sera désormais le Chaos l’ennemi à abattre, et nous quittons Seppault sur une touchante prêche pour aller purger la Forteresse Noire de sa corruption. Pas sûr qu’il arrive à recruter des bénévoles cette fois-ci… La nouvelle se termine avec Espern qui invite Grekh à boire un verre, en attendant d’être présenté à un Libre Marchand des connaissances de Lavitica, un certain Janus Draik. Ce nom vous est peut-être familier…Fin spoiler

AVIS:

Alors que tout le monde avait enterré Blackstone Fortress1, la Black Library publie ce qui semble être un fond de tiroir oublié lors de la mise en forme de l’anthologie ‘Vaults of Obsidian’, où ‘Suffer not a Human to Live’ aurait eu toute sa place. Pour la défense de Nottingham, on peut avancer que cette nouvelle ne ressemble pas au reste du corpus BF, puisqu’elle se passe à l’extérieur de ladite Forteresse Noire, et tient plus de l’enquête policière (Warhammer Crime, anyone ?) que de la quête pour les incommensurables richesses – défendus par de tout aussi incommensurables dangers – cachés dans Obsidienne Land.

Cette différence marquée ne rime cependant pas avec travail bâclé, Gavin G. Smith nous livrant une histoire tenant la route (même si l’identité du commanditaire, à défaut du coupable, qui est elle, un peu plus surprenante) pour sa longueur en pages, et ayant de plus le bon goût d’introduire un des personnages principaux de Blackstone Fortress dans le fluff romancé de ce micro-univers. Mon seul grief, ou interrogation, fut de constater que cette nouvelle n’a rien à voir avec ‘Suffer not the Unclean to Live’, écrite par un autre Gavin (Thorpe) il y a plus de vingt ans. Le clin d’œil aurait été sa-vou-reux.

1 : Cette chronique est écrite en Novembre 2022, et la dernière extension pour ce jeu est sortie en Septembre 2020.

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The Last Word – P. Kelly :

INTRIGUE:

Où l’on suit une kill team de la Deathwatch dans sa tentative de désorganiser les forces des T’au opérant dans le système d’Atazuga en assassinant l’Ethéré qui chapeaute les opérations du côté du Bien Suprême. Comme à chaque fois, les surhommes viennent de Chapitres différents, et comme à chaque fois, on a le droit à des petites frictions entre Astartes, causées par le choc des cultures. Rien de bien méchant ici, le Space Wolves de service (Braejac) se moquant gentiment de la dévotion du Novamarine Kolos (accessoirement, le personnage central de l’histoire) envers le saint Codex Astartes. On a aussi un Iron Hands très fort en pilotage et en mécanique, un Scar Lord (Caegros) qui en veut à mort au T’au d’avoir exterminé son Chapitre – ça se comprend –, un joyeux drille sans attache particulière (Diamendros), le tout placé sous le commandement d’un Obisdian Glaive (Orendu). Voilà pour le générique.

Le plan établi par nos héros consiste à rester planquer dans la soute d’un vaisseau humain affilié au Bien Suprême pour se rapprocher du vaisseau de leur cible, faire les derniers milliers de kilomètres (c’est grand l’espace) à bord de leur Corvus Blackstar, et de partir à l’abordage comme les pirates des temps jadis. Cette stratégie d’une rafraichissante simplicité est remise en question par le fait que le transporteur qui les a pris en stop n’a finalement pas les bons mots de passe, ce qui force la Deathwatch à sortir le bout de son museau plus tôt que prévu, et à devoir zigzaguer entre les tirs T’au, qui ont bien compris qu’on essayait de la leur faire à l’envers. Rien que Va’kaan (l’Iron Hand) n’est pas capable de gérer bien sûr. Le Blackstar se pose sur le Resplendent Dawn, et la fine équipe a tôt fait de se frayer un chemin jusqu’à l’intérieur du vaisseau, même si Kolos se fait une frayeur en partant en vol plané dans l’espace après s’être pris un tir de baby railgun dans le dos1.

La suite, et la fin (déjà), de la nouvelle n’est qu’une succession de combats très peu équilibrés entre les colosses en céramite et le service de sécurité de l’Ethéré. En désespoir de cause, ce dernier vient proposer un accord à ses agresseurs : s’ils lui laissent la vie sauve, il épargnera la population humaine de la planète Olovakia, récemment colonisée par le Bien Suprême, et jure de quitter le système d’Atazuga en prime. Cela afin de préparer la défense contre la prochaine vague de Tyranides qui menace les dernières acquisitions de l’empire T’au, et que l’Imperium a plutôt intérêt à voir triompher. Malgré les appels à la clémence de Kolos, qui est un natif d’Olovakia et est donc partial en la matière, la Deathwatch ne négocie pas avec les terroristes, et l’Ethéré finit avec une hache énergétique plantée dans le torse. Jeu, Sep’t et Match pour l’Imperium2.

1 : Il s’en sort grâce à un cheat code : il demande à l’Iron Hand de calculer le vecteur de tir de bolter qui lui permettra de repartir vers le vaisseau. Trop facile.
: On peut donc supposer que le dernier mot auquel le titre fait référence est « ouille ».

AVIS:

Petite nouvelle d’action sans beaucoup d’ambition, mais écrite convenablement (et surtout, raisonnablement courte) par un Phil Kelly qui en profite pour mettre ses T’au bien-aimés en vedette, ‘The Last Word’ mérite sans doute la lecture pour quiconque d’intéresse aux travaux que l’auteur a consacré aux petits hommes bleus de 40K. On retrouve ainsi quelques mentions à d’autres événements couverts dans le Kelly-verse (c’est peut-être un peu T’au pour lancer le concept, mais je vais lui laisser le bénéfice du doute) dans ces quelques pages, comme le Chapitre des Scar Lords dont Caegros fait partie, et dont on retrouve le Maître dans la nouvelle ‘Redemption on Dal’yth’. Pour les autres, et comme je doute que Phil Kelly consacre beaucoup de temps à relater la suite des trépidantes aventures d’Orendu et de ses Montres de la Mort, donc si ce genre de littérature vous intéresse, je ne saurais trop vous conseiller de vous diriger vers le vétéran Steve Parker, qui a, lui, démontré à maintes reprises qu’il s’agissait de sa faction de cœur.

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Reconsecration – A. Bridgeman :

INTRIGUE:

Astryd, une jeune Sœur de Bataille de l’Ordre du Cœur Valeureux, participe avec son escouade à une mission d’escorte d’un Inquisiteur de l’Ordo Hereticus (Tormun), envoyé sur la planète minière d’Hadrea pour enquêter sur les signes de rébellion manifeste de ses habitants. Après avoir refusé de payer la dîme impériale pendant quelques temps, ils ont en effet reçu la visite, pas vraiment amicale, d’un régiment de Gardes Impériaux, dont le Militarum est depuis sans nouvelles. Il n’en fallait pas plus pour que l’Imperium déroule le grand jeu et abatte sa carte maîtresse : un Inquisiteur (avec Servo-Crâne, tout de même) et 10 Sistas. Tremblez hérétiques, votre fin est proche.

On comprend rapidement que l’ambiance à la surface d’Hadrea est effectivement au libertarisme absolu, nos pugnaces héroïnes devant commencer la nouvelle en reprenant un temple impérial à une horde d’hostiles, composée en partie de mineurs et en partie de Gardes Impériaux renégats. Ayant perdu une des leurs dans l’accrochage, victime d’un kamikaze et de sa grenade krak, les Sœurettes ne sont pas d’humeur très charitable au moment d’interroger le prêcheur local (Ingor Previs), qui a miraculeusement réussi à échapper à la vindicte populaire alors que le reste de la planète sombrait dans l’hérésie.

La confession de Previs doit cependant être remise à plus tard, une nouvelle foule en colère menaçant de prendre d’assaut le temple où les Sœurs et l’Inquisiteur se sont barricadés. Bien qu’étant très largement surclassés en effectifs, la confiance règne du côté des zélotes, qui placent toute leur espérance dans le saint ratio, et parviennent effectivement à repousser sans mal ni perte les émeutiers. Il s’agissait toutefois d’une simple diversion de la part de ces derniers, qui profitent de la confusion pour kidnapper le prêcheur et l’Inquisiteur, que la Sœur Supérieure (Minnerva) avait relégué dans l’antichambre, le temps de gérer les impondérables. C’est la boulette.

Astryd et compagnie empruntent donc le tunnel utilisé par les hérétiques pour perpétrer leur forfait afin de leur reprendre la possession du ballon de l’Inquisiteur, ce qui les amènent dans les mines exploitées par les colons d’Hadrea. Alors qu’elles s’enfoncent profondément dans les galeries, des signes de combat et d’étranges marques sur les murs se présentent à leurs yeux…

Début spoiler…Quelques étages plus bas, elles surprennent le fourbe Previs et quelques copains très occupés à mener une cérémonie sacrificielle, dont Tormun est le récipiendaire. Une bonne rafale de bolter plus tard, tout est rentré de l’ordre, au grand désespoir de Previs, qui avoue, avant de rencontrer une fin bien méritée, que ce sacrifice avait pour but d’apaiser les « démons des mines », qui se trouvent être, je vous le donne en mille, des Necrons. Les détonations des bolt ayant visiblement perturbé leur sommeil, les Xenos envoient un Spectre Canoptek, puis deux, puis trois, puis des nuées de scarabées, puis une Mécarachnide, puis Frank (un unique Guerrier Necron) se plaindre auprès des bruyants locataires du dessus. D’abord bien décidés à tenir la ligne contre les abominations Xenos, Tormun and the girls décident, après plusieurs pertes et en voyant le niveau de leurs munitions baisser dangereusement, de battre en retraite.

En fin de compte, les Sistas parviennent à sortir de la mine avec une escouade pas encore tout à fait descendue à mi-force (ce vieux Frank réussissant tout de même à sniper Minnerva alors qu’elle s’apprêtait à embarquer dans le Rhino de fonction), et les survivantes jurent de purger tous les Necrons de la galaxie, en honneur de leurs camarades défuntes. Il faudra calculer ce ratio là, ça risque d’être marrant…Fin spoiler

AVIS:

Amanda Bridgeman marche dans les pas de Danie Ware en choisissant de consacrer sa première nouvelle de GW-Fiction aux exploits martiaux des Sœurs de Bataille. N’ayez crainte, braves gens, la newbie se sort de cette épreuve de manière beaucoup plus convaincante que son aînée, et cela fait plaisir de voir une escouade de Sistas combattre de manière Codex Approved, c’est-à-dire en utilisant en priorité ses bolters et armes lourdes, au lieu de foncer au corps à corps pour mettre des baffes à des ennemis qui devraient pouvoir les briser en deux d’une seule main. Alléluia. Cette satisfaction évacuée, il reste que ‘Reconsecration’ n’est absolument pas original dans son propos, et se trouve être une nouvelle d’action comme la BL nous en a prodigué des centaines depuis sa création. Mettons cependant ce classicisme sur le dos d’une volonté de Bridgeman de prouver aux éditeurs de la BL sa capacité à servir la soupe faire le job dès ses premiers pas dans la carrière, une inclinaison compréhensible de la part d’un nouveau contributeur cherchant à se faire une place au soleil.  

Plus embêtant à mes yeux est le choix de l’antagoniste principal, qui ne s’accorde que très mal avec le comportement digne de cultistes chaotiques de la population d’Hadrea et des Gardes Impériaux, qui sont pourtant censés en avoir vus d’autres et bénéficier de l’endoctrinement nécessaire pour ne pas devenir xenophiles au premier rayon Gauss venu. Même si on peut mettre cette faute de fluff sur le compte de sa possible méconnaissance du lore, Bridgeman aurait pu mieux faire ici. Au chapitre des griefs, je rajouterai un style parfois lourd, comme la répétition de la prophétie macabre du premier goon tué par Astryd en début de nouvelle, pas moins de huit fois au cours des pages suivantes le dénote. Bref, c’est beaucoup mieux que ce à quoi Danie Ware nous avait habitué ces dernières années, mais ce n’est pas (encore) intrinsèquement bien.

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In the Name of Victory – J. S. Collyer :

INTRIGUE:

Alors qu’elle menait ses charges déblayer une tranchée en prévision d’un prochain assaut Xenos sur les lignes impériales, l’Arbitrator Pondaris fait la connaissance d’un des Légionnaires Pénaux ayant la chance et l’honneur de servir sous ses ordres, le serviable <inspire profondément> Kyinlyinham Arminia Nikifynabylin Nam, ou Niki pour les intimes. Très doué pour les réparations mécaniques, il remet en état la carabine laser de sa supérieure, et accepte de lui raconter son histoire peu commune.

Né sur le monde de Kyunia, placé sous la protection du Chapitre des Storm Lords, Niki a d’abord cherché à devenir un Space Marine, comme tous les jeunes garçons de sa planète. Toutefois, son potentiel comme artisan fut vite détecté pendant les phases de sélection, et il finit affecté à l’armurerie du Chapitre, où il gravit rapidement des échelons. Attaché aux services du Capitaine Justus, Niki (rebaptisé Gallio pour l’occasion) eut l’honneur de se voir confier l’entretien de l’armure énergétique de l’officier, une tâche cruciale dont il s’affranchit brillamment, allant jusqu’à sauver la vie de son boss grâce à quelques améliorations bien senties apportées à la cuirasse. Les responsabilités de Niki s’étendaient également jusqu’au tuning de l’armure de Justus, et il fut ainsi chargé d’inscrire la rare et honorifique Epée d’Argent sur l’épaulière du Capitaine, après que ce dernier eut fait preuve d’une bravoure insensée lors de la campagne d’Arkania.

Hélas, cette situation harmonieuse ne devait pas durer : l’attention des Storm Lords se fixa sur Kyunia après qu’une insurrection s’y soit déclarée, et Justus mena la brutale opération de pacification qui vit la planète revenir dans le giron de l’Imperium. Tous les hilotes et serviteurs du Chapitre issus de ce monde furent placés en détention et longuement interrogés pour déceler d’éventuelles traces de sédition, mais Niki bénéficia d’un traitement de faveur grâce à l’intercession de Justus. En échange d’un complet reniement de ses origines, ce qui supposait l’effacement de ses tatouages tribaux et l’oubli de son nom kyunian, il lui serait permis de reprendre ses fonctions au sein de l’armurerie. Prenant l’air buté de l’hilote pour oui, Justus le laissa partir de la cellule où il était enfermé, et reprendre les travaux de réparation de sa précieuse armure…

Début spoiler…Une décision qu’il ne tarda pas à regretter lorsqu’il se rendit compte que l’insolent Niki avait mis à profit le temps qui lui avait attribué pour restaurer la précieuse Vici Solis pour enlever tous les marquages, honneurs et autres free hands qui l’ornait. Et comme tout le monde était jusqu’ici cool avec le fait que Niki travaille uniquement de mémoire, et n’ait pas fait de photos de son travail pendant toutes ses années de service, Justus fut bon pour participer au défilé de la victoire de la campagne d’Arkania dans une armure aussi basique que celle du premier Frère de Bataille venu. LA HON-TEUH.

Ce crime de lèse-Astartes ne pouvant pas rester impuni, Niki fut envoyé finir ses jours dans la Légion Pénale la plus proche, ce qui explique sa présence sur le champ de bataille d’Envictus Prime. Jugeant que l’histoire était bonne (et drôle, sans doute), Pondaris honore l’esprit frondeur de son sous-fifre en lui donnant le droit d’ajouter une dernière syllabe à son nom, en reconnaissance de son sens de la justice chevillé au corps. La nouvelle s’achève sur le sourire de celui qui peut désormais se faire appeler <inspire profondément> Kyinlyinham Arminia Nikifynabylin Nam-Ran… mais Niki c’est bien aussi.Fin spoiler

AVIS:

Très intéressante soumission de la part de J. S. Collyer, qui donne la parole à un type de personnage très peu couvert dans la littérature 40K jusqu’alors : les hilotes attachés aux Space Marines, et sans qui les Anges de la Mort devraient faire la guerre en caleçon. L’exploration à laquelle elle se livre des relations complexes pouvant exister entre ces travailleurs de l’ombre, leurs puissants protecteurs, et les artefacts sacrés dont ils doivent s’occuper, est passionnante, et donne envie de lire plus de textes de GW-Fiction écrits depuis la perspective de cette classe laborieuse1. En plus de cela, Collyer se paie le luxe de créer une culture de manière très convaincante en l’espace de quelques pages, ce qui est la marque des grands raconteurs d’histoire. Un talent à suivre, sans nul doute.

1 : Aaron Dembski-Bowden a également exploré cette voie dans sa trilogie Night Lords, avec le personnage de Septimus.

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Wings of Faith – V. Hayward :

INTRIGUE:

Alors qu’elle rêvait de sa jeunesse de pilote d’ULM//réalisatrice de documentaires animaliers sur sa planète natale de Zephyris, la Lieutenant Bren Tonor est brutalement réveillée par le bruit des combats aériens au-dessus de la base impériale de Sannan II. Il lui faut quelques instants pour se souvenir que son Lightning a été inexplicablement abattu alors qu’elle ramenait son escadron au garage après une mission de routine, et ne peut assister impuissante au massacre de ses camarades, dégommés comme des pigeons par les systèmes de défense de la forteresse. Elle-même accrochée par son parachute à une spire quelconque, elle ne peut rien faire d’autre que jurer vengeance au nom de ses morts, et ramper péniblement à l’intérieur du complexe pour tenter de mettre les choses au clair.

S’il apparaît rapidement et indéniablement qu’une bonne partie des forces déployées par l’Aeronautica Imperialis est passée au Chaos (tendance Khorne, au vu des tendances sanguinaires des quelques bad guys qu’elle croise pendant sa progression), tant la raison que la vitesse de cette radicalisation restent un mystère pour Bren… et le resteront jusqu’à la fin de la nouvelle. Pour retourner le couteau dans la plaie, notre héroïne réalise que sa propre héroïne, la Vice-Maréchale Maiken Lennard, n’a pas été victime, mais instigatrice de cette rébellion, et est donc responsable du massacre de son escadron. C’est ce que lui gargouille à l’oreille un Techno-Prêtre mutilé (Kaiber Wrasse) avant qu’elle ne mette fin à ses souffrances. Ayant appris qu’un régiment de Gardes Impériaux était sur le point d’arriver dans la forteresse pour soutenir l’effort de guerre de Sannan II, Bren doit maintenant tout faire pour empêcher un nouvel Isstvan V.

Heureusement pour elle, elle peut compter sur une bonne étoile brillante comme une supernova, qui lui permet tout d’abord d’être sélectionnée par Lennard en personne pour faire partie de son escadron de la mort, alors qu’elle s’était rapprochée de la salle de briefing des traîtres avec le blouson qu’elle avait piqué à un des leurs dans son excursion commando. Elle coiffe sur le poteau une autre pilote d’élite (Saffyr – dont on entendra plus parler), et s’attire les foudres du ténébreux Krozman (qui devait sans doute être le +1 de Saffyr, vu comme il le prend personnellement). Lennard ayant envie de se dégourdir les ailes, surtout depuis qu’elle a remplacé son bête Lightning de fonction par un appareil chaotique custom (tellement hype qu’il n’existe pas en figurine à ce jour), les angry élus prennent le chemin du tarmac, et se lancent dans l’azur pour… attendre l’arrivée des Gardes Impériaux. Pas le meilleur plan quand voler nécessite du carburant, mais passons.

Pour Bren, c’est l’occasion d’aller détruire un système de relai de coordonnées positionné près de la base, et dont les traîtres auront besoin pour descendre les appareils loyalistes. Bien qu’ayant essayé de s’éclipser discrètement (en initiant un concours d’acrobaties aériennes, cela dit…), elle se fait griller par Krozman lors de la réalisation de son objectif. Heureusement, elle est beaucoup plus forte que lui avec un manche entre les mains, et grâce aux bonnes astuces de son vieux mentor (Dysheed, qui a fait coucou un peu plus tôt dans la nouvelle mais n’y reviendra plus jamais), elle a tôt fait de disperser le goujat aux quatre vents.

Ce n’était cependant que le début des emm*rdes pour Bren, qui est bientôt prise en chasse par Lennard et quelques-uns de ses as. Se lance alors une course-poursuite assez dure à suivre, qui mènera l’intrépide pilote à tenter de piéger ses poursuivants dans le système de canalisation de plasma de la forteresse, dans l’espoir qu’une surcharge du réacteur les consume. Pas de chance pour Bren, son timing n’est pas idéal et l’aéronef de Lennard est de toute façon ignifugé, ce qui la place dans la même situation qu’auparavant. Il n’est cependant plus temps de lambiner car le régiment de Gardes a fini par arriver, et ses transports approchent de la base sans se douter du sort qui les attend. Bren leur met la puce à l’oreille en ouvrant le feu sur l’un des Lightnings qui la prenait en chasse de toute façon, et au bout de quelques autres péripéties à haute vitesse, tous les affreux se font dégommer (Lennard y compris).

Ce qui aurait pu être un happy end à la Top Gun se mue toutefois en baroud d’honneur pour Brend, qui a trouvé malin d’éclater sa radio pendant son affrontement avec les pilotes de Lennard pour ne plus subir les mufleries envoyées par cette dernière, et est donc incapable de convaincre les good guys  qu’elle est de leur côté, malgré le fait qu’elle vole dans un avion cHaOtIqUe. Elle décide donc de s’offrir un dernier kiff et s’élève tout droit dans le ciel, facilitant le travail de l’artilleur de Valkyrie qui lui envoie un missile dans la carlingue. RIP soldier…

AVIS:

Je ne suis pas franchement bon public des travaux consacrés à l’Aeronautica Imperialis, et des combats aériens en général, que je trouve assez compliqué à suivre lorsqu’ils sont relatés à l’écrit. Malheureusement, Victoria Hayward ne sera pas l’auteur qui me réconciliera avec ce type de littérature, la deuxième moitié de sa nouvelle enchaînant les péripéties aéroportées sans que l’on comprenne bien ce qu’il se passe (mention spéciale au passage dans les canalisations à plasma, très Star Wars dans l’idée, mais horriblement confus dans l’exécution), ce qui rend très difficile de s’investir dans la destinée de l’héroïne. De toute façon, elle réussit parfaitement tout ce qu’elle entreprend sans aucune aide, et n’a donc pas besoin de nous.

Ce constat négatif aurait pu être tempéré si la première moitié de la nouvelle avait été au niveau, mais là encore, c’est la déception qui l’emporte. La manière dont Hayward pose le cadre de son récit donne l’impression que Lennard s’est réveillée un matin et a décidé de devenir une cultiste de Khorne, comme une bonne partie des officiers et pilotes de Sannan II, et que cette joyeuse bande de psychopathes a réussi à éliminer tous les loyalistes (pourtant beaucoup plus posés et réfléchis qu’eux) en quelques heures. Oh, et n’oublions pas qu’elle a reçu son chasseur customisé dans ce très court délai, sans doute livré par un drone Amazon, ou fabriqué de toute pièce par un de ses admirateurs secrets. Bref, la crédibilité du récit est une des premières victimes de la nouvelle, et celle dont la perte est la plus dommageable. Je passe rapidement sur les personnages aussitôt présentés, aussitôt oubliés (Kaiber Wrasse, Dysheed, Saffyr, Krozman), et qui auraient donc gagné à ne pas être connus, comme dit le proverbe. Seule conclusion douce-amère de la nouvelle vient un peu relever le tableau, mais ce n’est pas assez pour considérer que ‘Wings of Faith’ mérite une lecture.

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Blood Legacy – J. C. Stearns :

INTRIGUE:

Notre histoire commence sur la planète Trehuarta Beta, convoitée par l’Imperium et défendue par les Eldars d’un Vaisseau Monde non identifié. La campagne n’a pas été dans le sens des Zoneilles, et nous arrivons à temps pour assister à la bataille finale du conflit, en compagnie de Solbert Rennard, pilote du Chevalier Verdance et dernier héritier de sa maisonnée, annihilée dans la défense de son monde natal contre les Nécrons. Devenu Errant par la force des choses, Solbert est un combattant aguerri et sa présence sur le front fait plier les Xenos en quelques minutes. La promenade de santé du Verdance est tout de même interrompue par la présence d’un Wraithknight du côté des Eldars, ce qui donne Solbert l’occasion de prouver sa valeur contre un adversaire de son gabarit. Au terme d’un combat épique, le Chevalier vient à bout de la construction eldar, scellant pour de bon le sort de Trehuarta Beta. Pour ne rien gâcher, le Wraithknight se révèle être après examen de l’épave le légendaire Vatinya, qui avait fait bien des misères aux forces de l’Imperium au cours des derniers siècles. Plus intéressé par la sauvegarde de la forêt vierge que par le pedigree de ses adversaires (qu’il respecte tout de même, paske c’est un gars bien), Solbert ne s’en était même pas aperçu.

Pendant les festivités de victoire, notre modeste héros est invité par ses compagnons de lutte, Emeric, Leold et Wylan Nighthowl, tous trois pilotes de Chevaliers pour le compte de la Maison Mortan, à les accompagner sur leur planète en reconnaissance de ses hauts faits d’arme. La visite étant accompagnée d’un droit d’utilisation du paddock Mortan, ce qui est une aubaine pour un Errant comme Solbert, ce dernier accepte l’offre et tout ce petit monde part en direction de Kimdaria, un monde célèbre dans le sous-secteur pour deux raisons principales : une visibilité très faible (la faute à une nébuleuse ayant infiltré la majeure partie du système) et la présence d’une mégafaune aussi pittoresque que dangereuse. Nous y reviendrons plus tard.

Le banquet célébrant le retour des enfants prodigues du Baron Nighthowl est l’occasion pour Solbert de faire la connaissance de leur père et chef de la dynastie, Shayn. Bien que s’attendant à ne pas être aussi bien reçu qu’un membre d’une Maison établie, du fait de son statut d’Errant, Solbert est cueilli à froid par les manières brutales de son hôte. Le Baron Shayn n’a en effet pas la langue dans sa poche, ni l’œil d’ailleurs : lorsque ses garnements présentent aux banqueteurs un pennon pris sur l’épave du Vatinya et s’approprient cette victoire, il a tôt fait de souligner que les Chevaliers qu’ils pilotent ne possèdent pas les armes thermiques qui ont visiblement été employées pour vaincre le Wraithknight. Ce n’est pas au vieil hibou qu’on apprend à ouvrir l’œil, tout de même.

Le banquet terminé, Solbert part se reposer dans la chambre d’amis qui lui a été attribuée, et est rejoint quelques minutes plus tard par Dame Lydi Nighthowl, épouse de Shayn et marâtre des enfants de ce dernier. Cette visite est d’abord mue par le besoin pour la gente dame d’excuser la rudesse de son époux, mais aussi par le désir de converser avec un « compatriote », elle et Solbert venant du même système1. Lydi explique à son hôte que le Baron est victime de sa pratique de la traque d’un des prédateurs les plus dangereux de Kimdaraia : la chauve-souris pasiphaénne. Bien que ne chassant pas l’être humain malgré sa taille colossale, cette chauve-souris présente un danger mortel à la population de la planète, car le cri qu’elle lance pendant la chasse affecte la psyché de ceux qui l’entendent, provoquant des accès de panique et de paranoïa. Afin de protéger son peuple, Shayn a pris sur lui de mener seul les campagnes annuelles de régulation de la population chiroptérienne de Kimdaria. Si les résultats sont probants, il en a payé le prix au fil des années, son état mental se dégradant de plus en plus de saison en saison.

À peine l’explication de texte fournie, Shayn en personne débarque en hurlant dans la piaule, persuadé que sa femme et le mercenaire ramené par ses enfants complotent en secret pour lui nuire. N’arrivant pas à faire comprendre à son hôte qu’il s’agit d’une méprise, et souhaitant éviter à Lydi de connaître le destin horrible qui attend les nobles reconnus coupables de traîtrise sur Kimdaria, le chevaleresque2 Solbert finit par défier le Baron à un duel d’honneur, dont le prix sera la vie de la gente dame. Tout content d’avoir l’occasion de sortir son Chevalier du garage, Shayn accepte et les deux champions se donnent rendez-vous dans l’arène locale pour en découdre…

Début spoiler 1…Si les règles fixées pour ce combat interdisent formellement l’utilisation des armes à distance principales, il est techniquement possible, mais très mal vu, de recourir aux armes de coque. Complètement surclassé par son adversaire, qui pour être totalement paranoïaque, est un pilote hors pair, Solbert finit par utiliser son fuseur de poche pour sauver son châssis, ce qui lui permet en fin de compte de remporter le combat. A son grand désespoir, Shayn refuse de reconnaître sa défaite, et périt dans l’explosion du réacteur de son Chevalier, endommagé dans l’affrontement. Une fin ignominieuse pour un loyal et expérimenté serviteur de l’Empereur…

Début spoiler 2…Et d’autant plus déplorable qu’elle a été manigancée par ses enfants, comme Solbert s’en rend compte lorsqu’Emeric, Leold et Wylan viennent lui remettre belle-maman Lydi et l’enjoindre de quitter sur le champ Kimdaria. Vivant dans l’ombre de leur illustre paternel depuis des décennies, les ambitieux rejetons ont exploité le caractère soupe au lait de feu Shayn et la noblesse de leur invité pour forcer les deux Chevaliers à se battre, combat qu’ils n’avaient aucune chance de remporter de leur côté. Solbert repart donc de Kimdaria écœuré de la nature humaine (c’est pas un sapin qui vous poignarderait comme ça dans le dos, c’est vrai), mais avec une nouvelle comparse et la certitude que les parricides ne s’en sortiront pas à bon compte : le cri des chauves-souris pasiphaénnes étant particulièrement dangereux pour les jeunes2, Lydi garantit à son sauveur qu’au moins un des trois chenapans finira la décennie en camisole de force. On a les satisfactions qu’on peut…Fin spoiler

1 : Ça doit être l’équivalent de venir du même quartier, à l’échelle de 40K.
2 : J’aime à penser que cela est dû à la perte de l’audition des fréquences élevées qui vient avec l’âge.

AVIS:

Il n’y a rien à jeter dans cette longue et chevaleresque nouvelle, signée par un J. C. Stearns très inspiré. Bien qu’il n’ait pas été le premier à faire le lien entre « nos » chevaliers et ceux du 41ème millénaire (faut dire que ce n’est pas très compliqué), Stearns réussit brillamment la fusion entre ces deux univers, et nous livre une sorte d’adaptation du roman arthurien sur une planète hostile, avec Solbert dans le rôle de Lancelot et Shayn dans celui d’Arthur. Sur ce canevas déjà plus intéressant que 90% des écrits de la BL, Stearns se paie le luxe de saupoudrer une bonne dose de grimdark et de broder du fluff à l’envi, faisant de ‘Blood Legacy’ une des nouvelles 40K « classique » (j’exclus de cette catégorie les travaux siglés Warahammer Horror et Warhammer Crime, qui ont leurs propres forces et faiblesses) les plus réussies que j’ai pu lire ces derniers temps.

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Song of the Mother – B. Modine :

INTRIGUE:

Les temps sont durs pour Barthol Tordai, Libre Marchand et capitaine de l’Indagator. L’ouverture de la Cicatrix Maledictum a emporté la meilleure partie de la flotte de sa maison, ne le laissant qu’en possession de son vaisseau (ainsi que d’un joli sabre hérité de son père, tout de même). Bien qu’ayant désespérément besoin de se refaire une santé financière, Barthol est trop fier pour accepter de servir de chauffeur routier ou de livreur Uber, au grand désespoir de sa contremaitre, Prasini. Aussi, lorsque la mystérieuse et imposante Dame Saori Orwan vient supplier le capitaine abandonné bien éméché de transporter sa cohorte de pèlerins en terre promise contre crédits impériaux sonnants et trébuchants, il ne faut pas longtemps aux deux complices pour accepter la mission.

Ce que ni Barthol, ni Prasini ne savent ni ne peuvent soupçonner (mais qui est connu du lecteur depuis les premières lignes de la nouvelle), c’est que Saori est la Magus d’un Culte Genestealers, cherchant désespérément à rejoindre « la Mère » dans les profondeurs de l’espace, après que leur insurrection sur Hypaeth ait été matée dans le sang. La « berceuse » de cette mystérieuse entité a guidé Saori et ses ouailles à travers l’Imperium, et permet également de calmer l’Immaterium sur le chemin de l’Indagator, au grand plaisir de sa Navigatrice (spoiler alert, elle finira par réaliser son erreur). A bord, la cohabitation entre l’équipage et les pèlerins ne se passe pas très bien, la nature suspicieuse et recluse des derniers empêchant le premier de contrôler que les parties du vaisseau dans lesquelles les civils ont été parqués sont en état. Un accident fâcheux prend même place lors d’une visite technique de routine organisée par un Techno-Adepte, se soldant en plusieurs morts de part et d’autre après qu’une des gardes de l’Indagator ait ouvert le feu de manière indiscriminée. Interrogée par Barthol avant qu’il ne l’exécute pour éviter que les pèlerins ne se révoltent, elle affirme avoir vu un monstre la regarder depuis les ténèbres… Bizarre autant qu’étrange.

Le voyage prend fin de manière très brutale alors que le vaisseau réalisait son dernier saut Warp jusqu’aux coordonnées fournies par Orwan à l’équipage, la Navigatrice de l’Indagator se faisant tout bonnement gober (psychiquement) par l’Ombre dans le Warp alors qu’elle batifolait dans l’Immaterium. Ce sont des choses qui arrivent. Le croiseur revient en catastrophe dans la dimension matérielle, et un spectacle glaçant se présente à Barthol et ses lieutenants…

Début spoiler 1…Au lieu de la planète idyllique que leur avait décrite Orwan, il n’y a qu’un monde sucé jusqu’au noyau par le vaisseau ruche qui orbite à proximité, et entouré par les épaves des autres vaisseaux que la Mère a attirés jusqu’à elle pour se refaire une santé. Rescapé d’une vrille ayant rencontré plus forte qu’elle, le bio-vaisseau a passé les dernières années à regagner des forces en consommant la biomasse passant à portée de tentacules, et l’Indagator est le petit digestif qui va lui permettre de finalement reprendre sa route vers le cœur de l’Imperium.

Réalisant qu’il a été dupé, Barthol décide de se racheter une conduite et une réputation en menant une action d’arrière-garde pleine de panache contre les hordes de cultistes, d’hybrides et de Xenos qui tentent de prendre d’assaut le Strategium pour guider le vaisseau jusque dans la gueule béante de la Madre. Au bout du compte, il parvient à 1) faire son affaire à Orwan, et 2) gagner suffisamment de temps pour permettre à une poignée de survivants, menés par Prasini, d’atteindre les navettes de sauvetage et de partir en direction de la planète (qui dispose toujours d’un chouilla d’atmosphère : c’est un peu quand on boit avec une paille, il en reste toujours un peu au fond, même en aspirant très fort). Dans ses derniers instants, le dernier des Tordai joue un coup tordu, mais prévisible, à l’Esprit de la Ruche en ordonnant la surchauffe du réacteur de l’Indigator, ce qui transforme le vaisseau en pili pili pour Xenos convalescent. BONNE FÊTE MAMAN !

Début spoiler 2…Cependant, tout n’est pas perdu pour feu la Mère, car Orwan et ses ouailles ont eu le temps de convertir certains membres d’équipage pendant le voyage, dont plusieurs ont accompagné Prasini à la surface de la planète. Une fois rentrés au bercail, il sera temps de trouver des Tantines…Fin spoiler

AVIS:

Pour sa première soumission, Boman Modine choisit de ne pas laisser planer de suspens sur son propos (la nouvelle commence avec Saori Orwan qui retrouve des hybrides dans une station spatiale), et de se concentrer à la place sur ses personnages – dont une bonne partie n’a pas été évoquée dans le résumé ci-dessus –, les relations qui les unissent (Prasini est ainsi mariée avec le pilote de l’Indagator), et la manière dont ils se comportent devant l’adversité. Cette histoire est d’abord celle de la rédemption de Barthol Tordai, qui passe de capitaine débauché et fantoche à parangon de la résistance humaine contre la menace Xenos. Si cette trajectoire n’a rien de neuf dans la GW-Fiction, la tentative de Modine est suffisamment bien construite et écrite pour ne pas lasser le lecteur, ce qui est évidemment positif.

Une autre caractéristique notable, et appréciable, de ‘Song of the Mother’ est de nous embarquer dans une véritable odyssée spatiale, en présentant de manière circonstanciée la vie à l’intérieur d’un vaisseau voyageant dans le Warp, et les risques pris par ce dernier en sortant des limites de l’Imperium pour aller explorer une partie « vierge » de la galaxie. Mine de rien, ce n’est pas une proposition si commune pour une publication de la Black Library. Enfin, la mise en perspective de l’objectif final poursuivi par les cultistes Genestealers (se faire dévorer par le premier vaisseau ruche venu) est un autre angle d’approche assez novateur, et particulièrement grimdark, à mettre au crédit de Boman Modine. A suivre par la suite, particulièrement s’il arrive à garder sa touche personnelle par rapport au BL-style ultra majoritaire à l’heure actuelle.

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Recriminant – R. S. Wilt :

INTRIGUE:

Alors que l’insurrection Recriminant bat son plein dans le sous-secteur, et a déjà coûté très cher à son Chapitre (les Flame Eagles), le Sergent Vétéran Kappadis mène une escouade d’Intercessors éliminer l’éminence grise à la tête de ce mouvement de grogne. Il s’agit du Sorcier Astrophon Zur de l’Alpha Legion, localisé sur une station de minage installée à la surface d’un astéroïde. Kappadis, qui souffre d’un traumatisme persistant mais pudiquement caché au lecteur, est accompagné par son copain de noviciat Safan, le jeunot Morovec, le vétéran taciturne Calahd et le vétéran-à-la-limite-de-tourner-berserker-de-Khorne1 Eltimur. Cette fine équipe s’introduit dans la station avec toute la subtilité qu’un impact de module d’abordage lancé à toute berzingue sur sa cible autorise, mais ne rencontre curieusement pas grande opposition sur sa route vers le centre de commandement ennemi. Seules quelques grappes de cultistes mal entraînés et coordonnés viennent se mettre dans leurs pattes énergétiques, au grand plaisir d’Eltimur qui les poursuit en rigolant dans les coursives. Fait étrange, en tout cas quand on n’est pas du côté de la team Chaos, les cultistes n’hésitent pas à se tirer dessus entre eux, ce qui plonge Kappadis dans la perplexité. Notre héros philosophe doit aussi composer avec un esprit de l’armure capricieux, qui persiste à afficher des cibles sur ses frères d’arme. Ah, et il a des visions pas très funky de gens qui mangent des cerveaux, aussi. Encore une fourberie des black hats d’Alpharius, sans nul doute.

Zur ayant eu l’idée, stupide du point de vue de Kappadis, de se terrer tout au fond de la mine, les Intercessors descendent en sautillant jusqu’au bunker de l’Alpha Legion. Bien conscient de la réputation d’amateurs de shenanigans de ses adversaires, Kap’ refuse de laisser ses hommes faire sauter la porte blindée qui barre la route aux Space Marines, se doutant que cette dernière a été piégée. Pendant que les Astartes cherchent une issue de secours, un velux ou une chatière pour faire leur entrée, une bande de cultistes arrive, et se met obligeamment à attaque la porte avec un fuseur. Triple bug pour Kappadis, qui 1) ne comprend pas pourquoi les amis de ses ennemis sont leurs ennemis, 2) se rend compte que le jaune poussin de son armure n’est pas très adapté à une mission d’infiltration, et 3) se fait griller par un cultiste, qui se contente de lui envoyer un gros clin d’œil de connivence au lieu de donner l’alerte. Avant qu’on ait eu le temps de lui désigner l’emplacement de la caméra cachée, les explosifs qui étaient bien en place derrière la porte (il avait raison, na) se déclenchent, annihilant une bonne partie des cultistes. Le reste charge dans le tas sans broncher, et se fait massacrer par les Space Marines du Chaos positionnés dans le bunker. Tout cela est bien confus mais au moins, la voie est libre.

Les Intercessors se ruent dans la brèche, et une fusillade acharnée s’engage avant que les présentations officielles2 n’aient pu se faire. La partie semble mal engagée pour les loyalistes, qui perdent rapidement Calahd et Eltimur, puis Morovec, qui se fait posséder par Zur. Cependant, le porteur de bolter lourd de l’Alpha Legion en décide autrement, et transforme méthodiquement ses camarades en gruyère. Curieux de comprendre les causes de ce revirement d’allégeance soudain, Kappadis laisse la vie sauve au renégat, qui s’approche et lui annonce qu’il a un message pour lui…

Début spoiler…Message qui était en fait une phrase code (d’une originalité foooooolle), et envoie Kap’ au tapis. Lorsqu’il se relève, il n’est plus le Sergent Vétéran des Flame Eagles qu’il pensait être depuis des années, mais l’Exodus, un Alpha Légionnaire ayant pris la place de Kappadis après que ce dernier ait été capturé par le Chaos. Ce retournement de veste plastron énergétique signe la fin des derniers loyalistes encore vivants, froidement exécuté par l’Exodus avant qu’ils aient pu comprendre ce qu’il se passait. Et c’est là qu’on passe en mode WTT (What The Traitor, le WTF de l’Alpha Legion)…

Le porteur de bolter lourd annonce alors à son camarade légionnaire qu’il a aussi un objet à lui remettre, qui se révèle être un bolter customisé, désigné sous le nom de l’Instrument (avec un -I majuscule). Il n’explique cependant pas pourquoi il a cru bon de flinguer les autres membres de l’Alpha Legion avant cette remise en mains propres, et comme Zur n’était en fait pas si mort que ça, il se relève pour se venger et réduit le friendly shooter en cendres… avant de se faire tuer pour de bon par l’Exodus. Là-dessus, un des cultistes survivants de son match contre la porte piégée arrive, fait le symbole de l’Aquila devant ExoKap (histoire de nous faire comprendre qu’il y avait des agents infiltrés chez les cultistes aussi) et repart en courant. Bigre. Ne pouvant plus trahir personne maintenant qu’il est tout seul, l’Exodus quitte les lieux après avoir pris connaissance des coordonnées de sa prochaine mission, le monde d’Enth, placé sous contrôle de l’Ecclesiarchie, et que son agent de liaison avait caché dans la crosse de l’Instrument. On ne saura pas pourquoi ses supérieurs ont choisi de mettre fin à son infiltration des Flame Eagles, mais nul doute que cette mission était plus importante…Fin spoiler

1 : Le gonze est tellement parti qu’il a été condamné à mort par son Chapitre pour avoir presque tué son Sergent lorsque ce dernier lui a donné l’ordre de se replier. Peine commuée par les Chapelains des Flame Eagles en service probatoire.
2 : Ça aurait dû forcément se passer comme ça, à mon avis.
« Je suis Zur. »
« Enchanté. »
« Evidemment. »

AVIS:

Les nouvelles où l’Alpha Legion apparaît sont l’occasion de contrôler les talents scénaristiques des auteurs de la Black Library, étant entendu que cette faction ne peut pas être mise en scène sans que l’intrigue parte en mode fractal (des rebondissements dans des rebondissements dans des rebondissements). C’était malheureusement trop tôt pour R. S. Wilt, qui livre avec ‘Recriminant’ une histoire simplement confuse, où tout le monde trahit tout le monde (ou pas), pour des raisons trotro mystérieuses et gardées secrètes. Comme c’est pratique. Même s’il y a une chance qu’une suite de la saga de l’Exodus1 donne a posteriori plus d’explications sur les activités de cet agent quintuple – au bas mot – j’estime qu’une nouvelle devrait toujours pouvoir être lue et appréciée pleinement de manière indépendante, et ne peut donc pas me satisfaire de ce travail. Les amateurs de fourberies énergétiques sont donc invités à se référer à ‘The Long Games at Carcharias’ (Rob Sanders), qui reste à mes yeux l’exercice le plus abouti en la matière.  

1 : Qui n’est pas une invention de R. S. Wilt, mais une figure (assez obscure) du fluff de l’Hérésie d’Horus, présentée dans le livre Extermination (Forge World).

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Cargo – C. Wraight :

INTRIGUE:

Alors que la guerre embrase Cadia, nous suivons la dangereuse et pénible remontée d’un mystérieux colis, blindé et réfrigéré, depuis la ligne de front jusqu’à l’orbite de la planète. Passant de main en main à mesure que ses précédents détenteurs tombent sous le feu de l’ennemi, le caisson semble avoir une importance majeure pour les rares soldats informés de son contenu. Après trois passages de relai (camion -> aéronef -> piétons, c’est le triathlon du 41ème millénaire) et des dizaines de morts, les Space Marines de la Cerulean Guard interviennent pour prendre en charge le colis pour la logistique du dernier kilomètre, la plus délicate de toutes comme chacun sait…

Début spoiler…Au final, c’était la dépouille mortelle du Frère Jorundur, de la Grande Compagnie de ce vieux Ragnar Crinière Noire, qui était contenue dans le Kinder surprise cadien, et qui est remise contre signature au Prêtre Loup Aj Olved, stationné dans le Greyblade, en orbite de Cadia. Alors que la planète est sur le point de tomber, et après les terribles pertes subies par les loyalistes sur le front, récupérer des glandes progénoïdes intactes valait bien le sacrifice de quelques grunts locaux, pas vrai ? Ne pas rompre la chaîne du froid, c’est important (surtout pour des Space Wolves j’imagine).Fin spoiler

AVIS:

Très bonne soumission de la part de Chris Wraight, qui met en scène une nouvelle chorale (et relai) à suspens de manière aussi prenante qu’efficace. Si on comprend après la mort brutale de la première volée de personnages que ce sort attend probablement tout ceux qui prendront leur place, ce qui limite la surprise sur les pages suivantes, Wraight arrive à nous immerger dans la guerre pour Cadia à son niveau le plus bas, en compagnie des auxiliaires et manutentionnaires se trouvant plongés dans un conflit d’une intensité terrible, et dont on devine rapidement qu’ils n’ont aucune chance de sortir vivants.

Début spoilerMerci aussi à l’auteur de replacer en perspective dans cette nouvelle l’importance capitale qu’ont les glande progénoïdes pour les Chapitres Space Marines1, et de montrer jusqu’où l’Imperium est prêt à aller pour s’assurer qu’elles soient remises à leurs propriétaires légitimes.Fin spoiler

1 : Dans la même veine du « totalement indispensable mais rarement évoqué », je conseille la nouvelle ‘Sacrifice’ de Ben Counter.

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Voilà qui termine cette revue de ‘The Emperor’s Finest’une anthologie finalement plus variée que son titre le laissait paraître, et qui contient plus d’une nouvelle valant franchement le détour. A titre personnel, je garderai un oeil sur les recrues Collyer, Teintze et Modine, qui ont l’étoffe pour rejoindre les meilleurs, si ce n’est de l’Empereur, au moins de la Black Library, ce qui n’est déjà pas mal. J’espère pour finir que le prochain numéro d’Inferno! (eh oui, je me projette déjà dans le futur) intégrera d’autres franchises que Warhammer 40,000, histoire de satisfaire le plus large public possible. Wait and see

BLACK LIBRARY CELEBRATION 2022 [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue, un peu tardive je vous l’accorde, du recueil Black Library Celebration 2022. Véritable institution de la BL, cette petite anthologie a pour elle d’être gratuite, ce qui est bien, et désormais disponible dans les trois langages principaux de la GW-Fiction (celui de Shakespeare, de Molière et de Goethe). Diffusé comme chaque année en Février, à l’occasion des mirifiques festivités littéraires que la Black Library offre à ses hordes de disciples, le millésime 2022 comporte 5 nouvelles, représentatives de la fabuleuse diversité des franchises de Games Workshop.

Black Library Celebration 2022_EN

Black Library Celebration 2022_FR

Il est assez fréquent que les éditeurs de Nottingham, en bons hommes et femmes d’affaires qu’ils sont, bourrent ces produits d’appel de nouvelles déjà publiées, ce qui est de bonne guerre il faut le reconnaître. C’est une fois de plus le cas ici, puisque seule la soumission de C. L. Werner est un inédit, mais à grox donné, on ne regarde pas les crocs. Plus important que la fraîcheur du produit, c’est sa pertinence, c’est-à-dire sa capacité à donner envie aux primo-lecteurs de devenir des rats de bibliothèque Prophètes Gris, qui fera office de juge de paix Arbites ici. Alors, l’édition 2022 a-t-elle été à la hauteur de cette lourde tâche, aussi bien en anglais que in French ? Voyons cela sans tarder.  

Black Library Celebration 2022

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The Serpent’s Dance – M. Brooks [HH] :

INTRIGUE:

Désormais rattachée au service exclusif du Régent rageux de Terra, Malcador le Sigilite, l’ex Sœur du Silence Amendera Kendel participe à l’effort de guerre en menant à bien des missions de contre-espionnage pour identifier les traîtres à l’œuvre dans le système solaire. Une vraie mission de l’inspection générale comme on les aime. Son devoir la mène jusqu’à Jupiter, où elle infiltre incognito un événement mondain organisé pour l’élite locale, à la recherche de… n’importe quoi en fait, car on ne dirait pas qu’elle tient une piste très sérieuse au moment de faire son entrée sur le dancefloor jovien. Cette approche au pur talent verse de maigres dividendes, malgré les conseils avisés que lui glisse son associé, chaperon mondain et consultant en jet set Ruvier Dall, et la soirée progresse sans que sa patronne n’arrive à coincer le moindre petit hérétique. Kendel a beau dissimuler son aquila frontale sous un masque, son physique de tueuse sous des froufrous1 et son aura de Paria avec un torque de suppression, on ne s’improvise pas femme du monde. La spécialité de la maison serait plutôt de les détruire, d’ailleurs (remember Proxima Majoris).

Après une heure à échanger des platitudes avec le gratin jupitérien en pure perte, Kendel en a ras la queue de cheval et opte pour une tactique différente. Rencardée en douce sur les agissements suspects d’un convive, qui est le seul à se balader librement de groupes en groupes sans gardes du corps, notre héroïne fonce sur sa cible comme un missile à tête chercheuse (et à la grande horreur de Dall, offusqué par ce manque flagrant de savoir vivre), avec la ferme attention de… l’inviter à danser. Si si. Ma foi, pourquoi pas: peut-être que le DJ local avait eu la mauvaise idée de mettre ‘Cotton Eye Joe‘ pile à ce moment. Quoiqu’il en soit, la tentative de Kendel se heurte, non pas à un mur, mais au refus poli de l’assistante du nobliau en roue libre (Durian Jarandille), une jeunette timide du nom de Kristanna Moristat, qui fait remarquer à cette virago d’Amendera qu’on ne peut pas macarener les gens sans sommation et sans leur demander leur avis d’abord. Ne pouvant pas décemment lui mettre une manchette sans créer un scandale, la sista improvise et entraîne l’impétrante dans une carioca fougueuse. Faute de merles… Cette proximité lui permet de détecter que Kristanna est elle-même une Paria, constat dont va découler tout un tas de déductions qui, pour la faire courte, mène à la neutralisation de Jurandille, un affreux Psyker sous couverture dont les discussions avec l’élite jovienne ne pouvaient qu’avoir pour but de préparer subrepticement l’arrivée d’Horus dans le système solaire.

Alors qu’elle s’apprêtait à se mettre une claque dans le dos pour se féliciter d’une mission rondement menée (difficile de compter sur des marques de franche camaraderie de ce genre de la part d’autrui quand on donne la nausée aux gens à 10 mètres à la ronde), on souffle dans l’oreillette de Kendel que le deuxième compagnon de Jurandille, Jorud Gevaz, a filé à l’anglaise pendant qu’elle remportait sa battle de tektonik contre le Psyker infiltré. Comme l’homme en question est parti dans la direction générale des appartements du Haut Thane de Jupiter et qu’il laisse des cadavres de gardes derrière lui, il s’agit de le rattraper en vitesse afin d’éviter une gueulante de Sire Gilles l’Huître. Beaucoup plus à l’aise maintenant qu’elle a le droit de mettre des gros taquets dans les nougats, Kendel finit par confronter sa proie avant qu’elle ne pose ses sales pattes sur le nabab local, et parvient à la retarder suffisamment longtemps pour que l’indispensable Helig Gallor (Death Guard en disponibilité) arrive disperser l’importun d’une rafale de bolter bien placée. Pas assez vite cependant pour empêcher Gevaz, un agent de l’Alpha Legion, d’appuyer sur le détonateur caché dans la boucle de sa ceinture avant de passer de vice à trépas. Être lent et méthodique est parfois handicapant. Bilan des courses: deux tiers des invités du bal (ainsi que Ruvier Dall) finissent en carpaccio, victimes des bombinettes cachées par les cultistes dans les automates de service, ce qui n’est pas un superbe résultat pour notre espionne en herbe. Elle fera sans doute mieux la prochaine fois, si prochaine fois il y a.

1Notons au passage qu’elle a réussi à convaincre ce vieux pingre de Malcador de lui adjoindre les services de deux couturier.e.s. Deux fois le nombre de Space Marines de son équipe: on voit où vont ses priorités. 

AVIS:

Dans la série des « Que sont-ils devenus? » de l’Hérésie d’Horus, le cas d’Amendera Kendel méritait-il qu’on s’y attarde? Personnage récurrent de James Swallow, ses apparitions dans la série se sont logiquement espacées au fur et à mesure que celles de son auteur faisaient de même. À titre personnel, je vivais et lisais très bien sans mademoiselle Kendel, et je m’interroge sur les raisons qui ont poussées Mike Brooks à la choisir pour ses débuts dans l’Hérésie. Amendera ne m’apparaît en effet pas comme une figure brooksienne classique, n’étant ni trop sarcastique pour son propre bien, ni le détournement d’un archétype de 40K, ni particulièrement originale au niveau de ses pronoms1, ni un Ork. L’intrigue et la mise en scène, sans être indigentes, ne sont pas non plus mémorables, et, à moins d’un fantastique coup de théâtre, l’intégralité des événements narrés dans The Serpent’ Dance aura autant d’impact sur le reste de l’Hérésie d’Horus que la couleur des papiers peints du boudoir d’Eidolon, voire qu’Eidolon lui-même (c’est dire). Bref, c’est un double gâchis à mes yeux: des compétences et de l’originalité de l’auteur en premier lieu, et des possibilités scénaristiques (que ce soit en termes de développement ou de conclusion d’arcs narratifs) offertes par une saga aussi étoffée en second lieu. On appréciera tout de même le sérieux dont Brooks a fait preuve dans sa préparation, qui transparaît dans les références aux travaux de ses prédécesseurs (battlemark et thoughtmark, Lucifer Black…), mais également dans des clins d’œil un peu plus subtils, comme le choix de Kendel de prétendre être une aristocrate d’une certaine planète Mollita pour accéder au bal. En conclusion, je ne voue pas cette nouvelle aux gémonies mais j’affirme sans détour qu’il y a beaucoup mieux à lire de la part de Mike Brooks et de l’Hérésie d’Horus que cette danse serpentine.

1La danse entre Kendel et Kristanna est toutefois une péripétie que l’on n’aurait à mon avis pas pu trouver ailleurs que chez Brooks parmi les auteurs de la Black Library. Et on a bien un personnage non-genré dans l’histoire, mais c’est un garde tué hors champ dont Krendel récupère le fusil, donc ça ne compte pas vraiment.

ET POUR LES NOUVEAUX?

L’Hérésie d’Horus est la franchise “Experts” de la GW-Fiction, peu accessible par nature aux débutants du fait de la nécessité de maîtriser les bases du background de 40K et de 30K pour en tirer la substantifique moelle spectrale. Intégrer une nouvelle hérétique dans un recueil destiné aux nouveaux venus représente donc une gageure, et si la décision m’avait été confiée, ‘The Serpent’s Dance’ et ses personnages ultra niches embarqués dans une aventure pas du tout représentative du corpus de l’Hérésie (des Space Marines qui se tapent sur le coin du museau par paquets de mille, pour simplifier), aurait été mon avant-dernier choix, ou peu s’en faut. Jugement de valeur mis à part, il s’agit ici d’une histoire pour « faux-débutants », qui n’a donc rien à faire dans ce type d’anthologie.

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The Shapers of Scars – M. Collins [40K] :

INTRIGUE:

Dans l’infirmerie du Wyrmslayer Queen, la Reine Guerrière de Fenris (surtout) et Capitaine Libre Marchand (un peu) Katla Helvintr passe un sale moment. Ayant fait l’erreur de tendre l’autre joue dans un concours de crachat d’acide, notre héroïne donne du fil à retordre et des points de suture à poser à son équipe médicale, qui s’affaire pour sauver ce qui peut l’être de sa carnation délicate et de sa chevelure luxuriante. La situation est tellement grave que la vieille Bodil (à ne pas confondre avec sa sœur, Bursul), gothi fenrissienne tout ce qu’il y a de moins scientifique, a été appelée à la rescousse. Entre deux jets de runes en os (non désinfectées, j’en suis sûr) et prophéties mystiques sur le destin de Katla, qui finira soit dévorée par les Tyranides, soit étranglée par un ver de terre – c’est écrit –, Bodil trouve le temps de sortir son matériel de tatouage et commence à gribouiller sur le visage de sa Jarl, soit disant pour lui donner la force de vaincre le mal qui la hante, mais plus sûrement pour se venger de la dernière demande d’augmentation refusée par cette pingre de Katla. On se console comme on peut.

Pendant que la Tin-Tin du 41ème millénaire dessine des élans sur le front de sa patiente, nous remontons le temps pour comprendre comment cette dernière s’est retrouvée dans cette position peu enviable. La série de flashbacks que Marc Collins intègre dans son récit nous permet de suivre Katla dans ses œuvres, qui consistent principalement à sillonner le vide à la recherche d’adversaires de valeur à combattre. Drôle d’activité pour un Libre Marchand, mais après tout, certains tiennent visiblement à jouir de leur liberté plus que de leurs marchandises, et comme ils ont un mot d’excuse signé par Pépé en personne, nous ne sommes pas en droit de leur demander des comptes sur l’usage qu’ils font des ressources de l’Imperium. La cible du Wyrmslayer Queen se trouve être un vaisseau tyranide esseulé par la dispersion de sa flotte ruche, mais que sa soudaine solitude ne dissuade pas le moins du monde d’attaquer son traqueur bil(l)e en tête. Bien aidée par le désir manifeste et palpable de la Jarl de Fenris de régler l’affaire au corps à corps plutôt que par salves de missiles interposées, la bioconstruction Xenos arrive à portée de tentacules, et envoie quelques nuées de cafards enragés à l’abordage de son tourmenteur. Voilà une situation bien engagée et tout à fait optimale pour les impériaux, comme chacun peut en juger.

Short story shorter, Katla emmène sa bande joyeux huscarls à la rencontre de l’infestation tyranide qui s’oublie sur la moquette du troisième pont, et finit par croiser le fer avec un Prince particulièrement caustique et affligé d’un gros problème d’acné. À trop faire la maline avec ses hachettes viking, elle finit par percer le bouton de trop, et se fait asperger d’un acide autrement plus corsé que celui qu’elle a pris avant de se ruer à la bataille. Cela ne l’empêche pas de finir l’impudente bestiole proprement avant de faire une petite pause coma bien méritée, et la suite nous est connue. L’histoire se termine par le réveil de Katla, qui trouve le tatouage tribal que la fidèle Bodil lui a fait sur la moitié de la tronche méchamment bath. C’est ce qui s’appelle faire contre mauvais profil bon cœur.

AVIS:

Petite histoire très simple (j’aurais pu résumer le propos en trois phrases sans omettre grand-chose d’important) au nom très compliqué, ce ‘The Shapers of Scars’ intrigue et déçoit à égales mesures. Pour commencer par les reproches, je me désespère de lire encore des affrontements spatiaux complètement stupides car physiquement abscons après 30 ans de publications 40K. Ici, nous rencontrons le cas d’école de l’auteur n’ayant pas intégré qu’une bataille spatiale se déroule à une échelle de centaines de milliers de kilomètres, et pas à portée de jet de chaussure (ou ici, de tentacules pour les Tyranides et de harpons pour les impériaux1), ce qui est à mon avis un héritage néfaste des derniers Star Wars. Reconnaissons au moins à Collins d’avoir de la suite dans les idées, car mettre en scène une héroïne tellement obnubilée par le pugilat qu’elle abandonne son rôle de commandante en pleine bataille pour aller jeter des javelots à la gu*ule de pauvres Gaunts dans les coursives de son propre navire, accompagnés d’hommes de main équipés comme des Burgondes du haut Moyen Âge, est d’une originalité rafraichissante par rapport au reste du corpus de la Black Library. Il faut de tout pour faire un Imperium, même des Fenrissiens bas du front et des auteurs en roue libre.

Si on est d’humeur plus charitable, on peut s’interroger sur les raisons qui ont poussées Collins à être si spécifique dans le choix de ses protagonistes, la rencontre entre « cultures » Rogue Trader et Space Wolves dans une nouvelle de quelques pages ne se justifiant à mes yeux que si ‘The Shapers of Scars’ est le prélude à une œuvre plus conséquente. Certains auteurs de la BL, Dan Abnett et Aaron Dembski Bowden en tête, ont déjà prouvé qu’il était possible de réaliser des fusions plus improbables que celle-là de façon convaincante, et au final à donner plus de substance et de saveur au gigantesque patchwork socio-culturo-politique qu’est l’Imperium. Il se pourrait donc que nous recroisions Katla Helvintr et la bonne Bodil dans un futur proche, hypothèse d’autant plus plausible que Marc Collins est toujours dans l’attente d’un premier roman pour la BL, et que les créneaux Rogue Trader et Space Wolves ne sont pris par personne en ce moment. Faîtes vos jeux.

1 : Imaginez un peu la longueur, donc la place et le poids, de la chaîne nécessaire pour qu’une telle arme puisse « ferrer » une cible et la ramener à bon port. Déjà que sur un Titan, c’est limite, mais sur une frégate…

ET POUR LES NOUVEAUX?

Si on étudie la liste des cinq nouvelles sélectionnées par la Black Library pour constituer ce petit recueil introductif, on se rend compte que ‘The Shapers of Scars’ a la très lourde tâche de représenter la littérature 40K « classique » (c’est-à-dire hors franchises à part comme l’Hérésie d’Horus, Necromunda ou Warhammer Crime), qui constitue à l’heure actuelle et sans doute pour toujours le plus large corpus de la BL, soit des centaines de nouvelles publiées au cours des trois dernières décennies. Il aurait donc été logique, si ce n’est obligatoire, de choisir une Space Marinade – possiblement de bonne qualité car, oui, cela existe – en lieu et place du court format totalement random de Marc Collins. Imaginez un peu que cette lecture soit votre porte d’entrée dans le 41ème millénaire : vous penseriez sans doute que le puissant Imperium est une civilisation steampunkbarbarian ayant conquis les étoiles en jetant des javelines même pas énergétiques sur des cafards géants. Ce qui n’est pas l’image d’Epinal du grimdark, vous le reconnaîtrez. Bref, je ne valide absolument pas ce parti pris.  

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No Use for Good Men – G. Haley [40K] :

INTRIGUE:

Notre récit commence par un petit mail envoyé par l’humble et fidèle Probator Fyedor Blovast à l’honorable et exalté Chef Justicius Maksell Resk, annonçant des progrès notables dans le décryptage du journal intime d’un certain Symeon Dymaxion-Noctis, placé sous bonne garde pour une raison indéterminée par la maréchaussée du district de Nearsteel. La nouvelle qui suit est l’extrait traduit par le stagiaire Linguee du probatoriat, ce qui indique clairement qu’il ne faut pas s’attendre à un compte-rendu complet et exhaustif de la vie et de l’œuvre de Sym’. Et pour cause…

Les quelques pages que nous sert Guy Haley sont consacrées à la description d’une matinée assez banale de notre héros, un Probator plutôt nanti et qui ne s’en cache ni ne s’en plaint pas (il a eu sa phase « solidarité prolétaire », mais ça lui est passé), vivant dans un duplex en haut de spire, avec un felid et un bras augmétique. Il enquête posément sur la disparition de Xuliana Marchentska, fille idéaliste d’un notable local, supposée enlevée et probablement morte à l’heure qu’il est. Un suspect ayant été localisé dans une cité sensible toute proche, Symeon décide d’y faire un saut pour tenter de le cueillir, malgré le fait qu’une émeute de la faim est en train de couver dans le district, et que la riposte des gardiens de la paix l’épée se prépare de concert. Usant de son statut spécial pour négocier le cordon de Sanctioners qui s’apprête à casser du contestataire, le super flic arrive en vue du dernier domicile connu de sa proie (Yerzy Demedoi)… et se fait griller par ce dernier sur le pas de la porte. Pas de chance.

S’en suit une course poursuite haletante et mauvaise pour les rotules, alors qu’en arrière-plan les CRS de Varangantua commencent à bavurer dans les brancards, au terme de laquelle le bien portant Symeon (Haley insiste là dessus, alors moi aussi) rattrape presque Demedoi, mais décide finalement de lui coller une bastos dans la cuisse au lieu de couvrir les 10 derniers mètres et de tenter le placage cathédrale. Sa fainéantise lui jouera un sale tour, et plus encore au fugitif, car son tir au jugé perce l’artère fémorale du présumé coupable, qui décide de finir en beauté d’un saut de l’ange renversé plutôt que de se vider tranquillement de son sang en répondant aux questions de son meurtrier. C’est bien une ingratitude de pauvre, ça. Ce faisant, il passe de l’autre côté du voile de chaînes métalliques qui sépare le district civil de Nearsteel de l’enclave du Mechanicum de Steelmound, ce qui place son cadavre hors de la juridiction et de la portée de Symeon, qui n’a plus qu’à rentrer chez lui ouvrir une boîte de Ronron à son matou d’appartement. Et c’est tout. La suite dans ‘Flesh & Steel’, j’imagine…

AVIS:

Haley fait sa propre pub pour le roman ‘Flesh & Steel’, écrit également pour Warhammer Crime, et mettant en vedette l’Hercule Poivrot de Varangantua, Symeon Noctis. Je ne lui en aurais pas tenu rigueur si le message publicitaire en question (‘No Use for Good Men’) avait été une véritable nouvelle, avec une intrigue, un développement et une conclusion, ce qui n’est malheureusement pas le cas. À la place, on a le droit à vingt quatre heures dans la vie d’un fât, dans un récit mêlant description de la géopolitique de Nearsteel, considérations philosophiques du héros, course poursuite peu concluante et références appuyées à un passé/futur mystérieux qui seront explicitées dans le bouquin qui prendra la suite de ce teaser littéraire. Haley sachant tenir une plume, l’ensemble est très lisible, mais ça sent la grosse démotivation de sa part, ce qui se solde par une expérience décevante pour le lecteur. J’espère vraiment pour lui que la lecture de ce ‘No Use for Good Men’ jettera un éclairage nouveau sur ‘Flesh and Steel’ (ce qui pourrait à la rigueur justifier sa lecture), mais j’en doute assez fortement.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Je n’ai pas grand-chose à ajouter au retour fait plus haut sur l’intérêt de cette courte nouvelle, dont le seul but est d’hameçonner le lecteur et de lui faire acheter ‘Flesh & Steel’. Même si je comprends l’approche, le fait qu’il soit possible de télécharger gratuitement un extrait de ce roman sur le site de la Black Library me fait me questionner sur la nécessité pour cette dernière de commander ce genre de publication, à l’âge du post-papier. Comme ‘No Use for Good Men’ est assez sympathique à parcourir, on peut défendre son utilisation comme produit d’appel pour Warhammer Crime, mais il y avait mieux et plus respectueux à proposer au lecteur, à commencer par un véritable stand alone. Ça fait que ce soit gratuit, mais…

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The Reaper’s Gift – R. Cluley [AoS] :

INTRIGUE:

Le milicien Rutger, confronté à une trop forte opposition lors de la dernière bataille livrée par sa compagnie franche à une bande d’Hommes Bêtes en maraude, a prudemment décidé de se faire porter pâle et quitté le champ de bataille pour le champ de maïs, laissant les copains se débrouiller sans lui. A sa décharge, notre héros courageux mais pas téméraire venait d’hériter d’une méchante estafilade sur le bedon, réduisant fortement son utilité au combat en même temps que son espérance de vie. Dans son malheur, Rutger a toutefois la chance de tomber sur une étable décrépite où il peut s’abriter de la pluie battante de Shyish, et recouvrer quelques forces avant de reprendre sa fuite éperdue. Dans cet abri de fortune, il fait la connaissance de Poll, le jeune fils d’une fermière du cru qui essaie tant bien que mal de survivre avec ses trois enfants et en l’absence de son mari, réquisitionné de force par l’armée locale il y a plusieurs mois. Ayant gagné la confiance du gamin grâce à ses talents de montreur d’ombres, Rutger parvient aussi à se mettre la mère (Maudeline) dans la poche, et est invité par cette dernière à dîner avec sa famille.

Pendant que le soldat se fait recoudre la bidoche et se gave de brouet, ses hôtes lui racontent la légende du Faucheur (Reaperman), un croquemitaine ayant l’apparence d’un épouvantail géant et venant punir les membres égoïstes de la communauté à grands coups de faux dans les gencives. Originellement, le Faucheur était un guérisseur dont le fils unique mourut écrasé par sa propre charrue, tragédie qui fit mourir sa femme de chagrin quelques semaines plus tard. Ses voisins n’ayant pas fait preuve d’une grande solidarité envers le pauvre homme dans ces moments difficiles, le désespoir et le ressentiment (et l’intervention de Nagash, aussi) le changèrent en spectre vengeur, que les paysans du coin tentent d’apaiser en se faisant des cadeaux entre eux, démontrant ainsi leur camaraderie. Il se trouve que Maudeline et Cie offrent des épouvantails, ce qui explique pourquoi l’étable où s’était réfugié Rutger était pleine de silhouettes tout à fait creepy. On est à Shyish, aussi.

Raccompagné par Maudeline jusqu’à la grange où elle accepte qu’il passe la nuit, Rutger réalise que la brave fermière dissimule en fait une ogresse en puissance, qui n’a pas hésité à tuer et découper les autres déserteurs amochés qui sont venus demander assistance au cours des derniers mois. Cela explique comment elle a pu confectionner autant d’épouvantails dans un endroit aussi reculé, où les fripes d’homme adulte sont rares. Pragmatique jusqu’au bout, Maudeline avoue que c’est l’infection qui commence à gagner sa plaie qui l’a convaincue de ne pas transformer Rutger en jambon, et qu’elle ne lui fera donc aucun mal. Cet échange de civilités est interrompu par l’arrivée d’un Ungor inquisiteur, qui se fait prestement occire par notre coriace agricultrice #LaMortEstDansLePré.

Il ne s’agit toutefois que d’un sursis pour la petite troupe, car il est certain que la disparition de l’éclaireur va donner l’idée au reste de la harde de passer une tête cornue dans le coin dans les prochaines heures. N’ayant aucun espoir de prendre de vitesse l’ennemi, Rutger propose de gagner du temps en utilisant la ruse…

Début spoiler 1…C’est-à-dire mettre à profit le stock d’épouvantails de ses hôtes pour donner l’impression à ces bêtes de Bêtes que la ferme est fortement gardée. Cela ne les trompera ni ralentira très longtemps, mais devrait permettre aux fuyards une chance d’atteindre les voisins les plus proches de Maudeline et sa marmaille. La journée qui s’en suit est donc tout entière consacrée à la préparation de ce musée Grévin hors les murs, mais alors l’après-midi avance, Rutger a une idée encore meilleure pour duper les Hommes-Bêtes en maraude…

Début spoiler 2…Laisser les femmes et les enfants derrière. Comme il se doute que Maudeline a peu de chance d’accepter, il lui colle un coup de hachette dans le crâne pour avoir les mains libres, et attache les orphelins avec les épouvantails pour donner l’illusion que son régiment de paille est bien vivant. A la guerre comme à la guerre, tout de même. C’est le culte de l’huître bleue qui avait raison, une fois de plus : don’t fear the reaper (fear the deserter).Fin spoiler

AVIS:

Pour sa deuxième contribution à la GW-Fiction (après ‘Flesh and Blood’), Ray Cluley corrige la mire et signe une histoire bien noire, et méritant tout à fait sa catégorisation dans la gamme Warhammer Horror. En distillant à petites touches les détails troublants, puis inquiétants, puis révoltants, l’auteur parvient à instiller une pure atmosphère de film de genre, où l’on comprend qu’il peut se passer quelque chose d’horrible à tout moment, et où tous les personnages, même (surtout) les protagonistes, peuvent partir en vrille sans crier gare. Il fait également preuve d’une maîtrise consommée de raconteur d’histoire en entraînant le lecteur sur la piste de l’épouvantail, figure horrifique s’il en est, pour au final donner à son récit un twist final bien plus prosaïque, mais d’autant plus marquant et efficace. Une vraie bonne soumission pour le sieur Cluley, qui remonte sensiblement dans mon estime.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Ecrire une bonne nouvelle est difficile, et écrire une bonne nouvelle d’horreur l’est encore plus. Pour avoir lu quelques recueils siglés Warhammer Horror dans mon jeune temps, je peux témoigner du fait que ‘The Reaper’s Gift’ se place dans le haut du panier de ce que la BL peut proposer, et il est donc heureux que le choix des pontes de Nottingham se soit porté sur cette nouvelle comme représentante de la franchise horrifique de la GW-Fiction. Si cela ne donne pas envie aux nouveaux lecteurs d’explorer plus en détail cette collection de niche, c’est que cette dernière n’est pas faite pour eux. Il est aussi à mon sens approprié que ‘The Reaper’s Gift’ soit assez « dur » en termes de narration, là aussi pour permettre aux curieux d’acheter un recueil en toute connaissance de cause.

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The Wolf and the Rat – C. L. Werner [AoS] :

INTRIGUE:

The Wolf and the RatScandale à la cour de Radukar le Loup, sanguinaire car vampirique maître de la cité d’Ulfenkarn, en Shyish. Une précieuse relique a été dérobée dans la crypte où elle sommeillait depuis des lustres, plongeant notre atrabilaire héros dans une colère noire (logique) : on lui a volé son doudou !!! Ah, on me dit dans l’oreillette qu’il s’agit en fait de la pelisse du vampire qui lui donné le Baiser de Sang, ce qui est un peu plus classe, mais beaucoup moins drôle, que ma version des faits. Je m’incline de bonne grâce et reprends le cours de mon récit.

On apprend rapidement que le crime à peine commis est déjà revendiqué par une coterie de suceurs de sang ne goûtant pas au règne sans partage de Radukar sur son fief, et souhaitant, d’après les mots bredouillants de leur émissaire, le froussard Valac Chrobak, seulement remettre au goût du jour le conseil municipal, où Loulou aurait bien sûr un siège. Le messager ayant raté son test de charisme de façon critique, il est expédié dans la post non-vie par les gardes du corps Ogors de Radukar, qui décide de prendre les choses en main. Sachant que les ravisseurs de courtepointe lui ont donné rendez-vous dans le quartier des docks pour procéder à l’échange, il en prend le chemin sans tarder, confiant dans le fait que sa Sénéchale, l’ex-pirate tournée vampiresse (vive les reconversions professionnelles, franchement) Natasyia, sécurisera discrètement le périmètre avec les squelettes de la garde municipale, au cas où l’affaire s’envenimerait.

Sur place, il retrouve une vieille et funeste connaissance, le Prince des Rats Kritza, un noble dévoyé (vampire lui aussi, évidemment) qui a pris la tête de la cabale lupophobe après que Radukar l’ait laissé pour mort suite à un petit accrochage autour de la machine à café. Kritza et son corps de lâche ne sont évidemment pas venus seuls : une petite bande de petites frappes à canines pointues a fait le déplacement, afin d’équilibrer un peu les choses entre Rad’ the Chad et Kritza le Rat. Sans surprise, l’entrevue se passe moyennement, chacun campant sur ses positions, jusqu’à ce que Natasyia arrive avec les renforts promis pour précipiter la résolution du litige…

Début spoiler 1…Seulement, cette fourbe de flibustière repentie jouait en fait du côté de Kritza. C’est d’ailleurs elle qui a dérobé la peau du père de Radukar, et l’a remise aux conjurés. Les griefs de Nat’ sont simples : elle en veut à son boss de ne lui avoir pas dit qu’être un vampire créait un grand vide spirituel, ce qui était pourtant assez facile à prévoir en réfléchissant deux secondes au concept de non-vie. Heureusement qu’il n’y a pas de termes et conditions dans les Royaumes Mortels, ce serait un véritable carnage. Quoiqu’il en soit, Radukar se retrouve finalement isolé et encerclé au milieu des épaves pourries (je ne parle pas des vampires) du port, ce qui n’est pas une situation enviable. Le plan de Kritza est simple : mettre le feu à l’une d’entre elles et faire pousser le seigneur d’Ulfenkarn dans le brasier par le cordon de sécurité squelettique rameuté par Natasyia. Aussitôt dit, aussitôt fait. A moins que…

Début spoiler 2…A moins que ce rusé de Radukar ait flairé la combine à des kilomètre grâce à sa truffe de loup, et ait pris des mesures de contingence pour piéger les piégeurs. Il désactive ainsi les squelettes d’une simple commande vocale1, et fait signe à ses fidèles Ogors zombies de sortir des coulisses avec leurs pieux de fonction pour châtier les trublions. Ce retournement de situation pousse la clique de Kritza à tenter de rusher Radukar, avec des résultats… médiocres. Un peu plus réfléchie, Natasyia se saisit de la pelisse convoitée par son ex-patron, et fait mine de la jeter dans les flammes de l’épave s’il ne la laisse pas partir. Manque de bol, en tant que « fille » de Radukar, elle découvre bientôt que braver la volonté paternelle n’est pas une sinécure, et finit par apporter gentiment la fourrure au brasier, et elle avec par la même occasion, lorsque le pater familias lui ordonne. Reste Kritza, qui en tant que personnage nommé avec une figurine dispose d’une sauvegarde invulnérable en sigmarite, et se tire donc d’affaire avec son special move, l’effervescence murine. La nouvelle se termine sur ce tableau théâtral, Radukar jurant sur ses grands morts d’éradiquer la menace surmulote sans aucune merci. Prend des notes, Anne Hidalgo.Fin spoiler

1 : J’imagine que chacun squelette avait une dent bleue au fond de la mâchoire.

AVIS:

Nouvelle d’accompagnement du livre qu’il a consacré à la dynastie Vyrkos (‘Cursed City’), qui n’était lui-même qu’un produit dérivé de la boîte de jeu éponyme, ‘The Wolf and the Rat’ sent franchement le réchauffé. Les fortes contraintes scénaristiques avec lesquelles il a dû composer pour écrire cette nouvelle, dont tous les personnages nommés devaient réchapper, ont amené le vétéran Werner à nous servir de la soupe littéraire, qui n’intéressera à la rigueur que les lecteurs souhaitant creuser le lore d’Ulfenkarn, bourgade mineure de Shyish et bac(kground) à sable patenté. Mêmes les surprises que l’auteur souhaitait ménager en guise de twists finaux tombent à plat, faute d’alternatives crédibles à l’inénarrable trahison-du-bras-droit-secrètement-insatisfait, contrée aussi sec par la toute aussi fameuse prévoyance-de-vieux-briscard-qui-ne-faisait-que-donner-le-change-mais-qui-avait-tout-pigé-depuis-longtemps. C. L. Werner fait généralement beaucoup mieux quand on le laisse s’amuser avec des ratons, et on peut donc classer cette nouvelle parmi ses moins réussies pour le compte d’Age of Sigmar.

ET POUR LES NOUVEAUX?

En faisant porter son choix sur une nouvelle illustrant les bisbilles d’une micro-faction d’Age of Sigmar récemment mis à l’honneur dans une boîte de jeu, la BL fait passer le promotionnel avant le didactique, et c’est pour moi une faute grave au vu de la mission première des anthologies Black Library Celebration. Cela me brûle les doigts de l’écrire, mais dans ces circonstances, c’est la nouvelle de Stormcast Eternals basique(s) qui était à privilégier, afin de permettre aux primo-lecteurs la découverte des Royaumes Mortels à travers sa faction la plus iconique. Bien sûr, C. L. Werner a suffisamment de bouteille pour nous proposer un résultat acceptable, mais il y avait beaucoup plus évident (et mieux aussi). Hors sujet.

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L’Enfant du Chaos (Child of Chaos) – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE:

Le Siège de Terra approche méchamment et quelque part en orbite du Monde Trône, un Astartes en arrêt maladie contemple la planète de Pépé avec un œil torve et un visage couvert de biafine. Notre protagoniste est, vous l’aurez deviné, Erebus. Sauf que en fait, non, mais nous y viendrons un peu plus tard. Passé à la râpe à fromage par Horus et slam dunk-é dans le bac à ordures dangereuses par Lorgar, le surhomme par qui le scandale éclata n’a pas vraiment d’épaule sur laquelle suinter, mais il s’en fout royalement car son auguste compagnie lui suffit. Et comme dit son deuxième proverbe favori (on parlera de son premier un peu plus loin): « plus on est de fous, plus on rit, moi je suis tout seul parce que personne ne m’aime alors je compense en étant complétement ravagé du bulbe et pouvoir rigoler un bon coup ». Quel dommage que seule la version abrégée de cette maxime si profonde nous soit parvenue. Toujours est-il qu’Erebus est décidé à se parler à lui-même pour passer le temps, et il embarque donc le lecteur dans le récit de son origin story, qu’il considère comme étant édifiante. Voyons cela.

Première confession: Bubus a toujours été mauvais. Et surtout en dictée. Il ne s’en cache ni ne s’en excuse, et il n’y a pas d’élément déclencheur à chercher pour explique sa chute, à part peut-être le fait qu’il ne supporte pas la chaleur. Mais bon, se dire que l’Hérésie aurait été évitée par un malheureux climatiseur, ce n’est pas très glamour, donc restons sur l’hypothèse de la malignité incarnée. Déjà tout môme, son passetemps favori était d’arracher les pattes de scorpion de Colchis, ce qui n’est guère charitable. Issu d’une famille miséreuse, il se mit à lorgner du côté des khôl gris du Covenant après avoir constaté que les prêtres menaient une vie de patachon. Après quelques mois à apprendre par cœur des cantiques et à apprendre à lire sur des bouquins piqués en douce dans le temple local, notre zéro accomplit ses premières armes en garrotant de sang froid un jeune dévôt de son quartier, auquel sa mufle de mère le comparait à longueur de journée pour le rabaisser. L’individu en question témoignait de sa foi envers les Puissances en se peignant des mots sacrés sur le visage, habitude que son assassin reprit, tout comme il lui emprunta son nom: Erebus. MIND BLOWN. On est passé à ça d’avoir l’Hérésie manigancée par un gonze appelé Post Malone ou Tekashi69, ça fait froid dans le dos tout de même. Heureusement que Môman Bubus n’aimait pas le rap.

Ce premier assassinat permit toutefois à l’usurpateur d’entrer dans les ordres sans coup férir, et de commencer à tailler son chemin vers le pire, soit le Pouvoir, l’Influence, la Richesse et l’Efferalgan. Car Erebus n’est pas vraiment croyant à la base, et avoue volontiers s’être piqué d’intérêt pour la chose religieuse de la même manière que tu as pris goût aux endives au jambon: à l’usure. BLIND MOWN. Pendant qu’il faisait ses classes, un certain Prophète commençait à faire parler de lui dans l’arrière pays colchitique, et il ne fallut pas longtemps avant qu’Erebus ne pose les yeux sur celui qui allait devenir son père adoptif (Lorgar), accompagné par sa future marâtre (Kor Phaeron). Ce ne fut pas le coup de foudre mais le jeunot comprit qu’il fallait qu’il se rapproche de Mr Tête d’Œuf pour son propre bien, ce qu’il fit.

Une arrivée impériale et une transformation en Space Marine plus tard, notre désormais fringant héros part sillonner la galaxie à la recherche des Dieux du Chaos, envers qui il sent une attirance particulière. Rien de très intéressant ne se produit jusqu’à l’arrivée sur Davin, et la visite qu’Erebus rend à un temple décati que lui ont révélé ses visions. Sur place, il rencontra un vieux prêtre ridé et impoli, ce qui n’est pas très malin quand on s’adresse à un type qui fait deux fois sa taille et trois fois son poids. Parmi les tags effacés et les inscriptions désobligeantes, les sens de sorceleur du surhomme firent clignoter en rouge un dessin de l’Anathame (qui ne se trouvait pas sur place, ce serait trop simple) ce qui fut apparemment suffisant pour son bonheur immédiat. Il repartit donc avec une envie folle de farmer du Wither squelette1, en ordonnant au vioque de faction de retaper un peu la bicoque, et en donnant rendez-vous dans quelques décennies à une très jeune Akshub (qui ironie de l’histoire, lui donnera des cours en chaotique appliqué lorsqu’il reviendra… quel fumiste tu fais Bubus alors). La suite de l’histoire, sans être parfaitement connue, l’est toutefois suffisamment pour pouvoir laisser Erebus à ses divagations fiévreuses et purulentes. Mais tel est le destin de ceux qui manquent de peau.

1Mais sans accès au Nether, il dut se contenter de piller les collections permanentes du musée de la vie rurale de l’Interex, comme chacun sait.

AVIS:

Chris Wraight lève le voile sur l’origine d’un des personnages les plus importants de l’Hérésie n’étant pas Pépé ou un Primarque : bonne idée dans l’absolu, et assez bien réalisée même si ‘Child of Chaos’ tient plus de la lecture complémentaire intéressante que du must read définitif. Il y a certes quelques révélations bien senties de la part d’un auteur qui a trop de métier pour ne pas jeter quelques bouts de fluff anecdotiques (au sens littéral) en pâture à son public de fanboys dans une nouvelle telle que celle-ci, mais rien qui changera la face du lore. On apprend par exemple que c’est à Erebus que l’on doit la maxime « béni soit l’esprit trop étroit pour le doute », ce qui est utile à savoir pour briller dans un centre GW mais relève de la trivia hérétique au final. Notons également que Wraight se retrouve piégé par cet ennemi acharné de l’auteur de l’Hérésie d’Horus qu’est la continuité temporelle (à égalité avec la bonne vieille logique cartésienne): si Erebus a pu devenir un Word Bearers, c’est qu’il était très jeune à l’arrivée de l’Empereur. Or on sait (‘Lorgar: Bearer of the Word’) que Kor Phaeron avait déjà mis des pensées non euclidiennes dans la tête de son pupille bien avant que Bubus soit en mesure de susurrer des salaceries à l’oreille de son Primarque : l’image d’Epinal d’instigateur de l’Hérésie qui accompagne le Chapel-Un depuis quelques années en prend donc un sacré coup dans les ratiches.

Bref, on tient ici une lecture sympathique et qui permet à Wraight de mettre un peu d’ordre1 dans, et de faire quelques clins d’œil à la suite de, l’histoire d’Erebus, ce qui peut, ou non, justifier les 3,49€ demandés par la Black Library pour tuyauter le lecteur/fluffiste sur ce VIP chaotique.

1J’ai bien aimé le fait qu’il cherche à couvrir les traces de Thorpe en indiquant au détour d’une phrase que, oui, les Dieux du Chaos avaient bien un œil (mais juste un œil) sur Colchis et le Covenant, respectivement élus « Planète chaotique la plus calme du Materium » et « Secte chaotique hégémonique la moins efficace de la galaxie » 10.000 ans de suite. Il ne pouvait guère faire plus que cela sans réécrire l’histoire.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Comme pour ‘The Serpent’s Dance‘, on peut considérer que ‘L’Enfant du Chaos‘ n’est pas assez grand public dans son propos pour mériter sans contestation sa place dans une anthologie introductive. Ceci dit, comme Erebus est une figure incontournable de l’Hérésie, permettre à un nouveau lecteur de s’initier à cette dernière à travers cette nouvelle retraçant ses origines se défend, surtout quand le résultat est de bonne qualité (comme c’est le cas ici). De manière plus large, donner la vedette à un anti-héros tel que ce bon Chapelain est également un bon moyen d’illustrer l’approche grimdark de la GW-Fiction, univers impitoyable où la pureté de la cause et la noublesse des sentiments ne servent absolument à rien. Un choix pas évident, mais qui se défend, donc.

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Mort sur la Route de Svardheim (Death on the Road to Svardheim) – D. Hinks [AoS] :

INTRIGUE:

En route vers la cité de Svardheim pour une raison sans doute logique mais inconnue de l’auteur de ces lignes au moment de l’écriture de cette chronique, le duo le plus mal assorti des Royaumes Mortels1 passe le temps et les kilomètres sur la route 88 (c’est tout plat, désertique et décoré avec des monceaux de crânes) en discutant théologie, comme à leur habitude. Bien évidemment, la situation finit par gentiment dégénérer, l’anticléricalisme blasphématoire d’un Gotrek toujours chafouin de s’être fait rouler dans la farine par les Dieux du Monde Qui Fut mettant sur les dents, qu’elle a éclatante, la dévote Maleneth. À force d’enquiller les bornes, elle finit même par les dépasser, allant jusqu’à accuser son rusé et runé camarade de servir le Chaos, à l’aide de l’argument, bien connu de George W. Bush, du « si tu n’es pas avec moi (et Ziggie) tu es contre moi ». Avant que la situation ne dégénère trop franchement, et que le Tueur vétéran ne doive se trouver encore un nouveau sidekick, les comparses tombent sur le théâtre d’une embuscade ayant été fatale à une bande de prêtres sigmarites, dont les corps décapités jonchent les alentours d’une carriole incendiée.

Après une rapide enquête, il s’avère que les assaillants n’ont pas réussi le perfect en matière d’élimination de témoins, une pauvre nonne répondant au nom de Carmina se présentant à nos héros et leur expliquant que sa congrégation s’est fait dérober une relique irremplaçable, le Poing Incorruptible, dont elle avait la charge et promenait de ville en ville pour ranimer la foi des locaux. Avant que Gotrek n’ait pu marquer de nouveaux points d’athéisme hardcore en demandant à Carmina en quoi un poing pouvait être corrompu, pour commencer (il en serait capable le bougre), Maleneth se fait embringuer dans une mission de récupération du saint gantelet, qu’il s’agit simplement de reprendre des mains malpropres d’une petite vingtaine de bandits, retranchés dans une forteresse abandonnée à quelque distance de la route. Rien que de très banal pour notre Tueur, qui accepte toutefois de mettre les formes et de suivre un plan un minimum intelligent (attendre que Maleneth se soit mise en position derrière le bastion pour intercepter d’éventuels fuyards) avant d’aller toquer à la porte le plus naturellement du monde.

La prévoyance de l’Aelf paie rapidement car il se fait bientôt jour (enfin, nuit, mais je me comprends) que les brigands sont un peu plus qu’une bande de maraudeurs sanguinaires, mais bien une authentique secte de Khorne, en train d’invoquer un démon de fort belle taille à l’aide de leur collection bien mal acquise de grigris et talismans. Maleneth n’a pas le temps de signaler qu’il y a une courge dans le potage que Gotrek est cependant déjà en train de défoncer la porte et de se tailler un chemin à travers les mobs de bas niveau, jusqu’à poser l’œil sur une Némésis digne de lui, qu’il engage évidemment en combat singulier dans la plus pure tradition du genre. Etant un VIP incontournable du multivers, Gogo est reconnu par son adversaire, qui a la mauvaise idée d’insinuer que le Tueur a fui son monde au moment de la Fin des Temps au lieu de rester et de se battre pour le défendre. Cela met notre nabot en rogne, et les deux adversaires se balancent quelques baffes amicales, sans trop d’effet de part et d’autre, jusqu’à ce que Meleneth ait l’idée géniale de confisquer les reliques ayant été mise à profit pour invoquer le démon, et dont ce dernier a encore besoin pour maintenir sa présence dans les Royaumes Mortels. Au fur et à mesure que les héros shootent dans les breloques, leur adversaire perd en taille et en carrure, jusqu’à finir rachitique et malingre, et se faire décapiter sans cérémonie par un Gotrek enfin à la bonne taille pour jouer de la hache.

Ceci fait, le duo infernal n’a plus qu’à remettre le Poing Incorruptible à la brave (en fait pas trop) et reconnaissante Carmina, qui s’en va à cheval remettre le précieux héritage en sécurité, pendant que nos héros continuent à pied leur périple. Poing/t final de notre histoire ?

Début spoilerEh bien non (comme la balise spoiler ne le laissait pas du tout envisager), car lorsque nos voyageurs, fourbus (surtout pour Maleneth) et assoiffés (surtout pour Gotrek) tentent d’obtenir le gîte et le couvert d’un monastère sigmarite croisé un peu plus loin sur la route, se disant à juste titre que tous les culs bénis à la ronde leur sont redevables de leurs récents exploits, c’est pour entendre un son de cloche bien différent. Carmina était en fait une voleuse ayant mené sa bande, déguisée en prêtres, dérober le fameux Poing Incorruptible (mais pas Inatteignable) de la garde des vrais fidèles de Sigmar, en tuant quelques uns au passage. L’abbé outré qui fait ce récit aux voyageurs est persuadé que l’iconoclaste va briser la relique en mille morceaux pour revendre la Pierre de Royaume dont elle est faite au plus offrant, au mépris de tous les commandements de Sigmar. C’est donc une grosse boulette, sur laquelle Maleneth manque de s’étouffer, mais qui ne déclenche chez ce philosophe de Gotrek qu’un rire tonitruant. Il en a certes vu d’autres…Fin spoiler 

1 : Gotrek est un Nain (et pas un Duardin) roux exhibitionniste, et Maleneth est une Aelf brune gothique.

AVIS:

Eh bien ça y est : après avoir laissé Gotrek (et le regretté Felix) à leurs aventures dans le Monde Qui Fut, je renoue enfin avec ce héros mythique sous sa nouvelle incarnation, à travers ce court format signé du père adoptif #3 du Tueur de… trucs, Darius Hinks. Ce qui m’intéressait particulièrement dans ces retrouvailles était de voir ce qui avait changé, et ce qui était resté, des précédentes aventures de M. Gurnisson, qui constituaient un sous-genre de la littérature BL à elles seules. L’équilibre n’était pas facile à trouver entre respect servile du cahier des charges, forcément un peu obsolète, établi par King et Long en la matière, et innovations radicales, qui auraient enlevé tout le sel de ce come-back improbable. Et je dois dire que Darius Hinks s’en est plutôt bien sorti, tant sur le fond que sur la forme. On est bien en présence d’une aventure de Gotrek & Cie, avec notre petit rouquin teigneux, grincheux et pince sans rire s’embarquant dans un combat à haut risque contre un adversaire très balèze (sur le papier en tout cas), au grand désespoir de son partenaire attitré. Ce qui change ici est que Gotrek est devenu un mécréant militant, gardant sa dernière dent contre tout le panthéon divin (à commencer par Sigmar, qui s’en prend plein les tresses), alors que Maleneth est, sous ses abords de tueuse froide, une zélote du grand barbu, ce qui est à la fois surprenant (c’est le type qui la voyait comme une pseudo Assassin druchii qui parle) et intéressant. Notons également que Hinks ne se gêne pas pour glisser quelques références au passé proprement légendaire de son héros et donc à feu Warhammer Fantasy Battle, ce qui devrait faire plaisir autant qu’intriguer le lecteur historique de la saga. Bref, le contrat est bien rempli dans ce ‘Death on the Road to Svardheim’, qui tient son rang parmi les cohortes de nouvelles Gotrekesques publiées par la BL depuis des temps immémoriaux. Reste à savoir ce que cette dernière compte faire de son increvable héros sur le long terme, maintenant qu’il ne peut absolument plus mourir (ce serait un énorme fail), mais ceci est une autre histoire.

ET POUR LES NOUVEAUX?

On ne fait pas vraiment plus iconique que Gotrek parmi les personnages de la Black Library, aussi sa présence dans un recueil tel qu’un Black Library Celebration fait tout à fait sens. Cette nouvelle permet à la fois au lecteur de se familiariser avec cette figure tutélaire de la GW-Fiction, à travers une petite aventure représentative de l’esprit de la saga, et à la BL de faire le lien avec l’imposant catalogue de courts et longs formats qu’elle est toute prête à nous vendre en cas d’intérêt pour le petit rouquin teigneux. Tout le monde est content.

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Secteur 13 (Sector 13) – S. Mitchell [40K] :

INTRIGUE:

Après les événements de Desolatia (‘Fight or Flight’), le Commissaire Cain profite enfin de la vie et d’un théâtre d’opérations beaucoup plus calme sur l’agrimonde de Keffia, où une coalition de régiments impériaux est à pied d’œuvre pour purger une infestation de Genestealers. Son rattachement à une compagnie d’artilleurs et sa popularité naissante donnent en effet à notre héros beaucoup d’occasions de faire son devoir de façon plaisante : à des kilomètres de la ligne de front et/ou à proximité des hors d’œuvre du Gouverneur local. Une vraie sinécure en quelque sorte, que le talent de Cain pour se mettre tout seul dans de sales draps va bien sûr interrompre de la plus brutale des façons.

Au début de la nouvelle, le Commissaire pensait pourtant avoir finement joué en trouvant un prétexte en plasbéton de décliner l’invitation du Colonel Mostrue de participer à un briefing de haut niveau, honneur lui ayant certainement valu de finir en première ligne sur une quelconque offensive décisive. Très peu pour Cain, qui a donc fait remarquer à l’officier qu’il était de son devoir d’aller superviser le rapatriement d’une poignée de Gardes des Glaces mis au trou par l’Arbites local, à la suite de troubles du voisinage dans la ville de Pagus Parva. Une tâche ingrate, mais qu’il faut bien faire, surtout quand cela permet de passer du temps avec la plastique Sergent Wynetha Phu. L’Empereur le veut, toussa toussa.

Rendu sur place avec son fidèle Jurgen, Cain badine un peu avec l’accorte Arbites, tout en sortant son numéro de Commissaire c’est juste mais vert (et inversement) aux cinq pochtrons bagarreurs qui ont causé du grabuge la nuit dernière. Bien que peu intéressé par les accusations de ses charges envers les locaux, qui auraient mis des roofies dans leurs verres pour leur faire les poches en douce, Cain accepte d’aller faire une enquête de voisinage (avec Wynetha bien sûr) pour tirer les choses au clair. Ses pas le conduisent alors jusqu’au bar du Crescent Moon, où travaille la sculpturale Kamella, escort girl rurale et ultime souvenir que gardent les Gardes de leur dernière soirée. Confrontés à la méfiance du propriétaire, qui ne consent à ouvrir la porte que devant le risque élevé de se la faire enfoncer par les enforcers – un comble –, Cain, Wynetha et le planton qu’elle a amené avec elle pour faire le nombre et grimper le bodycount à peu de frais1 sont forcés de prendre leur grosse voix impériale pour convaincre l’habitant de les laisser accéder à la chambre de Kamella. Et c’est là que les choses se corsent pour nos héros, car les paumes de Cain se mettent à le chatouiller, super pouvoir indiquant de façon indubitable que quelque diablerie est à l’œuvre…

Début spoiler…Et en effet, Kamella se trahit en demandant au Commissaire s’il aime ce qu’il voit (elle était nue sous ses vêtements à ce moment là) en utilisant son patronyme, qu’elle n’avait aucun moyen de connaître. La seule explication logique (mises à part celles basées sur la relative célébrité de Cain ou une ouïe un peu plus fine que la moyenne) est que la donzelle est capable de communiquer par télépathie avec le barman, comme deux hybrides Genestealers peuvent le faire. C’est le début des ennuis pour nos héros, qui se retrouvent vite assaillis par un essaim entier de cultistes plus ou moins présentables. Laissant l’Arbites inconnu mourir au champ d’horreur, comme convenu, Cain et Wynetha parviennent à s’échapper de ce guêpier et à rejoindre le commissariat (pas le sien, le nôtre, enfin je me comprends), où les attendent Jurgen et les cinq Gardes biturés. Bien que la bâtisse soit solidement construite et capable de soutenir un siège, la situation des impériaux ne va pas en s’améliorant car il s’avère bientôt que deux des bidasses ont chopés une MST tyrannique à trop fricoter avec l’habitant.e, et sont tombés sous la coupe de l’essaim. Contraints de se replier sur le toit du bâtiment après que leurs collègues aient fait défection et ouverts la porte aux hordes baveuses et chitineuses de Pagus Parva, Cain et Cie ne doivent leur salut qu’à l’arrivée propice et totalement inespérée d’un régiment de Cadiens, qui venait sans doute prendre un peu de bon temps après une campagne éprouvante sur le front, le vrai, le dur, le velu. Pas de chance pour les troupes de choc, il faudra passer sur le corps des filles de joie locales avant de leur passer… C’est peu conseillé de toute façon.

L’histoire se termine triplement bien pour Cain, qui écope d’une médaille, d’une réputation héroïque encore grandie (alors qu’il a simplement et bêtement pété les plombs en plein combat), et d’un regard lascif de Wynetha lors de la soirée de remise des honneurs. Vu comme ça, on aurait presque envie de s’engager.Fin spoiler

1 : Mitchell ne se donne même pas la peine de le baptiser, c’est dire s’il était mal barré le garçon.

AVIS:

Comme l’illustration d’époque qui accompagne cette chronique le fait subtilement remarquer, ‘Sector 13’ (le nom de la zone autour de Pagus Parva) est une nouvelle collector, remontant aux tout premiers chapitres de la longue, troublée et caustique histoire de Ciaphas Cain. 2003, pour être précis. La recette est la même que pour toutes les autres soumissions de Sandy Mitchell pour cette série : une approche décomplexée (les Anglais ont la jolie formule de tongue-in-cheek) du background de Warhammer 40.000 avec un gros B, permettant au personnage de sitcom qu’est Cain de vivre des aventures palpitantes à son corps défendant. Après avoir enquillé de nombreuses itérations de cette formule consacrée, qui a offert une carrière respectable à Mitchell au sein de la Black Library, je dois reconnaître que certains épisodes sont plus réussis que d’autres, et ‘Sector 13’ fait partie du haut du panier. Il m’est difficile de quantifier précisément ce qui fait de cette nouvelle un succès, mais il me semble que le rythme est plus enjoué, et les blagues plus efficaces que pour d’autres courts formats de Sandy Mitchell. Bref, c’est une des (més)aventures les plus satisfaisantes de l’incorrigible et incorrigé Ciaphas Cain que nous tenons là, et un point d’entrée idéal pour tout novice cherchant à se frotter à cette légende de la Black Library.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Comme Gotrek, Ciaphas Cain est un incontournable de la Black Library. Mon jugement sur l’intégration de ‘Secteur 13‘ dans cette anthologie introductive sera donc aligné sur celui donné plus haut: c’est un grand oui. Le fait que nous bénéficions ici d’une « bonne » nouvelle du Commissaire le plus cool du 41ème millénaire ne gâche évidemment rien.

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Les Réprouvés (Nightbleed) – P. Fehervari [40K] :

INTRIGUE:

Les journées de Chel Jarrow, medicae disgraciée et névrosée de Sarastus, sont hantées par un cauchemar récurrent dans lequel elle se revoit faire l’erreur qui lui a coûté sa carrière, ainsi que la vie d’une de ses patientes. Epuisée par un enchaînement de gardes, elle a en effet confondu un Death Guard « XIV » avec un Son of Horus « XVI » et injecté de l’eau de javel à une malade du COVID-19K, ou une joyeuseté de cet ordre, ce qui ne pouvait pas bien se terminer. Renvoyée par son employeur, elle enchaîne depuis les petits boulots minables, le dernier en date consistant à servir de technicienne de laboratoire dans une usine agroalimentaire. Affectée à des cycles nocturnes pour ne pas entraver la production, Chel passe ses journées à dormir et ses soirées à éviter son mari Lyle, dont elle ne supporte plus la petitesse et la servilité1. Une bonne crise de la quarantaine comme on les aime, en somme.

Alors qu’elle prend le chemin du turbin, elle remarque en attendant que l’ascenseur monte (131ème étage, tout de même) que de nouveaux tags ont fait leur apparition sur les murs de son couloir. L’un d’eux représente l’homme aiguille (Needleman), une sorte de croquemitaine local vivant dans les ténèbres et cherchant sans relâche à saboter les dômes abritant les cités ruches de Sarastus pour permettre à la Nuit Véritable de régner sans partage sur la planète. Le trouillomètre commence à s’affoler lorsque Chel entend des bruits suspects dans l’obscurité du couloir, hors de portée de sa fidèle lampe torche. Ou plutôt, aurait dû s’affoler car notre héroïne n’éprouve pas le moindre émoi à la pensée qu’un prédateur la guette peut-être depuis les ténèbres. C’est l’avantage d’avoir une vie vraiment pourrie : on voit toujours le bon côté des choses. Ceci dit, il ne se passera rien de bien méchant avant que l’ascenseur ne finisse enfin par arriver, et emmène Chel jusqu’au rez de chaussée de la tour Barka.

Il est temps pour nous de faire la connaissance de notre second personnage principal, un jeune à problème s’étant rebaptisé Screech (cri perçant en français) après avoir entendu sa mère pousser un hurlement inhumain lorsqu’il lui a crevé les yeux à l’aide d’une fourchette. Il venait de tuer son père de la même façon, et avait 14 ans à l’époque des faits. Voilà voilà. Obsédé par le mythe de l’homme aiguille, qui l’a fait basculer dans la folie homicidaire, Screech est devenu un grapheur marginal, laissant des messages aussi inquiétants que mal orthographiés2 sur les murs de la cité. En plus de cela, il lui arrive d’enfiler son cosplay de Needleman pour aller trucider du prolo au gré de ses envies. Cette nuit lui semble d’ailleurs propice à un nouveau crime, et alors qu’il erre dans la cité à la recherche de la bonne cible, son chemin finit par croiser celui de Chel, qui a pris place dans son TER habituel pour aller bosser. Pas de doute possible pour Screech, c’est elle que le destin a choisi pour rapprocher Sarastus de la Nuit Véritable, un meurtre sanguinaire à la fois.

De son côté, Chel, qui en a vu d’autres et se balade avec un taser dans la poche, sent bien que l’ado tatoué et crasseux qui s’est assis par terre en tête de wagon et l’épie sans en avoir l’air n’est pas animé d’intentions charitables envers sa personne. Une poussée de mauvaise humeur manque de la faire aller au clash contre son stalker (pas vraiment discret) à la sortie du train, mais ce dernier est trop perdu dans ses pensées (il a dû sniffer le reste de sa bombe de rose pour passer le temps) pour prendre la mouche. Laissant à sa victime un peu d’avance, il finit par la suivre jusqu’à l’usine où elle travaille, après avoir enfilé son habit de non-lumière : un masque de métal et les griffes de Freddie. Ainsi paré, il se sent possédé par l’esprit de Noël du Needleman, que l’on devine être un peu plus qu’un simple fantasme d’achluophobe. Et en effet, lorsque Screech se retrouve attaqué par un cyber molosse après être entré par effraction dans le périmètre de l’usine de Potton Vitapax, il ne doit son salut qu’à sa possession temporaire par son esprit totem, dont l’un des pouvoirs consiste à pouvoir tordre ses bras dans tous les sens, ce qui est pratique pour venir à bout d’un mastiff énergétique qui vous cloué au sol après vous avoir déchiqueté la cuisse. Mal en point mais toujours opérationnel, notre héraut reprend sa traque en traînant la jambe.

Pendant ce temps, Chel s’est remise à travailler sur le dernier échantillon qui lui a été remis, et dont elle suspecte la nature maléfique, ou en tout cas néfaste, sans pouvoir le prouver. Les tests du VLG-01 n’ont en effet rien détecté de suspect, mais la consistance de goudron pervers de la substance rend son utilisation dans des produits cuisinés, même pour des travailleurs de la caste Delta, impensable. En désespoir de cause, et prise d’une inspiration subite, Chel a résolu la veille d’ingérer un peu de cette mixture, ce qui a semble-t-il renforcé ses cauchemars. N’y tenant plus, et sans doute en manque, la technicienne décide d’aller visiter le lieu de stockage du VLG-01, convainquant pour ce faire un des gardes de nuit de la conduire jusqu’à l’entrepôt (forcément abandonné jusqu’il y a peu car il avait mauvaise réputation). Là, deux choses horribles se produisent coup sur coup. Premièrement, Chel sombre dans la folie et se sert une grande rasade d’élixir de noirceur à même la cuve (pochtronne !), ce qui ne lui fait pas du bien comme on peut s’en douter. Deuxièmement, Screech finit par la rattraper, après avoir égorgé le garde au passage, et s’apprête à lui jouer son grand classique : le concerto d’Edouard aux Mains d’Argent en Scie Mineure…

Début spoiler…Seulement voilà, le Needleman s’est trouvé un avatar plus méritant que ce petit péteux de taggeur, et Chel se fait un plaisir de corriger son agresseur d’un grand coup de taser dans la glotte, ce qui lui fait fondre la mâchoire et couler les yeux sur les joues, entre autres effets secondaires sympathiques. Ayant récupéré le masque de fonction de Screech sur son presque cadavre, Chel retourne à son laboratoire pour valider définitivement l’échantillon de VLG-01, qui pourra donc être distribué largement à la populace de Sarastus, avant d’embrasser définitivement son nouveau statut de femme de l’ombre. Première étape : son appartement de la tour Barka, où elle aura une petite discussion avec ce butor de Lyle à propos des radiateurs…Fin spoiler

1 : Et également sa froideur coupable, car monsieur refuse obstinément de monter le chauffage, quand bien même la température de leur HLM se rapproche sensiblement de zéro.
2 : Dernier chef d’œuvre en date de notre Banksy sociopathe « C 1 MENSSONJE » au Hello Kitty Pink. Sans point d’exclamation à la fin, car ce n’était pas nécessaire.

AVIS:

Comme on pouvait s’en doute, Peter Fehervari réussit sans problème son entrée dans la gamme Warhammer Horror avec ‘Nightbleed’, un petit concentré de noirceur (haha) à la sauce Dark Coil. Notons à ce propos que les références aux autres textes et arcs narratifs du Fehervariverse ne sont pas légions dans cette nouvelle (à moins qu’elles soient trop subtiles pour votre serviteur, ce qui est tout à fait possible), ce qui facilite sa compréhension pour le lecteur non familier de l’approche de l’auteur. Ceci dit, il n’est guère besoin de pousser loin l’analyse pour comprendre que ‘Nightbleed’ n’est pas un stand-alone, mais contient des éléments qui s(er)ont explicités ailleurs, à commencer par le sens des lettres « VLG », sur lequel Fehervari fait plancher son lecteur de façon très explicite1. Parmi les autres réussites indéniables de cette soumission, on peut citer la facilité déconcertante avec laquelle l’auteur arrive à « planter » son décor en quelques phrases, et à faire de Sarastus un monde impérial plus tangible et réel que bien des planètes auxquelles GW et la BL ont consacré des dizaines de pages (Necromunda ? Armaggedon ? Cadia ?), ce qui est la marque des vrais conteurs. De la même manière, Fehervari instille à son récit un véritable malaise (angoisse serait un peu fort), amplifié par les bribes de comptines qu’il met dans la bouche et dans l’esprit de Screech. Will you won’t you meet the Needleman ?

1 : À titre personnel, je penche pour un acronyme en haut gothique (latin donc) glorifiant les ténèbres/le Chaos, mais cela peut être chose. Je suis simplement à peu près sûr qu’il est possible pour un lecteur attentif de percer ce mystère à jour avec les indices que Fehervari a laissé ici et là…

ET POUR LES NOUVEAUX?

Si vous êtes familiers de mes retours, vous savez que je porte à la prose de Peter Fehervari une affection toute particulière parmi les contributeurs de la Black Library. Aussi, permettre aux lecteurs francophones de s’initier aux joies glauques de Warhammer Horror à travers une (bonne, évidemment) histoire écrite par mon chouchou est évidemment un choix que je valide, et plutôt 41.000 fois qu’une. Le seul risque pour les nouveaux venus serait de considérer que toute la gamme est au niveau de ce ‘Les Réprouvés‘, ce qui n’est malheureusement pas le cas. Too much of a good thing…

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Aberrations (Aberrant) – C. Wraigth [40K] :

INTRIGUE:

Agusto Zidarov, Probator gras du bide, marié, un enfant, est mis sur un sale coup par un prêtre aussi influent qu’extrémiste, Yvgen Asparev. L’Ecclésiaste a en effet eut vent par son réseau de fidèles de la présence d’individus peu amènes, et probablement un peu mutés sur les bords, dans une zone industrielle d’Urgeyena. Bien que moins chaud que son indic’, qui lui brûle littéralement d’impatience, d’aller à la chasse aux mutants dans les bas-fonds de Varangantua, Zidarov se rend sur place pour faire sa contre-enquête, obtenant la confirmation de la part des témoins identifiés par Asparev que quelque chose de pas très impérial se trame dans l’entrepôt proche de la gare locale. À la nuit tombée, notre héros se glisse discrètement à l’intérieur du bâtiment en question, et ne met pas longtemps à tomber sur le « dortoir » de travailleurs détachés d’un genre un peu particulier. Très grands, très costauds, avec une peau diaphane, des yeux noirs et trois slips à se partager pour deux cents individus, les humanoïdes enchaînés dans le sous sol du site industriel répondent parfaitement au cahier des charges de l’abhumain de contrebande, venant voler les emplois et le slab des honnêtes Alectiens.

Cette découverte ethnologique majeure ne peut toutefois être reportée aux autorités compétentes et/ou incandescentes, car Zidarov se fait surprendre par une bande de gorilles bourrés de stimms, qui se montrent assez peu impressionnés par son badge d’office. Il faut l’intervention salvatrice de la directrice de l’usine, Alissya Gordova, pour empêcher que le Probator n’aille rejoindre le panier à salade de l’Empereur. Cette dernière explique posément à son « invité » que les opérations du site sont placées sous la protection et la direction du vladar Aista Fyodor Meleta, qui, en sa qualité de sous-gouverneur planétaire, se contrefiche royalement de l’avis et des principes d’un flicaillon comme Zidarov. Reconduit sans ménagement à l’entrée, avec ordre de ne pas revenir de sitôt, notre héros s’exécute de bonne grâce, et parvient à poser un mouchard sur un véhicule de transport qu’il devine justement servir à l’acheminement de la main d’œuvre spécialisée qui trime dans les profondeurs.

Cette intuition le mène jusque dans la juridiction voisine de Korsk, sur les traces du semi-remorque en question, qui se gare au milieu de la pampa pour réceptionner une cargaison livrée par une navette spatiale banalisée. Le doute n’est à ce stade plus permis, mais Zidarov fait du zèle en rendant une visite de courtoisie au gros lard ayant supervisé l’opération dans la cabane minable qu’il occupe à proximité du site d’atterrissage clandestin, une fois le convoi reparti. Ayant menotté et bâillonné son hôte pour pouvoir explorer sa piaule en paix, Zidarov a la surprise et l’horreur de découvrir une femelle de la race des abhumains entraperçus dans l’usine d’Urgeyena attachée sur un lit. Gras double est en effet un petit pervers, qui aime jouer du fouet pour se sentir puissant (ce qui est somme toute moins dégoûtant que d’autres explications à cette situation particulière). Dilemme profond pour notre héros, qui ne sait pas trop s’il doit tuer la mutante de sang-froid, ou la libérer de son tortionnaire. Pris de doute, il commence à dialoguer avec la grande godiche, et se rend vite compte qu’elle est plutôt à plaindre qu’à exterminer. En définitive, il décide de la remettre en liberté, scellant du même coup le sort de l’Indiana Jones en surpoids qui se dandine sur la moquette de la pièce d’à côté, et donnant à la rescapée les informations nécessaires pour qu’elle puisse tenter d’aller libérer ses congénères de leur camp de travail.

La nouvelle se termine par la confrontation entre Zidarov et Asparev, durant laquelle on apprend qu’un regrettable accident s’est déclaré récemment dans l’usine du vladar, la réduisant en cendres et provoquant la mort d’une bonne partie de ses ouvriers. On n’a par contre pas trouvé trace du moindre mutant sur les lieux du drame, et d’ailleurs les Probators n’ont même pas été mandatés pour enquêter sur l’origine du sinistre, ce qui est assez bizarre quand on y réfléchit… Voire même aberrant.

AVIS:

Chris Wraight nous sert une nouvelle bien pensée (et mettant en scène son héros de Warhammer Crime, Agusto Zidarov, également au sommaire de ‘Bloodlines’), explorant le thème du rapport à la mutation – et donc à la différence – d’un Imperium dont la diversité intrinsèque devrait pousser à la tolérance sur le sujet, mais qui se complaît au contraire dans son obscurantisme. Dans les ténèbres d’un lointain futur, on n’est pas à un paradoxe près. S’il n’a pas été le premier à exploiter cette ficelle (je pense en particulier à Barrington J. Bayley et à son ‘Children of the Emperor’ et à Gav Thorpe avec ‘Suffer Not the Unclean to Live’), Wraight est un des rares auteurs contemporains de la BL à remettre l’idée au goût du jour, y ajoutant de façon (à mon avis) délibérée et pertinente des similitudes avec la situation des migrants fuyant la misère et la guerre de leurs pays pour finir exploités en Europe ou aux Etats-Unis. La réalisation de Zidarov que les êtres qu’il considère comme des animaux sont en fait des humains, au même titre, voire davantage, que lui et ses concitoyens de Varangantua, pourrait amener le lecteur à réfléchir à son tour sur la gestion actuelle de la crise migratoire, si le cœur lui en dit. C’est en tout cas l’un des textes les plus actuels et « réalistes » publiés par la Black Library depuis un bout de temps, et il mérite à ce titre largement la lecture.

Autre point fort de cet ‘Aberrant’, la réussite de Wraight au moment de dépeindre son héros comme un individu moralement ambigu, et loin d’être exemplaire. Les protagonistes de l’anthologie ‘No Good Men’ ont en effet tendance à avoir plutôt un bon fond, malgré leurs tendances auto-destructrices/associales, alors que Zidarov est, lui, objectivement compromis. La difficile décision qu’il prend de libérer celle qui est, selon toute évidence, une victime d’une exploitation sans vergogne de la part de Varangantua au sens strict, et de l’Imperium au sens large, fait de ce personnage une véritable incarnation des « types pas bien » que nous promet le titre du recueil. À côté de cela, le fait que Zidarov ne soit pas le flic/détective privé solitaire et alcoolique qui revient avec d’infimes variantes dans les autres nouvelles de l’ouvrage, mais un citoyen assez normal, intégré, rationnel et avec une famille, renforce encore la ligne de faille entre ce qu’il apparaît être et ce qu’il faillit devenir. Bref, si le suspens n’est ici pas au rendez-vous, cette nouvelle a bien d’autres qualités à mettre en avant, et est sans doute l’un des premiers classiques de Warhammer Crime.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Une très bonne introduction à Warhammer Crime et à la réjouissante et complexe noirceur de la société civile impériale, ‘Aberrations‘ remplit sa mission didactique aussi proprement que Zidarov son enquête. Un choix tout à fait approprié de la part de la Black Library donc, qui aura réussi à très bien mettre en valeur ses nouvelles franchises dans cette anthologie francophone 2022, si vous voulez mon avis.

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Au final, et c’est assez rare pour le souligner, je peux affirmer sans détour que le recueil français du Black Library Celebration 2022 est supérieur à celui proposé en version originale, et ce malgré l’absence totale d’inédites dans le premier (par rapport au second). Si cela est dû en grande partie aux choix hasardeux de la BL en matière de sélection des nouvelles figurant au sommaire de ces ouvrages, je me permets de souligner en outre que la cuvée francophone de cette année est très solide ceteris paribus, et devrait à mon sens être privilégiée par les lecteurs débutants par rapport aux autres anthologies du même tonneau (comme elles sont toutes proposées en vrac en bas de la page My Download du site de la Black Library, cela vaut peut-être la peine de le préciser ici). Le mot de la fin consistera tout de même et avant tout à remercier Nottingham pour avoir reconduit une fois encore cette louable initiative, afin de permettre au tout venant de s’initier aux plaisirs (plus ou moins coupables) de la GW-Fiction à vil prix. Pourvu que ça dure!

BLACK LIBRARY 2020 ADVENT CALENDAR

Bonjour à tous et bienvenue dans la traditionnelle chronique calendaire du mois de Décembre, consacrée au Black Library Advent Calendar. Le cru 2020 se distingue par rapport à ses prédécesseurs : aéré (une sortie tous les 2 jours, soit 12 au total contre les 24 habituelles), trilingue (le français et l’allemand s’invitent dans la veillée1) et totalement visuel (pas d’audio drama cette année), cet arrivage de nouvelles nouvelles (pour la VO tout du moins) est à l’image de l’année 2020 : très particulière. Souhaitons-lui et souhaitons nous cependant que cela soit dans un sens plus positif que ce à quoi les 11 derniers mois nous ont habitué.

Le sommaire du BLAC 2020 met particulièrement à l’honneur Warhammer 40.000, à qui revient la moitié des publications. Si en termes de personnages convoqués, et à première vue – des titres et des couvertures uniquement – , seul l’inusable Ciaphas Cain s’impose comme une valeur sûre, les auteurs mis à contribution sont quant à eux largement connus de la part des habitués de la Black Library. En plus de Sandy Mitchell, on retrouve ainsi les Seigneurs de Terra Guy Haley et John French, les confirmés Robert Rath et Danie Ware, et le « faux débutant » Marc Collins.

Les 6 autres nouvelles se répartissent également entre Age of Sigmar (la tête d’affiche étant ici tenue par le positivement immortel car intuable Gotrek Gurnison) et Hérésie d’Horus. Un certain mystère est ici laissé par la BL, en tout cas en matière picturale, puisque la couverture de la soumission du grand ancien sur le retour Graham McNeil n’a pas été révélée à l’heure où ses lignes sont écrites. On sait toutefois que l’histoire s’intitule ‘The Lightning Hall’, et je parie un petit crédit impérial qu’elle prendra place pendant le Siège de Terra et mettra en scène des Thousand Sons. Une intuition, comme ça. Notons également que pas moins de deux auteurs feront leurs premiers pas hérétiques à l’occasion du BLAC 2020: Mike Brooks et le bizut Brandon Easton, qui se paiera le luxe de signer ses débuts dans la Black Library par une publication dans la franchise la plus select de Nottingham.

1 : Avec comme d’habitude un contenu légèrement différent d’une langue à l’autre. J’ai toujours du mal à comprendre cette logique, étant donné que le nombre de lecteurs français de la Black Library capables de faire de l’achat d’impulsion en allemand pour compléter leur collection, et inversement, doit être marginal. Cette fois-ci, je pense que la team Croissant l’emporte sur la team Choucroute, car nous bénéficions d’un Fehervari alors que nos voisins écopent d’un Ware.

Sommaire Black Library Advent Calendar 2020 VF

Un mot sur le programme francophone pour terminer : il n’y a bien sûr pas d’inédits à attendre de ce côté-là, mais on peut saluer l’inclusion de pas moins de 8 nouvelles assez récentes dans les 12 proposées, et une variété notable en matière de contenu. En plus des incontournables Warhammer 40.000, Age of Sigmar et Hérésie d’Horus, le programme français inclue ainsi une nouvelle de Warhammer Horror et une autre de Warhammer Crime.

Comme la BL n’est pas la seule à innover, je conclue finalement cette introduction en indiquant que ce post sera mis à jour en cours de mois, idéalement quotidiennement mais à coup sûr plusieurs fois par semaine, au lieu d’être envoyé finalisé en fin de mois. Après Noël, c’est plus Noël.

12 Tales of Christmas

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Last Night at the Resplendent – S. Mitchell :

Last Night at the ResplendentINTRIGUE :

Où on apprend que le point commun caché entre Ciaphas Cain et Michel Sardou n’est pas d’avoir une mère qui a tourné dans un nanar de Philippe Clair, mais bien de ne pas aimer se souvenir dans l’ordre1. Derrière cette entrée en matière un peu tarabiscotée, je le reconnais, se cache un constat implacable: l’histoire qui nous occupe ici, pour récente qu’elle soit dans la production de Sandy Mitchell, remonte assez loin dans la geste épicomique de son héros d’opérette. Et pour cause, elle prend place juste après les événements narrés dans la nouvelle ‘Sector 13′, publiée en l’an de grâce 2003. Pour les béotiens et les oublieux, Cain et Cie avaient alors purgé, à la suite d’un malheureux concours de circonstances -comme toujours avec ce loustic-, un culte Genestealers planqué sur la planète agricole de Keffia. Nous retrouvons donc quelques têtes connues des habitués de la saga, en plus des incontournables et irrespirables figures que sont respectivement le Commissaire Cain et son aide de camp Jurgen, à commencer par le Lieutenant Toren Divas et, en arrière plan, le Colonel Mostrue2.

Notre propos débute par la proposition faite par Divas à son collègue de régiment, qui le considérerait presque comme un ami n’eut été sa détestable manie de l’appeler « ma caille » (ou Cai, en VO3), d’aller passer la soirée au théâtre. Cain, qui se sent un peu responsable de la frustration sexu…timentale de son comparse, car la fille avec laquelle ce dernier voulait à l’origine et véritablement passer un bon moment s’est révélée être un hybride Genestealer et a donc fini sur un bûcher, accepte l’offre et les deux soldats partent s’encanailler dans une salle de music-hall répondant au nom de Resplendent. Nous l’appellerons donc ici le Splendid, pour des raisons évidentes qui seront je l’espère reprises par le traducteur officiel de cette nouvelle, si un jour elle a cette chance. Arrivés sur place, les killer quilleurs sont rapidement reconnus par la plèbe locale comme l’illustre Commissaire Ken et son presque aussi illustre acolyte Bharbee, ce qui leur permet de récupérer, en plus de deux sachets de pralines gratuits à la caisse (ce qui représente déjà 800€ de gagné), un accès aux loges d’honneur de l’établissement en reconnaissance de leurs héroïques exploits. Accompagnés à leurs sièges par le propriétaire en personne, l’onctueux Erasmus Denovra (dont la calvitie naissante ne manquera pas de faire tiquer le lecteur attentif), Cain et Divas déclarent le mini bar objectif stratégique, et passent la soirée à boire des coups, tout en essayant de comprendre les vannes du Kev Adams de Keffia.

Tout cela aurait pu se finir très normalement, et donc ennuyeusement, si à la fin du spectacle Denovra n’était pas venu sur scène pour faire applaudir le sauveur de Keffia par la foule en délire, attention que le cabotin mais peu patient Cain n’apprécie pas le moins du monde. Se retrouver coincé par une horde de fanboys du tiers monde secteur, très peu pour lui, merci. Pour se tirer de ce mauvais pas, une seule solution: demander au brave Jurgen de rappliquer dare dare pour une évacuation par Salamandre interposée, et trouver un chemin jusqu’à l’entrée de service en passant par les sous-sols du Splendid, où entre un Père Noël en kloug massif et une bouteille d’amasec contenant un crapaud hurleur de Catachan, les fuyards tombent sur l’ouvreur du théâtre, Orris, venu refaire ses stocks de churros. Ayant fort besoin d’un guide pour naviguer le dédale, Cain et Divas acceptent le coup de main du factotum, mais ce dernier semble les mener toujours plus profond plutôt que vers la sortie…

Début spoiler…Et en effet, lorsqu’ils rencontrent par le plus grand des hasards Denovra au détour d’un couloir, le sagace Commissaire finit par comprendre devant l’air étonné de ce dernier qu’il y a baleine, ou plutôt Kraken, sous gravillon. Le placide Orris était lui aussi un hybride, qui cherchait à faire tomber le bourreau (involontaire) du culte dans les griffes de ses gros copains. Ni Denovra, ni Orris ne survivent longtemps à cette révélation, et la situation aurait pu très mal tourner pour nos deux héros, qui se retrouvent rapidement confrontés au Patriarche insaisissable de l’infestation, sans l’arrivée providentielle de Jurgen. Ce dernier n’hésite pas à fracasser un mur (il n’y avait pas de place pour se garer) pour cueillir son supérieur, et la combinaison du bolter lourd et du lance-flamme de coque du véhicule impérial a bientôt raison du gros cafard. Sur un malentendu, ça aurait pu dévorer. Seul petit problème, le Splendid devient la proie des flammes, mais comme c’était un nid de Xenos4, on ne va pas pleurer non plus. Tout est donc bien qui finit pas trop mal pour notre troupe d’impondérables, prête à repartir servir l’Empereur sur un autre… théâtre. M.O.U.A.H.A.H.A. Ce sera Perlia, et c’est couvert dans ‘Death or Glory’.Fin spoiler

1: Remember Olympia 95. Les vrais savent. 
2: Il est également fait mention d’une Sergent vétéran Wynetha Puh, pour laquelle Cain semble avoir une tendre concupiscence, mais j’avoue qu’elle ne me dit trop rien (et de toutes façons, elle n’intervient pas ici).
3: Ca fait beaucoup de renvois mais celui-ci vous sera peut-être utile (les autres non, on est d’accord). Ce surnom fait sens pour un lecteur anglophone car Ciaphas se prononce Kaïaphas en glaouiche. Si vous voulez un jour demander un autographe à Sandy Mitchell, ça vous évitera un moment de solitude.
4: Il faudrait penser à faire enquêter l’Ordo Xenos sur Michel Blanc pendant que j’y pense.

AVIS :

Les chroniques se suivent et se ressemblent pour Ciaphas Cain et Sandy Mitchell, qui ont fait leurs les principes de continuité et de persévérance. On a donc toujours droit aux mêmes ficelles, avec un Cain irrévérencieux qui se retrouve entraîné à son corps défendant dans des embrouilles mortelles, et ne doit son salut qu’à un heureux concours de circonstances, l’intervention énergique de son fidèle Jurgen, et ses compétences non nulles au pistolet bolter et à l’épée tronçonneuse. À la longue, je conçois que cela peut lasser, mais par petites doses, c’est tout à fait gouleyant. ‘Last Night at the Resplendent’ a également comme point fort, par rapport à d’autres nouvelles du même ordre commises par Mitchell, de mettre vraiment au premier plan sa figure de proue (pas comme ‘A Mug of Recaff’ et ‘The Smallest Detail’, qui propulsent Jurgen en vedette Valhallienne), et de venir compléter ou refermer des arcs narratifs existants, ce qui fera davantage plaisir aux fidèles du Commissaire Friseur que des pures et gratuites créations. En plus de ça, l’auteur nous réserve une petite surprise, ou un léger suspense, sur l’identité du fourbe traître de l’histoire, ce qui est toujours appréciable. Bref, pour les standards de la maison Mitchell, c’est plutôt de la qualité supérieure, et une façon agréable de (re)découvrir une des figures les plus excentriques, et donc attachantes, de la Black Library.

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L’Enfant du Chaos // Child of Chaos – C. Wraight :

Child of ChaosINTRIGUE :

Le Siège de Terra approche méchamment et quelque part en orbite du Monde Trône, un Astartes en arrêt maladie contemple la planète de Pépé avec un œil torve et un visage couvert de biafine. Notre protagoniste est, vous l’aurez deviné, Erebus. Sauf que en fait, non, mais nous y viendrons un peu plus tard. Passé à la râpe à fromage par Horus et slam dunk-é dans le bac à ordures dangereuses par Lorgar, le surhomme par qui le scandale éclata n’a pas vraiment d’épaule sur laquelle suinter, mais il s’en fout royalement car son auguste compagnie lui suffit. Et comme dit son deuxième proverbe favori (on parlera de son premier un peu plus loin): « plus on est de fous, plus on rit, moi je suis tout seul parce que personne ne m’aime alors je compense en étant complétement ravagé du bulbe et pouvoir rigoler un bon coup ». Quel dommage que seule la version abrégée de cette maxime si profonde nous soit parvenue. Toujours est-il qu’Erebus est décidé à se parler à lui-même pour passer le temps, et il embarque donc le lecteur dans le récit de son origin story, qu’il considère comme étant édifiante. Voyons cela.

Première confession: Bubus a toujours été mauvais. Et surtout en dictée. Il ne s’en cache ni ne s’en excuse, et il n’y a pas d’élément déclencheur à chercher pour explique sa chute, à part peut-être le fait qu’il ne supporte pas la chaleur. Mais bon, se dire que l’Hérésie aurait été évitée par un malheureux climatiseur, ce n’est pas très glamour, donc restons sur l’hypothèse de la malignité incarnée. Déjà tout môme, son passetemps favori était d’arracher les pattes de scorpion de Colchis, ce qui n’est guère charitable. Issu d’une famille miséreuse, il se mit à lorgner du côté des khôl gris du Covenant après avoir constaté que les prêtres menaient une vie de patachon. Après quelques mois à apprendre par cœur des cantiques et à apprendre à lire sur des bouquins piqués en douce dans le temple local, notre zéro accomplit ses premières armes en garrotant de sang froid un jeune dévôt de son quartier, auquel sa mufle de mère le comparait à longueur de journée pour le rabaisser. L’individu en question témoignait de sa foi envers les Puissances en se peignant des mots sacrés sur le visage, habitude que son assassin reprit, tout comme il lui emprunta son nom: Erebus. MIND BLOWN. On est passé à ça d’avoir l’Hérésie manigancée par un gonze appelé Post Malone ou Tekashi69, ça fait froid dans le dos tout de même. Heureusement que Môman Bubus n’aimait pas le rap.

Ce premier assassinat permit toutefois à l’usurpateur d’entrer dans les ordres sans coup férir, et de commencer à tailler son chemin vers le pire, soit le Pouvoir, l’Influence, la Richesse et l’Efferalgan. Car Erebus n’est pas vraiment croyant à la base, et avoue volontiers s’être piqué d’intérêt pour la chose religieuse de la même manière que tu as pris goût aux endives au jambon: à l’usure. BLIND MOWN. Pendant qu’il faisait ses classes, un certain Prophète commençait à faire parler de lui dans l’arrière pays colchitique, et il ne fallut pas longtemps avant qu’Erebus ne pose les yeux sur celui qui allait devenir son père adoptif (Lorgar), accompagné par sa future marâtre (Kor Phaeron). Ce ne fut pas le coup de foudre mais le jeunot comprit qu’il fallait qu’il se rapproche de Mr Tête d’Œuf pour son propre bien, ce qu’il fit.

Une arrivée impériale et une transformation en Space Marine plus tard, notre désormais fringant héros part sillonner la galaxie à la recherche des Dieux du Chaos, envers qui il sent une attirance particulière. Rien de très intéressant ne se produit jusqu’à l’arrivée sur Davin, et la visite qu’Erebus rend à un temple décati que lui ont révélé ses visions. Sur place, il rencontra un vieux prêtre ridé et impoli, ce qui n’est pas très malin quand on s’adresse à un type qui fait deux fois sa taille et trois fois son poids. Parmi les tags effacés et les inscriptions désobligeantes, les sens de sorceleur du surhomme firent clignoter en rouge un dessin de l’Anathame (qui ne se trouvait pas sur place, ce serait trop simple) ce qui fut apparemment suffisant pour son bonheur immédiat. Il repartit donc avec une envie folle de farmer du Wither squelette1, en ordonnant au vioque de faction de retaper un peu la bicoque, et en donnant rendez-vous dans quelques décennies à une très jeune Akshub (qui ironie de l’histoire, lui donnera des cours en chaotique appliqué lorsqu’il reviendra… quel fumiste tu fais Bubus alors). La suite de l’histoire, sans être parfaitement connue, l’est toutefois suffisamment pour pouvoir laisser Erebus à ses divagations fiévreuses et purulentes. Mais tel est le destin de ceux qui manquent de peau.

1Mais sans accès au Nether, il dut se contenter de piller les collections permanentes du musée de la vie rurale de l’Interex, comme chacun sait.

AVIS :

Chris Wraight lève le voile sur l’origine d’un des personnages les plus importants de l’Hérésie n’étant pas Pépé ou un Primarque : bonne idée dans l’absolu, et assez bien réalisée même si ‘Child of Chaos’ tient plus de la lecture complémentaire intéressante que du must read définitif. Il y a certes quelques révélations bien senties de la part d’un auteur qui a trop de métier pour ne pas jeter quelques bouts de fluff anecdotiques (au sens littéral) en pâture à son public de fanboys dans une nouvelle telle que celle-ci, mais rien qui changera la face du lore. On apprend par exemple que c’est à Erebus que l’on doit la maxime « béni soit l’esprit trop étroit pour le doute », ce qui est utile à savoir pour briller dans un centre GW mais relève de la trivia hérétique au final. Notons également que Wraight se retrouve piégé par cet ennemi acharné de l’auteur de l’Hérésie d’Horus qu’est la continuité temporelle (à égalité avec la bonne vieille logique cartésienne): si Erebus a pu devenir un Word Bearers, c’est qu’il était très jeune à l’arrivée de l’Empereur. Or on sait (‘Lorgar: Bearer of the Word’) que Kor Phaeron avait déjà mis des pensées non euclidiennes dans la tête de son pupille bien avant que Bubus soit en mesure de susurrer des salaceries à l’oreille de son Primarque : l’image d’Epinal d’instigateur de l’Hérésie qui accompagne le Chapel-Un depuis quelques années en prend donc un sacré coup dans les ratiches.

Bref, on tient ici une lecture sympathique et qui permet à Wraight de mettre un peu d’ordre1 dans, et de faire quelques clins d’œil à la suite de, l’histoire d’Erebus, ce qui peut, ou non, justifier les 3,49€ demandés par la Black Library pour tuyauter le lecteur/fluffiste sur ce VIP chaotique.

1J’ai bien aimé le fait qu’il cherche à couvrir les traces de Thorpe en indiquant au détour d’une phrase que, oui, les Dieux du Chaos avaient bien un œil (mais juste un œil) sur Colchis et le Covenant, respectivement élus « Planète chaotique la plus calme du Materium » et « Secte chaotique hégémonique la moins efficace de la galaxie » 10.000 ans de suite. Il ne pouvait guère faire plus que cela sans réécrire l’histoire.

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The Serpent’s Dance – M. Brooks :

The Serpent's DanceINTRIGUE :

Désormais rattachée au service exclusif du Régent rageux de Terra, Malcador le Sigilite, l’ex Sœur du Silence Amendera Kendel participe à l’effort de guerre en menant à bien des missions de contre-espionnage pour identifier les traîtres à l’œuvre dans le système solaire. Une vraie mission de l’inspection générale comme on les aime. Son devoir la mène jusqu’à Jupiter, où elle infiltre incognito un événement mondain organisé pour l’élite locale, à la recherche de… n’importe quoi en fait, car on ne dirait pas qu’elle tient une piste très sérieuse au moment de faire son entrée sur le dancefloor jovien. Cette approche au pur talent verse de maigres dividendes, malgré les conseils avisés que lui glisse son associé, chaperon mondain et consultant en jet set Ruvier Dall, et la soirée progresse sans que sa patronne n’arrive à coincer le moindre petit hérétique. Kendel a beau dissimuler son aquila frontale sous un masque, son physique de tueuse sous des froufrous1 et son aura de Paria avec un torque de suppression, on ne s’improvise pas femme du monde. La spécialité de la maison serait plutôt de les détruire, d’ailleurs (remember Proxima Majoris).

Après une heure à échanger des platitudes avec le gratin jupitérien en pure perte, Kendel en a ras la queue de cheval et opte pour une tactique différente. Rencardée en douce sur les agissements suspects d’un convive, qui est le seul à se balader librement de groupes en groupes sans gardes du corps, notre héroïne fonce sur sa cible comme un missile à tête chercheuse (et à la grande horreur de Dall, offusqué par ce manque flagrant de savoir vivre), avec la ferme attention de… l’inviter à danser. Si si. Ma foi, pourquoi pas: peut-être que le DJ local avait eu la mauvaise idée de mettre ‘Cotton Eye Joe‘ pile à ce moment. Quoiqu’il en soit, la tentative de Kendel se heurte, non pas à un mur, mais au refus poli de l’assistante du nobliau en roue libre (Durian Jarandille), une jeunette timide du nom de Kristanna Moristat, qui fait remarquer à cette virago d’Amendera qu’on ne peut pas macarener les gens sans sommation et sans leur demander leur avis d’abord. Ne pouvant pas décemment lui mettre une manchette sans créer un scandale, la sista improvise et entraîne l’impétrante dans une carioca fougueuse. Faute de merles… Cette proximité lui permet de détecter que Kristanna est elle-même une Paria, constat dont va découler tout un tas de déductions qui, pour la faire courte, mène à la neutralisation de Jurandille, un affreux Psyker sous couverture dont les discussions avec l’élite jovienne ne pouvaient qu’avoir pour but de préparer subrepticement l’arrivée d’Horus dans le système solaire.

Alors qu’elle s’apprêtait à se mettre une claque dans le dos pour se féliciter d’une mission rondement menée (difficile de compter sur des marques de franche camaraderie de ce genre de la part d’autrui quand on donne la nausée aux gens à 10 mètres à la ronde), on souffle dans l’oreillette de Kendel que le deuxième compagnon de Jurandille, Jorud Gevaz, a filé à l’anglaise pendant qu’elle remportait sa battle de tektonik contre le Psyker infiltré. Comme l’homme en question est parti dans la direction générale des appartements du Haut Thane de Jupiter et qu’il laisse des cadavres de gardes derrière lui, il s’agit de le rattraper en vitesse afin d’éviter une gueulante de Sire Gilles l’Huître. Beaucoup plus à l’aise maintenant qu’elle a le droit de mettre des gros taquets dans les nougats, Kendel finit par confronter sa proie avant qu’elle ne pose ses sales pattes sur le nabab local, et parvient à la retarder suffisamment longtemps pour que l’indispensable Helig Gallor (Death Guard en disponibilité) arrive disperser l’importun d’une rafale de bolter bien placée. Pas assez vite cependant pour empêcher Gevaz, un agent de l’Alpha Legion, d’appuyer sur le détonateur caché dans la boucle de sa ceinture avant de passer de vice à trépas. Être lent et méthodique est parfois handicapant. Bilan des courses: deux tiers des invités du bal (ainsi que Ruvier Dall) finissent en carpaccio, victimes des bombinettes cachées par les cultistes dans les automates de service, ce qui n’est pas un superbe résultat pour notre espionne en herbe. Elle fera sans doute mieux la prochaine fois, si prochaine fois il y a.

1: Notons au passage qu’elle a réussi à convaincre ce vieux pingre de Malcador de lui adjoindre les services de deux couturier.e.s. Deux fois le nombre de Space Marines de son équipe: on voit où vont ses priorités. 

AVIS :

Dans la série des « Que sont-ils devenus? » de l’Hérésie d’Horus, le cas d’Amendera Kendel méritait-il qu’on s’y attarde? Personnage récurrent de James Swallow, ses apparitions dans la série se sont logiquement espacées au fur et à mesure que celles de son auteur faisaient de même. À titre personnel, je vivais et lisais très bien sans mademoiselle Kendel, et je m’interroge sur les raisons qui ont poussées Mike Brooks à la choisir pour ses débuts dans l’Hérésie. Amendera ne m’apparaît en effet pas comme une figure brooksienne classique, n’étant ni trop sarcastique pour son propre bien, ni le détournement d’un archétype de 40K, ni particulièrement originale au niveau de ses pronoms1, ni un Ork. L’intrigue et la mise en scène, sans être indigentes, ne sont pas non plus mémorables, et, à moins d’un fantastique coup de théâtre, l’intégralité des événements narrés dans The Serpent’ Dance aura autant d’impact sur le reste de l’Hérésie d’Horus que la couleur des papiers peints du boudoir d’Eidolon, voire qu’Eidolon lui-même (c’est dire). Bref, c’est un double gâchis à mes yeux: des compétences et de l’originalité de l’auteur en premier lieu, et des possibilités scénaristiques (que ce soit en termes de développement ou de conclusion d’arcs narratifs) offertes par une saga aussi étoffée en second lieu. On appréciera tout de même le sérieux dont Brooks a fait preuve dans sa préparation, qui transparaît dans les références aux travaux de ses prédécesseurs (battlemark et thoughtmark, Lucifer Black…), mais également dans des clins d’œil un peu plus subtils, comme le choix de Kendel de prétendre être une aristocrate d’une certaine planète Mollita pour accéder au bal. En conclusion, je ne voue pas cette nouvelle aux gémonies mais j’affirme sans détour qu’il y a beaucoup mieux à lire de la part de Mike Brooks et de l »Hérésie d’Horus que cette danse serpentine.

1: La danse entre Kendel et Kristanna est toutefois une péripétie que l’on n’aurait à mon avis pas pu trouver ailleurs que chez Brooks parmi les auteurs de la Black Library. Et on a bien un personnage non-genré dans l’histoire, mais c’est un garde tué hors champ dont Krendel récupère le fusil, donc ça ne compte pas vraiment.

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Sauvage // Savage – G. Haley :

SavageINTRIGUE :

Notre histoire s’ouvre sur un concert de ronflements remplissant une tente à l’atmosphère étouffante, alors que le soleil est sur le point de se lever sur Omdurman. Allongé sur son lit de camp, notre héros, Gollph, après avoir courageusement mais vainement tenté de faire abstraction du bruit et de l’odeur la chaleur, décide d’aller se dégourdir les jambes pendant que la température est encore supportable. Gollph, comme ses camarades de la 7ème Companie Motorisée Super-Lourde de Paragonian (ou quelque chose comme ça), est un tankiste, et fier de l’être. Rattaché au Baneblade Cortein’s Honour, où il exerce la noble profession de senior chargeur – ce qui est mieux que serial killer, même si, au fond, cela revient au même –, Gollph espère un jour devenir artilleur. Bien que disposant des aptitudes nécessaires pour occuper cette fonction, notre héros est toutefois handicapé par ses origines : il vient en effet du monde sauvage de Bosovar, qui rime trop avec Kosovar pour que ses ressortissants soient pris au sérieux par les impériaux venant de mondes civilisés. En plus de ça, les Bosovarois ont la peau rose, ce qui, dans le régiment de Paragon dans lequel les hasards de la vie et de la guerre l’ont fait atterrir, est une source de discrimination et de brimades. Que fait donc la HALDE ?

Pour l’heure, Gollph profite du calme ambiant pour aller saluer son char, qui n’a pas vu le moindre combat depuis le début de la campagne, et aller contempler le lever du soleil en marchant pieds nus dans les hautes herbes, comme le petit sauvageon qu’il est resté au fond de lui-même (il n’enlève pas sa chemise tout de même, car le Commissaire n’aimerait pas ça). C’est l’occasion pour lui de se remémorer son parcours depuis les plaines de Bosovar jusqu’aux collines d’Omdurman, en passant par son recrutement dans la Garde, où il a appris à vaincre sa peur des portes. On n’en parle pas assez, mais c’est une technologie des plus dangereuses. Après tout, personne ne s’est jamais coincé les doigt dans un rideau de perles. De retour au camp, et occupé à lustrer des obus pour passer le temps en compagnie de son supérieur ronfleur, le 1er Artilleur Meggen, Gollph est surpris dans son ouvrage par l’arrivée silencieuse, mais pas inodore, de Shoam, le pilote du Cortein’s Honour. Ce dernier a obtenu des nouvelles fraîches faisant état d’un redéploiement imminent de la Compagnie, et de son départ d’Omdurman. Il vient donc rappeler à Gollph et à Meggen le pacte secret que les trois hommes avaient conclu des mois plus tôt, et qu’il leur faut mettre à exécution avant qu’il ne soit trop tard. Si Meggen se montre très enthousiaste à cette idée, Gollph l’est beaucoup moins, s’étant engagé dans l’aventure sous l’emprise de la boisson. Toutefois, une promesse est une promesse, et nos trois conspirateurs se retrouvent donc le soir venu derrière un buisson odoriférant1 pour accomplir leur sinistre dessein…

Début spoiler 1…Si Gollph avait traîné des pieds pour marcher dans la combine, c’est d’abord parce qu’il doit se taper le sale boulot, c’est-à-dire distraire les sentinelles placées devant la tente contenant les réserves de la Compagnie, pendant que ses comparses se glisseront à l’intérieur pour dérober ce dont ils ont besoin pour l’étape suivante de leur machination. En plus d’être dangereuse, cette tâche est humiliante pour le fier Bosovarien, car elle l’oblige à jouer au sauvage pour parvenir à ses fins, alors qu’il se considère comme étant parfaitement intégré au sein de la Garde Impériale. On voit donc Gollph se présenter devant les plantons de service, affublé d’un plastron fait de roseaux tressés (ça fait exotique, dixit Meggen), avec un formulaire mal rempli en main et un affreux dialecte petit nègre à la bouche, et tenter de se faire remettre farine pour dîner Lieutenant, oui oui, s’il te plait Monsieur présentement là dis donc. Pendant que l’héroïque peau rose occupe les gardes, et se fait dérouiller par le plus mal embouché des deux, Meggen et Shoam dévalisent les stocks du régiment, le premier intervenant une fois le forfait commis pour interrompre la bastonnade à laquelle le pauvre Gollph avait droit, et repartir avec lui vers leurs quartiers. La mission a été accomplie, reste à savoir quelle en était le but…

Début spoiler 2…Eh bien, et je n’invente rien, il s’agissait simplement d’organiser une petite fête d’anniversaire pour le Capitaine Bannick, avant que le camp soit levé. Ce dernier est donc pris au dépourvu lorsque son équipage et quelques amis le surprennent à la cantine avec un buffet de pâtisseries paragoniennes et quelques bonnes bouteilles. Parce que ce n’est pas parce que la galaxie est sur le point de s’effondrer qu’il ne faut pas profiter des petits plaisirs de la vie et prendre un pot entre collègues de temps à autres. L’enthousiasme collectif peine toutefois à déteindre sur Gollph, encore un peu marqué par son implication dans le complot pâtissier auquel il a participé, et surtout honteux que trois de ses compatriotes de Bosovar aient été sévèrement punis par les autorités régimentaires pour la disparition des victuailles dérobées par Meggen et Shoam. Il n’y a pas à dire, le racisme anti-rose reste un des fléaux cachés du 41ème millénaire…Fin spoiler

1 : Il a certainement été utilisé par un tankiste pressé comme petit coin, comme Gollph a le plaisir de le découvrir.

AVIS :

Attention, OVNI. Guy Haley signe avec Savage ce qui restera sans doute comme l’une des nouvelles de Gardes Impériaux les plus surprenantes du corpus de la Black Library. Pas de Xenos, pas de mutants et pas d’hérétiques ici, et à peine un peu de combat à proprement parler (même si la mâchoire de Gollph pourrait contester ce constat), mais la description de la vie d’un camp impérial dans toute sa singulière normalité. Si le « complot » fomenté par nos héros a une dimension comique assumée, et permet à Haley de démontrer qu’il est capable de jouer sur le registre humoristique de façon convaincante, c’est la description que l’auteur fait de la réalité sociologique de ce microcosme, où les préjugés et les discriminations1 entre Gardes de différentes origines demeurent aussi vivaces qu’aujourd’hui malgré les milliers d’années écoulées et la découverte d’autres espèces intelligentes, qui donne tout son sel à cette histoire. Le cosmopolitisme de l’Imperium est une de ses caractéristiques les plus intéressantes, mais rarement mise en valeur par la BL autrement qu’à travers l’exemple extrême des abhumains, du fait de sa ligne éditoriale résolument militariste. Haley démontre ici que la GW-Fiction peut encore totalement surprendre, et en bien, le lecteur, et que si la guerre est éternelle au 41ème millénaire, les à côté de cette dernière valent également la peine d’être racontés.

1 : Autre exemple, Shoam est traité comme un paria par ses camarades car il vient de Savlar, réputée pour être peuplé de criminels.

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Da Big Mouf – D. Ware :

Da Big MoufINTRIGUE :

Dans les entrailles du Space Hulk Big Mouf, colonisé par les Deathskulls du Big Boss Zoldag Legmangla, nous suivons notre héros, le Nob Grimdak, alors qu’il s’adonne innocemment (ou aussi innocemment que sa nature de Xenos ultra violent le permet) à ses activités favorites: chercher du ​​​​​matos à récupérer pour kustomiser son équipement, tirer à droite et à gauche pour se convaincre de la mieutitude de son fling’, et se pavaner devant un public imaginaire comme s’il était un mannequin à la Fashion Week. L’arrivée d’une petite force de Sœurs de Bataille dans les coursives du Big Mouf, annoncée sans doute possible par le double bruit des bottes énergétiques et des cantiques consacrés1, est cependant suffisante pour renvoyer Grimdak, courageux mais pas téméraire (ou peut-être sujet aux acouphènes) jusqu’à la salle du trône de Legmangla.

Ce dernier, une montagne de muscles et de membres bioniques tout à fait conforme à l’image d’Epinal que l’on se fait du meneur peau-verte, allie la carrure d’un Ogryn avec la culture générale d’un Inquisiteur, puisqu’il a tôt fait de souligner que les harpies impériale sont forcément à la recherche d’une relique, puisque la recherche de ces objets constitue leur unique leitmotiv​​​​. Il l’a lu dans un vieux Codex Approved de Space McQuirk (le bien le plus précieux de son tas de loot), c’est donc que c’est vrai.​​​ Par un concours de circonstances tellement heureux qu’il a fallu à Tzeentch 999 ans pour le mettre en place, la relique en question est présente dans les alentours immédiats, puisqu’il s’agit d’une lance dont le bout du manche est un fémur humain, et dont un Nob quelconque se servait à l’instant comme d’un cure-croc2. Après avoir morigéné (je vous avais dit que c’était un érudit) son sous-fifre en lui faisant avaler son ustensile, Legmangla sonne la Waaagh! et emmène sa tribu à la rencontre des envahisseurs, guidé par le radar de recul que Grimdak a monté sur sa pétoire.

La confrontation initiale et finale (14 pages, c’est court), a lieu dans la salle du vortex, occupée par une sorte de trou noir anémique attirant mollement tout ce qui s’approche un peu trop près. C’est de là que le Space Hulk tire son nom de Big Mouf, et ça nous fait une belle jambe. Juste au moment où son chant de guerre se termine3, la vague verte tombe dans l’embuscade tendue par les filles de l’Empereur, qui avaient eu la lumineuse idée de la fermer pour surprendre l’adversaire. Vue par les yeux de Grimdak, l’attaque est d’une violence insoutenable et cause des ravages inouïs parmi les Xenos. Alors que le lecteur tente fébrilement de calculer combien d’Ordres Militants ont été rassemblés pour mener à bien cette mission périlleuse, et se prépare déjà à voir arriver Ste Celestine en personne pour un duel avec Legmangla, Ware balance un pain tellement brutal dans la mâchoire de l’Epique qu’elle en assomme du même coup le Réalisme, qui le suivait prudemment, comme à son habitude. Car le massacre des Deathskulls a été orchestré par une pauvre escouade de Sœurs de Bataille, soit 6 gougnafières en armure énergétique. Dans le chaos de la mêlée, les Orks parviennent tout de même à blesser gravement une Sista, grâce à l’intervention énergique de Legmangla en personne, mais c’est à peu près tout.

Après quelques pages confuses, Big Mouf se met en rogne et avale proprement tout ce qui n’a pas une coupe à frange (et Grimdak, qui parvient à s’échapper mais tout le monde s’en fout), permettant à Danie Ware de terminer son propos en révélant à son public que la miraculeuse escouade était menée par, mais en doutait-on encore à ce stade, l’injouable Augusta Santorus, qui avait très envie d’ajouter le fémur de Saint Finiang à son ossuaire personnel. Et il n’est pas permis de douter qu’elle a échoué dans cette tâche, bien que localiser l’emplacement de la relique dans un Space Hulk regorgeant d’Orks en ayant seulement une vague idée de la direction dans laquelle aller constitue un défi littéralement herculéen. Comme on dit, the Emperor provides.

1: Oui, nos braves Sistas abordent un vaisseau qui selon toute logique est infesté d’ennemis mortels en scandant les Parapluies de Cherbourg à plein volume. À moins qu’elles ne chantent horriblement mal, et comptent là-dessus pour faire fuir l’adversaire (une tactique tout droit piquée aux Emperor’s Children), on peine à comprendre l’intérêt de la manœuvre. 
2: Ce n’est pas comme si 1) un Space Hulk était un agglomérat de vaisseaux spatiaux d’une taille colossale, dont la cartographie et l’inventaire occuperait même le plus diligent des experts pendant des décennies; 2) les Orks étaient connus pour leur goût de l’exploration minutieuse et 3) une lance terminée par un bout d’os avait une quelconque valeur aux yeux d’un Ork, et avait donc une chance d’être présentée au Big Boss.
3: Et Ware s’est donnée à fond sur le livret, car le lecteur bénéficie de plusieurs couplets de pop-rork. 

AVIS :

Danie Ware enrichit moins sa gamme qu’elle étend ses déprédations en s’essayant à la littérature Ork, avec des résultats dans la droite ligne de ses premiers travaux. Si la première partie de la nouvelle, centrée sur Grimdak et Legmangla, pourrait à la rigueur faire illusion malgré son lot d’incongruités, la seconde en revanche reprend tous les codes de la SoB-erie1 dont Ware s’est faite la grande (et heureusement, seule) spécialiste au sein de la Black Library. C’est confus, incohérent et cela va à l’encontre des principes et des préceptes les plus basiques du lore1 : ayant déjà passé quelques chroniques à exposer mes griefs sur le sujet, je me contenterai ici de noter que le lecteur familier de ‘Mercy’, ‘Forsaken’ et ‘The Crystal Cathedral’ évoluera à nouveau en territoire connu. Le titre orkifié et la narration centrée sur un peau verte ne doivent pas faire illusion: il s’agit bien de la suite des aventures massacres d’Augusta Santorus, et les amateurs de POV Ork seraient mieux inspirés de se tourner vers les travaux de Mike Brooks et de Guy Haley. Contrairement aux balises laissées par l’Interex à proximité de Murder, j’espère que ces avertissements ne seront pas compris trop tard par ceux qui pourraient en avoir besoin…

1: Dédicace spéciale aux Blood Angels, pas foutu de purger un Space Hulk sans perdre 90% de leurs effectifs alors que Santorus et ses copines plient l’affaire en une demi-journée et une cheville foulée. 
2: Heureux, ou en tout cas fatidique, hasard, « sob » veut dire sangloter en anglais. C’est approprié.

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Morts sur la Route de Svardheim // Death on the Road to Svardheim – D. Hinks :

INTRIGUE :

En route vers la cité de Svardheim pour une raison sans doute logique mais inconnue de l’auteur de ces lignes au moment de l’écriture de cette chronique, le duo le plus mal assorti des Royaumes Mortels1 passe le temps et les kilomètres sur la route 88 (c’est tout plat, désertique et décoré avec des monceaux de crânes) en discutant théologie, comme à leur habitude. Bien évidemment, la situation finit par gentiment dégénérer, l’anticléricalisme blasphématoire d’un Gotrek toujours chafouin de s’être fait rouler dans la farine par les Dieux du Monde Qui Fut mettant sur les dents, qu’elle a éclatante, la dévote Maleneth. À force d’enquiller les bornes, elle finit même par les dépasser, allant jusqu’à accuser son rusé et runé camarade de servir le Chaos, à l’aide de l’argument, bien connu de George W. Bush, du « si tu n’es pas avec moi (et Ziggie) tu es contre moi ». Avant que la situation ne dégénère trop franchement, et que le Tueur vétéran ne doive se trouver encore un nouveau sidekick, les comparses tombent sur le théâtre d’une embuscade ayant été fatale à une bande de prêtres sigmarites, dont les corps décapités jonchent les alentours d’une carriole incendiée.

Après une rapide enquête, il s’avère que les assaillants n’ont pas réussi le perfect en matière d’élimination de témoins, une pauvre nonne répondant au nom de Carmina se présentant à nos héros et leur expliquant que sa congrégation s’est fait dérober une relique irremplaçable, le Poing Incorruptible, dont elle avait la charge et promenait de ville en ville pour ranimer la foi des locaux. Avant que Gotrek n’ait pu marquer de nouveaux points d’athéisme hardcore en demandant à Carmina en quoi un poing pouvait être corrompu, pour commencer (il en serait capable le bougre), Maleneth se fait embringuer dans une mission de récupération du saint gantelet, qu’il s’agit simplement de reprendre des mains malpropres d’une petite vingtaine de bandits, retranchés dans une forteresse abandonnée à quelque distance de la route. Rien que de très banal pour notre Tueur, qui accepte toutefois de mettre les formes et de suivre un plan un minimum intelligent (attendre que Maleneth se soit mise en position derrière le bastion pour intercepter d’éventuels fuyards) avant d’aller toquer à la porte le plus naturellement du monde.

La prévoyance de l’Aelf paie rapidement car il se fait bientôt jour (enfin, nuit, mais je me comprends) que les brigands sont un peu plus qu’une bande de maraudeurs sanguinaires, mais bien une authentique secte de Khorne, en train d’invoquer un démon de fort belle taille à l’aide de leur collection bien mal acquise de grigris et talismans. Maleneth n’a pas le temps de signaler qu’il y a une courge dans le potage que Gotrek est cependant déjà en train de défoncer la porte et de se tailler un chemin à travers les mobs de bas niveau, jusqu’à poser l’œil sur une Némésis digne de lui, qu’il engage évidemment en combat singulier dans la plus pure tradition du genre. Etant un VIP incontournable du multivers, Gogo est reconnu par son adversaire, qui a la mauvaise idée d’insinuer que le Tueur a fui son monde au moment de la Fin des Temps au lieu de rester et de se battre pour le défendre. Cela met notre nabot en rogne, et les deux adversaires se balancent quelques baffes amicales, sans trop d’effet de part et d’autre, jusqu’à ce que Meleneth ait l’idée géniale de confisquer les reliques ayant été mise à profit pour invoquer le démon, et dont ce dernier a encore besoin pour maintenir sa présence dans les Royaumes Mortels. Au fur et à mesure que les héros shootent dans les breloques, leur adversaire perd en taille et en carrure, jusqu’à finir rachitique et malingre, et se faire décapiter sans cérémonie par un Gotrek enfin à la bonne taille pour jouer de la hache.

Ceci fait, le duo infernal n’a plus qu’à remettre le Poing Incorruptible à la brave (en fait pas trop) et reconnaissante Carmina, qui s’en va à cheval remettre le précieux héritage en sécurité, pendant que nos héros continuent à pied leur périple. Poing/t final de notre histoire ?

Début spoilerEh bien non (comme la balise spoiler ne le laissait pas du tout envisager), car lorsque nos voyageurs, fourbus (surtout pour Maleneth) et assoiffés (surtout pour Gotrek) tentent d’obtenir le gîte et le couvert d’un monastère sigmarite croisé un peu plus loin sur la route, se disant à juste titre que tous les culs bénis à la ronde leur sont redevables de leurs récents exploits, c’est pour entendre un son de cloche bien différent. Carmina était en fait une voleuse ayant mené sa bande, déguisée en prêtres, dérober le fameux Poing Incorruptible (mais pas Inatteignable) de la garde des vrais fidèles de Sigmar, en tuant quelques uns au passage. L’abbé outré qui fait ce récit aux voyageurs est persuadé que l’iconoclaste va briser la relique en mille morceaux pour revendre la Pierre de Royaume dont elle est faite au plus offrant, au mépris de tous les commandements de Sigmar. C’est donc une grosse boulette, sur laquelle Maleneth manque de s’étouffer, mais qui ne déclenche chez ce philosophe de Gotrek qu’un rire tonitruant. Il en a certes vu d’autres…Fin spoiler 

1 : Gotrek est un Nain (et pas un Duardin) roux exhibitionniste, et Maleneth est une Aelf brune gothique.

AVIS :

Eh bien ça y est : après avoir laissé Gotrek (et le regretté Felix) à leurs aventures dans le Monde Qui Fut, je renoue enfin avec ce héros mythique sous sa nouvelle incarnation, à travers ce court format signé du père adoptif #3 du Tueur de… trucs, Darius Hinks. Ce qui m’intéressait particulièrement dans ces retrouvailles était de voir ce qui avait changé, et ce qui était resté, des précédentes aventures de M. Gurnisson, qui constituaient un sous-genre de la littérature BL à elles seules. L’équilibre n’était pas facile à trouver entre respect servile du cahier des charges, forcément un peu obsolète, établi par King et Long en la matière, et innovations radicales, qui auraient enlevé tout le sel de ce come-back improbable. Et je dois dire que Darius Hinks s’en est plutôt bien sorti, tant sur le fond que sur la forme. On est bien en présence d’une aventure de Gotrek & Cie, avec notre petit rouquin teigneux, grincheux et pince sans rire s’embarquant dans un combat à haut risque contre un adversaire très balèze (sur le papier en tout cas), au grand désespoir de son partenaire attitré. Ce qui change ici est que Gotrek est devenu un mécréant militant, gardant sa dernière dent contre tout le panthéon divin (à commencer par Sigmar, qui s’en prend plein les tresses), alors que Maleneth est, sous ses abords de tueuse froide, une zélote du grand barbu, ce qui est à la fois surprenant (c’est le type qui la voyait comme une pseudo Assassin druchii qui parle) et intéressant. Notons également que Hinks ne se gêne pas pour glisser quelques références au passé proprement légendaire de son héros et donc à feu Warhammer Fantasy Battle, ce qui devrait faire plaisir autant qu’intriguer le lecteur historique de la saga. Bref, le contrat est bien rempli dans ce ‘Death on the Road to Svardheim’, qui tient son rang parmi les cohortes de nouvelles Gotrekesques publiées par la BL depuis des temps immémoriaux. Reste à savoir ce que cette dernière compte faire de son increvable héros sur le long terme, maintenant qu’il ne peut absolument plus mourir (ce serait un énorme fail), mais ceci est une autre histoire.

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Buyer Beware – G. Thorpe :

INTRIGUE :

Notre histoire commence par une descente de boardercross Kharadron, qui, comme chacun sait, se court en combinaison intégrale de laine de goret à poils longs de Chamon. Partis à cinq de la ligne de départ, située dans le nid d’une Maw-Crusha en attente d’un heureux événement, seuls quatre Duardin parviennent à boucler la course dans les temps impartis et en un seul morceau. On portera longtemps le deuil de Rogoth (casaque, culotte et barbe jaune poussin), dont les tendances gauchistes lui ont été fatales. Les Nains sont un peuple de (virage à) droite, c’est bien connu.

Parvenus jusqu’à la sécurité – toute relative – de leur vaisseau (Night’s Daughter), le capitaine Karazi ‘Fairgold’ Zaynson et ses acolytes n’ont pas besoin de signaler au reste de l’équipage qu’il serait de bon ton de souquer les aethertibuses, comme on dit à Barak-Mhornar : les rugissements tonitruants et les attaques en piqué de la mère poule dérangée dans sa retraite étant une motivation suffisante. Un tir de mitraille bien senti plus tard, l’affaire est réglée aux torts partagés : une gueule et une épaule chevrotinée pour le Maw-Crusha, ce qui l’oblige à rejoindre le plancher des Squigs, et une méchante estafilade de coque pour la Night’s Daughter. Pas assez pour amener le fier vaisseau par le sol, mais assez pour occuper l’endrineer de bord et son assistant pendant une bonne partie du voyage jusqu’à la destination fixée par Fairgold : un avant poste Orruk où l’attend le deal de sa vie. Car oui, à Age of Sigmar, les Nains et les Orques ne sont pas irrémédiablement et définitivement fâchés, et peuvent (apparemment) faire affaire quand la situation l’exige. En l’état, Fairgold a besoin de renflouer les caisses en exploitant un filon d’aether-or localisé par la tribu peau-verte avec laquelle il a rendez-vous, afin de financer une nouvelle expédition pour localiser l’épave d’un navire familial, le Night’s Gift. Une raison qui en vaut une autre, et se révèle donc assez impérieuse pour justifier les tractations contre nature dans lesquelles le capitaine entraîne ses matelots.

Arrivés à bon port après ne s’être que légèrement écrasés dans la forêt proche du village Orruk (équipage secoué + immobilisation), les Kharadron envoient une délégation réduite négocier l’accord avec la partie adverse, tandis que le reste de l’équipage s’emploie à remettre le châssis en état, sous les ordres de Verna (l’endrineer susnommée). À terre, Fairgold et ses compagnons rencontrent finalement le massif Orgaggarok, chef de la tribu du Poing qui Tombe, qui possède ce qu’ils désirent : une carte localisant l’emplacement précis du gisement d’aether-or convoité, flairé par les pouvoirs surnaturels du Wardancer local1.  Mais en échange, Orgaggarok veut les trois œufs de Maw Crusha que ses invités ont apportés avec eux, ce qu’un négociateur vétéran comme Fairgold ne peut laisser passer sans froncer de la moustache. Après un marchandage vindicatif et énergique, l’accord est sur le point de sans conclure sans le moindre sang versé sur la base de deux filons contre trois œufs, lorsque l’expert en ruralité profonde que le chef Orruk a amené à la table au tronc de négociation, lui hurle dans l’oreille qu’il est en train de se faire avoir comme un bleu. Les taches caractéristiques qui ornent la coquille des œufs montrent en effet de façon formelle que ces derniers viennent des Pics de Fer… qui sont sur le domaine des Poings qui Tombent. Oupsie.

Vendre un bien que l’acheteur possédait déjà étant une pratique universellement condamnée, le dialogue tourne court et les lames sortent des fourreaux (pour ceux qui en ont). Bien que tenus en respect par l’arsenal de leurs visiteurs, les Orruks sont tout prêts à foncer dans le tas pour apprendre les bonnes manières leurs visiteurs, mais l’arrivée de deux catastrophes aériennes coup sur coup va donner à Fairgold et ses matelots la distraction nécessaire pour se sortir de ce guêpier. D’abord, Mama-Crushaw débarque au village, guidé par son instinct maternel infaillible, ou la puce de géolocalisation qu’elle avait placé sur ses œufs (allez savoir, c’est de la high fantasy, je ne serais même pas surpris). Puis, c’est la Night’s Daughter, enfin réparée, qui arrive à son tour, abat pour de bon le lézard volant en rut, défonce la palissade Orruk, et maintient les sauvages en respect assez longtemps pour permettre aux VRP de remonter à bord. Bien entendu, Fairgold a trouvé le moyen de chiper la carte d’Orgaggarok au passage, et tout est bien qui finit donc bien pour nos petits gars et filles. Même mieux que bien, car ils ont gardé le dernier œuf de Maw Crusha pour eux, et que ce dernier vient d’éclore. Et une mascotte pour la Night’s Daughter, une !

1 : Spécialisé dans les souffles (ou pets, si on demande à ce diplomate né de Fairgold) de Mork, nom donné par les Orruks à ce type de filon.

AVIS :

Après des débuts discrets à Age of Sigmar (comparé à sa production soutenue pour Warhammer Fantasy Battle ; 40.000 et l’Hérésie d’Horus), Gav Thorpe signe une petite nouvelle posant tous les jalons d’une suite plus ambitieuse avec ce ‘Buyer Beware’. J’en vux pour preuves la galerie conséquente de personnages qu’il prend le temps de nous présenter, ainsi que les relations particulières qui unissent certains d’entre eux (Fairgold et Verna semblent très proches), mais également la mise en perspective de la quête inlassable de Fairgold pour le Night’s Gift, qui justifie tous les événements narrés dans ce court format. Il est encore trop tôt (au moment où cette chronique est écrite) pour acter de la véracité de cette intuition, d’autant plus que Thorpe a déjà une série de romans sur le feu – ça se passe à Aqshy après tout – pour AoS, avec ‘The Red Feast’ (et sa.es suite.s), mais il y a des signes qui ne trompent pas. Pour le reste, ‘Buyer Beware’ tient assez bien la route, sans originalité folle ni style flamboyant, mais avec un dosage correct d’action et d’humour, et surtout sans les incongruités regrettables dont Gav Thorpe parsème parfois ses soumissions à écrire sans se poser de questions. Qualité naine, dirons-nous.

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La Mort d’Uriel Ventris // The Death of Uriel Ventris  – G. McNeill :

INTRIGUE :

La Mort d'Uriel VentrisCe qui ne devait être qu’un contrôle dentaire de routine est sur le point de prendre un vilain tour pour le Capitaine Uriel Ventris, de la 4ème Compagnie des Ultramarines. Allongé dans le fauteuil du praticien, le patricien écoute avec angoisse le servocrâne de service lui demander de prendre une grande respiration et de la bloquer, afin que l’anesthésie puisse être effectuée. Cela risque de piquer un peu. En repensant à toutes ses sucreries englouties avec Pasanius pendant la Guerre de la Peste, notre héros se dit que s’il s’en sort, il investira pour sûr dans une brosse à dents énergétique, qu’il usera énergétiquement1. Mais pour l’heure, il est temps pour le vaillant mais douillet Capitaine de tomber dans les pommes pour échapper au supplice de la fraise.

Se réveillant dans une espèce de caverne qui ressemble fort à sa Calth natale, Ventris comprend rapidement qu’il expérimente une vision lorsque sa sortie de la grotte se fait sous un grand soleil et devant un paysage bucolique, loin des plaines radioactives dont la véritable planète peut s’enorgueillir depuis 10.000 ans. Comme pour confirmer son délire, il se fait héler par un quidam assis sur un rocher, qui se révèle être ce bon vieux Idaeus, Capitaine de la 4ème Compagnie avant lui, et auquel il a succédé après le sacrifice héroïque du briscard sur Thracia. À peine le temps de détailler les nombreuses cicatrices qui parsèment le corps de l’auguste héros pour s’assurer de son identité que les deux surhommes se mettent à dévaler la pente en direction de la caserne Asigelus (qui n’est pas sur Calth mais sur Macragge, mais bon on s’en fout c’est un rêve), où les hallucinations de Ventris l’entraînent. En chemin, ils croisent la route d’un groupe de jeunes coureurs engagés dans une compétition acharnée pour être le premier à utiliser la douche au retour de leur session d’entraînement, et Uriel reconnaît sans mal Learchus, Cleander, Pasanius et lui-même, tels qu’ils étaient à l’adolescence. Il ne peut qu’assister à nouveau à la tentative malheureuse de dépassement de ce snob de Learchus que son jeune lui avait tenté il y a toutes ces années, et sentir, très douloureusement, le vicieux coup de coude que son rival devenu rival devenu balance devenu Capitaine par intérim devenu Sergent Vétéran lui avait balancé dans le pif pour calmer ces ardeurs. Cela fait toujours aussi mal, et même beaucoup plus mal que cela devrait, mais cette soudaine vulnérabilité attendra un peu, car voici nos deux vétérans rendus devant les portes de la caserne, qui sont, comme de juste, fermées.

Peu disposé à laisser quelques quintaux de fer et d’adamantium se mettre en travers de la route de son flashback, et constatant qu’Idaeus se dégrade à vue d’œil, Ventris pousse de toutes ses forces sur les lourds battants pour pouvoir entrer, là aussi déclenchant des douleurs sans doute excessives par rapport à l’effort consenti par un Space Marines en bonne santé. Enfin parvenu à ses fins, il finit par rentrer dans les baraquements, un Idaeus positivement cacochyme sur les talons. Là, il est témoin du rassemblement de la 4ème Compagnie dans son ensemble, spectacle grandiose même si esthétiquement critiquable2, qui fait battre très fort ses petits cœurs. Après avoir identifié pour le lecteur qui n’en demandait pas temps la moitié des guerriers assemblés en silence sur la place, il est pris à partie par cette vieille baderne de Learchus, qui vient lui reprocher de les avoir abandonnés. « Oui mais bon c’est un rêve buddy et t’étais pas obligé de me foutre la honte devant Idaeus en mentionnant que j’avais prêté un serment de mort petit galapiat » répond Uriel, un peu embarrassé. Qu’importe, Learchus répète à nouveau que Ventris est en train de les abandonner à l’instant même, et lui tourne le dos comme un prince, suivi par l’intégralité de la Compagnie. C’est moche de bouder les enfants. Lorsque le Capitaine abandonné cherche à raisonner le Sergent, ce dernier a de plus la mesquinerie de tomber en poussière, suivi par 99% des Ultra Schtroumpfs. Seul reste ce bon vieux Pasanius, qui en guise d’adieu lui applique une petite imposition des mains sur le torse, mais seulement après avoir passé son membre augmétique au micro-ondes. Bref, ça brûle très fort pour notre pauvre Uriel, qui commence sérieusement à regretter sa consommation irraisonnée de Chupa Chups.

Lorsqu’il reprend ses esprits, le voilà sur Medrengard, et Idaeus a laissé la place à ce fieffé filou de Honsou. Réagissant comme un vrai serviteur de l’Empereur, notre héros commence par corriger bellement cette canaille à mains nues, qui se laisse faire sans protester. Sur le point de commettre l’irréparable avec la propre hache démoniaque de sa Némésis, Ventris réalise au dernier moment que ça pourrait être une mauvaise idée, et suspend son geste. S’engage alors un dialogue Batman vs Joker like entre Force Bleue et Force Jaune avec Rayures Noires, les deux adversaires se balançant des amabilités pendant quelques minutes jusqu’à ce qu’un nuage de poussière ne se profile à l’horizon, annonçant l’arrivée prochaine des War Boys d’Immortan Joe (sans doute le dernier film visionné par Ventris avant son opération), ce qui ne présage rien de bon pour notre héros. Qu’importe, ce dernier se tient prêt à faire face à son destin, et à mourir bravement au combat si nécessaire. Après un dernier « Witness meeeeeee ! » envoyé à Honsou, Uriel se fait pulvériser par l’artillerie montée sur les machines hurlantes qui convergent sur sa position. Fin de l’histoire.

Début spoilerOu en tout cas fin du rêve. De retour dans le cabinet du dentiste, nous assistons à un court dialogue entre l’Apothicaire Selenus et le Chapelain Clausel, alors que l’enveloppe corporelle de Ventris décède sur la table d’opération. Bien que le premier se félicite de la réussite de l’opération3, il prévient son interlocuteur que le plus délicat reste à venir, le Capitaine devant maintenant trouver la force de traverser ce fameux Rubicon4Fin spoiler

1 : Pour sa défense, l’Empereur lui-même n’avait rien prévu de spécial dans ce département pour ses Space Marines. Et pourtant, avec une salive acide, ils auraient eu grand besoin d’un émail renforcé à l’adamantium.
2 : Vert + bleu + jaune, franchement, c’est moche.
3 : « Ça a marché ? »
« Oui, il est mort. »
« GG. »
4 : Qui doit maintenant être encombré de Space Marines de toutes origines, au grand déplaisir de la faune locale et des touristes.

AVIS :

Ayant laissé tomber la saga d’Uriel Ventris il y a bien des années et après avoir seulement lu la première trilogie consacrée par McNeill à sa figure tutélaire dans le futur grimdark, j’avoue que la lecture de The Death of Uriel Ventris ne m’a pas touché plus que ça, mais peut aisément comprendre qu’un fan plus impliqué que votre serviteur ait une toute autre opinion du texte en question. Si l’auteur ne prend pas grand soin pour dissimuler la véritable nature de l’épreuve que le Capitaine traverse en filigrane de cette nouvelle (toutes les douleurs ressenties par ce dernier au fil des pages étant la conséquence de sa Primarisation douloureuse), enlevant donc un peu de suspense à cette dernière, il a au moins l’amabilité de terminer son propos sur un cliffhanger convenable, justifiant le titre donné à l’histoire. Même si je ne doute pas une seconde que notre héros finira par émerger du Rubicon – il doit y avoir un service de ferry pour les personnalités Space Marines, car elles sont vraiment peu nombreuses à s’y être noyées – comme les lois du marketing le demandent expressément, on peut au moins accorder à McNeill une utilisation appropriée de la formule « mort d’Uriel Ventris », ce dernier finissant la nouvelle dans un état minéral (c’est plus grave que le végétatif). À titre personnel, j’aurais apprécié que McNeill précise ou rappelle pourquoi le fier Capitaine a choisi/subi cette opération « risquée », à part pour suivre la dernière mode chez l’Astartes, bien entendu.

Pour le reste, le passage en revue de la carrière et des connaissances les plus marquantes de notre personnage, s’il est cinématiquement mis en scène par l’auteur, risque fort de diviser le lectorat entre ceux qui comprennent qui est qui et a fait quoi, et les autres. En d’autres termes, si vous découvrez Uriel Ventris par l’intermédiaire de cette nouvelle, je ne suis pas convaincu que l’expérience vous semble très intéressante (mais ce n’est que mon avis). En tous les cas, sachez que le personnage dispose d’ores et déjà d’une abondante biographie signée de la main de Graham McNeill, et que ce dernier ne l’ayant certes pas fait « mourir » pour rien, il est à parier que d’autres ouvrages ou nouvelles suivront. Dans le second cas, rendez-vous ici dans quelques temps pour un retour positivement objectif sur la suite des aventures de ce vieux Vent Triste.

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The Shapers of Scars – M. Collins :

The Shapers of ScarsINTRIGUE :

Dans l’infirmerie du Wyrmslayer Queen, la Reine Guerrière de Fenris (surtout) et Capitaine Libre Marchand (un peu) Katla Helvintr passe un sale moment. Ayant fait l’erreur de tendre l’autre joue dans un concours de crachat d’acide, notre héroïne donne du fil à retordre et des points de suture à poser à son équipe médicale, qui s’affaire pour sauver ce qui peut l’être de sa carnation délicate et de sa chevelure luxuriante. La situation est tellement grave que la vieille Bodil (à ne pas confondre avec sa sœur, Bursul), gothi fenrissienne tout ce qu’il y a de moins scientifique, a été appelée à la rescousse. Entre deux jets de runes en os (non désinfectées, j’en suis sûr) et prophéties mystiques sur le destin de Katla, qui finira soit dévorée par les Tyranides, soit étranglée par un ver de terre – c’est écrit –, Bodil trouve le temps de sortir son matériel de tatouage et commence à gribouiller sur le visage de sa Jarl, soit disant pour lui donner la force de vaincre le mal qui la hante, mais plus sûrement pour se venger de la dernière demande d’augmentation refusée par cette pingre de Katla. On se console comme on peut.

Pendant que la Tin-Tin du 41ème millénaire dessine des élans sur le front de sa patiente, nous remontons le temps pour comprendre comment cette dernière s’est retrouvée dans cette position peu enviable. La série de flashbacks que Marc Collins intègre dans son récit nous permet de suivre Katla dans ses œuvres, qui consistent principalement à sillonner le vide à la recherche d’adversaires de valeur à combattre. Drôle d’activité pour un Libre Marchand, mais après tout, certains tiennent visiblement à jouir de leur liberté plus que de leurs marchandises, et comme ils ont un mot d’excuse signé par Pépé en personne, nous ne sommes pas en droit de leur demander des comptes sur l’usage qu’ils font des ressources de l’Imperium. La cible du Wyrmslayer Queen se trouve être un vaisseau tyranide esseulé par la dispersion de sa flotte ruche, mais que sa soudaine solitude ne dissuade pas le moins du monde d’attaquer son traqueur bil(l)e en tête. Bien aidée par le désir manifeste et palpable de la Jarl de Fenris de régler l’affaire au corps à corps plutôt que par salves de missiles interposées, la bioconstruction Xenos arrive à portée de tentacules, et envoie quelques nuées de cafards enragés à l’abordage de son tourmenteur. Voilà une situation bien engagée et tout à fait optimale pour les impériaux, comme chacun peut en juger.

Short story shorter, Katla emmène sa bande joyeux huscarls à la rencontre de l’infestation tyranide qui s’oublie sur la moquette du troisième pont, et finit par croiser le fer avec un Prince particulièrement caustique et affligé d’un gros problème d’acné. À trop faire la maline avec ses hachettes viking, elle finit par percer le bouton de trop, et se fait asperger d’un acide autrement plus corsé que celui qu’elle a pris avant de se ruer à la bataille. Cela ne l’empêche pas de finir l’impudente bestiole proprement avant de faire une petite pause coma bien méritée, et la suite nous est connue. L’histoire se termine par le réveil de Katla, qui trouve le tatouage tribal que la fidèle Bodil lui a fait sur la moitié de la tronche méchamment bath. C’est ce qui s’appelle faire contre mauvais profil bon cœur.

AVIS :

Petite histoire très simple (j’aurais pu résumer le propos en trois phrases sans omettre grand-chose d’important) au nom très compliqué, ce ‘The Shapers of Scars’ intrigue et déçoit à égales mesures. Pour commencer par les reproches, je me désespère de lire encore des affrontements spatiaux complètement stupides car physiquement abscons après 30 ans de publications 40K. Ici, nous rencontrons le cas d’école de l’auteur n’ayant pas intégré qu’une bataille spatiale se déroule à une échelle de centaines de milliers de kilomètres, et pas à portée de jet de chaussure (ou ici, de tentacules pour les Tyranides et de harpons pour les impériaux1), ce qui est à mon avis un héritage néfaste des derniers Star Wars. Reconnaissons au moins à Collins d’avoir de la suite dans les idées, car mettre en scène une héroïne tellement obnubilée par le pugilat qu’elle abandonne son rôle de commandante en pleine bataille pour aller jeter des javelots à la gu*ule de pauvres Gaunts dans les coursives de son propre navire, accompagnés d’hommes de main équipés comme des Burgondes du haut Moyen Âge, est d’une originalité rafraichissante par rapport au reste du corpus de la Black Library. Il faut de tout pour faire un Imperium, même des Fenrissiens bas du front et des auteurs en roue libre.

Si on est d’humeur plus charitable, on peut s’interroger sur les raisons qui ont poussées Collins à être si spécifique dans le choix de ses protagonistes, la rencontre entre « cultures » Rogue Trader et Space Wolves dans une nouvelle de quelques pages ne se justifiant à mes yeux que si ‘The Shapers of Scars’ est le prélude à une œuvre plus conséquente. Certains auteurs de la BL, Dan Abnett et Aaron Dembski Bowden en tête, ont déjà prouvé qu’il était possible de réaliser des fusions plus improbables que celle-là de façon convaincante, et au final à donner plus de substance et de saveur au gigantesque patchwork socio-culturo-politique qu’est l’Imperium. Il se pourrait donc que nous recroisions Katla Helvintr et la bonne Bodil dans un futur proche, hypothèse d’autant plus plausible que Marc Collins est toujours dans l’attente d’un premier roman pour la BL, et que les créneaux Rogue Trader et Space Wolves ne sont pris par personne en ce moment. Faîtes vos jeux.

1 : Imaginez un peu la longueur, donc la place et le poids, de la chaîne nécessaire pour qu’une telle arme puisse « ferrer » une cible et la ramener à bon port. Déjà que sur un Titan, c’est limite, mais sur une frégate…

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À Vos Ordres // By Your Command – G. Thorpe :

By Your CommandINTRIGUE :

<surlaplanetenicomedua> + <ledatasmithundrasactivea> + <reveillerungroupederobotskastelan>… … … <reparamétrage_enclenché>. Ahem. Je disais donc que sur la planète Nicomedua, le Datasmith Undra s’active à réveiller un groupe de robots Kastelan. Plus lisible, clair et agréable ? Je m’en doutais. Mais il va pourtant falloir vous endurcir, amis lecteurs, car cette synthaxe aglutinée reviendra à plusieurs reprises dans notre nouvelle, trouvaille suicidaire1 de Gav Thorpe pour faire comprendre à son public qU’iL y A dEs RoBoTs DaNs SoN hIsToIrE. Mais revenons-en à nos moutons électriques. Nous faisons la connaissance d’Alpha 6-Terror, Kastelan en chef de l’escouade de six qu’Undra a sorti de sa torpeur pour aider l’équipage du Titan Casus Belli à repousser les assauts d’une bande de Space Marines du Chaos, dont les semelles boueuses et les goûts musicaux déplorables (ce sont des Emperor’s Children) menacent la sainteté de leur machine de guerre géante. Ayant reçu ses instructions (Détruire. Sécuriser. Protéger.) de la part du Datasmith, assorties d’une mise en garde formelle contre la puissance destructrice des armes soniques de ses ennemis, Alpha part au combat à la tête de ses hommes machines, le zélé Undra sur ses talons.

Bien que l’épaisseur de leur carapace protectrice et le prodigieux armement qu’ils trimbalent permettent à nos marcheurs de combat de repousser sans ménagement les quatre Astartes emperruqués qu’ils finissent par débusquer en train de faire des cochonneries dans un coin de l’akropoliz titanesque, l’échauffourée en question ne réussit pas le moins du monde à Undra, proprement tronçonné par un Space Marine revanchard avant que ce dernier ne se trouve contraint à la retraite. Dans son dernier souffle, l’adepte parvient toutefois à insérer sa clé USB personnelle dans un port du brave Alpha, transférant son esprit dans la machine. Bien que la perte de son enveloppe corporelle, et l’impossibilité pour le robot porteur de manipuler la délicate tablette de données de son garde chiourme avec ses gros doigts énergétiques, empêche notre duo de garder le contrôle du reste de l’escouade, qui s’en va pesamment DPS-er un peu plus loin, Undra réussit à ordonner à sa nouvelle monture de se rendre à la metempsykoza, où l’animus du défunt pourra être définitivement sauvegardé. Contraint par les trois lois de la robotique, c’est donc le chemin que prend cette terreur d’Alpha.

Evidemment, le parcours se révélera semé d’embûches, mais notre vaillant androïde, bien aidé par son copilote à certains moments, et par d’heureuses coïncidences à d’autres, parvient finalement à proximité de son objectif… pour se prendre un méchant riff de gratte bien saturé en plein cortex de la part d’un Noise Marine embusqué au deuxième balcon, incapacitant notre héros de façon terminale. Et pourtant, on lui avait dit que l’écoute prolongée à haut volume pouvait provoquer des lésions irréversibles ! Alors que ses systèmes se ferment les uns après les autres, présageant sa « mort » prochaine, Alpha a le temps d’échanger quelques questions métaphysiques avec son passager, condamné comme lui, sur la vie, la mort, l’âme et les pizzas hawaïennes avant que son système interne ne plante définitivement. Notre histoire se termine-t-elle sur ce constat d’échec ? Non ! Car Alpha 6-Terror finit par se réveiller, mais réalise qu’il n’est plus en possession de ses membres. Et pour cause, cette sangsue d’Undra, aussi intransférable que Lionel Messi, a échappé au trépas en parasitant son hôte et prenant le contrôle de ses fonctions motrices. Le 31ème millénaire a vu l’invention des Kastelans, le 41ème millénaire celui des Kastelans schizophrènes. Et on dit que l’Imperium ne sait plus innover…

1 : Je veux dire que jusqu’à présent, la seule chose qu’on ne pouvait pas retirer à Thorpe était que son style était lisible. Et voilà qu’il se met lui-même un bâton dans les roues. Quelle légende.

AVIS :

Même en lui faisant grâce de ses vaillants mais peu inspirés efforts calligraphiques, sensés représenter les communications de la sainte trinité du Mechanicus (l’homme, [lamachine] et {l’animus}), Gav Thorpe signe avec ce By Your Command une autre soumission des moins mémorables, car se concentrant quasi-exclusivement sur la mise en scène d’un affrontement insipide entre deux factions dont les particularités ne sont pas bien mises en valeur. Ainsi, la cohorte robotique d’Alpha 6-Terror, bientôt réduite à sa plus simple expression à cause d’un bête oubli de mot de passe (ou l’équivalent au 41ème millénaire), se contente d’errer de salles en salles en tentant de neutraliser quelques Emperor’s Children en maraude, tandis que ces derniers restent cantonnés au rôle de goons en armure à paillettes.

Ce manque d’inventivité de la part de Thorpe dans la nature des péripéties qu’il met sur la route du mâle robot Alpha est d’autant plus triste qu’il semblait avoir préparé le terrain à plusieurs endroits pour introduire un peu de variété à son propos. Undra met en garde son roomba blindé contre le potentiel dévastateur des armes soniques des Noise Marines ? Alpha se prend un tir, certes dévastateur, mais sans grande valeur ajoutée d’un point de vue narratif, d’éclateur sonique, point. Les membres de l’escouade Terror se « rebellent » contre l’autorité de leur chef ? Il les laisse partir sans rechigner1. L’über super duper Magos Dominus Exasas arrive avec ses troupes pour flinguer du traître ? Il repart tout de suite après, et on ne le reverra plus de la nouvelle. Bref, Thorpe a vraiment opté pour la ligne droite en termes d’intrigue et de déroulement de son histoire, ce qui lui permet certes de la boucler en quelques pages, mais n’incite pas vraiment le lecteur à l’enthousiasme délirant à propos de cette dernière.

On pourrait arguer que l’intérêt de ce By Your Command repose davantage dans les réflexions sur ce que la mort (et à travers elle, la conscience de son individualité) représente pour un adepte du Mechanicus (qui peut donc se « réincarner » dans un appareil électroménager à proximité de sa dépouille) et pour un robot conscient comme les modèles Kastelan, mais là encore, ça ne casse pas trois méchadendrites à un Servo-Crâne. Si le sujet peut être intéressant, et a donné à la Science-Fiction des chefs d’œuvre tels que Le Cycle des Robots (Asimov), ce ne sont pas les deux pages que Thorpe consacre à ce thème en conclusion de sa nouvelle qui viendront bouleverser la perception du lecteur sur cette thématique2. La somme de péripéties banales et d’une conclusion embryonnaire ne se révélant pas supérieure à ses parties constitutives, on sera donc pardonné de ranger cette nouvelle dans le dossier meh de la BL.

1 : Moi qui commençait à me hyper pour un duel de robots, j’ai dû prendre sur moi.
2 : Si vous voulez lire une adaptation plus réussie de cette dernière dans l’univers de 40K, je vous recommande ‘The Kaban Project’ de Graham McNeill.

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The Offering – A. Clark :

INTRIGUE :

C’est la belle sombre nuit de Noël Nost’rnight, ce qui signifie une chose pour les habitants de Breaker’s Vale, avant-poste minier de Chamon : leur offrande doit être livrée au pied de l’arbre du don sans tarder, sous peine de terribles représailles. Guidée par leur Aîné, une petite délégation de péquenauds chemine donc péniblement jusqu’au point de drop ‘n collect le plus proche, chargée des maigres richesses que les locaux ont mis de côté à cette fin au cours de l’année écoulée. Au moment de repartir se calfeutrer dans les chaumines, le jeune Narry choisit cependant d’initier sa crise d’adolescence en questionnant tout haut le choix de ses concitoyens de détourner une partie de la production de Breaker’s Vale pour payer un tribut à ce qu’il considère n’être que de vulgaires brigands. Le moment a beau être très mal choisi, l’Aîné prend sur lui de remettre le petit rebelle à sa place, en lui racontant ce qui s’est passé l’année où l’offrande n’a pas été faite…

À l’époque, Breaker’s Vale venait d’accueillir son nouveau maire, Gustav Thatcher, fils exilé pour détournement de fonds d’une grande famille azyrite. Ce châtiment n’avait cependant pas suffi pour guérir Gus de sa sale manie de truquer les registres et s’en mettre plein les poches (ou dans le cas précis, le coffre), l’édile malgré lui de Breaker’s Vale ne comptant pas rester toute sa vie à moisir rouiller dans l’arrière-pays chamoniard, et ayant besoin d’accumuler un petit pécule pour pouvoir faire son retour dans le game. Un amoureux des livres (de compte) comme lui ne pouvait donc pas manquer de rapidement remarquer les discrètes mais visibles modifications apportées par un quidam tout aussi filou que lui à son propre registre, preuve indiscutable que le PIB de Breaker’s Vale se faisait siphonner par de multiples fripouilles. On pourrait presque parler de république bananière si Sigmar n’était pas un despote (et plutôt foudroyant qu’éclairé, si vous voulez mon avis).

Guère soucieux de partager, et encore moins ravi d’avoir été pris par une andouille par ses administrés, Gustav remonta rapidement à l’origine du problème, et fit main basse sur le butin collecté par les locaux, malgré les supplications de son majordome (Saul) de laisser les habitants déposer leur offrande annuelle aux Grobbi Blackencap, sous peine de représailles. Croyant avoir affaire à une vulgaire superstition paysanne, Gustav refusa tout net, ce qui mena Breaker’s Vale à connaître une nuit très agitée, comme vous pouvez vous en douter. Mécontents de n’avoir pas reçu leur dû, les Gits locaux organisèrent une soirée à thème « Spores sur la ville », résultant en de multiples vomissements et purulences fatales parmi la population. Sauvé par le dévouement de ses gardes et le bon cœur de Saul, Gustav parvint à s’enfermer dans son coffre alors que les séides de la Mauvais Lune prenaient d’assaut son manoir, laissant son majordome s’expliquer avec les intrus. Ce fut toutefois la fourberie de trop pour l’arnaqueur de la métropole, qui se rendit compte un peu trop tard que Saul connaissait lui aussi le code de la chambre forte, et n’avait plus aucun scrupule à laisser son employeur s’expliquer en tête à tête avec la mafia gobelinoïde chamoniarde (et le Troggoth du parrain à capuche local).

Son récit terminé, l’Aîné (un Saul un peu décrépit par le poids des années) constate avec satisfaction que cette grande gueule de Norry n’a plus rien à redire au versement de la dîme, et enjoint son monde à regagner ses pénates métalliques en attendant que le soleil se lève. Comme on dit dans le coin, entre la caverne et le fungus, mieux vaut ne pas mettre le doigt.

AVIS :

Andy Clark retourne aux champignons avec ‘The Offering’, nouvelle mettant à nouveau en lumière (de la Mauvaise Lune) les déprédations micellaires des Gloomspite Gitz, quelques mois après la sortie de son roman ‘Gloomspite’. Ce court format se suffit à lui même1, et nous sert une variante AoSesque du récit classique du tribut versé par une communauté démunie à une force maléfique pour éviter les ennuis. Le déroulement de cette petite fable sera donc familier à la majorité des lecteurs, l’originalité et la valeur ajoutée de ‘The Offering’ résidant (un peu) dans les quelques descriptions graphiques des maléfices dont sont capables ces farceurs de Gitz, et (un peu aussi) dans la révélation de l’identité « secrète » de l’Aîné, qui aurait pu être aussi bien un Thatcher assagi par son accrochage avec la ruralité profonde de Chamon que le très évident Saul. À titre personnel, et ayant lu à de nombreuses reprises que Clark avait produit pour ‘Gloomspite’ des passages proprement nauséeux (ce qui est une bonne chose pour de la littérature gobeline, j’imagine), je suis resté sur ma faim : mis à part la classique mouche dans le potage – ici livrée sous sa variante d’asticot dans le pudding – et quelques inhalations de spores aux effets dermatologiques regrettables, rien n’est vraiment dégoutant. Un peu trop insipide à mon goût donc, même si l’ensemble reste très correct.

1 : On notera tout de même la présence d’un personnage nommé Saul dans les deux histoires. Comme quoi, en cas d’infestation gobeline, better call Saul.

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Prologue à Nikaea // Prologue to Nikaea – D. Annandale :

Prologue to NikaeaINTRIGUE :

Enfermé dans sa chambre comme un ado rebelle, Malcador s’adonne à une de ses activités favorites : fouiller le Warp à la recherche de potins croustillants. Malgré les prodigieux pouvoirs psychiques dont dispose le Sigilite, et le fauteuil ergonomique premier cri que lui a offert son boss pour ménager ses lombaires et sa santé mentale (la qualité de vie au travail, c’est important), la tâche n’est pas sans danger pour Malcador1, qui finit cependant par ferrer un nom après avoir mis son bras dans l’œil d’une tempête Warp particulièrement vindicative : Thawra. Il semble que quelque chose de vilain soit en train de se passer sur cette planète impériale, et il est du devoir du Ma(l)c’ d’aller enquêter sur place.

Quelques temps plus tard, le noble vieillard fait son arrivée en orbite autour de la planète en question, escorté par une compagnie de Custodes menée par le Capitaine Bouclier Collatinus. Il semble bien que Thawra a connu des avanies récentes, comme les débris de sa flotte marchande et le remplacement soudain de la Gouverneur Vasra par sa conseillère Arkanasia en attestent. Rendus à la surface, les enquêteurs impériaux se font briefer par leur hôte : une faction de Psykers séditieux a lancé une attaque surprise sur le gouvernement planétaire, causant un beau bordel (et la mort de Vasra) avant que la contre attaque loyaliste ne les force à battre en retraite. Arkanasia attribue une bonne partie de cette remontada à l’emploi d’une force de Psykers fidèles à l’Empereur, qu’elle a personnellement entraîné pour combattre les félons. Etant elle-même une Psyker, elle est convaincue de tenir là une arme décisive pour la suite de la Grande Croisade, et meurt d’envie d’aller pitcher son idée sur Terra pour la prochaine saison de La Galaxie A Un Incroyable Talent. Malcador, en vieux reac’ qu’il est, nourrit de profonds doutes sur cette idée, qu’il garde cependant pour lui. Il faut avant toute chose s’assurer que l’insurrection de Thawra est définitivement matée, ce qui n’est pas encore chose faite. En effet, les derniers rebelles se sont retranchés dans des cavernes au Sud de la capitale, et on est sans nouvelles des forces envoyées par Arkanasia, dont sa brigade de X-Men, pour leur faire rendre gorge.

Lorsque Malcador, Arkanasia, Collatinus et ses Custodes arrivent sur le théâtre d’opérations, ils sont accueillis par une tempête psychique petite par la taille mais vicieuse de tempérament2. Sa cause ne fait pas de doutes pour un expert aussi calé en warperie que le Sigilite : l’affrontement entre Psykers indisciplinés a dégénéré en un mindfuck littéral (merci Slaanesh), et il est urgent d’agir pour refermer la brèche avec l’Immaterium avant que la tempête n’engouffre tout Thawra. Fort heureusement, Malcador est venu avec les outils appropriés pour cette tâche : sa mauvaise humeur légendaire et sa capacité à faire plusieurs choses en même temps (indispensable lorsqu’on doit gérer une bande de Primarques mal élevés), ici balancer des décharges de taser aux Psykers survivants tout en évitant de laisser traîner sa toge dans la boue warpienne. Et pour ceux qui se demandent, non, les Custodes ne servent pas à grand-chose, à part balancer des rafales de bolter au jugé au niveau des genoux avec un angle de tir de 45°C. Pour des raisons inexplicables, Arkanasia décide soudainement de partir en courant vers la tempête avant que le Régent n’ait fini de réger le problème. Les derniers Psykers en état décident alors de converger sur elle, ce qui aurait pu très mal se finir pour Malcador n’eut été la foi chevillée au corps d’Arkanasia pour l’Empereur. Au lieu de vaporiser le petit vieux pénible qui tchipait sans merci ses condisciples, la Gouverneur par intérim choisit noblement de gueuler un grand « POUR PEPE !!! » en direction du ciel, avant de se prendre une rafale de bolts dans le buffet (qui n’arrivent même pas à la tuer sur le coup, c’est dire si les Custodes sont surfaits).

Tout est bien qui finit quand même pour Malcador et Collatinus, qui, en gentlemen qu’ils sont, viennent assister aux dernières paroles d’Arkanasia. Cette aventure provoque un certain malaise chez le Sigilite, qui n’a dû son salut qu’à la foi de la Psyker, c’est-à-dire au concept que lui et son boss se sont jurés d’éradiquer. Se pose également la question du positionnement de l’Imperium envers les pouvoirs psychiques : sont-ils trop dangereux pour être utilisés, ou bien un juste milieu est-il atteignable ? Rendez-vous sur Nikaea dans quelques années pour reprendre cette discussion…

1 : On en déduit qu’en M30, il n’existe plus de bouton « j’ai de la chance » sur la barre de recherche Google. Cela aurait été plus confortable pour tout le monde.
2 : Il semble à Malcador que la tempête sait qu’il se trouve sur Thawra, et qu’elle cherche à l’humilier, comme les inscriptions insultantes sur sa mère qui apparaissent à la surface du maelstrom semblent l’indiquer.

AVIS :

David Annandale attire l’attention du lecteur sur une question intéressante de l’Imperium naissant : la formation et le contrôle des Psykers par les autorités impériales (in)compétentes. À l’époque, l’Empereur avait d’autres chats à fouetter que de mettre des œillères aux cohortes de mutants acheminés par les Vaisseaux Noirs jusqu’à Terra, tâche peu gratifiante mais indispensable à la survie de son empire galactique. Pendant la Grande Croisade, il y a fort à parier que le sujet était traité au cas par cas, avec des risques de débordement, parfois causé par un enthousiasme sincère mais dangereux, comme cela a été le cas sur Thawra. Si une des missions de Malcador consistait bien à gérer les crises de ce genre pendant que son patron localisait sa marmaille, on comprend mieux pourquoi il tenait temps à renforcer son équipe : à son âge, arpenter la galaxie pour mettre des glaçons psychiques dans le slip du moindre Psyker en rut n’est pas une activité conseillée.

Sur cette base intéressante, Annandale ne développe cependant pas grand-chose, à commencer par des connexions avec Nikaea, ce que le titre laissait pourtant envisager. Il aurait été approprié, à mon sens, de jouer des rapports compliqués que le Warp entretient avec notre continuum spatio-temporel pour faire voir à Malcador des indices du procès en sorcellerie intenté à Magnus et aux Librarius des Légions de l’Astartes, voire de la déchéance de l’humanité telle qu’annoncée par l’Hérésie d’Horus. Rien de tout ceci ici, seulement une nouvelle très « premier degré », saupoudrée d’une pincée de fluff et terminée par quelques remarques d’ordre général sur le rapport qualité-prix de l’Immaterium. Il y avait moyen de mieux faire, mais on sauvera ‘Prologue to Nikaea’ du pilori compte tenu de son absence de défauts majeurs, ce qui place cette œuvre hérétique parmi les plus abouties de son auteur.

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A Coin for the Carrion Thieves – J. French :

A Coin for the Carrion ThievesINTRIGUE :

Le mauvais côté de l’éternité, c’est que l’on devient vite désabusé. Demandez à Ctesias par exemple : autrefois un fringant Thousand Sons passionné par la recherche de la vérité suprême et l’exploration de la nature de l’univers, quelques milliers d’années d’hérésie l’ont changé en vieux ronchon réactionnaire, passant le plus clair de son temps à marcher dans des coups foireux et le reste à regretter de l’avoir fait. C’est ainsi que notre ami s’est retrouvé en rade sur les Mondes Déchus, après que la tentative d’Ahriman de RE-lancer la Rubrique – ça avait tellement bien marché la première fois – se soit soldée, ô surprise, par un nouvel échec retentissant. Voilà ce qui arrive lorsque l’on suit les conseils d’un Duc du Changement qui se révèle être le Professeur Shadoko1 ! Encore 999.998 tentatives à rater et les résultats suivront, c’est certain.

Exilé avec quelques disciples dans la rase campagne de l’Œil de la Terreur, Ahri (un ami qui vous veut du bien) a besoin de se replumer. Par chance, les locaux sont assez conciliants : répondant aux noms divers et variés de Discordia, Fidèles Suivants de la Fausse Concordance Universelle, ou plus simplement, Voleurs de Charognes, cette bande de ferrailleurs de l’espace est prête à fournir des transports de seconde main (mais ayant passé le contrôle technique) aux Thousand Sons égarés… mais pas gratuitement. Comme le fait remarquer finement leur meneur, l’aptement nommé Premier Amasseur, dans l’Œil de la Terreur, le concret est une valeur refuge. Ce qui ne fait pas tellement les affaires d’Ahriman et de sa cabale, dont le fond de commerce réside plutôt dans les discours grandiloquents, les fausses promesses et les tours de passe passe. Fort heureusement, l’indispensable Ctesios pourra utiliser de sa spécialisation démoniaque (Monsieur est invocateur-lieur, ce qui est presque aussi bien que plombier-zingueur) pour tuner méchamment un vaisseau des Charognards, et ainsi fournir une monnaie d’échange acceptable par l’Amasseur.

Aussitôt dit, aussitôt fait : Ctesios se met à l’œuvre et repeint l’intérieur du vaisseau en question avec des litres de fluides pas vraiment ragoutants, tandis que son assistant Lycomedes saupoudre le sol de dents de lait, comme le veut la coutume. Déjà pas très jouasse de servir de bonniche au démonologue, Lycomedes devient carrément furax lorsque ce roué de Ctesios se sert de lui comme appât à démon pour son invocation, bien évidemment sans lui avoir demandé la permission avant. À la décharge de Ctesios, le lecteur un brin au fait des choses du Chaos avait compris que c’était le destin probable qui attendait ce sous fifre, ce qui est suffisant pour qualifier le manque de prescience du Thousand Sons de faute grourde (grave + lourde), passible de la damnation éternelle…

Début spoiler…Ceci dit, ce destin peu enviable sera épargné à Lyco’, Ctesios rabattant le capot sur le groin du démon juste avant que ce dernier ne passe à table. Piégé dans le véhicule consacré, qui pourrait très bien être une Fiat Panda pour ce que l’on en sait, l’habitant du Warp est condamné à servir d’ordinateur de bord et de mécanicien embarqué à la machine jusqu’à la fin des temps, pour le plus grand avantage de son nouveau et heureux propriétaire, Ah ma sœur (et la tienne ?). En échange, Ahriman récupère une petite armada de 14 navires, beaucoup plus qu’il n’en faut pour embarquer les reliquats de sa bande de guerre. Comme on peut s’en douter, le grand cornu a un plan à l’arrière du casque et ne compte pas passer les prochains siècles à se tourner les pouces. La suite au (peut-être) prochain épisode…Fin spoiler

AVIS :

John French pourrait ne pas en avoir tout à fait fini avec un de ses personnages fétiches, et donne avec ce ‘A Coin for the Carrion Thieves’ une suite aussi inattendue qu’intrigante à la trilogie consacrée au sorcier le plus talentueux et le moins efficace de la galaxie. Cette petite histoire permettra aux familiers de la série de retrouver, j’en gage, quelques vieilles connaissances – Ctesios et Lycomedes – qui tiennent les premiers rôles de ce récit de troc chaotique. Les nouveaux venus apprécieront quant à eux les efforts faits par French pour leur permettre d’apprécier pleinement cette nouvelle, dont ni l’intrigue ni le déroulement ne reposent sur des éléments inconnus du profane (ce que d’autres auteurs de la BL n’hésitent pas à faire). Au final, c’est assez sympathique, à l’image de ce bon vieux Ctesios, qui se contente de faire une sale blague à Lycomedes au lieu de le faire posséder par un démon majeur, comme on s’y attendait pourtant, et lui fait même la fleur de le prendre comme apprenti (comme quoi, l’allégeance « chaotique bon » existe bel et bien à 40K), et cela donne plutôt envie de découvrir cette série, ou de le voir se poursuivre.

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Secteur 13 // Sector 13 – S. Mitchell :

40K_Sector ThirteenINTRIGUE :

Après les événements de Desolatia (‘Fight or Flight’), le Commissaire Cain profite enfin de la vie et d’un théâtre d’opérations beaucoup plus calme sur l’agrimonde de Keffia, où une coalition de régiments impériaux est à pied d’œuvre pour purger une infestation de Genestealers. Son rattachement à une compagnie d’artilleurs et sa popularité naissante donnent en effet à notre héros beaucoup d’occasions de faire son devoir de façon plaisante : à des kilomètres de la ligne de front et/ou à proximité des hors d’œuvre du Gouverneur local. Une vraie sinécure en quelque sorte, que le talent de Cain pour se mettre tout seul dans de sales draps va bien sûr interrompre de la plus brutale des façons.

Au début de la nouvelle, le Commissaire pensait pourtant avoir finement joué en trouvant un prétexte en plasbéton de décliner l’invitation du Colonel Mostrue de participer à un briefing de haut niveau, honneur lui ayant certainement valu de finir en première ligne sur une quelconque offensive décisive. Très peu pour Cain, qui a donc fait remarquer à l’officier qu’il était de son devoir d’aller superviser le rapatriement d’une poignée de Gardes des Glaces mis au trou par l’Arbites local, à la suite de troubles du voisinage dans la ville de Pagus Parva. Une tâche ingrate, mais qu’il faut bien faire, surtout quand cela permet de passer du temps avec la plastique Sergent Wynetha Phu. L’Empereur le veut, toussa toussa.

Rendu sur place avec son fidèle Jurgen, Cain badine un peu avec l’accorte Arbites, tout en sortant son numéro de Commissaire c’est juste mais vert (et inversement) aux cinq pochtrons bagarreurs qui ont causé du grabuge la nuit dernière. Bien que peu intéressé par les accusations de ses charges envers les locaux, qui auraient mis des roofies dans leurs verres pour leur faire les poches en douce, Cain accepte d’aller faire une enquête de voisinage (avec Wynetha bien sûr) pour tirer les choses au clair. Ses pas le conduisent alors jusqu’au bar du Crescent Moon, où travaille la sculpturale Kamella, escort girl rurale et ultime souvenir que gardent les Gardes de leur dernière soirée. Confrontés à la méfiance du propriétaire, qui ne consent à ouvrir la porte que devant le risque élevé de se la faire enfoncer par les enforcers – un comble –, Cain, Wynetha et le planton qu’elle a amené avec elle pour faire le nombre et grimper le bodycount à peu de frais1 sont forcés de prendre leur grosse voix impériale pour convaincre l’habitant de les laisser accéder à la chambre de Kamella. Et c’est là que les choses se corsent pour nos héros, car les paumes de Cain se mettent à le chatouiller, super pouvoir indiquant de façon indubitable que quelque diablerie est à l’œuvre…

Début spoiler…Et en effet, Kamella se trahit en demandant au Commissaire s’il aime ce qu’il voit (elle était nue sous ses vêtements à ce moment là) en utilisant son patronyme, qu’elle n’avait aucun moyen de connaître. La seule explication logique (mises à part celles basées sur la relative célébrité de Cain ou une ouïe un peu plus fine que la moyenne) est que la donzelle est capable de communiquer par télépathie avec le barman, comme deux hybrides Genestealers peuvent le faire. C’est le début des ennuis pour nos héros, qui se retrouvent vite assaillis par un essaim entier de cultistes plus ou moins présentables. Laissant l’Arbites inconnu mourir au champ d’horreur, comme convenu, Cain et Wynetha parviennent à s’échapper de ce guêpier et à rejoindre le commissariat (pas le sien, le nôtre, enfin je me comprends), où les attendent Jurgen et les cinq Gardes biturés. Bien que la bâtisse soit solidement construite et capable de soutenir un siège, la situation des impériaux ne va pas en s’améliorant car il s’avère bientôt que deux des bidasses ont chopés une MST tyrannique à trop fricoter avec l’habitant.e, et sont tombés sous la coupe de l’essaim. Contraints de se replier sur le toit du bâtiment après que leurs collègues aient fait défection et ouverts la porte aux hordes baveuses et chitineuses de Pagus Parva, Cain et Cie ne doivent leur salut qu’à l’arrivée propice et totalement inespérée d’un régiment de Cadiens, qui venait sans doute prendre un peu de bon temps après une campagne éprouvante sur le front, le vrai, le dur, le velu. Pas de chance pour les troupes de choc, il faudra passer sur le corps des filles de joie locales avant de leur passer… C’est peu conseillé de toute façon.

L’histoire se termine triplement bien pour Cain, qui écope d’une médaille, d’une réputation héroïque encore grandie (alors qu’il a simplement et bêtement pété les plombs en plein combat), et d’un regard lascif de Wynetha lors de la soirée de remise des honneurs. Vu comme ça, on aurait presque envie de s’engager.Fin spoiler

1 : Mitchell ne se donne même pas la peine de le baptiser, c’est dire s’il était mal barré le garçon.

AVIS :

Comme l’illustration d’époque qui accompagne cette chronique le fait subtilement remarquer, ‘Sector Thirteen’ (le nom de la zone autour de Pagus Parva) est une nouvelle collector, remontant aux tout premiers chapitres de la longue, troublée et caustique histoire de Ciaphas Cain. 2003, pour être précis. La recette est la même que pour toutes les autres soumissions de Sandy Mitchell pour cette série : une approche décomplexée (les Anglais ont la jolie formule de tongue-in-cheek) du background de Warhammer 40.000 avec un gros B, permettant au personnage de sitcom qu’est Cain de vivre des aventures palpitantes à son corps défendant. Après avoir enquillé de nombreuses itérations de cette formule consacrée, qui a offert une carrière respectable à Mitchell au sein de la Black Library, je dois reconnaître que certains épisodes sont plus réussis que d’autres, et ‘Sector Thirteen’ fait partie du haut du panier. Il m’est difficile de quantifier précisément ce qui fait de cette nouvelle un succès, mais il me semble que le rythme est plus enjoué, et les blagues plus efficaces que pour d’autres courts formats de Sandy Mitchell. Bref, c’est une des (més)aventures les plus satisfaisantes de l’incorrigible et incorrigé Ciaphas Cain que nous tenons là, et un point d’entrée idéal pour tout novice cherchant à se frotter à cette légende de la Black Library.

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Embers of Extinction – B. Easton :

Embers of ExtinctionINTRIGUE :

Souvenez-vous de la bataille de Phall. En toute objectivité, Perturabo s’y était fait botter le joint de culasse par un Alexis Polux héroïque en défense, et qui aurait même pu remporter l’affrontement si son pôpa ne lui avait pas hurlé de rentrer tout de suite à la maison depuis la fenêtre du Palais Impérial au pire moment (‘The Crimson Fist’). Ce qui s’est passé immédiatement après cet épisode honteux pour les Iron Warriors, Brandon Easton propose au lecteur de le découvrir ici.

Notre récit commence sur les pondérations mathématiques et paléolithiques du Primarque de Fer alors que le Capitaine Vort de l’Iron Blood passe en revue les pertes subies par la Légion durant le tragique épisode phallique. Il ne faudra pas s’étonner si les Légionnaires développent des complexes à ce niveau et commencent à surcompenser. Bien loin de remettre en question le bien fondé de sa stratégie, dont l’implacable logique se contrefiche bien de quelques dizaines de milliers de morts et centaines de vaisseaux détruits ou endommagés, Perturabo cherche au contraire à maximiser les pertes chez les Imperial Fists, et ordonne donc la poursuite de trois croiseurs loyalistes jusque dans le système de Tarkovsky Epsilon. Une tâche bien triviale pour un vaisseau de type Gloriana, mais si on ne peut plus exercer ses penchants sadiques rigoler de temps en temps, où va la galaxie ma bonne dame ? Comme on peut s’y attendre, le Pylades, le Ramses et la Dévastation ne font pas de vieux os face à la fureur mathématiquement appliquée de l’Iron Blood. Avec un torpillage en règle, un écrasement provoqué sur une géante gazeuse et un éperonnage en bonne et due forme, Pervers Peper’ se paie même le luxe de marquer des points de style en offrant à chacune de ses victimes une fin personnalisée. S’il avait eu un nombre suffisant de victimes, on peut imaginer que l’un des vaisseaux de Dorn aurait été intégralement mastiqué, avalé, digéré et déféqué par son intraitable frangin afin de varier les plaisirs d’un côté et les insultes de l’autre. Et on ose dire que Perturabo n’a pas l’âme d’un artiste !

Cette sidequest rondement menée, le bourreau d’Olympia consent enfin à reprendre des activités normales, comme par exemple se rendre sur Hydra Cordatus, où l’attendent Fulgrim et ses Emperor’s Children, ainsi qu’un nouveau camp retranché romain Imperial Fists à raser de fond en comble, afin de prouver à l’Empereur qu’il est le plus brave de tous les peuples de la Gaule, ou quelque chose comme ça. Tout cela a été couvert dans ‘Angel Exterminatus’ et nous intéresse donc pas ici. En revanche, Easton se permet de meubler un autre « blanc » du parcours hérétique de son héros, précisément le moment qui suivit la remise de Forgebreaker à Perturabo par Horus en gage d’une bro-itude éternelle. L’épisode ayant eu lieu quelques semaines après la purge de sa planète d’adoption, il est somme toute logique que le Primarque se soit retrouvé avec un peu de temps à tuer, après avoir épuisé tout son stock d’Olympiens (à tuer également, pour ce qui ne suivent pas). Malgré la perfection manifeste de son cadeau, forgé par Fulgrim en personne, Perturabo ne put s’empêcher d’apporter de nombreuses modifications à l’arme, dont un changement de son centre d’équilibre afin d’en maximiser les dégâts1. Cette longue session de forge fut également l’occasion d’échanger quelques aphorismes impatients et acérés avec un de ses fistons, le pâle autant que curieux Arhalin, dont les questions lancinantes ne s’avèrèrent pas assez stupides pour que son père juge bon de l’utiliser comme sac de frappe pour tester son nouveau jouet. Cela ne s’est pas joué à grand-chose, ceci dit…

1 : Et également (et surtout) pour déconcerter et handicaper un éventuel adversaire qui tenterait de retourner Forgebreaker contre lui. Easton a tapé dans le mille avec ce mélange de paranoïa absurde et de rationalité implacable, tout à fait « perturabien » dans l’esprit.

AVIS :

Débuts solides et sérieux pour Brandon Easton, qui n’a pourtant pas choisi la facilité en documentant deux épisodes de la vie de Perturabo prenant place entre plusieurs périodes et événements déjà traités par d’autres auteurs avant lui (French, McNeill et Haley, pour n’en citer que trois). Le risque de faux raccord s’en trouvait logiquement accru, mais le rookie s’est fort bien acquitté de sa tâche, en inscrivant sa prose dans la droite ligne de celles de ses prédécesseurs. Au passage, il confirme et souligne le portrait psycho-rigide et surhumainement intransigeant de l’Homme de Fer à l’aide d’exemples et d’illustrations de son cru, ce qui permet d’envisager Perturabo sur un jour à la fois un peu différent et totalement cohérent avec le reste du corpus hérétique (que j’ai lu). Tous les Primarques et personnages de l’Hérésie n’ayant pas eu cette chance, pour diverses raisons (au rang desquelles le manque de recul et de préparation de nouveaux auteurs), je me devais de saluer le sans-faute d’Easton à cet endroit.

J’ai également bien aimé les raisons convoquées par l’auteur pour expliquer pourquoi un être aussi rationnel et résilient que le fils d’Olympia a fini par commettre l’inexplicable : trahir son Père et l’Imperium pour le Chaos. Selon Easton, ce serait – en partie – à cause de la trop grande tolérance de Pépé envers le mysticisme et les chicaneries en tout genre dans lesquelles le genre humain à tendance à se vautrer naturellement. Pour un progressiste hard boiled comme Perturabo, il aurait fallu guider l’humanité au forceps vers un idéal de perfection scientifique et technique, en extirpant au passage tous les corps et concepts « mous » venant freiner la transition. Ce à quoi on pourrait répondre que c’est justement ce à quoi l’Empereur tendait, comme sa tentative malheureuse d’excommunier le fait religieux l’a laissé apparaître. Sans doute était-ce trop peu et trop tard pour son intraitable fiston, dont la patience a fini par craquer à la suite de sa campagne cauchemardesque contre les Hruds et l’annonce de la trahison d’Olympia. Cette nouvelle nuance de gris sur la palette de la trahison de l’Iron Man vient enrichir le camaïeu de sa psyché (si si), sans jurer avec les touches déjà apportées par les biographes précédents de notre homme. Pas mal du tout. J’ai donc hâte de lire la suite des travaux de Mr Easton pour la BL, en espérant qu’il reste dans cette veine.

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Le Poing d’un Dieu Courroucé // The Fist of an Angry God – W. King :

The Fist of an Angry GodINTRIGUE :

Assignés à la conquête de la forteresse d’Azumbard, dans le Royaume d’Aqshy, le Liberator-Prime Balthus1 et ses Knights Excelsior sont à la peine. Non seulement la décoration psychédélique et les relents d’encens bon marché de leurs adversaires Tzeentchiens sont un affront à leurs sur-sens de surhommes, mais, nombre sacré du Dieu Poulet oblige, ils ont passé des plombes à sécuriser les neuf tours du bastion adverse, ce qui pèsera lourdement sur leur rémunération variable de l’année, alors que les Hammers of Sigmar affectés au front Slaaneshi ont une charge de travail un tiers moindre. Saleté de numérologie cosmique. Faisant contre mauvaise fortune feu de tout bois, Balthus mène ses ouailles à l’assaut de l’ultime donjon adverse, sans réussir à se défaire d’une étrange sensation de déjà-vu, qui ne lui dit rien qui vaille. L’absence de résistance des disciples de Tzeentch lui semble en effet de mauvais augure, et cette sinistre prémonition se trouve vérifiée lorsque la petite force de Stormcast qu’il commande se retrouve embusquée et submergée par une horde d’emplumés vindicatifs. Ayant pris deux méchants coups sur l’occiput, notre héros tombe dans les bras de morphine, et se réveille enchaîné dans un laboratoire arcanique, où il fait la connaissance de la sorcière Aesha, qui à son grand étonnement, semble le connaître2.

Après quelques instants consacrés à tenter de se défaire de ses liens enchantés, sans grand succès (ces derniers se resserrant de plus en plus à chaque fois que Balthus force dessus, conséquence d’un puissant enchantement… ou de l’utilisation d’un simple demi-nœud), le Liberator prisonnier – ironie – accepte d’ouvrir le dialogue avec Aesha, qui, cornes et sabot mis à part, se révèle être une hôte plutôt décente, et se montre plus intéressée par la poursuite des examens initiés sur son sujet d’étude que sur le sacrifice de ce dernier. L’échange permet de comprendre que les motivations de la magus sont, en toute simplicité, de percer à jour les secrets ayant permis à Sigmar de créer les Stormcast Eternals, qu’Aesha considère comme la clé de la transcendance divine. Ayant appris, sans doute à la lecture des tomes de la Fin des Temps (trouvés en occasion sur e-bay), que beaucoup des membres du panthéon de l’Ordre et de la Mort ont commencé leur carrière comme de simples mortels dans le Monde qui Fut, notre ambitieuse sorcière ne voit pas de raison de ne pas tenter le coup à son tour. Horrifié par ce projet blasphématoire, et peut-être également par le résultat de l’IRM complet qu’Aesha lui a fait passé grâce à ses miroirs ensorcelés, Balthus décide de contrecarrer les plans de sa Némésis en… rage-quittant. Ou plutôt, en essayant de rage-quitter. Car sa tentative héroïque de se suicider en tirant à mort (littéralement) sur ses chaînes se fait contrecarrer par Aesha, qui le met en pause avant qu’il ne perde son dernier PV, et profite de son coma réparateur pour infiltrer ce rêve, étrange pénétrant, de la fin inconnue de Balthus.

En des temps très anciens, Balthus était en effet Leoric, prince héritier du royaume d’Asqualon. Son règne fut toutefois aussi court (3 minutes et 26 secondes) que sanglant, puisqu’il hérita de la couronne après la mort de son père pendant la défense du Temple de l’Orage, dernier bastion de l’Ordre face aux assauts du démon Arkatryx et de ses disciples indisciplinés. Garrotté par son adversaire, Leoric invoqua Sigmar pour venger son paternel, et fut exaucé lorsque le Dieu lui envoya un éclair salvateur, non pas directement sur le démon, ce qui aurait été trop simple, mais sur l’épée que notre héros brandissait toujours. Chargé à bloc, Leoric trouva la force d’électrocuter son adversaire d’un ultime horion, avant de partir en direction de la forge divine. Par un hasard qui n’en était sans doute pas un, Aesha était également présente ce jour là (après tout, c’est elle qui a coup fatalisé le roi Aldred), ce qui donne un nouveau sujet de discussion tout trouvé à nos deux personnages une fois Balthus émergé de sa torpeur. S’en suit une joute verbale digne d’un débat de la primaire démocrate, avec Aesha se posant en Bernie Sanders chaotique, en lutte contre le 1% asqualique ayant exploité le petit peuple et fait exécuter son père parce qu’il avait volé une miche de pain. Face à ce déferlement de progressisme, Balthus ne peut que se référer aux bullet points qui lui ont été inculqués pendant sa formation: « l’Ordre, c’est cool » et « Yes, Sig’ Can ».

Ce passionnant échange est toutefois écourté par la notification que reçoit Aesha sur son portable professionnel, l’informant de l’intrusion d’une meute de militants en sigmarite dans son QG, avanie qu’il lui faut gérer sans attendre. « Pas si vite poulette » lui répond Balthus, qui dégaine son special move et gueule « Par le pouvoir du <insert random stuff here> ancestral, je détiens la force toute puissante! », et parvient enfin à se défaire de ses chaînes par l’intervention du saint sigmarite esprit. La fin de la nouvelle voit nos deux protagonistes jouer au chat et à la souris dans le dédale du donjon d’Aesha, jusqu’à ce qu’ils arrivent dans la salle de téléportation aménagée par cette dernière, et qui se révèle être le Temple de l’Orage où ils se sont rencontrés pour la première fois il y a des millénaires. S’il ne parvient pas à stopper la bougresse avant qu’elle ne s’éclipse, Balthus a au moins la satisfaction de mettre la main sur son ancienne épée, qu’il était le seul à pouvoir retirer de la pierre dans laquelle il l’avait plantée en transperçant le démon (ça me dit vaguement quelque chose…). Un milliard de Tzaangors occis plus tard, notre héros est récupéré par ses frères d’armes, esquinté mais en vie, et ayant inscrit sur sa to do liste de caler un nouveau tête à tête avec Aesha pour discuter du bon vieux temps dès qu’elle se montrera disponible.

À ne pas confondre (je l’écris car je l’ai fait moi-même) avec Balthas Arum, la réincarnation de Balthazar Gelt dans les Royaumes Mortels. 
2 : Le plus étonnant pour le lecteur est surtout la question que pose Balthus à sa geôlière juste après qu’elle l’ait identifié. OSEF quoi mon grand.

AVIS :

King fait ses premiers pas dans les Royaumes Mortels de manière assez discrète avec The Fist of an Angry God. Comme on pouvait l’attendre, et peut-être l’espérer, son passif d’auteur historique pour Warhammer Fantasy Battle apparaît clairement dans cette nouvelle à travers le personnage d’Aesha, dont la connaissance du Monde Qui Fut apparaît comme un clin d’œil (je le vois comme ça en tout cas) au parcours de King. Ce dernier prend en marche le train du « Sigmar-bashing » qui sous-tend beaucoup des dernières publications mettant en scène des Stormcast Eternals, et dépeint les méthodes de recrutement du Dieu Roi sous un jour contrasté, tout en justifiant en partie le passage au Chaos d’Aesha. Pas de manichéisme ici donc, et c’est bien le moins qu’on attendait de la part d’un contributeur aussi expérimenté que Bill King, dont les écrits ont toujours mis en avant la « grisaille » ambiante des univers de GW.

À titre personnel, je suis toutefois déçu de l’articulation de la nouvelle, dont le début est finalement insignifiant (je m’attendais à ce que King fasse une révélation sur un stratagème spatio-temporel utilisé par les disciples de Tzeentch, ce qui aurait justifié la sensation de « déjà-combattu » de Balthus) et la fin hurle littéralement « À SUIVRE… » à la tête du lecteur1. Le fond étant, comme dit plus haut, assez intéressant à défaut d’être captivant (cela montre au moins que King a digéré le background de cette nouvelle franchise), je trouve dommage que la forme n’ait pas été plus pensée et soignée par l’auteur. Ceci dit, King ne s’est jamais montré très doué sur les très courts formats, ses meilleures nouvelles se situant sur la marque des 40/50 pages. Quoiqu’il en soit, il convient de suivre la suite des événements avec attention, et espérer que le King finisse par remettre la plume sur le fils spirituel ayant lui aussi réussi son passage de Warhammer Fantasy Battle à Age of Sigmar, un certain Mr G. Gurnisson…

1 : En plus de passer vraiment vite sur des éléments pas anodins du tout pour l’intrigue, comme la libération miraculeuse de Balthus.

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The Dead Hours – D. Guymer :

The Dead HoursINTRIGUE :

Ereintés après une rude journée de tuerie en Shyish, Gotrek et Maneleth ont fait halte dans la petite ville de Skeltmorr pour se requinquer en attendant l’aube. Lorsque commence notre histoire, le Duardin a sombré dans le sommeil du juste après avoir vidé un tonneau de de bière et s’être fait un masque de beauté à base de jeune d’œuf et de bacon (c’est ça où il fait la vaisselle avec la langue et sans les mains). Maneleth s’est elle éclipsée pour prendre l’air, et, d’après la discussion entre les deux occupants de l’auberge investie par le vieux couple, aurait fait une mauvaise rencontre sur le chemin. Skeltmorr doit en effet un bon paquet d’os à Nagash, et les rares visiteurs sont donc invités à faire des donations en nature à l’œuvre de salut public municipale. Un tel destin attend également Gotrek, dont l’état comateux n’inspire pourtant pas confiance à Nieder Pedsen, le malabar chargé de l’amener, mort de préférence, jusqu’au repaire du redouté Tithekeeper.

La méfiance du reître était justifiée car le nabot émerge du coltard au moment où Pedsen s’apprête à lui faire tâter de son gourdin, et parvient à massacrer l’aubergiste (qui pour sa défense, venait de lui tirer dessus à la chevrotine) et à traîner son complice dans la rue malgré une gueule de bois carabinée. Sous ses abords bougons, Gotrek ne peut en effet laisser Maneleth dans les griffes des locaux, et demande donc à être conduit jusqu’à ce fameux Tithekeeper afin de plaider sa cause (un peu) et de planter sa hache (surtout). Sans doute nommé Lagardère sous sa cagoule de fonction, c’est le fonctionnaire tortionnaire qui vient toutefois à lui, en même temps que la moitié de la ville, réveillée par les beuglements imbibés du Duardin. Trop musclé/runé/ravagé pour être incapacité par les faibles attaques des Skeltmorriens, Gotrek massacre sans distinction tous ceux qui ont le malheur de croiser le chemin de sa hache, à commencer par le Tithekeeper. Le « boss final » de la nouvelle a donc mordu la poussière alors que nous n’en sommes qu’à la moitié du récit : comment Guymer va-t-il meubler la fin de ce dernier ?

La réponse est : avec des étagères Ikea et une petite visite dans la crypte du temple de Sigmar local, reconverti il y a quelques millénaires en entrepôt de stockage par les autorités de Skeltmorr. C’est en effet là qu’attend cette princesse de Maneleth que son chevalier servant vienne la secourir, ou plus précisément qu’un gentleman vienne lui rendre le couteau qu’elle a laissé planté dans la dépouille de son agresseur (ce sera Pedsen qui lui rendra ce service). Au passage, Gotrek réduira en cendres une meute de chiens issus de la filière de recyclage des déchets organiques de la ville, et que le Tithekeeper gardait pour lui tenir compagnie. Jamais à court de bonnes idées et toujours prêts à rendre service, les deux compagnons finissent la nouvelle en saccageant les stocks de cendres, d’os et d’âmes accumulés par leurs hôtes, actant par là leur « libération » de la tutelle de Nagash, mais signant plus certainement l’arrêt de mort des derniers habitants de Skeltmorr lorsque l’heure de la dîme aura sonné. Mais après tout, ils l’ont bien cherché.

AVIS :

Péripétie très mineure de la nième saison des aventures de Gotrek, ‘The Dead Hours’ est plus intéressant par les détails fournis sur la vie en Shyish que par ses péripéties combattantes, ni Gotrek ni Maneleth ne rencontrant ici un adversaire digne de ce nom1. Cela sent vraiment la panne d’inspiration devant un travail de commande pur et dur pour David Guymer, dont la tentative de s’écarter un peu du schéma classique de la nouvelle gotrekienne (embrouille, fessage de goons, gros monstre final) s’avère aussi peu concluante ici qu’elle l’avait été bien des années plus tôt avec ‘The Tilean Talisman’, son tout premier travail publié par Nottingham. Je sais bien qu’il est dur de faire des variations sur un thème usé jusqu’à la corde, mais une soumission classique mais sérieuse aurait été plus appréciable que cette improvisation assez peu concluante. Le mieux est l’ennemi du bien, du rien, et du Nain.

1 : Cela aurait été le cas si le Tithekeeper avait été la vieille qui se met à flécher Gotrek depuis sa fenêtre, avant de se faire fracasser les côtes d’un grand coup de boule. Sans doute le combat le plus mémorable de notre Nain depuis la Fin des Temps.

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La Forteresse de Vorago // The Vorago Fastness – D. Annandale :

The Vorago FastnessINTRIGUE :

C’est habité par un fort syndrome de l’imposteur que le Black Dragon et homme licorne Teiras fait son entrée dans la Deathwatch, sous le regard bleu cobalt d’un nième Capitaine Ultramarines1/portier de service. Et pour cause, il est logique qu’un frère de bataille d’un Chapitre au pedigree plus que borderline ne se sente pas très légitime à servir l’Inquisition. Cependant, notre héros ne tarde pas à découvrir que son nouveau maître, l’Inquisiteur Otto Dagover (une sorte de Mitch McConnell grimdark, d’après la description qu’en fait Annandale) a un goût prononcé pour les mauvais (sur)garçons. Ses camarades de jeu seront en effet le Son of Antaeus (Chapitre de la 21ème Fondation, maudite comme chacun sait2) Jern, le Flesh Tearer Utor, le Relictor Kyral et le trotro mystérieux Gherak, tous issus comme lui de confréries pas vraiment Charlie. Si Dagover les a réunis, c’est pour qu’ils l’aident à mettre la pince sur une arme cyranax, récemment excavée d’un site de fouilles par un collègue avec lequel il s’entend mal, un certain Salmenau. Ce n’est toutefois pour gérer cette rivalité professionnelle que la Deathwatch est requise, mais pour repousser l’assaut Nécron sur la planète où la découverte a été faite, Discidia. Cette dernière a deux particularités : un sous-sol riche en précieuse benthamite, et un centre pénitentiaire de la taille de l’Australie (la forteresse de Vorago), dont les détenus sont mis à contribution pour exploiter la pierre tant convoitée. Un système gagnant-gagnant donc, que les Xenos sont venus perturber avec leurs gros sabots métalliques.

Briefés sur leur mission avec un luxe de détails à faire l’envie de l’escouade Talon, Teiras et ses comparses se mettent à pied d’œuvre après avoir été téléportés à l’intérieur de la prison grâce une relique d’une précision incroyable… mais d’une portée limitée apparemment. Il leur faudra en effet se taper quelques heures de train depuis leur point de chute pour arriver jusqu’à la chambre où Salmenau et son équipe sont assiégés, ce qui leur permettra au moins d’apprendre à mieux se connaître, et au Flesh Tearer à faire de gros progrès en maîtrise de son humeur. Je vous épargne les combats à base de boum-boum et de pif-paf qui égayent le trajet de nos surhommes, il y a des déplacements sur la ligne 13 qui sont plus mouvementés que ça. Rendus sur place, les Deathwatch ont à peine le temps de constater que l’arme convoitée par Dagover n’est littéralement qu’un gros pistolet laser3, et à menacer légèrement Salmenau de les laisser jouer avec (Môssieur a des principes car Môssieur est un Amalathien) que les Nécrons repassent à l’attaque, menés par un Seigneur très très fâ(u)ché.

D’humeur inhabituellement magnanime pour un auteur de la BL, Annadale fait survivre tous les Astartes (même Utor ne succombe pas à la Rage Noire, c’est dire), se contenant de révéler que l’énigmatique Gherak était en fait un Flame Falcon, soit le Chapitre le plus maudit de la 21ème Fondation sensé avoir été Exterminatus-isé par l’Inquisition pour défaut majeur de fabrication il y a quelques siècles. Comme on pouvait s’y attendre, Teiras a finalement l’honneur de tirer son coup, ce qui a pour effet a) d’annihiler tous les Nécrons de la planète4 qui avaient eu la mauvaise idée de monter au combat en faisant la chenille derrière leur boss, b) de faire un gros trou dans le mur de la prison par lequel les prisonniers s’échappent, et c) de provoquer l’explosion de la centrale énergétique de la capitale planétaire, réduisant le gouvernement local en confettis. Teiras, qui sous ses airs de narval énergétique est un intellectuel, comprend à son retour sur le vaisseau de Dagover que ce dernier avait un objectif autre que celui de récupérer une grosse pétoire (plus vraiment fonctionnelle d’ailleurs). Et en effet, l’Inquisiteur avoue être un Recongrégateur, ce qui est peu commun – et consiste apparemment à désastibiliser les régimes d’obédience loyaliste mauvaise de l’Imperium… PARCE QUE C’EST NOTRE PROJEEEEEET !!! ou quelque chose comme ça – mais également un Schumpeterien, ce qui est proprement rarissime.

La nouvelle se termine sur le flou artistique des motivations et agenda de Dagover, rejoint discretos par une vieille amie dont le trait de Seigneur de Guerre est de se déguiser en statue pour espionner les conversations : la Chanoinesse Setheno. C’est elle qui a apparemment conseillé à Dagobert de recruter le Black Dragon, et elle part aussi mystérieusement qu’elle est arrivée pour la planète d’Anthagonis, où une Compagnie de ces braves guerriers est sur le point de recevoir la visite surprise de l’Inquisiteur Lettinger. Je suppose que l’on peut conclure avec une petite mention #BlackLivesMatter, à défaut d’une compréhension pleine et entière de l’intrigue d’Annandale.

1 : Ils se reproduisent tellement vite que Calgar les écoule en douce à l’Inquisition… Rusé.
2 : Même si les effets secondaires ne sont pas aussi graves pour tout le monde. Les Sons of Antaeus sont simplement plus grands que la moyenne des Space Marines. Pas pratique pour faire les boutiques, mais pas mortel non plus.
3 : Imaginez vous un canon de quinze mètres de long et une gachette à l’échelle, si bien qu’il faut à un Space Marine ses deux bras pour la presser.
4 : En tous cas, on n’entendra plus parler d’eux après ce moment. Tout comme Salmenau d’ailleurs.

AVIS :

Curieuse nouvelle que ce ‘The Vorago Fastness’, qui ne porte la patte distinctive du « maître », ni ne convoque ses factions favorites. Mis à part les quelques et légères bizarreries et omissions de l’intrigue, l’ensemble se laisse lire sans trop de problèmes, et se révèle être insipidement potable, ce qui serait presque un compliment. Point d’Annandalerie spectaculaire venant faire s’écraser la suspension d’incrédulité du lecteur avec perte et fracas (comme cela a été souvent le cas), seulement une histoire pas très passionnante, et que l’on comprend sans mal s’inscrire dans un arc narratif plus large1. C’est assez dommage au final car l’auteur avait ébauché des idées assez intéressantes, comme le regroupement de Space Marines peu fréquentables comme agents de l’Inquisition, ou une cité prison laissée en auto-gestion, sans que cela ne débouche sur quelque chose de concret ou de pertinent pour l’intrigue. À lire si vous voulez découvrir une autre facette de la prose de David Annandale, être absolument calé sur sa petite galerie de personnages récurrents, et/ou miner les quelques indications fluff que contient cette nouvelle, mais à laisser de côté sans regret sinon.

1 : On retrouvera les Black Dragons et Setheno dans ‘The Death of Anthagonis’, et la Chanoinesse croisera également la route de Yarrick.

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Live Wire – R. Rath :

Live WireINTRIGUE :

Faite prisonnière avec le reste de l’équipage du Theorem of Castillus, vaisseau de ligne de l’Adeptus Mechanicus, la maîtresse motoriste Jezette Vaal est amenée en classe de neige par ses ravisseurs, dont les plans machiavéliques incluent la corruption des cortex de leurs victimes par un malware particulièrement salace (il est plein de bits et d’octets, c’est dire), le heart_wyrm. Sur le point de se prendre un câble USB de fort belle taille à l’arrière du crâne sans son consentement1, ce qui est reconnu comme agression sexuelle caractérisée d’après le Code Pénal Impérial, Vaal est toutefois sauvée par l’intervention directe de Makov Quavarian, Magos renégat, hacker chaotique et cerveau de l’opération, venu s’enquérir de la chute impardonnable de la productivité de la station de mise à jour où notre héroïne était sur le point de passer à table. Car l’opérateur Slavigor, en charge de la manœuvre, n’a pas sa langue noire dans la poche et s’était permis d’échanger quelques banalités avec sa future victime, plus rebelle que le serf de base. Remis à sa place par le big boss, Slavi’ confie son plug occipital à un sous fifre et entraîne Vaal dans une salle à l’écart, pour aller s’expliquer au calme.

À la grande surprise de Vaal, Igor le Slave se révèle être un allié, qui lui remet un pistolet à fléchettes dernier cri, quelques conseils d’utilisation et une mission simple mais jouissive : foutre un boxon monstre dans la base de Quavarian. Si la motoriste s’exécute sans poser davantage de questions, et finit probablement par rejoindre l’Omnimessie après quelques minutes de fusillade intense (comprendre qu’elle sort de notre histoire en même temps que du local à balais dans lequel s’est déroulé son dernier entretien d’embauche), le lecteur averti comprend rapidement que Slavigor était en fait Sycorax, Assassin Callidus chargé.e de la neutralisation de Quavarian et de la destruction de ses recherches hérétiques. La sécurité renforcée mise en place par le Magos, et le contrôle poussé dont il bénéficie sur tous ses subalternes grâce à l’injection de son méchavirus, ont forcé l’agent de Terra a se faire implanter un spambot à l’intérieur du crâne pour donner le change de façon convaincante, et à progresser de façon très précautionneuse une fois arrivé.e sur place2. L’indépendance et la loyauté de Vaal lui ont donné une occasion inespérée de passer à l’étape suivante de son plan, la confusion provoquée par la dernière chevauchée de la motoriste lui permettant de se glisser jusqu’au centre de la base sans se faire repérer… Ou presque.

Car on ne saurait attendre d’une nouvelle mettant en scène l’Adeptus Assassinorum que tout se déroule sans accroc, ce qui ne serait pas très intéressant. Sycorax devra donc se prendre le bec avec une volée de Pteraxii télécommandés par Quavarian, se glisser comme un serpent (merci la polymorphine) jusqu’au lieu de stockage des banques de données du Magos, puis dégommer la garde rapprochée de ce dernier, avant de pouvoir se confronter à sa Némésis. Conformément à l’image d’Epinal du hacker, Quavarian se révèle être un petit gros complexé à l’hygiène douteuse, se croyant plus malin que tout le monde mais incapable de se douter que Sycorax avait anticipé sa potentielle capture, et avait donc paramétré son spambot avec des contre mesures. Dans une redite C++ de l’arroseur arrosé, Quavarian se mange ainsi à son tour un malware carabiné dans la carte-mère, ce qui lui est fatal. Même une tentative éteignage/rallumage ne pourra rien faire pour lui, c’est dire.

La nouvelle se termine, trois mois après les faits relatés plus haut3, par la visite d’un individu anonyme (merci NordVPN !) dans les ruines de l’installation de Quavarian. Guidé par le doigt obligeamment tendu par le cadavre du Magos, l’inconnu trekke jusqu’à une caverne où était conservée une version récente du Conqueror_Wyrm, démontrant une fois encore de l’intérêt de faire des sauvegardes régulières de son travail. L’Imperium n’est donc pas sauvé de la menace cyber, mais ceci est une autre histoire…

1 : Et au moins deux fois de suite, car comme on le sait bien, on n’insère jamais de cable USB dans le bon sens du premier coup.
2 : Fun fact, on apprend que Quavarian a dû interrompre ses premières recherches à cause des effets délétères du réchauffement climatique (très mauvais pour la surchauffe des banques de données). Le risque physique dans toute sa splendeur.
3 : On ne sait pas comment Sycorax termine la nouvelle, même si on peut supposer qu’iel s’en sort. Avec un nom pareil, j’espère qu’elle a rejoint sa navette en ski. Sur un malentendu…

AVIS :

Robert Rath poursuit sur sa lancée assassine en donnant des nouvelles de la Callidus Sycorax, que l’on avait déjà croisé dans ‘Divine Sanction’. Comme dans ce précédent court format, le lecteur a la nette impression d’un arc narratif beaucoup plus large (souligné ici par la conclusion très ouverte du récit), et je suis prêt à parier que la BL a passé commande d’un roman centré sur cette faction et ce personnage (mais peut-être également celui d’Absolom Raithe, le Vindicare de ‘Iron Sight’) à Rath. Dans l’attente de cette (probable) sortie, nous devrons nous contenter d’une nouvelle encore une fois bien maîtrisée par son auteur, tant sur les aspects narratif que fluffique. On peut ainsi apprécier le changement de perspective qui est opéré par Rath au premier tiers du récit, la caméra passant de Vaal à Slavigor/Sycorax de manière fluide et intéressante, tout comme l’utilisation pertinente et inventive par Rath des particularités de l’école Callidus dans le déroulé des péripéties (la partie de Snake de Sycorax à travers les canalisations de la base est particulièrement bien trouvée). Il se pourrait même que la description de l’opération subie par l’Assassin en préparation de sa mission soit un discret clin d’œil au texte de fiction de référence en matière de calliduseries (‘The Alien Beast Within’ d’Ian Watson), ce qui ne serait pas étonnant de la part d’un contributeur aussi féru de fluff que Rath, et ferait office de fan service de très haut niveau de la part de ce dernier. Quoi qu’il en soit, ‘Live Wire’ est un nouveau succès à mettre au crédit de M. Rath, que les Seigneurs de Terra devraient suivre de près

Les Réprouvés // Nightbleed – P. Fehervari :

NightbleedINTRIGUE :

Les journées de Chel Jarrow, medicae disgraciée et névrosée de Sarastus, sont hantées par un cauchemar récurrent dans lequel elle se revoit faire l’erreur qui lui a coûté sa carrière, ainsi que la vie d’une de ses patientes. Epuisée par un enchaînement de gardes, elle a en effet confondu un Death Guard « XIV » avec un Son of Horus « XVI » et injecté de l’eau de javel à une malade du COVID-19K, ou une joyeuseté de cet ordre, ce qui ne pouvait pas bien se terminer. Renvoyée par son employeur, elle enchaîne depuis les petits boulots minables, le dernier en date consistant à servir de technicienne de laboratoire dans une usine agroalimentaire. Affectée à des cycles nocturnes pour ne pas entraver la production, Chel passe ses journées à dormir et ses soirées à éviter son mari Lyle, dont elle ne supporte plus la petitesse et la servilité1. Une bonne crise de la quarantaine comme on les aime, en somme.

Alors qu’elle prend le chemin du turbin, elle remarque en attendant que l’ascenseur monte (131ème étage, tout de même) que de nouveaux tags ont fait leur apparition sur les murs de son couloir. L’un d’eux représente l’homme aiguille (Needleman), une sorte de croquemitaine local vivant dans les ténèbres et cherchant sans relâche à saboter les dômes abritant les cités ruches de Sarastus pour permettre à la Nuit Véritable de régner sans partage sur la planète. Le trouillomètre commence à s’affoler lorsque Chel entend des bruits suspects dans l’obscurité du couloir, hors de portée de sa fidèle lampe torche. Ou plutôt, aurait dû s’affoler car notre héroïne n’éprouve pas le moindre émoi à la pensée qu’un prédateur la guette peut-être depuis les ténèbres. C’est l’avantage d’avoir une vie vraiment pourrie : on voit toujours le bon côté des choses. Ceci dit, il ne se passera rien de bien méchant avant que l’ascenseur ne finisse enfin par arriver, et emmène Chel jusqu’au rez de chaussée de la tour Barka.

Il est temps pour nous de faire la connaissance de notre second personnage principal, un jeune à problème s’étant rebaptisé Screech (cri perçant en français) après avoir entendu sa mère pousser un hurlement inhumain lorsqu’il lui a crevé les yeux à l’aide d’une fourchette. Il venait de tuer son père de la même façon, et avait 14 ans à l’époque des faits. Voilà voilà. Obsédé par le mythe de l’homme aiguille, qui l’a fait basculer dans la folie homicidaire, Screech est devenu un grapheur marginal, laissant des messages aussi inquiétants que mal orthographiés2 sur les murs de la cité. En plus de cela, il lui arrive d’enfiler son cosplay de Needleman pour aller trucider du prolo au gré de ses envies. Cette nuit lui semble d’ailleurs propice à un nouveau crime, et alors qu’il erre dans la cité à la recherche de la bonne cible, son chemin finit par croiser celui de Chel, qui a pris place dans son TER habituel pour aller bosser. Pas de doute possible pour Screech, c’est elle que le destin a choisi pour rapprocher Sarastus de la Nuit Véritable, un meurtre sanguinaire à la fois.

De son côté, Chel, qui en a vu d’autres et se balade avec un taser dans la poche, sent bien que l’ado tatoué et crasseux qui s’est assis par terre en tête de wagon et l’épie sans en avoir l’air n’est pas animé d’intentions charitables envers sa personne. Une poussée de mauvaise humeur manque de la faire aller au clash contre son stalker (pas vraiment discret) à la sortie du train, mais ce dernier est trop perdu dans ses pensées (il a dû sniffer le reste de sa bombe de rose pour passer le temps) pour prendre la mouche. Laissant à sa victime un peu d’avance, il finit par la suivre jusqu’à l’usine où elle travaille, après avoir enfilé son habit de non-lumière : un masque de métal et les griffes de Freddie. Ainsi paré, il se sent possédé par l’esprit de Noël du Needleman, que l’on devine être un peu plus qu’un simple fantasme d’achluophobe. Et en effet, lorsque Screech se retrouve attaqué par un cyber molosse après être entré par effraction dans le périmètre de l’usine de Potton Vitapax, il ne doit son salut qu’à sa possession temporaire par son esprit totem, dont l’un des pouvoirs consiste à pouvoir tordre ses bras dans tous les sens, ce qui est pratique pour venir à bout d’un mastiff énergétique qui vous cloué au sol après vous avoir déchiqueté la cuisse. Mal en point mais toujours opérationnel, notre héraut reprend sa traque en traînant la jambe.

De son côté, Chel s’est remise à travailler sur le dernier échantillon qui lui a été remis, et dont elle suspecte la nature maléfique, ou en tout cas néfaste, sans pouvoir le prouver. Les tests du VLG-01 n’ont en effet rien détecté de suspect, mais la consistance de goudron pervers de la substance rend son utilisation dans des produits cuisinés, même pour des travailleurs de la caste Delta, impensable. En désespoir de cause, et prise d’une inspiration subite, Chel a résolu la veille d’ingérer un peu de cette mixture, ce qui a semble-t-il renforcé ses cauchemars. N’y tenant plus, et sans doute en manque, la technicienne décide d’aller visiter le lieu de stockage du VLG-01, convainquant pour ce faire un des gardes de nuit de la conduire jusqu’à l’entrepôt (forcément abandonné jusqu’il y a peu car il avait mauvaise réputation). Là, deux choses horribles se produisent coup sur coup. Premièrement, Chel sombre dans la folie et se sert une grande rasade d’élixir de noirceur à même la cuve (pochtronne !), ce qui ne lui fait pas du bien comme on peut s’en douter. Deuxièmement, Screech finit par la rattraper, après avoir égorgé le garde au passage, et s’apprête à lui jouer son grand classique : le concerto d’Edouard aux Mains d’Argent en Scie Mineure…

Début spoiler…Seulement voilà, le Needleman s’est trouvé un avatar plus méritant que ce petit péteux de taggeur, et Chel se fait un plaisir de corriger son agresseur d’un grand coup de taser dans la glotte, ce qui lui fait fondre la mâchoire et couler les yeux sur les joues, entre autres effets secondaires sympathiques. Ayant récupéré le masque de fonction de Screech sur son presque cadavre, Chel retourne à son laboratoire pour valider définitivement l’échantillon de VLG-01, qui pourra donc être distribué largement à la populace de Sarastus, avant d’embrasser définitivement son nouveau statut de femme de l’ombre. Première étape : son appartement de la tour Barka, où elle aura une petite discussion avec ce butor de Lyle à propos des radiateurs…Fin spoiler

1 : Et également sa froideur coupable, car monsieur refuse obstinément de monter le chauffage, quand bien même la température de leur HLM se rapproche sensiblement de zéro.
2 : Dernier chef d’œuvre en date de notre Banksy sociopathe « C 1 MENSSONJE » au Hello Kitty Pink. Sans point d’exclamation à la fin, car ce n’était pas nécessaire.

AVIS :

Comme on pouvait s’en doute, Peter Fehervari réussit sans problème son entrée dans la gamme Warhammer Horror avec ‘Nightbleed’, un petit concentré de noirceur (haha) à la sauce Dark Coil. Notons à ce propos que les références aux autres textes et arcs narratifs du Fehervariverse ne sont pas légions dans cette nouvelle (à moins qu’elles soient trop subtiles pour votre serviteur, ce qui est tout à fait possible), ce qui facilite sa compréhension pour le lecteur non familier de l’approche de l’auteur. Ceci dit, il n’est guère besoin de pousser loin l’analyse pour comprendre que ‘Nightbleed’ n’est pas un stand-alone, mais contient des éléments qui s(er)ont explicités ailleurs, à commencer par le sens des lettres « VLG », sur lequel Fehervari fait plancher son lecteur de façon très explicite1. Parmi les autres réussites indéniables de cette soumission, on peut citer la facilité déconcertante avec laquelle l’auteur arrive à « planter » son décor en quelques phrases, et à faire de Sarastus un monde impérial plus tangible et réel que bien des planètes auxquelles GW et la BL ont consacré des dizaines de pages (Necromunda ? Armaggedon ? Cadia ?), ce qui est la marque des vrais conteurs. De la même manière, Fehervari instille à son récit un véritable malaise (angoisse serait un peu fort), amplifié par les bribes de comptines qu’il met dans la bouche et dans l’esprit de Screech. Will you won’t you meet the Needleman ?

1 : À titre personnel, je penche pour un acronyme en haut gothique (latin donc) glorifiant les ténèbres/le Chaos, mais cela peut être chose. Je suis simplement à peu près sûr qu’il est possible pour un lecteur attentif de percer ce mystère à jour avec les indices que Fehervari a laissé ici et là…

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His Will – G. Haley :

His WillINTRIGUE :

Descente en rappel de l’épisode précédent, pour ceux qui avaient aqua-zumba ce jour là. Le Macragge’s Honour, vaisseau amiral des Ultramarines et véhicule de fonction de Roboute Guilliman a été capturé par les infâmes Red Corsairs alors qu’il ne faisait que vaquer à ses paisibles occupations. Parmi les membres de l’équipage passé au Chaos à l’insu de son plein gré, on trouve le Frater Mathieu, confident du Primarque et membre du saint ordre des Clochards Acronites. N’étant guère dans sa nature de se tourner les pouces en attendant qu’un stratagème salvateur se déclenche, Mathieu a résolu d’occuper sa clandestinité en célébrant des offices pour les matelots des ponts inférieurs, aidé en cela par le Frère Clydeus (porteur peureux) et le guide estropié Hiven. Malgré l’interdit qui frappe le culte de l’Empereur depuis que les Red Corsairs sont dans la place, et les patrouilles de gardes hérétiques qui sillonnent le Macragge’s Honour, le trio est parvenu à faire son office et à apporter un peu de réconfort moral et spirituel à ses paroissiens.

Alors qu’ils terminaient une messe donnée sous le regard bienveillant mais rendu torve par des lignes de moulage mal placée d’une statue en failcast de l’Empereur, Mathieu et Clydeus sont accostés par une jeune mère (Lyasona), très inquiète par l’état de son fils (Grent). Abandonnant le servo-crâne de Victor Hugo, Hubert Vedrine et/ou Horace Vernet dans sa mallette de transport, les deux hommes accompagnent la malheureuse jusqu’à sa coquette studette, transformée en chambre froide par les facéties du Warp. Comme on peut se l’imaginer, Grent s’est fait un nouvel ami imaginaire lorsque les fusibles de champs de Geller ont sauté, et le démon qui a pris possession du corps du garçonnet n’est pas disposé à vider les lieux. Saleté de squatteurs, décidément. Confiant dans sa capacité à réaliser un exorcisme en bonne et due forme, Mathieu demande à être conduit jusqu’à la chapelle impériale la plus proche, malgré le fait qu’elle ait été vandalisée par les renégats et reste surveillée par ces derniers.

N’écoutant que son courage et son statut de personnage apparaissant plus tard dans la série ‘Dark Imperium’, ce qui lui donne d’excellentes chances de survivre à l’aventure, Mathieu fait fi des conseils de prudence de son acolyte, et commence donc à invoquer son Grand Dieu pour chasser l’entité warpienne de son dernier lieu de villégiature. L’exorcisme suit à peu près le déroulé de la scène iconique du filme du même nom, jusqu’à ce que le démon décide qu’il en a assez entendu, se libère de ses liens et laisse libre cours à son imagination en termes de chirurgie plastique. On se dit alors que la procédure a échoué, et que Grent a passé l’â(r)me à gauche, mais que nenni : l’expérience de sa mort prochaine donne au froussard Clydeus un regain de piété, qui lui permet de couper la chique au démon assez longtemps pour que Mathieu et lui parviennent à le bannir une bonne fois pour toutes après une grande série de bourre-pifs karmiques.

Cerise sur le gâteau récompensant un enchaînement ayant été parfaitement exécuté, l’Empereur en personne apparaît pour s’en battre à l’arrière plan, et poser une main orgasmique sur l’épaule de son fidèle servant, qui tombe logiquement en pamoison. À Clydeus revient le lot de consolation, un peu pourri certes, de devenir martyr impérial en restant dans la chapelle pour permettre à Mathieu et à Grent de s’échapper. Mais il faut croire que Pépé a envoyé un clin d’œil langoureux au séminariste, car ce dernier accepte son sort avec un aplomb impressionnant et un entrain suspect. Notre histoire peut donc se terminer avec la remise du petit patient à sa mère éplorée, cependant que Mathieu devra désormais transporter tout seul son stuff dans les coursives du Macragge’s Honour, ou trouver une b/conne âme pour le faire à sa place. Le service de l’Empereur est sa propre récompense…

AVIS :

Guy Haley joue les prolongations du ‘Dark Imperium’ avec cette petite nouvelle venant s’intercaler entre les deux premiers romans de son arc (si j’ai bien tout suivi). Il va sans dire qu’avoir lu les œuvres en question permet de mieux comprendre, et donc apprécier ce ‘His Will’, mais le propos est suffisamment clair pour que même un novice puisse saisir de ce dont il retourne ici. Parmi les éléments intéressants de cette histoire, on peut retenir la destinée manifeste que Haley donne ou confirme à Frater Mathieu, qui a le privilège peu commun d’être approché par l’Empereur en personne. Le rapide panorama de la situation (presque) normale d’un équipage impérial de bas étage est également appréciable, et permet de réaliser que même sur le vaisseau amiral de Roboute Guilliman, les conditions de vie du serf moyen ne sont pas très Charlie. Le passage sur l’exorcisme permet à Haley de varier un peu le rythme de son récit en introduisant quelques paragraphes d’action, ce qui est une attention louable de sa part. Je nourris seulement quelques doutes sur la « réversibilité » physique d’une possession démoniaque, telle qu’elle nous est présentée ici. Grent se transforme en effet en Grishka Bogdanov l’espace d’un instant, avant de retourner à son état normal comme si de rien n’était. Ce point de détail mis à part, ‘His Will’ est donc une soumission égale à ce que l’on peut attendre de la part de Guy Haley (même si la touche humoristique de l’arc Cawl manque un peu) : solide et plaisante à lire.

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Repas de Famille // Family – D. Abnett :

Repas de FamilleINTRIGUE :

La bataille de Salvation’s Reach a été remportée, et les Fantômes de Gaunt sont de retour dans leur transport de troupes, en transit pour le prochain théâtre d’opérations. À la faveur d’une cantine blindée et d’un échange de regards, le Major Gol Kolea se retrouve à déjeuner en face de son fils, le Garde Dalin (surnommé Dal, en hommage au plat de lentilles) Criid.

Il faut évidemment préciser ici, si besoin était, que les deux hommes ont une histoire commune aussi fragmentaire que compliquée. Croyant que toute sa famille avait été tuée lors du siège de Vervunhive (‘Necropolis’), Kolea avait découvert fortuitement quelques temps après avoir rejoint les Tanith que ses enfants avaient été recueillis par la ganger Tona Criid (également engagée dans la Garde) et son partenaire Caffran. Ne voulant pas ruiner le bonheur de cette famille recomposée en faisant valoir son droit à la Garde, Kolea avait vu ses enfants grandir de loin, avant qu’une blessure de guerre ne le rende amnésique pendant quelques temps, puis qu’il guérisse grâce à ce que l’on peut appeler un miracle sabbatique. Au final, et pour autant que je puisse le dire, Dal a fini par découvrir le pot aux roses après avoir embrassé la carrière militaire, comme les trois quarts de ses parents. Sa petite sœur Yoncy n’a elle pas été mise dans la confidence, et considère toujours Kolea comme « Tonton Gol ». Cette mise au point effectuée, reprenons le cours de notre récit et de notre repas.

Après avoir échangé quelques banalités de circonstance sur le caractère détestable de la nourriture servie, Gol et Dal essaient de (re)trouver un peu de leur complicité père-fils, le premier acceptant l’invitation du second de venir dîner dans le studio familial, après avoir un peu rechigné. La soirée se passe bien, jusqu’à ce que Yoncy, dont l’âge est obtenu en faisant la somme de 2D6 à chaque round de joueur1, demande à Gol entre la poire et le fromage s’il est son père, comme elle a entendu beaucoup de Gardes le dire autour d’elle. Kolea sort alors sa meilleure poker face pour lui répondre qu’ils n’ont aucun lien de parenté, et la gamine enchaine en allant lui chercher le bôdéssain qu’elle lui a fait avec ses craies colorées. Conclusion : c’est très moche, passablement confus et empeste le pouvoir psychique latent, car les « ombres méchantes » qui sont dessinées fortuitement, ça vaut tous les jours un bolt dans la tête si un Inquisiteur passe dans le coin.

Ce mystère restera cependant entier, tout comme celui entourant le fils (caché ?) de Gaunt, un certain Felyx Meritous Chass, auquel Dal a été affecté comme escorte, brièvement évoqué autour de la table. Gol repart le ventre plein, le cœur gonflé et les yeux humides, ce qui n’est jamais bon signe quand on est un personnage d’Abnett. Mais pas de spoil.

1 : Sans rigoler, Criid soutient que dans six mois, elle fera tourner la tête à tous les Gardes, alors qu’elle parle comme une enfant de sept ans et dessine comme une de trois. À moins que les Tanith ait des canons de beauté franchement dérangeants, je m’explique assez mal cette « incohérence ».

AVIS :

Au moment où j’écris cette chronique, ma connaissance de la série des Fantômes de Gaunt se termine à la fin de l’arc ‘The Lost’, ce qui laisse un vide conséquent entre la fin de cet arc et les événements relatés dans ce ‘Family’. Abnett étant à la baguette, le briefing ou la mise à niveau des lecteurs n’étant pas totalement au fait de l’intrigue se fait de façon efficace et sans accroc, même si j’éprouve quelques doutes sur la valeur ajoutée de cette nouvelle si on ne s’intéresse pas aux relations compliquées de la famille Kolea-Criid, et en particulier au personnage de Yoncy, dont l’étrangeté se trouve au cœur de ce qui tient à la fois du fan service (enfin une réunion entre Gol et ses marmots, après des centaines pages de rendez-vous manqués) et de la scène coupée. Il faut également souligner que si l’auteur se veut pédagogue, il n’est pas non plus totalement newbie-friendly, puisque certains événements et personnages sont évoqués de façon cryptique pour le non initié, et la mort de deux personnages secondaires importants de la série (trois si on compte C.) est rappelée au détour d’un paragraphe. Comme la plupart des nouvelles des Fantômes de Gaunt, il est donc conseillé de lire ‘Family’ dans la suite logique de la série, c’est-à-dire après ‘Salvation’s Reach’, et pas avant.

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The Lightning Hall – G. McNeill :

INTRIGUE :

The Lightning HallRescapés de la Maison Taranis, dont l’indéfectible loyauté à l’Empereur a scellé le destin lorsque Mars a eu sa poussée indépendantiste, les chevaliers Raf Maven et Leopold Cronus ont passé les années suivant le schisme martien à trekker dans le désert de la planète rouge, rendant de menus services aux loyalistes et mettant de menus bâtons dans les rouages de Kelbor Hal lorsque l’occasion se présentait. Persuadés d’être les seuls survivants de leur chapitre, et habités par la honte de n’avoir pas été présents aux côtés de leurs frères et sœurs d’armes pour défendre leur forteresse, Raf et Leopold ont le moral dans les chaussettes1 et leur condition de fugitifs limite de façon drastique l’entretien de leur monture (et leur réserve d’antiseptiques), ce qui commence à être problématique. Lorsque l’esprit de la machine décide de partir chasser le dahut à la moindre perturbation du champ electromagnétique, les journées sont longues et les maux de crânes fréquents. Ceci dit, l’espoir demeure pour nos personnages, puisqu’ils ont capté une transmission radio leur donnant rendez-vous dans les ruines de leur ancien bastion. Presque totalement convaincus qu’il ne s’agit pas d’un piège, Rohff et Leo se rendent sur place, et posent enfin les senseurs sur le théâtre du dernier carré de leur chapitre.

Profitant de la hauteur sous plafond de la forteresse, nos héros n’ont pas besoin de laisser leur monture au parking et peuvent progresser sans problème jusqu’au hall de la foudre (Lightning Hall), lieu de rassemblement et de beuverie des Taranis depuis des temps immémoriaux. C’est notamment ici que le vieux seigneur Verticorda se plaisait à raconter sa rencontre avec l’Empereur, pendant le temps de l’Unification2, un souvenir qui ne va pas sans arracher une larme d’huile à ce gros fragile de Raf. Guidé par l’intuition et/ou le GPS embarqué de son Chevalier, le rétif et imprévisible Equitos Bellum, les deux rescapés sont confrontés à une scène d’horreur, le seul étant constellé de rebuts de machineries et de cadavres entremelés. C’est là la marque de l’infâmie réservée par Kerbor Hal à ceux qui ont osé lui résister, mais également un piège pas du tout évident dans lequel Raf et Leopold viennent de tomber…

Début spoiler…Car le Mechanicum Noir avait laissé des gardiens sur les lieux du crime. D’abord une horde de quelques centaines de Serviteurs corrompus et corrodés, représentant à peu près autant de danger pour les Chevaliers qu’une vague de hamsters pour un Space Marine. La suite est un peu plus relevée, sous la forme de six machines de tourment (Woe Machine) insectoïdes, qui tombent sur le châssis des Gundams loyalistes comme la vérole sur le bas clergé de Slaanesh. Poussés dans ses derniers retranchements, Raf est contraint à l’ultime sacrifice : faire surcharger son réacteur utiliser un cheat code, qui permet à l’esprit de la machine d’Equitos Bellum de prendre les commandes du Chevalier, et de poutrer la gu*ule des nuisibles en l’espace de 3 secondes. McNeill nous glisse dans l’oreillette que c’est une pratique proscrite par les gens comme il faut, et Raf douille salement lors du passage en pilote automatique, mais c’est tout de même con que personne ne se soit rendu compte qu’il était beaucoup plus efficace de combattre de cette façon que de laisser un clampin avec un permis poids lourd faire mumuse dans le cockpit. On en apprend tous les jours.

La partie n’est toutefois pas encore gagnée pour les Chevaliers, puisque la dernière machine de tourment est en train d’enlacer la carlingue de Leopold, et que Raf tire maintenant trop la jambe pour lui être d’une quelconque utilité. Heureusement, avant que l’infâme bestiole puisse mettre la langue, les portes de Fort le Cor s’ouvrent et un eored de Rohirrims menés par Aragorn tombe sur les arrières de l’ennemi. Ou quelque chose comme ça. Il s’agit en fait des survivants de la Maison Taranis, retranchés dans l’arrière-salle du Hall de la Foudre depuis des lustres, et qui sont venus secourir leurs visiteurs. Ce sont évidemment eux qui ont envoyé le message que Raf et Leopold ont reçu, à la demand expresse du Seigneur Caturix, laissé invalide à 93% lors du siège de la forteresse, et à la recherche d’un successeur digne de lui avant que la mort ne vienne. Avec l’arrivée des deux gusses susnommés, c’est maintenant chose faite : il leur reviendra de mener les reliquats de la Maison Taranis vers une grandeur retrouvée. Spoiler alert : ils y arriveront.Fin spoiler 

1 : Soit à 3 mètres au dessus du planche des servovaches pour un Chevalier impérial, donc tout de même assez haut.
2 : Une fois l’anecdote racontée, Verticorda passait ensuite à un strip tease intégral pendant que l’assistance chantait le générique de Bioman, mais McNeill a bizarrement choisi de couper le flashback avant ce point d’orgue.

AVIS :

McNeill boucle la boucle d’un arc mineur de ‘Mechanicus’ avec ‘The Lightning Hall’, qui permet de retrouver Raf Maven et Leopold Cronus dans leurs œuvres. S’il est tout à fait possible de lire cette nouvelle sans être familier du roman dont elle sert de chapitre supplémentaire, il est évidemment préférable de connaître les grandes lignes du bouquin en question et de ses personnages principaux (dont Dalia Cythera et ses yeux dorés), qui seront évoqués par l’auteur sans véritable mise en contexte. L’histoire en elle-même n’est guère compliquée ou complexe, puisqu’elle se décompose en une phase de randonnée, et une phase de MMA, durant lesquelles les deux Chevaliers se contentent de faire leur devoir, sans plus.

J’ai simplement tiqué sur le « super pouvoir » utilisé par Raf pour se défaire de ses adversaires, dont le potentiel fluffique me semble un peu trop énorme pour être intégré de la sorte par McNeill dans son histoire. Il se peut que ce soit ma méconnaissance du fluff Chevaliers qui me joue des tours, cette faction ne m’ayant jamais beaucoup intéressé, mais savoir qu’il est possible de décupler l’efficacité de ces machines en leur laissant prendre le contrôle de leurs actions, sans autre effets secondaires qu’un peu (beaucoup) de douleur pour leur pilote1, pose logiquement la question du non-recours systématique à cette pratique. Quoi qu’il en soit, c’est une soumission potable, mais pas mémorable, que nous propose Graham McNeill ici, avec ce qui sera peut-être sa dernière nouvelle pour l’Hérésie d’Horus…

1 : Je m’attendais à ce que ce dernier ne puisse plus reprendre le dessus sur l’Esprit de la Machine, ce qui aurait justifié la non-utilisation de ce trick, mais ce n’est même pas le cas.

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Aberrations // Aberrant – C. Wraight :

AberrationsINTRIGUE :

Agusto Zidarov, Probator gras du bide, marié, un enfant, est mis sur un sale coup par un prêtre aussi influent qu’extrémiste, Yvgen Asparev. L’Ecclésiaste a en effet eut vent par son réseau de fidèles de la présence d’individus peu amènes, et probablement un peu mutés sur les bords, dans une zone industrielle d’Urgeyena. Bien que moins chaud que son indic’, qui lui brûle littéralement d’impatience, d’aller à la chasse aux mutants dans les bas-fonds de Varangantua, Zidarov se rend sur place pour faire sa contre-enquête, obtenant la confirmation de la part des témoins identifiés par Asparev que quelque chose de pas très impérial se trame dans l’entrepôt proche de la gare locale. À la nuit tombée, notre héros se glisse discrètement à l’intérieur du bâtiment en question, et ne met pas longtemps à tomber sur le « dortoir » de travailleurs détachés d’un genre un peu particulier. Très grands, très costauds, avec une peau diaphane, des yeux noirs et trois slips à se partager pour deux cents individus, les humanoïdes enchaînés dans le sous sol du site industriel répondent parfaitement au cahier des charges de l’abhumain de contrebande, venant voler les emplois et le slab des honnêtes Alectiens.

Cette découverte ethnologique majeure ne peut toutefois être reportée aux autorités compétentes et/ou incandescentes, car Zidarov se fait surprendre par une bande de gorilles bourrés de stimms, qui se montrent assez peu impressionnés par son badge d’office. Il faut l’intervention salvatrice de la directrice de l’usine, Alissya Gordova, pour empêcher que le Probator n’aille rejoindre le panier à salade de l’Empereur. Cette dernière explique posément à son « invité » que les opérations du site sont placées sous la protection et la direction du vladar Aista Fyodor Meleta, qui, en sa qualité de sous-gouverneur planétaire, se contrefiche royalement de l’avis et des principes d’un flicaillon comme Zidarov. Reconduit sans ménagement à l’entrée, avec ordre de ne pas revenir de sitôt, notre héros s’exécute de bonne grâce, et parvient à poser un mouchard sur un véhicule de transport qu’il devine justement servir à l’acheminement de la main d’œuvre spécialisée qui trime dans les profondeurs.

Cette intuition le mène jusque dans la juridiction voisine de Korsk, sur les traces du semi-remorque en question, qui se gare au milieu de la pampa pour réceptionner une cargaison livrée par une navette spatiale banalisée. Le doute n’est à ce stade plus permis, mais Zidarov fait du zèle en rendant une visite de courtoisie au gros lard ayant supervisé l’opération dans la cabane minable qu’il occupe à proximité du site d’atterrissage clandestin, une fois le convoi reparti. Ayant menotté et bâillonné son hôte pour pouvoir explorer sa piaule en paix, Zidarov a la surprise et l’horreur de découvrir une femelle de la race des abhumains entraperçus dans l’usine d’Urgeyena attachée sur un lit. Gras double est en effet un petit pervers, qui aime jouer du fouet pour se sentir puissant (ce qui est somme toute moins dégoûtant que d’autres explications à cette situation particulière). Dilemme profond pour notre héros, qui ne sait pas trop s’il doit tuer la mutante de sang-froid, ou la libérer de son tortionnaire. Pris de doute, il commence à dialoguer avec la grande godiche, et se rend vite compte qu’elle est plutôt à plaindre qu’à exterminer. En définitive, il décide de la remettre en liberté, scellant du même coup le sort de l’Indiana Jones en surpoids qui se dandine sur la moquette de la pièce d’à côté, et donnant à la rescapée les informations nécessaires pour qu’elle puisse tenter d’aller libérer ses congénères de leur camp de travail.

La nouvelle se termine par la confrontation entre Zidarov et Asparev, durant laquelle on apprend qu’un regrettable accident s’est déclaré récemment dans l’usine du vladar, la réduisant en cendres et provoquant la mort d’une bonne partie de ses ouvriers. On n’a par contre pas trouvé trace du moindre mutant sur les lieux du drame, et d’ailleurs les Probators n’ont même pas été mandatés pour enquêter sur l’origine du sinistre, ce qui est assez bizarre quand on y réfléchit… Voire même aberrant.

AVIS :

Chris Wraight nous sert une nouvelle bien pensée (et mettant en scène son héros de Warhammer Crime, Agusto Zidarov, également au sommaire de ‘Bloodlines’), explorant le thème du rapport à la mutation – et donc à la différence – d’un Imperium dont la diversité intrinsèque devrait pousser à la tolérance sur le sujet, mais qui se complaît au contraire dans son obscurantisme. Dans les ténèbres d’un lointain futur, on n’est pas à un paradoxe près. S’il n’a pas été le premier à exploiter cette ficelle (je pense en particulier à Barrington J. Bayley et à son ‘Children of the Emperor’ et à Gav Thorpe avec ‘Suffer Not the Unclean to Live’), Wraight est un des rares auteurs contemporains de la BL à remettre l’idée au goût du jour, y ajoutant de façon (à mon avis) délibérée et pertinente des similitudes avec la situation des migrants fuyant la misère et la guerre de leurs pays pour finir exploités en Europe ou aux Etats-Unis. La réalisation de Zidarov que les êtres qu’il considère comme des animaux sont en fait des humains, au même titre, voire davantage, que lui et ses concitoyens de Varangantua, pourrait amener le lecteur à réfléchir à son tour sur la gestion actuelle de la crise migratoire, si le cœur lui en dit. C’est en tout cas l’un des textes les plus actuels et « réalistes » publiés par la Black Library depuis un bout de temps, et il mérite à ce titre largement la lecture.

Autre point fort de cet ‘Aberrant’, la réussite de Wraight au moment de dépeindre son héros comme un individu moralement ambigu, et loin d’être exemplaire. Les protagonistes de l’anthologie ‘No Good Men’ ont en effet tendance à avoir plutôt un bon fond, malgré leurs tendances auto-destructrices/associales, alors que Zidarov est, lui, objectivement compromis. La difficile décision qu’il prend de libérer celle qui est, selon toute évidence, une victime d’une exploitation sans vergogne de la part de Varangantua au sens strict, et de l’Imperium au sens large, fait de ce personnage une véritable incarnation des « types pas bien » que nous promet le titre du recueil. À côté de cela, le fait que Zidarov ne soit pas le flic/détective privé solitaire et alcoolique qui revient avec d’infimes variantes dans les autres nouvelles de l’ouvrage, mais un citoyen assez normal, intégré, rationnel et avec une famille, renforce encore la ligne de faille entre ce qu’il apparaît être et ce qu’il faillit devenir. Bref, si le suspens n’est ici pas au rendez-vous, cette nouvelle a bien d’autres qualités à mettre en avant, et est sans doute l’un des premiers classiques de Warhammer Crime.

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Et voilà qui termine cette double revue du Calendrier de l’Avent 2020 de la Black Library. À titre personnel, j’aurais préféré n’avoir que des nouvelles inédites pendant 24 jours, mais l’ajout d’une VF cette année fait de cette itération l’une des plus réussies de la BL depuis le début de l’exercice. Comme pour tous les recueils, les histoires proposées ne sont pas d’un niveau uniforme (cela doit sans doute se percevoir à la lecture des chroniques), mais (re)découvrir un court format chaque jour donne à ce calendrier une fraîcheur indéniable, et rend le tout plus ludique et digeste qu’il ne l’aurait été lu d’un bloc.

Si ne nous recroisons pas ici avant 2021, ce qui est franchement probable, je profite de cette conclusion pour vous souhaiter une excellente nouvelle année, que j’espère être un peu moins favorable à la lecture que 2020. Cela ne devrait pas nous empêcher de continuer à parcourir les mondes merveilleux de la GW Fiction ceci dit! See ya, punks.