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LUPERCAL’S WAR [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette chronique de ‘Lupercal’s War’, le premier recueil de nouvelles introductif pour la franchise Hérésie d’Horus publié par la Black Library. Ce n’était sans doute qu’une question de temps avant que Nottingham franchisse le Rubicon litteris et adapte à son troisième univers majeur un format qui a déjà été testé et re-testé pour 40K (‘Crusade & Other Stories’, ‘Nexus & Other Stories1) et Age of Sigmar (‘Hammerhal & Other Stories’, ‘Sacrosanct & Other Stories2), voire les deux (‘The Hammer & the Eagle3), avec des résultats assez probants je dois dire. Cependant, l’Hérésie ne se prête sans doute pas un décalquage bête et méchant (comme l’Empereur, quoi) du concept, du fait de ses particularités.

Lupercal's War

Contrairement à 40K et AoS, le 30ème millénaire suit un narratif précis (même si très fouillé et foisonnant), qui oblige le lecteur à ingurgiter des pages et des pages de fluff pour chacun des personnages et factions majeurs de la franchise pour pouvoir comprendre ce dont il en retourne lors des derniers événements de la série. Parvenir à donner à un lecteur non-familier à cet univers les bases historiques, culturelles et idéologiques pour chacune des 18 Legiones Astartes + Pépé (l’approche choisie par la Black Library), par le biais d’une (deux pour les chanceuses) seule nouvelle, est loin d’être facile.  Format introductif – et prix très réduit – oblige, les éditeurs de cet imposant volume se sont également astreints de n’utiliser que des travaux déjà publiés pour remplir leur sommaire, ce qui rajoute une nouvelle contrainte. Le défi que ce ‘Lupercal’s War’ doit relever est donc beaucoup plus important que celui de ses prédécesseurs, à mon humble avis.

Comme pour tous les recueils de cette gamme, j’élargirai donc mon approche critique à une nouvelle dimension : le caractère approprié de la.es nouvelle.s choisie.s par les pontes de la BL pour présenter chacune des factions abordées ici4. Le cas échéant, je ne me priverai pas pour mettre en avant l’histoire qui me semblait faire mieux l’affaire, à mon petit niveau. Le cadre étant posé, il est temps de passer à l’autopsie de cet ambitieux pavé (le petit nom donné par Valdor à Horus avant que tout parte en cacahouète). Start here ⬇️, comme ils disent.

1 : Chroniqués ici et , si ça vous intéresse.
2 : Ici et .
3 : Ici.
4 : J’en profite pour me plaindre de l’absence dans ‘Lupercal’s War’ de protagonistes majeurs, qui auraient pourtant mérité un tel traitement : l’Adeptus Custodes, les Sœurs du Silence,  l’Adeptus Mechanicus, les Légions Titaniques, l’Armée Impériale et les Chevaliers Errants.

Lupercal's War

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L’Empereur – The Last Church (G. McNeill) :

INTRIGUE:

The Last ChurchIl n’est pas loin de minuit dans l’Église de la Pierre Foudroyée, comme le constate le Père Uriah Olathaire en allumant les cierges du saint lieu. Un seul coup d’œil au coucou suisse cassé qu’il a volé à son propriétaire légitime lors de sa folle jeunesse suffit à notre héros pour se rendre compte que l’heure est grave, très précisément minuit moins deux sur l’horloge de l’apocalypse. Lorsqu’elle se mettra à sonner, l’a prévenu l’horloger auquel il a dérobé l’artefact, cela chauffera dans les chaumières. En attendant, Olathaire se prépare à célébrer la messe de minuit dans une profonde solitude, aucune de ses ouailles n’ayant jugé bon de braver la tempête sévissant cette nuit là pour monter au sommet du Ben Nevis1 assister au sermon de notre ecclésiastique. Plus que sur les conditions climatiques ou le dénivelé, il faut mettre cette désertion sur le compte des commandements laïques édictés par ce soi-disant Empereur, ayant conquis presque tout Terra pour y imposer son joug athée. Résolu à accomplir tout de même son office, Uriah est interrompu par l’arrivée d’un visiteur, se présentant sous le nom de Révélation, et venu avec quelques amis patientant tranquillement sur le parvis, discuter avec le prêtre de la dernière église terrane avant que cette dernière ne soit réduite en cendres. Du tourisme de l’apocalypse en quelque sorte…

Début spoiler 1…Ravi d’avoir un peu de compagnie, Uriah engage la discussion avec l’intrigant voyageur, qui ne met pas longtemps à exprimer ses vues résolument séculières et rationnelles à son hôte. S’engage alors une joute enfiévrée voyant les deux hommes échanger leurs arguments sur les mérites et les dangers de la foi. Guère convaincu par l’exhibition de la pierre sacrée dont l’église tient son nom, Révélation se montre cependant disposé, après un petit whiskey, à écouter Uriah lui raconter le soi-disant miracle dont il a été témoin lors de sa jeunesse, et qui l’a poussé à endosser le surplis. Notre prêtre était de son propre aveu une canaille en son jeune temps, et s’était piqué de voyager à la recherche de contrées pas encore assujetties au règne de l’Empereur, qui avait à cette époque déjà conquis la majeure partie de l’Europe. N’ayant réussi à rien d’autre qu’à se faire jeter d’une falaise italienne par un Guerrier Tonnerre dont il avait traité la maman de gorille, l’infernal Écossais était revenu chez lui pour un temps, avant de repartir pour se faire soldat dans toute armée de résistance à la tyrannie impériale qui voudrait bien le prendre. Et, comme de juste, il avait trouvé avec qui parler en se rendant en France (Franc dans le texte), un Etat connu dans le monde entier pour la belligérance de ses habitants. C’est ainsi qu’il s’était retrouvé mêlé à un soulèvement local, vite écrasé dans le sang par la patrouille de Guerriers Tonnerre de la région. Seul survivant du massacre, Uriah avait repris connaissance dans une forêt et vu une figure lumineuse s’approcher de lui pour tenir à peu près ce langage : « Yo dog, we cool now ? ». Transporté par cette expérience extraordinaire, il avait abandonné sa vie de marginal pour obéir au commandement divin qu’il était certain d’avoir reçu dans cette clairière abandonnée.

Cette émouvante anecdote ne convainc cependant pas Révélation de baisser sa garde, et il continue à critiquer les ravages de la religion2 à travers l’histoire avec tant de hargne que le bon prêtre finit par lui montrer la porte. Comprenant qu’il a épuisé la patience de son hôte, le visiteur laisse alors tomber le masque et se révèle être…

Début spoiler 2…L’Empereur en personne. Sous sa forme néon de cabine d’UV, qui plus est. Il ne faut pas longtemps à Uriah pour réaliser que c’est lui qu’il a vu dans la forêt il y a toutes ces années, et qu’une mauvaise interprétation a conditionné toute sa vie jusqu’à ce moment. C’est la lose. Un peu hébété par cette…épiphanie, le prêtre accepte de suivre Pépé à l’extérieur de l’église, et d’enfin souscrire à sa vision du monde… jusqu’à ce que l’Empereur lui révèle son grand projet de conquête de la galaxie, à laquelle Uriah ne croit pas du tout. Et lorsque le puissant monarque répond à la question « pourquoi ? » par un pauvre « parske-euh », le charme est définitivement rompu. Uriah préfère donc retourner dans son église, incendiée par les Guerriers Tonnerre amenés en renfort par leur boss, plutôt que de donner la satisfaction d’une victoire morale à son contradicteur. Ainsi brûle la dernière église de Terra, au son prophétique du coucou de l’apocalypse…Fin spoiler

1 : Pure supposition de ma part, mais McNeill, qui s’est donné pour mission de vendre son Écosse natale dans l’univers de 40K, donne quelques indices supportant cette thèse.
2 : On apprend à cette occasion qu’au 30ème millénaire, les gens se souviennent encore de Béziers. C’est tout de même la classe.

AVIS:

Je ne sais pas si la GW-Fiction sera un jour considérée comme autre chose que de la littérature de gare (ou de spatioport, pour rester dans l’ambiance), mais je peux déjà m’avancer en plaçant ‘The Last Church’ parmi les « classiques » de ce sous-sous-sous-sous-genre. Car McNeill réussit ici à livrer un texte aussi surprenant qu’intéressant et profond (toute proportion gardée, bien entendu), et justifie ainsi son positionnement parmi les meilleurs contributeurs de la Black Library… quand il s’en donne les moyens1.

Cette nouvelle est surprenante, car elle est (presque) totalement non-violente, et place le lecteur dans une situation des plus inhabituelles pour la littérature millénariste de Games Workshop : foin d’héroïques Space Marines, de courageux soldats impériaux, d’inflexibles Inquisiteurs, ou de civils apeurés2 ici, seulement un vieux prêtre et son visiteur inattendu, dialoguant des mystères de la foi et des conséquences, aussi positives que négatives, que cette dernière a eu pour l’humanité depuis l’aube des temps. Si les arguments convoqués par les débatteurs ne sont pas à placer au pinacle de la réflexion philosophique ni au sommet de l’art oratoire, il faut tout de même reconnaître que McNeill réussit à faire passer cet échange de façon distrayante et parfois instructive pour le lecteur, ce qui n’était pas couru d’avance pour un auteur spécialisé dans l’art délicat du grimdark d’action. Autre surprise et prise de risque, à mes yeux concluante, de Graham McNeill, son utilisation du personnage le plus central et intouchable de l’univers de 40K, Pépé 1er. La véritable identité de Révélation sera comprise par le lecteur plus ou moins tôt dans la nouvelle, en fonction de sa connaissance du fluff et de son attention aux petits indices égrenés par McNeill, mais la véritable surprise demeure ce choix de mettre l’Empereur à hauteur d’homme le temps d’une nouvelle, et de le laisser s’exprimer assez longuement au cours de cette dernière, alors que la norme avait jusqu’ici été de cantonner MoM à l’élément de décor3, balançant de temps à autres une phrase d’une infinie sagesse pour le bénéfice du fanboy transi. Ici, ce dernier en aura vraiment pour son argent, et The Last Church constitue encore à ce jour l’un des textes où Big E est le plus disert, ce qui en fait un passage quasi obligé pour tout citoyen impérial qui se respecte.

Cette nouvelle est également intéressante, car elle couvre de nombreux aspects des Luttes d’Unification, sorte de préhistoire impériale pendant laquelle de nombreux événements ont été mis en branle qui trouveront leur conclusion dans les siècles et millénaires suivants. Qu’il s’agisse de détails géographiques, historiques ou personnels, l’éclairage apporté par les souvenirs du Père Olathaire est précieux pour le fluffiste acharné, ou simplement curieux d’en apprendre un peu plus sur la manière dont Pépé a enfin tapé du poing énergétique sur la table pour réaliser son rêve galactique. En matière de construction narrative, McNeill parvient également à tirer son épingle du jeu en maintenant du suspens jusqu’à la fin de son récit. Comment Olathaire va-t-il réagir à sa propre révélation, lorsqu’il comprendra que son miracle personnel, sur lequel sa foi s’appuie, n’était en fait qu’une rencontre furtive entre un survivant en état de choc et un Empereur parti faire un tour en forêt ? Tout se joue dans les dernières lignes de la nouvelle, faisant de cette dernière une des plus abouties de McNeill de ce point de vue.

Enfin, cette nouvelle est profonde, et confine parfois à l’ironie, à travers le discours tranché livré par Révélation sur la religion et ses méfaits. Quand on sait comment l’histoire se termine, ou en tout cas se poursuit après cet ultime incendie d’église par un païen à cheveux longs4, la laïcité militante de l’Empereur apparaît comme le plus gros You had ONE job de l’histoire de l’humanité, tout comme son horreur absolue de l’Inquisition… Encore plus intéressant est le renversement de situation opéré par McNeill dans les dernières pages de la nouvelle, lorsque le jusqu’ici très rationnel Empereur ne peut justifier son projet de conquérir la galaxie par un « je sais que j’ai raison » assez minable, qui vient ruiner tout son argumentaire nocturne, et pousse finalement son interlocuteur à demeurer fidèle à sa foi, et à prendre son congé en prévenant Révélation qu’il deviendra sûrement ce qu’il s’était juré de détruire. Warhammer 40.000 étant un univers reposant à bien des égards sur de profonds paradoxes, l’exposition d’un des plus centraux de ces derniers prouve, si besoin était, l’excellente compréhension que Graham McNeill a du cadre dans lequel il évolue. Cela peut certes sembler banal pour le lecteur, mais la BL a connu son lot de soumissions ratées à cause de connaissances trop légères de la part de ses contributeurs : il faut donc reconnaître un auteur « bien (in)formé » quand on en croise un. En définitive, The Last Church se positionne très sérieusement comme l’une des meilleures nouvelles signées McNeill de l’Hérésie d’Horus, et peut-être même de sa production totale pour le compte de la Black Library.

1 : Car il y a tout de même beaucoup de scories dans sa production, vous ne m’en ferez pas démordre.
2 : Probablement parce qu’ils ont tendance à tomber comme des mouches dès lors que les trois autres catégories de personnages sont présents.
3 : Du genre luminaire, si on doit en croire sa propension à générer des flashs aveuglants.
4 : C’était bien la peine d’exterminer les Scandinaves pour leur piquer leurs traditions ancestrales.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme dit ci-dessus, on est en présence d’un des textes les plus marquants et importants de l’Hérésie d’Horus, dans lequel l’Empereur est présenté sous son « meilleur » jour, d’un point de vue narratif. Malheureusement pour Lui, et pour nous, Pépé passera en effet la majorité de l’Hérésie à balancer des one liners plus ou moins profonds comme un PNJ donneur de quête, ce qui est un niveau d’implication un chouilla décevant pour un personnage à l’omniscience et l’omnipotence quasi établies. Ici, on le voit en majesté, si je puis dire, mais McNeill prend également soin de montrer que derrière la bienveillance apparente de son grand projet d’unité terrane et de conquête de la galaxie se cache une tendance absolutiste pas vraiment subtile, et un complexe de supériorité irrépressible (« t’es pas content? Bim, triplé autodafé. »), qui viennent tempérer l’image d’autocrate idéal qu’il cherche à se donner. Une très bonne addition à cette anthologie, donc.

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Dark Angels – Savage Weapons (A. Dembski-Bowden) :

INTRIGUE:

Savage WeaponsDébut de journée classique pour Corswain, Champion du 9ème Ordre (ce qui est mieux que champion de 9ème ordre, reconnaissons-le). Après avoir fait son rêve habituel, étrange et pénétrant, d’une bête bien connue qu’il n’arrive jamais à vaincre dans son état catatonique, bien qu’il porte la pelisse de ce prédateur de Caliban sur l’épaule, il est convoqué avec son supérieur, le balafré+++ Alajos, par le Primarque des Dark Angels, Lion El’Jonson en personne. Et comme d’habitude, le léonin surhomme se prend la tête pour essayer de déjouer les friponneries des Night Lords dans le sous-secteur de Thramas, sans succès concluant depuis deux ans1. Ce manque de progrès tape sur les nerfs de ce bon Lionel, qui se doute bien qu’il y a de plus gros poissons hérétiques à ferrer dans le reste de la galaxie. Malgré tout, le devoir chevillé au corps du Primarque le pousse à persévérer dans ce jeu du chat et de la chauve-souris, et même à accepter l’invitation, inattendue il faut le reconnaître, de Kurze de se rencontrer sur une planète paumée pour taper la discute, comme au bon vieux temps. Le Lion, qui a juste entendu « taper », est d’accord, malgré les remarques sensées de ses petits frères, qui soupçonnent logiquement un piège. Confiant dans sa bogossitude naturelle et son statut de personnage nommé, le patron des anges sombres fait fi des conseils de prudence, et part avec le 9ème Ordre comme escorte au rencard fixé par son frérot.

Arrivée à proximité du monde de Tsagualsa, où doivent se tenir les pourparlers, la flotte loyaliste est accueillie par l’opérateur radio le plus irrespectueux de la galaxie, le Premier Capitaine Sevatar des Night Lords. Entre deux punchlines désinvoltes, le hallebardier le plus tristement célèbre des Legiones Astartes informe ses interlocuteurs que le point de rendez-vous a été fixé dans le chantier de forteresse que les Night Lords sont en train de construire sur la planète. Une petite téléportation plus tard (malgré le fait que Corswain n’aime pas vraiment ça, mais tout le monde s’en fout et le Lion en premier), voilà Lionel rendu sur place avec ses deux gardes du corps, comme convenu par le gentlepostmen’s agreement fixé par les parties en présence. Il ne faut pas longtemps pour que Konrad, bronzé comme jamais, n’arrive à son tour, avec son gang: l’impayable Sevatar bien sûr, mais également un dénommé Shang, choisi sans doute pour respecter les quota de représentation des minorités.

Les retrouvailles entre les deux frangins sont glaciales, malgré les efforts déployés par Konrad pour briser la glace et raviver l’esprit de franche camaraderie entre les deux enfants sauvages de la fratrie… qui n’a sans doute jamais existé. Il convainc toutefois Lionel d’aller faire un petit tour en tête à tête, laissant les quatre Capitaines échanger quelques boutades de bon aloi. Sevatar, qui est responsable de la défiguration d’Alajos, ne se gène pas pour mettre évoquer ce sujet encore douloureux (surtout pour le principal intéressé, que l’on sent tout prêt à lancer la belle), mais le tact et l’érudition de Corswain, qui parle Nostraman comme une vache espagnole, c’est à dire relativement bien, font légèrement retomber la pression entre cousins. On apprend également l’origine des magnifiques gantelets rouges arborés par le Premier Capitaine des Night Lords, une marque d’infamie pas si différente des casques écarlates des Ultramarines censurés. Comme quoi, tout est dans tout, et inversement.

Ce plaisant badinage est toutefois interrompu par le retour des Primarques, toujours aussi fâchés l’un contre l’autre. Enfin, surtout Lionel, outré que l’on soupçonne la fidélité de la moitié de Légion qu’il a laissé pourrir sur Caliban, et qui profite de l’inattention de Konrad pour l’empaler avec son espadon de maître de deux mètres, un peu en traître tout de même. Ce qui aurait été une blessure mortelle pour n’importe qui n’a que l’effet d’une simple gifle pour Kurze, que ses capacités physiques de Primarque sauvent d’un trépas ignominieux. C’en est toutefois terminé des gentillesses, et le combat s’engage entre la team robe de bure et la team cheveux gras. Si le Lion a d’abord l’avantage grâce à ses talents d’escrimeur, la tentative de strangulation dont il est la victime de la part du Nighthaunter lui fait perdre un peu de sa superbe, et motive Corswain à voler au secours de son seigneur. Cela laisse le pauvre Alajos Alaramasse (son deuxième prénom) contre Shang et Sevatar, combat inéquitable dans lequel le Capitaine laisse bientôt sa tête, non sans avoir réussi à faire perdre la main au Night Lord pas important (je vous laisse deviner de qui il s’agit) auparavant.

L’intervention de Corswain, si elle permet au Lion d’éviter d’avaler sa neuroglotte, se passe assez mal pour le chevalier blanc et noir, dont la tentative de rodéo kurzien se termine assez rapidement, et dans la douleur. Malmené par son adversaire, et avec un taux d’invalidité en rapide progression, le Champion n’est sauvé que par le retour sur le ring de Lionel, qui a mis beaucoup de temps à se relever pour un Primarque2. Son paternel étant à nouveau occupé, notre héros est sur le point de finir en kebab sur la lame de Sevatar quand les renforts finissent enfin par arriver. Dark Lords et Night Angels déferlent par dizaines sur le champ de bataille, parviennent à séparer leurs patrons qui en étaient réduits au bras de fer chinois pour se départager, et repartent chacun de leur côté. Corswain regrette un peu d’avoir perdu son épée dans la mêlée, mais comme il l’a égarée dans le fessier d’un Primarque, il ne s’en formalise pas trop…

Notre nouvelle se conclut presque comme elle a commencé, Corswain arrivant enfin à (r)avoir la peau de la marmotte de Caliban qui lui faisait tant de misère dans ses rêves, avant d’être convoqué par son boss. Il est depuis devenu Capitaine du 9ème Ordre, en remplacement du pauvre Alajos, qui s’est bien frotté à plus fort que lui en la personne de Sevatar. Les nouvelles qui tombent sont toutefois un peu particulières, car Roboute Guilliman a envoyé un smiley à Lionel, qui ne pige rien aux émojis. Le message qui a suivi a cependant fait comprendre au Lion que son frère nourrissait lui aussi quelques pensées plus ou moins hérétiques, ou, tout du moins, sécessionnistes…

1 : Plus j’avance et plus tu recules, comment veux-tu que je t’accule?
2 : Peut-être essayait-il de solliciter l’arbitre de la rencontre pour demander la VAR sur l’étranglement des yeux bassement exécuté par Kurze. 

AVIS:

Aaron Dembski-Bowden débute dans l’hérétique carrière en terrain à moitié connu avec ce Savage Weapons, puisque celui qui était jusqu’ici principalement connu pour ses travaux Night Lords ne se gène pas pour mettre les fils de Nostramo au casting de son histoire. En plus de mettre en scène le Joker des Primarques (qui avait commencé par être Batman, c’est dire si les années ne lui ont pas été clémentes), ADB introduit également l’un de mes personnages préférés de la série, le caustique, cruel mais surtout charismatique Premier Capitaine Sevatar, qui parvient sans mal à voler la vedette au pauvre Corswain, sensé être le héros de l’histoire. En plus de balancer des répliques d’anthologie (et ça tombe bien pour un recueil de nouvelles) et de se foutre ouvertement de la gueule de Lionel par moment, Sev’ se révèle avoir une personnalité complexe et profonde, et absolument pas aussi dénuée d’honneur qu’il essaie de le faire croire. S’ajoute à cela son passif mystérieux de condamné à mort en sursis, qui en fait un paria en même temps que l’individu le plus influent de la Légion après son Primarque. Et pour ne rien gâcher, notre surhomme est un bretteur de talent, maniant une arme certes improbable, mais absolument classe, avec des effets dévastateurs. Bref, voilà une entrée réussie dans le grand bazar qu’est cette Hérésie!

‘Savage Weapons’ mérite également la lecture en raison des portraits intéressants qu’ADB fait des Primarques convoqués, à la fois radicalement opposés et étrangement similaires sur certains points. Usant des talents de divination de Kurze, l’auteur peut également balancer quelques clins d’œil sur le lointain futur, et commencer à détruire la réputation de loyaliste de Lion El’Jonson. De son côté, le chevaleresque Maître de la Première Légion exsude une aura paladine presque palpable… mais est tout de même celui qui frappe son frérot en traître au début de leur bataille de polochons1. Le natif de Caliban apparaît comme un être parfait et froid, jusqu’à la limite de la sociopathie, et c’est très bien comme ça. Après tout, on est pas dans le monde des Bisounours2. De bonnes bases donc pour ces personnages importants, mais pas centraux, de l’Hérésie, sur lesquelles les auteurs prenant la suite de la couverture médiatique de la Croisade de Thramas, et de l’arc de l’Imperium Secondus, purent capitaliser (ou pas)3.

Enfin, notons les effets de style assez intéressants intégrés par ADB à son histoire, avec une introduction et une conclusion construite en quasi-miroir, ce qui est une manière de souligner que les Dark Angels n’ont pas fini de courir le sous-secteur à la poursuite de leurs insaisissables Némésis. Un jour de la marmotte un peu spécial (et spatial) pour Corswain, en quelque sorte, qui a tout de même gagné au change à la fin de la nouvelle, en ayant reçu une belle promotion et avoir enfin remporté son match de catch onirique. Il faut savoir profiter des petits bonheurs de la vie…

1 : Je remarque que ce pauvre Lionel n’a pas de chance dans ses duels avec ses frangins. Qu’il s’agisse de Leman Russ ou de Konrad Kurze, à chaque fois ça se finit en grosse empoignade de pochtrons se balançant des patates de forains. C’était bien la peine de passer autant de temps à pratiquer l’escrime médiévale sur l’Invicible Reason, tiens. 
2 : Et pour cause, les Dark Angels les ont exterminés au cours de l’invasion de Caring, leur planète natale, au début de la Grande Croisade.
3 : On appréciera la référence faite à ‘The Lightning Tower’ dans le dialogue entre Konnie et Lionel, le premier ayant bien compris qu’il foutait les chocottes à ce planqué de Rogal Dorn, dont la peur du noir est la plus grande faiblesse. 

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Étrangement pour une Légion aussi importante dans le fluff du 30ème et du 40ème millénaire, les Dark Angels n’ont pas bénéficié d’une couverture très importante dans le corpus de nouvelles hérétiques, ce qui a limité les choix possibles au moment de construire ce recueil. ‘Savage Weapons‘, même si elle est au moins autant consacrée aux Night Lords qu’à leurs adversaires loyalistes, était une des meilleures alternatives possibles à mon avis, puisqu’elle permet au lecteur d’aborder quelques uns des thèmes les plus importants de l’importante Première Légion: la fidélité absolue de Lion El’Jonson envers son Pôpa, ses problèmes relationnels persistants (aussi bien avec ses parties prenantes internes et externes), son tempérament chevaleresque (jusqu’à un certain point), sa future implication dans l’Imperium Secundis, et évidemment la trahison prochaine des Déchus. Il ne manque à mon avis à ce tableau très convaincant que l’évocation du culte du secret chez les natifs de Caliban pour cocher toutes les cases du bingo Dark Angels. C’est donc validé de mon côté.

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Emperor’s Children – Imperfect (N. Kyme) :

INTRIGUE:

ImperfectNous surprenons une innocente partie de régicide entre les deux frangins les plus proches de la smala primarquielle : Horus et Sanguinius Fulgrim et Ferrus Manus. Entre deux mouvements savamment planifiés, les joueurs tapent la discute avec bonhommie. Enfin, c’est surtout le Phénicien qui mène la danse de ce côté, sa tendance à jacasser comme une pie tout en buvant du chardonnay et en prenant des poses alanguies semblant dissimuler un objectif plus profond que de faire tourner en bourrique la Gorgone. Les questions que Fulgrim adressent à son cher frère (Est-ce que tu te vois plutôt comme l’Empereur ou le Tétrarque ? Tu sais d’où vient le terme de régicide ? Quelle est la capitale du Lesotho ?) sont d’ailleurs assez spécieuses, pour ne pas dire borderline hérétiques…

Début spoiler…Lorsque Fulgrim finit par dévoiler son coup gagnant, appelé le jeu du traître, Ferrus finit par perdre son calme et rage quit comme la petite personne qu’il a toujours été. Déçu par la réaction de son frère, qu’il n’a pas réussi à rallier à sa cause comme il s’en était pourtant donné l’objectif, Fulgrim débranche l’éclairage tamisé qui baignait la scène et se révèle dans toute sa sinueuse et serpentine majesté. Ferrus, ou plutôt son clone, en reste bouche bée et finit empalé sur la queue du Primarque démon (en tout bien tout honneur, hein), qui pique une grosse colère devant l’hologramme de Fabius Bile patientant à l’arrière-plan.

L’Araignée a en effet une nouvelle fois échoué à produire une copie parfaite de la Gorgone (à sa décharge, il a dû travailler uniquement avec le sang séché qui restait sur la lame de l’épée de son boss), comme les vulgaires gantelets métalliques qui lui enserraient les mains le révélaient1. Heureusement, Bile est venu avec des stocks importants, et calme Fulgrim en lui envoyant la petite sœur, ou plutôt le petit frère dans ce cas précis. On quitte le boudoir du Primarque alors qu’un nouveau Ferrus Manus arrive pour débuter une partie avec son frérot préféré, sans voir le carnage absolu et le bordel monstre2 qui règne dans la pénombre renouvelée (les clones de Buffalo Bile ont la vue basse on dirait).

De son côté, l’Apothicaire dévoyé retourne à ses chères et chairs études, et la nouvelle se termine avec une petite visite de son laboratoire secret, caché au plus profond du Pride of the Emperor. Fidèle à sa réputation de bourreau de travail, l’Araignée ne s’est pas contentée de produire des quantités industrielles de Ferrus Manus pour flatter l’ego démesuré de son patron, mais a également planché sur d’autres modèles primarquiels, avec plus ou moins de succès il faut dire (son Sanguinius est assez raté). Son chef d’œuvre est un bébé Horus, reconnaissable à la tache de naissance cthonienne (un manbun ?) qu’il arbore sur la fesse. Ce pauvre petit être ne se doute pas de la vie de m*rde qu’il aura bientôt à affronter…Fin spoiler

1 : Ça montre surtout que Fulgrim ne comprend rien à la génétique.
2 : Vous pensez vraiment que Fulgrim est du genre à ramasser les pièces et à les reposer sur la table ? Je suis 100% convaincu qu’il a fait installer 40 plateaux de régicide dans la pièce pour s’éviter cette infamie.

AVIS:

Quelques années avant le (très bon) ‘The Board is Set’ de Gav Thorpe, Nick Kyme a exploré le parallèle entre jeu de plateau et hérésie à travers ce sympathique ‘Imperfect’, dont le retournement final est assez bien amené je dois dire. En bonus, on en apprend plus sur les relations qui unissaient Fulgrim et Ferrus Manus du temps où ils pouvaient se voir tête à tête (mouahaha), ce qui est toujours bon à prendre pour les fluffistes acharnés. Une nouvelle de qualité à mettre au crédit de Kyme.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Malgré ses qualités intrinsèques, ‘Imperfect’ est à mes yeux une erreur de casting retentissante de la part de la Black Library, puisqu’elle traite de Fulgrim (et de Ferrus Manus) au lieu de nous éclairer sur les Emperor’s Children. On pourrait arguer que c’est finalement assez fluff que le Primarque avec l’ego le plus KOLOSSAL1 vienne s’arroger la nouvelle qui aurait dû présenter sa Légion, mais cette dernière méritait mieux. Je pense notamment à ‘Chirurgeon’ (toujours signée Nick Kyme), qui met à nouveau en vedette ce vieux Fabius Bile et lève le voile sur l’affliction dégénérative qui a faillit faire disparaître les Emperor’s Children. A mon sens, c’est cet événement qui permet de comprendre pourquoi la 3ème Légion est tellement obsédée par la recherche de la perfection (un trait de personnalité qui la mènera à sa chute), et il aurait donc été judicieux de la part de la BL d’intégrer cette nouvelle au sommaire de ‘Lupercal’s War’.

1 : Je suis persuadé qu’il a reçu une queue de serpent lors de son apothéose afin de se débarrasser des disgracieuses chevilles d’éléphant qu’il avait développées pendant sa vie mortelle.

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Iron Warriors – The Iron Within (R. Sanders) :

INTRIGUE:

The Iron Within‘The Iron Within’ permet à Sanders de mettre sous les feux de la rampe un Iron Warrior ayant choisi de se battre dans le sens de l’histoire, le Warsmith Barabas Dantioch. Il reste en ceci fidèle au portrait en clair obscur qu’il avait dressé de son dernier héros Marine (Elias « le Codex Astartes est formel sur ce point » Artegall, Maître du Chapitre des Crimson Consuls1), préférant s’attarder sur les faiblesses de son personnage pour le caractériser plutôt que sur ses forces, logique tout à fait défendable quand on parle de surhommes génétiquement supérieurs en tous points au reste de l’humanité.

La tare de Barabas, qui lui attache la sympathie du lecteur, n’est cette fois pas d’ordre psychologique, mais physique, puisque le Warsmith est le premier Marine atteint de mucoviscidose (et pas qu’un peu) de l’histoire de la Black Library. Évidemment, cette affliction découle d’une glorieuse campagne contre les Hruds, apparemment capable de réduire en grabataires même les meilleurs de l’Empereur par le seul poids du nombre (me demandez pas pourquoi). Prématurément usé par cette ultime bataille dont il fut quasiment le seul rescapé (l’autre survivant ayant fini dans un Dreadnought, et encore, un Dreadnought avec déambulateur), Barabas s’est trouvé affecté à la garde d’une planète de huitième ordre, poste honorifique mais véritable mise au placard déguisée, Perturabo n’ayant semble toute guère apprécié que sa Légion soit la première à devoir verser une pension vieillesse à un de ses combattants.

Isolé dans son trou ferreux, Barabas s’est occupé comme il a pu pour tuer le temps, ce qui pour un Iron Warrior, consiste surtout à construire des miradors derrière la haie et à installer des multi-lasers dans les bacs à géraniums. Malheureusement pour le pré-retraité qu’il est devenu, l’arrivée de l’arrogant et hérétique Warsmith Krendl va le forcer à prouver au reste de la galaxie que le vioque touche toujours sa bille en matière de conduite de siège.

1 : Voir ‘The Long Games at Carcharias’.

AVIS:

Si ni le thème, ni la conclusion de l’histoire ne sont très originaux, Sanders parvient bien à retranscrire l’effroyable guerre de positions qui oppose loyalistes et chaotiques, dans une sorte de préquelle clin d’œil à la bataille de Terra, au cours de laquelle les Iron Warriors affronteront cette fois leurs rivaux de toujours au lieu de leurs propres frères. S’il fallait retenir une morale de tout ceci, c’est que l’abus de Chaos est mauvais pour le sens stratégique, le méchant Krendl conduisant son offensive comme une savate, malgré les avantages quantitatif et qualitatif dont il dispose pour mener la réduction de la place-forte ennemie.

The Iron Within_IllustrationCertes, on peut se dire que Barabas est un Warsmith vétéran, défendant son chef d’œuvre en compagnie de troupes sur-motivées, mais son adversaire étant lui aussi un Iron Warrior de haut rang, et de ce fait un expert de la prise de fortifications, la correction que papy gaga lui inflige apparaît légèrement too much. On n’a pas vraiment l’impression de voir deux grands stratèges s’affronter à distance en se rendant coup pour coup, mais plutôt le sentiment d’assister à une partie de tower defense, les assaillants tombant comme des mouches pour gagner le moindre mètre.

Cette petite déception écartée, il faut bien avouer que Sanders maîtrise tout à fait les codes du dernier carré super héroïque, le rythme s’accélérant progressivement au fur et à mesure que le nombre des gentils diminue et que ces derniers doivent sans cesse reculer devant l’avance inexorable des vagues ennemies. Il y a bien quelques sujets à froncement de sourcils, comme le personnage de Vastopol, « Guerrier-Poète » à l’importance dans le récit aussi grande que son utilité à ce dernier apparaît comme contestable, mais Sanders ne relâche jamais le rythme, et toutes les incohérences sont vite laissées de côté. En conclusion, une autre nouvelle de Marines de bonne facture à mettre au crédit du petit Rob, dont j’attends personnellement de voir s’il peut faire aussi bien en long format et avec d’autres protagonistes.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Inclure dans un recueil introductif comme celui-ci une nouvelle relatant un siège pour parler des Iron Warriors était un no brainer, mais je suis tout de même content (et soulagé) que la Black Library ait fait le choix de la facilité. Si on veut chipoter, on peut regretter que ‘The Iron Within‘ soit centré sur l’exception Barabas Antioch, qui en tant que loyaliste ne représente pas la mentalité dominante chez les autres Iron Warriors, entièrement loyaux à leur Primarque otaku. Comme Krendl a eu l’honneur d’être le héros de sa propre nouvelle (‘Ironfire‘, écrit par le même Sanders), cette dernière aurait pu être considérée, tout comme la plus récente ‘Embers of Extinction‘ du nouveau-venu Brandon Ellis.

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Iron Warriors – Black Oculus (J. French) :

INTRIGUE:

Black OculusLes journées d’un Navigateur sont plus riches et hautes en couleurs que celles de la majorité des êtres humains de la galaxie, et le compte rendu fait par l’un des pilotes de l’Iron Blood de Perturabo de son voyage à travers l’Œil Noir en direction de Tallarn le montre bien. Malgré le fait que le saut Warp se soit bien passé, l’expérience a laissé le narrateur avec des séquelles profondes et sans doute définitives, qui ont mené les rationnels Iron Warriors à le placer sous sédation et à l’isolement, pour éviter que son malaise psychique ne les fasse rouiller (?).

Le plus traumatisant dans cette (nécessairement) sombre histoire semble avoir été les rires pré-enregistrés que notre héros triclope a entendu tout du long de sa transition galactique, et qu’il interprète maintenant comme la preuve indubitable que les dieux ne sont pas tombés sur la tête, mais se paient celles de Perturabo (et du reste de l’humanité d’ailleurs, comme ça pas de jaloux). Cela nous semble le comble du banal à nous, hobbyistes du M3, mais pour nos lointains descendants du 30ème millénaire, la surprise a dû être grande…

AVIS:

Si vous aviez envie d’avoir l’équivalent littéraire d’un écran de chargement entre ‘Angel Exterminatus’, qui se termine avec les Iron Warriors coincés au milieu de l’Œil de la Terreur suite au glow up de Fulgrim et ‘Tallarn’, la prochaine victime sur la to besiege liste de Perturabo, ‘Black Oculus’ est ce qu’il vous faut. Je pense que la plupart des lecteurs de l’Hérésie feront l’impasse sans sourciller.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Cette très courte nouvelle permet de se rendre compte que Perturabo n’est pas du genre à prendre des demi-mesures… et c’est à peu près tout. Comme l’Iron Man des Primarques n’apparait pas dans l’autre nouvelle Iron Warriors du recueil, je suppose que c’est un complément utile, mais ‘Black Oculus’ propose également un niveau de lecture inaccessible aux nouveaux-venus (mentions non contextualisées de l’Œil Noir et de Tallarn), ce qui est problématique ici.

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White Scars – Brotherhood of the Moon (C. Wraight) :

INTRIGUE:

Brotherhood of the MoonLa vie du Khan Torghun, chef de la Confrérie de la Lune des White Scars (aussi appelée 64ème Compagnie par les normies et les Sons of Horus), a pris un tour désagréable depuis qu’il a été associé avec la faction pro-Horus, et donc heresy-friendly de sa Légion. Mais peut-on vouloir à un White Scar de choisir l’option Faucon quand l’opportunité se présente, hein ? Capturé et interrogé par ses camarades ayant eu le nez de rester fidèles à Pépé, il consent à leur raconter comment il en est arrivé là.

Tout remonte à la campagne menée en coopération avec les Luna Wolves du Capitaine Verulam Moy dans la Ceinture de Tarsch. Le manque de progrès du contingent de la 16ème Légion avait contraint le haut commandement de la Croisade à lui dépêcher des alliés, sous la forme de la Confrérie de Torghun. Sans doute un appareillement décidé par un adepte un peu fleur bleue, trouvant poétique de faire coopérer deux factions lunaires sur le même conflit1. Sentant son homologue vexé par l’arrivée de renforts non sollicités, Torghun fit ce qu’il put pour arrondir les angles et put compter en cela sur l’aide de son second Hakeem, qu’il découvrit très déférent envers Moy (Moche et Méchant), sans qu’il comprenne tout de suite d’où venait ce respect interlegionnel.

Une attaque décidée sur une cité majeure du neuvième monde de la Ceinture fut l’occasion pour les deux forces de travailler de concert : pendant que les Luna Wolves infiltreraient à pinces les défenses adverses pour saboter les générateurs alimentant le bouclier défendant la position ennemie, les White Scars devraient faire diversion depuis les ailes, à grands renforts de burns et de rodéo urbain dans la périphérie de la cité. Car si la 5ème Légion déteste les Dreadnoughts, elle adore en revanche les doughnuts. Nuance importante.

L’opération se passa comme sur des roulettes (normal avec des White Scars me direz-vous), les assauts commandés par Torghun et Hakeem réussissant à semer la confusion parmi les défenseurs, et à sécuriser les objectifs fixés en amont de l’attaque. Au moment de se replier cependant, Hakeem insista auprès de son supérieur pour que les fiers bikers fassent une entorse à la règle du hit and ride qui les caractérisait pour mettre pied à terre et défendre leurs positions le temps que les Sons of Horus n’arrivent les soulager. Bien que 1) cela contredise la philosophie martiale du Grand Khan et 2) ses hommes ne soient pas équipés pour ce type d’affrontement (dur de caler un bouclier tempête à l’arrière d’une 125), Torghun accepta le défi après avoir compris de son subalterne qu’il s’agissait du plus sûr moyen de gagner le respect des coriaces Sons of Luna.

« Et Moy, et Moy, et Moy ? » vous entends-je demander. Eh bien Moy finit par arriver, et, bien que surpris de la résistance de ses alliés et du non-respect par ces derniers du plan de bataille, ne leur en tint absolument pas rigueur. Bien au contraire, et comme l’avait annoncé Hakeem, il devint bien plus amical envers les White Scars, au point d’inviter leurs deux commandants dans sa tente après le banquet de la victoire, pour une petite réunion de loge. On comprend alors que Hakeem était déjà initié, et qu’il a tout fait pour que Torghun le devienne aussi. Notre héros aura l’occasion plus tard de réaliser que le népotisme et l’entre soi causent autant de problèmes qu’ils ouvrent de portes, particulièrement lorsque son réseau fricote avec le Chaos. Mais ceci est une autre histoire (‘Scars’, pour être précis).

1 : Même cette vieille baderne de Moy relève cette coïncidence, c’est dire si l’intention était transparente.   

AVIS:

Chris Wraight développe l’origine du protagoniste de sa série White Scars, Torghun Khan, dans cette petite mais solide nouvelle, qui lorgne franchement du côté du fan service pour les inconditionnels de Dan Abnett1. Comme tout le monde faisait ça à l’époque et que cela ne dessert pas le récit, on passera l’éponge sans problème. Après tout, ‘Brotherhood of the Moon’ est l’histoire d’un petit nouveau qui gagne la confiance et l’amitié d’un gros bonnet de la Grande Croisade : le parallèle avec Wraight, dont ‘Scars’ était le premier roman dans cette franchise et qui était encore loin d’être un Seigneur de Terra à l’époque, est assez troublant. Il faut voir cette nouvelle comme un bonus appréciable mais non nécessaire à la compréhension de ce dernier roman (qui était déjà publié au moment de la sortie de ‘Brotherhood of the Moon’, d’ailleurs).

1 : C’est lui qui a créé le personnage de Verulam Moy dans ‘Horus Rising’.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Les White Scars sont sans doute la Légion dont le fluff a été le plus enrichi par la franchise Hérésie d’Horus, comparé à ce qu’il était dans le background prédatant le lancement de la série. Les scissions internes qui ont travaillé cette faction lors des premiers temps de l’Hérésie sont en effet un ajout (intéressant, si je peux me permettre) récent à son histoire officielle, et Chris Wraight en a été le chroniqueur attitré dans ses travaux consacrés aux bikers de Jaghatai Khan. Le choix de la Black Library d’évoquer ce schisme, encore que de manière très indirecte, dans ‘Lupercal’s War’ est compréhensible (notamment d’un point de vue marketing, cet arc hérétique se poursuivant sur plusieurs romans et nouvelles), et ‘Brotherhood of the Moon’ permet au lecteur de saisir les bases de la culture de cette Légion (fais ce que voudras, mais à moto) au début de l’Hérésie, ce qui en fait une soumission pertinente à mes yeux.

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Space Wolves – Bjorn: Lone Wolf (C. Wraight) :

INTRIGUE:

Bjorn_Lone WolfSur une plaine volcanique de Velbayne, les Space Wolves sont engagés dans une féroce bataille contre un ost démoniaque, une préparation adéquate à leur future purge de Prospero (l’univers est bien fait tout de même). Bien que Leman Russ en personne ait fait le déplacement, la star du jour est Bjorn, surnommé le loup solitaire par le reste du Rout depuis que le reste de sa meute a été unsuscribed from life par un Buveur de Sang lors de la campagne de Gryth. Par un heureux hasard, le même démon majeur, reconnaissable à ses mèches blondes effet mouillé (j’imagine), est présent sur Velbayne, et Bjorn est bien décidé à régler ses comptes avec la bête canicide d’une manière définitive.

Nous suivons donc sa course folle, son triple saut, son enfonçage de cordon (le joueur Démons était un gros newb) et pour finir son combat acharné contre sa Némésis khorneuse et cornue, en même temps que notre héros jusqu’ici silencieux égrène les noms de ses frères d’armes défunts. Protégé par son statut de personnage nommé et renforcé par une myriade de buffs, Bjorn couche le Buveur en moins de temps qu’il faut à son Primarque pour vider un tonneau de mjød, pour l’honneur de ses morts et la gloire des Space Wolves. On voit qu’il n’a pas perdu la main…

AVIS:

Soumission très honnête de la part de Chris Wraight pour cette micro-nouvelle, qui montre à quel point les liens unissant les frères de meute sont forts chez les Space Wolves, et à quel point le jeune Bjorn était une brute de corps à corps. Il n’était pas possible de faire beaucoup mieux que ça en trois pages/1.000 mots, c’est donc une mission accomplie en ce qui me concerne.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Fort heureusement, ‘Bjorn : Lone Wolf’ n’est pas la nouvelle choisie pour représenter les Space Wolves dans ‘Lupercal’s War’, car cela aurait fait court. Malgré sa brièveté, cela reste à mon sens un choix pertinent, car le lecteur est introduit aux valeurs profondes de cette Légion dans ces quelques pages, et se familiarise avec une des figures majeures de cette faction. Un bon bonus.

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Space Wolves – Bloodhowl (C. Forrester) :

INTRIGUE:

BloodhowlQue faire quand sa faction a pris une telle rouste qu’elle a été virtuellement annihilée et n’aura plus aucun impact sur la conclusion de l’Hérésie ? Plutôt que de demander conseil aux Légions Brisées ou aux Custodes, qui les ont précédés au panthéon de la lose glorieuse, les Space Wolves ont décidé de laver leur linge sale en et de famille au sortir de la campagne de Trisolian. Nous suivons donc le Jarl de la 13ème Compagnie (Dekk-Tra), Jorin Bloodhowl, alors qu’il emmène ses vétérans grisonnants et grommelants sur la planète de Bloodfall, après qu’un Leman Russ totalement déprimé lui ait donné la permission de s’absenter. Le but de l’escapade est de localiser un des lieutenants de Bloodhowl, Gunnar Thorolfsson, AWOL depuis l’incendie de Prospero. Le Jarl, qui espère toujours que la 6ème Légion pourra se rendre utile dans la défense de Terra, a en effet grand besoin de regonfler ses effectifs, et compte bien convaincre Thorolfsson et ses 200 loulous de regagner le bercail de Morkai, de gré ou de force.

L’explication de texte entre les frères d’armes devra toutefois attendre un peu, Bloodfall se trouvant être contestée par une bande de Night Lords en goguette, menée par le Prince de Bel Air du Perif1 en personne. Ce sinistre individu, qui avait déjà montré une sale tendance à la sociopathie et aux crimes contre l’humanité pendant la Grande Croisade, est devenu l’ennemi juré de Thorolfsson, qui a passé une bonne partie de son congé sabbatique à le pourchasser à travers la galaxie. Jugeant avec sagesse que s’il arrive à mettre la patte sur le Prince, il n’aura pas de mal à localiser son subalterne, Bloodhowl emmène donc ses hommes à l’assaut des positions Night Lords… et réalise assez rapidement que Booba (a.k.a. le Duc de Boulogne) est grave chaud avec son sabre énergétique. Largement surclassé par son adversaire, il ne doit sa survie qu’à l’intervention opportune de Thorolfsson, qui envoie un tir de plasma dans le buffet de son Altesse Noctilienne, et permet à Bloodhowl de remporter son « duel ».

Ayant contraint les Night Lords à se replier, les Space Wolves sont enfin libres de palabrer entre gens de bonne compagnie. Le ton de la discussion monte assez vite, Thorolfsson refusant tout net de retourner se battre contre les hérétiques menaçant Terra, comme lui demande Bloodhowl, arguant que ses hommes et lui sont plus utiles aux péquins moyens de l’Imperium dans leur défense des planètes laissées à la merci des Légions renégates du fait de leur peu d’importance stratégique. Le Jarl n’est pas de cet avis, et rappelle à son subalterne et objecteur de conscience qu’il a prêté serment à Russ et à l’Empereur, et qu’il ne lui appartient pas de choisir les combats qui lui semblent être les plus nobles. Aucun des deux tribuns n’arrivant à convaincre son vis-à-vis, on se résout à régler la situation par un duel à mort, comme le veut la tradition.

Bloodhowl, bien amoché par son combat contre le Prince du Périf, refuse de se faire représenter par un champion, et se fait donc fort logiquement mettre en KO technique par son adversaire. Thorolfsson, beau joueur, laisse toutefois la vie sauve à son adversaire, prétextant qu’obéir aveuglement aux traditions est aussi néfaste qu’obéir aveuglement aux ordres (quel esprit libre, vraiment). Il en veut pour exemple l’incendie de Prospero, commis par les Space Wolves sur l’ordre d’un Horus qui avait déjà basculé du côté sombre, et qui aurait pu être évité si la 6ème Légion n’avait pas bêtement obéi au Maître de Guerre. « Hmm maintenant que tu le dis, ça a pas l’air débile » répond Bloodhowl du haut de son ultime PV, avant de repartir la queue entre les jambes. Moralité : Jorin est nul au close.

1 : Sans rire, le gus s’appelle ‘The Prince of the City’s Edge’ en V.O. Ma traduction est tout à fait legit.

AVIS:

Chris Forrester réalise un début sans faute dans l’Hérésie d’Horus avec ce ‘Bloodhowl’, mélange de Space Marinade d’action bien dosée et de réflexion sur la culture et l’histoire des Space Wolves pendant leur heure de doute (juste après les événements de ‘Wolfsbane’). Un travail soigné et bien documenté, puisqu’on y trouve des références à la campagne de Dulan ainsi qu’à celle de Prospero, pourtant couvertes par d’autres auteurs (respectivement Chris Wraight et Dan Abnett), et des personnages tirés de ces vénérables écrits (Ulbrandr Crowhame, Hjalmar Stormfist, sans oublier ce vieux Bulveye). Mon seul regret fut de constater l’absence totale de conséquence de ‘Bloodhowl’ sur la suite de l’Hérésie, Jorin Bloodhowl et ses loyalistes premier degré repartant écluser du mjød avec Leman Russ, tandis que Gunnar Thorolfsson et ses loyalistes rebelles restent s’occuper du cheptel de Bloodfall. Comme Thorolfsson était une création de Forrester, et ne disposait donc pas d’une armure en scenarium1, on aurait pu s’attendre à une conclusion un peu plus tranchante et tranchée. Maintenant qu’il a prouvé qu’il avait les bases nécessaires pour participer à cette complexe œuvre collective qu’est l’Hérésie d’Horus, j’espère que Chris Forrester aura l’occasion de prendre en main des arcs narratifs (ce qui veut parfois dire les conclure), avant que la BL ne sonne la fin de la récré.

1 : Armure toute relative pour Bloodhowl lui-même, puisque personne ne s’est donné la peine de le faire revenir au 41ème millénaire (à la différence de presque tous ses sous-fifres). Et n’oublions pas que Mike Lee avait placé Bulveye à sa place à la tête de la Dekk-Tra dans ‘Wolf at the Door’…

ET POUR LES NOUVEAUX ?

‘Bloodhowl’ est indubitablement une nouvelle de qualité, mais elle arrive bien tard dans le déroulé de l’Hérésie, posant la question de sa pertinence dans un recueil destiné à des lecteurs novices. Chris Forrester prend certes le soin de contextualiser ses écrits pour ne pas perdre son public (qui autrement serait pardonné de ne pas comprendre pourquoi les Space Wolves ont leur mini-hérésie), et se paie le luxe d’un caméo de Leman Russ au lout de sa bife (toujours sympathique), mais j’ai un faible pour ‘The Thirteenth Wolf‘ en lieu et place de ‘Bloodhowl‘, ne serait ce que parce que cette histoire est directement liée à l’événement le plus marquant d’un point de vue Space Wolves de l’Hérésie : l’incendie de Prospero.

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Imperial Fists – Champion of Oaths (J. French) :

INTRIGUE:

Il y a des entretiens d’embauche plus facile que d’autres. Alors que la majorité d’entre nous a juste à savoir nommer trois qualités et trois défauts pour convaincre le recruteur, Sigismund des Imperial Fists va vraiment devoir donner de sa personne pour obtenir son dream job, lui. Notre homme candidate pour devenir le Maître du Temple, fonction honorifique s’il en est au sein de la VIIème Légion puisque les Templiers en question gardent le… temple du Phalanx où les Frères de Bataille jurent fidélité à l’Empereur et à Rogal Dorn. Pour obtenir ce poste convoité, l’impétrant doit vaincre en combat singulier la totalité de ses camarades, soit 199 Astartes vétérans à se farcir les uns après les autres. Même pour un guerrier de la trempe de Ziggy Jaune d’Œuf, l’épreuve est difficile, et notre héros encaisse les coups et les bosses au fur et à mesure que les duels se succèdent.

Cet affrontement au long cours est entrecoupé de flashbacks nous renseignant sur la trajectoire de Sigismund, depuis son enfance malheureuse dans les camps de réfugiés de Turquie (rebaptisée plateau ionien en M31), où il vit sa protectrice se faire tabasser à mort par une bande de wesh sanguinaires, jusqu’à son entraînement sous la conduite du maître d’armes Appius, alors qu’il n’était encore qu’un jeune et prometteur jaunard. L’occasion pour nous d’en apprendre plus sur la motivation profonde de Sigismund, qui va toujours de l’avant parce qu’il sait que les Space Marines ont le devoir de se battre à la place de ceux qui ne le peuvent pas. C’est beau, c’est noble, c’est grand, c’est corporate. Ce petit gars aurait pu faire Miss France, s’il n’avait pas choisi une autre voie.

Retour au Temple, et au boss de fin de la série infernale du Zig. Après avoir fisté sans répit et écopé de quelques bleus au passage, ne reste plus que ce bon vieil Appius en personne à maraver. Le problème, c’est que le vétéran a assez mal vieilli, et s’est fait enfermer dans un Dreadnought depuis l’époque où il refaisait le portrait de son padawan à grands coups d’espadon. Le combat n’est pas des plus équitables, mais les Imperial Fists sont du genre exigeant. Malgré un coup de moins bien passager, et un revers de bouclier énergétique en pleine face, Sigismund vient à bout de cet ultime adversaire en lui coupant le câble (ce qui est cruel quand on est confiné à un réservoir de liquide amiotique, tout de même). Félicité par Rogal Dorn en personne, qui était là incognito pour suivre l’épreuve pratique de son fiston favori, Sigismund devient officiellement le Maître des Serments, et reçoit l’épée de fonction qui va bien en reconnaissance de son nouveau statut. Un petit passage à l’infirmerie pour mettre de l’arnica (eh, c’est jaune aussi) sera sans doute nécessaire après cela…

AVIS:

John French se fait plaisir en retraçant en quelques pages bien senties la trajectoire de l’un des personnages les plus marquants des Imperial Fists pendant la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus (et même après cela), depuis ses humbles débuts jusqu’à sa prise de fonction comme Enfant de Juron. On peut y voir un avant-goût et un condensé du roman qu’il écrira un peu plus tard sur le même personnage, car tout est déjà bien en place à la conclusion de ces douze pages. L’exemple-type de la petite nouvelle à vocation fluffique, sans ambition particulière en matière d’intrigue mais très satisfaisante tout de même pour les amoureux de background, et grâce à la maîtrise consommée que l’auteur a de son sujet. Bref, un incontournable si vous êtes fan des Imperial Fists et/ou des Black Templars, ou tout simplement de l’Hérésie d’Horus en tant que telle.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Au risque de me faire huer par les fans les plus convaincus des Imperial Fists, qui auront sans doute apprécié cette nouvelle à la gloire du redoutable Sigismund, je pense que la Black Library aurait mieux fait de remplacer ‘Champion of Oaths‘ par ‘Duty Waits‘. Cette dernière histoire est beaucoup moins héroïque et riche en fluff que la première, mais elle a l’énorme intérêt de présenter la réalité du terrain pour un Imperial Fist forcé à patienter sur Terra que les hérétiques arrivent, ce qui a été leur lot pendant sept longues années, il faut le souligner. Mention honorable à ‘The Crimson Fist‘, qui illustre l’approche méthodique et disciplinée de la guerre qu’ont les surhommes en jaune, mais qui était évidemment trop longue pour être intégrée ici.

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Night Lords – Child of Night (J. French) :

INTRIGUE:

Child of NightL’heure du jugement a sonné pour Fel Zharost, maître déchu du Librarium des Night Lords. Alors qu’il était retourné dans ses ténèbres natales du sous-monde d’Albia, sur Terra, pour attendre d’être assez âgé pour toucher sa pension d’ancien combattant, le légionnaire déserteur s’est fait traquer par un autre Astartes nyctalope, et commence la nouvelle en contemplan le canon du pistolet bolter pointé sur son crâne chauve. Se jugeant sans doute coupable d’assez de crimes pour mériter une exécution sommaire, Fel Zharost exprime toutefois la dernière volonté de partager avec son futur bourreau ses souvenirs les plus mémorables, afin que ce dernier puisse appuyer sur la gâchette en connaissance de cause. Son interlocuteur n’est pas d’accord, mais on ne peut pas vraiment dire non à un Psyker télépathe qui veut remonter sa memory lane, et nous voilà donc partis pour un voyage dans les années tendres du Night Lord.

Tout a commencé de manière violente, cruelle et tragique, comme souvent à Albia1. À l’époque guère plus qu’un minot dégingandé et territorial, Baby Fel avait été surpris en compagnie d’une camarade de gang (Calliope) par un estranger en armure de céramite, à la recherche de nouvelles recrues pour les Légions de son Pépé, déjà parti depuis plusieurs décennies faire croisade dans la galaxie. Habités d’une confiance en eux inversement proportionnelle à leurs chances de sortir vainqueurs d’un tel affrontement, les deux jeunots avaient décidé de se venger de l’intrusion en assassinant le Space Marine alors qu’il repartait bredouille vers la surface. Bien qu’ils s’en soient sortis de manière très honorable, en lui sectionnant la jugulaire et lui crevant un œil avec leurs tessons de bouteille (le fighting spirit des Anglais n’est plus à démontrer), cela n’avait pas empêché le colosse transhumain d’abattre Calliope et de ramener Fel Zharost avec lui jusqu’au centre de formation le plus proche. L’expérience avait été si violente que l’adolescent avait pris pleine connaissance de ses pouvoirs psychiques, jusque là latents. Certaines pubertés sont plus difficiles que d’autres.

Le deuxième souvenir qui nous est proposé est celui d’une mission menée par les Night Lords pendant la Grande Croisade contre les dirigeants corrompus de l’Enclave Saragorn, coupables d’avoir fait du trafic d’organes à l’échelle industrielle (ce dont l’Empereur se fout comme de son premier fer à lisser) et d’avoir utilisé pour cela des mutants impurs (un scandale sanitaire et éthique absolument terrible). On assiste à l’approche onirique cauchemardesque de la guerre qu’ont les Night Lords, Fel Zharost plongeant le Gouverneur déchu (Mortinar) dans une boucle sans fin d’hallucinations terrifiantes, le réveillant de temps à autre pour prolonger le plaisir. Comme il l’explique posément pour la huitième fois de suite – ils ont des défauts, c’est certain, mais les Night Lords sont pédagogues – à sa victime hébétée, la 8ème Légion n’est pas là pour rendre la justice ou corriger les torts causés, mais seulement pour punir de manière spectaculaire ceux qui le méritent. Comme dit la Compagnie Créole (rattachée directement au Nighthaunter d’après mes sources) : c’est bon pour le moral… des autres.

La troisième et dernière vision partagée par Fel Zharost est celle de sa déchéance, prononcée de manière évidemment nonchalante par Sevatar en personne, alors que le petit Konrad était en train de se faire morigéner par ses frères dans une autre nouvelle. La scène se déroula après la proclamation de l’Edit de Nikea, auquel les Night Lords essayèrent – au début – de se conformer. Les deux Night Lords ne s’appréciant guère, l’Archiviste démobilisé reprochant au premier Capitaine d’être le symptôme de la corruption et du dévoiement des « valeurs » originales de la Légion, il ne fut guère étonnant que l’entrevue finisse par déboucher sur une petite baston entre Fel Zharost et Sevatar, après que le second eut condamné le premier à l’exil, sous peine de mort. Bien que l’Ecuyer du Primarque soit le meilleur combattant des deux, les pouvoirs psychiques de Fel Zharost lui permirent de laisser quelques marques sur l’armure de sa Némésis, avant que le flash de la Go Pro de coque de Sevatar ne vienne ruiner sa concentration et mettre fin à ce duel.

Retour dans les bas-fonds terrans, où cette diva de Fel Zharost a une nouvelle doléance à faire passer à son nouveau copain (un peu givré et désorienté à ce stade) : utiliser ses souvenirs pour voir le soleil une dernière fois. La nature fouineuse du Night Lords le mène cependant à fouiller dans d’autres dossiers mentaux du légionnaire Abribus, ce qui lui permet d’apprendre ce petit détail qu’est le déclenchement de l’Hérésie. Car il faut croire que Pépé n’a pas jugé bon de faire installer la 5G dans les zones déshéritées d’Albia, qu’il déteste cordialement depuis l’époque où il avait pris la forme de Margaret Thatcher pour mettre l’histoire sur de bons rails. Falafel comprend alors que son visiteur n’est pas venu pour le liquider, mais, à nouveau, pour le recruter. Engagez-vous, rengagez-vous qu’ils disaient…

1 : C’est comme là qu’a été décidée l’arrêt de Warhammer Fantasy Battle et l’augmentation continue des prix du zhobby. Never forget.

AVIS:

Nouvelle sympathique qui compile et condense en quelques pages les moments les plus marquants d’une vie de Night Lords, ‘Child of Night’ montre en particulier le rôle (tout aussi particulier) qu’avait cette Légion de joyeux drilles lorsqu’elle roulait encore pour son Empereur, ce qui est appréciable. Le troisième souvenir de Fel Zharost manque cependant un peu de contextualisation à mes yeux, car on ne comprend pas si l’Archiviste se fait virer du fait de l’Edit de Nikea, à cause de l’aversion de Sevatar pour lui, ou pour un autre crime non explicité par John French. Mise à part cette petite doléance, il s’agit d’un ajout qualitatif dans le corpus des Night Lords.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme dit ci-dessus, ‘Child of Night’ donne un aperçu de la philosophie des Night Lords, ce qui est ce qu’on peut attendre d’une nouvelle incluse dans ‘Lupercal’s War’ : ce choix est donc tout à fait pertinent de la part de la Black Library1. Comme le Nighthaunter et Sevatar servent d’antagonistes aux vertueux et ombrageux Dark Angels dans ‘Savage Weapons’ (et aux féroces et enjoués Space Wolves dans ‘Bloodhowl’ – ce sont les ennemis les renégats les plus populaires de l’Hérésie), cette faction s’en sort très bien au final en termes de représentation.

1 : Mention honorable à ‘The Conqueror’s Truth’, dont le pitch est littéralement : « voici comment les Night Lords soumettent les mondes isolationnistes pendant la Grande Croisade ».

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Blood Angels – Lost Sons (J. Swallow) :

INTRIGUE:

Lost SonsLes jours se suivent et se ressemblent sur Baal depuis que les Blood Angels sont tous partis châtier les Nephilim dans l’amas de Signus, comme demandé par Horus ‘Primes Inter Pares’ Lupercal à son frérot Sanguinius. Tous ? Non ! Comme l’addendum de l’ordre de mission l’autorisait, l’Ange a laissé une équipe de maintenance dans sa forteresse pour veiller au grain de sable en attendant son retour. Les 20 tondus ayant eu le grand honneur de rester à domicile patientent depuis plus de cinq ans dans le calme absolu de l’arrière-pays baalite, maintenant l’inflexible discipline et l’élégance vestimentaire qui ont fait la réputation des Blood Angels. Le chef de cette petite confrérie est le Chapelain Arkad, catapulté Gardien de Baal (c’est mieux que gardien de but) par Sanguinius avant son départ. Bien qu’habituellement calme, son sacerdoce l’a déjà amené à deux doigts de crozuser la goule de ses frères, lorsque certains d’eux ont cherché à abandonner leur poste pour partir à la recherche de leur famille perdue. Le déclenchement de la Tempête de la Ruine a en effet rendu toute communication avec la Légion angélique impossible, laissant nos plantons ressasser des idées plus noires que rouges sur le destin des Blood Angels.

A cela est venu s’ajouter les rumeurs, puis la confirmation officielle, de la trahison d’Horus et des massacres d’Isstvan et de Calth, et plus généralement d’une guerre civile de grande ampleur dans l’Imperium. Aussi, lorsqu’un vaisseau émerge du point de Mandeville du système de Baal et se dirige droit vers la forteresse quasi-déserte, c’est la méfiance qui domine chez Arkad et ses comparses. Il s’avère que le nouvel arrivé dispose de l’immunité diplomatique du 30ème millénaire, en cela qu’il est au service de Malcador le Sigilite, qui du haut de son poste de Régent de Terra, agit comme bon lui semble pendant que l’Empereur essaie désespérément d’isoler les combles de son Palais contre les courants d’air de Warp. Pingre comme jamais, le vioque a envoyé un unique émissaire, le Space Marine Tylos Rubio, ayant abandonné le bleu profond des Ultramarines pour le gris terne des Chevaliers Errants. Au moins, l’entretien est facile. Arkad et son copain Hezen sont atterrés de voir que leur visiteur est un Archiviste (Edit de Nikea, etc…), mais le sont bien davantage lorsque Rubio leur tend un parchemin avec accusé de réception annonçant la dissolution des Blood Angels. Gasp.

 La raison de cet acte administratif d’une brutalité sans nom est simple : considérant la 9ème Légion définitivement perdue du fait de la disparition pure et simple de l’amas de Signus, Malcador souhaite mettre la main sur les ressources considérables des Blood Angels en termes de matériel, d’armement et de glandes progénoïdes, afin de gérer au mieux son effort de guerre. Rien de personnel les gars, c’est que du business. Rubio informe toutefois ses hôtes que refuser d’obtempérer leur vaudra d’être déclarés traîtres à l’Imperium à leur tour, mais qu’il peut faire jouer ses relations pour leur trouver un poste à la MLCDR Corp, s’ils le souhaitent.

Cette décision unilatérale passe évidemment très mal chez les anges, aussi sanguins que leur blase le laisse présager. Après une réunion de famille houleuse, le Gardien s’en va porter la réponse du groupe à Rubio, qui patiente dans son véhicule de fonction en écoutant les Grosses Têtes : un non franc et massif. L’Archiviste s’attendait à ce refus de principe, et ne trouve rien à redire au projet des 20 derniers Blood Angels, qui ont repeint leur armure en noir pour l’occasion (parce qu’ils se considèrent comme faisant partie de la Compagnie de la Mort maintenant, wink wink) d’aller traquer Horus pour lui passer un savon1. Il est par contre beaucoup moins conciliant lorsque ses vis-à-vis refusent aussi d’ordonner à l’équipage de la petite flotte laissée par Sanguinius en orbite autour de Baal de coopérer à leur réaffectation prochaine. La tension monte soudainement d’un cran entre les cousins énergétiques.

Avant que Rubio n’ait pu commettre l’irréparable, comme crier « tu dépasses les bornes, Arkad ! » à son homologue, l’Astropathe local arrive en courant pour transmettre un message des plus urgents à ses patrons. Il s’agit d’une communication signée Raldoron, le premier Capitaine des Blood Angels, déclarant que Sanguinius est bien en vie et que la Légion perdure. Ce voicemail opportun, même s’il sonne le glas de l’Astropathe (ou peut-être est-ce son sprint de 300 mètres qui lui a été fatal), réjouit fortement Arkad et ses boys, et leur donne une opportunité en or pour renvoyer Rubio vers Terra avec la coiffe psychique entre les jambes. Ça ne s’est pas joué à grand-chose, mais les Blood Angels sont toujours officiellement dans la course, et il faudra compter sur eux pendant la seconde moitié de l’Hérésie.

1 : Enfin si, il trouve ça très con. Mais chacun ses fétiches hein.

AVIS:

James Swallow nous sert une nouvelle behind the scenes de l’Hérésie d’Horus, en se penchant sur les lignes trèèèès arrières d’une galaxie certes déchirée par la guerre, mais où un bon paquet de planètes sont tout de même loin du front. L’ironie de voir des Astartes se languir dans leur forteresse déserte et isolée pendant que tout le monde s’amuse sans eux rajoute du piment à cette histoire à la fois rafraichissante et intéressante d’un point de vue fluff. Un autre de ses points forts est de brouiller les lignes entre la position pragmatique à l’extrême de Malcador, et la fidélité romantique mais contre-productive des Blood Angels à leur Primarque : aucun de ces deux points de vue ne peut être considéré comme étant intrinsèquement supérieur à l’autre, et il revient au lecteur de décider dans quel camp il se retrouve le plus. Très sympathique.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme les Space Wolves, les Blood Angels n’ont pas bénéficié d’une couverture très importante dans le corpus de nouvelles de l’Hérésie d’Horus, et une bonne partie de ces dernières sont d’abord consacrées à Sanguinius (et sa plastique de rêve) plutôt qu’à ses fils – si on met de côté Azkaellon et Amit, les Dupont et Dupond de la 9ème Légion. Fort heureusement, ‘Lost Sons’ fait le job d’une façon tout à fait satisfaisante, en présentant au lecteur l’attachement viscéral que les Bloodies ont pour leur Primarque emplumé, et en lorgnant vers la Rage Noire et la Compagnie de la Mort, deux des « marqueurs » les plus notables de cette faction. On a aussi une bon teasing de la campagne de Signus Prime (pas trop subtil en plus), ce qui n’est pas étonnant vu que Swallow a raconté cette campagne dans un de ses romans. En bonus, il s’agit d’une nouvelle non-violente, ce qui est assez rare pour le signaler dès lors que des Space Marines sont les protagonistes, et qui contraste donc agréablement avec le reste du contenu de ‘Lupercal’s War’.

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Iron Hands – Immortal Duty (N. Kyme) :

INTRIGUE:

Immortal DutyAhrem Gallikus est un Immortel au sein de la Légion des Iron Hands. Ce titre n’est cependant pas une marque d’honneur, mais plutôt un symbole de disgrâce : dans la famille Manus, il est accolé aux guerriers qui auraient mieux fait de mourir dans l’accomplissement de leur tâche plutôt que de survivre et de faire honte à leurs camarades. En récompense de leurs mauvais services, ils se voient donc remettre un bouclier d’assaut et sont reversés dans les unités de Breachers de la 10ème, où ils hériteront des missions les plus pourries jusqu’à ce qu’ils aient la bonne idée de décéder dans l’exercice de leur fonction. Personne n’aime les CRS, ça reste vrai dans les ténèbres du lointain futur.

Gallikus commence la nouvelle sur le point d’être exécuté par un petit groupe de Space Marines l’ayant recueilli alors qu’il dérivait dans le vide à proximité d’Isstvan. Trop dans le coltar au moment de son réveil pour repérer l’héraldique de ses sauveteurs/bourreaux (rayer la mention inutile), il est amené manu militari dans un hangar décoré avec des têtes tranchées d’Iron Hands – un choix radical, mais tout le monde ne connaît pas les Displates – et sommé de faire un rapport sur les derniers événements dont il se souvient, sous peine de finir à son tour comme ornement d’intérieur. Notre héros groggy commence donc à raconter la mission qu’il avait entreprise avec quelques copains de section : aborder le Retiarus.

Cette attaque avait été rendue nécessaire par la participation de ce vaisseau World Eaters au blocus autour d’Isstvan V, empêchant le Gorgonesque Iron Hands d’aller s’enquérir de l’état de son Primarque à la surface de cette planète suppliciée. Disposant d’un plein contingent d’Immortels, le Capitaine Udris avait envoyé ces parias de choc à l’assaut du vaisseau adverse, et l’escouade de Gallikus, commandée par un Prêtre de Fer dégradé (Azoth) avait été couchée sur la feuille de match. Comme on pouvait s’y attendre, la progression avait été lente, pénible et sanglante, les fils d’Angron n’étant pas les hôtes les plus gracieux et civilisés de la galaxie. Après avoir fait leurs preuves contre l’équipage humain, transhumain et posthumain (un Dreadnought Contemptor surpris au saut du lit par l’abordage des Iron Hands), les quelques Immortels survivants arrivèrent au niveau de l’arène de combat du Retiarus, elle aussi décorée avec des bouts de cadavres appartenant à leur Légion. Ça commence à faire beaucoup.

Les y attendaient un petit groupe de berserkers, bien décidés à faire couler le sang des intrus. Pour la petite histoire, le chef des World Eaters (Robert Varken Rath) se trouvait être une ancienne connaissance de Gallikus, rencontré pendant la fatale campagne de Golthya pendant laquelle la Compagnie de notre héros fut victime d’un spectaculaire retour de flamme (de phosphex) alors qu’elle était en train de xenocider des Kethid. Ferrus Manus ayant comme chacun sait de gros problèmes de confiance en lui, il n’apprécia pas du tout les blagues potaches que Jaghatai et Leman Russ firent circuler en douce sur le démarrage de barbecue à la medusane lors du conseil primarquiel qui suivit ce regrettable événement, et catapulta les survivants chez les Immortels pour lui apprendre à lui faire honte.

Comme de juste, Gallikus et Rath se retrouvèrent au cœur de la mêlée, et notre héros aurait fini une tête plus court sans l’intervention désintéressée mais désabusée d’Azoth, qui profita du chaos des combats pour dépressuriser le sas et envoyer les combattants faire de la brasse coulée dans l’espace, constatant que les loyalistes avaient la main basse dans l’affrontement. Ça apprendra aux Iron Hands à relâcher leur discipline et à se battre comme des guerriers, et non comme des fonctionnaires CRS soldats.

Gallikus termine son compte rendu et s’attend à ce que ses mystérieux sauveteurs terminent ce que Rath avait commencé quelques heures plut tôt, mais à sa grande surprise, ce sont des loyalistes qui l’ont pris en stop, et non des hérétiques. Il fait ainsi la connaissance d’un Prêtre de Fer Iron Hands, d’un Salamander et d’un Raven Guard, et retrouve ce bon vieil Azoth, certes un peu zombifié sur les bords, comme son teint grisâtre et son œil morne le laissent apparaître, mais opérationnel à part ça. Il est temps pour les Légions brisées d’aller se venger sur les noix d’Horus…

AVIS:

Nick Kyme adapte le concept des Tueurs Nains de feu Warhammer Fantasy Battle au 30ème millénaire, les guerriers déshonorés cherchant une mort glorieuse au combat étant cette fois-ci des inflexibles Iron Hands plutôt que des nabots à crète. Nouvelle d’action pure, ‘Immortal Duty’ semble avoir été pensée comme une introduction au personnage d’Ahrem Gallikus, comme sa rencontre et son acceptation par un petit groupe de guerriers des Légions brisées à la fin du récit le laisse présupposer. Mis à part les torrents d’hémoglobine et d’huile de vidange qui s’écoulent de ces quelques pages, David Annandale nous propose de nous familiariser avec la caste des Immortels Iron Hands, introduite dans le volume ‘Massacre’ de Forge World quelques années avant la publication de cette nouvelle. Les quelques bribes de fluff parsemées au hasard des paragraphes valent-elles la peine de s’enquiller cette histoire simpliste1 ? Je vous laisse décider en votre âme et conscience.

1 : Mais qui se clôt aussi sur des questions non résolues : pourquoi des loyalistes s’amusent-ils à collectionner des têtes d’Iron Hands ? Comment Azoth a-t-il été « zombifié » ? Autant d’indices indiquant à mes yeux que Kyme n’en avait pas fini avec Gallikus et ses nouveaux copains.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Immortal Duty’ aborde beaucoup des thèmes et intrigues principaux des Iron Hands (leur penchant pour les bioniques, leur code d’honneur intransigeant, leur ténacité légendaire, la mort de Ferrus Manus et la quasi-destruction de la Légion sur Isstvan), ce qui en fait un choix pertinent pour un ouvrage comme ‘Lupercal’s War’. À titre personnel, je trouve que ‘Riven’ de John French fait encore mieux l’affaire, mais on n’est pas en présence d’une erreur de casting, comme pour certaines autres factions.

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World Eaters – After Desh’ea (M. Farrer) :

INTRIGUE:

Après Desh'eaUn sombre sentiment étreint les cœurs du fier Khârn et de ses compagnons War Hounds alors qu’ils patientent dans la salle d’attente du Conqueror. Pas de la peur, non (après tout, ils ne peuvent pas ressentir cette émotion, pas vrai ?), mais une certaine appréhension à l’idée de rencontrer pour la première fois leur Primarque perdu, le colérique Angron, que l’Empereur a téléporté chez ses fils en coup de vent avant de repartir vers sa Grande Croisade, justifiant son départ précipité pour Aldebaran par la nécessité de ne pas rater sa correspondance avec la 37ème. Le tout griffoné sur un post-it maculé de sang et collé sur la porte de la salle où Angron fait les cent pas et les quatre cents coups. Les tragédies causées par les parents démisionnaires…

Par le jeu des successions déclenché par le massacre systématique de tous les émissaires envoyés par les War Hounds se présenter au Primarque, Khârn est maintenant en charge de réussir là où ses supérieurs et camarades ont échoué au cours des heures précédentes. Faisant fi des conseils de prudence de ce planqué de Dreagher, le Capitaine toque à la porte, entre discrètement, et s’avance de quelques pas pour essayer d’apercevoir son père génétique. S’ensuit une conversation honnête et amicale entre Angron, toujours un peu jet lag depuis son départ de Nuceria, et celui qui ne tardera pas à devenir son Ecuyer. Hum. En fait, pas vraiment. Reprenons : Khârn entre, scrute les ténèbres de la pièce jonchée de cadavres mutilés, et… SE FAIT DEFONCER DANS LES GRANDES LARGEURS par un Angron toujours aussi grognon. Entre deux rebonds sur les murs, fractures, dislocations et hémorragies internes, Khârn, en grand professionnel qu’il est, tente de faire passer quelques infos capitales à son nouveau chef, comme qui il est vraiment, ce que sont les War Hounds, pourquoi ces derniers, à la grande frustration du Primarque, ne se sont pas défendus lorsqu’il leur est tombé sur le râble, ou encore comment se servir du papier toilette. Tout un programme, que seuls sa constitution renforcée de Space Marine et le bonus de résistance offert par son statut de personnage nommé lui permettent de dérouler de façon presque posée.

Angron, de son côté, s’il a tendance à évacuer sa légitime frustration d’avoir été forcé d’abandonner ses compagnons d’armes à leur destin sur Nuceria en utilisant le Capitaine comme ballon de foot, ne perd pas une miette de ce que son sous-fifre cherche à lui inculquer. Il peut également initier ce dernier à la culture martiale de sa planète d’adoption, où il exerçait la noble et utile profession de gladiateur jusqu’à ce qu’il réussisse à s’évader avec quelques collègues. Lui et ses Eaters of Cities s’étaient alors livrés à une orgie de pillages et de destruction dans l’arrière-pays de Desh’ea, vainquant l’une après l’autre les armées envoyées par les high riders pour écraser les rebelles. Coup de chance pour l’Empereur, Nuceria a été approchée juste au moment où les derniers gladiateurs étaient sur le point de livrer une ultime bataille contre les forces de l’ordre. Déveine pour Angron, recruté manu militari par son paternel pour sa Grande Croisade, même s’il ne souhaitait rien d’autre qu’une mort glorieuse aux côtés de ses frères et soeurs d’armes. La première confrontation orbitale entre le Père et le fils s’étant soldée par la mort atroce d’un des précieux Custodiens du premier, Pépé a donc décidé qu’il était too old for this shit1 et laissé son garnement de rejeton faire mumuse avec les chiens. Khârn apprend ainsi ce qu’est la Corde de Gloire, les Crocs du Boucher, ainsi que l’intégralité des techniques de soumissions, étranglements et self-defense pratiquées sur Nuceria auprès d’un professeur émérite, qui, sous ses abords de brute épaisse, se révèle redoutablement intelligent et…profondément timide (en effet, il ne lui est pas venu un instant à l’esprit qu’il avait la possibilité de sortir de la pièce dans laquelle l’Empereur l’avait confiné).

C’est toutefois la description par un Khârn au bord du KO (le Chaos viendra plus tard) de la campagne de Nove Shendak, à laquelle les War Hounds ont participé aux côtés des Iron Warriors de Perturabo et de l’Empereur en personne, qui achève de calmer Angron. Le récit des exploits vermifuges des Légions Space Marines, menées par le Maître de l’Humanité en personne, captive le Primarque au point qu’il se met à mimer les affrontements relatés par le Capitaine comateux, et la confirmation par ce dernier que Pépé est un grand guerrier n’hésitant pas à mouiller le maillot en compagnie de ses troupes, et pas un dirigeant dédaigneux laissant aux autres le sale boulot, comme l’étaient les high riders, pèse d’un certain poids dans la décision d’Angron de calmer sa colère, et d’engager la conversation honnête et amicale dont nous parlions précédemment avec ses fistons. Sa première décision, une fois ce pas franchi, sera de renommer les War Hounds World Eaters, en hommage aux camarades dont il n’a pu, à sa grande honte, ni accompagner dans la mort, ni commémorer le trépas en dotant sa Corde d’un tour funèbre avec la poussière de Nuceria. Une manière comme une autre de bien montrer à sa nouvelle famille qu’elle ne pourra jamais remplacer, ni rivaliser, avec la chaude camaraderie de l’arène. Mais c’est déjà mieux que rien…

1 : Se rappeler qu’Angron a été le 17ème Primarque découvert, et que l’Empereur en avait certainement par-dessus la tête des biberons et changements de couches à ce stade.

AVIS:

Je dois reconnaître que mon appréciation de cette nouvelle de Matthew Farrer a évolué au cours du temps. Lors de ma première lecture, j’avais été un peu déçu par ce qui m’était apparu comme une histoire simpliste, mettant en scène des personnages l’étant tout autant (un Primarque éructant de rage en mode Hulk, et un Space Marine encaissant les coups en lui refaisant son éducation). À présent, et même si je comprends toujours ce qui m’a poussé à émettre ce premier jugement, j’ai une vision plus favorable de ce ‘After Desh’ea’, que j’ai trouvé être plus complexe qu’il n’y paraissait.

Pour remettre en contexte le boulot effectué par Farrer, un auteur plutôt doué de la BL, avec cette nouvelle, il faut se rappeler que nous étions au tout début de l’Hérésie, dont les personnages étaient donc moins caractérisés qu’ils le sont aujourd’hui. Pour Angron, je pense même qu’il s’agissait de sa première apparition dans la série comme personnage de premier plan1, avant qu’ADB (entre autres) ne vienne s’occuper de son cas. Le fluffiste savait juste que ce Primarque avait été secouru contre son gré par l’Empereur d’une mort certaine à laquelle il était résigné, et que ce ressentiment allait le pousser à se rebeller contre son « sauveur » des années plus tard. Tout l’enjeu était d’expliquer de manière satisfaisante comment un gladiateur aux tendances homicidaires établies avait pu donner la patte à un maître honni pendant une période de temps assez longue, et n’était pas entré immédiatement en conflit avec son supérieur hiérarchique. Sur ce brief vraiment casse-gueule, Farrer est parvenu à livrer une copie relativement propre, ou en tout cas bien conçue, qui pemet au lecteur de suivre la progression émotionnelle et intellectuelle du Primarque, depuis sa téléportation sauvage en orbite, jusqu’à l’acceptation de ses nouveaux rôle et statut. D’abord convaincu d’avoir échappé à une tyrannie pour une autre, il finit par comprendre pourquoi les War Hounds n’ont pas cherché à riposter à ses attaques, et trouver une raison de respecter un Empereur très peu favorablement mis en avant dans cette nouvelle, lorsqu’il apprend que son père est un guerrier qui mène ses hommes à la bataille. La transition du point A au point B n’est certes pas facilitée par les caprices et tics nerveux du Primarque, qui use du pauvre Khârn comme un sac de frappe pour réguler son humeur mutine, mais on sent que Farrer avait à cœur de donner une justification logique à un ralliement peu évident, pour dire le moins.

Khârn, de son côté, est dépeint pour la première fois comme un individu sensé et sensible (qualificatifs ne s’appliquant plus guère à la fin de sa carrière), ce qui a dû surprendre plus d’un lecteur s’attendant sans doute à ce que Farrer prenne le pas de King à cet égard. Presque quinze ans plus tard, et grâce aux romans et nouvelles s’étant inscrit dans la droite ligne de ce choix de Matthew Farrer, cette divergence notable est parfaitement digérée, et, si je ne peux pas parler pour l’ensemble des hobbyistes, je suis en ce qui me concerne très satisfait de la profondeur du personnage, qui justifie à lui seul mon intérêt pour cette Légion de brutasses. Bref, si vous avez aimé le guerrier badass engagé dans une bromance déchirante avec ce vieil Argel Tal2, le combattant implacable animé par un sens du devoir chevillé au corps ayant maintenu les World Eaters à peu près dans les clous (du Boucher) pendant une bonne partie du mandat de PDG (Primarque Découpeur Général) d’Angron, et le fils dévoué prêt à se damner pour garder son père parmi les siens, vous pouvez remercier Matthew Farrer d’avoir établi ces fondations dans sa nouvelle, comme Perturabo l’a fait pour la digue impériale sur Nove Shendak. C’est d’ailleurs l’occasion pour moi de souligner que l’auteur donne également quelques éléments fluffiques dignes d’intérêt, tant au niveau micro (les traditions martiales de Nuceria) que macro (l’origine des noms de la 12ème Légion) et même meta (Big E est vraiment un très mauvais père) dans son récit, ce qui doit également être mis à son crédit.

Finalement, After Desh’ea a permis de poser de nombreuses bases de l’héritage « hérétique » des World Eaters, depuis la personnalité complexe de son Primarque et le rapport ambivalent de ce dernier avec ses fils génétiques, qu’il placera toujours en-dessous de ses premiers compagnons d’armes, jusqu’à l’adoration masochiste des World Eaters pour Angron, qui a poussé les premiers à des sacrifices toujours plus importants pour gagner l’amour et le respect du second. Il pose également Khârn comme l’excellent personnage que nous connaissons aujourd’hui, un guerrier réfléchi et pragmatique, qui finira par embrasser sa destinée et sombrer dans une folie meurtrière dont les écrits de Bill King et sa description dans le fluff de 40K se font écho (ce qui lui donne une profondeur tragique indéniable). Voilà pourquoi je considère que cette nouvelle a, au minimum, eu un impact fort sur le reste de l’Hérésie, au moins en ce qui concerne la 12ème Légion, et mérite donc la lecture à ce titre seul, mais peut également être appréciée pour la description que l’auteur fait d’Angron, tout à la fois une bête de guerre sanguinaire devant lutter contre les Clous du Boucher en permanence, un guerrier honorable et fidèle à ses compagnons, et un être à l’intelligence supérieure capable d’intégrer rapidement les informations que lui livre Khârn sous ses abords de primitif balbutiant. Bref, il y a du potentiel ici, peut-être pas superbement exprimé par Farrer3, mais présent tout de même. Dommage que l’auteur en soit (presque) resté là pour l’Hérésie d’Horus, un roman de sa main sur les World Eaters aurait été très intéressant…

1 : Je fais abstraction de son rôle de taupe de choc dans ‘Galaxy in Flames’.
2 : Et qui accomplira le rêve de tous les lecteurs de l’Hérésie d’Horus en bottant les fesses de ce faux jeton d’Erebus en one to one.
3 : Et peut-être affaibli par la traduction en français (que je n’ai pas lue). Difficile de transcrire dans une autre langue les borborigmes d’Angron de façon satisfaisante. En tous cas, j’ai trouvé qu’en anglais (et peut-être est-ce dû au fait que ce n’est pas ma langue natale) cela passait plutôt bien.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Les World Eaters ont eu la chance de se faire attribuer à Aaron Dembwki-Bowden lors de la répartition des Légions parmi les auteurs de la Black Library, ce qui leur a permis de gagner une profondeur intéressante par rapport à l’image de bêtes furieuses que le fluff leur avait accolé. Matthew Farrer a certainement joué un rôle dans cette « rédemption littéraire », qui est une des vraies réussites de l’Hérésie d’Horus, et le choix d’intégrer ‘After Desh’ea’ à ce recueil ne me surprend pas, même si le propos de cette nouvelle concerne d’abord Angron, et non pas sa Légion. Comme la trajectoire tragique du Primarque a induit en large partie celle de ses fils génétiques, trop attachés à lui pour réaliser qu’ils allaient dans la mauvaise direction, cette décision de la BL est compréhensible et pertinente. Nottingham aurait pu doubler la mise, comme pour d’autres Légions présentées dans ce recueil, avec le court mais efficace ‘Lord of the Red Sands‘.

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Ultramarines – The Laurel of Defiance (G. Haley) :

INTRIGUE:

The Laurel of DefianceLa Croisade des Ombres a été gérée, ou peu s’en faut, par les héroïques Ultramarines et l’ambiance est donc festive sur Macragge, centre politique du tout nouvel Imperium Secundus voulu par Roboute Guilliman. Mister Théorie_Pratique a organisé une cérémonie grandiose dans sa capitale pour honorer et récompenser les innombrables héros, civils et militaires, humains et Astartes, qui ont contribué à remporter cette éclatante victoire pour le camp loyaliste. Parmi eux, on trouve le Capitaine de la 90ème Compagnie des Ultramarines, le peu mondain Lucretius Corvo. Grâce à son leadership inspiré sur le monde d’Astagar, ses hommes ont mis en échec l’invasion chaotique de cette paisible planète de second ordre, lui gagnant le titre de Tueur de Titans dans la foulée (une accolade qu’il n’apprécie guère, mais il n’est pas d’une humeur très enjouée de toute façon). Nous suivons donc en parallèle la dure campagne des bleusailles contre les fanatiques de Lorgar et Angron, et le combat tout aussi éprouvant de Corvo contre le décorum et le protocole alors qu’il participe en traînant des savates énergétiques aux interminables cérémonies et soirées de Guilliman. Son arme secrète : se murger sans retenue (c’est au moins vrai pour l’un des deux événements évoqués ci-dessus).

Faisons les choses dans l’ordre et commençons par la défense d’Astagar. Ayant été retenu par l’avarie d’un moteur Warp sur le chemin de Calth, Corvo rata la surprise party donnée par les Word Bears en souvenir de Monarchia à leurs cousins a-do-rés, et fut donc surpris de constater que les renégats attaquaient comme des patates. Son petit rictus de supériorité fut toutefois remisé au placard de son Rhino de fonction lorsque les hérétiques dévoilèrent leur arme secrète : un Titan Warlord tombé dans la marmite du Chaos lorsqu’il était petit en kit1. Malgré le fait qu’avoir une langue et une truffe articulées est indéniablement cool, cette abomination (Ferghaaaaaaast de son petit nom) ne pouvait être laissée à vagabonder dans les rues d’Astagar les Vignes, mais sa vitesse et son caractère mutin empêchèrent dans un premier temps les Ultras de se débarrasser de cette menace d’une manière conventionnelle (et donc ennuyeuse), c’est-à-dire en la mettant face à un escadron de Shadowswords. N’écoutant que son instinct – ainsi qu’une remarque pleine de bon sens d’un de ses subalternes, qui ne bénéficia d’aucune médaille pour sa contribution, lui – Corvo décida de traiter le Warlord comme une bête fauve, et lui tendit un piège digne de Rahan, fils des âges farouches.

Dans les grandes lignes, il s’agît d’attirer la grosse nuisance en lui mettant un Rhino dans le champ de vision sur une place préalablement minée par les Ultramarines, et de faire péter les charges une fois le Titan en position. Brusquement plus si agile que ça, la machine chaotique n’eût d’autre choix que de sombrer dans la dépression (comme Corax avant elle) lorsque le sol se déroba sous ses gros petons, même si son augmentation « queue de singe » lui permit un instant de retarder l’échéance en se retenant à la statue de Konor Guilliman la plus proche. Iconoclaste dans l’âme, Corvo n’hésita pas un instant à déclarer une mêlée ouverte sur l’ennuyeux piédestal, dont l’effondrement provoqué par le solide pack d’avants de sa Compagnie mit fin au numéro d’équilibriste de Ferghast. Quelques tirs de fuseurs plus tard, la bête était hors d’état de nuire, et sa perte mina tant le moral des renégats qu’ils ne tardèrent pas à se faire écraser à leur tour.

Quelques semaines plus tard, sur Macragge, le même Corvo s’échine à esquiver les questions gênantes (comprendre : les questions) des participants à la soirée de pré-remise des médailles à laquelle il est forcé d’apparaître. Après s’être fait tenir la jambe par la charmante Medullina, qui ne réussit pas à le mettre sur son tableau de chasse, et avoir remonté le moral d’un autre Légionnaire habité par un sérieux syndrome de l’imposteur, le bon Capitaine va prendre l’air sur le balcon du palais où se tient la petite sauterie, et tombe sur l’Archiviste Titus Prayto, déployé comme agent de sécurité par un Guilliman très conscient de la tendance des Night Lords à venir pourrir les fêtes des autres, à plus forte mesure quand leur Primarque est en zonzon à proximité. Grâce à ses pouvoirs psychiques, Prayto repère sans mal la sale idée qu’a Corvo pour sa participation à la cérémonie du lendemain, et conseille à son frère d’armes de la jouer corporate, pour le bien de tous. « Tu peux siffler beau merle » répond un Corvo aussi éméché qu’un Astartes peut l’être, avant de monter une frappe préventive sur le buffet le plus proche…

Début spoiler…Et le jour suivant, on se rend compte que ce n’était pas une promesse d’ivrogne. Corvo accepte de recevoir les Lauriers de la Résistance que lui remet Guilliman devant la foule en délire (ou peut-être pas, car à ce stade la cérémonie durait déjà depuis 12 heures), mais il refuse en revanche de prêter à nouveau serment à sa Légion et à l’Imperium, comme tous ses prédécesseurs l’ont pourtant fait, jetant un malaise malaisant sur l’auguste assemblée. Shocking. Lorsque ce rigoriste de Lion El’Jonson lui demande de se justifier, il affirme qu’une fois c’est bien assez, car le serment d’un Ultramarine est inviolable (ce qui fait passer tous les copains qui sont passés avant lui pour des trompettes, au passage). Sourire crispé de la part de Guilliman, qui arrive tout de même à retomber sur ses pattes en faisant chanter le public (quel showman tout de même), pendant que Sanguinius se cure le nez d’un air pénétré et le Lion fronce les sourcils si fort qu’il commence à fissurer le noyau de Caliban.

La nouvelle se termine sur un dernier échange lapidaire entre Corvo et le Primarque Dark Angels, qui fait remarquer au petit impertinent que son armure est bien dépareillée pour un Ultramarine, ce à quoi notre héros répond « k » et s’en va comme un prince. La légende raconte que c’est à ce moment précis que Lionel décida qu’il préférait encore tenter sa chance à travers la Tempête de la Ruine plutôt que de continuer à se faire mal parler par le premier Schtroumpf venu. L’histoire était en marche…Fin spoiler

1 : Et à propos de marmite, son arrivée sur Astagar s’accompagna d’un tsunami de sang à l’ouverture de son vaisseau de transport, repeignant les rues de la capitale ainsi que l’armure de tous les Ultramarines du coin (dont Corvo) en cinq secondes. C’est peut-être de là que vient son goût pour l’héraldique clivante.  

AVIS:

Guy Haley honore un cahier des charges fourni dans ‘The Laurel of Defiance’, qui est à la fois une Space Marinade correcte et la réponse à la question : « et si on faisait référence à tous les événements de l’arc Ultramarines couverts dans l’Hérésie jusqu’ici ? ». La bataille de Calth, l’Imperium Secundus, l’emprisonnement du Nighthaunter, le Pharos… Haley met un point d’honneur à couvrir tous les faits saillants de sa faction d’adoption, pour un résultat qui fera sans doute la joie de l’expert, mais restera hors de portée du néophyte. Il prend aussi soin de lever un peu le voile sur les origines des Novamarines, ce qui devrait intéresser les fans du 40ème millénaire. Pour résumer : très gratifiant si vous avez pris le temps de vous pencher sur l’arc Unremembered Empire, sympathique sans plus sinon.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme les White Scars, les Ultramarines ont été dotés d’un historique hérétique particulièrement riche lorsque la Black Library s’est piquée de raconter cet épisode par le menu. L’Imperium Secundus, aussi appelée boulette de Guilliman dans certains cercles autorisés, est un arc intéressant de la saga, et il n’est donc pas étonnant que la BL ait choisi une nouvelle qui se situe au milieu de ce dernier, afin d’inciter le chaland à creuser dans cette direction après avoir terminé ‘The Laurel of Defiance’. Reste à savoir si le chaland en question aura l’envie et la motivation nécessaires pour relier les bribes d’informations et les mentions passagères que Haley fait aux événements précédant cette remise de médailles très mondaine, ou laissera ce (gros) morceau en plan. Mine de rien, tomber sur un passage comme celui-ci quand on débarque complètement dans l’Hérésie d’Horus peut être un peu fort de café !

Personnellement, j’aurais misé sur le plus simple à appréhender ‘Rules of Engagement’, qui a pour lui de présenter le véritable héritage éternel de Papa Schtroumpf : le Codex Astartes. Mieux adapté à l’exercice pédagogique que constitue ‘Lupercal’s War’ en théorie, mais moins marketing en pratique : on sait comment ce genre de dilemme est tranché.

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Death Guard – Daemonology (C. Wraight) :

INTRIGUE:

DaemonologyLa planète-bibliothèque Terathalion coulait des jours paisibles (et silencieux) depuis des décennies, ayant déplacé son allégeance de l’Ipsissimus (#TeamMagnus) à l’Impérium (#TeamPépé) après son annexion pacifique lors de la Grande Croisade. Plus occupés par la refonte de leur système de rayonnage (par auteur et/ou par spécialité ?) que par les choses bassement terre à terre comme euh… la guerre, les Terathalionnais ne se rendirent compte qu’indirectement du début de l’Hérésie, lorsque leurs grands copains Thousand Sons cessèrent de leur rendre visite. Les fils de Magnus ayant pris soin de rendre tous les bouquins qu’ils avaient emprunté chez leurs voisins, les autorités planétaires n’investiguèrent pas cette absence prolongée, et furent donc prises au dépourvu lorsque l’Endurance et une escadre de vaisseaux de la Death Guard vinrent se mettre en orbite haute au-dessus de Terathalion. Avec leur brutale efficacité habituelle, Mortarion et ses fils bombardèrent méthodiquement la planète, rasant toutes ses villes et réduisant en cendres ses inestimables archives. Ceci fait, le Primarque se téléporta à la surface du monde martyrisé afin de localiser la chose pour laquelle il avait fait le déplacement, pendant que ses hommes s’occupaient en massacrant les survivants désorientés.

Pour tenter de comprendre la raison de ce coup de folie, il faut remonter quelques décennies plus tôt, à l’époque où l’Empereur avait ramené avec lui sur Terra un Mortarion fraîchement retrouvé et dans un état physique et psychologique déjà inquiétant. Si le Maître de l’Humanité comptait à la base passer du temps avec son fiston pour resserrer les liens les unissant avant de l’envoyer conquérir la galaxie en Son nom, Ses divers projets ne tardèrent pas à L’accaparer totalement, laissant le Primarque anémié déambuler dans les couloirs du Palais Impérial sans supervision.

Comme toujours dans ces cas-là, il revint à Malcador de gérer la situation, et lorsque le service de sécurité fit une annonce micro pour demander à ce que le tuteur légal du petit Morty vienne le chercher au niveau du portail dans la toile (qui était à l’époque en chantier), le Régent de Terra se hâta en direction du sous-sol du Palais. Il n’était en effet pas nécessaire de disposer de la panoplie de pouvoirs psychiques de Malcador pour deviner qu’un individu aussi warpophobe que Mortarion soit révulsé par le grand dessein de son paternel, et puisse en conséquence agir de manière inappropriée. Après quelques minutes de discussion, Malcador réussit à attirer l’ado rebelle taille XXXXL jusque dans ses quartiers, afin d’avoir un tête à tête d’aberration à expérimentation. Echange qui se passa relativement bien, à l’aune des rapports compliqués entretenus par le Sigilite et les Primarques, puisque Mortarion se contenta d’étrangler légèrement son interlocuteur dans un accès de colère, reprochant à l’Empereur et à son bras droit de n’être pas très réglo à propos de leur rapport à la « sorcellerie ». Et en effet, prêcher une Vérité Impériale établissant l’absence du surnaturel et du divin d’un côté, et autoriser le recours aux pouvoirs psychiques de l’autre, c’est faire preuve d’une souplesse d’esprit qui se rapproche dangereusement de l’hypocrisie. « Si c’est comme ça, votre croisade, ce sera sans moi, na » conclut Mortarion d’un air boudeur.

S’étant remis le larynx en place, Malcador tenta d’amadouer cet enfant à problèmes en lui montrant que Pépé et lui travaillaient depuis des années sur un projet devant se terminer sur le monde de Nikaea, et dans lequel lui, Mortarion, aurait un grand rôle à jouer. Il faudrait seulement attendre le bon moment pour pouvoir prêcher sa cause devant l’Imperium entier, et, peut-être, obtenir l’interdiction pure et simple des pouvoirs psychiques dans les Legiones Astartes. Si le flashback d’interrompt avant que nous ayons pu voir Mortarion conclure un pacte avec son auguste géniteur sur ce sujet, sa coopération à la Grande Croisade laisse peu de doutes sur le fait qu’un compromis ait été trouvé.

Retour sur Terathalion, où la citoyenne Lermenta est venu faciliter la traque du Faucheur en chef en se jetant littéralement dans ses bras alors qu’elle tentait de fuir les combats. C’est en effet elle, ou plutôt ça, que Mortarion était venu chercher à la surface : un Démon ayant possédé un être humain, et qu’il compte utiliser pour obtenir des informations complémentaires sur le Warp, afin de combattre son influence néfaste (vaste programme). Ramenée dans les quartiers du Primarque sur l’Endurance, remplis jusqu’au plafond de grigris et autres colifichets sensés agir comme des protections contre l’Immaterium, Lermenta se retrouve attachée au mur et interrogée par un Morty se présentant comme un docteur es-ésotérisme, ce qui fait bien rire notre Démon. Etant elle-même affiliée à Tzeentch, alors qu’elle perçoit que son interlocuteur a été marqué par Nurgle, Lermenta décide de faire tourner en bourrique Mortarion en le forçant à recourir à une invocation arcanique afin de la bannir, au lieu de l’approche scientifique qu’il prétendait avoir développé à force d’étude et d’observations (mais qui ressemble furieusement à un match de MMA vu de loin). S’étant facilement libérée de ses chaînes et de son apparence humaine, la captive du Primarque titille un peu le cuir épais et la nuque roide de son hôte, et lui lâche un beau Hasta la Plagua, Baby au moment de repartir dans sa dimension natale. Ces résultats peu concluants ne font cependant que renforcer Mortarion dans son obsession anti-Warp, et la nouvelle se conclut sur la résolution prise par ce dernier de poursuivre ses investigations pour renforcer ses connaissances de l’ennemi, quitte à devenir ce qu’il déteste par­-dessus tout. 10 millénaires plus tard, les résultats parlent pour eux-mêmes…

AVIS:

Une nouvelle plus riche en révélations qu’en rebondissements, et qui fera donc la joie des fluffistes avertis (qui découvriront que Nikaea n’a pas été aussi impartial que les autorités voudraient qu’on le croit…) plus que des lecteurs occasionnels, qui pourraient se demander avec raison s’il est bien raisonnable de détruire une planète entière pour mettre la main sur un Démon (même pas majeur ou important, en plus), et souligner que Mortarion a tout de même été très chanceux de localiser en trente minutes max sa cible parmi une population s’élevant en milliards, et sur un périmètre aussi étendu qu’une métropole majeure. On pourrait me rétorquer que cela était en fait voulu par les Dieux du Chaos, la capture de Lermenta faisant progresser la corruption du Primarque et donc étant favorable aux Fab Four, mais comme Wraight ne donne aucun indice dans sa narration que c’était bien le cas, l’hypothèse du gros coup de bol WIJHesque tient la route.

On peut aussi remarquer quelques faux raccords entre la version de Mortarion de Chris Wraight et celles des autres auteurs de la Black Library ayant écrit la geste du Primarque asthmatique. Ainsi, James Swallow nous apprend dans ‘Lantern’s Light’ que la période probatoire durant laquelle l’Empereur a gardé un œil sur Son fils avant de lui donner les clés de sa Légion s’est passée dans les alentours de Barbarus, et non sur Terra comme c’est sous-entendu ici. De même, Mortarion semble être à deux doigts de basculer dans l’étreinte amicale de Nurgle à la fin de ‘Daemonology’, alors que pour Swallow (encore) et Annadale, cet événement arrivera bien plus tard et sera en grande partie orchestré par Typhon. Rien de très choquant, mais la continuité est toujours préférable.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Même si je considère ‘Daemonology’ comme une nouvelle de bonne qualité, elle ne répond selon moi pas assez au cahier des charges de ‘Lupercal’s War’ pour être considérée comme un bon choix de la part de la Black Library. Elle se concentre en effet davantage sur des arcs secondaires de l’Hérésie (et notamment l’avant Nikaea) et sur la personnalité de Mortarion, deux sujets intéressants en tant que tel, mais hors de propos ici ; que sur la Death Guard en elle-même. La description du début de l’attaque de la Légion sur Terathalion permet certes de se rendre compte de la brutalité industrielle et dépassionnée dont sont capables les ex-Dusk Raiders, mais le reste de la nouvelle ignore totalement le Death Guard moyen pour se concentrer sur la triade Mortarion – Malcador – Lermenta. À tout prendre, je pense que ‘Exocytosis’ aurait mieux fait l’affaire : même si cette histoire tourne exclusivement autour du premier Capitaine Callas Typhon, elle raconte son passage à Nurgle, qui peut être considéré comme la base de l’identité de la Death Guard hérétique.

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Thousand Sons – Rebirth (C. Wraight) :

INTRIGUE:

RebirthRetour au bercail compliqué pour le Capitaine Menes Kalliston et son escouade de Thousand Sons. Partis au Warp vauvert sur les instructions de leur Primarque six mois auparavant, ils ont tout raté de l’arrivée remarquée des Space Wolves, Custodiens et Sœurs de Bataille sur Prospero, et de l’expulsion dans l’Immaterium dont le Cyclope et ses quelques fistons survivants ont fait les frais1. Malgré la présence d’un Corvidae2 (le Sergent Revuel Arvida) dans son effectif, Kalliston ignore tout bonnement ce qu’il s’est passé sur la planète des sorciers, transformée en planète des cendriers par les bons soins des loulous pendant son absence. Pas très pro pour un Thousand Sons, vous en conviendrez. C’est donc ce qui motive notre héros à aller mener une petite due diligence sur le terrain, malgré les vagues mais mauvais pressentiments de son subalterne.

Sur place, les légendaires facultés cognitives des fils de Magnus ne mettent pas longtemps à conclure que quelque chose, ou quelqu’un, hante toujours la surface dévastée de Prospero. Les indices concordent vers la piste lupine, d’autant plus aisée à soupçonner que l’inimité entre les frères Husse (Lemaneur et Magueunne) est connue de tusse, euh, de tous. Ces savantes spéculations sont toutefois repoussées à plus tard lorsque l’un des gardes du corps de Kalliston prend un bolt en pleine tête, ce qui donne d’autres chats à fouetter à l’inspecteur Gadget. Walking like an Egyptian jusqu’au couvert le plus proche, il donne l’ordre à ses hommes de le rejoindre pour essayer de regagner ensemble leur transport…

J’opère ici une ellipse concave qui me permettra de ménager un peu de suspens à mon propos. Nous retrouvons un peu plus tard Kalliston en train d’émerger du kohl (le cirage, c’est bon pour les Dark Angels), nu comme un ver et attaché à une chaise dans une pièce plongée dans la pénombre. « Comme dans Casino Royal ! » réalise notre héros cultivé, qui se prend alors à craindre pour l’intégrité de ses bijoux de famille. Enfin, c’est sans doute ce qu’il aurait pensé s’il se souvenait de quelque chose. En l’état, le mauvais coup qu’il a reçu sur le crâne lorsqu’un missile krak est venu le photo-bomber lui a retourné le ciboulot, au point qu’il a même du mal à se souvenir de qui il est, et de comment il est arrivé ici. Quant à ses pouvoirs psychiques, ils commencent péniblement à revenir une fois son interrogatoire débuté. Car, bien évidemment, cette mise en scène funeste a pour but de prévenir le lecteur que quelqu’un, ou quelque chose, a les moyens de faire parler Kalliston… qui est plutôt OK avec ça. Après tout, il lui faut du temps pour pouvoir lancer un sort de démenottage que ses capacités d’Athanean3 ne laissent absolument pas envisager. La magie de… la magie. Bref.

Rebirth_IllustrationLa discussion s’engage donc entre le Capitaine abandonné et son interrogateur, qui prend bien soin de rester dans le noir pour laisser planer un vieux doute sur son identité. Mais on ne la fait pas facilement à ce rusé de Kalliston, qui, d’après la respiration bestiale, la voix gutturale et la tendance à l’énervement de son interlocuteur, a tôt fait de comprendre qu’il se trouve en présence d’un Space Wolf. Tout content de sa propre ingéniosité, il se permet même de titiller l’égo de son tortionnaire, oubliant un peu vite que le type en peau de slip énergétique attaché sur une chaise, c’est lui. Résultat des courses, il se mange une belle correction après avoir demandé à appeler son avocat, trait d’humour évidemment peu partagé par son vis-à-vis. Ce dernier riposte toutefois (autrement que par la violence) en faisant exprès de ne pas révéler à Kalliston ce qui s’est passé sur Prospero, information que le Thousand Son donnerait cher pour connaître. Après quelques minutes d’échanges de petites piques et de grosses torgnoles, c’est enfin le moment de jeter bas les masques, ou, dans notre cas, d’allumer la lumière. Et le colosse musculeux aux yeux injecté de sang et au comportement maniaque qui fait face au prisonnier se révèle être…

Début spoiler…Line Renaud. Ou plutôt, son descendant lointain, Khârn des World Eaters (et pourquoi pas d’abord, hein ?). Incompréhension compréhensible de la part de Kalliston, qui se trouve très Kallis-con devant ce retournement de situation. Pour sa défense, rien ne ressemble plus à un loup qu’un chien, même si on peut se poser la question pour les carlins. Bref, les Thousand Sons ont été pris en chasse et massacré par les suivants d’Angron, qui sont arrivés sur la planète après la bagarre (ce qui a dû les énerver) pour aller effacer le numéro personnel d’Horus du téléphone de Magnus (ou l’équivalent), ce qui a dû les mettre vraiment en rogne. Ils se foutent bien de savoir quel camp ont rejoint les Astartintellos, qu’ils méprisent copieusement, comme le reste des Légions d’ailleurs. Kalliston, qui pense que son vis-à-vis cherchait également la réserve de Xanax de Magnus pour gérer son stress de façon plus efficace, a alors la mauvaise idée de proposer un deal à Khârn : une thérapie complète assortie d’un stage de méditation tantrique pour retrouver sa paix intérieure, contre sa libération. Se passe alors une longue seconde pendant laquelle l’Ecuyer d’Angron semble hésiter… avant de décider bien sûr de corriger le maraud qui a osé sous-entendre qu’il était fou à lier. Et contre un personnage nommé spécialiste du corps à corps, notre héros ne fait pas le poids, même s’il arrive à se libérer de ses liens pour la bagarre finale. Surclassé par la puissance de son adversaire, Kalliston finit donc au tapis, puis dans le tapis, puis sous le tapis, au fur et à mesure que Khârn le réduit en porridge. Personne n’aime les psychiatres, c’est connu.

Finissons notre histoire et revenons en arrière pour suivre l’émancipation du dernier Thousand Son en un seul morceau de la nouvelle, le Sergent Arvida. Grâce à ses super pouvoirs de divination, il arrive à esquiver les ennemis et les balles avec un peu plus de succès que ses camarades, et échappe ainsi à la mort et à la capture. Le poids du nombre l’empêchant de secourir Kalliston, et son transport ayant été détruit par les World Eaters, notre loup solitaire joue un peu avec le feu en collant un bolt dans le casque du Capitaine Khorneux fort occupé à violenter la dépouille mortelle de ses frères d’armes, avant de partir comme un dératé dans le dédale carbonisé de Tizca. Tout finit cependant bien pour notre héros de rechange, dont le don de double vue lui a donné la certitude qu’il repartirait de la planète en vie. Bienvenue au club des personnages nommés, p’tit gars ! N’oublie pas de prendre tes chaussettes de scenarium avec toi pour la suite !Fin spoiler

1 : Après tout, il ne faut pas compter sur Leman Russ pour appliquer la trêve hivernale. Ça doit bien le faire rigoler.
2 : Les présentateurs météo de la Légion (ils voient le futur).
3 : Les psychologues de la Légion (ils lisent dans l’esprit).

AVIS:

Pour ses débuts dans l’Hérésie, Chris Wraigth a voulu soigner son lecteur avec une nouvelle à suspens. Cette intention louable s’est toutefois heurtée à une réalité que le futur seigneur de Terra ne pouvait pas vraiment deviner au moment où il a soumis son texte à la BL: l’évolution du personnage de Khârn dans la série. Car si on a droit dans ce ‘Rebirth’ à un berzerk de Khorne écumant de rage et guère maître de ses émotions, dans la droite lignée du positionnement choisi par Bill King pour cette figure chaotique dans ses propres écrits1, l’écuyer d’Angron est au contraire devenu sous la plume d’Aaron Dembski-Bowden la tête pensante et froide de sa Légion, jusqu’à un stade avancé de l’Hérésie tout du moins. De ce fait, le voir sombrer dans une démence sanguinaire au lendemain du sac de Prospero apparaît avec le recul comme un faux raccord narratif, dont Wraight n’est certes pas coupable, mais qui réduit le plaisir de lecture de cette nouvelle.  Le plus ironique dans tout ça est que n’importe quel autre Capitaine des World Eaters aurait magnifiquement fait l’affaire, alors que la présence au casting de cette célébrité, utilisée donc à contre-emploi par l’auteur, dessert ce ‘Rebirth’.

Cette déception évacuée, il faut reconnaître que Chris Wraigth livre une histoire assez correcte, sérieusement bâtie et respectueuse du fluff Thousand Sons et hérétique déjà établi – à l’exception de celle notée ci-dessus, évidemment – qui lui permet d’introduire son personnage récurrent d’Arvida, que l’on retrouvera (comme présagé en conclusion de la nouvelle) plus loin dans l’Hérésie2, et pas forcément du côté où on l’attendait. Et c’est plutôt heureux, car le « héros » malheureux Kalliston n’inspirait ni intérêt, ni sympathie à l’auteur de ces lignes. Ce ne sont pas toujours les meilleurs (personnages) qui partent les premiers, heureusement…

1 : Et dans une moindre mesure, Graham McNeill et Ben Counter dans ‘False Gods’ et ‘Galaxy in Flames’.
2 : ‘Allegiance’, ‘The Last Son of Prospero’.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Je peux comprendre pourquoi la Black Library a choisi de placer ‘Rebirth‘ dans l’emplacement dédié aux Thousand Sons dans ce recueil : il s’agit du premier épisode de la saga de Revuel Arvida, et avec un peu de chance, il intéressera suffisamment le lecteur pour que ce dernier achète les bouquins où cette dernière se poursuit. Ce raisonnement marketing ne fait cependant pas grand sens d’un point de vue didactique, ce qui aurait dû être la priorité des éditeurs de ‘Lupercal’s War‘: outre le fait que cette nouvelle est finalement plus liée aux World Eaters qu’aux Thousand Sons, elle ne contextualise pas assez à mes yeux l’incendie de Prospero. Plus grave, elle ne permet pas au newbie de comprendre pourquoi Magnus n’a rien fait de mal, ce qui est la BASE de la culture Thousand Sans, reconnaissons-le. Un meilleur choix aurait été ‘Thief of Revelations‘, avec une mention honorable pour ‘The Sixth Cult of the Denied‘, qui a l’énorme avantage d’expliquer en détail le système de cultes que Wraight mentionne rapidement ici.

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Sons of Horus – Little Horus (D. Abnett) :

INTRIGUE:

Little HorusDans la famille Horus, il y a bien sûr le père, Lulu la Percale1, mais il y a aussi le fils, Aximand, surnommé Horus Minus par ses petits camarades de jeu. Ou l’autre Horus, si on veut être corporate. Capitaine de la 5ème Compagnie des Sons of H…imself et membre du Mournival, c’est un individu qui compte au sein de la Légion. Son tort aura de ne pas avoir la personnalité, la fabuleuse destinée, ou le destin tragique de ses condisciples mal lunés, ce qui l’a contraint à jouer les seconds couteaux pendant ce début d’Hérésie. Tout le monde ne peut pas se retrouver sous les feux des projecteurs, il faut bien qu’il y ait des gens qui se battent (ou font semblant de se battre) à l’arrière-plan. Pourtant, notre héros du jour a des arguments à faire valoir, à part sa première place au concours inter-Segmentum des sosies de Michel Blanc, s’entend. C’est ce que cette nouvelle d’Abnett nous propose de découvrir.

Le propos prend place quelques temps après les événements d’Isstvan, alors que les Sons of Anarchy Chaos commencent leur course de fond en direction de Terra. Sur leur chemin se trouve le monde de Dwell, farouchement loyal à Pépé et trop militarisé pour être ignoré par les renégats. De plus, un petit comique en fer blanc du nom de Shendrak Meduson commence à faire parler de lui, et pas en bien. Très mécontent d’avoir retrouvé son Primarque rétréci à l’essorage, ce Capitaine Iron Hand a mis sur pied une force de guérilla galactique, qui s’est faite une spécialité de titiller les flancs du Maître de Guerre. Si Meduson parvient à rallier Dwell à sa cause, son pouvoir de nuisance en sera décuplé, et ça, Horus ne le souhaite pas le moins du monde. Alors que la Légion se prépare à illuminer la planète, nous surprenons une discussion entre les derniers Mournivaliers encore debout. Aximand, qui s’est mis à rêver que quelqu’un le regardait, et à entendre une respiration mystérieuse autour de lui depuis la purge des Sons, serait pour une reconstitution de cette saine institution. Il faudrait pour cela des candidats dignes de ce nom, et alors que lui penche pour un petit nouveau prometteur du nom de Grael Noctua, même pas encore Capitaine mais c’est pas grave, Abaddon se contente d’égrener les noms des types de sa Compagnie jusqu’à ce qu’Aximand finisse par lui accorder Falkus Kibre. Tope là mon gaillard, cochon qui s’en dédit.

Chargé de la prise du Mausolytique, croisement entre une morgue et une bibliothèque où les défunts de Dwell sont gardés sur étagère pour que leurs descendants puissent bénéficier de leur savoir, Aximand entraîne ses hommes, ainsi que son stagiaire Noctua, à l’assaut du complexe défendu par les Tyjunate Compulsories, une garde d’élite dont la chance est de pouvoir compter sur des boucliers énergétiques de bonne qualité. Résultat des courses, les bolts des Astartes se révèlent assez peu efficaces, ce qui chagrine profondément Horus Minus. Heureusement, la honte d’un retard lui est épargnée par la bonne idée de son rookie, qui suggère tout bêtement de foncer dans le tas l’épée au clair, ce qui marche du (marteau) tonnerre. Vive la jeunesse. Emporté par son élan, et bien aidé par les moulinets ravageurs de sa latte personnelle, qu’il a spirituellement appelé Mourn-it-all2, Aximand se retrouve un peu isolé en tête de l’assaut, et manque de se faire occire par la contre-attaque féroce d’un Iron Hand isolé, qu’il identifie comme étant Bion Henricos, l’un des lieutenants de ce diaaaaaable de Meduson. Il faut dire que ses hallucinations auditives l’ont distrait au pire moment, et il s’en est fallu d’un rien pour que notre héros se fasse bellement navrer par son adversaire, qui a une grande épée et sait bien s’en servir. Après quelques passes d’armes dans le Mausolytique, artistement décoré de grandes statues blanches, les renforts finissent enfin par arriver du côté renégat, permettant à Aximand de vaincre – en traître (c’est fluff) – Henricos. Une question lui brûle alors les lèvres : pourquoi son assaillant était il seul ?

Début spoiler…Et la réponse est : il ne l’était pas. Car les statues blanches de la pièce n’étaient pas en marbre mais en chogorite, et les White Scars les plus patients de la galaxie peuvent enfin déclencher leur attaque, menés par ce rusé de Hibou Khan.Les statuesques Astartes espéraient mettre le sabre sur Horus, mais faute de grives… Se rouler dans la farine pour rendre la pareille à son adversaire, c’est beau tout de même. Il y a un mot de Chogoris pour ça d’ailleurs: prank’h. Après avoir prononcé la seule phrase qui s’imposait en cette situation3, Baby Horus doit à nouveau défendre sa vie, et y arrive beaucoup moins bien. Une estocade de l’oiseau de nuit fend en effet son casque en deux, délestant notre héros de la plus grande partie de son visage. La blessure n’est pas mortelle, mais seulement évanouissante pour Aximand, qui, dans son coma réparateur, met enfin un nom sur le triste sire qui le stalke à coups de soupirs depuis ces dernières semaines : Garviel Loken. Le fâcheux en question étant présumé mort sur Isstvan III, cela règle le problème pour Horus Minus, dont la chirurgie reconstructrice a laissé quelques traces. Mais, comme il le dit lui-même, il n’a pas peur du changement, alors…Fin spoiler  

1 : Surnommé ainsi à cause de la finesse de ses draps.
2 : J’aimerais bien savoir comment la VF s’est dépatouillée de ce petit jeu de mots du père Abnett. Avis aux lecteurs francophones.
3 : Coucou, coucou, coucou, hibou, coucou.

AVIS:

Après avoir mis l’Hérésie sur les rails avec ‘Horus Rising’, Dan Abnett reprend les commandes d’une Légion dé-Lokenisée, et désormais en guerre ouverte contre l’Imperium. C’est l’occasion pour lui de donner son heure de gloire à l’un des membres les plus discrets du Mournival, Horus Aximand, qu’on sentait un peu mal à l’aise par la tournure prise par les événements dans ‘Galaxy in Flames’, même si cela ne l’avait pas empêché de rabattre le caquet de cette grande gueule de Torgaddon sur Isstvan III. C’est également par ce biais qu’il commence à nous présenter son nouveau projet hérétique, mené d’une main de fer (héhé) par un nouveau-venu du nom de Shendrak Meduson, déterminé à venger la mort de son Primarque en enquiquinant les traîtres sur la route de Terra au maximum de ses capacités.

On retrouve donc dans ce ‘Little Horus’ le mélange d’action frénétique, de rebondissements cinématiques et de réflexions plus posées sur l’état des Sons of Horus après qu’ils aient franchi le Rubicon (avant que ça ne devienne tendance) auquel Abnett nous avait habitué dans son pavé initial. Tout cela est bel et bien bon, et nous donne un précieux éclairage sur cette période de transition des fils d’Horus, à la trahison déjà consommée mais, pour la majorité d’entre eux, encore des Space Marines à peu près fréquentables, croyant sans doute s’être embarqués dans une noble révolution contre un Empereur tyrannique. Les années qui suivront en surprendront donc quelques uns… à commencer par notre protagoniste, déjà travaillé par sa conscience coupable1, et qui devra perdre la face au sens premier du terme pour laisser derrière lui ses allégeances passées. Little Horus est donc une lecture des plus sympathiques, pas indispensable en termes de compréhension de l’Hérésie, mais très intéressante pour ceux qui se passionnent pour les jeux de pouvoirs à l’oeuvre au sein des Sons of Horus.

1 : Il y a fort à parier que la révélation de l’identité de l’individu venant lui souffler dans les oreilles H24 ait été un moyen pour Abnett de nous prévenir qu’un duel entre Aximand et Loken dans la suite de l’Hérésie était à attendre.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Les Sons of Horus sont sans doute la Légion de Space Marines qui compte le plus de personnages nommés importants de toute l’Hérésie d’Horus, à commencer par leur père génétique, d’après qui la franchise est tout de même nommée. Cela explique que la majeure partie des nouvelles qui leur sont consacrées se concentrent sur leurs VIP et pas sur le sort du légionnaire de base (dont le point de vue aurait été intéressant, je le dis au passage). C’est le cas avec ce ‘Little Horus‘, qui a le mérite de faire ressortir les complexes rouages politiques qui meuvent cette Légion, surtout après qu’elle soit passée au Chaos. Et puis, c’est la seule nouvelle signée Abnett du recueil, donc il serait dommage de bouder son plaisir. Mentions honorables pour ‘Twisted‘ (sur la grande famille du Chaos) et ‘The Wolf of Ash and Fire’ (sur les relations entre Horus et l’Empereur avant l’Hérésie).

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Word Bearers – Child of Chaos (C. Wraight) :

INTRIGUE:

Child of ChaosLe Siège de Terra approche méchamment et quelque part en orbite du Monde Trône, un Astartes en arrêt maladie contemple la planète de Pépé avec un œil torve et un visage couvert de biafine. Notre protagoniste est, vous l’aurez deviné, Erebus. Sauf que en fait, non, mais nous y viendrons un peu plus tard. Passé à la râpe à fromage par Horus et slam dunk-é dans le bac à ordures dangereuses par Lorgar, le surhomme par qui le scandale éclata n’a pas vraiment d’épaule sur laquelle suinter, mais il s’en fout royalement car son auguste compagnie lui suffit. Et comme dit son deuxième proverbe favori (on parlera de son premier un peu plus loin): « plus on est de fous, plus on rit, moi je suis tout seul parce que personne ne m’aime alors je compense en étant complétement ravagé du bulbe et je peux rigoler un bon coup ». Quel dommage que seule la version abrégée de cette maxime si profonde nous soit parvenue. Toujours est-il qu’Erebus est décidé à se parler à lui-même pour passer le temps, et il embarque donc le lecteur dans le récit de son origin story, qu’il considère comme étant édifiante. Voyons cela.

Première confession: Bubus a toujours été mauvais. Et surtout en dictée. Il ne s’en cache ni ne s’en excuse, et il n’y a pas d’élément déclencheur à chercher pour explique sa chute, à part peut-être le fait qu’il ne supporte pas la chaleur. Mais bon, se dire que l’Hérésie aurait été évitée par un malheureux climatiseur, ce n’est pas très glamour, donc restons sur l’hypothèse de la malignité incarnée. Déjà tout môme, son passetemps favori était d’arracher les pattes de scorpion de Colchis, ce qui n’est guère charitable. Issu d’une famille miséreuse, il se mit à lorgner du côté des khôl gris du Covenant après avoir constaté que les prêtres menaient une vie de patachon. Après quelques mois à apprendre par cœur des cantiques et à apprendre à lire sur des bouquins piqués en douce dans le temple local, notre zéro accomplit ses premières armes en garrotant de sang froid un jeune dévôt de son quartier, auquel sa mufle de mère le comparait à longueur de journée pour le rabaisser. L’individu en question témoignait de sa foi envers les Puissances en se peignant des mots sacrés sur le visage, habitude que son assassin reprit, tout comme il lui emprunta son nom: Erebus. MIND BLOWN. On est passé à ça d’avoir l’Hérésie manigancée par un gonze appelé Post Malone ou Tekashi69, ça fait froid dans le dos tout de même. Heureusement que Môman Bubus n’aimait pas le rap.

Ce premier assassinat permit toutefois à l’usurpateur d’entrer dans les ordres sans coup férir, et de commencer à tailler son chemin vers le pire, soit le Pouvoir, l’Influence, la Richesse et l’Efferalgan. Car Erebus n’est pas vraiment croyant à la base, et avoue volontiers s’être piqué d’intérêt pour la chose religieuse de la même manière que tu as pris goût aux endives au jambon: à l’usure. BLIND MOWN. Pendant qu’il faisait ses classes, un certain Prophète commençait à faire parler de lui dans l’arrière pays colchitique, et il ne fallut pas longtemps avant qu’Erebus ne pose les yeux sur celui qui allait devenir son père adoptif (Lorgar), accompagné par sa future marâtre (Kor Phaeron). Ce ne fut pas le coup de foudre mais le jeunot comprit qu’il fallait qu’il se rapproche de Mr Tête d’Œuf pour son propre bien, ce qu’il fit.

Une arrivée impériale et une transformation en Space Marine plus tard, notre désormais fringant héros part sillonner la galaxie à la recherche des Dieux du Chaos, envers qui il sent une attirance particulière. Rien de très intéressant ne se produit jusqu’à l’arrivée sur Davin, et la visite qu’Erebus rend à un temple décati que lui ont révélé ses visions. Sur place, il rencontra un vieux prêtre ridé et impoli, ce qui n’est pas très malin quand on s’adresse à un type qui fait deux fois sa taille et trois fois son poids. Parmi les tags effacés et les inscriptions désobligeantes, les sens de sorceleur du surhomme firent clignoter en rouge un dessin de l’Anathame (qui ne se trouvait pas sur place, ce serait trop simple) ce qui fut apparemment suffisant pour son bonheur immédiat. Il repartit donc avec une envie folle de farmer du Wither squelette1, en ordonnant au vioque de faction de retaper un peu la bicoque, et en donnant rendez-vous dans quelques décennies à une très jeune Akshub (qui ironie de l’histoire, lui donnera des cours en chaotique appliqué lorsqu’il reviendra… quel fumiste tu fais Bubus alors). La suite de l’histoire, sans être parfaitement connue, l’est toutefois suffisamment pour pouvoir laisser Erebus à ses divagations fiévreuses et purulentes. Mais tel est le destin de ceux qui manquent de peau.

1Mais sans accès au Nether, il dut se contenter de piller les collections permanentes du musée de la vie rurale de l’Interex, comme chacun sait.

AVIS:

Chris Wraight lève le voile sur l’origine d’un des personnages les plus importants de l’Hérésie n’étant pas Pépé ou un Primarque : bonne idée dans l’absolu, et assez bien réalisée même si ‘Child of Chaos’ tient plus de la lecture complémentaire intéressante que du must read définitif. Il y a certes quelques révélations bien senties de la part d’un auteur qui a trop de métier pour ne pas jeter quelques bouts de fluff anecdotiques (au sens littéral) en pâture à son public de fanboys dans une nouvelle telle que celle-ci, mais rien qui changera la face du lore. On apprend par exemple que c’est à Erebus que l’on doit la maxime « béni soit l’esprit trop étroit pour le doute », ce qui est utile à savoir pour briller dans un centre GW mais relève de la trivia hérétique au final. Notons également que Wraight se retrouve piégé par cet ennemi acharné de l’auteur de l’Hérésie d’Horus qu’est la continuité temporelle (à égalité avec la bonne vieille logique cartésienne): si Erebus a pu devenir un Word Bearers, c’est qu’il était très jeune à l’arrivée de l’Empereur. Or on sait (‘Lorgar: Bearer of the Word’) que Kor Phaeron avait déjà mis des pensées non euclidiennes dans la tête de son pupille bien avant que Bubus soit en mesure de susurrer des salaceries à l’oreille de son Primarque : l’image d’Epinal d’instigateur de l’Hérésie qui accompagne le Chapel-Un depuis quelques années en prend donc un sacré coup dans les ratiches.

Bref, on tient ici une lecture sympathique et qui permet à Wraight de mettre un peu d’ordre1 dans, et de faire quelques clins d’œil à la suite de, l’histoire d’Erebus, ce qui peut, ou non, justifier les 3,49€ demandés par la Black Library pour tuyauter le lecteur/fluffiste sur ce VIP chaotique.

1J’ai bien aimé le fait qu’il cherche à couvrir les traces de Thorpe en indiquant au détour d’une phrase que, oui, les Dieux du Chaos avaient bien un œil (mais juste un œil) sur Colchis et le Covenant, respectivement élus « Planète chaotique la plus calme du Materium » et « Secte chaotique hégémonique la moins efficace de la galaxie » 10.000 ans de suite. Il ne pouvait guère faire plus que cela sans réécrire l’histoire.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Erebus est certainement un des personnages les plus importants de l’Hérésie d’Horus, mais sa tendance à ne parler que de sa vie et de son oeuvre fait de ‘Child of Chaos‘ une piètre entrée pour les Word Bearers dans ce recueil introductif. C’est dommage car cette Légion bénéficiait d’un corpus assez imposant par rapport à sa notoriété, dans lequel la Black Library aurait été bien inspirée de puiser. Ma préférence va à ‘Children of Sicarus‘, qui illustre le lien particulier qu’entretiennent les Word Bearers avec les Puissances Noires, et met également en lumière les relations tendues entre Kor Phaeron et Lorgar. Si les longs formats ne vous font pas peur, il faut évidemment lire ‘The First Heretic‘, qui reste à ce jour l’un des meilleurs bouquins de toute la série.

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Salamanders – Artefacts (N. Kyme) :

INTRIGUE:

ArtefactsHorus a franchi le Rubicon Traitoris et les Salamanders s’activent pour rejoindre la flotte envoyée par l’Empereur punir la rébellion de son Maître de Guerre. Vulkan est de passage par Nocturne et par la lune-arsenal Prometheus pour se ravitailler avant le grand départ, mais lorsqu’il convoque le Maître de Forge T’kell dans son atelier personnel, ce n’est pas pour parler batteries ou boulons.

Tout commence par le récit que fait le Primarque à son fils génétique de la destruction de Nostramo des mains armes de coque de ce mauvais sujet de Konrad Curze, il y a bien des années de cela. Arrivé en catastrophe dans le système en compagnie d’Horus et de Jaghatai pour tenter de raisonner le dément, il ne put qu’assister à la dislocation de la planète, expérience qui le marqua profondément (c’est un sensible). Toutefois, si le Nighthaunter n’avait pas son pareil pour se fondre dans l’obscurité lorsqu’il agissait en solo, il était moins insaisissable au volant du Nightfall (la légende raconte qu’il n’avait pas son permis), et le terrocide fut rapidement arrêté par ses frangins, qui durent décider que faire de ce mauvais sujet. Horus étant Horus, c’est son idée de réhabilitation par chaperonnage qui finit par l’emporter, et ce bonimenteur de première réussit même à refiler le bébé à Vulkan pendant que lui-même allait briller ailleurs dans la galaxie et devenir Maître de Guerre quelques années plus tard. Comme quoi, même au 30ème millénaire et même pour un Primarque, avoir la garde des enfants est un gros frein à la carrière.

Vulkan fit de son mieux, mais la psyché torturée et fracturée de Konrad Curze ne se remit jamais du Nostramo Incident, comme les Commémorateurs diplomates appelèrent cette boulette regrettable1. La campagne de Kharaatan, menée de front par les Salamanders et les Night Lords, en apporta l’éclatante et sanglante démonstration, bien que Papamander ne soit pas non plus exempt de tous reproches sur ce coup là (je suis presque certain que passer un enfant désarmé qui se rend au lance-flammes est un crime de guerre). Le plan initial prévoyait que Konrad soit confié à Rogal Dorn une fois dégrossi par les bons soins de Vulkan, mais, ô surprise des surprises, le Prétorien de Terra ne donna jamais suite aux multiples messages laissés par son frérot sur son répondeur. À croire qu’il ait gardé une dent contre le fou furieux qui manqua de le tuer quelques années plus tôt2… N’ayant pas d’autres recours, Mister V. finit par appeler Horus à la rescousse, mais manque de pot, son frère bien aimé était déjà secrètement corrompu (et pas secrètement du tout imbittable), et accueillit la nouvelle de l’indécrottable perversité du Nighthaunter avec un émoji ptdr avant de mettre fin à la discussion.

Long story short, si Vulkan a fait venir son teckel, c’est parce qu’il s’est rendu compte que certaines armes étaient trop puissantes pour prendre le risque qu’un être malintentionné s’en empare et les retourne contre l’Imperium. C’était vrai de Konrad Curze et du marteau tonnerre que le sympathique Primarque avait forgé pour Horus avant qu’il ne se rebelle contre l’autorité paternelle, ça l’est aussi des milliers de gadgets de maître que Vulkan a bricolé pendant la Grande Croisade, et dont il rempli un hangar sur Prometheus. Il souhaite donc que T’kell passe tout à la broyeuse pendant que lui ira passer les menottes énergétiques à son frère dévoyé.

C’est un grand sacrilège pour T’kell, qui ne peut se résoudre à laisser des trésors tels que l’Adamant Flyswatter ou le Perpetual Handspinner rejoindre les poubelles de l’histoire. A force de pleurnicheries éhontées, il finit par convaincre son boss d’épargner sept artefacts, un pour chaque royaume de Nocturne, dans sa corvée valorisation des pas-encore déchets dangereux. Troll dans l’âme, Vulkan bombarde son subalterne Père de Forge et lui indique que sa mission est tellement importante qu’il devra rester sur place pour la mener à bien au lieu d’accompagner les copains sur Isstvan. On connaît la suite de l’histoire…

1 : Fun fact, c’est également sous ces termes que l’Empereur désigna Nostramo la première fois qu’Il posa les yeux sur la planète.
2 : Et dont il a confessé à Malcador avoir une trouille bleue, qui plus est.

AVIS:

Une nouvelle très intéressante pour les amateurs de fluff car on y découvre un pan jusque là caché de la Grande Croisade (les efforts déployés par Horus et Vulkan pour réhabiliter Konrad Curze), ‘Artefacts’ est un travail de jonction soigné de la part de Nick Kyme. En plus de faire référence à la grande histoire de l’Hérésie (le départ de Vulkan vers Isstvan), cette nouvelle fait échos à certains événements dépeints dans le ‘Vulkan Lives’ du même auteur, et pose les fondations de l’un des mythes les plus importants du Chapitre des Salamanders au cours des millénaires qui suivront : la quête des artefacts légendaires mis de côté par le premier Père de Forge, T’Kell. Un vrai succès en ce qui me concerne.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Je suis partagé sur ‘Artefacts’ : d’un côté, cette nouvelle parle beaucoup plus des complexes relations entre Primarques que des Salamanders eux-mêmes, mais de l’autre, aborder le sujet des origines des Artefacts de Vulkan, c’est toucher du doigt l’une des facettes les plus importantes de la culture des lézards énergétiques. Ce qu’il manque à cette histoire pour remplir totalement son but pédagogique est à mon sens une emphase plus importante sur le caractère humain de cette Légion, qui est l’autre de ses caractéristiques notables. On peut arguer que l’exemple donné par Vulkan (a.k.a. le babysitter d’Horus) est déjà parlant, mais comme les actions du Primarque ne présupposent pas toujours celles de leurs fils génétiques, je n’accorde pas ce point à ‘Artefacts’. Ceci dit, il y a assez peu de nouvelles hérétiques dans lesquelles les héros sont des Salamanders : la BL n’avait pas des masses de choix pour cette section de ‘Lupercal’s War’.

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Raven Guard – The Grey Raven (G. Thorpe) :

INTRIGUE:

The Grey RavenL’ex-mais-pas-tout-à-fait-finalement Archiviste de la Raven Guard Balsar Kurthuri a été renvoyé sur Terra par Corax en personne après les événements relatés dans ‘Weregeld’, où il doit recevoir le jugement de Malcador le Sigilite. Tel le bouc (ici corbeau) émissaire, notre surhomme endosse une responsabilité collective dans cette histoire, puisqu’à travers lui, c’est tout le Librarium de la XIXème Légion qui se trouvera amnistié ou frappé d’anathème. Le Primarque furtif n’assume en effet plus trop la permission qu’il a donné à ses fils de s’asseoir sur l’Edit de Nikea, bien qu’il n’ait pas fait le fin bec lorsque les pouvoirs psychiques de Kurthuri – catapulté Archiviste en chef de la Raven Guard après le désastre d’Isstvan V – l’aidèrent à récupérer le patrimoine génétique nécessaire à la reconstruction accélérée de sa Légion. Avec les résultats que l’on sait (#JamaisPlus, etc). Très chill dans l’âme, Kurthuri a accepté la mission sans rechigner, tout comme il a juré à Corax de ne pas faire usage de ses pouvoirs jusqu’au verdict de Malcador. Voici les termes posés.

Les hasards de la guerre ont fait que notre corbeau énergétique a fait le voyage non pas sur un vaisseau appartenant à sa Légion, mais s’est fait prendre en stop par des Imperial Fists sous le commandement du Capitaine Noriz. Il est également accompagné par le Custodes Arcatus Vindix Centurio, détaché par Valdor pour s’assurer que le patrimoine génétique remis à la Raven Guard était utilisé dans le respect des clauses établies, et un peu désœuvré depuis que Corax a bousillé son kit de petit chimiste. Alors que le Wrathful Vanguard sort du Warp pour pénétrer dans le système solaire, les revenants sont accueillis par une armada de vaisseaux et de stations de combat, preuves irréfutables que la guerre ne tourne pas en faveur des forces impériales. Il ne faut pas longtemps avant que les demandes d’authentification pleuvent sur le Uber de Kurthuri, qui laisse sagement Tchuck Noriz et AVC gérer l’administratif avec leurs vis-à-vis. Après tout, qui de plus qualifié qu’un Imperial Fists et un Custodes pour négocier un passage vers Terra ?

Malheureusement pour l’Archiviste déclassé, ses comparses ne font pas un super taf, et lorsque le stagiaire Custodes (Ludivicus) que Malcador a placé à la régulation du trafic solaire se met à faire du zèle auprès de son collègue, la situation dérape très rapidement. Kurthuri, trop honnête, a en effet eut le malheur de déclarer qu’il était sous le coup de l’Edit de Nikea, aveu suffisant pour que Ludivicus éructe un mot code secret sur la fréquence radio, transformant aussitôt Arcatus en ennemi mortel de ce pauvre Corneille. Et lorsque les bolts commencent à lui voler dans les plumes, Kurthuri décide de connaître un petit peu la peur, et bat prudemment en retraite pendant que Noriz, tout aussi surpris que son camarade Légionnaire par la réaction à brûle pourpoint du Custodes, tente de raisonner ce dernier.

S’engage alors une partie de chasse d’une genre un peu particulier, les Custodes du Wrathful Vanguard se mettant à traquer Kurthuri dans les coursives, tandis que ce dernier cherche à s’échapper du vaisseau pour rejoindre Terra et plaider sa cause directement auprès du Régent de Pépé, bien aidé par les Imperial Fists dans ses manœuvres d’évasion. Comme ni les Jaunards ni les Dorés ne tiennent vraiment à causer des pertes dans l’autre camp, l’affrontement tient plus du match de paint ball que de la fusillade sans merci, jusqu’à ce qu’Arcatus rattrape Noriz et Kurthuri, et les engage au corps à corps.

Bien qu’en désavantage numérique, le Custodes a tôt fait de démontrer qu’il est une classe au-dessus de l’Astartes moyen, même gradé, et s’énerve tellement qu’il finit par empaler le pauvre Noriz sur sa lance gardienne. Comprenant qu’il n’a aucune chance de sortir vainqueur de ce combat à la régulière, Kurthuri décide de revenir sur sa parole et d’avoir recours à ses pouvoirs… jusqu’à qu’un froncement de sourcil dédaigneux de son adversaire lui fasse changer d’avis. Résigné à obéir à son Primarque, même au prix de sa vie, notre héros finit par se rendre, et est enfin mené jusqu’à Malcador…

Début spoiler…Qui avait en fait un job à lui proposer parmi ses Chevaliers Errants, et cherchait à tester… son self control j’imagine ? dans des conditions extrêmes avant de l’embrigader dans son organisation secrète. La nouvelle se termine donc avec l’arrivée de ce vieux lézard d’Umojen, chargé par le Sigilite de briefer le bizut sur ses missions à venir. L’histoire ne dit pas si Corax a été dédommagé pour ce détournement de ressources…Fin spoiler

AVIS:

Thorpe a beau être un expert de la Raven Guard, je n’ai pas trouvé cette histoire très aboutie. Outre le fait qu’elle n’apporte pas grand-chose à l’Hérésie d’Horus, et apparaît davantage comme un moyen pour l’auteur de faire faire des heures supplémentaires à l’un de ses personnages alors que la tendance générale est plutôt à l’écrémage sévère en préparation de la clôture de la saga, je reproche à Thorpe d’avoir dévoyé la loyauté fanatique des deux factions les plus Pépéphiles de l’époque, les Custodiens et les Imperial Fists, juste pour pouvoir mettre en scène à peu de frais le simulacre d’affrontement entre les deux gardes prétoriennes de l’Empereur sur le Wrathful Vanguard. Cette guéguerre sans (presque) victimes est totalement illogique à l’époque où l’histoire prend place (après la tentative d’infiltration de Terra par l’Alpha Legion), et la réaction imprévue d’Arcatus n’aurait dû selon moi avoir que deux conclusions : soit une coopération immédiate et totale entre Custodiens et Imperial Fists, même si les seconds ne comprennent pas les motivations des premiers, soit un combat sans merci, et autrement plus sanglant, entre les deux camps. On ne me fera pas croire qu’un Custodien qui a identifié un ennemi de l’Empereur retienne ses coups pour épargner quiconque se met sur son chemin, fut-il un Imperial Fists. Ajoutez à cela que le test de Malcador est, au fond, très bizarrement conçu (il cherchait une forte tête, mais pas trop quand même ?), et vous obtenez un résultat très passable. Espérons que Kurthuri justifie par la suite (et la fin) de l’Hérésie le traitement de faveur éhonté dont il bénéficie ici.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

La Raven Guard est tellement discrète que les nouvelles qui parlent vraiment d’elle (et pas de ce poseur de Valerius) sont relativement rares. Je dois avouer au moment où j’écris ces lignes que je n’ai pas de référence à mettre en avant à la place de ce ‘Grey Raven‘, qui ne rend pas vraiment justice à la Légion de Corax, et se concentre plutôt sur l’application de l’Edit de Nikea et la circulation compliquée sur le périphérique du système solaire (deux sujets très importants, j’en conviens). Pour ne rien arranger, cette histoire prend place relativement tard dans l’Hérésie, et a toutes les chances de ne pas être bien appréciée par un lecteur novice. Une nouvelle mettant en scène les talents d’infiltrateurs hors normes des surhommes corneilles aurait été à mon sens plus adaptée.

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Alpha Legion – Liar’s Due (J. Swallow) :

INTRIGUE:

Liar's DueMalgré le déclenchement de l’Hérésie, la vie suit son cours normal à la surface de Virger-Mos II, planète agricole de pouillème ordre située tellement loin en périphérie de l’Imperium que ses habitants doivent se contenter des podcasts envoyés par des YouTubers de Terra pour se tenir informés de l’avancement du conflit. L’épisode qui est retransmis le jour où commence notre histoire, dans la ville 441, est cependant un peu spécial, dans la droite lignée des ‘Noces Pourpres’ de Game of Thrones2. Et pour cause : on annonce à nos braves péquenauds que l’Empereur a cassé sa pipe, et qu’Horus a gagné la guerre et pris le trône paternel. Stupeur et tremblements parmi la populace, sur laquelle souffle bientôt un vent de panique. Que va devenir leur petite colonie ? Quelle position adopter après ce retournement de situation que nul n’avait vu venir ? Faut-il attendre de la visite dans les jours/mois/années à venir de la part du nouveau maître de l’Imperium et de ses armées ? Quel bruit fait le renard ? Des dizaines de questions à la gravité inédite fusent de part et d’autre, tandis qu’au milieu de la ville, notre héros, le jeune et idéaliste Leon Kyyter, a bien du mal à digérer la nouvelle.

Car Leon est un lointain descendant des fanboys pratiquant le « Hobby » sur Terra en M2. En plus de posséder une armée de figurines en métal (et en bois, ça coûte moins cher) peinte avec amour, il est un lecteur assidu du fluff de la propagande impériale, et possède même une authentique douille de bolter (les ravages du merchandising). Si son père lui avait permis, il se serait fait tatouer « I ❤ Pépé » sur le front. Aussi, apprendre de but en blanc que son idole absolue a tiré sa révérence le chagrine au plus haut point. Laissant ses concitoyens débattre entre eux de la marche à suivre, il s’en va relayer la nouvelle au seul résident du foyer de jeunes travailleurs que son père et lui font tourner, le sieur Mendacs, Commémorateur de son état.

Liar's Due_IllustrationMendacs est arrivé deux mois plus tôt à 44, annonçant aux locaux estomaqués par la survenue d’un estrangé dans leur communauté que sa mission était de peindre quelques paysages bucoliques de champs et de nuages, sans doute à fin d’illustrer les cartes postales et calendrier des postes du Segmentum. On ne saura jamais ce que notre Commémorateur a fait ou dit à son supérieur pour être envoyé sur une mission aussi pourrie, mais Mendacs prend son boulot avec philosophie, comme la nouvelle que lui apporte Leon, d’ailleurs. À la grande surprise de son jeune ami, il se montre en effet assez posé dans sa réaction, et rassure ce dernier que cette annonce n’aura sans doute aucune conséquence pour Virger-Mos II, dont l’enclavement galactique et le peu de valeur stratégique mettent à l’abri d’une invasion. Tous les locaux ne partagent cependant pas l’avis du chill-ommémorateur, et le conseil municipal improvisé le soir même tourne bientôt au vinaigre, loyalistes, opportunistes et jemenfoutistes n’arrivant pas à trouver un consensus sur la décision à prendre, et quel drapeau faire flotter sur la devanture de la mairie. La tension monte encore d’un cran lorsque des traînées lumineuses sont aperçues dans le ciel nocturne, faisant redouter à nos braves ruraux que l’invasion de leur patelin a déjà commencé. Dès lors, il ne faut pas s’étonner que la plèbe finisse par faire des choses stupides (sa spécialité depuis des temps immémoriaux), comme tirer d’abord et poser des questions après. C’est ainsi que l’apprenti vigilante local, Dallon Prael, tue par accident son pote de comptoir Silas Cincade avec le fusil laser de sa grand-maman, ayant pris la Kangoo de son compaing, parti chercher des nouvelles à la capitale, pour un Land Raider des Sons of Horus. Un tragique accident.

Début spoiler…Pendant que la psychose progresse gentiment mais sûrement dans sa cité, Leon décide de suivre un Mendacs parti en vadrouille en mode sneaky dans les rues de 44. Le Commémorateur se dirige vers le Skyhook, l’ascenseur orbital entièrement automatisé utilisé pour acheminer les récoltes de la planète jusqu’aux cargos spatiaux qui transporteront le précieux quinoa de Viger-Mos II jusqu’aux confins de l’Imperium. Déterminé à comprendre les raisons de ces agissements étranges, Leon parvient à sauter dans une cabine à la suite de Mendacs, et se retrouve quelques minutes plus tard sur la plateforme d’échange du Skyhook, qui se trouve être le lieu de résidence de la seule Astropathe de la planète. Cette dernière a passé les deux derniers mois emprisonnée dans un champ de stase posé par Mendacs, qui a mis ce temps à profit pour effectuer son œuvre de désinformation de masse. C’est lui qui a envoyé le message qui a mis le feu aux poudres en contrebas, utilisant le matériel et la formation de pointe fournis aux agents de l’Alpha Légion pour ce faire. C’est également lui qui a fait basculer la planète dans la paranoïa en programmant quelques drones faire s’écraser d’innocentes météorites à la surface de Virger-Mos II. Sa mission accomplie, il ne lui reste plus qu’à convaincre l’Astropathe d’envoyer un Tweet à ses patrons pour les informer de la réussite des opérations, avant de repartir vers de nouvelles aventures, non s’en s’être débarrassé des témoins gênants de son triomphe : l’Astropathe en question… et pas Leon. Mendacs décide en effet d’épargner le garçon, trop content d’avoir eu, pour une fois, un public témoin de ses manigances, et confiant dans l’incapacité de ce dernier d’enrayer la spirale de méfiance et de violence à l’œuvre sur la planète. En cela, il a probablement raison. Des dangers des fake news…Fin spoiler 

1 : Ça en dit long sur le niveau de motivation des colonisateurs au moment où ils sont arrivés sur la Saint-Sauveur-de-Ginestoux de l’Ultima Segmentum. Pas de noms pour les villes, juste des numéros.
: Que les habitants de Virger-Mos II ont pu commencer à visionner seulement depuis deux mois.

AVIS:

James Swallow prend son monde à contre-pied avec ‘The Liar’s Due’, dont le ton s’éloigne résolument du grimdark industriel auquel notre homme nous avait habitué jusqu’ici. J’ai trouvé pour ma part que ce récit se plaçait davantage dans la lignée de la SF classique (notamment le Skyhook, qui m’a fait penser à l’ascenseur spatial de la trilogie Mars de Kim Stanley Robinson), avec son intrigue majoritairement non-violente et placée à hauteur d’homme, que dans celle de la GW-Fiction telle qu’on la connaît. Je dois reconnaître que j’ai apprécié ce parti pris, qui change agréablement de ce que l’on peut lire ailleurs dans l’Hérésie d’Horus, et permet de réfléchir sur les implications concrètes de cette dernière pour les milliers de planète ayant eu la chance de ne pas retrouver au centre des violents combats entre loyalistes et renégats. Cette apparente tranquillité n’a sans doute pas toujours été synonyme de sérénité pour les populations aux secondes loges de cette guerre galactique, et la mise en avant de la cinquième colonne d’Alpharius, et du rôle joué par les agents de ce dernier en matière de propagande, est la bienvenue. Je regrette simplement que Swallow n’ait pas jugé bon d’entretenir un peu de suspens dans sa nouvelle, la duplicité de Mendacs étant établie très tôt dans l’histoire, ce qui entame un peu de son intérêt. Mais la balance reste malgré tout positive, et je place ‘The Liar’s Due’ en tête de la production de cet auteur, confortablement devant la majorité de ses écrits Blood Angelesques et Sœurs de Bataillesques.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Liar’s Due‘ est une nouvelle intéressante, mais où ne figure pas le moindre Alpha Légionnaire, ni le plus petit Alpharius, ce qui aurait dû la disqualifier d’office pour une inclusion dans ‘Lupercal’s War‘. C’est d’autant plus dommage que la Black Library avait en stock bon nombre de nouvelles traitant de la manière si particulière dont cette Légion atteint ses objectifs sur le champ de bataille, et pas dans les champs de colza : ‘Council of Truth‘, ‘The Face of Treachery‘, ‘The Harrowing‘… Pour les amateurs, la novella ‘The Serpent Beneath‘ et le roman ‘Legion’ valent également le détour.

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Et voilà qui conclut cette revue de ‘Lupercal’s War‘, première (et probablement seule, vu l’époque tardive, Heresy wise, à laquelle elle a été publiée) anthologie introductive consacrée à l’Hérésie d’Horus. Comme on l’a vu dans les critiques ci-dessus, la Black Library n’a pas réalisé un sans faute dans la sélection des nouvelles choisies pour présenter chacune des Légions impliquées dans ce conflit galactique, mais l’effort reste tout de même globalement satisfaisant. Au chapitre des regrets, j’aurai également apprécié que d’autres factions soient intégrées au sommaire de ce recueil, qui du haut de ses moins de 400 pages, n’a pas atteint la limite haute fixée par la BL en matière de longueur. Comme un autre recueil hérétique sorti en 2022 (‘Heirs of the Emperor‘, chroniqué ici si ça vous intéresse), approche les 450 pages, il aurait été possible d’aborder les Custodiens (‘Blood Games’), l’Adeptus Mechanicus (‘The Kaban Project‘, ou ‘Vorax‘ par souci de concision) et l’Armée Impériale (‘All That Remains‘) dans ‘Lupercal’s War1, quitte à bazarder les ‘Black Oculus‘ et ‘Bjorn: Lone Wolf‘ pour gagner un peu de place. Enfin, l’absence d’une version française est également dommage, la BL ayant jusqu’ici pris la peine de proposer ses recueils introductifs en plusieurs langues.

Toutefois, le bilan reste à mon sens largement positif, en bonne partie grâce à un prix de vente encore une fois très intéressant par rapport aux tarifs habituels de la maison (et c’est encore plus vrai pour la version audio book, vendue à 10,99€). Ces 21 nouvelles permettent au lecteur, quel que soit son niveau de connaissance es-hérésie, de découvrir les arcs narratifs et les styles d’écriture d’une palanquée de personnages et auteurs ayant marqué cette franchise iconique, et c’est bien cela qu’on attend de ce type de compilation. À titre personnel, je reste convaincu que la meilleure façon d’aborder ce mastodonte littéraire est de commencer par la trilogie originelle, qui, en plus d’être parmi les meilleures sorties de toute l’Hérésie, a été écrite pour permettre à n’importe que fan de science-fiction de comprendre les tenants et les aboutissants de cet événément tentaculaire, quitte à réserver ‘Lupercal’s War‘ pour un deuxième temps. À chacun sa méthode pour sombrer dans le schisme, cependant !

1 : Pour être vraiment complet, on peut rajouter les Légions Titaniques (‘The Ember Wolves’), les Soeurs du Silence (‘The Voice’) et les cultistes du Chaos (‘Twisted’). Et je suis sûr que j’en oublie…

HEIRS OF THE EMPEROR [HH]

Bienvenue dans la revue de Heirs of the Emperor, anthologie finale des courts formats dédiés aux Primarques publiés par la Black Library entre 2018 et 2021. Nous sommes en effet en présence de la compilation ultime de toutes les nouvelles rattachées à cette sous-sous-franchise à très haute teneur en personnages marquants du 30ème millénaire, soit 26 histoires et près de 450 pages consacrées à la fratrie impériale. Il va de soi que si vous cherchiez à en savoir plus sur ces individus légendaires, Heirs of the Emperor est le livre qu’il vous faut, en attendant que la Black Library se lance (peut-être un jour) dans la réédition des romans Primarques sous forme de bundles. Avant d’aller plus loin, ayons une pensée pour les acquéreurs des deux anthologies Loyal Sons et Traitorous Scions, qui pensaient sans doute faire une bonne affaire avec ces recueils thématiques (un consacré aux Primarques loyalistes et l’autre aux renégats, comme leur nom l’indique), vendus 15€ l’unité par la BL à l’époque reculée de… 2021. Quand on vous disait qu’il était rentable de ne pas choisir de camp1

1 : Pour être tout à fait exact, il y a trois nouvelles de ces recueils qu’on ne retrouve pas dans Heirs of the Emperor: ‘Child of Chaos’ et ‘Champion of Oaths’ (pour la troisième, voir ci-dessous). Comme ni l’une ni l’autre ne sont centrées sur un Primarque, cette absence est somme toute logique (mais leur inclusion dans Loyal Sons et Traitorous Scions fait débat, par contre).

Heirs of the Emperor

Il ne surprendra personne de constater que la majeure partie des nouvelles présentes au sommaire de cette brique que Rogal Dorn aurait intégré sans sourciller dans ses fortifications de Terra provienne des trois recueils Sons of the Emperor, Scions of the Emperor et Blood of the Emperor (encore une fois, le titre donnait un indice). Cinq histoires viennent compléter la liste, toutes précédemment publiées mais pas forcément incluses dans une anthologie avant cette réédition: ‘A Lesson in Iron‘, ‘The Atonement of Fire‘, ‘Lantern’s Light‘, ‘Embers of Extinction‘ et ‘Grandfather’s Gift‘. Cela est amplement suffisant pour couvrir les 18 bad boys de Pépé, même si à ce petit jeu, certains s’en sortent mieux que d’autres (il y a toujours eu des favoris dans les familles nombreuses). Ainsi, c’est Mortarion qui remporte la palme avec quatre apparitions, devant Horus et Ferrus Manus (3), et loin devant Lion El’Jonson, Leman Russ et Jaghatai Khan, qui doivent se contenter d’une pige chacun. Ils peuvent toutefois s’estimer chanceux car le pauvre Angron a purement et simplement été coupé au montage, la nouvelle ‘Prince of Blood‘ dans laquelle il apparaissait dans le recueil Sons of the Emperor ne figurant pas au sommaire du présent ouvrage. Oubli des éditeurs de Nottingham (ce serait fâcheux) ou volonté délibérée de nuire à l’Ange Rouge (ce serait dangereux)? On ne le saura sans doute jamais…

Malgré ces choix éditoriaux étranges et contestables, il n’en demeure pas moins que Heirs of the Emperor est une superbe affaire pour tous les passionnés de la Grande Croisade et de l’Hérésie (mais pas que, certaines nouvelles prenant place bien après ces événements majeurs), en tous cas au niveau quantité/prix. Si vous avez besoin de davantage d’informations pour consentir à payer les 15.99€ demandés par la BL pour ce pavé, c’est votre jour de chance cependant. Laissons les commémorateurs tresser des louanges à tout va, nous sommes ici pour dire les choses telles qu’elles sont. Une occupation dangereuse, mais il faut bien que quelqu’un s’en charge…

Heirs of the Emperor

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The Passing of Angels – J. French :

INTRIGUE:

The Passing of ANgelsLa planète Harpic, intégrée à l’Imperium pendant la Grande Croisade, a décidé de faire sécession de l’empire de Pépé. Ce crime de lèse majesté ne pouvant évidemment pas rester impuni, l’Armée Impériale est envoyée sur place pour calmer les velléités indépendantistes du Gouverneur Planétaire… et est accueillie à coup de bombes nucléaires, résultant en des pertes colossales parmi les assaillants mais également la population locale, sacrifiée sur l’autel du « vous ne m’aurez jamaaaaaaaaaaais ». L’Empereur ayant clairement établi que l’atome, c’était le mâââl dans une célèbre interview donnée au Journal de Mickey en M30, la machine de guerre impériale passe en mode hardcore et envoie Sanguinius et ses Blood Angels « pacifier » pour de bon la planète mutine, renommée H_____ en signe de la gravité de ses crimes.

Nous suivons donc le Primarque ailé et les soixante Space Marines de l’Ost de la Destruction, armés de l’arsenal le plus sale à disposition de l’Astartes (armes à phospex, grenades à radiations, cocktails cacatov et tutti quanti), alors qu’ils font s’abattre le jugement de l’Empereur sur les dissidents de H_____. Sanguinius a donné des ordres stricts : il ne doit y avoir aucun survivant, et, conscient du lourd fardeau psychologique qu’un tel massacre pourrait avoir sur ses fragiles de fistons, il leur a ordonné de revêtir le masque d’argent des Destructeurs, permettant à son porteur de dissocier son identité des actes horribles commis en tant que membre de l’Ost1. Seul le Primarque se rend au combat tête nue, car sa nature surhumaine lui permet d’endosser sans faiblir la responsabilité de ce massacre (raison officielle) et que mettre un casque lui aplatit les cheveux de manière disgracieuse (raison officieuse). Bien évidemment, les soldats de H_____ ne font pas le poids face à la furie sanguin(ius)aire des Blood Angels, et leur insignifiante petite planète ne tarde pas à repasser du bon côté de l’histoire.

La nouvelle se termine par une réunion informelle entre Horus et Sanguinius sur le Vengeful Spirit, pendant laquelle les deux frangins se livrent à leur activité préférée : battre son frère à un jeu de plateau pour Horus, et faire de lourds sous-entendus sur l’avenir pour Sanguinius. C’était une époque plus simple…

1 : C’est dans l’esprit très semblable aux masques de guerre des Guerriers Aspects Eldars… sauf qu’ici, on ne nous dit pas s’il y a une véritable technologie permettant de brainwasher le porteur, ou bien s’il devra faire la dissociation tout seul comme un grand.

AVIS:

Je suis un peu déçu de l’approche choisie par French pour cette nouvelle estampillée Primarques, car elle ne nous apprend au final pas grand-chose sur le personnage que l’auteur a choisi de traiter (Sanguinius)1, et aurait donc pu être cataloguée comme nouvelle « classique » de l’Hérésie à la place. Certes, on voit le Primarque mener ses fils à la bataille, mais la noblesse tragique dont il fait preuve au cours de la purge de H_____ n’est pas une caractéristique inconnue de Sanguinius : quiconque est un tant soit peu familier du personnage sait qu’il s’agit au contraire de la base de son identité. Partant, le propos déroulé par French dans ‘The Passing of Angels’ n’apporte pas de nouvel éclairage sur l’Archange de Baal, ce qui est à mes yeux la raison d’être d’un récit Primarques. Le même argument peut être avancé pour la scène de dialogue entre Sanguinius et Horus, qui relève à mon sens plus du clin d’œil à des éléments de fluff déjà établis au cours de l’Hérésie que d’une quelconque avancée de l’arc des Pépé Bros.

Je suis également resté sur ma faim avec l’Ost de la Destruction, convoqué par French pour montrer que même la Légion de Space Marines la plus angélique ne rechignait pas à faire le sale boulot de temps à autre, mais avait développé une technique bien à elle pour ne pas laisser ces actes barbares affecter durablement ses membres. L’idée est intéressante, mais sa mise en pratique tellement lacunaire que l’on ne sait pas comment le processus en question fonctionne. Les masques mortuaires des Destructeurs ont-ils seulement une fonction symbolique, ou sont-ils capables d’effacer les souvenirs de ceux qui les portent ? Bref, ‘The Passing of Angels’ passe à mes yeux à côté de son sujet, et si French est suffisamment compétent en tant qu’auteur pour que la lecture de cette nouvelle ne soit en rien désagréable, j’attendais plus et mieux de sa part ici.

1 : La plus grande révélation de ‘The Passing of Angels’ a été pour ma part d’apprendre que Sangui avait une vision laser, qui pouvait détecter une rupture d’alignement de l’ordre d’un micron. Il aurait dû être coiffeur au lieu de chef de guerre avec ce don, moi je dis.

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The Abyssal Edge – A. Dembski-Bowden :

INTRIGUE:

Gravement blessé dans le crash de son appareil au cours d’une glorieuse victoire impériale, le chef d’escadron Orthos Ulatal a été réaffecté au service des archives de la Grande Croisade, son corps étant trop endommagé pour lui permettre de s’envoyer en l’air comme autrefois. La réception par notre héros cabossé et amer d’un rapport d’un genre particulier va l’arracher à la monotonie pré-dépressive qui constituait son nouvel ordinaire : un certain Khayon des Khenetai, légionnaire Thousand Sons, a en effet proféré de graves accusations à l’encontre des Night Lords de Konrad Curze, alors que les deux Légions « coopéraient » au cours de la campagne de pacification de Zoah, plus connue sous le nom de « Dévastation de Zoah ». Après avoir cherché conseil – un peu – et échangé quelques remarques acerbes – surtout – avec son ancienne camarade et désormais remplaçante, Perdita, Lulu décide qu’il est de son devoir de faire toute la lumière sur cette bisbille inédite entre deux Légiones Astartes. La révélation de conflits larvés entre les champions de l’humanité risquerait en effet d’avoir un effet désastreux sur le moral des troupes, gavées de propagande impériale où tout le monde il est bô, tout le monde il est jenti (sauf le fourbe et puant ENNEMI, bien sûr).

Après un voyage mouvementé et donc vomitif à travers l’espace impérial, Ulatal parvient jusqu’au Nightfall, vaisseau amiral des Night Lords, et demande à être reçu par un des archivistes (et pas Archivistes) de la Légion, afin d’entendre la version des natifs de Nostramo sur les événements de Zoah. À sa grande, et pas franchement heureuse, surprise, c’est le Premier Capitaine de la VIIIème Légion, ce farceur de Sevatar, qui vient finalement toquer à sa porte, pour lui proposer un deal aux conséquences potentiellement funestes : enterrer le rapport de ce couillon de Khayon comme n’importe quel fonctionnaire sensé l’aurait fait depuis belle lurette, ou apprendre ce qu’il s’est réellement passé entre Night Lords et Thousand Sons sur Zoah…

Début spoiler…Comme la nouvelle aurait été beaucoup moins intéressante si Ulatal avait choisi la première option, nous embrayons donc sur un flash back des familles familial, durant lequel nous suivons Sevatar et son bodycam assister aux délibérations houleuses du camp impérial à propos de la Tour de la Sérénité, monument servant de bibliothèque et d’archives à la civilisation de Zoah, prestement incorporée à l’Imperium après un petit massacre pédagogique dont Curze à le secret. Ce même Curze serait d’avis de réduire la tour en poussière, comme le demande le manuel du parfait petit légionnaire, afin que les dangereuses connaissances qu’elle renferme ne viennent pas risquer de contredire la Vérité Impériale. Magnus (également présent) est bien sûr opposé à ce projet d’autodafé, et implore son frère de lui laisser le temps de contacter l’Empereur afin que ce dernier puisse trancher la question. Mais Konrad reste intraitable, et finit par ordonner à Sevatar de commencer le bombardement de la tour, malgré le fait que les Thousand Sons soient positionnés autour de cette dernière et la protègent grâce à leurs pouvoirs psychiques. Après avoir fait son Captain America pendant à peu près 12 secondes, Maggie finit par lâcher l’affaire, mais promet à Curze qu’il en parlera au manager (i. e. Pépé). Bilan des courses : la Tour de la Sérénité finit en gravats, son incommensurable et incommensuré savoir avec elle.

Ayant été témoin de ce clash frontal entre deux des fils de l’Empereur, Ulatal n’est guère surpris lorsque Sevatar prend son élan pour lui refaire le portrait à coup de glaive tronçonneur, cette information hautement sensible ne pouvant être ébruitée en dehors de la grande famille des Astartes. Notre héros est toutefois sauvé, non pas par le gong, mais par le Shang (un autre Capitaine des Night Lords), qui annonce à Sevatar que sa future victime a été nommée officier sur un des vaisseaux de la Légion, le Voidmaw. La nouvelle se termine sur le choix laissé à Ulatal : accepter son nouveau poste ou emporter son secret dans la tombe…Fin spoiler

AVIS:

Aaron Dembski-Bowden opère une fois encore sa magie narrative avec ce ‘The Abyssal Edge’, qui replonge le lecteur dans les savoureux paradoxes des Night Lords pré-Hérésie (un sujet de prédilection de cet auteur). On y retrouve bien sûr l’incontournable Sevatar, égal à lui-même en matière de killer one-liners, je m’en foutisme insolent1 et droiture morale bien cachée, mais le clou du spectacle est évidemment la joute verbale entre Konrad Curze et Magnus le Rouge au sujet de la Tour de la Sérénité. Dembski-Bowden prend soin de dépeindre les deux protagonistes de façon équilibrée, chacun ayant ses qualités (l’esprit critique de Magnus, qui lui donne la perspective nécessaire pour aller à l’encontre d’un édit impérial qu’il trouve stupide ; la « magnanimité » de Curze, qui a déterminé que l’utilisation de tactiques de terreur était la manière la plus efficace et la moins meurtrière pour conquérir Zoah) et ses défauts (l’indignation sélective de Magnus, qui a laissé les Night Lords mener la campagne comme ils le souhaitaient et ne s’oppose à eux que lorsqu’ils décident de raser la Tour de la Sérénité ; et ai-je vraiment besoin de souligner les problèmes de Curze2 ?), ce qui laisse au lecteur le soin de déterminer pour qui il prend fait et cause à la fin de la nouvelle.

Reste la partie consacrée à Ulatal, qui me paraît être trop développée pour un personnage à usage unique, et qui se conclut avec une indication assez nette que la gueule cassée se trouve un nouveau job parmi les auxiliaires humains de la Légion. Comme ADB a mis sous les feux des projecteurs les pilotes des escadrons de chasseurs de la flotte des Night Lords3 dans d’autres textes, je m’attendais à ce qu’Ulatal reparaisse à un moment ou à un autre dans le corpus nostramien de cet auteur, mais mes recherches n’ont rien donné à ce jour. Cela n’empêche pas de savourer cette nouvelle à son plein potentiel, mais pose la question de ce que voulait faire l’auteur avec ce personnage. À suivre ?

1 : La scène où Curze et Magnus lui disent en même temps de la fermer vaut son pesant de viande de grox.
2 : Le fait que l’on en apprenne plus sur Magnus dans ‘The Abyssal Edge’ que sur Konrad Curze me mène à considérer que cette nouvelle devrait être liée au premier plutôt qu’au second dans une optique ‘Primarques’.
3 : Particulièrement la pilote Taye Karenna, commandante de l’escadron des Voilés et chauffeur privé de Sevatar dans ‘Prince of Crows’.

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Mercy of the Dragon – N. Kyme :

INTRIGUE:

Mercy of the DragonLes réunions de famille ne sont pas toujours une partie de plaisir, c’est bien connu. Toutefois, les retrouvailles entre Vulkan et l’Empereur sur Nocturne se passèrent de manière que l’on peut qualifier de cordiale, surtout si on les compare à d’autres épisodes d’affiliés au premier regard tournées plus tard au cours de la Grande Croisade. Bien sûr, le fils adoptif de N’bel le forgeron a une âme paisible sous ses abords farouches, et il faudra une longue discussion (et une salamandre encore plus longue, mais c’est une autre histoire…) pour le convaincre de laisser tomber sa planète pourrie et sa salopette rapiécée pour prendre sa place aux côtés de son créateur dans la conquête de la galaxie. C’était à l’époque où Pépé prenait encore le temps de discuter avec ses fistons avant de les bombarder à la tête de leur Légion1… Et croyez-le ou non, mais un des critères majeurs ayant guidé la décision du colosse aux yeux de braise fut de savoir si ses nouveaux camarades de jeu allaient être gentils avec lui pouvaient apprendre quelque chose de sa part, lui qui se voyait davantage chaudronnier que chef de guerre. « Mais bien sûr gros bêta », lui répondit son papounet. « Attends un peu de rencontrer ce joyeux drille de Ferrus… ».

Flash forward quelques temps plus tard, au cours de la campagne de mise en conformité de Ranknar. Les indigènes ne se sont montrés sensibles ni aux talents oratoires, ni aux sculptures en ballons de l’Empereur (on ne peut pas être bon partout hein), et la guerre fait rage à la surface de la planète. Les défenseurs vont de défaites en défaites, leurs forteresses imprenables se faisant mettre minables en un temps ridicule et un déluge de flammes par un guerrier terrifiant, surnommé le Dragon par ses adversaires malheureux. Nous suivons le soldat Sarda et le prêtre Veddus alors qu’ils se rendent jusqu’à l’ultime bastion de la résistance : la Citadelle Rouge de Romistad. Le dernier carré des ranknariens dans la cité de Venikov s’est en effet terminé de manière abrupte et infernale, après que le Dragon ait décidé d’y allumer le feu.

À Romistad, la situation des défenseurs semble un chouilla moins désespérée, car ils ont à leur disposition non pas une, mais deux armes top secrètes moumoutes. Ceci dit, les impériaux ont de leur côté non pas deux, mais trois membres des Ramones (nouvelle période) : Peypey, Féroce Manosque, et bien sûr le Dragon, qui est bien sûr le nom de code trop trop secret de Vulkan. Bref, les carottes ne sont pas cuites, elles sont sur le point d’être carbonisées pour les irréductibles gaulois.

La stratégie de l’Empereur, qui consiste à lancer un Vulkan fou de rage (sans qu’on sache trop bien pourquoi d’ailleurs) sur l’ennemi en mangeant des chips avec Ferrus Manus à bonne distance des combats, rencontre toutefois ses limites lorsque les défenseurs abattent leur premier joker : un trio de bogatyrs, c’est-à-dire des golems de la taille d’un Titan, menant une sortie désespérée sur les lignes impériales. Ne pouvant pas laisser Vuvu se faire exploser sans intervenir, Pépé intervient gracieusement pour rétablir le déséquilibre en faveur de ses troupes, ce qui permet à l’irrascible Hulk, mit encore plus en rogne par la découverte de la source d’énergie des bogatyrs (des enfants sous hémodialyse) de charger seul la porte de la Citadelle Rouge, afin d’apprendre à ses occupants de quel boa il se chauffe…. Et c’est là qu’arrive la boulette.

Malgré ses puissants pouvoirs de guidage de missiles, l’Empereur n’est en effet pas foutu d’empêcher le dernier tir d’une salve tardive d’exploser pile sur la position de Vulkan, alors qu’il attendait que la gardienne vienne lui ouvrir. Pour sa défense, il y avait péril en demeure pour les impériaux, l’ultime botte secrète des défenseurs étant de déclencher une bombe virale, ce qui n’aurait pas été fair play. Fort heureusement, ‘tis but a scratch pour Papamanders, qui étrenne certainement ainsi sa perpétualité (reste à voir comment il a regénéré aussi vite ceci dit), et convainc les Ranknariens de déposer les armes après que ces derniers aient constaté que le féroce Dragon a fait obstacle de son corps pour protéger un frêle enfançon qui jouait à la marelle sur le champ de bataille. Le pouvoir de la gentillesse ! Bon, on ne dira rien sur les centaines de milliers de morts avant ça parce que ça serait un peu mesquin…

1 : D’après la chronologie donnée par Laurie Goulding (et donc aussi officielle que possible), Vulkan a été le cinquième Primarque retrouvé. L’Empereur a commencé à s’en balec au douzième round (Mortarion).

AVIS:

Nick Kyme n’a pas écrit le roman Primarques de sa Légion de cœur (l’honneur en est revenu à David Annandale), mais il s’est tout de même payé le luxe de raconter en quelques pages comment la rencontre entre le père et le fils s’est déroulée… et je reste un peu dubitatif sur la valeur de cette offrande. Le problème tient en deux mots : character development. Mettre en scène des personnages aussi iconiques que l’Empereur et ses Primarques de fils nécessite en effet de connaître le riche background de ces figures majeures, mais également de les faire agir en gardant en tête leur stature d’êtres sur(sur)humains. Et si j’aborde ce sujet, c’est bien entendu que Nick Kyme s’est planté sur les deux tableaux. On a ainsi un Empereur qui minaude en faisant briller ses gantelets au soleil et balance des répliques dignes du Thesaurus, mais également un Vulkan utilisé à total contre-emploi avec son fluff établi (le Primarque qui se soucie des simples humains), puisqu’il passe la majorité de la campagne de Raknar à se comporter comme un proto-Angron, massacrant l’ennemi sans lui montrer aucune pitié1, et sans que Kyme ne justifie d’aucune façon cette soudaine agressivité. Que Vulkan ait pété une durite après avoir vu comment ses adversaires faisaient avancer leurs golems de combat, ok, mais avant cela ? Ce n’est pas comme si le même Vulkan avait failli refusé la proposition de l’Empereur de rejoindre la Grande Croisade parce qu’il ne se sentait pas l’âme d’un guerrier littéralement deux paragraphes avant, hein.

On peut toutefois reconnaître à Kyme les efforts sincères qu’il a fait pour donner une culture un peu fouillée à Raknar et ses habitants/fidèles (car oui, c’est à la fois une planète et un dieu), ce qu’il ne s’est pas toujours motivé à faire dans sa production pour la Black Library. Ce n’est toutefois pas suffisant pour équilibrer l’ardoise, et ‘Mercy of the Dragon’ reste à mes yeux globalement raté.

1 : En témoigne le dialogue entre Sarda et Veddus au début de la nouvelle, qui permet d’établir que plus de cent mille hommes ont péri dans la défense de Venikov (sans compter les civils), avec Vulkan en allumeur en chef.

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Shadow of the Past – G. Thorpe :

INTRIGUE:

Pendant que la galaxie part en sucette énergétique, sur Sicarus les grands travaux lancés par Lorgar afin de templaformer la planète avancent gentiment. Sous le patronage avisé et le commandement sévère mais brusque de l’Apôtre Noir/chef de chantier Kalta-Ar, des milliers d’esclaves suent sang et os (on est dans l’Œil de la Terreur, tout est possible) pour bâtir la Beneficta Diabola, basilique impie qui comportera deux piscines, un centre commercial et un boulodrome olympique. Soucieux du respect le plus strict des meilleurs standards de santé et sécurité, Kalta-Ar a pris soin de protéger le chantier d’incursions démoniaques, fréquentes en ces latitudes, par des pentacles et sceaux de protection du tout dernier cri1. Aussi est il fort mécontent d’apprendre de la part de ses acolytes qu’un nombre croissant de légionnaires disparaissent sans laisser de trace, au lieu de monter la garde en chantant des cantiques impies comme ils étaient sensés le faire.

Accompagné de son bras droit Arkula le Coryphaus et du Sergent Isaikash, K-A se rend sur les lieux de la dernière disparition, qui devient vite l’avant-dernière car un autre Word Bearer fait soudainement une mauvaise rencontre sur le chemin de ronde, et rend l’âme après cinq secondes de hurlements stridents sur le WhatsApp de groupe. Malaisant. Si quelques esclaves ont été témoins des derniers instants de frère Barbaque, les subtiles techniques d’interrogatoire de nos héros ne leur permettent pas d’apprendre grand-chose sur la nature du prédateur qui s’amuse à les faire tourner bourrique. Les mortels ont en effet seulement vus une ombre écarteler le malheureux Space Marine, ce qui n’est pas lourd pour faire avancer une enquête. Jugeant probable que ces déboires sont de nature démoniaque, et suspectant les serfs d’avoir réussi à appâter un gros Nurgling dans le Materium pour se venger des mauvais traitements infligés par leurs geôliers, Kalta-Ar est sur le point de diligenter une inspection surprise de ses propres opérations (aux grands porteurs du mot, les grands remèdes) lorsqu’une présence indistincte mais pas franchement amicale se matérialise soudain à proximité.

Les rapports alarmistes et disparitions brutales commençant à se multiplier, nos trois affreux décident finalement de prudemment de battre en retraite en direction du portail Warp reliant la Beneficta Diabola au QG de Lorgar, afin de respectueusement demander au boss de venir gérer un impondérable que ses incapables de larbins sont bien en peine de pondérer de leur côté. Cette retraite stratégique, qui se transforme sous peu en débâcle effrénée vers la chambre de papa, voit un nombre non négligeable de Word Bearers aux noms plus exotiques les uns que les autres2 se faire oblitérer par le terrible blurry man qui les poursuit, mais également ce fieffé coquin de Marduk, fier comme Ar-Thaban dans son armure Terminator, faire son apparition dans l’histoire. Fidèle à lui-même, il se montre odieux envers Kalta-Ar et ses survivants, et d’une piètre aide lorsque the thing se remet à faire des siennes. Pourquoi se donner du mal quand on a une armure en scenarium, pas vrai ?

Heureusement pour nos héros, Lorgar avait les oreilles qui traînait et, bien qu’il tique un peu sur le vocabulaire peu flatteur utilisé par ses fils pour parler de lui, l’adoré doré fait son apparition pour se confronter au démon qui tourmente sa marmaille…

Début spoiler…Sauf qu’il ne s’agit pas d’un démon, mais de ce lascar de Corax, qui a gagné quelques pouvoirs funky et emo en diable (comme se changer en brume ou en nuée de corbeaux, ou se faire pousser des bras et des lames surnuméraires) à trop traîner dans le Warp, mais est resté fidèle à sa nature profonde : se venger des méchants très méchants. On se souvient que les deux Primarques se sont déjà frittés sur Isstvan au début de l’Hérésie, et que sans l’intervention salutaire de Konrad Curze, Lolo aurait avalé son crozius. La revanche qui prend place sur Sicarus, alors que Lorgar a été élevé au rang de Prince Démon et que Corax se bat seul sur une planète baignée par le Warp… va rigoureusement dans le même sens, ce nullard d’Aurelian se faisant perforer la glotte par les griffes énergétiques de son frangin, et ne devant son salut qu’à l’intervention peu sportive de ses Word Bearers pour occuper le Seigneur Corbaffe le temps que son adversaire malheureux soit évacué à travers son propre portail. La lose totale.

Coincé sur Sicarus à cause de sa nature à demi-démoniaque, Corax jure à son frère qu’il y aura une belle et s’en va fracasser sa basilique pour se passer les nerfs. De son côté, Lorgar décide d’aller bouder dans sa chambre pour marquer sa désapprobation, et la légende raconte qu’il n’en est toujours pas sorti à ce jour…Fin spoiler

1 : …des victimes sacrificielles utilisées pour les tracer.
2 : Hesta-Pek, Takla-Gad, Apall-Af, Ghoa-Lok, Ukna-Tav…

AVIS:

Gav Thorpe se paie le luxe de conclure la saga hérétique (et la saga tout court pour Corax) de deux Primarques à travers ce sympathique ‘Shadow of the Past’, ce qui est un ratio fluffique tout bonnement exceptionnel pour une simple nouvelle. Si les prémisses de cette histoire ne sont pas très intéressantes, et qu’un lecteur un peu au fait du passif de cet auteur pendant l’Hérésie d’Horus aura tôt fait d’identifier le mystérieux persécuteur de cette cruche de Kalta-Ar, je trouve la deuxième partie du récit nettement supérieure, notamment grâce à l’idée de faire de Corax une sorte de démon non chaotique1, ce qui permet de justifier à la fois comment le Primarque a pu survivre à son départ dans le Warp, et à quoi il occupe ses journées. En plus de ça, un petit duel entre deux frangins légendaires, ça ne se refuse pas (surtout quand c’est la tête à claque qui perd). Il y a même le Marduk d’Anthony Reynolds qui vient faire coucou, ce qui est sympa de la part de Thorpe, et fera sans doute plaisir aux fans du personnage. Bref, un final vraiment sympathique qui fait plus que rattraper un début assez meh. Si Gav Thorpe pouvait toujours s’en tenir à ce standard, je serais un lecteur comblé.

1 : Ou carrément affilié à Malal/Malice, ce qui serait encore plus cool, et une hypothèse pas si farfelue que ça pour une soumission d’un auteur aussi au fait du fluff que Thorpe. Après tout, les motivations et le code couleur de Corax correspondent tout à fait à ceux du dieu banni…

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The Emperor’s Architect – G. Haley :

INTRIGUE:

Olivier et Marissa LeBon, associés à la ville comme à la scène, arrivent sur Olympia pour tenter d’exercer leur noble mais difficile profession au mieux de leur capacité. Le couple est en effet spécialisé dans l’écriture de biographie de Primarques, et malgré leur patronage par Malcador en personne, il n’est pas aisé de convaincre un demi-dieu boudeur (et ils le sont tous) de prendre quelques heures pour raconter sa vie à cœur ouvert. Il n’y a d’ailleurs que Vulkan qui a accepté de jouer le jeu, mais seulement pendant une petite heure, car cette galaxie ne va pas se conquérir toute seule, nom de Pépé ! Leurs trente années de collaboration et cohabitation ont également mis l’amour et la patience d’Olivier envers sa tendre moitié à rude épreuve, et on sent bien qu’il a lost that lovin’ feelin’ à la manière dont il passe son temps à souffler pendant que la navette approche du spatioport et que Marissa s’émerveille du paysage si pittoresque de la planète natale de Perturabo.

Malheureusement pour le couple, le moment est mal choisi pour débuter ce nouveau projet. Non seulement leur sujet d’étude est parti aux confins de la galaxie mener une campagne ingrate de déhrudisation sur les ordres de l’Empereur, mais le régent qu’il a laissé pour régler les affaires courantes, et qui n’était autre que son vieux père adoptif, Dammekos, vient de mourir. Saignée à blanc par les besoins de la Légion en recrues et en ressources, Olympia gronde sourdement, et les quelques Iron Warriors chargés du service d’ordre ont fort à faire pour réprimer les manifestations et les émeutes de la populace mécontente. Cela n’empêche toutefois pas nos héros d’hériter d’un factotum/guide touristique à neuroglotte, le stoïque et froncé Krashkalix, qui se fait un devoir de les amener visiter les sites les plus notables de la planète, afin de leur (enfin, surtout Marissa, Olivier n’en a plus grand-chose à faire) permettre de prendre la mesure de Perturabo.

En parallèle de cette excursion hagiographique, nous suivons les premiers pas du Primarque sur la planète, avant qu’il ne soit surpris en train de faire de l’escalade sur les falaises de Lochos. Sans surprise, Perturabo s’est révélé être un enfant précoce, chassant le monstre à coup de gourdin pour le bénéfice et la sécurité de pauvres bergers, et squattant la forge de villages isolés pour se faire son matos. C’est d’ailleurs dans la forge où il a ouvragé sa première épée que les LeBon font la rencontre d’une forte tête n’ayant pas la langue dans sa poche : Gerademos, petit-fils d’Andos, lui-même fils de Dammekos et donc frère adoptif de Perturabo. Gege n’hésite pas longtemps avant de balancer du gros dossier sur le Primarque, dont l’un des petits plaisirs coupables était de défier son frangin à des concours d’artisanat ou d’ingénierie, dont il sortait logiquement systématiquement vainqueur. Sauf UNE fois, ce qui mit Rabo tellement en rogne qu’il détruisit les statues réalisées pour l’occasion (en prenant soin de laisser de beaux restes à la sienne pour que les gens puissent tout de même voir à quel point il est doué). Olivier trouve ça génial, mais Marissa est horrifiée par cette anecdote, inexploitable pour le panégyrique qu’elle en a tête.

Les dissensions entre mari et femme vont alors croissants, jusqu’à ce que cette dernière finisse par avouer qu’elle considère l’Empereur comme un dieu, et est donc prête à sacrifier la vérité sur l’autel de la glorification de Pépé et de ses créations. C’est évidemment contraire à la Vérité Impériale instituée par le même Pépé, et Olivier considère l’infraction comme étant assez grave pour pouvoir demander un divorce en tort exclusif… ou en tout cas, abandonner Marissa à sa lecture du ‘Lectitio Divinitatus’ pendant que lui va faire le coup de feu avec les gilets jaunes d’Olympia, qui parviennent finalement à déclarer leur indépendance de l’Imperium, sous la tutelle de la sœur du Primarque absent, Calliphone. L’histoire se terminera mal, on le sait, mais il reste permis d’espérer que Marissa a réussi à compléter en solo la biographie de Perturabo avant le début de l’Hérésie. Elle a peut-être pu s’inspirer du travail d’un obscur écrivain de M3 du nom de Gaïallet pour ce faire…

AVIS:

Guy Haley se démarque de ses petits camarades de Library par sa capacité à surprendre son lecteur en s’aventurant, souvent avec succès, sur des chemins que la maison d’édition de Nottingham ne fréquente pas. ‘The Emperor’s Architect’ vient démontrer la versatilité de Haley en mettant au cœur de son propos les querelles mesquines d’un vieux couple marié1, à des années lumières de ce à quoi on pouvait s’attendre de la part d’une nouvelle estampillée Primarques. Si vous êtes comme moi à la recherche de fantaisie (et pas de fantasy) et de caractère dans vos lectures de GW-Fiction, cette simple idée, farfelue mais suffisamment bien intégrée à l’univers et à l’ambiance générale de 40K pour ne pas jurer avec ces derniers, vous convaincra de donner sa chance à cette petite histoire. Ce vent de fraîcheur m’a d’ailleurs tellement plu que j’ai regretté que Guy Haley finisse son propos en faisant reposer une bonne partie de l’opposition entre Olivier et Marissa sur la lecture du ‘Lectitio Divinitatus’ par cette dernière. Comme s’il avait senti le besoin de justifier son « audace » en dégainant une explication que le fanboy moyen ne pourrait pas lui contester. Il aurait pu passer outre à mon avis (c’est pas comme si les couples humains avaient attendu la prose de Lorgar pour s’engu*uler), mais ce n’est que mon ressenti.

En plus de cette caractéristique très sympathique, ‘The Emperor’s Architect’ a le bon goût d’être le parfait complément du roman que Haley a consacré au maître d’Olympia, dont je vous recommande la lecture. En plus de couvrir des périodes de la saga perturabienne précédemment passées sous silence (son arrivée sur la planète, la campagne contre les Juges Noirs, le soulèvement de la population), cette nouvelle continue de fouiller la personnalité, décidemment très complexe, de cet enferré de Primarque. On le voit ainsi faire preuve d’un altruisme d’une pureté immaculée envers les bergers des montagnes, mais également se comporter avec une mesquinerie incroyablement puérile avec son pauvre frère adoptif, qui n’avait rien fait pour mériter ça. Une force de l’écriture de Haley est de parvenir à réconcilier ces aspects pourtant opposés du caractère de Perturabo pour donner l’impression d’une psyché véritablement surhumaine (et donc incompréhensible), alors qu’un auteur moins doué aurait juste donné l’impression de se contredire par manque de sérieux. Pour terminer, ‘The Emperor’s Architect’ n’est pas avare en détails fluffiques allant du notable (pourquoi Perturabo ne souvient-il pas de ses premiers jours sur Olympia ?) au superficiel (ne pas faire de tartare de jalpidae si on est pas un Space marines ou mieux), ce qui est toujours sympathique. Une vraie réussite.

1 : Aux noms tout à fait banal qui plus est, ce qui renforce encore le décalage par rapport à l’exotisme patronymaire (?) auquel la BL nous a habitué. Je soupçonne Haley d’en avoir fait exprès, et il a eu raison.

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The Ancient Awaits – G. McNeill :

INTRIGUE:

Un trio de sorciers Thousand Sons, Vistario le Corvidae (visions du futur), Murshid l’Athanean (télépathe) et Akhtar le Raptora (télékine), a été envoyé par Magnus le Rouge enquêter sur l’origine d’une vision subie par le premier. Ne pouvant pas désobéir à un ordre direct de leur borgne de boss, mais disposant de très peu d’indices pour localiser l’origine du message, une vague demande d’aide faite depuis les ruines d’une cité détruite, les compères ont passé les dernières années (ou l’équivalent en temps warpique) à voyager de monde mort en monde mort, sans succès. Leur chance a toutefois tourné lorsque le message s’est soudainement précisé, faisant état de l’identité de son émetteur, un certain « Ancien », qui patienterait donc à proximité. 

Guidé par une intuition de Murshid, les Thousand Sons prennent pied sur une nouvelle planète ravagée, sans savoir son nom ou ce qui lui est arrivé. Les indices troublants s’accumulent toutefois au fur et à mesure que nos héros s’approchent de leur destination : des douilles de bolts marquées du sceau des World Eaters sont retrouvées dans les décombres, et les ruines explorées par le trio portent la marque caractéristique d’un Exterminatus. Cependant, les niveaux inférieurs de la cité dans laquelle ils progressent ont résisté au terrible bombardement orbital déclenché par l’Imperium, ce qui indique que la civilisation qui a occupé cette planète était au fait des capacités destructrices des Legiones Astartes, et a pris des mesures pour résister à leur fureur. De façon tout aussi mystérieuse, mais beaucoup plus pressante, une tierce présence est détectée à proximité par les sens affutés de Murshid et Vistario : il semblerait que Magnus le Rouge ne soit pas le seul à s’intéresser à ce que cet énigmatique Ancien a à révéler.

Le fameux Ancien s’avère être un Dreadnought en très mauvais état, avachi à quelques mètres de la navette qu’il prévoyait sans doute d’utiliser pour quitter la planète au moment de son martyr. Il reste cependant suffisamment de batterie à la vénérable machine pour attraper Murshid alors qu’il passait à proximité, et pointer son canon d’assaut sur Vistario pour faire bonne mesure. Jugeant plus sage de négocier avec l’acariâtre vieillard énergétique plutôt que d’engager un combat qu’il n’est pas sûr de pouvoir remporter, Vistario opte pour une petite discussion avec l’Ancien, passablement confus après sa longue période d’isolation…

Début spoiler 1…Période qui se chiffre en millénaires plutôt qu’en années, car notre histoire prend place bien après la fin de l’Hérésie. Vistario finit par comprendre que la planète sur laquelle il se trouve n’est autre qu’Isstvan III, théâtre de la purge des éléments loyalistes des Légions renégates il y a dix mille ans. Son interlocuteur est une autre célébrité, l’Ancien Rylanor des Emperor’s Children, resté fidèle à l’Empereur malgré la trahison de son Primarque, mais rendu un peu barjo par cent siècles à fixer un mur effondré sans pouvoir se relever. Rylanor n’ayant pas appris que les Thounsand Sons ont également fait défection à Pépé, Vistario tente de détourner la conversation vers un sujet un peu moins polémique, échoue lamentablement, et aurait certainement fini en enduit organique sur ledit mur effondré sans l’arrivée opportune d’un nouveau personnage…

Début spoiler 2…Fulgrim en personne. Le Primarque démoniaque a en effet été attiré par la complainte de Rylanor au même titre que les Thousand Sons, et a décidé de corrompre le vénérable loyaliste pour son propre amusement pervers. Il tombe ce faisant dans le piège de Ryry, dont le châssis dissimulait une ogive contenant le virus mangeur de vie utilisé par feu Horus il y a fort longtemps pour régler son problème de dissensions internes. Cela était sans compter sur les manigances psychiques des Thousand Sons, qui parviennent à circonscrire l’explosion dans une bulle de force avant qu’elle n’ait pu engloutir les participants de cette petite réunion Copains d’Avant… pendant à peu près 27 secondes ½, soit le temps qu’il faut pour réaliser à Vistario qu’il préfère encore mourir et possiblement emporter Fulgrim avec lui (spoiler : ça ne marche pas) plutôt que de laisser le salace et serpentin Primarque faire des misères au pauvre Rylanor. Le sacrifice des Thousand Sons permet donc à la bombe d’exploser, faisant d’Isstvan III l’une des rares planètes à avoir subi un double Exterminatus (et sans doute la détentrice du record de l’Exterminatus le moins mortel de l’histoire, avec seulement quatre victimes confirmées). Fulgrim en est quitte pour aller se refaire une beauté dans l’Œil de la Terreur, mais surtout pour une éternité de séances auprès de son thérapeute attitré, car le refus catégorique de Rylanor de rejoindre le côté nervuré et lubrifié de la Force a profondément affecté le fragile ego du Pretty Primarque. Ce sont des choses qui arrivent.Fin spoiler

AVIS:

Graham McNeill n’en avait pas fini avec l’Ancien Rylanor (abandonné à son sort à la fin de ‘La Galaxie en Flammes’ et ‘Fulgrim’), et « détourne » une nouvelle Primarques pour donner à ce personnage secondaire du début de l’Hérésie la sortie de scène qu’il pensait lui devoir. Je suis moins convaincu que McNeill de la nécessité de terminer des arcs narratifs dont la plupart des lecteurs de la BL avaient dû oublier l’existence, mais c’est après tout la prérogative d’un auteur de raconter ce qui lui passe par la tête et le stylo.

Là où le bât blesse, en ce qui me concerne, est l’absence d’un travail de contextualisation/explication digne de ce nom de la part de McNeill. J’ai beau voir d’un œil permissif l’emploi « d’heureuses coïncidences » pour faire avancer et dénouer une intrigue, ‘The Ancient Awaits’ prend beaucoup trop de liberté à cet égard, et fait joyeusement exploser son compteur de WIJH. Comment Rylanor parvient-il à envoyer son RSVP à travers le Warp (ce personnage n’ayant aucune espèce de pouvoirs psychiques) ? Comment expliquer que le trio de Thousand Sons arrive pile au même moment que Fulgrim ? Et en bonus, pourquoi Magnus tenait tant à ce que ses fils se rendent sur place pour investiguer ce vague écho de l’Empyrean ? On peut supposer, au vu de ses pouvoirs, qu’il savait ce qu’ils allaient trouver, ce qui revient à poser la question de pourquoi le Cyclope voulait nuire à Fulgrim. Je laisse à chacun le soin d’apporter ses réponses à ces questions : pour ma part, je mets tout sur le compte d’un manque d’investissement de la part de Graham McNeill dans la construction de cette nouvelle, obnubilé qu’il était par son désir d’en terminer avec Rylanor sous couvert d’écrire une nouvelle Primarques1. Je sors donc déçu de cette lecture, qui ne mérite pas à mon sens son inclusion au sommaire de ‘Sons of the Emperor’.

1 : Dont le cahier des charges est tout autre. Si vous voulez lire un court format très instructif sur la personnalité et le destin de Fulgrim écrit par le même McNeill, je vous conseille chaudement ‘The Reflection Crack’d’.   

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Misbegotten – D. Abnett :

INTRIGUE:

Alors que les préparations pour la campagne d’Ullanor se terminent, la 63ème flotte d’expédition, commandée par nul autre qu’Horus Lupercal, se regroupe dans le système d’Issinium après vingt mois d’intenses mises en conformité. À la grande satisfaction du Primarque, pas moins de six civilisations humaines isolées au cours de la longue nuit ont accepté de rejoindre l’Imperium, et ce sans que le moindre bolt ne soit tiré ni aucune vie perdue. Ce tableau idyllique est toutefois compromis par les difficultés rencontrées par Hastur Sejanus à convaincre les habitants de Velich Tarn de give Pépé a chance. La planète a beau être insignifiante, tant en terme stratégique que démographique (400 habitants d’après les scans orbitaux), il n’est pas dans la nature des Luna Wolves de quitter un niveau sans l’avoir fini à 100%, et, comme il n’a plus rien d’autre à faire pour le moment, Horus décide d’aller pranker/soutenir son vieux poto Sejanus en se rendant incognito sur Velich Tarn.

Sur place, il se fait briefer en détail par le Capitaine dans son bunker de commandement, et réalise que la situation est plus compliquée que ce que le briefing initial le laissait à penser. Le maître de Velich Tarn est en effet un biogénéticien de sinistre réputation, Basilio Fo, ayant fuit Terra il y a plus de cinq mille ans après que ses voisins aient dénoncé ses expérimentations pas très ragoutantes aux autorités. N’ayant rien perdu de son génie morbide, Fo a passé le temps en transformant la population de sa planète d’adoption en abominations biologiques (pensez à The Human Centipede version 40K), plus que capables de dévorer/découper/éventrer/bouillir/écorcher un Space Marine qui leur tomberait sous la main/griffe/sabot/tentacule/trompe/nageoire. De plus, si les scanners n’ont détecté que 400 formes de vie humaine à la surface de la planète, c’est sans tenir compte des milliers de clones de chacune d’entre elles : les combats opposant la 4ème Compagnie des Luna Wolves aux hordes bioadaptées de Fo, surnommés « les bâtards » (misbegotten en VO) par les toujours inventifs transhumains, ont donc été beaucoup plus sanglants et accrochés que prévus (16 morts du côté des Legiones Astartes, tout de même).

L’arrivée d’Horus et de son massif buff de zone a toutefois accéléré le dénouement de cette campagne, et Sejanus apprend de son avant-garde que ce fieffé fripon de Fo a été capturé. Un peu trop facilement d’ailleurs. Horus a à peine le temps de froncer ses sourcils primarquiels que le bunker est éventré par l’arrivée du méga-monstre gardé en réserve par Fo, dans le but avoué d’abattre le meneur adverse dans un dernier acte de défiance. Vous ne serez pas surpris d’apprendre que cela ne fonctionne pas, et bien qu’Horus sorte de l’affrontement recouvert de sang, de bile et d’autres liquides encore moins identifiables, le coup fourré du bio-généticien dément échoue lamentablement.

D’une humeur magnanime, le Primarque tient à interroger son prisonnier plutôt que de l’exécuter sommairement, comme n’importe qui d’autre l’aurait fait. La conversation qu’il a avec Fo vient donner un éclairage particulier au projet de l’Empereur de réunir l’humanité sous sa bannière : on apprend ainsi que notre bad guy du jour a quitté Terra car même lui jugeait les desseins de Pépé comme étant trop démesurés et intrinsèquement condamnables pour tremper de près ou de loin dans cette future combine. Se voyant comme un simple scientifique s’amusant avec le potentiel infini du génome humain, Fo est sincèrement horrifié par Horus, qu’il considère comme une monstruosité bien plus repoussante et dangereuse que la plus mortelle de ses propres créations. Après tout, même son lombric géant n’avait pas le potentiel nécessaire pour mettre à feu et à sang la galaxie… On est toujours le Misbegot de quelqu’un d’autre, Fo croire. Interloqué par cette discussion, et toujours dans sa phase touleumondilégenty, Horus se résout à envoyer Fo à son cher Pôpa pour que le dissident puisse recevoir la vérité impériale de la bouche (ou de tout autre orifice qu’Il choisirait d’utiliser pour l’occasion) de Son créateur. Il est désormais temps pour les Luna Wolves de préparer la prochaine campagne de la Grande Croisade, car comme dit le proverbe : « quand y en a plus, y a Ullanor ».

AVIS:

Pour ce qui a toutes les chances d’être sa dernière nouvelle écrite pour le compte de l’Hérésie d’Horus (hélas), Dan Abnett retourne aux origines et nous livre une sorte de prologue au roman ‘Horus Rising’, mettant enfin en scène la relation fratermicale entre Horus et Hastur Sejanus, seulement esquissée dans le précédent roman. On a plaisir à retrouver ce monstre de charisme, d’empathie et de badasserie qu’était le demi-divin chauve au moment de la Grande Croisade, et Abnett démontre en quelques pages qu’il est toujours capable de signer des nouvelles de remplissage1 de très grande qualité. C’est bien simple, il n’y a que du contenu appréciable dans ‘Misbegotten’, qui choisit de limiter les combats à leur portion congrue pour se concentrer sur des descriptions de l’avancement de la Grande Croisade, des interactions sympathiques entre les (nombreuses) têtes connues de son casting, et des réflexions intéressantes/clins d’œil prophétiques sur le lore de 30K. Il n’y a rien à jeter ici, et si la BL avait la bonne idée de commander à Abnett un bouquin consacré uniquement aux aventures d’Horus et de sa Légion avant que le premier devienne Maître de Guerre, je le pré-commanderais dès son annonce (c’est dire à quel point j’apprécie ce qu’Abnett parvient à faire ici). Bien entendu, les chances que cela se produisent sont infinitésimales, aussi me contenterai-je de recommander chaudement ‘Misbegotten’ à tous ceux qui aiment Dan Abnett, l’Hérésie d’Horus, et Dan Abnett écrivant l’Hérésie d’Horus.

1 : J’utilise ce terme sans arrières-pensées péjoratives. Il faut reconnaître que ‘Misbegotten’ n’apporte rien à l’Hérésie en termes d’intrigue ou de révélation, mais cela ne veut pas dire que sa lecture est superflue.

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A Lesson in Iron – D. Guymer :

INTRIGUE:

A Lesson in IronS’il y a une chose que Ferrus Manus, paix à son âne, détestait, c’était bien perdre du temps. Aussi, sitôt réuni avec sa Légion, engagée dans le démantèlement de l’empire de rouille ork, le Primarque tint à imposer sa marque sur ses Légionnaires. Nous rejoignons ainsi l’impulsif M. Manus alors qu’il fait la chasse de quelques vaisseaux peaux vertes ayant survécu à la colère de l’Imperium, et qu’il compte bien détruire afin d’obtenir la complétion à 100% de sa mission, et ainsi prouver à l’univers qu’il vaut mieux que ces poseurs d’Horus et de Russ1. Et tant pis si ces couards d’Orks décident de foncer coque baissée dans une faille Warp qui flottait par là pour échapper au courroux de l’Astartes, et que personne n’a jamais été assez timbré du côté impérial pour se risquer dans ce genre d’environnement chelou. Ferrus, et son Fist of Iron, seront les premiers à tenter le coup. Encore un record à mettre au crédit du Primarque qui en voulait.

Ferrus n’est pas seul sur le pont de son vaisseau amiral alors que ce dernier réalise le premier fistage d’une faille Warp. Il est accompagné de deux Sergents vétérans, le Terran Harik Morn et le Medusan Gabriel Santar, tous deux pressentis pour devenir son bras droit. Alors que le Fist of Iron s’enfonce dans le trans Materium comme s’il s’agissait de caramel mou, avec des effets funky sur les appareils de navigation, comme on peut l’imaginer, les auspex détectent soudain des silhouettes de vaisseaux à proximité. Il s’agit des kroiseurs orks, mais également d’un nouvel arrivant, qui n’avait pas été identifié pendant la poursuite dans l’espace réel. Point commun : tous ont été réduits à l’état d’épave, et dans un passé lointain qui plus est. À la grande surprise des impériaux, il semble que le vaisseau en question appartienne à la 10ème Légion, ce qui hautement improbable mais pas totalement impossible. Pragmatique comme toujours, Ferrus Manus décide d’aller y jeter un œil.

Alors que les pauvres grunts qui forment son escorte découvrent avec émoi 1) l’existence de Démons et 2) s’il y a une vie après la mort, le Primarque et ses comparses arrivent jusqu’au pont du vaisseau mystère, où les attend un cadavre desséché de Space Marine. Ce dernier porte les marquages d’un Iron Hands, mais, au grand dégoût de FM, il semble avoir terminé sa carrière plus machine que (sur)homme, au vu de toutes les augmétiques et bioniques que la dépouille arbore. C’est le Tech-adepte qui accompagne la fine équipe qui finit par proposer l’hypothèse la plus intéressante pour expliquer ce répugnant mystère : l’épave sur laquelle ils se trouvent est un vaisseau des Iron Hands provenant du futur, transporté dans le passé par les caprices du Warp.

Avant que la nouvelle n’ait pu être digérée par l’assemblée, une palanquée de Démons se manifeste (dans tous les sens du terme) sur le pont, et forcent nos héros à – enfin – faire usage de la force. Si ce bogoss de Ferrus s’illustre à grands coups de marteau, ses subalternes sont plus à la peine. Surpris par les nouveaux arrivants, Santar se fait ainsi arracher le bras gauche par une Bête de Nurgle joueuse, tandis que Morn est submergé par des Horreurs rigolardes. Le premier réussit toutefois à marquer des points auprès du Primarque en retournant dans la mêlée sitôt ses esprits recouvrés, tandis que le Terran se contente de haleter comme un bébé phoque sur la banquise. Avant d’ordonner une retraite tactique vers le Fist of Iron, ignorant les avis de ses sous-fifres de rester pour looter de la technologie futuriste, et/ou défendre une relique de la Légion, Ferrus tranche en son for intérieur : ce sera Gaby qui deviendra son Ecuyer et 1er Capitaine. C’est dit.

1 : C’était l’époque de la Grande Croisade où tous les Primarques avaient un nom qui rimait avec « platypus », l’animal préféré de Pépé.

AVIS:

Petite nouvelle fort sympathique consacrée par leur spécialiste incontesté, David Guymer, aux Iron Hands et à leur Primarque caractériel, ‘A Lesson in Iron’ se paie le luxe de nous présenter en quelques lignes la prise de fonction de Ferrus Manus au sein de sa Légion (choix du 1er Capitaine, et autres révélations fluffiques intéressantes incluses), combiné avec une savoureuse mise en abîme du futur qui attend le Chapitre dans quelques millénaires. Le fait que les améliorations bioniques répugnent au plus haut point l’homme aux mains de fer n’est pas une nouveauté à ce stade, mais Guymer parvient tout de même à surfer sur cette iron-ie de façon tout à fait satisfaisante. Le pauvre Ferrus Manus aura soupé de prémonitions malheureuses car jamais utilisées pour modifier la destinée pas vraiment enviable attend ses fils et lui-même à la sortie de la Grande Croisade, et on en a encore un exemple ici. Ca reste plus distrayant à lire que la moyenne des soumissions de la BL, donc pourquoi cracher dans soupe ?

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The Atonement of Fire – D. Annandale :

INTRIGUE:

The Atonement of FireNous sommes dans la dernière ligne droite de l’Hérésie, quelques mois avant que le Siège de Terra ne débute. Roboute Guilliman a fini par réaliser que lancer sa petite entreprise personnelle alors qu’il est toujours techniquement employé par Pépé Corp., et en piquant dans la caisse de Big E. en profitant d’une panne généralisée d’internet pour ne pas se faire prendre, c’était assez craignos tout de même. Pétri de remords, Roro est désormais à la recherche d’un moyen de se faire pardonner ses errements passés. En sortant de sa séance hebdomadaire avec le Chapelain/Psychiatre Volusius, lui vient une idée toute simple pour expier son énorme hubris : aider Sanguinius à rejoindre Terra en détruisant les flottes hérétiques qui se mettront sans nul doute sur la route de l’Ange à la Moumoute.

Après une petite séance de triangulation avec les poteaux dans le strategium de l’Ultima Mundi, les Ultras de l’Empereur décident d’aller au secours de la planète Diavanos, d’où est arrivé un message astropathique implorant de l’assistance pour gérer une invasion de World Eaters mal-lunés. Diavanos est de plus un monde que les Ultramarines ont rattaché à l’Imperium il y a plusieurs décennies, et dont la technique de vitraux teintés a grandement impressionné le Primarque lorsqu’il flânait dans les rues de la capitale Ecstasia à la recherche d’inspiration pour son dernier roman. Pour toutes ces raisons, ainsi que pour celle, plus prosaïque, de se venger des ravages commis par les séides d’Angron et de Lorgar dans leur pré carré, les gars de la XIIIème se ruent au secours de Diavanos, et tombent à bras raccourcis sur leurs frères ennemis alors que ces derniers s’apprêtaient à repartir pour embusquer la flotte des Blood Angels.

La bataille spatiale qui s’en suit, si elle n’est guère équilibrée (les Ultramarines sont deux fois plus nombreux, sérieux, hargneux, farineux et bleus que leurs adversaires), permet à nos héros de relâcher la pression après tous ces mois à écouter les podcasts interminables du triumvirat de l’Imperium Secundus. Alors que les derniers vaisseaux renégats sont méthodiquement désintégrés par la froide fureur ultramarine, le cuirassé Gladiator profite de la confusion pour repartir en direction de Diavanos, et certainement pas pour une visite de politesse. Guilliman comprend que les World Eaters ont un petit creux, et que s’il n’intervient pas rapidement, la planète qu’il est venu sauver va s’en prendre plein la face. Mais arrivera-t-il à temps pour empêcher les fils d’Angron de commettre l’irréparable ?

Début spoiler…Après de multiples péripéties dans les coursives du Gladiator, que les World Eaters ont faites effondrer pour gêner la progression de leurs ennemis, Roboute et ses hommes (en grande partie des Destroyers, wink wink The Lord of Ultramar’) parviennent jusqu’à la salle des torpilles où les hérétiques se sont barricadés. La mêlée désespérée et surtout très sale qui s’ensuit tourne logiquement en faveur des surhommes en bleu, mais les World Eaters sont proches de réaliser leur objectif secret (faire péter une torpille à l’intérieur du vaisseau afin d’emporter Guilliman avec eux). Seule l’habilité du Grand Schtroumpf avec son combi-bolter customisé permet d’éviter la catastrophe, mais la victoire morale revient tout de même aux groupies d’Horus. Il est en effet trop tard pour prévenir le crash du Gladiator à la surface de Diavanos, et l’onde de choc qui s’en suit rase la capitale et dévaste une grande partie de la planète. Bien évidemment, les Ultramarines ont eu le temps de regagner leurs 22 avant que cette tragédie n’arrive, mais Guilliman finit la nouvelle avec le blues. Approprié, vous me direz.Fin spoiler

AVIS:

Vu le passif peu glorieux de David Annandale avec la XIIIème Légion (‘Lord of Ultramar’…), j’ai attaqué cette nouvelle dans un état d’esprit assez peu favorable à cette dernière, et j’ai été surpris de constater que cet ‘Atonement of Fire’ tenait tout à fait la route. Nous sommes en présence d’un court format siglé HH de facture assez classique (un peu de réflexion, beaucoup d’action, et en bonus une belle tranche de Primarque), mais débarrassé de tous les défauts que l’on pouvait trouver dans les autres soumissions de notre homme (personnages stupides/inintéressants, intrigue bancale, rythme chaotique)1. Ça pourrait et devrait être considéré comme le strict minimum, mais nous savons tous que la BL ne croit pas dans des concepts aussi restrictifs que le contrôle qualité. Enfin, pas tout le temps.

Surtout, et c’est assez rare dans une publication de la Black Library (quel que soit la franchise ou l’auteur) pour le souligner, Annandale parvient à ménager un vrai suspens jusqu’au bout de son propos. Guilliman et ses Schtroumpfs destructeurs arriveront-ils à sauver Diavanos des déprédations suicidaires des World Eaters ? Même si la planète a été créée de toute pièce pour l’occasion, l’auteur arrive à nous intéresser à la conclusion de cet accrochage mineur de la fin de l’Hérésie en appuyant de façon intelligente sur les remords éprouvés par Guilliman au sujet de son Imperium Secondus et son besoin de se faire pardonner de ce petit caprice. Annandale nous ressert également la vieille rengaine du « I am never going to financially recover from this », 30K style, déjà bien exploitée par d’autres avant lui, mais qui fait toujours son petit effet quand utilisée à dessein, ce qui est le cas ici. Bref, une vraie bonne surprise pour ma part, et une des meilleures soumissions de David Annandale pour le compte de cette franchise, si vous demandez mon avis.

1 : On pourrait lui reprocher de ne toujours pas maîtriser les bases spatio-temporelles d’une bataille spatiale (exemple gratuit : la course poursuite entre l’Ultimus Mundi et le Gladiator ne semble durer que quelques minutes, alors qu’elle s’engage à proximité du point de Mandeville du système et se termine dans l’atmosphère d’une planète habitable (donc proche de son soleil), ce qui devrait prendre au bas mot quelques jours), mais dans mon infinie générosité, je passe l’éponge là-dessus.

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Lantern’s Light – J. Swallow :

INTRIGUE:

Lantern's LightDepuis une année, Mortarion se morfond dans le système de Barbarus, après que ce dernier ait été intégré à l’Imperium par la volonté de son divin souverain, Pépé 1er. Bien que cette période ait permis au Primarque d’apprendre beaucoup sur le royaume galactique de son Père, la Grande Croisade et la place qu’il devra bientôt prendre dans cette dernière, Morty et son esprit rebelle (il a une petite voix dans la tête qui prend un malin plaisir à poser toutes les questions malaisantes) ne se satisfont pas de la situation. Pour faire simple, la seule chose qu’il trouve vraiment cool est le lien qu’il a réussi à tisser avec ses Dusk Raiders, bientôt renommés en Death Guard en l’honneur des compagnons de lutte qui l’ont soutenu sur Barbarus. Pour le reste, c’est la soupe à la grimace, comme si dans le corps gigantesque de notre héros se cachait un collégien complexé (ce qui est peut-être le cas, vu la vitesse à laquelle les Primarques grandissent).

Aujourd’hui est un jour spécial, cependant, puisque son Pôpa l’a invité à le rejoindre sur son vaisseau amiral, afin d’avoir une discussion avec son plus jeune rejeton. Ne pouvant pas s’enfermer dans sa chambre en écoutant The Cure, comme tout bon ado emo qui se respecte, Mortarion se rend sur le Bucephelus comme convenu, mais prend un malin plaisir à crash the party en piétinant le protocole de ses grosses bottes cloutées. Hôte gracieux s’il en est, l’Empereur ne s’en formalise pas et propose à son fiston une petite balade en tête, loin des petits fours et orchestres de chambre qui semblent taper sur les nerfs de son nihiliste de fils. Seulement, à vouloir en mettre plein la vue à ce dernier1, Papy gâteau ne parvient qu’à faire croître le ressentiment de Morty à son égard. Ce dernier n’a en effet toujours pas digéré la manière dont la campagne de Barbarus s’est terminée : lui crachant ses poumons et suintant du pus par tous les pores, et l’Empereur se téléportant par magie devant Necare (seigneur suprême de Barbarus et père adoptif de Mo’) pour lui voler son kill. On sent donc que les relations ne seront jamais au beau fixe entre ces deux là, mais que pouvait attendre donc de la part d’un Primarque ayant grandi sur une planète perpétuellement recouverte de nuages verdâtres ?

Un peu plus tard, l’Empereur tente une autre avancée, en amenant Son fils dans le « modeste » atelier où il se délasse l’esprit et les doigts lorsqu’il a un peu de temps libre. Comme Il le révèle à Morty, Il offre à chacun de Ses Primarques un cadeau fait de Son auguste et blanche main avant que ces derniers ne partent rejoindre la Grande Croisade, et c’est ainsi que Mortarion hérite d’un magnifique cimeter-. En fait non. Le goujat refuse tout net de se séparer de sa faux énergétique, ce qui crispe légèrement l’Empereur. Pour ne pas avoir l’air de refuser le cadeau paternel, Mortarion s’empare d’une autre relique qui traînait dans le coin, le pistolet Lanterne que Pépé a gardé comme souvenir de sa conquête de la planète Shenlong. Et voilà comment une bouderie puérile a fait de Morty le Primarque pistolero. The more you know…

La nouvelle se termine avec un Empereur sensiblement agacé par les caprices de Son Fils, et qui fait ce qu’il a l’habitude de faire depuis cinquante ans quand quelque chose Le gonfle : refiler la patate chaude à ce brave Horus. Comme Lulu la Percale tenait à rencontrer au plus tôt son nouveau frérot, il attendait patiemment dans une antichambre du Bucephelus, ce qui donne l’occasion à Pépé d’aller martyriser un sac de frappe à la salle de gym pendant que Ses fistons font connaissance. Pas tous les jours faciles d’être un père célibataire de famille nombreuse…

1 : La discussion dans la coursive avait pour but principal de montrer à Mortarion le véhicule de fonction gracieusement offert par l’Empereur, l’Endurance. On raconte que les derniers arbres de la forêt amazonienne ont été coupés pour produire le papier cadeau nécessaire à l’emballage.

AVIS:

James Swallow signe peut-être sa meilleure soumission consacrée à Mortarion avec Lantern’s Light, nouvelle qui explore de manière assez fine la psyché torturée du Primarque de Barbarus, et la relation complexe qu’il a toujours entretenue avec l’Empereur. Tout l’intérêt de ces quelques pages repose dans la dualité des sentiments ressentis par le nouveau patron des Dusk Raiders : a-t-il raison de considérer Pépé comme un tyran égoïste et incapable de considérer les autres que comme des expédients à utiliser comme bon lui semble, ou est il juste sujet à une paranoïa aigüe, sans doute renforcée par l’enfance traumatisante qu’il a subi avec son père adoptif ? Ce sera au lecteur de décider, et c’est bien mieux ainsi. En bonus, on a le droit à pas mal de détails fluff, ce qui est toujours appréciable, et à un Empereur pas totalement à côté de Ses pompes (ce qui est malheureusement souvent le cas lorsqu’Il intervient personnellement dans un récit de la BL). Je recommande donc une nouvelle de James Swallow, et c’est assez rare pour le souligner.

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Canticle – D. Guymer :

INTRIGUE:

On a tous nos surnoms, plus ou moins glorieux, et Ferrus Manus ne fait pas exception. Bien avant d’être baptisé pognes d’acier (en latin haut gothique pour faire plus classe), notre héros a ainsi été appelé Numerodis (l’Empereur), Cataclysme (les géants des tempêtes du Pinacle de Karaashi), La Finalité (des morts-vivants quelconques), Rehew Netjer, soit le Fils de l’Homme (les Necrons), Mon très Chair (les despotes fragmentés du Subliminat), et Empafé de première (le type auquel il a piqué sa place sur le parking du Monoprix de Medusa). Pour sa part, et après avoir malencontreusement libéré Asimoth sur sa planète d’adoption peu de temps après son arrivée remarquée sur cette dernière et s’être révélé trop faiblard pour ramener la bestiole dans son enclos, le Primarque des Iron Hands s’est donné le nom et la vocation de Chasseur, ayant décidé de réparer sa bévue en traquant le wyrm d’argent à travers les paysages bucoliques de Medusa.

Ces premières années sont également l’occasion pour Ferrus Manus de faire ses premières armes, dans tous les sens du terme. On apprend ainsi qu’il a rencontré quelques difficultés sur sa route, d’ordre robotique, semi-robotique et infernal, ce qui donne une idée de la très riche « biodiversité » de la planète sur laquelle il a fait son trou. Rien de très mémorable cependant pour FM (et pour Guymer), dont l’équipement consiste en une cuirasse d’adamantium upcyclé et une bardiche bricolée à partir des dépouilles fumantes de ses malheureux adversaires biomécaniques. On apprend également que ce gentil garçon est capable de subsister sur un régime composé de sable, minéraux et métaux1, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Poursuivant sans relâche sa proie insaisissable, Ferrus finit tout de même par rencontrer des membres de son espèce, d’abord sous forme de cadavres entourant l’épave d’un camping-car Medusan. Curieux d’en apprendre plus sur ces étrangers qui lui ressemblent tant, et soucieux de récupérer un peu de matos utile dans la boîte à gants du véhicule éventré avant que tous les charognards du coin ne débarquent, le jeune Primarque se fraie un chemin jusqu’à la chambre forte du Sandcrawler, négociant au passage dix zombies cyborgs (zomborgs ?) occupés à mastiquer les cartes mères et câbles jack leur étant tombé sous la pince. Ce régime majoritairement électrovore ne les empêche cependant pas de sauter sur l’aventurier pour lui faire les poches dès qu’il s’approche un peu trop, forçant notre héros à faire montre de force autant que de ruse.

Une fois parvenu dans la salle des coffres, Ferrus a la surprise d’être mis en joue par une rescapée de l’embuscade ayant scellé le destin du véhicule et de ses occupants. Guère impressionné par la pétoire plasmique que son interlocutrice lui pointe sur le torse, le Chasseur refuse l’offre qui lui est faite par cette dernière de rejoindre son clan, arguant qu’il a encore une opération de vermifuge à accomplir, et un véritable nom à obtenir, avant de pouvoir faire son entrée dans le monde et participer au Bal des Débutant.e.s de Medusa. La suite de l’histoire de Chéri FM, si elle est connue, sera toutefois narrée dans un autre cantique que celui-ci.

1 : Avec quelques protéines et lipides occasionnelles de temps à autres, par exemple lorsqu’il croise la route d’une escouade de Dépeceurs sur leur 31. On peut donc classer Ferrus Manus dans la sous-catégorie des Primarques cannibales, avec Konrad Curze et Sanguinius.

AVIS:

On a plus l’impression d’un épisode pilote pour une série consacrée à l’enfance de Ferrus Manus que d’une nouvelle indépendante à la lecture de ce ‘Canticle’. Guymer passe en effet la majorité de ses pages à présenter de façon intrigante le jeune Primarque et sa planète, dont on aimerait bien apprendre davantage à la fin de son récit. L’intrigue semble avoir été volontairement tronquée pour permettre à l’auteur de la reprendre au cours de l’épisode suivant, qui n’a, à ma connaissance, pas été publié à ce jour. Peut-être faut-il creuser du côté de la novella1 que David Guymer a consacré à son héros pour mettre en perspective cette nouvelle ? Ou plutôt dans le ‘Voice of Mars’ du même auteur, où le Cantique des Voyages occupe une place importante ? En tous cas, si elle n’est certes pas désagréable à lire, et livre quelques éléments de fluff sur le plus moyen des fils de l’Empereur, cette histoire aurait gagné à se conclure de façon plus définitive.

1 : ‘Ferrus Manus : La Gorgone de Medusa’.

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The Verdict of the Scythe – D. Annandale :

INTRIGUE:

Nous retrouvons Mortarion, le plus sec (dans tous les sens du terme) des Primarques pendant la Grande Croisade, alors que la flotte d’expédition qu’il mène approche de la planète Absyrthus en mode bulldozer, perforant comme qui rigole – si Morty savait ce que cela veut dire – les défenses orbitales des locaux et se préparant à larguer son contingent de Death Guards sur les positions stratégiques de ce théâtre d’opération. Pour une fois, cette brutalité, pour laquelle sa Légion est fameuse, semble être justifiée. La civilisation d’Absyrthus est en effet similaire à celle de Barbarus, en cela qu’elle est gouvernée par une caste de sorciers1, ce qui a le don de mettre le Primarque psychophobe en rogne. Son plan pour remédier à ce problème fâcheux et mettre ce monde en conformité avec le cahier des charges impérial est aussi simple qu’élégant que direct : envoyer une barge Astartes s’écraser sur le QG adverse, ici la capitale planétaire, Temnis, pour décapiter (et aplatir) sa chaîne de commandement et frapper l’ennemi au cœur. Il a déjà employé cette technique, sans doute piquée aux Orks, avec un succès indéniable mais un peu trop sanglant pour ses fragiles de frères, lors de la campagne de Galaspar, achevée en un temps record par l’envoi d’un vaisseau spatial dans sa cité ruche principale. Un vieux fond de compassion qu’il ne se savait pas avoir pousse toutefois Mortarion à limiter la casse sur Absyrthus, qui ne perdra que son spatioport sous les patins blindés du Fourth Horseman, avant de demander grâce quelques minutes plus tard. Toujours d’humeur miséricurieuse (ça veut dire ce que ça veut dire), le Faucheur masqué accepte la réédition sans condition du camp d’en face au lieu d’ordonner le massacre complet des habitants de Temnis, comme ses officiers, à commencer par ce fourbe de Typhon Calas, s’y attendaient.

Il s’avère en effet que Mortarion est travaillé par une vague pulsion empathique, et s’interroge sur la possibilité, même mineure, d’apporter la paix et l’ordre à la galaxie autrement qu’en massacrant les mécontents. Absyrthus fera donc figure de test grandeur nature, et notre ombrageux et ombragé héros accepte avec stoïcisme de se plier aux formalités organisées par la reine déposée Cirkesce après la fin des combats. Typhon, entraîné par son boss dans le traquenard absolu que constitue un dîner diplomatique, questionne ouvertement le bien-fondé de la décision du Primarque, arguant que si la Légion s’appelle DEATH Guard, et pas la IDAWYBRYO2 Guard, c’est bien pour une raison. Habitué à se faire bolosser par son sous-fifre dans les écrits de James Swallow, Morty ne trouve pas grand-chose à dire pour justifier sa magnanimité soudaine, et décide d’aller prendre l’air pour rencontrer les vrais gens d’Absyrthus, et ainsi se faire une opinion définitive sur la situation. Laissant le palais derrière lui et ses Deathshrouds à longue portée (49 pas exactement), sa (future) Majesté des Mouches s’enfonce dans le dédale de la vieille ville…

Début spoiler…Et là, cela tourne rapidement au drame. Les oreilles sensibles de Mortarion finissent en effet par détecter les bruits révélateurs d’un rituel chaotique, ce qu’il a formellement interdit aux nouveaux sujets de l’Imperium. On pourrait arguer que c’est un peu chien de sa part de se formaliser de la persistance d’une pratique traditionnelle bannie il y a moins d’une journée, mais le Primarque acquiert bientôt la certitude que la vieille femme qui fait couiner son brasero au cœur de la casbah de Temnis EN A FAIT EXPRÈS POUR LE FAIRE CHIER ce qui est un crime impardonnable. Pire, sa rapide entrevue avec la mégère décomplexée, et son retour jusqu’au palais de Cirkesce, le convainquent que les Absyrthusiens sont tous des hypocrites, faisant semblant de se plier aux consignes des envoyés de l’Empereur le temps que ces derniers repartent purger les étoiles.

Devant ce constat accablant, et peut-être un peu précipité, le sort de la planète est scellé. Mortarion siffle la fin de la récré, arrachant Typhon au buffet froid que le Premier Capitaine était en train de nettoyer avec lenteur et méthode3, repart en orbite et décrète l’Exterminatus pendant que ‘Won’t Get Fooled Again’ des Who est envoyé à fond les ballons par l’auto radio du Fourth Horseman. Ce sera désormais le seul verdict que délivrera la Death Guard à ses adversaires, en faisant la Légion la plus efficace de la Grande Croisade pour un temps…Fin spoiler

1 : Autre point commun avec la planète natale de Mortarion (et le Finistère Nord) un taux d’ensoleillement inférieur à 1%.
: I Don’t Agree With You But Respect Your Opinion.
3 : On le sait peut, mais c’est de là que vient la règle spéciale de la Death Guard.

AVIS:

David Annandale montre avec ‘The Verdict of the Scythe’ qu’il a parfaitement compris les modalités de l’exercice représenté par une nouvelle Primarchs, soit un récit mettant en scène un épisode marquant de la vie de son sujet, et éclairant le lecteur sur les raisons ayant poussé ce dernier à devenir la figure qu’il est dans le fluff. En 12 pages bien pesées, Annandale répond ainsi à la question Orangina Rouge (mais pourquoi est-il si méchant) pour Mortarion, brossant le portrait d’un Primarque dont le caractère impitoyable a été, à un certain niveau, causé/renforcé par un événement particulier l’ayant détourné pour de bon de la voie du Bisounours. On peut trouver l’histoire et la justification qu’elle apporte à la rigidité morale de son protagoniste simpliste, mais force est de reconnaître à l’auteur qu’il a rempli son contrat de façon satisfaisante, même si pas extraordinaire.

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A Game of Opposites – G. Haley :

INTRIGUE:

C’est malheureusement très peu traité dans les livres d’histoire impériaux, mais la bataille de Beta Garmon, aussi connue sous le nom de casse (de Titans) du millénaire, ne s’est pas tenue du jour au lendemain. Cette rencontre décisive entre renégats et loyalistes, et les milliards de morts qui en ont découlé, n’a été rendue possible que par le dévouement et le travail de l’ombre de Légions de sous-fifres, comme l’histoire dont il est question ici s’en fait écho. Bienvenue donc à la surface d’Epsilon Garmon II, planète du cluster garmonien que les Iron Warriors souhaiteraient fortifier pour ralentir l’arrivée prochaine de Guilliman et de ses hordes de Schtroumpfs. Le conditionnel est ici de mise car les efforts de terrassement des hommes de fer se sont jusqu’ici faits contrecarrer par les manœuvres destructrices d’une petite force de White Scars. Peu familiers des techniques de hit and run de leurs cousins des steppes, les fils de Perturabo sont perturbés par cette campagne d’un genre nouveau, où ils arrivent toujours trop tard pour empêcher les Space Bikers de sévir.

Fort heureusement, le Maître de Forge Xyrokles, affublé de son larbin et souffre douleur Phideark, ainsi que d’une ribambelle de Capitaines dont je vous épargnerai les noms, a un plan machiavélique pour venir à bout du péril jaune blanc à éclair rouge. Ayant récupéré dans un campement abandonné par ses ennemis quelques bouquins philosophiques signés de la main même de Jaghatai Khan et remplis d’aphorismes aussi profonds que « La taupe ne voit pas le vol de l’éléphant », « Pourquoi rester debout quand on peut s’asseoir » ou « Plus il y a de fous, moins il y a de riz », Xyrokles a tellement bûché sa philo1 qu’il est certain de pouvoir prendre les White Scars à leur propre piège, en réalisant un coup de billard à IV bandes à base de feintes, de retraites et d’embuscades tellement complexes que la majorité de ses sbires n’y blaire que dalle. Lorsque vient enfin le jour le plus long, le Khan Ishigu emmène ses motards énergétiques faire une petite virée dans un avant poste renégat, sans se doute un instant que ses minutes sont comptées.

Et en effet, le plan de Xyrokles se déroule comme sur des roulettes, la colonne blindée qu’il a envoyé leurrer les loyalistes au moment où ils commencent à se replier en bon ordre se révélant être un extra trop tentant pour qu’Ishigu et Cie résistent à la tentation d’y planter leurs pneus. Ce détour est toutefois lourd de conséquences pour les White Scars, qui se font surprendre par une contre-attaque vigoureuse de la part des Iron Warriors, et canalisés dans un goulet étroit débouchant sur la ligne de blindés du Maître de Forge, qui n’a plus qu’à donner l’ordre d’ouvrir le feu pour régler une fois pour toutes leur compte aux scarifiés d’en face…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur la légendaire flexibilité tactique des fils du Khan, qui avaient tout planifié depuis le début et cachés également une réserve mobile pour surprendre l’adversaire. Confrontés à une force anti-chars conséquente et bénéficiant de l’effet de surprise, Xyrokles et ses hommes ne font pas long feu (c’est la vieille histoire de l’artilleur artillé). L’honneur est toutefois sauf pour ce dernier, puisqu’il s’aperçoit après avoir été fait prisonnier que c’était Jaghatai Khan en personne qui était aux commandes dans le camp d’en face. S’en suit un échange d’amabilités qui nous permet d’apprendre que le Khan se tamponne le samovar avec la vérité impériale, qu’il considère poliment comme un avis parmi d’autres. Stupeur chez Xyrokles, qui en surhomme de principe, pensait que tous les loyalistes adhéraient scrupuleusement au dogme de Pépé. Il emportera toutefois ce secret dans la tombe, que son généreux vainqueur lui accorde en récompense de ses méritants efforts de réflexion, Jaggie Chan lui dévissant les cervicales d’un tour de main à la fin de leur échange. C’est qu’il a du pain sur la planche, et un retour sur Terra à préparer…Fin spoiler

1 : Ce qui est somme toute logique pour un grec ancien.

AVIS:

Je suis partagé sur la valeur de ce ‘A Game of Opposites’, qui comporte des éléments positifs comme négatifs. Pour commencer par ce qui ne fâche pas, j’ai apprécié le choix de Haley de donner une dimension, si ce n’est comique, au moins caustique, à ses Iron Warriors, qui font ainsi mentir leur réputation de guerriers prenant tout au premier degré. La dynamique entre Xyrokles et Phideark est particulièrement savoureuse, le second encaissant sans broncher toutes les punchlines que son supérieur lui balance à la tête. Dommage que le destin tragique du Coluche d’Olympia nous prive d’autres saillies drolatiques de sa part pour la suite de l’Hérésie. Cette nouvelle est également intéressante d’un point de vue fluffique, car elle donne à voir un Jaghatai Khan d’un pragmatisme assumé et presque hérétique, ayant pris parti pour son Père mais loin de se ranger à toutes ses vues, y compris sur des sujets aussi sensibles que la religion (il croit en la réincarnation). D’un autre côté, ‘A Game of Opposites’ pêche franchement pas son manque de suspens et son déroulement sans surprise. Car le résumé ci-dessus ne suit pas exactement le récit de Haley, qui choisit de révéler la présence du Khan au côté d’Ishigu dès le premier tiers de la nouvelle, ce qui condamne d’office le stratagème de Xyrokles à l’échec1. Le retournement de situation final et la victoire des White Scars sont donc aussi attendus que l’heure de la pause syndicale dans un guichet de poste, ce qui peut blaser le lecteur (en tout cas, ça a été mon cas). En conclusion, pas le meilleur texte de Guy Haley, mais pas désagréable ou inutile pour autant.

1 : Il n’y a que John French qui fait battre un Primarque par un Space Marine (‘The Crimson Fist’).

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Better Angels – I. St. Martin :

INTRIGUE:

Les Légions Space Marines sont un peu comme les filières post bac : il y en a pour tous les goûts et tous les niveaux. Si les impétrants ayant de la suite dans les idées et la volonté de faire carrière se rabattront sur des spécialisations ternes mais assurant la sécurité de l’emploi (BTS Gestion avec les Ultramarines, Bac Pro travaux publics avec les Imperial Fists ou les Iron Warriors, CAP Esthétique avec les Emperor’s Children…), les plus aventureux tenteront leur chance dans des cursus plus pointus, à leurs risques et périls. C’est ainsi que l’Empereur se retrouva avec des cohortes de philosophes désagrégés (Thousand Sons), théologiens en déshérence (Word Bearers), et vétérinaires ayant raté leur concours d’entrée (Space Wolves), qu’il dût bien recaser à droite et à gauche pour éviter la crise. Enfin, pour un temps. Mais, parmi tout l’Astartes, aucune Légion n’égale les Blood Angels en termes de réputation. Si on appelle les fils de Sanguinius (derrière ses ailes) des poètes, des peintres ou des danseuses, c’est pour une bonne raison : le Primarque exige que tout le monde pratique une discipline artistique, depuis le plus humble novice jusqu’au plus ancien des Dreadnoughts1. Notre héros, que nous allons suivre depuis le début de sa carrière jusqu’à l’arrivée de la flotte de la IXème en orbite de Terra, peu de temps avant le début du siège, ne fait pas exception. Jehoel (il faut croire que Joël était déjà pris) s’est ainsi spécialisé dans la verrerie, ce qui lui a attiré l’intérêt et le mentorat de son père génétique, souvent présent lorsque le souffleur fait parler la poudre le sable.

Ces rencontres ponctuelles mais fréquentes, si elles permettent aux deux surhommes de discuter technique et philosophie, amènent surtout le lecteur à suivre en filigrane la fin de la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus du point de vue d’un Primarque et d’une Légion particulièrement éprouvés par la traîtrise du Maître de Guerre, et le déclenchement de la baalédiction des fils de Malle, ou l’inverse. Finies donc les évocations de la prochaine reconversion des légionnaires en portraitistes et potiers une fois la galaxie conquise, et bonjour les sculptures de démons réalisées dans un état second, au grand déplaisir de Sanguinius – qui passe la nouvelle à critiquer Jehoel, ceci dit. Adieu aux riches galeries du Red Tear, et bonjour à la décoration minimaliste du Convenant of Blood, véhicule de courtoisie prêté par l’Imperium après le carambolage de Signus Prime. Lorsque St Martin décide enfin de mettre un point final à sa nouvelle, on apprend tout de même que si Sanguinius s’est montré aussi assidu dans ses discussions avec Jehoel au cours des décennies passées, c’est parce qu’il considérait que ce dernier était l’un des Blood Angels les plus bloodangeliques de la Légion, et pouvait ainsi se contempler à sa guise dans son interlocuteur. Un peu égocentrique le garçon, tout de même. Le rideau tombe sur la scène après que Jehoel ait montré à son pôpa la représentation idéalisée de Terra qu’il a réalisée avec de la pâte de verre, ce qui lui vaut les félicitations (enfin !) du jury, et que l’Ange ait balancé la remarque à connotation fataliste de rigueur, davantage pour le bénéfice du lecteur que pour celui de son fiston. Si jeunesse savait…

1 : À l’exception notable de la danse classique, après que le Vénérable Neolardon ait failli écraser Sanguinius en passant à travers le plancher du gymnase à la suite d’un saut carpé mal négocié.

AVIS:

Je placerais ce ‘Better Angels’ dans le prolongement de ‘Death of a Siversmith’/’Mort d’un Orfèvre’ (Graham McNeill), et pas seulement parce qu’il met en scène un protagoniste très porté sur les arts plastiques. On retrouve en effet, et surtout, dans cette nouvelle la volonté assumée de l’auteur de surprendre son public en livrant une histoire s’écartant largement du bolter porn qui est la norme de l’Hérésie d’Horus. Et, là encore, le résultat penche davantage vers l’exercice de style un brin forcé que vers la réussite incontestable. Ou peut-être n’ai-je pas lu assez sur Sanguinius et les Blood Angels pour tirer la substantifique mehoelle de ce texte ? C’est bien possible. Toujours est il que je sors du studio du Primarque à plumes un peu circonspect sur la valeur de cette soumission, qui aurait pu, pour reprendre son titre, être bien meilleure.

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The Conqueror’s Truth – G. Thorpe :

INTRIGUE:

La chance d’une vie. C’est ainsi que la Commémoratrice Ennylin Ares, rattachée à l’équivalent d’un car de manœuvres moldaves en matière de flotte d’expédition de la Grande Croisade, accueille la nouvelle d’une rencontre fortuite avec une escadre de vaisseaux de l’Astartes dans le système de Vestogorn. Et tant pis s’il s’agit des Night Lords, dont la réputation de brutalité et de sadisme commence à transpirer largement d’un bout à l’autre de l’Imperium. C’est en effet l’occasion pour notre héroïne, qui a jusque-là usé ses pellicules à immortaliser des inaugurations de barres de HLM pour déportés colons sur une douzaine de mondes conquis depuis belle lurette, de se confronter à la réalité de l’expansion humaine dans la galaxie, et de saisir sur le vif les glorieux Space Marines alors qu’ils apportent l’unité impériale à une planète un peu récalcitrante. Après tout, c’est pour son bien.

Sa requête d’un rattachement aux opérations des Night Lords ayant été rapidement acceptée, Ares bénéficie d’un traitement VIP, accordé à la demande expresse de Konrad Curze, qui dirige la mise en conformité de Vestogorn d’une main de fer et d’un air satisfait. C’est tout lui ça. Après une rencontre convenablement inquiétante et crépusculaire sur le Nightfall avec le Primarque en personne pour un entretien de motivation rapidement expédié, Konnie charge son surhomme à tout faire, le sarcastique Premier Capitaine Sevatar, de chaperonner la Commémoratrice sur le terrain. N’ayant que peu de temps à consacrer à une touriste à appareil photo, l’officier se contente de la déposer à bonne distance de la ligne de front, en lui intimant de ne pas se rapprocher de cette dernière, sous peine de rencontrer les mêmes problèmes que les Commémorateurs précédemment rattachés à la VIIIème Légion, dont les effectifs ont fondu comme neige au soleil après une série d’accidents fâcheux et de démissions subites. C’est que tout le monde ne supporte pas bien la manière très personnelle dont les Night Lords s’acquittent de leur mission de reconquête du Lebensraum impérial. Il y a des Croisés qu’il ne vaut mieux pas croiser dans une allée sombre…

Bien évidemment, dans la plus pure tradition des civils indisciplinés fourrés dans les pattes énergétiques des Space Marines, Ares décide de ne pas suivre le sage conseil de Sevatar, et bien évidemment, elle se met rapidement dans de beaux draps. Sa décision de grimper en haut d’un immeuble en ruines pour bénéficier d’une vision d’ensemble sur la cité « pacifiée » par les Night Lords se révèle être une mauvaise idée lorsqu’une petite bande de combattants locaux la repère et converge sur sa position, et sans doute pas pour lui demander de prendre une photo de groupe. Tout cela aurait pu très mal se finir pour notre héroïne sans l’intervention parfaitement ponctuelle des Night Lords, qui font leur fête aux insurgés, récupèrent la Commémoratrice égarée, et l’emmènent à quelques blocs de là rencontrer à nouveau Curze, qui a besoin de ses talents de communicante pour faire passer un message…

Début spoiler…Ce message, qu’il destine et dédicace à tous les pontes de Terra qui décident du devenir de la Grande Croisade sans y avoir jamais participé, et aussi cash que trash. Le rêve de l’Empereur est, dans bien des cas, un véritable cauchemar pour les populations des planètes qui résistent à l’assimilation, comme l’illustre bien le destin des Vestogorniens, victimes d’un grand remplacement littéral et expéditif pour faire la place aux colons impériaux. Faits prisonniers par les Night Lords, ils sont en effet précipités dans les puits géo-thermaux dont la cité tire son énergie, ce qui règle d’un seul coup les problèmes d’insécurité et de surpopulation auxquels Curze est confronté, en plus de se révéler économe en munitions. C’est Gégé de la compta’ qui va être content. Evidemment, Ares est scandalisée par ce crime de guerre puissance 30.000 auquel elle est forcée d’assister, mais est prise au dépourvu par le désir sincère du Primarque que cette vérité peu glamour soit partagée avec le reste de l’Imperium, et par la révélation (peut-être mensongère) que l’Empereur est déjà au courant de l’approche radicale de son fils indigne, et n’a rien trouvé à y redire… pour le moment. Curze insiste même pour récupérer les images et vidéos prises par Ares afin que les Community Managers de sa Légion puissent monter un petit clip d’avertissement sans frais pour les prochaines planètes que les Night Lords seront chargés d’ambiancer. Bref, tout le monde y gagne, et tout va (déjà) pour le mieux dans le meilleur des univers…Fin spoiler

AVIS:

Gav Thorpe fait le job avec cette chtite nouvelle, qui donne à voir les méthodes et philosophies d’un Konrad Curze encore loyal mais déjà fortement désabusé et totalement marginal, au plus fort de la Grande Croisade. Rien de tout cela n’est très nouveau, à part peut-être le fait que l’Empereur ait soi-disant choisi de fermer les yeux sur les méthodes incisives de l’ex futur Night Haunter, mais le propos est bien servi et mis en scène, et Thorpe ne se gêne pas pour souligner la logique dans la folie du Primarque justicier, qui fera finalement école dans les millénaires qui suivront. Quel visionnaire alors, ce Konrad. On a également plaisir à retrouver Sevatar, pas encore blanchi sous le harnais ni rougi sur le gantelet, et le voir faire du Sevatar (ADB style), c’est-à-dire balancer des remarques acerbes avec l’aplomb d’un Gaspard Proust sous progénoïdes. C’est du fan service certes, mais c’est pas mal fait et on aurait donc tort de s’en priver. Au final, ‘The Conqueror’s Truth’ est une version revue, corrigée et améliorée de ‘The Dark King’/’Le Roi Sombre’ (Graham McNeill), qui se donne l’espace et les moyens de délivrer son message de façon efficace.

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The Sinew of War – D. Hinks :

INTRIGUE:

Sur Macragge comme sur Terra, bien des millénaires plus tôt, la vile populace s’est soulevée contre ses justes et bienveillants maîtres, provoquant émeutes, massacres, feux de poubelle et occupations de ronds-points, tous crimes abominables mais heureusement sévèrement punis par les forces de l’ordre. Et en termes de répression policière, la capitale des 500 mondes a un avantage de taille et de poids par rapport à notre bonne vieille planète : Roboute Guilliman, génie précoce et baraqué, général visionnaire, humaniste convaincu, et fils adoptif du Consul Konor Guilliman, qui forme avec son collègue Gallan le duumvirat exécutif de l’espèce de république (il y a un sénat aussi) établie sur Macragge City. Occupé en Illyrium à pacifier une bande d’autochtones ayant eu la mauvaise idée de se rebeller contre l’ordre établi, notre héros a raté le début du soulèvement urbain qui a transformé la cité idéale de son enfance en champ de bataille. L’idéaliste, et un brin méprisant, surhomme a bien du mal à comprendre pourquoi diable une partie de l’armée s’est rangée du côté des casseurs, tout ça pour une bête histoire d’argent. C’est bien une réflexion de gosse de riches ça, Roro. Mais il lui faut attendre avant de consigner par écrit ses savantes réflexions sur les causes et les répercussions de ce mouvement social aussi inédit que violent : son père est resté dans la cité et a sans doute été pris pour cible par les fainéants et les sans dents. Il faut lui venir en aide.

Progressant rapidement vers le palais du Consul en distribuant quelques baffes aux mutins au passage, et utilisant son armure de scenarium pour passer entre les balles1, Gui est rejoint en chemin par Gallan, qui est venu lui aussi s’enquérir de la situation de son collègue de bureau. N’hésitant pas à joindre le geste à la parole, le Consul consort est même blessé dans la bagarre, écopant d’une estafilade au biceps pour preuve de son dévouement. Las, les deux compères arrivent trop tard pour sauver Konor (ce qui est triste) et les tapisseries (ce qui est pire). Papa Guilliman a été lâchement égorgé par ses assaillants, l’empêchant de dire adieu à son fils mais surtout de donner le nom des coupables. Bizarrement, il refuse catégoriquement que Roboute s’approche de lui dans ses derniers instants, allant jusqu’à le mettre en joue avec son pistolet pour le maintenir à distance. Le respect des gestes barrières jusqu’à la dernière seconde, on reconnaît bien là la trempe d’un vrai Macraggien. Konor a toutefois un message à faire passer à son fiston avant de mourir pour la patrie : une pièce frappée à l’effigie des deux Consuls de Macragge, et symbolisant le caractère éternel de la république, même en ces heures difficiles. Ou du moins, c’est ce que le cerveau embrouillé de Roboute en déduit, se souvenant d’une leçon de vie mémorable inculquée par son père avec un sesterce du même genre bien des années plus tôt. Sur ces considérations philsophico-fiduciaires, Konor passe de vie à trépas, provoquant une colère noire bleue chez son fils.

Convaincu par Gallan d’aller défendre le Sénat, probablement attaqué lui aussi par les vandales en sandales, Roboute sèche ses larmes et lèche ses armes, avant de se frayer un chemin jusqu’au parlement local en commettant quelques crimes de guerres au passage. On va dire qu’il bénéficiait de circonstances atténuantes. Pendant que Gallan tente d’aller raisonner les sénateurs, qui débattent férocement entre eux du meilleur moyen de châtier les gueux, Guilliman est envoyé se changer au vestiaire, son apparence dépenaillée risquant fort de provoquer des remous contre productifs dans les rangs de l’auguste assemblée. Cet enfilage de toge manque toutefois de tourner court pour le Primarque, qui se fait soudainement attaquer par le préposé aux cabines d’essayage, armé d’un poignard empoisonné. Le nez très fin de Guilliman lui permet de comprendre en un éclair que la même toxine a été utilisée sur Konor, et que c’est pour protéger son fils d’une intoxication involontaire que le Consul mourant l’a empêché d’approcher. Passé l’effet de surprise, l’assassin en puissance ne fait pas longtemps le malin face aux réflexes de mangouste et à la poigne de langouste de notre héros, qui ne parvient cependant pas à lui faire cracher autre chose que des bulles de bave (le bougre retourne son surn contre lui), à commencer par le nom de son commanditaire. Encore un crime crapuleux, c’est dingue ça. Il faudrait vraiment que les pauvres songent à être moins pauvres, ça réglerait beaucoup de problèmes d’un coup. Cette péripétie évacuée, il est temps pour Roboute de rejoindre Gallan sur l’estrade, afin de soutenir le coup d’état salutaire que ce dernier veut initier pour sauver la république…

Début spoiler…Mais, ô surprise, Rob’ est accueilli par un discours très critique de ce galopin de Gallan à l’encontre de son père, taxé de populiste et de socialiste par son homologue, et à l’annonce de son propre assassinat, pour le bien de Macragge. Evidemment, le « hum hum » que jette Guilliman juste après ruine un peu le groove de celui qui aurait bien aimé être empereur, qui se prend les pieds dans le tapis à tenter de justifier son double langage. Pas plus bêtes que la moyenne, les sénateurs comprennent vite que Gallan est le méchant de l’histoire, et qu’il a manigancé ce soulèvement populaire pour se débarrasser de ses rivaux et saisir le pouvoir. Roboute était parvenu à la même conclusion quelques instants auparavant en réalisant que la pièce que lui avait donné son père désignait en fait son meurtrier, puisqu’elle avait le profil de Gallan frappé sur ses deux faces2. Plus démasqué que Donald Trump au milieu d’une épidémie de COVID-19, le félon se fait appréhender par le service de sécurité, après que le noble Guilliman, ayant réalisé que tuer le traître de ses propres mains aurait été certes cathartique, mais contre-productif et contre ses valeurs, ait indiqué qu’il laisserait la justice suivre son cours. Devant tant de légalisme, les sénateurs ne peuvent que jurer allégeance au Primarque, exemple vivant d’une intégration réussie par un immigré méritant. L’histoire est en route pour Roboute…Fin spoiler

1 : Le pouvoir psychique caché de Guilliman est de faire voir flou à ses ennemis. C’est subtil mais très efficace. Ça marche malheureusement moins bien au corps à corps, comme Angron et Fulgrim le constateront.
2 : On pourrait dire qu’il aurait été plus efficace à Konor de simplement pointer du doigt Gallan au moment où lui et Roboute sont arrivés dans la pièce, mais l’histoire se serait terminée un peu brutalement.

AVIS:

Darius Hinks livre la version romancée de l’épisode le plus connu de la jeunesse de Roboute Guilliman (que David Annandale avait mystérieusement choisi d’ignorer dans la novella consacrée au Primarque), et le fait plutôt bien. Certes, si vous connaissez votre fluff, le suspense que l’auteur se donne du mal à entretenir jusqu’au bout de son récit tombe rapidement à l’eau, mais on ne peut pas reprocher à Hinks d’avoir voulu soigner sa sortie, et la relation de confiance qui existait auparavant entre les Guilliman et Gallan est un choix intéressant de sa part, qui peut en partie expliquer pourquoi le futur patron des Ultramarines a tendance à vouloir faire les choses tout seul de son côté. On glane également quelques informations sur la société de Macragge avant son intégration dans l’Imperium, ce qui est de l’ordre du notable. Il y avait sans doute moyen de capitaliser davantage sur cet événement fondateur pour expliquer la suite de l’histoire de Guilliman, voire l’Hérésie, voire le Sombre Imperium, ou, plus simplement, insérer quelques easter eggs saveur ultramarine (notons tout de même la mention faite à Tarasha Euten, Chambellan du Primarque et héroïne de l’audio book ‘Illyrium’ du même auteur) , mais pour une nouvelle de 16 pages, Hinks s’en sort très honorablement, autant sur le plan théorique que pratique.

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The Chamber at the End of Memory – J. Swallow :

INTRIGUE:

Comme tous les créatifs peuvent vous le dire, ce sont les derniers moments avant le rendu final qui sont les plus stressants. Et bien que Rogal Dorn ne mérite pas franchement ce qualificatif, il partage néanmoins ce souci du détail et cette tendance au micro-management qui distingue les génies et les pervers narcissiques du reste de la population. Ayant pris son hoverboard gravitationnel et son mécapigeon holographique1 pour inspecter l’avancée des travaux, l’Homme de Pierre corrige et réajuste les milliers de petites variables qu’il est le seul à voir mais dont la victoire dépendra peut-être. Après tout, si Horus tombe des fortifications après avoir glissé sur un gravillon énergétique, la guerre sera tout de même gagnée. Alors qu’il s’approche de l’Investiary, l’amphithéâtre anciennement décoré de 20 statues monumentales de la fratrie impériale, et dont deux des plinthes sont maintenant vides, une explosion attire son attention. Il semblerait que l’une des tours de stockage de la zone ait contenu du nitrate d’ammonium, et pas les précieuses antiquités collectionnées par Malcador le Sigilite, qui avait demandé au Prétorien de Terra de ne pas raser le quartier pour en faire des gravillons (énergétiques), comme il en a la sale habitude. N’écoutant que son statut de protagoniste de nouvelle, Rogal se hâte sur les lieux pour mener sa petite enquête.

Sur place, il constate qu’un début d’incendie a ravagé la façade, et que l’équipe en charge de l’audit/expropriation/démolition a connu une fin horrible et peu commune, les cadavres jonchant l’intérieur du bâtiment semblant avoir été causé par des ondes de choc, des explosions internes ou vaporisations pures et simples de l’individu, ce qui n’est certes pas banal. Pas banale non plus est la sensation persistante et croissante qu’éprouve le Primarque qu’il doit faire demi-tour au fur et à mesure qu’il progresse vers l’épicentre de la catastrophe. Ce mauvais pressentiment n’est pas suffisant pour arrêter la marche (du fils) de l’Empereur, mais les apparitions psioniques (des démons libres de droit, pour faire simple) qui l’attaquent dès qu’il pose le pied dans l’antichambre finale le convainquent de consulter un spécialiste, une fois les fâcheux renvoyés dans le Warp. Et justement, il a une soute pleine d’Archivistes sous scellés en orbite, qui n’attendent que son bon vouloir ou l’arrivée d’Horus pour se rendre utiles2.

Le destin ayant désigné le frère Yored Massak pour prêter main, ou plutôt tête, forte à son Primarque, nous suivons les deux guerriers revenir jusque dans la salle piégée, où les horreurs éthérées re-spawnent avec diligence, pour se faire à nouveau bannir en deux temps trois mouvements par nos héros. Si ces derniers étaient prêts à combattre des ennemis de cette trempe, qui ont fait leur fête aux malheureux larbins ayant eu la mauvaise idée de vouloir faire leur boulot, ils se figent sur place en remarquant les symboles qui marquent les deux gigantesques portes qui terminent le corridor : II et XI

Il s’agit bien entendu d’une référence aux deux Primarques disparus, frappés d’anathème par l’Empereur en personne, mais dont l’éphémère existence reste de notoriété publique au sein des Légions de l’Astartes. Pendant que Dorn se creuse les méninges pour percer ce mystère insondable, Massak parvient finalement à mettre le doigt, ou plutôt la tête, sur le sentiment de déjà perçu qui l’habitait depuis son entrée dans la tour. L’installation psychique de cette dernière a été effectuée par Malcador en personne, l’Archiviste repentant en est certain. Et l’intéressé confirme aussitôt sa déclaration, en arrivant sans crier gare dans la pièce. Ayant envoyé Massak poser des parpaings à l’extérieur pour avoir un peu d’intimité, le Régent de Terra a enfin la possibilité de s’expliquer auprès d’un Rogal Dorn qui sent de manière confuse qu’il s’est fait mindfucker par l’éminence grise dans un passé plus ou moins lointain. Il ne s’explique en effet pas son absence totale de souvenirs de Deuzio et Onzio, alors qu’il dispose d’une mémoire eidétique tout ce qu’il y a de plus primarquielle. Et Malcador d’avouer que c’est bien lui qui est responsable de ce trou de mémoire généralisé, touchant à la fois les Astartes des Légions décapitées (avant qu’ils puissent être réformés et repackagés), mais également les Primarques ayant connu personnellement les fils indignes de Pépé. Mais attention, il avait une bonne raison de le faire, se dépêche-t-il d’ajouter avant de finir tronçonné par l’Homme de Pierre : c’est Dorn et ses frères eux-mêmes qui lui avaient demandé un brainwash pour permettre à l’Imperium de se relever d’une tragédie si terrible qu’elle avait manqué de le mettre à genoux. L’Empereur, comme à son habitude, avait tout vu/su mais n’avait rien dit/fait. Classic MoM move here.

À moitié convaincu par l’explication du Sigilite, qu’il ne peut plus blairer depuis le début de la fortification de Terra, Dorn fronce les sourcils tellement fort que son interlocuteur décide de lui accorder un droit de flashback limité et provisoire sur son passé oublié, afin qu’il puisse se rendre compte par lui-même de la bonne foi du Régent. EVIDEMMENT, le lecteur ne sera pas convié à cette introspection douloureuse, dont les effets se dissipent rapidement mais qui convainc Dorn de la véracité des dires de Malcador, et surtout de la nécessité que ce passé, semble-t-il absolument honteux, de la Grande Croisade ne refasse jamais surface. Lorsqu’il ressort de la tour, il ordonne donc aux équipes venues en renforts de la détruire (plus de gravillons !). De toute façon, Massak avait achevé une copie conforme du bâtiment avant que le sort ne soit rompu par un claquement de doigts de Rogal Dorn, ce n’est donc pas une grande perte d’un point de vue stratégique.

1 : Surtout pour se délecter de le voir ch*er sur les hélotes en contrebas, je pense. Il faut bien trouver un moyen d’évacuer le stress quand on ne boit/fume/joue/prie/couche/rigole pas.
2 : Enfin, plus utiles qu’ils ne le sont à l’heure actuelle, le tricotage d’écharpes pour les soldats impériaux de faction sur les murailles du Palais n’exploitant pas tout le potentiel des Anges de la Mort susnommés.

AVIS:

James Swallow touche à l’un des mystères fluffiques les plus importants du background de l’Hérésie d’Horus dans ce ‘The Chamber…’ et parvient à nous vendre une once de révélations sur la destinée des Primarques disparus comme s’il s’agissait d’une avancée majeure du lore. C’est en tout cas le sentiment qui dominait chez votre serviteur à la fin de la lecture de cette nouvelle, qui contient trop de micro-informations et de sous-entendus sur lesquels gloser à l’infini pour ne pas mériter sa place dans la liste de lecture de tout fanboy/girl revendiqué.e. Mais on n’est certes pas au niveau d’un ‘Legion’ ou d’un ‘Saturnine’ en termes de coup de théâtre, ce qui est somme toute logique pour une histoire au tirage assez confidentiel telle que ‘The Chamber…’. Notons au passage la présence que quelques bouts de fluff « autres » au fil des pages, qu’il s’agisse du Palais Impérial ou de l’armement de Rogal Dorn, ainsi que le retour d’un second couteau souvent employé par Swallow en la personne de Yored Massak (‘La Fuite de l’Eisenstein’, ‘Garro’), et restons-en là.

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First Legion – C. Wraight :

INTRIGUE:

Spécialistes reconnus des campagnes pourries, les Dark Angels ont bien du mal à exterminer les Rangdan, espèce de Xenos experte en subterfuges et en tentacules, ce qui n’est guère du goût des roides et psychofrigides paladins de la Première Légion. Malgré tout, un ordre est un ordre, et les Astartes poursuivent leurs vaillants et violents efforts pour sécuriser ce petit bout de l’empire de leur Pépé, menés par nul autre que Lion El’Jonson en personne. Nous faisons tout d’abord la connaissance du Capitaine Arnaid, 45ème Compagnie, 8ème Ordre, 1ère Légion, dont la frégate a connu des jours meilleurs, mais qui n’hésite pas le moins du monde à intercepter le mystérieux vaisseau qui fait irruption dans la zone de « pacification » avec son Nightsward, bien que le nouveau-venu soit plus imposant et en meilleure forme. Alors que le Capitaine est sur le point d’ordonner un tir de semonce, ses salutations répétées n’ayant pas été retournées par les touristes en goguette, ceux-ci daignent enfin répondre, par la voix d’un autre officier Space Marine, un Capitaine de la nouvellement formée XXème Légion répondant au nom de…

Début spoilerJules-Edouard Petitbedon.

Bon ok : il s’appelle Alpharius. Incroyable, je sais.Fin spoiler

Alpharius s’excuse de ses manières cavalières et de son manque de décorum (son vaisseau, Perseus, a l’air d’avoir quitté les docks spatiaux avant que le Mechanicum n’y passe un coup de peinture), mais annonce qu’il est venu porteur de nouvelles pour Lion El’Jonson.

Pendant ce temps là, nous nous introduisons dans une réminiscence de Lionel en personne, du temps où il était un enfant sauvage qui courait cul nu dans les forêts de Caliban. Notre petit bonhomme semble être occupé à traquer une bête particulièrement bestiale, seulement armé d’une défense de phacochère nain et de sa volonté implacable. Wraight nous fait bien comprendre que c’est la destinée même d’El’Jonson qui est à l’œuvre ici, et entraîne le jeune Primarque au clash contre un monstre que la partie raisonnable/froussarde de Lionel aimerait éviter si possible. Pause pub.

Retour sur le Nightsward, où Alpharius est reçu par son homologue. Constatant qu’il ne sert à rien de féliciter ce dernier sur son goût (pratiquement inexistant) en matière de décoration d’intérieur, ni de tenter de piquer la curiosité (totalement inexistante) de l’austère Terran, l’Alpha Légionnaire qui s’ignore1 tente de soutirer quelques infos psychologiques et tactiques à Arnaid en jouant la carte de la franche admiration pour les exploits et la réputation de la Première Légion, avec un succès relatif. Ces oiseuses discussions sont toutefois interrompues par la réception d’un message autorisant Alpharius à voyager jusqu’à l’Invicible Reason pour y rencontrer Lion El’Jonson, avec Arnaid lui servant de Kaptain pour l’occasion. Simple déformation professionnelle, en somme.

Suite et fin du documentaire animalier commencé un peu plus haut avec la confrontation entre Lionel et sa Némésis, qui se trouve être un chevalier en armure. Car en fait, le zouave qui courrait dans la savane avec son coutelas d’ivoire n’était pas le Primarque, mais une sorte de démon ayant pris forme humaine, et décidé de mettre fin à l’écocide décrété par le chef de l’Ordre. Malheureusement pour notre ami, ce dernier se révèle être un adversaire trop coriace pour ses maigres ressources, et il finit promptement embroché par la rapière du palouf. Voilà qui lui apprendra à ne pas usurper, même littéralement, l’identité d’autrui. Avant de repartir dans le Warp, le Rahan de Caliban a le temps de traiter son assassin de « Premier Fils » et de l’accuser d’être « la mort de son monde », ce à quoi Lionel répond que son titre correct est le tueur de bêtes. Fin de l’épisode.

Sur l’Invicible Reason, le Dark Archangel reçoit comme convenu Arnaid et Alpharius, qui est en fait venu lui proposer un coup de main, en toute amitié2, pour en finir avec la campagne d’extermination des Rangdan. Les pertes terribles souffertes par la Première Légion menacent en effet son statut et son prestige par rapport à ses sœurs, et pourraient faire échapper à El’Jonson le titre de Maître de Guerre, que ce visionnaire d’Alpharius anticipe déjà qu’il sera décerné par l’Empereur à l’un de ses fils dans un futur pas trop lointain (dès que les 20 Primarques auront été retrouvés en fait…wait a minut-). Bien que ne contestant pas l’argumentaire de son petit neveu/frère, Lionel se montre méfiant devant l’intérêt qu’il semble attacher à la prédominance des Dark Angels dans l’équilibre politique de l’Imperium, et après avoir menacé de le couper en deux, en toute amitié, pour le forcer à exposer ses véritables motifs (Alpharius n’aime vraiment pas Guilliman), il le renvoie sur son vaisseau où il lui fera savoir sa réponse sous une heure. Resté seul avec Arnaid, El’Jonson consulte son Capitaine pour avis secondaire, avant de lui révéler que l’énorme poids de… sa parole donnée l’empêche et l’empêchera toujours de placer son intérêt personnel avant celui de son seigneur. C’est sur cette déclaration de loyauté véritablement désintéressée que se termine notre histoire, qui démontre à quel point Lion El’Jonson est un végétal politique. Un concombre, pour être précis.

1 : Il insiste pour être désigné comme être membre de la XXème Légion, sans autre précision. Quel coup de chance tout de même qu’il ait le même nom que le Primarque pas encore découvert de cette dernière
2 : Et surtout parce qu’il ne peut pas blairer Guilliman, ce qui lui fait un point commun avec Lionel.

AVIS:

On retrouve dans ‘The First Legion’ le goût de Chris Wraight pour des petits exposés au débotté sur la géopolitique impériale au moment de la Grande Croisade (tendance déjà aperçue dans ‘Leman Russ : Le Loup Suprême’), et c’est tant mieux si vous voulez mon avis. S’il ne se passe pas grand-chose dans cette nouvelle, on n’en ressort pas pour autant frustré de sa lecture, l’échange entre Alpharius et Lion El’Jonson, qui permet d’identifier les points communs et les différences entre le premier et le dernier de cordée et leurs Légions respectives, ainsi que d’en apprendre un peu plus sur la manière dont les Legiones Astartes étaient perçues par Terra au moment où Pépé songeait à partir en pré-retraite dans le Bhoutan profond, valant son pesant de papier. Lionel y apparaît comme le type imbuvable socialement (il le reconnaît lui-même d’ailleurs) mais irréprochable moralement que les derniers ouvrages de l’Hérésie tendent à dessiner, tandis qu’Alpharius est dépeint comme un intrigant de première, n’ayant aucunement besoin d’un slideshow de la Cabale pour trouver des raisons de comploter dans le dos de tout le monde. Bref, une soumission solide de la part de Chris Wraight, qui fait honneur à ses deux Légions secondaires avec cette nouvelle.

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Embers of Extinction – B. Easton :

INTRIGUE:

Embers of ExtinctionSouvenez-vous de la bataille de Phall. En toute objectivité, Perturabo s’y était fait botter le joint de culasse par un Alexis Polux héroïque en défense, et qui aurait même pu remporter l’affrontement si son pôpa ne lui avait pas hurlé de rentrer tout de suite à la maison depuis la fenêtre du Palais Impérial au pire moment (‘The Crimson Fist’). Ce qui s’est passé immédiatement après cet épisode honteux pour les Iron Warriors, Brandon Easton propose au lecteur de le découvrir ici.

Notre récit commence sur les pondérations mathématiques et paléolithiques du Primarque de Fer alors que le Capitaine Vort de l’Iron Blood passe en revue les pertes subies par la Légion durant le tragique épisode phallique. Il ne faudra pas s’étonner si les Légionnaires développent des complexes à ce niveau et commencent à surcompenser. Bien loin de remettre en question le bien fondé de sa stratégie, dont l’implacable logique se contrefiche bien de quelques dizaines de milliers de morts et centaines de vaisseaux détruits ou endommagés, Perturabo cherche au contraire à maximiser les pertes chez les Imperial Fists, et ordonne donc la poursuite de trois croiseurs loyalistes jusque dans le système de Tarkovsky Epsilon. Une tâche bien triviale pour un vaisseau de type Gloriana, mais si on ne peut plus exercer ses penchants sadiques rigoler de temps en temps, où va la galaxie ma bonne dame ? Comme on peut s’y attendre, le Pylades, le Ramses et la Dévastation ne font pas de vieux os face à la fureur mathématiquement appliquée de l’Iron Blood. Avec un torpillage en règle, un écrasement provoqué sur une géante gazeuse et un éperonnage en bonne et due forme, Pervers Peper’ se paie même le luxe de marquer des points de style en offrant à chacune de ses victimes une fin personnalisée. S’il avait eu un nombre suffisant de victimes, on peut imaginer que l’un des vaisseaux de Dorn aurait été intégralement mastiqué, avalé, digéré et déféqué par son intraitable frangin afin de varier les plaisirs d’un côté et les insultes de l’autre. Et on ose dire que Perturabo n’a pas l’âme d’un artiste !

Cette sidequest rondement menée, le bourreau d’Olympia consent enfin à reprendre des activités normales, comme par exemple se rendre sur Hydra Cordatus, où l’attendent Fulgrim et ses Emperor’s Children, ainsi qu’un nouveau camp retranché romain Imperial Fists à raser de fond en comble, afin de prouver à l’Empereur qu’il est le plus brave de tous les peuples de la Gaule, ou quelque chose comme ça. Tout cela a été couvert dans ‘Angel Exterminatus’ et nous intéresse donc pas ici. En revanche, Easton se permet de meubler un autre « blanc » du parcours hérétique de son héros, précisément le moment qui suivit la remise de Forgebreaker à Perturabo par Horus en gage d’une bro-itude éternelle. L’épisode ayant eu lieu quelques semaines après la purge de sa planète d’adoption, il est somme toute logique que le Primarque se soit retrouvé avec un peu de temps à tuer, après avoir épuisé tout son stock d’Olympiens (à tuer également, pour ce qui ne suivent pas). Malgré la perfection manifeste de son cadeau, forgé par Fulgrim en personne, Perturabo ne put s’empêcher d’apporter de nombreuses modifications à l’arme, dont un changement de son centre d’équilibre afin d’en maximiser les dégâts1. Cette longue session de forge fut également l’occasion d’échanger quelques aphorismes impatients et acérés avec un de ses fistons, le pâle autant que curieux Arhalin, dont les questions lancinantes ne s’avèrèrent pas assez stupides pour que son père juge bon de l’utiliser comme sac de frappe pour tester son nouveau jouet. Cela ne s’est pas joué à grand-chose, ceci dit…

1 : Et également (et surtout) pour déconcerter et handicaper un éventuel adversaire qui tenterait de retourner Forgebreaker contre lui. Easton a tapé dans le mille avec ce mélange de paranoïa absurde et de rationalité implacable, tout à fait « perturabien » dans l’esprit.

AVIS:

Débuts solides et sérieux pour Brandon Easton, qui n’a pourtant pas choisi la facilité en documentant deux épisodes de la vie de Perturabo prenant place entre plusieurs périodes et événements déjà traités par d’autres auteurs avant lui (French, McNeill et Haley, pour n’en citer que trois). Le risque de faux raccord s’en trouvait logiquement accru, mais le rookie s’est fort bien acquitté de sa tâche, en inscrivant sa prose dans la droite ligne de celles de ses prédécesseurs. Au passage, il confirme et souligne le portrait psycho-rigide et surhumainement intransigeant de l’Homme de Fer à l’aide d’exemples et d’illustrations de son cru, ce qui permet d’envisager Perturabo sur un jour à la fois un peu différent et totalement cohérent avec le reste du corpus hérétique (que j’ai lu). Tous les Primarques et personnages de l’Hérésie n’ayant pas eu cette chance, pour diverses raisons (au rang desquelles le manque de recul et de préparation de nouveaux auteurs), je me devais de saluer le sans-faute d’Easton à cet endroit.

J’ai également bien aimé les raisons convoquées par l’auteur pour expliquer pourquoi un être aussi rationnel et résilient que le fils d’Olympia a fini par commettre l’inexplicable : trahir son Père et l’Imperium pour le Chaos. Selon Easton, ce serait – en partie – à cause de la trop grande tolérance de Pépé envers le mysticisme et les chicaneries en tout genre dans lesquelles le genre humain à tendance à se vautrer naturellement. Pour un progressiste hard boiled comme Perturabo, il aurait fallu guider l’humanité au forceps vers un idéal de perfection scientifique et technique, en extirpant au passage tous les corps et concepts « mous » venant freiner la transition. Ce à quoi on pourrait répondre que c’est justement ce à quoi l’Empereur tendait, comme sa tentative malheureuse d’excommunier le fait religieux l’a laissé apparaître. Sans doute était-ce trop peu et trop tard pour son intraitable fiston, dont la patience a fini par craquer à la suite de sa campagne cauchemardesque contre les Hruds et l’annonce de la trahison d’Olympia. Cette nouvelle nuance de gris sur la palette de la trahison de l’Iron Man vient enrichir le camaïeu de sa psyché (si si), sans jurer avec les touches déjà apportées par les biographes précédents de notre homme. Pas mal du tout. J’ai donc hâte de lire la suite des travaux de Mr Easton pour la BL, en espérant qu’il reste dans cette veine.

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Lupus Daemonis – G. McNeill :

INTRIGUE:

Sur Cthonia, la vie est d’une dureté et d’une violence absurde. Les meurtres et pillages sont monnaie courante (par contre il n’y a pas de monnaie, c’est trop avancé pour cette brillance société), les dizaines de clans tribaux se disputant ressources et territoires passant leur temps à se fritter les uns aux autres. Une vie humaine vaut moins qu’un couteau à huître bien aiguisé, et on apprend aux enfants dès leur plus jeune âge à ne pas se laisser prendre vivant par l’ennemi1. Les ados ne rêvent que du jour où ils auront tué leur premier adversaire au combat, mutilé son cadavre et gagné le droit de faire la ola autour de leur suprême leader pendant qu’il décapite à l’opinel une malheureuse victime. Bref, c’est du grim.extra.dark auquel nous avons droit en guise de décor, dans lequel évolue tant bien que mal notre héros Nagui. Euh pardon, Nergüi.

Nergüi occupe une place à part, et pas vraiment enviable, parmi les Reivers (son clan d’adoption). Il a été trouvé en train de pendouiller à un croc de boucher par le puissant Khageddon, qui décida de le sauver du destin de cheeseburger auquel il était destiné, pour des raisons qu’il a lui-même du mal à s’expliquer. En fait, toute la tribu déteste et craint en même temps Nerguï, dont le nom signifie « personne » dans le chantant dialecte chtonien. Ce patronyme lui a été donné par Khageddon, là encore sur un éclair de génie non expliqué, et soi-disant pour assurer la protection des Reivers. La menace qui pèse sur ces derniers est laissée à l’imagination du lecteur, mais ce n’est en tout cas pas Nerguï qui y contribuerait de façon sérieuse. Notre héros est un avorton couturé de cicatrices, doté d’un corps de lâche mais d’une résilience hors du commun, ce qui l’aide à encaisser les nombreuses bastonnades auxquelles il est régulièrement sujet. Ah, et il a des yeux gris vert aussi. Qui doivent sans doute servir à envoyer des clins d’œil au lecteur sur sa véritable identité, au cas où cela serait nécessaire.

Après avoir vu ses camarades être « diplômés » sans lui grâce à leur participation à un raid contre les Deeprats, avoir échappé de peu à la mort des mains du bully de service, balancé le cadavre de celle qui a eu le malheur de prendre sa défense et s’est donc faite poignarder pour la peine dans une faille magmatique, avoir failli être poussé à son tour dans la faille par ce père indigne de Khageddon (qui passait par là et ne maîtrise pas bien ses pulsions), le tout en l’espace de 82 minutes, Nerguï décide qu’un petit break ne lui ferait pas de mal. Il part donc  pour la surface de Cthonia voir si l’herbe y est plus verte, ou la lumière plus bleue, que dans les cavernes des Reivers. Sur le chemin, il croise un supplicié en fin de vie qui lui servira de toute première victime (on n’oublie jamais sa première fois il paraît), avant d’arriver enfin à l’air libre.

Là, après avoir constaté que tout est aussi abandonné qu’on le lui avait dit, mais construit à l’échelle 3:1 (ce qu’on ne savait pas, et qui ne sert à rien dans l’histoire, mah bon), il perturbe les fouilles entreprises par ce que l’on devine être une expédition de l’Adeptus Mechanicus. Les Skitarii de garde ayant réglé leur protocole d’interaction avec les locaux sur le mode ‘Murica, ils tirent à vue sur le pauvre Nergüi, qui parvient tout de même à en tuer un au corps à corps et à lui piquer son fusil avant de repartir en sous-sol. S’il espère que le récit de ses exploits et le cadeau de ce trophée peu banal à Khageddon lui permettront de se faire accepter comme guerrier scarifié chez les Reivers, il lui faudra rapidement tempérer ses espérances. Sous ses abords de brute épaisse, Khag’ est un érudit, qui comprend que son punching ball adoptif s’est fait un ennemi un peu plus balèze que les bandes de goules aux yeux bleus qui hantent la surface de Cthonia. Il lui met donc une mandale paternelle pour lui apprendre la vie pendant que le plafond commence à s’écrouler sur la tribu, catastrophe causée par l’arrivée en termite des forces du Mechanicum. Il faut croire qu’ils pucent tout leurs fusils. Qui pourrait les en blâmer ceci dit.

Dans le séisme qui s’en suit, Nerguï, qui est passé en mode adolescent rebelle en lutte contre l’autorité depuis sa sortie à l’air libre, décide pour la première fois de rendre les coups, et plante donc son couteau dans le cœur de Khageddon, pour l’ensemble de son œuvre dirons nous. Mais attention, il le fait avec la bénédiction de ce dernier, dont les desseins resteront à jamais un mystère pour la science je pense. Dans ses derniers moments, Khageddon accomplit sa cryptique destinée en chuchotant à l’oreille de Nergüi son véritable nom. Et là, surprise.

Non pas qu’apprendre que Nergüi = Horus soit à ce stade une révélation sidérante (si c’est le cas, vous avez peut-être raté le titre de l’ouvrage et le titre de la nouvelle, qui donnaient tout de même des bons gros indices, hein). Mais c’est ce que cette connaissance déclenche chez notre héros qui est proprement bluffant. En quelques mots, Horus apprend par cœur tous les articles de Wikipedia, et envoie un poke psychique à son Pépé qui attendait telle la sœur Anne dans sa tour terrane, et contemplait la galaxie d’un air pensif en se demandant ouksé que ses fistons étaient, nom de Lui-Même. L’Empereur a alors ces trois mots éternels : +Pas trop tôt+, qui font, par absence de meilleure image, évoluer Horus. En mode Pokemon, exactement. Adieu au Magicarpe maigrichon et emo qu’était Nergüi, et bonjour au Léviathan majestueux mais colérique qu’est Horus. La nouvelle se termine sur la promesse d’une réunion prochaine entre le Père et le fils, si tant est que ce dernier ne massacre pas à mains nues les pauvres émissaires de l’Omnimessie. Ça m’étonnerait pas qu’il ait un trouble du caractère, ce petit gars.

1 : On les abandonne aussi dans les souterrains pour voir s’ils ont un sens de l’orientation correct. C’est une éducation complète(ment barge).

AVIS:

Graham McNeill ne fait pas dans la subtilité avec cette nouvelle horusienne, aussi larger than life que son héros (quand il adopte enfin sa forme finale, s’entend). Si le lecteur voulait avoir des révélations sur l’enfance du Primarque #1, avant que l’Empereur n’obtienne le droit de garde, il en aura certes pour son argent. Savoir que penser de ces révélations, qui posent plus de questions qu’elles n’apportent de réponses, est en revanche un débat distinct, auquel je soupçonne qu’il est encore trop tôt pour pouvoir participer. Au moment de sa publication, ‘Lupus Daemonis’ entraîne en effet le fluff hérétique sur des rivages inconnus (le stade « larvaire » des Primarques – à moins que Horus soit le seul concerné –, à ma connaissance jamais décrit à ce stade, mais également l’espèce d’aura de destinée manifeste qui entoure Nergüi et influence, de façon tellement grossière que tout le monde s’en rend compte, les actions de ses proches), que l’on pourrait considérer comme un peu too much de la part de McNeill, si « tard » dans la saga et sans donner plus d’explications. Mais comme cet auteur a prouvé qu’il adorait dérouler ses arcs sur le temps long, et qu’il lui reste encore quelques occasions de revenir sur l’origine d’Horus (au moment où cette chronique est écrite tout du moins), il se peut que ces additions volontairement choquantes soient intégrées de manière plus harmonieuse dans le reste du background de l’Hérésie en fin de compte1. Quoiqu’il en soit, on tient avec ‘Lupus Daemonis’ l’un des must-read des nouvelles Primarques, non pas par sa qualité intrinsèque (vous l’aurez deviné), mais par ses apports à l’historique du personnage principal de la série.

1 : Si c’est le cas, j’espère que McNeill expliquera également comment Cthonia n’est pas devenue une planète chaotique, vu l’anarchie sanglante et sadique qui y règne depuis des décennies. Je comprends que ça permet de renforcer la vibe « enfance difficile » d’Horus, mais si on pouvait éviter de s’arranger avec un des concepts cardinaux du lore de 40K, ça m’arrangerait.

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Skjalds – N. Kyme :

INTRIGUE:

Un monstre rôde dans l’arrière-pays de Fenris, attaquant des villages isolés et massacrant tous leurs habitants, depuis le huskarl sans défense jusqu’au bébé sans peur. Un jeudi normal sur un monde hostile, en quelque sorte, sauf que le monstre en question came to the wrong neighborhood, à savoir celui de Baerelt, Torvur, Ulfvye et Laggenhuf. Ces quatre hardis chasseurs ayant chacun perdu un ou plusieurs êtres chers dans l’attaque de l’innommable et innommée bestiole, ils ont fait le serment de traquer cette dernière et de mettre fin à ses déprédations. Et tant pis pour la biodiversité terrestre fenrissienne, qui se porte parfaitement bien vous pouvez me croire. L’histoire commence alors que notre petite bande est en train d’essayer d’allumer des torches pour y voir quelque chose dans la tempête de neige nocturne qui s’est abattue sur eux. Ce qui est bien le cadet de leurs soucis, car des profondeurs de la toundra jaillit bientôt un mini boss, une draugr.

Cette dernière (car le cadavre desséché et tirant la langue qui fond sur les chasseurs pour leur rouler des gamelles est indubitablement féminin) donne du fil à retordre aux humains, qui finissent toutefois par en venir à bout d’un jet de torche bien placé, mais perdent une lance dans la bataille. Ce qui est presque aussi grave que la mort d’un guerrier, si on écoute le vieux ronchon de service (mais expert en lance, sans doute parce qu’il a le bras fort), Ulfvye. Malgré l’issue heureuse de cette bataille, il ne fait pas de doute pour Baerelt que la draugr n’était qu’une vamp opportuniste, et pas la bête responsable de tous les malheurs de sa communauté. La petite troupe reprend donc sa marche sous un léger crachin (humour), et finit par bivouaquer dans une caverne miraculeusement vide de tout prédateur alpha. Le temps gagné à ne pas avoir à faire la peau à un phacochère laineux ou à un gigagolin est utilement mis à profit pour échanger quelques récits épiques au coin d’un feu de brindilles. Transformés en skjalds pour l’occasion, les compères s’écharpent sur la véridique légende du Russ, l’incarnation de l’hiver fenrissien, considéré par l’un comme un géant à lance de gel, par l’autre comme une tempête de neige douée de raison, par le troisième comme un loup géant qui accompagne les âmes dans l’autre monde, et par le dernier comme un roi. Et comme le gage de cette veillée était manifestement le premier tour de garde pour l’histoire la plus pourrie, c’est Baerelt le barbant qui s’y colle.

Le lendemain, les chasseurs se remettent en route et parviennent à un village qui a reçu la visite du monstre il y a peu de temps, comme les cadavres massacrés et à moitié boulottés des habitants en témoignent. S’étant rendus compte que quelque chose ou quelqu’un était toujours présent sur place, nos héros convergent sur la salle commune de la bourgade, qu’ils trouvent en effet occupées par un animal gigantesque, recouvert d’une fourrure hirsute, munis de crocs acérés et dégageant une odeur abominable. Vous l’avez compris, c’est Leman Russ en personne (qui se fait appeler ici Jotun, pour préserver son anonymat sans doute) qui fait son apparition dans l’histoire, et après avoir indiqué aux traqueurs tétanisés par son aura primarquielle qu’il est également sur la piste du gros gibier, accepte que ces derniers le suivent dans son pistage. Il a pour cela une méthode infaillible : suivre les loups.

Sortis du village à la suite de leur nouveau copain, Baerelt et Cie ne tardent pas à se rendre compte que si les loups peuvent être suivis, ils peuvent également suivre. Aussi, lorsqu’une meute de six herravargr (des loups géants) encercle le club des cinq au sommet d’une falaise, l’ambiance retombe un peu. Le combat qui s’en suit se termine par une nouvelle victoire de l’équipe bipède, en grande partie grâce à l’intervention efficace de Jotun, mais Ulfvye est gravement mordillé dans la bagarre, ce qui ralentit la progression de ses camarades. Comme la veille au soir, les chasseurs passent le temps en devisant au coin du feu et c’est au tour de Jojo de donner sa version du mythe de Russ, qu’il connaît sans doute mieux que la moyenne. Et en toute modestie, il choisit de raconter son histoire (sans dire qu’il s’agit de lui, évidemment), celle de l’enfant sauvage élevé par les loups et adopté par un roi de Fenris, avant que l’Empereur ne vienne plomber l’ambiance d’un petit gueuleton entre copains, on connait la suite.

Le jour suivant, la traque reprend et amène les chasseurs jusque dans une forêt, où ils croisent un Wulfen bien amoché sur le bord du sentier. Il ne fait aucun doute que le lycanthrope a combattu la bête (et a perdu), mais plutôt que de venir en aide à son fiston poilu, Jotun continue sa route en laissant le wyrd du comateux faire son office. Un peu plus loin, c’est le grand ménage parmi les suiveurs du Primarque, Ulfvye décédant d’une hémorragie interne, et Torvur et Laggenhuf ratant leur test de commandement lorsqu’ils entendent le monstre faire sa balance en préparation du combat final. Ne reste donc plus que Baerelt pour sauver l’honneur des péquenauds de Fenris, ce qu’il fait en partant à la poursuite de Jotun, qui n’a pas attendu de voir qui lui collait au train pour régler ses comptes avec le monstre de la pampa…

Début spoiler…Ou plutôt, les monstres. Car c’était un bien un couple d’ours géants avec des bois de cerf, ou beer en langage scientifique, qui était responsable de tout ce tintouin. N’étant venu qu’avec une hache même pas énergétique pour mieux se fondre dans la masse, Leman se retrouve rapidement dans le mal. Et même si l’andouille parvient à saisir un de ses adversaires par les andouillers, dans le but de lui tordre le cou jusqu’à ce que mort s’en suive, cette manœuvre n’a de chances d’aboutir que si elle n’est pas interrompue. Il faut donc que quelqu’un distraie Maman Ours jusqu’à ce que Boucles d’Or ait fini le sale boulot. Et ce quelqu’un, ça ne peut être évidemment que Baerelt. Enfin, pendant à peu près trois secondes, car notre héros est ensuite rejoint par le Wulfen croisé un peu plus tôt, assez remis de ses émotions pour demander une revanche à ses vainqueurs. Bilan de cette deuxième manche : une nouvelle victoire de la grande ourse sur Mini Loup, qui finit la baston en deux morceaux, mais de très peu. La bête fauve s’écroule en effet quelques instants plus tard, cannellisée à titre posthume par le Space Wolves déchu1. En arrière-plan, Jotun avait réussi à décoller les cervicales à l’autre affreux, ce qui met fin aux déprédations de Baloo et Baloote. Notre histoire se termine sur l’arrivée d’un Thunderhawk, venu raccompagner le patron vers le Croc où une mission importante l’attend sans aucun doute. On ne peut pas passer sa vie à se ressourcer dans la nature quand on est un Primarque, et c’est bien dommage…Fin spoiler

1 : Ce qui est finalement un destin enviable pour un membre du rout, puisque cela fait ch*er les Dark Angels.

AVIS:

Nick Kyme revient à ses anciennes et velues amours (les Salamanders étant plutôt écailleux, comme chacun sait), avec ce récit fenrissien de facture classique. Fort heureusement pour nous, l’auteur a progressé, ou s’est davantage intéressé à son sujet, depuis l’époque héroïque de ‘Thunder from Fenris’ et ce ‘Skjalds‘ s’avère être une lecture plaisante… au premier degré1. Si l’intégration de cette histoire dans l’anthologie ‘Blood of the Emperor‘ retire évidemment tout suspens sur la véritable identité de Jotun, cette absence de surprise est compensée par d’autres éléments intéressants, à commencer par une intrigue plus surprenante (là encore, dans le bon sens du terme) qu’à l’accoutumée pour une nouvelle de Kyme: le premier accrochage avec le.a draugr, dont on ne sait pas s’iel est le monstre traqué par les chasseurs constitue ainsi une sorte de prélude sympathique au reste du récit. Le choix de l’auteur de narrer son récit avec une perspective « humaine » lui permet également de glisser quelques infos sur la manière dont Russ considère l’Empereur, ses frères, sa Légion et son rôle dans l’Impérium, à la manière de confidences échangées sans arrière-pensées, pour le seul bénéfice du lecteur. Enfin, cette nouvelle n’est pas avare en fluff (pas moins de quatre légendes différentes sur le Russ, tout de même) ni en fragments de lore Space Wolves: je pense particulièrement aux considérations du Primarque sur les Wulfens, qui sont à replacer dans la saga du rout2, mais également au rôle proprement héroïque (au sens grec antique du terme) que Leman Russ choisit d’occuper dans la culture de Fenris, en tant que guerrier solitaire accomplissant des exploits pour le compte d’un peuple qui ignore sa véritable identité. Bref, une nouvelle qui vaut tout à fait le détour pour qui s’intéresse aux mythes et légendes du Vlka Fenryka, et un pas accompli par le skjald Nick Kyme sur le chemin de sa rédemption littéraire.

1‘Thunder from Fenris’ valant également le détour, mais pas d’une façon dont son auteur serait fier.
2Avant ou après la campagne de Dulan, pendant laquelle les Space Wolves apprennent que leur père savait pour les Wulfens? Si l’absence de réaction des deux Astartes qui servent de Kaptains à leur Primarque devant le cadavre de l’homme loup à la fin de l’histoire n’est pas un bête oubli de Kyme, ce serait plutôt la deuxième option qui tient la corde.

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The Sixth Cult of the Denied – D. Guymer :

INTRIGUE:

Aqhet Hakoris, Sergent au sein des Thousand Sons et explorateur au long cours du grand océan qu’est le Warp, est persuadé d’avoir fait une découverte fondamentale sur la nature de cette dimension mystérieuse, d’où sa Légion et son Primarques tirent leurs pouvoirs surhumains. Aidé dans ses recherches par deux associés Légionnaires (Khaleif et Nepfithu), ainsi que par son jeune et prometteur padawan (ou practicus, en prosperien) Djet, Hakoris doit présenter les résultats de ses recherches à un conclave d’Astartes dans le cadre de la prochaine session d’exposé libre organisée dans la capitale de la dernière planète conquise par les Thousand Sons, Thera. Impatient à l’idée de mettre ses idées à l’épreuve de la légendaire sagacité de la XVème, notre héros se rend dans la grande pyramide élevée au centre de Therebarg suivi par ses side kicks pour effectuer sa démonstration.

Une mauvaise surprise l’attend toutefois sur place : au lieu de la foule compacte qu’il attendait et espérait, l’amphithéâtre où doit se tenir sa soutenance n’accueille que six Astartes. Pas n’importe lesquels cependant : rien de moins que l’Ecuyer du Primarque, Amon, et les chefs des cinq cultes de la Légion, dont bien sûr l’inévitable Ahzek Ahriman. Autrement dit, le rehati, ou Comex des Thousand Sons, nommé par Magnus en personne. Faisant contre mauvaise fortune bons cœurs, Hakoris se présente comme le Magister du culte de l’Aquilae, titre auto-décerné qui fait grincer quelques dents et froncer quelques sourcils dans l’auguste assistance. En plus des problèmes immobiliers qu’une telle reconnaissance susciterait, les cultes établis ne sont pas très chauds à l’idée de reconnaître une nouvelle discipline qui ne serait non pas leur égale, mais leur supérieure, en cela qu’Hakoris affirme que c’est de l’Aquilae que proviendrait les « spécialisations » de chaque culte (à l’aide d’une métaphore mettant en scène Babar, Ray Charles, Stevie Wonder et Gilbert Montagné). Le vaillant petit théoricien n’a cependant pas loisir de commencer son exposé qu’arrive le big borgne en personne, qui se téléporte dans la salle1 et place une mention strictement confidentielle sur les futurs débats, enjoignant les présents à ne pas partager ce qui sera échangé ce jour, et brouillant la wifi (ou plutôt le Warpi) pour empêcher que des tours de passe passe psychiques ne viennent perturber la discussion.

Logiquement impressionné et pris au dépourvu par la venue impromptue du Primarque, Hakoris a bien du mal à défendre ses idées, d’autant plus qu’il perçoit vite que Magnus n’est pas aussi ouvert d’esprit et bienveillant envers ces dernières qu’il le donne à voir. Hakoris ayant fait ses découvertes sur la nature du Warp en bravant l’interdit paternel de ne pas chercher à communiquer avec les formes de vie « aquatiques » peuplant le grand océan (les démons quoi), il se retrouve dans une situation délicate, et se résout à mentir au Roi Écarlate pour éviter une remontrance qu’il devine être potentiellement très sévère. Ayant demandé et obtenu une pause clope pour se remettre les idées en place, Koko réunit ses acolytes et prend une décision que l’on qualifiera poliment d’audacieuse : tenter d’invoquer un démon comme témoin, en passant outre le sceau psychique apposé par Magnus en personne. Bien évidemment, cet appel à un honni2 tournera court, Mag’ étant beaucoup trop omniscient et omnipotent pour laisser une entité chaotique venir suinter sur la moquette de sa pyramide. La franche explication de texte entre le Primarque et le Légionnaire, si elle ne se solde pas par la mort subite du Thousand Son, viendra toutefois rappeler à Hakonis que si la recherche fondamentale, c’est bien, l’obéissance, c’est mieux, surtout dans un Imperium qui regarde déjà un peu bizarrement les frasques arcaniques de la XVème Légion. Après avoir décillé son naïf subordonné sur la véritable nature des démons, qu’il a fait semblant de ne pas connaître pour ne pas « corrompre » l’esprit du raheti avec cette connaissance empoisonnée, Magnus fait comprendre à Hakonis qu’il a tout intérêt à changer son bolter d’épaule lors de son imminente soutenance, pour le bien du reste de la Légion (et sa survie à court terme).

J’ai bien dit son imminente soutenance, car le borgne est tellement balèze qu’il est parvenu à arrêter le temps sans qu’Hakonis ou les autres participants à la présentation ne s’en rendent compte. Résultat des courses : notre héros se livre à un exposé aussi banal que consensuel sur le grand océan, à la surprise et/ou à la déception de son auditoire. Il n’y aura pas de reconnaissance du culte de l’Aquilae, et Hakonis est mis au placard dans une zone de guerre de troisième ordre au cours des années qui suivent pour éviter quesles vues hétérodoxes (on ne parle pas encore d’hérésie à cette époque) ne provoquent un schisme dans la Légion, au cas où il déciderait de reprendre ses activités prosélytes. Et c’est une sage précaution de la part de Magnus car, neuf ans après la fin du conclave de Therebarg, le Sergent dégradé décide qu’il est temps pour lui d’avoir une nouvelle discussion avec un vieil, et même éternel, ami, qui attendait patiemment son appel depuis son petit F3 au fond du Warp…

1 : Les Thousand Sons n’ont pas la même compréhension du terme télétravail que le reste des mortels.
2 : Une personnalité du Warp attention : rien de moins que the Dweller in the Abyss, aussi connu sous le nom de Choronzon. Même Aleister Crowley l’avait croisé de son temps.

AVIS:

David Guymer se fait et nous fait plaisir dans l’exploration de l’histoire, forcément alambiquée1, de l’âge d’or des Thousand Sons. Après avoir retrouvé leur Primarque et vaincu le fléau de la mutation, tout semblait bien aller pour les golden boys de Tizca… jusqu’à ce que leur sale manie d’aller chercher midi à 14 heures et de ne pas appliquer le sacro-saint principe de précaution leur joue des tours. Si ‘The Sixth Cult of the Denied‘ ne finit pas aussi mal pour le XV de l’Empereur que l’Incendie de Prospero, les déboires de Hakoris offrent une similitude frappante avec ceux de son borgne de père, des années/décennies plus tard. Et les raisons à l’origine de la disgrâce de l’un comme de l’autre sont frappées du même sceau de l’hubris: à croire naïvement que toute vérité mérite d’être établie, et qu’il n’y a pas de sujets tabous dans un univers où le spirituel joue finalement un rôle aussi grand que le matériel, le wanabee chef de culte pave la route qu’empruntera son Primarque, avec les conséquences que l’on sait. Il est ainsi amusant et révélateur du caractère de Magnus « I’m so SMRT » Lerouge de le voir adopter la posture toute impériale du « faîtes ce que je dis, pas ce que je fais, et je vous explique pas pourquoi parce que vous êtes trop c*ns » face à son fiston. Cet écho de la grande histoire dans la petite est une trouvaille sympathique de la part de l’auteur, et une raison suffisante de lire ‘The Sixth Cult of the Denied‘.

En plus de cela, cette nouvelle s’avère très riche en fluff Thousand Sons, depuis la révélation de la (presque) existence d’un sixième culte au sein de la Légion, jusqu’à l’identification d’une conquête de cette dernière, en passant par la description de la vision qu’à Magnus de l’assujettissement des planètes intégrées par l’Imperium, où encore des aspects de la culture des Thousand Sons, comme le système d’apprentissage liant novice et initié (qui ressemble un peu, et c’est ironique pour de tels opposés, à celui des Black Templars). La présence de la plupart des têtes connues de la Légion lors de la soutenance d’Hakoris, même si elle sont cantonnées à de la figuration (à part Amon, un peu plus développé que le reste du casting), ajoute un surplus d’awesomeness à l’histoire, et il est probable que Guymer ait caché quelques bribes de révélations seulement accessibles à l’érudit prospérien (ce que je ne suis pas à ce stade) dans les interactions entre Hakoris, ses disciples et son jury. Cependant, c’est Magnus qui crève l’écran dès son apparition, l’auteur parvenant parfaitement à retranscrire la quasi omnipotence et omniscience du Primarque, qui sait et peut (presque) tout. Ces capacités psychiques inégalables et insoupçonnables même pour les plus doués de ses fils servent bien l’intrigue en permettant à Guymer en rebootant l’exposé d’Hakoris, une fois que ce dernier a été convenablement briefé sur ce qu’il a intérêt à dire. Bref, une franche réussite pour David Guymer, qui démontre ici sa capacité à mettre en valeur une nouvelle Légion d’Astartes (après les Iron Hands et les Dark Angels).

1: À quoi fallait-il s’attendre de la part d’adeptes de la pensée complexe, aussi.

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The Will of the Legion – A. Clark :

INTRIGUE:

The Will of the LegionLa 3ème flotte d’expédition de la Grande Croisade, engagée dans la joyeuse réunification humanitaire de la galaxie désirée par l’Empereur, est tombée dans une embuscade à la sortie d’une rocade warpienne. Assaillis par l’armada destroy mais pléthorique des Driftborn, une civilisation humaine ayant passé quelques millénaires à vivoter dans une ceinture d’astéroïdes en s’adonnant à la récupération et à l’upcycling des épaves passant à portée de leurs cités roches (les ruches, ce sera après le passage à l’âge impérial), les Imperial Fists qui constituent le gros (et le grand) des forces expéditionnaires se font donc un devoir de repousser les piteux abordages de leurs lointains cousins. Nous faisons ainsi la connaissance du Capitaine Hashin Yonnad, de la 39èmeCompagnie Maisonnée d’Inwit, alors qu’il mène une escouade de Breachers, le corps anti-émeutes de sa Légion, dans la purge du Tribune, vaisseau amiral de la flotte impériale. Ayant massacré la plupart des malheureux corsaires ayant croisé sa route, et fait, dans son infinie bonté, prisonniers les autres avant qu’ils ne meurent de froid  dans les coursives extérieures mal isolées du Tribune, Yonnad reçoit une convocation urgente à se rendre à l’autre bout du vaisseau, où il embarque sans tarder dans un Stormbird, en compagnie de ses vétérans… et de Rogal Dorn, rendu très chafouin par la tournure prise par les événements1.

Rendu perplexe par l’absence de briefing quant au déploiement de la force de frappe Astartes que le Primarque emmène à l’assaut de la principale cité ennemie, Yonnad demande respectivement à son boss de bien vouloir partager sa gnose avec ses fistons, afin que ces derniers soient en mesure de mener à bien ses plans. Dorn s’exécute, et indique à ses Légionnaires que leur cible est un dôme stratégiquement important, dont la capture mettra fin au conflit de façon rapide. La moue désapprobatrice (encore plus que d’habitude) qu’il affiche fait cependant rapidement comprendre à Yoyo que les Driftborn ont épuisé la patience, pas très fournie de base, du Primarque, et que ce dernier considère très clairement l’annihilation pure et simple de ces derniers comme une option de travail. Après tout, la mort, autant que le mur, est son métier.

Débarqués en plein cœur du marché aux puces local, les Imperial Fists tracent la route sans trop (trois morts) forcer jusqu’à leur objectif, massacrant l’arrière garde adverse au passage, un Rogal Dorn toujours aussi revêche collé à leur train. Papa se contente en effet de marcher derrière sa marmaille en fronçant très fort les sourcils, observateur plutôt qu’acteur de la sanglante et implacable progression impériale. Une fois le dôme sécurisé, il demande, que dis-je, il orDORNne à ses Techmarines de bidouiller les consoles de l’endroit afin de pouvoir disposer d’un gros bouton (sans doute jaune) qui pourra couper le chauffage et l’air conditionné  l’échelle de la cité entière d’une simple pression, avec des conséquences funestes pour qui ne porterait pas une armure énergétique (ou s’appellerait Marneus Calgar). Trop snob pour se salir les mains, il somme le brave Yonnad de se mettre en position devant le buzzer magique, tandis que lui donne une dernière chance à ses malheureux adversaires de se rallier à l’Imperium. Ayant bien fait comprendre aux Driftborn qu’il avait été bien gentil jusqu’ici, mais qu’il n’avait, en sa qualité d’architecte de la destinée galactique de l’humanité (d’abord) et de décorateur intérieur de l’Empereur (surtout), absolument rien à carrer de leur civilisation minable, il leur donne royalement impérialement quelques instants de réflexion après avoir terminé sa harangue. Assez pour plonger Yonnad dans de profondes considérations éthiques quant à la trop grande facilité qu’il aurait à presser le bouton, et donc à signer l’arrêt de morts de millions d’êtres humains, pas coupables de grand-chose au fond, sur un simple branlement du chef de son Primarque. Fort heureusement pour notre héros philosophe, les Driftborn choisissent sagement de capituler, rendant leur dépressurisation inutile. La nouvelle se termine sur cette victoire décisive de la Team Pépé, qui ne suffit cependant pas à dissiper les doutes du Capitaine Dubious. Béni soit l’esprit…

1: Cela se perçoit dans la manière dont il prononce « connerie ». Et je ne parle pas de son accent chantant de Mareuh-seilleuh.

AVIS:

Petite nouvelle de bonne facture de la part d’Andy Clark, qui donne un peu de profondeur tant à Hashin Yonnad, avant sa sortie de route sur Phall, qu’à Rogal Dorn, qui gagne ici quelques précisions fluffiques qui ne manqueront pas d’intéresser le chaland, en attendant que le Primarque trumpien (build the wall!) ne dispose de son tome dans la série du même nom. Les lecteurs du troisième livre Forge World de l’Hérésie d’Horus apprécieront sans doute également de revoir apparaître les Driftborn du Consus Drift, présentés dans ce même ouvrage il y a quelques années. Narrativement parlant, l’intérêt principal de The Will of the Legion repose toutefois dans ses dernières pages, et la réalisation incrédule et dérangeante par Yonnad de son total endoctrinement à la cause de Dorn, dont il appliquera sans hésiter tous les ordres, même les plus immoraux. Nul doute que Clark voulait faire ressortir par cette réflexion intérieure toute l’ambivalence de l’Hérésie d’Horus, dont beaucoup des combattants se sont retrouvés dans un camp qu’ils n’avaient au final pas vraiment choisi, simplement parce qu’ils s’étaient contentés de suivre l’exemple, presque irrésistible, de leur Primarque. Il réussit bien son coup, et souligne donc de manière convaincante qu’entre « gentils » et « méchants », la ligne est souvent des plus fines.

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Council of Truth – M. Brooks :

INTRIGUE:

Sur l’Alpha, vaisseau amiral de la Légion du même nom, une réunion secrète a lieu entre quatre Astartes. Ou plutôt, trois Astartes et un Primarque. Réunis dans un cagibi étroit comme les navires de l’Alpha Legion en comptent un nombre irrationnel, les surhommes participent à un conseil de vérité, sorte d’interrogatoire sans haine, sans arme et sans violence (pour changer) dont le but est de clarifier une situation complexe ou des motivations absconses. Ce qui est assez fréquent chez les sous-fifres d’Alpharius, reconnaissons-le. Il n’est en revanche pas usuel que ce soit ce dernier qui se trouve dans la position du cuisiné. En cause, son manque flagrant d’esprit de camaraderie lorsque l’Alpha Legion s’est trouvée associée aux Ultramarines de Guilliman lors de la conquête de la Conservation Tesstranne, un empire humain isolé n’ayant pas trouvé bon de prendre son abonnement au club Pépé quand il en avait l’occasion.

Les questions et les réponses, qui permettent à Alphie d’expliquer un peu plus pourquoi il considère ses frères comme des crétins et tout particulièrement Roboute (grab popcorn), sont entrecoupées de flashbacks écrits du point de vue de divers défenseurs de la capitale de Tesstra, Prime, qui se trouvaient évidemment très malins et très bien préparés, hohoho, jusqu’à ce que l’impensable se produise et que l’Alpha Legion déclenche une attaque chirurgicale. D’abord en faisant sauter les ponts reliant les fortifications au reste de la cité, puis en infiltrant le QG adverse en se faisant passer pour les gardes du corps transhumains protégeant les hauts gradés et les personnalités politiques de la Conservation, et enfin en détournant l’endoctrinement subconscient des officiers restants, sortis de leurs barraquements à la tête d’une compagnie d’Ogryns pour reprendre Prime, et les forçant à se suicider avec coup de fil anonyme chargé en mots clés déprimants. Bilan des courses : une planète conquise en quelques semaines, au lieu des quelques mois que l’approche lente et méthodique de Guilliman laissait envisager. Evidemment, ce n’est pas « glorieux » ni « honorable », mais est-ce que l’Impérium l’est au fond, hein ? Parfaitement. C’est en quelque sorte le message que fait passer Alpharius à son jury, qui, très étonnamment, le déclare parfaitement dans son droit d’avoir envoyer scier le grand Schtroumpf, et le déclare vainqueur aux points sur décision unanime.

Début spoiler…On apprend en toute fin d’histoire que finalement, ce n’était pas Alpharius qui répondait aux questions d’anonymes clampins, mais Omegon qui répondait à celles d’anonymes clampins et d’Alpharius. Un grand classique de la XXème. Les deux frangins échangent un sourire complice et quelques boutades à quintuples sens qui n’en font sans doute pas pour nous, et le rideau tombe sur la fin de ce conseil, qui nous aura appris que la vérité est bien relative…Fin spoiler

AVIS:

Council of Truth’ fait partie de ces œuvres dont l’appréciation dépend grandement de votre niveau de connaissance, ou d’accoutumance (les deux termes étant ici synonymes) de/à l’univers et des protagonistes qu’on y retrouve. L’Alpha Legion, si elle n’est pas la faction de l’Hérésie d’Horus la plus populaire parmi les auteurs de la Black Library, dispose en revanche d’une sorte de cahier des charges littéraire auquel le lecteur peut se référer à chaque fois qu’une soumission traitant des fils d’Alpharius (et d’Omegon) est publiée. Organisation inhumainement secrète et retorse, cette Légion met un point d’honneur à ne jamais agir de manière claire, et cela s’illustre évidemment dans les histoires mises en scène dans la GW-Fiction: il y aura toujours des révélations, des retournements de situation et des personnages dupés lorsque la XXème est de la partie. Cela a été la règle depuis le ‘Legion‘ de Dan Abnett, et tous les auteurs qui sont passés après lui ont pris soin de se conformer à cette approche cryptique, avec plus ou moins de bonheur.

Aussi, lorsqu’en 2021 (13 ans après la sortie de ‘Legion’), Mike Brooks nous livre le récit d’une campagne tout à fait classique – si on peut utiliser cette expression pour ces Astartes – de l’Alpha Legion, sur fond de guéguerre d’ego avec les Ultramarines et de réunions secrètes et trotromystérieuses1, je dois admettre que c’est la déception qui prime. Tout cela a été lu et relu de nombreuses fois au cours des dernières années, et si Brooks livre une nouvelle efficace sur la forme, il lui manque de la valeur ajoutée sur le fond pour être qualifiée de réussite. À mes yeux, les publications de la gamme Primarques sont l’occasion de faire avancer notre compréhension sur cette confrérie de surhommes iconiques, et par extension, sur la manière dont ils organisent leur Légion et considèrent l’Impérium. Mike Brooks nous lance quelques bribes de fluff en cette direction (notamment la réflexion d’Alpharius que l’Alpha Legion doit être polyvalente pour éviter d’être vue comme obsolète par l’Empereur, dont il se méfie grandement), mais se contente sinon de nous servir sa version de ‘Legion’2//’The Harrowing’//’The Serpent Beneath‘, ce qui n’a pas grand intérêt je dois dire. Plus embêtant, il se vautre à certains endroits dans le fan service le plus grossier, en complexifiant les opérations de l’Alpha Legion pour le plaisir (si t’es capable de descendre une compagnie d’Ogryns au bolter, c’est pas le petit officier planqué dans son véhicule qui va beaucoup t’ennuyer s’il n’est pas absolument mis hors d’état de nuire avant l’embuscade hein), ou en incluant la fameuse catchphrase de la Légion (« I am… absolutely not original« ) et un Alpharius/Omegon swap de façon très artificielle à l’intrigue. Bref, on est ici sur une nouvelle très honnête mais plutôt décevante de la part de Mike Brooks, de qui j’attendais plus pour sa première publication au service d’Hydra. En espérant que le roman qu’il a écrit sur Alpharius soit plus audacieux que ça.

1: Brooks m’a mal vendu le concept du conseil de vérité je dois dire. Qui a des comptes à demander à un Primarque sur la manière dont il conduit ses opérations (qui plus est de façon victorieuse) au sein de sa propre Légion? Soit Alpharius a un ego tellement monstrueux qu’il a besoin de prouver qu’il avait raison même quand personne ne lui a rien demandé, soit il s’agissait de faire passer quelques éléments de langage aux officiers supérieurs de la Légion au cas où ils seraient interrogés sur les méthodes de cette dernière. Auquel cas, la transmission d’un memo ou l’organisation d’une réunion sur Teams aurait été plus efficace.
2: Avec les soldats génétiquement améliorés du roman d’Abnett du côté non-Impérial cette fois-ci. Mais c’est vraiment la même vibe.

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Terminus – C. Wraight :

INTRIGUE:

Notre histoire s’ouvre sur la glorieuse scène d’un Légionnaire Death Guard, Caipha Morarg, vomissant dans son casque et constatant avec inquiétude que le contenu de son estomac n’est pas évacué par les valves de son casque, sérieusement encrassées. Fort heureusement pour notre héros, le pouvoir de Nurgle lui permet de tenir en apnée longue dans ses glaires jusqu’à ce que l’Apothicaire Zadal Crosius (avec un nom pareil, il aurait dû faire Chapelain moi je dis) arrive avec sa fidèle clé de 12 et purge le heaume de son camarade. Bienvenue dans ‘Terminus’ et sur Terra, au début du siège de la planète par l’avant-garde d’Horus.

Récemment buzzés par Nurgle – et ses mouches – pour rejoindre sa team, les Death Guards doivent encore s’habituer à leur nouvelle condition de pestiférés ambulants, perclus de maux divers et variés, mais guère incapacités par ces derniers, mis à part au niveau de l’agilité. Nous suivons donc Morarg, qui se trouve être, en plus de barbouillé, l’Ecuyer personnel de Mortarion, et Crosius alors que la paire progresse lentement mais sûrement vers le Palais Impérial, rasant les avants postes fortifiés et exterminant les traînards de l’Armée Impériale avec détachement, tout en essayant de mettre des mots sur leur douloureux et désespérant passage de guerriers surhumains insensibles à toutes maladies, à celui de creusets de microbes, virus et autres bactéries. Une chose semble certaine : Mortarion a joué un rôle dans cette transition (énergétique, mouahaha).

Et à tout seigneur glandeur, tout honneur, Mort Shuman finit par rejoindre la ligne de front, sans doute fatigué que Typhon lui ressorte en boucle la blague de la grosse mite depuis qu’il lui a poussé des ailes. Cette arrivée funeste se solde d’un échange de haut niveau entre le Primarque et son chief of staff littéralement défroqué, par lequel on apprend que l’Empereur a interdit à son fils de remettre les pieds chez lui tant qu’il n’aurait pas pris une douche. La nouvelle se termine par une démonstration des nouveaux pouvoirs entropiques de Mortarion, qui est capable de faire vieillir en accéléré une zone de son choix à une distance respectable1, et c’est un bastion isolé dans la pampa himalayenne qui en fait les frais. Comme on disait au tout début de M3 : « va y avoir des spores ».

1 : Une compétence toute christique quand on y réfléchit. Mortarion est capable d’apporter mille ans de pets sur terre, ça se respecte.

AVIS:

Je ne sais pas vraiment ce que Chris Wraight a voulu faire avec ce ‘Terminus’, qui évoque plus le dernier arrêt d’une ligne de métro (« nous arrivons sur Terra, merci de ne rien laisser ni oublier derrière vous« ) que la conclusion fatidique d’une épopée sanglante, ou même, ce qui aurait été logique, le vaisseau spatial le plus tristement célèbre de la Légion. Ce n’est pourtant pas comme si cet auteur n’avait pas déjà un passif, et de qualité qui plus est, avec ces protagonistes, et des personnages et arcs narratifs à mettre en scène pour donner un semblant d’intérêt à cette soumission. Je m’attendais ainsi à retrouver, ou au moins à croiser le temps d’un caméo, ce bon vieux Vorx (‘Lords of Silence’), que l’on avait déjà vu à l’œuvre sur le temps long dans ‘Unification‘, mais me suis retrouvé à la place avec l’illustre pas très connu Morarg, le positivement obscur Crosius, et Mortarion faisant du sale sur les trois dernières pages. Ce casting surprenant aurait pu faire l’affaire si on lui avait donné une intrigue et une mise en scène digne de ce nom, mais la première s’est avérée être un mélange de poncifs (« Ahlala que nous sommes malades présentement une fois par exemple là dis donc… Mais on reste tout de même trotrobalèze paske fô pas déconner non plus« ) et de renvois au déroulé de ‘The Buried Dagger‘, et la seconde à une sorte de plan large sur une partie de tower defense en mode ralenti. Pas de surprise scénaristique comme dans ‘Endurance‘, ni de construction un peu travaillée comme dans ‘Unification‘: rien que le récit plan-plan du retour de la Death Guard sur le Monde Trône, dans une sorte de filler faisant le lien entre deux épisodes autrement plus intéressants de l’histoire de la Légion: sa corruption par Nurgle et sa participation au vrai siège du Palais Impérial. Au final, rien à retirer de ce ‘Terminus’ qui n’ait été déjà couvert, et de façon plus intéressante, par d’autres récits consacrés aux Barbarus Boyz au cours de l’Hérésie d’Horus.

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Grandfather’s Gift – G. Haley :

INTRIGUE:

Grandfather's GiftLe propos de notre récit se situe dans un jardin public, où un clochard toxicomane émerge péniblement d’un sniff de crack frelaté, dans une tenue étrange et avec une très vague idée de qui il est et ce qu’il fait là. Vous allez me dire : « C’est pas une nouvelle de l’Hérésie ça, c’est la Villette un mardi matin classique ». Vous auriez raison, sagaces lecteurs, ne serait-ce que pour les quelques détails ci-après : le jardin est géré par le NURGLE (Node Urbain de la Régie Générale de Laval Est), le clochard est un Primarque, et la mémoire qui lui revient progressivement lui apprend, et nous avec, qu’il est Mortarion, seigneur de la Death Guard.

Malgré ces débuts prometteurs, Morty se demande bien comment il est arrivé dans ce bouge, lui qui aux dernières nouvelles travailllait tranquillement dans son laboratoire de la planète de la peste à quelque grand dessein arcano-technologique. Plus curieux qu’inquiet devant le charme sauvage de l’endroit, à mi chemin entre le jardin anglais dans toute sa bucolique liberté et le fond d’un baril d’eau lourde oublié dans un terrain vague de Chernobyl, notre Primarque décide de partir en vadrouille, espérant trouver un agent municipal qui lui indiquera la station de tram la plus proche pour l’Oeil de la Terreur. Au bout de quelques secondes/minutes/heures/jours/mois/années/siècles/éons, il finit par tomber sur un Grand Immonde, en chair autant qu’en larmes, auprès duquel il s’enquiert poliment des raisons de son tracas. On a beau dire ce qu’on veut des qualités paternelles de l’Empereur, il a su inculquer à ses fils des manières tout ce qu’il y a de plus urbaines.

Khu’gath, car c’était lui, se fait un plaisir de rafraîchir la mémoire du dormeur du val, le taquinant au passage sur son aveuglement volontaire, et hilarant, quant au fait qu’il soit un psyker, appellation que Mortarion refuse catégoriquement1. Toujours totalement perturbé par une enfance difficile et un complexe d’Oedipe asymétrique (il veut tuer son père et… tuer son père) mal digéré, notre héros atrabilaire ne démord pas qu’il est un scientifique et non un praticien des arts occultes, ce que Khu’gath, conciliant, finit par lui accorder. En guise de cadeau d’adieu, l’affable démon a la bonté de remodeler le Primarque a sa véritable image, ailes de bourdon (l’animal totem de Mortarion) incluses, et de lui souffler à l’oreille la raison de sa venue à Neverland. Le bon Papa Nurgle lui a organisé une chasse au trésor pour le récompenser de sa piété, et l’âme de son beau-père l’attend quelque part sous les frondaisons moites de son jardin.

« Bon sang, mais c’est bien sûr ! » s’exclame Mort Shuman, qui s’envole à tire d’aile chercher la récompense qu’il poursuit depuis si longtemps, et qu’il finit par trouver, disséquer et enfermer dans une fiole en un tour de faux. Satisfait d’avoir rayé cet important item de sa to do list personnelle, Mortarion peut enfin regagner ses pénates et appeler son psy pour convenir d’une prochaine séance, se jurant au passage qu’il finira par régler ses comptes avec son autre père, dont la lampe torche psychique clignote en lisière du jardin de Grand-Père Nurgle. Pépé ou Papy, il fallait choisir, et il a choisi !

1 : « Tu es un sorcier, Mort- » « AGNANANANA, JE N’ENTENDS RIEN-EUH !»

AVIS:

‘Grandfather’s Gift’ a beau se concentrer sur un épisode somme toute négligeable de la saga de Mortarion, personnage l’étant – jusqu’à récemment – tout autant en termes d’importance sur le lore de 40K, sa (courte) lecture n’en demeure pas moins intéressante, en ce qu’elle permet à Haley de poursuivre sa description pour le moins contrastée du Primarque de la Death Guard, déjà généreusement ébauchée dans ‘Plague War’ : celui d’un être totalement paradoxal, qu’il est le seul à ne pas voir, ce qui a la fâcheuse tendance à miner son autorité naturelle. Prince Démon jurant ses grands dieux qu’il a réussi à dompter les forces du Chaos à force d’études et d’analyses tout ce qu’il y a de plus scientifiques, Morty apparaît comme un être aussi amer que pathétique, ce qui contribue à le rendre intéressant, même si la frontière est fine entre profondeur tourmentée et ridicule patenté. L’autre trait notable de son caractère, le mépris souverain qu’il semble éprouver envers toute chose (la condition humaine, ses frères, ses pères) pourrait tout autant le magnifier que le plomber, si utilisé de manière peu fine par un auteur en manque d’inspiration1. Affaire à suivre, donc.

Pour poursuivre mon fil rouge BLC-esque, enfin, je dois reconnaître que l’inclusion de cette nouvelle au recueil s’avère un choix assez pertinent, puisqu’elle offre au lecteur novice une bonne présentation d’un lieu (de) culte des franchises de Games Workshop : les fameux jardins de Nurgle, en plus d’une introduction intéressante au concept de « destruction créatrice » // « je meurs donc je ris » qui est à la base du dogme prouteux. L’utilisation de l’amnésie de Mortarion permet également à Haley de présenter le background de ce dernier de manière progressive et pédagogique, brossant en toile de fond les grandes lignes du fluff de 31K. Bref, une soumission qui répond plutôt bien au cahier des charges, sans pour autant se révéler être vide de substance pour les vieux BL-iscards. Pas mal du tout.

1 : L’extrait gratuit de ‘La Dague Enfouie’ de James Swallow me fait ainsi redouter le pire pour le DG de la DG, qui apparaît comme le pion d’un Typhus même pas respectueux de son père génétique, sans que ce dernier ne s’en offusque.

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Et voilà qui termine cette revue de Heirs of the Emperor, anthologie se plaçant dans le haut du panier des productions de la Black Library, tant en termes de qualité que de quantité. Un petit inédit (par exemple sur la création de ces fameux Primarques par l’Empereur) n’aurait certes pas été de refus, et l’absence d’Angron reste injustifiable, mais ce bouquin est appelé à devenir un classique du corpus de l’Hérésie d’Horus, en particulier pour les lecteurs n’ayant ni le temps, ni l’envie de se coltiner l’entièreté du catalogue (qui est assez inégal, il faut bien le reconnaître). Qu’on les aime ou qu’on les déteste, les Primarques sont en effet intrinsèquement distrayants, et on prend plaisir à les suivre d’un bout à l’autre de la galaxie, quelles que soient leurs motivations profondes. Pour finir, notons qu’il est tout de même savoureux que la majorité des soit-disant héritiers de Pépé soient morts bien avant lui… Toujours bon pied bon œil, le vioque, même 10.000 ans plus tard!

LOYAL SONS [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de ‘Loyal Sons, le fidèle reflet de ‘Traitorous Scions’ (chroniqué ici). Comme le nom de l’anthologie le laisse apparaître, nous sommes en présence exclusive de membres du good boys club de l’Empereur, autrement dit les Primarques qui ont choisi de se battre du bon côté de l’histoire. Au menu, et comme cela avait été le cas pour leurs homologues rebelles, les fistons loyaux sont évoqués à travers 14 nouvelles, dont aucune n’est inédite1. L’occasion de découvrir, ou redécouvrir, les hauts faits de cette fraternité surhumaine, avant et pendant l’Hérésie de la brebis loup galeux.  

1 : On pourrait cependant considérer que ‘Champion of Oaths’ de John French est une nouveauté à part entière, car elle n’avait été avant cela proposée que dans un recueil papier uniquement vendu lors d’événements organisés à Nottingham.

Loyal Sons

Au petit jeu des favoris (des éditeurs de la Black Library, ce qui est presque aussi bien que d’avoir l’attention de Pépé, quand on y réfléchit), on constate que pour une fois Ferrus Manus finit devant ses frangins (so happy for him!), à égalité avec l’incontournable Rogal Dorn. À l’autre bout du spectre, Vulkan, Leman Russ, Corax, Jaghatai Khan et Lion El’Jonson ne bénéficient que d’une nouvelle à leur nom (et encore, c’est assez discutable pour le Jag’ qui ne fait qu’un caméo à la fin de ‘A Game in Opposites‘): si vous êtes des fans transis et exclusifs de ces estimés gentlemen, peut-être que ‘Loyal Sons‘ n’est pas pour vous. Mais si vous voulez connaître un peu plus les faithful nine de l’Imperium, n’allez pas plus loin. Par ici la visite…

Loyal Sons

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The Passing of Angels – J. French :

INTRIGUE :

The Passing of ANgelsLa planète Harpic, intégrée à l’Imperium pendant la Grande Croisade, a décidé de faire sécession de l’empire de Pépé. Ce crime de lèse majesté ne pouvant évidemment pas rester impuni, l’Armée Impériale est envoyée sur place pour calmer les velléités indépendantistes du Gouverneur Planétaire… et est accueillie à coup de bombes nucléaires, résultant en des pertes colossales parmi les assaillants mais également la population locale, sacrifiée sur l’autel du « vous ne m’aurez jamaaaaaaaaaaais ». L’Empereur ayant clairement établi que l’atome, c’était le mâââl dans une célèbre interview donnée au Journal de Mickey en M30, la machine de guerre impériale passe en mode hardcore et envoie Sanguinius et ses Blood Angels « pacifier » pour de bon la planète mutine, renommée H_____ en signe de la gravité de ses crimes.

Nous suivons donc le Primarque ailé et les soixante Space Marines de l’Ost de la Destruction, armés de l’arsenal le plus sale à disposition de l’Astartes (armes à phospex, grenades à radiations, cocktails cacatov et tutti quanti), alors qu’ils font s’abattre le jugement de l’Empereur sur les dissidents de H_____. Sanguinius a donné des ordres stricts : il ne doit y avoir aucun survivant, et, conscient du lourd fardeau psychologique qu’un tel massacre pourrait avoir sur ses fragiles de fistons, il leur a ordonné de revêtir le masque d’argent des Destructeurs, permettant à son porteur de dissocier son identité des actes horribles commis en tant que membre de l’Ost1. Seul le Primarque se rend au combat tête nue, car sa nature surhumaine lui permet d’endosser sans faiblir la responsabilité de ce massacre (raison officielle) et que mettre un casque lui aplatit les cheveux de manière disgracieuse (raison officieuse). Bien évidemment, les soldats de H_____ ne font pas le poids face à la furie sanguin(ius)aire des Blood Angels, et leur insignifiante petite planète ne tarde pas à repasser du bon côté de l’histoire.

La nouvelle se termine par une réunion informelle entre Horus et Sanguinius sur le Vengeful Spirit, pendant laquelle les deux frangins se livrent à leur activité préférée : battre son frère à un jeu de plateau pour Horus, et faire de lourds sous-entendus sur l’avenir pour Sanguinius. C’était une époque plus simple…

1 : C’est dans l’esprit très semblable aux masques de guerre des Guerriers Aspects Eldars… sauf qu’ici, on ne nous dit pas s’il y a une véritable technologie permettant de brainwasher le porteur, ou bien s’il devra faire la dissociation tout seul comme un grand.

AVIS :

Je suis un peu déçu de l’approche choisie par French pour cette nouvelle estampillée Primarques, car elle ne nous apprend au final pas grand-chose sur le personnage que l’auteur a choisi de traiter (Sanguinius)1, et aurait donc pu être cataloguée comme nouvelle « classique » de l’Hérésie à la place. Certes, on voit le Primarque mener ses fils à la bataille, mais la noblesse tragique dont il fait preuve au cours de la purge de H_____ n’est pas une caractéristique inconnue de Sanguinius : quiconque est un tant soit peu familier du personnage sait qu’il s’agit au contraire de la base de son identité. Partant, le propos déroulé par French dans ‘The Passing of Angels’ n’apporte pas de nouvel éclairage sur l’Archange de Baal, ce qui est à mes yeux la raison d’être d’un récit Primarques. Le même argument peut être avancé pour la scène de dialogue entre Sanguinius et Horus, qui relève à mon sens plus du clin d’œil à des éléments de fluff déjà établis au cours de l’Hérésie que d’une quelconque avancée de l’arc des Pépé Bros.

Je suis également resté sur ma faim avec l’Ost de la Destruction, convoqué par French pour montrer que même la Légion de Space Marines la plus angélique ne rechignait pas à faire le sale boulot de temps à autre, mais avait développé une technique bien à elle pour ne pas laisser ces actes barbares affecter durablement ses membres. L’idée est intéressante, mais sa mise en pratique tellement lacunaire que l’on ne sait pas comment le processus en question fonctionne. Les masques mortuaires des Destructeurs ont-ils seulement une fonction symbolique, ou sont-ils capables d’effacer les souvenirs de ceux qui les portent ? Bref, ‘The Passing of Angels’ passe à mes yeux à côté de son sujet, et si French est suffisamment compétent en tant qu’auteur pour que la lecture de cette nouvelle ne soit en rien désagréable, j’attendais plus et mieux de sa part ici.

1 : La plus grande révélation de ‘The Passing of Angels’ a été pour ma part d’apprendre que Sangui avait une vision laser, qui pouvait détecter une rupture d’alignement de l’ordre d’un micron. Il aurait dû être coiffeur au lieu de chef de guerre avec ce don, moi je dis.

Mercy of the Dragon – N. Kyme :

INTRIGUE :

Mercy of the DragonLes réunions de famille ne sont pas toujours une partie de plaisir, c’est bien connu. Toutefois, les retrouvailles entre Vulkan et l’Empereur sur Nocturne se passèrent de manière que l’on peut qualifier de cordiale, surtout si on les compare à d’autres épisodes d’affiliés au premier regard tournées plus tard au cours de la Grande Croisade. Bien sûr, le fils adoptif de N’bel le forgeron a une âme paisible sous ses abords farouches, et il faudra une longue discussion (et une salamandre encore plus longue, mais c’est une autre histoire…) pour le convaincre de laisser tomber sa planète pourrie et sa salopette rapiécée pour prendre sa place aux côtés de son créateur dans la conquête de la galaxie. C’était à l’époque où Pépé prenait encore le temps de discuter avec ses fistons avant de les bombarder à la tête de leur Légion1… Et croyez-le ou non, mais un des critères majeurs ayant guidé la décision du colosse aux yeux de braise fut de savoir si ses nouveaux camarades de jeu allaient être gentils avec lui pouvaient apprendre quelque chose de sa part, lui qui se voyait davantage chaudronnier que chef de guerre. « Mais bien sûr gros bêta », lui répondit son papounet. « Attends un peu de rencontrer ce joyeux drille de Ferrus… ».

Flash forward quelques temps plus tard, au cours de la campagne de mise en conformité de Ranknar. Les indigènes ne se sont montrés sensibles ni aux talents oratoires, ni aux sculptures en ballons de l’Empereur (on ne peut pas être bon partout hein), et la guerre fait rage à la surface de la planète. Les défenseurs vont de défaites en défaites, leurs forteresses imprenables se faisant mettre minables en un temps ridicule et un déluge de flammes par un guerrier terrifiant, surnommé le Dragon par ses adversaires malheureux. Nous suivons le soldat Sarda et le prêtre Veddus alors qu’ils se rendent jusqu’à l’ultime bastion de la résistance : la Citadelle Rouge de Romistad. Le dernier carré des ranknariens dans la cité de Venikov s’est en effet terminé de manière abrupte et infernale, après que le Dragon ait décidé d’y allumer le feu.

À Romistad, la situation des défenseurs semble un chouilla moins désespérée, car ils ont à leur disposition non pas une, mais deux armes top secrètes moumoutes. Ceci dit, les impériaux ont de leur côté non pas deux, mais trois membres des Ramones (nouvelle période) : Peypey, Féroce Manosque, et bien sûr le Dragon, qui est bien sûr le nom de code trop trop secret de Vulkan. Bref, les carottes ne sont pas cuites, elles sont sur le point d’être carbonisées pour les irréductibles gaulois.

La stratégie de l’Empereur, qui consiste à lancer un Vulkan fou de rage (sans qu’on sache trop bien pourquoi d’ailleurs) sur l’ennemi en mangeant des chips avec Ferrus Manus à bonne distance des combats, rencontre toutefois ses limites lorsque les défenseurs abattent leur premier joker : un trio de bogatyrs, c’est-à-dire des golems de la taille d’un Titan, menant une sortie désespérée sur les lignes impériales. Ne pouvant pas laisser Vuvu se faire exploser sans intervenir, Pépé intervient gracieusement pour rétablir le déséquilibre en faveur de ses troupes, ce qui permet à l’irrascible Hulk, mit encore plus en rogne par la découverte de la source d’énergie des bogatyrs (des enfants sous hémodialyse) de charger seul la porte de la Citadelle Rouge, afin d’apprendre à ses occupants de quel boa il se chauffe…. Et c’est là qu’arrive la boulette.

Malgré ses puissants pouvoirs de guidage de missiles, l’Empereur n’est en effet pas foutu d’empêcher le dernier tir d’une salve tardive d’exploser pile sur la position de Vulkan, alors qu’il attendait que la gardienne vienne lui ouvrir. Pour sa défense, il y avait péril en demeure pour les impériaux, l’ultime botte secrète des défenseurs étant de déclencher une bombe virale, ce qui n’aurait pas été fair play. Fort heureusement, ‘tis but a scratch pour Papamanders, qui étrenne certainement ainsi sa perpétualité (reste à voir comment il a regénéré aussi vite ceci dit), et convainc les Ranknariens de déposer les armes après que ces derniers aient constaté que le féroce Dragon a fait obstacle de son corps pour protéger un frêle enfançon qui jouait à la marelle sur le champ de bataille. Le pouvoir de la gentillesse ! Bon, on ne dira rien sur les centaines de milliers de morts avant ça parce que ça serait un peu mesquin…

1 : D’après la chronologie donnée par Laurie Goulding (et donc aussi officielle que possible), Vulkan a été le cinquième Primarque retrouvé. L’Empereur a commencé à s’en balec au douzième round (Mortarion).

AVIS :

Nick Kyme n’a pas écrit le roman Primarques de sa Légion de cœur (l’honneur en est revenu à David Annandale), mais il s’est tout de même payé le luxe de raconter en quelques pages comment la rencontre entre le père et le fils s’est déroulée… et je reste un peu dubitatif sur la valeur de cette offrande. Le problème tient en deux mots : character development. Mettre en scène des personnages aussi iconiques que l’Empereur et ses Primarques de fils nécessite en effet de connaître le riche background de ces figures majeures, mais également de les faire agir en gardant en tête leur stature d’êtres sur(sur)humains. Et si j’aborde ce sujet, c’est bien entendu que Nick Kyme s’est planté sur les deux tableaux. On a ainsi un Empereur qui minaude en faisant briller ses gantelets au soleil et balance des répliques dignes du Thesaurus, mais également un Vulkan utilisé à total contre-emploi avec son fluff établi (le Primarque qui se soucie des simples humains), puisqu’il passe la majorité de la campagne de Raknar à se comporter comme un proto-Angron, massacrant l’ennemi sans lui montrer aucune pitié1, et sans que Kyme ne justifie d’aucune façon cette soudaine agressivité. Que Vulkan ait pété une durite après avoir vu comment ses adversaires faisaient avancer leurs golems de combat, ok, mais avant cela ? Ce n’est pas comme si le même Vulkan avait failli refusé la proposition de l’Empereur de rejoindre la Grande Croisade parce qu’il ne se sentait pas l’âme d’un guerrier littéralement deux paragraphes avant, hein.

On peut toutefois reconnaître à Kyme les efforts sincères qu’il a fait pour donner une culture un peu fouillée à Raknar et ses habitants/fidèles (car oui, c’est à la fois une planète et un dieu), ce qu’il ne s’est pas toujours motivé à faire dans sa production pour la Black Library. Ce n’est toutefois pas suffisant pour équilibrer l’ardoise, et ‘Mercy of the Dragon’ reste à mes yeux globalement raté.

1 : En témoigne le dialogue entre Sarda et Veddus au début de la nouvelle, qui permet d’établir que plus de cent mille hommes ont péri dans la défense de Venikov (sans compter les civils), avec Vulkan en allumeur en chef.

Shadow of the Past – G. Thorpe :

INTRIGUE :

Pendant que la galaxie part en sucette énergétique, sur Sicarus les grands travaux lancés par Lorgar afin de templaformer la planète avancent gentiment. Sous le patronage avisé et le commandement sévère mais brusque de l’Apôtre Noir/chef de chantier Kalta-Ar, des milliers d’esclaves suent sang et os (on est dans l’Œil de la Terreur, tout est possible) pour bâtir la Beneficta Diabola, basilique impie qui comportera deux piscines, un centre commercial et un boulodrome olympique. Soucieux du respect le plus strict des meilleurs standards de santé et sécurité, Kalta-Ar a pris soin de protéger le chantier d’incursions démoniaques, fréquentes en ces latitudes, par des pentacles et sceaux de protection du tout dernier cri1. Aussi est il fort mécontent d’apprendre de la part de ses acolytes qu’un nombre croissant de légionnaires disparaissent sans laisser de trace, au lieu de monter la garde en chantant des cantiques impies comme ils étaient sensés le faire.

Accompagné de son bras droit Arkula le Coryphaus et du Sergent Isaikash, K-A se rend sur les lieux de la dernière disparition, qui devient vite l’avant-dernière car un autre Word Bearer fait soudainement une mauvaise rencontre sur le chemin de ronde, et rend l’âme après cinq secondes de hurlements stridents sur le WhatsApp de groupe. Malaisant. Si quelques esclaves ont été témoins des derniers instants de frère Barbaque, les subtiles techniques d’interrogatoire de nos héros ne leur permettent pas d’apprendre grand-chose sur la nature du prédateur qui s’amuse à les faire tourner bourrique. Les mortels ont en effet seulement vus une ombre écarteler le malheureux Space Marine, ce qui n’est pas lourd pour faire avancer une enquête. Jugeant probable que ces déboires sont de nature démoniaque, et suspectant les serfs d’avoir réussi à appâter un gros Nurgling dans le Materium pour se venger des mauvais traitements infligés par leurs geôliers, Kalta-Ar est sur le point de diligenter une inspection surprise de ses propres opérations (aux grands porteurs du mot, les grands remèdes) lorsqu’une présence indistincte mais pas franchement amicale se matérialise soudain à proximité.

Les rapports alarmistes et disparitions brutales commençant à se multiplier, nos trois affreux décident finalement de prudemment de battre en retraite en direction du portail Warp reliant la Beneficta Diabola au QG de Lorgar, afin de respectueusement demander au boss de venir gérer un impondérable que ses incapables de larbins sont bien en peine de pondérer de leur côté. Cette retraite stratégique, qui se transforme sous peu en débâcle effrénée vers la chambre de papa, voit un nombre non négligeable de Word Bearers aux noms plus exotiques les uns que les autres2 se faire oblitérer par le terrible blurry man qui les poursuit, mais également ce fieffé coquin de Marduk, fier comme Ar-Thaban dans son armure Terminator, faire son apparition dans l’histoire. Fidèle à lui-même, il se montre odieux envers Kalta-Ar et ses survivants, et d’une piètre aide lorsque the thing se remet à faire des siennes. Pourquoi se donner du mal quand on a une armure en scenarium, pas vrai ?

Heureusement pour nos héros, Lorgar avait les oreilles qui traînait et, bien qu’il tique un peu sur le vocabulaire peu flatteur utilisé par ses fils pour parler de lui, l’adoré doré fait son apparition pour se confronter au démon qui tourmente sa marmaille…

Début spoiler…Sauf qu’il ne s’agit pas d’un démon, mais de ce lascar de Corax, qui a gagné quelques pouvoirs funky et emo en diable (comme se changer en brume ou en nuée de corbeaux, ou se faire pousser des bras et des lames surnuméraires) à trop traîner dans le Warp, mais est resté fidèle à sa nature profonde : se venger des méchants très méchants. On se souvient que les deux Primarques se sont déjà frittés sur Isstvan au début de l’Hérésie, et que sans l’intervention salutaire de Konrad Curze, Lolo aurait avalé son crozius. La revanche qui prend place sur Sicarus, alors que Lorgar a été élevé au rang de Prince Démon et que Corax se bat seul sur une planète baignée par le Warp… va rigoureusement dans le même sens, ce nullard d’Aurelian se faisant perforer la glotte par les griffes énergétiques de son frangin, et ne devant son salut qu’à l’intervention peu sportive de ses Word Bearers pour occuper le Seigneur Corbaffe le temps que son adversaire malheureux soit évacué à travers son propre portail. La lose totale.

Coincé sur Sicarus à cause de sa nature à demi-démoniaque, Corax jure à son frère qu’il y aura une belle et s’en va fracasser sa basilique pour se passer les nerfs. De son côté, Lorgar décide d’aller bouder dans sa chambre pour marquer sa désapprobation, et la légende raconte qu’il n’en est toujours pas sorti à ce jour…Fin spoiler

1 : …des victimes sacrificielles utilisées pour les tracer.
2 : Hesta-Pek, Takla-Gad, Apall-Af, Ghoa-Lok, Ukna-Tav…

AVIS :

Gav Thorpe se paie le luxe de conclure la saga hérétique (et la saga tout court pour Corax) de deux Primarques à travers ce sympathique ‘Shadow of the Past’, ce qui est un ratio fluffique tout bonnement exceptionnel pour une simple nouvelle. Si les prémisses de cette histoire ne sont pas très intéressantes, et qu’un lecteur un peu au fait du passif de cet auteur pendant l’Hérésie d’Horus aura tôt fait d’identifier le mystérieux persécuteur de cette cruche de Kalta-Ar, je trouve la deuxième partie du récit nettement supérieure, notamment grâce à l’idée de faire de Corax une sorte de démon non chaotique1, ce qui permet de justifier à la fois comment le Primarque a pu survivre à son départ dans le Warp, et à quoi il occupe ses journées. En plus de ça, un petit duel entre deux frangins légendaires, ça ne se refuse pas (surtout quand c’est la tête à claque qui perd). Il y a même le Marduk d’Anthony Reynolds qui vient faire coucou, ce qui est sympa de la part de Thorpe, et fera sans doute plaisir aux fans du personnage. Bref, un final vraiment sympathique qui fait plus que rattraper un début assez meh. Si Gav Thorpe pouvait toujours s’en tenir à ce standard, je serais un lecteur comblé.

1 : Ou carrément affilié à Malal/Malice, ce qui serait encore plus cool, et une hypothèse pas si farfelue que ça pour une soumission d’un auteur aussi au fait du fluff que Thorpe. Après tout, les motivations et le code couleur de Corax correspondent tout à fait à ceux du dieu banni…

A Lesson in Iron – D. Guymer :

INTRIGUE :

A Lesson in IronS’il y a une chose que Ferrus Manus, paix à son âne, détestait, c’était bien perdre du temps. Aussi, sitôt réuni avec sa Légion, engagée dans le démantèlement de l’empire de rouille ork, le Primarque tint à imposer sa marque sur ses Légionnaires. Nous rejoignons ainsi l’impulsif M. Manus alors qu’il fait la chasse de quelques vaisseaux peaux vertes ayant survécu à la colère de l’Imperium, et qu’il compte bien détruire afin d’obtenir la complétion à 100% de sa mission, et ainsi prouver à l’univers qu’il vaut mieux que ces poseurs d’Horus et de Russ1. Et tant pis si ces couards d’Orks décident de foncer coque baissée dans une faille Warp qui flottait par là pour échapper au courroux de l’Astartes, et que personne n’a jamais été assez timbré du côté impérial pour se risquer dans ce genre d’environnement chelou. Ferrus, et son Fist of Iron, seront les premiers à tenter le coup. Encore un record à mettre au crédit du Primarque qui en voulait.

Ferrus n’est pas seul sur le pont de son vaisseau amiral alors que ce dernier réalise le premier fistage d’une faille Warp. Il est accompagné de deux Sergents vétérans, le Terran Harik Morn et le Medusan Gabriel Santar, tous deux pressentis pour devenir son bras droit. Alors que le Fist of Iron s’enfonce dans le trans Materium comme s’il s’agissait de caramel mou, avec des effets funky sur les appareils de navigation, comme on peut l’imaginer, les auspex détectent soudain des silhouettes de vaisseaux à proximité. Il s’agit des kroiseurs orks, mais également d’un nouvel arrivant, qui n’avait pas été identifié pendant la poursuite dans l’espace réel. Point commun : tous ont été réduits à l’état d’épave, et dans un passé lointain qui plus est. À la grande surprise des impériaux, il semble que le vaisseau en question appartienne à la 10ème Légion, ce qui hautement improbable mais pas totalement impossible. Pragmatique comme toujours, Ferrus Manus décide d’aller y jeter un œil.

Alors que les pauvres grunts qui forment son escorte découvrent avec émoi 1) l’existence de Démons et 2) s’il y a une vie après la mort, le Primarque et ses comparses arrivent jusqu’au pont du vaisseau mystère, où les attend un cadavre desséché de Space Marine. Ce dernier porte les marquages d’un Iron Hands, mais, au grand dégoût de FM, il semble avoir terminé sa carrière plus machine que (sur)homme, au vu de toutes les augmétiques et bioniques que la dépouille arbore. C’est le Tech-adepte qui accompagne la fine équipe qui finit par proposer l’hypothèse la plus intéressante pour expliquer ce répugnant mystère : l’épave sur laquelle ils se trouvent est un vaisseau des Iron Hands provenant du futur, transporté dans le passé par les caprices du Warp.

Avant que la nouvelle n’ait pu être digérée par l’assemblée, une palanquée de Démons se manifeste (dans tous les sens du terme) sur le pont, et forcent nos héros à – enfin – faire usage de la force. Si ce bogoss de Ferrus s’illustre à grands coups de marteau, ses subalternes sont plus à la peine. Surpris par les nouveaux arrivants, Santar se fait ainsi arracher le bras gauche par une Bête de Nurgle joueuse, tandis que Morn est submergé par des Horreurs rigolardes. Le premier réussit toutefois à marquer des points auprès du Primarque en retournant dans la mêlée sitôt ses esprits recouvrés, tandis que le Terran se contente de haleter comme un bébé phoque sur la banquise. Avant d’ordonner une retraite tactique vers le Fist of Iron, ignorant les avis de ses sous-fifres de rester pour looter de la technologie futuriste, et/ou défendre une relique de la Légion, Ferrus tranche en son for intérieur : ce sera Gaby qui deviendra son Ecuyer et 1er Capitaine. C’est dit.

1 : C’était l’époque de la Grande Croisade où tous les Primarques avaient un nom qui rimait avec « platypus », l’animal préféré de Pépé.

AVIS :

Petite nouvelle fort sympathique consacrée par leur spécialiste incontesté, David Guymer, aux Iron Hands et à leur Primarque caractériel, ‘A Lesson in Iron’ se paie le luxe de nous présenter en quelques lignes la prise de fonction de Ferrus Manus au sein de sa Légion (choix du 1er Capitaine, et autres révélations fluffiques intéressantes incluses), combiné avec une savoureuse mise en abîme du futur qui attend le Chapitre dans quelques millénaires. Le fait que les améliorations bioniques répugnent au plus haut point l’homme aux mains de fer n’est pas une nouveauté à ce stade, mais Guymer parvient tout de même à surfer sur cette iron-ie de façon tout à fait satisfaisante. Le pauvre Ferrus Manus aura soupé de prémonitions malheureuses car jamais utilisées pour modifier la destinée pas vraiment enviable attend ses fils et lui-même à la sortie de la Grande Croisade, et on en a encore un exemple ici. Ca reste plus distrayant à lire que la moyenne des soumissions de la BL, donc pourquoi cracher dans soupe ?

The Atonement of Fire – D. Annandale :

INTRIGUE :

The Atonement of FireNous sommes dans la dernière ligne droite de l’Hérésie, quelques mois avant que le Siège de Terra ne débute. Roboute Guilliman a fini par réaliser que lancer sa petite entreprise personnelle alors qu’il est toujours techniquement employé par Pépé Corp., et en piquant dans la caisse de Big E. en profitant d’une panne généralisée d’internet pour ne pas se faire prendre, c’était assez craignos tout de même. Pétri de remords, Roro est désormais à la recherche d’un moyen de se faire pardonner ses errements passés. En sortant de sa séance hebdomadaire avec le Chapelain/Psychiatre Volusius, lui vient une idée toute simple pour expier son énorme hubris : aider Sanguinius à rejoindre Terra en détruisant les flottes hérétiques qui se mettront sans nul doute sur la route de l’Ange à la Moumoute.

Après une petite séance de triangulation avec les poteaux dans le strategium de l’Ultima Mundi, les Ultras de l’Empereur décident d’aller au secours de la planète Diavanos, d’où est arrivé un message astropathique implorant de l’assistance pour gérer une invasion de World Eaters mal-lunés. Diavanos est de plus un monde que les Ultramarines ont rattaché à l’Imperium il y a plusieurs décennies, et dont la technique de vitraux teintés a grandement impressionné le Primarque lorsqu’il flânait dans les rues de la capitale Ecstasia à la recherche d’inspiration pour son dernier roman. Pour toutes ces raisons, ainsi que pour celle, plus prosaïque, de se venger des ravages commis par les séides d’Angron et de Lorgar dans leur pré carré, les gars de la XIIIème se ruent au secours de Diavanos, et tombent à bras raccourcis sur leurs frères ennemis alors que ces derniers s’apprêtaient à repartir pour embusquer la flotte des Blood Angels.

La bataille spatiale qui s’en suit, si elle n’est guère équilibrée (les Ultramarines sont deux fois plus nombreux, sérieux, hargneux, farineux et bleus que leurs adversaires), permet à nos héros de relâcher la pression après tous ces mois à écouter les podcasts interminables du triumvirat de l’Imperium Secundus. Alors que les derniers vaisseaux renégats sont méthodiquement désintégrés par la froide fureur ultramarine, le cuirassé Gladiator profite de la confusion pour repartir en direction de Diavanos, et certainement pas pour une visite de politesse. Guilliman comprend que les World Eaters ont un petit creux, et que s’il n’intervient pas rapidement, la planète qu’il est venu sauver va s’en prendre plein la face. Mais arrivera-t-il à temps pour empêcher les fils d’Angron de commettre l’irréparable ?

Début spoiler…Après de multiples péripéties dans les coursives du Gladiator, que les World Eaters ont faites effondrer pour gêner la progression de leurs ennemis, Roboute et ses hommes (en grande partie des Destroyers, wink wink The Lord of Ultramar’) parviennent jusqu’à la salle des torpilles où les hérétiques se sont barricadés. La mêlée désespérée et surtout très sale qui s’ensuit tourne logiquement en faveur des surhommes en bleu, mais les World Eaters sont proches de réaliser leur objectif secret (faire péter une torpille à l’intérieur du vaisseau afin d’emporter Guilliman avec eux). Seule l’habilité du Grand Schtroumpf avec son combi-bolter customisé permet d’éviter la catastrophe, mais la victoire morale revient tout de même aux groupies d’Horus. Il est en effet trop tard pour prévenir le crash du Gladiator à la surface de Diavanos, et l’onde de choc qui s’en suit rase la capitale et dévaste une grande partie de la planète. Bien évidemment, les Ultramarines ont eu le temps de regagner leurs 22 avant que cette tragédie n’arrive, mais Guilliman finit la nouvelle avec le blues. Approprié, vous me direz.Fin spoiler

AVIS :

Vu le passif peu glorieux de David Annandale avec la XIIIème Légion (‘Lord of Ultramar’…), j’ai attaqué cette nouvelle dans un état d’esprit assez peu favorable à cette dernière, et j’ai été surpris de constater que cet ‘Atonement of Fire’ tenait tout à fait la route. Nous sommes en présence d’un court format siglé HH de facture assez classique (un peu de réflexion, beaucoup d’action, et en bonus une belle tranche de Primarque), mais débarrassé de tous les défauts que l’on pouvait trouver dans les autres soumissions de notre homme (personnages stupides/inintéressants, intrigue bancale, rythme chaotique)1. Ça pourrait et devrait être considéré comme le strict minimum, mais nous savons tous que la BL ne croit pas dans des concepts aussi restrictifs que le contrôle qualité. Enfin, pas tout le temps.

Surtout, et c’est assez rare dans une publication de la Black Library (quel que soit la franchise ou l’auteur) pour le souligner, Annandale parvient à ménager un vrai suspens jusqu’au bout de son propos. Guilliman et ses Schtroumpfs destructeurs arriveront-ils à sauver Diavanos des déprédations suicidaires des World Eaters ? Même si la planète a été créée de toute pièce pour l’occasion, l’auteur arrive à nous intéresser à la conclusion de cet accrochage mineur de la fin de l’Hérésie en appuyant de façon intelligente sur les remords éprouvés par Guilliman au sujet de son Imperium Secondus et son besoin de se faire pardonner de ce petit caprice. Annandale nous ressert également la vieille rengaine du « I am never going to financially recover from this », 30K style, déjà bien exploitée par d’autres avant lui, mais qui fait toujours son petit effet quand utilisée à dessein, ce qui est le cas ici. Bref, une vraie bonne surprise pour ma part, et une des meilleures soumissions de David Annandale pour le compte de cette franchise, si vous demandez mon avis.

1 : On pourrait lui reprocher de ne toujours pas maîtriser les bases spatio-temporelles d’une bataille spatiale (exemple gratuit : la course poursuite entre l’Ultimus Mundi et le Gladiator ne semble durer que quelques minutes, alors qu’elle s’engage à proximité du point de Mandeville du système et se termine dans l’atmosphère d’une planète habitable (donc proche de son soleil), ce qui devrait prendre au bas mot quelques jours), mais dans mon infinie générosité, je passe l’éponge là-dessus.

Canticle – D. Guymer :

INTRIGUE :

On a tous nos surnoms, plus ou moins glorieux, et Ferrus Manus ne fait pas exception. Bien avant d’être baptisé pognes d’acier (en latin haut gothique pour faire plus classe), notre héros a ainsi été appelé Numerodis (l’Empereur), Cataclysme (les géants des tempêtes du Pinacle de Karaashi), La Finalité (des morts-vivants quelconques), Rehew Netjer, soit le Fils de l’Homme (les Necrons), Mon très Chair (les despotes fragmentés du Subliminat), et Empafé de première (le type auquel il a piqué sa place sur le parking du Monoprix de Medusa). Pour sa part, et après avoir malencontreusement libéré Asimoth sur sa planète d’adoption peu de temps après son arrivée remarquée sur cette dernière et s’être révélé trop faiblard pour ramener la bestiole dans son enclos, le Primarque des Iron Hands s’est donné le nom et la vocation de Chasseur, ayant décidé de réparer sa bévue en traquant le wyrm d’argent à travers les paysages bucoliques de Medusa.

Ces premières années sont également l’occasion pour Ferrus Manus de faire ses premières armes, dans tous les sens du terme. On apprend ainsi qu’il a rencontré quelques difficultés sur sa route, d’ordre robotique, semi-robotique et infernal, ce qui donne une idée de la très riche « biodiversité » de la planète sur laquelle il a fait son trou. Rien de très mémorable cependant pour FM (et pour Guymer), dont l’équipement consiste en une cuirasse d’adamantium upcyclé et une bardiche bricolée à partir des dépouilles fumantes de ses malheureux adversaires biomécaniques. On apprend également que ce gentil garçon est capable de subsister sur un régime composé de sable, minéraux et métaux1, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Poursuivant sans relâche sa proie insaisissable, Ferrus finit tout de même par rencontrer des membres de son espèce, d’abord sous forme de cadavres entourant l’épave d’un camping-car Medusan. Curieux d’en apprendre plus sur ces étrangers qui lui ressemblent tant, et soucieux de récupérer un peu de matos utile dans la boîte à gants du véhicule éventré avant que tous les charognards du coin ne débarquent, le jeune Primarque se fraie un chemin jusqu’à la chambre forte du Sandcrawler, négociant au passage dix zombies cyborgs (zomborgs ?) occupés à mastiquer les cartes mères et câbles jack leur étant tombé sous la pince. Ce régime majoritairement électrovore ne les empêche cependant pas de sauter sur l’aventurier pour lui faire les poches dès qu’il s’approche un peu trop, forçant notre héros à faire montre de force autant que de ruse.

Une fois parvenu dans la salle des coffres, Ferrus a la surprise d’être mis en joue par une rescapée de l’embuscade ayant scellé le destin du véhicule et de ses occupants. Guère impressionné par la pétoire plasmique que son interlocutrice lui pointe sur le torse, le Chasseur refuse l’offre qui lui est faite par cette dernière de rejoindre son clan, arguant qu’il a encore une opération de vermifuge à accomplir, et un véritable nom à obtenir, avant de pouvoir faire son entrée dans le monde et participer au Bal des Débutant.e.s de Medusa. La suite de l’histoire de Chéri FM, si elle est connue, sera toutefois narrée dans un autre cantique que celui-ci.

1 : Avec quelques protéines et lipides occasionnelles de temps à autres, par exemple lorsqu’il croise la route d’une escouade de Dépeceurs sur leur 31. On peut donc classer Ferrus Manus dans la sous-catégorie des Primarques cannibales, avec Konrad Curze et Sanguinius.

AVIS :

On a plus l’impression d’un épisode pilote pour une série consacrée à l’enfance de Ferrus Manus que d’une nouvelle indépendante à la lecture de ce ‘Canticle’. Guymer passe en effet la majorité de ses pages à présenter de façon intrigante le jeune Primarque et sa planète, dont on aimerait bien apprendre davantage à la fin de son récit. L’intrigue semble avoir été volontairement tronquée pour permettre à l’auteur de la reprendre au cours de l’épisode suivant, qui n’a, à ma connaissance, pas été publié à ce jour. Peut-être faut-il creuser du côté de la novella1 que David Guymer a consacré à son héros pour mettre en perspective cette nouvelle ? Ou plutôt dans le ‘Voice of Mars’ du même auteur, où le Cantique des Voyages occupe une place importante ? En tous cas, si elle n’est certes pas désagréable à lire, et livre quelques éléments de fluff sur le plus moyen des fils de l’Empereur, cette histoire aurait gagné à se conclure de façon plus définitive.

1 : ‘Ferrus Manus : La Gorgone de Medusa’.

First Legion – C. Wraight :

INTRIGUE :

Spécialistes reconnus des campagnes pourries, les Dark Angels ont bien du mal à exterminer les Rangdan, espèce de Xenos experte en subterfuges et en tentacules, ce qui n’est guère du goût des roides et psychofrigides paladins de la Première Légion. Malgré tout, un ordre est un ordre, et les Astartes poursuivent leurs vaillants et violents efforts pour sécuriser ce petit bout de l’empire de leur Pépé, menés par nul autre que Lion El’Jonson en personne. Nous faisons tout d’abord la connaissance du Capitaine Arnaid, 45ème Compagnie, 8ème Ordre, 1ère Légion, dont la frégate a connu des jours meilleurs, mais qui n’hésite pas le moins du monde à intercepter le mystérieux vaisseau qui fait irruption dans la zone de « pacification » avec son Nightsward, bien que le nouveau-venu soit plus imposant et en meilleure forme. Alors que le Capitaine est sur le point d’ordonner un tir de semonce, ses salutations répétées n’ayant pas été retournées par les touristes en goguette, ceux-ci daignent enfin répondre, par la voix d’un autre officier Space Marine, un Capitaine de la nouvellement formée XXème Légion répondant au nom de…

Début spoilerJules-Edouard Petitbedon.

Bon ok : il s’appelle Alpharius. Incroyable, je sais.Fin spoiler

Alpharius s’excuse de ses manières cavalières et de son manque de décorum (son vaisseau, Perseus, a l’air d’avoir quitté les docks spatiaux avant que le Mechanicum n’y passe un coup de peinture), mais annonce qu’il est venu porteur de nouvelles pour Lion El’Jonson.

Pendant ce temps là, nous nous introduisons dans une réminiscence de Lionel en personne, du temps où il était un enfant sauvage qui courait cul nu dans les forêts de Caliban. Notre petit bonhomme semble être occupé à traquer une bête particulièrement bestiale, seulement armé d’une défense de phacochère nain et de sa volonté implacable. Wraight nous fait bien comprendre que c’est la destinée même d’El’Jonson qui est à l’œuvre ici, et entraîne le jeune Primarque au clash contre un monstre que la partie raisonnable/froussarde de Lionel aimerait éviter si possible. Pause pub.

Retour sur le Nightsward, où Alpharius est reçu par son homologue. Constatant qu’il ne sert à rien de féliciter ce dernier sur son goût (pratiquement inexistant) en matière de décoration d’intérieur, ni de tenter de piquer la curiosité (totalement inexistante) de l’austère Terran, l’Alpha Légionnaire qui s’ignore1 tente de soutirer quelques infos psychologiques et tactiques à Arnaid en jouant la carte de la franche admiration pour les exploits et la réputation de la Première Légion, avec un succès relatif. Ces oiseuses discussions sont toutefois interrompues par la réception d’un message autorisant Alpharius à voyager jusqu’à l’Invicible Reason pour y rencontrer Lion El’Jonson, avec Arnaid lui servant de Kaptain pour l’occasion. Simple déformation professionnelle, en somme.

Suite et fin du documentaire animalier commencé un peu plus haut avec la confrontation entre Lionel et sa Némésis, qui se trouve être un chevalier en armure. Car en fait, le zouave qui courrait dans la savane avec son coutelas d’ivoire n’était pas le Primarque, mais une sorte de démon ayant pris forme humaine, et décidé de mettre fin à l’écocide décrété par le chef de l’Ordre. Malheureusement pour notre ami, ce dernier se révèle être un adversaire trop coriace pour ses maigres ressources, et il finit promptement embroché par la rapière du palouf. Voilà qui lui apprendra à ne pas usurper, même littéralement, l’identité d’autrui. Avant de repartir dans le Warp, le Rahan de Caliban a le temps de traiter son assassin de « Premier Fils » et de l’accuser d’être « la mort de son monde », ce à quoi Lionel répond que son titre correct est le tueur de bêtes. Fin de l’épisode.

Sur l’Invicible Reason, le Dark Archangel reçoit comme convenu Arnaid et Alpharius, qui est en fait venu lui proposer un coup de main, en toute amitié2, pour en finir avec la campagne d’extermination des Rangdan. Les pertes terribles souffertes par la Première Légion menacent en effet son statut et son prestige par rapport à ses sœurs, et pourraient faire échapper à El’Jonson le titre de Maître de Guerre, que ce visionnaire d’Alpharius anticipe déjà qu’il sera décerné par l’Empereur à l’un de ses fils dans un futur pas trop lointain (dès que les 20 Primarques auront été retrouvés en fait…wait a minut-). Bien que ne contestant pas l’argumentaire de son petit neveu/frère, Lionel se montre méfiant devant l’intérêt qu’il semble attacher à la prédominance des Dark Angels dans l’équilibre politique de l’Imperium, et après avoir menacé de le couper en deux, en toute amitié, pour le forcer à exposer ses véritables motifs (Alpharius n’aime vraiment pas Guilliman), il le renvoie sur son vaisseau où il lui fera savoir sa réponse sous une heure. Resté seul avec Arnaid, El’Jonson consulte son Capitaine pour avis secondaire, avant de lui révéler que l’énorme poids de… sa parole donnée l’empêche et l’empêchera toujours de placer son intérêt personnel avant celui de son seigneur. C’est sur cette déclaration de loyauté véritablement désintéressée que se termine notre histoire, qui démontre à quel point Lion El’Jonson est un végétal politique. Un concombre, pour être précis.

1 : Il insiste pour être désigné comme être membre de la XXème Légion, sans autre précision. Quel coup de chance tout de même qu’il ait le même nom que le Primarque pas encore découvert de cette dernière
2 : Et surtout parce qu’il ne peut pas blairer Guilliman, ce qui lui fait un point commun avec Lionel.

AVIS :

On retrouve dans ‘The First Legion’ le goût de Chris Wraight pour des petits exposés au débotté sur la géopolitique impériale au moment de la Grande Croisade (tendance déjà aperçue dans ‘Leman Russ : Le Loup Suprême’), et c’est tant mieux si vous voulez mon avis. S’il ne se passe pas grand-chose dans cette nouvelle, on n’en ressort pas pour autant frustré de sa lecture, l’échange entre Alpharius et Lion El’Jonson, qui permet d’identifier les points communs et les différences entre le premier et le dernier de cordée et leurs Légions respectives, ainsi que d’en apprendre un peu plus sur la manière dont les Legiones Astartes étaient perçues par Terra au moment où Pépé songeait à partir en pré-retraite dans le Bhoutan profond, valant son pesant de papier. Lionel y apparaît comme le type imbuvable socialement (il le reconnaît lui-même d’ailleurs) mais irréprochable moralement que les derniers ouvrages de l’Hérésie tendent à dessiner, tandis qu’Alpharius est dépeint comme un intrigant de première, n’ayant aucunement besoin d’un slideshow de la Cabale pour trouver des raisons de comploter dans le dos de tout le monde. Bref, une soumission solide de la part de Chris Wraight, qui fait honneur à ses deux Légions secondaires avec cette nouvelle.

A Game of Opposites – G. Haley :

INTRIGUE :

C’est malheureusement très peu traité dans les livres d’histoire impériaux, mais la bataille de Beta Garmon, aussi connue sous le nom de casse (de Titans) du millénaire, ne s’est pas tenue du jour au lendemain. Cette rencontre décisive entre renégats et loyalistes, et les milliards de morts qui en ont découlé, n’a été rendue possible que par le dévouement et le travail de l’ombre de Légions de sous-fifres, comme l’histoire dont il est question ici s’en fait écho. Bienvenue donc à la surface d’Epsilon Garmon II, planète du cluster garmonien que les Iron Warriors souhaiteraient fortifier pour ralentir l’arrivée prochaine de Guilliman et de ses hordes de Schtroumpfs. Le conditionnel est ici de mise car les efforts de terrassement des hommes de fer se sont jusqu’ici faits contrecarrer par les manœuvres destructrices d’une petite force de White Scars. Peu familiers des techniques de hit and run de leurs cousins des steppes, les fils de Perturabo sont perturbés par cette campagne d’un genre nouveau, où ils arrivent toujours trop tard pour empêcher les Space Bikers de sévir.

Fort heureusement, le Maître de Forge Xyrokles, affublé de son larbin et souffre douleur Phideark, ainsi que d’une ribambelle de Capitaines dont je vous épargnerai les noms, a un plan machiavélique pour venir à bout du péril jaune blanc à éclair rouge. Ayant récupéré dans un campement abandonné par ses ennemis quelques bouquins philosophiques signés de la main même de Jaghatai Khan et remplis d’aphorismes aussi profonds que « La taupe ne voit pas le vol de l’éléphant », « Pourquoi rester debout quand on peut s’asseoir » ou « Plus il y a de fous, moins il y a de riz », Xyrokles a tellement bûché sa philo1 qu’il est certain de pouvoir prendre les White Scars à leur propre piège, en réalisant un coup de billard à IV bandes à base de feintes, de retraites et d’embuscades tellement complexes que la majorité de ses sbires n’y blaire que dalle. Lorsque vient enfin le jour le plus long, le Khan Ishigu emmène ses motards énergétiques faire une petite virée dans un avant poste renégat, sans se doute un instant que ses minutes sont comptées.

Et en effet, le plan de Xyrokles se déroule comme sur des roulettes, la colonne blindée qu’il a envoyé leurrer les loyalistes au moment où ils commencent à se replier en bon ordre se révélant être un extra trop tentant pour qu’Ishigu et Cie résistent à la tentation d’y planter leurs pneus. Ce détour est toutefois lourd de conséquences pour les White Scars, qui se font surprendre par une contre-attaque vigoureuse de la part des Iron Warriors, et canalisés dans un goulet étroit débouchant sur la ligne de blindés du Maître de Forge, qui n’a plus qu’à donner l’ordre d’ouvrir le feu pour régler une fois pour toutes leur compte aux scarifiés d’en face…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur la légendaire flexibilité tactique des fils du Khan, qui avaient tout planifié depuis le début et cachés également une réserve mobile pour surprendre l’adversaire. Confrontés à une force anti-chars conséquente et bénéficiant de l’effet de surprise, Xyrokles et ses hommes ne font pas long feu (c’est la vieille histoire de l’artilleur artillé). L’honneur est toutefois sauf pour ce dernier, puisqu’il s’aperçoit après avoir été fait prisonnier que c’était Jaghatai Khan en personne qui était aux commandes dans le camp d’en face. S’en suit un échange d’amabilités qui nous permet d’apprendre que le Khan se tamponne le samovar avec la vérité impériale, qu’il considère poliment comme un avis parmi d’autres. Stupeur chez Xyrokles, qui en surhomme de principe, pensait que tous les loyalistes adhéraient scrupuleusement au dogme de Pépé. Il emportera toutefois ce secret dans la tombe, que son généreux vainqueur lui accorde en récompense de ses méritants efforts de réflexion, Jaggie Chan lui dévissant les cervicales d’un tour de main à la fin de leur échange. C’est qu’il a du pain sur la planche, et un retour sur Terra à préparer…Fin spoiler

1 : Ce qui est somme toute logique pour un grec ancien.

AVIS :

Je suis partagé sur la valeur de ce ‘A Game of Opposites’, qui comporte des éléments positifs comme négatifs. Pour commencer par ce qui ne fâche pas, j’ai apprécié le choix de Haley de donner une dimension, si ce n’est comique, au moins caustique, à ses Iron Warriors, qui font ainsi mentir leur réputation de guerriers prenant tout au premier degré. La dynamique entre Xyrokles et Phideark est particulièrement savoureuse, le second encaissant sans broncher toutes les punchlines que son supérieur lui balance à la tête. Dommage que le destin tragique du Coluche d’Olympia nous prive d’autres saillies drolatiques de sa part pour la suite de l’Hérésie. Cette nouvelle est également intéressante d’un point de vue fluffique, car elle donne à voir un Jaghatai Khan d’un pragmatisme assumé et presque hérétique, ayant pris parti pour son Père mais loin de se ranger à toutes ses vues, y compris sur des sujets aussi sensibles que la religion (il croit en la réincarnation). D’un autre côté, ‘A Game of Opposites’ pêche franchement pas son manque de suspens et son déroulement sans surprise. Car le résumé ci-dessus ne suit pas exactement le récit de Haley, qui choisit de révéler la présence du Khan au côté d’Ishigu dès le premier tiers de la nouvelle, ce qui condamne d’office le stratagème de Xyrokles à l’échec1. Le retournement de situation final et la victoire des White Scars sont donc aussi attendus que l’heure de la pause syndicale dans un guichet de poste, ce qui peut blaser le lecteur (en tout cas, ça a été mon cas). En conclusion, pas le meilleur texte de Guy Haley, mais pas désagréable ou inutile pour autant.

1 : Il n’y a que John French qui fait battre un Primarque par un Space Marine (‘The Crimson Fist’).

Better Angels – I. St Martin :

INTRIGUE :

Les Légions Space Marines sont un peu comme les filières post bac : il y en a pour tous les goûts et tous les niveaux. Si les impétrants ayant de la suite dans les idées et la volonté de faire carrière se rabattront sur des spécialisations ternes mais assurant la sécurité de l’emploi (BTS Gestion avec les Ultramarines, Bac Pro travaux publics avec les Imperial Fists ou les Iron Warriors, CAP Esthétique avec les Emperor’s Children…), les plus aventureux tenteront leur chance dans des cursus plus pointus, à leurs risques et périls. C’est ainsi que l’Empereur se retrouva avec des cohortes de philosophes désagrégés (Thousand Sons), théologiens en déshérence (Word Bearers), et vétérinaires ayant raté leur concours d’entrée (Space Wolves), qu’il dût bien recaser à droite et à gauche pour éviter la crise. Enfin, pour un temps. Mais, parmi tout l’Astartes, aucune Légion n’égale les Blood Angels en termes de réputation. Si on appelle les fils de Sanguinius (derrière ses ailes) des poètes, des peintres ou des danseuses, c’est pour une bonne raison : le Primarque exige que tout le monde pratique une discipline artistique, depuis le plus humble novice jusqu’au plus ancien des Dreadnoughts1. Notre héros, que nous allons suivre depuis le début de sa carrière jusqu’à l’arrivée de la flotte de la IXème en orbite de Terra, peu de temps avant le début du siège, ne fait pas exception. Jehoel (il faut croire que Joël était déjà pris) s’est ainsi spécialisé dans la verrerie, ce qui lui a attiré l’intérêt et le mentorat de son père génétique, souvent présent lorsque le souffleur fait parler la poudre le sable.

Ces rencontres ponctuelles mais fréquentes, si elles permettent aux deux surhommes de discuter technique et philosophie, amènent surtout le lecteur à suivre en filigrane la fin de la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus du point de vue d’un Primarque et d’une Légion particulièrement éprouvés par la traîtrise du Maître de Guerre, et le déclenchement de la baalédiction des fils de Malle, ou l’inverse. Finies donc les évocations de la prochaine reconversion des légionnaires en portraitistes et potiers une fois la galaxie conquise, et bonjour les sculptures de démons réalisées dans un état second, au grand déplaisir de Sanguinius – qui passe la nouvelle à critiquer Jehoel, ceci dit. Adieu aux riches galeries du Red Tear, et bonjour à la décoration minimaliste du Convenant of Blood, véhicule de courtoisie prêté par l’Imperium après le carambolage de Signus Prime. Lorsque St Martin décide enfin de mettre un point final à sa nouvelle, on apprend tout de même que si Sanguinius s’est montré aussi assidu dans ses discussions avec Jehoel au cours des décennies passées, c’est parce qu’il considérait que ce dernier était l’un des Blood Angels les plus bloodangeliques de la Légion, et pouvait ainsi se contempler à sa guise dans son interlocuteur. Un peu égocentrique le garçon, tout de même. Le rideau tombe sur la scène après que Jehoel ait montré à son pôpa la représentation idéalisée de Terra qu’il a réalisée avec de la pâte de verre, ce qui lui vaut les félicitations (enfin !) du jury, et que l’Ange ait balancé la remarque à connotation fataliste de rigueur, davantage pour le bénéfice du lecteur que pour celui de son fiston. Si jeunesse savait…

1 : À l’exception notable de la danse classique, après que le Vénérable Neolardon ait failli écraser Sanguinius en passant à travers le plancher du gymnase à la suite d’un saut carpé mal négocié.

AVIS :

Je placerais ce ‘Better Angels’ dans le prolongement de ‘Death of a Siversmith’/’Mort d’un Orfèvre’ (Graham McNeill), et pas seulement parce qu’il met en scène un protagoniste très porté sur les arts plastiques. On retrouve en effet, et surtout, dans cette nouvelle la volonté assumée de l’auteur de surprendre son public en livrant une histoire s’écartant largement du bolter porn qui est la norme de l’Hérésie d’Horus. Et, là encore, le résultat penche davantage vers l’exercice de style un brin forcé que vers la réussite incontestable. Ou peut-être n’ai-je pas lu assez sur Sanguinius et les Blood Angels pour tirer la substantifique mehoelle de ce texte ? C’est bien possible. Toujours est il que je sors du studio du Primarque à plumes un peu circonspect sur la valeur de cette soumission, qui aurait pu, pour reprendre son titre, être bien meilleure.

The Sinew of War – D. Hinks :

INTRIGUE :

Sur Macragge comme sur Terra, bien des millénaires plus tôt, la vile populace s’est soulevée contre ses justes et bienveillants maîtres, provoquant émeutes, massacres, feux de poubelle et occupations de ronds-points, tous crimes abominables mais heureusement sévèrement punis par les forces de l’ordre. Et en termes de répression policière, la capitale des 500 mondes a un avantage de taille et de poids par rapport à notre bonne vieille planète : Roboute Guilliman, génie précoce et baraqué, général visionnaire, humaniste convaincu, et fils adoptif du Consul Konor Guilliman, qui forme avec son collègue Gallan le duumvirat exécutif de l’espèce de république (il y a un sénat aussi) établie sur Macragge City. Occupé en Illyrium à pacifier une bande d’autochtones ayant eu la mauvaise idée de se rebeller contre l’ordre établi, notre héros a raté le début du soulèvement urbain qui a transformé la cité idéale de son enfance en champ de bataille. L’idéaliste, et un brin méprisant, surhomme a bien du mal à comprendre pourquoi diable une partie de l’armée s’est rangée du côté des casseurs, tout ça pour une bête histoire d’argent. C’est bien une réflexion de gosse de riches ça, Roro. Mais il lui faut attendre avant de consigner par écrit ses savantes réflexions sur les causes et les répercussions de ce mouvement social aussi inédit que violent : son père est resté dans la cité et a sans doute été pris pour cible par les fainéants et les sans dents. Il faut lui venir en aide.

Progressant rapidement vers le palais du Consul en distribuant quelques baffes aux mutins au passage, et utilisant son armure de scenarium pour passer entre les balles1, Gui est rejoint en chemin par Gallan, qui est venu lui aussi s’enquérir de la situation de son collègue de bureau. N’hésitant pas à joindre le geste à la parole, le Consul consort est même blessé dans la bagarre, écopant d’une estafilade au biceps pour preuve de son dévouement. Las, les deux compères arrivent trop tard pour sauver Konor (ce qui est triste) et les tapisseries (ce qui est pire). Papa Guilliman a été lâchement égorgé par ses assaillants, l’empêchant de dire adieu à son fils mais surtout de donner le nom des coupables. Bizarrement, il refuse catégoriquement que Roboute s’approche de lui dans ses derniers instants, allant jusqu’à le mettre en joue avec son pistolet pour le maintenir à distance. Le respect des gestes barrières jusqu’à la dernière seconde, on reconnaît bien là la trempe d’un vrai Macraggien. Konor a toutefois un message à faire passer à son fiston avant de mourir pour la patrie : une pièce frappée à l’effigie des deux Consuls de Macragge, et symbolisant le caractère éternel de la république, même en ces heures difficiles. Ou du moins, c’est ce que le cerveau embrouillé de Roboute en déduit, se souvenant d’une leçon de vie mémorable inculquée par son père avec un sesterce du même genre bien des années plus tôt. Sur ces considérations philsophico-fiduciaires, Konor passe de vie à trépas, provoquant une colère noire bleue chez son fils.

Convaincu par Gallan d’aller défendre le Sénat, probablement attaqué lui aussi par les vandales en sandales, Roboute sèche ses larmes et lèche ses armes, avant de se frayer un chemin jusqu’au parlement local en commettant quelques crimes de guerres au passage. On va dire qu’il bénéficiait de circonstances atténuantes. Pendant que Gallan tente d’aller raisonner les sénateurs, qui débattent férocement entre eux du meilleur moyen de châtier les gueux, Guilliman est envoyé se changer au vestiaire, son apparence dépenaillée risquant fort de provoquer des remous contre productifs dans les rangs de l’auguste assemblée. Cet enfilage de toge manque toutefois de tourner court pour le Primarque, qui se fait soudainement attaquer par le préposé aux cabines d’essayage, armé d’un poignard empoisonné. Le nez très fin de Guilliman lui permet de comprendre en un éclair que la même toxine a été utilisée sur Konor, et que c’est pour protéger son fils d’une intoxication involontaire que le Consul mourant l’a empêché d’approcher. Passé l’effet de surprise, l’assassin en puissance ne fait pas longtemps le malin face aux réflexes de mangouste et à la poigne de langouste de notre héros, qui ne parvient cependant pas à lui faire cracher autre chose que des bulles de bave (le bougre retourne son surn contre lui), à commencer par le nom de son commanditaire. Encore un crime crapuleux, c’est dingue ça. Il faudrait vraiment que les pauvres songent à être moins pauvres, ça réglerait beaucoup de problèmes d’un coup. Cette péripétie évacuée, il est temps pour Roboute de rejoindre Gallan sur l’estrade, afin de soutenir le coup d’état salutaire que ce dernier veut initier pour sauver la république…

Début spoiler…Mais, ô surprise, Rob’ est accueilli par un discours très critique de ce galopin de Gallan à l’encontre de son père, taxé de populiste et de socialiste par son homologue, et à l’annonce de son propre assassinat, pour le bien de Macragge. Evidemment, le « hum hum » que jette Guilliman juste après ruine un peu le groove de celui qui aurait bien aimé être empereur, qui se prend les pieds dans le tapis à tenter de justifier son double langage. Pas plus bêtes que la moyenne, les sénateurs comprennent vite que Gallan est le méchant de l’histoire, et qu’il a manigancé ce soulèvement populaire pour se débarrasser de ses rivaux et saisir le pouvoir. Roboute était parvenu à la même conclusion quelques instants auparavant en réalisant que la pièce que lui avait donné son père désignait en fait son meurtrier, puisqu’elle avait le profil de Gallan frappé sur ses deux faces2. Plus démasqué que Donald Trump au milieu d’une épidémie de COVID-19, le félon se fait appréhender par le service de sécurité, après que le noble Guilliman, ayant réalisé que tuer le traître de ses propres mains aurait été certes cathartique, mais contre-productif et contre ses valeurs, ait indiqué qu’il laisserait la justice suivre son cours. Devant tant de légalisme, les sénateurs ne peuvent que jurer allégeance au Primarque, exemple vivant d’une intégration réussie par un immigré méritant. L’histoire est en route pour Roboute…Fin spoiler

1 : Le pouvoir psychique caché de Guilliman est de faire voir flou à ses ennemis. C’est subtil mais très efficace. Ça marche malheureusement moins bien au corps à corps, comme Angron et Fulgrim le constateront.
2 : On pourrait dire qu’il aurait été plus efficace à Konor de simplement pointer du doigt Gallan au moment où lui et Roboute sont arrivés dans la pièce, mais l’histoire se serait terminée un peu brutalement.

AVIS :

Darius Hinks livre la version romancée de l’épisode le plus connu de la jeunesse de Roboute Guilliman (que David Annandale avait mystérieusement choisi d’ignorer dans la novella consacrée au Primarque), et le fait plutôt bien. Certes, si vous connaissez votre fluff, le suspense que l’auteur se donne du mal à entretenir jusqu’au bout de son récit tombe rapidement à l’eau, mais on ne peut pas reprocher à Hinks d’avoir voulu soigner sa sortie, et la relation de confiance qui existait auparavant entre les Guilliman et Gallan est un choix intéressant de sa part, qui peut en partie expliquer pourquoi le futur patron des Ultramarines a tendance à vouloir faire les choses tout seul de son côté. On glane également quelques informations sur la société de Macragge avant son intégration dans l’Imperium, ce qui est de l’ordre du notable. Il y avait sans doute moyen de capitaliser davantage sur cet événement fondateur pour expliquer la suite de l’histoire de Guilliman, voire l’Hérésie, voire le Sombre Imperium, ou, plus simplement, insérer quelques easter eggs saveur ultramarine (notons tout de même la mention faite à Tarasha Euten, Chambellan du Primarque et héroïne de l’audio book ‘Illyrium’ du même auteur) , mais pour une nouvelle de 16 pages, Hinks s’en sort très honorablement, autant sur le plan théorique que pratique.

The Chamber at the End of Memory – J. Swallow :

INTRIGUE :

Comme tous les créatifs peuvent vous le dire, ce sont les derniers moments avant le rendu final qui sont les plus stressants. Et bien que Rogal Dorn ne mérite pas franchement ce qualificatif, il partage néanmoins ce souci du détail et cette tendance au micro-management qui distingue les génies et les pervers narcissiques du reste de la population. Ayant pris son hoverboard gravitationnel et son mécapigeon holographique1 pour inspecter l’avancée des travaux, l’Homme de Pierre corrige et réajuste les milliers de petites variables qu’il est le seul à voir mais dont la victoire dépendra peut-être. Après tout, si Horus tombe des fortifications après avoir glissé sur un gravillon énergétique, la guerre sera tout de même gagnée. Alors qu’il s’approche de l’Investiary, l’amphithéâtre anciennement décoré de 20 statues monumentales de la fratrie impériale, et dont deux des plinthes sont maintenant vides, une explosion attire son attention. Il semblerait que l’une des tours de stockage de la zone ait contenu du nitrate d’ammonium, et pas les précieuses antiquités collectionnées par Malcador le Sigilite, qui avait demandé au Prétorien de Terra de ne pas raser le quartier pour en faire des gravillons (énergétiques), comme il en a la sale habitude. N’écoutant que son statut de protagoniste de nouvelle, Rogal se hâte sur les lieux pour mener sa petite enquête.

Sur place, il constate qu’un début d’incendie a ravagé la façade, et que l’équipe en charge de l’audit/expropriation/démolition a connu une fin horrible et peu commune, les cadavres jonchant l’intérieur du bâtiment semblant avoir été causé par des ondes de choc, des explosions internes ou vaporisations pures et simples de l’individu, ce qui n’est certes pas banal. Pas banale non plus est la sensation persistante et croissante qu’éprouve le Primarque qu’il doit faire demi-tour au fur et à mesure qu’il progresse vers l’épicentre de la catastrophe. Ce mauvais pressentiment n’est pas suffisant pour arrêter la marche (du fils) de l’Empereur, mais les apparitions psioniques (des démons libres de droit, pour faire simple) qui l’attaquent dès qu’il pose le pied dans l’antichambre finale le convainquent de consulter un spécialiste, une fois les fâcheux renvoyés dans le Warp. Et justement, il a une soute pleine d’Archivistes sous scellés en orbite, qui n’attendent que son bon vouloir ou l’arrivée d’Horus pour se rendre utiles2.

Le destin ayant désigné le frère Yored Massak pour prêter main, ou plutôt tête, forte à son Primarque, nous suivons les deux guerriers revenir jusque dans la salle piégée, où les horreurs éthérées re-spawnent avec diligence, pour se faire à nouveau bannir en deux temps trois mouvements par nos héros. Si ces derniers étaient prêts à combattre des ennemis de cette trempe, qui ont fait leur fête aux malheureux larbins ayant eu la mauvaise idée de vouloir faire leur boulot, ils se figent sur place en remarquant les symboles qui marquent les deux gigantesques portes qui terminent le corridor : II et XI

Il s’agit bien entendu d’une référence aux deux Primarques disparus, frappés d’anathème par l’Empereur en personne, mais dont l’éphémère existence reste de notoriété publique au sein des Légions de l’Astartes. Pendant que Dorn se creuse les méninges pour percer ce mystère insondable, Massak parvient finalement à mettre le doigt, ou plutôt la tête, sur le sentiment de déjà perçu qui l’habitait depuis son entrée dans la tour. L’installation psychique de cette dernière a été effectuée par Malcador en personne, l’Archiviste repentant en est certain. Et l’intéressé confirme aussitôt sa déclaration, en arrivant sans crier gare dans la pièce. Ayant envoyé Massak poser des parpaings à l’extérieur pour avoir un peu d’intimité, le Régent de Terra a enfin la possibilité de s’expliquer auprès d’un Rogal Dorn qui sent de manière confuse qu’il s’est fait mindfucker par l’éminence grise dans un passé plus ou moins lointain. Il ne s’explique en effet pas son absence totale de souvenirs de Deuzio et Onzio, alors qu’il dispose d’une mémoire eidétique tout ce qu’il y a de plus primarquielle. Et Malcador d’avouer que c’est bien lui qui est responsable de ce trou de mémoire généralisé, touchant à la fois les Astartes des Légions décapitées (avant qu’ils puissent être réformés et repackagés), mais également les Primarques ayant connu personnellement les fils indignes de Pépé. Mais attention, il avait une bonne raison de le faire, se dépêche-t-il d’ajouter avant de finir tronçonné par l’Homme de Pierre : c’est Dorn et ses frères eux-mêmes qui lui avaient demandé un brainwash pour permettre à l’Imperium de se relever d’une tragédie si terrible qu’elle avait manqué de le mettre à genoux. L’Empereur, comme à son habitude, avait tout vu/su mais n’avait rien dit/fait. Classic MoM move here.

À moitié convaincu par l’explication du Sigilite, qu’il ne peut plus blairer depuis le début de la fortification de Terra, Dorn fronce les sourcils tellement fort que son interlocuteur décide de lui accorder un droit de flashback limité et provisoire sur son passé oublié, afin qu’il puisse se rendre compte par lui-même de la bonne foi du Régent. EVIDEMMENT, le lecteur ne sera pas convié à cette introspection douloureuse, dont les effets se dissipent rapidement mais qui convainc Dorn de la véracité des dires de Malcador, et surtout de la nécessité que ce passé, semble-t-il absolument honteux, de la Grande Croisade ne refasse jamais surface. Lorsqu’il ressort de la tour, il ordonne donc aux équipes venues en renforts de la détruire (plus de gravillons !). De toute façon, Massak avait achevé une copie conforme du bâtiment avant que le sort ne soit rompu par un claquement de doigts de Rogal Dorn, ce n’est donc pas une grande perte d’un point de vue stratégique.

1 : Surtout pour se délecter de le voir ch*er sur les hélotes en contrebas, je pense. Il faut bien trouver un moyen d’évacuer le stress quand on ne boit/fume/joue/prie/couche/rigole pas.
2 : Enfin, plus utiles qu’ils ne le sont à l’heure actuelle, le tricotage d’écharpes pour les soldats impériaux de faction sur les murailles du Palais n’exploitant pas tout le potentiel des Anges de la Mort susnommés.

AVIS :

James Swallow touche à l’un des mystères fluffiques les plus importants du background de l’Hérésie d’Horus dans ce ‘The Chamber…’ et parvient à nous vendre une once de révélations sur la destinée des Primarques disparus comme s’il s’agissait d’une avancée majeure du lore. C’est en tout cas le sentiment qui dominait chez votre serviteur à la fin de la lecture de cette nouvelle, qui contient trop de micro-informations et de sous-entendus sur lesquels gloser à l’infini pour ne pas mériter sa place dans la liste de lecture de tout fanboy/girl revendiqué.e. Mais on n’est certes pas au niveau d’un ‘Legion’ ou d’un ‘Saturnine’ en termes de coup de théâtre, ce qui est somme toute logique pour une histoire au tirage assez confidentiel telle que ‘The Chamber…’. Notons au passage la présence que quelques bouts de fluff « autres » au fil des pages, qu’il s’agisse du Palais Impérial ou de l’armement de Rogal Dorn, ainsi que le retour d’un second couteau souvent employé par Swallow en la personne de Yored Massak (‘La Fuite de l’Eisenstein’, ‘Garro’), et restons-en là.

The Will of the Legion – A. Clark :

INTRIGUE :

The Will of the LegionLa 3ème flotte d’expédition de la Grande Croisade, engagée dans la joyeuse réunification humanitaire de la galaxie désirée par l’Empereur, est tombée dans une embuscade à la sortie d’une rocade warpienne. Assaillis par l’armada destroy mais pléthorique des Driftborn, une civilisation humaine ayant passé quelques millénaires à vivoter dans une ceinture d’astéroïdes en s’adonnant à la récupération et à l’upcycling des épaves passant à portée de leurs cités roches (les ruches, ce sera après le passage à l’âge impérial), les Imperial Fists qui constituent le gros (et le grand) des forces expéditionnaires se font donc un devoir de repousser les piteux abordages de leurs lointains cousins. Nous faisons ainsi la connaissance du Capitaine Hashin Yonnad, de la 39èmeCompagnie Maisonnée d’Inwit, alors qu’il mène une escouade de Breachers, le corps anti-émeutes de sa Légion, dans la purge du Tribune, vaisseau amiral de la flotte impériale. Ayant massacré la plupart des malheureux corsaires ayant croisé sa route, et fait, dans son infinie bonté, prisonniers les autres avant qu’ils ne meurent de froid  dans les coursives extérieures mal isolées du Tribune, Yonnad reçoit une convocation urgente à se rendre à l’autre bout du vaisseau, où il embarque sans tarder dans un Stormbird, en compagnie de ses vétérans… et de Rogal Dorn, rendu très chafouin par la tournure prise par les événements1.

Rendu perplexe par l’absence de briefing quant au déploiement de la force de frappe Astartes que le Primarque emmène à l’assaut de la principale cité ennemie, Yonnad demande respectivement à son boss de bien vouloir partager sa gnose avec ses fistons, afin que ces derniers soient en mesure de mener à bien ses plans. Dorn s’exécute, et indique à ses Légionnaires que leur cible est un dôme stratégiquement important, dont la capture mettra fin au conflit de façon rapide. La moue désapprobatrice (encore plus que d’habitude) qu’il affiche fait cependant rapidement comprendre à Yoyo que les Driftborn ont épuisé la patience, pas très fournie de base, du Primarque, et que ce dernier considère très clairement l’annihilation pure et simple de ces derniers comme une option de travail. Après tout, la mort, autant que le mur, est son métier.

Débarqués en plein cœur du marché aux puces local, les Imperial Fists tracent la route sans trop (trois morts) forcer jusqu’à leur objectif, massacrant l’arrière garde adverse au passage, un Rogal Dorn toujours aussi revêche collé à leur train. Papa se contente en effet de marcher derrière sa marmaille en fronçant très fort les sourcils, observateur plutôt qu’acteur de la sanglante et implacable progression impériale. Une fois le dôme sécurisé, il demande, que dis-je, il orDORNne à ses Techmarines de bidouiller les consoles de l’endroit afin de pouvoir disposer d’un gros bouton (sans doute jaune) qui pourra couper le chauffage et l’air conditionné  l’échelle de la cité entière d’une simple pression, avec des conséquences funestes pour qui ne porterait pas une armure énergétique (ou s’appellerait Marneus Calgar). Trop snob pour se salir les mains, il somme le brave Yonnad de se mettre en position devant le buzzer magique, tandis que lui donne une dernière chance à ses malheureux adversaires de se rallier à l’Imperium. Ayant bien fait comprendre aux Driftborn qu’il avait été bien gentil jusqu’ici, mais qu’il n’avait, en sa qualité d’architecte de la destinée galactique de l’humanité (d’abord) et de décorateur intérieur de l’Empereur (surtout), absolument rien à carrer de leur civilisation minable, il leur donne royalement impérialement quelques instants de réflexion après avoir terminé sa harangue. Assez pour plonger Yonnad dans de profondes considérations éthiques quant à la trop grande facilité qu’il aurait à presser le bouton, et donc à signer l’arrêt de morts de millions d’êtres humains, pas coupables de grand-chose au fond, sur un simple branlement du chef de son Primarque. Fort heureusement pour notre héros philosophe, les Driftborn choisissent sagement de capituler, rendant leur dépressurisation inutile. La nouvelle se termine sur cette victoire décisive de la Team Pépé, qui ne suffit cependant pas à dissiper les doutes du Capitaine Dubious. Béni soit l’esprit…

1: Cela se perçoit dans la manière dont il prononce « connerie ». Et je ne parle pas de son accent chantant de Mareuh-seilleuh.

AVIS :

Petite nouvelle de bonne facture de la part d’Andy Clark, qui donne un peu de profondeur tant à Hashin Yonnad, avant sa sortie de route sur Phall, qu’à Rogal Dorn, qui gagne ici quelques précisions fluffiques qui ne manqueront pas d’intéresser le chaland, en attendant que le Primarque trumpien (build the wall!) ne dispose de son tome dans la série du même nom. Les lecteurs du troisième livre Forge World de l’Hérésie d’Horus apprécieront sans doute également de revoir apparaître les Driftborn du Consus Drift, présentés dans ce même ouvrage il y a quelques années. Narrativement parlant, l’intérêt principal de The Will of the Legion repose toutefois dans ses dernières pages, et la réalisation incrédule et dérangeante par Yonnad de son total endoctrinement à la cause de Dorn, dont il appliquera sans hésiter tous les ordres, même les plus immoraux. Nul doute que Clark voulait faire ressortir par cette réflexion intérieure toute l’ambivalence de l’Hérésie d’Horus, dont beaucoup des combattants se sont retrouvés dans un camp qu’ils n’avaient au final pas vraiment choisi, simplement parce qu’ils s’étaient contentés de suivre l’exemple, presque irrésistible, de leur Primarque. Il réussit bien son coup, et souligne donc de manière convaincante qu’entre « gentils » et « méchants », la ligne est souvent des plus fines.

Skjalds – N. Kyme :

INTRIGUE :

Un monstre rôde dans l’arrière-pays de Fenris, attaquant des villages isolés et massacrant tous leurs habitants, depuis le huskarl sans défense jusqu’au bébé sans peur. Un jeudi normal sur un monde hostile, en quelque sorte, sauf que le monstre en question came to the wrong neighborhood, à savoir celui de Baerelt, Torvur, Ulfvye et Laggenhuf. Ces quatre hardis chasseurs ayant chacun perdu un ou plusieurs êtres chers dans l’attaque de l’innommable et innommée bestiole, ils ont fait le serment de traquer cette dernière et de mettre fin à ses déprédations. Et tant pis pour la biodiversité terrestre fenrissienne, qui se porte parfaitement bien vous pouvez me croire. L’histoire commence alors que notre petite bande est en train d’essayer d’allumer des torches pour y voir quelque chose dans la tempête de neige nocturne qui s’est abattue sur eux. Ce qui est bien le cadet de leurs soucis, car des profondeurs de la toundra jaillit bientôt un mini boss, une draugr.

Cette dernière (car le cadavre desséché et tirant la langue qui fond sur les chasseurs pour leur rouler des gamelles est indubitablement féminin) donne du fil à retordre aux humains, qui finissent toutefois par en venir à bout d’un jet de torche bien placé, mais perdent une lance dans la bataille. Ce qui est presque aussi grave que la mort d’un guerrier, si on écoute le vieux ronchon de service (mais expert en lance, sans doute parce qu’il a le bras fort), Ulfvye. Malgré l’issue heureuse de cette bataille, il ne fait pas de doute pour Baerelt que la draugr n’était qu’une vamp opportuniste, et pas la bête responsable de tous les malheurs de sa communauté. La petite troupe reprend donc sa marche sous un léger crachin (humour), et finit par bivouaquer dans une caverne miraculeusement vide de tout prédateur alpha. Le temps gagné à ne pas avoir à faire la peau à un phacochère laineux ou à un gigagolin est utilement mis à profit pour échanger quelques récits épiques au coin d’un feu de brindilles. Transformés en skjalds pour l’occasion, les compères s’écharpent sur la véridique légende du Russ, l’incarnation de l’hiver fenrissien, considéré par l’un comme un géant à lance de gel, par l’autre comme une tempête de neige douée de raison, par le troisième comme un loup géant qui accompagne les âmes dans l’autre monde, et par le dernier comme un roi. Et comme le gage de cette veillée était manifestement le premier tour de garde pour l’histoire la plus pourrie, c’est Baerelt le barbant qui s’y colle.

Le lendemain, les chasseurs se remettent en route et parviennent à un village qui a reçu la visite du monstre il y a peu de temps, comme les cadavres massacrés et à moitié boulottés des habitants en témoignent. S’étant rendus compte que quelque chose ou quelqu’un était toujours présent sur place, nos héros convergent sur la salle commune de la bourgade, qu’ils trouvent en effet occupées par un animal gigantesque, recouvert d’une fourrure hirsute, munis de crocs acérés et dégageant une odeur abominable. Vous l’avez compris, c’est Leman Russ en personne (qui se fait appeler ici Jotun, pour préserver son anonymat sans doute) qui fait son apparition dans l’histoire, et après avoir indiqué aux traqueurs tétanisés par son aura primarquielle qu’il est également sur la piste du gros gibier, accepte que ces derniers le suivent dans son pistage. Il a pour cela une méthode infaillible : suivre les loups.

Sortis du village à la suite de leur nouveau copain, Baerelt et Cie ne tardent pas à se rendre compte que si les loups peuvent être suivis, ils peuvent également suivre. Aussi, lorsqu’une meute de six herravargr (des loups géants) encercle le club des cinq au sommet d’une falaise, l’ambiance retombe un peu. Le combat qui s’en suit se termine par une nouvelle victoire de l’équipe bipède, en grande partie grâce à l’intervention efficace de Jotun, mais Ulfvye est gravement mordillé dans la bagarre, ce qui ralentit la progression de ses camarades. Comme la veille au soir, les chasseurs passent le temps en devisant au coin du feu et c’est au tour de Jojo de donner sa version du mythe de Russ, qu’il connaît sans doute mieux que la moyenne. Et en toute modestie, il choisit de raconter son histoire (sans dire qu’il s’agit de lui, évidemment), celle de l’enfant sauvage élevé par les loups et adopté par un roi de Fenris, avant que l’Empereur ne vienne plomber l’ambiance d’un petit gueuleton entre copains, on connait la suite.

Le jour suivant, la traque reprend et amène les chasseurs jusque dans une forêt, où ils croisent un Wulfen bien amoché sur le bord du sentier. Il ne fait aucun doute que le lycanthrope a combattu la bête (et a perdu), mais plutôt que de venir en aide à son fiston poilu, Jotun continue sa route en laissant le wyrd du comateux faire son office. Un peu plus loin, c’est le grand ménage parmi les suiveurs du Primarque, Ulfvye décédant d’une hémorragie interne, et Torvur et Laggenhuf ratant leur test de commandement lorsqu’ils entendent le monstre faire sa balance en préparation du combat final. Ne reste donc plus que Baerelt pour sauver l’honneur des péquenauds de Fenris, ce qu’il fait en partant à la poursuite de Jotun, qui n’a pas attendu de voir qui lui collait au train pour régler ses comptes avec le monstre de la pampa…

Début spoiler…Ou plutôt, les monstres. Car c’était un bien un couple d’ours géants avec des bois de cerf, ou beer en langage scientifique, qui était responsable de tout ce tintouin. N’étant venu qu’avec une hache même pas énergétique pour mieux se fondre dans la masse, Leman se retrouve rapidement dans le mal. Et même si l’andouille parvient à saisir un de ses adversaires par les andouillers, dans le but de lui tordre le cou jusqu’à ce que mort s’en suive, cette manœuvre n’a de chances d’aboutir que si elle n’est pas interrompue. Il faut donc que quelqu’un distraie Maman Ours jusqu’à ce que Boucles d’Or ait fini le sale boulot. Et ce quelqu’un, ça ne peut être évidemment que Baerelt. Enfin, pendant à peu près trois secondes, car notre héros est ensuite rejoint par le Wulfen croisé un peu plus tôt, assez remis de ses émotions pour demander une revanche à ses vainqueurs. Bilan de cette deuxième manche : une nouvelle victoire de la grande ourse sur Mini Loup, qui finit la baston en deux morceaux, mais de très peu. La bête fauve s’écroule en effet quelques instants plus tard, cannellisée à titre posthume par le Space Wolves déchu1. En arrière-plan, Jotun avait réussi à décoller les cervicales à l’autre affreux, ce qui met fin aux déprédations de Baloo et Baloote. Notre histoire se termine sur l’arrivée d’un Thunderhawk, venu raccompagner le patron vers le Croc où une mission importante l’attend sans aucun doute. On ne peut pas passer sa vie à se ressourcer dans la nature quand on est un Primarque, et c’est bien dommage…Fin spoiler

1 : Ce qui est finalement un destin enviable pour un membre du rout, puisque cela fait ch*er les Dark Angels.

AVIS :

Nick Kyme revient à ses anciennes et velues amours (les Salamanders étant plutôt écailleux, comme chacun sait), avec ce récit fenrissien de facture classique. Fort heureusement pour nous, l’auteur a progressé, ou s’est davantage intéressé à son sujet, depuis l’époque héroïque de ‘Thunder from Fenris’ et ce ‘Skjalds‘ s’avère être une lecture plaisante… au premier degré1. Si l’intégration de cette histoire dans l’anthologie ‘Blood of the Emperor‘ retire évidemment tout suspens sur la véritable identité de Jotun, cette absence de surprise est compensée par d’autres éléments intéressants, à commencer par une intrigue plus surprenante (là encore, dans le bon sens du terme) qu’à l’accoutumée pour une nouvelle de Kyme: le premier accrochage avec le.a draugr, dont on ne sait pas s’iel est le monstre traqué par les chasseurs constitue ainsi une sorte de prélude sympathique au reste du récit. Le choix de l’auteur de narrer son récit avec une perspective « humaine » lui permet également de glisser quelques infos sur la manière dont Russ considère l’Empereur, ses frères, sa Légion et son rôle dans l’Impérium, à la manière de confidences échangées sans arrière-pensées, pour le seul bénéfice du lecteur. Enfin, cette nouvelle n’est pas avare en fluff (pas moins de quatre légendes différentes sur le Russ, tout de même) ni en fragments de lore Space Wolves: je pense particulièrement aux considérations du Primarque sur les Wulfens, qui sont à replacer dans la saga du rout2, mais également au rôle proprement héroïque (au sens grec antique du terme) que Leman Russ choisit d’occuper dans la culture de Fenris, en tant que guerrier solitaire accomplissant des exploits pour le compte d’un peuple qui ignore sa véritable identité. Bref, une nouvelle qui vaut tout à fait le détour pour qui s’intéresse aux mythes et légendes du Vlka Fenryka, et un pas accompli par le skjald Nick Kyme sur le chemin de sa rédemption littéraire.

1‘Thunder from Fenris’ valant également le détour, mais pas d’une façon dont son auteur serait fier.
2Avant ou après la campagne de Dulan, pendant laquelle les Space Wolves apprennent que leur père savait pour les Wulfens? Si l’absence de réaction des deux Astartes qui servent de Kaptains à leur Primarque devant le cadavre de l’homme loup à la fin de l’histoire n’est pas un bête oubli de Kyme, ce serait plutôt la deuxième option qui tient la corde.

Champion of Oaths – J. French :

INTRIGUE :

Il y a des entretiens d’embauche plus facile que d’autres. Alors que la majorité d’entre nous a juste à savoir nommer trois qualités et trois défauts pour convaincre le recruteur, Sigismund des Imperial Fists va vraiment devoir donner de sa personne pour obtenir son dream job, lui. Notre homme candidate pour devenir le Maître du Temple, fonction honorifique s’il en est au sein de la VIIème Légion puisque les Templiers en question gardent le… temple du Phalanx où les Frères de Bataille jurent fidélité à l’Empereur et à Rogal Dorn. Pour obtenir ce poste convoité, l’impétrant doit vaincre en combat singulier la totalité de ses camarades, soit 199 Astartes vétérans à se farcir les uns après les autres. Même pour un guerrier de la trempe de Ziggy Jaune d’Œuf, l’épreuve est difficile, et notre héros encaisse les coups et les bosses au fur et à mesure que les duels se succèdent.

Cet affrontement au long cours est entrecoupé de flashbacks nous renseignant sur la trajectoire de Sigismund, depuis son enfance malheureuse dans les camps de réfugiés de Turquie (rebaptisée plateau ionien en M31), où il vit sa protectrice se faire tabasser à mort par une bande de wesh sanguinaires, jusqu’à son entraînement sous la conduite du maître d’armes Appius, alors qu’il n’était encore qu’un jeune et prometteur jaunard. L’occasion pour nous d’en apprendre plus sur la motivation profonde de Sigismund, qui va toujours de l’avant parce qu’il sait que les Space Marines ont le devoir de se battre à la place de ceux qui ne le peuvent pas. C’est beau, c’est noble, c’est grand, c’est corporate. Ce petit gars aurait pu faire Miss France, s’il n’avait pas choisi une autre voie.

Retour au Temple, et au boss de fin de la série infernale du Zig. Après avoir fisté sans répit et écopé de quelques bleus au passage, ne reste plus que ce bon vieil Appius en personne à maraver. Le problème, c’est que le vétéran a assez mal vieilli, et s’est fait enfermer dans un Dreadnought depuis l’époque où il refaisait le portrait de son padawan à grands coups d’espadon. Le combat n’est pas des plus équitables, mais les Imperial Fists sont du genre exigeant. Malgré un coup de moins bien passager, et un revers de bouclier énergétique en pleine face, Sigismund vient à bout de cet ultime adversaire en lui coupant le câble (ce qui est cruel quand on est confiné à un réservoir de liquide amiotique, tout de même). Félicité par Rogal Dorn en personne, qui était là incognito pour suivre l’épreuve pratique de son fiston favori, Sigismund devient officiellement le Maître des Serments, et reçoit l’épée de fonction qui va bien en reconnaissance de son nouveau statut. Un petit passage à l’infirmerie pour mettre de l’arnica (eh, c’est jaune aussi) sera sans doute nécessaire après cela…

AVIS :

John French se fait plaisir en retraçant en quelques pages bien senties la trajectoire de l’un des personnages les plus marquants des Imperial Fists pendant la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus (et même après cela), depuis ses humbles débuts jusqu’à sa prise de fonction comme Enfant de Juron. On peut y voir un avant-goût et un condensé du roman qu’il écrira un peu plus tard sur le même personnage, car tout est déjà bien en place à la conclusion de ces douze pages. L’exemple-type de la petite nouvelle à vocation fluffique, sans ambition particulière en matière d’intrigue mais très satisfaisante tout de même pour les amoureux de background, et grâce à la maîtrise consommée que l’auteur a de son sujet. Bref, un incontournable si vous êtes fan des Imperial Fists et/ou des Black Templars, ou tout simplement de l’Hérésie d’Horus en tant que telle.

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Voilà qui termine cette revue de ‘Loyal Sons, une anthologie à l’image de la plupart des recueils de nouvelles de la Black Library, c’est à dire alternant le bon et le moins bon. La balance étant en faveur du qualitatif, pour autant que je puisse le dire, je ne déconseille pas l’acquisition de cet ouvrage, mais ne vous ruez pas dessus en pensant que les personnages mythiques qui y sont décrits sont la garantie d’histoires de meilleure facture que celles que l’on peut lire habituellement dans des pages siglées BL. Ce serait aller à l’encontre d’une grosse désillusion… A la prochaine pour de nouvelles chroniques irrévérencieuses au possible!

 

SCIONS OF THE EMPEROR [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette critique de ‘Scions of the Emperor’, recueil consacré par la Black Library aux pérégrinations des fils de Pépé. Cet ouvrage est le deuxième du genre, et fait suite à ‘Sons of the Emperor’, que la logique aurait sans doute voulu que je couvre en premier. Son tour viendra, n’en doutez pas un instant. Pour l’heure, la sortie en format numérique de cette anthologie, originellement distribuée uniquement sous format papier et dans des conventions de la Black Library, constituait une trop belle occasion de me replonger dans l’Hérésie d’Horus pour ne pas la saisir. Faisant fi du prix significatif de ce petit recueil (15€ pour 116 pages utiles, c’est un ratio famélique), j’ai donc placé ce dernier en haut de ma liste de lecture des vacances, en espérant y trouver quelques informations pas piqués des vers sur la marmaille impériale.

Scions of the Emperor (HH)

Au menu de ce ‘Scions…’, huit nouvelles signées de la main d’auteurs bien connus de l’amateur de GW-Fiction, même si certains ne pouvaient pas justifier d’une expérience conséquente en termes d’Hérésie (David Guymer, Ian St Martin), voire entraient carrément dans la carrière avec cette soumission (Darius Hinks). Comme l’a dit l’Empereur à Roboute Guilliman lors de la troisième mi-temps du Siège de Terra, mieux vaut tard que jamais1. On retrouve également des vétérans/revenants du 31ème millénaire, en la personne de David Annandale, Guy Haley, Gav Thorpe, James Swallow et Chris Wraight. Reste à découvrir ce que ces sacripants de Primarques ont fait de leur temps libre, pendant que leur Pépé avait le dos tourné…

1 : Il est probable que cette remarque soit apocryphe et mise dans la bouche de Pépé (en même temps que la canule de son intubation) par Guilliman lui-même, dont la tendance à réécrire l’histoire pour se donner le beau rôle n’est plus à démontrer.

Scions of the Emperor

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Canticle – D. Guymer :

INTRIGUE :

On a tous nos surnoms, plus ou moins glorieux, et Ferrus Manus ne fait pas exception. Bien avant d’être baptisé pognes d’acier (en latin haut gothique pour faire plus classe), notre héros a ainsi été appelé Numerodis (l’Empereur), Cataclysme (les géants des tempêtes du Pinacle de Karaashi), La Finalité (des morts-vivants quelconques), Rehew Netjer, soit le Fils de l’Homme (les Necrons), Mon très Chair (les despotes fragmentés du Subliminat), et Empafé de première (le type auquel il a piqué sa place sur le parking du Monoprix de Medusa). Pour sa part, et après avoir malencontreusement libéré Asimoth sur sa planète d’adoption peu de temps après son arrivée remarquée sur cette dernière et s’être révélé trop faiblard pour ramener la bestiole dans son enclos, le Primarque des Iron Hands s’est donné le nom et la vocation de Chasseur, ayant décidé de réparer sa bévue en traquant le wyrm d’argent à travers les paysages bucoliques de Medusa.

Ces premières années sont également l’occasion pour Ferrus Manus de faire ses premières armes, dans tous les sens du terme. On apprend ainsi qu’il a rencontré quelques difficultés sur sa route, d’ordre robotique, semi-robotique et infernal, ce qui donne une idée de la très riche « biodiversité » de la planète sur laquelle il a fait son trou. Rien de très mémorable cependant pour FM (et pour Guymer), dont l’équipement consiste en une cuirasse d’adamantium upcyclé et une bardiche bricolée à partir des dépouilles fumantes de ses malheureux adversaires biomécaniques. On apprend également que ce gentil garçon est capable de subsister sur un régime composé de sable, minéraux et métaux1, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Poursuivant sans relâche sa proie insaisissable, Ferrus finit tout de même par rencontrer des membres de son espèce, d’abord sous forme de cadavres entourant l’épave d’un camping-car Medusan. Curieux d’en apprendre plus sur ces étrangers qui lui ressemblent tant, et soucieux de récupérer un peu de matos utile dans la boîte à gants du véhicule éventré avant que tous les charognards du coin ne débarquent, le jeune Primarque se fraie un chemin jusqu’à la chambre forte du Sandcrawler, négociant au passage dix zombies cyborgs (zomborgs ?) occupés à mastiquer les cartes mères et câbles jack leur étant tombé sous la pince. Ce régime majoritairement électrovore ne les empêche cependant pas de sauter sur l’aventurier pour lui faire les poches dès qu’il s’approche un peu trop, forçant notre héros à faire montre de force autant que de ruse.

Une fois parvenu dans la salle des coffres, Ferrus a la surprise d’être mis en joue par une rescapée de l’embuscade ayant scellé le destin du véhicule et de ses occupants. Guère impressionné par la pétoire plasmique que son interlocutrice lui pointe sur le torse, le Chasseur refuse l’offre qui lui est faite par cette dernière de rejoindre son clan, arguant qu’il a encore une opération de vermifuge à accomplir, et un véritable nom à obtenir, avant de pouvoir faire son entrée dans le monde et participer au Bal des Débutant.e.s de Medusa. La suite de l’histoire de Chéri FM, si elle est connue, sera toutefois narrée dans un autre cantique que celui-ci.

1 : Avec quelques protéines et lipides occasionnelles de temps à autres, par exemple lorsqu’il croise la route d’une escouade de Dépeceurs sur leur 31. On peut donc classer Ferrus Manus dans la sous-catégorie des Primarques cannibales, avec Konrad Curze et Sanguinius.

AVIS :

On a plus l’impression d’un épisode pilote pour une série consacrée à l’enfance de Ferrus Manus que d’une nouvelle indépendante à la lecture de ce ‘Canticle’. Guymer passe en effet la majorité de ses pages à présenter de façon intrigante le jeune Primarque et sa planète, dont on aimerait bien apprendre davantage à la fin de son récit. L’intrigue semble avoir été volontairement tronquée pour permettre à l’auteur de la reprendre au cours de l’épisode suivant, qui n’a, à ma connaissance, pas été publié à ce jour. Peut-être faut-il creuser du côté de la novella1 que David Guymer a consacré à son héros pour mettre en perspective cette nouvelle ? Ou plutôt dans le ‘Voice of Mars’ du même auteur, où le Cantique des Voyages occupe une place importante ? En tous cas, si elle n’est certes pas désagréable à lire, et livre quelques éléments de fluff sur le plus moyen des fils de l’Empereur, cette histoire aurait gagné à se conclure de façon plus définitive.

1 : ‘Ferrus Manus : La Gorgone de Medusa’.

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The Verdict of the Scythe – D. Annandale :

INTRIGUE :

Nous retrouvons Mortarion, le plus sec (dans tous les sens du terme) des Primarques pendant la Grande Croisade, alors que la flotte d’expédition qu’il mène approche de la planète Absyrthus en mode bulldozer, perforant comme qui rigole – si Morty savait ce que cela veut dire – les défenses orbitales des locaux et se préparant à larguer son contingent de Death Guards sur les positions stratégiques de ce théâtre d’opération. Pour une fois, cette brutalité, pour laquelle sa Légion est fameuse, semble être justifiée. La civilisation d’Absyrthus est en effet similaire à celle de Barbarus, en cela qu’elle est gouvernée par une caste de sorciers1, ce qui a le don de mettre le Primarque psychophobe en rogne. Son plan pour remédier à ce problème fâcheux et mettre ce monde en conformité avec le cahier des charges impérial est aussi simple qu’élégant que direct : envoyer une barge Astartes s’écraser sur le QG adverse, ici la capitale planétaire, Temnis, pour décapiter (et aplatir) sa chaîne de commandement et frapper l’ennemi au cœur. Il a déjà employé cette technique, sans doute piquée aux Orks, avec un succès indéniable mais un peu trop sanglant pour ses fragiles de frères, lors de la campagne de Galaspar, achevée en un temps record par l’envoi d’un vaisseau spatial dans sa cité ruche principale. Un vieux fond de compassion qu’il ne se savait pas avoir pousse toutefois Mortarion à limiter la casse sur Absyrthus, qui ne perdra que son spatioport sous les patins blindés du Fourth Horseman, avant de demander grâce quelques minutes plus tard. Toujours d’humeur miséricurieuse (ça veut dire ce que ça veut dire), le Faucheur masqué accepte la réédition sans condition du camp d’en face au lieu d’ordonner le massacre complet des habitants de Temnis, comme ses officiers, à commencer par ce fourbe de Typhon Calas, s’y attendaient.

Il s’avère en effet que Mortarion est travaillé par une vague pulsion empathique, et s’interroge sur la possibilité, même mineure, d’apporter la paix et l’ordre à la galaxie autrement qu’en massacrant les mécontents. Absyrthus fera donc figure de test grandeur nature, et notre ombrageux et ombragé héros accepte avec stoïcisme de se plier aux formalités organisées par la reine déposée Cirkesce après la fin des combats. Typhon, entraîné par son boss dans le traquenard absolu que constitue un dîner diplomatique, questionne ouvertement le bien-fondé de la décision du Primarque, arguant que si la Légion s’appelle DEATH Guard, et pas la IDAWYBRYO2 Guard, c’est bien pour une raison. Habitué à se faire bolosser par son sous-fifre dans les écrits de James Swallow, Morty ne trouve pas grand-chose à dire pour justifier sa magnanimité soudaine, et décide d’aller prendre l’air pour rencontrer les vrais gens d’Absyrthus, et ainsi se faire une opinion définitive sur la situation. Laissant le palais derrière lui et ses Deathshrouds à longue portée (49 pas exactement), sa (future) Majesté des Mouches s’enfonce dans le dédale de la vieille ville…

Début spoiler…Et là, cela tourne rapidement au drame. Les oreilles sensibles de Mortarion finissent en effet par détecter les bruits révélateurs d’un rituel chaotique, ce qu’il a formellement interdit aux nouveaux sujets de l’Imperium. On pourrait arguer que c’est un peu chien de sa part de se formaliser de la persistance d’une pratique traditionnelle bannie il y a moins d’une journée, mais le Primarque acquiert bientôt la certitude que la vieille femme qui fait couiner son brasero au cœur de la casbah de Temnis EN A FAIT EXPRÈS POUR LE FAIRE CHIER ce qui est un crime impardonnable. Pire, sa rapide entrevue avec la mégère décomplexée, et son retour jusqu’au palais de Cirkesce, le convainquent que les Absyrthusiens sont tous des hypocrites, faisant semblant de se plier aux consignes des envoyés de l’Empereur le temps que ces derniers repartent purger les étoiles.

Devant ce constat accablant, et peut-être un peu précipité, le sort de la planète est scellé. Mortarion siffle la fin de la récré, arrachant Typhon au buffet froid que le Premier Capitaine était en train de nettoyer avec lenteur et méthode3, repart en orbite et décrète l’Exterminatus pendant que ‘Won’t Get Fooled Again’ des Who est envoyé à fond les ballons par l’auto radio du Fourth Horseman. Ce sera désormais le seul verdict que délivrera la Death Guard à ses adversaires, en faisant la Légion la plus efficace de la Grande Croisade pour un temps…Fin spoiler

1 : Autre point commun avec la planète natale de Mortarion (et le Finistère Nord) un taux d’ensoleillement inférieur à 1%.
: I Don’t Agree With You But Respect Your Opinion.
3 : On le sait peut, mais c’est de là que vient la règle spéciale de la Death Guard.

AVIS :

David Annandale montre avec ‘The Verdict of the Scythe’ qu’il a parfaitement compris les modalités de l’exercice représenté par une nouvelle Primarchs, soit un récit mettant en scène un épisode marquant de la vie de son sujet, et éclairant le lecteur sur les raisons ayant poussé ce dernier à devenir la figure qu’il est dans le fluff. En 12 pages bien pesées, Annandale répond ainsi à la question Orangina Rouge (mais pourquoi est-il si méchant) pour Mortarion, brossant le portrait d’un Primarque dont le caractère impitoyable a été, à un certain niveau, causé/renforcé par un événement particulier l’ayant détourné pour de bon de la voie du Bisounours. On peut trouver l’histoire et la justification qu’elle apporte à la rigidité morale de son protagoniste simpliste, mais force est de reconnaître à l’auteur qu’il a rempli son contrat de façon satisfaisante, même si pas extraordinaire.

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A Game of Opposites – G. Haley :

INTRIGUE :

C’est malheureusement très peu traité dans les livres d’histoire impériaux, mais la bataille de Beta Garmon, aussi connue sous le nom de casse (de Titans) du millénaire, ne s’est pas tenue du jour au lendemain. Cette rencontre décisive entre renégats et loyalistes, et les milliards de morts qui en ont découlé, n’a été rendue possible que par le dévouement et le travail de l’ombre de Légions de sous-fifres, comme l’histoire dont il est question ici s’en fait écho. Bienvenue donc à la surface d’Epsilon Garmon II, planète du cluster garmonien que les Iron Warriors souhaiteraient fortifier pour ralentir l’arrivée prochaine de Guilliman et de ses hordes de Schtroumpfs. Le conditionnel est ici de mise car les efforts de terrassement des hommes de fer se sont jusqu’ici faits contrecarrer par les manœuvres destructrices d’une petite force de White Scars. Peu familiers des techniques de hit and run de leurs cousins des steppes, les fils de Perturabo sont perturbés par cette campagne d’un genre nouveau, où ils arrivent toujours trop tard pour empêcher les Space Bikers de sévir.

Fort heureusement, le Maître de Forge Xyrokles, affublé de son larbin et souffre douleur Phideark, ainsi que d’une ribambelle de Capitaines dont je vous épargnerai les noms, a un plan machiavélique pour venir à bout du péril jaune blanc à éclair rouge. Ayant récupéré dans un campement abandonné par ses ennemis quelques bouquins philosophiques signés de la main même de Jaghatai Khan et remplis d’aphorismes aussi profonds que « La taupe ne voit pas le vol de l’éléphant », « Pourquoi rester debout quand on peut s’asseoir » ou « Plus il y a de fous, moins il y a de riz », Xyrokles a tellement bûché sa philo1 qu’il est certain de pouvoir prendre les White Scars à leur propre piège, en réalisant un coup de billard à IV bandes à base de feintes, de retraites et d’embuscades tellement complexes que la majorité de ses sbires n’y blaire que dalle. Lorsque vient enfin le jour le plus long, le Khan Ishigu emmène ses motards énergétiques faire une petite virée dans un avant poste renégat, sans se doute un instant que ses minutes sont comptées.

Et en effet, le plan de Xyrokles se déroule comme sur des roulettes, la colonne blindée qu’il a envoyé leurrer les loyalistes au moment où ils commencent à se replier en bon ordre se révélant être un extra trop tentant pour qu’Ishigu et Cie résistent à la tentation d’y planter leurs pneus. Ce détour est toutefois lourd de conséquences pour les White Scars, qui se font surprendre par une contre-attaque vigoureuse de la part des Iron Warriors, et canalisés dans un goulet étroit débouchant sur la ligne de blindés du Maître de Forge, qui n’a plus qu’à donner l’ordre d’ouvrir le feu pour régler une fois pour toutes leur compte aux scarifiés d’en face…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur la légendaire flexibilité tactique des fils du Khan, qui avaient tout planifié depuis le début et cachés également une réserve mobile pour surprendre l’adversaire. Confrontés à une force anti-chars conséquente et bénéficiant de l’effet de surprise, Xyrokles et ses hommes ne font pas long feu (c’est la vieille histoire de l’artilleur artillé). L’honneur est toutefois sauf pour ce dernier, puisqu’il s’aperçoit après avoir été fait prisonnier que c’était Jaghatai Khan en personne qui était aux commandes dans le camp d’en face. S’en suit un échange d’amabilités qui nous permet d’apprendre que le Khan se tamponne le samovar avec la vérité impériale, qu’il considère poliment comme un avis parmi d’autres. Stupeur chez Xyrokles, qui en surhomme de principe, pensait que tous les loyalistes adhéraient scrupuleusement au dogme de Pépé. Il emportera toutefois ce secret dans la tombe, que son généreux vainqueur lui accorde en récompense de ses méritants efforts de réflexion, Jaggie Chan lui dévissant les cervicales d’un tour de main à la fin de leur échange. C’est qu’il a du pain sur la planche, et un retour sur Terra à préparer…Fin spoiler

1 : Ce qui est somme toute logique pour un grec ancien.

AVIS :

Je suis partagé sur la valeur de ce ‘A Game of Opposites’, qui comporte des éléments positifs comme négatifs. Pour commencer par ce qui ne fâche pas, j’ai apprécié le choix de Haley de donner une dimension, si ce n’est comique, au moins caustique, à ses Iron Warriors, qui font ainsi mentir leur réputation de guerriers prenant tout au premier degré. La dynamique entre Xyrokles et Phideark est particulièrement savoureuse, le second encaissant sans broncher toutes les punchlines que son supérieur lui balance à la tête. Dommage que le destin tragique du Coluche d’Olympia nous prive d’autres saillies drolatiques de sa part pour la suite de l’Hérésie. Cette nouvelle est également intéressante d’un point de vue fluffique, car elle donne à voir un Jaghatai Khan d’un pragmatisme assumé et presque hérétique, ayant pris parti pour son Père mais loin de se ranger à toutes ses vues, y compris sur des sujets aussi sensibles que la religion (il croit en la réincarnation). D’un autre côté, ‘A Game of Opposites’ pêche franchement pas son manque de suspens et son déroulement sans surprise. Car le résumé ci-dessus ne suit pas exactement le récit de Haley, qui choisit de révéler la présence du Khan au côté d’Ishigu dès le premier tiers de la nouvelle, ce qui condamne d’office le stratagème de Xyrokles à l’échec1. Le retournement de situation final et la victoire des White Scars sont donc aussi attendus que l’heure de la pause syndicale dans un guichet de poste, ce qui peut blaser le lecteur (en tout cas, ça a été mon cas). En conclusion, pas le meilleur texte de Guy Haley, mais pas désagréable ou inutile pour autant.

1 : Il n’y a que John French qui fait battre un Primarque par un Space Marine (‘The Crimson Fist’).

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Better Angels – I. St Martin :

INTRIGUE :

Les Légions Space Marines sont un peu comme les filières post bac : il y en a pour tous les goûts et tous les niveaux. Si les impétrants ayant de la suite dans les idées et la volonté de faire carrière se rabattront sur des spécialisations ternes mais assurant la sécurité de l’emploi (BTS Gestion avec les Ultramarines, Bac Pro travaux publics avec les Imperial Fists ou les Iron Warriors, CAP Esthétique avec les Emperor’s Children…), les plus aventureux tenteront leur chance dans des cursus plus pointus, à leurs risques et périls. C’est ainsi que l’Empereur se retrouva avec des cohortes de philosophes désagrégés (Thousand Sons), théologiens en déshérence (Word Bearers), et vétérinaires ayant raté leur concours d’entrée (Space Wolves), qu’il dût bien recaser à droite et à gauche pour éviter la crise. Enfin, pour un temps. Mais, parmi tout l’Astartes, aucune Légion n’égale les Blood Angels en termes de réputation. Si on appelle les fils de Sanguinius (derrière ses ailes) des poètes, des peintres ou des danseuses, c’est pour une bonne raison : le Primarque exige que tout le monde pratique une discipline artistique, depuis le plus humble novice jusqu’au plus ancien des Dreadnoughts1. Notre héros, que nous allons suivre depuis le début de sa carrière jusqu’à l’arrivée de la flotte de la IXème en orbite de Terra, peu de temps avant le début du siège, ne fait pas exception. Jehoel (il faut croire que Joël était déjà pris) s’est ainsi spécialisé dans la verrerie, ce qui lui a attiré l’intérêt et le mentorat de son père génétique, souvent présent lorsque le souffleur fait parler la poudre le sable.

Ces rencontres ponctuelles mais fréquentes, si elles permettent aux deux surhommes de discuter technique et philosophie, amènent surtout le lecteur à suivre en filigrane la fin de la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus du point de vue d’un Primarque et d’une Légion particulièrement éprouvés par la traîtrise du Maître de Guerre, et le déclenchement de la baalédiction des fils de Malle, ou l’inverse. Finies donc les évocations de la prochaine reconversion des légionnaires en portraitistes et potiers une fois la galaxie conquise, et bonjour les sculptures de démons réalisées dans un état second, au grand déplaisir de Sanguinius – qui passe la nouvelle à critiquer Jehoel, ceci dit. Adieu aux riches galeries du Red Tear, et bonjour à la décoration minimaliste du Convenant of Blood, véhicule de courtoisie prêté par l’Imperium après le carambolage de Signus Prime. Lorsque St Martin décide enfin de mettre un point final à sa nouvelle, on apprend tout de même que si Sanguinius s’est montré aussi assidu dans ses discussions avec Jehoel au cours des décennies passées, c’est parce qu’il considérait que ce dernier était l’un des Blood Angels les plus bloodangeliques de la Légion, et pouvait ainsi se contempler à sa guise dans son interlocuteur. Un peu égocentrique le garçon, tout de même. Le rideau tombe sur la scène après que Jehoel ait montré à son pôpa la représentation idéalisée de Terra qu’il a réalisée avec de la pâte de verre, ce qui lui vaut les félicitations (enfin !) du jury, et que l’Ange ait balancé la remarque à connotation fataliste de rigueur, davantage pour le bénéfice du lecteur que pour celui de son fiston. Si jeunesse savait…

1 : À l’exception notable de la danse classique, après que le Vénérable Neolardon ait failli écraser Sanguinius en passant à travers le plancher du gymnase à la suite d’un saut carpé mal négocié.

AVIS :

Je placerais ce ‘Better Angels’ dans le prolongement de ‘Death of a Siversmith’/’Mort d’un Orfèvre’ (Graham McNeill), et pas seulement parce qu’il met en scène un protagoniste très porté sur les arts plastiques. On retrouve en effet, et surtout, dans cette nouvelle la volonté assumée de l’auteur de surprendre son public en livrant une histoire s’écartant largement du bolter porn qui est la norme de l’Hérésie d’Horus. Et, là encore, le résultat penche davantage vers l’exercice de style un brin forcé que vers la réussite incontestable. Ou peut-être n’ai-je pas lu assez sur Sanguinius et les Blood Angels pour tirer la substantifique mehoelle de ce texte ? C’est bien possible. Toujours est il que je sors du studio du Primarque à plumes un peu circonspect sur la valeur de cette soumission, qui aurait pu, pour reprendre son titre, être bien meilleure.

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The Conqueror’s Truth – G. Thorpe :

INTRIGUE :

La chance d’une vie. C’est ainsi que la Commémoratrice Ennylin Ares, rattachée à l’équivalent d’un car de manœuvres moldaves en matière de flotte d’expédition de la Grande Croisade, accueille la nouvelle d’une rencontre fortuite avec une escadre de vaisseaux de l’Astartes dans le système de Vestogorn. Et tant pis s’il s’agit des Night Lords, dont la réputation de brutalité et de sadisme commence à transpirer largement d’un bout à l’autre de l’Imperium. C’est en effet l’occasion pour notre héroïne, qui a jusque-là usé ses pellicules à immortaliser des inaugurations de barres de HLM pour déportés colons sur une douzaine de mondes conquis depuis belle lurette, de se confronter à la réalité de l’expansion humaine dans la galaxie, et de saisir sur le vif les glorieux Space Marines alors qu’ils apportent l’unité impériale à une planète un peu récalcitrante. Après tout, c’est pour son bien.

Sa requête d’un rattachement aux opérations des Night Lords ayant été rapidement acceptée, Ares bénéficie d’un traitement VIP, accordé à la demande expresse de Konrad Curze, qui dirige la mise en conformité de Vestogorn d’une main de fer et d’un air satisfait. C’est tout lui ça. Après une rencontre convenablement inquiétante et crépusculaire sur le Nightfall avec le Primarque en personne pour un entretien de motivation rapidement expédié, Konnie charge son surhomme à tout faire, le sarcastique Premier Capitaine Sevatar, de chaperonner la Commémoratrice sur le terrain. N’ayant que peu de temps à consacrer à une touriste à appareil photo, l’officier se contente de la déposer à bonne distance de la ligne de front, en lui intimant de ne pas se rapprocher de cette dernière, sous peine de rencontrer les mêmes problèmes que les Commémorateurs précédemment rattachés à la VIIIème Légion, dont les effectifs ont fondu comme neige au soleil après une série d’accidents fâcheux et de démissions subites. C’est que tout le monde ne supporte pas bien la manière très personnelle dont les Night Lords s’acquittent de leur mission de reconquête du Lebensraum impérial. Il y a des Croisés qu’il ne vaut mieux pas croiser dans une allée sombre…

Bien évidemment, dans la plus pure tradition des civils indisciplinés fourrés dans les pattes énergétiques des Space Marines, Ares décide de ne pas suivre le sage conseil de Sevatar, et bien évidemment, elle se met rapidement dans de beaux draps. Sa décision de grimper en haut d’un immeuble en ruines pour bénéficier d’une vision d’ensemble sur la cité « pacifiée » par les Night Lords se révèle être une mauvaise idée lorsqu’une petite bande de combattants locaux la repère et converge sur sa position, et sans doute pas pour lui demander de prendre une photo de groupe. Tout cela aurait pu très mal se finir pour notre héroïne sans l’intervention parfaitement ponctuelle des Night Lords, qui font leur fête aux insurgés, récupèrent la Commémoratrice égarée, et l’emmènent à quelques blocs de là rencontrer à nouveau Curze, qui a besoin de ses talents de communicante pour faire passer un message…

Début spoiler…Ce message, qu’il destine et dédicace à tous les pontes de Terra qui décident du devenir de la Grande Croisade sans y avoir jamais participé, et aussi cash que trash. Le rêve de l’Empereur est, dans bien des cas, un véritable cauchemar pour les populations des planètes qui résistent à l’assimilation, comme l’illustre bien le destin des Vestogorniens, victimes d’un grand remplacement littéral et expéditif pour faire la place aux colons impériaux. Faits prisonniers par les Night Lords, ils sont en effet précipités dans les puits géo-thermaux dont la cité tire son énergie, ce qui règle d’un seul coup les problèmes d’insécurité et de surpopulation auxquels Curze est confronté, en plus de se révéler économe en munitions. C’est Gégé de la compta’ qui va être content. Evidemment, Ares est scandalisée par ce crime de guerre puissance 30.000 auquel elle est forcée d’assister, mais est prise au dépourvu par le désir sincère du Primarque que cette vérité peu glamour soit partagée avec le reste de l’Imperium, et par la révélation (peut-être mensongère) que l’Empereur est déjà au courant de l’approche radicale de son fils indigne, et n’a rien trouvé à y redire… pour le moment. Curze insiste même pour récupérer les images et vidéos prises par Ares afin que les Community Managers de sa Légion puissent monter un petit clip d’avertissement sans frais pour les prochaines planètes que les Night Lords seront chargés d’ambiancer. Bref, tout le monde y gagne, et tout va (déjà) pour le mieux dans le meilleur des univers…Fin spoiler

AVIS :

Gav Thorpe fait le job avec cette chtite nouvelle, qui donne à voir les méthodes et philosophies d’un Konrad Curze encore loyal mais déjà fortement désabusé et totalement marginal, au plus fort de la Grande Croisade. Rien de tout cela n’est très nouveau, à part peut-être le fait que l’Empereur ait soi-disant choisi de fermer les yeux sur les méthodes incisives de l’ex futur Night Haunter, mais le propos est bien servi et mis en scène, et Thorpe ne se gêne pas pour souligner la logique dans la folie du Primarque justicier, qui fera finalement école dans les millénaires qui suivront. Quel visionnaire alors, ce Konrad. On a également plaisir à retrouver Sevatar, pas encore blanchi sous le harnais ni rougi sur le gantelet, et le voir faire du Sevatar (ADB style), c’est-à-dire balancer des remarques acerbes avec l’aplomb d’un Gaspard Proust sous progénoïdes. C’est du fan service certes, mais c’est pas mal fait et on aurait donc tort de s’en priver. Au final, ‘The Conqueror’s Truth’ est une version revue, corrigée et améliorée de ‘The Dark King’/’Le Roi Sombre’ (Graham McNeill), qui se donne l’espace et les moyens de délivrer son message de façon efficace.

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The Sinew of War – D. Hinks :

INTRIGUE :

Sur Macragge comme sur Terra, bien des millénaires plus tôt, la vile populace s’est soulevée contre ses justes et bienveillants maîtres, provoquant émeutes, massacres, feux de poubelle et occupations de ronds-points, tous crimes abominables mais heureusement sévèrement punis par les forces de l’ordre. Et en termes de répression policière, la capitale des 500 mondes a un avantage de taille et de poids par rapport à notre bonne vieille planète : Roboute Guilliman, génie précoce et baraqué, général visionnaire, humaniste convaincu, et fils adoptif du Consul Konor Guilliman, qui forme avec son collègue Gallan le duumvirat exécutif de l’espèce de république (il y a un sénat aussi) établie sur Macragge City. Occupé en Illyrium à pacifier une bande d’autochtones ayant eu la mauvaise idée de se rebeller contre l’ordre établi, notre héros a raté le début du soulèvement urbain qui a transformé la cité idéale de son enfance en champ de bataille. L’idéaliste, et un brin méprisant, surhomme a bien du mal à comprendre pourquoi diable une partie de l’armée s’est rangée du côté des casseurs, tout ça pour une bête histoire d’argent. C’est bien une réflexion de gosse de riches ça, Roro. Mais il lui faut attendre avant de consigner par écrit ses savantes réflexions sur les causes et les répercussions de ce mouvement social aussi inédit que violent : son père est resté dans la cité et a sans doute été pris pour cible par les fainéants et les sans dents. Il faut lui venir en aide.

Progressant rapidement vers le palais du Consul en distribuant quelques baffes aux mutins au passage, et utilisant son armure de scenarium pour passer entre les balles1, Gui est rejoint en chemin par Gallan, qui est venu lui aussi s’enquérir de la situation de son collègue de bureau. N’hésitant pas à joindre le geste à la parole, le Consul consort est même blessé dans la bagarre, écopant d’une estafilade au biceps pour preuve de son dévouement. Las, les deux compères arrivent trop tard pour sauver Konor (ce qui est triste) et les tapisseries (ce qui est pire). Papa Guilliman a été lâchement égorgé par ses assaillants, l’empêchant de dire adieu à son fils mais surtout de donner le nom des coupables. Bizarrement, il refuse catégoriquement que Roboute s’approche de lui dans ses derniers instants, allant jusqu’à le mettre en joue avec son pistolet pour le maintenir à distance. Le respect des gestes barrières jusqu’à la dernière seconde, on reconnaît bien là la trempe d’un vrai Macraggien. Konor a toutefois un message à faire passer à son fiston avant de mourir pour la patrie : une pièce frappée à l’effigie des deux Consuls de Macragge, et symbolisant le caractère éternel de la république, même en ces heures difficiles. Ou du moins, c’est ce que le cerveau embrouillé de Roboute en déduit, se souvenant d’une leçon de vie mémorable inculquée par son père avec un sesterce du même genre bien des années plus tôt. Sur ces considérations philsophico-fiduciaires, Konor passe de vie à trépas, provoquant une colère noire bleue chez son fils.

Convaincu par Gallan d’aller défendre le Sénat, probablement attaqué lui aussi par les vandales en sandales, Roboute sèche ses larmes et lèche ses armes, avant de se frayer un chemin jusqu’au parlement local en commettant quelques crimes de guerres au passage. On va dire qu’il bénéficiait de circonstances atténuantes. Pendant que Gallan tente d’aller raisonner les sénateurs, qui débattent férocement entre eux du meilleur moyen de châtier les gueux, Guilliman est envoyé se changer au vestiaire, son apparence dépenaillée risquant fort de provoquer des remous contre productifs dans les rangs de l’auguste assemblée. Cet enfilage de toge manque toutefois de tourner court pour le Primarque, qui se fait soudainement attaquer par le préposé aux cabines d’essayage, armé d’un poignard empoisonné. Le nez très fin de Guilliman lui permet de comprendre en un éclair que la même toxine a été utilisée sur Konor, et que c’est pour protéger son fils d’une intoxication involontaire que le Consul mourant l’a empêché d’approcher. Passé l’effet de surprise, l’assassin en puissance ne fait pas longtemps le malin face aux réflexes de mangouste et à la poigne de langouste de notre héros, qui ne parvient cependant pas à lui faire cracher autre chose que des bulles de bave (le bougre retourne son surn contre lui), à commencer par le nom de son commanditaire. Encore un crime crapuleux, c’est dingue ça. Il faudrait vraiment que les pauvres songent à être moins pauvres, ça réglerait beaucoup de problèmes d’un coup. Cette péripétie évacuée, il est temps pour Roboute de rejoindre Gallan sur l’estrade, afin de soutenir le coup d’état salutaire que ce dernier veut initier pour sauver la république…

Début spoiler…Mais, ô surprise, Rob’ est accueilli par un discours très critique de ce galopin de Gallan à l’encontre de son père, taxé de populiste et de socialiste par son homologue, et à l’annonce de son propre assassinat, pour le bien de Macragge. Evidemment, le « hum hum » que jette Guilliman juste après ruine un peu le groove de celui qui aurait bien aimé être empereur, qui se prend les pieds dans le tapis à tenter de justifier son double langage. Pas plus bêtes que la moyenne, les sénateurs comprennent vite que Gallan est le méchant de l’histoire, et qu’il a manigancé ce soulèvement populaire pour se débarrasser de ses rivaux et saisir le pouvoir. Roboute était parvenu à la même conclusion quelques instants auparavant en réalisant que la pièce que lui avait donné son père désignait en fait son meurtrier, puisqu’elle avait le profil de Gallan frappé sur ses deux faces2. Plus démasqué que Donald Trump au milieu d’une épidémie de COVID-19, le félon se fait appréhender par le service de sécurité, après que le noble Guilliman, ayant réalisé que tuer le traître de ses propres mains aurait été certes cathartique, mais contre-productif et contre ses valeurs, ait indiqué qu’il laisserait la justice suivre son cours. Devant tant de légalisme, les sénateurs ne peuvent que jurer allégeance au Primarque, exemple vivant d’une intégration réussie par un immigré méritant. L’histoire est en route pour Roboute…Fin spoiler

1 : Le pouvoir psychique caché de Guilliman est de faire voir flou à ses ennemis. C’est subtil mais très efficace. Ça marche malheureusement moins bien au corps à corps, comme Angron et Fulgrim le constateront.
2 : On pourrait dire qu’il aurait été plus efficace à Konor de simplement pointer du doigt Gallan au moment où lui et Roboute sont arrivés dans la pièce, mais l’histoire se serait terminée un peu brutalement.

AVIS :

Darius Hinks livre la version romancée de l’épisode le plus connu de la jeunesse de Roboute Guilliman (que David Annandale avait mystérieusement choisi d’ignorer dans la novella consacrée au Primarque), et le fait plutôt bien. Certes, si vous connaissez votre fluff, le suspense que l’auteur se donne du mal à entretenir jusqu’au bout de son récit tombe rapidement à l’eau, mais on ne peut pas reprocher à Hinks d’avoir voulu soigner sa sortie, et la relation de confiance qui existait auparavant entre les Guilliman et Gallan est un choix intéressant de sa part, qui peut en partie expliquer pourquoi le futur patron des Ultramarines a tendance à vouloir faire les choses tout seul de son côté. On glane également quelques informations sur la société de Macragge avant son intégration dans l’Imperium, ce qui est de l’ordre du notable. Il y avait sans doute moyen de capitaliser davantage sur cet événement fondateur pour expliquer la suite de l’histoire de Guilliman, voire l’Hérésie, voire le Sombre Imperium, ou, plus simplement, insérer quelques easter eggs saveur ultramarine (notons tout de même la mention faite à Tarasha Euten, Chambellan du Primarque et héroïne de l’audio book ‘Illyrium’ du même auteur) , mais pour une nouvelle de 16 pages, Hinks s’en sort très honorablement, autant sur le plan théorique que pratique.

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The Chamber at the End of Memory – J. Swallow :

INTRIGUE :

Comme tous les créatifs peuvent vous le dire, ce sont les derniers moments avant le rendu final qui sont les plus stressants. Et bien que Rogal Dorn ne mérite pas franchement ce qualificatif, il partage néanmoins ce souci du détail et cette tendance au micro-management qui distingue les génies et les pervers narcissiques du reste de la population. Ayant pris son hoverboard gravitationnel et son mécapigeon holographique1 pour inspecter l’avancée des travaux, l’Homme de Pierre corrige et réajuste les milliers de petites variables qu’il est le seul à voir mais dont la victoire dépendra peut-être. Après tout, si Horus tombe des fortifications après avoir glissé sur un gravillon énergétique, la guerre sera tout de même gagnée. Alors qu’il s’approche de l’Investiary, l’amphithéâtre anciennement décoré de 20 statues monumentales de la fratrie impériale, et dont deux des plinthes sont maintenant vides, une explosion attire son attention. Il semblerait que l’une des tours de stockage de la zone ait contenu du nitrate d’ammonium, et pas les précieuses antiquités collectionnées par Malcador le Sigilite, qui avait demandé au Prétorien de Terra de ne pas raser le quartier pour en faire des gravillons (énergétiques), comme il en a la sale habitude. N’écoutant que son statut de protagoniste de nouvelle, Rogal se hâte sur les lieux pour mener sa petite enquête.

Sur place, il constate qu’un début d’incendie a ravagé la façade, et que l’équipe en charge de l’audit/expropriation/démolition a connu une fin horrible et peu commune, les cadavres jonchant l’intérieur du bâtiment semblant avoir été causé par des ondes de choc, des explosions internes ou vaporisations pures et simples de l’individu, ce qui n’est certes pas banal. Pas banale non plus est la sensation persistante et croissante qu’éprouve le Primarque qu’il doit faire demi-tour au fur et à mesure qu’il progresse vers l’épicentre de la catastrophe. Ce mauvais pressentiment n’est pas suffisant pour arrêter la marche (du fils) de l’Empereur, mais les apparitions psioniques (des démons libres de droit, pour faire simple) qui l’attaquent dès qu’il pose le pied dans l’antichambre finale le convainquent de consulter un spécialiste, une fois les fâcheux renvoyés dans le Warp. Et justement, il a une soute pleine d’Archivistes sous scellés en orbite, qui n’attendent que son bon vouloir ou l’arrivée d’Horus pour se rendre utiles2.

Le destin ayant désigné le frère Yored Massak pour prêter main, ou plutôt tête, forte à son Primarque, nous suivons les deux guerriers revenir jusque dans la salle piégée, où les horreurs éthérées re-spawnent avec diligence, pour se faire à nouveau bannir en deux temps trois mouvements par nos héros. Si ces derniers étaient prêts à combattre des ennemis de cette trempe, qui ont fait leur fête aux malheureux larbins ayant eu la mauvaise idée de vouloir faire leur boulot, ils se figent sur place en remarquant les symboles qui marquent les deux gigantesques portes qui terminent le corridor : II et XI

Il s’agit bien entendu d’une référence aux deux Primarques disparus, frappés d’anathème par l’Empereur en personne, mais dont l’éphémère existence reste de notoriété publique au sein des Légions de l’Astartes. Pendant que Dorn se creuse les méninges pour percer ce mystère insondable, Massak parvient finalement à mettre le doigt, ou plutôt la tête, sur le sentiment de déjà perçu qui l’habitait depuis son entrée dans la tour. L’installation psychique de cette dernière a été effectuée par Malcador en personne, l’Archiviste repentant en est certain. Et l’intéressé confirme aussitôt sa déclaration, en arrivant sans crier gare dans la pièce. Ayant envoyé Massak poser des parpaings à l’extérieur pour avoir un peu d’intimité, le Régent de Terra a enfin la possibilité de s’expliquer auprès d’un Rogal Dorn qui sent de manière confuse qu’il s’est fait mindfucker par l’éminence grise dans un passé plus ou moins lointain. Il ne s’explique en effet pas son absence totale de souvenirs de Deuzio et Onzio, alors qu’il dispose d’une mémoire eidétique tout ce qu’il y a de plus primarquielle. Et Malcador d’avouer que c’est bien lui qui est responsable de ce trou de mémoire généralisé, touchant à la fois les Astartes des Légions décapitées (avant qu’ils puissent être réformés et repackagés), mais également les Primarques ayant connu personnellement les fils indignes de Pépé. Mais attention, il avait une bonne raison de le faire, se dépêche-t-il d’ajouter avant de finir tronçonné par l’Homme de Pierre : c’est Dorn et ses frères eux-mêmes qui lui avaient demandé un brainwash pour permettre à l’Imperium de se relever d’une tragédie si terrible qu’elle avait manqué de le mettre à genoux. L’Empereur, comme à son habitude, avait tout vu/su mais n’avait rien dit/fait. Classic MoM move here.

À moitié convaincu par l’explication du Sigilite, qu’il ne peut plus blairer depuis le début de la fortification de Terra, Dorn fronce les sourcils tellement fort que son interlocuteur décide de lui accorder un droit de flashback limité et provisoire sur son passé oublié, afin qu’il puisse se rendre compte par lui-même de la bonne foi du Régent. EVIDEMMENT, le lecteur ne sera pas convié à cette introspection douloureuse, dont les effets se dissipent rapidement mais qui convainc Dorn de la véracité des dires de Malcador, et surtout de la nécessité que ce passé, semble-t-il absolument honteux, de la Grande Croisade ne refasse jamais surface. Lorsqu’il ressort de la tour, il ordonne donc aux équipes venues en renforts de la détruire (plus de gravillons !). De toute façon, Massak avait achevé une copie conforme du bâtiment avant que le sort ne soit rompu par un claquement de doigts de Rogal Dorn, ce n’est donc pas une grande perte d’un point de vue stratégique.

1 : Surtout pour se délecter de le voir ch*er sur les hélotes en contrebas, je pense. Il faut bien trouver un moyen d’évacuer le stress quand on ne boit/fume/joue/prie/couche/rigole pas.
2 : Enfin, plus utiles qu’ils ne le sont à l’heure actuelle, le tricotage d’écharpes pour les soldats impériaux de faction sur les murailles du Palais n’exploitant pas tout le potentiel des Anges de la Mort susnommés.

AVIS :

James Swallow touche à l’un des mystères fluffiques les plus importants du background de l’Hérésie d’Horus dans ce ‘The Chamber…’ et parvient à nous vendre une once de révélations sur la destinée des Primarques disparus comme s’il s’agissait d’une avancée majeure du lore. C’est en tout cas le sentiment qui dominait chez votre serviteur à la fin de la lecture de cette nouvelle, qui contient trop de micro-informations et de sous-entendus sur lesquels gloser à l’infini pour ne pas mériter sa place dans la liste de lecture de tout fanboy/girl revendiqué.e. Mais on n’est certes pas au niveau d’un ‘Legion’ ou d’un ‘Saturnine’ en termes de coup de théâtre, ce qui est somme toute logique pour une histoire au tirage assez confidentiel telle que ‘The Chamber…’. Notons au passage la présence que quelques bouts de fluff « autres » au fil des pages, qu’il s’agisse du Palais Impérial ou de l’armement de Rogal Dorn, ainsi que le retour d’un second couteau souvent employé par Swallow en la personne de Yored Massak (‘La Fuite de l’Eisenstein’, ‘Garro’), et restons-en là.

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First Legion – C. Wraight :

INTRIGUE :

Spécialistes reconnus des campagnes pourries, les Dark Angels ont bien du mal à exterminer les Rangdan, espèce de Xenos experte en subterfuges et en tentacules, ce qui n’est guère du goût des roides et psychofrigides paladins de la Première Légion. Malgré tout, un ordre est un ordre, et les Astartes poursuivent leurs vaillants et violents efforts pour sécuriser ce petit bout de l’empire de leur Pépé, menés par nul autre que Lion El’Jonson en personne. Nous faisons tout d’abord la connaissance du Capitaine Arnaid, 45ème Compagnie, 8ème Ordre, 1ère Légion, dont la frégate a connu des jours meilleurs, mais qui n’hésite pas le moins du monde à intercepter le mystérieux vaisseau qui fait irruption dans la zone de « pacification » avec son Nightsward, bien que le nouveau-venu soit plus imposant et en meilleure forme. Alors que le Capitaine est sur le point d’ordonner un tir de semonce, ses salutations répétées n’ayant pas été retournées par les touristes en goguette, ceux-ci daignent enfin répondre, par la voix d’un autre officier Space Marine, un Capitaine de la nouvellement formée XXème Légion répondant au nom de…

Début spoiler..Jules-Edouard Petitbedon.

Bon ok : il s’appelle Alpharius. Incroyable, je sais.Fin spoiler

Alpharius s’excuse de ses manières cavalières et de son manque de décorum (son vaisseau, Perseus, a l’air d’avoir quitté les docks spatiaux avant que le Mechanicum n’y passe un coup de peinture), mais annonce qu’il est venu porteur de nouvelles pour Lion El’Jonson.

Pendant ce temps là, nous nous introduisons dans une réminiscence de Lionel en personne, du temps où il était un enfant sauvage qui courait cul nu dans les forêts de Caliban. Notre petit bonhomme semble être occupé à traquer une bête particulièrement bestiale, seulement armé d’une défense de phacochère nain et de sa volonté implacable. Wraight nous fait bien comprendre que c’est la destinée même d’El’Jonson qui est à l’œuvre ici, et entraîne le jeune Primarque au clash contre un monstre que la partie raisonnable/froussarde de Lionel aimerait éviter si possible. Pause pub.

Retour sur le Nightsward, où Alpharius est reçu par son homologue. Constatant qu’il ne sert à rien de féliciter ce dernier sur son goût (pratiquement inexistant) en matière de décoration d’intérieur, ni de tenter de piquer la curiosité (totalement inexistante) de l’austère Terran, l’Alpha Légionnaire qui s’ignore1 tente de soutirer quelques infos psychologiques et tactiques à Arnaid en jouant la carte de la franche admiration pour les exploits et la réputation de la Première Légion, avec un succès relatif. Ces oiseuses discussions sont toutefois interrompues par la réception d’un message autorisant Alpharius à voyager jusqu’à l’Invicible Reason pour y rencontrer Lion El’Jonson, avec Arnaid lui servant de Kaptain pour l’occasion. Simple déformation professionnelle, en somme.

Suite et fin du documentaire animalier commencé un peu plus haut avec la confrontation entre Lionel et sa Némésis, qui se trouve être un chevalier en armure. Car en fait, le zouave qui courrait dans la savane avec son coutelas d’ivoire n’était pas le Primarque, mais une sorte de démon ayant pris forme humaine, et décidé de mettre fin à l’écocide décrété par le chef de l’Ordre. Malheureusement pour notre ami, ce dernier se révèle être un adversaire trop coriace pour ses maigres ressources, et il finit promptement embroché par la rapière du palouf. Voilà qui lui apprendra à ne pas usurper, même littéralement, l’identité d’autrui. Avant de repartir dans le Warp, le Rahan de Caliban a le temps de traiter son assassin de « Premier Fils » et de l’accuser d’être « la mort de son monde », ce à quoi Lionel répond que son titre correct est le tueur de bêtes. Fin de l’épisode.

Sur l’Invicible Reason, le Dark Archangel reçoit comme convenu Arnaid et Alpharius, qui est en fait venu lui proposer un coup de main, en toute amitié2, pour en finir avec la campagne d’extermination des Rangdan. Les pertes terribles souffertes par la Première Légion menacent en effet son statut et son prestige par rapport à ses sœurs, et pourraient faire échapper à El’Jonson le titre de Maître de Guerre, que ce visionnaire d’Alpharius anticipe déjà qu’il sera décerné par l’Empereur à l’un de ses fils dans un futur pas trop lointain (dès que les 20 Primarques auront été retrouvés en fait…wait a minut-). Bien que ne contestant pas l’argumentaire de son petit neveu/frère, Lionel se montre méfiant devant l’intérêt qu’il semble attacher à la prédominance des Dark Angels dans l’équilibre politique de l’Imperium, et après avoir menacé de le couper en deux, en toute amitié, pour le forcer à exposer ses véritables motifs (Alpharius n’aime vraiment pas Guilliman), il le renvoie sur son vaisseau où il lui fera savoir sa réponse sous une heure. Resté seul avec Arnaid, El’Jonson consulte son Capitaine pour avis secondaire, avant de lui révéler que l’énorme poids de… sa parole donnée l’empêche et l’empêchera toujours de placer son intérêt personnel avant celui de son seigneur. C’est sur cette déclaration de loyauté véritablement désintéressée que se termine notre histoire, qui démontre à quel point Lion El’Jonson est un végétal politique. Un concombre, pour être précis.

1 : Il insiste pour être désigné comme être membre de la XXème Légion, sans autre précision. Quel coup de chance tout de même qu’il ait le même nom que le Primarque pas encore découvert de cette dernière
2 : Et surtout parce qu’il ne peut pas blairer Guilliman, ce qui lui fait un point commun avec Lionel.

AVIS :

On retrouve dans ‘The First Legion’ le goût de Chris Wraight pour des petits exposés au débotté sur la géopolitique impériale au moment de la Grande Croisade (tendance déjà aperçue dans ‘Leman Russ : Le Loup Suprême’), et c’est tant mieux si vous voulez mon avis. S’il ne se passe pas grand-chose dans cette nouvelle, on n’en ressort pas pour autant frustré de sa lecture, l’échange entre Alpharius et Lion El’Jonson, qui permet d’identifier les points communs et les différences entre le premier et le dernier de cordée et leurs Légions respectives, ainsi que d’en apprendre un peu plus sur la manière dont les Legiones Astartes étaient perçues par Terra au moment où Pépé songeait à partir en pré-retraite dans le Bhoutan profond, valant son pesant de papier. Lionel y apparaît comme le type imbuvable socialement (il le reconnaît lui-même d’ailleurs) mais irréprochable moralement que les derniers ouvrages de l’Hérésie tendent à dessiner, tandis qu’Alpharius est dépeint comme un intrigant de première, n’ayant aucunement besoin d’un slideshow de la Cabale pour trouver des raisons de comploter dans le dos de tout le monde. Bref, une soumission solide de la part de Chris Wraight, qui fait honneur à ses deux Légions secondaires avec cette nouvelle.

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Et voilà qui conclut cette revue de ‘Scions of the Emperor’, ouvrage peu avare en Primarques (9 différents tout de même) à défaut d’être prodigue en contenu et en révélations fracassantes. Si ce recueil se laisse lire sans problème, il ne contient pas d’informations absolument essentielles pour le fluffiste acharné qui, soyons honnête, constitue la cible principale de la Black Library pour une publication de ce genre. À garder en tête au moment de décider si les 15 € nécessaires à l’acquisition de cette courte anthologie ne serait pas mieux investis ailleurs.

 

THE PRIMARCHS [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette critique de ‘The Primarchs’ (que je ne vous ferai pas l’affront de traduire en français), recueil de courts formats de l’Hérésie d’Horus un peu particulier. Il s’agit en effet d’une anthologie ne regroupant que des novellas (tous les textes ici font au moins 70 pages), et dédiée exclusivement aux exploits et méfaits des fils de l’Empereur, comme le titre de l’ouvrage le laisse entendre. En ceci, il s’agit tout simplement de la première tentative de la BL de capitaliser sur la popularité insoupçonnée de cette fratrie de surhommes parmi son lectorat, bien avant que la maison d’édition ne se décide à lancer une série parallèle dédiée, que je ne vous ferai pas l’affront de nommer (non plus1), en 2016. Le postface de Laurie Goulding nous apprend en effet que le succès rencontré par ‘Promethean Sun’ de Nick Kyme, dont les 3.000 exemplaires de l’édition limitée ont trouvé preneurs en une journée, a incité la BL à donner aux fanboys & girls ce qu’ils voulaient : du Primarque faisant des sidequests.

The Primarchs (HH)

Christian Dunn, éditeur de la série à l’époque des faits, commanda donc quatre novellas aux sieurs McNeill, Kyme, Thorpe et Dembski-Bowden, mission assortie d’un petit concours contre la montre, puisqu’il fut décidé que le premier texte complété aurait le droit à une sortie sous format individuel, tandis que les trois autres formeraient le corps du volume ‘The Primarchs’. Comme vous pouvez vous en douter, les choses ne se déroulèrent pas totalement comme prévu, Dembski-Bowden sortant finalement de la course (même si son ‘Aurelian’ finit par bénéficier du traitement de faveur souligné ci-dessus) et étant remplacé par Rob Sanders. Au final, ‘The Primarchs’ fut mis en tirage avec quatre histoires au sommaire2 : McNeill poursuivant le récit des déboires de Fulgrim, Kyme livrant une autre version, à haute teneur en fer, des événements de ‘Promethan Sun’, Thorpe emmenant le Lion faire un break de la Croisade de Thramas, et Sanders faisant se mordre la queue au serpent de l’Alpha Legion. Si le recul nous permet d’affirmer que l’exercice fut satisfaisant, au vu de la suite qui lui fut donnée, cela ne nous empêche pas de revisiter cet ouvrage un peu à part de l’Hérésie, du temps où cette dernière commençait légèrement à partir dans tous les sens. C’est ça aussi d’avoir 18/9 vedettes au casting du même film…

1 : Un indice : c’est facile.
2 : Et une couverture qui ne demandait qu’à se faire détourner. Dont acte.

The Primarchs'

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The Reflection Crack’d // Et le Reflet se Brisa – G. McNeill:

INTRIGUE:

The Reflection Crack'dNotre histoire commence par un vilain cauchemar fait par Lucius, quelques temps après les événements d’Isstvan V. Dans son rêve, le bretteur se retrouve à arpenter seul les allées de la Fenice, le théâtre de l’Emperor Pride, fermé pour travaux depuis la première triomphale, mais salissante, de la Maraviglia, et dont l’accès a depuis été interdit sous peine de mort par Fulgrim. Ce qui trouble le plus notre narcissique héros n’est pas d’avoir bravé l’interdit du Primarque, ni de patauger jusqu’au genou dans les restes mortels du public de cette soirée mémorable, mais bien d’être tout seul. Lucius n’aime en effet pas être seul, car personne ne peut alors admirer sa bogosserie surnaturelle. Au fur et à mesure qu’il s’approche de la scène, attiré par le genre d’intuition que seuls les rêveurs des œuvres de fiction ont, Lulu distingue la présence d’un miroir sur les planches, dans lequel il se voit tel qu’il était avant que ce petit joueur de Loken lui pète le pif. Un peu plus loin, il distingue le portrait de Fulgrim peint par D’Angelus, dont les yeux semblent être habités par une souffrance indicible. C’est sur ce constat suspect qu’il finit par se réveiller, dans sa piaule encombrée par tous les souvenirs et trophées accumulés au cours de sa longue et distinguée carrière de champion de kendo. Il ne lui faut cependant pas traîner, car le Phénicien a convoqué ses Capitaines pour leur annoncer le théâtre d’opérations sur lequel la Légion, un peu désœuvrée depuis le massacre fraternel d’Isstvan, va combattre. Sur le chemin de la réunion, il croise ce bon à rien d’Eidolon, qui lui balance quelques aménités à la figure mais se dégonfle comme la grosse baudruche froussarde qu’il est dès que Lucius fait mine de se mettre en garde. Ce dernier laisse partir le Seigneur Commandant le plus inepte de l’histoire de l’humanité sans découper la cantatrice chauve en rondelles, car, comme il le dit lui-même : « Pas (encore) de violence, c’est (toujours) les vacances ».

La magnanimité de l’épéiste le plus doué de l’univers (selon lui-même) ne sauvera cependant pas Dodo la Saumure du déplaisir de son Primarque, qui arrive comme une rock star devant son public en extase, dans un sons et lumières tellement extrême que même le festival d’Avignon n’en a pas voulu. C’est dire. Comme la diva démoniaque qu’il est devenu, Fulgrim se délecte de l’adoration sans limite de ses fils envers sa précieuse personne, avant de passer aux choses sérieuses et de leur dévoiler leur prochaine cible : l’Amas de Primastica, où le Mechanicum mine de précieux cristaux dont le Phénicien souhaiterait se faire des boucles d’oreilles. Eidolon a alors le malheur de lancer la question que tout le monde se pose, sans oser la soumettre au mercuriel Primarque : WTF ? Et ça, Fulgrim ne le supporte pas. Malgré les protestations de loyauté de son sous-fifre, il finit par le décapiter avec l’Anathame, utilisant le sang de cet immonde fayot pour parfumer le vin de la victoire qu’il a fait amener pour célébrer le début de la prochaine campagne. Au milieu de ces libations un peu crispées, Lucius se remémore l’exécution de son rival et en vient à la conclusion que Fulgrim n’est pas tout à fait dans son assiette, l’enchaînement fatal à Eidolon lui ayant fait remarquer une minuscule faiblesse dans le style du Primarque. En plus de prendre un peu trop la confiance, au point de se persuader lui-même qu’il serait capable de vaincre son boss en duel, notre héros se retrouve surtout conforté dans son sentiment que quelque chose de tourne pas rond chez la grande folle de Chemos.

Ce sentiment d’étrangeté est renforcé par la bataille qui se tient sur Prismatica V entre les Emperor’s Children et la garnison du Mechanicum. L’affrontement en lui-même n’a pas grand intérêt pour un esthète de la trempe de Lucius, mais il est témoin d’une démonstration de pouvoirs psychiques inédits de la part de Fulgrim, qui transforme l’équipage d’un Titan Warhound en pâte à modeler vivante en claquant des doigts, chose qu’il n’était certainement pas capable de faire précédemment. Après la victoire, le Primarque va se balader dans les forêts cristallines de la planète1, où il reçoit la visite d’une présence peu amicale qui interrompt son trip Blanche-Neige2 et lui met en tête celle de Ferrus Manus. Le dialogue qui s’engage entre Fulgrim et ses millions de reflets vient faire réaliser au lecteur que le corps du Phénicien est le sujet d’une guerre larvée entre deux consciences cherchant à revendiquer cet hôte de marque. L’un est un démon, et l’autre le vrai Primarque, mais qui est qui (et où) ? That is the question.

Fulgrim

Fulgrim

Pendant que les petites mains de la Légion s’activent à collecter les cristaux de Prismatica V, Lucius tue le temps en se combattant lui-même dans le dédale cristallin de la planète, exercice de style qui le voit réduire à néant un total cumulé de 827 milliards d’années de développements géologiques. Il croise également le Premier Capitaine Julius Kaesoron, dont le fier profil a été quelque peu esquinté par Gabriel Santar sur Isstvan V. Entre deux insultes et menaces de mort, qui sont la manière dont les Emperor’s Children se saluent ces temps-ci, les deux Capitaines arrivent tout de même à partager leur suspicion commune à propos de Fulgrim. Ceci pousse Lucius à se rendre à la Fenice IRL, bravant l’interdit primarquiel et massacrant une poignée de Gardes Phénix pour entrer dans le théâtre, où il acquiert la conviction que la conscience du Primarque a bien été enfermée dans le tableau de la défunte Commémoratrice. Égoïste certes, mais tout de même fils fidèle, Lulu résout de libérer son père de cet exil artistique, et convoque pour ce faire l’Ordre Silencieux, seul capable d’exécuter le plan un peu fou qu’il a imaginé pour parvenir à ses fins

Tout semblant de fraternité et de bonne intelligence entre les membres de ce club select ayant depuis longtemps disparu, Lucius éprouve d’abord quelques difficultés à faire passer son message à ses interlocuteurs sans que ces derniers ne lui sautent dessus lui faire la peau. Le soutien de Kaesoron et de Fabius permet toutefois au bretteur de convaincre ses acolytes de la justesse de sa cause, et la petite troupe décide de capturer le possédé pour l’exorciser de la seule manière qu’ils peuvent le concevoir : très trèèès douloureusement. Cette opération de sauvetage d’un genre un peu particulier prend place dans la Galerie des Epées de l’Emperor Pride, avec Kaesoron dans le rôle de l’appât (sans doute parce qu’il ressemble à une boulette de viande) et le reste des comploteurs en mode commando, prêts à sauter sur le râble de Fulgrim. Le combat qui s’en suit permet à quelques Capitaines non-nommés de faire preuve de leurs techniques et arsenal de combat contre le Primarque, avec plus ou moins de succès il faut dire, jusqu’à ce qu’une petite berceuse crachée à 40.000 décibels dans l’oreille de Fulgrim par Marius Vairosean mette fin aux débats. On notera au passage que Lucius a pris soin de ne pas intervenir dans la bagarre, sa certitude de venir à bout d’un tel adversaire, même après qu’il se soit pris quelques coups de lattes de la part des autres participants à la Battle Royal, ayant mystérieusement disparue au moment décisif. On n’est jamais trop prudent.

La suite du récit prend place dans les quartiers de Fabius Bile, où le Primarque se fait consciencieusement torturer par ses fils dévoyés mais bien intentionnés, dans le but de forcer l’entité qui habite son corps à laisser place nette. Petit problème : Fulgrim a développé des penchants sado-masochistes extrêmement poussés depuis quelques mois, que sa possession n’ont fait que renforcer. Il accueille donc les sévices infligés à sa chair par ses fistons avec des petits cris de joie parfaitement malaisants, et, par-dessus le marché, ses capacités de guérison surnaturelles ne mettent pas longtemps à réparer les dégâts commis par ses tortionnaires. Mutilé, écorché, poinçonné, passé au chalumeau, à la gégéne, au sérum de vérité et à la poire d’angoisse, Fulgrim s’occupe en partageant avec ses fils ses théories sur l’histoire de l’Univers, ce qui met ces derniers sur les nerfs et provoque quelques prises de bec et bris de glace regrettables dans le laboratoire de Fabius. Tout cela aurait pu durer très longtemps si Fulgrim, qui en avait à ce moment là littéralement plein le c*l, ne décide de sonner la fin de la récré en se libérant de ses entraves en un claquement de doigts…

Début spoiler…Ce n’est cependant pas la fin pour notre équipe de bras cassés, car Lucius se persuade soudainement qu’en fait, il s’était trompé sur l’état du Phénicien, et que ce dernier est vraiment lui-même, haha, c’est une regrettable méprise. Magnanime, et peut-être reconnaissant de cette séance de bondage qui l’a sans doute amené un peu plus près de son ascension démoniaque, Fulgrim accepte le repentir de ses fils, et passe l’éponge sur cette petite péripétie. Notre histoire se termine alors que le Primarque, remis de ses blessures ou en tout cas, capable de donner le change, instruit sa Légion sur la prochaine étape de son plan : faire construire à ce tâcheron de Perturabo une cité des miroirs (qui n’est pas Shadespire), afin d’attirer une certaine Angèle Esther Mina Tuche dans le Materium. Vaste projet…Fin spoiler

1 : Où McNeill se permet un petit clin d’œil lovecraftien bien senti (‘In the Walls of Eryx’).
2 : Miroir, mon beau miroir, dis-moi qui est la plus belle…

AVIS:

Très intéressante soumission et addition à la saga phénicienne de Graham McNeill, ‘The Reflection Crack’d1 est la conclusion/transition parfaite entre les événements narrés dans ‘Fulgrim’ et ‘Angel Exterminatus’. En plus de donner un aperçu saisissant de ce qu’est devenu la Légion des Emperor’s Children et quelques unes de ses têtes d’affiche après l’orgie de violence d’Isstvan V2, cette novella explore de façon fine l’un des paradoxes, ou questions ouvertes, propres à cette faction hérétique, à savoir : qu’est-il advenu de Fulgrim après la décapitation de Ferrus Manus ? Sachant globalement de quoi ‘The Reflection…’ parlait sans l’avoir lu jusqu’ici, je dois avouer que je m’attendais à être déçu par McNeill, qui a donc dépassé mes attentes (ou plutôt, mon absence d’attentes) de façon magistrale. Car (et c’est mon interprétation personnelle de cette histoire, qui peut donc être sujette à discussion) en faisant le choix de ne pas trancher cette question cruciale, le Mac permet à chacun de se faire son opinion sur la destinée du Primarque peroxydé.

Si les indices semblent indiquer que Fulgrim a bien été possédé par un démon, qui a relégué sa conscience à un tableau gardé sous clé, le fait que Lucius nous apprenne en fin de nouvelle que son patron est en fait maître de lui-même, et l’a toujours été, donne à réfléchir. Peut-on vraiment se fier au jugement du Capitaine, qui avait à ce moment précis tout intérêt à aller dans le sens du Primarque en rogne lui faisant face ? Peut-on croire les explications de Fulgrim sur sa victoire miraculeuse sur le démon, alors que c’est précisément ce que ce dernier dirait pour convaincre les Emperor’s Children que la situation est sous contrôle ? Qui est vraiment enfermé dans ce tableau au final ? À mon sens, rien n’est définitivement tranché, et c’est ce qui fait de cette histoire une vraie réussite (et en bonus, Eidolon se fait remettre à sa place légitime – citron pressé pour mojito – ce qui justifie tout à fait la lecture de cette novella), et un passage obligé pour tous les amoureux de la IIIème Légion et de son troublant et troublé Primarque.

1 : Titre très classe hérité d’une légende arthurienne mis en poème par Lord Tennyson. Ne me lancez pas là-dessus car ça pourrait durer des heures et des pages.
2 : J’ai particulièrement apprécié les passages où McNeill insiste sur le fait que les conjurateurs ne sont pas seulement animés par un amour filial envers leur Primarque, mais également par les sensations inédites que la trahison et la torture de leur père génétique peut leur apporter. C’est tout à fait slaaneshi comme logique.

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Feat of Iron // Triomphe de Fer – N. Kyme:

INTRIGUE:

Feat of IronL’ambiance est morose sur One-Five-Four Four, planète difficilement mise en conformité par moins de trois Légions Space Marines, menées par leur Primarque respectif qui plus est. Pendant que Vulkan et Mortarion commettent un biocide décomplexé dans les jungles de ce monde Exodite, Ferrus Manus, qui se considère comme le chef naturel de l’expédition en tant que candidat-peut-être-shortlisté-par-l’Empereur-pour-devenir-Maître-de-Guerre-mais-qui-s-est-fait-éconduire-au-final, piétine dans le désert aride de ce théâtre ingrat, comme lui (on en reparlera plus tard). Ces fourbes d’Eldars ont en effet organisé leur défense autour de nodes psychiques, protégés par des VPN tellement puissants que même la proverbiale appétence technologique des Iron Hands se trouve mise en défaut. Incapables de localiser le véritable emplacement des pylônes adverses parmi les myriades de leurres s’affichant sur leurs écrans, les Légionnaires de la Xème sont à la traîne par rapport à leurs cousins. Conséquence: Ferrus Manus en a marrus. Et cela se ressent sur son caractère, déjà pas facile en temps normal, mais qui gravite ces derniers jours entre l’exécrable, le sinistre et le violent. Seul son Premier Capitaine et Écuyer, le fidèle Gabriel Santar, ose encore lui dire ses quatre vérités, et encore, en mettant des gants de fer par-dessus ses mains de fer. Facteur aggravant, mais tenu secret par le pudique Ferrus, il est troublé par des rêves de désert de sable noir, et une irritation persistante au niveau de la nuque et du cou, comme si une lame était posée en permanence à cet endroit. Encore un peu, et il en perdrait la tête…

En plus de l’infâme FM et du p’tit Gaby, on retrouve au casting de notre nouvelle quelques Capitaines et Légionnaires Iron Hands, dont seuls trois valent vraiment le détour. Le premier parce que c’est une célébrité qui s’ignore encore (Shadrak Meduson), les deux autres parce qu’ils incarnent les vues les plus extrêmes de leur Légion sur la question carnée. Dans la team « la chair prend cher », on retrouve le Capitaine Vaakal Desaan, qui ne jure que par les bielles et les boulons. En face, c’est le Sergent Bion Henricos qui représente la team « la chair m’est chère », formule qu’il s’est fait fièrement tatouer sur la fesse gauche, constituée de tissus mous, comme la grande majorité de son anatomie. Nos deux polémistes s’opposent sur le « support » de l’Armée Impériale dont disposent les Iron Hands, bien à la peine dans l’enfer torride de cette partie de 154-4 : Desaan voudrait laisser les lambins se débrouiller tous seuls, et tant pis pour les pertes que cela représenterait, tandis que le plus altruiste Henricos est persuadé que les bidasses qui leur collent au train peuvent encore se montrer utiles. En tout cas, force est de reconnaître que ce sont les Iron Hands qui se tapent le gros du boulot, comme la bataille introductive de notre histoire, livrée contre des vers des sables d’Arakis et des scorpions des tombes de Khemri, le démontre amplement. La victoire acquise, Santar va sans tarder faire son rapport à son père, qui décide de pousser plus avant sans attendre, et tant pis pour les traînards. La route des Paluches de Fonte les amène à travers une petite vallée, que le Primarque impatient décide de traverser sans regarder à gauche ni à droite, à la tête de ses fidèles Morlocks Avernii. Bien évidemment, il s’agit d’une erreur lourde de conséquences pour nos héros.

Avant d’aller plus loin, je me dois de signaler la présence dans cette novella de deux Prophètes Eldars, un certain Lathsarial, qui est persuadé qu’il peut guider le surhomme d’acier sur de bons rails (un chemin de fer, en quelque sorte), par le biais d’une petite manipulation psychique dont sa race perfide a le secret. La mort programmée de Ferrus Manus aurait en effet des conséquences néfastes pour les Zoneilles, ce qui pousse notre grand marabout à tenter le coup, malgré le pessimisme non masqué de son interlocuteur, qui se fait appeler le Devin. Et qui n’est certainement pas Eldrad. Non non non. Bref, nos deux complices complotent en arrière-plan de notre histoire pour tenter d’offrir un futur au Primarque, évidemment sans que ce dernier ne s’en rende compte. Passons à la suite.

Fœtus Minus, suivi de Santar et de ses Terminators, s’enfonce donc dans la vallée, lon-la, et est bientôt assailli par une tempête de sable de force 19 sur l’échelle de Beaufort. Un malheur n’arrivant jamais seul, c’est le moment que choisit un gang de Banshees glapissantes pour attaquer Gaston Deferre et sa tribu, dont l’appareillage donne en plus de sérieux signes de fatigue. En clair, toutes les prothèses, bioniques et augmétiques des Avernii se mettent soudainement à attaquer leurs porteurs, dont plus d’un fini donc empalé par son propre bras, ou piétiné par ses propres jambes (ce qui doit être douloureux). Dans la mêlée confuse qui s’ensuit, Henricos parvient à sauver la vie de Desaan, sur le point de se faire seppuku à son corps défendant, tandis que Santar manque de se faire une Wolverine avec ses griffes éclairs. Une fois la tempête calmée grâce à quelques bolts bien placés dans la tête des Psykers Eldars en charge de la météo, et les assauts des grognardes hystériques matés manu militari, il faut se rendre à l’évidence pour les survivants : Ferrus a disparrus.

Ferrus Manus

Ferrus Manus

Le Primarque est en effet entré dans une caverne/dimension parallèle à son insu, persuadé que ses fistons étaient sur ses pas. Il lui faut toutefois bientôt reconnaître qu’il est seul dans sa galère, ce qui ne le décourage pas de poursuivre sa route. Il en sera quitte pour quelques visions et expériences assez perturbantes, allant d’un teaser sanglant d’Isstvan V, assorti des meilleures morts de ses fils préférés, jusqu’à la visite d’un statuaire un peu particulier, représentant les Primarques sous forme symbolique1, en passant par une prise de tête avec la sienne, dupliquée en dizaines d’exemplaires sous forme décapitée. C’est bien sûr Lathsarial qui est à la mise en scène et aux décors de ces tableaux très symboliques, sensés prévenir Manu qu’il y a une douille dans le potage. Malheureusement pour notre Prophète tragique, et encore plus pour son sujet d’expérimentation, les manigances du premier ont attiré un démon curieux dans le sad trip2 du second. Prenant la forme d’Asirnoth, le lombric de fer blanc que FM a noyé dans la lave sur Medusa, héritant au passage de ses mimines chromées, l’entité clandestine attaque le voyageur, qui ne doit son salut qu’à la spatha que lui avait remis en cadeau Vulkan. L’occasion pour notre héros de réaliser qu’il a été vraiment mauvais ce jour là, puisque tout ce qu’il a trouvé à dire lorsque son frangin lui a remis ce surin fut « Méheu, pourquoi t’as fait des free hands, moâ j’déteste les fioritureuuuuuuh ». Et après, il s’étonne de ne pas être populaire auprès de la famille. Menfin. Toujours est-il que c’est grâce à ce coupe papier personnalisé que Ferrus Manus parvient à blesser son assaillant, qui va l’attendre quelques salles plus loin pour finir le boulot, laissant notre héros recouvrer ses forces dans un coma (causé par le venin de la bestiole) réparateur.

Un peu plus loin ailleurs, Santar, qui était resté sur les lieux de la disparition de son Pôpa avec 50 Légionnaires pour retourner des cailloux et coller des affichettes, finit par laisser tomber la traque pour se rendre sur le front, le reste de la colonne ayant finit par localiser le node ennemi. Petit problème, ce dernier est défendu par une forte garnison et un bouclier psychique quasiment infranchissable, même pour les robustes Avernii. Encore une fois, ce sont les malfonctions malfaisantes de leurs membres artificiels qui contraignent les fiers guerriers à battre en retraite, malgré qu’ils aient réussi à ébrécher les défenses adverses. Comment faire pour vaincre cet ennemi qui a réussi à retourner la plus grande force des Iron Hands contre eux-mêmes, se demandent Santar et ses collègues ? Et la réponse, je vous le donne en mille, est apportée par Henricos, défenseur du bio devant l’éternel, qui demande l’autorisation de mener un régiment de soldats impériaux ayant enfin réussi à refaire son retard sur le peloton de tête, à l’assaut des Xenos. Le Premier Capitaine finit par accepter la proposition hétérodoxe et blasphématoire (Henricos va jusqu’à retirer sa main mécanique pour éviter de se mettre des pains par mégarde pendant l’assaut) du Sergent, qui entraîne donc ses troupes à la boucherie, dans la joie et la bonne humeur. Et ça marche (évidemment).

Retour à Battoirs d’Acier, réveillé de son petit roupillon. Déterminé à briser le 4ème mur, et à coups de marteau si nécessaire, Ferrus finit par arriver dans une salle où l’attend l’Empereur en format 40.000, soit le cosplay minable d’un Skeletor sous perfusion assis sur fatboy moisi. Derrière le trône, le démon attendait l’arrivée du Primarque, et se jette sur sa proie sans faire plus de chichis, laissant choir au passage deux mots lourds de symbole, si ce n’est de sens, pour la suite de l’Hérésie : Angel Exterminatus. Pas de quoi troubler notre héros, qui étrangle la sale bête à mains nues, puis concasse son cadavre avec son fidèle Forgebreaker jusqu’à n’en laisser que de la pulpe. Ceci fait, il passe en coulisse, où l’attend (enfin) Lathsarial, dont le PowerPoint représentant le système d’Isstvan ne passionne pas des masses son auditoire. Pas plus que les cinq premières secondes de sa tirade, sans doute mûrement réfléchie et longuement répétée, ne convainquent la Gorgone de laisser sa chance à l’Eldar de plaider sa cause plus longtemps. Beuglant comme un veau, il se met à courser le Psyker en jupette en agitant son maillet, ce qui persuade Lathsarial d’écourter son exposé, de s’éclipser sans attendre et de rendre à son sujet d’expérimentation sa liberté. Dommage pour les Eldars, et dommage pour Ferrus Manus, qui n’échappera donc pas à son destin entêté et étêté. Pour l’heure, le patron de la Xème se retrouve au cœur de l’assaut sur le node psychique, à temps pour donner un coup de main à Henricos et ses derniers survivants, avant que les renforts ne débarquent. Tout est bien qui finit donc bien, au moins pour le moment, pour les Iron Hands, qui peuvent enfin mettre un pylône à leur tableau de chasse, et sont de plus invités à prêter main forte (leur spécialité) aux Salamanders à la demande de Vulkan. Dans la Toile, le pauvre Lathsarial pleure comme madeleishaine l’échec de sa tentative et la bastonnade qu’il a prise de la part du monkeigh buté qui cherchait à le buter. Tout n’est cependant pas perdu pour les visionnaires Zoneilles, comme le révèle le Devin en conclusion du récit, car un autre serviteur de l’Empereur pourrait, lui, se montrer ouvert aux négociations avec les Eldars…

1 : Petit défi pour le lecteur attentif : identifier tous les Fils de l’Empereur décrits par Nick Kyme dans cet extrait (sachant que les #2 et 11 ne font pas partie du lot). Bonus pour qui arrive à m’expliquer pourquoi le cheval c’est génial (et surtout, de qui il s’agit).
2 : On ne dirait pas comme ça mais l’expérience attriste profondément Ferrus Manus, notamment la mort horrible de Santar. C’est un tendre, en fait.

AVIS:

Je ne m’attendais à pas grand-chose de la part de cette novella, consacrée à un Primarque qui ne passionne pas par un auteur dont je pourrais dire la même chose. Eh bien, je dois reconnaître à Nick Kyme qu’il a su faire mentir cette impression initiale, et qu’il a fait de ‘Feat of Iron’ une lecture assez intéressante, ce dont je lui sais gré. Pour faire simple, chacune des deux intrigues parallèles de cette histoire contient, derrière des apparences pas folichonnes, des éléments rédempteurs. Du côté de Ferrus Manus, c’est l’exploration de la psyché du Devon Larratt de la bande à Pépé qui vaut le détour, Kyme parvenant à donner un peu de relief à celui qui n’était jusqu’à présent connu pour… à peu près rien mis à part ses phalanges chromées. On apprend ainsi que derrière ses extérieurs de gros dur colérique et assez imbuvable, Ferrus est travaillé par un sentiment permanent d’infériorité par rapport à ses frangins, dont il jalouse le succès des plus populaires, surtout aux yeux de l’Empereur, qu’il est terrifié de décevoir. En témoigne ce passage frappant du récit, où on s’aperçoit à quel point ce surhomme rugueux et implacable peut douter de lui-même. Notons également l’amour et l’attachement sincère qu’il éprouve pour Gabriel Santar (qui le lui rend bien), qu’on ne retrouve pas ailleurs entre un Primarque et un Space Marine, mis à part peut-être entre Horus et Sejanus. En bonus, Kyme nous sert quelques pépites de fluff cryptiques à souhait, comme le statuaire souterrain (où on apprend que Ferrus Manus ne se souvient pas du visage de ses frères disparus), la destinée non réalisée de la Gorgone (contenir l’Hérésie sur Isstvan V avec Roboute Guilliman et ses Ultramarines), où encore l’identité du candide candidat repéré par Eldrad. Que du bon.

De l’autre côté du ring, l’affrontement entre Iron Hands et Exodites, s’il n’est pas exaltant à proprement parler, permet à Kyme de mettre en avant la relation particulière de la Légion avec le monde du vivant, par opposition au goût prononcé de ces Space Marines pistonnés pour la chose mécanique. Ce sont en effet de simples humains qui permettent aux fils de Medusa de remporter la victoire contre des adversaires trop retors pour eux, ce qui les pousse à reconsidérer leur jugement critique sur la fragilité de la chair. C’est d’ailleurs de cette campagne de la Grande Croisade que Nick Kyme fait naître la division Chainveil, les régiments de l’Armée Impériale, puis de la Garde Impériale, reconnus comme fils adoptifs de Medusa par les Iron Hands en récompense de leur bravoure. Quand on voit le tournant qu’a pris le background du Chapitre au cours des dernières années, avec une remise en question de plus en plus forte du dégoût pour le muscle historiquement éprouvé par ces Space Marines, on peut voir dans cette bataille un signe avant-coureur de cette évolution… ou pas.

En tout cas, cela fait plaisir de voir un auteur utiliser de façon habile et satisfaisante l’identité de la faction qu’il met en scène dans son intrigue. Là encore, on peut apprécier un petit bonus additionnel, en la présence de quelques unes des figures hérétiques des Iron Hands dans le récit, depuis le regretté Gabriel Santar, à l’entrejambe encore intacte, jusqu’à l’insaisissable guérillero Shadrak Meduson, et son fidèle Bion Henricos (vu dans ‘Little Horus’). Bref, je rends à César ce qui est à César, et à Kyme ce qui est à Kyme, et annonce sans détour que j’ai apprécié cette novella, que je place donc parmi les meilleures soumissions de notre homme pour cette série.

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The Lion // Le Lion – G. Thorpe:

INTRIGUE:

The LionPrenant la suite de l’affrontement entre les deux self-made Primarques sur Tsagualsa (épisode narré dans le ‘Savage Weapons’ d’ADB), dans le cadre de l’affrontement larvé entre Dark Angels et Night Lords, Thorpe centre logiquement son propos sur la Première Légion et sur Lion El’Jonson, tout à la fois frustré par l’impossibilité de mettre un terme à la croisade de Thramas et de se porter au secours de Terra, et travaillé par la déclaration du Night Haunter à propos de la loyauté vacillante des Dark Angels restés sur Caliban.

La réception d’une demande d’assistance émise par la garnison d’un complexe isolé de l’Adeptus Mechanicum (eh oui, encore un !) localisé dans le système de Perditus vient tirer le Lion de la bouderie contemplative dans laquelle il s’était plongé depuis la tentative de strangulation dont il avait fait les frais de la part de ce coquin de Kurze. Ni une ni deux, Jonson décide de se rendre sur place à la tête d’un contingent d’une taille plus que respectable (30.000 légionnaires tout de même), afin de s’assurer que le secret détenu sur Perditus ne tombe pas entre de mauvaises mains, Iron Warriors, Iron Hands et Death Guard ayant été repérés en train de rôder dans les environs.

Le gros de la première partie de The Lion décrit donc le voyage de l’Invincible Reason et de son escorte vers le système de Perditus, odyssée pimentée par la prise en filature du vaisseau amiral des Dark Angels par un mystérieux poursuivant, phénomène normalement impossible du fait de la nature particulière du Warp. Soucieux de préserver la confidentialité de son arrivée, Lionel parvient à attirer son poisson pilote dans l’univers réel pour une petite explication de texte, qui se solde au final par l’invasion de l’Invincible Reason par une flopée de démons pas vraiment concernés par les désirs d’intimité des DA. Too bad. Jonsy (à ne pas confondre avec Jónsi, bien que les deux partagent la même coquetterie à l’œil droit) s’apprête alors à aller coller quelques baffes aux séides des Dieux Sombres afin de leur apprendre à respecter la propriété d’autrui. Non mais. Réalisant que ses sous-fifres sont incapables d’expulser les indésirables sans un petit coup de main de sa part, Lionel part s’équiper dans ses quartiers pendant que son fidèle Corswain réorganise la riposte des Anges (dit comme ça, on dirait un teaser pour une émission de la TNT). Malgré l’urgence de la situation, le Primarque réfléchit longuement aux options s’offrant à lui1 en matière de stuff (le bougre a une pièce entière remplie d’armes de corps à corps), et finit par opter pour une paire d’épées bâtardes, choix certes kikoolol dans l’absolu mais assez dévastateur dans la pratique, comme on le verra plus tard

À la tête de ses légionnaires, Lionel s’enfonce donc dans les entrailles de son vaisseau en direction du réacteur Warp, qu’il sait être la cible principale des vils résidents de l’Immaterium ! Les premiers mobs ayant le malheur de spawner sur son chemin sont rapidement réduits à l’état de protoplasme, pour un gain d’expérience assez minime pour notre héros, tant la différence de niveau est criante. Bien décidé à rattraper son retard sur Sanguinius et Fulgrim, qui eux ont passé le niveau 105, le Lion enclenche la vitesse supérieure et initie un raid de la base adverse… en solo. Dommage pour les PNJ qui constituaient son « escorte », et doivent maintenant se débrouiller tout seuls contre des ennemis dont ils ne soupçonnaient même pas l’existence une heure plus tôt. Big brother is not watching you any longer, suckers.

De leur côté, Corswain et sa garde rapprochée finissent par pénétrer dans la salle du réacteur, où les attend un Duc du Changement bicéphale (qui n’est pas Kairos, sauf erreur de ma part) qui insiste lourdement pour avoir une discussion avec le shift manager. Son sénéchal ayant perdu une guerre mentale contre Super Poulet et se trouvant par conséquent sous la domination de ce dernier, Lionel n’a d’autre choix que de la jouer fine et échange donc quelques banalités avec sa Nemesis avant de profiter de la nuque roide de ce dernier pour lui tomber sur le râble gésier et lui faire avaler son bâton. L’Angry Bird Alpha ayant été mis hors d’état de nuire, les autres démons sont rapidement bannis par l’équipage de l’Invincible Reason, qui peut alors reprendre sa route vers le système de Perditus et rallie bon port sans plus d’incidents.

Typhon

Typhon

La deuxième partie de notre histoire met sur le devant de la scène les forces en présence à la surface de la planète, en particulier les Iron Hands du capitain Lasko Midoa et la Death Guard de ce bon vieux Calas Typhon. L’arrivée en orbite de la flotte des Dark Angels venant mettre fin au statu quo atteint par les belligérants depuis plusieurs jours, les poings nickelés saisissent l’occasion se présentant à eux pour attaquer les positions des prouteux. On ne peut plus suspicieux, le Lion décide toutefois d’envoyer un ultimatum indiscriminé par le biais de ses Archivistes2 aux factions présentes sur Perditus, que l’on peut résumer en cinq mots : « Cassez-vous de ma planète ». Et si les Iron Hands trouvent plus prudents d’obtempérer, Typhon ne l’entend pas de cette oreille et profite du désarroi de ses adversaires pour monter une contre-attaque, ce qui manque de convaincre tonton Lionel, passablement énervé de voir son autorité bafouée par ses neveux, d’envoyer quelques mégatonnes de glaçons sur la station de recherche afin que tout le monde puisse en mettre dans son slip. Zut à la fin.

Le troisième acte de ‘The Lion’ débute par la proclamation d’un fragile cessez le feu entre les belligérants de Perditus, la mauvaise volonté manifeste exprimée par Typhon ne faisant au final pas le poids face aux méthodes de négociations musclées d’El’Jonson3. Ce dernier arrive (finalement) à la surface de la planète aussi sapé qu’un maquereau de GTA, et pénètre dans la station de l’Adeptus Mechanicus, où l’attend Tuchulcha, boule à facette géante et accessoirement intelligence artificielle ayant asservi le système de Perditus jusqu’à ce qu’il soit libéré par l’effort combiné des Dark Angels et de la Death Guard. Epargné après sa défaite à fins d’études par le Mechanicum, Tu-pues-le-chat est le prix tant convoité par Typhon et Midoa, chaque camp cherchant à priver l’autre de la possession d’une machine au potentiel aussi extraordinaire que son humeur est taquine (du genre à envoyer des vaisseaux dans le Warp sans prévenir – ce qui n’est pas sympa – ni enclencher leurs champs de Geller – ce qui n’est franchement pas sympa –).

Au début pas franchement emballé par le tour qu’ont pris les expérimentations des prêtres rouges depuis son départ de Perditus, puis carrément effrayé par la puissance de HAL 30.000, Lionel décide de finir ce qu’il avait commencé il y avait des années et de détruire Tuchulcha… en apparence. Il annonce donc aux capitaines des autres Légions que la station de recherche de Perditus va être oblitérée afin que nul ne puisse être tenté d’utiliser le Tuch’ à des fins malavisées. Peu satisfait par cette décision, Typhon profite de la clémence du Lion à son égard pour se téléporter au cœur du complexe du Mechanicum4 afin de convaincre Tuchulcha de repartir avec lui sur le Terminus Est. Confiant dans sa survie (d’ailleurs il n’était même pas sûr qu’un Exterminatus soit capable de venir à bout de cet engin démoniaque – sans doute conçu par Nokia à la base –), ce dernier renvoie gentiment les Death Guards à leurs chères études et sur leur vaisseau, juste au moment où un Lionel vraiment furax de constater qu’absolument tout le monde le prend pour un con(combre) arrive à son tour dans la station et commence à botter des derches de Prouteux (résultat des courses : une paire de pompes en croco de Caliban5 bousillée).

La novella se termine avec un Lion El’Jonson ruminant de bien sombres pensées, seul dans sa salle du trône (NDR : non, il n’est pas aux chiottes). Ayant au final récupéré Tuchulcha, qu’il compte utiliser pour mettre fin à la Croisade de Thramas une bonne fois pour toutes, il médite sur les derniers développements de la rébellion d’Horus et sur le comportement plus que suspect de Roboute Guilliman (qu’il ne semble d’ailleurs pas vraiment porter dans son cœur6) avec un de ses Jawas de compagnie (qui lui confirme ce que Cruze lui avait susurré à l’oreille sur Tsagualsa : les Dark Angels restés sur Caliban sont sur le point de faire sécession). Il en profite également pour exposer ce qui sera son grand dessein pendant l’Hérésie : s’assurer qu’aucune Légion, loyale ou non, ne sorte du conflit assez puissante pour pouvoir menacer le règne de Pépé. Une ligne de conduite plus que borderline, en cohérence avec les agendas secrets développés par la plupart des Primarques au cours du conflit (j’écris la plupart car je ne pense pas qu’Angron goûte aux plaisirs de la realpolitik), dont l’exposition permet de conclure ‘The Lion’ de fort belle manière.

1 : On me signale dans l’oreillette que cet épisode de la geste d’El’Jonson est entré dans la postérité au point de se retrouver dans une comptine bien connue des bambins de l’Imperium quelques dix mille ans plus tard :
Promenons-nous dans le vaisseau
Pendant que le Lion s’fait beau
Si le Lion y était
Il nous défoncerait
Mais comme il n’y est pas
Il nous butera pas
Lion y es-tu ? Que fais-tu ? M’entends-tu ?
Lionel : Je mets mon armure d’artificier
(au refrain)
Lionel : Je ceins ma pelisse en peau de panthère de Caliban
(au refrain)
Lionel : Ah merde, j’ai oublié de mettre mes chaussettes, du coup il faut que j’enl-
(au refrain)
Lionel : C’est bon, je suis prêt ! Maintenant, il faut que je choisisse une arme.
(au refrain)
Lionel : Hmmm…
(au refrain)
Lionel : J’hésite.
(au refrain)
Lionel :
(87 refrains plus tard)
Lionel : Ok pour la paire d’épées longues. ME VOILAAAAAAA !!!
2 : On notera au passage que Lionel n’a pas suspendu l’Edit de Nikea de manière temporaire, comme on aurait pu s’y attendre de la part d’un fiston loyaliste. Il aurait été logique que le commandement de Pépé redevienne loi une fois l’Invincible Reason débarassé de ses parasites démoniaques, l’utilité de psykers de bataille une fois cette crise surmontée n’étant plus que marginale. Reste que le Primarque de la première Légion avait visiblement un autre avis sur la question.
3 : Lionel : Bon je te préviens coco, si tu ne fais pas exactement ce que je t’ai dit de faire, ça va très mal se passer pour toi. Je compte jusqu’à trois.
Typhon : Whatever, bitch.
Lionel : Un.
Typhon : Parle à ma fau-
– BOOOOOOOOOM –
Typhon : Oh, c’était quoi ça? Tu avais dit que tu comptais jusqu’à trois !
Lionel : Oui, et je balance une torpille cyclonique pour marquer le décompte. Deu-
Typhon : Okokokok, tu l’as ton armistice espèce de grand malade.
Lionel : Tu vois quand tu veux. On se retrouve en bas, bises.
4 : On se demande pourquoi la Death Guard n’a pas commencé par ça au lieu d’assiéger la station de manière conventionnelle.
5 : Ce jeu de mots vous a été gracieusement offert par Privateer Press.
6 : Il le considère au mieux comme un imbécile heureux et au pire comme un ignoble traître, le projet du grand Schtroumpf de commencer un Imperium 2.0 ne plaisant pas du tout à un Lionel se voyant en parangon de loyauté à son Pôpa. C’est assez savoureux de la part d’un Primarque qui a révoqué l’Edit de Nikea sans états d’âme et a décapité à mains nues un de ses Chapelains qui lui rappelait que ce faisant, il défiait ouvertement la volonté de l’Empereur.

AVIS:

Malgré quelques longueurs dans son déroulement, The Lion s’est révélée être une lecture assez agréable, même si Gav ne parvient pas à rendre une copie du même niveau que Dembski Bowden, dont les nouvelles ‘Savage Weapons’ et ‘Prince of Crows’ restent à mes yeux les deux must read pour tous les amateurs de l’Horésie d’Hérus (j’invertis des lettres si je veux). On peut d’ailleurs tout à fait considérer que la soumission de Thorpe comme un side event de la croisade de Thramas, El’Jonson prenant un break bien mérité après trois années de cache-cache avec les Night Lords pour accomplir une quête annexe, sans que la VIIIème Légion n’intervienne de manière significative dans l’intrigue.

En choisissant de faire d’un Primarque le personnage principal de son propos (même si le Sénéchal Corswain tente également d’exister aux côtés de son père génétique), Gawin prenait le risque de ne pas rendre justice à cette figure surhumaine, trop souvent décrite comme un simple super Space Marine dans les œuvres romancées de la Black Library. Je dois reconnaître qu’il s’en est plutôt bien tiré, en grande partie grâce à la description en clair-obscur qu’il fait de son héros, dont les motivations comme l’allégeance finissent par apparaître bien plus floues que ce que son image de loyaliste radical laissait à penser. Méfiant jusqu’à la paranoïa, faisant preuve d’un goût prononcé pour l’isolation (certains diront pour la bouderie), ne supportant pas la contestation de la part de ses subalternes (au point de décapiter à main nue un Chapelain ayant refusé de révoquer l’édit de Nikea), et éprouvant un indéniable, même si coupable, plaisir à imposer son point de vue par la force, le Lion de Thorpe n’est pas le parfait chevalier décrit par la propagande impériale, ce qui rajoute une profondeur intéressante à un personnage autrement ennuyeux de surpuissance. À l’inverse, j’ai trouvé la baston de l’Invincible Reason assez dommageable du point de vue du character development mis en place par Gav depuis le début de la nouvelle, Jonson apparaissant certes à cette occasion comme un guerrier insurpassable (et suffisant), mais également (et surtout) comme un stratège très limité et un meneur d’hommes abominable. De la part du frère ennemi de Leman Russ, je m’attendais à une approche moins rentre dedans de la chose militaire, même s’il est somme toute assez logique qu’un Primarque aussi renfermé et méfiant que Lionel choisisse d’agir comme la one man army qu’il est en définitive, sans prendre le temps de coordonner ses actions avec ses alliés.

Si l’utilisation de Lion El’Jonson comme protagoniste est donc assez réussie, les autres personnages de Thorpe, à commencer par Corswain, aka le Loken de la Première Légion (il en faut bien un), se révèlent malheureusement bien fades, tout comme la plupart des péripéties mises en scène au cours de la première partie. Typhon en prend aussi pour son grade, notez. Dépeint comme un demeuré fini en matière stratégique (toutes ses décisions intelligentes lui sont en fait soufflées par un sous-fifre) et comme une grande gueule prompt à insulter un Primarque, tout en sachant pertinemment que cela risque de se retourner contre lui et ses hommes1 (il doit faire des Périscopes, c’est pas possible autrement), le premier Capitaine de la Death Guard ne sort pas grandi cette nouvelle.

Autre source d’insatisfaction, les quelques failles de cohérence relevées en cours de route, la plupart découlant directement d’une utilisation trop bornée des pouvoirs de téléportation dont bénéficient les protagonistes de l’histoire, et qui auraient dû selon toute logique empêcher l’apparition du statu quo mis en scène par Thorpe sur Perditus (seul moyen pour que Lionel puisse arriver sur place à temps pour régler la situation). Entre Typhon qui se souvient soudainement qu’il n’a pas besoin de jouer au tower defense avec les Iron Hands pour accéder à Tuchulcha, et ce dernier qui attend obligeamment sur sa planète minable que Lionel vienne le chercher alors qu’il a certainement les moyens de précipiter leur entrevue, la crédibilité SF du récit est largement battue en brèche, ce qui est toujours dommage dans un nouvelle de 40K.

Jamais avare en matière d’affrontement entre vaisseaux spatiaux, le Gav sert une nouvelle fois la soupe en consacrant une part non négligeable de sa nouvelle à la description de la « poursuite » entre l’Invincible Reason et son admirateur secret, à la fois dans, hors et entre (je me comprends) le Warp. Comme le bonhomme maîtrise son sujet, la pilule passe sans douleur, mais sans plaisir non plus. En complément, et comme souvent dans les publications relatives à l’Hérésie d’Horus, les détails de fluff (d’un intérêt plus ou moins grand) abondent, surtout dans la dernière partie du récit, ce qui justifie amplement la lecture de cette nouvelle par tous les fans des Dark Angels. En auteur vétéran, Thorpe prend de plus bien soin de donner aux fanboys ce qu’ils veulent, c’est-à-dire des révélations fluffiques ayant une véritable portée sur le développement de l’Herésie d’Horus. Même si on n’est pas au niveau du twist final de Legion, c’est toujours sympa de voir des personnages importants se « griser » au fil des pages, et force est de reconnaître que Gav a fait honorablement le job de ce point de vue-là.

Le bilan reste au final assez positif pour The Lion, qui se révèle être un long format digne d’intérêt et à la lecture divertissante. À l’inévitable question : « n’y avait-il pas moyen de faire la même chose en trente pages ? » j’apporterai une réponse négative, la longueur du récit permettant à Thorpe de peindre son sujet par petites touches, un parti pris s’avérant au final plus judicieux qu’un descriptif ramassé sur quelques lignes ou pages. Cet espace supplémentaire permet de plus à l’auteur de débuter quelques intrigues secondaires (Lionel qui doute de la loyauté du capitaine de l’Invincible Reason, Typhon qui voulait récupérer Tuchulcha pour le compte d’un mystérieux commanditaire, la probable présence d’agents du Dark Mechanicus parmi les gardiens de Tuchulcha) ne demandant qu’à être explorées dans d’autres récits. Pas mal Gavin, pas mal du tout.

1 : Extrait de la nouvelle fable du Lion et du Rat. « … Et Typhon lui tint à peu près ce langage: “Wesh bolos, les DG sont dans la place, prêts à te ravager la face ». Et Lionel répondit : « J’ai entendu ». Et Typhon ne dit plus rien car il s’était fait dessus… ».

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The Serpent Beneath // Le Serpent en dessous – R. Sanders:

INTRIGUE:

The Serpent BeneathAlors que l’Hérésie bat son plein dans la galaxie, Omegon, directeur adjoint de l’Alpha Legion enchaîne les échanges téléphoniques holographiques avec ses centaines d’opérateurs et d’agents pour s’assurer de la bonne conduite des affaires. Nous nous glissons dans le bureau de la légende pendant qu’il s’entretient avec Ursinus Echion, Archiviste reconduit dans ses fonctions occultes à la suite du ralliement de la XXème Légion à Horus, et expert psychique en charge du fonctionnement de la base Tenebrae 9-50. Bien que tout semble se passer aussi bien que possible, malgré quelques frictions d’ego entre Ursinus et Volkern Auguramus, tech-adepte du Mechanicus dont les compétences mécaniques sont indispensables au bon fonctionnement du mystérieux pylône Xenos autour duquel la base est construite, Omegon a un vieux doute sur la confidentialité et la sécurité de cette installation capitale dans l’effort de guerre hérétique (on saura pourquoi plus tard). En maître stratège aussi retors que cryptique, il demande donc tout simplement à son interlocuteur de lui envoyer les plans détaillés de la station ainsi que la composition de sa garnison, dirigée par le Commandant Arvas Janic, pour pouvoir les étudier de son côté, et faire quelques remarques pertinentes. En tout bien tout honneur, bien sûr. Pourquoi faire compliqué, quand on peut simplement donner des ordres à ses grouillots, aussi.

Une fois l’entrevue terminée, le Capitaine Ranko Sheed, qui s’était mis dans l’angle mort de la webcam du Primarque pour assister à la discussion sans se faire gauler, est invité par son hôte à donner son avis et ses conseils sur la marche à suivre. Omegon a pour projet d’infiltrer et de détruire Tenebrae-50, qu’il a de bonnes raisons de considérer comme étant compromise. Qu’importe pour les « loyaux » serviteurs, personnels, gardes et Légionnaires stationnés sur place, qui devront payer de leur vie la présence d’une taupe dans le marais de l’hydre (avouez que c’est pas banal). L’opération sera toutefois très délicate, car on ne prend pas facilement l’Alpha Legion à son propre piège. C’est donc à une équipe de choc que la mission sera confiée, et ce sera Omegon lui-même qui en prendra la tête. Le petit verre de l’amitié échangé par les deux conspirateurs à la fin de leur échange laisse toutefois un goût amer dans la bouche de Sheed. Il semblerait que le Primarque lui ait glissé des roofies dans son jus de tomate. C’est trop bête.

Nous partons ensuite à la rencontre de nos spécialistes, plus ou moins volontaires, lors de leur recrutement. Le gros des forces sera constitué de l’escouade du Sergent Goran Setebos, recommandée par Sheed du fait de l’obéissance totale dont fait preuve son officier, qui n’aura donc pas de scrupules à tuer ses propres frères si le besoin s’en fait sentir. Setebos et ses hommes étaient auparavant en mission sur Phemus IV, où ils s’appliquaient à mettre des bâtons dans les roues (de moto) des White Scars, engagés dans une campagne peu fructueuse d’extermination des Orks locaux. À l’aide de déclenchement d’éruptions volcaniques canalisatrices, l’Alpha Legion a en effet réussit à maintenir groupées les hordes Xenos, empêchant les motards du Khan d’en venir à bout une bande à la fois. Lorsque la convocation de Mémé Gon leur est parvenue, ils venaient juste de réduire au silence un trio de bikers un peu trop curieux, avec l’expertise des super soldats (pensez à un James Bond où le grand méchant serait vulcanologue) qu’ils sont.

Pour mettre en échec les pouvoirs psychiques d’Ursinus, c’est vers une psyker free lance que se tourne ensuite le Primarque, qui craint d’employer un autre Archiviste de sa Légion du fait de l’implication de sa cible dans l’entraînement des novices. C’est sur Drusilla qu’il dégote la perle rare, en la personne de la Calamity Jane de ce monde ruche, aussi appelée Xalmagundi, ou « Sup(syk)er sans plomb » par les Sœurs du Silence cherchant à la ramener sur Terra pour des raisons que notre paria juge suspectes. Télékinésiste à haut potentiel, Xalmagundi n’a pas son pareil pour déclencher des séismes, faire s’effondrer des bâtiments et compresser des véhicules1, ce qui lui a permis d’échapper jusqu’ici aux poursuites des autorités et des Vaisseaux Noirs. Cependant, elle ne refuse pas l’aide apportée par Sheed et son escouade pour la débarrasser d’une bande de Sœurs du Silence un peu trop collantes, et accepte de marcher dans la combine en reconnaissance de ce fier coup de main.

Pour finir, Omegon en personne organise le kidnapping de Volkern Auguramus pendant l’une de ses permissions hors de la base, convaincant sans mal l’adepte pirate (il avait entrepris de copier le pylône de Tenebrae sur une planète mineure, pour la science et le bien commun) et caustique2 de faire office d’agent double pour faciliter la progression du reste de l’équipe à l’intérieur de l’astéroïde où l’installation est localisée.

Et parlons un peu de cet astéroïde, car il n’est pas banal. En plus d’abriter un obélisque gigantesque de construction Xenos (sans doute un pylône Necron détourné par des hooligans sur la route de Cadia), agissant comme un anticyclone warpien aux alentours3, Tenebrae 9-50 a également été investi par les machines des Démiurges, une autre race Xenos spécialisée dans les opérations de minage dans l’espace. Pour faire simple, notre patate cosmique est en fait une sorte de colis Amazon géant, se dirigeant lentement vers son heureux acquéreur pendant que les automates installés par les Démiurges à l’intérieur collectent, transforment et raffinent les précieux minerais enfermés dans l’astéroïde. Il faudra en tenir compte dans la conduite de la mission, qui commence par un peu de physique vectorielle en mode hardcore, notre fine équipe devant dériver jusqu’à une faille de Tenebrae 9-50 avec le moteur, l’auto-radio et la climatisation de leur vaisseau éteint afin d’éviter toute détection de la part de la station. Une fois la Twingo (volée, évidemment) garée en sous-sol, s’engage une longue session de spéléologie à travers les grottes et tunnels de l’astéroïde, en prenant bien soin de ne pas perturber les machines démiurges, myopes comme des taupes (c’est logique) mais très territoriales. Ceci fait, au prix d’une première perte du côté des infiltrateurs (le pauvre Vermes, écrasé par une faille tectonique), il n’y a plus qu’à entrer discrètement dans le complexe à proprement parler, grâce à la complicité d’Auguramus. Commencent alors les choses sérieuses.

Pendant que Setebos et la moitié de son escouade vont déclencher une bataille de polochons dans les dortoirs des Légionnaires, Omegon et les autres se dirigent vers l’aile où sont gardés captifs les Psykers dont le pylône a besoin pour fonctionner. C’est en effet ici que les attend Xalmagundi depuis qu’elle a été placée dans une cargaison de mutants envoyée par l’Alpha Legion sur Tenebrae en même temps que les ramettes de feuilles A4 et les gobelets de la machine à café. Ayant réussi à attirer Ursinus sur place grâce à une fausse alerte déclenchée par Auguramus, Omegon le fait neutraliser par Xalmagundi, avant de l’exécuter de façon très obscure (comprendre : après lui avoir expliquer ce qu’il faisait sur place, sans avoir de preuves de sa trahison, et dans une cellule plongée dans le noir). Ceci fait, et constatant que la résistance se corse, il envoie la Psyker et ses derniers hommes foutre le feu au parking de la station, tandis que lui se chargera de réduire au silence les Astropathes de l’astéroïde.

Plus facile à dire qu’à faire cependant, car Omegon ne tarde pas à réaliser que les plans qui lui ont été transmis ne sont pas tout à fait exacts. Le rusé et méfiant Commandant Janic a en effet fait réaliser quelques aménagements et travaux sur son lieu de travail, ce qui a conduit Setebos et ses hommes droit dans une embuscade : au lieu du dortoir, c’était en fait un pas de tir qui attendait les Légionnaires, mettant ces derniers en mauvaise posture. Omegon a cependant d’autres chats à fouetter, puisqu’il est également victime des fourberies de Janic, et se fait molester par quatre Space Marines imprévus sur le chemin de la chorale astropathique. Bien que plus petit que le Primarque moyen, notre héros parvient tout de même à se défaire de ses assaillants et à exécuter les Psykers assez mal défendus par ces derniers, jusqu’à ce que Janic en personne n’intervienne et lui colle quelques bolts en haut des fesses pour lui apprendre à envahir la propriété d’autrui.

Le Commandant commet cependant l’erreur fatale d’engager la conversation avec son adversaire mal en point, et de s’approcher suffisamment près de ce dernier pour qu’il lui subtilise son casque. Et alors ? Et alors, c’est le moment où, enragées par les explosions déclenchées quelques temps auparavant par Setebos, les machines démiurges envahissent la base, pétant suffisamment de cloisons au passage pour provoquer une dépressurisation de l’installation, qui envoie le pauvre Janic nager le papillon dans l’espace… sans son casque. Et comme tout le monde n’a pas les gros poumons ni la peau épaisse de Roboute Guilliman, je pense que cette expérience lui a été fatale. En tout cas, on ne le reverra plus (comme Auguramus d’ailleurs, exécuté par la garnison après qu’elle se soit rendue compte que le tech-adepte avait un comportement très bizarre).

Un peu fatigué par sa journée, Omegon prend enfin la direction du hangar-parking de la station, où l’attendent les derniers survivants de la mission. La phase finale du plan consiste à dévier la trajectoire de l’astéroïde en direction de l’étoile du système, afin de ne laisser aucune trace de son existence. C’est un job pour Xalmagundi, qui ruine son maquillage et son acuité visuelle au passage, et se prend un bolt dans la tête en récompense de ses loyaux services quand elle a l’audace de demander la prise en charge de ses verres correcteurs par la mutuelle de l’Alpha Legion. Cette exécution sommaire choque un peu le jusqu’ici peu sentimental Sergent Setebos, tout comme le retard du Thunderhawk du Capitaine Sheed (réputé pour sa ponctualité, il faut croire), sensé évacuer les infiltrateurs de l’astéroïde avant que ce dernier ne finisse à la corbeille. Mais, bien sûr, c’est une éventualité qu’Omegon a prévu dans son plan…

Début spoiler…Puisque le plan d’Omegon consistait à ne pas être là du tout. C’est en effet Sheed en personne qui a agi comme doublure pour son Primarque3, de manière tellement convaincante qu’il a bluffé tout son monde, en plus du lecteur. Il avait cependant pu bosser le rôle de sa vie lors du verre de l’amitié du début de l’histoire, le petit goût aigre détecté par son palais sensible n’étant pas du tabasco mais du sang d’Omegon, ce qui lui a permis d’assimiler une grande partie des souvenirs de son modèle. La mission impossible était donc une mission suicide, et Sheed enjoint donc ses hommes à chiller un peu en attendant le coup de soleil fatal, puisqu’ils n’auront jamais le temps de rejoindre leur Twingo au 1739ème sous-sol avant qu’il ne soit trop tard. Dont acte. Probablement.

Notre histoire se termine avec la destruction par l’Alpha Legion de la lune Parabellus, où Auguramus avait commencé à installer son propre pylône. Pour un faussaire éhonté, je trouve qu’Alpharius tient beaucoup à la notion de propriété intellectuelle tout de même. Omegon, qui était là aussi, discute un peu avec son frangin, et on sent que la belle concorde entre les jumeaux est en train de battre de l’aile. Le rideau finit par tomber sur la vision de notre héros, seul dans ses quartiers, devant ses deux armures, dont l’une semble apparemment très spéciale, sans l’être. La suite, ce sera Chondax et la lutte acharnée entre l’hydre et le faucon…Fin spoiler

1 : Le revers de la médaille étant sa nullité crasse au Jenga.
2 : En témoigne cette remarque pleine de bon sens, guère au goût de ce hipster d’Omegon.
3 : Ce qui fait tout l’intérêt de cette base, car elle a permis à l’Alpha Legion de plonger le système de Chandax dans une dépression Warp soutenue, qui a empêché le Khan de recevoir les SMS d’alerte de Rogal Dorn depuis la rebellion d’Horus. Petit cadeau de la Cabale.
4 : « J’peux pas, j’ai Alpha-poney. »

AVIS:

Alpharius - Omegon

Alpharion (ou Omegus)

Rob Sanders donne à l’Alpha Legion la novella de démonstration que cette faction attendait depuis la sortie de ‘Legion‘ quelques années plus tôt, dont l’un des manquements avait été de placer Alpharius et consorts au second plan de l’histoire, derrière les péripéties balistiques des soldats de l’Armée Impériale et des coucheries cabalistiques de John Grammaticus. Ici, ce sont bien les hydres énergétiques qui tiennent le haut du pavé (dont bon nombre de personnages précédemment croisés, ce qui est toujours un plus), et on a plaisir à les voir évoluer dans une opération tout à fait typique de leur science si particulière de la guerre. Infiltration, espionnage, trahison, mensonge, frappe préventive et sacrifice sans état d’âme: Sanders utilise toute la palette des coups fourrés à disposition de ses héros pour faire vivre au lecteur the Alpha experience. Le résultat est prenant, et les conditions très particulières dans lesquelles cette mission se déroule ajoutent au suspens de ce ‘The Serpent Beneath’1.

Pour autant, je dois avouer avoir été un peu déçu par la fin de cette novella, sans doute parce que j’attendais un retournement de situation ou un coup de théâtre digne de ceux concoctés par Abnett dans son bouquin. Car s’il est une chose que l’on ne peut pas reprocher à ‘Legion‘, c’est bien de distiller quelques révélations de premier plan sur son sujet d’étude, et les rouages de l’Hérésie en général. Depuis la gémellité des Primarques jusqu’à la cause de leur ralliement à Horus, en passant par le fameux gimmick « You got a friend Alpharius in me« , voilà un bouquin qui laisse sa trace dans l’inconscient du lecteur et du fluffiste. ‘The Serpent Beneath‘ est moins percutant dans son approche, gratifiant son public d’une pirouette conclusive certes bien trouvée et bien mise en scène, mais qui m’a personnellement laissé sur ma faim (et d’autant plus que le destin final des protagonistes est, volontairement et poétiquement, laissé en suspens par l’auteur, ce qui m’a amené à faire quelques recherches pour être certain de tout comprendre2). En plus de cela, j’ai eu la désagréable sensation de passer à côté de certains indices et teasings laissés par Rob Sanders sur la suite de la mission trouble de l’Alpha Legion, comme cette mention d’une armure suspicieusement normale, ce qui m’a un peu chagriné. Ceci dit, s’il y a bien une Légion pour laquelle j’accepte d’être mené en bateau, c’est bien celle des jumeaux, donc je n’en tiens pas grief à l’auteur.

En définitive, il s’agit d’un travail solide, sérieux et assez inspiré, dont j’attendais peut-être un peu trop. Je ne vois cependant aucune raison de ne pas conseiller ‘The Serpent Beneath‘ à tous les amateurs de la vingtième Légion passée cinquième colonne, et pas nécessairement dans cet ordre.

1Cela permet aussi de remettre en question la mort de l’un ou l’autre des Primarques de l’Alpha Legion au cours de l’Hérésie. S’ils ont accès à des doublures aussi convaincantes, dur d’être certain que l’hydre a bien été décapitée par Dorn ou Guilliman. Et c’est tant mieux!
2On va appeler ça la jurisprudence Loken, mais je préfère m’assurer que ceux qui ont 99% de chances de mourir meurent bien. Et comme on a également une jurisprudence Eidolon, ce n’est parfois pas suffisant.

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Et voilà qui termine cette revue de ‘The Primarchs‘, anthologie d’un genre un peu particulier, mais loin d’être désagréable à lire. Je pense même qu’il s’agit du recueil bénéficiant de la plus haute qualité intrinsèque de l’Hérésie à ce jour, aucune histoire ne m’ayant déçu (ce qui est rare). Fidèle à son titre, cet ouvrage permet une plongée intéressante dans l’histoire, la personnalité et la destinée de quatre fils de l’Empereur, dont certains jusqu’alors assez peu mis sur le devant de la scène, ce qui renforce l’intérêt du bouquin. Sans présager de la suite de la série, je subodore également que les événements couverts dans ces pages permettent de mieux comprendre les intrigues, de plus en plus complexes, déroulées et entremêlées dans les romans postérieurs à ce tome, faisant de la lecture de ‘The Primarchs‘ un passage peut-être pas obligé, mais utile et conseillé, pour l’aficionado du 31ème millénaire. Bref, un petit plaisir de connaisseur à s’offrir pour les amateurs et les acharnés, mais pas vraiment l’achat obligatoire pour le casual heretic, si un tel concept existe.

SHADOWS OF TREACHERY [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue critique de Shadows of Treachery, connu en nos vertes contrées sous le titre des Ombres de la Trahison, ce qui est une traduction littérale mais tout à fait appropriée. Plutôt que d’argumenter sur la qualité de la version française, que je n’ai de toutes façons pas lue, je vous propose de partir à l’exploration de ce 22ème tome de l’Hérésie d’Horus, qui, de l’aveu même de son éditeur, constitua un tournant pour cette tentaculaire saga : nous sommes en effet en présence de la fin du commencement1, la suite de la série étant placée sous des auspices, tant organisationnels que marketing, différents de ceux de ses débuts. Ce changement de braquet eut un impact certain sur la constitution de cette anthologie, dont la mise sur pied a répondu à des besoins bassement pratiques de la part de la Black Library.

Sommaire Shadows of Treachery (HH)

Devant faire face à l’ubiquité imprévue du brave Sigismund2 et au lambinage des Night Lords dans la Croisade de Thramas, les pontes de Nottingham chargèrent John French et Aaron Dembski-Bowden de colmater les brèches narratives dans des délais assez courts, ce qui donna ‘The Crimson Fist‘ et ‘Prince of Crows‘. Comme cela ne faisait jamais que 250 pages, les fonds de tiroir furent consciencieusement raclés pour arriver à une taille convenable, ce qui explique l’intégration sous format écrit de trois audio dramas originellement sortis en 2007, au tout début de l’Hérésie, et donc un peu déconnectés des nouvelles du front de 2012. Ceci est particulièrement vrai de ‘The Dark King’ et ‘The Lightning Tower’, qui donnent un certain éclairage à l’une des inimitiés primarquielles les plus discrètes de l’Hérésie. Quant à Raven’s Flight, il s’agit du premier acte de la geste aviaire de Corax, telle qu’initiée par le bon Gav Thorpe en cette époque reculée.

Enfin, les deux dernières pièces de ce patchwork, toutes deux signées de Graham McNeill, au four et au moulin dans ce recueil, avaient déjà été publiées entre 2007 et 2011, la première (‘The Kaban Project’) dans les pages saintes de ‘Collected Vision’, et la seconde (‘Death of a Silversmith’) dans le Black Library Games Day Anthology 2011/2012, recueil à petit tirage contenant généralement des nouvelles un peu plus fantaisistes qu’à l’accoutumée… ce qui est le cas ici. Nécessité a donc fait loi pour l’objet littéraire considéré aujourd’hui. Il nous appartiendra donc de trancher si Shadows of Treachery demeure une oeuvre intéressante, et surtout, cohérente avec le reste du corpus, ou bien si les ficelles sont tellement grosses que le plaisir de lecture s’en trouve gâché. Prenez garde à vous, Nick Kyme et Christian Dunn ! Le « grand » méchant chroniqueur arrive, et il sait tout de vos petits secrets honteux3

1 : Le commencement de la fin, lui, se fera encore attendre quelques années.
2 : Envoyé vers Isstvan par James Swallow à la fin de ‘The Flight of the Eisenstein’ et convoqué sur Mars par McNeill dans ‘Mechanicum’.
3 : On peut remercier pour cela Laurie Goulding, qui a signé la postface de la dernière version (2016) de ‘Shadows of Treachery’. Ça balance sévère entre collègues, tout de même.

Shadows of Treachery

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The Crimson Fist // Le Poing Écarlate – J. French :

INTRIGUE:

The Crimson FistOù sera posée la question : faut-il toujours suivre ses ordres ? L’élève John French, se rappelant ses cours de philo du lycée, saisit son crayon d’une main fébrile et commence à digresser sur le thème, utilisant ses quatre heures1 pour nous raconter ce qu’il est advenu de la flotte de la VENGEANCE !!! envoyée par Rogal Dorn mettre des baffes énergétiques à ce petit sacripant de Horus lorsque la trahison de ce dernier lui a été caftée par cette balance de Garro (‘The Flight of the Eisenstein‘). Notre histoire commence cependant par quelques vers de T. S. Elliott, un proverbe sado-masochiste, et une citation de Solomon Voss, histoire que le public/correcteur de ‘The Crimson Fist’ comprenne que l’ami French a bien révisé avant de passer son bac. Puis, nous avons droit à un petit flashback dans lequel est présenté le héros du jour, Alexis Polux. On le découvre ainsi en PLS à écouter du Pink Floyd sur la face sombre de la lune d’Inwit, un petit peu blessé et un petit peu gelé par la randonnée sauvage qu’il a entreprise avec son frère jumeau, Helias, pour rallier la base des Imperial Fists et ainsi gagner le droit de rejoindre la Légion. Cette dernière n’aimant pas les petites natures, l’épreuve est évidemment très dure et dangereuse, comme notre chochotte d’Alexis l’a découvert à ses dépends. Il a ainsi fait la connaissance d’un lemming d’Inwit aux dents longues et à l’appétit féroce, qui lui a mordillé la cuisse quelque temps auparavant et le traque depuis pour finir le job. Dure la vie. Heureusement, Alex peut compter sur son frère pour le remettre sur pied et dans la bonne direction, et affronter la bête du Gévaudan au corps à corps à sa place. Tout cela aurait été parfait si la planchette japonaise envoyée par le plus doué des frères Polux pour expédier l’insistant rongeur dans une crevasse salvatrice ne s’était pas retournée contre son instigateur, le lemming réussissant à balroguer Helias dans sa chute, et donc à l’entraîner avec lui en contrebas. Bien sûr, Alexis réussit à retenir son frère pendant une demi seconde à bout de bras avant de laisser tomber, dans tous les sens du terme, son pauvre jumeau. Fin de la parenthèse-traumatisante-qui-explique-pourquoi-les-Crimson-Fists-s-appellent-comme-ça2. Rassurez-vous, il y en aura d’autres.

Nous voilà maintenant dans le système de Phall, en compagnie de la flotte de la VENGEANCE !!!, ou de ce qu’il en reste. Car des 561 navires et 30.000 Space Marines envoyés par Dorn porter ses sentiments les plus sincères à Horus, il ne reste plus que 200 vaisseaux et 20.000 Astartes, les autres ayant été victimes des tempêtes Warp qui ont frappé l’expédition dès son départ vers Isstvan. Faisant partie des survivants, Alexis Polux prend la suite de son défunt mentor Yonnad, passé par-dessus bord avec l’eau de son bain, après avoir été sauvé d’une mort indigne, piégé dans une armure à 1% de batterie flottant dans un vaisseau plus vraiment étanche, par ses petits camarades. Polux aurait préféré que l’honneur échoisse (???) à quelqu’un d’autre, mais il était le meilleur élève de Tonton Yoyo, lui-même meilleur amiral des Imperial Fists, ce qui en fait le profil rêvé pour ce poste. « Et Sigismund ? » me demandent ceux d’entre vous qui se souviennent encore de la fin de ‘The Flight of the Eisenstein’, « Il est parti faire un bowling ? ». Eh bien non, sagaces lecteurs, mais c’est tout comme. Le fier Premier Capitaine a en effet demandé à Dorn de l’accompagner sur Terra, ce que le Prétorien a accepté sans rechigner ni questionner les motivations de son assistant de direction. Bref, c’est sur les larges épaules de Popol que repose maintenant le sort de l’expédition, et c’est pourquoi ce dernier, suspectant dans cet encalminage suspect un piège, ordonne à ses vaisseaux de se mettre en position de combat autour d’une des planètes du système, afin de parer à toute éventualité. Sage précaution qui rendra une fière chandelle aux jaunards dans peu de temps, comme vous pouvez vous en douter, mais qui ne va pas sans susciter quelques froncements de sourcils de la part de certains Capitaines au tempérament plus nerveux, comme Amandus Tyr (et non pas Amanda Lear), qui voudraient que Polux reparte vers Isstvan pour y accomplir sa mission, chose que la persistance de la drache warpienne rend impossible.

Nous partons ensuite sur Terra, où Dorn s’occupe à fortifier le Palais Impérial et à encaisser les mauvaises nouvelles avec stoïcisme, comme il sait si bien le faire. Au fil des petites vignettes intégrées dans le récit, nous le voyons donc envoyer Sigismund mettre du sucre dans le réservoir des Magos sécessionnistes de Mars, apprendre le désastre d’Isstvan V de la bouche d’Armina Fel pendant qu’il était en train de discuter carrelage avec son vieux poto Vadokh Singh3, et finalement, renier secrètement Ziggie après que ce dernier lui ait appris les vraies raisons de son refus de mener la flotte de la VENGEANCE !!!. Une rencontre fortuite avec Euphrati Keeler sur le Phalanx, assortie d’une vision de l’avenir pas tip top qui l’attendait en cas de départ pour Isstvan, ont en effet persuadé le Premier Capitaine que sa place était aux côtés de son papounet sur Terra, et pas dans un champ d’astéroïdes quelconque, sans gloire ni honneur. Evidemment, cela ne plaît pas du tout à Dorn, qui attend que chacun de ses fils fasse son devoir sans broncher. Plutôt que de faire un scandale et de réprimander publiquement ce garnement de Sigismund, le Prétorien le conserve dans ses fonctions, mais lui inflige une cuisante blessure psychologique en lui révélant qu’il a été adopté à la naissance. Ou quelque chose comme ça. En tout cas, il n’est plus son père et ne le sera jamais plus, et ça, c’est triste.

The Crimson Fist_Ill. 1Ces parenthèses bassement Terra-terre expédiées, nous voilà de retour à Phall, où… il ne s’est rien passé de bien intéressant pendant près de cinq mois (141 jours pour être précis). Les Imperial Fists ont bien subi une petite attaque psychique qui les a fait saigner du nez, et repêché un satellite psyker dans les océans de la Phall-1, les confortant dans leurs soupçons que quelqu’un les a piégés, mais à part ça, les journées ont été longues, en opposition avec la vie des Astropathes de la flotte, écourtée sans état d’âme par Polux pour tenter de contacter Terra, en vain. Cependant, cette longue attente touche bientôt à sa fin, car une flotte Iron Warriors conséquente débarque à l’improviste et ouvre le feu sans sommation sur ses cousins. À la tête de l’ost renégat, on trouve Perturabo en personne, qui s’est fait tuyauté par le Maître de Guerre sur la localisation de la flotte envoyée par son frère détesté. Bien qu’étant au courant que Roggie est resté sur Terra servir de concierge à son Pépé, le Primarque de Fer, qui vient juste de mettre le feu à l’Olympia, est bien décidé à frapper là où ça fait mal et à utiliser Sigismund comme mannequin de test pour ses prochaines expérimentations pyrotechniques. Secondé par l’obséquieux Berossus, Perturabo fond donc sur les Fists comme la misère sur le monde, bénéficiant du triple avantage de la surprise, du nombre et de son intelligence supérieure. Cela provoque bien sûr des pertes importantes chez les loyalistes… au moins au début. Car la formation défensive ordonnée par Polux et maintenue par ses capitaines pendant tous ces millénaires d’attente est tellement bien conçue et gérée par son créateur qu’elle permet aux Imperial Fists de riposter de façon efficace, et même de prendre l’avantage sur leurs assaillants. Bravo Perturabo. Le tempérament mercuriel du surhomme de fer joue même des tours à ses propres fils, comme peut en témoigner le pauvre Berossus, qui se prend un enchaînement uppercut/jumping side-kick pour avoir osé apprendre à son boss que Sigismund n’était pas sur la feuille de match, et qu’un péquenaud ayant le même nom que le chien du Manège Enchanté est en train de le mettre minable à Battlefleet Galactica. Gageons que notre malheureux sous-fifre pourra se mater en boucle Le Diable s’habille en Prada dans son caisson de Dreadnought pour les dix millénaires à venir.

Tout va donc raisonnablement bien pour les Imperial Fists, qui se permettent même d’envoyer une bonne partie de leurs forces aborder l’Iron Blood pour faire sa fête à Porte-Rhubarbe. C’est le bouillant Capitaine Tyr qui s’y colle, et qui passe à deux doigts de réussir… n’eut été la réception d’un message taggé important et urgent, avec demande d’un accusé de réception et de lecture de la part de Terra4. Il s’agit d’un ordre de Rogal Dorn qui demande à ses fistons de plier les gaules et de rentrer au bercail séance tenante. Casse-tête pour le brave Polux, qui ne peut pas se désengager proprement d’une bataille spatiale de cette envergure. La solution la plus logique et profitable pour l’Imperium consistant à remporter la bataille, affaiblir le plus possible les Iron Warriors, voire tuer leur Primarque, puis repartir vers Terra, il ne faut alors pas s’étonner que notre héros décide de faire exactement l’inverse, et ordonne une retraite générale, qui se transforme bientôt en déroute, puis en débâcle. Abandonnant les derniers assaillants de l’Iron Blood à leur triste sort – Tyr aura tout le temps de réfléchir à la sagesse d’El Condor Pasa (surtout le passage où il est dit qu’il vaut mieux être un marteau qu’un clou) lors de sa rencontre avec Perturabo5 – Polux sauve les meubles comme il peut en dérobant le vaisseau du Capitaine Golg, alors que les forces de ce dernier abordent sa Tribune, perdant la main gauche au passage (nouveau-clin-d-œil-au-futur-nom-des-Crimson-Fists) mais transformant le Trident adverse en fourche, voire en fourchette, dans l’opération. Notre nouvelle se termine finalement par l’arrivée des derniers rescapés dans le système solaire, beaucoup plus plasbétonné qu’il ne l’était qu’à leur départ. Dommage qu’on n’ait pas eu le droit au debriefing entre Dorn et Polux, cela aurait été savoureux…

1 : Chapeau s’il a réussi à pondre une novella de plus de cent pages dans le temps imparti.
2 : La main faible d’Alexis étant en effet maculée de sang au moment du drame, du fait d’une nouvelle morsure de la bestiole affamée.
3 : Qui occupe l’honorable profession de ‘War Masson’, ce qui lui donne le droit d’utiliser une truelle à cran d’arrêt et des parpaings en uranium appauvri. Il peut aussi appeler Dorn « Roger », ce qui crispe ce rigoriste de Sigismund.
4 : Ils sont facilement reconnaissables car ils font léviter, puis brûler vifs les Astropathes qui les reçoivent. On comprend pourquoi leur usage est limité aux circonstances les plus graves.
5 : Petit cliffhanger terminant cette séquence, on apprend qu’au moins un des Terminator ayant accompagné Tyr est encore vivant une fois que Perturabo a fini de jouer au golf avec les Fists. Il se pourrait donc qu’un certain Navarra revienne plus loin dans l’Hérésie.

AVIS:

Quelques années après la première publication de cette novella, les éditeurs de la BL révélèrent que cette dernière avait été commandée à John French pour justifier la non-présence de Sigismund à la tête de la flotte vengeresse des Imperial Fists. Cette rustine narrative se révèle cependant être bien plus que cela, French parvenant à intégrer à son récit pas mal de fluff, tant hérétique que contemporain, sur les Imperial Fists, leurs descendants et leurs personnages nommés (les Iron Warriors bénéficiant dans une moindre mesure de ces largesses françaises). En plus de cela, le format généreux de cette histoire permet à son auteur de mettre en scène de façon assez prenante une bataille méconnue, mais importante d’un point de vue stratégique de l’Hérésie… au moins jusqu’au premier tir de torpilles. Car le plus gros point noir de ce The Crimson Fist reste pour moi la façon ni réaliste, ni crédible, dont la bataille en question est menée. En plus des approximations d’ordre purement physiques (comme la flotte Iron Warriors qui attaque par surprise l’adversaire, alors qu’une transition hors du Warp est décrite comme laissant les vaisseaux incapables de faire autre chose que de relancer leurs systèmes et de baisser leur vitesse pendant plusieurs heures), le fait qu’un simple Capitaine puisse tenir la dragée haute à un Primarque réputé pour son intellect supérieur au cours d’un affrontement où le second dispose de tous les avantages me semble un peu exagéré. Quand au choix de Polux de repartir vers Terra au pire moment possible, cela fait passer le Nelson de la Grande Croisade à celui des Simpsons en termes de brillance tactique. Mais il fallait bien sauver les miches de cet empoté de Perturabo, sinon le cours de l’Hérésie en eut été bouleversé, pas vrai ? Bref, à trop vouloir cirer les pompes des fils de Dorn, faction pour laquelle il révélera par la suite un attachement certain (‘Praetorian of Dorn’, ‘The Solar War’), French fragilise quelque peu sa soumission, qui se révèle sinon être très convaincante et plaisante à lire.

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The Dark King // Le Roi Sombre – G. McNeill :

INTRIGUE:

The Dark KingÇa se bouscule dans le crâne de Konrad Curze, Primarque des Night Lords. Visionnaire sociopathe et dépressif, notre ami a bien du mal à rentrer dans le rang de la fratrie, et à se faire accepter par ses frangins. Demandez à Rogal Dorn par exemple : une petite dispute de rien du tout après un différent mineur à propos de la pacification pas si pacifique que ça d’une planète qui jouait les kékés devant Pépé, et ça se finit dans les larmes, le sang, et les larmes de sang. C’est en tout cas en position compromettante que ce fayot de Sigismund trouve le Nighthaunter au début de la nouvelle, juché sur la forme prostrée du pas encore Prétorien de Terra, qu’il a agressé violemment pour une raison encore indéterminée. Boys will be boys, comme on dit en Albia.

Enfermé dans sa chambre dans l’attente de son jugement prochain, pendant que cette mauviette de Dorn réapprend doucement à manger avec une paille, Curze a tout le temps de repenser aux derniers événements l’ayant mené droit à la case prison. Au commencement était donc la campagne de mise en conformité de Cheraut, menée de concert avec les Imperial Fists et les Emperor’s Children. Malgré la victoire remportée par les impériaux, les techniques de soumission un peu trop extrémistes des Night Lords, consistant à exécuter froidement tous les prisonniers adverses plutôt que de leur mettre une tape sur les fesses (ou l’inverse dans les cas des Emperor’s Children, mais on s’égare) et de les laisser partir, provoqua l’ire de Rogal Dorn. Arrivé sur place en gueulant « Curze ! », ce qui n’était pas un bon signe avant-coureur, comme tous les employés polyvalents du monde peuvent en témoigner, Mellow Yellow tenta de faire comprendre à son frère pourquoi il fallait mieux la jouer plus cool auprès des locaux, sans parvenir à convaincre ce dernier des avantages du management bienveillant. Et Curze de démonter la logique fraternelle en remettant un bolter et un totem d’immunité à un prisonnier, le premier réel et le second factice. Sans doute inspiré par la dernière saison de Koh-Lanta, le Jean-Bernard Moundir du Segmentum crut toucher le gros lot en faisant feu sur le Primarque qui lui avait tourné le dos, mais ne toucha en fait que le grelot du bonnet de Curze, qui lui décolla les gencives d’une mandale bien sentie pour lui apprendre 1) la vie, 2) à viser un peu mieux et 3) les conséquences d’une opposition à l’Imperium. Conclusion : il y a vraiment des baffes (énergétiques) qui se perdent. Cette démonstration graphique de la faiblesse du caractère humain ne convaincant pas Dorn non plus, les Night Lords acceptèrent de partir regarder le dernier Batman dans leur vaisseau avant que la bande à Jauni ne commence à faire du vilain. Grosse ambiance parmi la smala impériale, donc.

La tension aurait pu redescendre n’eut été la mauvaise idée de ce cafardeur de Fulgrim d’aller raconter les dernières visions macabres de Curze à ce psychofrigide de Dorn, qui accueillit très mal le délire de persécution et les allégations de (futures) maltraitances que le Nostradamus de Nostramo proféra à l’égard de son paternel dans ce moment de faiblesse. Et le secret médical alors, Fulgrim? Malheureusement pour le Chevalier Blanc Jaune de l’Imperium, ce n’était pas le moment de venir chercher des noises au Nighthaunter, qui lui tomba dessus with extreme prejudice comme on dit en Merica. Vous connaissez la suite.

« C’est bien beau tout ça, mais j’ai d’autres chats à écorcher » se dit alors Curze, qui résout donc de s’évader, peu enclin qu’il est d’aller s’expliquer de ses actes sur Terra d’une part, et soucieux d’aller remettre un peu d’ordre sur sa planète, transformée en zone de non droit depuis son départ en croisade d’autre part. Bien évidemment, sa piaule est étroitement surveillée par des Templiers et des Gardes Phénix, mais ce n’est pas un problème pour un Primarque, et encore moins un Primarque en armure (parce que oui, on lui avait laissée…), qui s’amuse donc sous peu à trucider ses matons en faisant du pole dance autour des colonnes de sa chambre. Quand les renforts arrivent, il est déjà trop tard…sauf pour essayer de récupérer la moquette, qui s’est prise quelques litres de sang dans la trame. Ça leur apprendra à être à l’heure.

Un peu plus tard, nous retrouvons Konrad, toujours accompagné de son écuyer Shang1, engoncé dans sa magnifique cape de patagium2, sur le pont du Nightfall, à deux pas de Nostramo. Après avoir fini de tirer ses cartes, qui donnent toujours la même prédiction funeste à base de colombe monstrueuse et de lune royale, Curze passe en mode méchant de série B et ordonne la destruction de sa planète, non sans avoir consulté une dernière fois les statistiques, très détaillées, de la criminalité locale. Ça n’allait peut-être pas fort sur la fin, mais l’INSEE de Nostramo continuait à faire son boulot de façon superlative. Puisque personne n’en parle, il faut bien que je le fasse. Bref, clap de fin pour notre histoire, le petit Konrad s’étant mué en grand méchant Nighthaunter, ou la peur incarnée dixit lui-même. On comprend mieux pourquoi Dorn n’a jamais pu passer de sa veilleuse…

1 : Je dis toujours car il était venu rendre visite au parloir à son patron sur Cheraut, mais ne sert tellement à rien dans l’histoire que je n’ai pas trouvé comment l’introduire avant cela.
2 : Googlez le terme, et représentez vous le style de notre bonhomme. Heureusement qu’Aaron Dembski-Bowden l’a forcé à passer la main (de façon littérale) à Sevatar dans le rôle du fidèle Capitaine, sinon on aurait été marron.

AVIS:

N’en déplaise à Brassens, le temps fait quelque chose à l’affaire, en tout cas en ce qui me concerne et quand je lis (et relis) des nouvelles de l’Hérésie d’Horus. Prenons (au hasard) le cas de The Dark King : lors de ma première lecture, il y a quelques années, j’avais plutôt apprécié cette présentation de Konrad Curze, alors au pic de sa sociabilité et de sa santé mentale. Je pense que ce sentiment aurait été encore plus marqué si j’avais pris connaissance de ce texte au moment de sa première publication, en 2007. Il s’agissait alors d’une des toutes premières plongées dans une Hérésie encore naissante, et peuplée de figures mythiques mais connues uniquement par le fluff des suppléments de jeu. Voir pour la première fois des Primarques se tirer la bourre, et vivre aux premières loges un épisode aussi crucial que la destruction de Nostramo, voilà une expérience peu commune pour un lecteur de l’époque !

Cependant, avec le recul apporté par plus d’une décennie, et des centaines de contributions à la série, je dois dire que mes retrouvailles avec ce texte historique ne se sont pas révélées très satisfaisantes. Si j’ai apprécié la tentative de McNeill d’intégrer dans son récit une dimension philosophique (Imperium solidaire vs Imperium tortionnaire, pour résumer), comme il le refera quelques temps plus tard dans The Last Church, je trouve que l’auteur a péché dans sa mise en contexte du sujet traité, qui donne l’impression que Curze a pris la décision de détruire sa planète sur un coup de tête1, ce qui colle assez mal avec l’image du prophète torturé qu’il avait (justement) essayé de dépeindre quelques pages auparavant. Passé ce moment, Curze devient un méchant en armure énergétique2 des plus classiques, comme la BL en comptait déjà des dizaines avant cela (certains créés par McNeill en personne). Le Nighthaunter reste un personnage intéressant, certes, mais on est loin de la profondeur qu’il gagnera sous la plume d’Aaron Dembski-Bowden, et il ne faut pas compter sur les autres protagonistes pour l’aider à briller (mention spéciale à Shang, qui a autant de personnalité et de répondant qu’un paquet de Chips). Bref, encore un cas de sénescence littéraire, ce qui est logique pour les œuvres les plus anciennes de l’Hérésie, mais pas une fatalité non plus (The Lightning Tower, ou The Last Church d’ailleurs…). Dommage pour notre Roi Sombre.

1 : Franchement, le dialogue avec Curze qui amène à ce basculement est d’une banalité confondante. On dirait que le Primarque demande quel temps il fait là-bas, ou qui a gagné la dernière coupe du monde de curling. Voire (encore pire), qu’il attendait que Nostramo parte à vau l’eau, ce qui est précisément la pire chose qui pouvait lui arriver.
2 : On soulignera d’ailleurs le génie des Imperial Fists et des Emperor’s Children d’avoir laissé son armure à un Primarque ayant failli tuer Rogal Dorn à mains nues dans l’attente de son procès.

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The Lightning Tower // La Tour Foudroyée – D. Abnett :

INTRIGUE:

The Lightning TowerSur la Terra impériale du 31ème millénaire, la trahison d’Horus, Primarque, Maître de Guerre et fils favori de l’Empereur, est encore fraîche que ce dernier, jamais à repousser à la décennie suivante ce qui peut être fait cette année, ordonne à son manœuvre portugais inwittien de fiston de fortifier son Palais, en préparation d’un siège qu’il voit déjà se profiler à l’horizon, bien que ce qui deviendra l’Hérésie d’Horus n’en soit encore qu’à ses prémisses. S’exécutant sans broncher, Rogal Dorn, car c’était lui (quelle surprise), se met au travail avec ardeur, bien qu’il lui en coûte de devoir construire des casemates et des miradors sur un site classé au patrimoine galactique de l’humanité. Les considérations esthétiques du Primaçon, habituellement aveugle à toute beauté, ne manquent pas de surprendre ses collègues de truelle (Vadok Singh, le Contremaître de Guerre) et proches collaborateurs (Sigismund, pas encore disgracié, et Archamus, pas encore empalé) parmi lesquels on compte heureusement un psychiatre homologué en la personne de Malcador le Sigilite.

Ayant surpris Rogal traîner sur les remparts du Palais dans le pyjama en pilou qu’il tient de son grand-père1 (un signe manifeste de déprime), le Premier Seigneur de Terra comprend qu’il est de son devoir d’intervenir, et invite donc le rejeton de son boss à une consultation privée dans ses appartements. Ne pouvant décemment pas partir sur le complexe d’Oedipe avec la moitié des Primarques déjà décidés à tuer le père, Malcador opte pour une approche un peu différente, et demande à son interlocuteur ce qui l’effraie, afin de comprendre d’où vient le spleen persistant du Prétorien. Fort à propos, la question avait déjà été soumise à Dorn quelque temps auparavant, lui laissant le temps de considérer le sujet. Ayant décrété qu’il ne craignait personne, le Primarque tente de se donner l’air profond en répondant qu’il avait peur de ce qu’il ne comprenait pas, comme les règles de la belote, la communication de la Black Library ou encore les causes ayant poussé la moitié des Légions impériales à rejoindre la cause d’Horus. Malheureusement pour lui, il en faut plus pour berner le Sigilite, qui sort de ses tiroirs un jeu de cartes ayant appartenu à Konrad Curze, frère ennemi ayant failli tuer Dorn sur Cheraut après une dispute. Voyant son patient tourner au flave2, Malcador enchaîne sur une thérapie accélérée et tire les cartes à ce dernier, avec des résultats plutôt inquiétants. Mais évidemment, ce n’est qu’un jeu, haha. Ça fera 83 €.

La nouvelle se termine sur un Rogal Dorn un peu plus gaillard depuis sa discussion cathartique avec son prof principal, qui se prépare à repousser les assauts des traîtres avec un petit jeu de tower defence. Surpris par son Père en train de niaiser au lieu de faire ses devoirs, le Primarque dissipé jure toutefois qu’il ne laissera pas tomber son Pôpa, qui repart donc sur le Trône l’esprit tranquille mais le colon obstrué (la constipation, quel fléau). Rendez-vous dans sept ans pour que ça commence à vraiment chier sur Terra.

1 : Qui devait s’appeler Hodor pour que sa robe de chambre aille à son petit fils naturel. Je ne veux pas penser à l’alternative.
2 : C’est un jaune pâle. Non, je ne connaissais pas ce terme avant d’écrire cette chronique. Oui, je vais dès à présent tenter de le placer discrètement dans autant de conversations que possible.

AVIS:

À l’heure où cette chronique est écrite, The Lightning Tower affiche plus d’une décennie au compteur, faisant partie des premiers textes écrits pour l’Hérésie d’Horus lorsque le projet fut initié par la Black Library en 2007, ce qui ne nous rajeunit pas. Pour ceux qui ont vécu l’épopée littéraire que constitue cette saga, cette nouvelle occupe sans doute une place particulière, le témoin d’une époque où le lecteur, probablement enthousiaste, mais peut-être dubitatif, devant cet OLNI, se demandait à quelle sauce il allait être mangé. Ayant sans doute voulu assurer le coup, la BL avait fait le sage choix de confier le début de la série à des contributeurs expérimentés, l’incontournable Dan Abnett en tête. Et force est de constater que, comme son Horus Rising pour les romans de l’Hérésie, The Lightning Tower a parfaitement accompli sa mission, c’est à dire fournir des fondations solides et inspirantes aux publications qui suivirent (qui se comptent aujourd’hui en centaines pour les nouvelles). Bénéficiant de la maîtrise narrative et de la patte littéraire du Wordmaster, cette soumission demeure à mes yeux l’une des meilleures introductions disponibles à cette franchise dans la franchise qu’est l’Hérésie d’Horus. En une vingtaine de pages, elle parvient ainsi à poser les bases de l’intrigue (une trahison monumentale mettant en péril le règne du bon Roy Empereur), présenter quelques personnages cruciaux, donner un aperçu satisfaisant de l’univers et de l’atmosphère de cette fin de 31ème millénaire, et esquisser la perte d’innocence que se révélera être ce conflit galactique. Si, en plus, le lecteur connaît ses classiques, il aura droit en sus à quelques détails fluff assez sympathiques, variant du cool-à-savoir-mais-pas-vraiment-important (la barboteuse de Rogal) au cryptique-mais-probablement-lourd-de-sens (le tirage de Malcador). Bref, véritablement la pierre sur laquelle la Black Library a construit sa cathédrale, et une « relique » de l’Hérésie à laquelle il convient de rendre hommage.

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The Kaban Project // Le Projet Kaban – G. McNeill :

INTRIGUE:

The Kaban ProjectSur la planète rouge, les masses industrieuses s’activent pour fournir à la Grande Croisade de l’Empereur les armes, armures, munitions et selfie sticks (très important) nécessaires à la conquête des étoiles. Notre héros, Pallas Ravachol, fait sa part en réparant les circuits imprimés des Serviteurs de son nouveau patron, l’Adepte Lukas Chrom. Entre deux insertions de cartes à puce, cet employé modèle décide toutefois de faire une petite pause dans l’arrière-salle du temple, où patiente sous très bonne garde un projet ultra secret : Kaban. Non pas que les huiles du Mechanicum se soient lancés dans la confection textile (après tout, à quoi servent les cabans quand on n’a pas de mer ?), mais plutôt dans des recherches pas très consensuelles, qui ont abouties en une machine intelligente et consciente. Comme Ravachol ne l’ignore pas, ce type de robot autonome n’est pas du tout du goût de l’Empereur, sans doute à cause d’un incident malheureux avec un Roomba un peu trop zélé en des temps très anciens. Il a même porté la nouvelle à son boss après s’être convaincu que le talent certain de Kaban de le vanner sur sa coupe de cheveux ne venait pas d’une banque de réponses pré-programmés très développée, pour découvrir que Chrom n’ignorait rien de l’entourloupe, mais avait obtenu la permission du Maître de Guerre Horus pour poursuivre son projet.

Ravachol, qui s’est entiché de Kaban et lui a appris à jouer à Magic the Gathering en cachette, est toutefois déchiré entre sa relation privilégiée avec l’énorme robot de combat qui trône dans la remise de Chrom, et sa fidélité envers l’Empereur, qui devrait le pousser à dénoncer l’expérimentation haram aux autorités compétentes. Le dialogue qui s’engage ce jour là avec Kaban est l’écho de ce mal-être intérieur, et n’est interrompu que par l’arrivée d’une escouade de Protectors, envoyé par ce petit fifou de Chrom mettre l’homme qui bricolait à l’oreille des cyborgs en retraite anticipée. Ce sort peu enviable lui est toutefois évité grâce à l’esprit d’initiative de Kaban, qui prend sur elle de flinguer les sbires de l’Adepte pour sauver la vie de son copain. Si c’est pas beau ça. Reconnaissant, mais passablement effrayé par la situation et inquiet de l’autonomie de la machine, qui s’est royalement assise sur les trois lois de la robotique, Ravachol décide de prendre congé de son patron, réquisitionnant au passage un quatuor de Serviteurs de combat pour lui servir de garde du corps. Et il en aura besoin car Chrom, alerté de l’échec de sa tentative de meurtre, met l’Assassin chevronnée et héliportée Remiare à ses trousses, avant d’aller apprendre la vie (artificielle) à cette petite rebelle de Kaban…

Début spoiler…La fuite éperdue de Ravachol et de ses gorilles sur chenilles finit par les mener jusqu’à la Basilique de l’Algorithme Béni, où notre héros trouve l’oreille (façon de parler) attentive d’un vieux prêtre pour vider son sac. Coup de bol, le cureton à piston est un impérialiste convaincu, qui l’enjoint donc à faire ce qui est en son pouvoir pour alerter l’Empereur de cette menace technologique. La Vache Folle décide donc d’aller porter l’affaire à son ancien mentor, l’Adepte Malevolus, dont il a quitté le service pour rejoindre ce traître de Chrom. Il espère ainsi pouvoir bénéficier du droit d’asile que Mars n’a toujours pas aboli, et donc être protégé des représailles de son ex-employeur.

Le chemin jusqu’au temple forge de Malevolus est toutefois très embouteillé, ce qui laisse largement le temps à Remiare de rattraper sa cible, même si elle a pris auparavant le temps d’aller torturer désosser le confesseur de Ravachol, par pur vice semble-t-il. Décidément, les prêtres de Graham McNeill ont bien du mal à finir ses histoires en un seul morceau1. Bien heureusement, les Serviteurs de notre héros font leur office, et arrivent à mourir suffisamment lentement pour permettre à leur protégé de se jeter sur le parvis du temple et de demander asile en ce lieu, après avoir plongé ses mains dans le bidon d’huile de vidange qui sert de bénitier aux fidèles, j’imagine. Et contre ça (et surtout contre le champ de force protecteur qui se déclenche immédiatement), même Remiare ne peut rien faire.

Un peu plus tard, et après avoir été accueilli par ce vieux Malevolus, pas rancunier pour un sou, Ravachol bénéficie d’une petite visite des ateliers de son ancien maître, spécialisé dans la construction des armures des Space Marines. Mal’ tient absolument à montrer à son invité ce qu’il considère comme être son chef d’œuvre, une armure Terminator flambant neuve et d’un noir de jais, qui se révèle être destinée à, je vous le donne en mille, Horus. Glups.

Car Malevolus faisait aussi partie de la conspiration des séides de Siri, ou quelque chose comme ça, et il annonce jovialement à Ravachol qu’il est re-re-tombé dans un piège, mouahahahahaha, pendant que Remiare fait des loopings maléfiques au plafond. Laissant son dernier serviteur se faire massacrer par la tueuse au tournevis, Ravachol tape son meilleur sprint vers la sortie, espérant contre toute attente échapper une nouvelle fois à ses poursuivants… et tombe nez à pare-choc avec Kaban, à laquelle Chrom a monté des roulettes de fauteuil, et qui peut désormais se déplacer. La machine intelligente s’est toutefois fait convaincre par son créateur que Ravachol voulait l’envoyer à la casse (ce qui n’est pas faux), perspective de carrière qui n’enchante absolument pas Mr Robot. Il n’est donc guère étonnant que notre histoire se termine sur le jet d’un bon saut de dés (Kaban étant armé comme un Titan Reaver), mettant notre pauvre réparateur de grille-pain à -23.743 PV. C’est ça aussi que d’être un rétrograde. ♫Is there (artificial) life on Maaaaaaars?Fin spoiler

1 : Voir ‘The Last Church’ dans ‘Tales of Heresy’.

AVIS:

The Kaban Project_Ill. 1On tient sans doute avec The Kaban Project la nouvelle de la BL qui traite le plus intelligemment du sujet de l’intelligence artificielle, trope central de la science-fiction. Si la GW-Fiction fait généralement l’impasse sur cette question pour des raisons fluffiques1, McNeill réussit à mettre la plume dans la porte de façon assez convaincante à travers la relation ambivalente et interdite entre Ravachol et sa Kaban au fond du jardin temple, ce qui lui permet de poser les questions intéressantes de ce sujet archi classique : fallait-il le faire ? Quelle sera la suite des événements ? Faut-il considérer l’autre comme un égal, un inférieur ou une menace ? Si les réponses apportées ici ne sont pas à mettre au même niveau, tant d’un point de vue intellectuel que stylistique, que celles des maîtres du genre que sont Asimov ou Dick, McNeill ne s’en sort toutefois pas si mal que ça pour une nouvelle de 50 pages devant s’intégrer dans un univers grimdark, avec des combats à gogo, des méchants très méchants, et, surtout, la nécessité de relier le bouzin à ce petit détail de l’histoire qu’on appelle l’Hérésie2. En plus de ça, on a le droit a pas mal de fluff martien, remontant jusqu’aux premiers temps de la colonisation de la planète (ce qui est l’occasion d’un autre clin d’œil aux pères fondateurs, ici Robinson et sa trilogie Mars), et donnant également quelques détails sur les relations, pas forcément très apaisées, entre Pépé et ses mécanos. Il ne s’agit pas de cracher dessus (ça fait rouiller).

D’un autre côté (et comme à chaque fois que je relis du McNeill, j’ai l’impression) je me suis pris à soupirer devant des faiblesses dans la construction et l’intrigue de la nouvelle, que je n’avais pas forcément repérées la première fois. Ainsi, je ne comprends pas/plus pourquoi le projet top secret méga sensible supra hérétique de Chrom et de ses copains a été mis sous le nez d’un adepte de bas niveau spécialisé dans la réparation des Thermomix. C’est quand même courir d’énormes risques pour pas grand-chose. Autre grief, la facilité un peu stupide de certaines péripéties, comme l’assassin qui s’en va torturer un prêtre juste pour le fun (de son propre aveu), alors qu’elle a une cible prioritaire à neutraliser de tout urgence. Cela permet certes de montrer à quel point cette époque est cruelle, mais ça reste tout de même assez concon dès lors qu’on réfléchit deux minutes.

Cela étant dit, The Kaban Project reste une soumission des plus intéressantes, à la fois pour la littérature hérétique/40K, et pour Graham McNeill, dont l’une des forces par rapport à certains de ses petits copains d’écritoire est de ne pas hésiter à tenter des trucs, et à envoyer des clins d’œil (à d’autres que lui, s’entend) au corpus SF dont la BL est plus ou moins lointainement apparentée.

1 : « L’IA, c’est mal. Moi Président, je l’interdirai. » Pépé, après avoir vu Terminator en M2.
2 : Jusqu’à quel point, je ne saurai le dire. Je n’ai rien vu passer jusqu’ici qui remettait au goût du jour Kaban ou ses descendants dans la série, mais je n’ai pas tout lu.

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Raven’s Flight // Le Vol du Corbeau – G. Thorpe :

INTRIGUE:

Raven's FlightPerturbé depuis une semaine par des rêves de corbeaux enflammés, le Praefactor Marcus Valerius de l’Armée Impériale tente d’interpréter comme il peut ces visions inquiétantes. Malheureusement, les indices sont ténus. Nous savons seulement que lui et son régiment ont été affectés au service de la Raven (ça veut dire corbeau) Guard et postés sur Deliverance, la lune natale de Corvus (ça veut dire corbeau) Corax (çA VeUt DiRe CoRbEaU), qui, selon toute logique, est arrivé avec le gros de sa Légion dans le système d’Isstvan pour punir la trahison du Maître de Guerre depuis une semaine. Ah, et le même Corax a dit à Marcus avant de partir faire son devoir que, je cite, « s’il avait besoin de lui, il l’appellerait ». Ah là là, cette énigme est vraiment trop complexe.

Convaincu par un échange avec son page Pelon pendant sa cérémonie d’habillage et de nattage (parce que notre empoté de héros ne sait pas faire ça tout seul apparemment) d’aller porter sa sinistre suspicion au Commandant Branne, que Corax a laissé en concierge de Deliverance avec quelques centaines de Marines pendant son absence, Marcus monte jusqu’au bureau de ce dernier, qui le reçoit très simplement en pantoufles et poncho1 beaucoup trop petit, qu’il a dû piquer à un aspirant pas encore changé en armoire à glace. Bref, la discipline a pris un coup dans le bec depuis le départ du patron sur Isstvan. Après un début de conversation un peu malaisant2, Marcus finit par cracher le morceau à son interlocuteur : il pense que quelque chose s’est mal passé lors de l’interpellation d’Horus, et il demande qu’on l’autorise à se rendre sur place pour en avoir le cœur net. Branne, qui a reçu des ordres stricts de la part du Primarque, refuse tout net de laisser de simples humains aller mettre leur nez dans une affaire ne regardant que les Astartes, et nous en restons donc là pour le moment.

Sur Isstvan V, pendant ce temps là, la situation est légèrement désespérée pour Corax et ses corbeaux. La Raven Guard est tombée dans le piège du Maître de Guerre et de ses alliés, et le Primarque emo (et pas émeu) a été contraint de donner l’ordre de la retraite générale, laissant les Salamanders et les Iron Hands mourir avec honneur dans leur coin. Ayant réussi à regrouper 4.000 Marines autour de lui, et sans possibilité de quitter la planète ni d’alerter le reste de l’Imperium de la traîtrise à l’œuvre, Corax se résout à tuer le temps en faisant ce qu’il sait faire de mieux : des embuscades. Ce sont les Iron Warriors qui goûtent les premiers à la colère du corbeau, une de leurs colonnes blindées étant assaillie par les survivants de la XIXème Légion. On voit alors le Primarque à turbines au turbin, ses capacités sur-surhumaines lui permettant sans mal d’enfoncer un flanc des renégats à lui tout seul, bien aidé par sa résistance impressionnante (encaisser un tir direct de canon laser :  ; encaisser les tirs de bolters de 80 Iron Warriors : ) et son grand fouet énergétique (qui, si on y réfléchit, est tout de même l’arme la moins pratique du monde pour un type spécialisé dans les assauts aériens furtifs).

Heureusement d’ailleurs, car en termes de leadership, Coco est une vraie bouse, ou fiente. Du style à dire à ses hommes sans sourciller que sa garde personnelle ne sert à rien (super pour le moral), ou encore à mentir à ses Capitaines sur la teneur de ses plans. Ah, et il lui prend aussi de partir en vadrouille solitaire pendant plusieurs jours, laissant les rescapés se débrouiller tout seuls en son absence. La raison de ces excursions secrètes ? Aller prendre des renseignements dans le camp adverse, qu’il peut pénétrer sans problème grâce à son super pouvoir d’invisibilité suggérée. En gros, s’il pense très fort qu’il est invisible, il le devient. Pourquoi ça me rappelle quelque chose… Ce qui est très pratique pour éviter de se faire accoster dans la rue par des militants d’Amnesty International, ou, dans le cas qui nous intéresse, d’aller verser une petite larme sur l’honneur souillé des Spess Mehreens (les dizaines de milliers de morts dans sa Légion, par contre, ça lui en touche une sans lui faire bouger l’autre3). Et le lecteur a le droit à un petit bout de fluff avec de l’Empereur dedans, donc on va laisser passer cette escapade.

Retour sur Deliverance, où la situation n’a pas progressé d’un iota. Marcus a toujours ses terreurs nocturnes, Branne refuse toujours de le laisser partir, et commence même à penser que la bougeotte du Praefactor est motivée par des sentiments séditieux. Qu’à cela ne tienne, Marcus rassemble son régiment, le fait embarquer dans ses vaisseaux, et se prépare à voguer vers Isstvan, sans la permission de Branne si besoin est. Sauf que ce dernier a en sa possession un petit gadget très rigolo appelé station de défense orbitale, et qu’il peut réduire les déserteurs en confetti en appuyant sur un bouton. Ce qu’il compte bien faire lorsqu’il est averti que la manœuvre pas si furtive que ça de Valerius. S’engage alors un dialogue absolument puéril, à base de « Ce que je m’apprête à faire, c’est de ta faute. » « Non, c’est toi. » « Chips. » « Contre-chips. », entrecoupé par de nouveaux arguments fallacieux de Marcus « Et si j’avais raison et que tu avais tort ?» Valerius, qui ne convainquent pas vraiment Branne. Pas que ce dernier soit capable de mettre le doigt sur les nombreuses faiblesses du raisonnement de son vis-à-vis, hein, mais plutôt qu’il tienne à suivre les ordres, et ne veuille pas avoir l’air d’un pigeon auprès de son Primarque (qu’il idolâtre tellement que sa chambre est recouverte de ses posters) si les rêves du Praefactor devaient s’avérer bidon. Alors que la tension est à son comble et que Branne se prépare à anéantir les contrevenants au couvre-feu, nous retournons sur Isstvan V. MAIS QUEL SUSPENSE MES PETITS AMIS !!!

Presque 100 jours se sont écoulés depuis le massacre du parking du Super U, comme l’histoire retiendra cet événement fondateur. Malgré tous ses efforts de subterfuge, fausses adresses et non réponse au téléphone, Corax se retrouve bel et bien coincé dans les plaines de Ghular par ces gueulards de World Eaters, menés par Angron en personne. Tout à fait convaincu qu’il va se faire démembrer vif par son psychopathe de frère, le Seigneur Corbeau harangue une dernière fois ses troupes en l’espace d’une seconde et demie, et attend tout bêtement de se faire cueillir par la patrouille. Prenant exemple sur leur père génétique, les quelques 3.000 Raven Guards survivants se pressent en rangs d’oignons à ses côtés, et se font donc pulvériser en grand nombre par les tirs de Whirlwinds ennemis. C’est pas comme si vous étiez sur une plaine qui s’étendait sur des centaines de kilomètres carrés, les oisillons. Est-ce la fin des harricorbeaux ? NON ! Car, semblant crever le ciel et venant de nulle part, surgit un Stormbird noir. C’est bien sûr la flotte de secours de Branne et Valerius qui est enfin arrivée, permettant aux derniers des pélicans de prendre leur envol, au nez et à la barbe d’Angron. EH BAH DIS DONC, JE NE L’AVAIS PAS VU VENIR CELLE-LA. Voilà donc comment la Raven Guard a réussi à se dépêtrer des filets d’Horus, et à quitter Isstvan V en un seul, mais tout petit, morceau. La suite dans Deliverance Lost

1 : En vrai, c’est un tabard, mais encore plus en vrai, c’est la même chose.
2 : « Comment allez-vous, cher Commandant Branne ? »
« C’est dans cette pièce que j’ai tué mon premier homme. J’étais tout jeune à l’époque. Corax était là, et je me souviens l’avoir vu arracher le cœur d’un garde de sa poitrine, et écraser le crâne d’un autre à main nue. »
« … »
« Je dois avouer que je m’ennuie un peu ces temps-ci. »
3 : De rémiges, hein. Evidemment.

AVIS:

Signant à la fois l’entrée de Gav Thorpe dans l’Hérésie d’Horus et le début de son cycle consacré à la Raven Guard, Raven’s Flight se situe dans la droite ligne des travaux de notre homme : globalement passable, mais parsemé d’éléments et de détails variant du peu abouti au franchement risible. Ici, c’est la partie consacrée aux divagations de Valerius et de Branne qui récolte le gros lot en matière de crispation, tant les échanges entre le Praefactor devin et le pragmatique Commandant laissent à désirer. On se croirait plongé dans un mauvais film catastrophe, avec Valoche dans le rôle du scientifique qui joue la Cassandre de service, et Branne dans celui du Président/PDG qui ne veut pas entendre les avertissements du trublion avant qu’il ne soit (presque) trop tard. Le pire dans tout ça, c’est que Thorpe n’explique même pas de façon convaincante comment le premier a fini par convaincre le second de la validité de ses idées. Alors que, au hasard, une petite vision reçue par Branne également aurait permis de plier l’affaire de manière facile et adéquate. Au lieu de ça, on doit se contenter de penser que l’inflexible Space Marine a fini par avoir un gros doute, et qu’il a donc désobéi à ses ordres sur ce seul motif. Bref, c’est décevant.

D’un autre côté, les passages sur Isstvan V, s’ils ne sont pas exempts de toute critique, sont bien plus intéressants. Au-delà des exploits martiaux d’un Corax increvable, c’est la caractérisation de ce Primarque discret qui fait tout le sel de ces parties, Thorpe ayant choisi, et c’est une bonne chose, de ne pas peindre un personnage sans failles, un simple super Space Marine engagé dans une bataille inégale contre les vilains traîtres d’en face. Au contraire, Corax apparaît comme asocial, distant, pessimiste, et parfois méprisant envers ses hommes, ce qui lui forge une personnalité plus mémorable que celle dont bénéficie certains Primarques loyalistes sans le moindre défaut. Le discret caméo de l’Empereur (et ses yeux bleus, information capitale) en milieu de nouvelle est également une addition bienvenue, tant au niveau du fluff que du service des fanboys. Au final, si on peut très bien se passer de la lecture de ce Raven’s Flight (et de toute la littérature touchant à la Raven Guard et aux Légions Brisées, si je force un peu le trait) dans la prise en compte de l’Hérésie au sens large, il s’agit néanmoins d’un texte potable, et qui fait figure d’introduction utile aux éléments de Deliverance Lost.

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Death of a Silversmith // Mort d’un Orfèvre – G. McNeill :

INTRIGUE:

Death of a SilversmithDans ses quartiers du Vengeful Spirit, un vieux Commémorateur, spécialisé en orfèvrerie, se débat futilement contre la mort qui approche. Sa trachée a en effet été écrasée par un de ses clients quelques minutes auparavant, pas parce que ce dernier était mécontent de son travail, mais plutôt parce qu’il ne souhaitait pas laisser de témoins de sa commande (on suppose qu’il a pris les tickets de caisse avec lui également). Avant d’apprendre le pourquoi du comment de cette tragique histoire, notre héros agonisant passe en revue les étapes les plus marquantes de sa longue vie, qui l’ont mené depuis le sol de Terra jusqu’à la moquette du Vengeful Spirit.

Destiné depuis son plus jeune âge aux travaux manuels, dans la droite ligne de son grand-père, également orfèvre, notre homme (que nous appellerons Bobby, parce que pourquoi pas) a eu la chance de commencer sa carrière à la fin des guerres d’Unification, et dans une région du monde déjà sous la coupe de Pépé, ce qui lui a permis d’éviter de se manger une botte de Guerrier Tonnerre dans le ventre, ou de voir sa cité rasée jusqu’aux fondations par les armées conquérantes de l’Empereur, ce qui est un plus pour assurer une continuité de l’activité professionnelle. Son talent lui permit en outre de travailler pour les grands de ce monde, confectionnant d’exquis bijoux, gardes d’épée, stylos, ou encore reliquaires, comme celui réalisé pour un Général ayant été récompensé de ses loyaux services par un bout de bannière Iron Hands, remise par le Primarque1 en personne, qui n’avait plus de cash sur lui à ce moment là.

De fil en aiguille, et sa réputation ne cessant de croître, Bobby fut approché par un vieux monsieur à l’épaisse crinière blanche, qui souhaitait le recruter pour son projet d’artistes couvrant la future Grande Croisade de l’Empereur. Après avoir poliment décliné l’offre du noble vieillard, qui lui remit malgré tout une enveloppe avant de partir, Bobby finit par accepter l’offre de Malcador (car c’était lui), sans doute convaincu par les menaces de mort et les dessins suggestifs que contenaient le pli. Il faut ce qu’il faut. Bref, voici notre orfèvre en route pour le Palais Impérial, et de là, pour le Vengeful Spirit d’Horus2 et des Luna Wolves. Le début de deux siècles de péripéties galactiques, de rencontres marquantes (coucou Ignace Karkasy) et de réalisations grandioses, dont certaines commandées par d’illustres clients. Ce fut le cas d’Hastur Sejanus, qui tenait à faire réaliser des chevalières pour les membres du Mournival, mais qui oublia d’aller chercher les bagouzes une fois ces dernières confectionnées. L’ultime réalisation de Bobby fut cependant réalisée pour un Légionnaire patibulaire, qui souhaitait obtenir un moule pour tirer des médailles représentant un loup et une lune. Travail facile pour notre héros, qui plia l’affaire en deux-deux, et se retrouva pris au dépourvu lorsque son client lui broya le larynx en guise de paiement, le laissant suffoquer sur le sol comme un poisson hors de l’eau, justifiant son acte par un cryptique « J’peux pas dire » à l’oreille de sa victime, avant de repartir.

Même si Bobby finit par être secouru par Sejanus, qui dans son empressement écrasera par mégarde l’anneau réalisé pour lui par ce dernier sous sa semelle énergétique – présageant le triste destin de ce membre du Mournival – il est trop tard pour le vieil orfèvre, qui n’aura que le temps de souffler la réplique assassine de Serghar Targost (car c’était lui) à son sauveteur. Mais que fait la Miviludes ?

1 : Ce qui voudrait dire que Ferrus Manus a combattu pendant les guerres d’Unification… ou que McNeill a sauté depuis le haut de la troisième corde sur le fluff de la Grande Croisade. Au choix.
2 : Ce qui voudrait dire qu’Horus avait déjà rejoint son Père avant le début de la Grande Croisade… ou que McNeill… (voir ci-dessus).

AVIS:

Petite nouvelle d’ambiance, sans aucune conséquence sur l’histoire avec un grand H de l’Hérésie, mais apportant une nouvelle perspective sur quelques uns des personnages et événements clés du début de cette dernière, Death of a Silversmith1 est à réserver aux inconditionnels de McNeill, qui trouve encore le moyen de se balancer un petit clin d’œil (mention de la dernière église de Terra, au-delà du « pont argenté », que l’Empereur a faite détruire…) mais surtout celui de massacrer le fluff en convoquant des Primarques dans son récit de façon totalement anachronique. Et on ne peut même pas l’excuser en mettant en avant la date d’écriture de cette nouvelle, car cette dernière date du début des années 2010, époque à laquelle l’Hérésie comptait déjà une bonne dizaine d’ouvrages, dont plusieurs écrits de la main du Mac. Ce gros et indigne fail est un peu rattrapé par le suspens que l’auteur laisse planer sur l’identité du tueur, que de petits indices permettront toutefois au lecteur attentif d’identifier sans trop de difficultés. On apprend également que les Loges n’étaient pas à la fête même avant Davin, ou en tout cas tenaient plus à leur confidentialité qu’à la vie d’un pauvre civil innocent. Pas de quoi réécrire l’histoire de l’Hérésie, mais intéressant tout de même.

1 : Je me demande encore aujourd’hui si ce titre est un hommage aux Kinks ou aux Smiths.

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Prince of Crows // Le Prince des Corbeaux – A. Dembski-Bowden :

INTRIGUE:

Prince of CrowsCoup de théâtre à Thramas ! Après des mois à s’échanger des insultes sur le Discord primarquiel (qui mérite donc bien son nom), Lion El’Jonson et Konrad Curze en viennent (à nouveau, remember ‘Savage Weapons’) aux mains. Et, cette fois-ci, ce duel se termine de façon sans équivoque par une victoire de Simba, qui égorge, étripe, empale, épile (à sec) et ébouriffe son frangin jusqu’à ce que l’ultime PV de ce dernier commence à choper un rhume. Après un moment de grâce tragique pendant lequel le temps suspend son vol, et à peine gâché par le refus du Nighthaunter de se mettre en PLS malgré les injonctions de son frère1, le seigneur de la nuit (pas Michou hein) s’écroule finalement au sol dans un « Gasp ! By jove ! Par Toutatis ! Mama mia ! Ventre saint gris ! Je suis mouru ! » lourd de conséquence. Un petit selfie duckface avec le presque cadavre, et Lionel décale, convaincu d’avoir enfin vaincu cet ennemi tenace.

Notre histoire passe ensuite dans une pièce enténébrée de l’Excoriator, vaisseau Night Lords où se trouve le salon d’esthétique de Curze. À l’intérieur, trois mystérieux individus discutent de sujets graves. Il s’agit des survivants du Kyroptera, le Mournival de la 8ème Légion, qui se réunit traditionnellement dans l’obscurité2, et qui doivent désormais décider du devenir de cette dernière. Si Kurze a été récupéré en plus ou moins un seul morceau de la surface de Shoel, son état est en effet désespéré, et ses forces ont subi une correction mémorable de la part des Anges. Pour l’heure, la seule option qui reste aux survivants est de se replier dans les ténèbres pour panser leurs plaies, avant de pouvoir songer à revenir stalker les loyalistes. Ces sombres – à tout point de vue – conciliabules sont toutefois interrompus par l’arrivée inespérée d’un autre membre du club, le Premier Capitaine Sevatar, mis en retard par son action d’arrière-garde ayant permis à d’autres rescapés de s’enfuir du champ de bataille. Un vrai héros, lui. Comme à son habitude, Jago ne mâche pas ses mots, et annonce tout net la couleur à ses collègues du Comex : il est hors de question qu’il laisse la Légion guéguerroyer plus longtemps contre les lionceaux, et qu’importe ce qu’en dit l’honneur. Ne trouvant pas d’oreille attentive ni d’épaule amicale vers lesquelles se tourner, il s’en va en grommelant, non sans avoir balancé sa célèbre lance sur la table de la réunion, ce qui surprend un peu le Capitaine Var Jahan. Il sait en effet que cette arme contient une balise de téléportation dans son manche, et… feinte du Père Lafeinte ! Une escouade de Terminators de l’Atramentar arrive sans crier gare, et flingue sans ménagement les pauvres Malithos et Cel Herec. Var Jahan, qui était champion de 50 mètres dans son ancienne vie, parvient à sortir de la salle, et est épargné par un Sevatar magnanime, mais bien décidé à reprendre en main la Légion. Il s’octroie donc les pleins pouvoirs, et nomme son propre Kyroptera parmi ses « potes » Légionnaires, incluant même un Raven Guard renégat et aphone dans l’auguste assemblée. Voilà une politique diversité dont bien des Conseils d’Administration du CAC 40.000 devraient s’inspirer.

Nous suivons pendant quelques jours la nouvelle vie de Sevatar, rythmée par des visites régulières à l’infirmerie où Curze passe son temps à rebooter ses systèmes, au grand désarroi des Apothicaires de garde, des discussions stratégiques avec ses pairs quant au futur des Night Lords, que le Premier Capitaine voudrait fortement décentraliser, et des prises de bec avec Ekra Trez, le Mange-Pêché personnel du Nighthaunter3, qui, de son aveu même, n’a pas super bien fait son travail récemment. À la fois confident, thérapeute et Xanax humain du Primarque, Trez a pour fonction de vider la tête de Curze de ses idées et rêves les plus noirs, ce qui lui avait permis de fonctionner plus ou moins normalement jusque là. Les derniers temps ont toutefois été difficiles, comme en témoignent les monceaux de cadavres défigurés et démembrés qui jonchent les quartiers privés de Konrad, ce qui n’empêche pas Sevatar de les squatter pour organiser ses petites réunions de direction. On apprend à cette occasion que le nouvel surhomme fort de la Légion souffre d’une affliction secrète, contre laquelle il lutte en s’empêchant de dormir. Et ce n’est pas l’énurésie. Et, bien qu’il trouve la tendance de Trez à l’appeler par son petit nom au lieu de lui donner du Premier Capitaine, comme le voudrait le protocole, totalement crispante, il épargne toutefois l’agaçant psyker pour tenter une expérience visant à tirer Kurze de sa cadavérique catalepsie. Il lui faudra pour cela « ouvrir des portes qu’il ne pourra plus refermer »…

Début spoiler…Car Sev’ est un psyker qui ne s’assume pas, mais qui accepte de sortir son potentiel du placard dans lequel il l’avait relégué pour entrer en contact avec l’esprit de son père. Cette plongée dans les abysses lui permet ainsi de revivre l’enfance pour le moins difficile du petit Konrad, alternant entre lectures de Kant, Hobbes et Machiavel et séances de torture, meurtre et cannibalisme. La projection s’arrête au moment où le Batman de Nostramo reçoit la visite de Pépé et de quatre de ses frères, et où il s’aperçoit de la présence d’un voyeur dans ses souvenirs. Ayant menacé Sevatar de lui révéler sa destinée, ce que le Capitaine souhaiterait éviter, si possible, et taillé le bout de gras avec son fils préféré, ou en tout cas, le moins détesté, à propos de la déchéance de sa Légion, Curze éjecte l’apprenti sorcier de sa psyché au moment même où sonne l’alerte générale. Les Dark Angels ont retrouvé la trace de leurs cousins, et ils ne sont (toujours) pas contents.

Les Night Lords n’étant pas vraiment en position de livrer la belle (de nuit) en l’état, Sevatar ordonne la dispersion générale de la Légion, dont le destin sera de ne plus jamais se rassembler. Pendant que ses frères partent faire des bêtises dans le Warp, notre héros rassemble cinquante vaisseaux autour du Nightfall et fonce sur l’ennemi pour gagner du temps. Son but est de transpercer la flotte adverse pour pouvoir s’éclipser à son tour pendant que les Dark Angels feront une marche arrière… et cela fonctionne presque. Un grain de sable aux cheveux gras et aux dents effilées du nom de Konrad Curze, enfin réveillé, décide en effet de venir se glisser dans les rouages de ce plan bien huilé, forçant son vaisseau à se diriger droit sur l’Invicible Reason pour un safari suicidaire. Ne pouvant pas laisser son père se faire tuer sans réagir, Sevatar n’a d’autre choix que d’ordonner à l’Atramentar de se téléporter sur le vaisseau amiral des Dark Angels, pendant que lui se retrouve à faire du stop pour se rendre sur place. La lose. Heureusement, il peut compter sur le soutien sans faille de la chef d’escadron Taye Karenna, possible cousine éloignée du héros, qui l’autorise à enfourcher son starfighter pour une traversée mouvementée jusqu’au pont d’atterrissage des loyalistes. Une fois sur place, et après avoir nettoyé le vomi dans son casque, le Prince des Corbeaux4 trace une route sanglante dans les coursives du vaisseau ennemi, et parvient enfin à rejoindre ses hommes et son Primarque, engagés dans un dernier carré furieux au milieu de la salle de collection de bigoudis du Lion.

Ce combat inégal et peu réfléchi ne pouvant se terminer que d’une seule façon, Sevatar se retrouve finalement au trou, en compagnie des quelques survivants Night Lords de l’échauffourée. Seule consolation pour les renégats, Curze a réussi à disparaître dans les profondeurs de l’Invicible Reason en utilisant ses super pouvoirs de lâche. C’est déjà ça. La situation reste tout de même compliquée et précaire pour Sevatar et ses ouailles, mais comme le dit la chanson : « ♫ Noir c’est noir, il me reste l’espoir… ♫ »Fin spoiler

1 : C’est assez drôle en fait. Même si j’en doute, je pense que la VF aurait dû traduire ça par « Tombe. Tombeuuuuh ! »
2 : Cela remonte à l’époque héroïque où les premiers Night Lords avaient oublié de payer leur facture d’électricité au Mechanicum. Une tradition fondatrice.
3 : Là aussi, c’est plutôt comique.
4 : Un titre dont il a hérité du fait de son attachement pour ces oiseaux, qu’il nourrissait du temps de sa jeunesse sur Nostramo avec des petits bouts de p…équenauds. Le pain blanc est très mauvais pour eux, c’est bien connu.

AVIS:

Poursuivant sur sa lancée nocturne, Aaron Dembski-Bowden met sa plume au service d’une Légion délaissée de l’Hérésie, et livre un tableau sans concession des Night Lords à la fin de la Croisade de Thramas. Pour le dire simplement, tout dans de Prince of Crows est plus abouti, plus fouillé et plus passionnant que l’amuse-bouche que constituait Savage Weapons (et qui était déjà très bien, c’est dire le niveau). En plongeant dans les arcanes de cette Légion semblable à nulle autre et mettant sur le devant de la scène les personnages tragi-comiques – dans le sens littéral du terme – de Sevatar et Konrad Curze, ADB joue habilement des sentiments du lecteur envers ces antihéros absolus, qui, malgré leurs tendances au meurtre, à la torture et à la tromperie, restent toutefois très attachants. Ceci est particulièrement vrai du Premier Capitaine Night Lords, aussi bien capable de faire assassiner de sang froid ses rivaux pour une simple divergence de point de vue, ou de tuer des enfants pour en nourrir ses corbeaux de compagnie ; que de rester en arrière-garde pour permettre à ses frères de s’enfuir, ou à risquer sa vie pour secourir son Primarque. Si on ajoute à cela son sens de la répartie et son goût pour les blagues absurdes, on tient sans doute l’un des Space Marines les plus intéressants de la GW-Fiction, loin devant les fades paladins loyalistes clonés en masse par la BL. De son côté, Kurze est dépeint en monstre sensible, dont les motivations honorables ont été perverties par l’environnement impitoyable dans lequel il a grandi. En ceci, le Nighthaunter est peut-être l’incarnation parfaite du futur Imperium de son Père : un cauchemar sanguinaire où la fin justifie toujours les moyens. Dernier personnage d’importance, la pilote Taye Karenna (et ses copains voilés) apporte un éclairage bienvenu sur l’organisation de la Légion, qui malgré sa réputation effroyable et ses crimes atroces, peut compter sur le support d’une foule de serviteurs et suivants humains. Si ADB ne prend pas ici le temps d’explorer en détails ce paradoxe, il donne envie d’en apprendre plus sur la mentalité et les motivations du personnel non Astartes des Night Lords, qui devrait avoir toutes les raisons du monde de la galaxie pour déserter, et ne l’a pourtant pas fait.

Si Prince of Crows brille grâce à ses personnages complexes et fascinants, cette novella vaut aussi le détour en matière de fluff. Écrite pour réaliser la jonction entre la fin de la Croisade de Thramas et l’arc de l’Imperium Secondus, elle se paie également le luxe de poser les bases de l’organisation (ou plutôt, la non-organisation) des Night Lords au cours des millénaires suivants, et, surtout, donne un aperçu passionnant de la terrible enfance de Konrad Curze sur Nostramo, des méthodes qu’il a utilisées pour faire revenir l’ordre sur sa planète, et sa rencontre fatidique avec l’Empereur et ses frères. En quelques dizaines de pages, Dembski-Bowden brosse un portrait fouillé et nuancé du Primarque justicier, être perverti et torturé… mais qui bénéficie de circonstances atténuantes. Un des aspects les plus intéressants de ce flashback fondateur, qui aurait eu sa place dans un roman Primarques, est à mes yeux la discussion entre Sevatar et son père génétique à propos de la déchéance des Night Lords, qui ne serait que le miroir de celle de son commandant. Cette relation d’amour-haine entre Primarque et légionnaires est caractéristique de l’approche d’ADB des Légions qu’il aborde dans ses écrits (cf le dialogue entre Khârn et Argel Tal dans Betrayer), et lui permet de donner une profondeur supplémentaire à des factions que d’autres auteurs présentent comme de simples vilains en armure énergétique.

Derniers aspects positifs à mettre en avant, la construction et le rythme de l’histoire donnent vraiment envie de savoir comment cette dernière se poursuit et se termine, faisant d’ADB un publicitaire de talent pour les travaux de ses petits camarades. Si Abnett n’avait sans doute pas besoin de ce coup de pouce pour son The Unrembered Empire (bien qu’il ne s’agisse pas de son meilleur bouquin, si on en croit les retours), Haley (Pharos), Thorpe (Angels of Caliban) et Annandale (Ruinstorm) peuvent remercie leur petit camarade pour ce relais efficace, qui a je pense dû les aider à vendre quelques copies de leurs bouquins. Bref, une des meilleures novellas de l’Hérésie, qui peut justifier à elle seule l’achat de toute anthologie dans laquelle elle figure. C’est dit.

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Et c’est ainsi que se termine cette revue de ‘Shadows of Treachery’, recueil faisant figure de conclusion du premier segment de l’Hérésie, d’après le postface de Laurie Goulding. Ce dernier permet de mieux comprendre la genèse particulière de cet ouvrage composite, dont la raison d’être principal fut de servir d’écrin aux deux novellas nécessaires à la bonne progression de la série. Si ces dernières valent tout à fait le déplacement (ou l’achat) et la lecture, avec une mention spéciale à ‘Prince of Crows’, le reste des soumissions s’avère être plus inégal, et assez anachronique par rapport au déroulé de l’Hérésie au moment de la sortie de ce tome #22. Nous sommes en effet après la bataille de Calth et la campagne de Signus Prime, et juste avant le lancement de la Croisade des Ombres (Betrayer) et l’apothéose de Fulgrim (‘Angel Exterminatus’). Partant, ‘The Dark King’, ‘The Lightning Tower’, ‘The Kaban Project’ et ‘Death of a Silversmith’ apparaissent déjà comme des reliques d’un passé lointain (comme ‘Deliverance Lost’ est sortie la même année que ce recueil, on peut à l’inverse considérer que l’inclusion de ‘Raven’s Flight’ est pertinente). Cela fait de ‘Shadows of Treachery’ une anthologie un peu particulière, et destinée en premier lieu aux lecteurs déjà familiers et intéressés par les arcs narratifs Iron Warriors/Imperial Fists et Night Lords/Dark Angels, et/ou les amateurs de courts formats hérétiques, qui seront enchantés par la présence de quelques nouvelles de très bonnes factures au sommaire de ce bouquin.

Rendez-vous prochainement, loyaux ou hérétiques lecteurs, pour l’analyse de ‘The Primarchs’, regroupement de quatre novellas consacrées à… (je vous laisse deviner), et précurseur probable de la série parallèle (presque) du même nom.

AGE OF DARKNESS [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue critique du recueil Age of Darkness (L’Âge des Ténèbres dans la langue de Céline Dion), la deuxième anthologie de courts formats publiée par la Black Library pour le compte de l’Hérésie d’Horus, en l’an de grâce 2011. On prend les mêmes et on recommence1, vous entends-je soupirer ? Eh bien, oui et non. Il est vrai que certains auteurs déjà présents dans Tales of Heresy poursuivent ici sur leur lancée, à l’instar de Dan Abnett, Graham McNeill, Gav Thorpe et James Swallow. Mais derrière ce carré de gros bonnets, une quintette de « petits nouveaux » est également de la partie. Et quelle belle brochette de newbies (pour l’Hérésie d’Horus en format mignonnette en tout cas) les amis : Aaron Dembski-Bowden, Nick Kyme, Chris Wright, John French et Rob Sanders. L’avenir nous dira s’ils ont du potentiel…

Sommaire Age of Darkness [HH]

En plus de ce casting un peu remanié, Age of Darkness, qui est sorti deux ans après la précédente anthologie, place son propos fermement dans le début de l’Hérésie. Horus a piqué sa crise d’adolescence, cassé ses jouets2, claqué la porte de l’Imperium paternel et est parti errer sur les routes comme un marginal en compagnie d’individus peu recommandables. Pour Pépé et ses fidèles, l’heure n’est désormais plus aux sessions de crapette dans la véranda du Palais Impérial (aussi appelé Bhoutan, dans un lointain passé), mais bien à la mobilisation et à l’action. Nous aurons donc droit à nos premières batailles rangées entre fils et petits-fils fayots ou indignes de l’Empereur, au début d’affrontements mythiques, comme la Croisade de Thramas, et à l’arrivée de personnages récurrents et jusqu’alors inédits, comme le croulant Barabas Dantioch3 et l’irrésistible Jago Sevatarion. Bref, un contenu résolument hérétique, et peut-être essentiel à la compréhension de la suite de la saga. En tout cas, nous allons tenter de le déterminer.

1 : Ou plutôt, on commence l’Hérésie pour de bon, ‘Tales of Heresy’ étant en avance sur son temps et en retard sur son titre. Je me comprends. Vous aussi, peut-être.
2 : Si par jouets on considère les Légions des Salamanders, Iron Hands et Raven Guard, en plus de ses loyalistes de fistons.
: Qui peut être légitiment tenu responsable de l’arrivée des Tyranides dans la galaxie (mais c’est une autre histoire, et une autre époque).

Age of Darkness.

Rules of Engagement // Les Règles du Combat – G. McNeill :

INTRIGUE:

Rules of EngagementNous retrouvons le premiarque de la classe, Roboute Guilliman, en train d’écrire (quelle surprise) dans son bureau, situé au cœur de son palais résidentiel sur Macragge. Le manuscrit (dans tous les sens du terme) sur lequel il travaille actuellement, et qu’il considère déjà comme son chef d’œuvre, n’est autre que le Codex Astartes, que les derniers événements de l’Hérésie, et notamment l’attaque des Word Bearers sur Calth1, l’ont convaincu de terminer séance tenante, quand bien même les demandes d’audience de la part de ses Maîtres de Chapitre ne cessent de s’abattre sur la permanence téléphonique du patron des 500 Mondes. Qu’importe que sa Légion ait pris un méchant coup dans le nez, que la Croisade des Ombres soit en train de ravager Ultramar, ou même qu’Horus poursuive son chemin vers Terra, tant qu’à faire. Qu’importe aussi que Guilliman passe pour un despote demeuré auprès de ses hommes par son mutisme persistant2 en cette période de troubles. Rob’ est persuadé que l’Imperium de son Père est bon pour la décharge, mais espère que son prochain bouquin parviendra à sauvegarder les idéaux sur lesquels le rêve paternel a été bâti. Ce qui est vendre la peau de MoM avant qu’il ne soit mort, pour sûr, et limite hérétique sur les bords, tout comme les deux mots que Guiliman inscrit en tête d’un nouveau chapitre de son magnum opus : « Imperium Secundus »…

Nous partons ensuite sur les traces de Remus Ventanus, Capitaine de la 4ème Compagnie des Ultramarines, aussi appelée la Troublesome 4th (la SEGPA du Segmentum, en VF), alors qu’il mène ses hommes dans ce que la nouvelle présente comme « l’engagement #94 ». Tiens tiens, faudrait-il y voir un message caché par ce coquin de McNeill ? Seul l’avenir nous le dira (mais, oui, évidemment)… Les Ultras défendent Talassar contre un assaut de la Death Guard, dont la fameuse tenacité pose beaucoup de problèmes à nos bleusailles. Pour ne rien arranger, les hommes de Ventanus sont tenus d’appliquer les commandements tactiques donnés par le Primarque, sans possibilité d’y déroger. Une hérésie (wait…) pour les esprits libres de la 4ème, dont le point de vue est abondamment relayé par le Sergent Barkha à son Capitaine. Mais Ventanus, assagi par les événements de Calth, se conforme aux instructions, et commet l’impensable pour un être (masculin) normalement constitué : il se réfère à la notice d’utilisation. C’est beau la post-humanité, tout de même. Résultat des courses : les affreux de Mortarion finissent par être vaincus, de façon un peu miraculeuse pour un observateur lambda, mais qui fait au contraire beaucoup de sens pour notre héros, qui reste admiratif devant le génie de Guili.

Nous enchaînons ensuite les batailles à travers les 500 mondes, Ventanus et ses frères se frottant aux World Eaters sur Prandium, puis aux Salamanders sur Quintarn. Car oui, les Salamanders ont rejoint le Maître de Guerre. À moins que. À MOINS QUE… Bref. À chaque fois, le même schéma se répète : Ventanus parvient à arracher la victoire des griffes de la défaite en appliquant scrupuleusement les instructions du patron, malgré les protestations outrées de la part de ses collègues et équipes devant ce qu’ils considèrent, en pauvres normies qu’ils sont, comme des ordres dénués de raison. La leçon est claire : Roboute a plié le wargame, et il suffit désormais de choisir parmi les menus déroulants mémorisés par son beta testeur de choc Ventanus pour vaincre l’adversaire. Cependant, lors du dernier affrontement de la série victorieuse de la 4ème Compagnie, qui prend place sur Macragge et oppose les Ultramarines aux Sons of Horus menés par leur Pôpa en personne, notre fringant Capitaine s’aperçoit dans la douleur que, malgré son respect absolu des consignes, il ne peut empêcher les hérétiques de prendre la capitale planétaire, et consigner ainsi Ultramar aux livres d’histo- et mettre fin à sa série de victoires personnelles. Car, évidemment, toutes ces batailles n’étaient que de simulations grandeur nature organisées par Guilliman3 pour peaufiner ‘La Guerre pour les Nuls’, et les Ultramarines ont bien sûr le temps et les ressources nécessaires pour faire du paintball à grande échelle pendant que la galaxie brûle autour d’eux, haha.

La nouvelle se termine sur un dialogue entre Ventanus, chafouin d’avoir été mis en échec, et Guilliman, à l’esprit occupé par son projet d’OPA « amicale » sur les 500 mondes, résumant parfaitement la position du Primarque : il faut appliquer scrupuleusement le Codex Astartes parce qu’il prévoit tout, sauf dans les cas où ce n’est pas le cas, et où il est donc toléré d’improviser. C’est pour ça que Roboute a tenu à réaliser ses tests avec Ventanus, qui sait faire preuve d’indépendance… mais a été tellement obnubilé par les consignes qu’il n’a pas trouvé comment remporter cette dernière bataille. Ceci souligne l’importance pour les Ultramarines de ne jamais rien prendre pour argent comptant… sauf quand leur Primarque va dévoiler son futur projet secret, qu’il faudra alors appliquer sans réfléchir, même si cela mènera la Légion à être considérée comme traîtresse. Quelle clarté limpide. Guilliman aurait pu être ministre de l’Éducation Nationale, s’il était né un peu plus tôt. En tout cas, nos deux compères en viennent à espérer qu’ils se retrouveront face à Horus lorsque l’Hérésie arrivera à sa fin. Ce qui ne sera pas le cas, évidemment. C’est ça aussi, de faire des tournois de DoW IV en ligne au lieu d’aller aider son Pépé.

1 : Petite remarque meta : au moment de l’écriture de cette nouvelle, la série n’avait pas encore abordé cette bataille (‘Know No Fear’ et ‘Mark of Calth’). McNeill se projette donc dans le futur.
2 : Comme il le dit lui-même, l’obéissance aveugle de ses sbires lui suffit amplement. On se demande de qui il tient ça…
3 : Qui met lui-même la griffe à la patte dans un souci d’authenticité, en endossant le rôle d’Horus dans la dernière simulation. Notons le très joli heaume qu’il portait à l’occasion, et/ou la fragilité psychologique de Ventanus, ému aux larmes par une barbute alors qu’il se fout d’avoir oublié ses parents.

AVIS:

Difficile d’évaluer ce ‘Rules of Engagement’ avec ma perspective de fluffiste averti, qui a lu ce texte pour la première fois en 2020, soit près de dix ans après sa publication dans le recueil Age of Darkness, et en savait donc « trop » sur certains aspects. Ainsi, la mention d’Imperium Secondus, balancée nonchalamment par McNeill en début de nouvelle, n’aurait certainement pas eu le même impact si j’avais pris connaissance de cette dernière avant que ce développement du background n’ait été présenté en détail par la Black Library. De la même manière, savoir ce qu’est le Codex Astartes peut gâcher un peu du suspens du récit, McNeill ne « révélant » à son public que les batailles menées par Ventanus sont factices qu’en conclusion de son texte, ce qu’un lecteur un minimum averti aura deviné bien plus tôt1. Enfin, les pensées de traîtrise entretenues par Ventanus au cours de la nouvelle ne sont jamais clairement expliquées par l’auteur, ce qui laisse une zone d’ombre sur ‘Rules of Engagement’ peut-être pas voulue par McNeill. En effet, la seule fourberie d’importance à relever ici est le projet de sécession fomenté par Guilliman, mais dont il n’a mis personne au courant au moment où l’histoire se déroule. Tout cela reste donc bien mystérieux. Je dois donc me déclarer incompétent pour livrer un jugement impartial sur la qualité de ce texte, même si le plus gros problème que j’ai avec ce dernier (le globiboulga philosophique entourant le Codex Astartes, qu’il faut appliquer à la lettre sauf quand il ne le faut pas) est indépendant de la « temporalité de lecture » de cette nouvelle. Pour finir sur un point positif, j’ai toutefois apprécié la manière dont McNeill parvient à faire ressortir la manière dont les relations entre Légions loyalistes ont été ébranlées depuis le début de l’Hérésie, Ventanus n’ayant apparemment aucun problème à trouver des raisons de haïr les Salamanders2, sans que ces braves amphibiens aient fait quoi que ce soit pour mériter une telle hargne. Comme on dit en Russie, le crapaud aimerait casser des noix, mais n’a pas de dent. Deal with it.

1 : Personnellement, je pense que McNeill a trop flirté avec la ligne blanche bleue en mettant en scène une bataille contre les Salamanders (dont on peine à imaginer comment les quelques survivants d’après Isstvan auraient réussi à mener une opération militaire contre Ultramar, et ce sans aborder le problème posé par ce retournement inédit d’une Légion loyaliste), puis en faisant participer « Horus » au siège de Macragge. Your are fake news, Graham !
2 : McNeill aurait pu poussé le bouchon un peu plus loin en mettant en scène l’affrontement « hérétique » ultime : Ultramarines vs Ultramarines. Ça aurait été intéressant.

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Liar’s Due // Le Fruit du Mensonge – J. Swallow :

INTRIGUE:

Liar's DueMalgré le déclenchement de l’Hérésie, la vie suit son cours normal à la surface de Virger-Mos II, planète agricole de pouillème ordre située tellement loin en périphérie de l’Imperium que ses habitants doivent se contenter des podcasts envoyés par des YouTubers de Terra pour se tenir informés de l’avancement du conflit. L’épisode qui est retransmis le jour où commence notre histoire, dans la ville 441, est cependant un peu spécial, dans la droite lignée des ‘Noces Pourpres’ de Game of Thrones2. Et pour cause : on annonce à nos braves péquenauds que l’Empereur a cassé sa pipe, et qu’Horus a gagné la guerre et pris le trône paternel. Stupeur et tremblements parmi la populace, sur laquelle souffle bientôt un vent de panique. Que va devenir leur petite colonie ? Quelle position adopter après ce retournement de situation que nul n’avait vu venir ? Faut-il attendre de la visite dans les jours/mois/années à venir de la part du nouveau maître de l’Imperium et de ses armées ? Quel bruit fait le renard ? Des dizaines de questions à la gravité inédite fusent de part et d’autre, tandis qu’au milieu de la ville, notre héros, le jeune et idéaliste Leon Kyyter, a bien du mal à digérer la nouvelle.

Car Leon est un lointain descendant des fanboys pratiquant le « Hobby » sur Terra en M2. En plus de posséder une armée de figurines en métal (et en bois, ça coûte moins cher) peinte avec amour, il est un lecteur assidu du fluff de la propagande impériale, et possède même une authentique douille de bolter (les ravages du merchandising). Si son père lui avait permis, il se serait fait tatouer « I ❤ Pépé » sur le front. Aussi, apprendre de but en blanc que son idole absolue a tiré sa révérence le chagrine au plus haut point. Laissant ses concitoyens débattre entre eux de la marche à suivre, il s’en va relayer la nouvelle au seul résident du foyer de jeunes travailleurs que son père et lui font tourner, le sieur Mendacs, Commémorateur de son état.

Liar's Due_IllustrationMendacs est arrivé deux mois plus tôt à 44, annonçant aux locaux estomaqués par la survenue d’un estrangé dans leur communauté que sa mission était de peindre quelques paysages bucoliques de champs et de nuages, sans doute à fin d’illustrer les cartes postales et calendrier des postes du Segmentum. On ne saura jamais ce que notre Commémorateur a fait ou dit à son supérieur pour être envoyé sur une mission aussi pourrie, mais Mendacs prend son boulot avec philosophie, comme la nouvelle que lui apporte Leon, d’ailleurs. À la grande surprise de son jeune ami, il se montre en effet assez posé dans sa réaction, et rassure ce dernier que cette annonce n’aura sans doute aucune conséquence pour Virger-Mos II, dont l’enclavement galactique et le peu de valeur stratégique mettent à l’abri d’une invasion. Tous les locaux ne partagent cependant pas l’avis du chill-ommémorateur, et le conseil municipal improvisé le soir même tourne bientôt au vinaigre, loyalistes, opportunistes et jemenfoutistes n’arrivant pas à trouver un consensus sur la décision à prendre, et quel drapeau faire flotter sur la devanture de la mairie. La tension monte encore d’un cran lorsque des traînées lumineuses sont aperçues dans le ciel nocturne, faisant redouter à nos braves ruraux que l’invasion de leur patelin a déjà commencé. Dès lors, il ne faut pas s’étonner que la plèbe finisse par faire des choses stupides (sa spécialité depuis des temps immémoriaux), comme tirer d’abord et poser des questions après. C’est ainsi que l’apprenti vigilante local, Dallon Prael, tue par accident son pote de comptoir Silas Cincade avec le fusil laser de sa grand-maman, ayant pris la Kangoo de son compaing, parti chercher des nouvelles à la capitale, pour un Land Raider des Sons of Horus. Un tragique accident.

Début spoiler…Pendant que la psychose progresse gentiment mais sûrement dans sa cité, Leon décide de suivre un Mendacs parti en vadrouille en mode sneaky dans les rues de 44. Le Commémorateur se dirige vers le Skyhook, l’ascenseur orbital entièrement automatisé utilisé pour acheminer les récoltes de la planète jusqu’aux cargos spatiaux qui transporteront le précieux quinoa de Viger-Mos II jusqu’aux confins de l’Imperium. Déterminé à comprendre les raisons de ces agissements étranges, Leon parvient à sauter dans une cabine à la suite de Mendacs, et se retrouve quelques minutes plus tard sur la plateforme d’échange du Skyhook, qui se trouve être le lieu de résidence de la seule Astropathe de la planète. Cette dernière a passé les deux derniers mois emprisonnée dans un champ de stase posé par Mendacs, qui a mis ce temps à profit pour effectuer son œuvre de désinformation de masse. C’est lui qui a envoyé le message qui a mis le feu aux poudres en contrebas, utilisant le matériel et la formation de pointe fournis aux agents de l’Alpha Légion pour ce faire. C’est également lui qui a fait basculer la planète dans la paranoïa en programmant quelques drones faire s’écraser d’innocentes météorites à la surface de Virger-Mos II. Sa mission accomplie, il ne lui reste plus qu’à convaincre l’Astropathe d’envoyer un Tweet à ses patrons pour les informer de la réussite des opérations, avant de repartir vers de nouvelles aventures, non s’en s’être débarrassé des témoins gênants de son triomphe : l’Astropathe en question… et pas Leon. Mendacs décide en effet d’épargner le garçon, trop content d’avoir eu, pour une fois, un public témoin de ses manigances, et confiant dans l’incapacité de ce dernier d’enrayer la spirale de méfiance et de violence à l’œuvre sur la planète. En cela, il a probablement raison. Des dangers des fake news…Fin spoiler 

1 : Ça en dit long sur le niveau de motivation des colonisateurs au moment où ils sont arrivés sur la Saint-Sauveur-de-Ginestoux de l’Ultima Segmentum. Pas de noms pour les villes, juste des numéros.
: Que les habitants de Virger-Mos II ont pu commencer à visionner seulement depuis deux mois.

AVIS:

James Swallow prend son monde à contre-pied avec The Liar’s Due, dont le ton s’éloigne résolument du grimdark industriel auquel notre homme nous avait habitué jusqu’ici. J’ai trouvé pour ma part que ce récit se plaçait davantage dans la lignée de la SF classique (notamment le Skyhook, qui m’a fait penser à l’ascenseur spatial de la trilogie Mars de Kim Stanley Robinson), avec son intrigue majoritairement non-violente et placée à hauteur d’homme, que dans celle de la GW-Fiction telle qu’on la connaît. Je dois reconnaître que j’ai apprécié ce parti pris, qui change agréablement de ce que l’on peut lire ailleurs dans l’Hérésie d’Horus, et permet de réfléchir sur les implications concrètes de cette dernière pour les milliers de planète ayant eu la chance de ne pas retrouver au centre des violents combats entre loyalistes et renégats. Cette apparente tranquillité n’a sans doute pas toujours été synonyme de sérénité pour les populations aux secondes loges de cette guerre galactique, et la mise en avant de la cinquième colonne d’Alpharius, et du rôle joué par les agents de ce dernier en matière de propagande, est la bienvenue. Je regrette simplement que Swallow n’ait pas jugé bon d’entretenir un peu de suspens dans sa nouvelle, la duplicité de Mendacs étant établie très tôt dans l’histoire, ce qui entame un peu de son intérêt. Mais la balance reste malgré tout positive, et je place The Liar’s Due en tête de la production de cet auteur, confortablement devant la majorité de ses écrits Blood Angelesques et Sœurs de Bataillesques.

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Forgotten Sons // Fils Oubliés – N. Kyme :

INTRIGUE:

Forgotten SonsC’est sur la vision d’un Salamander (presque) à poil surplombant la forme recroquevillée d’une humaine en détresse que Nick Kyme fait ses débuts dans l’Hérésie d’Horus. Le surhomme en pagne s’appelle Heka’tan, et est Capitaine d’une Légion placée sur la liste des espèces en voie d’extinction par l’IUCN. La frêle (en comparaison) jouvencelle se nomme Persephia, et est une ancienne Commémoratrice devenue aide soignante1 du Capitaine Arcadese des Ultramarines depuis l’Edit de Dissolution. Tous trois se trouvaient à bord d’un Stormbird les amenant jusqu’à la capitale de la planète Bastion, mais victime d’une avarie grave en chemin, qui a provoqué les turbulences ayant mis Persephia au tapis. Quelques secondes plus tard, l’appareil se crashe, ne laissant que notre trio de choc comme survivants. Après avoir convaincu l’acariâtre Arcadese de laisser son auxiliaire de vie les accompagner jusqu’à Cullis, leur destination finale, nos héros partent donc vers la cité, croisant un autochtone en chemin2.

Avant d’aller plus loin, il est nécessaire de donner un peu de contexte à notre propos. Arcadese et Heka’tan ont été envoyés sur Bastion pour une mission d’un genre un peu particulier : remporter le concours d’éloquence organisée par le gouvernement local pour décider qui de l’Empereur ou d’Horus il soutiendra. Comme aucun des belligérants n’a trop envie d’envoyer ses légionnaires conquérir la planète en son nom, mais que cette dernière possède un potentiel militaire indéniable, la question sera donc tranchée à l’amiable, pour changer. Nos deux Space Marines, guère indispensables à la conduite du conflit pour raisons médicales et organisationnelles, respectivement, ont donc été chargés de convaincre Bastion d’honorer son allégeance à Pépé, Arcadese en tant qu’avocat de la défense, et Heka’tan, qui était présent sur Isstvan V et est encore traumatisé par la disparition de son Primarque, comme témoin principal. Dans le coin opposé, c’est l’itérateur renégat Ortane Vorkellen qui représente les intérêts du Maître de Guerre, et se frotte donc les mains d’avance de ce combat très déséquilibré sur le papier. Après tout, si mon sort devait être tranché devant une cours de justice, je préférerais être défendu par Dupont-Moretti que par Hulk Hogan et Mr T. Reprenons.

Après une petite balade, les loyalistes, qui soupçonnent que leur accident d’avion n’est pas le fruit du hasard, arrivent devant le Sénat de Cullis, où, au grand énervement d’Arcadese, on leur demande de laisser leurs armes et armures au vestiaire. Après avoir juré son grand Empereur qu’il ne payerait jamais deux euros par article, alors qu’il pouvait tout garder sur lui sans problème, l’Ultramarine finit par obtempérer, et les comparses sont introduits devant l’auguste assemblée, où attend déjà Vorkellen. Persephia, de son côté, est chargée par son boss d’aller récupérer « discrètement » son bolter et de lui apporter tout aussi « discrètement », pour le cas où la situation dégénérerait. Fort heureusement pour la malheureuse larbine et la tout aussi malheureuse histoire de Nick Kyme, la sécurité de Cullis est plus laxiste que les principes moraux de Fulgrim, et elle parvient donc à récup- se perdre dans les niveaux inférieurs de l’auditorium, et à arriver en vue du réacteur nucléaire qui se trouve en sous-sol. Parce que c’est tout à fait logique de faire siéger la plus haute instance législative d’une planète entière sur un site classé Seveso seuil haut. Sur place, notre auxiliaire fait une mauvaise rencontre : un Iron Warrior à l’impressionnante détente sèche, qu’elle a surpris en train d’installer quelque chose sur la console de contrôle de la centrale. On Se DeMaNdE bIeN cE qUe C’eSt AlOrS ! Notre petite futée ne courra cependant pas assez vite pour éviter de faire connaissance avec l’épée tronçonneuse du traître, ce qui est tout à fait tragique.

Un peu plus haut, le débat suit son cours, les deux parties rivalisant de stupidité pour faire basculer Bastion dans leur camp. Si on peut excuser les Space Marines de ne rien y connaître en rhétorique, même si la tendance d’Arcadese à prendre toutes les mouches que Vorkellen lui envoie voler autour de la tête est rapidement lassante, notre itérateur s’avoue être redoutablement c*n lui-même, ce qui équilibre un peu les débats. Il axe ainsi son argumentation sur l’exemple de Monarchia, qu’il arrive à présenter de telle façon que tout être intelligent en retiendra que l’Empereur a puni Lorgar après que ce dernier ait une nouvelle fois ch… prié dans la colle. Et donc qu’il l’avait bien cherché. De son côté, en attendant d’être appelé à la barre pour raconter l’atrocité d’Isstvan, Heka’tan croit apercevoir une forme menaçante au premier balcon, puis s’en va chercher Persephia parce que « ça fait quand même longtemps qu’elle est partie, la ptiote », laissant son collègue pédaler dans la Roboute tout seul dans son coin. Profitant une fois encore de la permissivité de ses hôtes, le Salamander ne met pas longtemps à trouver le cadavre de Persephia, que ce tâcheron d’Iron Warriors n’a pas pris la peine de beaucoup camoufler. Utilisant son super pouvoir de détection des sources de chaleur, Heke’Tan parvient ensuite au réacteur, où il tombe sur le râble du renégat. Malgré le fait qu’il ne soit ni armé, ni armuré, le loyaliste parvient à se défaire de son adversaire, lui aussi complètement cramé du bulbe. J’en veux pour preuve qu’il ne prend pas la peine d’utiliser son pistolet bolter pour descendre son assaillant, et finit donc empalé sur sa propre épée tronçonneuse, puis balancé dans le noyau nucléaire (Palpatine like, c’est dire à quel point cette installation semble sécurisée). Une fois cette petite vengeance accomplie, Heka’tan trouve un bout de papier déchiré indiquant « -out faire pét- », et constate que l’écran du terminal sur lequel travaillait l’Iron Warrior affichait toutes les autres installations nucléaires de la planète… et ne fait pas le lien. C’mon duuuuuuuuuuuude. Il s’en retourne donc gentiment à l’auditorium, où Arcadese s’est fait humilier par son adversaire.

Forgotten Sons_IllustrationUne délibération plus tard, il est temps pour les dirigeants de Bastion de rendre leur verdict. Ce dernier est cependant interrompu au moment où le juge prononce : « Je kiffe trop Hor- » par l’arrivée de Heka’tan, juste à temps pour avertir Arcadese de la présence d’un sniper au balcon. Oui, le même qu’il avait cru voir quelques minutes plus tôt, et qu’il avait laissé tranquille pour partir en vadrouille. Pour sa défense, et pour rester dans le thème des personnages de cette nouvelle, il s’agit du plus mauvais sniper du monde, puisqu’il se passe trois secondes entre l’avertissement du Space Marine et le tir, destiné à Vorkellen, qu’Arcadese intercepte avec ses gros pecs huilés. La situation devient encore plus confuse qu’elle ne l’était précédemment, nos héros parvenant toutefois à se frayer un chemin jusqu’au tireur, qui se trouve être l’autochtone croisé sur la route de Cullis3, ayant pris la place de l’un des gardes du Sénat. Mais l’autochtone lui-même défie les pronostics en parvenant à matérialiser une épée en os à partir de sa propre jambe, et à s’échapper sans difficulté dans les galeries supérieures de l’auditorium. Kyme décrète alors que personne ne peut plus sortir de la pièce, ce qui était totalement faux jusqu’à présent, mais permet d’accélérer la suite de l’intrigue. Littéralement deux lignes plus loin, c’est le retour de la revanche du fils de la momie, soit un nouvel affrontement entre les deux surhommes et l’assassin… qui se révèle être un Custodien. Non ? Si. Mais en fait non, comme ce rusé de Heka’tan le démontre par l’absurde à son comparse, après que l’escarmouche ait été interrompue une nouvelle fois. Ce n’est pas un vrai Custodien, car sinon les deux compères seraient déjà morts. Dit comme ça…

Finalement, nos héros parviennent à mettre la main au collet de l’invité mystère, mais non sans qu’Heka’tan ait pété le pif à Arcadese, et que ce dernier lui ait avoué qu’il devrait utiliser du déo (it’s complicated). Feinté et contre-feinté par les Space Marines, l’entité homicidaire est victime d’un bear hug carabiné de la part de Heka’tan, qui appuie tellement fort que sa victime finit par révéler sa véritable identité… un lacrymole. Un assassin Callidus renégat aurait tout aussi bien fait l’affaire, mais après tout, c’est le droit des auteurs de la BL que de piocher dans le fluff le plus obscur pour faire des révélations téléphonées. En tout cas, ça n’explique pas ce que ce transformiste Xenos faisait là, ni pourquoi il a agi de la sorte, apparemment sans coopération avec l’Iron Warrior dérouillé (haha) par Heka’tan un peu plus tôt. Bref, c’est la grosse m*rde dans cette histoire, qui heureusement arrive à son terme lorsque les réactions en chaîne nucléaires causées par les bombes laissées par l’Homer Simpson renégat finissent par se déclencher. Nos héros comprennent alors que le but du Maître de Guerre était d’intimider les planètes se ralliant à l’Imperium en faisant de Bastion un exemple de ce qu’il leur réservait… Sauf que Bastion s’était déclaré pour lui. Ce qui devrait donc avoir l’effet inverse à celui recherché. Bon, moi, j’ai décidé que j’en avais assez à ce moment là, et me suis dépêché de finir les dernières pages de la nouvelle, qui voient la planète partir autant en cacahuète que le scénario de Kyme, Heka’tan tomber dans un trou et décider de faire son Gandalf plutôt que de laisser Arcadese lui sauver la vie, soi disant pour aller retrouver ses frères et son père morts sur Isstvan (et moi qui croyait que les Salamanders étaient réputés pour leur résistance), et l’Ultramarine repêcher Vorkellen en guise de lot de consolation, pour honorer la dernière volonté de son frère d’armes. Voilà comment se termine ce récit des fils oubliés, qui auraient sans doute dû le rester si vous voulez mon avis…

: Arcadese est un peu le Rick Grimes du 30ème millénaire. Il a été gravement blessé sur Ullanor et est tombé dans un coma dont il n’est sorti qu’une fois l’Hérésie commencée. Tu parles d’un choc au réveil. Rafistolé par ses toubibs, il dépend en grande partie des augmétiques qui lui ont été implantées, et que Persephia aide à entretenir.
2 : Oui, c’est important. En tout cas pour Nick Kyme. Vous comprendrez plus tard.
3 : Quand je vous disais que c’était important !

AVIS:

On reconnaît sans mal la « patte » WTFesque du Nick Kyme du début des années 2010 dans ce Forgotten Sons, qui est je pense la nouvelle de l’Hérésie d’Horus la plus comiquement ridicule que j’ai jamais lue1. « Grâce » à ses personnages demeurés prenant des décisions stupides pour tenter de coller à une intrigue lacunaire, cette histoire s’avère être aussi mémorable qu’épuisante, Kyme parvenant à surenchérir sur le n’importe nawak avec une constance aussi admirable qu’inquiétante. Il n’y a guère que les flashbacks d’Isstvan V qui affligent Heka’tan qui parviennent à relever un peu le niveau, en braquant la caméra sur Vulkan juste avant que le géant vert de Pépé n’aille danser le MIA chez le Nighthaunter. Pour le reste, c’est un bon gros nanard hérétique que Nick Kyme nous sert, comme il avait l’habitude de le faire pour 40K à la même époque (‘Thunder from Fenris’, ‘Fireborn’). Je vous laisse déterminer si cela manquait à la série…

1 : On verra bien si quelqu’un arrive à ravir cette « distinction »  à Mr Kyme dans le futur.

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The Last Remembrancer // Le Dernier Commémorateur – J. French :

INTRIGUE:

The Last RemembrancerFrench place l’action à quelques encablures à peine de la sainte Terra, dans les geôles d’une prison secrète dissimulée sur Titan (pas sûr que Mac Aldor y ait déjà envoyé ses premières super recrues faire du camping et, accessoirement, s’entraîner à poutrer du démon à l’abri des regards à ce moment là, mais il n’en reste pas moins que cette lune a l’air d’être ze place to be quand il s’agit de cacher des trucs top secrets). On y suit la confrontation entre Rogal Dorn, assisté de Iacton Qruze, avec le premier et dernier des Commémorateurs, Solomon Voss. Dûment renvoyé à l’expéditeur par Chaossimo (c’était le temps béni de l’Hérésie où les gars ne regardaient pas à la dépense: sacrifier un gros vaisseau un kilomètre de long, des milliers de membres d’équipage et de soldats juste pour faire une blague pourrie à un frère qu’on ne peut pas blairer, c’est bling bling) après avoir bénéficié d’une visite thématique de la galaxie offerte par Horus himself, Voss est assez logiquement soupçonné par Dorn et Qruze de jouer maintenant dans le camp adverse.

Cependant, French déplace rapidement le débat du classique « loyaliste ou hérétique? » vers une nouvelle problématique, à savoir: la fin justifie-t-elle toujours les moyens, ou encore: la défense de valeurs peut-elle justifier qu’on renonce à ces dernières, même temporairement? Le souci de transparence/propagande qui avait mené l’Empereur à créer les Commémorateurs lui retombe à présent sur le coin du nez (qu’Il avait aquilin), car il va sans dire qu’autoriser celui que le texte présente comme étant le plus grand écrivain de son temps à raconter tout ce qu’Horus lui a fait voir durant son trip cosmique n’est pas vraiment une grande idée pour le moral des troupes. Écartelé entre l’idée qu’il se fait de l’Imperium et les décisions borderline qu’il va lui falloir prendre pour le préserver de l’anéantissement, Dorn va finir par trancher dans le vif (littéralement), perdant du même coup un peu plus de ses illusions vis à vis du monstre qu’il a contribué à créer.

AVIS:

Clairement une bonne petite nouvelle, qui si elle n’apporte pas grand chose en terme de fluff à la grande fresque que constitue les résilles d’Aude Russe, permet de reprendre contact avec quelques seconds rôles attachants de cette dernière, en plus de délivrer le questionnement moral qui constitue sa raison d’être de manière assez fine. On aurait étudié ça en philo au lycée, j’aurais sans doute été plus attentif.

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Rebirth // Renaissance – C. Wraight :

INTRIGUE:

RebirthRetour au bercail compliqué pour le Capitaine Menes Kalliston et son escouade de Thousand Sons. Partis au Warp vauvert sur les instructions de leur Primarque six mois auparavant, ils ont tout raté de l’arrivée remarquée des Space Wolves, Custodiens et Sœurs de Bataille sur Prospero, et de l’expulsion dans l’Immaterium dont le Cyclope et ses quelques fistons survivants ont fait les frais1. Malgré la présence d’un Corvidae2 (le Sergent Revuel Arvida) dans son effectif, Kalliston ignore tout bonnement ce qu’il s’est passé sur la planète des sorciers, transformée en planète des cendriers par les bons soins des loulous pendant son absence. Pas très pro pour un Thousand Sons, vous en conviendrez. C’est donc ce qui motive notre héros à aller mener une petite due diligence sur le terrain, malgré les vagues mais mauvais pressentiments de son subalterne.

Sur place, les légendaires facultés cognitives des fils de Magnus ne mettent pas longtemps à conclure que quelque chose, ou quelqu’un, hante toujours la surface dévastée de Prospero. Les indices concordent vers la piste lupine, d’autant plus aisée à soupçonner que l’inimité entre les frères Husse (Lemaneur et Magueunne) est connue de tusse, euh, de tous. Ces savantes spéculations sont toutefois repoussées à plus tard lorsque l’un des gardes du corps de Kalliston prend un bolt en pleine tête, ce qui donne d’autres chats à fouetter à l’inspecteur Gadget. Walking like an Egyptian jusqu’au couvert le plus proche, il donne l’ordre à ses hommes de le rejoindre pour essayer de regagner ensemble leur transport…

J’opère ici une ellipse concave qui me permettra de ménager un peu de suspens à mon propos. Nous retrouvons un peu plus tard Kalliston en train d’émerger du kohl (le cirage, c’est bon pour les Dark Angels), nu comme un ver et attaché à une chaise dans une pièce plongée dans la pénombre. « Comme dans Casino Royal ! » réalise notre héros cultivé, qui se prend alors à craindre pour l’intégrité de ses bijoux de famille. Enfin, c’est sans doute ce qu’il aurait pensé s’il se souvenait de quelque chose. En l’état, le mauvais coup qu’il a reçu sur le crâne lorsqu’un missile krak est venu le photo-bomber lui a retourné le ciboulot, au point qu’il a même du mal à se souvenir de qui il est, et de comment il est arrivé ici. Quant à ses pouvoirs psychiques, ils commencent péniblement à revenir une fois son interrogatoire débuté. Car, bien évidemment, cette mise en scène funeste a pour but de prévenir le lecteur que quelqu’un, ou quelque chose, a les moyens de faire parler Kalliston… qui est plutôt OK avec ça. Après tout, il lui faut du temps pour pouvoir lancer un sort de démenottage que ses capacités d’Athanean3 ne laissent absolument pas envisager. La magie de… la magie. Bref.

Rebirth_IllustrationLa discussion s’engage donc entre le Capitaine abandonné et son interrogateur, qui prend bien soin de rester dans le noir pour laisser planer un vieux doute sur son identité. Mais on ne la fait pas facilement à ce rusé de Kalliston, qui, d’après la respiration bestiale, la voix gutturale et la tendance à l’énervement de son interlocuteur, a tôt fait de comprendre qu’il se trouve en présence d’un Space Wolf. Tout content de sa propre ingéniosité, il se permet même de titiller l’égo de son tortionnaire, oubliant un peu vite que le type en peau de slip énergétique attaché sur une chaise, c’est lui. Résultat des courses, il se mange une belle correction après avoir demandé à appeler son avocat, trait d’humour évidemment peu partagé par son vis-à-vis. Ce dernier riposte toutefois (autrement que par la violence) en faisant exprès de ne pas révéler à Kalliston ce qui s’est passé sur Prospero, information que le Thousand Son donnerait cher pour connaître. Après quelques minutes d’échanges de petites piques et de grosses torgnoles, c’est enfin le moment de jeter bas les masques, ou, dans notre cas, d’allumer la lumière. Et le colosse musculeux aux yeux injecté de sang et au comportement maniaque qui fait face au prisonnier se révèle être…

Début spoiler…Line Renaud. Ou plutôt, son descendant lointain, Khârn des World Eaters (et pourquoi pas d’abord, hein ?). Incompréhension compréhensible de la part de Kalliston, qui se trouve très Kallis-con devant ce retournement de situation. Pour sa défense, rien ne ressemble plus à un loup qu’un chien, même si on peut se poser la question pour les carlins. Bref, les Thousand Sons ont été pris en chasse et massacré par les suivants d’Angron, qui sont arrivés sur la planète après la bagarre (ce qui a dû les énerver) pour aller effacer le numéro personnel d’Horus du téléphone de Magnus (ou l’équivalent), ce qui a dû les mettre vraiment en rogne. Ils se foutent bien de savoir quel camp ont rejoint les Astartintellos, qu’ils méprisent copieusement, comme le reste des Légions d’ailleurs. Kalliston, qui pense que son vis-à-vis cherchait également la réserve de Xanax de Magnus pour gérer son stress de façon plus efficace, a alors la mauvaise idée de proposer un deal à Khârn : une thérapie complète assortie d’un stage de méditation tantrique pour retrouver sa paix intérieure, contre sa libération. Se passe alors une longue seconde pendant laquelle l’Ecuyer d’Angron semble hésiter… avant de décider bien sûr de corriger le maraud qui a osé sous-entendre qu’il était fou à lier. Et contre un personnage nommé spécialiste du corps à corps, notre héros ne fait pas le poids, même s’il arrive à se libérer de ses liens pour la bagarre finale. Surclassé par la puissance de son adversaire, Kalliston finit donc au tapis, puis dans le tapis, puis sous le tapis, au fur et à mesure que Khârn le réduit en porridge. Personne n’aime les psychiatres, c’est connu.

Finissons notre histoire et revenons en arrière pour suivre l’émancipation du dernier Thousand Son en un seul morceau de la nouvelle, le Sergent Arvida. Grâce à ses super pouvoirs de divination, il arrive à esquiver les ennemis et les balles avec un peu plus de succès que ses camarades, et échappe ainsi à la mort et à la capture. Le poids du nombre l’empêchant de secourir Kalliston, et son transport ayant été détruit par les World Eaters, notre loup solitaire joue un peu avec le feu en collant un bolt dans le casque du Capitaine Khorneux fort occupé à violenter la dépouille mortelle de ses frères d’armes, avant de partir comme un dératé dans le dédale carbonisé de Tizca. Tout finit cependant bien pour notre héros de rechange, dont le don de double vue lui a donné la certitude qu’il repartirait de la planète en vie. Bienvenue au club des personnages nommés, p’tit gars ! N’oublie pas de prendre tes chaussettes de scenarium avec toi pour la suite !Fin spoiler

1 : Après tout, il ne faut pas compter sur Leman Russ pour appliquer la trêve hivernale. Ça doit bien le faire rigoler.
2 : Les présentateurs météo de la Légion (ils voient le futur).
3 : Les psychologues de la Légion (ils lisent dans l’esprit).

AVIS:

Pour ses débuts dans l’Hérésie, Chris Wraigth a voulu soigner son lecteur avec une nouvelle à suspens. Cette intention louable s’est toutefois heurtée à une réalité que le futur seigneur de Terra ne pouvait pas vraiment deviner au moment où il a soumis son texte à la BL: l’évolution du personnage de Khârn dans la série. Car si on a droit dans ce Rebirth à un berzerk de Khorne écumant de rage et guère maître de ses émotions, dans la droite lignée du positionnement choisi par Bill King pour cette figure chaotique dans ses propres écrits1, l’écuyer d’Angron est au contraire devenu sous la plume d’Aaron Dembski-Bowden la tête pensante et froide de sa Légion, jusqu’à un stade avancé de l’Hérésie tout du moins. De ce fait, le voir sombrer dans une démence sanguinaire au lendemain du sac de Prospero apparaît avec le recul comme un faux raccord narratif, dont Wraigth n’est certes pas coupable, mais qui réduit le plaisir de lecture de cette nouvelle.  Le plus ironique dans tout ça est que n’importe quel autre Capitaine des World Eaters aurait magnifiquement fait l’affaire, alors que la présence au casting de cette célébrité, utilisée donc à contre-emploi par l’auteur, dessert ce Rebirth.

Cette déception évacuée, il faut reconnaître que Chris Wraigth livre une histoire assez correcte, sérieusement bâtie et respectueuse du fluff Thousand Sons et hérétique déjà établi – à l’exception de celle notée ci-dessus, évidemment – qui lui permet d’introduire son personnage récurrent d’Arvida, que l’on retrouvera (comme présagé en conclusion de la nouvelle) plus loin dans l’Hérésie2, et pas forcément du côté où on l’attendait. Et c’est plutôt heureux, car le « héros » malheureux Kalliston n’inspirait ni intérêt, ni sympathie à l’auteur de ces lignes. Ce ne sont pas toujours les meilleurs (personnages) qui partent les premiers, heureusement…

1 : Et dans une moindre mesure, Graham McNeill et Ben Counter dans ‘False Gods’ et ‘Galaxy in Flames’.
2 : ‘Allegiance’, ‘The Last Son of Prospero’.

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The Face of Treachery // Le Visage de la Trahison – G. Thorpe :

INTRIGUE:

The Face of TreacheryC’est l’heure de l’after dans le système d’Isstvan. Après avoir massacré tous les loyalistes leur étant tombés sous le gantelet sur Isstvan V, les fidèles d’Horus s’appliquent à passer la serpillière dans les moindres recoins, débusquant ça et là quelques Raven Guards déplumés, Iron Hands rouillés, ou, dans le cas de notre héros, le Lieutenant-Commandant Nigh Vash Delerax des World Eaters, des Salamanders carbonisés. Ayant raté le fun du site d’atterrissage, Delerax se rattrape comme il peut en passant les abords du système au peigne (ou, dans notre cas, au croiseur) fin, à la recherche des rares survivants de l’hécatombe. Une tâche ingrate mais nécessaire, compliquée par la présence à bord de sa Barge de Bataille d’un inspecteur du travail de l’Alpha Legion, chargé de contrôler la bonne conduite des opérations. En bon World Eater, Delerax a toutefois beaucoup de mal avec l’autorité, la contrariété, ou même la physique appliquée1, et fait comprendre à son bras droit, le plus diplomate Kordassis, que le plénipotentiaire horusien n’a pas intérêt à lui baver longtemps sur les rouleaux s’il ne veut pas finir avec son code de conduite dans le fondement. Le farouche guerrier est toutefois rappelé en orbite d’Isstvan V (après qu’il ait fini de tester ses torpilles Warp sur le vaisseau Salamander ayant eu la malchance de croiser sa route, paskifôpadékoné, non plus) par une communication pressante de son Primarque, qui, entre deux footings dans les montagnes à la recherche de Corax et de ses survivants, enregistre un podcast encore plus furibard que celui d’Alex Jones2, où il passe le plus clair de son temps à se chauffer tout seul et à insulter son couard de frère.

Plus loin, mais pas trop, c’est une autre flotte, celle menée par le Commandant Branne de la Raven Guard et le Praefactor Marcus Valerius de l’Armée Impériale, qui s’approche des lieux du carnage. Les funestes et aviaires visions reçues par le second ont fini par convaincre le premier d’aller jeter un œil dans le système d’Isstvan, où Corax a emmené le gros de sa Légion pour clouer le bec d’Horus et de ses groupies, sans savoir qu’il volait tout droit dans un piège3. Alors que le Space Marine ne se départit pas de sa prudence et furtivité naturelle, son comparse semble avoir sombré dans une profonde dépression, doublée de tendances stupidement suicidaires. Du genre à envoyer des messages radio au premier vaisseau Iron Hands qui passe à proximité pour prendre des nouvelles, en priant très fort pour que ce dernier ne soit pas hostile, ou qu’un vaisseau ennemi ne surprenne pas la communication. Les preuves suggérant que la flotte loyaliste a été détruite s’accumulant au fur et à mesure que les secouristes s’approchent du soleil local, le circonspect Branne est sur le point de chuchoter la retraite lorsqu’il capte le dernier épisode d’InfoWars, par lequel il apprend de la bouche éructante de haine d’Angron que Corax est toujours en vie, et fait du camping sauvage sur Isstvan V. Il n’en faut pas plus pour pousser le Commandant à mettre le cap sur la planète, utilisant les vaisseaux de Valerius pour faire distraction tandis que les siens, protégés par leur VPN surpuissant, se faufileront jusqu’à l’orbite.

Cette savante manœuvre manque toutefois d’échouer lorsque Delerax (et surtout sa Barge de Bataille) se présente à l’improviste, prêt à caillasser du corbeau après avoir écorché de la salamandre. Malgré les ordres transmis par le haut commandement félon de prioriser la destruction des leurres canards corbeaux au bombardement des positions occupées par l’insaisissable Corax, le World Eater se montre déterminé à seconder son pôpa, ce qui provoque des remontrances assez sèches de la part de son superviseur. Voyant que les mots ne suffiront pas à faire entendre raison à ce chien fou de Delerax, ce dernier finit par se rendre sur le pont de commandement pour glisser lui-même quelques glaçons dans le slip énergétique du capitaine. Delerax, trop heureux d’avoir une occasion « d’accidenter » son garde-chiourme, fait signe à Kordassis d’enlever par mégarde la sécurité de son pistolet bolter…

Début spoiler…Et se retrouve donc fort étonné lorsque son second lui colle son flingue sur la tempe. Car si l’Alpha Légionnaire était Alpharius, Kordassis l’était aussi (c’est un fan club puissant), ce qui fait de Delerax le maillon faible. Un petit bolt dans la tête plus tard, tout est bien qui finit bien pour la flotte de secours de la Raven Guard, qui peut récupérer ce qu’il reste de sa volée sans être molestée par les renégats. Ça tombe bien, c’était exactement ce qu’ils voulaient aussi…Fin spoiler

: En témoigne ce passage où il engueule son équipage parce que ce dernier n’a pas jugé bon de mettre les réacteurs en surchauffe pour arriver plus vite à destination
2 : Dont il a sans doute piqué le nom, d’ailleurs.
3 : Je me fais rigoler tout seul en imaginant Horus lancer des bouts de pain derrière une vitre et Corax s’écraser dessus comme une bouse parce qu’il ne voit pas le verre, en bon oiseau.

AVIS:

SThe Face of Treachery est la première nouvelle publiée par Gav Thorpe pour le compte de la Raven Guard, dont il deviendra par la suite le principal Commémorateur, il apparaît rapidement à la lecture de ce texte qu’il prend la suite d’un arc narratif déjà initié, comme le manque d’introduction des personnages de Marcus Valerius et de Branne, qui sont pourtant au coeur du récit, le laisse apparaître. Et pour cause, avant The Face of Treachery, il y eut Raven’s Flight, un audio drama sorti en 2010, dans lequel est relaté le début de la quête mystique de Valerius vers Isstvan, à la suite d’un rêve l’avertissant du funeste destin des loyalistes. Comme la BL ne jugea bon de publier Raven’s Flight sous forme écrite que dans Shadows of Treachery, autre anthologie de nouvelles de l’Hérésie sortie en 2012, nous nous retrouvons donc avec une histoire racontée à l’envers dans les bouquins, ce qui est légèrement gênant pour la compréhension et l’appréciation de l’oeuvre.

Ce point technique évacué, on peut alors se pencher sur la nouvelle en question, et rapidement conclure qu’il s’agit d’un honnête filler, assurant la transition entre les nuits agitées de Valerius (Raven’s Flight) et celles de son bien-aimé Primarque (Deliverance Lost). Le principal intérêt de cette soumission, dont l’absence de suspense (évidemment que les derniers Raven Guards vont être secourus) ne peut pas vraiment être reprochée à son auteur, vue la « fonction » narrative de ce texte, réside dans l’intervention de l’Alpha Legion dans le sauvetage des corbeaux déplumés de Corax. Savoir que la plus retorse des Légions renégates est intervenue pour éviter l’extinction de la galinette cendrée sur Isstvan constitue un bel ajout au fluff classique de l’Hérésie, et fait office de bon teaser pour le roman suivant de Thorpe. C’est à peu près tout ce que je retiens de The Face of Treachery, dont les protagonistes apparaissent sinon comme des archétypes caricaturaux de leurs Légions, avec Delerax dans le rôle du gros rageux World Eaters, qui ne peut s’empêcher de casser des trucs dès qu’il s’énerve (heureusement qu’ADB est intervenu, tout de même), Branne en maître infiltrateur super sneaky, et ces fourbes d’Alpharius, toujours fidèles à eux-mêmes…

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Little Horus // L’Autre Horus – D. Abnett :

INTRIGUE:

Little HorusDans la famille Horus, il y a bien sûr le père, Lulu la Percale1, mais il y a aussi le fils, Aximand, surnommé Horus Minus par ses petits camarades de jeu. Ou l’autre Horus, si on veut être corporate. Capitaine de la 5ème Compagnie des Sons of H…imself et membre du Mournival, c’est un individu qui compte au sein de la Légion. Son tort aura de ne pas avoir la personnalité, la fabuleuse destinée, ou le destin tragique de ses condisciples mal lunés, ce qui l’a contraint à jouer les seconds couteaux pendant ce début d’Hérésie. Tout le monde ne peut pas se retrouver sous les feux des projecteurs, il faut bien qu’il y ait des gens qui se battent (ou font semblant de se battre) à l’arrière-plan. Pourtant, notre héros du jour a des arguments à faire valoir, à part sa première place au concours inter-Segmentum des sosies de Michel Blanc, s’entend. C’est ce que cette nouvelle d’Abnett nous propose de découvrir.

Le propos prend place quelques temps après les événements d’Isstvan, alors que les Sons of Anarchy Chaos commencent leur course de fond en direction de Terra. Sur leur chemin se trouve le monde de Dwell, farouchement loyal à Pépé et trop militarisé pour être ignoré par les renégats. De plus, un petit comique en fer blanc du nom de Shendrak Meduson commence à faire parler de lui, et pas en bien. Très mécontent d’avoir retrouvé son Primarque rétréci à l’essorage, ce Capitaine Iron Hand a mis sur pied une force de guérilla galactique, qui s’est faite une spécialité de titiller les flancs du Maître de Guerre. Si Meduson parvient à rallier Dwell à sa cause, son pouvoir de nuisance en sera décuplé, et ça, Horus ne le souhaite pas le moins du monde. Alors que la Légion se prépare à illuminer la planète, nous surprenons une discussion entre les derniers Mournivaliers encore debout. Aximand, qui s’est mis à rêver que quelqu’un le regardait, et à entendre une respiration mystérieuse autour de lui depuis la purge des Sons, serait pour une reconstitution de cette saine institution. Il faudrait pour cela des candidats dignes de ce nom, et alors que lui penche pour un petit nouveau prometteur du nom de Grael Noctua, même pas encore Capitaine mais c’est pas grave, Abaddon se contente d’égrener les noms des types de sa Compagnie jusqu’à ce qu’Aximand finisse par lui accorder Falkus Kibre. Tope là mon gaillard, cochon qui s’en dédit.

Chargé de la prise du Mausolytique, croisement entre une morgue et une bibliothèque où les défunts de Dwell sont gardés sur étagère pour que leurs descendants puissent bénéficier de leur savoir, Aximand entraîne ses hommes, ainsi que son stagiaire Noctua, à l’assaut du complexe défendu par les Tyjunate Compulsories, une garde d’élite dont la chance est de pouvoir compter sur des boucliers énergétiques de bonne qualité. Résultat des courses, les bolts des Astartes se révèlent assez peu efficaces, ce qui chagrine profondément Horus Minus. Heureusement, la honte d’un retard lui est épargnée par la bonne idée de son rookie, qui suggère tout bêtement de foncer dans le tas l’épée au clair, ce qui marche du (marteau) tonnerre. Vive la jeunesse. Emporté par son élan, et bien aidé par les moulinets ravageurs de sa latte personnelle, qu’il a spirituellement appelé Mourn-it-all2, Aximand se retrouve un peu isolé en tête de l’assaut, et manque de se faire occire par la contre-attaque féroce d’un Iron Hand isolé, qu’il identifie comme étant Bion Henricos, l’un des lieutenants de ce diaaaaaable de Meduson. Il faut dire que ses hallucinations auditives l’ont distrait au pire moment, et il s’en est fallu d’un rien pour que notre héros se fasse bellement navrer par son adversaire, qui a une grande épée et sait bien s’en servir. Après quelques passes d’armes dans le Mausolytique, artistement décoré de grandes statues blanches, les renforts finissent enfin par arriver du côté renégat, permettant à Aximand de vaincre – en traître (c’est fluff) – Henricos. Une question lui brûle alors les lèvres : pourquoi son assaillant était il seul ?

Début spoiler…Et la réponse est : il ne l’était pas. Car les statues blanches de la pièce n’étaient pas en marbre mais en chogorite, et les White Scars les plus patients de la galaxie peuvent enfin déclencher leur attaque, menés par ce rusé de Hibou Khan.Les statuesques Astartes espéraient mettre le sabre sur Horus, mais faute grives… Se rouler dans la famille pour rendre la pareille à son adversaire, c’est beau tout de même. Il y a un mot de Chogoris pour ça d’ailleurs: prank’h. Après avoir prononcé la seule phrase qui s’imposait en cette situation3, Baby Horus doit à nouveau défendre sa vie, et y arrive beaucoup moins bien. Une estocade de l’oiseau de nuit fend en effet son casque en deux, délestant notre héros de la plus grande partie de son visage. La blessure n’est pas mortelle, mais seulement évanouissante pour Aximand, qui, dans son coma réparateur, met enfin un nom sur le triste sire qui le stalke à coups de soupirs depuis ces dernières semaines : Garviel Loken. Le fâcheux en question étant présumé mort sur Isstvan III, cela règle le problème pour Horus Minus, dont la chirurgie reconstructrice a laissé quelques traces. Mais, comme il le dit lui-même, il n’a pas peur du changement, alors…Fin spoiler  

1 : Surnommé ainsi à cause de la finesse de ses draps.
2 : J’aimerais bien savoir comment la VF s’est dépatouillée de ce petit jeu de mots du père Abnett. Avis aux lecteurs francophones.
3 : Coucou, coucou, coucou, hibou, coucou.

AVIS:

Après avoir mis l’Hérésie sur les rails avec Horus Rising, Dan Abnett reprend les commandes d’une Légion dé-Lokenisée, et désormais en guerre ouverte contre l’Imperium. C’est l’occasion pour lui de donner son heure de gloire à l’un des membres les plus discrets du Mournival, Horus Aximand, qu’on sentait un peu mal à l’aise par la tournure prise par les événements dans Galaxy in Flames, même si cela ne l’avait pas empêché de rabattre le caquet de cette grande gueule de Torgaddon sur Isstvan III. C’est également par ce biais qu’il commence à nous présenter son nouveau projet hérétique, mené d’une main de fer (héhé) par un nouveau-venu du nom de Shendrak Meduson, déterminé à venger la mort de son Primarque en enquiquinant les traîtres sur la route de Terra au maximum de ses capacités.

On retrouve donc dans ce Little Horus le mélange d’action frénétique, de rebondissements cinématiques et de réflexions plus posées sur l’état des Sons of Horus après qu’ils aient franchi le Rubicon (avant que ça ne devienne tendance) auquel Abnett nous avait habitué dans son pavé initial. Tout cela est bel et bien bon, et nous donne un précieux éclairage sur cette période de transition des fils d’Horus, à la trahison déjà consommée mais, pour la majorité d’entre eux, encore des Space Marines à peu près fréquentables, croyant sans doute s’être embarqués dans une noble révolution contre un Empereur tyrannique. Les années qui suivront en surprendront donc quelques uns… à commencer par notre protagoniste, déjà travaillé par sa conscience coupable1, et qui devra perdre la face au sens premier du terme pour laisser derrière lui ses allégeances passées. Little Horus est donc une lecture des plus sympathiques, pas indispensable en termes de compréhension de l’Hérésie, mais très intéressante pour ceux qui se passionnent pour les jeux de pouvoirs à l’oeuvre au sein des Sons of Horus.

1 : Il y a fort à parier que la révélation de l’identité de l’individu venant lui souffler dans les oreilles H24 ait été un moyen pour Abnett de nous prévenir qu’un duel entre Aximand et Loken dans la suite de l’Hérésie était à attendre.  

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The Iron Within // Cœur de Fer – R. Sanders :

INTRIGUE:

The Iron WithinThe Iron Within permet à Sanders de mettre sous les feux de la rampe un Iron Warrior ayant choisi de se battre dans le sens de l’histoire, le Warsmith Barabas Dantioch. Fidèle au portrait en clair obscur qu’il avait dressé de son dernier héros Marine (Elias « le Codex Astartes est formel sur ce point » Artegall, Maître du Chapitre des Crimson Consuls1), préférant s’attarder sur les faiblesses de son personnage pour le caractériser plutôt que sur ses forces, logique tout à fait défendable quand on parle de surhommes génétiquement supérieurs en tous points au reste de l’humanité.

La tare de Barabas, qui lui attache la sympathie du lecteur, n’est cette fois pas d’ordre psychologique, mais physique, puisque le Warsmith est le premier Marine atteint de mucoviscidose (et pas qu’un peu) de l’histoire de la Black Library. Évidemment, cette affliction découle d’une glorieuse campagne contre les Hruds, apparemment capable de réduire en grabataires même les meilleurs de l’Empereur par le seul poids du nombre (me demandez pas pourquoi). Prématurément usé par cette ultime bataille dont il fut quasiment le seul rescapé (l’autre survivant ayant fini dans un Dreadnought, et encore, un Dreadnought avec déambulateur), Barabas s’est trouvé affecté à la garde d’une planète de huitième ordre, poste honorifique mais véritable mise au placard déguisée, Perturabo n’ayant semble toute guère apprécié que sa légion soit la première à devoir verser une pension vieillesse à un de ses combattants.

Isolé dans son trou ferreux, Barabas s’est occupé comme il a pu pour tuer le temps, ce qui pour un Iron Warrior, consiste surtout à construire des miradors derrière la haie et à installer des multi-lasers dans les bacs à géraniums. Malheureusement pour le pré-retraité qu’il est devenu, l’arrivée de l’arrogant et hérétique Warsmith Krendl va le forcer à prouver au reste de la galaxie que le vioque touche toujours sa bille en matière de conduite de siège.

1 : Voir ‘The Long Games at Carcharias’.

AVIS:

Si ni le thème, ni la conclusion de l’histoire ne sont très originaux, Sanders parvient bien à retranscrire l’effroyable guerre de positions qui oppose loyalistes et chaotiques, dans une sorte de préquelle clin d’œil à la bataille de Terra, au cours de laquelle les Iron Warriors affronteront cette fois leurs rivaux de toujours au lieu de leurs propres frères. S’il fallait retenir une morale de tout ceci, c’est que l’abus de Chaos est mauvais pour le sens stratégique, le méchant Krendl conduisant son offensive comme une savate, malgré les avantages quantitatif et qualitatif dont il dispose pour mener la réduction de la place-forte ennemie.

The Iron Within_IllustrationCertes, on peut se dire que Barabas est un Warsmith vétéran, défendant son chef d’oeuvre en compagnie de troupes sur motivées, mais son adversaire étant lui aussi un Iron Warrior de haut rang, et de ce fait un expert de la prise de fortifications, la correction que papy gaga lui inflige apparaît légèrement too much. On n’a pas vraiment l’impression de voir deux grands stratèges s’affronter à distance en se rendant coup pour coup, mais plutôt le sentiment d’assister à une partie de tower defense, les assaillants tombant comme des mouches pour gagner le moindre mètre.

Cette petite déception écartée, il faut bien avouer que Sanders maîtrise tout à fait les codes du dernier carré super héroïque, le rythme s’accélérant progressivement au fur et à mesure que le nombre des gentils diminue et que ces derniers doivent sans cesse reculer devant l’avance inexorable des vagues ennemies. Il y a bien quelques sujets à froncement de sourcils, comme le personnage de Vastopol, « Guerrier-Poète » à l’importance dans le récit aussi grande que son utilité à ce dernier apparaît comme contestable, mais Sanders ne relâche jamais le rythme, et toutes les incohérences sont vite laissées de côté. En conclusion, une autre nouvelle de Marines de bonne facture à mettre au crédit du petit Rob, dont j’attends personnellement de voir s’il peut faire aussi bien en long format et avec d’autres protagonistes.

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Savages Weapons // Des Armes Brutales  – A. Dembski-Bowden :

INTRIGUE:

Savage WeaponsDébut de journée classique pour Corswain, Champion du 9ème Ordre (ce qui est mieux que champion de 9ème ordre, reconnaissons-le). Après avoir fait son rêve habituel, étrange et pénétrant, d’une bête bien connue qu’il n’arrive jamais à vaincre dans son état catatonique, bien qu’il porte la pelisse de ce prédateur de Caliban sur l’épaule, il est convoqué avec son supérieur, le balafré+++ Alajos, par le Primarque des Dark Angels, Lion El’Jonson en personne. Et comme d’habitude, le léonin surhomme se prend la tête pour essayer de déjouer les friponneries des Night Lords dans le sous-secteur de Thramas, sans succès concluant depuis deux ans1. Ce manque de progrès tape sur les nerfs de ce bon Lionel, qui se doute bien qu’il y a de plus gros poissons hérétiques à ferrer dans le reste de la galaxie. Malgré tout, le devoir chevillé au corps du Primarque le pousse à persévérer dans ce jeu du chat et de la chauve-souris, et même à accepter l’invitation, inattendue il faut le reconnaître, de Kurze de se rencontrer sur une planète paumée pour taper la discute, comme au bon vieux temps. Le Lion, qui a juste entendu « taper », est d’accord, malgré les remarques sensées de ses petits frères, qui soupçonnent logiquement un piège. Confiant dans sa bogossitude naturelle et son statut de personnage nommé, le patron des anges sombres fait fi des conseils de prudence, et part avec le 9ème Ordre comme escorte au rencard fixé par son frérot.

Arrivée à proximité du monde de Tsagualsa, où doivent se tenir les pourparlers, la flotte loyaliste est accueillie par l’opérateur radio le plus irrespectueux de la galaxie, le Premier Capitaine Sevatar des Night Lords. Entre deux punchlines désinvoltes, le hallebardier le plus tristement célèbre des Legiones Astartes informe ses interlocuteurs que le point de rendez-vous a été fixé dans le chantier de forteresse que les Night Lords sont en train de construire sur la planète. Une petite téléportation plus tard (malgré le fait que Corswain n’aime pas vraiment ça, mais tout le monde s’en fout et le Lion en premier), voilà Lionel rendu sur place avec ses deux gardes du corps, comme convenu par le gentlepostmen’s agreement fixé par les parties en présence. Il ne faut pas longtemps pour que Konrad, bronzé comme jamais, n’arrive à son tour, avec son gang: l’impayable Sevatar bien sûr, mais également un dénommé Shang, choisi sans doute pour respecter les quota de représentation des minorités.

Les retrouvailles entre les deux frangins sont glaciales, malgré les efforts déployés par Konrad pour briser la glace et raviver l’esprit de franche camaraderie entre les deux enfants sauvages de la fratrie… qui n’a sans doute jamais existé. Il convainc toutefois Lionel d’aller faire un petit tour en tête à tête, laissant les quatre Capitaines échanger quelques boutades de bon aloi. Sevatar, qui est responsable de la défiguration d’Alajos, ne se gène pas pour mettre évoquer ce sujet encore douloureux (surtout pour le principal intéressé, que l’on sent tout prêt à lancer la belle), mais le tact et l’érudition de Corswain, qui parle Nostraman comme une vache espagnole, c’est à dire relativement bien, font légèrement retomber la pression entre cousins. On apprend également l’origine des magnifiques gantelets rouges arborés par le Premier Capitaine des Night Lords, une marque d’infamie pas si différente des casques écarlates des Ultramarines censurés. Comme quoi, tout est dans tout, et inversement.

Ce plaisant badinage est toutefois interrompu par le retour des Primarques, toujours aussi fâchés l’un contre l’autre. Enfin, surtout Lionel, outré que l’on soupçonne la fidélité de la moitié de Légion qu’il a laissé pourrir sur Caliban, et qui profite de l’inattention de Konrad pour l’empaler avec son espadon de maître de deux mètres, un peu en traître tout de même. Ce qui aurait été une blessure mortelle pour n’importe qui n’a que l’effet d’une simple gifle pour Kurze, que ses capacités physiques de Primarque sauvent d’un trépas ignominieux. C’en est toutefois terminé des gentillesses, et le combat s’engage entre la team robe de bure et la team cheveux gras. Si le Lion a d’abord l’avantage grâce à ses talents d’escrimeur, la tentative de strangulation dont il est la victime de la part du Nighthaunter lui fait perdre un peu de sa superbe, et motive Corswain à voler au secours de son seigneur. Cela laisse le pauvre Alajos Alaramasse (son deuxième prénom) contre Shang et Sevatar, combat inéquitable dans lequel le Capitaine laisse bientôt sa tête, non sans avoir réussi à faire perdre la main au Night Lord pas important (je vous laisse deviner de qui il s’agit) auparavant.

L’intervention de Corswain, si elle permet au Lion d’éviter d’avaler sa neuroglotte, se passe assez mal pour le chevalier blanc et noir, dont la tentative de rodéo kurzien se termine assez rapidement, et dans la douleur. Malmené par son adversaire, et avec un taux d’invalidité en rapide progression, le Champion n’est sauvé que par le retour sur le ring de Lionel, qui a mis beaucoup de temps à se relever pour un Primarque2. Son paternel étant à nouveau occupé, notre héros est sur le point de finir en kebab sur la lame de Sevatar quand les renforts finissent enfin par arriver. Dark Lords et Night Angels déferlent par dizaines sur le champ de bataille, parviennent à séparer leurs patrons qui en étaient réduits au bras de fer chinois pour se départager, et repartent chacun de leur côté. Corswain regrette un peu d’avoir perdu son épée dans la mêlée, mais comme il l’a égarée dans le fessier d’un Primarque, il ne s’en formalise pas trop…

Notre nouvelle se conclut presque comme elle a commencé, Corswain arrivant enfin à (r)avoir la peau de la marmotte de Caliban qui lui faisait tant de misère dans ses rêves, avant d’être convoqué par son boss. Il est depuis devenu Capitaine du 9ème Ordre, en remplacement du pauvre Alajos, qui s’est bien frotté à plus fort que lui en la personne de Sevatar. Les nouvelles qui tombent sont toutefois un peu particulières, car Roboute Guilliman a envoyé un smiley à Lionel, qui ne pige rien aux émojis. Le message qui a suivi a cependant fait comprendre au Lion que son frère nourrissait lui aussi quelques pensées plus ou moins hérétiques, ou, tout du moins, sécessionnistes…

1 : Plus j’avance et plus tu recules, comment veux-tu que je t’accule?
2 : Peut-être essayait-il de solliciter l’arbitre de la rencontre pour demander la VAR sur l’étranglement des yeux bassement exécuté par Kurze. 

AVIS:

Aaron Dembski-Bowden débute dans l’hérétique carrière en terrain à moitié connu avec ce Savage Weapons, puisque celui qui était jusqu’ici principalement connu pour ses travaux Night Lords ne se gène pas pour mettre les fils de Nostramo au casting de son histoire. En plus de mettre en scène le Joker des Primarques (qui avait commencé par être Batman, c’est dire si les années ne lui ont pas été clémentes), ADB introduit également l’un de mes personnages préférés de la série, le caustique, cruel mais surtout charismatique Premier Capitaine Sevatar, qui parvient sans mal à voler la vedette au pauvre Corswain, sensé être le héros de l’histoire. En plus de balancer des répliques d’anthologie (et ça tombe bien pour un recueil de nouvelles) et de se foutre ouvertement de la gueule de Lionel par moment, Sev’ se révèle avoir une personnalité complexe et profonde, et absolument pas aussi dénuée d’honneur qu’il essaie de le faire croire. S’ajoute à cela son passif mystérieux de condamné à mort en sursis, qui en fait un paria en même temps que l’individu le plus influent de la Légion après son Primarque. Et pour ne rien gâcher, notre surhomme est un bretteur de talent, maniant une arme certes improbable, mais absolument classe, avec des effets dévastateurs. Bref, voilà une entrée réussie dans le grand bazar qu’est cette Hérésie!

Savage Weapons mérite également la lecture en raison des portraits intéressants qu’ADB fait des Primarques convoqués, à la fois radicalement opposés et étrangement similaires sur certains points. Usant des talents de divination de Kurze, l’auteur peut également balancer quelques clins d’œil sur le lointain futur, et commencer à détruire la réputation de loyaliste de Lion El’Jonson. De son côté, le chevaleresque Maître de la Première Légion exsude une aura paladine presque palpable… mais est tout de même celui qui frappe son frérot en traître au début de leur bataille de polochons1. Le natif de Caliban apparaît comme un être parfait et froid, jusqu’à la limite de la sociopathie, et c’est très bien comme ça. Après tout, on est pas dans le monde des Bisounours2. De bonnes bases donc pour ces personnages importants, mais pas centraux, de l’Hérésie, sur lesquelles les auteurs prenant la suite de la couverture médiatique de la Croisade de Thramas, et de l’arc de l’Imperium Secondus, purent capitaliser (ou pas)3.

Enfin, notons les effets de style assez intéressants intégrés par ADB à son histoire, avec une introduction et une conclusion construite en quasi-miroir, ce qui est une manière de souligner que les Dark Angels n’ont pas fini de courir le sous-secteur à la poursuite de leurs insaisissables Némésis. Un jour de la marmotte un peu spécial (et spatial) pour Corswain, en quelque sorte, qui a tout de même gagné au change à la fin de la nouvelle, en ayant reçu une belle promotion et avoir enfin remporté son match de catch onirique. Il faut savoir profiter des petits bonheurs de la vie…

1 : Je remarque que ce pauvre Lionel n’a pas de chance dans ses duels avec ses frangins. Qu’il s’agisse de Leman Russ ou de Konrad Kurze, à chaque fois ça se finit en grosse empoignade de pochtrons se balançant des patates de forains. C’était bien la peine de passer autant de temps à pratiquer l’escrime médiévale sur l’Invicible Reason, tiens. 
2 : Et pour cause, les Dark Angels les ont exterminés au cours de l’invasion de Caring, leur planète natale, au début de la Grande Croisade.
3 : On appréciera la référence faite à ‘The Lightning Tower’ dans le dialogue entre Konnie et Lionel, le premier ayant bien compris qu’il foutait les chocottes à ce planqué de Rogal Dorn, dont la peur du noir est la plus grande faiblesse. 

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Et voilà qui conclut la revue critique de cette anthologie. Que dire de cette dernière pour en terminer? Eh bien, que les « petits nouveaux » n’ont pas raté leur entrée (à l’exception de Nick Kyme), pour commencer, et s’en tirent même généralement mieux que leurs aînés, pour diverses raisons. Il me faut également souligner la grande diversité des factions couvertes dans ce recueil, qui a donc des chances d’intéresser le fan quelque soit son armée de cœur: avec 14 Légions convoquées dans ces pages, et pas moins de 8 Primarques sur la feuille de match (même si, comme toujours, le doute est permis à propos d’Alpharius), il y en a vraiment pour tous les goûts. La même chose peut être dite des sujets des histoires ici proposées, qui vont bien au delà de la classique bataille entre loyalistes et renégats. Si l’exécution pêche parfois, les intrigues présentent toutes un intérêt, et permettent d’envisager l’Hérésie sous un angle un peu différent de celui exposé dans le background classique et dans les romans de la série. C’est bien l’intérêt de ce genre de format, et on peut remercier les auteurs et éditeurs de la BL de ne pas l’avoir oublié.

Au petit jeu de la comparaison avec Tales of Heresy (l’anthologie qui précède pour ceux qui ne suivent pas), on constate que cet Age of Darkness est beaucoup plus « intégré » dans les arcs narratifs de l’Hérésie que son prédécesseur. Ce dernier comportait un bon nombre de nouvelles indépendantes, qui, même si elles mettaient parfois en scène des personnages récurrents de la saga, racontaient des histoires n’ayant pas être vocation à être développées plus tard dans cette dernière. Le contraire est plutôt vrai ici, en particulier en ce qui concerne l’arc de l’Imperium Secondus, soigneusement teasé par McNeill, Sanders et Dembski-Bowden dans leurs soumissions respectives. Abnett, de son côté, en plus de remettre une pièce dans la machine du Mournival, introduit les Légions Brisées, que nous ne retrouverons pas avant quelques années. Au moment de sa sortie, ce recueil était donc une lecture indispensable à tous ceux qui voulaient se tenir au fait des développements hérétiques, beaucoup plus que Tales of Heresy à mes yeux. Maintenant que ce suspense est en grande partie éventée, fin de l’Hérésie oblige, il ne reste pas moins que ces nouvelles, parce qu’elles introduisent un certain nombre de personnages récurrents (Remus Ventanus, Revuel Arvida, Marcus Valerius, Barabas Dantioch, Sevatar, Corswain…), restent assez importantes pour bien comprendre toutes les motivations de ces héros et anti héros du 31ème millénaire. En ceci, je recommande donc utile de passer quelques heures à explorer cet âge de ténèbres, qui ne faisait alors que commencer…

LEMAN RUSS: THE GREAT WOLF [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette chronique du roman de la série Primarques consacré par Chris Wraight à l’infernal Fenrissien, loubard alpha, snowboarder de l’extrême, parrain galactique de la SPA, sabreur de magnu(m)s, saint patron des tankistes et caniche à son pépère, pour ne citer que quelques-uns de ses titres. Primogéniteur d’une des Légions, et plus tard, d’un des Chapitres les plus populaires de Warhammer 40.000, Leman des Russ, tel qu’il fut nommé par son père adoptif, est une figure marquante du backgound, qu’il hante de son imposante présente depuis des temps immémoriaux1. Il était donc logique que le Roi Loup de Fenris bénéficie parmi les premiers du traitement particulier que constitue un roman Primarques. Pour quel résultat, vous entends-je vous, et me, demander? Et bien, c’est votre veine, j’ai justement une critique détaillée de l’ouvrage à vous proposer. Quel heureux hasard, vraiment.

1 : À l’époque de Rogue Trader, il n’était toutefois qu’un humble Commandant Space Marines, tenant plus du Darth Vader sous progénoïdes que du Viking de l’Espace.

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INTRIGUE:

Notre histoire commence aux côtés d’Ove-Thost, jeune guerrier de Fenris totalement dans le mal après avoir pris une rasade du Canis Helix quelques heures plus tôt, dans le cadre de son week-end d’intégration au sein du Rout. Et à propos de route, il en a une belle devant lui, le retour vers le Croc passant par quelques pittoresques endroits, dont des pinèdes enneigées remplies de prédateurs affamés de chair fraîche, qu’O.T. négocie avec un sang-froid impérial. Ayant trucidé toute la biodiversité placée sur sa route par cette farceuse de Fenris, notre héros finit par tituber jusqu’au lieu de rendez-vous fixé par les Prêtres Loups, soit le Portail dans la Montagne1, où il est chaleureusement accueilli par ses tuteurs. L’un d’eux ayant remarqué le fort attachement manifesté par Ove-Toast pour les crocs bestiaux ramenés comme trophées de son trail sauvage dans le Gévaudan2, il accepte que le louveteau conserve ses colifichets, qui lui donneront son premier qualificatif : Twinfang (ce qui est plus classe que Twingo).

Remis de ses émotions, rebaptisé Haldor (c’était l’année des -H au LOF) et intégré à une meute de fringantes Griffes Sanglantes, l’impétrant réalise bientôt, et le lecteur avec lui, qu’il se distingue des rangs braillards et indisciplinés des louveteaux de l’espace. En plus de se faire dévisager – ce qui est plus cool que de se faire défigurer, et au Croc, tout peut arriver – par tous les vétérans qui croisent sa route, Haldor a de plus la surprise de recevoir en dotation, non pas la bonne vieille épée tronçonneuse classique qui est le lot de ses comparses, mais une francisque énergétique (puisque je vous dis que c’était l’année des haches) d’excellente et exotique facture, de la part de son maître instructeur, Brannak. Le légitime contentement que notre rookie éprouve devant ce cadeau de valeur vole toute fois en éclat, en même temps que quelques-unes de ses molaires, lorsque le Prêtre Loup lui allonge une mandale après qu’il ait échoué à nommer la relique placée sous sa garde. Sommé par son supérieur d’apprendre cette information, apparemment capitale because of reasons, Haldor se dépêche de ne rien faire de particulier à cet égard (fuck the rules), et nous le retrouvons après quelques années pendant sa cérémonie de diplomation.

Sous le regard torve du Seigneur Loup Aeska Brokenlip, Maître de la 3ème Grande Compagnie des Space Wolves, les guerriers du Rout accueillent avec leur enthousiasme habituel leurs nouveaux compagnons d’armes, jugés dignes d’aller combattre dans les étoiles. Ce banquet a toutefois une résonnance particulière, car il marque l’arrivée dans les rangs – passablement désorganisés – des surhommes de Fenris des premières recrues n’ayant pas connu la Légion, mais seulement le Chapitre. Le lecteur sagace en déduit donc que l’histoire se passe quelques années après la conclusion de l’Hérésie, au lendemain de la Seconde Fondation décrétée par cette bleusaille de Guilliman. Haldor, de son côté, n’en peut rapidement plus des oeillades suspectes que lui décoche son big boss, et décide d’aller prendre un peu l’air hors du hall de festin. L’avantage avec le Croc, c’est que les Wolves sont tellement radin et le climat tellement rude qu’il n’a pas loin à aller. Les couloirs de la forteresse sont en effet plongés dans le froid et les ténèbres (il fallait payer la redevance les gars !), et plus d’un Space Marine trop sûr de lui a glissé sur une plaque de glace ou s’est cogné la tête dans une porte en se rendant aux latrines. À côté de ça, les périls du Warp, c’est de la petite bière. Haldor ne tarde donc pas à se perdre, et finit par débouler dans une salle inconnue, où l’attend Jø le Clödø. Ah non, pardon, on me souffle dans l’oreillette que le type à dreadlocks rances engoncé dans un poncho informe et un amas de fourrures puantes, et la gueule tartinée de suie, n’est pas le SDF alcoolique et incontinent du coin, mais bel et bien le noble Primarque Leman Russ en personne. Et il était temps que diable ! On en aurait presque oublié que le sujet du bouquin n’est pas de suivre les premiers pas d’Haldor Twinfang, malamute de l’espace, mais d’apprendre le fin mot de l’histoire du duel mythique entre le Loup et le Lion pendant la campagne de Dulan. Et, coup de bol, c’est de la bouche même d’un des intéressés que nous allons plonger dans la légende de la Grande Croisade, Papy Russ acceptant de jouer au skjald pour l’instruction du novice après avoir, lui aussi, buggé sur l’arme que ce dernier porte à la ceinture.

Nous voilà donc plongés dans cette époque héroïque et insouciante, et faisons la connaissance d’un autre protagoniste lupin, le Jarl Jorin Bloodhowl du Dekk-Tra, c’est à dire la 13ème Grande Compagnie de la Légion. Le Dekk-Tra a pour particularité d’accueillir en son sein les Frères Loups (Wolf Brothers), soit le reliquat des guerriers jurés de Leman Russ du temps où il n’était « que » le maître de Fenris, et qui ont pris le risque de boire au calice du Canis Helix alors qu’ils avaient déjà du poil aux pattes. La concoction réussissant mieux, comme chacun sait, aux ados qu’aux hommes mûrs (ça doit être horriblement sucré, comme du lait concentré puissance 1.000), l’immense majorité de nos barbares bravaches est morte dans d’horribles souffrances3, laissant les pouillèmes restants prendre leur place aux côtés de leur suzerain bien aimé. Jorin est l’un de ces grands-pères à barbe, comme l’indiquent son teint blafard et ses cernes marquées, mais cela ne l’empêche pas de faire le coup de feu comme un vrai Astartes, la plupart du temps accompagné par son âme damnée, le tout aussi ancien Bulveye4.

Nous retrouvons notre paire aux prises avec l’équipage d’un Prédateur Faash, en fuite éperdue du système d’Ynniu après que les loulous aient ravagé la base orbitale Dulanite qui défendait l’endroit, et que ce rusé de Bloodhowl veut mettre à profit pour localiser les coordonnées spatiales de Dulan, qui échappe depuis trop longtemps au courroux des armées de l’Empereur. Fidèle à sa philosophie très tactile (comme on le verra plus tard) de la guerre, le Jarl a embouti l’arrière-train du vaisseau ennemi avec le sien, débarqué en force dans les coursives, et est parvenu, à un poil de moustache près, à interrompre la transition Warp des Faashistes (je n’en ai pas fait exprès mais ça rend plutôt pas mal). La suite ne semble être qu’une formalité, malgré la résistance acharnée des défenseurs, mais un petit problème, poilu, écumant et odorant, menace de gâcher la journée de notre héros : deux des guerriers de son escorte ont fait une poussée d’hypertrichose, et, coquets, ont foncé cacher leur honte dans le sang et les viscères de leurs ennemis. Ne reconnaissant plus la voix de leur maître, les molosses enragés ont commis un carnage sur le pont du Prédateur, empêchant Bloodie et Bulvie de faire des prisonniers auxquels ils auraient pu soutirer la précieuse information.

N’ayant d’autre choix que l’euthanasie pour ces spécimens déviants, Bloodhowl doit de plus composer avec l’arrivée impromptue de son Primarque, escorté par le Tra du Jarl Ogvai Ogvai Helmschrot. Redoutant une placardisation (ou plutôt une mise en chenil) de sa Compagnie si Leman Russ devait avoir vent du problème rencontré au cours de la bataille, Jorin décide de taire l’affliction dont ses guerriers souffrent, le temps de trouver un remède à cette dernière. De son côté, Russ apprend à son Jarl qu’il est arrivé pour accélérer la conduite de la campagne, certains personnages hauts placés (dont le nom commence par M. et finit par -acaldor) de Terra ayant émis des doutes sur la capacité de la VIème Légion de faire rendre gorge au Tyran de Dulan. Les chevaleresques et propres sur eux Dark Angels sont désormais également sur le coup, et ça, Russ ne peut pas l’avaler. Plutôt se faire poser une collerette que de se faire griller la politesse et voler les honneurs par Lionel et son club de philatélistes ! The race is on, et le Loup Suprême est mauvais perdant. Fort heureusement, le GPS du Prédateur Faash avait mémorisé l’itinéraire « Maison » dans son processeur (quelle erreur de débutant de la part des Dulanites… le mode incognito, il n’y a que ça de vrai), et l’armada du Rout peut bientôt la prendre (la route, pour ceux qui ne bénéficient pas d’un humour glacé et sophistique).

Après un périple sans embûches majeures d’une durée de deux semaines, soit largement le temps nécessaire pour permettre aux éclopés de la bataille d’Ynniu de reprendre du poil de la bête, nos fiers loulous passent le point de Mandeville de Dulan… et ont la désagréable surprise de constater que la 1ère Légion est déjà sur place5, et a engagé la flotte locale dans une bataille encore indécise. Car si les Dark Angels sont venus en force, et bénéficient de l’imposante présence de l’Invicible Reason, leur vaisseau amiral bien burné lancé, les Dulanites ont l’avantage du nombre et de l’appui d’un colossal anneau de défense qui entoure toute la planète. Que voilà des ressources bien utilisées, 95% des armes et équipages du hula hoop géant ceinturant Dulan faisant face au vide intersidéral pendant que leurs petits copains doivent garder à la porte les armures à glace prosélytes de Pépé. Menfin. Après avoir sans doute poussé un bon gros Fuuuuuuuuuuuuuuuu-nris des familles, Russ décide de passer à l’action, histoire de justifier son émargement sur la feuille de présence. Il lance donc ses vaisseaux à l’assaut de la flotte ennemie, avec des ordres d’une élégante simplicité : « butélétousse ». Grave erreur.

Car, alors que la caméra se braque à nouveau sur Bloodhowl et le Dekk-Tra, aux premières loges dans le croiseur Aesrumnir, nous assistons en spectateurs muets et horrifiés à une incompréhension aussi tragique que lourde de conséquences entre les deux Légions. L’Aesrumnir torpille en effet à bout portant (quand je vous disais que Bloodhowl était tactile… c’est le genre de type qui achève les blessés d’un bolt en pleine tête à bout touchant : un coup à perdre une main ça) un vaisseau Faash, sans que Jorin ne se donne la peine de prendre la communication émanant du tout proche Blade of Numarc au moment de porter le coup de grâce. La bordée que leur envoie le croiseur de la 1ère Légion une fois la grosse commission effectuée ne manque donc pas de surprendre et d’outrer les Space Wolves, en plus de laisser l’Aesrumnir dans un piteux état. Témoin de l’inconcevable, Russ use de ses supers pouvoirs de Primarque pour intercepter la volée fatale du Blade of Numarc avec son propre vaisseau en bougeant très vite les bras (même Magnus est jaloux de ce trick), et appelle le standard des DA pour passer une gueulante à son frérot. Mais ce dernier, malgré la froideur et l’arrogance qui transparaît d’un bout à l’autre de l’appel, est incontestablement dans son bon droit. L’Aesrumnir a en effet détruit un vaisseau sur lequel dix escouades de Dark Angels avaient pris pied, condamnant ces derniers à la mort. Les tirs du Blade of Numarc n’étaient donc que la manifestation d’énervement, bien légitime, des officiers Dark Angels devant la stupidité crasse et le filtrage téléphonique de leurs cousins velus. Russ doit bien reconnaître qu’il a merdé dans les grandes largeurs, et, chose assez rare pour être soulignée, il s’engage même à venir s’excuser en personne auprès de Lionel une fois la bataille remportée, à la grande consternation de ses Jarls, qui, en bon loup-bards qu’ils sont, l’incitaient plutôt à chercher la baston avec les groupies de Lion El’Jospin.

Mais avant d’aller faire amende honorable il faut tout de même régler le léger problème causé par la présence de l’armada de Dulan et de l’über Cheerios dans les environs immédiats de la flotte impériale. Qu’à cela ne tienne, Leman Russ prend la tête de son gang et réalise une percée dans l’anneau de défense en direction… d’un point important de la structure (car ces andouilles de Dulanites ont placé leur état-major en première ligne au lieu de l’abriter de l’autre côté de la planète). #BarkBarkGrrrWooofBarkGrrr. Les Space Wolves s’illustrent de belle façon, et l’on voit le Seigneur de l’Hiver et de la Guerre prouver qu’il n’a volé aucun de ses titres, l’utilisation de son mystérieux wyrd’s wind paralysant ses ennemis et enrageant ses fistons à 50 mètres à la ronde6 au meilleur moment pour les Wolves. Bref, le Rout casse la c-Roûte, réduisant la dernière défense de Dulan en épave avec toute la diligence due.

Fidèle à sa parole, Russ s’en va ensuite présenter ses plus plates confuses à son frère, qui l’attend avec une simple escorte de 30.000 Légionnaires (quel poseur ce Lion), et accepte en grand seigneur les excuses, pas vraiment sincères, de Leman. Nos deux Primarques en profitent pour se répartir le boulot en vue de la conclusion rapide et efficace de la campagne de Dulan, Russ insistant lourdement pour être celui qui fera manger son chapeau au Tyran, ce que Lionel accepte sans sourciller. Mieux, il permet aux Space Wolves de prendre le bastion ennemi, l’imposante Forteresse Ecarlate, en solo, lui-même et ses sbires se contentant d’empêcher les locaux de pourrir le groove du rottweiler de l’Empereur. Trop sympa, le palouf.

Un peu plus loin, l’ambiance est moins rose sur l’Aesrumnir, où Bloodhowl et ses posses réalisent, après avoir recompté trois fois… au moins, que tous les guerriers de Dekk Tra n’ont pas été rapatriés à bord, sur leurs deux jambes, à quatre pattes ou les pieds devant. Et le sagace Prêtre Loup Ulbrandr de soumettre à son Jarl une sinistre hypothèse : comme aucun Space Wolves digne de son collier antipuces ne se laisserait capturer vivant par l’ennemi, et que ce dernier a réussi à faire partir des navettes vers la surface de Dulan avant la destruction de l’anneau (qui n’est pas complète à cette heure, ça prend du temps de désosser un truc de cette taille), c’est donc que l’ennemi a capturé des Wulfens. Nonobstant les trilliards d’explications raisonnables et sensées que l’on peut mettre en avant pour contextualiser les deux faits sur lesquels Ulbrandr base son raisonnement, et vu tout ce qui vient avant cette péripétie, on se doute que papi a tapé dans le mille, et que le honteux petit secret du Dekk-Tra est tombé entre de mauvaises mains. Que faire ? Aller se confier à un Primarque qui vous considère comme son plus proche frère d’armes, qui a démontré à de maintes reprises sa solidarité avec ses hommes, s’est mis personnellement en danger pour vous sauver des conséquences d’une de vos conneries il n’y a pas deux heures et est actuellement en train de se rabaisser devant son frère imbuvable à votre place ? Ou continuer de la jouer solo, dans l’espoir de trouver une cure hypothétique à un mal dont on ignore tout, et se tenir prêt à faire faux bond à ce même Primarque par la suite si cela peut permettre de garder le Wulfen dans le placard ? Faut-il vraiment que je demande ?

Brefle, une fois la bataille finale pour Dulan initiée, et alors que Russ s’amuse comme un fou à faire des knock knock jokes en utilisant des brigades entières de Typhons et de Shadowswords, et tandis que les Dark Angels déversent leur fureur froide, clinique et silencieuse sur les alentours immédiats du bac à sable de la litière du Loup Suprême, Bloodhowl, briefé par Ulbrandr qui a repéré des signaux suspects dans un bâtiment à l’écart du front, s’embarque dans une side quest en loup-cedé, chargeant ses collègues de l’excuser auprès du boss le temps qu’il tire les choses au clair de son côté. Malheureusement pour lui, c’était aussi l’idée des défenseurs, qui diffusent bientôt un petit clip pas mal foutu à l’échelle planétaire, consistant en quelques gros plans suggestifs du Wulfen écumant qu’ils ont effectivement traficoté en douce à la surface de leur planète, et nourri exclusivement de rutabagas depuis pour le rendre furax. Pire que du outing, c’est du louping, et c’est l’estomac de Jorin qui fait loopings en réalisant que tout le monde est maintenant au courant du secret honteux de sa Grande Compagnie.

Il n’a cependant pas loisir de se lamenter longtemps sur son sort, l’assaut impromptu d’une vague de Scarabiniers, puis l’arrivée furibarde de Leman Russ, l’homme-loup qui n’aimait pas qu’on lui pose des lapins, coupant court à ses sombres réflexions. Après quelques échanges de vérités, Primarque et Jarl se tombent toutefois dans les bras, et s’entendent pour faire front de concert contre cette mystérieuse malédiction, qui vient s’ajouter à la liste d’emmerdes que la VIème Légion doit gérer. La hache tronçonneuse de guerre n’a toutefois pas le temps d’être totalement enterrée, que les Space Wolves reçoivent une terrible nouvelle : contrairement à la parole qu’il avait donnée, ce fieffé fripon de Lionel semble s’être téléporté dans les niveaux supérieurs de la Forteresse Ecarlate, profitant de la trêve dans l’assaut des loulous pour aller soloter le boss de fin de planète. C’est très petit ça.

Et, effectivement, nous retrouvons le Maître de la Première Légion en grande conversation avec le Tyran de Dulan, un vieux schnoque en bout de course passablement résigné à son sort, et faisant même mine d’engager un duel avec El’Jonson avec le couteau à fromage qu’il dissimulait dans ses robes pour la beauté du geste, et avec des résultats prévisibles. Avant cela, on avait appris que le grillage de priorité du Lion n’avait pas que pour but de foutre son frère en rogne (ce qui était un bonus appréciable, malgré tout), mais surtout de mettre fin aux hostilités le plus rapidement possible afin de préserver les forces Dark Angels chargées du maintien de l’ordre autour de la Forteresse Ecarlate, où se massaient des millions de soldats Dulanites en prévision de l’inévitable contre-attaque. Vu sous cet angle, ça se défend. Mais, bien évidemment, Russ n’en a catégoriquement rien à carrer, frustré et outré qu’il est d’avoir été une nouvelle fois devancé par sa sainte nitouche (de Force 6, tout de même) de frangin. Et cette fois, les roucoulades, accolades et persillades du Palouf en chef ne sont pas suffisantes pour évacuer la tension fraternelle. Dégainant son tetsubo tronçonneur, Leman ouvre les hostilités, et il ne faut pas grand-chose pour convaincre Lionel de lui rendre la pareille. Entre le Loup et le Lion, la bataille fait rage, sous les vivats enthousiastes de leurs groupies respectifs, et c’est le moment, où, estimé lecteur, je fais appel à tes capacités mémorielles, pour te référer à ce qu’on disait il y a exactement 2 869 mots. Tu y es ? Eh oui, quel est le nom de la hache de ce vieux jeune Haldor ? Nous y venons. Désarmé d’une botte magistrale d’El’Jonson, Russ gagne un peu de temps en balançant ce dernier à travers le hall (ce que nous avons tous rêvé de faire) et emprunte poliment l’arme du présomptueux Capitaine Dark Angels qui se tenait entre lui et sa fidèle Krakenmaw. Cette hache, avec laquelle il entreprend bientôt de débiter son frérot, n’est autre que l’arme remise à notre Griffe Sanglante, et fait donc partie de l’héritage de la Légion. Mais n’allons pas trop vite en besogne, nous avons toujours un duel à mort sur le feu.

Vous épargnant les péripéties usuelles de ce genre d’exercice, simplement portées au carré de l’hypoténuse par la nature primarquielle des combattants (ça ne rend pas grand-chose à l’écrit, ceci dit), je dirai simplement que nos deux sacripants, après avoir donné du boulot à leurs ostéopathes et artificiers respectifs pour des semaines, ne trouvent rien de mieux que de basculer du balcon de leur hôte, pour faire une chute de cinquante mètres, égarant au passage leur quincaillerie respective mais par leur mauvaise humeur. La baston reprend donc à grands coups de poings dans la neuro-glotte, jusqu’à ce que Russ, réalisant l’absurdité de la situation, se mette à rire. Le fait que Lionel lui demande de manière très sérieuse si son hilarité doit être interprétée comme une offre de reddition ne fait pas grand-chose pour calmer la crise du jovial loubard, qui se fend tellement la poire qu’il ne voit pas arriver le crochet vengeur de Jack Jo(h)nson, qui l’envoie définitivement au tapis. Ainsi se termine ce qui est sans doute l’un des premiers duels fratricides entre Primarques, prélude innocent à des affrontements autrement plus amers.

Est-ce pour autant la fin de notre histoire ? Non ! Wraight boucle la boucle, d’abord en nous amenant sur Terra après la fin du siège et de l’Hérésie, alors que Leman Russ et Lion El’Jonson, arrivés avec un gros quart d’heure de retard sur l’heure du RDV fixé par Horus pour la réunion de famille, ne peuvent que constater que tout est fini et qu’ils n’ont plus qu’à passer la mop pour leur peine. Trop snob pour s’abaisser à ce genre de tâche, Lionel tue le temps et noie son cafard en défiant à nouveau Russ en duel, histoire de régler une fois pour toutes leur contentieux. Après avoir sorti une réplique d’un niveau de mauvaise foi si élevé que Necoho se retrouva de façon provisoire à la tête du panthéon chaotique, Russ refusa tout net de croiser le frère, prétextant une migraine tenace, ou quelque chose comme ça. Pas du genre à prendre un non pour une réponse, ce mauvais joueur de Lionel transperça son frangin de sang-froid, blessure grave mais non mortelle, d’où s’écoula apparemment tout le mauvais sang entre nos deux lascars puisque leur relation, d’après Russ, s’apaisa après cet épisode.

Et nous voilà enfin de retour dans le Croc, où le Loup Suprême en termine avec son histoire. Guère renommé pour la rapidité de son intellect, il faut un moment à Haldor pour comprendre que son Primarque porte en fait le deuil d’El’Jonson, dont la nouvelle de la mort vient juste d’arriver sur Fenris. Comme quoi, sous ses abords de brute, deux petits cœurs sensibles battent dans la poitrine de Russ. La conclusion du récit voit Twinfang, à présent au clair à propos de son statut au sein du Chapitre, commencer sa carrière active en compagnie de ses camarades Griffes Sanglantes, et s’aguerrir jusqu’à devenir Chasseur Gris. Participant à l’effort de guerre de l’Imperium contre la première Croisade Noire d’Ah Bon Donc, Twin Peaks croise la route d’une force de Dark Angels, et ce qui doit arriver arrive… on le prend (à nouveau) pour un abruti. Le mérite-t-il ? À vous de juger. Personne ne peut en revanche mettre en doute son zèle à défendre l’honneur de son Chapitre et de son Primarque, comme son adversaire du jour l’a certainement appris à ses dépens…

1 : Car oui, il s’agit bien de leur nom exact, majuscules à l’appui. C’est cool d’avoir donné aux Space Wolves leur propre langage, mais il s’agirait d’en faire usage.

2 : Cela s’explique également par le fait que les canines en question servent à maintenir l’intégrité physique de l’épaule du noble barbare, amoureusement mastiquée par un campagnol entreprenant sur le chemin de l’école, et dont le retrait risque d’avoir des conséquences fatales pour notre héros.

3 : À côté de ça, les 40% de chance de réussite de primarisation des Space Marines, c’est le brevet des collèges.

4 : Qui était aux commandes de Dekk-Tra lorsque Mike Lee tenait la plume (Dans la Gueule du Loup/Wolf at the Door). On ne saura sans doute jamais ce qui lui a valu cette rétrogradation (mis à part une relecture hâtive des éléments de background établis par Wraight, s’entend).

5 : Les fourbes avaient pensé à consulter les archives impériales. C’est pas du jeu. Tout le monde ne sait pas lire, ni utiliser un moteur de recherche.

6 : Et, non, le fait qu’une bête flatulence de sa part aurait probablement eu les mêmes effets n’est pas une raison pour trivialiser ce moment de pure awesomeness.

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AVIS:

En choisissant de se frotter au crin hirsute de Leman Russ, Chris Wraight relevait un défi assez conséquent, ce Primarque parmi les plus populaires de la bande à Pépé ayant bénéficié d’un traitement assez contrasté de la part des auteurs de l’Hérésie d’Horus. Barbare beuglard et soiffard à un moment, bourreau inflexible et sanguinaire à un autre, vandale bestial et marginal aux yeux de la galaxie mais malgré tout dans le secret des du Dieux, Russ est et reste une énigme coriace pour le fluffiste. Wraight avait donc la lourde tâche de poursuivre sur cette lancée, et d’ajouter, plus que de la profondeur (car Leman n’en manque certes pas, comme vu ci-dessus), de la définition à son héros, afin de permettre au lecteur de comprendre un peu mieux qui était le Primarque du Rout. Et à ce petit jeu-là, même si la copie n’est pas parfaite, je dois dire que notre homme a plutôt bien fait le job.

Pour commencer sur les sources de satisfaction dûment listées par votre humble serviteur, je parlerai d’abord du choix de l’évènement couvert dans The Great Wolf. Mine de rien, le cahier des charges de la série Primarchs n’est pas si évident que ça, la nécessité de placer son propos dans le laps de temps compris entre la découverte de l’Übermensch en question et le début de l’Hérésie pouvant conduire l’auteur à se hasarder dans la mise en scène d’une péripétie de son cru, avec des résultats parfois décevants (Lord of Ultramar). En sa qualité de barbouze/bourreau officieux de son despote de paternel, Russ pouvait cependant faire l’objet de récits dépeignant la face cachée de l’Imperium même au moment de sa gloire la plus éclatante, le Graal (ou plutôt le Canis Helix, soit l’écuelle de Milou) ayant été de faire le lien entre la disparition des Primarques inconnus et la VIème Légion, que l’on soupçonne fortement dans les cercles autorisés d’avoir joué un rôle majeur dans l’effacement de #2 et #11. Rien de tout ça ici (le contraire eut été étonnant, très franchement), mais Wraight fit le next best choice à mon sens en choisissant de mettre en lumière l’élément le plus ancien du fluff de « croisé » de Leman Russ, à savoir la campagne de Dulan. Cela faisait en effet des années, voire des décennies que tous les petits Zhobbystes faisant leurs classes apprenaient que de ce funeste évènement provenait la rivalité entre Balto et Simba, sans avoir à se mettre autre chose sous la canine que trois lignes lapidaires expliquant que Lionel avait eu la mauvaise idée de voler un kill à son sanguin de frérot. Si ce survol depuis l’orbite haute de l’épisode, tel qu’il était relaté dans les Codex Space Wolves et Dark Angels, permettait de se faire une bonne idée du caractère de chaque Légion et Primarque, il n’empêche que tout fluffiste un brin curieux se posait sans doute la question de savoir comment cette rivalité pluri millénaire avait débuté. Le dévolu que Chris Wraight a jeté sur l’incident de Dulan m’apparaît donc comme tout à fait pertinent.

Deuxième effet kiss cool, Dulan a permis à Wraight de servir au lecteur une double ration de Primarques, ce qui est toujours bon à prendre. C’est fin, ça se lit sans faim. En plus de voir Leman Russ se secouer les puces, nous avons donc le droit à sa majesté Lionel, second rôle mâtiné d’antagoniste bien mis en avant par l’auteur, et c’est plutôt heureux. Le Primarque étant un être complexe à mettre en scène de par la nécessité de faire rejaillir sa supériorité totale sur des individus déjà intrinsèquement surhumains, les récits n’intégrant qu’un seul de ces spécimens ont la fâcheuse tendance à les dépeindre de façon ingrate, en particulier si l’auteur choisit pour protagoniste un simple Astartes. En mettant Russ face à ses responsabilités, nommées Lion E’Jonson, et réciproquement, Wraight a contourné cet écueil, les Primarqueries auxquelles les frères se livrent permettant de justifier pas mal de leurs actions par l’égo surdimensionné qui est le leur, et qui est attendu dans ce genre de situation. Rien de plus douloureux pour le fluffiste que de voir un D20 passer pour un abruti fini par suite d’actions stupides ou des réflexions oiseuses. Ce n’est pas le cas ici (ou en tout cas, ça peut se discuter), et c’est tant mieux. Ajoutez à cela que Wraight prend soin de ne pas accorder de traitement de faveur à Leman Russ, qui en tant que héros, aurait pu y avoir droit, par rapport à El Jonson, et vous obtenez une recette gagnante. Là où Russ est jovial, honnête et farouchement fidèle envers les siens, le Lion fait montre de noblesse, de droiture et d’équanimité. Et quand le Loup Suprême se fait violent, caractériel, borné et impulsif, le Roi Lion renchérit par le mépris, l’arrogance et la tromperie. Nos deux mâles alpha ne sont donc pas manichéens, et c’est très appréciable.

D’un point de vue un peu plus macro, pour continuer, j’ai apprécié le fait que Wraight se donne la peine de lier son roman avec le fluff pré-existant des Space Wolves, et tente à son tour d’apporter des éléments explicatifs à certains des points les plus saillants de ce dernier. La malédiction du Wulfen, caractéristique essentielle de la VIème Légion, est ainsi au cœur du Loup Suprême, et, même si l’origine de cette affliction n’est pas révélée dans ces pages, elle est au moins documentée de façon sérieuse par Chris Wraight. On apprend ainsi à quel moment Russ a découvert le fléau qui menaçait le Rout, les premières réponses apportées par les Space Wolves à cette situation inédite, et surtout, le rôle que la malédiction a joué dans le déroulé de la campagne de Dulan. Car si la solution de facilité aurait consisté à faire résulter le clash fraternel d’une simple incompatibilité d’humeur, Wraight ne mange pas de ce pain-là et transforme l’explication simpliste en simple facteur aggravant, ce qui est à mettre à son crédit. Entre le tempérament fougueux à tendance monomaniaque de Russ, qui permet à ses Jarls de foncer tête baissée dans les combats de dépit d’avoir été coiffé sur le poteau par Lionel, Bloodhowl qui met ses torpilles où il veut, et c’est souvent dans le réacteur des vaisseaux ennemis, sans prendre le temps de décrocher son téléphone avant de commettre l’irréparable, le désir déplacé, mais compréhensible, du même Bloodhowl de cacher son honteux petit secret à son patron, ce qui conduit in fine ce dernier à prendre du retard sur l’accomplissement de sa mission, et Lionel qui donne sa parole de ne pas y toucher, et qui finit par le faire… mais parce qu’il veut éviter des pertes inutiles parmi les guerriers de sa Légion, les causes expliquant l’empoignade virile autant qu’animale entre Primarques sont multiples et crédibles. Un autre bon point.

Autre élément favorable à verser au dossier, une quantité non négligeable d’éléments fluff à piocher au fil des pages, tant sur la campagne en question que sur les Légions et Primarques convoqués, ainsi que quelques informations intéressantes sur l’équilibre des forces dans le camp impérial pendant la Grande Croisade, ce qui est particulièrement intéressant. Reynolds avait fait de même dans son The Palatine Phoenix, et brossé un portrait saisissant des Emperor’s Children avant le début de la campagne de Byzas, à même d’expliquer en bonne partie la mentalité particulière de cette Légion. Wraight ne va pas aussi loin ni ne fait aussi bien avec The Great Wolf, mais soumet tout de même quelques idées intéressantes, notamment à propos des relations qu’entretiennent les Primarques avec l’Empereur et Malcador. L’utilisation de flashbacks et d’ellipses pour dérouler l’histoire permet en outre à Chris Wraight de donner un aperçu de ce à quoi ressemble le Chapitre des Space Wolves au moment de sa création, ainsi que, de façon plus tenue, d’approcher Leman Russ immédiatement après la fin du siège de Terra, deux moments qui ne manqueront pas d’intéresser le fluffiste aux aguets.

Dernier lourd branlement du chef en direction de la plume de Wraight, et de manière plus terre à terre, j’ai trouvé que son ouvrage était un bon mélange de description, d’action et de discussion, cochant toutes les cases attendues d’une campagne de la Grande Croisade menée par un Primarque. On a donc droit à de la baston Astartes vs the world, tant dans l’espace que sur le plancher des vaches, rehaussée d’interventions primarquielles forcement bad ass (à consommer avec modération mais une fois de temps en temps, ça ne fait pas de mal), et couronnée par le crépage de chignon attendu entre Loulou et Chouchou. À côté de ça, Russ, Bloodhowl et Cie tapent la discute sur des sujets sensibles tout en se remémorant le bon vieux temps et tirant de savantes conjonctures sur leur rôle au sein de la Grande Croisade et de l’Imperium, ce qui permet de souffler un peu. On a enfin droit à quelques passage descriptifs et/ou explicatifs de bon aloi, même si Wraight se prend les pieds dans sa pelisse de skjald sur un sujet bien précis (voir plus bas). Finissons par mentionner les quelques grammes d’humour que l’auteur a saupoudré sur son ouvrage, et qui se concentrent quasi exclusivement en la personne du Prêtre de Fer Kloja, un vrai Normand dans l’âme, en plus d’être un fan boy des Dark Angels pour des raisons… cosmétiques. Chacun son sale goût.

Passons maintenant de l’autre côté du miroir pour dresser la liste des points perfectibles de la prose d’Herr Wraight. Celle-ci sera plus courte, mais non moins importante, que la précédente, et est à mes yeux révélatrice du statut actuel de cet auteur de la BL, considéré par beaucoup (dont le Schattra ici présent) comme un contributeur qualitatif, mais pas superlatif, de cette dernière. La faute à quelques défauts ou manquements récurrents, illustrés ici par la présence de faux raccords narratifs, certes mineurs, mais révélateurs d’un manque de documentation et/ou de relecture n’ayant pas sa place dans un ouvrage de l’Hérésie d’Horus. Qu’il s’agisse de la couleur de Freki et Geri, dont l’un a blanchi et l’autre noirci au lavage si on prend comme référence Prospero Burn et A Thousand Sonds, de la triple mention du Xenos, du mutant et, surtout, de l’hérétique, comme ennemis d’une civilisation opposée à l’Imperium pendant la Grande Croisade (erreur compte double), ou de la confusion de grade entre Bloodhowl et Bulveye par rapport à Wolf at the Door de Mike Lee (pas de chance, c’était la seule nouvelle abordant le Dekk-Tra), Wraight prend quelques libertés avec les faits (pré) établis, et c’est dommage.

Pas critique non plus mais passablement irritant, la compréhension limitée qu’à l’auteur de tout ce qui touche à l’espace, et en particulier, des dimensions et distances à considérer sur ce théâtre, empêchent l’immersion au cours des scènes s’y déroulant. L’arrivée des Space Wolves dans le système de Dulan et la bataille spatiale qui s’ensuit accumulent ainsi les problèmes de réalisme. On peut relever l’hyper vitesse avec laquelle le Rout arrive en orbite autour de Dulan après l’extraction du point de Mandeville (de l’ordre de 10 minutes d’après la manière dont c’est raconté), la tendance de Bloodhowl à faire du pare choc à pare choc avec les vaisseaux ennemis, Russ qui arrive à intercepter une salve de rayons laser (qui se déplacent donc à la vitesse de la lumière) avant qu’elle ne frappe un croiseur ami, ou encore la taille inversement proportionnelle à l’utilité de l’anneau planétaire de défense de Dulan, et ses centaines de milliers de kilomètres de coursives nettoyées en quelques heures, pour se convaincre de la nécessité pour Wraight de potasser le sujet (ou de demander conseil à Thorpe, l’expert maison de l’engagement spatial) avant d’écrire des énormités.

Troisièmement, et c’est plus un regret qu’un grief, on ressort du Loup Suprême sans avoir rencontré une nouvelle facette de la personnalité de Leman Russ ou de Lion El’Jonson. C’était pourtant l’occasion d’innover et de surprendre un peu le lecteur à ce sujet. Il n’y a pas à dire, Chris Wraight réussit à panacher les éléments constitutifs du caractère du Primarque canin avec succès, ce dernier oscillant entre violence frustre, sauvagerie réelle et feinte, réalisme froid et constat las et désabusé quant à son rôle au sein de l’Imperium. Mais, tout ça, on le savait déjà ! J’aurais bien aimé que Wraight complexifie encore le portrait de notre surhomme, ou force un peu plus le trait sur une de ses caractéristiques en particulier, afin que son Leman Russ sorte du lot. Bizarrement, je trouve que c’est le Lion qui s’en sort le mieux à cet égard, l’alternance entre odieuseté objective et noblesse angélique lui donnant davantage de relief que son frangin.

Enfin, et c’est un constat qui sera sans doute à se répéter, ce qui ne m’empêchera certainement pas de le réitérer lors de prochaines chroniques, ça reste diablement cher pour ce que c’est. Une grosse centaine de pages pour 9,99 € en format numérique, ce n’est pas un rapport quantité ni qualité prix exceptionnel. J’ai bon espoir que la BL finisse par sortir des recueils des romans Primarques, possiblement une fois que tous auront été couverts, et peut-être sous la forme d’une trilogie (6 Primarques par bouquin), en attendant, c’est clairement un produit de luxe.

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Au final, The Great Wolf est une lecture des plus honnêtes, et qui a tout pour intéresser l’amateur de Space Wolves pas trop près de ses crédits impériaux. Chris Wraight n’a ni coupé son loup, ni loupé son coup, et c’est tant mieux. À parcourir si vous en avez l’occasion, et à ne pas regretter si vous ne l’avez pas.

HAMMER & BOLTER [N°19]

Bonjour à tous, et bienvenue dans la chronique du 19ème numéro de Hammer & Bolter ! Je vous avoue que la lecture de la couverture de cet opus m’a fait présager, non pas du pire, mais du moyen, perspective guère emballante au moment de s’atteler à la rédaction d’une chronique. En cause, la présence au casting du besogneux brelan de la BL, j’ai nommé Mrs Counter, Thorpe et Kyme (en plus de la récurrente Vincent et du perpétuel Abnett). Auteurs bien établis au sein de la noble maison d’édition de Games Workshop, nos trois gaillards partagent en effet une tendance pour la prose SF/med-fan sans saveur, même si la soumission de textes intéressants n’est pas au-dessus d’eux (pas sûr pour Kyme, il faudrait que je cherche dans mes notes de lecture). Les voir truster la table des matières d’un numéro de Hammer & Bolter n’augurait donc pas du meilleur pour ce dernier, même si on n’est jamais à l’abri d’une bonne surprise. Et effectivement…

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Irixa – B. Counter [40K] :

IrixaTel Joséphine Baker, Ben Counter a deux amours : la tête de veau sauce gribiche et écrire sur les Imperial Fists (ou leurs chapitres descendants). Bon, j’avoue que je ne suis pas tout à fait sûr de ma première proposition (je lui poserai la question la prochaine fois que je le croise), mais aucun doute n’est permis quant à la seconde, et cette nouvelle soumission à Hammer & Bolter en apporte la preuve éclatante. Irixa ne traite en effet pas d’une lotion anti démangeaison miraculeuse, d’un complément alimentaire à base de jinseng, de curcumin et de pot de yaourt ou d’une offre de placement à taux garanti de 87% (autant de suppositions pourtant valides, vu le nom de la nouvelle), mais bien de l’héroïque Premier Capitaine des Fists, l’imprésentable Darnath Lysander. Catapulté à la peu enviable position de maître de conférences pour une poignée de novices du Chapitre, sans doute suite à un défi perdu contre le roué Vladimir Pugh, Lysa prend le parti d’instruire ses charges en prenant comme exemple trois engagements de l’histoire des Fists ayant mis le commandant de ces derniers devant un choix cornélien.

Le premier exemple vit le capitaine Siculus résister à la tentation d’aller chasser un Acanthaspis petax1 fait Emperor’s Children pour la simple et bonne raison qu’il avait une colonne de réfugiés à escorter au spatioport le plus proche. Le second mit l’impétueux Hamander face à ses responsabilités lorsqu’il choisit d’aller récupérer avec quelques copains l’étendard de sa 7ème Compagnie2, abattu en même temps que le Thunderhawk le transportant lors d’une retraite stratégique. Malgré le fait que la plupart de ses collègues lui fissent part en termes non incertains de la stupidité d’aller risquer la vie de Space Marines pour chopper un bout de tissu, Hamander préféra la gloâre à la raison et s’en alla chercher l’étole… pour au final se prendre une tôle, les Eldars ayant envoyé rien de moins qu’un Avatar de Khaine pour les représenter au jeu du béret.

Utilisant ces deux anecdotes pour faire réfléchir ses pupilles aux responsabilités d’un Space Marine, Lysander conclut son cours magistral par un dernier récit, beaucoup moins connu que les précédents. Extrayant une douille de bolt de son tote bag Camaloon (car oui, on peut ne jamais quitter son armure terminator et néanmoins être un hipster hyper pointu3), il se lance dans la narration de l’expédition du Chapelain Belisar sur le monde hostile (il pleut des galets tout de même) de Xanatar, à la recherche des wanabees renégat du chapitre des Venom Thorns, dont les velléités de débuter leur Ultramar personnel à partir de cette planète pas vraiment sympathique mais néanmoins propriété de l’Empereur, passèrent moyennement bien auprès des autorités compétentes. Ayant filé rencart au Capitaine Tek’Shal (un ancien pote rencontré à la faveur d’un Festival des Lames) près d’un tas de cailloux particulièrement pittoresque, Belisar tenta de raisonner son buddy à coups d’arguments bien sentis, puis, constatant le peu de succès de sa méthode, dégaina sa pétoire et mit en joue l’apprenti Guilliman. Tirera, tirera pas ? Tout comme Siculus et Hamander, Belisar s’est retrouvé devant un choix sans solution évidente : descendre de sang-froid un frère de sang qui ne lui avait personnellement rien fait ou laisser partir un Space Marine félon ? Laissant les bleu jaune-bites méditer sur ce qu’ils auraient fait à la place de leur (pas si) illustre (que ça) prédécesseur, Darnie remballe son grigri gravé de l’acronyme IRIXA (Imperator Rex In Xanatar Aeternam), sonne la fin de la classe et part s’isoler dans son petit coin privé du Phalanx, qui se trouve être une salle accueillant une statue en pied de Belisar. La nouvelle se termine avec la révélation de comment le face à face entre ce dernier et le tourne-casaque s’est réellement conclu4, épisode ayant apparemment profondément marqué le jeune Lysander pendant son propre noviciat, et dont il tire une partie de sa légendaire fortitude. The end.

Avec Irixa, Counter corrige de fort belle manière le presque faux pas qu’avait été le Vermillion soumis quelques mois plus tôt dans Hammer & Bolter #17. Bénéficiant d’une structure narrative bien mieux définie, alternant plaisamment et assez cinématographiquement les passages de questions-réponses entre Lysander et ses élèves et le récit des trois épisodes servant de base à la leçon de ce dernier (ce qui permet à Counter de mettre en scène quelques scènes d’action plutôt honnêtes), abordant de manière intéressante la relation pas forcément évidente entre le sens du devoir et la fierté martiale d’un Space Marine, et se terminant par une conclusion en bonne et due forme agrémentée d’une mini révélation pas vraiment capitale mais néanmoins sympathique, Irixa est un travail sérieux auquel on ne peut pas reprocher grand-chose. Construit sur le même modèle qu’un autre succès indéniable de Counter (Sacrifice – Victories of the Space Marines), Irixa est à mon avis l’un des meilleurs courts formats de ce pilier de la BL.

1 : Aussi connu sous le nom d’assassin bug, l’acanthaspis petax est une punaise de Malaisie utilisant le corps de ses proies comme armure. Pareillement, le Capitaine Cohpran Vaa’eigoloth s’est façonné un bouclier avec les parties les plus nobles d’un malheureux Archonte Eldar. Le plus drôle est que le zoneille est encore vivant, et peut donc faire office d’enceinte Bose de secours si le Guide Eternel souhaite organiser une petite soirée à l’improviste.

2 : Avec un matricule pareil, il n’aurait guère été étonnant que les héroïques sauveteurs se révèlent être des bras cassés de première, ce qui n’a évidemment pas manqué (merci Ben de respecter les classiques de la cinémathèque française). Ma scène préférée reste le moment où l’un des deux Thunderhawks ayant rebroussé chemin pour porter secours à l’arrière garde des Fists se crashe tout seul dans un bâtiment en feu, condamnant de fait ses occupants à faire le chemin du retour à pied. Le théâtre des opérations étant une ville en ruines grouillant de Dragons de Feu se croyant au Burning Man et de Banshees fans de Captain Beefheart, cette randonnée pédestre ne pouvait pas bien se terminer.

3 : D’ailleurs, Lysander a la coupe de cheveux et la barbe d’un mec qui écoute des bootlegs de Pigeon Haggard (le demi-frère alcoolique et bipolaire de Merle) au 41ème millénaire.

: Pour faire simple, disons que ça c’est fini par un « Take that Tek’shal ».

The Lion (part III) – G. Thorpe [HH] :

The LionGrand final du plus long format jamais publié dans un numéro de Hammer & Bolter (romans feuilletons mis à part), le troisième acte de The Lion débute par la proclamation d’un fragile cessez le feu entre les belligérants de Perditus, la mauvaise volonté manifeste exprimée par Typhon ne faisant au final pas le poids face aux méthodes de négociations musclées d’El’Jonson1. Ce dernier arrive (finalement) à la surface de la planète aussi sapé qu’un maquereau de GTA, et pénètre dans la station de l’Adeptus Mechanicus, où l’attend Tuchulcha, boule à facette géante et accessoirement intelligence artificielle ayant asservi le système de Perditus jusqu’à ce qu’il soit libéré par l’effort combiné des Dark Angels et de la Death Guard. Epargné après sa défaite à fins d’études par le Mechanicum, Tu-pues-le-chat est le prix tant convoité par Typhon et Midoa, chaque camp cherchant à priver l’autre de la possession d’une machine au potentiel aussi extraordinaire que son humeur est taquine (du genre à envoyer des vaisseaux dans le Warp sans prévenir – ce qui n’est pas sympa – ni enclencher leurs champs de Geller – ce qui n’est franchement pas sympa –).

Au début pas franchement emballé par le tour qu’ont pris les expérimentations des prêtres rouges depuis son départ de Perditus, puis carrément effrayé par la puissance de HAL 30.000, Lionel décide de finir ce qu’il avait commencé il y avait des années et de détruire Tuchulcha… en apparence. Il annonce donc aux capitaines des autres Légions que la station de recherche de Perditus va être oblitérée afin que nul ne puisse être tenté d’utiliser le Tuch’ à des fins malavisées. Peu satisfait par cette décision, Typhon profite de la clémence du Lion à son égard pour se téléporter au cœur du complexe du Mechanicum2 afin de convaincre Tuchulcha de repartir avec lui sur le Terminus Est. Confiant dans sa survie (d’ailleurs il n’était même pas sûr qu’un Exterminatus soit capable de venir à bout de cet engin démoniaque – sans doute conçu par Nokia à la base –), ce dernier renvoie gentiment les Death Guards à leurs chères études et sur leur vaisseau, juste au moment où un Lionel vraiment furax de constater qu’absolument tout le monde le prend pour un con(combre) arrive à son tour dans la station et commence à botter des derches de Prouteux (résultat des courses : une paire de pompes en croco de Caliban3 bousillée).

La nouvelle se termine avec un Lion El’Jonson ruminant de bien sombres pensées, seul dans sa salle du trône (NDR : non, il n’est pas aux chiottes). Ayant au final récupéré Tuchulcha, qu’il compte utiliser pour mettre fin à la Croisade de Thramas une bonne fois pour toutes, il médite sur les derniers développements de la rébellion d’Horus et sur le comportement plus que suspect de Roboute Guilliman (qu’il ne semble d’ailleurs pas vraiment porter dans son cœur4) avec un de ses Jawas de compagnie (qui lui confirme ce que Cruze lui avait susurré à l’oreille sur Tsagualsa : les Dark Angels restés sur Caliban sont sur le point de faire sécession). Il en profite également pour exposer ce qui sera son grand dessein pendant l’Hérésie : s’assurer qu’aucune Légion, loyale ou non, ne sorte du conflit assez puissante pour pouvoir menacer le règne de Pépé. Une ligne de conduite plus que borderline, en cohérence avec les agendas secrets développés par la plupart des Primarques au cours du conflit (j’écris la plupart car je ne pense pas qu’Angron goûte aux plaisirs de la realpolitik), dont l’exposition permet de conclure The Lion de fort belle manière.

Bénéficiant grandement des révélations fluffiques amenées dans les dernières pages du récit, ce troisième volet n’est pas moins exempt de défauts, dont le premier est à mes yeux le traitement subi par Typhon sous la plume de Thorpe. Dépeint comme un demeuré fini en matière stratégique (toutes ses décisions intelligentes lui sont en fait soufflées par un sous-fifre) et comme une grande gueule prompt à insulter un Primarque, tout en sachant pertinemment que cela risque de se retourner contre lui et ses hommes5 (il doit faire des Périscopes, c’est pas possible autrement), le premier Capitaine de la Death Guard ne sort pas grandi cette nouvelle. À l’inverse, Lionel regagne en profondeur ce qu’il avait perdu pendant le 2ème épisode, son positionnement toujours plus ambigu par rapport aux forces en présence de l’Hérésie s’inscrivant fort bien dans le background, historiquement et canoniquement trouble, des Dark Angels en ces heures décisives. En auteur vétéran, Thorpe prend de plus bien soin de donner aux fanboys ce qu’ils veulent, c’est-à-dire des révélations fluffiques ayant une véritable portée sur le développement de l’Herésie d’Horus. Même si on n’est pas au niveau du twist final de Legion, c’est toujours sympa de voir des personnages importants se « griser » au fil des pages, et force est de reconnaître que Gav a fait honorablement le job de ce point de vue-là.

Autre source d’insatisfaction, les quelques failles de cohérence relevées en cours de route, la plupart découlant directement d’une utilisation trop bornée des pouvoirs de téléportation dont bénéficient les protagonistes de l’histoire, et qui auraient dû selon toute logique empêcher l’apparition du statu quo mis en scène par Thorpe sur Perditus (seul moyen pour que Lionel puisse arriver sur place à temps pour régler la situation). Entre Typhon qui se souvient soudainement qu’il n’a pas besoin de jouer au tower defense avec les Iron Hands pour accéder à Tuchulcha, et ce dernier qui attend obligeamment sur sa planète minable que Lionel vienne le chercher alors qu’il a certainement les moyens de précipiter leur entrevue, la crédibilité SF du récit est largement battue en brèche, ce qui est toujours dommage dans un nouvelle de 40K.

Ceci dit, le bilan est au final assez positif pour The Lion, qui se révèle être un long format digne d’intérêt et à la lecture divertissante. À l’inévitable question : « n’y avait-il pas moyen de faire la même chose en trente pages ? » j’apporterai une réponse négative, la longueur du récit permettant à Thorpe de peindre son sujet par petites touches, un parti pris s’avérant au final plus judicieux qu’un descriptif ramassé sur quelques lignes ou pages. Cet espace supplémentaire permet de plus à l’auteur de débuter quelques intrigues secondaires (Lionel qui doute de la loyauté du capitaine de l’Invincible Reason, Typhon qui voulait récupérer Tuchulcha pour le compte d’un mystérieux commanditaire, la probable présence d’agents du Dark Mechanicus parmi les gardiens de Tuchulcha) ne demandant qu’à être explorées dans d’autres récits. Pas mal Gavin, pas mal du tout.

1 : Lionel: Bon je te préviens coco, si tu ne fais pas exactement ce que je t’ai dit de faire, ça va très mal se passer pour toi. Je compte jusqu’à trois.

Typhon: Whatever, bitch.

Lionel: Un.

Typhon: Parle à ma fau-

BOOOOOOOOOM

Typhon: Oh, c’était quoi ça? Tu avais dit que tu comptais jusqu’à trois !

Lionel: Oui, et je balance une torpille cyclonique pour marquer le décompte. Deu-

Typhon: Okokokok, tu l’as ton armistice espèce de grand malade.

Lionel: Tu vois quand tu veux. On se retrouve en bas, bises.

2 : On se demande pourquoi la Death Guard n’a pas commencé par ça au lieu d’assiéger la station de manière conventionnelle.

: Ce jeu de mots vous a été gracieusement offert par Privateer Press.

: Il le considère au mieux comme un imbécile heureux et au pire comme un ignoble traître, le projet du grand Schtroumpf de commencer un Imperium 2.0 ne plaisant pas du tout à un Lionel se voyant en parangon de loyauté à son Pôpa. C’est assez savoureux de la part d’un Primarque qui a révoqué l’Edit de Nikea sans états d’âme et a décapité à mains nues un de ses Chapelains qui lui rappelait que ce faisant, il défiait ouvertement la volonté de l’Empereur.

5 : Extrait de la nouvelle fable du Lion et du Rat. « … Et Typhon lui tint à peu près ce langage: “Wesh bolos, les DG sont dans la place, prêts à te ravager la face ». Et Lionel répondit : « J’ai entendu ». Et Typhon ne dit plus rien car il s’était fait dessus… ».

Gilead’s Curse (ch. 6) – D. Abnett & N. Vincent [WFB] :

Gilead's CurseRetour à la geste de Gilead le môôôdit, qui commence cette fois par un petit poème faisant rimer moon avec doom (rime touchant le RSA) et death avec faith (rime indigente)1. Ce huitain très imparfait sert d’introduction au retour d’un personnage délaissé par les auteurs depuis quelques chapitres, j’ai nommé le vampire Dragon Rouge lâchement attaqué par Gilead en pleine séance de pilates au début du roman. Et, tout comme son altesse murinissime Raton DLXXXVIII, notre ami hématophile est visiblement affligé d’un TOC de langage assez handicapant dans la vie de tous les jours, puisqu’il passe son temps à répéter son interminable haïku, encore, encore et encore. Lui a cependant l’excuse que ce mantra lui permet de rester à peu près sain d’esprit, en le rapprochant de l’idéal du chevalier bretonnien qu’il a été avant de se faire rouler une pelle par Edward Cullen, il a de cela plus d’un millénaire. D’ailleurs, son quotidien est tout entier consacré au respect d’une routine « humaine » (entretenir son matériel, affuter son épée, dresser le camp pour la nuit…), quand bien même notre vampire n’a en réalité aucun besoin de cela pour poursuivre son existence éternelle.

Totalement déprimé après des éons à traîner ses solerets d’un bout à l’autre du Vieux Monde, le Comte Vampire (puisque c’est ainsi qu’il est appelé pendant la première moitié du chapitre2) n’aspire a rien d’autre qu’à goûter au repos éternel, mais son amour-propre l’empêche d’aller s’enfermer dans la cabine à UV la plus proche ou de s’empaler sur son propre cure-dent. Tel le Tueur Nain qu’il n’est définitivement pas, notre CV cherche à être vaincu en combat singulier par un adversaire digne de ce nom, ce qu’il pensait avoir trouvé en la personne de Gilou le mangeur de tofu. Ceci dit, cela ne l’a pas empêché de laisser filer le bretteur elfe à deux reprises en autant de chapitres, alors que ce dernier ne demandait pas mieux que d’accorder une place au soleil à sa Nemesis… Pourquoi faire logique et simple quand on peut faire abscons et tordu ? Cette fois-ci tout à fait résolu à finir la reprise de manière définitive, le Comte Vampire repart donc dans les souterrains skavens, définitivement très facile à trouver, à la recherche de l’insurpassable Gilead.

En parallèle, deux mystérieux compagnons (très grands, très minces, les traits dissimulés par une capuche, passant inaperçus auprès des humains, je vous le donne en mille ce sont les Casseurs Flowteurs3) sont également sur les traces de notre héros, et après avoir longuement réfléchi à la question, finissent par conclure que le guerrier elfique supra-balèze bougeant à une vitesse supersonique ayant récemment décimé la population skaven des environs à lui tout seul est, selon toute probabilité, Gilead. Pas plus bête que le premier vampire venu, nos deux lascars optent également pour une petite virée dans le sous-monde, et tombent fatalement nez à nez avec le Comte au bout de quelques pages (c’est pas comme si le réseau des tunnels skavens était aussi tentaculaire que labyrinthique, hein). Gros moment de malaise entre les trois poursuivant du maillot jaune, qui après un bref combat4, décident de faire cause commune afin de retrouver leur connaissance mutuelle. Arriveront-ils à temps pour assister au combat apocalyptique entre l’Elfe qui pelait des patates plus vite que son ombre et le beau-frère attardé de Maître Splinter ? Le suspense reste entier.

Croyez-le si vous le voulez, mais j’ai trouvé ce chapitre plutôt pas mal par rapport aux précédents. Certes, il y a encore largement matière à redire ou à commenter dans cette vingtaine de pages5, mais on est loin des délires à la limite du mystique qui étaient la norme jusqu’à récemment. En centrant leur narration sur d’autres personnages, les auteurs ont offert à leur lectorat une pause salutaire dans l’éprouvante narration des baroques aventures de Gilead. Vous ne pouvez pas imaginer à quel point cela fait du bien de lire un dialogue à peu près sensé entre des personnages l’étant également après plusieurs épisodes très possiblement rédigés sous l’influence de substances illicites. De même, le simple fait que Vincent et Abnett justifient certains comportements précédemment perçus comme irrationnels (pourquoi un vampire allumerait-il un feu alors qu’il ne sent pas le froid et voit parfaitement de nuit ? – voir ch. 1 –) incite à une certaine clémence au moment de juger de la qualité de l’épisode. Ce n’est pas du Cavaliers de la Mort, très loin de là même, mais on s’en approche, un pas à la fois.

1 : Je ne vous ai pas dit mais chaque chapitre débute systématiquement par quelques lignes racontées depuis le point de vue de la barde narrant l’histoire de Gilead à un public que je me plais à imaginer passablement blasé, si elle leur balance à la tête la même prose que Vincent et Abnett. Elle n’aurait pas été à l’agonie, je pense qu’un de ses spectateurs l’aurait étranglée avec les cordes de sa lyre avant la fin du chapitre 3.

2 : Puis simplement le Comte pendant la seconde mi-temps. Le Comte quoi. Celui-ci est plus littéraire que matheux, mais difficile de ne pas voir dans cette appellation un clin d’œil appuyé à Sesame Street de la part d’auteurs de langue anglaise.

3 : Blague à part, on apprend à la fin du chapitre qu’il s’agit de Fithvael (ancien sidekick de Gilead) et de son éromène disciple Laban, lointain cousin de notre héros.

4 : Combat qui donne d’ailleurs à voir la gent elfique telle qu’elle est vraiment, c’est-à-dire fourbe (ils se mettent à deux contre le vampire après avoir réalisé qu’il était beaucoup trop balaise pour un combat à la loyale), rageuse (le jeune elfe continue à attaquer son adversaire après que ce dernier ait rompu l’affrontement à la demande du troisième larron), et malpolie. Heureusement que le Comte a, lui, des manières d’homme du monde, sans quoi la rencontre aurait pu très mal finir pour Siegfried & Roy.

5 : Le vampire qui préfère (littéralement) sucer des vaches plutôt que des humains, on en parle ?  Bon ok, mais le fait qu’il ait un faible pour les jeunes filles menant une vie saine (pas de drogue surtout !) et ne buvant que de l’eau, malgré le fait que ce soit « ben difficile à trouver de nos jours », on en parle quand même ? Non ? Et lorsqu’il utilise ses yeux comme lampe-torche pour éclairer son chemin dans les souterrains des hommes rats (les vampires ont des yeux rouges qui brillent dans le noir, c’est bien connu), on va en parler tout de même ? Surtout qu’il se fait griller par ses stalkers elfiques à cause de ça. Non, vraiment? Ok. Allez, une petite tournure made in Vincent pour terminer, parce que je sais que vous aimez ça.

Thunder from Fenris – N. Kyme [40K] :

Thunder from FenrisCe qu’il y a de bien avec les audiobooks de la Black Library c’est qu’une bonne partie d’entre eux finissent par être publiés en format ebook quelques mois après leur première sortie, et ce pour un prix bien plus attractif qu’à l’origine. Hammer & Bolter a également contribué à ce genre de recyclage en son temps, en incluant des nouvelles précédemment disponibles uniquement en mode audio. Thunder from Fenris appartient à cette catégorie de fictions multicanal, et avait été à l’origine publiée en accompagnement de la sortie du Codex Space Wolves en 2009, avant de trouver le chemin du 19ème numéro de Hammer & Bolter.

Envoyée combattre aux côtés de la Garde Impériale sur le monde gelé de Skorbad, une escouade de cavaliers tonnerre voit l’un de ses membres succomber à la malédiction du Wulfen et s’enfuir dans les étendues sauvages de la planète après avoir trucidé son loup de compagnie ainsi qu’un de ses camarades et sa monture. Bien embêtés par ce coup du sort, les trois autres fils de Russ mettent ces pertes sur le dos de l’ennemi local (des zombies de la Peste) afin de sauver les apparences devant leurs alliés, mais décident tout de même de mettre la main sur le fratricide avant de quitter Skorbad, l’épidémie étant en passe d’être contenue au moment où commence notre histoire.

S’en suit le récit de la traque du Wulfen en liberté par les grands méchants loups, séquence riche en péripéties et en scènes de baston assez insipides, et conclue par un retournement de situation pas vraiment original. On notera tout de même que la nouvelle se termine sans que l’intrigue n’ait évolué d’un iota, la dernière ligne du texte décrivant l’ultime survivant de l’escouade (voilà une campagne qui a du faire pleurer plus d’un RH du Croc : 90% de pertes parmi la crème de la crème du chapitre) s’élançant dans la toundra hache de givre au clair à la poursuite de son infatigable comparse poilu, comme il l’avait déjà fait 28 pages plus tôt. It’s groundhog Wulfen day folks.

Thunder from Fenris nous propose de, ou plutôt nous force à, renouer avec Nick Kyme sous son incarnation la moins avenante, celle de l’auteur publicitaire qui ne fait même pas semblant de s’intéresser à son sujet et se contente de cocher toutes les cases de son cahier des charges sans chercher à livrer un résultat intéressant, ni même cohérent. Cela avait déjà transpiré dans l’extrait de The Fall of Damnos (Hammer & Bolter #4), narration très peu inspirée du potentiel martial des Nécrons mettant en scène la moitié des entrées de l’ancien Codex ; cela dégouline carrément dans cette nouvelle soumission, qui se révèle être une ode bancale et risible à la puissance des cavaliers tonnerre, nouveauté du Codex SW de 2009 qu’il fallait bien faire acheter en masse par les fanboys pour rembourser les moules.

Bancale tout d’abord car Kyme ne s’embête pas à justifier ni à dissimuler les multiples incongruités de son scénario. Le simple fait qu’une escouade de cavaliers tonnerre opère en solo (ce qui semble être ici le cas, nos héros ne communiquant avec personne tout au long de la nouvelle, pas même avec l’équipage du vaisseau sans lequel ils auraient eu bien du mal à rejoindre Skorbad) constitue déjà une double hérésie, non seulement d’un point de vue stratégique, mais également au niveau du fluff, qui dépeint clairement les chevaucheurs de loulous géants comme l’un des secrets les mieux gardés du Chapitre, ce qui ne plaide pas pour un déploiement sur une opération de soutien à la Garde Impériale. La nouvelle n’a même pas commencé qu’elle prend déjà l’eau de toute part ! Kyme réussit donc à prendre un pire départ que Green dans son Salvation, que je considérais jusqu’à présent comme le nadir de la littérature 40K en matière de respect du background, ce qui mérite d’être souligné.

La suite est (mal)heureusement1 du même tonneau, le souci de Kyme de peindre ses héros sous le meilleur jour possible prenant le pas sur tout le reste, y compris et surtout la cohérence de son récit. Le Wulfen doit étriper un de ses camarades de classe pour lancer l’intrigue ? Ça tombe bien, les trois autres membres de l’escouade étaient à des kilomètres de leurs comparses au moment des faits et ne pouvaient donc pas intervenir. Un loup tonnerre, ça court à quelle vitesse ? Bah, ça dépend des pages, mais ça n’est en tout cas pas foutu de rattraper un Wulfen, tenez-le vous pour dit. Les Space Wolves sont de nobles guerriers faisant toujours ce qui leur semble juste, même si cela doit les mettre en porte à faux avec les factions les plus cyniques de l’Imperium ? Ceux de Kyme exécutent de sang-froid une poignée de Gardes Impériaux ayant eu le malheur de combattre des zombies de la Peste au corps à corps2. Un Space Marine en armure énergétique qui tombe dans de l’eau profonde ne coule pas comme une pierre du fait de son poids considérable (alors qu’un loup tonnerre, moins caparaçonné que son cavalier, si). Les zombies de Kyme découvrent soudainement comment utiliser des fusils lasers et des autocanons (avec assez de précision pour descendre un loup tonnerre pendant sa charge) lors du final de la nouvelle… Autant de « détails » pouvant, et encore, passer inaperçus dans un audiobook, le rythme de la narration ne permettant généralement pas à l’auditeur de se livrer à un contrôle de cohérence en bonne et due forme, mais qui ressortent comme un bouton d’acné sur le front d’un Blood Angels une fois couchés sur le papier.

Risible ensuite, car les adversaires choisis par Kyme à ses vikings du futur ne paient vraiment pas de mine. Une galaxie hostile remplie de joyeusetés pouvant gober un Space Marine comme qui rigole, souvent sans même avoir besoin de l’éplucher auparavant, et nos Gardes Loups d’élite se retrouvent à tataner de vulgaires zombies de la Peste ? Et pourquoi pas des Grots hémiplégiques pendant que tu y es, Nick ? Résultat des courses, nos héros font bien évidemment exploser le bodycount de la nouvelle à grands renforts de scènes d’action tout droit sorties d’une repompée philipino-turco-italienne des aventures de Connard le Barbant, mais à vaincre sans péril… Quitte à donner dans le panégyrique, autant donner aux protagonistes un ennemi à leur taille, ce qui ne donnera que plus de valeur à leurs exploits : César avait bien pigé la ficelle dans sa Guerre des Gaules, mais Kyme n’a visiblement pas eu le même déclic au moment d’écrire Thunder from Fenris, ce qui est assez malheureux étant donné le but premier de l’opus.

En conclusion de cette chronique, vous l’aurez compris assez désabusée de ma part, je ne résiste pas à la tentation de vous soumettre une réflexion que je me suis faite au moment des recherches préliminaires à la rédaction de ce billet (car oui, je fais des recherches, même – surtout d’ailleurs – pour des œuvres aussi terribles que ce Thunder from Fenris). La nouvelle ayant une entrée sur le Lexicanum, j’ai eu la surprise de découvrir à la lecture de l’article que Kyme avait calqué ses personnages sur le trio de Space Wolves représenté sur l’illustration de couverture de l’avant-dernier Codex. Le héros (ou en tout cas, le dernier survivant de l’escouade) est ainsi un guerrier blond avec une cicatrice au-dessus de l’œil gauche, une cape en peau de loup, un collier de crocs et maniant une hache de givre. Il est secondé par un adepte du bolter noir de poil et d’humeur, et par un joyeux berserk aux cheveux bruns armé d’une paire de griffes énergétiques. Toute ressemblance avec des personnages ayant existé (ou dans notre cas, ayant été représenté ailleurs) est bien entendue totalement fortuite… Même si un tel « plagiat » n’a rien de répréhensible en tant que tel, je trouve que cela en dit long sur la motivation qui devait être celle de Kyme au moment de pondre Thunder from Fenris, le bougre ayant simplement recyclé un artwork (très réussi il faut bien le reconnaître) au lieu de partir sur une création originale. La vie d’un auteur de la BL peut-être ingrate.

1 : À ce stade, j’avais déjà basculé en mode sarcastique, et prenait les nouvelles bourdes de Kyme avec un détachement total et un plaisir mauvais.

2 : On rappellera tout de même que Logan Grimnar s’est mis l’Inquisition à dos en critiquant ouvertement les mesures préventives prises par cette dernière envers la population d’Armageddon après qu’Angron et ses potes soient venus faire un bowling sur la planète en 444M41.

Au final, ce 19ème numéro a clairement surpassé les attentes, certes peu élevées, que j’avais placées en lui à la lecture de son lineup. You can’t judge a book by looking at the cover, comme dit le poète, et à raison. Avec un chapitre de Gilead’s Curse plutôt meilleur qu’à l’accoutumée, un final de The Lion assez convaincant et un Irixa tapant dans le haut du panier de Counter, les ¾ de ce numéro ont surperformé, ce qui est toujours agréable. Reste le Thunder from Fenris de Kyme, qui s’est révélé contenir assez d’éléments what-the-fuck-esques pour l’opus dans son ensemble : regrettable, certes, mais pas vraiment surprenant. À la prochaine !

HAMMER & BOLTER [N°17]

Bonjour et bienvenue dans la chronique du numéro 17 de Hammer & Bolter! Au menu aujourd’hui, un hors d’œuvre de Counter, une entrée de McNeill, un plat de résistance signé Josh Reynolds, et une petite Thorperie en guise de dessert (c’est fin, c’est très fin, ça se mange sans fin). Les plus observateurs parmi vous auront noté que le tandem infernal Vincent/Abnett n’a pas contribué à cette publication (tout le monde a le droit à ses vacances après tout), ce qui, très honnêtement, ne me semble pas augurer du pire pour la qualité générale de l’ouvrage. Mais je m’avance…

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Vermilion – B. Counter [40K] :

VermilionToujours engagé dans sa période (Imperial) Fists & Fils, Ben Counter livre avec Vermilion un petit stand alone assez surprenant. Si le style du créateur des immortels (mais néanmoins disparus) Soul Drinkers imprègne sans hésitation possible les 15 pages de ce récit, l’objectif poursuivi par l’auteur dans cette courte nouvelle ne saute pas aux yeux, ce qui étonne de la part d’un contributeur (habituellement) aussi « carré » que Counter1.

Notre histoire débute dans les ruines fumantes d’une station de recherche de l’Ordo Xenos, quelque part dans le Nord Est galactique. Prévenu d’une attaque du complexe scientifique par l’Inquisitrice Carmillas, l’Archiviste Deiphobus débarque avec quelques copains pour apprendre les bonnes manières aux xenos responsables de ces troubles du voisinage. Manque de bol, comme les carabiniers d’Offenbach, les jaunards arrivent trop tard pour interrompre la baston, et ne peuvent que constater l’extermination de tous les occupants de la station (Carmillas comprise). Seul survivant de cette empoignade, un unique xenos est ramené sur le vaisseau des Imperial Fists pour y subir des interrogatoires psychiques de la part de Deiphobus.

La suite de la nouvelle est principalement consacrée à l’exploration de la psyché du prisonnier des Fists par un Deiphobus assez imaginatif dans ses méthodes. Chaque « plongée » dans l’esprit de l’homme-pruneau (car c’en était un) donne ainsi l’occasion à notre héros de prendre une forme différente, afin de percer les défenses mentales du xenos. Barge de bataille, scout Space Marine ou missionnaire impérial, Barba-phobus ne rechigne pas à donner dans le transformisme lors de ses séances de trekking à l’intérieur du cerveau de son captif. Chaque expédition lui révèle de nouvelles pièces du puzzle, jusqu’à ce que la lumière se fasse sur les causes de l’attaque de la station.

Ayant obtenu le fin mot de l’histoire, Deiphobus fait son rapport au Seigneur Inquisiteur Vortz, lui laisse le xenos pour qu’il puisse faire mumuse avec, et s’en va en jouant de l’harmonica dans le soleil couchant, juché sur les épaules du fidèle sergent Ctesiphon. La nouvelle se termine par une signature de bail psychique entre Deiphy et Carmillas, la première (ou ce qu’il en reste, tout du moins) acceptant de mettre un peu d’ordre dans les souvenirs de l’Imperial Fist2. Le lecteur est laissé seul juge de la manière d’interpréter cette bien étrange conclusion, que l’on peut mettre au crédit soit d’un soudain penchant de Counter pour la métaphore larmoyante, soit de la volonté du même Counter de présenter à son lectorat un pouvoir psychique jusque-là inconnu des psykers impériaux. You choose.

Au final, Vermilion se révèle être assez différent du reste de la bibliographie SM-esque (essaimesque ?) de Ben Counter, cette nouvelle manquant à mes yeux de l’axe directeur fort présent dans tous les autres travaux de l’auteur. Le huis clos entre Deiphobus, son prisonnier et le fantôme de Carmillas, qui occupe la majeure partie du récit, ne semble ainsi avoir d’autre fonction narrative que de permettre à Counter de décrire avec l’imagination qu’on lui connaît les tribulations mentales d’un psyker en terrain hostile. Le fait que le psyker en question soit un Space Marine mène le lecteur à penser que ces séances d’interrogatoire déboucheront forcément sur un final musclé, au cours duquel Deiphobus et ses sous-fifres casseront du xenos afin de venger le trépas de l’Inquisitrice, développement archétypique de l’histoire de marounes de la BL (genre dont Counter est l’un des fers de lance). La direction différente que Ben choisit d’emprunter en conclusion de son récit constitue donc une surprise, qui, si elle ne peut pas être qualifiée de mauvaise (une nouvelle de SM qui se termine sans effusion de sang ? J’achète !), n’est pas superlative non plus, le final manquant de maîtrise comme d’intérêt.

Vermilion, étude littéraire plutôt que nouvelle totalement finie ? Et pourquoi pas ? Ce ne serait pas la première fois (ni la dernière, je gage) qu’un texte assez peu travaillé a été publié dans Hammer & Bolter.

 1 : Nik Vincent et Dan Abnett ayant fait un break dans l’écriture de leur feuilleton halluciné, et la nature ayant, comme chacun sait, horreur du vide, je me plais à penser que les errements rougeâtres de Counter ont été causés par l’impérieuse nécessité de proposer au lecteur de Hammer & Bolter sa dose de prose cryptique mensuelle.

2 : Ce faisant, l’Inqusitrice devient l’archiviste d’un Archiviste. Mind blown.

The Iron Without – G. McNeill [40K] :

The Iron WithoutAuteur Iron Warriors par excellence, Graham McNeill donne avec The Iron Without un nouveau chapitre à la tentaculaire saga du Warsmith Honsou, Nemesis autoproclamée de l’autre personnage majeur du Grahamivers, j’ai nommé le Capitaine Uriel Ventris des Ultramarines. Les meilleures choses finissant toutefois par lasser, la présente nouvelle ne met au premier plan ni le diabolique sang de bourbe rouille de la IVème Légion (bien que ce dernier y apparaisse néanmoins, accompagné de sa clique de side-freaks), ni le vertueux Schtroumpf Paladin (cette vieille baderne psychorigide de Learchus viendra tout de même faire le coup de feu en fin de récit), mais le brave Soltarn Vull Bronn, alias The Stonewrougth, Mozart de la géologie militaire et prodige de la conduite de siège en environnement pierreux. Pour des raisons de simplicité, nous l’appellerons désormais Yves (pour Yves Rocher1).

The Iron Without commence bien mal pour Yves, enseveli qu’il est sous quelques tonnes de gravats. Passablement amoché par toute cette caillasse, et bien incapable de bouger, notre malheureux héros a tout le temps de se demander ce qu’il a fait pour mériter un si triste destin, lui le légionnaire modèle, la coqueluche de Perturabo ! Et à la réflexion, Yves finit par mettre le doigt (façon de parler, il ne lui en reste plus guère) sur le nœud du problème : cette enflure de Honsou, dont les directives semblent n’avoir pas pris en considération la survie de l’armée que ce dernier a amené sur Calth (après l’avoir gagnée chez la Mamie Loto du Maelström, j’ai nommé ce vieux Huron Blackheart2).

La suite, et le gros, de la nouvelle, est l’occasion pour McNeill de dérouler un petit flashback des familles, destiné à mettre en lumière les évènements ayant mené Yves au triste état qui est le sien. Arrivé sur Calth dans les bagages de Honsou, notre héros s’est vu confier par son boss l’insigne honneur de commander l’armée Iron Warriors à la victoire contre ces planqués d’Ultramarines, pendant que le Warsmith et sa garde mystérieuse partaient looter en lousdé quelque artefact mystique loin du front (ne m’en demandez pas davantage à ce sujet, je n’ai pas lu Invasion of Ultramar, qui relate en détail les péripéties non couvertes dans The Iron Without). Malgré sa science de la fortification, les hordes de mercenaires assoiffés de sang qu’il a à sa solde et les innombrables machines sur lesquelles il peut compter, Yves et ses grouillots finissent éclatés dans les grandes largeurs, victimes de la supériorité stratégique de l’alliance Ultramarines – Raven Guard leur étant opposé. Seule consolation pour notre malchanceux protagoniste, il croit apercevoir l’increvable Honsou s’éclipser dans le chaos de la bataille juste avant que Learchus ne vienne transformer le Stonewrought en Splashedbrain. Vae Victis !

Même s’il est préférable de lire cette nouvelle à la suite du roman Invasion of Ultramar, auquel elle donne un nouvel éclairage que je devine être intéressant, McNeill mène sa plume avec suffisamment de brio pour permettre à tous ses lecteurs de retirer quelque chose de The Iron Without. Les non-initiés à l’épopée Honsou-enne y trouveront une histoire de Space Marines contenant assez d’éléments fluffiques et d’action musclée pour satisfaire leurs coupables penchants, les autres pourront y retrouver quelques têtes connues, et bénéficier d’une vision plus macroscopique de l’anéantissement de l’armée chaotique sur Calth. Tout bénef’.

The Iron Without s’avère donc être une contribution solide, à la fois à la bibliographie de McNeill, mais également à la littérature 40K-esque en général. Pour ma part, la seule ombre au tableau serait les nébuleuses explications avancées par McNeill pour justifier la montée en première ligne de Honsou, tout prêt à mener une charge suicide en compagnie d’esclaves terrassiers pour prouver à ses hommes qu’il possède bien les douilles3 en acier trempé faisant de lui un digne (beau) fils de Perturabo4. À quand le sans-faute, Graham ?

1 : C’était ça ou Roch Voisine, je vous ai évité le pire.

2 : Pour plus d’information sur ce passage mémorable de la geste de Honsou, se reporter à la nouvelle Skull Harvest.

: Oui, les douilles. C’est un Iron Warrior après tout.

4 : « Bon, je vais aller m’exposer inutilement en première ligne afin de montrer aux gars que j’en ai dans le falzar, et que c’est moi le boss. Ceci dit, je sais pertinemment que rien de ce que ne pourrais faire ou dire ne pourra jamais les convaincre que je suis autre chose qu’un parvenu. Il est donc nécessaire que j’aille montrer ma lune à l’artillerie des Ultramarrants, même si cela ne servira absolument à rien. »
« C’est brillant maître. »

« N’est-ce pas ? »

« Je parlais de votre jeu de douilles, pas de cette idée complètement débile. »

« … »

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Stromfel’s Teeth – J. Reynolds [WFB] :

Deuxième volet de la série de nouvelles consacrée à Erkhart Dubnitz, et à travers lui au très humble et très violent Ordre de Manann, Stromfel’s Teeth permet à Josh Reynolds de poursuivre sa visite guidée de la plus célèbre, la plus riche, la plus corrompue et la plus humide cité-Etat du Vieux Monde. Et au petit jeu du « et si Marienburg m’était contée », force est de constater que Herr Reynolds fait tranquillement la course en tête, sa plume donnant vie aux quartiers et aux habitants du cru avec une aisance et une justesse fluffique dignes d’être notées (et appréciées).

Marienburg, l’après-midi de la veille de Mitterfruhl (l’équinoxe du printemps du monde de Warhammer). Alors que les citadins vaquent tranquillement à leurs occupations, deux évènements sont sur le point de pourrir le groove de l’empereur. Le premier est l’arrivée d’une tempête assez costaude depuis la Mer des Griffes (ce qui n’est jamais une bonne nouvelle quand on a du linge étendu à sécher dehors). Soit. Le deuxième est l’arrivée de Street Sharks assez affamés dans la place, qui se solde immédiatement par une panique monstre et des morts en pagaille. Pas glop.

Sommés d’agir par les autorités compétentes, Dubnitz et ses condisciples, menés par l’inénarrable Dietrich Ogg (Grand Maître manchot, brutal et obséquieux – car non ces trois termes ne sont pas antinomiques – de l’Ordre de Manann), se lancent à la poursuite des quatre fils du docteur Bolton1, avec des résultats concluants malgré quelques pertes du côté des templiers. Dépêché en renfort de la garnison du temple de Manann, assiégé par une foule aussi bienveillante et ouverte d’esprit qu’un bataillon de partisans de Donald Trump défoncés à la bière en goguette dans un Chipotle, Dubnitz croise la route d’une ancienne connaissance (Esme Goodweather, prêtresse de l’Ordre de l’Albatros, déjà croisée dans Dead Calm), dont les tours de passe-passe et l’intuition salutaire2 permettront à l’enquête menée par notre jovial héros d’être bouclée rapidement et (presque) proprement. On ne change pas une équipe qui gagne.

Stromfel’s Teeth est la confirmation des débuts prometteurs du moins australien des Reynolds de la Black Library dans le sous genre, assez délicat à manier (demandez à Sarah Cawkwell), de la nouvelle sérialisée. Dans la droite ligne de ce que C. L. Werner avait réussi à faire avec son personnage de Brunner, Josh parvient à faire vivre à ses personnages récurrents des aventures rythmées, prenantes et bien construites, en n’oubliant ni de faire évoluer ces derniers d’un opus à l’autre (on apprend ainsi en cours de récit que Dubnitz et Goodweather ont eu une liaison qui s’est mal terminée entre Dead Calm et Stomfel’s Teeth), ni d’incorporer de nombreuses informations fluffiques plus ou moins importantes mais toujours à propos et en cohérence avec le background canonique. Le petit plus de Reynolds par rapport à son illustre aîné est qu’il parvient même à franchement tirer sur la veine humoristique, la truculence de son héros débouchant sur quelques dialogues particulièrement savoureux (1/2). Ca aura pris plus d’un an, mais les « Hot New Talents » promis en ouverture du premier numéro de Hammer & Bolter ont enfin trouvé leur chef de file.

: Le plus drôle étant que le personnage se révélant le plus efficace dans la traque des hommes requins est un look-alike du Dr Paradigm.

2 : Détective en chef de Marienburg : « Hmmm, une affaire compliquée c’est certain. Nous n’avons pas la moindre piste pour remonter à l’origine de cette soudaine épidémie squalide. »

Dubnitz : « J’aurais dit carcharodienne. »

Détective en chef de Marienburg : « Les deux sont tolérés, mais venons-en au fait. – inspecte le cadavre de Ripster – L’individu ne portait rien d’autre qu’un pantalon rapiécé et une sorte d’amulette taillée dans une dent de requin et portant le symbole de Stromfels autour du cou. Fascinant… »

Dubnitz : « Quoi donc ? »

Détective en chef de Marienburg : « Je viens de réaliser à l’instant que la somme des chiffres composant les nombres divisibles par neuf est elle-même divisible par neuf. C’est extraordinaire… mais malheureusement sans la moindre utilité pour le cas qui nous intéresse. Je crains fort qu’il ne nous faille classer ce dossier. »

Dubnitz : « C’est regrettable mais puisque l’enquête se retrouve dans un cul de sac… Ça nous laissera plus de temps pour essayer de la mettre la main sur cet individu louche qui a été vu en train de distribuer des colifichets tout à fait similaires à celui que le suspect avait sur lui au moment où il s’est transformé en requin. Deux affaires tout à fait distinctes, bien sûr. « 

Goodweather : « Vous allez rire, mais j’ai peut-être une idée… »

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Knight of the Blazing Sun – J. Reynolds [WFB] :

Knight of the Blazing SunOn ne se lasse pas des bonnes choses. C’est ce qu’ont dû se dire les éditeurs de Hammer & Bolter en choisissant de faire suivre une nouvelle de Josh Reynolds… par un extrait de Knight of the Blazing Sun, roman signé par le même gaillard.

Là encore, nous nous retrouvons en terrain connu, puisque le personnage de la première partie du chapitre livré en pâture aux insatiables lecteurs de la BL n’est autre qu’Hector Goetz, déjà mis en avant dans The First Duty (Hammer & Bolter #6). Et si l’autre héros templier de Josh n’a pas la faconde ni l’expérience de sa contrepartie Manannite1, Herr Goetz ne manque certes pas de ressources, à commencer par un talent certain au maniement des armes, qui lui permet de se farcir un Chef de Guerre Orque Noir en (quasi) solo, quand Erkhart Dubnitz est bien en peine de gourmander un pauvre petit homme requin de rien du tout sans manquer de se faire arracher la tête. Ajoutez à cela un pédigrée certes mystérieux mais apparemment de haute volée (selon les dires de son propre Hochmeister, Goetz serait l’héritier de la province perdue du Solland/Suddenland), et pour finir une volée de flèches décochée par des gobelins revanchards, et vous obtiendrez un portrait assez fidèle du protagoniste de Knight of the Blazing Sun, personnage pas vraiment mémorable mais pas désagréable non plus, ce qui constitue un point de départ honorable pour un roman de la BL.

Plus intéressant est le parti pris choisi par Reynolds de relater une bataille mettant aux prises l’armée de Wolfram Hertwig, comte électeur de l’Ostermark, à une Waaagh ! quelconque mais très remontée, depuis le point de vue d’un escadron de chevaliers impériaux2. Qu’il s’agisse de décrire l’attente tendue en réserve du gros des forces impériales, la transmission – loin d’être évidente – des ordres du commandement à cet escadron excentré de la ligne de bataille, l’impact d’une charge de cavalerie (en insistant bien sur le fait que, comme sur la table, ce sont les chevaux qui font le gros du boulot), ou encore la situation précaire d’une unité de cavalerie d’élite de cinquante hommes encerclée de toutes part par de l’infanterie, même basique, une fois l’élan de sa charge dissipé, Josh Reynolds réussit à donner à son récit une patine de crédibilité, sans oublier de donner à ses lecteurs quelques scènes de combat distrayantes à défaut d’être mémorables.

La deuxième partie du chapitre, qui débute après que Goetz ait été initié aux joies de l’acuponcture gobeline par les archers de compagnie du Big Boss qu’il venait juste d’étendre, transporte le lecteur sur les rivages de la Mer des Griffes, où un n-ième Hochmeister de l’Ordre recueille une prophétie à part égale funeste et difficile à interpréter de la bouche de l’oracle de Myrmida du cru. Nul doute que cette conclusion sibylline fait parfaitement sens un peu plus tard dans le roman, et le procédé du « tu comprendras plus tard » utilisé par Reynolds n’est pas vraiment rédhibitoire au plaisir de lecture, pour peu qu’il soit étayé par une mise en contexte postérieure suffisamment bien faite pour ne pas laisser le lecteur sur sa faim. Abnett fait ça très bien (voir l’extrait de Prospero Burns de Hammer & Bolter #1), et il n’y a aucune raison de penser que Josh Reynolds ne soit pas capable d’en faire de même. Ce teaser de Knight of the Blazing Sun remplit donc sa fonction, et ne manquera pas je gage de faire gagner quelques nouveaux fidèles à Reynolds. De ce que l’ai pu lire du bonhomme jusqu’ici, c’est tout à fait mérité.

1 : Ca fait mieux que Manannaine, non ?

2 : Le fluffiste impérial ne manquera pas de noter l’ironie que constitue l’inclusion d’une force de chevaliers dans l’armée d’Hertwig, dont le principal fait d’arme consistait (avant la Fin des Temps) à avoir mené son ost au massacre du fait de son inexpérience et de sa farouche volonté de ne pas laisser le commandement des forces impériales au Grand Maître Kessler.

The Lion (part I) – G. Thorpe [HH] :

The LionÀ la suite de la première (et peu concluante) tentative des éditeurs de Hammer & Bolter d’aborder le format de la longue nouvelle (une cinquantaine de pages au lieu de la vingtaine constituant le mètre étalon de la maison) via la soumission par Andy Smillie de son assez quelconque Beneath the Flesh (Hammer & Bolter #15/16), c’est au tour du Gav de se frotter à la novella, cet entre-deux indéfinissable entre la nouvelle et le roman. Et avant même de débuter la lecture de ce The Lion, force était de constater que Thorpe abordait l’obstacle dans des conditions bien plus favorables que son prédécesseur, tant au niveau de l’expérience (plus de 20 ans de maison) que du sujet (Lion El’Jonson, sa vie, son œuvre) et de l’univers (l’Hérésie d’Horus). Cela étant dit, la tendance de Gavin à se contenter du strict minimum en matière de storytelling incitait également à la circonspection, et c’est ainsi que j’abordais cette première partie sans a priori d’aucune sorte.

Prenant la suite de l’affrontement entre les deux self-made Primarques sur Tsagualsa (épisode narré dans le Savage Weapons d’ADB), dans le cadre de l’affrontement larvé entre Dark Angels et Night Lords, Thorpe centre logiquement son propos sur la Première Légion et sur Lion El’Jonson, tout à la fois frustré par l’impossibilité de mettre un terme à la croisade de Thramas et de se porter au secours de Terra, et travaillé par la déclaration du Night Haunter à propos de la loyauté vacillante des Dark Angels restés sur Caliban.

La réception d’une demande d’assistance émise par la garnison d’un complexe isolé de l’Adeptus Mechanicum (eh oui, encore un!) localisé dans le système de Perditus vient tirer le Lion de la bouderie contemplative dans laquelle il s’était plongé depuis la tentative de strangulation dont il avait fait les frais de la part de ce coquin de Kurze. Ni une ni deux, Jonson décide de se rendre sur place à la tête d’un contingent d’une taille plus que respectable (30.000 légionnaires tout de même), afin de s’assurer que le secret détenu sur Perditus ne tombe pas entre de mauvaises mains, Iron Warriors, Iron Hands et Death Guard ayant été repérés en train de rôder dans les environs.

Le gros de la première partie de The Lion décrit donc le voyage de l’Invincible Reason et de son escorte vers le système de Perditus, odyssée pimentée par la prise en filature du vaisseau amiral des Dark Angels par un mystérieux poursuivant, phénomène normalement impossible du fait de la nature particulière du Warp. Soucieux de préserver la confidentialité de son arrivée, Lionel parvient à attirer son poisson pilote dans l’univers réel pour une petite explication de texte, qui se solde au final par l’invasion de l’Invincible Reason par une flopée de démons pas vraiment concernés par les désirs d’intimité des DA. Too bad. Le rideau retombe au moment où Jonsy (à ne pas confondre avec Jónsi, bien que les deux partagent la même coquetterie à l’œil droit) s’apprête à aller coller quelques baffes aux séides des Dieux Sombres afin de leur apprendre à respecter la propriété d’autrui. Non mais.

Malgré quelques longueurs dans son déroulement, The Lion s’est révélée être une lecture assez agréable, même si Gav ne parvient pas à rendre une copie du même niveau que Dembski Bowden, dont les nouvelles Savage Weapons et Prince of Crows restent à mes yeux les deux must read pour tous les amateurs de l’Horésie d’Hérus (j’invertis des lettres si je veux) intéressés par la guéguerre entre paloufs et rogues. On peut d’ailleurs tout à fait considérer que la soumission de Thorpe comme un side event de la croisade de Thramas, El’Jonson prenant un break bien mérité après trois années de cache-cache avec les Night Lords pour accomplir une quête annexe, sans que la VIIIème Légion n’intervienne de manière significative dans l’intrigue.

En choisissant de faire d’un Primarque le personnage principal de son propos (même si le Sénéchal Corswain tente également d’exister aux côtés de son père génétique), Gawin prenait le risque de ne pas rendre justice à cette figure surhumaine, trop souvent décrite comme un simple super Space Marine dans les œuvres romancées de la Black Library. Je dois reconnaître qu’il s’en est plutôt bien tiré, en grande partie grâce à la description en clair-obscur qu’il fait de son héros, dont les motivations comme l’allégeance finissent par apparaître bien plus floues que ce que son image de loyaliste radical laissait à penser. Méfiant jusqu’à la paranoïa, faisant preuve d’un goût prononcé pour l’isolation (certains diront pour la bouderie), ne supportant pas la contestation de la part de ses subalternes (au point de décapiter à main nue un Chapelain ayant refusé de révoquer l’édit de Nikea), et éprouvant un indéniable, même si coupable, plaisir à imposer son point de vue par la force, le Lion de Thorpe n’est pas le parfait chevalier décrit par la propagande impériale, ce qui rajoute une profondeur intéressante à un personnage autrement ennuyeux de surpuissance. En complément, et comme souvent dans les publications relatives à l’Hérésie d’Horus, les détails de fluff (d’un intérêt plus ou moins grand) abondent, ce qui justifie amplement la lecture de cette nouvelle par tous les fans des Dark Angels.

Si l’utilisation de Lion El’Jonson comme protagoniste est donc assez réussie, les autres personnages de Thorpe, à commencer par Corswain, aka le Loken de la Première Légion (il en faut bien un), se révèlent malheureusement bien fades, tout comme la plupart des péripéties mises en scène au cours de cette première partie. Jamais avare en matière d’affrontement entre vaisseaux spatiaux, le Gav sert une nouvelle fois la soupe en consacrant une part non négligeable de sa nouvelle à la description de la « poursuite » entre l’Invincible Reason et son admirateur secret, à la fois dans, hors et entre (je me comprends) le Warp. Comme le bonhomme maîtrise son sujet, la pilule passe sans douleur, mais sans plaisir non plus. En fin de course, les points positifs l’emportent tout de même sur les points négatifs, et c’est avec une bienveillante neutralité que j’aborderai la deuxième partie de The Lion dans le prochain numéro de Hammer & Bolter.

Au final, ce 17ème numéro de Hammer & Bolter constitue l’une des livraisons les plus consistantes de cette deuxième année, en grande partie grâce au doublé de Josh Reynolds, honorablement complété par les nouvelles des grands anciens McNeill et Thorpe, un ton en dessous mais toujours dans la tranche haute du lisible et du divertissant. Counter ferme la marche avec son Vermilion, plus incongru que réellement indigeste, pour un solde largement positif. C’est suffisamment rare pour être souligné !