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HERALDS OF THE SIEGE [HH]

Bonjour et bienvenue dans cette critique de ‘Heralds of the Siege’, l’ultime1 recueil de nouvelles consacrées à l’Hérésie d’Horus sorti par la Black Library, en l’an de grâce 2018. Regroupant 16 courts formats prenant place dans les dernières années de cet événement cataclysmique, ‘Heralds’ renoue dès sa couverture avec la tradition des recueils thématiques, comme ‘Tales of the Heresy’, ‘Mark of Calth’ et ‘Shattered Legions’, qui ont laissé la place à des anthologies généralistes (ou fourre-tout, si on laisse tomber le politiquement correct) au fil des ans. Un signe de bon augure pour les lecteurs qui, comme votre serviteur, sont sensibles à la cohérence des ouvrages qu’ils parcourent, même si ces derniers ont été écrits par des auteurs différents. Reste à vérifier si derrière cette image d’un Rogal Dorn triomphant flanqué d’un Malcador mal remis de sa dernière virée en ville, ‘Heralds’ se révèle être une bonne introduction au Siège de Terra, comme on cherche à nous le faire croire. C’est ce que nous allons voir…

1 : En tout cas si on se réfère à la liste officielle de la BL, que cette dernière a largement laissé tomber après le début du Siège de Terra. C’est ainsi qu’on a pu voir sortir des OLNI, comme ‘Cthonia’s Reckoning’, qui n’appartiennent ni à l’Hérésie d’Horus, ni au Siège de Terra. Notons aussi que depuis le Summer of Reading 2017, les quelques nouvelles hérétiques inédites que la Black Library a publié n’ont été regroupées dans aucun recueil.

Heralds of the Siege

On le sait, contribuer à l’Hérésie n’est pas donné à tout le monde, et c’est pourquoi on ne retrouve que des noms connus au sommaire de cette anthologie. Parmi les auteurs vétérans mis à contribution dans cet effort collectif, c’est le futur Seigneur de Terra Chris Wraight qui se taille la part du lion, avec pas moins de quatre nouvelles au compteur, suivi par son camarade Gav Thorpe et ses trois offrandes. Signalons également que ‘Heralds’ marque la fin du parcours hérétique de deux compagnons de route de longue date de cette odyssée littéraire : Rob Sanders et Anthony Reynolds. Prenons un moment pour rendre hommage à leur contribution importante au grand œuvre de la BL, et attaquons sans plus attendre : on a un siège à préparer après cela.

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52. Heralds of the Siege

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Myriad – R. Sanders :

INTRIGUE :

MyriadNous suivons l’ex Princeps Kallistra Lennox et sa petite bande de loyalistes alors qu’ils mènent des opérations de sabotage à la surface de Mars, tentant à leur humble niveau de mettre des bâtons dans les chenilles du Mechanicus Noir qui règne en maître sur la planète rouge. Après avoir détruit l’Ajax Abominata, un Titan Warlord qui patientait dans la pampa que les Imperial Fists arrêtent leur blocus orbital pour rejoindre les hordes horusiennes, Lennox et ses ouailles répondent au SOS d’un martien en détresse sur le chemin du retour vers la base secrète de la résistance. Ils arrivent sur le lieu d’un accrochage entre une équipe de récupérateurs loyalistes et les forces du sinistre Gordicor, chargé par Kelbor-Hal de traquer les fidèles de l’Omnimessie, et se préparent à faire une nouvelle fois parler la poudre.

À la grande surprise de nos héros, leurs adversaires semblent cependant s’être entretués pour une raison inexpliquée peu de temps après leur arrivée sur site, leur facilitant grandement le travail et leur permettant de mettre la main sur du matos de premier choix parmi les décombres, en la figure d’un robot Kastelan presque neuf. L’automate a bien une espèce de protubérance mécanique non identifiée au milieu du torse, mais cela n’empêche pas Lennox et ses sous-fifres de l’embarquer dans le coffre de leur tunnelier de service, et de reprendre le chemin de la base Invalis en compagnie des camarades qu’ils ont secourus.

Une mauvaise nouvelle attend toutefois la Princeps Disney à son arrivée au poste de commandement des insurgés, dirigé par le presque mort mais toujours vaillant (il lui reste l’usage de la main droite, et pour un gamer, c’est plus que suffisant) Raman Synk : les forces de l’Ordo Reductor de cette brute de Gordicor se sont inexplicablement mises en route en direction d’Invalis peu de temps après le raid sur l’Ajax Abominata, ce qui ne peut que signifier qu’ils ont réussi à suivre la trace des loyalistes. Aussi pragmatiques que l’on pouvait s’y attendre de la part d’ingénieurs de leur calibre, Lennox et ses supérieurs ne tardent pas à soupçonner que la cause de leur problème vient de leur trouvaille miraculeuse, laissée en quarantaine dans un hangar en compagnie d’une nouvelle recrue enthousiaste mais pas encore testée, Lenk 4/12 (ces noms, ces noms…). Comme pour confirmer leurs suspicions, le Kastelan inerte reprend soudainement du service, et commence à pomper goulument la base de données d’Invalis sans que les adeptes ne puissent rien faire. En effet, l’appareil monté sur la carlingue du robot de combat est identifié (un peu tard) par le docte Synk comme la marque de la Myriade Tabula, une intelligence artificielle ayant tenté de conquérir la galaxie par le passé, et mise sous clé à fin d’étude par le Mechanicum après avoir été vaincue de haute lutte. Et l’IA semble très déterminée à prendre sa revanche…

Début spoiler…Fort heureusement pour les loyalistes, Mme Tabula considère, dans son infinie sagesse, qu’ils ne sont pas une menace, ce qui est à la fois rassurant et insultant, et se concentre exclusivement sur la purge du Mechanicus Noir, à commencer par l’émetteur corrompu que le pauvre Lenk 4/12 transportait dans son bedon sans même le savoir, et qui est prestement confisqué et détruit par le Kastelan « possédé », sauvant du même coup la base Invalis d’une attaque de Gordicor.

Peu optimistes quant à leur chance de neutraliser la Myriade, Synk et ses complices décident de faire contre mauvaise fortune bon cœur core et de capitaliser sur la haine que l’IA semble vouer au Chaos pour poursuivre leur lutte contre Kelbor-Hal et ses sbires. En effet, la puissance et la pureté logique du code tabulaire permet de retourner les machines corrompues les uns contre les autres, comme cela a été le cas lorsque Lennox et ses hommes ont répondu à l’appel à l’aide de leurs camarades, un peu plus tôt dans la journée. Il ne leur reste plus qu’à suivre le plan en 4.267 étapes concoctés par la Myriade pour parvenir à leurs fins, et avec un peu de chance, appuyer sur le bouton Reset juste avant que cette dernière parvienne à assujettir l’univers, comme elle en a l’intention. Tout sera une affaire de timing…Fin spoiler

AVIS :

Les lecteurs familiers du fluff de l’Hérésie d’Horus savent que le Schisme de Mars a constitué un événement important de cette campagne cataclysmique, que la Black Library a cependant traité assez légèrement dans sa couverture de cette dernière. Partant, il est difficile de cracher sur une nouvelle traitant de ce théâtre particulier, même si Rob Sanders livre une copie assez particulière avec ce ‘Myriad’, continuation logique de la novellaCybernetica’ (où la Myriade Tabula apparaît pour la première fois), et qui semble n’être qu’une succession de péripéties mineures (détruire un Titan, secourir des copains en rade…) jusqu’à ce qu’un littéral Deus Ex Machina se produise et le rideau tombe sur Kallistra Lennox et sa looooongue liste de camarades nommés1. Mars méritait mieux.

1 : Ce qui semble indique que Rob Sanders avait l’intention de développer cet arc dans d’autres publications, si vous voulez mon avis. Pas de chance, ‘Myriad’ a été son dernier travail pour l’Hérésie d’Horus…

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The Grey Raven – G. Thorpe :

INTRIGUE :

The Grey RavenL’ex-mais-pas-tout-à-fait-finalement Archiviste de la Raven Guard Balsar Kurthuri a été renvoyé sur Terra par Corax en personne après les événements relatés dans ‘Weregeld’, où il doit recevoir le jugement de Malcador le Sigilite. Tel le bouc (ici corbeau) émissaire, notre surhomme endosse une responsabilité collective dans cette histoire, puisqu’à travers lui, c’est tout le Librarium de la XIXème Légion qui se trouvera amnistié ou frappé d’anathème. Le Primarque furtif n’assume en effet plus trop la permission qu’il a donné à ses fils de s’asseoir sur l’Edit de Nikea, bien qu’il n’ait pas fait le fin bec lorsque les pouvoirs psychiques de Kurthuri – catapulté Archiviste en chef de la Raven Guard après le désastre d’Isstvan V – l’aidèrent à récupérer le patrimoine génétique nécessaire à la reconstruction accélérée de sa Légion. Avec les résultats que l’on sait (#JamaisPlus, etc). Très chill dans l’âme, Kurthuri a accepté la mission sans rechigner, tout comme il a juré à Corax de ne pas faire usage de ses pouvoirs jusqu’au verdict de Malcador. Voici les termes posés.

Les hasards de la guerre ont fait que notre corbeau énergétique a fait le voyage non pas sur un vaisseau appartenant à sa Légion, mais s’est fait prendre en stop par des Imperial Fists sous le commandement du Capitaine Noriz. Il est également accompagné par le Custodes Arcatus Vindix Centurio, détaché par Valdor pour s’assurer que le patrimoine génétique remis à la Raven Guard était utilisé dans le respect des clauses établies, et un peu désœuvré depuis que Corax a bousillé son kit de petit chimiste. Alors que le Wrathful Vanguard sort du Warp pour pénétrer dans le système solaire, les revenants sont accueillis par une armada de vaisseaux et de stations de combat, preuves irréfutables que la guerre ne tourne pas en faveur des forces impériales. Il ne faut pas longtemps avant que les demandes d’authentification pleuvent sur le Uber de Kurthuri, qui laisse sagement Tchuck Noriz et AVC gérer l’administratif avec leurs vis-à-vis. Après tout, qui de plus qualifié qu’un Imperial Fists et un Custodes pour négocier un passage vers Terra ?

Malheureusement pour l’Archiviste déclassé, ses comparses ne font pas un super taf, et lorsque le stagiaire Custodes (Ludivicus) que Malcador a placé à la régulation du trafic solaire se met à faire du zèle auprès de son collègue, la situation dérape très rapidement. Kurthuri, trop honnête, a en effet eut le malheur de déclarer qu’il était sous le coup de l’Edit de Nikea, aveu suffisant pour que Ludivicus éructe un mot code secret sur la fréquence radio, transformant aussitôt Arcatus en ennemi mortel de ce pauvre Corneille. Et lorsque les bolts commencent à lui voler dans les plumes, Kurthuri décide de connaître un petit peu la peur, et bat prudemment en retraite pendant que Noriz, tout aussi surpris que son camarade Légionnaire par la réaction à brûle pourpoint du Custodes, tente de raisonner ce dernier.

S’engage alors une partie de chasse d’une genre un peu particulier, les Custodes du Wrathful Vanguard se mettant à traquer Kurthuri dans les coursives, tandis que ce dernier cherche à s’échapper du vaisseau pour rejoindre Terra et plaider sa cause directement auprès du Régent de Pépé, bien aidé par les Imperial Fists dans ses manœuvres d’évasion. Comme ni les Jaunards ni les Dorés ne tiennent vraiment à causer des pertes dans l’autre camp, l’affrontement tient plus du match de paint ball que de la fusillade sans merci, jusqu’à ce qu’Arcatus rattrape Noriz et Kurthuri, et les engage au corps à corps.

Bien qu’en désavantage numérique, le Custodes a tôt fait de démontrer qu’il est une classe au-dessus de l’Astartes moyen, même gradé, et s’énerve tellement qu’il finit par empaler le pauvre Noriz sur sa lance gardienne. Comprenant qu’il n’a aucune chance de sortir vainqueur de ce combat à la régulière, Kurthuri décide de revenir sur sa parole et d’avoir recours à ses pouvoirs… jusqu’à qu’un froncement de sourcil dédaigneux de son adversaire lui fasse changer d’avis. Résigné à obéir à son Primarque, même au prix de sa vie, notre héros finit par se rendre, et est enfin mené jusqu’à Malcador…

Début spoiler…Qui avait en fait un job à lui proposer parmi ses Chevaliers Errants, et cherchait à tester… son self control j’imagine ? dans des conditions extrêmes avant de l’embrigader dans son organisation secrète. La nouvelle se termine donc avec l’arrivée de ce vieux lézard d’Umojen, chargé par le Sigilite de briefer le bizut sur ses missions à venir. L’histoire ne dit pas si Corax a été dédommagé pour ce détournement de ressources…Fin spoiler

AVIS :

Thorpe a beau être un expert de la Raven Guard, je n’ai pas trouvé cette histoire très aboutie. Outre le fait qu’elle n’apporte pas grand-chose à l’Hérésie d’Horus, et apparaît davantage comme un moyen pour l’auteur de faire faire des heures supplémentaires à l’un de ses personnages alors que la tendance générale est plutôt à l’écrémage sévère en préparation de la clôture de la saga, je reproche à Thorpe d’avoir dévoyé la loyauté fanatique des deux factions les plus Pépéphiles de l’époque, les Custodiens et les Imperial Fists, juste pour pouvoir mettre en scène à peu de frais le simulacre d’affrontement entre les deux gardes prétoriennes de l’Empereur sur le Wrathful Vanguard. Cette guéguerre sans (presque) victimes est totalement illogique à l’époque où l’histoire prend place (après la tentative d’infiltration de Terra par l’Alpha Legion), et la réaction imprévue d’Arcatus n’aurait dû selon moi avoir que deux conclusions : soit une coopération immédiate et totale entre Custodiens et Imperial Fists, même si les seconds ne comprennent pas les motivations des premiers, soit un combat sans merci, et autrement plus sanglant, entre les deux camps. On ne me fera pas croire qu’un Custodien qui a identifié un ennemi de l’Empereur retienne ses coups pour épargner quiconque se met sur son chemin, fut-il un Imperial Fists. Ajoutez à cela que le test de Malcador est, au fond, très bizarrement conçu (il cherchait une forte tête, mais pas trop quand même ?), et vous obtenez un résultat très passable. Espérons que Kurthuri justifie par la suite (et la fin) de l’Hérésie le traitement de faveur éhonté dont il bénéficie ici.

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Valerius – G. Thorpe :

INTRIGUE :

ValeriusOù il sera question de Marcus Valerius et de la Cohorte Therion, compagnons de route de la Raven Guard pendant la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus, et envoyés pour une raison non explicitée ici se faire euthanasier par les renégats d’Horus sur le théâtre de Beta-Garmon par ce brave type de Corax. Nous retrouvons donc le Vice-Caesari Valerius au volant de sa forteresse Capitol Imperialis, et chargé de tenir la rive gauche de la Veule (une rivière locale) avec ses frères d’armes – dont son propre frère, Antonius, Princeps de Titan Reaver. Lorsque les forces du Maître de Guerre lancent une offensive majeure sur sa position, Valerius, qui a toujours sa foi impériale chevillée au corps, refuse de battre en retraite comme aurait fait n’importe qui, mais préfère au contraire saisir Horus à l’oreille et l’entraîner dans un maquis. Ou en l’absence du grand chauve barraqué, les Titans envoyés à l’assaut des positions loyalistes.

Valerius_IllustrationTout à fait réaliste sur ses chances quasi nulles de remporter la victoire, Valerius n’aspire plus qu’au martyre, persuadé qu’il est que Pépé ne l’aurait pas envoyé crever comme un rat dans une bataille mineure sans une très bonne raison. Chacun voit midi à sa porte. Après une prière rapidement conduite dans sa chapelle improvisée, Valoche ordonne donc à la Cohorte de se battre jusqu’au dernier soldat, assiste à la mort d’Antonius, carbonisé dans son Titan en emportant son vis-à-vis chaotique, sans verser une larme, puis ordonne dans le plus grand des calmes la surcharge du réacteur1 de son véhicule de fonction lorsque les Sons of Horus arrivent frapper à la vitre pour demander un constat à l’amiable.

Début spoilerCe n’est toutefois pas la fin pour Valerius. Peut-être. Une inspection du champ de bataille quelques heures plus tard par une force de reconnaissance impériale permet en effet d’identifier un survivant hébété se promenant le zguegue à l’air dans le cratère de l’explosion de la Capitol Imperialis. Incapable de décliner ses nom et profession aux soldats qui le prennent en charge, le nudiste inconnu se baladait toutefois avec une copie du Lectitio Divinitatus camouflé dans son anatomie (vous ne voulez pas de détails additionnels), et attribue sa survie surnaturelle à rien de moins qu’un miracle. On se demande bien de qui il peut s’agir…Fin spoiler

1 : C’est une manœuvre tellement classique à Warhammer 40K qu’on peut se demander pourquoi les commandants continuent à envoyer des troupes essayer de capturer les vaisseaux ennemis. Sans doute des escouades que Horus ne pouvait pas blairer.

AVIS :

Gav Thorpe offre une sortie de scène digne de ce nom à l’un de ses personnages fétiches de l’Hérésie, ce qui fera sans doute plaisir aux lecteurs que la destinée de Marcus Valerius intéressent. Ne faisant pas partie de ces « fidèles », je dois avouer que mon attention s’est concentrée davantage sur le la forme que sur le fond du récit, et je suis au regret de penser que Thorpe aurait pu rendre une meilleure copie. Mes principaux griefs portent sur la contextualisation très lacunaire de ce morceau de bravoure final, qui ne prend pas la peine de présenter de manière suffisante les personnages, leurs motivations et leur parcours, et nous laisse donc avec un illuminé de la première heure qui semble incapable de réfléchir par lui-même et considère tout ce qui se passe comme le résultat de la volonté de l’Empereur (ce qui est rassurant pour lui, mais pas vraiment approprié à un officier supérieur de l’Armée Impériale), son frère et son valet de pied, apparemment envoyé à la mort par un Primarque loyaliste plutôt sympathique jusqu’ici, sans plus d’explications. Une question me brûle les lèvres doigts à ce stade : WHY SHOULD I CARE ? Certes, on pourrait arguer que Thorpe avait trop peu d’espace à disposition pour briefer les nouveaux arrivants sur la saga Valerienne, mais pour une nouvelle censée pouvoir être lue de manière indépendante, le résultat laisse vraiment à désirer. Je reste convaincu que ces quelques pages relevaient plus du chapitre d’un roman que Gav Thorpe aurait dû écrire pour boucler son arc Raven Guard que d’un stand alone.

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The Ember Wolves – R. Sanders :

INTRIGUE :

The Ember WolvesAbsolom, monde ruche de troisième ordre perdu dans le système de Gorgonopsii Maestrale, est le théâtre malheureux d’un affrontement aussi insignifiant au niveau global que destructeur à l’échelle locale alors que l’Hérésie bat son plein à travers la galaxie : une bataille entre deux Légions titaniques. Côté loyalistes, c’est la Legio Castigrata qui tient la ligne, tandis que les renégats peuvent compter sur les chiens fous de la Legio Audax, dont l’une des formations, les Loups de Braises du Princeps Balthus Voltemand, vont nous servir de protagonistes aujourd’hui.

Planquée au cœur des ruines fumantes de la banlieue industrielle ceinturant la ruche Septus, la meute de Warhounds de Voltemand attend patiemment qu’une cible juteuse se présente à elle. Lorsque le Warmonger Tantorus Magnificat se met à faire des claquettes dans les décombres, les six mini-Titans ne mettent pas longtemps à partir en chasse, confiants dans la puissance du collectif (et celle de leur harpon Griffe d’Ours, aussi) pour venir à bout d’un adversaire de cette taille. Au bout d’un combat acharné, durant lequel un tiers des Loulous se fait estourbir par Tantor le Magnifique, le Warmonger isolé et tiraillé de toutes parts finit par mordre la poussière, au grand plaisir de Voltemand qui s’approche de son adversaire au sol pour lui infliger le coup de grâce…

Début spoiler…Cependant, si les talents guerriers des Loups de Braises n’ont pas pâti de leur passage au Chaos, loin s’en faut, leur discipline laisse désormais grandement à désirer. Le Princeps Primus a ainsi la mauvaise surprise de se faire défier par son rival du Rubella Mortem, Grental Thrax, qui n’a pas supporté de se faire « voler son kill » par son supérieur hiérarchique. Accusant ce dernier de couardise, il ignore les sommations de Voltemand, et la victoire de la Legio d’Audax se transforme en règlement de comptes à KO Corral lorsque le Vulpium Nox abat le Rapacia Rex à bout portant (ou l’équivalent pour une machine de 15 mètres de hait), avant de se faire lui-même descendre par le turbo-laser du Rubella Mortem. Ayant vidé son mega-bolter sur le Tantorus Magnificat au cours des combats, le Canis Ulteriax de Voltemand ne réagit pas assez vite pour empêcher son adversaire de lui envoyer à son tour un coup de canon en plein dans le museau, mais il parvient malgré tout à sortir vainqueur de ce duel proprement titanesque en lui arrachant la tête d’un tir de harpon bien placé. Cinq machines détruites du côté des renégats, contre une seule pour les loyalistes : le ratio n’est pas terrible, mais c’est tout de même une victoire pour la team Horus, pas vrai ?

Début spoiler 2…Eh bien, non. Car pendant que les Loups de Braise lavaient leur linge sale en famille, l’équipage du Tantorus Magnificat a, je vous le donne en mille, mis son réacteur en surcharge pour éviter que la précieuse machine tombe aux mains du Chaos. Lorsque Voltemand et ce qui reste de son équipage se rendent compte de l’entourloupe, il est trop tard pour s’enfuir (à supposer qu’ils soient encore en état de le faire), et la nouvelle se termine sur une explosion cataclysmique qui détruit tout à des kilomètres à la ronde. Egalité.Fin spoiler

AVIS :

Une petite bataille de Titans de temps en temps, ça ne fait pas de mal (et ça varie agréablement des Space Marinades qui constituent l’ordinaire du lecteur hérétique). Rob Sanders soigne sa copie avec cette nouvelle simple sans être simpliste, puisqu’elle parvient à mettre en relief les tendances anarchiques des forces chaotiques, qui peuvent aussi bien se révéler être un avantage qu’un handicap au combat. On passera sur les envolées lyriques de Balthus Voltemand, qui adore déclamer des tirades pompeuses à tout bout de champ (on peut aimer mais je trouve ça too much) et sur les combats de coups de pied de Titans (ça aussi c’est too much), mais le reste se laisse très bien lire.

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Blackshield – C. Wraight :

INTRIGUE :

BlackshieldLa fin de la récré approche à grands pas pour Khorak de la Death Guard et ses quelques frères d’armes survivants, ayant fait sécession de leur Légion après le siège de Molech et s’étant transformés en pirates galactiques nourrissant le vague projet de faire payer son hypocrisie à Mortarion depuis lors. Poursuivis par de mystérieux adversaires jusqu’à l’orbite du monde hostile d’Agarvian, les non alignés sont contraints d’abandonner leur vaisseau (le joliment nommé Ghogolla… je pense que ces nerds de Thousand Sons – et leur énervante maîtrise de toutes les langues mortes de la galaxie, y compris le français – ont dû bien se foutre d’eux pendant la Grande Croisade) et de se poser en catastrophe à la surface de ce caillou aussi minable que gazeux, espérant que leur légendaire fortitude leur permettra de gagner un avantage sur ce champ de bataille des plus difficiles.

Après une marche éprouvante à travers les marais spongieux qui constituent l’unique écosystème d’Argavian, Khokho and the boyz finissent par trouver un endroit idéal pour livrer leur dernier carré (ça tombe bien, ils ne sont plus que quatre), une fois que leurs poursuivants les auront rattrapés, bien sûr. Littéralement quatre jours plus tard, une petite force de Space Marines passablement exténués par cet UTMB1 finit par arriver à portée de bolter, et se fait donc accueillir bellement par les Death Guards qui barbotaient dans la bouillasse sans bouger le petit doigt depuis un petit moment2.

Si les premiers instants de l’accrochage tournent logiquement en faveur des défenseurs embusqués, le nombre de leurs assaillants finit par renverser le rapport de forces, et Khorak, bien protégé par son armure Terminator et son statut de protagoniste, finit par se retrouver seul face à un véritable peloton d’exécution. Bravache jusqu’au bout, il défie en duel le meneur adverse, dont l’héraldique est totalement noire, comme celle de ses suivants. Souhaitant au moins savoir qui sera responsable de son futur et inévitable trépas, l’ex Death Shroud bombarde son homologue de question, jusqu’à ce que ce dernier consente à révéler son identité…

Début spoiler 1…Et, surprise, il s’agit d’un frérot, comme sa capacité à respirer l’air vicié d’Argavian sans protection le laisse apparaître. Les points communs ne s’arrêtent pas là, car Crysos Morturg (son petit nom) est également un renégat Death Guard, ayant été laissé pour mort sur le champ de bataille d’Isstvan III après la purge des premières Légions traîtresses par leurs frères d’armes. Ayant survécu au prix d’une reconstitution quasi-complète de son anatomie, Crysos s’est depuis donné comme mission de traquer et détruire les forces Death Guard sur lesquelles il arrive à mettre la prothèse, en compagnie d’un contingent issus des tristement célèbres Légions Brisées, renommé Black Shields en référence à leur héraldique monocolore. Comprenant qu’il partage le même but que son poursuivant, et malgré la perte regrettable de son vaisseau et ses camarades, Khorak semble prêt à passer l’éponge sur les derniers événements et à repartir du bon pied avec ses nouveaux copains, lorsqu’un accident fâcheux se produit…

Début spoiler 2…Un de ses frères d’armes, qui n’était pas tout à fait mort au final, s’extirpe de son bain de boue pour réaliser un headshot parfait sur le front dégarni et ridé de Jason Statham Crysos, avant d’être transformé en hachis parmentier par la riposte des Black Shields. Cette mort tragique et ironique aurait toutefois préférable pour Khorak à la réalité dont il est témoin, Crysos parvenant à stopper le projectile fatal grâce à ses pouvoirs psychiques. Ayant laissé tomber Mortarion, mais pas son endoctrinement psychophobe, Khorak renonce à rejoindre la team noiraud et préfère tomber au champ d’honneur en essayant de faire goûter de sa faux à Crysos, tentative évidemment vouée à l’échec et dans laquelle il perd le dernier de ses points de vie.

De retour sur son vaisseau, et plus qu’un peu dépité par la tournure qu’ont pris les événements, Crysos décide de mettre le cap sur Terra pour solliciter rien de moins qu’une audience avec l’Empereur en personne (qui n’a sans doute rien d’autre à faire en ce moment), afin d’attirer Son auguste regard sur les services rendus par Robocopmarine et sa bande d’irréguliers. On lui souhaite bien du courage…Fin spoiler

1 : Ultra Trail du Marécage Boueux. Le Mont Blanc a été rasé à la fin de M29 pour construire un centre commercial.
2 : Les amateurs de hard SF me feront remarquer, avec raison, qu’aucune indication n’est donnée sur la longueur du jour sur Agarvian. Il se peut donc que nos héros n’aient attendu que trois minutes avant que la bagarre ne s’engage, mais ce serait beaucoup moins badass, reconnaissons-le.

AVIS :

Chris Wraight se paie le luxe d’introduire une nouvelle faction (certes mineure) à l’Hérésie d’Horus avec ce ‘Blackshield’, ce qui n’est pas donné à tout le monde, et le fait plutôt bien (même s’il passera immédiatement le flambeau à l’infatigable Josh Reynolds après la publication de cette nouvelle). On a ici le droit à une histoire bien ficelée, n’oubliant pas de donner au lecteur sa ration d’action brutale, ni de mettre en relief les conséquences de l’Hérésie pour les personnages lambda qui y sont confrontés. Seul léger bémol : il est nécessaire de maîtriser un minimum le fluff hérétique (en particulier les événements d’Isstvan III et de Molech) pour bien comprendre de quoi Khorak et Crysos discutent lors de leur petit tête à tête agarvien et pourquoi ils sont autant surpris l’un que l’autre de la présence de leur vis-à-vis. En outre, et comme beaucoup d’arcs narratifs ébauchés à cette période charnière de l’Hérésie d’Horus, on reste pour le moment sans nouvelle du space trip vers Terra qui sert d’ouverture à ‘Blackshield’, ce qui est un peu dommage.

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Children of Sicarus – A. Reynolds :

INTRIGUE :

Children of SicarusAprès sa quasi-victoire à Calth et sa fuite honteuse pour échapper à la juste colère des Ultramarines, cette vieille baderne de Kor Phaeron se retrouve isolé sur la planète démon Sicarus, en compagnie d’une poignée de Légionnaires (dont un tout jeune Marduk) et une douzaine de Serfs. Comme on ne change pas une formule qui gagne, le Premier Capitaine n’a rien trouvé de plus urgent à son arrivée que de s’enjailler avec ses nouveaux voisins, en l’occurrence les tribus humaines contrôlées par la redoutable Larazzar, Elue de Tzeentch frôlant l’élévation démoniaque et défenderesse acharnée de son pré carré. Bien que la puissance de ses Space Marines, et en particulier celle de son Gal Vorbak de compagnie, Nemkhar, soit suffisante pour repousser les attaques adverses, ce n’est qu’une affaire de temps avant que les Astartes ne tombent sous les coups de leurs innombrables ennemis. Il faut donc un plan aux Word Bearers pour se sortir de ce pétrin, et heureusement pour eux, quelqu’un en a un à leur soumettre. Pas Kor Phareon, bien sûr, mais ça vous l’aviez deviné.

L’homme providentiel se nomme Jepeth 87 (comme le nombre de ses réincarnations successives), prophète de sa profession. Il se présente à la petite bande alors que cette dernière est sur le point de se faire rattraper par l’armée de Larazzar, qui a très mal pris la mort au combat de son fils préféré, le doux et tendre Orox’i’nor. Cet affrontement scellera sans nul doute le sort des naufragés, aussi, après avoir seulement tenté de le tuer une fois, ces derniers acceptent l’offre qui leur est faite d’accompagner Jep’ jusqu’à son village, camouflé des yeux indiscrets grâce à une puissante magie et quelques hologrammes convaincants. Il paraîtrait même que les Word Bearers sont les héros d’une prophétie top moumoute, ce qui redonne le moral à tout le monde (excepté à ce pisse-vinaigre de Kor Phaeron bien sûr, mais ça…).

Arrivé sur place, KP laisse ses hommes souffler un coup et part avec son cher Nemkhar visiter la caverne de Jepeth, où l’intégralité de la prophétie lui sera révélée. Cette dernière présente deux grands avantages : le premier étant d’annoncer une réunification avec Lorgar, et le second de nécessiter la mort de Kor Phaeron pour ouvrir le portail qui permettra à Marduk de mener ses frères d’armes et les tribus rebelles de Sicarus jusqu’au QG du Primarque. Bien que tout soit dépeint de manière irréfutable, dessins rupestres à l’appui, sur les murs de la grotte de Jepeth, et que ce dernier ait même réussi à mettre la main sur l’athame que Kor Phaeron avait offert à Lorgar lorsqu’ils étaient encore sur Colchis (un tour de magie des plus bluffants), le Maître de la Mauvaise Foi refuse ca-té-go-ri-que-ment d’embrasser la grandiose et altruiste destinée de martyr, et ordonne à Nemkhar de réduire au silence le pauvre Jepeth, qui ne l’avait absolument pas vu venir. La mort du prophète dissipe cependant les illusions qui protégeaient le village caché, et Larazzar ne tarde pas à débarquer avec son armée sur les talons.

Cependant, au lieu de massacrer les quelques Space Marines éprouvés qui lui font face, la Sorcière propose un marché à Kor Phaeron : s’il consent à l’aider à conquérir Sicarus (ce qui ne devrait pas être très compliqué, puisqu’apparemment, il n’y avait que Jepeth et ses hippies qui s’opposaient à son hégémonie) et à ainsi atteindre l’immortalité, elle lui laissera l’usufruit de la planète, qui pourra servir de camp de base aux Word Bearers. Ce qui leur serait utile puisque Colchis a été ravagée en punition de leur traîtrise. Kor Phareon a-t-il vraiment les moyens de refuser un pacte aussi avantageux ?

Début spoiler…La réponse est non, mais cela ne veut pas dire qu’il tient sa parole. Ce serait faire injure à sa réputation, après tout. Ainsi, dès que Larazzar déchaîne ses pouvoirs mutagènes pour transformer les suivants de Jepeth en Enfants du Chaos, le perfide Word Bearers lui tranche la gorge avec l’athame qu’il a récupéré dans la caverne du feu prophète (et qui, quelque part, lui appartenait de plein droit), récupérant au passage toute la… heu… faveur chaotique ? emmagasinée par la trop confiante Sorcière. La mort de leur maîtresse jetant ses serviteurs dans la confusion la plus totale, il ne faut pas longtemps avant que l’ambitieux et impitoyable Kor Phaeron s’affirme comme le suzerain incontesté de Sicarus, et commence à construire sa première cathédrale noire, peu soucieux de rejoindre sa Légion pour le grand final de l’Hérésie. Avait-il déjà compris que le projet d’Horus était voué à l’échec ? Ce n’est pas improbable, car s’il y a une règle immuable dans cette galaxie sans foi ni loi, c’est bien que le camp de Kor Phaeron ne peut pas l’emporter. Jamais.Fin spoiler

AVIS :

Pour sa dernière entrée dans l’Hérésie d’Horus, Anthony Reynolds nous donne des nouvelles du personnage que tout le monde avait oublié après ‘Know No Fear’, et qui n’avait sans doute manqué à personne : Kor Phaeron. Rien de particulièrement mémorable dans ce ‘Children of Sicarus’, mais on a au moins un arc narratif fermé assez proprement, ce qui est loin d’être négligeable eut égard à la sale manie des auteurs de cette franchise à laisser leurs intrigues en plan, soit que leur collaboration avec la BL ait cessé avant qu’ils n’aient pu aller plus loin, soit que cette dernière ne leur ait pas donné la possibilité de terminer le boulot. Reynolds en profite pour mettre en avant sa propre création (Marduk), comme il l’avait fait dans ‘Dark Heart’, mais c’est de bonne guerre.

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Exocytosis – J. Swallow :

INTRIGUE :

ExocytosisDurement éprouvés par la poursuite féroce que leur livre l’implacable Corswain depuis leur affrontement dans le système de Perditus (‘The Lion’), Calas Typhon et ses Grave Wardens ont fait escale sur la planète féodale de Zaramund pour panser leurs plaies et réparer leurs vaisseaux. Accueillis à bras ouverts par Luther et ses Dark Angels renégats, qui pensent pouvoir se faire bien voir du Maître de Guerre en échange de leur coup de main (les Dark Angels ne font jamais rien de manière désintéressée, c’est connu), les Death Guards ont cependant choisi de limiter les interactions avec leurs cousins Légionnaires au minimum, ce qui chagrine fortement ces snobs de Calibanites. Officiellement, comme l’annonce Typhon à son homologue après avoir filtré ses appels pendant plusieurs jours, il s’agit de réduire le risque d’accident malheureux entre les deux contingents, certains Death Guards étant apparemment trop neuneus pour faire la différence entre un bon et un mauvais chasseur Dark Angel. Officieusement, le Premier Capitaine sent qu’il couve quelque chose de pas net depuis Perditus, comme les triades de bubons qui se développent sur son épiderme et l’intérêt que sa personne provoque chez la gent diptère lui laissent à penser. Redoutant sans doute le jugement de cet arbitre des élégances qu’est Luther (et sa barbe de hipster), Typhon refuse poliment mais fermement que ses nouveaux alliés lui envoient des Techmarines pour superviser les réparations, et consent seulement à venir au pot de l’amitié que l’état-major Dark Angels organisera à la fin des travaux.

Ce manque flagrant de reconnaissance est mal vécu du côté de la Première Légion, et un Capitaine gaffeur et désœuvré (Vastobal) convainc Luther de le laisser aller espionner le camp retranché de la Death Guard. En chemin, il tombe sur une caravane de civils locaux, bien décidés à rendre visite et hommage à un certain Typhus, sur lequel ils ne tarissent pas d’éloges. Profitant de la diversion offerte par ce troupeau de pèlerins, Vastobal se planque dans un bosquet tout proche de l’entrée du camp, et prend la pose d’un mélèze pour ne pas se faire repérer, tandis que Typhon en personne sort pour aller s’enquérir de la cause de tout ce raffut…

Début spoiler…Il ne lui faut pas longtemps pour comprendre qu’il est bien le Typhus dont ses groupies sont énamourés, et que ces derniers présentent tous les mêmes marques cutanées que lui. Appelé « Héraut du Grand-Père » par la petite mamie qui mène la congrégation, Typhon constate avec plus de fascination que de révulsion que ses visiteurs portent tous les symptômes de maladies graves, qui auraient dû les emporter depuis longtemps mais contre lesquelles ils semblent immunisés. Cette sympathique communion est toutefois interrompue par ce butor de Vastobal, qui sort de ses gonds et de ses bois lorsque les Zaramundois commencent à exsuder des essaims de mouches par tous leurs orifices. Fermement opposé aux choses du Warp, comme tout Calibanite qui se respecte, le Capitaine se met à massacrer les pèlerins à grands coups d’espadon, ce qui provoque la réaction de Typhon.

Le combat s’engage, au cours duquel le porteur de faux hérite d’une coupure au menton, ce qui le chagrine si fortement qu’il en devient authentiquement chaotique. Si si. Renforcé par les bienfaits de Nurgle, qui se manifestent pleinement après cette épiphanie barbière, Typhon décapite son adversaire, et part discrètement du système avant que les Dark Angels ne s’inquiètent de la disparition de Vastobal. Lorsque le Seigneur Cypher alerte Luther du départ en loucedé de ses invités, ces derniers sont déjà loin, et Typhon est fort occupé à précipiter la corruption de sa Compagnie en faisant goûter à ses officiers son hémoglobine suspecte lors du rituel des Coupes (encore un scandale de sang contaminé). Et ce n’est qu’un avant-goût de ce qu’il réservera à son vieux poto Mortarion lorsqu’ils seront à nouveau réunis…Fin spoiler

AVIS :

Si la déchéance de la Death Guard a été suggérée depuis les tout débuts de l’Hérésie (‘The Flight of the Eisenstein’), ‘Exocytosis’ marque véritablement le moment de la bascule définitive de cette Légion vers Nurgle, Calas Typhon servant de catalyseur à cette évolution fatidique. En cela, la lecture de cette nouvelle est obligatoire pour tous les amoureux du fluff de cette faction, et sert de prologue assez robuste aux événements couverts dans ‘The Buried Dagger’, où le même Swallow finira le travail et racontera le désastreux voyage de la Death Guard réunifiée jusqu’à Terra. Comme cet auteur prend un malin plaisir à faire passer Mortarion pour la dupe de son Premier Capitaine, l’absence du premier n’est absolument pas rédhibitoire, et permet même de relever le niveau de la nouvelle, si j’en suis seul juge. Les seules victimes de l’histoire sont finalement les Dark Angels, qui apparaissent comme les nice guys/dindons de cette farce. On peut s’interroger sur la nécessité de faire participer Luther à cette galéjade, d’où il ne sort pas vraiment grandi : vu l’importance qu’il a dans l’intrigue, n’importe quel Capitaine Dark Angels aurait pu tout aussi bien faire l’affaire. Peut-être que James Swallow avait des comptes à régler avec la Première Légion…

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The Painted Count – G. Haley :

INTRIGUE :

The Painted CountSi les lendemains de cuite sont difficiles, ceux de défaite cuisante le sont encore plus. Particulièrement quand on est aussi douillet que notre héros du jour, ou plutôt de la nuit, le Capitaine des Night Lords Gendor Skraivok, aussi connu sous le nom de Comte Peint du fait de son maquillage très bath. Dispersés, démoralisés et laissés orphelins après la bataille de Thramas et la capture de Konrad Curze (sans oublier ce bon vieux Sevatar), les Légionnaires de la VIIIème doivent faire face à une période de transition forcément chaotique, du fait de leur nature profonde et de leurs sales tendances au complot et au meurtre. Skraivok est l’un des prétendants les mieux placés pour devenir le nouveau meneur des Night Lords, notamment grâce à sa maîtrise du vaisseau amiral de la Légion, le redouté Nightfall, mais il doit se défaire de son rival Shang, qui dispose de nombreux soutiens et de l’aura d’avoir été l’Ecuyer de Hante-la-Nuit.

Cette lutte de pouvoir n’est cependant que l’un des problèmes qui tracassent le Comte. Il a aussi hérité sur Sotha d’une épée d’un genre un peu particulier, en cela qu’elle est très certainement démoniaque de nature, et plutôt collante dans ses attentions. Ainsi, malgré des efforts vigoureux, répétés et inventifs pour s’en débarrasser, elle a toujours trouvé le moyen de revenir à ses côtés pour le tenter. Dernière tentative en date, et donc dernier échec : le jeter dans l’espace depuis un sas ouvert (le tout sans casque, opa Guilliman style), qui n’a rien donné non plus, et s’est même montré contre-productif car Shang et deux Atramentar attendaient Skraivok à la sortie du vestiaire, et sans arme pour se défendre, se défaire d’un Capitaine et de Terminators est nettement moins facile, même pour un individu aussi talentueux que notre héros.

The Painted Count_IllustrationFort heureusement, Shang est plutôt chill pour un Night Lords, et se contente de balancer son rival dans le labyrinthe que Konrad Curze avait utilisé pour son animal de compagnie et néanmoins frère, Vulkan, au lendemain du massacre d’Isstvan. Comme l’élection du prochain maître de la Légion est prévue plus tard dans la journée, l’absence de Skraivok sera suffisante pour permettre à Shang de remporter les suffrages, où du moins le pense-t-il. Cela était sans compter sur l’aide apportée par l’épée, qui attendait comme de juste son porteur élu dans le labyrinthe, et grâce à son GPS intégré et son impressionnant bonus aux jets de pénétration d’armure, permet au Comte de se sortir de ce dédale beaucoup plus vite que cette chochotte de Vulkan. Bien sûr, il doit livrer son âme au démon enfermé dans l’arme, mais nécessité fait loi.

De retour sur le plancher des vaches chauves-souris, il se précipite jusqu’à la salle où le Kyreptoran Vicaria (Conseil d’Administration en bon nostraman) tient séance. Arrivant trop tard pour le vote, il a recours à la bonne vieille méthode du défi en duel à mort pour se défaire de ce fieffé coquin de Shang, qui finit promptement une demi-tête plus petit qu’au débit de la séance, grâce à la super-vitesse que lui confère son épée maudite. Cette démonstration de force ayant considérablement refroidi l’ambiance au sein de l’auguste assemblée, Skraivok est élu sans coup férir Overlord Nightest, et jure d’emmener sa Légion, ou ce qu’il en reste, participer au Siège de Terra pour faire les pieds à l’Empereur. Pas la motivation la plus noble ou la plus profonde, mais que peut-on attendre de la part d’un gonze dont le role model est Gene Simmons, je vous le demande.

AVIS :

Dans le sous-sous-sous genre des nouvelles de l’Hérésie d’Horus expliquant pourquoi et comment les Légions renégates sans Primarques décident de se rendre sur Terra, Guy Haley livre une histoire très correcte avec ce ‘The Painted Count’, qui s’inscrit fort bien dans la grande (la captivité de Vulkan et la capture de Konrad Curze) et la moyenne (la campagne de Pharos, couverte par le même Guy Haley dans le roman éponyme) histoires de l’Hérésie. Si l’utilisation du topos de l’épée maudite ne gagnera pas à l’auteur un prix d’originalité, le rendu est suffisamment propre et le personnage de Gendor Skraivok suffisamment distrayant – même si Sevatar reste, et de loin, le G.O.A.T – pour donner envie d’en savoir plus sur la destinée du Comte Peint, dont on devine qu’elle sera forcément fatidique et tragique. Sortez les mouchoirs et le popcorn.

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The Last Son of Prospero – C. Wraight :

INTRIGUE :

The Last Son of ProsperoRamené sur Terra grâce aux efforts conjoints des White Scars, qu’il a aidé à sortir de la tempête Warp dans laquelle ils étaient encalminés, et des Élus de Malcador le Sigilite, le Sergent Revuel Arvida des Thousand Sons n’est plus vraiment au pic de sa forme à son arrivée sur le monde Trône. En cause, cette cochonnerie de malédiction du changement, un temps contenue par Magnus le Rouge, mais à présent hors de tout contrôle. Exfiltré vers l’infirmerie privée du Régent de Terra au nez et à la moustache de Jaghatai Khan, pour que Papi Mougeot puisse jouer au docteur avec ses abattis, le pauvre Arvida n’est plus qu’un tas de chair décoloré et instable, mais auquel son âme s’accroche encore avec l’énergie du désespoir.

Pendant que Malcador joue du scalpel avec plus de ténacité que d’efficacité (6 heures d’opération, tout de même), puis doit expliquer à un Jag’ hors de lui pourquoi il a cru bon de lui emprunter celui que le Primarque considère comme étant son obligé – et notre gonze prend les serments très au sérieux – Arvida expérimente des visions mystiques, où le passé et le présent s’entremêlent. Après quelques flashbacks peu intéressants, il fait la rencontre de son progéniteur borgne, ou plutôt de l’un de ses éclats1, qui a choisi de rester sur Terra… pour demander pardon à l’Empereur, j’imagine ? Toujours est-il que cette fraction du Roi Ecarlate est tirée de sa stupeur hébétée par l’arrivée de celui qui peut prétendre être le dernier fils de Prospero, et commence à se matérialiser dans la salle d’opération, juste à temps pour éviter à Jaghatai de faire avaler son bâton à Malcador pour lui apprendre à piquer les sauvegardes invulnérables pupilles des autres.

Cette apparition, c’était sur quoi le rusé vieillard comptait, lui qui cherchait un moyen de sécuriser les niveaux inférieurs du Palais Impérial en y installant un concierge avec un DEUG en occultisme. Malheureusement, la mayonnaise ne prend pas, ce qui laisse le champ libre au motivational speaker de Chogoris pour venir hurler des encouragements dans l’oreille la direction générale de son poulain. Miracle des miracles, cela marche beaucoup mieux que la combine de Malcador, et l’âme d’Arvida finit par fusionner avec l’éclat de Magnus, gagnant au passage une cure de beauté spectaculaire (les jeunes disent un glow up), qui redonne à notre comateux héros forme humaine. C’est ce qu’on appelle dans le jargon un coup d’éclat. Le rideau tombe sur une séance de présentation en bonne et due forme entre les membres du casting de cette nouvelle. Plutôt que de se prénommer Marvidus ou Manuel le Vouge, comme il en avait pourtant le droit et la possibilité, le « nouveau-né » s’introduit sous le nom d’Ianius, qui était le tutélaire (i.e. la mascotte démoniaque) d’Arvida au cours de sa carrière dans la Légion. Quelque chose me dit qu’on n’a pas encore fini d’entendre parler de lui…

1 : Parce que n’est plus Magn-I, c’est Magn-Us.

AVIS :

Chris Wraight signe une nouvelle pour connoisseurs de l’Hérésie d’Horus avec ‘The Last Son of Prospero’, qui ne peut être pleinement compris et apprécié qu’en maîtrisant, outre l’arc consacré par cet auteur au personnage de Revuel Arvida (‘Rebirth’, ‘Allegiance’), ceux propres à Malcador le Sigilite et ses élus (‘The Sigillite’), à Magnus (‘The Crimson King’) et aux White Scars (‘The Path of Heaven’, ‘Scars’)… ce qui fait un sacré bagage, mine de rien. Pour les happy few ayant investi assez de temps dans la maîtrise de l’Hérésie littéraire, cette nouvelle est à la fois intéressante sur le plan narratif et fluffique, ce qui est suffisamment rare pour être souligné, et apprécié. Pour les autres, qui formeront je crois la majorité, le bilan risque d’être un peu moins positif. Même si Wraight livre un récit de rédemption miraculeuse qui reste compréhensible pour un faux débutant (si vous ne savez pas qui sont Magnus, Jaghatai Khan et Malcador, ça va picoter), c’est bien le contexte dans lequel ‘The Last Son of Prospero’ se déroule qui fait tout l’intérêt de cette nouvelle. A ne pas mettre entre toutes les mains donc, ou en tous cas, à ne pas aborder sans préparation.

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The Soul, Severed – C. Wraight :

INTRIGUE :

The Soul, SeveredAprès les événements d’Iydris et l’abandon de poste de leur Primarque, les Emperor’s Children eurent une petite période de flottement pendant que la galaxie se déchirait autour d’eux. Bien que leur amour pour les belles choses et les plaisirs simples (mais intenses) de la vie les garda occupé pendant cet intérim, certains officiers prirent sur eux de tenter de redonner un cap et une unité à ce qui était pendant la Grande Croisade la fine fleur des Legiones Astartes, et était devenu un ramassis de glandeurs jouisseurs passant leurs journées à écouter de la dubstep à haute fréquence.

L’humilité et l’esprit d’équipe n’ayant jamais été des qualités fortes chez les Enfants (gâtés) de l’Empereur, il était à peu près certain que ces efforts hégémoniques déboucheraient sur des affrontements ouverts entre prétendants au climazon de Fulgrim (son bien le plus précieux et le symbole de son statut de Maître de Légion) plutôt que sur des tractations en bonne intelligence. Aussi, lorsque les Seigneurs Commandeurs Eidolon, dit Dondon la Raclure, et Archorian, dit l’Italique, (il parle toujours comme ça) acceptent de se rencontrer en terrain neutre, c’est-à-dire un terrain vague dans une friche industrielle de la planète Horvia, ravagée par la guerre, c’est forcément qu’ils ont un coup fourré caché dans leur manche énergétique. Reste à savoir qui aura le dernier mot dans cette partie de poker menteur dont la mise n’est rien de moins que le leadership sur la Légion…

Début spoiler…Archorian ouvre les hostilités le premier en lançant ses troupes à l’attaque de son rival et de son escorte de Kakophoni, mais Eidolon n’avait pas perdu la tête (hoho) et gardé sa propre armée en réserve. Le conflit tourne en faveur de ce dernier, forçant les hommes d’Archorian à se replier à travers les ruines d’un manufactorium en déréliction, poursuivis par leurs frères d’armes. Il s’agissait toutefois d’une feinte pour attirer le gros des forces d’Eidolon dans une zone piégée, et un tsunami de boue toxique s’abat sur les assaillants après qu’Archorian ait fait sauter les bombes placées sur la paroi des cuves de rétention qui surplombent la zone.

Seulement, on ne vient pas aussi facilement à bout d’une tache aussi tenace qu’Eidolon, qui se contente de hurler « MEUHHHH » à la face de son adversaire lorsqu’il vient terminer le travail au corps à corps. Comme les Kakophoni ont aussi survécu sans rétrécir au lavage, et donnent également de la voix à la suite de leur patron, le pauvre Archorian finit éparpillé aux quatre vents, et son armée suit rapidement. Comme on dit à Chemos, rira bien qui criera le dernier. Ces deux déluges consécutifs (l’un littéral, l’autre sonique) provoquent une frénésie de massacre et de sévices chez les Emperor’s Children, qui foncent assouvir leurs plus bas instincts sur la population locale de Horvia, qui n’en demandait pas tant et n’est pas assez nombreuse pour occuper longtemps cette bande d’esthètes en puissance. C’est alors qu’Eidolon a une idée de génie : sur Terra, il y a beaucoup plus de monde à torturer/distiller, de quoi tenir au moins quelques années en tout cas. Et c’est ainsi que la IIIème Légion prit le chemin de Terra, sur le caprice coup de tête de son commandant par défaut après qu’il ait pris un bain de boue. A quoi tient l’Imperium, finalement…Fin spoiler

AVIS :

Chris Wraight endosse le rôle peu glorieux mais nécessaire du manager de transition pour les Emperor’s Children1, Légion bien mise en avant au début de l’Hérésie puis laissée à son triste mais coloré destin à partir du milieu de la saga. Même si sa corruption était déjà bien amorcée au moment du congé sabbatique warpesque de Fulgrim, cette fière confrérie n’en était pas encore rendue à l’hédonisme désordonné qu’on lui connaitrait pendant le Siège de Terra, évolution qui nécessitait donc une justification digne de ce nom. C’est chose faite avec ‘The Soul-Severed’, qui utilise Eidolon plus qu’elle ne le met en valeur (et ça tombe bien, c’est le personnage favori d’absolument personne) pour mettre la IIIème Légion sur le chemin de Terra. On peut mettre cette petite nouvelle au même niveau que ‘Prince of Blood’ de Laurie Goulding, qui rend le même service à une autre Légion dont le Primarque n’était plus en état de la mener jusqu’au monde Trône (les World Eaters). Absolument indispensable si vous êtes un fluffiste acharné, car Wraight se pique de donner l’origine de pas mal de caractéristiques des Emperor’s Children « modernes » (héraldique, goût pour les poisons et l’esclavagisme…), seulement sympathique pour le reste.

1 : Il est assez surprenant que la BL ait confié cette tâche à un auteur qui n’avait jamais vraiment écrit pour cette faction jusqu’ici (spécialisation Space Wolves, Thousand Sons et White Scars pour notre homme).

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Dark Compliance – J. French :

INTRIGUE :

Dark ComplianceOn a tendance à l’oublier, mais l’Hérésie d’Horus a donné lieu à autant si ce n’est plus de tractations entre diplomates que de batailles entre forces loyalistes et renégates. Il faut s’imaginer que chaque planète d’une certaine importance a reçu la visite d’émissaires du Maître de Guerre, chargés de la délicate mission de convaincre le Gouverneur local de trahir Pépé pour rejoindre le camp des rebelles. Une tâche ingrate et très souvent mortelle, dont certains s’acquittèrent mieux que d’autres. Et parmi les meilleurs des meilleurs, nous retrouvons Kinor Argonis, un des messagers favoris du grand chauve, qui lui confia des missions sensibles d’un bout à l’autre de l’Hérésie. On le retrouve ici, peu de temps après les événements de Tallarn, en train de baratiner Desigus, despote des Mondes Dorés et gardien du Golfe Aventien. Desigual semble être un farouche partisan de Pépé, et a prévu d’esquinter sérieusement le messager horusien avant de le renvoyer à son maître avec un tatouage « C’est non » en Comic Sans MS en travers du front (ce qui constitue l’outrage le plus terrible qui soit, même à cette époque reculée). Argonis le sait bien, mais reste confiant dans sa capacité à retourner son interlocuteur, témoignage édifiant à l’appui. Il a en effet assisté aux premières loges à l’agonie d’un monde ayant commis l’erreur de refuser l’amitié du Lupercal, et ne se fait pas prier pour partager cette anecdote avec son hôte.

La malchanceuse planète dont il a été question se nommait Acazzar-Beta, et était placée sous la coupe de l’Adeptus Mechanicus. Son Gouverneur, le Technoprêtre Myrmidax Kadith1, accueillit très chaudement l’offre de sécession d’Horus en noyant ses émissaires dans le plasma, outrage que le Maître de Guerre ne pouvait laisser impuni. Défendue par une flotte respectable et des millions de Skitarii, Acazzar-Beta avait sur le papier une chance non nulle de sortir vainqueur d’une guerre ouverte avec les forces hérétiques, mais Horus avait comme a son habitude tout prévu, et l’affrontement, pour sanglant qu’il fut, se termina rapidement par une victoire sans appel des visiteurs. Dans un premier temps, l’Über Primarque remporta la bataille spatiale grâce à une attaque surprise de sa seconde flotte, qu’il avait caché… dans l’espace et qui prit par revers les stations de défense planétaire (il faut croire qu’elles regardaient toutes du mauvais côté, c’est ballot), et l’utilisation de quelques torpilles vortex pour faire des gros trous (noirs) dans les blindages ennemis. Bien que cela ait coûté cher en troupes et en personnages nommés (en l’occurrence, l’irremplaçable Galdron et son acolyte Night Lords Scarrix), ce fut un petit prix à payer pour pouvoir accéder à la surface d’Acazzar-Beta.

Rendu sur place avec ses Justaerin, son vieux pote Mal(oghurst), son témoin Argonis, un bouquet de fleurs et une perle rouge à l’aura très particulière, Horus passa à la seconde étape de son plan machiavélique. Contrairement à son habitude de décapiter et démoraliser l’ennemi en tuant de ses mains son commandant, ce que le fataliste Kadith avait escompté et intégré à son plan pour infliger le plus de pertes possibles aux Sons of Horus, le Primarque se posa loin du front et fit usage de son boulard écarlate, qui se révéla être une Master Ball démoniaque, pour invoquer le Prince Démon Doombreed et ses armées de Khorne. Ceci fait, il repartit aussi sec en orbite pour assister à l’annihilation des loyalistes, toujours escorté du fidèle Argonis, qui ne rata pas une miette de ce spectacle pittoresque.

De retour dans le présent et sur les Mondes Dorés, le même Argonis demande à un Desigus plus aussi sûr de lui de mûrement réfléchir à la décision qu’il va prendre, et qui pourrait sceller la fin de son empire et la mort de tous ses sujets. On ne saura pas au final quel fut le choix du despote, mais on ne peut pas vraiment lui reprocher d’avoir pris un petit temps de réflexion pour se mettre les idées au clair…

1 : Renommé dans tout le Segmentum pour sa manie de monter des optiques sur les pistons de ses moteurs. D’où l’expression « la bielle de Kadith a des yeux de velours ».

AVIS :

Dark Compliance’ a deux intérêts principaux : il remet sur le devant de la scène un personnage mineur mais régulier de l’Hérésie, le persistant Kinor Argonis (‘Tallarn: Ironclad’, ‘Slaves to Darkness’), ce qui est appréciable si vous vous êtes entichés de ce petit galopin. Il met également en scène un affrontement de grande ampleur entre hérétiques et loyalistes, avec rien de moins que le Maître de Guerre en personne à la tête des premiers, ce qui n’arrive pas souvent dans un court format. Ceci dit, French n’arrive pas vraiment à convaincre du génie tactique de son héros, qui remporte la bataille spatiale (affreusement condensée, on a l’impression qu’elle dure littéralement cinq minutes) sur un gros TGCM, et sort un Demonis ex Machina de sa poche pour plier la manche terrestre. Plutôt décevant.

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Duty Waits – G. Haley :

INTRIGUE :

Duty WaitsSur Terra, les loyaux défenseurs de l’Empereur ne savent plus quoi inventer pour tuer le temps. Nous suivons ainsi le quotidien à la fois morne et stressant de deux Astartes de la VIIème Légion, le Capitaine Maximus Thane de la 22ème Compagnie, et le poussin Kolo, fraîchement diplômé de la promotion Eltaune Jaune, alors qu’Horus n’en finit plus de faire traîner son quart d’heure d’impolitesse. Alors que Max’ a au moins le loisir de faire un peu d’exercice à la tête de ses hommes, qu’il emmène régulièrement faire des joggings sur le mur d’enceinte du Palais1, Kolo est assigné au support informatique de ce dernier, et, entre deux appels d’un certain M. Alcador, qui éprouve toutes les peines du monde à envoyer un mail ou à ouvrir une pièce jointe (et qui oublie une fois sur deux d’allumer son écran), doit gérer une bien pesante inactivité. Car, il faut bien le reconnaître : il ne se passe pas grand-chose d’intéressant sur Terra d’un point de vue strictement apocalyptique. Bref, les journées sont longues2.

À défaut de s’améliorer franchement, les choses évoluent un peu pour nos protagonistes après le départ de la flotte en destination de Beta-Garmon. Bien qu’ils n’aient pas eu la « chance » de faire partie des heureux élus envoyés au casse-pipe contre les renégats, Thane et Kolo ont en effet reçu de nouvelles affectations. Le Capitaine a ainsi la chance, la joie et l’avantage de faire le planton à 300 mètres au dessus d’un square fréquenté par les civils du Palais, afin de rassurer et d’inspirer ces derniers. Malheureusement, les cadences infernales de travail auxquelles sont soumises les masses laborieuses de Terra, les conditions météorologiques détestables de la région, et le manque d’intérêt du spectacle (les gars restent vraiment plantés comme des piquets pendant des heures, à tel point que son Lieutenant manque de déclencher une alerte jaune quand il voit Thane lever les yeux vers le ciel) viennent contrarier cette noble initiative de propagande. Ils auraient jonglé avec leurs bolters, ça aurait eu plus de gueule, moi je dis. Pour se distraire, Maximus imagine ce qu’il se passerait s’il se laissait tomber depuis le mur, et calcule les probabilités jusqu’à la 15ème décimale de sa survie en fonction de paramètres divers, comme l’écartement de ses bras pendant la chute, l’atterrissage sur un quidam, ou encore la vitesse de croisière d’un Stormbird (africain) non chargé. Il soupçonne que le développement d’un passe-temps tel que le suicide mental pourrait peut-être trahir un léger début de névrose, mais cela ne l’empêche évidemment pas de faire son devoir.

De son côté, Kolo participe à l’opération Sentinelle II (la première ayant pris place 28.000 ans plus tôt, même si personne ne s’en souvient), ce qui lui donne l’occasion d’interagir avec les civils que Thane ne voit que de loin. Entre deux contrôles d’identité et palpations aléatoires, le voilà sommé avec son escouade d’intervenir en support des forces de l’ordre, débordées par une foule hostile car affamée. La distribution du pain quotidien ayant en effet annulée sans prévenir, une poignée d’Arbites doivent calmer les velléités meurtrières de quelques milliers de mal-contents. L’arrivée des gilets plastrons jaunes n’a pas l’effet escompté, pas plus que les talents oratoires et diplomatiques, assez limités il faut bien le reconnaître, du Sergent Benedict ne permettent de désamorcer le conflit latent. Ce qui doit arriver arrive, et les manifestants commettent l’erreur de charger leurs protecteurs, qui répondent par une rafale de bolter dans le plus grand des calmes. 80 douilles très exactement plus tard, l’incident est clos, au prix d’un petit millier de morts seulement. Voilà qui mérite bien un honneur balistique, il me semble. Bref, sur Terra il n’y a pas que le temps qu’on tue.

1 : En revanche, pas question de traverser la route avant que le petit bonhomme ne passe au vert jaune. Sous peine de mort.
: Il est d’ailleurs murmuré dans les cercles autorisés que c’est la surutilisation de leur membrane cataleptique pour faire passer le temps plus vite pendant leur interminable garnison sur Terra qui a entraîné la dysfonction de cette dernière chez les Imperial Fists et leurs successeurs.

AVIS :

Dans la série des nouvelles de C.A.L.T.H.1 constituant une partie non négligeable du recueil Heralds of the Siege, Duty Waits se place en tête de peloton par ses importants apports en termes de fluff, ainsi que par la réussite de Haley à faire ressortir la torture mentale que représente cette attente interminable pour les défenseurs, fussent-ils des transhumains conditionnés et entraînés pour faire face à toute situation. Et les Space Marines ont beau ne pas connaître la peur, l’Empereur n’a rien dit ni prévu en ce qui concerne l’ennui, ce qui peut mener même les soldats les plus disciplinés à commettre quelques regrettables boulettes. Dans cette ambiance de Désert des Tartares, Thane et Kolo vivent chacun leur propre enfer, et se retrouvent, sans le savoir, complices d’une exaction qui ne manquera pas de venir les hanter après l’Hérésie. Sur le thème, déjà couvert de nombreuses fois mais tellement central pour la série qu’on pardonnera aisément cette nouvelle itération, du sacrifice des fins en faveur des moyens, Haley parvient à brosser un portrait singulier et sinistre du Monde Trône avant que l’apocalypse ne s’y déchaîne, et préfigurant sans le savoir la dictature brutale, liberticide et usine-à-gazesque que deviendra l’Imperium, autrefois « simple » despotisme éclairé et progressiste, une fois la guerre civile terminée. Et si la question du « mais comment en est-on arrivés là ? » est la plus importante à laquelle l’Hérésie d’Horus doit répondre, alors on peut considérer Duty Waits comme une vraie réussite.

1 : Calme Avant La Tempête Horusienne.

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Magisterium – C. Wraight :

INTRIGUE :

MagisteriumSortis très éprouvés de la Guerre dans la Toile, la première défaite qu’ils aient connu depuis leur fondation, et qui a réduit drastiquement leur nombre, les Custodes doivent à présent panser1 leurs plaies et se préparer pour l’arrivée prochaine d’Horus et ses Légions renégates. Nous suivons donc le Vestarios (soit littéralement, le préposé au vestiaire de la boîte de nuit, en grec ancien) Samonas, fidèle bras droit de imperturbable Constantin Valdor alors qu’il supervise la réhabilitation des gardes suisses de l’Empereur, qui, en plus d’avoir été nonagimés (mais si, mais si, c’est du haut gothique) par les hordes démoniaques, ont cabossé et égaré leur matériel dans des proportions abominables, ce qui force les services généraux de la custoderie à enquiller les heures sup’ sans compter. Au moins, le temps d’attente à la cantine et à la photocopieuse s’en trouve fortement réduit, et il n’y a plus de problème de place au parking des trottinettes électriques. C’est déjà ça.

Ayant obtenu une audience auprès de (son demi-frère ?) Rogal Dorn, avec lequel il entretient des relations aussi fraîches que le bloc Harpic qui orne ses toilettes personnelles, Valdor se rend dans les appartements du Seigneur Commandeur de l’Imperium, toujours escorté de son fidèle Samonas. Comme on peut s’y attendre, l’entrevue se passe assez mal, les deux surhommes se balançant des amabilités au visage sans prendre de gants, énergétiques ou pas. Tandis que le maître des Imperial Fists reproche à son interlocuteur sa roideur confinant parfois à l’autisme, dès lors qu’une directive lui ait été donnée par l’Empereur, ce qui a conduit les Custodiens à contenir seuls les brèches dans les niveaux inférieurs du Palais, alors qu’un retrait stratégique aurait permis d’épargner de nombreuses vies, Valdoche nous joue son air favori du « Oh-mais-vous-les-Primarques-vous-n-êtes-que-des-sales-gosses-pourris-gâtés-et-on-était-bien-mieux-avec-Pépé-avant-votre-naissance2 ». Le sentiment de supériorité de Darth Valdor est toutefois tout ce qui lui reste, Dorn soulignant avec à propos que les pertes subies par les 10.000 ont de facto condamnés ces derniers à jouer les seconds rôles dans le futur siège de Terra, et que le sort de l’Hérésie repose maintenant entre les gantelets des Legiones Astartes, qu’ils soient traîtres ou loyalistes. Bref, la garde aurique n’est plus bonne qu’à assurer le service d’ordre autour de la chaise d’affaires impériale, et doit laisser aux Space Marines la gestion des vrais dossiers.

La virulence des échanges entre la main droite et le poing gauche de l’Empereur n’est pas sans rappeler à Samonas, qui s’ennuie ferme pendant ce crêpage de chignon3, une conversation du même ordre qui avait pris place quelques années plus tôt sur Prospero, lorsque que les Custodiens étaient venus donner un coup de main aux Space Wolves dans le châtiment, que d’aucuns jugent mérités, de Magnus et ses Thousand Sons à la suite du poke un peu trop accentué que ce dernier avait envoyé à son paternel pour lui signaler le comportement déviant d’Horus. Bien que Leman Russ se soit révélé un tout autre animal (autant comparer un malamut à un poisson pierre), le zèle sanguinaire avec lequel le Fenrissien mena l’assaut sur Tizca, et sa volonté sans équivoque de ne pas faire de prisonnier, au mépris des instructions remises par l’Empereur au Capitaine-Général, ne furent pas sans générer des frictions entre les deux envoyés impériaux. Dans ce cas, comme plus tard avec Dorn, Valdor, en tant que Magisterium, disposait d’une autorité théoriquement absolue sur son vis à vis Primarque, mais cela n’a pas empêché ce dernier de n’en faire qu’à sa tête, avec des résultats spectaculaires, à défaut d’être satisfaisants. Et Constantin d’y aller de son petit « Primarque… » méprisant en voyant Russ hurler à la lune sur la grand-place de Tizca après la volatilisation du Cyclope. Décidément, ils n’ont pas les mêmes valeurs.

La nouvelle se termine sur une scène de remparts (comme beaucoup des histoires de Heralds of the Siege d’ailleurs), Valdor enjoignant son sous-fifre porte-cravate de ne pas désespérer que l’Empereur reprenne enfin contact avec ses Custodiens, malgré tous les travaux d’isolation des fondations du palais à terminer avant l’arrivée d’Horus, et qui l’occupent à plein temps depuis maintenant des mois. D’une manière ou d’une autre, la fin approche à grands pas…

1 : Et penser, ils ont tous passé l’agreg’ de philosophie après tout.
2 : Funfact : Sur les 1932 mots titres et qualificatifs gravés à l’intérieur de la cuirasse de Valdor, 93% sont des critiques adressées aux fistons du Patron.
3 : Dorn s’étant laissé pousser les tifs pendant ses sept années de permanence au domicile paternel, il y a largement de quoi faire un manbun.

AVIS :

Pure nouvelle de fluffiste, en ce qu’elle s’avère être beaucoup plus riche en petites révélations et lourdes insinuations de background qu’en action pure et dure, Magisterium est une soumission de qualité de la part de Chris Wraight. Son principal intérêt, et non des moindres pour les amateurs de grandes figures de l’Hérésie (c’est à dire la plupart des lecteurs de la série, soyons honnêtes), est d’apporter quelques os à ronger sur le discret mais crucial Constantin Valdor, et de le faire interagir avec d’autres VIP impériaux. Les bisbilles qui s’ensuivent permettent à Wraight de soumettre quelques concepts intéressants, et de soulever des questions l’étant tout autant, comme celles de l’origine de Valdor et du rôle que lui a attribué l’Empereur, qui semble dépasser celui de simple garde du corps et porte parole officiel de Son Altesse Suprêmissime (bien que la fonction de Magisterium, et les prérogatives qui vont avec, soient déjà une belle source de discussion). La rivalité latente entre l’aîné des surhommes de Pépé et la fratrie primarquielle, qui est venue après, ne sera pas sans susciter quelques folles hypothèses de la part du lecteur, et j’espère bien que l’auteur continuera sur cette prometteuse lancée dans le roman dédié à l’énigmatique Capitaine-Général. En sus, l’état des lieux dressé par Wraight du piteux état dans lequel la Guerre dans la Toile a laissé les Custodiens permet de faire le lien entre cet épisode bien couvert dans les dernières publications de l’Hérésie d’Horus et le Siège de Terra, ce qui est toujours bon à prendre. Bref, une lecture tout ce qu’il y a de plus conseillée pour celles et ceux qui prennent l’Hérésie à coeur.

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Now Peals Midnight – J. French :

INTRIGUE :

Now Peals MidnightAlors que l’horloge de l’ApocalypseTM se rapproche furieusement de l’heure fatidique du début de la plus grande bataille de Warhammer 40K de l’histoire de la galaxie, le capitaine de l’équipe loyaliste décide de passer le temps avant le lancement de la clock en se dégourdissant les jambes sur le chemin de ronde qu’il a passé le dernier lustre à bâtir. Rogal Dorn, Prétorien de Terra, a beau se répéter que lui et ses gars (et filles) sont aussi prêts qu’ils puissent l’être, il est difficile d’être certain de rien alors que l’express d’Isstvan V est sur le point d’entrer en gare système, rempli jusqu’à la gueule de félons et de traîtres. Un calme de mauvais augure est d’ailleurs tombé sur Terra, comme si la planète tout entière retenait son souffle dans l’attente de l’arrivée d’Horus et de ses ruffians.

Alors que le Primarque des Imperial Fists boucle son parcours en écoutant le podcast des meilleures prédictions pessimistes et autres maximes déprimantes de l’Hérésie, depuis Malcador dans The Lightning Tower1 jusqu’à Solomon Voss dans The Last Remembrancer2, en passant par… lui-même (il le vaut bien) dans The Crimson Fist3, il fait plusieurs rencontres aussi vides de sens que lourdes d’intérêt, ou peut-être est-ce le contraire. Après avoir demandé à l’astropathe et secrétaire de direction Armina Fel d’organiser un dîner de travail avec ses frangins, il passe une tête au PC Sécurité jauger des conditions de circulation sur le périphérique solaire. Vison Buté voit noir foncé. Zut. Juste le temps de donner sa soirée à l’Amiral Su-Kassen (qui ferait bien d’en profiter pour bingewatcher la saison IV de Stranger Things, elle n’aura plus le temps après), et Jauni est déjà reparti.

Un petit aparté littéraire nous permet de faire la connaissance de Seplin Tu et de son paternel (Tur-Lu’tu), banlieusards impériaux enrôlés de force dans la milice terrane, et qui feront peut-être/sûrement une apparition dans une des prochaines soumissions de French dans cette franchise. Hello Yellow. Retour sur les remparts, où Archamus-3 et Andromeda-17 attendent l’arrivée du taulier en discutant anthropologie et philosophie. On s’occupe comme on peut. Dorn finissant par pointer ses guêtres, le Huscarl et la Devineresse lui emboîtent le pas jusqu’au lieu de rendez-vous avec Sanguinius et le Khan… qui savent déjà ce qu’il avait à leur annoncer, à savoir que la flotte du Maître de Guerre vient de se matérialiser aux confins du système solaire, prélude à la guerre du même nom. La prochaine fois, utilisez Whatsapp les gars, ça ira plus vite.

Enfin, en orbite, dans l’assiette de guerre sur laquelle il est posté, le Capitaine Katafalque reçoit un message privé signé d’un « RD » très peu protocolaire, mais qui n’en contient pas moins une information de (pierre de) taille : l’ennemi vient d’arriver. Corporate jusqu’au bout, Dorn insiste toutefois pour que l’ordre de mobilisation générale ne soit passé dans un premier temps qu’à la 7ème Légion, les White Scars et les Blood Angels bénéficiant d’un léger sursis avant d’être mis au parfum. Pourquoi ? Mystère. Mais comme on le disait chez les tribus Franc à la fin de M2 : « Avant l’heure, c’est pas l’heure… »

1 : ‘He saw this Heresy coming in his visions. That is the truth you fear. You wish you had listened…’
2 : ‘The future is dead, Rogal Dorn. It is ashes running through our hands…’ C’est moche l’auto-citation, John.
3 : ‘You’re no son, you’re no son of maïïïïïne !’ Bon c’est Genesis (We Can’t Dance), mais vous saisissez l’idée.

AVIS :

Je pense que l’apprécation de cette nouvellinette de French variera fortement selon le contexte dans lequel elle sera lue. Prise individuellement, il serait facile (et exact) de souligner qu’il ne se passe vraiment pas grand-chose dans Now Peals Midnight, Dorn se contentant de faire ce qu’il fait depuis les prémices de l’Hérésie d’Horus (The Lightning Tower, 2007) : regarder le ciel d’un air pénétré en fronçant très fort les sourcils. Cette fois-ci, c’est vréééééééééément la bonne, Rogal ! Bien sûr, il a gagné quelques souvenirs et connaissances dans l’intervalle, certains d’entre elles convoquées pour quelques lignes de dialogue, mais dans l’ensemble, rien de nouveau sous la plateforme de défense orbitale. D’un autre côté, si Now Peals Midnight est la culmination du corpus (entier ou partiel) de l’Hérésie, et que le lecteur sait que la prochaine fois qu’il recroisera la route des personnages de la nouvelle (qu’il a appris à connaître au cours de ses précédentes lectures), l’acte final de cette tragédie galactique aura débuté, il y a de bonnes chances qu’il éprouve quelques trépidations de bon aloi en parcourant ces quelques pages. Bref, comme souvent avec ce genre de production purement atmosphérique, time is the essence. J’appose donc la mention « à conserver dans un endroit frais et sec, à l’abri de la lumière, de la chaleur et de la précipitation » sur cette soumission. On connaissait la slow food, nous voilà avec du slow reading. Ce siècle est décidément étrange.

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Dreams of Unity – N. Kyme :

INTRIGUE :

Dreams of Unity« Démobilisé » comme ses camarades à la fin des Guerres d’Unification, l’ancien (dans tous les sens du terme) Légionnaire Tonnerre Dahren Heruk s’est reconverti dans le gladiatorat avec une poignée de comparses afin de joindre les deux bouts. L’Empereur n’ayant visiblement pas prévu de plan épargne retraite digne de ce nom en faveur de ses premiers prototypes de post-humains, la joyeuse bande vivote sur les maigres bénéfices des combats auxquels elle participe dans le Swathe, bidonville Terran s’étendant en périphérie du Palais de leur ancien patron. Pour ne rien arranger, les vétérans sont affligés de divers troubles physiques et psychologiques, dont une forme particulièrement vivace et handicapante de PTSD, poétiquement nommée les Rêves d’Unité, qui les mène à revivre leurs souvenirs de bataille comme s’ils y étaient, avec des conséquences généralement fâcheuses pour les quidams évoluant à proximité. Les Blood Angels n’ont vraiment rien inventés.

Ayant été témoin de la mort d’un de ses comparses (Kabe) sur le sable de l’arène, des mains d’un chrono-gladiateur au final desservi par son propre sadisme, Heruk commence sa journée par un peu de manutention, ramenant les restes mortels de son défunt collègue jusqu’au domicile de son dominus et imprésario (Tarrigata), afin de procéder au recyclage, puis à l’incinération de ces derniers. Il part ensuite à la recherche d’un autre gladiateur de l’écurie (Gairok) aux abonnés absents depuis quelques heures, ce qui n’augure rien de bon. Pris en chemin d’une crise de somnambulisme aiguë, il revient à lui dans un bar dévasté du Swathe, où Gairok1 semble avoir organisé une reconstitution hyper réaliste du siège d’Abyssna, avec les piliers de comptoir comme figurants (involontaires). Jugeant son camarade trop atteint pour qu’une autre issue soit possible, Heruk l’euthanasie la mort dans l’âme, et poursuit sa mission de porteur d’os en charriant le cadavre jusqu’au QG de la bande.

Ailleurs dans le Swathe, le SWAT impérial (see what I did there ?) se déploie à grand renfort de gadgets, sous les traits aquilins mais masqués du Custodien Tagiomalchian. Ce dernier a été chargé de trouver et de neutraliser des éléments séditieux opérant depuis les dédales mal famés du bidonville, et se montre très intéressé par le carnage commis par Gairok au café PMU du coin. Alors qu’il est occupé à faire quelques relevés en mode les Experts : Terra, il est violemment attaqué par un agresseur non identifié, ce qui coupe la transmission envers la Tour de l’Hegemon. Sus-pense.

Nous retrouvons Heruk et son poids mort alors qu’ils arrivent enfin en vue de la bicoque de Tarrigata, qui se trouve être en proie des flammes. Décidément, ce n’est pas la journée de notre heruk. Réussissant à extraire son patron des décombres au péril de sa vie, le Guerrier Tonnerre n’arrive pas à lui sous-tirer d’informations vraiment utiles quant à l’identité des petits gougnafiers responsables de cette destruction de propriété privée avant que Papy Tarri’ n’aille rejoindre la droite de l’Empereur. Supputant que l’incident ait pu être causé par une autre crise de delirium tremens du dernier de ses corelégionnaires vivants (Vezulah Vult), Heruk se met à nouveau en chasse, et parvient à débusquer Vivi dans les égouts du Swathe. Ce dernier, également à l’article de la mort, et aveuglé par un Bitch Betcher move réalisé par son assassin, refait le coup du « je meurs avant d’avoir donné la bonne info à mon pote pour préserver le suspens de l’histoire mouahaha- couic » à Heruk. Au moins, l’honneur des Guerriers Tonnerre est sauf, car ce n’est pas Vult qui a foutu le feu aux pénates de son patron. C’est déjà ça. Résolu à tirer ce mystère au clair, et désormais libre de toute obligation professionnelle du fait du décès de tous ses collègues, Heruk poursuit son avancée dans les niveaux inférieurs du Swathe…

Début spoiler…et arrive à temps pour filer un salutaire coup de main à Tagiomalchian, fort occupé à maîtriser un Alpha Légionnaire possédé et son culte de groupies, que l’on devine être responsables du saccage du Balto pendant que Gairok s’en jetait un petit, ce qui lui a fait péter les plombs, et de l’attaque des locaux de Tarrigata… parce qu’il leur devait de l’argent, peut-être ? Toujours est-il que ce sont les méchants de la nouvelle, les vrais, en plus d’avoir été impliqués dans la tentative d’infiltration du Palais Impérial quelque temps auparavant, bien sûr. Prudence étant mère de sûreté, Heruk commence par s’occuper des goons chaotiques pendant que Tag’ et Alpharius (car c’était lui… c’est toujours lui) se roulent par terre en bonne intelligence, écopant de quelques légères blessures mais se montrant si convaincant dans son approche qu’il arrive même à convaincre la meneuse adverse de se suicider plutôt que de l’affronter2. Ceci fait, il ne reste plus à notre increvable vétéran qu’à régler son compte au bossédé de fin, en partenariat avec l’Adeptus Custodes, et en écopant d’une déchirure mortelle au passage (si seulement il s’était souvenu qu’il avait piqué le pistolet à radiations de Tarrigata avant que d’engager le renégat au corps à corps… les ravages de la grande vieillesse). Herruïque jusqu’au bout, notre briscard peut ainsi tirer sa révérence la tête haute, ayant bien mérité un honorable coup de grâce de la part de son camarade de jeu. Dreams are my reality… (air connu).Fin spoiler

1 : Pour être honnête, on ne sait pas trop qui blâmer pour ces troubles de voisinage, Heruk ayant été tout aussi parti que son poto à son arrivée sur les lieux. Dans ces cas là, mieux vaut reporter le problème sur le type d’en face c’est vrai.
2 : Il faut dire que voir un colosse écumant perforer la cage thoracique de Roger de la compta’ à coup de pied ne donne pas en vie d’engager le dialogue.

AVIS :

Cette nouvelle de Kyme s’avère être assez satisfaisante, et plus qualitative que nombre de ses travaux précédents, ce qui est appréciable pour le lecteur et peut laisser à penser que notre homme s’améliore au fil du temps. Tant qu’il y a de la vie… En plus de la généreuse dose de fluff relative aux Guerriers Tonnerre dont nous bénéficions ici, le petit thriller mis en scène par Kyme quant à l’identité des proies traquées par Tagiomalchian tient plutôt bien la route, dès lors qu’on ne le regarde pas de trop près. À titre personnel, j’ai trouvé que l’auteur s’inspirait lourdement des travaux de certains collègues (le Custodes est un clone Kymesque du Tauromachian d’Abnett dans Blood Games, le crachat venimeux un emprunt au Talos d’ADB), ce qui peut peut-être expliquer pourquoi cette soumission est de meilleure facture que d’ordinaire. La tendance de Kyme à saboter l’exécution d’idées pourtant intéressantes par la non prise en compte de détails mineurs (affliction baptisée annandalisme par votre serviteur) vient toutefois fragiliser l’édifice1, ce qui est dommage mais pas surprenant. Mais on progresse, on progresse…

1 : Exemple gratuit, le chrono-gladiateur du début de la nouvelle est d’abord décrit d’une telle manière à ce que le lecteur croit qu’il s’agit d’un Custodien (ce qui ferait sens car ce sont eux qui ont massacrés les Guerriers Tonnerre sur l’ordre de l’Empereur). Ce quiproquo assez malin est affaibli par le choix de Kyme de faire de son antagoniste un tueur sadique, qui prend son temps pour tuer sa victime au lieu de l’achever efficacement. Pour un guerrier vivant littéralement sur du temps emprunté, une telle procrastination est en effet très improbable.

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The Board is Set – G. Thorpe :

INTRIGUE :

The Board is SetSur le sol de cette bonne vieille Terra, les armées loyalistes se préparent à recevoir comme il se doit le retour du fils indigne et de sa bande de potes, dont on entend déjà les « boum boum boum » crachés par les enceintes de leurs Clio tunées résonner depuis le parking de la copropriété, brisant le calme légendaire du quartier1. Comme le petit vieux acariâtre qu’il est, Macaldor, après avoir balancé une ou deux références que les moins de 20.000 ans ne peuvent ni connaître, ni comprendre, s’en va en grommelant dans sa barbe psychique que Dorn est définitivement une grande et jaune godiche, et que son obsession pour les briquettes et les portails électriques n’est qu’une lubie de jeune crétin. Ca tombe bien, notez, c’est l’heure de la coinche à l’EHPAD Bon Séjour, et le Mac’ ne raterait pour rien au monde ce moment de la journée.

À peine a-t-il fini d’installer la table que son acolyte de jeu révèle (you see what I did there…) sa présence et engage sans plus tarder les hostilités. Dans les ténèbres mi-obscures du 31ème millénaire, l’antique jeu de belote se joue en effet à deux plutôt qu’à quatre, et sur un plateau de jeu avec figurines en plus du traditionnel paquet de cartes. En fait, ça ressemble furieusement à une version Shadespirée des échecs, et ça a l’air donc vachement cool, d’autant plus que toutes les pièces se trouvent être des représentations des Primarques engagés dans l’Hérésie d’Horus2. Comme à chaque partie depuis leur internement respectif, Pépé et… Mémé ? rejouent la bataille finale de l’Hérésie, avec l’Empereur dans son propre rôle et Malcador dans celui de ce fripon d’Horus. Et comme à chaque fois depuis le début de ces amicales sessions, le Sigillite constate que son adversaire passe son temps à tricher. Manipulation de la pioche, duplication de cartes, ajout de pièces non WYSIWYG en cours de jeu… s’il y avait un arbitre, celà ferait longtemps que le Maître de l’Humanité aurait mangé son ban. Malheureusement pour lui, Malky ne peut compter que sur lui même pour se faire justice, ce à quoi il s’emploie avec toute la rouerie et la malice qu’on lui connaît.

En face de lui, l’Empereur semble peu intéressé par le déroulé de la partie, et joue franchement comme une savate, seulement sauvé par sa capacité à top decker comme un porcasse avec une régularité des plus suspectes. Ajoutant l’insulte à l’outrage, il se permet même de tancer son partenaire sur son faible niveau de jeu, alors que Horus, lui, était un opposant digne de ce nom. Sans doute très fatigué par l’enchaînement des nuits blanches à pousser sur son trône (la constipation psychique est un problème commun chez les démiurges millénaires, tous les auxiliaires de vie vous le diront), Big E va même jusqu’à utiliser des mots très durs à l’encontre de son vieux comparse, au point d’arracher à ce dernier des larmes de collyre. Qu’à cela ne tienne, Malcador en a vu d’autres, et met à profit sa rogne pour sortir un enchaînement digne de Magnus Carlsen le Rouge, le laissant en position de remporter la partie au coup suivant. « Ha ha, tu l’avais pas vu venir celui-ci, bouffi » exulte notre vieillard échevelé, pas peu fier de tenir sa première victoire en 1.834.427 confrontations. Sauf que, sauf que… Sauf que l’Empereur est décidément un mauvais joueur à la main leste, et trouve le moyen de substituer à son Roi Empereur lui-même une nouvelle pièce, le Fou, qui va héroïquement se sacrifier pour lui permettre de gagner la partie. Comble de la bassesse, le Fou a la tête de Malcador, à qui il prend l’envie folle de fracasser l’échiquier sur le crâne de son suzerain.

Sur ces entrefaites, une estafette se présente à la porte, et vient apporter la nouvelle tant redoutée au Premier Seigneur de l’Impérium : la flotte d’Horus vient de se matérialiser dans le système solaire, et la plus grande bataille de l’Humanité est sur le point de s’engager. Cherchant du regard son boss, Malcador a la surprise de s’apercevoir qu’il est seul dans la pièce, et l’a apparemment toujours été, d’après le retour un peu honteux du messager, qui n’a pas osé déranger tout de suite l’aïeul vociférant qui faisait une tournante autour du plateau de jeu à son arrivée. Conclusion de l’histoire : la grande vieillesse est un naufrage, mais au moins, on ne s’ennuie pas.

1 : Et je ne rigole même pas, la nouvelle commence par un constat par Macaldor et le chef de l’Adeptus Astra Telepathica du tapage nocturne diurne warpurne généré par l’approche de la flotte traîtresse.
2 : On comprend mieux du coup pourquoi l’Empereur tenait absolument à avoir un nombre pair de rejetons. C’est mieux pour équilibrer les parties.

AVIS :

The Board is Set est une nouvelle intéressante, mais dont l’inclusion dans un BLC ne tombait pas, de mon point de vue, sous le sens. Parmi les qualités notables de cette soumission, on peut mettre en avant l’art consommé avec lequel Thorpe distille à la foi clins d’oeil aux évènements passés et à venir de l’Hérésie, à coups de manœuvres lourdes de sens des pièces sur l’échiquier et de remarques sibyllines soufflées par un Empereur plus que jamais omniscient au bras droit/fusible qu’il s’apprête à griller, mais également allusions fluffiques subtiles, sur lesquelles les fans hardlore passeront des pages et des pages à s’étriper, par les mêmes biais que ceux donnés ci-dessus. Même sans être un amateur transi du style du Gav, on peut lui reconnaître un certain talent de mise en scène de ces passages prophétiques, ce qui n’était pas gagné d’avance au vu du casting de monstres sacrés qu’il convoque.

À titre personnel, j’ai également apprécié la tirade que MoM (Master of Mankind) balance à son larbin dans le but de le mettre en rogne et de le forcer à la jouer comme Lupercal, qui est un condensé de remarques blessantes mettant en évidence que Malcador n’a été qu’un outil utilisé par l’Empereur pour arriver à ses fins, et qu’il n’aura absolument aucun scrupule à s’en débarrasser une fois qu’il n’en n’aura plus l’usage. Ce discours des plus cash trouve une résonnance particulière depuis Dark Imperium, où il est clairement indiqué la dualité de l’Empereur dans ses « sentiments » envers ses congénères : incapable d’aimer l’homme, mais absolument dévoué à l’Humanité. On peut alors se demander si les piques envoyées par Pépé ne sont pas simplement le fond de sa pensée, qu’il livre à un Malcador qui reste persuadé qu’il ne s’agit que de la manoeuvre d’un monarque bienveillant et attentionné pour lui faire donner le meilleur de lui-même. Chacun se fera sa religion sur le sujet, mais cette dualité d’interprétation est assez intéressante.

D’un autre côté, The Board is Set s’avère être l’antithèse absolue de la nouvelle à mettre dans les pattes d’un novice de la BL ! Regorgeant de sous-entendus et d’Easter eggs qui feront les gorges chaudes des lecteurs vétérans, pour peu qu’ils soient des fluffistes un minimum intéressés, cette soumission possède en effet une valeur ajoutée littéraire qui passera à 31.014 pieds au dessus de la tête du newbie. Il est plutôt probable que ce dernier ressorte du propos de Thorpe ou perplexe ou soulé par l’accumulation de mentions et notions « members only » qui lambrissent les pages d’un bout à l’autre du récit. D’une manière plus large, on peut considérer l’Hérésie d’Horus comme étant, de manière générale, une franchise trop spécialisée pour être incluse dans des ouvrages de « propagande » de la Black Library. Sans mettre en question l’intelligence et les capacités de déduction du novice moyen, je doute en effet qu’il ait la patience ou l’intérêt pour percer à jour les tenants et aboutissants de cette absconse partie de Cards against Humanity. Bref, la définition même de l’acquired taste, et en tant que tel, aussi surprenant qu’une douzaine d’huitres au fond d’un Happy Meal.

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Voilà qui conclut cette critique de ‘Heralds of the Siege, recueil dont je ressors avec un sentiment mitigé. Si certaines des nouvelles proposées aussi sont d’un très bon niveau, et se placent parmi mes favorites de toute l’Hérésie, et que la dernière section du bouquin possède une atmosphère « veillée d’armes avant le début du siège » tout à fait plaisante, il me faut également constater qu’un bon tiers des histoires au sommaire de ce tome ne s’intègrent pas du tout ce fil conducteur, ce qui est très dommage1. On peut cependant mettre au crédit de cette anthologie sa quasi-exhaustivité en matière de factions (treize Légions de Space Marines, les deux Mechanicus, l’Armée Impériale, l’Adeptus Custodes et même les Guerriers Tonnerre) et de personnages nommés (l’Empereur, Horus, Malcador, cinq Primarques et une demi-douzaine de VIP tels que Valdor, Luther et Eidolon), ce qui devrait permettre de contenter le plus grand nombre de lecteurs, quelles que soient leurs sympathies.

1 : Et d’autant plus qu’une nouvelle qui aurait parfaitement eu sa place dans cette anthologie, ‘Restorer’ (la convalescence de Shiban Khan sur Terra) n’y figure pas alors que sa première publication date de l’été 2017.

SUMMER OF READING 2018 [40K-AoS-HH]

Bonjour et bienvenue dans cette revue du Summer of Reading 2018 de la Black Library, dont je vous ne ferai pas l’affront de préciser l’année et la saison de sortie. Si vous n’êtes pas familier avec les SoR, il s’agissait de petits recueils de nouvelles publiés par la BL au cœur de l’été, période creuse de l’année par excellence, pour donner aux fans quelque chose à se mettre sous la dent, ou plutôt sous la rétine, en attendant la rentrée. Lancé en 2014, le concept perdura jusqu’à l’été 2019, après quoi il fut de facto remplacé par des semaines thématiques comme la Character Week (2020) ou la Gods & Monsters Week (2021), pour ne citer que deux exemples.

Summer of Reading 2018

L’été 2018 nous apporta un contingent de sept nouvelles, tirées des franchises majeures de la GW-Fiction que sont Warhammer 40,000, Age of Sigmar et l’Hérésie d’Horus, dont deux toujours non republiées à ce jour (‘Two Metaphysical Blades’ et ‘The Armour of Fate’). Au niveau des contributeurs de cette pause estivale, on retrouve une majorité de têtes connues (Haley, Wraight, Clark, Guyme et Annandale), seuls les noms de Rachel Harrison et de Peter McLean (qui semblent avoir cessé leur collaboration avec la BL au moment où cette chronique est publiée) pouvant se révéler inconnus aux nouveaux lecteurs. On se souvient tous que cet été fut chaud d’un point de vue météorologique : il est temps de voir ce qu’il a donné d’un point de vue littéraire…

Summer of Reading 2018

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Two Metaphysical Blades – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE :

Two Metaphysical BladesOù il sera question de deux lances forgées de la main même de l’Empereur, du temps où il n’était encore qu’un pouvoir mineur sur une Terra en proies aux affres de la Longue Nuit (c’était juste avant que l’heure d’hiver soit enfin abandonnée, après 25.000 de report), et squattait la cave de son vieux pote Malcador. Appelées Apollonienne et Dionysiaque, soit des références comprises par moins de dix personnes à l’époque (que snob ce Pépé), ces armes étaient à la fois des opposées polaires et unies par une connexion profonde. La première fut attribuée à nul autre que Constantin Valdor, qui la mania à de nombreuses reprises lors de sa longue et distinguée carrière. La deuxième revint à Leman Russ en lot de consolation après qu’il eut perdu une bonne partie de sa Légion à exterminer les Orks de la Roue de Feu, une région galactique conquise par l’Imperium pendant la Grande Croisade1. Un cadeau qui fut apprécié à sa juste valeur par le caractériel Roi Loup, et jamais utilisé par ce dernier, jusqu’au moment où il décida d’aller soloter le Maître de Guerre félon au plus fort de l’Hérésie, avec les résultats que l’on sait.

En plus d’être des armes incomparables, Apollonienne et Dionysiaque étaient imbues de capacités psychiques (certains diront métaphysiques) uniques, permettant dans le cas de la première à son porteur de connaître les vérités profondes2 de ses victimes au moment de leur mort, et dans le cas de la seconde, d’ouvrir les yeux de tout individu blessé par cette dernière sur sa situation. On ne saura jamais pourquoi l’Empereur n’a pas jugé bon d’appeler ses créations « Contrôle Fiscal » et « Psychothérapie », mais ça aurait été beaucoup plus approprié, à mon humble avis. Si Chris Wraight a la bonté de nous fournir une petite démonstration du fonctionnement d’Apo’ à la faveur du massacre d’une bande de bikers dégénérés par Valdor et une vingtaine de ses collègues pendant l’Unification de Terra, il faudra vous munir d’une copie de ‘Wolfsbane’ pour découvrir l’effet kiss cool de l’écouvillon de la mère Denis.

Cette nouvelle examine également les relations peu simples, mais pas si froides que ça, entre Valdor et Russ, avant et après l’Hérésie. De son propre aveu, le Custodien apprécie assez le Roi Loup, qui le déteste cordialement en retour. Vous parlez d’une relation asymétrique. Ces bisbilles persistantes n’empêcheront toutefois pas les deux compères d’être frappés par une révélation mystique au même moment, les conduisant à abandonner leur poste et leurs subordonnés pour s’embarquer dans une quête mystérieuse dont ils ne reviendront jamais (pour le moment…). Bien qu’ils aient également laissés leur arme derrière eux, il y a fort à parier que l’histoire de ces deux reliques ne se terminera pas dans les tréfonds d’une armurerie poussiéreuse, mais ceci est une autre histoire…

1 : L’Empereur lui promit aussi une forteresse mastoc sur Fenris (le Croc), car il n’était pas chien envers les loulous. Mais comme cela allait prendre trois plombes, j’aime à penser qu’il a refilé la lance à Son fiston pour marquer le coup, un peu comme une boîte de chocolats oubliée au fond d’un placard quand la belle-famille débarque.
2 : Ou, pour utiliser le lexique de ce rabat-joie de Valdor, leurs défauts.

AVIS :

Chris Wraight est un des auteurs de la Black Library qui maîtrise le mieux le genre cryptique, qui est l’un des plus complexes à utiliser : trop, et on ne comprend plus de quoi il en retourne ; pas assez, et l’effet mystérieux est perdu. ‘Two Metaphysical Blades’ est un très bon exemple du savoir-faire déployé par Wraight, puisqu’à travers les différentes vignettes qu’il nous propose d’examiner, depuis les prémices de l’Imperium (qui comme toutes les start-up vouées à transformer l’humanité, a commencé dans un garage) jusqu’à la purge post-hérétique et la disparition des grandes figures de la Grande Croisade (Leman Russ et Constantin Valdor en tête), on a la nette impression d’être initié à des vérités importantes sur le grand dessein de l’Empereur, qui comme chacun sait n’a jamais rien fait au hasard. La destinée liant les porteurs originaux des lances Apollonienne et Dionysiaque sera-t-elle un jour révélée ? Rien n’est moins sûr (même si à notre époque, les Primarques courent de nouveau les rues), mais cela n’empêche pas de savourer cette nouvelle à sa juste valeur, et c’est là tout le talent de conteur de Chris Wraight. Un must read absolu si vous vous sentez une âme d’exégète, si vous vous êtes fixés comme objectifs de lire toutes les histoires consacrées à des armes1 de la Black Library, ou, tout simplement, que vous avez envie de variété et de qualité après une overdose de bolter porn.

1 : Ne pas oublier ‘Athame’ de John French et ‘Les Fragments d’Erebus’ de Guy Haley.

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Blacktalon: When Cornered – A. Clark [AoS] :

INTRIGUE :

When CorneredJe suis sûr que vous vous êtes déjà retrouvé dans une situation où vous avez été coiffé sur le poteau par un quidam quelconque (à la caisse du Super U par une petite mamie, ou pour l’accès à une place de parking par un automobiliste sans vergogne). On peut tous admettre ici que, malgré le fait que ce soit très pénible et qu’il faille prendre sur soi pour ne pas créer un esclandre, il serait malvenu de laisser ses penchants de primate territorial s’exprimer. C’est à peu près la situation dans laquelle se retrouve la Knight-Zepyhros et chasseresse en chef de Sigmar, Neave Blacktalon, après que la proie après laquelle elle courrait depuis six mois, le sorcier de Tzeentch Xelkyn Xerkanos, se soit fait alpaguer par l’armée du Thane Halgrimmsson, alors qu’il rôdait dans l’arrière-pays chamoniard (il préparait l’UTMB, sans doute).

On pourrait penser que la coopération serait naturelle entre la Stormcast et les Duardin, mais comme les deux camps ont choisi de miser sur les raisons de détester Xerkanos (il a tué le roi Halgrimm, père du Thane, ainsi que bon nombre de ses guerriers du côté des petits barbus, et a commis une litanie de massacres et de déprédations qui ont conduit le grand barbu à le mettre sur sa to kill list du côté de Blacktalon) plutôt que de développer leurs talents de diplomate au moment d’établir leur fiche de personnage, le problème est loin d’être résolu pour les forces de l’Ordre. Un fragile accord a été négocié de haute lutte, selon lequel Xerkanos sera ramené à la forteresse des Duardin pour être formellement jugé, mais il reviendra à Blacktalon d’exécuter le sorcier une fois la sentence prononcée. Comme personne n’est dans le fond satisfait de cette négociation, les premières pages de la nouvelle voient Halgrimmsson et Blacktalon palabrer comme des marchands de tapis sur la route qui ramène l’armée du Thane en direction de la petite ville de Lightsdawn, étape obligatoire avant d’arriver au karak du clan. N’ayant pas réussi à convaincre son interlocuteur de régler une bonne fois pour toute son compte au mage à tête de libellule qui se lamente dans une charriote en queue de peloton, l’opiniâtre Stormcast décide d’aller se passer les nerfs en allant se moquer du prisonnier (pas très classe, mais elle ne l’est pas). Avant de se faire gentiment jeter par les Brise Fer qui gardent la roulotte, agacés à juste titre par les jurons démoniaques que Blacktalon fait pousser à Xerkanos à force de punchlines, notre héroïne acquiert la certitude grâce à ses sens trop trop aiguisés que le sorcier fomente une tentative d’évasion. D’ailleurs, elle l’a vu cacher une écharde de bois dans ses robes, ce qui lui sera sans doute utile pour forcer ses chaînes… ou se curer les dents. En tous cas, elle décide très intelligemment de garder cette information pour elle et de ne pas intervenir sur le moment, certaine de sa capacité à vaincre le faquin s’il devait avoir la bonne idée de sortir de sa cage un peu trop tôt…

Lorsque la colonne éprouvée finit par arriver en vue de Lightsdawn, les super pouvoirs sensoriels de Blacktalon lui permettent à nouveau de déceler que quelque chose ne tourne pas rond chez les miliciens qui patientent sur le chemin de ronde pendant que les Duardin approchent par la route. Cette fois-ci, elle juge bon de prévenir Halgrimmsson, mais ce dernier a décidé de faire sa mauvaise tête, sûrement fâché qu’elle soit toujours plus grande que lui alors qu’il se déplace sur un bouclier porté par ses Longues Barbes, Abraracourcix-style. Il ne claque donc pas de PC pour donner une défense en règle à ses troupes alors qu’elles entrent dans la ville, ce qui a bien sûr des conséquences tragiques à très court terme. Un terrible cri se fait entendre alors que l’armée chemine sur la grand rue, d’une puissance telle qu’il incapacite les Duardin (et leurs tympans fragiles) pendant quelques instants, permettant aux cultistes (avec boules Quies) qui avaient pris la place des véritables gardes de Lightsdawn de passer à l’attaque sans rencontrer de résistance.

Grâce à sa constitution supérieure, Blacktalon récupère plus vite que ses alliés, et se rue en direction du wagon où est retenu Xerkanos afin de l’empêcher de s’enfuir à nouveau, jugeant assez logiquement que l’embuscade a été montée par des disciples du sorcier. À sa grande surprise, comme à celle de sa proie, il s’avère en fait qu’une nouvelle faction s’est jointe aux réjouissances : le culte slaaneshi du Sixième Tourment. Cette bande de chercheurs (nerds) menée par le supersonique Achylla – et sa grande gu*ule – en a après le sang de Xernakos, ingrédient indispensable à la conclusion d’un rituel qui leur permettrait de localiser enfin leur divinité disparue. Blacktalon se retrouve alors confrontée à un dilemme épineux : faire la peau à sa cible en profitant de la confusion ambiante, mais courir le risque de permettre aux hédonistes de parvenir à leurs fins (la Knight Zephyros ne se berçant pas d’illusions sur sa capacité à empêcher les cultistes à récupérer le cadavre du sorcier), ou agir comme babysitter de son ennemi mortel, afin de mettre en échec les sinistres plans d’Achylla ?

C’est finalement la deuxième option qui s’impose lorsque ce rusé de Xernakos décide de filer en mode kamikaze jusqu’au temple de Sigmar où il sait que ses disciples ont caché une amulette de téléportation. Protégé bon an mal an par Blacktalon, qui lui court après et laisse les Duardin se débrouiller tout seul, le sorcier parvient jusqu’au saint édifice, où l’attend Achylla et sa garde rapprochée. Big Mouth avait mis une de ses six mains sur l’amulette planquée par les suivants de Xernakos, mais son air suffisant est rapidement effacé par l’énorme uppercut que lui colle Blacktalon après qu’il ait commencé à monologuer comme un méchant de série B. Dans la cohue qui s’en suit, le facteur X parvient à récupérer son bien et à fausser compagnie à tous ses haters, laissant Blackie de trèèèès mauvaise humeur. On souhaite bon courage à Achylla et à ses mauvais bougres dans leur future explication de texte avec une Stormcast Eternal en rogne…

AVIS :

Nous tenons avec ce ‘Blacktalon : When Cornered’ une solide introduction au roman ‘First Mark’ consacré par le même Andy Clark à la (suite de la) traque du sorcier XX par l’infatigable chasseresse. Combinant une bonne présentation, tant sur le plan physique (sens super développés, vitesse éclair, force colossale) que mental (obsession pour ses missions, jusqu’à la mise en danger d’elle-même et d’autrui pour arriver à ses fins) de son héroïne avec quelques scènes d’action bien mises en scène, et un peu de tourisme dans un coin bucolique de Chamon1, ce prequel donne plutôt envie de lire la suite, ce qui est bien tout ce que lui demande. Le seul léger grief que je ferai à Clark est le manque de développement dont il fait bénéficier son antagoniste dans ces quelques pages : mis à part son look d’insecte et son côté savonnette, on n’apprend pas grand-chose sur Xernakos et n’avons donc pas de raison de nous attacher particulièrement à lui. J’espère qu’il apparaît plus à son avantage dans ‘First Mark’.

1 : Je suis un peu triste que les mystérieux croquemitaines nocturnes locaux n’ait joué aucun rôle dans la nouvelle, mais peut-être qu’ils apparaissent dans le roman…

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A Company of Shadows – R. Harrison [40K] :

INTRIGUE :

A Company of ShadowsLes choses ne se passent pas tout à fait comme prévu sur le front de Gholl pour la Commissaire Severina Raine et ses Fusilières du 11ème régiment d’Antari, forcés d’effectuer un redéploiement stratégique depuis la cité de l’Arrête de Caulder suite à la poussée de ces diables de Clairvoyants. Escortant un officier impérial aussi important pour la suite de la campagne qu’insupportable de morgue, l’escouade de Raine embarque dans une Valkyrie, promptement descendue par un missile qui lui a grillé la priorité à droite, avec des conséquences variant du dommageable au définitif pour notre petite bande de personnages, qui se trouve encore réduite une fois le sol atteint. Perdus au milieu des contreforts escarpés et sous contrôle ennemi connus sous le nom de la Gueule, ralentis par leurs blessés et ne pouvant décemment laisser tomber leur charge entre les mains des cultistes, qui ont déjà démontré de manière graphique qu’ils faisaient grand et bon usage des gradés impériaux, Raine et ses hommes décident de tenter un bluff pour priver les Clairvoyants de leur proie. L’intrépide Commissaire endosse donc l’uniforme de la Tacticae Principal, et organise un dernier carré ne pouvant se terminer par autre chose que sa capture, mais permettant, l’Empereur aidant, au colis d’être récupéré ni vu ni connu par les renforts de la Garde. Téméraire mais pas suicidaire, Raine prend soin de confier au Sergent Wyck (Daven de son nom malheureusement, et pas Jöhn) sa montre de gousset, dont l’imprégnation psychique devrait permettre à un psyker digne de Lui de la retrouver jusque dans le bastion des chaotiques.

Le succès quasi total de la première partie de ce plan audacieux laisse donc nos héros séparés. D’un côté, un commando d’Antaris, incluant, outre les Farouches de Wyck, une escouade de Storm Troopers menée par le Capitaine Andren Fel, âme damnée et probable love interest de Miss Raine, ainsi que la psyker sanctionnée Lydia Zane, se lance dans une course contre la montre (mais avec le concours de cette dernière également, if you see what I mean) pour extraire leur petite camarade des griffes des Clairvoyants. De l’autre, cette dernière a la désagréable surprise d’apprendre que les cultistes ne sont absolument pas tombés dans le panneau, mais qu’ils voulaient la capturer depuis le début. C’est ce que lui apprend le magos en charge des opérations, un charmant individu répondant au nom d’Arcadius Verastus, alias 9/9. Il a en effet perçu dans l’âme de sa prisonnière un potentiel des plus alléchants, qu’il compte offrir à Tzeentch pour favoriser son avancement. Ayant manifestement un peu de temps à tuer avant Severina, il prend plaisir à soumettre l’inflexible Commissaire à un interrogatoire poussé, s’insinuant sans gène dans son esprit pour tenter de lui dérober ses secrets les plus honteux1. Même si ces introspections malpolies permettent au lecteur d’en apprendre un peu plus sur le passé de Raine, et notamment le fait qu’elle a repris le nom de sa mère (la Raine-Mère donc), Lord-General Militant de carrière, et choisi d’enterrer celui de son père, sommairement exécuté pour couardise, elles coûtent cher au psyker indélicat, qui se prend une mandale mentale dans les gencives pour sa peine. Victoire morale de l’Imperium.

Pendant ce temps, les intrépides sauveteurs en terre et Antari réussissent à franchir les cordons de sentinelles (pas si) Clairvoyantes (que ça) grâce à leur badasserie naturelle, et à pénétrer dans le bastion ennemi grâce au traqueur GPS de Zane, qui voit clair à travers les illusions tissées par les sorciers ennemis et emmène ses camarades dans la gueule du loup sous couvert d’un tour de passe-passe de son propre cru. Juste à temps pour empêcher l’énucléation et égorgement sauvage de Purple Raine (interrogatoire musclé oblige) par 9/9, qui apprécie moyennement l’intervention non scriptée des bidasses en folie, et se met à leur tailler des croupières psychiques pour la peine. Malheureusement pour Arcadius, Zane détient un MBA de Stanford en occultisme, alors que lui a à grand peine bouclé sa première année de BTS au Lycée Professionnel Ohrmuzd Ahriman de Vaulx-en-Velin, et la confrontation qui s’en suit est à sens unique. Bien que jurant son grand dieu que tout ça faisait partie de son plan, Arcadius a donc l’obligeance de décéder de mort violente quelques secondes plus tard, après que sa prisonnière lui ait mis un peu de plomb dans la cervelle.

Dès lors, il ne s’agit plus pour nos hardis Antaris (Anthardis donc) que d’évacuer les lieux avant que le Haut Commandement ne déclenche le bombardement orbital de la Gueule, ce qui n’est bien sûr qu’une formalité pour ces soldats d’élite. Voilà comment transformer une honteuse défaite en glorieuse victoire, et arracher l’initiative aux hordes damnées contestant la mainmise de Pépé sur la belle planète de Gholl. Comme on dit chez les Ogryns : Go Gholl !

1 : Comme le nom du Primarque sur lequel elle a écrit des fan fictions torrides pendant ses années à la Schola Progenium. On a tous été jeunes !

AVIS :

Nouvelle conséquente dédiée à la nouvelle égérie de la BL, catégorie Commissaire, A Company of Shadows permet à Rachel Harrison de donner du relief à son imposante galerie de personnages, ainsi que de situer le cadre dans lequel ils évoluent. Tout cela est fait de manière fort capable, et dénote d’une belle ambition en terme de construction d’intrigue , mais le grand nombre de points communs avec la saga Gaunt’s Ghosts (une Commissaire héroïque avec un lourd secret de famille et ses relations tantôt amicales – Fel = Corbec – tantôt à couteaux tirés – Wyck = Rawne – avec les officiers de son régiment, qui sont des super soldats venant d’un monde recouvert de forêts, et engagée dans une vaste campagne contre une faction chaotique…) ne risque-t-il pas d’être rédhibitoire à la dernière née de la Black Library ? Même s’il est plus que probable qu’Abnett approche de la toute fin de sa propre série, à supposer qu’il démarre un nouveau cycle après celui de La Victoire, et laissera donc le champ libre à d’autres auteurs dans un futur plus ou moins proche, il est loin d’être évident que les lecteurs de la BL adhèrent en masse à ce qui sera toujours perçu, plus ou moins consciemment, comme la resucée de la saga phare 40K. Le succès du premier roman de cette nouvelle série en puissance, Honourbound, sera sans doute déterminant pour le futur de Raine et de ses Antari, comme First and Only l’a été, en son temps, pour Gaunt et ses Tanith.

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The Armour of Fate – G. Haley [40K] :

INTRIGUE :

The Armour of FateSorti de ses dix mille ans de stase par les bons soins d’Yvraine lors de la 13ème Croisade Noire, Roboute Guilliman, Primarque des Ultramarines et nouvelle person in charge d’un Imperium passablement délabré, consacre ses formidables talents à une tâche d’une technicité insondable : aller prendre une douche. Harnaché comme il l’est dans l’Armure du Destin depuis son miraculeux reboot, Roboute supporte en effet de moins en moins les contraintes de cette carapace providentielle, mais qui malgré tous ses avantages, reste un exosquelette bruyant, encombrant et peu précis. Parfait pour mener ses Bleus sur le champ de bataille et en ressortir indemne, certes, mais inadapté pour réaliser des choses aussi banales que tenir un stylo ou ramasser une fiche bristol (deux des activités favorites de M. Codex Astartes, on s’en rappelle). Et ne parlons pas de l’humiliation de devoir se nourrir à la paille, et du supplice de ne pas pouvoir se gratter le bas du dos. Aussi, bien qu’Yvraine lui ait formellement interdit de se dessaper sous peine de mort après son réveil millénaire, Roro est bien décidé à tenter The Full Monty, ne serait-ce que pour voir la tête de cette andouille de Sicarius, revenu de ses périples dans le Warp avec autant de second degré qu’un thermomètre en panne, et qui lui sert de nounou depuis plusieurs semaines.

S’étant documenté autant que possible sur les armures énergétiques à travers les âges et complété une thèse de recherche appliquée sur ce sujet auprès de l’académie de Thalassar pendant qu’il y était, Guilliman se sent prêt pour tenter l’opération ‘Dépiautage du Homard’ (le nom de code qu’il lui a donné1), mais tient avant ça à obtenir une confirmation qu’il ne va pas faire une grosse couennerie auprès de l’entité la plus savante de l’Imperium – après lui, bien sûr – ChatGPT l’Inferior Cawl, que le véritable Cawl lui a laissé sur le Macragge’s Honour pour répondre à toutes ses questions pressantes et/ou stupides sur le 41ème millénaire. Après avoir réveillé la capricieuse machine, le Primarque s’entretient brièvement avec le chatbot le plus blasé de la galaxie, qui refuse posément de répondre à sa question en plaidant l’incompétence. Il y a des jours comme ça où la technologie décide de faire des siennes. Un rage quit plus tard, Guilliman passe au plan B (car évidemment, il en avait un) : faire appel à un ami. On verra si cela lui portera davantage chance que le 50/50.

Nous partons alors sur Westeros une planète dont la principale caractéristique est d’abriter une falaise de glace, où le Grand Schtroumpf a le souvenir d’un petit bar peinard, accessible seulement après avoir creusé une galerie de dix mètres à un endroit bien précis, et connu de lui seul. Laissant l’impayable Sicarius et son escouade de Vitrixificateurs faire le pied de grue à l’entrée, Guilliman pénètre seul dans la caverne dégagée par ses hommes, et arrive dans une ville eldar complètement désertée. L’attend toutefois sur place une projection d’Eldrad Ulthuan, plus insupportable que jamais2, mais disposé à répondre à la question qui tourmente tant le Primarque convalescent.. mais eldar style, c’est-à-dire de la façon la moins tranchée et honnête possible. Si notre sagace héros semble se satisfaire de la réponse de normand que lui donne son interlocuteur avant que la communication soit coupée, nous pauvres lecteurs apprenons au moins que l’Armure du Destin permet entre autres choses au vague à l’âme que la blessure infligée par Fulgrim a provoqué chez son frère de ne pas s’étendre, ce qui pourrait avoir des conséquences potentiellement fatales pour Ultraman à long terme.

Mais comme le disait un certain économiste quelques millénaires plus tôt, « à long terme, on sera tous morts ». Définitivement tenté par l’idée de se faire tatouer « I love my Pépé » sur la fesse gauche, Roboute Guilliman convoque la fine fleur de l’Apothicarion et de l’Adeptus Mechanicus du Macragge’s Honour à son retour sur le vaisseau, et leur ordonne de procéder au strip tease le plus lourd de conséquences de l’histoire de l’humanité…

1 : On se rappellera que les homards sont bleus lorsqu’ils sont en pleine forme.
2 : Genre tu fais un effort pour t’exprimer dans sa langue, que tu es l’un des seuls êtres humains à maîtriser, et lui te balance ça. Tu sais où tu peux te les carrer, tes runes ?

AVIS :

Guy Haley est un des auteurs de la Black Library les plus doués pour rendre sympathiques et accessibles les personnages glorifiés par le background officiel, et c’est ici Roboute Guilliman qui bénéficie de ses bonnes œuvres (par contre, le pauvre Cato Sicarius ne sort pas vraiment grandi de cette nouvelle). Bien que la tension dramatique de ‘The Armour of Fate’ soit assez inexistante, en raison de l’autre armure, en scenarium celle-ci, portée par le Primarque sur le retour, on lit avec intérêt cette petite digression « vestimentaire », qui montre que même les individus les plus puissants et intelligents qui soient ne sont pas au-dessus de considérations bassement prosaïques, ou de comportements semblables à celui du premier quidam venu. Ça change agréablement des nouvelles d’action effrénée qui constituent le régime de base du lecteur de littérature 40K, et ce ne sera certainement pas moi qui m’en plaindrait.

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The Learning – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE :

The LearningNous suivons l’apprentissage difficile d’Ubraich, un jeune Idoneth ayant gagné à la loterie des profondeurs et étant né avec une âme (et des yeux), et placé par sa mère en internat au temple isharann le plus proche après que son potentiel de mage ait été découvert. Ayant tapé dans l’œil d’un Embailleur (ce qui est délicieusement ironique) du nom de Giléan aux Six Yeux pendant ses études, Ubraich se fait rituellement taillader le visage par son futur tuteur pendant la journée porte ouverte organisée par Giléan dans la piaule de son futur apprenti. Car chez les Idoneth, on ne choisit pas de faire des études, ce sont les études qui débarquent chez vous par effraction et animées de mauvaises intentions. Peine de mort pour les redoublants, je suis sûr. Le vieux maître est une peau de vache de mer, mais parvient tout de même à former son apprenti de manière convenable avant qu’un tragique accident de domptage de deepmare rétive (comme toutes les deepmares) ne vienne mettre un terme sanglant et définitif à sa carrière. Son sacrifice permettra toutefois à Ubraich de terminer de mater l’acariâtre bestiole, pour le compte de la tout aussi acariâtre Dame Sithilien, qui désirait une monture digne de ce nom pour frimer parmi la jet set des profondeurs.

20 ans plus tard, nous retrouvons Ubraich, devenu maître Embailleur à son tour et formant trois apprentis (Irimé, Flowain et Valhanir) alors qu’il se masse une cuisse douloureuse dans le confort de sa moule de compagnie. Il s’agit d’une des séquelles que notre héros a hérité lors de sa confrontation avec la deepmare de Sithilien, et qui n’a jamais guéri (fun fact : les Idoneth cicatrisent très mal). Alors qu’il regarde du coin de l’œil ses pupilles (ça aussi, c’est pas mal comme calembour) tabasser un pauvre allopex avec les matraques électriques qui sont l’outil principal des Embailleurs, il est surpris par l’arrivée de sa vieille amie with benefits (fun fact : les Idoneth sont libertins), qui lui apporte des nouvelles intéressantes du vaste monde. Une deepmare d’une taille prodigieuse aurait été aperçue près de l’enclave de Dwy-Hor, et comme Ubraich s’est donné pour but de devenir la référence absolue de la profession, il ne peut pas passer à côté de cette occasion de surpasser son maître en capturant ce léviathan. Dwy-Hor n’étant pas la porte d’à côté, une telle expédition ne pourra se faire sans l’appui d’un patron influent, et Sithilien accepte noblement de prêter sa petite armée de Namasti à son concessionnaire favori. Tout ce beau monde se met en route, et au bout d’un voyage éprouvant, parvient à l’endroit où la bête fabuleuse a été repérée.

Grâce aux pouvoirs mystiques des Embailleurs, qui peuvent pister une âme à partir de la morsure laissée dans un bout de bidoche (c’est fort), les chasseurs ne mettent guère de temps à localiser l’antre de la deepmare, qui se révèle être en effet d’un fort beau gabarit (trois fois la taille de la monture de Sithilien). L’opération de capture commence, et comme prévu, un grand nombre de Namasti connaît une mort horrible en détournant l’attention de la bête pour le compte de leurs patrons. Confiant dans sa maîtrise du bâton de berger, Ubraich nage en douce jusqu’à la tête du monstre et lui assène un coup bien placé qui lui réduit un œil en bouillie (ce qui fait partie du protocole classique de domptage chez les Idoneth, je vous rassure). Encore un, et l’affaire sera dans le sac…

Début spoiler…Sauf que la deepmare en question dispose d’un système nerveux particulier, qui la rend insensible à la vague de douleur indicible qui incapacite en temps normal les êtres vivants frappés par une crosse d’Embailleur. Elle est seulement très mécontente d’avoir été éborgnée par l’Aelf en calbute qui essaie maintenant de s’éloigner frénétiquement en brasse coulée, et on peut la comprendre. Ubraich essaie bien d’appeler à l’aide son apprentie la plus proche pour qu’elle utilise ses pouvoirs pour empapaouter la bestiole vengeresse le temps qu’il se mette à l’abri, mais cette fourbe d’Irimé, aussi avide de gloire qu’Ubraich l’était à son âge, ignore malencontreusement les instructions de son maître et ce dernier se fait promptement déchiqueter par la deepmare. Moralité de l’histoire : le dialogue intergénérationnel est vraiment rompu chez les Idoneth…Fin spoiler

AVIS :

Je ne sais pas pour vous, mais de toutes les factions développées par Games Workshop à ce jour, j’ai trouvé les Idoneth Deepkin les plus complexes à comprendre (mes avocats me disent que je dois préciser ici que je n’ai pas lu le Battle Tome de cette armée). Outre le fait que leur existence sous-marine me fait poser un tas de question pratico-pratique qui sont rarement évoquées dans la GW-Fiction, le lexique qu’il faut maitriser pour ne rien rater de leurs pérégrinations aquatiques est particulièrement riche. Certes, il est souvent possible de laisser sa curiosité insatisfaite devant un mot incongru écrit en italiques (on peut vivre sans savoir comme les Idoneth appellent leurs pinces à bigorneau), mais il est au contraire parfois essentiel de faire de la recherche appliquée pour ne pas passer à côté d’un élément important de la résolution d’une intrigue.

Je me suis fendu de ce paragraphe de contexte pour pouvoir décerner à ‘The Learning’ la palme (de plongée) de la nouvelle Idoneth Deepkin la plus accessible – ce qui est bien – et la plus didactique – ce qui est mieux – du catalogue de la BL à ce jour. Avec un titre et un sujet pareils, vous me direz que c’est assez logique, et vous aurez raison, mais les contributeurs de la Black Library ne sont pas tous égaux au moment de prendre la plume, et je suis sûr que d’autres que David Guymer auraient sombré dans les abysses sombres et glacées du « cf le Battle Tome » s’ils avaient écrit cette histoire. Rien de tout ça ici, la culture si particulière de cette faction étant présentée avec le bon niveau d’immersion (lol) et de pédagogie, ce qui permet d’en apprendre beaucoup sur les Aelfs des mers en l’espace de quelques pages. C’est là la première qualité de ‘The Learning’, mais l’histoire en elle-même est loin d’être mauvaise (on a le droit à un twist final bien senti, c’est déjà ça), même si son intrigue est d’une simplicité consommée. Bref, j’en recommande la lecture à tous ceux qui veulent découvrir les ID dans les meilleures conditions.

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Lightning Run – P. McLean [40K] :

INTRIGUE :

Lightning RoadSur la planète d’Elijan III, les forces du glorieux Empereur de l’Humanité sont en train de se faire mettre minable par le culte chaotique local, menaçant de priver l’Imperium des précieuses ressources de prométheum de cette colonie. Affectée au transport d’un général de la Flotte, la pilote Salvatoria Grant patiente dans le cockpit de sa bien-aimée Valkyrieen attendant l’arrivée du colis, et tue le temps en murmurant à l’oreille du tableau de bord de son oiseau de fer, s’attirant des remarques acerbes de son co-pilote, le fumiste et fumeur Herrion. Avant que Grant n’ait eu le loisir de mettre sa menace de flinguer l’irrespectueux à bout portant (grosse ambiance), le général Gobrecht arrive avec son escorte, et enjoint son chauffeur Uber de l’amener à la base Patroclus en moins de huit heures, ce qui ferait la différence entre la victoire et la défaite pour cette campagne. Si un raccourci est techniquement faisable pour tenir ces délais serrés, ce dernier force toutefois la Valkyrie à chevaucher au dessus du territoire ennemi, ce qui, je vous le donne en mille, ne se termine pas super bien pour le fringant appareil. Heureusement pour nous d’ailleurs, sinon la nouvelle aurait fait cinq pages. Bref, le coucou se prend un missile en pleine queue, Sal’ fait du sale, et crashe son appareil dans un bout de forêt bien loin derrière la ligne de front, avant de sombrer dans l’inconscience avec la satisfaction du devoir presque bien accompli1.

À son réveil, elle a tôt fait de réaliser qu’elle est la seule survivante de son atterrissage sauvage, le général Gobrecht s’accrochant à son ultime point de vie juste assez longtemps pour lui remettre un anneau de pouvoir qu’elle devra aller jeter au cœur de la Montagne du Destin, et… euh, pardon, erreur d’univers. L’anneau que le gradé blessé à mort lui remet est un décodeur de niveau vermillon, dont le haut commandement de la base Patroclus aura besoin pour décrypter les plans de bataille de l’ennemi, envoyés par mail sécurisé quelques heures plus tôt. À cela s’ajoute un mot de passe en haut gothique, parce que ça fait classe, qui permettra à la coursière commise d’office d’accéder jusqu’à la base en question sans se faire abattre en cours de route. Ceci fait, il ne reste plus qu’à notre héroïne qu’à troquer sa licence de Kaptain pour celle de Deliveroo, ce qui ne fait pas grande différence, il faut bien le reconnaître. Un rapide coup d’œil sur le temps qui lui reste et sa position sur la carte l’amène toutefois à une conclusion logique : il lui faudra piquer un avion aux hérétiques pour tenir les délais. Coup de chance, une base aérienne chaotique ne se trouve qu’à quelques kilomètres du lieu du crash, permettant à la débrouillarde Grant de hijacker un Lightning laissé à l’abandon sur le tarmac. Quelques tirs de pistolet laser plus tard, et grâce à la magie de la standardisation de la technologie impériale, notre pilote est donc de retour dans les nuages, dans un cockpit détrempé de sang certes, mais nécessité fait loi.

Ce n’est cependant pas la fin des problèmes pour Grant, qui doit maintenant trouver un moyen de se poser sans se faire dégommer par un tir ami, l’aspect proto-punk de son avion incitant les forces impériales de tirer à vue. Ces petits rigolos de cultistes ayant piraté la radio de bord, elle a ainsi toutes les difficultés du monde à se faire comprendre de la part de la tour de contrôle locale, et ne réussit à négocier une autorisation d’atterrir qu’après avoir été forcée d’abattre quelques missiles et détruire quelques Hydres en dessinant l’aquila dans le ciel. Ce léger malentendu, ayant toutefois fait 29 morts du côté loyaliste et réduit l’épaule de notre héroïne en steak haché, dissipé, Grant peut enfin remettre sa précieuse bagouze à la colonel Shrake (baptisée en hommage à l’Ogryn philosophe, avec lequel elle partage une certaine ressemblance physique), et recevoir quelques soins. S’attendant à finir devant le peloton d’exécution à cause du carnage – certes involontaire – qu’elle a provoqué sur la base à son arrivée, elle est cependant la première surprise de se retrouver catapultée héroïne de l’Impérium pour son action décisive dans la campagne d’Elijan III, prestement remportée par le camp des gentils une fois leur décodeur installé.

Ce n’est cependant pas tout à fait la fin pour Grant, dont l’élévation au statut d’outil de propagande ne fait pas grand-chose pour combattre la profonde dépression dans laquelle ses actes désespérés l’ont fait sombrer. Devenue alcoolique, et utilisée sans vergogne par le haut commandement comme motivation speaker, ou quelque chose comme ça, à destination des bidasses des Flotte et Garde impériaux, Grant réalise amèrement qu’il n’est décidément pas facile de faire son devoir pour l’Impérium, que l’on soit simple pilote ou tête de gondole. Espérons qu’elle puisse bénéficier des sages conseils de Ciaphas Cain sur le sujet avant de commettre l’irréparable…

1 : Il y a une leçon à tirer de cet accident. Si tu es un personnage de McLean et que l’on te propose de faire un tour de Valkyrie, run (‘No Hero’).

AVIS :

McLean livre avec Lightning Run une nouvelle d’action pure, qui n’aurait pas dépareillée au sommaire de l’anthologie Wings of Blood, se terminant avec un twist final d’un genre un peu particulier et faisant à mes yeux tout l’intérêt d’une soumission autrement très classique (mais efficacement mise en scène et déroulée quoi qu’il en soit). En effet, en suivant Grant pendant les quelques semaines venant après son sauvetage de la campagne d’Elijan III, l’auteur montre à quel point le statut d’héros de l’Imperium peut être dur à porter malgré les apparences, et comment l’appareil de propagande impérial a tôt fait de mettre à profit les individus méritants, sans grande considération pour leur bien-être ou leur santé mentale. Cet aspect de l’effort de guerre, peu abordé jusqu’ici dans la GW-Fiction, permet de conclure la nouvelle sur une touche un peu plus originale, même si bien sombre1, que ce que le déroulement des événements ne nous le laissait pressentir. La marque d’un auteur qui ne se contente pas de servir la soupe, mais cherche à faire sortir ses écrits du lot, ce qui n’est jamais un mal dès lors que les idées sont intéressantes et l’exécution convenable.

1 : Et encore, je pense que McLean aurait pu faire bien pire dans ce registre. Après tout, Grant finit l’histoire vivante, non ?

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Prologue to Nikaea – D. Annandale [HH] :

INTRIGUE :

Prologue to NikaeaEnfermé dans sa chambre comme un ado rebelle, Malcador s’adonne à une de ses activités favorites : fouiller le Warp à la recherche de potins croustillants. Malgré les prodigieux pouvoirs psychiques dont dispose le Sigilite, et le fauteuil ergonomique premier cri que lui a offert son boss pour ménager ses lombaires et sa santé mentale (la qualité de vie au travail, c’est important), la tâche n’est pas sans danger pour Malcador1, qui finit cependant par ferrer un nom après avoir mis son bras dans l’œil d’une tempête Warp particulièrement vindicative : Thawra. Il semble que quelque chose de vilain soit en train de se passer sur cette planète impériale, et il est du devoir du Ma(l)c’ d’aller enquêter sur place.

Quelques temps plus tard, le noble vieillard fait son arrivée en orbite autour de la planète en question, escorté par une compagnie de Custodes menée par le Capitaine Bouclier Collatinus. Il semble bien que Thawra a connu des avanies récentes, comme les débris de sa flotte marchande et le remplacement soudain de la Gouverneur Vasra par sa conseillère Arkanasia en attestent. Rendus à la surface, les enquêteurs impériaux se font briefer par leur hôte : une faction de Psykers séditieux a lancé une attaque surprise sur le gouvernement planétaire, causant un beau bordel (et la mort de Vasra) avant que la contre attaque loyaliste ne les force à battre en retraite. Arkanasia attribue une bonne partie de cette remontada à l’emploi d’une force de Psykers fidèles à l’Empereur, qu’elle a personnellement entraîné pour combattre les félons. Etant elle-même une Psyker, elle est convaincue de tenir là une arme décisive pour la suite de la Grande Croisade, et meurt d’envie d’aller pitcher son idée sur Terra pour la prochaine saison de La Galaxie A Un Incroyable Talent. Malcador, en vieux reac’ qu’il est, nourrit de profonds doutes sur cette idée, qu’il garde cependant pour lui. Il faut avant toute chose s’assurer que l’insurrection de Thawra est définitivement matée, ce qui n’est pas encore chose faite. En effet, les derniers rebelles se sont retranchés dans des cavernes au Sud de la capitale, et on est sans nouvelles des forces envoyées par Arkanasia, dont sa brigade de X-Men, pour leur faire rendre gorge.

Lorsque Malcador, Arkanasia, Collatinus et ses Custodes arrivent sur le théâtre d’opérations, ils sont accueillis par une tempête psychique petite par la taille mais vicieuse de tempérament2. Sa cause ne fait pas de doutes pour un expert aussi calé en warperie que le Sigilite : l’affrontement entre Psykers indisciplinés a dégénéré en un mindfuck littéral (merci Slaanesh), et il est urgent d’agir pour refermer la brèche avec l’Immaterium avant que la tempête n’engouffre tout Thawra. Fort heureusement, Malcador est venu avec les outils appropriés pour cette tâche : sa mauvaise humeur légendaire et sa capacité à faire plusieurs choses en même temps (indispensable lorsqu’on doit gérer une bande de Primarques mal élevés), ici balancer des décharges de taser aux Psykers survivants tout en évitant de laisser traîner sa toge dans la boue warpienne. Et pour ceux qui se demandent, non, les Custodes ne servent pas à grand-chose, à part balancer des rafales de bolter au jugé au niveau des genoux avec un angle de tir de 45°C. Pour des raisons inexplicables, Arkanasia décide soudainement de partir en courant vers la tempête avant que le Régent n’ait fini de réger le problème. Les derniers Psykers en état décident alors de converger sur elle, ce qui aurait pu très mal se finir pour Malcador n’eut été la foi chevillée au corps d’Arkanasia pour l’Empereur. Au lieu de vaporiser le petit vieux pénible qui tchipait sans merci ses condisciples, la Gouverneur par intérim choisit noblement de gueuler un grand « POUR PEPE !!! » en direction du ciel, avant de se prendre une rafale de bolts dans le buffet (qui n’arrivent même pas à la tuer sur le coup, c’est dire si les Custodes sont surfaits).

Tout est bien qui finit quand même pour Malcador et Collatinus, qui, en gentlemen qu’ils sont, viennent assister aux dernières paroles d’Arkanasia. Cette aventure provoque un certain malaise chez le Sigilite, qui n’a dû son salut qu’à la foi de la Psyker, c’est-à-dire au concept que lui et son boss se sont jurés d’éradiquer. Se pose également la question du positionnement de l’Imperium envers les pouvoirs psychiques : sont-ils trop dangereux pour être utilisés, ou bien un juste milieu est-il atteignable ? Rendez-vous sur Nikaea dans quelques années pour reprendre cette discussion…

1 : On en déduit qu’en M30, il n’existe plus de bouton « j’ai de la chance » sur la barre de recherche Google. Cela aurait été plus confortable pour tout le monde.
2 : Il semble à Malcador que la tempête sait qu’il se trouve sur Thawra, et qu’elle cherche à l’humilier, comme les inscriptions insultantes sur sa mère qui apparaissent à la surface du maelstrom semblent l’indiquer.

AVIS :

David Annandale attire l’attention du lecteur sur une question intéressante de l’Imperium naissant : la formation et le contrôle des Psykers par les autorités impériales (in)compétentes. À l’époque, l’Empereur avait d’autres chats à fouetter que de mettre des œillères aux cohortes de mutants acheminés par les Vaisseaux Noirs jusqu’à Terra, tâche peu gratifiante mais indispensable à la survie de son empire galactique. Pendant la Grande Croisade, il y a fort à parier que le sujet était traité au cas par cas, avec des risques de débordement, parfois causé par un enthousiasme sincère mais dangereux, comme cela a été le cas sur Thawra. Si une des missions de Malcador consistait bien à gérer les crises de ce genre pendant que son patron localisait sa marmaille, on comprend mieux pourquoi il tenait temps à renforcer son équipe : à son âge, arpenter la galaxie pour mettre des glaçons psychiques dans le slip du moindre Psyker en rut n’est pas une activité conseillée.

Sur cette base intéressante, Annandale ne développe cependant pas grand-chose, à commencer par des connexions avec Nikaea, ce que le titre laissait pourtant envisager. Il aurait été approprié, à mon sens, de jouer des rapports compliqués que le Warp entretient avec notre continuum spatio-temporel pour faire voir à Malcador des indices du procès en sorcellerie intenté à Magnus et aux Librarius des Légions de l’Astartes, voire de la déchéance de l’humanité telle qu’annoncée par l’Hérésie d’Horus. Rien de tout ceci ici, seulement une nouvelle très « premier degré », saupoudrée d’une pincée de fluff et terminée par quelques remarques d’ordre général sur le rapport qualité-prix de l’Immaterium. Il y avait moyen de mieux faire, mais on sauvera ‘Prologue to Nikaea’ du pilori compte tenu de son absence de défauts majeurs, ce qui place cette œuvre hérétique parmi les plus abouties de son auteur.

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Voilà qui termine cette revue du Summer of Reading 2018, une remarquable fournée de nouvelles à mon avis, aussi bien en ce qui concerne la qualité littéraire des soumissions (ce qui est bien) que des ajouts fluffiques que ces dernières apportent aux univers de la GW-Fiction (ce qui est assez rare). Bien qu’il soit relativement coûteux de se procurer cette mini anthologie à l’heure actuelle (pas de regroupement dans un recueil proposé à prix avantageux par la BL), elle contient des nouvelles qui méritent vraiment le détour si vous êtes un amateur de ce type de littérature. Rendez-vous ici même et sous peu pour continuer cette œuvre de (re)découverte des listes de lecture estivales de la Black Library.

LUPERCAL’S WAR [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette chronique de ‘Lupercal’s War’, le premier recueil de nouvelles introductif pour la franchise Hérésie d’Horus publié par la Black Library. Ce n’était sans doute qu’une question de temps avant que Nottingham franchisse le Rubicon litteris et adapte à son troisième univers majeur un format qui a déjà été testé et re-testé pour 40K (‘Crusade & Other Stories’, ‘Nexus & Other Stories1) et Age of Sigmar (‘Hammerhal & Other Stories’, ‘Sacrosanct & Other Stories2), voire les deux (‘The Hammer & the Eagle3), avec des résultats assez probants je dois dire. Cependant, l’Hérésie ne se prête sans doute pas un décalquage bête et méchant (comme l’Empereur, quoi) du concept, du fait de ses particularités.

Lupercal's War

Contrairement à 40K et AoS, le 30ème millénaire suit un narratif précis (même si très fouillé et foisonnant), qui oblige le lecteur à ingurgiter des pages et des pages de fluff pour chacun des personnages et factions majeurs de la franchise pour pouvoir comprendre ce dont il en retourne lors des derniers événements de la série. Parvenir à donner à un lecteur non-familier à cet univers les bases historiques, culturelles et idéologiques pour chacune des 18 Legiones Astartes + Pépé (l’approche choisie par la Black Library), par le biais d’une (deux pour les chanceuses) seule nouvelle, est loin d’être facile.  Format introductif – et prix très réduit – oblige, les éditeurs de cet imposant volume se sont également astreints de n’utiliser que des travaux déjà publiés pour remplir leur sommaire, ce qui rajoute une nouvelle contrainte. Le défi que ce ‘Lupercal’s War’ doit relever est donc beaucoup plus important que celui de ses prédécesseurs, à mon humble avis.

Comme pour tous les recueils de cette gamme, j’élargirai donc mon approche critique à une nouvelle dimension : le caractère approprié de la.es nouvelle.s choisie.s par les pontes de la BL pour présenter chacune des factions abordées ici4. Le cas échéant, je ne me priverai pas pour mettre en avant l’histoire qui me semblait faire mieux l’affaire, à mon petit niveau. Le cadre étant posé, il est temps de passer à l’autopsie de cet ambitieux pavé (le petit nom donné par Valdor à Horus avant que tout parte en cacahouète). Start here ⬇️, comme ils disent.

1 : Chroniqués ici et , si ça vous intéresse.
2 : Ici et .
3 : Ici.
4 : J’en profite pour me plaindre de l’absence dans ‘Lupercal’s War’ de protagonistes majeurs, qui auraient pourtant mérité un tel traitement : l’Adeptus Custodes, les Sœurs du Silence,  l’Adeptus Mechanicus, les Légions Titaniques, l’Armée Impériale et les Chevaliers Errants.

Lupercal's War

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L’Empereur – The Last Church (G. McNeill) :

INTRIGUE:

The Last ChurchIl n’est pas loin de minuit dans l’Église de la Pierre Foudroyée, comme le constate le Père Uriah Olathaire en allumant les cierges du saint lieu. Un seul coup d’œil au coucou suisse cassé qu’il a volé à son propriétaire légitime lors de sa folle jeunesse suffit à notre héros pour se rendre compte que l’heure est grave, très précisément minuit moins deux sur l’horloge de l’apocalypse. Lorsqu’elle se mettra à sonner, l’a prévenu l’horloger auquel il a dérobé l’artefact, cela chauffera dans les chaumières. En attendant, Olathaire se prépare à célébrer la messe de minuit dans une profonde solitude, aucune de ses ouailles n’ayant jugé bon de braver la tempête sévissant cette nuit là pour monter au sommet du Ben Nevis1 assister au sermon de notre ecclésiastique. Plus que sur les conditions climatiques ou le dénivelé, il faut mettre cette désertion sur le compte des commandements laïques édictés par ce soi-disant Empereur, ayant conquis presque tout Terra pour y imposer son joug athée. Résolu à accomplir tout de même son office, Uriah est interrompu par l’arrivée d’un visiteur, se présentant sous le nom de Révélation, et venu avec quelques amis patientant tranquillement sur le parvis, discuter avec le prêtre de la dernière église terrane avant que cette dernière ne soit réduite en cendres. Du tourisme de l’apocalypse en quelque sorte…

Début spoiler 1…Ravi d’avoir un peu de compagnie, Uriah engage la discussion avec l’intrigant voyageur, qui ne met pas longtemps à exprimer ses vues résolument séculières et rationnelles à son hôte. S’engage alors une joute enfiévrée voyant les deux hommes échanger leurs arguments sur les mérites et les dangers de la foi. Guère convaincu par l’exhibition de la pierre sacrée dont l’église tient son nom, Révélation se montre cependant disposé, après un petit whiskey, à écouter Uriah lui raconter le soi-disant miracle dont il a été témoin lors de sa jeunesse, et qui l’a poussé à endosser le surplis. Notre prêtre était de son propre aveu une canaille en son jeune temps, et s’était piqué de voyager à la recherche de contrées pas encore assujetties au règne de l’Empereur, qui avait à cette époque déjà conquis la majeure partie de l’Europe. N’ayant réussi à rien d’autre qu’à se faire jeter d’une falaise italienne par un Guerrier Tonnerre dont il avait traité la maman de gorille, l’infernal Écossais était revenu chez lui pour un temps, avant de repartir pour se faire soldat dans toute armée de résistance à la tyrannie impériale qui voudrait bien le prendre. Et, comme de juste, il avait trouvé avec qui parler en se rendant en France (Franc dans le texte), un Etat connu dans le monde entier pour la belligérance de ses habitants. C’est ainsi qu’il s’était retrouvé mêlé à un soulèvement local, vite écrasé dans le sang par la patrouille de Guerriers Tonnerre de la région. Seul survivant du massacre, Uriah avait repris connaissance dans une forêt et vu une figure lumineuse s’approcher de lui pour tenir à peu près ce langage : « Yo dog, we cool now ? ». Transporté par cette expérience extraordinaire, il avait abandonné sa vie de marginal pour obéir au commandement divin qu’il était certain d’avoir reçu dans cette clairière abandonnée.

Cette émouvante anecdote ne convainc cependant pas Révélation de baisser sa garde, et il continue à critiquer les ravages de la religion2 à travers l’histoire avec tant de hargne que le bon prêtre finit par lui montrer la porte. Comprenant qu’il a épuisé la patience de son hôte, le visiteur laisse alors tomber le masque et se révèle être…

Début spoiler 2…L’Empereur en personne. Sous sa forme néon de cabine d’UV, qui plus est. Il ne faut pas longtemps à Uriah pour réaliser que c’est lui qu’il a vu dans la forêt il y a toutes ces années, et qu’une mauvaise interprétation a conditionné toute sa vie jusqu’à ce moment. C’est la lose. Un peu hébété par cette…épiphanie, le prêtre accepte de suivre Pépé à l’extérieur de l’église, et d’enfin souscrire à sa vision du monde… jusqu’à ce que l’Empereur lui révèle son grand projet de conquête de la galaxie, à laquelle Uriah ne croit pas du tout. Et lorsque le puissant monarque répond à la question « pourquoi ? » par un pauvre « parske-euh », le charme est définitivement rompu. Uriah préfère donc retourner dans son église, incendiée par les Guerriers Tonnerre amenés en renfort par leur boss, plutôt que de donner la satisfaction d’une victoire morale à son contradicteur. Ainsi brûle la dernière église de Terra, au son prophétique du coucou de l’apocalypse…Fin spoiler

1 : Pure supposition de ma part, mais McNeill, qui s’est donné pour mission de vendre son Écosse natale dans l’univers de 40K, donne quelques indices supportant cette thèse.
2 : On apprend à cette occasion qu’au 30ème millénaire, les gens se souviennent encore de Béziers. C’est tout de même la classe.

AVIS:

Je ne sais pas si la GW-Fiction sera un jour considérée comme autre chose que de la littérature de gare (ou de spatioport, pour rester dans l’ambiance), mais je peux déjà m’avancer en plaçant ‘The Last Church’ parmi les « classiques » de ce sous-sous-sous-sous-genre. Car McNeill réussit ici à livrer un texte aussi surprenant qu’intéressant et profond (toute proportion gardée, bien entendu), et justifie ainsi son positionnement parmi les meilleurs contributeurs de la Black Library… quand il s’en donne les moyens1.

Cette nouvelle est surprenante, car elle est (presque) totalement non-violente, et place le lecteur dans une situation des plus inhabituelles pour la littérature millénariste de Games Workshop : foin d’héroïques Space Marines, de courageux soldats impériaux, d’inflexibles Inquisiteurs, ou de civils apeurés2 ici, seulement un vieux prêtre et son visiteur inattendu, dialoguant des mystères de la foi et des conséquences, aussi positives que négatives, que cette dernière a eu pour l’humanité depuis l’aube des temps. Si les arguments convoqués par les débatteurs ne sont pas à placer au pinacle de la réflexion philosophique ni au sommet de l’art oratoire, il faut tout de même reconnaître que McNeill réussit à faire passer cet échange de façon distrayante et parfois instructive pour le lecteur, ce qui n’était pas couru d’avance pour un auteur spécialisé dans l’art délicat du grimdark d’action. Autre surprise et prise de risque, à mes yeux concluante, de Graham McNeill, son utilisation du personnage le plus central et intouchable de l’univers de 40K, Pépé 1er. La véritable identité de Révélation sera comprise par le lecteur plus ou moins tôt dans la nouvelle, en fonction de sa connaissance du fluff et de son attention aux petits indices égrenés par McNeill, mais la véritable surprise demeure ce choix de mettre l’Empereur à hauteur d’homme le temps d’une nouvelle, et de le laisser s’exprimer assez longuement au cours de cette dernière, alors que la norme avait jusqu’ici été de cantonner MoM à l’élément de décor3, balançant de temps à autres une phrase d’une infinie sagesse pour le bénéfice du fanboy transi. Ici, ce dernier en aura vraiment pour son argent, et The Last Church constitue encore à ce jour l’un des textes où Big E est le plus disert, ce qui en fait un passage quasi obligé pour tout citoyen impérial qui se respecte.

Cette nouvelle est également intéressante, car elle couvre de nombreux aspects des Luttes d’Unification, sorte de préhistoire impériale pendant laquelle de nombreux événements ont été mis en branle qui trouveront leur conclusion dans les siècles et millénaires suivants. Qu’il s’agisse de détails géographiques, historiques ou personnels, l’éclairage apporté par les souvenirs du Père Olathaire est précieux pour le fluffiste acharné, ou simplement curieux d’en apprendre un peu plus sur la manière dont Pépé a enfin tapé du poing énergétique sur la table pour réaliser son rêve galactique. En matière de construction narrative, McNeill parvient également à tirer son épingle du jeu en maintenant du suspens jusqu’à la fin de son récit. Comment Olathaire va-t-il réagir à sa propre révélation, lorsqu’il comprendra que son miracle personnel, sur lequel sa foi s’appuie, n’était en fait qu’une rencontre furtive entre un survivant en état de choc et un Empereur parti faire un tour en forêt ? Tout se joue dans les dernières lignes de la nouvelle, faisant de cette dernière une des plus abouties de McNeill de ce point de vue.

Enfin, cette nouvelle est profonde, et confine parfois à l’ironie, à travers le discours tranché livré par Révélation sur la religion et ses méfaits. Quand on sait comment l’histoire se termine, ou en tout cas se poursuit après cet ultime incendie d’église par un païen à cheveux longs4, la laïcité militante de l’Empereur apparaît comme le plus gros You had ONE job de l’histoire de l’humanité, tout comme son horreur absolue de l’Inquisition… Encore plus intéressant est le renversement de situation opéré par McNeill dans les dernières pages de la nouvelle, lorsque le jusqu’ici très rationnel Empereur ne peut justifier son projet de conquérir la galaxie par un « je sais que j’ai raison » assez minable, qui vient ruiner tout son argumentaire nocturne, et pousse finalement son interlocuteur à demeurer fidèle à sa foi, et à prendre son congé en prévenant Révélation qu’il deviendra sûrement ce qu’il s’était juré de détruire. Warhammer 40.000 étant un univers reposant à bien des égards sur de profonds paradoxes, l’exposition d’un des plus centraux de ces derniers prouve, si besoin était, l’excellente compréhension que Graham McNeill a du cadre dans lequel il évolue. Cela peut certes sembler banal pour le lecteur, mais la BL a connu son lot de soumissions ratées à cause de connaissances trop légères de la part de ses contributeurs : il faut donc reconnaître un auteur « bien (in)formé » quand on en croise un. En définitive, The Last Church se positionne très sérieusement comme l’une des meilleures nouvelles signées McNeill de l’Hérésie d’Horus, et peut-être même de sa production totale pour le compte de la Black Library.

1 : Car il y a tout de même beaucoup de scories dans sa production, vous ne m’en ferez pas démordre.
2 : Probablement parce qu’ils ont tendance à tomber comme des mouches dès lors que les trois autres catégories de personnages sont présents.
3 : Du genre luminaire, si on doit en croire sa propension à générer des flashs aveuglants.
4 : C’était bien la peine d’exterminer les Scandinaves pour leur piquer leurs traditions ancestrales.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme dit ci-dessus, on est en présence d’un des textes les plus marquants et importants de l’Hérésie d’Horus, dans lequel l’Empereur est présenté sous son « meilleur » jour, d’un point de vue narratif. Malheureusement pour Lui, et pour nous, Pépé passera en effet la majorité de l’Hérésie à balancer des one liners plus ou moins profonds comme un PNJ donneur de quête, ce qui est un niveau d’implication un chouilla décevant pour un personnage à l’omniscience et l’omnipotence quasi établies. Ici, on le voit en majesté, si je puis dire, mais McNeill prend également soin de montrer que derrière la bienveillance apparente de son grand projet d’unité terrane et de conquête de la galaxie se cache une tendance absolutiste pas vraiment subtile, et un complexe de supériorité irrépressible (« t’es pas content? Bim, triplé autodafé. »), qui viennent tempérer l’image d’autocrate idéal qu’il cherche à se donner. Une très bonne addition à cette anthologie, donc.

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Dark Angels – Savage Weapons (A. Dembski-Bowden) :

INTRIGUE:

Savage WeaponsDébut de journée classique pour Corswain, Champion du 9ème Ordre (ce qui est mieux que champion de 9ème ordre, reconnaissons-le). Après avoir fait son rêve habituel, étrange et pénétrant, d’une bête bien connue qu’il n’arrive jamais à vaincre dans son état catatonique, bien qu’il porte la pelisse de ce prédateur de Caliban sur l’épaule, il est convoqué avec son supérieur, le balafré+++ Alajos, par le Primarque des Dark Angels, Lion El’Jonson en personne. Et comme d’habitude, le léonin surhomme se prend la tête pour essayer de déjouer les friponneries des Night Lords dans le sous-secteur de Thramas, sans succès concluant depuis deux ans1. Ce manque de progrès tape sur les nerfs de ce bon Lionel, qui se doute bien qu’il y a de plus gros poissons hérétiques à ferrer dans le reste de la galaxie. Malgré tout, le devoir chevillé au corps du Primarque le pousse à persévérer dans ce jeu du chat et de la chauve-souris, et même à accepter l’invitation, inattendue il faut le reconnaître, de Kurze de se rencontrer sur une planète paumée pour taper la discute, comme au bon vieux temps. Le Lion, qui a juste entendu « taper », est d’accord, malgré les remarques sensées de ses petits frères, qui soupçonnent logiquement un piège. Confiant dans sa bogossitude naturelle et son statut de personnage nommé, le patron des anges sombres fait fi des conseils de prudence, et part avec le 9ème Ordre comme escorte au rencard fixé par son frérot.

Arrivée à proximité du monde de Tsagualsa, où doivent se tenir les pourparlers, la flotte loyaliste est accueillie par l’opérateur radio le plus irrespectueux de la galaxie, le Premier Capitaine Sevatar des Night Lords. Entre deux punchlines désinvoltes, le hallebardier le plus tristement célèbre des Legiones Astartes informe ses interlocuteurs que le point de rendez-vous a été fixé dans le chantier de forteresse que les Night Lords sont en train de construire sur la planète. Une petite téléportation plus tard (malgré le fait que Corswain n’aime pas vraiment ça, mais tout le monde s’en fout et le Lion en premier), voilà Lionel rendu sur place avec ses deux gardes du corps, comme convenu par le gentlepostmen’s agreement fixé par les parties en présence. Il ne faut pas longtemps pour que Konrad, bronzé comme jamais, n’arrive à son tour, avec son gang: l’impayable Sevatar bien sûr, mais également un dénommé Shang, choisi sans doute pour respecter les quota de représentation des minorités.

Les retrouvailles entre les deux frangins sont glaciales, malgré les efforts déployés par Konrad pour briser la glace et raviver l’esprit de franche camaraderie entre les deux enfants sauvages de la fratrie… qui n’a sans doute jamais existé. Il convainc toutefois Lionel d’aller faire un petit tour en tête à tête, laissant les quatre Capitaines échanger quelques boutades de bon aloi. Sevatar, qui est responsable de la défiguration d’Alajos, ne se gène pas pour mettre évoquer ce sujet encore douloureux (surtout pour le principal intéressé, que l’on sent tout prêt à lancer la belle), mais le tact et l’érudition de Corswain, qui parle Nostraman comme une vache espagnole, c’est à dire relativement bien, font légèrement retomber la pression entre cousins. On apprend également l’origine des magnifiques gantelets rouges arborés par le Premier Capitaine des Night Lords, une marque d’infamie pas si différente des casques écarlates des Ultramarines censurés. Comme quoi, tout est dans tout, et inversement.

Ce plaisant badinage est toutefois interrompu par le retour des Primarques, toujours aussi fâchés l’un contre l’autre. Enfin, surtout Lionel, outré que l’on soupçonne la fidélité de la moitié de Légion qu’il a laissé pourrir sur Caliban, et qui profite de l’inattention de Konrad pour l’empaler avec son espadon de maître de deux mètres, un peu en traître tout de même. Ce qui aurait été une blessure mortelle pour n’importe qui n’a que l’effet d’une simple gifle pour Kurze, que ses capacités physiques de Primarque sauvent d’un trépas ignominieux. C’en est toutefois terminé des gentillesses, et le combat s’engage entre la team robe de bure et la team cheveux gras. Si le Lion a d’abord l’avantage grâce à ses talents d’escrimeur, la tentative de strangulation dont il est la victime de la part du Nighthaunter lui fait perdre un peu de sa superbe, et motive Corswain à voler au secours de son seigneur. Cela laisse le pauvre Alajos Alaramasse (son deuxième prénom) contre Shang et Sevatar, combat inéquitable dans lequel le Capitaine laisse bientôt sa tête, non sans avoir réussi à faire perdre la main au Night Lord pas important (je vous laisse deviner de qui il s’agit) auparavant.

L’intervention de Corswain, si elle permet au Lion d’éviter d’avaler sa neuroglotte, se passe assez mal pour le chevalier blanc et noir, dont la tentative de rodéo kurzien se termine assez rapidement, et dans la douleur. Malmené par son adversaire, et avec un taux d’invalidité en rapide progression, le Champion n’est sauvé que par le retour sur le ring de Lionel, qui a mis beaucoup de temps à se relever pour un Primarque2. Son paternel étant à nouveau occupé, notre héros est sur le point de finir en kebab sur la lame de Sevatar quand les renforts finissent enfin par arriver. Dark Lords et Night Angels déferlent par dizaines sur le champ de bataille, parviennent à séparer leurs patrons qui en étaient réduits au bras de fer chinois pour se départager, et repartent chacun de leur côté. Corswain regrette un peu d’avoir perdu son épée dans la mêlée, mais comme il l’a égarée dans le fessier d’un Primarque, il ne s’en formalise pas trop…

Notre nouvelle se conclut presque comme elle a commencé, Corswain arrivant enfin à (r)avoir la peau de la marmotte de Caliban qui lui faisait tant de misère dans ses rêves, avant d’être convoqué par son boss. Il est depuis devenu Capitaine du 9ème Ordre, en remplacement du pauvre Alajos, qui s’est bien frotté à plus fort que lui en la personne de Sevatar. Les nouvelles qui tombent sont toutefois un peu particulières, car Roboute Guilliman a envoyé un smiley à Lionel, qui ne pige rien aux émojis. Le message qui a suivi a cependant fait comprendre au Lion que son frère nourrissait lui aussi quelques pensées plus ou moins hérétiques, ou, tout du moins, sécessionnistes…

1 : Plus j’avance et plus tu recules, comment veux-tu que je t’accule?
2 : Peut-être essayait-il de solliciter l’arbitre de la rencontre pour demander la VAR sur l’étranglement des yeux bassement exécuté par Kurze. 

AVIS:

Aaron Dembski-Bowden débute dans l’hérétique carrière en terrain à moitié connu avec ce Savage Weapons, puisque celui qui était jusqu’ici principalement connu pour ses travaux Night Lords ne se gène pas pour mettre les fils de Nostramo au casting de son histoire. En plus de mettre en scène le Joker des Primarques (qui avait commencé par être Batman, c’est dire si les années ne lui ont pas été clémentes), ADB introduit également l’un de mes personnages préférés de la série, le caustique, cruel mais surtout charismatique Premier Capitaine Sevatar, qui parvient sans mal à voler la vedette au pauvre Corswain, sensé être le héros de l’histoire. En plus de balancer des répliques d’anthologie (et ça tombe bien pour un recueil de nouvelles) et de se foutre ouvertement de la gueule de Lionel par moment, Sev’ se révèle avoir une personnalité complexe et profonde, et absolument pas aussi dénuée d’honneur qu’il essaie de le faire croire. S’ajoute à cela son passif mystérieux de condamné à mort en sursis, qui en fait un paria en même temps que l’individu le plus influent de la Légion après son Primarque. Et pour ne rien gâcher, notre surhomme est un bretteur de talent, maniant une arme certes improbable, mais absolument classe, avec des effets dévastateurs. Bref, voilà une entrée réussie dans le grand bazar qu’est cette Hérésie!

‘Savage Weapons’ mérite également la lecture en raison des portraits intéressants qu’ADB fait des Primarques convoqués, à la fois radicalement opposés et étrangement similaires sur certains points. Usant des talents de divination de Kurze, l’auteur peut également balancer quelques clins d’œil sur le lointain futur, et commencer à détruire la réputation de loyaliste de Lion El’Jonson. De son côté, le chevaleresque Maître de la Première Légion exsude une aura paladine presque palpable… mais est tout de même celui qui frappe son frérot en traître au début de leur bataille de polochons1. Le natif de Caliban apparaît comme un être parfait et froid, jusqu’à la limite de la sociopathie, et c’est très bien comme ça. Après tout, on est pas dans le monde des Bisounours2. De bonnes bases donc pour ces personnages importants, mais pas centraux, de l’Hérésie, sur lesquelles les auteurs prenant la suite de la couverture médiatique de la Croisade de Thramas, et de l’arc de l’Imperium Secondus, purent capitaliser (ou pas)3.

Enfin, notons les effets de style assez intéressants intégrés par ADB à son histoire, avec une introduction et une conclusion construite en quasi-miroir, ce qui est une manière de souligner que les Dark Angels n’ont pas fini de courir le sous-secteur à la poursuite de leurs insaisissables Némésis. Un jour de la marmotte un peu spécial (et spatial) pour Corswain, en quelque sorte, qui a tout de même gagné au change à la fin de la nouvelle, en ayant reçu une belle promotion et avoir enfin remporté son match de catch onirique. Il faut savoir profiter des petits bonheurs de la vie…

1 : Je remarque que ce pauvre Lionel n’a pas de chance dans ses duels avec ses frangins. Qu’il s’agisse de Leman Russ ou de Konrad Kurze, à chaque fois ça se finit en grosse empoignade de pochtrons se balançant des patates de forains. C’était bien la peine de passer autant de temps à pratiquer l’escrime médiévale sur l’Invicible Reason, tiens. 
2 : Et pour cause, les Dark Angels les ont exterminés au cours de l’invasion de Caring, leur planète natale, au début de la Grande Croisade.
3 : On appréciera la référence faite à ‘The Lightning Tower’ dans le dialogue entre Konnie et Lionel, le premier ayant bien compris qu’il foutait les chocottes à ce planqué de Rogal Dorn, dont la peur du noir est la plus grande faiblesse. 

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Étrangement pour une Légion aussi importante dans le fluff du 30ème et du 40ème millénaire, les Dark Angels n’ont pas bénéficié d’une couverture très importante dans le corpus de nouvelles hérétiques, ce qui a limité les choix possibles au moment de construire ce recueil. ‘Savage Weapons‘, même si elle est au moins autant consacrée aux Night Lords qu’à leurs adversaires loyalistes, était une des meilleures alternatives possibles à mon avis, puisqu’elle permet au lecteur d’aborder quelques uns des thèmes les plus importants de l’importante Première Légion: la fidélité absolue de Lion El’Jonson envers son Pôpa, ses problèmes relationnels persistants (aussi bien avec ses parties prenantes internes et externes), son tempérament chevaleresque (jusqu’à un certain point), sa future implication dans l’Imperium Secundis, et évidemment la trahison prochaine des Déchus. Il ne manque à mon avis à ce tableau très convaincant que l’évocation du culte du secret chez les natifs de Caliban pour cocher toutes les cases du bingo Dark Angels. C’est donc validé de mon côté.

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Emperor’s Children – Imperfect (N. Kyme) :

INTRIGUE:

ImperfectNous surprenons une innocente partie de régicide entre les deux frangins les plus proches de la smala primarquielle : Horus et Sanguinius Fulgrim et Ferrus Manus. Entre deux mouvements savamment planifiés, les joueurs tapent la discute avec bonhommie. Enfin, c’est surtout le Phénicien qui mène la danse de ce côté, sa tendance à jacasser comme une pie tout en buvant du chardonnay et en prenant des poses alanguies semblant dissimuler un objectif plus profond que de faire tourner en bourrique la Gorgone. Les questions que Fulgrim adressent à son cher frère (Est-ce que tu te vois plutôt comme l’Empereur ou le Tétrarque ? Tu sais d’où vient le terme de régicide ? Quelle est la capitale du Lesotho ?) sont d’ailleurs assez spécieuses, pour ne pas dire borderline hérétiques…

Début spoiler…Lorsque Fulgrim finit par dévoiler son coup gagnant, appelé le jeu du traître, Ferrus finit par perdre son calme et rage quit comme la petite personne qu’il a toujours été. Déçu par la réaction de son frère, qu’il n’a pas réussi à rallier à sa cause comme il s’en était pourtant donné l’objectif, Fulgrim débranche l’éclairage tamisé qui baignait la scène et se révèle dans toute sa sinueuse et serpentine majesté. Ferrus, ou plutôt son clone, en reste bouche bée et finit empalé sur la queue du Primarque démon (en tout bien tout honneur, hein), qui pique une grosse colère devant l’hologramme de Fabius Bile patientant à l’arrière-plan.

L’Araignée a en effet une nouvelle fois échoué à produire une copie parfaite de la Gorgone (à sa décharge, il a dû travailler uniquement avec le sang séché qui restait sur la lame de l’épée de son boss), comme les vulgaires gantelets métalliques qui lui enserraient les mains le révélaient1. Heureusement, Bile est venu avec des stocks importants, et calme Fulgrim en lui envoyant la petite sœur, ou plutôt le petit frère dans ce cas précis. On quitte le boudoir du Primarque alors qu’un nouveau Ferrus Manus arrive pour débuter une partie avec son frérot préféré, sans voir le carnage absolu et le bordel monstre2 qui règne dans la pénombre renouvelée (les clones de Buffalo Bile ont la vue basse on dirait).

De son côté, l’Apothicaire dévoyé retourne à ses chères et chairs études, et la nouvelle se termine avec une petite visite de son laboratoire secret, caché au plus profond du Pride of the Emperor. Fidèle à sa réputation de bourreau de travail, l’Araignée ne s’est pas contentée de produire des quantités industrielles de Ferrus Manus pour flatter l’ego démesuré de son patron, mais a également planché sur d’autres modèles primarquiels, avec plus ou moins de succès il faut dire (son Sanguinius est assez raté). Son chef d’œuvre est un bébé Horus, reconnaissable à la tache de naissance cthonienne (un manbun ?) qu’il arbore sur la fesse. Ce pauvre petit être ne se doute pas de la vie de m*rde qu’il aura bientôt à affronter…Fin spoiler

1 : Ça montre surtout que Fulgrim ne comprend rien à la génétique.
2 : Vous pensez vraiment que Fulgrim est du genre à ramasser les pièces et à les reposer sur la table ? Je suis 100% convaincu qu’il a fait installer 40 plateaux de régicide dans la pièce pour s’éviter cette infamie.

AVIS:

Quelques années avant le (très bon) ‘The Board is Set’ de Gav Thorpe, Nick Kyme a exploré le parallèle entre jeu de plateau et hérésie à travers ce sympathique ‘Imperfect’, dont le retournement final est assez bien amené je dois dire. En bonus, on en apprend plus sur les relations qui unissaient Fulgrim et Ferrus Manus du temps où ils pouvaient se voir tête à tête (mouahaha), ce qui est toujours bon à prendre pour les fluffistes acharnés. Une nouvelle de qualité à mettre au crédit de Kyme.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Malgré ses qualités intrinsèques, ‘Imperfect’ est à mes yeux une erreur de casting retentissante de la part de la Black Library, puisqu’elle traite de Fulgrim (et de Ferrus Manus) au lieu de nous éclairer sur les Emperor’s Children. On pourrait arguer que c’est finalement assez fluff que le Primarque avec l’ego le plus KOLOSSAL1 vienne s’arroger la nouvelle qui aurait dû présenter sa Légion, mais cette dernière méritait mieux. Je pense notamment à ‘Chirurgeon’ (toujours signée Nick Kyme), qui met à nouveau en vedette ce vieux Fabius Bile et lève le voile sur l’affliction dégénérative qui a faillit faire disparaître les Emperor’s Children. A mon sens, c’est cet événement qui permet de comprendre pourquoi la 3ème Légion est tellement obsédée par la recherche de la perfection (un trait de personnalité qui la mènera à sa chute), et il aurait donc été judicieux de la part de la BL d’intégrer cette nouvelle au sommaire de ‘Lupercal’s War’.

1 : Je suis persuadé qu’il a reçu une queue de serpent lors de son apothéose afin de se débarrasser des disgracieuses chevilles d’éléphant qu’il avait développées pendant sa vie mortelle.

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Iron Warriors – The Iron Within (R. Sanders) :

INTRIGUE:

The Iron Within‘The Iron Within’ permet à Sanders de mettre sous les feux de la rampe un Iron Warrior ayant choisi de se battre dans le sens de l’histoire, le Warsmith Barabas Dantioch. Il reste en ceci fidèle au portrait en clair obscur qu’il avait dressé de son dernier héros Marine (Elias « le Codex Astartes est formel sur ce point » Artegall, Maître du Chapitre des Crimson Consuls1), préférant s’attarder sur les faiblesses de son personnage pour le caractériser plutôt que sur ses forces, logique tout à fait défendable quand on parle de surhommes génétiquement supérieurs en tous points au reste de l’humanité.

La tare de Barabas, qui lui attache la sympathie du lecteur, n’est cette fois pas d’ordre psychologique, mais physique, puisque le Warsmith est le premier Marine atteint de mucoviscidose (et pas qu’un peu) de l’histoire de la Black Library. Évidemment, cette affliction découle d’une glorieuse campagne contre les Hruds, apparemment capable de réduire en grabataires même les meilleurs de l’Empereur par le seul poids du nombre (me demandez pas pourquoi). Prématurément usé par cette ultime bataille dont il fut quasiment le seul rescapé (l’autre survivant ayant fini dans un Dreadnought, et encore, un Dreadnought avec déambulateur), Barabas s’est trouvé affecté à la garde d’une planète de huitième ordre, poste honorifique mais véritable mise au placard déguisée, Perturabo n’ayant semble toute guère apprécié que sa Légion soit la première à devoir verser une pension vieillesse à un de ses combattants.

Isolé dans son trou ferreux, Barabas s’est occupé comme il a pu pour tuer le temps, ce qui pour un Iron Warrior, consiste surtout à construire des miradors derrière la haie et à installer des multi-lasers dans les bacs à géraniums. Malheureusement pour le pré-retraité qu’il est devenu, l’arrivée de l’arrogant et hérétique Warsmith Krendl va le forcer à prouver au reste de la galaxie que le vioque touche toujours sa bille en matière de conduite de siège.

1 : Voir ‘The Long Games at Carcharias’.

AVIS:

Si ni le thème, ni la conclusion de l’histoire ne sont très originaux, Sanders parvient bien à retranscrire l’effroyable guerre de positions qui oppose loyalistes et chaotiques, dans une sorte de préquelle clin d’œil à la bataille de Terra, au cours de laquelle les Iron Warriors affronteront cette fois leurs rivaux de toujours au lieu de leurs propres frères. S’il fallait retenir une morale de tout ceci, c’est que l’abus de Chaos est mauvais pour le sens stratégique, le méchant Krendl conduisant son offensive comme une savate, malgré les avantages quantitatif et qualitatif dont il dispose pour mener la réduction de la place-forte ennemie.

The Iron Within_IllustrationCertes, on peut se dire que Barabas est un Warsmith vétéran, défendant son chef d’œuvre en compagnie de troupes sur-motivées, mais son adversaire étant lui aussi un Iron Warrior de haut rang, et de ce fait un expert de la prise de fortifications, la correction que papy gaga lui inflige apparaît légèrement too much. On n’a pas vraiment l’impression de voir deux grands stratèges s’affronter à distance en se rendant coup pour coup, mais plutôt le sentiment d’assister à une partie de tower defense, les assaillants tombant comme des mouches pour gagner le moindre mètre.

Cette petite déception écartée, il faut bien avouer que Sanders maîtrise tout à fait les codes du dernier carré super héroïque, le rythme s’accélérant progressivement au fur et à mesure que le nombre des gentils diminue et que ces derniers doivent sans cesse reculer devant l’avance inexorable des vagues ennemies. Il y a bien quelques sujets à froncement de sourcils, comme le personnage de Vastopol, « Guerrier-Poète » à l’importance dans le récit aussi grande que son utilité à ce dernier apparaît comme contestable, mais Sanders ne relâche jamais le rythme, et toutes les incohérences sont vite laissées de côté. En conclusion, une autre nouvelle de Marines de bonne facture à mettre au crédit du petit Rob, dont j’attends personnellement de voir s’il peut faire aussi bien en long format et avec d’autres protagonistes.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Inclure dans un recueil introductif comme celui-ci une nouvelle relatant un siège pour parler des Iron Warriors était un no brainer, mais je suis tout de même content (et soulagé) que la Black Library ait fait le choix de la facilité. Si on veut chipoter, on peut regretter que ‘The Iron Within‘ soit centré sur l’exception Barabas Antioch, qui en tant que loyaliste ne représente pas la mentalité dominante chez les autres Iron Warriors, entièrement loyaux à leur Primarque otaku. Comme Krendl a eu l’honneur d’être le héros de sa propre nouvelle (‘Ironfire‘, écrit par le même Sanders), cette dernière aurait pu être considérée, tout comme la plus récente ‘Embers of Extinction‘ du nouveau-venu Brandon Ellis.

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Iron Warriors – Black Oculus (J. French) :

INTRIGUE:

Black OculusLes journées d’un Navigateur sont plus riches et hautes en couleurs que celles de la majorité des êtres humains de la galaxie, et le compte rendu fait par l’un des pilotes de l’Iron Blood de Perturabo de son voyage à travers l’Œil Noir en direction de Tallarn le montre bien. Malgré le fait que le saut Warp se soit bien passé, l’expérience a laissé le narrateur avec des séquelles profondes et sans doute définitives, qui ont mené les rationnels Iron Warriors à le placer sous sédation et à l’isolement, pour éviter que son malaise psychique ne les fasse rouiller (?).

Le plus traumatisant dans cette (nécessairement) sombre histoire semble avoir été les rires pré-enregistrés que notre héros triclope a entendu tout du long de sa transition galactique, et qu’il interprète maintenant comme la preuve indubitable que les dieux ne sont pas tombés sur la tête, mais se paient celles de Perturabo (et du reste de l’humanité d’ailleurs, comme ça pas de jaloux). Cela nous semble le comble du banal à nous, hobbyistes du M3, mais pour nos lointains descendants du 30ème millénaire, la surprise a dû être grande…

AVIS:

Si vous aviez envie d’avoir l’équivalent littéraire d’un écran de chargement entre ‘Angel Exterminatus’, qui se termine avec les Iron Warriors coincés au milieu de l’Œil de la Terreur suite au glow up de Fulgrim et ‘Tallarn’, la prochaine victime sur la to besiege liste de Perturabo, ‘Black Oculus’ est ce qu’il vous faut. Je pense que la plupart des lecteurs de l’Hérésie feront l’impasse sans sourciller.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Cette très courte nouvelle permet de se rendre compte que Perturabo n’est pas du genre à prendre des demi-mesures… et c’est à peu près tout. Comme l’Iron Man des Primarques n’apparait pas dans l’autre nouvelle Iron Warriors du recueil, je suppose que c’est un complément utile, mais ‘Black Oculus’ propose également un niveau de lecture inaccessible aux nouveaux-venus (mentions non contextualisées de l’Œil Noir et de Tallarn), ce qui est problématique ici.

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White Scars – Brotherhood of the Moon (C. Wraight) :

INTRIGUE:

Brotherhood of the MoonLa vie du Khan Torghun, chef de la Confrérie de la Lune des White Scars (aussi appelée 64ème Compagnie par les normies et les Sons of Horus), a pris un tour désagréable depuis qu’il a été associé avec la faction pro-Horus, et donc heresy-friendly de sa Légion. Mais peut-on vouloir à un White Scar de choisir l’option Faucon quand l’opportunité se présente, hein ? Capturé et interrogé par ses camarades ayant eu le nez de rester fidèles à Pépé, il consent à leur raconter comment il en est arrivé là.

Tout remonte à la campagne menée en coopération avec les Luna Wolves du Capitaine Verulam Moy dans la Ceinture de Tarsch. Le manque de progrès du contingent de la 16ème Légion avait contraint le haut commandement de la Croisade à lui dépêcher des alliés, sous la forme de la Confrérie de Torghun. Sans doute un appareillement décidé par un adepte un peu fleur bleue, trouvant poétique de faire coopérer deux factions lunaires sur le même conflit1. Sentant son homologue vexé par l’arrivée de renforts non sollicités, Torghun fit ce qu’il put pour arrondir les angles et put compter en cela sur l’aide de son second Hakeem, qu’il découvrit très déférent envers Moy (Moche et Méchant), sans qu’il comprenne tout de suite d’où venait ce respect interlegionnel.

Une attaque décidée sur une cité majeure du neuvième monde de la Ceinture fut l’occasion pour les deux forces de travailler de concert : pendant que les Luna Wolves infiltreraient à pinces les défenses adverses pour saboter les générateurs alimentant le bouclier défendant la position ennemie, les White Scars devraient faire diversion depuis les ailes, à grands renforts de burns et de rodéo urbain dans la périphérie de la cité. Car si la 5ème Légion déteste les Dreadnoughts, elle adore en revanche les doughnuts. Nuance importante.

L’opération se passa comme sur des roulettes (normal avec des White Scars me direz-vous), les assauts commandés par Torghun et Hakeem réussissant à semer la confusion parmi les défenseurs, et à sécuriser les objectifs fixés en amont de l’attaque. Au moment de se replier cependant, Hakeem insista auprès de son supérieur pour que les fiers bikers fassent une entorse à la règle du hit and ride qui les caractérisait pour mettre pied à terre et défendre leurs positions le temps que les Sons of Horus n’arrivent les soulager. Bien que 1) cela contredise la philosophie martiale du Grand Khan et 2) ses hommes ne soient pas équipés pour ce type d’affrontement (dur de caler un bouclier tempête à l’arrière d’une 125), Torghun accepta le défi après avoir compris de son subalterne qu’il s’agissait du plus sûr moyen de gagner le respect des coriaces Sons of Luna.

« Et Moy, et Moy, et Moy ? » vous entends-je demander. Eh bien Moy finit par arriver, et, bien que surpris de la résistance de ses alliés et du non-respect par ces derniers du plan de bataille, ne leur en tint absolument pas rigueur. Bien au contraire, et comme l’avait annoncé Hakeem, il devint bien plus amical envers les White Scars, au point d’inviter leurs deux commandants dans sa tente après le banquet de la victoire, pour une petite réunion de loge. On comprend alors que Hakeem était déjà initié, et qu’il a tout fait pour que Torghun le devienne aussi. Notre héros aura l’occasion plus tard de réaliser que le népotisme et l’entre soi causent autant de problèmes qu’ils ouvrent de portes, particulièrement lorsque son réseau fricote avec le Chaos. Mais ceci est une autre histoire (‘Scars’, pour être précis).

1 : Même cette vieille baderne de Moy relève cette coïncidence, c’est dire si l’intention était transparente.   

AVIS:

Chris Wraight développe l’origine du protagoniste de sa série White Scars, Torghun Khan, dans cette petite mais solide nouvelle, qui lorgne franchement du côté du fan service pour les inconditionnels de Dan Abnett1. Comme tout le monde faisait ça à l’époque et que cela ne dessert pas le récit, on passera l’éponge sans problème. Après tout, ‘Brotherhood of the Moon’ est l’histoire d’un petit nouveau qui gagne la confiance et l’amitié d’un gros bonnet de la Grande Croisade : le parallèle avec Wraight, dont ‘Scars’ était le premier roman dans cette franchise et qui était encore loin d’être un Seigneur de Terra à l’époque, est assez troublant. Il faut voir cette nouvelle comme un bonus appréciable mais non nécessaire à la compréhension de ce dernier roman (qui était déjà publié au moment de la sortie de ‘Brotherhood of the Moon’, d’ailleurs).

1 : C’est lui qui a créé le personnage de Verulam Moy dans ‘Horus Rising’.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Les White Scars sont sans doute la Légion dont le fluff a été le plus enrichi par la franchise Hérésie d’Horus, comparé à ce qu’il était dans le background prédatant le lancement de la série. Les scissions internes qui ont travaillé cette faction lors des premiers temps de l’Hérésie sont en effet un ajout (intéressant, si je peux me permettre) récent à son histoire officielle, et Chris Wraight en a été le chroniqueur attitré dans ses travaux consacrés aux bikers de Jaghatai Khan. Le choix de la Black Library d’évoquer ce schisme, encore que de manière très indirecte, dans ‘Lupercal’s War’ est compréhensible (notamment d’un point de vue marketing, cet arc hérétique se poursuivant sur plusieurs romans et nouvelles), et ‘Brotherhood of the Moon’ permet au lecteur de saisir les bases de la culture de cette Légion (fais ce que voudras, mais à moto) au début de l’Hérésie, ce qui en fait une soumission pertinente à mes yeux.

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Space Wolves – Bjorn: Lone Wolf (C. Wraight) :

INTRIGUE:

Bjorn_Lone WolfSur une plaine volcanique de Velbayne, les Space Wolves sont engagés dans une féroce bataille contre un ost démoniaque, une préparation adéquate à leur future purge de Prospero (l’univers est bien fait tout de même). Bien que Leman Russ en personne ait fait le déplacement, la star du jour est Bjorn, surnommé le loup solitaire par le reste du Rout depuis que le reste de sa meute a été unsuscribed from life par un Buveur de Sang lors de la campagne de Gryth. Par un heureux hasard, le même démon majeur, reconnaissable à ses mèches blondes effet mouillé (j’imagine), est présent sur Velbayne, et Bjorn est bien décidé à régler ses comptes avec la bête canicide d’une manière définitive.

Nous suivons donc sa course folle, son triple saut, son enfonçage de cordon (le joueur Démons était un gros newb) et pour finir son combat acharné contre sa Némésis khorneuse et cornue, en même temps que notre héros jusqu’ici silencieux égrène les noms de ses frères d’armes défunts. Protégé par son statut de personnage nommé et renforcé par une myriade de buffs, Bjorn couche le Buveur en moins de temps qu’il faut à son Primarque pour vider un tonneau de mjød, pour l’honneur de ses morts et la gloire des Space Wolves. On voit qu’il n’a pas perdu la main…

AVIS:

Soumission très honnête de la part de Chris Wraight pour cette micro-nouvelle, qui montre à quel point les liens unissant les frères de meute sont forts chez les Space Wolves, et à quel point le jeune Bjorn était une brute de corps à corps. Il n’était pas possible de faire beaucoup mieux que ça en trois pages/1.000 mots, c’est donc une mission accomplie en ce qui me concerne.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Fort heureusement, ‘Bjorn : Lone Wolf’ n’est pas la nouvelle choisie pour représenter les Space Wolves dans ‘Lupercal’s War’, car cela aurait fait court. Malgré sa brièveté, cela reste à mon sens un choix pertinent, car le lecteur est introduit aux valeurs profondes de cette Légion dans ces quelques pages, et se familiarise avec une des figures majeures de cette faction. Un bon bonus.

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Space Wolves – Bloodhowl (C. Forrester) :

INTRIGUE:

BloodhowlQue faire quand sa faction a pris une telle rouste qu’elle a été virtuellement annihilée et n’aura plus aucun impact sur la conclusion de l’Hérésie ? Plutôt que de demander conseil aux Légions Brisées ou aux Custodes, qui les ont précédés au panthéon de la lose glorieuse, les Space Wolves ont décidé de laver leur linge sale en et de famille au sortir de la campagne de Trisolian. Nous suivons donc le Jarl de la 13ème Compagnie (Dekk-Tra), Jorin Bloodhowl, alors qu’il emmène ses vétérans grisonnants et grommelants sur la planète de Bloodfall, après qu’un Leman Russ totalement déprimé lui ait donné la permission de s’absenter. Le but de l’escapade est de localiser un des lieutenants de Bloodhowl, Gunnar Thorolfsson, AWOL depuis l’incendie de Prospero. Le Jarl, qui espère toujours que la 6ème Légion pourra se rendre utile dans la défense de Terra, a en effet grand besoin de regonfler ses effectifs, et compte bien convaincre Thorolfsson et ses 200 loulous de regagner le bercail de Morkai, de gré ou de force.

L’explication de texte entre les frères d’armes devra toutefois attendre un peu, Bloodfall se trouvant être contestée par une bande de Night Lords en goguette, menée par le Prince de Bel Air du Perif1 en personne. Ce sinistre individu, qui avait déjà montré une sale tendance à la sociopathie et aux crimes contre l’humanité pendant la Grande Croisade, est devenu l’ennemi juré de Thorolfsson, qui a passé une bonne partie de son congé sabbatique à le pourchasser à travers la galaxie. Jugeant avec sagesse que s’il arrive à mettre la patte sur le Prince, il n’aura pas de mal à localiser son subalterne, Bloodhowl emmène donc ses hommes à l’assaut des positions Night Lords… et réalise assez rapidement que Booba (a.k.a. le Duc de Boulogne) est grave chaud avec son sabre énergétique. Largement surclassé par son adversaire, il ne doit sa survie qu’à l’intervention opportune de Thorolfsson, qui envoie un tir de plasma dans le buffet de son Altesse Noctilienne, et permet à Bloodhowl de remporter son « duel ».

Ayant contraint les Night Lords à se replier, les Space Wolves sont enfin libres de palabrer entre gens de bonne compagnie. Le ton de la discussion monte assez vite, Thorolfsson refusant tout net de retourner se battre contre les hérétiques menaçant Terra, comme lui demande Bloodhowl, arguant que ses hommes et lui sont plus utiles aux péquins moyens de l’Imperium dans leur défense des planètes laissées à la merci des Légions renégates du fait de leur peu d’importance stratégique. Le Jarl n’est pas de cet avis, et rappelle à son subalterne et objecteur de conscience qu’il a prêté serment à Russ et à l’Empereur, et qu’il ne lui appartient pas de choisir les combats qui lui semblent être les plus nobles. Aucun des deux tribuns n’arrivant à convaincre son vis-à-vis, on se résout à régler la situation par un duel à mort, comme le veut la tradition.

Bloodhowl, bien amoché par son combat contre le Prince du Périf, refuse de se faire représenter par un champion, et se fait donc fort logiquement mettre en KO technique par son adversaire. Thorolfsson, beau joueur, laisse toutefois la vie sauve à son adversaire, prétextant qu’obéir aveuglement aux traditions est aussi néfaste qu’obéir aveuglement aux ordres (quel esprit libre, vraiment). Il en veut pour exemple l’incendie de Prospero, commis par les Space Wolves sur l’ordre d’un Horus qui avait déjà basculé du côté sombre, et qui aurait pu être évité si la 6ème Légion n’avait pas bêtement obéi au Maître de Guerre. « Hmm maintenant que tu le dis, ça a pas l’air débile » répond Bloodhowl du haut de son ultime PV, avant de repartir la queue entre les jambes. Moralité : Jorin est nul au close.

1 : Sans rire, le gus s’appelle ‘The Prince of the City’s Edge’ en V.O. Ma traduction est tout à fait legit.

AVIS:

Chris Forrester réalise un début sans faute dans l’Hérésie d’Horus avec ce ‘Bloodhowl’, mélange de Space Marinade d’action bien dosée et de réflexion sur la culture et l’histoire des Space Wolves pendant leur heure de doute (juste après les événements de ‘Wolfsbane’). Un travail soigné et bien documenté, puisqu’on y trouve des références à la campagne de Dulan ainsi qu’à celle de Prospero, pourtant couvertes par d’autres auteurs (respectivement Chris Wraight et Dan Abnett), et des personnages tirés de ces vénérables écrits (Ulbrandr Crowhame, Hjalmar Stormfist, sans oublier ce vieux Bulveye). Mon seul regret fut de constater l’absence totale de conséquence de ‘Bloodhowl’ sur la suite de l’Hérésie, Jorin Bloodhowl et ses loyalistes premier degré repartant écluser du mjød avec Leman Russ, tandis que Gunnar Thorolfsson et ses loyalistes rebelles restent s’occuper du cheptel de Bloodfall. Comme Thorolfsson était une création de Forrester, et ne disposait donc pas d’une armure en scenarium1, on aurait pu s’attendre à une conclusion un peu plus tranchante et tranchée. Maintenant qu’il a prouvé qu’il avait les bases nécessaires pour participer à cette complexe œuvre collective qu’est l’Hérésie d’Horus, j’espère que Chris Forrester aura l’occasion de prendre en main des arcs narratifs (ce qui veut parfois dire les conclure), avant que la BL ne sonne la fin de la récré.

1 : Armure toute relative pour Bloodhowl lui-même, puisque personne ne s’est donné la peine de le faire revenir au 41ème millénaire (à la différence de presque tous ses sous-fifres). Et n’oublions pas que Mike Lee avait placé Bulveye à sa place à la tête de la Dekk-Tra dans ‘Wolf at the Door’…

ET POUR LES NOUVEAUX ?

‘Bloodhowl’ est indubitablement une nouvelle de qualité, mais elle arrive bien tard dans le déroulé de l’Hérésie, posant la question de sa pertinence dans un recueil destiné à des lecteurs novices. Chris Forrester prend certes le soin de contextualiser ses écrits pour ne pas perdre son public (qui autrement serait pardonné de ne pas comprendre pourquoi les Space Wolves ont leur mini-hérésie), et se paie le luxe d’un caméo de Leman Russ au lout de sa bife (toujours sympathique), mais j’ai un faible pour ‘The Thirteenth Wolf‘ en lieu et place de ‘Bloodhowl‘, ne serait ce que parce que cette histoire est directement liée à l’événement le plus marquant d’un point de vue Space Wolves de l’Hérésie : l’incendie de Prospero.

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Imperial Fists – Champion of Oaths (J. French) :

INTRIGUE:

Il y a des entretiens d’embauche plus facile que d’autres. Alors que la majorité d’entre nous a juste à savoir nommer trois qualités et trois défauts pour convaincre le recruteur, Sigismund des Imperial Fists va vraiment devoir donner de sa personne pour obtenir son dream job, lui. Notre homme candidate pour devenir le Maître du Temple, fonction honorifique s’il en est au sein de la VIIème Légion puisque les Templiers en question gardent le… temple du Phalanx où les Frères de Bataille jurent fidélité à l’Empereur et à Rogal Dorn. Pour obtenir ce poste convoité, l’impétrant doit vaincre en combat singulier la totalité de ses camarades, soit 199 Astartes vétérans à se farcir les uns après les autres. Même pour un guerrier de la trempe de Ziggy Jaune d’Œuf, l’épreuve est difficile, et notre héros encaisse les coups et les bosses au fur et à mesure que les duels se succèdent.

Cet affrontement au long cours est entrecoupé de flashbacks nous renseignant sur la trajectoire de Sigismund, depuis son enfance malheureuse dans les camps de réfugiés de Turquie (rebaptisée plateau ionien en M31), où il vit sa protectrice se faire tabasser à mort par une bande de wesh sanguinaires, jusqu’à son entraînement sous la conduite du maître d’armes Appius, alors qu’il n’était encore qu’un jeune et prometteur jaunard. L’occasion pour nous d’en apprendre plus sur la motivation profonde de Sigismund, qui va toujours de l’avant parce qu’il sait que les Space Marines ont le devoir de se battre à la place de ceux qui ne le peuvent pas. C’est beau, c’est noble, c’est grand, c’est corporate. Ce petit gars aurait pu faire Miss France, s’il n’avait pas choisi une autre voie.

Retour au Temple, et au boss de fin de la série infernale du Zig. Après avoir fisté sans répit et écopé de quelques bleus au passage, ne reste plus que ce bon vieil Appius en personne à maraver. Le problème, c’est que le vétéran a assez mal vieilli, et s’est fait enfermer dans un Dreadnought depuis l’époque où il refaisait le portrait de son padawan à grands coups d’espadon. Le combat n’est pas des plus équitables, mais les Imperial Fists sont du genre exigeant. Malgré un coup de moins bien passager, et un revers de bouclier énergétique en pleine face, Sigismund vient à bout de cet ultime adversaire en lui coupant le câble (ce qui est cruel quand on est confiné à un réservoir de liquide amiotique, tout de même). Félicité par Rogal Dorn en personne, qui était là incognito pour suivre l’épreuve pratique de son fiston favori, Sigismund devient officiellement le Maître des Serments, et reçoit l’épée de fonction qui va bien en reconnaissance de son nouveau statut. Un petit passage à l’infirmerie pour mettre de l’arnica (eh, c’est jaune aussi) sera sans doute nécessaire après cela…

AVIS:

John French se fait plaisir en retraçant en quelques pages bien senties la trajectoire de l’un des personnages les plus marquants des Imperial Fists pendant la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus (et même après cela), depuis ses humbles débuts jusqu’à sa prise de fonction comme Enfant de Juron. On peut y voir un avant-goût et un condensé du roman qu’il écrira un peu plus tard sur le même personnage, car tout est déjà bien en place à la conclusion de ces douze pages. L’exemple-type de la petite nouvelle à vocation fluffique, sans ambition particulière en matière d’intrigue mais très satisfaisante tout de même pour les amoureux de background, et grâce à la maîtrise consommée que l’auteur a de son sujet. Bref, un incontournable si vous êtes fan des Imperial Fists et/ou des Black Templars, ou tout simplement de l’Hérésie d’Horus en tant que telle.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Au risque de me faire huer par les fans les plus convaincus des Imperial Fists, qui auront sans doute apprécié cette nouvelle à la gloire du redoutable Sigismund, je pense que la Black Library aurait mieux fait de remplacer ‘Champion of Oaths‘ par ‘Duty Waits‘. Cette dernière histoire est beaucoup moins héroïque et riche en fluff que la première, mais elle a l’énorme intérêt de présenter la réalité du terrain pour un Imperial Fist forcé à patienter sur Terra que les hérétiques arrivent, ce qui a été leur lot pendant sept longues années, il faut le souligner. Mention honorable à ‘The Crimson Fist‘, qui illustre l’approche méthodique et disciplinée de la guerre qu’ont les surhommes en jaune, mais qui était évidemment trop longue pour être intégrée ici.

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Night Lords – Child of Night (J. French) :

INTRIGUE:

Child of NightL’heure du jugement a sonné pour Fel Zharost, maître déchu du Librarium des Night Lords. Alors qu’il était retourné dans ses ténèbres natales du sous-monde d’Albia, sur Terra, pour attendre d’être assez âgé pour toucher sa pension d’ancien combattant, le légionnaire déserteur s’est fait traquer par un autre Astartes nyctalope, et commence la nouvelle en contemplan le canon du pistolet bolter pointé sur son crâne chauve. Se jugeant sans doute coupable d’assez de crimes pour mériter une exécution sommaire, Fel Zharost exprime toutefois la dernière volonté de partager avec son futur bourreau ses souvenirs les plus mémorables, afin que ce dernier puisse appuyer sur la gâchette en connaissance de cause. Son interlocuteur n’est pas d’accord, mais on ne peut pas vraiment dire non à un Psyker télépathe qui veut remonter sa memory lane, et nous voilà donc partis pour un voyage dans les années tendres du Night Lord.

Tout a commencé de manière violente, cruelle et tragique, comme souvent à Albia1. À l’époque guère plus qu’un minot dégingandé et territorial, Baby Fel avait été surpris en compagnie d’une camarade de gang (Calliope) par un estranger en armure de céramite, à la recherche de nouvelles recrues pour les Légions de son Pépé, déjà parti depuis plusieurs décennies faire croisade dans la galaxie. Habités d’une confiance en eux inversement proportionnelle à leurs chances de sortir vainqueurs d’un tel affrontement, les deux jeunots avaient décidé de se venger de l’intrusion en assassinant le Space Marine alors qu’il repartait bredouille vers la surface. Bien qu’ils s’en soient sortis de manière très honorable, en lui sectionnant la jugulaire et lui crevant un œil avec leurs tessons de bouteille (le fighting spirit des Anglais n’est plus à démontrer), cela n’avait pas empêché le colosse transhumain d’abattre Calliope et de ramener Fel Zharost avec lui jusqu’au centre de formation le plus proche. L’expérience avait été si violente que l’adolescent avait pris pleine connaissance de ses pouvoirs psychiques, jusque là latents. Certaines pubertés sont plus difficiles que d’autres.

Le deuxième souvenir qui nous est proposé est celui d’une mission menée par les Night Lords pendant la Grande Croisade contre les dirigeants corrompus de l’Enclave Saragorn, coupables d’avoir fait du trafic d’organes à l’échelle industrielle (ce dont l’Empereur se fout comme de son premier fer à lisser) et d’avoir utilisé pour cela des mutants impurs (un scandale sanitaire et éthique absolument terrible). On assiste à l’approche onirique cauchemardesque de la guerre qu’ont les Night Lords, Fel Zharost plongeant le Gouverneur déchu (Mortinar) dans une boucle sans fin d’hallucinations terrifiantes, le réveillant de temps à autre pour prolonger le plaisir. Comme il l’explique posément pour la huitième fois de suite – ils ont des défauts, c’est certain, mais les Night Lords sont pédagogues – à sa victime hébétée, la 8ème Légion n’est pas là pour rendre la justice ou corriger les torts causés, mais seulement pour punir de manière spectaculaire ceux qui le méritent. Comme dit la Compagnie Créole (rattachée directement au Nighthaunter d’après mes sources) : c’est bon pour le moral… des autres.

La troisième et dernière vision partagée par Fel Zharost est celle de sa déchéance, prononcée de manière évidemment nonchalante par Sevatar en personne, alors que le petit Konrad était en train de se faire morigéner par ses frères dans une autre nouvelle. La scène se déroula après la proclamation de l’Edit de Nikea, auquel les Night Lords essayèrent – au début – de se conformer. Les deux Night Lords ne s’appréciant guère, l’Archiviste démobilisé reprochant au premier Capitaine d’être le symptôme de la corruption et du dévoiement des « valeurs » originales de la Légion, il ne fut guère étonnant que l’entrevue finisse par déboucher sur une petite baston entre Fel Zharost et Sevatar, après que le second eut condamné le premier à l’exil, sous peine de mort. Bien que l’Ecuyer du Primarque soit le meilleur combattant des deux, les pouvoirs psychiques de Fel Zharost lui permirent de laisser quelques marques sur l’armure de sa Némésis, avant que le flash de la Go Pro de coque de Sevatar ne vienne ruiner sa concentration et mettre fin à ce duel.

Retour dans les bas-fonds terrans, où cette diva de Fel Zharost a une nouvelle doléance à faire passer à son nouveau copain (un peu givré et désorienté à ce stade) : utiliser ses souvenirs pour voir le soleil une dernière fois. La nature fouineuse du Night Lords le mène cependant à fouiller dans d’autres dossiers mentaux du légionnaire Abribus, ce qui lui permet d’apprendre ce petit détail qu’est le déclenchement de l’Hérésie. Car il faut croire que Pépé n’a pas jugé bon de faire installer la 5G dans les zones déshéritées d’Albia, qu’il déteste cordialement depuis l’époque où il avait pris la forme de Margaret Thatcher pour mettre l’histoire sur de bons rails. Falafel comprend alors que son visiteur n’est pas venu pour le liquider, mais, à nouveau, pour le recruter. Engagez-vous, rengagez-vous qu’ils disaient…

1 : C’est comme là qu’a été décidée l’arrêt de Warhammer Fantasy Battle et l’augmentation continue des prix du zhobby. Never forget.

AVIS:

Nouvelle sympathique qui compile et condense en quelques pages les moments les plus marquants d’une vie de Night Lords, ‘Child of Night’ montre en particulier le rôle (tout aussi particulier) qu’avait cette Légion de joyeux drilles lorsqu’elle roulait encore pour son Empereur, ce qui est appréciable. Le troisième souvenir de Fel Zharost manque cependant un peu de contextualisation à mes yeux, car on ne comprend pas si l’Archiviste se fait virer du fait de l’Edit de Nikea, à cause de l’aversion de Sevatar pour lui, ou pour un autre crime non explicité par John French. Mise à part cette petite doléance, il s’agit d’un ajout qualitatif dans le corpus des Night Lords.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme dit ci-dessus, ‘Child of Night’ donne un aperçu de la philosophie des Night Lords, ce qui est ce qu’on peut attendre d’une nouvelle incluse dans ‘Lupercal’s War’ : ce choix est donc tout à fait pertinent de la part de la Black Library1. Comme le Nighthaunter et Sevatar servent d’antagonistes aux vertueux et ombrageux Dark Angels dans ‘Savage Weapons’ (et aux féroces et enjoués Space Wolves dans ‘Bloodhowl’ – ce sont les ennemis les renégats les plus populaires de l’Hérésie), cette faction s’en sort très bien au final en termes de représentation.

1 : Mention honorable à ‘The Conqueror’s Truth’, dont le pitch est littéralement : « voici comment les Night Lords soumettent les mondes isolationnistes pendant la Grande Croisade ».

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Blood Angels – Lost Sons (J. Swallow) :

INTRIGUE:

Lost SonsLes jours se suivent et se ressemblent sur Baal depuis que les Blood Angels sont tous partis châtier les Nephilim dans l’amas de Signus, comme demandé par Horus ‘Primes Inter Pares’ Lupercal à son frérot Sanguinius. Tous ? Non ! Comme l’addendum de l’ordre de mission l’autorisait, l’Ange a laissé une équipe de maintenance dans sa forteresse pour veiller au grain de sable en attendant son retour. Les 20 tondus ayant eu le grand honneur de rester à domicile patientent depuis plus de cinq ans dans le calme absolu de l’arrière-pays baalite, maintenant l’inflexible discipline et l’élégance vestimentaire qui ont fait la réputation des Blood Angels. Le chef de cette petite confrérie est le Chapelain Arkad, catapulté Gardien de Baal (c’est mieux que gardien de but) par Sanguinius avant son départ. Bien qu’habituellement calme, son sacerdoce l’a déjà amené à deux doigts de crozuser la goule de ses frères, lorsque certains d’eux ont cherché à abandonner leur poste pour partir à la recherche de leur famille perdue. Le déclenchement de la Tempête de la Ruine a en effet rendu toute communication avec la Légion angélique impossible, laissant nos plantons ressasser des idées plus noires que rouges sur le destin des Blood Angels.

A cela est venu s’ajouter les rumeurs, puis la confirmation officielle, de la trahison d’Horus et des massacres d’Isstvan et de Calth, et plus généralement d’une guerre civile de grande ampleur dans l’Imperium. Aussi, lorsqu’un vaisseau émerge du point de Mandeville du système de Baal et se dirige droit vers la forteresse quasi-déserte, c’est la méfiance qui domine chez Arkad et ses comparses. Il s’avère que le nouvel arrivé dispose de l’immunité diplomatique du 30ème millénaire, en cela qu’il est au service de Malcador le Sigilite, qui du haut de son poste de Régent de Terra, agit comme bon lui semble pendant que l’Empereur essaie désespérément d’isoler les combles de son Palais contre les courants d’air de Warp. Pingre comme jamais, le vioque a envoyé un unique émissaire, le Space Marine Tylos Rubio, ayant abandonné le bleu profond des Ultramarines pour le gris terne des Chevaliers Errants. Au moins, l’entretien est facile. Arkad et son copain Hezen sont atterrés de voir que leur visiteur est un Archiviste (Edit de Nikea, etc…), mais le sont bien davantage lorsque Rubio leur tend un parchemin avec accusé de réception annonçant la dissolution des Blood Angels. Gasp.

 La raison de cet acte administratif d’une brutalité sans nom est simple : considérant la 9ème Légion définitivement perdue du fait de la disparition pure et simple de l’amas de Signus, Malcador souhaite mettre la main sur les ressources considérables des Blood Angels en termes de matériel, d’armement et de glandes progénoïdes, afin de gérer au mieux son effort de guerre. Rien de personnel les gars, c’est que du business. Rubio informe toutefois ses hôtes que refuser d’obtempérer leur vaudra d’être déclarés traîtres à l’Imperium à leur tour, mais qu’il peut faire jouer ses relations pour leur trouver un poste à la MLCDR Corp, s’ils le souhaitent.

Cette décision unilatérale passe évidemment très mal chez les anges, aussi sanguins que leur blase le laisse présager. Après une réunion de famille houleuse, le Gardien s’en va porter la réponse du groupe à Rubio, qui patiente dans son véhicule de fonction en écoutant les Grosses Têtes : un non franc et massif. L’Archiviste s’attendait à ce refus de principe, et ne trouve rien à redire au projet des 20 derniers Blood Angels, qui ont repeint leur armure en noir pour l’occasion (parce qu’ils se considèrent comme faisant partie de la Compagnie de la Mort maintenant, wink wink) d’aller traquer Horus pour lui passer un savon1. Il est par contre beaucoup moins conciliant lorsque ses vis-à-vis refusent aussi d’ordonner à l’équipage de la petite flotte laissée par Sanguinius en orbite autour de Baal de coopérer à leur réaffectation prochaine. La tension monte soudainement d’un cran entre les cousins énergétiques.

Avant que Rubio n’ait pu commettre l’irréparable, comme crier « tu dépasses les bornes, Arkad ! » à son homologue, l’Astropathe local arrive en courant pour transmettre un message des plus urgents à ses patrons. Il s’agit d’une communication signée Raldoron, le premier Capitaine des Blood Angels, déclarant que Sanguinius est bien en vie et que la Légion perdure. Ce voicemail opportun, même s’il sonne le glas de l’Astropathe (ou peut-être est-ce son sprint de 300 mètres qui lui a été fatal), réjouit fortement Arkad et ses boys, et leur donne une opportunité en or pour renvoyer Rubio vers Terra avec la coiffe psychique entre les jambes. Ça ne s’est pas joué à grand-chose, mais les Blood Angels sont toujours officiellement dans la course, et il faudra compter sur eux pendant la seconde moitié de l’Hérésie.

1 : Enfin si, il trouve ça très con. Mais chacun ses fétiches hein.

AVIS:

James Swallow nous sert une nouvelle behind the scenes de l’Hérésie d’Horus, en se penchant sur les lignes trèèèès arrières d’une galaxie certes déchirée par la guerre, mais où un bon paquet de planètes sont tout de même loin du front. L’ironie de voir des Astartes se languir dans leur forteresse déserte et isolée pendant que tout le monde s’amuse sans eux rajoute du piment à cette histoire à la fois rafraichissante et intéressante d’un point de vue fluff. Un autre de ses points forts est de brouiller les lignes entre la position pragmatique à l’extrême de Malcador, et la fidélité romantique mais contre-productive des Blood Angels à leur Primarque : aucun de ces deux points de vue ne peut être considéré comme étant intrinsèquement supérieur à l’autre, et il revient au lecteur de décider dans quel camp il se retrouve le plus. Très sympathique.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme les Space Wolves, les Blood Angels n’ont pas bénéficié d’une couverture très importante dans le corpus de nouvelles de l’Hérésie d’Horus, et une bonne partie de ces dernières sont d’abord consacrées à Sanguinius (et sa plastique de rêve) plutôt qu’à ses fils – si on met de côté Azkaellon et Amit, les Dupont et Dupond de la 9ème Légion. Fort heureusement, ‘Lost Sons’ fait le job d’une façon tout à fait satisfaisante, en présentant au lecteur l’attachement viscéral que les Bloodies ont pour leur Primarque emplumé, et en lorgnant vers la Rage Noire et la Compagnie de la Mort, deux des « marqueurs » les plus notables de cette faction. On a aussi une bon teasing de la campagne de Signus Prime (pas trop subtil en plus), ce qui n’est pas étonnant vu que Swallow a raconté cette campagne dans un de ses romans. En bonus, il s’agit d’une nouvelle non-violente, ce qui est assez rare pour le signaler dès lors que des Space Marines sont les protagonistes, et qui contraste donc agréablement avec le reste du contenu de ‘Lupercal’s War’.

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Iron Hands – Immortal Duty (N. Kyme) :

INTRIGUE:

Immortal DutyAhrem Gallikus est un Immortel au sein de la Légion des Iron Hands. Ce titre n’est cependant pas une marque d’honneur, mais plutôt un symbole de disgrâce : dans la famille Manus, il est accolé aux guerriers qui auraient mieux fait de mourir dans l’accomplissement de leur tâche plutôt que de survivre et de faire honte à leurs camarades. En récompense de leurs mauvais services, ils se voient donc remettre un bouclier d’assaut et sont reversés dans les unités de Breachers de la 10ème, où ils hériteront des missions les plus pourries jusqu’à ce qu’ils aient la bonne idée de décéder dans l’exercice de leur fonction. Personne n’aime les CRS, ça reste vrai dans les ténèbres du lointain futur.

Gallikus commence la nouvelle sur le point d’être exécuté par un petit groupe de Space Marines l’ayant recueilli alors qu’il dérivait dans le vide à proximité d’Isstvan. Trop dans le coltar au moment de son réveil pour repérer l’héraldique de ses sauveteurs/bourreaux (rayer la mention inutile), il est amené manu militari dans un hangar décoré avec des têtes tranchées d’Iron Hands – un choix radical, mais tout le monde ne connaît pas les Displates – et sommé de faire un rapport sur les derniers événements dont il se souvient, sous peine de finir à son tour comme ornement d’intérieur. Notre héros groggy commence donc à raconter la mission qu’il avait entreprise avec quelques copains de section : aborder le Retiarus.

Cette attaque avait été rendue nécessaire par la participation de ce vaisseau World Eaters au blocus autour d’Isstvan V, empêchant le Gorgonesque Iron Hands d’aller s’enquérir de l’état de son Primarque à la surface de cette planète suppliciée. Disposant d’un plein contingent d’Immortels, le Capitaine Udris avait envoyé ces parias de choc à l’assaut du vaisseau adverse, et l’escouade de Gallikus, commandée par un Prêtre de Fer dégradé (Azoth) avait été couchée sur la feuille de match. Comme on pouvait s’y attendre, la progression avait été lente, pénible et sanglante, les fils d’Angron n’étant pas les hôtes les plus gracieux et civilisés de la galaxie. Après avoir fait leurs preuves contre l’équipage humain, transhumain et posthumain (un Dreadnought Contemptor surpris au saut du lit par l’abordage des Iron Hands), les quelques Immortels survivants arrivèrent au niveau de l’arène de combat du Retiarus, elle aussi décorée avec des bouts de cadavres appartenant à leur Légion. Ça commence à faire beaucoup.

Les y attendaient un petit groupe de berserkers, bien décidés à faire couler le sang des intrus. Pour la petite histoire, le chef des World Eaters (Robert Varken Rath) se trouvait être une ancienne connaissance de Gallikus, rencontré pendant la fatale campagne de Golthya pendant laquelle la Compagnie de notre héros fut victime d’un spectaculaire retour de flamme (de phosphex) alors qu’elle était en train de xenocider des Kethid. Ferrus Manus ayant comme chacun sait de gros problèmes de confiance en lui, il n’apprécia pas du tout les blagues potaches que Jaghatai et Leman Russ firent circuler en douce sur le démarrage de barbecue à la medusane lors du conseil primarquiel qui suivit ce regrettable événement, et catapulta les survivants chez les Immortels pour lui apprendre à lui faire honte.

Comme de juste, Gallikus et Rath se retrouvèrent au cœur de la mêlée, et notre héros aurait fini une tête plus court sans l’intervention désintéressée mais désabusée d’Azoth, qui profita du chaos des combats pour dépressuriser le sas et envoyer les combattants faire de la brasse coulée dans l’espace, constatant que les loyalistes avaient la main basse dans l’affrontement. Ça apprendra aux Iron Hands à relâcher leur discipline et à se battre comme des guerriers, et non comme des fonctionnaires CRS soldats.

Gallikus termine son compte rendu et s’attend à ce que ses mystérieux sauveteurs terminent ce que Rath avait commencé quelques heures plut tôt, mais à sa grande surprise, ce sont des loyalistes qui l’ont pris en stop, et non des hérétiques. Il fait ainsi la connaissance d’un Prêtre de Fer Iron Hands, d’un Salamander et d’un Raven Guard, et retrouve ce bon vieil Azoth, certes un peu zombifié sur les bords, comme son teint grisâtre et son œil morne le laissent apparaître, mais opérationnel à part ça. Il est temps pour les Légions brisées d’aller se venger sur les noix d’Horus…

AVIS:

Nick Kyme adapte le concept des Tueurs Nains de feu Warhammer Fantasy Battle au 30ème millénaire, les guerriers déshonorés cherchant une mort glorieuse au combat étant cette fois-ci des inflexibles Iron Hands plutôt que des nabots à crète. Nouvelle d’action pure, ‘Immortal Duty’ semble avoir été pensée comme une introduction au personnage d’Ahrem Gallikus, comme sa rencontre et son acceptation par un petit groupe de guerriers des Légions brisées à la fin du récit le laisse présupposer. Mis à part les torrents d’hémoglobine et d’huile de vidange qui s’écoulent de ces quelques pages, David Annandale nous propose de nous familiariser avec la caste des Immortels Iron Hands, introduite dans le volume ‘Massacre’ de Forge World quelques années avant la publication de cette nouvelle. Les quelques bribes de fluff parsemées au hasard des paragraphes valent-elles la peine de s’enquiller cette histoire simpliste1 ? Je vous laisse décider en votre âme et conscience.

1 : Mais qui se clôt aussi sur des questions non résolues : pourquoi des loyalistes s’amusent-ils à collectionner des têtes d’Iron Hands ? Comment Azoth a-t-il été « zombifié » ? Autant d’indices indiquant à mes yeux que Kyme n’en avait pas fini avec Gallikus et ses nouveaux copains.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Immortal Duty’ aborde beaucoup des thèmes et intrigues principaux des Iron Hands (leur penchant pour les bioniques, leur code d’honneur intransigeant, leur ténacité légendaire, la mort de Ferrus Manus et la quasi-destruction de la Légion sur Isstvan), ce qui en fait un choix pertinent pour un ouvrage comme ‘Lupercal’s War’. À titre personnel, je trouve que ‘Riven’ de John French fait encore mieux l’affaire, mais on n’est pas en présence d’une erreur de casting, comme pour certaines autres factions.

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World Eaters – After Desh’ea (M. Farrer) :

INTRIGUE:

Après Desh'eaUn sombre sentiment étreint les cœurs du fier Khârn et de ses compagnons War Hounds alors qu’ils patientent dans la salle d’attente du Conqueror. Pas de la peur, non (après tout, ils ne peuvent pas ressentir cette émotion, pas vrai ?), mais une certaine appréhension à l’idée de rencontrer pour la première fois leur Primarque perdu, le colérique Angron, que l’Empereur a téléporté chez ses fils en coup de vent avant de repartir vers sa Grande Croisade, justifiant son départ précipité pour Aldebaran par la nécessité de ne pas rater sa correspondance avec la 37ème. Le tout griffoné sur un post-it maculé de sang et collé sur la porte de la salle où Angron fait les cent pas et les quatre cents coups. Les tragédies causées par les parents démisionnaires…

Par le jeu des successions déclenché par le massacre systématique de tous les émissaires envoyés par les War Hounds se présenter au Primarque, Khârn est maintenant en charge de réussir là où ses supérieurs et camarades ont échoué au cours des heures précédentes. Faisant fi des conseils de prudence de ce planqué de Dreagher, le Capitaine toque à la porte, entre discrètement, et s’avance de quelques pas pour essayer d’apercevoir son père génétique. S’ensuit une conversation honnête et amicale entre Angron, toujours un peu jet lag depuis son départ de Nuceria, et celui qui ne tardera pas à devenir son Ecuyer. Hum. En fait, pas vraiment. Reprenons : Khârn entre, scrute les ténèbres de la pièce jonchée de cadavres mutilés, et… SE FAIT DEFONCER DANS LES GRANDES LARGEURS par un Angron toujours aussi grognon. Entre deux rebonds sur les murs, fractures, dislocations et hémorragies internes, Khârn, en grand professionnel qu’il est, tente de faire passer quelques infos capitales à son nouveau chef, comme qui il est vraiment, ce que sont les War Hounds, pourquoi ces derniers, à la grande frustration du Primarque, ne se sont pas défendus lorsqu’il leur est tombé sur le râble, ou encore comment se servir du papier toilette. Tout un programme, que seuls sa constitution renforcée de Space Marine et le bonus de résistance offert par son statut de personnage nommé lui permettent de dérouler de façon presque posée.

Angron, de son côté, s’il a tendance à évacuer sa légitime frustration d’avoir été forcé d’abandonner ses compagnons d’armes à leur destin sur Nuceria en utilisant le Capitaine comme ballon de foot, ne perd pas une miette de ce que son sous-fifre cherche à lui inculquer. Il peut également initier ce dernier à la culture martiale de sa planète d’adoption, où il exerçait la noble et utile profession de gladiateur jusqu’à ce qu’il réussisse à s’évader avec quelques collègues. Lui et ses Eaters of Cities s’étaient alors livrés à une orgie de pillages et de destruction dans l’arrière-pays de Desh’ea, vainquant l’une après l’autre les armées envoyées par les high riders pour écraser les rebelles. Coup de chance pour l’Empereur, Nuceria a été approchée juste au moment où les derniers gladiateurs étaient sur le point de livrer une ultime bataille contre les forces de l’ordre. Déveine pour Angron, recruté manu militari par son paternel pour sa Grande Croisade, même s’il ne souhaitait rien d’autre qu’une mort glorieuse aux côtés de ses frères et soeurs d’armes. La première confrontation orbitale entre le Père et le fils s’étant soldée par la mort atroce d’un des précieux Custodiens du premier, Pépé a donc décidé qu’il était too old for this shit1 et laissé son garnement de rejeton faire mumuse avec les chiens. Khârn apprend ainsi ce qu’est la Corde de Gloire, les Crocs du Boucher, ainsi que l’intégralité des techniques de soumissions, étranglements et self-defense pratiquées sur Nuceria auprès d’un professeur émérite, qui, sous ses abords de brute épaisse, se révèle redoutablement intelligent et…profondément timide (en effet, il ne lui est pas venu un instant à l’esprit qu’il avait la possibilité de sortir de la pièce dans laquelle l’Empereur l’avait confiné).

C’est toutefois la description par un Khârn au bord du KO (le Chaos viendra plus tard) de la campagne de Nove Shendak, à laquelle les War Hounds ont participé aux côtés des Iron Warriors de Perturabo et de l’Empereur en personne, qui achève de calmer Angron. Le récit des exploits vermifuges des Légions Space Marines, menées par le Maître de l’Humanité en personne, captive le Primarque au point qu’il se met à mimer les affrontements relatés par le Capitaine comateux, et la confirmation par ce dernier que Pépé est un grand guerrier n’hésitant pas à mouiller le maillot en compagnie de ses troupes, et pas un dirigeant dédaigneux laissant aux autres le sale boulot, comme l’étaient les high riders, pèse d’un certain poids dans la décision d’Angron de calmer sa colère, et d’engager la conversation honnête et amicale dont nous parlions précédemment avec ses fistons. Sa première décision, une fois ce pas franchi, sera de renommer les War Hounds World Eaters, en hommage aux camarades dont il n’a pu, à sa grande honte, ni accompagner dans la mort, ni commémorer le trépas en dotant sa Corde d’un tour funèbre avec la poussière de Nuceria. Une manière comme une autre de bien montrer à sa nouvelle famille qu’elle ne pourra jamais remplacer, ni rivaliser, avec la chaude camaraderie de l’arène. Mais c’est déjà mieux que rien…

1 : Se rappeler qu’Angron a été le 17ème Primarque découvert, et que l’Empereur en avait certainement par-dessus la tête des biberons et changements de couches à ce stade.

AVIS:

Je dois reconnaître que mon appréciation de cette nouvelle de Matthew Farrer a évolué au cours du temps. Lors de ma première lecture, j’avais été un peu déçu par ce qui m’était apparu comme une histoire simpliste, mettant en scène des personnages l’étant tout autant (un Primarque éructant de rage en mode Hulk, et un Space Marine encaissant les coups en lui refaisant son éducation). À présent, et même si je comprends toujours ce qui m’a poussé à émettre ce premier jugement, j’ai une vision plus favorable de ce ‘After Desh’ea’, que j’ai trouvé être plus complexe qu’il n’y paraissait.

Pour remettre en contexte le boulot effectué par Farrer, un auteur plutôt doué de la BL, avec cette nouvelle, il faut se rappeler que nous étions au tout début de l’Hérésie, dont les personnages étaient donc moins caractérisés qu’ils le sont aujourd’hui. Pour Angron, je pense même qu’il s’agissait de sa première apparition dans la série comme personnage de premier plan1, avant qu’ADB (entre autres) ne vienne s’occuper de son cas. Le fluffiste savait juste que ce Primarque avait été secouru contre son gré par l’Empereur d’une mort certaine à laquelle il était résigné, et que ce ressentiment allait le pousser à se rebeller contre son « sauveur » des années plus tard. Tout l’enjeu était d’expliquer de manière satisfaisante comment un gladiateur aux tendances homicidaires établies avait pu donner la patte à un maître honni pendant une période de temps assez longue, et n’était pas entré immédiatement en conflit avec son supérieur hiérarchique. Sur ce brief vraiment casse-gueule, Farrer est parvenu à livrer une copie relativement propre, ou en tout cas bien conçue, qui pemet au lecteur de suivre la progression émotionnelle et intellectuelle du Primarque, depuis sa téléportation sauvage en orbite, jusqu’à l’acceptation de ses nouveaux rôle et statut. D’abord convaincu d’avoir échappé à une tyrannie pour une autre, il finit par comprendre pourquoi les War Hounds n’ont pas cherché à riposter à ses attaques, et trouver une raison de respecter un Empereur très peu favorablement mis en avant dans cette nouvelle, lorsqu’il apprend que son père est un guerrier qui mène ses hommes à la bataille. La transition du point A au point B n’est certes pas facilitée par les caprices et tics nerveux du Primarque, qui use du pauvre Khârn comme un sac de frappe pour réguler son humeur mutine, mais on sent que Farrer avait à cœur de donner une justification logique à un ralliement peu évident, pour dire le moins.

Khârn, de son côté, est dépeint pour la première fois comme un individu sensé et sensible (qualificatifs ne s’appliquant plus guère à la fin de sa carrière), ce qui a dû surprendre plus d’un lecteur s’attendant sans doute à ce que Farrer prenne le pas de King à cet égard. Presque quinze ans plus tard, et grâce aux romans et nouvelles s’étant inscrit dans la droite ligne de ce choix de Matthew Farrer, cette divergence notable est parfaitement digérée, et, si je ne peux pas parler pour l’ensemble des hobbyistes, je suis en ce qui me concerne très satisfait de la profondeur du personnage, qui justifie à lui seul mon intérêt pour cette Légion de brutasses. Bref, si vous avez aimé le guerrier badass engagé dans une bromance déchirante avec ce vieil Argel Tal2, le combattant implacable animé par un sens du devoir chevillé au corps ayant maintenu les World Eaters à peu près dans les clous (du Boucher) pendant une bonne partie du mandat de PDG (Primarque Découpeur Général) d’Angron, et le fils dévoué prêt à se damner pour garder son père parmi les siens, vous pouvez remercier Matthew Farrer d’avoir établi ces fondations dans sa nouvelle, comme Perturabo l’a fait pour la digue impériale sur Nove Shendak. C’est d’ailleurs l’occasion pour moi de souligner que l’auteur donne également quelques éléments fluffiques dignes d’intérêt, tant au niveau micro (les traditions martiales de Nuceria) que macro (l’origine des noms de la 12ème Légion) et même meta (Big E est vraiment un très mauvais père) dans son récit, ce qui doit également être mis à son crédit.

Finalement, After Desh’ea a permis de poser de nombreuses bases de l’héritage « hérétique » des World Eaters, depuis la personnalité complexe de son Primarque et le rapport ambivalent de ce dernier avec ses fils génétiques, qu’il placera toujours en-dessous de ses premiers compagnons d’armes, jusqu’à l’adoration masochiste des World Eaters pour Angron, qui a poussé les premiers à des sacrifices toujours plus importants pour gagner l’amour et le respect du second. Il pose également Khârn comme l’excellent personnage que nous connaissons aujourd’hui, un guerrier réfléchi et pragmatique, qui finira par embrasser sa destinée et sombrer dans une folie meurtrière dont les écrits de Bill King et sa description dans le fluff de 40K se font écho (ce qui lui donne une profondeur tragique indéniable). Voilà pourquoi je considère que cette nouvelle a, au minimum, eu un impact fort sur le reste de l’Hérésie, au moins en ce qui concerne la 12ème Légion, et mérite donc la lecture à ce titre seul, mais peut également être appréciée pour la description que l’auteur fait d’Angron, tout à la fois une bête de guerre sanguinaire devant lutter contre les Clous du Boucher en permanence, un guerrier honorable et fidèle à ses compagnons, et un être à l’intelligence supérieure capable d’intégrer rapidement les informations que lui livre Khârn sous ses abords de primitif balbutiant. Bref, il y a du potentiel ici, peut-être pas superbement exprimé par Farrer3, mais présent tout de même. Dommage que l’auteur en soit (presque) resté là pour l’Hérésie d’Horus, un roman de sa main sur les World Eaters aurait été très intéressant…

1 : Je fais abstraction de son rôle de taupe de choc dans ‘Galaxy in Flames’.
2 : Et qui accomplira le rêve de tous les lecteurs de l’Hérésie d’Horus en bottant les fesses de ce faux jeton d’Erebus en one to one.
3 : Et peut-être affaibli par la traduction en français (que je n’ai pas lue). Difficile de transcrire dans une autre langue les borborigmes d’Angron de façon satisfaisante. En tous cas, j’ai trouvé qu’en anglais (et peut-être est-ce dû au fait que ce n’est pas ma langue natale) cela passait plutôt bien.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Les World Eaters ont eu la chance de se faire attribuer à Aaron Dembwki-Bowden lors de la répartition des Légions parmi les auteurs de la Black Library, ce qui leur a permis de gagner une profondeur intéressante par rapport à l’image de bêtes furieuses que le fluff leur avait accolé. Matthew Farrer a certainement joué un rôle dans cette « rédemption littéraire », qui est une des vraies réussites de l’Hérésie d’Horus, et le choix d’intégrer ‘After Desh’ea’ à ce recueil ne me surprend pas, même si le propos de cette nouvelle concerne d’abord Angron, et non pas sa Légion. Comme la trajectoire tragique du Primarque a induit en large partie celle de ses fils génétiques, trop attachés à lui pour réaliser qu’ils allaient dans la mauvaise direction, cette décision de la BL est compréhensible et pertinente. Nottingham aurait pu doubler la mise, comme pour d’autres Légions présentées dans ce recueil, avec le court mais efficace ‘Lord of the Red Sands‘.

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Ultramarines – The Laurel of Defiance (G. Haley) :

INTRIGUE:

The Laurel of DefianceLa Croisade des Ombres a été gérée, ou peu s’en faut, par les héroïques Ultramarines et l’ambiance est donc festive sur Macragge, centre politique du tout nouvel Imperium Secundus voulu par Roboute Guilliman. Mister Théorie_Pratique a organisé une cérémonie grandiose dans sa capitale pour honorer et récompenser les innombrables héros, civils et militaires, humains et Astartes, qui ont contribué à remporter cette éclatante victoire pour le camp loyaliste. Parmi eux, on trouve le Capitaine de la 90ème Compagnie des Ultramarines, le peu mondain Lucretius Corvo. Grâce à son leadership inspiré sur le monde d’Astagar, ses hommes ont mis en échec l’invasion chaotique de cette paisible planète de second ordre, lui gagnant le titre de Tueur de Titans dans la foulée (une accolade qu’il n’apprécie guère, mais il n’est pas d’une humeur très enjouée de toute façon). Nous suivons donc en parallèle la dure campagne des bleusailles contre les fanatiques de Lorgar et Angron, et le combat tout aussi éprouvant de Corvo contre le décorum et le protocole alors qu’il participe en traînant des savates énergétiques aux interminables cérémonies et soirées de Guilliman. Son arme secrète : se murger sans retenue (c’est au moins vrai pour l’un des deux événements évoqués ci-dessus).

Faisons les choses dans l’ordre et commençons par la défense d’Astagar. Ayant été retenu par l’avarie d’un moteur Warp sur le chemin de Calth, Corvo rata la surprise party donnée par les Word Bears en souvenir de Monarchia à leurs cousins a-do-rés, et fut donc surpris de constater que les renégats attaquaient comme des patates. Son petit rictus de supériorité fut toutefois remisé au placard de son Rhino de fonction lorsque les hérétiques dévoilèrent leur arme secrète : un Titan Warlord tombé dans la marmite du Chaos lorsqu’il était petit en kit1. Malgré le fait qu’avoir une langue et une truffe articulées est indéniablement cool, cette abomination (Ferghaaaaaaast de son petit nom) ne pouvait être laissée à vagabonder dans les rues d’Astagar les Vignes, mais sa vitesse et son caractère mutin empêchèrent dans un premier temps les Ultras de se débarrasser de cette menace d’une manière conventionnelle (et donc ennuyeuse), c’est-à-dire en la mettant face à un escadron de Shadowswords. N’écoutant que son instinct – ainsi qu’une remarque pleine de bon sens d’un de ses subalternes, qui ne bénéficia d’aucune médaille pour sa contribution, lui – Corvo décida de traiter le Warlord comme une bête fauve, et lui tendit un piège digne de Rahan, fils des âges farouches.

Dans les grandes lignes, il s’agît d’attirer la grosse nuisance en lui mettant un Rhino dans le champ de vision sur une place préalablement minée par les Ultramarines, et de faire péter les charges une fois le Titan en position. Brusquement plus si agile que ça, la machine chaotique n’eût d’autre choix que de sombrer dans la dépression (comme Corax avant elle) lorsque le sol se déroba sous ses gros petons, même si son augmentation « queue de singe » lui permit un instant de retarder l’échéance en se retenant à la statue de Konor Guilliman la plus proche. Iconoclaste dans l’âme, Corvo n’hésita pas un instant à déclarer une mêlée ouverte sur l’ennuyeux piédestal, dont l’effondrement provoqué par le solide pack d’avants de sa Compagnie mit fin au numéro d’équilibriste de Ferghast. Quelques tirs de fuseurs plus tard, la bête était hors d’état de nuire, et sa perte mina tant le moral des renégats qu’ils ne tardèrent pas à se faire écraser à leur tour.

Quelques semaines plus tard, sur Macragge, le même Corvo s’échine à esquiver les questions gênantes (comprendre : les questions) des participants à la soirée de pré-remise des médailles à laquelle il est forcé d’apparaître. Après s’être fait tenir la jambe par la charmante Medullina, qui ne réussit pas à le mettre sur son tableau de chasse, et avoir remonté le moral d’un autre Légionnaire habité par un sérieux syndrome de l’imposteur, le bon Capitaine va prendre l’air sur le balcon du palais où se tient la petite sauterie, et tombe sur l’Archiviste Titus Prayto, déployé comme agent de sécurité par un Guilliman très conscient de la tendance des Night Lords à venir pourrir les fêtes des autres, à plus forte mesure quand leur Primarque est en zonzon à proximité. Grâce à ses pouvoirs psychiques, Prayto repère sans mal la sale idée qu’a Corvo pour sa participation à la cérémonie du lendemain, et conseille à son frère d’armes de la jouer corporate, pour le bien de tous. « Tu peux siffler beau merle » répond un Corvo aussi éméché qu’un Astartes peut l’être, avant de monter une frappe préventive sur le buffet le plus proche…

Début spoiler…Et le jour suivant, on se rend compte que ce n’était pas une promesse d’ivrogne. Corvo accepte de recevoir les Lauriers de la Résistance que lui remet Guilliman devant la foule en délire (ou peut-être pas, car à ce stade la cérémonie durait déjà depuis 12 heures), mais il refuse en revanche de prêter à nouveau serment à sa Légion et à l’Imperium, comme tous ses prédécesseurs l’ont pourtant fait, jetant un malaise malaisant sur l’auguste assemblée. Shocking. Lorsque ce rigoriste de Lion El’Jonson lui demande de se justifier, il affirme qu’une fois c’est bien assez, car le serment d’un Ultramarine est inviolable (ce qui fait passer tous les copains qui sont passés avant lui pour des trompettes, au passage). Sourire crispé de la part de Guilliman, qui arrive tout de même à retomber sur ses pattes en faisant chanter le public (quel showman tout de même), pendant que Sanguinius se cure le nez d’un air pénétré et le Lion fronce les sourcils si fort qu’il commence à fissurer le noyau de Caliban.

La nouvelle se termine sur un dernier échange lapidaire entre Corvo et le Primarque Dark Angels, qui fait remarquer au petit impertinent que son armure est bien dépareillée pour un Ultramarine, ce à quoi notre héros répond « k » et s’en va comme un prince. La légende raconte que c’est à ce moment précis que Lionel décida qu’il préférait encore tenter sa chance à travers la Tempête de la Ruine plutôt que de continuer à se faire mal parler par le premier Schtroumpf venu. L’histoire était en marche…Fin spoiler

1 : Et à propos de marmite, son arrivée sur Astagar s’accompagna d’un tsunami de sang à l’ouverture de son vaisseau de transport, repeignant les rues de la capitale ainsi que l’armure de tous les Ultramarines du coin (dont Corvo) en cinq secondes. C’est peut-être de là que vient son goût pour l’héraldique clivante.  

AVIS:

Guy Haley honore un cahier des charges fourni dans ‘The Laurel of Defiance’, qui est à la fois une Space Marinade correcte et la réponse à la question : « et si on faisait référence à tous les événements de l’arc Ultramarines couverts dans l’Hérésie jusqu’ici ? ». La bataille de Calth, l’Imperium Secundus, l’emprisonnement du Nighthaunter, le Pharos… Haley met un point d’honneur à couvrir tous les faits saillants de sa faction d’adoption, pour un résultat qui fera sans doute la joie de l’expert, mais restera hors de portée du néophyte. Il prend aussi soin de lever un peu le voile sur les origines des Novamarines, ce qui devrait intéresser les fans du 40ème millénaire. Pour résumer : très gratifiant si vous avez pris le temps de vous pencher sur l’arc Unremembered Empire, sympathique sans plus sinon.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme les White Scars, les Ultramarines ont été dotés d’un historique hérétique particulièrement riche lorsque la Black Library s’est piquée de raconter cet épisode par le menu. L’Imperium Secundus, aussi appelée boulette de Guilliman dans certains cercles autorisés, est un arc intéressant de la saga, et il n’est donc pas étonnant que la BL ait choisi une nouvelle qui se situe au milieu de ce dernier, afin d’inciter le chaland à creuser dans cette direction après avoir terminé ‘The Laurel of Defiance’. Reste à savoir si le chaland en question aura l’envie et la motivation nécessaires pour relier les bribes d’informations et les mentions passagères que Haley fait aux événements précédant cette remise de médailles très mondaine, ou laissera ce (gros) morceau en plan. Mine de rien, tomber sur un passage comme celui-ci quand on débarque complètement dans l’Hérésie d’Horus peut être un peu fort de café !

Personnellement, j’aurais misé sur le plus simple à appréhender ‘Rules of Engagement’, qui a pour lui de présenter le véritable héritage éternel de Papa Schtroumpf : le Codex Astartes. Mieux adapté à l’exercice pédagogique que constitue ‘Lupercal’s War’ en théorie, mais moins marketing en pratique : on sait comment ce genre de dilemme est tranché.

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Death Guard – Daemonology (C. Wraight) :

INTRIGUE:

DaemonologyLa planète-bibliothèque Terathalion coulait des jours paisibles (et silencieux) depuis des décennies, ayant déplacé son allégeance de l’Ipsissimus (#TeamMagnus) à l’Impérium (#TeamPépé) après son annexion pacifique lors de la Grande Croisade. Plus occupés par la refonte de leur système de rayonnage (par auteur et/ou par spécialité ?) que par les choses bassement terre à terre comme euh… la guerre, les Terathalionnais ne se rendirent compte qu’indirectement du début de l’Hérésie, lorsque leurs grands copains Thousand Sons cessèrent de leur rendre visite. Les fils de Magnus ayant pris soin de rendre tous les bouquins qu’ils avaient emprunté chez leurs voisins, les autorités planétaires n’investiguèrent pas cette absence prolongée, et furent donc prises au dépourvu lorsque l’Endurance et une escadre de vaisseaux de la Death Guard vinrent se mettre en orbite haute au-dessus de Terathalion. Avec leur brutale efficacité habituelle, Mortarion et ses fils bombardèrent méthodiquement la planète, rasant toutes ses villes et réduisant en cendres ses inestimables archives. Ceci fait, le Primarque se téléporta à la surface du monde martyrisé afin de localiser la chose pour laquelle il avait fait le déplacement, pendant que ses hommes s’occupaient en massacrant les survivants désorientés.

Pour tenter de comprendre la raison de ce coup de folie, il faut remonter quelques décennies plus tôt, à l’époque où l’Empereur avait ramené avec lui sur Terra un Mortarion fraîchement retrouvé et dans un état physique et psychologique déjà inquiétant. Si le Maître de l’Humanité comptait à la base passer du temps avec son fiston pour resserrer les liens les unissant avant de l’envoyer conquérir la galaxie en Son nom, Ses divers projets ne tardèrent pas à L’accaparer totalement, laissant le Primarque anémié déambuler dans les couloirs du Palais Impérial sans supervision.

Comme toujours dans ces cas-là, il revint à Malcador de gérer la situation, et lorsque le service de sécurité fit une annonce micro pour demander à ce que le tuteur légal du petit Morty vienne le chercher au niveau du portail dans la toile (qui était à l’époque en chantier), le Régent de Terra se hâta en direction du sous-sol du Palais. Il n’était en effet pas nécessaire de disposer de la panoplie de pouvoirs psychiques de Malcador pour deviner qu’un individu aussi warpophobe que Mortarion soit révulsé par le grand dessein de son paternel, et puisse en conséquence agir de manière inappropriée. Après quelques minutes de discussion, Malcador réussit à attirer l’ado rebelle taille XXXXL jusque dans ses quartiers, afin d’avoir un tête à tête d’aberration à expérimentation. Echange qui se passa relativement bien, à l’aune des rapports compliqués entretenus par le Sigilite et les Primarques, puisque Mortarion se contenta d’étrangler légèrement son interlocuteur dans un accès de colère, reprochant à l’Empereur et à son bras droit de n’être pas très réglo à propos de leur rapport à la « sorcellerie ». Et en effet, prêcher une Vérité Impériale établissant l’absence du surnaturel et du divin d’un côté, et autoriser le recours aux pouvoirs psychiques de l’autre, c’est faire preuve d’une souplesse d’esprit qui se rapproche dangereusement de l’hypocrisie. « Si c’est comme ça, votre croisade, ce sera sans moi, na » conclut Mortarion d’un air boudeur.

S’étant remis le larynx en place, Malcador tenta d’amadouer cet enfant à problèmes en lui montrant que Pépé et lui travaillaient depuis des années sur un projet devant se terminer sur le monde de Nikaea, et dans lequel lui, Mortarion, aurait un grand rôle à jouer. Il faudrait seulement attendre le bon moment pour pouvoir prêcher sa cause devant l’Imperium entier, et, peut-être, obtenir l’interdiction pure et simple des pouvoirs psychiques dans les Legiones Astartes. Si le flashback d’interrompt avant que nous ayons pu voir Mortarion conclure un pacte avec son auguste géniteur sur ce sujet, sa coopération à la Grande Croisade laisse peu de doutes sur le fait qu’un compromis ait été trouvé.

Retour sur Terathalion, où la citoyenne Lermenta est venu faciliter la traque du Faucheur en chef en se jetant littéralement dans ses bras alors qu’elle tentait de fuir les combats. C’est en effet elle, ou plutôt ça, que Mortarion était venu chercher à la surface : un Démon ayant possédé un être humain, et qu’il compte utiliser pour obtenir des informations complémentaires sur le Warp, afin de combattre son influence néfaste (vaste programme). Ramenée dans les quartiers du Primarque sur l’Endurance, remplis jusqu’au plafond de grigris et autres colifichets sensés agir comme des protections contre l’Immaterium, Lermenta se retrouve attachée au mur et interrogée par un Morty se présentant comme un docteur es-ésotérisme, ce qui fait bien rire notre Démon. Etant elle-même affiliée à Tzeentch, alors qu’elle perçoit que son interlocuteur a été marqué par Nurgle, Lermenta décide de faire tourner en bourrique Mortarion en le forçant à recourir à une invocation arcanique afin de la bannir, au lieu de l’approche scientifique qu’il prétendait avoir développé à force d’étude et d’observations (mais qui ressemble furieusement à un match de MMA vu de loin). S’étant facilement libérée de ses chaînes et de son apparence humaine, la captive du Primarque titille un peu le cuir épais et la nuque roide de son hôte, et lui lâche un beau Hasta la Plagua, Baby au moment de repartir dans sa dimension natale. Ces résultats peu concluants ne font cependant que renforcer Mortarion dans son obsession anti-Warp, et la nouvelle se conclut sur la résolution prise par ce dernier de poursuivre ses investigations pour renforcer ses connaissances de l’ennemi, quitte à devenir ce qu’il déteste par­-dessus tout. 10 millénaires plus tard, les résultats parlent pour eux-mêmes…

AVIS:

Une nouvelle plus riche en révélations qu’en rebondissements, et qui fera donc la joie des fluffistes avertis (qui découvriront que Nikaea n’a pas été aussi impartial que les autorités voudraient qu’on le croit…) plus que des lecteurs occasionnels, qui pourraient se demander avec raison s’il est bien raisonnable de détruire une planète entière pour mettre la main sur un Démon (même pas majeur ou important, en plus), et souligner que Mortarion a tout de même été très chanceux de localiser en trente minutes max sa cible parmi une population s’élevant en milliards, et sur un périmètre aussi étendu qu’une métropole majeure. On pourrait me rétorquer que cela était en fait voulu par les Dieux du Chaos, la capture de Lermenta faisant progresser la corruption du Primarque et donc étant favorable aux Fab Four, mais comme Wraight ne donne aucun indice dans sa narration que c’était bien le cas, l’hypothèse du gros coup de bol WIJHesque tient la route.

On peut aussi remarquer quelques faux raccords entre la version de Mortarion de Chris Wraight et celles des autres auteurs de la Black Library ayant écrit la geste du Primarque asthmatique. Ainsi, James Swallow nous apprend dans ‘Lantern’s Light’ que la période probatoire durant laquelle l’Empereur a gardé un œil sur Son fils avant de lui donner les clés de sa Légion s’est passée dans les alentours de Barbarus, et non sur Terra comme c’est sous-entendu ici. De même, Mortarion semble être à deux doigts de basculer dans l’étreinte amicale de Nurgle à la fin de ‘Daemonology’, alors que pour Swallow (encore) et Annadale, cet événement arrivera bien plus tard et sera en grande partie orchestré par Typhon. Rien de très choquant, mais la continuité est toujours préférable.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Même si je considère ‘Daemonology’ comme une nouvelle de bonne qualité, elle ne répond selon moi pas assez au cahier des charges de ‘Lupercal’s War’ pour être considérée comme un bon choix de la part de la Black Library. Elle se concentre en effet davantage sur des arcs secondaires de l’Hérésie (et notamment l’avant Nikaea) et sur la personnalité de Mortarion, deux sujets intéressants en tant que tel, mais hors de propos ici ; que sur la Death Guard en elle-même. La description du début de l’attaque de la Légion sur Terathalion permet certes de se rendre compte de la brutalité industrielle et dépassionnée dont sont capables les ex-Dusk Raiders, mais le reste de la nouvelle ignore totalement le Death Guard moyen pour se concentrer sur la triade Mortarion – Malcador – Lermenta. À tout prendre, je pense que ‘Exocytosis’ aurait mieux fait l’affaire : même si cette histoire tourne exclusivement autour du premier Capitaine Callas Typhon, elle raconte son passage à Nurgle, qui peut être considéré comme la base de l’identité de la Death Guard hérétique.

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Thousand Sons – Rebirth (C. Wraight) :

INTRIGUE:

RebirthRetour au bercail compliqué pour le Capitaine Menes Kalliston et son escouade de Thousand Sons. Partis au Warp vauvert sur les instructions de leur Primarque six mois auparavant, ils ont tout raté de l’arrivée remarquée des Space Wolves, Custodiens et Sœurs de Bataille sur Prospero, et de l’expulsion dans l’Immaterium dont le Cyclope et ses quelques fistons survivants ont fait les frais1. Malgré la présence d’un Corvidae2 (le Sergent Revuel Arvida) dans son effectif, Kalliston ignore tout bonnement ce qu’il s’est passé sur la planète des sorciers, transformée en planète des cendriers par les bons soins des loulous pendant son absence. Pas très pro pour un Thousand Sons, vous en conviendrez. C’est donc ce qui motive notre héros à aller mener une petite due diligence sur le terrain, malgré les vagues mais mauvais pressentiments de son subalterne.

Sur place, les légendaires facultés cognitives des fils de Magnus ne mettent pas longtemps à conclure que quelque chose, ou quelqu’un, hante toujours la surface dévastée de Prospero. Les indices concordent vers la piste lupine, d’autant plus aisée à soupçonner que l’inimité entre les frères Husse (Lemaneur et Magueunne) est connue de tusse, euh, de tous. Ces savantes spéculations sont toutefois repoussées à plus tard lorsque l’un des gardes du corps de Kalliston prend un bolt en pleine tête, ce qui donne d’autres chats à fouetter à l’inspecteur Gadget. Walking like an Egyptian jusqu’au couvert le plus proche, il donne l’ordre à ses hommes de le rejoindre pour essayer de regagner ensemble leur transport…

J’opère ici une ellipse concave qui me permettra de ménager un peu de suspens à mon propos. Nous retrouvons un peu plus tard Kalliston en train d’émerger du kohl (le cirage, c’est bon pour les Dark Angels), nu comme un ver et attaché à une chaise dans une pièce plongée dans la pénombre. « Comme dans Casino Royal ! » réalise notre héros cultivé, qui se prend alors à craindre pour l’intégrité de ses bijoux de famille. Enfin, c’est sans doute ce qu’il aurait pensé s’il se souvenait de quelque chose. En l’état, le mauvais coup qu’il a reçu sur le crâne lorsqu’un missile krak est venu le photo-bomber lui a retourné le ciboulot, au point qu’il a même du mal à se souvenir de qui il est, et de comment il est arrivé ici. Quant à ses pouvoirs psychiques, ils commencent péniblement à revenir une fois son interrogatoire débuté. Car, bien évidemment, cette mise en scène funeste a pour but de prévenir le lecteur que quelqu’un, ou quelque chose, a les moyens de faire parler Kalliston… qui est plutôt OK avec ça. Après tout, il lui faut du temps pour pouvoir lancer un sort de démenottage que ses capacités d’Athanean3 ne laissent absolument pas envisager. La magie de… la magie. Bref.

Rebirth_IllustrationLa discussion s’engage donc entre le Capitaine abandonné et son interrogateur, qui prend bien soin de rester dans le noir pour laisser planer un vieux doute sur son identité. Mais on ne la fait pas facilement à ce rusé de Kalliston, qui, d’après la respiration bestiale, la voix gutturale et la tendance à l’énervement de son interlocuteur, a tôt fait de comprendre qu’il se trouve en présence d’un Space Wolf. Tout content de sa propre ingéniosité, il se permet même de titiller l’égo de son tortionnaire, oubliant un peu vite que le type en peau de slip énergétique attaché sur une chaise, c’est lui. Résultat des courses, il se mange une belle correction après avoir demandé à appeler son avocat, trait d’humour évidemment peu partagé par son vis-à-vis. Ce dernier riposte toutefois (autrement que par la violence) en faisant exprès de ne pas révéler à Kalliston ce qui s’est passé sur Prospero, information que le Thousand Son donnerait cher pour connaître. Après quelques minutes d’échanges de petites piques et de grosses torgnoles, c’est enfin le moment de jeter bas les masques, ou, dans notre cas, d’allumer la lumière. Et le colosse musculeux aux yeux injecté de sang et au comportement maniaque qui fait face au prisonnier se révèle être…

Début spoiler…Line Renaud. Ou plutôt, son descendant lointain, Khârn des World Eaters (et pourquoi pas d’abord, hein ?). Incompréhension compréhensible de la part de Kalliston, qui se trouve très Kallis-con devant ce retournement de situation. Pour sa défense, rien ne ressemble plus à un loup qu’un chien, même si on peut se poser la question pour les carlins. Bref, les Thousand Sons ont été pris en chasse et massacré par les suivants d’Angron, qui sont arrivés sur la planète après la bagarre (ce qui a dû les énerver) pour aller effacer le numéro personnel d’Horus du téléphone de Magnus (ou l’équivalent), ce qui a dû les mettre vraiment en rogne. Ils se foutent bien de savoir quel camp ont rejoint les Astartintellos, qu’ils méprisent copieusement, comme le reste des Légions d’ailleurs. Kalliston, qui pense que son vis-à-vis cherchait également la réserve de Xanax de Magnus pour gérer son stress de façon plus efficace, a alors la mauvaise idée de proposer un deal à Khârn : une thérapie complète assortie d’un stage de méditation tantrique pour retrouver sa paix intérieure, contre sa libération. Se passe alors une longue seconde pendant laquelle l’Ecuyer d’Angron semble hésiter… avant de décider bien sûr de corriger le maraud qui a osé sous-entendre qu’il était fou à lier. Et contre un personnage nommé spécialiste du corps à corps, notre héros ne fait pas le poids, même s’il arrive à se libérer de ses liens pour la bagarre finale. Surclassé par la puissance de son adversaire, Kalliston finit donc au tapis, puis dans le tapis, puis sous le tapis, au fur et à mesure que Khârn le réduit en porridge. Personne n’aime les psychiatres, c’est connu.

Finissons notre histoire et revenons en arrière pour suivre l’émancipation du dernier Thousand Son en un seul morceau de la nouvelle, le Sergent Arvida. Grâce à ses super pouvoirs de divination, il arrive à esquiver les ennemis et les balles avec un peu plus de succès que ses camarades, et échappe ainsi à la mort et à la capture. Le poids du nombre l’empêchant de secourir Kalliston, et son transport ayant été détruit par les World Eaters, notre loup solitaire joue un peu avec le feu en collant un bolt dans le casque du Capitaine Khorneux fort occupé à violenter la dépouille mortelle de ses frères d’armes, avant de partir comme un dératé dans le dédale carbonisé de Tizca. Tout finit cependant bien pour notre héros de rechange, dont le don de double vue lui a donné la certitude qu’il repartirait de la planète en vie. Bienvenue au club des personnages nommés, p’tit gars ! N’oublie pas de prendre tes chaussettes de scenarium avec toi pour la suite !Fin spoiler

1 : Après tout, il ne faut pas compter sur Leman Russ pour appliquer la trêve hivernale. Ça doit bien le faire rigoler.
2 : Les présentateurs météo de la Légion (ils voient le futur).
3 : Les psychologues de la Légion (ils lisent dans l’esprit).

AVIS:

Pour ses débuts dans l’Hérésie, Chris Wraigth a voulu soigner son lecteur avec une nouvelle à suspens. Cette intention louable s’est toutefois heurtée à une réalité que le futur seigneur de Terra ne pouvait pas vraiment deviner au moment où il a soumis son texte à la BL: l’évolution du personnage de Khârn dans la série. Car si on a droit dans ce ‘Rebirth’ à un berzerk de Khorne écumant de rage et guère maître de ses émotions, dans la droite lignée du positionnement choisi par Bill King pour cette figure chaotique dans ses propres écrits1, l’écuyer d’Angron est au contraire devenu sous la plume d’Aaron Dembski-Bowden la tête pensante et froide de sa Légion, jusqu’à un stade avancé de l’Hérésie tout du moins. De ce fait, le voir sombrer dans une démence sanguinaire au lendemain du sac de Prospero apparaît avec le recul comme un faux raccord narratif, dont Wraight n’est certes pas coupable, mais qui réduit le plaisir de lecture de cette nouvelle.  Le plus ironique dans tout ça est que n’importe quel autre Capitaine des World Eaters aurait magnifiquement fait l’affaire, alors que la présence au casting de cette célébrité, utilisée donc à contre-emploi par l’auteur, dessert ce ‘Rebirth’.

Cette déception évacuée, il faut reconnaître que Chris Wraigth livre une histoire assez correcte, sérieusement bâtie et respectueuse du fluff Thousand Sons et hérétique déjà établi – à l’exception de celle notée ci-dessus, évidemment – qui lui permet d’introduire son personnage récurrent d’Arvida, que l’on retrouvera (comme présagé en conclusion de la nouvelle) plus loin dans l’Hérésie2, et pas forcément du côté où on l’attendait. Et c’est plutôt heureux, car le « héros » malheureux Kalliston n’inspirait ni intérêt, ni sympathie à l’auteur de ces lignes. Ce ne sont pas toujours les meilleurs (personnages) qui partent les premiers, heureusement…

1 : Et dans une moindre mesure, Graham McNeill et Ben Counter dans ‘False Gods’ et ‘Galaxy in Flames’.
2 : ‘Allegiance’, ‘The Last Son of Prospero’.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Je peux comprendre pourquoi la Black Library a choisi de placer ‘Rebirth‘ dans l’emplacement dédié aux Thousand Sons dans ce recueil : il s’agit du premier épisode de la saga de Revuel Arvida, et avec un peu de chance, il intéressera suffisamment le lecteur pour que ce dernier achète les bouquins où cette dernière se poursuit. Ce raisonnement marketing ne fait cependant pas grand sens d’un point de vue didactique, ce qui aurait dû être la priorité des éditeurs de ‘Lupercal’s War‘: outre le fait que cette nouvelle est finalement plus liée aux World Eaters qu’aux Thousand Sons, elle ne contextualise pas assez à mes yeux l’incendie de Prospero. Plus grave, elle ne permet pas au newbie de comprendre pourquoi Magnus n’a rien fait de mal, ce qui est la BASE de la culture Thousand Sans, reconnaissons-le. Un meilleur choix aurait été ‘Thief of Revelations‘, avec une mention honorable pour ‘The Sixth Cult of the Denied‘, qui a l’énorme avantage d’expliquer en détail le système de cultes que Wraight mentionne rapidement ici.

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Sons of Horus – Little Horus (D. Abnett) :

INTRIGUE:

Little HorusDans la famille Horus, il y a bien sûr le père, Lulu la Percale1, mais il y a aussi le fils, Aximand, surnommé Horus Minus par ses petits camarades de jeu. Ou l’autre Horus, si on veut être corporate. Capitaine de la 5ème Compagnie des Sons of H…imself et membre du Mournival, c’est un individu qui compte au sein de la Légion. Son tort aura de ne pas avoir la personnalité, la fabuleuse destinée, ou le destin tragique de ses condisciples mal lunés, ce qui l’a contraint à jouer les seconds couteaux pendant ce début d’Hérésie. Tout le monde ne peut pas se retrouver sous les feux des projecteurs, il faut bien qu’il y ait des gens qui se battent (ou font semblant de se battre) à l’arrière-plan. Pourtant, notre héros du jour a des arguments à faire valoir, à part sa première place au concours inter-Segmentum des sosies de Michel Blanc, s’entend. C’est ce que cette nouvelle d’Abnett nous propose de découvrir.

Le propos prend place quelques temps après les événements d’Isstvan, alors que les Sons of Anarchy Chaos commencent leur course de fond en direction de Terra. Sur leur chemin se trouve le monde de Dwell, farouchement loyal à Pépé et trop militarisé pour être ignoré par les renégats. De plus, un petit comique en fer blanc du nom de Shendrak Meduson commence à faire parler de lui, et pas en bien. Très mécontent d’avoir retrouvé son Primarque rétréci à l’essorage, ce Capitaine Iron Hand a mis sur pied une force de guérilla galactique, qui s’est faite une spécialité de titiller les flancs du Maître de Guerre. Si Meduson parvient à rallier Dwell à sa cause, son pouvoir de nuisance en sera décuplé, et ça, Horus ne le souhaite pas le moins du monde. Alors que la Légion se prépare à illuminer la planète, nous surprenons une discussion entre les derniers Mournivaliers encore debout. Aximand, qui s’est mis à rêver que quelqu’un le regardait, et à entendre une respiration mystérieuse autour de lui depuis la purge des Sons, serait pour une reconstitution de cette saine institution. Il faudrait pour cela des candidats dignes de ce nom, et alors que lui penche pour un petit nouveau prometteur du nom de Grael Noctua, même pas encore Capitaine mais c’est pas grave, Abaddon se contente d’égrener les noms des types de sa Compagnie jusqu’à ce qu’Aximand finisse par lui accorder Falkus Kibre. Tope là mon gaillard, cochon qui s’en dédit.

Chargé de la prise du Mausolytique, croisement entre une morgue et une bibliothèque où les défunts de Dwell sont gardés sur étagère pour que leurs descendants puissent bénéficier de leur savoir, Aximand entraîne ses hommes, ainsi que son stagiaire Noctua, à l’assaut du complexe défendu par les Tyjunate Compulsories, une garde d’élite dont la chance est de pouvoir compter sur des boucliers énergétiques de bonne qualité. Résultat des courses, les bolts des Astartes se révèlent assez peu efficaces, ce qui chagrine profondément Horus Minus. Heureusement, la honte d’un retard lui est épargnée par la bonne idée de son rookie, qui suggère tout bêtement de foncer dans le tas l’épée au clair, ce qui marche du (marteau) tonnerre. Vive la jeunesse. Emporté par son élan, et bien aidé par les moulinets ravageurs de sa latte personnelle, qu’il a spirituellement appelé Mourn-it-all2, Aximand se retrouve un peu isolé en tête de l’assaut, et manque de se faire occire par la contre-attaque féroce d’un Iron Hand isolé, qu’il identifie comme étant Bion Henricos, l’un des lieutenants de ce diaaaaaable de Meduson. Il faut dire que ses hallucinations auditives l’ont distrait au pire moment, et il s’en est fallu d’un rien pour que notre héros se fasse bellement navrer par son adversaire, qui a une grande épée et sait bien s’en servir. Après quelques passes d’armes dans le Mausolytique, artistement décoré de grandes statues blanches, les renforts finissent enfin par arriver du côté renégat, permettant à Aximand de vaincre – en traître (c’est fluff) – Henricos. Une question lui brûle alors les lèvres : pourquoi son assaillant était il seul ?

Début spoiler…Et la réponse est : il ne l’était pas. Car les statues blanches de la pièce n’étaient pas en marbre mais en chogorite, et les White Scars les plus patients de la galaxie peuvent enfin déclencher leur attaque, menés par ce rusé de Hibou Khan.Les statuesques Astartes espéraient mettre le sabre sur Horus, mais faute de grives… Se rouler dans la farine pour rendre la pareille à son adversaire, c’est beau tout de même. Il y a un mot de Chogoris pour ça d’ailleurs: prank’h. Après avoir prononcé la seule phrase qui s’imposait en cette situation3, Baby Horus doit à nouveau défendre sa vie, et y arrive beaucoup moins bien. Une estocade de l’oiseau de nuit fend en effet son casque en deux, délestant notre héros de la plus grande partie de son visage. La blessure n’est pas mortelle, mais seulement évanouissante pour Aximand, qui, dans son coma réparateur, met enfin un nom sur le triste sire qui le stalke à coups de soupirs depuis ces dernières semaines : Garviel Loken. Le fâcheux en question étant présumé mort sur Isstvan III, cela règle le problème pour Horus Minus, dont la chirurgie reconstructrice a laissé quelques traces. Mais, comme il le dit lui-même, il n’a pas peur du changement, alors…Fin spoiler  

1 : Surnommé ainsi à cause de la finesse de ses draps.
2 : J’aimerais bien savoir comment la VF s’est dépatouillée de ce petit jeu de mots du père Abnett. Avis aux lecteurs francophones.
3 : Coucou, coucou, coucou, hibou, coucou.

AVIS:

Après avoir mis l’Hérésie sur les rails avec ‘Horus Rising’, Dan Abnett reprend les commandes d’une Légion dé-Lokenisée, et désormais en guerre ouverte contre l’Imperium. C’est l’occasion pour lui de donner son heure de gloire à l’un des membres les plus discrets du Mournival, Horus Aximand, qu’on sentait un peu mal à l’aise par la tournure prise par les événements dans ‘Galaxy in Flames’, même si cela ne l’avait pas empêché de rabattre le caquet de cette grande gueule de Torgaddon sur Isstvan III. C’est également par ce biais qu’il commence à nous présenter son nouveau projet hérétique, mené d’une main de fer (héhé) par un nouveau-venu du nom de Shendrak Meduson, déterminé à venger la mort de son Primarque en enquiquinant les traîtres sur la route de Terra au maximum de ses capacités.

On retrouve donc dans ce ‘Little Horus’ le mélange d’action frénétique, de rebondissements cinématiques et de réflexions plus posées sur l’état des Sons of Horus après qu’ils aient franchi le Rubicon (avant que ça ne devienne tendance) auquel Abnett nous avait habitué dans son pavé initial. Tout cela est bel et bien bon, et nous donne un précieux éclairage sur cette période de transition des fils d’Horus, à la trahison déjà consommée mais, pour la majorité d’entre eux, encore des Space Marines à peu près fréquentables, croyant sans doute s’être embarqués dans une noble révolution contre un Empereur tyrannique. Les années qui suivront en surprendront donc quelques uns… à commencer par notre protagoniste, déjà travaillé par sa conscience coupable1, et qui devra perdre la face au sens premier du terme pour laisser derrière lui ses allégeances passées. Little Horus est donc une lecture des plus sympathiques, pas indispensable en termes de compréhension de l’Hérésie, mais très intéressante pour ceux qui se passionnent pour les jeux de pouvoirs à l’oeuvre au sein des Sons of Horus.

1 : Il y a fort à parier que la révélation de l’identité de l’individu venant lui souffler dans les oreilles H24 ait été un moyen pour Abnett de nous prévenir qu’un duel entre Aximand et Loken dans la suite de l’Hérésie était à attendre.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Les Sons of Horus sont sans doute la Légion de Space Marines qui compte le plus de personnages nommés importants de toute l’Hérésie d’Horus, à commencer par leur père génétique, d’après qui la franchise est tout de même nommée. Cela explique que la majeure partie des nouvelles qui leur sont consacrées se concentrent sur leurs VIP et pas sur le sort du légionnaire de base (dont le point de vue aurait été intéressant, je le dis au passage). C’est le cas avec ce ‘Little Horus‘, qui a le mérite de faire ressortir les complexes rouages politiques qui meuvent cette Légion, surtout après qu’elle soit passée au Chaos. Et puis, c’est la seule nouvelle signée Abnett du recueil, donc il serait dommage de bouder son plaisir. Mentions honorables pour ‘Twisted‘ (sur la grande famille du Chaos) et ‘The Wolf of Ash and Fire’ (sur les relations entre Horus et l’Empereur avant l’Hérésie).

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Word Bearers – Child of Chaos (C. Wraight) :

INTRIGUE:

Child of ChaosLe Siège de Terra approche méchamment et quelque part en orbite du Monde Trône, un Astartes en arrêt maladie contemple la planète de Pépé avec un œil torve et un visage couvert de biafine. Notre protagoniste est, vous l’aurez deviné, Erebus. Sauf que en fait, non, mais nous y viendrons un peu plus tard. Passé à la râpe à fromage par Horus et slam dunk-é dans le bac à ordures dangereuses par Lorgar, le surhomme par qui le scandale éclata n’a pas vraiment d’épaule sur laquelle suinter, mais il s’en fout royalement car son auguste compagnie lui suffit. Et comme dit son deuxième proverbe favori (on parlera de son premier un peu plus loin): « plus on est de fous, plus on rit, moi je suis tout seul parce que personne ne m’aime alors je compense en étant complétement ravagé du bulbe et je peux rigoler un bon coup ». Quel dommage que seule la version abrégée de cette maxime si profonde nous soit parvenue. Toujours est-il qu’Erebus est décidé à se parler à lui-même pour passer le temps, et il embarque donc le lecteur dans le récit de son origin story, qu’il considère comme étant édifiante. Voyons cela.

Première confession: Bubus a toujours été mauvais. Et surtout en dictée. Il ne s’en cache ni ne s’en excuse, et il n’y a pas d’élément déclencheur à chercher pour explique sa chute, à part peut-être le fait qu’il ne supporte pas la chaleur. Mais bon, se dire que l’Hérésie aurait été évitée par un malheureux climatiseur, ce n’est pas très glamour, donc restons sur l’hypothèse de la malignité incarnée. Déjà tout môme, son passetemps favori était d’arracher les pattes de scorpion de Colchis, ce qui n’est guère charitable. Issu d’une famille miséreuse, il se mit à lorgner du côté des khôl gris du Covenant après avoir constaté que les prêtres menaient une vie de patachon. Après quelques mois à apprendre par cœur des cantiques et à apprendre à lire sur des bouquins piqués en douce dans le temple local, notre zéro accomplit ses premières armes en garrotant de sang froid un jeune dévôt de son quartier, auquel sa mufle de mère le comparait à longueur de journée pour le rabaisser. L’individu en question témoignait de sa foi envers les Puissances en se peignant des mots sacrés sur le visage, habitude que son assassin reprit, tout comme il lui emprunta son nom: Erebus. MIND BLOWN. On est passé à ça d’avoir l’Hérésie manigancée par un gonze appelé Post Malone ou Tekashi69, ça fait froid dans le dos tout de même. Heureusement que Môman Bubus n’aimait pas le rap.

Ce premier assassinat permit toutefois à l’usurpateur d’entrer dans les ordres sans coup férir, et de commencer à tailler son chemin vers le pire, soit le Pouvoir, l’Influence, la Richesse et l’Efferalgan. Car Erebus n’est pas vraiment croyant à la base, et avoue volontiers s’être piqué d’intérêt pour la chose religieuse de la même manière que tu as pris goût aux endives au jambon: à l’usure. BLIND MOWN. Pendant qu’il faisait ses classes, un certain Prophète commençait à faire parler de lui dans l’arrière pays colchitique, et il ne fallut pas longtemps avant qu’Erebus ne pose les yeux sur celui qui allait devenir son père adoptif (Lorgar), accompagné par sa future marâtre (Kor Phaeron). Ce ne fut pas le coup de foudre mais le jeunot comprit qu’il fallait qu’il se rapproche de Mr Tête d’Œuf pour son propre bien, ce qu’il fit.

Une arrivée impériale et une transformation en Space Marine plus tard, notre désormais fringant héros part sillonner la galaxie à la recherche des Dieux du Chaos, envers qui il sent une attirance particulière. Rien de très intéressant ne se produit jusqu’à l’arrivée sur Davin, et la visite qu’Erebus rend à un temple décati que lui ont révélé ses visions. Sur place, il rencontra un vieux prêtre ridé et impoli, ce qui n’est pas très malin quand on s’adresse à un type qui fait deux fois sa taille et trois fois son poids. Parmi les tags effacés et les inscriptions désobligeantes, les sens de sorceleur du surhomme firent clignoter en rouge un dessin de l’Anathame (qui ne se trouvait pas sur place, ce serait trop simple) ce qui fut apparemment suffisant pour son bonheur immédiat. Il repartit donc avec une envie folle de farmer du Wither squelette1, en ordonnant au vioque de faction de retaper un peu la bicoque, et en donnant rendez-vous dans quelques décennies à une très jeune Akshub (qui ironie de l’histoire, lui donnera des cours en chaotique appliqué lorsqu’il reviendra… quel fumiste tu fais Bubus alors). La suite de l’histoire, sans être parfaitement connue, l’est toutefois suffisamment pour pouvoir laisser Erebus à ses divagations fiévreuses et purulentes. Mais tel est le destin de ceux qui manquent de peau.

1Mais sans accès au Nether, il dut se contenter de piller les collections permanentes du musée de la vie rurale de l’Interex, comme chacun sait.

AVIS:

Chris Wraight lève le voile sur l’origine d’un des personnages les plus importants de l’Hérésie n’étant pas Pépé ou un Primarque : bonne idée dans l’absolu, et assez bien réalisée même si ‘Child of Chaos’ tient plus de la lecture complémentaire intéressante que du must read définitif. Il y a certes quelques révélations bien senties de la part d’un auteur qui a trop de métier pour ne pas jeter quelques bouts de fluff anecdotiques (au sens littéral) en pâture à son public de fanboys dans une nouvelle telle que celle-ci, mais rien qui changera la face du lore. On apprend par exemple que c’est à Erebus que l’on doit la maxime « béni soit l’esprit trop étroit pour le doute », ce qui est utile à savoir pour briller dans un centre GW mais relève de la trivia hérétique au final. Notons également que Wraight se retrouve piégé par cet ennemi acharné de l’auteur de l’Hérésie d’Horus qu’est la continuité temporelle (à égalité avec la bonne vieille logique cartésienne): si Erebus a pu devenir un Word Bearers, c’est qu’il était très jeune à l’arrivée de l’Empereur. Or on sait (‘Lorgar: Bearer of the Word’) que Kor Phaeron avait déjà mis des pensées non euclidiennes dans la tête de son pupille bien avant que Bubus soit en mesure de susurrer des salaceries à l’oreille de son Primarque : l’image d’Epinal d’instigateur de l’Hérésie qui accompagne le Chapel-Un depuis quelques années en prend donc un sacré coup dans les ratiches.

Bref, on tient ici une lecture sympathique et qui permet à Wraight de mettre un peu d’ordre1 dans, et de faire quelques clins d’œil à la suite de, l’histoire d’Erebus, ce qui peut, ou non, justifier les 3,49€ demandés par la Black Library pour tuyauter le lecteur/fluffiste sur ce VIP chaotique.

1J’ai bien aimé le fait qu’il cherche à couvrir les traces de Thorpe en indiquant au détour d’une phrase que, oui, les Dieux du Chaos avaient bien un œil (mais juste un œil) sur Colchis et le Covenant, respectivement élus « Planète chaotique la plus calme du Materium » et « Secte chaotique hégémonique la moins efficace de la galaxie » 10.000 ans de suite. Il ne pouvait guère faire plus que cela sans réécrire l’histoire.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Erebus est certainement un des personnages les plus importants de l’Hérésie d’Horus, mais sa tendance à ne parler que de sa vie et de son oeuvre fait de ‘Child of Chaos‘ une piètre entrée pour les Word Bearers dans ce recueil introductif. C’est dommage car cette Légion bénéficiait d’un corpus assez imposant par rapport à sa notoriété, dans lequel la Black Library aurait été bien inspirée de puiser. Ma préférence va à ‘Children of Sicarus‘, qui illustre le lien particulier qu’entretiennent les Word Bearers avec les Puissances Noires, et met également en lumière les relations tendues entre Kor Phaeron et Lorgar. Si les longs formats ne vous font pas peur, il faut évidemment lire ‘The First Heretic‘, qui reste à ce jour l’un des meilleurs bouquins de toute la série.

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Salamanders – Artefacts (N. Kyme) :

INTRIGUE:

ArtefactsHorus a franchi le Rubicon Traitoris et les Salamanders s’activent pour rejoindre la flotte envoyée par l’Empereur punir la rébellion de son Maître de Guerre. Vulkan est de passage par Nocturne et par la lune-arsenal Prometheus pour se ravitailler avant le grand départ, mais lorsqu’il convoque le Maître de Forge T’kell dans son atelier personnel, ce n’est pas pour parler batteries ou boulons.

Tout commence par le récit que fait le Primarque à son fils génétique de la destruction de Nostramo des mains armes de coque de ce mauvais sujet de Konrad Curze, il y a bien des années de cela. Arrivé en catastrophe dans le système en compagnie d’Horus et de Jaghatai pour tenter de raisonner le dément, il ne put qu’assister à la dislocation de la planète, expérience qui le marqua profondément (c’est un sensible). Toutefois, si le Nighthaunter n’avait pas son pareil pour se fondre dans l’obscurité lorsqu’il agissait en solo, il était moins insaisissable au volant du Nightfall (la légende raconte qu’il n’avait pas son permis), et le terrocide fut rapidement arrêté par ses frangins, qui durent décider que faire de ce mauvais sujet. Horus étant Horus, c’est son idée de réhabilitation par chaperonnage qui finit par l’emporter, et ce bonimenteur de première réussit même à refiler le bébé à Vulkan pendant que lui-même allait briller ailleurs dans la galaxie et devenir Maître de Guerre quelques années plus tard. Comme quoi, même au 30ème millénaire et même pour un Primarque, avoir la garde des enfants est un gros frein à la carrière.

Vulkan fit de son mieux, mais la psyché torturée et fracturée de Konrad Curze ne se remit jamais du Nostramo Incident, comme les Commémorateurs diplomates appelèrent cette boulette regrettable1. La campagne de Kharaatan, menée de front par les Salamanders et les Night Lords, en apporta l’éclatante et sanglante démonstration, bien que Papamander ne soit pas non plus exempt de tous reproches sur ce coup là (je suis presque certain que passer un enfant désarmé qui se rend au lance-flammes est un crime de guerre). Le plan initial prévoyait que Konrad soit confié à Rogal Dorn une fois dégrossi par les bons soins de Vulkan, mais, ô surprise des surprises, le Prétorien de Terra ne donna jamais suite aux multiples messages laissés par son frérot sur son répondeur. À croire qu’il ait gardé une dent contre le fou furieux qui manqua de le tuer quelques années plus tôt2… N’ayant pas d’autres recours, Mister V. finit par appeler Horus à la rescousse, mais manque de pot, son frère bien aimé était déjà secrètement corrompu (et pas secrètement du tout imbittable), et accueillit la nouvelle de l’indécrottable perversité du Nighthaunter avec un émoji ptdr avant de mettre fin à la discussion.

Long story short, si Vulkan a fait venir son teckel, c’est parce qu’il s’est rendu compte que certaines armes étaient trop puissantes pour prendre le risque qu’un être malintentionné s’en empare et les retourne contre l’Imperium. C’était vrai de Konrad Curze et du marteau tonnerre que le sympathique Primarque avait forgé pour Horus avant qu’il ne se rebelle contre l’autorité paternelle, ça l’est aussi des milliers de gadgets de maître que Vulkan a bricolé pendant la Grande Croisade, et dont il rempli un hangar sur Prometheus. Il souhaite donc que T’kell passe tout à la broyeuse pendant que lui ira passer les menottes énergétiques à son frère dévoyé.

C’est un grand sacrilège pour T’kell, qui ne peut se résoudre à laisser des trésors tels que l’Adamant Flyswatter ou le Perpetual Handspinner rejoindre les poubelles de l’histoire. A force de pleurnicheries éhontées, il finit par convaincre son boss d’épargner sept artefacts, un pour chaque royaume de Nocturne, dans sa corvée valorisation des pas-encore déchets dangereux. Troll dans l’âme, Vulkan bombarde son subalterne Père de Forge et lui indique que sa mission est tellement importante qu’il devra rester sur place pour la mener à bien au lieu d’accompagner les copains sur Isstvan. On connaît la suite de l’histoire…

1 : Fun fact, c’est également sous ces termes que l’Empereur désigna Nostramo la première fois qu’Il posa les yeux sur la planète.
2 : Et dont il a confessé à Malcador avoir une trouille bleue, qui plus est.

AVIS:

Une nouvelle très intéressante pour les amateurs de fluff car on y découvre un pan jusque là caché de la Grande Croisade (les efforts déployés par Horus et Vulkan pour réhabiliter Konrad Curze), ‘Artefacts’ est un travail de jonction soigné de la part de Nick Kyme. En plus de faire référence à la grande histoire de l’Hérésie (le départ de Vulkan vers Isstvan), cette nouvelle fait échos à certains événements dépeints dans le ‘Vulkan Lives’ du même auteur, et pose les fondations de l’un des mythes les plus importants du Chapitre des Salamanders au cours des millénaires qui suivront : la quête des artefacts légendaires mis de côté par le premier Père de Forge, T’Kell. Un vrai succès en ce qui me concerne.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Je suis partagé sur ‘Artefacts’ : d’un côté, cette nouvelle parle beaucoup plus des complexes relations entre Primarques que des Salamanders eux-mêmes, mais de l’autre, aborder le sujet des origines des Artefacts de Vulkan, c’est toucher du doigt l’une des facettes les plus importantes de la culture des lézards énergétiques. Ce qu’il manque à cette histoire pour remplir totalement son but pédagogique est à mon sens une emphase plus importante sur le caractère humain de cette Légion, qui est l’autre de ses caractéristiques notables. On peut arguer que l’exemple donné par Vulkan (a.k.a. le babysitter d’Horus) est déjà parlant, mais comme les actions du Primarque ne présupposent pas toujours celles de leurs fils génétiques, je n’accorde pas ce point à ‘Artefacts’. Ceci dit, il y a assez peu de nouvelles hérétiques dans lesquelles les héros sont des Salamanders : la BL n’avait pas des masses de choix pour cette section de ‘Lupercal’s War’.

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Raven Guard – The Grey Raven (G. Thorpe) :

INTRIGUE:

The Grey RavenL’ex-mais-pas-tout-à-fait-finalement Archiviste de la Raven Guard Balsar Kurthuri a été renvoyé sur Terra par Corax en personne après les événements relatés dans ‘Weregeld’, où il doit recevoir le jugement de Malcador le Sigilite. Tel le bouc (ici corbeau) émissaire, notre surhomme endosse une responsabilité collective dans cette histoire, puisqu’à travers lui, c’est tout le Librarium de la XIXème Légion qui se trouvera amnistié ou frappé d’anathème. Le Primarque furtif n’assume en effet plus trop la permission qu’il a donné à ses fils de s’asseoir sur l’Edit de Nikea, bien qu’il n’ait pas fait le fin bec lorsque les pouvoirs psychiques de Kurthuri – catapulté Archiviste en chef de la Raven Guard après le désastre d’Isstvan V – l’aidèrent à récupérer le patrimoine génétique nécessaire à la reconstruction accélérée de sa Légion. Avec les résultats que l’on sait (#JamaisPlus, etc). Très chill dans l’âme, Kurthuri a accepté la mission sans rechigner, tout comme il a juré à Corax de ne pas faire usage de ses pouvoirs jusqu’au verdict de Malcador. Voici les termes posés.

Les hasards de la guerre ont fait que notre corbeau énergétique a fait le voyage non pas sur un vaisseau appartenant à sa Légion, mais s’est fait prendre en stop par des Imperial Fists sous le commandement du Capitaine Noriz. Il est également accompagné par le Custodes Arcatus Vindix Centurio, détaché par Valdor pour s’assurer que le patrimoine génétique remis à la Raven Guard était utilisé dans le respect des clauses établies, et un peu désœuvré depuis que Corax a bousillé son kit de petit chimiste. Alors que le Wrathful Vanguard sort du Warp pour pénétrer dans le système solaire, les revenants sont accueillis par une armada de vaisseaux et de stations de combat, preuves irréfutables que la guerre ne tourne pas en faveur des forces impériales. Il ne faut pas longtemps avant que les demandes d’authentification pleuvent sur le Uber de Kurthuri, qui laisse sagement Tchuck Noriz et AVC gérer l’administratif avec leurs vis-à-vis. Après tout, qui de plus qualifié qu’un Imperial Fists et un Custodes pour négocier un passage vers Terra ?

Malheureusement pour l’Archiviste déclassé, ses comparses ne font pas un super taf, et lorsque le stagiaire Custodes (Ludivicus) que Malcador a placé à la régulation du trafic solaire se met à faire du zèle auprès de son collègue, la situation dérape très rapidement. Kurthuri, trop honnête, a en effet eut le malheur de déclarer qu’il était sous le coup de l’Edit de Nikea, aveu suffisant pour que Ludivicus éructe un mot code secret sur la fréquence radio, transformant aussitôt Arcatus en ennemi mortel de ce pauvre Corneille. Et lorsque les bolts commencent à lui voler dans les plumes, Kurthuri décide de connaître un petit peu la peur, et bat prudemment en retraite pendant que Noriz, tout aussi surpris que son camarade Légionnaire par la réaction à brûle pourpoint du Custodes, tente de raisonner ce dernier.

S’engage alors une partie de chasse d’une genre un peu particulier, les Custodes du Wrathful Vanguard se mettant à traquer Kurthuri dans les coursives, tandis que ce dernier cherche à s’échapper du vaisseau pour rejoindre Terra et plaider sa cause directement auprès du Régent de Pépé, bien aidé par les Imperial Fists dans ses manœuvres d’évasion. Comme ni les Jaunards ni les Dorés ne tiennent vraiment à causer des pertes dans l’autre camp, l’affrontement tient plus du match de paint ball que de la fusillade sans merci, jusqu’à ce qu’Arcatus rattrape Noriz et Kurthuri, et les engage au corps à corps.

Bien qu’en désavantage numérique, le Custodes a tôt fait de démontrer qu’il est une classe au-dessus de l’Astartes moyen, même gradé, et s’énerve tellement qu’il finit par empaler le pauvre Noriz sur sa lance gardienne. Comprenant qu’il n’a aucune chance de sortir vainqueur de ce combat à la régulière, Kurthuri décide de revenir sur sa parole et d’avoir recours à ses pouvoirs… jusqu’à qu’un froncement de sourcil dédaigneux de son adversaire lui fasse changer d’avis. Résigné à obéir à son Primarque, même au prix de sa vie, notre héros finit par se rendre, et est enfin mené jusqu’à Malcador…

Début spoiler…Qui avait en fait un job à lui proposer parmi ses Chevaliers Errants, et cherchait à tester… son self control j’imagine ? dans des conditions extrêmes avant de l’embrigader dans son organisation secrète. La nouvelle se termine donc avec l’arrivée de ce vieux lézard d’Umojen, chargé par le Sigilite de briefer le bizut sur ses missions à venir. L’histoire ne dit pas si Corax a été dédommagé pour ce détournement de ressources…Fin spoiler

AVIS:

Thorpe a beau être un expert de la Raven Guard, je n’ai pas trouvé cette histoire très aboutie. Outre le fait qu’elle n’apporte pas grand-chose à l’Hérésie d’Horus, et apparaît davantage comme un moyen pour l’auteur de faire faire des heures supplémentaires à l’un de ses personnages alors que la tendance générale est plutôt à l’écrémage sévère en préparation de la clôture de la saga, je reproche à Thorpe d’avoir dévoyé la loyauté fanatique des deux factions les plus Pépéphiles de l’époque, les Custodiens et les Imperial Fists, juste pour pouvoir mettre en scène à peu de frais le simulacre d’affrontement entre les deux gardes prétoriennes de l’Empereur sur le Wrathful Vanguard. Cette guéguerre sans (presque) victimes est totalement illogique à l’époque où l’histoire prend place (après la tentative d’infiltration de Terra par l’Alpha Legion), et la réaction imprévue d’Arcatus n’aurait dû selon moi avoir que deux conclusions : soit une coopération immédiate et totale entre Custodiens et Imperial Fists, même si les seconds ne comprennent pas les motivations des premiers, soit un combat sans merci, et autrement plus sanglant, entre les deux camps. On ne me fera pas croire qu’un Custodien qui a identifié un ennemi de l’Empereur retienne ses coups pour épargner quiconque se met sur son chemin, fut-il un Imperial Fists. Ajoutez à cela que le test de Malcador est, au fond, très bizarrement conçu (il cherchait une forte tête, mais pas trop quand même ?), et vous obtenez un résultat très passable. Espérons que Kurthuri justifie par la suite (et la fin) de l’Hérésie le traitement de faveur éhonté dont il bénéficie ici.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

La Raven Guard est tellement discrète que les nouvelles qui parlent vraiment d’elle (et pas de ce poseur de Valerius) sont relativement rares. Je dois avouer au moment où j’écris ces lignes que je n’ai pas de référence à mettre en avant à la place de ce ‘Grey Raven‘, qui ne rend pas vraiment justice à la Légion de Corax, et se concentre plutôt sur l’application de l’Edit de Nikea et la circulation compliquée sur le périphérique du système solaire (deux sujets très importants, j’en conviens). Pour ne rien arranger, cette histoire prend place relativement tard dans l’Hérésie, et a toutes les chances de ne pas être bien appréciée par un lecteur novice. Une nouvelle mettant en scène les talents d’infiltrateurs hors normes des surhommes corneilles aurait été à mon sens plus adaptée.

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Alpha Legion – Liar’s Due (J. Swallow) :

INTRIGUE:

Liar's DueMalgré le déclenchement de l’Hérésie, la vie suit son cours normal à la surface de Virger-Mos II, planète agricole de pouillème ordre située tellement loin en périphérie de l’Imperium que ses habitants doivent se contenter des podcasts envoyés par des YouTubers de Terra pour se tenir informés de l’avancement du conflit. L’épisode qui est retransmis le jour où commence notre histoire, dans la ville 441, est cependant un peu spécial, dans la droite lignée des ‘Noces Pourpres’ de Game of Thrones2. Et pour cause : on annonce à nos braves péquenauds que l’Empereur a cassé sa pipe, et qu’Horus a gagné la guerre et pris le trône paternel. Stupeur et tremblements parmi la populace, sur laquelle souffle bientôt un vent de panique. Que va devenir leur petite colonie ? Quelle position adopter après ce retournement de situation que nul n’avait vu venir ? Faut-il attendre de la visite dans les jours/mois/années à venir de la part du nouveau maître de l’Imperium et de ses armées ? Quel bruit fait le renard ? Des dizaines de questions à la gravité inédite fusent de part et d’autre, tandis qu’au milieu de la ville, notre héros, le jeune et idéaliste Leon Kyyter, a bien du mal à digérer la nouvelle.

Car Leon est un lointain descendant des fanboys pratiquant le « Hobby » sur Terra en M2. En plus de posséder une armée de figurines en métal (et en bois, ça coûte moins cher) peinte avec amour, il est un lecteur assidu du fluff de la propagande impériale, et possède même une authentique douille de bolter (les ravages du merchandising). Si son père lui avait permis, il se serait fait tatouer « I ❤ Pépé » sur le front. Aussi, apprendre de but en blanc que son idole absolue a tiré sa révérence le chagrine au plus haut point. Laissant ses concitoyens débattre entre eux de la marche à suivre, il s’en va relayer la nouvelle au seul résident du foyer de jeunes travailleurs que son père et lui font tourner, le sieur Mendacs, Commémorateur de son état.

Liar's Due_IllustrationMendacs est arrivé deux mois plus tôt à 44, annonçant aux locaux estomaqués par la survenue d’un estrangé dans leur communauté que sa mission était de peindre quelques paysages bucoliques de champs et de nuages, sans doute à fin d’illustrer les cartes postales et calendrier des postes du Segmentum. On ne saura jamais ce que notre Commémorateur a fait ou dit à son supérieur pour être envoyé sur une mission aussi pourrie, mais Mendacs prend son boulot avec philosophie, comme la nouvelle que lui apporte Leon, d’ailleurs. À la grande surprise de son jeune ami, il se montre en effet assez posé dans sa réaction, et rassure ce dernier que cette annonce n’aura sans doute aucune conséquence pour Virger-Mos II, dont l’enclavement galactique et le peu de valeur stratégique mettent à l’abri d’une invasion. Tous les locaux ne partagent cependant pas l’avis du chill-ommémorateur, et le conseil municipal improvisé le soir même tourne bientôt au vinaigre, loyalistes, opportunistes et jemenfoutistes n’arrivant pas à trouver un consensus sur la décision à prendre, et quel drapeau faire flotter sur la devanture de la mairie. La tension monte encore d’un cran lorsque des traînées lumineuses sont aperçues dans le ciel nocturne, faisant redouter à nos braves ruraux que l’invasion de leur patelin a déjà commencé. Dès lors, il ne faut pas s’étonner que la plèbe finisse par faire des choses stupides (sa spécialité depuis des temps immémoriaux), comme tirer d’abord et poser des questions après. C’est ainsi que l’apprenti vigilante local, Dallon Prael, tue par accident son pote de comptoir Silas Cincade avec le fusil laser de sa grand-maman, ayant pris la Kangoo de son compaing, parti chercher des nouvelles à la capitale, pour un Land Raider des Sons of Horus. Un tragique accident.

Début spoiler…Pendant que la psychose progresse gentiment mais sûrement dans sa cité, Leon décide de suivre un Mendacs parti en vadrouille en mode sneaky dans les rues de 44. Le Commémorateur se dirige vers le Skyhook, l’ascenseur orbital entièrement automatisé utilisé pour acheminer les récoltes de la planète jusqu’aux cargos spatiaux qui transporteront le précieux quinoa de Viger-Mos II jusqu’aux confins de l’Imperium. Déterminé à comprendre les raisons de ces agissements étranges, Leon parvient à sauter dans une cabine à la suite de Mendacs, et se retrouve quelques minutes plus tard sur la plateforme d’échange du Skyhook, qui se trouve être le lieu de résidence de la seule Astropathe de la planète. Cette dernière a passé les deux derniers mois emprisonnée dans un champ de stase posé par Mendacs, qui a mis ce temps à profit pour effectuer son œuvre de désinformation de masse. C’est lui qui a envoyé le message qui a mis le feu aux poudres en contrebas, utilisant le matériel et la formation de pointe fournis aux agents de l’Alpha Légion pour ce faire. C’est également lui qui a fait basculer la planète dans la paranoïa en programmant quelques drones faire s’écraser d’innocentes météorites à la surface de Virger-Mos II. Sa mission accomplie, il ne lui reste plus qu’à convaincre l’Astropathe d’envoyer un Tweet à ses patrons pour les informer de la réussite des opérations, avant de repartir vers de nouvelles aventures, non s’en s’être débarrassé des témoins gênants de son triomphe : l’Astropathe en question… et pas Leon. Mendacs décide en effet d’épargner le garçon, trop content d’avoir eu, pour une fois, un public témoin de ses manigances, et confiant dans l’incapacité de ce dernier d’enrayer la spirale de méfiance et de violence à l’œuvre sur la planète. En cela, il a probablement raison. Des dangers des fake news…Fin spoiler 

1 : Ça en dit long sur le niveau de motivation des colonisateurs au moment où ils sont arrivés sur la Saint-Sauveur-de-Ginestoux de l’Ultima Segmentum. Pas de noms pour les villes, juste des numéros.
: Que les habitants de Virger-Mos II ont pu commencer à visionner seulement depuis deux mois.

AVIS:

James Swallow prend son monde à contre-pied avec ‘The Liar’s Due’, dont le ton s’éloigne résolument du grimdark industriel auquel notre homme nous avait habitué jusqu’ici. J’ai trouvé pour ma part que ce récit se plaçait davantage dans la lignée de la SF classique (notamment le Skyhook, qui m’a fait penser à l’ascenseur spatial de la trilogie Mars de Kim Stanley Robinson), avec son intrigue majoritairement non-violente et placée à hauteur d’homme, que dans celle de la GW-Fiction telle qu’on la connaît. Je dois reconnaître que j’ai apprécié ce parti pris, qui change agréablement de ce que l’on peut lire ailleurs dans l’Hérésie d’Horus, et permet de réfléchir sur les implications concrètes de cette dernière pour les milliers de planète ayant eu la chance de ne pas retrouver au centre des violents combats entre loyalistes et renégats. Cette apparente tranquillité n’a sans doute pas toujours été synonyme de sérénité pour les populations aux secondes loges de cette guerre galactique, et la mise en avant de la cinquième colonne d’Alpharius, et du rôle joué par les agents de ce dernier en matière de propagande, est la bienvenue. Je regrette simplement que Swallow n’ait pas jugé bon d’entretenir un peu de suspens dans sa nouvelle, la duplicité de Mendacs étant établie très tôt dans l’histoire, ce qui entame un peu de son intérêt. Mais la balance reste malgré tout positive, et je place ‘The Liar’s Due’ en tête de la production de cet auteur, confortablement devant la majorité de ses écrits Blood Angelesques et Sœurs de Bataillesques.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Liar’s Due‘ est une nouvelle intéressante, mais où ne figure pas le moindre Alpha Légionnaire, ni le plus petit Alpharius, ce qui aurait dû la disqualifier d’office pour une inclusion dans ‘Lupercal’s War‘. C’est d’autant plus dommage que la Black Library avait en stock bon nombre de nouvelles traitant de la manière si particulière dont cette Légion atteint ses objectifs sur le champ de bataille, et pas dans les champs de colza : ‘Council of Truth‘, ‘The Face of Treachery‘, ‘The Harrowing‘… Pour les amateurs, la novella ‘The Serpent Beneath‘ et le roman ‘Legion’ valent également le détour.

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Et voilà qui conclut cette revue de ‘Lupercal’s War‘, première (et probablement seule, vu l’époque tardive, Heresy wise, à laquelle elle a été publiée) anthologie introductive consacrée à l’Hérésie d’Horus. Comme on l’a vu dans les critiques ci-dessus, la Black Library n’a pas réalisé un sans faute dans la sélection des nouvelles choisies pour présenter chacune des Légions impliquées dans ce conflit galactique, mais l’effort reste tout de même globalement satisfaisant. Au chapitre des regrets, j’aurai également apprécié que d’autres factions soient intégrées au sommaire de ce recueil, qui du haut de ses moins de 400 pages, n’a pas atteint la limite haute fixée par la BL en matière de longueur. Comme un autre recueil hérétique sorti en 2022 (‘Heirs of the Emperor‘, chroniqué ici si ça vous intéresse), approche les 450 pages, il aurait été possible d’aborder les Custodiens (‘Blood Games’), l’Adeptus Mechanicus (‘The Kaban Project‘, ou ‘Vorax‘ par souci de concision) et l’Armée Impériale (‘All That Remains‘) dans ‘Lupercal’s War1, quitte à bazarder les ‘Black Oculus‘ et ‘Bjorn: Lone Wolf‘ pour gagner un peu de place. Enfin, l’absence d’une version française est également dommage, la BL ayant jusqu’ici pris la peine de proposer ses recueils introductifs en plusieurs langues.

Toutefois, le bilan reste à mon sens largement positif, en bonne partie grâce à un prix de vente encore une fois très intéressant par rapport aux tarifs habituels de la maison (et c’est encore plus vrai pour la version audio book, vendue à 10,99€). Ces 21 nouvelles permettent au lecteur, quel que soit son niveau de connaissance es-hérésie, de découvrir les arcs narratifs et les styles d’écriture d’une palanquée de personnages et auteurs ayant marqué cette franchise iconique, et c’est bien cela qu’on attend de ce type de compilation. À titre personnel, je reste convaincu que la meilleure façon d’aborder ce mastodonte littéraire est de commencer par la trilogie originelle, qui, en plus d’être parmi les meilleures sorties de toute l’Hérésie, a été écrite pour permettre à n’importe que fan de science-fiction de comprendre les tenants et les aboutissants de cet événément tentaculaire, quitte à réserver ‘Lupercal’s War‘ pour un deuxième temps. À chacun sa méthode pour sombrer dans le schisme, cependant !

1 : Pour être vraiment complet, on peut rajouter les Légions Titaniques (‘The Ember Wolves’), les Soeurs du Silence (‘The Voice’) et les cultistes du Chaos (‘Twisted’). Et je suis sûr que j’en oublie…

HEIRS OF THE EMPEROR [HH]

Bienvenue dans la revue de Heirs of the Emperor, anthologie finale des courts formats dédiés aux Primarques publiés par la Black Library entre 2018 et 2021. Nous sommes en effet en présence de la compilation ultime de toutes les nouvelles rattachées à cette sous-sous-franchise à très haute teneur en personnages marquants du 30ème millénaire, soit 26 histoires et près de 450 pages consacrées à la fratrie impériale. Il va de soi que si vous cherchiez à en savoir plus sur ces individus légendaires, Heirs of the Emperor est le livre qu’il vous faut, en attendant que la Black Library se lance (peut-être un jour) dans la réédition des romans Primarques sous forme de bundles. Avant d’aller plus loin, ayons une pensée pour les acquéreurs des deux anthologies Loyal Sons et Traitorous Scions, qui pensaient sans doute faire une bonne affaire avec ces recueils thématiques (un consacré aux Primarques loyalistes et l’autre aux renégats, comme leur nom l’indique), vendus 15€ l’unité par la BL à l’époque reculée de… 2021. Quand on vous disait qu’il était rentable de ne pas choisir de camp1

1 : Pour être tout à fait exact, il y a trois nouvelles de ces recueils qu’on ne retrouve pas dans Heirs of the Emperor: ‘Child of Chaos’ et ‘Champion of Oaths’ (pour la troisième, voir ci-dessous). Comme ni l’une ni l’autre ne sont centrées sur un Primarque, cette absence est somme toute logique (mais leur inclusion dans Loyal Sons et Traitorous Scions fait débat, par contre).

Heirs of the Emperor

Il ne surprendra personne de constater que la majeure partie des nouvelles présentes au sommaire de cette brique que Rogal Dorn aurait intégré sans sourciller dans ses fortifications de Terra provienne des trois recueils Sons of the Emperor, Scions of the Emperor et Blood of the Emperor (encore une fois, le titre donnait un indice). Cinq histoires viennent compléter la liste, toutes précédemment publiées mais pas forcément incluses dans une anthologie avant cette réédition: ‘A Lesson in Iron‘, ‘The Atonement of Fire‘, ‘Lantern’s Light‘, ‘Embers of Extinction‘ et ‘Grandfather’s Gift‘. Cela est amplement suffisant pour couvrir les 18 bad boys de Pépé, même si à ce petit jeu, certains s’en sortent mieux que d’autres (il y a toujours eu des favoris dans les familles nombreuses). Ainsi, c’est Mortarion qui remporte la palme avec quatre apparitions, devant Horus et Ferrus Manus (3), et loin devant Lion El’Jonson, Leman Russ et Jaghatai Khan, qui doivent se contenter d’une pige chacun. Ils peuvent toutefois s’estimer chanceux car le pauvre Angron a purement et simplement été coupé au montage, la nouvelle ‘Prince of Blood‘ dans laquelle il apparaissait dans le recueil Sons of the Emperor ne figurant pas au sommaire du présent ouvrage. Oubli des éditeurs de Nottingham (ce serait fâcheux) ou volonté délibérée de nuire à l’Ange Rouge (ce serait dangereux)? On ne le saura sans doute jamais…

Malgré ces choix éditoriaux étranges et contestables, il n’en demeure pas moins que Heirs of the Emperor est une superbe affaire pour tous les passionnés de la Grande Croisade et de l’Hérésie (mais pas que, certaines nouvelles prenant place bien après ces événements majeurs), en tous cas au niveau quantité/prix. Si vous avez besoin de davantage d’informations pour consentir à payer les 15.99€ demandés par la BL pour ce pavé, c’est votre jour de chance cependant. Laissons les commémorateurs tresser des louanges à tout va, nous sommes ici pour dire les choses telles qu’elles sont. Une occupation dangereuse, mais il faut bien que quelqu’un s’en charge…

Heirs of the Emperor

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The Passing of Angels – J. French :

INTRIGUE:

The Passing of ANgelsLa planète Harpic, intégrée à l’Imperium pendant la Grande Croisade, a décidé de faire sécession de l’empire de Pépé. Ce crime de lèse majesté ne pouvant évidemment pas rester impuni, l’Armée Impériale est envoyée sur place pour calmer les velléités indépendantistes du Gouverneur Planétaire… et est accueillie à coup de bombes nucléaires, résultant en des pertes colossales parmi les assaillants mais également la population locale, sacrifiée sur l’autel du « vous ne m’aurez jamaaaaaaaaaaais ». L’Empereur ayant clairement établi que l’atome, c’était le mâââl dans une célèbre interview donnée au Journal de Mickey en M30, la machine de guerre impériale passe en mode hardcore et envoie Sanguinius et ses Blood Angels « pacifier » pour de bon la planète mutine, renommée H_____ en signe de la gravité de ses crimes.

Nous suivons donc le Primarque ailé et les soixante Space Marines de l’Ost de la Destruction, armés de l’arsenal le plus sale à disposition de l’Astartes (armes à phospex, grenades à radiations, cocktails cacatov et tutti quanti), alors qu’ils font s’abattre le jugement de l’Empereur sur les dissidents de H_____. Sanguinius a donné des ordres stricts : il ne doit y avoir aucun survivant, et, conscient du lourd fardeau psychologique qu’un tel massacre pourrait avoir sur ses fragiles de fistons, il leur a ordonné de revêtir le masque d’argent des Destructeurs, permettant à son porteur de dissocier son identité des actes horribles commis en tant que membre de l’Ost1. Seul le Primarque se rend au combat tête nue, car sa nature surhumaine lui permet d’endosser sans faiblir la responsabilité de ce massacre (raison officielle) et que mettre un casque lui aplatit les cheveux de manière disgracieuse (raison officieuse). Bien évidemment, les soldats de H_____ ne font pas le poids face à la furie sanguin(ius)aire des Blood Angels, et leur insignifiante petite planète ne tarde pas à repasser du bon côté de l’histoire.

La nouvelle se termine par une réunion informelle entre Horus et Sanguinius sur le Vengeful Spirit, pendant laquelle les deux frangins se livrent à leur activité préférée : battre son frère à un jeu de plateau pour Horus, et faire de lourds sous-entendus sur l’avenir pour Sanguinius. C’était une époque plus simple…

1 : C’est dans l’esprit très semblable aux masques de guerre des Guerriers Aspects Eldars… sauf qu’ici, on ne nous dit pas s’il y a une véritable technologie permettant de brainwasher le porteur, ou bien s’il devra faire la dissociation tout seul comme un grand.

AVIS:

Je suis un peu déçu de l’approche choisie par French pour cette nouvelle estampillée Primarques, car elle ne nous apprend au final pas grand-chose sur le personnage que l’auteur a choisi de traiter (Sanguinius)1, et aurait donc pu être cataloguée comme nouvelle « classique » de l’Hérésie à la place. Certes, on voit le Primarque mener ses fils à la bataille, mais la noblesse tragique dont il fait preuve au cours de la purge de H_____ n’est pas une caractéristique inconnue de Sanguinius : quiconque est un tant soit peu familier du personnage sait qu’il s’agit au contraire de la base de son identité. Partant, le propos déroulé par French dans ‘The Passing of Angels’ n’apporte pas de nouvel éclairage sur l’Archange de Baal, ce qui est à mes yeux la raison d’être d’un récit Primarques. Le même argument peut être avancé pour la scène de dialogue entre Sanguinius et Horus, qui relève à mon sens plus du clin d’œil à des éléments de fluff déjà établis au cours de l’Hérésie que d’une quelconque avancée de l’arc des Pépé Bros.

Je suis également resté sur ma faim avec l’Ost de la Destruction, convoqué par French pour montrer que même la Légion de Space Marines la plus angélique ne rechignait pas à faire le sale boulot de temps à autre, mais avait développé une technique bien à elle pour ne pas laisser ces actes barbares affecter durablement ses membres. L’idée est intéressante, mais sa mise en pratique tellement lacunaire que l’on ne sait pas comment le processus en question fonctionne. Les masques mortuaires des Destructeurs ont-ils seulement une fonction symbolique, ou sont-ils capables d’effacer les souvenirs de ceux qui les portent ? Bref, ‘The Passing of Angels’ passe à mes yeux à côté de son sujet, et si French est suffisamment compétent en tant qu’auteur pour que la lecture de cette nouvelle ne soit en rien désagréable, j’attendais plus et mieux de sa part ici.

1 : La plus grande révélation de ‘The Passing of Angels’ a été pour ma part d’apprendre que Sangui avait une vision laser, qui pouvait détecter une rupture d’alignement de l’ordre d’un micron. Il aurait dû être coiffeur au lieu de chef de guerre avec ce don, moi je dis.

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The Abyssal Edge – A. Dembski-Bowden :

INTRIGUE:

Gravement blessé dans le crash de son appareil au cours d’une glorieuse victoire impériale, le chef d’escadron Orthos Ulatal a été réaffecté au service des archives de la Grande Croisade, son corps étant trop endommagé pour lui permettre de s’envoyer en l’air comme autrefois. La réception par notre héros cabossé et amer d’un rapport d’un genre particulier va l’arracher à la monotonie pré-dépressive qui constituait son nouvel ordinaire : un certain Khayon des Khenetai, légionnaire Thousand Sons, a en effet proféré de graves accusations à l’encontre des Night Lords de Konrad Curze, alors que les deux Légions « coopéraient » au cours de la campagne de pacification de Zoah, plus connue sous le nom de « Dévastation de Zoah ». Après avoir cherché conseil – un peu – et échangé quelques remarques acerbes – surtout – avec son ancienne camarade et désormais remplaçante, Perdita, Lulu décide qu’il est de son devoir de faire toute la lumière sur cette bisbille inédite entre deux Légiones Astartes. La révélation de conflits larvés entre les champions de l’humanité risquerait en effet d’avoir un effet désastreux sur le moral des troupes, gavées de propagande impériale où tout le monde il est bô, tout le monde il est jenti (sauf le fourbe et puant ENNEMI, bien sûr).

Après un voyage mouvementé et donc vomitif à travers l’espace impérial, Ulatal parvient jusqu’au Nightfall, vaisseau amiral des Night Lords, et demande à être reçu par un des archivistes (et pas Archivistes) de la Légion, afin d’entendre la version des natifs de Nostramo sur les événements de Zoah. À sa grande, et pas franchement heureuse, surprise, c’est le Premier Capitaine de la VIIIème Légion, ce farceur de Sevatar, qui vient finalement toquer à sa porte, pour lui proposer un deal aux conséquences potentiellement funestes : enterrer le rapport de ce couillon de Khayon comme n’importe quel fonctionnaire sensé l’aurait fait depuis belle lurette, ou apprendre ce qu’il s’est réellement passé entre Night Lords et Thousand Sons sur Zoah…

Début spoiler…Comme la nouvelle aurait été beaucoup moins intéressante si Ulatal avait choisi la première option, nous embrayons donc sur un flash back des familles familial, durant lequel nous suivons Sevatar et son bodycam assister aux délibérations houleuses du camp impérial à propos de la Tour de la Sérénité, monument servant de bibliothèque et d’archives à la civilisation de Zoah, prestement incorporée à l’Imperium après un petit massacre pédagogique dont Curze à le secret. Ce même Curze serait d’avis de réduire la tour en poussière, comme le demande le manuel du parfait petit légionnaire, afin que les dangereuses connaissances qu’elle renferme ne viennent pas risquer de contredire la Vérité Impériale. Magnus (également présent) est bien sûr opposé à ce projet d’autodafé, et implore son frère de lui laisser le temps de contacter l’Empereur afin que ce dernier puisse trancher la question. Mais Konrad reste intraitable, et finit par ordonner à Sevatar de commencer le bombardement de la tour, malgré le fait que les Thousand Sons soient positionnés autour de cette dernière et la protègent grâce à leurs pouvoirs psychiques. Après avoir fait son Captain America pendant à peu près 12 secondes, Maggie finit par lâcher l’affaire, mais promet à Curze qu’il en parlera au manager (i. e. Pépé). Bilan des courses : la Tour de la Sérénité finit en gravats, son incommensurable et incommensuré savoir avec elle.

Ayant été témoin de ce clash frontal entre deux des fils de l’Empereur, Ulatal n’est guère surpris lorsque Sevatar prend son élan pour lui refaire le portrait à coup de glaive tronçonneur, cette information hautement sensible ne pouvant être ébruitée en dehors de la grande famille des Astartes. Notre héros est toutefois sauvé, non pas par le gong, mais par le Shang (un autre Capitaine des Night Lords), qui annonce à Sevatar que sa future victime a été nommée officier sur un des vaisseaux de la Légion, le Voidmaw. La nouvelle se termine sur le choix laissé à Ulatal : accepter son nouveau poste ou emporter son secret dans la tombe…Fin spoiler

AVIS:

Aaron Dembski-Bowden opère une fois encore sa magie narrative avec ce ‘The Abyssal Edge’, qui replonge le lecteur dans les savoureux paradoxes des Night Lords pré-Hérésie (un sujet de prédilection de cet auteur). On y retrouve bien sûr l’incontournable Sevatar, égal à lui-même en matière de killer one-liners, je m’en foutisme insolent1 et droiture morale bien cachée, mais le clou du spectacle est évidemment la joute verbale entre Konrad Curze et Magnus le Rouge au sujet de la Tour de la Sérénité. Dembski-Bowden prend soin de dépeindre les deux protagonistes de façon équilibrée, chacun ayant ses qualités (l’esprit critique de Magnus, qui lui donne la perspective nécessaire pour aller à l’encontre d’un édit impérial qu’il trouve stupide ; la « magnanimité » de Curze, qui a déterminé que l’utilisation de tactiques de terreur était la manière la plus efficace et la moins meurtrière pour conquérir Zoah) et ses défauts (l’indignation sélective de Magnus, qui a laissé les Night Lords mener la campagne comme ils le souhaitaient et ne s’oppose à eux que lorsqu’ils décident de raser la Tour de la Sérénité ; et ai-je vraiment besoin de souligner les problèmes de Curze2 ?), ce qui laisse au lecteur le soin de déterminer pour qui il prend fait et cause à la fin de la nouvelle.

Reste la partie consacrée à Ulatal, qui me paraît être trop développée pour un personnage à usage unique, et qui se conclut avec une indication assez nette que la gueule cassée se trouve un nouveau job parmi les auxiliaires humains de la Légion. Comme ADB a mis sous les feux des projecteurs les pilotes des escadrons de chasseurs de la flotte des Night Lords3 dans d’autres textes, je m’attendais à ce qu’Ulatal reparaisse à un moment ou à un autre dans le corpus nostramien de cet auteur, mais mes recherches n’ont rien donné à ce jour. Cela n’empêche pas de savourer cette nouvelle à son plein potentiel, mais pose la question de ce que voulait faire l’auteur avec ce personnage. À suivre ?

1 : La scène où Curze et Magnus lui disent en même temps de la fermer vaut son pesant de viande de grox.
2 : Le fait que l’on en apprenne plus sur Magnus dans ‘The Abyssal Edge’ que sur Konrad Curze me mène à considérer que cette nouvelle devrait être liée au premier plutôt qu’au second dans une optique ‘Primarques’.
3 : Particulièrement la pilote Taye Karenna, commandante de l’escadron des Voilés et chauffeur privé de Sevatar dans ‘Prince of Crows’.

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Mercy of the Dragon – N. Kyme :

INTRIGUE:

Mercy of the DragonLes réunions de famille ne sont pas toujours une partie de plaisir, c’est bien connu. Toutefois, les retrouvailles entre Vulkan et l’Empereur sur Nocturne se passèrent de manière que l’on peut qualifier de cordiale, surtout si on les compare à d’autres épisodes d’affiliés au premier regard tournées plus tard au cours de la Grande Croisade. Bien sûr, le fils adoptif de N’bel le forgeron a une âme paisible sous ses abords farouches, et il faudra une longue discussion (et une salamandre encore plus longue, mais c’est une autre histoire…) pour le convaincre de laisser tomber sa planète pourrie et sa salopette rapiécée pour prendre sa place aux côtés de son créateur dans la conquête de la galaxie. C’était à l’époque où Pépé prenait encore le temps de discuter avec ses fistons avant de les bombarder à la tête de leur Légion1… Et croyez-le ou non, mais un des critères majeurs ayant guidé la décision du colosse aux yeux de braise fut de savoir si ses nouveaux camarades de jeu allaient être gentils avec lui pouvaient apprendre quelque chose de sa part, lui qui se voyait davantage chaudronnier que chef de guerre. « Mais bien sûr gros bêta », lui répondit son papounet. « Attends un peu de rencontrer ce joyeux drille de Ferrus… ».

Flash forward quelques temps plus tard, au cours de la campagne de mise en conformité de Ranknar. Les indigènes ne se sont montrés sensibles ni aux talents oratoires, ni aux sculptures en ballons de l’Empereur (on ne peut pas être bon partout hein), et la guerre fait rage à la surface de la planète. Les défenseurs vont de défaites en défaites, leurs forteresses imprenables se faisant mettre minables en un temps ridicule et un déluge de flammes par un guerrier terrifiant, surnommé le Dragon par ses adversaires malheureux. Nous suivons le soldat Sarda et le prêtre Veddus alors qu’ils se rendent jusqu’à l’ultime bastion de la résistance : la Citadelle Rouge de Romistad. Le dernier carré des ranknariens dans la cité de Venikov s’est en effet terminé de manière abrupte et infernale, après que le Dragon ait décidé d’y allumer le feu.

À Romistad, la situation des défenseurs semble un chouilla moins désespérée, car ils ont à leur disposition non pas une, mais deux armes top secrètes moumoutes. Ceci dit, les impériaux ont de leur côté non pas deux, mais trois membres des Ramones (nouvelle période) : Peypey, Féroce Manosque, et bien sûr le Dragon, qui est bien sûr le nom de code trop trop secret de Vulkan. Bref, les carottes ne sont pas cuites, elles sont sur le point d’être carbonisées pour les irréductibles gaulois.

La stratégie de l’Empereur, qui consiste à lancer un Vulkan fou de rage (sans qu’on sache trop bien pourquoi d’ailleurs) sur l’ennemi en mangeant des chips avec Ferrus Manus à bonne distance des combats, rencontre toutefois ses limites lorsque les défenseurs abattent leur premier joker : un trio de bogatyrs, c’est-à-dire des golems de la taille d’un Titan, menant une sortie désespérée sur les lignes impériales. Ne pouvant pas laisser Vuvu se faire exploser sans intervenir, Pépé intervient gracieusement pour rétablir le déséquilibre en faveur de ses troupes, ce qui permet à l’irrascible Hulk, mit encore plus en rogne par la découverte de la source d’énergie des bogatyrs (des enfants sous hémodialyse) de charger seul la porte de la Citadelle Rouge, afin d’apprendre à ses occupants de quel boa il se chauffe…. Et c’est là qu’arrive la boulette.

Malgré ses puissants pouvoirs de guidage de missiles, l’Empereur n’est en effet pas foutu d’empêcher le dernier tir d’une salve tardive d’exploser pile sur la position de Vulkan, alors qu’il attendait que la gardienne vienne lui ouvrir. Pour sa défense, il y avait péril en demeure pour les impériaux, l’ultime botte secrète des défenseurs étant de déclencher une bombe virale, ce qui n’aurait pas été fair play. Fort heureusement, ‘tis but a scratch pour Papamanders, qui étrenne certainement ainsi sa perpétualité (reste à voir comment il a regénéré aussi vite ceci dit), et convainc les Ranknariens de déposer les armes après que ces derniers aient constaté que le féroce Dragon a fait obstacle de son corps pour protéger un frêle enfançon qui jouait à la marelle sur le champ de bataille. Le pouvoir de la gentillesse ! Bon, on ne dira rien sur les centaines de milliers de morts avant ça parce que ça serait un peu mesquin…

1 : D’après la chronologie donnée par Laurie Goulding (et donc aussi officielle que possible), Vulkan a été le cinquième Primarque retrouvé. L’Empereur a commencé à s’en balec au douzième round (Mortarion).

AVIS:

Nick Kyme n’a pas écrit le roman Primarques de sa Légion de cœur (l’honneur en est revenu à David Annandale), mais il s’est tout de même payé le luxe de raconter en quelques pages comment la rencontre entre le père et le fils s’est déroulée… et je reste un peu dubitatif sur la valeur de cette offrande. Le problème tient en deux mots : character development. Mettre en scène des personnages aussi iconiques que l’Empereur et ses Primarques de fils nécessite en effet de connaître le riche background de ces figures majeures, mais également de les faire agir en gardant en tête leur stature d’êtres sur(sur)humains. Et si j’aborde ce sujet, c’est bien entendu que Nick Kyme s’est planté sur les deux tableaux. On a ainsi un Empereur qui minaude en faisant briller ses gantelets au soleil et balance des répliques dignes du Thesaurus, mais également un Vulkan utilisé à total contre-emploi avec son fluff établi (le Primarque qui se soucie des simples humains), puisqu’il passe la majorité de la campagne de Raknar à se comporter comme un proto-Angron, massacrant l’ennemi sans lui montrer aucune pitié1, et sans que Kyme ne justifie d’aucune façon cette soudaine agressivité. Que Vulkan ait pété une durite après avoir vu comment ses adversaires faisaient avancer leurs golems de combat, ok, mais avant cela ? Ce n’est pas comme si le même Vulkan avait failli refusé la proposition de l’Empereur de rejoindre la Grande Croisade parce qu’il ne se sentait pas l’âme d’un guerrier littéralement deux paragraphes avant, hein.

On peut toutefois reconnaître à Kyme les efforts sincères qu’il a fait pour donner une culture un peu fouillée à Raknar et ses habitants/fidèles (car oui, c’est à la fois une planète et un dieu), ce qu’il ne s’est pas toujours motivé à faire dans sa production pour la Black Library. Ce n’est toutefois pas suffisant pour équilibrer l’ardoise, et ‘Mercy of the Dragon’ reste à mes yeux globalement raté.

1 : En témoigne le dialogue entre Sarda et Veddus au début de la nouvelle, qui permet d’établir que plus de cent mille hommes ont péri dans la défense de Venikov (sans compter les civils), avec Vulkan en allumeur en chef.

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Shadow of the Past – G. Thorpe :

INTRIGUE:

Pendant que la galaxie part en sucette énergétique, sur Sicarus les grands travaux lancés par Lorgar afin de templaformer la planète avancent gentiment. Sous le patronage avisé et le commandement sévère mais brusque de l’Apôtre Noir/chef de chantier Kalta-Ar, des milliers d’esclaves suent sang et os (on est dans l’Œil de la Terreur, tout est possible) pour bâtir la Beneficta Diabola, basilique impie qui comportera deux piscines, un centre commercial et un boulodrome olympique. Soucieux du respect le plus strict des meilleurs standards de santé et sécurité, Kalta-Ar a pris soin de protéger le chantier d’incursions démoniaques, fréquentes en ces latitudes, par des pentacles et sceaux de protection du tout dernier cri1. Aussi est il fort mécontent d’apprendre de la part de ses acolytes qu’un nombre croissant de légionnaires disparaissent sans laisser de trace, au lieu de monter la garde en chantant des cantiques impies comme ils étaient sensés le faire.

Accompagné de son bras droit Arkula le Coryphaus et du Sergent Isaikash, K-A se rend sur les lieux de la dernière disparition, qui devient vite l’avant-dernière car un autre Word Bearer fait soudainement une mauvaise rencontre sur le chemin de ronde, et rend l’âme après cinq secondes de hurlements stridents sur le WhatsApp de groupe. Malaisant. Si quelques esclaves ont été témoins des derniers instants de frère Barbaque, les subtiles techniques d’interrogatoire de nos héros ne leur permettent pas d’apprendre grand-chose sur la nature du prédateur qui s’amuse à les faire tourner bourrique. Les mortels ont en effet seulement vus une ombre écarteler le malheureux Space Marine, ce qui n’est pas lourd pour faire avancer une enquête. Jugeant probable que ces déboires sont de nature démoniaque, et suspectant les serfs d’avoir réussi à appâter un gros Nurgling dans le Materium pour se venger des mauvais traitements infligés par leurs geôliers, Kalta-Ar est sur le point de diligenter une inspection surprise de ses propres opérations (aux grands porteurs du mot, les grands remèdes) lorsqu’une présence indistincte mais pas franchement amicale se matérialise soudain à proximité.

Les rapports alarmistes et disparitions brutales commençant à se multiplier, nos trois affreux décident finalement de prudemment de battre en retraite en direction du portail Warp reliant la Beneficta Diabola au QG de Lorgar, afin de respectueusement demander au boss de venir gérer un impondérable que ses incapables de larbins sont bien en peine de pondérer de leur côté. Cette retraite stratégique, qui se transforme sous peu en débâcle effrénée vers la chambre de papa, voit un nombre non négligeable de Word Bearers aux noms plus exotiques les uns que les autres2 se faire oblitérer par le terrible blurry man qui les poursuit, mais également ce fieffé coquin de Marduk, fier comme Ar-Thaban dans son armure Terminator, faire son apparition dans l’histoire. Fidèle à lui-même, il se montre odieux envers Kalta-Ar et ses survivants, et d’une piètre aide lorsque the thing se remet à faire des siennes. Pourquoi se donner du mal quand on a une armure en scenarium, pas vrai ?

Heureusement pour nos héros, Lorgar avait les oreilles qui traînait et, bien qu’il tique un peu sur le vocabulaire peu flatteur utilisé par ses fils pour parler de lui, l’adoré doré fait son apparition pour se confronter au démon qui tourmente sa marmaille…

Début spoiler…Sauf qu’il ne s’agit pas d’un démon, mais de ce lascar de Corax, qui a gagné quelques pouvoirs funky et emo en diable (comme se changer en brume ou en nuée de corbeaux, ou se faire pousser des bras et des lames surnuméraires) à trop traîner dans le Warp, mais est resté fidèle à sa nature profonde : se venger des méchants très méchants. On se souvient que les deux Primarques se sont déjà frittés sur Isstvan au début de l’Hérésie, et que sans l’intervention salutaire de Konrad Curze, Lolo aurait avalé son crozius. La revanche qui prend place sur Sicarus, alors que Lorgar a été élevé au rang de Prince Démon et que Corax se bat seul sur une planète baignée par le Warp… va rigoureusement dans le même sens, ce nullard d’Aurelian se faisant perforer la glotte par les griffes énergétiques de son frangin, et ne devant son salut qu’à l’intervention peu sportive de ses Word Bearers pour occuper le Seigneur Corbaffe le temps que son adversaire malheureux soit évacué à travers son propre portail. La lose totale.

Coincé sur Sicarus à cause de sa nature à demi-démoniaque, Corax jure à son frère qu’il y aura une belle et s’en va fracasser sa basilique pour se passer les nerfs. De son côté, Lorgar décide d’aller bouder dans sa chambre pour marquer sa désapprobation, et la légende raconte qu’il n’en est toujours pas sorti à ce jour…Fin spoiler

1 : …des victimes sacrificielles utilisées pour les tracer.
2 : Hesta-Pek, Takla-Gad, Apall-Af, Ghoa-Lok, Ukna-Tav…

AVIS:

Gav Thorpe se paie le luxe de conclure la saga hérétique (et la saga tout court pour Corax) de deux Primarques à travers ce sympathique ‘Shadow of the Past’, ce qui est un ratio fluffique tout bonnement exceptionnel pour une simple nouvelle. Si les prémisses de cette histoire ne sont pas très intéressantes, et qu’un lecteur un peu au fait du passif de cet auteur pendant l’Hérésie d’Horus aura tôt fait d’identifier le mystérieux persécuteur de cette cruche de Kalta-Ar, je trouve la deuxième partie du récit nettement supérieure, notamment grâce à l’idée de faire de Corax une sorte de démon non chaotique1, ce qui permet de justifier à la fois comment le Primarque a pu survivre à son départ dans le Warp, et à quoi il occupe ses journées. En plus de ça, un petit duel entre deux frangins légendaires, ça ne se refuse pas (surtout quand c’est la tête à claque qui perd). Il y a même le Marduk d’Anthony Reynolds qui vient faire coucou, ce qui est sympa de la part de Thorpe, et fera sans doute plaisir aux fans du personnage. Bref, un final vraiment sympathique qui fait plus que rattraper un début assez meh. Si Gav Thorpe pouvait toujours s’en tenir à ce standard, je serais un lecteur comblé.

1 : Ou carrément affilié à Malal/Malice, ce qui serait encore plus cool, et une hypothèse pas si farfelue que ça pour une soumission d’un auteur aussi au fait du fluff que Thorpe. Après tout, les motivations et le code couleur de Corax correspondent tout à fait à ceux du dieu banni…

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The Emperor’s Architect – G. Haley :

INTRIGUE:

Olivier et Marissa LeBon, associés à la ville comme à la scène, arrivent sur Olympia pour tenter d’exercer leur noble mais difficile profession au mieux de leur capacité. Le couple est en effet spécialisé dans l’écriture de biographie de Primarques, et malgré leur patronage par Malcador en personne, il n’est pas aisé de convaincre un demi-dieu boudeur (et ils le sont tous) de prendre quelques heures pour raconter sa vie à cœur ouvert. Il n’y a d’ailleurs que Vulkan qui a accepté de jouer le jeu, mais seulement pendant une petite heure, car cette galaxie ne va pas se conquérir toute seule, nom de Pépé ! Leurs trente années de collaboration et cohabitation ont également mis l’amour et la patience d’Olivier envers sa tendre moitié à rude épreuve, et on sent bien qu’il a lost that lovin’ feelin’ à la manière dont il passe son temps à souffler pendant que la navette approche du spatioport et que Marissa s’émerveille du paysage si pittoresque de la planète natale de Perturabo.

Malheureusement pour le couple, le moment est mal choisi pour débuter ce nouveau projet. Non seulement leur sujet d’étude est parti aux confins de la galaxie mener une campagne ingrate de déhrudisation sur les ordres de l’Empereur, mais le régent qu’il a laissé pour régler les affaires courantes, et qui n’était autre que son vieux père adoptif, Dammekos, vient de mourir. Saignée à blanc par les besoins de la Légion en recrues et en ressources, Olympia gronde sourdement, et les quelques Iron Warriors chargés du service d’ordre ont fort à faire pour réprimer les manifestations et les émeutes de la populace mécontente. Cela n’empêche toutefois pas nos héros d’hériter d’un factotum/guide touristique à neuroglotte, le stoïque et froncé Krashkalix, qui se fait un devoir de les amener visiter les sites les plus notables de la planète, afin de leur (enfin, surtout Marissa, Olivier n’en a plus grand-chose à faire) permettre de prendre la mesure de Perturabo.

En parallèle de cette excursion hagiographique, nous suivons les premiers pas du Primarque sur la planète, avant qu’il ne soit surpris en train de faire de l’escalade sur les falaises de Lochos. Sans surprise, Perturabo s’est révélé être un enfant précoce, chassant le monstre à coup de gourdin pour le bénéfice et la sécurité de pauvres bergers, et squattant la forge de villages isolés pour se faire son matos. C’est d’ailleurs dans la forge où il a ouvragé sa première épée que les LeBon font la rencontre d’une forte tête n’ayant pas la langue dans sa poche : Gerademos, petit-fils d’Andos, lui-même fils de Dammekos et donc frère adoptif de Perturabo. Gege n’hésite pas longtemps avant de balancer du gros dossier sur le Primarque, dont l’un des petits plaisirs coupables était de défier son frangin à des concours d’artisanat ou d’ingénierie, dont il sortait logiquement systématiquement vainqueur. Sauf UNE fois, ce qui mit Rabo tellement en rogne qu’il détruisit les statues réalisées pour l’occasion (en prenant soin de laisser de beaux restes à la sienne pour que les gens puissent tout de même voir à quel point il est doué). Olivier trouve ça génial, mais Marissa est horrifiée par cette anecdote, inexploitable pour le panégyrique qu’elle en a tête.

Les dissensions entre mari et femme vont alors croissants, jusqu’à ce que cette dernière finisse par avouer qu’elle considère l’Empereur comme un dieu, et est donc prête à sacrifier la vérité sur l’autel de la glorification de Pépé et de ses créations. C’est évidemment contraire à la Vérité Impériale instituée par le même Pépé, et Olivier considère l’infraction comme étant assez grave pour pouvoir demander un divorce en tort exclusif… ou en tout cas, abandonner Marissa à sa lecture du ‘Lectitio Divinitatus’ pendant que lui va faire le coup de feu avec les gilets jaunes d’Olympia, qui parviennent finalement à déclarer leur indépendance de l’Imperium, sous la tutelle de la sœur du Primarque absent, Calliphone. L’histoire se terminera mal, on le sait, mais il reste permis d’espérer que Marissa a réussi à compléter en solo la biographie de Perturabo avant le début de l’Hérésie. Elle a peut-être pu s’inspirer du travail d’un obscur écrivain de M3 du nom de Gaïallet pour ce faire…

AVIS:

Guy Haley se démarque de ses petits camarades de Library par sa capacité à surprendre son lecteur en s’aventurant, souvent avec succès, sur des chemins que la maison d’édition de Nottingham ne fréquente pas. ‘The Emperor’s Architect’ vient démontrer la versatilité de Haley en mettant au cœur de son propos les querelles mesquines d’un vieux couple marié1, à des années lumières de ce à quoi on pouvait s’attendre de la part d’une nouvelle estampillée Primarques. Si vous êtes comme moi à la recherche de fantaisie (et pas de fantasy) et de caractère dans vos lectures de GW-Fiction, cette simple idée, farfelue mais suffisamment bien intégrée à l’univers et à l’ambiance générale de 40K pour ne pas jurer avec ces derniers, vous convaincra de donner sa chance à cette petite histoire. Ce vent de fraîcheur m’a d’ailleurs tellement plu que j’ai regretté que Guy Haley finisse son propos en faisant reposer une bonne partie de l’opposition entre Olivier et Marissa sur la lecture du ‘Lectitio Divinitatus’ par cette dernière. Comme s’il avait senti le besoin de justifier son « audace » en dégainant une explication que le fanboy moyen ne pourrait pas lui contester. Il aurait pu passer outre à mon avis (c’est pas comme si les couples humains avaient attendu la prose de Lorgar pour s’engu*uler), mais ce n’est que mon ressenti.

En plus de cette caractéristique très sympathique, ‘The Emperor’s Architect’ a le bon goût d’être le parfait complément du roman que Haley a consacré au maître d’Olympia, dont je vous recommande la lecture. En plus de couvrir des périodes de la saga perturabienne précédemment passées sous silence (son arrivée sur la planète, la campagne contre les Juges Noirs, le soulèvement de la population), cette nouvelle continue de fouiller la personnalité, décidemment très complexe, de cet enferré de Primarque. On le voit ainsi faire preuve d’un altruisme d’une pureté immaculée envers les bergers des montagnes, mais également se comporter avec une mesquinerie incroyablement puérile avec son pauvre frère adoptif, qui n’avait rien fait pour mériter ça. Une force de l’écriture de Haley est de parvenir à réconcilier ces aspects pourtant opposés du caractère de Perturabo pour donner l’impression d’une psyché véritablement surhumaine (et donc incompréhensible), alors qu’un auteur moins doué aurait juste donné l’impression de se contredire par manque de sérieux. Pour terminer, ‘The Emperor’s Architect’ n’est pas avare en détails fluffiques allant du notable (pourquoi Perturabo ne souvient-il pas de ses premiers jours sur Olympia ?) au superficiel (ne pas faire de tartare de jalpidae si on est pas un Space marines ou mieux), ce qui est toujours sympathique. Une vraie réussite.

1 : Aux noms tout à fait banal qui plus est, ce qui renforce encore le décalage par rapport à l’exotisme patronymaire (?) auquel la BL nous a habitué. Je soupçonne Haley d’en avoir fait exprès, et il a eu raison.

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The Ancient Awaits – G. McNeill :

INTRIGUE:

Un trio de sorciers Thousand Sons, Vistario le Corvidae (visions du futur), Murshid l’Athanean (télépathe) et Akhtar le Raptora (télékine), a été envoyé par Magnus le Rouge enquêter sur l’origine d’une vision subie par le premier. Ne pouvant pas désobéir à un ordre direct de leur borgne de boss, mais disposant de très peu d’indices pour localiser l’origine du message, une vague demande d’aide faite depuis les ruines d’une cité détruite, les compères ont passé les dernières années (ou l’équivalent en temps warpique) à voyager de monde mort en monde mort, sans succès. Leur chance a toutefois tourné lorsque le message s’est soudainement précisé, faisant état de l’identité de son émetteur, un certain « Ancien », qui patienterait donc à proximité. 

Guidé par une intuition de Murshid, les Thousand Sons prennent pied sur une nouvelle planète ravagée, sans savoir son nom ou ce qui lui est arrivé. Les indices troublants s’accumulent toutefois au fur et à mesure que nos héros s’approchent de leur destination : des douilles de bolts marquées du sceau des World Eaters sont retrouvées dans les décombres, et les ruines explorées par le trio portent la marque caractéristique d’un Exterminatus. Cependant, les niveaux inférieurs de la cité dans laquelle ils progressent ont résisté au terrible bombardement orbital déclenché par l’Imperium, ce qui indique que la civilisation qui a occupé cette planète était au fait des capacités destructrices des Legiones Astartes, et a pris des mesures pour résister à leur fureur. De façon tout aussi mystérieuse, mais beaucoup plus pressante, une tierce présence est détectée à proximité par les sens affutés de Murshid et Vistario : il semblerait que Magnus le Rouge ne soit pas le seul à s’intéresser à ce que cet énigmatique Ancien a à révéler.

Le fameux Ancien s’avère être un Dreadnought en très mauvais état, avachi à quelques mètres de la navette qu’il prévoyait sans doute d’utiliser pour quitter la planète au moment de son martyr. Il reste cependant suffisamment de batterie à la vénérable machine pour attraper Murshid alors qu’il passait à proximité, et pointer son canon d’assaut sur Vistario pour faire bonne mesure. Jugeant plus sage de négocier avec l’acariâtre vieillard énergétique plutôt que d’engager un combat qu’il n’est pas sûr de pouvoir remporter, Vistario opte pour une petite discussion avec l’Ancien, passablement confus après sa longue période d’isolation…

Début spoiler 1…Période qui se chiffre en millénaires plutôt qu’en années, car notre histoire prend place bien après la fin de l’Hérésie. Vistario finit par comprendre que la planète sur laquelle il se trouve n’est autre qu’Isstvan III, théâtre de la purge des éléments loyalistes des Légions renégates il y a dix mille ans. Son interlocuteur est une autre célébrité, l’Ancien Rylanor des Emperor’s Children, resté fidèle à l’Empereur malgré la trahison de son Primarque, mais rendu un peu barjo par cent siècles à fixer un mur effondré sans pouvoir se relever. Rylanor n’ayant pas appris que les Thounsand Sons ont également fait défection à Pépé, Vistario tente de détourner la conversation vers un sujet un peu moins polémique, échoue lamentablement, et aurait certainement fini en enduit organique sur ledit mur effondré sans l’arrivée opportune d’un nouveau personnage…

Début spoiler 2…Fulgrim en personne. Le Primarque démoniaque a en effet été attiré par la complainte de Rylanor au même titre que les Thousand Sons, et a décidé de corrompre le vénérable loyaliste pour son propre amusement pervers. Il tombe ce faisant dans le piège de Ryry, dont le châssis dissimulait une ogive contenant le virus mangeur de vie utilisé par feu Horus il y a fort longtemps pour régler son problème de dissensions internes. Cela était sans compter sur les manigances psychiques des Thousand Sons, qui parviennent à circonscrire l’explosion dans une bulle de force avant qu’elle n’ait pu engloutir les participants de cette petite réunion Copains d’Avant… pendant à peu près 27 secondes ½, soit le temps qu’il faut pour réaliser à Vistario qu’il préfère encore mourir et possiblement emporter Fulgrim avec lui (spoiler : ça ne marche pas) plutôt que de laisser le salace et serpentin Primarque faire des misères au pauvre Rylanor. Le sacrifice des Thousand Sons permet donc à la bombe d’exploser, faisant d’Isstvan III l’une des rares planètes à avoir subi un double Exterminatus (et sans doute la détentrice du record de l’Exterminatus le moins mortel de l’histoire, avec seulement quatre victimes confirmées). Fulgrim en est quitte pour aller se refaire une beauté dans l’Œil de la Terreur, mais surtout pour une éternité de séances auprès de son thérapeute attitré, car le refus catégorique de Rylanor de rejoindre le côté nervuré et lubrifié de la Force a profondément affecté le fragile ego du Pretty Primarque. Ce sont des choses qui arrivent.Fin spoiler

AVIS:

Graham McNeill n’en avait pas fini avec l’Ancien Rylanor (abandonné à son sort à la fin de ‘La Galaxie en Flammes’ et ‘Fulgrim’), et « détourne » une nouvelle Primarques pour donner à ce personnage secondaire du début de l’Hérésie la sortie de scène qu’il pensait lui devoir. Je suis moins convaincu que McNeill de la nécessité de terminer des arcs narratifs dont la plupart des lecteurs de la BL avaient dû oublier l’existence, mais c’est après tout la prérogative d’un auteur de raconter ce qui lui passe par la tête et le stylo.

Là où le bât blesse, en ce qui me concerne, est l’absence d’un travail de contextualisation/explication digne de ce nom de la part de McNeill. J’ai beau voir d’un œil permissif l’emploi « d’heureuses coïncidences » pour faire avancer et dénouer une intrigue, ‘The Ancient Awaits’ prend beaucoup trop de liberté à cet égard, et fait joyeusement exploser son compteur de WIJH. Comment Rylanor parvient-il à envoyer son RSVP à travers le Warp (ce personnage n’ayant aucune espèce de pouvoirs psychiques) ? Comment expliquer que le trio de Thousand Sons arrive pile au même moment que Fulgrim ? Et en bonus, pourquoi Magnus tenait tant à ce que ses fils se rendent sur place pour investiguer ce vague écho de l’Empyrean ? On peut supposer, au vu de ses pouvoirs, qu’il savait ce qu’ils allaient trouver, ce qui revient à poser la question de pourquoi le Cyclope voulait nuire à Fulgrim. Je laisse à chacun le soin d’apporter ses réponses à ces questions : pour ma part, je mets tout sur le compte d’un manque d’investissement de la part de Graham McNeill dans la construction de cette nouvelle, obnubilé qu’il était par son désir d’en terminer avec Rylanor sous couvert d’écrire une nouvelle Primarques1. Je sors donc déçu de cette lecture, qui ne mérite pas à mon sens son inclusion au sommaire de ‘Sons of the Emperor’.

1 : Dont le cahier des charges est tout autre. Si vous voulez lire un court format très instructif sur la personnalité et le destin de Fulgrim écrit par le même McNeill, je vous conseille chaudement ‘The Reflection Crack’d’.   

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Misbegotten – D. Abnett :

INTRIGUE:

Alors que les préparations pour la campagne d’Ullanor se terminent, la 63ème flotte d’expédition, commandée par nul autre qu’Horus Lupercal, se regroupe dans le système d’Issinium après vingt mois d’intenses mises en conformité. À la grande satisfaction du Primarque, pas moins de six civilisations humaines isolées au cours de la longue nuit ont accepté de rejoindre l’Imperium, et ce sans que le moindre bolt ne soit tiré ni aucune vie perdue. Ce tableau idyllique est toutefois compromis par les difficultés rencontrées par Hastur Sejanus à convaincre les habitants de Velich Tarn de give Pépé a chance. La planète a beau être insignifiante, tant en terme stratégique que démographique (400 habitants d’après les scans orbitaux), il n’est pas dans la nature des Luna Wolves de quitter un niveau sans l’avoir fini à 100%, et, comme il n’a plus rien d’autre à faire pour le moment, Horus décide d’aller pranker/soutenir son vieux poto Sejanus en se rendant incognito sur Velich Tarn.

Sur place, il se fait briefer en détail par le Capitaine dans son bunker de commandement, et réalise que la situation est plus compliquée que ce que le briefing initial le laissait à penser. Le maître de Velich Tarn est en effet un biogénéticien de sinistre réputation, Basilio Fo, ayant fuit Terra il y a plus de cinq mille ans après que ses voisins aient dénoncé ses expérimentations pas très ragoutantes aux autorités. N’ayant rien perdu de son génie morbide, Fo a passé le temps en transformant la population de sa planète d’adoption en abominations biologiques (pensez à The Human Centipede version 40K), plus que capables de dévorer/découper/éventrer/bouillir/écorcher un Space Marine qui leur tomberait sous la main/griffe/sabot/tentacule/trompe/nageoire. De plus, si les scanners n’ont détecté que 400 formes de vie humaine à la surface de la planète, c’est sans tenir compte des milliers de clones de chacune d’entre elles : les combats opposant la 4ème Compagnie des Luna Wolves aux hordes bioadaptées de Fo, surnommés « les bâtards » (misbegotten en VO) par les toujours inventifs transhumains, ont donc été beaucoup plus sanglants et accrochés que prévus (16 morts du côté des Legiones Astartes, tout de même).

L’arrivée d’Horus et de son massif buff de zone a toutefois accéléré le dénouement de cette campagne, et Sejanus apprend de son avant-garde que ce fieffé fripon de Fo a été capturé. Un peu trop facilement d’ailleurs. Horus a à peine le temps de froncer ses sourcils primarquiels que le bunker est éventré par l’arrivée du méga-monstre gardé en réserve par Fo, dans le but avoué d’abattre le meneur adverse dans un dernier acte de défiance. Vous ne serez pas surpris d’apprendre que cela ne fonctionne pas, et bien qu’Horus sorte de l’affrontement recouvert de sang, de bile et d’autres liquides encore moins identifiables, le coup fourré du bio-généticien dément échoue lamentablement.

D’une humeur magnanime, le Primarque tient à interroger son prisonnier plutôt que de l’exécuter sommairement, comme n’importe qui d’autre l’aurait fait. La conversation qu’il a avec Fo vient donner un éclairage particulier au projet de l’Empereur de réunir l’humanité sous sa bannière : on apprend ainsi que notre bad guy du jour a quitté Terra car même lui jugeait les desseins de Pépé comme étant trop démesurés et intrinsèquement condamnables pour tremper de près ou de loin dans cette future combine. Se voyant comme un simple scientifique s’amusant avec le potentiel infini du génome humain, Fo est sincèrement horrifié par Horus, qu’il considère comme une monstruosité bien plus repoussante et dangereuse que la plus mortelle de ses propres créations. Après tout, même son lombric géant n’avait pas le potentiel nécessaire pour mettre à feu et à sang la galaxie… On est toujours le Misbegot de quelqu’un d’autre, Fo croire. Interloqué par cette discussion, et toujours dans sa phase touleumondilégenty, Horus se résout à envoyer Fo à son cher Pôpa pour que le dissident puisse recevoir la vérité impériale de la bouche (ou de tout autre orifice qu’Il choisirait d’utiliser pour l’occasion) de Son créateur. Il est désormais temps pour les Luna Wolves de préparer la prochaine campagne de la Grande Croisade, car comme dit le proverbe : « quand y en a plus, y a Ullanor ».

AVIS:

Pour ce qui a toutes les chances d’être sa dernière nouvelle écrite pour le compte de l’Hérésie d’Horus (hélas), Dan Abnett retourne aux origines et nous livre une sorte de prologue au roman ‘Horus Rising’, mettant enfin en scène la relation fratermicale entre Horus et Hastur Sejanus, seulement esquissée dans le précédent roman. On a plaisir à retrouver ce monstre de charisme, d’empathie et de badasserie qu’était le demi-divin chauve au moment de la Grande Croisade, et Abnett démontre en quelques pages qu’il est toujours capable de signer des nouvelles de remplissage1 de très grande qualité. C’est bien simple, il n’y a que du contenu appréciable dans ‘Misbegotten’, qui choisit de limiter les combats à leur portion congrue pour se concentrer sur des descriptions de l’avancement de la Grande Croisade, des interactions sympathiques entre les (nombreuses) têtes connues de son casting, et des réflexions intéressantes/clins d’œil prophétiques sur le lore de 30K. Il n’y a rien à jeter ici, et si la BL avait la bonne idée de commander à Abnett un bouquin consacré uniquement aux aventures d’Horus et de sa Légion avant que le premier devienne Maître de Guerre, je le pré-commanderais dès son annonce (c’est dire à quel point j’apprécie ce qu’Abnett parvient à faire ici). Bien entendu, les chances que cela se produisent sont infinitésimales, aussi me contenterai-je de recommander chaudement ‘Misbegotten’ à tous ceux qui aiment Dan Abnett, l’Hérésie d’Horus, et Dan Abnett écrivant l’Hérésie d’Horus.

1 : J’utilise ce terme sans arrières-pensées péjoratives. Il faut reconnaître que ‘Misbegotten’ n’apporte rien à l’Hérésie en termes d’intrigue ou de révélation, mais cela ne veut pas dire que sa lecture est superflue.

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A Lesson in Iron – D. Guymer :

INTRIGUE:

A Lesson in IronS’il y a une chose que Ferrus Manus, paix à son âne, détestait, c’était bien perdre du temps. Aussi, sitôt réuni avec sa Légion, engagée dans le démantèlement de l’empire de rouille ork, le Primarque tint à imposer sa marque sur ses Légionnaires. Nous rejoignons ainsi l’impulsif M. Manus alors qu’il fait la chasse de quelques vaisseaux peaux vertes ayant survécu à la colère de l’Imperium, et qu’il compte bien détruire afin d’obtenir la complétion à 100% de sa mission, et ainsi prouver à l’univers qu’il vaut mieux que ces poseurs d’Horus et de Russ1. Et tant pis si ces couards d’Orks décident de foncer coque baissée dans une faille Warp qui flottait par là pour échapper au courroux de l’Astartes, et que personne n’a jamais été assez timbré du côté impérial pour se risquer dans ce genre d’environnement chelou. Ferrus, et son Fist of Iron, seront les premiers à tenter le coup. Encore un record à mettre au crédit du Primarque qui en voulait.

Ferrus n’est pas seul sur le pont de son vaisseau amiral alors que ce dernier réalise le premier fistage d’une faille Warp. Il est accompagné de deux Sergents vétérans, le Terran Harik Morn et le Medusan Gabriel Santar, tous deux pressentis pour devenir son bras droit. Alors que le Fist of Iron s’enfonce dans le trans Materium comme s’il s’agissait de caramel mou, avec des effets funky sur les appareils de navigation, comme on peut l’imaginer, les auspex détectent soudain des silhouettes de vaisseaux à proximité. Il s’agit des kroiseurs orks, mais également d’un nouvel arrivant, qui n’avait pas été identifié pendant la poursuite dans l’espace réel. Point commun : tous ont été réduits à l’état d’épave, et dans un passé lointain qui plus est. À la grande surprise des impériaux, il semble que le vaisseau en question appartienne à la 10ème Légion, ce qui hautement improbable mais pas totalement impossible. Pragmatique comme toujours, Ferrus Manus décide d’aller y jeter un œil.

Alors que les pauvres grunts qui forment son escorte découvrent avec émoi 1) l’existence de Démons et 2) s’il y a une vie après la mort, le Primarque et ses comparses arrivent jusqu’au pont du vaisseau mystère, où les attend un cadavre desséché de Space Marine. Ce dernier porte les marquages d’un Iron Hands, mais, au grand dégoût de FM, il semble avoir terminé sa carrière plus machine que (sur)homme, au vu de toutes les augmétiques et bioniques que la dépouille arbore. C’est le Tech-adepte qui accompagne la fine équipe qui finit par proposer l’hypothèse la plus intéressante pour expliquer ce répugnant mystère : l’épave sur laquelle ils se trouvent est un vaisseau des Iron Hands provenant du futur, transporté dans le passé par les caprices du Warp.

Avant que la nouvelle n’ait pu être digérée par l’assemblée, une palanquée de Démons se manifeste (dans tous les sens du terme) sur le pont, et forcent nos héros à – enfin – faire usage de la force. Si ce bogoss de Ferrus s’illustre à grands coups de marteau, ses subalternes sont plus à la peine. Surpris par les nouveaux arrivants, Santar se fait ainsi arracher le bras gauche par une Bête de Nurgle joueuse, tandis que Morn est submergé par des Horreurs rigolardes. Le premier réussit toutefois à marquer des points auprès du Primarque en retournant dans la mêlée sitôt ses esprits recouvrés, tandis que le Terran se contente de haleter comme un bébé phoque sur la banquise. Avant d’ordonner une retraite tactique vers le Fist of Iron, ignorant les avis de ses sous-fifres de rester pour looter de la technologie futuriste, et/ou défendre une relique de la Légion, Ferrus tranche en son for intérieur : ce sera Gaby qui deviendra son Ecuyer et 1er Capitaine. C’est dit.

1 : C’était l’époque de la Grande Croisade où tous les Primarques avaient un nom qui rimait avec « platypus », l’animal préféré de Pépé.

AVIS:

Petite nouvelle fort sympathique consacrée par leur spécialiste incontesté, David Guymer, aux Iron Hands et à leur Primarque caractériel, ‘A Lesson in Iron’ se paie le luxe de nous présenter en quelques lignes la prise de fonction de Ferrus Manus au sein de sa Légion (choix du 1er Capitaine, et autres révélations fluffiques intéressantes incluses), combiné avec une savoureuse mise en abîme du futur qui attend le Chapitre dans quelques millénaires. Le fait que les améliorations bioniques répugnent au plus haut point l’homme aux mains de fer n’est pas une nouveauté à ce stade, mais Guymer parvient tout de même à surfer sur cette iron-ie de façon tout à fait satisfaisante. Le pauvre Ferrus Manus aura soupé de prémonitions malheureuses car jamais utilisées pour modifier la destinée pas vraiment enviable attend ses fils et lui-même à la sortie de la Grande Croisade, et on en a encore un exemple ici. Ca reste plus distrayant à lire que la moyenne des soumissions de la BL, donc pourquoi cracher dans soupe ?

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The Atonement of Fire – D. Annandale :

INTRIGUE:

The Atonement of FireNous sommes dans la dernière ligne droite de l’Hérésie, quelques mois avant que le Siège de Terra ne débute. Roboute Guilliman a fini par réaliser que lancer sa petite entreprise personnelle alors qu’il est toujours techniquement employé par Pépé Corp., et en piquant dans la caisse de Big E. en profitant d’une panne généralisée d’internet pour ne pas se faire prendre, c’était assez craignos tout de même. Pétri de remords, Roro est désormais à la recherche d’un moyen de se faire pardonner ses errements passés. En sortant de sa séance hebdomadaire avec le Chapelain/Psychiatre Volusius, lui vient une idée toute simple pour expier son énorme hubris : aider Sanguinius à rejoindre Terra en détruisant les flottes hérétiques qui se mettront sans nul doute sur la route de l’Ange à la Moumoute.

Après une petite séance de triangulation avec les poteaux dans le strategium de l’Ultima Mundi, les Ultras de l’Empereur décident d’aller au secours de la planète Diavanos, d’où est arrivé un message astropathique implorant de l’assistance pour gérer une invasion de World Eaters mal-lunés. Diavanos est de plus un monde que les Ultramarines ont rattaché à l’Imperium il y a plusieurs décennies, et dont la technique de vitraux teintés a grandement impressionné le Primarque lorsqu’il flânait dans les rues de la capitale Ecstasia à la recherche d’inspiration pour son dernier roman. Pour toutes ces raisons, ainsi que pour celle, plus prosaïque, de se venger des ravages commis par les séides d’Angron et de Lorgar dans leur pré carré, les gars de la XIIIème se ruent au secours de Diavanos, et tombent à bras raccourcis sur leurs frères ennemis alors que ces derniers s’apprêtaient à repartir pour embusquer la flotte des Blood Angels.

La bataille spatiale qui s’en suit, si elle n’est guère équilibrée (les Ultramarines sont deux fois plus nombreux, sérieux, hargneux, farineux et bleus que leurs adversaires), permet à nos héros de relâcher la pression après tous ces mois à écouter les podcasts interminables du triumvirat de l’Imperium Secundus. Alors que les derniers vaisseaux renégats sont méthodiquement désintégrés par la froide fureur ultramarine, le cuirassé Gladiator profite de la confusion pour repartir en direction de Diavanos, et certainement pas pour une visite de politesse. Guilliman comprend que les World Eaters ont un petit creux, et que s’il n’intervient pas rapidement, la planète qu’il est venu sauver va s’en prendre plein la face. Mais arrivera-t-il à temps pour empêcher les fils d’Angron de commettre l’irréparable ?

Début spoiler…Après de multiples péripéties dans les coursives du Gladiator, que les World Eaters ont faites effondrer pour gêner la progression de leurs ennemis, Roboute et ses hommes (en grande partie des Destroyers, wink wink The Lord of Ultramar’) parviennent jusqu’à la salle des torpilles où les hérétiques se sont barricadés. La mêlée désespérée et surtout très sale qui s’ensuit tourne logiquement en faveur des surhommes en bleu, mais les World Eaters sont proches de réaliser leur objectif secret (faire péter une torpille à l’intérieur du vaisseau afin d’emporter Guilliman avec eux). Seule l’habilité du Grand Schtroumpf avec son combi-bolter customisé permet d’éviter la catastrophe, mais la victoire morale revient tout de même aux groupies d’Horus. Il est en effet trop tard pour prévenir le crash du Gladiator à la surface de Diavanos, et l’onde de choc qui s’en suit rase la capitale et dévaste une grande partie de la planète. Bien évidemment, les Ultramarines ont eu le temps de regagner leurs 22 avant que cette tragédie n’arrive, mais Guilliman finit la nouvelle avec le blues. Approprié, vous me direz.Fin spoiler

AVIS:

Vu le passif peu glorieux de David Annandale avec la XIIIème Légion (‘Lord of Ultramar’…), j’ai attaqué cette nouvelle dans un état d’esprit assez peu favorable à cette dernière, et j’ai été surpris de constater que cet ‘Atonement of Fire’ tenait tout à fait la route. Nous sommes en présence d’un court format siglé HH de facture assez classique (un peu de réflexion, beaucoup d’action, et en bonus une belle tranche de Primarque), mais débarrassé de tous les défauts que l’on pouvait trouver dans les autres soumissions de notre homme (personnages stupides/inintéressants, intrigue bancale, rythme chaotique)1. Ça pourrait et devrait être considéré comme le strict minimum, mais nous savons tous que la BL ne croit pas dans des concepts aussi restrictifs que le contrôle qualité. Enfin, pas tout le temps.

Surtout, et c’est assez rare dans une publication de la Black Library (quel que soit la franchise ou l’auteur) pour le souligner, Annandale parvient à ménager un vrai suspens jusqu’au bout de son propos. Guilliman et ses Schtroumpfs destructeurs arriveront-ils à sauver Diavanos des déprédations suicidaires des World Eaters ? Même si la planète a été créée de toute pièce pour l’occasion, l’auteur arrive à nous intéresser à la conclusion de cet accrochage mineur de la fin de l’Hérésie en appuyant de façon intelligente sur les remords éprouvés par Guilliman au sujet de son Imperium Secondus et son besoin de se faire pardonner de ce petit caprice. Annandale nous ressert également la vieille rengaine du « I am never going to financially recover from this », 30K style, déjà bien exploitée par d’autres avant lui, mais qui fait toujours son petit effet quand utilisée à dessein, ce qui est le cas ici. Bref, une vraie bonne surprise pour ma part, et une des meilleures soumissions de David Annandale pour le compte de cette franchise, si vous demandez mon avis.

1 : On pourrait lui reprocher de ne toujours pas maîtriser les bases spatio-temporelles d’une bataille spatiale (exemple gratuit : la course poursuite entre l’Ultimus Mundi et le Gladiator ne semble durer que quelques minutes, alors qu’elle s’engage à proximité du point de Mandeville du système et se termine dans l’atmosphère d’une planète habitable (donc proche de son soleil), ce qui devrait prendre au bas mot quelques jours), mais dans mon infinie générosité, je passe l’éponge là-dessus.

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Lantern’s Light – J. Swallow :

INTRIGUE:

Lantern's LightDepuis une année, Mortarion se morfond dans le système de Barbarus, après que ce dernier ait été intégré à l’Imperium par la volonté de son divin souverain, Pépé 1er. Bien que cette période ait permis au Primarque d’apprendre beaucoup sur le royaume galactique de son Père, la Grande Croisade et la place qu’il devra bientôt prendre dans cette dernière, Morty et son esprit rebelle (il a une petite voix dans la tête qui prend un malin plaisir à poser toutes les questions malaisantes) ne se satisfont pas de la situation. Pour faire simple, la seule chose qu’il trouve vraiment cool est le lien qu’il a réussi à tisser avec ses Dusk Raiders, bientôt renommés en Death Guard en l’honneur des compagnons de lutte qui l’ont soutenu sur Barbarus. Pour le reste, c’est la soupe à la grimace, comme si dans le corps gigantesque de notre héros se cachait un collégien complexé (ce qui est peut-être le cas, vu la vitesse à laquelle les Primarques grandissent).

Aujourd’hui est un jour spécial, cependant, puisque son Pôpa l’a invité à le rejoindre sur son vaisseau amiral, afin d’avoir une discussion avec son plus jeune rejeton. Ne pouvant pas s’enfermer dans sa chambre en écoutant The Cure, comme tout bon ado emo qui se respecte, Mortarion se rend sur le Bucephelus comme convenu, mais prend un malin plaisir à crash the party en piétinant le protocole de ses grosses bottes cloutées. Hôte gracieux s’il en est, l’Empereur ne s’en formalise pas et propose à son fiston une petite balade en tête, loin des petits fours et orchestres de chambre qui semblent taper sur les nerfs de son nihiliste de fils. Seulement, à vouloir en mettre plein la vue à ce dernier1, Papy gâteau ne parvient qu’à faire croître le ressentiment de Morty à son égard. Ce dernier n’a en effet toujours pas digéré la manière dont la campagne de Barbarus s’est terminée : lui crachant ses poumons et suintant du pus par tous les pores, et l’Empereur se téléportant par magie devant Necare (seigneur suprême de Barbarus et père adoptif de Mo’) pour lui voler son kill. On sent donc que les relations ne seront jamais au beau fixe entre ces deux là, mais que pouvait attendre donc de la part d’un Primarque ayant grandi sur une planète perpétuellement recouverte de nuages verdâtres ?

Un peu plus tard, l’Empereur tente une autre avancée, en amenant Son fils dans le « modeste » atelier où il se délasse l’esprit et les doigts lorsqu’il a un peu de temps libre. Comme Il le révèle à Morty, Il offre à chacun de Ses Primarques un cadeau fait de Son auguste et blanche main avant que ces derniers ne partent rejoindre la Grande Croisade, et c’est ainsi que Mortarion hérite d’un magnifique cimeter-. En fait non. Le goujat refuse tout net de se séparer de sa faux énergétique, ce qui crispe légèrement l’Empereur. Pour ne pas avoir l’air de refuser le cadeau paternel, Mortarion s’empare d’une autre relique qui traînait dans le coin, le pistolet Lanterne que Pépé a gardé comme souvenir de sa conquête de la planète Shenlong. Et voilà comment une bouderie puérile a fait de Morty le Primarque pistolero. The more you know…

La nouvelle se termine avec un Empereur sensiblement agacé par les caprices de Son Fils, et qui fait ce qu’il a l’habitude de faire depuis cinquante ans quand quelque chose Le gonfle : refiler la patate chaude à ce brave Horus. Comme Lulu la Percale tenait à rencontrer au plus tôt son nouveau frérot, il attendait patiemment dans une antichambre du Bucephelus, ce qui donne l’occasion à Pépé d’aller martyriser un sac de frappe à la salle de gym pendant que Ses fistons font connaissance. Pas tous les jours faciles d’être un père célibataire de famille nombreuse…

1 : La discussion dans la coursive avait pour but principal de montrer à Mortarion le véhicule de fonction gracieusement offert par l’Empereur, l’Endurance. On raconte que les derniers arbres de la forêt amazonienne ont été coupés pour produire le papier cadeau nécessaire à l’emballage.

AVIS:

James Swallow signe peut-être sa meilleure soumission consacrée à Mortarion avec Lantern’s Light, nouvelle qui explore de manière assez fine la psyché torturée du Primarque de Barbarus, et la relation complexe qu’il a toujours entretenue avec l’Empereur. Tout l’intérêt de ces quelques pages repose dans la dualité des sentiments ressentis par le nouveau patron des Dusk Raiders : a-t-il raison de considérer Pépé comme un tyran égoïste et incapable de considérer les autres que comme des expédients à utiliser comme bon lui semble, ou est il juste sujet à une paranoïa aigüe, sans doute renforcée par l’enfance traumatisante qu’il a subi avec son père adoptif ? Ce sera au lecteur de décider, et c’est bien mieux ainsi. En bonus, on a le droit à pas mal de détails fluff, ce qui est toujours appréciable, et à un Empereur pas totalement à côté de Ses pompes (ce qui est malheureusement souvent le cas lorsqu’Il intervient personnellement dans un récit de la BL). Je recommande donc une nouvelle de James Swallow, et c’est assez rare pour le souligner.

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Canticle – D. Guymer :

INTRIGUE:

On a tous nos surnoms, plus ou moins glorieux, et Ferrus Manus ne fait pas exception. Bien avant d’être baptisé pognes d’acier (en latin haut gothique pour faire plus classe), notre héros a ainsi été appelé Numerodis (l’Empereur), Cataclysme (les géants des tempêtes du Pinacle de Karaashi), La Finalité (des morts-vivants quelconques), Rehew Netjer, soit le Fils de l’Homme (les Necrons), Mon très Chair (les despotes fragmentés du Subliminat), et Empafé de première (le type auquel il a piqué sa place sur le parking du Monoprix de Medusa). Pour sa part, et après avoir malencontreusement libéré Asimoth sur sa planète d’adoption peu de temps après son arrivée remarquée sur cette dernière et s’être révélé trop faiblard pour ramener la bestiole dans son enclos, le Primarque des Iron Hands s’est donné le nom et la vocation de Chasseur, ayant décidé de réparer sa bévue en traquant le wyrm d’argent à travers les paysages bucoliques de Medusa.

Ces premières années sont également l’occasion pour Ferrus Manus de faire ses premières armes, dans tous les sens du terme. On apprend ainsi qu’il a rencontré quelques difficultés sur sa route, d’ordre robotique, semi-robotique et infernal, ce qui donne une idée de la très riche « biodiversité » de la planète sur laquelle il a fait son trou. Rien de très mémorable cependant pour FM (et pour Guymer), dont l’équipement consiste en une cuirasse d’adamantium upcyclé et une bardiche bricolée à partir des dépouilles fumantes de ses malheureux adversaires biomécaniques. On apprend également que ce gentil garçon est capable de subsister sur un régime composé de sable, minéraux et métaux1, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Poursuivant sans relâche sa proie insaisissable, Ferrus finit tout de même par rencontrer des membres de son espèce, d’abord sous forme de cadavres entourant l’épave d’un camping-car Medusan. Curieux d’en apprendre plus sur ces étrangers qui lui ressemblent tant, et soucieux de récupérer un peu de matos utile dans la boîte à gants du véhicule éventré avant que tous les charognards du coin ne débarquent, le jeune Primarque se fraie un chemin jusqu’à la chambre forte du Sandcrawler, négociant au passage dix zombies cyborgs (zomborgs ?) occupés à mastiquer les cartes mères et câbles jack leur étant tombé sous la pince. Ce régime majoritairement électrovore ne les empêche cependant pas de sauter sur l’aventurier pour lui faire les poches dès qu’il s’approche un peu trop, forçant notre héros à faire montre de force autant que de ruse.

Une fois parvenu dans la salle des coffres, Ferrus a la surprise d’être mis en joue par une rescapée de l’embuscade ayant scellé le destin du véhicule et de ses occupants. Guère impressionné par la pétoire plasmique que son interlocutrice lui pointe sur le torse, le Chasseur refuse l’offre qui lui est faite par cette dernière de rejoindre son clan, arguant qu’il a encore une opération de vermifuge à accomplir, et un véritable nom à obtenir, avant de pouvoir faire son entrée dans le monde et participer au Bal des Débutant.e.s de Medusa. La suite de l’histoire de Chéri FM, si elle est connue, sera toutefois narrée dans un autre cantique que celui-ci.

1 : Avec quelques protéines et lipides occasionnelles de temps à autres, par exemple lorsqu’il croise la route d’une escouade de Dépeceurs sur leur 31. On peut donc classer Ferrus Manus dans la sous-catégorie des Primarques cannibales, avec Konrad Curze et Sanguinius.

AVIS:

On a plus l’impression d’un épisode pilote pour une série consacrée à l’enfance de Ferrus Manus que d’une nouvelle indépendante à la lecture de ce ‘Canticle’. Guymer passe en effet la majorité de ses pages à présenter de façon intrigante le jeune Primarque et sa planète, dont on aimerait bien apprendre davantage à la fin de son récit. L’intrigue semble avoir été volontairement tronquée pour permettre à l’auteur de la reprendre au cours de l’épisode suivant, qui n’a, à ma connaissance, pas été publié à ce jour. Peut-être faut-il creuser du côté de la novella1 que David Guymer a consacré à son héros pour mettre en perspective cette nouvelle ? Ou plutôt dans le ‘Voice of Mars’ du même auteur, où le Cantique des Voyages occupe une place importante ? En tous cas, si elle n’est certes pas désagréable à lire, et livre quelques éléments de fluff sur le plus moyen des fils de l’Empereur, cette histoire aurait gagné à se conclure de façon plus définitive.

1 : ‘Ferrus Manus : La Gorgone de Medusa’.

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The Verdict of the Scythe – D. Annandale :

INTRIGUE:

Nous retrouvons Mortarion, le plus sec (dans tous les sens du terme) des Primarques pendant la Grande Croisade, alors que la flotte d’expédition qu’il mène approche de la planète Absyrthus en mode bulldozer, perforant comme qui rigole – si Morty savait ce que cela veut dire – les défenses orbitales des locaux et se préparant à larguer son contingent de Death Guards sur les positions stratégiques de ce théâtre d’opération. Pour une fois, cette brutalité, pour laquelle sa Légion est fameuse, semble être justifiée. La civilisation d’Absyrthus est en effet similaire à celle de Barbarus, en cela qu’elle est gouvernée par une caste de sorciers1, ce qui a le don de mettre le Primarque psychophobe en rogne. Son plan pour remédier à ce problème fâcheux et mettre ce monde en conformité avec le cahier des charges impérial est aussi simple qu’élégant que direct : envoyer une barge Astartes s’écraser sur le QG adverse, ici la capitale planétaire, Temnis, pour décapiter (et aplatir) sa chaîne de commandement et frapper l’ennemi au cœur. Il a déjà employé cette technique, sans doute piquée aux Orks, avec un succès indéniable mais un peu trop sanglant pour ses fragiles de frères, lors de la campagne de Galaspar, achevée en un temps record par l’envoi d’un vaisseau spatial dans sa cité ruche principale. Un vieux fond de compassion qu’il ne se savait pas avoir pousse toutefois Mortarion à limiter la casse sur Absyrthus, qui ne perdra que son spatioport sous les patins blindés du Fourth Horseman, avant de demander grâce quelques minutes plus tard. Toujours d’humeur miséricurieuse (ça veut dire ce que ça veut dire), le Faucheur masqué accepte la réédition sans condition du camp d’en face au lieu d’ordonner le massacre complet des habitants de Temnis, comme ses officiers, à commencer par ce fourbe de Typhon Calas, s’y attendaient.

Il s’avère en effet que Mortarion est travaillé par une vague pulsion empathique, et s’interroge sur la possibilité, même mineure, d’apporter la paix et l’ordre à la galaxie autrement qu’en massacrant les mécontents. Absyrthus fera donc figure de test grandeur nature, et notre ombrageux et ombragé héros accepte avec stoïcisme de se plier aux formalités organisées par la reine déposée Cirkesce après la fin des combats. Typhon, entraîné par son boss dans le traquenard absolu que constitue un dîner diplomatique, questionne ouvertement le bien-fondé de la décision du Primarque, arguant que si la Légion s’appelle DEATH Guard, et pas la IDAWYBRYO2 Guard, c’est bien pour une raison. Habitué à se faire bolosser par son sous-fifre dans les écrits de James Swallow, Morty ne trouve pas grand-chose à dire pour justifier sa magnanimité soudaine, et décide d’aller prendre l’air pour rencontrer les vrais gens d’Absyrthus, et ainsi se faire une opinion définitive sur la situation. Laissant le palais derrière lui et ses Deathshrouds à longue portée (49 pas exactement), sa (future) Majesté des Mouches s’enfonce dans le dédale de la vieille ville…

Début spoiler…Et là, cela tourne rapidement au drame. Les oreilles sensibles de Mortarion finissent en effet par détecter les bruits révélateurs d’un rituel chaotique, ce qu’il a formellement interdit aux nouveaux sujets de l’Imperium. On pourrait arguer que c’est un peu chien de sa part de se formaliser de la persistance d’une pratique traditionnelle bannie il y a moins d’une journée, mais le Primarque acquiert bientôt la certitude que la vieille femme qui fait couiner son brasero au cœur de la casbah de Temnis EN A FAIT EXPRÈS POUR LE FAIRE CHIER ce qui est un crime impardonnable. Pire, sa rapide entrevue avec la mégère décomplexée, et son retour jusqu’au palais de Cirkesce, le convainquent que les Absyrthusiens sont tous des hypocrites, faisant semblant de se plier aux consignes des envoyés de l’Empereur le temps que ces derniers repartent purger les étoiles.

Devant ce constat accablant, et peut-être un peu précipité, le sort de la planète est scellé. Mortarion siffle la fin de la récré, arrachant Typhon au buffet froid que le Premier Capitaine était en train de nettoyer avec lenteur et méthode3, repart en orbite et décrète l’Exterminatus pendant que ‘Won’t Get Fooled Again’ des Who est envoyé à fond les ballons par l’auto radio du Fourth Horseman. Ce sera désormais le seul verdict que délivrera la Death Guard à ses adversaires, en faisant la Légion la plus efficace de la Grande Croisade pour un temps…Fin spoiler

1 : Autre point commun avec la planète natale de Mortarion (et le Finistère Nord) un taux d’ensoleillement inférieur à 1%.
: I Don’t Agree With You But Respect Your Opinion.
3 : On le sait peut, mais c’est de là que vient la règle spéciale de la Death Guard.

AVIS:

David Annandale montre avec ‘The Verdict of the Scythe’ qu’il a parfaitement compris les modalités de l’exercice représenté par une nouvelle Primarchs, soit un récit mettant en scène un épisode marquant de la vie de son sujet, et éclairant le lecteur sur les raisons ayant poussé ce dernier à devenir la figure qu’il est dans le fluff. En 12 pages bien pesées, Annandale répond ainsi à la question Orangina Rouge (mais pourquoi est-il si méchant) pour Mortarion, brossant le portrait d’un Primarque dont le caractère impitoyable a été, à un certain niveau, causé/renforcé par un événement particulier l’ayant détourné pour de bon de la voie du Bisounours. On peut trouver l’histoire et la justification qu’elle apporte à la rigidité morale de son protagoniste simpliste, mais force est de reconnaître à l’auteur qu’il a rempli son contrat de façon satisfaisante, même si pas extraordinaire.

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A Game of Opposites – G. Haley :

INTRIGUE:

C’est malheureusement très peu traité dans les livres d’histoire impériaux, mais la bataille de Beta Garmon, aussi connue sous le nom de casse (de Titans) du millénaire, ne s’est pas tenue du jour au lendemain. Cette rencontre décisive entre renégats et loyalistes, et les milliards de morts qui en ont découlé, n’a été rendue possible que par le dévouement et le travail de l’ombre de Légions de sous-fifres, comme l’histoire dont il est question ici s’en fait écho. Bienvenue donc à la surface d’Epsilon Garmon II, planète du cluster garmonien que les Iron Warriors souhaiteraient fortifier pour ralentir l’arrivée prochaine de Guilliman et de ses hordes de Schtroumpfs. Le conditionnel est ici de mise car les efforts de terrassement des hommes de fer se sont jusqu’ici faits contrecarrer par les manœuvres destructrices d’une petite force de White Scars. Peu familiers des techniques de hit and run de leurs cousins des steppes, les fils de Perturabo sont perturbés par cette campagne d’un genre nouveau, où ils arrivent toujours trop tard pour empêcher les Space Bikers de sévir.

Fort heureusement, le Maître de Forge Xyrokles, affublé de son larbin et souffre douleur Phideark, ainsi que d’une ribambelle de Capitaines dont je vous épargnerai les noms, a un plan machiavélique pour venir à bout du péril jaune blanc à éclair rouge. Ayant récupéré dans un campement abandonné par ses ennemis quelques bouquins philosophiques signés de la main même de Jaghatai Khan et remplis d’aphorismes aussi profonds que « La taupe ne voit pas le vol de l’éléphant », « Pourquoi rester debout quand on peut s’asseoir » ou « Plus il y a de fous, moins il y a de riz », Xyrokles a tellement bûché sa philo1 qu’il est certain de pouvoir prendre les White Scars à leur propre piège, en réalisant un coup de billard à IV bandes à base de feintes, de retraites et d’embuscades tellement complexes que la majorité de ses sbires n’y blaire que dalle. Lorsque vient enfin le jour le plus long, le Khan Ishigu emmène ses motards énergétiques faire une petite virée dans un avant poste renégat, sans se doute un instant que ses minutes sont comptées.

Et en effet, le plan de Xyrokles se déroule comme sur des roulettes, la colonne blindée qu’il a envoyé leurrer les loyalistes au moment où ils commencent à se replier en bon ordre se révélant être un extra trop tentant pour qu’Ishigu et Cie résistent à la tentation d’y planter leurs pneus. Ce détour est toutefois lourd de conséquences pour les White Scars, qui se font surprendre par une contre-attaque vigoureuse de la part des Iron Warriors, et canalisés dans un goulet étroit débouchant sur la ligne de blindés du Maître de Forge, qui n’a plus qu’à donner l’ordre d’ouvrir le feu pour régler une fois pour toutes leur compte aux scarifiés d’en face…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur la légendaire flexibilité tactique des fils du Khan, qui avaient tout planifié depuis le début et cachés également une réserve mobile pour surprendre l’adversaire. Confrontés à une force anti-chars conséquente et bénéficiant de l’effet de surprise, Xyrokles et ses hommes ne font pas long feu (c’est la vieille histoire de l’artilleur artillé). L’honneur est toutefois sauf pour ce dernier, puisqu’il s’aperçoit après avoir été fait prisonnier que c’était Jaghatai Khan en personne qui était aux commandes dans le camp d’en face. S’en suit un échange d’amabilités qui nous permet d’apprendre que le Khan se tamponne le samovar avec la vérité impériale, qu’il considère poliment comme un avis parmi d’autres. Stupeur chez Xyrokles, qui en surhomme de principe, pensait que tous les loyalistes adhéraient scrupuleusement au dogme de Pépé. Il emportera toutefois ce secret dans la tombe, que son généreux vainqueur lui accorde en récompense de ses méritants efforts de réflexion, Jaggie Chan lui dévissant les cervicales d’un tour de main à la fin de leur échange. C’est qu’il a du pain sur la planche, et un retour sur Terra à préparer…Fin spoiler

1 : Ce qui est somme toute logique pour un grec ancien.

AVIS:

Je suis partagé sur la valeur de ce ‘A Game of Opposites’, qui comporte des éléments positifs comme négatifs. Pour commencer par ce qui ne fâche pas, j’ai apprécié le choix de Haley de donner une dimension, si ce n’est comique, au moins caustique, à ses Iron Warriors, qui font ainsi mentir leur réputation de guerriers prenant tout au premier degré. La dynamique entre Xyrokles et Phideark est particulièrement savoureuse, le second encaissant sans broncher toutes les punchlines que son supérieur lui balance à la tête. Dommage que le destin tragique du Coluche d’Olympia nous prive d’autres saillies drolatiques de sa part pour la suite de l’Hérésie. Cette nouvelle est également intéressante d’un point de vue fluffique, car elle donne à voir un Jaghatai Khan d’un pragmatisme assumé et presque hérétique, ayant pris parti pour son Père mais loin de se ranger à toutes ses vues, y compris sur des sujets aussi sensibles que la religion (il croit en la réincarnation). D’un autre côté, ‘A Game of Opposites’ pêche franchement pas son manque de suspens et son déroulement sans surprise. Car le résumé ci-dessus ne suit pas exactement le récit de Haley, qui choisit de révéler la présence du Khan au côté d’Ishigu dès le premier tiers de la nouvelle, ce qui condamne d’office le stratagème de Xyrokles à l’échec1. Le retournement de situation final et la victoire des White Scars sont donc aussi attendus que l’heure de la pause syndicale dans un guichet de poste, ce qui peut blaser le lecteur (en tout cas, ça a été mon cas). En conclusion, pas le meilleur texte de Guy Haley, mais pas désagréable ou inutile pour autant.

1 : Il n’y a que John French qui fait battre un Primarque par un Space Marine (‘The Crimson Fist’).

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Better Angels – I. St. Martin :

INTRIGUE:

Les Légions Space Marines sont un peu comme les filières post bac : il y en a pour tous les goûts et tous les niveaux. Si les impétrants ayant de la suite dans les idées et la volonté de faire carrière se rabattront sur des spécialisations ternes mais assurant la sécurité de l’emploi (BTS Gestion avec les Ultramarines, Bac Pro travaux publics avec les Imperial Fists ou les Iron Warriors, CAP Esthétique avec les Emperor’s Children…), les plus aventureux tenteront leur chance dans des cursus plus pointus, à leurs risques et périls. C’est ainsi que l’Empereur se retrouva avec des cohortes de philosophes désagrégés (Thousand Sons), théologiens en déshérence (Word Bearers), et vétérinaires ayant raté leur concours d’entrée (Space Wolves), qu’il dût bien recaser à droite et à gauche pour éviter la crise. Enfin, pour un temps. Mais, parmi tout l’Astartes, aucune Légion n’égale les Blood Angels en termes de réputation. Si on appelle les fils de Sanguinius (derrière ses ailes) des poètes, des peintres ou des danseuses, c’est pour une bonne raison : le Primarque exige que tout le monde pratique une discipline artistique, depuis le plus humble novice jusqu’au plus ancien des Dreadnoughts1. Notre héros, que nous allons suivre depuis le début de sa carrière jusqu’à l’arrivée de la flotte de la IXème en orbite de Terra, peu de temps avant le début du siège, ne fait pas exception. Jehoel (il faut croire que Joël était déjà pris) s’est ainsi spécialisé dans la verrerie, ce qui lui a attiré l’intérêt et le mentorat de son père génétique, souvent présent lorsque le souffleur fait parler la poudre le sable.

Ces rencontres ponctuelles mais fréquentes, si elles permettent aux deux surhommes de discuter technique et philosophie, amènent surtout le lecteur à suivre en filigrane la fin de la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus du point de vue d’un Primarque et d’une Légion particulièrement éprouvés par la traîtrise du Maître de Guerre, et le déclenchement de la baalédiction des fils de Malle, ou l’inverse. Finies donc les évocations de la prochaine reconversion des légionnaires en portraitistes et potiers une fois la galaxie conquise, et bonjour les sculptures de démons réalisées dans un état second, au grand déplaisir de Sanguinius – qui passe la nouvelle à critiquer Jehoel, ceci dit. Adieu aux riches galeries du Red Tear, et bonjour à la décoration minimaliste du Convenant of Blood, véhicule de courtoisie prêté par l’Imperium après le carambolage de Signus Prime. Lorsque St Martin décide enfin de mettre un point final à sa nouvelle, on apprend tout de même que si Sanguinius s’est montré aussi assidu dans ses discussions avec Jehoel au cours des décennies passées, c’est parce qu’il considérait que ce dernier était l’un des Blood Angels les plus bloodangeliques de la Légion, et pouvait ainsi se contempler à sa guise dans son interlocuteur. Un peu égocentrique le garçon, tout de même. Le rideau tombe sur la scène après que Jehoel ait montré à son pôpa la représentation idéalisée de Terra qu’il a réalisée avec de la pâte de verre, ce qui lui vaut les félicitations (enfin !) du jury, et que l’Ange ait balancé la remarque à connotation fataliste de rigueur, davantage pour le bénéfice du lecteur que pour celui de son fiston. Si jeunesse savait…

1 : À l’exception notable de la danse classique, après que le Vénérable Neolardon ait failli écraser Sanguinius en passant à travers le plancher du gymnase à la suite d’un saut carpé mal négocié.

AVIS:

Je placerais ce ‘Better Angels’ dans le prolongement de ‘Death of a Siversmith’/’Mort d’un Orfèvre’ (Graham McNeill), et pas seulement parce qu’il met en scène un protagoniste très porté sur les arts plastiques. On retrouve en effet, et surtout, dans cette nouvelle la volonté assumée de l’auteur de surprendre son public en livrant une histoire s’écartant largement du bolter porn qui est la norme de l’Hérésie d’Horus. Et, là encore, le résultat penche davantage vers l’exercice de style un brin forcé que vers la réussite incontestable. Ou peut-être n’ai-je pas lu assez sur Sanguinius et les Blood Angels pour tirer la substantifique mehoelle de ce texte ? C’est bien possible. Toujours est il que je sors du studio du Primarque à plumes un peu circonspect sur la valeur de cette soumission, qui aurait pu, pour reprendre son titre, être bien meilleure.

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The Conqueror’s Truth – G. Thorpe :

INTRIGUE:

La chance d’une vie. C’est ainsi que la Commémoratrice Ennylin Ares, rattachée à l’équivalent d’un car de manœuvres moldaves en matière de flotte d’expédition de la Grande Croisade, accueille la nouvelle d’une rencontre fortuite avec une escadre de vaisseaux de l’Astartes dans le système de Vestogorn. Et tant pis s’il s’agit des Night Lords, dont la réputation de brutalité et de sadisme commence à transpirer largement d’un bout à l’autre de l’Imperium. C’est en effet l’occasion pour notre héroïne, qui a jusque-là usé ses pellicules à immortaliser des inaugurations de barres de HLM pour déportés colons sur une douzaine de mondes conquis depuis belle lurette, de se confronter à la réalité de l’expansion humaine dans la galaxie, et de saisir sur le vif les glorieux Space Marines alors qu’ils apportent l’unité impériale à une planète un peu récalcitrante. Après tout, c’est pour son bien.

Sa requête d’un rattachement aux opérations des Night Lords ayant été rapidement acceptée, Ares bénéficie d’un traitement VIP, accordé à la demande expresse de Konrad Curze, qui dirige la mise en conformité de Vestogorn d’une main de fer et d’un air satisfait. C’est tout lui ça. Après une rencontre convenablement inquiétante et crépusculaire sur le Nightfall avec le Primarque en personne pour un entretien de motivation rapidement expédié, Konnie charge son surhomme à tout faire, le sarcastique Premier Capitaine Sevatar, de chaperonner la Commémoratrice sur le terrain. N’ayant que peu de temps à consacrer à une touriste à appareil photo, l’officier se contente de la déposer à bonne distance de la ligne de front, en lui intimant de ne pas se rapprocher de cette dernière, sous peine de rencontrer les mêmes problèmes que les Commémorateurs précédemment rattachés à la VIIIème Légion, dont les effectifs ont fondu comme neige au soleil après une série d’accidents fâcheux et de démissions subites. C’est que tout le monde ne supporte pas bien la manière très personnelle dont les Night Lords s’acquittent de leur mission de reconquête du Lebensraum impérial. Il y a des Croisés qu’il ne vaut mieux pas croiser dans une allée sombre…

Bien évidemment, dans la plus pure tradition des civils indisciplinés fourrés dans les pattes énergétiques des Space Marines, Ares décide de ne pas suivre le sage conseil de Sevatar, et bien évidemment, elle se met rapidement dans de beaux draps. Sa décision de grimper en haut d’un immeuble en ruines pour bénéficier d’une vision d’ensemble sur la cité « pacifiée » par les Night Lords se révèle être une mauvaise idée lorsqu’une petite bande de combattants locaux la repère et converge sur sa position, et sans doute pas pour lui demander de prendre une photo de groupe. Tout cela aurait pu très mal se finir pour notre héroïne sans l’intervention parfaitement ponctuelle des Night Lords, qui font leur fête aux insurgés, récupèrent la Commémoratrice égarée, et l’emmènent à quelques blocs de là rencontrer à nouveau Curze, qui a besoin de ses talents de communicante pour faire passer un message…

Début spoiler…Ce message, qu’il destine et dédicace à tous les pontes de Terra qui décident du devenir de la Grande Croisade sans y avoir jamais participé, et aussi cash que trash. Le rêve de l’Empereur est, dans bien des cas, un véritable cauchemar pour les populations des planètes qui résistent à l’assimilation, comme l’illustre bien le destin des Vestogorniens, victimes d’un grand remplacement littéral et expéditif pour faire la place aux colons impériaux. Faits prisonniers par les Night Lords, ils sont en effet précipités dans les puits géo-thermaux dont la cité tire son énergie, ce qui règle d’un seul coup les problèmes d’insécurité et de surpopulation auxquels Curze est confronté, en plus de se révéler économe en munitions. C’est Gégé de la compta’ qui va être content. Evidemment, Ares est scandalisée par ce crime de guerre puissance 30.000 auquel elle est forcée d’assister, mais est prise au dépourvu par le désir sincère du Primarque que cette vérité peu glamour soit partagée avec le reste de l’Imperium, et par la révélation (peut-être mensongère) que l’Empereur est déjà au courant de l’approche radicale de son fils indigne, et n’a rien trouvé à y redire… pour le moment. Curze insiste même pour récupérer les images et vidéos prises par Ares afin que les Community Managers de sa Légion puissent monter un petit clip d’avertissement sans frais pour les prochaines planètes que les Night Lords seront chargés d’ambiancer. Bref, tout le monde y gagne, et tout va (déjà) pour le mieux dans le meilleur des univers…Fin spoiler

AVIS:

Gav Thorpe fait le job avec cette chtite nouvelle, qui donne à voir les méthodes et philosophies d’un Konrad Curze encore loyal mais déjà fortement désabusé et totalement marginal, au plus fort de la Grande Croisade. Rien de tout cela n’est très nouveau, à part peut-être le fait que l’Empereur ait soi-disant choisi de fermer les yeux sur les méthodes incisives de l’ex futur Night Haunter, mais le propos est bien servi et mis en scène, et Thorpe ne se gêne pas pour souligner la logique dans la folie du Primarque justicier, qui fera finalement école dans les millénaires qui suivront. Quel visionnaire alors, ce Konrad. On a également plaisir à retrouver Sevatar, pas encore blanchi sous le harnais ni rougi sur le gantelet, et le voir faire du Sevatar (ADB style), c’est-à-dire balancer des remarques acerbes avec l’aplomb d’un Gaspard Proust sous progénoïdes. C’est du fan service certes, mais c’est pas mal fait et on aurait donc tort de s’en priver. Au final, ‘The Conqueror’s Truth’ est une version revue, corrigée et améliorée de ‘The Dark King’/’Le Roi Sombre’ (Graham McNeill), qui se donne l’espace et les moyens de délivrer son message de façon efficace.

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The Sinew of War – D. Hinks :

INTRIGUE:

Sur Macragge comme sur Terra, bien des millénaires plus tôt, la vile populace s’est soulevée contre ses justes et bienveillants maîtres, provoquant émeutes, massacres, feux de poubelle et occupations de ronds-points, tous crimes abominables mais heureusement sévèrement punis par les forces de l’ordre. Et en termes de répression policière, la capitale des 500 mondes a un avantage de taille et de poids par rapport à notre bonne vieille planète : Roboute Guilliman, génie précoce et baraqué, général visionnaire, humaniste convaincu, et fils adoptif du Consul Konor Guilliman, qui forme avec son collègue Gallan le duumvirat exécutif de l’espèce de république (il y a un sénat aussi) établie sur Macragge City. Occupé en Illyrium à pacifier une bande d’autochtones ayant eu la mauvaise idée de se rebeller contre l’ordre établi, notre héros a raté le début du soulèvement urbain qui a transformé la cité idéale de son enfance en champ de bataille. L’idéaliste, et un brin méprisant, surhomme a bien du mal à comprendre pourquoi diable une partie de l’armée s’est rangée du côté des casseurs, tout ça pour une bête histoire d’argent. C’est bien une réflexion de gosse de riches ça, Roro. Mais il lui faut attendre avant de consigner par écrit ses savantes réflexions sur les causes et les répercussions de ce mouvement social aussi inédit que violent : son père est resté dans la cité et a sans doute été pris pour cible par les fainéants et les sans dents. Il faut lui venir en aide.

Progressant rapidement vers le palais du Consul en distribuant quelques baffes aux mutins au passage, et utilisant son armure de scenarium pour passer entre les balles1, Gui est rejoint en chemin par Gallan, qui est venu lui aussi s’enquérir de la situation de son collègue de bureau. N’hésitant pas à joindre le geste à la parole, le Consul consort est même blessé dans la bagarre, écopant d’une estafilade au biceps pour preuve de son dévouement. Las, les deux compères arrivent trop tard pour sauver Konor (ce qui est triste) et les tapisseries (ce qui est pire). Papa Guilliman a été lâchement égorgé par ses assaillants, l’empêchant de dire adieu à son fils mais surtout de donner le nom des coupables. Bizarrement, il refuse catégoriquement que Roboute s’approche de lui dans ses derniers instants, allant jusqu’à le mettre en joue avec son pistolet pour le maintenir à distance. Le respect des gestes barrières jusqu’à la dernière seconde, on reconnaît bien là la trempe d’un vrai Macraggien. Konor a toutefois un message à faire passer à son fiston avant de mourir pour la patrie : une pièce frappée à l’effigie des deux Consuls de Macragge, et symbolisant le caractère éternel de la république, même en ces heures difficiles. Ou du moins, c’est ce que le cerveau embrouillé de Roboute en déduit, se souvenant d’une leçon de vie mémorable inculquée par son père avec un sesterce du même genre bien des années plus tôt. Sur ces considérations philsophico-fiduciaires, Konor passe de vie à trépas, provoquant une colère noire bleue chez son fils.

Convaincu par Gallan d’aller défendre le Sénat, probablement attaqué lui aussi par les vandales en sandales, Roboute sèche ses larmes et lèche ses armes, avant de se frayer un chemin jusqu’au parlement local en commettant quelques crimes de guerres au passage. On va dire qu’il bénéficiait de circonstances atténuantes. Pendant que Gallan tente d’aller raisonner les sénateurs, qui débattent férocement entre eux du meilleur moyen de châtier les gueux, Guilliman est envoyé se changer au vestiaire, son apparence dépenaillée risquant fort de provoquer des remous contre productifs dans les rangs de l’auguste assemblée. Cet enfilage de toge manque toutefois de tourner court pour le Primarque, qui se fait soudainement attaquer par le préposé aux cabines d’essayage, armé d’un poignard empoisonné. Le nez très fin de Guilliman lui permet de comprendre en un éclair que la même toxine a été utilisée sur Konor, et que c’est pour protéger son fils d’une intoxication involontaire que le Consul mourant l’a empêché d’approcher. Passé l’effet de surprise, l’assassin en puissance ne fait pas longtemps le malin face aux réflexes de mangouste et à la poigne de langouste de notre héros, qui ne parvient cependant pas à lui faire cracher autre chose que des bulles de bave (le bougre retourne son surn contre lui), à commencer par le nom de son commanditaire. Encore un crime crapuleux, c’est dingue ça. Il faudrait vraiment que les pauvres songent à être moins pauvres, ça réglerait beaucoup de problèmes d’un coup. Cette péripétie évacuée, il est temps pour Roboute de rejoindre Gallan sur l’estrade, afin de soutenir le coup d’état salutaire que ce dernier veut initier pour sauver la république…

Début spoiler…Mais, ô surprise, Rob’ est accueilli par un discours très critique de ce galopin de Gallan à l’encontre de son père, taxé de populiste et de socialiste par son homologue, et à l’annonce de son propre assassinat, pour le bien de Macragge. Evidemment, le « hum hum » que jette Guilliman juste après ruine un peu le groove de celui qui aurait bien aimé être empereur, qui se prend les pieds dans le tapis à tenter de justifier son double langage. Pas plus bêtes que la moyenne, les sénateurs comprennent vite que Gallan est le méchant de l’histoire, et qu’il a manigancé ce soulèvement populaire pour se débarrasser de ses rivaux et saisir le pouvoir. Roboute était parvenu à la même conclusion quelques instants auparavant en réalisant que la pièce que lui avait donné son père désignait en fait son meurtrier, puisqu’elle avait le profil de Gallan frappé sur ses deux faces2. Plus démasqué que Donald Trump au milieu d’une épidémie de COVID-19, le félon se fait appréhender par le service de sécurité, après que le noble Guilliman, ayant réalisé que tuer le traître de ses propres mains aurait été certes cathartique, mais contre-productif et contre ses valeurs, ait indiqué qu’il laisserait la justice suivre son cours. Devant tant de légalisme, les sénateurs ne peuvent que jurer allégeance au Primarque, exemple vivant d’une intégration réussie par un immigré méritant. L’histoire est en route pour Roboute…Fin spoiler

1 : Le pouvoir psychique caché de Guilliman est de faire voir flou à ses ennemis. C’est subtil mais très efficace. Ça marche malheureusement moins bien au corps à corps, comme Angron et Fulgrim le constateront.
2 : On pourrait dire qu’il aurait été plus efficace à Konor de simplement pointer du doigt Gallan au moment où lui et Roboute sont arrivés dans la pièce, mais l’histoire se serait terminée un peu brutalement.

AVIS:

Darius Hinks livre la version romancée de l’épisode le plus connu de la jeunesse de Roboute Guilliman (que David Annandale avait mystérieusement choisi d’ignorer dans la novella consacrée au Primarque), et le fait plutôt bien. Certes, si vous connaissez votre fluff, le suspense que l’auteur se donne du mal à entretenir jusqu’au bout de son récit tombe rapidement à l’eau, mais on ne peut pas reprocher à Hinks d’avoir voulu soigner sa sortie, et la relation de confiance qui existait auparavant entre les Guilliman et Gallan est un choix intéressant de sa part, qui peut en partie expliquer pourquoi le futur patron des Ultramarines a tendance à vouloir faire les choses tout seul de son côté. On glane également quelques informations sur la société de Macragge avant son intégration dans l’Imperium, ce qui est de l’ordre du notable. Il y avait sans doute moyen de capitaliser davantage sur cet événement fondateur pour expliquer la suite de l’histoire de Guilliman, voire l’Hérésie, voire le Sombre Imperium, ou, plus simplement, insérer quelques easter eggs saveur ultramarine (notons tout de même la mention faite à Tarasha Euten, Chambellan du Primarque et héroïne de l’audio book ‘Illyrium’ du même auteur) , mais pour une nouvelle de 16 pages, Hinks s’en sort très honorablement, autant sur le plan théorique que pratique.

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The Chamber at the End of Memory – J. Swallow :

INTRIGUE:

Comme tous les créatifs peuvent vous le dire, ce sont les derniers moments avant le rendu final qui sont les plus stressants. Et bien que Rogal Dorn ne mérite pas franchement ce qualificatif, il partage néanmoins ce souci du détail et cette tendance au micro-management qui distingue les génies et les pervers narcissiques du reste de la population. Ayant pris son hoverboard gravitationnel et son mécapigeon holographique1 pour inspecter l’avancée des travaux, l’Homme de Pierre corrige et réajuste les milliers de petites variables qu’il est le seul à voir mais dont la victoire dépendra peut-être. Après tout, si Horus tombe des fortifications après avoir glissé sur un gravillon énergétique, la guerre sera tout de même gagnée. Alors qu’il s’approche de l’Investiary, l’amphithéâtre anciennement décoré de 20 statues monumentales de la fratrie impériale, et dont deux des plinthes sont maintenant vides, une explosion attire son attention. Il semblerait que l’une des tours de stockage de la zone ait contenu du nitrate d’ammonium, et pas les précieuses antiquités collectionnées par Malcador le Sigilite, qui avait demandé au Prétorien de Terra de ne pas raser le quartier pour en faire des gravillons (énergétiques), comme il en a la sale habitude. N’écoutant que son statut de protagoniste de nouvelle, Rogal se hâte sur les lieux pour mener sa petite enquête.

Sur place, il constate qu’un début d’incendie a ravagé la façade, et que l’équipe en charge de l’audit/expropriation/démolition a connu une fin horrible et peu commune, les cadavres jonchant l’intérieur du bâtiment semblant avoir été causé par des ondes de choc, des explosions internes ou vaporisations pures et simples de l’individu, ce qui n’est certes pas banal. Pas banale non plus est la sensation persistante et croissante qu’éprouve le Primarque qu’il doit faire demi-tour au fur et à mesure qu’il progresse vers l’épicentre de la catastrophe. Ce mauvais pressentiment n’est pas suffisant pour arrêter la marche (du fils) de l’Empereur, mais les apparitions psioniques (des démons libres de droit, pour faire simple) qui l’attaquent dès qu’il pose le pied dans l’antichambre finale le convainquent de consulter un spécialiste, une fois les fâcheux renvoyés dans le Warp. Et justement, il a une soute pleine d’Archivistes sous scellés en orbite, qui n’attendent que son bon vouloir ou l’arrivée d’Horus pour se rendre utiles2.

Le destin ayant désigné le frère Yored Massak pour prêter main, ou plutôt tête, forte à son Primarque, nous suivons les deux guerriers revenir jusque dans la salle piégée, où les horreurs éthérées re-spawnent avec diligence, pour se faire à nouveau bannir en deux temps trois mouvements par nos héros. Si ces derniers étaient prêts à combattre des ennemis de cette trempe, qui ont fait leur fête aux malheureux larbins ayant eu la mauvaise idée de vouloir faire leur boulot, ils se figent sur place en remarquant les symboles qui marquent les deux gigantesques portes qui terminent le corridor : II et XI

Il s’agit bien entendu d’une référence aux deux Primarques disparus, frappés d’anathème par l’Empereur en personne, mais dont l’éphémère existence reste de notoriété publique au sein des Légions de l’Astartes. Pendant que Dorn se creuse les méninges pour percer ce mystère insondable, Massak parvient finalement à mettre le doigt, ou plutôt la tête, sur le sentiment de déjà perçu qui l’habitait depuis son entrée dans la tour. L’installation psychique de cette dernière a été effectuée par Malcador en personne, l’Archiviste repentant en est certain. Et l’intéressé confirme aussitôt sa déclaration, en arrivant sans crier gare dans la pièce. Ayant envoyé Massak poser des parpaings à l’extérieur pour avoir un peu d’intimité, le Régent de Terra a enfin la possibilité de s’expliquer auprès d’un Rogal Dorn qui sent de manière confuse qu’il s’est fait mindfucker par l’éminence grise dans un passé plus ou moins lointain. Il ne s’explique en effet pas son absence totale de souvenirs de Deuzio et Onzio, alors qu’il dispose d’une mémoire eidétique tout ce qu’il y a de plus primarquielle. Et Malcador d’avouer que c’est bien lui qui est responsable de ce trou de mémoire généralisé, touchant à la fois les Astartes des Légions décapitées (avant qu’ils puissent être réformés et repackagés), mais également les Primarques ayant connu personnellement les fils indignes de Pépé. Mais attention, il avait une bonne raison de le faire, se dépêche-t-il d’ajouter avant de finir tronçonné par l’Homme de Pierre : c’est Dorn et ses frères eux-mêmes qui lui avaient demandé un brainwash pour permettre à l’Imperium de se relever d’une tragédie si terrible qu’elle avait manqué de le mettre à genoux. L’Empereur, comme à son habitude, avait tout vu/su mais n’avait rien dit/fait. Classic MoM move here.

À moitié convaincu par l’explication du Sigilite, qu’il ne peut plus blairer depuis le début de la fortification de Terra, Dorn fronce les sourcils tellement fort que son interlocuteur décide de lui accorder un droit de flashback limité et provisoire sur son passé oublié, afin qu’il puisse se rendre compte par lui-même de la bonne foi du Régent. EVIDEMMENT, le lecteur ne sera pas convié à cette introspection douloureuse, dont les effets se dissipent rapidement mais qui convainc Dorn de la véracité des dires de Malcador, et surtout de la nécessité que ce passé, semble-t-il absolument honteux, de la Grande Croisade ne refasse jamais surface. Lorsqu’il ressort de la tour, il ordonne donc aux équipes venues en renforts de la détruire (plus de gravillons !). De toute façon, Massak avait achevé une copie conforme du bâtiment avant que le sort ne soit rompu par un claquement de doigts de Rogal Dorn, ce n’est donc pas une grande perte d’un point de vue stratégique.

1 : Surtout pour se délecter de le voir ch*er sur les hélotes en contrebas, je pense. Il faut bien trouver un moyen d’évacuer le stress quand on ne boit/fume/joue/prie/couche/rigole pas.
2 : Enfin, plus utiles qu’ils ne le sont à l’heure actuelle, le tricotage d’écharpes pour les soldats impériaux de faction sur les murailles du Palais n’exploitant pas tout le potentiel des Anges de la Mort susnommés.

AVIS:

James Swallow touche à l’un des mystères fluffiques les plus importants du background de l’Hérésie d’Horus dans ce ‘The Chamber…’ et parvient à nous vendre une once de révélations sur la destinée des Primarques disparus comme s’il s’agissait d’une avancée majeure du lore. C’est en tout cas le sentiment qui dominait chez votre serviteur à la fin de la lecture de cette nouvelle, qui contient trop de micro-informations et de sous-entendus sur lesquels gloser à l’infini pour ne pas mériter sa place dans la liste de lecture de tout fanboy/girl revendiqué.e. Mais on n’est certes pas au niveau d’un ‘Legion’ ou d’un ‘Saturnine’ en termes de coup de théâtre, ce qui est somme toute logique pour une histoire au tirage assez confidentiel telle que ‘The Chamber…’. Notons au passage la présence que quelques bouts de fluff « autres » au fil des pages, qu’il s’agisse du Palais Impérial ou de l’armement de Rogal Dorn, ainsi que le retour d’un second couteau souvent employé par Swallow en la personne de Yored Massak (‘La Fuite de l’Eisenstein’, ‘Garro’), et restons-en là.

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First Legion – C. Wraight :

INTRIGUE:

Spécialistes reconnus des campagnes pourries, les Dark Angels ont bien du mal à exterminer les Rangdan, espèce de Xenos experte en subterfuges et en tentacules, ce qui n’est guère du goût des roides et psychofrigides paladins de la Première Légion. Malgré tout, un ordre est un ordre, et les Astartes poursuivent leurs vaillants et violents efforts pour sécuriser ce petit bout de l’empire de leur Pépé, menés par nul autre que Lion El’Jonson en personne. Nous faisons tout d’abord la connaissance du Capitaine Arnaid, 45ème Compagnie, 8ème Ordre, 1ère Légion, dont la frégate a connu des jours meilleurs, mais qui n’hésite pas le moins du monde à intercepter le mystérieux vaisseau qui fait irruption dans la zone de « pacification » avec son Nightsward, bien que le nouveau-venu soit plus imposant et en meilleure forme. Alors que le Capitaine est sur le point d’ordonner un tir de semonce, ses salutations répétées n’ayant pas été retournées par les touristes en goguette, ceux-ci daignent enfin répondre, par la voix d’un autre officier Space Marine, un Capitaine de la nouvellement formée XXème Légion répondant au nom de…

Début spoilerJules-Edouard Petitbedon.

Bon ok : il s’appelle Alpharius. Incroyable, je sais.Fin spoiler

Alpharius s’excuse de ses manières cavalières et de son manque de décorum (son vaisseau, Perseus, a l’air d’avoir quitté les docks spatiaux avant que le Mechanicum n’y passe un coup de peinture), mais annonce qu’il est venu porteur de nouvelles pour Lion El’Jonson.

Pendant ce temps là, nous nous introduisons dans une réminiscence de Lionel en personne, du temps où il était un enfant sauvage qui courait cul nu dans les forêts de Caliban. Notre petit bonhomme semble être occupé à traquer une bête particulièrement bestiale, seulement armé d’une défense de phacochère nain et de sa volonté implacable. Wraight nous fait bien comprendre que c’est la destinée même d’El’Jonson qui est à l’œuvre ici, et entraîne le jeune Primarque au clash contre un monstre que la partie raisonnable/froussarde de Lionel aimerait éviter si possible. Pause pub.

Retour sur le Nightsward, où Alpharius est reçu par son homologue. Constatant qu’il ne sert à rien de féliciter ce dernier sur son goût (pratiquement inexistant) en matière de décoration d’intérieur, ni de tenter de piquer la curiosité (totalement inexistante) de l’austère Terran, l’Alpha Légionnaire qui s’ignore1 tente de soutirer quelques infos psychologiques et tactiques à Arnaid en jouant la carte de la franche admiration pour les exploits et la réputation de la Première Légion, avec un succès relatif. Ces oiseuses discussions sont toutefois interrompues par la réception d’un message autorisant Alpharius à voyager jusqu’à l’Invicible Reason pour y rencontrer Lion El’Jonson, avec Arnaid lui servant de Kaptain pour l’occasion. Simple déformation professionnelle, en somme.

Suite et fin du documentaire animalier commencé un peu plus haut avec la confrontation entre Lionel et sa Némésis, qui se trouve être un chevalier en armure. Car en fait, le zouave qui courrait dans la savane avec son coutelas d’ivoire n’était pas le Primarque, mais une sorte de démon ayant pris forme humaine, et décidé de mettre fin à l’écocide décrété par le chef de l’Ordre. Malheureusement pour notre ami, ce dernier se révèle être un adversaire trop coriace pour ses maigres ressources, et il finit promptement embroché par la rapière du palouf. Voilà qui lui apprendra à ne pas usurper, même littéralement, l’identité d’autrui. Avant de repartir dans le Warp, le Rahan de Caliban a le temps de traiter son assassin de « Premier Fils » et de l’accuser d’être « la mort de son monde », ce à quoi Lionel répond que son titre correct est le tueur de bêtes. Fin de l’épisode.

Sur l’Invicible Reason, le Dark Archangel reçoit comme convenu Arnaid et Alpharius, qui est en fait venu lui proposer un coup de main, en toute amitié2, pour en finir avec la campagne d’extermination des Rangdan. Les pertes terribles souffertes par la Première Légion menacent en effet son statut et son prestige par rapport à ses sœurs, et pourraient faire échapper à El’Jonson le titre de Maître de Guerre, que ce visionnaire d’Alpharius anticipe déjà qu’il sera décerné par l’Empereur à l’un de ses fils dans un futur pas trop lointain (dès que les 20 Primarques auront été retrouvés en fait…wait a minut-). Bien que ne contestant pas l’argumentaire de son petit neveu/frère, Lionel se montre méfiant devant l’intérêt qu’il semble attacher à la prédominance des Dark Angels dans l’équilibre politique de l’Imperium, et après avoir menacé de le couper en deux, en toute amitié, pour le forcer à exposer ses véritables motifs (Alpharius n’aime vraiment pas Guilliman), il le renvoie sur son vaisseau où il lui fera savoir sa réponse sous une heure. Resté seul avec Arnaid, El’Jonson consulte son Capitaine pour avis secondaire, avant de lui révéler que l’énorme poids de… sa parole donnée l’empêche et l’empêchera toujours de placer son intérêt personnel avant celui de son seigneur. C’est sur cette déclaration de loyauté véritablement désintéressée que se termine notre histoire, qui démontre à quel point Lion El’Jonson est un végétal politique. Un concombre, pour être précis.

1 : Il insiste pour être désigné comme être membre de la XXème Légion, sans autre précision. Quel coup de chance tout de même qu’il ait le même nom que le Primarque pas encore découvert de cette dernière
2 : Et surtout parce qu’il ne peut pas blairer Guilliman, ce qui lui fait un point commun avec Lionel.

AVIS:

On retrouve dans ‘The First Legion’ le goût de Chris Wraight pour des petits exposés au débotté sur la géopolitique impériale au moment de la Grande Croisade (tendance déjà aperçue dans ‘Leman Russ : Le Loup Suprême’), et c’est tant mieux si vous voulez mon avis. S’il ne se passe pas grand-chose dans cette nouvelle, on n’en ressort pas pour autant frustré de sa lecture, l’échange entre Alpharius et Lion El’Jonson, qui permet d’identifier les points communs et les différences entre le premier et le dernier de cordée et leurs Légions respectives, ainsi que d’en apprendre un peu plus sur la manière dont les Legiones Astartes étaient perçues par Terra au moment où Pépé songeait à partir en pré-retraite dans le Bhoutan profond, valant son pesant de papier. Lionel y apparaît comme le type imbuvable socialement (il le reconnaît lui-même d’ailleurs) mais irréprochable moralement que les derniers ouvrages de l’Hérésie tendent à dessiner, tandis qu’Alpharius est dépeint comme un intrigant de première, n’ayant aucunement besoin d’un slideshow de la Cabale pour trouver des raisons de comploter dans le dos de tout le monde. Bref, une soumission solide de la part de Chris Wraight, qui fait honneur à ses deux Légions secondaires avec cette nouvelle.

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Embers of Extinction – B. Easton :

INTRIGUE:

Embers of ExtinctionSouvenez-vous de la bataille de Phall. En toute objectivité, Perturabo s’y était fait botter le joint de culasse par un Alexis Polux héroïque en défense, et qui aurait même pu remporter l’affrontement si son pôpa ne lui avait pas hurlé de rentrer tout de suite à la maison depuis la fenêtre du Palais Impérial au pire moment (‘The Crimson Fist’). Ce qui s’est passé immédiatement après cet épisode honteux pour les Iron Warriors, Brandon Easton propose au lecteur de le découvrir ici.

Notre récit commence sur les pondérations mathématiques et paléolithiques du Primarque de Fer alors que le Capitaine Vort de l’Iron Blood passe en revue les pertes subies par la Légion durant le tragique épisode phallique. Il ne faudra pas s’étonner si les Légionnaires développent des complexes à ce niveau et commencent à surcompenser. Bien loin de remettre en question le bien fondé de sa stratégie, dont l’implacable logique se contrefiche bien de quelques dizaines de milliers de morts et centaines de vaisseaux détruits ou endommagés, Perturabo cherche au contraire à maximiser les pertes chez les Imperial Fists, et ordonne donc la poursuite de trois croiseurs loyalistes jusque dans le système de Tarkovsky Epsilon. Une tâche bien triviale pour un vaisseau de type Gloriana, mais si on ne peut plus exercer ses penchants sadiques rigoler de temps en temps, où va la galaxie ma bonne dame ? Comme on peut s’y attendre, le Pylades, le Ramses et la Dévastation ne font pas de vieux os face à la fureur mathématiquement appliquée de l’Iron Blood. Avec un torpillage en règle, un écrasement provoqué sur une géante gazeuse et un éperonnage en bonne et due forme, Pervers Peper’ se paie même le luxe de marquer des points de style en offrant à chacune de ses victimes une fin personnalisée. S’il avait eu un nombre suffisant de victimes, on peut imaginer que l’un des vaisseaux de Dorn aurait été intégralement mastiqué, avalé, digéré et déféqué par son intraitable frangin afin de varier les plaisirs d’un côté et les insultes de l’autre. Et on ose dire que Perturabo n’a pas l’âme d’un artiste !

Cette sidequest rondement menée, le bourreau d’Olympia consent enfin à reprendre des activités normales, comme par exemple se rendre sur Hydra Cordatus, où l’attendent Fulgrim et ses Emperor’s Children, ainsi qu’un nouveau camp retranché romain Imperial Fists à raser de fond en comble, afin de prouver à l’Empereur qu’il est le plus brave de tous les peuples de la Gaule, ou quelque chose comme ça. Tout cela a été couvert dans ‘Angel Exterminatus’ et nous intéresse donc pas ici. En revanche, Easton se permet de meubler un autre « blanc » du parcours hérétique de son héros, précisément le moment qui suivit la remise de Forgebreaker à Perturabo par Horus en gage d’une bro-itude éternelle. L’épisode ayant eu lieu quelques semaines après la purge de sa planète d’adoption, il est somme toute logique que le Primarque se soit retrouvé avec un peu de temps à tuer, après avoir épuisé tout son stock d’Olympiens (à tuer également, pour ce qui ne suivent pas). Malgré la perfection manifeste de son cadeau, forgé par Fulgrim en personne, Perturabo ne put s’empêcher d’apporter de nombreuses modifications à l’arme, dont un changement de son centre d’équilibre afin d’en maximiser les dégâts1. Cette longue session de forge fut également l’occasion d’échanger quelques aphorismes impatients et acérés avec un de ses fistons, le pâle autant que curieux Arhalin, dont les questions lancinantes ne s’avèrèrent pas assez stupides pour que son père juge bon de l’utiliser comme sac de frappe pour tester son nouveau jouet. Cela ne s’est pas joué à grand-chose, ceci dit…

1 : Et également (et surtout) pour déconcerter et handicaper un éventuel adversaire qui tenterait de retourner Forgebreaker contre lui. Easton a tapé dans le mille avec ce mélange de paranoïa absurde et de rationalité implacable, tout à fait « perturabien » dans l’esprit.

AVIS:

Débuts solides et sérieux pour Brandon Easton, qui n’a pourtant pas choisi la facilité en documentant deux épisodes de la vie de Perturabo prenant place entre plusieurs périodes et événements déjà traités par d’autres auteurs avant lui (French, McNeill et Haley, pour n’en citer que trois). Le risque de faux raccord s’en trouvait logiquement accru, mais le rookie s’est fort bien acquitté de sa tâche, en inscrivant sa prose dans la droite ligne de celles de ses prédécesseurs. Au passage, il confirme et souligne le portrait psycho-rigide et surhumainement intransigeant de l’Homme de Fer à l’aide d’exemples et d’illustrations de son cru, ce qui permet d’envisager Perturabo sur un jour à la fois un peu différent et totalement cohérent avec le reste du corpus hérétique (que j’ai lu). Tous les Primarques et personnages de l’Hérésie n’ayant pas eu cette chance, pour diverses raisons (au rang desquelles le manque de recul et de préparation de nouveaux auteurs), je me devais de saluer le sans-faute d’Easton à cet endroit.

J’ai également bien aimé les raisons convoquées par l’auteur pour expliquer pourquoi un être aussi rationnel et résilient que le fils d’Olympia a fini par commettre l’inexplicable : trahir son Père et l’Imperium pour le Chaos. Selon Easton, ce serait – en partie – à cause de la trop grande tolérance de Pépé envers le mysticisme et les chicaneries en tout genre dans lesquelles le genre humain à tendance à se vautrer naturellement. Pour un progressiste hard boiled comme Perturabo, il aurait fallu guider l’humanité au forceps vers un idéal de perfection scientifique et technique, en extirpant au passage tous les corps et concepts « mous » venant freiner la transition. Ce à quoi on pourrait répondre que c’est justement ce à quoi l’Empereur tendait, comme sa tentative malheureuse d’excommunier le fait religieux l’a laissé apparaître. Sans doute était-ce trop peu et trop tard pour son intraitable fiston, dont la patience a fini par craquer à la suite de sa campagne cauchemardesque contre les Hruds et l’annonce de la trahison d’Olympia. Cette nouvelle nuance de gris sur la palette de la trahison de l’Iron Man vient enrichir le camaïeu de sa psyché (si si), sans jurer avec les touches déjà apportées par les biographes précédents de notre homme. Pas mal du tout. J’ai donc hâte de lire la suite des travaux de Mr Easton pour la BL, en espérant qu’il reste dans cette veine.

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Lupus Daemonis – G. McNeill :

INTRIGUE:

Sur Cthonia, la vie est d’une dureté et d’une violence absurde. Les meurtres et pillages sont monnaie courante (par contre il n’y a pas de monnaie, c’est trop avancé pour cette brillance société), les dizaines de clans tribaux se disputant ressources et territoires passant leur temps à se fritter les uns aux autres. Une vie humaine vaut moins qu’un couteau à huître bien aiguisé, et on apprend aux enfants dès leur plus jeune âge à ne pas se laisser prendre vivant par l’ennemi1. Les ados ne rêvent que du jour où ils auront tué leur premier adversaire au combat, mutilé son cadavre et gagné le droit de faire la ola autour de leur suprême leader pendant qu’il décapite à l’opinel une malheureuse victime. Bref, c’est du grim.extra.dark auquel nous avons droit en guise de décor, dans lequel évolue tant bien que mal notre héros Nagui. Euh pardon, Nergüi.

Nergüi occupe une place à part, et pas vraiment enviable, parmi les Reivers (son clan d’adoption). Il a été trouvé en train de pendouiller à un croc de boucher par le puissant Khageddon, qui décida de le sauver du destin de cheeseburger auquel il était destiné, pour des raisons qu’il a lui-même du mal à s’expliquer. En fait, toute la tribu déteste et craint en même temps Nerguï, dont le nom signifie « personne » dans le chantant dialecte chtonien. Ce patronyme lui a été donné par Khageddon, là encore sur un éclair de génie non expliqué, et soi-disant pour assurer la protection des Reivers. La menace qui pèse sur ces derniers est laissée à l’imagination du lecteur, mais ce n’est en tout cas pas Nerguï qui y contribuerait de façon sérieuse. Notre héros est un avorton couturé de cicatrices, doté d’un corps de lâche mais d’une résilience hors du commun, ce qui l’aide à encaisser les nombreuses bastonnades auxquelles il est régulièrement sujet. Ah, et il a des yeux gris vert aussi. Qui doivent sans doute servir à envoyer des clins d’œil au lecteur sur sa véritable identité, au cas où cela serait nécessaire.

Après avoir vu ses camarades être « diplômés » sans lui grâce à leur participation à un raid contre les Deeprats, avoir échappé de peu à la mort des mains du bully de service, balancé le cadavre de celle qui a eu le malheur de prendre sa défense et s’est donc faite poignarder pour la peine dans une faille magmatique, avoir failli être poussé à son tour dans la faille par ce père indigne de Khageddon (qui passait par là et ne maîtrise pas bien ses pulsions), le tout en l’espace de 82 minutes, Nerguï décide qu’un petit break ne lui ferait pas de mal. Il part donc  pour la surface de Cthonia voir si l’herbe y est plus verte, ou la lumière plus bleue, que dans les cavernes des Reivers. Sur le chemin, il croise un supplicié en fin de vie qui lui servira de toute première victime (on n’oublie jamais sa première fois il paraît), avant d’arriver enfin à l’air libre.

Là, après avoir constaté que tout est aussi abandonné qu’on le lui avait dit, mais construit à l’échelle 3:1 (ce qu’on ne savait pas, et qui ne sert à rien dans l’histoire, mah bon), il perturbe les fouilles entreprises par ce que l’on devine être une expédition de l’Adeptus Mechanicus. Les Skitarii de garde ayant réglé leur protocole d’interaction avec les locaux sur le mode ‘Murica, ils tirent à vue sur le pauvre Nergüi, qui parvient tout de même à en tuer un au corps à corps et à lui piquer son fusil avant de repartir en sous-sol. S’il espère que le récit de ses exploits et le cadeau de ce trophée peu banal à Khageddon lui permettront de se faire accepter comme guerrier scarifié chez les Reivers, il lui faudra rapidement tempérer ses espérances. Sous ses abords de brute épaisse, Khag’ est un érudit, qui comprend que son punching ball adoptif s’est fait un ennemi un peu plus balèze que les bandes de goules aux yeux bleus qui hantent la surface de Cthonia. Il lui met donc une mandale paternelle pour lui apprendre la vie pendant que le plafond commence à s’écrouler sur la tribu, catastrophe causée par l’arrivée en termite des forces du Mechanicum. Il faut croire qu’ils pucent tout leurs fusils. Qui pourrait les en blâmer ceci dit.

Dans le séisme qui s’en suit, Nerguï, qui est passé en mode adolescent rebelle en lutte contre l’autorité depuis sa sortie à l’air libre, décide pour la première fois de rendre les coups, et plante donc son couteau dans le cœur de Khageddon, pour l’ensemble de son œuvre dirons nous. Mais attention, il le fait avec la bénédiction de ce dernier, dont les desseins resteront à jamais un mystère pour la science je pense. Dans ses derniers moments, Khageddon accomplit sa cryptique destinée en chuchotant à l’oreille de Nergüi son véritable nom. Et là, surprise.

Non pas qu’apprendre que Nergüi = Horus soit à ce stade une révélation sidérante (si c’est le cas, vous avez peut-être raté le titre de l’ouvrage et le titre de la nouvelle, qui donnaient tout de même des bons gros indices, hein). Mais c’est ce que cette connaissance déclenche chez notre héros qui est proprement bluffant. En quelques mots, Horus apprend par cœur tous les articles de Wikipedia, et envoie un poke psychique à son Pépé qui attendait telle la sœur Anne dans sa tour terrane, et contemplait la galaxie d’un air pensif en se demandant ouksé que ses fistons étaient, nom de Lui-Même. L’Empereur a alors ces trois mots éternels : +Pas trop tôt+, qui font, par absence de meilleure image, évoluer Horus. En mode Pokemon, exactement. Adieu au Magicarpe maigrichon et emo qu’était Nergüi, et bonjour au Léviathan majestueux mais colérique qu’est Horus. La nouvelle se termine sur la promesse d’une réunion prochaine entre le Père et le fils, si tant est que ce dernier ne massacre pas à mains nues les pauvres émissaires de l’Omnimessie. Ça m’étonnerait pas qu’il ait un trouble du caractère, ce petit gars.

1 : On les abandonne aussi dans les souterrains pour voir s’ils ont un sens de l’orientation correct. C’est une éducation complète(ment barge).

AVIS:

Graham McNeill ne fait pas dans la subtilité avec cette nouvelle horusienne, aussi larger than life que son héros (quand il adopte enfin sa forme finale, s’entend). Si le lecteur voulait avoir des révélations sur l’enfance du Primarque #1, avant que l’Empereur n’obtienne le droit de garde, il en aura certes pour son argent. Savoir que penser de ces révélations, qui posent plus de questions qu’elles n’apportent de réponses, est en revanche un débat distinct, auquel je soupçonne qu’il est encore trop tôt pour pouvoir participer. Au moment de sa publication, ‘Lupus Daemonis’ entraîne en effet le fluff hérétique sur des rivages inconnus (le stade « larvaire » des Primarques – à moins que Horus soit le seul concerné –, à ma connaissance jamais décrit à ce stade, mais également l’espèce d’aura de destinée manifeste qui entoure Nergüi et influence, de façon tellement grossière que tout le monde s’en rend compte, les actions de ses proches), que l’on pourrait considérer comme un peu too much de la part de McNeill, si « tard » dans la saga et sans donner plus d’explications. Mais comme cet auteur a prouvé qu’il adorait dérouler ses arcs sur le temps long, et qu’il lui reste encore quelques occasions de revenir sur l’origine d’Horus (au moment où cette chronique est écrite tout du moins), il se peut que ces additions volontairement choquantes soient intégrées de manière plus harmonieuse dans le reste du background de l’Hérésie en fin de compte1. Quoiqu’il en soit, on tient avec ‘Lupus Daemonis’ l’un des must-read des nouvelles Primarques, non pas par sa qualité intrinsèque (vous l’aurez deviné), mais par ses apports à l’historique du personnage principal de la série.

1 : Si c’est le cas, j’espère que McNeill expliquera également comment Cthonia n’est pas devenue une planète chaotique, vu l’anarchie sanglante et sadique qui y règne depuis des décennies. Je comprends que ça permet de renforcer la vibe « enfance difficile » d’Horus, mais si on pouvait éviter de s’arranger avec un des concepts cardinaux du lore de 40K, ça m’arrangerait.

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Skjalds – N. Kyme :

INTRIGUE:

Un monstre rôde dans l’arrière-pays de Fenris, attaquant des villages isolés et massacrant tous leurs habitants, depuis le huskarl sans défense jusqu’au bébé sans peur. Un jeudi normal sur un monde hostile, en quelque sorte, sauf que le monstre en question came to the wrong neighborhood, à savoir celui de Baerelt, Torvur, Ulfvye et Laggenhuf. Ces quatre hardis chasseurs ayant chacun perdu un ou plusieurs êtres chers dans l’attaque de l’innommable et innommée bestiole, ils ont fait le serment de traquer cette dernière et de mettre fin à ses déprédations. Et tant pis pour la biodiversité terrestre fenrissienne, qui se porte parfaitement bien vous pouvez me croire. L’histoire commence alors que notre petite bande est en train d’essayer d’allumer des torches pour y voir quelque chose dans la tempête de neige nocturne qui s’est abattue sur eux. Ce qui est bien le cadet de leurs soucis, car des profondeurs de la toundra jaillit bientôt un mini boss, une draugr.

Cette dernière (car le cadavre desséché et tirant la langue qui fond sur les chasseurs pour leur rouler des gamelles est indubitablement féminin) donne du fil à retordre aux humains, qui finissent toutefois par en venir à bout d’un jet de torche bien placé, mais perdent une lance dans la bataille. Ce qui est presque aussi grave que la mort d’un guerrier, si on écoute le vieux ronchon de service (mais expert en lance, sans doute parce qu’il a le bras fort), Ulfvye. Malgré l’issue heureuse de cette bataille, il ne fait pas de doute pour Baerelt que la draugr n’était qu’une vamp opportuniste, et pas la bête responsable de tous les malheurs de sa communauté. La petite troupe reprend donc sa marche sous un léger crachin (humour), et finit par bivouaquer dans une caverne miraculeusement vide de tout prédateur alpha. Le temps gagné à ne pas avoir à faire la peau à un phacochère laineux ou à un gigagolin est utilement mis à profit pour échanger quelques récits épiques au coin d’un feu de brindilles. Transformés en skjalds pour l’occasion, les compères s’écharpent sur la véridique légende du Russ, l’incarnation de l’hiver fenrissien, considéré par l’un comme un géant à lance de gel, par l’autre comme une tempête de neige douée de raison, par le troisième comme un loup géant qui accompagne les âmes dans l’autre monde, et par le dernier comme un roi. Et comme le gage de cette veillée était manifestement le premier tour de garde pour l’histoire la plus pourrie, c’est Baerelt le barbant qui s’y colle.

Le lendemain, les chasseurs se remettent en route et parviennent à un village qui a reçu la visite du monstre il y a peu de temps, comme les cadavres massacrés et à moitié boulottés des habitants en témoignent. S’étant rendus compte que quelque chose ou quelqu’un était toujours présent sur place, nos héros convergent sur la salle commune de la bourgade, qu’ils trouvent en effet occupées par un animal gigantesque, recouvert d’une fourrure hirsute, munis de crocs acérés et dégageant une odeur abominable. Vous l’avez compris, c’est Leman Russ en personne (qui se fait appeler ici Jotun, pour préserver son anonymat sans doute) qui fait son apparition dans l’histoire, et après avoir indiqué aux traqueurs tétanisés par son aura primarquielle qu’il est également sur la piste du gros gibier, accepte que ces derniers le suivent dans son pistage. Il a pour cela une méthode infaillible : suivre les loups.

Sortis du village à la suite de leur nouveau copain, Baerelt et Cie ne tardent pas à se rendre compte que si les loups peuvent être suivis, ils peuvent également suivre. Aussi, lorsqu’une meute de six herravargr (des loups géants) encercle le club des cinq au sommet d’une falaise, l’ambiance retombe un peu. Le combat qui s’en suit se termine par une nouvelle victoire de l’équipe bipède, en grande partie grâce à l’intervention efficace de Jotun, mais Ulfvye est gravement mordillé dans la bagarre, ce qui ralentit la progression de ses camarades. Comme la veille au soir, les chasseurs passent le temps en devisant au coin du feu et c’est au tour de Jojo de donner sa version du mythe de Russ, qu’il connaît sans doute mieux que la moyenne. Et en toute modestie, il choisit de raconter son histoire (sans dire qu’il s’agit de lui, évidemment), celle de l’enfant sauvage élevé par les loups et adopté par un roi de Fenris, avant que l’Empereur ne vienne plomber l’ambiance d’un petit gueuleton entre copains, on connait la suite.

Le jour suivant, la traque reprend et amène les chasseurs jusque dans une forêt, où ils croisent un Wulfen bien amoché sur le bord du sentier. Il ne fait aucun doute que le lycanthrope a combattu la bête (et a perdu), mais plutôt que de venir en aide à son fiston poilu, Jotun continue sa route en laissant le wyrd du comateux faire son office. Un peu plus loin, c’est le grand ménage parmi les suiveurs du Primarque, Ulfvye décédant d’une hémorragie interne, et Torvur et Laggenhuf ratant leur test de commandement lorsqu’ils entendent le monstre faire sa balance en préparation du combat final. Ne reste donc plus que Baerelt pour sauver l’honneur des péquenauds de Fenris, ce qu’il fait en partant à la poursuite de Jotun, qui n’a pas attendu de voir qui lui collait au train pour régler ses comptes avec le monstre de la pampa…

Début spoiler…Ou plutôt, les monstres. Car c’était un bien un couple d’ours géants avec des bois de cerf, ou beer en langage scientifique, qui était responsable de tout ce tintouin. N’étant venu qu’avec une hache même pas énergétique pour mieux se fondre dans la masse, Leman se retrouve rapidement dans le mal. Et même si l’andouille parvient à saisir un de ses adversaires par les andouillers, dans le but de lui tordre le cou jusqu’à ce que mort s’en suive, cette manœuvre n’a de chances d’aboutir que si elle n’est pas interrompue. Il faut donc que quelqu’un distraie Maman Ours jusqu’à ce que Boucles d’Or ait fini le sale boulot. Et ce quelqu’un, ça ne peut être évidemment que Baerelt. Enfin, pendant à peu près trois secondes, car notre héros est ensuite rejoint par le Wulfen croisé un peu plus tôt, assez remis de ses émotions pour demander une revanche à ses vainqueurs. Bilan de cette deuxième manche : une nouvelle victoire de la grande ourse sur Mini Loup, qui finit la baston en deux morceaux, mais de très peu. La bête fauve s’écroule en effet quelques instants plus tard, cannellisée à titre posthume par le Space Wolves déchu1. En arrière-plan, Jotun avait réussi à décoller les cervicales à l’autre affreux, ce qui met fin aux déprédations de Baloo et Baloote. Notre histoire se termine sur l’arrivée d’un Thunderhawk, venu raccompagner le patron vers le Croc où une mission importante l’attend sans aucun doute. On ne peut pas passer sa vie à se ressourcer dans la nature quand on est un Primarque, et c’est bien dommage…Fin spoiler

1 : Ce qui est finalement un destin enviable pour un membre du rout, puisque cela fait ch*er les Dark Angels.

AVIS:

Nick Kyme revient à ses anciennes et velues amours (les Salamanders étant plutôt écailleux, comme chacun sait), avec ce récit fenrissien de facture classique. Fort heureusement pour nous, l’auteur a progressé, ou s’est davantage intéressé à son sujet, depuis l’époque héroïque de ‘Thunder from Fenris’ et ce ‘Skjalds‘ s’avère être une lecture plaisante… au premier degré1. Si l’intégration de cette histoire dans l’anthologie ‘Blood of the Emperor‘ retire évidemment tout suspens sur la véritable identité de Jotun, cette absence de surprise est compensée par d’autres éléments intéressants, à commencer par une intrigue plus surprenante (là encore, dans le bon sens du terme) qu’à l’accoutumée pour une nouvelle de Kyme: le premier accrochage avec le.a draugr, dont on ne sait pas s’iel est le monstre traqué par les chasseurs constitue ainsi une sorte de prélude sympathique au reste du récit. Le choix de l’auteur de narrer son récit avec une perspective « humaine » lui permet également de glisser quelques infos sur la manière dont Russ considère l’Empereur, ses frères, sa Légion et son rôle dans l’Impérium, à la manière de confidences échangées sans arrière-pensées, pour le seul bénéfice du lecteur. Enfin, cette nouvelle n’est pas avare en fluff (pas moins de quatre légendes différentes sur le Russ, tout de même) ni en fragments de lore Space Wolves: je pense particulièrement aux considérations du Primarque sur les Wulfens, qui sont à replacer dans la saga du rout2, mais également au rôle proprement héroïque (au sens grec antique du terme) que Leman Russ choisit d’occuper dans la culture de Fenris, en tant que guerrier solitaire accomplissant des exploits pour le compte d’un peuple qui ignore sa véritable identité. Bref, une nouvelle qui vaut tout à fait le détour pour qui s’intéresse aux mythes et légendes du Vlka Fenryka, et un pas accompli par le skjald Nick Kyme sur le chemin de sa rédemption littéraire.

1‘Thunder from Fenris’ valant également le détour, mais pas d’une façon dont son auteur serait fier.
2Avant ou après la campagne de Dulan, pendant laquelle les Space Wolves apprennent que leur père savait pour les Wulfens? Si l’absence de réaction des deux Astartes qui servent de Kaptains à leur Primarque devant le cadavre de l’homme loup à la fin de l’histoire n’est pas un bête oubli de Kyme, ce serait plutôt la deuxième option qui tient la corde.

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The Sixth Cult of the Denied – D. Guymer :

INTRIGUE:

Aqhet Hakoris, Sergent au sein des Thousand Sons et explorateur au long cours du grand océan qu’est le Warp, est persuadé d’avoir fait une découverte fondamentale sur la nature de cette dimension mystérieuse, d’où sa Légion et son Primarques tirent leurs pouvoirs surhumains. Aidé dans ses recherches par deux associés Légionnaires (Khaleif et Nepfithu), ainsi que par son jeune et prometteur padawan (ou practicus, en prosperien) Djet, Hakoris doit présenter les résultats de ses recherches à un conclave d’Astartes dans le cadre de la prochaine session d’exposé libre organisée dans la capitale de la dernière planète conquise par les Thousand Sons, Thera. Impatient à l’idée de mettre ses idées à l’épreuve de la légendaire sagacité de la XVème, notre héros se rend dans la grande pyramide élevée au centre de Therebarg suivi par ses side kicks pour effectuer sa démonstration.

Une mauvaise surprise l’attend toutefois sur place : au lieu de la foule compacte qu’il attendait et espérait, l’amphithéâtre où doit se tenir sa soutenance n’accueille que six Astartes. Pas n’importe lesquels cependant : rien de moins que l’Ecuyer du Primarque, Amon, et les chefs des cinq cultes de la Légion, dont bien sûr l’inévitable Ahzek Ahriman. Autrement dit, le rehati, ou Comex des Thousand Sons, nommé par Magnus en personne. Faisant contre mauvaise fortune bons cœurs, Hakoris se présente comme le Magister du culte de l’Aquilae, titre auto-décerné qui fait grincer quelques dents et froncer quelques sourcils dans l’auguste assistance. En plus des problèmes immobiliers qu’une telle reconnaissance susciterait, les cultes établis ne sont pas très chauds à l’idée de reconnaître une nouvelle discipline qui ne serait non pas leur égale, mais leur supérieure, en cela qu’Hakoris affirme que c’est de l’Aquilae que proviendrait les « spécialisations » de chaque culte (à l’aide d’une métaphore mettant en scène Babar, Ray Charles, Stevie Wonder et Gilbert Montagné). Le vaillant petit théoricien n’a cependant pas loisir de commencer son exposé qu’arrive le big borgne en personne, qui se téléporte dans la salle1 et place une mention strictement confidentielle sur les futurs débats, enjoignant les présents à ne pas partager ce qui sera échangé ce jour, et brouillant la wifi (ou plutôt le Warpi) pour empêcher que des tours de passe passe psychiques ne viennent perturber la discussion.

Logiquement impressionné et pris au dépourvu par la venue impromptue du Primarque, Hakoris a bien du mal à défendre ses idées, d’autant plus qu’il perçoit vite que Magnus n’est pas aussi ouvert d’esprit et bienveillant envers ces dernières qu’il le donne à voir. Hakoris ayant fait ses découvertes sur la nature du Warp en bravant l’interdit paternel de ne pas chercher à communiquer avec les formes de vie « aquatiques » peuplant le grand océan (les démons quoi), il se retrouve dans une situation délicate, et se résout à mentir au Roi Écarlate pour éviter une remontrance qu’il devine être potentiellement très sévère. Ayant demandé et obtenu une pause clope pour se remettre les idées en place, Koko réunit ses acolytes et prend une décision que l’on qualifiera poliment d’audacieuse : tenter d’invoquer un démon comme témoin, en passant outre le sceau psychique apposé par Magnus en personne. Bien évidemment, cet appel à un honni2 tournera court, Mag’ étant beaucoup trop omniscient et omnipotent pour laisser une entité chaotique venir suinter sur la moquette de sa pyramide. La franche explication de texte entre le Primarque et le Légionnaire, si elle ne se solde pas par la mort subite du Thousand Son, viendra toutefois rappeler à Hakonis que si la recherche fondamentale, c’est bien, l’obéissance, c’est mieux, surtout dans un Imperium qui regarde déjà un peu bizarrement les frasques arcaniques de la XVème Légion. Après avoir décillé son naïf subordonné sur la véritable nature des démons, qu’il a fait semblant de ne pas connaître pour ne pas « corrompre » l’esprit du raheti avec cette connaissance empoisonnée, Magnus fait comprendre à Hakonis qu’il a tout intérêt à changer son bolter d’épaule lors de son imminente soutenance, pour le bien du reste de la Légion (et sa survie à court terme).

J’ai bien dit son imminente soutenance, car le borgne est tellement balèze qu’il est parvenu à arrêter le temps sans qu’Hakonis ou les autres participants à la présentation ne s’en rendent compte. Résultat des courses : notre héros se livre à un exposé aussi banal que consensuel sur le grand océan, à la surprise et/ou à la déception de son auditoire. Il n’y aura pas de reconnaissance du culte de l’Aquilae, et Hakonis est mis au placard dans une zone de guerre de troisième ordre au cours des années qui suivent pour éviter quesles vues hétérodoxes (on ne parle pas encore d’hérésie à cette époque) ne provoquent un schisme dans la Légion, au cas où il déciderait de reprendre ses activités prosélytes. Et c’est une sage précaution de la part de Magnus car, neuf ans après la fin du conclave de Therebarg, le Sergent dégradé décide qu’il est temps pour lui d’avoir une nouvelle discussion avec un vieil, et même éternel, ami, qui attendait patiemment son appel depuis son petit F3 au fond du Warp…

1 : Les Thousand Sons n’ont pas la même compréhension du terme télétravail que le reste des mortels.
2 : Une personnalité du Warp attention : rien de moins que the Dweller in the Abyss, aussi connu sous le nom de Choronzon. Même Aleister Crowley l’avait croisé de son temps.

AVIS:

David Guymer se fait et nous fait plaisir dans l’exploration de l’histoire, forcément alambiquée1, de l’âge d’or des Thousand Sons. Après avoir retrouvé leur Primarque et vaincu le fléau de la mutation, tout semblait bien aller pour les golden boys de Tizca… jusqu’à ce que leur sale manie d’aller chercher midi à 14 heures et de ne pas appliquer le sacro-saint principe de précaution leur joue des tours. Si ‘The Sixth Cult of the Denied‘ ne finit pas aussi mal pour le XV de l’Empereur que l’Incendie de Prospero, les déboires de Hakoris offrent une similitude frappante avec ceux de son borgne de père, des années/décennies plus tard. Et les raisons à l’origine de la disgrâce de l’un comme de l’autre sont frappées du même sceau de l’hubris: à croire naïvement que toute vérité mérite d’être établie, et qu’il n’y a pas de sujets tabous dans un univers où le spirituel joue finalement un rôle aussi grand que le matériel, le wanabee chef de culte pave la route qu’empruntera son Primarque, avec les conséquences que l’on sait. Il est ainsi amusant et révélateur du caractère de Magnus « I’m so SMRT » Lerouge de le voir adopter la posture toute impériale du « faîtes ce que je dis, pas ce que je fais, et je vous explique pas pourquoi parce que vous êtes trop c*ns » face à son fiston. Cet écho de la grande histoire dans la petite est une trouvaille sympathique de la part de l’auteur, et une raison suffisante de lire ‘The Sixth Cult of the Denied‘.

En plus de cela, cette nouvelle s’avère très riche en fluff Thousand Sons, depuis la révélation de la (presque) existence d’un sixième culte au sein de la Légion, jusqu’à l’identification d’une conquête de cette dernière, en passant par la description de la vision qu’à Magnus de l’assujettissement des planètes intégrées par l’Imperium, où encore des aspects de la culture des Thousand Sons, comme le système d’apprentissage liant novice et initié (qui ressemble un peu, et c’est ironique pour de tels opposés, à celui des Black Templars). La présence de la plupart des têtes connues de la Légion lors de la soutenance d’Hakoris, même si elle sont cantonnées à de la figuration (à part Amon, un peu plus développé que le reste du casting), ajoute un surplus d’awesomeness à l’histoire, et il est probable que Guymer ait caché quelques bribes de révélations seulement accessibles à l’érudit prospérien (ce que je ne suis pas à ce stade) dans les interactions entre Hakoris, ses disciples et son jury. Cependant, c’est Magnus qui crève l’écran dès son apparition, l’auteur parvenant parfaitement à retranscrire la quasi omnipotence et omniscience du Primarque, qui sait et peut (presque) tout. Ces capacités psychiques inégalables et insoupçonnables même pour les plus doués de ses fils servent bien l’intrigue en permettant à Guymer en rebootant l’exposé d’Hakoris, une fois que ce dernier a été convenablement briefé sur ce qu’il a intérêt à dire. Bref, une franche réussite pour David Guymer, qui démontre ici sa capacité à mettre en valeur une nouvelle Légion d’Astartes (après les Iron Hands et les Dark Angels).

1: À quoi fallait-il s’attendre de la part d’adeptes de la pensée complexe, aussi.

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The Will of the Legion – A. Clark :

INTRIGUE:

The Will of the LegionLa 3ème flotte d’expédition de la Grande Croisade, engagée dans la joyeuse réunification humanitaire de la galaxie désirée par l’Empereur, est tombée dans une embuscade à la sortie d’une rocade warpienne. Assaillis par l’armada destroy mais pléthorique des Driftborn, une civilisation humaine ayant passé quelques millénaires à vivoter dans une ceinture d’astéroïdes en s’adonnant à la récupération et à l’upcycling des épaves passant à portée de leurs cités roches (les ruches, ce sera après le passage à l’âge impérial), les Imperial Fists qui constituent le gros (et le grand) des forces expéditionnaires se font donc un devoir de repousser les piteux abordages de leurs lointains cousins. Nous faisons ainsi la connaissance du Capitaine Hashin Yonnad, de la 39èmeCompagnie Maisonnée d’Inwit, alors qu’il mène une escouade de Breachers, le corps anti-émeutes de sa Légion, dans la purge du Tribune, vaisseau amiral de la flotte impériale. Ayant massacré la plupart des malheureux corsaires ayant croisé sa route, et fait, dans son infinie bonté, prisonniers les autres avant qu’ils ne meurent de froid  dans les coursives extérieures mal isolées du Tribune, Yonnad reçoit une convocation urgente à se rendre à l’autre bout du vaisseau, où il embarque sans tarder dans un Stormbird, en compagnie de ses vétérans… et de Rogal Dorn, rendu très chafouin par la tournure prise par les événements1.

Rendu perplexe par l’absence de briefing quant au déploiement de la force de frappe Astartes que le Primarque emmène à l’assaut de la principale cité ennemie, Yonnad demande respectivement à son boss de bien vouloir partager sa gnose avec ses fistons, afin que ces derniers soient en mesure de mener à bien ses plans. Dorn s’exécute, et indique à ses Légionnaires que leur cible est un dôme stratégiquement important, dont la capture mettra fin au conflit de façon rapide. La moue désapprobatrice (encore plus que d’habitude) qu’il affiche fait cependant rapidement comprendre à Yoyo que les Driftborn ont épuisé la patience, pas très fournie de base, du Primarque, et que ce dernier considère très clairement l’annihilation pure et simple de ces derniers comme une option de travail. Après tout, la mort, autant que le mur, est son métier.

Débarqués en plein cœur du marché aux puces local, les Imperial Fists tracent la route sans trop (trois morts) forcer jusqu’à leur objectif, massacrant l’arrière garde adverse au passage, un Rogal Dorn toujours aussi revêche collé à leur train. Papa se contente en effet de marcher derrière sa marmaille en fronçant très fort les sourcils, observateur plutôt qu’acteur de la sanglante et implacable progression impériale. Une fois le dôme sécurisé, il demande, que dis-je, il orDORNne à ses Techmarines de bidouiller les consoles de l’endroit afin de pouvoir disposer d’un gros bouton (sans doute jaune) qui pourra couper le chauffage et l’air conditionné  l’échelle de la cité entière d’une simple pression, avec des conséquences funestes pour qui ne porterait pas une armure énergétique (ou s’appellerait Marneus Calgar). Trop snob pour se salir les mains, il somme le brave Yonnad de se mettre en position devant le buzzer magique, tandis que lui donne une dernière chance à ses malheureux adversaires de se rallier à l’Imperium. Ayant bien fait comprendre aux Driftborn qu’il avait été bien gentil jusqu’ici, mais qu’il n’avait, en sa qualité d’architecte de la destinée galactique de l’humanité (d’abord) et de décorateur intérieur de l’Empereur (surtout), absolument rien à carrer de leur civilisation minable, il leur donne royalement impérialement quelques instants de réflexion après avoir terminé sa harangue. Assez pour plonger Yonnad dans de profondes considérations éthiques quant à la trop grande facilité qu’il aurait à presser le bouton, et donc à signer l’arrêt de morts de millions d’êtres humains, pas coupables de grand-chose au fond, sur un simple branlement du chef de son Primarque. Fort heureusement pour notre héros philosophe, les Driftborn choisissent sagement de capituler, rendant leur dépressurisation inutile. La nouvelle se termine sur cette victoire décisive de la Team Pépé, qui ne suffit cependant pas à dissiper les doutes du Capitaine Dubious. Béni soit l’esprit…

1: Cela se perçoit dans la manière dont il prononce « connerie ». Et je ne parle pas de son accent chantant de Mareuh-seilleuh.

AVIS:

Petite nouvelle de bonne facture de la part d’Andy Clark, qui donne un peu de profondeur tant à Hashin Yonnad, avant sa sortie de route sur Phall, qu’à Rogal Dorn, qui gagne ici quelques précisions fluffiques qui ne manqueront pas d’intéresser le chaland, en attendant que le Primarque trumpien (build the wall!) ne dispose de son tome dans la série du même nom. Les lecteurs du troisième livre Forge World de l’Hérésie d’Horus apprécieront sans doute également de revoir apparaître les Driftborn du Consus Drift, présentés dans ce même ouvrage il y a quelques années. Narrativement parlant, l’intérêt principal de The Will of the Legion repose toutefois dans ses dernières pages, et la réalisation incrédule et dérangeante par Yonnad de son total endoctrinement à la cause de Dorn, dont il appliquera sans hésiter tous les ordres, même les plus immoraux. Nul doute que Clark voulait faire ressortir par cette réflexion intérieure toute l’ambivalence de l’Hérésie d’Horus, dont beaucoup des combattants se sont retrouvés dans un camp qu’ils n’avaient au final pas vraiment choisi, simplement parce qu’ils s’étaient contentés de suivre l’exemple, presque irrésistible, de leur Primarque. Il réussit bien son coup, et souligne donc de manière convaincante qu’entre « gentils » et « méchants », la ligne est souvent des plus fines.

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Council of Truth – M. Brooks :

INTRIGUE:

Sur l’Alpha, vaisseau amiral de la Légion du même nom, une réunion secrète a lieu entre quatre Astartes. Ou plutôt, trois Astartes et un Primarque. Réunis dans un cagibi étroit comme les navires de l’Alpha Legion en comptent un nombre irrationnel, les surhommes participent à un conseil de vérité, sorte d’interrogatoire sans haine, sans arme et sans violence (pour changer) dont le but est de clarifier une situation complexe ou des motivations absconses. Ce qui est assez fréquent chez les sous-fifres d’Alpharius, reconnaissons-le. Il n’est en revanche pas usuel que ce soit ce dernier qui se trouve dans la position du cuisiné. En cause, son manque flagrant d’esprit de camaraderie lorsque l’Alpha Legion s’est trouvée associée aux Ultramarines de Guilliman lors de la conquête de la Conservation Tesstranne, un empire humain isolé n’ayant pas trouvé bon de prendre son abonnement au club Pépé quand il en avait l’occasion.

Les questions et les réponses, qui permettent à Alphie d’expliquer un peu plus pourquoi il considère ses frères comme des crétins et tout particulièrement Roboute (grab popcorn), sont entrecoupées de flashbacks écrits du point de vue de divers défenseurs de la capitale de Tesstra, Prime, qui se trouvaient évidemment très malins et très bien préparés, hohoho, jusqu’à ce que l’impensable se produise et que l’Alpha Legion déclenche une attaque chirurgicale. D’abord en faisant sauter les ponts reliant les fortifications au reste de la cité, puis en infiltrant le QG adverse en se faisant passer pour les gardes du corps transhumains protégeant les hauts gradés et les personnalités politiques de la Conservation, et enfin en détournant l’endoctrinement subconscient des officiers restants, sortis de leurs barraquements à la tête d’une compagnie d’Ogryns pour reprendre Prime, et les forçant à se suicider avec coup de fil anonyme chargé en mots clés déprimants. Bilan des courses : une planète conquise en quelques semaines, au lieu des quelques mois que l’approche lente et méthodique de Guilliman laissait envisager. Evidemment, ce n’est pas « glorieux » ni « honorable », mais est-ce que l’Impérium l’est au fond, hein ? Parfaitement. C’est en quelque sorte le message que fait passer Alpharius à son jury, qui, très étonnamment, le déclare parfaitement dans son droit d’avoir envoyer scier le grand Schtroumpf, et le déclare vainqueur aux points sur décision unanime.

Début spoiler…On apprend en toute fin d’histoire que finalement, ce n’était pas Alpharius qui répondait aux questions d’anonymes clampins, mais Omegon qui répondait à celles d’anonymes clampins et d’Alpharius. Un grand classique de la XXème. Les deux frangins échangent un sourire complice et quelques boutades à quintuples sens qui n’en font sans doute pas pour nous, et le rideau tombe sur la fin de ce conseil, qui nous aura appris que la vérité est bien relative…Fin spoiler

AVIS:

Council of Truth’ fait partie de ces œuvres dont l’appréciation dépend grandement de votre niveau de connaissance, ou d’accoutumance (les deux termes étant ici synonymes) de/à l’univers et des protagonistes qu’on y retrouve. L’Alpha Legion, si elle n’est pas la faction de l’Hérésie d’Horus la plus populaire parmi les auteurs de la Black Library, dispose en revanche d’une sorte de cahier des charges littéraire auquel le lecteur peut se référer à chaque fois qu’une soumission traitant des fils d’Alpharius (et d’Omegon) est publiée. Organisation inhumainement secrète et retorse, cette Légion met un point d’honneur à ne jamais agir de manière claire, et cela s’illustre évidemment dans les histoires mises en scène dans la GW-Fiction: il y aura toujours des révélations, des retournements de situation et des personnages dupés lorsque la XXème est de la partie. Cela a été la règle depuis le ‘Legion‘ de Dan Abnett, et tous les auteurs qui sont passés après lui ont pris soin de se conformer à cette approche cryptique, avec plus ou moins de bonheur.

Aussi, lorsqu’en 2021 (13 ans après la sortie de ‘Legion’), Mike Brooks nous livre le récit d’une campagne tout à fait classique – si on peut utiliser cette expression pour ces Astartes – de l’Alpha Legion, sur fond de guéguerre d’ego avec les Ultramarines et de réunions secrètes et trotromystérieuses1, je dois admettre que c’est la déception qui prime. Tout cela a été lu et relu de nombreuses fois au cours des dernières années, et si Brooks livre une nouvelle efficace sur la forme, il lui manque de la valeur ajoutée sur le fond pour être qualifiée de réussite. À mes yeux, les publications de la gamme Primarques sont l’occasion de faire avancer notre compréhension sur cette confrérie de surhommes iconiques, et par extension, sur la manière dont ils organisent leur Légion et considèrent l’Impérium. Mike Brooks nous lance quelques bribes de fluff en cette direction (notamment la réflexion d’Alpharius que l’Alpha Legion doit être polyvalente pour éviter d’être vue comme obsolète par l’Empereur, dont il se méfie grandement), mais se contente sinon de nous servir sa version de ‘Legion’2//’The Harrowing’//’The Serpent Beneath‘, ce qui n’a pas grand intérêt je dois dire. Plus embêtant, il se vautre à certains endroits dans le fan service le plus grossier, en complexifiant les opérations de l’Alpha Legion pour le plaisir (si t’es capable de descendre une compagnie d’Ogryns au bolter, c’est pas le petit officier planqué dans son véhicule qui va beaucoup t’ennuyer s’il n’est pas absolument mis hors d’état de nuire avant l’embuscade hein), ou en incluant la fameuse catchphrase de la Légion (« I am… absolutely not original« ) et un Alpharius/Omegon swap de façon très artificielle à l’intrigue. Bref, on est ici sur une nouvelle très honnête mais plutôt décevante de la part de Mike Brooks, de qui j’attendais plus pour sa première publication au service d’Hydra. En espérant que le roman qu’il a écrit sur Alpharius soit plus audacieux que ça.

1: Brooks m’a mal vendu le concept du conseil de vérité je dois dire. Qui a des comptes à demander à un Primarque sur la manière dont il conduit ses opérations (qui plus est de façon victorieuse) au sein de sa propre Légion? Soit Alpharius a un ego tellement monstrueux qu’il a besoin de prouver qu’il avait raison même quand personne ne lui a rien demandé, soit il s’agissait de faire passer quelques éléments de langage aux officiers supérieurs de la Légion au cas où ils seraient interrogés sur les méthodes de cette dernière. Auquel cas, la transmission d’un memo ou l’organisation d’une réunion sur Teams aurait été plus efficace.
2: Avec les soldats génétiquement améliorés du roman d’Abnett du côté non-Impérial cette fois-ci. Mais c’est vraiment la même vibe.

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Terminus – C. Wraight :

INTRIGUE:

Notre histoire s’ouvre sur la glorieuse scène d’un Légionnaire Death Guard, Caipha Morarg, vomissant dans son casque et constatant avec inquiétude que le contenu de son estomac n’est pas évacué par les valves de son casque, sérieusement encrassées. Fort heureusement pour notre héros, le pouvoir de Nurgle lui permet de tenir en apnée longue dans ses glaires jusqu’à ce que l’Apothicaire Zadal Crosius (avec un nom pareil, il aurait dû faire Chapelain moi je dis) arrive avec sa fidèle clé de 12 et purge le heaume de son camarade. Bienvenue dans ‘Terminus’ et sur Terra, au début du siège de la planète par l’avant-garde d’Horus.

Récemment buzzés par Nurgle – et ses mouches – pour rejoindre sa team, les Death Guards doivent encore s’habituer à leur nouvelle condition de pestiférés ambulants, perclus de maux divers et variés, mais guère incapacités par ces derniers, mis à part au niveau de l’agilité. Nous suivons donc Morarg, qui se trouve être, en plus de barbouillé, l’Ecuyer personnel de Mortarion, et Crosius alors que la paire progresse lentement mais sûrement vers le Palais Impérial, rasant les avants postes fortifiés et exterminant les traînards de l’Armée Impériale avec détachement, tout en essayant de mettre des mots sur leur douloureux et désespérant passage de guerriers surhumains insensibles à toutes maladies, à celui de creusets de microbes, virus et autres bactéries. Une chose semble certaine : Mortarion a joué un rôle dans cette transition (énergétique, mouahaha).

Et à tout seigneur glandeur, tout honneur, Mort Shuman finit par rejoindre la ligne de front, sans doute fatigué que Typhon lui ressorte en boucle la blague de la grosse mite depuis qu’il lui a poussé des ailes. Cette arrivée funeste se solde d’un échange de haut niveau entre le Primarque et son chief of staff littéralement défroqué, par lequel on apprend que l’Empereur a interdit à son fils de remettre les pieds chez lui tant qu’il n’aurait pas pris une douche. La nouvelle se termine par une démonstration des nouveaux pouvoirs entropiques de Mortarion, qui est capable de faire vieillir en accéléré une zone de son choix à une distance respectable1, et c’est un bastion isolé dans la pampa himalayenne qui en fait les frais. Comme on disait au tout début de M3 : « va y avoir des spores ».

1 : Une compétence toute christique quand on y réfléchit. Mortarion est capable d’apporter mille ans de pets sur terre, ça se respecte.

AVIS:

Je ne sais pas vraiment ce que Chris Wraight a voulu faire avec ce ‘Terminus’, qui évoque plus le dernier arrêt d’une ligne de métro (« nous arrivons sur Terra, merci de ne rien laisser ni oublier derrière vous« ) que la conclusion fatidique d’une épopée sanglante, ou même, ce qui aurait été logique, le vaisseau spatial le plus tristement célèbre de la Légion. Ce n’est pourtant pas comme si cet auteur n’avait pas déjà un passif, et de qualité qui plus est, avec ces protagonistes, et des personnages et arcs narratifs à mettre en scène pour donner un semblant d’intérêt à cette soumission. Je m’attendais ainsi à retrouver, ou au moins à croiser le temps d’un caméo, ce bon vieux Vorx (‘Lords of Silence’), que l’on avait déjà vu à l’œuvre sur le temps long dans ‘Unification‘, mais me suis retrouvé à la place avec l’illustre pas très connu Morarg, le positivement obscur Crosius, et Mortarion faisant du sale sur les trois dernières pages. Ce casting surprenant aurait pu faire l’affaire si on lui avait donné une intrigue et une mise en scène digne de ce nom, mais la première s’est avérée être un mélange de poncifs (« Ahlala que nous sommes malades présentement une fois par exemple là dis donc… Mais on reste tout de même trotrobalèze paske fô pas déconner non plus« ) et de renvois au déroulé de ‘The Buried Dagger‘, et la seconde à une sorte de plan large sur une partie de tower defense en mode ralenti. Pas de surprise scénaristique comme dans ‘Endurance‘, ni de construction un peu travaillée comme dans ‘Unification‘: rien que le récit plan-plan du retour de la Death Guard sur le Monde Trône, dans une sorte de filler faisant le lien entre deux épisodes autrement plus intéressants de l’histoire de la Légion: sa corruption par Nurgle et sa participation au vrai siège du Palais Impérial. Au final, rien à retirer de ce ‘Terminus’ qui n’ait été déjà couvert, et de façon plus intéressante, par d’autres récits consacrés aux Barbarus Boyz au cours de l’Hérésie d’Horus.

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Grandfather’s Gift – G. Haley :

INTRIGUE:

Grandfather's GiftLe propos de notre récit se situe dans un jardin public, où un clochard toxicomane émerge péniblement d’un sniff de crack frelaté, dans une tenue étrange et avec une très vague idée de qui il est et ce qu’il fait là. Vous allez me dire : « C’est pas une nouvelle de l’Hérésie ça, c’est la Villette un mardi matin classique ». Vous auriez raison, sagaces lecteurs, ne serait-ce que pour les quelques détails ci-après : le jardin est géré par le NURGLE (Node Urbain de la Régie Générale de Laval Est), le clochard est un Primarque, et la mémoire qui lui revient progressivement lui apprend, et nous avec, qu’il est Mortarion, seigneur de la Death Guard.

Malgré ces débuts prometteurs, Morty se demande bien comment il est arrivé dans ce bouge, lui qui aux dernières nouvelles travailllait tranquillement dans son laboratoire de la planète de la peste à quelque grand dessein arcano-technologique. Plus curieux qu’inquiet devant le charme sauvage de l’endroit, à mi chemin entre le jardin anglais dans toute sa bucolique liberté et le fond d’un baril d’eau lourde oublié dans un terrain vague de Chernobyl, notre Primarque décide de partir en vadrouille, espérant trouver un agent municipal qui lui indiquera la station de tram la plus proche pour l’Oeil de la Terreur. Au bout de quelques secondes/minutes/heures/jours/mois/années/siècles/éons, il finit par tomber sur un Grand Immonde, en chair autant qu’en larmes, auprès duquel il s’enquiert poliment des raisons de son tracas. On a beau dire ce qu’on veut des qualités paternelles de l’Empereur, il a su inculquer à ses fils des manières tout ce qu’il y a de plus urbaines.

Khu’gath, car c’était lui, se fait un plaisir de rafraîchir la mémoire du dormeur du val, le taquinant au passage sur son aveuglement volontaire, et hilarant, quant au fait qu’il soit un psyker, appellation que Mortarion refuse catégoriquement1. Toujours totalement perturbé par une enfance difficile et un complexe d’Oedipe asymétrique (il veut tuer son père et… tuer son père) mal digéré, notre héros atrabilaire ne démord pas qu’il est un scientifique et non un praticien des arts occultes, ce que Khu’gath, conciliant, finit par lui accorder. En guise de cadeau d’adieu, l’affable démon a la bonté de remodeler le Primarque a sa véritable image, ailes de bourdon (l’animal totem de Mortarion) incluses, et de lui souffler à l’oreille la raison de sa venue à Neverland. Le bon Papa Nurgle lui a organisé une chasse au trésor pour le récompenser de sa piété, et l’âme de son beau-père l’attend quelque part sous les frondaisons moites de son jardin.

« Bon sang, mais c’est bien sûr ! » s’exclame Mort Shuman, qui s’envole à tire d’aile chercher la récompense qu’il poursuit depuis si longtemps, et qu’il finit par trouver, disséquer et enfermer dans une fiole en un tour de faux. Satisfait d’avoir rayé cet important item de sa to do list personnelle, Mortarion peut enfin regagner ses pénates et appeler son psy pour convenir d’une prochaine séance, se jurant au passage qu’il finira par régler ses comptes avec son autre père, dont la lampe torche psychique clignote en lisière du jardin de Grand-Père Nurgle. Pépé ou Papy, il fallait choisir, et il a choisi !

1 : « Tu es un sorcier, Mort- » « AGNANANANA, JE N’ENTENDS RIEN-EUH !»

AVIS:

‘Grandfather’s Gift’ a beau se concentrer sur un épisode somme toute négligeable de la saga de Mortarion, personnage l’étant – jusqu’à récemment – tout autant en termes d’importance sur le lore de 40K, sa (courte) lecture n’en demeure pas moins intéressante, en ce qu’elle permet à Haley de poursuivre sa description pour le moins contrastée du Primarque de la Death Guard, déjà généreusement ébauchée dans ‘Plague War’ : celui d’un être totalement paradoxal, qu’il est le seul à ne pas voir, ce qui a la fâcheuse tendance à miner son autorité naturelle. Prince Démon jurant ses grands dieux qu’il a réussi à dompter les forces du Chaos à force d’études et d’analyses tout ce qu’il y a de plus scientifiques, Morty apparaît comme un être aussi amer que pathétique, ce qui contribue à le rendre intéressant, même si la frontière est fine entre profondeur tourmentée et ridicule patenté. L’autre trait notable de son caractère, le mépris souverain qu’il semble éprouver envers toute chose (la condition humaine, ses frères, ses pères) pourrait tout autant le magnifier que le plomber, si utilisé de manière peu fine par un auteur en manque d’inspiration1. Affaire à suivre, donc.

Pour poursuivre mon fil rouge BLC-esque, enfin, je dois reconnaître que l’inclusion de cette nouvelle au recueil s’avère un choix assez pertinent, puisqu’elle offre au lecteur novice une bonne présentation d’un lieu (de) culte des franchises de Games Workshop : les fameux jardins de Nurgle, en plus d’une introduction intéressante au concept de « destruction créatrice » // « je meurs donc je ris » qui est à la base du dogme prouteux. L’utilisation de l’amnésie de Mortarion permet également à Haley de présenter le background de ce dernier de manière progressive et pédagogique, brossant en toile de fond les grandes lignes du fluff de 31K. Bref, une soumission qui répond plutôt bien au cahier des charges, sans pour autant se révéler être vide de substance pour les vieux BL-iscards. Pas mal du tout.

1 : L’extrait gratuit de ‘La Dague Enfouie’ de James Swallow me fait ainsi redouter le pire pour le DG de la DG, qui apparaît comme le pion d’un Typhus même pas respectueux de son père génétique, sans que ce dernier ne s’en offusque.

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Et voilà qui termine cette revue de Heirs of the Emperor, anthologie se plaçant dans le haut du panier des productions de la Black Library, tant en termes de qualité que de quantité. Un petit inédit (par exemple sur la création de ces fameux Primarques par l’Empereur) n’aurait certes pas été de refus, et l’absence d’Angron reste injustifiable, mais ce bouquin est appelé à devenir un classique du corpus de l’Hérésie d’Horus, en particulier pour les lecteurs n’ayant ni le temps, ni l’envie de se coltiner l’entièreté du catalogue (qui est assez inégal, il faut bien le reconnaître). Qu’on les aime ou qu’on les déteste, les Primarques sont en effet intrinsèquement distrayants, et on prend plaisir à les suivre d’un bout à l’autre de la galaxie, quelles que soient leurs motivations profondes. Pour finir, notons qu’il est tout de même savoureux que la majorité des soit-disant héritiers de Pépé soient morts bien avant lui… Toujours bon pied bon œil, le vioque, même 10.000 ans plus tard!

BLACK LIBRARY 2021 ADVENT CALENDAR [40K – HH – AoS]

Bonjour et bienvenue dans cette revue du 2021 Advent Calendar de la Black Library, réalisée avec un an de retard (ce qui explique pourquoi j’ai dû réaliser ma propre illustration, « l’officielle » ayant été retirée de la circulation depuis plusieurs mois), mais mieux vaut tard que jamais I guess. Profitant de la sortie du calendrier de l’Avent de 2022 (couvert ici), je me suis dit qu’il serait approprié de faire d’une pierre deux coups, et comme la BL a choisi de conserver le format « une nouvelle tous les deux jours », la combinaison de ces deux années permet d’obtenir les 24 histoires nécessaires à un véritable calendrier de l’Avent. Elle est pas belle la vie?Black Library 2021 Advent Calendar

Pot-pourri de nouvelles tirées des trois franchises majeures de la GW-Fiction, avec une saveur 40K plus fortement marquée (5 nouvelles, contre 4 pour Age of Sigmar et 3 pour l’Hérésie d’Horus), la sélection 2021 ratisse large. Au niveau des personnages notables que nous allons rencontrer dans les histoires ci-dessous, on peut noter la présence de vrais poids lourds du lore, comme Ghazghkull et Eidolon, ainsi que de personnages plus niches ou récents (Yndrasta, Cado Ezechiar, Augusta Santorus, Lazarus)1. Le même constat s’impose en ce qui concerne les auteurs réunis par la Black Library: à côté de valeurs sûres du calibre de C. L. Werner, John French et Guy Haley, on retrouve des figures déjà bien connues du lecteur régulier (Mike Brooks, Nate Crowley, Danie Ware), ainsi que des contributeurs faisant leurs premiers pas dans la carrière (Chris Forrester, Michael F. Haspil). Un joyeux mélange d’univers, de factions, de perspectives et de styles, pour résumer. Un beau « cadeau » (c’est tout de même pas gratuit, voire franchement cher) que nous a fait la BL? Voyons cela de plus près.

1 : On remarque d’ailleurs sur les couvertures des nouvelles que toutes sont explicitement liées à un personnage nommé (pas forcément très connu). Une sorte de Character Week à la sauce de Noël, en quelque sorte.

Black Library 2021 Advent Calendar

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Road Rage – M. Brooks [40K] :

INTRIGUE:

Road RageNous retrouvons Ufthak Blackhawk, le Boss Ork le plus kool de ce côté-ci de la galaxie, après les événements couverts dans ‘Brutal Kunin’. Désormais lieutenant de Da Meklord, Ufthak est promis à un brillant avenir et gère sa propre bande de Boyz, mais les choses se compliquent lorsque son autorité est contestée par un Speed Freek du nom de Riptoof. Ce dernier reproche au Boss 1) de lui avoir piqué son dragsta pour réaliser la cascade qui l’a fait rentrer dans les annales1 (et ne pas lui avoir rendu après ça), mais surtout 2) de ne pas avoir trouvé une baston digne de ce nom pour occuper les troupes. La Tekwaaagh ! a en effet fait escale sur un monde Exodite, et massacré les Eldars et leurs diplodocus de compagnies en quelques jours. Depuis, c’est l’ennui. Jugeant Ufthak inapte au commandement, Riptoof le défie à la course (mécanisée, bien sûr), et notre héros est assez malin pour comprendre qu’il est dans son intérêt de jouer le jeu, étant entendu que « simplement » tabasser son rival ne lui fera pas gagner de points auprès des autres Speed Freeks qui forment le gros de sa bande.

Ne disposant que d’une journée pour se trouver une bécane digne de ce nom, Ufthak rend visite à son vieux complice, le Mek Da Boffin (toujours monté sur son solo wheel, comme la vraie légende qu’il est), qui lui promet un véhicule pour le lendemain. Et le brikolork tient parole, livrant un beau trukk (avec jantes alliage et roquettes de propulsion) à son Boss, alors que Riptoof concourt dans un nouveau dragsta kustom. L’épreuve consiste en un simple tour du pâté de maison, ou l’équivalent pour des Orks sur un monde vierge, le premier à revenir au bercail remportant la victoire. Lorsque le départ est donné, une dizaine de concurrents s’élance dans un concert de rugissements, Ufthak étant accompagne de son Daniel Elena personnel (le fidèle Mogrot Redtoof), mais également, et ce n’était pas prévu, par le tout aussi fidèle Grot Nizqwik, et le plus fidèle de tous, le Squig Princesse. C’est ça d’être un manager populaire.

Ce qui était encore moins prévu, c’est qu’une partie de chasse Drukhari fasse son apparition en milieu de parcours, et décide de se joindre à la course. Ne supportant pas le manque de respect des Eldars, qui commencent à drifter entre les buggies et les trukks Orks au lieu de simplement leur tirer dessus, Ufthak voit rouge et ouvre le feu sur les malotrus, déclenchant une bataille inter-espèce à 150 kilomètres/heure2. Le destin faisant bien les choses, notre héros se retrouve face au commandant adverse pour un duel au sommet (pendant ce temps-là, c’est Mogrot qui tient le manche), et bien qu’il en perde la main, Ufthak corrige son vis à vis avec l’aide providentielle et plongeante de Princesse, qui coûte un bras au leader Eldar Noir.

La ligne d’arrivée se rapprochant à vue d’œil, Ufthak a la clairvoyance d’utiliser le décor comme tremplin et les roquettes montées par Da Boffin comme booster, pour réaliser un saut qui réduit en compression de César le dernier Raider drukhari, et lui permet surtout de chiper la première place à Riptoof. Verstappen n’a plus qu’à bien se tenir ! Un bonheur n’arrivant jamais seul, la nouvelle se termine sur l’arrivée dans le camp Ork du reste de l’armée des Eldars Noirs, ce qui promet aux Boys désœuvrés une belle bagarre pour se remettre en jambe. Il faut savoir profiter des petits plaisirs de la vie.

1 : Détruire un Titan impérial au corps à corps.
2 : Il le fait en hurlant du Radiorkhead, ce qui est une raison supplémentaire de l’aimer.

AVIS:

Franche réussite que ce ‘Road Rage’ pour Mike Brooks, qui réussit le doublé que tous les auteurs d’œuvres feuilletonnées poursuivent : satisfaire à la fois les lecteurs familiers de la série (ici en prenant soin de faire apparaître presque tous les personnages secondaires de ‘Brutal Kunin’’) et ceux qui n’en ont rien lu avant cette nouvelle (en prenant bien soin de présenter les événements importants des épisodes précédents). Ca a l’air simple sur le papier, mais tout le monde n’y arrive pas, loin de là.

Ajoutons à cela que Brooks est très à l’aise dans l’écriture, là aussi faussement simple, de la littérature ork. On pourrait croire qu’il suffit d’écrire de manière outrageusement simplifiée pour donner le change, mais cela n’est pas suffisant : pour rester compréhensible, il faut au contraire faire attention aux tournures phonétiques utilisées, au point que je suis persuadé qu’il est plus long d’écrire en ork qu’en anglais (ou français) classique. Mike Brooks infuse également le reste de sa nouvelle de tournures et réflexions drolatiquement absurdes, ce qui change agréablement du grimdark auquel les œuvres de GW-Fiction nous ont habitué. Encore plus réussi que ‘Where Dere’s Da Warp Dere’s A Way’ (sauf pour le titre, évidemment), c’est dire !

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The Wolf and the Rat – C. L. Werner [AoS] :

INTRIGUE:

The Wolf and the RatScandale à la cour de Radukar le Loup, sanguinaire car vampirique maître de la cité d’Ulfenkarn, en Shyish. Une précieuse relique a été dérobée dans la crypte où elle sommeillait depuis des lustres, plongeant notre atrabilaire héros dans une colère noire (logique) : on lui a volé son doudou !!! Ah, on me dit dans l’oreillette qu’il s’agit en fait de la pelisse du vampire qui lui donné le Baiser de Sang, ce qui est un peu plus classe, mais beaucoup moins drôle, que ma version des faits. Je m’incline de bonne grâce et reprends le cours de mon récit.

On apprend rapidement que le crime à peine commis est déjà revendiqué par une coterie de suceurs de sang ne goûtant pas au règne sans partage de Radukar sur son fief, et souhaitant, d’après les mots bredouillants de leur émissaire, le froussard Valac Chrobak, seulement remettre au goût du jour le conseil municipal, où Loulou aurait bien sûr un siège. Le messager ayant raté son test de charisme de façon critique, il est expédié dans la post non-vie par les gardes du corps Ogors de Radukar, qui décide de prendre les choses en main. Sachant que les ravisseurs de courtepointe lui ont donné rendez-vous dans le quartier des docks pour procéder à l’échange, il en prend le chemin sans tarder, confiant dans le fait que sa Sénéchale, l’ex-pirate tournée vampiresse (vive les reconversions professionnelles, franchement) Natasyia, sécurisera discrètement le périmètre avec les squelettes de la garde municipale, au cas où l’affaire s’envenimerait.

Sur place, il retrouve une vieille et funeste connaissance, le Prince des Rats Kritza, un noble dévoyé (vampire lui aussi, évidemment) qui a pris la tête de la cabale lupophobe après que Radukar l’ait laissé pour mort suite à un petit accrochage autour de la machine à café. Kritza et son corps de lâche ne sont évidemment pas venus seuls : une petite bande de petites frappes à canines pointues a fait le déplacement, afin d’équilibrer un peu les choses entre Rad’ the Chad et Kritza le Rat. Sans surprise, l’entrevue se passe moyennement, chacun campant sur ses positions, jusqu’à ce que Natasyia arrive avec les renforts promis pour précipiter la résolution du litige…

Début spoiler 1…Seulement, cette fourbe de flibustière repentie jouait en fait du côté de Kritza. C’est d’ailleurs elle qui a dérobé la peau du père de Radukar, et l’a remise aux conjurés. Les griefs de Nat’ sont simples : elle en veut à son boss de ne lui avoir pas dit qu’être un vampire créait un grand vide spirituel, ce qui était pourtant assez facile à prévoir en réfléchissant deux secondes au concept de non-vie. Heureusement qu’il n’y a pas de termes et conditions dans les Royaumes Mortels, ce serait un véritable carnage. Quoiqu’il en soit, Radukar se retrouve finalement isolé et encerclé au milieu des épaves pourries (je ne parle pas des vampires) du port, ce qui n’est pas une situation enviable. Le plan de Kritza est simple : mettre le feu à l’une d’entre elles et faire pousser le seigneur d’Ulfenkarn dans le brasier par le cordon de sécurité squelettique rameuté par Natasyia. Aussitôt dit, aussitôt fait. A moins que…

Début spoiler 2…A moins que ce rusé de Radukar ait flairé la combine à des kilomètre grâce à sa truffe de loup, et ait pris des mesures de contingence pour piéger les piégeurs. Il désactive ainsi les squelettes d’une simple commande vocale1, et fait signe à ses fidèles Ogors zombies de sortir des coulisses avec leurs pieux de fonction pour châtier les trublions. Ce retournement de situation pousse la clique de Kritza à tenter de rusher Radukar, avec des résultats… médiocres. Un peu plus réfléchie, Natasyia se saisit de la pelisse convoitée par son ex-patron, et fait mine de la jeter dans les flammes de l’épave s’il ne la laisse pas partir. Manque de bol, en tant que « fille » de Radukar, elle découvre bientôt que braver la volonté paternelle n’est pas une sinécure, et finit par apporter gentiment la fourrure au brasier, et elle avec par la même occasion, lorsque le pater familias lui ordonne. Reste Kritza, qui en tant que personnage nommé avec une figurine dispose d’une sauvegarde invulnérable en sigmarite, et se tire donc d’affaire avec son special move, l’effervescence murine. La nouvelle se termine sur ce tableau théâtral, Radukar jurant sur ses grands morts d’éradiquer la menace surmulote sans aucune merci. Prend des notes, Anne Hidalgo.Fin spoiler

1 : J’imagine que chacun squelette avait une dent bleue au fond de la mâchoire.

AVIS:

Nouvelle d’accompagnement du livre qu’il a consacré à la dynastie Vyrkos (‘Cursed City’), qui n’était lui-même qu’un produit dérivé de la boîte de jeu éponyme, ‘The Wolf and the Rat’ sent franchement le réchauffé. Les fortes contraintes scénaristiques avec lesquelles il a dû composer pour écrire cette nouvelle, dont tous les personnages nommés devaient réchapper, ont amené le vétéran Werner à nous servir de la soupe littéraire, qui n’intéressera à la rigueur que les lecteurs souhaitant creuser le lore d’Ulfenkarn, bourgade mineure de Shyish et bac(kground) à sable patenté. Mêmes les surprises que l’auteur souhaitait ménager en guise de twists finaux tombent à plat, faute d’alternatives crédibles à l’inénarrable trahison-du-bras-droit-secrètement-insatisfait, contrée aussi sec par la toute aussi fameuse prévoyance-de-vieux-briscard-qui-ne-faisait-que-donner-le-change-mais-qui-avait-tout-pigé-depuis-longtemps. C. L. Werner fait généralement beaucoup mieux quand on le laisse s’amuser avec des ratons, et on peut donc classer cette nouvelle parmi ses moins réussies pour le compte d’Age of Sigmar.

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Eater of Dreams – M. Collins [HH] :

INTRIGUE:

Eater of DreamsPour ceux qui se demandaient ce qui était arrivé à ce vieil associal de Fel Zharost, ex-Archiviste en chef des Night Lords réfugié dans les bas-fonds d’Albia après avoir quiet quitted sa Légion lorsque cette dernière s’est mise à faire vraiment n’importe quoi (et pour dégoûter un Anglais, il faut le faire), l’attente se termine aujourd’hui. Emmené par le Chevalier Errant qui l’avait retrouvé dans les bas-fonds Terran jusque dans les appartements du Sigilite, le Psyker albinos découvre avec effroi que le Régent de Terra a recours aux cantrips les plus cringe du monde pour impressionner son monde. Ah là là, ces vieux qui veulent faire jeunes alors, quelle plaie. Maîtrisant sa révulsion, Zharost prête l’oreille à la proposition d’embauche formulée par Malcador, qui offre au Night Lord retraité d’aller régler ses comptes avec un autre Archiviste de la VIIIème, le dénommé Vathras Kell, dont il connaît la localisation exacte car, voyons, le vieux Mac’ a plus d’un tour dans son sac. Réalisant sans nul doute qu’un refus poli mais ferme ne mènerait à rien d’autre qu’un bolt entre les yeux, Zharost accepte, et est intégré sans plus de cérémonies parmi les Chevaliers Errants.

La confiance n’excluant pas le contrôle, le Sigilite prend soin de faire chaperonner sa nouvelle recrue par un Astartes de confiance, l’ex World Eater Macer Varren. Le newbie palichon et le vétéran barbu ne s’apprécient guère, mais cela ne les empêche pas de voyager sans trop d’anicroches jusqu’au monde de Malec’Nar, autour duquel flottent les débris de vaisseaux Night Lords. Cette planète insignifiante, conquise au début de la Grande Croisade et laissée à baigner dans son jus par la suite, a été prise par les forces du Maître de Guerre et corrompue à un tel point qu’elle résonne d’un cri psychique permanent, ce qui est assez pénible pour un Zharost qui peut maintenant réutiliser ses pouvoirs occultes. Si Malcador a envoyé le duo de choc sur ce plan foireux, c’est que c’est Kell qui est derrière la damnation de Malec’Nar. Après avoir expédié ad patres quelques locaux transformés en réceptacles Warp par les bons soins des sorciers Night Lords, Zharost et Varren se confrontent à la Némésis du premier. On apprend à cette occasion que le mauvais sang entre les deux Psykers remonte à l’époque où Zharost a commencé à douter du leadership de Konrad Curze, au contraire de son protégé (également issu des bas-fonds d’Albia) Kell. Ce dernier n’a jamais pardonné à son tuteur d’avoir déserté la Légion – faut dire que Sevatar ne lui avait pas trop laissé le choix – car cela n’a fait que précariser encore davantage la situation des Psykers Night Lords. Il est donc temps de vider cette vieille querelle.

Pendant que Varren se tape l’entourage de Kell, avec des résultats plus ou moins probants, les deux Archivistes engagent un combat autrement moins prosaïque que celui mené par cette brute de World Eater. Au bout du compte et de quelques visions du passé revisitées à la sauce prophétique (dont le grand classique : la destruction de Nostramo), Zharost fait respecter la hiérarchie et parler son ancienneté, et broie le crâne de son pupille à main nue grâce à ses super pouvoirs. Varren ayant déjà été booké sur Terra par Swallow dans le futur (‘The Buried Dagger’), il survit également et très logiquement à cette mini bataille, et les deux compères en sont quittes pour repartir vers Terra pour recevoir une nouvelle mission de la part de Malcador. La routine habituelle, quoi.

AVIS:

Si le titre de cette nouvelle vendait du rêve (mouahaha), son contenu se révèle malheureusement assez peu intéressant. On ne retrouve en effet dans ces quelques pages aucune information sur les cauchemars récurrents qui tourmentent Konrad Curze, et la manière originale dont il parvenait à réguler ses humeurs mutines, sujets que l’indispensable Aaron Dembski-Bowden avait introduit dans le fluff avec brio dans ses propres travaux (‘Prince of Crows’) il y a quelques années. Le Fel Zharost dont nous héritons ici n’est plus qu’un Archiviste tout à fait banal, embarqué dans une vendetta personnelle contre un ennemi créé de toute pièce par Collins, et secondé dans sa mission par un personnage protégé par une armure en scenarium brossé. On peut comprendre qu’un contributeur novice à l’Hérésie d’Horus comme Marc Collins ait cherché à calquer ses premiers pas dans ceux de Seigneurs de Terra, en prenant la suite du ‘Child of Night’ de John French, mais j’aurais apprécié qu’il vienne boucler un arc narratif, même mineur, plutôt que de dérouler une sous-sous-sous-péripétie totalement gratuite comme il le fait ici. On peut faire l’impasse sans problème.

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The Moon Mines of Sciara Lone – D. Ware [40K] :

INTRIGUE:

The Moon Mines of Sciara LoneUn joint de culasse fendu force l’escouade de Sœurs de Bataille où sert cette bonne vieille jeune Augusta Santorus à évacuer en urgence le vaisseau qui les ramenait vers Ophelia VII. Coup de chance, la planète où le Heart of Devotion finit par s’écraser possède un satellite, et la flottille de capsules de sauvetage où les quelques survivants de l’accident ont trouvé refuge se pose bientôt à la surface de la lune de Sciara Lone. Accueillies par le Gouverneur Ido en personne, les sœurettes demandent à avoir accès à la chapelle et à l’Astropathe locaux, pendant que leurs vaisseaux sont révisés et leurs accompagnants envoyés à l’hospice pour récupérer. Si l’attitude serviable et débonnaire d’Ido semble mettre immédiatement la revêche Sœur Supérieure Veradis de mauvais poil (en même temps, c’est son état normal), c’est plutôt l’étonnement qui l’emporte du côté d’Augusta (et de sa pote Lucienne). Elle n’arrive en effet pas à croire que des colonies minières de 10.000 habitants puissent exister dans l’Imperium. Ses études ne l’avaient absolument pas préparé à ça, en tout cas, ce qui en dit long sur la qualité de l’enseignement que les novices de l’Ordre de la Rose Sanglante doivent recevoir, moi je dis.   

L’ébahissement se change cependant rapidement en désarroi et en colère lorsque la fine équipe arrive à la chapelle, et se rend compte que cette dernière a été abandonnée depuis des lustres. Ce n’est toutefois pas une raison de ne pas rendre grâce à Pépé de ses bienfaits, et une fois la prière achevée, Veradis disperse ses ouailles à travers la colonie. Pendant qu’elle ira envoyer un compte rendu des derniers événements à l’Ordre, Augusta et Lucienne devront retourner au spatioport et garder un œil sur les navettes. Juste au cas où bien sûr. Notre héroïne sent bien que quelque chose préoccupe sa supérieure, mais comme on ne lui a pas donné le droit de poser des questions aujourd’hui, elle se contente d’obéir sans chercher à en savoir plus. « Béni soit l’esprit trop étroit…», toussa toussa…

Bien évidemment, les choses se compliquent rapidement une fois rendu sur place, le personnel du spatioport ne se montrant pas très coopératif malgré les cris stridents et les froncements de sourcil auxquels Augusta a recours pour tenter d’asseoir son autorité. Pire, les Sœurs se rendent compte qu’elles sont encerclées par leurs hôtes, ce qui n’augure rien de bon pour la suite. Avant que la distribution de bourre-pifs ne commence, Augusta a toutefois une révélation en contemplant un transport Aquila faire un créneau dans le lointain : le logo de l’Empereur est tout bonnement absent de tous les uniformes, bâtiments et véhicules de la colonie. Une preuve d’indépendance qui lui semble être encore plus grave qu’une simple hérésie, à tout prendre.

Cette incroyable révélation ayant été faite, la nouvelle passe en mode Smackdown, dans la plus pure tradition de la série. Augusta et Lucienne rossent bellement les nuées de goons qui tentent de les mobber, sans utiliser autre chose que leurs poings et leurs genoux énergisés (c’est beau jeu). A la conclusion d’une cascade osée, qui voit Augusta parvenir aux commandes d’un vaisseau bourré d’explosif menaçant d’ouvrir le feu sur le spatioport, avant de réaliser qu’elle ne sait absolument pas piloter ce genre d’appareil et le crasher en 10 secondes top chrono ; notre héroïne a la bonne idée de tomber dans les pommes, ce qui permet à Danie Ware de boucler son intrigue hors champ. A son réveil, Augusta apprend en effet de Veradis que le Gouverneur a été exécuté et que l’ordre règne désormais dans la colonie. Cette dernière, qui avait rejeté le règne bienveillant de l’Empereur pour miner du bitcoin de l’or et de l’argent et l’écouler sous le manteau, est désormais placée sous l’autorité de l’Ordre de la Rose Sanglante1. En attendant que l’intendance arrive et qu’elle se remette de ses émotions, Veradis donne à sa novice le soin de potasser le Traité de l’Epine pour rester au niveau pendant que le reste de l’escouade partira épurer les indigènes réfractaires. Merci qui ?

1 : Ça explique peut-être d’où vient la tendance d’Augusta à annexer des planètes (voir ‘Mercy’) par la suite de sa carrière.

AVIS:

The Moon Mines of Sciara Lone’ n’est pas l’épisode le plus désolant/distrayant de la série consacrée par Danie Ware à son héroïne fétiche, et se contente d’être assez quelconque tant sur le fond que sur la forme. S’il s’agit de votre première rencontre avec Augusta Santorus, nul doute que vous sortirez assez surpris de cette nouvelle, où on chante beaucoup, catche régulièrement, et où les personnages semblent en peine de prendre les décisions les plus évidentes (Veradis avait grillé depuis le début que quelque chose de louche se passait dans la colonie, mais a trouvé malin de ne pas prévenir le reste de son escouade). Mais si vous êtes un suiveur vétéran de l’Ordre de la Rose Sanglante, tout cela vous semblera bien ordinaire. A son crédit, je dois reconnaître à Ware que l’idée de mettre en scène une communauté humaine « indépendante » est intéressante, en partie parce que ce concept, qui n’est pourtant pas révolutionnaire pour un Imperium s’entendant à l’échelle galactique, n’a été jusque là que très rarement abordé dans la GW-Fiction. Avec seulement quelques pages à consacrer à ce sujet, et une maîtrise assez faible du lore, Danie Ware ne signe pas ici une nouvelle incontournable pour les amateurs de curiosités BLesques, mais démontre à tout le moins qu’elle est capable de sortir des tropes habituels que l’on retrouve à l’œuvre dans les nouvelles de 40K.

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The Lost Karak – G. Haley [AoS] :

INTRIGUE:

The Lost KarakAmbiance orageuse sur l’Aelsling. Lorsque le Maître des Runes Kedren Grunnbor, deuxième mascotte du navire (après le familier mécanique de Flynt, Trokwi), insiste lourdement pour faire une halte sur îlot rocheux insignifiant perdu au milieu des Bancs Célestes Adromite, le capitaine Kharadron commence par refuser. La Longue Barbe ne s’avoue toutefois pas vaincue, et commence à grommeler si fort que même le blagueur Flynt comprend que l’affaire est sérieuse. Si sérieuse que Kedren va jusqu’à utiliser le mot magique pour amadouer le capitaine, extrême extrémité à laquelle peu de Duardin sont prêts à se rabaisser (même s’ils ne sont pas grands). Intrigué par l’opiniâtreté de son vieux complice, Flynt finit par capituler, à la condition de pouvoir accompagner Kedren dans son escapade en terre inconnue.

Après une ascension éreintante à travers la forêt vierge qui recouvre l’île, le petit groupe (Flynt, Kedren, l’Ogor Gord et quelques Kharadrons additionnels) arrivent devant l’entrée d’un ancien Karak, ce qui explique l’intérêt que le Maître des Runes porte à ce caillou autrement dépourvu d’ather-or, et pique celui de Flynt. Après tout, les Dépossédés ne le sont que parce qu’ils ont oublié de prendre leur magot avec eux pendant l’Âge du Chaos : leurs anciennes demeures ont de bonnes chances d’être pleines de loot… Il faudra cependant faire attention, le flair infaillible du khemiste qui accompagne les explorateurs (Otherek Zhurafon) a décelé le puissant et musqué bouquet du Troggoth dans les galeries souterraines empruntées par la petite troupe.

Et cela ne rate pas, en effet. Un Dankhold Troggoth squatte les niveaux inférieurs de la forteresse, et malgré l’absence de trêve hivernale en Chamon (un Royaume plutôt chaud il faut le dire), personne n’a eu le cœur, ou le courage, de le faire déguerpir. Le combat s’engage entre les courts sur patte et le grand dadais, la régénération de ce dernier posant rapidement de gros problème aux barbus. Il faudra finalement une combinaison de tir de mitraille du tromblon runique de Kedren, et une ingestion d’aether-bombe provoquée par un shoot habile de Flynt, pour que l’ennuyeuse bestiole consente à décéder de manière définitive. Ceci fait, il est temps d’une franche explication de texte entre le Maître des Runes et ses invités involontaires : pourquoi par Grugni tenait-il tant à se rendre sur place ?

La réponse est toute bête, surtout pour des Kharadrons : rendre hommage à ses ancêtres. C’est en effet toute la famille de Kedren qui est enterrée dans ces cavernes, et cela n’a pas de prix pour un traditionaliste tel que lui. S’il tenait à s’y rendre seul, malgré les dangers évidents, c’est qu’il craignait que ses copains capitalistes ne profitent de la visite pour s’en mettre plein les poches… Crainte non dénuée de fondements, comme le renflement suspect dans la besace de Flynt à la fin de l’histoire le laisse apparaître, mais dans l’ensemble, l’équipage de l’Aelsling se comporte dignement. Ils ne sont pas si insortables que ça, finalement.

AVIS:

Les différences entre les factions Duardin d’Age of Sigmar ont beau être très visibles quand on compare les figurines des différentes gammes, il n’est jamais inutile de se pencher également sur ce qui les sépare de manière invisible, c’est-à-dire leurs cultures, croyances et traditions. C’est la piste que Guy Haley explore dans ‘The Lost Karak’, qui montre à quel point Dépossédés et Kharadrons diffèrent en matière de philosophie, mais aussi, et c’est intéressant, qu’ils restent liés par des valeurs communes. Sur cette idée simple mais riche, Haley ajoute un soupçon d’humour (sa marque de fabrique pour sa série arkanaute), un bon fond de fluff et un enrobage d’action, pour un résultat tout à fait correct.

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The Place of Pain and Healing – J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE:

The Place of Pain & HealingComme vous le savez peut-être, la dernière incursion d’Abaddon & friends sur Cadia ne s’est pas super bien terminée pour la planète. Aux dernières nouvelles, elle serait tombée sur le sol de la galaxie, ce qui fait tout de même une sacrée chute. Minka Lesk, jeune Bouclier Blanc aux débuts de ce que nous appellerons pudiquement « les événements », peut témoigner des derniers moments difficiles de la population locale : évacuée en compagnie du Capitaine Kasrkin Rath Sturm avant la victoire du Chaos (voir ‘Cadia Stands’), elle passe les premiers moments du voyage sur le croiseur Space Wolves qui convoie les deux Cadiens à délirer dans son sommeil. Les souvenirs de la défense contre la 13ème Croisade Noire se mélangent avec d’autres, plus anciens, de son enfance et son entraînement à devenir une bonne petite soldate. On apprend aussi que Minka est une Katherinette (même si elle ne porte pas de chapeau).

Cette transe enfiévrée est interrompue par le médecin de garde du Fang of Fenris, qu’un serviable hilote Space Wolves va quérir en catastrophe après avoir été témoin de la tachycardie suspecte de Minka. Une petite injection de stimms et ça repart comme en 40,000, cependant. Après une brève période de confusion, notre héroïne échange deux mots avec son camarade d’infortune, puis part errer dans les couloirs désertés et ténébreux du croiseur pour se changer les idées. Elle tombe sur Skarp-Hedin, le Space Marine qui l’a ramenée dans sa besace énergétique au moment de quitter Cadia (comme quoi on peut avoir un mono sourcil et bon(s) cœur(s), et parvient au terme d’un dialogue aussi profond que virtuose, mais en tout cas cathartique, à se réconcilier avec l’idée de la perte de sa planète natale, de ses milliards de compatriotes, et du fier héritage d’inflexibilité des centaines de générations précédentes. Le tout en deux minutes top chrono. A ce niveau, on ne dit pas tourner la page, mais désapprendre à lire.

Skarp-Hedin, qui a senti que son vaisseau était entré dans le Warp, et plus certainement que la fin de la nouvelle était imminente (c’est fou comme les Space Wolves ont le nez fin), trouve une excuse bidon pour partir dans l’arrière-plan narratif à petites foulées – mais en continuant le dialogue avec Minka, car c’est un gentleman. Cette dernière repart pioncer dans sa cellule, et sous son matelas, il faut le préciser, l’odeur et le poids de sa paillasse lui rappelant les jours heureux où elle faisait la nouba dans les dortoirs des premières années. You do you, girl, you do you.

AVIS:

Nouvelle de transition entre ‘Cadia Stands’ et ‘Cadian Honour’, ‘The Place…’ ne me semble pas être une addition très intéressante à la saga de Minka Lesk (que je ne considère pas comme étant très intéressante non plus, je dois dire). On n’apprend en effet pas grand-chose de nouveau sur l’héroïne aux yeux violets, qui a eu l’enfance stricte et militarisée que tous les Cadiens ont eu (aaaaaah), et a été traumatisée par la violence des combats de la Croisade Noire (oooooh). Comme les trois personnages principaux (Lesk, Sturm et Skarp-Hedin) ont un charisme cumulé proche de celui d’une huître comptable, il est dur de sympathiser un tant soit peu avec leur peine et leur déchirement.  J’ajoute que Hill se montre particulièrement peu inspiré dans l’écriture des quelques dialogues de sa nouvelle, qui sont si vides et grotesques que leur simple lecture vous sort immédiatement de l’histoire. À laisser sur Cadia.  

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Bloodhowl – C. Forrester [HH] :

INTRIGUE:

BloodhowlQue faire quand sa faction a pris une telle rouste qu’elle a été virtuellement annihilée et n’aura plus aucun impact sur la conclusion de l’Hérésie ? Plutôt que de demander conseil aux Légions Brisées ou aux Custodes, qui les ont précédés au panthéon de la lose glorieuse, les Space Wolves ont décidé de laver leur linge sale en et de famille au sortir de la campagne de Trisolian. Nous suivons donc le Jarl de la 13ème Compagnie (Dekk-Tra), Jorin Bloodhowl, alors qu’il emmène ses vétérans grisonnants et grommelants sur la planète de Bloodfall, après qu’un Leman Russ totalement déprimé lui ait donné la permission de s’absenter. Le but de l’escapade est de localiser un des lieutenants de Bloodhowl, Gunnar Thorolfsson, AWOL depuis l’incendie de Prospero. Le Jarl, qui espère toujours que la 6ème Légion pourra se rendre utile dans la défense de Terra, a en effet grand besoin de regonfler ses effectifs, et compte bien convaincre Thorolfsson et ses 200 loulous de regagner le bercail de Morkai, de gré ou de force.

L’explication de texte entre les frères d’armes devra toutefois attendre un peu, Bloodfall se trouvant être contestée par une bande de Night Lords en goguette, menée par le Prince de Bel Air du Perif1 en personne. Ce sinistre individu, qui avait déjà montré une sale tendance à la sociopathie et aux crimes contre l’humanité pendant la Grande Croisade, est devenu l’ennemi juré de Thorolfsson, qui a passé une bonne partie de son congé sabbatique à le pourchasser à travers la galaxie. Jugeant avec sagesse que s’il arrive à mettre la patte sur le Prince, il n’aura pas de mal à localiser son subalterne, Bloodhowl emmène donc ses hommes à l’assaut des positions Night Lords… et réalise assez rapidement que Booba (a.k.a. le Duc de Boulogne) est grave chaud avec son sabre énergétique. Largement surclassé par son adversaire, il ne doit sa survie qu’à l’intervention opportune de Thorolfsson, qui envoie un tir de plasma dans le buffet de son Altesse Noctilienne, et permet à Bloodhowl de remporter son « duel ».

Ayant contraint les Night Lords à se replier, les Space Wolves sont enfin libres de palabrer entre gens de bonne compagnie. Le ton de la discussion monte assez vite, Thorolfsson refusant tout net de retourner se battre contre les hérétiques menaçant Terra, comme lui demande Bloodhowl, arguant que ses hommes et lui sont plus utiles aux péquins moyens de l’Imperium dans leur défense des planètes laissées à la merci des Légions renégates du fait de leur peu d’importance stratégique. Le Jarl n’est pas de cet avis, et rappelle à son subalterne et objecteur de conscience qu’il a prêté serment à Russ et à l’Empereur, et qu’il ne lui appartient pas de choisir les combats qui lui semblent être les plus nobles. Aucun des deux tribuns n’arrivant à convaincre son vis-à-vis, on se résout à régler la situation par un duel à mort, comme le veut la tradition.

Bloodhowl, bien amoché par son combat contre le Prince du Périf, refuse de se faire représenter par un champion, et se fait donc fort logiquement mettre en KO technique par son adversaire. Thorolfsson, beau joueur, laisse toutefois la vie sauve à son adversaire, prétextant qu’obéir aveuglement aux traditions est aussi néfaste qu’obéir aveuglement aux ordres (quel esprit libre, vraiment). Il en veut pour exemple l’incendie de Prospero, commis par les Space Wolves sur l’ordre d’un Horus qui avait déjà basculé du côté sombre, et qui aurait pu être évité si la 6ème Légion n’avait pas bêtement obéi au Maître de Guerre. « Hmm maintenant que tu le dis, ça a pas l’air débile » répond Bloodhowl du haut de son ultime PV, avant de repartir la queue entre les jambes. Moralité : Jorin est nul au close.

1 : Sans rire, le gus s’appelle ‘The Prince of the City’s Edge’ en V.O. Ma traduction est tout à fait legit.

AVIS:

Chris Forrester réalise un début sans faute dans l’Hérésie d’Horus avec ce ‘Bloodhowl’, mélange de Space Marinade d’action bien dosée et de réflexion sur la culture et l’histoire des Space Wolves pendant leur heure de doute (juste après les événements de ‘Wolfsbane’). Un travail soigné et bien documenté, puisqu’on y trouve des références à la campagne de Dulan ainsi qu’à celle de Prospero, pourtant couvertes par d’autres auteurs (respectivement Chris Wraight et Dan Abnett), et des personnages tirés de ces vénérables écrits (Ulbrandr Crowhame, Hjalmar Stormfist, sans oublier ce vieux Bulveye). Mon seul regret fut de constater l’absence totale de conséquence de ‘Bloodhowl’ sur la suite de l’Hérésie, Jorin Bloodhowl et ses loyalistes premier degré repartant écluser du mjød avec Leman Russ, tandis que Gunnar Thorolfsson et ses loyalistes rebelles restent s’occuper du cheptel de Bloodfall. Comme Thorolfsson était une création de Forrester, et ne disposait donc pas d’une armure en scenarium1, on aurait pu s’attendre à une conclusion un peu plus tranchante et tranchée. Maintenant qu’il a prouvé qu’il avait les bases nécessaires pour participer à cette complexe œuvre collective qu’est l’Hérésie d’Horus, j’espère que Chris Forrester aura l’occasion de prendre en main des arcs narratifs (ce qui veut parfois dire les conclure), avant que la BL ne sonne la fin de la récré.

1 : Armure toute relative pour Bloodhowl lui-même, puisque personne ne s’est donné la peine de le faire revenir au 41ème millénaire (à la différence de presque tous ses sous-fifres). Et n’oublions pas que Mike Lee avait placé Bulveye à sa place à la tête de la Dekk-Tra dans ‘Wolf at the Door’…

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Monsters – N. V. Nguyen [AoS] :

INTRIGUE:

MonstersOù nous suivons la nouvelle1 chasseuse de monstres officielle de papa Sigmar dans l’une de ses traques dans les Royaumes Mortels, ici Shyish un soir de pluie et de brouillard. Déployée en soutien des Anvils of the Heldenhammer, occupés en contrebas à contenir une invasion de démons de Tzeentch, Yndrasta a fait le déplacement pour bannir un Duc du Changement si changeant qu’il n’a d’autre nom que l’Anomie. Super plan pour éviter d’être convoqué par des mortels ambitieux à tout bout de champ (et de chant), moi je dis. Ayant certainement compris qu’il était dans le viseur de la virago de Ziggy, l’Anomie se la joue cependant petit bras et se transforme en nuage de barbe à papa au lieu de livrer un honnête combat à la championne adverse. Sous cette forme, il se révèle aussi inoffensif qu’invulnérable, ce qui ne fait pas les affaires d’Yndrasta et de sa lance magique, Thengavar, qui disparaît corps et bien dans le protoplasme gazeux et ne revient pas dans la main de sa porteuse, comme c’est habituellement le cas.

Sigmar ayant pensé à lui fournir une arme de rechange, Yndie ne se laisse pas décontenancer par la tournure prise par les événements et se rue à l’assaut de sa Némésis pour finir les choses au corps à corps. Un nouveau shenanigan de l’Anomie l’envoie toutefois dans le décor, et l’intrépide héroïne fait une chute douloureuse mais pas mortelle jusque dans la piscine privée d’une grotte souterraine, Gandalf style. Elle serait repartie aussi sec (mais mouillée, je me comprends) castagner le démon si elle ne s’était pas rendu compte que son point de chute n’était pas aussi désert qu’il l’aurait dû être. Un vieil ermite d’une carrure peu commune et arborant une ‘stache de compétition a en effet assisté à sa culbute pas très légendaire, et comme le quidam exsude une aura mythique et possède une hache qui l’est tout autant (appelez ça l’intuition féminine si vous voulez), Yndrasta reste faire un brin de causette.

Il ne lui faut pas longtemps pour comprendre que cet inconnu n’est autre que Voyi. Si cela ne vous dit rien, c’est normal : Voyi, aussi connu sous les noms du Non Béni, du Traître et surtout de l’Oublié, était un héros de l’Âge de Mythes, élevé par Sigmar au rang de champion, mais qui choisit d’aller vivre sa vie en solitaire au lieu de défendre Sigmaron lorsque le besoin s’en fit sentir. Sigmar n’étant pas connu pour sa magnanimité envers ceux qui le déçoivent, et ayant un égo trop important pour reconnaître ses échecs, le nom de Voyi fut rayé de tous les registres officiels, et seuls une poignée d’Elus, dont Yndrasta fait partie, eut vent de l’existence de ce paria depuis lors. Dès lors, la chasseresse se trouve confronté à un dilemme peu évident : rapporter la tête du traître à son patron pour lui faire plaisir, ou tenter de négocier avec Voyi pour apprendre comment, il y a de cela des millénaires, il réussit à bannir l’Anomie…

Après un échange tendu, durant lequel Voyi se permit de comparer Yndrasta et les Stormcast Eternals aux monstres chassés par la première, ce qui n’est guère gentil, et ponctué par un duel rapidement conclu par un point de côté débilitant pour le champion grabataire, Yndrasta se résout à laisser l’ancêtre en paix rien que pour lui montrer qu’elle n’est pas si méchante que ça, et à retourner se battre contre l’Anomie, même s’en savoir comment le vaincre. Sa « générosité » est toutefois récompensée par Voyi, qui lui révèle avant qu’elle ne parte qu’il lui suffira de prélever un échantillon sur la forme blurbesque du démon pour l’exiler des Royaumes Mortels (et récupérer sa précieuse lance au passage). Armée de ce tuyau, Yndrasta peut enfin repartir au front, non sans promettre à son hôte de garder pour elle le secret de sa destinée. Ce sera la première fois qu’elle dissimulera des choses à Sigmar depuis sa Reforge : pourvu qu’il ne l’apprenne jamais…

1 : Eh oui, la position était déjà prise avant que la V3 ne fasse de Miss Yndrasta une des têtes d’affiche de la franchise. Remember Neave Blacktalon ?

AVIS:

Une très bonne entrée de la part de Noah Van Nguyen, qui part explorer l’une de mes facettes préférées du fluff des Royaumes Mortels : le côté sombre de Sigmar et de ses élus. Yndrasta en elle-même est très loin d’être une parangon de noblesse et d’humanité, puisqu’elle se décrit volontiers comme cruelle et intéressée uniquement par sa mission de chasseresse, ce qui en fait sans doute la première héroïne Stormcast Eternal de la BL ouvertement antipathique (un progrès, si vous me demandez). Sa confrontation avec Voyi m’a fortement rappelé la difficile transition entre Guerriers Tonnerre et Space Marines entre la fin de l’Unification de Terra et le début de la Grande Croisade, avec Sigmar dans le rôle de l’Empereur1, en plus de venir approfondir et complexifier le fluff de cette faction. Un choix très intéressant de la part de Van Nguyen (j’aurais moyennement apprécié me retrouver avec une nouvelle de Neave Blacktalon bis, pour être honnête), qui démontre ici qu’il est capable de sortir du manichéisme Stormcast Eternals = gentils // opposants des Stormcast Eternals = méchants dans lequel bon nombre de ses collègues ont donné. De bon augure pour son roman ‘Godeater’s Son’, qui traitera spécifiquement de ce thème, et pour la qualité et l’intérêt de la littérature AoS en général.

1 : On peut aussi faire un parallèle avec le ‘Misbegotten’ de Dan Abnett, où le savant fou Fo déclare à Horus qu’il considère les Primarques et les Space Marines comme beaucoup horribles que toutes créations.

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The Buried Beast – G. Kloster [40K] :

INTRIGUE:

The Buried BeastTout le monde ne passe pas le Rubicon Primaris en sifflotant. Prenez par exemple ce vieux Lazarus, Maître de la 5ème Compagnie des Dark Angels, et accessoirement premier membre du Chapitre à avoir franchi le gué : bien que l’opération ait été un succès, et lui ait permis de reprendre son poste avec un corps encore plus perfectionné, il éprouve toujours des difficultés à considérer son nouvel organisme comme autre chose qu’une prison pour son cerveau. Une mentalité fâcheuse, qui le pousse à négliger ses devoirs de critique des vieilles histoires des Dark Angels (crime impardonnable pour un Impardonné), et à écouter en boucle les contes et légendes de Caliban en version Audible1. Il est aussi hanté par le souvenir de sa presque mort sur le monde de Rimenok, où il eut l’honneur d’incarner un chamallow dans la pièce « Le Feu de Joie », montée par l’amicale des cultistes de Cui. Voilà pour les présentations.

Le concept d’arrêt maladie n’existant pas chez l’Adeptus Astartes, Lazarus est chargé d’une mission top-secrète (le plus bas niveau de confidentialité des Dark Angels) par Gargamel Azrael en personne : des opérations de minage sur la lune de Cinero ont permis d’excaver le Lion’s Blade, un vaisseau de la 1ère Légion s’étant écrasé sur le satellite pendant l’Hérésie d’Horus. Toujours soucieux de défendre leur droit à l’oubli, les Dark Angels ne perdent pas une seconde pour envoyer une équipe de nettoyage sur place, afin de s’assurer qu’aucun fâcheux petit secret sur la potentielle allégeance de l’équipage ne tombe entre de mauvaises mains.

Petit problème : la Gouverneur locale, Catherine Ruus, refuse de coopérer avec le Lieutenant (Abad) que Lazarus envoie récupérer la localisation de l’épave. D’humeur très cordiale pour un Dark Angel, Abad accepte de transmettre les conditions de l’impudente mortelle à son boss (elle ne veut passer l’info qu’à Lazarus), qui tout aussi gracieusement obtempère. Elle serait tombée sur Asmodai, elle n’aurait pas fait longtemps la maline la Catty, moi je dis. Pendant l’entrevue, Ruus révèle au Maître de la 5ème que l’équipage du Lion’s Blade avait informé son arrière-arrière-arrière487 grand-père, lui aussi Gouverneur, qu’un démon s’était matérialisé sur le vaisseau. N’ayant pas réussi à le bannir, les héroïques Space Marines décidèrent de faire s’écraser le Lion’s Blade dans le cratère d’un des volcans de Cinero pour régler le problème une fois pour toutes, mais ratèrent leur cible et enfouirent à la place le vaisseau dans une galerie de mine. Ayant interdit au Gouverneur d’intervenir ni de révéler leur présence au reste de l’Imperium, de crainte de libérer le démon, les Dark Angels vendirent chèrement leur carapace noire avant de tomber dans un oubli quasi-complet pour les dix millénaires suivants. Pas franchement emballée par l’idée que quelqu’un aille mettre son nez, même aquilin, dans ce nid de corruption, Ruus finit tout de même par donner à Lazarus les coordonnées du site, et l’inflexible Maître emmène ses hommes faire un peu d’archéologie.

Le vaisseau en lui-même est vide, mis à part les cadavres desséchés et décapités de son équipage. Ne trouvant pas le démon dans les coursives, mais constatant qu’un tunnel s’enfonce depuis un trou dans la coque jusqu’aux profondeurs du volcan dans lequel le Lion’s Blade s’est écrasé, Lazarus enclenche le mode Bogoss et s’en va seul enquêter dans cette galerie, laissant le soin à son crew de ramener les dépouilles mortelles de leurs prédécesseurs en orbite.

Bien évidemment, le démon a trouvé le moyen de rester dans le Materium pendant toutes ses années (sans doute en prenant des bains de lave pour se détendre, d’ailleurs il sort de sa baignoire à l’arrivée de Lazarus), mais n’est pas contre un peu d’exercice et une nouvelle âme à engloutir pour recharger ses batteries. Malgré son statut de personnage nommé, Lazarus galère un peu au début de combat, mais finit par trouver en lui les ressources et la gniaque nécessaire pour renverser la vapeur et triompher de son adversaire. Tout cela est bien classique. Ceci fait, il a la bonté d’aller faire ses adieux à Ruus, et lui montrer la fin de son combat contre son adversaire démoniaque pour prouver qu’elle n’a plus à s’en faire. Car, oui, il a tout filmé2. Quels poseurs alors, ces Dark Angels…

1 : Même en mission.
: Ça ne m’étonne pas qu’un Chapitre aussi suspicieux et retors ait intégré des caméras dans les armures énergétiques de ses Frères de Bataille, mais de là à partager des clips de démons avec des civils ? C’est pas ça qui les grandirait dans l’opinion de l’Inquisition, si ça se savait…

AVIS:

Gary Kloster nous sert une authentique rareté avec ce ‘The Buried Beast’ : une nouvelle de Dark Angels qui ne tourne pas autour de la traque des Déchus. Rien que pour ça, cette histoire m’est sympathique, et même s’il ne s’agit au fond que d’une Space Marinade à la sauce Rubicon (un sous-genre qui se développe), le résultat est assez convenable, surtout pour un auteur qui, pour autant que le sache, ne s’était jusque là pas intéressé à ce type de nouvelle. On apprend même deux ou trois trucs au passage sur l’histoire et l’organisation du Chapitre, ce qui est toujours bon à prendre. La seule question que je me pose à la fin de ‘The Buried Beast’ est de savoir si Kloster n’a pas rendu les Dark Angels trop sympas par rapport à leurs standards habituels. C’est un peu ce qui fait leur charme, après tout…

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Beasts – J. French [AoS] :

INTRIGUE:

BeastLes années et les siècles n’ont pas été tendres envers Cado Ezechiar : alors qu’il disposait de son propre petit royaume et gérait ses affaires dans son coin, le Chaos vint frapper à sa porte avec des gros sabots anarchiques, résultant en la ruine de son domaine et le massacre de ses sujets. Depuis, l’ex souverain immortel (c’est un Vampire) traque les huluberlus qu’il tient responsable de ce fiasco (un culte de Tzeentch nommé la Main Enflammée), ce qui l’a amené dans la cité de Glimmerheart, récemment reprise par les forces sigmarites.

Ayant massacré les trois sorciers de niveau 3 qui zonaient dans la ville sans penser à leur demander de le mettre sur une piste digne de ce nom pour poursuivre sa quête, Cado se retrouve dans une impasse, et obligé de faire profil bas pour éviter d’attirer l’attention des vertueux et peu tolérants Azyrites. Il accepte ainsi une mission d’escorte de prêtres chargés de contrôler la pureté d’une ancienne source sacrée, située à quelques heures de marche de Glimmerheart. De retour dans la cité, il fait la connaissance d’un mystérieux individu, Byrazan, qui semble en savoir beaucoup sur son tragique passé, et n’accepte pas « non » comme une réponse à sa demande de lui rendre un petit service en échange de renseignements. Avant qu’il n’ait pu expliquer au présomptueux mortel pourquoi il n’est pas conseillé de lui baver sur les rouleaux, Cado est mis KO de manière aussi rapide qu’inexpliquée, et se réveille quelques heures plus tard au plus profond d’une caverne humide, obscure et mal fréquentée.

Ayant repris ses esprits et réglé son compte à l’araignée géante qui avait des vues sur sa carcasse, notre héros se met en quête d’une sortie, mais ne parvient qu’à attirer l’attention du Troggoth affamé qui s’est établi dans ces tunnels. Bien que disposant d’aptitudes physiques bien supérieures à celles de l’humain moyen, et pouvant compter sur les esprits des membres de feu sa cour royale (ici, l’érudite Solia, qui ne peut malheureusement rester longtemps à cause de problèmes récurrents de connexion1) pour le conseiller, Cado n’est pas vraiment à son avantage. En cause, la constitution robuste et la résistance à la magie de son adversaire, ainsi que les nuages de spores hallucinogènes déversés par les champignons qui recouvrent les parois de la caverne. Fort heureusement, notre héros a la bonne idée d’utiliser le décor pour venir à bout de son poursuivant, et parvient à faire basculer le Troggoth dans un graaaaaaand trou dans le sol, qui se révèle être un abysse arcanique (encore un kit de décor qui sera vendu 50 balles par GW dans les années à venir, j’imagine), soit une sorte de trou de ver menant vers une dimension parallèle, et dont l’accès était entravé par la présence d’une locale hostile, comme l’explique posément Byrazan lorsque Cado sort enfin de son trou, quelques temps plus tard.

Logiquement outré par le traitement qu’il a subi, le Roi Vide doit cependant mettre sa colère en veilleuse car son interlocuteur révèle avoir sur lui une fiole contenant le sang d’un vampire de sa lignée, ce qui fonctionne basiquement comme une injonction d’éloignement/kryptonite/Xanax pour la gent à longues canines (ce qui explique le black out subi par Kad&O lors de sa première rencontre avec l’impudent mortel). En attendant d’identifier l’employeur de Byrazan et de comprendre l’intérêt qu’il lui porte, Cado récolte tout de même les fruits de son labeur, Byby lui indiquant d’aller visiter une tour de sorcier située dans les hauteurs de Glimmerheart pour faire progresser sa quête. Une tour invisible et inatteignable, certes, mais ce n’est pas vraiment son problème. Les PNJ donneurs de quête ne sont plus ce qu’ils étaient, c’est malheureux.  

1 : En même temps, l’histoire se passe dans un tunnel. What did you expect ?

AVIS:

John French pose proprement les bases de sa première série siglée Age of Sigmar avec ce ‘Beasts’, qui introduit de manière efficace le Roi Vide Cado Ezechiar, sa quête vengeresse dirigée vers les séides de la Main Enflammée, les anneaux de pouvoir qui constituent son équipement distinctif, et les relations troubles qu’il entretient avec ses mystérieux et puissants commanditaires. Toute cette exposition est faite de manière fluide, ce qui n’est pas donné à tous les contributeurs de la BL, et le combat/course-poursuite qui met notre immortel héros aux prises avec un Dankhold Troggoth jaloux de son intimité nous change agréablement de l’ordinaire des bastons mises en scène dans la littérature AoS. Un début prometteur dans les Royaumes Mortels, tant pour Cado que pour son créateur.    

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Amor Fati – M. F. Haspil [HH] :

INTRIGUE:

Amor FatiRevenu d’entre les morts grâce aux talents nécromantiques de Fabius Bile, le Seigneur Commandeur Eidolon n’est cependant pas satisfait de son sort (pour changer). Son retour dans le Materium s’est en effet accompagné d’effets secondaires désagréables et disgracieux, ce qui lui a valu des critiques acerbes de la part de Fulgrim. Honteux de « se déplacer comme un Ork », dixit cette petite bi*tch de Fufu, Eidolon passe ses journées à la salle d’entraînement du Proudheart, à massacrer des esclaves gladiateurs sous le regard fatigué de Fabius (qui ne voit pas à quoi ça sert). Bien que l’opposition ne soit pas de taille à menacer un Astartes, même un Astartes dont la motricité fine est inférieure à celle d’un enfant de deux ans, les progrès ne sont pas au rendez-vous. Comprenant sans doute qu’il doit donner à son patron un os à ronger pour éviter de passer le reste de son existence à lui préparer des sparring partners qu’il dézingue en dix secondes, l’Araignée finit par révéler à Dondon qu’il connaît un moyen de le restaurer dans son état initial. Il lui faudrait pour cela disposer des glandes progénoïdes d’Emperor’s Children (ce qui est facile)… non-corrompu par le Chaos (ce qui l’est beaucoup moins). Et ça tombe bien, Fabius sait exactement où dégoter cet ingrédient devenu rarissime : l’Apothicaire a en effet pris soin d’envoyer une douzaine d’Astartes s’isoler du reste de la Légion pendant qu’il travaillait sur un remède à la dégénérescence qui affligeait les Emperor’s Children pendant la Grande Croisade. On a toujours besoin d’un groupe témoin pour tester l’efficacité d’un traitement, c’est bien vrai. Cela fait maintenant plusieurs années, et un début d’Hérésie, que ces exilés n’ont pas donné signe de vie, mais avec un peu de chance, il en reste encore un en vie, et il se fera un plaisiiiir de donner ses glandes pour la cause.

Eidolon part donc immédiatement à la cueillette aux loyalistes, bien conscient que son état de méforme actuel risque de lui être fatal la prochaine fois qu’il croisera la route de ce parvenu de Lucius (qui lui est revenu d’entre les morts sans séquelles, c’est vraiment trop injuste). Si les premières adresses données par Fabius se révèlent être des impasses, le destin finit par sourire au Seigneur Commandeur, dont le vaisseau sort sans crier gare du Warp à proximité de la planète où sont stationnés les derniers échantillons de la liste arachnéenne. Prenant avec lui une escouade de Kakophoni dont, je cite, « la disparition ne chagrinera personne » (ambiance ambiance), Eidolon atterrit à proximité de la forteresse solitaire tenue par ses frères d’armes, et se prépare à une émouvante réunion de famille.

Les hérétiques sont froidement accueillis par le Sergent Avram Rakomon, qui se présente comme le dernier des Emperor’s Children, et ses quelques potos des Légions Brisées. Dans la fusillade qui s’ensuit, Eidolon se découvre des capacités physiques insoupçonnées, qui font plus que compenser ses tics et ses tocs nerveux. Une preuve que Slaanesh ne l’a pas oublié, sans nul doute. Ayant perdu son escouade dans l’affrontement (notons tout de même qu’il tue lui-même le champion Kakophoni parce qu’il avait osé lui parler de Lucius), Eidolon engage Rakomon au corps à corps, et profite de son nouveau regain de forme pour marteler le loyaliste jusqu’à ce que mort s’en suive. Il ne lui reste plus qu’à décortiquer ce mollusque énergétique pour récupérer les précieuses glandes qui lui permettront de retrouver sa jeunesse…

Début spoiler…Mais à bien y réfléchir (car oui, ça lui arrive), Eidolon se rend compte qu’agir de la sorte serait commettre un fashion faux pas envers Slaanesh, qui lui a accordé des dons compensant les faiblesses causées par sa résurrection. Il ne faudrait pas fâcher le Prince du Chaos en redevenant un simple et boring Space Marine, tout de même. La nouvelle se termine donc avec un broyage à main nue des glandes du pauvre Rakomon, dont le sacrifice n’aura pas servi à grand-chose. Perdu pour perdu, je pense que Fabius aurait apprécié ce cadeau, mais il est vrai que l’altruisme n’est pas le premier trait des Emperor’s Children…Fin spoiler

AVIS:

Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, ou qu’on aime à le détester, Eidolon occupe une place particulière dans la galerie des personnages secondaires de l’Hérésie d’Horus, en cela qu’il ne laisse personne indifférent. Si ‘Amor Fati’ ne lui permettra pas de se refaire une réputation parmi les fans de cette franchise (il reste en effet parfaitement égal à lui-même), Michael F. Haspil réussit à donner à l’imbuvable Seigneur Commandant une profondeur inédite. En choisissant d’endurer son statut de créature de Frankenstein – avec bénéfices, tout de même – au lieu de chercher une régénération en bonne et due forme, Eidolon se pose pour la première fois en maître de son destin. Il démontre également une compréhension du crédo Slaaneshi (plus ça fait mal, plus c’est bon) digne d’un Elu du Prince du Chaos, ce qui renforce sa future candidature au commandement de la Légion (voir ‘The Soul, Severed’, qui se déroule peu après). De son côté, Haspil fait preuve d’une belle maîtrise de son sujet pour un newbie hérétique, et se paie même le luxe de venir enrichir le fluff de sa Légion d’adoption, audace que peu d’auteurs nouvellement venus se sont autorisés. Une nouvelle tout à fait honorable donc, et une lecture plus que recommandée aux amateurs de la IIIème Légion.

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Mad Dok – N. Crowley [40K] :

INTRIGUE:

Mad DokGhazghkull Mag Uruk Thraka est mort, éparpillé façon puzzle par les bons soins de Ragnar Crinière Noire et ses Space Wolves dans la cathédrale du monde de Krongar. Pour la plupart des autres personnages de Warhammer 40.000, cet état serait définitif, mais pour le prophète de Gork & Mork, il ne s’agit que d’un incident mineur, car l’inégalable Mad Dok Grotsnik a également fait le déplacement, et salive d’avance sur la possibilité qui lui est offerte de littéralement reconstruire Ghazgkull de la tête aux pieds, sans que ce dernier n’ait loisir de rechigner (ce qui peut être dangereux pour le bon Dok).

Cependant, Grotsnik doit composer avec la mauvaise volonté manifeste de ses infirmiers Grots, à commencer par le morveux mais intelligent Drippa, qui se demande bien si cela vaut la peine de sortir le jeu de limes, la perceuse à main et la superglu pour lancer une session de kitbashing de l’extrême alors que les Orks de Krongar sont en train de se faire botter énergétiquement l’arrière-train par les Space Marines encore présents sur la planète, et qu’il ne faudra pas attendre longtemps avant qu’un Nob pas trop bête décide que c’est son tour de devenir le Boss des Boss. Bien tenté de réduire l’impertinente créature en pièces détachées pour lui apprendre le respect, Grotsnik comprend qu’il ne pourra pas arriver à bon port sans l’aide de ses assistants, et choisit donc de résoudre le problème de façon pacifique. Il se met donc à raconter au parterre de Grots l’autre fois où il a réussi à ressusciter Ghazgkull, épisode connu de nul autre que lui.

Cela s’est passé lors du retour des Orks sur Armageddon, et plus précisément lors de l’assaut en sous-marin sur la cité ruche Tempestora. Alors que la côte se profilait à l’horizon (façon de parler lorsqu’on est passager d’un submersible, bien sûr), le soupe au lait Ghazgkull fit une attaque d’apoplexie si sévère lorsque son médecin traitant (toujours Grotsnik) lui annonça qu’il était nécessaire de lui ouvrir le crâne pour réparer les dégâts causés par une vie de guerre (un peu) et les expérimentations sadiques du Dok (surtout) qu’il s’en fit exploser le cerveau. La présence du leader suprême des peaux vertes sur les « plages » du débarquement n’étant pas optionnelle, Ghazgkull lui-même ayant juré qu’il mènerait l’assaut de ses troupes, Grotsnik a dû réaliser une opération d’urgence et dans des conditions loin d’être idéales pour remettre son patient sur pied. Grâce à la complicité de ce bon vieux Taktikus, mis au courant du pépin de santé du boss, et qui inventa un bon gros mensonge pour justifier son absence lors du briefing d’avant bataille (les Blood Axes sont bons pour ça), le Dok parvint in extremis à remettre le cerveau et le cœur (saleté de cholesterork) de Ghazgkull en état, et à réveiller le prophète au moment où quelques Space Marines firent intrusion dans la salle du trône du sous-marin échoué. La suite appartient à l’histoire…

Ce récit captivant fait toutefois remarquer au sagace Drippa que la résurrection de l’increvable Goff semble avoir été en partie causée, une nouvelle fois, par l’intervention providentielle du fidèle Makari. Grotsnik a en effet avoué qu’il a dû utiliser une hampe de bannière pour effectuer le triple pontage express qui a remis en marche le cœur de Ghazgkull dans le money time, et cette bannière n’était autre que le fameux bâton chanceux manié par le Grot porte-bonheur. Cette révélation fait comprendre à Grotsnik que cette nouvelle résurrection ne pourra réussir sans la participation de Makari, porté disparu lors de l’accrochage avec Ragnar. Qu’à cela ne tienne, le Dok connaît un cheat code efficace : une imposition des mains de Ghazgkull a déjà réussi à faire revenir la petite créature d’entre les morts. Et il n’y a pas de raison que ça ne marche pas même si le boss est techniquement mort lui aussi, pas vrai ?

AVIS:

Une nouvelle sympatoche, qui se concentre davantage sur la mentalité Ork (dont Grotsnik s’éloigne souvent, avec sa sale manie de considérer les choses de façon rassionel) que sur l’action à proprement parler. La première moitié de l’histoire est ainsi occupée par le Mad Dok se préparant mentalement à ressusciter sa plus grande création, les choses ne démarrant vraiment que dans la seconde partie, avec la confrontation initiée par le tout aussi rassionel Drippa, et le récit de la seconde revenue d’entre les morts de Ghazghkull lors de la troisième guerre pour Armageddon. On apprend beaucoup de choses sur la relation particulière qui unit Grotsnik et Ghazghkull d’une part (le premier passant son temps à empoisonner ou mutiler le second en douce pour tester sa résistance et se venger de ses sévices), et que Ghazghkull et son fidèle autant qu’immortel Makari d’autre part (il semblerait qu’aucun des deux ne peut vraiment mourir tant que l’autre est en vie). Une lecture tout à fait complémentaire du roman que le même Nate Crowley a consacré au prophète de Gork et Mork, et qui fera plaisir aux fans de la littérature orkoïde, dont Crowley est l’un des dignes représentants contemporains, avec son comparse Mike Brooks.

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Et voilà qui termine cette revue des 12 nouvelles du Nowel 2021. Une bonne petite sélection d’histoires, de personnages et d’ambiances, que l’on retrouvera dans quelques mois dans les anthologies Black Library. A bientôt pour l’exercice 2022, que j’espère chroniquer dans des délais plus raisonnables!

 

BLACK LIBRARY 2017 ADVENT CALENDAR [40K – AoS – HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans une chronique franchement opportuniste, mais qui n’est tout de même pas totalement gratuite. Il sera ici question des nouvelles intégrées par la Black Library à son calendrier de l’avent…2017. Soumission de première fraîcheur donc, mais j’avais plusieurs raisons de consacrer un post à ce cru particulier.

Black Library 2017 Advent Calendar

La première d’entre elle était, je l’avoue sans mal, franchement prosaïque. Je me suis aperçu en mettant à jour mes fichiers de suivi (#IAmAFunGuy) qu’il ne me manquait que la revue de ‘The Tainted Axe’ de Josh Reynolds pour avoir chroniqué toutes les nouvelles de cette sélection (les audio dramas étant naturellement sortis de l’équation, car je n’ai jamais pu me faire à ce format). Si vous avez suivi mes publications sur le Warfo, je vous conseille donc de vous concentrer sur cette section de l’article, et de passer à autre chose, car le reste n’est pas inédit. En revanche (et c’est la deuxième raison), si vous ne connaissez que ce blog, j’ai le bonheur et l’avantage de vous annoncer que les nouveautés sont un peu plus fournies, car les nouvelles de l’Hérésie d’Horus ‘Duty Waits‘ (Guy Haley), ‘Magisterium‘ (Chris Wraight), ‘Now Peals Midnight‘ (John French) et ‘Dreams of Unity‘ (Nick Kyme) n’avaient pas été couvertes dans de précédents posts. C’est votre jour de chance!

Ce sujet de nouveau contenu évacué, il est enfin intéressant de revenir cinq ans en arrière – une période de temps importante pour la Black Library, pensez donc: c’était avant Warhammer Crime, Warhammer Horror et la série L’Aube de Feu – afin de juger de la qualité de cette sélection hivernale. 2017, grand cru ou récolte famélique? On va bien voir.

Black Library Advent Calendar 2017

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Endurance – C. Wraight [40K] :

INTRIGUE :

EnduranceSur le monde ruche de Lystra, l’escouade du frère Sarrien des Imperial Talons livre un combat d’arrière-garde aussi noble que vain contre les hordes innombrables des Zombies de la Peste ayant plus ou moins remplacées la population locale. Envoyés au casse-pipe pour permettre à un fonctionnaire de l’Adeptus Administratum obèse et tire au flanc (du moins, c’est comme ça que Sarrien se le représente) de maintenir son quota de dîme mensuel, ou autre raison purement technocratique, les braves Space Marines tiennent la ligne du mieux qu’ils peuvent, mais même leur constitution suprahumaine commence à donner d’inquiétants signes de fatigue. Pour ne rien arranger, les lignes de ravitaillement avec le reste de l’Imperium sont totalement coupées, ne laissant à nos fiers héros que la bonne vieille énergie cinétique pour défendre le domaine de l’immortel Empereur contre la corruption galopante titubante représentée par les Stumblers. Isolé de ses frères pour maximiser l’efficacité du soutien martial et moral que les Astartes représentent pour leurs alliés de la Garde, Sarrien débute la soirée comme toutes les autres auparavant : il chante chante chante ce rythme qui lui plaît (Endure ! For the Emperor ! Stand Fast ! Chihuahua !) et il tape tape tape (c’est sa façon d’aimer). On comprend cependant assez clairement que notre héros en a gros, et qu’il n’y a que son exemplaire éthique qui le pousse à suivre des ordres qui lui semblent totalement débiles.

À quelques encablures de cette planète condamnée, nous faisons la connaissance de notre deuxième protagoniste, le réfléchi (il ne court jamais) et hédoniste Dragan, Death Guard appartenant à la faction des Lords of Silence. Bénéficiant d’un quartier libre entre deux opérations de grande ampleur, Dragan a embarqué sa coterie sur son vaisseau personnel, l’Incaligant, et vogue là où le Warp le mène, massacrant tous les Impériaux qui lui tombent sous le moignon au passage. Les petits plaisirs de la vie, il n’y a que ça de vrai. Ayant fondu (dans tous les sens du terme) sur un transporteur de troupes de la Garde Impériale dépêché sans escorte en renforts de Lystra, Dragan décide sur un coup de tête, une fois le carnage expédié, d’emmener ses ouailles sur le monde en question, où il suppute (en même temps qu’il supure) qu’une distraction peut être trouvée.

Nous retrouvons ensuite Sarrien, toujours plus amer et toujours plus crevé, qui décide d’aller rôder derrière les lignes ennemies pour… le fun ? (étant donné que les défenseurs sont au bout du rouleau et s’attendent tous à crever, et que l’adversaire n’a aucune chaîne de commandement à décapiter ni de cibles stratégiques à prendre, l’utilité de la manœuvre me semble obscure). Bien que durement éprouvé par des semaines de combat sans répit, notre surhomme se révèle malgré tout capable de faire mordre la poussière à son poids en Stumblers, voire plus, jusqu’à ce qu’il tombe sur un Fatty dont l’odeur corporelle, ou l’aura de zenitude, c’est selon, est telle qu’il a bien du mal à lever la main sur lui. Malgré l’attitude résolument peace man du gros lard, Sarrien parvient à le décoller proprement, non sans que sa victime n’ait eu le temps de le prévenir 1) des dangers physiques et mentaux du surmenage (il devait être élu au CHSCT dans sa première vie), 2) de l’arrivée prochaine du Potencier (Gallowsman). Bien en peine de faire quelque chose de cette information, et sappé comme jamais, l’Imperial Talon décide de se rentrer, avec l’espoir futile de trouver un McDo encore ouvert sur le chemin pour s’envoyer un bon Coca bien frais.

De son côté, Dragan a fini par arriver en orbite autour de Lystra, et emmène sa bande sur les lieux du dernier conflit agitant encore la planète, dans l’espoir de trouver un adversaire de valeur. Escortés par quelques cohortes de die hard fans, les Lords of Silence progressent pondéreusement vers la ligne de front, où les attendent…

Spoiler Des Iron Warriors. Eh oui. Car en fait, Sarrien et Dragan ont visité Lystra à deux moments distincts, petite surprise savamment préparée par Wraight. Il est d’ailleurs fortement suggéré que Sarrien est devenu Glask (le second de Dragan, qui passe son temps à l’appeler Potencier – au grand ennui de son boss – et dont la jambe torse pourrait être la conséquence de la blessure subie par Sarrien au même endroit à la fin de la campagne) peu de temps après sa rencontre avec le gros plein de pus, lorsque, finalement submergé par le nombre de ses ennemis et l’amertume envers l’Imperium, il a décidé que sa survie était plus importante que son devoir. Ceci dit, le récit se termine sur un flou artistique et un amoncellement de Zombies affamés sur Sarrien, dont le salut final n’est pas garanti, ralliement à papa Nurgle bien acté par ce dernier ou pas. Quelques dizaines/centaines/milliers d’années plus tard, Dragan est quant à lui saisi d’une impression de déjà vu alors qu’il corrode les armures chromées de ces frimeurs de la IVème, ce qui ne fait que renforcer l’hypothèse de la défection de Mr Talon. Fin du spoiler

AVIS :

Mis à part le manque de clarté de sa conclusion (voir la partie spoiler ci-dessus), Endurance est une soumission solide de la part de l’ami Wraight, sans doute rédigée en accompagnement de son roman The Lords of Silence pour un galop d’essai littéraire. En quelques pages, Chris arrive ainsi à donner une véritable profondeur à ses répugnants héros, dont l’attitude chill, thrill & kill les distingue clairement des autres factions d’Astartes chaotiques et renégats de notre sombre galaxie, en plus de s’accorder parfaitement avec la philosophie débonnaire de Papa Nurgle, ce qui ne gâche rien. Sans rien galvauder de leur nature éminemment mauvaise, Wraight réussit également à rendre attachant (sans mauvais jeu de mots) le personnage de Dragan, dont le caractère égal et l’approche désinvolte de sa pestilentielle vocation le font apparaître comme éminemment plus sympathique que le Seigneur du Chaos lambda de la BL. De l’autre côté du ring, Sarrien s’avère moins mémorable, mais le récit que fait l’auteur de la lutte désespérée du loyaliste pour retarder l’inévitable, de part son caractère assez original (il combat en solo, et pas avec le reste de son escouade) et la bonne prise en compte des effets débilitants de la fatigue et des blessures sur la constitution d’un Space Marine – qui reste une machine de guerre insurpassable, mais peut se mettre dans le rouge s’il tire trop sur la corde – s’avère prenant et plaisant, sur les quelques pages qu’il dure. Une nouvelle SM comme je les aime donc : courte dans son propos, précise dans son dessein, efficace dans sa réalisation et à twist dans sa conclusion. Prenez-en de la graine, les rookies.

Gardant une nouvelle en fois en tête le but premier d’un recueil tel que celui dans lequel elle a été incluse, j’ajouterai pour conclure qu’Endurance fait un beau boulot de présentation d’une faction amenée à jouer un rôle important dans l’univers 40K (la Death Guard), en plus de donner assez envie de lire le long format mettant en vedette les Lords of Silence. Que l’exploration d’un concept central du fluff, le ralliement d’un Space Marine loyaliste au Chaos, soit également présente pour l’instruction des lecteurs novices ajoute encore a l’intérêt du propos, qui mérite donc largement sa place dans le Black Library Celebration 2019.

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Duty Waits – G. Haley [HH] :

INTRIGUE :

Duty WaitsSur Terra, les loyaux défenseurs de l’Empereur ne savent plus quoi inventer pour tuer le temps. Nous suivons ainsi le quotidien à la fois morne et stressant de deux Astartes de la VIIème Légion, le Capitaine Maximus Thane de la 22ème Compagnie, et le poussin Kolo, fraîchement diplômé de la promotion Eltaune Jaune, alors qu’Horus n’en finit plus de faire traîner son quart d’heure d’impolitesse. Alors que Max’ a au moins le loisir de faire un peu d’exercice à la tête de ses hommes, qu’il emmène régulièrement faire des joggings sur le mur d’enceinte du Palais1, Kolo est assigné au support informatique de ce dernier, et, entre deux appels d’un certain M. Alcador, qui éprouve toutes les peines du monde à envoyer un mail ou à ouvrir une pièce jointe (et qui oublie une fois sur deux d’allumer son écran), doit gérer une bien pesante inactivité. Car, il faut bien le reconnaître : il ne se passe pas grand-chose d’intéressant sur Terra d’un point de vue strictement apocalyptique. Bref, les journées sont longues2.

À défaut de s’améliorer franchement, les choses évoluent un peu pour nos protagonistes après le départ de la flotte en destination de Beta-Garmon. Bien qu’ils n’aient pas eu la « chance » de faire partie des heureux élus envoyés au casse-pipe contre les renégats, Thane et Kolo ont en effet reçu de nouvelles affectations. Le Capitaine a ainsi la chance, la joie et l’avantage de faire le planton à 300 mètres au dessus d’un square fréquenté par les civils du Palais, afin de rassurer et d’inspirer ces derniers. Malheureusement, les cadences infernales de travail auxquelles sont soumises les masses laborieuses de Terra, les conditions météorologiques détestables de la région, et le manque d’intérêt du spectacle (les gars restent vraiment plantés comme des piquets pendant des heures, à tel point que son Lieutenant manque de déclencher une alerte jaune quand il voit Thane lever les yeux vers le ciel) viennent contrarier cette noble initiative de propagande. Ils auraient jonglé avec leurs bolters, ça aurait eu plus de gueule, moi je dis. Pour se distraire, Maximus imagine ce qu’il se passerait s’il se laissait tomber depuis le mur, et calcule les probabilités jusqu’à la 15ème décimale de sa survie en fonction de paramètres divers, comme l’écartement de ses bras pendant la chute, l’atterrissage sur un quidam, ou encore la vitesse de croisière d’un Stormbird (africain) non chargé. Il soupçonne que le développement d’un passe-temps tel que le suicide mental pourrait peut-être trahir un léger début de névrose, mais cela ne l’empêche évidemment pas de faire son devoir.

De son côté, Kolo participe à l’opération Sentinelle II (la première ayant pris place 28.000 ans plus tôt, même si personne ne s’en souvient), ce qui lui donne l’occasion d’interagir avec les civils que Thane ne voit que de loin. Entre deux contrôles d’identité et palpations aléatoires, le voilà sommé avec son escouade d’intervenir en support des forces de l’ordre, débordées par une foule hostile car affamée. La distribution du pain quotidien ayant en effet annulée sans prévenir, une poignée d’Arbites doivent calmer les velléités meurtrières de quelques milliers de mal-contents. L’arrivée des gilets plastrons jaunes n’a pas l’effet escompté, pas plus que les talents oratoires et diplomatiques, assez limités il faut bien le reconnaître, du Sergent Benedict ne permettent de désamorcer le conflit latent. Ce qui doit arriver arrive, et les manifestants commettent l’erreur de charger leurs protecteurs, qui répondent par une rafale de bolter dans le plus grand des calmes. 80 douilles très exactement plus tard, l’incident est clos, au prix d’un petit millier de morts seulement. Voilà qui mérite bien un honneur balistique, il me semble. Bref, sur Terra il n’y a pas que le temps qu’on tue.

1 : En revanche, pas question de traverser la route avant que le petit bonhomme ne passe au vert jaune. Sous peine de mort.
: Il est d’ailleurs murmuré dans les cercles autorisés que c’est la surutilisation de leur membrane cataleptique pour faire passer le temps plus vite pendant leur interminable garnison sur Terra qui a entraîné la dysfonction de cette dernière chez les Imperial Fists et leurs successeurs.

AVIS :

Dans la série des nouvelles de C.A.L.T.H.1 constituant une partie non négligeable du recueil Heralds of the Siege, Duty Waits se place en tête de peloton par ses importants apports en termes de fluff, ainsi que par la réussite de Haley à faire ressortir la torture mentale que représente cette attente interminable pour les défenseurs, fussent-ils des transhumains conditionnés et entraînés pour faire face à toute situation. Et les Space Marines ont beau ne pas connaître la peur, l’Empereur n’a rien dit ni prévu en ce qui concerne l’ennui, ce qui peut mener même les soldats les plus disciplinés à commettre quelques regrettables boulettes. Dans cette ambiance de Désert des Tartares, Thane et Kolo vivent chacun leur propre enfer, et se retrouvent, sans le savoir, complices d’une exaction qui ne manquera pas de venir les hanter après l’Hérésie. Sur le thème, déjà couvert de nombreuses fois mais tellement central pour la série qu’on pardonnera aisément cette nouvelle itération, du sacrifice des fins en faveur des moyens, Haley parvient à brosser un portrait singulier et sinistre du Monde Trône avant que l’apocalypse ne s’y déchaîne, et préfigurant sans le savoir la dictature brutale, liberticide et usine-à-gazesque que deviendra l’Imperium, autrefois « simple » despotisme éclairé et progressiste, une fois la guerre civile terminée. Et si la question du « mais comment en est-on arrivés là ? » est la plus importante à laquelle l’Hérésie d’Horus doit répondre, alors on peut considérer Duty Waits comme une vraie réussite.

1 : Calme Avant La Tempête Horusienne.

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Gods’ Gift – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE :

Gods' GiftPrenant place après les évènements narrés dans Great Red et The Beasts of Cartha, pour ne citer que deux des précédentes aventures de notre fougueux héros, Gods’ Gift voit Hamilcar et quelques uns de ses potes des Astral Templars accomplir une mission d’intérêt général, sans doute pour avoir commis quelque tour pendable à une chambre rivale lors d’une permission à Hammerhall. Il s’agit en l’état de punir et faire stopper les exactions d’une bête monstrueuse s’amusant à disposer des hardis bûcherons d’un camp de colons récemment implanté dans les terres farouches de Ghur, tâche récréative pour des Stormcast Eternals de la trempe de nos gais lurons. Guidés par un local – Fage – qui malgré son âge vénérable semble tout émoustillé par la seule présence des Elus de Sigmar, Hamilcar & Cie s’embarquent donc dans une épopée aussi directe et rapide qu’une quête de zone de didacticiel de World of Warcraft.

Depuis le relevé de empreintes jusqu’à la constatation de l’heure du décès, ou plutôt, de l’abattage, il ne se passera ainsi qu’une petite journée, soit une vingtaine de pages pour le lecteur, juste le temps pour Ham’ de piquer un roupillon qui lui apportera un rêve plus ou moins prophétique, dans lequel un chêne vient lui chanter Je suis malade (ce qui est ‘achement dur pour un végétal, et mérite le respect), ce qui lui permettra de prendre une décision des plus inspirées quelques heures plus tard. La nouvelle se terminant pour un petit cliffhanger pas vraiment haletant, mais sans doute important pour la suite de la saga d’Hamilcar (Mark de son prénom), le lecteur en est quitte pour embrayer sur directement sur la première, ou plutôt le premier roman dédié à Guymer à sa coqueluche hirsute (Champion of the Gods), dans lequel il est presque certain que des réponses seront apportées aux questions laissées en suspens à la fin de Gods’ Gift.

: L’Homme Arbre qui s’était chargé de la besogne de déshumanisation – c’est comme la désinsectisation, mais avec des primates – servant de pied à terre racine à humus à une sylvaneth passablement enrhumée.

AVIS :

Malgré les dizaines de titres que compte sa bibliographie BL à l’heure actuelle, ce n’était que la deuxième soumission de Mr Guymer m’étant tombée sous la main depuis l’inaugural The Tilean Talisman, initialement publié en 2011. Et je dois dire que mon appréciation de l’œuvre du bonhomme est resté scrupuleusement identique, huit ans plus tard : des aptitudes certaines en terme de narration, avec des personnages au minimum distrayants, à défaut d’être immédiatement attachants (mention spéciale à Brouddican, l’Hillarion Lefuneste personnel de cette grande gueule d’Hamilcar), relevé par quelques notes boisées – c’est le cas de le dire – de fluff, plombées par une vacuité de l’intrigue assez rédhibitoire. C’est bien simple, celle de Gods’ Gift (d’ailleurs, on ne comprend pas vraiment quel est le don auquel Guymer fait référence dans le titre de sa nouvelle1) s’articule en deux temps trois mouvements, sans qu’on ait l’impression d’une quelconque progression entre le début et la fin de la nouvelle. Hamilcar traque un monstre. Hamilcar rêve d’un chêne. Hamilcar tombe dans une embuscade d’Hommes Bêtes (il faut bien qu’il montre qu’il est un cador du corps à corps). Hamilcar débouche sur un bosquet de chênes sacrés, gardé par… le monstre qu’il traquait. Coup de bol. Baston. Victoire. Fin.

Bref, rien de bien challengeant pour l’intellect du lecteur, qui aurait pu s’attendre à quelques liens de causalité entre les différents éléments constitutifs du propos de Guymer. Rien de tel ici, ou de manière tellement évidente et peu fine que les relever n’a pas grand intérêt. Comme dit plus haut, cela peut sans doute se justifier par le fait que Gods’ Gift est un rehaut littéraire à un travail plus conséquent, avec lequel l’auteur prend bien soin de faire la liaison. Telle la rondelle de tomate venant décorer une entrecôte frites, cette nouvelle peut être consommée si on a vraiment faim, mais ne remplira pas l’estomac pour autant. Et comme dit plus tôt (Décembre 2014, pour être précis), c’est plutôt cher payé pour ce que c’est. On me souffle dans l’oreillette que c’est fois ci, c’est gratuit. Bon. Mais avant cela, cela ne valait certes pas les 2,99€ demandés. Rem-bour-sez nos in-vi-tat-tions !

1 : Soit ce sont les visions vagues envoyées par Sigmar, soit c’est le photophore magique remis par icelui, et qui permettra à notre fier héros de venir à bout de Marylise Lebranchu. Au lecteur de décider s’il prend le messie ou la lanterne.

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Magisterium – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE :

MagisteriumSortis très éprouvés de la Guerre dans la Toile, la première défaite qu’ils aient connu depuis leur fondation, et qui a réduit drastiquement leur nombre, les Custodes doivent à présent panser1 leurs plaies et se préparer pour l’arrivée prochaine d’Horus et ses Légions renégates. Nous suivons donc le Vestarios (soit littéralement, le préposé au vestiaire de la boîte de nuit, en grec ancien) Samonas, fidèle bras droit de imperturbable Constantin Valdor alors qu’il supervise la réhabilitation des gardes suisses de l’Empereur, qui, en plus d’avoir été nonagimés (mais si, mais si, c’est du haut gothique) par les hordes démoniaques, ont cabossé et égaré leur matériel dans des proportions abominables, ce qui force les services généraux de la custoderie à enquiller les heures sup’ sans compter. Au moins, le temps d’attente à la cantine et à la photocopieuse s’en trouve fortement réduit, et il n’y a plus de problème de place au parking des trottinettes électriques. C’est déjà ça.

Ayant obtenu une audience auprès de (son demi-frère ?) Rogal Dorn, avec lequel il entretient des relations aussi fraîches que le bloc Harpic qui orne ses toilettes personnelles, Valdor se rend dans les appartements du Seigneur Commandeur de l’Imperium, toujours escorté de son fidèle Samonas. Comme on peut s’y attendre, l’entrevue se passe assez mal, les deux surhommes se balançant des amabilités au visage sans prendre de gants, énergétiques ou pas. Tandis que le maître des Imperial Fists reproche à son interlocuteur sa roideur confinant parfois à l’autisme, dès lors qu’une directive lui ait été donnée par l’Empereur, ce qui a conduit les Custodiens à contenir seuls les brèches dans les niveaux inférieurs du Palais, alors qu’un retrait stratégique aurait permis d’épargner de nombreuses vies, Valdoche nous joue son air favori du « Oh-mais-vous-les-Primarques-vous-n-êtes-que-des-sales-gosses-pourris-gâtés-et-on-était-bien-mieux-avec-Pépé-avant-votre-naissance2 ». Le sentiment de supériorité de Darth Valdor est toutefois tout ce qui lui reste, Dorn soulignant avec à propos que les pertes subies par les 10.000 ont de facto condamnés ces derniers à jouer les seconds rôles dans le futur siège de Terra, et que le sort de l’Hérésie repose maintenant entre les gantelets des Legiones Astartes, qu’ils soient traîtres ou loyalistes. Bref, la garde aurique n’est plus bonne qu’à assurer le service d’ordre autour de la chaise d’affaires impériale, et doit laisser aux Space Marines la gestion des vrais dossiers.

La virulence des échanges entre la main droite et le poing gauche de l’Empereur n’est pas sans rappeler à Samonas, qui s’ennuie ferme pendant ce crêpage de chignon3, une conversation du même ordre qui avait pris place quelques années plus tôt sur Prospero, lorsque que les Custodiens étaient venus donner un coup de main aux Space Wolves dans le châtiment, que d’aucuns jugent mérités, de Magnus et ses Thousand Sons à la suite du poke un peu trop accentué que ce dernier avait envoyé à son paternel pour lui signaler le comportement déviant d’Horus. Bien que Leman Russ se soit révélé un tout autre animal (autant comparer un malamut à un poisson pierre), le zèle sanguinaire avec lequel le Fenrissien mena l’assaut sur Tizca, et sa volonté sans équivoque de ne pas faire de prisonnier, au mépris des instructions remises par l’Empereur au Capitaine-Général, ne furent pas sans générer des frictions entre les deux envoyés impériaux. Dans ce cas, comme plus tard avec Dorn, Valdor, en tant que Magisterium, disposait d’une autorité théoriquement absolue sur son vis à vis Primarque, mais cela n’a pas empêché ce dernier de n’en faire qu’à sa tête, avec des résultats spectaculaires, à défaut d’être satisfaisants. Et Constantin d’y aller de son petit « Primarque… » méprisant en voyant Russ hurler à la lune sur la grand-place de Tizca après la volatilisation du Cyclope. Décidément, ils n’ont pas les mêmes valeurs.

La nouvelle se termine sur une scène de remparts (comme beaucoup des histoires de Heralds of the Siege d’ailleurs), Valdor enjoignant son sous-fifre porte-cravate de ne pas désespérer que l’Empereur reprenne enfin contact avec ses Custodiens, malgré tous les travaux d’isolation des fondations du palais à terminer avant l’arrivée d’Horus, et qui l’occupent à plein temps depuis maintenant des mois. D’une manière ou d’une autre, la fin approche à grands pas…

1 : Et penser, ils ont tous passé l’agreg’ de philosophie après tout.
2 : Funfact : Sur les 1932 mots titres et qualificatifs gravés à l’intérieur de la cuirasse de Valdor, 93% sont des critiques adressées aux fistons du Patron.
3 : Dorn s’étant laissé pousser les tifs pendant ses sept années de permanence au domicile paternel, il y a largement de quoi faire un manbun.

AVIS :

Pure nouvelle de fluffiste, en ce qu’elle s’avère être beaucoup plus riche en petites révélations et lourdes insinuations de background qu’en action pure et dure, Magisterium est une soumission de qualité de la part de Chris Wraight. Son principal intérêt, et non des moindres pour les amateurs de grandes figures de l’Hérésie (c’est à dire la plupart des lecteurs de la série, soyons honnêtes), est d’apporter quelques os à ronger sur le discret mais crucial Constantin Valdor, et de le faire interagir avec d’autres VIP impériaux. Les bisbilles qui s’ensuivent permettent à Wraight de soumettre quelques concepts intéressants, et de soulever des questions l’étant tout autant, comme celles de l’origine de Valdor et du rôle que lui a attribué l’Empereur, qui semble dépasser celui de simple garde du corps et porte parole officiel de Son Altesse Suprêmissime (bien que la fonction de Magisterium, et les prérogatives qui vont avec, soient déjà une belle source de discussion). La rivalité latente entre l’aîné des surhommes de Pépé et la fratrie primarquielle, qui est venue après, ne sera pas sans susciter quelques folles hypothèses de la part du lecteur, et j’espère bien que l’auteur continuera sur cette prometteuse lancée dans le roman dédié à l’énigmatique Capitaine-Général. En sus, l’état des lieux dressé par Wraight du piteux état dans lequel la Guerre dans la Toile a laissé les Custodiens permet de faire le lien entre cet épisode bien couvert dans les dernières publications de l’Hérésie d’Horus et le Siège de Terra, ce qui est toujours bon à prendre. Bref, une lecture tout ce qu’il y a de plus conseillée pour celles et ceux qui prennent l’Hérésie à coeur.

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Now Peals Midnight – J. French [HH] :

INTRIGUE :

Now Peals MidnightAlors que l’horloge de l’ApocalypseTM se rapproche furieusement de l’heure fatidique du début de la plus grande bataille de Warhammer 40K de l’histoire de la galaxie, le capitaine de l’équipe loyaliste décide de passer le temps avant le lancement de la clock en se dégourdissant les jambes sur le chemin de ronde qu’il a passé le dernier lustre à bâtir. Rogal Dorn, Prétorien de Terra, a beau se répéter que lui et ses gars (et filles) sont aussi prêts qu’ils puissent l’être, il est difficile d’être certain de rien alors que l’express d’Isstvan V est sur le point d’entrer en gare système, rempli jusqu’à la gueule de félons et de traîtres. Un calme de mauvais augure est d’ailleurs tombé sur Terra, comme si la planète tout entière retenait son souffle dans l’attente de l’arrivée d’Horus et de ses ruffians.

Alors que le Primarque des Imperial Fists boucle son parcours en écoutant le podcast des meilleures prédictions pessimistes et autres maximes déprimantes de l’Hérésie, depuis Malcador dans The Lightning Tower1 jusqu’à Solomon Voss dans The Last Remembrancer2, en passant par… lui-même (il le vaut bien) dans The Crimson Fist3, il fait plusieurs rencontres aussi vides de sens que lourdes d’intérêt, ou peut-être est-ce le contraire. Après avoir demandé à l’astropathe et secrétaire de direction Armina Fel d’organiser un dîner de travail avec ses frangins, il passe une tête au PC Sécurité jauger des conditions de circulation sur le périphérique solaire. Vison Buté voit noir foncé. Zut. Juste le temps de donner sa soirée à l’Amiral Su-Kassen (qui ferait bien d’en profiter pour bingewatcher la saison IV de Stranger Things, elle n’aura plus le temps après), et Jauni est déjà reparti.

Un petit aparté littéraire nous permet de faire la connaissance de Seplin Tu et de son paternel (Tur-Lu’tu), banlieusards impériaux enrôlés de force dans la milice terrane, et qui feront peut-être/sûrement une apparition dans une des prochaines soumissions de French dans cette franchise. Hello Yellow. Retour sur les remparts, où Archamus-3 et Andromeda-17 attendent l’arrivée du taulier en discutant anthropologie et philosophie. On s’occupe comme on peut. Dorn finissant par pointer ses guêtres, le Huscarl et la Devineresse lui emboîtent le pas jusqu’au lieu de rendez-vous avec Sanguinius et le Khan… qui savent déjà ce qu’il avait à leur annoncer, à savoir que la flotte du Maître de Guerre vient de se matérialiser aux confins du système solaire, prélude à la guerre du même nom. La prochaine fois, utilisez Whatsapp les gars, ça ira plus vite.

Enfin, en orbite, dans l’assiette de guerre sur laquelle il est posté, le Capitaine Katafalque reçoit un message privé signé d’un « RD » très peu protocolaire, mais qui n’en contient pas moins une information de (pierre de) taille : l’ennemi vient d’arriver. Corporate jusqu’au bout, Dorn insiste toutefois pour que l’ordre de mobilisation générale ne soit passé dans un premier temps qu’à la 7ème Légion, les White Scars et les Blood Angels bénéficiant d’un léger sursis avant d’être mis au parfum. Pourquoi ? Mystère. Mais comme on le disait chez les tribus Franc à la fin de M2 : « Avant l’heure, c’est pas l’heure… »

1 : ‘He saw this Heresy coming in his visions. That is the truth you fear. You wish you had listened…’
2 : ‘The future is dead, Rogal Dorn. It is ashes running through our hands…’ C’est moche l’auto-citation, John.
3 : ‘You’re no son, you’re no son of maïïïïïne !’ Bon c’est Genesis (We Can’t Dance), mais vous saisissez l’idée.

AVIS :

Je pense que l’apprécation de cette nouvellinette de French variera fortement selon le contexte dans lequel elle sera lue. Prise individuellement, il serait facile (et exact) de souligner qu’il ne se passe vraiment pas grand-chose dans Now Peals Midnight, Dorn se contentant de faire ce qu’il fait depuis les prémices de l’Hérésie d’Horus (The Lightning Tower, 2007) : regarder le ciel d’un air pénétré en fronçant très fort les sourcils. Cette fois-ci, c’est vréééééééééément la bonne, Rogal ! Bien sûr, il a gagné quelques souvenirs et connaissances dans l’intervalle, certains d’entre elles convoquées pour quelques lignes de dialogue, mais dans l’ensemble, rien de nouveau sous la plateforme de défense orbitale. D’un autre côté, si Now Peals Midnight est la culmination du corpus (entier ou partiel) de l’Hérésie, et que le lecteur sait que la prochaine fois qu’il recroisera la route des personnages de la nouvelle (qu’il a appris à connaître au cours de ses précédentes lectures), l’acte final de cette tragédie galactique aura débuté, il y a de bonnes chances qu’il éprouve quelques trépidations de bon aloi en parcourant ces quelques pages. Bref, comme souvent avec ce genre de production purement atmosphérique, time is the essence. J’appose donc la mention « à conserver dans un endroit frais et sec, à l’abri de la lumière, de la chaleur et de la précipitation » sur cette soumission. On connaissait la slow food, nous voilà avec du slow reading. Ce siècle est décidément étrange.

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The Witch Takers – C. L. Werner [AoS] :

INTRIGUE :

The Witch TakersMis sur une sale histoire de meurtre dans la ruralité profonde du Khanat d’Arkl, en Chamon, les chasseurs de sorcières Esselt et Talorcan, unis à la scène comme à la ville, remontent une piste, forcément chaude, à travers les dunes du désert de Droost. De villages martyrs en tombes profanées et cadavres possédés il ne faut pas longtemps à notre fine équipe pour subodorer que quelque chose de pas sigmarite se cache au fond de ce dossier. Il semblerait que quelqu’un hante Droost avec pour seule mission de massacrer tout ceux ayant le malheur de croiser sa route. Quelqu’un… ou quelque chose, qui asservirait ses hôtes les uns après les autres, passant de main en main et ne laissant que les dépouilles de ses victimes et de ses porteurs derrière lui. Alors que les deux Répurgateurs approchent l’oasis de Tora Grae, miraculeusement épargnée par la folie environnante, il leur faudra agir rapidement et intelligemment pour empêcher le Tournetueur (pun intended) de commettre un nouveau carnage…

AVIS :

C.L. Werner qui met en scène un duo de Répurgateurs embarqués dans une quête qui les conduira dans quelque sinistre recoin de leur « circonscription » : du tout cuit pour l’auteur de la (plutôt bonne) série des Mathias Thulmann me direz-vous. C’est aussi ce que je pensais avant de commencer la lecture de ces Tueurs de Sorcières, et me suis donc surpris à reconsidérer légèrement ce postulat une fois passé le point final. Comme quoi, rien n’est gravé dans le marbre dans ce bas monde. La première divergence notable qui m’est apparue est la relation amoureuse unissant Esselt et Talorcan, ce qui n’a rien de rédhibitoire en soi (et est même suffisamment rare dans une publication de la Black Library pour qu’on puisse au contraire saluer l’audace de l’auteur), mais m’a semblé tellement éloignée des conventions usuelles de ce genre de littérature que mon expérience de lecture s’en est trouvée, pas polluée, le terme serait un peu fort, mais au moins perturbée par les roucoulades échangées par nos héros1. Passées ces considérations romantiques, l’intrigue que nous propose Werner ne s’avère pas être très haletante, la course poursuite par hôte interposé à laquelle se livrent Buffy, Xander et le bracelet perdu de Valkia la Sanglante suivant son cours avec une linéarité décevante, alors que la méconnaissance par nos héros de la nature et de la forme du mal qu’ils ont à combattre ouvrait la porte au développement de fausses pistes. Quant au binôme de choc proposé par l’auteur, il se révèle être d’une décevante platitude, Esselt et Talcoran ne s’écartant pas d’un pouce de leur stéréotype respectif (la paladine zélée et le rôdeur débrouillard), ce qui ne donne pas vraiment envie d’embrayer sur le roman que Werner leur a consacré (Le Cœur Corrompu//The Tainted Heart). Pour terminer, les apports fluff de cette nouvelle se comptent sur les doigts d’une main d’un Zombie de la Peste, le fait qu’elle se déroule dans un bout de désert perdu au milieu de nulle part ne jouant évidemment pas en la faveur d’inclusions significatives (même si ce genre de théâtre d’opérations n’est en rien rédhibitoire pour peu qu’on veuille s’en donner la peine, comme Guy Haley l’a prouvé avec Les Sables du Chagrin//The Sands of Grief). En conclusion, il ne reste guère que le métier de C. L. Werner pour faire tenir ces Tueurs de Sorcières debout, ce qui est suffisant pour une lecture rapide de l’ouvrage, mais à peine.

1 : Quand bien même ces dernières sont restées d’une sobriété bienvenue. C’est ainsi, j’ai du mal à voir des « Mon amour » apparaître dans une nouvelle de la Black Library.

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Dreams of Unity – N. Kyme [HH] :

INTRIGUE :

Dreams of Unity« Démobilisé » comme ses camarades à la fin des Guerres d’Unification, l’ancien (dans tous les sens du terme) Légionnaire Tonnerre Dahren Heruk s’est reconverti dans le gladiatorat avec une poignée de comparses afin de joindre les deux bouts. L’Empereur n’ayant visiblement pas prévu de plan épargne retraite digne de ce nom en faveur de ses premiers prototypes de post-humains, la joyeuse bande vivote sur les maigres bénéfices des combats auxquels elle participe dans le Swathe, bidonville Terran s’étendant en périphérie du Palais de leur ancien patron. Pour ne rien arranger, les vétérans sont affligés de divers troubles physiques et psychologiques, dont une forme particulièrement vivace et handicapante de PTSD, poétiquement nommée les Rêves d’Unité, qui les mène à revivre leurs souvenirs de bataille comme s’ils y étaient, avec des conséquences généralement fâcheuses pour les quidams évoluant à proximité. Les Blood Angels n’ont vraiment rien inventés.

Ayant été témoin de la mort d’un de ses comparses (Kabe) sur le sable de l’arène, des mains d’un chrono-gladiateur au final desservi par son propre sadisme, Heruk commence sa journée par un peu de manutention, ramenant les restes mortels de son défunt collègue jusqu’au domicile de son dominus et imprésario (Tarrigata), afin de procéder au recyclage, puis à l’incinération de ces derniers. Il part ensuite à la recherche d’un autre gladiateur de l’écurie (Gairok) aux abonnés absents depuis quelques heures, ce qui n’augure rien de bon. Pris en chemin d’une crise de somnambulisme aiguë, il revient à lui dans un bar dévasté du Swathe, où Gairok1 semble avoir organisé une reconstitution hyper réaliste du siège d’Abyssna, avec les piliers de comptoir comme figurants (involontaires). Jugeant son camarade trop atteint pour qu’une autre issue soit possible, Heruk l’euthanasie la mort dans l’âme, et poursuit sa mission de porteur d’os en charriant le cadavre jusqu’au QG de la bande.

Ailleurs dans le Swathe, le SWAT impérial (see what I did there ?) se déploie à grand renfort de gadgets, sous les traits aquilins mais masqués du Custodien Tagiomalchian. Ce dernier a été chargé de trouver et de neutraliser des éléments séditieux opérant depuis les dédales mal famés du bidonville, et se montre très intéressé par le carnage commis par Gairok au café PMU du coin. Alors qu’il est occupé à faire quelques relevés en mode les Experts : Terra, il est violemment attaqué par un agresseur non identifié, ce qui coupe la transmission envers la Tour de l’Hegemon. Sus-pense.

Nous retrouvons Heruk et son poids mort alors qu’ils arrivent enfin en vue de la bicoque de Tarrigata, qui se trouve être en proie des flammes. Décidément, ce n’est pas la journée de notre heruk. Réussissant à extraire son patron des décombres au péril de sa vie, le Guerrier Tonnerre n’arrive pas à lui sous-tirer d’informations vraiment utiles quant à l’identité des petits gougnafiers responsables de cette destruction de propriété privée avant que Papy Tarri’ n’aille rejoindre la droite de l’Empereur. Supputant que l’incident ait pu être causé par une autre crise de delirium tremens du dernier de ses corelégionnaires vivants (Vezulah Vult), Heruk se met à nouveau en chasse, et parvient à débusquer Vivi dans les égouts du Swathe. Ce dernier, également à l’article de la mort, et aveuglé par un Bitch Betcher move réalisé par son assassin, refait le coup du « je meurs avant d’avoir donné la bonne info à mon pote pour préserver le suspens de l’histoire mouahaha- couic » à Heruk. Au moins, l’honneur des Guerriers Tonnerre est sauf, car ce n’est pas Vult qui a foutu le feu aux pénates de son patron. C’est déjà ça. Résolu à tirer ce mystère au clair, et désormais libre de toute obligation professionnelle du fait du décès de tous ses collègues, Heruk poursuit son avancée dans les niveaux inférieurs du Swathe…

Début spoiler…et arrive à temps pour filer un salutaire coup de main à Tagiomalchian, fort occupé à maîtriser un Alpha Légionnaire possédé et son culte de groupies, que l’on devine être responsables du saccage du Balto pendant que Gairok s’en jetait un petit, ce qui lui a fait péter les plombs, et de l’attaque des locaux de Tarrigata… parce qu’il leur devait de l’argent, peut-être ? Toujours est-il que ce sont les méchants de la nouvelle, les vrais, en plus d’avoir été impliqués dans la tentative d’infiltration du Palais Impérial quelque temps auparavant, bien sûr. Prudence étant mère de sûreté, Heruk commence par s’occuper des goons chaotiques pendant que Tag’ et Alpharius (car c’était lui… c’est toujours lui) se roulent par terre en bonne intelligence, écopant de quelques légères blessures mais se montrant si convaincant dans son approche qu’il arrive même à convaincre la meneuse adverse de se suicider plutôt que de l’affronter2. Ceci fait, il ne reste plus à notre increvable vétéran qu’à régler son compte au bossédé de fin, en partenariat avec l’Adeptus Custodes, et en écopant d’une déchirure mortelle au passage (si seulement il s’était souvenu qu’il avait piqué le pistolet à radiations de Tarrigata avant que d’engager le renégat au corps à corps… les ravages de la grande vieillesse). Herruïque jusqu’au bout, notre briscard peut ainsi tirer sa révérence la tête haute, ayant bien mérité un honorable coup de grâce de la part de son camarade de jeu. Dreams are my reality… (air connu).Fin spoiler

1 : Pour être honnête, on ne sait pas trop qui blâmer pour ces troubles de voisinage, Heruk ayant été tout aussi parti que son poto à son arrivée sur les lieux. Dans ces cas là, mieux vaut reporter le problème sur le type d’en face c’est vrai.
2 : Il faut dire que voir un colosse écumant perforer la cage thoracique de Roger de la compta’ à coup de pied ne donne pas en vie d’engager le dialogue.

AVIS :

Cette nouvelle de Kyme s’avère être assez satisfaisante, et plus qualitative que nombre de ses travaux précédents, ce qui est appréciable pour le lecteur et peut laisser à penser que notre homme s’améliore au fil du temps. Tant qu’il y a de la vie… En plus de la généreuse dose de fluff relative aux Guerriers Tonnerre dont nous bénéficions ici, le petit thriller mis en scène par Kyme quant à l’identité des proies traquées par Tagiomalchian tient plutôt bien la route, dès lors qu’on ne le regarde pas de trop près. À titre personnel, j’ai trouvé que l’auteur s’inspirait lourdement des travaux de certains collègues (le Custodes est un clone Kymesque du Tauromachian d’Abnett dans Blood Games, le crachat venimeux un emprunt au Talos d’ADB), ce qui peut peut-être expliquer pourquoi cette soumission est de meilleure facture que d’ordinaire. La tendance de Kyme à saboter l’exécution d’idées pourtant intéressantes par la non prise en compte de détails mineurs (affliction baptisée annandalisme par votre serviteur) vient toutefois fragiliser l’édifice1, ce qui est dommage mais pas surprenant. Mais on progresse, on progresse…

1 : Exemple gratuit, le chrono-gladiateur du début de la nouvelle est d’abord décrit d’une telle manière à ce que le lecteur croit qu’il s’agit d’un Custodien (ce qui ferait sens car ce sont eux qui ont massacrés les Guerriers Tonnerre sur l’ordre de l’Empereur). Ce quiproquo assez malin est affaibli par le choix de Kyme de faire de son antagoniste un tueur sadique, qui prend son temps pour tuer sa victime au lieu de l’achever efficacement. Pour un guerrier vivant littéralement sur du temps emprunté, une telle procrastination est en effet très improbable.

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The Old Ways – N. Horth [AoS] :

INTRIGUE :

Callis and Toll_The Old WaysAffecté à la surveillance de la cité d’Excelsis, dans le royaume de Ghur, le répurgateur de l’Ordre d’Azyr Halliver Toll, escorté de son sidekick Armand Callis, est envoyé par ses supérieurs tirer au clair une sombre histoire de disparition à Marshpoint, une ville agricole située en périphérie de la Cité des Secrets. Le fils aîné de la puissante famille Junica n’a en effet plus donné signe de vie après avoir eu maille à partir avec quelques soldats de l’autre grande famille locale, les Dezraed, qui l’ont poursuivi jusque dans les profondeurs de la forêt d’Ulwhyr. L’entente entre Junica et Dezraed n’ayant jamais été cordiale, c’est une vendetta en bonne et due forme qui menace d’éclater entre les Capulet et les Montaigu de Ghur, gueguerre qui mettrait en péril l’approvisionnement des régiments d’Excelsis en précieuse soie d’acier, ressource collectée depuis les fermes arachnides de Marshpoint. Il va donc de l’interêt général que cette triste affaire soit réglée dans les meilleurs délais, et qui de plus qualifié qu’un répurgateur pour traiter ce problème ?

Nous suivons donc Thalys et Colle au cours de l’enquête à laquelle ils se livrent à leur arrivée dans le bourg miteux et boueux de Marshpoint. Après un interrogatoire croisé des patriciens des deux familles, l’énorme et suintant Fenrol var Dezraed, autoproclamé Gardien de Marshpoint du fait de sa capacité de bloquer à lui seul l’entrée de la ville s’il lui prenait l’envie de s’asseoir en travers du portail, et le sec et irritable Kiervaan Junica, nos experts se rendent sur les lieux de la disparition à proprement parler, escortés par l’homme de confiance du patricien Junica, un natif du nom de Ghedren, et par un trio de gardes Dezraed. Et s’il se pourrait bien que la rivalité larvée entre familles nobles ait bien fait couler le sang, les enquêteurs feraient bien de prendre au sérieux les rumeurs entourant la Sorcière Blanche d’Ulwyhr. Après tout, ils ont pénétré sur son domaine…

AVIS :

C’est avec enthousiasme que j’avais vu revenir la figure iconique du chasseur de sorcières/répurgateur dans le lore d’Age of Sigmar, que son inclinaison high fantasy aurait pu « immuniser » à l’introduction de ce type de personnage, très grimdark par nature. La lutte contre les cultes chaotiques gangrénant le nouvel ordre rutilant de Sigmar constitue en effet à mes yeux un axe de développement des plus intéressants, et une prise de recul bienvenue sur le manichéisme caractéristique des premières années d’AoS. Encore fallait-il que l’image d’Epinal Hammerhal de l’inquisiteur traquant le vice et la trahison parmi les sujets obéissants de l’autorité centrale (préférablement divine, c’est plus classe) soit convenablement adaptée dans cette nouvelle franchise, la profession en question exigeant une rigueur morale confinant à la psychose, ce qui n’est pas franchement la norme parmi la soldatesque sigmarite (ces martel-sans-rire de Celestial Vindicators mis à part), dépeinte à de nombreuses reprises comme adepte du compromis et de la tempérance. Qu’en est-il avec la paire Callis & Toll, promise à un bel avenir au sein de la BL à en juger de la façon dont leurs noms ressortent dans tous les ouvrages auxquels ils ont été inclus ? Eh bien, c’est plutôt pas mal, encore que pas spécialement pour les raisons détaillées ci-dessus. Je m’explique.

Si le fanatisme (dans le bon sens du terme, car, si si, dans la littérature med-fan, cela existe) de nos héros laisse à désirer, la retenue dont fait preuve Toll, sensé être le vrai bad guy du duo, dans le jugement qu’il délivre au coupable, le plaçant à un petit 2 sur l’échelle de Mathias Thulmann (le référentiel absolu de la maison à cet égard), Horth se rattrape néanmoins en glissant quelques remarques de bon aloi à propos d’un certain White Reaper (Cerrus Sentanus sur son état civil), Stormcast Eternal pas vraiment Charlie, à tel point que son nom est utilisé pour effrayer les enfants d’Excelsis. Voilà un type qui mérite que l’on suive, et j’espère bien que ça sera le cas dans un futur pas trop lointain. Celà étant dit, The Old Ways a d’autres qualités, la première étant de proposer une petite enquête policière pas trop mal troussée au vu du nombre de pages limité avec lequel elle doit composer1, l’atmosphère horrifique du passage « sylvestre » du récit étant une autre source de satisfaction. D’autre part, cette nouvelle présente également l’intérêt de creuser le background de la cité libre d’Excelsis, qui devrait normalement ne pas disparaître corps et bien dans les annales du fluff, au vu du nombre d’apparitions qu’elle a faite dans divers écrits depuis son introduction dans le background. En apprendre plus sur cette bourgade présente donc un intérêt pour le fluffiste, tellement bombardé d’informations géographiques par ailleurs qu’on ne peut lui reprocher de ne pas prendre note de tout ce qu’on lui soumet.

Enfin, de façon plus large, elle fait ressortir un concept intéressant : le fossé existant entre natifs d’Azyr et populations locales au sein des cités libres, les seconds étant généralement mal considérés, voire méprisés par les premiers, qui les qualifient « d’Amendés » (traduction personnelle de Reclaimed, qui peut aussi s’entendre comme « Récupéré ») ou de « Sang Maudit » (curseblood), ce qui n’est pas très sympathique, mais ajoute de la profondeur à la société sigmarite. Quand on lit que même un personnage « égalitariste » comme Toll n’aurait pas de problème à raser toutes les forêts de Ghur pour pouvoir accélérer la colonisation de ce Royaume, au grand désarroi des locaux qui ont appris à vivre dans les étendues sauvages et à les respecter, on se dit que la possibilité d’un soulèvement des indigènes contre la métropole et ses représentants est une possibilité réelle… et c’est tant mieux en termes de potentiel narratif ! Bref, une plongée satisfaisante dans l’arrière-pays d’Excelsis, et une nouvelle qui vaut le coup d’être lue pour qui s’intéresse au fluff des cités libres.

: On saluera également le twist proprement « meta » de Horth, qui fait dire à Toll qu’il avait identifié le coupable depuis belle lurette et attendait juste de voir combien de temps il faudrait à Callis (et donc au lecteur) pour faire de même. On ne me l’avait jamais faite celle-là.

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The Battle for Markgraaf Hive – J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE :

The Battle of Markgraaf HiveComme les plus sagaces des lecteurs de cette chronique l’auront certainement deviné, la nouvelle du sieur Hill traite donc de la bataille pour la ruche Markgraaf1, opération de reconquête et pacification à laquelle l’unité de Minka Lensk, héroïne récurrente de l’auteur, à le plaisir et l’avantage de participer, en compagnie du \[|{™#{ème Cadien (comprendre qu’entre les pertes au combat non remplacées et les fusions régimentaires qui s’en suivent, les numéros défilent plus rapidement que lors d’une soirée bingo à l’Ehpad de Bois-Robert-sur-Veule).

Au menu de ce qui peut sans doute être considéré comme un séminaire annuel pour les derniers des Targaryen – cette manie de coller des yeux violets aux protagonistes pour les distinguer de la masse… –, une activité de team building dans les ténèbres des niveaux inférieurs de la ruche en question, avec les habituels cultistes hargneux-mais-bon-ça-va-on-a-vu-pire en lieu et place des assiettes en céramique à décorer, qui étaient à la mode en ce genre d’occasions quelques millénaires plus tôt. Une fois la séance initiale de laser game terminée, on enchaîne avec une découverte de la faune locale, qui consiste en des rats de la taille d’un rat et des asticots de la taille d’un chien (appelons-les maxticots), suivie par une session d’aqua-relax dans un bassin naturel, sous les ordres d’un Commissaire-Nageur un brin autoritaire.

À peine le temps de réaliser que les maxticots ne font pas de bons candidats au fish pédicure, à moins d’être un Ogryn peu chatouilleux, qu’il faut enchaîner avec une initiation à l’escrime médiévale/escape game sous la houlette de Philippe Chaos-therine (il coupe sa hache… et il rallume sa hache…), Space Marine renégat reconverti en coach de vie. Cette journée intense se termine par quelques longueurs de brasse coulée, un temps calme de 10 minutes devant une œuvre d’art moderne convenablement moche, et un ultime passage au hammam (mais habillé, ce qui est concept). Ce n’est pas tout le monde qui a la chance de vivre des séminaires aussi riches. Merci qui ? Merci Abby !

À ne pas confondre avec la ruche Steffigraaf, qui malgré quelques revers, est toujours au service de l’Empereur.

AVIS :

Propulsé directement dans le feu de l’action dès les premières lignes de The Battle… (au moins, le titre n’est pas mensonger), le lecteur aura sans doute quelques difficultés à comprendre les tenants et les aboutissants de cette successions de péripéties aussi guerrières que brouillonnes, expédiées sans tact, ni finesse, ni connecteurs logiques (ce qui surprend au début, irrite au milieu, et fait marrer à la fin) par un Justin Hill aussi maître de son propos qu’un élève de CM1 couchant par écrit le récit de ses vacances de printemps.

Si le début de la nouvelle fait illusion, tout se corse à l’arrivée sur la mare aux maxticots, théâtre d’une empoignade confuse, suivi de l’arrivée d’un groupe de survivants – dont un Valhallan, qui passait dans le coin – mené par un Commissaire, suivi de l’exécution d’un Garde qui trouvait l’eau trop froide, suivi de l’arrivée du random Chaotic Space Marine de base, suivi d’une ré-empoignade confuse, suivie d’une fuite éperdue de l’héroïne jusqu’au fond du bassin, suivi d’un questionnement philosophique sur la destinée des Cadiens survivants, suivi d’un séchage express, inexpliqué et interprété comme miraculeux par une Minka à laquelle il ne faut pas grand chose, des vêtements de nos héros, suivi de la fin du récit, qui s’achève donc davantage comme un chapitre de roman qu’un court format digne de ce nom, faute d’un dénouement digne de ce nom (sauf si être coincé à deux sans matos dans une caverne inondée peuplée de vers carnivores géants et squattée par des hordes d’hérétiques peu aimables et un Space Marine du Chaos altéré de sang constitue un explicit satisfaisant, bien sûr1).

Pauvre en termes de fluff, d’informations sur le passif de Mina Lensk, et d’une assez grande banalité dans son propos, The Battle… lorgnait peut-être du côté de la saga Gaunt’s Ghosts, et notamment du siège de Vervunhive couvert dans Necropolis, pour son inspiration, mais le fruit (plein d’asticots, donc) est tombé trèèèès loin de l’arbre. Pour laisser le mot de la fin, en même temps que du début, car j’aime bien boucler des boucles sur mon temps libre, à Hill en personne : « What the hell is happening ? »

1 : Si c’est le cas, vous êtes bizarre.

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A Brother’s Confession – R. MacNiven [40K] :

INTRIGUE :

A Brother's ConfessionSur la barge de bataille Ultramarines Spear of Macragge, l’Apothicaire Primaris Polixis se rend à confesse pour expier le crime qui lui pèse sur la conscience depuis le dernier engagement auquel il a participé aux côtés de ses comparses de la Fulminata, contingent de Necmarines1 rattaché au Chapitre natal de ce bon Roboute. Et quel crime ! Rien de moins que le meurtre d’un de ses frères de bataille, l’infortuné Artimeus Tulio. Avant que le sévère Chapelain Kastor, qui se trouve être le véritable frère de Popol (d’où la subtile référence mythologique que le lecteur sagace n’aura pas manqué d’identifier) et auquel pleins pouvoirs sont laissés pour traiter cette affaire, ne délivre son jugement, un petit flashback explicatif des familles (et pour cause) s’impose…

Nous voilà donc sur Atari, planète renommée dans tout l’Ultima Segmentum pour la rectitude de ses arcades et la qualité de ses bornes, et plus précisément dans le manoir du gouverneur local, où les Fulminata sont engagés dans une furieuse partie de FPS contre des hordes de cultistes de Tzeentch. Le monde est en effet la proie à une rébellion caractérisée contre la sainte autorité de l’Empereur, et la situation est suffisamment mal engagée pour que les grands bleus se retrouvent engagés dans une course contre la montre pour mettre le gouverneur De La Sario en sécurité, ou a défaut, lui coller un bolt dans le caisson, afin d’empêcher les dissidents chaotiques d’activer les plateformes orbitales de la planète, verrouillées génétiquement sur le profil du dirigeant légitime d’Atari.

Accompagnant une escouade d’Intercessors sur place, Polixis se trouve confronté à un choix difficile : voler à la rescousse de ses frères, dont certains ont été grièvement blessés par un assaut de cultistes à la férocité imprévue, à l’autre bout du palais, ou battre en retraite en compagnie des hommes du Sergent Nerva, comme ce dernier, le bon sens, et jusqu’au Codex Astartes le préconisent. Confiant en l’épaisseur de son armure en scenarium renforcé, l’intrépide Apothicaire décide de taper un sprint jusqu’à la position des surhommes à terre, ce qu’il parvient à faire sans trop de difficultés. Il est cependant déjà trop tard pour le pauvre Scaevola, plus perforé qu’une copie double à la sortie de la presse, et dans un état trop désespéré pour que Polixis ne puisse lui accorder autre chose que la Paix de l’Emper- ah, non, visiblement il n’y a même pas le temps pour ça, et c’est donc à une ablation de ses glandes progénoïdes pre-mortem (en atteste le fait que Polixis ait besoin de clamper l’incision cervicale pour éviter que la plaie se referme trop vite) à laquelle le doublement malchanceux Scav’ a droit. Il y a des jours comme ça…

L’affaire réglée en moins d’une minute, qui a dû tout de même paraître très longue au patient opéré2, Polixis, décidément très joueur, opte pour une action d’arrière garde afin de s’enquérir de la santé du dernier membre de l’escouade, qui se trouve être le fameux Tulio. Pendant que ses petits copains, qui ne connaissent ni la peur, ni la témérité, se replient sagement vers le point d’extraction, notre héroïque Apothicaire se glisse jusqu’à la position de Tutu, qui git dans une mare de sang et un monceau de cultistes du mauvais côté d’un pas de tir chaotique. Pas de quoi arrêter Polixis, que son statut de personnage principal racontant un flashback rend confiant quant à sa capacité de braver la mort, n’eut été la présence im- ou o- pportune de la fille du gouverneur de l’autre côté de la pièce. Cette dernière pouvant tout autant que son pôpa donner aux Ultramarines l’accès à la plateforme orbitale, c’est à un nouveau dilemme que Polixis doit faire face. Il ne peut en effet secourir qu’un des deux individus susnommés, et c’est peu dire que ses cœurs balancent. Optant finalement pour la fille (chez les Ultras, c’est pas « bros before hoes » donc), il récupère le précieux colis et repart enfin vers la sécurité du Thunderhawk garé en double file à l’extérieur du palais, les quelques blessures qu’il récolte au passage n’étant pas assez graves pour l’empêcher de mener sa mission à bien.

Et nous voilà de retour sur le Spear of Macragge, où l’inflexible Kastor doit bien se demander ce qu’il a fait pour avoir un tel Mary Sue comme frangin. Car non, Polixis n’a pas tué Tulio. Son « crime » est d’avoir sciemment abandonné le patrimoine génétique d’un frère tombé au combat, pour accomplir une mission qui lui semblait plus importante sur le moment. Oh mon Empereur, mais c’est absolument terribleuh ! Et Kastor de broder une jolie parabole sur le sauvetage d’un chiot tombé dans la rivière quand lui et Polixis étaient gamins, afin de convaincre son fragile de frère qu’il n’a rien fait de rédhibitoire. À se demander comment il a réussi à gagner sa carapace noire avec cette sensibilité malvenue. Je te l’enverrais vers un stage d’endurcissement chez les Iron Hands ou les Marines Malevolent, moi. MauviBleuette, va.

1 : Car comme le dit l’expression : « Nec plus ultra ».
2 : D’autant plus que le Sergent décide une fois les glandes extraites de repartir avec le corps de Scaevola. Sauf perissabilité extrême des progénoïdes, ce qui serait étonnant vu la résilience généralisée d’un Space Marine, on peut donc plaider la cause de l’acharnement thérapeutique sur le pauvre bougre.

AVIS :

Malgré une introduction prometteuse, augurant d’un fratricide en bonne et due forme commis par le plus insoupçonnable des coupables (un Primaris Ultramarine : plus droit dans ses bottes que ça, c’est un chausse-pied), cette courte nouvelle de McNiven se révèle être au final composée à 50% de bolter porn, et à 50% de publicité pour les organes supplémentaires des Primaris. À croire que le déclenchement de la Fournaise Belisarienne du frère Posthumus constitue une information cruciale à transmettre lorsqu’on est sous le feu ennemi. L’occasion pour les fans de Bonnet Bleu et Bleu Bonnet, héros du roman Blood of Iax/Le Sang d’Iax de retrouver les frangins dans un contexte un peu différent, mais qui ne devrait, sauf erreur de ma part, pas fondamentalement changer la vision que le lecteur a de nos deux larrons. Pas désagréable, mais très loin d’être indispensable.

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The Tainted Axe – J. Reynolds [AoS] :

INTRIGUE :

The Tainted AxePeu de temps après les événements relatés dans ‘Spear of Shadows’, nous retrouvons le chevalier – ou plutôt, demigryphier – Roggen de Ghyrwood March, de retour en Ghyran avec une main en moins et des souvenirs en plus. Ayant refusé l’offre de Grugni de remplacer son membre manquant par une réplique mécanique, au profit d’une solution plus naturelle, notre héros n’a toutefois pas trouvé chaussure à son pied ni prothèse à son moignon. Sa convalescence prend un tour particulier lorsqu’il se sent appelé une nuit dans le bosquet de ferbois consacré de son ordre, où l’attend une Branchwraith mutine, avec une nouvelle quête divine à lui confier.

Loin au Sud se trouve le Gaut Tors1, une forêt qui a cruellement souffert des déprédations de Nurgle et des ses séides au cours des dernières années. Un champion du Dieu des maladies y a jadis mené une expédition corruptrice, dont il n’est jamais revenu mais qui a résulté en l’abandon de sa hache maudite sous un tas de feuilles. Depuis lors, cette arme maléfique corrompt les bois aux alentours, comme une pile au mercure enterrée dans l’humus. La mission de Roggen consistera donc à localiser cette relique impie et à la ramener à sa commanditrice, qui en échange de ses bons et loyaux ordonnés services lui fera pousser une nouvelle menotte. Bien que notre héros ne soit pas né de la dernière pluie, et se méfie à juste titre des fantasques Sylvaneth, le serment d’allégeance à Alarielle qu’il a prêté en devenant chevalier, et l’attrait de retrouver la main, le convainquent rapidement d’accepter cette quête. Avant de retourner écouter pousser les fleurs, la Branchwraith a l’amabilité de lui adjoindre les services d’un sherpa forestier, en la personne compacte mais grincheuse d’un esprit de la forêt.

Nous suivons alors Roggen, son guide mal-luné (il passe son temps à appeler le chevalier « viande », ce qui n’est guère aimable) et sa farouche monture (Harrow) jusque dans les profondeurs mal famées du Gaut Tors. Bien que sa patronne lui a promis qu’il aurait un droit de passage auprès des Sylvaneth du cru, le fait que ces derniers soient perturbés par les émanations toxiques de la hache perdue d’une part, et leur allégeance à nulle autre que Drycha Hamadreth d’autre part (un petit détail que la Branchwraith avait omis de préciser à son prestataire pendant le briefing), n’incitent pas Roggen à la détente de son slip (en bois, comme le reste de sa garde-robe). Le trio finit toutefois par arriver dans une clairière, où un petit groupe de Rotbringers est à pied (gangréné) d’œuvre, et vient d’exhumer une sorte de cocon de racines calcifiées, qui ne peut être que le réceptacle de cette fameuse hache.

Confiant dans ses capacités de bretteur et l’effet de surprise, Roggen fonce dans le tas avec abandon, mais se retrouve rapidement en difficulté, notamment du fait que ses adversaires ont apporté avec eux des arbalètes, ce qui n’est pas très fluff tout de même. Avant que l’impétueux chevalier n’ait été transformé en hérisson manchot (ce qui vaut mieux qu’un échidné pingouin, qu’on se le dise), une voix tonitruante vient intimer aux Nurgoons de cesser le feu. Il s’agit du Blight Knight qui commande l’expédition des prouteux, et qui, en véritable chevalier de l’ordre de la mouche, propose à Roggen de régler l’affaire par un duel tout ce qu’il y a de plus honorable, et au gagnant le loot. N’ayant pas de meilleure option sous la main, notre héros accepte la proposition de son adversaire (Feculus), et les deux champions se mettent sans tarder à l’ouvrage.

Si sa monture parvient sans mal à vaincre le destrier démoniaque de sa Némésis, Roggen éprouve quant à lui les pires difficultés à tenir tête à cette dernière, qui est à la fois plus forte et plus résistante que lui. Au bout du compte, il faudra l’intervention, pas vraiment fair play mais très secourable, de son sidekick végétal (qui utilise l’attaque airbark) pour que Roggen parvienne à vaincre l’ignoble Feculus. La mort de leur patron libère toutefois les Rotbringers de leur serment de non-intervention, et le chevalier Dubois n’aurait pas fait long feu sans l’arrivée à point nommée des Sylvaneth du Gaut Tors, qui se font un plaisir d’offrir une démonstration de bio compostage express à leurs ennemis honnis. Cela laisse le temps à Roggen de repartir avec sa relique rouillée, et de se retrouver en bout du compte avec une greffe maniable. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.    

1 : Je ne sais pas si cette nouvelle a été traduite en français, mais je suis hyper fier de ma proposition (Writhing Weald en VO).

AVIS :

On ne le savait pas encore à l’époque de sa publication, mais ‘The Tainted Axe’ constituait la dernière apparition du chevalier Roggen de de Ghyrwood March, l’un des personnages attachants1 créés par Josh Reynolds dans le cadre de sa saga – laissée inachevée – des Lamentations de Khorne. Si cette péripétie mineure ne se place pas parmi les meilleures soumissions de notre homme, on y retrouve toutefois les points forts habituels de sa prose, à savoir des personnages intéressants (mention spéciale au jovial Feculus, que l’on retrouve cité dans les écrits consacrés par Reynolds à l’ordre de la mouche), une intrigue et un développement qui tiennent la route, et une généreuse dose de fluff pour napper le tout. Des nouvelles comme ça, je pourrais en lire 10 par jour sans me lasser. A mettre entre toutes les mains (haha).

1 : Notamment parce qu’il a pas mal de traits communs avec Erkhart Dubnitz, du très saint et très violent ordre de Manann, un des héros les plus hauts en couleurs de la Black Library.

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Fireheart – G. Thorpe [40K] :

INTRIGUE :

FireheartEnvoyée par Yvraine comme émissaire auprès des Eldars du Saim Hann afin d’obtenir de l’aide dans la quête des mondes de Morai-Heg, la Céraste Druthkala Shadowspite (Drudru pour les intimes) a bien du mal à convaincre ses hôtes de prêter une oreille pointue attentive à ses doléances. Car étonnamment, les Zoneilles sont égoïstes et mesquins. Qui l’eut pensé, vraiment ? Alors que les Clans réunis en assemblés dans le bois de Vincennes du Vaisseau Monde n’en finissent plus de se crêper le chignon, et que Druthkala tue le temps, faute de mieux, en imaginant les sévices qu’elle pourrait infliger à ses lointains cousins, Nuadhu du Clan Fireheart fait son apparition, en retard comme à son habitude. Bien que seulement héritier putatif du Clan, l’état végétatif de son père lui donne le pouvoir de décider à sa place, et un seul regard sur les courbes généreuses et l’armure minimaliste de la diplomate Ynnari convainquent notre dalleux de héros qu’il doit lui venir en aide pour s’en faire bien voir, et plus si affinités. Le choix d’Yvraine d’envoyer une bombasse plutôt qu’un érudit fait tout d’un coup plus de sens…

La mission de Shadowspite et de ses nouveaux amis est assez simple : mener une reconnaissance sur le monde vierge d’Agarimethea, où un vaisseau Exodite patiente en double file orbitale depuis quelques semaines, ce qui indique que quelque chose ne tourne pas rond à la surface. Après un petit go fast dans la Toile, dans la plus pure tradition des Wild Riders, les bikers au serpent arrive sur place, où ils ne mettent pas longtemps à repérer un complexe Necron défigurant le paysage champêtre, comme un magasin Bricodépôt construit au milieu d’un parc naturel. La présence de l’ennemi primordial des Eldars sur une planète qui devrait pourtant être exempte de toute souillure provoque des réactions mitigées dans la compagnie. Ceux qui réfléchissent avec le cerveau (Caelledhin, la demi-sœur du héros) sont pour une retraite prudente, ceux qui réfléchissent avec un autre organe (Nuadhu, qui n’en finit plus de baver sur les jambes de Shadowspite) insistent pour aller jeter un œil sur site, afin de peut-être trouver une arme qui pourrait aider les Eldars dans leur lutte contre les Necrontyr. Nuadhu étant techniquement aux commandes (même si cet incapable a laissé le pilotage de sa Vyper à son chauffeur de fonction), l’expédition fait fi de toute prudence et va se garer devant la pyramide principale. Bien évidemment, le calme qui baigne les lieux n’est qu’apparent, et lorsque Nuadhu pose la main sur la surface inerte du monument aux des morts, une alarme se déclenche et le ciel se remplit bientôt de tirs de désintégrateurs et d’aéronefs Necrons.

La fuite éperdue qui s’en suit voit la disparition tragique d’un certain nombre de cousins Fireheart, victimes des tirs ennemis, du relief ou du troupeau de dinosaures local (obligatoire sur un monde vierge). J’imagine qu’il en reste encore plein de là où ils viennent, et on ne pleurera donc pas trop sur leur sort. Les Eldars, bien diminués par la tournure qu’ont pris les événements, et la stupidité crasse de leur chef, jurent toutefois de revenir pour rendre aux Necrons la monnaie de leur pièce, ce qui sera fait dans ‘Wild Rider’/’Le Cavalier Rebelle’, le deuxième bouquin consacré aux suivants d’Ynnead par Gav Thorpe.

AVIS :

Je dois avouer tout de suite que je n’ai pour le moment pas réussi à m’intéresser aux Ynnari, ce qui est un handicap pour qui veut effectuer une chronique impartiale d’une nouvelle consacrée à cette nouvelle faction de 40K. Toutefois, même si les cultistes d’Ynnead avaient bénéficié de ma légendaire bienveillante neutralité, je pense que mon jugement de ce ‘Fireheart’ serait resté sévère. Il n’y en a en effet pas grand-chose à tirer de cette histoire, mis à part quelques fragments de fluff sur l’organisation et la culture de Saim Hann, et le nom du canasson de Khaine, ce qui n’est pas lourd. Pour le reste, on assiste à un festival de gaffes, puis de baffes, provoqué par l’incompétence notoire de Nuadhu, dont la concupiscence irréfléchie mettra Saim Hann en danger, et, surtout, donnera à peu de frais à Thorpe le pitch d’un de ses bouquins. C’est à une nouvelle purement et crânement utilitaire que nous avons affaire ici, qu’il convient de lire à l’extrême limite en prologue de ‘Wild Rider’ et c’est bien tout.

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The Dance of the Skulls – D. Annandale [AoS] :

INTRIGUE :

The Dance of the SkullsInvitée à honorer de sa présence un bal donné par la reine Ahalaset et le seigneur Nagen dans la cité de Mortannis, Nefarata se doute bien que cet évènement mondain n’est qu’un prétexte commode pour permettre à ces deux grandes lignées d’agir à ses dépends, ce qui ne l’empêche pas d’accepter gracieusement de se rendre sur place, n’ayant de toute façon rien d’autre de prévu ce soir là. Voyant d’un mauvais oeil le rapprochement s’étant récemment opéré entre Ahalaset et Nagen, la Mortarque de Sang suppute avec raison qu’un piège va lui être tendu, et se réjouit d’avance de cette (més)aventure, le quotidien de Nulahmia devant apparemment être assez terne.

Après avoir été accueillie avec tout le faste et la pompe liés à son r/sang (et infligé rateau sur rateau à ce pauvre Nagen, auquel elle promet toutefois une danse plus tard dans la soirée1), Neffie se voit proposer par son hôte une dégustation privée de crus tirés de l’hématothèque personnelle d’Ahalaset, ce qui ne se refuse pas. Guidée jusqu’à un salon lounge où l’attendent une dizaine d’esclaves qui s’appellent tous Mathusalem ou Réhoboam, notre rusée vampire à tôt fait d’identifier l’aiguille d’argent se terrant sous la roche, en l’occurrence un assassin assermenté doté d’une fourchette à escargot à la place du bras (c’est la mode à Hammerhal). Ayant raté son test d’Initiative, le faquin est toutefois aisément neutralisé par sa victime supposée, qui l’attache à son service d’un langoureux battement de cils. Satisfaite de la tournure prise par les évènements, et comme toute quinqua-millénaire de la bonne société après une dure journée de labeur, Neferata s’accorde un petit verre (et fracasse au passage toutes les « bouteilles », qui espéraient peut-être qu’on les laisse tranquille le temps qu’elles refassent le plein) aux frais de ses hôtes avant de revenir se joindre à la fête.

Là, il est temps pour la Lahmiane de porter l’estocade aux traîtres débusqués, et en musique s’il vous plaît, la danse des crânes consentie à ce benêt de Nagen donnant amplement le temps à notre héroïne de cimenter sa victoire en enchantant légèrement son cavalier, qui ne trouvera rien de plus malin lorsque l’assassin d’Ahalaset viendra sonner les douze coups de minuit à son ancienne patronne à l’aide de son argenterie intégrée, de lancer sa devise dans le silence de mort (héhé) qui s’ensuit. Cette dernière tombera à plat comme la totalité de ses blagues, et, mal comprise par la garde de la reine défunte, aura des conséquences tragiques pour notre pauvre Nagen. Un verre ça va, trois verres…

1 : En même temps, cette coquetterie de laisser dépasser une canine par dessus sa lèvre inférieure ne doit pas aider à lui donner un air très intelligent.

AVIS :

C’est peu de chose de dire que la prose de Herr Annandale n’était pas tenue en haute estime de ce côté du clavier, depuis la chronique de ses débuts pour la BL (The Carrion AnthemHammer & Bolter #11) jusqu’à aujourd’hui. Les choses ont légèrement évolué avec cette Danse des Crânes, qui s’affirme facilement comme la meilleure soumission de notre homme que j’ai pu lire à ce jour. Certes, on parle ici en progrès relatif plutôt qu’en performance absolue, cette courte nouvelle ne se comparant guère aux travaux d’auteurs que je considère être plus méritants que David Annandale, Abnett, Dembski-Bowden, Farrer et Fehervari en tête, pour n’en citer que quelques uns (la liste serait assez longue sinon), mais j’aurais trop beau jeu de ne pointer que les trous dans la cuirasse ou les défauts dans la raquette des travaux de ce régulier de la BL, si je ne soulignais pas également les sources de satisfaction à la lecture de ces derniers. L’Empereur sait qu’ils sont encore rares à cette heure.

Alors, quels sont les éléments positifs de La Danse des Crânes ? Pour commencer, une absence de ce que l’on peut presque appeler une « annandalerie », terme forgé par votre serviteur et désignant une mauvaise, grossière ou grotesque exploitation d’une idée de départ pourtant assez sympathique, pour des résultats évidemment décevants. Le huis-clos victorien qui nous est proposé ici ne pêche ainsi pas par excès de zèle ou manque de structuration, les péripéties s’enchaînant de façon tout à fait convenable et crédible, ce qui pourrait sembler aller de soi mais n’était pas gagné d’avance au vu du pedigree de l’auteur. On sent que ce dernier a réfléchi à la manière dont il devait dérouler son récit pour que le plan alambiqué de Nefarata puisse se dérouler sans (trop) d’accroc, et même si l’usage d’un petit TGCM en fin de nouvelle pour parfaire le triomphe de Mama Lahmia peut être noté, c’est finalement peu de chose comparé aux problèmes structurels émaillant quelques unes des précédentes soumissions de David Annandale.

Autre source de contentement, la description intéressante qui nous est faite de la haute société mort-vivante, nid de vipères aux crocs acérés et n’hésitant pas un instant à comploter pour précipiter la chute de leurs prochains, alors même que les ennemis extérieurs se comptent par milliers, et qu’un brin de solidarité entre macchabées ne serait pas de trop pour défendre le pré carré de Nagash. Le fait que cette société, mêlant vampires et humains à tous les échelons, apparaisse comme fonctionnelle et pérenne (en même temps, c’est bien le minimum quand on est immortel) est une autre réussite d’Annandale, qui parvient à donner un volume fort bienvenu à une faction qui jusque là se réduisait à des légions de squelettes traînant leur mélancolie dans des déserts violacés. On peut s’amuser aussi en Shyish, telle est la morale de cette petite histoire.

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The Board is Set – G. Thorpe [HH] :

INTRIGUE :

The Board is SetSur le sol de cette bonne vieille Terra, les armées loyalistes se préparent à recevoir comme il se doit le retour du fils indigne et de sa bande de potes, dont on entend déjà les « boum boum boum » crachés par les enceintes de leurs Clio tunées résonner depuis le parking de la copropriété, brisant le calme légendaire du quartier1. Comme le petit vieux acariâtre qu’il est, Macaldor, après avoir balancé une ou deux références que les moins de 20.000 ans ne peuvent ni connaître, ni comprendre, s’en va en grommelant dans sa barbe psychique que Dorn est définitivement une grande et jaune godiche, et que son obsession pour les briquettes et les portails électriques n’est qu’une lubie de jeune crétin. Ca tombe bien, notez, c’est l’heure de la coinche à l’EHPAD Bon Séjour, et le Mac’ ne raterait pour rien au monde ce moment de la journée.

À peine a-t-il fini d’installer la table que son acolyte de jeu révèle (you see what I did there…) sa présence et engage sans plus tarder les hostilités. Dans les ténèbres mi-obscures du 31ème millénaire, l’antique jeu de belote se joue en effet à deux plutôt qu’à quatre, et sur un plateau de jeu avec figurines en plus du traditionnel paquet de cartes. En fait, ça ressemble furieusement à une version Shadespirée des échecs, et ça a l’air donc vachement cool, d’autant plus que toutes les pièces se trouvent être des représentations des Primarques engagés dans l’Hérésie d’Horus2. Comme à chaque partie depuis leur internement respectif, Pépé et… Mémé ? rejouent la bataille finale de l’Hérésie, avec l’Empereur dans son propre rôle et Malcador dans celui de ce fripon d’Horus. Et comme à chaque fois depuis le début de ces amicales sessions, le Sigillite constate que son adversaire passe son temps à tricher. Manipulation de la pioche, duplication de cartes, ajout de pièces non WYSIWYG en cours de jeu… s’il y avait un arbitre, celà ferait longtemps que le Maître de l’Humanité aurait mangé son ban. Malheureusement pour lui, Malky ne peut compter que sur lui même pour se faire justice, ce à quoi il s’emploie avec toute la rouerie et la malice qu’on lui connaît.

En face de lui, l’Empereur semble peu intéressé par le déroulé de la partie, et joue franchement comme une savate, seulement sauvé par sa capacité à top decker comme un porcasse avec une régularité des plus suspectes. Ajoutant l’insulte à l’outrage, il se permet même de tancer son partenaire sur son faible niveau de jeu, alors que Horus, lui, était un opposant digne de ce nom. Sans doute très fatigué par l’enchaînement des nuits blanches à pousser sur son trône (la constipation psychique est un problème commun chez les démiurges millénaires, tous les auxiliaires de vie vous le diront), Big E va même jusqu’à utiliser des mots très durs à l’encontre de son vieux comparse, au point d’arracher à ce dernier des larmes de collyre. Qu’à cela ne tienne, Malcador en a vu d’autres, et met à profit sa rogne pour sortir un enchaînement digne de Magnus Carlsen le Rouge, le laissant en position de remporter la partie au coup suivant. « Ha ha, tu l’avais pas vu venir celui-ci, bouffi » exulte notre vieillard échevelé, pas peu fier de tenir sa première victoire en 1.834.427 confrontations. Sauf que, sauf que… Sauf que l’Empereur est décidément un mauvais joueur à la main leste, et trouve le moyen de substituer à son Roi Empereur lui-même une nouvelle pièce, le Fou, qui va héroïquement se sacrifier pour lui permettre de gagner la partie. Comble de la bassesse, le Fou a la tête de Malcador, à qui il prend l’envie folle de fracasser l’échiquier sur le crâne de son suzerain.

Sur ces entrefaites, une estafette se présente à la porte, et vient apporter la nouvelle tant redoutée au Premier Seigneur de l’Impérium : la flotte d’Horus vient de se matérialiser dans le système solaire, et la plus grande bataille de l’Humanité est sur le point de s’engager. Cherchant du regard son boss, Malcador a la surprise de s’apercevoir qu’il est seul dans la pièce, et l’a apparemment toujours été, d’après le retour un peu honteux du messager, qui n’a pas osé déranger tout de suite l’aïeul vociférant qui faisait une tournante autour du plateau de jeu à son arrivée. Conclusion de l’histoire : la grande vieillesse est un naufrage, mais au moins, on ne s’ennuie pas.

1 : Et je ne rigole même pas, la nouvelle commence par un constat par Macaldor et le chef de l’Adeptus Astra Telepathica du tapage nocturne diurne warpurne généré par l’approche de la flotte traîtresse.
2 : On comprend mieux du coup pourquoi l’Empereur tenait absolument à avoir un nombre pair de rejetons. C’est mieux pour équilibrer les parties.

AVIS :

The Board is Set est une nouvelle intéressante, mais dont l’inclusion dans un BLC ne tombait pas, de mon point de vue, sous le sens. Parmi les qualités notables de cette soumission, on peut mettre en avant l’art consommé avec lequel Thorpe distille à la foi clins d’oeil aux évènements passés et à venir de l’Hérésie, à coups de manœuvres lourdes de sens des pièces sur l’échiquier et de remarques sibyllines soufflées par un Empereur plus que jamais omniscient au bras droit/fusible qu’il s’apprête à griller, mais également allusions fluffiques subtiles, sur lesquelles les fans hardlore passeront des pages et des pages à s’étriper, par les mêmes biais que ceux donnés ci-dessus. Même sans être un amateur transi du style du Gav, on peut lui reconnaître un certain talent de mise en scène de ces passages prophétiques, ce qui n’était pas gagné d’avance au vu du casting de monstres sacrés qu’il convoque.

À titre personnel, j’ai également apprécié la tirade que MoM (Master of Mankind) balance à son larbin dans le but de le mettre en rogne et de le forcer à la jouer comme Lupercal, qui est un condensé de remarques blessantes mettant en évidence que Malcador n’a été qu’un outil utilisé par l’Empereur pour arriver à ses fins, et qu’il n’aura absolument aucun scrupule à s’en débarrasser une fois qu’il n’en n’aura plus l’usage. Ce discours des plus cash trouve une résonnance particulière depuis Dark Imperium, où il est clairement indiqué la dualité de l’Empereur dans ses « sentiments » envers ses congénères : incapable d’aimer l’homme, mais absolument dévoué à l’Humanité. On peut alors se demander si les piques envoyées par Pépé ne sont pas simplement le fond de sa pensée, qu’il livre à un Malcador qui reste persuadé qu’il ne s’agit que de la manoeuvre d’un monarque bienveillant et attentionné pour lui faire donner le meilleur de lui-même. Chacun se fera sa religion sur le sujet, mais cette dualité d’interprétation est assez intéressante.

D’un autre côté, The Board is Set s’avère être l’antithèse absolue de la nouvelle à mettre dans les pattes d’un novice de la BL ! Regorgeant de sous-entendus et d’Easter eggs qui feront les gorges chaudes des lecteurs vétérans, pour peu qu’ils soient des fluffistes un minimum intéressés, cette soumission possède en effet une valeur ajoutée littéraire qui passera à 31.014 pieds au dessus de la tête du newbie. Il est plutôt probable que ce dernier ressorte du propos de Thorpe ou perplexe ou soulé par l’accumulation de mentions et notions « members only » qui lambrissent les pages d’un bout à l’autre du récit. D’une manière plus large, on peut considérer l’Hérésie d’Horus comme étant, de manière générale, une franchise trop spécialisée pour être incluse dans des ouvrages de « propagande » de la Black Library. Sans mettre en question l’intelligence et les capacités de déduction du novice moyen, je doute en effet qu’il ait la patience ou l’intérêt pour percer à jour les tenants et aboutissants de cette absconse partie de Cards against Humanity. Bref, la définition même de l’acquired taste, et en tant que tel, aussi surprenant qu’une douzaine d’huitres au fond d’un Happy Meal.

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Au final, je dois reconnaître que la cuvée 2017 envoyait plutôt du bois, surtout du côté de l’Hérésie d’Horus, avec des soumissions assez mémorables (et kudos à la BL pour avoir placé ‘The Board is Set‘ en dernière position pour impact maximal). Age of Sigmar a également bien tenu son rang, et seul 40K s’est montré globalement décevant, avec uniquement ‘Endurance’ d’intéressant dans le lot (as far as I am concerned). Comme la plupart de ces nouvelles ont trouvé leur chemin dans des recueils et anthologies (certains gratuits) depuis leur première sortie, j’espère que cette revue tardive aura été tout de même utile, et je vous donne rendez-vous bientôt pour de nouvelles aventures.

LOYAL SONS [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de ‘Loyal Sons, le fidèle reflet de ‘Traitorous Scions’ (chroniqué ici). Comme le nom de l’anthologie le laisse apparaître, nous sommes en présence exclusive de membres du good boys club de l’Empereur, autrement dit les Primarques qui ont choisi de se battre du bon côté de l’histoire. Au menu, et comme cela avait été le cas pour leurs homologues rebelles, les fistons loyaux sont évoqués à travers 14 nouvelles, dont aucune n’est inédite1. L’occasion de découvrir, ou redécouvrir, les hauts faits de cette fraternité surhumaine, avant et pendant l’Hérésie de la brebis loup galeux.  

1 : On pourrait cependant considérer que ‘Champion of Oaths’ de John French est une nouveauté à part entière, car elle n’avait été avant cela proposée que dans un recueil papier uniquement vendu lors d’événements organisés à Nottingham.

Loyal Sons

Au petit jeu des favoris (des éditeurs de la Black Library, ce qui est presque aussi bien que d’avoir l’attention de Pépé, quand on y réfléchit), on constate que pour une fois Ferrus Manus finit devant ses frangins (so happy for him!), à égalité avec l’incontournable Rogal Dorn. À l’autre bout du spectre, Vulkan, Leman Russ, Corax, Jaghatai Khan et Lion El’Jonson ne bénéficient que d’une nouvelle à leur nom (et encore, c’est assez discutable pour le Jag’ qui ne fait qu’un caméo à la fin de ‘A Game in Opposites‘): si vous êtes des fans transis et exclusifs de ces estimés gentlemen, peut-être que ‘Loyal Sons‘ n’est pas pour vous. Mais si vous voulez connaître un peu plus les faithful nine de l’Imperium, n’allez pas plus loin. Par ici la visite…

Loyal Sons

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The Passing of Angels – J. French :

INTRIGUE :

The Passing of ANgelsLa planète Harpic, intégrée à l’Imperium pendant la Grande Croisade, a décidé de faire sécession de l’empire de Pépé. Ce crime de lèse majesté ne pouvant évidemment pas rester impuni, l’Armée Impériale est envoyée sur place pour calmer les velléités indépendantistes du Gouverneur Planétaire… et est accueillie à coup de bombes nucléaires, résultant en des pertes colossales parmi les assaillants mais également la population locale, sacrifiée sur l’autel du « vous ne m’aurez jamaaaaaaaaaaais ». L’Empereur ayant clairement établi que l’atome, c’était le mâââl dans une célèbre interview donnée au Journal de Mickey en M30, la machine de guerre impériale passe en mode hardcore et envoie Sanguinius et ses Blood Angels « pacifier » pour de bon la planète mutine, renommée H_____ en signe de la gravité de ses crimes.

Nous suivons donc le Primarque ailé et les soixante Space Marines de l’Ost de la Destruction, armés de l’arsenal le plus sale à disposition de l’Astartes (armes à phospex, grenades à radiations, cocktails cacatov et tutti quanti), alors qu’ils font s’abattre le jugement de l’Empereur sur les dissidents de H_____. Sanguinius a donné des ordres stricts : il ne doit y avoir aucun survivant, et, conscient du lourd fardeau psychologique qu’un tel massacre pourrait avoir sur ses fragiles de fistons, il leur a ordonné de revêtir le masque d’argent des Destructeurs, permettant à son porteur de dissocier son identité des actes horribles commis en tant que membre de l’Ost1. Seul le Primarque se rend au combat tête nue, car sa nature surhumaine lui permet d’endosser sans faiblir la responsabilité de ce massacre (raison officielle) et que mettre un casque lui aplatit les cheveux de manière disgracieuse (raison officieuse). Bien évidemment, les soldats de H_____ ne font pas le poids face à la furie sanguin(ius)aire des Blood Angels, et leur insignifiante petite planète ne tarde pas à repasser du bon côté de l’histoire.

La nouvelle se termine par une réunion informelle entre Horus et Sanguinius sur le Vengeful Spirit, pendant laquelle les deux frangins se livrent à leur activité préférée : battre son frère à un jeu de plateau pour Horus, et faire de lourds sous-entendus sur l’avenir pour Sanguinius. C’était une époque plus simple…

1 : C’est dans l’esprit très semblable aux masques de guerre des Guerriers Aspects Eldars… sauf qu’ici, on ne nous dit pas s’il y a une véritable technologie permettant de brainwasher le porteur, ou bien s’il devra faire la dissociation tout seul comme un grand.

AVIS :

Je suis un peu déçu de l’approche choisie par French pour cette nouvelle estampillée Primarques, car elle ne nous apprend au final pas grand-chose sur le personnage que l’auteur a choisi de traiter (Sanguinius)1, et aurait donc pu être cataloguée comme nouvelle « classique » de l’Hérésie à la place. Certes, on voit le Primarque mener ses fils à la bataille, mais la noblesse tragique dont il fait preuve au cours de la purge de H_____ n’est pas une caractéristique inconnue de Sanguinius : quiconque est un tant soit peu familier du personnage sait qu’il s’agit au contraire de la base de son identité. Partant, le propos déroulé par French dans ‘The Passing of Angels’ n’apporte pas de nouvel éclairage sur l’Archange de Baal, ce qui est à mes yeux la raison d’être d’un récit Primarques. Le même argument peut être avancé pour la scène de dialogue entre Sanguinius et Horus, qui relève à mon sens plus du clin d’œil à des éléments de fluff déjà établis au cours de l’Hérésie que d’une quelconque avancée de l’arc des Pépé Bros.

Je suis également resté sur ma faim avec l’Ost de la Destruction, convoqué par French pour montrer que même la Légion de Space Marines la plus angélique ne rechignait pas à faire le sale boulot de temps à autre, mais avait développé une technique bien à elle pour ne pas laisser ces actes barbares affecter durablement ses membres. L’idée est intéressante, mais sa mise en pratique tellement lacunaire que l’on ne sait pas comment le processus en question fonctionne. Les masques mortuaires des Destructeurs ont-ils seulement une fonction symbolique, ou sont-ils capables d’effacer les souvenirs de ceux qui les portent ? Bref, ‘The Passing of Angels’ passe à mes yeux à côté de son sujet, et si French est suffisamment compétent en tant qu’auteur pour que la lecture de cette nouvelle ne soit en rien désagréable, j’attendais plus et mieux de sa part ici.

1 : La plus grande révélation de ‘The Passing of Angels’ a été pour ma part d’apprendre que Sangui avait une vision laser, qui pouvait détecter une rupture d’alignement de l’ordre d’un micron. Il aurait dû être coiffeur au lieu de chef de guerre avec ce don, moi je dis.

Mercy of the Dragon – N. Kyme :

INTRIGUE :

Mercy of the DragonLes réunions de famille ne sont pas toujours une partie de plaisir, c’est bien connu. Toutefois, les retrouvailles entre Vulkan et l’Empereur sur Nocturne se passèrent de manière que l’on peut qualifier de cordiale, surtout si on les compare à d’autres épisodes d’affiliés au premier regard tournées plus tard au cours de la Grande Croisade. Bien sûr, le fils adoptif de N’bel le forgeron a une âme paisible sous ses abords farouches, et il faudra une longue discussion (et une salamandre encore plus longue, mais c’est une autre histoire…) pour le convaincre de laisser tomber sa planète pourrie et sa salopette rapiécée pour prendre sa place aux côtés de son créateur dans la conquête de la galaxie. C’était à l’époque où Pépé prenait encore le temps de discuter avec ses fistons avant de les bombarder à la tête de leur Légion1… Et croyez-le ou non, mais un des critères majeurs ayant guidé la décision du colosse aux yeux de braise fut de savoir si ses nouveaux camarades de jeu allaient être gentils avec lui pouvaient apprendre quelque chose de sa part, lui qui se voyait davantage chaudronnier que chef de guerre. « Mais bien sûr gros bêta », lui répondit son papounet. « Attends un peu de rencontrer ce joyeux drille de Ferrus… ».

Flash forward quelques temps plus tard, au cours de la campagne de mise en conformité de Ranknar. Les indigènes ne se sont montrés sensibles ni aux talents oratoires, ni aux sculptures en ballons de l’Empereur (on ne peut pas être bon partout hein), et la guerre fait rage à la surface de la planète. Les défenseurs vont de défaites en défaites, leurs forteresses imprenables se faisant mettre minables en un temps ridicule et un déluge de flammes par un guerrier terrifiant, surnommé le Dragon par ses adversaires malheureux. Nous suivons le soldat Sarda et le prêtre Veddus alors qu’ils se rendent jusqu’à l’ultime bastion de la résistance : la Citadelle Rouge de Romistad. Le dernier carré des ranknariens dans la cité de Venikov s’est en effet terminé de manière abrupte et infernale, après que le Dragon ait décidé d’y allumer le feu.

À Romistad, la situation des défenseurs semble un chouilla moins désespérée, car ils ont à leur disposition non pas une, mais deux armes top secrètes moumoutes. Ceci dit, les impériaux ont de leur côté non pas deux, mais trois membres des Ramones (nouvelle période) : Peypey, Féroce Manosque, et bien sûr le Dragon, qui est bien sûr le nom de code trop trop secret de Vulkan. Bref, les carottes ne sont pas cuites, elles sont sur le point d’être carbonisées pour les irréductibles gaulois.

La stratégie de l’Empereur, qui consiste à lancer un Vulkan fou de rage (sans qu’on sache trop bien pourquoi d’ailleurs) sur l’ennemi en mangeant des chips avec Ferrus Manus à bonne distance des combats, rencontre toutefois ses limites lorsque les défenseurs abattent leur premier joker : un trio de bogatyrs, c’est-à-dire des golems de la taille d’un Titan, menant une sortie désespérée sur les lignes impériales. Ne pouvant pas laisser Vuvu se faire exploser sans intervenir, Pépé intervient gracieusement pour rétablir le déséquilibre en faveur de ses troupes, ce qui permet à l’irrascible Hulk, mit encore plus en rogne par la découverte de la source d’énergie des bogatyrs (des enfants sous hémodialyse) de charger seul la porte de la Citadelle Rouge, afin d’apprendre à ses occupants de quel boa il se chauffe…. Et c’est là qu’arrive la boulette.

Malgré ses puissants pouvoirs de guidage de missiles, l’Empereur n’est en effet pas foutu d’empêcher le dernier tir d’une salve tardive d’exploser pile sur la position de Vulkan, alors qu’il attendait que la gardienne vienne lui ouvrir. Pour sa défense, il y avait péril en demeure pour les impériaux, l’ultime botte secrète des défenseurs étant de déclencher une bombe virale, ce qui n’aurait pas été fair play. Fort heureusement, ‘tis but a scratch pour Papamanders, qui étrenne certainement ainsi sa perpétualité (reste à voir comment il a regénéré aussi vite ceci dit), et convainc les Ranknariens de déposer les armes après que ces derniers aient constaté que le féroce Dragon a fait obstacle de son corps pour protéger un frêle enfançon qui jouait à la marelle sur le champ de bataille. Le pouvoir de la gentillesse ! Bon, on ne dira rien sur les centaines de milliers de morts avant ça parce que ça serait un peu mesquin…

1 : D’après la chronologie donnée par Laurie Goulding (et donc aussi officielle que possible), Vulkan a été le cinquième Primarque retrouvé. L’Empereur a commencé à s’en balec au douzième round (Mortarion).

AVIS :

Nick Kyme n’a pas écrit le roman Primarques de sa Légion de cœur (l’honneur en est revenu à David Annandale), mais il s’est tout de même payé le luxe de raconter en quelques pages comment la rencontre entre le père et le fils s’est déroulée… et je reste un peu dubitatif sur la valeur de cette offrande. Le problème tient en deux mots : character development. Mettre en scène des personnages aussi iconiques que l’Empereur et ses Primarques de fils nécessite en effet de connaître le riche background de ces figures majeures, mais également de les faire agir en gardant en tête leur stature d’êtres sur(sur)humains. Et si j’aborde ce sujet, c’est bien entendu que Nick Kyme s’est planté sur les deux tableaux. On a ainsi un Empereur qui minaude en faisant briller ses gantelets au soleil et balance des répliques dignes du Thesaurus, mais également un Vulkan utilisé à total contre-emploi avec son fluff établi (le Primarque qui se soucie des simples humains), puisqu’il passe la majorité de la campagne de Raknar à se comporter comme un proto-Angron, massacrant l’ennemi sans lui montrer aucune pitié1, et sans que Kyme ne justifie d’aucune façon cette soudaine agressivité. Que Vulkan ait pété une durite après avoir vu comment ses adversaires faisaient avancer leurs golems de combat, ok, mais avant cela ? Ce n’est pas comme si le même Vulkan avait failli refusé la proposition de l’Empereur de rejoindre la Grande Croisade parce qu’il ne se sentait pas l’âme d’un guerrier littéralement deux paragraphes avant, hein.

On peut toutefois reconnaître à Kyme les efforts sincères qu’il a fait pour donner une culture un peu fouillée à Raknar et ses habitants/fidèles (car oui, c’est à la fois une planète et un dieu), ce qu’il ne s’est pas toujours motivé à faire dans sa production pour la Black Library. Ce n’est toutefois pas suffisant pour équilibrer l’ardoise, et ‘Mercy of the Dragon’ reste à mes yeux globalement raté.

1 : En témoigne le dialogue entre Sarda et Veddus au début de la nouvelle, qui permet d’établir que plus de cent mille hommes ont péri dans la défense de Venikov (sans compter les civils), avec Vulkan en allumeur en chef.

Shadow of the Past – G. Thorpe :

INTRIGUE :

Pendant que la galaxie part en sucette énergétique, sur Sicarus les grands travaux lancés par Lorgar afin de templaformer la planète avancent gentiment. Sous le patronage avisé et le commandement sévère mais brusque de l’Apôtre Noir/chef de chantier Kalta-Ar, des milliers d’esclaves suent sang et os (on est dans l’Œil de la Terreur, tout est possible) pour bâtir la Beneficta Diabola, basilique impie qui comportera deux piscines, un centre commercial et un boulodrome olympique. Soucieux du respect le plus strict des meilleurs standards de santé et sécurité, Kalta-Ar a pris soin de protéger le chantier d’incursions démoniaques, fréquentes en ces latitudes, par des pentacles et sceaux de protection du tout dernier cri1. Aussi est il fort mécontent d’apprendre de la part de ses acolytes qu’un nombre croissant de légionnaires disparaissent sans laisser de trace, au lieu de monter la garde en chantant des cantiques impies comme ils étaient sensés le faire.

Accompagné de son bras droit Arkula le Coryphaus et du Sergent Isaikash, K-A se rend sur les lieux de la dernière disparition, qui devient vite l’avant-dernière car un autre Word Bearer fait soudainement une mauvaise rencontre sur le chemin de ronde, et rend l’âme après cinq secondes de hurlements stridents sur le WhatsApp de groupe. Malaisant. Si quelques esclaves ont été témoins des derniers instants de frère Barbaque, les subtiles techniques d’interrogatoire de nos héros ne leur permettent pas d’apprendre grand-chose sur la nature du prédateur qui s’amuse à les faire tourner bourrique. Les mortels ont en effet seulement vus une ombre écarteler le malheureux Space Marine, ce qui n’est pas lourd pour faire avancer une enquête. Jugeant probable que ces déboires sont de nature démoniaque, et suspectant les serfs d’avoir réussi à appâter un gros Nurgling dans le Materium pour se venger des mauvais traitements infligés par leurs geôliers, Kalta-Ar est sur le point de diligenter une inspection surprise de ses propres opérations (aux grands porteurs du mot, les grands remèdes) lorsqu’une présence indistincte mais pas franchement amicale se matérialise soudain à proximité.

Les rapports alarmistes et disparitions brutales commençant à se multiplier, nos trois affreux décident finalement de prudemment de battre en retraite en direction du portail Warp reliant la Beneficta Diabola au QG de Lorgar, afin de respectueusement demander au boss de venir gérer un impondérable que ses incapables de larbins sont bien en peine de pondérer de leur côté. Cette retraite stratégique, qui se transforme sous peu en débâcle effrénée vers la chambre de papa, voit un nombre non négligeable de Word Bearers aux noms plus exotiques les uns que les autres2 se faire oblitérer par le terrible blurry man qui les poursuit, mais également ce fieffé coquin de Marduk, fier comme Ar-Thaban dans son armure Terminator, faire son apparition dans l’histoire. Fidèle à lui-même, il se montre odieux envers Kalta-Ar et ses survivants, et d’une piètre aide lorsque the thing se remet à faire des siennes. Pourquoi se donner du mal quand on a une armure en scenarium, pas vrai ?

Heureusement pour nos héros, Lorgar avait les oreilles qui traînait et, bien qu’il tique un peu sur le vocabulaire peu flatteur utilisé par ses fils pour parler de lui, l’adoré doré fait son apparition pour se confronter au démon qui tourmente sa marmaille…

Début spoiler…Sauf qu’il ne s’agit pas d’un démon, mais de ce lascar de Corax, qui a gagné quelques pouvoirs funky et emo en diable (comme se changer en brume ou en nuée de corbeaux, ou se faire pousser des bras et des lames surnuméraires) à trop traîner dans le Warp, mais est resté fidèle à sa nature profonde : se venger des méchants très méchants. On se souvient que les deux Primarques se sont déjà frittés sur Isstvan au début de l’Hérésie, et que sans l’intervention salutaire de Konrad Curze, Lolo aurait avalé son crozius. La revanche qui prend place sur Sicarus, alors que Lorgar a été élevé au rang de Prince Démon et que Corax se bat seul sur une planète baignée par le Warp… va rigoureusement dans le même sens, ce nullard d’Aurelian se faisant perforer la glotte par les griffes énergétiques de son frangin, et ne devant son salut qu’à l’intervention peu sportive de ses Word Bearers pour occuper le Seigneur Corbaffe le temps que son adversaire malheureux soit évacué à travers son propre portail. La lose totale.

Coincé sur Sicarus à cause de sa nature à demi-démoniaque, Corax jure à son frère qu’il y aura une belle et s’en va fracasser sa basilique pour se passer les nerfs. De son côté, Lorgar décide d’aller bouder dans sa chambre pour marquer sa désapprobation, et la légende raconte qu’il n’en est toujours pas sorti à ce jour…Fin spoiler

1 : …des victimes sacrificielles utilisées pour les tracer.
2 : Hesta-Pek, Takla-Gad, Apall-Af, Ghoa-Lok, Ukna-Tav…

AVIS :

Gav Thorpe se paie le luxe de conclure la saga hérétique (et la saga tout court pour Corax) de deux Primarques à travers ce sympathique ‘Shadow of the Past’, ce qui est un ratio fluffique tout bonnement exceptionnel pour une simple nouvelle. Si les prémisses de cette histoire ne sont pas très intéressantes, et qu’un lecteur un peu au fait du passif de cet auteur pendant l’Hérésie d’Horus aura tôt fait d’identifier le mystérieux persécuteur de cette cruche de Kalta-Ar, je trouve la deuxième partie du récit nettement supérieure, notamment grâce à l’idée de faire de Corax une sorte de démon non chaotique1, ce qui permet de justifier à la fois comment le Primarque a pu survivre à son départ dans le Warp, et à quoi il occupe ses journées. En plus de ça, un petit duel entre deux frangins légendaires, ça ne se refuse pas (surtout quand c’est la tête à claque qui perd). Il y a même le Marduk d’Anthony Reynolds qui vient faire coucou, ce qui est sympa de la part de Thorpe, et fera sans doute plaisir aux fans du personnage. Bref, un final vraiment sympathique qui fait plus que rattraper un début assez meh. Si Gav Thorpe pouvait toujours s’en tenir à ce standard, je serais un lecteur comblé.

1 : Ou carrément affilié à Malal/Malice, ce qui serait encore plus cool, et une hypothèse pas si farfelue que ça pour une soumission d’un auteur aussi au fait du fluff que Thorpe. Après tout, les motivations et le code couleur de Corax correspondent tout à fait à ceux du dieu banni…

A Lesson in Iron – D. Guymer :

INTRIGUE :

A Lesson in IronS’il y a une chose que Ferrus Manus, paix à son âne, détestait, c’était bien perdre du temps. Aussi, sitôt réuni avec sa Légion, engagée dans le démantèlement de l’empire de rouille ork, le Primarque tint à imposer sa marque sur ses Légionnaires. Nous rejoignons ainsi l’impulsif M. Manus alors qu’il fait la chasse de quelques vaisseaux peaux vertes ayant survécu à la colère de l’Imperium, et qu’il compte bien détruire afin d’obtenir la complétion à 100% de sa mission, et ainsi prouver à l’univers qu’il vaut mieux que ces poseurs d’Horus et de Russ1. Et tant pis si ces couards d’Orks décident de foncer coque baissée dans une faille Warp qui flottait par là pour échapper au courroux de l’Astartes, et que personne n’a jamais été assez timbré du côté impérial pour se risquer dans ce genre d’environnement chelou. Ferrus, et son Fist of Iron, seront les premiers à tenter le coup. Encore un record à mettre au crédit du Primarque qui en voulait.

Ferrus n’est pas seul sur le pont de son vaisseau amiral alors que ce dernier réalise le premier fistage d’une faille Warp. Il est accompagné de deux Sergents vétérans, le Terran Harik Morn et le Medusan Gabriel Santar, tous deux pressentis pour devenir son bras droit. Alors que le Fist of Iron s’enfonce dans le trans Materium comme s’il s’agissait de caramel mou, avec des effets funky sur les appareils de navigation, comme on peut l’imaginer, les auspex détectent soudain des silhouettes de vaisseaux à proximité. Il s’agit des kroiseurs orks, mais également d’un nouvel arrivant, qui n’avait pas été identifié pendant la poursuite dans l’espace réel. Point commun : tous ont été réduits à l’état d’épave, et dans un passé lointain qui plus est. À la grande surprise des impériaux, il semble que le vaisseau en question appartienne à la 10ème Légion, ce qui hautement improbable mais pas totalement impossible. Pragmatique comme toujours, Ferrus Manus décide d’aller y jeter un œil.

Alors que les pauvres grunts qui forment son escorte découvrent avec émoi 1) l’existence de Démons et 2) s’il y a une vie après la mort, le Primarque et ses comparses arrivent jusqu’au pont du vaisseau mystère, où les attend un cadavre desséché de Space Marine. Ce dernier porte les marquages d’un Iron Hands, mais, au grand dégoût de FM, il semble avoir terminé sa carrière plus machine que (sur)homme, au vu de toutes les augmétiques et bioniques que la dépouille arbore. C’est le Tech-adepte qui accompagne la fine équipe qui finit par proposer l’hypothèse la plus intéressante pour expliquer ce répugnant mystère : l’épave sur laquelle ils se trouvent est un vaisseau des Iron Hands provenant du futur, transporté dans le passé par les caprices du Warp.

Avant que la nouvelle n’ait pu être digérée par l’assemblée, une palanquée de Démons se manifeste (dans tous les sens du terme) sur le pont, et forcent nos héros à – enfin – faire usage de la force. Si ce bogoss de Ferrus s’illustre à grands coups de marteau, ses subalternes sont plus à la peine. Surpris par les nouveaux arrivants, Santar se fait ainsi arracher le bras gauche par une Bête de Nurgle joueuse, tandis que Morn est submergé par des Horreurs rigolardes. Le premier réussit toutefois à marquer des points auprès du Primarque en retournant dans la mêlée sitôt ses esprits recouvrés, tandis que le Terran se contente de haleter comme un bébé phoque sur la banquise. Avant d’ordonner une retraite tactique vers le Fist of Iron, ignorant les avis de ses sous-fifres de rester pour looter de la technologie futuriste, et/ou défendre une relique de la Légion, Ferrus tranche en son for intérieur : ce sera Gaby qui deviendra son Ecuyer et 1er Capitaine. C’est dit.

1 : C’était l’époque de la Grande Croisade où tous les Primarques avaient un nom qui rimait avec « platypus », l’animal préféré de Pépé.

AVIS :

Petite nouvelle fort sympathique consacrée par leur spécialiste incontesté, David Guymer, aux Iron Hands et à leur Primarque caractériel, ‘A Lesson in Iron’ se paie le luxe de nous présenter en quelques lignes la prise de fonction de Ferrus Manus au sein de sa Légion (choix du 1er Capitaine, et autres révélations fluffiques intéressantes incluses), combiné avec une savoureuse mise en abîme du futur qui attend le Chapitre dans quelques millénaires. Le fait que les améliorations bioniques répugnent au plus haut point l’homme aux mains de fer n’est pas une nouveauté à ce stade, mais Guymer parvient tout de même à surfer sur cette iron-ie de façon tout à fait satisfaisante. Le pauvre Ferrus Manus aura soupé de prémonitions malheureuses car jamais utilisées pour modifier la destinée pas vraiment enviable attend ses fils et lui-même à la sortie de la Grande Croisade, et on en a encore un exemple ici. Ca reste plus distrayant à lire que la moyenne des soumissions de la BL, donc pourquoi cracher dans soupe ?

The Atonement of Fire – D. Annandale :

INTRIGUE :

The Atonement of FireNous sommes dans la dernière ligne droite de l’Hérésie, quelques mois avant que le Siège de Terra ne débute. Roboute Guilliman a fini par réaliser que lancer sa petite entreprise personnelle alors qu’il est toujours techniquement employé par Pépé Corp., et en piquant dans la caisse de Big E. en profitant d’une panne généralisée d’internet pour ne pas se faire prendre, c’était assez craignos tout de même. Pétri de remords, Roro est désormais à la recherche d’un moyen de se faire pardonner ses errements passés. En sortant de sa séance hebdomadaire avec le Chapelain/Psychiatre Volusius, lui vient une idée toute simple pour expier son énorme hubris : aider Sanguinius à rejoindre Terra en détruisant les flottes hérétiques qui se mettront sans nul doute sur la route de l’Ange à la Moumoute.

Après une petite séance de triangulation avec les poteaux dans le strategium de l’Ultima Mundi, les Ultras de l’Empereur décident d’aller au secours de la planète Diavanos, d’où est arrivé un message astropathique implorant de l’assistance pour gérer une invasion de World Eaters mal-lunés. Diavanos est de plus un monde que les Ultramarines ont rattaché à l’Imperium il y a plusieurs décennies, et dont la technique de vitraux teintés a grandement impressionné le Primarque lorsqu’il flânait dans les rues de la capitale Ecstasia à la recherche d’inspiration pour son dernier roman. Pour toutes ces raisons, ainsi que pour celle, plus prosaïque, de se venger des ravages commis par les séides d’Angron et de Lorgar dans leur pré carré, les gars de la XIIIème se ruent au secours de Diavanos, et tombent à bras raccourcis sur leurs frères ennemis alors que ces derniers s’apprêtaient à repartir pour embusquer la flotte des Blood Angels.

La bataille spatiale qui s’en suit, si elle n’est guère équilibrée (les Ultramarines sont deux fois plus nombreux, sérieux, hargneux, farineux et bleus que leurs adversaires), permet à nos héros de relâcher la pression après tous ces mois à écouter les podcasts interminables du triumvirat de l’Imperium Secundus. Alors que les derniers vaisseaux renégats sont méthodiquement désintégrés par la froide fureur ultramarine, le cuirassé Gladiator profite de la confusion pour repartir en direction de Diavanos, et certainement pas pour une visite de politesse. Guilliman comprend que les World Eaters ont un petit creux, et que s’il n’intervient pas rapidement, la planète qu’il est venu sauver va s’en prendre plein la face. Mais arrivera-t-il à temps pour empêcher les fils d’Angron de commettre l’irréparable ?

Début spoiler…Après de multiples péripéties dans les coursives du Gladiator, que les World Eaters ont faites effondrer pour gêner la progression de leurs ennemis, Roboute et ses hommes (en grande partie des Destroyers, wink wink The Lord of Ultramar’) parviennent jusqu’à la salle des torpilles où les hérétiques se sont barricadés. La mêlée désespérée et surtout très sale qui s’ensuit tourne logiquement en faveur des surhommes en bleu, mais les World Eaters sont proches de réaliser leur objectif secret (faire péter une torpille à l’intérieur du vaisseau afin d’emporter Guilliman avec eux). Seule l’habilité du Grand Schtroumpf avec son combi-bolter customisé permet d’éviter la catastrophe, mais la victoire morale revient tout de même aux groupies d’Horus. Il est en effet trop tard pour prévenir le crash du Gladiator à la surface de Diavanos, et l’onde de choc qui s’en suit rase la capitale et dévaste une grande partie de la planète. Bien évidemment, les Ultramarines ont eu le temps de regagner leurs 22 avant que cette tragédie n’arrive, mais Guilliman finit la nouvelle avec le blues. Approprié, vous me direz.Fin spoiler

AVIS :

Vu le passif peu glorieux de David Annandale avec la XIIIème Légion (‘Lord of Ultramar’…), j’ai attaqué cette nouvelle dans un état d’esprit assez peu favorable à cette dernière, et j’ai été surpris de constater que cet ‘Atonement of Fire’ tenait tout à fait la route. Nous sommes en présence d’un court format siglé HH de facture assez classique (un peu de réflexion, beaucoup d’action, et en bonus une belle tranche de Primarque), mais débarrassé de tous les défauts que l’on pouvait trouver dans les autres soumissions de notre homme (personnages stupides/inintéressants, intrigue bancale, rythme chaotique)1. Ça pourrait et devrait être considéré comme le strict minimum, mais nous savons tous que la BL ne croit pas dans des concepts aussi restrictifs que le contrôle qualité. Enfin, pas tout le temps.

Surtout, et c’est assez rare dans une publication de la Black Library (quel que soit la franchise ou l’auteur) pour le souligner, Annandale parvient à ménager un vrai suspens jusqu’au bout de son propos. Guilliman et ses Schtroumpfs destructeurs arriveront-ils à sauver Diavanos des déprédations suicidaires des World Eaters ? Même si la planète a été créée de toute pièce pour l’occasion, l’auteur arrive à nous intéresser à la conclusion de cet accrochage mineur de la fin de l’Hérésie en appuyant de façon intelligente sur les remords éprouvés par Guilliman au sujet de son Imperium Secondus et son besoin de se faire pardonner de ce petit caprice. Annandale nous ressert également la vieille rengaine du « I am never going to financially recover from this », 30K style, déjà bien exploitée par d’autres avant lui, mais qui fait toujours son petit effet quand utilisée à dessein, ce qui est le cas ici. Bref, une vraie bonne surprise pour ma part, et une des meilleures soumissions de David Annandale pour le compte de cette franchise, si vous demandez mon avis.

1 : On pourrait lui reprocher de ne toujours pas maîtriser les bases spatio-temporelles d’une bataille spatiale (exemple gratuit : la course poursuite entre l’Ultimus Mundi et le Gladiator ne semble durer que quelques minutes, alors qu’elle s’engage à proximité du point de Mandeville du système et se termine dans l’atmosphère d’une planète habitable (donc proche de son soleil), ce qui devrait prendre au bas mot quelques jours), mais dans mon infinie générosité, je passe l’éponge là-dessus.

Canticle – D. Guymer :

INTRIGUE :

On a tous nos surnoms, plus ou moins glorieux, et Ferrus Manus ne fait pas exception. Bien avant d’être baptisé pognes d’acier (en latin haut gothique pour faire plus classe), notre héros a ainsi été appelé Numerodis (l’Empereur), Cataclysme (les géants des tempêtes du Pinacle de Karaashi), La Finalité (des morts-vivants quelconques), Rehew Netjer, soit le Fils de l’Homme (les Necrons), Mon très Chair (les despotes fragmentés du Subliminat), et Empafé de première (le type auquel il a piqué sa place sur le parking du Monoprix de Medusa). Pour sa part, et après avoir malencontreusement libéré Asimoth sur sa planète d’adoption peu de temps après son arrivée remarquée sur cette dernière et s’être révélé trop faiblard pour ramener la bestiole dans son enclos, le Primarque des Iron Hands s’est donné le nom et la vocation de Chasseur, ayant décidé de réparer sa bévue en traquant le wyrm d’argent à travers les paysages bucoliques de Medusa.

Ces premières années sont également l’occasion pour Ferrus Manus de faire ses premières armes, dans tous les sens du terme. On apprend ainsi qu’il a rencontré quelques difficultés sur sa route, d’ordre robotique, semi-robotique et infernal, ce qui donne une idée de la très riche « biodiversité » de la planète sur laquelle il a fait son trou. Rien de très mémorable cependant pour FM (et pour Guymer), dont l’équipement consiste en une cuirasse d’adamantium upcyclé et une bardiche bricolée à partir des dépouilles fumantes de ses malheureux adversaires biomécaniques. On apprend également que ce gentil garçon est capable de subsister sur un régime composé de sable, minéraux et métaux1, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Poursuivant sans relâche sa proie insaisissable, Ferrus finit tout de même par rencontrer des membres de son espèce, d’abord sous forme de cadavres entourant l’épave d’un camping-car Medusan. Curieux d’en apprendre plus sur ces étrangers qui lui ressemblent tant, et soucieux de récupérer un peu de matos utile dans la boîte à gants du véhicule éventré avant que tous les charognards du coin ne débarquent, le jeune Primarque se fraie un chemin jusqu’à la chambre forte du Sandcrawler, négociant au passage dix zombies cyborgs (zomborgs ?) occupés à mastiquer les cartes mères et câbles jack leur étant tombé sous la pince. Ce régime majoritairement électrovore ne les empêche cependant pas de sauter sur l’aventurier pour lui faire les poches dès qu’il s’approche un peu trop, forçant notre héros à faire montre de force autant que de ruse.

Une fois parvenu dans la salle des coffres, Ferrus a la surprise d’être mis en joue par une rescapée de l’embuscade ayant scellé le destin du véhicule et de ses occupants. Guère impressionné par la pétoire plasmique que son interlocutrice lui pointe sur le torse, le Chasseur refuse l’offre qui lui est faite par cette dernière de rejoindre son clan, arguant qu’il a encore une opération de vermifuge à accomplir, et un véritable nom à obtenir, avant de pouvoir faire son entrée dans le monde et participer au Bal des Débutant.e.s de Medusa. La suite de l’histoire de Chéri FM, si elle est connue, sera toutefois narrée dans un autre cantique que celui-ci.

1 : Avec quelques protéines et lipides occasionnelles de temps à autres, par exemple lorsqu’il croise la route d’une escouade de Dépeceurs sur leur 31. On peut donc classer Ferrus Manus dans la sous-catégorie des Primarques cannibales, avec Konrad Curze et Sanguinius.

AVIS :

On a plus l’impression d’un épisode pilote pour une série consacrée à l’enfance de Ferrus Manus que d’une nouvelle indépendante à la lecture de ce ‘Canticle’. Guymer passe en effet la majorité de ses pages à présenter de façon intrigante le jeune Primarque et sa planète, dont on aimerait bien apprendre davantage à la fin de son récit. L’intrigue semble avoir été volontairement tronquée pour permettre à l’auteur de la reprendre au cours de l’épisode suivant, qui n’a, à ma connaissance, pas été publié à ce jour. Peut-être faut-il creuser du côté de la novella1 que David Guymer a consacré à son héros pour mettre en perspective cette nouvelle ? Ou plutôt dans le ‘Voice of Mars’ du même auteur, où le Cantique des Voyages occupe une place importante ? En tous cas, si elle n’est certes pas désagréable à lire, et livre quelques éléments de fluff sur le plus moyen des fils de l’Empereur, cette histoire aurait gagné à se conclure de façon plus définitive.

1 : ‘Ferrus Manus : La Gorgone de Medusa’.

First Legion – C. Wraight :

INTRIGUE :

Spécialistes reconnus des campagnes pourries, les Dark Angels ont bien du mal à exterminer les Rangdan, espèce de Xenos experte en subterfuges et en tentacules, ce qui n’est guère du goût des roides et psychofrigides paladins de la Première Légion. Malgré tout, un ordre est un ordre, et les Astartes poursuivent leurs vaillants et violents efforts pour sécuriser ce petit bout de l’empire de leur Pépé, menés par nul autre que Lion El’Jonson en personne. Nous faisons tout d’abord la connaissance du Capitaine Arnaid, 45ème Compagnie, 8ème Ordre, 1ère Légion, dont la frégate a connu des jours meilleurs, mais qui n’hésite pas le moins du monde à intercepter le mystérieux vaisseau qui fait irruption dans la zone de « pacification » avec son Nightsward, bien que le nouveau-venu soit plus imposant et en meilleure forme. Alors que le Capitaine est sur le point d’ordonner un tir de semonce, ses salutations répétées n’ayant pas été retournées par les touristes en goguette, ceux-ci daignent enfin répondre, par la voix d’un autre officier Space Marine, un Capitaine de la nouvellement formée XXème Légion répondant au nom de…

Début spoilerJules-Edouard Petitbedon.

Bon ok : il s’appelle Alpharius. Incroyable, je sais.Fin spoiler

Alpharius s’excuse de ses manières cavalières et de son manque de décorum (son vaisseau, Perseus, a l’air d’avoir quitté les docks spatiaux avant que le Mechanicum n’y passe un coup de peinture), mais annonce qu’il est venu porteur de nouvelles pour Lion El’Jonson.

Pendant ce temps là, nous nous introduisons dans une réminiscence de Lionel en personne, du temps où il était un enfant sauvage qui courait cul nu dans les forêts de Caliban. Notre petit bonhomme semble être occupé à traquer une bête particulièrement bestiale, seulement armé d’une défense de phacochère nain et de sa volonté implacable. Wraight nous fait bien comprendre que c’est la destinée même d’El’Jonson qui est à l’œuvre ici, et entraîne le jeune Primarque au clash contre un monstre que la partie raisonnable/froussarde de Lionel aimerait éviter si possible. Pause pub.

Retour sur le Nightsward, où Alpharius est reçu par son homologue. Constatant qu’il ne sert à rien de féliciter ce dernier sur son goût (pratiquement inexistant) en matière de décoration d’intérieur, ni de tenter de piquer la curiosité (totalement inexistante) de l’austère Terran, l’Alpha Légionnaire qui s’ignore1 tente de soutirer quelques infos psychologiques et tactiques à Arnaid en jouant la carte de la franche admiration pour les exploits et la réputation de la Première Légion, avec un succès relatif. Ces oiseuses discussions sont toutefois interrompues par la réception d’un message autorisant Alpharius à voyager jusqu’à l’Invicible Reason pour y rencontrer Lion El’Jonson, avec Arnaid lui servant de Kaptain pour l’occasion. Simple déformation professionnelle, en somme.

Suite et fin du documentaire animalier commencé un peu plus haut avec la confrontation entre Lionel et sa Némésis, qui se trouve être un chevalier en armure. Car en fait, le zouave qui courrait dans la savane avec son coutelas d’ivoire n’était pas le Primarque, mais une sorte de démon ayant pris forme humaine, et décidé de mettre fin à l’écocide décrété par le chef de l’Ordre. Malheureusement pour notre ami, ce dernier se révèle être un adversaire trop coriace pour ses maigres ressources, et il finit promptement embroché par la rapière du palouf. Voilà qui lui apprendra à ne pas usurper, même littéralement, l’identité d’autrui. Avant de repartir dans le Warp, le Rahan de Caliban a le temps de traiter son assassin de « Premier Fils » et de l’accuser d’être « la mort de son monde », ce à quoi Lionel répond que son titre correct est le tueur de bêtes. Fin de l’épisode.

Sur l’Invicible Reason, le Dark Archangel reçoit comme convenu Arnaid et Alpharius, qui est en fait venu lui proposer un coup de main, en toute amitié2, pour en finir avec la campagne d’extermination des Rangdan. Les pertes terribles souffertes par la Première Légion menacent en effet son statut et son prestige par rapport à ses sœurs, et pourraient faire échapper à El’Jonson le titre de Maître de Guerre, que ce visionnaire d’Alpharius anticipe déjà qu’il sera décerné par l’Empereur à l’un de ses fils dans un futur pas trop lointain (dès que les 20 Primarques auront été retrouvés en fait…wait a minut-). Bien que ne contestant pas l’argumentaire de son petit neveu/frère, Lionel se montre méfiant devant l’intérêt qu’il semble attacher à la prédominance des Dark Angels dans l’équilibre politique de l’Imperium, et après avoir menacé de le couper en deux, en toute amitié, pour le forcer à exposer ses véritables motifs (Alpharius n’aime vraiment pas Guilliman), il le renvoie sur son vaisseau où il lui fera savoir sa réponse sous une heure. Resté seul avec Arnaid, El’Jonson consulte son Capitaine pour avis secondaire, avant de lui révéler que l’énorme poids de… sa parole donnée l’empêche et l’empêchera toujours de placer son intérêt personnel avant celui de son seigneur. C’est sur cette déclaration de loyauté véritablement désintéressée que se termine notre histoire, qui démontre à quel point Lion El’Jonson est un végétal politique. Un concombre, pour être précis.

1 : Il insiste pour être désigné comme être membre de la XXème Légion, sans autre précision. Quel coup de chance tout de même qu’il ait le même nom que le Primarque pas encore découvert de cette dernière
2 : Et surtout parce qu’il ne peut pas blairer Guilliman, ce qui lui fait un point commun avec Lionel.

AVIS :

On retrouve dans ‘The First Legion’ le goût de Chris Wraight pour des petits exposés au débotté sur la géopolitique impériale au moment de la Grande Croisade (tendance déjà aperçue dans ‘Leman Russ : Le Loup Suprême’), et c’est tant mieux si vous voulez mon avis. S’il ne se passe pas grand-chose dans cette nouvelle, on n’en ressort pas pour autant frustré de sa lecture, l’échange entre Alpharius et Lion El’Jonson, qui permet d’identifier les points communs et les différences entre le premier et le dernier de cordée et leurs Légions respectives, ainsi que d’en apprendre un peu plus sur la manière dont les Legiones Astartes étaient perçues par Terra au moment où Pépé songeait à partir en pré-retraite dans le Bhoutan profond, valant son pesant de papier. Lionel y apparaît comme le type imbuvable socialement (il le reconnaît lui-même d’ailleurs) mais irréprochable moralement que les derniers ouvrages de l’Hérésie tendent à dessiner, tandis qu’Alpharius est dépeint comme un intrigant de première, n’ayant aucunement besoin d’un slideshow de la Cabale pour trouver des raisons de comploter dans le dos de tout le monde. Bref, une soumission solide de la part de Chris Wraight, qui fait honneur à ses deux Légions secondaires avec cette nouvelle.

A Game of Opposites – G. Haley :

INTRIGUE :

C’est malheureusement très peu traité dans les livres d’histoire impériaux, mais la bataille de Beta Garmon, aussi connue sous le nom de casse (de Titans) du millénaire, ne s’est pas tenue du jour au lendemain. Cette rencontre décisive entre renégats et loyalistes, et les milliards de morts qui en ont découlé, n’a été rendue possible que par le dévouement et le travail de l’ombre de Légions de sous-fifres, comme l’histoire dont il est question ici s’en fait écho. Bienvenue donc à la surface d’Epsilon Garmon II, planète du cluster garmonien que les Iron Warriors souhaiteraient fortifier pour ralentir l’arrivée prochaine de Guilliman et de ses hordes de Schtroumpfs. Le conditionnel est ici de mise car les efforts de terrassement des hommes de fer se sont jusqu’ici faits contrecarrer par les manœuvres destructrices d’une petite force de White Scars. Peu familiers des techniques de hit and run de leurs cousins des steppes, les fils de Perturabo sont perturbés par cette campagne d’un genre nouveau, où ils arrivent toujours trop tard pour empêcher les Space Bikers de sévir.

Fort heureusement, le Maître de Forge Xyrokles, affublé de son larbin et souffre douleur Phideark, ainsi que d’une ribambelle de Capitaines dont je vous épargnerai les noms, a un plan machiavélique pour venir à bout du péril jaune blanc à éclair rouge. Ayant récupéré dans un campement abandonné par ses ennemis quelques bouquins philosophiques signés de la main même de Jaghatai Khan et remplis d’aphorismes aussi profonds que « La taupe ne voit pas le vol de l’éléphant », « Pourquoi rester debout quand on peut s’asseoir » ou « Plus il y a de fous, moins il y a de riz », Xyrokles a tellement bûché sa philo1 qu’il est certain de pouvoir prendre les White Scars à leur propre piège, en réalisant un coup de billard à IV bandes à base de feintes, de retraites et d’embuscades tellement complexes que la majorité de ses sbires n’y blaire que dalle. Lorsque vient enfin le jour le plus long, le Khan Ishigu emmène ses motards énergétiques faire une petite virée dans un avant poste renégat, sans se doute un instant que ses minutes sont comptées.

Et en effet, le plan de Xyrokles se déroule comme sur des roulettes, la colonne blindée qu’il a envoyé leurrer les loyalistes au moment où ils commencent à se replier en bon ordre se révélant être un extra trop tentant pour qu’Ishigu et Cie résistent à la tentation d’y planter leurs pneus. Ce détour est toutefois lourd de conséquences pour les White Scars, qui se font surprendre par une contre-attaque vigoureuse de la part des Iron Warriors, et canalisés dans un goulet étroit débouchant sur la ligne de blindés du Maître de Forge, qui n’a plus qu’à donner l’ordre d’ouvrir le feu pour régler une fois pour toutes leur compte aux scarifiés d’en face…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur la légendaire flexibilité tactique des fils du Khan, qui avaient tout planifié depuis le début et cachés également une réserve mobile pour surprendre l’adversaire. Confrontés à une force anti-chars conséquente et bénéficiant de l’effet de surprise, Xyrokles et ses hommes ne font pas long feu (c’est la vieille histoire de l’artilleur artillé). L’honneur est toutefois sauf pour ce dernier, puisqu’il s’aperçoit après avoir été fait prisonnier que c’était Jaghatai Khan en personne qui était aux commandes dans le camp d’en face. S’en suit un échange d’amabilités qui nous permet d’apprendre que le Khan se tamponne le samovar avec la vérité impériale, qu’il considère poliment comme un avis parmi d’autres. Stupeur chez Xyrokles, qui en surhomme de principe, pensait que tous les loyalistes adhéraient scrupuleusement au dogme de Pépé. Il emportera toutefois ce secret dans la tombe, que son généreux vainqueur lui accorde en récompense de ses méritants efforts de réflexion, Jaggie Chan lui dévissant les cervicales d’un tour de main à la fin de leur échange. C’est qu’il a du pain sur la planche, et un retour sur Terra à préparer…Fin spoiler

1 : Ce qui est somme toute logique pour un grec ancien.

AVIS :

Je suis partagé sur la valeur de ce ‘A Game of Opposites’, qui comporte des éléments positifs comme négatifs. Pour commencer par ce qui ne fâche pas, j’ai apprécié le choix de Haley de donner une dimension, si ce n’est comique, au moins caustique, à ses Iron Warriors, qui font ainsi mentir leur réputation de guerriers prenant tout au premier degré. La dynamique entre Xyrokles et Phideark est particulièrement savoureuse, le second encaissant sans broncher toutes les punchlines que son supérieur lui balance à la tête. Dommage que le destin tragique du Coluche d’Olympia nous prive d’autres saillies drolatiques de sa part pour la suite de l’Hérésie. Cette nouvelle est également intéressante d’un point de vue fluffique, car elle donne à voir un Jaghatai Khan d’un pragmatisme assumé et presque hérétique, ayant pris parti pour son Père mais loin de se ranger à toutes ses vues, y compris sur des sujets aussi sensibles que la religion (il croit en la réincarnation). D’un autre côté, ‘A Game of Opposites’ pêche franchement pas son manque de suspens et son déroulement sans surprise. Car le résumé ci-dessus ne suit pas exactement le récit de Haley, qui choisit de révéler la présence du Khan au côté d’Ishigu dès le premier tiers de la nouvelle, ce qui condamne d’office le stratagème de Xyrokles à l’échec1. Le retournement de situation final et la victoire des White Scars sont donc aussi attendus que l’heure de la pause syndicale dans un guichet de poste, ce qui peut blaser le lecteur (en tout cas, ça a été mon cas). En conclusion, pas le meilleur texte de Guy Haley, mais pas désagréable ou inutile pour autant.

1 : Il n’y a que John French qui fait battre un Primarque par un Space Marine (‘The Crimson Fist’).

Better Angels – I. St Martin :

INTRIGUE :

Les Légions Space Marines sont un peu comme les filières post bac : il y en a pour tous les goûts et tous les niveaux. Si les impétrants ayant de la suite dans les idées et la volonté de faire carrière se rabattront sur des spécialisations ternes mais assurant la sécurité de l’emploi (BTS Gestion avec les Ultramarines, Bac Pro travaux publics avec les Imperial Fists ou les Iron Warriors, CAP Esthétique avec les Emperor’s Children…), les plus aventureux tenteront leur chance dans des cursus plus pointus, à leurs risques et périls. C’est ainsi que l’Empereur se retrouva avec des cohortes de philosophes désagrégés (Thousand Sons), théologiens en déshérence (Word Bearers), et vétérinaires ayant raté leur concours d’entrée (Space Wolves), qu’il dût bien recaser à droite et à gauche pour éviter la crise. Enfin, pour un temps. Mais, parmi tout l’Astartes, aucune Légion n’égale les Blood Angels en termes de réputation. Si on appelle les fils de Sanguinius (derrière ses ailes) des poètes, des peintres ou des danseuses, c’est pour une bonne raison : le Primarque exige que tout le monde pratique une discipline artistique, depuis le plus humble novice jusqu’au plus ancien des Dreadnoughts1. Notre héros, que nous allons suivre depuis le début de sa carrière jusqu’à l’arrivée de la flotte de la IXème en orbite de Terra, peu de temps avant le début du siège, ne fait pas exception. Jehoel (il faut croire que Joël était déjà pris) s’est ainsi spécialisé dans la verrerie, ce qui lui a attiré l’intérêt et le mentorat de son père génétique, souvent présent lorsque le souffleur fait parler la poudre le sable.

Ces rencontres ponctuelles mais fréquentes, si elles permettent aux deux surhommes de discuter technique et philosophie, amènent surtout le lecteur à suivre en filigrane la fin de la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus du point de vue d’un Primarque et d’une Légion particulièrement éprouvés par la traîtrise du Maître de Guerre, et le déclenchement de la baalédiction des fils de Malle, ou l’inverse. Finies donc les évocations de la prochaine reconversion des légionnaires en portraitistes et potiers une fois la galaxie conquise, et bonjour les sculptures de démons réalisées dans un état second, au grand déplaisir de Sanguinius – qui passe la nouvelle à critiquer Jehoel, ceci dit. Adieu aux riches galeries du Red Tear, et bonjour à la décoration minimaliste du Convenant of Blood, véhicule de courtoisie prêté par l’Imperium après le carambolage de Signus Prime. Lorsque St Martin décide enfin de mettre un point final à sa nouvelle, on apprend tout de même que si Sanguinius s’est montré aussi assidu dans ses discussions avec Jehoel au cours des décennies passées, c’est parce qu’il considérait que ce dernier était l’un des Blood Angels les plus bloodangeliques de la Légion, et pouvait ainsi se contempler à sa guise dans son interlocuteur. Un peu égocentrique le garçon, tout de même. Le rideau tombe sur la scène après que Jehoel ait montré à son pôpa la représentation idéalisée de Terra qu’il a réalisée avec de la pâte de verre, ce qui lui vaut les félicitations (enfin !) du jury, et que l’Ange ait balancé la remarque à connotation fataliste de rigueur, davantage pour le bénéfice du lecteur que pour celui de son fiston. Si jeunesse savait…

1 : À l’exception notable de la danse classique, après que le Vénérable Neolardon ait failli écraser Sanguinius en passant à travers le plancher du gymnase à la suite d’un saut carpé mal négocié.

AVIS :

Je placerais ce ‘Better Angels’ dans le prolongement de ‘Death of a Siversmith’/’Mort d’un Orfèvre’ (Graham McNeill), et pas seulement parce qu’il met en scène un protagoniste très porté sur les arts plastiques. On retrouve en effet, et surtout, dans cette nouvelle la volonté assumée de l’auteur de surprendre son public en livrant une histoire s’écartant largement du bolter porn qui est la norme de l’Hérésie d’Horus. Et, là encore, le résultat penche davantage vers l’exercice de style un brin forcé que vers la réussite incontestable. Ou peut-être n’ai-je pas lu assez sur Sanguinius et les Blood Angels pour tirer la substantifique mehoelle de ce texte ? C’est bien possible. Toujours est il que je sors du studio du Primarque à plumes un peu circonspect sur la valeur de cette soumission, qui aurait pu, pour reprendre son titre, être bien meilleure.

The Sinew of War – D. Hinks :

INTRIGUE :

Sur Macragge comme sur Terra, bien des millénaires plus tôt, la vile populace s’est soulevée contre ses justes et bienveillants maîtres, provoquant émeutes, massacres, feux de poubelle et occupations de ronds-points, tous crimes abominables mais heureusement sévèrement punis par les forces de l’ordre. Et en termes de répression policière, la capitale des 500 mondes a un avantage de taille et de poids par rapport à notre bonne vieille planète : Roboute Guilliman, génie précoce et baraqué, général visionnaire, humaniste convaincu, et fils adoptif du Consul Konor Guilliman, qui forme avec son collègue Gallan le duumvirat exécutif de l’espèce de république (il y a un sénat aussi) établie sur Macragge City. Occupé en Illyrium à pacifier une bande d’autochtones ayant eu la mauvaise idée de se rebeller contre l’ordre établi, notre héros a raté le début du soulèvement urbain qui a transformé la cité idéale de son enfance en champ de bataille. L’idéaliste, et un brin méprisant, surhomme a bien du mal à comprendre pourquoi diable une partie de l’armée s’est rangée du côté des casseurs, tout ça pour une bête histoire d’argent. C’est bien une réflexion de gosse de riches ça, Roro. Mais il lui faut attendre avant de consigner par écrit ses savantes réflexions sur les causes et les répercussions de ce mouvement social aussi inédit que violent : son père est resté dans la cité et a sans doute été pris pour cible par les fainéants et les sans dents. Il faut lui venir en aide.

Progressant rapidement vers le palais du Consul en distribuant quelques baffes aux mutins au passage, et utilisant son armure de scenarium pour passer entre les balles1, Gui est rejoint en chemin par Gallan, qui est venu lui aussi s’enquérir de la situation de son collègue de bureau. N’hésitant pas à joindre le geste à la parole, le Consul consort est même blessé dans la bagarre, écopant d’une estafilade au biceps pour preuve de son dévouement. Las, les deux compères arrivent trop tard pour sauver Konor (ce qui est triste) et les tapisseries (ce qui est pire). Papa Guilliman a été lâchement égorgé par ses assaillants, l’empêchant de dire adieu à son fils mais surtout de donner le nom des coupables. Bizarrement, il refuse catégoriquement que Roboute s’approche de lui dans ses derniers instants, allant jusqu’à le mettre en joue avec son pistolet pour le maintenir à distance. Le respect des gestes barrières jusqu’à la dernière seconde, on reconnaît bien là la trempe d’un vrai Macraggien. Konor a toutefois un message à faire passer à son fiston avant de mourir pour la patrie : une pièce frappée à l’effigie des deux Consuls de Macragge, et symbolisant le caractère éternel de la république, même en ces heures difficiles. Ou du moins, c’est ce que le cerveau embrouillé de Roboute en déduit, se souvenant d’une leçon de vie mémorable inculquée par son père avec un sesterce du même genre bien des années plus tôt. Sur ces considérations philsophico-fiduciaires, Konor passe de vie à trépas, provoquant une colère noire bleue chez son fils.

Convaincu par Gallan d’aller défendre le Sénat, probablement attaqué lui aussi par les vandales en sandales, Roboute sèche ses larmes et lèche ses armes, avant de se frayer un chemin jusqu’au parlement local en commettant quelques crimes de guerres au passage. On va dire qu’il bénéficiait de circonstances atténuantes. Pendant que Gallan tente d’aller raisonner les sénateurs, qui débattent férocement entre eux du meilleur moyen de châtier les gueux, Guilliman est envoyé se changer au vestiaire, son apparence dépenaillée risquant fort de provoquer des remous contre productifs dans les rangs de l’auguste assemblée. Cet enfilage de toge manque toutefois de tourner court pour le Primarque, qui se fait soudainement attaquer par le préposé aux cabines d’essayage, armé d’un poignard empoisonné. Le nez très fin de Guilliman lui permet de comprendre en un éclair que la même toxine a été utilisée sur Konor, et que c’est pour protéger son fils d’une intoxication involontaire que le Consul mourant l’a empêché d’approcher. Passé l’effet de surprise, l’assassin en puissance ne fait pas longtemps le malin face aux réflexes de mangouste et à la poigne de langouste de notre héros, qui ne parvient cependant pas à lui faire cracher autre chose que des bulles de bave (le bougre retourne son surn contre lui), à commencer par le nom de son commanditaire. Encore un crime crapuleux, c’est dingue ça. Il faudrait vraiment que les pauvres songent à être moins pauvres, ça réglerait beaucoup de problèmes d’un coup. Cette péripétie évacuée, il est temps pour Roboute de rejoindre Gallan sur l’estrade, afin de soutenir le coup d’état salutaire que ce dernier veut initier pour sauver la république…

Début spoiler…Mais, ô surprise, Rob’ est accueilli par un discours très critique de ce galopin de Gallan à l’encontre de son père, taxé de populiste et de socialiste par son homologue, et à l’annonce de son propre assassinat, pour le bien de Macragge. Evidemment, le « hum hum » que jette Guilliman juste après ruine un peu le groove de celui qui aurait bien aimé être empereur, qui se prend les pieds dans le tapis à tenter de justifier son double langage. Pas plus bêtes que la moyenne, les sénateurs comprennent vite que Gallan est le méchant de l’histoire, et qu’il a manigancé ce soulèvement populaire pour se débarrasser de ses rivaux et saisir le pouvoir. Roboute était parvenu à la même conclusion quelques instants auparavant en réalisant que la pièce que lui avait donné son père désignait en fait son meurtrier, puisqu’elle avait le profil de Gallan frappé sur ses deux faces2. Plus démasqué que Donald Trump au milieu d’une épidémie de COVID-19, le félon se fait appréhender par le service de sécurité, après que le noble Guilliman, ayant réalisé que tuer le traître de ses propres mains aurait été certes cathartique, mais contre-productif et contre ses valeurs, ait indiqué qu’il laisserait la justice suivre son cours. Devant tant de légalisme, les sénateurs ne peuvent que jurer allégeance au Primarque, exemple vivant d’une intégration réussie par un immigré méritant. L’histoire est en route pour Roboute…Fin spoiler

1 : Le pouvoir psychique caché de Guilliman est de faire voir flou à ses ennemis. C’est subtil mais très efficace. Ça marche malheureusement moins bien au corps à corps, comme Angron et Fulgrim le constateront.
2 : On pourrait dire qu’il aurait été plus efficace à Konor de simplement pointer du doigt Gallan au moment où lui et Roboute sont arrivés dans la pièce, mais l’histoire se serait terminée un peu brutalement.

AVIS :

Darius Hinks livre la version romancée de l’épisode le plus connu de la jeunesse de Roboute Guilliman (que David Annandale avait mystérieusement choisi d’ignorer dans la novella consacrée au Primarque), et le fait plutôt bien. Certes, si vous connaissez votre fluff, le suspense que l’auteur se donne du mal à entretenir jusqu’au bout de son récit tombe rapidement à l’eau, mais on ne peut pas reprocher à Hinks d’avoir voulu soigner sa sortie, et la relation de confiance qui existait auparavant entre les Guilliman et Gallan est un choix intéressant de sa part, qui peut en partie expliquer pourquoi le futur patron des Ultramarines a tendance à vouloir faire les choses tout seul de son côté. On glane également quelques informations sur la société de Macragge avant son intégration dans l’Imperium, ce qui est de l’ordre du notable. Il y avait sans doute moyen de capitaliser davantage sur cet événement fondateur pour expliquer la suite de l’histoire de Guilliman, voire l’Hérésie, voire le Sombre Imperium, ou, plus simplement, insérer quelques easter eggs saveur ultramarine (notons tout de même la mention faite à Tarasha Euten, Chambellan du Primarque et héroïne de l’audio book ‘Illyrium’ du même auteur) , mais pour une nouvelle de 16 pages, Hinks s’en sort très honorablement, autant sur le plan théorique que pratique.

The Chamber at the End of Memory – J. Swallow :

INTRIGUE :

Comme tous les créatifs peuvent vous le dire, ce sont les derniers moments avant le rendu final qui sont les plus stressants. Et bien que Rogal Dorn ne mérite pas franchement ce qualificatif, il partage néanmoins ce souci du détail et cette tendance au micro-management qui distingue les génies et les pervers narcissiques du reste de la population. Ayant pris son hoverboard gravitationnel et son mécapigeon holographique1 pour inspecter l’avancée des travaux, l’Homme de Pierre corrige et réajuste les milliers de petites variables qu’il est le seul à voir mais dont la victoire dépendra peut-être. Après tout, si Horus tombe des fortifications après avoir glissé sur un gravillon énergétique, la guerre sera tout de même gagnée. Alors qu’il s’approche de l’Investiary, l’amphithéâtre anciennement décoré de 20 statues monumentales de la fratrie impériale, et dont deux des plinthes sont maintenant vides, une explosion attire son attention. Il semblerait que l’une des tours de stockage de la zone ait contenu du nitrate d’ammonium, et pas les précieuses antiquités collectionnées par Malcador le Sigilite, qui avait demandé au Prétorien de Terra de ne pas raser le quartier pour en faire des gravillons (énergétiques), comme il en a la sale habitude. N’écoutant que son statut de protagoniste de nouvelle, Rogal se hâte sur les lieux pour mener sa petite enquête.

Sur place, il constate qu’un début d’incendie a ravagé la façade, et que l’équipe en charge de l’audit/expropriation/démolition a connu une fin horrible et peu commune, les cadavres jonchant l’intérieur du bâtiment semblant avoir été causé par des ondes de choc, des explosions internes ou vaporisations pures et simples de l’individu, ce qui n’est certes pas banal. Pas banale non plus est la sensation persistante et croissante qu’éprouve le Primarque qu’il doit faire demi-tour au fur et à mesure qu’il progresse vers l’épicentre de la catastrophe. Ce mauvais pressentiment n’est pas suffisant pour arrêter la marche (du fils) de l’Empereur, mais les apparitions psioniques (des démons libres de droit, pour faire simple) qui l’attaquent dès qu’il pose le pied dans l’antichambre finale le convainquent de consulter un spécialiste, une fois les fâcheux renvoyés dans le Warp. Et justement, il a une soute pleine d’Archivistes sous scellés en orbite, qui n’attendent que son bon vouloir ou l’arrivée d’Horus pour se rendre utiles2.

Le destin ayant désigné le frère Yored Massak pour prêter main, ou plutôt tête, forte à son Primarque, nous suivons les deux guerriers revenir jusque dans la salle piégée, où les horreurs éthérées re-spawnent avec diligence, pour se faire à nouveau bannir en deux temps trois mouvements par nos héros. Si ces derniers étaient prêts à combattre des ennemis de cette trempe, qui ont fait leur fête aux malheureux larbins ayant eu la mauvaise idée de vouloir faire leur boulot, ils se figent sur place en remarquant les symboles qui marquent les deux gigantesques portes qui terminent le corridor : II et XI

Il s’agit bien entendu d’une référence aux deux Primarques disparus, frappés d’anathème par l’Empereur en personne, mais dont l’éphémère existence reste de notoriété publique au sein des Légions de l’Astartes. Pendant que Dorn se creuse les méninges pour percer ce mystère insondable, Massak parvient finalement à mettre le doigt, ou plutôt la tête, sur le sentiment de déjà perçu qui l’habitait depuis son entrée dans la tour. L’installation psychique de cette dernière a été effectuée par Malcador en personne, l’Archiviste repentant en est certain. Et l’intéressé confirme aussitôt sa déclaration, en arrivant sans crier gare dans la pièce. Ayant envoyé Massak poser des parpaings à l’extérieur pour avoir un peu d’intimité, le Régent de Terra a enfin la possibilité de s’expliquer auprès d’un Rogal Dorn qui sent de manière confuse qu’il s’est fait mindfucker par l’éminence grise dans un passé plus ou moins lointain. Il ne s’explique en effet pas son absence totale de souvenirs de Deuzio et Onzio, alors qu’il dispose d’une mémoire eidétique tout ce qu’il y a de plus primarquielle. Et Malcador d’avouer que c’est bien lui qui est responsable de ce trou de mémoire généralisé, touchant à la fois les Astartes des Légions décapitées (avant qu’ils puissent être réformés et repackagés), mais également les Primarques ayant connu personnellement les fils indignes de Pépé. Mais attention, il avait une bonne raison de le faire, se dépêche-t-il d’ajouter avant de finir tronçonné par l’Homme de Pierre : c’est Dorn et ses frères eux-mêmes qui lui avaient demandé un brainwash pour permettre à l’Imperium de se relever d’une tragédie si terrible qu’elle avait manqué de le mettre à genoux. L’Empereur, comme à son habitude, avait tout vu/su mais n’avait rien dit/fait. Classic MoM move here.

À moitié convaincu par l’explication du Sigilite, qu’il ne peut plus blairer depuis le début de la fortification de Terra, Dorn fronce les sourcils tellement fort que son interlocuteur décide de lui accorder un droit de flashback limité et provisoire sur son passé oublié, afin qu’il puisse se rendre compte par lui-même de la bonne foi du Régent. EVIDEMMENT, le lecteur ne sera pas convié à cette introspection douloureuse, dont les effets se dissipent rapidement mais qui convainc Dorn de la véracité des dires de Malcador, et surtout de la nécessité que ce passé, semble-t-il absolument honteux, de la Grande Croisade ne refasse jamais surface. Lorsqu’il ressort de la tour, il ordonne donc aux équipes venues en renforts de la détruire (plus de gravillons !). De toute façon, Massak avait achevé une copie conforme du bâtiment avant que le sort ne soit rompu par un claquement de doigts de Rogal Dorn, ce n’est donc pas une grande perte d’un point de vue stratégique.

1 : Surtout pour se délecter de le voir ch*er sur les hélotes en contrebas, je pense. Il faut bien trouver un moyen d’évacuer le stress quand on ne boit/fume/joue/prie/couche/rigole pas.
2 : Enfin, plus utiles qu’ils ne le sont à l’heure actuelle, le tricotage d’écharpes pour les soldats impériaux de faction sur les murailles du Palais n’exploitant pas tout le potentiel des Anges de la Mort susnommés.

AVIS :

James Swallow touche à l’un des mystères fluffiques les plus importants du background de l’Hérésie d’Horus dans ce ‘The Chamber…’ et parvient à nous vendre une once de révélations sur la destinée des Primarques disparus comme s’il s’agissait d’une avancée majeure du lore. C’est en tout cas le sentiment qui dominait chez votre serviteur à la fin de la lecture de cette nouvelle, qui contient trop de micro-informations et de sous-entendus sur lesquels gloser à l’infini pour ne pas mériter sa place dans la liste de lecture de tout fanboy/girl revendiqué.e. Mais on n’est certes pas au niveau d’un ‘Legion’ ou d’un ‘Saturnine’ en termes de coup de théâtre, ce qui est somme toute logique pour une histoire au tirage assez confidentiel telle que ‘The Chamber…’. Notons au passage la présence que quelques bouts de fluff « autres » au fil des pages, qu’il s’agisse du Palais Impérial ou de l’armement de Rogal Dorn, ainsi que le retour d’un second couteau souvent employé par Swallow en la personne de Yored Massak (‘La Fuite de l’Eisenstein’, ‘Garro’), et restons-en là.

The Will of the Legion – A. Clark :

INTRIGUE :

The Will of the LegionLa 3ème flotte d’expédition de la Grande Croisade, engagée dans la joyeuse réunification humanitaire de la galaxie désirée par l’Empereur, est tombée dans une embuscade à la sortie d’une rocade warpienne. Assaillis par l’armada destroy mais pléthorique des Driftborn, une civilisation humaine ayant passé quelques millénaires à vivoter dans une ceinture d’astéroïdes en s’adonnant à la récupération et à l’upcycling des épaves passant à portée de leurs cités roches (les ruches, ce sera après le passage à l’âge impérial), les Imperial Fists qui constituent le gros (et le grand) des forces expéditionnaires se font donc un devoir de repousser les piteux abordages de leurs lointains cousins. Nous faisons ainsi la connaissance du Capitaine Hashin Yonnad, de la 39èmeCompagnie Maisonnée d’Inwit, alors qu’il mène une escouade de Breachers, le corps anti-émeutes de sa Légion, dans la purge du Tribune, vaisseau amiral de la flotte impériale. Ayant massacré la plupart des malheureux corsaires ayant croisé sa route, et fait, dans son infinie bonté, prisonniers les autres avant qu’ils ne meurent de froid  dans les coursives extérieures mal isolées du Tribune, Yonnad reçoit une convocation urgente à se rendre à l’autre bout du vaisseau, où il embarque sans tarder dans un Stormbird, en compagnie de ses vétérans… et de Rogal Dorn, rendu très chafouin par la tournure prise par les événements1.

Rendu perplexe par l’absence de briefing quant au déploiement de la force de frappe Astartes que le Primarque emmène à l’assaut de la principale cité ennemie, Yonnad demande respectivement à son boss de bien vouloir partager sa gnose avec ses fistons, afin que ces derniers soient en mesure de mener à bien ses plans. Dorn s’exécute, et indique à ses Légionnaires que leur cible est un dôme stratégiquement important, dont la capture mettra fin au conflit de façon rapide. La moue désapprobatrice (encore plus que d’habitude) qu’il affiche fait cependant rapidement comprendre à Yoyo que les Driftborn ont épuisé la patience, pas très fournie de base, du Primarque, et que ce dernier considère très clairement l’annihilation pure et simple de ces derniers comme une option de travail. Après tout, la mort, autant que le mur, est son métier.

Débarqués en plein cœur du marché aux puces local, les Imperial Fists tracent la route sans trop (trois morts) forcer jusqu’à leur objectif, massacrant l’arrière garde adverse au passage, un Rogal Dorn toujours aussi revêche collé à leur train. Papa se contente en effet de marcher derrière sa marmaille en fronçant très fort les sourcils, observateur plutôt qu’acteur de la sanglante et implacable progression impériale. Une fois le dôme sécurisé, il demande, que dis-je, il orDORNne à ses Techmarines de bidouiller les consoles de l’endroit afin de pouvoir disposer d’un gros bouton (sans doute jaune) qui pourra couper le chauffage et l’air conditionné  l’échelle de la cité entière d’une simple pression, avec des conséquences funestes pour qui ne porterait pas une armure énergétique (ou s’appellerait Marneus Calgar). Trop snob pour se salir les mains, il somme le brave Yonnad de se mettre en position devant le buzzer magique, tandis que lui donne une dernière chance à ses malheureux adversaires de se rallier à l’Imperium. Ayant bien fait comprendre aux Driftborn qu’il avait été bien gentil jusqu’ici, mais qu’il n’avait, en sa qualité d’architecte de la destinée galactique de l’humanité (d’abord) et de décorateur intérieur de l’Empereur (surtout), absolument rien à carrer de leur civilisation minable, il leur donne royalement impérialement quelques instants de réflexion après avoir terminé sa harangue. Assez pour plonger Yonnad dans de profondes considérations éthiques quant à la trop grande facilité qu’il aurait à presser le bouton, et donc à signer l’arrêt de morts de millions d’êtres humains, pas coupables de grand-chose au fond, sur un simple branlement du chef de son Primarque. Fort heureusement pour notre héros philosophe, les Driftborn choisissent sagement de capituler, rendant leur dépressurisation inutile. La nouvelle se termine sur cette victoire décisive de la Team Pépé, qui ne suffit cependant pas à dissiper les doutes du Capitaine Dubious. Béni soit l’esprit…

1: Cela se perçoit dans la manière dont il prononce « connerie ». Et je ne parle pas de son accent chantant de Mareuh-seilleuh.

AVIS :

Petite nouvelle de bonne facture de la part d’Andy Clark, qui donne un peu de profondeur tant à Hashin Yonnad, avant sa sortie de route sur Phall, qu’à Rogal Dorn, qui gagne ici quelques précisions fluffiques qui ne manqueront pas d’intéresser le chaland, en attendant que le Primarque trumpien (build the wall!) ne dispose de son tome dans la série du même nom. Les lecteurs du troisième livre Forge World de l’Hérésie d’Horus apprécieront sans doute également de revoir apparaître les Driftborn du Consus Drift, présentés dans ce même ouvrage il y a quelques années. Narrativement parlant, l’intérêt principal de The Will of the Legion repose toutefois dans ses dernières pages, et la réalisation incrédule et dérangeante par Yonnad de son total endoctrinement à la cause de Dorn, dont il appliquera sans hésiter tous les ordres, même les plus immoraux. Nul doute que Clark voulait faire ressortir par cette réflexion intérieure toute l’ambivalence de l’Hérésie d’Horus, dont beaucoup des combattants se sont retrouvés dans un camp qu’ils n’avaient au final pas vraiment choisi, simplement parce qu’ils s’étaient contentés de suivre l’exemple, presque irrésistible, de leur Primarque. Il réussit bien son coup, et souligne donc de manière convaincante qu’entre « gentils » et « méchants », la ligne est souvent des plus fines.

Skjalds – N. Kyme :

INTRIGUE :

Un monstre rôde dans l’arrière-pays de Fenris, attaquant des villages isolés et massacrant tous leurs habitants, depuis le huskarl sans défense jusqu’au bébé sans peur. Un jeudi normal sur un monde hostile, en quelque sorte, sauf que le monstre en question came to the wrong neighborhood, à savoir celui de Baerelt, Torvur, Ulfvye et Laggenhuf. Ces quatre hardis chasseurs ayant chacun perdu un ou plusieurs êtres chers dans l’attaque de l’innommable et innommée bestiole, ils ont fait le serment de traquer cette dernière et de mettre fin à ses déprédations. Et tant pis pour la biodiversité terrestre fenrissienne, qui se porte parfaitement bien vous pouvez me croire. L’histoire commence alors que notre petite bande est en train d’essayer d’allumer des torches pour y voir quelque chose dans la tempête de neige nocturne qui s’est abattue sur eux. Ce qui est bien le cadet de leurs soucis, car des profondeurs de la toundra jaillit bientôt un mini boss, une draugr.

Cette dernière (car le cadavre desséché et tirant la langue qui fond sur les chasseurs pour leur rouler des gamelles est indubitablement féminin) donne du fil à retordre aux humains, qui finissent toutefois par en venir à bout d’un jet de torche bien placé, mais perdent une lance dans la bataille. Ce qui est presque aussi grave que la mort d’un guerrier, si on écoute le vieux ronchon de service (mais expert en lance, sans doute parce qu’il a le bras fort), Ulfvye. Malgré l’issue heureuse de cette bataille, il ne fait pas de doute pour Baerelt que la draugr n’était qu’une vamp opportuniste, et pas la bête responsable de tous les malheurs de sa communauté. La petite troupe reprend donc sa marche sous un léger crachin (humour), et finit par bivouaquer dans une caverne miraculeusement vide de tout prédateur alpha. Le temps gagné à ne pas avoir à faire la peau à un phacochère laineux ou à un gigagolin est utilement mis à profit pour échanger quelques récits épiques au coin d’un feu de brindilles. Transformés en skjalds pour l’occasion, les compères s’écharpent sur la véridique légende du Russ, l’incarnation de l’hiver fenrissien, considéré par l’un comme un géant à lance de gel, par l’autre comme une tempête de neige douée de raison, par le troisième comme un loup géant qui accompagne les âmes dans l’autre monde, et par le dernier comme un roi. Et comme le gage de cette veillée était manifestement le premier tour de garde pour l’histoire la plus pourrie, c’est Baerelt le barbant qui s’y colle.

Le lendemain, les chasseurs se remettent en route et parviennent à un village qui a reçu la visite du monstre il y a peu de temps, comme les cadavres massacrés et à moitié boulottés des habitants en témoignent. S’étant rendus compte que quelque chose ou quelqu’un était toujours présent sur place, nos héros convergent sur la salle commune de la bourgade, qu’ils trouvent en effet occupées par un animal gigantesque, recouvert d’une fourrure hirsute, munis de crocs acérés et dégageant une odeur abominable. Vous l’avez compris, c’est Leman Russ en personne (qui se fait appeler ici Jotun, pour préserver son anonymat sans doute) qui fait son apparition dans l’histoire, et après avoir indiqué aux traqueurs tétanisés par son aura primarquielle qu’il est également sur la piste du gros gibier, accepte que ces derniers le suivent dans son pistage. Il a pour cela une méthode infaillible : suivre les loups.

Sortis du village à la suite de leur nouveau copain, Baerelt et Cie ne tardent pas à se rendre compte que si les loups peuvent être suivis, ils peuvent également suivre. Aussi, lorsqu’une meute de six herravargr (des loups géants) encercle le club des cinq au sommet d’une falaise, l’ambiance retombe un peu. Le combat qui s’en suit se termine par une nouvelle victoire de l’équipe bipède, en grande partie grâce à l’intervention efficace de Jotun, mais Ulfvye est gravement mordillé dans la bagarre, ce qui ralentit la progression de ses camarades. Comme la veille au soir, les chasseurs passent le temps en devisant au coin du feu et c’est au tour de Jojo de donner sa version du mythe de Russ, qu’il connaît sans doute mieux que la moyenne. Et en toute modestie, il choisit de raconter son histoire (sans dire qu’il s’agit de lui, évidemment), celle de l’enfant sauvage élevé par les loups et adopté par un roi de Fenris, avant que l’Empereur ne vienne plomber l’ambiance d’un petit gueuleton entre copains, on connait la suite.

Le jour suivant, la traque reprend et amène les chasseurs jusque dans une forêt, où ils croisent un Wulfen bien amoché sur le bord du sentier. Il ne fait aucun doute que le lycanthrope a combattu la bête (et a perdu), mais plutôt que de venir en aide à son fiston poilu, Jotun continue sa route en laissant le wyrd du comateux faire son office. Un peu plus loin, c’est le grand ménage parmi les suiveurs du Primarque, Ulfvye décédant d’une hémorragie interne, et Torvur et Laggenhuf ratant leur test de commandement lorsqu’ils entendent le monstre faire sa balance en préparation du combat final. Ne reste donc plus que Baerelt pour sauver l’honneur des péquenauds de Fenris, ce qu’il fait en partant à la poursuite de Jotun, qui n’a pas attendu de voir qui lui collait au train pour régler ses comptes avec le monstre de la pampa…

Début spoiler…Ou plutôt, les monstres. Car c’était un bien un couple d’ours géants avec des bois de cerf, ou beer en langage scientifique, qui était responsable de tout ce tintouin. N’étant venu qu’avec une hache même pas énergétique pour mieux se fondre dans la masse, Leman se retrouve rapidement dans le mal. Et même si l’andouille parvient à saisir un de ses adversaires par les andouillers, dans le but de lui tordre le cou jusqu’à ce que mort s’en suive, cette manœuvre n’a de chances d’aboutir que si elle n’est pas interrompue. Il faut donc que quelqu’un distraie Maman Ours jusqu’à ce que Boucles d’Or ait fini le sale boulot. Et ce quelqu’un, ça ne peut être évidemment que Baerelt. Enfin, pendant à peu près trois secondes, car notre héros est ensuite rejoint par le Wulfen croisé un peu plus tôt, assez remis de ses émotions pour demander une revanche à ses vainqueurs. Bilan de cette deuxième manche : une nouvelle victoire de la grande ourse sur Mini Loup, qui finit la baston en deux morceaux, mais de très peu. La bête fauve s’écroule en effet quelques instants plus tard, cannellisée à titre posthume par le Space Wolves déchu1. En arrière-plan, Jotun avait réussi à décoller les cervicales à l’autre affreux, ce qui met fin aux déprédations de Baloo et Baloote. Notre histoire se termine sur l’arrivée d’un Thunderhawk, venu raccompagner le patron vers le Croc où une mission importante l’attend sans aucun doute. On ne peut pas passer sa vie à se ressourcer dans la nature quand on est un Primarque, et c’est bien dommage…Fin spoiler

1 : Ce qui est finalement un destin enviable pour un membre du rout, puisque cela fait ch*er les Dark Angels.

AVIS :

Nick Kyme revient à ses anciennes et velues amours (les Salamanders étant plutôt écailleux, comme chacun sait), avec ce récit fenrissien de facture classique. Fort heureusement pour nous, l’auteur a progressé, ou s’est davantage intéressé à son sujet, depuis l’époque héroïque de ‘Thunder from Fenris’ et ce ‘Skjalds‘ s’avère être une lecture plaisante… au premier degré1. Si l’intégration de cette histoire dans l’anthologie ‘Blood of the Emperor‘ retire évidemment tout suspens sur la véritable identité de Jotun, cette absence de surprise est compensée par d’autres éléments intéressants, à commencer par une intrigue plus surprenante (là encore, dans le bon sens du terme) qu’à l’accoutumée pour une nouvelle de Kyme: le premier accrochage avec le.a draugr, dont on ne sait pas s’iel est le monstre traqué par les chasseurs constitue ainsi une sorte de prélude sympathique au reste du récit. Le choix de l’auteur de narrer son récit avec une perspective « humaine » lui permet également de glisser quelques infos sur la manière dont Russ considère l’Empereur, ses frères, sa Légion et son rôle dans l’Impérium, à la manière de confidences échangées sans arrière-pensées, pour le seul bénéfice du lecteur. Enfin, cette nouvelle n’est pas avare en fluff (pas moins de quatre légendes différentes sur le Russ, tout de même) ni en fragments de lore Space Wolves: je pense particulièrement aux considérations du Primarque sur les Wulfens, qui sont à replacer dans la saga du rout2, mais également au rôle proprement héroïque (au sens grec antique du terme) que Leman Russ choisit d’occuper dans la culture de Fenris, en tant que guerrier solitaire accomplissant des exploits pour le compte d’un peuple qui ignore sa véritable identité. Bref, une nouvelle qui vaut tout à fait le détour pour qui s’intéresse aux mythes et légendes du Vlka Fenryka, et un pas accompli par le skjald Nick Kyme sur le chemin de sa rédemption littéraire.

1‘Thunder from Fenris’ valant également le détour, mais pas d’une façon dont son auteur serait fier.
2Avant ou après la campagne de Dulan, pendant laquelle les Space Wolves apprennent que leur père savait pour les Wulfens? Si l’absence de réaction des deux Astartes qui servent de Kaptains à leur Primarque devant le cadavre de l’homme loup à la fin de l’histoire n’est pas un bête oubli de Kyme, ce serait plutôt la deuxième option qui tient la corde.

Champion of Oaths – J. French :

INTRIGUE :

Il y a des entretiens d’embauche plus facile que d’autres. Alors que la majorité d’entre nous a juste à savoir nommer trois qualités et trois défauts pour convaincre le recruteur, Sigismund des Imperial Fists va vraiment devoir donner de sa personne pour obtenir son dream job, lui. Notre homme candidate pour devenir le Maître du Temple, fonction honorifique s’il en est au sein de la VIIème Légion puisque les Templiers en question gardent le… temple du Phalanx où les Frères de Bataille jurent fidélité à l’Empereur et à Rogal Dorn. Pour obtenir ce poste convoité, l’impétrant doit vaincre en combat singulier la totalité de ses camarades, soit 199 Astartes vétérans à se farcir les uns après les autres. Même pour un guerrier de la trempe de Ziggy Jaune d’Œuf, l’épreuve est difficile, et notre héros encaisse les coups et les bosses au fur et à mesure que les duels se succèdent.

Cet affrontement au long cours est entrecoupé de flashbacks nous renseignant sur la trajectoire de Sigismund, depuis son enfance malheureuse dans les camps de réfugiés de Turquie (rebaptisée plateau ionien en M31), où il vit sa protectrice se faire tabasser à mort par une bande de wesh sanguinaires, jusqu’à son entraînement sous la conduite du maître d’armes Appius, alors qu’il n’était encore qu’un jeune et prometteur jaunard. L’occasion pour nous d’en apprendre plus sur la motivation profonde de Sigismund, qui va toujours de l’avant parce qu’il sait que les Space Marines ont le devoir de se battre à la place de ceux qui ne le peuvent pas. C’est beau, c’est noble, c’est grand, c’est corporate. Ce petit gars aurait pu faire Miss France, s’il n’avait pas choisi une autre voie.

Retour au Temple, et au boss de fin de la série infernale du Zig. Après avoir fisté sans répit et écopé de quelques bleus au passage, ne reste plus que ce bon vieil Appius en personne à maraver. Le problème, c’est que le vétéran a assez mal vieilli, et s’est fait enfermer dans un Dreadnought depuis l’époque où il refaisait le portrait de son padawan à grands coups d’espadon. Le combat n’est pas des plus équitables, mais les Imperial Fists sont du genre exigeant. Malgré un coup de moins bien passager, et un revers de bouclier énergétique en pleine face, Sigismund vient à bout de cet ultime adversaire en lui coupant le câble (ce qui est cruel quand on est confiné à un réservoir de liquide amiotique, tout de même). Félicité par Rogal Dorn en personne, qui était là incognito pour suivre l’épreuve pratique de son fiston favori, Sigismund devient officiellement le Maître des Serments, et reçoit l’épée de fonction qui va bien en reconnaissance de son nouveau statut. Un petit passage à l’infirmerie pour mettre de l’arnica (eh, c’est jaune aussi) sera sans doute nécessaire après cela…

AVIS :

John French se fait plaisir en retraçant en quelques pages bien senties la trajectoire de l’un des personnages les plus marquants des Imperial Fists pendant la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus (et même après cela), depuis ses humbles débuts jusqu’à sa prise de fonction comme Enfant de Juron. On peut y voir un avant-goût et un condensé du roman qu’il écrira un peu plus tard sur le même personnage, car tout est déjà bien en place à la conclusion de ces douze pages. L’exemple-type de la petite nouvelle à vocation fluffique, sans ambition particulière en matière d’intrigue mais très satisfaisante tout de même pour les amoureux de background, et grâce à la maîtrise consommée que l’auteur a de son sujet. Bref, un incontournable si vous êtes fan des Imperial Fists et/ou des Black Templars, ou tout simplement de l’Hérésie d’Horus en tant que telle.

***

Voilà qui termine cette revue de ‘Loyal Sons, une anthologie à l’image de la plupart des recueils de nouvelles de la Black Library, c’est à dire alternant le bon et le moins bon. La balance étant en faveur du qualitatif, pour autant que je puisse le dire, je ne déconseille pas l’acquisition de cet ouvrage, mais ne vous ruez pas dessus en pensant que les personnages mythiques qui y sont décrits sont la garantie d’histoires de meilleure facture que celles que l’on peut lire habituellement dans des pages siglées BL. Ce serait aller à l’encontre d’une grosse désillusion… A la prochaine pour de nouvelles chroniques irrévérencieuses au possible!

 

BLOOD OF THE EMPEROR [HH]

Bonjour et bienvenue dans cette revue de ‘Blood of the Emperor‘, une anthologie de nouvelles centrées sur les fils de l’Empereur, ces fripons de Primarques. Prenant la suite de ‘Sons of the Emperor‘ et ‘Scions of the Emperor’, Blood of the Emperor‘ sera sans doute le dernier volet de cette mini série de recueils primarquiels, la fin de l’Hérésie approchant fortement au moment de la sortie de cet opus. Rassemblant 6 nouvelles, dont 5 inédites (la dernière, ‘The Will of the Legion’, étant initialement sortie dans le cadre de la Black Library Celebration Week 2020), ‘Blood…‘ s’avère moins consistant que ses aînés, mais s’il y a une chose que l’on apprend en lisant de la GW-Fiction, c’est que la taille (ou plutôt, le volume), ne fait pas tout. Ceci dit à 15€ les 150 pages, on est en droit de considérer l’objet comme étant honteusement cher, toute choses égales par ailleurs.

Sommaire Blood of the Emperor (HH)

Niveau casting, peu de surprise: on retrouve six auteurs bien connus des amateurs de la Black Library, même si certains commencent ici (Andy Clark), ou peu s’en faut (Mike Brooks), leur épopée hérétique. Par niveau d’expérience croissant, on retrouve ensuite David Guymer et Chris Wraight, Nick Kyme, et le positivement vénérable Graham McNeill, qui n’en finit plus de revenir à sa période horusienne. Sans plus attendre, ouvrons donc l’objet du délit (et sa couverture illustrée par la célèbre allégorie d’Horus et son air-fau[ssement]con) et découvrons de nouvelles facettes de la personnalité des fistons de notre cher Pépé.

Blood of the Emperor

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Lupus Daemonis – G. McNeill :

INTRIGUE :

Sur Cthonia, la vie est d’une dureté et d’une violence absurde. Les meurtres et pillages sont monnaie courante (par contre il n’y a pas de monnaie, c’est trop avancé pour cette brillance société), les dizaines de clans tribaux se disputant ressources et territoires passant leur temps à se fritter les uns aux autres. Une vie humaine vaut moins qu’un couteau à huître bien aiguisé, et on apprend aux enfants dès leur plus jeune âge à ne pas se laisser prendre vivant par l’ennemi1. Les ados ne rêvent que du jour où ils auront tué leur premier adversaire au combat, mutilé son cadavre et gagné le droit de faire la ola autour de leur suprême leader pendant qu’il décapite à l’opinel une malheureuse victime. Bref, c’est du grim.extra.dark auquel nous avons droit en guise de décor, dans lequel évolue tant bien que mal notre héros Nagui. Euh pardon, Nergüi.

Nergüi occupe une place à part, et pas vraiment enviable, parmi les Reivers (son clan d’adoption). Il a été trouvé en train de pendouiller à un croc de boucher par le puissant Khageddon, qui décida de le sauver du destin de cheeseburger auquel il était destiné, pour des raisons qu’il a lui-même du mal à s’expliquer. En fait, toute la tribu déteste et craint en même temps Nerguï, dont le nom signifie « personne » dans le chantant dialecte chtonien. Ce patronyme lui a été donné par Khageddon, là encore sur un éclair de génie non expliqué, et soi-disant pour assurer la protection des Reivers. La menace qui pèse sur ces derniers est laissée à l’imagination du lecteur, mais ce n’est en tout cas pas Nerguï qui y contribuerait de façon sérieuse. Notre héros est un avorton couturé de cicatrices, doté d’un corps de lâche mais d’une résilience hors du commun, ce qui l’aide à encaisser les nombreuses bastonnades auxquelles il est régulièrement sujet. Ah, et il a des yeux gris vert aussi. Qui doivent sans doute servir à envoyer des clins d’œil au lecteur sur sa véritable identité, au cas où cela serait nécessaire.

Après avoir vu ses camarades être « diplômés » sans lui grâce à leur participation à un raid contre les Deeprats, avoir échappé de peu à la mort des mains du bully de service, balancé le cadavre de celle qui a eu le malheur de prendre sa défense et s’est donc faite poignarder pour la peine dans une faille magmatique, avoir failli être poussé à son tour dans la faille par ce père indigne de Khageddon (qui passait par là et ne maîtrise pas bien ses pulsions), le tout en l’espace de 82 minutes, Nerguï décide qu’un petit break ne lui ferait pas de mal. Il part donc  pour la surface de Cthonia voir si l’herbe y est plus verte, ou la lumière plus bleue, que dans les cavernes des Reivers. Sur le chemin, il croise un supplicié en fin de vie qui lui servira de toute première victime (on n’oublie jamais sa première fois il paraît), avant d’arriver enfin à l’air libre.

Là, après avoir constaté que tout est aussi abandonné qu’on le lui avait dit, mais construit à l’échelle 3:1 (ce qu’on ne savait pas, et qui ne sert à rien dans l’histoire, mah bon), il perturbe les fouilles entreprises par ce que l’on devine être une expédition de l’Adeptus Mechanicus. Les Skitarii de garde ayant réglé leur protocole d’interaction avec les locaux sur le mode ‘Murica, ils tirent à vue sur le pauvre Nergüi, qui parvient tout de même à en tuer un au corps à corps et à lui piquer son fusil avant de repartir en sous-sol. S’il espère que le récit de ses exploits et le cadeau de ce trophée peu banal à Khageddon lui permettront de se faire accepter comme guerrier scarifié chez les Reivers, il lui faudra rapidement tempérer ses espérances. Sous ses abords de brute épaisse, Khag’ est un érudit, qui comprend que son punching ball adoptif s’est fait un ennemi un peu plus balèze que les bandes de goules aux yeux bleus qui hantent la surface de Cthonia. Il lui met donc une mandale paternelle pour lui apprendre la vie pendant que le plafond commence à s’écrouler sur la tribu, catastrophe causée par l’arrivée en termite des forces du Mechanicum. Il faut croire qu’ils pucent tout leurs fusils. Qui pourrait les en blâmer ceci dit.

Dans le séisme qui s’en suit, Nerguï, qui est passé en mode adolescent rebelle en lutte contre l’autorité depuis sa sortie à l’air libre, décide pour la première fois de rendre les coups, et plante donc son couteau dans le cœur de Khageddon, pour l’ensemble de son œuvre dirons nous. Mais attention, il le fait avec la bénédiction de ce dernier, dont les desseins resteront à jamais un mystère pour la science je pense. Dans ses derniers moments, Khageddon accomplit sa cryptique destinée en chuchotant à l’oreille de Nergüi son véritable nom. Et là, surprise.

Non pas qu’apprendre que Nergüi = Horus soit à ce stade une révélation sidérante (si c’est le cas, vous avez peut-être raté le titre de l’ouvrage et le titre de la nouvelle, qui donnaient tout de même des bons gros indices, hein). Mais c’est ce que cette connaissance déclenche chez notre héros qui est proprement bluffant. En quelques mots, Horus apprend par cœur tous les articles de Wikipedia, et envoie un poke psychique à son Pépé qui attendait telle la sœur Anne dans sa tour terrane, et contemplait la galaxie d’un air pensif en se demandant ouksé que ses fistons étaient, nom de Lui-Même. L’Empereur a alors ces trois mots éternels : +Pas trop tôt+, qui font, par absence de meilleure image, évoluer Horus. En mode Pokemon, exactement. Adieu au Magicarpe maigrichon et emo qu’était Nergüi, et bonjour au Léviathan majestueux mais colérique qu’est Horus. La nouvelle se termine sur la promesse d’une réunion prochaine entre le Père et le fils, si tant est que ce dernier ne massacre pas à mains nues les pauvres émissaires de l’Omnimessie. Ça m’étonnerait pas qu’il ait un trouble du caractère, ce petit gars.

1 : On les abandonne aussi dans les souterrains pour voir s’ils ont un sens de l’orientation correct. C’est une éducation complète(ment barge).

AVIS :

Graham McNeill ne fait pas dans la subtilité avec cette nouvelle horusienne, aussi larger than life que son héros (quand il adopte enfin sa forme finale, s’entend). Si le lecteur voulait avoir des révélations sur l’enfance du Primarque #1, avant que l’Empereur n’obtienne le droit de garde, il en aura certes pour son argent. Savoir que penser de ces révélations, qui posent plus de questions qu’elles n’apportent de réponses, est en revanche un débat distinct, auquel je soupçonne qu’il est encore trop tôt pour pouvoir participer. Au moment de sa publication, ‘Lupus Daemonis’ entraîne en effet le fluff hérétique sur des rivages inconnus (le stade « larvaire » des Primarques – à moins que Horus soit le seul concerné –, à ma connaissance jamais décrit à ce stade, mais également l’espèce d’aura de destinée manifeste qui entoure Nergüi et influence, de façon tellement grossière que tout le monde s’en rend compte, les actions de ses proches), que l’on pourrait considérer comme un peu too much de la part de McNeill, si « tard » dans la saga et sans donner plus d’explications. Mais comme cet auteur a prouvé qu’il adorait dérouler ses arcs sur le temps long, et qu’il lui reste encore quelques occasions de revenir sur l’origine d’Horus (au moment où cette chronique est écrite tout du moins), il se peut que ces additions volontairement choquantes soient intégrées de manière plus harmonieuse dans le reste du background de l’Hérésie en fin de compte1. Quoiqu’il en soit, on tient avec ‘Lupus Daemonis’ l’un des must-read des nouvelles Primarques, non pas par sa qualité intrinsèque (vous l’aurez deviné), mais par ses apports à l’historique du personnage principal de la série.

1 : Si c’est le cas, j’espère que McNeill expliquera également comment Cthonia n’est pas devenue une planète chaotique, vu l’anarchie sanglante et sadique qui y règne depuis des décennies. Je comprends que ça permet de renforcer la vibe « enfance difficile » d’Horus, mais si on pouvait éviter de s’arranger avec un des concepts cardinaux du lore de 40K, ça m’arrangerait.

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Skjalds – N. Kyme :

INTRIGUE :

Un monstre rôde dans l’arrière-pays de Fenris, attaquant des villages isolés et massacrant tous leurs habitants, depuis le huskarl sans défense jusqu’au bébé sans peur. Un jeudi normal sur un monde hostile, en quelque sorte, sauf que le monstre en question came to the wrong neighborhood, à savoir celui de Baerelt, Torvur, Ulfvye et Laggenhuf. Ces quatre hardis chasseurs ayant chacun perdu un ou plusieurs êtres chers dans l’attaque de l’innommable et innommée bestiole, ils ont fait le serment de traquer cette dernière et de mettre fin à ses déprédations. Et tant pis pour la biodiversité terrestre fenrissienne, qui se porte parfaitement bien vous pouvez me croire. L’histoire commence alors que notre petite bande est en train d’essayer d’allumer des torches pour y voir quelque chose dans la tempête de neige nocturne qui s’est abattue sur eux. Ce qui est bien le cadet de leurs soucis, car des profondeurs de la toundra jaillit bientôt un mini boss, une draugr.

Cette dernière (car le cadavre desséché et tirant la langue qui fond sur les chasseurs pour leur rouler des gamelles est indubitablement féminin) donne du fil à retordre aux humains, qui finissent toutefois par en venir à bout d’un jet de torche bien placé, mais perdent une lance dans la bataille. Ce qui est presque aussi grave que la mort d’un guerrier, si on écoute le vieux ronchon de service (mais expert en lance, sans doute parce qu’il a le bras fort), Ulfvye. Malgré l’issue heureuse de cette bataille, il ne fait pas de doute pour Baerelt que la draugr n’était qu’une vamp opportuniste, et pas la bête responsable de tous les malheurs de sa communauté. La petite troupe reprend donc sa marche sous un léger crachin (humour), et finit par bivouaquer dans une caverne miraculeusement vide de tout prédateur alpha. Le temps gagné à ne pas avoir à faire la peau à un phacochère laineux ou à un gigagolin est utilement mis à profit pour échanger quelques récits épiques au coin d’un feu de brindilles. Transformés en skjalds pour l’occasion, les compères s’écharpent sur la véridique légende du Russ, l’incarnation de l’hiver fenrissien, considéré par l’un comme un géant à lance de gel, par l’autre comme une tempête de neige douée de raison, par le troisième comme un loup géant qui accompagne les âmes dans l’autre monde, et par le dernier comme un roi. Et comme le gage de cette veillée était manifestement le premier tour de garde pour l’histoire la plus pourrie, c’est Baerelt le barbant qui s’y colle.

Le lendemain, les chasseurs se remettent en route et parviennent à un village qui a reçu la visite du monstre il y a peu de temps, comme les cadavres massacrés et à moitié boulottés des habitants en témoignent. S’étant rendus compte que quelque chose ou quelqu’un était toujours présent sur place, nos héros convergent sur la salle commune de la bourgade, qu’ils trouvent en effet occupées par un animal gigantesque, recouvert d’une fourrure hirsute, munis de crocs acérés et dégageant une odeur abominable. Vous l’avez compris, c’est Leman Russ en personne (qui se fait appeler ici Jotun, pour préserver son anonymat sans doute) qui fait son apparition dans l’histoire, et après avoir indiqué aux traqueurs tétanisés par son aura primarquielle qu’il est également sur la piste du gros gibier, accepte que ces derniers le suivent dans son pistage. Il a pour cela une méthode infaillible : suivre les loups.

Sortis du village à la suite de leur nouveau copain, Baerelt et Cie ne tardent pas à se rendre compte que si les loups peuvent être suivis, ils peuvent également suivre. Aussi, lorsqu’une meute de six herravargr (des loups géants) encercle le club des cinq au sommet d’une falaise, l’ambiance retombe un peu. Le combat qui s’en suit se termine par une nouvelle victoire de l’équipe bipède, en grande partie grâce à l’intervention efficace de Jotun, mais Ulfvye est gravement mordillé dans la bagarre, ce qui ralentit la progression de ses camarades. Comme la veille au soir, les chasseurs passent le temps en devisant au coin du feu et c’est au tour de Jojo de donner sa version du mythe de Russ, qu’il connaît sans doute mieux que la moyenne. Et en toute modestie, il choisit de raconter son histoire (sans dire qu’il s’agit de lui, évidemment), celle de l’enfant sauvage élevé par les loups et adopté par un roi de Fenris, avant que l’Empereur ne vienne plomber l’ambiance d’un petit gueuleton entre copains, on connait la suite.

Le jour suivant, la traque reprend et amène les chasseurs jusque dans une forêt, où ils croisent un Wulfen bien amoché sur le bord du sentier. Il ne fait aucun doute que le lycanthrope a combattu la bête (et a perdu), mais plutôt que de venir en aide à son fiston poilu, Jotun continue sa route en laissant le wyrd du comateux faire son office. Un peu plus loin, c’est le grand ménage parmi les suiveurs du Primarque, Ulfvye décédant d’une hémorragie interne, et Torvur et Laggenhuf ratant leur test de commandement lorsqu’ils entendent le monstre faire sa balance en préparation du combat final. Ne reste donc plus que Baerelt pour sauver l’honneur des péquenauds de Fenris, ce qu’il fait en partant à la poursuite de Jotun, qui n’a pas attendu de voir qui lui collait au train pour régler ses comptes avec le monstre de la pampa…

Début spoiler…Ou plutôt, les monstres. Car c’était un bien un couple d’ours géants avec des bois de cerf, ou beer en langage scientifique, qui était responsable de tout ce tintouin. N’étant venu qu’avec une hache même pas énergétique pour mieux se fondre dans la masse, Leman se retrouve rapidement dans le mal. Et même si l’andouille parvient à saisir un de ses adversaires par les andouillers, dans le but de lui tordre le cou jusqu’à ce que mort s’en suive, cette manœuvre n’a de chances d’aboutir que si elle n’est pas interrompue. Il faut donc que quelqu’un distraie Maman Ours jusqu’à ce que Boucles d’Or ait fini le sale boulot. Et ce quelqu’un, ça ne peut être évidemment que Baerelt. Enfin, pendant à peu près trois secondes, car notre héros est ensuite rejoint par le Wulfen croisé un peu plus tôt, assez remis de ses émotions pour demander une revanche à ses vainqueurs. Bilan de cette deuxième manche : une nouvelle victoire de la grande ourse sur Mini Loup, qui finit la baston en deux morceaux, mais de très peu. La bête fauve s’écroule en effet quelques instants plus tard, cannellisée à titre posthume par le Space Wolves déchu1. En arrière-plan, Jotun avait réussi à décoller les cervicales à l’autre affreux, ce qui met fin aux déprédations de Baloo et Baloote. Notre histoire se termine sur l’arrivée d’un Thunderhawk, venu raccompagner le patron vers le Croc où une mission importante l’attend sans aucun doute. On ne peut pas passer sa vie à se ressourcer dans la nature quand on est un Primarque, et c’est bien dommage…Fin spoiler

1 : Ce qui est finalement un destin enviable pour un membre du rout, puisque cela fait ch*er les Dark Angels.

AVIS :

Nick Kyme revient à ses anciennes et velues amours (les Salamanders étant plutôt écailleux, comme chacun sait), avec ce récit fenrissien de facture classique. Fort heureusement pour nous, l’auteur a progressé, ou s’est davantage intéressé à son sujet, depuis l’époque héroïque de ‘Thunder from Fenris’ et ce ‘Skjalds‘ s’avère être une lecture plaisante… au premier degré1. Si l’intégration de cette histoire dans l’anthologie ‘Blood of the Emperor‘ retire évidemment tout suspens sur la véritable identité de Jotun, cette absence de surprise est compensée par d’autres éléments intéressants, à commencer par une intrigue plus surprenante (là encore, dans le bon sens du terme) qu’à l’accoutumée pour une nouvelle de Kyme: le premier accrochage avec le.a draugr, dont on ne sait pas s’iel est le monstre traqué par les chasseurs constitue ainsi une sorte de prélude sympathique au reste du récit. Le choix de l’auteur de narrer son récit avec une perspective « humaine » lui permet également de glisser quelques infos sur la manière dont Russ considère l’Empereur, ses frères, sa Légion et son rôle dans l’Impérium, à la manière de confidences échangées sans arrière-pensées, pour le seul bénéfice du lecteur. Enfin, cette nouvelle n’est pas avare en fluff (pas moins de quatre légendes différentes sur le Russ, tout de même) ni en fragments de lore Space Wolves: je pense particulièrement aux considérations du Primarque sur les Wulfens, qui sont à replacer dans la saga du rout2, mais également au rôle proprement héroïque (au sens grec antique du terme) que Leman Russ choisit d’occuper dans la culture de Fenris, en tant que guerrier solitaire accomplissant des exploits pour le compte d’un peuple qui ignore sa véritable identité. Bref, une nouvelle qui vaut tout à fait le détour pour qui s’intéresse aux mythes et légendes du Vlka Fenryka, et un pas accompli par le skjald Nick Kyme sur le chemin de sa rédemption littéraire.

1: ‘Thunder from Fenris’ valant également le détour, mais pas d’une façon dont son auteur serait fier.
2: Avant ou après la campagne de Dulan, pendant laquelle les Space Wolves apprennent que leur père savait pour les Wulfens? Si l’absence de réaction des deux Astartes qui servent de Kaptains à leur Primarque devant le cadavre de l’homme loup à la fin de l’histoire n’est pas un bête oubli de Kyme, ce serait plutôt la deuxième option qui tient la corde.

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The Sixth Cult of the Denied – D. Guymer :

INTRIGUE :

Aqhet Hakoris, Sergent au sein des Thousand Sons et explorateur au long cours du grand océan qu’est le Warp, est persuadé d’avoir fait une découverte fondamentale sur la nature de cette dimension mystérieuse, d’où sa Légion et son Primarques tirent leurs pouvoirs surhumains. Aidé dans ses recherches par deux associés Légionnaires (Khaleif et Nepfithu), ainsi que par son jeune et prometteur padawan (ou practicus, en prosperien) Djet, Hakoris doit présenter les résultats de ses recherches à un conclave d’Astartes dans le cadre de la prochaine session d’exposé libre organisée dans la capitale de la dernière planète conquise par les Thousand Sons, Thera. Impatient à l’idée de mettre ses idées à l’épreuve de la légendaire sagacité de la XVème, notre héros se rend dans la grande pyramide élevée au centre de Therebarg suivi par ses side kicks pour effectuer sa démonstration.

Une mauvaise surprise l’attend toutefois sur place : au lieu de la foule compacte qu’il attendait et espérait, l’amphithéâtre où doit se tenir sa soutenance n’accueille que six Astartes. Pas n’importe lesquels cependant : rien de moins que l’Ecuyer du Primarque, Amon, et les chefs des cinq cultes de la Légion, dont bien sûr l’inévitable Ahzek Ahriman. Autrement dit, le rehati, ou Comex des Thousand Sons, nommé par Magnus en personne. Faisant contre mauvaise fortune bons cœurs, Hakoris se présente comme le Magister du culte de l’Aquilae, titre auto-décerné qui fait grincer quelques dents et froncer quelques sourcils dans l’auguste assistance. En plus des problèmes immobiliers qu’une telle reconnaissance susciterait, les cultes établis ne sont pas très chauds à l’idée de reconnaître une nouvelle discipline qui ne serait non pas leur égale, mais leur supérieure, en cela qu’Hakoris affirme que c’est de l’Aquilae que proviendrait les « spécialisations » de chaque culte (à l’aide d’une métaphore mettant en scène Babar, Ray Charles, Stevie Wonder et Gilbert Montagné). Le vaillant petit théoricien n’a cependant pas loisir de commencer son exposé qu’arrive le big borgne en personne, qui se téléporte dans la salle1 et place une mention strictement confidentielle sur les futurs débats, enjoignant les présents à ne pas partager ce qui sera échangé ce jour, et brouillant la wifi (ou plutôt le Warpi) pour empêcher que des tours de passe passe psychiques ne viennent perturber la discussion.

Logiquement impressionné et pris au dépourvu par la venue impromptue du Primarque, Hakoris a bien du mal à défendre ses idées, d’autant plus qu’il perçoit vite que Magnus n’est pas aussi ouvert d’esprit et bienveillant envers ces dernières qu’il le donne à voir. Hakoris ayant fait ses découvertes sur la nature du Warp en bravant l’interdit paternel de ne pas chercher à communiquer avec les formes de vie « aquatiques » peuplant le grand océan (les démons quoi), il se retrouve dans une situation délicate, et se résout à mentir au Roi Écarlate pour éviter une remontrance qu’il devine être potentiellement très sévère. Ayant demandé et obtenu une pause clope pour se remettre les idées en place, Koko réunit ses acolytes et prend une décision que l’on qualifiera poliment d’audacieuse : tenter d’invoquer un démon comme témoin, en passant outre le sceau psychique apposé par Magnus en personne. Bien évidemment, cet appel à un honni2 tournera court, Mag’ étant beaucoup trop omniscient et omnipotent pour laisser une entité chaotique venir suinter sur la moquette de sa pyramide. La franche explication de texte entre le Primarque et le Légionnaire, si elle ne se solde pas par la mort subite du Thousand Son, viendra toutefois rappeler à Hakonis que si la recherche fondamentale, c’est bien, l’obéissance, c’est mieux, surtout dans un Imperium qui regarde déjà un peu bizarrement les frasques arcaniques de la XVème Légion. Après avoir décillé son naïf subordonné sur la véritable nature des démons, qu’il a fait semblant de ne pas connaître pour ne pas « corrompre » l’esprit du raheti avec cette connaissance empoisonnée, Magnus fait comprendre à Hakonis qu’il a tout intérêt à changer son bolter d’épaule lors de son imminente soutenance, pour le bien du reste de la Légion (et sa survie à court terme).

J’ai bien dit son imminente soutenance, car le borgne est tellement balèze qu’il est parvenu à arrêter le temps sans qu’Hakonis ou les autres participants à la présentation ne s’en rendent compte. Résultat des courses : notre héros se livre à un exposé aussi banal que consensuel sur le grand océan, à la surprise et/ou à la déception de son auditoire. Il n’y aura pas de reconnaissance du culte de l’Aquilae, et Hakonis est mis au placard dans une zone de guerre de troisième ordre au cours des années qui suivent pour éviter quesles vues hétérodoxes (on ne parle pas encore d’hérésie à cette époque) ne provoquent un schisme dans la Légion, au cas où il déciderait de reprendre ses activités prosélytes. Et c’est une sage précaution de la part de Magnus car, neuf ans après la fin du conclave de Therebarg, le Sergent dégradé décide qu’il est temps pour lui d’avoir une nouvelle discussion avec un vieil, et même éternel, ami, qui attendait patiemment son appel depuis son petit F3 au fond du Warp…

1 : Les Thousand Sons n’ont pas la même compréhension du terme télétravail que le reste des mortels.
2 : Une personnalité du Warp attention : rien de moins que the Dweller in the Abyss, aussi connu sous le nom de Choronzon. Même Aleister Crowley l’avait croisé de son temps.

AVIS :

David Guymer se fait et nous fait plaisir dans l’exploration de l’histoire, forcément alambiquée1, de l’âge d’or des Thousand Sons. Après avoir retrouvé leur Primarque et vaincu le fléau de la mutation, tout semblait bien aller pour les golden boys de Tizca… jusqu’à ce que leur sale manie d’aller chercher midi à 14 heures et de ne pas appliquer le sacro-saint principe de précaution leur joue des tours. Si ‘The Sixth Cult of the Denied‘ ne finit pas aussi mal pour le XV de l’Empereur que l’Incendie de Prospero, les déboires de Hakoris offrent une similitude frappante avec ceux de son borgne de père, des années/décennies plus tard. Et les raisons à l’origine de la disgrâce de l’un comme de l’autre sont frappées du même sceau de l’hubris: à croire naïvement que toute vérité mérite d’être établie, et qu’il n’y a pas de sujets tabous dans un univers où le spirituel joue finalement un rôle aussi grand que le matériel, le wanabee chef de culte pave la route qu’empruntera son Primarque, avec les conséquences que l’on sait. Il est ainsi amusant et révélateur du caractère de Magnus « I’m so SMRT » Lerouge de le voir adopter la posture toute impériale du « faîtes ce que je dis, pas ce que je fais, et je vous explique pas pourquoi parce que vous êtes trop c*ns » face à son fiston. Cet écho de la grande histoire dans la petite est une trouvaille sympathique de la part de l’auteur, et une raison suffisante de lire ‘The Sixth Cult of the Denied‘.

En plus de cela, cette nouvelle s’avère très riche en fluff Thousand Sons, depuis la révélation de la (presque) existence d’un sixième culte au sein de la Légion, jusqu’à l’identification d’une conquête de cette dernière, en passant par la description de la vision qu’à Magnus de l’assujettissement des planètes intégrées par l’Imperium, où encore des aspects de la culture des Thousand Sons, comme le système d’apprentissage liant novice et initié (qui ressemble un peu, et c’est ironique pour de tels opposés, à celui des Black Templars). La présence de la plupart des têtes connues de la Légion lors de la soutenance d’Hakoris, même si elle sont cantonnées à de la figuration (à part Amon, un peu plus développé que le reste du casting), ajoute un surplus d’awesomeness à l’histoire, et il est probable que Guymer ait caché quelques bribes de révélations seulement accessibles à l’érudit prospérien (ce que je ne suis pas à ce stade) dans les interactions entre Hakoris, ses disciples et son jury. Cependant, c’est Magnus qui crève l’écran dès son apparition, l’auteur parvenant parfaitement à retranscrire la quasi omnipotence et omniscience du Primarque, qui sait et peut (presque) tout. Ces capacités psychiques inégalables et insoupçonnables même pour les plus doués de ses fils servent bien l’intrigue en permettant à Guymer en rebootant l’exposé d’Hakoris, une fois que ce dernier a été convenablement briefé sur ce qu’il a intérêt à dire. Bref, une franche réussite pour David Guymer, qui démontre ici sa capacité à mettre en valeur une nouvelle Légion d’Astartes (après les Iron Hands et les Dark Angels).

1: À quoi fallait-il s’attendre de la part d’adeptes de la pensée complexe, aussi.

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The Will of the Legion – A. Clark :

The Will of the LegionINTRIGUE :

La 3ème flotte d’expédition de la Grande Croisade, engagée dans la joyeuse réunification humanitaire de la galaxie désirée par l’Empereur, est tombée dans une embuscade à la sortie d’une rocade warpienne. Assaillis par l’armada destroy mais pléthorique des Driftborn, une civilisation humaine ayant passé quelques millénaires à vivoter dans une ceinture d’astéroïdes en s’adonnant à la récupération et à l’upcycling des épaves passant à portée de leurs cités roches (les ruches, ce sera après le passage à l’âge impérial), les Imperial Fists qui constituent le gros (et le grand) des forces expéditionnaires se font donc un devoir de repousser les piteux abordages de leurs lointains cousins. Nous faisons ainsi la connaissance du Capitaine Hashin Yonnad, de la 39èmeCompagnie Maisonnée d’Inwit, alors qu’il mène une escouade de Breachers, le corps anti-émeutes de sa Légion, dans la purge du Tribune, vaisseau amiral de la flotte impériale. Ayant massacré la plupart des malheureux corsaires ayant croisé sa route, et fait, dans son infinie bonté, prisonniers les autres avant qu’ils ne meurent de froid  dans les coursives extérieures mal isolées du Tribune, Yonnad reçoit une convocation urgente à se rendre à l’autre bout du vaisseau, où il embarque sans tarder dans un Stormbird, en compagnie de ses vétérans… et de Rogal Dorn, rendu très chafouin par la tournure prise par les événements1.

Rendu perplexe par l’absence de briefing quant au déploiement de la force de frappe Astartes que le Primarque emmène à l’assaut de la principale cité ennemie, Yonnad demande respectivement à son boss de bien vouloir partager sa gnose avec ses fistons, afin que ces derniers soient en mesure de mener à bien ses plans. Dorn s’exécute, et indique à ses Légionnaires que leur cible est un dôme stratégiquement important, dont la capture mettra fin au conflit de façon rapide. La moue désapprobatrice (encore plus que d’habitude) qu’il affiche fait cependant rapidement comprendre à Yoyo que les Driftborn ont épuisé la patience, pas très fournie de base, du Primarque, et que ce dernier considère très clairement l’annihilation pure et simple de ces derniers comme une option de travail. Après tout, la mort, autant que le mur, est son métier.

Débarqués en plein cœur du marché aux puces local, les Imperial Fists tracent la route sans trop (trois morts) forcer jusqu’à leur objectif, massacrant l’arrière garde adverse au passage, un Rogal Dorn toujours aussi revêche collé à leur train. Papa se contente en effet de marcher derrière sa marmaille en fronçant très fort les sourcils, observateur plutôt qu’acteur de la sanglante et implacable progression impériale. Une fois le dôme sécurisé, il demande, que dis-je, il orDORNne à ses Techmarines de bidouiller les consoles de l’endroit afin de pouvoir disposer d’un gros bouton (sans doute jaune) qui pourra couper le chauffage et l’air conditionné  l’échelle de la cité entière d’une simple pression, avec des conséquences funestes pour qui ne porterait pas une armure énergétique (ou s’appellerait Marneus Calgar). Trop snob pour se salir les mains, il somme le brave Yonnad de se mettre en position devant le buzzer magique, tandis que lui donne une dernière chance à ses malheureux adversaires de se rallier à l’Imperium. Ayant bien fait comprendre aux Driftborn qu’il avait été bien gentil jusqu’ici, mais qu’il n’avait, en sa qualité d’architecte de la destinée galactique de l’humanité (d’abord) et de décorateur intérieur de l’Empereur (surtout), absolument rien à carrer de leur civilisation minable, il leur donne royalement impérialement quelques instants de réflexion après avoir terminé sa harangue. Assez pour plonger Yonnad dans de profondes considérations éthiques quant à la trop grande facilité qu’il aurait à presser le bouton, et donc à signer l’arrêt de morts de millions d’êtres humains, pas coupables de grand-chose au fond, sur un simple branlement du chef de son Primarque. Fort heureusement pour notre héros philosophe, les Driftborn choisissent sagement de capituler, rendant leur dépressurisation inutile. La nouvelle se termine sur cette victoire décisive de la Team Pépé, qui ne suffit cependant pas à dissiper les doutes du Capitaine Dubious. Béni soit l’esprit…

1: Cela se perçoit dans la manière dont il prononce « connerie ». Et je ne parle pas de son accent chantant de Mareuh-seilleuh.

AVIS:

Petite nouvelle de bonne facture de la part d’Andy Clark, qui donne un peu de profondeur tant à Hashin Yonnad, avant sa sortie de route sur Phall, qu’à Rogal Dorn, qui gagne ici quelques précisions fluffiques qui ne manqueront pas d’intéresser le chaland, en attendant que le Primarque trumpien (build the wall!) ne dispose de son tome dans la série du même nom. Les lecteurs du troisième livre Forge World de l’Hérésie d’Horus apprécieront sans doute également de revoir apparaître les Driftborn du Consus Drift, présentés dans ce même ouvrage il y a quelques années. Narrativement parlant, l’intérêt principal de The Will of the Legion repose toutefois dans ses dernières pages, et la réalisation incrédule et dérangeante par Yonnad de son total endoctrinement à la cause de Dorn, dont il appliquera sans hésiter tous les ordres, même les plus immoraux. Nul doute que Clark voulait faire ressortir par cette réflexion intérieure toute l’ambivalence de l’Hérésie d’Horus, dont beaucoup des combattants se sont retrouvés dans un camp qu’ils n’avaient au final pas vraiment choisi, simplement parce qu’ils s’étaient contentés de suivre l’exemple, presque irrésistible, de leur Primarque. Il réussit bien son coup, et souligne donc de manière convaincante qu’entre « gentils » et « méchants », la ligne est souvent des plus fines.

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Council of Truth – M. Brooks :

INTRIGUE :

Sur l’Alpha, vaisseau amiral de la Légion du même nom, une réunion secrète a lieu entre quatre Astartes. Ou plutôt, trois Astartes et un Primarque. Réunis dans un cagibi étroit comme les navires de l’Alpha Legion en comptent un nombre irrationnel, les surhommes participent à un conseil de vérité, sorte d’interrogatoire sans haine, sans arme et sans violence (pour changer) dont le but est de clarifier une situation complexe ou des motivations absconses. Ce qui est assez fréquent chez les sous-fifres d’Alpharius, reconnaissons-le. Il n’est en revanche pas usuel que ce soit ce dernier qui se trouve dans la position du cuisiné. En cause, son manque flagrant d’esprit de camaraderie lorsque l’Alpha Legion s’est trouvée associée aux Ultramarines de Guilliman lors de la conquête de la Conservation Tesstranne, un empire humain isolé n’ayant pas trouvé bon de prendre son abonnement au club Pépé quand il en avait l’occasion.

Les questions et les réponses, qui permettent à Alphie d’expliquer un peu plus pourquoi il considère ses frères comme des crétins et tout particulièrement Roboute (grab popcorn), sont entrecoupées de flashbacks écrits du point de vue de divers défenseurs de la capitale de Tesstra, Prime, qui se trouvaient évidemment très malins et très bien préparés, hohoho, jusqu’à ce que l’impensable se produise et que l’Alpha Legion déclenche une attaque chirurgicale. D’abord en faisant sauter les ponts reliant les fortifications au reste de la cité, puis en infiltrant le QG adverse en se faisant passer pour les gardes du corps transhumains protégeant les hauts gradés et les personnalités politiques de la Conservation, et enfin en détournant l’endoctrinement subconscient des officiers restants, sortis de leurs barraquements à la tête d’une compagnie d’Ogryns pour reprendre Prime, et les forçant à se suicider avec coup de fil anonyme chargé en mots clés déprimants. Bilan des courses : une planète conquise en quelques semaines, au lieu des quelques mois que l’approche lente et méthodique de Guilliman laissait envisager. Evidemment, ce n’est pas « glorieux » ni « honorable », mais est-ce que l’Impérium l’est au fond, hein ? Parfaitement. C’est en quelque sorte le message que fait passer Alpharius à son jury, qui, très étonnamment, le déclare parfaitement dans son droit d’avoir envoyer scier le grand Schtroumpf, et le déclare vainqueur aux points sur décision unanime.

Début spoiler…On apprend en toute fin d’histoire que finalement, ce n’était pas Alpharius qui répondait aux questions d’anonymes clampins, mais Omegon qui répondait à celles d’anonymes clampins et d’Alpharius. Un grand classique de la XXème. Les deux frangins échangent un sourire complice et quelques boutades à quintuples sens qui n’en font sans doute pas pour nous, et le rideau tombe sur la fin de ce conseil, qui nous aura appris que la vérité est bien relative…Fin spoiler

AVIS :

Council of Truth’ fait partie de ces œuvres dont l’appréciation dépend grandement de votre niveau de connaissance, ou d’accoutumance (les deux termes étant ici synonymes) de/à l’univers et des protagonistes qu’on y retrouve. L’Alpha Legion, si elle n’est pas la faction de l’Hérésie d’Horus la plus populaire parmi les auteurs de la Black Library, dispose en revanche d’une sorte de cahier des charges littéraire auquel le lecteur peut se référer à chaque fois qu’une soumission traitant des fils d’Alpharius (et d’Omegon) est publiée. Organisation inhumainement secrète et retorse, cette Légion met un point d’honneur à ne jamais agir de manière claire, et cela s’illustre évidemment dans les histoires mises en scène dans la GW-Fiction: il y aura toujours des révélations, des retournements de situation et des personnages dupés lorsque la XXème est de la partie. Cela a été la règle depuis le ‘Legion‘ de Dan Abnett, et tous les auteurs qui sont passés après lui ont pris soin de se conformer à cette approche cryptique, avec plus ou moins de bonheur.

Aussi, lorsqu’en 2021 (13 ans après la sortie de ‘Legion’), Mike Brooks nous livre le récit d’une campagne tout à fait classique – si on peut utiliser cette expression pour ces Astartes – de l’Alpha Legion, sur fond de guéguerre d’ego avec les Ultramarines et de réunions secrètes et trotromystérieuses1, je dois admettre que c’est la déception qui prime. Tout cela a été lu et relu de nombreuses fois au cours des dernières années, et si Brooks livre une nouvelle efficace sur la forme, il lui manque de la valeur ajoutée sur le fond pour être qualifiée de réussite. À mes yeux, les publications de la gamme Primarques sont l’occasion de faire avancer notre compréhension sur cette confrérie de surhommes iconiques, et par extension, sur la manière dont ils organisent leur Légion et considèrent l’Impérium. Mike Brooks nous lance quelques bribes de fluff en cette direction (notamment la réflexion d’Alpharius que l’Alpha Legion doit être polyvalente pour éviter d’être vue comme obsolète par l’Empereur, dont il se méfie grandement), mais se contente sinon de nous servir sa version de ‘Legion’2//’The Harrowing’//’The Serpent Beneath‘, ce qui n’a pas grand intérêt je dois dire. Plus embêtant, il se vautre à certains endroits dans le fan service le plus grossier, en complexifiant les opérations de l’Alpha Legion pour le plaisir (si t’es capable de descendre une compagnie d’Ogryns au bolter, c’est pas le petit officier planqué dans son véhicule qui va beaucoup t’ennuyer s’il n’est pas absolument mis hors d’état de nuire avant l’embuscade hein), ou en incluant la fameuse catchphrase de la Légion (« I am… absolutely not original« ) et un Alpharius/Omegon swap de façon très artificielle à l’intrigue. Bref, on est ici sur une nouvelle très honnête mais plutôt décevante de la part de Mike Brooks, de qui j’attendais plus pour sa première publication au service d’Hydra. En espérant que le roman qu’il a écrit sur Alpharius soit plus audacieux que ça.

1: Brooks m’a mal vendu le concept du conseil de vérité je dois dire. Qui a des comptes à demander à un Primarque sur la manière dont il conduit ses opérations (qui plus est de façon victorieuse) au sein de sa propre Légion? Soit Alpharius a un ego tellement monstrueux qu’il a besoin de prouver qu’il avait raison même quand personne ne lui a rien demandé, soit il s’agissait de faire passer quelques éléments de langage aux officiers supérieurs de la Légion au cas où ils seraient interrogés sur les méthodes de cette dernière. Auquel cas, la transmission d’un memo ou l’organisation d’une réunion sur Teams aurait été plus efficace.
2: Avec les soldats génétiquement améliorés du roman d’Abnett du côté non-Impérial cette fois-ci. Mais c’est vraiment la même vibe.

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Terminus – C. Wraight :

INTRIGUE :

Notre histoire s’ouvre sur la glorieuse scène d’un Légionnaire Death Guard, Caipha Morarg, vomissant dans son casque et constatant avec inquiétude que le contenu de son estomac n’est pas évacué par les valves de son casque, sérieusement encrassées. Fort heureusement pour notre héros, le pouvoir de Nurgle lui permet de tenir en apnée longue dans ses glaires jusqu’à ce que l’Apothicaire Zadal Crosius (avec un nom pareil, il aurait dû faire Chapelain moi je dis) arrive avec sa fidèle clé de 12 et purge le heaume de son camarade. Bienvenue dans ‘Terminus’ et sur Terra, au début du siège de la planète par l’avant-garde d’Horus.

Récemment buzzés par Nurgle – et ses mouches – pour rejoindre sa team, les Death Guards doivent encore s’habituer à leur nouvelle condition de pestiférés ambulants, perclus de maux divers et variés, mais guère incapacités par ces derniers, mis à part au niveau de l’agilité. Nous suivons donc Morarg, qui se trouve être, en plus de barbouillé, l’Ecuyer personnel de Mortarion, et Crosius alors que la paire progresse lentement mais sûrement vers le Palais Impérial, rasant les avants postes fortifiés et exterminant les traînards de l’Armée Impériale avec détachement, tout en essayant de mettre des mots sur leur douloureux et désespérant passage de guerriers surhumains insensibles à toutes maladies, à celui de creusets de microbes, virus et autres bactéries. Une chose semble certaine : Mortarion a joué un rôle dans cette transition (énergétique, mouahaha).

Et à tout seigneur glandeur, tout honneur, Mort Shuman finit par rejoindre la ligne de front, sans doute fatigué que Typhon lui ressorte en boucle la blague de la grosse mite depuis qu’il lui a poussé des ailes. Cette arrivée funeste se solde d’un échange de haut niveau entre le Primarque et son chief of staff littéralement défroqué, par lequel on apprend que l’Empereur a interdit à son fils de remettre les pieds chez lui tant qu’il n’aurait pas pris une douche. La nouvelle se termine par une démonstration des nouveaux pouvoirs entropiques de Mortarion, qui est capable de faire vieillir en accéléré une zone de son choix à une distance respectable1, et c’est un bastion isolé dans la pampa himalayenne qui en fait les frais. Comme on disait au tout début de M3 : « va y avoir des spores ».

1 : Une compétence toute christique quand on y réfléchit. Mortarion est capable d’apporter mille ans de pets sur terre, ça se respecte.

AVIS :

Je ne sais pas vraiment ce que Chris Wraight a voulu faire avec ce ‘Terminus’, qui évoque plus le dernier arrêt d’une ligne de métro (« nous arrivons sur Terra, merci de ne rien laisser ni oublier derrière vous« ) que la conclusion fatidique d’une épopée sanglante, ou même, ce qui aurait été logique, le vaisseau spatial le plus tristement célèbre de la Légion. Ce n’est pourtant pas comme si cet auteur n’avait pas déjà un passif, et de qualité qui plus est, avec ces protagonistes, et des personnages et arcs narratifs à mettre en scène pour donner un semblant d’intérêt à cette soumission. Je m’attendais ainsi à retrouver, ou au moins à croiser le temps d’un caméo, ce bon vieux Vorx (‘Lords of Silence’), que l’on avait déjà vu à l’œuvre sur le temps long dans ‘Unification‘, mais me suis retrouvé à la place avec l’illustre pas très connu Morarg, le positivement obscur Crosius, et Mortarion faisant du sale sur les trois dernières pages. Ce casting surprenant aurait pu faire l’affaire si on lui avait donné une intrigue et une mise en scène digne de ce nom, mais la première s’est avérée être un mélange de poncifs (« Ahlala que nous sommes malades présentement une fois par exemple là dis donc… Mais on reste tout de même trotrobalèze paske fô pas déconner non plus« ) et de renvois au déroulé de ‘The Buried Dagger‘, et la seconde à une sorte de plan large sur une partie de tower defense en mode ralenti. Pas de surprise scénaristique comme dans ‘Endurance‘, ni de construction un peu travaillée comme dans ‘Unification‘: rien que le récit plan-plan du retour de la Death Guard sur le Monde Trône, dans une sorte de filler faisant le lien entre deux épisodes autrement plus intéressants de l’histoire de la Légion: sa corruption par Nurgle et sa participation au vrai siège du Palais Impérial. Au final, rien à retirer de ce ‘Terminus’ qui n’ait été déjà couvert, et de façon plus intéressante, par d’autres récits consacrés aux Barbarus Boyz au cours de l’Hérésie d’Horus.

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Et voici qui termine cette revue de ‘Blood of the Emperor‘, une anthologie que je qualifierai davantage de « sans points faibles » que « d’un bon niveau », si vous voyez la nuance. Si la qualité intrinsèque des contributeurs de ce recueil lui permette de n’aligner que de nouvelles qui se laissent lire sans problème, beaucoup de ces dernières présentent des lacunes assez marquées sur un point ou un autre, le plus souvent en termes d’ajouts intéressants au fluff des Primarques qu’elles couvrent. On peut considérer que l’exercice est devenu de plus en plus complexe au fur et à mesure que l’Hérésie s’étoffait et que la part d’ombre de ses protagonistes diminuait d’autant, mais McNeill et surtout Guymer ont démontré par leurs contributions qu’il restait possible de présenter des éléments dignes de considération à un public de plus en plus expert, et donc (logiquement) exigeant. Il est dommage que tous leurs camarades n’aient pas pu ou su suivre leur exemple, même si on accordera tout de même les encouragements à Nick Kyme pour les progrès notables qu’il a fait au cours de la dernière décennie. En conclusion, un dernier volet honnête pour la trilogie ‘Relatives of the Emperor’, plus qu’un grand final spectaculaire et rigoureusement indispensable que toutes les sorties de l’Hérésie d’Horus devraient être à mes yeux à ce stade.

LEMAN RUSS: THE GREAT WOLF [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette chronique du roman de la série Primarques consacré par Chris Wraight à l’infernal Fenrissien, loubard alpha, snowboarder de l’extrême, parrain galactique de la SPA, sabreur de magnu(m)s, saint patron des tankistes et caniche à son pépère, pour ne citer que quelques-uns de ses titres. Primogéniteur d’une des Légions, et plus tard, d’un des Chapitres les plus populaires de Warhammer 40.000, Leman des Russ, tel qu’il fut nommé par son père adoptif, est une figure marquante du backgound, qu’il hante de son imposante présente depuis des temps immémoriaux1. Il était donc logique que le Roi Loup de Fenris bénéficie parmi les premiers du traitement particulier que constitue un roman Primarques. Pour quel résultat, vous entends-je vous, et me, demander? Et bien, c’est votre veine, j’ai justement une critique détaillée de l’ouvrage à vous proposer. Quel heureux hasard, vraiment.

1 : À l’époque de Rogue Trader, il n’était toutefois qu’un humble Commandant Space Marines, tenant plus du Darth Vader sous progénoïdes que du Viking de l’Espace.

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INTRIGUE:

Notre histoire commence aux côtés d’Ove-Thost, jeune guerrier de Fenris totalement dans le mal après avoir pris une rasade du Canis Helix quelques heures plus tôt, dans le cadre de son week-end d’intégration au sein du Rout. Et à propos de route, il en a une belle devant lui, le retour vers le Croc passant par quelques pittoresques endroits, dont des pinèdes enneigées remplies de prédateurs affamés de chair fraîche, qu’O.T. négocie avec un sang-froid impérial. Ayant trucidé toute la biodiversité placée sur sa route par cette farceuse de Fenris, notre héros finit par tituber jusqu’au lieu de rendez-vous fixé par les Prêtres Loups, soit le Portail dans la Montagne1, où il est chaleureusement accueilli par ses tuteurs. L’un d’eux ayant remarqué le fort attachement manifesté par Ove-Toast pour les crocs bestiaux ramenés comme trophées de son trail sauvage dans le Gévaudan2, il accepte que le louveteau conserve ses colifichets, qui lui donneront son premier qualificatif : Twinfang (ce qui est plus classe que Twingo).

Remis de ses émotions, rebaptisé Haldor (c’était l’année des -H au LOF) et intégré à une meute de fringantes Griffes Sanglantes, l’impétrant réalise bientôt, et le lecteur avec lui, qu’il se distingue des rangs braillards et indisciplinés des louveteaux de l’espace. En plus de se faire dévisager – ce qui est plus cool que de se faire défigurer, et au Croc, tout peut arriver – par tous les vétérans qui croisent sa route, Haldor a de plus la surprise de recevoir en dotation, non pas la bonne vieille épée tronçonneuse classique qui est le lot de ses comparses, mais une francisque énergétique (puisque je vous dis que c’était l’année des haches) d’excellente et exotique facture, de la part de son maître instructeur, Brannak. Le légitime contentement que notre rookie éprouve devant ce cadeau de valeur vole toute fois en éclat, en même temps que quelques-unes de ses molaires, lorsque le Prêtre Loup lui allonge une mandale après qu’il ait échoué à nommer la relique placée sous sa garde. Sommé par son supérieur d’apprendre cette information, apparemment capitale because of reasons, Haldor se dépêche de ne rien faire de particulier à cet égard (fuck the rules), et nous le retrouvons après quelques années pendant sa cérémonie de diplomation.

Sous le regard torve du Seigneur Loup Aeska Brokenlip, Maître de la 3ème Grande Compagnie des Space Wolves, les guerriers du Rout accueillent avec leur enthousiasme habituel leurs nouveaux compagnons d’armes, jugés dignes d’aller combattre dans les étoiles. Ce banquet a toutefois une résonnance particulière, car il marque l’arrivée dans les rangs – passablement désorganisés – des surhommes de Fenris des premières recrues n’ayant pas connu la Légion, mais seulement le Chapitre. Le lecteur sagace en déduit donc que l’histoire se passe quelques années après la conclusion de l’Hérésie, au lendemain de la Seconde Fondation décrétée par cette bleusaille de Guilliman. Haldor, de son côté, n’en peut rapidement plus des oeillades suspectes que lui décoche son big boss, et décide d’aller prendre un peu l’air hors du hall de festin. L’avantage avec le Croc, c’est que les Wolves sont tellement radin et le climat tellement rude qu’il n’a pas loin à aller. Les couloirs de la forteresse sont en effet plongés dans le froid et les ténèbres (il fallait payer la redevance les gars !), et plus d’un Space Marine trop sûr de lui a glissé sur une plaque de glace ou s’est cogné la tête dans une porte en se rendant aux latrines. À côté de ça, les périls du Warp, c’est de la petite bière. Haldor ne tarde donc pas à se perdre, et finit par débouler dans une salle inconnue, où l’attend Jø le Clödø. Ah non, pardon, on me souffle dans l’oreillette que le type à dreadlocks rances engoncé dans un poncho informe et un amas de fourrures puantes, et la gueule tartinée de suie, n’est pas le SDF alcoolique et incontinent du coin, mais bel et bien le noble Primarque Leman Russ en personne. Et il était temps que diable ! On en aurait presque oublié que le sujet du bouquin n’est pas de suivre les premiers pas d’Haldor Twinfang, malamute de l’espace, mais d’apprendre le fin mot de l’histoire du duel mythique entre le Loup et le Lion pendant la campagne de Dulan. Et, coup de bol, c’est de la bouche même d’un des intéressés que nous allons plonger dans la légende de la Grande Croisade, Papy Russ acceptant de jouer au skjald pour l’instruction du novice après avoir, lui aussi, buggé sur l’arme que ce dernier porte à la ceinture.

Nous voilà donc plongés dans cette époque héroïque et insouciante, et faisons la connaissance d’un autre protagoniste lupin, le Jarl Jorin Bloodhowl du Dekk-Tra, c’est à dire la 13ème Grande Compagnie de la Légion. Le Dekk-Tra a pour particularité d’accueillir en son sein les Frères Loups (Wolf Brothers), soit le reliquat des guerriers jurés de Leman Russ du temps où il n’était « que » le maître de Fenris, et qui ont pris le risque de boire au calice du Canis Helix alors qu’ils avaient déjà du poil aux pattes. La concoction réussissant mieux, comme chacun sait, aux ados qu’aux hommes mûrs (ça doit être horriblement sucré, comme du lait concentré puissance 1.000), l’immense majorité de nos barbares bravaches est morte dans d’horribles souffrances3, laissant les pouillèmes restants prendre leur place aux côtés de leur suzerain bien aimé. Jorin est l’un de ces grands-pères à barbe, comme l’indiquent son teint blafard et ses cernes marquées, mais cela ne l’empêche pas de faire le coup de feu comme un vrai Astartes, la plupart du temps accompagné par son âme damnée, le tout aussi ancien Bulveye4.

Nous retrouvons notre paire aux prises avec l’équipage d’un Prédateur Faash, en fuite éperdue du système d’Ynniu après que les loulous aient ravagé la base orbitale Dulanite qui défendait l’endroit, et que ce rusé de Bloodhowl veut mettre à profit pour localiser les coordonnées spatiales de Dulan, qui échappe depuis trop longtemps au courroux des armées de l’Empereur. Fidèle à sa philosophie très tactile (comme on le verra plus tard) de la guerre, le Jarl a embouti l’arrière-train du vaisseau ennemi avec le sien, débarqué en force dans les coursives, et est parvenu, à un poil de moustache près, à interrompre la transition Warp des Faashistes (je n’en ai pas fait exprès mais ça rend plutôt pas mal). La suite ne semble être qu’une formalité, malgré la résistance acharnée des défenseurs, mais un petit problème, poilu, écumant et odorant, menace de gâcher la journée de notre héros : deux des guerriers de son escorte ont fait une poussée d’hypertrichose, et, coquets, ont foncé cacher leur honte dans le sang et les viscères de leurs ennemis. Ne reconnaissant plus la voix de leur maître, les molosses enragés ont commis un carnage sur le pont du Prédateur, empêchant Bloodie et Bulvie de faire des prisonniers auxquels ils auraient pu soutirer la précieuse information.

N’ayant d’autre choix que l’euthanasie pour ces spécimens déviants, Bloodhowl doit de plus composer avec l’arrivée impromptue de son Primarque, escorté par le Tra du Jarl Ogvai Ogvai Helmschrot. Redoutant une placardisation (ou plutôt une mise en chenil) de sa Compagnie si Leman Russ devait avoir vent du problème rencontré au cours de la bataille, Jorin décide de taire l’affliction dont ses guerriers souffrent, le temps de trouver un remède à cette dernière. De son côté, Russ apprend à son Jarl qu’il est arrivé pour accélérer la conduite de la campagne, certains personnages hauts placés (dont le nom commence par M. et finit par -acaldor) de Terra ayant émis des doutes sur la capacité de la VIème Légion de faire rendre gorge au Tyran de Dulan. Les chevaleresques et propres sur eux Dark Angels sont désormais également sur le coup, et ça, Russ ne peut pas l’avaler. Plutôt se faire poser une collerette que de se faire griller la politesse et voler les honneurs par Lionel et son club de philatélistes ! The race is on, et le Loup Suprême est mauvais perdant. Fort heureusement, le GPS du Prédateur Faash avait mémorisé l’itinéraire « Maison » dans son processeur (quelle erreur de débutant de la part des Dulanites… le mode incognito, il n’y a que ça de vrai), et l’armada du Rout peut bientôt la prendre (la route, pour ceux qui ne bénéficient pas d’un humour glacé et sophistique).

Après un périple sans embûches majeures d’une durée de deux semaines, soit largement le temps nécessaire pour permettre aux éclopés de la bataille d’Ynniu de reprendre du poil de la bête, nos fiers loulous passent le point de Mandeville de Dulan… et ont la désagréable surprise de constater que la 1ère Légion est déjà sur place5, et a engagé la flotte locale dans une bataille encore indécise. Car si les Dark Angels sont venus en force, et bénéficient de l’imposante présence de l’Invicible Reason, leur vaisseau amiral bien burné lancé, les Dulanites ont l’avantage du nombre et de l’appui d’un colossal anneau de défense qui entoure toute la planète. Que voilà des ressources bien utilisées, 95% des armes et équipages du hula hoop géant ceinturant Dulan faisant face au vide intersidéral pendant que leurs petits copains doivent garder à la porte les armures à glace prosélytes de Pépé. Menfin. Après avoir sans doute poussé un bon gros Fuuuuuuuuuuuuuuuu-nris des familles, Russ décide de passer à l’action, histoire de justifier son émargement sur la feuille de présence. Il lance donc ses vaisseaux à l’assaut de la flotte ennemie, avec des ordres d’une élégante simplicité : « butélétousse ». Grave erreur.

Car, alors que la caméra se braque à nouveau sur Bloodhowl et le Dekk-Tra, aux premières loges dans le croiseur Aesrumnir, nous assistons en spectateurs muets et horrifiés à une incompréhension aussi tragique que lourde de conséquences entre les deux Légions. L’Aesrumnir torpille en effet à bout portant (quand je vous disais que Bloodhowl était tactile… c’est le genre de type qui achève les blessés d’un bolt en pleine tête à bout touchant : un coup à perdre une main ça) un vaisseau Faash, sans que Jorin ne se donne la peine de prendre la communication émanant du tout proche Blade of Numarc au moment de porter le coup de grâce. La bordée que leur envoie le croiseur de la 1ère Légion une fois la grosse commission effectuée ne manque donc pas de surprendre et d’outrer les Space Wolves, en plus de laisser l’Aesrumnir dans un piteux état. Témoin de l’inconcevable, Russ use de ses supers pouvoirs de Primarque pour intercepter la volée fatale du Blade of Numarc avec son propre vaisseau en bougeant très vite les bras (même Magnus est jaloux de ce trick), et appelle le standard des DA pour passer une gueulante à son frérot. Mais ce dernier, malgré la froideur et l’arrogance qui transparaît d’un bout à l’autre de l’appel, est incontestablement dans son bon droit. L’Aesrumnir a en effet détruit un vaisseau sur lequel dix escouades de Dark Angels avaient pris pied, condamnant ces derniers à la mort. Les tirs du Blade of Numarc n’étaient donc que la manifestation d’énervement, bien légitime, des officiers Dark Angels devant la stupidité crasse et le filtrage téléphonique de leurs cousins velus. Russ doit bien reconnaître qu’il a merdé dans les grandes largeurs, et, chose assez rare pour être soulignée, il s’engage même à venir s’excuser en personne auprès de Lionel une fois la bataille remportée, à la grande consternation de ses Jarls, qui, en bon loup-bards qu’ils sont, l’incitaient plutôt à chercher la baston avec les groupies de Lion El’Jospin.

Mais avant d’aller faire amende honorable il faut tout de même régler le léger problème causé par la présence de l’armada de Dulan et de l’über Cheerios dans les environs immédiats de la flotte impériale. Qu’à cela ne tienne, Leman Russ prend la tête de son gang et réalise une percée dans l’anneau de défense en direction… d’un point important de la structure (car ces andouilles de Dulanites ont placé leur état-major en première ligne au lieu de l’abriter de l’autre côté de la planète). #BarkBarkGrrrWooofBarkGrrr. Les Space Wolves s’illustrent de belle façon, et l’on voit le Seigneur de l’Hiver et de la Guerre prouver qu’il n’a volé aucun de ses titres, l’utilisation de son mystérieux wyrd’s wind paralysant ses ennemis et enrageant ses fistons à 50 mètres à la ronde6 au meilleur moment pour les Wolves. Bref, le Rout casse la c-Roûte, réduisant la dernière défense de Dulan en épave avec toute la diligence due.

Fidèle à sa parole, Russ s’en va ensuite présenter ses plus plates confuses à son frère, qui l’attend avec une simple escorte de 30.000 Légionnaires (quel poseur ce Lion), et accepte en grand seigneur les excuses, pas vraiment sincères, de Leman. Nos deux Primarques en profitent pour se répartir le boulot en vue de la conclusion rapide et efficace de la campagne de Dulan, Russ insistant lourdement pour être celui qui fera manger son chapeau au Tyran, ce que Lionel accepte sans sourciller. Mieux, il permet aux Space Wolves de prendre le bastion ennemi, l’imposante Forteresse Ecarlate, en solo, lui-même et ses sbires se contentant d’empêcher les locaux de pourrir le groove du rottweiler de l’Empereur. Trop sympa, le palouf.

Un peu plus loin, l’ambiance est moins rose sur l’Aesrumnir, où Bloodhowl et ses posses réalisent, après avoir recompté trois fois… au moins, que tous les guerriers de Dekk Tra n’ont pas été rapatriés à bord, sur leurs deux jambes, à quatre pattes ou les pieds devant. Et le sagace Prêtre Loup Ulbrandr de soumettre à son Jarl une sinistre hypothèse : comme aucun Space Wolves digne de son collier antipuces ne se laisserait capturer vivant par l’ennemi, et que ce dernier a réussi à faire partir des navettes vers la surface de Dulan avant la destruction de l’anneau (qui n’est pas complète à cette heure, ça prend du temps de désosser un truc de cette taille), c’est donc que l’ennemi a capturé des Wulfens. Nonobstant les trilliards d’explications raisonnables et sensées que l’on peut mettre en avant pour contextualiser les deux faits sur lesquels Ulbrandr base son raisonnement, et vu tout ce qui vient avant cette péripétie, on se doute que papi a tapé dans le mille, et que le honteux petit secret du Dekk-Tra est tombé entre de mauvaises mains. Que faire ? Aller se confier à un Primarque qui vous considère comme son plus proche frère d’armes, qui a démontré à de maintes reprises sa solidarité avec ses hommes, s’est mis personnellement en danger pour vous sauver des conséquences d’une de vos conneries il n’y a pas deux heures et est actuellement en train de se rabaisser devant son frère imbuvable à votre place ? Ou continuer de la jouer solo, dans l’espoir de trouver une cure hypothétique à un mal dont on ignore tout, et se tenir prêt à faire faux bond à ce même Primarque par la suite si cela peut permettre de garder le Wulfen dans le placard ? Faut-il vraiment que je demande ?

Brefle, une fois la bataille finale pour Dulan initiée, et alors que Russ s’amuse comme un fou à faire des knock knock jokes en utilisant des brigades entières de Typhons et de Shadowswords, et tandis que les Dark Angels déversent leur fureur froide, clinique et silencieuse sur les alentours immédiats du bac à sable de la litière du Loup Suprême, Bloodhowl, briefé par Ulbrandr qui a repéré des signaux suspects dans un bâtiment à l’écart du front, s’embarque dans une side quest en loup-cedé, chargeant ses collègues de l’excuser auprès du boss le temps qu’il tire les choses au clair de son côté. Malheureusement pour lui, c’était aussi l’idée des défenseurs, qui diffusent bientôt un petit clip pas mal foutu à l’échelle planétaire, consistant en quelques gros plans suggestifs du Wulfen écumant qu’ils ont effectivement traficoté en douce à la surface de leur planète, et nourri exclusivement de rutabagas depuis pour le rendre furax. Pire que du outing, c’est du louping, et c’est l’estomac de Jorin qui fait loopings en réalisant que tout le monde est maintenant au courant du secret honteux de sa Grande Compagnie.

Il n’a cependant pas loisir de se lamenter longtemps sur son sort, l’assaut impromptu d’une vague de Scarabiniers, puis l’arrivée furibarde de Leman Russ, l’homme-loup qui n’aimait pas qu’on lui pose des lapins, coupant court à ses sombres réflexions. Après quelques échanges de vérités, Primarque et Jarl se tombent toutefois dans les bras, et s’entendent pour faire front de concert contre cette mystérieuse malédiction, qui vient s’ajouter à la liste d’emmerdes que la VIème Légion doit gérer. La hache tronçonneuse de guerre n’a toutefois pas le temps d’être totalement enterrée, que les Space Wolves reçoivent une terrible nouvelle : contrairement à la parole qu’il avait donnée, ce fieffé fripon de Lionel semble s’être téléporté dans les niveaux supérieurs de la Forteresse Ecarlate, profitant de la trêve dans l’assaut des loulous pour aller soloter le boss de fin de planète. C’est très petit ça.

Et, effectivement, nous retrouvons le Maître de la Première Légion en grande conversation avec le Tyran de Dulan, un vieux schnoque en bout de course passablement résigné à son sort, et faisant même mine d’engager un duel avec El’Jonson avec le couteau à fromage qu’il dissimulait dans ses robes pour la beauté du geste, et avec des résultats prévisibles. Avant cela, on avait appris que le grillage de priorité du Lion n’avait pas que pour but de foutre son frère en rogne (ce qui était un bonus appréciable, malgré tout), mais surtout de mettre fin aux hostilités le plus rapidement possible afin de préserver les forces Dark Angels chargées du maintien de l’ordre autour de la Forteresse Ecarlate, où se massaient des millions de soldats Dulanites en prévision de l’inévitable contre-attaque. Vu sous cet angle, ça se défend. Mais, bien évidemment, Russ n’en a catégoriquement rien à carrer, frustré et outré qu’il est d’avoir été une nouvelle fois devancé par sa sainte nitouche (de Force 6, tout de même) de frangin. Et cette fois, les roucoulades, accolades et persillades du Palouf en chef ne sont pas suffisantes pour évacuer la tension fraternelle. Dégainant son tetsubo tronçonneur, Leman ouvre les hostilités, et il ne faut pas grand-chose pour convaincre Lionel de lui rendre la pareille. Entre le Loup et le Lion, la bataille fait rage, sous les vivats enthousiastes de leurs groupies respectifs, et c’est le moment, où, estimé lecteur, je fais appel à tes capacités mémorielles, pour te référer à ce qu’on disait il y a exactement 2 869 mots. Tu y es ? Eh oui, quel est le nom de la hache de ce vieux jeune Haldor ? Nous y venons. Désarmé d’une botte magistrale d’El’Jonson, Russ gagne un peu de temps en balançant ce dernier à travers le hall (ce que nous avons tous rêvé de faire) et emprunte poliment l’arme du présomptueux Capitaine Dark Angels qui se tenait entre lui et sa fidèle Krakenmaw. Cette hache, avec laquelle il entreprend bientôt de débiter son frérot, n’est autre que l’arme remise à notre Griffe Sanglante, et fait donc partie de l’héritage de la Légion. Mais n’allons pas trop vite en besogne, nous avons toujours un duel à mort sur le feu.

Vous épargnant les péripéties usuelles de ce genre d’exercice, simplement portées au carré de l’hypoténuse par la nature primarquielle des combattants (ça ne rend pas grand-chose à l’écrit, ceci dit), je dirai simplement que nos deux sacripants, après avoir donné du boulot à leurs ostéopathes et artificiers respectifs pour des semaines, ne trouvent rien de mieux que de basculer du balcon de leur hôte, pour faire une chute de cinquante mètres, égarant au passage leur quincaillerie respective mais par leur mauvaise humeur. La baston reprend donc à grands coups de poings dans la neuro-glotte, jusqu’à ce que Russ, réalisant l’absurdité de la situation, se mette à rire. Le fait que Lionel lui demande de manière très sérieuse si son hilarité doit être interprétée comme une offre de reddition ne fait pas grand-chose pour calmer la crise du jovial loubard, qui se fend tellement la poire qu’il ne voit pas arriver le crochet vengeur de Jack Jo(h)nson, qui l’envoie définitivement au tapis. Ainsi se termine ce qui est sans doute l’un des premiers duels fratricides entre Primarques, prélude innocent à des affrontements autrement plus amers.

Est-ce pour autant la fin de notre histoire ? Non ! Wraight boucle la boucle, d’abord en nous amenant sur Terra après la fin du siège et de l’Hérésie, alors que Leman Russ et Lion El’Jonson, arrivés avec un gros quart d’heure de retard sur l’heure du RDV fixé par Horus pour la réunion de famille, ne peuvent que constater que tout est fini et qu’ils n’ont plus qu’à passer la mop pour leur peine. Trop snob pour s’abaisser à ce genre de tâche, Lionel tue le temps et noie son cafard en défiant à nouveau Russ en duel, histoire de régler une fois pour toutes leur contentieux. Après avoir sorti une réplique d’un niveau de mauvaise foi si élevé que Necoho se retrouva de façon provisoire à la tête du panthéon chaotique, Russ refusa tout net de croiser le frère, prétextant une migraine tenace, ou quelque chose comme ça. Pas du genre à prendre un non pour une réponse, ce mauvais joueur de Lionel transperça son frangin de sang-froid, blessure grave mais non mortelle, d’où s’écoula apparemment tout le mauvais sang entre nos deux lascars puisque leur relation, d’après Russ, s’apaisa après cet épisode.

Et nous voilà enfin de retour dans le Croc, où le Loup Suprême en termine avec son histoire. Guère renommé pour la rapidité de son intellect, il faut un moment à Haldor pour comprendre que son Primarque porte en fait le deuil d’El’Jonson, dont la nouvelle de la mort vient juste d’arriver sur Fenris. Comme quoi, sous ses abords de brute, deux petits cœurs sensibles battent dans la poitrine de Russ. La conclusion du récit voit Twinfang, à présent au clair à propos de son statut au sein du Chapitre, commencer sa carrière active en compagnie de ses camarades Griffes Sanglantes, et s’aguerrir jusqu’à devenir Chasseur Gris. Participant à l’effort de guerre de l’Imperium contre la première Croisade Noire d’Ah Bon Donc, Twin Peaks croise la route d’une force de Dark Angels, et ce qui doit arriver arrive… on le prend (à nouveau) pour un abruti. Le mérite-t-il ? À vous de juger. Personne ne peut en revanche mettre en doute son zèle à défendre l’honneur de son Chapitre et de son Primarque, comme son adversaire du jour l’a certainement appris à ses dépens…

1 : Car oui, il s’agit bien de leur nom exact, majuscules à l’appui. C’est cool d’avoir donné aux Space Wolves leur propre langage, mais il s’agirait d’en faire usage.

2 : Cela s’explique également par le fait que les canines en question servent à maintenir l’intégrité physique de l’épaule du noble barbare, amoureusement mastiquée par un campagnol entreprenant sur le chemin de l’école, et dont le retrait risque d’avoir des conséquences fatales pour notre héros.

3 : À côté de ça, les 40% de chance de réussite de primarisation des Space Marines, c’est le brevet des collèges.

4 : Qui était aux commandes de Dekk-Tra lorsque Mike Lee tenait la plume (Dans la Gueule du Loup/Wolf at the Door). On ne saura sans doute jamais ce qui lui a valu cette rétrogradation (mis à part une relecture hâtive des éléments de background établis par Wraight, s’entend).

5 : Les fourbes avaient pensé à consulter les archives impériales. C’est pas du jeu. Tout le monde ne sait pas lire, ni utiliser un moteur de recherche.

6 : Et, non, le fait qu’une bête flatulence de sa part aurait probablement eu les mêmes effets n’est pas une raison pour trivialiser ce moment de pure awesomeness.

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AVIS:

En choisissant de se frotter au crin hirsute de Leman Russ, Chris Wraight relevait un défi assez conséquent, ce Primarque parmi les plus populaires de la bande à Pépé ayant bénéficié d’un traitement assez contrasté de la part des auteurs de l’Hérésie d’Horus. Barbare beuglard et soiffard à un moment, bourreau inflexible et sanguinaire à un autre, vandale bestial et marginal aux yeux de la galaxie mais malgré tout dans le secret des du Dieux, Russ est et reste une énigme coriace pour le fluffiste. Wraight avait donc la lourde tâche de poursuivre sur cette lancée, et d’ajouter, plus que de la profondeur (car Leman n’en manque certes pas, comme vu ci-dessus), de la définition à son héros, afin de permettre au lecteur de comprendre un peu mieux qui était le Primarque du Rout. Et à ce petit jeu-là, même si la copie n’est pas parfaite, je dois dire que notre homme a plutôt bien fait le job.

Pour commencer sur les sources de satisfaction dûment listées par votre humble serviteur, je parlerai d’abord du choix de l’évènement couvert dans The Great Wolf. Mine de rien, le cahier des charges de la série Primarchs n’est pas si évident que ça, la nécessité de placer son propos dans le laps de temps compris entre la découverte de l’Übermensch en question et le début de l’Hérésie pouvant conduire l’auteur à se hasarder dans la mise en scène d’une péripétie de son cru, avec des résultats parfois décevants (Lord of Ultramar). En sa qualité de barbouze/bourreau officieux de son despote de paternel, Russ pouvait cependant faire l’objet de récits dépeignant la face cachée de l’Imperium même au moment de sa gloire la plus éclatante, le Graal (ou plutôt le Canis Helix, soit l’écuelle de Milou) ayant été de faire le lien entre la disparition des Primarques inconnus et la VIème Légion, que l’on soupçonne fortement dans les cercles autorisés d’avoir joué un rôle majeur dans l’effacement de #2 et #11. Rien de tout ça ici (le contraire eut été étonnant, très franchement), mais Wraight fit le next best choice à mon sens en choisissant de mettre en lumière l’élément le plus ancien du fluff de « croisé » de Leman Russ, à savoir la campagne de Dulan. Cela faisait en effet des années, voire des décennies que tous les petits Zhobbystes faisant leurs classes apprenaient que de ce funeste évènement provenait la rivalité entre Balto et Simba, sans avoir à se mettre autre chose sous la canine que trois lignes lapidaires expliquant que Lionel avait eu la mauvaise idée de voler un kill à son sanguin de frérot. Si ce survol depuis l’orbite haute de l’épisode, tel qu’il était relaté dans les Codex Space Wolves et Dark Angels, permettait de se faire une bonne idée du caractère de chaque Légion et Primarque, il n’empêche que tout fluffiste un brin curieux se posait sans doute la question de savoir comment cette rivalité pluri millénaire avait débuté. Le dévolu que Chris Wraight a jeté sur l’incident de Dulan m’apparaît donc comme tout à fait pertinent.

Deuxième effet kiss cool, Dulan a permis à Wraight de servir au lecteur une double ration de Primarques, ce qui est toujours bon à prendre. C’est fin, ça se lit sans faim. En plus de voir Leman Russ se secouer les puces, nous avons donc le droit à sa majesté Lionel, second rôle mâtiné d’antagoniste bien mis en avant par l’auteur, et c’est plutôt heureux. Le Primarque étant un être complexe à mettre en scène de par la nécessité de faire rejaillir sa supériorité totale sur des individus déjà intrinsèquement surhumains, les récits n’intégrant qu’un seul de ces spécimens ont la fâcheuse tendance à les dépeindre de façon ingrate, en particulier si l’auteur choisit pour protagoniste un simple Astartes. En mettant Russ face à ses responsabilités, nommées Lion E’Jonson, et réciproquement, Wraight a contourné cet écueil, les Primarqueries auxquelles les frères se livrent permettant de justifier pas mal de leurs actions par l’égo surdimensionné qui est le leur, et qui est attendu dans ce genre de situation. Rien de plus douloureux pour le fluffiste que de voir un D20 passer pour un abruti fini par suite d’actions stupides ou des réflexions oiseuses. Ce n’est pas le cas ici (ou en tout cas, ça peut se discuter), et c’est tant mieux. Ajoutez à cela que Wraight prend soin de ne pas accorder de traitement de faveur à Leman Russ, qui en tant que héros, aurait pu y avoir droit, par rapport à El Jonson, et vous obtenez une recette gagnante. Là où Russ est jovial, honnête et farouchement fidèle envers les siens, le Lion fait montre de noblesse, de droiture et d’équanimité. Et quand le Loup Suprême se fait violent, caractériel, borné et impulsif, le Roi Lion renchérit par le mépris, l’arrogance et la tromperie. Nos deux mâles alpha ne sont donc pas manichéens, et c’est très appréciable.

D’un point de vue un peu plus macro, pour continuer, j’ai apprécié le fait que Wraight se donne la peine de lier son roman avec le fluff pré-existant des Space Wolves, et tente à son tour d’apporter des éléments explicatifs à certains des points les plus saillants de ce dernier. La malédiction du Wulfen, caractéristique essentielle de la VIème Légion, est ainsi au cœur du Loup Suprême, et, même si l’origine de cette affliction n’est pas révélée dans ces pages, elle est au moins documentée de façon sérieuse par Chris Wraight. On apprend ainsi à quel moment Russ a découvert le fléau qui menaçait le Rout, les premières réponses apportées par les Space Wolves à cette situation inédite, et surtout, le rôle que la malédiction a joué dans le déroulé de la campagne de Dulan. Car si la solution de facilité aurait consisté à faire résulter le clash fraternel d’une simple incompatibilité d’humeur, Wraight ne mange pas de ce pain-là et transforme l’explication simpliste en simple facteur aggravant, ce qui est à mettre à son crédit. Entre le tempérament fougueux à tendance monomaniaque de Russ, qui permet à ses Jarls de foncer tête baissée dans les combats de dépit d’avoir été coiffé sur le poteau par Lionel, Bloodhowl qui met ses torpilles où il veut, et c’est souvent dans le réacteur des vaisseaux ennemis, sans prendre le temps de décrocher son téléphone avant de commettre l’irréparable, le désir déplacé, mais compréhensible, du même Bloodhowl de cacher son honteux petit secret à son patron, ce qui conduit in fine ce dernier à prendre du retard sur l’accomplissement de sa mission, et Lionel qui donne sa parole de ne pas y toucher, et qui finit par le faire… mais parce qu’il veut éviter des pertes inutiles parmi les guerriers de sa Légion, les causes expliquant l’empoignade virile autant qu’animale entre Primarques sont multiples et crédibles. Un autre bon point.

Autre élément favorable à verser au dossier, une quantité non négligeable d’éléments fluff à piocher au fil des pages, tant sur la campagne en question que sur les Légions et Primarques convoqués, ainsi que quelques informations intéressantes sur l’équilibre des forces dans le camp impérial pendant la Grande Croisade, ce qui est particulièrement intéressant. Reynolds avait fait de même dans son The Palatine Phoenix, et brossé un portrait saisissant des Emperor’s Children avant le début de la campagne de Byzas, à même d’expliquer en bonne partie la mentalité particulière de cette Légion. Wraight ne va pas aussi loin ni ne fait aussi bien avec The Great Wolf, mais soumet tout de même quelques idées intéressantes, notamment à propos des relations qu’entretiennent les Primarques avec l’Empereur et Malcador. L’utilisation de flashbacks et d’ellipses pour dérouler l’histoire permet en outre à Chris Wraight de donner un aperçu de ce à quoi ressemble le Chapitre des Space Wolves au moment de sa création, ainsi que, de façon plus tenue, d’approcher Leman Russ immédiatement après la fin du siège de Terra, deux moments qui ne manqueront pas d’intéresser le fluffiste aux aguets.

Dernier lourd branlement du chef en direction de la plume de Wraight, et de manière plus terre à terre, j’ai trouvé que son ouvrage était un bon mélange de description, d’action et de discussion, cochant toutes les cases attendues d’une campagne de la Grande Croisade menée par un Primarque. On a donc droit à de la baston Astartes vs the world, tant dans l’espace que sur le plancher des vaches, rehaussée d’interventions primarquielles forcement bad ass (à consommer avec modération mais une fois de temps en temps, ça ne fait pas de mal), et couronnée par le crépage de chignon attendu entre Loulou et Chouchou. À côté de ça, Russ, Bloodhowl et Cie tapent la discute sur des sujets sensibles tout en se remémorant le bon vieux temps et tirant de savantes conjonctures sur leur rôle au sein de la Grande Croisade et de l’Imperium, ce qui permet de souffler un peu. On a enfin droit à quelques passage descriptifs et/ou explicatifs de bon aloi, même si Wraight se prend les pieds dans sa pelisse de skjald sur un sujet bien précis (voir plus bas). Finissons par mentionner les quelques grammes d’humour que l’auteur a saupoudré sur son ouvrage, et qui se concentrent quasi exclusivement en la personne du Prêtre de Fer Kloja, un vrai Normand dans l’âme, en plus d’être un fan boy des Dark Angels pour des raisons… cosmétiques. Chacun son sale goût.

Passons maintenant de l’autre côté du miroir pour dresser la liste des points perfectibles de la prose d’Herr Wraight. Celle-ci sera plus courte, mais non moins importante, que la précédente, et est à mes yeux révélatrice du statut actuel de cet auteur de la BL, considéré par beaucoup (dont le Schattra ici présent) comme un contributeur qualitatif, mais pas superlatif, de cette dernière. La faute à quelques défauts ou manquements récurrents, illustrés ici par la présence de faux raccords narratifs, certes mineurs, mais révélateurs d’un manque de documentation et/ou de relecture n’ayant pas sa place dans un ouvrage de l’Hérésie d’Horus. Qu’il s’agisse de la couleur de Freki et Geri, dont l’un a blanchi et l’autre noirci au lavage si on prend comme référence Prospero Burn et A Thousand Sonds, de la triple mention du Xenos, du mutant et, surtout, de l’hérétique, comme ennemis d’une civilisation opposée à l’Imperium pendant la Grande Croisade (erreur compte double), ou de la confusion de grade entre Bloodhowl et Bulveye par rapport à Wolf at the Door de Mike Lee (pas de chance, c’était la seule nouvelle abordant le Dekk-Tra), Wraight prend quelques libertés avec les faits (pré) établis, et c’est dommage.

Pas critique non plus mais passablement irritant, la compréhension limitée qu’à l’auteur de tout ce qui touche à l’espace, et en particulier, des dimensions et distances à considérer sur ce théâtre, empêchent l’immersion au cours des scènes s’y déroulant. L’arrivée des Space Wolves dans le système de Dulan et la bataille spatiale qui s’ensuit accumulent ainsi les problèmes de réalisme. On peut relever l’hyper vitesse avec laquelle le Rout arrive en orbite autour de Dulan après l’extraction du point de Mandeville (de l’ordre de 10 minutes d’après la manière dont c’est raconté), la tendance de Bloodhowl à faire du pare choc à pare choc avec les vaisseaux ennemis, Russ qui arrive à intercepter une salve de rayons laser (qui se déplacent donc à la vitesse de la lumière) avant qu’elle ne frappe un croiseur ami, ou encore la taille inversement proportionnelle à l’utilité de l’anneau planétaire de défense de Dulan, et ses centaines de milliers de kilomètres de coursives nettoyées en quelques heures, pour se convaincre de la nécessité pour Wraight de potasser le sujet (ou de demander conseil à Thorpe, l’expert maison de l’engagement spatial) avant d’écrire des énormités.

Troisièmement, et c’est plus un regret qu’un grief, on ressort du Loup Suprême sans avoir rencontré une nouvelle facette de la personnalité de Leman Russ ou de Lion El’Jonson. C’était pourtant l’occasion d’innover et de surprendre un peu le lecteur à ce sujet. Il n’y a pas à dire, Chris Wraight réussit à panacher les éléments constitutifs du caractère du Primarque canin avec succès, ce dernier oscillant entre violence frustre, sauvagerie réelle et feinte, réalisme froid et constat las et désabusé quant à son rôle au sein de l’Imperium. Mais, tout ça, on le savait déjà ! J’aurais bien aimé que Wraight complexifie encore le portrait de notre surhomme, ou force un peu plus le trait sur une de ses caractéristiques en particulier, afin que son Leman Russ sorte du lot. Bizarrement, je trouve que c’est le Lion qui s’en sort le mieux à cet égard, l’alternance entre odieuseté objective et noblesse angélique lui donnant davantage de relief que son frangin.

Enfin, et c’est un constat qui sera sans doute à se répéter, ce qui ne m’empêchera certainement pas de le réitérer lors de prochaines chroniques, ça reste diablement cher pour ce que c’est. Une grosse centaine de pages pour 9,99 € en format numérique, ce n’est pas un rapport quantité ni qualité prix exceptionnel. J’ai bon espoir que la BL finisse par sortir des recueils des romans Primarques, possiblement une fois que tous auront été couverts, et peut-être sous la forme d’une trilogie (6 Primarques par bouquin), en attendant, c’est clairement un produit de luxe.

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Au final, The Great Wolf est une lecture des plus honnêtes, et qui a tout pour intéresser l’amateur de Space Wolves pas trop près de ses crédits impériaux. Chris Wraight n’a ni coupé son loup, ni loupé son coup, et c’est tant mieux. À parcourir si vous en avez l’occasion, et à ne pas regretter si vous ne l’avez pas.