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HERALDS OF THE SIEGE [HH]

Bonjour et bienvenue dans cette critique de ‘Heralds of the Siege’, l’ultime1 recueil de nouvelles consacrées à l’Hérésie d’Horus sorti par la Black Library, en l’an de grâce 2018. Regroupant 16 courts formats prenant place dans les dernières années de cet événement cataclysmique, ‘Heralds’ renoue dès sa couverture avec la tradition des recueils thématiques, comme ‘Tales of the Heresy’, ‘Mark of Calth’ et ‘Shattered Legions’, qui ont laissé la place à des anthologies généralistes (ou fourre-tout, si on laisse tomber le politiquement correct) au fil des ans. Un signe de bon augure pour les lecteurs qui, comme votre serviteur, sont sensibles à la cohérence des ouvrages qu’ils parcourent, même si ces derniers ont été écrits par des auteurs différents. Reste à vérifier si derrière cette image d’un Rogal Dorn triomphant flanqué d’un Malcador mal remis de sa dernière virée en ville, ‘Heralds’ se révèle être une bonne introduction au Siège de Terra, comme on cherche à nous le faire croire. C’est ce que nous allons voir…

1 : En tout cas si on se réfère à la liste officielle de la BL, que cette dernière a largement laissé tomber après le début du Siège de Terra. C’est ainsi qu’on a pu voir sortir des OLNI, comme ‘Cthonia’s Reckoning’, qui n’appartiennent ni à l’Hérésie d’Horus, ni au Siège de Terra. Notons aussi que depuis le Summer of Reading 2017, les quelques nouvelles hérétiques inédites que la Black Library a publié n’ont été regroupées dans aucun recueil.

Heralds of the Siege

On le sait, contribuer à l’Hérésie n’est pas donné à tout le monde, et c’est pourquoi on ne retrouve que des noms connus au sommaire de cette anthologie. Parmi les auteurs vétérans mis à contribution dans cet effort collectif, c’est le futur Seigneur de Terra Chris Wraight qui se taille la part du lion, avec pas moins de quatre nouvelles au compteur, suivi par son camarade Gav Thorpe et ses trois offrandes. Signalons également que ‘Heralds’ marque la fin du parcours hérétique de deux compagnons de route de longue date de cette odyssée littéraire : Rob Sanders et Anthony Reynolds. Prenons un moment pour rendre hommage à leur contribution importante au grand œuvre de la BL, et attaquons sans plus attendre : on a un siège à préparer après cela.

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52. Heralds of the Siege

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Myriad – R. Sanders :

INTRIGUE :

MyriadNous suivons l’ex Princeps Kallistra Lennox et sa petite bande de loyalistes alors qu’ils mènent des opérations de sabotage à la surface de Mars, tentant à leur humble niveau de mettre des bâtons dans les chenilles du Mechanicus Noir qui règne en maître sur la planète rouge. Après avoir détruit l’Ajax Abominata, un Titan Warlord qui patientait dans la pampa que les Imperial Fists arrêtent leur blocus orbital pour rejoindre les hordes horusiennes, Lennox et ses ouailles répondent au SOS d’un martien en détresse sur le chemin du retour vers la base secrète de la résistance. Ils arrivent sur le lieu d’un accrochage entre une équipe de récupérateurs loyalistes et les forces du sinistre Gordicor, chargé par Kelbor-Hal de traquer les fidèles de l’Omnimessie, et se préparent à faire une nouvelle fois parler la poudre.

À la grande surprise de nos héros, leurs adversaires semblent cependant s’être entretués pour une raison inexpliquée peu de temps après leur arrivée sur site, leur facilitant grandement le travail et leur permettant de mettre la main sur du matos de premier choix parmi les décombres, en la figure d’un robot Kastelan presque neuf. L’automate a bien une espèce de protubérance mécanique non identifiée au milieu du torse, mais cela n’empêche pas Lennox et ses sous-fifres de l’embarquer dans le coffre de leur tunnelier de service, et de reprendre le chemin de la base Invalis en compagnie des camarades qu’ils ont secourus.

Une mauvaise nouvelle attend toutefois la Princeps Disney à son arrivée au poste de commandement des insurgés, dirigé par le presque mort mais toujours vaillant (il lui reste l’usage de la main droite, et pour un gamer, c’est plus que suffisant) Raman Synk : les forces de l’Ordo Reductor de cette brute de Gordicor se sont inexplicablement mises en route en direction d’Invalis peu de temps après le raid sur l’Ajax Abominata, ce qui ne peut que signifier qu’ils ont réussi à suivre la trace des loyalistes. Aussi pragmatiques que l’on pouvait s’y attendre de la part d’ingénieurs de leur calibre, Lennox et ses supérieurs ne tardent pas à soupçonner que la cause de leur problème vient de leur trouvaille miraculeuse, laissée en quarantaine dans un hangar en compagnie d’une nouvelle recrue enthousiaste mais pas encore testée, Lenk 4/12 (ces noms, ces noms…). Comme pour confirmer leurs suspicions, le Kastelan inerte reprend soudainement du service, et commence à pomper goulument la base de données d’Invalis sans que les adeptes ne puissent rien faire. En effet, l’appareil monté sur la carlingue du robot de combat est identifié (un peu tard) par le docte Synk comme la marque de la Myriade Tabula, une intelligence artificielle ayant tenté de conquérir la galaxie par le passé, et mise sous clé à fin d’étude par le Mechanicum après avoir été vaincue de haute lutte. Et l’IA semble très déterminée à prendre sa revanche…

Début spoiler…Fort heureusement pour les loyalistes, Mme Tabula considère, dans son infinie sagesse, qu’ils ne sont pas une menace, ce qui est à la fois rassurant et insultant, et se concentre exclusivement sur la purge du Mechanicus Noir, à commencer par l’émetteur corrompu que le pauvre Lenk 4/12 transportait dans son bedon sans même le savoir, et qui est prestement confisqué et détruit par le Kastelan « possédé », sauvant du même coup la base Invalis d’une attaque de Gordicor.

Peu optimistes quant à leur chance de neutraliser la Myriade, Synk et ses complices décident de faire contre mauvaise fortune bon cœur core et de capitaliser sur la haine que l’IA semble vouer au Chaos pour poursuivre leur lutte contre Kelbor-Hal et ses sbires. En effet, la puissance et la pureté logique du code tabulaire permet de retourner les machines corrompues les uns contre les autres, comme cela a été le cas lorsque Lennox et ses hommes ont répondu à l’appel à l’aide de leurs camarades, un peu plus tôt dans la journée. Il ne leur reste plus qu’à suivre le plan en 4.267 étapes concoctés par la Myriade pour parvenir à leurs fins, et avec un peu de chance, appuyer sur le bouton Reset juste avant que cette dernière parvienne à assujettir l’univers, comme elle en a l’intention. Tout sera une affaire de timing…Fin spoiler

AVIS :

Les lecteurs familiers du fluff de l’Hérésie d’Horus savent que le Schisme de Mars a constitué un événement important de cette campagne cataclysmique, que la Black Library a cependant traité assez légèrement dans sa couverture de cette dernière. Partant, il est difficile de cracher sur une nouvelle traitant de ce théâtre particulier, même si Rob Sanders livre une copie assez particulière avec ce ‘Myriad’, continuation logique de la novellaCybernetica’ (où la Myriade Tabula apparaît pour la première fois), et qui semble n’être qu’une succession de péripéties mineures (détruire un Titan, secourir des copains en rade…) jusqu’à ce qu’un littéral Deus Ex Machina se produise et le rideau tombe sur Kallistra Lennox et sa looooongue liste de camarades nommés1. Mars méritait mieux.

1 : Ce qui semble indique que Rob Sanders avait l’intention de développer cet arc dans d’autres publications, si vous voulez mon avis. Pas de chance, ‘Myriad’ a été son dernier travail pour l’Hérésie d’Horus…

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The Grey Raven – G. Thorpe :

INTRIGUE :

The Grey RavenL’ex-mais-pas-tout-à-fait-finalement Archiviste de la Raven Guard Balsar Kurthuri a été renvoyé sur Terra par Corax en personne après les événements relatés dans ‘Weregeld’, où il doit recevoir le jugement de Malcador le Sigilite. Tel le bouc (ici corbeau) émissaire, notre surhomme endosse une responsabilité collective dans cette histoire, puisqu’à travers lui, c’est tout le Librarium de la XIXème Légion qui se trouvera amnistié ou frappé d’anathème. Le Primarque furtif n’assume en effet plus trop la permission qu’il a donné à ses fils de s’asseoir sur l’Edit de Nikea, bien qu’il n’ait pas fait le fin bec lorsque les pouvoirs psychiques de Kurthuri – catapulté Archiviste en chef de la Raven Guard après le désastre d’Isstvan V – l’aidèrent à récupérer le patrimoine génétique nécessaire à la reconstruction accélérée de sa Légion. Avec les résultats que l’on sait (#JamaisPlus, etc). Très chill dans l’âme, Kurthuri a accepté la mission sans rechigner, tout comme il a juré à Corax de ne pas faire usage de ses pouvoirs jusqu’au verdict de Malcador. Voici les termes posés.

Les hasards de la guerre ont fait que notre corbeau énergétique a fait le voyage non pas sur un vaisseau appartenant à sa Légion, mais s’est fait prendre en stop par des Imperial Fists sous le commandement du Capitaine Noriz. Il est également accompagné par le Custodes Arcatus Vindix Centurio, détaché par Valdor pour s’assurer que le patrimoine génétique remis à la Raven Guard était utilisé dans le respect des clauses établies, et un peu désœuvré depuis que Corax a bousillé son kit de petit chimiste. Alors que le Wrathful Vanguard sort du Warp pour pénétrer dans le système solaire, les revenants sont accueillis par une armada de vaisseaux et de stations de combat, preuves irréfutables que la guerre ne tourne pas en faveur des forces impériales. Il ne faut pas longtemps avant que les demandes d’authentification pleuvent sur le Uber de Kurthuri, qui laisse sagement Tchuck Noriz et AVC gérer l’administratif avec leurs vis-à-vis. Après tout, qui de plus qualifié qu’un Imperial Fists et un Custodes pour négocier un passage vers Terra ?

Malheureusement pour l’Archiviste déclassé, ses comparses ne font pas un super taf, et lorsque le stagiaire Custodes (Ludivicus) que Malcador a placé à la régulation du trafic solaire se met à faire du zèle auprès de son collègue, la situation dérape très rapidement. Kurthuri, trop honnête, a en effet eut le malheur de déclarer qu’il était sous le coup de l’Edit de Nikea, aveu suffisant pour que Ludivicus éructe un mot code secret sur la fréquence radio, transformant aussitôt Arcatus en ennemi mortel de ce pauvre Corneille. Et lorsque les bolts commencent à lui voler dans les plumes, Kurthuri décide de connaître un petit peu la peur, et bat prudemment en retraite pendant que Noriz, tout aussi surpris que son camarade Légionnaire par la réaction à brûle pourpoint du Custodes, tente de raisonner ce dernier.

S’engage alors une partie de chasse d’une genre un peu particulier, les Custodes du Wrathful Vanguard se mettant à traquer Kurthuri dans les coursives, tandis que ce dernier cherche à s’échapper du vaisseau pour rejoindre Terra et plaider sa cause directement auprès du Régent de Pépé, bien aidé par les Imperial Fists dans ses manœuvres d’évasion. Comme ni les Jaunards ni les Dorés ne tiennent vraiment à causer des pertes dans l’autre camp, l’affrontement tient plus du match de paint ball que de la fusillade sans merci, jusqu’à ce qu’Arcatus rattrape Noriz et Kurthuri, et les engage au corps à corps.

Bien qu’en désavantage numérique, le Custodes a tôt fait de démontrer qu’il est une classe au-dessus de l’Astartes moyen, même gradé, et s’énerve tellement qu’il finit par empaler le pauvre Noriz sur sa lance gardienne. Comprenant qu’il n’a aucune chance de sortir vainqueur de ce combat à la régulière, Kurthuri décide de revenir sur sa parole et d’avoir recours à ses pouvoirs… jusqu’à qu’un froncement de sourcil dédaigneux de son adversaire lui fasse changer d’avis. Résigné à obéir à son Primarque, même au prix de sa vie, notre héros finit par se rendre, et est enfin mené jusqu’à Malcador…

Début spoiler…Qui avait en fait un job à lui proposer parmi ses Chevaliers Errants, et cherchait à tester… son self control j’imagine ? dans des conditions extrêmes avant de l’embrigader dans son organisation secrète. La nouvelle se termine donc avec l’arrivée de ce vieux lézard d’Umojen, chargé par le Sigilite de briefer le bizut sur ses missions à venir. L’histoire ne dit pas si Corax a été dédommagé pour ce détournement de ressources…Fin spoiler

AVIS :

Thorpe a beau être un expert de la Raven Guard, je n’ai pas trouvé cette histoire très aboutie. Outre le fait qu’elle n’apporte pas grand-chose à l’Hérésie d’Horus, et apparaît davantage comme un moyen pour l’auteur de faire faire des heures supplémentaires à l’un de ses personnages alors que la tendance générale est plutôt à l’écrémage sévère en préparation de la clôture de la saga, je reproche à Thorpe d’avoir dévoyé la loyauté fanatique des deux factions les plus Pépéphiles de l’époque, les Custodiens et les Imperial Fists, juste pour pouvoir mettre en scène à peu de frais le simulacre d’affrontement entre les deux gardes prétoriennes de l’Empereur sur le Wrathful Vanguard. Cette guéguerre sans (presque) victimes est totalement illogique à l’époque où l’histoire prend place (après la tentative d’infiltration de Terra par l’Alpha Legion), et la réaction imprévue d’Arcatus n’aurait dû selon moi avoir que deux conclusions : soit une coopération immédiate et totale entre Custodiens et Imperial Fists, même si les seconds ne comprennent pas les motivations des premiers, soit un combat sans merci, et autrement plus sanglant, entre les deux camps. On ne me fera pas croire qu’un Custodien qui a identifié un ennemi de l’Empereur retienne ses coups pour épargner quiconque se met sur son chemin, fut-il un Imperial Fists. Ajoutez à cela que le test de Malcador est, au fond, très bizarrement conçu (il cherchait une forte tête, mais pas trop quand même ?), et vous obtenez un résultat très passable. Espérons que Kurthuri justifie par la suite (et la fin) de l’Hérésie le traitement de faveur éhonté dont il bénéficie ici.

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Valerius – G. Thorpe :

INTRIGUE :

ValeriusOù il sera question de Marcus Valerius et de la Cohorte Therion, compagnons de route de la Raven Guard pendant la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus, et envoyés pour une raison non explicitée ici se faire euthanasier par les renégats d’Horus sur le théâtre de Beta-Garmon par ce brave type de Corax. Nous retrouvons donc le Vice-Caesari Valerius au volant de sa forteresse Capitol Imperialis, et chargé de tenir la rive gauche de la Veule (une rivière locale) avec ses frères d’armes – dont son propre frère, Antonius, Princeps de Titan Reaver. Lorsque les forces du Maître de Guerre lancent une offensive majeure sur sa position, Valerius, qui a toujours sa foi impériale chevillée au corps, refuse de battre en retraite comme aurait fait n’importe qui, mais préfère au contraire saisir Horus à l’oreille et l’entraîner dans un maquis. Ou en l’absence du grand chauve barraqué, les Titans envoyés à l’assaut des positions loyalistes.

Valerius_IllustrationTout à fait réaliste sur ses chances quasi nulles de remporter la victoire, Valerius n’aspire plus qu’au martyre, persuadé qu’il est que Pépé ne l’aurait pas envoyé crever comme un rat dans une bataille mineure sans une très bonne raison. Chacun voit midi à sa porte. Après une prière rapidement conduite dans sa chapelle improvisée, Valoche ordonne donc à la Cohorte de se battre jusqu’au dernier soldat, assiste à la mort d’Antonius, carbonisé dans son Titan en emportant son vis-à-vis chaotique, sans verser une larme, puis ordonne dans le plus grand des calmes la surcharge du réacteur1 de son véhicule de fonction lorsque les Sons of Horus arrivent frapper à la vitre pour demander un constat à l’amiable.

Début spoilerCe n’est toutefois pas la fin pour Valerius. Peut-être. Une inspection du champ de bataille quelques heures plus tard par une force de reconnaissance impériale permet en effet d’identifier un survivant hébété se promenant le zguegue à l’air dans le cratère de l’explosion de la Capitol Imperialis. Incapable de décliner ses nom et profession aux soldats qui le prennent en charge, le nudiste inconnu se baladait toutefois avec une copie du Lectitio Divinitatus camouflé dans son anatomie (vous ne voulez pas de détails additionnels), et attribue sa survie surnaturelle à rien de moins qu’un miracle. On se demande bien de qui il peut s’agir…Fin spoiler

1 : C’est une manœuvre tellement classique à Warhammer 40K qu’on peut se demander pourquoi les commandants continuent à envoyer des troupes essayer de capturer les vaisseaux ennemis. Sans doute des escouades que Horus ne pouvait pas blairer.

AVIS :

Gav Thorpe offre une sortie de scène digne de ce nom à l’un de ses personnages fétiches de l’Hérésie, ce qui fera sans doute plaisir aux lecteurs que la destinée de Marcus Valerius intéressent. Ne faisant pas partie de ces « fidèles », je dois avouer que mon attention s’est concentrée davantage sur le la forme que sur le fond du récit, et je suis au regret de penser que Thorpe aurait pu rendre une meilleure copie. Mes principaux griefs portent sur la contextualisation très lacunaire de ce morceau de bravoure final, qui ne prend pas la peine de présenter de manière suffisante les personnages, leurs motivations et leur parcours, et nous laisse donc avec un illuminé de la première heure qui semble incapable de réfléchir par lui-même et considère tout ce qui se passe comme le résultat de la volonté de l’Empereur (ce qui est rassurant pour lui, mais pas vraiment approprié à un officier supérieur de l’Armée Impériale), son frère et son valet de pied, apparemment envoyé à la mort par un Primarque loyaliste plutôt sympathique jusqu’ici, sans plus d’explications. Une question me brûle les lèvres doigts à ce stade : WHY SHOULD I CARE ? Certes, on pourrait arguer que Thorpe avait trop peu d’espace à disposition pour briefer les nouveaux arrivants sur la saga Valerienne, mais pour une nouvelle censée pouvoir être lue de manière indépendante, le résultat laisse vraiment à désirer. Je reste convaincu que ces quelques pages relevaient plus du chapitre d’un roman que Gav Thorpe aurait dû écrire pour boucler son arc Raven Guard que d’un stand alone.

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The Ember Wolves – R. Sanders :

INTRIGUE :

The Ember WolvesAbsolom, monde ruche de troisième ordre perdu dans le système de Gorgonopsii Maestrale, est le théâtre malheureux d’un affrontement aussi insignifiant au niveau global que destructeur à l’échelle locale alors que l’Hérésie bat son plein à travers la galaxie : une bataille entre deux Légions titaniques. Côté loyalistes, c’est la Legio Castigrata qui tient la ligne, tandis que les renégats peuvent compter sur les chiens fous de la Legio Audax, dont l’une des formations, les Loups de Braises du Princeps Balthus Voltemand, vont nous servir de protagonistes aujourd’hui.

Planquée au cœur des ruines fumantes de la banlieue industrielle ceinturant la ruche Septus, la meute de Warhounds de Voltemand attend patiemment qu’une cible juteuse se présente à elle. Lorsque le Warmonger Tantorus Magnificat se met à faire des claquettes dans les décombres, les six mini-Titans ne mettent pas longtemps à partir en chasse, confiants dans la puissance du collectif (et celle de leur harpon Griffe d’Ours, aussi) pour venir à bout d’un adversaire de cette taille. Au bout d’un combat acharné, durant lequel un tiers des Loulous se fait estourbir par Tantor le Magnifique, le Warmonger isolé et tiraillé de toutes parts finit par mordre la poussière, au grand plaisir de Voltemand qui s’approche de son adversaire au sol pour lui infliger le coup de grâce…

Début spoiler…Cependant, si les talents guerriers des Loups de Braises n’ont pas pâti de leur passage au Chaos, loin s’en faut, leur discipline laisse désormais grandement à désirer. Le Princeps Primus a ainsi la mauvaise surprise de se faire défier par son rival du Rubella Mortem, Grental Thrax, qui n’a pas supporté de se faire « voler son kill » par son supérieur hiérarchique. Accusant ce dernier de couardise, il ignore les sommations de Voltemand, et la victoire de la Legio d’Audax se transforme en règlement de comptes à KO Corral lorsque le Vulpium Nox abat le Rapacia Rex à bout portant (ou l’équivalent pour une machine de 15 mètres de hait), avant de se faire lui-même descendre par le turbo-laser du Rubella Mortem. Ayant vidé son mega-bolter sur le Tantorus Magnificat au cours des combats, le Canis Ulteriax de Voltemand ne réagit pas assez vite pour empêcher son adversaire de lui envoyer à son tour un coup de canon en plein dans le museau, mais il parvient malgré tout à sortir vainqueur de ce duel proprement titanesque en lui arrachant la tête d’un tir de harpon bien placé. Cinq machines détruites du côté des renégats, contre une seule pour les loyalistes : le ratio n’est pas terrible, mais c’est tout de même une victoire pour la team Horus, pas vrai ?

Début spoiler 2…Eh bien, non. Car pendant que les Loups de Braise lavaient leur linge sale en famille, l’équipage du Tantorus Magnificat a, je vous le donne en mille, mis son réacteur en surcharge pour éviter que la précieuse machine tombe aux mains du Chaos. Lorsque Voltemand et ce qui reste de son équipage se rendent compte de l’entourloupe, il est trop tard pour s’enfuir (à supposer qu’ils soient encore en état de le faire), et la nouvelle se termine sur une explosion cataclysmique qui détruit tout à des kilomètres à la ronde. Egalité.Fin spoiler

AVIS :

Une petite bataille de Titans de temps en temps, ça ne fait pas de mal (et ça varie agréablement des Space Marinades qui constituent l’ordinaire du lecteur hérétique). Rob Sanders soigne sa copie avec cette nouvelle simple sans être simpliste, puisqu’elle parvient à mettre en relief les tendances anarchiques des forces chaotiques, qui peuvent aussi bien se révéler être un avantage qu’un handicap au combat. On passera sur les envolées lyriques de Balthus Voltemand, qui adore déclamer des tirades pompeuses à tout bout de champ (on peut aimer mais je trouve ça too much) et sur les combats de coups de pied de Titans (ça aussi c’est too much), mais le reste se laisse très bien lire.

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Blackshield – C. Wraight :

INTRIGUE :

BlackshieldLa fin de la récré approche à grands pas pour Khorak de la Death Guard et ses quelques frères d’armes survivants, ayant fait sécession de leur Légion après le siège de Molech et s’étant transformés en pirates galactiques nourrissant le vague projet de faire payer son hypocrisie à Mortarion depuis lors. Poursuivis par de mystérieux adversaires jusqu’à l’orbite du monde hostile d’Agarvian, les non alignés sont contraints d’abandonner leur vaisseau (le joliment nommé Ghogolla… je pense que ces nerds de Thousand Sons – et leur énervante maîtrise de toutes les langues mortes de la galaxie, y compris le français – ont dû bien se foutre d’eux pendant la Grande Croisade) et de se poser en catastrophe à la surface de ce caillou aussi minable que gazeux, espérant que leur légendaire fortitude leur permettra de gagner un avantage sur ce champ de bataille des plus difficiles.

Après une marche éprouvante à travers les marais spongieux qui constituent l’unique écosystème d’Argavian, Khokho and the boyz finissent par trouver un endroit idéal pour livrer leur dernier carré (ça tombe bien, ils ne sont plus que quatre), une fois que leurs poursuivants les auront rattrapés, bien sûr. Littéralement quatre jours plus tard, une petite force de Space Marines passablement exténués par cet UTMB1 finit par arriver à portée de bolter, et se fait donc accueillir bellement par les Death Guards qui barbotaient dans la bouillasse sans bouger le petit doigt depuis un petit moment2.

Si les premiers instants de l’accrochage tournent logiquement en faveur des défenseurs embusqués, le nombre de leurs assaillants finit par renverser le rapport de forces, et Khorak, bien protégé par son armure Terminator et son statut de protagoniste, finit par se retrouver seul face à un véritable peloton d’exécution. Bravache jusqu’au bout, il défie en duel le meneur adverse, dont l’héraldique est totalement noire, comme celle de ses suivants. Souhaitant au moins savoir qui sera responsable de son futur et inévitable trépas, l’ex Death Shroud bombarde son homologue de question, jusqu’à ce que ce dernier consente à révéler son identité…

Début spoiler 1…Et, surprise, il s’agit d’un frérot, comme sa capacité à respirer l’air vicié d’Argavian sans protection le laisse apparaître. Les points communs ne s’arrêtent pas là, car Crysos Morturg (son petit nom) est également un renégat Death Guard, ayant été laissé pour mort sur le champ de bataille d’Isstvan III après la purge des premières Légions traîtresses par leurs frères d’armes. Ayant survécu au prix d’une reconstitution quasi-complète de son anatomie, Crysos s’est depuis donné comme mission de traquer et détruire les forces Death Guard sur lesquelles il arrive à mettre la prothèse, en compagnie d’un contingent issus des tristement célèbres Légions Brisées, renommé Black Shields en référence à leur héraldique monocolore. Comprenant qu’il partage le même but que son poursuivant, et malgré la perte regrettable de son vaisseau et ses camarades, Khorak semble prêt à passer l’éponge sur les derniers événements et à repartir du bon pied avec ses nouveaux copains, lorsqu’un accident fâcheux se produit…

Début spoiler 2…Un de ses frères d’armes, qui n’était pas tout à fait mort au final, s’extirpe de son bain de boue pour réaliser un headshot parfait sur le front dégarni et ridé de Jason Statham Crysos, avant d’être transformé en hachis parmentier par la riposte des Black Shields. Cette mort tragique et ironique aurait toutefois préférable pour Khorak à la réalité dont il est témoin, Crysos parvenant à stopper le projectile fatal grâce à ses pouvoirs psychiques. Ayant laissé tomber Mortarion, mais pas son endoctrinement psychophobe, Khorak renonce à rejoindre la team noiraud et préfère tomber au champ d’honneur en essayant de faire goûter de sa faux à Crysos, tentative évidemment vouée à l’échec et dans laquelle il perd le dernier de ses points de vie.

De retour sur son vaisseau, et plus qu’un peu dépité par la tournure qu’ont pris les événements, Crysos décide de mettre le cap sur Terra pour solliciter rien de moins qu’une audience avec l’Empereur en personne (qui n’a sans doute rien d’autre à faire en ce moment), afin d’attirer Son auguste regard sur les services rendus par Robocopmarine et sa bande d’irréguliers. On lui souhaite bien du courage…Fin spoiler

1 : Ultra Trail du Marécage Boueux. Le Mont Blanc a été rasé à la fin de M29 pour construire un centre commercial.
2 : Les amateurs de hard SF me feront remarquer, avec raison, qu’aucune indication n’est donnée sur la longueur du jour sur Agarvian. Il se peut donc que nos héros n’aient attendu que trois minutes avant que la bagarre ne s’engage, mais ce serait beaucoup moins badass, reconnaissons-le.

AVIS :

Chris Wraight se paie le luxe d’introduire une nouvelle faction (certes mineure) à l’Hérésie d’Horus avec ce ‘Blackshield’, ce qui n’est pas donné à tout le monde, et le fait plutôt bien (même s’il passera immédiatement le flambeau à l’infatigable Josh Reynolds après la publication de cette nouvelle). On a ici le droit à une histoire bien ficelée, n’oubliant pas de donner au lecteur sa ration d’action brutale, ni de mettre en relief les conséquences de l’Hérésie pour les personnages lambda qui y sont confrontés. Seul léger bémol : il est nécessaire de maîtriser un minimum le fluff hérétique (en particulier les événements d’Isstvan III et de Molech) pour bien comprendre de quoi Khorak et Crysos discutent lors de leur petit tête à tête agarvien et pourquoi ils sont autant surpris l’un que l’autre de la présence de leur vis-à-vis. En outre, et comme beaucoup d’arcs narratifs ébauchés à cette période charnière de l’Hérésie d’Horus, on reste pour le moment sans nouvelle du space trip vers Terra qui sert d’ouverture à ‘Blackshield’, ce qui est un peu dommage.

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Children of Sicarus – A. Reynolds :

INTRIGUE :

Children of SicarusAprès sa quasi-victoire à Calth et sa fuite honteuse pour échapper à la juste colère des Ultramarines, cette vieille baderne de Kor Phaeron se retrouve isolé sur la planète démon Sicarus, en compagnie d’une poignée de Légionnaires (dont un tout jeune Marduk) et une douzaine de Serfs. Comme on ne change pas une formule qui gagne, le Premier Capitaine n’a rien trouvé de plus urgent à son arrivée que de s’enjailler avec ses nouveaux voisins, en l’occurrence les tribus humaines contrôlées par la redoutable Larazzar, Elue de Tzeentch frôlant l’élévation démoniaque et défenderesse acharnée de son pré carré. Bien que la puissance de ses Space Marines, et en particulier celle de son Gal Vorbak de compagnie, Nemkhar, soit suffisante pour repousser les attaques adverses, ce n’est qu’une affaire de temps avant que les Astartes ne tombent sous les coups de leurs innombrables ennemis. Il faut donc un plan aux Word Bearers pour se sortir de ce pétrin, et heureusement pour eux, quelqu’un en a un à leur soumettre. Pas Kor Phareon, bien sûr, mais ça vous l’aviez deviné.

L’homme providentiel se nomme Jepeth 87 (comme le nombre de ses réincarnations successives), prophète de sa profession. Il se présente à la petite bande alors que cette dernière est sur le point de se faire rattraper par l’armée de Larazzar, qui a très mal pris la mort au combat de son fils préféré, le doux et tendre Orox’i’nor. Cet affrontement scellera sans nul doute le sort des naufragés, aussi, après avoir seulement tenté de le tuer une fois, ces derniers acceptent l’offre qui leur est faite d’accompagner Jep’ jusqu’à son village, camouflé des yeux indiscrets grâce à une puissante magie et quelques hologrammes convaincants. Il paraîtrait même que les Word Bearers sont les héros d’une prophétie top moumoute, ce qui redonne le moral à tout le monde (excepté à ce pisse-vinaigre de Kor Phaeron bien sûr, mais ça…).

Arrivé sur place, KP laisse ses hommes souffler un coup et part avec son cher Nemkhar visiter la caverne de Jepeth, où l’intégralité de la prophétie lui sera révélée. Cette dernière présente deux grands avantages : le premier étant d’annoncer une réunification avec Lorgar, et le second de nécessiter la mort de Kor Phaeron pour ouvrir le portail qui permettra à Marduk de mener ses frères d’armes et les tribus rebelles de Sicarus jusqu’au QG du Primarque. Bien que tout soit dépeint de manière irréfutable, dessins rupestres à l’appui, sur les murs de la grotte de Jepeth, et que ce dernier ait même réussi à mettre la main sur l’athame que Kor Phaeron avait offert à Lorgar lorsqu’ils étaient encore sur Colchis (un tour de magie des plus bluffants), le Maître de la Mauvaise Foi refuse ca-té-go-ri-que-ment d’embrasser la grandiose et altruiste destinée de martyr, et ordonne à Nemkhar de réduire au silence le pauvre Jepeth, qui ne l’avait absolument pas vu venir. La mort du prophète dissipe cependant les illusions qui protégeaient le village caché, et Larazzar ne tarde pas à débarquer avec son armée sur les talons.

Cependant, au lieu de massacrer les quelques Space Marines éprouvés qui lui font face, la Sorcière propose un marché à Kor Phaeron : s’il consent à l’aider à conquérir Sicarus (ce qui ne devrait pas être très compliqué, puisqu’apparemment, il n’y avait que Jepeth et ses hippies qui s’opposaient à son hégémonie) et à ainsi atteindre l’immortalité, elle lui laissera l’usufruit de la planète, qui pourra servir de camp de base aux Word Bearers. Ce qui leur serait utile puisque Colchis a été ravagée en punition de leur traîtrise. Kor Phareon a-t-il vraiment les moyens de refuser un pacte aussi avantageux ?

Début spoiler…La réponse est non, mais cela ne veut pas dire qu’il tient sa parole. Ce serait faire injure à sa réputation, après tout. Ainsi, dès que Larazzar déchaîne ses pouvoirs mutagènes pour transformer les suivants de Jepeth en Enfants du Chaos, le perfide Word Bearers lui tranche la gorge avec l’athame qu’il a récupéré dans la caverne du feu prophète (et qui, quelque part, lui appartenait de plein droit), récupérant au passage toute la… heu… faveur chaotique ? emmagasinée par la trop confiante Sorcière. La mort de leur maîtresse jetant ses serviteurs dans la confusion la plus totale, il ne faut pas longtemps avant que l’ambitieux et impitoyable Kor Phaeron s’affirme comme le suzerain incontesté de Sicarus, et commence à construire sa première cathédrale noire, peu soucieux de rejoindre sa Légion pour le grand final de l’Hérésie. Avait-il déjà compris que le projet d’Horus était voué à l’échec ? Ce n’est pas improbable, car s’il y a une règle immuable dans cette galaxie sans foi ni loi, c’est bien que le camp de Kor Phaeron ne peut pas l’emporter. Jamais.Fin spoiler

AVIS :

Pour sa dernière entrée dans l’Hérésie d’Horus, Anthony Reynolds nous donne des nouvelles du personnage que tout le monde avait oublié après ‘Know No Fear’, et qui n’avait sans doute manqué à personne : Kor Phaeron. Rien de particulièrement mémorable dans ce ‘Children of Sicarus’, mais on a au moins un arc narratif fermé assez proprement, ce qui est loin d’être négligeable eut égard à la sale manie des auteurs de cette franchise à laisser leurs intrigues en plan, soit que leur collaboration avec la BL ait cessé avant qu’ils n’aient pu aller plus loin, soit que cette dernière ne leur ait pas donné la possibilité de terminer le boulot. Reynolds en profite pour mettre en avant sa propre création (Marduk), comme il l’avait fait dans ‘Dark Heart’, mais c’est de bonne guerre.

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Exocytosis – J. Swallow :

INTRIGUE :

ExocytosisDurement éprouvés par la poursuite féroce que leur livre l’implacable Corswain depuis leur affrontement dans le système de Perditus (‘The Lion’), Calas Typhon et ses Grave Wardens ont fait escale sur la planète féodale de Zaramund pour panser leurs plaies et réparer leurs vaisseaux. Accueillis à bras ouverts par Luther et ses Dark Angels renégats, qui pensent pouvoir se faire bien voir du Maître de Guerre en échange de leur coup de main (les Dark Angels ne font jamais rien de manière désintéressée, c’est connu), les Death Guards ont cependant choisi de limiter les interactions avec leurs cousins Légionnaires au minimum, ce qui chagrine fortement ces snobs de Calibanites. Officiellement, comme l’annonce Typhon à son homologue après avoir filtré ses appels pendant plusieurs jours, il s’agit de réduire le risque d’accident malheureux entre les deux contingents, certains Death Guards étant apparemment trop neuneus pour faire la différence entre un bon et un mauvais chasseur Dark Angel. Officieusement, le Premier Capitaine sent qu’il couve quelque chose de pas net depuis Perditus, comme les triades de bubons qui se développent sur son épiderme et l’intérêt que sa personne provoque chez la gent diptère lui laissent à penser. Redoutant sans doute le jugement de cet arbitre des élégances qu’est Luther (et sa barbe de hipster), Typhon refuse poliment mais fermement que ses nouveaux alliés lui envoient des Techmarines pour superviser les réparations, et consent seulement à venir au pot de l’amitié que l’état-major Dark Angels organisera à la fin des travaux.

Ce manque flagrant de reconnaissance est mal vécu du côté de la Première Légion, et un Capitaine gaffeur et désœuvré (Vastobal) convainc Luther de le laisser aller espionner le camp retranché de la Death Guard. En chemin, il tombe sur une caravane de civils locaux, bien décidés à rendre visite et hommage à un certain Typhus, sur lequel ils ne tarissent pas d’éloges. Profitant de la diversion offerte par ce troupeau de pèlerins, Vastobal se planque dans un bosquet tout proche de l’entrée du camp, et prend la pose d’un mélèze pour ne pas se faire repérer, tandis que Typhon en personne sort pour aller s’enquérir de la cause de tout ce raffut…

Début spoiler…Il ne lui faut pas longtemps pour comprendre qu’il est bien le Typhus dont ses groupies sont énamourés, et que ces derniers présentent tous les mêmes marques cutanées que lui. Appelé « Héraut du Grand-Père » par la petite mamie qui mène la congrégation, Typhon constate avec plus de fascination que de révulsion que ses visiteurs portent tous les symptômes de maladies graves, qui auraient dû les emporter depuis longtemps mais contre lesquelles ils semblent immunisés. Cette sympathique communion est toutefois interrompue par ce butor de Vastobal, qui sort de ses gonds et de ses bois lorsque les Zaramundois commencent à exsuder des essaims de mouches par tous leurs orifices. Fermement opposé aux choses du Warp, comme tout Calibanite qui se respecte, le Capitaine se met à massacrer les pèlerins à grands coups d’espadon, ce qui provoque la réaction de Typhon.

Le combat s’engage, au cours duquel le porteur de faux hérite d’une coupure au menton, ce qui le chagrine si fortement qu’il en devient authentiquement chaotique. Si si. Renforcé par les bienfaits de Nurgle, qui se manifestent pleinement après cette épiphanie barbière, Typhon décapite son adversaire, et part discrètement du système avant que les Dark Angels ne s’inquiètent de la disparition de Vastobal. Lorsque le Seigneur Cypher alerte Luther du départ en loucedé de ses invités, ces derniers sont déjà loin, et Typhon est fort occupé à précipiter la corruption de sa Compagnie en faisant goûter à ses officiers son hémoglobine suspecte lors du rituel des Coupes (encore un scandale de sang contaminé). Et ce n’est qu’un avant-goût de ce qu’il réservera à son vieux poto Mortarion lorsqu’ils seront à nouveau réunis…Fin spoiler

AVIS :

Si la déchéance de la Death Guard a été suggérée depuis les tout débuts de l’Hérésie (‘The Flight of the Eisenstein’), ‘Exocytosis’ marque véritablement le moment de la bascule définitive de cette Légion vers Nurgle, Calas Typhon servant de catalyseur à cette évolution fatidique. En cela, la lecture de cette nouvelle est obligatoire pour tous les amoureux du fluff de cette faction, et sert de prologue assez robuste aux événements couverts dans ‘The Buried Dagger’, où le même Swallow finira le travail et racontera le désastreux voyage de la Death Guard réunifiée jusqu’à Terra. Comme cet auteur prend un malin plaisir à faire passer Mortarion pour la dupe de son Premier Capitaine, l’absence du premier n’est absolument pas rédhibitoire, et permet même de relever le niveau de la nouvelle, si j’en suis seul juge. Les seules victimes de l’histoire sont finalement les Dark Angels, qui apparaissent comme les nice guys/dindons de cette farce. On peut s’interroger sur la nécessité de faire participer Luther à cette galéjade, d’où il ne sort pas vraiment grandi : vu l’importance qu’il a dans l’intrigue, n’importe quel Capitaine Dark Angels aurait pu tout aussi bien faire l’affaire. Peut-être que James Swallow avait des comptes à régler avec la Première Légion…

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The Painted Count – G. Haley :

INTRIGUE :

The Painted CountSi les lendemains de cuite sont difficiles, ceux de défaite cuisante le sont encore plus. Particulièrement quand on est aussi douillet que notre héros du jour, ou plutôt de la nuit, le Capitaine des Night Lords Gendor Skraivok, aussi connu sous le nom de Comte Peint du fait de son maquillage très bath. Dispersés, démoralisés et laissés orphelins après la bataille de Thramas et la capture de Konrad Curze (sans oublier ce bon vieux Sevatar), les Légionnaires de la VIIIème doivent faire face à une période de transition forcément chaotique, du fait de leur nature profonde et de leurs sales tendances au complot et au meurtre. Skraivok est l’un des prétendants les mieux placés pour devenir le nouveau meneur des Night Lords, notamment grâce à sa maîtrise du vaisseau amiral de la Légion, le redouté Nightfall, mais il doit se défaire de son rival Shang, qui dispose de nombreux soutiens et de l’aura d’avoir été l’Ecuyer de Hante-la-Nuit.

Cette lutte de pouvoir n’est cependant que l’un des problèmes qui tracassent le Comte. Il a aussi hérité sur Sotha d’une épée d’un genre un peu particulier, en cela qu’elle est très certainement démoniaque de nature, et plutôt collante dans ses attentions. Ainsi, malgré des efforts vigoureux, répétés et inventifs pour s’en débarrasser, elle a toujours trouvé le moyen de revenir à ses côtés pour le tenter. Dernière tentative en date, et donc dernier échec : le jeter dans l’espace depuis un sas ouvert (le tout sans casque, opa Guilliman style), qui n’a rien donné non plus, et s’est même montré contre-productif car Shang et deux Atramentar attendaient Skraivok à la sortie du vestiaire, et sans arme pour se défendre, se défaire d’un Capitaine et de Terminators est nettement moins facile, même pour un individu aussi talentueux que notre héros.

The Painted Count_IllustrationFort heureusement, Shang est plutôt chill pour un Night Lords, et se contente de balancer son rival dans le labyrinthe que Konrad Curze avait utilisé pour son animal de compagnie et néanmoins frère, Vulkan, au lendemain du massacre d’Isstvan. Comme l’élection du prochain maître de la Légion est prévue plus tard dans la journée, l’absence de Skraivok sera suffisante pour permettre à Shang de remporter les suffrages, où du moins le pense-t-il. Cela était sans compter sur l’aide apportée par l’épée, qui attendait comme de juste son porteur élu dans le labyrinthe, et grâce à son GPS intégré et son impressionnant bonus aux jets de pénétration d’armure, permet au Comte de se sortir de ce dédale beaucoup plus vite que cette chochotte de Vulkan. Bien sûr, il doit livrer son âme au démon enfermé dans l’arme, mais nécessité fait loi.

De retour sur le plancher des vaches chauves-souris, il se précipite jusqu’à la salle où le Kyreptoran Vicaria (Conseil d’Administration en bon nostraman) tient séance. Arrivant trop tard pour le vote, il a recours à la bonne vieille méthode du défi en duel à mort pour se défaire de ce fieffé coquin de Shang, qui finit promptement une demi-tête plus petit qu’au débit de la séance, grâce à la super-vitesse que lui confère son épée maudite. Cette démonstration de force ayant considérablement refroidi l’ambiance au sein de l’auguste assemblée, Skraivok est élu sans coup férir Overlord Nightest, et jure d’emmener sa Légion, ou ce qu’il en reste, participer au Siège de Terra pour faire les pieds à l’Empereur. Pas la motivation la plus noble ou la plus profonde, mais que peut-on attendre de la part d’un gonze dont le role model est Gene Simmons, je vous le demande.

AVIS :

Dans le sous-sous-sous genre des nouvelles de l’Hérésie d’Horus expliquant pourquoi et comment les Légions renégates sans Primarques décident de se rendre sur Terra, Guy Haley livre une histoire très correcte avec ce ‘The Painted Count’, qui s’inscrit fort bien dans la grande (la captivité de Vulkan et la capture de Konrad Curze) et la moyenne (la campagne de Pharos, couverte par le même Guy Haley dans le roman éponyme) histoires de l’Hérésie. Si l’utilisation du topos de l’épée maudite ne gagnera pas à l’auteur un prix d’originalité, le rendu est suffisamment propre et le personnage de Gendor Skraivok suffisamment distrayant – même si Sevatar reste, et de loin, le G.O.A.T – pour donner envie d’en savoir plus sur la destinée du Comte Peint, dont on devine qu’elle sera forcément fatidique et tragique. Sortez les mouchoirs et le popcorn.

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The Last Son of Prospero – C. Wraight :

INTRIGUE :

The Last Son of ProsperoRamené sur Terra grâce aux efforts conjoints des White Scars, qu’il a aidé à sortir de la tempête Warp dans laquelle ils étaient encalminés, et des Élus de Malcador le Sigilite, le Sergent Revuel Arvida des Thousand Sons n’est plus vraiment au pic de sa forme à son arrivée sur le monde Trône. En cause, cette cochonnerie de malédiction du changement, un temps contenue par Magnus le Rouge, mais à présent hors de tout contrôle. Exfiltré vers l’infirmerie privée du Régent de Terra au nez et à la moustache de Jaghatai Khan, pour que Papi Mougeot puisse jouer au docteur avec ses abattis, le pauvre Arvida n’est plus qu’un tas de chair décoloré et instable, mais auquel son âme s’accroche encore avec l’énergie du désespoir.

Pendant que Malcador joue du scalpel avec plus de ténacité que d’efficacité (6 heures d’opération, tout de même), puis doit expliquer à un Jag’ hors de lui pourquoi il a cru bon de lui emprunter celui que le Primarque considère comme étant son obligé – et notre gonze prend les serments très au sérieux – Arvida expérimente des visions mystiques, où le passé et le présent s’entremêlent. Après quelques flashbacks peu intéressants, il fait la rencontre de son progéniteur borgne, ou plutôt de l’un de ses éclats1, qui a choisi de rester sur Terra… pour demander pardon à l’Empereur, j’imagine ? Toujours est-il que cette fraction du Roi Ecarlate est tirée de sa stupeur hébétée par l’arrivée de celui qui peut prétendre être le dernier fils de Prospero, et commence à se matérialiser dans la salle d’opération, juste à temps pour éviter à Jaghatai de faire avaler son bâton à Malcador pour lui apprendre à piquer les sauvegardes invulnérables pupilles des autres.

Cette apparition, c’était sur quoi le rusé vieillard comptait, lui qui cherchait un moyen de sécuriser les niveaux inférieurs du Palais Impérial en y installant un concierge avec un DEUG en occultisme. Malheureusement, la mayonnaise ne prend pas, ce qui laisse le champ libre au motivational speaker de Chogoris pour venir hurler des encouragements dans l’oreille la direction générale de son poulain. Miracle des miracles, cela marche beaucoup mieux que la combine de Malcador, et l’âme d’Arvida finit par fusionner avec l’éclat de Magnus, gagnant au passage une cure de beauté spectaculaire (les jeunes disent un glow up), qui redonne à notre comateux héros forme humaine. C’est ce qu’on appelle dans le jargon un coup d’éclat. Le rideau tombe sur une séance de présentation en bonne et due forme entre les membres du casting de cette nouvelle. Plutôt que de se prénommer Marvidus ou Manuel le Vouge, comme il en avait pourtant le droit et la possibilité, le « nouveau-né » s’introduit sous le nom d’Ianius, qui était le tutélaire (i.e. la mascotte démoniaque) d’Arvida au cours de sa carrière dans la Légion. Quelque chose me dit qu’on n’a pas encore fini d’entendre parler de lui…

1 : Parce que n’est plus Magn-I, c’est Magn-Us.

AVIS :

Chris Wraight signe une nouvelle pour connoisseurs de l’Hérésie d’Horus avec ‘The Last Son of Prospero’, qui ne peut être pleinement compris et apprécié qu’en maîtrisant, outre l’arc consacré par cet auteur au personnage de Revuel Arvida (‘Rebirth’, ‘Allegiance’), ceux propres à Malcador le Sigilite et ses élus (‘The Sigillite’), à Magnus (‘The Crimson King’) et aux White Scars (‘The Path of Heaven’, ‘Scars’)… ce qui fait un sacré bagage, mine de rien. Pour les happy few ayant investi assez de temps dans la maîtrise de l’Hérésie littéraire, cette nouvelle est à la fois intéressante sur le plan narratif et fluffique, ce qui est suffisamment rare pour être souligné, et apprécié. Pour les autres, qui formeront je crois la majorité, le bilan risque d’être un peu moins positif. Même si Wraight livre un récit de rédemption miraculeuse qui reste compréhensible pour un faux débutant (si vous ne savez pas qui sont Magnus, Jaghatai Khan et Malcador, ça va picoter), c’est bien le contexte dans lequel ‘The Last Son of Prospero’ se déroule qui fait tout l’intérêt de cette nouvelle. A ne pas mettre entre toutes les mains donc, ou en tous cas, à ne pas aborder sans préparation.

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The Soul, Severed – C. Wraight :

INTRIGUE :

The Soul, SeveredAprès les événements d’Iydris et l’abandon de poste de leur Primarque, les Emperor’s Children eurent une petite période de flottement pendant que la galaxie se déchirait autour d’eux. Bien que leur amour pour les belles choses et les plaisirs simples (mais intenses) de la vie les garda occupé pendant cet intérim, certains officiers prirent sur eux de tenter de redonner un cap et une unité à ce qui était pendant la Grande Croisade la fine fleur des Legiones Astartes, et était devenu un ramassis de glandeurs jouisseurs passant leurs journées à écouter de la dubstep à haute fréquence.

L’humilité et l’esprit d’équipe n’ayant jamais été des qualités fortes chez les Enfants (gâtés) de l’Empereur, il était à peu près certain que ces efforts hégémoniques déboucheraient sur des affrontements ouverts entre prétendants au climazon de Fulgrim (son bien le plus précieux et le symbole de son statut de Maître de Légion) plutôt que sur des tractations en bonne intelligence. Aussi, lorsque les Seigneurs Commandeurs Eidolon, dit Dondon la Raclure, et Archorian, dit l’Italique, (il parle toujours comme ça) acceptent de se rencontrer en terrain neutre, c’est-à-dire un terrain vague dans une friche industrielle de la planète Horvia, ravagée par la guerre, c’est forcément qu’ils ont un coup fourré caché dans leur manche énergétique. Reste à savoir qui aura le dernier mot dans cette partie de poker menteur dont la mise n’est rien de moins que le leadership sur la Légion…

Début spoiler…Archorian ouvre les hostilités le premier en lançant ses troupes à l’attaque de son rival et de son escorte de Kakophoni, mais Eidolon n’avait pas perdu la tête (hoho) et gardé sa propre armée en réserve. Le conflit tourne en faveur de ce dernier, forçant les hommes d’Archorian à se replier à travers les ruines d’un manufactorium en déréliction, poursuivis par leurs frères d’armes. Il s’agissait toutefois d’une feinte pour attirer le gros des forces d’Eidolon dans une zone piégée, et un tsunami de boue toxique s’abat sur les assaillants après qu’Archorian ait fait sauter les bombes placées sur la paroi des cuves de rétention qui surplombent la zone.

Seulement, on ne vient pas aussi facilement à bout d’une tache aussi tenace qu’Eidolon, qui se contente de hurler « MEUHHHH » à la face de son adversaire lorsqu’il vient terminer le travail au corps à corps. Comme les Kakophoni ont aussi survécu sans rétrécir au lavage, et donnent également de la voix à la suite de leur patron, le pauvre Archorian finit éparpillé aux quatre vents, et son armée suit rapidement. Comme on dit à Chemos, rira bien qui criera le dernier. Ces deux déluges consécutifs (l’un littéral, l’autre sonique) provoquent une frénésie de massacre et de sévices chez les Emperor’s Children, qui foncent assouvir leurs plus bas instincts sur la population locale de Horvia, qui n’en demandait pas tant et n’est pas assez nombreuse pour occuper longtemps cette bande d’esthètes en puissance. C’est alors qu’Eidolon a une idée de génie : sur Terra, il y a beaucoup plus de monde à torturer/distiller, de quoi tenir au moins quelques années en tout cas. Et c’est ainsi que la IIIème Légion prit le chemin de Terra, sur le caprice coup de tête de son commandant par défaut après qu’il ait pris un bain de boue. A quoi tient l’Imperium, finalement…Fin spoiler

AVIS :

Chris Wraight endosse le rôle peu glorieux mais nécessaire du manager de transition pour les Emperor’s Children1, Légion bien mise en avant au début de l’Hérésie puis laissée à son triste mais coloré destin à partir du milieu de la saga. Même si sa corruption était déjà bien amorcée au moment du congé sabbatique warpesque de Fulgrim, cette fière confrérie n’en était pas encore rendue à l’hédonisme désordonné qu’on lui connaitrait pendant le Siège de Terra, évolution qui nécessitait donc une justification digne de ce nom. C’est chose faite avec ‘The Soul-Severed’, qui utilise Eidolon plus qu’elle ne le met en valeur (et ça tombe bien, c’est le personnage favori d’absolument personne) pour mettre la IIIème Légion sur le chemin de Terra. On peut mettre cette petite nouvelle au même niveau que ‘Prince of Blood’ de Laurie Goulding, qui rend le même service à une autre Légion dont le Primarque n’était plus en état de la mener jusqu’au monde Trône (les World Eaters). Absolument indispensable si vous êtes un fluffiste acharné, car Wraight se pique de donner l’origine de pas mal de caractéristiques des Emperor’s Children « modernes » (héraldique, goût pour les poisons et l’esclavagisme…), seulement sympathique pour le reste.

1 : Il est assez surprenant que la BL ait confié cette tâche à un auteur qui n’avait jamais vraiment écrit pour cette faction jusqu’ici (spécialisation Space Wolves, Thousand Sons et White Scars pour notre homme).

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Dark Compliance – J. French :

INTRIGUE :

Dark ComplianceOn a tendance à l’oublier, mais l’Hérésie d’Horus a donné lieu à autant si ce n’est plus de tractations entre diplomates que de batailles entre forces loyalistes et renégates. Il faut s’imaginer que chaque planète d’une certaine importance a reçu la visite d’émissaires du Maître de Guerre, chargés de la délicate mission de convaincre le Gouverneur local de trahir Pépé pour rejoindre le camp des rebelles. Une tâche ingrate et très souvent mortelle, dont certains s’acquittèrent mieux que d’autres. Et parmi les meilleurs des meilleurs, nous retrouvons Kinor Argonis, un des messagers favoris du grand chauve, qui lui confia des missions sensibles d’un bout à l’autre de l’Hérésie. On le retrouve ici, peu de temps après les événements de Tallarn, en train de baratiner Desigus, despote des Mondes Dorés et gardien du Golfe Aventien. Desigual semble être un farouche partisan de Pépé, et a prévu d’esquinter sérieusement le messager horusien avant de le renvoyer à son maître avec un tatouage « C’est non » en Comic Sans MS en travers du front (ce qui constitue l’outrage le plus terrible qui soit, même à cette époque reculée). Argonis le sait bien, mais reste confiant dans sa capacité à retourner son interlocuteur, témoignage édifiant à l’appui. Il a en effet assisté aux premières loges à l’agonie d’un monde ayant commis l’erreur de refuser l’amitié du Lupercal, et ne se fait pas prier pour partager cette anecdote avec son hôte.

La malchanceuse planète dont il a été question se nommait Acazzar-Beta, et était placée sous la coupe de l’Adeptus Mechanicus. Son Gouverneur, le Technoprêtre Myrmidax Kadith1, accueillit très chaudement l’offre de sécession d’Horus en noyant ses émissaires dans le plasma, outrage que le Maître de Guerre ne pouvait laisser impuni. Défendue par une flotte respectable et des millions de Skitarii, Acazzar-Beta avait sur le papier une chance non nulle de sortir vainqueur d’une guerre ouverte avec les forces hérétiques, mais Horus avait comme a son habitude tout prévu, et l’affrontement, pour sanglant qu’il fut, se termina rapidement par une victoire sans appel des visiteurs. Dans un premier temps, l’Über Primarque remporta la bataille spatiale grâce à une attaque surprise de sa seconde flotte, qu’il avait caché… dans l’espace et qui prit par revers les stations de défense planétaire (il faut croire qu’elles regardaient toutes du mauvais côté, c’est ballot), et l’utilisation de quelques torpilles vortex pour faire des gros trous (noirs) dans les blindages ennemis. Bien que cela ait coûté cher en troupes et en personnages nommés (en l’occurrence, l’irremplaçable Galdron et son acolyte Night Lords Scarrix), ce fut un petit prix à payer pour pouvoir accéder à la surface d’Acazzar-Beta.

Rendu sur place avec ses Justaerin, son vieux pote Mal(oghurst), son témoin Argonis, un bouquet de fleurs et une perle rouge à l’aura très particulière, Horus passa à la seconde étape de son plan machiavélique. Contrairement à son habitude de décapiter et démoraliser l’ennemi en tuant de ses mains son commandant, ce que le fataliste Kadith avait escompté et intégré à son plan pour infliger le plus de pertes possibles aux Sons of Horus, le Primarque se posa loin du front et fit usage de son boulard écarlate, qui se révéla être une Master Ball démoniaque, pour invoquer le Prince Démon Doombreed et ses armées de Khorne. Ceci fait, il repartit aussi sec en orbite pour assister à l’annihilation des loyalistes, toujours escorté du fidèle Argonis, qui ne rata pas une miette de ce spectacle pittoresque.

De retour dans le présent et sur les Mondes Dorés, le même Argonis demande à un Desigus plus aussi sûr de lui de mûrement réfléchir à la décision qu’il va prendre, et qui pourrait sceller la fin de son empire et la mort de tous ses sujets. On ne saura pas au final quel fut le choix du despote, mais on ne peut pas vraiment lui reprocher d’avoir pris un petit temps de réflexion pour se mettre les idées au clair…

1 : Renommé dans tout le Segmentum pour sa manie de monter des optiques sur les pistons de ses moteurs. D’où l’expression « la bielle de Kadith a des yeux de velours ».

AVIS :

Dark Compliance’ a deux intérêts principaux : il remet sur le devant de la scène un personnage mineur mais régulier de l’Hérésie, le persistant Kinor Argonis (‘Tallarn: Ironclad’, ‘Slaves to Darkness’), ce qui est appréciable si vous vous êtes entichés de ce petit galopin. Il met également en scène un affrontement de grande ampleur entre hérétiques et loyalistes, avec rien de moins que le Maître de Guerre en personne à la tête des premiers, ce qui n’arrive pas souvent dans un court format. Ceci dit, French n’arrive pas vraiment à convaincre du génie tactique de son héros, qui remporte la bataille spatiale (affreusement condensée, on a l’impression qu’elle dure littéralement cinq minutes) sur un gros TGCM, et sort un Demonis ex Machina de sa poche pour plier la manche terrestre. Plutôt décevant.

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Duty Waits – G. Haley :

INTRIGUE :

Duty WaitsSur Terra, les loyaux défenseurs de l’Empereur ne savent plus quoi inventer pour tuer le temps. Nous suivons ainsi le quotidien à la fois morne et stressant de deux Astartes de la VIIème Légion, le Capitaine Maximus Thane de la 22ème Compagnie, et le poussin Kolo, fraîchement diplômé de la promotion Eltaune Jaune, alors qu’Horus n’en finit plus de faire traîner son quart d’heure d’impolitesse. Alors que Max’ a au moins le loisir de faire un peu d’exercice à la tête de ses hommes, qu’il emmène régulièrement faire des joggings sur le mur d’enceinte du Palais1, Kolo est assigné au support informatique de ce dernier, et, entre deux appels d’un certain M. Alcador, qui éprouve toutes les peines du monde à envoyer un mail ou à ouvrir une pièce jointe (et qui oublie une fois sur deux d’allumer son écran), doit gérer une bien pesante inactivité. Car, il faut bien le reconnaître : il ne se passe pas grand-chose d’intéressant sur Terra d’un point de vue strictement apocalyptique. Bref, les journées sont longues2.

À défaut de s’améliorer franchement, les choses évoluent un peu pour nos protagonistes après le départ de la flotte en destination de Beta-Garmon. Bien qu’ils n’aient pas eu la « chance » de faire partie des heureux élus envoyés au casse-pipe contre les renégats, Thane et Kolo ont en effet reçu de nouvelles affectations. Le Capitaine a ainsi la chance, la joie et l’avantage de faire le planton à 300 mètres au dessus d’un square fréquenté par les civils du Palais, afin de rassurer et d’inspirer ces derniers. Malheureusement, les cadences infernales de travail auxquelles sont soumises les masses laborieuses de Terra, les conditions météorologiques détestables de la région, et le manque d’intérêt du spectacle (les gars restent vraiment plantés comme des piquets pendant des heures, à tel point que son Lieutenant manque de déclencher une alerte jaune quand il voit Thane lever les yeux vers le ciel) viennent contrarier cette noble initiative de propagande. Ils auraient jonglé avec leurs bolters, ça aurait eu plus de gueule, moi je dis. Pour se distraire, Maximus imagine ce qu’il se passerait s’il se laissait tomber depuis le mur, et calcule les probabilités jusqu’à la 15ème décimale de sa survie en fonction de paramètres divers, comme l’écartement de ses bras pendant la chute, l’atterrissage sur un quidam, ou encore la vitesse de croisière d’un Stormbird (africain) non chargé. Il soupçonne que le développement d’un passe-temps tel que le suicide mental pourrait peut-être trahir un léger début de névrose, mais cela ne l’empêche évidemment pas de faire son devoir.

De son côté, Kolo participe à l’opération Sentinelle II (la première ayant pris place 28.000 ans plus tôt, même si personne ne s’en souvient), ce qui lui donne l’occasion d’interagir avec les civils que Thane ne voit que de loin. Entre deux contrôles d’identité et palpations aléatoires, le voilà sommé avec son escouade d’intervenir en support des forces de l’ordre, débordées par une foule hostile car affamée. La distribution du pain quotidien ayant en effet annulée sans prévenir, une poignée d’Arbites doivent calmer les velléités meurtrières de quelques milliers de mal-contents. L’arrivée des gilets plastrons jaunes n’a pas l’effet escompté, pas plus que les talents oratoires et diplomatiques, assez limités il faut bien le reconnaître, du Sergent Benedict ne permettent de désamorcer le conflit latent. Ce qui doit arriver arrive, et les manifestants commettent l’erreur de charger leurs protecteurs, qui répondent par une rafale de bolter dans le plus grand des calmes. 80 douilles très exactement plus tard, l’incident est clos, au prix d’un petit millier de morts seulement. Voilà qui mérite bien un honneur balistique, il me semble. Bref, sur Terra il n’y a pas que le temps qu’on tue.

1 : En revanche, pas question de traverser la route avant que le petit bonhomme ne passe au vert jaune. Sous peine de mort.
: Il est d’ailleurs murmuré dans les cercles autorisés que c’est la surutilisation de leur membrane cataleptique pour faire passer le temps plus vite pendant leur interminable garnison sur Terra qui a entraîné la dysfonction de cette dernière chez les Imperial Fists et leurs successeurs.

AVIS :

Dans la série des nouvelles de C.A.L.T.H.1 constituant une partie non négligeable du recueil Heralds of the Siege, Duty Waits se place en tête de peloton par ses importants apports en termes de fluff, ainsi que par la réussite de Haley à faire ressortir la torture mentale que représente cette attente interminable pour les défenseurs, fussent-ils des transhumains conditionnés et entraînés pour faire face à toute situation. Et les Space Marines ont beau ne pas connaître la peur, l’Empereur n’a rien dit ni prévu en ce qui concerne l’ennui, ce qui peut mener même les soldats les plus disciplinés à commettre quelques regrettables boulettes. Dans cette ambiance de Désert des Tartares, Thane et Kolo vivent chacun leur propre enfer, et se retrouvent, sans le savoir, complices d’une exaction qui ne manquera pas de venir les hanter après l’Hérésie. Sur le thème, déjà couvert de nombreuses fois mais tellement central pour la série qu’on pardonnera aisément cette nouvelle itération, du sacrifice des fins en faveur des moyens, Haley parvient à brosser un portrait singulier et sinistre du Monde Trône avant que l’apocalypse ne s’y déchaîne, et préfigurant sans le savoir la dictature brutale, liberticide et usine-à-gazesque que deviendra l’Imperium, autrefois « simple » despotisme éclairé et progressiste, une fois la guerre civile terminée. Et si la question du « mais comment en est-on arrivés là ? » est la plus importante à laquelle l’Hérésie d’Horus doit répondre, alors on peut considérer Duty Waits comme une vraie réussite.

1 : Calme Avant La Tempête Horusienne.

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Magisterium – C. Wraight :

INTRIGUE :

MagisteriumSortis très éprouvés de la Guerre dans la Toile, la première défaite qu’ils aient connu depuis leur fondation, et qui a réduit drastiquement leur nombre, les Custodes doivent à présent panser1 leurs plaies et se préparer pour l’arrivée prochaine d’Horus et ses Légions renégates. Nous suivons donc le Vestarios (soit littéralement, le préposé au vestiaire de la boîte de nuit, en grec ancien) Samonas, fidèle bras droit de imperturbable Constantin Valdor alors qu’il supervise la réhabilitation des gardes suisses de l’Empereur, qui, en plus d’avoir été nonagimés (mais si, mais si, c’est du haut gothique) par les hordes démoniaques, ont cabossé et égaré leur matériel dans des proportions abominables, ce qui force les services généraux de la custoderie à enquiller les heures sup’ sans compter. Au moins, le temps d’attente à la cantine et à la photocopieuse s’en trouve fortement réduit, et il n’y a plus de problème de place au parking des trottinettes électriques. C’est déjà ça.

Ayant obtenu une audience auprès de (son demi-frère ?) Rogal Dorn, avec lequel il entretient des relations aussi fraîches que le bloc Harpic qui orne ses toilettes personnelles, Valdor se rend dans les appartements du Seigneur Commandeur de l’Imperium, toujours escorté de son fidèle Samonas. Comme on peut s’y attendre, l’entrevue se passe assez mal, les deux surhommes se balançant des amabilités au visage sans prendre de gants, énergétiques ou pas. Tandis que le maître des Imperial Fists reproche à son interlocuteur sa roideur confinant parfois à l’autisme, dès lors qu’une directive lui ait été donnée par l’Empereur, ce qui a conduit les Custodiens à contenir seuls les brèches dans les niveaux inférieurs du Palais, alors qu’un retrait stratégique aurait permis d’épargner de nombreuses vies, Valdoche nous joue son air favori du « Oh-mais-vous-les-Primarques-vous-n-êtes-que-des-sales-gosses-pourris-gâtés-et-on-était-bien-mieux-avec-Pépé-avant-votre-naissance2 ». Le sentiment de supériorité de Darth Valdor est toutefois tout ce qui lui reste, Dorn soulignant avec à propos que les pertes subies par les 10.000 ont de facto condamnés ces derniers à jouer les seconds rôles dans le futur siège de Terra, et que le sort de l’Hérésie repose maintenant entre les gantelets des Legiones Astartes, qu’ils soient traîtres ou loyalistes. Bref, la garde aurique n’est plus bonne qu’à assurer le service d’ordre autour de la chaise d’affaires impériale, et doit laisser aux Space Marines la gestion des vrais dossiers.

La virulence des échanges entre la main droite et le poing gauche de l’Empereur n’est pas sans rappeler à Samonas, qui s’ennuie ferme pendant ce crêpage de chignon3, une conversation du même ordre qui avait pris place quelques années plus tôt sur Prospero, lorsque que les Custodiens étaient venus donner un coup de main aux Space Wolves dans le châtiment, que d’aucuns jugent mérités, de Magnus et ses Thousand Sons à la suite du poke un peu trop accentué que ce dernier avait envoyé à son paternel pour lui signaler le comportement déviant d’Horus. Bien que Leman Russ se soit révélé un tout autre animal (autant comparer un malamut à un poisson pierre), le zèle sanguinaire avec lequel le Fenrissien mena l’assaut sur Tizca, et sa volonté sans équivoque de ne pas faire de prisonnier, au mépris des instructions remises par l’Empereur au Capitaine-Général, ne furent pas sans générer des frictions entre les deux envoyés impériaux. Dans ce cas, comme plus tard avec Dorn, Valdor, en tant que Magisterium, disposait d’une autorité théoriquement absolue sur son vis à vis Primarque, mais cela n’a pas empêché ce dernier de n’en faire qu’à sa tête, avec des résultats spectaculaires, à défaut d’être satisfaisants. Et Constantin d’y aller de son petit « Primarque… » méprisant en voyant Russ hurler à la lune sur la grand-place de Tizca après la volatilisation du Cyclope. Décidément, ils n’ont pas les mêmes valeurs.

La nouvelle se termine sur une scène de remparts (comme beaucoup des histoires de Heralds of the Siege d’ailleurs), Valdor enjoignant son sous-fifre porte-cravate de ne pas désespérer que l’Empereur reprenne enfin contact avec ses Custodiens, malgré tous les travaux d’isolation des fondations du palais à terminer avant l’arrivée d’Horus, et qui l’occupent à plein temps depuis maintenant des mois. D’une manière ou d’une autre, la fin approche à grands pas…

1 : Et penser, ils ont tous passé l’agreg’ de philosophie après tout.
2 : Funfact : Sur les 1932 mots titres et qualificatifs gravés à l’intérieur de la cuirasse de Valdor, 93% sont des critiques adressées aux fistons du Patron.
3 : Dorn s’étant laissé pousser les tifs pendant ses sept années de permanence au domicile paternel, il y a largement de quoi faire un manbun.

AVIS :

Pure nouvelle de fluffiste, en ce qu’elle s’avère être beaucoup plus riche en petites révélations et lourdes insinuations de background qu’en action pure et dure, Magisterium est une soumission de qualité de la part de Chris Wraight. Son principal intérêt, et non des moindres pour les amateurs de grandes figures de l’Hérésie (c’est à dire la plupart des lecteurs de la série, soyons honnêtes), est d’apporter quelques os à ronger sur le discret mais crucial Constantin Valdor, et de le faire interagir avec d’autres VIP impériaux. Les bisbilles qui s’ensuivent permettent à Wraight de soumettre quelques concepts intéressants, et de soulever des questions l’étant tout autant, comme celles de l’origine de Valdor et du rôle que lui a attribué l’Empereur, qui semble dépasser celui de simple garde du corps et porte parole officiel de Son Altesse Suprêmissime (bien que la fonction de Magisterium, et les prérogatives qui vont avec, soient déjà une belle source de discussion). La rivalité latente entre l’aîné des surhommes de Pépé et la fratrie primarquielle, qui est venue après, ne sera pas sans susciter quelques folles hypothèses de la part du lecteur, et j’espère bien que l’auteur continuera sur cette prometteuse lancée dans le roman dédié à l’énigmatique Capitaine-Général. En sus, l’état des lieux dressé par Wraight du piteux état dans lequel la Guerre dans la Toile a laissé les Custodiens permet de faire le lien entre cet épisode bien couvert dans les dernières publications de l’Hérésie d’Horus et le Siège de Terra, ce qui est toujours bon à prendre. Bref, une lecture tout ce qu’il y a de plus conseillée pour celles et ceux qui prennent l’Hérésie à coeur.

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Now Peals Midnight – J. French :

INTRIGUE :

Now Peals MidnightAlors que l’horloge de l’ApocalypseTM se rapproche furieusement de l’heure fatidique du début de la plus grande bataille de Warhammer 40K de l’histoire de la galaxie, le capitaine de l’équipe loyaliste décide de passer le temps avant le lancement de la clock en se dégourdissant les jambes sur le chemin de ronde qu’il a passé le dernier lustre à bâtir. Rogal Dorn, Prétorien de Terra, a beau se répéter que lui et ses gars (et filles) sont aussi prêts qu’ils puissent l’être, il est difficile d’être certain de rien alors que l’express d’Isstvan V est sur le point d’entrer en gare système, rempli jusqu’à la gueule de félons et de traîtres. Un calme de mauvais augure est d’ailleurs tombé sur Terra, comme si la planète tout entière retenait son souffle dans l’attente de l’arrivée d’Horus et de ses ruffians.

Alors que le Primarque des Imperial Fists boucle son parcours en écoutant le podcast des meilleures prédictions pessimistes et autres maximes déprimantes de l’Hérésie, depuis Malcador dans The Lightning Tower1 jusqu’à Solomon Voss dans The Last Remembrancer2, en passant par… lui-même (il le vaut bien) dans The Crimson Fist3, il fait plusieurs rencontres aussi vides de sens que lourdes d’intérêt, ou peut-être est-ce le contraire. Après avoir demandé à l’astropathe et secrétaire de direction Armina Fel d’organiser un dîner de travail avec ses frangins, il passe une tête au PC Sécurité jauger des conditions de circulation sur le périphérique solaire. Vison Buté voit noir foncé. Zut. Juste le temps de donner sa soirée à l’Amiral Su-Kassen (qui ferait bien d’en profiter pour bingewatcher la saison IV de Stranger Things, elle n’aura plus le temps après), et Jauni est déjà reparti.

Un petit aparté littéraire nous permet de faire la connaissance de Seplin Tu et de son paternel (Tur-Lu’tu), banlieusards impériaux enrôlés de force dans la milice terrane, et qui feront peut-être/sûrement une apparition dans une des prochaines soumissions de French dans cette franchise. Hello Yellow. Retour sur les remparts, où Archamus-3 et Andromeda-17 attendent l’arrivée du taulier en discutant anthropologie et philosophie. On s’occupe comme on peut. Dorn finissant par pointer ses guêtres, le Huscarl et la Devineresse lui emboîtent le pas jusqu’au lieu de rendez-vous avec Sanguinius et le Khan… qui savent déjà ce qu’il avait à leur annoncer, à savoir que la flotte du Maître de Guerre vient de se matérialiser aux confins du système solaire, prélude à la guerre du même nom. La prochaine fois, utilisez Whatsapp les gars, ça ira plus vite.

Enfin, en orbite, dans l’assiette de guerre sur laquelle il est posté, le Capitaine Katafalque reçoit un message privé signé d’un « RD » très peu protocolaire, mais qui n’en contient pas moins une information de (pierre de) taille : l’ennemi vient d’arriver. Corporate jusqu’au bout, Dorn insiste toutefois pour que l’ordre de mobilisation générale ne soit passé dans un premier temps qu’à la 7ème Légion, les White Scars et les Blood Angels bénéficiant d’un léger sursis avant d’être mis au parfum. Pourquoi ? Mystère. Mais comme on le disait chez les tribus Franc à la fin de M2 : « Avant l’heure, c’est pas l’heure… »

1 : ‘He saw this Heresy coming in his visions. That is the truth you fear. You wish you had listened…’
2 : ‘The future is dead, Rogal Dorn. It is ashes running through our hands…’ C’est moche l’auto-citation, John.
3 : ‘You’re no son, you’re no son of maïïïïïne !’ Bon c’est Genesis (We Can’t Dance), mais vous saisissez l’idée.

AVIS :

Je pense que l’apprécation de cette nouvellinette de French variera fortement selon le contexte dans lequel elle sera lue. Prise individuellement, il serait facile (et exact) de souligner qu’il ne se passe vraiment pas grand-chose dans Now Peals Midnight, Dorn se contentant de faire ce qu’il fait depuis les prémices de l’Hérésie d’Horus (The Lightning Tower, 2007) : regarder le ciel d’un air pénétré en fronçant très fort les sourcils. Cette fois-ci, c’est vréééééééééément la bonne, Rogal ! Bien sûr, il a gagné quelques souvenirs et connaissances dans l’intervalle, certains d’entre elles convoquées pour quelques lignes de dialogue, mais dans l’ensemble, rien de nouveau sous la plateforme de défense orbitale. D’un autre côté, si Now Peals Midnight est la culmination du corpus (entier ou partiel) de l’Hérésie, et que le lecteur sait que la prochaine fois qu’il recroisera la route des personnages de la nouvelle (qu’il a appris à connaître au cours de ses précédentes lectures), l’acte final de cette tragédie galactique aura débuté, il y a de bonnes chances qu’il éprouve quelques trépidations de bon aloi en parcourant ces quelques pages. Bref, comme souvent avec ce genre de production purement atmosphérique, time is the essence. J’appose donc la mention « à conserver dans un endroit frais et sec, à l’abri de la lumière, de la chaleur et de la précipitation » sur cette soumission. On connaissait la slow food, nous voilà avec du slow reading. Ce siècle est décidément étrange.

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Dreams of Unity – N. Kyme :

INTRIGUE :

Dreams of Unity« Démobilisé » comme ses camarades à la fin des Guerres d’Unification, l’ancien (dans tous les sens du terme) Légionnaire Tonnerre Dahren Heruk s’est reconverti dans le gladiatorat avec une poignée de comparses afin de joindre les deux bouts. L’Empereur n’ayant visiblement pas prévu de plan épargne retraite digne de ce nom en faveur de ses premiers prototypes de post-humains, la joyeuse bande vivote sur les maigres bénéfices des combats auxquels elle participe dans le Swathe, bidonville Terran s’étendant en périphérie du Palais de leur ancien patron. Pour ne rien arranger, les vétérans sont affligés de divers troubles physiques et psychologiques, dont une forme particulièrement vivace et handicapante de PTSD, poétiquement nommée les Rêves d’Unité, qui les mène à revivre leurs souvenirs de bataille comme s’ils y étaient, avec des conséquences généralement fâcheuses pour les quidams évoluant à proximité. Les Blood Angels n’ont vraiment rien inventés.

Ayant été témoin de la mort d’un de ses comparses (Kabe) sur le sable de l’arène, des mains d’un chrono-gladiateur au final desservi par son propre sadisme, Heruk commence sa journée par un peu de manutention, ramenant les restes mortels de son défunt collègue jusqu’au domicile de son dominus et imprésario (Tarrigata), afin de procéder au recyclage, puis à l’incinération de ces derniers. Il part ensuite à la recherche d’un autre gladiateur de l’écurie (Gairok) aux abonnés absents depuis quelques heures, ce qui n’augure rien de bon. Pris en chemin d’une crise de somnambulisme aiguë, il revient à lui dans un bar dévasté du Swathe, où Gairok1 semble avoir organisé une reconstitution hyper réaliste du siège d’Abyssna, avec les piliers de comptoir comme figurants (involontaires). Jugeant son camarade trop atteint pour qu’une autre issue soit possible, Heruk l’euthanasie la mort dans l’âme, et poursuit sa mission de porteur d’os en charriant le cadavre jusqu’au QG de la bande.

Ailleurs dans le Swathe, le SWAT impérial (see what I did there ?) se déploie à grand renfort de gadgets, sous les traits aquilins mais masqués du Custodien Tagiomalchian. Ce dernier a été chargé de trouver et de neutraliser des éléments séditieux opérant depuis les dédales mal famés du bidonville, et se montre très intéressé par le carnage commis par Gairok au café PMU du coin. Alors qu’il est occupé à faire quelques relevés en mode les Experts : Terra, il est violemment attaqué par un agresseur non identifié, ce qui coupe la transmission envers la Tour de l’Hegemon. Sus-pense.

Nous retrouvons Heruk et son poids mort alors qu’ils arrivent enfin en vue de la bicoque de Tarrigata, qui se trouve être en proie des flammes. Décidément, ce n’est pas la journée de notre heruk. Réussissant à extraire son patron des décombres au péril de sa vie, le Guerrier Tonnerre n’arrive pas à lui sous-tirer d’informations vraiment utiles quant à l’identité des petits gougnafiers responsables de cette destruction de propriété privée avant que Papy Tarri’ n’aille rejoindre la droite de l’Empereur. Supputant que l’incident ait pu être causé par une autre crise de delirium tremens du dernier de ses corelégionnaires vivants (Vezulah Vult), Heruk se met à nouveau en chasse, et parvient à débusquer Vivi dans les égouts du Swathe. Ce dernier, également à l’article de la mort, et aveuglé par un Bitch Betcher move réalisé par son assassin, refait le coup du « je meurs avant d’avoir donné la bonne info à mon pote pour préserver le suspens de l’histoire mouahaha- couic » à Heruk. Au moins, l’honneur des Guerriers Tonnerre est sauf, car ce n’est pas Vult qui a foutu le feu aux pénates de son patron. C’est déjà ça. Résolu à tirer ce mystère au clair, et désormais libre de toute obligation professionnelle du fait du décès de tous ses collègues, Heruk poursuit son avancée dans les niveaux inférieurs du Swathe…

Début spoiler…et arrive à temps pour filer un salutaire coup de main à Tagiomalchian, fort occupé à maîtriser un Alpha Légionnaire possédé et son culte de groupies, que l’on devine être responsables du saccage du Balto pendant que Gairok s’en jetait un petit, ce qui lui a fait péter les plombs, et de l’attaque des locaux de Tarrigata… parce qu’il leur devait de l’argent, peut-être ? Toujours est-il que ce sont les méchants de la nouvelle, les vrais, en plus d’avoir été impliqués dans la tentative d’infiltration du Palais Impérial quelque temps auparavant, bien sûr. Prudence étant mère de sûreté, Heruk commence par s’occuper des goons chaotiques pendant que Tag’ et Alpharius (car c’était lui… c’est toujours lui) se roulent par terre en bonne intelligence, écopant de quelques légères blessures mais se montrant si convaincant dans son approche qu’il arrive même à convaincre la meneuse adverse de se suicider plutôt que de l’affronter2. Ceci fait, il ne reste plus à notre increvable vétéran qu’à régler son compte au bossédé de fin, en partenariat avec l’Adeptus Custodes, et en écopant d’une déchirure mortelle au passage (si seulement il s’était souvenu qu’il avait piqué le pistolet à radiations de Tarrigata avant que d’engager le renégat au corps à corps… les ravages de la grande vieillesse). Herruïque jusqu’au bout, notre briscard peut ainsi tirer sa révérence la tête haute, ayant bien mérité un honorable coup de grâce de la part de son camarade de jeu. Dreams are my reality… (air connu).Fin spoiler

1 : Pour être honnête, on ne sait pas trop qui blâmer pour ces troubles de voisinage, Heruk ayant été tout aussi parti que son poto à son arrivée sur les lieux. Dans ces cas là, mieux vaut reporter le problème sur le type d’en face c’est vrai.
2 : Il faut dire que voir un colosse écumant perforer la cage thoracique de Roger de la compta’ à coup de pied ne donne pas en vie d’engager le dialogue.

AVIS :

Cette nouvelle de Kyme s’avère être assez satisfaisante, et plus qualitative que nombre de ses travaux précédents, ce qui est appréciable pour le lecteur et peut laisser à penser que notre homme s’améliore au fil du temps. Tant qu’il y a de la vie… En plus de la généreuse dose de fluff relative aux Guerriers Tonnerre dont nous bénéficions ici, le petit thriller mis en scène par Kyme quant à l’identité des proies traquées par Tagiomalchian tient plutôt bien la route, dès lors qu’on ne le regarde pas de trop près. À titre personnel, j’ai trouvé que l’auteur s’inspirait lourdement des travaux de certains collègues (le Custodes est un clone Kymesque du Tauromachian d’Abnett dans Blood Games, le crachat venimeux un emprunt au Talos d’ADB), ce qui peut peut-être expliquer pourquoi cette soumission est de meilleure facture que d’ordinaire. La tendance de Kyme à saboter l’exécution d’idées pourtant intéressantes par la non prise en compte de détails mineurs (affliction baptisée annandalisme par votre serviteur) vient toutefois fragiliser l’édifice1, ce qui est dommage mais pas surprenant. Mais on progresse, on progresse…

1 : Exemple gratuit, le chrono-gladiateur du début de la nouvelle est d’abord décrit d’une telle manière à ce que le lecteur croit qu’il s’agit d’un Custodien (ce qui ferait sens car ce sont eux qui ont massacrés les Guerriers Tonnerre sur l’ordre de l’Empereur). Ce quiproquo assez malin est affaibli par le choix de Kyme de faire de son antagoniste un tueur sadique, qui prend son temps pour tuer sa victime au lieu de l’achever efficacement. Pour un guerrier vivant littéralement sur du temps emprunté, une telle procrastination est en effet très improbable.

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The Board is Set – G. Thorpe :

INTRIGUE :

The Board is SetSur le sol de cette bonne vieille Terra, les armées loyalistes se préparent à recevoir comme il se doit le retour du fils indigne et de sa bande de potes, dont on entend déjà les « boum boum boum » crachés par les enceintes de leurs Clio tunées résonner depuis le parking de la copropriété, brisant le calme légendaire du quartier1. Comme le petit vieux acariâtre qu’il est, Macaldor, après avoir balancé une ou deux références que les moins de 20.000 ans ne peuvent ni connaître, ni comprendre, s’en va en grommelant dans sa barbe psychique que Dorn est définitivement une grande et jaune godiche, et que son obsession pour les briquettes et les portails électriques n’est qu’une lubie de jeune crétin. Ca tombe bien, notez, c’est l’heure de la coinche à l’EHPAD Bon Séjour, et le Mac’ ne raterait pour rien au monde ce moment de la journée.

À peine a-t-il fini d’installer la table que son acolyte de jeu révèle (you see what I did there…) sa présence et engage sans plus tarder les hostilités. Dans les ténèbres mi-obscures du 31ème millénaire, l’antique jeu de belote se joue en effet à deux plutôt qu’à quatre, et sur un plateau de jeu avec figurines en plus du traditionnel paquet de cartes. En fait, ça ressemble furieusement à une version Shadespirée des échecs, et ça a l’air donc vachement cool, d’autant plus que toutes les pièces se trouvent être des représentations des Primarques engagés dans l’Hérésie d’Horus2. Comme à chaque partie depuis leur internement respectif, Pépé et… Mémé ? rejouent la bataille finale de l’Hérésie, avec l’Empereur dans son propre rôle et Malcador dans celui de ce fripon d’Horus. Et comme à chaque fois depuis le début de ces amicales sessions, le Sigillite constate que son adversaire passe son temps à tricher. Manipulation de la pioche, duplication de cartes, ajout de pièces non WYSIWYG en cours de jeu… s’il y avait un arbitre, celà ferait longtemps que le Maître de l’Humanité aurait mangé son ban. Malheureusement pour lui, Malky ne peut compter que sur lui même pour se faire justice, ce à quoi il s’emploie avec toute la rouerie et la malice qu’on lui connaît.

En face de lui, l’Empereur semble peu intéressé par le déroulé de la partie, et joue franchement comme une savate, seulement sauvé par sa capacité à top decker comme un porcasse avec une régularité des plus suspectes. Ajoutant l’insulte à l’outrage, il se permet même de tancer son partenaire sur son faible niveau de jeu, alors que Horus, lui, était un opposant digne de ce nom. Sans doute très fatigué par l’enchaînement des nuits blanches à pousser sur son trône (la constipation psychique est un problème commun chez les démiurges millénaires, tous les auxiliaires de vie vous le diront), Big E va même jusqu’à utiliser des mots très durs à l’encontre de son vieux comparse, au point d’arracher à ce dernier des larmes de collyre. Qu’à cela ne tienne, Malcador en a vu d’autres, et met à profit sa rogne pour sortir un enchaînement digne de Magnus Carlsen le Rouge, le laissant en position de remporter la partie au coup suivant. « Ha ha, tu l’avais pas vu venir celui-ci, bouffi » exulte notre vieillard échevelé, pas peu fier de tenir sa première victoire en 1.834.427 confrontations. Sauf que, sauf que… Sauf que l’Empereur est décidément un mauvais joueur à la main leste, et trouve le moyen de substituer à son Roi Empereur lui-même une nouvelle pièce, le Fou, qui va héroïquement se sacrifier pour lui permettre de gagner la partie. Comble de la bassesse, le Fou a la tête de Malcador, à qui il prend l’envie folle de fracasser l’échiquier sur le crâne de son suzerain.

Sur ces entrefaites, une estafette se présente à la porte, et vient apporter la nouvelle tant redoutée au Premier Seigneur de l’Impérium : la flotte d’Horus vient de se matérialiser dans le système solaire, et la plus grande bataille de l’Humanité est sur le point de s’engager. Cherchant du regard son boss, Malcador a la surprise de s’apercevoir qu’il est seul dans la pièce, et l’a apparemment toujours été, d’après le retour un peu honteux du messager, qui n’a pas osé déranger tout de suite l’aïeul vociférant qui faisait une tournante autour du plateau de jeu à son arrivée. Conclusion de l’histoire : la grande vieillesse est un naufrage, mais au moins, on ne s’ennuie pas.

1 : Et je ne rigole même pas, la nouvelle commence par un constat par Macaldor et le chef de l’Adeptus Astra Telepathica du tapage nocturne diurne warpurne généré par l’approche de la flotte traîtresse.
2 : On comprend mieux du coup pourquoi l’Empereur tenait absolument à avoir un nombre pair de rejetons. C’est mieux pour équilibrer les parties.

AVIS :

The Board is Set est une nouvelle intéressante, mais dont l’inclusion dans un BLC ne tombait pas, de mon point de vue, sous le sens. Parmi les qualités notables de cette soumission, on peut mettre en avant l’art consommé avec lequel Thorpe distille à la foi clins d’oeil aux évènements passés et à venir de l’Hérésie, à coups de manœuvres lourdes de sens des pièces sur l’échiquier et de remarques sibyllines soufflées par un Empereur plus que jamais omniscient au bras droit/fusible qu’il s’apprête à griller, mais également allusions fluffiques subtiles, sur lesquelles les fans hardlore passeront des pages et des pages à s’étriper, par les mêmes biais que ceux donnés ci-dessus. Même sans être un amateur transi du style du Gav, on peut lui reconnaître un certain talent de mise en scène de ces passages prophétiques, ce qui n’était pas gagné d’avance au vu du casting de monstres sacrés qu’il convoque.

À titre personnel, j’ai également apprécié la tirade que MoM (Master of Mankind) balance à son larbin dans le but de le mettre en rogne et de le forcer à la jouer comme Lupercal, qui est un condensé de remarques blessantes mettant en évidence que Malcador n’a été qu’un outil utilisé par l’Empereur pour arriver à ses fins, et qu’il n’aura absolument aucun scrupule à s’en débarrasser une fois qu’il n’en n’aura plus l’usage. Ce discours des plus cash trouve une résonnance particulière depuis Dark Imperium, où il est clairement indiqué la dualité de l’Empereur dans ses « sentiments » envers ses congénères : incapable d’aimer l’homme, mais absolument dévoué à l’Humanité. On peut alors se demander si les piques envoyées par Pépé ne sont pas simplement le fond de sa pensée, qu’il livre à un Malcador qui reste persuadé qu’il ne s’agit que de la manoeuvre d’un monarque bienveillant et attentionné pour lui faire donner le meilleur de lui-même. Chacun se fera sa religion sur le sujet, mais cette dualité d’interprétation est assez intéressante.

D’un autre côté, The Board is Set s’avère être l’antithèse absolue de la nouvelle à mettre dans les pattes d’un novice de la BL ! Regorgeant de sous-entendus et d’Easter eggs qui feront les gorges chaudes des lecteurs vétérans, pour peu qu’ils soient des fluffistes un minimum intéressés, cette soumission possède en effet une valeur ajoutée littéraire qui passera à 31.014 pieds au dessus de la tête du newbie. Il est plutôt probable que ce dernier ressorte du propos de Thorpe ou perplexe ou soulé par l’accumulation de mentions et notions « members only » qui lambrissent les pages d’un bout à l’autre du récit. D’une manière plus large, on peut considérer l’Hérésie d’Horus comme étant, de manière générale, une franchise trop spécialisée pour être incluse dans des ouvrages de « propagande » de la Black Library. Sans mettre en question l’intelligence et les capacités de déduction du novice moyen, je doute en effet qu’il ait la patience ou l’intérêt pour percer à jour les tenants et aboutissants de cette absconse partie de Cards against Humanity. Bref, la définition même de l’acquired taste, et en tant que tel, aussi surprenant qu’une douzaine d’huitres au fond d’un Happy Meal.

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Voilà qui conclut cette critique de ‘Heralds of the Siege, recueil dont je ressors avec un sentiment mitigé. Si certaines des nouvelles proposées aussi sont d’un très bon niveau, et se placent parmi mes favorites de toute l’Hérésie, et que la dernière section du bouquin possède une atmosphère « veillée d’armes avant le début du siège » tout à fait plaisante, il me faut également constater qu’un bon tiers des histoires au sommaire de ce tome ne s’intègrent pas du tout ce fil conducteur, ce qui est très dommage1. On peut cependant mettre au crédit de cette anthologie sa quasi-exhaustivité en matière de factions (treize Légions de Space Marines, les deux Mechanicus, l’Armée Impériale, l’Adeptus Custodes et même les Guerriers Tonnerre) et de personnages nommés (l’Empereur, Horus, Malcador, cinq Primarques et une demi-douzaine de VIP tels que Valdor, Luther et Eidolon), ce qui devrait permettre de contenter le plus grand nombre de lecteurs, quelles que soient leurs sympathies.

1 : Et d’autant plus qu’une nouvelle qui aurait parfaitement eu sa place dans cette anthologie, ‘Restorer’ (la convalescence de Shiban Khan sur Terra) n’y figure pas alors que sa première publication date de l’été 2017.

BLACK LIBRARY 2018 ADVENT CALENDAR [40K – HH – AoS]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue des nouvelles du Black Library 2018 Advent Calendar, que je reconnais volontiers entreprendre bien tardivement (mais j’ai fait pire). Comme pour les autres chroniques du genre, il s’agira de passer au crible les histoires proposées par la BL, à raison d’une par jour, du 1er au 24 Décembre. On peut d’ores et déjà constater que le millésime 2018 était assez bien doté, avec pas moins de 18 nouvelles (complétées par six audio dramas, qui ne seront pas traités ici), provenant de quatre franchises de la GW-Fiction : 40K, Age of Sigmar et l’Hérésie d’Horus, bien sûr, mais également Blackstone Fortress1.

1 : Le panorama aurait pu être encore plus complet si les trois soumissions se déroulant à Necromunda n’avaient pas été des audio dramas.

Black Library 2018 Advent Calendar

Les auteurs mis à contribution pour cette fournée hivernale ne surprendront pas des masses les lecteurs vétérans, puisque l’on retrouvera ici des noms aussi connus que Graham McNeill, Gav Thorpe, David Annandale ou encore C. L. Werner. Pour la nostalgie, signalons également que cette série compte l’une des dernières productions du regretté Josh Reynolds pour la Black Library. Dernier détail notable avant d’entrer dans le dur, c’est à partir de ce moment que la BL a cessé (pour l’heure) de republier les nouvelles siglées Hérésie d’Horus dans des recueils tels que ‘Heralds of the Siege’ ou ‘The Burden of Loyalty’, ce qui rend la lecture de ce pot-pourri littéraire incontournable pour le fan hardcore. Voyons maintenant s’il ce dernier n’a pas perdu son temps et son argent…

Black Library 2018 Advent Calendar

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Old Wounds, New Scars – G. McNeill [HH] :

INTRIGUE :

Old Wounds, New ScarsAprès s’être échappée de Molech avec homme et enfants, la pépée (Perpétuelle et Psyker) Alivia Sureka a patienté de longs mois dans des conditions de promiscuité inconfortables que le Molech’s Enlightenment traverse la galaxie pour rejoindre Terra. Alors que ça commence à sentir bon l’écurie (ou bien est-ce simplement une conséquence de mettre 30.000 personnes en vase clos pendant deux an), les nuits de celle que ses co-passagers appellent Sainte Liv – à son grand agacement, elle aurait préféré Liv Tyler – se font de plus en plus agitées. Elle rêve ainsi de sa vie passée sur ce qui n’était alors que la Terre, il y a plusieurs millénaires de cela, le tout entrecoupé de métaphores animalières où l’Empereur lui apparaît comme cerf (ce qui est toujours mieux qu’un gnou) pourchassé par une meute de loups. Pour ne rien arranger, une voix mystérieuse s’invite à intervalles de plus en plus réguliers dans sa tête, et émet des jugements de valeur tout à fait déplacés sur la qualité de ses visions. C’est beaucoup pour une seule femme, reconnaissons-le.

Pour se changer les idées et prendre des nouvelles fraîches de l’avancée du périple du Molech’s Enlightenment, Alivia décide d’aller rendre une visite de courtoisie au capitaine du vaisseau (Sulaiman). Ce dernier lui apprend que le destroyer n’est plus qu’à quelques encâblures du la porte élyséenne, un des accès principaux du système solaire, ce qui est certes appréciable, mais aussi et surtout très dangereux. Alivia doute en effet qu’un vaisseau en provenance d’un système tombé entre les griffes du Maître de Guerre soit accueilli les bras ouverts par la flotte solaire, quand bien même il ne serait occupé que par des fidèles sujets de l’Empereur, comme c’est ici le cas. Son argumentaire ne parvient toutefois pas à convaincre Sulaiman, qui la fait gentiment mais fermement mettre à la porte par son service de sécurité après que la donzelle ait aggravé son cas en engueulant tout fort la voix qui continue à geindre dans sa tête, ce qui est une chose très rassurante de la part d’un Psyker en train de traverser le Warp, comme on s’en doute.

N’ayant rien de plus urgent à faire, Alivia finit par s’isoler dans un coin pour percer à jour le mystère de la voix (sans doute bulgare, du coup), et il s’avère que c’est son ex, lui aussi Perpétuel et Psyker, John Grammaticus, qui cherchait à la recontacter. Comme la dernière fois qu’ils se sont vus, Monsieur l’a laissé enfouie sous les décombres du bar de Kaboul où le couple avait ses habitudes après qu’un malheureux tir d’artillerie ait atteint le rade, les premiers échanges sont un peu tendus. Toutefois, après avoir évoqué le bon vieux temps, et notamment ces vacances mémorables à Béziers, Grammaticus finit par cracher le morceau : il a absolument besoin de retrouver Oll Persson, qu’il a « perdu de vue » depuis les événements de Calth, et doit pourtant amener jusqu’à Terra pour servir de botte secrète à Pépé. Le perpétualisme étant un milieu assez fermé, sans doute que sa bonne amie Alivia pourra lui fournir un tuyau utile ?

À cela, la réponse simple est « non », car notre héroïne n’a pas la moindre idée d’où ce vieux Persson s’est planqué depuis Béziers (ils sont partis à trois). Mais comme Madame est une chicaneuse, elle fait croire à Grammaticus qu’elle sait où le troisième larron se trouve, mais n’est pas disposée à lui passer cette info, na. Ceci fait, elle met fin à l’échange télépathique et trouve un moyen de se représenter devant Sulaiman pour plaider à nouveau sa cause et obtenir que le retour dans le système solaire se fasse par l’entrée de service plutôt que par la grande porte. Elle arrive cependant trop tard pour empêcher le Molech’s Enlightenment de se jeter dans la gueule du loup, et, lorsqu’à peu près 78,439 vaisseaux de guerre attendant l’arrivée d’Horus et de sa flotte avec le doigt sur la gâchette du macrocanon leur balancent une volée de missiles en guise de salutation, elle se rend compte qu’elle ne tient pas tant que ça à savoir ce qu’il arrive à un Perpétuel qui se ferait réduire en cendres dans l’espace (une expérience fascinante). Fort heureusement, Johnny Grammy a le bras long maintenant qu’il est revenu aider son Pépé, et grâce à un coup de fil tête urgent et en échange de la localisation de Persson (un problème pour future her), il parvient à stopper le feu d’artifice avant qu’il ne soit trop tard.

La nouvelle se termine avec l’arrivée de la petite famille recomposée d’Alivia dans le spatioport de la Porte du Lion, et le rembarrage ferme mais poli du larbin (Khalid Hassan) envoyé par Malcador servir de taxi à la smala. Quoi de plus normal que de faire un peu de tourisme de l’apocalypse en toute liberté avant que l’état de siège soit déclaré, pas vrai ?

AVIS :

Graham McNeill se frotte à l’exercice délicat de l’arc mineur feuilletonné (ça fait classe dit comme ça), sur le modèle de ce que l’incomparable Dan Abnett a tenté, et en grande partie réussi, avec Oll Persson et John Grammaticus dans cette même Hérésie. Cela est peut-être dû à mon ignorance crasse de qui était Alivia Sureka au moment où j’ai lu pour la première fois ‘Old Wounds, New Scars’, mais je n’ai pas trouvé le résultat très réussi. McNeill nous balance certes quelques bribes sur le passé (aussi bien proche que trèèèèès lointain) de son héroïne, mais il n’a pas l’élégance ou l’efficacité d’Abnett pour aider le tout venant à raccrocher les wagons des épisodes précédents. Si on passe outre ces considérations séquentielles, l’intrigue de la nouvelle n’est pas non plus exempte de tout reproche, ou, dit autrement, est d’une simplicité et d’une linéarité absolue. On comprend à la conclusion de l’histoire qu’il s’agissait surtout pour l’auteur de positionner un de ses personnages perpétuels récurrents au bon endroit et au bon moment pour faire avancer son arc narratif1, mais je ne suis pas convaincu que dédier une nouvelle entière à cette péripétie très moyenne d’un rôle secondaire (pour le dire poliment) était absolument nécessaire.

1 : Ce qui semble avoir été le cas, Alivia Sureka reprenant du service dans ‘Fury of Magnus’.

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Blood Gold – G. Thorpe [AoS] :

INTRIGUE :

Blood GoldUn ost de Lames de Khorne se dirige dans le chaos et l’anarchie (logique) vers la forme imposante du Mont Vostargi, le méga-volcan du Royaume d’Aqshy ayant servi de berceau enflammé aux robustes Fyreslayers. L’arrivée des maniaques n’étant pas passée inaperçue, une armée de petits rouquins a pris position devant la Porte de la Défiance Eternelle pour leur barrer la route, sous le commandement du Père des Runes Ungrimmsson Drakkazak. Alors que les Duardin patientent avant que la mêlée ne s’engage, Ungrimmsson décide de raconter à un jeune et nerveux Vulkite les origines de la malédiction qui frappe les membres de sa Loge, et a changé la peau de ses fiers guerriers en roche en fusion (ce qui n’est pas banal, reconnaissons-le).

Durant l’Âge des Mythes, la Loge Ironfist était dirigée par un Père des Runes aussi acariâtre que déterminé, Brynnson Drakkazak. Alors que les autres Loges se satisfaisaient d’exploiter les ressources minérales de leurs montagnes natales, les Ironfists n’hésitait pas à monter des raids à travers Aqshy, et plus (loin) si affinités, afin de récupérer le plus possible du précieux ur-or disséminé à travers les Royaumes. Après tout, la reconstitution de l’intégrité physique de Grimnir ne pouvait pas être retardée par des considérations aussi terre à terre que le respect des traités et le consentement libre, informé et préalable des populations locales, pas vrai ? Cette attitude belliqueuse n’était pas appréciée des autres Pères des Runes, mais Brynnson n’étant pas du genre à écouter les jérémiades de ses pairs, les Ironfists ne restaient jamais longtemps au Mont Vostargi à se tourner les pouces.

Un beau jour, ou peut-être une nuit, se présenta un émissaire humain du nom d’Ologhor Shenk, qui annonça à l’assemblée des Pépères (un nom approprié pour cette instance suprême, à mon humble avis) venir forger une alliance avec les Fyreslayers. En échange d’une grande quantité d’ur-gold, d’une qualité particulière mais reconnue comme legit par le Seigneur des Runes de fonction, il était à la recherche d’alliés prêts à se salir les mains pour le débarrasser d’une tribu rivale, les Direbrands. Ces derniers étant des sigmarites invétérés, et donc protégés par l’alliance établie entre Sigmar et Grimnir avant que ce dernier parte en safari, l’offre fut refusée par tous les Pères des Runes présents… à l’exception bien sûr de Brynnson.

L’enthousiasme du maître des Ironfists ne tarda pas à redescendre lorsqu’il se rendit compte que Shenk n’était pas le type le plus honnête de l’univers, et que sa haine des Direbrands était sans limite. Après avoir guidé les Fyreslayers jusqu’au camp d’été de la tribu, où les guerriers humains surpris en pleine bombance se battirent vaillamment mais se firent massacrer jusqu’au dernier par les implacables Duardin, Shenk exigea de ses alliés qu’ils fassent subir le même sort à la colonie de vacances établie pour les enfants Direbrands à quelques encablures du camp des adultes. Mercenaire avec des principes, Brynnson refusa de tourner full Anakin Skywalker, et repartit vers le Mont Vostargi avec son ur-or salement gagné, laissant Shenk se débrouiller avec sa marmaille.

Cette décision ne fut pas sans conséquence, car lorsque les membres de la Loge se livrèrent au rituel de runification corporelle pour lequel les Fyreslayers sont bien connus, les effets secondaires ne tardèrent pas à se manifester. Comme vous pouvez vous en douter, le métal mystique remis par Shenk, qui était coupé avec du bronze provenant de la forteresse de Khorne, causa la peau des Duardin à se transformer en roche fondue, conséquence du déplaisir de la divinité tutélaire du fourbe émissaire devant un job bâclé par les Ironfists. Bien que l’ur-or ait gardé ses propriétés de renforcement musculaire, les Fyreslayers Ironfists furent marqués à jamais par leur association douteuse – mais involontaire, il faut leur reconnaitre au moins ça – avec une divinité chaotique.

Retour au temps présent et au périphérique vostargien, Ungrimmsson ayant terminé son histoire et les Khorneux ayant fini leur marche d’approche. Lorsque son jeune interlocuteur lui fait remarquer qu’il a narré cette légende comme s’il y avait pris part, le Père des Rune a un petit sourire triste, et révèle au Vulkite que c’est bien le cas. Ungrimmsson, ce qui signifie briseur de serment en whatever la langue des Duardin is called these days, a pris ce nom après que la malédiction se soit abattue sur sa Loge, et attribue sa trèèèèès longue vie au sens de l’humour très particulier de Khorne, qui s’est plu à prolonger les jours de celui qui a osé le défier il y a tous ces millénaires. La nouvelle se termine sur une nouvelle transaction à l’amiable entre chaotiques et Fyreslayers, la meneuse des maraudeurs balançant une bourse d’ur-or aux pieds de la (mini) Chose. On ne saura pas pourquoi les deux généraux ont trouvé malin de déranger leurs armées pour cet échange trivial, mais pour une fois que les choses ne dégénèrent pas dans les Royaumes Mortels, on ne va pas s’en plaindre.

AVIS :

Gav Thorpe reprend du service comme aède épique (l’un des rôles dans lesquels il est le plus à l’aise, et le plus « performant ») dans ce ‘Blood Gold’, et nous sert une petite histoire tout à fait satisfaisante sur la géopolitique complexe du Royaume d’Aqshy aux temps jadis. Il en profite pour faire le lien avec ses travaux chaotiques initiés dans ‘The Red Feast’, ce qui fera sans doute plaisir aux lecteurs de ce bouquin. J’ai particulièrement apprécié le portrait nuancé que fait Thorpe des Fyreslayers, qui apparaissent comme les véritables mercenaires que le background établit, et n’ont donc aucun problème à massacrer sans crier gare de lointains alliés pour peu qu’ils aient été payés au juste prix. Cela les différencie très nettement des honorables Tueurs du Monde qui Fut dont ils sont les héritiers, ce qui est une bonne chose, et donne à cette faction une complexité qui est la bienvenue dans le monde de high fantasy d’Age of Sigmar. Une réussite.

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Fire and Thunder – R. Harrison [40K] :

INTRIGUE :

Fire and ThunderNous sommes sur Balfar, monde impérial contesté par ces mauvais sujets de Clairvoyants, et les forces impériales chargées de tenir la cité cathédrale de Whend sont en train de se faire botter les fesses de belle manière. Un début de mission ma foi fort classique pour la Commissaire Severina Raine et son régiment d’adoption (le 11ème Fusilier d’Antari), qui aiment laisser l’initiative à leurs adversaires pour mieux le contrer dans le money time. Faut croire. En tout cas, la situation ne cesse de se détériorer pour les braves soldats de la Compagnie Grise du Capitaine Yuri Hale : après avoir réussi à battre en retraite jusqu’au dernier pont tenu par les forces impériales permettant de sortir de la cité, malgré la poursuite acharnée – mais rigolarde, car les Clairvoyants passent leur temps à se gondoler comme des baleines, ce qui est doit être un peu crispant pour leurs adversaires – menée par les cultistes, nos héros sont frappés par la poisse et par un barrage d’artillerie suivi par un raid de chasseurs ennemis, qui détruit le pont, blesse une bonne partie du casting, et piège Raine et ses ouailles du mauvais côté du périphérique.

Après s’être terrés quelques temps dans une caserne abandonnée, ce qui permet au Medic de la fine équipe (Nuria Lye) de traiter les petits et gros bobos subis par ses collègues de travail, à commencer par la Psyker sanctionnée Lydia Zane, qui a payé très cher ses dernières interventions kinétiques et s’est pris quelques shrapnels dans le buffet pour ne rien arranger, les Antaris parviennent à joindre le Tacticae par radio, mais se font sèchement rembarrer par leur interlocuteur (Logun) lorsqu’ils demandent une extraction. Motif : ils ne sont plus assez nombreux (23) pour que le jeu en vaille la chandelle, et ils n’ont pas pris l’assurance dépannage premier kilomètre, en plus (grosse erreur). La Garde Impériale, toujours à mettre en avant les ressources dans « ressources humaines ». Qu’à cela ne tienne, les hardis fusiliers s’en sortiront par leurs propres moyens, et après avoir soigneusement étudié la carte de Whend, les officiers décident de tenter leur chance du côté de Deadways, soit l’ossuaire de la cité. C’est en effet ici qu’un aqueduc traverse la gorge qui ceinture la ville pour apporter de l’eau aux quartiers ouest, et il y a donc de bonnes chances pour que les Clairvoyants ne l’aient pas fait sauter (tout le monde a besoin de boire, même les cultistes de Tzeentch).

Démarre alors une excursion en terrain ennemi qui mettra à rude épreuve le moral, la discipline et les capacités martiales des rescapés. En plus des attaques récurrentes des Clairvoyants, à négocier avec des blessés de plus nombreux (et blessés) et un stock de munitions qui baisse à vue d’œil, le spectacle des exactions commises par les Clairvoyants sur les habitants de Whend et sur les malheureux Gardes qui sont tombés entre leurs mains refroidit considérablement l’enthousiasme de nos bidasses. Pour ne rien arranger, le Sergent Daven Wyck lutte contre une addiction dévorante aux drogues de combat, et lorsque sa dernière dose se brise malencontreusement alors que les réjouissances viennent de commencer, il en est quitte pour une descente très malaisante. À tel point qu’il manque d’en venir aux mains avec le Capitaine Hale après avoir perdu un jeune membre de son escouade sur un booby trap qu’il n’a vu que trop tard, et dont il se reproche donc le décès tragique. Ce sont des choses qui arrivent, mais quand Severina Raine regarde, seulement une fois. Se sachant en sursis, Wyck se tiendra à carreau pour le reste de la mission, et sauvera même ses petits camarades lors de l’arrivée du boss de fin (un Thunderbolt chaotique) grâce à un tir exceptionnel avec le fusil de sniper qu’il a looté sur un cadavre d’officier, quelques heures plus tôt1.

Au terme d’un parcours éprouvant, la fine équipe parvient à rejoindre ses pénates, avec des effectifs très réduits (13/23), mais sans avoir perdu un seul personnage important dans l’affaire. Même l’increvable Zane s’est courageusement accrochée à son dernier point de vie, et pourra donc être remise sur pied pour servir à nouveau l’Empereur. Ce n’est toutefois pas la fin de la journée de l’infatigable Raine, qui sitôt sortie de l’hopital de campagne, se rend au Tacticae pour faire son rapport…

Début spoiler…Et surtout pour confronter notre ami Logun, qui, après vérification de la part de l’exacte Commissaire, a donné l’ordre de bombarder la zone où se trouvait Raine et ses troupes en début de nouvelle. Mis devant ses responsabilités, l’officier reconnaît ses fautes2 mais plaide l’honnête boulette (honestus bulletius en Haut Gothique) consécutive à des longues heures de travail et une climatisation défaillante – il fait chaud sur Balfar, car la planète a deux soleils. Cela fait doucement rigoler Raine, mais elle se contente de demander à Logun de lui lire la liste des Antaris tués par sa faute, avant de laisser son interlocuteur méditer sur sa tragique erreur. Une preuve de mansuétude ? Pas vraiment, Raine ayant pris soin de passer l’information à ses collègues du Commissariat rattaché au haut commandement des opérations sur Balfar. Il n’y a plus qu’à laisser la justice faire son trav- BANG.Fin spoiler

1 : Même si le nom de l’officier en question n’est pas donné, je parie ma paie qu’elle s’appelait Tchekov.
2 : Ce qui est toujours plus classe que ce qu’a fait le Général Sturm aux Fantômes de Gaunt pendant le siège de Voltis City.  

AVIS :

Rachel Harrison s’impose plus que jamais comme la nouvelle référence en matière de littérature de guerre (spécialité : Garde Impériale) avec ce très complet ‘Fire and Thunder’, qui place l’inflexible Commissaire Raine et une poignée de personnages secondaires (Wyck, Hale, Zale, Cris, Lye) dans un beau pétrin, et laisse ce beau monde se débrouiller pour retrouver le chemin du baraquement, ce qui ne tient évidemment pas du parcours de santé. En plus de regorger de scènes d’actions nerveuses et violentes, ce qui permet de maintenir une tension narrative optimale1, cette nouvelle fait gagner une belle profondeur au Sergent Daven Wyck, dont la lutte contre ses démons personnels (don’t do drugs, kids) constitue une intrigue secondaire tout aussi prenante que la mission d’exfiltration par les catacombes qui occupe le cœur de notre propos. Harrison parvient également à développer/rendre attachants quelques autres membres de la garde (impériale) rapprochée de Miss Raine, à commencer par la Psyker hémophile Zane – qui s’en prend vraiment plein la tronche d’un bout à l’autre de l’histoire – mais également la Medic Nuria Lye (et ses rapports complexes avec Wyck) ou encore la rigolarde mais explosive ingénieure Yulia Crys. On termine ‘Fire and Thunder’ avec une envie pressante de connaître la suite des arcs savamment mis en lumière par Rachel Harrison, ce qui est une marque indéniable de réussite. Un très bon cru.

1 : Un peu amoindrie quand on sait que plusieurs personnages disposent d’une armure en scenarium, mais Harrison réussit tout de même à nous intéresser au sort des seconds couteaux de cette petite escapade en terrain ennemi, ce qui est la marque d’un auteur compétent.

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Man of Iron – G. Haley [40K] :

INTRIGUE :

Man of IronAlors qu’il se reposait rechargeait tranquillement dans la soute du vaisseau qu’il partage avec les jumeaux Ratlings Raus et Rein, UR-025 est réveillé mis en marche par l’intrusion d’un de ces petits parasites, lui annonçant l’arrivée de visiteurs souhaitant s’entretenir avec lui. Dont acte. Les individus en question se révèlent être un trio d’adeptes du Mechanicus de rang minable et d’intentions peu charitables, escortés par un vieux modèle de Kastelan pour faire bonne mesure. Ayant appris l’existence d’UR-025, et n’avalant qu’à moitié son histoire de contrôle à distance par un Magos surdoué (comme la plupart des gens à qui le robot a livré cette expédition, pour être honnête), les trois desperadeptes ne souhaitent rien de moins que kidnapper le mystérieux cyborg pour leur propre profit. Il ne faut pas longtemps à UR-025 et ses systèmes perfectionnés d’homme de fer pour comprendre de quoi il en retourne, mais problématiquement, il ne peut pas refuser de but en (métal) blanc d’accompagner ses visiteurs dans leur projet d’escapade dans la Forteresse Noire. Il est censé être après tout un robot dénué de libre arbitre, et les accords liant les mondes forges de Ryza (où vit le Magos imaginaire que notre héros s’est donné comme patron) et Metallica (planète d’origine des forbans) ne lui laissent pas d’autres choix que de s’exécuter.

Fort heureusement, UR-025 a plus d’un programme dans sa banque de données, et entraîne ses nouveaux amis dans une partie tranquille de la Forteresse, sous couvert de les mener sur un filon de xenotech, où une franche explication sera plus facile que dans l’agitation de Precipice. Les cris stridents annonçant l’arrivée prochaine d’une meute d’ur-ghuls affamés, et les effets que ces signes avant-coureurs ont sur les nerfs fragiles des renégats, signalent à l’androïde que la récré est terminée. Profitant de la confiance mal placée que ses kidnappeurs lui accordent, UR-025 descend froidement ses compagnons les uns après les autres, révélant sa véritable identité au dernier survivant de la bande avant de le terminer à son tour. Ceci fait, il ne reste plus à notre indéboulonnable homme de fer qu’à prendre le chemin du retour, afin de pouvoir continuer sa mise en charge bien méritée. Moralité : Metallica, ce n’est pas toujours plus fort que toi.

AVIS :

Petite nouvelle sans prétention de la part de Haley, ce Man of Iron n’en est pas moins sympathique, la maîtrise narrative de l’auteur se doublant d’une mise en scène intéressante de son protagoniste, qui peut sans doute prétendre au titre de « personnage de Blackstone Fortress au fluff le plus intéressant ». Diantre, ce n’est pas tous les jours que l’on a affaire à un authentique homme de fer, même si « l’aventure » à laquelle il participe tient plus de l’esquive de démarcheur de rue que de la fresque épique révélant les origines de cette relique ambulante (qui se vante d’avoir rencontré le véritable Omnimessie – c’est à dire pas l’Empereur – aux cours de ses pérégrinations). Guy Haley arrive à insuffler à UR-025 une personnalité de vieux ronchon désespéré par la tournure prise par les événements au cours des derniers millénaires, et forcé de jouer au robot stupide – ce qui est souvent assez drôle – pour éviter d’attirer les soupçons sur qui il est vraiment. Le résultat, à défaut d’être mémorable, est tout à fait correct, et on se prend à rêver d’une éventuelle rencontre entre UR-025 et Bellisarius Cawl, et du dialogue qui s’en suivrait…

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The Deeper Shade – C. L. Werner [AoS] :

INTRIGUE :

The Deeper ShadeQuelque part sur le littoral luxuriant de Ghyran, la bande d’affreux du sorcier Thalinosh de Charr se prépare à explorer un donjon un peu particulier. La cible des cultistes est en effet la Griffe de Mermedus, une aiguille rocheuse fermement plantée dans une baie isolée de la côte ghyranite, et que les locaux évitent avec soin du fait de son effroyable réputation. Comme le confirme le vieux prêtre de Sigmar que Thalinosh a capturé pour lui servir de guide, un fantôme assoiffé de sang moelle hante les lieux et attaque tant les hommes que les navires ayant la mauvaise idée de s’aventurer sur son territoire. Il en faut cependant plus pour décourager notre héros, car c’est ici-même que son apprenti fugueur (Gratz) a perdu une relique que le sorcier souhaite absolument récupérer, spectre grognon ou pas.

Accéder à la grotte où le monstre, que Thalinosh suppose avec raison être désormais l’heureux détenteur de son bien, se prélasse ne sera pas chose facile, la caverne se situant à la base de la Griffe et étant donc submergée par les eaux. Il en faut toutefois plus pour décourager le sorcier, qui grâce à un ingénieux dispositif de digue (magique) et de pompage (magique aussi), parvient à mettre la base de l’aiguille en cale sèche, au modique prix de la vie du prêtre et de son chenapan d’apprenti. Ceci fait, il emmène ses fidèles suivants, commandés par l’homme-bête Sharga et la guerrière Borir, faire un peu de spéléologie marine.

Au bout d’une marche d’approche sans autres désagréments qu’un pantalon trempé et une persistante odeur de limon, la fine équipe arrive au cœur de la Griffe, où tout semble indiquer que le mystérieux fantôme a pris ses quartiers. Le sol est en effet jonché d’ossements rongés et de trésors boueux, et lorsque le trio de goons qu’il a envoyé à l’avant-garde est attiré sous la surface par un invisible assaillant, il est temps pour que le boss fight que l’on devinait se profiler à l’horizon se déclenche. Envoyez la musique…

Début spoiler 1…L’adversaire auquel Thalinosh et Cie font face se révèle être un Krakigon adulte, soit le fruit des amours interdits entre un kraken et un caméléon. Si les capacités mimétiques de la bête compliquent dans un premier temps son ciblage par nos aventuriers trempés jusqu’à l’os, la magie de Thalinosh permet de jeter une lumière crue sur l’ennuyeuse bestiole, et de révéler que dans grande coquetterie, elle porte l’éclat de shadeglass dérobé par Gratz à son tuteur en sautoir. Au bout d’un combat éreintant au cours duquel tous les personnages non nommés finissent éclatés sur les parois de la grotte ou dévorés par la bête, l’intrépide Sharga parvient à arracher le précieux du maître au caractériel calamar, avant que ce dernier ne se fasse écraser par un pan de falaise que ses tentaculaires gesticulations avaient dérangé. Voilà une affaire rondement menée…

Début spoiler 2…Mais cela est sans compter la perfidie naturelle des Disciples de Tzeentch, bien sûr. Borir trahit donc ses comparses et arrache le précieux éclat des doigts raidis par la mort du pauvre Sharga après lui avoir planté sa dague rituelle dans le cœur. Elle révèle à Thalinosh avoir fait un pacte avec le rival de ce dernier, l’infâme Carradras (qui s’est enfin réveillé, il faut croire), et, confiante dans l’état de fatigue avancé de son ancien patron après les efforts consentis pour venir à bout du Krakigon, lui expédie sa dague en pleine poitrine pour faire bonne mesure. En cela, elle commet une grave erreur, comme lui souffle ce rusé de Thalinosh, car c’est le sortilège du sorcier qui empêche les eaux d’engloutir la grotte où ils se trouvent. Réalisant sa boulette, Borir se lance dans un sprint éperdu en direction de la sortie, laissant Thalinosh seul dans la caverne, mais moins mal en point qu’il n’y paraissait. La dague avec laquelle la traitresse l’a frappé étant un athame qu’il a lui-même confectionné, il ne pouvait être blessé par ce projectile. Mouahahaha. Trop fatigué pour donner la chasse à son acolyte, il claque ses dernières réserves de mana dans un sort de vol afin de sortir de la Griffe par le trou dans le plafond obligeamment aménagé par le Krakigon dans son agonie, et a la satisfaction de voir Borir se faire submerger par les vagues lorsqu’il met fin à son enchantement. Qui sait, peut-être qu’il trouvera ce qu’il cherche lors de la prochaine marée basse ?Fin spoiler  

AVIS :

C. L. Werner revisite l’archétype de la nouvelle d’heroic fantasy, la bande d’aventuriers en quête d’un artefact mystique gardé par un monstre patibulaire, en mettant en scène une bande de cultistes de Tzeentch plutôt qu’un groupe à l’allégeance plus neutre. Le résultat est tout à fait satisfaisant, même si assez convenu, Werner ayant assez de métier pour rendre une copie de qualité. Un filler très honnête.

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Abyssal – D. Annandale [HH] :

INTRIGUE :

AbyssalOù il sera question du Psyker Aveth Vairon, cueilli comme la rosée du matin par l’équipage d’un Vaisseau Noir alors qu’il cherchait à évacuer sa planète natale (Kithnos) avant l’arrivée d’Horus et de ses renégats. N’ayant pas perdu tout fighting spirit malgré les conditions de détention épouvantables qui sont les siennes, et persuadé que le destin (qui se manifeste dans son cas particulier par l’apparition d’une rune bien particulière dans son champ de vision) finira par lui sourire, Vairon convainc deux de ses co-détenus de monter une insurrection contre l’équipage de l’Irkalla, initiative généreuse mais mise en échec par l’arrivée de la première Sœur du Silence venue. Saleté de Parias.

Jeté au mitard en punition de son rôle d’objecteur de conscience, Vairon est toutefois rapidement tiré de sa cellule par ses complices, après que le Vaisseau Noir ait été attaqué par un ennemi inconnu, permettant au trio d’échapper à l’attention des gardes et de libérer une autre détenue placée à l’isolement en raison de sa dangerosité. Celle que nous surnommerons la cantatrice chauve du fait de son physique particulier et de sa voix de stentor doit servir de ticket de sortie à Vairon et ses camarades (Cassina et Harvus), d’après le pressentiment confus que le premier éprouve en sa présence. Bien aidé par ses pouvoirs de Banshee (elle hurle dès qu’elle se sent menacée, avec des effets radicaux sur les malheureux qui lui font face) et le GPS psychique de Vairon, le petit groupe parvient à naviguer dans le dédale des coursives, et se rapproche de la section du vaisseau où sont stockés les modules de survie. Une stratégie de court terme, certes, mais on ne peut pas reprocher à des Psykers de vouloir quitter un Vaisseau Noir par tous les moyens, et de réfléchir à la suite des opérations plus tard.

Manque de bol, Vairon and friends croisent la route d’une Sœur du Silence solitaire alors qu’ils touchaient au but, et l’aura anti-psy couplée au pistolet bolter de la nouvelle arrivante se révèlent être fatals à Cassina, Harvus et à Miss Grandgousier. Miraculeusement épargné par les bolts, Vairon ne donne toutefois pas cher de sa chère personne, et aurait sans nul doute fini éparpillé façon puzzle à son tour n’eut été l’intervention décisive de mystérieux sauveurs…

Début spoiler…Une escouade de Word Bearers débarque en effet sur les lieux du cri(me), et règle rapidement son compte à la Sœurette isolée. Vairon réalise alors avec horreur que la fameuse rune qui a guidé sa vie pendant toutes ces années n’était en fait qu’une décoration de l’armure du frère Jean-Firmin, 734ème Compagnie, et qu’il s’est fait des plans sur la place que la DESTINEE lui avait réservé dans le grand ordre des choses. Une chose est sûre, ses talents vont être utilisés à plein potentiel, mais sans doute pas d’une manière qui le satisfasse beaucoup…Fin spoiler

AVIS :

Onze pages, c’est un format exigeant pour écrire une nouvelle intéressante, et ayant pratiqué la prose de David Annandale plus qu’à mon tour, j’avais inconsciemment placé la barre assez basse sur cet ‘Abyssal’ dès la réalisation qu’il s’agissait d’un très court format. Et je n’ai pas été déçu (et donc j’ai été déçu). S’il serait mesquin de ma part de pointer la simplicité de l’intrigue, qui est directement reliée au nombre de pages que l’auteur peut consacrer à étoffer son histoire, je serai en revanche moins conciliant sur le choix d’Annandale de mettre en avant un personnage (la femme sans visage), pour au final le bazarder comme un malpropre et sans que le soin consacré à le faire ressortir du lot ne serve à grand-chose. De plus, et c’est assez ironique pour un texte aussi court, j’ai trouvé la préparation du (mini) twist final trop longue, ce qui amène le lecteur à deviner ce qu’Annandale avait derrière la tête deux paragraphes avant qu’il révèle le fin mot de l’histoire. ‘Abyssal’ n’est pas abysmal (je reste mesuré, même si le jeu de mots était tentant), mais il ne mérite pas vraiment le détour.

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Acts of Sacrifice – E. Dicken [AoS] :

INTRIGUE :

Acts of SacrificeLa situation n’est pas fameuse pour les templiers de l’ordre de l’Étoile Ardente, dédié à cette bonne vieille Myrmidia. Assiégés dans leur forteresse par la horde de Sulkotha Godspite, championne de Khorne au physique impressionnant, ils ont résisté avec vaillance pendant des semaines mais la sauvagerie et le nombre de leurs adversaires ne laissent que peu d’espoir aux derniers rescapés quant à la conclusion de cet affrontement. Leur Grand Maître (Vaskar) tombé au champ d’honneur la veille, et sans aucune nouvelle de l’émissaire dépêché en début de siège quérir l’aide des Fyreslayers de la Loge Hermdar, la commandante par intérim Anaea se résout à tenter le tout pour le tout et à monter une sortie pour rejoindre le Drakemount, un autre bastion de l’ordre situé à quelques jours de voyage sur le plateau de Flamescar. Malgré la réticence de son second Karon, un chevalier old school tout prêt à donner sa vie pour l’honneur et la gloire dans un dernier carré futile, Anaea convainc ses troupes d’abandonner aux Khorneux la possession du terrain, et les Myrmidions se lancent à l’assaut des barbares braillards, juchés sur leurs fidèles demidroths.

Au prix d’une mêlée furieuse pendant laquelle Karon et Godspite croisent le fer et l’indispensable Anaea récupère la bannière de l’ordre au moment où elle allait tomber 1) par terre et 2) à l’ennemi, les templiers parviennent à transpercer les lignes ennemies et à s’enfuir dans le Désert de Verre, gardant l’accès au Drakemount. Le voyage est éprouvant pour les chevaliers lézardiers, plus d’un succombant à ses blessures ou à l’impitoyable soleil d’Aqshy, tandis que les meutes de molosses mutants (check l’allitération) que Godspite utilise comme éclaireurs harcèlent les rescapés. Lorsque la forteresse tant attendue se profile enfin à l’horizon, Anaea entraîne ses troupes dans un dernier élan vers la sécurité du bastion allié, où ils pourront enfin se reposer avant que les hostilités recommencent…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur l’omniprésence de l’ennemi (on ne l’appelle pas Chaos universel pour rien), qui a attaqué la forteresse et passé sa garnison par l’épée il y a de cela plusieurs mois, à en juger par l’état des cadavres que les templiers découvrent sur place. La horde de Godspite n’étant qu’à quelques heures de marche du Drakemount, et sans autre plan de rechange à disposition, c’est au tour de Karon de faire valoir ses arguments, et de résoudre ses compagnons d’armes de vendre chèrement leur vie dans les ruines de la citadelle. Cette décision suicidaire n’est toutefois pas du goût d’Anaea, déterminée à faire survivre son ordre à tout prix, et en solitaire s’il le faut. Cette traditionaliste acharnée s’éclipse donc par une poterne (toujours avec sa précieuse bannière, parce que why not) avant l’arrivée des Khorneux, et bien qu’elle doive rabrouer quelques vilains doggos en route vers sa prochaine destination, elle parvient à nouveau à s’échapper de la nasse chaotique. La nouvelle s’achève sur sa contemplation, forcément morne et déchirante, de l’ultime bataille livrée par son ordre, avant qu’elle ne reparte en direction d’un nouveau foyer. Que font les Stormcast Eternals quand on a besoin d’eux ?Fin spoiler

AVIS :

Acts of Sacrifice’ fait partie de ces nouvelles qui se terminent et laissent un fort goût d’inachevé à leurs lecteurs. C’est d’autant plus dommage qu’Evan Dicken avait réussi à rendre intéressant son histoire de dernier carré désespéré, notamment grâce à une personnification réussie des personnages principaux. La terrible Sulkotha Godspite (et sa chaîne magique) n’aura donc pas le droit au combat épique auquel elle semblait pourtant promise, ce qui est particulièrement dommage. Même si l’histoire racontée par Dicken tient la route, et offre même une variété bienvenue par rapport aux happy/glorious endings qui forment la majorité du corpus de la GW-Fiction, je reste convaincu que la conclusion aurait pu et dû être plus soignée, pour un résultat plus satisfaisant1.

1 : À moins qu’il ne s’agisse d’une sorte de prologue à un arc plus large, au cours duquel Anaea aurait la chance de se venger de sa Némésis. Mais pour le moment, rien de tel n’a été publié ou annoncé par la Black Library.

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The Son of Sorrows – J. French [40K] :

INTRIGUE :

The Son of SorrowsSur une planète banale, une secte impériale l’étant tout autant a commis la singulière et fatale erreur de franchir une des lignes rouges de l’Inquisition : capturer des Psykers (ok) et les torturer (ok) pour obtenir des bouts de prophéties (HERESIIIIIIE !!!). Mettez vous bien ça dans la tête, mécréants : le loto doit rester un jeu de hasard, sinon comment voulez vous que les Seigneurs de Terra financent les opérations de la Garde Impériale, hein ? L’affaire ayant été remontée jusqu’à l’Inquisiteur Covenant, ce dernier décide d’envoyer une de ses nouvelles recrues, l’ex Sergent des forces spéciales Koleg, faire un exemple des Chercheurs de la Vérité Incandescente (le petit nom de la secte), sur le lieu même où ils ont monté leur sinistre opération : la cathédrale Saint Raymond des Charentaises.

On suit donc Koleg depuis sa préparation méthodique dans la cellule qui lui sert de chambre, après que la brave Viola von Castellan, qui entre autres tâches s’occupe des ressources humaines pour le compte de son patron, lui ait transmis le briefing de la mission, jusqu’à l’exécution de cette dernière. Déployé comme la one man army qu’il est, Koleg sait qu’il doit faire un exemple des pécheurs et utilise pour ça un armement bien spécifique : un lance grenade balançant des bombinettes à fumée saturée de LSD et d’agent phobique (pour faire littéralement halluciner ses victimes et les mener à se retourner les unes contre les autres) d’une part, et un pistolet à chevrotine d’autre part (ça sert toujours). Ah, il utilise aussi une sorte de porte manteaux rétractable à un moment, mais je serai bien infoutu de vous dire à quoi ça lui a servi1. Toujours est il que le K. nettoie la place avec l’efficacité des grands professionnels, même lorsque l’un des Psykers gardés au frigo par les hérétiques s’invite à la fête après qu’une grenade ait défoncé son aquarium amniotique.

En parallèle, nous avons droit à quelques flashbacks retraçant les événements ayant mené notre héros à rejoindre la team Covenant. On apprend ainsi que Koleg avait un frère (Kesh) avec lequel il partageait la passion de la fauconnerie, et qui est mort tragiquement après qu’une bombe au napalm soit tombé sur leur maison. Bien des années plus tard, un Koleg adulte et engagé dans la Garde Impériale battit son Capitaine comme plâtre après que ce dernier se soit trompé dans les coordonnées d’un raid incendiaire, ayant sans doute fait des victimes civiles et triggered Koko. Un tel crime ne pouvant rester impuni, Koleg s’attendait à être exécuté sans sommation par le Commissaire le plus proche, mais par un heureux hasard, un homme de main de Covenant (peut-être Josef) passait dans le coin et proposa au soldat dépressif de rejoindre l’Inquisition. Koleg accepta à la condition d’être débarrassé de son spleen persistant, et comme une psychothérapie coûte apparemment trop cher pour l’Inquisition, il fut à moitié lobotomisé par ses nouveaux copains à la place. Résultat : il n’est plus capable de ressentir aucune émotion, ce qui peut avoir ses bons côtés je suppose. Comme dit le proverbe, keep calm and purge on

1 : Et je ne suis pas le seul apparemment.

AVIS :

Parmi la foultitude de suivants de l’Inquisiteur Covenant, le taciturne Koleg est sans doute le moins remarquable, son statut de simple gros bras chargé des basses besognes ne lui permettant pas de voler la vedette aux seconds couteaux les plus fantasques, stylés ou particuliers du Francis Lalanne de l’Ordo Malleus. Cela n’a pas empêché l’aimable John French de donner à cet humble personnage un début d’origin story, convenablement mystérieux1 et résolument tragique, ce qui est approprié pour un type évoluant dans un univers grimdark. À vrai dire, ce sont les flashbacks retraçant le parcours de Koleg qui m’ont le plus intéressé, le récit de sa mission « Epouvantail » dans la cathédrale squattée par les cultistes ne révolutionnant pas le genre du bolt porn, et j’aurais donc apprécié que French passe plus de temps à détailler le passif du pseudo Space Marine (après tout, lui non plus ne connaîtra plus la peur) plutôt qu’à le décrire en train de gazer de l’hérétique. Pas la meilleure nouvelle horusienne de notre homme, mais tout de même sympathique. Tous avec moi : Heeeeee’s a maaaaaan of constant sooooorrooooooow…

1 : J’ai compris qu’il a tabassé son Capitaine parce que l’erreur que ce dernier a commise lui a rappelé le tragique destin de sa propre famille, mais peut-être qu’il s’agit du même accident.

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A Lesson in Iron – D. Guymer [HH] :

INTRIGUE :

A Lesson in IronS’il y a une chose que Ferrus Manus, paix à son âne, détestait, c’était bien perdre du temps. Aussi, sitôt réuni avec sa Légion, engagée dans le démantèlement de l’empire de rouille ork, le Primarque tint à imposer sa marque sur ses Légionnaires. Nous rejoignons ainsi l’impulsif M. Manus alors qu’il fait la chasse de quelques vaisseaux peaux vertes ayant survécu à la colère de l’Imperium, et qu’il compte bien détruire afin d’obtenir la complétion à 100% de sa mission, et ainsi prouver à l’univers qu’il vaut mieux que ces poseurs d’Horus et de Russ1. Et tant pis si ces couards d’Orks décident de foncer coque baissée dans une faille Warp qui flottait par là pour échapper au courroux de l’Astartes, et que personne n’a jamais été assez timbré du côté impérial pour se risquer dans ce genre d’environnement chelou. Ferrus, et son Fist of Iron, seront les premiers à tenter le coup. Encore un record à mettre au crédit du Primarque qui en voulait.

Ferrus n’est pas seul sur le pont de son vaisseau amiral alors que ce dernier réalise le premier fistage d’une faille Warp. Il est accompagné de deux Sergents vétérans, le Terran Harik Morn et le Medusan Gabriel Santar, tous deux pressentis pour devenir son bras droit. Alors que le Fist of Iron s’enfonce dans le trans Materium comme s’il s’agissait de caramel mou, avec des effets funky sur les appareils de navigation, comme on peut l’imaginer, les auspex détectent soudain des silhouettes de vaisseaux à proximité. Il s’agit des kroiseurs orks, mais également d’un nouvel arrivant, qui n’avait pas été identifié pendant la poursuite dans l’espace réel. Point commun : tous ont été réduits à l’état d’épave, et dans un passé lointain qui plus est. À la grande surprise des impériaux, il semble que le vaisseau en question appartienne à la 10ème Légion, ce qui hautement improbable mais pas totalement impossible. Pragmatique comme toujours, Ferrus Manus décide d’aller y jeter un œil.

Alors que les pauvres grunts qui forment son escorte découvrent avec émoi 1) l’existence de Démons et 2) s’il y a une vie après la mort, le Primarque et ses comparses arrivent jusqu’au pont du vaisseau mystère, où les attend un cadavre desséché de Space Marine. Ce dernier porte les marquages d’un Iron Hands, mais, au grand dégoût de FM, il semble avoir terminé sa carrière plus machine que (sur)homme, au vu de toutes les augmétiques et bioniques que la dépouille arbore. C’est le Tech-adepte qui accompagne la fine équipe qui finit par proposer l’hypothèse la plus intéressante pour expliquer ce répugnant mystère : l’épave sur laquelle ils se trouvent est un vaisseau des Iron Hands provenant du futur, transporté dans le passé par les caprices du Warp.

Avant que la nouvelle n’ait pu être digérée par l’assemblée, une palanquée de Démons se manifeste (dans tous les sens du terme) sur le pont, et forcent nos héros à – enfin – faire usage de la force. Si ce bogoss de Ferrus s’illustre à grands coups de marteau, ses subalternes sont plus à la peine. Surpris par les nouveaux arrivants, Santar se fait ainsi arracher le bras gauche par une Bête de Nurgle joueuse, tandis que Morn est submergé par des Horreurs rigolardes. Le premier réussit toutefois à marquer des points auprès du Primarque en retournant dans la mêlée sitôt ses esprits recouvrés, tandis que le Terran se contente de haleter comme un bébé phoque sur la banquise. Avant d’ordonner une retraite tactique vers le Fist of Iron, ignorant les avis de ses sous-fifres de rester pour looter de la technologie futuriste, et/ou défendre une relique de la Légion, Ferrus tranche en son for intérieur : ce sera Gaby qui deviendra son Ecuyer et 1er Capitaine. C’est dit.

1 : C’était l’époque de la Grande Croisade où tous les Primarques avaient un nom qui rimait avec « platypus », l’animal préféré de Pépé.

AVIS :

Petite nouvelle fort sympathique consacrée par leur spécialiste incontesté, David Guymer, aux Iron Hands et à leur Primarque caractériel, ‘A Lesson in Iron’ se paie le luxe de nous présenter en quelques lignes la prise de fonction de Ferrus Manus au sein de sa Légion (choix du 1er Capitaine, et autres révélations fluffiques intéressantes incluses), combiné avec une savoureuse mise en abîme du futur qui attend le Chapitre dans quelques millénaires. Le fait que les améliorations bioniques répugnent au plus haut point l’homme aux mains de fer n’est pas une nouveauté à ce stade, mais Guymer parvient tout de même à surfer sur cette iron-ie de façon tout à fait satisfaisante. Le pauvre Ferrus Manus aura soupé de prémonitions malheureuses car jamais utilisées pour modifier la destinée pas vraiment enviable attend ses fils et lui-même à la sortie de la Grande Croisade, et on en a encore un exemple ici. Ca reste plus distrayant à lire que la moyenne des soumissions de la BL, donc pourquoi cracher dans soupe ?

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A Dirge of Dust and Steel  – J. Reynolds [AoS] :

INTRIGUE :

A Dirge of Dust and SteelÀ la recherche de la légendaire cité corbeau de Caddow et de son Portail des Royaumes reliant à Shyish à Azyr, une petite force de Stormcast Eternals de la Chambre Vanguard des Hallowed Knights (soyons précis) a conclu un pacte avec les Duardin de Gazul-Zagaz, seuls à connaître l’emplacement de cette ville mystérieuse1. En échange de leur aide contre les hordes du Gardien des Secrets Amin’Hrith, connu sous le nom d’Ecorchâme, les nabots dépressifs (leur royaume est en ruines, leur Dieu s’est fait bouffer par Nagash et l’âme de leur dernier prince sert de skin au démon de Slaanesh) mèneront les guerriers du Lord Aquilor Sathphren Swiftblade jusqu’à bon port. Jamais le dernier à rendre service à son prochain, notre héros accepte bien entendu cette généreuse proposition, et se fait fort d’entraîner ce fât d’Amin’Hrith dans un piège ingénieux.

Ayant réussi à capter l’attention des Hédonistes, probablement en leur faisant remarquer que leurs soieries avaient fait fureur à Ghur il y a trois saisons de celà (ce qui, pour une fashionista des Royaumes Mortels, est une insulte mortelle), les prestes cavaliers de Sigmar emmènent leur nouveaux amis dans une course éperdue à travers les dunes, jusque dans les ruines de Gazul-Zagaz, où les attendent de pied ferme (et depuis un petit moment apparemment, à en juger par l’épaisse couche de poussière qui les recouvre) les guerriers Duardin. S’en suit une bataille des plus classiques, illustrant de fort belle manière l’intérêt de se rendre au combat avec une armure de plates et non une combinaison en viscose, dont le point culminant sera le duel entre Swiftblade et Amin’Hrith dans le temple de Zagaz, où le rusé Stormcast s’emploiera à faire un boucan à réveiller les morts…

1 : On peut donc dire qu’ils ont une carte Caddow. Mouahahaha.

AVIS :

À l’heure où cette chronique est écrite, Josh Reynolds est probablement le contributeur principal de la BL en matière de contenus siglés Age of Sigmar. Une telle prodigalité ne pouvant évidemment pas être synonyme de qualité exceptionnelle à chaque soumission, il est en somme tout à fait logique que certaines des nouvelles rédigées par notre homme ne s’avèrent pas être d’une lecture des plus passionnantes. C’est le cas de ce A Dirge of Dust and Steel (on me passera l’usage du titre original, à la fois plus poétique et plus élégant que le monstre qu’il est devenu en VF), qui se trouve être une nième variation du topos le plus employé de cette nouvelle franchise : la baston de Stormcast Eternals contre les forces du Chaos1. On pourra certes m’opposer que cet épisode particulier se distingue des dizaines qui l’ont précédé par l’emploi d’une Chambre relativement nouvelle (Vanguard), d’un héros inédit (Sathphren Swiftblade) et d’un environnement exotique en diable (l’Oasis de Gazul, en Shyish). Ce à quoi je répondrai que les Vanguard ne sont « que » des Stormcast sur demi-gryffs, et ne conservent de fait que très peu de temps l’attrait de la nouveauté. Swiftblade a quant à lui l’originalité d’une boîte Barbie et son Cheval, même son côté grande gueule n’étant plus vraiment novateur depuis l’arrivée d’Hamilcar Bear-Eater sur le créneau « humoristique » des SE. Pour terminer, Gazul a depuis lors sans doute rejoint l’interminable liste des lieux des Royaumes Mortels dans lesquels plus personne ne reviendra jamais, et ne mérite donc pas que l’on s’y intéresse plus que de mesure.

Non, pour ma part, la seule vraie valeur ajoutée de ce Dirge… tient en l’inclusion d’une faction Duardin sortant franchement du lot par sa vénération d’un Dieu de la Mort mort (combo !) et sa capacité à invoquer des esprits, ce qui constitue des variations intéressantes par rapport au stéréotype du guerrier nain que tout lecteur connaissant ses classiques se représente de façon plus ou moins inconsciente. Pour le reste, c’est de la qualité Reynolds (Josh), donc un récit bien structuré et rythmé, s’intégrant parfaitement dans les conventions définies pour Age of Sigmar en termes de fluff et d’atmosphère, et s’avérant dans l’ensemble plaisant à lire. Ne lui retirons pas ça.

1 : Comme les dernières années ont vu apparaître d’autres types d’adversaires, comme les morts-vivants de Nagash pendant la Tempête des Âmes ou les Orruks Ironjaws de manière collatérale à la traque de Mannfred von Carstein, j’attends avec impatience le moment où les vertueux Sigmarines commenceront à taper sur d’autres factions de l’Ordre, en attendant l’inévitable guerre civile que le passif de GW en la matière nous promet depuis que le premier Stormcast a dévoilé le bout de son masque de guerre. ‘La Vilainie de Vanus’, ça c’est un titre qui claque !

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The Last Council – L. J. Goulding [HH] :

INTRIGUE :

The Last CouncilPendant que Pépé emmenait ses fils à la conquête d’une galaxie qui n’avait rien demandé, l’ingrat mais nécessaire boulot de gestion de son Imperium naissant fut confié à un conseil de technocrates et autres représentants (parfois élus) du peuple, placé sur l’autorité chillax mais absolue de Malcador le Sigilite. Ce dernier réussit à faire reconnaître la pénibilité de sa tâche après le Triomphe d’Ullanor, l’Empereur ayant eu la grâce d’envoyer le mème ‘Vu et s’en tape’ lorsque son Régent lui proposa de passer officiellement la conduite des affaires civiles au Conseil de Terra. Cette situation perdura pendant dix ans, jusqu’à ce que l’arrivée d’un Horus plus rebelle que jamais à la porte du Monde Trône force les Hauts Seigneurs de Terra à repasser la main aux autorités militaires afin de préparer au mieux le futur siège.

Nous suivons ce qui se trouva être la dernière session du Conseil présidée par Malcador, et assistons à des débats passionnés entre les représentants des institutions majeures d’un Imperium en crise (Administratum, Adeptus Arbites, Adeptus Mechanicus, Libres Marchands, Navigateurs, Influenceurs, Furries…), sur des sujets aussi importants que la quarantaine des vaisseaux spatiaux entrant dans le système solaire, la fortification du commissariat central de l’Arbites, ou encore le déplacement de quelques millions de réfugiés demandés par l’inflexible Dorn pour fortifier comme il se doit la cabane au fond du jardin du Palais Impérial, qu’on ne saurait laisser tomber au main des traîtres sans sourciller.

Suivant les discussions d’une seule oreille, Malcador voit son regard attiré par la petite imperfection qui marque la surface de la grande table du Conseil autour de laquelle les Hauts Seigneurs palabrent. Cela lui remet en tête le souvenir du moment où l’impérial guéridon (qui fait neuf mètres de diamètre, parce qu’on ne fait pas les choses normalement sur Terra) a été irrémédiablement « défiguré », et est resté comme tel malgré les efforts diligents des moyens généraux du Palais.

À l’époque, l’Empereur était déjà parti depuis longtemps faire la tournée des bars de la galaxie, et tous les Primarques avaient finalement été retrouvés. L’un d’entre eux avait toutefois trouvé malin de commettre un crime tellement grave que son nom fut frappé d’anathème, sa Légion dissoute et sa statue géante en marbre dans la galerie de l’Investiaire discrètement retirée de sa plinthe et destinée à être concassée pour faire une allée zen dans le jardin du Palais. Ce crime monstrueux parvint cependant aux oreilles de cette fouine d’Alpharius, qui alla tout cafter à son grand frère Horus, dont la nature généreuse ne put supporter une telle infamie. Accompagné par Alphie et par Jaghatai (dont la principale occupation pendant la Grande Croisade consistait apparemment à zoner autour du canapé du Vengeful Spirit), celui qui n’était pas encore le Maître de Guerre s’en vint piquer un scandale en pleine session du Conseil de Terra, provoquant une belle pagaille au sein de l’auguste assemblée.

Habitué aux caprices de ces enfants gâtés de Primarques, Malcador géra le débordement avec son efficacité habituelle, mais dut cependant montrer à ce kéké d’Horus qu’il devait respecter son oncle en l’absence de Son père, en lui infligeant une soumission mentale qui envoya le grand chauve baraqué inspecter la poussière en dessous de la table du Conseil. Il faut dire qu’Horus avait menacé de prononcer le nom de son frère disgracié, ce qui aurait constitué un crime absolument impardonnable (l’Imperium est bizarre). Avant de partir en claquant la porte, Horus trouva malin de planter son épée dans la pauvre table pour montrer qu’il était très en colère, nous donnant l’explication derrière le détail ayant attiré le regard de Malcador.

Réalisant qu’il était en train de bailler aux corneilles ravens, le Sigilite prit sur lui et prononça la fin de cette ultime séance, laissant le soin aux Primarques présents sur Terra de reprendre le fardeau de la gestion des affaires courantes. Grand prince, il mit à profit son agenda désormais un peu plus libre pour faire du bénévolat pendant l’opération d’évacuation des squatteurs de la périphérie du Palais Impérial (hébergés dans la salle du Conseil de Terra, qui ne servait de toutes façons plus à rien), donnant quelques nouveaux cheveux blancs à un Rogal Dorn soucieux de la sécurité du Régent1.

Jagathai Khan, qui passait évidemment par-là, demanda à avoir un mot à part avec Malcador pour 1) s’excuser d’avoir contemplé béatement ce dernier mettre une rouste psychique à Horus sans intervenir d’une quelconque façon, et 2) lui révéler qu’il est au courant du terrible secret autour de l’identité du Régent de Terra… qui se révèle être d’une innocuité assez absolue, en tout cas pour l’époque de crise de cette fin d’Hérésie. Malcador s’appelait à l’origine Brahm Al-Kadour (soit), est un Perpétuel (you don’t say), le dernier membre de l’organisation des Sigilites (c’est comme le Port Salut, c’était écrit dessus), et a été responsable d’actions pas très charitables pendant la Longue Nuit (comme tout le monde, j’ai envie de dire). Jagathai a alors un moment de naïveté touchante, en se demandant sincèrement si l’Empereur est au courant du passé trouble de son bras droit, prêtant à Son impérial père une droiture morale qu’il est très loin d’avoir. Comme Pépé est introuvable et injoignable de toutes façons, l’origin story de Malcador restera dans les cartons pour le moment, mais le passé finira peut-être par ressortir2

1 : Alors que cette bonne pâte de Sanguinius, qui ne voyait le mal nulle part, trouva l’idée trop kawai.
2 : Non.

AVIS :

Laurie Goulding signe une nouvelle très intéressante sur le complexe fonctionnement des instances dirigeantes l’Imperium, où toutes les bonnes volontés et les nobles aspirations viennent mourir. En plus de nous rassasier de fluff et de faire monter le cœur des fanboys & girls dans les tours avec sa mention habile du sort d’un des Primarques disparus (on était à ça de connaître son nom !), ce qui suffit déjà à placer ‘The Last Council’ parmi les courts formats les plus satisfaisants de tout le catalogue hérétique, Goulding démontre avec un talent consommé que l’Imperium est un concept chimérique, ne pouvant être construit et maintenu que sur la base de mensonges et d’actions brutalement pragmatiques, et dont il vaut mieux que la connaissance soit perdue ou ignorée par les quelques rares individus capables de garder les yeux sur l’idéal irréalisable, mais pourtant nécessaire, fixé par l’Empereur. L’Hérésie d’Horus est le cadre parfait pour ce genre de réflexions, et on peut remercier Goulding d’avoir tenté (et réussi) quelque chose de très différent des habituelles batailles de Légionnaires que l’on retrouve dans beaucoup des travaux des autres auteurs de cette franchise.

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Motherlode – N. Kyme [40K] :

INTRIGUE :

MotherlodeRaus & Rein Gaffar, jumeaux Ratlings, déserteurs de la Garde Impériale et duo comique doublement troupier, vivent une journée particulièrement agitée de leur vie d’explorateurs de la Forteresse Noire. Ayant échappés de peu au sadisme proactif d’un concurrent Drukhari alors qu’ils étaient en maraude sur leur terrain de chasse, les tireurs pointeurs (ça marche aussi bien pour la pétanque que pour le tir de précision) regagnent leur vaisseau avec une caisse mystérieuse contenant un butin mirobolant, sans réaliser que leur Némésis, Akrahel Drek, a survécu à la bastos expédiée par Rein, et prévoit logiquement de se venger de ces petites pestes, dans un éclat de rire ronronnement (si si) maléfique. * Purrr purrr purrrr puuuuuuuuurrrr *

Un peu plus tard, nous retrouvons nos abhumains, également traqués par un Commissaire amnésique et son escouade de vétérans couturés, sans doute pour quelques tours pendables et plaisanteries de mauvais goût, au bazar de Nadir, où ils ont rendez-vous avec une vieille et morbidement obèse connaissance, le receleur et trafiquant Ogryn Murlock, auquel ils souhaiteraient vendre leur dernière trouvaille. Petit problème, il n’y a pas que le Commissaire – Vudus Mettik de son petit nom – qui a des problèmes de mémoire, les twins ayant semble-t-il complètement oublié qu’ils ont tuyauté les Arbites sur le petit commerce de Murlock quelque temps auparavant, avec des conséquences logiques et néfastes pour sa modeste échoppe, et que Murlock est au courant de ce cafardage. Evidemment, cet historique compliqué ne facilite pas les négociations, et Raus & Rein doivent à nouveau se tirer d’un beau guêpier, ce qu’ils font en dégoupillant quelques grenades de la bandoulière de leur hôte, après que ce dernier ait tenté de les hacher encore plus menu qu’ils ne le sont.

Nullement découragés par cette déconvenue, les Ratlings utilisent le carnet d’adresses de leur dernière victime pour contacter directement un acheteur potentiel, qu’ils trouvent raide mort à son domicile, et pas de causes naturelles (à moins que les Kroots aient la jugulaire clipsable, ce qui doit arriver s’ils consomment trop de distributeurs de Pez). Poursuivis jusque dans les égouts par Mettik et ses hommes, responsables du krooticide et déterminés à capturer les déserteurs, les frérots sont contraints de se séparer, Raus choisissant la capture pendant que Rein se carapate… pour mieux revenir avec son fusil de sniper de rechange (toujours utile), et la fameuse boîte mystère, juste à temps pour secourir son bro’, que se disputent Mettik et Akrahel, qui a fini par retrouver la trace de ses tourmenteurs. L’impasse mexicaine qui se profile à l’horizon trouve toutefois une fin précipitée (c’est fluff) lorsque Rein lâche la précieuse caisse au milieu de la scène, qui se révèle contenir la tête d’une matriarche ur-ghul. Et alors, me demanderez-vous ? Et alors, la famille élargie de la défunte a trouvé les moyens de sortir de la Forteresse (en Ur-bher, sans doute) pour rapatrier la relique, et investit les lieux de la confrontation à ce moment précis, avec des résultats salissants. Encore une fois, les Ratlings sont les seuls à se sortir indemnes de cette péripétie, mais peuvent au moins terminer la journée en passant deux de leurs ennemis mortels en perte et profit. C’est déjà ça.

AVIS :

On (en tout cas, je) savait déjà que Kyme avait une fâcheuse tendance à pondre des histoires mal ficelées, sacrifiant avec une constance consternante la moindre prétention de crédibilité narrative pour se concentrer sur une agglutination de scènes « cinégéniques ». Rassurez-vous, c’est bien le cas ici, même si l’absence de Space Marines (et donc de Salamanders, les victimes préférées de l’auteur) et la brièveté de l’objet du délit ne permettent pas à ce dernier de rivaliser avec ses records personnels de WTF. On se contentera de souligner que beaucoup de choses arrivent au bon moment, et/ou sans mise en contexte, dans ce Motherlode (jeu de mots !1), ce qui est la marque des auteurs fainéants.

Là où Kyme innove et fait fort, c’est dans la veine scatologique qu’il choisit de pousser fortement d’un bout à l’autre de son récit. C’est simple, tout pue dans ces 20 pages : les héros, les méchants, les lieux, la nouvelle elle-même ; c’est le royal flush de l’infamie, et tant qu’à parler de flush, autant tirer la chasse. J’ai fini la lecture de ce… texte légèrement hébété par l’aplomb ou le jemenfoutisme complet revendiqué par son auteur, qui réussit le tour de force de faire passer 40K de grimdark à off-colour avec son inimitable (et j’espère inimitée) prose. Motherlode est à ranger parmi les rebuts honteux de la Black Library, et à oublier le plus vite possible.

1 : Motherlode se traduisant par filon (au sens premier ou figuré) en anglais, la relique récupérée par Alain et Alex Térieur étant à la fois une richesse et ayant une connotation maternelle.

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One, Untended – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE :

One, UntendedUne fois n’est pas rancune, nous retrouvons le Tueur préféré de ton Tueur préféré, Gotrek Gurnisson, dans le mal le plus complet au début de cette nouvelle aventure, qui sera sans aucun doute trépidante, mais qui commence par être vomissante. Notre héros est en effet pris d’un mal de ventre carabiné, ce qui, de son aveu même à son acolyte Maleneth, ne lui était jamais arrivé avant. Et si l’Aelfe sigmarite, en bonne compagnonne qu’elle est, prend soin de tenir la crête de Gotrek pour éviter que cette dernière ne prenne une couleur et une texture encore plus dégoûtantes qu’à l’accoutumée, elle n’est pas étrangère à cette gueule de bois subite. Bien au contraire, c’est elle-même qui en est la cause, ses tentatives d’empoisonner le Nain afin de lui dérober la rune majeure de Krag Marteau Noir pour la ramener à Azyrheim n’ayant eu pas d’autres effets qu’un émétique avarié sur la robuste constitution du Tueur1. Ses vaillants efforts de se débarrasser de Gotrek devront cependant attendre un peu, car les éructations du transfuge du Monde qui Fut sont dérangés par une scène de ménage entre plusieurs individus aussi louches qu’imbibés. La raison de ce tapage nocturne se fait bientôt jour : un jeune bambin du nom de Tambrin a échappé à la vigilance légère de ses parents (Junas et Magda), et s’est semble-t-il enfoncé dans les catacombes d’Hammerhal Ghyra, que l’on dit hantées par le spectre vengeur d’Hanberra (à ne pas confondre avec celui d’Harambe, même si ça lui donnerait une bonne raison de persécuter les garçonnets), un ancien héros local ayant renoncé à servir Sigmar sous la forme d’un Stormcast Eternal à sa mort, et à la recherche des enfants qu’il n’avait pas pu sauver de son vivant depuis lors. La perspective de se frotter à un spectre légendaire pique bien évidemment l’intérêt professionnel de Gotrek, qui insiste pour prendre la tête de l’expédition de secours mise sur pied par les habitués de la taverne où les deux compères ont passé la nuit. En plus de Junas, qui sert de videur à l’auguste établissement, on retrouve la Ranger retraitée Halik et le Prêtre d’Alarielle Alanaer, qui serviront donc de meatshields aux véritables héros de l’histoire. Dommage que personne ne les ait prévenus.

La descente s’engage donc, et après quelques heures de progression dans les boyaux insalubres de la cité, un premier ennemi pointe le bout de ses moustaches. Il ne s’agit pas de Philippe Martinez, mais d’une bande de Moines de la Peste, peut-être syndiqués, squattant le bas de la cage d’escalier comme un gang de trafiquants de la cité Péri. Et à propos de périr, laissez moi vous dire que les ratons ne font pas long feu face à la colère incandescente de Gotrek, qui peut désormais passer en mode super saiyan lorsqu’il est très énervé, et élever la température autour de lui à des niveaux insupportables. Sa nouvelle hache de fonction, si elle est sans doute un peu moins cheatée que l’ancienne (dur de battre une arme forgée par Grugni pour Grimnir, tout de même), s’avère également très efficace, et la menace murine est donc prestement éliminée par les aventuriers, qui peuvent poursuivre leur route sans autre dommage qu’un pif écrasé par un coup de matraque pour Junas.

Le moment tant attendu de la confrontation avec Hanberra finit enfin par arriver, l’esprit ayant bien dérobé/envoûté Tanbrin (qui dort comme un bienheureux) car il l’avait pris pour son propre fils, Hangharth. Némésis de Gotrek oblige, le combat est bien plus serré que précédemment, la pauvre Halik rendant les armes et l’âme au premier cri poussé par le poltergeist kidnappeur, qui prouve au monde entier qu’il existe des Banshees masculines. Non mais. L’évanescence intermittente du fantôme n’est pas sans poser quelque problème au Tueur, ce qui ferait plutôt les affaires de Maleneth, toujours déterminée à récupérer la rune majeure tant convoitée de sa dépouille, mais il lui faut pour cela donner une raison à Hanberra de se battre à fond, ce que sa main mise sur Tambrin l’empêche de faire. La cultiste de Khaine repentie puise donc au fond de sa sacoche un clou de ci-gît Rolf2, souverain contre les ectoplasmes tenaces (et les Mortarques collants), et le frotte vigoureusement sur le bras porteur d’Hanberra pour lui subtiliser son précieux. N’ayant plus rien à perdre, le spectre va certainement réduire Gotrek en bouillie…

Début spoiler…Eh bien non (quelle surprise). Mais le plus étonnant n’est pas tant le résultat final que le dénouement, non violent, de cet affrontement. Le Tueur parvient en effet à faire entendre raison à son adversaire par le dialogue au lieu de lui faire manger sa hache, et ce dernier se dissipe donc de lui-même, comme le malentendu qui l’avait mené à dérober les enfants des autres depuis quelques siècles. Tout est donc bien qui finit bien (sauf pour Halik et la bière que Gotrek avait laissé sur le comptoir3), mais Maleneth la malhonnête devra trouver une autre combine pour récupérer la précieuse broquille incrustée dans le plastron de son compagnon.Fin spoiler

1 : Maleneth ne sait pas que la glotte de sa cible est marquée de la rune majeure de Cubi, le dieu Nain de l’alcoolisme.
2 : Vous me pardonnerez le calembour, mais traduire ‘wightclove’ en français n’est pas facile.
3 : À ce propos, il est probable que ce soit elle qui ait donné son nom à la nouvelle (que l’on pourrait traduire par ‘Laissé(e) sans surveillance’) et non pas Tanbrin.

AVIS :

David Guymer, qui avait écrit les dernières aventures de Gotrek (et Felix) dans le Vieux Monde, signe avec ‘One, Untended’ un parfait récit de transition et d’acclimatation pour les lecteurs familiers du personnage mais pas des Royaumes Mortels. Au-delà du déroulé précis de cette quête, tout à fait classique sauf dans son dénouement, ce sont les informations que l’auteur donne sur ce nouvel univers, les changements subis par son héros (nouvelle arme, nouvelle rune, nouveau sidekick) depuis qu’il y a fait son entrée, et les motivations, pas vraiment charitables, de Maleneth, qui rendent cette lecture intéressante, et même indispensable pour qui voudrait reprendre la suite de la geste de Gotrek sans passer par la case romanesque (‘Realmslayer’). L’auteur parvient également à aborder des éléments de fluff relevant de la sociopolitique, comme l’acculturation progressive des habitants de Ghyran aux mœurs d’Azyr, qui donnent une profondeur et un réalisme très appréciables à une franchise qui en manquait (et en manque toujours) cruellement par rapport à Warhammer Fantasy Battle. Bref, c’est une transition très réussie que Gotrek Gurnisson doit à David Guymer, bien que le flambeau des rancunes soit passé peu de temps après à Darius Hinks.

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The Battle of Blackthunder Mesa – P. Kelly [40K] :

INTRIGUE :

The Battle of Blackthunder MesaLa situation des défenseurs T’au de la planète Dal’yth, et plus particulièrement, de l’académie militaire située sur cette dernière, est positivement catastrophique. Isolés par le retrait des troupes de cette fayotte de Shadowsun, qui s’est repliée sans coup férir au lieu de se battre jusqu’au bout, comme le préconisait Farsight, les derniers guerriers de la caste du feu en sont réduits à livrer de coûteux et futiles combats d’arrière-garde pour ralentir l’avancée des impériaux, et permettre, peut-être, d’évacuer les survivants de la Star Academy locale. Placés sous l’autorité du Commander Bravestorm, adepte convaincu de la vision hypermétrope de la guerre de Farsight (et pour cause), nos héros viennent cependant de recevoir du matos un peu spécial, commandé auprès des grosses têtes de la caste de la terre il y a peu et livré sous forme encore expérimentale : des gants de boxe énergétiques. En effet, poussés par l’épuisement de leurs munitions et la puissance de feu de leur adversaire, Farsight et Bravestorm ont changé leur fusil à impulsion d’épaule, et monté une opération osée pour engager les tanks ennemis au corps à corps. Cela n’est certes pas très conventionnel, comme le fait remarquer la pimbêche (Furuja) du groupe1, mais nécessité faisant loi, Bravestorm emmène donc son cadre de cadets à l’assaut de la tristement célèbre Blackthunder Mesa, transformée en drive-in pour Leman Russ et Basilisks par l’Imperium depuis quelques semaines, avec des conséquences architecturales dramatiques pour la ville universitaire de Dal’Ryu, située en contrebas.

Si le déploiement de notre petite force d’Iron Men ne pose pas de problèmes, grâce à la maîtrise du vol furtif et à la technologie avancée du Bien Suprême, les choses se compliquent toutefois assez rapidement pour les concasseurs de tôle. Bien que Bravestorm ait pris soin d’indiquer à ses élèves qu’il fallait mieux rester au cœur de la mêlée pour gêner les tanks dans leur utilisation de leurs armes de défense, le poids du nombre, le comportement kikoulol de certains, et l’arrivée importune d’un Stormhammer, font lentement grimper les pertes du côté des punchers, bien que leurs maniques custom prélèvent un lourd tribut parmi les colonnes blindées de l’ennemi. L’équilibre des forces se renverse cependant brutalement lorsque, non pas un, mais deux Titans Warlord viennent se joindre aux festivités. L’apparition « subite » de ces discrètes et furtives machines de guerre en dit long sur le degré de préparation de l’opération, mais cela sera une discussion pour une autre fois. De toute façon, Bravestorm est certain que les nouveaux-venus n’oseront pas tirer sur les T’au, qui sont toujours engagés dans une partie d’auto-tamponneuse hardcore avec les blindés impériaux. Sa suffisance de Xenos idéaliste se trouve donc méchamment battue en brèche lorsque le turbo-laser du Titan de tête ouvre le feu sur les empêcheurs de bombarder en rond, réduisant le cadre de Bravestorm en confettis et cuisant ce dernier dans son armure.

Ce n’est cependant pas la fin pour notre héros trop confiant, qui trouve les ressources intérieures nécessaires pour faire abstraction de ses blessures et partir à l’assaut de la machine meurtrière. Son dernier fait d’arme consistera donc à « égorger » son adversaire en lui arrachant le câble d’alimentation, « fier comme un dindon », euh, tendon, courant le long du « cou » de la machine. À quoi cela a-t-il servi ? À rien en fait, puisque Bravestorm se prend à son tour une baffe monumentale – on saluera la dextérité de l’équipage impérial pour arriver à atteindre une cible aussi petite – s’écrase au sol comme une bouse, et sombre dans une inconscience logique. Certes, il a le temps de voir les forces impériales, dont le Titan trachéotomisé, se retirer de la mesa avant de tomber dans le coma, mais la victoire stratégique qu’il revendique au nom du Bien Suprême me semble un peu tirée par les cheveux (lui n’en a pas, je vous l’accorde). Après tout, c’était peut-être seulement l’heure de la cantine du côté adverse ?  En tout cas, notre increvable héros n’a pas dit son dernier mot, puisque sa carcasse mutilée finit par être récupérée sur le champ de bataille par les éboueurs de la caste de la terre. Pas encore tout à fait mort, il entend ses sauveteurs discuter des conséquences positives de son coup d’éclat quasiment fatal, qui a au moins permis de préserver les derniers quartiers de Dal’Ryu des déprédations impériales. La nouvelle se termine sur la réalisation que Bravestorm sera bien sauvé, mais au prix d’un enfermement perpétuel dans son Exo-armure, ses blessures étant trop graves pour espérer une véritable guérison. Assez ironique pour un personnage ouvertement Dreadnoughtophobe2

1 : Qui remonte toutefois dans mon estime grâce au magnifique « OK Gooder » (l’équivalent de notre OK Boomer) expédié à son supérieur un peu plus loin.
2 : Ce n’est pas qu’il en ait peur, mais la vue des pilotes Space Marines mutilés le dégoûte. Il en fait même des cauchemars.

AVIS :

Kelly retourne une fois encore sur la planète Dal’yth (Redemption on… Dal’yth) pour livrer un compte rendu romancé de la première utilisation d’une arme expérimentale T’au, le fameux gantelet Onagre. Si j’ai pu deviner à la lecture de cette nouvelle qu’elle mettait en scène des personnages déjà présentés dans d’autres textes qu’il a consacré à la couverture de la campagne de Damocles, l’immersion dans la galerie de seconds couteaux (rituels) gravitant autour de Farsight ne s’est pas faite sans difficultés de mon côté. En cause, le nombre de personnages convoqués par l’auteur1, et la complexité naturelle des patronymes T’au, qui se sont conjugués pour rendre difficile l’identification, et à travers elle, l’intérêt, de votre serviteur envers les pioupious de l’académie que Bravestorm a pris sous son aile. Cette difficulté évacuée, le récit de la fameuse bataille de Blackthunder Mesa ne m’a pas collé à mon siège, du fait du caractère binaire de l’affrontement en question. Si les Exo-armures commencent par faire des gros trous dans les tanks impériaux, sans vraiment être mises en danger par leurs proies (plutôt qu’adversaires), l’arrivée du titan renverse totalement la situation en un seul tir (merci Bravestorm), éparpillant le maigre suspens agencé jusqu’ici par Kelly aussi facilement que les assaillants Xenos venus souffler dans les chenilles des blindés de l’Empereur. On saluera tout de même la bonne « préparation » faite par l’auteur de la destinée claustrophobie de Bravestorm, qui après la Voie de la Lame Courte suivra celle de la Boîte de Conserve, sort ironique eut égard à l’effroi que lui inspirait les Dreadnoughts Space Marines. Au final, une lecture qui pourra intéresser les familiers de la prose suprêmiste de Kelly, mais qui n’a pas grand-chose à apporter au tout venant à la recherche d’un récit de bataille prenant.

1 : Ironie du sort, ils y passeront presque tous avant la fin de la nouvelle. C’était bien la peine de faire des efforts.

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The Atonement of Fire – D. Annandale [HH] :

INTRIGUE :

The Atonement of FireNous sommes dans la dernière ligne droite de l’Hérésie, quelques mois avant que le Siège de Terra ne débute. Roboute Guilliman a fini par réaliser que lancer sa petite entreprise personnelle alors qu’il est toujours techniquement employé par Pépé Corp., et en piquant dans la caisse de Big E. en profitant d’une panne généralisée d’internet pour ne pas se faire prendre, c’était assez craignos tout de même. Pétri de remords, Roro est désormais à la recherche d’un moyen de se faire pardonner ses errements passés. En sortant de sa séance hebdomadaire avec le Chapelain/Psychiatre Volusius, lui vient une idée toute simple pour expier son énorme hubris : aider Sanguinius à rejoindre Terra en détruisant les flottes hérétiques qui se mettront sans nul doute sur la route de l’Ange à la Moumoute.

Après une petite séance de triangulation avec les poteaux dans le strategium de l’Ultima Mundi, les Ultras de l’Empereur décident d’aller au secours de la planète Diavanos, d’où est arrivé un message astropathique implorant de l’assistance pour gérer une invasion de World Eaters mal-lunés. Diavanos est de plus un monde que les Ultramarines ont rattaché à l’Imperium il y a plusieurs décennies, et dont la technique de vitraux teintés a grandement impressionné le Primarque lorsqu’il flânait dans les rues de la capitale Ecstasia à la recherche d’inspiration pour son dernier roman. Pour toutes ces raisons, ainsi que pour celle, plus prosaïque, de se venger des ravages commis par les séides d’Angron et de Lorgar dans leur pré carré, les gars de la XIIIème se ruent au secours de Diavanos, et tombent à bras raccourcis sur leurs frères ennemis alors que ces derniers s’apprêtaient à repartir pour embusquer la flotte des Blood Angels.

La bataille spatiale qui s’en suit, si elle n’est guère équilibrée (les Ultramarines sont deux fois plus nombreux, sérieux, hargneux, farineux et bleus que leurs adversaires), permet à nos héros de relâcher la pression après tous ces mois à écouter les podcasts interminables du triumvirat de l’Imperium Secundus. Alors que les derniers vaisseaux renégats sont méthodiquement désintégrés par la froide fureur ultramarine, le cuirassé Gladiator profite de la confusion pour repartir en direction de Diavanos, et certainement pas pour une visite de politesse. Guilliman comprend que les World Eaters ont un petit creux, et que s’il n’intervient pas rapidement, la planète qu’il est venu sauver va s’en prendre plein la face. Mais arrivera-t-il à temps pour empêcher les fils d’Angron de commettre l’irréparable ?

Début spoiler…Après de multiples péripéties dans les coursives du Gladiator, que les World Eaters ont faites effondrer pour gêner la progression de leurs ennemis, Roboute et ses hommes (en grande partie des Destroyers, wink wink The Lord of Ultramar’) parviennent jusqu’à la salle des torpilles où les hérétiques se sont barricadés. La mêlée désespérée et surtout très sale qui s’ensuit tourne logiquement en faveur des surhommes en bleu, mais les World Eaters sont proches de réaliser leur objectif secret (faire péter une torpille à l’intérieur du vaisseau afin d’emporter Guilliman avec eux). Seule l’habilité du Grand Schtroumpf avec son combi-bolter customisé permet d’éviter la catastrophe, mais la victoire morale revient tout de même aux groupies d’Horus. Il est en effet trop tard pour prévenir le crash du Gladiator à la surface de Diavanos, et l’onde de choc qui s’en suit rase la capitale et dévaste une grande partie de la planète. Bien évidemment, les Ultramarines ont eu le temps de regagner leurs 22 avant que cette tragédie n’arrive, mais Guilliman finit la nouvelle avec le blues. Approprié, vous me direz.Fin spoiler

AVIS :

Vu le passif peu glorieux de David Annandale avec la XIIIème Légion (‘Lord of Ultramar’…), j’ai attaqué cette nouvelle dans un état d’esprit assez peu favorable à cette dernière, et j’ai été surpris de constater que cet ‘Atonement of Fire’ tenait tout à fait la route. Nous sommes en présence d’un court format siglé HH de facture assez classique (un peu de réflexion, beaucoup d’action, et en bonus une belle tranche de Primarque), mais débarrassé de tous les défauts que l’on pouvait trouver dans les autres soumissions de notre homme (personnages stupides/inintéressants, intrigue bancale, rythme chaotique)1. Ça pourrait et devrait être considéré comme le strict minimum, mais nous savons tous que la BL ne croit pas dans des concepts aussi restrictifs que le contrôle qualité. Enfin, pas tout le temps.

Surtout, et c’est assez rare dans une publication de la Black Library (quel que soit la franchise ou l’auteur) pour le souligner, Annandale parvient à ménager un vrai suspens jusqu’au bout de son propos. Guilliman et ses Schtroumpfs destructeurs arriveront-ils à sauver Diavanos des déprédations suicidaires des World Eaters ? Même si la planète a été créée de toute pièce pour l’occasion, l’auteur arrive à nous intéresser à la conclusion de cet accrochage mineur de la fin de l’Hérésie en appuyant de façon intelligente sur les remords éprouvés par Guilliman au sujet de son Imperium Secondus et son besoin de se faire pardonner de ce petit caprice. Annandale nous ressert également la vieille rengaine du « I am never going to financially recover from this », 30K style, déjà bien exploitée par d’autres avant lui, mais qui fait toujours son petit effet quand utilisée à dessein, ce qui est le cas ici. Bref, une vraie bonne surprise pour ma part, et une des meilleures soumissions de David Annandale pour le compte de cette franchise, si vous demandez mon avis.

1 : On pourrait lui reprocher de ne toujours pas maîtriser les bases spatio-temporelles d’une bataille spatiale (exemple gratuit : la course poursuite entre l’Ultimus Mundi et le Gladiator ne semble durer que quelques minutes, alors qu’elle s’engage à proximité du point de Mandeville du système et se termine dans l’atmosphère d’une planète habitable (donc proche de son soleil), ce qui devrait prendre au bas mot quelques jours), mais dans mon infinie générosité, je passe l’éponge là-dessus.

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Purity is a Lie – G. Thorpe [40K] :

INTRIGUE :

Purity is a LieTaddeus le Purificateur, zélote du Ministorum, carafe Brita faite homme, Donald Trump du 41ème millénaire. Arrivé à Precipice en compagnie de sa fidèle Pious Vorne, à la suite de vision envoyée par l’Empereur (et d’une confidence déplacée d’un sous-officier de la Navy), notre Prêtre peine à se faire accepter par la faune bigarrée et profane peuplant la cité, et n’a donc pas réussi à rejoindre une expédition d’exploration de la Blackstone Fortress, en dépit de ses meilleurs efforts et ses plus sincères prières. Sa chance tourne toutefois lorsqu’il reçoit une invitation de la part de Janus Draik, qui a flashé sur son énorme mitre, à le rencontrer au Looter’s Den afin de discuter affaire. Après avoir détendu l’ambiance, qui s’était refroidie comme un Roboute Guilliman faisant de l’apnée dans l’espace à l’arrivée du prélat, le Rogue Trader annonce à son hôte qu’il a besoin d’un coup de main pour tenter une descente jusqu’au Labyrinthe de la Mort (Deathmaze), et que Taddeus est sur sa shortlist. Pourquoi ? Eh bien, parce qu’il a l’air honnête et courageux. That’s it. Comme quoi, on peut être un aventurier sans foi ni loi évoluant dans une cour des miracles traîtresse et meurtrière, et donner sa chance au premier venu, parce qu’on a un bon feeling. Merci qui ? Merci Gav Thorpe.

Après avoir un peu tergiversé, Taddeus accepte, et retrouve son nouveau collègue à l’entrée de la Forteresse, laissant Vorne dans le vaisseau (c’est un raid de 4 personnes, le maglev a une capacité limitée) avec un bol d’eau fraîche, la climatisation et l’autoradio allumée. L’exigeant ecclésiastique n’est guère enchanté de voir que Draik a recruté une Eldar (Amallyn Shadowguide) et un mutant (le Navigateur Espern Locarno) pour compléter son équipe, mais, nécessité faisant loi, à défaut de foi, il accepte tout de même de partir en vadrouille avec ces compagnons particuliers. La suite est, pour autant que je puisse le dire, le compte rendu romancé d’une partie de Blackstone Fortress, interrompue avant la fin par un quelconque événement (peut-être que Thorpe a dû partir plus tôt pour aller faire des courses ou passer au pressing). Ainsi, notre bande se coltine d’abord une escouade de Gardes renégats, puis quelques drones, avant de terminer par un quintette de cultistes Negavolts, et un psyker chaotique pour faire passer le tout. Entre deux coups de massue énergétique et blessures de guerre héroïquement glanée au combat, Taddeus réalise à quel point la coopération avec ses camarades est nécessaire, et perd donc un point en xénophobie (il est sauvé par et sauve la Ranger) et un demi-point en mutophobie (Locarno le prévient de l’arrivée du psyker). Kawaiiiii. On ne saura en revanche pas ce qui attend nos héros dans ce fameux « Labyrinthe de la Mort », que ces derniers n’atteindront même pas avant que Thorpe ne décide qu’il a bien assez bossé comme ça et mette un point final à sa nouvelle. Non. Si.

AVIS :

Gav Thorpe prouve avec ‘Purity is a Lie’ qu’il maîtrise parfaitement l’art complexe et délicat de la courte nouvelle de 40K où rien d’intéressant ne se passe. Un peu comme le haïku suivant : Forty forty kay//Forty forty forty kay//Forty forty kay. Oui, c’est du sarcasme. Malgré toute la sympathie que j’éprouve pour ce collaborateur historique et figure mythique de GW, la plupart des nouvelles qu’il a soumis à la BL ces dernières années se sont avérées très décevantes, et celle-ci ne fait malheureusement pas exception. Ne disposant même pas d’une conclusion digne de ce nom, et développant de façon inimaginative au possible une idée absolument banale du background de Warhammer 40.000 (« il faut savoir mettre de côté ses principes pour atteindre ses objectifs »), le seul mérite de cette soumission est d’intégrer cinq personnages nommés de Blackstone Fortress (même si la plupart font papier peint) dans son casting, dont deux (Vorne et Locarno) dont ce sera la seule apparition dans le recueil Vaults of Obsidian. Ce n’est pas lourd, mais c’est vraiment tout le bien que je peux dire de ce texte, qui aurait mérité d’apparaître sous son titre complet : Purity is a Lie, Story is a Bore, Not Inspired at all, Send Help.

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Sand Lords – P. McLean [40K] :

INTRIGUE :

Sand LordsOù il sera question du Capitaine Amareo Thrax et de sa colonne blindée du 236ème Régiment des Tallarn Desert Raiders, engagés dans une course éperdue vers la sécurité des lignes impériales. Si Thrax et ses hommes (et femmes, pas de sexisme chez les Tallarn) sont si pressés de rentrer au bercail, c’est d’abord qu’ils ne sont plus très nombreux (un Leman Russ et trois Chimères, sur vingt-huit véhicules initialement engagés), ensuite que les réserves d’eau et de carburant commencent à baisser dangereusement, et enfin que quelque chose de gros, menaçant et très énervé les poursuit sans relâche à travers les dunes de Marbas II. Quelque chose contre lequel même le courage et les ressources de ces légendaires guerriers des sables ne peuvent espérer prévaloir. Mais pour mieux comprendre de quoi il en retourne, il nous faut faire un petit crochet vers le passé récent, pendant que nous laissons Thrax porter un toast à l’urine en l’honneur de la Chimère qui vient de perforer son joint de culasse de façon irrémédiable…

Si notre vaillant Capitaine se trouvait dans le désert de cette planète pour commencer, c’est parce qu’il avait reçu la mission de la part d’un Colonel1 de se rendre dans les ruines de la ville d’Iblis Amrargh, prise par les envahisseurs Orks dont la présence a justifié le déploiement des Tallarn sur Marbas II, pour récupérer le khalig (cimeterre) du Général Al-Fallan, héros des Desert Raiders, dérobé après sa mort par le Big Boss Gorebrakah Urlakk. Une telle relique ne pouvant pas rester entre les griffes des Xenos, qui n’en auraient de toute façon aucune utilité si ce n’est pour émincer des Squigs, le haut commandement du 236ème a donc donné à Thrax l’ordre de reprendre le légendaire coupe papier, localisé dans la cathédrale de la ville, investie par la vermine verte. L’officier a également reçu un briefing plus complet de la part de son boss sur les tenants et aboutissants de la mission, mais ne le partagera pas avec de simples lecteurs tels que nous. Ou en tout cas, pas tout de suite.

Si les premiers temps de l’assaut donné par la colonne blindée sur Iblis Amargh se passent sans soucis, l’armement, le blindage et la vitesse des tanks impériaux leur permettant de forcer sans coup férir les barrages mis en place par les fonctionnaires Grots délégués à la surveillance du camp Ork, un tir de plasma bien senti, pulvérisant une Chimère dans le plus grand des calmes, marque le début des ennuis pour Thrax, qui ne s’attendait pas à rencontrer une résistance si forte si tôt dans la mission. Ayant perdu un peu de temps et beaucoup de munitions à canarder les alentours dans le vain espoir d’abattre le faquin plasmique qui lui a fait des misères et vaporisé son vieux copain Al-Nasir, Thrax finit par donner l’ordre de repartir, perdant de plus en plus de châssis et de personnel au fur et à mesure que les Orks réalisent qu’ils sont attaqués, et que l’insaisissable franc-tireur continue à dégommer les SUV de l’Empereur sans se faire voir. Il en faut cependant plus pour décourager nos héros, qui finissent par pénétrer (en char, sinon c’est pas drôle) dans la cathédrale, où les attend le fameux khalig du nom moins célèbre Al-Fallan, ainsi que des hordes de peaux vertes pas vraiment jouasses…

Début spoiler 1…Victimes de mines dissimulées, et embusqués par des centaines d’Orks gardés en réserve par ce ruzé de Gorebrakah, les Tallarn se battent comme des lions fennecs, parvenant à récupérer le précieux cimeterre à l’absence de nez et au manque de barbe du Big Boss, qui daigne enfin se joindre aux réjouissances après que les assaillants soient parvenus à se défaire de ses deux mini-boss (un Kommando mastoc avec lance-plasma, et un Nob en Mega-armure). Et là, surprise : Gorebrakah a cassé sa tirelire (ou la figure de tous ses rivaux pour leur piquer leurs dents) depuis la dernière fois qu’il a croisé les Desert Raiders, et est maintenant plus machine que champignon, sa parenté avec un Dred Eud’la mort lui permettant  de désosser sans mal les malheureux tanks lui tombant sous la pince. Pour Thrax cependant, l’objectif primaire consiste seulement à repartir avec le coupe-chou d’Al-Fallan, ce qu’il a fait sans hésiter, laissant derrière lui la plus grande partie de ses soldats.

De retour dans le désert, nous apprenons/comprenons donc que le traqueur des Tallarn n’est autre que Gorebrakah, dont l’amour-propre et le statut contraignent à récupérer son bien sous peine de se faire défier par l’ensemble de ses Nobs-1, et que c’est bien sur cela que comptait le Colonel qui a monté le raid de Thrax. Ce dernier doit donc trouver un moyen de franchir la ligne d’arrivée (bleue) avec le colis pour permettre aux forces impériales de régler son compte à cet illustre ennemi. Les Tallarn sont en effet sport, et se sont contentés d’installer une batterie de Basilisks à plusieurs heures/jours de distance d’Iblis Amrargh pour faire sa fête au Big Boss plutôt que, je ne sais pas moi, réquisitionner des appareils de la Flotte qui les amenés sur place ? Gorebrakah est également sport, notez, puisqu’il poursuit les voleurs de loot tout seul. A gentleman’s war, really.

Ce fair-play ne fait cependant pas les affaires de Thrax et de ses survivants, qui se font insensiblement rattraper par leur poursuivant, condamnant d’abord les malheureux n’ayant pas trouvé place dans les Chimères, puis ces dernières et leur équipage (malgré une héroïque action d’arrière-garde de la Duf’Adar Al-Maddon), ne laissant plus que le Leman Russ du Capitaine, à court de munitions et à bout de nerfs (un des servants se suicidera d’ailleurs plutôt que de se faire éplucher par le Big Boss), tenter d’arracher la victoire…

Début spoiler 2…Ce qui sera finalement cas (ouf), Thrax parvenant à passer la ligne en un morceau, avant que le bombardement déclenché par ses petits copains ne vienne sonner le glas de Gorebrakah, qui aurait dû investir dans un Gargant plutôt que dans un Deff’Dread. Tiré de l’inconscience dans laquelle le barrage ami l’avait plongé par la seule autre survivante de la mission, la pilote Kalan, rendue borgne et folle par les événements (ce qui ne lui a pas retiré son sens de l’humour), Thrax n’a plus qu’à attendre l’arrivée des secours, en espérant que la perte de sa jambe dans l’accident ne lui soit pas fatale. La routine, quoi…Fin spoiler

1 : Qui ne sera jamais nommé (j’ai vérifié). McLean devait être tombé en rade de nom à consonance arabe (on peut d’ailleurs s’interroger sur « Amareo Thrax », au passage…).

AVIS :

Pour sa première virée avec un régiment nommé de la Garde Impériale, Peter McLean livre une nouvelle aboutie, généreuse en termes de fluff et consistante en termes d’intrigue, grâce à sa progression alternée entre le Paris-Dakkar extrême auxquels se livrent Thrax et ses survivants, et les flashbacks de leur mission suicide dans la cathédrale d’Iblis Amargh. L’auteur a suffisamment de maîtrise pour prendre son lecteur au jeu des devinettes quant à l’identité de la chose qui traque les valeureux guerriers des sables dans leur retraite éperdue, et aux véritables objectifs poursuivis par la colonne blindée Tallarn, ce qui rend l’expérience assez plaisante, même si les deux révélations en question ne s’avéreront pas renversantes. Autre point appréciable, McLean applique à ses nouveaux souffre-douleur sujets l’approche sans concession qu’il l’avait vu massacrer les uns après les autres ses personnages du 45ème Reslian (‘No Hero’, ‘Baphomet by Night’, ‘Predation of the Eagle’, ‘Blood Sacrifice’), laissant les deux seuls survivants du carnage perpétré par le ruzé mais brutal (et surtout blindé) Gorebrakah profiter du calme après la tempête dans un piteux état, tant physique que mental. À la guerre comme à la guerre, après tout, et McLean fait partie des contributeurs de la BL qui n’a pas peur d’être graphique dans son approche, ce qui est plutôt un trait positif dans ce genre de littérature, à mon humble avis.

Les seuls reproches que j’adresserai à cette soumission seraient relatifs au choix de l’auteur de ne pas expliquer pourquoi le sous-sol de la cathédrale semble regorger d’armes de pointe d’une part, et de faire se terminer son épreuve d’enduro sous un déluge d’obus plutôt que sous les lasers d’un escadron de Vendettas, ce qui aurait certainement permis aux Tallarn de sauver leur chèche, d’autre part. On me dira que leur mort était de toute façon nécessaire pour le déroulement de l’histoire, et on aura raison, mais je trouve tout de même que le plan du Colonel X – et par extension, celui de McLean – n’est pas au dessus de tout reproche. Il y avait certainement moyen de faire mieux, sans épargner pour autant aux soldats de Thrax leur glorieux sacrifice. Après tout, qui peut dire à quelle vitesse un Ork en Giga-armure peut courir, quand il est recouvert du sang de ses ennemis, et qu’on lui a volé son présssssieux ?

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A Rose Watered with Blood – A. Dembski-Bowden [HH] :

INTRIGUE :

A Rose Watered with BloodLes choses ne s’améliorent pas vraiment sur le Conqueror, qui se traîne péniblement à travers la galaxie pour livrer l’Angron démoniaque commandé par Horus jusqu’à son ancienne adresse sur Terra, du temps où il habitait encore chez son Pépé. La vie à bord est devenue dangereusement morne (comprendre que tout le monde s’est habitué à la possibilité de se faire tuer d’une manière horrible et roll with it), et bien que les problèmes d’intendance dont le vaisseau était affligé – depuis le miracle du changement de l’eau en sang, jusqu’à l’infestation de puces de Khorne – ait été en partie résolus par un arrêt au stand en orbite de la planète Heshimar, le Conqueror n’en finit plus de faire des blagues potaches et souvent mortelles à son équipage. Dans le cas de Lotara Sarrin, capitaine du Gloriana polisson et figure respectée au sein de la Légion, cela a consisté à recevoir en pleine nuit la visite galante de l’officier Ivar Tobin… alors que ce dernier avait été tué par Khârn dans un accès de fureur il y a plusieurs mois. Quand l’esprit de la machine se comporte comme un chat rapportant à son maître le cadavre de sa dernière proie, il est permis de s’inquiéter de sa survie.

Cette ambiance des plus lourdes a assez logiquement conduit certains passagers à caresser des projets d’évasion du vaisseau maudit, et Lotara est introduite dans le cercle des mutins par le Sergent Skane, un Destroyer ravagé de corps et d’esprit, après qu’il ait machinalement massacré l’escorte du capitaine afin de préserver le secret des échanges (les World Eaters ne croient pas vraiment aux NDA). Après avoir hésité, Lotara accepte de participer aux réunions des déserteurs en puissance, et pousse même l’amabilité jusqu’à prendre en charge les opérations d’évacuation, qui ne pourront se produire qu’une fois le Conqueror de retour dans le Materium. La plus grande crainte de ses conjurés, dont fait partie le Capitaine Maruuk, est que l’inflexible Khârn ait vent de leur projet de mise au vert, mais Lotara promet de gérer ce petit problème le cas échéant, et comme le mâle alpha qu’il est, Maruuk est bien content de laisser la charge mentale associée à cette tâche complexe à une femme. Après tout, il est trop occupé à faire des duels à mort dans les arènes du Conqueror pour traiter ce genre de détail trivial.

Après un long et pénible voyage (Angron s’est piqué de devenir chanteur d’opéra et danseur de claquettes pendant la traversée, ce qui est venu perturber le sommeil du reste des passagers), le vaisseau émerge enfin du Warp, et Lotara envoie les ordres codés mettant en branle l’opération SOS (Save Our Skulls) parmi les conjurés. Lorsque la frégate Bestiarius approche du vaisseau amiral pour récupérer des vivres, cinq navettes sont envoyées pour la ravitailler : rien de plus normal de prime abord, mais ces navettes sont en fait le ticket de sortie des mutins hors des entrailles viciées du Conqueror. En bonne capitaine, Lotara attend le dernier moment pour s’exfiltrer à son tour, et rejoint discrètement la cinquième navette en compagnie de Skane et Maruuk…

Début spoiler…C’est le moment que choisit Khârn pour débarquer en mugissant comme un veau, mis au courant par un traître des velléités d’évasion de Lotara and friends. Si Maruuk décide bravement de sauter dans la navette sans attendre personne et de mettre les gaz pour rejoindre le Bestiarius, le noble mais moche Skane reste en arrière garde pour « ralentir » l’Ecuyer d’Angron et faire gagner du temps à ses camarades. Les guillemets sont ici de rigueur, car le Sergent irradié ne tient pas trois secondes avant que Khârn ne lui fasse avaler son dentier en duracier. Un peu lente à la détente, Lotara n’a pas eu le temps de suivre ce mufle de Maruuk avant qu’il passe la seconde, la laissant dans une position très délicate…

Début spoiler 2…Si elle avait vraiment voulu quitter le Conqueror. Car, comme le pauvre Skane le comprend avant qu’elle ne l’envoie sauter sur les genoux de Khorne d’un tir de pistolet laser bien placé, Lotara, à l’instar de Khârn, s’est résignée à son sort et n’avait aucune intention de faire faux bond à Angron. Et on traite les World Eaters de renégats ? Laissez-moi rire. Si elle a accepté de marcher dans la combine des mutins (outre le fait que Skane l’aurait certainement tuée sur place si elle lui avait mis un vent lorsqu’il est venu lui demander son aide), c’était pour débarrasser le Conqueror de ses mauvais éléments et séparer le bon grain ( ?) de l’ivraie. De retour à son poste de commandement, la Rose baignée de sang (le surnom que lui avait donné un Commémorateur poète un peu fleur bleue – et mort depuis) prend grand plaisir à vaporiser les navettes des déserteurs avant qu’elles n’aient pu rejoindre le Bestiairius, et en particulier celle de Maruuk. Il ne l’avait pas volé, reconnaissons-le.Fin spoiler

AVIS :

Aaron Dembski-Bowden déroule une nouvelle histoire très plaisante à lire (ce sens de la formule, tout de même…) mettant en scène deux de ses personnages les plus attachants (Lotara Sarrin et le Conqueror), avec un petit caméo de Khârn pour ne rien gâcher en sus. Même si l’arc World Eaters de cet auteur n’avance pas beaucoup au cours de cette nouvelle, le suspens que Dembski-Bowden parvint à instiller dans son propos, couplé avec son génie de la caractérisation – c’est bien simple, quand ADB tient la plume, tous les personnages nommés se transforment en protagonistes1 – suffisent à faire de cet ‘A Rose Watered with Blood’ une soumission de qualité au corpus hérétique.

1 : Sauf Maruuk, qui reste détestable.

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Voilà qui termine la revue de cette fournée de nouvelles de l’an de grâce 2018, et même si la qualité est encore une fois variable, je peux écrire avec sincérité que ce millésime se place parmi les meilleurs que j’ai pu lire (‘Fire and Thunder’, qui n’a pas encore été réédité au moment où cette chronique est écrite, méritant particulièrement le détour). Je me dois de souligner également que le choix de la BL de varier les plaisirs en diversifiant les franchises représentées dans ce calendrier de l’avent est très appréciable, et j’espère que cette idée simple mais de bon goût sera reprise dans les futures itérations du concept. Réponse dans quelques mois !

HEIRS OF THE EMPEROR [HH]

Bienvenue dans la revue de Heirs of the Emperor, anthologie finale des courts formats dédiés aux Primarques publiés par la Black Library entre 2018 et 2021. Nous sommes en effet en présence de la compilation ultime de toutes les nouvelles rattachées à cette sous-sous-franchise à très haute teneur en personnages marquants du 30ème millénaire, soit 26 histoires et près de 450 pages consacrées à la fratrie impériale. Il va de soi que si vous cherchiez à en savoir plus sur ces individus légendaires, Heirs of the Emperor est le livre qu’il vous faut, en attendant que la Black Library se lance (peut-être un jour) dans la réédition des romans Primarques sous forme de bundles. Avant d’aller plus loin, ayons une pensée pour les acquéreurs des deux anthologies Loyal Sons et Traitorous Scions, qui pensaient sans doute faire une bonne affaire avec ces recueils thématiques (un consacré aux Primarques loyalistes et l’autre aux renégats, comme leur nom l’indique), vendus 15€ l’unité par la BL à l’époque reculée de… 2021. Quand on vous disait qu’il était rentable de ne pas choisir de camp1

1 : Pour être tout à fait exact, il y a trois nouvelles de ces recueils qu’on ne retrouve pas dans Heirs of the Emperor: ‘Child of Chaos’ et ‘Champion of Oaths’ (pour la troisième, voir ci-dessous). Comme ni l’une ni l’autre ne sont centrées sur un Primarque, cette absence est somme toute logique (mais leur inclusion dans Loyal Sons et Traitorous Scions fait débat, par contre).

Heirs of the Emperor

Il ne surprendra personne de constater que la majeure partie des nouvelles présentes au sommaire de cette brique que Rogal Dorn aurait intégré sans sourciller dans ses fortifications de Terra provienne des trois recueils Sons of the Emperor, Scions of the Emperor et Blood of the Emperor (encore une fois, le titre donnait un indice). Cinq histoires viennent compléter la liste, toutes précédemment publiées mais pas forcément incluses dans une anthologie avant cette réédition: ‘A Lesson in Iron‘, ‘The Atonement of Fire‘, ‘Lantern’s Light‘, ‘Embers of Extinction‘ et ‘Grandfather’s Gift‘. Cela est amplement suffisant pour couvrir les 18 bad boys de Pépé, même si à ce petit jeu, certains s’en sortent mieux que d’autres (il y a toujours eu des favoris dans les familles nombreuses). Ainsi, c’est Mortarion qui remporte la palme avec quatre apparitions, devant Horus et Ferrus Manus (3), et loin devant Lion El’Jonson, Leman Russ et Jaghatai Khan, qui doivent se contenter d’une pige chacun. Ils peuvent toutefois s’estimer chanceux car le pauvre Angron a purement et simplement été coupé au montage, la nouvelle ‘Prince of Blood‘ dans laquelle il apparaissait dans le recueil Sons of the Emperor ne figurant pas au sommaire du présent ouvrage. Oubli des éditeurs de Nottingham (ce serait fâcheux) ou volonté délibérée de nuire à l’Ange Rouge (ce serait dangereux)? On ne le saura sans doute jamais…

Malgré ces choix éditoriaux étranges et contestables, il n’en demeure pas moins que Heirs of the Emperor est une superbe affaire pour tous les passionnés de la Grande Croisade et de l’Hérésie (mais pas que, certaines nouvelles prenant place bien après ces événements majeurs), en tous cas au niveau quantité/prix. Si vous avez besoin de davantage d’informations pour consentir à payer les 15.99€ demandés par la BL pour ce pavé, c’est votre jour de chance cependant. Laissons les commémorateurs tresser des louanges à tout va, nous sommes ici pour dire les choses telles qu’elles sont. Une occupation dangereuse, mais il faut bien que quelqu’un s’en charge…

Heirs of the Emperor

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The Passing of Angels – J. French :

INTRIGUE:

The Passing of ANgelsLa planète Harpic, intégrée à l’Imperium pendant la Grande Croisade, a décidé de faire sécession de l’empire de Pépé. Ce crime de lèse majesté ne pouvant évidemment pas rester impuni, l’Armée Impériale est envoyée sur place pour calmer les velléités indépendantistes du Gouverneur Planétaire… et est accueillie à coup de bombes nucléaires, résultant en des pertes colossales parmi les assaillants mais également la population locale, sacrifiée sur l’autel du « vous ne m’aurez jamaaaaaaaaaaais ». L’Empereur ayant clairement établi que l’atome, c’était le mâââl dans une célèbre interview donnée au Journal de Mickey en M30, la machine de guerre impériale passe en mode hardcore et envoie Sanguinius et ses Blood Angels « pacifier » pour de bon la planète mutine, renommée H_____ en signe de la gravité de ses crimes.

Nous suivons donc le Primarque ailé et les soixante Space Marines de l’Ost de la Destruction, armés de l’arsenal le plus sale à disposition de l’Astartes (armes à phospex, grenades à radiations, cocktails cacatov et tutti quanti), alors qu’ils font s’abattre le jugement de l’Empereur sur les dissidents de H_____. Sanguinius a donné des ordres stricts : il ne doit y avoir aucun survivant, et, conscient du lourd fardeau psychologique qu’un tel massacre pourrait avoir sur ses fragiles de fistons, il leur a ordonné de revêtir le masque d’argent des Destructeurs, permettant à son porteur de dissocier son identité des actes horribles commis en tant que membre de l’Ost1. Seul le Primarque se rend au combat tête nue, car sa nature surhumaine lui permet d’endosser sans faiblir la responsabilité de ce massacre (raison officielle) et que mettre un casque lui aplatit les cheveux de manière disgracieuse (raison officieuse). Bien évidemment, les soldats de H_____ ne font pas le poids face à la furie sanguin(ius)aire des Blood Angels, et leur insignifiante petite planète ne tarde pas à repasser du bon côté de l’histoire.

La nouvelle se termine par une réunion informelle entre Horus et Sanguinius sur le Vengeful Spirit, pendant laquelle les deux frangins se livrent à leur activité préférée : battre son frère à un jeu de plateau pour Horus, et faire de lourds sous-entendus sur l’avenir pour Sanguinius. C’était une époque plus simple…

1 : C’est dans l’esprit très semblable aux masques de guerre des Guerriers Aspects Eldars… sauf qu’ici, on ne nous dit pas s’il y a une véritable technologie permettant de brainwasher le porteur, ou bien s’il devra faire la dissociation tout seul comme un grand.

AVIS:

Je suis un peu déçu de l’approche choisie par French pour cette nouvelle estampillée Primarques, car elle ne nous apprend au final pas grand-chose sur le personnage que l’auteur a choisi de traiter (Sanguinius)1, et aurait donc pu être cataloguée comme nouvelle « classique » de l’Hérésie à la place. Certes, on voit le Primarque mener ses fils à la bataille, mais la noblesse tragique dont il fait preuve au cours de la purge de H_____ n’est pas une caractéristique inconnue de Sanguinius : quiconque est un tant soit peu familier du personnage sait qu’il s’agit au contraire de la base de son identité. Partant, le propos déroulé par French dans ‘The Passing of Angels’ n’apporte pas de nouvel éclairage sur l’Archange de Baal, ce qui est à mes yeux la raison d’être d’un récit Primarques. Le même argument peut être avancé pour la scène de dialogue entre Sanguinius et Horus, qui relève à mon sens plus du clin d’œil à des éléments de fluff déjà établis au cours de l’Hérésie que d’une quelconque avancée de l’arc des Pépé Bros.

Je suis également resté sur ma faim avec l’Ost de la Destruction, convoqué par French pour montrer que même la Légion de Space Marines la plus angélique ne rechignait pas à faire le sale boulot de temps à autre, mais avait développé une technique bien à elle pour ne pas laisser ces actes barbares affecter durablement ses membres. L’idée est intéressante, mais sa mise en pratique tellement lacunaire que l’on ne sait pas comment le processus en question fonctionne. Les masques mortuaires des Destructeurs ont-ils seulement une fonction symbolique, ou sont-ils capables d’effacer les souvenirs de ceux qui les portent ? Bref, ‘The Passing of Angels’ passe à mes yeux à côté de son sujet, et si French est suffisamment compétent en tant qu’auteur pour que la lecture de cette nouvelle ne soit en rien désagréable, j’attendais plus et mieux de sa part ici.

1 : La plus grande révélation de ‘The Passing of Angels’ a été pour ma part d’apprendre que Sangui avait une vision laser, qui pouvait détecter une rupture d’alignement de l’ordre d’un micron. Il aurait dû être coiffeur au lieu de chef de guerre avec ce don, moi je dis.

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The Abyssal Edge – A. Dembski-Bowden :

INTRIGUE:

Gravement blessé dans le crash de son appareil au cours d’une glorieuse victoire impériale, le chef d’escadron Orthos Ulatal a été réaffecté au service des archives de la Grande Croisade, son corps étant trop endommagé pour lui permettre de s’envoyer en l’air comme autrefois. La réception par notre héros cabossé et amer d’un rapport d’un genre particulier va l’arracher à la monotonie pré-dépressive qui constituait son nouvel ordinaire : un certain Khayon des Khenetai, légionnaire Thousand Sons, a en effet proféré de graves accusations à l’encontre des Night Lords de Konrad Curze, alors que les deux Légions « coopéraient » au cours de la campagne de pacification de Zoah, plus connue sous le nom de « Dévastation de Zoah ». Après avoir cherché conseil – un peu – et échangé quelques remarques acerbes – surtout – avec son ancienne camarade et désormais remplaçante, Perdita, Lulu décide qu’il est de son devoir de faire toute la lumière sur cette bisbille inédite entre deux Légiones Astartes. La révélation de conflits larvés entre les champions de l’humanité risquerait en effet d’avoir un effet désastreux sur le moral des troupes, gavées de propagande impériale où tout le monde il est bô, tout le monde il est jenti (sauf le fourbe et puant ENNEMI, bien sûr).

Après un voyage mouvementé et donc vomitif à travers l’espace impérial, Ulatal parvient jusqu’au Nightfall, vaisseau amiral des Night Lords, et demande à être reçu par un des archivistes (et pas Archivistes) de la Légion, afin d’entendre la version des natifs de Nostramo sur les événements de Zoah. À sa grande, et pas franchement heureuse, surprise, c’est le Premier Capitaine de la VIIIème Légion, ce farceur de Sevatar, qui vient finalement toquer à sa porte, pour lui proposer un deal aux conséquences potentiellement funestes : enterrer le rapport de ce couillon de Khayon comme n’importe quel fonctionnaire sensé l’aurait fait depuis belle lurette, ou apprendre ce qu’il s’est réellement passé entre Night Lords et Thousand Sons sur Zoah…

Début spoiler…Comme la nouvelle aurait été beaucoup moins intéressante si Ulatal avait choisi la première option, nous embrayons donc sur un flash back des familles familial, durant lequel nous suivons Sevatar et son bodycam assister aux délibérations houleuses du camp impérial à propos de la Tour de la Sérénité, monument servant de bibliothèque et d’archives à la civilisation de Zoah, prestement incorporée à l’Imperium après un petit massacre pédagogique dont Curze à le secret. Ce même Curze serait d’avis de réduire la tour en poussière, comme le demande le manuel du parfait petit légionnaire, afin que les dangereuses connaissances qu’elle renferme ne viennent pas risquer de contredire la Vérité Impériale. Magnus (également présent) est bien sûr opposé à ce projet d’autodafé, et implore son frère de lui laisser le temps de contacter l’Empereur afin que ce dernier puisse trancher la question. Mais Konrad reste intraitable, et finit par ordonner à Sevatar de commencer le bombardement de la tour, malgré le fait que les Thousand Sons soient positionnés autour de cette dernière et la protègent grâce à leurs pouvoirs psychiques. Après avoir fait son Captain America pendant à peu près 12 secondes, Maggie finit par lâcher l’affaire, mais promet à Curze qu’il en parlera au manager (i. e. Pépé). Bilan des courses : la Tour de la Sérénité finit en gravats, son incommensurable et incommensuré savoir avec elle.

Ayant été témoin de ce clash frontal entre deux des fils de l’Empereur, Ulatal n’est guère surpris lorsque Sevatar prend son élan pour lui refaire le portrait à coup de glaive tronçonneur, cette information hautement sensible ne pouvant être ébruitée en dehors de la grande famille des Astartes. Notre héros est toutefois sauvé, non pas par le gong, mais par le Shang (un autre Capitaine des Night Lords), qui annonce à Sevatar que sa future victime a été nommée officier sur un des vaisseaux de la Légion, le Voidmaw. La nouvelle se termine sur le choix laissé à Ulatal : accepter son nouveau poste ou emporter son secret dans la tombe…Fin spoiler

AVIS:

Aaron Dembski-Bowden opère une fois encore sa magie narrative avec ce ‘The Abyssal Edge’, qui replonge le lecteur dans les savoureux paradoxes des Night Lords pré-Hérésie (un sujet de prédilection de cet auteur). On y retrouve bien sûr l’incontournable Sevatar, égal à lui-même en matière de killer one-liners, je m’en foutisme insolent1 et droiture morale bien cachée, mais le clou du spectacle est évidemment la joute verbale entre Konrad Curze et Magnus le Rouge au sujet de la Tour de la Sérénité. Dembski-Bowden prend soin de dépeindre les deux protagonistes de façon équilibrée, chacun ayant ses qualités (l’esprit critique de Magnus, qui lui donne la perspective nécessaire pour aller à l’encontre d’un édit impérial qu’il trouve stupide ; la « magnanimité » de Curze, qui a déterminé que l’utilisation de tactiques de terreur était la manière la plus efficace et la moins meurtrière pour conquérir Zoah) et ses défauts (l’indignation sélective de Magnus, qui a laissé les Night Lords mener la campagne comme ils le souhaitaient et ne s’oppose à eux que lorsqu’ils décident de raser la Tour de la Sérénité ; et ai-je vraiment besoin de souligner les problèmes de Curze2 ?), ce qui laisse au lecteur le soin de déterminer pour qui il prend fait et cause à la fin de la nouvelle.

Reste la partie consacrée à Ulatal, qui me paraît être trop développée pour un personnage à usage unique, et qui se conclut avec une indication assez nette que la gueule cassée se trouve un nouveau job parmi les auxiliaires humains de la Légion. Comme ADB a mis sous les feux des projecteurs les pilotes des escadrons de chasseurs de la flotte des Night Lords3 dans d’autres textes, je m’attendais à ce qu’Ulatal reparaisse à un moment ou à un autre dans le corpus nostramien de cet auteur, mais mes recherches n’ont rien donné à ce jour. Cela n’empêche pas de savourer cette nouvelle à son plein potentiel, mais pose la question de ce que voulait faire l’auteur avec ce personnage. À suivre ?

1 : La scène où Curze et Magnus lui disent en même temps de la fermer vaut son pesant de viande de grox.
2 : Le fait que l’on en apprenne plus sur Magnus dans ‘The Abyssal Edge’ que sur Konrad Curze me mène à considérer que cette nouvelle devrait être liée au premier plutôt qu’au second dans une optique ‘Primarques’.
3 : Particulièrement la pilote Taye Karenna, commandante de l’escadron des Voilés et chauffeur privé de Sevatar dans ‘Prince of Crows’.

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Mercy of the Dragon – N. Kyme :

INTRIGUE:

Mercy of the DragonLes réunions de famille ne sont pas toujours une partie de plaisir, c’est bien connu. Toutefois, les retrouvailles entre Vulkan et l’Empereur sur Nocturne se passèrent de manière que l’on peut qualifier de cordiale, surtout si on les compare à d’autres épisodes d’affiliés au premier regard tournées plus tard au cours de la Grande Croisade. Bien sûr, le fils adoptif de N’bel le forgeron a une âme paisible sous ses abords farouches, et il faudra une longue discussion (et une salamandre encore plus longue, mais c’est une autre histoire…) pour le convaincre de laisser tomber sa planète pourrie et sa salopette rapiécée pour prendre sa place aux côtés de son créateur dans la conquête de la galaxie. C’était à l’époque où Pépé prenait encore le temps de discuter avec ses fistons avant de les bombarder à la tête de leur Légion1… Et croyez-le ou non, mais un des critères majeurs ayant guidé la décision du colosse aux yeux de braise fut de savoir si ses nouveaux camarades de jeu allaient être gentils avec lui pouvaient apprendre quelque chose de sa part, lui qui se voyait davantage chaudronnier que chef de guerre. « Mais bien sûr gros bêta », lui répondit son papounet. « Attends un peu de rencontrer ce joyeux drille de Ferrus… ».

Flash forward quelques temps plus tard, au cours de la campagne de mise en conformité de Ranknar. Les indigènes ne se sont montrés sensibles ni aux talents oratoires, ni aux sculptures en ballons de l’Empereur (on ne peut pas être bon partout hein), et la guerre fait rage à la surface de la planète. Les défenseurs vont de défaites en défaites, leurs forteresses imprenables se faisant mettre minables en un temps ridicule et un déluge de flammes par un guerrier terrifiant, surnommé le Dragon par ses adversaires malheureux. Nous suivons le soldat Sarda et le prêtre Veddus alors qu’ils se rendent jusqu’à l’ultime bastion de la résistance : la Citadelle Rouge de Romistad. Le dernier carré des ranknariens dans la cité de Venikov s’est en effet terminé de manière abrupte et infernale, après que le Dragon ait décidé d’y allumer le feu.

À Romistad, la situation des défenseurs semble un chouilla moins désespérée, car ils ont à leur disposition non pas une, mais deux armes top secrètes moumoutes. Ceci dit, les impériaux ont de leur côté non pas deux, mais trois membres des Ramones (nouvelle période) : Peypey, Féroce Manosque, et bien sûr le Dragon, qui est bien sûr le nom de code trop trop secret de Vulkan. Bref, les carottes ne sont pas cuites, elles sont sur le point d’être carbonisées pour les irréductibles gaulois.

La stratégie de l’Empereur, qui consiste à lancer un Vulkan fou de rage (sans qu’on sache trop bien pourquoi d’ailleurs) sur l’ennemi en mangeant des chips avec Ferrus Manus à bonne distance des combats, rencontre toutefois ses limites lorsque les défenseurs abattent leur premier joker : un trio de bogatyrs, c’est-à-dire des golems de la taille d’un Titan, menant une sortie désespérée sur les lignes impériales. Ne pouvant pas laisser Vuvu se faire exploser sans intervenir, Pépé intervient gracieusement pour rétablir le déséquilibre en faveur de ses troupes, ce qui permet à l’irrascible Hulk, mit encore plus en rogne par la découverte de la source d’énergie des bogatyrs (des enfants sous hémodialyse) de charger seul la porte de la Citadelle Rouge, afin d’apprendre à ses occupants de quel boa il se chauffe…. Et c’est là qu’arrive la boulette.

Malgré ses puissants pouvoirs de guidage de missiles, l’Empereur n’est en effet pas foutu d’empêcher le dernier tir d’une salve tardive d’exploser pile sur la position de Vulkan, alors qu’il attendait que la gardienne vienne lui ouvrir. Pour sa défense, il y avait péril en demeure pour les impériaux, l’ultime botte secrète des défenseurs étant de déclencher une bombe virale, ce qui n’aurait pas été fair play. Fort heureusement, ‘tis but a scratch pour Papamanders, qui étrenne certainement ainsi sa perpétualité (reste à voir comment il a regénéré aussi vite ceci dit), et convainc les Ranknariens de déposer les armes après que ces derniers aient constaté que le féroce Dragon a fait obstacle de son corps pour protéger un frêle enfançon qui jouait à la marelle sur le champ de bataille. Le pouvoir de la gentillesse ! Bon, on ne dira rien sur les centaines de milliers de morts avant ça parce que ça serait un peu mesquin…

1 : D’après la chronologie donnée par Laurie Goulding (et donc aussi officielle que possible), Vulkan a été le cinquième Primarque retrouvé. L’Empereur a commencé à s’en balec au douzième round (Mortarion).

AVIS:

Nick Kyme n’a pas écrit le roman Primarques de sa Légion de cœur (l’honneur en est revenu à David Annandale), mais il s’est tout de même payé le luxe de raconter en quelques pages comment la rencontre entre le père et le fils s’est déroulée… et je reste un peu dubitatif sur la valeur de cette offrande. Le problème tient en deux mots : character development. Mettre en scène des personnages aussi iconiques que l’Empereur et ses Primarques de fils nécessite en effet de connaître le riche background de ces figures majeures, mais également de les faire agir en gardant en tête leur stature d’êtres sur(sur)humains. Et si j’aborde ce sujet, c’est bien entendu que Nick Kyme s’est planté sur les deux tableaux. On a ainsi un Empereur qui minaude en faisant briller ses gantelets au soleil et balance des répliques dignes du Thesaurus, mais également un Vulkan utilisé à total contre-emploi avec son fluff établi (le Primarque qui se soucie des simples humains), puisqu’il passe la majorité de la campagne de Raknar à se comporter comme un proto-Angron, massacrant l’ennemi sans lui montrer aucune pitié1, et sans que Kyme ne justifie d’aucune façon cette soudaine agressivité. Que Vulkan ait pété une durite après avoir vu comment ses adversaires faisaient avancer leurs golems de combat, ok, mais avant cela ? Ce n’est pas comme si le même Vulkan avait failli refusé la proposition de l’Empereur de rejoindre la Grande Croisade parce qu’il ne se sentait pas l’âme d’un guerrier littéralement deux paragraphes avant, hein.

On peut toutefois reconnaître à Kyme les efforts sincères qu’il a fait pour donner une culture un peu fouillée à Raknar et ses habitants/fidèles (car oui, c’est à la fois une planète et un dieu), ce qu’il ne s’est pas toujours motivé à faire dans sa production pour la Black Library. Ce n’est toutefois pas suffisant pour équilibrer l’ardoise, et ‘Mercy of the Dragon’ reste à mes yeux globalement raté.

1 : En témoigne le dialogue entre Sarda et Veddus au début de la nouvelle, qui permet d’établir que plus de cent mille hommes ont péri dans la défense de Venikov (sans compter les civils), avec Vulkan en allumeur en chef.

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Shadow of the Past – G. Thorpe :

INTRIGUE:

Pendant que la galaxie part en sucette énergétique, sur Sicarus les grands travaux lancés par Lorgar afin de templaformer la planète avancent gentiment. Sous le patronage avisé et le commandement sévère mais brusque de l’Apôtre Noir/chef de chantier Kalta-Ar, des milliers d’esclaves suent sang et os (on est dans l’Œil de la Terreur, tout est possible) pour bâtir la Beneficta Diabola, basilique impie qui comportera deux piscines, un centre commercial et un boulodrome olympique. Soucieux du respect le plus strict des meilleurs standards de santé et sécurité, Kalta-Ar a pris soin de protéger le chantier d’incursions démoniaques, fréquentes en ces latitudes, par des pentacles et sceaux de protection du tout dernier cri1. Aussi est il fort mécontent d’apprendre de la part de ses acolytes qu’un nombre croissant de légionnaires disparaissent sans laisser de trace, au lieu de monter la garde en chantant des cantiques impies comme ils étaient sensés le faire.

Accompagné de son bras droit Arkula le Coryphaus et du Sergent Isaikash, K-A se rend sur les lieux de la dernière disparition, qui devient vite l’avant-dernière car un autre Word Bearer fait soudainement une mauvaise rencontre sur le chemin de ronde, et rend l’âme après cinq secondes de hurlements stridents sur le WhatsApp de groupe. Malaisant. Si quelques esclaves ont été témoins des derniers instants de frère Barbaque, les subtiles techniques d’interrogatoire de nos héros ne leur permettent pas d’apprendre grand-chose sur la nature du prédateur qui s’amuse à les faire tourner bourrique. Les mortels ont en effet seulement vus une ombre écarteler le malheureux Space Marine, ce qui n’est pas lourd pour faire avancer une enquête. Jugeant probable que ces déboires sont de nature démoniaque, et suspectant les serfs d’avoir réussi à appâter un gros Nurgling dans le Materium pour se venger des mauvais traitements infligés par leurs geôliers, Kalta-Ar est sur le point de diligenter une inspection surprise de ses propres opérations (aux grands porteurs du mot, les grands remèdes) lorsqu’une présence indistincte mais pas franchement amicale se matérialise soudain à proximité.

Les rapports alarmistes et disparitions brutales commençant à se multiplier, nos trois affreux décident finalement de prudemment de battre en retraite en direction du portail Warp reliant la Beneficta Diabola au QG de Lorgar, afin de respectueusement demander au boss de venir gérer un impondérable que ses incapables de larbins sont bien en peine de pondérer de leur côté. Cette retraite stratégique, qui se transforme sous peu en débâcle effrénée vers la chambre de papa, voit un nombre non négligeable de Word Bearers aux noms plus exotiques les uns que les autres2 se faire oblitérer par le terrible blurry man qui les poursuit, mais également ce fieffé coquin de Marduk, fier comme Ar-Thaban dans son armure Terminator, faire son apparition dans l’histoire. Fidèle à lui-même, il se montre odieux envers Kalta-Ar et ses survivants, et d’une piètre aide lorsque the thing se remet à faire des siennes. Pourquoi se donner du mal quand on a une armure en scenarium, pas vrai ?

Heureusement pour nos héros, Lorgar avait les oreilles qui traînait et, bien qu’il tique un peu sur le vocabulaire peu flatteur utilisé par ses fils pour parler de lui, l’adoré doré fait son apparition pour se confronter au démon qui tourmente sa marmaille…

Début spoiler…Sauf qu’il ne s’agit pas d’un démon, mais de ce lascar de Corax, qui a gagné quelques pouvoirs funky et emo en diable (comme se changer en brume ou en nuée de corbeaux, ou se faire pousser des bras et des lames surnuméraires) à trop traîner dans le Warp, mais est resté fidèle à sa nature profonde : se venger des méchants très méchants. On se souvient que les deux Primarques se sont déjà frittés sur Isstvan au début de l’Hérésie, et que sans l’intervention salutaire de Konrad Curze, Lolo aurait avalé son crozius. La revanche qui prend place sur Sicarus, alors que Lorgar a été élevé au rang de Prince Démon et que Corax se bat seul sur une planète baignée par le Warp… va rigoureusement dans le même sens, ce nullard d’Aurelian se faisant perforer la glotte par les griffes énergétiques de son frangin, et ne devant son salut qu’à l’intervention peu sportive de ses Word Bearers pour occuper le Seigneur Corbaffe le temps que son adversaire malheureux soit évacué à travers son propre portail. La lose totale.

Coincé sur Sicarus à cause de sa nature à demi-démoniaque, Corax jure à son frère qu’il y aura une belle et s’en va fracasser sa basilique pour se passer les nerfs. De son côté, Lorgar décide d’aller bouder dans sa chambre pour marquer sa désapprobation, et la légende raconte qu’il n’en est toujours pas sorti à ce jour…Fin spoiler

1 : …des victimes sacrificielles utilisées pour les tracer.
2 : Hesta-Pek, Takla-Gad, Apall-Af, Ghoa-Lok, Ukna-Tav…

AVIS:

Gav Thorpe se paie le luxe de conclure la saga hérétique (et la saga tout court pour Corax) de deux Primarques à travers ce sympathique ‘Shadow of the Past’, ce qui est un ratio fluffique tout bonnement exceptionnel pour une simple nouvelle. Si les prémisses de cette histoire ne sont pas très intéressantes, et qu’un lecteur un peu au fait du passif de cet auteur pendant l’Hérésie d’Horus aura tôt fait d’identifier le mystérieux persécuteur de cette cruche de Kalta-Ar, je trouve la deuxième partie du récit nettement supérieure, notamment grâce à l’idée de faire de Corax une sorte de démon non chaotique1, ce qui permet de justifier à la fois comment le Primarque a pu survivre à son départ dans le Warp, et à quoi il occupe ses journées. En plus de ça, un petit duel entre deux frangins légendaires, ça ne se refuse pas (surtout quand c’est la tête à claque qui perd). Il y a même le Marduk d’Anthony Reynolds qui vient faire coucou, ce qui est sympa de la part de Thorpe, et fera sans doute plaisir aux fans du personnage. Bref, un final vraiment sympathique qui fait plus que rattraper un début assez meh. Si Gav Thorpe pouvait toujours s’en tenir à ce standard, je serais un lecteur comblé.

1 : Ou carrément affilié à Malal/Malice, ce qui serait encore plus cool, et une hypothèse pas si farfelue que ça pour une soumission d’un auteur aussi au fait du fluff que Thorpe. Après tout, les motivations et le code couleur de Corax correspondent tout à fait à ceux du dieu banni…

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The Emperor’s Architect – G. Haley :

INTRIGUE:

Olivier et Marissa LeBon, associés à la ville comme à la scène, arrivent sur Olympia pour tenter d’exercer leur noble mais difficile profession au mieux de leur capacité. Le couple est en effet spécialisé dans l’écriture de biographie de Primarques, et malgré leur patronage par Malcador en personne, il n’est pas aisé de convaincre un demi-dieu boudeur (et ils le sont tous) de prendre quelques heures pour raconter sa vie à cœur ouvert. Il n’y a d’ailleurs que Vulkan qui a accepté de jouer le jeu, mais seulement pendant une petite heure, car cette galaxie ne va pas se conquérir toute seule, nom de Pépé ! Leurs trente années de collaboration et cohabitation ont également mis l’amour et la patience d’Olivier envers sa tendre moitié à rude épreuve, et on sent bien qu’il a lost that lovin’ feelin’ à la manière dont il passe son temps à souffler pendant que la navette approche du spatioport et que Marissa s’émerveille du paysage si pittoresque de la planète natale de Perturabo.

Malheureusement pour le couple, le moment est mal choisi pour débuter ce nouveau projet. Non seulement leur sujet d’étude est parti aux confins de la galaxie mener une campagne ingrate de déhrudisation sur les ordres de l’Empereur, mais le régent qu’il a laissé pour régler les affaires courantes, et qui n’était autre que son vieux père adoptif, Dammekos, vient de mourir. Saignée à blanc par les besoins de la Légion en recrues et en ressources, Olympia gronde sourdement, et les quelques Iron Warriors chargés du service d’ordre ont fort à faire pour réprimer les manifestations et les émeutes de la populace mécontente. Cela n’empêche toutefois pas nos héros d’hériter d’un factotum/guide touristique à neuroglotte, le stoïque et froncé Krashkalix, qui se fait un devoir de les amener visiter les sites les plus notables de la planète, afin de leur (enfin, surtout Marissa, Olivier n’en a plus grand-chose à faire) permettre de prendre la mesure de Perturabo.

En parallèle de cette excursion hagiographique, nous suivons les premiers pas du Primarque sur la planète, avant qu’il ne soit surpris en train de faire de l’escalade sur les falaises de Lochos. Sans surprise, Perturabo s’est révélé être un enfant précoce, chassant le monstre à coup de gourdin pour le bénéfice et la sécurité de pauvres bergers, et squattant la forge de villages isolés pour se faire son matos. C’est d’ailleurs dans la forge où il a ouvragé sa première épée que les LeBon font la rencontre d’une forte tête n’ayant pas la langue dans sa poche : Gerademos, petit-fils d’Andos, lui-même fils de Dammekos et donc frère adoptif de Perturabo. Gege n’hésite pas longtemps avant de balancer du gros dossier sur le Primarque, dont l’un des petits plaisirs coupables était de défier son frangin à des concours d’artisanat ou d’ingénierie, dont il sortait logiquement systématiquement vainqueur. Sauf UNE fois, ce qui mit Rabo tellement en rogne qu’il détruisit les statues réalisées pour l’occasion (en prenant soin de laisser de beaux restes à la sienne pour que les gens puissent tout de même voir à quel point il est doué). Olivier trouve ça génial, mais Marissa est horrifiée par cette anecdote, inexploitable pour le panégyrique qu’elle en a tête.

Les dissensions entre mari et femme vont alors croissants, jusqu’à ce que cette dernière finisse par avouer qu’elle considère l’Empereur comme un dieu, et est donc prête à sacrifier la vérité sur l’autel de la glorification de Pépé et de ses créations. C’est évidemment contraire à la Vérité Impériale instituée par le même Pépé, et Olivier considère l’infraction comme étant assez grave pour pouvoir demander un divorce en tort exclusif… ou en tout cas, abandonner Marissa à sa lecture du ‘Lectitio Divinitatus’ pendant que lui va faire le coup de feu avec les gilets jaunes d’Olympia, qui parviennent finalement à déclarer leur indépendance de l’Imperium, sous la tutelle de la sœur du Primarque absent, Calliphone. L’histoire se terminera mal, on le sait, mais il reste permis d’espérer que Marissa a réussi à compléter en solo la biographie de Perturabo avant le début de l’Hérésie. Elle a peut-être pu s’inspirer du travail d’un obscur écrivain de M3 du nom de Gaïallet pour ce faire…

AVIS:

Guy Haley se démarque de ses petits camarades de Library par sa capacité à surprendre son lecteur en s’aventurant, souvent avec succès, sur des chemins que la maison d’édition de Nottingham ne fréquente pas. ‘The Emperor’s Architect’ vient démontrer la versatilité de Haley en mettant au cœur de son propos les querelles mesquines d’un vieux couple marié1, à des années lumières de ce à quoi on pouvait s’attendre de la part d’une nouvelle estampillée Primarques. Si vous êtes comme moi à la recherche de fantaisie (et pas de fantasy) et de caractère dans vos lectures de GW-Fiction, cette simple idée, farfelue mais suffisamment bien intégrée à l’univers et à l’ambiance générale de 40K pour ne pas jurer avec ces derniers, vous convaincra de donner sa chance à cette petite histoire. Ce vent de fraîcheur m’a d’ailleurs tellement plu que j’ai regretté que Guy Haley finisse son propos en faisant reposer une bonne partie de l’opposition entre Olivier et Marissa sur la lecture du ‘Lectitio Divinitatus’ par cette dernière. Comme s’il avait senti le besoin de justifier son « audace » en dégainant une explication que le fanboy moyen ne pourrait pas lui contester. Il aurait pu passer outre à mon avis (c’est pas comme si les couples humains avaient attendu la prose de Lorgar pour s’engu*uler), mais ce n’est que mon ressenti.

En plus de cette caractéristique très sympathique, ‘The Emperor’s Architect’ a le bon goût d’être le parfait complément du roman que Haley a consacré au maître d’Olympia, dont je vous recommande la lecture. En plus de couvrir des périodes de la saga perturabienne précédemment passées sous silence (son arrivée sur la planète, la campagne contre les Juges Noirs, le soulèvement de la population), cette nouvelle continue de fouiller la personnalité, décidemment très complexe, de cet enferré de Primarque. On le voit ainsi faire preuve d’un altruisme d’une pureté immaculée envers les bergers des montagnes, mais également se comporter avec une mesquinerie incroyablement puérile avec son pauvre frère adoptif, qui n’avait rien fait pour mériter ça. Une force de l’écriture de Haley est de parvenir à réconcilier ces aspects pourtant opposés du caractère de Perturabo pour donner l’impression d’une psyché véritablement surhumaine (et donc incompréhensible), alors qu’un auteur moins doué aurait juste donné l’impression de se contredire par manque de sérieux. Pour terminer, ‘The Emperor’s Architect’ n’est pas avare en détails fluffiques allant du notable (pourquoi Perturabo ne souvient-il pas de ses premiers jours sur Olympia ?) au superficiel (ne pas faire de tartare de jalpidae si on est pas un Space marines ou mieux), ce qui est toujours sympathique. Une vraie réussite.

1 : Aux noms tout à fait banal qui plus est, ce qui renforce encore le décalage par rapport à l’exotisme patronymaire (?) auquel la BL nous a habitué. Je soupçonne Haley d’en avoir fait exprès, et il a eu raison.

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The Ancient Awaits – G. McNeill :

INTRIGUE:

Un trio de sorciers Thousand Sons, Vistario le Corvidae (visions du futur), Murshid l’Athanean (télépathe) et Akhtar le Raptora (télékine), a été envoyé par Magnus le Rouge enquêter sur l’origine d’une vision subie par le premier. Ne pouvant pas désobéir à un ordre direct de leur borgne de boss, mais disposant de très peu d’indices pour localiser l’origine du message, une vague demande d’aide faite depuis les ruines d’une cité détruite, les compères ont passé les dernières années (ou l’équivalent en temps warpique) à voyager de monde mort en monde mort, sans succès. Leur chance a toutefois tourné lorsque le message s’est soudainement précisé, faisant état de l’identité de son émetteur, un certain « Ancien », qui patienterait donc à proximité. 

Guidé par une intuition de Murshid, les Thousand Sons prennent pied sur une nouvelle planète ravagée, sans savoir son nom ou ce qui lui est arrivé. Les indices troublants s’accumulent toutefois au fur et à mesure que nos héros s’approchent de leur destination : des douilles de bolts marquées du sceau des World Eaters sont retrouvées dans les décombres, et les ruines explorées par le trio portent la marque caractéristique d’un Exterminatus. Cependant, les niveaux inférieurs de la cité dans laquelle ils progressent ont résisté au terrible bombardement orbital déclenché par l’Imperium, ce qui indique que la civilisation qui a occupé cette planète était au fait des capacités destructrices des Legiones Astartes, et a pris des mesures pour résister à leur fureur. De façon tout aussi mystérieuse, mais beaucoup plus pressante, une tierce présence est détectée à proximité par les sens affutés de Murshid et Vistario : il semblerait que Magnus le Rouge ne soit pas le seul à s’intéresser à ce que cet énigmatique Ancien a à révéler.

Le fameux Ancien s’avère être un Dreadnought en très mauvais état, avachi à quelques mètres de la navette qu’il prévoyait sans doute d’utiliser pour quitter la planète au moment de son martyr. Il reste cependant suffisamment de batterie à la vénérable machine pour attraper Murshid alors qu’il passait à proximité, et pointer son canon d’assaut sur Vistario pour faire bonne mesure. Jugeant plus sage de négocier avec l’acariâtre vieillard énergétique plutôt que d’engager un combat qu’il n’est pas sûr de pouvoir remporter, Vistario opte pour une petite discussion avec l’Ancien, passablement confus après sa longue période d’isolation…

Début spoiler 1…Période qui se chiffre en millénaires plutôt qu’en années, car notre histoire prend place bien après la fin de l’Hérésie. Vistario finit par comprendre que la planète sur laquelle il se trouve n’est autre qu’Isstvan III, théâtre de la purge des éléments loyalistes des Légions renégates il y a dix mille ans. Son interlocuteur est une autre célébrité, l’Ancien Rylanor des Emperor’s Children, resté fidèle à l’Empereur malgré la trahison de son Primarque, mais rendu un peu barjo par cent siècles à fixer un mur effondré sans pouvoir se relever. Rylanor n’ayant pas appris que les Thounsand Sons ont également fait défection à Pépé, Vistario tente de détourner la conversation vers un sujet un peu moins polémique, échoue lamentablement, et aurait certainement fini en enduit organique sur ledit mur effondré sans l’arrivée opportune d’un nouveau personnage…

Début spoiler 2…Fulgrim en personne. Le Primarque démoniaque a en effet été attiré par la complainte de Rylanor au même titre que les Thousand Sons, et a décidé de corrompre le vénérable loyaliste pour son propre amusement pervers. Il tombe ce faisant dans le piège de Ryry, dont le châssis dissimulait une ogive contenant le virus mangeur de vie utilisé par feu Horus il y a fort longtemps pour régler son problème de dissensions internes. Cela était sans compter sur les manigances psychiques des Thousand Sons, qui parviennent à circonscrire l’explosion dans une bulle de force avant qu’elle n’ait pu engloutir les participants de cette petite réunion Copains d’Avant… pendant à peu près 27 secondes ½, soit le temps qu’il faut pour réaliser à Vistario qu’il préfère encore mourir et possiblement emporter Fulgrim avec lui (spoiler : ça ne marche pas) plutôt que de laisser le salace et serpentin Primarque faire des misères au pauvre Rylanor. Le sacrifice des Thousand Sons permet donc à la bombe d’exploser, faisant d’Isstvan III l’une des rares planètes à avoir subi un double Exterminatus (et sans doute la détentrice du record de l’Exterminatus le moins mortel de l’histoire, avec seulement quatre victimes confirmées). Fulgrim en est quitte pour aller se refaire une beauté dans l’Œil de la Terreur, mais surtout pour une éternité de séances auprès de son thérapeute attitré, car le refus catégorique de Rylanor de rejoindre le côté nervuré et lubrifié de la Force a profondément affecté le fragile ego du Pretty Primarque. Ce sont des choses qui arrivent.Fin spoiler

AVIS:

Graham McNeill n’en avait pas fini avec l’Ancien Rylanor (abandonné à son sort à la fin de ‘La Galaxie en Flammes’ et ‘Fulgrim’), et « détourne » une nouvelle Primarques pour donner à ce personnage secondaire du début de l’Hérésie la sortie de scène qu’il pensait lui devoir. Je suis moins convaincu que McNeill de la nécessité de terminer des arcs narratifs dont la plupart des lecteurs de la BL avaient dû oublier l’existence, mais c’est après tout la prérogative d’un auteur de raconter ce qui lui passe par la tête et le stylo.

Là où le bât blesse, en ce qui me concerne, est l’absence d’un travail de contextualisation/explication digne de ce nom de la part de McNeill. J’ai beau voir d’un œil permissif l’emploi « d’heureuses coïncidences » pour faire avancer et dénouer une intrigue, ‘The Ancient Awaits’ prend beaucoup trop de liberté à cet égard, et fait joyeusement exploser son compteur de WIJH. Comment Rylanor parvient-il à envoyer son RSVP à travers le Warp (ce personnage n’ayant aucune espèce de pouvoirs psychiques) ? Comment expliquer que le trio de Thousand Sons arrive pile au même moment que Fulgrim ? Et en bonus, pourquoi Magnus tenait tant à ce que ses fils se rendent sur place pour investiguer ce vague écho de l’Empyrean ? On peut supposer, au vu de ses pouvoirs, qu’il savait ce qu’ils allaient trouver, ce qui revient à poser la question de pourquoi le Cyclope voulait nuire à Fulgrim. Je laisse à chacun le soin d’apporter ses réponses à ces questions : pour ma part, je mets tout sur le compte d’un manque d’investissement de la part de Graham McNeill dans la construction de cette nouvelle, obnubilé qu’il était par son désir d’en terminer avec Rylanor sous couvert d’écrire une nouvelle Primarques1. Je sors donc déçu de cette lecture, qui ne mérite pas à mon sens son inclusion au sommaire de ‘Sons of the Emperor’.

1 : Dont le cahier des charges est tout autre. Si vous voulez lire un court format très instructif sur la personnalité et le destin de Fulgrim écrit par le même McNeill, je vous conseille chaudement ‘The Reflection Crack’d’.   

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Misbegotten – D. Abnett :

INTRIGUE:

Alors que les préparations pour la campagne d’Ullanor se terminent, la 63ème flotte d’expédition, commandée par nul autre qu’Horus Lupercal, se regroupe dans le système d’Issinium après vingt mois d’intenses mises en conformité. À la grande satisfaction du Primarque, pas moins de six civilisations humaines isolées au cours de la longue nuit ont accepté de rejoindre l’Imperium, et ce sans que le moindre bolt ne soit tiré ni aucune vie perdue. Ce tableau idyllique est toutefois compromis par les difficultés rencontrées par Hastur Sejanus à convaincre les habitants de Velich Tarn de give Pépé a chance. La planète a beau être insignifiante, tant en terme stratégique que démographique (400 habitants d’après les scans orbitaux), il n’est pas dans la nature des Luna Wolves de quitter un niveau sans l’avoir fini à 100%, et, comme il n’a plus rien d’autre à faire pour le moment, Horus décide d’aller pranker/soutenir son vieux poto Sejanus en se rendant incognito sur Velich Tarn.

Sur place, il se fait briefer en détail par le Capitaine dans son bunker de commandement, et réalise que la situation est plus compliquée que ce que le briefing initial le laissait à penser. Le maître de Velich Tarn est en effet un biogénéticien de sinistre réputation, Basilio Fo, ayant fuit Terra il y a plus de cinq mille ans après que ses voisins aient dénoncé ses expérimentations pas très ragoutantes aux autorités. N’ayant rien perdu de son génie morbide, Fo a passé le temps en transformant la population de sa planète d’adoption en abominations biologiques (pensez à The Human Centipede version 40K), plus que capables de dévorer/découper/éventrer/bouillir/écorcher un Space Marine qui leur tomberait sous la main/griffe/sabot/tentacule/trompe/nageoire. De plus, si les scanners n’ont détecté que 400 formes de vie humaine à la surface de la planète, c’est sans tenir compte des milliers de clones de chacune d’entre elles : les combats opposant la 4ème Compagnie des Luna Wolves aux hordes bioadaptées de Fo, surnommés « les bâtards » (misbegotten en VO) par les toujours inventifs transhumains, ont donc été beaucoup plus sanglants et accrochés que prévus (16 morts du côté des Legiones Astartes, tout de même).

L’arrivée d’Horus et de son massif buff de zone a toutefois accéléré le dénouement de cette campagne, et Sejanus apprend de son avant-garde que ce fieffé fripon de Fo a été capturé. Un peu trop facilement d’ailleurs. Horus a à peine le temps de froncer ses sourcils primarquiels que le bunker est éventré par l’arrivée du méga-monstre gardé en réserve par Fo, dans le but avoué d’abattre le meneur adverse dans un dernier acte de défiance. Vous ne serez pas surpris d’apprendre que cela ne fonctionne pas, et bien qu’Horus sorte de l’affrontement recouvert de sang, de bile et d’autres liquides encore moins identifiables, le coup fourré du bio-généticien dément échoue lamentablement.

D’une humeur magnanime, le Primarque tient à interroger son prisonnier plutôt que de l’exécuter sommairement, comme n’importe qui d’autre l’aurait fait. La conversation qu’il a avec Fo vient donner un éclairage particulier au projet de l’Empereur de réunir l’humanité sous sa bannière : on apprend ainsi que notre bad guy du jour a quitté Terra car même lui jugeait les desseins de Pépé comme étant trop démesurés et intrinsèquement condamnables pour tremper de près ou de loin dans cette future combine. Se voyant comme un simple scientifique s’amusant avec le potentiel infini du génome humain, Fo est sincèrement horrifié par Horus, qu’il considère comme une monstruosité bien plus repoussante et dangereuse que la plus mortelle de ses propres créations. Après tout, même son lombric géant n’avait pas le potentiel nécessaire pour mettre à feu et à sang la galaxie… On est toujours le Misbegot de quelqu’un d’autre, Fo croire. Interloqué par cette discussion, et toujours dans sa phase touleumondilégenty, Horus se résout à envoyer Fo à son cher Pôpa pour que le dissident puisse recevoir la vérité impériale de la bouche (ou de tout autre orifice qu’Il choisirait d’utiliser pour l’occasion) de Son créateur. Il est désormais temps pour les Luna Wolves de préparer la prochaine campagne de la Grande Croisade, car comme dit le proverbe : « quand y en a plus, y a Ullanor ».

AVIS:

Pour ce qui a toutes les chances d’être sa dernière nouvelle écrite pour le compte de l’Hérésie d’Horus (hélas), Dan Abnett retourne aux origines et nous livre une sorte de prologue au roman ‘Horus Rising’, mettant enfin en scène la relation fratermicale entre Horus et Hastur Sejanus, seulement esquissée dans le précédent roman. On a plaisir à retrouver ce monstre de charisme, d’empathie et de badasserie qu’était le demi-divin chauve au moment de la Grande Croisade, et Abnett démontre en quelques pages qu’il est toujours capable de signer des nouvelles de remplissage1 de très grande qualité. C’est bien simple, il n’y a que du contenu appréciable dans ‘Misbegotten’, qui choisit de limiter les combats à leur portion congrue pour se concentrer sur des descriptions de l’avancement de la Grande Croisade, des interactions sympathiques entre les (nombreuses) têtes connues de son casting, et des réflexions intéressantes/clins d’œil prophétiques sur le lore de 30K. Il n’y a rien à jeter ici, et si la BL avait la bonne idée de commander à Abnett un bouquin consacré uniquement aux aventures d’Horus et de sa Légion avant que le premier devienne Maître de Guerre, je le pré-commanderais dès son annonce (c’est dire à quel point j’apprécie ce qu’Abnett parvient à faire ici). Bien entendu, les chances que cela se produisent sont infinitésimales, aussi me contenterai-je de recommander chaudement ‘Misbegotten’ à tous ceux qui aiment Dan Abnett, l’Hérésie d’Horus, et Dan Abnett écrivant l’Hérésie d’Horus.

1 : J’utilise ce terme sans arrières-pensées péjoratives. Il faut reconnaître que ‘Misbegotten’ n’apporte rien à l’Hérésie en termes d’intrigue ou de révélation, mais cela ne veut pas dire que sa lecture est superflue.

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A Lesson in Iron – D. Guymer :

INTRIGUE:

A Lesson in IronS’il y a une chose que Ferrus Manus, paix à son âne, détestait, c’était bien perdre du temps. Aussi, sitôt réuni avec sa Légion, engagée dans le démantèlement de l’empire de rouille ork, le Primarque tint à imposer sa marque sur ses Légionnaires. Nous rejoignons ainsi l’impulsif M. Manus alors qu’il fait la chasse de quelques vaisseaux peaux vertes ayant survécu à la colère de l’Imperium, et qu’il compte bien détruire afin d’obtenir la complétion à 100% de sa mission, et ainsi prouver à l’univers qu’il vaut mieux que ces poseurs d’Horus et de Russ1. Et tant pis si ces couards d’Orks décident de foncer coque baissée dans une faille Warp qui flottait par là pour échapper au courroux de l’Astartes, et que personne n’a jamais été assez timbré du côté impérial pour se risquer dans ce genre d’environnement chelou. Ferrus, et son Fist of Iron, seront les premiers à tenter le coup. Encore un record à mettre au crédit du Primarque qui en voulait.

Ferrus n’est pas seul sur le pont de son vaisseau amiral alors que ce dernier réalise le premier fistage d’une faille Warp. Il est accompagné de deux Sergents vétérans, le Terran Harik Morn et le Medusan Gabriel Santar, tous deux pressentis pour devenir son bras droit. Alors que le Fist of Iron s’enfonce dans le trans Materium comme s’il s’agissait de caramel mou, avec des effets funky sur les appareils de navigation, comme on peut l’imaginer, les auspex détectent soudain des silhouettes de vaisseaux à proximité. Il s’agit des kroiseurs orks, mais également d’un nouvel arrivant, qui n’avait pas été identifié pendant la poursuite dans l’espace réel. Point commun : tous ont été réduits à l’état d’épave, et dans un passé lointain qui plus est. À la grande surprise des impériaux, il semble que le vaisseau en question appartienne à la 10ème Légion, ce qui hautement improbable mais pas totalement impossible. Pragmatique comme toujours, Ferrus Manus décide d’aller y jeter un œil.

Alors que les pauvres grunts qui forment son escorte découvrent avec émoi 1) l’existence de Démons et 2) s’il y a une vie après la mort, le Primarque et ses comparses arrivent jusqu’au pont du vaisseau mystère, où les attend un cadavre desséché de Space Marine. Ce dernier porte les marquages d’un Iron Hands, mais, au grand dégoût de FM, il semble avoir terminé sa carrière plus machine que (sur)homme, au vu de toutes les augmétiques et bioniques que la dépouille arbore. C’est le Tech-adepte qui accompagne la fine équipe qui finit par proposer l’hypothèse la plus intéressante pour expliquer ce répugnant mystère : l’épave sur laquelle ils se trouvent est un vaisseau des Iron Hands provenant du futur, transporté dans le passé par les caprices du Warp.

Avant que la nouvelle n’ait pu être digérée par l’assemblée, une palanquée de Démons se manifeste (dans tous les sens du terme) sur le pont, et forcent nos héros à – enfin – faire usage de la force. Si ce bogoss de Ferrus s’illustre à grands coups de marteau, ses subalternes sont plus à la peine. Surpris par les nouveaux arrivants, Santar se fait ainsi arracher le bras gauche par une Bête de Nurgle joueuse, tandis que Morn est submergé par des Horreurs rigolardes. Le premier réussit toutefois à marquer des points auprès du Primarque en retournant dans la mêlée sitôt ses esprits recouvrés, tandis que le Terran se contente de haleter comme un bébé phoque sur la banquise. Avant d’ordonner une retraite tactique vers le Fist of Iron, ignorant les avis de ses sous-fifres de rester pour looter de la technologie futuriste, et/ou défendre une relique de la Légion, Ferrus tranche en son for intérieur : ce sera Gaby qui deviendra son Ecuyer et 1er Capitaine. C’est dit.

1 : C’était l’époque de la Grande Croisade où tous les Primarques avaient un nom qui rimait avec « platypus », l’animal préféré de Pépé.

AVIS:

Petite nouvelle fort sympathique consacrée par leur spécialiste incontesté, David Guymer, aux Iron Hands et à leur Primarque caractériel, ‘A Lesson in Iron’ se paie le luxe de nous présenter en quelques lignes la prise de fonction de Ferrus Manus au sein de sa Légion (choix du 1er Capitaine, et autres révélations fluffiques intéressantes incluses), combiné avec une savoureuse mise en abîme du futur qui attend le Chapitre dans quelques millénaires. Le fait que les améliorations bioniques répugnent au plus haut point l’homme aux mains de fer n’est pas une nouveauté à ce stade, mais Guymer parvient tout de même à surfer sur cette iron-ie de façon tout à fait satisfaisante. Le pauvre Ferrus Manus aura soupé de prémonitions malheureuses car jamais utilisées pour modifier la destinée pas vraiment enviable attend ses fils et lui-même à la sortie de la Grande Croisade, et on en a encore un exemple ici. Ca reste plus distrayant à lire que la moyenne des soumissions de la BL, donc pourquoi cracher dans soupe ?

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The Atonement of Fire – D. Annandale :

INTRIGUE:

The Atonement of FireNous sommes dans la dernière ligne droite de l’Hérésie, quelques mois avant que le Siège de Terra ne débute. Roboute Guilliman a fini par réaliser que lancer sa petite entreprise personnelle alors qu’il est toujours techniquement employé par Pépé Corp., et en piquant dans la caisse de Big E. en profitant d’une panne généralisée d’internet pour ne pas se faire prendre, c’était assez craignos tout de même. Pétri de remords, Roro est désormais à la recherche d’un moyen de se faire pardonner ses errements passés. En sortant de sa séance hebdomadaire avec le Chapelain/Psychiatre Volusius, lui vient une idée toute simple pour expier son énorme hubris : aider Sanguinius à rejoindre Terra en détruisant les flottes hérétiques qui se mettront sans nul doute sur la route de l’Ange à la Moumoute.

Après une petite séance de triangulation avec les poteaux dans le strategium de l’Ultima Mundi, les Ultras de l’Empereur décident d’aller au secours de la planète Diavanos, d’où est arrivé un message astropathique implorant de l’assistance pour gérer une invasion de World Eaters mal-lunés. Diavanos est de plus un monde que les Ultramarines ont rattaché à l’Imperium il y a plusieurs décennies, et dont la technique de vitraux teintés a grandement impressionné le Primarque lorsqu’il flânait dans les rues de la capitale Ecstasia à la recherche d’inspiration pour son dernier roman. Pour toutes ces raisons, ainsi que pour celle, plus prosaïque, de se venger des ravages commis par les séides d’Angron et de Lorgar dans leur pré carré, les gars de la XIIIème se ruent au secours de Diavanos, et tombent à bras raccourcis sur leurs frères ennemis alors que ces derniers s’apprêtaient à repartir pour embusquer la flotte des Blood Angels.

La bataille spatiale qui s’en suit, si elle n’est guère équilibrée (les Ultramarines sont deux fois plus nombreux, sérieux, hargneux, farineux et bleus que leurs adversaires), permet à nos héros de relâcher la pression après tous ces mois à écouter les podcasts interminables du triumvirat de l’Imperium Secundus. Alors que les derniers vaisseaux renégats sont méthodiquement désintégrés par la froide fureur ultramarine, le cuirassé Gladiator profite de la confusion pour repartir en direction de Diavanos, et certainement pas pour une visite de politesse. Guilliman comprend que les World Eaters ont un petit creux, et que s’il n’intervient pas rapidement, la planète qu’il est venu sauver va s’en prendre plein la face. Mais arrivera-t-il à temps pour empêcher les fils d’Angron de commettre l’irréparable ?

Début spoiler…Après de multiples péripéties dans les coursives du Gladiator, que les World Eaters ont faites effondrer pour gêner la progression de leurs ennemis, Roboute et ses hommes (en grande partie des Destroyers, wink wink The Lord of Ultramar’) parviennent jusqu’à la salle des torpilles où les hérétiques se sont barricadés. La mêlée désespérée et surtout très sale qui s’ensuit tourne logiquement en faveur des surhommes en bleu, mais les World Eaters sont proches de réaliser leur objectif secret (faire péter une torpille à l’intérieur du vaisseau afin d’emporter Guilliman avec eux). Seule l’habilité du Grand Schtroumpf avec son combi-bolter customisé permet d’éviter la catastrophe, mais la victoire morale revient tout de même aux groupies d’Horus. Il est en effet trop tard pour prévenir le crash du Gladiator à la surface de Diavanos, et l’onde de choc qui s’en suit rase la capitale et dévaste une grande partie de la planète. Bien évidemment, les Ultramarines ont eu le temps de regagner leurs 22 avant que cette tragédie n’arrive, mais Guilliman finit la nouvelle avec le blues. Approprié, vous me direz.Fin spoiler

AVIS:

Vu le passif peu glorieux de David Annandale avec la XIIIème Légion (‘Lord of Ultramar’…), j’ai attaqué cette nouvelle dans un état d’esprit assez peu favorable à cette dernière, et j’ai été surpris de constater que cet ‘Atonement of Fire’ tenait tout à fait la route. Nous sommes en présence d’un court format siglé HH de facture assez classique (un peu de réflexion, beaucoup d’action, et en bonus une belle tranche de Primarque), mais débarrassé de tous les défauts que l’on pouvait trouver dans les autres soumissions de notre homme (personnages stupides/inintéressants, intrigue bancale, rythme chaotique)1. Ça pourrait et devrait être considéré comme le strict minimum, mais nous savons tous que la BL ne croit pas dans des concepts aussi restrictifs que le contrôle qualité. Enfin, pas tout le temps.

Surtout, et c’est assez rare dans une publication de la Black Library (quel que soit la franchise ou l’auteur) pour le souligner, Annandale parvient à ménager un vrai suspens jusqu’au bout de son propos. Guilliman et ses Schtroumpfs destructeurs arriveront-ils à sauver Diavanos des déprédations suicidaires des World Eaters ? Même si la planète a été créée de toute pièce pour l’occasion, l’auteur arrive à nous intéresser à la conclusion de cet accrochage mineur de la fin de l’Hérésie en appuyant de façon intelligente sur les remords éprouvés par Guilliman au sujet de son Imperium Secondus et son besoin de se faire pardonner de ce petit caprice. Annandale nous ressert également la vieille rengaine du « I am never going to financially recover from this », 30K style, déjà bien exploitée par d’autres avant lui, mais qui fait toujours son petit effet quand utilisée à dessein, ce qui est le cas ici. Bref, une vraie bonne surprise pour ma part, et une des meilleures soumissions de David Annandale pour le compte de cette franchise, si vous demandez mon avis.

1 : On pourrait lui reprocher de ne toujours pas maîtriser les bases spatio-temporelles d’une bataille spatiale (exemple gratuit : la course poursuite entre l’Ultimus Mundi et le Gladiator ne semble durer que quelques minutes, alors qu’elle s’engage à proximité du point de Mandeville du système et se termine dans l’atmosphère d’une planète habitable (donc proche de son soleil), ce qui devrait prendre au bas mot quelques jours), mais dans mon infinie générosité, je passe l’éponge là-dessus.

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Lantern’s Light – J. Swallow :

INTRIGUE:

Lantern's LightDepuis une année, Mortarion se morfond dans le système de Barbarus, après que ce dernier ait été intégré à l’Imperium par la volonté de son divin souverain, Pépé 1er. Bien que cette période ait permis au Primarque d’apprendre beaucoup sur le royaume galactique de son Père, la Grande Croisade et la place qu’il devra bientôt prendre dans cette dernière, Morty et son esprit rebelle (il a une petite voix dans la tête qui prend un malin plaisir à poser toutes les questions malaisantes) ne se satisfont pas de la situation. Pour faire simple, la seule chose qu’il trouve vraiment cool est le lien qu’il a réussi à tisser avec ses Dusk Raiders, bientôt renommés en Death Guard en l’honneur des compagnons de lutte qui l’ont soutenu sur Barbarus. Pour le reste, c’est la soupe à la grimace, comme si dans le corps gigantesque de notre héros se cachait un collégien complexé (ce qui est peut-être le cas, vu la vitesse à laquelle les Primarques grandissent).

Aujourd’hui est un jour spécial, cependant, puisque son Pôpa l’a invité à le rejoindre sur son vaisseau amiral, afin d’avoir une discussion avec son plus jeune rejeton. Ne pouvant pas s’enfermer dans sa chambre en écoutant The Cure, comme tout bon ado emo qui se respecte, Mortarion se rend sur le Bucephelus comme convenu, mais prend un malin plaisir à crash the party en piétinant le protocole de ses grosses bottes cloutées. Hôte gracieux s’il en est, l’Empereur ne s’en formalise pas et propose à son fiston une petite balade en tête, loin des petits fours et orchestres de chambre qui semblent taper sur les nerfs de son nihiliste de fils. Seulement, à vouloir en mettre plein la vue à ce dernier1, Papy gâteau ne parvient qu’à faire croître le ressentiment de Morty à son égard. Ce dernier n’a en effet toujours pas digéré la manière dont la campagne de Barbarus s’est terminée : lui crachant ses poumons et suintant du pus par tous les pores, et l’Empereur se téléportant par magie devant Necare (seigneur suprême de Barbarus et père adoptif de Mo’) pour lui voler son kill. On sent donc que les relations ne seront jamais au beau fixe entre ces deux là, mais que pouvait attendre donc de la part d’un Primarque ayant grandi sur une planète perpétuellement recouverte de nuages verdâtres ?

Un peu plus tard, l’Empereur tente une autre avancée, en amenant Son fils dans le « modeste » atelier où il se délasse l’esprit et les doigts lorsqu’il a un peu de temps libre. Comme Il le révèle à Morty, Il offre à chacun de Ses Primarques un cadeau fait de Son auguste et blanche main avant que ces derniers ne partent rejoindre la Grande Croisade, et c’est ainsi que Mortarion hérite d’un magnifique cimeter-. En fait non. Le goujat refuse tout net de se séparer de sa faux énergétique, ce qui crispe légèrement l’Empereur. Pour ne pas avoir l’air de refuser le cadeau paternel, Mortarion s’empare d’une autre relique qui traînait dans le coin, le pistolet Lanterne que Pépé a gardé comme souvenir de sa conquête de la planète Shenlong. Et voilà comment une bouderie puérile a fait de Morty le Primarque pistolero. The more you know…

La nouvelle se termine avec un Empereur sensiblement agacé par les caprices de Son Fils, et qui fait ce qu’il a l’habitude de faire depuis cinquante ans quand quelque chose Le gonfle : refiler la patate chaude à ce brave Horus. Comme Lulu la Percale tenait à rencontrer au plus tôt son nouveau frérot, il attendait patiemment dans une antichambre du Bucephelus, ce qui donne l’occasion à Pépé d’aller martyriser un sac de frappe à la salle de gym pendant que Ses fistons font connaissance. Pas tous les jours faciles d’être un père célibataire de famille nombreuse…

1 : La discussion dans la coursive avait pour but principal de montrer à Mortarion le véhicule de fonction gracieusement offert par l’Empereur, l’Endurance. On raconte que les derniers arbres de la forêt amazonienne ont été coupés pour produire le papier cadeau nécessaire à l’emballage.

AVIS:

James Swallow signe peut-être sa meilleure soumission consacrée à Mortarion avec Lantern’s Light, nouvelle qui explore de manière assez fine la psyché torturée du Primarque de Barbarus, et la relation complexe qu’il a toujours entretenue avec l’Empereur. Tout l’intérêt de ces quelques pages repose dans la dualité des sentiments ressentis par le nouveau patron des Dusk Raiders : a-t-il raison de considérer Pépé comme un tyran égoïste et incapable de considérer les autres que comme des expédients à utiliser comme bon lui semble, ou est il juste sujet à une paranoïa aigüe, sans doute renforcée par l’enfance traumatisante qu’il a subi avec son père adoptif ? Ce sera au lecteur de décider, et c’est bien mieux ainsi. En bonus, on a le droit à pas mal de détails fluff, ce qui est toujours appréciable, et à un Empereur pas totalement à côté de Ses pompes (ce qui est malheureusement souvent le cas lorsqu’Il intervient personnellement dans un récit de la BL). Je recommande donc une nouvelle de James Swallow, et c’est assez rare pour le souligner.

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Canticle – D. Guymer :

INTRIGUE:

On a tous nos surnoms, plus ou moins glorieux, et Ferrus Manus ne fait pas exception. Bien avant d’être baptisé pognes d’acier (en latin haut gothique pour faire plus classe), notre héros a ainsi été appelé Numerodis (l’Empereur), Cataclysme (les géants des tempêtes du Pinacle de Karaashi), La Finalité (des morts-vivants quelconques), Rehew Netjer, soit le Fils de l’Homme (les Necrons), Mon très Chair (les despotes fragmentés du Subliminat), et Empafé de première (le type auquel il a piqué sa place sur le parking du Monoprix de Medusa). Pour sa part, et après avoir malencontreusement libéré Asimoth sur sa planète d’adoption peu de temps après son arrivée remarquée sur cette dernière et s’être révélé trop faiblard pour ramener la bestiole dans son enclos, le Primarque des Iron Hands s’est donné le nom et la vocation de Chasseur, ayant décidé de réparer sa bévue en traquant le wyrm d’argent à travers les paysages bucoliques de Medusa.

Ces premières années sont également l’occasion pour Ferrus Manus de faire ses premières armes, dans tous les sens du terme. On apprend ainsi qu’il a rencontré quelques difficultés sur sa route, d’ordre robotique, semi-robotique et infernal, ce qui donne une idée de la très riche « biodiversité » de la planète sur laquelle il a fait son trou. Rien de très mémorable cependant pour FM (et pour Guymer), dont l’équipement consiste en une cuirasse d’adamantium upcyclé et une bardiche bricolée à partir des dépouilles fumantes de ses malheureux adversaires biomécaniques. On apprend également que ce gentil garçon est capable de subsister sur un régime composé de sable, minéraux et métaux1, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Poursuivant sans relâche sa proie insaisissable, Ferrus finit tout de même par rencontrer des membres de son espèce, d’abord sous forme de cadavres entourant l’épave d’un camping-car Medusan. Curieux d’en apprendre plus sur ces étrangers qui lui ressemblent tant, et soucieux de récupérer un peu de matos utile dans la boîte à gants du véhicule éventré avant que tous les charognards du coin ne débarquent, le jeune Primarque se fraie un chemin jusqu’à la chambre forte du Sandcrawler, négociant au passage dix zombies cyborgs (zomborgs ?) occupés à mastiquer les cartes mères et câbles jack leur étant tombé sous la pince. Ce régime majoritairement électrovore ne les empêche cependant pas de sauter sur l’aventurier pour lui faire les poches dès qu’il s’approche un peu trop, forçant notre héros à faire montre de force autant que de ruse.

Une fois parvenu dans la salle des coffres, Ferrus a la surprise d’être mis en joue par une rescapée de l’embuscade ayant scellé le destin du véhicule et de ses occupants. Guère impressionné par la pétoire plasmique que son interlocutrice lui pointe sur le torse, le Chasseur refuse l’offre qui lui est faite par cette dernière de rejoindre son clan, arguant qu’il a encore une opération de vermifuge à accomplir, et un véritable nom à obtenir, avant de pouvoir faire son entrée dans le monde et participer au Bal des Débutant.e.s de Medusa. La suite de l’histoire de Chéri FM, si elle est connue, sera toutefois narrée dans un autre cantique que celui-ci.

1 : Avec quelques protéines et lipides occasionnelles de temps à autres, par exemple lorsqu’il croise la route d’une escouade de Dépeceurs sur leur 31. On peut donc classer Ferrus Manus dans la sous-catégorie des Primarques cannibales, avec Konrad Curze et Sanguinius.

AVIS:

On a plus l’impression d’un épisode pilote pour une série consacrée à l’enfance de Ferrus Manus que d’une nouvelle indépendante à la lecture de ce ‘Canticle’. Guymer passe en effet la majorité de ses pages à présenter de façon intrigante le jeune Primarque et sa planète, dont on aimerait bien apprendre davantage à la fin de son récit. L’intrigue semble avoir été volontairement tronquée pour permettre à l’auteur de la reprendre au cours de l’épisode suivant, qui n’a, à ma connaissance, pas été publié à ce jour. Peut-être faut-il creuser du côté de la novella1 que David Guymer a consacré à son héros pour mettre en perspective cette nouvelle ? Ou plutôt dans le ‘Voice of Mars’ du même auteur, où le Cantique des Voyages occupe une place importante ? En tous cas, si elle n’est certes pas désagréable à lire, et livre quelques éléments de fluff sur le plus moyen des fils de l’Empereur, cette histoire aurait gagné à se conclure de façon plus définitive.

1 : ‘Ferrus Manus : La Gorgone de Medusa’.

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The Verdict of the Scythe – D. Annandale :

INTRIGUE:

Nous retrouvons Mortarion, le plus sec (dans tous les sens du terme) des Primarques pendant la Grande Croisade, alors que la flotte d’expédition qu’il mène approche de la planète Absyrthus en mode bulldozer, perforant comme qui rigole – si Morty savait ce que cela veut dire – les défenses orbitales des locaux et se préparant à larguer son contingent de Death Guards sur les positions stratégiques de ce théâtre d’opération. Pour une fois, cette brutalité, pour laquelle sa Légion est fameuse, semble être justifiée. La civilisation d’Absyrthus est en effet similaire à celle de Barbarus, en cela qu’elle est gouvernée par une caste de sorciers1, ce qui a le don de mettre le Primarque psychophobe en rogne. Son plan pour remédier à ce problème fâcheux et mettre ce monde en conformité avec le cahier des charges impérial est aussi simple qu’élégant que direct : envoyer une barge Astartes s’écraser sur le QG adverse, ici la capitale planétaire, Temnis, pour décapiter (et aplatir) sa chaîne de commandement et frapper l’ennemi au cœur. Il a déjà employé cette technique, sans doute piquée aux Orks, avec un succès indéniable mais un peu trop sanglant pour ses fragiles de frères, lors de la campagne de Galaspar, achevée en un temps record par l’envoi d’un vaisseau spatial dans sa cité ruche principale. Un vieux fond de compassion qu’il ne se savait pas avoir pousse toutefois Mortarion à limiter la casse sur Absyrthus, qui ne perdra que son spatioport sous les patins blindés du Fourth Horseman, avant de demander grâce quelques minutes plus tard. Toujours d’humeur miséricurieuse (ça veut dire ce que ça veut dire), le Faucheur masqué accepte la réédition sans condition du camp d’en face au lieu d’ordonner le massacre complet des habitants de Temnis, comme ses officiers, à commencer par ce fourbe de Typhon Calas, s’y attendaient.

Il s’avère en effet que Mortarion est travaillé par une vague pulsion empathique, et s’interroge sur la possibilité, même mineure, d’apporter la paix et l’ordre à la galaxie autrement qu’en massacrant les mécontents. Absyrthus fera donc figure de test grandeur nature, et notre ombrageux et ombragé héros accepte avec stoïcisme de se plier aux formalités organisées par la reine déposée Cirkesce après la fin des combats. Typhon, entraîné par son boss dans le traquenard absolu que constitue un dîner diplomatique, questionne ouvertement le bien-fondé de la décision du Primarque, arguant que si la Légion s’appelle DEATH Guard, et pas la IDAWYBRYO2 Guard, c’est bien pour une raison. Habitué à se faire bolosser par son sous-fifre dans les écrits de James Swallow, Morty ne trouve pas grand-chose à dire pour justifier sa magnanimité soudaine, et décide d’aller prendre l’air pour rencontrer les vrais gens d’Absyrthus, et ainsi se faire une opinion définitive sur la situation. Laissant le palais derrière lui et ses Deathshrouds à longue portée (49 pas exactement), sa (future) Majesté des Mouches s’enfonce dans le dédale de la vieille ville…

Début spoiler…Et là, cela tourne rapidement au drame. Les oreilles sensibles de Mortarion finissent en effet par détecter les bruits révélateurs d’un rituel chaotique, ce qu’il a formellement interdit aux nouveaux sujets de l’Imperium. On pourrait arguer que c’est un peu chien de sa part de se formaliser de la persistance d’une pratique traditionnelle bannie il y a moins d’une journée, mais le Primarque acquiert bientôt la certitude que la vieille femme qui fait couiner son brasero au cœur de la casbah de Temnis EN A FAIT EXPRÈS POUR LE FAIRE CHIER ce qui est un crime impardonnable. Pire, sa rapide entrevue avec la mégère décomplexée, et son retour jusqu’au palais de Cirkesce, le convainquent que les Absyrthusiens sont tous des hypocrites, faisant semblant de se plier aux consignes des envoyés de l’Empereur le temps que ces derniers repartent purger les étoiles.

Devant ce constat accablant, et peut-être un peu précipité, le sort de la planète est scellé. Mortarion siffle la fin de la récré, arrachant Typhon au buffet froid que le Premier Capitaine était en train de nettoyer avec lenteur et méthode3, repart en orbite et décrète l’Exterminatus pendant que ‘Won’t Get Fooled Again’ des Who est envoyé à fond les ballons par l’auto radio du Fourth Horseman. Ce sera désormais le seul verdict que délivrera la Death Guard à ses adversaires, en faisant la Légion la plus efficace de la Grande Croisade pour un temps…Fin spoiler

1 : Autre point commun avec la planète natale de Mortarion (et le Finistère Nord) un taux d’ensoleillement inférieur à 1%.
: I Don’t Agree With You But Respect Your Opinion.
3 : On le sait peut, mais c’est de là que vient la règle spéciale de la Death Guard.

AVIS:

David Annandale montre avec ‘The Verdict of the Scythe’ qu’il a parfaitement compris les modalités de l’exercice représenté par une nouvelle Primarchs, soit un récit mettant en scène un épisode marquant de la vie de son sujet, et éclairant le lecteur sur les raisons ayant poussé ce dernier à devenir la figure qu’il est dans le fluff. En 12 pages bien pesées, Annandale répond ainsi à la question Orangina Rouge (mais pourquoi est-il si méchant) pour Mortarion, brossant le portrait d’un Primarque dont le caractère impitoyable a été, à un certain niveau, causé/renforcé par un événement particulier l’ayant détourné pour de bon de la voie du Bisounours. On peut trouver l’histoire et la justification qu’elle apporte à la rigidité morale de son protagoniste simpliste, mais force est de reconnaître à l’auteur qu’il a rempli son contrat de façon satisfaisante, même si pas extraordinaire.

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A Game of Opposites – G. Haley :

INTRIGUE:

C’est malheureusement très peu traité dans les livres d’histoire impériaux, mais la bataille de Beta Garmon, aussi connue sous le nom de casse (de Titans) du millénaire, ne s’est pas tenue du jour au lendemain. Cette rencontre décisive entre renégats et loyalistes, et les milliards de morts qui en ont découlé, n’a été rendue possible que par le dévouement et le travail de l’ombre de Légions de sous-fifres, comme l’histoire dont il est question ici s’en fait écho. Bienvenue donc à la surface d’Epsilon Garmon II, planète du cluster garmonien que les Iron Warriors souhaiteraient fortifier pour ralentir l’arrivée prochaine de Guilliman et de ses hordes de Schtroumpfs. Le conditionnel est ici de mise car les efforts de terrassement des hommes de fer se sont jusqu’ici faits contrecarrer par les manœuvres destructrices d’une petite force de White Scars. Peu familiers des techniques de hit and run de leurs cousins des steppes, les fils de Perturabo sont perturbés par cette campagne d’un genre nouveau, où ils arrivent toujours trop tard pour empêcher les Space Bikers de sévir.

Fort heureusement, le Maître de Forge Xyrokles, affublé de son larbin et souffre douleur Phideark, ainsi que d’une ribambelle de Capitaines dont je vous épargnerai les noms, a un plan machiavélique pour venir à bout du péril jaune blanc à éclair rouge. Ayant récupéré dans un campement abandonné par ses ennemis quelques bouquins philosophiques signés de la main même de Jaghatai Khan et remplis d’aphorismes aussi profonds que « La taupe ne voit pas le vol de l’éléphant », « Pourquoi rester debout quand on peut s’asseoir » ou « Plus il y a de fous, moins il y a de riz », Xyrokles a tellement bûché sa philo1 qu’il est certain de pouvoir prendre les White Scars à leur propre piège, en réalisant un coup de billard à IV bandes à base de feintes, de retraites et d’embuscades tellement complexes que la majorité de ses sbires n’y blaire que dalle. Lorsque vient enfin le jour le plus long, le Khan Ishigu emmène ses motards énergétiques faire une petite virée dans un avant poste renégat, sans se doute un instant que ses minutes sont comptées.

Et en effet, le plan de Xyrokles se déroule comme sur des roulettes, la colonne blindée qu’il a envoyé leurrer les loyalistes au moment où ils commencent à se replier en bon ordre se révélant être un extra trop tentant pour qu’Ishigu et Cie résistent à la tentation d’y planter leurs pneus. Ce détour est toutefois lourd de conséquences pour les White Scars, qui se font surprendre par une contre-attaque vigoureuse de la part des Iron Warriors, et canalisés dans un goulet étroit débouchant sur la ligne de blindés du Maître de Forge, qui n’a plus qu’à donner l’ordre d’ouvrir le feu pour régler une fois pour toutes leur compte aux scarifiés d’en face…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur la légendaire flexibilité tactique des fils du Khan, qui avaient tout planifié depuis le début et cachés également une réserve mobile pour surprendre l’adversaire. Confrontés à une force anti-chars conséquente et bénéficiant de l’effet de surprise, Xyrokles et ses hommes ne font pas long feu (c’est la vieille histoire de l’artilleur artillé). L’honneur est toutefois sauf pour ce dernier, puisqu’il s’aperçoit après avoir été fait prisonnier que c’était Jaghatai Khan en personne qui était aux commandes dans le camp d’en face. S’en suit un échange d’amabilités qui nous permet d’apprendre que le Khan se tamponne le samovar avec la vérité impériale, qu’il considère poliment comme un avis parmi d’autres. Stupeur chez Xyrokles, qui en surhomme de principe, pensait que tous les loyalistes adhéraient scrupuleusement au dogme de Pépé. Il emportera toutefois ce secret dans la tombe, que son généreux vainqueur lui accorde en récompense de ses méritants efforts de réflexion, Jaggie Chan lui dévissant les cervicales d’un tour de main à la fin de leur échange. C’est qu’il a du pain sur la planche, et un retour sur Terra à préparer…Fin spoiler

1 : Ce qui est somme toute logique pour un grec ancien.

AVIS:

Je suis partagé sur la valeur de ce ‘A Game of Opposites’, qui comporte des éléments positifs comme négatifs. Pour commencer par ce qui ne fâche pas, j’ai apprécié le choix de Haley de donner une dimension, si ce n’est comique, au moins caustique, à ses Iron Warriors, qui font ainsi mentir leur réputation de guerriers prenant tout au premier degré. La dynamique entre Xyrokles et Phideark est particulièrement savoureuse, le second encaissant sans broncher toutes les punchlines que son supérieur lui balance à la tête. Dommage que le destin tragique du Coluche d’Olympia nous prive d’autres saillies drolatiques de sa part pour la suite de l’Hérésie. Cette nouvelle est également intéressante d’un point de vue fluffique, car elle donne à voir un Jaghatai Khan d’un pragmatisme assumé et presque hérétique, ayant pris parti pour son Père mais loin de se ranger à toutes ses vues, y compris sur des sujets aussi sensibles que la religion (il croit en la réincarnation). D’un autre côté, ‘A Game of Opposites’ pêche franchement pas son manque de suspens et son déroulement sans surprise. Car le résumé ci-dessus ne suit pas exactement le récit de Haley, qui choisit de révéler la présence du Khan au côté d’Ishigu dès le premier tiers de la nouvelle, ce qui condamne d’office le stratagème de Xyrokles à l’échec1. Le retournement de situation final et la victoire des White Scars sont donc aussi attendus que l’heure de la pause syndicale dans un guichet de poste, ce qui peut blaser le lecteur (en tout cas, ça a été mon cas). En conclusion, pas le meilleur texte de Guy Haley, mais pas désagréable ou inutile pour autant.

1 : Il n’y a que John French qui fait battre un Primarque par un Space Marine (‘The Crimson Fist’).

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Better Angels – I. St. Martin :

INTRIGUE:

Les Légions Space Marines sont un peu comme les filières post bac : il y en a pour tous les goûts et tous les niveaux. Si les impétrants ayant de la suite dans les idées et la volonté de faire carrière se rabattront sur des spécialisations ternes mais assurant la sécurité de l’emploi (BTS Gestion avec les Ultramarines, Bac Pro travaux publics avec les Imperial Fists ou les Iron Warriors, CAP Esthétique avec les Emperor’s Children…), les plus aventureux tenteront leur chance dans des cursus plus pointus, à leurs risques et périls. C’est ainsi que l’Empereur se retrouva avec des cohortes de philosophes désagrégés (Thousand Sons), théologiens en déshérence (Word Bearers), et vétérinaires ayant raté leur concours d’entrée (Space Wolves), qu’il dût bien recaser à droite et à gauche pour éviter la crise. Enfin, pour un temps. Mais, parmi tout l’Astartes, aucune Légion n’égale les Blood Angels en termes de réputation. Si on appelle les fils de Sanguinius (derrière ses ailes) des poètes, des peintres ou des danseuses, c’est pour une bonne raison : le Primarque exige que tout le monde pratique une discipline artistique, depuis le plus humble novice jusqu’au plus ancien des Dreadnoughts1. Notre héros, que nous allons suivre depuis le début de sa carrière jusqu’à l’arrivée de la flotte de la IXème en orbite de Terra, peu de temps avant le début du siège, ne fait pas exception. Jehoel (il faut croire que Joël était déjà pris) s’est ainsi spécialisé dans la verrerie, ce qui lui a attiré l’intérêt et le mentorat de son père génétique, souvent présent lorsque le souffleur fait parler la poudre le sable.

Ces rencontres ponctuelles mais fréquentes, si elles permettent aux deux surhommes de discuter technique et philosophie, amènent surtout le lecteur à suivre en filigrane la fin de la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus du point de vue d’un Primarque et d’une Légion particulièrement éprouvés par la traîtrise du Maître de Guerre, et le déclenchement de la baalédiction des fils de Malle, ou l’inverse. Finies donc les évocations de la prochaine reconversion des légionnaires en portraitistes et potiers une fois la galaxie conquise, et bonjour les sculptures de démons réalisées dans un état second, au grand déplaisir de Sanguinius – qui passe la nouvelle à critiquer Jehoel, ceci dit. Adieu aux riches galeries du Red Tear, et bonjour à la décoration minimaliste du Convenant of Blood, véhicule de courtoisie prêté par l’Imperium après le carambolage de Signus Prime. Lorsque St Martin décide enfin de mettre un point final à sa nouvelle, on apprend tout de même que si Sanguinius s’est montré aussi assidu dans ses discussions avec Jehoel au cours des décennies passées, c’est parce qu’il considérait que ce dernier était l’un des Blood Angels les plus bloodangeliques de la Légion, et pouvait ainsi se contempler à sa guise dans son interlocuteur. Un peu égocentrique le garçon, tout de même. Le rideau tombe sur la scène après que Jehoel ait montré à son pôpa la représentation idéalisée de Terra qu’il a réalisée avec de la pâte de verre, ce qui lui vaut les félicitations (enfin !) du jury, et que l’Ange ait balancé la remarque à connotation fataliste de rigueur, davantage pour le bénéfice du lecteur que pour celui de son fiston. Si jeunesse savait…

1 : À l’exception notable de la danse classique, après que le Vénérable Neolardon ait failli écraser Sanguinius en passant à travers le plancher du gymnase à la suite d’un saut carpé mal négocié.

AVIS:

Je placerais ce ‘Better Angels’ dans le prolongement de ‘Death of a Siversmith’/’Mort d’un Orfèvre’ (Graham McNeill), et pas seulement parce qu’il met en scène un protagoniste très porté sur les arts plastiques. On retrouve en effet, et surtout, dans cette nouvelle la volonté assumée de l’auteur de surprendre son public en livrant une histoire s’écartant largement du bolter porn qui est la norme de l’Hérésie d’Horus. Et, là encore, le résultat penche davantage vers l’exercice de style un brin forcé que vers la réussite incontestable. Ou peut-être n’ai-je pas lu assez sur Sanguinius et les Blood Angels pour tirer la substantifique mehoelle de ce texte ? C’est bien possible. Toujours est il que je sors du studio du Primarque à plumes un peu circonspect sur la valeur de cette soumission, qui aurait pu, pour reprendre son titre, être bien meilleure.

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The Conqueror’s Truth – G. Thorpe :

INTRIGUE:

La chance d’une vie. C’est ainsi que la Commémoratrice Ennylin Ares, rattachée à l’équivalent d’un car de manœuvres moldaves en matière de flotte d’expédition de la Grande Croisade, accueille la nouvelle d’une rencontre fortuite avec une escadre de vaisseaux de l’Astartes dans le système de Vestogorn. Et tant pis s’il s’agit des Night Lords, dont la réputation de brutalité et de sadisme commence à transpirer largement d’un bout à l’autre de l’Imperium. C’est en effet l’occasion pour notre héroïne, qui a jusque-là usé ses pellicules à immortaliser des inaugurations de barres de HLM pour déportés colons sur une douzaine de mondes conquis depuis belle lurette, de se confronter à la réalité de l’expansion humaine dans la galaxie, et de saisir sur le vif les glorieux Space Marines alors qu’ils apportent l’unité impériale à une planète un peu récalcitrante. Après tout, c’est pour son bien.

Sa requête d’un rattachement aux opérations des Night Lords ayant été rapidement acceptée, Ares bénéficie d’un traitement VIP, accordé à la demande expresse de Konrad Curze, qui dirige la mise en conformité de Vestogorn d’une main de fer et d’un air satisfait. C’est tout lui ça. Après une rencontre convenablement inquiétante et crépusculaire sur le Nightfall avec le Primarque en personne pour un entretien de motivation rapidement expédié, Konnie charge son surhomme à tout faire, le sarcastique Premier Capitaine Sevatar, de chaperonner la Commémoratrice sur le terrain. N’ayant que peu de temps à consacrer à une touriste à appareil photo, l’officier se contente de la déposer à bonne distance de la ligne de front, en lui intimant de ne pas se rapprocher de cette dernière, sous peine de rencontrer les mêmes problèmes que les Commémorateurs précédemment rattachés à la VIIIème Légion, dont les effectifs ont fondu comme neige au soleil après une série d’accidents fâcheux et de démissions subites. C’est que tout le monde ne supporte pas bien la manière très personnelle dont les Night Lords s’acquittent de leur mission de reconquête du Lebensraum impérial. Il y a des Croisés qu’il ne vaut mieux pas croiser dans une allée sombre…

Bien évidemment, dans la plus pure tradition des civils indisciplinés fourrés dans les pattes énergétiques des Space Marines, Ares décide de ne pas suivre le sage conseil de Sevatar, et bien évidemment, elle se met rapidement dans de beaux draps. Sa décision de grimper en haut d’un immeuble en ruines pour bénéficier d’une vision d’ensemble sur la cité « pacifiée » par les Night Lords se révèle être une mauvaise idée lorsqu’une petite bande de combattants locaux la repère et converge sur sa position, et sans doute pas pour lui demander de prendre une photo de groupe. Tout cela aurait pu très mal se finir pour notre héroïne sans l’intervention parfaitement ponctuelle des Night Lords, qui font leur fête aux insurgés, récupèrent la Commémoratrice égarée, et l’emmènent à quelques blocs de là rencontrer à nouveau Curze, qui a besoin de ses talents de communicante pour faire passer un message…

Début spoiler…Ce message, qu’il destine et dédicace à tous les pontes de Terra qui décident du devenir de la Grande Croisade sans y avoir jamais participé, et aussi cash que trash. Le rêve de l’Empereur est, dans bien des cas, un véritable cauchemar pour les populations des planètes qui résistent à l’assimilation, comme l’illustre bien le destin des Vestogorniens, victimes d’un grand remplacement littéral et expéditif pour faire la place aux colons impériaux. Faits prisonniers par les Night Lords, ils sont en effet précipités dans les puits géo-thermaux dont la cité tire son énergie, ce qui règle d’un seul coup les problèmes d’insécurité et de surpopulation auxquels Curze est confronté, en plus de se révéler économe en munitions. C’est Gégé de la compta’ qui va être content. Evidemment, Ares est scandalisée par ce crime de guerre puissance 30.000 auquel elle est forcée d’assister, mais est prise au dépourvu par le désir sincère du Primarque que cette vérité peu glamour soit partagée avec le reste de l’Imperium, et par la révélation (peut-être mensongère) que l’Empereur est déjà au courant de l’approche radicale de son fils indigne, et n’a rien trouvé à y redire… pour le moment. Curze insiste même pour récupérer les images et vidéos prises par Ares afin que les Community Managers de sa Légion puissent monter un petit clip d’avertissement sans frais pour les prochaines planètes que les Night Lords seront chargés d’ambiancer. Bref, tout le monde y gagne, et tout va (déjà) pour le mieux dans le meilleur des univers…Fin spoiler

AVIS:

Gav Thorpe fait le job avec cette chtite nouvelle, qui donne à voir les méthodes et philosophies d’un Konrad Curze encore loyal mais déjà fortement désabusé et totalement marginal, au plus fort de la Grande Croisade. Rien de tout cela n’est très nouveau, à part peut-être le fait que l’Empereur ait soi-disant choisi de fermer les yeux sur les méthodes incisives de l’ex futur Night Haunter, mais le propos est bien servi et mis en scène, et Thorpe ne se gêne pas pour souligner la logique dans la folie du Primarque justicier, qui fera finalement école dans les millénaires qui suivront. Quel visionnaire alors, ce Konrad. On a également plaisir à retrouver Sevatar, pas encore blanchi sous le harnais ni rougi sur le gantelet, et le voir faire du Sevatar (ADB style), c’est-à-dire balancer des remarques acerbes avec l’aplomb d’un Gaspard Proust sous progénoïdes. C’est du fan service certes, mais c’est pas mal fait et on aurait donc tort de s’en priver. Au final, ‘The Conqueror’s Truth’ est une version revue, corrigée et améliorée de ‘The Dark King’/’Le Roi Sombre’ (Graham McNeill), qui se donne l’espace et les moyens de délivrer son message de façon efficace.

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The Sinew of War – D. Hinks :

INTRIGUE:

Sur Macragge comme sur Terra, bien des millénaires plus tôt, la vile populace s’est soulevée contre ses justes et bienveillants maîtres, provoquant émeutes, massacres, feux de poubelle et occupations de ronds-points, tous crimes abominables mais heureusement sévèrement punis par les forces de l’ordre. Et en termes de répression policière, la capitale des 500 mondes a un avantage de taille et de poids par rapport à notre bonne vieille planète : Roboute Guilliman, génie précoce et baraqué, général visionnaire, humaniste convaincu, et fils adoptif du Consul Konor Guilliman, qui forme avec son collègue Gallan le duumvirat exécutif de l’espèce de république (il y a un sénat aussi) établie sur Macragge City. Occupé en Illyrium à pacifier une bande d’autochtones ayant eu la mauvaise idée de se rebeller contre l’ordre établi, notre héros a raté le début du soulèvement urbain qui a transformé la cité idéale de son enfance en champ de bataille. L’idéaliste, et un brin méprisant, surhomme a bien du mal à comprendre pourquoi diable une partie de l’armée s’est rangée du côté des casseurs, tout ça pour une bête histoire d’argent. C’est bien une réflexion de gosse de riches ça, Roro. Mais il lui faut attendre avant de consigner par écrit ses savantes réflexions sur les causes et les répercussions de ce mouvement social aussi inédit que violent : son père est resté dans la cité et a sans doute été pris pour cible par les fainéants et les sans dents. Il faut lui venir en aide.

Progressant rapidement vers le palais du Consul en distribuant quelques baffes aux mutins au passage, et utilisant son armure de scenarium pour passer entre les balles1, Gui est rejoint en chemin par Gallan, qui est venu lui aussi s’enquérir de la situation de son collègue de bureau. N’hésitant pas à joindre le geste à la parole, le Consul consort est même blessé dans la bagarre, écopant d’une estafilade au biceps pour preuve de son dévouement. Las, les deux compères arrivent trop tard pour sauver Konor (ce qui est triste) et les tapisseries (ce qui est pire). Papa Guilliman a été lâchement égorgé par ses assaillants, l’empêchant de dire adieu à son fils mais surtout de donner le nom des coupables. Bizarrement, il refuse catégoriquement que Roboute s’approche de lui dans ses derniers instants, allant jusqu’à le mettre en joue avec son pistolet pour le maintenir à distance. Le respect des gestes barrières jusqu’à la dernière seconde, on reconnaît bien là la trempe d’un vrai Macraggien. Konor a toutefois un message à faire passer à son fiston avant de mourir pour la patrie : une pièce frappée à l’effigie des deux Consuls de Macragge, et symbolisant le caractère éternel de la république, même en ces heures difficiles. Ou du moins, c’est ce que le cerveau embrouillé de Roboute en déduit, se souvenant d’une leçon de vie mémorable inculquée par son père avec un sesterce du même genre bien des années plus tôt. Sur ces considérations philsophico-fiduciaires, Konor passe de vie à trépas, provoquant une colère noire bleue chez son fils.

Convaincu par Gallan d’aller défendre le Sénat, probablement attaqué lui aussi par les vandales en sandales, Roboute sèche ses larmes et lèche ses armes, avant de se frayer un chemin jusqu’au parlement local en commettant quelques crimes de guerres au passage. On va dire qu’il bénéficiait de circonstances atténuantes. Pendant que Gallan tente d’aller raisonner les sénateurs, qui débattent férocement entre eux du meilleur moyen de châtier les gueux, Guilliman est envoyé se changer au vestiaire, son apparence dépenaillée risquant fort de provoquer des remous contre productifs dans les rangs de l’auguste assemblée. Cet enfilage de toge manque toutefois de tourner court pour le Primarque, qui se fait soudainement attaquer par le préposé aux cabines d’essayage, armé d’un poignard empoisonné. Le nez très fin de Guilliman lui permet de comprendre en un éclair que la même toxine a été utilisée sur Konor, et que c’est pour protéger son fils d’une intoxication involontaire que le Consul mourant l’a empêché d’approcher. Passé l’effet de surprise, l’assassin en puissance ne fait pas longtemps le malin face aux réflexes de mangouste et à la poigne de langouste de notre héros, qui ne parvient cependant pas à lui faire cracher autre chose que des bulles de bave (le bougre retourne son surn contre lui), à commencer par le nom de son commanditaire. Encore un crime crapuleux, c’est dingue ça. Il faudrait vraiment que les pauvres songent à être moins pauvres, ça réglerait beaucoup de problèmes d’un coup. Cette péripétie évacuée, il est temps pour Roboute de rejoindre Gallan sur l’estrade, afin de soutenir le coup d’état salutaire que ce dernier veut initier pour sauver la république…

Début spoiler…Mais, ô surprise, Rob’ est accueilli par un discours très critique de ce galopin de Gallan à l’encontre de son père, taxé de populiste et de socialiste par son homologue, et à l’annonce de son propre assassinat, pour le bien de Macragge. Evidemment, le « hum hum » que jette Guilliman juste après ruine un peu le groove de celui qui aurait bien aimé être empereur, qui se prend les pieds dans le tapis à tenter de justifier son double langage. Pas plus bêtes que la moyenne, les sénateurs comprennent vite que Gallan est le méchant de l’histoire, et qu’il a manigancé ce soulèvement populaire pour se débarrasser de ses rivaux et saisir le pouvoir. Roboute était parvenu à la même conclusion quelques instants auparavant en réalisant que la pièce que lui avait donné son père désignait en fait son meurtrier, puisqu’elle avait le profil de Gallan frappé sur ses deux faces2. Plus démasqué que Donald Trump au milieu d’une épidémie de COVID-19, le félon se fait appréhender par le service de sécurité, après que le noble Guilliman, ayant réalisé que tuer le traître de ses propres mains aurait été certes cathartique, mais contre-productif et contre ses valeurs, ait indiqué qu’il laisserait la justice suivre son cours. Devant tant de légalisme, les sénateurs ne peuvent que jurer allégeance au Primarque, exemple vivant d’une intégration réussie par un immigré méritant. L’histoire est en route pour Roboute…Fin spoiler

1 : Le pouvoir psychique caché de Guilliman est de faire voir flou à ses ennemis. C’est subtil mais très efficace. Ça marche malheureusement moins bien au corps à corps, comme Angron et Fulgrim le constateront.
2 : On pourrait dire qu’il aurait été plus efficace à Konor de simplement pointer du doigt Gallan au moment où lui et Roboute sont arrivés dans la pièce, mais l’histoire se serait terminée un peu brutalement.

AVIS:

Darius Hinks livre la version romancée de l’épisode le plus connu de la jeunesse de Roboute Guilliman (que David Annandale avait mystérieusement choisi d’ignorer dans la novella consacrée au Primarque), et le fait plutôt bien. Certes, si vous connaissez votre fluff, le suspense que l’auteur se donne du mal à entretenir jusqu’au bout de son récit tombe rapidement à l’eau, mais on ne peut pas reprocher à Hinks d’avoir voulu soigner sa sortie, et la relation de confiance qui existait auparavant entre les Guilliman et Gallan est un choix intéressant de sa part, qui peut en partie expliquer pourquoi le futur patron des Ultramarines a tendance à vouloir faire les choses tout seul de son côté. On glane également quelques informations sur la société de Macragge avant son intégration dans l’Imperium, ce qui est de l’ordre du notable. Il y avait sans doute moyen de capitaliser davantage sur cet événement fondateur pour expliquer la suite de l’histoire de Guilliman, voire l’Hérésie, voire le Sombre Imperium, ou, plus simplement, insérer quelques easter eggs saveur ultramarine (notons tout de même la mention faite à Tarasha Euten, Chambellan du Primarque et héroïne de l’audio book ‘Illyrium’ du même auteur) , mais pour une nouvelle de 16 pages, Hinks s’en sort très honorablement, autant sur le plan théorique que pratique.

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The Chamber at the End of Memory – J. Swallow :

INTRIGUE:

Comme tous les créatifs peuvent vous le dire, ce sont les derniers moments avant le rendu final qui sont les plus stressants. Et bien que Rogal Dorn ne mérite pas franchement ce qualificatif, il partage néanmoins ce souci du détail et cette tendance au micro-management qui distingue les génies et les pervers narcissiques du reste de la population. Ayant pris son hoverboard gravitationnel et son mécapigeon holographique1 pour inspecter l’avancée des travaux, l’Homme de Pierre corrige et réajuste les milliers de petites variables qu’il est le seul à voir mais dont la victoire dépendra peut-être. Après tout, si Horus tombe des fortifications après avoir glissé sur un gravillon énergétique, la guerre sera tout de même gagnée. Alors qu’il s’approche de l’Investiary, l’amphithéâtre anciennement décoré de 20 statues monumentales de la fratrie impériale, et dont deux des plinthes sont maintenant vides, une explosion attire son attention. Il semblerait que l’une des tours de stockage de la zone ait contenu du nitrate d’ammonium, et pas les précieuses antiquités collectionnées par Malcador le Sigilite, qui avait demandé au Prétorien de Terra de ne pas raser le quartier pour en faire des gravillons (énergétiques), comme il en a la sale habitude. N’écoutant que son statut de protagoniste de nouvelle, Rogal se hâte sur les lieux pour mener sa petite enquête.

Sur place, il constate qu’un début d’incendie a ravagé la façade, et que l’équipe en charge de l’audit/expropriation/démolition a connu une fin horrible et peu commune, les cadavres jonchant l’intérieur du bâtiment semblant avoir été causé par des ondes de choc, des explosions internes ou vaporisations pures et simples de l’individu, ce qui n’est certes pas banal. Pas banale non plus est la sensation persistante et croissante qu’éprouve le Primarque qu’il doit faire demi-tour au fur et à mesure qu’il progresse vers l’épicentre de la catastrophe. Ce mauvais pressentiment n’est pas suffisant pour arrêter la marche (du fils) de l’Empereur, mais les apparitions psioniques (des démons libres de droit, pour faire simple) qui l’attaquent dès qu’il pose le pied dans l’antichambre finale le convainquent de consulter un spécialiste, une fois les fâcheux renvoyés dans le Warp. Et justement, il a une soute pleine d’Archivistes sous scellés en orbite, qui n’attendent que son bon vouloir ou l’arrivée d’Horus pour se rendre utiles2.

Le destin ayant désigné le frère Yored Massak pour prêter main, ou plutôt tête, forte à son Primarque, nous suivons les deux guerriers revenir jusque dans la salle piégée, où les horreurs éthérées re-spawnent avec diligence, pour se faire à nouveau bannir en deux temps trois mouvements par nos héros. Si ces derniers étaient prêts à combattre des ennemis de cette trempe, qui ont fait leur fête aux malheureux larbins ayant eu la mauvaise idée de vouloir faire leur boulot, ils se figent sur place en remarquant les symboles qui marquent les deux gigantesques portes qui terminent le corridor : II et XI

Il s’agit bien entendu d’une référence aux deux Primarques disparus, frappés d’anathème par l’Empereur en personne, mais dont l’éphémère existence reste de notoriété publique au sein des Légions de l’Astartes. Pendant que Dorn se creuse les méninges pour percer ce mystère insondable, Massak parvient finalement à mettre le doigt, ou plutôt la tête, sur le sentiment de déjà perçu qui l’habitait depuis son entrée dans la tour. L’installation psychique de cette dernière a été effectuée par Malcador en personne, l’Archiviste repentant en est certain. Et l’intéressé confirme aussitôt sa déclaration, en arrivant sans crier gare dans la pièce. Ayant envoyé Massak poser des parpaings à l’extérieur pour avoir un peu d’intimité, le Régent de Terra a enfin la possibilité de s’expliquer auprès d’un Rogal Dorn qui sent de manière confuse qu’il s’est fait mindfucker par l’éminence grise dans un passé plus ou moins lointain. Il ne s’explique en effet pas son absence totale de souvenirs de Deuzio et Onzio, alors qu’il dispose d’une mémoire eidétique tout ce qu’il y a de plus primarquielle. Et Malcador d’avouer que c’est bien lui qui est responsable de ce trou de mémoire généralisé, touchant à la fois les Astartes des Légions décapitées (avant qu’ils puissent être réformés et repackagés), mais également les Primarques ayant connu personnellement les fils indignes de Pépé. Mais attention, il avait une bonne raison de le faire, se dépêche-t-il d’ajouter avant de finir tronçonné par l’Homme de Pierre : c’est Dorn et ses frères eux-mêmes qui lui avaient demandé un brainwash pour permettre à l’Imperium de se relever d’une tragédie si terrible qu’elle avait manqué de le mettre à genoux. L’Empereur, comme à son habitude, avait tout vu/su mais n’avait rien dit/fait. Classic MoM move here.

À moitié convaincu par l’explication du Sigilite, qu’il ne peut plus blairer depuis le début de la fortification de Terra, Dorn fronce les sourcils tellement fort que son interlocuteur décide de lui accorder un droit de flashback limité et provisoire sur son passé oublié, afin qu’il puisse se rendre compte par lui-même de la bonne foi du Régent. EVIDEMMENT, le lecteur ne sera pas convié à cette introspection douloureuse, dont les effets se dissipent rapidement mais qui convainc Dorn de la véracité des dires de Malcador, et surtout de la nécessité que ce passé, semble-t-il absolument honteux, de la Grande Croisade ne refasse jamais surface. Lorsqu’il ressort de la tour, il ordonne donc aux équipes venues en renforts de la détruire (plus de gravillons !). De toute façon, Massak avait achevé une copie conforme du bâtiment avant que le sort ne soit rompu par un claquement de doigts de Rogal Dorn, ce n’est donc pas une grande perte d’un point de vue stratégique.

1 : Surtout pour se délecter de le voir ch*er sur les hélotes en contrebas, je pense. Il faut bien trouver un moyen d’évacuer le stress quand on ne boit/fume/joue/prie/couche/rigole pas.
2 : Enfin, plus utiles qu’ils ne le sont à l’heure actuelle, le tricotage d’écharpes pour les soldats impériaux de faction sur les murailles du Palais n’exploitant pas tout le potentiel des Anges de la Mort susnommés.

AVIS:

James Swallow touche à l’un des mystères fluffiques les plus importants du background de l’Hérésie d’Horus dans ce ‘The Chamber…’ et parvient à nous vendre une once de révélations sur la destinée des Primarques disparus comme s’il s’agissait d’une avancée majeure du lore. C’est en tout cas le sentiment qui dominait chez votre serviteur à la fin de la lecture de cette nouvelle, qui contient trop de micro-informations et de sous-entendus sur lesquels gloser à l’infini pour ne pas mériter sa place dans la liste de lecture de tout fanboy/girl revendiqué.e. Mais on n’est certes pas au niveau d’un ‘Legion’ ou d’un ‘Saturnine’ en termes de coup de théâtre, ce qui est somme toute logique pour une histoire au tirage assez confidentiel telle que ‘The Chamber…’. Notons au passage la présence que quelques bouts de fluff « autres » au fil des pages, qu’il s’agisse du Palais Impérial ou de l’armement de Rogal Dorn, ainsi que le retour d’un second couteau souvent employé par Swallow en la personne de Yored Massak (‘La Fuite de l’Eisenstein’, ‘Garro’), et restons-en là.

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First Legion – C. Wraight :

INTRIGUE:

Spécialistes reconnus des campagnes pourries, les Dark Angels ont bien du mal à exterminer les Rangdan, espèce de Xenos experte en subterfuges et en tentacules, ce qui n’est guère du goût des roides et psychofrigides paladins de la Première Légion. Malgré tout, un ordre est un ordre, et les Astartes poursuivent leurs vaillants et violents efforts pour sécuriser ce petit bout de l’empire de leur Pépé, menés par nul autre que Lion El’Jonson en personne. Nous faisons tout d’abord la connaissance du Capitaine Arnaid, 45ème Compagnie, 8ème Ordre, 1ère Légion, dont la frégate a connu des jours meilleurs, mais qui n’hésite pas le moins du monde à intercepter le mystérieux vaisseau qui fait irruption dans la zone de « pacification » avec son Nightsward, bien que le nouveau-venu soit plus imposant et en meilleure forme. Alors que le Capitaine est sur le point d’ordonner un tir de semonce, ses salutations répétées n’ayant pas été retournées par les touristes en goguette, ceux-ci daignent enfin répondre, par la voix d’un autre officier Space Marine, un Capitaine de la nouvellement formée XXème Légion répondant au nom de…

Début spoilerJules-Edouard Petitbedon.

Bon ok : il s’appelle Alpharius. Incroyable, je sais.Fin spoiler

Alpharius s’excuse de ses manières cavalières et de son manque de décorum (son vaisseau, Perseus, a l’air d’avoir quitté les docks spatiaux avant que le Mechanicum n’y passe un coup de peinture), mais annonce qu’il est venu porteur de nouvelles pour Lion El’Jonson.

Pendant ce temps là, nous nous introduisons dans une réminiscence de Lionel en personne, du temps où il était un enfant sauvage qui courait cul nu dans les forêts de Caliban. Notre petit bonhomme semble être occupé à traquer une bête particulièrement bestiale, seulement armé d’une défense de phacochère nain et de sa volonté implacable. Wraight nous fait bien comprendre que c’est la destinée même d’El’Jonson qui est à l’œuvre ici, et entraîne le jeune Primarque au clash contre un monstre que la partie raisonnable/froussarde de Lionel aimerait éviter si possible. Pause pub.

Retour sur le Nightsward, où Alpharius est reçu par son homologue. Constatant qu’il ne sert à rien de féliciter ce dernier sur son goût (pratiquement inexistant) en matière de décoration d’intérieur, ni de tenter de piquer la curiosité (totalement inexistante) de l’austère Terran, l’Alpha Légionnaire qui s’ignore1 tente de soutirer quelques infos psychologiques et tactiques à Arnaid en jouant la carte de la franche admiration pour les exploits et la réputation de la Première Légion, avec un succès relatif. Ces oiseuses discussions sont toutefois interrompues par la réception d’un message autorisant Alpharius à voyager jusqu’à l’Invicible Reason pour y rencontrer Lion El’Jonson, avec Arnaid lui servant de Kaptain pour l’occasion. Simple déformation professionnelle, en somme.

Suite et fin du documentaire animalier commencé un peu plus haut avec la confrontation entre Lionel et sa Némésis, qui se trouve être un chevalier en armure. Car en fait, le zouave qui courrait dans la savane avec son coutelas d’ivoire n’était pas le Primarque, mais une sorte de démon ayant pris forme humaine, et décidé de mettre fin à l’écocide décrété par le chef de l’Ordre. Malheureusement pour notre ami, ce dernier se révèle être un adversaire trop coriace pour ses maigres ressources, et il finit promptement embroché par la rapière du palouf. Voilà qui lui apprendra à ne pas usurper, même littéralement, l’identité d’autrui. Avant de repartir dans le Warp, le Rahan de Caliban a le temps de traiter son assassin de « Premier Fils » et de l’accuser d’être « la mort de son monde », ce à quoi Lionel répond que son titre correct est le tueur de bêtes. Fin de l’épisode.

Sur l’Invicible Reason, le Dark Archangel reçoit comme convenu Arnaid et Alpharius, qui est en fait venu lui proposer un coup de main, en toute amitié2, pour en finir avec la campagne d’extermination des Rangdan. Les pertes terribles souffertes par la Première Légion menacent en effet son statut et son prestige par rapport à ses sœurs, et pourraient faire échapper à El’Jonson le titre de Maître de Guerre, que ce visionnaire d’Alpharius anticipe déjà qu’il sera décerné par l’Empereur à l’un de ses fils dans un futur pas trop lointain (dès que les 20 Primarques auront été retrouvés en fait…wait a minut-). Bien que ne contestant pas l’argumentaire de son petit neveu/frère, Lionel se montre méfiant devant l’intérêt qu’il semble attacher à la prédominance des Dark Angels dans l’équilibre politique de l’Imperium, et après avoir menacé de le couper en deux, en toute amitié, pour le forcer à exposer ses véritables motifs (Alpharius n’aime vraiment pas Guilliman), il le renvoie sur son vaisseau où il lui fera savoir sa réponse sous une heure. Resté seul avec Arnaid, El’Jonson consulte son Capitaine pour avis secondaire, avant de lui révéler que l’énorme poids de… sa parole donnée l’empêche et l’empêchera toujours de placer son intérêt personnel avant celui de son seigneur. C’est sur cette déclaration de loyauté véritablement désintéressée que se termine notre histoire, qui démontre à quel point Lion El’Jonson est un végétal politique. Un concombre, pour être précis.

1 : Il insiste pour être désigné comme être membre de la XXème Légion, sans autre précision. Quel coup de chance tout de même qu’il ait le même nom que le Primarque pas encore découvert de cette dernière
2 : Et surtout parce qu’il ne peut pas blairer Guilliman, ce qui lui fait un point commun avec Lionel.

AVIS:

On retrouve dans ‘The First Legion’ le goût de Chris Wraight pour des petits exposés au débotté sur la géopolitique impériale au moment de la Grande Croisade (tendance déjà aperçue dans ‘Leman Russ : Le Loup Suprême’), et c’est tant mieux si vous voulez mon avis. S’il ne se passe pas grand-chose dans cette nouvelle, on n’en ressort pas pour autant frustré de sa lecture, l’échange entre Alpharius et Lion El’Jonson, qui permet d’identifier les points communs et les différences entre le premier et le dernier de cordée et leurs Légions respectives, ainsi que d’en apprendre un peu plus sur la manière dont les Legiones Astartes étaient perçues par Terra au moment où Pépé songeait à partir en pré-retraite dans le Bhoutan profond, valant son pesant de papier. Lionel y apparaît comme le type imbuvable socialement (il le reconnaît lui-même d’ailleurs) mais irréprochable moralement que les derniers ouvrages de l’Hérésie tendent à dessiner, tandis qu’Alpharius est dépeint comme un intrigant de première, n’ayant aucunement besoin d’un slideshow de la Cabale pour trouver des raisons de comploter dans le dos de tout le monde. Bref, une soumission solide de la part de Chris Wraight, qui fait honneur à ses deux Légions secondaires avec cette nouvelle.

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Embers of Extinction – B. Easton :

INTRIGUE:

Embers of ExtinctionSouvenez-vous de la bataille de Phall. En toute objectivité, Perturabo s’y était fait botter le joint de culasse par un Alexis Polux héroïque en défense, et qui aurait même pu remporter l’affrontement si son pôpa ne lui avait pas hurlé de rentrer tout de suite à la maison depuis la fenêtre du Palais Impérial au pire moment (‘The Crimson Fist’). Ce qui s’est passé immédiatement après cet épisode honteux pour les Iron Warriors, Brandon Easton propose au lecteur de le découvrir ici.

Notre récit commence sur les pondérations mathématiques et paléolithiques du Primarque de Fer alors que le Capitaine Vort de l’Iron Blood passe en revue les pertes subies par la Légion durant le tragique épisode phallique. Il ne faudra pas s’étonner si les Légionnaires développent des complexes à ce niveau et commencent à surcompenser. Bien loin de remettre en question le bien fondé de sa stratégie, dont l’implacable logique se contrefiche bien de quelques dizaines de milliers de morts et centaines de vaisseaux détruits ou endommagés, Perturabo cherche au contraire à maximiser les pertes chez les Imperial Fists, et ordonne donc la poursuite de trois croiseurs loyalistes jusque dans le système de Tarkovsky Epsilon. Une tâche bien triviale pour un vaisseau de type Gloriana, mais si on ne peut plus exercer ses penchants sadiques rigoler de temps en temps, où va la galaxie ma bonne dame ? Comme on peut s’y attendre, le Pylades, le Ramses et la Dévastation ne font pas de vieux os face à la fureur mathématiquement appliquée de l’Iron Blood. Avec un torpillage en règle, un écrasement provoqué sur une géante gazeuse et un éperonnage en bonne et due forme, Pervers Peper’ se paie même le luxe de marquer des points de style en offrant à chacune de ses victimes une fin personnalisée. S’il avait eu un nombre suffisant de victimes, on peut imaginer que l’un des vaisseaux de Dorn aurait été intégralement mastiqué, avalé, digéré et déféqué par son intraitable frangin afin de varier les plaisirs d’un côté et les insultes de l’autre. Et on ose dire que Perturabo n’a pas l’âme d’un artiste !

Cette sidequest rondement menée, le bourreau d’Olympia consent enfin à reprendre des activités normales, comme par exemple se rendre sur Hydra Cordatus, où l’attendent Fulgrim et ses Emperor’s Children, ainsi qu’un nouveau camp retranché romain Imperial Fists à raser de fond en comble, afin de prouver à l’Empereur qu’il est le plus brave de tous les peuples de la Gaule, ou quelque chose comme ça. Tout cela a été couvert dans ‘Angel Exterminatus’ et nous intéresse donc pas ici. En revanche, Easton se permet de meubler un autre « blanc » du parcours hérétique de son héros, précisément le moment qui suivit la remise de Forgebreaker à Perturabo par Horus en gage d’une bro-itude éternelle. L’épisode ayant eu lieu quelques semaines après la purge de sa planète d’adoption, il est somme toute logique que le Primarque se soit retrouvé avec un peu de temps à tuer, après avoir épuisé tout son stock d’Olympiens (à tuer également, pour ce qui ne suivent pas). Malgré la perfection manifeste de son cadeau, forgé par Fulgrim en personne, Perturabo ne put s’empêcher d’apporter de nombreuses modifications à l’arme, dont un changement de son centre d’équilibre afin d’en maximiser les dégâts1. Cette longue session de forge fut également l’occasion d’échanger quelques aphorismes impatients et acérés avec un de ses fistons, le pâle autant que curieux Arhalin, dont les questions lancinantes ne s’avèrèrent pas assez stupides pour que son père juge bon de l’utiliser comme sac de frappe pour tester son nouveau jouet. Cela ne s’est pas joué à grand-chose, ceci dit…

1 : Et également (et surtout) pour déconcerter et handicaper un éventuel adversaire qui tenterait de retourner Forgebreaker contre lui. Easton a tapé dans le mille avec ce mélange de paranoïa absurde et de rationalité implacable, tout à fait « perturabien » dans l’esprit.

AVIS:

Débuts solides et sérieux pour Brandon Easton, qui n’a pourtant pas choisi la facilité en documentant deux épisodes de la vie de Perturabo prenant place entre plusieurs périodes et événements déjà traités par d’autres auteurs avant lui (French, McNeill et Haley, pour n’en citer que trois). Le risque de faux raccord s’en trouvait logiquement accru, mais le rookie s’est fort bien acquitté de sa tâche, en inscrivant sa prose dans la droite ligne de celles de ses prédécesseurs. Au passage, il confirme et souligne le portrait psycho-rigide et surhumainement intransigeant de l’Homme de Fer à l’aide d’exemples et d’illustrations de son cru, ce qui permet d’envisager Perturabo sur un jour à la fois un peu différent et totalement cohérent avec le reste du corpus hérétique (que j’ai lu). Tous les Primarques et personnages de l’Hérésie n’ayant pas eu cette chance, pour diverses raisons (au rang desquelles le manque de recul et de préparation de nouveaux auteurs), je me devais de saluer le sans-faute d’Easton à cet endroit.

J’ai également bien aimé les raisons convoquées par l’auteur pour expliquer pourquoi un être aussi rationnel et résilient que le fils d’Olympia a fini par commettre l’inexplicable : trahir son Père et l’Imperium pour le Chaos. Selon Easton, ce serait – en partie – à cause de la trop grande tolérance de Pépé envers le mysticisme et les chicaneries en tout genre dans lesquelles le genre humain à tendance à se vautrer naturellement. Pour un progressiste hard boiled comme Perturabo, il aurait fallu guider l’humanité au forceps vers un idéal de perfection scientifique et technique, en extirpant au passage tous les corps et concepts « mous » venant freiner la transition. Ce à quoi on pourrait répondre que c’est justement ce à quoi l’Empereur tendait, comme sa tentative malheureuse d’excommunier le fait religieux l’a laissé apparaître. Sans doute était-ce trop peu et trop tard pour son intraitable fiston, dont la patience a fini par craquer à la suite de sa campagne cauchemardesque contre les Hruds et l’annonce de la trahison d’Olympia. Cette nouvelle nuance de gris sur la palette de la trahison de l’Iron Man vient enrichir le camaïeu de sa psyché (si si), sans jurer avec les touches déjà apportées par les biographes précédents de notre homme. Pas mal du tout. J’ai donc hâte de lire la suite des travaux de Mr Easton pour la BL, en espérant qu’il reste dans cette veine.

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Lupus Daemonis – G. McNeill :

INTRIGUE:

Sur Cthonia, la vie est d’une dureté et d’une violence absurde. Les meurtres et pillages sont monnaie courante (par contre il n’y a pas de monnaie, c’est trop avancé pour cette brillance société), les dizaines de clans tribaux se disputant ressources et territoires passant leur temps à se fritter les uns aux autres. Une vie humaine vaut moins qu’un couteau à huître bien aiguisé, et on apprend aux enfants dès leur plus jeune âge à ne pas se laisser prendre vivant par l’ennemi1. Les ados ne rêvent que du jour où ils auront tué leur premier adversaire au combat, mutilé son cadavre et gagné le droit de faire la ola autour de leur suprême leader pendant qu’il décapite à l’opinel une malheureuse victime. Bref, c’est du grim.extra.dark auquel nous avons droit en guise de décor, dans lequel évolue tant bien que mal notre héros Nagui. Euh pardon, Nergüi.

Nergüi occupe une place à part, et pas vraiment enviable, parmi les Reivers (son clan d’adoption). Il a été trouvé en train de pendouiller à un croc de boucher par le puissant Khageddon, qui décida de le sauver du destin de cheeseburger auquel il était destiné, pour des raisons qu’il a lui-même du mal à s’expliquer. En fait, toute la tribu déteste et craint en même temps Nerguï, dont le nom signifie « personne » dans le chantant dialecte chtonien. Ce patronyme lui a été donné par Khageddon, là encore sur un éclair de génie non expliqué, et soi-disant pour assurer la protection des Reivers. La menace qui pèse sur ces derniers est laissée à l’imagination du lecteur, mais ce n’est en tout cas pas Nerguï qui y contribuerait de façon sérieuse. Notre héros est un avorton couturé de cicatrices, doté d’un corps de lâche mais d’une résilience hors du commun, ce qui l’aide à encaisser les nombreuses bastonnades auxquelles il est régulièrement sujet. Ah, et il a des yeux gris vert aussi. Qui doivent sans doute servir à envoyer des clins d’œil au lecteur sur sa véritable identité, au cas où cela serait nécessaire.

Après avoir vu ses camarades être « diplômés » sans lui grâce à leur participation à un raid contre les Deeprats, avoir échappé de peu à la mort des mains du bully de service, balancé le cadavre de celle qui a eu le malheur de prendre sa défense et s’est donc faite poignarder pour la peine dans une faille magmatique, avoir failli être poussé à son tour dans la faille par ce père indigne de Khageddon (qui passait par là et ne maîtrise pas bien ses pulsions), le tout en l’espace de 82 minutes, Nerguï décide qu’un petit break ne lui ferait pas de mal. Il part donc  pour la surface de Cthonia voir si l’herbe y est plus verte, ou la lumière plus bleue, que dans les cavernes des Reivers. Sur le chemin, il croise un supplicié en fin de vie qui lui servira de toute première victime (on n’oublie jamais sa première fois il paraît), avant d’arriver enfin à l’air libre.

Là, après avoir constaté que tout est aussi abandonné qu’on le lui avait dit, mais construit à l’échelle 3:1 (ce qu’on ne savait pas, et qui ne sert à rien dans l’histoire, mah bon), il perturbe les fouilles entreprises par ce que l’on devine être une expédition de l’Adeptus Mechanicus. Les Skitarii de garde ayant réglé leur protocole d’interaction avec les locaux sur le mode ‘Murica, ils tirent à vue sur le pauvre Nergüi, qui parvient tout de même à en tuer un au corps à corps et à lui piquer son fusil avant de repartir en sous-sol. S’il espère que le récit de ses exploits et le cadeau de ce trophée peu banal à Khageddon lui permettront de se faire accepter comme guerrier scarifié chez les Reivers, il lui faudra rapidement tempérer ses espérances. Sous ses abords de brute épaisse, Khag’ est un érudit, qui comprend que son punching ball adoptif s’est fait un ennemi un peu plus balèze que les bandes de goules aux yeux bleus qui hantent la surface de Cthonia. Il lui met donc une mandale paternelle pour lui apprendre la vie pendant que le plafond commence à s’écrouler sur la tribu, catastrophe causée par l’arrivée en termite des forces du Mechanicum. Il faut croire qu’ils pucent tout leurs fusils. Qui pourrait les en blâmer ceci dit.

Dans le séisme qui s’en suit, Nerguï, qui est passé en mode adolescent rebelle en lutte contre l’autorité depuis sa sortie à l’air libre, décide pour la première fois de rendre les coups, et plante donc son couteau dans le cœur de Khageddon, pour l’ensemble de son œuvre dirons nous. Mais attention, il le fait avec la bénédiction de ce dernier, dont les desseins resteront à jamais un mystère pour la science je pense. Dans ses derniers moments, Khageddon accomplit sa cryptique destinée en chuchotant à l’oreille de Nergüi son véritable nom. Et là, surprise.

Non pas qu’apprendre que Nergüi = Horus soit à ce stade une révélation sidérante (si c’est le cas, vous avez peut-être raté le titre de l’ouvrage et le titre de la nouvelle, qui donnaient tout de même des bons gros indices, hein). Mais c’est ce que cette connaissance déclenche chez notre héros qui est proprement bluffant. En quelques mots, Horus apprend par cœur tous les articles de Wikipedia, et envoie un poke psychique à son Pépé qui attendait telle la sœur Anne dans sa tour terrane, et contemplait la galaxie d’un air pensif en se demandant ouksé que ses fistons étaient, nom de Lui-Même. L’Empereur a alors ces trois mots éternels : +Pas trop tôt+, qui font, par absence de meilleure image, évoluer Horus. En mode Pokemon, exactement. Adieu au Magicarpe maigrichon et emo qu’était Nergüi, et bonjour au Léviathan majestueux mais colérique qu’est Horus. La nouvelle se termine sur la promesse d’une réunion prochaine entre le Père et le fils, si tant est que ce dernier ne massacre pas à mains nues les pauvres émissaires de l’Omnimessie. Ça m’étonnerait pas qu’il ait un trouble du caractère, ce petit gars.

1 : On les abandonne aussi dans les souterrains pour voir s’ils ont un sens de l’orientation correct. C’est une éducation complète(ment barge).

AVIS:

Graham McNeill ne fait pas dans la subtilité avec cette nouvelle horusienne, aussi larger than life que son héros (quand il adopte enfin sa forme finale, s’entend). Si le lecteur voulait avoir des révélations sur l’enfance du Primarque #1, avant que l’Empereur n’obtienne le droit de garde, il en aura certes pour son argent. Savoir que penser de ces révélations, qui posent plus de questions qu’elles n’apportent de réponses, est en revanche un débat distinct, auquel je soupçonne qu’il est encore trop tôt pour pouvoir participer. Au moment de sa publication, ‘Lupus Daemonis’ entraîne en effet le fluff hérétique sur des rivages inconnus (le stade « larvaire » des Primarques – à moins que Horus soit le seul concerné –, à ma connaissance jamais décrit à ce stade, mais également l’espèce d’aura de destinée manifeste qui entoure Nergüi et influence, de façon tellement grossière que tout le monde s’en rend compte, les actions de ses proches), que l’on pourrait considérer comme un peu too much de la part de McNeill, si « tard » dans la saga et sans donner plus d’explications. Mais comme cet auteur a prouvé qu’il adorait dérouler ses arcs sur le temps long, et qu’il lui reste encore quelques occasions de revenir sur l’origine d’Horus (au moment où cette chronique est écrite tout du moins), il se peut que ces additions volontairement choquantes soient intégrées de manière plus harmonieuse dans le reste du background de l’Hérésie en fin de compte1. Quoiqu’il en soit, on tient avec ‘Lupus Daemonis’ l’un des must-read des nouvelles Primarques, non pas par sa qualité intrinsèque (vous l’aurez deviné), mais par ses apports à l’historique du personnage principal de la série.

1 : Si c’est le cas, j’espère que McNeill expliquera également comment Cthonia n’est pas devenue une planète chaotique, vu l’anarchie sanglante et sadique qui y règne depuis des décennies. Je comprends que ça permet de renforcer la vibe « enfance difficile » d’Horus, mais si on pouvait éviter de s’arranger avec un des concepts cardinaux du lore de 40K, ça m’arrangerait.

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Skjalds – N. Kyme :

INTRIGUE:

Un monstre rôde dans l’arrière-pays de Fenris, attaquant des villages isolés et massacrant tous leurs habitants, depuis le huskarl sans défense jusqu’au bébé sans peur. Un jeudi normal sur un monde hostile, en quelque sorte, sauf que le monstre en question came to the wrong neighborhood, à savoir celui de Baerelt, Torvur, Ulfvye et Laggenhuf. Ces quatre hardis chasseurs ayant chacun perdu un ou plusieurs êtres chers dans l’attaque de l’innommable et innommée bestiole, ils ont fait le serment de traquer cette dernière et de mettre fin à ses déprédations. Et tant pis pour la biodiversité terrestre fenrissienne, qui se porte parfaitement bien vous pouvez me croire. L’histoire commence alors que notre petite bande est en train d’essayer d’allumer des torches pour y voir quelque chose dans la tempête de neige nocturne qui s’est abattue sur eux. Ce qui est bien le cadet de leurs soucis, car des profondeurs de la toundra jaillit bientôt un mini boss, une draugr.

Cette dernière (car le cadavre desséché et tirant la langue qui fond sur les chasseurs pour leur rouler des gamelles est indubitablement féminin) donne du fil à retordre aux humains, qui finissent toutefois par en venir à bout d’un jet de torche bien placé, mais perdent une lance dans la bataille. Ce qui est presque aussi grave que la mort d’un guerrier, si on écoute le vieux ronchon de service (mais expert en lance, sans doute parce qu’il a le bras fort), Ulfvye. Malgré l’issue heureuse de cette bataille, il ne fait pas de doute pour Baerelt que la draugr n’était qu’une vamp opportuniste, et pas la bête responsable de tous les malheurs de sa communauté. La petite troupe reprend donc sa marche sous un léger crachin (humour), et finit par bivouaquer dans une caverne miraculeusement vide de tout prédateur alpha. Le temps gagné à ne pas avoir à faire la peau à un phacochère laineux ou à un gigagolin est utilement mis à profit pour échanger quelques récits épiques au coin d’un feu de brindilles. Transformés en skjalds pour l’occasion, les compères s’écharpent sur la véridique légende du Russ, l’incarnation de l’hiver fenrissien, considéré par l’un comme un géant à lance de gel, par l’autre comme une tempête de neige douée de raison, par le troisième comme un loup géant qui accompagne les âmes dans l’autre monde, et par le dernier comme un roi. Et comme le gage de cette veillée était manifestement le premier tour de garde pour l’histoire la plus pourrie, c’est Baerelt le barbant qui s’y colle.

Le lendemain, les chasseurs se remettent en route et parviennent à un village qui a reçu la visite du monstre il y a peu de temps, comme les cadavres massacrés et à moitié boulottés des habitants en témoignent. S’étant rendus compte que quelque chose ou quelqu’un était toujours présent sur place, nos héros convergent sur la salle commune de la bourgade, qu’ils trouvent en effet occupées par un animal gigantesque, recouvert d’une fourrure hirsute, munis de crocs acérés et dégageant une odeur abominable. Vous l’avez compris, c’est Leman Russ en personne (qui se fait appeler ici Jotun, pour préserver son anonymat sans doute) qui fait son apparition dans l’histoire, et après avoir indiqué aux traqueurs tétanisés par son aura primarquielle qu’il est également sur la piste du gros gibier, accepte que ces derniers le suivent dans son pistage. Il a pour cela une méthode infaillible : suivre les loups.

Sortis du village à la suite de leur nouveau copain, Baerelt et Cie ne tardent pas à se rendre compte que si les loups peuvent être suivis, ils peuvent également suivre. Aussi, lorsqu’une meute de six herravargr (des loups géants) encercle le club des cinq au sommet d’une falaise, l’ambiance retombe un peu. Le combat qui s’en suit se termine par une nouvelle victoire de l’équipe bipède, en grande partie grâce à l’intervention efficace de Jotun, mais Ulfvye est gravement mordillé dans la bagarre, ce qui ralentit la progression de ses camarades. Comme la veille au soir, les chasseurs passent le temps en devisant au coin du feu et c’est au tour de Jojo de donner sa version du mythe de Russ, qu’il connaît sans doute mieux que la moyenne. Et en toute modestie, il choisit de raconter son histoire (sans dire qu’il s’agit de lui, évidemment), celle de l’enfant sauvage élevé par les loups et adopté par un roi de Fenris, avant que l’Empereur ne vienne plomber l’ambiance d’un petit gueuleton entre copains, on connait la suite.

Le jour suivant, la traque reprend et amène les chasseurs jusque dans une forêt, où ils croisent un Wulfen bien amoché sur le bord du sentier. Il ne fait aucun doute que le lycanthrope a combattu la bête (et a perdu), mais plutôt que de venir en aide à son fiston poilu, Jotun continue sa route en laissant le wyrd du comateux faire son office. Un peu plus loin, c’est le grand ménage parmi les suiveurs du Primarque, Ulfvye décédant d’une hémorragie interne, et Torvur et Laggenhuf ratant leur test de commandement lorsqu’ils entendent le monstre faire sa balance en préparation du combat final. Ne reste donc plus que Baerelt pour sauver l’honneur des péquenauds de Fenris, ce qu’il fait en partant à la poursuite de Jotun, qui n’a pas attendu de voir qui lui collait au train pour régler ses comptes avec le monstre de la pampa…

Début spoiler…Ou plutôt, les monstres. Car c’était un bien un couple d’ours géants avec des bois de cerf, ou beer en langage scientifique, qui était responsable de tout ce tintouin. N’étant venu qu’avec une hache même pas énergétique pour mieux se fondre dans la masse, Leman se retrouve rapidement dans le mal. Et même si l’andouille parvient à saisir un de ses adversaires par les andouillers, dans le but de lui tordre le cou jusqu’à ce que mort s’en suive, cette manœuvre n’a de chances d’aboutir que si elle n’est pas interrompue. Il faut donc que quelqu’un distraie Maman Ours jusqu’à ce que Boucles d’Or ait fini le sale boulot. Et ce quelqu’un, ça ne peut être évidemment que Baerelt. Enfin, pendant à peu près trois secondes, car notre héros est ensuite rejoint par le Wulfen croisé un peu plus tôt, assez remis de ses émotions pour demander une revanche à ses vainqueurs. Bilan de cette deuxième manche : une nouvelle victoire de la grande ourse sur Mini Loup, qui finit la baston en deux morceaux, mais de très peu. La bête fauve s’écroule en effet quelques instants plus tard, cannellisée à titre posthume par le Space Wolves déchu1. En arrière-plan, Jotun avait réussi à décoller les cervicales à l’autre affreux, ce qui met fin aux déprédations de Baloo et Baloote. Notre histoire se termine sur l’arrivée d’un Thunderhawk, venu raccompagner le patron vers le Croc où une mission importante l’attend sans aucun doute. On ne peut pas passer sa vie à se ressourcer dans la nature quand on est un Primarque, et c’est bien dommage…Fin spoiler

1 : Ce qui est finalement un destin enviable pour un membre du rout, puisque cela fait ch*er les Dark Angels.

AVIS:

Nick Kyme revient à ses anciennes et velues amours (les Salamanders étant plutôt écailleux, comme chacun sait), avec ce récit fenrissien de facture classique. Fort heureusement pour nous, l’auteur a progressé, ou s’est davantage intéressé à son sujet, depuis l’époque héroïque de ‘Thunder from Fenris’ et ce ‘Skjalds‘ s’avère être une lecture plaisante… au premier degré1. Si l’intégration de cette histoire dans l’anthologie ‘Blood of the Emperor‘ retire évidemment tout suspens sur la véritable identité de Jotun, cette absence de surprise est compensée par d’autres éléments intéressants, à commencer par une intrigue plus surprenante (là encore, dans le bon sens du terme) qu’à l’accoutumée pour une nouvelle de Kyme: le premier accrochage avec le.a draugr, dont on ne sait pas s’iel est le monstre traqué par les chasseurs constitue ainsi une sorte de prélude sympathique au reste du récit. Le choix de l’auteur de narrer son récit avec une perspective « humaine » lui permet également de glisser quelques infos sur la manière dont Russ considère l’Empereur, ses frères, sa Légion et son rôle dans l’Impérium, à la manière de confidences échangées sans arrière-pensées, pour le seul bénéfice du lecteur. Enfin, cette nouvelle n’est pas avare en fluff (pas moins de quatre légendes différentes sur le Russ, tout de même) ni en fragments de lore Space Wolves: je pense particulièrement aux considérations du Primarque sur les Wulfens, qui sont à replacer dans la saga du rout2, mais également au rôle proprement héroïque (au sens grec antique du terme) que Leman Russ choisit d’occuper dans la culture de Fenris, en tant que guerrier solitaire accomplissant des exploits pour le compte d’un peuple qui ignore sa véritable identité. Bref, une nouvelle qui vaut tout à fait le détour pour qui s’intéresse aux mythes et légendes du Vlka Fenryka, et un pas accompli par le skjald Nick Kyme sur le chemin de sa rédemption littéraire.

1‘Thunder from Fenris’ valant également le détour, mais pas d’une façon dont son auteur serait fier.
2Avant ou après la campagne de Dulan, pendant laquelle les Space Wolves apprennent que leur père savait pour les Wulfens? Si l’absence de réaction des deux Astartes qui servent de Kaptains à leur Primarque devant le cadavre de l’homme loup à la fin de l’histoire n’est pas un bête oubli de Kyme, ce serait plutôt la deuxième option qui tient la corde.

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The Sixth Cult of the Denied – D. Guymer :

INTRIGUE:

Aqhet Hakoris, Sergent au sein des Thousand Sons et explorateur au long cours du grand océan qu’est le Warp, est persuadé d’avoir fait une découverte fondamentale sur la nature de cette dimension mystérieuse, d’où sa Légion et son Primarques tirent leurs pouvoirs surhumains. Aidé dans ses recherches par deux associés Légionnaires (Khaleif et Nepfithu), ainsi que par son jeune et prometteur padawan (ou practicus, en prosperien) Djet, Hakoris doit présenter les résultats de ses recherches à un conclave d’Astartes dans le cadre de la prochaine session d’exposé libre organisée dans la capitale de la dernière planète conquise par les Thousand Sons, Thera. Impatient à l’idée de mettre ses idées à l’épreuve de la légendaire sagacité de la XVème, notre héros se rend dans la grande pyramide élevée au centre de Therebarg suivi par ses side kicks pour effectuer sa démonstration.

Une mauvaise surprise l’attend toutefois sur place : au lieu de la foule compacte qu’il attendait et espérait, l’amphithéâtre où doit se tenir sa soutenance n’accueille que six Astartes. Pas n’importe lesquels cependant : rien de moins que l’Ecuyer du Primarque, Amon, et les chefs des cinq cultes de la Légion, dont bien sûr l’inévitable Ahzek Ahriman. Autrement dit, le rehati, ou Comex des Thousand Sons, nommé par Magnus en personne. Faisant contre mauvaise fortune bons cœurs, Hakoris se présente comme le Magister du culte de l’Aquilae, titre auto-décerné qui fait grincer quelques dents et froncer quelques sourcils dans l’auguste assistance. En plus des problèmes immobiliers qu’une telle reconnaissance susciterait, les cultes établis ne sont pas très chauds à l’idée de reconnaître une nouvelle discipline qui ne serait non pas leur égale, mais leur supérieure, en cela qu’Hakoris affirme que c’est de l’Aquilae que proviendrait les « spécialisations » de chaque culte (à l’aide d’une métaphore mettant en scène Babar, Ray Charles, Stevie Wonder et Gilbert Montagné). Le vaillant petit théoricien n’a cependant pas loisir de commencer son exposé qu’arrive le big borgne en personne, qui se téléporte dans la salle1 et place une mention strictement confidentielle sur les futurs débats, enjoignant les présents à ne pas partager ce qui sera échangé ce jour, et brouillant la wifi (ou plutôt le Warpi) pour empêcher que des tours de passe passe psychiques ne viennent perturber la discussion.

Logiquement impressionné et pris au dépourvu par la venue impromptue du Primarque, Hakoris a bien du mal à défendre ses idées, d’autant plus qu’il perçoit vite que Magnus n’est pas aussi ouvert d’esprit et bienveillant envers ces dernières qu’il le donne à voir. Hakoris ayant fait ses découvertes sur la nature du Warp en bravant l’interdit paternel de ne pas chercher à communiquer avec les formes de vie « aquatiques » peuplant le grand océan (les démons quoi), il se retrouve dans une situation délicate, et se résout à mentir au Roi Écarlate pour éviter une remontrance qu’il devine être potentiellement très sévère. Ayant demandé et obtenu une pause clope pour se remettre les idées en place, Koko réunit ses acolytes et prend une décision que l’on qualifiera poliment d’audacieuse : tenter d’invoquer un démon comme témoin, en passant outre le sceau psychique apposé par Magnus en personne. Bien évidemment, cet appel à un honni2 tournera court, Mag’ étant beaucoup trop omniscient et omnipotent pour laisser une entité chaotique venir suinter sur la moquette de sa pyramide. La franche explication de texte entre le Primarque et le Légionnaire, si elle ne se solde pas par la mort subite du Thousand Son, viendra toutefois rappeler à Hakonis que si la recherche fondamentale, c’est bien, l’obéissance, c’est mieux, surtout dans un Imperium qui regarde déjà un peu bizarrement les frasques arcaniques de la XVème Légion. Après avoir décillé son naïf subordonné sur la véritable nature des démons, qu’il a fait semblant de ne pas connaître pour ne pas « corrompre » l’esprit du raheti avec cette connaissance empoisonnée, Magnus fait comprendre à Hakonis qu’il a tout intérêt à changer son bolter d’épaule lors de son imminente soutenance, pour le bien du reste de la Légion (et sa survie à court terme).

J’ai bien dit son imminente soutenance, car le borgne est tellement balèze qu’il est parvenu à arrêter le temps sans qu’Hakonis ou les autres participants à la présentation ne s’en rendent compte. Résultat des courses : notre héros se livre à un exposé aussi banal que consensuel sur le grand océan, à la surprise et/ou à la déception de son auditoire. Il n’y aura pas de reconnaissance du culte de l’Aquilae, et Hakonis est mis au placard dans une zone de guerre de troisième ordre au cours des années qui suivent pour éviter quesles vues hétérodoxes (on ne parle pas encore d’hérésie à cette époque) ne provoquent un schisme dans la Légion, au cas où il déciderait de reprendre ses activités prosélytes. Et c’est une sage précaution de la part de Magnus car, neuf ans après la fin du conclave de Therebarg, le Sergent dégradé décide qu’il est temps pour lui d’avoir une nouvelle discussion avec un vieil, et même éternel, ami, qui attendait patiemment son appel depuis son petit F3 au fond du Warp…

1 : Les Thousand Sons n’ont pas la même compréhension du terme télétravail que le reste des mortels.
2 : Une personnalité du Warp attention : rien de moins que the Dweller in the Abyss, aussi connu sous le nom de Choronzon. Même Aleister Crowley l’avait croisé de son temps.

AVIS:

David Guymer se fait et nous fait plaisir dans l’exploration de l’histoire, forcément alambiquée1, de l’âge d’or des Thousand Sons. Après avoir retrouvé leur Primarque et vaincu le fléau de la mutation, tout semblait bien aller pour les golden boys de Tizca… jusqu’à ce que leur sale manie d’aller chercher midi à 14 heures et de ne pas appliquer le sacro-saint principe de précaution leur joue des tours. Si ‘The Sixth Cult of the Denied‘ ne finit pas aussi mal pour le XV de l’Empereur que l’Incendie de Prospero, les déboires de Hakoris offrent une similitude frappante avec ceux de son borgne de père, des années/décennies plus tard. Et les raisons à l’origine de la disgrâce de l’un comme de l’autre sont frappées du même sceau de l’hubris: à croire naïvement que toute vérité mérite d’être établie, et qu’il n’y a pas de sujets tabous dans un univers où le spirituel joue finalement un rôle aussi grand que le matériel, le wanabee chef de culte pave la route qu’empruntera son Primarque, avec les conséquences que l’on sait. Il est ainsi amusant et révélateur du caractère de Magnus « I’m so SMRT » Lerouge de le voir adopter la posture toute impériale du « faîtes ce que je dis, pas ce que je fais, et je vous explique pas pourquoi parce que vous êtes trop c*ns » face à son fiston. Cet écho de la grande histoire dans la petite est une trouvaille sympathique de la part de l’auteur, et une raison suffisante de lire ‘The Sixth Cult of the Denied‘.

En plus de cela, cette nouvelle s’avère très riche en fluff Thousand Sons, depuis la révélation de la (presque) existence d’un sixième culte au sein de la Légion, jusqu’à l’identification d’une conquête de cette dernière, en passant par la description de la vision qu’à Magnus de l’assujettissement des planètes intégrées par l’Imperium, où encore des aspects de la culture des Thousand Sons, comme le système d’apprentissage liant novice et initié (qui ressemble un peu, et c’est ironique pour de tels opposés, à celui des Black Templars). La présence de la plupart des têtes connues de la Légion lors de la soutenance d’Hakoris, même si elle sont cantonnées à de la figuration (à part Amon, un peu plus développé que le reste du casting), ajoute un surplus d’awesomeness à l’histoire, et il est probable que Guymer ait caché quelques bribes de révélations seulement accessibles à l’érudit prospérien (ce que je ne suis pas à ce stade) dans les interactions entre Hakoris, ses disciples et son jury. Cependant, c’est Magnus qui crève l’écran dès son apparition, l’auteur parvenant parfaitement à retranscrire la quasi omnipotence et omniscience du Primarque, qui sait et peut (presque) tout. Ces capacités psychiques inégalables et insoupçonnables même pour les plus doués de ses fils servent bien l’intrigue en permettant à Guymer en rebootant l’exposé d’Hakoris, une fois que ce dernier a été convenablement briefé sur ce qu’il a intérêt à dire. Bref, une franche réussite pour David Guymer, qui démontre ici sa capacité à mettre en valeur une nouvelle Légion d’Astartes (après les Iron Hands et les Dark Angels).

1: À quoi fallait-il s’attendre de la part d’adeptes de la pensée complexe, aussi.

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The Will of the Legion – A. Clark :

INTRIGUE:

The Will of the LegionLa 3ème flotte d’expédition de la Grande Croisade, engagée dans la joyeuse réunification humanitaire de la galaxie désirée par l’Empereur, est tombée dans une embuscade à la sortie d’une rocade warpienne. Assaillis par l’armada destroy mais pléthorique des Driftborn, une civilisation humaine ayant passé quelques millénaires à vivoter dans une ceinture d’astéroïdes en s’adonnant à la récupération et à l’upcycling des épaves passant à portée de leurs cités roches (les ruches, ce sera après le passage à l’âge impérial), les Imperial Fists qui constituent le gros (et le grand) des forces expéditionnaires se font donc un devoir de repousser les piteux abordages de leurs lointains cousins. Nous faisons ainsi la connaissance du Capitaine Hashin Yonnad, de la 39èmeCompagnie Maisonnée d’Inwit, alors qu’il mène une escouade de Breachers, le corps anti-émeutes de sa Légion, dans la purge du Tribune, vaisseau amiral de la flotte impériale. Ayant massacré la plupart des malheureux corsaires ayant croisé sa route, et fait, dans son infinie bonté, prisonniers les autres avant qu’ils ne meurent de froid  dans les coursives extérieures mal isolées du Tribune, Yonnad reçoit une convocation urgente à se rendre à l’autre bout du vaisseau, où il embarque sans tarder dans un Stormbird, en compagnie de ses vétérans… et de Rogal Dorn, rendu très chafouin par la tournure prise par les événements1.

Rendu perplexe par l’absence de briefing quant au déploiement de la force de frappe Astartes que le Primarque emmène à l’assaut de la principale cité ennemie, Yonnad demande respectivement à son boss de bien vouloir partager sa gnose avec ses fistons, afin que ces derniers soient en mesure de mener à bien ses plans. Dorn s’exécute, et indique à ses Légionnaires que leur cible est un dôme stratégiquement important, dont la capture mettra fin au conflit de façon rapide. La moue désapprobatrice (encore plus que d’habitude) qu’il affiche fait cependant rapidement comprendre à Yoyo que les Driftborn ont épuisé la patience, pas très fournie de base, du Primarque, et que ce dernier considère très clairement l’annihilation pure et simple de ces derniers comme une option de travail. Après tout, la mort, autant que le mur, est son métier.

Débarqués en plein cœur du marché aux puces local, les Imperial Fists tracent la route sans trop (trois morts) forcer jusqu’à leur objectif, massacrant l’arrière garde adverse au passage, un Rogal Dorn toujours aussi revêche collé à leur train. Papa se contente en effet de marcher derrière sa marmaille en fronçant très fort les sourcils, observateur plutôt qu’acteur de la sanglante et implacable progression impériale. Une fois le dôme sécurisé, il demande, que dis-je, il orDORNne à ses Techmarines de bidouiller les consoles de l’endroit afin de pouvoir disposer d’un gros bouton (sans doute jaune) qui pourra couper le chauffage et l’air conditionné  l’échelle de la cité entière d’une simple pression, avec des conséquences funestes pour qui ne porterait pas une armure énergétique (ou s’appellerait Marneus Calgar). Trop snob pour se salir les mains, il somme le brave Yonnad de se mettre en position devant le buzzer magique, tandis que lui donne une dernière chance à ses malheureux adversaires de se rallier à l’Imperium. Ayant bien fait comprendre aux Driftborn qu’il avait été bien gentil jusqu’ici, mais qu’il n’avait, en sa qualité d’architecte de la destinée galactique de l’humanité (d’abord) et de décorateur intérieur de l’Empereur (surtout), absolument rien à carrer de leur civilisation minable, il leur donne royalement impérialement quelques instants de réflexion après avoir terminé sa harangue. Assez pour plonger Yonnad dans de profondes considérations éthiques quant à la trop grande facilité qu’il aurait à presser le bouton, et donc à signer l’arrêt de morts de millions d’êtres humains, pas coupables de grand-chose au fond, sur un simple branlement du chef de son Primarque. Fort heureusement pour notre héros philosophe, les Driftborn choisissent sagement de capituler, rendant leur dépressurisation inutile. La nouvelle se termine sur cette victoire décisive de la Team Pépé, qui ne suffit cependant pas à dissiper les doutes du Capitaine Dubious. Béni soit l’esprit…

1: Cela se perçoit dans la manière dont il prononce « connerie ». Et je ne parle pas de son accent chantant de Mareuh-seilleuh.

AVIS:

Petite nouvelle de bonne facture de la part d’Andy Clark, qui donne un peu de profondeur tant à Hashin Yonnad, avant sa sortie de route sur Phall, qu’à Rogal Dorn, qui gagne ici quelques précisions fluffiques qui ne manqueront pas d’intéresser le chaland, en attendant que le Primarque trumpien (build the wall!) ne dispose de son tome dans la série du même nom. Les lecteurs du troisième livre Forge World de l’Hérésie d’Horus apprécieront sans doute également de revoir apparaître les Driftborn du Consus Drift, présentés dans ce même ouvrage il y a quelques années. Narrativement parlant, l’intérêt principal de The Will of the Legion repose toutefois dans ses dernières pages, et la réalisation incrédule et dérangeante par Yonnad de son total endoctrinement à la cause de Dorn, dont il appliquera sans hésiter tous les ordres, même les plus immoraux. Nul doute que Clark voulait faire ressortir par cette réflexion intérieure toute l’ambivalence de l’Hérésie d’Horus, dont beaucoup des combattants se sont retrouvés dans un camp qu’ils n’avaient au final pas vraiment choisi, simplement parce qu’ils s’étaient contentés de suivre l’exemple, presque irrésistible, de leur Primarque. Il réussit bien son coup, et souligne donc de manière convaincante qu’entre « gentils » et « méchants », la ligne est souvent des plus fines.

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Council of Truth – M. Brooks :

INTRIGUE:

Sur l’Alpha, vaisseau amiral de la Légion du même nom, une réunion secrète a lieu entre quatre Astartes. Ou plutôt, trois Astartes et un Primarque. Réunis dans un cagibi étroit comme les navires de l’Alpha Legion en comptent un nombre irrationnel, les surhommes participent à un conseil de vérité, sorte d’interrogatoire sans haine, sans arme et sans violence (pour changer) dont le but est de clarifier une situation complexe ou des motivations absconses. Ce qui est assez fréquent chez les sous-fifres d’Alpharius, reconnaissons-le. Il n’est en revanche pas usuel que ce soit ce dernier qui se trouve dans la position du cuisiné. En cause, son manque flagrant d’esprit de camaraderie lorsque l’Alpha Legion s’est trouvée associée aux Ultramarines de Guilliman lors de la conquête de la Conservation Tesstranne, un empire humain isolé n’ayant pas trouvé bon de prendre son abonnement au club Pépé quand il en avait l’occasion.

Les questions et les réponses, qui permettent à Alphie d’expliquer un peu plus pourquoi il considère ses frères comme des crétins et tout particulièrement Roboute (grab popcorn), sont entrecoupées de flashbacks écrits du point de vue de divers défenseurs de la capitale de Tesstra, Prime, qui se trouvaient évidemment très malins et très bien préparés, hohoho, jusqu’à ce que l’impensable se produise et que l’Alpha Legion déclenche une attaque chirurgicale. D’abord en faisant sauter les ponts reliant les fortifications au reste de la cité, puis en infiltrant le QG adverse en se faisant passer pour les gardes du corps transhumains protégeant les hauts gradés et les personnalités politiques de la Conservation, et enfin en détournant l’endoctrinement subconscient des officiers restants, sortis de leurs barraquements à la tête d’une compagnie d’Ogryns pour reprendre Prime, et les forçant à se suicider avec coup de fil anonyme chargé en mots clés déprimants. Bilan des courses : une planète conquise en quelques semaines, au lieu des quelques mois que l’approche lente et méthodique de Guilliman laissait envisager. Evidemment, ce n’est pas « glorieux » ni « honorable », mais est-ce que l’Impérium l’est au fond, hein ? Parfaitement. C’est en quelque sorte le message que fait passer Alpharius à son jury, qui, très étonnamment, le déclare parfaitement dans son droit d’avoir envoyer scier le grand Schtroumpf, et le déclare vainqueur aux points sur décision unanime.

Début spoiler…On apprend en toute fin d’histoire que finalement, ce n’était pas Alpharius qui répondait aux questions d’anonymes clampins, mais Omegon qui répondait à celles d’anonymes clampins et d’Alpharius. Un grand classique de la XXème. Les deux frangins échangent un sourire complice et quelques boutades à quintuples sens qui n’en font sans doute pas pour nous, et le rideau tombe sur la fin de ce conseil, qui nous aura appris que la vérité est bien relative…Fin spoiler

AVIS:

Council of Truth’ fait partie de ces œuvres dont l’appréciation dépend grandement de votre niveau de connaissance, ou d’accoutumance (les deux termes étant ici synonymes) de/à l’univers et des protagonistes qu’on y retrouve. L’Alpha Legion, si elle n’est pas la faction de l’Hérésie d’Horus la plus populaire parmi les auteurs de la Black Library, dispose en revanche d’une sorte de cahier des charges littéraire auquel le lecteur peut se référer à chaque fois qu’une soumission traitant des fils d’Alpharius (et d’Omegon) est publiée. Organisation inhumainement secrète et retorse, cette Légion met un point d’honneur à ne jamais agir de manière claire, et cela s’illustre évidemment dans les histoires mises en scène dans la GW-Fiction: il y aura toujours des révélations, des retournements de situation et des personnages dupés lorsque la XXème est de la partie. Cela a été la règle depuis le ‘Legion‘ de Dan Abnett, et tous les auteurs qui sont passés après lui ont pris soin de se conformer à cette approche cryptique, avec plus ou moins de bonheur.

Aussi, lorsqu’en 2021 (13 ans après la sortie de ‘Legion’), Mike Brooks nous livre le récit d’une campagne tout à fait classique – si on peut utiliser cette expression pour ces Astartes – de l’Alpha Legion, sur fond de guéguerre d’ego avec les Ultramarines et de réunions secrètes et trotromystérieuses1, je dois admettre que c’est la déception qui prime. Tout cela a été lu et relu de nombreuses fois au cours des dernières années, et si Brooks livre une nouvelle efficace sur la forme, il lui manque de la valeur ajoutée sur le fond pour être qualifiée de réussite. À mes yeux, les publications de la gamme Primarques sont l’occasion de faire avancer notre compréhension sur cette confrérie de surhommes iconiques, et par extension, sur la manière dont ils organisent leur Légion et considèrent l’Impérium. Mike Brooks nous lance quelques bribes de fluff en cette direction (notamment la réflexion d’Alpharius que l’Alpha Legion doit être polyvalente pour éviter d’être vue comme obsolète par l’Empereur, dont il se méfie grandement), mais se contente sinon de nous servir sa version de ‘Legion’2//’The Harrowing’//’The Serpent Beneath‘, ce qui n’a pas grand intérêt je dois dire. Plus embêtant, il se vautre à certains endroits dans le fan service le plus grossier, en complexifiant les opérations de l’Alpha Legion pour le plaisir (si t’es capable de descendre une compagnie d’Ogryns au bolter, c’est pas le petit officier planqué dans son véhicule qui va beaucoup t’ennuyer s’il n’est pas absolument mis hors d’état de nuire avant l’embuscade hein), ou en incluant la fameuse catchphrase de la Légion (« I am… absolutely not original« ) et un Alpharius/Omegon swap de façon très artificielle à l’intrigue. Bref, on est ici sur une nouvelle très honnête mais plutôt décevante de la part de Mike Brooks, de qui j’attendais plus pour sa première publication au service d’Hydra. En espérant que le roman qu’il a écrit sur Alpharius soit plus audacieux que ça.

1: Brooks m’a mal vendu le concept du conseil de vérité je dois dire. Qui a des comptes à demander à un Primarque sur la manière dont il conduit ses opérations (qui plus est de façon victorieuse) au sein de sa propre Légion? Soit Alpharius a un ego tellement monstrueux qu’il a besoin de prouver qu’il avait raison même quand personne ne lui a rien demandé, soit il s’agissait de faire passer quelques éléments de langage aux officiers supérieurs de la Légion au cas où ils seraient interrogés sur les méthodes de cette dernière. Auquel cas, la transmission d’un memo ou l’organisation d’une réunion sur Teams aurait été plus efficace.
2: Avec les soldats génétiquement améliorés du roman d’Abnett du côté non-Impérial cette fois-ci. Mais c’est vraiment la même vibe.

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Terminus – C. Wraight :

INTRIGUE:

Notre histoire s’ouvre sur la glorieuse scène d’un Légionnaire Death Guard, Caipha Morarg, vomissant dans son casque et constatant avec inquiétude que le contenu de son estomac n’est pas évacué par les valves de son casque, sérieusement encrassées. Fort heureusement pour notre héros, le pouvoir de Nurgle lui permet de tenir en apnée longue dans ses glaires jusqu’à ce que l’Apothicaire Zadal Crosius (avec un nom pareil, il aurait dû faire Chapelain moi je dis) arrive avec sa fidèle clé de 12 et purge le heaume de son camarade. Bienvenue dans ‘Terminus’ et sur Terra, au début du siège de la planète par l’avant-garde d’Horus.

Récemment buzzés par Nurgle – et ses mouches – pour rejoindre sa team, les Death Guards doivent encore s’habituer à leur nouvelle condition de pestiférés ambulants, perclus de maux divers et variés, mais guère incapacités par ces derniers, mis à part au niveau de l’agilité. Nous suivons donc Morarg, qui se trouve être, en plus de barbouillé, l’Ecuyer personnel de Mortarion, et Crosius alors que la paire progresse lentement mais sûrement vers le Palais Impérial, rasant les avants postes fortifiés et exterminant les traînards de l’Armée Impériale avec détachement, tout en essayant de mettre des mots sur leur douloureux et désespérant passage de guerriers surhumains insensibles à toutes maladies, à celui de creusets de microbes, virus et autres bactéries. Une chose semble certaine : Mortarion a joué un rôle dans cette transition (énergétique, mouahaha).

Et à tout seigneur glandeur, tout honneur, Mort Shuman finit par rejoindre la ligne de front, sans doute fatigué que Typhon lui ressorte en boucle la blague de la grosse mite depuis qu’il lui a poussé des ailes. Cette arrivée funeste se solde d’un échange de haut niveau entre le Primarque et son chief of staff littéralement défroqué, par lequel on apprend que l’Empereur a interdit à son fils de remettre les pieds chez lui tant qu’il n’aurait pas pris une douche. La nouvelle se termine par une démonstration des nouveaux pouvoirs entropiques de Mortarion, qui est capable de faire vieillir en accéléré une zone de son choix à une distance respectable1, et c’est un bastion isolé dans la pampa himalayenne qui en fait les frais. Comme on disait au tout début de M3 : « va y avoir des spores ».

1 : Une compétence toute christique quand on y réfléchit. Mortarion est capable d’apporter mille ans de pets sur terre, ça se respecte.

AVIS:

Je ne sais pas vraiment ce que Chris Wraight a voulu faire avec ce ‘Terminus’, qui évoque plus le dernier arrêt d’une ligne de métro (« nous arrivons sur Terra, merci de ne rien laisser ni oublier derrière vous« ) que la conclusion fatidique d’une épopée sanglante, ou même, ce qui aurait été logique, le vaisseau spatial le plus tristement célèbre de la Légion. Ce n’est pourtant pas comme si cet auteur n’avait pas déjà un passif, et de qualité qui plus est, avec ces protagonistes, et des personnages et arcs narratifs à mettre en scène pour donner un semblant d’intérêt à cette soumission. Je m’attendais ainsi à retrouver, ou au moins à croiser le temps d’un caméo, ce bon vieux Vorx (‘Lords of Silence’), que l’on avait déjà vu à l’œuvre sur le temps long dans ‘Unification‘, mais me suis retrouvé à la place avec l’illustre pas très connu Morarg, le positivement obscur Crosius, et Mortarion faisant du sale sur les trois dernières pages. Ce casting surprenant aurait pu faire l’affaire si on lui avait donné une intrigue et une mise en scène digne de ce nom, mais la première s’est avérée être un mélange de poncifs (« Ahlala que nous sommes malades présentement une fois par exemple là dis donc… Mais on reste tout de même trotrobalèze paske fô pas déconner non plus« ) et de renvois au déroulé de ‘The Buried Dagger‘, et la seconde à une sorte de plan large sur une partie de tower defense en mode ralenti. Pas de surprise scénaristique comme dans ‘Endurance‘, ni de construction un peu travaillée comme dans ‘Unification‘: rien que le récit plan-plan du retour de la Death Guard sur le Monde Trône, dans une sorte de filler faisant le lien entre deux épisodes autrement plus intéressants de l’histoire de la Légion: sa corruption par Nurgle et sa participation au vrai siège du Palais Impérial. Au final, rien à retirer de ce ‘Terminus’ qui n’ait été déjà couvert, et de façon plus intéressante, par d’autres récits consacrés aux Barbarus Boyz au cours de l’Hérésie d’Horus.

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Grandfather’s Gift – G. Haley :

INTRIGUE:

Grandfather's GiftLe propos de notre récit se situe dans un jardin public, où un clochard toxicomane émerge péniblement d’un sniff de crack frelaté, dans une tenue étrange et avec une très vague idée de qui il est et ce qu’il fait là. Vous allez me dire : « C’est pas une nouvelle de l’Hérésie ça, c’est la Villette un mardi matin classique ». Vous auriez raison, sagaces lecteurs, ne serait-ce que pour les quelques détails ci-après : le jardin est géré par le NURGLE (Node Urbain de la Régie Générale de Laval Est), le clochard est un Primarque, et la mémoire qui lui revient progressivement lui apprend, et nous avec, qu’il est Mortarion, seigneur de la Death Guard.

Malgré ces débuts prometteurs, Morty se demande bien comment il est arrivé dans ce bouge, lui qui aux dernières nouvelles travailllait tranquillement dans son laboratoire de la planète de la peste à quelque grand dessein arcano-technologique. Plus curieux qu’inquiet devant le charme sauvage de l’endroit, à mi chemin entre le jardin anglais dans toute sa bucolique liberté et le fond d’un baril d’eau lourde oublié dans un terrain vague de Chernobyl, notre Primarque décide de partir en vadrouille, espérant trouver un agent municipal qui lui indiquera la station de tram la plus proche pour l’Oeil de la Terreur. Au bout de quelques secondes/minutes/heures/jours/mois/années/siècles/éons, il finit par tomber sur un Grand Immonde, en chair autant qu’en larmes, auprès duquel il s’enquiert poliment des raisons de son tracas. On a beau dire ce qu’on veut des qualités paternelles de l’Empereur, il a su inculquer à ses fils des manières tout ce qu’il y a de plus urbaines.

Khu’gath, car c’était lui, se fait un plaisir de rafraîchir la mémoire du dormeur du val, le taquinant au passage sur son aveuglement volontaire, et hilarant, quant au fait qu’il soit un psyker, appellation que Mortarion refuse catégoriquement1. Toujours totalement perturbé par une enfance difficile et un complexe d’Oedipe asymétrique (il veut tuer son père et… tuer son père) mal digéré, notre héros atrabilaire ne démord pas qu’il est un scientifique et non un praticien des arts occultes, ce que Khu’gath, conciliant, finit par lui accorder. En guise de cadeau d’adieu, l’affable démon a la bonté de remodeler le Primarque a sa véritable image, ailes de bourdon (l’animal totem de Mortarion) incluses, et de lui souffler à l’oreille la raison de sa venue à Neverland. Le bon Papa Nurgle lui a organisé une chasse au trésor pour le récompenser de sa piété, et l’âme de son beau-père l’attend quelque part sous les frondaisons moites de son jardin.

« Bon sang, mais c’est bien sûr ! » s’exclame Mort Shuman, qui s’envole à tire d’aile chercher la récompense qu’il poursuit depuis si longtemps, et qu’il finit par trouver, disséquer et enfermer dans une fiole en un tour de faux. Satisfait d’avoir rayé cet important item de sa to do list personnelle, Mortarion peut enfin regagner ses pénates et appeler son psy pour convenir d’une prochaine séance, se jurant au passage qu’il finira par régler ses comptes avec son autre père, dont la lampe torche psychique clignote en lisière du jardin de Grand-Père Nurgle. Pépé ou Papy, il fallait choisir, et il a choisi !

1 : « Tu es un sorcier, Mort- » « AGNANANANA, JE N’ENTENDS RIEN-EUH !»

AVIS:

‘Grandfather’s Gift’ a beau se concentrer sur un épisode somme toute négligeable de la saga de Mortarion, personnage l’étant – jusqu’à récemment – tout autant en termes d’importance sur le lore de 40K, sa (courte) lecture n’en demeure pas moins intéressante, en ce qu’elle permet à Haley de poursuivre sa description pour le moins contrastée du Primarque de la Death Guard, déjà généreusement ébauchée dans ‘Plague War’ : celui d’un être totalement paradoxal, qu’il est le seul à ne pas voir, ce qui a la fâcheuse tendance à miner son autorité naturelle. Prince Démon jurant ses grands dieux qu’il a réussi à dompter les forces du Chaos à force d’études et d’analyses tout ce qu’il y a de plus scientifiques, Morty apparaît comme un être aussi amer que pathétique, ce qui contribue à le rendre intéressant, même si la frontière est fine entre profondeur tourmentée et ridicule patenté. L’autre trait notable de son caractère, le mépris souverain qu’il semble éprouver envers toute chose (la condition humaine, ses frères, ses pères) pourrait tout autant le magnifier que le plomber, si utilisé de manière peu fine par un auteur en manque d’inspiration1. Affaire à suivre, donc.

Pour poursuivre mon fil rouge BLC-esque, enfin, je dois reconnaître que l’inclusion de cette nouvelle au recueil s’avère un choix assez pertinent, puisqu’elle offre au lecteur novice une bonne présentation d’un lieu (de) culte des franchises de Games Workshop : les fameux jardins de Nurgle, en plus d’une introduction intéressante au concept de « destruction créatrice » // « je meurs donc je ris » qui est à la base du dogme prouteux. L’utilisation de l’amnésie de Mortarion permet également à Haley de présenter le background de ce dernier de manière progressive et pédagogique, brossant en toile de fond les grandes lignes du fluff de 31K. Bref, une soumission qui répond plutôt bien au cahier des charges, sans pour autant se révéler être vide de substance pour les vieux BL-iscards. Pas mal du tout.

1 : L’extrait gratuit de ‘La Dague Enfouie’ de James Swallow me fait ainsi redouter le pire pour le DG de la DG, qui apparaît comme le pion d’un Typhus même pas respectueux de son père génétique, sans que ce dernier ne s’en offusque.

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Et voilà qui termine cette revue de Heirs of the Emperor, anthologie se plaçant dans le haut du panier des productions de la Black Library, tant en termes de qualité que de quantité. Un petit inédit (par exemple sur la création de ces fameux Primarques par l’Empereur) n’aurait certes pas été de refus, et l’absence d’Angron reste injustifiable, mais ce bouquin est appelé à devenir un classique du corpus de l’Hérésie d’Horus, en particulier pour les lecteurs n’ayant ni le temps, ni l’envie de se coltiner l’entièreté du catalogue (qui est assez inégal, il faut bien le reconnaître). Qu’on les aime ou qu’on les déteste, les Primarques sont en effet intrinsèquement distrayants, et on prend plaisir à les suivre d’un bout à l’autre de la galaxie, quelles que soient leurs motivations profondes. Pour finir, notons qu’il est tout de même savoureux que la majorité des soit-disant héritiers de Pépé soient morts bien avant lui… Toujours bon pied bon œil, le vioque, même 10.000 ans plus tard!

BLACK LIBRARY 2016 ADVENT CALENDAR [40K – HH – AoS – BB]

Bonjour et bienvenue dans une nouvelle chronique sponsorisée par Time Spiral, puisque publiée des années après la sortie de l’objet ici revu. Il faut croire que je deviens de plus en plus nostalgique avec le passage des années (et que j’ai davantage les moyens d’acheter au prix fort les nouvelles nécessaires à cette nouvelle passion que par le passé)… Il sera ici question des nouvelles (mais pas que) rassemblées par la Black Library dans son calendrier de l’Avent 2016. Vous savez, cette année que l’on a tous considéré comme étant la pire de notre vie (RIP toutes les stars) jusqu’à ce qu’un drôle de virus à couronne s’invite sur le devant de la scène. Aaaah, que nous étions jeunes et naïfs à cette époque.

Black Library 2016 Advent Calendar

Cette année-là, la BL avait fait le choix de mixer les nouvelles avec les audio dramas, que je laisse généralement en dehors de mes revues pour la bonne et simple raison que je n’ai jamais accroché avec ce format. La magie des rééditions successives a toutefois fait que certains des podcasts de 2016 ont bénéficié depuis lors d’une sortie papier, ou en tout cas écrite, en bonne et due forme. Cela m’a permis de ratisser plus large que prévu, et de ne laisser hors du coup que trois des vingt-quatre soumissions de cette édition. Pas mal du tout.

Au programme, l’une des sélections les plus éclectiques jamais proposées par l’Adeptus Nottinghamus, puisque l’on y trouve du 40K, de l’Hérésie d’Horus, de l’Age of Sigmar et du Blood Bowl (pour la seule et unique fois, so far), avec une forte teneur en grimdark (18/24) il faut toutefois le souligner. Côté contributeurs, que du classique, même si on peut souligner que J. C. Stearns fit ses débuts dans la GW-Fiction avec le ‘Wraithbound’ inclus dans ce calendrier (et que l’increvable Josh Reynolds signe 4 nouvelles à lui tout seul). A l’inverse, 2016 fut la dernière année où Dan Abnett et Rob Sanders nous firent l’honneur d’une participation (so far, là encore). Ceci étant dit, il est plus que temps de mettre en marche la machine à remonter le temps, et à revenir quelques années plus tôt pour juger de la qualité de la prose made in BL de l’époque.

Advent Calendar 2016

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Perpetual – D. Abnett [HH] :

INTRIGUE:

PerpetualNous avions laissé l’increvable Oll Persson (45 mille ans au compteur au dernier contrôle technique) et sa petite bande de survivants de Calth embarqués dans un trek spatiotemporel pour rejoindre Terra et… aider Pépé dans son heure de besoin (le soutien moral, ça compte aussi) à la fin de ‘Unmarked’. Il est temps de prendre des nouvelles des voyageurs intergalactiques, deux ans plus tard1, et leur situation n’est pas idéale. En fait, elle est même plutôt moyenne : cela fait deux ans que notre fine équipe végète sur une planète anonyme à la fin de M23, et la boussole magique utilisée par Persson pour trouver son chemin dans le multiverse of madness ne réagit absolument plus, malgré toutes les tentatives de relocalisation et de redémarrage initiées par le Perpétuel. En cause, soupçonne le sagace Persson, le graaaaaaaand trou dans le sol qui occupe le centre de la cité d’Andrioch à côté de laquelle les fugitifs se sont installés : probablement causé par un mechnivore affamé pendant la révolte des hommes de fer, il s’étend dans plusieurs dimensions, y compris celle du Warp, et rend donc le GPS de notre héros non-fonctionnel.

Alors qu’il réfléchit sérieusement à retourner sur ses pas, malgré les instructions spécifiques laissées par son pote (et également Perpétuel) John Grammaticus, qui l’a mis sur ce pire bail à sa place du fait de son absence de potentiel psychique, ce qui lui permettra de se faufiler sur Terra sans se faire griller par les alarmes Warp de Pépé, Oll reçoit la visite du Gram’ en personne. Il s’agit bien sûr d’une projection télépathique, mais à conseiller retraite disponible, on ne regarde pas les dents comme on dit à Andrioch. John révèle ainsi à son factotum qu’il est responsable de cet encalminage prolongé, ayant influencé sur l’astrolabe étherique de Persson pour l’envoyer dans cette impasse, afin de l’empêcher de rejoindre Cadia où l’attendait des assassins de la Cabale. Maintenant que cet impondérable est géré, il enjoint son compère pétuel de reculer d’une case planète afin de pouvoir reprendre sa course vers le monde Trône dans de meilleures conditions. Un petit demi-tour spatio-temporel, rien de grave…

Début spoiler…Seulement, n’est pas Grammaticus qui veut, et l’aimable interlocuteur de Persson n’est pas ce dear John, mais un agent de l’Alpha Legion avec un faux nez (et une falsehood cloak, ok). Vieille perssonne serait tombée dans le panneau sans l’intervention impromptue d’une de ses camarades (Katt), qui lui permet de remarquer que pour une projection psychique, John déplace tout de même beaucoup les graviers au sol quand il bouge. Un coup d’athame dans la carotide du faquin (l’usurpation d’identité, c’est moche) pour lui régler son compte, et il est temps pour nos héros de repartir en vadrouille, cette tentative d’assassinat démontrant que leur position a été détectée par leurs ennemis. En désespoir de cause, Oll propose à ses acolytes de tenter un saut dans l’inconnu et de se tailler une bavette divine avec son canif magique. La nouvelle se termine avec une séance de base jump dans le cratère d’Andrioch, suivie probablement d’un cri de rage de Khorne après qu’il se soit fait entailler la fesse gauche par l’opinel de Persson. La suite au prochain épisode.Fin spoiler

: Ce qui est marrant, c’est que ce délai est encore plus long in real life, Abnett ayant écrit ‘Unmarked’ en 2013 et ‘Perpetual’ en 2016. Encore un coup de la théorie de la relativité.

AVIS:

Dan Abnett revient faire (un peu) avancer l’intrigue de l’un des sous-arcs narratifs les plus singuliers et, je dois dire, plaisants de cette fin d’Hérésie dans ce ‘Perpetual’, qui donne finalement plus d’infos sur la mythique rébellion des hommes de fer des temps jadis que sur les tenants et les aboutissants de la quête de Persson et ses comparses. Comme on sait de longue date qu’il arrivera à bon port et aura son moment de gloire pendant le Siège de Terra, ce sur-place n’est pas rédhibitoire, et Abnett est suffisamment expérimenté pour meubler cette petite péripétie avec tout ce qui fera battre nos cœurs de fanboys et girls plus fort. Goûtu.

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The Maiden of the Dream – J. French [40K] :

INTRIGUE:

The Maiden of the DreamC’est l’heure du contrôle technique psychique pour Mylasa, Psyker Primaris recrutée par l’Inquisiteur Covenant pour le seconder dans sa lutte contre l’Archennemi. Surnommée la Demoiselle du Rêve, Mymy possède un pouvoir peu banal, celui de s’approprier les souvenirs des individus qu’elle côtoie, ce qui lui permet aussi bien de percer à jour leurs secrets les plus intimes que, au besoin, effacer de leur mémoire des informations trop dangereuses pour leur propre bien1. Pur produit de la Scholastia Psykana, notre héroïne a évidemment dû payer un tribut exorbitant pour devenir la Psyker accomplie et redoutable qu’elle est, en l’occurrence, sacrifier la totalité de ses propres souvenirs. Le test auquel elle est donc soumis consiste à une sorte de course poursuite mâtinée de visionnage de clips YouTube (sans les pubs, car l’Inquisition a les moyens de vous faire parler/de ses ambitions), pendant laquelle elle revit des bribes de la vie d’autres personnes, avant d’être confrontée – généralement après un épisode traumatique – par son examinateur, qui lui pose la même question : « qui est-elle ?2 »

Nous suivons donc les péripéties de Mylasa-Yaygus-l-assassin, Mylasa-Ilk-la-Psyker-embarquée-par-les-Vaisseaux-Noirs, Mylasa-Verrun-l-héritière-alcoolique-qui-deviendra-plus-tard-l-Inquisitrice-Idris, chaque flashback d’emprunt étant séparé du suivant par un passage par la loge commentateurs, où le brave prêcheur Josef est de plus en plus en nage de voir sa collègue de travail prendre physiquement très cher au cours de son grand oral. Enfin, le dernier tableau se met en place, et Mylasa fait face à son examinateur dans un ultime rêve, où la fatidique question lui est posée une ultime fois…

Début spoiler…Et à laquelle elle répond « Chais pô ». Ce qui est la bonne réponse, car le moindre souvenir de sa vie passée (durant laquelle, à un certain point, elle a subi le grave accident qui l’a laissée tétraplégique) l’aurait condamné à une exécution sommaire. La nouvelle se termine toutefois sur un sourire de connivence que Mylasa se fait à elle-même du fond de son inconscient le plus profond, ce qui pourrait signifier qu’elle cache en fait son jeu. Faudrait demander à Christopher Nolan de lire la nouvelle pour en être sûr.Fin spoiler

1 : Voir par exemple ‘The Purity of Ignorance’, également de French.
2 : Faut le dire avec la voix du Père Fourras, c’est beaucoup plus marrant.

AVIS:

John French se paie un petit trip à la Inception dans cette nouvelle où rien n’est ce qu’il semble être, et où les personnages sont à la recherche d’une réalité et d’une véracité qu’ils n’ont finalement pas vraiment intérêt à trouver. La plume de French rend l’expérience assez plaisante, et la construction en vignette lui permet d’intégrer des informations sur les autres personnages importants de sa série inquisitoriale de manière détournée, ce qui est appréciable pour les fans du Conv’. Pas la nouvelle la plus marquante/essentielle du cycle de courts-formats dédiés par l’auteur à sa galerie de seconds couteaux, mais une contribution solide malgré tout.

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Into Exile – A. Dembski-Bowden [HH] :

INTRIGUE:

Into ExileSommité reconnue de son domaine d’expertise (la techno-archéologie), le Magos Arkhan Land coulait des jours heureux sur Mars à diriger des fouilles dans les niveaux inférieurs de la planète rouge et à remettre la main sur des gadgets funky de l’Âge d’Or de la technologie (on raconte même qu’il a un Tamagotchi), quand l’Hérésie s’invita sur le monde forge. Bien que considérant cette guerre idéologique comme parfaitement en-dessous de lui, le Didier Raoult de M31 se retrouva à son corps défendant au cœur d’une lutte d’influence entre loyalistes et renégats, chacun des deux camps voulant bénéficier de son génie dans le meilleur des cas, et en priver son adversaire dans le pire. C’est ainsi que Malcador chargea Rogal Dorn de « convaincre » Land d’accepter un poste sur Terra, mission barbante que le Primarque se dépêcha de refiler à Sigismund, qui fit de même jusqu’à ce qu’elle échût au Légionnaire Nicanor, dont le statut de simple bidasse ne lui permettait pas de se défausser du job sur quelqu’un d’autre. Il aurait dû prendre un stagiaire, moi je dis.

Envoyé sur une Mars contrôlée en majorité par les forces du Fabricator General Kelbor-Hal, Nicanor parvint à se frayer un chemin jusqu’au laboratoire d’Arkhan Land, qui après avoir fait sa diva, conclut à la vision d’un bolter braqué sur son gros nez qu’il était dans son intérêt de suivre son nouveau copain tout jaune jusqu’au vaisseau de réfugiés qu’il lui servirait de ticket de sortie de la planète. Bien entendu, le voyage ne pouvait ne pas se passer sans encombres (bien que le complexe de supériorité chevillé au corps et le manque absolu de tact de Land menacent de faire dégénérer chaque conversation en pugilat), et les trois – Land emporte avec lui son singe mécanique de compagnie, Raghavan Sapien – ne tarde pas à découvrir qu’il est suivi…

Début spoiler…Leur stalker n’est autre qu’un automate Vorax, qui en a après les technomiches du technoarchélogiste, et n’accepte pas « non », ou même une rafale de bolts en pleine face, comme une réponse. Les nombreuses inimitiés que notre héros et sa grande gueule ont cultivé depuis des années rendent l’identification des commanditaires de cet assassinat impossible, mais il ne s’agit que d’un détail pour Nicanor, dont la mission reste de faire évacuer son colis en un seul morceau, quelqu’en soit le prix. Après avoir gagné un peu de temps en détruisant le pont où le Vorax avait lancé son attaque avec une charge melta, héritant au passage d’un criblage de chevrotine carabiné, le Space Marine choisit héroïquement de faire une Gandalf le Gris Jaune lorsque la machine tueuse les rattrapa à nouveau, à quelques centaines de mètres du Uber Pool réservé par ces radins d’Imperial Fists pour le transfert de Land.

Pas au mieux de sa forme et totalement surclassé par son adversaire mécanique, Nicanor réussit toutefois à tenir assez longtemps pour permettre à Arkhan Land et sa grosse pointe de vitesse de rejoindre bon port et prendre le chemin du monde Trône. Le rideau « tombe » (voir ci-dessous) sur le cadavre du brave Légionnaire reposant dans la poussière ocre de Mars, tandis que Land a un sursaut temporaire et passager d’humanité en pensant au sacrifice désintéressé de son protecteur.Fin spoiler 

AVIS:

On peut toujours compter sur Aaron Dembski-Bowden pour proposer quelque chose d’intéressant dans les nouvelles qu’il écrit pour la Black Library, et ce ‘Into Exile’ ne fait pas exception. Ici, notre homme s’aventure sur le terrain de la construction narrative, en optant pour une succession de vignettes (10 en tout) déroulant le récit de la fuite d’Arkhan Land, une des figures de l’Hérésie dont Dembski-Bowden s’est entiché, depuis Mars jusqu’à Terra, de manière antéchronologique. L’histoire s’ouvre donc avec le départ du Vorax des lieux du combat final avec Nicanor, et la navette spatiale prise par Land déjà partie en orbite. On remonte ensuite le temps, pour retracer l’histoire dont on connaît déjà la fin, mais qui se révèle être tout de même agréable à suivre et assez rythmée, malgré le manque de suspens qui est la conséquence logique de ce parti pris Memento-esque. Bref, un exercice de style des plus concluants de la part de la golden plume de la BL, qui mérite d’être lu (et pas seulement résumé).

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The Road of Blades – J. Reynolds [AoS] :

INTRIGUE:

The Road of BladesAhazian Kel est ce que l’on peut appeler un routard des Royaumes Mortels. Guerrier accompli et sans pitié, il a tout sacrifié (y compris sa famille et sa tribu) pour se vouer à Khorne et devenir le plus grand dresseur Pokémon la guerre incarnée, avec un certain succès il faut le dire. Au début de notre propos, nous cueillons cette grande baderne flegmatique (y a pas grand-chose qui touche sa hache qui fait bouger son marteau) au saut du cheval, sa monture ayant prise une flèche dans l’œil après qu’il ait été repéré par un groupe de maraudeurs de Caldera alors qu’il parcourait les Herbes Noires (une steppe d’Aqshy). Peu impressionné par cet accueil hostile, Ahazian découpe quelques-uns de ces faquins mongoloïdes, ce qui convainc les survivants d’aller voir ailleurs s’il y est. L’Elu de Khorne peut donc reprendre sa route, qui doit le mener… à une autre route, mais pas n’importe laquelle : il a en effet reçu des présages insistants l’enjoignant à rejoindre la légendaire cité de Soulmaw, située à la croisée des Royaumes et centre névralgique de la production d’armes et d’armures des hordes du Dieu du Sang. Pour cela, il est nécessaire d’emprunter une huit voies, connue sous le nom de Route des Lames.

L’appellation n’est pas mensongère, comme il ne tarde pas à s’en rendre compte, puisque cette route est littéralement constituée de lames fondues ensemble, comme si un conquérant Targaryen anonyme avait eu des envies de tapis plutôt que de fauteuil. A chacun ses goûts. Comme Khorne n’est pas du genre à ménager ses champions, Ahazian est confronté à quelques épreuves sur le chemin de Soulmaw : des Epées de Vive-Argent s’extirpent de la route et lui tombent sur le râble, des automates tueurs lui refusent la priorité, et d’autres aspirants attirés par les mêmes présages de carnage et de grandeur que lui cherchent querelle alors qu’il attend à la sortie de la bretelle de péage. Pas vraiment ce qu’on peut appeler de la mobilité douce. Le sanguin A-ha est bien décidé à resteeeeeer sur sa route, en recourant au meurtre si nécessaire, mais avant que l’irréparable ne se produise, il est téléporté à l’intérieur d’une forge spacieuse mais rustique, où le maître des lieux lui accorde audience.

L’hôte en question, le Skullgrinder Volundr, n’est pas n’importe qui. Il s’agit de l’un des huit Maîtres de Forge de Khorne, soit l’élite de la crème des forgerons chaotiques. Chacun d’entre eux a notamment créé l’une des huit Lamentations du Dieu du Sang, armes exceptionnelles que Khorne avait offert à ses frères1, et qui furent perdues pendant l’Âge du Sang. Vovo a ainsi confectionné l’épée Coupemoelle (Marrowcutter en VO, c’est à peine moins ridicule), trempée dans le sang de cent démons. C’est lui qui a convoqué Ahazian, car il sait que les armées du Chaos auront bientôt besoin d’être menées par des héros maniant des armes légendaires, et il a pressenti que notre homme, s’il est le dernier des Kel, n’était pas le dernier des abrutis, et pourrait avoir l’étoffe nécessaire pour le job. Pour en être sûr, et comme c’est la tradition lors de recrutement à la Khorne Khorp., il défie Ahazian en duel, et se fait vaincre par une fourchette dans les yeux vicelarde mais réglementaire. Satisfait par le fighting spirit de sa recrue, il lui remet une hache bien stylée, et le prend à l’essai pour un premier contrat. La suite dans ‘The Spear of Shadows’.  

1 : Ce qui est assez stupide de sa part car cela fait 2.666666666666667 armes par Dieu. Il en aurait fait 9, ça aurait été plus simple.    

AVIS:

Nouvelle présentant les origines du principal antagoniste de ‘The Spear of Shadows’ et contextualisant la légende entourant les Lamentations de Khorne, ‘The Road of Blades’ n’a curieusement pas été nommément reliée au cycle éponyme par la Black Library, alors qu’elle y a toute sa place. Il n’en reste pas moins que cette histoire de champion chaotique embarqué dans une quête mortelle et affrontant des dangers aussi variés que surnaturels (Chaos oblige) se laisse lire sans problème, et permet à Reynolds de nous livrer un beau spécimen d’anti-héros aussi charismatique que détestable. Comme le dit l’adage, une bonne histoire repose en grande partie sur la qualité de son méchant, et Ahazian Kel est un (futur) antagoniste auquel on s’attache rapidement. Lecture essentielle si vous vous lancez dans la saga, malheureusement inachevée, de Reynolds pour Age of Sigmar, et sympathique sinon.

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Fixed – R. MacNiven [BB] :

INTRIGUE:

FixedBien qu’il ait mené son équipe à la victoire contre une opposition farouche d’Hommes Lézards, Garr Greyg des Nordland Rangers a écopé d’une sale blessure à la cuisse pendant le match, victime d’un contact rugueux avec le Kroxigor adverse. Opéré contre son gré par le médecin des Rangers, l’alcoolique mais efficace Frisk, le meilleur Blitzer que le Nordland ait connu (it’s something) se remet doucement dans le calme dépouillé de son manoir, en attendant de pouvoir 1) participer à la finale contre les East End Boyz, pour une place en ligue majeure la saison prochaine, 2) trouver un moyen de rembourser ses dettes au Vampire Grizmund, qui lui a fait comprendre en des termes non incertains qu’il attendait que son dû lui soit payé avec impatience.

Veillé par son ogre à tout faire Nor, Garr reprend du poil de la bête, mais finit par se rendre compte que le doc a outrepassé ses prérogatives en lui greffant une jambe de Saurus à la place de son membre esquinté, ce qui lui pose plus des problèmes de style que physiologie, à la décharge de Frisk. Cette découverte sinistre est interrompue par la matérialisation près du lit du patient d’un individu louche et puant (mais qui est Bretonnien, ce qui suffit à justifier son accent étrange et sa drôle d’odeur, apparemment), se présentant comme Mister Squimper. L’impétrant fait une offre non-refusable à Garr : une convalescence rapide et complète, assortie d’une belle bourse de reikmarks, en échange d’un menu service lors du prochain match…

Comme on s’en doute, ce service consiste à s’assurer que les Rangers s’inclinent contre les peaux vertes, ce que le Blitzer s’emploie à faire de manière pas trop évidente. Malgré la mauvaise volonté, les deux mains gauches et les pieds carrés de leur joueur star, les humains parviennent cependant à faire jeu égal avec les East End Boyz de Krapnugg, et la partie va se jouer sur une ultime possession, alors que les deux équipes sont à égalité au tableau d’affichage. Alors que la balle atterrit dans ses bras, Garr va devoir prendre la décision la plus importante de sa vie…

Début spoiler…Qui consiste à jouer pour la gloire et la gagne plutôt que pour la vie et l’argent. C’est noble de sa part. Malgré la douleur insidieuse de son greffon, parasité par la magie néfaste de Mister Squimper qui regarde le match depuis les gradins, le Blitzer se fraie un chemin parmi les lignes adverses, évite le plaquage de Krapnugg, lui crève un œil pour faire bonne mesure, et envoie la passe victorieuse à un receveur de son équipe. Alors que le stade explose dans tous les sens du terme (les adversaires précédents des East End Boys ont eu la défaite mauvaise), Garr a la satisfaction finale de voir du coin de l’œil son fidèle Nor mettre la main sur Squimper, qui était en fait deux Prophètes Gris sous une toge. Le Rat Cornu, jamais réputé pour être très sports, ne sauve pas ses élus de la poigne de fer de l’Ogre domestique, qui fracasse le crâne des rongeurs truqueurs. Tout est bien qui finit bien donc (Garr pourra payer ses dettes grâce à la prime de victoire), si la foule ne piétine pas les joueurs à mort, s’entend…Fin spoiler

AVIS:

Robbie McNiven nous sert ce que l’on peut appeler une histoire classique de Blood Bowl avec cet aptement nommé ‘Fixed’ (truqué en français) : un joueur charismatique mais borderline, qui doit gérer des magouilles extra-sportives tout en mouillant tout de même le maillot sur le terrain. C’est honnête à défaut d’être follement excitant, mais l’impression d’ensemble reste pour ma part gâchée par deux points faibles de la prose de McNiven : un manque de clarté dans la description des passages sportifs pour commencer (au point que j’ai cru à un moment que le match se jouait avec deux balles, une par équipe), et aucune explication donnée pour justifier pourquoi l’énigmatique Mister Squimper a senti le besoin de se faire passer pour un humain dans cette histoire. Après tout, Blood Bowl est beaucoup plus tolérant et cosmopolite que Warhammer Fantasy Battle par nature : un Skaven n’a donc aucune véritable raison de se déguiser pour interagir avec des individus plus fréquentables que lui. Dommage dommage.

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The Grey Raven – G. Thorpe [HH] :

INTRIGUE:

The Grey RavenL’ex-mais-pas-tout-à-fait-finalement Archiviste de la Raven Guard Balsar Kurthuri a été renvoyé sur Terra par Corax en personne après les événements relatés dans ‘Weregeld’, où il doit recevoir le jugement de Malcador le Sigilite. Tel le bouc (ici corbeau) émissaire, notre surhomme endosse une responsabilité collective dans cette histoire, puisqu’à travers lui, c’est tout le Librarium de la XIXème Légion qui se trouvera amnistié ou frappé d’anathème. Le Primarque furtif n’assume en effet plus trop la permission qu’il a donné à ses fils de s’asseoir sur l’Edit de Nikea, bien qu’il n’ait pas fait le fin bec lorsque les pouvoirs psychiques de Kurthuri – catapulté Archiviste en chef de la Raven Guard après le désastre d’Isstvan V – l’aidèrent à récupérer le patrimoine génétique nécessaire à la reconstruction accélérée de sa Légion. Avec les résultats que l’on sait (#JamaisPlus, etc). Très chill dans l’âme, Kurthuri a accepté la mission sans rechigner, tout comme il a juré à Corax de ne pas faire usage de ses pouvoirs jusqu’au verdict de Malcador. Voici les termes posés.

Les hasards de la guerre ont fait que notre corbeau énergétique a fait le voyage non pas sur un vaisseau appartenant à sa Légion, mais s’est fait prendre en stop par des Imperial Fists sous le commandement du Capitaine Noriz. Il est également accompagné par le Custodes Arcatus Vindix Centurio, détaché par Valdor pour s’assurer que le patrimoine génétique remis à la Raven Guard était utilisé dans le respect des clauses établies, et un peu désœuvré depuis que Corax a bousillé son kit de petit chimiste. Alors que le Wrathful Vanguard sort du Warp pour pénétrer dans le système solaire, les revenants sont accueillis par une armada de vaisseaux et de stations de combat, preuves irréfutables que la guerre ne tourne pas en faveur des forces impériales. Il ne faut pas longtemps avant que les demandes d’authentification pleuvent sur le Uber de Kurthuri, qui laisse sagement Tchuck Noriz et AVC gérer l’administratif avec leurs vis-à-vis. Après tout, qui de plus qualifié qu’un Imperial Fists et un Custodes pour négocier un passage vers Terra ?

Malheureusement pour l’Archiviste déclassé, ses comparses ne font pas un super taf, et lorsque le stagiaire Custodes (Ludivicus) que Malcador a placé à la régulation du trafic solaire se met à faire du zèle auprès de son collègue, la situation dérape très rapidement. Kurthuri, trop honnête, a en effet eut le malheur de déclarer qu’il était sous le coup de l’Edit de Nikea, aveu suffisant pour que Ludivicus éructe un mot code secret sur la fréquence radio, transformant aussitôt Arcatus en ennemi mortel de ce pauvre Corneille. Et lorsque les bolts commencent à lui voler dans les plumes, Kurthuri décide de connaître un petit peu la peur, et bat prudemment en retraite pendant que Noriz, tout aussi surpris que son camarade Légionnaire par la réaction à brûle pourpoint du Custodes, tente de raisonner ce dernier.   

S’engage alors une partie de chasse d’une genre un peu particulier, les Custodes du Wrathful Vanguard se mettant à traquer Kurthuri dans les coursives, tandis que ce dernier cherche à s’échapper du vaisseau pour rejoindre Terra et plaider sa cause directement auprès du Régent de Pépé, bien aidé par les Imperial Fists dans ses manœuvres d’évasion. Comme ni les Jaunards ni les Dorés ne tiennent vraiment à causer des pertes dans l’autre camp, l’affrontement tient plus du match de paint ball que de la fusillade sans merci, jusqu’à ce qu’Arcatus rattrape Noriz et Kurthuri, et les engage au corps à corps.

Bien qu’en désavantage numérique, le Custodes a tôt fait de démontrer qu’il est une classe au-dessus de l’Astartes moyen, même gradé, et s’énerve tellement qu’il finit par empaler le pauvre Noriz sur sa lance gardienne. Comprenant qu’il n’a aucune chance de sortir vainqueur de ce combat à la régulière, Kurthuri décide de revenir sur sa parole et d’avoir recours à ses pouvoirs… jusqu’à qu’un froncement de sourcil dédaigneux de son adversaire lui fasse changer d’avis. Résigné à obéir à son Primarque, même au prix de sa vie, notre héros finit par se rendre, et est enfin mené jusqu’à Malcador…

Début spoiler…Qui avait en fait un job à lui proposer parmi ses Chevaliers Errants, et cherchait à tester… son self control j’imagine ? dans des conditions extrêmes avant de l’embrigader dans son organisation secrète. La nouvelle se termine donc avec l’arrivée de ce vieux lézard d’Umojen, chargé par le Sigilite de briefer le bizut sur ses missions à venir. L’histoire ne dit pas si Corax a été dédommagé pour ce détournement de ressources…Fin spoiler

AVIS:

Thorpe a beau être un expert de la Raven Guard, je n’ai pas trouvé cette histoire très aboutie. Outre le fait qu’elle n’apporte pas grand-chose à l’Hérésie d’Horus, et apparaît davantage comme un moyen pour l’auteur de faire faire des heures supplémentaires à l’un de ses personnages alors que la tendance générale est plutôt à l’écrémage sévère en préparation de la clôture de la saga, je reproche à Thorpe d’avoir dévoyé la loyauté fanatique des deux factions les plus Pépéphiles de l’époque, les Custodiens et les Imperial Fists, juste pour pouvoir mettre en scène à peu de frais le simulacre d’affrontement entre les deux gardes prétoriennes de l’Empereur sur le Wrathful Vanguard. Cette guéguerre sans (presque) victimes est totalement illogique à l’époque où l’histoire prend place (après la tentative d’infiltration de Terra par l’Alpha Legion), et la réaction imprévue d’Arcatus n’aurait dû selon moi avoir que deux conclusions : soit une coopération immédiate et totale entre Custodiens et Imperial Fists, même si les seconds ne comprennent pas les motivations des premiers, soit un combat sans merci, et autrement plus sanglant, entre les deux camps. On ne me fera pas croire qu’un Custodien qui a identifié un ennemi de l’Empereur retienne ses coups pour épargner quiconque se met sur son chemin, fut-il un Imperial Fists. Ajoutez à cela que le test de Malcador est, au fond, très bizarrement conçu (il cherchait une forte tête, mais pas trop quand même ?), et vous obtenez un résultat très passable. Espérons que Kurthuri justifie par la suite (et la fin) de l’Hérésie le traitement de faveur éhonté dont il bénéficie ici.

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Wraithbound – J. C. Stearns [40K] :

INTRIGUE:

WraithboundMobilisé avec la levée de Lugganath, complétée pour l’occasion par les troupes des seigneurs Corsaires Eidaear et Isbeil, le Crimson Hunter Seoci patiente en double file sur le périph’ de la Toile, l’Autarque menant l’armée Eldar ayant sans doute égaré sa carte bleue au moment de payer le péage. Accompagné de ses collègues de Temple, le novice Padruic – ayant récemment abandonné ses activités de proctologue1 pour devenir pilote de Mirage – et l’Exarque Lioda, notre héros n’a heureusement pas à se tourner les pouces très longtemps, et le portail menant sur – insert random planet name – s’ouvre, permettant aux Chasseurs sachant chasser sans chiens de débarquer à toute berzingue dans une cité ruche récemment envahie par les hordes du Big Mek Gorkog Chrometeef. Alors que les Eldars commencent un prompt carnage des peaux vertes très surpris de cette intrusion à l’improviste de leur espace de vie, nous apprenons que l’assaut du Vaisseau Monde constitue une frappe préemptive contre le par trop prometteur Chrometeef, qui finirait par s’attirer les foudres xénophobes indiscriminées de l’Imperium à force de sanglants massacres, scénario dans lequel Lugganath ne pourrait échapper à la destruction. Violence étant mère de sûreté, les Zoneilles se la jouent donc Terminator (d’assaut) et se lancent à la recherche de Sarah Connork pour s’assurer de lendemains qui chantent. Logique implacable.

Alors que les Crimson Hunters assurent les arrières dessus de leurs petits copains, Seoci a la surprise de croiser son ex, Ailios, dans les cieux de – 404 : planet name not found – ce qui lui provoque une montée de mélancol-èr-ie (masque tout vénère de Khaine oblige), et lui fait se souvenir du temps de leur rencontre, lorsqu’il était encore un poète anarcho-communiste et Ailios femme de chambre à l’Ibis Budget de Lugganath2. Aaah, folle jeunesse… Séparés par les hasards de la vie et les caprices des tout puissants conseillers d’orientation professionnelle Aeldari, nos tourtereaux se retrouvent donc quelques siècles plus tard, ce qui permet à Seoci de réaliser que sa dulcinée est devenue medium en EHPAD, ou quelque chose comme ça. Chargée d’encadrer les âmes des pilotes des Hemlock lors de leurs excursions culturelles, Ailios ne semble pas être contre prendre une tisane à la fin de la bataille, mais le flux des combats sépare rapidement les anciens amants. Assaillis par une nuée de Dakkajets, les Hunters perdent rapidement l’un des leurs (ce bon à rien de Padruic), ce qui rend Lioda d’humeur massacrante. Pour ne rien arranger, Chrometeef choisit ce moment pour mettre en marche les milliers de moteurs anti-gravitiques (ou les millions de ventilateurs, ce serait marrant) qu’il a fait installer sous la cité envahie, qui commence à s’élever dans les airs dans le plus grands des calmes, et se révèle être un terror ship bourré de chasseurs Orks.

Seul survivant de son escadre après que sa sanguine Exarque soit tombé dans le piège tendu par des Orks brutaux mais rusés, Seoci mène la charge jusqu’au cœur du château dans le ciel, et parvient à faire suffisamment de dégâts aux centrales énergétiques qui alimentent la répulsion urbaine pour que la ZUS de Chrometeef regagne le plancher des squigs, et plutôt plus rapidement que ce que son constructeur ne le souhaiterait. Tragiquement, Seoci ne vivra pas pour raconter l’histoire, comme on le dit chez les glaouiches, son biplan étant pris dans une explosion plasmique alors qu’il se frayait un chemin vers le bercail. Ayant oublié de boucler sa ceinture de sécurité, le pré-retraité (il s’était juré de tomber le masque pour de bon après ce dernier tour de piste) finit polytraumatisé dans son cockpit, et se console en songeant que son concassage fatal lui permettra sans doute de passer plus de temps avec sa sorrowrose. Un crash pour un crush, c’est pas si pire au final.

1 : La nouvelle dit qu’il suivait jusque-là la Voie du Soigneur, so why not. 
: La nouvelle dit qu’elle suivait la Voie du Service, donc vous ne pouvez pas me prouver que j’ai tort.

AVIS:

Débuts sérieux, même si un peu trop scolaires, de la part de J. C. Stearns, dont l’amour pour les Eldars ne s’est pas démenti à ce jour. En prenant soin de dépeindre une opération Eldar typique, tant dans sa forme (attaque soudaine par une force aussi mortelle que mobile) que dans son objectif (supprimer une cible de façon préventive, afin d’empêcher la réalisation d’une funeste prophétie), l’auteur démontre sa bonne compréhension des fondements du background de 40K. Même constat sur le plan purement narratif, sur lequel Stearns boucle la boucle en condamnant son héros, que le destin des co-pilotes des Hemlock Wraithfighters horrifie au plus haut point, à devenir l’un d’eux après son accident. Cette conclusion cruelle, mais attendue, s’inscrit tout à fait dans l’ambiance générale de la littérature BL, où, comme le disait Chirac (hommage !), les emmerdes volent en escadrilles, même – surtout ? – pour les pilotes de chasse. Si ces éléments positifs préfigurent un potentiel certain, on pourra regretter l’intrusion mal négociée du passif amoureux entre Seoci et Ailios dans l’intrigue, que Stearns traite à demi-mots et qui ne fait donc pas vraiment pas sens pour le lecteur, jusqu’aux dernières lignes de la nouvelle, où l’intérêt scénaristique de cette idylle est enfin révélé. Bref, une œuvre de jeunesse, prometteuse et perfectible, et en tout cas parfaitement lisible.

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The Soul-Severed – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE:

The Soul, SeveredAprès les événements d’Iydris et l’abandon de poste de leur Primarque, les Emperor’s Children eurent une petite période de flottement pendant que la galaxie se déchirait autour d’eux. Bien que leur amour pour les belles choses et les plaisirs simples (mais intenses) de la vie les garda occupé pendant cet intérim, certains officiers prirent sur eux de tenter de redonner un cap et une unité à ce qui était pendant la Grande Croisade la fine fleur des Legiones Astartes, et était devenu un ramassis de glandeurs jouisseurs passant leurs journées à écouter de la dubstep à haute fréquence.

L’humilité et l’esprit d’équipe n’ayant jamais été des qualités fortes chez les Enfants (gâtés) de l’Empereur, il était à peu près certain que ces efforts hégémoniques déboucheraient sur des affrontements ouverts entre prétendants au climazon de Fulgrim (son bien le plus précieux et le symbole de son statut de Maître de Légion) plutôt que sur des tractations en bonne intelligence. Aussi, lorsque les Seigneurs Commandeurs Eidolon, dit Dondon la Raclure, et Archorian, dit l’Italique, (il parle toujours comme ça) acceptent de se rencontrer en terrain neutre, c’est-à-dire un terrain vague dans une friche industrielle de la planète Horvia, ravagée par la guerre, c’est forcément qu’ils ont un coup fourré caché dans leur manche énergétique. Reste à savoir qui aura le dernier mot dans cette partie de poker menteur dont la mise n’est rien de moins que le leadership sur la Légion…

Début spoiler…Archorian ouvre les hostilités le premier en lançant ses troupes à l’attaque de son rival et de son escorte de Kakophoni, mais Eidolon n’avait pas perdu la tête (hoho) et gardé sa propre armée en réserve. Le conflit tourne en faveur de ce dernier, forçant les hommes d’Archorian à se replier à travers les ruines d’un manufactorium en déréliction, poursuivis par leurs frères d’armes. Il s’agissait toutefois d’une feinte pour attirer le gros des forces d’Eidolon dans une zone piégée, et un tsunami de boue toxique s’abat sur les assaillants après qu’Archorian ait fait sauter les bombes placées sur la paroi des cuves de rétention qui surplombent la zone.

Seulement, on ne vient pas aussi facilement à bout d’une tache aussi tenace qu’Eidolon, qui se contente de hurler « MEUHHHH » à la face de son adversaire lorsqu’il vient terminer le travail au corps à corps. Comme les Kakophoni ont aussi survécu sans rétrécir au lavage, et donnent également de la voix à la suite de leur patron, le pauvre Archorian finit éparpillé aux quatre vents, et son armée suit rapidement. Comme on dit à Chemos, rira bien qui criera le dernier. Ces deux déluges consécutifs (l’un littéral, l’autre sonique) provoquent une frénésie de massacre et de sévices chez les Emperor’s Children, qui foncent assouvir leurs plus bas instincts sur la population locale de Horvia, qui n’en demandait pas tant et n’est pas assez nombreuse pour occuper longtemps cette bande d’esthètes en puissance. C’est alors qu’Eidolon a une idée de génie : sur Terra, il y a beaucoup plus de monde à torturer/distiller, de quoi tenir au moins quelques années en tout cas. Et c’est ainsi que la IIIème Légion prit le chemin de Terra, sur le caprice coup de tête de son commandant par défaut après qu’il ait pris un bain de boue. A quoi tient l’Imperium, finalement…Fin spoiler

AVIS:

Chris Wraight endosse le rôle peu glorieux mais nécessaire du manager de transition pour les Emperor’s Children1, Légion bien mise en avant au début de l’Hérésie puis laissée à son triste mais coloré destin à partir du milieu de la saga. Même si sa corruption était déjà bien amorcée au moment du congé sabbatique warpesque de Fulgrim, cette fière confrérie n’en était pas encore rendue à l’hédonisme désordonné qu’on lui connaitrait pendant le Siège de Terra, évolution qui nécessitait donc une justification digne de ce nom. C’est chose faite avec ‘The Soul-Severed’, qui utilise Eidolon plus qu’elle ne le met en valeur (et ça tombe bien, c’est le personnage favori d’absolument personne) pour mettre la IIIème Légion sur le chemin de Terra. On peut mettre cette petite nouvelle au même niveau que ‘Prince of Blood’ de Laurie Goulding, qui rend le même service à une autre Légion dont le Primarque n’était plus en état de la mener jusqu’au monde Trône (les World Eaters). Absolument indispensable si vous êtes un fluffiste acharné, car Wraight se pique de donner l’origine de pas mal de caractéristiques des Emperor’s Children « modernes » (héraldique, goût pour les poisons et l’esclavagisme…), seulement sympathique pour le reste.

1 : Il est assez surprenant que la BL ait confié cette tâche à un auteur qui n’avait jamais vraiment écrit pour cette faction jusqu’ici (spécialisation Space Wolves, Thousand Sons et White Scars pour notre homme).

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Prodigal – J. Reynolds [40K] :

INTRIGUE:

ProdigalAlors qu’il couve, quasi littéralement, sa nouvelle génération d’enfants-cobayes, spécimens de la nouvelle humanité qu’il appelle de ses vœux et crée de ses recherches, Fabius Bile reçoit la visite d’une présence démoniaque furtive et rigolarde, envoyée par l’un de ses nombreux ennemis pour mettre fin à ses expérimentations. Pas de chance pour le rejeton du Warp, Fab en a vu d’autres, et ordonne posément à l’esprit de la machine du Vesalius, son vaisseau amiral, de sceller son laboratorium pour lui permettre de localiser l’agent contaminateur importun et lui passer l’animus à l’eau de javel, comme la procédure le demande. Si la baston qui s’en suit ne fait de victimes que parmi la collection d’occulobes et de glandes de Betcher gardés par l’Apothicaire fou, les choses manquent de mal tourner pour ce dernier après que le premier démon assassin soit rejoint par un second. L’arrivée opportune de Melusine, la « fille » aînée de Bile, permet toutefois de mettre fin aux débats avant que le laboratoire ne soit complètement ravagé. Si Mel a pu intervenir en ce moment décisif, c’est parce qu’elle est elle-même plus qu’à moitié démoniaque, une orientation qui déçoit beaucoup son géniteur, mais qu’il accepte, en père modèle moderne et philosophe. S’en suit un dialogue entre les deux générations de Bile, qui génère plus de questions qu’il n’apporte de réponses, à commencer par les motivations ayant poussé Melusine à venir à la rescousse de son vieux, et à lui transmettre des avertissements à la demande de… Fantomas ? Jack l’Eventreur ? the masked singer ? Le suspens restera entier, en partie à cause de la folie manifeste de Fabienne (son vrai nom), qui a du mal à se situer entre le passé, le présent et le futur, et le choix de Fabius de ne pas poser la question qui pourtant le travaille autant que le lecteur. L’entrevue se termine sur le départ précipité de Melusine, qui « n’aime pas parler aux fantômes » (sic), et laisse donc son vieux pôpa méditer sur l’ingratitude de la jeunesse et sur l’inexorable passage des années, ou, dans son cas, des millénaires. Bile reste toutefois convaincu de l’intérêt et du caractère fondamental de ses recherches, qu’il continuera à mener en dépit de l’opposition d’une galaxie obscurantiste. C’est cela que d’être en avance sur son temps…

AVIS:

‘Prodigal’ apprend beaucoup de choses sur la vie et l’œuvre de Fabius Bile (et à travers lui sur les Emperor’s Children et les Légions renégates), ce qui en fait un bon point de départ pour quiconque souhaite se plonger dans le corpus que la Black Library a dédié à son charismatique et échevelé savant fou, écrit en bonne partie par le même Josh Reynolds. Je ne suis en revanche pas certain que les lecteurs familiers du personnage et de sa saga y trouvent de grandes sources de satisfaction, le retour de Melusine (la fille prodigue annoncée par le titre) ne faisant finalement pas progresser les relations entre les deux personnages d’un iota. Une bonne petite nouvelle d’ambiance/d’acclimatation donc, mais en rien essentielle à la bonne compréhension des chroniques bilieuses et billesques de Reynolds.

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Bear Eater – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE:

Bear EaterToujours en maraude dans les Royaumes Mortels (ici en Ghur) avec ses Astral Templars pour le compte du patron, Hamilcar Bear Eater voit une occasion en or d’agrandir le protectorat sigmarite se présenter à lui lorsqu’il arrive en vue de la cité de Jercho. Miraculeusement épargnée des déprédations des hordes du Chaos, cette ville ferait un bastion idéal pour les croisés d’Azyr… si Hamilcar arrive à convaincre son monarque, le Roi Soleil Joraad el Ranoon, de rejoindre le camp de l’Ordre. Rien de plus facile pour notre héros, dont les prouesses martiales ne sont égalées que par ses talents de diplomate (du moins c’est comme ça qu’il voit les choses, en sa qualité de plus grand fan de lui-même).

Après une petite parade militaire réalisée dans des conditions éprouvantes (#SousLeSoleilExactement), même pour des immortels en sigmarite, Hamilcar et ses lieutenants (le vieux bougon Broudiccan et un random dude du nom de Thracius) sont pris à parti par une émissaire de Jojo et sommés de laisser leurs armes au vestiaire pour respecter le protocole officiel. Lorsque nos trois compères finissent par obtempérer, ils ont la désagréable de surprise de constater qu’ils sont tombés dans un piège, une petite armée de gardes se déversant dans le hall avec des velléités peu charitables envers les Stormcasts.

Punk à chien gryffhound dans l’âme, Hamilcar ne perd pas de temps à tenter de résoudre ce conflit par la parole, et commence à zlataner à tout va les malheureux mortels qui lui passent sous la main. Ayant manifestement sous-estimés la puissance de leurs adversaires, les miliciens de Jercho finissent par battre en retraite, laissant toute latitude à notre héros de monter une expédition punitive envers ce pendard de Joraad el Ranoon (officiellement) et d’annexer la cité pour la plus grande gloire de Sigmar (officieusement)1. Sur le chemin de la salle du trône, il rencontre une vieille connaissance, le général Sarmiel el Talame, avec qui il a fait le coup de feu contre les Sankrit quelques semaines auparavant, et qui l’avait mis sur la route de Jercho après la bataille de Heliopalis. Miraculeusement convaincu par Hamilcar en l’espace de deux répliques qu’il était dans le camp des méchants, Sarmiel fait défection de la Garde Solaire et accepte de guider ses gros copains jusqu’au Palais de la Lune, où le Roi Soleil tient sa cour.

En route vers son objectif, Hamilcar développe un point de côté persistant2 et se retrouve confronté, en plus des bidasses solaires qui défendent le Palais, à des vampires feulant, preuve irréfutable du passage de ce coquin de Mannfred von Castein (ennemi juré de notre héros depuis qu’il s’est fait tuer par le Mortarque3) par Jercho. Il en faut toutefois plus pour empêcher l’injouable Mimil – qui se paie le luxe d’infliger une Mike Tyson à un suceur de sang un peu trop sûr de lui – de se frayer un chemin jusqu’à l’affreux Jojo. Ce dernier ne peut compter que sur ses rayons, des serviteurs totalement assujettis à sa volonté, pour faire office de derniers défenseurs, et place Hamilcar devant un dilemme cornélien pour le héros du Bien (avec un grand B et un grand nez) qu’il est : massacrer des innocents pour atteindre son objectif, ou les épargner et laisser le Roi Soleil s’en tirer à peu de frais…

Début spoiler…Malheureusement pour Joraad el Ranoon, une troisième voie était possible, à savoir embrocher le lumineux monarque sur son trône d’un jet de hallebarde bien senti. La mort rapide et sanglante du roitelet permet au moins d’établir qu’il n’avait pas été changé en vampire par Mannfred von Carstein, ce qui est… une information. Et le savoir est le pouvoir, paraît-il. La nouvelle s’achève sur cette conquête nette et (presque) sans bavure d’une nouvelle Cité de Sigmar par les Astral Templars. Du travail bien fait.Fin spoiler

1 : On peut remercier Guymer d’adapter un grand classique de la culture britannique à la sauce d’Age of Sigmar. Appelons ça le Fardeau du Mangeur d’Ours Blanc.
2 : Qui ne sera pas expliqué dans la suite de la nouvelle et n’aura pas d’impact sur la conclusion de cette dernière, mais suggère fortement que Guymer avait quelque chose de particulier en tête au moment de l’écriture.
3 : Voir ‘Beasts of Cartha’.

AVIS:

Je ressors de ce ‘Bear Eater’ avec une persistante sensation de gâchis au fond de la gorge (ou peut-être du cerveau), ce qui me désole au plus haut point compte tenu de mon attachement pour le personnage de Hamilcar, une des premières têtes d’affiche moderne (comprendre, un brin complexe) des Royaumes Mortels, et qui faisait ici ses grands débuts dans la carrière. En cause, le choix de David Guymer de placer son intrigue dans un cadre exotique et singulier (donc intéressant) en diable, mais de confiner ce dernier à une toile de fond au profit d’une nième baston entre Stormcast Eternals et locaux impénitents. La deuxième moitié de la nouvelle vient ainsi ruiner le travail de world building de la première, en se focalisant uniquement sur les exploits martiaux du fortiche Hamilcar, qui parviendra une fois encore et sans aucune surprise à vaincre l’affreux vilain que la destinée lui a mis sur son chemin. Et comme les compétences martiales de sa Némésis du jour (ou de la nuit) culminent à « lever le bras d’un air vaguement menaçant », on n’a même pas le droit à un combat final digne de ce nom, comme cela avait été le cas lors d’épisodes précédents de la série.

De manière générale, il se perçoit bien trop clairement à la lecture que ‘Bear Eater’ n’est qu’un segment d’un arc narratif bien plus large, dans la droite ligne des événements relatés dans ‘The Realmgate Wars’, écrits à quatre mains par Guymer et Josh Reynolds lors des premières années d’Age of Sigmar. Les références à la traque de Mannfred von Carstein sont tellement nombreuses au fil des pages que je soupçonne que cette nouvelle devait initialement faire partie d’une nouvelle tétralogie (comme ‘The Hunt for Nagash’ et ‘Knights of Vengeance’), avant que le projet soit abandonné pour une raison non précisée. Cela expliquerait aussi cette fin des plus abruptes ainsi que le traitement bizarre réservé au personnage de Sarmiel el Talame, qui semble avoir un passif conséquent avec Hamilcar et ses Astral Templars : je suis prêt à mettre une pièce sur le fait que cette première rencontre aurait dû faire l’objet d’une nouvelle ou d’un audio drama. Bref, un véritable et regrettable accident de parcours pour la paire Guymer & Hamilcar, sans doute causé par les errements éditoriaux de la Black Library à l’époque.

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The Painted Count – G. Haley [HH] :

INTRIGUE:

The Painted CountSi les lendemains de cuite sont difficiles, ceux de défaite cuisante le sont encore plus. Particulièrement quand on est aussi douillet que notre héros du jour, ou plutôt de la nuit, le Capitaine des Night Lords Gendor Skraivok, aussi connu sous le nom de Comte Peint du fait de son maquillage très bath. Dispersés, démoralisés et laissés orphelins après la bataille de Thramas et la capture de Konrad Curze (sans oublier ce bon vieux Sevatar), les Légionnaires de la VIIIème doivent faire face à une période de transition forcément chaotique, du fait de leur nature profonde et de leurs sales tendances au complot et au meurtre. Skraivok est l’un des prétendants les mieux placés pour devenir le nouveau meneur des Night Lords, notamment grâce à sa maîtrise du vaisseau amiral de la Légion, le redouté Nightfall, mais il doit se défaire de son rival Shang, qui dispose de nombreux soutiens et de l’aura d’avoir été l’Ecuyer de Hante-la-Nuit.

Cette lutte de pouvoir n’est cependant que l’un des problèmes qui tracassent le Comte. Il a aussi hérité sur Sotha d’une épée d’un genre un peu particulier, en cela qu’elle est très certainement démoniaque de nature, et plutôt collante dans ses attentions. Ainsi, malgré des efforts vigoureux, répétés et inventifs pour s’en débarrasser, elle a toujours trouvé le moyen de revenir à ses côtés pour le tenter. Dernière tentative en date, et donc dernier échec : le jeter dans l’espace depuis un sas ouvert (le tout sans casque, opa Guilliman style), qui n’a rien donné non plus, et s’est même montré contre-productif car Shang et deux Atramentar attendaient Skraivok à la sortie du vestiaire, et sans arme pour se défendre, se défaire d’un Capitaine et de Terminators est nettement moins facile, même pour un individu aussi talentueux que notre héros.

The Painted Count_IllustrationFort heureusement, Shang est plutôt chill pour un Night Lords, et se contente de balancer son rival dans le labyrinthe que Konrad Curze avait utilisé pour son animal de compagnie et néanmoins frère, Vulkan, au lendemain du massacre d’Isstvan. Comme l’élection du prochain maître de la Légion est prévue plus tard dans la journée, l’absence de Skraivok sera suffisante pour permettre à Shang de remporter les suffrages, où du moins le pense-t-il. Cela était sans compter sur l’aide apportée par l’épée, qui attendait comme de juste son porteur élu dans le labyrinthe, et grâce à son GPS intégré et son impressionnant bonus aux jets de pénétration d’armure, permet au Comte de se sortir de ce dédale beaucoup plus vite que cette chochotte de Vulkan. Bien sûr, il doit livrer son âme au démon enfermé dans l’arme, mais nécessité fait loi.

De retour sur le plancher des vaches chauves-souris, il se précipite jusqu’à la salle où le Kyreptoran Vicaria (Conseil d’Administration en bon nostraman) tient séance. Arrivant trop tard pour le vote, il a recours à la bonne vieille méthode du défi en duel à mort pour se défaire de ce fieffé coquin de Shang, qui finit promptement une demi-tête plus petit qu’au débit de la séance, grâce à la super-vitesse que lui confère son épée maudite. Cette démonstration de force ayant considérablement refroidi l’ambiance au sein de l’auguste assemblée, Skraivok est élu sans coup férir Overlord Nightest, et jure d’emmener sa Légion, ou ce qu’il en reste, participer au Siège de Terra pour faire les pieds à l’Empereur. Pas la motivation la plus noble ou la plus profonde, mais que peut-on attendre de la part d’un gonze dont le role model est Gene Simmons, je vous le demande.

AVIS:

Dans le sous-sous-sous genre des nouvelles de l’Hérésie d’Horus expliquant pourquoi et comment les Légions renégates sans Primarques décident de se rendre sur Terra, Guy Haley livre une histoire très correcte avec ce ‘The Painted Count’, qui s’inscrit fort bien dans la grande (la captivité de Vulkan et la capture de Konrad Curze) et la moyenne (la campagne de Pharos, couverte par le même Guy Haley dans le roman éponyme) histoires de l’Hérésie. Si l’utilisation du topos de l’épée maudite ne gagnera pas à l’auteur un prix d’originalité, le rendu est suffisamment propre et le personnage de Gendor Skraivok suffisamment distrayant – même si Sevatar reste, et de loin, le G.O.A.T – pour donner envie d’en savoir plus sur la destinée du Comte Peint, dont on devine qu’elle sera forcément fatidique et tragique. Sortez les mouchoirs et le popcorn.

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Becoming – A. Clark [40K] :

INTRIGUE:

BecomingDaniel et Luc doivent passer leur oral de français demain en matinée, mais plutôt que de se coucher tôt pour attaquer cette épreuve cruciale dans les meilleures conditions, ces deux garnements préfèrent traîner jusqu’à pas d’heure dans le gymnase de l’internat à se battre avec leurs sabres laser de geeks. Ah euh, wait. On me souffle dans l’oreillette que je me suis trompé de lieu et d’époque. Nos héros s’appellent Danial Tan Draconis et Luk Tan Chimaeros, ils sont écuyers sur le monde Chevalier d’Adrastapol, et ils ne passent pas leur baccalauréat mais s’apprêtent à DEVENIR. Devenir quoi ? Je vous en pose des questions ? Sur Adrastapol, le verbe est intransitif, ok?

Leur duel puéril est interrompu par l’arrivée propice d’une légende vivante de la planète, Sire Markos Dan Draconis, dont les deux newbies se récitaient justement la liste des exploits, plus badass les uns que les autres. Il paraîtrait même qu’il arriverait à lacer ses chaussures1, ce beau gosse. Markos les gronde un peu pour la forme, mais accepte bien vite de leur raconter l’histoire de son propre rite de DEVIENDANCE, sur une idée originale de… lui-même. C’était il y a bien des années, alors qu’Adrastapol luttait pour sa survie lors d’une invasion massive de peaux vertes belliqueux, menés par le terrible Skarjaw…

La situation avait tellement dégénéré que tous les pilotes aptes, même peu expérimentés, avaient été mobilisés pour tenter d’endiguer la Waaagh. Cela avait conduit le tout jeune Markos à coller un groooooos « A » sur la lunette arrière de son Chevalier de fonction, le Dracon’s Wrath, et de partir au front le jour même de son DEVENAGE, après que le commandement impérial se fut rendu compte que sa savante manœuvre d’encerclement de la horde adverse avait lamentablement échouée. Fort heureusement, les Orks seraient obligés de passer par une passe (how apt) pour atteindre la plaine centrale du continent quelconque où le conflit prenait place. Si les Chevaliers de la Maison Draconis, sous le commandement du Portier (Gatekeeper) et futur Haut Roi (et père de Danial) Talwyn Tan Draconis, se révèlent assez rapides, il serait possible de bloquer les affreux Xenos entre deux pièces de décor infranchissable et les pilonner à distance : technique de chien mais technique qui marche, comme on dit dans les conventions 40K. Après une marche forcée durant laquelle Markos eut tout le temps de se familiariser avec les voix des fantômes de ses prédécesseurs, qui hantaient toujours sa fière monture, la bataille s’engagea.

Sans surprise, les Chevaliers parvinrent à leurs fins (avec tout de même quelques pertes pour faire genre c’était dur), et Markos s’illustra particulièrement en donnant le coup de grâce à Skarjaw en personne, qui commandait à ses Boyz depuis le howdah de son Squiggoth personnel. Ce haut fait fut même bonifié par le sauvetage in extremis de Talwyn par le novice, le Portier ayant fait l’erreur de faire une sortie à la Manuel Neuer sur le Big Boss adverse, et s’être fait à moitié empalé par sa monture pour sa peine. Un acte chevaleresque qui fit rentrer directement son auteur dans la légende…

Début spoiler…Mais qui a été sérieusement enjolivé par le service Com’ d’Adrastapol pour booster le moral des locaux, comme le révèle le roué Markos à ses padawans ébahis. Car en fait, et tout à fait entre nous, celui qui a vraiment atomisé Skarjaw et remporté la bataille, c’est…

Début spoiler 2…Ben on sait pas. Ptêt que c’est bien Markos, qui a tiré au pif et a eu la chance du débutant. Ou ptêt que ce sont les esprits de ses prédécesseurs qui se sont cotisés pour lui acheter un PC de relance de son tir complètement foireux. Ou ptêt que ce sont les Orks qui ont fait le coup. Ou les Necrons. Ou l’Empereur. Ou Alexandre. Bref, c’est flou. En tout cas, Danial et Luk sont estomaqués par cette belle histoire, et promettent d’aller se coucher pour pouvoir eux aussi devenir de vrais pilotes de Chevalier dès le lendemain… s’ils réussissent l’ardue épreuve de DEVENIRATION bien sûr…Fin spoiler

1 : C’est nul quand on est une tortue mais essayez de faire ça aux commandes d’un Chevalier, bande de petits rigolos.

AVIS:

Andy Clark nous sert le B.A.BA de la nouvelle Chevaleresque, dégoulinant de bravoure désintéressée et de puissance martiale débridée, avec ce très convenu ‘Becoming’. On peut en partie lui pardonner en replaçant ce travail dans le contexte de la série qu’il a écrite sur cette faction, à l’époque assez nouvelle, de l’univers de 40K, et dont ce court format ne sert que de pièce d’introduction aux romans ‘Kingsblade’ et ‘Knighstblade’, dont Danial et Luk sont les protagonistes. Cependant, même ce lourd passif (jamais facile de devoir écrire de la GW-Fiction commerciale) n’excuse pas le manque assez total d’inspiration dont ‘Becoming’ est frappé. Le « twist » final est représentatif de cette carence fatale : c’est bien beau de révéler la face cachée, et donc moins glorieuse, d’une légende de propagande, mais ça aurait été plus efficace si on avait vraiment su le fin mot de l’histoire, au lieu de cette conclusion de Normand. Très dispensable.

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Doc Morgrim’s Vow – J. Reynolds [BB] :

INTRIGUE:

Doc Morgrim's VowLes Middenplatz Manglers ont accumulé les victoires depuis la mort tragique mais finalement bénéfique de leur Blitzer vedette (‘Manglers Never Lose’), et sont maintenant à la recherche de nouvelles opportunités de briller. Malgré les protestations répétées de leur apothicaire, le solide Morgrim Ironbane, le coach Tyros Bundt a accepté l’invitation qui lui a été faite de prendre part au Tournoi des Cent Malheurs, organisé dans la forteresse de Karaz Ankor. Gagner un match contre les redoutables, mais isolés, Dragon’s Hold Drakeslayers, permettrait aux Manglers de mettre la main sur l’Angry Dragon Cup, un trophée légendaire au sein de la communauté des fans. Dans le dirigeable Makaisson & Sons qui les emmène en Norsca, les Manglers discutent le bout de gras, Bundt et Franco Fiducci (le Nécromancien qui fait tenir en un morceau les deux tiers de l’équipe) essayant de découvrir pourquoi le Doc Morgrim se montre si récalcitrant à revenir dans sa cité natale, en vain.

La réponse se fait jour lorsque les visiteurs sont accueillis par une escouade d’Arquebusiers, et placés sous bonne garde le temps qu’un notable vienne leur rendre visite. Ce notable, c’est le Thane Thunor Thunorsson, figure importante de Karaz Ankor, coach des Drakeslayers, et accessoirement, père de Hrulda Thunorsdottir, capitaine de l’équipe, Tueuse de Trolls et… fiancée de Morgrim. On apprend ainsi que ce dernier s’est éclipsé sournoisement alors qu’il avait déjà échangé ses vœux avec Hrulda, préférant le deshonneur et l’errance au conservatisme rigide du Dragon’s Hold. En plus, c’était le seul moyen pour lui de jouer au Blood Bowl, sa passion, dans des conditions normales, l’équipe et le stade locaux étant très particuliers, comme nous allons le voir. Bien entendu, ce camouflet n’a pas été bien perçu par sa promise et sa lignée, et c’est donc assez naturellement que Morgrim se prend un bourre pif bien mérité de la part de Hrulda pour arriérés de paiement. Bien que Thunor souhaite enfin marier les deux tourtereaux, de force s’il le faut, pour restaurer son honneur, Morgrim parvient à négocier une échappatoire : si les Manglers gagnent le match, il sera libre de partir. Si les Drakeslayers restent invaincus, il épousera Hrulda. Les choses étant clarifiées et les parties en présence d’accord sur les termes, il est temps de passer aux choses sérieuses.

Le match se déroule selon les règles du Dungeon Bowl, un peu adaptées par les locaux. Foin de coffres explosifs ici, mais des monstres errants et des pièges mortels en tout genre, et un terrain en trois dimensions puisque placé à flanc de montagne. Morgrim apprend d’ailleurs à ses acolytes que la tactique préférée des Drakeslayers est de partir en PvE (tous leurs joueurs sont des Tueurs), et d’attendre que leurs adversaires se fassent tuer, plutôt que de chercher à jouer la balle. Une vraie approche naine, qui fait chaud au cœur. Fort heureusement, la forte teneur en morts vivants des Manglers leur donne une résistance accrue qui s’avère précieuse, et Marius Hertz, leur Blitzer vedette, est en grande forme. C’est d’ailleurs lui qui marque le touchdown de la victoire, après avoir arraché la balle de l’œsophage d’un Drake qui passait dans le coin, et s’était mis à harceler la pauvre Hrulda (galamment secourue par Morgrim, contre toutes les règles du Dungeon Bowl, ceci dit). Tout est bien qui finit bien donc, le Doc réalisant même que son ancienne fiancée ne lui en veut pas tant que ça, en fait. Ca aurait été des Elfes, on aurait eu le droit à un baiser langoureux en tomber de rideau, mais les Nains sont heureusement plus dignes, et Hrulda se contente de péter le pif de son sauveur pour intervention illicite, en tout bien tout honneur évidemment. Il y a des signes qui ne trompent pas…

AVIS:

Josh Reynolds poursuit sa saga Manglers avec la suite logique de ‘Manglers Never Lose’, qu’il n’est même pas nécessaire d’avoir lu pour comprendre de quoi il en retourne ici, l’auteur prenant la peine de bien contextualiser cette nouvelle, en vrai gentleman. L’accent a été ici mis sur l’intrigue plus que sur l’ambiance, ce qui fait de ‘Doc Morgrim’s Vow’ un bon contrepoint à l’épisode précédent : l’un est plus drôle, l’autre plus étoffé, mais les deux sont d’un très bon niveau, et Reynolds distille assez de punchlines (mention spéciale au dialogue portant sur la neige biologique et artisanale de Karaz Ankor) pour que le lecteur ne se sente pas dans une classique histoire de WFB… même si les ajouts fluffiques de cet incorrigible Josh Reynolds donnent vraiment envie de prendre cette historiette au sérieux. Encore un essai transformé pour l’auteur, qui honore ici sa réputation bien méritée de star writer de la BL.

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Valerius – G. Thorpe [HH] :

INTRIGUE:

ValeriusOù il sera question de Marcus Valerius et de la Cohorte Therion, compagnons de route de la Raven Guard pendant la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus, et envoyés pour une raison non explicitée ici se faire euthanasier par les renégats d’Horus sur le théâtre de Beta-Garmon par ce brave type de Corax. Nous retrouvons donc le Vice-Caesari Valerius au volant de sa forteresse Capitol Imperialis, et chargé de tenir la rive gauche de la Veule (une rivière locale) avec ses frères d’armes – dont son propre frère, Antonius, Princeps de Titan Reaver. Lorsque les forces du Maître de Guerre lancent une offensive majeure sur sa position, Valerius, qui a toujours sa foi impériale chevillée au corps, refuse de battre en retraite comme aurait fait n’importe qui, mais préfère au contraire saisir Horus à l’oreille et l’entraîner dans un maquis. Ou en l’absence du grand chauve barraqué, les Titans envoyés à l’assaut des positions loyalistes.

Valerius_IllustrationTout à fait réaliste sur ses chances quasi nulles de remporter la victoire, Valerius n’aspire plus qu’au martyre, persuadé qu’il est que Pépé ne l’aurait pas envoyé crever comme un rat dans une bataille mineure sans une très bonne raison. Chacun voit midi à sa porte. Après une prière rapidement conduite dans sa chapelle improvisée, Valoche ordonne donc à la Cohorte de se battre jusqu’au dernier soldat, assiste à la mort d’Antonius, carbonisé dans son Titan en emportant son vis-à-vis chaotique, sans verser une larme, puis ordonne dans le plus grand des calmes la surcharge du réacteur1 de son véhicule de fonction lorsque les Sons of Horus arrivent frapper à la vitre pour demander un constat à l’amiable.

Début spoilerCe n’est toutefois pas la fin pour Valerius. Peut-être. Une inspection du champ de bataille quelques heures plus tard par une force de reconnaissance impériale permet en effet d’identifier un survivant hébété se promenant le zguegue à l’air dans le cratère de l’explosion de la Capitol Imperialis. Incapable de décliner ses nom et profession aux soldats qui le prennent en charge, le nudiste inconnu se baladait toutefois avec une copie du Lectitio Divinitatus camouflé dans son anatomie (vous ne voulez pas de détails additionnels), et attribue sa survie surnaturelle à rien de moins qu’un miracle. On se demande bien de qui il peut s’agir…Fin spoiler

1 : C’est une manœuvre tellement classique à Warhammer 40K qu’on peut se demander pourquoi les commandants continuent à envoyer des troupes essayer de capturer les vaisseaux ennemis. Sans doute des escouades que Horus ne pouvait pas blairer.

AVIS:

Gav Thorpe offre une sortie de scène digne de ce nom à l’un de ses personnages fétiches de l’Hérésie, ce qui fera sans doute plaisir aux lecteurs que la destinée de Marcus Valerius intéressent. Ne faisant pas partie de ces « fidèles », je dois avouer que mon attention s’est concentrée davantage sur le la forme que sur le fond du récit, et je suis au regret de penser que Thorpe aurait pu rendre une meilleure copie. Mes principaux griefs portent sur la contextualisation très lacunaire de ce morceau de bravoure final, qui ne prend pas la peine de présenter de manière suffisante les personnages, leurs motivations et leur parcours, et nous laisse donc avec un illuminé de la première heure qui semble incapable de réfléchir par lui-même et considère tout ce qui se passe comme le résultat de la volonté de l’Empereur (ce qui est rassurant pour lui, mais pas vraiment approprié à un officier supérieur de l’Armée Impériale), son frère et son valet de pied, apparemment envoyé à la mort par un Primarque loyaliste plutôt sympathique jusqu’ici, sans plus d’explications. Une question me brûle les lèvres doigts à ce stade : WHY SHOULD I CARE ? Certes, on pourrait arguer que Thorpe avait trop peu d’espace à disposition pour briefer les nouveaux arrivants sur la saga Valerienne, mais pour une nouvelle censée pouvoir être lue de manière indépendante, le résultat laisse vraiment à désirer. Je reste convaincu que ces quelques pages relevaient plus du chapitre d’un roman que Gav Thorpe aurait dû écrire pour boucler son arc Raven Guard que d’un stand alone.

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The Aegidian Oath – L. Goulding [40K] :

INTRIGUE:

The Aegidian OathGoulding nous plonge dans le ventre mou de la (plus ou moins) Pax Imperialis, ces dix mille ans succédant à la fin de l’Hérésie d’Horus et à la mise sous cellophane de l’Empereur, et s’achevant aux alentours du fameux 41ème millénaire que nous avons appris à aimer. Malgré la couverture fluffique très limitée de cette époque, il est certain que les contemporains de cette dernière ne devaient pas se tourner les pouces, au vu de la fâcheuse tendance de la galaxie à partir en cacahouète juste au moment où l’on pensait la situation revenue sous contrôle. Bienvenue donc dans les toutes dernières années du 31ème millénaire, quelques neuf siècles après la grosse colère de (et la non moins grosse mandale paternelle à) Lulu Percale, et sur le monde – bien connu du fluffiste – de Sotha, où le devoir appelle le Chapelain Segas et le Frère-Vétéran Wenlocke, deux guerriers du Chapitre des Ultramarines.

Si nos deux acolytes ont fait le déplacement dans ce coin paumé du Greater-Ultramar, c’est qu’une mission bien particulière leur a été confiée par le Maître de Chapitre du moment, un certain Tigris Decon. Pour la mener à bien, ils doivent se rendre à la surface de la planète, et gravir la montagne interdite où, des centaines d’années plus tôt, s’est jouée une part non négligeable de l’Hérésie. Profitant de la présence, techniquement interdite mais néanmoins bienvenue, d’un berger local à la langue bien pendue et aux manières cavalières (appeler un Space Marine « guerrier châtré » en face à face, c’est sans doute faire preuve d’un peu trop de familiarité), Segas et Wenlocke rallient leur objectif sans tarder, et font bientôt la connaissance de l’homme qu’ils sont venus rencontrer : le Capitaine Oberdeii de la 199ème Compagnie des Ultramarines, du temps où le Chapitre était encore une Légion.

Vous me direz : « tout ça ne nous rajeunit pas », et vous aurez raison. Car Robert Déhi, comme son commandement (dont il est le seul survivant à l’arrivée des petits petits petits petits petits petits fils des ses anciens collègues), émargent à neuf cents ans bien tassés. Originellement affectée à la surveillance du Mont Pharos et à la protection de Sotha par Guilliman en personne pendant l’Hérésie, la 199ème, aussi connue sous le nom de Compagnie Egide, bénéficia d’un traitement particulier et pas vraiment orthodoxe de la part de Mister Codex une fois la tension retombée. Dans un élan d’hypocrisie jamais égalé depuis, Guilliman décréta en effet que l’Egide constituerait la 11ème Compagnie du Chapitre des Ultramarines, en prenant évidemment bien soin de ne pas ébruiter la nouvelle de cette non-conformité majeure à ses propres écrits. C’est ainsi que, pendant que les Légions de ses frérots étaient implacablement dépecées pour la bonne cause, le Grand Schtroumpf s’asseyait sur ses principes avec autant d’aplomb qu’il en avait eu au moment de créer l’Imperium Secondus, cinq minutes après que la connexion avec l’Astronomicon eut été coupée. Sacré RG, va.

Ce petit de secret de famille, connu d’une minorité d’initiés seulement, surtout après le placement de Roboute en soins stasatifs dans le siècle qui suivit son décret, aurait pu se perpétrer jusqu’à la disparition des derniers gardiens du Pharos, n’eut été l’idée, saugrenue et à la limite de l’hérésie pour les Ultramarines, ce qui est tout de même un chouilla hypocrite, de Rogal Dorn de procéder à une 3ème Fondation afin de renforcer à nouveaux les effectifs de l’Adeptus Astartes. Sans Guilliman pour faire obstacle de son large torse et de son aura primarquielle aux investigations des adeptes du Ministorum en charge des préparatifs de mitoses chapitrales, le risque de voir les errements du Robouteux de service être révélés au grand jour, avec des conséquences potentiellement pas très fun pour les surhommes en bleu, était simplement trop élevé pour que les instances dirigeantes des Ultras ne cherchent à effacer toute trace du caprice de leur géniteur. La mission de Segas et de Wenlocke est donc de faire disparaître la Compagnie Egide, préféremment de manière douce, le gars Oberdeii étant tout de même un héros de la Légion.

Une fois la raison de la visite établie, Oberdeii, que les envoyés de Decon ont surpris en train de tondre la pelouse à grands coups de faux (parce qu’il le faut, c’est bien connu), pête une durite de manière bien légitime, les siècles de placard qu’il a subi sans broncher, alors que ses compagnons d’armes mourraient les uns après les autres (comment, mystère, puisqu’il ne s’est pas passé grand chose sur Sotha en 900 ans), ne pouvant décemment pas se terminer par un plan de départ volontaire. Afin de sauver l’honneur, le Capitaine défroqué obtient un duel rituel contre Segas… et se fait rétamer la tronche en deux temps trois mouvement par le Chapelain, malgré l’avantage procuré par une attaque en traître au début du combat. Ramené à des dispositions plus urbaines à grands coups de Crozius, Oberdeii accepte finalement de faire faire à ses hôtes le tour du propriétaire, s’attardant longuement sur les mystérieux phénomènes agitants toujours sporadiquement le Pharos, ainsi que sur la petite galerie de saintes reliques que la Chapelle locale expose, dont le masque de protection du Warsmith loyaliste Dantioch, premier et plus illustre Gardien de Phare(os) qu’ait connu Sotha.

Arrive finalement l’heure du choix pour notre immortel autant qu’insomniaque héros : ou accepter une mutation au sein de la 5ème Compagnie des Ultramarines, avec un beau martyr à la clé dans des délais raisonnables, ou prendre la tête de son propre Chapitre successeur, en compagnie de Segas, Wenlocke et l’amicale des Vétérans de la conquête d’Orlan. Après avoir pesé le pour et le contre et grommelé comme le vieux ronchon qu’il est, Oberdeii finit par opter pour l’option sécessionniste, et la nouvelle se termine par le baptême en bonne et due forme des tout nouveaux Scythes of the Emperor par leur premier Maître de Chapitre, sous le regard ému et admiratif des deux transfuges de Macragge. Ca c’est de l’info, en plus d’être de la faux.

AVIS:

Goulding tape dans le mille avec cet intéressant The Aegidian Oath, qui donne une profondeur et une dimension prophético-tragique bienvenues à son Chapitre de prédilection, dont les déboires contre la flotte ruche Kraken n’étaient pas suffisants à les faire ressortir de la masse des fraternités de colosses en armures énergétiques (surtout depuis que le rôle des insecticides acculés a été repris par les Blood Angels) jusqu’ici. En plus d’abreuver le lecteur de notions fluffiques sur les Scythes, et à travers elles, sur les Ultramarines et les modalités de création d’un nouveau Chapitre Space Marines, ce qui est toujours intéressant, l’auteur déterre quelques potins croustillants à propos du comportement pas si irréprochable que cela de Rouboute Guilliman, dont certaines décisions ont même été remises en cause par ses fistons, avec le recul qu’un petit millénaire et la permissivité que le décès quasi établi de l’intéressé, peuvent apporter à la réflexion.

Sous la plume de Goulding, les insoupçonnables Ultramarines se grisent légèrement, leur farouche volonté de garder la face et de maintenir les squelettes bien au frais dans le placard (ou la boîte à gants du Land Raider de Guilliman, c’est selon), les faisant se rapprocher de leurs cousins des Dark Angels dans l’esprit. Rien qui ne révolutionne la vision que le lecteur aura du background établi de 40K, mais assez pour enrichir la compréhension que le premier a du second, et brouiller encore peu plus les lignes entre parangons de droiture (supposés) et sales types se battant du bon côté de l’histoire, que tout un chacun a défini en son for(t stellaire) intérieur d’hobbyiste pour classer les Chapitres loyalistes entre eux. Exclamons-nous à la suite de l’Empereur, s’il pouvait encore le faire, Tu quoque mi fili, à la réalisation des manigances pas très blanc bleu de Rob’, et savourons le plaisir d’une nouvelle SM (quasi) non-violente et (plutôt) réussie.

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The Reaping Time – R. MacNiven [40K] :

INTRIGUE:

The Reaping TimeVous est-il jamais arrivé de mal comprendre votre interlocuteur au cours d’une conversation, et de donner à l’un de ses mots ou phrases une interprétation tout à fait différente de celle de votre vis à vis ? Quiproquo ou malentendu, ce décalage involontaire entre ce que l’un a en tête et ce que l’autre comprend peut avoir de lourdes conséquences, comme peuvent en témoigner Thomas Beckett, Cyrano de Bergerac ou les Mantis Warriors. Ce n’est pas la population de la colonie minière de Zartak qui soutiendra le contraire, comme Robbie McNiven l’explicite dans la nouvelle qu’il consacre à son Chapitre d’adoption, les psychotiques Carcharodons Astra.

À leur charge, les Zartakois n’étaient pas exempts de tout reproche à l’arrivée – inopinée il faut bien le reconnaître, mais comme dit le proverbe, no one expects the spooky Carcharodons – des Astartes en orbite de leur planète. S’étant rebellé il y a quelques années contre le joug impérial et ayant envoyé par le fond vide le vaisseau de collecte de la dîme qui était revenu relever les compteurs, les pas si honnêtes que ça citoyens de Zartak s’attendaient donc à ce que les Carcharodons viennent pour mettre la main sur les stocks d’adamantium dus à Pépé, et fin aux velléités sécessionnistes du conseil des guildes, sorte de Sénat local en charge du gouvernement planétaire. Et effectivement, force-leur est de constater que l’escouade de Space Marines qui vient rapidement frapper à leur porte réclame de façon insistante que la dîme soit payée1. Doutant fortement de l’issue heureuse et indolore de cette visite de courtoisie si la vérité éclate au grand jour, les rusés maîtres de guildes vont d’abord tenter de noyer le poisson, avec des résultats très peu concluants, comme on peut s’y attendre. Non pas que les Astartes mutiques venus à leur rencontre soient de fins limiers, mais surtout grâce aux visions du Nomade Pâle, le Maître Archiviste des Carcharodons, qui permettent à ce dernier d’y voir clair dans les manigances de ses hôtes, et de réagir en conséquence. C’est bien pratique tout de même, la prescience.

Entraînés jusqu’aux niveaux les plus bas des mines de Zartak par le déclenchement des hostilités et un ascenseur piégé, Akia – Capitaine de la 3ème Compagnie – et son escorte vont alors s’engager dans une lente et sanglante remontée vers la surface, bien aidés ce faisant par les capacités de sauvegarde préemptives du Nomade Pâle – aussi connu sous le nom de Te Kahurangi –, ainsi que par la connaissance des lieux d’une paire de prisonniers politiques secourus sur le chemin. Malgré le dédain avec lequel ils considèrent ces simples humains, ce seront d’ailleurs ces derniers qui sauveront les fesses squameuses des Space Sharks, en prenant d’assaut le conseil des guildes avec une poignée de partisans loyalistes, et forçant les dirigeants félons à se rendre. Nos farouches Space Marines, trop gros pour ce travail d’infiltration, étaient en effet en train de prendre plutôt cher à l’extérieur de l’hémicycle, placés sous la protection d’une douzaine de Power Loaders opérés avec une maîtrise toute Ripley-ienne par les locaux.

Ce n’est qu’une fois le calme revenu, et alors que les masses laborieuses de Zartak commençaient déjà à préparer un happy end, à la suite du discours magnanime et inspirant donné par le jeune Caderick, dont la bravoure et la dévotion à l’Imperium ne font aucun doute, que le malentendu est révélé, dans toute son implacable horreur. Car la dîme convoitée par les Space Marines n’était pas constituée d’adamantium (encore que, je pense qu’ils ont pris ce qu’on leur avait préparé, ça peut toujours servir), mais bien de la population de Zartak, ressource indispensable tant au bon fonctionnement de la flotte du Chapitre qu’au recrutement des nouvelles générations de Frères de Bataille (il faut bien se requin-quer de temps en temps). Maigre consolation pour Caderick, la Pommade Sale semble détecter en lui l’étoffe, ou plutôt le cuir, d’un aspirant prometteur, ce qui lui fait sans doute une belle nageoire alors qu’il contemple ses concitoyens se faire déporter sur la barge de bataille de leurs libérateurs2. Quelques mois plus tard, les envoyés véritables de l’Imperium découvriront une colonie totalement déserte, ainsi qu’une note sibylline posée en évidence à proximité des corps des traîtres : « Squale-ala ! Nous sommes partis ! »

1 : En même temps, quand ton animal totem est le requin, c’est normal de faire une fixation sur les tithes (ceci est un jeu de mots bilingue hasardeux).

AVIS:

Mise en bouche aux ouvrages plus conséquents consacrés par McNiven aux disciples de Rangu (Red Tithe et Outer Dark), The Reaping Time contient son pesant d’informations fluff sur ce qui est probablement le plus célèbre des Chapitres méconnus de Warhammer 40K. N’étant pas familier de la couverture dont ont bénéficié les Carcharodons, à l’époque connus sous le nom de Space Sharks, dans les publications de Forge World dédiées à la guerre de Badab, il se peut que je sois passé à côté de conflits canoniques à la lecture de cette nouvelle, qui décrit ses protagonistes en descendants exilés de la Raven Guard, affligés par un patrimoine génétique dégradé et une tendance à sombrer dans une rage sanguinaire assez semblable à celle de leurs cousins Blood Angels, et d’inspiration mahori avouée. Toutes ces caractéristiques permettent de singulariser les Carcharodons par rapport aux autres Chapitres Space Marines, ce qui n’est pas plus mal, et même si je n’ai pas ressenti d’intérêt ntable pour cette confrérie particulière, on peut reconnaître que McNiven fait le job sérieusement sur ce point, trop souvent négligé par les auteurs de la BL dans leurs histoires de Marounes. Reste qu’une fois le fluff évoqué et évacué, The Reaping Time ne s’avère être qu’un condensé de bolter (and chainaxe) porn, articulé autour d’une intrigue des plus banales et débouchant sur un twist final insuffisamment préparé pour vraiment porter. Bref, rien de vraiment mémorable.

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Exocytosis – J. Swallow [HH] :

INTRIGUE:

ExocytosisDurement éprouvés par la poursuite féroce que leur livre l’implacable Corswain depuis leur affrontement dans le système de Perditus (‘The Lion’), Calas Typhon et ses Grave Wardens ont fait escale sur la planète féodale de Zaramund pour panser leurs plaies et réparer leurs vaisseaux. Accueillis à bras ouverts par Luther et ses Dark Angels renégats, qui pensent pouvoir se faire bien voir du Maître de Guerre en échange de leur coup de main (les Dark Angels ne font jamais rien de manière désintéressée, c’est connu), les Death Guards ont cependant choisi de limiter les interactions avec leurs cousins Légionnaires au minimum, ce qui chagrine fortement ces snobs de Calibanites. Officiellement, comme l’annonce Typhon à son homologue après avoir filtré ses appels pendant plusieurs jours, il s’agit de réduire le risque d’accident malheureux entre les deux contingents, certains Death Guards étant apparemment trop neuneus pour faire la différence entre un bon et un mauvais chasseur Dark Angel. Officieusement, le Premier Capitaine sent qu’il couve quelque chose de pas net depuis Perditus, comme les triades de bubons qui se développent sur son épiderme et l’intérêt que sa personne provoque chez la gent diptère lui laissent à penser. Redoutant sans doute le jugement de cet arbitre des élégances qu’est Luther (et sa barbe de hipster), Typhon refuse poliment mais fermement que ses nouveaux alliés lui envoient des Techmarines pour superviser les réparations, et consent seulement à venir au pot de l’amitié que l’état-major Dark Angels organisera à la fin des travaux.

Ce manque flagrant de reconnaissance est mal vécu du côté de la Première Légion, et un Capitaine gaffeur et désœuvré (Vastobal) convainc Luther de le laisser aller espionner le camp retranché de la Death Guard. En chemin, il tombe sur une caravane de civils locaux, bien décidés à rendre visite et hommage à un certain Typhus, sur lequel ils ne tarissent pas d’éloges. Profitant de la diversion offerte par ce troupeau de pèlerins, Vastobal se planque dans un bosquet tout proche de l’entrée du camp, et prend la pose d’un mélèze pour ne pas se faire repérer, tandis que Typhon en personne sort pour aller s’enquérir de la cause de tout ce raffut…

Début spoiler…Il ne lui faut pas longtemps pour comprendre qu’il est bien le Typhus dont ses groupies sont énamourés, et que ces derniers présentent tous les mêmes marques cutanées que lui. Appelé « Héraut du Grand-Père » par la petite mamie qui mène la congrégation, Typhon constate avec plus de fascination que de révulsion que ses visiteurs portent tous les symptômes de maladies graves, qui auraient dû les emporter depuis longtemps mais contre lesquelles ils semblent immunisés. Cette sympathique communion est toutefois interrompue par ce butor de Vastobal, qui sort de ses gonds et de ses bois lorsque les Zaramundois commencent à exsuder des essaims de mouches par tous leurs orifices. Fermement opposé aux choses du Warp, comme tout Calibanite qui se respecte, le Capitaine se met à massacrer les pèlerins à grands coups d’espadon, ce qui provoque la réaction de Typhon.

Le combat s’engage, au cours duquel le porteur de faux hérite d’une coupure au menton, ce qui le chagrine si fortement qu’il en devient authentiquement chaotique. Si si. Renforcé par les bienfaits de Nurgle, qui se manifestent pleinement après cette épiphanie barbière, Typhon décapite son adversaire, et part discrètement du système avant que les Dark Angels ne s’inquiètent de la disparition de Vastobal. Lorsque le Seigneur Cypher alerte Luther du départ en loucedé de ses invités, ces derniers sont déjà loin, et Typhon est fort occupé à précipiter la corruption de sa Compagnie en faisant goûter à ses officiers son hémoglobine suspecte lors du rituel des Coupes (encore un scandale de sang contaminé). Et ce n’est qu’un avant-goût de ce qu’il réservera à son vieux poto Mortarion lorsqu’ils seront à nouveau réunis…Fin spoiler

AVIS:

Si la déchéance de la Death Guard a été suggérée depuis les tout débuts de l’Hérésie (‘The Flight of the Eisenstein’), ‘Exocytosis’ marque véritablement le moment de la bascule définitive de cette Légion vers Nurgle, Calas Typhon servant de catalyseur à cette évolution fatidique. En cela, la lecture de cette nouvelle est obligatoire pour tous les amoureux du fluff de cette faction, et sert de prologue assez robuste aux événements couverts dans ‘The Buried Dagger’, où le même Swallow finira le travail et racontera le désastreux voyage de la Death Guard réunifiée jusqu’à Terra. Comme cet auteur prend un malin plaisir à faire passer Mortarion pour la dupe de son Premier Capitaine, l’absence du premier n’est absolument pas rédhibitoire, et permet même de relever le niveau de la nouvelle, si j’en suis seul juge. Les seules victimes de l’histoire sont finalement les Dark Angels, qui apparaissent comme les nice guys/dindons de cette farce. On peut s’interroger sur la nécessité de faire participer Luther à cette galéjade, d’où il ne sort pas vraiment grandi : vu l’importance qu’il a dans l’intrigue, n’importe quel Capitaine Dark Angels aurait pu tout aussi bien faire l’affaire. Peut-être que James Swallow avait des comptes à régler avec la Première Légion…

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Pantheon – G. Haley [AoS] :

INTRIGUE:

PantheonÀ une époque lointaine et plus heureuse, Sigmar prit sur lui de faire construire l’équivalent de Strasbourg (une ville avec du cachet + un lieu de rassemblement pour les décideurs politiques) sur la plus haute montagne d’Azyr. Nommé Highheim, ce qui sonne convenablement alsacien vous le reconnaitrez, ce complexe accueillit pendant un temps, voire une ère, les Dieux (plus ou moins) civilisés qui formèrent le panthéon des Royaumes Mortels. Puis le Chaos arriva, et chacun repartit dans ses pénates, laissant le pauvre Ziggy errer comme une âme en peine dans les allées désertes de la Theopolis.

La guerre totale décrétée par le divin barbu contre les quatre affreux est toutefois l’occasion pour le premier de réactiver ses vieux réseaux, et par une belle mâtinée pas encore tout à fait ensoleillée, il invite Alarielle à faire un Teams (avec webcam) pour parler du bon vieux temps. Au début franchement sur la défensive – ne pas oublier que la blitzkrieg sigmarienne a failli très mal finir pour elle – la Déesse finit par se détendre un peu, et accepte d’accompagner son hôte jusqu’à la place centrale du Highheim, où se trouve comme de juste une pièce d’eau. Mais attention, ce n’est pas n’importe quoi : plutôt qu’un bête bassin avec une fontaine rococo et des fientes de pigeon sur la margelle, il s’agit d’un miroir argenté créé par le mage Sanasay Bayla, et offert au Panthéon comme cadeau, outil et avertissement. Bayla, qui n’était pas la moitié d’un abruti, a en effet réussi à réaliser une œuvre qui permet à qui la contemple de voyager dans l’espace et dans le temps. Si Sigmar a tenu à ce qu’Alarielle vienne avec lui devant le miroir, ce n’est pas pour tenter de conclure avec la seule Déesse un tant soit peu accorte de son entourage (on est d’accord que Morathi est un peu creepy sur les bords), mais pour mater ensemble la vie de Brian Bayla, qui en plus d’être distrayante – on parle tout de même d’un type qui a réussi à maîtriser cinq des huit formes de magie – pourrait se révéler instructive.

La caméra se braque donc sur le mage prodige, au moment où une crise existentielle le saisit. A force d’exceller en tout, notre homme ne sait plus quel but se donner dans la vie, et après mûre réflexion, il décide d’aller vérifier si les Royaumes Mortels ont bien une fin physique, just for the thrill of it. La première étape de cette odyssée est de fact checker le sujet auprès d’une sommité en la matière, et comme Bayla a le bras long et le cœur bien accroché, il monte tout en haut du minaret du temple de Teclis le plus proche, entre en transe et se téléporte directement auprès du Dieu, qui lui assure que l’on peut bien s’asseoir sur le rebord du monde1. Cependant, cela n’est pas donné au premier clampin venu, car il faut passer par une porte secrète qui ne peut s’ouvrir qu’avec une clé forgée exprès par Grugni, puis terrasser un monstre immortel. Ca fait cher le coup d’œil.

Ce topo ne fait cependant pas peur à Bayla, qui abandonne séance tenance femme et enfants pour se lancer dans ce trek de l’extrême, ce qui l’occupe pendant quelques années. S’il ne parvient pas à négocier une audience auprès du Dieu forgeron lorsqu’il se rend à son temple de Chamon, il réussit tout du moins à obtenir un double de la clé en partageant sa Rince-Cochon avec le Nain Blanc (qui passait dans le coin). Il trouve également une astuce pour venir à bout du loup géant (Afrener) qui garde l’accès au bord du monde en se suicidant à 99% pour pouvoir rencontre Nagash, qui accepte d’euthanasier l’encombrant clébard en échange de cinq siècles et cinq jours de servitude post-mortem. Faut ce qu’il faut.

Ces obstacles enfin négociés, Bayla peut enfin boucler son périple, et contempler l’immensité magique et chaotique où les Royaumes (ici Ghyran) commencent et s’achèvent. Il est cependant immédiatement alpagué par un Magister de Tzeentch, qui essaie de lui vendre un plan de carrière mirobolant en l’échange de son âme, mais qui commet l’erreur de révéler que l’équilibre perso-pro ne serait alors pas vraiment respecté. Car Bayla est, au fond de lui, un authentique pater familias, et toutes ses pérégrinations lui ont ouvert les yeux sur le fait qu’il n’a pas été très présent au cours de la dernière décennie. Raccrochant violemment au bec de son démarcheur (ou l’équivalent dans les Royaumes Mortels), il repart dare dare en direction de son foyer, non sans avoir eu la vision d’une époque lointaine où ce dernier serait frappé par la guerre. Sachant qu’il ne serait plus là pour le voir, et donc l’empêcher, il décide de créer son fameux miroir pour que les Dieux puissent s’en servir dans leur veille constante contre le Chaos. Ce qui nous ramène au point de départ et à Highheim.

La nouvelle se termine sur un petit speech de Sigmar à sa bonne amie, qu’il voudrait plus active auprès des mortels afin de contrecarrer les fake news répandues par le Chaos à propos de la vie éternelle qui attendrait les serviteurs des puissances de la ruine. Qui de plus qualifié que la Déesse de la Vie pour porter ce message optimiste et philosophique auprès des habitants des Royaumes Mortels, hein ? Alarielle lâche un gros « mouais, j’y penserais » et repart semer du gazon en Ghyran, laissant Sigmar passer la mop et fermer la lumière sur Higgheim. C’est pas tous les jours facile d’être un petit patron.

1 : C’est malin, je vois maintenant Teclis avec la moustache de Francis Cabrel.

AVIS:

On savait Guy Haley très à l’aise dans le registre « mythique », qu’il est l’un des seuls contributeurs de la Black Library à pratiquer de manière régulière1, et ‘Pantheon’ est sans doute sa soumission de référence en la matière. Il parvient en effet à mettre en scène une épopée légendaire comparable à celle Gilgamesh (un héros d’une puissance quasi-divine s’embarque dans une quête impossible), transposée dans l’univers d’Age of Sigmar, et même plus largement, de la GW-Fiction, comme les références au Monde qui Fut qui émaillent le récit le dénotent. On se laisse embarquer dans ce voyage très différent des nouvelles ordinaires de la BL, où le moindre personnage est un Dieu, une Bête Zodiacale ou un individu mythique, et qui se termine comme souvent dans ce type de littérature par un enseignement moral à méditer (ici un bon carpe diem des familles). C’est à la fois rafraichissant et bien réalisé, et mérite donc vraiment d’être lu par celles et ceux qui souhaitent explorer le catalogue de la Black Library à la sauce AoS. Un classique en devenir, à mon humble opinion.

1 : Voir sa série sur le Prince Maesa, par exemple.

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Unearthed – R. Sanders [40K] :

INTRIGUE:

UnearthedÀ la poursuite de la bande d’Alpha Légionnaires (le nom sonne bizarre, mais on va dire que c’est techniquement correct et facilement compréhensible, donc…) responsable du décès tragique et prématuré de son supérieur hiérarchique, le regretté Inquisiteur Godefroy Pyramus, l’Interrogateur Kiefer atterrit sur le monde agricole de Grendl, lui aussi victime des (in)délicates attentions des fils putatifs d’Alpharius et Omegon. Les vastes champs céréaliers de la planète ont en effet été dévastés par une invasion de vermine Xenos, « malencontreusement » libérées à la surface de Grendl par ces farceurs de chaotiques, réduisant la mer de grains en bassin de poussière. Cette tragédie écologique est cependant le cadet des soucis de notre héros, qui, tout à son désir de vengeance, a réquisitionné les services d’un peloton de Rough Riders d’Attila ainsi que d’une escouade d’Ogryns, combinaison assez exotique il faut bien le reconnaître. Ayant localisé l’épave d’un cargo spatial à proximité de sa position, Kiefer entraîne ses ouailles sur place afin d’explorer ce qui pourrait être la planque de ses ennemis.

L’exploration de l’intérieur du vaisseau, bien que n’apportant dans un premier temps que la confirmation que les Honourless (le nom de la bande du Seigneur du Chaos Sysyphon Vail1, la Némésis de Pyramus et Kiefer) sont bien derrière le crime environnemental commis sur Grendl – ce que Sanders avait affirmé de façon péremptoire au début de la nouvelle, ce qui rend l’hésitation postérieure de son héros assez contre intuitive –, finit cependant pas porter ses fruits, Kiefer et Cie tombant dans l’embuscade tendue par les Space Marines du Chaos, dont les armures mises en veille prolongée ont trompé les scanners impériaux jusqu’à ce qu’il soit trop tard. Et pour tomber, ça, ils tombent. Déchiquetée par le barrage de bolts déchaîné par les renégats, la passerelle occupée par les troupes inquisitoriales s’écroule sur elle-même, entraînant avec elle la plupart des Attilans, qui font décidément moins les malins sans chevaux et sans lances explosives. Furieux à l’idée que ses hommes puissent avoir du plomb dans la cervelle, si tant est que les semelles des bottes énergétiques de l’Alpha Legion soient plombées (bah oui, les munitions ça coûte cher), Kiefer, rattrapé in extremis par le bout de sa cape et par son dévoué garde du corps, rate toutefois son test de stupidité, et se laisse choir à son tour dans la mêlée, se brisant la jambe et perdant son pistolet bolter à la réception, comme un grand. Avait-il bu pour prendre une décision aussi radicale ? Eh bien… oui. C’est Godefroy qui doit s’interroger sur son Interrogateur.

Fort heureusement pour notre héros peu inspiré, ses adversaires ne sont pas exactement des foudres de guerre non plus. En témoigne le Légionnaire qui s’approche pour lui régler son compte, et rate lui aussi son test, cette fois d’Initiative, ce qui laisse à Kiefer assez de temps pour se traîner jusqu’à son arme, la ramasser, mettre le chaotique en joue, et lui coller un bolt entre les augmétiques. La confusion généralisée régnant à ce moment du récit permet même à l’Interrogateur de sonner les Ogryns qui patientaient jusqu’alors à l’entrée du vaisseau, détestant comme chacun sait les espaces confinés (ce que Sanders soulignera un nombre non nul de fois au cours de la quinzaine de pages de sa nouvelle). L’arrivée des Abhumains offre un sursis bienvenu, mais de courte durée, aux impériaux, et c’est avec un regret non feint que Kiefer voit le fameux Sysyphon filer à l’anglaise avec quelques hommes sans que son fémur fracturé et son abdomen perforé de shrapnels ne lui permettent d’y faire grand chose. Comble de malheur, le fourbe Vail, en bon méchant de série Z Oméga qu’il est, avait eu le temps d’installer des booby traps dans l’épave, qui commence à se remplir de sable à une vitesse inquiétante sitôt après son départ.

Début spoilerIncapacité par ses blessures, Kiefer aurait certainement suffoqué dans la soute en compagnie de ses suivant, n’eut été la dévotion d’un Ogryn mieux équipé que la moyenne des ses camarades (pensez-donc, il avait un bandana et des lunettes de protection : un prix Nobel en puissance), qui sacrifie noblement sa vie pour permettre à sa nullité de patron de s’échapper par une fissure de la pièce. S’en suit une longue séance de reptation pour notre héros, qui ne pense à utiliser sa radio qu’un peu tard en chemin, et arrive évidemment trop tard pour assister son arrière-garde contre la percée des Honourless. Et la situation s’empire encore lorsque Kiefer se rend compte, après avoir tenté de contacter le reste de son équipe, en orbite autour de la planète sur son vaisseau de fonction, que ce dernier a été abordé et saisi sans coup férir par l’Alpha Légion. C’est un Sysyphon heureux qui annonce à son ennemi qu’il a bien pris connaissance des informations top secret que l’ordinateur de bord contenait à propos de l’Inquisition (Kiefer aurait dû fermer sa session avant de descendre sur le plancher des vaches), et qu’il va de ce pas point de Mandeville rendre une visite de courtoisie à la base inquisitoriale la plus proche.

Seule source de réconfort pour notre héros, il parvient à couper la communication avant que Sysyphon ait eu le temps de placer un rire machiavélique de rigueur, ce qui aurait constitué un déshonneur absolu pour le camp loyaliste. Au lieu de ça, Kiefer parvient à joindre ses derniers fidèles, barricadés dans la salle des machines du vaisseau, et à le convaincre de faire sauter ce dernier afin d’empêcher l’Alpha Legion de ruiner définitivement le groove de l’Empereur, et arracher une victoire morale pour l’Imperium. Ce qu’ils parviennent à faire. Bon. Kiefer voit donc un petit point lumineux s’allumer au firmament, et se diriger vers la surface. Certes. L’épave finit par s’écraser à la surface Grendl, ce qui réchauffe le cœur de l’Interrogateur avant que la mort ne le pr- ah, non, pardon, il est mort hors champ avant ça. Hmmm… Anti-climatique, vous avez dit anti-climatique ? Comme c’est anti-climatique.Fin spoiler

1 : Qui avait une soeur assez connue, Sysymone.

AVIS:

Nouvelle soumission plus que moyenne de la part de Rob Sanders, qui retrouvait cependant sa faction favorite pour l’occasion. L’Alpha Legion dépeinte dans ce Unearthed (pourquoi ce titre d’ailleurs, puisque l’intrigue ne fait pas mention d’un quelconque objet déterré) n’apparaît en effet pas comme l’implacable machine à manigancer qui avait signé la perte des Crimson Consuls de main de maître dans The Long Games at Carcharias, mais davantage comme une bande de sbires un peu plus furtifs que la moyenne, menés par un Seigneur du Chaos brillant plus par son œil jaune et noir que par son génie malveillant, ou même son implication dans le récit. Face à la nullité consommée de leurs adversaires, les renégats parviennent cependant à sauver la face d’Alpharius, mais que ce fut laborieux ! En choisissant d’articuler sa nouvelle autour de péripéties martiales des plus classiques, et donc assez peu intéressantes pour le lecteur habitué, Sanders ne capitalise pas vraiment sur le potentiel scénaristique de l’Alpha Legion, de la part de laquelle on serait en droit d’attendre coup fourré sur trahison (comme John French a réussi à le faire dans son très correct We Are One). Rien de tout ça ici, la seule fourberie à mettre au crédit des surhommes en canard (la couleur hein, pas l’animal) étant la mise de leurs armures énergétiques en mode nuit. Mouarf. Même la fin d’Unearthed est tristement sans équivoque, Sanders ne laissant à aucun moment soupçonner que l’insaisi (à défaut d’être vraiment insaisissable) Sysyphon Vail aurait pu mettre en scène sa disparition pour réapparaître quelques temps plus tard et continuer sa sinistre carrière. Bref, pas de quoi casser trois pattes à un canard (l’animal hein, pas la couleur).

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Da Bank Job – A. Hall [BB] :

INTRIGUE:

Da Bank JobLes Kostos de Brobrag ont passé une première saison mémorable, mais pas pour les bonnes raisons. Incapables de remporter le moindre match, et généreux fournisseurs de séquences d’anthologie pour le bêtisier de la ligue, l’équipe ne semble pas promise à un grand avenir. Cependant, les mystérieux Ger et Bil, homme et gobelin d’affaires à l’air louche et aux intentions suspectes, ont des projets grandioses pour Brobrag et ses joueurs : une participation au Reikland Invitational pendant l’intersaison, avec à la clé un match d’anthologie contre les célèbres Reavers pour la meilleure équipe de la phase de poules. Non pas que les Kostos aient des chances de parvenir jusqu’à ce stade de la compétition, mais surtout pour couvrir le cambriolage de la salle des coffres de l’Oldbowl d’Altdorf par quelques complices pendant que le reste des peaux vertes fera de la figuration sur le terrain.

Si le plan avait l’air solide sur le papier, il ne tarde pas à devenir caduque, dans la plus pure tradition des stratégies taqueutiques et tequeuniques d’avant match. Bien que l’excentrique sorcier humain (Chanzeenmitt) que Ger & Bil ont intégré à l’équipe ait rempli sa part du marché en ouvrant un portail où se sont engouffrés Fingurs, le bloqueur Orque noir et solide bras droit de Brobrag, et une poignée de goons destinés à déclencher les pièges à congres qui jonchent le chemin de la salle des coffres, les Kostos ont la désagréable surprise de se retrouver opposés non pas aux inoffensifs Merrywald Chums, mais directement aux Reikland Reavers. C’est un match que les peaux vertes ne peuvent pas gagner, mais qu’ils peuvent au moins essayer de faire durer assez longtemps pour permettre à leurs complices de récupérer le butin.

Comme prévu, Fingurs finit par se retrouver seul après la mort tragique mais pas surprenante de ses sous fifres, et, guidé par la voix dans sa tête, fait main basse sur… un sifflet. Ce qui le lui coupe1. Lorsqu’il fait son retour sur le banc de l’Oldbowl, c’est la mi-temps et les Kostos sont menés 4-0, avec déjà quelques pertes à déplorer. Les quinze minutes de répit réglementaires sont cependant bien mis à profit par Andy Hall pour débrouiller son intrigue (Chanzeenmitt est en fait deux sorciers de Tzeentch fusionnés dans le même corps, et il(s) a/ont doublé Ger & Bil pour récupérer le mythique sifflet de Nuffle pour son compte), et par Brobrag pour retourner la situation à son avantage. Car il est dit que quiconque énonce un commandement de Nuffle et siffle dans son sifflet voit son énoncé réalisé. That’s the rules, stoopid. Un mage maigrelet et skizophrène ne faisant pas le poids contre un chef Orque en rogne, notre héros récupère facilement l’instrument convoité, et décrète que « c’est celui qui siffle qui gagne ». S’en suit une remontada digne de Barcelone en 2017, aussi inexplicable pour les commentateurs que pour les spectateurs et surtout les Reavers, et, surtout, la première victoire, certes volée mais pas imméritée, de Brobrag et de ses Boyz. Bien sûr, le sifflet attise les convoitises et déchaîne les passions, mais heureusement, le Boss a un endroit beaucoup plus sûr qu’un bête coffre pour conserver son bien mal acquis : l’estomac du Troll de l’équipe. Il fallait y panser.

1 : Le squeeg. Ceci est une blague de niche.

AVIS:

Andy Hall se disperse un peu trop à mon goût dans ce ‘Da Bank Job’, tant au niveau de l’intrigue (quel besoin d’impliquer un/deux sorcier.s de Tzeentch et un match de Blood Bowl dans une histoire de casse ?) que des personnages (à quoi servent Ger & Bil ?). Moins grave mais également handicapant pour sa nouvelle, il bâcle totalement la fin de cette dernière d’un point de vue stylistique, ce qui laisse une sale impression au lecteur au moment d’en terminer. On lui accordera tout de même quelques points pour le grand nombre de célébrités croisées dans ces quelques pages, depuis Jim Johnson et Bob Bifford jusqu’à Lord Borak, le Mighty Zug et Griff Oberwald, ainsi que pour un ajout fluffique notable à l’univers parallèle de Blood Bowl avec le surpuissant sifflet de Nuffle. Mais c’est à peu près tout et ça ne suffit pas pour faire de ‘Da Bank Job’ une réussite.

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The Last Son of Prospero – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE:

The Last Son of ProsperoRamené sur Terra grâce aux efforts conjoints des White Scars, qu’il a aidé à sortir de la tempête Warp dans laquelle ils étaient encalminés, et des Elus de Malcador le Sigilite, le Sergent Revuel Arvida des Thousand Sons n’est plus vraiment au pic de sa forme à son arrivée sur le monde Trône. En cause, cette cochonnerie de malédiction du changement, un temps contenue par Magnus le Rouge, mais à présent hors de tout contrôle. Exfiltré vers l’infirmerie privée du Régent de Terra au nez et à la moustache de Jaghatai Khan, pour que Papi Mougeot puisse jouer au docteur avec ses abattis, le pauvre Arvida n’est plus qu’un tas de chair décoloré et instable, mais auquel son âme s’accroche encore avec l’énergie du désespoir.

Pendant que Malcador joue du scalpel avec plus de ténacité que d’efficacité (6 heures d’opération, tout de même), puis doit expliquer à un Jag’ hors de lui pourquoi il a cru bon de lui emprunter celui que le Primarque considère comme étant son obligé – et notre gonze prend les serments très au sérieux – Arvida expérimente des visions mystiques, où le passé et le présent s’entremêlent. Après quelques flashbacks peu intéressants, il fait la rencontre de son progéniteur borgne, ou plutôt de l’un de ses éclats1, qui a choisi de rester sur Terra… pour demander pardon à l’Empereur, j’imagine ? Toujours est-il que cette fraction du Roi Ecarlate est tirée de sa stupeur hébétée par l’arrivée de celui qui peut prétendre être le dernier fils de Prospero, et commence à se matérialiser dans la salle d’opération, juste à temps pour éviter à Jaghatai de faire avaler son bâton à Malcador pour lui apprendre à piquer les sauvegardes invulnérables pupilles des autres.

Cette apparition, c’était sur quoi le rusé vieillard comptait, lui qui cherchait un moyen de sécuriser les niveaux inférieurs du Palais Impérial en y installant un concierge avec un DEUG en occultisme. Malheureusement, la mayonnaise ne prend pas, ce qui laisse le champ libre au motivational speaker de Chogoris pour venir hurler des encouragements dans l’oreille la direction générale de son poulain. Miracle des miracles, cela marche beaucoup mieux que la combine de Malcador, et l’âme d’Arvida finit par fusionner avec l’éclat de Magnus, gagnant au passage une cure de beauté spectaculaire (les jeunes disent un glow up), qui redonne à notre comateux héros forme humaine. C’est ce qu’on appelle dans le jargon un coup d’éclat. Le rideau tombe sur une séance de présentation en bonne et due forme entre les membres du casting de cette nouvelle. Plutôt que de se prénommer Marvidus ou Manuel le Vouge, comme il en avait pourtant le droit et la possibilité, le « nouveau-né » s’introduit sous le nom d’Ianius, qui était le tutélaire (i.e. la mascotte démoniaque) d’Arvida au cours de sa carrière dans la Légion. Quelque chose me dit qu’on n’a pas encore fini d’entendre parler de lui…

1 : Parce que n’est plus Magn-I, c’est Magn-Us.

AVIS:

Chris Wraight signe une nouvelle pour connoisseurs de l’Hérésie d’Horus avec ‘The Last Son of Prospero’, qui ne peut être pleinement compris et apprécié qu’en maîtrisant, outre l’arc consacré par cet auteur au personnage de Revuel Arvida (‘Rebirth’, ‘Allegiance’), ceux propres à Malcador le Sigilite et ses élus (‘The Sigillite’), à Magnus (‘The Crimson King’) et aux White Scars (‘The Path of Heaven’, ‘Scars’)… ce qui fait un sacré bagage, mine de rien. Pour les happy few ayant investi assez de temps dans la maîtrise de l’Hérésie littéraire, cette nouvelle est à la fois intéressante sur le plan narratif et fluffique, ce qui est suffisamment rare pour être souligné, et apprécié. Pour les autres, qui formeront je crois la majorité, le bilan risque d’être un peu moins positif. Même si Wraight livre un récit de rédemption miraculeuse qui reste compréhensible pour un faux débutant (si vous ne savez pas qui sont Magnus, Jaghatai Khan et Malcador, ça va picoter), c’est bien le contexte dans lequel ‘The Last Son of Prospero’ se déroule qui fait tout l’intérêt de cette nouvelle. A ne pas mettre entre toutes les mains donc, ou en tous cas, à ne pas aborder sans préparation.

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Voilà qui conclut cette revue du Black Library 2016 Advent Calendar, qui contenait avec le recul pas mal de nouvelles que l’on peut considérer comme étant devenu des incontournables de leurs franchises respectives. Même s’il n’est plus possible d’acheter ce pot-pourri de courts formats autrement qu’à l’unité, ou en faisant l’acquisition des recueils qui regroupent ces histoires (‘Heralds of the Siege’ pour l’Hérésie d’Horus, ‘Lords & Tyrants’ pour 40K, ‘Gods & Mortals’ pour Age of Sigmar, et ‘Death on the Pitch’ pour Bloodbowl… en gros), ce qui rend l’entreprise assez onéreuse, j’espère que cette critique vous aura donné envie de vous plonger dans les univers riches et dépaysants de la GW-Fiction, et peut-être même de vous offrir un calendrier de l’avent un peu spécial pour cette année…

 

BLACK LIBRARY CELEBRATION 2018 [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du recueil/échantillon gratuit sorti par la Black Library en 2018, à l’occasion de sa célébration annuelle. Si mes recherches sont exactes, il s’agissait de la première fois que l’auguste maison au marteau noir expérimentait avec ce format, qu’elle a continué à supporter jusqu’à aujourd’hui. A l’époque pas encore décliné en plusieurs langues, ni proposé en format numérique, ce petit livret contient six histoires, à raison de deux par franchise majeur de la BL (40K, Age of Sigmar et l’Hérésie d’Horus). Au niveau des contributeurs, on retrouve la fine fleur des auteurs de l’époque, dont pas moins de quatre Seigneurs de Terra (French, Haley, Dembski-Bowden et Wraight), ce qui en fait peut-être la mini-anthologie la plus premium du lot.

Black Library Celebration 2018

Comme d’habitude, l’examen qui suit portera sur une dimension supplémentaire à mes revues habituelles, à savoir la pertinence de proposer la nouvelle en question à un public par nature pas du tout au courant des publications de la BL. Une sélection forcément difficile, eut égard à la richesse et la complexité des univers de la GW-Fiction, mais dont la réussite ou l’échec pourrait avoir un effet important sur le développement de la fanbase de la maison d’édition de Nottingham. Le millésime 2018 a-t-il passé l’épreuve du feu noob ? C’est ce que nous allons voir.

Black Library Celebration 2018

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The Absolution of Swords – J. French [40K] :

INTRIGUE:

The Absolution of SwordsPar une nuit frisquette dont Dominicus Prime a le secret, un trio de figures enrobées se dirige vers la forme imposante de la Haute Chapelle, dont l’accès a pourtant été interdit par le Prefectus Prior Gul. Lorsqu’une patrouille de gardes a la mauvaise idée de leur barrer la route, les marcheurs jettent à bas leurs masques (et chasubles), et forcent leur chemin jusqu’au bâtiment où les attendent – sans le savoir encore – Aristas Gul et son bedaud Lumn, qui se croient avoir été convoqués par leur contact au sein de la 10ème Voie pour un point d’avancement surprise. Nos trois compères sont l’Inquisiteur Covenant, la Sœur Repentia Severita (qui ajoute pieusement le KO des deux gardes qu’elle a molestés dans l’exercice de leurs fonctions à son ardoise de péchés), et le Prieur Josef, et s’ils ont fait le voyage dans ce trou perdu de la galaxie alors qu’un Conclave est sur le point de débuter sur Ero, c’est qu’ils ont de bonnes raisons.

Un peu plus loin, sur la même planète, deux autres agents de l’homme au catogan tentent d’obtenir leurs entrées dans le night club le plus privé de Dominicus Prime : la salle de pause de la 10ème Voie. Ils ont dû pour cela négocier leur passage à travers des kilomètres de couloirs, fumoirs et dortoirs, graissant les pattes des pèlerins de faction tout du long, jusqu’à faire la connaissance d’un gros malabar peu aimable, qui accepte toutefois de les mener à confesse après avoir vu les (faux) tatouages et entendu les (bonnes) réponses de ces visiteurs impromptus. Pour continuer les présentations, il s’agit du blasé Cleander Von Castellan, marchand libre-mais-pas-vraiment-en-fait, et de l’imperturbable Koleg, ex-soldat aussi mortel que morne. Seul petit problème, la brute fait du zèle dans son interrogatoire, et pose une dernière question à laquelle Cleander n’a pas la réponse. Son improvisation ne donnant rien, le rogue trader est contraint d’écourter l’entrevue en dégainant ses fidèles pistolets à aiguilles, ce qui règle le problème de façon élégante (plus qu’un bolter, en tout cas). Ceci fait, les deux agents sont libres de s’engager dans l’escalier qui les mènera jusqu’à leur destination, peut-être finale.

Retour dans la Haute Chapelle, où de foie jaune de Gul en est quitte pour une petite leçon de catéchisme. Car le bon Prior couvre depuis trois ans les agissements démoniaques de la 10ème Voie, depuis qu’il a reçu la visite d’un Inquisiteur radical ayant confirmé ses doutes athéistes sur la non-divinité de l’Empereur. Bon prince, Covenant est venu offrir une chance d’absolution au grox égaré, en échange de quelques tuyaux sur son commanditaire, ce que Gul est plutôt prêt à faire, mais ce que Lumn, moins moinillon muet que démon déguisé, n’est pas très chaud pour autoriser. L’inévitable baston qui fait suite à ce léger différend est remportée de haute lutte par l’Inquisition, mais creuse un gros trou dans la réserve de points de vie (et la couche de graisse protectrice) de Josef, en plus de mettre Severita sur les rotules. Heureusement que le boss et sa grande épée énergétique sont là, tout de même.

Sous terre, c’est à peu près le même topo pour Cleander et Koleg, après qu’ils soient parvenus à une crypte contenant un pédiluve, un Psyker enchaîné, une foule de cultistes enragés, et un démon d’intérieur qui n’a pas été nourri depuis longtemps. Pendant que Koleg maintient les hostiles à distance à grand renfort de gomme cogne et grenades de désencerclement, Cleander, qui a eu une bonne éducation et se charge donc de réfléchir pour deux, réalise que la situation se simplifierait sans doute beaucoup si le Psyker captif était sorti de l’équation, ce qu’il fait d’une petite torsion des cervicales, avec la bénédiction de l’intéressé. Et en effet, cette déconnexion warpique brutale renvoie le démon dans les limbes, ce qui est suffisant pour permettre à Koleg de terminer les hostiles tout seul comme un grand. Leur mission accomplie, et peu emballés à l’idée de faire le ménage, les deux hommes reprennent le chemin de la surface pour prendre un Champomy.

Notre nouvelle se termine avec la fin de l’interrogatoire psychique de Gul, mené d’esprit de maître par Mylasa, la Psyker de fonction de Covenant. Cette dernière offre à son sujet un départ apaisé, après quelques semaines de franches tortures dont elle a effacé la trace de sa mémoire, en reconnaissance du manque de bol colossal de Gul, coupable d’avoir obéi à un Inquisiteur soupçonné d’être tombé du mauvais côté de la barrière. Les souvenirs du Prior seront utiles à Covenant pour exposer la duplicité de son collègue lors du Conclave de guerre qui prendra place dans quelques semaines à Ero, et auquel les deux hommes participeront. Cela n’est cependant plus l’affaire de Gul, qui finit sa vie un verre à la main et sur le bord de mer, de façon purement psychique certes, mais plus agréablement que la grande majorité des citoyens de l’Imperium. C’est l’Inquisition qui régale.

AVIS:

John French signe une très bonne introduction à sa saga inquisitoriale avec ‘The Absolution of Swords’, qui se déroule juste avant les événements de ‘Resurrection’ et permet de se familiariser en douceur avec la galerie de personnages gravitant autour de Covenant, et découvrir la rivalité professionnelle qu’il entretient avec Talicto. Considérant que les duels fratricides au sein de l’Inquisition donnaient les intrigues les plus intéressantes de ce sous-genre de la GW-Fiction, ‘The Absolution…’ a piqué mon intérêt et donné sérieusement envie d’en savoir plus sur l’héritier présomptif d’Eisenhorn1 (qui a aussi eu affaire à un collègue radical en son jeune temps). Pour ne rien gâcher, le récit en lui-même est tout à fait digeste, mélangeant scènes d’action efficaces et atmosphère poisseusement grimdark, comme on est en droit de l’attendre de la part d’une soumission de ce type. Bref, si vous débutez avec Coco, voici la nouvelle qu’il vous faut, loin devant les « introspections » que French a dédié à chacun des serviteurs de Catogan-man (‘The Purity of Ignorance’, ‘The Spirit of Cogs’), qui sont à réserver aux lecteurs déjà familiers du bon Inquisiteur.

1 : Ou plutôt contemporain, car les deux personnages ont été créés pour le jeu Inquisitor, il y a fort longtemps.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Une très bonne introduction au côté grimdark de Warhammer 40K en général, doublée d’une très bonne introduction à la série des Guerres Horusiennes en particulier: la Black Library s’offre et nous offre un combo gagnant avec ‘The Absolution of Swords‘. Rien à dire sur ce coup là.

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A Trick of the Light – J. Reynolds [40K] :

INTRIGUE:

A Trick of the LightOù il sera question des premiers moments de ce fripon de Lukas parmi les Space Wolves, et de la façon dont ce turbulent ex-personnage nommé parvint à s’emparer de la pelisse d’un doppelgangrel, haut fait jamais égalé de mémoire de Long Croc. Notre histoire commence de façon assez classique par un gros plan sur un novice en petite tenue courant comme un dératé sur la banquise en direction du Croc, après avoir été jeté hors d’un Stormwolf par son tuteur Prêtre Loup. Comme tous les impétrants du Chapitre, Lukas doit maîtriser le Canis Helix et réussir à revenir à la forteresse des Space Wolves1, ce qui n’est pas une mince affaire. Forte tête devant l’éternel l’Allfather, Lulu va même jusqu’à se poser la question de sa coopération à cette épreuve brutale, et à laquelle il n’a jamais donné son consentement. Contrairement à la majorité des jeunes hommes de Fenris, il ne rêvait en effet pas de rejoindre les mythiques Guerriers du Ciel, mais était assez satisfait d’occuper le rôle du branleur/lover de sa communauté, au grand dam des époux et à la grande satisfaction des épouses de cette dernière. Embarqué contre son gré dans une expédition de chasse qui eut la malchance de contester un élan à un doppelgangrel peu partageur, Lukas vit tous ses camarades mourir les uns après les autres sous les griffes/crocs/tentacules/pinces du changeforme. Le flegmatique rouquin eut toutefois sa revanche lorsque la bête s’attaqua à son auguste personne, et la blessa grièvement au cours du combat, ce qui convainquit le Prêtre Loup qui suivait la confrontation à distance de récupérer cet individu prometteur avant qu’il ne se vide de son sang sur la toundra gelée.

Ce que Lukas ne tarde pas à découvrir, alors qu’il trotte en petites foulées vers le Croc sous un délicieux grésil fenrissien, c’est que sous son aspect pince-sans-rire, le Prêtre Loup qu’il l’a recueilli a lui aussi de l’humour. La preuve en est qu’il l’a laissé pile à l’endroit où il l’avait ramassé après sa bataille contre le doppelgangrel, et ce dernier – qui n’a apparemment pas bougé d’endroit pendant les quelques jours/semaines/mois nécessaires à la préparation des novices au test final de leur introduction – est bien décidé à régler ses comptes avec sa proie. Avant que les deux adversaires puissent s’expliquer, il faudra à Lukas se défaire des attentions d’un kraken affamé, et, pire, se faire faire la leçon par les fantômes de ses compagnons de chasse (son mentor Kvelduf, son cousin Thord et sa sex friend Gunnhild), ainsi que par les apparitions de son Prêtre Loup et de son Prêtre des Runes référents, pour faire bonne mesure2. Comme tout ce petit monde revient au moins deux fois hanter le pauvre Lukas, il passe au final plus de temps à essayer de détendre l’atmosphère en balançant quelques one liners dont il a le secret qu’à combattre la mégafaune de Fenris.

On a tout de même droit au récit circonstancié de la lutte, cette fois à mort, entre le Trompeur et le Trumpiste3, remportée comme prévu par le premier après quelques échanges accrochés. En hommage à ses comparses défunts, Lukas prélève la peau de la bête et refuse de la jeter à son arrivée au Croc. La suite appartient, si ce n’est à l’histoire, au moins au Codex Space Wolves V5…

: On peut donc dire qu’il est sur la route de la Rout, mouahaha.
2 : Il y a même Pépé qui vient dire bonjour à la fin, et repart en se tenant la bedaine après que Lukas lui ait raconté l’histoire de Guilliman qui repeint son plafond. Un grand classique.
3 : Une entité qui déforme en permanence la réalité pour duper ceux qui cherchent à le confronter. Et en plus, le changeforme avait une casquette MAGA (Make Asaheim Great Again), c’est presque certain.

AVIS:

Toujours à l’aise dans l’exercice délicat du développement du fluff sommairement présenté dans les suppléments de jeu (lire ‘The Gods Demand’ pour s’en convaincre), Josh Reynolds opère sa science narrative sur la figure de Lukas le Trompeur, à laquelle il consacrera un audio drama (‘The Art of Provocation’) et un roman (éponyme). Sans grande révélation pouvant expliquer pourquoi Lulu est aussi pénible (short story shorter : il a toujours été comme ça), cette nouvelle est plus sympathique qu’intéressante, et est sans doute à réserver aux lecteurs voulant en savoir plus sur cette figure du lore Space Wolves, et/ou à ceux qui cherchent à savoir si un (ici futur) Space Marine peut faire de l’humour, qu’au tout venant.   

ET POUR LES NOUVEAUX?

Choisir une nouvelle centrée autour d’un personnage pas vraiment connu (sorry Lukas) pour figurer dans un recueil introductif est une décision risquée : à mon humble avis, des têtes d’affiche du calibre d’Uriel Ventris ou Abaddon auraient mieux fait l’affaire. Comme l’histoire déroulée par Josh Reynolds couvre également un pan central du background (le trail du Canis Helix) d’un des Chapitres Space Marines les plus fameux qui soient, sa lecture est toutefois assez appropriée pour des nouveaux venus dans la GW-Fiction. On peut également souligner qu’inclure une nouvelle dont le ton varie un peu du grimdark premier degré, et donc un peu plombant, qui transpire largement des ouvrages de la Black Library, est également assez malin de la part des pontes de Nottingham. Bref, un bilan plutôt positif.

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Bear Eater – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE:

Bear EaterToujours en maraude dans les Royaumes Mortels (ici en Ghur) avec ses Astral Templars pour le compte du patron, Hamilcar Bear Eater voit une occasion en or d’agrandir le protectorat sigmarite se présenter à lui lorsqu’il arrive en vue de la cité de Jercho. Miraculeusement épargnée des déprédations des hordes du Chaos, cette ville ferait un bastion idéal pour les croisés d’Azyr… si Hamilcar arrive à convaincre son monarque, le Roi Soleil Joraad el Ranoon, de rejoindre le camp de l’Ordre. Rien de plus facile pour notre héros, dont les prouesses martiales ne sont égalées que par ses talents de diplomate (du moins c’est comme ça qu’il voit les choses, en sa qualité de plus grand fan de lui-même).

Après une petite parade militaire réalisée dans des conditions éprouvantes (#SousLeSoleilExactement), même pour des immortels en sigmarite, Hamilcar et ses lieutenants (le vieux bougon Broudiccan et un random dude du nom de Thracius) sont pris à parti par une émissaire de Jojo et sommés de laisser leurs armes au vestiaire pour respecter le protocole officiel. Lorsque nos trois compères finissent par obtempérer, ils ont la désagréable de surprise de constater qu’ils sont tombés dans un piège, une petite armée de gardes se déversant dans le hall avec des velléités peu charitables envers les Stormcasts.

Punk à chien gryffhound dans l’âme, Hamilcar ne perd pas de temps à tenter de résoudre ce conflit par la parole, et commence à zlataner à tout va les malheureux mortels qui lui passent sous la main. Ayant manifestement sous-estimés la puissance de leurs adversaires, les miliciens de Jercho finissent par battre en retraite, laissant toute latitude à notre héros de monter une expédition punitive envers ce pendard de Joraad el Ranoon (officiellement) et d’annexer la cité pour la plus grande gloire de Sigmar (officieusement)1. Sur le chemin de la salle du trône, il rencontre une vieille connaissance, le général Sarmiel el Talame, avec qui il a fait le coup de feu contre les Sankrit quelques semaines auparavant, et qui l’avait mis sur la route de Jercho après la bataille de Heliopalis. Miraculeusement convaincu par Hamilcar en l’espace de deux répliques qu’il était dans le camp des méchants, Sarmiel fait défection de la Garde Solaire et accepte de guider ses gros copains jusqu’au Palais de la Lune, où le Roi Soleil tient sa cour.

En route vers son objectif, Hamilcar développe un point de côté persistant2 et se retrouve confronté, en plus des bidasses solaires qui défendent le Palais, à des vampires feulant, preuve irréfutable du passage de ce coquin de Mannfred von Castein (ennemi juré de notre héros depuis qu’il s’est fait tuer par le Mortarque3) par Jercho. Il en faut toutefois plus pour empêcher l’injouable Mimil – qui se paie le luxe d’infliger une Mike Tyson à un suceur de sang un peu trop sûr de lui – de se frayer un chemin jusqu’à l’affreux Jojo. Ce dernier ne peut compter que sur ses rayons, des serviteurs totalement assujettis à sa volonté, pour faire office de derniers défenseurs, et place Hamilcar devant un dilemme cornélien pour le héros du Bien (avec un grand B et un grand nez) qu’il est : massacrer des innocents pour atteindre son objectif, ou les épargner et laisser le Roi Soleil s’en tirer à peu de frais…

Début spoiler…Malheureusement pour Joraad el Ranoon, une troisième voie était possible, à savoir embrocher le lumineux monarque sur son trône d’un jet de hallebarde bien senti. La mort rapide et sanglante du roitelet permet au moins d’établir qu’il n’avait pas été changé en vampire par Mannfred von Carstein, ce qui est… une information. Et le savoir est le pouvoir, paraît-il. La nouvelle s’achève sur cette conquête nette et (presque) sans bavure d’une nouvelle Cité de Sigmar par les Astral Templars. Du travail bien fait.Fin spoiler

1 : On peut remercier Guymer d’adapter un grand classique de la culture britannique à la sauce d’Age of Sigmar. Appelons ça le Fardeau du Mangeur d’Ours Blanc.
2 : Qui ne sera pas expliqué dans la suite de la nouvelle et n’aura pas d’impact sur la conclusion de cette dernière, mais suggère fortement que Guymer avait quelque chose de particulier en tête au moment de l’écriture.
3 : Voir ‘Beasts of Cartha’.

AVIS:

Je ressors de ce ‘Bear Eater’ avec une persistante sensation de gâchis au fond de la gorge (ou peut-être du cerveau), ce qui me désole au plus haut point compte tenu de mon attachement pour le personnage de Hamilcar, une des premières têtes d’affiche moderne (comprendre, un brin complexe) des Royaumes Mortels, et qui faisait ici ses grands débuts dans la carrière. En cause, le choix de David Guymer de placer son intrigue dans un cadre exotique et singulier (donc intéressant) en diable, mais de confiner ce dernier à une toile de fond au profit d’une nième baston entre Stormcast Eternals et locaux impénitents. La deuxième moitié de la nouvelle vient ainsi ruiner le travail de world building de la première, en se focalisant uniquement sur les exploits martiaux du fortiche Hamilcar, qui parviendra une fois encore et sans aucune surprise à vaincre l’affreux vilain que la destinée lui a mis sur son chemin. Et comme les compétences martiales de sa Némésis du jour (ou de la nuit) culminent à « lever le bras d’un air vaguement menaçant », on n’a même pas le droit à un combat final digne de ce nom, comme cela avait été le cas lors d’épisodes précédents de la série.

De manière générale, il se perçoit bien trop clairement à la lecture que ‘Bear Eater’ n’est qu’un segment d’un arc narratif bien plus large, dans la droite ligne des événements relatés dans ‘The Realmgate Wars’, écrits à quatre mains par Guymer et Josh Reynolds lors des premières années d’Age of Sigmar. Les références à la traque de Mannfred von Carstein sont tellement nombreuses au fil des pages que je soupçonne que cette nouvelle devait initialement faire partie d’une nouvelle tétralogie (comme ‘The Hunt for Nagash’ et ‘Knights of Vengeance’), avant que le projet soit abandonné pour une raison non précisée. Cela expliquerait aussi cette fin des plus abruptes ainsi que le traitement bizarre réservé au personnage de Sarmiel el Talame, qui semble avoir un passif conséquent avec Hamilcar et ses Astral Templars : je suis prêt à mettre une pièce sur le fait que cette première rencontre aurait dû faire l’objet d’une nouvelle ou d’un audio drama. Bref, un véritable et regrettable accident de parcours pour la paire Guymer & Hamilcar, sans doute causé par les errements éditoriaux de la Black Library à l’époque.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Mettre un personnage récurrent de la BL en avant dans un recueil promotionnel est une tactique courante et sensée d’un point de vue marketing, et comme ‘Bear Eater‘ marque les débuts de Hamilcar dans la carrière, il s’agissait d’un choix logique. Cependant, cette nouvelle n’est pas la meilleure, ni la plus représentative du style « high fantasy détendu du slip » que Guymer a signé pour ce héros charismatique (‘The Hardest Word‘ est supérieur sur les deux plans, et a été initialement publié en 2017, donc à temps pour figurer dans ce recueil), ce qui fait de sa sélection une petite faute de goût.

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Pantheon – G. Haley [AoS] :

INTRIGUE:

PantheonÀ une époque lointaine et plus heureuse, Sigmar prit sur lui de faire construire l’équivalent de Strasbourg (une ville avec du cachet + un lieu de rassemblement pour les décideurs politiques) sur la plus haute montagne d’Azyr. Nommé Highheim, ce qui sonne convenablement alsacien vous le reconnaitrez, ce complexe accueillit pendant un temps, voire une ère, les Dieux (plus ou moins) civilisés qui formèrent le panthéon des Royaumes Mortels. Puis le Chaos arriva, et chacun repartit dans ses pénates, laissant le pauvre Ziggy errer comme une âme en peine dans les allées désertes de la Theopolis.

La guerre totale décrétée par le divin barbu contre les quatre affreux est toutefois l’occasion pour le premier de réactiver ses vieux réseaux, et par une belle mâtinée pas encore tout à fait ensoleillée, il invite Alarielle à faire un Teams (avec webcam) pour parler du bon vieux temps. Au début franchement sur la défensive – ne pas oublier que la blitzkrieg sigmarienne a failli très mal finir pour elle – la Déesse finit par se détendre un peu, et accepte d’accompagner son hôte jusqu’à la place centrale du Highheim, où se trouve comme de juste une pièce d’eau. Mais attention, ce n’est pas n’importe quoi : plutôt qu’un bête bassin avec une fontaine rococo et des fientes de pigeon sur la margelle, il s’agit d’un miroir argenté créé par le mage Sanasay Bayla, et offert au Panthéon comme cadeau, outil et avertissement. Bayla, qui n’était pas la moitié d’un abruti, a en effet réussi à réaliser une œuvre qui permet à qui la contemple de voyager dans l’espace et dans le temps. Si Sigmar a tenu à ce qu’Alarielle vienne avec lui devant le miroir, ce n’est pas pour tenter de conclure avec la seule Déesse un tant soit peu accorte de son entourage (on est d’accord que Morathi est un peu creepy sur les bords), mais pour mater ensemble la vie de Brian Bayla, qui en plus d’être distrayante – on parle tout de même d’un type qui a réussi à maîtriser cinq des huit formes de magie – pourrait se révéler instructive.

La caméra se braque donc sur le mage prodige, au moment où une crise existentielle le saisit. A force d’exceller en tout, notre homme ne sait plus quel but se donner dans la vie, et après mûre réflexion, il décide d’aller vérifier si les Royaumes Mortels ont bien une fin physique, just for the thrill of it. La première étape de cette odyssée est de fact checker le sujet auprès d’une sommité en la matière, et comme Bayla a le bras long et le cœur bien accroché, il monte tout en haut du minaret du temple de Teclis le plus proche, entre en transe et se téléporte directement auprès du Dieu, qui lui assure que l’on peut bien s’asseoir sur le rebord du monde1. Cependant, cela n’est pas donné au premier clampin venu, car il faut passer par une porte secrète qui ne peut s’ouvrir qu’avec une clé forgée exprès par Grugni, puis terrasser un monstre immortel. Ca fait cher le coup d’œil.

Ce topo ne fait cependant pas peur à Bayla, qui abandonne séance tenance femme et enfants pour se lancer dans ce trek de l’extrême, ce qui l’occupe pendant quelques années. S’il ne parvient pas à négocier une audience auprès du Dieu forgeron lorsqu’il se rend à son temple de Chamon, il réussit tout du moins à obtenir un double de la clé en partageant sa Rince-Cochon avec le Nain Blanc (qui passait dans le coin). Il trouve également une astuce pour venir à bout du loup géant (Afrener) qui garde l’accès au bord du monde en se suicidant à 99% pour pouvoir rencontre Nagash, qui accepte d’euthanasier l’encombrant clébard en échange de cinq siècles et cinq jours de servitude post-mortem. Faut ce qu’il faut.

Ces obstacles enfin négociés, Bayla peut enfin boucler son périple, et contempler l’immensité magique et chaotique où les Royaumes (ici Ghyran) commencent et s’achèvent. Il est cependant immédiatement alpagué par un Magister de Tzeentch, qui essaie de lui vendre un plan de carrière mirobolant en l’échange de son âme, mais qui commet l’erreur de révéler que l’équilibre perso-pro ne serait alors pas vraiment respecté. Car Bayla est, au fond de lui, un authentique pater familias, et toutes ses pérégrinations lui ont ouvert les yeux sur le fait qu’il n’a pas été très présent au cours de la dernière décennie. Raccrochant violemment au bec de son démarcheur (ou l’équivalent dans les Royaumes Mortels), il repart dare dare en direction de son foyer, non sans avoir eu la vision d’une époque lointaine où ce dernier serait frappé par la guerre. Sachant qu’il ne serait plus là pour le voir, et donc l’empêcher, il décide de créer son fameux miroir pour que les Dieux puissent s’en servir dans leur veille constante contre le Chaos. Ce qui nous ramène au point de départ et à Highheim.

La nouvelle se termine sur un petit speech de Sigmar à sa bonne amie, qu’il voudrait plus active auprès des mortels afin de contrecarrer les fake news répandues par le Chaos à propos de la vie éternelle qui attendrait les serviteurs des puissances de la ruine. Qui de plus qualifié que la Déesse de la Vie pour porter ce message optimiste et philosophique auprès des habitants des Royaumes Mortels, hein ? Alarielle lâche un gros « mouais, j’y penserais » et repart semer du gazon en Ghyran, laissant Sigmar passer la mop et fermer la lumière sur Higgheim. C’est pas tous les jours facile d’être un petit patron.

1 : C’est malin, je vois maintenant Teclis avec la moustache de Francis Cabrel.

AVIS:

On savait Guy Haley très à l’aise dans le registre « mythique », qu’il est l’un des seuls contributeurs de la Black Library à pratiquer de manière régulière1, et ‘Pantheon’ est sans doute sa soumission de référence en la matière. Il parvient en effet à mettre en scène une épopée légendaire comparable à celle Gilgamesh (un héros d’une puissance quasi-divine s’embarque dans une quête impossible), transposée dans l’univers d’Age of Sigmar, et même plus largement, de la GW-Fiction, comme les références au Monde qui Fut qui émaillent le récit le dénotent. On se laisse embarquer dans ce voyage très différent des nouvelles ordinaires de la BL, où le moindre personnage est un Dieu, une Bête Zodiacale ou un individu mythique, et qui se termine comme souvent dans ce type de littérature par un enseignement moral à méditer (ici un bon carpe diem des familles). C’est à la fois rafraichissant et bien réalisé, et mérite donc vraiment d’être lu par celles et ceux qui souhaitent explorer le catalogue de la Black Library à la sauce AoS. Un classique en devenir, à mon humble opinion.

1 : Voir sa série sur le Prince Maesa, par exemple.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Même si cette nouvelle n’est pas la plus « didactique » qui soit (on n’apprend pas grand-chose sur les factions d’Age of Sigmar en tant que tel), son approche, que je qualifierais de surplombante, du lore, envisagé depuis la perspective exaltée des Dieux et puissants héros des Royaumes Mortels, en fait une lecture tout à fait appropriée pour des nouveaux venus. C’est tellement plus intéressant à lire qu’une banale empoignade entre une cohorte de Stormcast Eternals et une armée chaotique/de la mort/de la destruction (rayez les mentions inappropriées) qui constituait la majeure partie des nouvelles des premiers temps d’AoS! Un classique, je vous disais. 

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The Last Son of Prospero – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE:

The Last Son of ProsperoRamené sur Terra grâce aux efforts conjoints des White Scars, qu’il a aidé à sortir de la tempête Warp dans laquelle ils étaient encalminés, et des Elus de Malcador le Sigilite, le Sergent Revuel Arvida des Thousand Sons n’est plus vraiment au pic de sa forme à son arrivée sur le monde Trône. En cause, cette cochonnerie de malédiction du changement, un temps contenue par Magnus le Rouge, mais à présent hors de tout contrôle. Exfiltré vers l’infirmerie privée du Régent de Terra au nez et à la moustache de Jaghatai Khan, pour que Papi Mougeot puisse jouer au docteur avec ses abattis, le pauvre Arvida n’est plus qu’un tas de chair décoloré et instable, mais auquel son âme s’accroche encore avec l’énergie du désespoir.

Pendant que Malcador joue du scalpel avec plus de ténacité que d’efficacité (6 heures d’opération, tout de même), puis doit expliquer à un Jag’ hors de lui pourquoi il a cru bon de lui emprunter celui que le Primarque considère comme étant son obligé – et notre gonze prend les serments très au sérieux – Arvida expérimente des visions mystiques, où le passé et le présent s’entremêlent. Après quelques flashbacks peu intéressants, il fait la rencontre de son progéniteur borgne, ou plutôt de l’un de ses éclats1, qui a choisi de rester sur Terra… pour demander pardon à l’Empereur, j’imagine ? Toujours est-il que cette fraction du Roi Ecarlate est tirée de sa stupeur hébétée par l’arrivée de celui qui peut prétendre être le dernier fils de Prospero, et commence à se matérialiser dans la salle d’opération, juste à temps pour éviter à Jaghatai de faire avaler son bâton à Malcador pour lui apprendre à piquer les sauvegardes invulnérables pupilles des autres.

Cette apparition, c’était sur quoi le rusé vieillard comptait, lui qui cherchait un moyen de sécuriser les niveaux inférieurs du Palais Impérial en y installant un concierge avec un DEUG en occultisme. Malheureusement, la mayonnaise ne prend pas, ce qui laisse le champ libre au motivational speaker de Chogoris pour venir hurler des encouragements dans l’oreille la direction générale de son poulain. Miracle des miracles, cela marche beaucoup mieux que la combine de Malcador, et l’âme d’Arvida finit par fusionner avec l’éclat de Magnus, gagnant au passage une cure de beauté spectaculaire (les jeunes disent un glow up), qui redonne à notre comateux héros forme humaine. C’est ce qu’on appelle dans le jargon un coup d’éclat. Le rideau tombe sur une séance de présentation en bonne et due forme entre les membres du casting de cette nouvelle. Plutôt que de se prénommer Marvidus ou Manuel le Vouge, comme il en avait pourtant le droit et la possibilité, le « nouveau-né » s’introduit sous le nom d’Ianius, qui était le tutélaire (i.e. la mascotte démoniaque) d’Arvida au cours de sa carrière dans la Légion. Quelque chose me dit qu’on n’a pas encore fini d’entendre parler de lui…

1 : Parce que n’est plus Magn-I, c’est Magn-Us.

AVIS:

Chris Wraight signe une nouvelle pour connoisseurs de l’Hérésie d’Horus avec ‘The Last Son of Prospero’, qui ne peut être pleinement compris et apprécié qu’en maîtrisant, outre l’arc consacré par cet auteur au personnage de Revuel Arvida (‘Rebirth’, ‘Allegiance’), ceux propres à Malcador le Sigilite et ses élus (‘The Sigillite’), à Magnus (‘The Crimson King’) et aux White Scars (‘The Path of Heaven’, ‘Scars’)… ce qui fait un sacré bagage, mine de rien. Pour les happy few ayant investi assez de temps dans la maîtrise de l’Hérésie littéraire, cette nouvelle est à la fois intéressante sur le plan narratif et fluffique, ce qui est suffisamment rare pour être souligné, et apprécié. Pour les autres, qui formeront je crois la majorité, le bilan risque d’être un peu moins positif. Même si Wraight livre un récit de rédemption miraculeuse qui reste compréhensible pour un faux débutant (si vous ne savez pas qui sont Magnus, Jaghatai Khan et Malcador, ça va picoter), c’est bien le contexte dans lequel ‘The Last Son of Prospero’ se déroule qui fait tout l’intérêt de cette nouvelle. A ne pas mettre entre toutes les mains donc, ou en tous cas, à ne pas aborder sans préparation.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Comme souligné juste au-dessus, vraiment très peu, tant la nouvelle est destinée à un public de vétérans. C’est donc un raté assez phénoménal de la part de la BL que d’avoir choisi une des nouvelles les moins appropriées à figurer dans un recueil d’i-ni-tia-tion à la GW-Fiction de tout le corpus de l’Hérésie d’Horus, alors que ce dernier comptait déjà des dizaines de courts formats qui auraient beaucoup mieux fait l’affaire. Dans le doute, toujours mettre ‘La Tour Foudroyée‘, c’est pourtant simple!

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Into Exile – A. Dembski-Bowden [HH] :

INTRIGUE:

Into ExileSommité reconnue de son domaine d’expertise (la techno-archéologie), le Magos Arkhan Land coulait des jours heureux sur Mars à diriger des fouilles dans les niveaux inférieurs de la planète rouge et à remettre la main sur des gadgets funky de l’Âge d’Or de la technologie (on raconte même qu’il a un Tamagotchi), quand l’Hérésie s’invita sur le monde forge. Bien que considérant cette guerre idéologique comme parfaitement en-dessous de lui, le Didier Raoult de M31 se retrouva à son corps défendant au cœur d’une lutte d’influence entre loyalistes et renégats, chacun des deux camps voulant bénéficier de son génie dans le meilleur des cas, et en priver son adversaire dans le pire. C’est ainsi que Malcador chargea Rogal Dorn de « convaincre » Land d’accepter un poste sur Terra, mission barbante que le Primarque se dépêcha de refiler à Sigismund, qui fit de même jusqu’à ce qu’elle échût au Légionnaire Nicanor, dont le statut de simple bidasse ne lui permettait pas de se défausser du job sur quelqu’un d’autre. Il aurait dû prendre un stagiaire, moi je dis.

Envoyé sur une Mars contrôlée en majorité par les forces du Fabricator General Kelbor-Hal, Nicanor parvint à se frayer un chemin jusqu’au laboratoire d’Arkhan Land, qui après avoir fait sa diva, conclut à la vision d’un bolter braqué sur son gros nez qu’il était dans son intérêt de suivre son nouveau copain tout jaune jusqu’au vaisseau de réfugiés qu’il lui servirait de ticket de sortie de la planète. Bien entendu, le voyage ne pouvait ne pas se passer sans encombres (bien que le complexe de supériorité chevillé au corps et le manque absolu de tact de Land menacent de faire dégénérer chaque conversation en pugilat), et les trois – Land emporte avec lui son singe mécanique de compagnie, Raghavan Sapien – ne tarde pas à découvrir qu’il est suivi…

Début spoiler…Leur stalker n’est autre qu’un automate Vorax, qui en a après les technomiches du technoarchélogiste, et n’accepte pas « non », ou même une rafale de bolts en pleine face, comme une réponse. Les nombreuses inimitiés que notre héros et sa grande gueule ont cultivé depuis des années rendent l’identification des commanditaires de cet assassinat impossible, mais il ne s’agit que d’un détail pour Nicanor, dont la mission reste de faire évacuer son colis en un seul morceau, quelqu’en soit le prix. Après avoir gagné un peu de temps en détruisant le pont où le Vorax avait lancé son attaque avec une charge melta, héritant au passage d’un criblage de chevrotine carabiné, le Space Marine choisit héroïquement de faire une Gandalf le Gris Jaune lorsque la machine tueuse les rattrapa à nouveau, à quelques centaines de mètres du Uber Pool réservé par ces radins d’Imperial Fists pour le transfert de Land.

Pas au mieux de sa forme et totalement surclassé par son adversaire mécanique, Nicanor réussit toutefois à tenir assez longtemps pour permettre à Arkhan Land et sa grosse pointe de vitesse de rejoindre bon port et prendre le chemin du monde Trône. Le rideau « tombe » (voir ci-dessous) sur le cadavre du brave Légionnaire reposant dans la poussière ocre de Mars, tandis que Land a un sursaut temporaire et passager d’humanité en pensant au sacrifice désintéressé de son protecteur.Fin spoiler 

AVIS:

On peut toujours compter sur Aaron Dembski-Bowden pour proposer quelque chose d’intéressant dans les nouvelles qu’il écrit pour la Black Library, et ce ‘Into Exile’ ne fait pas exception. Ici, notre homme s’aventure sur le terrain de la construction narrative, en optant pour une succession de vignettes (10 en tout) déroulant le récit de la fuite d’Arkhan Land, une des figures de l’Hérésie dont Dembski-Bowden s’est entiché, depuis Mars jusqu’à Terra, de manière antéchronologique. L’histoire s’ouvre donc avec le départ du Vorax des lieux du combat final avec Nicanor, et la navette spatiale prise par Land déjà partie en orbite. On remonte ensuite le temps, pour retracer l’histoire dont on connaît déjà la fin, mais qui se révèle être tout de même agréable à suivre et assez rythmée, malgré le manque de suspens qui est la conséquence logique de ce parti pris Memento-esque. Bref, un exercice de style des plus concluants de la part de la golden plume de la BL, qui mérite d’être lu (et pas seulement résumé).

ET POUR LES NOUVEAUX?

On partait de très loin avec l’entrée précédente, mais la BL fait mieux que se rattraper en misant sur cette nouvelle, qui, si elle se bonifie également à la lecture si on connaît le lore de 30K et de 40K (ce qui est logique pour une franchise qui a été créée pour enrichir le fluff), présente la caractéristique d’être aussi intéressante sur la forme que sur le fond. Et si le dernier doit se mériter, la première est à la portée de tous, ce qui fait de ‘Into Exile‘ un bon produit promotionnel à mes yeux, qui pourrait même aider à casser l’image de sous-littérature qui colle à la Black Library, en montrant que cette dernière compte parmi ses contributeurs des auteurs assez imaginatifs et doués pour proposer des histoires du calibre de celle-ci. Pas énormément, c’est vrai, mais il y en a.

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Voilà qui conclut cette revue du recueil introductif 2018 de la Black Library. Comme toujours, saluons une nouvelle fois l’initiative de la maison d’édition de Nottingham de mettre à disposition de façon gracieuse ces quelques nouvelles: c’est un geste appréciable dans l’absolu, et auquel rien ne l’obligeait. En ce qui concerne la qualité et la pertinence des six courts formats décortiqués ci-dessus, je dois dire que le millésime 2018 se situe dans le haut du panier, avec deux histoires à la fois excellentes et grand public, et aucune soumission totalement dispensable, même si certaines étaient clairement destinées à une audience déjà familière des publications de la BL. L’exemple à suivre pour les recueils des années à venir.

 

BLACK LIBRARY 2017 ADVENT CALENDAR [40K – AoS – HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans une chronique franchement opportuniste, mais qui n’est tout de même pas totalement gratuite. Il sera ici question des nouvelles intégrées par la Black Library à son calendrier de l’avent…2017. Soumission de première fraîcheur donc, mais j’avais plusieurs raisons de consacrer un post à ce cru particulier.

Black Library 2017 Advent Calendar

La première d’entre elle était, je l’avoue sans mal, franchement prosaïque. Je me suis aperçu en mettant à jour mes fichiers de suivi (#IAmAFunGuy) qu’il ne me manquait que la revue de ‘The Tainted Axe’ de Josh Reynolds pour avoir chroniqué toutes les nouvelles de cette sélection (les audio dramas étant naturellement sortis de l’équation, car je n’ai jamais pu me faire à ce format). Si vous avez suivi mes publications sur le Warfo, je vous conseille donc de vous concentrer sur cette section de l’article, et de passer à autre chose, car le reste n’est pas inédit. En revanche (et c’est la deuxième raison), si vous ne connaissez que ce blog, j’ai le bonheur et l’avantage de vous annoncer que les nouveautés sont un peu plus fournies, car les nouvelles de l’Hérésie d’Horus ‘Duty Waits‘ (Guy Haley), ‘Magisterium‘ (Chris Wraight), ‘Now Peals Midnight‘ (John French) et ‘Dreams of Unity‘ (Nick Kyme) n’avaient pas été couvertes dans de précédents posts. C’est votre jour de chance!

Ce sujet de nouveau contenu évacué, il est enfin intéressant de revenir cinq ans en arrière – une période de temps importante pour la Black Library, pensez donc: c’était avant Warhammer Crime, Warhammer Horror et la série L’Aube de Feu – afin de juger de la qualité de cette sélection hivernale. 2017, grand cru ou récolte famélique? On va bien voir.

Black Library Advent Calendar 2017

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Endurance – C. Wraight [40K] :

INTRIGUE :

EnduranceSur le monde ruche de Lystra, l’escouade du frère Sarrien des Imperial Talons livre un combat d’arrière-garde aussi noble que vain contre les hordes innombrables des Zombies de la Peste ayant plus ou moins remplacées la population locale. Envoyés au casse-pipe pour permettre à un fonctionnaire de l’Adeptus Administratum obèse et tire au flanc (du moins, c’est comme ça que Sarrien se le représente) de maintenir son quota de dîme mensuel, ou autre raison purement technocratique, les braves Space Marines tiennent la ligne du mieux qu’ils peuvent, mais même leur constitution suprahumaine commence à donner d’inquiétants signes de fatigue. Pour ne rien arranger, les lignes de ravitaillement avec le reste de l’Imperium sont totalement coupées, ne laissant à nos fiers héros que la bonne vieille énergie cinétique pour défendre le domaine de l’immortel Empereur contre la corruption galopante titubante représentée par les Stumblers. Isolé de ses frères pour maximiser l’efficacité du soutien martial et moral que les Astartes représentent pour leurs alliés de la Garde, Sarrien débute la soirée comme toutes les autres auparavant : il chante chante chante ce rythme qui lui plaît (Endure ! For the Emperor ! Stand Fast ! Chihuahua !) et il tape tape tape (c’est sa façon d’aimer). On comprend cependant assez clairement que notre héros en a gros, et qu’il n’y a que son exemplaire éthique qui le pousse à suivre des ordres qui lui semblent totalement débiles.

À quelques encablures de cette planète condamnée, nous faisons la connaissance de notre deuxième protagoniste, le réfléchi (il ne court jamais) et hédoniste Dragan, Death Guard appartenant à la faction des Lords of Silence. Bénéficiant d’un quartier libre entre deux opérations de grande ampleur, Dragan a embarqué sa coterie sur son vaisseau personnel, l’Incaligant, et vogue là où le Warp le mène, massacrant tous les Impériaux qui lui tombent sous le moignon au passage. Les petits plaisirs de la vie, il n’y a que ça de vrai. Ayant fondu (dans tous les sens du terme) sur un transporteur de troupes de la Garde Impériale dépêché sans escorte en renforts de Lystra, Dragan décide sur un coup de tête, une fois le carnage expédié, d’emmener ses ouailles sur le monde en question, où il suppute (en même temps qu’il supure) qu’une distraction peut être trouvée.

Nous retrouvons ensuite Sarrien, toujours plus amer et toujours plus crevé, qui décide d’aller rôder derrière les lignes ennemies pour… le fun ? (étant donné que les défenseurs sont au bout du rouleau et s’attendent tous à crever, et que l’adversaire n’a aucune chaîne de commandement à décapiter ni de cibles stratégiques à prendre, l’utilité de la manœuvre me semble obscure). Bien que durement éprouvé par des semaines de combat sans répit, notre surhomme se révèle malgré tout capable de faire mordre la poussière à son poids en Stumblers, voire plus, jusqu’à ce qu’il tombe sur un Fatty dont l’odeur corporelle, ou l’aura de zenitude, c’est selon, est telle qu’il a bien du mal à lever la main sur lui. Malgré l’attitude résolument peace man du gros lard, Sarrien parvient à le décoller proprement, non sans que sa victime n’ait eu le temps de le prévenir 1) des dangers physiques et mentaux du surmenage (il devait être élu au CHSCT dans sa première vie), 2) de l’arrivée prochaine du Potencier (Gallowsman). Bien en peine de faire quelque chose de cette information, et sappé comme jamais, l’Imperial Talon décide de se rentrer, avec l’espoir futile de trouver un McDo encore ouvert sur le chemin pour s’envoyer un bon Coca bien frais.

De son côté, Dragan a fini par arriver en orbite autour de Lystra, et emmène sa bande sur les lieux du dernier conflit agitant encore la planète, dans l’espoir de trouver un adversaire de valeur. Escortés par quelques cohortes de die hard fans, les Lords of Silence progressent pondéreusement vers la ligne de front, où les attendent…

Spoiler Des Iron Warriors. Eh oui. Car en fait, Sarrien et Dragan ont visité Lystra à deux moments distincts, petite surprise savamment préparée par Wraight. Il est d’ailleurs fortement suggéré que Sarrien est devenu Glask (le second de Dragan, qui passe son temps à l’appeler Potencier – au grand ennui de son boss – et dont la jambe torse pourrait être la conséquence de la blessure subie par Sarrien au même endroit à la fin de la campagne) peu de temps après sa rencontre avec le gros plein de pus, lorsque, finalement submergé par le nombre de ses ennemis et l’amertume envers l’Imperium, il a décidé que sa survie était plus importante que son devoir. Ceci dit, le récit se termine sur un flou artistique et un amoncellement de Zombies affamés sur Sarrien, dont le salut final n’est pas garanti, ralliement à papa Nurgle bien acté par ce dernier ou pas. Quelques dizaines/centaines/milliers d’années plus tard, Dragan est quant à lui saisi d’une impression de déjà vu alors qu’il corrode les armures chromées de ces frimeurs de la IVème, ce qui ne fait que renforcer l’hypothèse de la défection de Mr Talon. Fin du spoiler

AVIS :

Mis à part le manque de clarté de sa conclusion (voir la partie spoiler ci-dessus), Endurance est une soumission solide de la part de l’ami Wraight, sans doute rédigée en accompagnement de son roman The Lords of Silence pour un galop d’essai littéraire. En quelques pages, Chris arrive ainsi à donner une véritable profondeur à ses répugnants héros, dont l’attitude chill, thrill & kill les distingue clairement des autres factions d’Astartes chaotiques et renégats de notre sombre galaxie, en plus de s’accorder parfaitement avec la philosophie débonnaire de Papa Nurgle, ce qui ne gâche rien. Sans rien galvauder de leur nature éminemment mauvaise, Wraight réussit également à rendre attachant (sans mauvais jeu de mots) le personnage de Dragan, dont le caractère égal et l’approche désinvolte de sa pestilentielle vocation le font apparaître comme éminemment plus sympathique que le Seigneur du Chaos lambda de la BL. De l’autre côté du ring, Sarrien s’avère moins mémorable, mais le récit que fait l’auteur de la lutte désespérée du loyaliste pour retarder l’inévitable, de part son caractère assez original (il combat en solo, et pas avec le reste de son escouade) et la bonne prise en compte des effets débilitants de la fatigue et des blessures sur la constitution d’un Space Marine – qui reste une machine de guerre insurpassable, mais peut se mettre dans le rouge s’il tire trop sur la corde – s’avère prenant et plaisant, sur les quelques pages qu’il dure. Une nouvelle SM comme je les aime donc : courte dans son propos, précise dans son dessein, efficace dans sa réalisation et à twist dans sa conclusion. Prenez-en de la graine, les rookies.

Gardant une nouvelle en fois en tête le but premier d’un recueil tel que celui dans lequel elle a été incluse, j’ajouterai pour conclure qu’Endurance fait un beau boulot de présentation d’une faction amenée à jouer un rôle important dans l’univers 40K (la Death Guard), en plus de donner assez envie de lire le long format mettant en vedette les Lords of Silence. Que l’exploration d’un concept central du fluff, le ralliement d’un Space Marine loyaliste au Chaos, soit également présente pour l’instruction des lecteurs novices ajoute encore a l’intérêt du propos, qui mérite donc largement sa place dans le Black Library Celebration 2019.

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Duty Waits – G. Haley [HH] :

INTRIGUE :

Duty WaitsSur Terra, les loyaux défenseurs de l’Empereur ne savent plus quoi inventer pour tuer le temps. Nous suivons ainsi le quotidien à la fois morne et stressant de deux Astartes de la VIIème Légion, le Capitaine Maximus Thane de la 22ème Compagnie, et le poussin Kolo, fraîchement diplômé de la promotion Eltaune Jaune, alors qu’Horus n’en finit plus de faire traîner son quart d’heure d’impolitesse. Alors que Max’ a au moins le loisir de faire un peu d’exercice à la tête de ses hommes, qu’il emmène régulièrement faire des joggings sur le mur d’enceinte du Palais1, Kolo est assigné au support informatique de ce dernier, et, entre deux appels d’un certain M. Alcador, qui éprouve toutes les peines du monde à envoyer un mail ou à ouvrir une pièce jointe (et qui oublie une fois sur deux d’allumer son écran), doit gérer une bien pesante inactivité. Car, il faut bien le reconnaître : il ne se passe pas grand-chose d’intéressant sur Terra d’un point de vue strictement apocalyptique. Bref, les journées sont longues2.

À défaut de s’améliorer franchement, les choses évoluent un peu pour nos protagonistes après le départ de la flotte en destination de Beta-Garmon. Bien qu’ils n’aient pas eu la « chance » de faire partie des heureux élus envoyés au casse-pipe contre les renégats, Thane et Kolo ont en effet reçu de nouvelles affectations. Le Capitaine a ainsi la chance, la joie et l’avantage de faire le planton à 300 mètres au dessus d’un square fréquenté par les civils du Palais, afin de rassurer et d’inspirer ces derniers. Malheureusement, les cadences infernales de travail auxquelles sont soumises les masses laborieuses de Terra, les conditions météorologiques détestables de la région, et le manque d’intérêt du spectacle (les gars restent vraiment plantés comme des piquets pendant des heures, à tel point que son Lieutenant manque de déclencher une alerte jaune quand il voit Thane lever les yeux vers le ciel) viennent contrarier cette noble initiative de propagande. Ils auraient jonglé avec leurs bolters, ça aurait eu plus de gueule, moi je dis. Pour se distraire, Maximus imagine ce qu’il se passerait s’il se laissait tomber depuis le mur, et calcule les probabilités jusqu’à la 15ème décimale de sa survie en fonction de paramètres divers, comme l’écartement de ses bras pendant la chute, l’atterrissage sur un quidam, ou encore la vitesse de croisière d’un Stormbird (africain) non chargé. Il soupçonne que le développement d’un passe-temps tel que le suicide mental pourrait peut-être trahir un léger début de névrose, mais cela ne l’empêche évidemment pas de faire son devoir.

De son côté, Kolo participe à l’opération Sentinelle II (la première ayant pris place 28.000 ans plus tôt, même si personne ne s’en souvient), ce qui lui donne l’occasion d’interagir avec les civils que Thane ne voit que de loin. Entre deux contrôles d’identité et palpations aléatoires, le voilà sommé avec son escouade d’intervenir en support des forces de l’ordre, débordées par une foule hostile car affamée. La distribution du pain quotidien ayant en effet annulée sans prévenir, une poignée d’Arbites doivent calmer les velléités meurtrières de quelques milliers de mal-contents. L’arrivée des gilets plastrons jaunes n’a pas l’effet escompté, pas plus que les talents oratoires et diplomatiques, assez limités il faut bien le reconnaître, du Sergent Benedict ne permettent de désamorcer le conflit latent. Ce qui doit arriver arrive, et les manifestants commettent l’erreur de charger leurs protecteurs, qui répondent par une rafale de bolter dans le plus grand des calmes. 80 douilles très exactement plus tard, l’incident est clos, au prix d’un petit millier de morts seulement. Voilà qui mérite bien un honneur balistique, il me semble. Bref, sur Terra il n’y a pas que le temps qu’on tue.

1 : En revanche, pas question de traverser la route avant que le petit bonhomme ne passe au vert jaune. Sous peine de mort.
: Il est d’ailleurs murmuré dans les cercles autorisés que c’est la surutilisation de leur membrane cataleptique pour faire passer le temps plus vite pendant leur interminable garnison sur Terra qui a entraîné la dysfonction de cette dernière chez les Imperial Fists et leurs successeurs.

AVIS :

Dans la série des nouvelles de C.A.L.T.H.1 constituant une partie non négligeable du recueil Heralds of the Siege, Duty Waits se place en tête de peloton par ses importants apports en termes de fluff, ainsi que par la réussite de Haley à faire ressortir la torture mentale que représente cette attente interminable pour les défenseurs, fussent-ils des transhumains conditionnés et entraînés pour faire face à toute situation. Et les Space Marines ont beau ne pas connaître la peur, l’Empereur n’a rien dit ni prévu en ce qui concerne l’ennui, ce qui peut mener même les soldats les plus disciplinés à commettre quelques regrettables boulettes. Dans cette ambiance de Désert des Tartares, Thane et Kolo vivent chacun leur propre enfer, et se retrouvent, sans le savoir, complices d’une exaction qui ne manquera pas de venir les hanter après l’Hérésie. Sur le thème, déjà couvert de nombreuses fois mais tellement central pour la série qu’on pardonnera aisément cette nouvelle itération, du sacrifice des fins en faveur des moyens, Haley parvient à brosser un portrait singulier et sinistre du Monde Trône avant que l’apocalypse ne s’y déchaîne, et préfigurant sans le savoir la dictature brutale, liberticide et usine-à-gazesque que deviendra l’Imperium, autrefois « simple » despotisme éclairé et progressiste, une fois la guerre civile terminée. Et si la question du « mais comment en est-on arrivés là ? » est la plus importante à laquelle l’Hérésie d’Horus doit répondre, alors on peut considérer Duty Waits comme une vraie réussite.

1 : Calme Avant La Tempête Horusienne.

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Gods’ Gift – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE :

Gods' GiftPrenant place après les évènements narrés dans Great Red et The Beasts of Cartha, pour ne citer que deux des précédentes aventures de notre fougueux héros, Gods’ Gift voit Hamilcar et quelques uns de ses potes des Astral Templars accomplir une mission d’intérêt général, sans doute pour avoir commis quelque tour pendable à une chambre rivale lors d’une permission à Hammerhall. Il s’agit en l’état de punir et faire stopper les exactions d’une bête monstrueuse s’amusant à disposer des hardis bûcherons d’un camp de colons récemment implanté dans les terres farouches de Ghur, tâche récréative pour des Stormcast Eternals de la trempe de nos gais lurons. Guidés par un local – Fage – qui malgré son âge vénérable semble tout émoustillé par la seule présence des Elus de Sigmar, Hamilcar & Cie s’embarquent donc dans une épopée aussi directe et rapide qu’une quête de zone de didacticiel de World of Warcraft.

Depuis le relevé de empreintes jusqu’à la constatation de l’heure du décès, ou plutôt, de l’abattage, il ne se passera ainsi qu’une petite journée, soit une vingtaine de pages pour le lecteur, juste le temps pour Ham’ de piquer un roupillon qui lui apportera un rêve plus ou moins prophétique, dans lequel un chêne vient lui chanter Je suis malade (ce qui est ‘achement dur pour un végétal, et mérite le respect), ce qui lui permettra de prendre une décision des plus inspirées quelques heures plus tard. La nouvelle se terminant pour un petit cliffhanger pas vraiment haletant, mais sans doute important pour la suite de la saga d’Hamilcar (Mark de son prénom), le lecteur en est quitte pour embrayer sur directement sur la première, ou plutôt le premier roman dédié à Guymer à sa coqueluche hirsute (Champion of the Gods), dans lequel il est presque certain que des réponses seront apportées aux questions laissées en suspens à la fin de Gods’ Gift.

: L’Homme Arbre qui s’était chargé de la besogne de déshumanisation – c’est comme la désinsectisation, mais avec des primates – servant de pied à terre racine à humus à une sylvaneth passablement enrhumée.

AVIS :

Malgré les dizaines de titres que compte sa bibliographie BL à l’heure actuelle, ce n’était que la deuxième soumission de Mr Guymer m’étant tombée sous la main depuis l’inaugural The Tilean Talisman, initialement publié en 2011. Et je dois dire que mon appréciation de l’œuvre du bonhomme est resté scrupuleusement identique, huit ans plus tard : des aptitudes certaines en terme de narration, avec des personnages au minimum distrayants, à défaut d’être immédiatement attachants (mention spéciale à Brouddican, l’Hillarion Lefuneste personnel de cette grande gueule d’Hamilcar), relevé par quelques notes boisées – c’est le cas de le dire – de fluff, plombées par une vacuité de l’intrigue assez rédhibitoire. C’est bien simple, celle de Gods’ Gift (d’ailleurs, on ne comprend pas vraiment quel est le don auquel Guymer fait référence dans le titre de sa nouvelle1) s’articule en deux temps trois mouvements, sans qu’on ait l’impression d’une quelconque progression entre le début et la fin de la nouvelle. Hamilcar traque un monstre. Hamilcar rêve d’un chêne. Hamilcar tombe dans une embuscade d’Hommes Bêtes (il faut bien qu’il montre qu’il est un cador du corps à corps). Hamilcar débouche sur un bosquet de chênes sacrés, gardé par… le monstre qu’il traquait. Coup de bol. Baston. Victoire. Fin.

Bref, rien de bien challengeant pour l’intellect du lecteur, qui aurait pu s’attendre à quelques liens de causalité entre les différents éléments constitutifs du propos de Guymer. Rien de tel ici, ou de manière tellement évidente et peu fine que les relever n’a pas grand intérêt. Comme dit plus haut, cela peut sans doute se justifier par le fait que Gods’ Gift est un rehaut littéraire à un travail plus conséquent, avec lequel l’auteur prend bien soin de faire la liaison. Telle la rondelle de tomate venant décorer une entrecôte frites, cette nouvelle peut être consommée si on a vraiment faim, mais ne remplira pas l’estomac pour autant. Et comme dit plus tôt (Décembre 2014, pour être précis), c’est plutôt cher payé pour ce que c’est. On me souffle dans l’oreillette que c’est fois ci, c’est gratuit. Bon. Mais avant cela, cela ne valait certes pas les 2,99€ demandés. Rem-bour-sez nos in-vi-tat-tions !

1 : Soit ce sont les visions vagues envoyées par Sigmar, soit c’est le photophore magique remis par icelui, et qui permettra à notre fier héros de venir à bout de Marylise Lebranchu. Au lecteur de décider s’il prend le messie ou la lanterne.

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Magisterium – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE :

MagisteriumSortis très éprouvés de la Guerre dans la Toile, la première défaite qu’ils aient connu depuis leur fondation, et qui a réduit drastiquement leur nombre, les Custodes doivent à présent panser1 leurs plaies et se préparer pour l’arrivée prochaine d’Horus et ses Légions renégates. Nous suivons donc le Vestarios (soit littéralement, le préposé au vestiaire de la boîte de nuit, en grec ancien) Samonas, fidèle bras droit de imperturbable Constantin Valdor alors qu’il supervise la réhabilitation des gardes suisses de l’Empereur, qui, en plus d’avoir été nonagimés (mais si, mais si, c’est du haut gothique) par les hordes démoniaques, ont cabossé et égaré leur matériel dans des proportions abominables, ce qui force les services généraux de la custoderie à enquiller les heures sup’ sans compter. Au moins, le temps d’attente à la cantine et à la photocopieuse s’en trouve fortement réduit, et il n’y a plus de problème de place au parking des trottinettes électriques. C’est déjà ça.

Ayant obtenu une audience auprès de (son demi-frère ?) Rogal Dorn, avec lequel il entretient des relations aussi fraîches que le bloc Harpic qui orne ses toilettes personnelles, Valdor se rend dans les appartements du Seigneur Commandeur de l’Imperium, toujours escorté de son fidèle Samonas. Comme on peut s’y attendre, l’entrevue se passe assez mal, les deux surhommes se balançant des amabilités au visage sans prendre de gants, énergétiques ou pas. Tandis que le maître des Imperial Fists reproche à son interlocuteur sa roideur confinant parfois à l’autisme, dès lors qu’une directive lui ait été donnée par l’Empereur, ce qui a conduit les Custodiens à contenir seuls les brèches dans les niveaux inférieurs du Palais, alors qu’un retrait stratégique aurait permis d’épargner de nombreuses vies, Valdoche nous joue son air favori du « Oh-mais-vous-les-Primarques-vous-n-êtes-que-des-sales-gosses-pourris-gâtés-et-on-était-bien-mieux-avec-Pépé-avant-votre-naissance2 ». Le sentiment de supériorité de Darth Valdor est toutefois tout ce qui lui reste, Dorn soulignant avec à propos que les pertes subies par les 10.000 ont de facto condamnés ces derniers à jouer les seconds rôles dans le futur siège de Terra, et que le sort de l’Hérésie repose maintenant entre les gantelets des Legiones Astartes, qu’ils soient traîtres ou loyalistes. Bref, la garde aurique n’est plus bonne qu’à assurer le service d’ordre autour de la chaise d’affaires impériale, et doit laisser aux Space Marines la gestion des vrais dossiers.

La virulence des échanges entre la main droite et le poing gauche de l’Empereur n’est pas sans rappeler à Samonas, qui s’ennuie ferme pendant ce crêpage de chignon3, une conversation du même ordre qui avait pris place quelques années plus tôt sur Prospero, lorsque que les Custodiens étaient venus donner un coup de main aux Space Wolves dans le châtiment, que d’aucuns jugent mérités, de Magnus et ses Thousand Sons à la suite du poke un peu trop accentué que ce dernier avait envoyé à son paternel pour lui signaler le comportement déviant d’Horus. Bien que Leman Russ se soit révélé un tout autre animal (autant comparer un malamut à un poisson pierre), le zèle sanguinaire avec lequel le Fenrissien mena l’assaut sur Tizca, et sa volonté sans équivoque de ne pas faire de prisonnier, au mépris des instructions remises par l’Empereur au Capitaine-Général, ne furent pas sans générer des frictions entre les deux envoyés impériaux. Dans ce cas, comme plus tard avec Dorn, Valdor, en tant que Magisterium, disposait d’une autorité théoriquement absolue sur son vis à vis Primarque, mais cela n’a pas empêché ce dernier de n’en faire qu’à sa tête, avec des résultats spectaculaires, à défaut d’être satisfaisants. Et Constantin d’y aller de son petit « Primarque… » méprisant en voyant Russ hurler à la lune sur la grand-place de Tizca après la volatilisation du Cyclope. Décidément, ils n’ont pas les mêmes valeurs.

La nouvelle se termine sur une scène de remparts (comme beaucoup des histoires de Heralds of the Siege d’ailleurs), Valdor enjoignant son sous-fifre porte-cravate de ne pas désespérer que l’Empereur reprenne enfin contact avec ses Custodiens, malgré tous les travaux d’isolation des fondations du palais à terminer avant l’arrivée d’Horus, et qui l’occupent à plein temps depuis maintenant des mois. D’une manière ou d’une autre, la fin approche à grands pas…

1 : Et penser, ils ont tous passé l’agreg’ de philosophie après tout.
2 : Funfact : Sur les 1932 mots titres et qualificatifs gravés à l’intérieur de la cuirasse de Valdor, 93% sont des critiques adressées aux fistons du Patron.
3 : Dorn s’étant laissé pousser les tifs pendant ses sept années de permanence au domicile paternel, il y a largement de quoi faire un manbun.

AVIS :

Pure nouvelle de fluffiste, en ce qu’elle s’avère être beaucoup plus riche en petites révélations et lourdes insinuations de background qu’en action pure et dure, Magisterium est une soumission de qualité de la part de Chris Wraight. Son principal intérêt, et non des moindres pour les amateurs de grandes figures de l’Hérésie (c’est à dire la plupart des lecteurs de la série, soyons honnêtes), est d’apporter quelques os à ronger sur le discret mais crucial Constantin Valdor, et de le faire interagir avec d’autres VIP impériaux. Les bisbilles qui s’ensuivent permettent à Wraight de soumettre quelques concepts intéressants, et de soulever des questions l’étant tout autant, comme celles de l’origine de Valdor et du rôle que lui a attribué l’Empereur, qui semble dépasser celui de simple garde du corps et porte parole officiel de Son Altesse Suprêmissime (bien que la fonction de Magisterium, et les prérogatives qui vont avec, soient déjà une belle source de discussion). La rivalité latente entre l’aîné des surhommes de Pépé et la fratrie primarquielle, qui est venue après, ne sera pas sans susciter quelques folles hypothèses de la part du lecteur, et j’espère bien que l’auteur continuera sur cette prometteuse lancée dans le roman dédié à l’énigmatique Capitaine-Général. En sus, l’état des lieux dressé par Wraight du piteux état dans lequel la Guerre dans la Toile a laissé les Custodiens permet de faire le lien entre cet épisode bien couvert dans les dernières publications de l’Hérésie d’Horus et le Siège de Terra, ce qui est toujours bon à prendre. Bref, une lecture tout ce qu’il y a de plus conseillée pour celles et ceux qui prennent l’Hérésie à coeur.

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Now Peals Midnight – J. French [HH] :

INTRIGUE :

Now Peals MidnightAlors que l’horloge de l’ApocalypseTM se rapproche furieusement de l’heure fatidique du début de la plus grande bataille de Warhammer 40K de l’histoire de la galaxie, le capitaine de l’équipe loyaliste décide de passer le temps avant le lancement de la clock en se dégourdissant les jambes sur le chemin de ronde qu’il a passé le dernier lustre à bâtir. Rogal Dorn, Prétorien de Terra, a beau se répéter que lui et ses gars (et filles) sont aussi prêts qu’ils puissent l’être, il est difficile d’être certain de rien alors que l’express d’Isstvan V est sur le point d’entrer en gare système, rempli jusqu’à la gueule de félons et de traîtres. Un calme de mauvais augure est d’ailleurs tombé sur Terra, comme si la planète tout entière retenait son souffle dans l’attente de l’arrivée d’Horus et de ses ruffians.

Alors que le Primarque des Imperial Fists boucle son parcours en écoutant le podcast des meilleures prédictions pessimistes et autres maximes déprimantes de l’Hérésie, depuis Malcador dans The Lightning Tower1 jusqu’à Solomon Voss dans The Last Remembrancer2, en passant par… lui-même (il le vaut bien) dans The Crimson Fist3, il fait plusieurs rencontres aussi vides de sens que lourdes d’intérêt, ou peut-être est-ce le contraire. Après avoir demandé à l’astropathe et secrétaire de direction Armina Fel d’organiser un dîner de travail avec ses frangins, il passe une tête au PC Sécurité jauger des conditions de circulation sur le périphérique solaire. Vison Buté voit noir foncé. Zut. Juste le temps de donner sa soirée à l’Amiral Su-Kassen (qui ferait bien d’en profiter pour bingewatcher la saison IV de Stranger Things, elle n’aura plus le temps après), et Jauni est déjà reparti.

Un petit aparté littéraire nous permet de faire la connaissance de Seplin Tu et de son paternel (Tur-Lu’tu), banlieusards impériaux enrôlés de force dans la milice terrane, et qui feront peut-être/sûrement une apparition dans une des prochaines soumissions de French dans cette franchise. Hello Yellow. Retour sur les remparts, où Archamus-3 et Andromeda-17 attendent l’arrivée du taulier en discutant anthropologie et philosophie. On s’occupe comme on peut. Dorn finissant par pointer ses guêtres, le Huscarl et la Devineresse lui emboîtent le pas jusqu’au lieu de rendez-vous avec Sanguinius et le Khan… qui savent déjà ce qu’il avait à leur annoncer, à savoir que la flotte du Maître de Guerre vient de se matérialiser aux confins du système solaire, prélude à la guerre du même nom. La prochaine fois, utilisez Whatsapp les gars, ça ira plus vite.

Enfin, en orbite, dans l’assiette de guerre sur laquelle il est posté, le Capitaine Katafalque reçoit un message privé signé d’un « RD » très peu protocolaire, mais qui n’en contient pas moins une information de (pierre de) taille : l’ennemi vient d’arriver. Corporate jusqu’au bout, Dorn insiste toutefois pour que l’ordre de mobilisation générale ne soit passé dans un premier temps qu’à la 7ème Légion, les White Scars et les Blood Angels bénéficiant d’un léger sursis avant d’être mis au parfum. Pourquoi ? Mystère. Mais comme on le disait chez les tribus Franc à la fin de M2 : « Avant l’heure, c’est pas l’heure… »

1 : ‘He saw this Heresy coming in his visions. That is the truth you fear. You wish you had listened…’
2 : ‘The future is dead, Rogal Dorn. It is ashes running through our hands…’ C’est moche l’auto-citation, John.
3 : ‘You’re no son, you’re no son of maïïïïïne !’ Bon c’est Genesis (We Can’t Dance), mais vous saisissez l’idée.

AVIS :

Je pense que l’apprécation de cette nouvellinette de French variera fortement selon le contexte dans lequel elle sera lue. Prise individuellement, il serait facile (et exact) de souligner qu’il ne se passe vraiment pas grand-chose dans Now Peals Midnight, Dorn se contentant de faire ce qu’il fait depuis les prémices de l’Hérésie d’Horus (The Lightning Tower, 2007) : regarder le ciel d’un air pénétré en fronçant très fort les sourcils. Cette fois-ci, c’est vréééééééééément la bonne, Rogal ! Bien sûr, il a gagné quelques souvenirs et connaissances dans l’intervalle, certains d’entre elles convoquées pour quelques lignes de dialogue, mais dans l’ensemble, rien de nouveau sous la plateforme de défense orbitale. D’un autre côté, si Now Peals Midnight est la culmination du corpus (entier ou partiel) de l’Hérésie, et que le lecteur sait que la prochaine fois qu’il recroisera la route des personnages de la nouvelle (qu’il a appris à connaître au cours de ses précédentes lectures), l’acte final de cette tragédie galactique aura débuté, il y a de bonnes chances qu’il éprouve quelques trépidations de bon aloi en parcourant ces quelques pages. Bref, comme souvent avec ce genre de production purement atmosphérique, time is the essence. J’appose donc la mention « à conserver dans un endroit frais et sec, à l’abri de la lumière, de la chaleur et de la précipitation » sur cette soumission. On connaissait la slow food, nous voilà avec du slow reading. Ce siècle est décidément étrange.

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The Witch Takers – C. L. Werner [AoS] :

INTRIGUE :

The Witch TakersMis sur une sale histoire de meurtre dans la ruralité profonde du Khanat d’Arkl, en Chamon, les chasseurs de sorcières Esselt et Talorcan, unis à la scène comme à la ville, remontent une piste, forcément chaude, à travers les dunes du désert de Droost. De villages martyrs en tombes profanées et cadavres possédés il ne faut pas longtemps à notre fine équipe pour subodorer que quelque chose de pas sigmarite se cache au fond de ce dossier. Il semblerait que quelqu’un hante Droost avec pour seule mission de massacrer tout ceux ayant le malheur de croiser sa route. Quelqu’un… ou quelque chose, qui asservirait ses hôtes les uns après les autres, passant de main en main et ne laissant que les dépouilles de ses victimes et de ses porteurs derrière lui. Alors que les deux Répurgateurs approchent l’oasis de Tora Grae, miraculeusement épargnée par la folie environnante, il leur faudra agir rapidement et intelligemment pour empêcher le Tournetueur (pun intended) de commettre un nouveau carnage…

AVIS :

C.L. Werner qui met en scène un duo de Répurgateurs embarqués dans une quête qui les conduira dans quelque sinistre recoin de leur « circonscription » : du tout cuit pour l’auteur de la (plutôt bonne) série des Mathias Thulmann me direz-vous. C’est aussi ce que je pensais avant de commencer la lecture de ces Tueurs de Sorcières, et me suis donc surpris à reconsidérer légèrement ce postulat une fois passé le point final. Comme quoi, rien n’est gravé dans le marbre dans ce bas monde. La première divergence notable qui m’est apparue est la relation amoureuse unissant Esselt et Talorcan, ce qui n’a rien de rédhibitoire en soi (et est même suffisamment rare dans une publication de la Black Library pour qu’on puisse au contraire saluer l’audace de l’auteur), mais m’a semblé tellement éloignée des conventions usuelles de ce genre de littérature que mon expérience de lecture s’en est trouvée, pas polluée, le terme serait un peu fort, mais au moins perturbée par les roucoulades échangées par nos héros1. Passées ces considérations romantiques, l’intrigue que nous propose Werner ne s’avère pas être très haletante, la course poursuite par hôte interposé à laquelle se livrent Buffy, Xander et le bracelet perdu de Valkia la Sanglante suivant son cours avec une linéarité décevante, alors que la méconnaissance par nos héros de la nature et de la forme du mal qu’ils ont à combattre ouvrait la porte au développement de fausses pistes. Quant au binôme de choc proposé par l’auteur, il se révèle être d’une décevante platitude, Esselt et Talcoran ne s’écartant pas d’un pouce de leur stéréotype respectif (la paladine zélée et le rôdeur débrouillard), ce qui ne donne pas vraiment envie d’embrayer sur le roman que Werner leur a consacré (Le Cœur Corrompu//The Tainted Heart). Pour terminer, les apports fluff de cette nouvelle se comptent sur les doigts d’une main d’un Zombie de la Peste, le fait qu’elle se déroule dans un bout de désert perdu au milieu de nulle part ne jouant évidemment pas en la faveur d’inclusions significatives (même si ce genre de théâtre d’opérations n’est en rien rédhibitoire pour peu qu’on veuille s’en donner la peine, comme Guy Haley l’a prouvé avec Les Sables du Chagrin//The Sands of Grief). En conclusion, il ne reste guère que le métier de C. L. Werner pour faire tenir ces Tueurs de Sorcières debout, ce qui est suffisant pour une lecture rapide de l’ouvrage, mais à peine.

1 : Quand bien même ces dernières sont restées d’une sobriété bienvenue. C’est ainsi, j’ai du mal à voir des « Mon amour » apparaître dans une nouvelle de la Black Library.

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Dreams of Unity – N. Kyme [HH] :

INTRIGUE :

Dreams of Unity« Démobilisé » comme ses camarades à la fin des Guerres d’Unification, l’ancien (dans tous les sens du terme) Légionnaire Tonnerre Dahren Heruk s’est reconverti dans le gladiatorat avec une poignée de comparses afin de joindre les deux bouts. L’Empereur n’ayant visiblement pas prévu de plan épargne retraite digne de ce nom en faveur de ses premiers prototypes de post-humains, la joyeuse bande vivote sur les maigres bénéfices des combats auxquels elle participe dans le Swathe, bidonville Terran s’étendant en périphérie du Palais de leur ancien patron. Pour ne rien arranger, les vétérans sont affligés de divers troubles physiques et psychologiques, dont une forme particulièrement vivace et handicapante de PTSD, poétiquement nommée les Rêves d’Unité, qui les mène à revivre leurs souvenirs de bataille comme s’ils y étaient, avec des conséquences généralement fâcheuses pour les quidams évoluant à proximité. Les Blood Angels n’ont vraiment rien inventés.

Ayant été témoin de la mort d’un de ses comparses (Kabe) sur le sable de l’arène, des mains d’un chrono-gladiateur au final desservi par son propre sadisme, Heruk commence sa journée par un peu de manutention, ramenant les restes mortels de son défunt collègue jusqu’au domicile de son dominus et imprésario (Tarrigata), afin de procéder au recyclage, puis à l’incinération de ces derniers. Il part ensuite à la recherche d’un autre gladiateur de l’écurie (Gairok) aux abonnés absents depuis quelques heures, ce qui n’augure rien de bon. Pris en chemin d’une crise de somnambulisme aiguë, il revient à lui dans un bar dévasté du Swathe, où Gairok1 semble avoir organisé une reconstitution hyper réaliste du siège d’Abyssna, avec les piliers de comptoir comme figurants (involontaires). Jugeant son camarade trop atteint pour qu’une autre issue soit possible, Heruk l’euthanasie la mort dans l’âme, et poursuit sa mission de porteur d’os en charriant le cadavre jusqu’au QG de la bande.

Ailleurs dans le Swathe, le SWAT impérial (see what I did there ?) se déploie à grand renfort de gadgets, sous les traits aquilins mais masqués du Custodien Tagiomalchian. Ce dernier a été chargé de trouver et de neutraliser des éléments séditieux opérant depuis les dédales mal famés du bidonville, et se montre très intéressé par le carnage commis par Gairok au café PMU du coin. Alors qu’il est occupé à faire quelques relevés en mode les Experts : Terra, il est violemment attaqué par un agresseur non identifié, ce qui coupe la transmission envers la Tour de l’Hegemon. Sus-pense.

Nous retrouvons Heruk et son poids mort alors qu’ils arrivent enfin en vue de la bicoque de Tarrigata, qui se trouve être en proie des flammes. Décidément, ce n’est pas la journée de notre heruk. Réussissant à extraire son patron des décombres au péril de sa vie, le Guerrier Tonnerre n’arrive pas à lui sous-tirer d’informations vraiment utiles quant à l’identité des petits gougnafiers responsables de cette destruction de propriété privée avant que Papy Tarri’ n’aille rejoindre la droite de l’Empereur. Supputant que l’incident ait pu être causé par une autre crise de delirium tremens du dernier de ses corelégionnaires vivants (Vezulah Vult), Heruk se met à nouveau en chasse, et parvient à débusquer Vivi dans les égouts du Swathe. Ce dernier, également à l’article de la mort, et aveuglé par un Bitch Betcher move réalisé par son assassin, refait le coup du « je meurs avant d’avoir donné la bonne info à mon pote pour préserver le suspens de l’histoire mouahaha- couic » à Heruk. Au moins, l’honneur des Guerriers Tonnerre est sauf, car ce n’est pas Vult qui a foutu le feu aux pénates de son patron. C’est déjà ça. Résolu à tirer ce mystère au clair, et désormais libre de toute obligation professionnelle du fait du décès de tous ses collègues, Heruk poursuit son avancée dans les niveaux inférieurs du Swathe…

Début spoiler…et arrive à temps pour filer un salutaire coup de main à Tagiomalchian, fort occupé à maîtriser un Alpha Légionnaire possédé et son culte de groupies, que l’on devine être responsables du saccage du Balto pendant que Gairok s’en jetait un petit, ce qui lui a fait péter les plombs, et de l’attaque des locaux de Tarrigata… parce qu’il leur devait de l’argent, peut-être ? Toujours est-il que ce sont les méchants de la nouvelle, les vrais, en plus d’avoir été impliqués dans la tentative d’infiltration du Palais Impérial quelque temps auparavant, bien sûr. Prudence étant mère de sûreté, Heruk commence par s’occuper des goons chaotiques pendant que Tag’ et Alpharius (car c’était lui… c’est toujours lui) se roulent par terre en bonne intelligence, écopant de quelques légères blessures mais se montrant si convaincant dans son approche qu’il arrive même à convaincre la meneuse adverse de se suicider plutôt que de l’affronter2. Ceci fait, il ne reste plus à notre increvable vétéran qu’à régler son compte au bossédé de fin, en partenariat avec l’Adeptus Custodes, et en écopant d’une déchirure mortelle au passage (si seulement il s’était souvenu qu’il avait piqué le pistolet à radiations de Tarrigata avant que d’engager le renégat au corps à corps… les ravages de la grande vieillesse). Herruïque jusqu’au bout, notre briscard peut ainsi tirer sa révérence la tête haute, ayant bien mérité un honorable coup de grâce de la part de son camarade de jeu. Dreams are my reality… (air connu).Fin spoiler

1 : Pour être honnête, on ne sait pas trop qui blâmer pour ces troubles de voisinage, Heruk ayant été tout aussi parti que son poto à son arrivée sur les lieux. Dans ces cas là, mieux vaut reporter le problème sur le type d’en face c’est vrai.
2 : Il faut dire que voir un colosse écumant perforer la cage thoracique de Roger de la compta’ à coup de pied ne donne pas en vie d’engager le dialogue.

AVIS :

Cette nouvelle de Kyme s’avère être assez satisfaisante, et plus qualitative que nombre de ses travaux précédents, ce qui est appréciable pour le lecteur et peut laisser à penser que notre homme s’améliore au fil du temps. Tant qu’il y a de la vie… En plus de la généreuse dose de fluff relative aux Guerriers Tonnerre dont nous bénéficions ici, le petit thriller mis en scène par Kyme quant à l’identité des proies traquées par Tagiomalchian tient plutôt bien la route, dès lors qu’on ne le regarde pas de trop près. À titre personnel, j’ai trouvé que l’auteur s’inspirait lourdement des travaux de certains collègues (le Custodes est un clone Kymesque du Tauromachian d’Abnett dans Blood Games, le crachat venimeux un emprunt au Talos d’ADB), ce qui peut peut-être expliquer pourquoi cette soumission est de meilleure facture que d’ordinaire. La tendance de Kyme à saboter l’exécution d’idées pourtant intéressantes par la non prise en compte de détails mineurs (affliction baptisée annandalisme par votre serviteur) vient toutefois fragiliser l’édifice1, ce qui est dommage mais pas surprenant. Mais on progresse, on progresse…

1 : Exemple gratuit, le chrono-gladiateur du début de la nouvelle est d’abord décrit d’une telle manière à ce que le lecteur croit qu’il s’agit d’un Custodien (ce qui ferait sens car ce sont eux qui ont massacrés les Guerriers Tonnerre sur l’ordre de l’Empereur). Ce quiproquo assez malin est affaibli par le choix de Kyme de faire de son antagoniste un tueur sadique, qui prend son temps pour tuer sa victime au lieu de l’achever efficacement. Pour un guerrier vivant littéralement sur du temps emprunté, une telle procrastination est en effet très improbable.

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The Old Ways – N. Horth [AoS] :

INTRIGUE :

Callis and Toll_The Old WaysAffecté à la surveillance de la cité d’Excelsis, dans le royaume de Ghur, le répurgateur de l’Ordre d’Azyr Halliver Toll, escorté de son sidekick Armand Callis, est envoyé par ses supérieurs tirer au clair une sombre histoire de disparition à Marshpoint, une ville agricole située en périphérie de la Cité des Secrets. Le fils aîné de la puissante famille Junica n’a en effet plus donné signe de vie après avoir eu maille à partir avec quelques soldats de l’autre grande famille locale, les Dezraed, qui l’ont poursuivi jusque dans les profondeurs de la forêt d’Ulwhyr. L’entente entre Junica et Dezraed n’ayant jamais été cordiale, c’est une vendetta en bonne et due forme qui menace d’éclater entre les Capulet et les Montaigu de Ghur, gueguerre qui mettrait en péril l’approvisionnement des régiments d’Excelsis en précieuse soie d’acier, ressource collectée depuis les fermes arachnides de Marshpoint. Il va donc de l’interêt général que cette triste affaire soit réglée dans les meilleurs délais, et qui de plus qualifié qu’un répurgateur pour traiter ce problème ?

Nous suivons donc Thalys et Colle au cours de l’enquête à laquelle ils se livrent à leur arrivée dans le bourg miteux et boueux de Marshpoint. Après un interrogatoire croisé des patriciens des deux familles, l’énorme et suintant Fenrol var Dezraed, autoproclamé Gardien de Marshpoint du fait de sa capacité de bloquer à lui seul l’entrée de la ville s’il lui prenait l’envie de s’asseoir en travers du portail, et le sec et irritable Kiervaan Junica, nos experts se rendent sur les lieux de la disparition à proprement parler, escortés par l’homme de confiance du patricien Junica, un natif du nom de Ghedren, et par un trio de gardes Dezraed. Et s’il se pourrait bien que la rivalité larvée entre familles nobles ait bien fait couler le sang, les enquêteurs feraient bien de prendre au sérieux les rumeurs entourant la Sorcière Blanche d’Ulwyhr. Après tout, ils ont pénétré sur son domaine…

AVIS :

C’est avec enthousiasme que j’avais vu revenir la figure iconique du chasseur de sorcières/répurgateur dans le lore d’Age of Sigmar, que son inclinaison high fantasy aurait pu « immuniser » à l’introduction de ce type de personnage, très grimdark par nature. La lutte contre les cultes chaotiques gangrénant le nouvel ordre rutilant de Sigmar constitue en effet à mes yeux un axe de développement des plus intéressants, et une prise de recul bienvenue sur le manichéisme caractéristique des premières années d’AoS. Encore fallait-il que l’image d’Epinal Hammerhal de l’inquisiteur traquant le vice et la trahison parmi les sujets obéissants de l’autorité centrale (préférablement divine, c’est plus classe) soit convenablement adaptée dans cette nouvelle franchise, la profession en question exigeant une rigueur morale confinant à la psychose, ce qui n’est pas franchement la norme parmi la soldatesque sigmarite (ces martel-sans-rire de Celestial Vindicators mis à part), dépeinte à de nombreuses reprises comme adepte du compromis et de la tempérance. Qu’en est-il avec la paire Callis & Toll, promise à un bel avenir au sein de la BL à en juger de la façon dont leurs noms ressortent dans tous les ouvrages auxquels ils ont été inclus ? Eh bien, c’est plutôt pas mal, encore que pas spécialement pour les raisons détaillées ci-dessus. Je m’explique.

Si le fanatisme (dans le bon sens du terme, car, si si, dans la littérature med-fan, cela existe) de nos héros laisse à désirer, la retenue dont fait preuve Toll, sensé être le vrai bad guy du duo, dans le jugement qu’il délivre au coupable, le plaçant à un petit 2 sur l’échelle de Mathias Thulmann (le référentiel absolu de la maison à cet égard), Horth se rattrape néanmoins en glissant quelques remarques de bon aloi à propos d’un certain White Reaper (Cerrus Sentanus sur son état civil), Stormcast Eternal pas vraiment Charlie, à tel point que son nom est utilisé pour effrayer les enfants d’Excelsis. Voilà un type qui mérite que l’on suive, et j’espère bien que ça sera le cas dans un futur pas trop lointain. Celà étant dit, The Old Ways a d’autres qualités, la première étant de proposer une petite enquête policière pas trop mal troussée au vu du nombre de pages limité avec lequel elle doit composer1, l’atmosphère horrifique du passage « sylvestre » du récit étant une autre source de satisfaction. D’autre part, cette nouvelle présente également l’intérêt de creuser le background de la cité libre d’Excelsis, qui devrait normalement ne pas disparaître corps et bien dans les annales du fluff, au vu du nombre d’apparitions qu’elle a faite dans divers écrits depuis son introduction dans le background. En apprendre plus sur cette bourgade présente donc un intérêt pour le fluffiste, tellement bombardé d’informations géographiques par ailleurs qu’on ne peut lui reprocher de ne pas prendre note de tout ce qu’on lui soumet.

Enfin, de façon plus large, elle fait ressortir un concept intéressant : le fossé existant entre natifs d’Azyr et populations locales au sein des cités libres, les seconds étant généralement mal considérés, voire méprisés par les premiers, qui les qualifient « d’Amendés » (traduction personnelle de Reclaimed, qui peut aussi s’entendre comme « Récupéré ») ou de « Sang Maudit » (curseblood), ce qui n’est pas très sympathique, mais ajoute de la profondeur à la société sigmarite. Quand on lit que même un personnage « égalitariste » comme Toll n’aurait pas de problème à raser toutes les forêts de Ghur pour pouvoir accélérer la colonisation de ce Royaume, au grand désarroi des locaux qui ont appris à vivre dans les étendues sauvages et à les respecter, on se dit que la possibilité d’un soulèvement des indigènes contre la métropole et ses représentants est une possibilité réelle… et c’est tant mieux en termes de potentiel narratif ! Bref, une plongée satisfaisante dans l’arrière-pays d’Excelsis, et une nouvelle qui vaut le coup d’être lue pour qui s’intéresse au fluff des cités libres.

: On saluera également le twist proprement « meta » de Horth, qui fait dire à Toll qu’il avait identifié le coupable depuis belle lurette et attendait juste de voir combien de temps il faudrait à Callis (et donc au lecteur) pour faire de même. On ne me l’avait jamais faite celle-là.

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The Battle for Markgraaf Hive – J. D. Hill [40K] :

INTRIGUE :

The Battle of Markgraaf HiveComme les plus sagaces des lecteurs de cette chronique l’auront certainement deviné, la nouvelle du sieur Hill traite donc de la bataille pour la ruche Markgraaf1, opération de reconquête et pacification à laquelle l’unité de Minka Lensk, héroïne récurrente de l’auteur, à le plaisir et l’avantage de participer, en compagnie du \[|{™#{ème Cadien (comprendre qu’entre les pertes au combat non remplacées et les fusions régimentaires qui s’en suivent, les numéros défilent plus rapidement que lors d’une soirée bingo à l’Ehpad de Bois-Robert-sur-Veule).

Au menu de ce qui peut sans doute être considéré comme un séminaire annuel pour les derniers des Targaryen – cette manie de coller des yeux violets aux protagonistes pour les distinguer de la masse… –, une activité de team building dans les ténèbres des niveaux inférieurs de la ruche en question, avec les habituels cultistes hargneux-mais-bon-ça-va-on-a-vu-pire en lieu et place des assiettes en céramique à décorer, qui étaient à la mode en ce genre d’occasions quelques millénaires plus tôt. Une fois la séance initiale de laser game terminée, on enchaîne avec une découverte de la faune locale, qui consiste en des rats de la taille d’un rat et des asticots de la taille d’un chien (appelons-les maxticots), suivie par une session d’aqua-relax dans un bassin naturel, sous les ordres d’un Commissaire-Nageur un brin autoritaire.

À peine le temps de réaliser que les maxticots ne font pas de bons candidats au fish pédicure, à moins d’être un Ogryn peu chatouilleux, qu’il faut enchaîner avec une initiation à l’escrime médiévale/escape game sous la houlette de Philippe Chaos-therine (il coupe sa hache… et il rallume sa hache…), Space Marine renégat reconverti en coach de vie. Cette journée intense se termine par quelques longueurs de brasse coulée, un temps calme de 10 minutes devant une œuvre d’art moderne convenablement moche, et un ultime passage au hammam (mais habillé, ce qui est concept). Ce n’est pas tout le monde qui a la chance de vivre des séminaires aussi riches. Merci qui ? Merci Abby !

À ne pas confondre avec la ruche Steffigraaf, qui malgré quelques revers, est toujours au service de l’Empereur.

AVIS :

Propulsé directement dans le feu de l’action dès les premières lignes de The Battle… (au moins, le titre n’est pas mensonger), le lecteur aura sans doute quelques difficultés à comprendre les tenants et les aboutissants de cette successions de péripéties aussi guerrières que brouillonnes, expédiées sans tact, ni finesse, ni connecteurs logiques (ce qui surprend au début, irrite au milieu, et fait marrer à la fin) par un Justin Hill aussi maître de son propos qu’un élève de CM1 couchant par écrit le récit de ses vacances de printemps.

Si le début de la nouvelle fait illusion, tout se corse à l’arrivée sur la mare aux maxticots, théâtre d’une empoignade confuse, suivi de l’arrivée d’un groupe de survivants – dont un Valhallan, qui passait dans le coin – mené par un Commissaire, suivi de l’exécution d’un Garde qui trouvait l’eau trop froide, suivi de l’arrivée du random Chaotic Space Marine de base, suivi d’une ré-empoignade confuse, suivie d’une fuite éperdue de l’héroïne jusqu’au fond du bassin, suivi d’un questionnement philosophique sur la destinée des Cadiens survivants, suivi d’un séchage express, inexpliqué et interprété comme miraculeux par une Minka à laquelle il ne faut pas grand chose, des vêtements de nos héros, suivi de la fin du récit, qui s’achève donc davantage comme un chapitre de roman qu’un court format digne de ce nom, faute d’un dénouement digne de ce nom (sauf si être coincé à deux sans matos dans une caverne inondée peuplée de vers carnivores géants et squattée par des hordes d’hérétiques peu aimables et un Space Marine du Chaos altéré de sang constitue un explicit satisfaisant, bien sûr1).

Pauvre en termes de fluff, d’informations sur le passif de Mina Lensk, et d’une assez grande banalité dans son propos, The Battle… lorgnait peut-être du côté de la saga Gaunt’s Ghosts, et notamment du siège de Vervunhive couvert dans Necropolis, pour son inspiration, mais le fruit (plein d’asticots, donc) est tombé trèèèès loin de l’arbre. Pour laisser le mot de la fin, en même temps que du début, car j’aime bien boucler des boucles sur mon temps libre, à Hill en personne : « What the hell is happening ? »

1 : Si c’est le cas, vous êtes bizarre.

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A Brother’s Confession – R. MacNiven [40K] :

INTRIGUE :

A Brother's ConfessionSur la barge de bataille Ultramarines Spear of Macragge, l’Apothicaire Primaris Polixis se rend à confesse pour expier le crime qui lui pèse sur la conscience depuis le dernier engagement auquel il a participé aux côtés de ses comparses de la Fulminata, contingent de Necmarines1 rattaché au Chapitre natal de ce bon Roboute. Et quel crime ! Rien de moins que le meurtre d’un de ses frères de bataille, l’infortuné Artimeus Tulio. Avant que le sévère Chapelain Kastor, qui se trouve être le véritable frère de Popol (d’où la subtile référence mythologique que le lecteur sagace n’aura pas manqué d’identifier) et auquel pleins pouvoirs sont laissés pour traiter cette affaire, ne délivre son jugement, un petit flashback explicatif des familles (et pour cause) s’impose…

Nous voilà donc sur Atari, planète renommée dans tout l’Ultima Segmentum pour la rectitude de ses arcades et la qualité de ses bornes, et plus précisément dans le manoir du gouverneur local, où les Fulminata sont engagés dans une furieuse partie de FPS contre des hordes de cultistes de Tzeentch. Le monde est en effet la proie à une rébellion caractérisée contre la sainte autorité de l’Empereur, et la situation est suffisamment mal engagée pour que les grands bleus se retrouvent engagés dans une course contre la montre pour mettre le gouverneur De La Sario en sécurité, ou a défaut, lui coller un bolt dans le caisson, afin d’empêcher les dissidents chaotiques d’activer les plateformes orbitales de la planète, verrouillées génétiquement sur le profil du dirigeant légitime d’Atari.

Accompagnant une escouade d’Intercessors sur place, Polixis se trouve confronté à un choix difficile : voler à la rescousse de ses frères, dont certains ont été grièvement blessés par un assaut de cultistes à la férocité imprévue, à l’autre bout du palais, ou battre en retraite en compagnie des hommes du Sergent Nerva, comme ce dernier, le bon sens, et jusqu’au Codex Astartes le préconisent. Confiant en l’épaisseur de son armure en scenarium renforcé, l’intrépide Apothicaire décide de taper un sprint jusqu’à la position des surhommes à terre, ce qu’il parvient à faire sans trop de difficultés. Il est cependant déjà trop tard pour le pauvre Scaevola, plus perforé qu’une copie double à la sortie de la presse, et dans un état trop désespéré pour que Polixis ne puisse lui accorder autre chose que la Paix de l’Emper- ah, non, visiblement il n’y a même pas le temps pour ça, et c’est donc à une ablation de ses glandes progénoïdes pre-mortem (en atteste le fait que Polixis ait besoin de clamper l’incision cervicale pour éviter que la plaie se referme trop vite) à laquelle le doublement malchanceux Scav’ a droit. Il y a des jours comme ça…

L’affaire réglée en moins d’une minute, qui a dû tout de même paraître très longue au patient opéré2, Polixis, décidément très joueur, opte pour une action d’arrière garde afin de s’enquérir de la santé du dernier membre de l’escouade, qui se trouve être le fameux Tulio. Pendant que ses petits copains, qui ne connaissent ni la peur, ni la témérité, se replient sagement vers le point d’extraction, notre héroïque Apothicaire se glisse jusqu’à la position de Tutu, qui git dans une mare de sang et un monceau de cultistes du mauvais côté d’un pas de tir chaotique. Pas de quoi arrêter Polixis, que son statut de personnage principal racontant un flashback rend confiant quant à sa capacité de braver la mort, n’eut été la présence im- ou o- pportune de la fille du gouverneur de l’autre côté de la pièce. Cette dernière pouvant tout autant que son pôpa donner aux Ultramarines l’accès à la plateforme orbitale, c’est à un nouveau dilemme que Polixis doit faire face. Il ne peut en effet secourir qu’un des deux individus susnommés, et c’est peu dire que ses cœurs balancent. Optant finalement pour la fille (chez les Ultras, c’est pas « bros before hoes » donc), il récupère le précieux colis et repart enfin vers la sécurité du Thunderhawk garé en double file à l’extérieur du palais, les quelques blessures qu’il récolte au passage n’étant pas assez graves pour l’empêcher de mener sa mission à bien.

Et nous voilà de retour sur le Spear of Macragge, où l’inflexible Kastor doit bien se demander ce qu’il a fait pour avoir un tel Mary Sue comme frangin. Car non, Polixis n’a pas tué Tulio. Son « crime » est d’avoir sciemment abandonné le patrimoine génétique d’un frère tombé au combat, pour accomplir une mission qui lui semblait plus importante sur le moment. Oh mon Empereur, mais c’est absolument terribleuh ! Et Kastor de broder une jolie parabole sur le sauvetage d’un chiot tombé dans la rivière quand lui et Polixis étaient gamins, afin de convaincre son fragile de frère qu’il n’a rien fait de rédhibitoire. À se demander comment il a réussi à gagner sa carapace noire avec cette sensibilité malvenue. Je te l’enverrais vers un stage d’endurcissement chez les Iron Hands ou les Marines Malevolent, moi. MauviBleuette, va.

1 : Car comme le dit l’expression : « Nec plus ultra ».
2 : D’autant plus que le Sergent décide une fois les glandes extraites de repartir avec le corps de Scaevola. Sauf perissabilité extrême des progénoïdes, ce qui serait étonnant vu la résilience généralisée d’un Space Marine, on peut donc plaider la cause de l’acharnement thérapeutique sur le pauvre bougre.

AVIS :

Malgré une introduction prometteuse, augurant d’un fratricide en bonne et due forme commis par le plus insoupçonnable des coupables (un Primaris Ultramarine : plus droit dans ses bottes que ça, c’est un chausse-pied), cette courte nouvelle de McNiven se révèle être au final composée à 50% de bolter porn, et à 50% de publicité pour les organes supplémentaires des Primaris. À croire que le déclenchement de la Fournaise Belisarienne du frère Posthumus constitue une information cruciale à transmettre lorsqu’on est sous le feu ennemi. L’occasion pour les fans de Bonnet Bleu et Bleu Bonnet, héros du roman Blood of Iax/Le Sang d’Iax de retrouver les frangins dans un contexte un peu différent, mais qui ne devrait, sauf erreur de ma part, pas fondamentalement changer la vision que le lecteur a de nos deux larrons. Pas désagréable, mais très loin d’être indispensable.

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The Tainted Axe – J. Reynolds [AoS] :

INTRIGUE :

The Tainted AxePeu de temps après les événements relatés dans ‘Spear of Shadows’, nous retrouvons le chevalier – ou plutôt, demigryphier – Roggen de Ghyrwood March, de retour en Ghyran avec une main en moins et des souvenirs en plus. Ayant refusé l’offre de Grugni de remplacer son membre manquant par une réplique mécanique, au profit d’une solution plus naturelle, notre héros n’a toutefois pas trouvé chaussure à son pied ni prothèse à son moignon. Sa convalescence prend un tour particulier lorsqu’il se sent appelé une nuit dans le bosquet de ferbois consacré de son ordre, où l’attend une Branchwraith mutine, avec une nouvelle quête divine à lui confier.

Loin au Sud se trouve le Gaut Tors1, une forêt qui a cruellement souffert des déprédations de Nurgle et des ses séides au cours des dernières années. Un champion du Dieu des maladies y a jadis mené une expédition corruptrice, dont il n’est jamais revenu mais qui a résulté en l’abandon de sa hache maudite sous un tas de feuilles. Depuis lors, cette arme maléfique corrompt les bois aux alentours, comme une pile au mercure enterrée dans l’humus. La mission de Roggen consistera donc à localiser cette relique impie et à la ramener à sa commanditrice, qui en échange de ses bons et loyaux ordonnés services lui fera pousser une nouvelle menotte. Bien que notre héros ne soit pas né de la dernière pluie, et se méfie à juste titre des fantasques Sylvaneth, le serment d’allégeance à Alarielle qu’il a prêté en devenant chevalier, et l’attrait de retrouver la main, le convainquent rapidement d’accepter cette quête. Avant de retourner écouter pousser les fleurs, la Branchwraith a l’amabilité de lui adjoindre les services d’un sherpa forestier, en la personne compacte mais grincheuse d’un esprit de la forêt.

Nous suivons alors Roggen, son guide mal-luné (il passe son temps à appeler le chevalier « viande », ce qui n’est guère aimable) et sa farouche monture (Harrow) jusque dans les profondeurs mal famées du Gaut Tors. Bien que sa patronne lui a promis qu’il aurait un droit de passage auprès des Sylvaneth du cru, le fait que ces derniers soient perturbés par les émanations toxiques de la hache perdue d’une part, et leur allégeance à nulle autre que Drycha Hamadreth d’autre part (un petit détail que la Branchwraith avait omis de préciser à son prestataire pendant le briefing), n’incitent pas Roggen à la détente de son slip (en bois, comme le reste de sa garde-robe). Le trio finit toutefois par arriver dans une clairière, où un petit groupe de Rotbringers est à pied (gangréné) d’œuvre, et vient d’exhumer une sorte de cocon de racines calcifiées, qui ne peut être que le réceptacle de cette fameuse hache.

Confiant dans ses capacités de bretteur et l’effet de surprise, Roggen fonce dans le tas avec abandon, mais se retrouve rapidement en difficulté, notamment du fait que ses adversaires ont apporté avec eux des arbalètes, ce qui n’est pas très fluff tout de même. Avant que l’impétueux chevalier n’ait été transformé en hérisson manchot (ce qui vaut mieux qu’un échidné pingouin, qu’on se le dise), une voix tonitruante vient intimer aux Nurgoons de cesser le feu. Il s’agit du Blight Knight qui commande l’expédition des prouteux, et qui, en véritable chevalier de l’ordre de la mouche, propose à Roggen de régler l’affaire par un duel tout ce qu’il y a de plus honorable, et au gagnant le loot. N’ayant pas de meilleure option sous la main, notre héros accepte la proposition de son adversaire (Feculus), et les deux champions se mettent sans tarder à l’ouvrage.

Si sa monture parvient sans mal à vaincre le destrier démoniaque de sa Némésis, Roggen éprouve quant à lui les pires difficultés à tenir tête à cette dernière, qui est à la fois plus forte et plus résistante que lui. Au bout du compte, il faudra l’intervention, pas vraiment fair play mais très secourable, de son sidekick végétal (qui utilise l’attaque airbark) pour que Roggen parvienne à vaincre l’ignoble Feculus. La mort de leur patron libère toutefois les Rotbringers de leur serment de non-intervention, et le chevalier Dubois n’aurait pas fait long feu sans l’arrivée à point nommée des Sylvaneth du Gaut Tors, qui se font un plaisir d’offrir une démonstration de bio compostage express à leurs ennemis honnis. Cela laisse le temps à Roggen de repartir avec sa relique rouillée, et de se retrouver en bout du compte avec une greffe maniable. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.    

1 : Je ne sais pas si cette nouvelle a été traduite en français, mais je suis hyper fier de ma proposition (Writhing Weald en VO).

AVIS :

On ne le savait pas encore à l’époque de sa publication, mais ‘The Tainted Axe’ constituait la dernière apparition du chevalier Roggen de de Ghyrwood March, l’un des personnages attachants1 créés par Josh Reynolds dans le cadre de sa saga – laissée inachevée – des Lamentations de Khorne. Si cette péripétie mineure ne se place pas parmi les meilleures soumissions de notre homme, on y retrouve toutefois les points forts habituels de sa prose, à savoir des personnages intéressants (mention spéciale au jovial Feculus, que l’on retrouve cité dans les écrits consacrés par Reynolds à l’ordre de la mouche), une intrigue et un développement qui tiennent la route, et une généreuse dose de fluff pour napper le tout. Des nouvelles comme ça, je pourrais en lire 10 par jour sans me lasser. A mettre entre toutes les mains (haha).

1 : Notamment parce qu’il a pas mal de traits communs avec Erkhart Dubnitz, du très saint et très violent ordre de Manann, un des héros les plus hauts en couleurs de la Black Library.

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Fireheart – G. Thorpe [40K] :

INTRIGUE :

FireheartEnvoyée par Yvraine comme émissaire auprès des Eldars du Saim Hann afin d’obtenir de l’aide dans la quête des mondes de Morai-Heg, la Céraste Druthkala Shadowspite (Drudru pour les intimes) a bien du mal à convaincre ses hôtes de prêter une oreille pointue attentive à ses doléances. Car étonnamment, les Zoneilles sont égoïstes et mesquins. Qui l’eut pensé, vraiment ? Alors que les Clans réunis en assemblés dans le bois de Vincennes du Vaisseau Monde n’en finissent plus de se crêper le chignon, et que Druthkala tue le temps, faute de mieux, en imaginant les sévices qu’elle pourrait infliger à ses lointains cousins, Nuadhu du Clan Fireheart fait son apparition, en retard comme à son habitude. Bien que seulement héritier putatif du Clan, l’état végétatif de son père lui donne le pouvoir de décider à sa place, et un seul regard sur les courbes généreuses et l’armure minimaliste de la diplomate Ynnari convainquent notre dalleux de héros qu’il doit lui venir en aide pour s’en faire bien voir, et plus si affinités. Le choix d’Yvraine d’envoyer une bombasse plutôt qu’un érudit fait tout d’un coup plus de sens…

La mission de Shadowspite et de ses nouveaux amis est assez simple : mener une reconnaissance sur le monde vierge d’Agarimethea, où un vaisseau Exodite patiente en double file orbitale depuis quelques semaines, ce qui indique que quelque chose ne tourne pas rond à la surface. Après un petit go fast dans la Toile, dans la plus pure tradition des Wild Riders, les bikers au serpent arrive sur place, où ils ne mettent pas longtemps à repérer un complexe Necron défigurant le paysage champêtre, comme un magasin Bricodépôt construit au milieu d’un parc naturel. La présence de l’ennemi primordial des Eldars sur une planète qui devrait pourtant être exempte de toute souillure provoque des réactions mitigées dans la compagnie. Ceux qui réfléchissent avec le cerveau (Caelledhin, la demi-sœur du héros) sont pour une retraite prudente, ceux qui réfléchissent avec un autre organe (Nuadhu, qui n’en finit plus de baver sur les jambes de Shadowspite) insistent pour aller jeter un œil sur site, afin de peut-être trouver une arme qui pourrait aider les Eldars dans leur lutte contre les Necrontyr. Nuadhu étant techniquement aux commandes (même si cet incapable a laissé le pilotage de sa Vyper à son chauffeur de fonction), l’expédition fait fi de toute prudence et va se garer devant la pyramide principale. Bien évidemment, le calme qui baigne les lieux n’est qu’apparent, et lorsque Nuadhu pose la main sur la surface inerte du monument aux des morts, une alarme se déclenche et le ciel se remplit bientôt de tirs de désintégrateurs et d’aéronefs Necrons.

La fuite éperdue qui s’en suit voit la disparition tragique d’un certain nombre de cousins Fireheart, victimes des tirs ennemis, du relief ou du troupeau de dinosaures local (obligatoire sur un monde vierge). J’imagine qu’il en reste encore plein de là où ils viennent, et on ne pleurera donc pas trop sur leur sort. Les Eldars, bien diminués par la tournure qu’ont pris les événements, et la stupidité crasse de leur chef, jurent toutefois de revenir pour rendre aux Necrons la monnaie de leur pièce, ce qui sera fait dans ‘Wild Rider’/’Le Cavalier Rebelle’, le deuxième bouquin consacré aux suivants d’Ynnead par Gav Thorpe.

AVIS :

Je dois avouer tout de suite que je n’ai pour le moment pas réussi à m’intéresser aux Ynnari, ce qui est un handicap pour qui veut effectuer une chronique impartiale d’une nouvelle consacrée à cette nouvelle faction de 40K. Toutefois, même si les cultistes d’Ynnead avaient bénéficié de ma légendaire bienveillante neutralité, je pense que mon jugement de ce ‘Fireheart’ serait resté sévère. Il n’y en a en effet pas grand-chose à tirer de cette histoire, mis à part quelques fragments de fluff sur l’organisation et la culture de Saim Hann, et le nom du canasson de Khaine, ce qui n’est pas lourd. Pour le reste, on assiste à un festival de gaffes, puis de baffes, provoqué par l’incompétence notoire de Nuadhu, dont la concupiscence irréfléchie mettra Saim Hann en danger, et, surtout, donnera à peu de frais à Thorpe le pitch d’un de ses bouquins. C’est à une nouvelle purement et crânement utilitaire que nous avons affaire ici, qu’il convient de lire à l’extrême limite en prologue de ‘Wild Rider’ et c’est bien tout.

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The Dance of the Skulls – D. Annandale [AoS] :

INTRIGUE :

The Dance of the SkullsInvitée à honorer de sa présence un bal donné par la reine Ahalaset et le seigneur Nagen dans la cité de Mortannis, Nefarata se doute bien que cet évènement mondain n’est qu’un prétexte commode pour permettre à ces deux grandes lignées d’agir à ses dépends, ce qui ne l’empêche pas d’accepter gracieusement de se rendre sur place, n’ayant de toute façon rien d’autre de prévu ce soir là. Voyant d’un mauvais oeil le rapprochement s’étant récemment opéré entre Ahalaset et Nagen, la Mortarque de Sang suppute avec raison qu’un piège va lui être tendu, et se réjouit d’avance de cette (més)aventure, le quotidien de Nulahmia devant apparemment être assez terne.

Après avoir été accueillie avec tout le faste et la pompe liés à son r/sang (et infligé rateau sur rateau à ce pauvre Nagen, auquel elle promet toutefois une danse plus tard dans la soirée1), Neffie se voit proposer par son hôte une dégustation privée de crus tirés de l’hématothèque personnelle d’Ahalaset, ce qui ne se refuse pas. Guidée jusqu’à un salon lounge où l’attendent une dizaine d’esclaves qui s’appellent tous Mathusalem ou Réhoboam, notre rusée vampire à tôt fait d’identifier l’aiguille d’argent se terrant sous la roche, en l’occurrence un assassin assermenté doté d’une fourchette à escargot à la place du bras (c’est la mode à Hammerhal). Ayant raté son test d’Initiative, le faquin est toutefois aisément neutralisé par sa victime supposée, qui l’attache à son service d’un langoureux battement de cils. Satisfaite de la tournure prise par les évènements, et comme toute quinqua-millénaire de la bonne société après une dure journée de labeur, Neferata s’accorde un petit verre (et fracasse au passage toutes les « bouteilles », qui espéraient peut-être qu’on les laisse tranquille le temps qu’elles refassent le plein) aux frais de ses hôtes avant de revenir se joindre à la fête.

Là, il est temps pour la Lahmiane de porter l’estocade aux traîtres débusqués, et en musique s’il vous plaît, la danse des crânes consentie à ce benêt de Nagen donnant amplement le temps à notre héroïne de cimenter sa victoire en enchantant légèrement son cavalier, qui ne trouvera rien de plus malin lorsque l’assassin d’Ahalaset viendra sonner les douze coups de minuit à son ancienne patronne à l’aide de son argenterie intégrée, de lancer sa devise dans le silence de mort (héhé) qui s’ensuit. Cette dernière tombera à plat comme la totalité de ses blagues, et, mal comprise par la garde de la reine défunte, aura des conséquences tragiques pour notre pauvre Nagen. Un verre ça va, trois verres…

1 : En même temps, cette coquetterie de laisser dépasser une canine par dessus sa lèvre inférieure ne doit pas aider à lui donner un air très intelligent.

AVIS :

C’est peu de chose de dire que la prose de Herr Annandale n’était pas tenue en haute estime de ce côté du clavier, depuis la chronique de ses débuts pour la BL (The Carrion AnthemHammer & Bolter #11) jusqu’à aujourd’hui. Les choses ont légèrement évolué avec cette Danse des Crânes, qui s’affirme facilement comme la meilleure soumission de notre homme que j’ai pu lire à ce jour. Certes, on parle ici en progrès relatif plutôt qu’en performance absolue, cette courte nouvelle ne se comparant guère aux travaux d’auteurs que je considère être plus méritants que David Annandale, Abnett, Dembski-Bowden, Farrer et Fehervari en tête, pour n’en citer que quelques uns (la liste serait assez longue sinon), mais j’aurais trop beau jeu de ne pointer que les trous dans la cuirasse ou les défauts dans la raquette des travaux de ce régulier de la BL, si je ne soulignais pas également les sources de satisfaction à la lecture de ces derniers. L’Empereur sait qu’ils sont encore rares à cette heure.

Alors, quels sont les éléments positifs de La Danse des Crânes ? Pour commencer, une absence de ce que l’on peut presque appeler une « annandalerie », terme forgé par votre serviteur et désignant une mauvaise, grossière ou grotesque exploitation d’une idée de départ pourtant assez sympathique, pour des résultats évidemment décevants. Le huis-clos victorien qui nous est proposé ici ne pêche ainsi pas par excès de zèle ou manque de structuration, les péripéties s’enchaînant de façon tout à fait convenable et crédible, ce qui pourrait sembler aller de soi mais n’était pas gagné d’avance au vu du pedigree de l’auteur. On sent que ce dernier a réfléchi à la manière dont il devait dérouler son récit pour que le plan alambiqué de Nefarata puisse se dérouler sans (trop) d’accroc, et même si l’usage d’un petit TGCM en fin de nouvelle pour parfaire le triomphe de Mama Lahmia peut être noté, c’est finalement peu de chose comparé aux problèmes structurels émaillant quelques unes des précédentes soumissions de David Annandale.

Autre source de contentement, la description intéressante qui nous est faite de la haute société mort-vivante, nid de vipères aux crocs acérés et n’hésitant pas un instant à comploter pour précipiter la chute de leurs prochains, alors même que les ennemis extérieurs se comptent par milliers, et qu’un brin de solidarité entre macchabées ne serait pas de trop pour défendre le pré carré de Nagash. Le fait que cette société, mêlant vampires et humains à tous les échelons, apparaisse comme fonctionnelle et pérenne (en même temps, c’est bien le minimum quand on est immortel) est une autre réussite d’Annandale, qui parvient à donner un volume fort bienvenu à une faction qui jusque là se réduisait à des légions de squelettes traînant leur mélancolie dans des déserts violacés. On peut s’amuser aussi en Shyish, telle est la morale de cette petite histoire.

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The Board is Set – G. Thorpe [HH] :

INTRIGUE :

The Board is SetSur le sol de cette bonne vieille Terra, les armées loyalistes se préparent à recevoir comme il se doit le retour du fils indigne et de sa bande de potes, dont on entend déjà les « boum boum boum » crachés par les enceintes de leurs Clio tunées résonner depuis le parking de la copropriété, brisant le calme légendaire du quartier1. Comme le petit vieux acariâtre qu’il est, Macaldor, après avoir balancé une ou deux références que les moins de 20.000 ans ne peuvent ni connaître, ni comprendre, s’en va en grommelant dans sa barbe psychique que Dorn est définitivement une grande et jaune godiche, et que son obsession pour les briquettes et les portails électriques n’est qu’une lubie de jeune crétin. Ca tombe bien, notez, c’est l’heure de la coinche à l’EHPAD Bon Séjour, et le Mac’ ne raterait pour rien au monde ce moment de la journée.

À peine a-t-il fini d’installer la table que son acolyte de jeu révèle (you see what I did there…) sa présence et engage sans plus tarder les hostilités. Dans les ténèbres mi-obscures du 31ème millénaire, l’antique jeu de belote se joue en effet à deux plutôt qu’à quatre, et sur un plateau de jeu avec figurines en plus du traditionnel paquet de cartes. En fait, ça ressemble furieusement à une version Shadespirée des échecs, et ça a l’air donc vachement cool, d’autant plus que toutes les pièces se trouvent être des représentations des Primarques engagés dans l’Hérésie d’Horus2. Comme à chaque partie depuis leur internement respectif, Pépé et… Mémé ? rejouent la bataille finale de l’Hérésie, avec l’Empereur dans son propre rôle et Malcador dans celui de ce fripon d’Horus. Et comme à chaque fois depuis le début de ces amicales sessions, le Sigillite constate que son adversaire passe son temps à tricher. Manipulation de la pioche, duplication de cartes, ajout de pièces non WYSIWYG en cours de jeu… s’il y avait un arbitre, celà ferait longtemps que le Maître de l’Humanité aurait mangé son ban. Malheureusement pour lui, Malky ne peut compter que sur lui même pour se faire justice, ce à quoi il s’emploie avec toute la rouerie et la malice qu’on lui connaît.

En face de lui, l’Empereur semble peu intéressé par le déroulé de la partie, et joue franchement comme une savate, seulement sauvé par sa capacité à top decker comme un porcasse avec une régularité des plus suspectes. Ajoutant l’insulte à l’outrage, il se permet même de tancer son partenaire sur son faible niveau de jeu, alors que Horus, lui, était un opposant digne de ce nom. Sans doute très fatigué par l’enchaînement des nuits blanches à pousser sur son trône (la constipation psychique est un problème commun chez les démiurges millénaires, tous les auxiliaires de vie vous le diront), Big E va même jusqu’à utiliser des mots très durs à l’encontre de son vieux comparse, au point d’arracher à ce dernier des larmes de collyre. Qu’à cela ne tienne, Malcador en a vu d’autres, et met à profit sa rogne pour sortir un enchaînement digne de Magnus Carlsen le Rouge, le laissant en position de remporter la partie au coup suivant. « Ha ha, tu l’avais pas vu venir celui-ci, bouffi » exulte notre vieillard échevelé, pas peu fier de tenir sa première victoire en 1.834.427 confrontations. Sauf que, sauf que… Sauf que l’Empereur est décidément un mauvais joueur à la main leste, et trouve le moyen de substituer à son Roi Empereur lui-même une nouvelle pièce, le Fou, qui va héroïquement se sacrifier pour lui permettre de gagner la partie. Comble de la bassesse, le Fou a la tête de Malcador, à qui il prend l’envie folle de fracasser l’échiquier sur le crâne de son suzerain.

Sur ces entrefaites, une estafette se présente à la porte, et vient apporter la nouvelle tant redoutée au Premier Seigneur de l’Impérium : la flotte d’Horus vient de se matérialiser dans le système solaire, et la plus grande bataille de l’Humanité est sur le point de s’engager. Cherchant du regard son boss, Malcador a la surprise de s’apercevoir qu’il est seul dans la pièce, et l’a apparemment toujours été, d’après le retour un peu honteux du messager, qui n’a pas osé déranger tout de suite l’aïeul vociférant qui faisait une tournante autour du plateau de jeu à son arrivée. Conclusion de l’histoire : la grande vieillesse est un naufrage, mais au moins, on ne s’ennuie pas.

1 : Et je ne rigole même pas, la nouvelle commence par un constat par Macaldor et le chef de l’Adeptus Astra Telepathica du tapage nocturne diurne warpurne généré par l’approche de la flotte traîtresse.
2 : On comprend mieux du coup pourquoi l’Empereur tenait absolument à avoir un nombre pair de rejetons. C’est mieux pour équilibrer les parties.

AVIS :

The Board is Set est une nouvelle intéressante, mais dont l’inclusion dans un BLC ne tombait pas, de mon point de vue, sous le sens. Parmi les qualités notables de cette soumission, on peut mettre en avant l’art consommé avec lequel Thorpe distille à la foi clins d’oeil aux évènements passés et à venir de l’Hérésie, à coups de manœuvres lourdes de sens des pièces sur l’échiquier et de remarques sibyllines soufflées par un Empereur plus que jamais omniscient au bras droit/fusible qu’il s’apprête à griller, mais également allusions fluffiques subtiles, sur lesquelles les fans hardlore passeront des pages et des pages à s’étriper, par les mêmes biais que ceux donnés ci-dessus. Même sans être un amateur transi du style du Gav, on peut lui reconnaître un certain talent de mise en scène de ces passages prophétiques, ce qui n’était pas gagné d’avance au vu du casting de monstres sacrés qu’il convoque.

À titre personnel, j’ai également apprécié la tirade que MoM (Master of Mankind) balance à son larbin dans le but de le mettre en rogne et de le forcer à la jouer comme Lupercal, qui est un condensé de remarques blessantes mettant en évidence que Malcador n’a été qu’un outil utilisé par l’Empereur pour arriver à ses fins, et qu’il n’aura absolument aucun scrupule à s’en débarrasser une fois qu’il n’en n’aura plus l’usage. Ce discours des plus cash trouve une résonnance particulière depuis Dark Imperium, où il est clairement indiqué la dualité de l’Empereur dans ses « sentiments » envers ses congénères : incapable d’aimer l’homme, mais absolument dévoué à l’Humanité. On peut alors se demander si les piques envoyées par Pépé ne sont pas simplement le fond de sa pensée, qu’il livre à un Malcador qui reste persuadé qu’il ne s’agit que de la manoeuvre d’un monarque bienveillant et attentionné pour lui faire donner le meilleur de lui-même. Chacun se fera sa religion sur le sujet, mais cette dualité d’interprétation est assez intéressante.

D’un autre côté, The Board is Set s’avère être l’antithèse absolue de la nouvelle à mettre dans les pattes d’un novice de la BL ! Regorgeant de sous-entendus et d’Easter eggs qui feront les gorges chaudes des lecteurs vétérans, pour peu qu’ils soient des fluffistes un minimum intéressés, cette soumission possède en effet une valeur ajoutée littéraire qui passera à 31.014 pieds au dessus de la tête du newbie. Il est plutôt probable que ce dernier ressorte du propos de Thorpe ou perplexe ou soulé par l’accumulation de mentions et notions « members only » qui lambrissent les pages d’un bout à l’autre du récit. D’une manière plus large, on peut considérer l’Hérésie d’Horus comme étant, de manière générale, une franchise trop spécialisée pour être incluse dans des ouvrages de « propagande » de la Black Library. Sans mettre en question l’intelligence et les capacités de déduction du novice moyen, je doute en effet qu’il ait la patience ou l’intérêt pour percer à jour les tenants et aboutissants de cette absconse partie de Cards against Humanity. Bref, la définition même de l’acquired taste, et en tant que tel, aussi surprenant qu’une douzaine d’huitres au fond d’un Happy Meal.

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Au final, je dois reconnaître que la cuvée 2017 envoyait plutôt du bois, surtout du côté de l’Hérésie d’Horus, avec des soumissions assez mémorables (et kudos à la BL pour avoir placé ‘The Board is Set‘ en dernière position pour impact maximal). Age of Sigmar a également bien tenu son rang, et seul 40K s’est montré globalement décevant, avec uniquement ‘Endurance’ d’intéressant dans le lot (as far as I am concerned). Comme la plupart de ces nouvelles ont trouvé leur chemin dans des recueils et anthologies (certains gratuits) depuis leur première sortie, j’espère que cette revue tardive aura été tout de même utile, et je vous donne rendez-vous bientôt pour de nouvelles aventures.

LOYAL SONS [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de ‘Loyal Sons, le fidèle reflet de ‘Traitorous Scions’ (chroniqué ici). Comme le nom de l’anthologie le laisse apparaître, nous sommes en présence exclusive de membres du good boys club de l’Empereur, autrement dit les Primarques qui ont choisi de se battre du bon côté de l’histoire. Au menu, et comme cela avait été le cas pour leurs homologues rebelles, les fistons loyaux sont évoqués à travers 14 nouvelles, dont aucune n’est inédite1. L’occasion de découvrir, ou redécouvrir, les hauts faits de cette fraternité surhumaine, avant et pendant l’Hérésie de la brebis loup galeux.  

1 : On pourrait cependant considérer que ‘Champion of Oaths’ de John French est une nouveauté à part entière, car elle n’avait été avant cela proposée que dans un recueil papier uniquement vendu lors d’événements organisés à Nottingham.

Loyal Sons

Au petit jeu des favoris (des éditeurs de la Black Library, ce qui est presque aussi bien que d’avoir l’attention de Pépé, quand on y réfléchit), on constate que pour une fois Ferrus Manus finit devant ses frangins (so happy for him!), à égalité avec l’incontournable Rogal Dorn. À l’autre bout du spectre, Vulkan, Leman Russ, Corax, Jaghatai Khan et Lion El’Jonson ne bénéficient que d’une nouvelle à leur nom (et encore, c’est assez discutable pour le Jag’ qui ne fait qu’un caméo à la fin de ‘A Game in Opposites‘): si vous êtes des fans transis et exclusifs de ces estimés gentlemen, peut-être que ‘Loyal Sons‘ n’est pas pour vous. Mais si vous voulez connaître un peu plus les faithful nine de l’Imperium, n’allez pas plus loin. Par ici la visite…

Loyal Sons

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The Passing of Angels – J. French :

INTRIGUE :

The Passing of ANgelsLa planète Harpic, intégrée à l’Imperium pendant la Grande Croisade, a décidé de faire sécession de l’empire de Pépé. Ce crime de lèse majesté ne pouvant évidemment pas rester impuni, l’Armée Impériale est envoyée sur place pour calmer les velléités indépendantistes du Gouverneur Planétaire… et est accueillie à coup de bombes nucléaires, résultant en des pertes colossales parmi les assaillants mais également la population locale, sacrifiée sur l’autel du « vous ne m’aurez jamaaaaaaaaaaais ». L’Empereur ayant clairement établi que l’atome, c’était le mâââl dans une célèbre interview donnée au Journal de Mickey en M30, la machine de guerre impériale passe en mode hardcore et envoie Sanguinius et ses Blood Angels « pacifier » pour de bon la planète mutine, renommée H_____ en signe de la gravité de ses crimes.

Nous suivons donc le Primarque ailé et les soixante Space Marines de l’Ost de la Destruction, armés de l’arsenal le plus sale à disposition de l’Astartes (armes à phospex, grenades à radiations, cocktails cacatov et tutti quanti), alors qu’ils font s’abattre le jugement de l’Empereur sur les dissidents de H_____. Sanguinius a donné des ordres stricts : il ne doit y avoir aucun survivant, et, conscient du lourd fardeau psychologique qu’un tel massacre pourrait avoir sur ses fragiles de fistons, il leur a ordonné de revêtir le masque d’argent des Destructeurs, permettant à son porteur de dissocier son identité des actes horribles commis en tant que membre de l’Ost1. Seul le Primarque se rend au combat tête nue, car sa nature surhumaine lui permet d’endosser sans faiblir la responsabilité de ce massacre (raison officielle) et que mettre un casque lui aplatit les cheveux de manière disgracieuse (raison officieuse). Bien évidemment, les soldats de H_____ ne font pas le poids face à la furie sanguin(ius)aire des Blood Angels, et leur insignifiante petite planète ne tarde pas à repasser du bon côté de l’histoire.

La nouvelle se termine par une réunion informelle entre Horus et Sanguinius sur le Vengeful Spirit, pendant laquelle les deux frangins se livrent à leur activité préférée : battre son frère à un jeu de plateau pour Horus, et faire de lourds sous-entendus sur l’avenir pour Sanguinius. C’était une époque plus simple…

1 : C’est dans l’esprit très semblable aux masques de guerre des Guerriers Aspects Eldars… sauf qu’ici, on ne nous dit pas s’il y a une véritable technologie permettant de brainwasher le porteur, ou bien s’il devra faire la dissociation tout seul comme un grand.

AVIS :

Je suis un peu déçu de l’approche choisie par French pour cette nouvelle estampillée Primarques, car elle ne nous apprend au final pas grand-chose sur le personnage que l’auteur a choisi de traiter (Sanguinius)1, et aurait donc pu être cataloguée comme nouvelle « classique » de l’Hérésie à la place. Certes, on voit le Primarque mener ses fils à la bataille, mais la noblesse tragique dont il fait preuve au cours de la purge de H_____ n’est pas une caractéristique inconnue de Sanguinius : quiconque est un tant soit peu familier du personnage sait qu’il s’agit au contraire de la base de son identité. Partant, le propos déroulé par French dans ‘The Passing of Angels’ n’apporte pas de nouvel éclairage sur l’Archange de Baal, ce qui est à mes yeux la raison d’être d’un récit Primarques. Le même argument peut être avancé pour la scène de dialogue entre Sanguinius et Horus, qui relève à mon sens plus du clin d’œil à des éléments de fluff déjà établis au cours de l’Hérésie que d’une quelconque avancée de l’arc des Pépé Bros.

Je suis également resté sur ma faim avec l’Ost de la Destruction, convoqué par French pour montrer que même la Légion de Space Marines la plus angélique ne rechignait pas à faire le sale boulot de temps à autre, mais avait développé une technique bien à elle pour ne pas laisser ces actes barbares affecter durablement ses membres. L’idée est intéressante, mais sa mise en pratique tellement lacunaire que l’on ne sait pas comment le processus en question fonctionne. Les masques mortuaires des Destructeurs ont-ils seulement une fonction symbolique, ou sont-ils capables d’effacer les souvenirs de ceux qui les portent ? Bref, ‘The Passing of Angels’ passe à mes yeux à côté de son sujet, et si French est suffisamment compétent en tant qu’auteur pour que la lecture de cette nouvelle ne soit en rien désagréable, j’attendais plus et mieux de sa part ici.

1 : La plus grande révélation de ‘The Passing of Angels’ a été pour ma part d’apprendre que Sangui avait une vision laser, qui pouvait détecter une rupture d’alignement de l’ordre d’un micron. Il aurait dû être coiffeur au lieu de chef de guerre avec ce don, moi je dis.

Mercy of the Dragon – N. Kyme :

INTRIGUE :

Mercy of the DragonLes réunions de famille ne sont pas toujours une partie de plaisir, c’est bien connu. Toutefois, les retrouvailles entre Vulkan et l’Empereur sur Nocturne se passèrent de manière que l’on peut qualifier de cordiale, surtout si on les compare à d’autres épisodes d’affiliés au premier regard tournées plus tard au cours de la Grande Croisade. Bien sûr, le fils adoptif de N’bel le forgeron a une âme paisible sous ses abords farouches, et il faudra une longue discussion (et une salamandre encore plus longue, mais c’est une autre histoire…) pour le convaincre de laisser tomber sa planète pourrie et sa salopette rapiécée pour prendre sa place aux côtés de son créateur dans la conquête de la galaxie. C’était à l’époque où Pépé prenait encore le temps de discuter avec ses fistons avant de les bombarder à la tête de leur Légion1… Et croyez-le ou non, mais un des critères majeurs ayant guidé la décision du colosse aux yeux de braise fut de savoir si ses nouveaux camarades de jeu allaient être gentils avec lui pouvaient apprendre quelque chose de sa part, lui qui se voyait davantage chaudronnier que chef de guerre. « Mais bien sûr gros bêta », lui répondit son papounet. « Attends un peu de rencontrer ce joyeux drille de Ferrus… ».

Flash forward quelques temps plus tard, au cours de la campagne de mise en conformité de Ranknar. Les indigènes ne se sont montrés sensibles ni aux talents oratoires, ni aux sculptures en ballons de l’Empereur (on ne peut pas être bon partout hein), et la guerre fait rage à la surface de la planète. Les défenseurs vont de défaites en défaites, leurs forteresses imprenables se faisant mettre minables en un temps ridicule et un déluge de flammes par un guerrier terrifiant, surnommé le Dragon par ses adversaires malheureux. Nous suivons le soldat Sarda et le prêtre Veddus alors qu’ils se rendent jusqu’à l’ultime bastion de la résistance : la Citadelle Rouge de Romistad. Le dernier carré des ranknariens dans la cité de Venikov s’est en effet terminé de manière abrupte et infernale, après que le Dragon ait décidé d’y allumer le feu.

À Romistad, la situation des défenseurs semble un chouilla moins désespérée, car ils ont à leur disposition non pas une, mais deux armes top secrètes moumoutes. Ceci dit, les impériaux ont de leur côté non pas deux, mais trois membres des Ramones (nouvelle période) : Peypey, Féroce Manosque, et bien sûr le Dragon, qui est bien sûr le nom de code trop trop secret de Vulkan. Bref, les carottes ne sont pas cuites, elles sont sur le point d’être carbonisées pour les irréductibles gaulois.

La stratégie de l’Empereur, qui consiste à lancer un Vulkan fou de rage (sans qu’on sache trop bien pourquoi d’ailleurs) sur l’ennemi en mangeant des chips avec Ferrus Manus à bonne distance des combats, rencontre toutefois ses limites lorsque les défenseurs abattent leur premier joker : un trio de bogatyrs, c’est-à-dire des golems de la taille d’un Titan, menant une sortie désespérée sur les lignes impériales. Ne pouvant pas laisser Vuvu se faire exploser sans intervenir, Pépé intervient gracieusement pour rétablir le déséquilibre en faveur de ses troupes, ce qui permet à l’irrascible Hulk, mit encore plus en rogne par la découverte de la source d’énergie des bogatyrs (des enfants sous hémodialyse) de charger seul la porte de la Citadelle Rouge, afin d’apprendre à ses occupants de quel boa il se chauffe…. Et c’est là qu’arrive la boulette.

Malgré ses puissants pouvoirs de guidage de missiles, l’Empereur n’est en effet pas foutu d’empêcher le dernier tir d’une salve tardive d’exploser pile sur la position de Vulkan, alors qu’il attendait que la gardienne vienne lui ouvrir. Pour sa défense, il y avait péril en demeure pour les impériaux, l’ultime botte secrète des défenseurs étant de déclencher une bombe virale, ce qui n’aurait pas été fair play. Fort heureusement, ‘tis but a scratch pour Papamanders, qui étrenne certainement ainsi sa perpétualité (reste à voir comment il a regénéré aussi vite ceci dit), et convainc les Ranknariens de déposer les armes après que ces derniers aient constaté que le féroce Dragon a fait obstacle de son corps pour protéger un frêle enfançon qui jouait à la marelle sur le champ de bataille. Le pouvoir de la gentillesse ! Bon, on ne dira rien sur les centaines de milliers de morts avant ça parce que ça serait un peu mesquin…

1 : D’après la chronologie donnée par Laurie Goulding (et donc aussi officielle que possible), Vulkan a été le cinquième Primarque retrouvé. L’Empereur a commencé à s’en balec au douzième round (Mortarion).

AVIS :

Nick Kyme n’a pas écrit le roman Primarques de sa Légion de cœur (l’honneur en est revenu à David Annandale), mais il s’est tout de même payé le luxe de raconter en quelques pages comment la rencontre entre le père et le fils s’est déroulée… et je reste un peu dubitatif sur la valeur de cette offrande. Le problème tient en deux mots : character development. Mettre en scène des personnages aussi iconiques que l’Empereur et ses Primarques de fils nécessite en effet de connaître le riche background de ces figures majeures, mais également de les faire agir en gardant en tête leur stature d’êtres sur(sur)humains. Et si j’aborde ce sujet, c’est bien entendu que Nick Kyme s’est planté sur les deux tableaux. On a ainsi un Empereur qui minaude en faisant briller ses gantelets au soleil et balance des répliques dignes du Thesaurus, mais également un Vulkan utilisé à total contre-emploi avec son fluff établi (le Primarque qui se soucie des simples humains), puisqu’il passe la majorité de la campagne de Raknar à se comporter comme un proto-Angron, massacrant l’ennemi sans lui montrer aucune pitié1, et sans que Kyme ne justifie d’aucune façon cette soudaine agressivité. Que Vulkan ait pété une durite après avoir vu comment ses adversaires faisaient avancer leurs golems de combat, ok, mais avant cela ? Ce n’est pas comme si le même Vulkan avait failli refusé la proposition de l’Empereur de rejoindre la Grande Croisade parce qu’il ne se sentait pas l’âme d’un guerrier littéralement deux paragraphes avant, hein.

On peut toutefois reconnaître à Kyme les efforts sincères qu’il a fait pour donner une culture un peu fouillée à Raknar et ses habitants/fidèles (car oui, c’est à la fois une planète et un dieu), ce qu’il ne s’est pas toujours motivé à faire dans sa production pour la Black Library. Ce n’est toutefois pas suffisant pour équilibrer l’ardoise, et ‘Mercy of the Dragon’ reste à mes yeux globalement raté.

1 : En témoigne le dialogue entre Sarda et Veddus au début de la nouvelle, qui permet d’établir que plus de cent mille hommes ont péri dans la défense de Venikov (sans compter les civils), avec Vulkan en allumeur en chef.

Shadow of the Past – G. Thorpe :

INTRIGUE :

Pendant que la galaxie part en sucette énergétique, sur Sicarus les grands travaux lancés par Lorgar afin de templaformer la planète avancent gentiment. Sous le patronage avisé et le commandement sévère mais brusque de l’Apôtre Noir/chef de chantier Kalta-Ar, des milliers d’esclaves suent sang et os (on est dans l’Œil de la Terreur, tout est possible) pour bâtir la Beneficta Diabola, basilique impie qui comportera deux piscines, un centre commercial et un boulodrome olympique. Soucieux du respect le plus strict des meilleurs standards de santé et sécurité, Kalta-Ar a pris soin de protéger le chantier d’incursions démoniaques, fréquentes en ces latitudes, par des pentacles et sceaux de protection du tout dernier cri1. Aussi est il fort mécontent d’apprendre de la part de ses acolytes qu’un nombre croissant de légionnaires disparaissent sans laisser de trace, au lieu de monter la garde en chantant des cantiques impies comme ils étaient sensés le faire.

Accompagné de son bras droit Arkula le Coryphaus et du Sergent Isaikash, K-A se rend sur les lieux de la dernière disparition, qui devient vite l’avant-dernière car un autre Word Bearer fait soudainement une mauvaise rencontre sur le chemin de ronde, et rend l’âme après cinq secondes de hurlements stridents sur le WhatsApp de groupe. Malaisant. Si quelques esclaves ont été témoins des derniers instants de frère Barbaque, les subtiles techniques d’interrogatoire de nos héros ne leur permettent pas d’apprendre grand-chose sur la nature du prédateur qui s’amuse à les faire tourner bourrique. Les mortels ont en effet seulement vus une ombre écarteler le malheureux Space Marine, ce qui n’est pas lourd pour faire avancer une enquête. Jugeant probable que ces déboires sont de nature démoniaque, et suspectant les serfs d’avoir réussi à appâter un gros Nurgling dans le Materium pour se venger des mauvais traitements infligés par leurs geôliers, Kalta-Ar est sur le point de diligenter une inspection surprise de ses propres opérations (aux grands porteurs du mot, les grands remèdes) lorsqu’une présence indistincte mais pas franchement amicale se matérialise soudain à proximité.

Les rapports alarmistes et disparitions brutales commençant à se multiplier, nos trois affreux décident finalement de prudemment de battre en retraite en direction du portail Warp reliant la Beneficta Diabola au QG de Lorgar, afin de respectueusement demander au boss de venir gérer un impondérable que ses incapables de larbins sont bien en peine de pondérer de leur côté. Cette retraite stratégique, qui se transforme sous peu en débâcle effrénée vers la chambre de papa, voit un nombre non négligeable de Word Bearers aux noms plus exotiques les uns que les autres2 se faire oblitérer par le terrible blurry man qui les poursuit, mais également ce fieffé coquin de Marduk, fier comme Ar-Thaban dans son armure Terminator, faire son apparition dans l’histoire. Fidèle à lui-même, il se montre odieux envers Kalta-Ar et ses survivants, et d’une piètre aide lorsque the thing se remet à faire des siennes. Pourquoi se donner du mal quand on a une armure en scenarium, pas vrai ?

Heureusement pour nos héros, Lorgar avait les oreilles qui traînait et, bien qu’il tique un peu sur le vocabulaire peu flatteur utilisé par ses fils pour parler de lui, l’adoré doré fait son apparition pour se confronter au démon qui tourmente sa marmaille…

Début spoiler…Sauf qu’il ne s’agit pas d’un démon, mais de ce lascar de Corax, qui a gagné quelques pouvoirs funky et emo en diable (comme se changer en brume ou en nuée de corbeaux, ou se faire pousser des bras et des lames surnuméraires) à trop traîner dans le Warp, mais est resté fidèle à sa nature profonde : se venger des méchants très méchants. On se souvient que les deux Primarques se sont déjà frittés sur Isstvan au début de l’Hérésie, et que sans l’intervention salutaire de Konrad Curze, Lolo aurait avalé son crozius. La revanche qui prend place sur Sicarus, alors que Lorgar a été élevé au rang de Prince Démon et que Corax se bat seul sur une planète baignée par le Warp… va rigoureusement dans le même sens, ce nullard d’Aurelian se faisant perforer la glotte par les griffes énergétiques de son frangin, et ne devant son salut qu’à l’intervention peu sportive de ses Word Bearers pour occuper le Seigneur Corbaffe le temps que son adversaire malheureux soit évacué à travers son propre portail. La lose totale.

Coincé sur Sicarus à cause de sa nature à demi-démoniaque, Corax jure à son frère qu’il y aura une belle et s’en va fracasser sa basilique pour se passer les nerfs. De son côté, Lorgar décide d’aller bouder dans sa chambre pour marquer sa désapprobation, et la légende raconte qu’il n’en est toujours pas sorti à ce jour…Fin spoiler

1 : …des victimes sacrificielles utilisées pour les tracer.
2 : Hesta-Pek, Takla-Gad, Apall-Af, Ghoa-Lok, Ukna-Tav…

AVIS :

Gav Thorpe se paie le luxe de conclure la saga hérétique (et la saga tout court pour Corax) de deux Primarques à travers ce sympathique ‘Shadow of the Past’, ce qui est un ratio fluffique tout bonnement exceptionnel pour une simple nouvelle. Si les prémisses de cette histoire ne sont pas très intéressantes, et qu’un lecteur un peu au fait du passif de cet auteur pendant l’Hérésie d’Horus aura tôt fait d’identifier le mystérieux persécuteur de cette cruche de Kalta-Ar, je trouve la deuxième partie du récit nettement supérieure, notamment grâce à l’idée de faire de Corax une sorte de démon non chaotique1, ce qui permet de justifier à la fois comment le Primarque a pu survivre à son départ dans le Warp, et à quoi il occupe ses journées. En plus de ça, un petit duel entre deux frangins légendaires, ça ne se refuse pas (surtout quand c’est la tête à claque qui perd). Il y a même le Marduk d’Anthony Reynolds qui vient faire coucou, ce qui est sympa de la part de Thorpe, et fera sans doute plaisir aux fans du personnage. Bref, un final vraiment sympathique qui fait plus que rattraper un début assez meh. Si Gav Thorpe pouvait toujours s’en tenir à ce standard, je serais un lecteur comblé.

1 : Ou carrément affilié à Malal/Malice, ce qui serait encore plus cool, et une hypothèse pas si farfelue que ça pour une soumission d’un auteur aussi au fait du fluff que Thorpe. Après tout, les motivations et le code couleur de Corax correspondent tout à fait à ceux du dieu banni…

A Lesson in Iron – D. Guymer :

INTRIGUE :

A Lesson in IronS’il y a une chose que Ferrus Manus, paix à son âne, détestait, c’était bien perdre du temps. Aussi, sitôt réuni avec sa Légion, engagée dans le démantèlement de l’empire de rouille ork, le Primarque tint à imposer sa marque sur ses Légionnaires. Nous rejoignons ainsi l’impulsif M. Manus alors qu’il fait la chasse de quelques vaisseaux peaux vertes ayant survécu à la colère de l’Imperium, et qu’il compte bien détruire afin d’obtenir la complétion à 100% de sa mission, et ainsi prouver à l’univers qu’il vaut mieux que ces poseurs d’Horus et de Russ1. Et tant pis si ces couards d’Orks décident de foncer coque baissée dans une faille Warp qui flottait par là pour échapper au courroux de l’Astartes, et que personne n’a jamais été assez timbré du côté impérial pour se risquer dans ce genre d’environnement chelou. Ferrus, et son Fist of Iron, seront les premiers à tenter le coup. Encore un record à mettre au crédit du Primarque qui en voulait.

Ferrus n’est pas seul sur le pont de son vaisseau amiral alors que ce dernier réalise le premier fistage d’une faille Warp. Il est accompagné de deux Sergents vétérans, le Terran Harik Morn et le Medusan Gabriel Santar, tous deux pressentis pour devenir son bras droit. Alors que le Fist of Iron s’enfonce dans le trans Materium comme s’il s’agissait de caramel mou, avec des effets funky sur les appareils de navigation, comme on peut l’imaginer, les auspex détectent soudain des silhouettes de vaisseaux à proximité. Il s’agit des kroiseurs orks, mais également d’un nouvel arrivant, qui n’avait pas été identifié pendant la poursuite dans l’espace réel. Point commun : tous ont été réduits à l’état d’épave, et dans un passé lointain qui plus est. À la grande surprise des impériaux, il semble que le vaisseau en question appartienne à la 10ème Légion, ce qui hautement improbable mais pas totalement impossible. Pragmatique comme toujours, Ferrus Manus décide d’aller y jeter un œil.

Alors que les pauvres grunts qui forment son escorte découvrent avec émoi 1) l’existence de Démons et 2) s’il y a une vie après la mort, le Primarque et ses comparses arrivent jusqu’au pont du vaisseau mystère, où les attend un cadavre desséché de Space Marine. Ce dernier porte les marquages d’un Iron Hands, mais, au grand dégoût de FM, il semble avoir terminé sa carrière plus machine que (sur)homme, au vu de toutes les augmétiques et bioniques que la dépouille arbore. C’est le Tech-adepte qui accompagne la fine équipe qui finit par proposer l’hypothèse la plus intéressante pour expliquer ce répugnant mystère : l’épave sur laquelle ils se trouvent est un vaisseau des Iron Hands provenant du futur, transporté dans le passé par les caprices du Warp.

Avant que la nouvelle n’ait pu être digérée par l’assemblée, une palanquée de Démons se manifeste (dans tous les sens du terme) sur le pont, et forcent nos héros à – enfin – faire usage de la force. Si ce bogoss de Ferrus s’illustre à grands coups de marteau, ses subalternes sont plus à la peine. Surpris par les nouveaux arrivants, Santar se fait ainsi arracher le bras gauche par une Bête de Nurgle joueuse, tandis que Morn est submergé par des Horreurs rigolardes. Le premier réussit toutefois à marquer des points auprès du Primarque en retournant dans la mêlée sitôt ses esprits recouvrés, tandis que le Terran se contente de haleter comme un bébé phoque sur la banquise. Avant d’ordonner une retraite tactique vers le Fist of Iron, ignorant les avis de ses sous-fifres de rester pour looter de la technologie futuriste, et/ou défendre une relique de la Légion, Ferrus tranche en son for intérieur : ce sera Gaby qui deviendra son Ecuyer et 1er Capitaine. C’est dit.

1 : C’était l’époque de la Grande Croisade où tous les Primarques avaient un nom qui rimait avec « platypus », l’animal préféré de Pépé.

AVIS :

Petite nouvelle fort sympathique consacrée par leur spécialiste incontesté, David Guymer, aux Iron Hands et à leur Primarque caractériel, ‘A Lesson in Iron’ se paie le luxe de nous présenter en quelques lignes la prise de fonction de Ferrus Manus au sein de sa Légion (choix du 1er Capitaine, et autres révélations fluffiques intéressantes incluses), combiné avec une savoureuse mise en abîme du futur qui attend le Chapitre dans quelques millénaires. Le fait que les améliorations bioniques répugnent au plus haut point l’homme aux mains de fer n’est pas une nouveauté à ce stade, mais Guymer parvient tout de même à surfer sur cette iron-ie de façon tout à fait satisfaisante. Le pauvre Ferrus Manus aura soupé de prémonitions malheureuses car jamais utilisées pour modifier la destinée pas vraiment enviable attend ses fils et lui-même à la sortie de la Grande Croisade, et on en a encore un exemple ici. Ca reste plus distrayant à lire que la moyenne des soumissions de la BL, donc pourquoi cracher dans soupe ?

The Atonement of Fire – D. Annandale :

INTRIGUE :

The Atonement of FireNous sommes dans la dernière ligne droite de l’Hérésie, quelques mois avant que le Siège de Terra ne débute. Roboute Guilliman a fini par réaliser que lancer sa petite entreprise personnelle alors qu’il est toujours techniquement employé par Pépé Corp., et en piquant dans la caisse de Big E. en profitant d’une panne généralisée d’internet pour ne pas se faire prendre, c’était assez craignos tout de même. Pétri de remords, Roro est désormais à la recherche d’un moyen de se faire pardonner ses errements passés. En sortant de sa séance hebdomadaire avec le Chapelain/Psychiatre Volusius, lui vient une idée toute simple pour expier son énorme hubris : aider Sanguinius à rejoindre Terra en détruisant les flottes hérétiques qui se mettront sans nul doute sur la route de l’Ange à la Moumoute.

Après une petite séance de triangulation avec les poteaux dans le strategium de l’Ultima Mundi, les Ultras de l’Empereur décident d’aller au secours de la planète Diavanos, d’où est arrivé un message astropathique implorant de l’assistance pour gérer une invasion de World Eaters mal-lunés. Diavanos est de plus un monde que les Ultramarines ont rattaché à l’Imperium il y a plusieurs décennies, et dont la technique de vitraux teintés a grandement impressionné le Primarque lorsqu’il flânait dans les rues de la capitale Ecstasia à la recherche d’inspiration pour son dernier roman. Pour toutes ces raisons, ainsi que pour celle, plus prosaïque, de se venger des ravages commis par les séides d’Angron et de Lorgar dans leur pré carré, les gars de la XIIIème se ruent au secours de Diavanos, et tombent à bras raccourcis sur leurs frères ennemis alors que ces derniers s’apprêtaient à repartir pour embusquer la flotte des Blood Angels.

La bataille spatiale qui s’en suit, si elle n’est guère équilibrée (les Ultramarines sont deux fois plus nombreux, sérieux, hargneux, farineux et bleus que leurs adversaires), permet à nos héros de relâcher la pression après tous ces mois à écouter les podcasts interminables du triumvirat de l’Imperium Secundus. Alors que les derniers vaisseaux renégats sont méthodiquement désintégrés par la froide fureur ultramarine, le cuirassé Gladiator profite de la confusion pour repartir en direction de Diavanos, et certainement pas pour une visite de politesse. Guilliman comprend que les World Eaters ont un petit creux, et que s’il n’intervient pas rapidement, la planète qu’il est venu sauver va s’en prendre plein la face. Mais arrivera-t-il à temps pour empêcher les fils d’Angron de commettre l’irréparable ?

Début spoiler…Après de multiples péripéties dans les coursives du Gladiator, que les World Eaters ont faites effondrer pour gêner la progression de leurs ennemis, Roboute et ses hommes (en grande partie des Destroyers, wink wink The Lord of Ultramar’) parviennent jusqu’à la salle des torpilles où les hérétiques se sont barricadés. La mêlée désespérée et surtout très sale qui s’ensuit tourne logiquement en faveur des surhommes en bleu, mais les World Eaters sont proches de réaliser leur objectif secret (faire péter une torpille à l’intérieur du vaisseau afin d’emporter Guilliman avec eux). Seule l’habilité du Grand Schtroumpf avec son combi-bolter customisé permet d’éviter la catastrophe, mais la victoire morale revient tout de même aux groupies d’Horus. Il est en effet trop tard pour prévenir le crash du Gladiator à la surface de Diavanos, et l’onde de choc qui s’en suit rase la capitale et dévaste une grande partie de la planète. Bien évidemment, les Ultramarines ont eu le temps de regagner leurs 22 avant que cette tragédie n’arrive, mais Guilliman finit la nouvelle avec le blues. Approprié, vous me direz.Fin spoiler

AVIS :

Vu le passif peu glorieux de David Annandale avec la XIIIème Légion (‘Lord of Ultramar’…), j’ai attaqué cette nouvelle dans un état d’esprit assez peu favorable à cette dernière, et j’ai été surpris de constater que cet ‘Atonement of Fire’ tenait tout à fait la route. Nous sommes en présence d’un court format siglé HH de facture assez classique (un peu de réflexion, beaucoup d’action, et en bonus une belle tranche de Primarque), mais débarrassé de tous les défauts que l’on pouvait trouver dans les autres soumissions de notre homme (personnages stupides/inintéressants, intrigue bancale, rythme chaotique)1. Ça pourrait et devrait être considéré comme le strict minimum, mais nous savons tous que la BL ne croit pas dans des concepts aussi restrictifs que le contrôle qualité. Enfin, pas tout le temps.

Surtout, et c’est assez rare dans une publication de la Black Library (quel que soit la franchise ou l’auteur) pour le souligner, Annandale parvient à ménager un vrai suspens jusqu’au bout de son propos. Guilliman et ses Schtroumpfs destructeurs arriveront-ils à sauver Diavanos des déprédations suicidaires des World Eaters ? Même si la planète a été créée de toute pièce pour l’occasion, l’auteur arrive à nous intéresser à la conclusion de cet accrochage mineur de la fin de l’Hérésie en appuyant de façon intelligente sur les remords éprouvés par Guilliman au sujet de son Imperium Secondus et son besoin de se faire pardonner de ce petit caprice. Annandale nous ressert également la vieille rengaine du « I am never going to financially recover from this », 30K style, déjà bien exploitée par d’autres avant lui, mais qui fait toujours son petit effet quand utilisée à dessein, ce qui est le cas ici. Bref, une vraie bonne surprise pour ma part, et une des meilleures soumissions de David Annandale pour le compte de cette franchise, si vous demandez mon avis.

1 : On pourrait lui reprocher de ne toujours pas maîtriser les bases spatio-temporelles d’une bataille spatiale (exemple gratuit : la course poursuite entre l’Ultimus Mundi et le Gladiator ne semble durer que quelques minutes, alors qu’elle s’engage à proximité du point de Mandeville du système et se termine dans l’atmosphère d’une planète habitable (donc proche de son soleil), ce qui devrait prendre au bas mot quelques jours), mais dans mon infinie générosité, je passe l’éponge là-dessus.

Canticle – D. Guymer :

INTRIGUE :

On a tous nos surnoms, plus ou moins glorieux, et Ferrus Manus ne fait pas exception. Bien avant d’être baptisé pognes d’acier (en latin haut gothique pour faire plus classe), notre héros a ainsi été appelé Numerodis (l’Empereur), Cataclysme (les géants des tempêtes du Pinacle de Karaashi), La Finalité (des morts-vivants quelconques), Rehew Netjer, soit le Fils de l’Homme (les Necrons), Mon très Chair (les despotes fragmentés du Subliminat), et Empafé de première (le type auquel il a piqué sa place sur le parking du Monoprix de Medusa). Pour sa part, et après avoir malencontreusement libéré Asimoth sur sa planète d’adoption peu de temps après son arrivée remarquée sur cette dernière et s’être révélé trop faiblard pour ramener la bestiole dans son enclos, le Primarque des Iron Hands s’est donné le nom et la vocation de Chasseur, ayant décidé de réparer sa bévue en traquant le wyrm d’argent à travers les paysages bucoliques de Medusa.

Ces premières années sont également l’occasion pour Ferrus Manus de faire ses premières armes, dans tous les sens du terme. On apprend ainsi qu’il a rencontré quelques difficultés sur sa route, d’ordre robotique, semi-robotique et infernal, ce qui donne une idée de la très riche « biodiversité » de la planète sur laquelle il a fait son trou. Rien de très mémorable cependant pour FM (et pour Guymer), dont l’équipement consiste en une cuirasse d’adamantium upcyclé et une bardiche bricolée à partir des dépouilles fumantes de ses malheureux adversaires biomécaniques. On apprend également que ce gentil garçon est capable de subsister sur un régime composé de sable, minéraux et métaux1, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Poursuivant sans relâche sa proie insaisissable, Ferrus finit tout de même par rencontrer des membres de son espèce, d’abord sous forme de cadavres entourant l’épave d’un camping-car Medusan. Curieux d’en apprendre plus sur ces étrangers qui lui ressemblent tant, et soucieux de récupérer un peu de matos utile dans la boîte à gants du véhicule éventré avant que tous les charognards du coin ne débarquent, le jeune Primarque se fraie un chemin jusqu’à la chambre forte du Sandcrawler, négociant au passage dix zombies cyborgs (zomborgs ?) occupés à mastiquer les cartes mères et câbles jack leur étant tombé sous la pince. Ce régime majoritairement électrovore ne les empêche cependant pas de sauter sur l’aventurier pour lui faire les poches dès qu’il s’approche un peu trop, forçant notre héros à faire montre de force autant que de ruse.

Une fois parvenu dans la salle des coffres, Ferrus a la surprise d’être mis en joue par une rescapée de l’embuscade ayant scellé le destin du véhicule et de ses occupants. Guère impressionné par la pétoire plasmique que son interlocutrice lui pointe sur le torse, le Chasseur refuse l’offre qui lui est faite par cette dernière de rejoindre son clan, arguant qu’il a encore une opération de vermifuge à accomplir, et un véritable nom à obtenir, avant de pouvoir faire son entrée dans le monde et participer au Bal des Débutant.e.s de Medusa. La suite de l’histoire de Chéri FM, si elle est connue, sera toutefois narrée dans un autre cantique que celui-ci.

1 : Avec quelques protéines et lipides occasionnelles de temps à autres, par exemple lorsqu’il croise la route d’une escouade de Dépeceurs sur leur 31. On peut donc classer Ferrus Manus dans la sous-catégorie des Primarques cannibales, avec Konrad Curze et Sanguinius.

AVIS :

On a plus l’impression d’un épisode pilote pour une série consacrée à l’enfance de Ferrus Manus que d’une nouvelle indépendante à la lecture de ce ‘Canticle’. Guymer passe en effet la majorité de ses pages à présenter de façon intrigante le jeune Primarque et sa planète, dont on aimerait bien apprendre davantage à la fin de son récit. L’intrigue semble avoir été volontairement tronquée pour permettre à l’auteur de la reprendre au cours de l’épisode suivant, qui n’a, à ma connaissance, pas été publié à ce jour. Peut-être faut-il creuser du côté de la novella1 que David Guymer a consacré à son héros pour mettre en perspective cette nouvelle ? Ou plutôt dans le ‘Voice of Mars’ du même auteur, où le Cantique des Voyages occupe une place importante ? En tous cas, si elle n’est certes pas désagréable à lire, et livre quelques éléments de fluff sur le plus moyen des fils de l’Empereur, cette histoire aurait gagné à se conclure de façon plus définitive.

1 : ‘Ferrus Manus : La Gorgone de Medusa’.

First Legion – C. Wraight :

INTRIGUE :

Spécialistes reconnus des campagnes pourries, les Dark Angels ont bien du mal à exterminer les Rangdan, espèce de Xenos experte en subterfuges et en tentacules, ce qui n’est guère du goût des roides et psychofrigides paladins de la Première Légion. Malgré tout, un ordre est un ordre, et les Astartes poursuivent leurs vaillants et violents efforts pour sécuriser ce petit bout de l’empire de leur Pépé, menés par nul autre que Lion El’Jonson en personne. Nous faisons tout d’abord la connaissance du Capitaine Arnaid, 45ème Compagnie, 8ème Ordre, 1ère Légion, dont la frégate a connu des jours meilleurs, mais qui n’hésite pas le moins du monde à intercepter le mystérieux vaisseau qui fait irruption dans la zone de « pacification » avec son Nightsward, bien que le nouveau-venu soit plus imposant et en meilleure forme. Alors que le Capitaine est sur le point d’ordonner un tir de semonce, ses salutations répétées n’ayant pas été retournées par les touristes en goguette, ceux-ci daignent enfin répondre, par la voix d’un autre officier Space Marine, un Capitaine de la nouvellement formée XXème Légion répondant au nom de…

Début spoilerJules-Edouard Petitbedon.

Bon ok : il s’appelle Alpharius. Incroyable, je sais.Fin spoiler

Alpharius s’excuse de ses manières cavalières et de son manque de décorum (son vaisseau, Perseus, a l’air d’avoir quitté les docks spatiaux avant que le Mechanicum n’y passe un coup de peinture), mais annonce qu’il est venu porteur de nouvelles pour Lion El’Jonson.

Pendant ce temps là, nous nous introduisons dans une réminiscence de Lionel en personne, du temps où il était un enfant sauvage qui courait cul nu dans les forêts de Caliban. Notre petit bonhomme semble être occupé à traquer une bête particulièrement bestiale, seulement armé d’une défense de phacochère nain et de sa volonté implacable. Wraight nous fait bien comprendre que c’est la destinée même d’El’Jonson qui est à l’œuvre ici, et entraîne le jeune Primarque au clash contre un monstre que la partie raisonnable/froussarde de Lionel aimerait éviter si possible. Pause pub.

Retour sur le Nightsward, où Alpharius est reçu par son homologue. Constatant qu’il ne sert à rien de féliciter ce dernier sur son goût (pratiquement inexistant) en matière de décoration d’intérieur, ni de tenter de piquer la curiosité (totalement inexistante) de l’austère Terran, l’Alpha Légionnaire qui s’ignore1 tente de soutirer quelques infos psychologiques et tactiques à Arnaid en jouant la carte de la franche admiration pour les exploits et la réputation de la Première Légion, avec un succès relatif. Ces oiseuses discussions sont toutefois interrompues par la réception d’un message autorisant Alpharius à voyager jusqu’à l’Invicible Reason pour y rencontrer Lion El’Jonson, avec Arnaid lui servant de Kaptain pour l’occasion. Simple déformation professionnelle, en somme.

Suite et fin du documentaire animalier commencé un peu plus haut avec la confrontation entre Lionel et sa Némésis, qui se trouve être un chevalier en armure. Car en fait, le zouave qui courrait dans la savane avec son coutelas d’ivoire n’était pas le Primarque, mais une sorte de démon ayant pris forme humaine, et décidé de mettre fin à l’écocide décrété par le chef de l’Ordre. Malheureusement pour notre ami, ce dernier se révèle être un adversaire trop coriace pour ses maigres ressources, et il finit promptement embroché par la rapière du palouf. Voilà qui lui apprendra à ne pas usurper, même littéralement, l’identité d’autrui. Avant de repartir dans le Warp, le Rahan de Caliban a le temps de traiter son assassin de « Premier Fils » et de l’accuser d’être « la mort de son monde », ce à quoi Lionel répond que son titre correct est le tueur de bêtes. Fin de l’épisode.

Sur l’Invicible Reason, le Dark Archangel reçoit comme convenu Arnaid et Alpharius, qui est en fait venu lui proposer un coup de main, en toute amitié2, pour en finir avec la campagne d’extermination des Rangdan. Les pertes terribles souffertes par la Première Légion menacent en effet son statut et son prestige par rapport à ses sœurs, et pourraient faire échapper à El’Jonson le titre de Maître de Guerre, que ce visionnaire d’Alpharius anticipe déjà qu’il sera décerné par l’Empereur à l’un de ses fils dans un futur pas trop lointain (dès que les 20 Primarques auront été retrouvés en fait…wait a minut-). Bien que ne contestant pas l’argumentaire de son petit neveu/frère, Lionel se montre méfiant devant l’intérêt qu’il semble attacher à la prédominance des Dark Angels dans l’équilibre politique de l’Imperium, et après avoir menacé de le couper en deux, en toute amitié, pour le forcer à exposer ses véritables motifs (Alpharius n’aime vraiment pas Guilliman), il le renvoie sur son vaisseau où il lui fera savoir sa réponse sous une heure. Resté seul avec Arnaid, El’Jonson consulte son Capitaine pour avis secondaire, avant de lui révéler que l’énorme poids de… sa parole donnée l’empêche et l’empêchera toujours de placer son intérêt personnel avant celui de son seigneur. C’est sur cette déclaration de loyauté véritablement désintéressée que se termine notre histoire, qui démontre à quel point Lion El’Jonson est un végétal politique. Un concombre, pour être précis.

1 : Il insiste pour être désigné comme être membre de la XXème Légion, sans autre précision. Quel coup de chance tout de même qu’il ait le même nom que le Primarque pas encore découvert de cette dernière
2 : Et surtout parce qu’il ne peut pas blairer Guilliman, ce qui lui fait un point commun avec Lionel.

AVIS :

On retrouve dans ‘The First Legion’ le goût de Chris Wraight pour des petits exposés au débotté sur la géopolitique impériale au moment de la Grande Croisade (tendance déjà aperçue dans ‘Leman Russ : Le Loup Suprême’), et c’est tant mieux si vous voulez mon avis. S’il ne se passe pas grand-chose dans cette nouvelle, on n’en ressort pas pour autant frustré de sa lecture, l’échange entre Alpharius et Lion El’Jonson, qui permet d’identifier les points communs et les différences entre le premier et le dernier de cordée et leurs Légions respectives, ainsi que d’en apprendre un peu plus sur la manière dont les Legiones Astartes étaient perçues par Terra au moment où Pépé songeait à partir en pré-retraite dans le Bhoutan profond, valant son pesant de papier. Lionel y apparaît comme le type imbuvable socialement (il le reconnaît lui-même d’ailleurs) mais irréprochable moralement que les derniers ouvrages de l’Hérésie tendent à dessiner, tandis qu’Alpharius est dépeint comme un intrigant de première, n’ayant aucunement besoin d’un slideshow de la Cabale pour trouver des raisons de comploter dans le dos de tout le monde. Bref, une soumission solide de la part de Chris Wraight, qui fait honneur à ses deux Légions secondaires avec cette nouvelle.

A Game of Opposites – G. Haley :

INTRIGUE :

C’est malheureusement très peu traité dans les livres d’histoire impériaux, mais la bataille de Beta Garmon, aussi connue sous le nom de casse (de Titans) du millénaire, ne s’est pas tenue du jour au lendemain. Cette rencontre décisive entre renégats et loyalistes, et les milliards de morts qui en ont découlé, n’a été rendue possible que par le dévouement et le travail de l’ombre de Légions de sous-fifres, comme l’histoire dont il est question ici s’en fait écho. Bienvenue donc à la surface d’Epsilon Garmon II, planète du cluster garmonien que les Iron Warriors souhaiteraient fortifier pour ralentir l’arrivée prochaine de Guilliman et de ses hordes de Schtroumpfs. Le conditionnel est ici de mise car les efforts de terrassement des hommes de fer se sont jusqu’ici faits contrecarrer par les manœuvres destructrices d’une petite force de White Scars. Peu familiers des techniques de hit and run de leurs cousins des steppes, les fils de Perturabo sont perturbés par cette campagne d’un genre nouveau, où ils arrivent toujours trop tard pour empêcher les Space Bikers de sévir.

Fort heureusement, le Maître de Forge Xyrokles, affublé de son larbin et souffre douleur Phideark, ainsi que d’une ribambelle de Capitaines dont je vous épargnerai les noms, a un plan machiavélique pour venir à bout du péril jaune blanc à éclair rouge. Ayant récupéré dans un campement abandonné par ses ennemis quelques bouquins philosophiques signés de la main même de Jaghatai Khan et remplis d’aphorismes aussi profonds que « La taupe ne voit pas le vol de l’éléphant », « Pourquoi rester debout quand on peut s’asseoir » ou « Plus il y a de fous, moins il y a de riz », Xyrokles a tellement bûché sa philo1 qu’il est certain de pouvoir prendre les White Scars à leur propre piège, en réalisant un coup de billard à IV bandes à base de feintes, de retraites et d’embuscades tellement complexes que la majorité de ses sbires n’y blaire que dalle. Lorsque vient enfin le jour le plus long, le Khan Ishigu emmène ses motards énergétiques faire une petite virée dans un avant poste renégat, sans se doute un instant que ses minutes sont comptées.

Et en effet, le plan de Xyrokles se déroule comme sur des roulettes, la colonne blindée qu’il a envoyé leurrer les loyalistes au moment où ils commencent à se replier en bon ordre se révélant être un extra trop tentant pour qu’Ishigu et Cie résistent à la tentation d’y planter leurs pneus. Ce détour est toutefois lourd de conséquences pour les White Scars, qui se font surprendre par une contre-attaque vigoureuse de la part des Iron Warriors, et canalisés dans un goulet étroit débouchant sur la ligne de blindés du Maître de Forge, qui n’a plus qu’à donner l’ordre d’ouvrir le feu pour régler une fois pour toutes leur compte aux scarifiés d’en face…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur la légendaire flexibilité tactique des fils du Khan, qui avaient tout planifié depuis le début et cachés également une réserve mobile pour surprendre l’adversaire. Confrontés à une force anti-chars conséquente et bénéficiant de l’effet de surprise, Xyrokles et ses hommes ne font pas long feu (c’est la vieille histoire de l’artilleur artillé). L’honneur est toutefois sauf pour ce dernier, puisqu’il s’aperçoit après avoir été fait prisonnier que c’était Jaghatai Khan en personne qui était aux commandes dans le camp d’en face. S’en suit un échange d’amabilités qui nous permet d’apprendre que le Khan se tamponne le samovar avec la vérité impériale, qu’il considère poliment comme un avis parmi d’autres. Stupeur chez Xyrokles, qui en surhomme de principe, pensait que tous les loyalistes adhéraient scrupuleusement au dogme de Pépé. Il emportera toutefois ce secret dans la tombe, que son généreux vainqueur lui accorde en récompense de ses méritants efforts de réflexion, Jaggie Chan lui dévissant les cervicales d’un tour de main à la fin de leur échange. C’est qu’il a du pain sur la planche, et un retour sur Terra à préparer…Fin spoiler

1 : Ce qui est somme toute logique pour un grec ancien.

AVIS :

Je suis partagé sur la valeur de ce ‘A Game of Opposites’, qui comporte des éléments positifs comme négatifs. Pour commencer par ce qui ne fâche pas, j’ai apprécié le choix de Haley de donner une dimension, si ce n’est comique, au moins caustique, à ses Iron Warriors, qui font ainsi mentir leur réputation de guerriers prenant tout au premier degré. La dynamique entre Xyrokles et Phideark est particulièrement savoureuse, le second encaissant sans broncher toutes les punchlines que son supérieur lui balance à la tête. Dommage que le destin tragique du Coluche d’Olympia nous prive d’autres saillies drolatiques de sa part pour la suite de l’Hérésie. Cette nouvelle est également intéressante d’un point de vue fluffique, car elle donne à voir un Jaghatai Khan d’un pragmatisme assumé et presque hérétique, ayant pris parti pour son Père mais loin de se ranger à toutes ses vues, y compris sur des sujets aussi sensibles que la religion (il croit en la réincarnation). D’un autre côté, ‘A Game of Opposites’ pêche franchement pas son manque de suspens et son déroulement sans surprise. Car le résumé ci-dessus ne suit pas exactement le récit de Haley, qui choisit de révéler la présence du Khan au côté d’Ishigu dès le premier tiers de la nouvelle, ce qui condamne d’office le stratagème de Xyrokles à l’échec1. Le retournement de situation final et la victoire des White Scars sont donc aussi attendus que l’heure de la pause syndicale dans un guichet de poste, ce qui peut blaser le lecteur (en tout cas, ça a été mon cas). En conclusion, pas le meilleur texte de Guy Haley, mais pas désagréable ou inutile pour autant.

1 : Il n’y a que John French qui fait battre un Primarque par un Space Marine (‘The Crimson Fist’).

Better Angels – I. St Martin :

INTRIGUE :

Les Légions Space Marines sont un peu comme les filières post bac : il y en a pour tous les goûts et tous les niveaux. Si les impétrants ayant de la suite dans les idées et la volonté de faire carrière se rabattront sur des spécialisations ternes mais assurant la sécurité de l’emploi (BTS Gestion avec les Ultramarines, Bac Pro travaux publics avec les Imperial Fists ou les Iron Warriors, CAP Esthétique avec les Emperor’s Children…), les plus aventureux tenteront leur chance dans des cursus plus pointus, à leurs risques et périls. C’est ainsi que l’Empereur se retrouva avec des cohortes de philosophes désagrégés (Thousand Sons), théologiens en déshérence (Word Bearers), et vétérinaires ayant raté leur concours d’entrée (Space Wolves), qu’il dût bien recaser à droite et à gauche pour éviter la crise. Enfin, pour un temps. Mais, parmi tout l’Astartes, aucune Légion n’égale les Blood Angels en termes de réputation. Si on appelle les fils de Sanguinius (derrière ses ailes) des poètes, des peintres ou des danseuses, c’est pour une bonne raison : le Primarque exige que tout le monde pratique une discipline artistique, depuis le plus humble novice jusqu’au plus ancien des Dreadnoughts1. Notre héros, que nous allons suivre depuis le début de sa carrière jusqu’à l’arrivée de la flotte de la IXème en orbite de Terra, peu de temps avant le début du siège, ne fait pas exception. Jehoel (il faut croire que Joël était déjà pris) s’est ainsi spécialisé dans la verrerie, ce qui lui a attiré l’intérêt et le mentorat de son père génétique, souvent présent lorsque le souffleur fait parler la poudre le sable.

Ces rencontres ponctuelles mais fréquentes, si elles permettent aux deux surhommes de discuter technique et philosophie, amènent surtout le lecteur à suivre en filigrane la fin de la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus du point de vue d’un Primarque et d’une Légion particulièrement éprouvés par la traîtrise du Maître de Guerre, et le déclenchement de la baalédiction des fils de Malle, ou l’inverse. Finies donc les évocations de la prochaine reconversion des légionnaires en portraitistes et potiers une fois la galaxie conquise, et bonjour les sculptures de démons réalisées dans un état second, au grand déplaisir de Sanguinius – qui passe la nouvelle à critiquer Jehoel, ceci dit. Adieu aux riches galeries du Red Tear, et bonjour à la décoration minimaliste du Convenant of Blood, véhicule de courtoisie prêté par l’Imperium après le carambolage de Signus Prime. Lorsque St Martin décide enfin de mettre un point final à sa nouvelle, on apprend tout de même que si Sanguinius s’est montré aussi assidu dans ses discussions avec Jehoel au cours des décennies passées, c’est parce qu’il considérait que ce dernier était l’un des Blood Angels les plus bloodangeliques de la Légion, et pouvait ainsi se contempler à sa guise dans son interlocuteur. Un peu égocentrique le garçon, tout de même. Le rideau tombe sur la scène après que Jehoel ait montré à son pôpa la représentation idéalisée de Terra qu’il a réalisée avec de la pâte de verre, ce qui lui vaut les félicitations (enfin !) du jury, et que l’Ange ait balancé la remarque à connotation fataliste de rigueur, davantage pour le bénéfice du lecteur que pour celui de son fiston. Si jeunesse savait…

1 : À l’exception notable de la danse classique, après que le Vénérable Neolardon ait failli écraser Sanguinius en passant à travers le plancher du gymnase à la suite d’un saut carpé mal négocié.

AVIS :

Je placerais ce ‘Better Angels’ dans le prolongement de ‘Death of a Siversmith’/’Mort d’un Orfèvre’ (Graham McNeill), et pas seulement parce qu’il met en scène un protagoniste très porté sur les arts plastiques. On retrouve en effet, et surtout, dans cette nouvelle la volonté assumée de l’auteur de surprendre son public en livrant une histoire s’écartant largement du bolter porn qui est la norme de l’Hérésie d’Horus. Et, là encore, le résultat penche davantage vers l’exercice de style un brin forcé que vers la réussite incontestable. Ou peut-être n’ai-je pas lu assez sur Sanguinius et les Blood Angels pour tirer la substantifique mehoelle de ce texte ? C’est bien possible. Toujours est il que je sors du studio du Primarque à plumes un peu circonspect sur la valeur de cette soumission, qui aurait pu, pour reprendre son titre, être bien meilleure.

The Sinew of War – D. Hinks :

INTRIGUE :

Sur Macragge comme sur Terra, bien des millénaires plus tôt, la vile populace s’est soulevée contre ses justes et bienveillants maîtres, provoquant émeutes, massacres, feux de poubelle et occupations de ronds-points, tous crimes abominables mais heureusement sévèrement punis par les forces de l’ordre. Et en termes de répression policière, la capitale des 500 mondes a un avantage de taille et de poids par rapport à notre bonne vieille planète : Roboute Guilliman, génie précoce et baraqué, général visionnaire, humaniste convaincu, et fils adoptif du Consul Konor Guilliman, qui forme avec son collègue Gallan le duumvirat exécutif de l’espèce de république (il y a un sénat aussi) établie sur Macragge City. Occupé en Illyrium à pacifier une bande d’autochtones ayant eu la mauvaise idée de se rebeller contre l’ordre établi, notre héros a raté le début du soulèvement urbain qui a transformé la cité idéale de son enfance en champ de bataille. L’idéaliste, et un brin méprisant, surhomme a bien du mal à comprendre pourquoi diable une partie de l’armée s’est rangée du côté des casseurs, tout ça pour une bête histoire d’argent. C’est bien une réflexion de gosse de riches ça, Roro. Mais il lui faut attendre avant de consigner par écrit ses savantes réflexions sur les causes et les répercussions de ce mouvement social aussi inédit que violent : son père est resté dans la cité et a sans doute été pris pour cible par les fainéants et les sans dents. Il faut lui venir en aide.

Progressant rapidement vers le palais du Consul en distribuant quelques baffes aux mutins au passage, et utilisant son armure de scenarium pour passer entre les balles1, Gui est rejoint en chemin par Gallan, qui est venu lui aussi s’enquérir de la situation de son collègue de bureau. N’hésitant pas à joindre le geste à la parole, le Consul consort est même blessé dans la bagarre, écopant d’une estafilade au biceps pour preuve de son dévouement. Las, les deux compères arrivent trop tard pour sauver Konor (ce qui est triste) et les tapisseries (ce qui est pire). Papa Guilliman a été lâchement égorgé par ses assaillants, l’empêchant de dire adieu à son fils mais surtout de donner le nom des coupables. Bizarrement, il refuse catégoriquement que Roboute s’approche de lui dans ses derniers instants, allant jusqu’à le mettre en joue avec son pistolet pour le maintenir à distance. Le respect des gestes barrières jusqu’à la dernière seconde, on reconnaît bien là la trempe d’un vrai Macraggien. Konor a toutefois un message à faire passer à son fiston avant de mourir pour la patrie : une pièce frappée à l’effigie des deux Consuls de Macragge, et symbolisant le caractère éternel de la république, même en ces heures difficiles. Ou du moins, c’est ce que le cerveau embrouillé de Roboute en déduit, se souvenant d’une leçon de vie mémorable inculquée par son père avec un sesterce du même genre bien des années plus tôt. Sur ces considérations philsophico-fiduciaires, Konor passe de vie à trépas, provoquant une colère noire bleue chez son fils.

Convaincu par Gallan d’aller défendre le Sénat, probablement attaqué lui aussi par les vandales en sandales, Roboute sèche ses larmes et lèche ses armes, avant de se frayer un chemin jusqu’au parlement local en commettant quelques crimes de guerres au passage. On va dire qu’il bénéficiait de circonstances atténuantes. Pendant que Gallan tente d’aller raisonner les sénateurs, qui débattent férocement entre eux du meilleur moyen de châtier les gueux, Guilliman est envoyé se changer au vestiaire, son apparence dépenaillée risquant fort de provoquer des remous contre productifs dans les rangs de l’auguste assemblée. Cet enfilage de toge manque toutefois de tourner court pour le Primarque, qui se fait soudainement attaquer par le préposé aux cabines d’essayage, armé d’un poignard empoisonné. Le nez très fin de Guilliman lui permet de comprendre en un éclair que la même toxine a été utilisée sur Konor, et que c’est pour protéger son fils d’une intoxication involontaire que le Consul mourant l’a empêché d’approcher. Passé l’effet de surprise, l’assassin en puissance ne fait pas longtemps le malin face aux réflexes de mangouste et à la poigne de langouste de notre héros, qui ne parvient cependant pas à lui faire cracher autre chose que des bulles de bave (le bougre retourne son surn contre lui), à commencer par le nom de son commanditaire. Encore un crime crapuleux, c’est dingue ça. Il faudrait vraiment que les pauvres songent à être moins pauvres, ça réglerait beaucoup de problèmes d’un coup. Cette péripétie évacuée, il est temps pour Roboute de rejoindre Gallan sur l’estrade, afin de soutenir le coup d’état salutaire que ce dernier veut initier pour sauver la république…

Début spoiler…Mais, ô surprise, Rob’ est accueilli par un discours très critique de ce galopin de Gallan à l’encontre de son père, taxé de populiste et de socialiste par son homologue, et à l’annonce de son propre assassinat, pour le bien de Macragge. Evidemment, le « hum hum » que jette Guilliman juste après ruine un peu le groove de celui qui aurait bien aimé être empereur, qui se prend les pieds dans le tapis à tenter de justifier son double langage. Pas plus bêtes que la moyenne, les sénateurs comprennent vite que Gallan est le méchant de l’histoire, et qu’il a manigancé ce soulèvement populaire pour se débarrasser de ses rivaux et saisir le pouvoir. Roboute était parvenu à la même conclusion quelques instants auparavant en réalisant que la pièce que lui avait donné son père désignait en fait son meurtrier, puisqu’elle avait le profil de Gallan frappé sur ses deux faces2. Plus démasqué que Donald Trump au milieu d’une épidémie de COVID-19, le félon se fait appréhender par le service de sécurité, après que le noble Guilliman, ayant réalisé que tuer le traître de ses propres mains aurait été certes cathartique, mais contre-productif et contre ses valeurs, ait indiqué qu’il laisserait la justice suivre son cours. Devant tant de légalisme, les sénateurs ne peuvent que jurer allégeance au Primarque, exemple vivant d’une intégration réussie par un immigré méritant. L’histoire est en route pour Roboute…Fin spoiler

1 : Le pouvoir psychique caché de Guilliman est de faire voir flou à ses ennemis. C’est subtil mais très efficace. Ça marche malheureusement moins bien au corps à corps, comme Angron et Fulgrim le constateront.
2 : On pourrait dire qu’il aurait été plus efficace à Konor de simplement pointer du doigt Gallan au moment où lui et Roboute sont arrivés dans la pièce, mais l’histoire se serait terminée un peu brutalement.

AVIS :

Darius Hinks livre la version romancée de l’épisode le plus connu de la jeunesse de Roboute Guilliman (que David Annandale avait mystérieusement choisi d’ignorer dans la novella consacrée au Primarque), et le fait plutôt bien. Certes, si vous connaissez votre fluff, le suspense que l’auteur se donne du mal à entretenir jusqu’au bout de son récit tombe rapidement à l’eau, mais on ne peut pas reprocher à Hinks d’avoir voulu soigner sa sortie, et la relation de confiance qui existait auparavant entre les Guilliman et Gallan est un choix intéressant de sa part, qui peut en partie expliquer pourquoi le futur patron des Ultramarines a tendance à vouloir faire les choses tout seul de son côté. On glane également quelques informations sur la société de Macragge avant son intégration dans l’Imperium, ce qui est de l’ordre du notable. Il y avait sans doute moyen de capitaliser davantage sur cet événement fondateur pour expliquer la suite de l’histoire de Guilliman, voire l’Hérésie, voire le Sombre Imperium, ou, plus simplement, insérer quelques easter eggs saveur ultramarine (notons tout de même la mention faite à Tarasha Euten, Chambellan du Primarque et héroïne de l’audio book ‘Illyrium’ du même auteur) , mais pour une nouvelle de 16 pages, Hinks s’en sort très honorablement, autant sur le plan théorique que pratique.

The Chamber at the End of Memory – J. Swallow :

INTRIGUE :

Comme tous les créatifs peuvent vous le dire, ce sont les derniers moments avant le rendu final qui sont les plus stressants. Et bien que Rogal Dorn ne mérite pas franchement ce qualificatif, il partage néanmoins ce souci du détail et cette tendance au micro-management qui distingue les génies et les pervers narcissiques du reste de la population. Ayant pris son hoverboard gravitationnel et son mécapigeon holographique1 pour inspecter l’avancée des travaux, l’Homme de Pierre corrige et réajuste les milliers de petites variables qu’il est le seul à voir mais dont la victoire dépendra peut-être. Après tout, si Horus tombe des fortifications après avoir glissé sur un gravillon énergétique, la guerre sera tout de même gagnée. Alors qu’il s’approche de l’Investiary, l’amphithéâtre anciennement décoré de 20 statues monumentales de la fratrie impériale, et dont deux des plinthes sont maintenant vides, une explosion attire son attention. Il semblerait que l’une des tours de stockage de la zone ait contenu du nitrate d’ammonium, et pas les précieuses antiquités collectionnées par Malcador le Sigilite, qui avait demandé au Prétorien de Terra de ne pas raser le quartier pour en faire des gravillons (énergétiques), comme il en a la sale habitude. N’écoutant que son statut de protagoniste de nouvelle, Rogal se hâte sur les lieux pour mener sa petite enquête.

Sur place, il constate qu’un début d’incendie a ravagé la façade, et que l’équipe en charge de l’audit/expropriation/démolition a connu une fin horrible et peu commune, les cadavres jonchant l’intérieur du bâtiment semblant avoir été causé par des ondes de choc, des explosions internes ou vaporisations pures et simples de l’individu, ce qui n’est certes pas banal. Pas banale non plus est la sensation persistante et croissante qu’éprouve le Primarque qu’il doit faire demi-tour au fur et à mesure qu’il progresse vers l’épicentre de la catastrophe. Ce mauvais pressentiment n’est pas suffisant pour arrêter la marche (du fils) de l’Empereur, mais les apparitions psioniques (des démons libres de droit, pour faire simple) qui l’attaquent dès qu’il pose le pied dans l’antichambre finale le convainquent de consulter un spécialiste, une fois les fâcheux renvoyés dans le Warp. Et justement, il a une soute pleine d’Archivistes sous scellés en orbite, qui n’attendent que son bon vouloir ou l’arrivée d’Horus pour se rendre utiles2.

Le destin ayant désigné le frère Yored Massak pour prêter main, ou plutôt tête, forte à son Primarque, nous suivons les deux guerriers revenir jusque dans la salle piégée, où les horreurs éthérées re-spawnent avec diligence, pour se faire à nouveau bannir en deux temps trois mouvements par nos héros. Si ces derniers étaient prêts à combattre des ennemis de cette trempe, qui ont fait leur fête aux malheureux larbins ayant eu la mauvaise idée de vouloir faire leur boulot, ils se figent sur place en remarquant les symboles qui marquent les deux gigantesques portes qui terminent le corridor : II et XI

Il s’agit bien entendu d’une référence aux deux Primarques disparus, frappés d’anathème par l’Empereur en personne, mais dont l’éphémère existence reste de notoriété publique au sein des Légions de l’Astartes. Pendant que Dorn se creuse les méninges pour percer ce mystère insondable, Massak parvient finalement à mettre le doigt, ou plutôt la tête, sur le sentiment de déjà perçu qui l’habitait depuis son entrée dans la tour. L’installation psychique de cette dernière a été effectuée par Malcador en personne, l’Archiviste repentant en est certain. Et l’intéressé confirme aussitôt sa déclaration, en arrivant sans crier gare dans la pièce. Ayant envoyé Massak poser des parpaings à l’extérieur pour avoir un peu d’intimité, le Régent de Terra a enfin la possibilité de s’expliquer auprès d’un Rogal Dorn qui sent de manière confuse qu’il s’est fait mindfucker par l’éminence grise dans un passé plus ou moins lointain. Il ne s’explique en effet pas son absence totale de souvenirs de Deuzio et Onzio, alors qu’il dispose d’une mémoire eidétique tout ce qu’il y a de plus primarquielle. Et Malcador d’avouer que c’est bien lui qui est responsable de ce trou de mémoire généralisé, touchant à la fois les Astartes des Légions décapitées (avant qu’ils puissent être réformés et repackagés), mais également les Primarques ayant connu personnellement les fils indignes de Pépé. Mais attention, il avait une bonne raison de le faire, se dépêche-t-il d’ajouter avant de finir tronçonné par l’Homme de Pierre : c’est Dorn et ses frères eux-mêmes qui lui avaient demandé un brainwash pour permettre à l’Imperium de se relever d’une tragédie si terrible qu’elle avait manqué de le mettre à genoux. L’Empereur, comme à son habitude, avait tout vu/su mais n’avait rien dit/fait. Classic MoM move here.

À moitié convaincu par l’explication du Sigilite, qu’il ne peut plus blairer depuis le début de la fortification de Terra, Dorn fronce les sourcils tellement fort que son interlocuteur décide de lui accorder un droit de flashback limité et provisoire sur son passé oublié, afin qu’il puisse se rendre compte par lui-même de la bonne foi du Régent. EVIDEMMENT, le lecteur ne sera pas convié à cette introspection douloureuse, dont les effets se dissipent rapidement mais qui convainc Dorn de la véracité des dires de Malcador, et surtout de la nécessité que ce passé, semble-t-il absolument honteux, de la Grande Croisade ne refasse jamais surface. Lorsqu’il ressort de la tour, il ordonne donc aux équipes venues en renforts de la détruire (plus de gravillons !). De toute façon, Massak avait achevé une copie conforme du bâtiment avant que le sort ne soit rompu par un claquement de doigts de Rogal Dorn, ce n’est donc pas une grande perte d’un point de vue stratégique.

1 : Surtout pour se délecter de le voir ch*er sur les hélotes en contrebas, je pense. Il faut bien trouver un moyen d’évacuer le stress quand on ne boit/fume/joue/prie/couche/rigole pas.
2 : Enfin, plus utiles qu’ils ne le sont à l’heure actuelle, le tricotage d’écharpes pour les soldats impériaux de faction sur les murailles du Palais n’exploitant pas tout le potentiel des Anges de la Mort susnommés.

AVIS :

James Swallow touche à l’un des mystères fluffiques les plus importants du background de l’Hérésie d’Horus dans ce ‘The Chamber…’ et parvient à nous vendre une once de révélations sur la destinée des Primarques disparus comme s’il s’agissait d’une avancée majeure du lore. C’est en tout cas le sentiment qui dominait chez votre serviteur à la fin de la lecture de cette nouvelle, qui contient trop de micro-informations et de sous-entendus sur lesquels gloser à l’infini pour ne pas mériter sa place dans la liste de lecture de tout fanboy/girl revendiqué.e. Mais on n’est certes pas au niveau d’un ‘Legion’ ou d’un ‘Saturnine’ en termes de coup de théâtre, ce qui est somme toute logique pour une histoire au tirage assez confidentiel telle que ‘The Chamber…’. Notons au passage la présence que quelques bouts de fluff « autres » au fil des pages, qu’il s’agisse du Palais Impérial ou de l’armement de Rogal Dorn, ainsi que le retour d’un second couteau souvent employé par Swallow en la personne de Yored Massak (‘La Fuite de l’Eisenstein’, ‘Garro’), et restons-en là.

The Will of the Legion – A. Clark :

INTRIGUE :

The Will of the LegionLa 3ème flotte d’expédition de la Grande Croisade, engagée dans la joyeuse réunification humanitaire de la galaxie désirée par l’Empereur, est tombée dans une embuscade à la sortie d’une rocade warpienne. Assaillis par l’armada destroy mais pléthorique des Driftborn, une civilisation humaine ayant passé quelques millénaires à vivoter dans une ceinture d’astéroïdes en s’adonnant à la récupération et à l’upcycling des épaves passant à portée de leurs cités roches (les ruches, ce sera après le passage à l’âge impérial), les Imperial Fists qui constituent le gros (et le grand) des forces expéditionnaires se font donc un devoir de repousser les piteux abordages de leurs lointains cousins. Nous faisons ainsi la connaissance du Capitaine Hashin Yonnad, de la 39èmeCompagnie Maisonnée d’Inwit, alors qu’il mène une escouade de Breachers, le corps anti-émeutes de sa Légion, dans la purge du Tribune, vaisseau amiral de la flotte impériale. Ayant massacré la plupart des malheureux corsaires ayant croisé sa route, et fait, dans son infinie bonté, prisonniers les autres avant qu’ils ne meurent de froid  dans les coursives extérieures mal isolées du Tribune, Yonnad reçoit une convocation urgente à se rendre à l’autre bout du vaisseau, où il embarque sans tarder dans un Stormbird, en compagnie de ses vétérans… et de Rogal Dorn, rendu très chafouin par la tournure prise par les événements1.

Rendu perplexe par l’absence de briefing quant au déploiement de la force de frappe Astartes que le Primarque emmène à l’assaut de la principale cité ennemie, Yonnad demande respectivement à son boss de bien vouloir partager sa gnose avec ses fistons, afin que ces derniers soient en mesure de mener à bien ses plans. Dorn s’exécute, et indique à ses Légionnaires que leur cible est un dôme stratégiquement important, dont la capture mettra fin au conflit de façon rapide. La moue désapprobatrice (encore plus que d’habitude) qu’il affiche fait cependant rapidement comprendre à Yoyo que les Driftborn ont épuisé la patience, pas très fournie de base, du Primarque, et que ce dernier considère très clairement l’annihilation pure et simple de ces derniers comme une option de travail. Après tout, la mort, autant que le mur, est son métier.

Débarqués en plein cœur du marché aux puces local, les Imperial Fists tracent la route sans trop (trois morts) forcer jusqu’à leur objectif, massacrant l’arrière garde adverse au passage, un Rogal Dorn toujours aussi revêche collé à leur train. Papa se contente en effet de marcher derrière sa marmaille en fronçant très fort les sourcils, observateur plutôt qu’acteur de la sanglante et implacable progression impériale. Une fois le dôme sécurisé, il demande, que dis-je, il orDORNne à ses Techmarines de bidouiller les consoles de l’endroit afin de pouvoir disposer d’un gros bouton (sans doute jaune) qui pourra couper le chauffage et l’air conditionné  l’échelle de la cité entière d’une simple pression, avec des conséquences funestes pour qui ne porterait pas une armure énergétique (ou s’appellerait Marneus Calgar). Trop snob pour se salir les mains, il somme le brave Yonnad de se mettre en position devant le buzzer magique, tandis que lui donne une dernière chance à ses malheureux adversaires de se rallier à l’Imperium. Ayant bien fait comprendre aux Driftborn qu’il avait été bien gentil jusqu’ici, mais qu’il n’avait, en sa qualité d’architecte de la destinée galactique de l’humanité (d’abord) et de décorateur intérieur de l’Empereur (surtout), absolument rien à carrer de leur civilisation minable, il leur donne royalement impérialement quelques instants de réflexion après avoir terminé sa harangue. Assez pour plonger Yonnad dans de profondes considérations éthiques quant à la trop grande facilité qu’il aurait à presser le bouton, et donc à signer l’arrêt de morts de millions d’êtres humains, pas coupables de grand-chose au fond, sur un simple branlement du chef de son Primarque. Fort heureusement pour notre héros philosophe, les Driftborn choisissent sagement de capituler, rendant leur dépressurisation inutile. La nouvelle se termine sur cette victoire décisive de la Team Pépé, qui ne suffit cependant pas à dissiper les doutes du Capitaine Dubious. Béni soit l’esprit…

1: Cela se perçoit dans la manière dont il prononce « connerie ». Et je ne parle pas de son accent chantant de Mareuh-seilleuh.

AVIS :

Petite nouvelle de bonne facture de la part d’Andy Clark, qui donne un peu de profondeur tant à Hashin Yonnad, avant sa sortie de route sur Phall, qu’à Rogal Dorn, qui gagne ici quelques précisions fluffiques qui ne manqueront pas d’intéresser le chaland, en attendant que le Primarque trumpien (build the wall!) ne dispose de son tome dans la série du même nom. Les lecteurs du troisième livre Forge World de l’Hérésie d’Horus apprécieront sans doute également de revoir apparaître les Driftborn du Consus Drift, présentés dans ce même ouvrage il y a quelques années. Narrativement parlant, l’intérêt principal de The Will of the Legion repose toutefois dans ses dernières pages, et la réalisation incrédule et dérangeante par Yonnad de son total endoctrinement à la cause de Dorn, dont il appliquera sans hésiter tous les ordres, même les plus immoraux. Nul doute que Clark voulait faire ressortir par cette réflexion intérieure toute l’ambivalence de l’Hérésie d’Horus, dont beaucoup des combattants se sont retrouvés dans un camp qu’ils n’avaient au final pas vraiment choisi, simplement parce qu’ils s’étaient contentés de suivre l’exemple, presque irrésistible, de leur Primarque. Il réussit bien son coup, et souligne donc de manière convaincante qu’entre « gentils » et « méchants », la ligne est souvent des plus fines.

Skjalds – N. Kyme :

INTRIGUE :

Un monstre rôde dans l’arrière-pays de Fenris, attaquant des villages isolés et massacrant tous leurs habitants, depuis le huskarl sans défense jusqu’au bébé sans peur. Un jeudi normal sur un monde hostile, en quelque sorte, sauf que le monstre en question came to the wrong neighborhood, à savoir celui de Baerelt, Torvur, Ulfvye et Laggenhuf. Ces quatre hardis chasseurs ayant chacun perdu un ou plusieurs êtres chers dans l’attaque de l’innommable et innommée bestiole, ils ont fait le serment de traquer cette dernière et de mettre fin à ses déprédations. Et tant pis pour la biodiversité terrestre fenrissienne, qui se porte parfaitement bien vous pouvez me croire. L’histoire commence alors que notre petite bande est en train d’essayer d’allumer des torches pour y voir quelque chose dans la tempête de neige nocturne qui s’est abattue sur eux. Ce qui est bien le cadet de leurs soucis, car des profondeurs de la toundra jaillit bientôt un mini boss, une draugr.

Cette dernière (car le cadavre desséché et tirant la langue qui fond sur les chasseurs pour leur rouler des gamelles est indubitablement féminin) donne du fil à retordre aux humains, qui finissent toutefois par en venir à bout d’un jet de torche bien placé, mais perdent une lance dans la bataille. Ce qui est presque aussi grave que la mort d’un guerrier, si on écoute le vieux ronchon de service (mais expert en lance, sans doute parce qu’il a le bras fort), Ulfvye. Malgré l’issue heureuse de cette bataille, il ne fait pas de doute pour Baerelt que la draugr n’était qu’une vamp opportuniste, et pas la bête responsable de tous les malheurs de sa communauté. La petite troupe reprend donc sa marche sous un léger crachin (humour), et finit par bivouaquer dans une caverne miraculeusement vide de tout prédateur alpha. Le temps gagné à ne pas avoir à faire la peau à un phacochère laineux ou à un gigagolin est utilement mis à profit pour échanger quelques récits épiques au coin d’un feu de brindilles. Transformés en skjalds pour l’occasion, les compères s’écharpent sur la véridique légende du Russ, l’incarnation de l’hiver fenrissien, considéré par l’un comme un géant à lance de gel, par l’autre comme une tempête de neige douée de raison, par le troisième comme un loup géant qui accompagne les âmes dans l’autre monde, et par le dernier comme un roi. Et comme le gage de cette veillée était manifestement le premier tour de garde pour l’histoire la plus pourrie, c’est Baerelt le barbant qui s’y colle.

Le lendemain, les chasseurs se remettent en route et parviennent à un village qui a reçu la visite du monstre il y a peu de temps, comme les cadavres massacrés et à moitié boulottés des habitants en témoignent. S’étant rendus compte que quelque chose ou quelqu’un était toujours présent sur place, nos héros convergent sur la salle commune de la bourgade, qu’ils trouvent en effet occupées par un animal gigantesque, recouvert d’une fourrure hirsute, munis de crocs acérés et dégageant une odeur abominable. Vous l’avez compris, c’est Leman Russ en personne (qui se fait appeler ici Jotun, pour préserver son anonymat sans doute) qui fait son apparition dans l’histoire, et après avoir indiqué aux traqueurs tétanisés par son aura primarquielle qu’il est également sur la piste du gros gibier, accepte que ces derniers le suivent dans son pistage. Il a pour cela une méthode infaillible : suivre les loups.

Sortis du village à la suite de leur nouveau copain, Baerelt et Cie ne tardent pas à se rendre compte que si les loups peuvent être suivis, ils peuvent également suivre. Aussi, lorsqu’une meute de six herravargr (des loups géants) encercle le club des cinq au sommet d’une falaise, l’ambiance retombe un peu. Le combat qui s’en suit se termine par une nouvelle victoire de l’équipe bipède, en grande partie grâce à l’intervention efficace de Jotun, mais Ulfvye est gravement mordillé dans la bagarre, ce qui ralentit la progression de ses camarades. Comme la veille au soir, les chasseurs passent le temps en devisant au coin du feu et c’est au tour de Jojo de donner sa version du mythe de Russ, qu’il connaît sans doute mieux que la moyenne. Et en toute modestie, il choisit de raconter son histoire (sans dire qu’il s’agit de lui, évidemment), celle de l’enfant sauvage élevé par les loups et adopté par un roi de Fenris, avant que l’Empereur ne vienne plomber l’ambiance d’un petit gueuleton entre copains, on connait la suite.

Le jour suivant, la traque reprend et amène les chasseurs jusque dans une forêt, où ils croisent un Wulfen bien amoché sur le bord du sentier. Il ne fait aucun doute que le lycanthrope a combattu la bête (et a perdu), mais plutôt que de venir en aide à son fiston poilu, Jotun continue sa route en laissant le wyrd du comateux faire son office. Un peu plus loin, c’est le grand ménage parmi les suiveurs du Primarque, Ulfvye décédant d’une hémorragie interne, et Torvur et Laggenhuf ratant leur test de commandement lorsqu’ils entendent le monstre faire sa balance en préparation du combat final. Ne reste donc plus que Baerelt pour sauver l’honneur des péquenauds de Fenris, ce qu’il fait en partant à la poursuite de Jotun, qui n’a pas attendu de voir qui lui collait au train pour régler ses comptes avec le monstre de la pampa…

Début spoiler…Ou plutôt, les monstres. Car c’était un bien un couple d’ours géants avec des bois de cerf, ou beer en langage scientifique, qui était responsable de tout ce tintouin. N’étant venu qu’avec une hache même pas énergétique pour mieux se fondre dans la masse, Leman se retrouve rapidement dans le mal. Et même si l’andouille parvient à saisir un de ses adversaires par les andouillers, dans le but de lui tordre le cou jusqu’à ce que mort s’en suive, cette manœuvre n’a de chances d’aboutir que si elle n’est pas interrompue. Il faut donc que quelqu’un distraie Maman Ours jusqu’à ce que Boucles d’Or ait fini le sale boulot. Et ce quelqu’un, ça ne peut être évidemment que Baerelt. Enfin, pendant à peu près trois secondes, car notre héros est ensuite rejoint par le Wulfen croisé un peu plus tôt, assez remis de ses émotions pour demander une revanche à ses vainqueurs. Bilan de cette deuxième manche : une nouvelle victoire de la grande ourse sur Mini Loup, qui finit la baston en deux morceaux, mais de très peu. La bête fauve s’écroule en effet quelques instants plus tard, cannellisée à titre posthume par le Space Wolves déchu1. En arrière-plan, Jotun avait réussi à décoller les cervicales à l’autre affreux, ce qui met fin aux déprédations de Baloo et Baloote. Notre histoire se termine sur l’arrivée d’un Thunderhawk, venu raccompagner le patron vers le Croc où une mission importante l’attend sans aucun doute. On ne peut pas passer sa vie à se ressourcer dans la nature quand on est un Primarque, et c’est bien dommage…Fin spoiler

1 : Ce qui est finalement un destin enviable pour un membre du rout, puisque cela fait ch*er les Dark Angels.

AVIS :

Nick Kyme revient à ses anciennes et velues amours (les Salamanders étant plutôt écailleux, comme chacun sait), avec ce récit fenrissien de facture classique. Fort heureusement pour nous, l’auteur a progressé, ou s’est davantage intéressé à son sujet, depuis l’époque héroïque de ‘Thunder from Fenris’ et ce ‘Skjalds‘ s’avère être une lecture plaisante… au premier degré1. Si l’intégration de cette histoire dans l’anthologie ‘Blood of the Emperor‘ retire évidemment tout suspens sur la véritable identité de Jotun, cette absence de surprise est compensée par d’autres éléments intéressants, à commencer par une intrigue plus surprenante (là encore, dans le bon sens du terme) qu’à l’accoutumée pour une nouvelle de Kyme: le premier accrochage avec le.a draugr, dont on ne sait pas s’iel est le monstre traqué par les chasseurs constitue ainsi une sorte de prélude sympathique au reste du récit. Le choix de l’auteur de narrer son récit avec une perspective « humaine » lui permet également de glisser quelques infos sur la manière dont Russ considère l’Empereur, ses frères, sa Légion et son rôle dans l’Impérium, à la manière de confidences échangées sans arrière-pensées, pour le seul bénéfice du lecteur. Enfin, cette nouvelle n’est pas avare en fluff (pas moins de quatre légendes différentes sur le Russ, tout de même) ni en fragments de lore Space Wolves: je pense particulièrement aux considérations du Primarque sur les Wulfens, qui sont à replacer dans la saga du rout2, mais également au rôle proprement héroïque (au sens grec antique du terme) que Leman Russ choisit d’occuper dans la culture de Fenris, en tant que guerrier solitaire accomplissant des exploits pour le compte d’un peuple qui ignore sa véritable identité. Bref, une nouvelle qui vaut tout à fait le détour pour qui s’intéresse aux mythes et légendes du Vlka Fenryka, et un pas accompli par le skjald Nick Kyme sur le chemin de sa rédemption littéraire.

1‘Thunder from Fenris’ valant également le détour, mais pas d’une façon dont son auteur serait fier.
2Avant ou après la campagne de Dulan, pendant laquelle les Space Wolves apprennent que leur père savait pour les Wulfens? Si l’absence de réaction des deux Astartes qui servent de Kaptains à leur Primarque devant le cadavre de l’homme loup à la fin de l’histoire n’est pas un bête oubli de Kyme, ce serait plutôt la deuxième option qui tient la corde.

Champion of Oaths – J. French :

INTRIGUE :

Il y a des entretiens d’embauche plus facile que d’autres. Alors que la majorité d’entre nous a juste à savoir nommer trois qualités et trois défauts pour convaincre le recruteur, Sigismund des Imperial Fists va vraiment devoir donner de sa personne pour obtenir son dream job, lui. Notre homme candidate pour devenir le Maître du Temple, fonction honorifique s’il en est au sein de la VIIème Légion puisque les Templiers en question gardent le… temple du Phalanx où les Frères de Bataille jurent fidélité à l’Empereur et à Rogal Dorn. Pour obtenir ce poste convoité, l’impétrant doit vaincre en combat singulier la totalité de ses camarades, soit 199 Astartes vétérans à se farcir les uns après les autres. Même pour un guerrier de la trempe de Ziggy Jaune d’Œuf, l’épreuve est difficile, et notre héros encaisse les coups et les bosses au fur et à mesure que les duels se succèdent.

Cet affrontement au long cours est entrecoupé de flashbacks nous renseignant sur la trajectoire de Sigismund, depuis son enfance malheureuse dans les camps de réfugiés de Turquie (rebaptisée plateau ionien en M31), où il vit sa protectrice se faire tabasser à mort par une bande de wesh sanguinaires, jusqu’à son entraînement sous la conduite du maître d’armes Appius, alors qu’il n’était encore qu’un jeune et prometteur jaunard. L’occasion pour nous d’en apprendre plus sur la motivation profonde de Sigismund, qui va toujours de l’avant parce qu’il sait que les Space Marines ont le devoir de se battre à la place de ceux qui ne le peuvent pas. C’est beau, c’est noble, c’est grand, c’est corporate. Ce petit gars aurait pu faire Miss France, s’il n’avait pas choisi une autre voie.

Retour au Temple, et au boss de fin de la série infernale du Zig. Après avoir fisté sans répit et écopé de quelques bleus au passage, ne reste plus que ce bon vieil Appius en personne à maraver. Le problème, c’est que le vétéran a assez mal vieilli, et s’est fait enfermer dans un Dreadnought depuis l’époque où il refaisait le portrait de son padawan à grands coups d’espadon. Le combat n’est pas des plus équitables, mais les Imperial Fists sont du genre exigeant. Malgré un coup de moins bien passager, et un revers de bouclier énergétique en pleine face, Sigismund vient à bout de cet ultime adversaire en lui coupant le câble (ce qui est cruel quand on est confiné à un réservoir de liquide amiotique, tout de même). Félicité par Rogal Dorn en personne, qui était là incognito pour suivre l’épreuve pratique de son fiston favori, Sigismund devient officiellement le Maître des Serments, et reçoit l’épée de fonction qui va bien en reconnaissance de son nouveau statut. Un petit passage à l’infirmerie pour mettre de l’arnica (eh, c’est jaune aussi) sera sans doute nécessaire après cela…

AVIS :

John French se fait plaisir en retraçant en quelques pages bien senties la trajectoire de l’un des personnages les plus marquants des Imperial Fists pendant la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus (et même après cela), depuis ses humbles débuts jusqu’à sa prise de fonction comme Enfant de Juron. On peut y voir un avant-goût et un condensé du roman qu’il écrira un peu plus tard sur le même personnage, car tout est déjà bien en place à la conclusion de ces douze pages. L’exemple-type de la petite nouvelle à vocation fluffique, sans ambition particulière en matière d’intrigue mais très satisfaisante tout de même pour les amoureux de background, et grâce à la maîtrise consommée que l’auteur a de son sujet. Bref, un incontournable si vous êtes fan des Imperial Fists et/ou des Black Templars, ou tout simplement de l’Hérésie d’Horus en tant que telle.

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Voilà qui termine cette revue de ‘Loyal Sons, une anthologie à l’image de la plupart des recueils de nouvelles de la Black Library, c’est à dire alternant le bon et le moins bon. La balance étant en faveur du qualitatif, pour autant que je puisse le dire, je ne déconseille pas l’acquisition de cet ouvrage, mais ne vous ruez pas dessus en pensant que les personnages mythiques qui y sont décrits sont la garantie d’histoires de meilleure facture que celles que l’on peut lire habituellement dans des pages siglées BL. Ce serait aller à l’encontre d’une grosse désillusion… A la prochaine pour de nouvelles chroniques irrévérencieuses au possible!

 

SCIONS OF THE EMPEROR [HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette critique de ‘Scions of the Emperor’, recueil consacré par la Black Library aux pérégrinations des fils de Pépé. Cet ouvrage est le deuxième du genre, et fait suite à ‘Sons of the Emperor’, que la logique aurait sans doute voulu que je couvre en premier. Son tour viendra, n’en doutez pas un instant. Pour l’heure, la sortie en format numérique de cette anthologie, originellement distribuée uniquement sous format papier et dans des conventions de la Black Library, constituait une trop belle occasion de me replonger dans l’Hérésie d’Horus pour ne pas la saisir. Faisant fi du prix significatif de ce petit recueil (15€ pour 116 pages utiles, c’est un ratio famélique), j’ai donc placé ce dernier en haut de ma liste de lecture des vacances, en espérant y trouver quelques informations pas piqués des vers sur la marmaille impériale.

Scions of the Emperor (HH)

Au menu de ce ‘Scions…’, huit nouvelles signées de la main d’auteurs bien connus de l’amateur de GW-Fiction, même si certains ne pouvaient pas justifier d’une expérience conséquente en termes d’Hérésie (David Guymer, Ian St Martin), voire entraient carrément dans la carrière avec cette soumission (Darius Hinks). Comme l’a dit l’Empereur à Roboute Guilliman lors de la troisième mi-temps du Siège de Terra, mieux vaut tard que jamais1. On retrouve également des vétérans/revenants du 31ème millénaire, en la personne de David Annandale, Guy Haley, Gav Thorpe, James Swallow et Chris Wraight. Reste à découvrir ce que ces sacripants de Primarques ont fait de leur temps libre, pendant que leur Pépé avait le dos tourné…

1 : Il est probable que cette remarque soit apocryphe et mise dans la bouche de Pépé (en même temps que la canule de son intubation) par Guilliman lui-même, dont la tendance à réécrire l’histoire pour se donner le beau rôle n’est plus à démontrer.

Scions of the Emperor

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Canticle – D. Guymer :

INTRIGUE :

On a tous nos surnoms, plus ou moins glorieux, et Ferrus Manus ne fait pas exception. Bien avant d’être baptisé pognes d’acier (en latin haut gothique pour faire plus classe), notre héros a ainsi été appelé Numerodis (l’Empereur), Cataclysme (les géants des tempêtes du Pinacle de Karaashi), La Finalité (des morts-vivants quelconques), Rehew Netjer, soit le Fils de l’Homme (les Necrons), Mon très Chair (les despotes fragmentés du Subliminat), et Empafé de première (le type auquel il a piqué sa place sur le parking du Monoprix de Medusa). Pour sa part, et après avoir malencontreusement libéré Asimoth sur sa planète d’adoption peu de temps après son arrivée remarquée sur cette dernière et s’être révélé trop faiblard pour ramener la bestiole dans son enclos, le Primarque des Iron Hands s’est donné le nom et la vocation de Chasseur, ayant décidé de réparer sa bévue en traquant le wyrm d’argent à travers les paysages bucoliques de Medusa.

Ces premières années sont également l’occasion pour Ferrus Manus de faire ses premières armes, dans tous les sens du terme. On apprend ainsi qu’il a rencontré quelques difficultés sur sa route, d’ordre robotique, semi-robotique et infernal, ce qui donne une idée de la très riche « biodiversité » de la planète sur laquelle il a fait son trou. Rien de très mémorable cependant pour FM (et pour Guymer), dont l’équipement consiste en une cuirasse d’adamantium upcyclé et une bardiche bricolée à partir des dépouilles fumantes de ses malheureux adversaires biomécaniques. On apprend également que ce gentil garçon est capable de subsister sur un régime composé de sable, minéraux et métaux1, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Poursuivant sans relâche sa proie insaisissable, Ferrus finit tout de même par rencontrer des membres de son espèce, d’abord sous forme de cadavres entourant l’épave d’un camping-car Medusan. Curieux d’en apprendre plus sur ces étrangers qui lui ressemblent tant, et soucieux de récupérer un peu de matos utile dans la boîte à gants du véhicule éventré avant que tous les charognards du coin ne débarquent, le jeune Primarque se fraie un chemin jusqu’à la chambre forte du Sandcrawler, négociant au passage dix zombies cyborgs (zomborgs ?) occupés à mastiquer les cartes mères et câbles jack leur étant tombé sous la pince. Ce régime majoritairement électrovore ne les empêche cependant pas de sauter sur l’aventurier pour lui faire les poches dès qu’il s’approche un peu trop, forçant notre héros à faire montre de force autant que de ruse.

Une fois parvenu dans la salle des coffres, Ferrus a la surprise d’être mis en joue par une rescapée de l’embuscade ayant scellé le destin du véhicule et de ses occupants. Guère impressionné par la pétoire plasmique que son interlocutrice lui pointe sur le torse, le Chasseur refuse l’offre qui lui est faite par cette dernière de rejoindre son clan, arguant qu’il a encore une opération de vermifuge à accomplir, et un véritable nom à obtenir, avant de pouvoir faire son entrée dans le monde et participer au Bal des Débutant.e.s de Medusa. La suite de l’histoire de Chéri FM, si elle est connue, sera toutefois narrée dans un autre cantique que celui-ci.

1 : Avec quelques protéines et lipides occasionnelles de temps à autres, par exemple lorsqu’il croise la route d’une escouade de Dépeceurs sur leur 31. On peut donc classer Ferrus Manus dans la sous-catégorie des Primarques cannibales, avec Konrad Curze et Sanguinius.

AVIS :

On a plus l’impression d’un épisode pilote pour une série consacrée à l’enfance de Ferrus Manus que d’une nouvelle indépendante à la lecture de ce ‘Canticle’. Guymer passe en effet la majorité de ses pages à présenter de façon intrigante le jeune Primarque et sa planète, dont on aimerait bien apprendre davantage à la fin de son récit. L’intrigue semble avoir été volontairement tronquée pour permettre à l’auteur de la reprendre au cours de l’épisode suivant, qui n’a, à ma connaissance, pas été publié à ce jour. Peut-être faut-il creuser du côté de la novella1 que David Guymer a consacré à son héros pour mettre en perspective cette nouvelle ? Ou plutôt dans le ‘Voice of Mars’ du même auteur, où le Cantique des Voyages occupe une place importante ? En tous cas, si elle n’est certes pas désagréable à lire, et livre quelques éléments de fluff sur le plus moyen des fils de l’Empereur, cette histoire aurait gagné à se conclure de façon plus définitive.

1 : ‘Ferrus Manus : La Gorgone de Medusa’.

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The Verdict of the Scythe – D. Annandale :

INTRIGUE :

Nous retrouvons Mortarion, le plus sec (dans tous les sens du terme) des Primarques pendant la Grande Croisade, alors que la flotte d’expédition qu’il mène approche de la planète Absyrthus en mode bulldozer, perforant comme qui rigole – si Morty savait ce que cela veut dire – les défenses orbitales des locaux et se préparant à larguer son contingent de Death Guards sur les positions stratégiques de ce théâtre d’opération. Pour une fois, cette brutalité, pour laquelle sa Légion est fameuse, semble être justifiée. La civilisation d’Absyrthus est en effet similaire à celle de Barbarus, en cela qu’elle est gouvernée par une caste de sorciers1, ce qui a le don de mettre le Primarque psychophobe en rogne. Son plan pour remédier à ce problème fâcheux et mettre ce monde en conformité avec le cahier des charges impérial est aussi simple qu’élégant que direct : envoyer une barge Astartes s’écraser sur le QG adverse, ici la capitale planétaire, Temnis, pour décapiter (et aplatir) sa chaîne de commandement et frapper l’ennemi au cœur. Il a déjà employé cette technique, sans doute piquée aux Orks, avec un succès indéniable mais un peu trop sanglant pour ses fragiles de frères, lors de la campagne de Galaspar, achevée en un temps record par l’envoi d’un vaisseau spatial dans sa cité ruche principale. Un vieux fond de compassion qu’il ne se savait pas avoir pousse toutefois Mortarion à limiter la casse sur Absyrthus, qui ne perdra que son spatioport sous les patins blindés du Fourth Horseman, avant de demander grâce quelques minutes plus tard. Toujours d’humeur miséricurieuse (ça veut dire ce que ça veut dire), le Faucheur masqué accepte la réédition sans condition du camp d’en face au lieu d’ordonner le massacre complet des habitants de Temnis, comme ses officiers, à commencer par ce fourbe de Typhon Calas, s’y attendaient.

Il s’avère en effet que Mortarion est travaillé par une vague pulsion empathique, et s’interroge sur la possibilité, même mineure, d’apporter la paix et l’ordre à la galaxie autrement qu’en massacrant les mécontents. Absyrthus fera donc figure de test grandeur nature, et notre ombrageux et ombragé héros accepte avec stoïcisme de se plier aux formalités organisées par la reine déposée Cirkesce après la fin des combats. Typhon, entraîné par son boss dans le traquenard absolu que constitue un dîner diplomatique, questionne ouvertement le bien-fondé de la décision du Primarque, arguant que si la Légion s’appelle DEATH Guard, et pas la IDAWYBRYO2 Guard, c’est bien pour une raison. Habitué à se faire bolosser par son sous-fifre dans les écrits de James Swallow, Morty ne trouve pas grand-chose à dire pour justifier sa magnanimité soudaine, et décide d’aller prendre l’air pour rencontrer les vrais gens d’Absyrthus, et ainsi se faire une opinion définitive sur la situation. Laissant le palais derrière lui et ses Deathshrouds à longue portée (49 pas exactement), sa (future) Majesté des Mouches s’enfonce dans le dédale de la vieille ville…

Début spoiler…Et là, cela tourne rapidement au drame. Les oreilles sensibles de Mortarion finissent en effet par détecter les bruits révélateurs d’un rituel chaotique, ce qu’il a formellement interdit aux nouveaux sujets de l’Imperium. On pourrait arguer que c’est un peu chien de sa part de se formaliser de la persistance d’une pratique traditionnelle bannie il y a moins d’une journée, mais le Primarque acquiert bientôt la certitude que la vieille femme qui fait couiner son brasero au cœur de la casbah de Temnis EN A FAIT EXPRÈS POUR LE FAIRE CHIER ce qui est un crime impardonnable. Pire, sa rapide entrevue avec la mégère décomplexée, et son retour jusqu’au palais de Cirkesce, le convainquent que les Absyrthusiens sont tous des hypocrites, faisant semblant de se plier aux consignes des envoyés de l’Empereur le temps que ces derniers repartent purger les étoiles.

Devant ce constat accablant, et peut-être un peu précipité, le sort de la planète est scellé. Mortarion siffle la fin de la récré, arrachant Typhon au buffet froid que le Premier Capitaine était en train de nettoyer avec lenteur et méthode3, repart en orbite et décrète l’Exterminatus pendant que ‘Won’t Get Fooled Again’ des Who est envoyé à fond les ballons par l’auto radio du Fourth Horseman. Ce sera désormais le seul verdict que délivrera la Death Guard à ses adversaires, en faisant la Légion la plus efficace de la Grande Croisade pour un temps…Fin spoiler

1 : Autre point commun avec la planète natale de Mortarion (et le Finistère Nord) un taux d’ensoleillement inférieur à 1%.
: I Don’t Agree With You But Respect Your Opinion.
3 : On le sait peut, mais c’est de là que vient la règle spéciale de la Death Guard.

AVIS :

David Annandale montre avec ‘The Verdict of the Scythe’ qu’il a parfaitement compris les modalités de l’exercice représenté par une nouvelle Primarchs, soit un récit mettant en scène un épisode marquant de la vie de son sujet, et éclairant le lecteur sur les raisons ayant poussé ce dernier à devenir la figure qu’il est dans le fluff. En 12 pages bien pesées, Annandale répond ainsi à la question Orangina Rouge (mais pourquoi est-il si méchant) pour Mortarion, brossant le portrait d’un Primarque dont le caractère impitoyable a été, à un certain niveau, causé/renforcé par un événement particulier l’ayant détourné pour de bon de la voie du Bisounours. On peut trouver l’histoire et la justification qu’elle apporte à la rigidité morale de son protagoniste simpliste, mais force est de reconnaître à l’auteur qu’il a rempli son contrat de façon satisfaisante, même si pas extraordinaire.

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A Game of Opposites – G. Haley :

INTRIGUE :

C’est malheureusement très peu traité dans les livres d’histoire impériaux, mais la bataille de Beta Garmon, aussi connue sous le nom de casse (de Titans) du millénaire, ne s’est pas tenue du jour au lendemain. Cette rencontre décisive entre renégats et loyalistes, et les milliards de morts qui en ont découlé, n’a été rendue possible que par le dévouement et le travail de l’ombre de Légions de sous-fifres, comme l’histoire dont il est question ici s’en fait écho. Bienvenue donc à la surface d’Epsilon Garmon II, planète du cluster garmonien que les Iron Warriors souhaiteraient fortifier pour ralentir l’arrivée prochaine de Guilliman et de ses hordes de Schtroumpfs. Le conditionnel est ici de mise car les efforts de terrassement des hommes de fer se sont jusqu’ici faits contrecarrer par les manœuvres destructrices d’une petite force de White Scars. Peu familiers des techniques de hit and run de leurs cousins des steppes, les fils de Perturabo sont perturbés par cette campagne d’un genre nouveau, où ils arrivent toujours trop tard pour empêcher les Space Bikers de sévir.

Fort heureusement, le Maître de Forge Xyrokles, affublé de son larbin et souffre douleur Phideark, ainsi que d’une ribambelle de Capitaines dont je vous épargnerai les noms, a un plan machiavélique pour venir à bout du péril jaune blanc à éclair rouge. Ayant récupéré dans un campement abandonné par ses ennemis quelques bouquins philosophiques signés de la main même de Jaghatai Khan et remplis d’aphorismes aussi profonds que « La taupe ne voit pas le vol de l’éléphant », « Pourquoi rester debout quand on peut s’asseoir » ou « Plus il y a de fous, moins il y a de riz », Xyrokles a tellement bûché sa philo1 qu’il est certain de pouvoir prendre les White Scars à leur propre piège, en réalisant un coup de billard à IV bandes à base de feintes, de retraites et d’embuscades tellement complexes que la majorité de ses sbires n’y blaire que dalle. Lorsque vient enfin le jour le plus long, le Khan Ishigu emmène ses motards énergétiques faire une petite virée dans un avant poste renégat, sans se doute un instant que ses minutes sont comptées.

Et en effet, le plan de Xyrokles se déroule comme sur des roulettes, la colonne blindée qu’il a envoyé leurrer les loyalistes au moment où ils commencent à se replier en bon ordre se révélant être un extra trop tentant pour qu’Ishigu et Cie résistent à la tentation d’y planter leurs pneus. Ce détour est toutefois lourd de conséquences pour les White Scars, qui se font surprendre par une contre-attaque vigoureuse de la part des Iron Warriors, et canalisés dans un goulet étroit débouchant sur la ligne de blindés du Maître de Forge, qui n’a plus qu’à donner l’ordre d’ouvrir le feu pour régler une fois pour toutes leur compte aux scarifiés d’en face…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur la légendaire flexibilité tactique des fils du Khan, qui avaient tout planifié depuis le début et cachés également une réserve mobile pour surprendre l’adversaire. Confrontés à une force anti-chars conséquente et bénéficiant de l’effet de surprise, Xyrokles et ses hommes ne font pas long feu (c’est la vieille histoire de l’artilleur artillé). L’honneur est toutefois sauf pour ce dernier, puisqu’il s’aperçoit après avoir été fait prisonnier que c’était Jaghatai Khan en personne qui était aux commandes dans le camp d’en face. S’en suit un échange d’amabilités qui nous permet d’apprendre que le Khan se tamponne le samovar avec la vérité impériale, qu’il considère poliment comme un avis parmi d’autres. Stupeur chez Xyrokles, qui en surhomme de principe, pensait que tous les loyalistes adhéraient scrupuleusement au dogme de Pépé. Il emportera toutefois ce secret dans la tombe, que son généreux vainqueur lui accorde en récompense de ses méritants efforts de réflexion, Jaggie Chan lui dévissant les cervicales d’un tour de main à la fin de leur échange. C’est qu’il a du pain sur la planche, et un retour sur Terra à préparer…Fin spoiler

1 : Ce qui est somme toute logique pour un grec ancien.

AVIS :

Je suis partagé sur la valeur de ce ‘A Game of Opposites’, qui comporte des éléments positifs comme négatifs. Pour commencer par ce qui ne fâche pas, j’ai apprécié le choix de Haley de donner une dimension, si ce n’est comique, au moins caustique, à ses Iron Warriors, qui font ainsi mentir leur réputation de guerriers prenant tout au premier degré. La dynamique entre Xyrokles et Phideark est particulièrement savoureuse, le second encaissant sans broncher toutes les punchlines que son supérieur lui balance à la tête. Dommage que le destin tragique du Coluche d’Olympia nous prive d’autres saillies drolatiques de sa part pour la suite de l’Hérésie. Cette nouvelle est également intéressante d’un point de vue fluffique, car elle donne à voir un Jaghatai Khan d’un pragmatisme assumé et presque hérétique, ayant pris parti pour son Père mais loin de se ranger à toutes ses vues, y compris sur des sujets aussi sensibles que la religion (il croit en la réincarnation). D’un autre côté, ‘A Game of Opposites’ pêche franchement pas son manque de suspens et son déroulement sans surprise. Car le résumé ci-dessus ne suit pas exactement le récit de Haley, qui choisit de révéler la présence du Khan au côté d’Ishigu dès le premier tiers de la nouvelle, ce qui condamne d’office le stratagème de Xyrokles à l’échec1. Le retournement de situation final et la victoire des White Scars sont donc aussi attendus que l’heure de la pause syndicale dans un guichet de poste, ce qui peut blaser le lecteur (en tout cas, ça a été mon cas). En conclusion, pas le meilleur texte de Guy Haley, mais pas désagréable ou inutile pour autant.

1 : Il n’y a que John French qui fait battre un Primarque par un Space Marine (‘The Crimson Fist’).

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Better Angels – I. St Martin :

INTRIGUE :

Les Légions Space Marines sont un peu comme les filières post bac : il y en a pour tous les goûts et tous les niveaux. Si les impétrants ayant de la suite dans les idées et la volonté de faire carrière se rabattront sur des spécialisations ternes mais assurant la sécurité de l’emploi (BTS Gestion avec les Ultramarines, Bac Pro travaux publics avec les Imperial Fists ou les Iron Warriors, CAP Esthétique avec les Emperor’s Children…), les plus aventureux tenteront leur chance dans des cursus plus pointus, à leurs risques et périls. C’est ainsi que l’Empereur se retrouva avec des cohortes de philosophes désagrégés (Thousand Sons), théologiens en déshérence (Word Bearers), et vétérinaires ayant raté leur concours d’entrée (Space Wolves), qu’il dût bien recaser à droite et à gauche pour éviter la crise. Enfin, pour un temps. Mais, parmi tout l’Astartes, aucune Légion n’égale les Blood Angels en termes de réputation. Si on appelle les fils de Sanguinius (derrière ses ailes) des poètes, des peintres ou des danseuses, c’est pour une bonne raison : le Primarque exige que tout le monde pratique une discipline artistique, depuis le plus humble novice jusqu’au plus ancien des Dreadnoughts1. Notre héros, que nous allons suivre depuis le début de sa carrière jusqu’à l’arrivée de la flotte de la IXème en orbite de Terra, peu de temps avant le début du siège, ne fait pas exception. Jehoel (il faut croire que Joël était déjà pris) s’est ainsi spécialisé dans la verrerie, ce qui lui a attiré l’intérêt et le mentorat de son père génétique, souvent présent lorsque le souffleur fait parler la poudre le sable.

Ces rencontres ponctuelles mais fréquentes, si elles permettent aux deux surhommes de discuter technique et philosophie, amènent surtout le lecteur à suivre en filigrane la fin de la Grande Croisade et l’Hérésie d’Horus du point de vue d’un Primarque et d’une Légion particulièrement éprouvés par la traîtrise du Maître de Guerre, et le déclenchement de la baalédiction des fils de Malle, ou l’inverse. Finies donc les évocations de la prochaine reconversion des légionnaires en portraitistes et potiers une fois la galaxie conquise, et bonjour les sculptures de démons réalisées dans un état second, au grand déplaisir de Sanguinius – qui passe la nouvelle à critiquer Jehoel, ceci dit. Adieu aux riches galeries du Red Tear, et bonjour à la décoration minimaliste du Convenant of Blood, véhicule de courtoisie prêté par l’Imperium après le carambolage de Signus Prime. Lorsque St Martin décide enfin de mettre un point final à sa nouvelle, on apprend tout de même que si Sanguinius s’est montré aussi assidu dans ses discussions avec Jehoel au cours des décennies passées, c’est parce qu’il considérait que ce dernier était l’un des Blood Angels les plus bloodangeliques de la Légion, et pouvait ainsi se contempler à sa guise dans son interlocuteur. Un peu égocentrique le garçon, tout de même. Le rideau tombe sur la scène après que Jehoel ait montré à son pôpa la représentation idéalisée de Terra qu’il a réalisée avec de la pâte de verre, ce qui lui vaut les félicitations (enfin !) du jury, et que l’Ange ait balancé la remarque à connotation fataliste de rigueur, davantage pour le bénéfice du lecteur que pour celui de son fiston. Si jeunesse savait…

1 : À l’exception notable de la danse classique, après que le Vénérable Neolardon ait failli écraser Sanguinius en passant à travers le plancher du gymnase à la suite d’un saut carpé mal négocié.

AVIS :

Je placerais ce ‘Better Angels’ dans le prolongement de ‘Death of a Siversmith’/’Mort d’un Orfèvre’ (Graham McNeill), et pas seulement parce qu’il met en scène un protagoniste très porté sur les arts plastiques. On retrouve en effet, et surtout, dans cette nouvelle la volonté assumée de l’auteur de surprendre son public en livrant une histoire s’écartant largement du bolter porn qui est la norme de l’Hérésie d’Horus. Et, là encore, le résultat penche davantage vers l’exercice de style un brin forcé que vers la réussite incontestable. Ou peut-être n’ai-je pas lu assez sur Sanguinius et les Blood Angels pour tirer la substantifique mehoelle de ce texte ? C’est bien possible. Toujours est il que je sors du studio du Primarque à plumes un peu circonspect sur la valeur de cette soumission, qui aurait pu, pour reprendre son titre, être bien meilleure.

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The Conqueror’s Truth – G. Thorpe :

INTRIGUE :

La chance d’une vie. C’est ainsi que la Commémoratrice Ennylin Ares, rattachée à l’équivalent d’un car de manœuvres moldaves en matière de flotte d’expédition de la Grande Croisade, accueille la nouvelle d’une rencontre fortuite avec une escadre de vaisseaux de l’Astartes dans le système de Vestogorn. Et tant pis s’il s’agit des Night Lords, dont la réputation de brutalité et de sadisme commence à transpirer largement d’un bout à l’autre de l’Imperium. C’est en effet l’occasion pour notre héroïne, qui a jusque-là usé ses pellicules à immortaliser des inaugurations de barres de HLM pour déportés colons sur une douzaine de mondes conquis depuis belle lurette, de se confronter à la réalité de l’expansion humaine dans la galaxie, et de saisir sur le vif les glorieux Space Marines alors qu’ils apportent l’unité impériale à une planète un peu récalcitrante. Après tout, c’est pour son bien.

Sa requête d’un rattachement aux opérations des Night Lords ayant été rapidement acceptée, Ares bénéficie d’un traitement VIP, accordé à la demande expresse de Konrad Curze, qui dirige la mise en conformité de Vestogorn d’une main de fer et d’un air satisfait. C’est tout lui ça. Après une rencontre convenablement inquiétante et crépusculaire sur le Nightfall avec le Primarque en personne pour un entretien de motivation rapidement expédié, Konnie charge son surhomme à tout faire, le sarcastique Premier Capitaine Sevatar, de chaperonner la Commémoratrice sur le terrain. N’ayant que peu de temps à consacrer à une touriste à appareil photo, l’officier se contente de la déposer à bonne distance de la ligne de front, en lui intimant de ne pas se rapprocher de cette dernière, sous peine de rencontrer les mêmes problèmes que les Commémorateurs précédemment rattachés à la VIIIème Légion, dont les effectifs ont fondu comme neige au soleil après une série d’accidents fâcheux et de démissions subites. C’est que tout le monde ne supporte pas bien la manière très personnelle dont les Night Lords s’acquittent de leur mission de reconquête du Lebensraum impérial. Il y a des Croisés qu’il ne vaut mieux pas croiser dans une allée sombre…

Bien évidemment, dans la plus pure tradition des civils indisciplinés fourrés dans les pattes énergétiques des Space Marines, Ares décide de ne pas suivre le sage conseil de Sevatar, et bien évidemment, elle se met rapidement dans de beaux draps. Sa décision de grimper en haut d’un immeuble en ruines pour bénéficier d’une vision d’ensemble sur la cité « pacifiée » par les Night Lords se révèle être une mauvaise idée lorsqu’une petite bande de combattants locaux la repère et converge sur sa position, et sans doute pas pour lui demander de prendre une photo de groupe. Tout cela aurait pu très mal se finir pour notre héroïne sans l’intervention parfaitement ponctuelle des Night Lords, qui font leur fête aux insurgés, récupèrent la Commémoratrice égarée, et l’emmènent à quelques blocs de là rencontrer à nouveau Curze, qui a besoin de ses talents de communicante pour faire passer un message…

Début spoiler…Ce message, qu’il destine et dédicace à tous les pontes de Terra qui décident du devenir de la Grande Croisade sans y avoir jamais participé, et aussi cash que trash. Le rêve de l’Empereur est, dans bien des cas, un véritable cauchemar pour les populations des planètes qui résistent à l’assimilation, comme l’illustre bien le destin des Vestogorniens, victimes d’un grand remplacement littéral et expéditif pour faire la place aux colons impériaux. Faits prisonniers par les Night Lords, ils sont en effet précipités dans les puits géo-thermaux dont la cité tire son énergie, ce qui règle d’un seul coup les problèmes d’insécurité et de surpopulation auxquels Curze est confronté, en plus de se révéler économe en munitions. C’est Gégé de la compta’ qui va être content. Evidemment, Ares est scandalisée par ce crime de guerre puissance 30.000 auquel elle est forcée d’assister, mais est prise au dépourvu par le désir sincère du Primarque que cette vérité peu glamour soit partagée avec le reste de l’Imperium, et par la révélation (peut-être mensongère) que l’Empereur est déjà au courant de l’approche radicale de son fils indigne, et n’a rien trouvé à y redire… pour le moment. Curze insiste même pour récupérer les images et vidéos prises par Ares afin que les Community Managers de sa Légion puissent monter un petit clip d’avertissement sans frais pour les prochaines planètes que les Night Lords seront chargés d’ambiancer. Bref, tout le monde y gagne, et tout va (déjà) pour le mieux dans le meilleur des univers…Fin spoiler

AVIS :

Gav Thorpe fait le job avec cette chtite nouvelle, qui donne à voir les méthodes et philosophies d’un Konrad Curze encore loyal mais déjà fortement désabusé et totalement marginal, au plus fort de la Grande Croisade. Rien de tout cela n’est très nouveau, à part peut-être le fait que l’Empereur ait soi-disant choisi de fermer les yeux sur les méthodes incisives de l’ex futur Night Haunter, mais le propos est bien servi et mis en scène, et Thorpe ne se gêne pas pour souligner la logique dans la folie du Primarque justicier, qui fera finalement école dans les millénaires qui suivront. Quel visionnaire alors, ce Konrad. On a également plaisir à retrouver Sevatar, pas encore blanchi sous le harnais ni rougi sur le gantelet, et le voir faire du Sevatar (ADB style), c’est-à-dire balancer des remarques acerbes avec l’aplomb d’un Gaspard Proust sous progénoïdes. C’est du fan service certes, mais c’est pas mal fait et on aurait donc tort de s’en priver. Au final, ‘The Conqueror’s Truth’ est une version revue, corrigée et améliorée de ‘The Dark King’/’Le Roi Sombre’ (Graham McNeill), qui se donne l’espace et les moyens de délivrer son message de façon efficace.

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The Sinew of War – D. Hinks :

INTRIGUE :

Sur Macragge comme sur Terra, bien des millénaires plus tôt, la vile populace s’est soulevée contre ses justes et bienveillants maîtres, provoquant émeutes, massacres, feux de poubelle et occupations de ronds-points, tous crimes abominables mais heureusement sévèrement punis par les forces de l’ordre. Et en termes de répression policière, la capitale des 500 mondes a un avantage de taille et de poids par rapport à notre bonne vieille planète : Roboute Guilliman, génie précoce et baraqué, général visionnaire, humaniste convaincu, et fils adoptif du Consul Konor Guilliman, qui forme avec son collègue Gallan le duumvirat exécutif de l’espèce de république (il y a un sénat aussi) établie sur Macragge City. Occupé en Illyrium à pacifier une bande d’autochtones ayant eu la mauvaise idée de se rebeller contre l’ordre établi, notre héros a raté le début du soulèvement urbain qui a transformé la cité idéale de son enfance en champ de bataille. L’idéaliste, et un brin méprisant, surhomme a bien du mal à comprendre pourquoi diable une partie de l’armée s’est rangée du côté des casseurs, tout ça pour une bête histoire d’argent. C’est bien une réflexion de gosse de riches ça, Roro. Mais il lui faut attendre avant de consigner par écrit ses savantes réflexions sur les causes et les répercussions de ce mouvement social aussi inédit que violent : son père est resté dans la cité et a sans doute été pris pour cible par les fainéants et les sans dents. Il faut lui venir en aide.

Progressant rapidement vers le palais du Consul en distribuant quelques baffes aux mutins au passage, et utilisant son armure de scenarium pour passer entre les balles1, Gui est rejoint en chemin par Gallan, qui est venu lui aussi s’enquérir de la situation de son collègue de bureau. N’hésitant pas à joindre le geste à la parole, le Consul consort est même blessé dans la bagarre, écopant d’une estafilade au biceps pour preuve de son dévouement. Las, les deux compères arrivent trop tard pour sauver Konor (ce qui est triste) et les tapisseries (ce qui est pire). Papa Guilliman a été lâchement égorgé par ses assaillants, l’empêchant de dire adieu à son fils mais surtout de donner le nom des coupables. Bizarrement, il refuse catégoriquement que Roboute s’approche de lui dans ses derniers instants, allant jusqu’à le mettre en joue avec son pistolet pour le maintenir à distance. Le respect des gestes barrières jusqu’à la dernière seconde, on reconnaît bien là la trempe d’un vrai Macraggien. Konor a toutefois un message à faire passer à son fiston avant de mourir pour la patrie : une pièce frappée à l’effigie des deux Consuls de Macragge, et symbolisant le caractère éternel de la république, même en ces heures difficiles. Ou du moins, c’est ce que le cerveau embrouillé de Roboute en déduit, se souvenant d’une leçon de vie mémorable inculquée par son père avec un sesterce du même genre bien des années plus tôt. Sur ces considérations philsophico-fiduciaires, Konor passe de vie à trépas, provoquant une colère noire bleue chez son fils.

Convaincu par Gallan d’aller défendre le Sénat, probablement attaqué lui aussi par les vandales en sandales, Roboute sèche ses larmes et lèche ses armes, avant de se frayer un chemin jusqu’au parlement local en commettant quelques crimes de guerres au passage. On va dire qu’il bénéficiait de circonstances atténuantes. Pendant que Gallan tente d’aller raisonner les sénateurs, qui débattent férocement entre eux du meilleur moyen de châtier les gueux, Guilliman est envoyé se changer au vestiaire, son apparence dépenaillée risquant fort de provoquer des remous contre productifs dans les rangs de l’auguste assemblée. Cet enfilage de toge manque toutefois de tourner court pour le Primarque, qui se fait soudainement attaquer par le préposé aux cabines d’essayage, armé d’un poignard empoisonné. Le nez très fin de Guilliman lui permet de comprendre en un éclair que la même toxine a été utilisée sur Konor, et que c’est pour protéger son fils d’une intoxication involontaire que le Consul mourant l’a empêché d’approcher. Passé l’effet de surprise, l’assassin en puissance ne fait pas longtemps le malin face aux réflexes de mangouste et à la poigne de langouste de notre héros, qui ne parvient cependant pas à lui faire cracher autre chose que des bulles de bave (le bougre retourne son surn contre lui), à commencer par le nom de son commanditaire. Encore un crime crapuleux, c’est dingue ça. Il faudrait vraiment que les pauvres songent à être moins pauvres, ça réglerait beaucoup de problèmes d’un coup. Cette péripétie évacuée, il est temps pour Roboute de rejoindre Gallan sur l’estrade, afin de soutenir le coup d’état salutaire que ce dernier veut initier pour sauver la république…

Début spoiler…Mais, ô surprise, Rob’ est accueilli par un discours très critique de ce galopin de Gallan à l’encontre de son père, taxé de populiste et de socialiste par son homologue, et à l’annonce de son propre assassinat, pour le bien de Macragge. Evidemment, le « hum hum » que jette Guilliman juste après ruine un peu le groove de celui qui aurait bien aimé être empereur, qui se prend les pieds dans le tapis à tenter de justifier son double langage. Pas plus bêtes que la moyenne, les sénateurs comprennent vite que Gallan est le méchant de l’histoire, et qu’il a manigancé ce soulèvement populaire pour se débarrasser de ses rivaux et saisir le pouvoir. Roboute était parvenu à la même conclusion quelques instants auparavant en réalisant que la pièce que lui avait donné son père désignait en fait son meurtrier, puisqu’elle avait le profil de Gallan frappé sur ses deux faces2. Plus démasqué que Donald Trump au milieu d’une épidémie de COVID-19, le félon se fait appréhender par le service de sécurité, après que le noble Guilliman, ayant réalisé que tuer le traître de ses propres mains aurait été certes cathartique, mais contre-productif et contre ses valeurs, ait indiqué qu’il laisserait la justice suivre son cours. Devant tant de légalisme, les sénateurs ne peuvent que jurer allégeance au Primarque, exemple vivant d’une intégration réussie par un immigré méritant. L’histoire est en route pour Roboute…Fin spoiler

1 : Le pouvoir psychique caché de Guilliman est de faire voir flou à ses ennemis. C’est subtil mais très efficace. Ça marche malheureusement moins bien au corps à corps, comme Angron et Fulgrim le constateront.
2 : On pourrait dire qu’il aurait été plus efficace à Konor de simplement pointer du doigt Gallan au moment où lui et Roboute sont arrivés dans la pièce, mais l’histoire se serait terminée un peu brutalement.

AVIS :

Darius Hinks livre la version romancée de l’épisode le plus connu de la jeunesse de Roboute Guilliman (que David Annandale avait mystérieusement choisi d’ignorer dans la novella consacrée au Primarque), et le fait plutôt bien. Certes, si vous connaissez votre fluff, le suspense que l’auteur se donne du mal à entretenir jusqu’au bout de son récit tombe rapidement à l’eau, mais on ne peut pas reprocher à Hinks d’avoir voulu soigner sa sortie, et la relation de confiance qui existait auparavant entre les Guilliman et Gallan est un choix intéressant de sa part, qui peut en partie expliquer pourquoi le futur patron des Ultramarines a tendance à vouloir faire les choses tout seul de son côté. On glane également quelques informations sur la société de Macragge avant son intégration dans l’Imperium, ce qui est de l’ordre du notable. Il y avait sans doute moyen de capitaliser davantage sur cet événement fondateur pour expliquer la suite de l’histoire de Guilliman, voire l’Hérésie, voire le Sombre Imperium, ou, plus simplement, insérer quelques easter eggs saveur ultramarine (notons tout de même la mention faite à Tarasha Euten, Chambellan du Primarque et héroïne de l’audio book ‘Illyrium’ du même auteur) , mais pour une nouvelle de 16 pages, Hinks s’en sort très honorablement, autant sur le plan théorique que pratique.

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The Chamber at the End of Memory – J. Swallow :

INTRIGUE :

Comme tous les créatifs peuvent vous le dire, ce sont les derniers moments avant le rendu final qui sont les plus stressants. Et bien que Rogal Dorn ne mérite pas franchement ce qualificatif, il partage néanmoins ce souci du détail et cette tendance au micro-management qui distingue les génies et les pervers narcissiques du reste de la population. Ayant pris son hoverboard gravitationnel et son mécapigeon holographique1 pour inspecter l’avancée des travaux, l’Homme de Pierre corrige et réajuste les milliers de petites variables qu’il est le seul à voir mais dont la victoire dépendra peut-être. Après tout, si Horus tombe des fortifications après avoir glissé sur un gravillon énergétique, la guerre sera tout de même gagnée. Alors qu’il s’approche de l’Investiary, l’amphithéâtre anciennement décoré de 20 statues monumentales de la fratrie impériale, et dont deux des plinthes sont maintenant vides, une explosion attire son attention. Il semblerait que l’une des tours de stockage de la zone ait contenu du nitrate d’ammonium, et pas les précieuses antiquités collectionnées par Malcador le Sigilite, qui avait demandé au Prétorien de Terra de ne pas raser le quartier pour en faire des gravillons (énergétiques), comme il en a la sale habitude. N’écoutant que son statut de protagoniste de nouvelle, Rogal se hâte sur les lieux pour mener sa petite enquête.

Sur place, il constate qu’un début d’incendie a ravagé la façade, et que l’équipe en charge de l’audit/expropriation/démolition a connu une fin horrible et peu commune, les cadavres jonchant l’intérieur du bâtiment semblant avoir été causé par des ondes de choc, des explosions internes ou vaporisations pures et simples de l’individu, ce qui n’est certes pas banal. Pas banale non plus est la sensation persistante et croissante qu’éprouve le Primarque qu’il doit faire demi-tour au fur et à mesure qu’il progresse vers l’épicentre de la catastrophe. Ce mauvais pressentiment n’est pas suffisant pour arrêter la marche (du fils) de l’Empereur, mais les apparitions psioniques (des démons libres de droit, pour faire simple) qui l’attaquent dès qu’il pose le pied dans l’antichambre finale le convainquent de consulter un spécialiste, une fois les fâcheux renvoyés dans le Warp. Et justement, il a une soute pleine d’Archivistes sous scellés en orbite, qui n’attendent que son bon vouloir ou l’arrivée d’Horus pour se rendre utiles2.

Le destin ayant désigné le frère Yored Massak pour prêter main, ou plutôt tête, forte à son Primarque, nous suivons les deux guerriers revenir jusque dans la salle piégée, où les horreurs éthérées re-spawnent avec diligence, pour se faire à nouveau bannir en deux temps trois mouvements par nos héros. Si ces derniers étaient prêts à combattre des ennemis de cette trempe, qui ont fait leur fête aux malheureux larbins ayant eu la mauvaise idée de vouloir faire leur boulot, ils se figent sur place en remarquant les symboles qui marquent les deux gigantesques portes qui terminent le corridor : II et XI

Il s’agit bien entendu d’une référence aux deux Primarques disparus, frappés d’anathème par l’Empereur en personne, mais dont l’éphémère existence reste de notoriété publique au sein des Légions de l’Astartes. Pendant que Dorn se creuse les méninges pour percer ce mystère insondable, Massak parvient finalement à mettre le doigt, ou plutôt la tête, sur le sentiment de déjà perçu qui l’habitait depuis son entrée dans la tour. L’installation psychique de cette dernière a été effectuée par Malcador en personne, l’Archiviste repentant en est certain. Et l’intéressé confirme aussitôt sa déclaration, en arrivant sans crier gare dans la pièce. Ayant envoyé Massak poser des parpaings à l’extérieur pour avoir un peu d’intimité, le Régent de Terra a enfin la possibilité de s’expliquer auprès d’un Rogal Dorn qui sent de manière confuse qu’il s’est fait mindfucker par l’éminence grise dans un passé plus ou moins lointain. Il ne s’explique en effet pas son absence totale de souvenirs de Deuzio et Onzio, alors qu’il dispose d’une mémoire eidétique tout ce qu’il y a de plus primarquielle. Et Malcador d’avouer que c’est bien lui qui est responsable de ce trou de mémoire généralisé, touchant à la fois les Astartes des Légions décapitées (avant qu’ils puissent être réformés et repackagés), mais également les Primarques ayant connu personnellement les fils indignes de Pépé. Mais attention, il avait une bonne raison de le faire, se dépêche-t-il d’ajouter avant de finir tronçonné par l’Homme de Pierre : c’est Dorn et ses frères eux-mêmes qui lui avaient demandé un brainwash pour permettre à l’Imperium de se relever d’une tragédie si terrible qu’elle avait manqué de le mettre à genoux. L’Empereur, comme à son habitude, avait tout vu/su mais n’avait rien dit/fait. Classic MoM move here.

À moitié convaincu par l’explication du Sigilite, qu’il ne peut plus blairer depuis le début de la fortification de Terra, Dorn fronce les sourcils tellement fort que son interlocuteur décide de lui accorder un droit de flashback limité et provisoire sur son passé oublié, afin qu’il puisse se rendre compte par lui-même de la bonne foi du Régent. EVIDEMMENT, le lecteur ne sera pas convié à cette introspection douloureuse, dont les effets se dissipent rapidement mais qui convainc Dorn de la véracité des dires de Malcador, et surtout de la nécessité que ce passé, semble-t-il absolument honteux, de la Grande Croisade ne refasse jamais surface. Lorsqu’il ressort de la tour, il ordonne donc aux équipes venues en renforts de la détruire (plus de gravillons !). De toute façon, Massak avait achevé une copie conforme du bâtiment avant que le sort ne soit rompu par un claquement de doigts de Rogal Dorn, ce n’est donc pas une grande perte d’un point de vue stratégique.

1 : Surtout pour se délecter de le voir ch*er sur les hélotes en contrebas, je pense. Il faut bien trouver un moyen d’évacuer le stress quand on ne boit/fume/joue/prie/couche/rigole pas.
2 : Enfin, plus utiles qu’ils ne le sont à l’heure actuelle, le tricotage d’écharpes pour les soldats impériaux de faction sur les murailles du Palais n’exploitant pas tout le potentiel des Anges de la Mort susnommés.

AVIS :

James Swallow touche à l’un des mystères fluffiques les plus importants du background de l’Hérésie d’Horus dans ce ‘The Chamber…’ et parvient à nous vendre une once de révélations sur la destinée des Primarques disparus comme s’il s’agissait d’une avancée majeure du lore. C’est en tout cas le sentiment qui dominait chez votre serviteur à la fin de la lecture de cette nouvelle, qui contient trop de micro-informations et de sous-entendus sur lesquels gloser à l’infini pour ne pas mériter sa place dans la liste de lecture de tout fanboy/girl revendiqué.e. Mais on n’est certes pas au niveau d’un ‘Legion’ ou d’un ‘Saturnine’ en termes de coup de théâtre, ce qui est somme toute logique pour une histoire au tirage assez confidentiel telle que ‘The Chamber…’. Notons au passage la présence que quelques bouts de fluff « autres » au fil des pages, qu’il s’agisse du Palais Impérial ou de l’armement de Rogal Dorn, ainsi que le retour d’un second couteau souvent employé par Swallow en la personne de Yored Massak (‘La Fuite de l’Eisenstein’, ‘Garro’), et restons-en là.

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First Legion – C. Wraight :

INTRIGUE :

Spécialistes reconnus des campagnes pourries, les Dark Angels ont bien du mal à exterminer les Rangdan, espèce de Xenos experte en subterfuges et en tentacules, ce qui n’est guère du goût des roides et psychofrigides paladins de la Première Légion. Malgré tout, un ordre est un ordre, et les Astartes poursuivent leurs vaillants et violents efforts pour sécuriser ce petit bout de l’empire de leur Pépé, menés par nul autre que Lion El’Jonson en personne. Nous faisons tout d’abord la connaissance du Capitaine Arnaid, 45ème Compagnie, 8ème Ordre, 1ère Légion, dont la frégate a connu des jours meilleurs, mais qui n’hésite pas le moins du monde à intercepter le mystérieux vaisseau qui fait irruption dans la zone de « pacification » avec son Nightsward, bien que le nouveau-venu soit plus imposant et en meilleure forme. Alors que le Capitaine est sur le point d’ordonner un tir de semonce, ses salutations répétées n’ayant pas été retournées par les touristes en goguette, ceux-ci daignent enfin répondre, par la voix d’un autre officier Space Marine, un Capitaine de la nouvellement formée XXème Légion répondant au nom de…

Début spoiler..Jules-Edouard Petitbedon.

Bon ok : il s’appelle Alpharius. Incroyable, je sais.Fin spoiler

Alpharius s’excuse de ses manières cavalières et de son manque de décorum (son vaisseau, Perseus, a l’air d’avoir quitté les docks spatiaux avant que le Mechanicum n’y passe un coup de peinture), mais annonce qu’il est venu porteur de nouvelles pour Lion El’Jonson.

Pendant ce temps là, nous nous introduisons dans une réminiscence de Lionel en personne, du temps où il était un enfant sauvage qui courait cul nu dans les forêts de Caliban. Notre petit bonhomme semble être occupé à traquer une bête particulièrement bestiale, seulement armé d’une défense de phacochère nain et de sa volonté implacable. Wraight nous fait bien comprendre que c’est la destinée même d’El’Jonson qui est à l’œuvre ici, et entraîne le jeune Primarque au clash contre un monstre que la partie raisonnable/froussarde de Lionel aimerait éviter si possible. Pause pub.

Retour sur le Nightsward, où Alpharius est reçu par son homologue. Constatant qu’il ne sert à rien de féliciter ce dernier sur son goût (pratiquement inexistant) en matière de décoration d’intérieur, ni de tenter de piquer la curiosité (totalement inexistante) de l’austère Terran, l’Alpha Légionnaire qui s’ignore1 tente de soutirer quelques infos psychologiques et tactiques à Arnaid en jouant la carte de la franche admiration pour les exploits et la réputation de la Première Légion, avec un succès relatif. Ces oiseuses discussions sont toutefois interrompues par la réception d’un message autorisant Alpharius à voyager jusqu’à l’Invicible Reason pour y rencontrer Lion El’Jonson, avec Arnaid lui servant de Kaptain pour l’occasion. Simple déformation professionnelle, en somme.

Suite et fin du documentaire animalier commencé un peu plus haut avec la confrontation entre Lionel et sa Némésis, qui se trouve être un chevalier en armure. Car en fait, le zouave qui courrait dans la savane avec son coutelas d’ivoire n’était pas le Primarque, mais une sorte de démon ayant pris forme humaine, et décidé de mettre fin à l’écocide décrété par le chef de l’Ordre. Malheureusement pour notre ami, ce dernier se révèle être un adversaire trop coriace pour ses maigres ressources, et il finit promptement embroché par la rapière du palouf. Voilà qui lui apprendra à ne pas usurper, même littéralement, l’identité d’autrui. Avant de repartir dans le Warp, le Rahan de Caliban a le temps de traiter son assassin de « Premier Fils » et de l’accuser d’être « la mort de son monde », ce à quoi Lionel répond que son titre correct est le tueur de bêtes. Fin de l’épisode.

Sur l’Invicible Reason, le Dark Archangel reçoit comme convenu Arnaid et Alpharius, qui est en fait venu lui proposer un coup de main, en toute amitié2, pour en finir avec la campagne d’extermination des Rangdan. Les pertes terribles souffertes par la Première Légion menacent en effet son statut et son prestige par rapport à ses sœurs, et pourraient faire échapper à El’Jonson le titre de Maître de Guerre, que ce visionnaire d’Alpharius anticipe déjà qu’il sera décerné par l’Empereur à l’un de ses fils dans un futur pas trop lointain (dès que les 20 Primarques auront été retrouvés en fait…wait a minut-). Bien que ne contestant pas l’argumentaire de son petit neveu/frère, Lionel se montre méfiant devant l’intérêt qu’il semble attacher à la prédominance des Dark Angels dans l’équilibre politique de l’Imperium, et après avoir menacé de le couper en deux, en toute amitié, pour le forcer à exposer ses véritables motifs (Alpharius n’aime vraiment pas Guilliman), il le renvoie sur son vaisseau où il lui fera savoir sa réponse sous une heure. Resté seul avec Arnaid, El’Jonson consulte son Capitaine pour avis secondaire, avant de lui révéler que l’énorme poids de… sa parole donnée l’empêche et l’empêchera toujours de placer son intérêt personnel avant celui de son seigneur. C’est sur cette déclaration de loyauté véritablement désintéressée que se termine notre histoire, qui démontre à quel point Lion El’Jonson est un végétal politique. Un concombre, pour être précis.

1 : Il insiste pour être désigné comme être membre de la XXème Légion, sans autre précision. Quel coup de chance tout de même qu’il ait le même nom que le Primarque pas encore découvert de cette dernière
2 : Et surtout parce qu’il ne peut pas blairer Guilliman, ce qui lui fait un point commun avec Lionel.

AVIS :

On retrouve dans ‘The First Legion’ le goût de Chris Wraight pour des petits exposés au débotté sur la géopolitique impériale au moment de la Grande Croisade (tendance déjà aperçue dans ‘Leman Russ : Le Loup Suprême’), et c’est tant mieux si vous voulez mon avis. S’il ne se passe pas grand-chose dans cette nouvelle, on n’en ressort pas pour autant frustré de sa lecture, l’échange entre Alpharius et Lion El’Jonson, qui permet d’identifier les points communs et les différences entre le premier et le dernier de cordée et leurs Légions respectives, ainsi que d’en apprendre un peu plus sur la manière dont les Legiones Astartes étaient perçues par Terra au moment où Pépé songeait à partir en pré-retraite dans le Bhoutan profond, valant son pesant de papier. Lionel y apparaît comme le type imbuvable socialement (il le reconnaît lui-même d’ailleurs) mais irréprochable moralement que les derniers ouvrages de l’Hérésie tendent à dessiner, tandis qu’Alpharius est dépeint comme un intrigant de première, n’ayant aucunement besoin d’un slideshow de la Cabale pour trouver des raisons de comploter dans le dos de tout le monde. Bref, une soumission solide de la part de Chris Wraight, qui fait honneur à ses deux Légions secondaires avec cette nouvelle.

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Et voilà qui conclut cette revue de ‘Scions of the Emperor’, ouvrage peu avare en Primarques (9 différents tout de même) à défaut d’être prodigue en contenu et en révélations fracassantes. Si ce recueil se laisse lire sans problème, il ne contient pas d’informations absolument essentielles pour le fluffiste acharné qui, soyons honnête, constitue la cible principale de la Black Library pour une publication de ce genre. À garder en tête au moment de décider si les 15 € nécessaires à l’acquisition de cette courte anthologie ne serait pas mieux investis ailleurs.