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LET THE GALAXY BURN [40K]

Bonjour et bienvenue dans cette revue de ‘Let the Galaxy Burn’, anthologie gargantuesque de nouvelles de Warhammer 40,000 publiée en 2006 par la Black Library. Avec pas moins de 38 histoires au compteur1 et 765 pages, cette vénérable brique fut en son temps l’un des ouvrages les plus volumineux jamais sorti par la BL, comme son équivalent de Warhammer Fantasy Battle (chroniqué ici), ‘Tales of the Old Word’. Il servit également de chapitre final à la première mouture du magazine bimensuel Inferno!, dont il compila une bonne moitié des nouvelles 40K initialement publiées dans ces pages légendaires (du numéro 1 au numéro 28, pour être précis). Cette distinction nette entre la période 1997 – 2002 et 2002 – 2005 me laisse à penser que Nottingham avait prévu de sortir un deuxième recueil sur le modèle de ‘Let the Galaxy Burn’, mais n’a pas concrétisé la deuxième phase de ce diptyque. Encore un mystère propre à la GW-Fiction, qui n’en manque décidément pas.

1 : Si vous vous dîtes qu’il aurait été plus stylé d’arrondir à 40, ne vous inquiétez pas les éditeurs avaient eu la même idée, et réaliseront leur objectif dans le recueil ‘There Is Only War’, comptant 41 entrées en hommage aux 41 millénaires de la franchise.

Let the Galaxy Burn [40K]

Divisé en sept sous-parties plus ou moins thématiques (je comprends ce qui a été fait pour ‘We are the Space Marines…’, beaucoup moins pour ‘Kill Them All!’), ‘Let the Galaxy Burn’ propose un panorama quasi-complet du 41ème millénaire tel qu’il était couché sur le papier par les auteurs recrutés par la BL au tournant du 3ème (millénaire). On a donc droit à du « BL-Style » chimiquement pur et en grande quantité, grâce aux efforts enthousiastes mais pas toujours aboutis des 18 contributeurs ayant prêté leur plume et leurs idées à ce regroupement hétéroclite de courts formats assez nerveux en règle générale. Avec pas moins de cinq piges à son actif, c’est l’aujourd’hui vénérable Gav Thorpe qui fait office de pyromane galactique en chef, suivi de Ben Counter et Dan Abnett (4 chacun). On peut toutefois décerner à ce dernier le titre de MVP, car ‘Let the Galaxy Burn’ contient deux inédits du futur Maître du Millénaire Sombre et Se/aigneur de Terra : ‘Playing Patience1 et ‘The Fall of Malvolion’. A son niveau, C. S. Goto fit de même avec ‘The Tower’, et remporte ainsi le prix de la confidentialité car cette nouvelle ne bénéficié (à ce jour, et je ne pense pas que ça change de sitôt) d’aucune réédition depuis lors. Faîtes ce que vous voulez de ces informations.

Avant de conclure cette introduction et de passer aux choses sérieuses, je tiens à prévenir le lecteur que les chroniques qui suivent constituent aussi une plongée dans mes travaux critiques de la dernière décennie (dit comme ça, ça me fout un coup de vieux). La différence entre les nouvelles que j’ai couvertes au début de ma « carrière », comme ‘The Raven’s Claw’ ou ‘Ancient Lances’ et celles que j’ai abordées bien plus tard (‘Playing Patience’) ne manquera pas de sauter aux yeux du lecteur, qui se trouvera en présence d’un patchwork de revues. Je me suis brièvement demandé s’il ne serait pas nécessaire de reprendre mes premiers travaux pour uniformiser le tout, mais comme je ne renie ces modestes débuts, je me suis contenté d’éditer à la marge les références n’ayant plus lieu d’être dans les chroniques. J’espère que le résultat vous satisfera !

1 : Ce que je trouve assez étrange car la BL a soigneusement gardé hors de l’anthologie les autres nouvelles inquisitrices d’Abnett.

Let the Galaxy Burn

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We are the Space Marines, the Champions of Humanity

Words of Blood – B. Counter :

INTRIGUE :

40K_Words of BloodSur la planète quasiment abandonnée d’Empyrion IX, le Commandeur Athellenas des Black Templars doit relever un défi de taille : empêcher une armée de 6.000 cultistes de Khorne de s’emparer du seul spatioport de ce monde minable, ce qui permettrait aux hordes dépravées et mal fringuées du terrible Manskinner de fondre sur Macharia pour y commettre un génocide. Le tout avec seulement trente Space Marines à disposition. Le rapport de force n’est pas en faveur de l’Astartes, mais Athellenas a… un plan (et pour un Black Templar, c’est déjà beaucoup). Le seul problème, c’est que ses frères risquent de ne pas l’apprécier du tout, ce qui va le contraindre à jouer très finement la partie1.

Du côté adverse, les préparatifs vont bon train pour ce qui ne devrait être qu’un massacre en bonne et due forme entre deux factions peu réputées pour leur tactique d’évitement. Le Manskinner, qui a reçu de sa divinité tutélaire le don démoniaque « parole de sang », ce qui lui permet de plonger son audimat dans une folie furieuse (et non pas de se mordre la langue à chaque fois qu’il prononce une phrase), prononce une petite causerie d’avant-match qui met ses ouailles de bonne humeur, et envoie sa cavalerie (si si) à l’assaut des positions retranchées des Marines. Il se doute que les fringants hussards ne feront pas long feu face à l’arsenal des Black Templars, mais cela devrait laisser le temps nécessaire au gros de ses forces d’arriver à portée de charge.

Conformément à ses pronostics, la brigade légère du bien nommé Die(ss) tombe glorieusement au champ d’honneur, sur le score sans appel de 210 morts à trois doigts tranchés. C’est alors que le rusé Athellenas dévoile la profondeur insondable de son génie stratégique, en ordonnant la retraite. Stupeur et bégaiements chez les meilleurs de l’Empereur, qui n’ont pas pour habitude d’abandonner du terrain à l’ennemi, à plus forte raison un temple millénaire à la gloire de Pépé, comme celui qu’ils occupent actuellement. Il faut donc claquer quelques PC au Commandeur pour passer le stratagème « Y a pas de mais », permettant un repli en bon ordre jusqu’à la ville voisine où une nouvelle position défensive est installée sans tarder.

Si cette manœuvre n’a pas fait consensus chez les Black Templars, elle a cependant compliqué la situation du Manskinner, dont l’emprise sur les éléments les plus foufous de son armée commence à s’effilocher. Malgré son éloquence sans pareille – en même temps, la plupart de ses suivants ont perdu l’usage de la parole, donc la compétition n’est pas féroce – Manski’ ne parvient pas à empêcher un de ses lieutenants, le Caporal Recoba, de partir à la chasse aux Marounes sans attendre les retardataires. L’ennui est que le charismatique officier embarque avec lui deux mille copains, divisant l’armée des cultistes en deux. Comme on peut s’y attendre, cet empressement à porter le combat à l’ennemi sera fatal pour Recoba et ses suivants, qui tomberont sous les bolts et les coups des Space Marines lors d’une embuscade savamment orchestrée par Athellenas et ses Sergents.

Cette nouvelle victoire est cependant rapidement ternie par la décision de Big A. de battre à nouveau en retraite, cette fois-ci pour une défense sur la ligne (ici le spatioport d’Empyrion IX). Cette annonce dévaste le Devastator Valerian, qui menace de se faire renégat plutôt que de commettre la forfaiture de la marche arrière, et n’accepte finalement de se plier aux instructions de son supérieur qu’après s’être fait menacer de sanctions disciplinaires dans cette vie et dans la suivante.

De son côté, le Manskinner enrage (comme d’hab’ vous me direz) de la couardise manifeste de ses adversaires, qui rend son armée sevrée de violence de plus en plus difficile à contrôler. Ayant compris qu’il s’agit d’un stratagème pour désorganiser ses forces, il tente de calmer les ardeurs de ses cultistes en exaltant les valeurs de la vengeance et de la patience, mais se fait brutalement interrompre par son dernier sous-fifre (Kireeah) avant d’avoir pu terminer son sermon. Bien que l’impoli paie son impudence de sa tête, proprement séparée de son corps par la paire de ciseaux géants que le Manskinner arbore à la place de son bras droit – c’est pratique pour inaugurer les bâtiments, je me demande pourquoi Charles III ne s’en est pas déjà équipé – le mal est fait et les Khorneux se lancent dans un sprint éperdu en direction du spatioport. Après avoir tenté de remettre un semblant d’ordre dans la horde en cisaillant de droite et de gauche, Manski’ décide de se joindre à la fête car après tout, les Marines n’ont plus nulle part où aller et l’avantage numérique est toujours largement en faveur des rouges…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur le besoin pathologique des Khorneux de cogner sur quelque chose ou quelqu’un dans les plus brefs délais, qui va jouer un bien mauvais tour aux hérétiques. Alors qu’ils ne sont plus qu’à quelques dizaines de mètres de leurs cibles, leur soif de sang finit par se retourner contre eux et l’armée du Manskinner se transforme en battle royal géante, de laquelle seuls quelques survivants confus et blessés émergent à la fin des combats pour tomber aussitôt sous les coups des Marines. C’était ce sur quoi comptait Athellenas, qui a interdit à ses frères d’ouvrir le feu pour ne pas permettre aux cultistes de se reconcentrer sur leurs priorités. Malin. Ce qu’il l’aurait été encore plus, ce serait d’avoir partagé son plan avec ses hommes pour s’assurer que tout se déroule bien, plutôt que de compter aveuglément sur la discipline et la loyauté vacillante de ces derniers. Mais comme Athellenas l’explique doctement à Valerian une fois la bataille remportée, les meneurs n’ont pas à se justifier auprès des exécutants. Ce n’est pas avec une telle mentalité que notre héros gagnera le prix de camaraderie, mais les résultats parlent d’eux-mêmes, et c’est plus qu’assez au 41ème millénaire…Fin spoiler

1 : Je choisis de penser qu’il s’est équipé d’un poing énergétique (qu’il n’utilisera pas une fois de la nouvelle, malgré ce que l’illustration grimdark à souhait laisse penser) pour donner l’impression à ses bourrins de collègues qu’il serait le premier à sauter dans la mêlée. Mais la moufle ne fait pas le moine de l’espace…

AVIS :

Words of Blood’ fait partie des nouvelles écrites pour explorer une situation paradoxale ou problématique si on se réfère au background canon de univers de Games Workshop1, ici : « que se passerait-il si le seul moyen pour des Black Templars de remporter une bataille était de battre en retraite ? ». Je précise qu’à l’époque où cette histoire a été écrite, les zélés fils de Dorn prenaient leur serment de défense de l’Imperium de manière beaucoup plus littérale – certains esprits chagrins pourraient dire « basse du front », mais il ne faut pas écouter ces vils persifleurs – que maintenant. Sur ces prémisses intéressantes, en tout cas plus qu’une vulgaire empoignade entre Space Marounes et mutants/hérétiques/Xenos (rayer la ou les mentions inutiles), Ben Counter développe un propos qui, s’il accuse aujourd’hui sérieusement son âge, mérite encore la lecture à mon sens.

En effet, si on fait abstraction des quelques éléments surannés de ‘Words of Blood’ (le serment de non-reculade des Black Templars, les attaques de cavalerie…), la trame de l’histoire reste solide. Mieux encore, cette nouvelle présente un parallélisme aussi élégant que satisfaisant entre les dilemmes tactiques et managériaux auxquels sont confrontés les deux commandants ennemis. Tant Athellenas que le Manskinner doivent en effet réfréner les penchants naturels de leurs troupes pour espérer l’emporter, et composer avec la mauvaise volonté de ces dernières à obéir à des ordres avec lesquels elles ne sont pas en phase. À ce petit jeu, la discipline naturelle des Space Marines finit par l’emporter (mais de très peu), provoquant la fin des hordes hérétiques de la manière la plus Khorneuse qui soit. Le vieux fluffiste qui sommeille en moi a d’ailleurs failli verser une larme (de sang) en lisant la harangue de la dernière chance faite par le Manskinner à ses troupes indisciplinées juste avant qu’elles ne piquent leur sprint fatal vers le spatioport d’Empyrion IX. Car oui, Khorne était dans l’archéofluff une divinité plus complexe que l’immonde bourrin qu’il est devenu au fil des versions2, et Counter mérite une accolade pour avoir reflété ces fifty shades of red dans sa nouvelle.

Boni appréciables, il s’est également donné la peine de développer un minimum sa galerie de personnages (les plus intéressants étant le Manskinner philosophe et ses lieutenants exaltés), et se révèle plutôt généreux en termes de fluff Black Templar, même s’il est permis de douter de la validité de ces informations plus de vingt ans après l’écriture de cette nouvelle (à l’époque, cette faction ne disposait pas de son propre Codex, et on pouvait donc y aller franco sur leur background). Pour ne rien gâcher, la nouvelle se termine par un petit twist final, un peu ruiné par le TGJSUO (Ta Gu*ule Je Suis Un Officier) que l’aimable Athellenas décoche au pauvre Valerian, mais on n’en tiendra pas rigueur à l’auteur. Bref, même si ‘Words of Blood’ a un peu vieilli depuis sa sortie (en 2000, on peut être miséricordieux), il elle ça se laisse lire sans problème encore aujourd’hui.

1 : Marc Gascoigne indique dans son introduction de l’anthologie ‘Let the Galaxy Burn’ que la Black Library a été (au moins en partie) créée à cette fin. C’est dire si ce « genre » est important.
2 : Quand on voit les dernières entrées du Codex World Eaters, on ne s’étonne pas que le mot « subtilité » s’écrive avec neuf lettres, et non pas huit…

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The Black Pearl – C. Pramas :

INTRIGUE :

The Black PearlFraîchement nommé Chapelain Interrogateur, Uzziel des Dark Angels emmène ses frères sur le monde exodite de Lughnasa, afin de vérifier une information obtenue du premier Déchu qu’il a capturé. Selon la confession du traître, la mythique épée du Lion, maniée par le Primarque de la première Légion au cours de la Grande Croisade, et perdue au cours de la destruction de Caliban, reposerait en effet dans un temple de cette planète.

AVIS :

Une nouvelle rythmée et assez bien construite, dans la droite lignée d’Into the Maelstrom’. Comme cette dernière histoire, ‘The Black Pearl’ se termine par un petit twist1 qui, sans être transcendant, conclut le récit de manière opportune et démontre que Pramas a bien intégré les codes de 40K (Praaaaa-maaaaaaaaas…ton univers impitoyaaaa-aaa-bleuh).

Reste qu’utiliser les Dark Angels comme protagonistes est un exercice périlleux, les multiples couches de secrets et de rumeurs entourant les Impardonnés obligeant l’auteur à procéder avec prudence. Malgré sa maîtrise du background (mention est faite de Moloc(h)ia, Chapelain Interrogateur détenteur du highest score en matière de confessions de Déchus), Pramas se prend les pieds dans le tapis pelucheux du fluff des Anges de la Mort à quelques reprises. Rien de très grave, je vous rassure, mais il fallait tout de même que le signale. Paradoxalement cependant, ce sont les (petites) révélations sur le passé des Dark Angels glissées par Pramas dans ‘The Black Pearl’2 qui constituent l’intérêt principal de la nouvelle. Les vieux de la vieille apprécieront aussi la présence de chevaliers dragons Exodites en tant qu’antagonistes, même si l’auteur se contente de les balancer sur les Space Marines dans une reconstitution futuriste de la charge de la brigade légère (si tant est qu’un chevaucheur de megadon puisse être considéré comme un cavalier léger) à la bataille de la Balaklava, et ne s’attarde donc guère sur la culture de ces fiers guerriers tribaux.

Honnête mais finalement assez terne, en ce qu’elle n’explore pas assez à mon goût la psyché si particulière des Dark Angels (une joyeuse bande de zélotes psychorigides et intolérants au plus haut point, à la fois arrogants à l’extrême et terrifiés à l’idée que le reste de l’Imperium apprenne leur honteux petit secret), ‘The Black Pearl’ constitue une lecture assez dispensable, sauf si vous êtes un amateur inconditionnel de Lionel et de ses fistons.

1L’épée du Lion se révèle au final être l’épée de Luther.
2 : Référence à la perle noire que les Chapelains Interrogateurs des chapitres Impardonnés ajoutent à leur Rosarius pour chaque Déchu qu’ils « convainquent » de se confesser.

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Angels – R. Earl :

INTRIGUE :

Alors que la fin approche pour lui, après une longue vie de près de 50 ans (ce qui est apparemment respectable sur la planète féodale sur laquelle il vit), Bobby1 se remémore l’événement le plus marquant de son existence, un souvenir tellement puissant qu’il l’a guidé dans les moments charnières de sa vie, depuis l’accouchement de sa femme jusqu’à l’extermination d’une meute de loups un peu trop familiers. Cela s’est passé il y a bien longtemps, lorsqu’il n’était qu’un petit nenfant…

Né dans le petit village de Pasternach, Bobby connut une enfance rude mais heureuse dans ce hameau fort éloigné du tumulte grimdark d’une galaxie hostile, jusqu’à ce que des signes inquiétants se multiplient dans les environs immédiats du bourg. Les méthodes traditionnelles (envoyer une patrouille faire mumuse dans la forêt voisine) n’ayant, pour une fois, pas donné les résultats escomptés, une douce psychose commence à s’abattre sur Pasternach au fur et à mesure que des événements sinistres se produisent dans le voisinage (meurtre sauvage d’un vieil ermite qui résidait un peu en retrait du village, disparition de l’expédition de volontaires envoyés quérir de l’aide dans la ville la plus proche, incendie probable de cette dernière en pleine nuit). Décidés à se défendre contre les forces maléfiques qui crapahutent dans les sous-bois, les villageois transforment leur communauté en fort retranché, mais cela ne décourage pas la bande de mutants assoiffés de sang et de chair fraîche qui constitue la cause de leurs tracas de passer à l’attaque, au cœur d’une sombre nuit d’automne.

Malgré leur vaillance et leurs outils de ferme soigneusement affutés, tout aurait pu et dû très mal se finir pour les Pasternachois, très démunis face à la férocité et au nombre de leurs assaillants. Au moment où tout semblait perdu, cependant, quatre « anges » (d’après les mots du narrateur) font leur apparition sur la palissade ceignant le village, et commencent à tailler des croupières à la horde impie, avec une terrible efficacité qui ne manque pas d’impressionner le jeune Bobby. Ce qu’il ne peut pas savoir, en pauvre inculte qu’il est, c’est que les nouveaux arrivants sont des Space Marines2, et que le massacre d’une bande d’Hommes Bêtes en maraude n’est probablement qu’un échauffement avant leur tournoi de bière pong énergétique. Toujours est il que la bogossitude absolue de l’Astartes fait une très forte impression sur Bobby, qui tirera de ce souvenir impérissable la fortitude nécessaire pour affronter tous les aléas de sa morne vie de péquenot. Merci Pépé.

1 : Comme il n’a pas de nom, je lui en donne un.
2 : Robert Earl ne donne pas d’indication quant à leur allégeance, et comme leur livrée est bleue et verte, il est permis de penser qu’il ne s’agit pas nécessairement de loyalistes

AVIS :

Avant le lancement des gammes Warhammer Horror et Crime, rares étaient les nouvelles de 40K s’intéressant au point de vue des humbles sujets de l’Imperium, et à ce titre, ‘Angels’ est une œuvre intéressante et résolument précurseuse (?), puisqu’écrite plus de vingt ans avant que la Black Library fasse le pari de la diversification. Bien sûr, il y a bien des Space Marines au casting de cette courte nouvelle, mais Robert Earl garde volontairement et astucieusement la caméra braquée au niveau de son jeune et impressionnable héros, qui est au fond assez proche de la grande majorité des habitants de l’Imperium dans sa méconnaissance absolue de qui sont les Élus de l’Empereur. Ajoutez à cette bonne idée de positionnement narratif le talent de conteur d’Earl, et vous obtenez une des nouvelles courtes (10 pages ou moins) les plus efficaces du catalogue de la BL à mon humble avis. Un vrai masterclass en GW-Fiction.

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Unforgiven – G. McNeill :

INTRIGUE :

40K_UnforgivenMission classique pour le Sergent Dark Angels Kaelen et son escouade de marsouins vert bouteille. Largués sur leur cible, une cathédrale quelconque1, par Thunderhawk furtif, les angles eud’la muerta se posent sans encombre sur une place grouillante d’ennemis, qui ne tardent pas à goûter à la colère des meilleurs de l’Empereur. Chargés d’accompagner le Chapelain Interrogateur2 Bareus jusqu’au mystérieux prophète ayant fait basculer la jusque là paisible Valedor dans l’hérésie la plus totale, Kaelen et ses hommes sont surpris d’entendre l’officier leur annoncer, après avoir regardé sous les jupes des filles cultistes comme un gros père vert (ce qu’il est), que le QG ennemi doit être capturé, et non pas exécuté, comme c’était jusqu’ici le plan. En privé, ce grand meneur d’homme de Bareus avoue sans détour à son sous-fifre qu’il s’attend à ce que tous les bidasses de l’escouade rejoignent la droite de l’Empereur au cours des prochaines minutes, ce qui énerve un peu notre Sergent, qui aurait bien aimé qu’on lui annonce sa participation à une mission suicide en temps et en heure. Histoire d’avoir pu demander à un camarade de dortoir de supprimer son historique de navigation avant de partir, sans doute. Quoi qu’il en soit, la prédiction funeste du Chapelain ne met pas longtemps avant de commencer à se réaliser, le pauvre frère Lucius payant de sa vie son ultime double screwgie de grenade à travers les vitraux de la cathédrale, mais permettant tout de même au reste de l’escouade de pénétrer à l’intérieur du bâtiment sans trop de casse3.

À l’intérieur, la résistance va croissante au fur et à mesure que nos braves héros se rapprochent de la dernière position connue de leur cible. Cette dernière profite que quelques apartés dans l’action frénétique de cette nouvelle endiablée pour commencer à se faire connaître, et, ô surprise, c’est très probablement peut-être certainement sans doute un Déchu. Mais on n’est pas sûr. En tout cas, si Bareus a des grands projets pour sa verdâtre Némésis, cette dernière n’est pas en reste, puisqu’elle instruit spécifiquement son second, Casta, de lui laisser s’occuper du Chapelain. Le reste des Space Marines peut cependant être massacré sans arrière-pensée, quelque chose que le mystérieux Ange des Lames, que le prophète charge son side kick de réveiller, devrait être capable de faire sans problème.

Un peu plus loin, Kaelan commence à se douter qu’il y a Luther sous Roc et qu’on ne lui a pas tout dit, lorsqu’il constate que la décoration d’intérieur de l’église a été refaite à base d’anges en feu, de planète qui explosent et de têtes de lion empaillées. En plus de cela, les vagues de cultistes qui s’abattent sur lui et ses frères, de moins en moins nombreux au fur et à mesure que McNeill les zigouille, sont habillés comme des cosplayers d’Impardonnés, ce qui est impardonnable. Malgré cela, Bareus ne consent pas à lui donner plus d’infos sur la nature véritable de sa mission, bien que notre balourd de Chapelain soit très fort pour mettre les pieds dans le plat. Devant tant de cachotteries, le Sergent Garcia se rabat sur les fondamentaux pour tenter d’atteindre un objectif qui paraît de plus en plus inatteignable, au fur et à mesure que les Astartes mordent la poussière. Heureusement pour lui, sa foi en l’Empereur et sa haine de l’onanisme l’aident à venir à bout de ses adversaires, jusqu’à ce que les survivants parviennent dans la salle du mini-boss de fin. C’est en effet là qu’il se trouvent confrontés à rien de moins que le premier Metabrutus de l’histoire, soit un Dreadnought muté monté sur crampons et exhibant fièrement son grillz et ses tablettes de chocolat aux alentours. Le pire dans tout ça, c’est que le fameux Ange des Lames est également un ex-Dark Angels, comme le symbole de son caisson le montre bien. Pas le temps de tergiverser pour nos héros cependant, il faut décarcasser le Père Ducroc.

Dans la bagarre qui s’ensuit, la plupart des survivants loyalistes se font écharper par Lââm, ne laissant en vie que Bas Rhésus, Koala et le pauvre frère Persus, qui commence à se douter qu’il ne finira pas la nouvelle en un seul morceau. À raison. Car c’est au tour du grand méchant de faire son entrée, qui se révèle être…

Début spoiler…Un Déchu. Et si. Incroyable. Je suis siégé de ma tombe. Le sinistre individu en question s’appelle Cephesus, et il a trouvé un hobby passionnant pour s’occuper depuis 10.000 ans : collectionner les Lames de la Raison des Chapelains Dark Angels qui cherchent à le capturer. La quincaillerie de Bareus lui permettra d’arriver à douze goodies, ce qui est score respectable sachant que même Molochia n’avait que dix perles sur son Rosarius. Le combat s’engage, et le Déchu parvient sans mal à trucider Persus, qui meurt en gueulant « Je le savaiiiiiiiis !!! », et à égorger Bareus avec son trousseau de clés énergétiques. La suffisance dont il fait preuve lui sera cependant fatale, car elle permettra à Kaelan, blessé mais pas vaincu, de lui arracher son Rosarius et sa précieuse sauvegarde invulnérable, avant de lui décocher un direct au foie et à la foi ravageur avec sa moufle. Traversé par un mal-être profond et le bras armé de son adversaire, Cephesus tombe raide mort au sol, et avec lui la rébellion de Valedor. Kaelan reçoit ensuite les clés du camion de la part du Chapelain mourant, qui lui vomit le mot « Deathwing » au visage dans un dernier souffle. C’est une nouvelle carrière qui s’ouvre pour notre Sergent, comme il l’annonce fièrement au Terminator de la Deathwing qui arrive peinard devant la cathédrale quelques minutes plus tard. À croire qu’on n’avait pas besoin de lui plus tôt. La relève est assurée.Fin spoiler

1 : Car nous sommes sur un monde cathédrale. Donc pour l’originalité, on repassera.
2 : Ca m’est venu comme ça mais… C’est tout de même ballot que les Dark Angels aient donné un titre spécial aux types chargés d’une mission top secrète que personne ne doit connaître. Parce que moi, si on me dit que Gérard Duchmol n’est pas comptable, mais « Comptable-Investigateur », je vais fatalement me demander ce qu’il cherche à investiguer. Et probablement me prendre un bolt dans la tête. Ou un contrôle fiscal.
3 : Le frère Marius se fracturant toutefois la hanche en glissant sur une peau de banane traîtreusement jetée par les hérétiques. Pas de quoi l’arrêter ceci dit.  

AVIS :

McNeill, qui ne devait pas être vieux à l’époque, signe une nouvelle Dark Angels des plus classiques avec ce ‘Unforgiven’, mettant évidemment en scène la traque d’un ennemi mystérieux se révélant au final être un Déchu. À croire que les lionceaux ne font que ça de leurs journées. À défaut de surprise et de suspens, il y a au moins de l’action dans cette histoire, mais pas grand-chose en termes de fluff, ce qui est dommage pour un Chapitre au passé aussi riche. On passera généreusement sur les quelques approximations et incongruités du récit, comme la disparition mystérieuse des jet-packs de l’escouade une fois rendue sur place (ça aurait pourtant pratique pour avancer jusqu’à la cible), ou le Chapelain le moins tenu au secret professionnel de l’univers, à mettre sur le compte d’une volonté manifeste de divertir le fanboy plutôt que de satisfaire le lecteur. Si vous voulez mon avis, ‘The Falls of Marakross’ de Steve Parker est en tous points supérieurs à cet ‘Unforgiven’, qui à défaut d’être pardonné, peut être oublié.

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In the Belly of the Beast – W. King :

INTRIGUE :

40K_In the Belly of the BeastUne escouade de Griffes Sanglantes menée par un Garde Loup est envoyée explorer l’intérieur d’un vaisseau tyranide. Même si la Grande Dévoreuse a la tête dans le biomorphe après quelques éons passés à dériver dans la galaxie, les Loulous vont vite se rendre compte qu’entrer par effraction chez les cafards de l’espace est une très, très mauvaise idée.

AVIS :

‘In the Belly of the Beast’ est la nouvelle de type « et si ? » par excellence. Son principal intérêt est de permettre au lecteur de découvrir un pan jusqu’ici peu exploré du fluff, ici la structure et le fonctionnement d’un bio vaisseau tyranide. King accomplit cette mission avec sérieux et réussite, et parvient à décrire ce petit monde complétement alien (c’est le cas de le dire) à l’esprit humain de manière convaincante, insistant bien sur sa perfection organique et son aspect oppressant. Il enrichit en outre son propos en décrivant la progression des Space Wolves depuis le point de vue de chacune des Griffes Sanglantes, dont les réactions varient entre rage bestiale (Egil), prémonition funeste (Njal), légèreté feinte (Gunnar) ou encore crainte dissimulée (Sven). L’éveil progressif de l’écosystème tyranide en réponse à l’intrusion des marounes donne enfin l’occasion à l’auteur de relever son texte de quelques passages d’action tout à fait convenables, et d’une poignée de décès astucieusement gores (mention spéciale à la disparition de Njal).

On peut en revanche regretter le manque flagrant d’inspiration de King au moment d’insérer ‘In the Belly of the Beast’ dans l’univers de 40K. Comment, en effet, justifier l’envoi d’une (seule) escouade de Space Marines inexpérimentés dans une mission aussi dangereuse que l’exploration d’un vaisseau tyranide, même inerte ? Réponse de l’intéressé : nos héros sont assignés à un navire marchand (et quand je dis assigné, c’est en mode larbin hein : à côté, la Wolfblade c’est une nomination honorifique), dont le capitaine, apparemment ignare au dernier stade, n’est pas foutu de repérer une bioconstruction tyranide quand il en croise une (manque évident de culture générale également partagé par le sergent Hakon, ceci dit). Le navigateur de bord – un homme cultivé, lui – a beau insister lourdement pour que ce mystérieux vaisseau soit détruit sur le champ, le capitaine envoie tout de même ses loulous de compagnie explorer ce dernier dans l’espoir de « découvrir quelque chose dont l’Imperium pourrait avoir l’utilité ». Pour un point de départ pourri, c’est un point de départ pourri. Dans la même veine, on ne peut que s’émerveiller de l’innocence des Space Wolves, qui ne réalisent qu’ils sont au cœur d’un vaisseau tyranide qu’au moment où ils débarquent dans la salle centrale et assistent au réveil d’une tripotée de guerriers. Allo nan mais allo quoi.

En dépit des quelques couleuvres que King tente de faire avaler au lecteur pour justifier les actions stupides de ses personnages, ‘In the Belly of the Beast’ est une nouvelle honorable, dont l’ambiance d’horreur lovecraftienne détonne agréablement des productions classiques de la BL, où l’action omniprésente laisse peu de place au développement d’atmosphères oppressantes dignes de ce nom.

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Suffer not the Alien to Live

Hellbreak – B. Counter :

INTRIGUE :

40K_HellbreakLe Commissaire von Klas a eu la mauvaise idée d’être capturé vivant par les Eldars Noirs lorsque ces derniers ont annihilé son régiment, et son séjour à Commoragh se passe aussi bien, ou mal (c’est selon), que l’on peut l’imaginer. Identifié par ses tortionnaires comme officier, il a la chance douteuse de participer aux jeux donnés par la cabale de l’Échine Rompue (Broken Spine) en l’honneur de son maître, le positivement ancien Archon Kypselon. Rustre jusqu’au bout des ongles, von Klas a l’outrecuidance de remporter son duel face à une Céraste au style trop chargé pour son propre bien, et d’une manière si peu élégante (il lui pète le pif avant de l’empaler sur sa propre hallebarde… honteux) qu’il est prestement condamné à être écorché vif par l’Haemonculus personnel de Kypselon.

Survivre aux Intervilles1 de Commoragh a toutefois boosté le moral, déjà naturellement élevé, de notre brave Commissaire. Lorsque son tortionnaire (Verredaek) fait l’erreur de se présenter à lui sans l’avoir attaché au préalable, confiant qu’il est dans son aura de terreur pour figer sur place son nouveau sujet d’expérimentation, von Klas ne tarde pas à lui faire goûter à sa propre médecine, et s’échappe après lui avoir fauché sa main rasoir et son pistolet à aiguille, recrutant dans des geôles adjacentes quatre autres Gardes Impériaux malchanceux gardés en réserve par Verredaek. L’Haemonculus agressé n’aura guère le temps de s’excuser de sa nullité crasse auprès de son impitoyable employeur, qui le fait exécuter par sa Succube de compagnie (Yae) pour faute lourde, avant d’ordonner à cette dernière d’aller mettre un terme à l’excursion des Mon-keigh dans son territoire. Après tout, il a un rival ambitieux (Uergax de la cabale du Fil de la Lame) à mater, et ne peut se permettre qu’une bande de primates mal dégrossis sèment la pagaille à domicile.

Malheureusement pour Kyky, Yae ne sera pas très efficace dans sa traque, à tel point que von Klas et sa petite escouade parviennent à s’emparer de l’usine du Sybarite Laeveq, et des deux mille esclaves humains utilisés par ce dernier comme main d’œuvre, multipliant leur potentiel de nuisance. Pire, les mutins choisissent de se réfugier dans le temple que l’Archonte a fait élever à sa gloire (c’est un gars simple), ce qui constitue un crime de lèse-majesté impardonnable. Tant pis pour la prudence, Kypselon réunit le ban et l’arrière-ban de sa cabale et envoie ses pillards reprendre possession de la basilique gothique (elle est construite uniquement en os) aux zadistes en furie. Il commet toutefois l’erreur de sous-estimer la résolution du meneur adverse, trop content de faire s’effondrer le plafond de l’édifice sur les combattants au plus fort de la bataille, même si cela précipite l’écrasement de son insurrection raciale. Écrasé pour écrasé, autant que les Eldars Noirs participent à cette soirée crêpes, pas vrai ?

Début spoiler…La nouvelle se termine dans une cellule de la cabale, où un von Klas en bien piteux état après son coup d’éclat languit des jours durant, jusqu’à ce que ses geôliers lui amènent un compagnon d’infortune, qui se révèle être Kypselon en personne. Comme l’Archonte l’apprend à son valeureux adversaire, sa rébellion a coûté très cher à l’Echine Rompue, aussi bien en ressources qu’en cabalites, et ses rivaux du Fil de la Lame ont profité de ce moment de faiblesse pour attaquer et annihiler ce qu’il lui restait de suivants. Bien que von Klas sache qu’il ne lui reste plus longtemps à vivre, il peut toutefois savourer l’indéniable victoire qu’il a remporté sur son adversaire, qui n’aura certainement pas la chance de bénéficier de la mort rapide dont le Commissaire agonisant héritera…Fin spoiler

1 : Je m’interroge sur la pertinence de mettre un -s, la cité drukhari n’ayant pas d’équivalent.

AVIS :

Ben Counter nous plonge dans l’enfer de Commoragh avec maestria dans cette variation sur le thème de Spartacus, qui illustre parfaitement la cruauté des Eldars Noirs et la défiance de la Garde Impériale face à l’adversité. Au final, ces deux factions sortent grandies de ce ‘Hellbreak’, et le lecteur bénéficie d’une histoire purement grimdark, comme sa conclusion aussi satisfaisante que nihiliste le démontre pleinement. De la nouvelle 40K comme on aime.

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Small Cogs – N. Rutledge :

INTRIGUE :

40K_Small CogsSeule la mort met fin au devoir nous dit le proverbe, et ce n’est pas le Colonel Soth du 8ème Ulbaran qui viendra s’en plaindre. Ayant participé à la reprise de la planète de Luxoris Beta, confisquée par les Orks pendant des siècles, le régiment se retrouve mobilisé pour défendre la station d’épuration le Temple de l’Eau local contre une excursion eldar repérée au dernier moment par ces planqués du Haut Commandement. Malgré le fait que ses hommes doivent combattre en uniforme d’apparat, leur mission première étant de participer au défilé du 14 juillet local, Soth fait contre mauvaise fortune veste qui gratte bon cœur et organise un périmètre défensif autour du bâtiment visé par les Xenos. Le Temple de l’Eau contrôle en effet le système d’irrigation de la planète, en faisant une cible de choix pour les Eldars : inonder les basses terres de Luxoris Beta priverait en effet les défenseurs impérieux de la possibilité de déployer leurs véhicules blindés dans ce conflit.

Après avoir échangé quelques banalités avec le prêtre Jarendar, tout à fait confiant dans la protection qu’apportera l’Empereur à ses fidèles, Soth est appelé à son poste de commandement par son second (Hoddish) lorsque les Eldars lancent leur assaut. S’en suit une bataille urbaine tout à fait classique entre les deux factions, à la ténacité et la discipline des Gardes Impériaux s’opposant la vitesse et la technologie avancée des Xenos. En bon commandant, Soth met les mains dans le cambouis et mène une charge au fuseur contre un Falcon trop confiant, héritant d’une blessure à la cuisse mais permettant aux lignes impériales de tenir.

Un moment de répit entre deux attaques permet à notre héros d’inspecter le périmètre… et de manquer de tomber sous les tirs d’un Ranger isolé, finalement localisé et abattu sur un gros coup de chance par Soth. Il ne faut pas longtemps au sagace officier pour réaliser que le sniper n’a pas fait le déplacement seul, et que ses petits copains sont certainement en train de converger vers le Temple pendant que le reste des forces eldars fait diversion. Ne pouvant mobiliser un peloton entier sous peine de laisser ses lignes dangereusement dégarnies, Soth ordonne à Hoddish de lui envoyer trois Gardes pour tenter d’intercepter les infiltrateurs ennemis avant qu’il ne soit trop tard.

Je vous la fais courte : au prix d’une progression sanglante et de la perte de tous ses sidekicks, Soth parvient jusque dans la salle des machines du Temple, où il surprend le dernier Ranger en pleine lutte avec Jarendar. Le prêtre étant plus doué en parabole qu’en krav-maga, il ne tarde pas à rejoindre la droite de l’Empereur, tandis que Soth hérite pour sa part de quelques shurikens dans le thorax, lui faisant perdre la règle Objectif Sécurisé et lui donnant l’impression de voir les esprits de ses camarades défunts danser le harlem shuffle autour de lui. Ces hallucinations dissimulaient cependant l’arrivée d’un clutch player de chair et de sang : le novice de Jarendar – et son chandelier – qui règle son compte au pénible Xenos alors qu’il trifouillait les panneaux de commandes en fredonnant ‘Here comes the flood’. Bien fait. La nouvelle se termine sur la victoire des impériaux et l’évacuation de Soth vers l’hôpital le plus proche, mais pas avant qu’il n’ait bredouillé au Medic qui l’a stabilisé de faire passer à Hoddish la morale de cette histoire : prêter attention au moindre détail (small cogs). Que voilà une édifiante conclusion.

AVIS :

Pour sa seule incursion dans le 41ème millénaire (si on ne considère pas la nouvelle ‘Sisters’, écrite pour Necromunda), Neil Rutledge livre une bonne histoire de « Gardes Impériaux d’action », dans la droite lignée de ce que nous propose le légendaire Dan Abnett avec ses Fantômes de Gaunt. Chose appréciable, on a le droit en seulement 26 pages à une bataille rangée, suivie par une mission d’infiltration tournant au duel de snipers, ce qui est une variété tout à fait appréciable pour un court format. Les affrontements entre Garde Impériale et Eldars des Vaisseaux Mondes étant de plus assez rare dans la GW-Fiction, on appréciera d’autant plus ce ‘Small Cogs’ à sa juste valeur. Je valide.

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The Fall of Malvolion – D. Abnett :

INTRIGUE :

The Fall of MalvolionLa mission de garnison du Garde de Fer Karl Grauss et de ses copains Mordiens sur la planète de Malvolion prend un tour très désagréable après que les signes avant-coureurs d’une infestation Genestealers aient été détectés dans une station d’épuration jusqu’ici sans histoire (comme la majorité des stations d’épuration vous me direz). Rescapé de la malheureuse mission de reconnaissance qui a permis de se rendre compte de l’existence de Xenos affamés et acérés sur ce monde agricole, Grauss couve un petit choc post-traumatique carabiné et demande donc à être réaffecté en service actif pour se changer les idées. Compréhensif, son supérieur lui donne les clés d’un camion de transport et l’ordre de mener un convoi de paysans du cru jusqu’à la zone d’extraction la plus proche : comprenant que la Grande Dévoreuse n’allait pas tarder à pointer le bout de son museau, l’Imperium a préféré la jouer safe et abandonner Malvolion à ses appétits voraces. Il faut choisir ses combats.

Un peu plus loin, nous faisons la connaissance d’un bataillon du 4ème régiment de Phyrus et du Sergent Gallo, qui auront l’honneur douteux d’être les premières victimes de la véritable attaque tyranide sur Malvolion, perpétrés par un essaim de Genestealers et quelques Lictors en vadrouille. Hachés menu comme chair à pâté, les Phyrus auront toutefois le temps de prévenir le haut commandement de la gravité de la situation, ce qui permet au Général Caen de… se faire totalement déborder par un barrage de spores mycétiques larguées par les premiers bio-vaisseaux de la flotte ruche. Même punition pour le Colonel Grizmund et sa colonne blindée Paladiane, culbutée par les hordes de Hormagaunts et Carnifex alors qu’elle allait renforcer les positions impériales plus au sud. Il y a des jours comme ça…

Retour à Grauss et à son tacot, qui nous rejouent ‘Le Salaire de la Peur’ à la sauce ‘Alien’ et parviennent tant bien que mal à se frayer un chemin vers la sécurité illusoire et très distante de la cité ruche de Malvo Height… jusqu’à un certain point. Harcelés par les Gargouilles, ralentis par les conditions météorologiques et une flore aussi exubérante qu’hostile, talonnés par les essaims ennemis, les Gardes de Fer finissent par se résoudre à un dernier combat aussi héroïque que vain pour vendre chèrement leurs vies. C’est alors qu’un petit point brillant, puis deux, puis dix, apparaissent dans le ciel tourmenté et se précipitent vers le convoi arrêté. Seraient-ce des oiseaux ? Seraient-ce des avions ?

Début spoiler…Non, ce sont des Drop Pods de SPESS MEHRINZ ! Grauss assiste émerveillé au déploiement d’une Compagnie de ces surhommes en armure, qui moissonnent les Xenos à grands renforts de rafales de bolters, de gerbes de prometheum enflammé et de tirs de plasma. L’espoir renait et la horde chitineuse semble sur le point de refluer, mais c’est alors que notre héros remarque la magnifique couleur jaune et le petit cœur trop kawaiiii sur l’armure de ses sauveurs, et se rend compte avec effroi qu’il s’agit de Lamenters. Ce qui ne peut signifier qu’une chose : l’Imperium ne peut pas gagner cette bataille (c’est écrit dans le lore). Et en effet, les braves mais maudits Astartes finissent par se faire dépecer à leur tour, et moins de quarante minutes après leur arrivée tonitruante, Grauss se résout à avaler le canon de son fusil laser pour en finir avec cette chienne de vie de la manière la plus digne et la plus indolore possible. J’aurais fait pareil à sa place. Fin spoiler

AVIS :

Dan Abnett a maintes fois prouvé qu’il était un maître dans la mise en scène de personnages humains dans l’univers cruellement absurde de Warhammer 40.000, mais n’a que peu pratiqué les autres races majeures de la franchise grimdark : ‘The Fall of Malvolion’ est seulement la seconde nouvelle qu’il a signée dans lesquels les Tyranides apparaissent1. Malgré ce manque de pratique, Abnett livre malgré tout une histoire très correcte, et une adaptation littéraire convaincante du topos bien connu des fans de 40K : l’invasion d’une planète impériale par des hordes inarrêtables de Xenomorphes affamés. Si vous cherchez le mètre étalon de ce type de récit, ‘The Fall of Malvolion’ est un candidat très crédible.

Malgré cela, cette soumission n’est pas exempte de tout défaut et accuse parfois franchement son âge. Ainsi, on se retrouve confronté à des personnages étrangement peu détaillés, et donc peu attachants, pour une nouvelle d’Abnett. Bien que son choix de multiplier les protagonistes pour les faire mourir de façon horrible quelques pages plus tard soit compréhensible, et que les Mordiens qui lui servent de chair à canon Voraces ne sont pas les Gardes Impériaux les plus intéressants qui soient pour commencer (avis purement personnel, mais que j’assume totalement), notre homme a démontré par le passé et depuis qu’il lui suffisait de quelques lignes pour rendre appréciable un personnage lambda2. Il ne s’est pas donné ce mal ici, et c’est évidemment dommage. A cela s’ajoute un schéma narratif sans beaucoup de surprises, plombé en sus par un titre qui retire tout suspens à la conclusion du récit (même si le massacre des Lamenters est une pépite grimdark comme on en a peu fait), là encore assez indignes d’un auteur du calibre d’Abnett. A croire que ‘The Fall of Malvolion’ n’était qu’une commande à honorer pour la BL, et qu’il n’était pas très emballé par cette perspective.

D’un point de vue fluff aussi, la nouvelle ne fait pas un sans-faute. Si je donne crédit à Abnett pour avoir pensé à intégrer à son propos les armes météorologiques et botaniques des flottes ruches, que je n’ai pas souvent retrouvé dans les histoires de ses confrères et sœurs malgré leur existence dans le lore et leur grand potentiel en termes d’atmosphère (sans jeu de mots), il sombre dans la facilité en déclenchant une attaque depuis l’orbite « par surprise ». Même si l’Ombre dans le Warp est mentionnée, cela ne suffit pas à expliquer comment une flotte peut arriver en basse orbite d’une planète en alerte et disposant de vaisseaux spatiaux de manière si furtive et rapide qu’elle prend de court le haut commandement adverse.

Cependant, les points positifs l’emportent largement sur les points négatifs ici, et même si je sors de ma relecture de ‘The Fall of Malvolion’ avec moins de satisfaction que lors de ma découverte de cette histoire, nous sommes bien en présence d’une nouvelle de qualité.

1 : Et ils avaient été réduits à portion congrue dans ‘The Curiosity’.
2 : Et plus encore, un Garde Impérial lambda. Je suis toujours étonné par le nombre de membres du Premier et Unique de Tanith dont je me souviens sans avoir besoin de réfléchir, et des années après ma dernière lecture de la série.

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Children of the Emperor – B. J. Bayley :

INTRIGUE :

Ayant échappé de justesse à la destruction du vaisseau qui transportait son régiment jusqu’à sa nouvelle affectation, le Garde Impérial Floscan Hartoum n’a d’autre choix que de faire atterrir sa capsule de sauvetage à la surface d’une planète mystérieuse dans l’attente d’être secouru. Recueilli par une tribu d’abhumains (deux paires de jambes) dont la mutation a été volontairement déclenchée par leurs ancêtres colons afin de lutter contre la forte gravité de leur monde d’adoption, Hartoum verra son courage et sa vision de l’Imperium sérieusement testés au cours de son séjour chez les enfants perdus de l’Empereur.

AVIS :

‘Children of the Emperor’ est une petite gemme, et sa lecture est fortement conseillée à tous les esprits curieux familiers des publications de la Black Library. Cette nouvelle jette en effet un éclairage particulier et très dépaysant sur l’univers de Warhammer 40.000, en prenant toutefois garde de bien respecter le background qui existait à l’époque, attention aussi délicate que louable de la part d’un auteur aussi établi que Barrington J Bayley. L’un des charmes de ‘Children of the Emperor’ est ainsi son absence d’aberrations fluffiques, preuve indubitable du sérieux travail de « documentation » effectué par Bayley avant la rédaction de ce texte1 (tous les contributeurs de la BL ne peuvent en dire autant, pas vrai Nik Vincent ?).

Mais les principales plus-values apportées par la plume experte de Bayley restent son style, affirmé, maîtrisé et très différent des canons de la BL (ce qui fait tout son intérêt), ainsi que son expérience d’écrivain de SF vétéran, qui lui permet d’attirer l’attention du lecteur sur des points jamais soulevés jusqu’ici par les autres auteurs de la maison (comme les variations de gravité d’une planète à l’autre, et les conséquences de ce changement sur un organisme humain normal) ; mais également d’amener son public à réfléchir sur des questions aussi centrales que celle de la tolérance envers la mutation (et donc du droit à la différence de manière plus large) au sein d’un Imperium dont la psychorigidité sur ce sujet – personnifiée par le personnage du Commissaire Leminkanen, zélote écumant et pas très futé – apparaît comme assez grotesque, eut égard à son histoire millénaire et au million de planètes qui le compose. Bref, on peut remercier Barrington J Bayley pour l’amical coup de pied dans la fourmilière qu’il a mis dans le background de Warhammer 40.000, qui n’était (et n’est toujours) pas au-dessus de tous reproches à l’époque, malgré le soin que lui a apporté Priestley et Cie au moment de son élaboration.

1 : Il va même jusqu’à faire mention d’éléments de background un peu avancés, tels que les fameux Schémas de Construction Standardisés. Chapeau l’artiste.

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Deus ex Mechanicus – A. Chambers :

INTRIGUE :

Deus Ex MechanicusL’arrivée sur Naogeddon, monde mort et terne par excellence, de l’ingénieur et Techno-Prêtre (double cursus, t’as vu) Lakius Danzager et de son acolyte Osil manque de très mal se finir pour nos deux personnages, embarqué à bord d’un vaisseau à l’autopilote très bas de gamme. En chute libre depuis l’atmosphère haute de la planète, la navette occupée par les envoyés du Mechanicus est rebootée à temps par le dégourdi Lakius pour éviter un crash mortel à la surface désertique de ce roc sans vie, mais accueillant des ruines très anciennes qu’un Magos Explorator (Egal) souhaite étudier. En tant que spécialiste de la cryo-stase, Lakius dispose d’une expertise précieuse en matière de compréhension de technologie Necron (à ce stade, vous aviez sans doute déjà deviné qu’on prenait ce chemin…), et Egal l’a donc réquisitionné pour assister sa petite équipe de super geeks.

A peine remis de leur atterrissage mouvementé, Lakius et Osil doivent encaisser une nouvelle expérience traumatisante : l’attaque du camp du Mechanicus par quelques escouades de Guerriers Necrons, vomies comme toutes les six heures par la Nécropole encore endormie qu’Egal a commencé à explorer. Bien que l’effet de surprise ne soit pas de leur côté, et que les servants de l’Omnimessie puissent compter sur une cohorte de Prétoriens ainsi que de solides fortifications pour les défendre, les robots squelettiques vendent chèrement leur châssis, forçant les adeptes à partir à la découverte de la crypte exhumée par le Magos avec une protection réduite.

De manière très prévisible, la progression du petit groupe (Egal, Lakius, Osil et quelques personnages secondaires à l’espérance de vie très limitée) rencontre une résistance qui va croissant, depuis des marches très hautes qui obligent les Prétoriens à rouler à deux à l’heure, jusqu’à des champs magnétiques générateurs de trouille, ou plus prosaïquement des vagues de Scarabées kamikazes. Au bout du compte, Lakius et Egal se retrouvent seuls dans la salle des bornes de chargement sarcophages de la Nécropole, tandis qu’Osil, qui s’est pris quelques échardes dans la fesse gauche pendant l’expédition indoor, a été ramené au campement de base par le dernier Pretorien pour désinfection et pose de pansement. La tension est à son comble…

Début spoiler…Commençons par évoquer le destin d’Osil, que son maître a chargé d’une mission simple mais capitale : réveiller au plus vite l’Assassin Eversor qui végète dans la soute de leur vaisseau. Lakius soupçonne en effet que la Necropole est en train de se réveiller, et que seule l’intervention d’une machine à tuer bourrée de Red Bull a une chance d’enrayer cette trajectoire menaçante. Malheureusement, la navette du Techno-Prêtre s’est fait coloniser par une nuée de… barnacles (vous croyiez que les Necrons s’en étaient tenus aux scarabées ? erreur) métalliques pendant l’absence de ses propriétaires, empêchant l’acolyte de sortir le tueur de sa torpeur. Voilà qui est dommage.

De leur côté, Lakius et Egal récupèrent un « Bâton de Lumière » dans le sarcophage (vide) du probable Phaëron du lieu, avant de prendre à leur tour le chemin de la sortie. Bien que le Magos assure à son compagnon que cette relique a le pouvoir de tenir à distance les gardiens de la Nécropole, Lakius décide de jouer la carte de la sécurité et de détruire le générateur de phase qui a ouvert le portail permettant d’accéder à l’intérieur du complexe, une fois les deux explorateurs sortis de ce dernier. Egal n’est pas d’accord, et la dispute académique dégénère rapidement en duel de carabine laser, au cours duquel Lakius colle un tir à pleine puissance en pleine tête de son estimé confrère, avant de réduire le générateur en cendres. Une conclusion regrettable, mais la fin justifie les moyens…

Début spoiler 2…Sauf qu’Egal refuse de rester au sol, et pour cause. Sous le fond de teint soigneusement appliqué, c’était un C’tan qui avait revêtu les robes écarlates du Mechanicus. On ne saura jamais ce qu’il cherchait à faire sur Naogeddon, à part troller quelques pauvres adeptes qui n’avaient rien demandé, bien sûr, mais comme on peut s’y attendre, les tirs désespérés de Lakius le font doucement rigoler. Beau joueur, il laisse ce dernier s’enfermer avec Osil dans le laboratoire installé par les chercheurs, avant de frapper doucement à la porte pour essayer de leur vendre des boîtes de biscuits pour financer sa classe de neige et/ou des bons du trésor moldave. Lorsque la paroi finit par céder sous ses coups, le C’tan s’aperçoit que ses proies n’ont pas été oisives, et ont bricolé une étrange machine avec les composants qu’ils avaient sous la main. That’s cute, but too little, too late

Début spoiler 3…Eh non. La machine en question était un générateur de stase, qui emprisonne fissa la truculente Echarde dans une bulle atemporelle. Fin. Comment, vous trouvez ça un peu tiré par les cheveux ? Mais qu’attendiez vous d’une histoire qui s’appelle presque Deus ex Machina, enfin ? Fin spoiler

AVIS :

Les nouvelles d’exploration de Nécropoles Necron, un sous-genre assez populaire de la littérature 40K, ne sont pas vraiment ma tasse de thé. J’ai toujours l’impression de lire la même histoire, basée autour d’un faux suspens (« eh non, ils ne dormaient pas en fait… SHOCKING ») et finissant généralement par une course effrénée vers la sortie de la petite bande de héros ayant eu la mauvaise idée de faire de l’archéologie chez les grands anciens galactiques. Ce ‘Deus Ex Mechanicus’ a pour lui de proposer des variations assez intéressantes à cette base éculée (l’intervention d’un C’tan transformiste1, la presque intervention d’un Assassin Eversor), ce dont je sais gré à Andy Chambers.

Malheureusement pour ce dernier, il ne suffit pas d’avoir des idées innovantes pour accoucher d’une nouvelle réussie : encore faut il les intégrer à l’intrigue et en soutenir le développement de manière un tant soit peu crédible, ce qui n’est pas le cas ici. On ne saura donc pas comment un Techno Adepte du Mechanicus a pu se retrouver en possession d’un Eversor (l’Adeptus Assassinarum n’étant pas vraiment connu pour sa générosité), comment le C’tan transformiste a pris la place d’Egal (ou pourquoi il s’est donné le mal de revenir sur sa planète natale avec des acolytes humains, si le Magos n’a toujours été qu’une couverture), ou ce qu’il se passe après que cette divinité en vadrouille se soit retrouvée piégée dans un champ de stase (ce qui pourrait sans doute intéresser l’Inquisition, et impacter fortement le fluff de Warhammer 40,000… mais je dis ça comme ça). Ou même à quoi sert la scène initiale de la nouvelle (le quasi-crash du vaisseau de nos deux lurons), dont il ne sera plus jamais fait mention par la suite et qui aurait pu être remplacée par une arrivée sur site des plus classiques sans que cela ne change rien à la suite. Trop brouillon.

1 : Qui avec le recul ressemble fortement à Trazyn l’Infini, dans le genre boute en train avide de connaissances. Vu l’âge canonique de cette nouvelle, cette similitude ne peut être autre chose qu’une coïncidence troublante…

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Business as Usual – G. McNeill :

INTRIGUE :

40K_Business as UsualTrois mois après la victoire de l’Imperium sur la Flotte Ruche Leviathan sur le monde de Tarsis Ultra, la vie a retrouvé un cours plus ou moins normal dans la capitale planétaire, Erebus (rien à voir avec l’affreux vieillard ridé et son couteau tout chelou). Pour Snowdog et son gang de trafiquants de drogue, cela signifie la reprise d’activités illicites dans la zone tampon séparant le sous-monde de cette cité ruchette1 et la banlieue mal famée où rôde une faune aussi sauvage que mortelle. Et je ne parle pas uniquement des essaims tyranides qui squattent l’endroit à la suite de la destruction de leur vaisseau mère. La nouvelle débute ainsi sur une rencontre business assez tendue entre notre héros peroxydé et trois de ses acolytes (Lex, Silver et Tigerlily), et une bande de Jackboys cherchant à écouler une grande quantité de Kalma, sorte d’ecstasy grimdark.

Bien que la came soit de qualité, comme le trip cosmique du brave Lex, ayant pris sur lui de goûter le produit, le révèle sans ambages, le sixième sens de Snowdog le titille méchamment. Il se doute que ses interlocuteurs vont essayer de la lui faire à l’envers, et lorsque les Jackboys dégainent leurs pétoires pour piquer les crédits durement gagnés du Malamut, ce dernier ne se laisse pas faire. L’échange de tirs entre les deux gangs finit par tourner en faveur de celui composé à 100% de personnages nommés (comme c’est étrange), mais attire également l’attention de la patrouille d’Arbites du Capitaine Jakob Gunderson. Ce dernier voue une détestation cordiale à Snowdog, coupable de l’impardonnable crime de vente de dope dans son périmètre, et n’est que trop heureux d’entraîner ses hommes sur les lieux de l’échauffourée après que quelques bribes d’échanges radio entre Jackboys lui aient permis de connaître l’identité de leur adversaire.

L’arrivée de cette troisième faction rebat les cartes, et scelle surtout le destin du pauvre Lex, utilisé par un Snowdog loyal sans excès envers ses hommes comme bouclier humain contre les balles à guidage laser de Gunderson. L’utilisation judicieuse d’un chapelet de grenades artisanales récupérées sur le cadavre d’un Jackboy permet toutefois aux trois survivants de se ménager une sortie explosive (et de tuer une grande partie des camarades de Gunderson, qui étaient pourtant à deux jours de la retraite), mais leur course effrénée les amène en territoire tyranide, ce qui n’est pas l’idée du siècle, et encore moins du millénaire. Rattrapés par les deux Arbites survivants alors qu’ils contemplaient les cadavres récurés de quelques gangers malheureux dans le boyau des égouts qu’ils avaient empruntés pour filer à l’anglaise, Snowdog, Silver et Tigerlily se retrouvent en mauvaise posture. Gendarmes et voleurs se réconcilient cependant en un éclair lorsqu’une horde d’Hormagaunts interrompt leur règlement de comptes, et les humains décident sagement de se carapater le plus loin possible de la menace Xenos, à plus forte raison lorsque le Guerrier Tyranide qui manage la horde chitineuse arrive à son tour pour profiter des calories faciles que représentent nos héros.

La poursuite tunnelière qui s’ensuit n’est pas sans causer quelques pertes déchirantes (dans tous les sens du terme) parmi les hominidés, le dernier collègue de Gunderson gagnant une séance d’acupuncture tyran(n)ique, avant que la pauvre Tigerlily n’aille rejoindre Peter Pan, Sanguinius et Geneviève de Fontenay dans le pays imaginaire. Lorsque l’affreuse bestiole assomme Gundy et met la griffe broyeuse sur la veste gifesque (c’est beau le 41ème millénaire tout de même) de Snowdog, la messe semble dite pour nos héros…

Début spoiler…C’était toutefois sans compter sur le pouvoir de l’amitié la foi la Force la DROOOOOOGUE. En désespoir de cause, Snowdog balance en effet sans s’en rendre compte la totalité du stock de Kalma piqué aux Jackboys dans le gosier du Guerrier, provoquant un KO technique suivi d’une overdose fatale en moins de vingt secondes. Magnanime, El Doggo décide d’épargner la vie de Gunderson au lieu de profiter de son piteux état pour lui faire passer la matraque énergétique à gauche, et les deux gangers survivants s’en repartent vers d’autres aventures. Ils ne savaient pas encore qu’ils vivaient sur du temps empruntéFin spoiler

Tarsis Ultra n’était censé avoir que 60 millions d’habitants avant de se prendre un enchaînement fatal Tyranides-Iron Warriors dans la biosphère, ce qui est positivement clairsemé à l’aune des standards impériaux.

AVIS :

Graham McNeill n’a jamais (pour autant que je le sache et au moment où cette chronique est publiée) écrit pour Necromunda, mais les amateurs de ce monde-ruche si bucolique ne seront pas dépaysés par ce ‘Business as Usual’. Des gangs ennemis qui s’étripent pour de la dope dans des usines en ruines et des terrains vagues toxiques, avant qu’une escouade d’Arbites nommée bavure et quelques bestioles atrabilaires ne viennent se mêler aux réjouissances : on est ici en terrain connu (mais dangereux tout de même, relancez vos 1 si vous pouvez). À titre personnel, il n’y a pas grand-chose qui me fasse vibrer dans cette nouvelle qui ne détonne absolument pas du mètre étalon de la GW-Fiction, et qui a plutôt mal vieilli sur certains aspects, notamment l’argot utilisé par Snowdog et ses acolytes, qui sonne aujourd’hui terriblement daté. À chacun son sale goût.

Pour la petite histoire de cette petite histoire, ‘Business as Usual’ a en fait été écrite avant ‘Warriors of Ultramar’, dans laquelle Snowdog fait également une apparition au côté d’Uriel Ventris et des héroïques défenseurs de Tarsis Ultra, même si elle prend place après les événements relatés dans ce roman. Voilà de quoi briller en société, sans nul doute.

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Only in Death Does Duty End

Salvation – J. Green :

INTRIGUE :

40K_Salvation‘Salvation’ suit la laborieuse épopée de frère Rius (André de son prénom), Terminator de son état au sein de la première compagnie des Ultramarines. Envoyés défendre le monde de Jaroth contre un car de tyranides s’étant perdu sur la route d’Ichar IV, Rius et ses petits camarades tombent dans une embuscade tendue par des Genestealers, au cours de laquelle notre héros prend un vilain coup sur le crâne, et se réveille en conséquence totalement amnésique. Recueilli par la population indigène, Rius fera-t-il triompher son village d’adoption aux Intervilles locales, ou renouera-t-il avec son passé de meilleur de l’Empereur ?

AVIS :

Comme dit en introduction, se frotter aux descendants de Guiliman s’apparente plus un à exercice de haute voltige qu’à une promenade de santé, l’abondante littérature leur ayant été consacrée au fil du temps obligeant l’auteur chargé de cette délicate mission à se livrer à un véritable travail de recherche afin de respecter le background établi par ses prédécesseurs. Certes, le fluff des Schtroumpfs énergétiques n’était pas aussi fouillé à l’époque de l’écriture de ‘Salvation’ qu’il ne l’est aujourd’hui (où l’on connaît jusqu’au nom du cousin de la belle-sœur du professeur de piano d’Uriel Ventris), mais cela n’a pas empêché Green de pêcher, par nonchalance ou ignorance crasse, comme un bleu.

C’est en effet à un festival d’approximations, de contre-sens et absurdités en tous genres que Jonathan Green se livre dans ‘Salvation’, témoignage douloureux (pour les zygomatiques et les fluffistes acharnés) de ses lacunes en matière de 41ème millénaire. Cela commence très fort dès la deuxième ligne du récit, avec la mention de « vétérans de la Première Compagnie d’Ultramar », illustres guerriers n’existant que dans la représentation confuse que se fait l’auteur du Chapitre des Ultramarines. Quelques pages plus loin, Green fait mention de « cette vieille Terre » (Old Earth), ignorant sans doute que les gens respectables parlent plutôt de Terra. L’inclusion de la nouvelle dans la chronologie de Warhammer 40.000 ne m’a également pas semblé au-dessus de tous soupçons, Rius étant présenté comme un vétéran d’Ichar IV alors que les tyranides qu’il affronte semblent plutôt appartenir à la flotte ruche Béhémoth (corps rouges/violets), annihilée 200 ans avant l’arrivée de Léviathan dans l’espace impérial. On lui laissera cependant le bénéfice du doute, d’autres critiques plus franches, et celles-là indiscutables, pouvant lui être adressées.

Car la plus grande atteinte au fluff commise par Green très peu documenté ne vient pas tant du manque de connaissances de ce dernier sur les Ultramarines, mais bien de son manque de connaissances sur les Space Marines en général, décrits par l’auteur comme de vulgaires super-soldats disposant d’un équipement de pointe, tableau ultra (haha) réducteur et sensiblement erroné de la condition d’Ange de la Mort. Par exemple, Green affirme sans broncher que la présence des Ultramarines sur le monde de Jaroth s’explique par la présence du Gauntlet of Macragge (présenté comme rien de moins que le vaisseau amiral de la flotte Ultra – inutile de préciser que c’est la seule fois où il est fait mention de ce nom dans un texte de la BL1– ) à proximité de la planète suite à une « visite de routine dans l’Est de l’Ultima Segmentum ». Et les Space Marines, bien braves, de voler à la rescousse d’un monde tribal ne faisant même pas partie de l’Imperium, et d’envoyer la crème de leurs vétérans (qui n’avaient rien d’autre à faire que de participer à cette patrouille, sans doute) castagner la Grande Dévoreuse pour sauver trois poules et deux cochons, au lieu de lui balancer un petit Exterminatus sur le coin du museau depuis la sécurité de l’orbite haute. Bref, les Ultramarines de Jonathan Green tiennent plus des casques bleus galactiques (c’est la couleur qui l’a induit en erreur je pense) que des moines-soldats cherchant avant tout à sauvegarder leur empire personnel d’une galaxie hostile et méchante.

Beaucoup plus grave, Green fait reposer son intrigue sur une aberration, que dis-je, une hérésie pure et simple, qui ne manquera pas d’arracher un sanglot de rage à tous ceux n’ayant ne serait-ce que feuilletés distraitement un Codex Space Marines au cours de leur vie. Au moment de l’embuscade qui laisse Rius amnésique, son escouade était en effet engagée dans une opération de nettoyage des dernières poches de résistance tyranides de la planète (oui, de la planète, ils avaient visiblement un peu de temps devant eux), mission perturbée comme dit plus haut par une bande de Genestealers adeptes du « coucou qui c’est ? ». Résultats des courses : l’épave de Thunderhawk qui servait de décor à l’embuscade en question explose suite à une utilisation peu finaude du lance-flammes par frère Hastus, projetant notre héros contre un arbre à l’écorce visiblement plus dure que son crâne, vus les résultats désastreux sur ses facultés mnémoniques. Le paragraphe suivant nous apprend que Rius se réveille, seul, dans la maison du couple qui l’a recueilli2 suite à sa funeste rencontre avec un tronc (Georges de son prénom), ce qui signifie (accrochez-vous) que les Ultramarines sont repartis de Jaroth sans chercher à s’enquérir du destin d’une entière escouade de Terminators, faute de quoi ils auraient fatalement retrouvés Rius, qui n’a pas dû atterrir bien loin du lieu de l’explosion.

Je veux bien que les Ultra soient un Chapitre pétés de thunes, mais de là à « oublier » cinq armures Terminators sur une planète de huitième ordre (sans parler de la valeur intrinsèque des bonhommes occupant lesdites armures : ce n’est pas comme si la Première Compagnie des Ultramarines s’était faite massacrée jusqu’au dernier pignouf quelques années plus tôt, hein), il y a une sacrée marge tout de même. Dans la catégorie relique à la valeur incommensurable, une Crux Terminatus (avec un vrai morceau de l’armure de l’Empereur dedans !) ça se pose là tout de même, alors cinq… Malheureusement pour tout le monde, et surtout pour lui, Green ne voit cependant aucun problème à faire disparaître totalement le reste des Marines de ‘Salvation’ passé ce moment, ce qui donne au lecteur la furieuse envie d’emboîter le pas de ces derniers, et de tourner la page (dans tous les sens du terme) de cette piètre nouvelle.

Avec tout ça, on en oublierait presque que Green n’est pas, même lorsqu’il maîtrise un tant soit peu son sujet, un écrivain des plus intéressants, son absence de style le rendant parfait pour pondre des encadrés d’ambiance génériques dans les Codices GW, mais beaucoup moins convaincant dès qu’il s’agit de garder le lecteur en haleine plus de trois paragraphes d’affilée. Seul personnage un tant soit peu développé de ‘Salvation’, Rius (du latin rius, ce qui veut dire rillettes) pâtit particulièrement du manque d’inspiration de son créateur, et justifie à lui seul l’image de fadeur bleuâtre ayant poursuivi les Ultramarines depuis la création de Warhammer 40.000. Pour être honnête, le personnage le plus charismatique de la nouvelle reste à mes yeux, et de loin, le brave Carnifex faisant office de boss de fin, talonné de près par le Prince tyranide nain3 dézingué hors champ quelques pages plus tôt par la bleusaille en colère.

Imparfait sur le fond comme sur la forme, ‘Salvation’ est la preuve irréfutable que la BL publiait vraiment n’importe quoi à ses débuts, sale habitude dont elle n’est malheureusement toujours pas guérie à l’heure actuelle.

1 : On notera tout de même le fétichisme des Ultramarines (ou de leurs auteurs) en matière de « gantelets » quand on en vient au baptême de leurs vaisseaux. À l’hypothétique Gauntlet of Macragge viennent ainsi s’ajouter le Gauntlet of Victory et le Gauntlet of Glory, ce qui nous fait trois moufles et ouvre des perspectives intéressantes quant à un hypothétique « troisième bras » de Roboute Guilliman. Moi je dis que si Fulgrim s’est enquiquiné à venir égorger son frangin bien après la fin de l’Hérésie d’Horus, c’est qu’il avait ses raisons.
2 : « Chérie, j’ai une surprise pour toi ! »
« Tu m’as ramené des fleurs ? C’est trop ge- »
« Euh, non, pas exactement des fleurs. »
3 : « The hive tyrant was a truly terrifying figure to behold. The monster stood over two metres tall […] »
Sachant qu’un Space Marine normal taille dans les deux mètres cinquante, et qu’engoncé dans une armure Terminator, il frôle les trois mètres, je ne vois pas pourquoi il souillerait son slip à la vue d’un gros criquet.

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Hell in a Bottle – S. Jowett :

INTRIGUE :

40K_Hell in a BottleLe Sergent Instructeur Tydaeus des Iron Hearts doit faire face à une situation inédite: la machine Mimesis, simulateur de conflits utilisé pour l’entraînement des recrues du Chapitre, a été envahie par un ost démoniaque, mené par le prince démon Kargon. N’ayant pas réalisés que leur dernière conquête était un monde virtuel, les démons se retrouvent bloqués dans la réalité numérique de la machine, à la merci d’un Tydaeus qui doit maintenant décider s’il préfère la jouer safe (débrancher Mimesis et l’envoyer à l’incinérateur) ou héroïque (débuter une « partie » et aller botter les fesses calleuses de Kargon en live).

AVIS :

‘Hell in a Bottle’ est sans doute la nouvelle la plus étrange d’Into the Maelstrom’ (où cette nouvelle a été publiée pour la première fois), voire de toutes les publications 40K de la Black Library. L’argument du récit, déjà très peu banal en lui-même (« et si les Space Marines s’entraînaient sur des bornes de shoot ‘em up ? »), se combine en effet à une interprétation pour le moins libérale du fluff de la part de Simon Jowett, qui n’hésite pas à nommer un des Primarques inconnus dans le cours du récit, ou encore à dépeindre son héros en employé de bureau désabusé plutôt qu’en inflexible moine-guerrier. Il faut dire que Tydaeus n’est, à proprement parler, pas vraiment un Space Marines, son corps ayant rejeté les implants génétiques lui étant destiné au cours de son initiation. Le Chapitre des Iron Hearts étant néanmoins très humain (malgré ce que laisse penser leur nom), notre héros a été reclassé à un poste de non-combattant au lieu d’être transformé en serviteur, ou pire. Dans les ténèbres d’un lointain futur, la loi handicap de 2005 est toujours en vigueur. Bravo.

De l’autre côté de la matrice, le prince démon Kargon n’est pas vraiment reste, sa diction sifflante et ses pratiques sexuelles peu banales (ce n’est pas pour rien qu’on l’appelle Seed-Bearer, monsieur inséminant personnellement les planètes qu’il a conquis avec des spermatozoïdes chaotiques) faisant de lui une Nemesis pittoresque pour Tydaeus, qui, bien sûr, ne résistera pas à l’envie d’aller casser du démon, pensant (à tort) qu’il ne pourrait rien lui arriver de plus fâcheux que d’être déconnecté du serveur une fois tous ses points de vie envolés.

Parenthèse parodique (volontaire ou non) de l’univers gothique de Warhammer 40.000, ‘Hell in a Bottle’ est un souvenir d’une époque révolue de l’histoire de la Black Library, pendant laquelle les contributeurs pouvaient se permettre d’écrire tout ce qui leur passait par la tête. Et, rien que pour ça, cette nouvelle mérite d’être lue.

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Tenebrae – M. Brendan :

INTRIGUE :

‘Tenebrae’ relate les derniers moments du gouverneur planétaire Dane Cortez, alors qu’il contemple les forces du Chaos prendre d’assaut la capitale de son monde. Seul dans sa chambre de commandement, Cortez se remémore les évènements ayant conduits à la débâcle actuelle, et assiste à l’arrivée du général des hordes chaotiques, Lord Vog des Word Bearers, sur la place centrale de la capitale. Le réquisitoire sans concession qu’il dresse de ses errements et erreurs en tant que régent de Tenebrae (le nom de la planète qu’il dirige), et la colère qu’il éprouve envers l’Imperium pour avoir abandonné cette dernière dans son heure de besoin finissent par ouvrir un portail Warp dans son sanctuaire, duquel s’extirpent une poignée de Sanguinaires en goguette. Cortez aura alors un ultime choix à faire : au nom de qui, ou de quoi, donner sa vie ?

AVIS :

Mark Brendan (dont c’est la seule contribution connue à la Black Library) signe avec ‘Tenebrae’ un texte assez étrange. L’approche adoptée à beau être originale, privilégiant l’examen de conscience de Cortez à une banale scène de guerre urbaine, on ne peut s’empêcher de se demander « et alors ? » à la fin de la lecture de cette courte nouvelle (15 pages). Il ne se passe en effet pas grand-chose dans ‘Tenebrae’, si l’on met de côté les atermoiements et imprécations de notre héros, entrecoupés de quelques flashbacks explicatifs (où l’on comprend comment Cortez est arrivé à la tête de la planète, en récompense de ses bons services dans la Garde Impériale) et rapports sur l’avancée des troupes adverses dans Wormwood (la capitale de Tenebrae, tu parles d’un nom). Malgré sa bonne volonté, Brendan n’a pas le talent de Brian Craig pour tenir son lecteur en haleine de manière non-violente, ni le souci du détail d’un Abnett ou d’un Dembski-Bowden, lacunes faisant de ‘Tenebrae’ une curiosité assez fade au final. Rideau.

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Daemonblood – B. Counter :

INTRIGUE :

DaemonbloodSur la planète (forcément bleeue) de Saafir, Papy Nurgle est sur le point de rafler le vote populaire, au grand dam des défenseurs impériaux dépéchés par Pépé (l’autre) pour passer la serpilière. Isolés par les aléas de la guerre, la Sœur de Bataille Aescarion et le Sergent Ultramarines Castus se retrouvent dans les souterrains de la capitale planétaire (éponyme), où se trouve s’étend une station d’épuration possédée par le Warp, forme physique imposante du Prince Démon Parmenides le Vil. Comme il est difficile de passer par l’épée, ou, dans le cas de cette brutale d’Aescarion par la hache énergétique, une flaque de morve et d’excréments couvrant plusieurs hectares, M. et Mme Meilleurs de l’Empereur sont bien embêtés. Profitant de leur désarroi, le vil Parmenides lave/salit le cerveau du Space Marine avec ses confidences crasseuses sur l’état de la galaxie, transformant le pauvre Castus en séide chaotique. Immunisée à cet insidieux virus par sa foi dévorante et absolue, Aescarion n’est cependant pas de taille à achever les souffrances et les errances métaphysiques de son compagnon, et ne doit son salut qu’à la robustesse de son jetpack, qui la ramène à la surface avant qu’elle ne se retrouve féminicidée par le renégat.

On n’échappe cependant pas aussi facilement à cette force puissante qu’est la Destinée au 41ème millénaire, et les routes d’Aescarion et de Castus se croiseront à deux nouvelles reprises pendant les décennies suivantes. La première fois lors de la purge d’un Space Hulk squaté par les suivants de Parmenides, dont Castus est devenu le porte-parole officiel. Castoche aurait pu se faire trouer les pores par un peloton de Sistas judicieusement gardé en réserve par Aescarion, n’eut été la compétence « corps de mouches » développée par le M. Impropre de Saafir, et qui lui permet de tirer sa révérence sans dommage. La seconde, et dernière fois, se déroule sur le vaisseau du Seigneur du Chaos, le Defixio1, et avec la bénédiction de l’Inquisition, qui souhaitait contenir l’expansion cancéreuse de l’empire spatial de Parmenides en envoyant un petit Exterminatus bien senti sur Saafir. Il fallait bien ça à la Canonnesse de l’Ordre du Calice d’Ebène, auquel Aescarion appartient, pour autoriser l’impulsive et revancharde vétérante à se mesurer une nouvelle fois avec sa Némésis. Les deux précédentes tentatives ayant eu un coût élevé en termes de vies de Sœurs de Bataille aguerries, on comprend sa réticence à permettre à sa sous-fifre de sortir à nouveau le karscher. La connaissance intime de notre héroïne de la mentalité et des forces et faiblesses de Castus en faisait toutefois la meilleure candidate pour mener l’expédition impériale jusqu’à bonne orbite, en dépit de la défense acharnée orchestrée par le fidèle Castus du pré de la décharge carrée de son seigneur et maître.

Ayant soigneusement préparé son combat en oignant sa hache de gel Harpic, Aescarion parvient assez facilement à vaincre son adversaire, mais ne l’achève pas immédiatement. Elle souhaite en effet le faire revenir du côté lumineux, et aseptisé, de la force avant qu’il ne soit trop tard, et parvient (assez facilement *2) à convaincre Castus de retourner sa veste énergétique. Cachant une balise de visée, ou quelque chose comme ça, entre deux bourrelets du champion déchu, elle envoie son ancien camarade apporter ses salutations les plus distinguées à Parmenides dans les profondeurs de Saafir, permettant à l’ex Ultramarine de partir avec les mains sales, certes, mais une ardoise propre2. C’est ce qu’on appelle passer l’éponge, grimdark style.

1 : Je précise car Counter a écrit une autre nouvelle portant ce nom, pour ceux que ça intéresse.
2 : Le fait que Parmenides ne se souvienne même pas du nom de son champion après toutes ces décennies de collaboration à également dû convaincre ce dernier d’envoyer tout balader.

AVIS :

Bien des années ont passé et bien des textes ont été écrits depuis, mais il faut se rappeler que c’est avec ‘Daemonblood’ qu’un tout jeune Ben Counter a fait ses débuts pour la Black Library, dans un numéro d’Inferno ! Si je ne placerais pas cette petite nouvelle parmi les meilleures soumissions de cet auteur, capable du moins convaincant1 comme du meilleur, cette première tentative a plutôt bien vieillie (notamment quand on la compare à certaines nouvelles publiées au début des années 2000), et s’avère assez solide dans sa réalisation, même si très peu originale dans son propos. Les milliards de Space Marinades qui nous ont été servies par la BL au cours des dernières décennies y sont sûrement pour quelque chose…

Ici, on peut tout de même mettre au crédit de Counter une conclusion un peu plus originale que le traditionnel « le-méchant-chaoteux-meurt-sur-un-gros-malentendu-avant-d’avoir-pu-mettre-son-plan-presque-infaillible-à-exécution», avec l’exploration d’un thème assez rare dans l’univers grimdark de 40K : la rédemption.  Cela compense largement à mes yeux les points techniques sur lesquels on pourrait venir lui chercher des noises, comme l’apparente facilité avec laquelle une « simple » Sœur de Bataille vétérante arrive à tailler des croupières à un Seigneur de la Peste. On apprendra d’ailleurs par la suite que la bonne Aescarion est une véritable héroïne d’action, ayant plus d’un Space Marine à son tableau de chasse, ce qui pourrait être perçu comme du féminisme de GW-Fiction avant-gardiste de la part de Ben Counter. Quel visionnaire alors…

1 : Vus les loustics qui ont bossé pour la BL, je ne peux pas décemment utiliser le qualificatif de pire pour la prose de Ben Counter. Il y a bien plus mauvais que lui.

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Know Thine Enemy – G. Thorpe :

INTRIGUE :

40K_Know Thine EnemyLorsque la planète Slato et ses deux cent mille colons se trouvent menacés par les perfides Eldars, il incombe à la 4ème Compagnie des Salamanders de voler à la rescousse de cet agri-monde guère capable de se défendre seul contre les insaisissables Xenos. Nous suivons donc le Chapelain Ramesis et les trois escouades qu’il chaperonne alors que ce beau monde se dirige en Thunderhawk vers le portail Warp où se concentre la majorité des combats. Après avoir conduit les rites appropriés, formellement accueilli un frère de bataille novice (Xavier1) au sein de la Compagnie, et surtout briefé ses hommes – et le lecteur avec eux – sur les tenants et les aboutissants de leur mission, Ramesis est sauvé de l’indignité de devoir se lancer dans le stand up pour meubler la nouvelle par l’attaque d’un vaisseau eldar, qui force le Thunderhawk à se poser en catastrophe dans la pampa. Rien de très grave pour nos fiers surhommes, qui partent en petites foulées en direction du champ de bataille, après s’être rapidement coordonnés avec le reste du contingent Salamanders, sous les ordres du Capitaine Nubean et de l’Archiviste Zambias.

La session de décrassage des verts les amène à traverser un bois, où les attendaient quelques Rangers pas très dégourdis, et qui se font vite laminer par les intraitables (mais pas beaucoup plus malins2) Astartes. Cette échauffourée donne l’occasion à Thorpe de nous resservir une nouvelle tournée de dialogues ciselés, avant que les détachements de Ramesis et de Nubean n’accomplissent leur jonction, ce qui mène évidemment à plus de palabres entre les trois officiers. Moment de grâce absolu où les lignes défilent sans que les mots prononcés n’aient le plus traître intérêt : c’est un peu comme si on avait demandé à ChatGPT d’écrire un rapport de bataille 40K depuis le point de vue d’un mauvais commentateur sportif. Après avoir débattu pendant à peu près trois mille ans, notre fine équipe repart, toujours en courant, vers le portail Warp tant attendu (par le lecteur en tout cas) afin d’aider la Garde Impériale à défendre cette mystérieuse relique contre les attaques incessantes des Eldars. On apprend aussi qu’un Techno-Prêtre de l’Adeptus Mechanicus (Simeniz) a été dépêché sur place pour étudier la machinerie Xenos, qui doit donc être impérativement défendue et non détruite de manière préventive (ce qui serait tout de même ’achement plus pratique). ‘Ach !’ fait Ramesis, que son dédain pour les disciples de l’Omnimessie transforme soudainement en germanophone. On est plus à un cliché près, à ce stade.

Après avoir complété leur marathon, les Salamanders se positionnent autour du portail, confiants dans la tactique du camping éhonté pour remporter la victoire à la clock. Après tout, c’est ce qu’à fait l’Empereur pendant le Siège de Terra, et ça lui a bien réussi. Nouvelle scène de baston, nocturne cette fois-ci (sans doute un hommage à la planète natale de nos héros), pendant laquelle Thorpe finit d’égrener laborieusement les entrées du Codex Eldars V3, et où rien de bien intéressant ne se passe. Hors champ, Nubean décide d’aller taquiner le goujon avec son escouade de commandement et revient après quelques temps accompagné d’un Prophète et de deux Archontes. Stupéfaction chez Ramesis, qui ne comprend pas comment le Capitaine a pu parlementer avec l’ennemi, et manque de commettre une boulette en décochant un coup de crozius aux invités de son supérieur. En même temps, la haine est son métier, on ne peut pas lui reprocher d’être un peu intolérant sur les bords.

Revenus devant le portail pour, je vous le donne en mille, tailler le bout de gras, Salamanders et Eldars parviennent presque à se mettre d’accord sur la marche à suivre pour coopérer et ainsi empêcher la cabale du redoutable Kha-rehk d’activer la porte afin de piller Slato. C’était d’ailleurs l’objectif initial des Zoneilles, dont la tranquillité du Vaisseau Monde se serait retrouvée menacée à plus ou moins long terme en cas d’incursion réussie de la part de leurs méchants cousins sur la colonie impériale. Je dis « presque » car au moment où le Prophète commence à incanter pour désactiver la wifi, le portail commence à s’ouvrir et Ramesis a une réaction malheureuse : coller un pain au Xenos le plus proche. Après tout, il y a une bonne chance que ce soit de sa faute, pas vrai ? La situation dégénère totalement et les trois Eldars finissent en salami, Xavier s’illustrant particulièrement en assénant le coup de grâce au Prophète avec le crozius de Ramesis…

Début spoiler…Toutefois, cela n’empêche pas la nouvelle de se terminer sur une défaite critique de l’Imperium, la décision hâtive et xénophobe du Chapelain ayant permis aux Eldars Noirs d’ouvrir le portail et de déferler en masse sur les positions impériales. Ramesis a le temps de réaliser qu’il a vraiment chier dans la colle, l’alliance des Space Marines, Gardes Impériaux et Eldars ayant pu permettre de repousser les Drukharis, avant de se faire ôter son dernier point de vie par une foultitude de cabalites surexcités. Dans la vie, il faut savoir choisir ses combats.Fin spoiler

1 : Oui, LE Xav’ en personne. Gav Thorpe n’a jamais pu résister à un caméo de personnage nommé, c’est son péché mignon.
2 : Ramesis décide en effet de couper à travers bois alors que 1) son second lui avait fait part d’un fort risque d’embuscade, et 2) l’auspex de ce dernier avait confirmé la présence d’humanoïdes embusqués dans le bosquet.

AVIS :

Un jeune Gav Thorpe se frotte à la nouvelle de taille intermédiaire (32 pages), pour un résultat comiquement laborieux. C’est bien simple, plus de la moitié du texte de ce ‘Know Thine Enemy’ est constituée de passages de remplissage, alternant entre passages fluff (ne respectant d’ailleurs pas du tout le background1), expositions sans honte et dialogues creux. Ah, et de remise de casque aussi. Parmi les rares éléments rédempteurs de cette bouillie littéraire, citons tout de même l’idée de terminer la nouvelle sur une défaite sans appel des protagonistes (pas si fréquent dans la GW-Fiction), et l’enrichissement de l’historique du (pas encore) Chapelain Xavier. Pour le reste, nous qualifierons poliment cette nouvelle de travail de jeunesse assez peu abouti, et passerons à autre chose. Ça vaut mieux pour tout le monde.

1 : Entre les Space Marines qui considèrent l’Empereur comme un dieu, les 10 Compagnies de Salamanders (au lieu de sept) dénombrées par Thorpe, et le mépris total dont ces derniers font preuve pour la vie de leurs alliés humains, le fluffiste souffle fort à la lecture. L’auteur a fini maître du background chez GW, donc il s’est rattrapé après cela.

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Innocence Proves Nothing

Nightmare – G. Thorpe :

INTRIGUE :

Nous suivons les péripéties oniriques du jeune Joshua, dont l’adolescence a pris un sale tour depuis que sa famille et ses amis l’ont rejeté pour crime de sorcellerie, forçant le jeune homme à vivre seul dans le désert inhospitalier de la planète de Sha’ul. Seul ? Pas tout à fait. Une mystérieuse voix, que l’on appellera donc Daniel, lui tient compagnie et lui prodigue des conseils dans son exil, sans que le peu curieux Joshua s’interroge beaucoup sur l’origine de ce phénomène. Pour la première fois depuis que son ami imaginaire lui rend visite, la Voix a retentit dans son esprit alors qu’il était endormi, et lui propose rien de moins que de participer à une grande aventure, comme quand il était enfant et jouait au Space Marine, ainsi que font les bambins de l’Imperium.

Sur les indications de The Voice, Joshua part donc en vadrouille et commence à farmer du mob démoniaque de bas étage, grâce aux pouvoirs merveilleux de son esprit, capable de matérialiser des armes et des armures à volonté pour affronter toutes les épreuves de ce qui ressemble fort à un RPG en réalité virtuelle (ça doit être commun au 41ème millénaire). Bien que Joshua ne soit pas plus violent que la moyenne, l’aspect répugnant des créatures qu’il rencontre et l’assurance maintes fois répétées par la Voix que tout ça n’est qu’un rêve, conduisent notre héros à commettre un véritable massacre grâce à ses pouvoirs psychiques fantasmés.

Guidé par son GPS intégré, Joshua finit par arriver devant un bâtiment dont l’entrée est gardée par une grille de fer, dont il tort aisément les barreaux avant de se glisser dans un étroit tunnel en prenant la forme d’un serpent. Au bout du compte, il parvient dans une salle obscure où l’attend le « boss de fin », un tas de saindoux à tentacules que la Voix l’incite à tuer pour terminer sa quête. Bien fatigué par ses aventures et lassé de ces tueries incessantes, Joshua fait mine de refuser mais son compagnon excite son amertume et sa rage d’avoir été abandonné par ses proches à cause de sa différence jusqu’à ce que le jeune homme pète les plombs et étrangle à mains nues sa victime dans un accès de colère. Ceci fait, la Voix lui annonce qu’il n’a qu’à imaginer qu’il est de retour à son point de départ pour sortir de ce rêve étrange et pénétrant, et lui promet de le laisser désormais tranquille…

Début spoiler…A son réveil, Joshua a la surprise de découvrir qu’il n’est pas dans sa cahutte du désert, mais dans un jardin luxuriant qui ne peut être que celui du Gouverneur Planétaire Ree en personne. Surprenant la conversation de passants alors qu’il se cache dans les fourrés, il comprend alors qu’un mystérieux assassin a réussi à s’infiltrer dans le palais, massacrant les gardes et les sentinelles au cours de sa progression, défonçant tous les obstacles et se glissant dans les moindres interstices, jusqu’à parvenir dans la chambre du Gouverneur, retrouvé étranglé dans son lit au petit matin. La nouvelle se termine avec l’horrible réalisation par Joshua qu’il s’est fait grandiosement balader par celui qu’il considérait comme son seul ami, pendant que dans le Warp, un démon mineur de Tzeentch ricane follement en se tenant la bedaine…Fin spoiler

AVIS :

Gav Thorpe tenait une idée de nouvelle assez intéressante avec ce ‘Nightmare’ (Adventure Times à la sauce 40K, rien que ça), mais il pêche un peu par son exécution, qui ne laisse pas assez planer de mystère sur les actions accomplies par Joshua lors de sa virée nocturne à mon goût. Dès lors que Thorpe nous révèle que son héros a été chassé de son village après avoir été accusé d’être un sorcier (donc un Psyker en puissance), n’importe quel lecteur au fait de son fluff prendra le ‘it’s just a dream bro’ que la Voix sert à Joshua à toutes les sauces avec les pincettes de rigueur. J’ajoute que ‘Nightmare’ exploite le même filon qu’une vieille nouvelle de 40K, autrement plus mémorable car joyeusement foutraque (normal pour une soumission d’Ian Watson, vous me direz) : ‘Warped Stars’. L’imitation est la forme la plus sincère de flatterie, et on peut pardonner à un auteur – à l’époque – aussi vert que Gav Thorpe de vouloir s’inspirer d’un auteur vétéran et célébré comme Watson, mais cela ne vient pas non plus jouer en faveur de son travail. Bref, une petite nouvelle fort convenable mais absolument pas mémorable.

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Ancient History – A. Chambers :

INTRIGUE :

40K_Ancient HistoryRecruté contre son gré comme équipier polyvalent du Retribution, fier vaisseau de la flotte impériale à rade de personnel, à l’issue d’une opération porte fermée (traduction : une fois qu’on est rentré, on ne peut plus sortir), Nathan, notre héros, découvre progressivement les joies et les peines de la vie de canonnier de marine, noble et utile occupation qu’il projette toutefois d’abandonner dès qu’une occasion de déserter se présentera à lui. Cette frilosité à s’engager sur le long terme dans une institution impériale pourtant aussi respectable que la Navy1 s’explique en partie par la présence d’un nuisible connu de Nathan, Kendrikson, dans l’équipage de Balthasar (le nom du macrocanon auquel notre homme a été affecté). Les deux forçats se sont quittés fâchés au cours d’une précédente collaboration, et bien que Nath’ ne serait pas contre une petite vendetta pour régler ses comptes avec son ex-nouveau collègue, il préférerait à tout prendre mettre quelques années lumières entre eux, un « accident » du travail étant si vite arrivé… En plus de ces problèmes relationnels, le Warp ne s’avère pas être un long fleuve tranquille, et sa traversée pèse lourdement sur l’estomac et la psyché des rats de cale. En témoigne le coup de sang passager d’un passager, Fetchin, qui succombe à une crise de claustrophobie démoniaque, puis à une décharge de fusil à pompe à bout portant, non sans avoir envoyé quelques badauds à l’hôpital et à la morgue auparavant.

Nathan a toutefois la chance de pouvoir compter sur le patronage bienveillant de Kron, canonnier vétéran dont l’accent chantant, les histoires passionnantes, les relations privilégiées avec le management et la connaissance intime des coursives du Retribution permettent au bizut d’acquérir des connaissances et compétences précieuses, monter dans la hiérarchie balthasaresque et, accessoirement, échapper à la tentative d’assassinat dont il fait les frais de la part de ce mauvais sujet de Kendrikson, qui se révèle être un Luminen2 infiltré.

Cette prise de fonction mouvementée culmine avec la toute première bataille spatiale à laquelle Nathan participe, baptême du feu à plus d’un titre au cours duquel il aura l’occasion de se frotter à l’ennemi de plus près que prévu sur sa fiche de poste, le crash d’une torpille d’abordage à proximité de son espace de co-working le forçant à prendre les armes pour défendre la vertu et l’intégrité de Balthasar contre les assauts païens de vils cultistes chaotiques, dont l’encadrant se trouve être un Space Marine renégat. Il faudra une nouvelle fois l’intervention décisive de Kron, qui sous ses abords décatis, se révèle être un individu décidément plein de ressources et d’énergie (il se relève d’un tir de pistolet bolter à bout portant et tase l’Astartes à mains nues), pour permettre à notre héros de se sortir de ce coup de Trafalgar. Les mystères de l’origine et des motivations du mentor de Nathan ne seront pas levés par Chambers avant la conclusion de cet ‘Ancient History3′, mais une chose est sûre, quand on est Kron, on est Kron.

1 : Sécurité de l’emploi, gîte et couvert offerts, destinations variées, activités physiques régulières… Ça c’est un job de rêve.
2 : Plus de quinze ans avant la sortie du Codex Adeptus Mechanicus, Chambers convoquait déjà des électro-prêtres dans ses nouvelles.
3 : Qui a peut-être été suivi d’une autre nouvelle, et aurait dû l’être ? Je suis sur le coup les aminches.

AVIS :

Nouvelle protéiforme et un peu foutraque, ‘Ancient History’ est une soumission plutôt hétérodoxe, mais loin d’être inintéressante de la part d’Andy Chambers. En multipliant les partis pris narratifs (cela commence comme un récit d’évasion, avant d’intégrer un passage « mythes et légendes », puis d’embrayer sur une révélation plutôt étrange sur un des personnages principaux, et de tourner à l’action pure et dure, pour se terminer sur un mystère vraiment mystérieux) et les péripéties, le grand méchant joueur n’a pas choisi la facilité, et son propos en paraît en conséquence décousu et incertain dans sa finalité. Pour autant, le simple fait de mettre sur le devant de la scène des personnages très peu abordés par la BL mais au moins aussi caractéristiques du grimdark de 40K que les Space Marines ou l’Inquisition (les « marins » de la Flotte Impériale) ne manquera pas d’attirer la curiosité bienveillante des lecteurs avides d’en apprendre plus sur la vie des travailleurs de la mer l’espace, ce en quoi Chambers se montre plutôt généreux. En outre, l’inclusion de la Complainte du Vieux Marin à la sauce 40K dans le récit s’avère être un interlude des plus intéressants entre deux scènes d’action, et ne manquera pas de susciter les hypothèses les plus radicales de la part des exégètes de tout poil qui constituent une part non négligeable du lectorat de la Black Library. La balance est donc plus que positive pour ‘Ancient History’ dont les apports fluff et l’originalité compensent largement les tâtonnements et… l’originalité (aussi)

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The Tower – C. S. Goto :

INTRIGUE :

La routine habituelle du cipher (à ne pas confondre avec Cypher, sinon vous serez déchu) Lexio, employé comme ses aïeux avant lui au service de l’Historicus de la Tour des Idoles, sur Terra, est interrompue de manière brutale alors qu’il se rendait comme tous les jours à son travail. Il n’est pas rançonné par un gang local ou piétiné par un mouvement de foule, comme cela arrive sans aucun doute très souvent à la surface du Monde Trône, mais le choc est néanmoins total pour notre héros, homme d’habitude et de rituel, lorsqu’il remarque une ombre inhabituelle être projetée sur le marbre de l’allée qu’il emprunte quotidiennement. C’est peut-être un détail pour vous, mais pour lui ça veut dire beaucoup.

Ayant recruté un des nombreux agents d’entretien de cette institution vénérable (mais pas immaculée pour autant, car le traditionnel tour de vis budgétaire a mené au gel des embauches et par conséquent au nettoyage exclusif des zones ouvertes au public de la Tour) pour investiguer sur cette anomalie proprement terrifiante, Lexio finit par se retrouver en possession d’un petit tube de métal contenant un bout de parchemin sur lequel sont gribouillés des signes qu’il n’est pas en mesure de déchiffrer. C’est ce tube qui, posé derrière la tête d’une gargouille située sous une rosace exposée à la lumière du jour, avait causé ce jeu d’ombre perturbateur. Tout peut maintenant rentrer dans l’ordre, même si l’enquête de terrain menée par l’homme de ménage missionné par Lexio s’est soldée par une échelle renversée et un pauvre bougre suspendu à bout de bras à quinze mètres du sol. Ce sont des choses qui arrivent.

Arrivé à son poste avec onze minutes de retard, Lexio se fait houspiller comme il se doit par son supérieur hiérarchique, le Prefectus secondus Kayle, et ne peut que lui tendre sa trouvaille matinale pour expliquer cette prise de poste tardive. Guère impressionné par le tube récolté par son sous-fifre, le pragmatique Kayle envoie tout de même ce dernier solliciter l’un des nombreux traducteurs travaillant dans la Tour pour décrypter le message y étant renfermé. C’est ainsi que Lexio se retrouve à grimper 47 étages (à pied, très probablement) jusqu’au bureau de l’adepte Thucydia, grande spécialiste du Vindracum dans lequel la brève a été écrite1.

Faisons ici une pause pour nous téléporter jusque dans les ténèbres du Temple Vindicare, où l’Assassin Nyjia a été convoquée par le Grand Maître en personne pour recevoir une mission. Après un parcours du combattant digne de la version hardcore de Ninja Warrior, que cette athlète incomparable accomplit en chantonnant, elle est dûment briefée par cette figure mystérieuse et repart sans tarder afin d’accomplir la volonté de son sensei.

Retour à la Tour des Idoles, où Lexio accomplit sa propre mission en demandant humblement à Thucydia de lui traduire le texte qu’il lui apporte, afin qu’il puisse en transmettre la substantifique moelle à Kayle. Ce qu’il ne sait pas, mais nous oui grâce à la magie de l’exposition narrative, c’est que Thucydia enquête de longue date sur le Temple Vindicare, et sa mystérieuse absence des archives impériales (quand on y réfléchit deux minutes, c’est pas surprenant qu’une organisation d’assassins cherche à éviter qu’on parle d’elle, mais bon…). Et le message que lui a délivré Lexio la plonge dans une fébrilité intense, car après examen, il s’agit de la pièce manquante du puzzle permettant de tracer la quadrature du cercle, ou quelque chose comme ça. ENCORE UN P*TAIN DE COUP DE CHANCE DITES MOI. Professionnelle malgré tout, Thucydia livre à Lexio ses conclusions, mais comme ce dernier est formaté pour se souvenir parfaitement des messages qu’on lui dicte sans les comprendre, on n’en saura pas plus pour le moment.

Lexio retourne donc jusqu’à son point de départ, et attend au pied du trône de l’Historicus, à qui Kayle est parti faire son rapport matinal, l’occasion de transmettre à son boss la traduction qu’il avait demandé. Cette journée commence de manière bien étrange, mais ce sont des choses qui arrivent (bis)…

Début spoiler…Ce qui arrive en revanche de manière beaucoup plus rare, c’est que l’Historicus se prenne un tir de sniper en pleine tête, provoquant la consternation compréhensible de son personnel. Comme on s’en doute, c’est Nyjia qui a fait le coup, et les raisons en sont simples (enfin bon, je vous laisse seuls juges) : l’Historicus était sur le point de recevoir des informations compromettantes sur les agissements du Temple Vindicare, et devait être supprimé pour préserver l’anonymat de cette institution. Les informations en question étaient le message traduit par Thucydia, et que Lexio délivre automatiquement à un Kayle éclaboussé de sang et de cervelle quelques secondes plus tard : « Vous devez tuer l’Historicus aujourd’hui. Ils en savent trop » (sic). Si cela vous paraît logique, vous avez bien de la chance… Fin spoiler

1 : On pourrait faire remarquer que c’est tout de même beaucoup de chance que Kayle ait assez de connaissance dans cette langue morte quasiment oubliée pour diriger Lexio vers la bonne personne pour le job, mais je choisis de croire qu’on ne devient pas Prefectus secundus par hasard.

AVIS :

Singulière nouvelle que ce ‘The Tower’, qui se démarque du reste du corpus 40K « classique » tant sur le fond que sur la forme. Sur ce second point, on ne peut que constater que C. S. Goto a choisi de prendre à contre-pied la tendance au bolter porn très présente dans les travaux de ses collègues (surtout à l’époque où cette nouvelle a été écrite, c’est-à-dire au milieu des années 2000) en se livrant au récit scrupuleux du fonctionnement d’un service de l’Adeptus Administratum, ce qui est beaucoup moins épique que la Space Marinade de base, on en conviendra. Pour autant, cette prise de liberté stylistique est loin d’être désagréable, et illustre de manière appropriée « l’envers » de l’Imperium de l’Humanité, c’est-à-dire la vie morne des milliards de fonctionnaires totalement aliénés par la bureaucratie d’un empire s’étendant sur un million de planètes et vieux de plus de dix mille ans. Les passages consacrés à Lexio et Thucydia constituent donc à mes yeux les points forts de la nouvelle, compensant leur manque d’action (et encore, on assiste à une remarquable cascade à un moment) par leur caractère inédit, ou presque1.

En revanche, les acrobaties de Nyjia ne m’ont que moyennement intéressées, sans doute parce que je m’attendais à ce qu’un Assassin soit capable de faire ce genre de dingueries et que Goto n’est pas le premier (ni le plus inspiré) à avoir intégré des membres de cette discrète et mortelle faction dans ses écrits. Ceci dit, ‘The Tower’ est de ce fait une source importante de fluff sur le Temple Vindicare, ce qui est appréciable, même si les informations relayées par Goto sont à prendre avec des pincettes. Notre homme n’a en effet pas fait long feu au sein de la Black Library et n’a pas quitté cette dernière avec une réputation d’amoureux du background.

Sur le fond, j’ai malheureusement moins de choses positives à relayer car le dénouement de la nouvelle m’a laissé profondément perplexe. Je n’arrive en effet pas à faire de lien entre la découverte fortuite par Lexio d’un document compromettant (oublié là par un Vindicare ? mais si c’est le cas, pourquoi ?) et la mission accomplie par Nyjia. Il aurait fallu que Goto se donne plus de mal pour relier ces deux intrigues, qui se percutent sans grâce et sans génie à la fin de son histoire. Il y a une petite chance que ce mystère soit levé ou en partie éclairci dans ses autres textes de GW-Fiction (que je n’ai pas lu), et je lui laisse donc le bénéfice du doute à hauteur de 5%, mais il y avait moyen de livrer une copie plus aboutie de ce point de vue-là.

: On peut penser à ‘A Good Man’ de Sandy Mitchell, qui place aussi sa caméra au niveau d’un clerc de l’Administratum. Et bien des années plus tard, Warhammer Crime viendra donner vie au grimBAU (Business As Usual) de 40K.

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Loyalty’s Reward – S. Jowett :

INTRIGUE :

40K_Loyalty's RewardNotre histoire commence par une scène tendue à l’arrière de l’honorable établissement du Cochon PFendu, taverne située à proximité du spatioport de Praxis, cité prospère d’Equus III. Mikhail Kravi, jeune loup à l’ambition féroce et bras droit d’un des Protektors affiliés à la puissante Maison Gaudi, est venu avec quelques gros bras de ses amis « persuader » le marchand Leon Kleist, un peu trop porté sur la dive bouteille pour son propre bien, d’offrir un superbe présent au nouveau Graf Gaudi lors de son intronisation prochaine. Cela serait un moyen judicieux de faire oublier à ce dernier les mots un peu lestes qu’un Leon rond comme une queue de pelle a eu à son égard il y a quelques jours, et dans une cité mise en coupe réglée par de puissants gangs depuis des siècles, s’attirer l’inimitié d’un Graf n’est pas une perspective attrayante. Convaincu par l’argumentaire de Mikhail autant que par son solide crochet du gauche, Leon le Persiffleur se fait un honneur de remettre à Viktor Gaudi une babiole hors de prix dès le surlendemain, lors de la cérémonie durant laquelle le jeune héritier prend officiellement le titre et la place de feu son grand-père Bruno.

Alors que Papi Gaudi préférait maintenir des relations cordiales et éviter les affrontements larvés avec les autres Maisons de Praxis, Viktor nourrit des rêves de conquêtes urbaines. Bien que sa faction compte parmi les plus puissantes de la ruche, elle n’est pas de taille à affronter frontalement tous ses rivaux… jusqu’à ce qu’un marchand (Brek) se présente avec une occasion en or : une cargaison de catapultes shuriken reconditionnées, qu’il est prêt à céder à vil prix au Graf ambitieux. C’est le début d’une OPA agressive sur les territoires des autres Maisons, dans laquelle Mikhail s’illustre particulièrement en organisant l’assassinat du Graf Reisiger, abattu avec ses conseillers les plus proches alors qu’ils dînaient dans un kebab de luxe. Récompensé par l’élévation au rang de Protektor, Mikhail est convié avec tous ses collègues à une petite soirée au manoir Gaudi, et se réveille le lendemain matin dans son appartement, nu comme un ver, couvert de sang et pris d’une gerbe carabinée. La nuit a dû être bonne !

Début spoiler…Les quelques souvenirs qui finissent par lui revenir après s’être envoyé une demi-bouteille de cointreau pour se remettre les idées en place ne sont cependant pas très sympathiques. Il a de vagues réminiscences de litanies prononcées dans une langue inconnue, en direction d’un bloc d’obsidienne couvert de runes bizarres. N’ayant pas atteint sa position en étant complètement obtus, et étant un croyant convaincu et pratiquant du culte impérial (comme la plupart des habitants de la pieuse Equus III), Mikhail comprend vite qu’il a assisté à des activités encore plus prohibées que la moyenne, et qu’il est de son devoir d’en alerter les autorités compétentes l’Ecclesiarchie. Il sèche donc le nouvel afterwork organisé par Viktor Gaudi et son pote Brek pour aller se confesser dans le temple le plus proche, espérant que sa coopération désintéressée (en partie tout du moins) lui permettra d’échapper au jugement réservé aux cultistes, même involontaires.

Le hasard faisant bien les choses, un Inquisiteur de l’Ordo Malleus (Belael) passait dans le coin, en même temps qu’un contingent de Chevaliers Gris. Tout ce petit monde débarque fissa à la casa Gaudi, et pas pour causer modernisme catalan, croyez-le bien. Au terme d’une opération rondement et prestement menée, tous les membres de la cabale de Tzeentch sont passés par le bolter, scellant la fin de la Maison Gaudi. Et la balance Mikhail, me direz-vous ?

Début spoiler 2…Bien qu’il se voie déjà pardonné, ordonné Prêtre et oint Cardinal sur un monde très lointain en reconnaissance de son impeccable probité, Belael avait d’autres idées en tête lorsqu’il lui a promis une « juste récompense » en échange de sa collaboration totale. Ayant été infecté par une présence démoniaque pendant sa soirée blackout chez Totor, comme tous les Protektors invités, Mikhail n’héritera donc que d’un rituel de purification (privé, c’est déjà appréciable) et d’un bolt dans la tête. Ce n’est pas pour rien qu’on parle du fardeau et non du bonheur de la loyauté…Fin spoiler

AVIS :

Bien des années avant le lancement de Warhammer Crime et de son approche résolument urbaine et quotidienne du 41ème millénaire, Simon Jowett signait avec ‘Loyalty’s Reward’ une très bonne nouvelle dans ce registre low-key. Librement inspirée du Parrain de Coppola, et relevée d’un zeste de conspiration chaotique à la Eisenhorn dans sa seconde moitié, cette histoire démontre qu’il est tout à fait possible d’intéresser le lecteur sans avoir besoin de mettre en scène des batailles gigantesques ou des machinations à l’échelle galactique. L’immersion est réussie, l’intrigue se déroule de manière fluide et parfois assez inventive pour de la GW-Fiction (petit Mcguffin réussi avec le tabassage du pauvre Leon en introduction) : c’est un travail soigné auquel on a droit. Mon seul petit regret porte sur le choix de Jowett du Chaos comme antagoniste, alors que les symptômes éprouvés par Mikhail le lendemain de sa « cuite » faisaient plutôt penser à une infestation Genestealer, ce qui aurait été (à mes yeux) encore plus viscéral – à tous niveaux. Top qualité.

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Raptor Down – G. Thorpe :

INTRIGUE :

40K_Raptor DownNous retrouvons le Commandant Jacques Jaeger de l’escadron Raptor, après les évènements couverts dans ‘Acceptable Losses’, et la prise de fonction compliquée et sanglante de notre héros à l’occasion d’une bataille spatiale contre un Rok Ork. 18 mois plus tard, le Divine Justice, croiseur impérial auquel les Raptors sont rattachés, est passé à autre chose, et fait partie de la flotte d’invasion du système de Mearopyis, que l’Imperium cherche à reprendre aux Noctal après quelques millénaires d’atermoiements (saleté de bureaucratie). Ayant eu largement le temps de se familiariser avec son nouveau poste, de se faire accepter par ses hommes et de terroriser les nouvelles recrues venues remplacer les pertes subies au cours de  la campagne précédente, Jacques le Fataliste1 supervise les opérations de soutien du déploiement de la Garde Impériale au sol, qui consistent surtout à aller bombarder les cibles les plus juteuses à la surface de la planète capitale du système, tâche grandement facilitée par l’absence de chasseurs à capacité de projection spatiale dans le camp d’en face, ce qui permet aux Maraudeurs de frapper avec une impunité assez totale.

Chargés d’une nouvelle mission de démolition de l’infrastructure militaire locale, les escadrons Raptor et Storm, accompagnés  de leurs écrans de chasseurs (pour une fois qu’ils sont là, ces vole au flanc) quittent leur vaisseau mère pour ce qui ne semble être qu’une formalité pour ces pilotes aguerris. Malgré la tentative malheureuse d’interception de la part des Noctal, prestement contrecarrée par le professionnalisme et les gros flingues impériaux, tout semble baigner dans l’huile de moteur pour Jaeger et ses hommes, jusqu’à ce que ce dernier ait la malheureuse et déplorable idée de… prendre une initiative. Ahlàlà. Pour sa défense, son projet d’attaque d’une colonne blindée Noctal, repérée par l’esprit de la machine d’un missile2, et dont l’utilisation fourbe de la géographie locale avait permis d’échapper aux scanners de la flotte jusqu’ici, partait d’une bonne intention : protéger l’avance des bidasses de la Garde et les empêcher d’être pris en tenaille par les défenseurs. Malheureusement, les grands projets de canyoning de Jaeger, pour prometteurs qu’ils aient semblé sur le papier (en voilà une activité de team building qu’elle est bonne !), se trouvent rapidement et violemment contrariés par la puissance de feu des assaillis. Et même si Thorpe ne se donne pas vraiment la peine de décrire la manière dont les Noctal parviennent à dégommer l’invincible armada de manière aussi brutale, le résultat de l’accrochage n’est pas franchement en faveur des Impériaux. Bien que ces derniers aient pu larguer quelques missiles sur zone, le bilan est très lourd, et même Jaeger ne s’en sort pas indemne, son appareil étant lui aussi abattu en plein vol, forçant l’impulsif et inconstant Commandant3 à évacuer la carlingue en compagnie de ses hommes. Se réveillant avec une jambe cassée dans le désert de Mearopyis, Jacquou le Croqueur de feuille de match doit maintenant digérer les conséquences humaines et matérielles de son coup de sang : avec deux tiers de ses Maraudeurs et la moitié des Thunderhawks passés en perte et profit, le bilan est lourd pour Herr Jaeger. Cela en valait-il la peine ? C’est sur cette question lourde de sens que nous quittons notre héros, qui pourra attendre d’être secouru en dessinant des faucons. C’est ça d’être une buse

AVIS :

Suite de l’acceptable ‘Acceptable Losses’, ‘Raptor Down’ donne l’occasion à Gav Thorpe de nous tenir au courant de l’évolution de carrière ce bon vieux commandant Jaeger, et met l’escadron de ce dernier aux prises avec un nouvel ennemi et sur un nouveau théâtre d’opérations. Après l’espace froid et mortel qui a vu les Raptors aller au casse-pipe contre un Rok, nous sommes donc témoins d’une excursion atmosphérique dans les déserts de Mearopyis, ce qui illustre bien la versatilité des Maraudeurs impériaux. Sur la forme, la nouvelle de Thorpe se révèle être d’un niveau sensiblement égal à ses œuvres « spatiales » précédentes, c’est-à-dire très correct. Si on peut critiquer la prose de notre homme à bien des égards, il faut lui reconnaître une capacité à dépeindre un engagement aéronautique/spatial de manière convaincante et intéressante, beaucoup mieux que la plupart de ses collègues en tout cas. Sa maîtrise des unités (tant spatiales4 que temporelles5) et des facteurs propres à ce type de combat, comme la vitesse et la direction du vent, ou le niveau de carburant et des munitions embarqués rendent la lecture des péripéties aériennes de l’escadron Raptor plutôt prenante. Thorpe fait même du zèle en intégrant en début de récit une retransmission d’un affrontement spatial entre la flotte impériale et son homologue Noctal, que le supérieur de Jaeger se  repasse en boucle comme d’autres matent un top 10 NBA. Petit plaisir coupable, que nous lui pardonnons sans mal puisque le résultat est là aussi assez qualitatif.

L’intrigue et la construction de ‘Raptor Down’, en revanche, s’avèrent être moins satisfaisantes. La première est une variation sans originalité du scenario d’Acceptable Losses’ (un escadron de Maraudeurs chargé d’une mission où rien ne se passe comme prévu), ce qui n’est en soit pas un gros problème puisque la possibilité de Thorpe d’innover sur le sujet est passablement limitée (un Maraudeur, ça maraude, poingue). Ce qui est moins acceptable à mes yeux est la manière dont l’auteur fait passer Jaeger de Mr Baillezeubouque à Dr Folamour en l’espace de deux paragraphes, le chef d’escadre précautionneux se muant en tête brûlée sans qu’aucun élément préalablement établi par Thorpe sur le caractère de son personnage ne puisse laisser augurer ce changement radical de tempérament. Autre point plutôt mal géré par le Gav, le raid des Maraudeurs sur la colonne blindée, torché en même pas une page, et qui tient plus du tir au pigeon que de l’attaque en rase-motte. Le fait qu’on ne voit même pas à qui les impériaux sont confrontés, ce qui ne permet pas de comprendre pourquoi ils se font ainsi décimer par un adversaire totalement à leur merci sur le papier (à moins que les Raptors aient eu la malchance de tomber sur un convoi DCA Noctal), annihile toute tension narrative, les (bol)os des as se faisant canarder (un comble pour des raptors6) en l’espace de quelques secondes. Finalement, la conclusion même de la nouvelle ne m’est pas apparue comme particulièrement maîtrisée, les états d’âme douloureux de Jaeger alors qu’il se retrouve isolé avec ses hommes en territoire ennemi, ne suscitant qu’un distrait « so what ? » chez votre serviteur. À titre personnel, je pense que Thorpe a laissé ainsi la porte ouverte à un nouvel épisode (à ma connaissance jamais écrit), et que cette fin n’en était en fait pas vraiment une. Pas de chance, cela n’a débouché sur rien, et la dernière image que le lecteur emportera du commandant Jaeger sera celle du matelot du radeau de la Méduse fixant l’horizon d’un œil torve, le menton dans la main. Ce qui n’est pas commun, avouons-le.

1 : Il reconnaît lui-même qu’il n’est jamais heureux. Sauf quand il vole. Et encore, il stresse tellement que j’ai du mal à voir quel plaisir il tire de l’expérience. Pauvre bonhomme.
2 : On peut remercier le Techno-Adepte Ferrix, l’homme qui murmurait à l’oreille des (AGM-119) Pingouins.
3 : Pour un gars qui avait passé la nouvelle à ressasser son amour des plans qui se déroulent sans accrocs et la nécessité de se conformer aux règles établies, surtout quand elles touchent à la Santé & Sécurité, décider de se la jouer berzerk à la première colonne blindée, c’est assez surprenant.
4 : Quand on est un pilote de Maraudeur, 150 kilomètres, c’est proche.
5 : Quand on est un pilote de Maraudeur, 3 minutes, c’est long.
6 : ‘Rapace’ en anglais. Rien à voir avec les dinosaures donc.

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For the Emperor!

Defixio – B. Counter :

INTRIGUE :

40K_DefixioNous embarquons à bord du Leman Russ Exterminator Defixio, rattaché à un contingent de Chem-Dogs de Savlar, au cours de la campagne menée par la Garde Impériale contre une Waaagh ! Ork sur le monde de Jaegersweld. Parmi les membres d’équipage, le jeune Samiel peine à se faire une place pour une raison aussi simple que stupide : ayant survécu par miracle à la destruction de son précédent véhicule de fonction, ses nouveaux camarades (Karra-Vrass, Graek, Damrid, Dniep et Kallin) considèrent qu’il a « consommé » toutes ses réserves de chance, et que cela va porter la poisse au Defixio. Un accrochage rugueux avec une bande de Bikers Orks, pendant lequel le tank hérite d’une belle balafre de coque et l’horrible Graek d’une balle perdue fatale, ne fait pas grand-chose pour les convaincre de réviser leur jugement.

Isolé en territoire ennemi, le Leman Russ déglingué doit maintenant se frayer un chemin jusqu’au camp impérial le plus proche, tenu par le 24ème régiment de Cadia. Cela représente près de trois jours de route dans un environnement hostile, mais, sans autre perspective, les Chem-Dogs se lancent à corps perdu et à tombeau ouvert dans ce raid de tous les dangers. Alors qu’ils avançaient à bon rythme, un champ de mines posées par des Orks farceurs les force à faire une halte dans la pampa, le temps que Samiel leur ouvre un passage en identifiant les explosifs, permettant au bricoleur Dniep de les désamorcer plus rapidement dans un second temps. Cet arrêt au stand prend une tournure funeste lorsqu’un autre Kult’ de la Vitess’ tombe sans crier gare sur le Defixio alors qu’il patientait en double file que Samiel ait fini sa petite affaire. Assistant de loin à l’attaque, ce dernier décide d’aider ses camarades par une action aussi brave que suicidaire : utiliser le pistolet lance-fusée qu’on lui avait remis pour attirer l’attention des peaux vertes. Et ça marche. Intrigué par la belle rouge tirée par notre héros, les Orks se ruent sur sa position, ne réalisant que trop tard qu’ils s’engagent littéralement en terrain miné. Le bouquet final qui s’en suit permet à la fois de se débarrasser des motards indésirables, et d’accélérer le processus de déminage débuté par Samiel (qui survit encore une fois miraculeusement à une situation improbable). C’est ce qu’on appelle un win-win.

Sans d’autres difficultés techniques ou autochtones grognons pour les empêcher de reprendre leur route, les hardis tankistes filent à toute berzingue vers la terre promise, et finissent par arriver à proximité du camp de leurs camarades de lutte. Encore une colline à passer, et ce sera la quille…

Début spoiler…Qui se transforme toutefois en tuile lorsque nos héros découvrent que le QG Cadien a été attaqué et squatté par une tribu d’Orks. Pour une culture qui s’enorgueillit tellement de tenir la ligne, c’est une faute professionnelle autant qu’éthique, si vous voulez mon avis. C’est surtout une cruelle désillusion pour les Chem-Dogs, qui se voyaient déjà engloutir leur pâtée bien méritée et se lover dans leur coucouche panier. Il faut toute la fortitude du chef de char Karra-Vrass pour remobiliser ses hommes et leur rappeler que leur devoir en tant que soldats impériaux est de mourir au combat en emportant le plus possible de Xenos avec eux dans la tombe. N’ayant c’est vrai rien de mieux à faire, les servants du Defixio reprennent du poil de la bête et livrent un combat homérique contre la patrouille d’Orks qui finit par les localiser. Submergé par les vagues vertes, le brave petit châssis finit par rompre sous les coups de boutoirs des Boyz, mais pas avant d’avoir clairsemé leurs rangs de manière drastique. Une fin honorable pour de telles crapules (et je ne parle pas des Orks)…

Début spoiler 2…Enfin, presque pour tout le monde. Fidèle à sa réputation de catalyseur de chatte, Samiel se débrouille une fois encore pour survivre à la baston, alors que tout le monde meurt autour de lui. Récupéré quelques heures plus tard sous l’épave carbonisée du Defixio par un bataillon de Cadiens qui passait dans le coin, le chien chimique le plus chanceux de l’univers en est quitte pour quelques semaines chez le véto, le temps que ses pattes brûlées cicatrisent. Il se fait la réflexion qu’il aura encore plus de mal à trouver une nouvelle unité de rattachement avec un casier aussi chargé que le sien, mais ce sera une préoccupation pour plus tard…Fin spoiler

AVIS :

Sans doute une des premières nouvelles « embarquées » (c’est-à-dire prenant place dans un char ou un aéronef) de la GW-Fiction, mais loin d’être la plus marquante ou intéressante de ce sous-genre, ‘Defixio’ permet au moins d’en apprendre un peu plus sur les Chem-Dogs de Savlar, l’un des régiments de Gardes Impériaux à l’histoire la plus particulière qui soit. Pour le reste, c’est de l’action très classique, avec un peu de camaraderie virile et quelques gros coups de chance pour napper le tout. Counter a fait mieux.

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Ancient Lances – A. Hammond :

INTRIGUE :

40K_Ancient LancesDe retour sur son Attila natale après des années de bons et loyaux services, le commandeur Al’Kahan découvre avec stupeur que son monde et ses compatriotes se sont détournés de leur mode de vie ancestral, et se font exploiter sans vergogne par les marchands de l’Imperium. Outré par cette infamie, il rejoint ce qu’il reste de sa tribu, et l’entraine dans une vendetta sanglante contre des voisins indélicats, ayant fait leurs les pâturages et les troupeaux des clans environnants. La victoire acquise, il repart aussi sec dans le vaisseau par lequel il est arrivé, ayant visiblement décidé de passer sa retraite ailleurs que de ce bled paumé. Merde, ils n’ont même pas la wifi.

AVIS :

Si ‘Ancient Lances’ s’avère plus consistant qu’Emperor’s Grace’ (dont le personnage principal, le Commissaire Streck, fait deux brèves apparitions en début et fin de nouvelle, sans qu’on comprenne trop ce qu’il vient faire dans cette histoire1), la seconde publication d’Alex Hammond comporte elle aussi son lot d’imperfections. On notera tout d’abord que l’auteur orthographie « Atilla » la planète d’Al’Kahan, ce qui laisse planer un gros doute aussi bien sur sa maitrise du background de la Garde Impériale que sur son niveau de culture générale. Deuxièmement, la meilleure progression narrative d’Ancient Lances’ par rapport à ‘Emperor’s Grace’ (comprendre que la première se termine de manière un peu plus compréhensible que la seconde) n’empêche pas Hammond de perdre le lecteur par endroits, la faute à une absence de mise en exergue de points importants pour la compréhension de son propos.

Par exemple, lorsqu’Al’Kahan sort du vaisseau spatial qui l’a ramené sur Attila au début de la nouvelle, il se fait contrôler par deux Gardes Impériaux d’un autre régiment, qui lui demandent de présenter ses papiers. Notre héros s’exécute… et leur casse la gueule. Violence gratuite d’un vétéran psychotique ? Pas exactement, les victimes d’Al’Kahan appartenant au XIIIème régiment de Prakash, sauvé de la destruction quelques pages plus tôt par le sacrifice de la cavalerie Attilane. On peut donc comprendre que le vieux commandeur n’ait pas apprécié l’intervention des Prakashiens, et le leur ai fait savoir de manière appuyée. Seulement voilà, Hammond ne facilite pas ce travail de déduction, puisqu’il ne prend pas la peine de rappeler de manière explicite la cause de la rancune d’Al’Kahan envers ces deux pauvres bidasses, (trop) confiant qu’il est dans la capacité du lecteur à faire le lien entre les trois micro-passages où est mentionné le XIIIème Prakashien (dispersés sur neuf pages). Faut pas baisser la garde.

J’ai également eu du mal à accrocher au personnage d’Al’Kahan, vétéran couturé aux motivations aussi nébuleuses que son sens tactique2. Comme le fait remarquer le méchant de l’histoire juste avant de se faire trucider par le Zapata des grandes steppes, notre héros a beau gueuler contre les ravages de la galaxisation (c’est le même principe que la mondialisation, mais à l’échelle supérieure) sur Attila et se faire le défenseur des anciennes traditions de la planète, il ne se gêne pas pour utiliser l’arsenal de la Garde Impériale, beaucoup plus avancé que les armes de fer et de corne utilisées par ses compatriotes, afin de faire triompher sa cause. Bref, faîtes ce que je dis, mais ne regardez pas comment je le fais. On notera aussi qu’Al’kahan se barre juste après la victoire de son camp (abandonnant une deuxième fois sa femme et son – second – mari, mutilé par ses bons soins au passage), très probablement pour prendre possession de la province d’un autre monde lui ayant été promise en récompense de ses impeccables états de service. C’est ce qu’on appelle avoir de la suite dans les idées.

Toutefois, ‘Ancient Lances’ est toutefois plus sympathique que pénible, en grande partie grâce aux détails de fluff apportés par un Hammond assez crédible dans son propos. Cette nouvelle a également le mérite de traiter des frictions pouvant naître de la rencontre de plusieurs cultures d’un niveau technologique très différent, sujet intéressant à aborder dans le cadre d’un empire galactique d’un million de mondes, où cette question doit évidemment se poser de manière récurrente sur pas mal de planètes. En conclusion, si vous ne deviez lire qu’un seul texte de Hammond, c’est celui-là que je vous recommande, et de loin.

1 : ‘Ancient Lances’ se déroule un peu avant ‘Emperor’s Grace’, mais les deux nouvelles n’ont d’autre point commun que la présence de Streck dans l’un et l’autre. Peut-être Hammond avait-il pour projet de développer une série dont Sterck serait le héros ? Malheureusement pour lui, Ibram Gaunt (et plus tard Ciaphas Cain) avait déjà pris la place du Commissaire héroïque au sein de la Black Library.
2 : « Salut tout le monde, c’est Al’Kahan ! Ça fait 30 ans que je vous ai quitté, mais maintenant que je suis revenu, vous allez tous faire exactement ce que je dis. »
« Et pourquoi ? »
« Parce que sinon, je vais devenir très méchant. Et comme presque tous les hommes en âge de se battre sont morts, je ne vois pas comment vous pourriez m’empêcher de devenir le nouveau chef de tribu. D’ailleurs, voilà la femme que j’ai épousée juste avant de partir me battre pour l’Empereur (je suis un vrai gentleman). Elle n’a pas l’air très contente de me voir, mais je vais lui offrir la main tranchée de son deuxième mari, ça lui fera plaisir. »
« Bon ok. On n’a pas le choix de toute façon. Mais on te prévient, on s’est fait volé tout notre cheptel par le clan d’à côté, dont le chef a construit une forteresse imprenable depuis laquelle il pille les terres alentours en toute impunité. »
« Pas de problème, j’en fais mon affaire. En ma qualité de soldat vétéran, je vous propose ce plan infaillible : nous allons charger les murs de son bastion à cheval, comme on le faisait à mon époque ! »
« C’est complètement con. »
« Et toi, à la prochaine remarque désobligeante, t’es complètement mort. Nan, mais en fait, je vous ai ramené quelques lances à têtes explosives, ça devrait faire de gros trous dans les murs, qui nous permettront de passer. »
« Ok, mais comment on arrive à s’approcher assez près pour utiliser ces armes fabuleuses ? La forteresse est entourée de pieux en acier, spécialement conçus pour briser une charge de cavalerie. »
« C’est pas un problème, j’ai également un fusil plasma, qui me permettra de détruire ces obstacles pendant notre glorieuse chevauchée ! »
« Heu, tu veux dire avant notre glorieuse chevauchée, non ? Genre on envoie un éclaireur préparer le terrain pour éviter les mauvaise surprises. »
« Pas du tout, on charge comme des débiles un ennemi bien retranché et mieux armé que nous, en faisant une confiance aveugle à mes talents de tireur. C’est non négociable. »
« C’est complètement c- »

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Ork Hunter – D. Abnett :

INTRIGUE :

Ork HunterLa première mission de l’unité du Caporal Ondy Scalber dans la ceinture équatoriale d’Armageddon se passe assez mal. Déployés avec les Chasseurs d’Orks vétérans du Boss Keyser (les Ecorcheurs), les propres sur eux Jopalliens comprennent rapidement que leurs alliés ne les voient au mieux comme des appâts à peaux vertes, au pire comme des poids morts dont ils n’hésiteront pas une seconde à se débarrasser si la situation l’impose. Le Capitaine Lorit lui-même en fait l’amère expérience lors d’une pause en pleine jungle, le non-respect de la consigne de silence absolu donnée par Keyser lui valant d’abord un étranglement de la part d’un Ecorcheur, puis un direct dans la gorge décoché par Keyser en personne lorsqu’il fait mine de se plaindre de cette agression.

Les méthodes des Ecorcheurs ne manquent cependant pas d’efficacité, et leur affinité avec l’enfer vert dans lequel ils évoluent depuis des années leur permet de surprendre une colonie d’Orks sauvages s’étant acclimatée aux mangroves étouffantes d’Armageddon1. L’affrontement est aussi violent et sanglant que l’on peut se l’imaginer, et bien qu’Ondy gagne le respect, ainsi que le surnom de Bon Œil (et un véritable œil d’Ork en trophée), des Ecorcheurs grâce à son engagement total dans cette lutte sans merci, la plupart de ses camarades de Jopall ne passent pas l’épreuve du feu2, ou commencent à le regarder bizarrement. Qu’importe pour Ondy Bon Œil, qui speedrun son passage de Garde Impérial BCBG à vétéran psychotique en l’espace d’un après-midi, terminé par un combat singulier entre Keyser et le Boss Ork de la colonie décimée par les Ecorcheurs. Vous parlez d’une expérience marquante…

1 : On peut considérer que Dan Abnett a prophétisé l’arrivée des Kruleboyz près de vingt ans avant que la première figurine de cette faction ne soit commercialisée. Quel cador.
2 : Ou se font euthanasier de manière préventive par leurs chaperons au premier signe de détresse psychologique venu. C’est ainsi que le pauvre (Mishell) Rokar se prend une dague dans le sternum après avoir initié une partie de chat perché au mauvais moment. En même temps, il était plus taillé pour la banquise que pour la jungle…

AVIS :

Dan Abnett qui écrit une histoire de Gardes Impériaux, c’est assez banal. Dan Abnett qui écrit une histoire de Gardes Impériaux qui ne soient pas des Fantômes de Gaunt1, en revanche, c’est plutôt rare (il y a eu ‘The Fall of Malvolion’ et je crois que c’est à peu près tout). On sent tout de même que notre homme évolue en territoire connu dans ce sympathique ‘Ork Hunter’, qui semble être un petit exercice de style pour cet auteur vétéran : mettre en scène des Gardes d’élite, mais complètement antipathiques (alors que Gaunt et ses ouailles sont – à part Rawne, et encore, et Lijah Cuu – des crèmes). Le pari est réussi, et donne même envie de suivre la descente aux enfers (verts) du Caporal Scalber sur le long terme. Et comme Abnett ne rechigne jamais à relier a posteriori ses vieux one-shots avec le reste du Daniverse (de manière plus ou moins naturelle et élégante, il est vrai) il se pourrait que cela se produise un jour…

1 : Mais qui se déplacent tout de même comme des éclaireurs de Tanith, parce que certaines habitudes ont la vie dure.

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The Raven’s Claw – J. Curran :

INTRIGUE :

Début de journée difficile pour Veronique Sanson, le héros de ‘The Raven’s Claw’ (nouvelle au titre potterien s’il en est). Tiré d’une gueule de bois carabinée par le quasi-crash de son vaisseau en plein cœur d’une zone de guerre urbaine, notre protagoniste se rend rapidement compte que 1) il n’a absolument aucun souvenir de qui il est, et 2) il fait visiblement partie d’un régiment de Légionnaires Pénaux. Vivement le week-end.

AVIS :

Jouant honnêtement de cette ficelle narrative bien connue qu’est l’amnésie du héros, Curran trousse une petite nouvelle ma foi fort potable, si on la replace dans son contexte (c’est-à-dire 1999, une époque où les contributeurs de la BL n’étaient pas tenus d’être docteurs -es fluff pour proposer leur travail1). Le background est en effet quelque peu malmené au cours du récit, en particulier au moment de la conclusion de l’histoire, qui aurait pu être mieux négociée, surtout au vu du choix effectué par l’auteur à son endroit2. Ce manque de maîtrise du background de Warhammer 40.000 est d’autant plus gênant que Curran termine son histoire avec un exposé bancal sur la nature de l’Imperium, dont il donne une image biaisée, et finalement assez fausse3. Bref, une mention passable bien méritée.

1 : Non pas que ce soit actuellement le cas aujourd’hui d’ailleurs (l’espoir fait vivre).
2 : Vero se révèle être un (et non pas une – d’après le fluff, c’est rare mais pas impossible – ) assassin Callidus, envoyé sur le terrain afin de faire la peau à un Gouverneur planétaire félon. Sauf que l’utilisation faite par Vero (Averius de son vrai nom) de la fameuse polymorphine est complètement marginale (« Et hop, je passe de L à M en taille de veste ! Ils ne me reconnaîtront jamais ! »), ce qui est tout de même dommage étant donné que c’est cette dernière qui fait tout le charme de cette caste particulière. Étant donné les spécificités de cette mission (à savoir, la présence d’un psyker prescient aux côtés du Gouverneur), un Culexus aurait à mon sens bien mieux fait l’affaire. Quant à la Raven’s Claw qui donne son titre à la nouvelle, il s’agit d’une sorte de neuro-gantelet subdermal, arme appartenant davantage à l’arsenal des assassins Eversor qu’à leurs consœurs Callidus.
3 : Selon Curran, l’Imperium a envoyé Vero recueillir la confession du Gouverneur renégat, car, ayant trahi la confiance de l’Empereur, ce dernier se trouve être un hérétique (nié ?), et tout hérétique doit se repentir avant de recevoir sa punition (nié ?). Et Vero d’expliquer que la rébellion aurait pu être matée en deux deux, et qu’une force d’intervention constituée de plusieurs régiments de Gardes Impériaux ainsi que d’un contingent de White Scars attend tranquillement en orbite son feu vert avant de débarquer sur la planète remettre un peu d’ordre dans tout ce bordel. Et tout ce temps gâché, toutes ces ressources dépensées, toutes ces vies perdues, pour quoi ? Pour permettre à Vero d’absoudre sa cible de ses pêchés. Amen.

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Emperor’s Grace – A. Hammond :

INTRIGUE :

Hammond propose au lecteur de suivre la lutte pour la possession de la planète d’Olstar Prime entre Impériaux et Eldars par les yeux de deux personnages aux vues radicalement divergentes sur la question. Au zèle fanatique du Commissaire Streck s’oppose en effet le pragmatisme du Lieutenant Catachan Lownes, et alors que le premier se tient prêt à sacrifier jusqu’au dernier soldat pour repousser les Xenos, le second serait plutôt du genre à filer à l’anglaise avec les survivants de son unité avant que les zoneilles ne massacrent tout le monde. Pressé par le temps et surveillé de près par un Streck ayant mal digéré le retrait stratégique ordonné par Lownes, notre Lieutenant tire au flanc arrivera-t-il à mener son projet de désertion à bien ?

AVIS :

À y regarder de plus près, ‘Emperor’s Grace’ n’est pas tant une nouvelle que le développement sur une vingtaine de pages par Hammond du dilemme classique du Garde Impérial : est-il vraiment condamnable de chercher à sauver sa peau plutôt que de voir sa vie sacrifiée par des officiers indifférents pour la défense d’une planète insignifiante ? Ce parti pris aurait pu être payant si l’auteur avait réussi à répondre à cette question, somme toute centrale dans l’univers violent et totalitaire de Warhammer 40.000, de manière convaincante et/ou originale. Au lieu de ça, Hammond termine son propos avec un piteux WIJH1, laissant un fort goût d’inachevé au lecteur à la fin d’Emperor’s Grace’ (dans la même veine, mais pour Warhammer Battle, on retrouve ‘The Last Charge’ d’Andy Hoare). À oublier.

1: Well, It Just Happened que la personne qui devait permettre à Lownes et ses hommes de quitter la planète s’est pris un missile Eldar dans le buffet, ce qui condamne les Catachans à se battre aux côtés des défenseurs d’Olstar Prime.

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Acceptable Losses – G. Thorpe :

INTRIGUE :

40K_Acceptable LossesNommé à la tête du tristement célèbre escadron de Maraudeurs Raptor, le commandant Jaeger a l’occasion de prouver la valeur de ses hommes au cours d’une mission aussi vitale que périlleuse : la destruction des réacteurs d’un Space Hulk grouillant d’orks. Livrés à eux-mêmes dans l’immensité hostile de l’espace, les Raptors se rendront rapidement compte qu’il n’y a pas d’ennemi plus mortel que l’ami dans lequel on a placé (à tort) sa confiance.

AVIS :

Après les Nains et les Hauts Elfes, Battlefleet Gothic est l’une des lubies du bon Gav Thorpe, qui ne manque jamais une occasion de mettre en scène une petite bataille spatiale dans ses écrits futuristes. Sachant que le recueil ’Into the Maelstrom’ (et donc ‘Acceptable Losses’, où cette nouvelle figure) a été publié en 1999, soit l’année de sortie du livre de règles BFG, il était inévitable que cette nouvelle fasse la part belle à des héros maîtrisant l’art subtil de la guerre dans l’espace.

Cette nouvelle conséquente (33 pages) se divise ainsi en deux parties distinctes. La première (un tiers) voit Jaeger et ses hommes faire connaissance, les premières impressions mitigées faisant rapidement place à une véritable camaraderie entre un commandant sévère-mais-humain et des équipages indisciplinés-mais-courageux-et-loyaux (et l’Oscar du meilleur scénario original est attribué à…). Thorpe sait qu’il doit en passer par là pour que la suite de son récit tienne la route et s’exécute de bonne grâce, son style passepartout lui permettant d’expédier cette introduction sans trop lasser le lecteur (en partie grâce à la partie « contes et légendes de l’Imperium »).

La deuxième partie (deux tiers) est une description minutieuse de la mission plus ou moins suicide de l’escadron Raptor, sur lequel s’acharne bien entendu un sort contraire : escorte de Thunderbolts retirée au dernier moment, Rok en maraude à négocier en solo, rencontre inopinée avec une escadrille de chassa-bombas, cible protégée par une hénôrme batterie de lance-plasma… autant de petits riens qui font que la vie d’un pilote de Maraudeur vaut d’être vécue (et se termine de manière prématurée). Fort de son expertise dans le sujet, Thorpe réussit à faire de ce compte rendu une expérience plaisante, tant par son originalité que par son enthousiasme perceptible pour cette forme de combat, dont les règles diffèrent considérablement de la classique bataille rangée de fantassins et de véhicules à laquelle l’amateur de 40K a droit d’habitude.

Bon, ça reste du Thorpe, et du Thorpe « primitif » qui plus est, ce qui signifie que l’histoire en elle-même ne vole pas beaucoup plus haut qu’un plongeur de la mort ayant fait un six sur son jet d’incident de tir (ouais, j’ai pas peur des mélanges). En même temps, difficile de révolutionner l’art de la nouvelle de science-fiction avec un pitch aussi ingrat qu’une bataille spatiale vue depuis l’intérieur d’un cockpit de Maraudeur. On a donc le droit à une triple dose d’héroïsme désintéressé et de sacrifice pour la bonne cause, généreusement saupoudrés de « bon sang, c’était moins une »1 et de « mais où est notre écran de chasseurs ? » : une fois de temps en temps, pourquoi pas.

Bref, Thorpe réussit assez bien son coup avec ‘Acceptable Losses’, un de ses meilleurs courts formats pour la BL à date.

1 : Appelons ça le syndrome de l’Etoile de la Mort.

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Burn the Heretic, Kill the Mutant, Purge the Unclean

Pestilence – D. Abnett :

INTRIGUE :

40K_PestilenceLorsque les forces impériales lancées à la conquête de Genovingia commencent à tomber comme des mouches sous les coups et les miasmes de la Peste d’Uhlren, les autorités compétentes agissent sans tarder. Et, une fois n’est pas coutume, leur réaction n’est ni brutale, ni sanglante, ni stupide, ou en tout cas pas tout de suite. Car c’est bien à Lemual Sark et à ses collègues érudits que le Maître de Guerre Rhyngold s’adresse, chargeant notre héros et ses homologues de fouiller les archives à la recherche de toute information qui pourrait s’avérer utile à l’endiguement du fléau.

Sark est, pour résumer grossièrement, un archiviste épidémiologique, double spécialisation très rare proposée uniquement par le centre universitaire Du Guesclin de Béziers. Il passe donc ses journées à enquêter sur les épidémies du passé, dans le but d’aider ses contemporains à se prémunir contre les joyeusetés concoctées à tour de chaudron par papy Nurgle. Après une harassante recherche Doctossimo durant laquelle il a appris à vingt-huit reprises qu’il avait contracté un cancer généralisé des cuticules, Sark finit par trouver une piste digne d’intérêt, qui l’emmène sur Symbal Iota, planète marine où tout le monde se déplace en catamaran et où Kevin Costner a été élevé au statut de saint impérial. C’est en effet là le dernier domicile connu de Fege Ebhoe, Général émérite du 23ème Régiment de Lanciers de Lammark, et survivant de la vague de varicelle carabinée qui a décimé ses hommes sur Pirody, il y a de cela bien des années. Avec un peu de chance, Sark pourra tirer au vétéran quelques confessions utiles pour les victimes de la Peste d’Uhlren, pour lesquelles ni l’homéopathie, ni l’hydroxychloroquine, ni l’ingestion d’eau de javel n’ont été efficaces.

Arrivé sur place avec son Serviteur Kalibane et un chapeau tellement ridicule qu’il manque de le faire interner d’office, Sark expose son cas au très relax frère Baptrice, qui s’occupe de l’administration de l’Hospice Saint Bastian, spécialisé dans l’accueil et le traitement de vétérans de la Garde Impériale complètement traumatisés par leur expérience du front. C’est en effet dans cette maison de repos d’un genre un peu spécial que Ebhoe a passé les trente-quatre dernières années, plongé dans le noir le plus total (une séquelle neurologique de son expérience sur Pirody). Après s’être un peu fait désirer, le patient finit par accepter de répondre aux questions de son visiteur, bien que cela semble manifestement beaucoup l’éprouver. Et pour cause, Pirody n’a pas vraiment été une partie de plaisir.

Envoyé au front contre des hordes de cultistes du Chaos, en plein été polaire et sans masques de sommeil (ce qui n’a pas dû aider), le 23ème Lanciers de Lammark s’est vite retrouvé débordé par la situation et assiégé sans espoir de secours par l’ennemi. Fort heureusement, une Compagnie de Space Marines des Doom Eagles (toujours dans les bons coups) était également présente pour leur prêter main forte, et empêcher la cité de tomber aux mains purulentes et malpropres des séides de Nurgle. Les Astartes ne purent en revanche pas faire grand-chose pour empêcher un mal aussi mortel que contagieux, sobrement baptisé le Tourment, de s’abattre sur la garnison et les civils, faisant des centaines puis des milliers de morts du côté loyaliste. Malgré tous les efforts de l’Apothicaire Subjunctus Valis, la situation continua de dégénérer jusqu’à… la coupure pub, déclenchée par la prononciation par Ebhoe d’un mot tellement sââââle que son voisin de cellule passe en mode berzerk et fait mine de sauter sur Sark, sauvé par l’intervention altruiste mais inefficace de son Serviteur, et surtout par les matraques énergétiques du personnel soignant de Saint Bastian. L’incident clos, Sark apprend qu’il lui sera demandé de quitter les lieux au matin pour éviter de perturber plus encore la vie jusqu’ici tranquille de l’hospice. Cela ne fait évidemment pas les affaires de notre détective, qui profite de la nuit pour rendre la visite de la dernière chance à Ebhoe…

Début spoiler…Déterminé à obtenir le fin mot de l’histoire, quitte à menacer son interlocuteur avec une lampe torche1, Lark apprend que la situation désespérée de Pirody a été sauvée au dernier moment par la découverte par Ebhoe que le vertueux et altruiste Valis était lui aussi totalement Tourmenté, et avait œuvré en sous-main pour propager le virus parmi les défenseurs (Space Marines compris) à l’aide de « vaccins » pas vraiment homologués par l’OGS. Trahi par un bubon disgracieux juste en dessous de son oreille, Valis fut promptement incinéré par le lance-flamme d’Ebhoe, qui paya chèrement son acte héroïque, l’incendie du laboratoire de l’Apothicaire corrompu lui ravageant le corps. Les hurlements du vétéran ont également comme effets secondaires pas très Charlie de plonger à nouveau l’asile dans la folie, menant à quelques morts parmi le personnel et les pensionnaires de Saint Bastian. Tout est cependant bien qui finit (presque) bien pour Sark, qui peut rentrer au bercail avec sa précieuse info, dont le Haut Commandement de la campagne de Genovingia se servira pour faire exécuter quelques dizaines de médecins, juste au cas où. Ebhoe, de son côté, est parti rejoindre l’Empereur, sa dernière crise d’hystérie ayant fait lâcher son cœur fragile. On pourra dire de lui qu’il a donné son corps à la science, au moins.Fin spoiler  

1 : « Nous affons les moyens de fous faire parler, Herr Ebhoe… »

AVIS :

Dan Abnett a plutôt réussi son coup avec ‘Pestilence’, courte nouvelle d’ambiance et de suspens à haute teneur en grimdark. On peut rapprocher ce one-shot des travaux inquisitoriaux de notre homme, ainsi que de la mini-série des aventures animalières de Valentin Drusher, où Abnett se fait un malin plaisir de plonger dans la vie quotidienne de l’Imperium, loin derrière les lignes de front et les combats sanguinaires illustrés dans le jeu de figurines, mais qui comporte son lot de caractéristiques allant du dérangeant à l’insoutenable. L’enquête de notre héros à la recherche d’une cure pour un mal surnaturel dans un asile pour aliénés est naturellement riche en glauquerie, ce qui permet à Abnett de jouer avec les préjugés de son lecteur : finalement, les bons samaritains de l’hospice ne sont pas une secte de cultistes chaotiques sous couverture, mais bien d’authentiques philanthropes cherchant véritablement à soulager la détresse de leurs patients (de manière très 40Kesque, certes). Il s’agit à mes yeux de la réussite la plus franche de ‘Pestilence’, sa révélation sur l’identité du patient 0 du Tourment n’étant pas vraiment renversante (dur de maintenir le suspens quand on a qu’un seul suspect aussi). Bref, une petite histoire assez sympathique mais pas mémorable, comme Dan Abnett en a écrit beaucoup au début de sa carrière au sein de la BL.

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Barathrum – J. Curran :

INTRIGUE :

40K_BarathrumLorsque l’Inquisiteur Anselm est appelé par un vieil ami sur la planète de Barathrum pour élucider la série de morts violentes ayant endeuillé l’expédition de l’Adeptus Mechanicus en charge de l’excavation de la cité souterraine découverte à la surface de ce monde mort, il ne s’attendait pas à recroiser la route de son ancien mentor, Grogan. Les deux hommes se sont séparés en mauvais terme après une enquête bâclée sur Tantalus il y a bien des années de cela, à la suite de laquelle le puritain Grogan a déclaré un Exterminatus que son élève trouvait bien précipité. Guère enchanté par la présence de son collègue et néanmoins rival sur cette affaire sordide (rapport aux cadavres horriblement mutilés laissés par le tueur) et poussiéreuse (rapport aux interminables tunnels que nos héros passent la moitié de la nouvelle à parcourir), Anselm fait contre mauvaise fortune bon cœur et collabore en bonne intelligence avec Grogan, que le passage du temps n’a pas du tout adouci.

Une analyse poussée des victimes permet à Anselm, dont l’une des spécialités semble être la médecine légale, d’établir que ces dernières ont toutes été amputées d’un membre ou d’un organe différent, avec une précision chirurgicale qui plus est. Cette conclusion des plus sinistres passe au second plan lorsque les deux fins limiers des Ordos sont alertés par le Magos Explorator en charge de l’expédition (Eremet) qu’un portail gigantesque a été découvert par ses équipes. Scellé et couvert d’inscriptions écrites dans une langue indéchiffrable (à court terme tout du moins), l’édifice est également protégé par un champ électrique qui carbonise le premier Technoprêtre ayant eu la mauvaise idée d’y poser la méchadendrite. Pour le bouillant Grogan, cet incident est la preuve irréfutable que le Chaos est à l’œuvre sur Barathrum, et il s’empresse de suspendre les fouilles, au grand désespoir d’Eremet. Connaissant les méthodes employées par son ancien boss, Anselm se doute que les malheureux archéologistes ne tarderont pas à être soumis à un interrogatoire serré dont pas un ne sortira indemne. Cherchant à éviter à son vieil ami Cantor ce sort peu enviable, il poursuit donc les recherches de son côté… en piquant un somme. Dans un rêve que l’on peut qualifier de prémonitoire, il est mis en présence de l’Empereur en personne, fièrement juché sur sa chaise percée plaquée or, mais les traits aquilins du Maître de l’Humanité se transforment en ceux d’une hyène, et très mauvaise actrice avec cela1.

Ce pénible cauchemar est heureusement interrompu par l’arrivée d’Eremet, qui apporte à son hôte le résultat de l’expertise (expresse) réalisée par les savants de l’Inquisition sur le texte mystérieux gravé sur le portail récemment mis à jour. Comme on peut s’en douter, ce n’est pas la recette de l’aligot que les précédents habitants de Barathrum ont tenu à transmettre aux générations futures, mais un avertissement sans frais sur l’indicible (et illisible) menace dormant dans la crypte ainsi condamnée. Car ce n’est rien de moins que le Prince Démon Szarach’il qui patiente dans la cité morte, enfermé dans ce tombeau par les efforts de l’Inquisiteur Amaril il y a des milliers d’années. Grogan avait donc raison ! Mais d’ailleurs, où est-il ?

Eh bien, sur les lieux du crime pardi. Ayant surpris Cantor bravant le couvre-feu qu’il avait déclaré, l’Inquisiteur a suivi discrètement le Technoprêtre réfractaire jusqu’au portail interdit, et l’a chopé en train de se livrer à un rituel passablement chaotique. Il s’avère que le servant du Dieu Machine s’est fait hacker par l’esprit néfaste de Szarach’il, qui compte bien profiter de l’arrivée de l’expédition pour se faire la malle. Mais notre démon est très exigeant : alors qu’il aurait pu se contenter de posséder le premier humain passant à sa portée, comme le pauvre Cantor, il cherche également à se venger d’Amaril en infiltrant les rangs de l’Inquisition, et a pour cela besoin qu’un représentant des saints Ordos tombe sous son influence. Et tant qu’à faire, Anselm, qui est plus jeune et plus swag (il ne porte pas de moustaches) que ce vieux tromblon de Grogan, serait le candidat idéal. Tout cela nous est longuement raconté par un Szarach’il dont la passion pour le monologue de grand méchant ne présage rien de bon pour le succès de son entreprise…

Pour l’heure, Grogan croise le fer avec la terrible créature que Cantor a mis sur pied avec les organes de ses collègues… et l’abat sans trop de difficulté. Ce n’était toutefois qu’une diversion, permettant à un Cantor lévitant de desceller le portail et de libérer le terrible Démon… ou en tout cas son essence, qui s’empresse de posséder Grogan (Cantor s’écrase sur le sol comme une bouse et meurt après avoir présenté ses plus plates excuses). Sur ces entrefaites, Anselm arrive in da club et un (court) duel s’engage entre les deux Inquisiteurs. Ayant réussi à reprendre le contrôle de son corps pour un instant, Grogan décharge son hellgun sur le plafond en lave mi-cuite de la crypte, provoquant son enfouissement en même temps qu’incinération sous quelques tonnes/mètres cube de magma coagulé. Son sacrifice altruiste autant que le coup de moins bien de Szarach’il, qui ne parvient plus à sauter d’hôte en hôte comme il l’avait fait précédemment, permet de mettre un terme à cette escapade démoniaque, et de préserver l’Imperium d’une (sans doute) terrible menace.

1 : N’ayant qu’une version papier de cette nouvelle à disposition, je ne peux pas faire de capture d’écran pour prouver mes dires, mais sachez que l’apparition démoniaque interpelle notre héros somnolent de la sorte : “Anselm ! Anselm my servant, you have come to me. Anselm ! Anselm, Anselm ! Open the door!”

AVIS :

La tentative de Jonathan Curran de dépeindre les activités inquisitoriales ne s’avère guère probantes dans ce ‘Barathrum’ très moyen, qui explore plusieurs ambiances (slasherthriller, roman noir, horreur…) sans réussir à s’en approprier aucune. Cette base bancale est de plus handicapée par le manque de maîtrise du lore de 40K par Curran, qui semble considérer les Inquisiteurs comme des détectives privés de choc, envoyés par leur hiérarchie enquêter en solitaire sur des affaires étranges. Pour ne rien arranger, les machinations de l’antagoniste sont inutilement complexes, et l’auteur ne semble même pas avoir pris le soin de se relire1. Ça fait beaucoup de problèmes pour une nouvelle qui peut être mis en comparaison avec les travaux inquisitoriaux, autrement plus réussis, de Dan Abnett, publiés pour les premiers d’entre eux à la même époque que ‘Barathrum’. Comme la nécropole d’où elle tire son nom, cette histoire mérite l’oubli profond dans lequel elle a été plongée depuis des millénaires.

1 : “The Inquisition is a tool” (Grogan, p. 9). “The Inquisition is not a tool” (Grogan, p. 23).

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Suffer not the Unclean to Live – G. Thorpe :

INTRIGUE :

40K_Suffer not the Unclean to LiveC’est sur la planète de Karis Cephalon que les ambitions carriéristes du prêcheur Yakov ont été brutalement stoppées. Il faut dire que l’amour du bling-bling (Yakov est un Armormant) de notre héros lui ont attiré la morgue et la défiance du Cardinal Kodaczka, d’obédience Lucide, et donc bien moins porté sur la pompe et le clinquant que son subalterne. Ceci explique probablement que Yakov ait reçu la charge d’une paroisse située en territoire mutant, classe laborieuse et opprimée de Karis Cephalon, qui doit sûrement se spécialiser dans l’élevage de crevettes, la fabrication de briques et le tissage de tapis. Dans cette épreuve, tant pour son amour propre que pour son odorat, Yakov peut toutefois compter sur sa foi sincère en l’Empereur, et sur la dévotion véritable de ses ouailles, qui acceptent leur condition servile avec une constance admirable. Ou plutôt, acceptaient.

Car, comme le prêcheur ne tarde pas à le découvrir lors de son retour dans le bidonville qui lui sert de QG, une fois son cours de yoga du mercredi soir achevé, une épidémie s’est déclarée parmi les mutants, et ces derniers montrent des signes aisément compréhensibles d’énervement devant le manque à peu près total de réaction des autorités compétentes. Sachant qu’aller gueuler « On en a gros » devant la préfecture n’aura que des effets limités, et probablement déplaisants, Yakov convainc ses fidèles de prendre leur mal en patience, mais accepte tout de même, à la demande insistante de Lathesia, une jeune hors-la-loi altruiste dont la mutation consiste à être gothique, de faire doléance d’aspirine et de gel hydroalcoolique auprès de Kodaczka… qui refuse bien évidemment de consacrer le moindre kopeck à ce problème de santé publique. Et puis quoi encore. Laissant le prélat sur une maigre promesse de prière en faveur des nécessiteux, Yakov retourne dans sa banlieue, calme une nouvelle émeute naissante, et va se coucher. Il est toutefois réveillé en plein milieu de la nuit par Lathesia et son complice Byzanthus, qui ont remis une pièce dans la machine et réussi à générer une foule en colère digne de ce nom, après que le fossoyeur de la communauté ait été retrouvé égorgé. Malgré ses meilleurs efforts et son implication physique sans faille, Yakov ne parvient pas à dissiper la manif sauvage avant qu’elle se fasse disperser à coups de chevrotine laser par les forces de l’ordre. Et pas la peine d’attendre une contre-enquête de l’IGS.

La situation commence alors à échapper à notre héros, qui tente le lendemain de l’émeute matée dans le sang de convaincre Lathesia et sa bande d’arrêter leurs bêtises avant qu’il ne soit trop tard, mais ne parvient qu’à les intéresser à enquêter sur le meurtre du fossoyeur. Une visite au cimetière municipal plus tard, la bande fait l’acquisition d’un cercueil en métal, dont la particularité est d’être couvert de chaînes, comme pour empêcher son occupant d’en sortir. Pas le temps toutefois de percer ce mystère, car la planque des mutants est attaquée par les Enforcers. Byzanthus et les autres figurants vendent alors chèrement leur vie pour permettre à leur meneuse et au prêcheur de s’enfuir. Vous trouvez que ça va vite ? Accrochez-vous car Thorpe lâche les freins.

Toujours déterminés à tirer les choses au clair, Yakov et Lathesia décident de retourner dans le squat de cette dernière le jour suivant, pour enfin déterminer ce qui se cache dans le cercueil verrouillé qu’ils ont abandonné sur place. Ils font alors la connaissance d’un type louche qui se présente comme un free lance inquisitorial (il bosse pour l’Inquisition… sans en faire partie), lui aussi intéressé par ce mystérieux sarcophage. Et comme jamais deux sans trois est resté un proverbe très populaire au 41ème millénaire, les deux complices acceptent d’intégrer le nouveau-venu dans leur raid, sans lui demander plus de précisions sur ses motivations. À l’intérieur, la petite bande a la surprise de tomber en plein milieu d’un rituel manifestement chaotique, auquel participe rien de moins que le Gouverneur de Karis Cephalon. Parce qu’on peut être l’individu le plus puissant d’une planète et ne pas trouver un livreur pour amener un colis un peu encombrant jusqu’à son palais depuis une ZUS toute proche. Le problème des no go zones s’est manifestement perpétué dans le lointain futur. Bref, la fainéantise des uns (le Gouverneur et Thorpe) faisant le bonheur des autres (Yakov, Lathesia et leur invité mystère), la petite cérémonie païenne est interrompue par le mitraillage en règle des libertins, laissant le cercueil (et le Gouverneur) en possession du trio. Il reste alors une page et demie à Thorpe pour conclure, ce qui n’est pas suffisant pour trouver et utiliser une pince monseigneur, ni faire des présentations dignes de ce nom, mais assez pour que la tierce partie de confiance de notre histoire explique à ses compagnons que Keris Cephalon est sur le point de vivre cinq années très difficiles, que le Gouverneur a organisé la révolte de mutants pour pouvoir les sacrifier aux Dieux du Chaos, et qu’il pourrait tirer quelques ficelles pour permettre à Yakov d’être muté sur une planète plus tranquille. Noblement, notre héros décline cette offre, prétextant que ses chers mutants auront besoin de son aide dans l’épreuve à venir, mais quelque chose me dit qu’il n’en a pas fini avec l’Inquisition1

1 : Cette illustration vient du livre de règles Inquisitor et représente Yakov (le grand type) et l’investigateur Malovich (le hippie renfrogné), surplombant quelques Gilets Jaunes très colère.

AVIS :

Ça partait bien pour Thorpe avec cette plongée atmosphérique dans les bas fonds de Keris Cephalon, ‘Suffer…’ bénéficiant, une fois n’est pas coutume, d’un personnage principal et d’un contexte étonnement complexes et fouillés (aux vues des standards de l’auteur). Malheureusement, ce dernier a vu trop grand, ou plutôt trop long (ou pas assez, ça dépend du point de vue) avec son intrigue, qui se retrouve bâclée, estropiée et finalement catapultée à un prochain et hypothétique épisode au lieu de s’achever avec un peu de tenue et de dignité. La raison, comme dit ci-dessus, tient sans doute à la volonté de GW et de la BL de soutenir le lancement d’Inquisitor avec un peu de background romancé, comme d’autres auteurs (McNeill et ‘Payback’, par exemple) le firent également à la même époque. Mais si le motif est tout à fait compréhensible, l’exécution laisse franchement à désirer, et transforme ‘Suffer…’ en objet littéraire finalement aussi contrefait et difforme que les mutants dont le héros s’occupe. Vous parlez d’une mise en abyme ! J’espère franchement que Thorpe a fini son cycle Yakovien ailleurs, ne serait-ce que dans un rapport de bataille ou une nouvelle du White Dwarf, mais je n’en suis pas absolument convaincu…

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The Lives of Ferag Lion-Wolf – B. J. Bayley :

INTRIGUE :

WFB_The Lives of Ferag Lion-WolfC’est une belle journée qui commence dans le palais de Ferag Lion-Wolf, Champion de Tzeentch ayant bien réussi dans la vie. Après avoir servi comme Space Marine dans les rangs des Purple Stars, notre héros a décidé d’aller relever de nouveaux défis en passant de l’autre côté du périph’ et de l’Œil de la Terreur, où il s’est taillé un petit empire. Aujourd’hui, il accueille un visiteur de marque, en la personne du Seigneur Quillilil (eh oui), autre Elu du Dieu du Changement dont il convoite le domaine (et réciproquement, comme on peut s’y attendre la part de disciples de Tzeentch).

Après avoir galamment secouru son hôte alors qu’il se faisait attaquer par des terroristes1 disques-jockeys pendant la descente vers son palais, Ferag ne peut résister à la tentation de faire une démonstration de ses pouvoirs de… maître Lego, aussitôt imité – mais en moins bien, évidemment – par Quillilil. Passées ces aménités, il est temps pour Fefe d’emmener son invité jusqu’à la table du festin qu’il a organisé pour lui, mais surtout de lui narrer par le menu les épisodes les plus mémorables de sa longue et épique vie.

On apprend ainsi que notre héros a reçu son nom si particulier après avoir vengé son père, sauvagement tué par un gigantesque lion-loup alors qu’il n’avait que huit ans (Ferag, pas son père), en réglant son compte en solo à la pénible bestiole, d’un coup d’épieu bien placé. Bien des années plus tard, Ferag s’est distingué en menant ses frères de bataille Purple Stars dans l’abordage inspiré d’un vaisseau ruche tyranide, d’une manière si convaincante que le Codex Astartes fut revu et corrigé pour l’occasion (nous dit-il). Enfin, ce fut le triomphe tactique de la bataille pour la planète-bol (si si), brillamment remportée contre les hordes énervées de Khorne et pestilentes de Nurgle, pour la plus grande gloire de Tzeentch. La régalade aurait pu continuer longtemps si un bloc de maçonnerie ne s’était pas décroché alors que les deux Elus passaient en contrebas, frappant Ferag en pleine tête et le faisant sombrer dans l’inconscience…

Début spoiler…Et à son réveil, les choses ne sont plus les mêmes pour notre héros. Exit sa vie rêvée de Champion du Chaos, et bonjour à la triste réalité : Ferag n’est en fait qu’Ulf Rampe-Bouse, un avorton ayant intégré un culte de Tzeentch pour tenter de gagner de l’influence, mais ayant manqué du courage nécessaire pour assassiner un rival politique, malgré les ordres clairs donnés par son Magister. Condamné à être transformé en Enfant du Chaos en punition de son échec, Ulf a été victime d’une ultime cruauté de la part de sa déité, qui n’est pas connue comme étant le Maître du Mensonge pour rien : un aperçu de la vie qu’il aurait pu avoir, si les étoiles avaient été alignées différemment, ou quelque chose comme ça. Alors que son corps se transforme en amas informe et que son esprit sombre dans la folie, nous laissons Ferag/Ulf se débattre avec l’épineuse question de ce qui est réel et de ce qui ne l’est pas. Critique de la raison pure, Kant tu nous tiens…Fin spoiler

1 : Comme quoi, on peut être un Seigneur du Chaos et détester l’anarchie.

AVIS :

Les nouvelles dont le twist final consiste à révéler que le protagoniste a rêvé ou halluciné tout ce qui nous a été présenté au cours des pages précédentes sont assez rare au sein du corpus de la Black Library1, aussi ‘The Lives of Ferag Lion-Wolf’ n’est pas aussi inimaginatif dans son intrigue que ce que le lecteur non familier avec la GW-Fiction pourrait en penser2. Avec son style flamboyant/ampoulé (c’est selon) assez unique parmi les auteurs de la Black Library, et sa vision quelque peu surannée – justifiable au vu de l’ancienneté de la nouvelle – du fluff, Barrington J. Bayley trousse une petite histoire tenant plus de la fable fantasy cruelle que du bolter porn qui était, et est toujours, la norme pour les courts formats 40K. Un acquired taste, comme disent nos amis anglais, qui peut ne pas convenir à tout le monde mais qui mérite le détour à mon avis.

1 : Mais de manière assez drôle, deux d’entre elles se suivent dans le recueil ‘Dark Imperium’, le ‘Nightmares’ de Gav Thorpe exploitant la même idée.
2 : Je dois indiquer ici que même Lovecraft a cédé à cette tentation, dans ce qui peut être considéré comme la moins lovecraftienne de ses nouvelles : ‘The Dream-Quest of Unknown Kadath’.

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Playing Patience – D. Abnett :

INTRIGUE :

Playing PatienceLe monde de second ordre de Sameter reçoit la visite inespérée autant que désespérée de l’Inquisiteur Gideon ‘Barquette’ Ravenor et des quelques survivants de sa suite (Harlon Nayl, Kara Swole, Carl Thonius, Wystan Frauka), après que cette fine équipe se soit faite piégée et bellement rossée par ce diaaaaable de Zygmunt Molotch lors de son assaut sur l’Hinterlight1. Ayant perdu plusieurs des leurs ainsi que leur vaisseau spatial de fonction, Gigi et Cie n’ont plus que leurs yeux pour pleurer (et encore, pour Ravenor ce n’est plus le cas) et une piste aussi froide que ténue pour tenter de débusquer l’insaisissable génie du crime qu’est Molotch. Après tout, on parle d’un major de promo de la Cognitae, soit l’équivalent du MIT en études chaotiques du sous-secteur. Pas n’importe qui, donc.

Sameter, et plus précisément la cité ruche d’Urbitane, intéresse nos amis car c’est de là que venaient trois des hommes de main recrutés par Molotch pour son embuscade. C’est un bien maigre début, mais n’ayant pas d’alternatives, les limiers se mettent en chasse et parviennent à localiser un trafiquant local ayant employé l’un des gros bras en question quelque temps avant son départ de la planète. L’interrogatoire, mené par l’intraitable et peu diplomate Nayl, débouche assez logiquement sur une bagarre générale, pendant laquelle les acolytes de Ravenor peuvent démontrer leur talent indéniable dans toutes les formes de combat… et leur regrettable tendance à s’emporter au pire moment. Nayl envoie en effet la cible de son patron au 50ème sous-sol d’un tir malheureux de son fidèle Hecuter 10, et éteint la piste de Morpal Who Moves (and Falls, donc) par la même occasion. Voilà qui est fâcheux. Heureusement, le petit génie dandy qu’est Carl Thonius vient sauver les miches de son comparse en mettant le Giddy Gang sur un autre bail, bien plus prometteur celui-là : la Kindred Youth Scholam.

Établissement de bienfaisance recueillant et éduquant les orphelins des rues d’Urbitane, la Kindred Youth Scholam dissimule sous ses apparences très honorables, si un peu décaties, de bien sombres secrets. Grâce à ses talents consommés de hacker et d’analyste extra-financier, Thonius a découvert que les trois Stooges au service de Molotch étaient passés par cette noble institution, coïncidence fort improbable s’il en est. En creusant un peu, et en faisant des due diligences un chouilla plus longues que celles des clercs de l’Administratum (qui n’ont juste pas le time, les pauvres), l’Interrogateur a trouvé des preuves que la Scholam avait des liens avec la Cognitae, à commencer par son directeur Berto Cyrus a.k.a. Ludovic Kyro, un autre alumnus de cette sulfureuse institution. Il n’en fallait évidemment pas autant pour que Ravenor décide qu’une visite de terrain s’impose dans les plus brefs délais, et envoie ses hommes (et sa femme) de main sur place pour tirer les vers du nez à ce botoxé de Kyro.

Après un nouvel échange de tir (la couverture de trafiquant d’enfants utilisée par Thonius n’ayant pas fonctionné), Ravenor débarque en majesté accompagné d’un bataillon d’Arbites afin de procéder à l’interrogation de l’onctueux directeur de la Scholam et de ses associés survivants. Ce succès est toutefois terni par une absence regrettable de Thonius, trop occupé à se boucher les oreilles en gémissant pendant la baston pour remarquer que Kyro avait sur lui un détonateur de données, ce qui lui a permis de faire Ctrl+A/Ctrl+X/Ctrl+S sur le serveur de l’école, détruisant la grande majorité des archives de cette dernière. C’est la tuile.

Un peu dégoûté par l’amateurisme crasse de son bras droit, Ravenor décide de se passer les nerfs en se lançant dans une quête secondaire, réflexe naturel quand on est coincé sur la quête primaire, vous le reconnaîtrez. Ayant (psychiquement) senti lors de son arrivée dans la Scholam qu’un Psyker y avait séjourné pendant des années, et n’en est parti qu’il y a quelques jours, il décide qu’il est de son devoir d’Inquisiteur de mettre hors d’état de nuire cette menace manifeste à l’ordre impérial. Pendant qu’un Thonius très contrit essaie de récupérer les quelques infos encore stockés sur le C:\ du PC de Kyro, le Charles Xavier de 40K se livre à un interrogatoire serré, stressé et secoué de ce dernier, parvenant à lui arracher le nom de Loketter, narco baron auquel il a vendu une certaine Patience la veille au soir pour qu’elle serve de proie à l’une des chasses à l’homme que ce sombre individu organise pour le compte de quelques-uns de ses amis.

Si Patience a retenu son attention, c’est qu’il s’agit d’une telekine dont les talents sont devenus manifestes après qu’elle ait appris que Kyro avait remis ses deux jeunes sœurs (Prudence et Providence, ça ne s’invente pas) à un tiers, sans la consulter auparavant. Comme Patience avait choisi de rester à la Scholam malgré son âge avancé (21 ans) afin de pouvoir veiller sur ses cadettes le temps qu’elles soient à leur tour majeures, l’annonce de ce coup de Jarnac a naturellement eu raison d’elle-même (de sa patience, si vous trouvez que la phrase est déjà trop longue), et ses pouvoirs longtemps dissimulés se sont déchaînés sur le personnel éducatif de la Kindred Youth, jusqu’à ce que le Paria qui accompagnait Loketter ne siffle la fin de la récré.

Apprenant la tragic back story de Patience, Ravenor passe de chasseur inflexible de mutants à chevalier blanc au secours de la veuve et de l’orpheline et entraîne ses larbins dans un raid en terrain très mal famé pour localiser et secourir la pauvre enfant pourchassée aussi bien par les gangers locaux que par les tueurs à gage des amis de Loketter. Malgré sa volonté farouche de s’en sortir et son usage déjà mortel de ses pouvoirs, Patience aurait en effet fini comme ses anciens camarades de Scholam sans l’intervention décisive du bon Inquisiteur, qui n’hésite pas à posséder Kara Swole pour pouvoir utiliser sa voix suave à la place de la sienne, et convaincre une Patience traumatisée par les quarantenaires toxiques de coopérer à son sauvetage.

Au final, presque tout est bien qui ne se finit pas trop mal : même si Loketter parvint à s’enfuir avant d’être attrapé par la maréchaussée, et que tous les efforts pour localiser Prudence et Providence se révèlent vains, Kyro finit par remettre Ravenor sur la piste de Molotch, aucun acolyte de l’Inquisiteur n’est mort dans l’opération, et il convainc même Patience de rejoindre sa suite (en même temps c’était ça où le Vaisseau Noir, le choix était facile). Avant de partir, cette dernière se donne le nom de Kys, non pas en hommage au groupe favori de sa défunte môman, mais en référence à l’institution où elle a passé de longues et belles années avec ses sœurs. Eh oui, ça vient de là !

1 : Si cet épisode vous évoque de quelques vagues et brumeux souvenirs, c’est parce qu’Abnett ne l’a pas vraiment couvert dans sa trilogie ‘Ravenor’, mais y fait référence pour justifier la haine que l’Inquisiteur éprouve envers sa Némésis.

AVIS :

Au cours de ses séries inquisitoriales, Dan Abnett a signé de nombreuses nouvelles dévouées à l’enrichissement et à l’approfondissement des personnages accompagnant ses protagonistes, et ‘Playing Patience’ est sans doute l’œuvre la plus aboutie qu’il ait soumis en la matière. Tout à la fois thriller, polar, horreur et buddy movie1, bien desservi par son format deluxe (une cinquantaine de pages, ce qui permet à Abnett de donner du volume à son intrigue et à ses personnages) et ses points de vue alternés entre Patience et Ravenor et Cie, cette longue nouvelle est un excellent prologue à la trilogie ‘Ravenor’, même si elle a été écrite après la sortie du premier tome de cette dernière. On en ressort avec la ferme intention d’embrayer avec la suite de la traque de l’infâme Zygmunt Molotch – qui n’apparaît pourtant pas du tout dans la nouvelle – et un attachement sincère envers Ravenor et sa clique. Du bel et propre ouvrage.

1 : L’interaction entre Frauka et Thonius à la fin de la nouvelle est vraiment drôle, et sert de contre point parfait à l’ambiance pesante du reste de l’histoire.

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Kill Them All!

Snares and Delusions – M. Farrer :

INTRIGUE :

40K_Snares & DelusionsC’est un jour très spécial pour l’Apôtre Noir De Haan (Dan de son prénom) : après des millénaires passés à traquer le Vaisseau Monde de Varantha à travers la galaxie, tous les signes prédisent que l’heure de la confrontation finale est arrivée entre Word Bearers rancuniers et Eldars élusifs. Débarqué à la surface d’un monde vierge peuplé d’Exodites (rapidement matés) avec l’avant-garde de son ost, De Haan supervise la consécration du bâtiment offert par la Légion hérétique à la seule ville de la planète : la Cathédrale de la 5ème Bénédiction. Les styles jurent un peu mais c’est une attention touchante, il faut le reconnaître. Notre zélé héros est persuadé que ce monde minable dissimule des portails Warp reliés à Varantha, qu’il hait du plus profond de ses cœurs depuis le moment où les Eldars de ce Vaisseau Monde ont fait échouer dans le sang l’opération tractage et prosélytisme montée par le mentor de De Haan sur Sahch-V, contraignant les fils de Lorgar à une honteuse retraite. Depuis, l’Apôtre Noir a consacré sa vie à la traque de cette faction eldar, parvenant progressivement à resserrer l’étau autour du Vaisseau Monde honni. Preuve de l’inimitié tenace l’opposant à Varantha, il a même reçu une prédiction personnalisée de la bouche de l’un de ses Prophètes, juste avant que le crozius protéiforme1 de De Haan ne le réduise en bouillie : « lorsque tu poseras les yeux sur le cœur de Varantha, la messe sera dite2 ».

Les travaux avancent bien, les Exodites sont en voie avancée d’extermination, et les renforts qui patientent dans la barge de bataille en orbite de la planète ne vont pas tarder à descendre renforcer l’avant-garde : tout va pour le mieux dans la plus grimdark des galaxies, mais un événement troublant vient perturber la bonne humeur de De Haan. Au moment de prononcer son sermon de Haine o’clock, il a eu une panne d’inspiration subite. Son second Meer a beau lui répéter que ça peut arriver à tout le monde, le fier Apôtre est aussi gêné que perplexe après cet incident, mais finit par décider que c’est encore un signe que sa quête arrive à son terme, avant d’imaginer toutes les choses horribles qu’il fera subir à Varantha et à ses habitants une fois qu’il aura craqué le digicode. Positive thinking here. Après tout, les choses se déroulent tellement bien que ce n’est pas un petit blanc passager qui va faire dérailler l’Omphalos Daemonium, pas vrai ?

Début spoiler…Eh bien (et vous vous en doutiez, sagaces lecteurs que vous êtes), si. Surgissant de l’ombre et/ou de la banlieue pourrie de la ville Exodite – ça dépend des versions – les forces de Varantha attaquent la Cathédrale sans crier gare, avec la redoutable efficacité et le haut potentiel disruptif3 qui sont la marque des Eldars des Vaisseaux Mondes. Coupé de ses renforts et bientôt laissé seul survivant de son ost, De Haan a un peu de temps pour songer à la prophétie qui lui a été révélée, et surtout à l’interprétation très optimiste qu’il en a eu jusque-là. Car toutes les fins ne sont pas heureuses, comme l’Apôtre Noir ne tarde pas à le découvrir lorsque le cœur de Varantha, alias son Avatar de Khaine, entre dans la Cathédrale pour demander un petit tête à tête au confessionnel… Ite, missa est.Fin spoiler

1 : Il a le superpouvoir de changer de tête à chaque fois que De Haan pose les yeux dessus, ce qui est… cool.
2 : Ok, c’est pas la traduction littérale mais bon, avouez que c’est approprié pour un Word Bearers.
3 : Tous leurs points de commandement ont été claqués dans le stratagème « pièges à c*n », qui colle des blessures mortelles à toute figure s’approchant à 6 pas ou moins des 10 pions « râteau » placés par le joueur Eldar.

AVIS :

Une nouvelle moins intéressante par son intrigue (dont on devine la fin pratiquement dès le début, la faute aussi à un titre qui vend un peu trop la mèche) et ses personnages (assez quelconques) que par l’aisance stylistique dont fait preuve Matthew Farrer et surtout la bonne rasade de fluff qu’il nous sert au fil des pages, et qu’il a la bonne idée de répartir entre Word Bearers et Eldars. Pas sa meilleure, pour sûr, mais tout de même d’un très solide niveau.

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Apothecary’s Honour – S. Jowett :

INTRIGUE :

40K_Apothecary's HonnorDéployée sur le monde d’Antillis IV pour aider les autorités locales à se défaire d’une invasion chaotique plus grave qu’anticipée, la Seconde Compagnie du Chapitre des Avenging Sons, menée par le Capitaine Selleus, s’est battue vaillamment mais cela n’a pas suffi. Isolé au milieu des bourrasques de cendres humaines conjurées par un géo-ingénieur plus ravagé du bulbe que la moyenne pour combattre les effets du changement climatique (eh, c’est un aérosol comme un autre), l’Apothicaire Korpus se consacre toutefois sans faiblir à son sacerdoce : récupérer les glandes progénoïdes de ses camarades tombés au combat. Il sait en effet qu’il s’agit d’une partie vitale de l’effort de guerre de l’Adeptus Astartes, qui se retrouverait rapidement réduit à peau carapace noire de chagrin sans la récolte et la réimplantation dans de nouveaux hôtes de ces précieux kystes. On le suit ainsi jusqu’au quasi-cadavre du Sergent Pereus, blessé à mort1 lors d’une escarmouche contre une bande de Space Marines du Chaos, qu’il accompagne pieusement dans ses derniers instants et déleste de ses mirifiques glandes, stockées dans le petit frigo personnel qu’il trimballe sur son armure. À la guerre comme à la guerre.

Sur le chemin du retour vers le QG château (en français dans le texte) de sa Compagnie, Korpus reçoit un message alarmant de la part de Selleus, lui annonçant que la campagne est perdue et lui ordonnant de se diriger sans tarder vers le spatioport où sont garés les Thunderhawks des Avenging Sons, et de les utiliser pour rejoindre leur vaisseau amiral. Il est en effet capital de renvoyer les Avenging Glandes jusqu’à l’Apothicarium chapitral, on a bien compris. De son côté, le Capitaine et ses derniers hommes préfèrent se faire exploser dans leur bastion plutôt que de s’offrir un dernier carré digne de ce nom, ce qui surprend fortement Korpus. Cela dit, un ordre est un ordre, et le zélé Apothicaire part donc en petites foulées en direction du hangar à aéronefs mis à disposition par les autorités d’Antillis IV, en espérant que ce dernier n’ait pas déjà été conquis par l’ennemi.

En chemin, notre héros tombe par hasard sur une escouade de Scouts dont on était sans nouvelles depuis plus d’une journée et que tout le monde avait donc considéré comme perdue corps et biens (faut pas se retrouver en zone blanche au 41ème millénaire). Coincés dans une friche industrielle par une horde de World Eaters ricanant à défaut d’être très doués, les novices auraient rapidement perdus la tête sans l’intervention décisive de Korpus, dont le poing énergétique – un choix d’équipement un peu bizarre pour quelqu’un sensé effectuer des actions chirurgicales sur le champ de bataille, mais passons – et l’effroyable mauvaise humeur, appelée Cœur Vengeur par les initiés, règlent rapidement leur compte aux affreux.

Au bout d’un voyage sans trop d’encombres, les survivants finissent par arriver jusqu’au spatioport et commencent à retaper le Thunderhawk le moins amoché du lot afin de pouvoir s’éclipser de la planète condamnée au nez et à la barbe énergétique des Khorneux. Bien évidemment, ils n’auront pas loisir de mener à bien cette mission d’extraction furtive, une nouvelle vague de renégats leur tombant dessus sans crier gare (en même temps, il n’y avait pas de train sur place) avant que Korpus et les Scouts n’aient eu le temps de boucher tous les trous de la carlingue avec du chewing-gum. Comble de malchance, les World Eaters sont menés par un Dreadnought équipé d’un canon laser, dont la portée risque d’être fatale au coucou déglingué des Avenging Sons. L’Apothicaire décide alors de mener une charge suicide avec les novices afin de permettre au Thunderhawk piloté par le seul Scout ayant passé son permis ULM de s’échapper, après avoir déposé ses précieuses glandes dans le minibar de l’appareil, bien sûr.

Cette contre-attaque inspirée est couronnée de succès, Korpus faisant entrer son poing énergétique en surchauffe après l’avoir coincé sous un piston du Dreadnought adverse, vaporisant la machine impie ainsi qu’une bonne partie de ses suivants, au modique prix d’un évanouissement pour notre viril héros (tous les Scouts meurent dans la bagarre par contre, mais on s’en fout un peu). Il a toutefois accompli brillamment sa mission, pas vrai ?

Début spoiler…Eh bien, non. La mauvaise nouvelle lui est transmise par un Space Marine hérétique ayant autrefois servi comme Apothicaire et qui a fermement attaché Korpus sur un chevalet d’opération dans l’attente de son réveil. Une légende noire parmi l’Adeptus Astartes, responsable de la création de nombreux monstres génétiquement modifiés se battant dans les rangs des Légions renégates. Je veux bien sûr parler de Fab…rikus. Si si. Toute ressemblance avec un personnage nommé serait évidemment totalement fortuite. Fab’ révèle à son collègue et néanmoins prisonnier qu’il a été chargé par ses patrons chaotiques de trouver un moyen de recruter en masse de nouveaux Space Marines, ce qui n’est pas facile du fait de l’influence corruptrice du Warp sur les glandes progénoïdes des Astartes vétérans. Une seule solution pour contourner ce problème : aller taper dans les stocks de ces saintes nitouches de loyalistes, et c’était bien le but de la campagne d’Antillis IV. Cependant, les dernières actions du Capitaine Selleus ont fait capoter ce plan machiavélique, et l’entière opération se serait terminée par un fiasco retentissant pour les traîtres sans l’étourderie de Korpus, qui a « oublié » de prélever ses propres glandes et de les déposer dans le frigo du Thunderhawk avant de foncer dans le tas comme un demeuré. La boulette. Notre histoire se termine sur la scène pénible de l’opération sans anesthésie pratiquée sur ce glandu – et c’est bien le problème – d’Apothicaire, qui se désole en son for intérieur de sa propre stupidité. Charité bien ordonnée…Fin spoiler

1 : Je tique un peu du fait que Pereus se soit auto-diagnostiqué perdu pour la cause, sans que Korpus juge bon de faire son boulot de medic et de vérifier par lui-même la gravité de l’état de son camarade. Après tout, qu’est-ce qu’une paraplégie quand on possède la technologie nécessaire pour créer des Dreadnoughts ?

AVIS:

Simon Jowett signe une nouvelle franchement vintage pour le lecteur contemporain (qui sera peut-être surpris que le nom de Roboute Guilliman n’apparaisse pas une seule fois dans une histoire qui parle des Avenging Sons), explorant une des particularités du background des Space Marines : le rôle crucial des glandes progénoïdes dans leur organisation et leur culture.

Si l’idée est bonne, la réalisation n’est toutefois pas au-dessus de tout reproche : on passe à mes yeux beaucoup trop de temps à voir voler les bolts dans cette nouvelle, sans que l’auteur se consacre à faire monter la pression autour de Korpus, ni ne le confronte à des décisions véritablement difficiles, où il aurait eu à choisir entre son fameux honneur d’Apothicaire, et la mission vitale confiée par son supérieur. A cela viennent s’ajouter des petits irritants sans conséquence pour la structure de l’histoire, mais pénible à lire quoi qu’il en soit, comme la nullité crasse des World Eaters qui servent d’opposition aux vertueux Avenging Sons, pas foutus de régler leur compte à cinq Scouts et un Apothicaire mouflé même avec l’avantage du nombre.

On peut toutefois mettre au crédit de Jowett un twist final pas trop mal fichu (même si Korpus et Fabrikus ont vraiment une haute idée d’eux-mêmes pour penser que ce micro-événement risque de faire basculer le rapport de forces entre Imperium et Chaos) et quelques infos fluff relevant plus de la curiosité académique que de la source canonique1, cependant.

1 : C’est le même Jowett qui a doté le Chapitre des Iron Hearts de casque de VR pour s’entraîner au combat, et baptisé d’autorité un des Primarques disparus (voir ‘Hell in a Bottle’) : ses contributions au fluff Space Marine doivent être pris avec 72 pas de recul.

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Unthinking Justice – A. Millward :

INTRIGUE :

40K_Unthinking JusticeUne force de Black Consuls est envoyée sur la planète Suracto, en rébellion ouverte contre l’Imperium. Au fur et à mesure du déroulement de la mission, il apparaît toutefois que les traîtres ne sont pas forcément ceux auxquels on pense.

AVIS :

Une petite nouvelle sympatoche, qui commence comme une histoire de marounes classique, puis se corse salutairement grâce à la mise en scène d’un (léger1) doute quant à la nature de l’ennemi véritable des Black Consuls. On est très loin de l’Elucidium’ de Simon Spurrier et du ‘We Are One’ de John French, mais on ne peut que saluer l’intention d’Andras Millward de donner au lecteur davantage qu’une Cawkwell-erie lambda. La conclusion de l’histoire est toutefois assez nébuleuse, ce qui affaiblit un peu le twist final concocté par l’auteur.

1 : « Alors vermine, pourquoi t’es-tu rebellé contre l’Empereur ?»
« Monseigneur Marine, il y a malentendu. Les copains et moi nous sommes soulevés contre l’administration planétaire parce qu’elle cherche à faire tomber la planète aux mains du Chaos. Nous avons des preuves solides de son implication dans un compl- »
« BAM BAM BAM »
« Administrateur ! C’est le cinquième prisonnier que vous exécutez en plein interrogatoire, juste au moment où il allait vous mettre en cause dans cette triste histoire. Je commence à croire que vous nous cachez quelque chose… »
« Veuillez me pardonner, ça n’arrivera plus. J’ai tendance à sur réagir quand ma fidélité envers l’Imperium est mise en doute. Héhé. »
« Bon, d’accord. Mais que je ne vous y reprenne pas une sixième fois, hein ! »

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Battle of the Archaeosaurs – B. J. Bayley :

INTRIGUE :

40K_Battle of the ArcheosaursLa planète ABL 1034, colonisée par l’humanité en des temps forts lointains puis laissée à mariner dans son jus pendant la Longue Nuit, a été redécouverte par l’Imperium. Idéalement situé pour devenir une capitale sous-sectorielle, comme Mont de Marsan avant lui, ce monde primitif aurait dû être conquis ou reconquis par le régiment de Gardes Impériaux dépêché sur place sans le moindre effort, mais voilà : les bidasses ont été toutes massacrées par la population locale, malgré le très faible niveau technologique de cette dernière. Une deuxième expédition, mécanisée celle-là, n’a pas connu un sort plus favorable, faisant d’ABL 1034 une sorte de village gaulois galactique, résistant vaillamment contre l’envahisseur romain impérial. Foin de druide à la faucille en or ou de potion magique ici : la raison de cette défiance étonnante se trouve dans la présence d’une mégafaune domestiquée par les natifs, et baptisée archéosaures par les Magos Biologis en raison de la ressemblance des dites bestioles avec les lézards géants qui peuplaient Terra il y a des millions d’années.

Comme on le sait bien ici, ni la patience ni la bienveillance de Pépé ne sont sans limite, au contraire de ses armées, qui sont elles proprement inextinguibles. La troisième fois sera donc la bonne pour l’Imperium, qui décide de mettre le paquet pour s’assurer d’une victoire probante et envoie pas un, mais deux Titans Warlord mettre de l’ordre sur ABL 1034. Bien que les Princeps des machines envoyées sur place (Gaerius et Efferim) doutent fortement que l’ennemi soit en mesure de les inquiéter, la discipline légendaire de l’Adeptus Titanicus les empêche de livrer le fond de leur pensée aux gradés de la Flotte et de la Garde avec lesquels ils partagent la séance de briefing pré-déploiement. Et puisqu’ils sont sur place, autant faire le job, pas vrai ?

Cette belle confiance est rapidement, même si temporairement, ébranlée par la vision qui attend les Princeps lors de leur descente à la surface de la planète : pas moins de cinq épaves de Gargants ork jonchant la plaine choisie par le commandement impérial pour déployer ses forces. Bien que Gaerius choisisse de croire qu’il s’agit d’une conséquence de la nature belliqueuse des Xenos, tout prêts à se battre en eux en absence d’ennemis valables, plutôt que d’un fait d’armes des indigènes, son aveuglement béat ne va pas durer longtemps. L’arrivée de la troisième vague d’assaillants n’est en effet pas passée inaperçue chez les locaux (en même temps, on parle de marcheurs d’assaut de plus de trente mètres de haut, c’est voyant), et la tribu la plus proche n’est pas longue à envoyer ses guerriers et deux archéosaures livrer bataille aux nouveaux venus. On apprend à l’occasion d’un petit passage raconté depuis le point de vue de l’un des deux seuls survivants de la deuxième vague impériale, et reconverti en étendard vivant par les autochtones, que ces derniers arrivent à contrôler leurs montures grâce à des pieux métalliques fichés dans le crâne des archéosaures à des endroits précis, et dont les vibrations permettent d’activer certaines zones du cerveau de ces grosses bestioles. C’est tout simple, mais il fallait y penser (et surtout, trouver un moyen de mettre l’idée en pratique…).

Le combat s’engage donc entre les Titans et les Kaijus, et le petit rictus de suffisance qui flottait sur les lèvres du Princeps Gaerius est rapidement remplacé par une grimace d’incrédulité devant la résistance incroyable de ses adversaires, puis par de la panique pure et simple lorsque les archéosaures déclenchent leur combo spéciale « jet de flammes/cabrage/coup de queue », mettant au tapis le Warlord d’Efferim et laissant la machine rescapée composer seule avec les deux dinosaures énervés qui lui font face. L’entraînement et la discipline de l’équipage du Titan survivant (et les gros flingues dont il dispose) permettent toutefois à Gaerius d’arracher une victoire mineure en abattant les lézards géants à bout portant avant qu’ils n’aient pu lui faire des papouilles. C’était moins une pour la crème de la crème de l’Omnimessie…

Début spoiler…Et ce n’est surtout que partie remise pour la tribu vaincue, dont le nouveau chef décide que l’heure n’est plus aux combats honorables en 2 contre 2. Ayant bien compris que les armées impériales ne reculeraient devant rien pour s’emparer de la planète, il envoie dès le lendemain l’intégralité de son cheptel, soit une centaine d’archéosaures, piétiner les positions adverses. Le Titan mal en point de Gaerius ne peut pas s’opposer à une telle démonstration de force, et la troisième campagne se termine aussi ignominieusement que les précédentes.

Notre nouvelle quant à elle se conclut sur la décision prise par des gros bonnets de l’Imperium de régler une fois pour toutes cet ennuyeux, coûteux et humiliant problème en déchainant un petit Exterminatus sur la planète rebelle, quand bien même ça l’abimerait un peu, au moins à moyen terme. Un constat partagé à grand cri par notre ami Gaerius, qui a survécu à la débâcle et a été « adopté » par la tribu d’ABL 1034, où il sert maintenant de décoration frontale d’archéosaure. Voilà une reconversion réussie.Fin spoiler  

AVIS :

Une nouvelle « et si ? » par excellence, ‘Battle of the Archeosaurs’ permet à une des plumes les plus libres de la première époque de la Black Library de mettre en scène une bataille assez improbable et donc totalement savoureuse entre Titans Warlord et dinosaures géants, le tout avec un respect du fluff que l’on ne peut qu’admirer. On ne verra probablement plus rien de tel dans le catalogue de la BL (tant pis ou tant mieux, je vous laisse seuls juges), ce qui est une autre raison pour les amateurs de GW-Fiction de prendre connaissance de cet OVNI de la littérature 40K.

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The Wrath of Khârn – W. King :

INTRIGUE :

The Wrath of KhârnLa régularité, c’est la clé de la longévité. Il suffit de regarder Khârn (10.000 printemps et 2.243 meurtres – pour cette campagne – au compteur au début de notre histoire) pour s’en convaincre : le bougre aime toujours autant ce qu’il fait depuis dix millénaires, et cela lui a permis de garder la vigueur d’un jeune homme malgré une existence aventureuse et une hygiène de vie questionnable. Un véritable exemple pour la jeunesse, moi je dis. Nous cueillons le petit chaperon rouge sang au détour d’un champ de bataille situé sur un monde démon dédié à Slaanesh, sur lequel Mr Félon mène une attaque avec ses enthousiastes Berzerkers pour détruire une relique impie gardée au sein du Temple de l’Indulgence Superlative (tout un programme) : le Cœur du Désir.

Comme on peut s’en douter, il n’y a personne dans la team duckface qui soit capable de rivaliser avec notre héros dans le noble art du combat rapproché, et Khârn ne met que quelques pages à enfoncer les défenses ennemies, détruisant l’intégrité physique et ruinant les justaucorps moulants de tous ceux qui ont le malheur de croiser sa route. Il finit par parvenir avec quelques copains jusqu’à la salle principale du Temple, où les attendait le chef des Slaaneshi, alangui comme il se doit sur un trône enfermant l’essence d’un Démon Majeur : le fameux Cœur du Désir !

Si l’aura de sensualité et de concupiscence qui émane de la chaise démoniaque pique un peu les yeux de notre farouche champion, ses effets sont décuplés sur ses humbles suivants, qui à sa grande colère succombent tous à l’étreinte lascive du Prince des Plaisirs. Juste le temps de corriger de manière définitive ces gougnafiers, et Khârn peut se concentrer sur le cas du cultiste en chef, dont l’inqualifiable familiarité1 n’est pas le moindre de ses péchés. Encore une fois, l’affaire est vite expédiée, quelques moulinets de Gorechild ayant vite fait d’apprendre la bienséance à ce hippie dévergondé, et ce malgré son intéressante capacité à continuer à contrôler ses membres après qu’ils aient été tranchés.

Le boss final de notre récit s’avère être le Cœur du Désir, ou plus précisément l’entité démoniaque qui y est prisonnière. Cette dernière commet l’impardonnable erreur de suggérer à Khârn qu’un type qui s’appelle « le Félon » peut sans problème s’asseoir sur sa loyauté à Khorne (et sur le trône de Slaanesh par la même occasion), alors que notre héros est justement fier de sa loyauté exclusive au dieu du Sang. S’il a trahi ses camarades World Eaters, c’est justement parce qu’il considérait qu’ils s’étaient détournés des commandements de Khorne ! Cette bévue sera lourde de conséquence pour le Cœur du Désir, qui se prend un grand coup de hache tronçonneuse dans le dossier et termine la nouvelle en pièces détachées. Si vous tendez bien l’oreille, vous pourrez entendre Khârn fredonner I’m still standing alors qu’il regagne son vaisseau avec la satisfaction du devoir accompli…

1 : Il appelle Khârn « vieille branche », ce qui n’est pas très pro.

AVIS :

Nous sommes en présence de la toute première apparition de Khârn dans la GW-Fiction, et c’est peu de choses que de dire que de l’eau – ou peut-être du sang – a coulé sous les ponts depuis ces débuts brut(aux) de décoffrage signés de la main de William King. Ce personnage iconique a en effet gagné une profondeur très intéressante à travers son traitement dans l’Hérésie d’Horus, et que l’on ne retrouve absolument pas dans ‘The Wrath of Khârn1, mais il serait assez injuste de le reprocher à King à mon avis. Ici, nous sommes en présence du champion de Khorne altéré de sang dans sa plus pure forme, et dont la plus grande force est son inextinguible soif de combat et de meurtre ; c’est d’ailleurs la « morale » de l’histoire servie par un William King qui n’a pas franchement poussé son talent de scénariste. Cette nouvelle pourrait être qualifiée de simpliste et d’indigente au vu des standards actuels de la Black Library, mais si on la considère dans le contexte de sa première publication (en 2001, et dans un White Dwarf), un peu de mansuétude est tolérable. À lire si vous êtes un aficionado dévoué du Félon, très dispensable sinon.

1 : Un jeu de mots typiquement anglo-saxon, car faisant référence au film ‘The Wrath of Khan’ de la série Star Trek.

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Into the Maelstrom – C. Pramas :

INTRIGUE :

40K_Into the MaelstromCapturé après l’abordage malheureux d’un croiseur White Scars par ses camarades Red Corsairs, l’archiviste Sartak doit prouver sa loyauté retrouvée envers l’Empereur (car la vue d’une dizaine de bolters braqués sur sa tête l’a aisément convaincu de retourner sa veste énergétique, étonnant non ?) en informant ses nouveaux copains de la destination du prochain raid de Huron Sombrecoeur hors du Maelstrom. Notre héros repentant arrivera-t-il à abuser le paranoïaque ex Tyran de Badab assez longtemps pour accomplir sa périlleuse mission ?

AVIS :

Si on met de côté les zones d’ombre1 de l’argument d’Into the Maelstrom’, que l’on peut imputer à la plus grande permissivité qui régnait à cette époque (voir ‘Hell in a Bottle’ de Simon Jowett pour s’en convaincre), cette nouvelle se révèle être très convenable. La force de l’écriture de Pramas est d’arriver à retranscrire la course contre la montre dans laquelle est engagée son héros, et l’étau qui se resserre de plus en plus autour de lui au fur et à mesure des pages. ‘Into the Maelstrom’ peut également se targuer de bénéficier d’un final réussi, autant du point de vue de la construction narrative que du respect de l’ambiance nihiliste de Warhammer 40.000, et de la participation du Huron Sombrecœur convaincant en psychopathe retors et flamboyant.

1 : « Seigneur Subotai Khan, le Red Corsair que nous avons fait prisonnier après l’attaque de notre barge de bataille (au lieu de lui coller un bolt dans le crâne, comme il aurait été normal) est réveillé et attend votre bon plaisir. »
« Faîtes le entrer. »
« Qui a été un vilain garnement, hum ? »
« Je dois reconnaître que j’ai commis quelques erreurs ces dernières années votre honneur, mais depuis que vous m’avez capturé et me tenez à votre merci, j’ai très envie que nous devenions copains. Vive l’Imperium donc. »
« Merveilleux. Maintenant que tu as miraculeusement retrouvé foi en l’Empereur, tu es libre de retourner chez les Red Corsairs. Essaie juste de nous dire où Huron dirigera sa prochaine attaque, de manière à nous permettre de le prendre en embuscade. »
« Vous ne préférez pas plutôt que je vous mène directement jusqu’à la flotte des Red Corsairs, chose dont je suis capable selon l’auteur de la nouvelle ? »
« Nan. »
« Euh, d’accord, c’est comme vous voulez… Mais imaginons – je dis bien imaginons – que mon repentir ne soit pas sincère, et qu’une fois de retour dans le Maelstrom, je vous fasse parvenir des informations erronées, permettant à Huron d’attaquer une planète sans défense, ou pire, de retourner l’embuscade des White Scars contre eux. Vous avez prévu quelque chose pour ce cas de figure ? »
« Bien sûr ! Le fidèle Arghun ici présent t’accompagnera dans ta mission, et s’assurera que tu mènes à bien cette dernière. »
« Vous êtes bien conscient que Huron risque de le faire tuer à la minute où il posera les yeux sur lui, hein ? Et que même dans le cas où il survivrait à son bizutage, il n’aurait aucun moyen de vous avertir de mon hypothétique trahison, étant donné que je serai celui qui vous transmettra les coordonnées du prochain objectif de Huron grâce à mes pouvoirs psychiques ? »
« Tu as raison Sartak, mon plan repose entièrement sur ta pleine et entière coopération. Mais j’ai tout à fait confiance en toi, car nos trente secondes d’entretien m’ont convaincu qu’en dépit des actes monstrueux que tu as commis en tant que Red Corsairs, tu es quelqu’un de bien. Pars avec ma bénédiction. »
« Merci Subotai Con, heu Khan. »

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Et voilà qui conclue cette revue de ‘Let the Galaxy Burn’, et clôture définitivement la partie grimdark de mon aventure infernale ! Je ne pense pas avoir besoin d’émettre de jugement final sur cette anthologie, qui présente la variété stylistique et qualitative propre à la plupart des recueils de la BL. Si vous êtes fans de cette époque mythique et fondatrice de la GW-Fiction, nul doute que vous trouverez plaisir à parcourir ces pages aujourd’hui un peu jaunies. Sinon, il y a énormément d’autres ouvrages qui vous attendent dans les rayons de la Bibliothèque Interdite, et vous y trouverez sans doute votre bonheur… je vous le souhaite en tout cas !

INFERNO! – ANNEE 6

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de la 6ème année d’Inferno!, le magazine bi-mensuel publié par la Black Library entre 1997 et 2005, et dédié à la GW-Fiction sous toutes ses formes. Les six numéros dont il sera fait mention ici sont sortis entre juillet 2002 et mai 2003, et regroupent entre eux pas moins de 21 nouvelles, tirées de façon quasi paritaire des franchises Warhammer Fantasy Battle (11 histoires) et Warhammer 40.000 (10 histoires). Pour les plus attentifs et/ou fidèles d’entre vous, l’absence de nouvelles Necromundesques, qui ont pourtant fait partie du périmètre infernal depuis le premier numéro (‘The Demon Bottle’) s’explique à mes yeux par la concurrence faite par un autre jeu « spécialistes » futuriste, et qui venait de sortir à l’époque : Inquisitor1. Un clou chasse l’autre, comme on dit.

1 : J’en veux pour preuve la nouvelle ‘Payback’ de Graham McNeill, qui prend place sur Karis Cephalon, la planète où se déroulent les événements du livret de campagne ‘Death of an Angel’ (2003).

Inferno!_Année 6

Que les admirateurs éperdus de Nathan Creed et de Kal Jericho se consolent, s’ils le peuvent, avec la promesse d’une très haute concentration de personnages nommés (et parfois fameux) dans les numéros qui nous intéressent aujourd’hui. En plus de Gotrek & Felix (‘Redhand’s Daughter’), qui bénéficient, comme les Fantômes de Gaunt avant eux, d’un numéro (#36) à leur gloire, cette année sixième vit le retour d’Uriel Ventris (‘Leviathan’), Mathias Thulmann (‘Meat Wagon’), Angeika Fleischer (‘Head Hunting’), le Sergent Priad (‘Blue Blood’), Torben Badenov (‘Mark of the Beast’), sans oublier l’affable Gregor Eisenhorn (‘Backcloth for a Crown Additional’). Le millésime 2002/2003 vit également la création de figures importantes de la GW-Fiction, à commencer par l’impayable Ciaphas Cain (‘Fight or Flight’, ‘The Beguiling’) et l’efficace Brunner (‘What Price Vengeance?’). Moins gâtés par le passage des ans, mais méritants tout de même une mention spéciale, signalons enfin la présence des agents des lices Dirk Grenner et Karl Johansen (‘Rest for the Wicked’), du Magos Biologis Valentin Drusher (‘The Curiosity’) et du flamboyant corsaire Luka Silvaro (‘A Ship Called Rumour’), que nous aurons l’occasion de recroiser plus tard.

En ce qui concerne les contributeurs de cette année 6, il ne surprendra sans doute personne d’apprendre que ce fut une fois de plus Dan Abnett qui se révéla être le primo plumo (ouais je parle italien) de cette série, avec pas moins de quatre nouvelles à son nom. Suivent les sieurs McNeill, Werner, Mitchell et Spurrier (dont il s’agit pour les deux derniers des premières collaborations avec la Black Library), avec deux contributions par têtes de pipe. Et puisque nous avons commencé notre propos par un rappel de la disparition de Necromunda des pages infernales, terminons par une accolade aux auteurs qui ne reviendront plus nous faire bénéficier de leur talent dans le futur (du passé, mais je me comprends) : Brian Craig et Neil McIntosh. Mention spectrale à Robin D. Laws et Simon Jowett, qui poursuiveront encore quelque temps leur collaboration avec la BL, mais qui n’écriront plus pour Inferno!  par la suite.

Le cadre étant, je le pense, suffisamment planté, il est temps de passer aux choses sérieuses et de partir à la découverte de cette année slaaneshi (allez directement à ‘The Beguiling’ si vous voulez rester dans le thème)…

Inferno! Année 6

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Backcloth for a Crown Additional – D. Abnett [40K] – #31 :

INTRIGUE :

40K_Backcloth for a Crown AdditionalEn villégiature dans son domaine de Gudrun, l’Inquisiteur Gregor Eisehorn doit interrompre ses vacances pour enquêter sur la mort suspecte d’un de ses amis notables. Le seigneur Froigre a en effet passé l’arme à gauche à la suite de la fête organisée pour le retour de son fils sur la planète, à l’âge déçu de 82 ans. Par considération pour la famille, Eisenhorn accepte de jeter un œil au dossier, même si l’affaire lui semble d’une banalité consommée. Pourtant, au fur et à mesure que les indices s’accumulent, Greg va devoir admettre que ce cas n’est peut-être pas aussi éloigné de ses enquêtes habituelles. Le Chaos ne respecte rien, pas même les RTT des fonctionnaires de l’Ordo Xenos. Vilain Chaos, vilain.

AVIS :

Backcloth for a Crown Additional est la réponse d’Abnett à la question que nous nous sommes tous posés un jour : « mais que font les Inquisiteurs pendant leurs congés ? ». Plutôt que de partir à la pêche à la mouche ou faire des paniers en rotin, Gregor Eisenhorn joue donc au Cluedo avec quelques-unes de ses connaissances, ce qui ne doit pas vraiment le changer du boulot. Pour le lecteur, c’est toutefois l’occasion de découvrir l’iconique héros d’Abnett et ses plus proches collaborateurs (Bequin et Aemos) dans un cadre de quasi normalité.

La « gratuité » de cette nouvelle1, qui relate une anecdote assez inconséquente de la longue et difficile carrière d’Eisenhorn, permet à l’auteur de faire la démonstration de sa maîtrise du tempo romanesque : le rythme posé des vingt premières pages, au cours desquelles Abnett fait siens tous les codes du polar d’enquête, s’accélère brusquement et débouche sur un final enlevé, pendant lequel le bon Gregorbotte le cul calleux d’une bouteille de mercure possédée. 

Si la Black Library compte des contributeurs capables d’écrire de bons textes d’action pure, et (mais c’est plus rare) de bons textes « contemplatifs », ils sont en revanche très peu nombreux à savoir marier les deux approches de manière convaincante, ce qui est une autre raison de placer Dan Abnett en tête de peloton.

1 : Comprendre que, contrairement aux autres courts formats prenant place dans la saga inquisitoriale d’Abnett, Backcloth… n’a aucune incidence sur le reste de la série (Thorn Wishes Talon), ni ne révèle d’éléments intéressants sur le passé (Missing in Action, Playing Patience) ou le destin (The Strange Demise of Titus Endor) d’un personnage important de cette dernière.

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Head Hunting – R. D. Laws [WFB] – #31 :

INTRIGUE :

WFB_Head HuntingRetour au Col du Feu Noir (car c’est là que ça se Passe… mouéhéhé) en compagnie d’Angelika Fleischer et de son protecteur (ce qu’il pense) /stalker (ce qu’elle pense), Franziskus. C’est une journée normale pour Angie, qui exerce l’utile profession de récupératrice des champs de bataille, et a localisé le site d’une embuscade grâce aux croassements des corbeaux faisant bombance sur les cadavres abandonnés. Bien que Franziskus, en aristocrate principiel qu’il est, trouve la pratique dégradante, il faut bien que quelqu’un se charge de remettre sur le marché les biens et espèces qui resteraient sinon à prendre la pluie sur leurs défunts propriétaires, au lieu de créer du PIB, comme Baltazar Gelt le voudrait. La moisson du jour est plutôt bonne (un anneau nain pouvant servir de bracelet – les Dawi ont des doigts boudinés – et quelques pièces pour s’acheter un Sub’ en rentrant), mais se fait interrompre par un bruit caractéristique et de mauvais augure : celui d’une hache taillant de la barbaque. Prudents, les deux looters se cachent sur le bord de la route et surprennent peu de temps après un voyageur marchant avec une hache sur l’épaule et un sac suspect à la ceinture.

L’explication de texte entre les trois larrons permet au nouvel arrivant, qui se présente comme le professeur Victor Schreber, de dissiper tout malentendu quant à son accoutrement. Certes, il se balade avec un sac de têtes tranchées, et certes, c’est lui qui les a séparées de leurs précédents propriétaires, mais il l’a fait pour la science. Schreber est en effet un expert en phrénologie, et collectionne les crânes afin de percer le mystère des humeurs et des sentiments de ses semblables. Voyant que le bougre est seulement un gros nerd, et pas un psychopathe en puissance, Angelika et Franziskus ne le retiennent pas plus, mais à leur grande surprise, le prof a eu proposition à leur faire. Il revient en effet du petit village de Verldorf, situé en amont du Col, où il espérait pouvoir collecter un spécimen unique : le crâne du malandrin notoire appelé Potocki, récemment capturé et exécuté pour ses mauvaises actions par les Verldorfer. Ces derniers n’ont pas accepté l’offre, pourtant généreuse, de Schreber de leur prendre la tête (on les comprend), et l’ont chassé à coup de pierres lorsqu’il a insisté. Déterminé à agrandir sa collection, il propose donc deux cents shillings à nos héros en l’échange du crâne tant convoité, à collecter après livraison du paquet à son domicile. Il leur remet également une boîte rembourrée pour faciliter le transport et éviter toute casse pendant le voyage. La présence d’un cadenas pour fermer ladite boîte ne manque par contre pas d’interroger Franziskus…

Après un voyage sans encombre, Angie et Frankie arrivent à Verldorf, hameau misérable dont la principale attraction est le gibet où croupit un cadavre bien amoché, suspendu dans une cage en fer. Malgré son état décati, Potocki terrifie visiblement les locaux, qui refusent de parler de lui en dépit des perches que leur tend une Angelika preneuse d’informations pour faciliter son futur larcin. Ce n’est pas grave, elle fera sans, en bonne professionnelle qu’elle est. Ayant pris résidence dans l’auberge locale, les deux Bonereapers avant l’heure se glissent dehors au cœur de la nuit pour aller perpétrer leur forfait, neutralisant au passage l’alarme que l’aubergiste avait installé à sa fenêtre pour empêcher les mauvais payeurs de s’échapper sans régler l’addition. C’est du moins ce qu’Angelika et son side kick supputent, jusqu’à que l’horrible vérité leur saute littéralement à la figure…

Début spoiler…Potocki n’était en fait pas aussi mort qu’il n’y paraissait, et lorsqu’Angelika fait mine de le raser à l’œil, le cadavre s’anime et l’attaque furieusement. Bien qu’elle s’en sorte sans dommage, le raffut causé par l’affrontement réveille Verldorf, forçant notre héroïne à sortir une masterclass d’improvisation. Elle n’a pas été prise la main dans le sac en train d’attenter à l’intégrité d’un cadavre, non non : elle a été prise d’une crise de somnambulisme causée par l’influence maligne de la goule locale, dont personne, absolument personne ne l’a mis au courant. SKANDHAL !!! Totalement mystifiés par la prestation de leur hôte, les Verldorfer retournent se coucher sans faire d’esclandres, après avoir expliqué que la situation actuelle est le seul moyen qu’ils ont trouvé pour tenir à l’œil l’increvable et intenable Potocki, qui les tourmente depuis des générations et dont la vitalité maléfique défie l’imagination. Faute avouée étant à demi pardonnée, Angelika et Franziskus retournent également se pieuter…

…Et refont une sortie sans tarder, utilisant cette fois-ci la clé qu’Angelika a dérobé à l’aubergiste pendant qu’il lui présentait ses plus plates excuses, ce qui simplifie grandement l’opération « Louis XVI » planifiée par nos héros. Bien que Potocki ne se laisse pas faire, et que le bruit attire à nouveau les villageois hors de leurs masures, la tête finit par être collectée, et les deux gredins peuvent s’enfuir à toutes jambes en direction du manoir de Schreber.

Comme on pouvait s’y attendre de la part d’un employeur ayant omis de préciser ce « petit » détail au moment du briefing, Schreber se révèle être un mauvais payeur, qui sort un pistolet de son armoire au lieu des deux cents shillings promis. Angie avait toutefois prévu le coup, et se contente d’ouvrir la boîte contenant la tête de Potocki en direction de l’érudit félon. Pris au dépourvu par la manœuvre et par le crâne pourrissant qui lui saute à la jugulaire, Schreber est rapidement hors du coup (et hors de cou), ce qui laisse à Angelika et Franziskus toute latitude pour fouiller son domicile à la recherche d’un dédommagement, une fois qu’ils ont pris soin de réduire la tête enragée en bouillie, bien sûr. Au final, les deux comparses repartent avec un nouveau pistolet, ce qui n’est pas beaucoup mais déjà mieux que rien. Ils constatent d’un air détaché que la traînée informe qui était la tête de Potocki semble également être sur le départ, mais à la vitesse où elle progresse, le bougre ne devrait pas faire parler de lui avant cent vingt cinq ans. La Fin des Temps n’attend pour personne…Fin spoiler

AVIS :

Seconde (et à ma connaissance dernière) nouvelle consacrée par Laws à son personnage fétiche d’Angelika Fleischer, ‘Head Hunting’ semble tout droit sorti de l’imagination d’un DM facétieux, et peut se lire comme tel. Malgré l’horreur que représente un cadavre animé (de mauvais sentiments) et apparemment invulnérable, le ton léger avec lequel Robin D. Laws narre cette histoire la fait basculer dans le royaume de la comic fantasy, mais pas dans la parodie pure et simple de Warhammer Fantasy Battle, ce qui est appréciable. Un sympathique interlude entre deux lectures plus sombres.

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Liberation Day – M. Farrer & E. Rusk [40K] – #31 :

INTRIGUE :

40K_Liberation's DayFarrer et Rusk nous plongent dans les entrailles d’un Space Hulk colonisés par les orks, et dans lequel une communauté d’esclaves humains en fuite tente tant bien que mal de survivre. Profitant de la taille cyclopéenne du vaisseau et de la nature paresseuse des peaux vertes, nos héros ont en effet réussi à installer un camp de fortune dans le dédale de coursives et de ponts abandonnés du Hulk.

Les orks étant, comme chacun sait, des voisins abominables (tapage nocturne, poubelles renversées, murs taggés, voitures volées, crottes de squigs non ramassées…), la petite bande de survivants se venge comme elle peut en organisant des raids réguliers en territoire xenos, à la recherche de matériel utile et d’esclaves pas trop esquintés à libérer. Un de ces derniers ayant réussi à convaincre le leader des évadés (Challis) que le Space Hulk convergeait vers la Waaagh ! la plus proche, nos guérilleros décident de monter une expédition jusqu’à la salle des communications1 afin de faire connaître leur situation au reste de l’Imperium.

Coup de chance, ils arrivent à contacter l’astropathe de garde du Ragnarok, une barge de bataille Space Marines, et à convaincre le commandant de cette dernière de leur venir en aide. Mais pour cela, il faudra que Challis et ses potes réussissent à faire taire les défenses du Hulk, faute de quoi la libération tant espérée ne pourra avoir lieu.

1 : Ou plus exactement, l’enclos à bizarboys.

AVIS :

Liberation Day est une nouvelle intéressante à plus d’un titre. D’un point de vue strictement narratif, tout d’abord, elle présente une construction impeccable, les deux auteurs étant parvenus à optimiser leur séquençage du récit avec brio, permettant à l’intrigue de suivre son cours sans temps mort ni faux raccords. Le découpage du texte en cinq parties distinctes, relatant chacune un évènement important ayant pris place avant le fameux jour de la libération1, laisse ainsi apparaître la trame de la nouvelle2. Le résultat aurait pu être scolaire et décousu, mais Farrer et Rusk ont assez de métier pour éviter cet écueil et agrémenter l’ossature du récit de péripéties plaisantes à lire.

Deuxièmement, le fluff de 40K est non seulement respecté, mais également mis en perspective de manière intéressante. C’est indéniablement l’une des forces de Matthew Farrer (je ne me prononcerai pas sur le cas d’Edward Rusk, dont c’est la seule contribution à la Black Library) que de proposer un angle de vue à la fois original et pertinent de l’univers de Warhammer 40.000. Ici, il rappelle ainsi au lecteur que l’écrasante majorité des citoyens de l’Imperium n’a qu’une compréhension très limitée de la technologie et de l’organisation de ce dernier, ce qui n’est pas sans poser des problèmes que la plupart des autres auteurs de la BL auraient balayés d’un revers de plume, en conférant à leurs héros la confortable (quasi3) omniscience qui est la leur. Ainsi, le héros de Liberation Day a beau venir d’un monde assez développé, il n’a aucune connaissance en matière de voyage spatial (et n’a donc pas la moindre idée de la manière dont faire parvenir un SOS au reste de l’Imperium depuis le Space Hulk qu’il squatte), et rit carrément au nez de l’intello du groupe lorsque ce dernier lui affirme que les Space Marines existent bel et bien. Ça fait bizarre au début, tant l’Astartes est une figure centrale de la Black Library, mais c’est tout à fait cohérent d’un point de vue fluff, et je remercie Farrer de placer (pour une fois) la caméra au niveau du Mr Tout le monde de l’Imperium. C’est tellement rare4.

Troisièmement, la nouvelle se termine par un twist final pas trop mal introduit.

Au final, Liberation Day est une livraison plus que correcte de la part d’un des tout meilleurs (à mes yeux) contributeurs de la Black Library. On est assez loin du niveau de Faces, le must read absolu de Matthew Farrer, mais c’est tout de même suffisant pour faire passer un bon moment au lecteur gavé de Thorperies, Cawkwelleries et autres Swalloweries qui désespère en chacun de nous. C’est déjà pas mal. .

1 : Le premier chapitre s’intitule ainsi « 115 jours avant la libération », le deuxième « 112 jours avant la libération », et le dernier « Jour de libération ».
2 : Passage 1 : Challis libère un petit groupe d’esclaves.
Passage 2 : Un des nouveaux membres de la bande informe Challis que le Space Hulk approche d’une zone de guerre, et qu’il sera donc potentiellement possible d’envoyer un SOS à l’Imperium. Problème : comment s’y prendre ?
Passage 3 : Découverte d’un stock d’armes et de l’emplacement de la salle des communications du Space Hulk. Problème du passage 2 résolu.
Passage 4 : Raid chez les bizarboys, communication avec les Space Marines.
Passage 5 : Attaque des défenses orques afin de permettre la téléportation des Space Marines dans le Hulk. Pas de chance, c’étaient des Iron Warriors. C’est ballot.
3 : Il n’y a guère que les trois choses que le héros moyen de la Black Library découvre par lui-même au cours de ses aventures : 1) Le KO cé vrément pa kool 2) Ne jamais faire confiance à l’Inquisition 3) Ce n’est pas une bonne idée de partir en randonnée dans une mystérieuse nécropole peuplée de statues en métal à l’air patibulaire.
4 : Sur les 102 nouvelles 40K lues jusqu’à présent par votre serviteur (rq : c’était il y a bien longtemps, et surtout avant le lancement de Warhammer Horror et Warhammer Crime, mais j’ai la flemme de remettre à jour, donc ça restera comme ça) , seules 8 ont été écrites depuis le point de vue du sujet de l’Imperium lambda :  Liberation Day donc, mais aussi Warped Stars (Ian Watson), Nightmare (Gavin Thorpe), Angels (Robert Earl), Ancient History (Andy Chambers), Faces (Matthew Farrer), Survivor (Steve Parker) et The Shadow in the Glass (Steve Lyons). Les trois dernières sont des pépites que je recommande à tout le monde.

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A Matter of Evidence – B. Craig [WFB] – #31 :

INTRIGUE :

WFB_A Matter of EvidenceL’hiver est long et la vie est courte dans le grand Nord de Kislev, et de ces deux constats irréfutables vient peut-être l’attrait que Danila, cousine de la Reine des Glaces en personne et Electrice de la cité de Volkolamsk, éprouve pour les beaux jeunes hommes. Incarnation même de la noblesse guerrière de cette contrée inhospitalière, adulée de ses troupes pour sa bravoure au combat, qui lui a valu une cicatrices d’étoile sous l’œil gauche à la suite d’un accrochage avec une bande de chevaucheurs de loup Gobelins1, Danila a porté son dévolu sur Ivan Skavinsky, un modeste archer de la ville ayant pour particularité de posséder des yeux presque entièrement noirs. Et alors, me demandez-vous ? Et alors, ces yeux de chiot lui permettent de mentir avec aplomb, car ils rendent toute détection de ses bobards quasi-impossible, personne ne pouvant affirmer que la pupille de notre homme grossit ou diminue, signes indéniables de la véracité, ou non, d’un propos.

Les premiers temps de la passion entre nos deux tourtereaux se passent splendidement, mais Ivan commence bientôt à tourner autour d’une autre femme, plus de son âge que cette cougar de Danila. Cette dernière, informée de l’infidélité de son amant, lui laisse toutefois une chance de renoncer à sa folie, en lui faisant jurer sur ses yeux qu’il n’aime qu’elle, ce que le jeune freluquet, un peu trop confiant dans la noirceur de ses quinquets, accepte sans ciller. Arrive ce qui doit arriver, Danila surprend un peu plus tard un regard lourd de sens entre son rigolo de gigolo et une servante du nom de Natasha, et les bâtonnets de carotte sont cuits pour Ivan. Rancunière mais inventive dans sa jalousie, l’Electrice fait arracher les yeux du parjure, avant de les remplacer par des billes de bois qu’elle enchante pour que notre homme ne voit plus qu’elle, jour et nuit (en fait elle a inventé le FaceTime du Vieux Monde).

Ayant appris sa leçon sur les serments un peu trop hâtifs, et se disant sans doute qu’il n’a plus rien à perdre, Ivan décide de passer en mode mari honnête – même s’il n’est qu’un amant, bien sûr – et ne cherche plus à dissimuler la vérité à sa Dominatrice. Cette dernière peut ainsi jouir d’un sursis d’affection avant que l’archer aveugle (très utile à la défense de la ville donc) ne retombe amoureux des doux roucoulements de Natasha, et se permette même de lui balancer un « so what ? (bitch) » lorsqu’il est pris sur le fait. Déçue mais pas surprise, et au-dessus de ces petites mesquineries, Danila se contente de lui faire casser les doigts et arracher les ongles, et jeter en prison jusqu’à la fin de ses jours, où il pourra entendre jacasser les commères qu’elle envoie à dessein raconter les anecdotes croustillantes sur les coucheries de Volkolamsk, les siennes et celles de Natasha en priorité bien entendue. Moralité : mieux vaut garder ses yeux dans ses poches, pour ne pas finir comme tel.

 1 : Ils semblent toujours viser au même endroit, comme peut en témoigner Gotrek.

AVIS :

Brian Craig déroule une histoire d’amour, de jalousie et de vengeance, bâtie sur une caractéristique physique des plus spécifiques (la rétractation pupillaire, rien que ça) dans le monde impitoyable de Warhammer Fantasy Battle. Il aurait pu le faire n’importe où ailleurs que cela aurait marché, son talent de conteur entraînant sans mal le lecteur à sa suite, et pour ma part, j’ai plutôt apprécié ce petit texte à valeur de conte, avertissant des dangers de se faire de ses amis puissants des ennemis l’étant tout autant. On peut toutefois reprocher à ce A Matter of Evidence de ne pas vraiment remplir le cahier des charges d’une publication de la Black Library, l’utilisation du Vieux Monde comme trame d’une histoire d’amour dysfonctionnelle apparaissant comme un détournement, plutôt qualitatif il faut dire, de la mission première du contributeur de la maison d’édition de Nottingham : donner vie et enrichir le background des franchises de GW, sans trop s’éloigner des choses de la guerre qui constituent le cœur du sujet quand on donne dans le wargame. Peut-être ne faut-il donc pas trop s’étonner de constater que cette nouvelle fut la dernière de Brian Craig publiée dans Inferno! (à ce jour), tout comme sa non inclusion dans les recueils et anthologies de la Black Library tombe naturellement sous le sens. Les Liaisons Dangereuses ne s’accordent en effet pas facilement au hack’n’slash et au sword and sorcery, et la BL a choisi son camp depuis longtemps.

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On Mournful Wings – S. Spurrier [40K] – #32 :

INTRIGUE :

40K_On Mournful WingsLes jumeaux Ica et Delus1, seuls membres de leur tribu ayant survécu à l’ouragan qui a frappé leur village, voyagent jusqu’à la capitale de Gathis II afin de participer au processus de sélection des aspirants du Chapitre des Doom Eagles. Shortlistés par l’Archiviste faisant office de DRH en raison de leur imperturbable pessimisme, les deux adolescents se retrouvent engagés dans une course contre la montre, la mort et le désespoir ;  leur parcours d’initiation consistant à s’échapper de l’intérieur d’un volcan sur le point d’entrer en éruption afin de rejoindre la forteresse monastère du Chapitre.

Alors que leurs condisciples périssent les uns après les autres, victime des nombreux dangers parsemant la voie menant vers le salut et l’honneur de rejoindre les meilleurs consommateurs de Prozac de l’Empereur, Ica et Dalus triomphent de toutes leurs épreuves et se présentent ensemble devant les portes de l’Aire des Doom Eagles. Un ultime test les attend toutefois avant de pénétrer dans le sanctuaire des Astartes, qui fera ressortir l’unique, mais crucial, point de divergence entre les deux frères.

1 : Un exemplaire dédicacé de La Mythologie Grecque pour les Nuls à celui qui identifie la légende à laquelle ces noms font référence. Exemplaire remporté.

AVIS :

En choisissant de centrer son récit sur la psyché si particulière des Doom Eagles, le plus emo des Chapitres loyalistes, Simon Spurrier n’a pas opté pour la facilité. Il est en effet assez compliqué de rendre justice au mélange de fatalisme et de résolution qui caractérise les locataires de Ghostmountain, et dont l’état d’esprit morbide se révèle être une force (il n’y a pas grand-chose qui puisse effrayer un Space Marine qui se considère comme étant déjà mort) plutôt qu’un handicap. Si la force de la foi et le psycho-conditionnement des surhommes du 41ème millénaire constituent des pistes crédibles pour expliquer ce paradoxe, ces justificatifs bien pratiques ne peuvent pas être avancés pour les recrues du Chapitre, qui, en tant qu’êtres humains normaux, ont la fâcheuse tendance à se noyer dans leur désespoir au lieu de s’en servir comme bouclier.

Bref, Spurrier marchait écrivait sur des œufs, et je trouve qu’il s’en est remarquablement tiré. Outre le fait que sa présentation des Doom Eagles rend hommage à ces derniers (plus que le portrait qu’en a fait Ben Counter dans son Phalanx) en faisant ressortir à la fois leur singularité et leur noblesse, la rivalité latente des deux héros de la nouvelle est rendue avec justesse et suffisamment bien mise en contexte pour que la conclusion d’On Mournful Wings (même le titre a grave la classe) fasse mouche1. On appréciera également l’art consommé avec lequel Spurrier entremêle scènes d’actions, flashbacks et contemplations d’Ica sur son sort, pour un résultat aussi digeste qu’élégant. Inspirée, conséquente et bien construite, On Mournful Wings est définitivement l’une de ces nouvelles justifiant à elles seules l’achat du recueil (‘Crucible of War’) entier2.

1 : Arrivés devant l’entrée de la forteresse des Doom Eagles, les jumeaux sont sondés psychiquement par l’Archiviste en charge du recrutement des novices du Chapitre. Ica a la mentalité nécessaire pour devenir un Doom Eagle, mais Dalus, qui toute sa vie n’a cherché qu’à sortir de l’ombre de son frère en surpassant ce dernier à la moindre occasion (en pure perte, Ica restant le favori des parents des jumeaux, à cause de sa – relative – aînesse), est jugé trop amer et torturé pour être introduit dans l’Aire…et est donc condamné à mourir de faim, de froid et d’épuisement au pied du portail que seul son frère a eu le droit de franchir.
2 : Et au prix dudit recueil (Crucible of War) sur le marché de l’occasion, on aurait tort de se priver.

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A Good Thief – S. Jowett [WFB] – #32 :

INTRIGUE :

A Good ThiefFrançois Villon est un poète (naaaaaan ???) à l’esprit vif et à la langue bien pendue, ce qui lui cause autant de problèmes que d’opportunités. Forcé à l’exil de sa Marienburg natale après que les vers qu’il a composés sur les activités extra-maritales de la femme de l’un des princes marchands de la cité soient parvenus aux oreilles du mari cocu, il a trouvé refuge dans la petite ville de Wallenholt, et est devenu le poète de cour du Graf local. Une occupation indigne de ses talents, qui sont de son avis de spécialiste, superlatifs, mais qui lui permet de vivoter tranquillement aux crochets de son mécène.

La situation de Villon se complique lorsque le Graf de Wallenholt reçoit la visite d’une délégation de notables impériaux, dans laquelle se trouve un parent de la Frau von Klacht, dont les frasques libertines ont été mises en vers (et contre tous) par notre poète. Reconnu par le visiteur, Villon est fissa envoyé à la case prison par son employeur, qui préfère logiquement se séparer de son flagorneur licencié plutôt que d’hériter d’une guerre commerciale avec l’un des marchands les plus influents du Vieux Monde. Par chance pour Villon, la petite soirée pendant laquelle son destin s’est joué s’est déroulée devant un autre témoin, d’opinion plus favorable envers le rimailleur de cour. Le Magister (puisqu’on ne le connaîtra pas sous d’autres noms) organise l’évasion de notre héros pendant son transfert vers Marienburg, et lui remet une mission très spéciale en échange de ce coup de pouce inespéré : il doit se rendre dans un village du Reikwald tombé sous la coupe du bandit Gerhard Kraus, et mettre la main sur un artefact magique que le même Kraus a acquis pour le compte du Magister, avant de décider de le garder pour lui. Tout cela est bien mystérieux.

A son arrivée à Krausberg, Villon ne perd pas de temps à s’encanailler avec les hommes du seigneur brigand, qui reste lui complètement reclus dans ses quartiers. Il lui faudra attendre une nuit de beuverie pendant laquelle son public lui demande de réciter pour la énième fois son ode épique sur Frau von Klacht pour que Kraus daigne faire son apparition, et défie Villon à un duel… de poésie. Original, n’est-ce pas ? Le brigand n’est cependant pas un adepte du free style, et se contente de réciter les strophes tirées d’un petit livre qu’il a amené avec lui, et dont la nature arcanique ne fait rapidement pas de doute à Villon, qui se fait happer par la déclamation de Kraus au même titre que le reste de l’assemblée. Il est évident que c’est l’objet que le Magister l’a envoyé reprendre au mercenaire indélicat, et Villon décide d’agir la nuit même, profitant du gros coup de mou subi par Kraus après la fin de sa prestation. L’art est épuisant, c’est vrai.

Voleur avant d’être poète, Villon n’a aucun mal à se glisser dans la chambre du bandit et à mettre la main sur le livre en question, dont l’influence néfaste n’est pas à sous-estimer. Ne pouvant corrompre directement notre héros (qui est analphabète, et c’est bien pour cela que le Magister l’a choisi en premier lieu) comme il l’a fait pour Kraus, le grimoire possède ce dernier et un combat féroce s’engage entre les deux chineurs d’antiquités pour la possession du grimoire. Villon finit par remporter le match et s’enfuit par la fenêtre avec son butin sous le bras, laissant Kraus éborgné et exposé comme fraude littéraire (une double sanction bien sévère, si vous voulez mon avis). Après un voyage vers Altdorf, où le Magister lui a donné rendez-vous, le poète remet le bouquin tant convoité à son commanditaire, qui le jette immédiatement dans le feu, OPA Gandalf-style. Contrairement à l’Anneau Unique, le parchemin est inflammable et l’ouvrage maudit (askip) finit en fumée. Voilà une nouvelle menace qui planait insidieusement sur l’Empire écartée pour de bon…

Début spoiler…Enfin presque. Villon a en effet jugé malin de donner au Magister un livre dérobé au hasard dans la bibliothèque municipale la plus proche, préférant trouver un riche gogo pour lui acheter le vrai grimoire un peu plus tard. A malin, malin et demi cependant : le Magister ne met pas longtemps à se rendre compte qu’il a été dupé, et se fait un plaisir de faire arrêter Villon pour lui apprendre à jouer des tours aux puissants de ce monde. Par chance pour notre poète-escroc, M a une nouvelle mission à lui confier, ce qui est toujours mieux que danser la gigue des pendus (en attendant d’en composer la ballade, bien sûr)…Fin spoiler

AVIS :

Simon Jowett prend son temps et déroule une histoire originale de poète-voleur missionné pour dérober un grimoire de sonnets à un seigneur bandit trop cultivé pour son propre bien (je vous défie de trouver une intrigue comparable dans tout le corpus de la GW-Fiction) dans ce ‘A Good Thief’, dont la moitié des pages est finalement consacrée à la présentation du héros. Jowett est suffisamment doué avec sa plume pour que le lecteur n’ait pas l’impression de se faire flouer dans la manœuvre, mais il ne reste pas moins que cette nouvelle ressemble plus à l’introduction d’un roman, qui n’aura au final pas été écrit1, qu’à une œuvre indépendante. Une sympathique curiosité.

1 : Un puissant et mystérieux commanditaire œuvrant en secret pour le bien de l’Empire recrute des agents doués de talents particuliers parmi le gibier de potence impérial ? Ça me dit vaguement quelque chose

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Payback – G. McNeill [40K] – #32 :

INTRIGUE :

40K_PaybackLe trafiquant d’armes Cornelius Barden se retrouve dans une situation difficile après qu’une transaction avec des activistes de la cause mutante ait été interrompue par l’arrivée impromptue du baron du crime local (« Red » Ivan Constantine) et de ses hommes, pas très jouasses à l’idée de laisser Barden marcher sur leurs plates-bandes en écoulant sa came sur leur territoire. Blessé dans la fusillade qui s’en suit, trahi par son partenaire qui s’enfuit avec le magot, et recherché à la fois par Constantine et par les mutants, Barden va devoir la jouer fine pour espérer sortir entier du pétrin dans lequel il s’est fourré.

AVIS :

Ecrite à la suite de la sortie du jeu Inquisitor (dont le background est en grande partie centré sur la planète Karis Cephalon, où se déroule également la nouvelle de McNeill), Payback est selon son auteur1 un hommage au style de James Ellroy (le pape du roman noir moderne, auteur notamment du Dahlia Noir et de L.A. Confidential), arrangé à la sauce Warhammer 40.000.

À l’image de son anti-héros violent et cynique mais droit dans ses bottes, Payback est un agrégat de clichés mis en forme de manière très cinématique par un McNeill égal à lui-même, c’est-à-dire sensiblement meilleur que la moyenne des contributeurs de la BL, mais pas mémorable non plus. Il manque ainsi une véritable profondeur à ses personnages, que le lecteur cerne totalement à leur première réplique, ce qui n’est certes pas vraiment un problème pour une nouvelle « one-shot », mais aurait pu se transformer en handicap si Payback n’avait été que le prélude d’un travail plus conséquent (comme Kinstrife a préfiguré le diptyque Defenders of Ulthuan et Sons of Ellyrion par exemple).

S’il n’est pas exclu que Cornelius Barden revienne faire un petit tour de piste dans les années à venir, j’espère sincèrement que McNeill parviendra à développer son Harlon Naye (le gros bras des séries Eisenhorn et Ravenor) personnel de manière un peu plus poussée que dans ce premier jet.

1 : Le site de Graham McNeill comporte une partie « short story », dans laquelle chaque publication est commentée et resituée dans son contexte d’écriture.

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Rest for the Wicked – J. Wallis [WFB] – #32 :

INTRIGUE :

WFB_Rest for the WickedAltdorf, et ses rues bruissantes de vie, ses marchés bien achalandés, ses honnêtes citoyens faisant leurs courses… Et, bien entendu, ses forces de police luttant au jour le jour contre les déprédations des mauvais sujets de l’Empereur, ou, dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, celles de dangereux immigrants, comme ce Kislévite à moustache de Kislévite (ok) et aux yeux de Kislévite (plus dur), qui se fait courser comme un lapin par nos héros, les officiers des Lices Dirk Grenner (aka Astérix) et Karl Johansen (aka Lucky Luke1), qui cherchent ainsi à boucler une enquête de trois mois de façon probante. Manque de bol pour les Starsky et Hutch impériaux, leur course poursuite les amène jusqu’aux portes de la ville, où le cortège de Leopold von Bildhofen, Comte Électeur du Middenland, fait son entrée en grande pompe. Le périmètre de sécurité étant strictement maintenu par la garde civile, nos héros ne peuvent que constater la disparition de leur proie dans la foule massée pour l’occasion… jusqu’à ce que le suspect moustachu trouve intelligent de passer en courant devant le cheval de l’Électeur, pile au moment où ce dernier reçoit un carreau en pleine encolure (le cheval, pas le bonhomme). La suite est assez facile à prédire : la bête s’emballe et part au triple galop dans les rues pavées d’Altdorf, en direction de la Königplatz (à ne pas confondre avec la Kaiserplatz) et de son marché bondé. Serait-ce la fin de ce bon vieux Leopold ? NON, car les héroïques Johansen et Grenner subtilisent deux montures à leurs balourds de collègues, piquent des deux et parviennent in extremis à se saisir de l’aristocrate avant que son destrier n’aille s’emboutir dans un food truck, avec des résultats dévastateurs. Malgré leur intervention salutaire, ce snob de von Bildhofen remercie à peine ses sauveurs, et repart avec sa troupe jusqu’à son Air BnB.

De retour au poste, les officiers doivent à présent amadouer la colère de leur patron et chef des Lices d’Altdorf, le Général Hoffmann, devant le capotage complet de l’opération Kosachok. Ce fiasco a toutefois libéré le duo, qui peut enquêter sur la tentative d’assassinat dont l’influent aristocrate vient de faire les frais. Ayant déjà reçu le résultat des expertises du laboratoire alchémico-légal avec lequel les Lices travaillent, qui a établi que le carreau était d’origine tiléenne, Johansen et Grenner partent en direction de la petite Tilée pour creuser la piste d’un assassin étranger engagé par un mystérieux commanditaire pour se débarasser de von Bildhofen. L’héritier du Comte étant son frère Siegfried, marié à une Tiléenne, c’est donc vers ce dernier que les premiers soupçons se portent. Après une rencontre fructueuse avec le signor Argentari, parrain de la pègre italienne tiléenne locale, les deux équipiers filent jusqu’à la Marianstrasse, où leur indic leur a confié que se trouvait le tireur d’élite recruté pour effectuer ce sale boulot. Bien qu’ils parviennent sur place avant que ce dernier n’ait pu retenter sa chance, profitant du passage du Comte Électeur à la sortie de la messe, ils perdent l’élément de surprise lorsque Grenner ne parvient pas à enfoncer la porte de la planque du premier coup. S’en suit un face à face tendu entre les officiers et leur suspect, qui se prend la dague de jet de Johansen dans l’estomac pour commencer, mais riposte en logeant un carreau dans la poitrine de ce dernier. Ce tilean stand-off, qui aurait pu durer longtemps vu la stupidité des participants2, est toutefois interrompu par une boule de feu impromptue, qui ravage la piaule et réduit le sniper en cendres. Comprenant que cette intervention enflammée était probablement celle du commanditaire, peu soucieux de laisser les enquêteurs interroger le tueur à gages, Johansen indique à son partenaire qu’il serait judicieux qu’il aille rendre une visite de courtoisie à la DGSI impériale, une cellule de la Reiksguard (en civil) enquêtant sur les complots et manigances agitant l’entourage de l’Empereur. Cette organisation moyennement secrète (puisque un simple officier des Lices sait qu’elle existe et où elle opère3), du nom d’Untersuchung, s’est faite une spécialité d’enquêter sur les mages renégats, et pourrait donc aider l’enquête à progresser. Pendant que son collègue passe aux urgences se faire recoudre, Grenner se rend donc sur place.

Là, il se fait poliment mais fermement éconduire par ses interlocuteurs, qui ont l’air d’en savoir beaucoup plus qu’ils ne veulent bien en dire sur cette affaire, et ne consentent qu’à lui expliquer la différence entre une boule de feu et une explosion flamboyante. Car non, ce n’est pas la même chose. De retour au poste, Johansen est toutefois briefé par Hoffmann, qui a reçu les infos refusées à son sous fifre par fax pigeon voyageur, sur la situation très délicate dans laquelle ils doivent opérer. La sorcière pyromane se révèle être une certaine Emilie Trautt, mage flamboyante passée libérale depuis quelques années et concubine notoire du fils de Leopold von Bildhofen, Udo, qui passe du coup suspect #1 de l’enquête. Cependant, l’Untersuchung a formellement interdit à ses collègues d’intenter quoi que ce soit envers Trautt, qui pourrait mener le Bureau des Légendes d’Altdorf à de plus gros poissons. Cela n’empêche toutefois pas les Lices de monter un plan audacieux pour protéger le mal-aimé Leopold de ses persécuteurs…

Début spoiler…Et notre duo infernal, maintenu sur l’affaire par un Hoffmann très peu progressiste quand au concept d’ITT et de congés maladie, de se rendre à la place de leur boss au rendez-vous organisé par Udo afin de discuter des mesures de protection prises par les Lices envers le Comte Électeur. Tout aussi odieux que son paternel, Udo gobe toutefois sans broncher les bobards débités par un Johansen imperturbable, qui lui fait croire que les suspects principaux sont les Kislévites (décidément, il ne les aime pas), et lui révèle les dispositions super secrètes prises par son équipe pour protéger le convoi qui amènera le Comte et sa famille à la réception organisée par l’Empereur en leur honneur le soir même, lorsqu’Udo se met à flipper des tables pour exprimer son mécontentement d’être tenu hors de la confidence. Le piège étant tendu, il est maintenant temps de voir si le poisson va mordre…

Aussi, lorsque les rusés officiers changent l’ordre des carrosses banalisés transportant les huiles Middenlander, positionnant celui d’Udo en deuxième position, à la place de celui de Leopold et Siegfried, c’est sans surprise qu’ils constatent la combustion spontanée mais peu naturelle du fiacre. C’est ce qui s’appelle un retour de flamme, je suppose. Bravant les ordres, l’intenable Johansen s’élance ensuite à la poursuite de Trautt sur les toits, ne parvenant pas à refaire son retard (et pourtant, elle était en robe longue) avant que la magicienne utilise ses pouvoirs enflammés pour… partir en lévitation et franchir le mur d’enceinte de la ville, évitant facilement la dague de jet que Johansen lui avait lancée sans sommation. C’en est fini de notre enquête, mais pas du boulot de notre paire de choc, qui devra dès le lendemain faire porter le chapeau de ces tentatives d’assassinat répétées aux, je vous le donne en mille, Kislévites. Comme on dit par chez nous, pas de pitié pour les croissants Cosaques.Fin spoiler

1 : Comprendre que le premier est un petit blond raleur, et le second un grand brun à la gâchette facile.
2 : Ainsi, l’assassin parvient à se surprendre lui-même lorsque sa manœuvre de diversion à l’encontre de Johansen le mène à regarder également dans la direction vers laquelle il pointait son arbalète, permettant à l’officier de lui balancer un pied de chaise dans la tronche en toute impunité.
3 : Rendant son utilisation de mot de passe alambiqué à l’entrée un peu ridicule.

AVIS :

Pastiche assez transparente de la série policière classique des années 80, mettant en scène des flics débrouillards aux méthodes non conventionnelles mais efficaces pour combattre le crime, Pas de Répit pour les Braves souffre des grosses ficelles parodiques utilisées par l’auteur, d’un duo de héros pas vraiment attachants, et de l’intégration assez grossière de l’Untersuchung (que Wallis mettra au centre de son roman La Marque de la Damnation) à l’intrigue pour des raisons relevant selon moi du teasing pur et simple. Si on peut reconnaître à cette nouvelle un rythme enlevé et une enquête potable, même si pas vraiment spectaculaire en termes de rebondissements1, ainsi que quelques détails fluffiques sur Altdorf et ses forces de po-Lices, à prendre avec des pincettes car reprises par personne d’autre depuis, la Black Library a beaucoup mieux à offrir en termes de nouvelles « policières » se déroulant dans le Vieux Monde, à commencer par L’Affaire de la Cellule Écarlate dans la même anthologie, supérieure sur tous les points à Pas de Répit pour les Braves.

1 : En même temps, avec deux suspects identifiés en tout et pour tout, difficile de faire planer longtemps un suspens étouffant. Wallis avait fait beaucoup mieux ceci dit avec sa série Dieter Brossmann (‘The Dead Among Us’ et ‘The Bretonnian Connection’).

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Blue Blood – D. Abnett [40K] – #33 :

INTRIGUE :

40K_Blue BloodLa nouvelle affectation de l’escouade Damocles, fraîchement de retour à plein effectif après son passage au stand sur Ithaka (‘Crimson Storm’) ne ravit guère le Sergent Priad. Il s’agit en effet de faire de la figuration protocolaire lors des cérémonies de couronnement du nouveau souverain d’Iorgu, planète d’importance des mondes récifs dont les Iron Snakes sont les défenseurs attitrés. Priad et ses hommes espéraient faire un peu de team building sur le front, histoire que les grands nouveaux et les petits anciens1 puissent sympathiser en situation de travail, mais les ordres sont les ordres. Bien que l’accueil réservé par leurs hôtes soit impeccable, et permette à nos spartiates (haha) héros de découvrir des concepts d’une opulence inouïe – comme celui du lit – l’ennui guette rapidement les Space Marines, qui commencent à développer des TOC à force de banquets et de processions.

Fort heureusement, cette festive monotonie est brisée par l’arrivée d’une tête connue, celle de l’Inquisiteur Mabuse (‘Red Rain’). King Mab est présent sur Iorgu incognito, car il soupçonne que la disparition de la vieille reine n’était pas due à son âge avancé, mais bien à une conspiration dont il doit percer à jour les tenants et aboutissants. La suite des événements lui donne rapidement raison : la ferveur bon enfant d’Iorgu City tourne vite au vinaigre et à l’émeute alors qu’une pluie diluvienne se met à tomber sur la ville. C’est peut-être un détail pour vous, mais comme Iargu connaît un léger crachin une fois tous les vingt ans, on peut comprendre que les citoyens commencent à paniquer à l’idée de devoir acheter des bottes en caoutchouc pour marcher dans rue. La situation dégénère tellement rapidement que la jet set ayant fait le déplacement décide de quitter les lieux sans tarder, et Priad se trouve noyé sous les demandes d’escorte émanant des plus hautes sphères, sollicitations que même son psycho-endoctrinement rigoureux ne l’a pas préparé à encaisser.

Le salut vient, une fois de plus, de Mabuse, qui envoie un doigt aux Iron Snakes afin de solliciter leur assistance immédiate sur le Mont Sacré, où les reliques les plus anciennes d’Iorgu (dont les regalia utilisés pour le couronnement) sont gardées. Cette bonne excuse permet à Priad d’envoyer balader un Lord Militant irritant et de réquisitionner la limousine d’une princesse royale pourrie gâtée, ce qui est tout de même satisfaisant. Les Iron Snakes rejoignent l’Inquisiteur après avoir été témoins de phénomènes paranormaux, une sûre indication que le Warp est de la partie. Le briefing qu’ils reçoivent est simple : escorter Mabuse dans la crypte du Mont Sacré où les regalia sont conservés, et les remettre à leur place. Ces objets ne sont en effet pas uniquement des symboles un peu kitsch, mais font partie intégrante du dispositif de stase que les premiers habitants d’Iorgu ont installé pour exiler un démon local, peu après leur arrivée. Les cultistes du Chaos que l’escouade Damocles doit affronter en cours de route cherchent évidemment à réveiller celui que Mabuse appelle le Dormeur (sans doute un crabe gigantesque), et cela aurait des conséquences assez graves pour la Pax Imperialis, donc autant éviter.

Après moultes péripéties, le crypt rush se solde par une victoire sur le gong pour le camp impérial, qui n’a à déplorer que la perte de l’Inquisiteur, criblé de balles lors d’un accrochage sur le chemin. Dans son dernier souffle, il a cependant l’amabilité d’enregistrer un vlog élogieux sur le dévouement de Damocles à destination du Maître de Chapitre des Iron Snakes, permettant de contrebalancer la shit storm de revues négatives laissées par les pontes que les Space Marines ont ignoré/rudoyé/spolié lors de leur intervention urgente. L’image de marque, ça reste important au 41ème millénaire.

1 : Les Space Marines de Dan Abnett ont la morphologie d’une équipe de rugby des années 80, ça doit être pratique lors des essayages de matériel.

AVIS :

Il lui aura fallu cinq tentatives et une soixantaine de pages, mais Dan Abnett a finalement réussi à faire sortir les Iron Snakes de l’océan de médiocrité littéraire dans lequel les fiers fils de la fière Ithaka pataugeaient (fièrement, sans nul doute) depuis ‘White Heat’. On retrouve ici les talents de conteur d’histoires et de distillateur d’atmosphère et d’univers1 de l’Abnett des séries Eisenhorn et Ravenor (et le retour gagnant – sauf pour lui – de l’Inquisiteur Mabuse y est sans doute pour quelque chose), capable de camper un monde impérial et sa culture propre en l’espace de quelques paragraphes bien sentis. Je ne pouvais donc pas aborder cette critique sans remettre à ‘Blue Blood’ les lauriers de meilleure nouvelle de la pentalogie chromatique reptilienne (vous êtes au 3ème millénaire, moi je suis déjà au 30ème) de Dan Abnett. Pas que la concurrence ait été très rude, notez bien, mais cette soumission n’est pas seulement la moins pire du lot, elle est objectivement satisfaisante, ce qui change agréablement.

Malheureusement, et c’est très ironique, cette amélioration notable se fait aux dépends des Iron Snakes eux-mêmes, qui sont ici relégués au rang de simples super soldats sans personnalité2. Inutile donc de s’être enfilé les quatre épisodes précédents, et surtout le Space Marines-onlyCrimson Storm’ pour apprécier à sa juste valeur cette nouvelle. L’escouade Damocles est juste une escouade tactique classique, et son Sergent n’a rien de particulier qui le distingue des milliers d’autres officiers Astartes de la Black Library. C’est comme si Abnett avait finalement décidé de ne pas écrire une histoire de Space Marines – ce qu’il ne sait, ou savait en tous cas, pas vraiment faire – mais une histoire avec des Space Marines – ce qui ne lui pose aucun problème. Le résultat est convaincant, mais on ne retrouvera plus trace des Iron Snakes dans Inferno ! après ‘Blue Blood’, alors que le magazine sera encore publié pendant deux ans à la suite de ce numéro #33. On peut expliquer cet abandon par de multiples raisons, mais je choisis de penser qu’Abnett a gagné son bras de fer avec la BL sur ce sujet, et est parvenu à démontrer par l’absurde qu’il ne servait à rien de s’acharner dans cette direction. ‘Blue Blood’ a donc une saveur particulière, et mérite donc la lecture à plus d’un titre.

1 : La description de l’intérieur du Mont Sacré m’a également fait penser à ce qu’on pourrait lire quelques années plus tard dans ‘Legion’, lorsque sont décrits les pouvoirs d’invocation et d’illusion des cultistes du Chaos de Nurth.
2 : Il est donc assez savoureux de lire dans la nouvelle que Priad s’insurge contre ce même constat, qui est appliqué à l’escouade Damocles par le nouveau roi d’Iorgu. Eh oui mon pauvre choupinet, ce n’est pas la carrure ou la taille qui sont d’une grande utilité sur ce plan…

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What Price Vengeance? – C. L. Werner [WFB] – #33 :

INTRIGUE :

What Price VengeanceLa bande de mercenaires tiléens du Capitaine Ursio a connu de meilleurs jours : engagée par le rusé Vicomte Augustine de Chegney pour brigander en son nom sur les terres de ses voisins, elle a failli à sa mission et a en conséquence essuyé une attaque meurtrière de la part d’autres sbires de l’implacable Bretonien, peu enclin à laisser des témoins de sa vilénie ternir sa réputation. Il paraît que les chevaliers du Royaume sont h.o.n.o.r.a.b.l.e.s après tout. Malheureusement pour Gus, les reitres ont survécu, et sont maintenant assoiffés de vengeance. Profitant de la bonté de Claudan de Chegney (fils du premier), ils investissent donc la place forte que ce dernier occupe au nom de son père – et qu’il a dérobé à un autre voisin, impérial celui-ci – en prétextant chercher à s’abriter des terribles orages des Montagnes Grises… et passent tous les habitants du château par le fil de l’épée pour se passer les nerfs. Tous ? Pas tout à fait. À malin, malin à demi : Ursio repart donc se cacher dans la campagne avoisinante avec le jeune fils de feu Claudan et sa nourrice, et charge le gouverneur du noble trucidé d’aller porter sa demande de rançon à Augustine.

Bien que n’étant pas vraiment un enfant de chœur, comme on a pu le voir plus haut, le Vicomte est un family man, ne serait-ce que parce qu’il est trop bête d’agrandir le fief familial uniquement pour le voir disparaître à sa mort, faute d’héritiers. N’ayant plus que Claudan Junior (que nous appellerons Cloclo) de ce côté-là, il est prêt à dépenser sans compter pour retrouver l’usufruit de son petit-fils, mais est convaincu par son conseiller (Plaisant) de ne pas négocier avec des terroristes, et de recruter à la place un tueur professionnel pour aller récupérer le bébé à ses ravisseurs. Cela tombe bien, Plaisant a justement un nom à souffler à son patron : celui du redoutable Brunner, un impérial que l’on dit de noble ascendance (ça compte pour les Bretonniens), et n’ayant jamais failli à la tâche. Augustine envoie donc son sénéchal recruter le chasseur de primes… qui refuse de prendre la mission, malgré les 200 couronnes d’or sonnantes et trébuchantes que le bon Plaise lui fait miroiter. Enfin, il fait mine de refuser plutôt, le temps de laisser un Plaisant très colère repartir de la taverne dans laquelle le rendez-vous a pris place, et se faire embusquer quelques mètres plus loin par un groupe de truands de bas étage, qui n’ont pas pu résister à la grosse bourse (au singulier ça va) du sénéchal. Cette avidité leur sera fatale, Brunner sortant des ombres au moment fatidique pour leur régler leur compte avec une efficacité consumée, et empocher au passage les quelques pièces d’argent que la mort de ces soudards lui rapporteront. Y a pas de petits profits.

Un peu plus tard, nous retrouvons le taciturne mercenaire sur les terres du Vicomte, qu’il semble très bien connaître. Ayant joué le rôle de l’innocent (mais tout de même très bien armé) voyageur pour attirer trois des hommes d’Ursio à se montrer auprès de son feu de camp, il a tôt fait d’en envoyer deux chez Morio (le Morr tiléen), gardant le troisième en vie pour qu’il lui indique où se sont cachés ses petits camarades. Et si la tour de guet abandonnée que les kidnappeurs ont choisi comme repaire semblait être un endroit parfait pour surveiller les environs, on s’aperçoit bien vite que Brunner joue vraiment à domicile, puisqu’il pénètre dans le donjon au nez et à la barbe des sentinelles grâce à sa connaissance du passage secret reliant l’édifice à un tunnel à proximité. Cet avantage lui permet de neutraliser discrètement (au début) les hommes d’Ursio, laissant ce dernier seulement accompagné de ses deux derniers lieutenants, et de ce cher Cloclo (la nourrice ayant été étranglée par un mercenaire nerveux après que Brunner ait arrêté le mode silencieux, et commencé à castagner du sbire sans retenue), dans la salle principale de la tour.

Ce remake Battle de ‘Trois Hommes et un Couffin’ ne se termine pas aussi bien que l’œuvre originale pour le trio en question. Les compagnons d’Ursio tombent rapidement sous les balles et les lames du chasseur de primes, ce qui laisse leur Capitaine s’échapper en courant avec le bébé dans les bras… jusqu’à ce qu’il fasse la rencontre des chausse-trapes que Brunner a pris soin de semer en bas de l’escalier de la tour, ce qui ruine ses sneakers et l’envoie au tapis (et le pauvre Cloclo avec, encore un drame des bébés secoués). Lorsque le Tiléen voit sa Némésis apparaître sur le pallier, il tente de le convaincre de le ramener avec lui chez de Chegney, ce que Brunner accepte… partiellement. Comme il le révèle à sa victime, le Vicomte n’a en effet payé que pour sa tête, le reste de son anatomie peut donc rester sur place.

La nouvelle se termine avec un face à face entre Brunner et de Chegney, le premier annonçant à son employeur que, malheureusement, Cloclo n’a pas survécu à sa capture. Dévasté par la nouvelle, le noble accepte tout de même d’honorer sa part du contrat et remet à son chasseur de tête (qui n’est pas revenu les mains vides) la moitié restante de la somme convenue, avant de lui donner congé…

Début spoiler…Mais la scène « post-credit » (si je puis dire) révèle que Brunner a menti, et gardé le bébé avec lui. Ne pouvant l’élever seul, il le confie à un couple de marchands, auxquels il remet également la prime versée par de Chegney. On comprend quand il présente Cloclo comme étant également son petit-fils que le chasseur de primes était en fait le Graf Von Drakenburg dont de Chegney a usurpé le domaine, marié de force la fille à son fils, et vendu à des esclavagistes pour s’en débarrasser. Cela explique la connaissance approfondie des terres des Von Drakenburg dont Brunner dispose, et son peu d’empressement à rendre Cloclo à Gus. La garde partagée est un plat qui se mange froid.Fin spoiler

AVIS :

Après nous avoir fait don de Mathias Thulmann quelques infernaux numéros plus tôt, C. L. Werner remet le couvert avec ‘What Price Vengeance?’, nouvelle introductive de l’un de ses personnages les plus marquants, le chasseur de primes Brunner. Le charme opère immédiatement dans cette histoire de prise d’otage (violente) et d’opération de libération (tout aussi violente), l’auteur parvenant à nous embarquer d’un tour de plume dans les bas-fonds du Vieux Monde en compagnie de brigands sanguinaires, de nobles cauteleux et de mercenaires impitoyables. L’intrigue est très solide, le déroulé plaisant à lire et idéalement dosé (Werner fait partie de ces bons écrivains qui savent prendre leur temps sans qu’on ait l’impression qu’ils meublent, qualité trop souvent absente des écrits de la Black Library à mon goût), la conclusion apporte sa petite révélation bien sentie et finement préparée par Werner au cours des pages précédentes, il y a du fluff et des one liners bien sentis… Que demande le peuple ?

Le seul petit défaut qu’on pourrait reprocher à cette masterclass med-fan est la tonne de descriptions vestimentaires dont Werner nous abreuve dès lors qu’un personnage important nous est introduit pour la première fois, une excentricité qu’on ne retrouve chez personne d’autre au sein de la BL à ma connaissance. A part ça, on a affaire à une nouvelle de très haute volée, tout comme l’anti-héros qu’elle nous présente.

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Fight or Flight – S. Mitchell [40K] – #33 :

INTRIGUE :

40K_Fight or FlightAyant récemment achevé ses classes de Commissaire, Ciaphas Cain intègre le 12ème régiment d’artillerie de campagne de Valhalla. Cette affectation sied tout à fait au futur Héros de l’Imperium, sensible aux nombreux avantages procurés par le fait que sa nouvelle unité contribue à l’effort de guerre depuis une distance confortable du front et de ses dangers. Malheureusement pour Cain, ses grands projets de pré-retraite avant l’heure vont être contrariés par l’arrivée inopinée d’un fragment de la flotte ruche Kraken en orbite de la planète Desolatia IV. L’occasion pour notre anti-héros de commencer à écrire sa légende, tout à fait malgré lui bien sûr.

AVIS :

Fight or Flight est la première consacrée par Sandy Mitchell à son personnage fétiche de Ciaphas Cain, le Commissaire le plus cool de la Garde Impérial. Même si le concept du petit rigolo perdu dans l’univers gothique du 41ème millénaire a fini par s’épuiser au fil des publications, cette introduction conserve encore aujourd’hui une indéniable fraîcheur, résultant de l’approche mesurée qu’à Mitchell de son sujet : même s’il s’agit pour lui de divertir le lecteur en usant des ressorts comiques de Cain (« mais non, je n’étais pas en train de m’enfuir ! ») et de son fidèle Jurgen (« mon odeur corporelle est une arme de destruction massive), et plus tard de l’Inquisitrice Amberley « girl next door » Vail, il prend en effet soin de ne pas sombrer dans la caricature, ce qui ne rend que plus attachant la bande de bras cassés qui lui sert de héros.

Pour résumer, si la lecture de la saga de Ciaphas Cain (neuf romans à date) n’est pas recommandée aux inconditionnels de la science-fiction « premier degré » de la Black Library, celle de Fight or Flight, parce qu’elle permet justement de se faire une religion sur les travaux du trublion Sandy Mitchell, est elle fortement conseillée par l’auteur de ces lignes.

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The Path of Warriors – N. McIntosh [WFB] – #33 :

INTRIGUE :

WFB_The Path of WarriorsOn le sait, la vie en Kislev n’est pas de tout repos. En plus du rude climat et de l’isolement qui frappe la plupart des communautés éparpillées sur ces vastes steppes, la menace d’une visite de « courtoisie » rendue par des voisins nordiques avides de pillage plane en permanence au-dessus des chapkas des braves sujets du Tsar. C’est donc avec plus de fatalisme que d’appréhension que Fedor Kumansky, pêcheur buriné par ses années à taquiner la tanche dans l’estuaire du Lynsk, voit approcher une flotille de maraudeurs venus tout droit de la Mer des Griffes. Il a même reçu un songe prémonitoire de la tuile qui n’allait pas tarder à tomber sur le petit village d’Odensk la nuit passée, c’est dire s’il est au fait des événements.

Accompagné par son fils aîné, Stefan, il se hâte de porter la mauvaise nouvelle à ses concitoyens, et prend la tête de la milice de farouches péquenauds bien décidée à repousser les Norscans s’ils leur venaient l’idée de s’arrêter à Odensk avant de remonter jusqu’à Erengrad. Il laisse son autre fils, Mikhal, aux bons soins de l’aîné, et fait promettre à ce dernier de protéger son cadet comme il l’avait lui-même juré à sa défunte femme sur son lit de mort. À ce stade, vous devez sans doute vous dire qu’un tel comportement ne peut signifier qu’une chose pour le brave Fedor : une mort prématurée d’ici à la fin de la nouvelle. Et vous avez raison, futés que vous êtes. Sans beaucoup de surprise, mais tout de même hors champ (donc il s’est peut-être simplement empalé sur son épée en trébuchant sur un caillou, laissons le bénéfice du doute aux maraudeurs), Papa Kumansky ne passe pas la nuit, vaincu avec ses camarades par la furie sanguinaire des hommes du Nord.

De leur côté, les fistons Kumansky s’en sortent beaucoup mieux. Planqués dans la maison familiale, ils commettent l’erreur de quitter leur refuge au premier bruit de bottes venu, confondant en cela la démarche chaloupée des Kislevites avec celle, chaloupée aussi à leur décharge, des Norscans. Livrés à eux-mêmes dans la scène de chaos (c’est fluff) que constitue le pillage d’Odensk, les frérots parviennent à échapper aux sales pattes d’un duo de maraudeurs mal-intentionnés, dont un se fait éborgner par le petit couteau de Stefan au passage. S’étant tapis au fond d’une barrique remplie de tripes de poissons (on ne jette rien à Kislev), le temps que le jour se lève et que la poussière retombe, Stefan et Mikhal sortent de leur cachette une fois le calme revenu à Odensk, et se rendent compte qu’ils sont probablement les seuls survivants de cette terrible nuit. Sans autre recours, les orphelins prennent le chemin de la terrible et dangereuse civilisation (sans doute Erengrad, tbh), empruntant par là-même le chemin des guerriers (wink wink), qui les mènera des années plus tard à exercer leur VENGEANCE sur les méchants qui leur ont fait du tort et navré à mort leur pauvre papounet. Sans doute que les chemins des mages et des voleurs étaient en travaux, à ce moment.

AVIS :

Neil McIntosh lève le voile sur la tragic origin story des frères Kumansky, qui servent de héros à la trilogie ‘Star of Erengrad’/’Tainted Faith’/’Keeper of the Faith’ que cet auteur a signé pour la Black Library en des temps très anciens ; dans ce très honnête ‘The Path of Warriors’. Si le déroulé des événements ne surprendra pas grand-monde, et que le cameo du maraudeur éborgné (que l’on retrouve plus tard dans les bouquins, mais dont le nom m’échappe au moment d’écrire cette chronique) risque de ne résonner qu’auprès de la toute petite communauté des fans hardcore de cette série aujourd’hui tombée dans l’anonymat le plus complet, on peut apprécier d’être enfin en présence de personnages un minimum complexe et sympathique, ce qui n’est pas le cas dans la majeure partie des Kumanskynneries que j’ai pu lire avant. La meilleure nouvelle de la trilogie de courts formats que McIntosh a écrit pour accompagner les romans, à mon humble avis.

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Leviathan – G. McNeill [40K] – #34 :

INTRIGUE :

40K_LeviathanLeviathan prend place entre les deux premiers tomes de la saga d’Uriel Vent Triste, Nightbringer et Warriors of Ultramar. La sorte de prologue qui ouvre la nouvelle voit le nouveau capitaine de la 4ème compagnie des Ultramarines se forger une épée pour remplacer l’arme dont il a hérité à la mort d’Idaeus, son prédécesseur à la tête des schtroumpfs verts. Euh… soit. La suite est plus classique, Uriel menant ses hommes dans le Space Hulk Death of Virtue dans le but de détruire ce dernier en posant quelques bombes à des endroits clés. Bien évidemment, les Space Marines vont rencontrer une opposition aussi féroce que prévisible, d’abord sous la forme d’Orks poltrons, puis de Genestealers grognons. Ce qui ne les empêchera pas de compléter leur mission, bien entendu. Le texte se termine par la détection de l’ombre dans le Warp par les astropathes du croiseur d’attaque Vae Victus, ce qui permet à McNeill de faire le lien avec la campagne de Tarsis Ultra. Ils arrivent…

AVIS :

Il y a des nouvelles dont on se demande à quoi elles servent, et Leviathan fait indéniablement partie de ces travaux à l’intérêt des moins évidents. Selon les mots mêmes de l’auteur, il s’agit d’une histoire « très simple », ce qui ne suffit pas à excuser le profond sentiment d’ennui qui émane de la quarantaine de pages consacrée par McNeill à cet épisode de transition, qui, s’il n’aurait sans doute pas pu être intégré au corps de Warriors of Ultramar sans ralentir considérablement le rythme de ce dernier, ne méritait pas franchement non plus de se voir dédier une nouvelle entière (et une nouvelle assez longue qui plus est). Pour résumer le fond de ma pensée, Leviathan est du proto-Cawkwell, ce qui est loin d’être un compliment.

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Glow – S. Spurrier [WFB] – #34 :

INTRIGUE :

GlowC’est la fin de l’automne à Talabheim, et le Temple de Sigmar local, dirigé par le capitaine Richt ‘Hmm’ Karver, enquête sur une addiction d’un nouvel ordre qui s’étend dans les bas-fonds de la cité. Le Glow, une poudre verte de composition inconnue, fait en effet des ravages parmi les déshérités de la métropole cratérisée. Très addictif, il a en outre comme fâcheux effet secondaire de provoquer des mutations spontanées chez ses utilisateurs réguliers, ce qui n’est pas du tout du goût de ce gentleman de Karver. Après avoir mené un raid dans un taudis dont l’adresse lui avait été donnée par un suspect, l’impeccable capitaine repart avec un cadavre frais de junkie agressif ainsi qu’une petite réserve de la substance en question, qu’il choisit d’ajouter à la diète du rat géant skaven qu’il a adopté comme animal de compagnie après une purge des souterrains de Talabheim l’année passée. Le savoir fait le pouvoir, c’est bien connu.

Les mois passent et l’hiver arrive sur l’Empire, sans que la filière locale de Glow soit démantelée malgré les meilleurs efforts de Karver et de ses hommes (Kubler, Holst et Spielmunn). L’épidémie ne fait au contraire que progresser, ce qui force les chasseurs de sorcières crackheads à muscler leurs méthodes, déjà assez viriles. Interrogatoires menés au tison, menaces d’envoyer leurs indics au bûcher s’ils ne s’activent pas et autres descentes dans la ville tous flingues dehors se multiplient. C’est au cours de l’une d’entre elles que Karver commet une bavure : surpris par la réaction de l’occupant d’un laboratoire clandestin où le Glow était produit, il déchargea sa pétoire sur ce qui se révéla être, après inspection post mortem, une fillette réduite en esclavage par le maître du cartel pour la confection des tablettes inondant la cité. Enchaînée dans son local et ayant été privée de langue par son tortionnaire, elle cherchait seulement à expliquer pourquoi elle n’était pas en capacité d’obtempérer aux ordres des Templiers lorsqu’un Karver sur les nerfs lui envoya un pruneau dans le caisson pour slow play. Ce sont des choses qui arrivent…

L’opération ne fut cependant pas un total échec, notre héros mettant le gant sur la poudre entrant dans la composition du Glow en fouillant le laboratoire. Ayant fait pression sur un sorcier de Jade pour obtenir une expertise express, il reçut la confirmation de ses soupçons : l’ingrédient actif du Glow était bien de la malepierre. Une erreur de manipulation de la part du thaumaturge lui permit de recevoir une autre information utile : la substance toxique se trouvait à la fois dans le gant utilisé pour recueillir la poudre dans le laboratoire, mais également à l’extérieur de ce dernier, indiquant sans équivoque que Karver avait manipulé de la malepierre peu de temps auparavant. Un résultat étrange, à moins que…

Début spoiler…À moins que la broche ornée d’une pierre verte que son meilleur disciple, Kubler, portait à la boutonnière ce jour-là n’ait pas été montée d’une émeraude, comme il le pensait, mais d’un minéral bien plus sinistre. La confrontation entre les deux hommes prend place dans la chambre froide creusée sous le Temple de Sigmar, dans lequel les répurgateurs stockent leurs cadavres contaminés dans l’attente du dégel. Ayant participé à la purge des terriers skavens en compagnie de son mentor, Kubler avait eu la mauvaise idée de s’intéresser à la malepierre utilisée comme monnaie d’échange par ces derniers, et qui le transforma rapidement en méchant de série B.

Ayant dupé la vigilance de son supérieur jusqu’à son fashion faux pas en matière d’accessorisation de sa tenue, Kubler est pris au dépourvu lorsque Karver le trouve en train de faire les poches des corps de Guerriers des Clans gardés en réserve par les Templiers à la recherche de cailloux verts. La surprise change toutefois de camp après qu’un Kubler gravement blessé par le tir de son patron passe en mode Technomage et avale d’un seul coup tous les éclats de malepierre qu’il trimballait sur lui, se transformant en mutant à la force et à la rapidité décuplés. C’est au tour de Karver de se retrouver dans les cordes, mais notre héros avait gardé un atout dans sa manche, ou plutôt au bout d’une chaîne : son rat de compagnie. Transformé en abomination (et pas Abomination, ça ne serait pas rentré dans son bureau) poilue par sa consommation régulière de Glow, Ratatouille est libéré par son maître et ne perd pas une seconde pour creuser un terrier dans la bedaine de Kubler afin d’accéder à la malepierre récemment consommée par le ruffian. Cet affrontement sans merci résulte en la mort simultanée des deux adversaires, laissant Karver le seul survivant de ce truel chaotique. Il faudra penser à passer un coup de mop, tout de même.Fin spoiler

AVIS :

Spurrier transpose avec succès une enquête des stups dans le monde de Warhammer Fantasy Battle avec ce ‘Glow’, qui illustre le sombre mais palpitant quotidien des Templiers de Sigmar lorsqu’ils n’ont pas de sorcières à se mettre sous la dent. Ambiance poisseuse, action rythmée, twist final bien amené… Simon Spurrier démontre l’étendue de ses talents de scénariste et sa valeur comme contributeur à la GW-Fiction avec cette nouvelle, qui sera malheureusement sa seule incursion dans le Monde qui Fut. Comme le hamster adoptif de Richt Karver, on aurait bien aimé avoir du rab’.

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The Curiosity – D. Abnett [40K] – #34 :

INTRIGUE :

40K_The CuriosityChargé par le gouverneur de Gershom d’établir la taxinomie complète des espèces animales de la planète, le magos biologis Valentin Drusher est sur le point de remettre son rapport lorsqu’il a vent des ravages causés par un mystérieux prédateur dans la région reculée de l’Udar Extérieur. Ayant consacré les sept dernières années à étudier la faune locale sans jamais rencontrer une créature pouvant être tenue responsable des attaques, la curiosité et l’orgueil professionnel de Drusher sont piqués au vif par ces échos lointains, et il décide en conséquence de répondre à l’invitation du baron du cru afin de tirer les choses au clair.

Associé à une Arbites (Germaine Macks) et à un chasseur de gros gibier (Fernal Skoh1), Drusher va rapidement se rendre compte que la « curiosité » de l’Udar est une réalité tangible, et que ses exploits sanglants et son élusivité ne doivent pas grand-chose au hasard. Quelqu’un se sert de la bête pour faire passer un message, mais qui, et pourquoi ?

1 : On retrouve d’autres membres de la famille Skoh (Feaver et Fernan, tous deux impliqués dans le juteux business de l’import de créatures exotiques destinées à combattre dans les arènes impériales) mêlés à l’intrigue de la trilogie Ravenor. Car-car-carnivora !

AVIS :

Si vous avez vu le film Le Pacte des Loups1, ni l’intrigue ni la conclusion de The Curiosity ne vous sembleront très originales, ce qui ne devrait pas vous empêcher de goûter malgré tout à cette première enquête de Valentin Drusher (que l’on retrouve également dans Gardens of Tycho, toujours en compagnie de Germaine Macks).

Très à son aise pour dépeindre la vie quotidienne des sujets de l’Imperium, à la fois dans sa normalité (Drusher étant l’incarnation même du fonctionnaire désabusé par son travail, et Macks celle du flic de province à qui on ne la fait pas) et son anormalité2, Abnett prouve qu’il maîtrise les codes du polar et est capable de les transposer dans l’univers gothique de 40K. Merci à Dan de démontrer sans équivoque que l’envers de l’Imperium (le côté civil) est au moins aussi passionnant que l’endroit (le côté militaire), et qu’il est possible de satisfaire le lecteur de la Black Library sans impliquer la moindre faction de Warhammer 40.000 au récit3. Avis aux autorités compétentes…

1 : Le long métrage de Christophe Gans étant sorti en 2001 et le recueil Crucible of War en 2003, il n’est pas interdit de voir en The Curiosity un pastiche volontaire de ce gros succès du box-office français.
2 : La bête du Gévaudan d’Abnett se révèle être un bête hormagaunt (bien qu’il nous l’ait plutôt vendu comme la Mort Bondissante en personne), ramené en sous-main par un membre de l’Ecclésiarchie cherchant à assurer la fidélité de ses ouailles aux offices dominicales (ou leur équivalent du 41ème millénaire), et auquel on a implanté une sorte de puce électronique dans le crâne afin de réguler son humeur mutine.
3 : Bon, ok, il y 1 hormagaunt qui vient contredire cette affirmation. Mais cette affectueuse bestiole est ici utilisée dans un rôle à contre-emploi (on est très loin des hordes chitineuses noircissant l’horizon), ce qui justifie à mon sens le fait qu’on ne puisse pas parler d’histoire de tyranides pour The Curiosity.

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Mark of the Beast – J. Green [WFB] – #34 :

INTRIGUE :

Mark of the BeastSoldat de carrière dans l’armée du Tzar de Kislev, Torben Badenov a gravi les échelons jusqu’à devenir le commandant d’une unité d’éclaireurs montés (15 exactement, et tous présentés par Green dès la première page de la nouvelle1). Pour son grand malheur, il sert sous le Capitaine Arman Yasharov, un noble kislevite aussi incompétent que méprisant, et bien décidé à faire tout ce qui est en son pouvoir pour revenir le plus tôt possible vidanger le samovar de la Reine des Glaces (en tout bien tout honneur, bien sûr). La bande d’Hommes Bêtes que son armée poursuit, et qui signe ses méfaits en apposant la titulaire « marque de la bête » dans les décombres des villages qu’elle a rasée2, bénéficie donc d’un avantage certain sur ses adversaires humains, et le pauvre Badenov en est réduit à limiter les dégâts causés par le leadership exécrable de son officier.

Envoyés par Yasharov pister la trace de la harde, qui semble avoir fait des prisonniers lors de sa dernière attaque, comme le faible nombre de cadavres trouvés dans les ruines du hameau où la nouvelle débute le laisse à penser, Badenov et ses scouts se font surprendre en rase taïga par une bande d’Ungors dépêchés par le Seigneur des Bêtes Gashrakk Blackhoof pour faire le service d’ordre à proximité de son campement. Gashrakk est en effet un visionnaire, dont le grand dessein est de réveiller le Seigneur du Dawa (Lord of Misrule en V.O.), une déité 100% chaotique que les légendes des Bêtes du Chaos font reposer en dessous de la pierre des hardes de la tribu de la Corne Noire. Pour permettre au Dawaster de sortir de son trou et de régner à nouveau sur son « royaume de confusion » (sicoù on n’écoute que du Genesis à fond les ballons, j’imagine), le big G. a un plan : sacrifier un nombre suffisant de prisonniers au Chaos, en mettant le feu à une effigie géante d’Homme Bête construit avec des cages en bois. Et moi qui pensait qu’ils ne savaient rien faire de leurs dix (?) doigts (?), me voilà corrigé. L’approche peu subtile de Yasharov ayant alerté le chamane Cathbad, Gashrakk sait que son projet X risque d’être interrompu par des Kislevites en maraude, et a donc envoyé quelques bandes désœuvrées contrecarrer la manœuvre. Il a aussi envoyé une doublette de chars à sangleboucs, malheureusement pour les cavaliers légers de Badenov, qui sont contraints à se replier en désordre après l’intervention des panzers adverses, abandonnant quelques morts et blessés sur le champ de bataille.

De retour au campement kislévite, Badenov réussit à obtenir de son Capitaine l’autorisation de lancer une mission d’infiltration de la base adverse (repérée par d’autres scouts, plus doués, eux) pour tenter de libérer ses camarades prisonniers, et peut-être secourir quelques civils au passage. Yasharov n’est absolument pas convaincu par la menace posée par un rituel sacrificiel qu’il s’agirait d’empêcher avant que l’attaque de son armée ne débute, mais il laisse tout de même à son sous-fifre jusqu’à la tombée de la nuit pour mettre à exécution son plan, après quoi il donnera l’assaut. Réduits à mi-effectifs à ce stade de la nouvelle, les Badenov’s Baddies profitent d’un coup de pouce de la part du script pour progresser vers leur objectif : le campement des Hommes Bêtes a été établi sur un ancien oppidum ungol, et compte bien entendu un souterrain secret reliant le centre de la place forte à l’extérieur. Haaa. Et nos héros trouvent bien sûr ce souterrain secret en l’espace de trois minutes. Hooo. Leur chance tourne cependant lorsqu’ils découvrent que les Gors ont décidé d’installer leurs latrines à l’endroit où le tunnel émerge dans leur campement. Un petit prix à payer pour speed runner cette quête, cependant.

De son côté, Gashrakk ne s’est pas tourné les sabots et a entamé le rite de réveil démoniaque/feu de joie païen avec Cathbad. L’arrivée imminente de l’armée kislevite, que sa bande d’Ungors n’a manifestement pas arrêtée (comme c’est bizarre) force toutefois le Seigneur des Hardes à accélérer le protocole, et à balancer une torche sur son bonhomme (bête) carnaval avant que le chamane n’ait pu terminer de réciter « je te tiens par la barbichette » 666 fois de suite. C’est le moment que choisissent Badenov et ses hommes pour lancer leur attaque sur les mutants, confiants dans le fait qu’il ne leur faudra tenir que quelques minutes avant que le reste de leurs forces n’arrivent en renfort, pas vrai ? PAS VRAI ? En cela, ils ont sous-estimé le jemenfoutisme de Yasharov, qui se contente d’envoyer quelques cavaliers barricader les portes du campement (?) pour empêcher les Hommes Bêtes de sortir. Car apparemment, ces derniers savent construire des statues en bois de 10 mètres de haut, mais le concept de distance de sécurité par rapport à un foyer de combustion leur est inconnu. La magie du scénario…

Toujours est-il que cette défection de dernière minute ne fait pas les affaires de nos héros. Si Cathbad se fait assez facilement soloter par Arnwolf le Norse, Badenov n’a pas la partie facile contre Gashrakk. Finalement, un anneau nasal trop solidement fixé, un crochet attaché à une chaîne elle-même fixée à la pierre des hardes, et surtout un positionnement malheureux du Seigneur des Blettes vis-à-vis de l’angle de chute de son effigie enflammée, auront raison du pauvre Blackhoof. C’est ce qu’on appelle un bûcher des vanités, vraiment. S’il ne réussit pas à réveiller le Dawaster et perd toute sa tribu en même temps que sa vie dans cette folle soirée (les Hommes Bêtes le sont vraiment, faut croire), il peut au moins se réconforter en songeant que tous les villageois capturés ont également fini en marshmallow (donc je ne comprends pas pourquoi son plan n’a pas marché… à moins que les invocations de Cathbad soient vraiment capitales), ainsi que la plupart des hommes de Badenov. En comptant l’évasion miraculeuse d’Oran et de Manfred, qui avaient été faits prisonniers par les Ungors, nos héros ne sont plus que six, et c’est assez naturellement qu’ils décident de déserter pour devenir des mercenaires, loin de l’incompétente brutalité des officiers placés là par leur famille. D’ailleurs, à ce propos…

Début spoiler…Il n’est jamais trop tard pour se venger de mauvais traitements, surtout quand on n’a plus rien à perdre. Badenov et Oran rendent donc visite à Yasharov au cœur de la nuit, et procèdent à un échange du meilleur goût : ils laissent la tête calcinée de Gashrakk dans le lit de l’aristocrate, Le Parrain-style, et vont planter la sienne sur une pique à l’extérieur du camp kislévite, avant de partir voir ailleurs s’ils y sont. On connaît la suite…Fin spoiler

1 : Et si vous pensez que je n’ai pas la patience ou la mesquinerie nécessaire pour relayer l’information, vous devez être nouveau ici : Torben Badenov, Oran Scarfen, Vladimir Grozny, Alexi, Arkady et Andrei Tolyev, Manfred, Oleg Chenkov, Arnwolf, Zabrov, Mikhail Polenko, Yuri Gorsk Kiryl, Evgenii, Cheslav, Stefan. Il n’en resteraque six  à la fin, ne vous attachez pas trop.
2 : Parfois en utilisant des matériaux… plus biodégradables que d’autres.

AVIS :

S’il ne s’agit pas de la première nouvelle écrite par Jonathan Green pour sa bande de mercenaires préférés, ‘Mark of the Beast’ peut au moins se prévaloir d’être le premier épisode de la série qui donnera au final le recueil ‘The Dead and the Damned’. Le résultat n’est pas aussi navrant qu’il a pu être dans d’autres péripéties badenoviennes, la haute teneur en action (bas du front) injectée par Green dans cette aventure l’empêchant de trop s’empêtrer dans son scénario, même si ce dernier apparaît tout de même très fragile dès lors qu’on a le malheur de s’intéresser un peu trop à lui. Si le héros s’appelle Badenov, l’auteur a pour sa part bien mérité le nom de Good Enough… De la cheap fantasy très peu intéressante, à moins que vous ne cherchiez à voir ce que le BL style a produit de plus suranné.

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A Ship Called Rumour – D. Abnett [WFB] – #35 :

INTRIGUE :

WFB_A Ship Called RumourDe retour à Sartosa, la cité pirate du Vieux Monde, après avoir effectué un séjour dans les geôles tilléennes, Luka Silvaro compte bien reprendre en main sa petite affaire familiale, récupérée par son demi-frère Guido après sa malheureuse incarcération. Très originalement pour l’endroit, Luka est un capitaine pirate, et pour rentrer en possession de ses biens (et personnes), il lui faut vaincre en « duel » – lui doit se battre seul, son adversaire non – son fourbe de parent. Ce qu’il fait avec les formes, dans le cadre bucolique d’une taverne enfumée, et sous les yeux d’un compagnon (Sesto) qui l’a suivi depuis Luccini pour s’assurer qu’il mettrait à profit sa liberté retrouvée pour accomplir une mission d’importance : traquer et couler le Butcher’s Ship, un vaisseau pirate semant la terreur sur le Grand Océan. Gentleman jusqu’au bout, Luka se contente d’amputer son gredin de frérot de sa main gauche (de toute façon, il ne lui restait plus que deux doigts de ce côté-là) plutôt que de l’achever, comme il en avait pourtant le droit et l’envie.

La suite de la nouvelle suit la préparation du capitaine abandonné réhabilité et de ses principaux lieutenants pour partir en chasse, sur les deux vaisseaux (la Rumeur et le Saphir) que compte la petite flotte de Silvaro. Les coques calfatées et les cambuses remplies, il est temps pour ce beau monde de cingler les voiles afin de… trouver un tuyau sur la localisation du Bucher’s Ship. Car malgré toute sa bonne volonté, Luka n’a pas la moindre idée d’où se cache sa proie, ce qui ne va pas faciliter la levée de sa probation et le versement des mille couronnes promises par Luccini en échange de l’accomplissement de sa mission. Il croit que sa chance a tourné lorsque se présente au loin les galères du collègue pirate arabien Ru’Af, mais ce qui devait n’être qu’une discussion informelle entre gens de mer se transforme soudainement et sans crier gare en bataille navale rangée. En cause : encore ce maudit Boucher, qui a tellement vidé les eaux internationales de leur trafic habituel que les pirates en sont réduits à s’attaquer les uns les autres pour tenter de survivre. Quelle époque mes pauvres amis.

Cueilli à froid par la traîtrise de Ru’Af, il faut bien quelques pages de féroces combats, et la perte d’un membre du casting, pour que Luka Silvaro parvienne à se tirer de cette mauvaise passe. La nouvelle se termine sur l’annonce officielle faite à son équipage de la mission qui lui a été confiée par ses employeurs tiléens, et sur un peu de name dropping de bon aloi. Il se pourrait que ce soit ce triste sire d’Henri le Breton qui se cache derrière la barre du Butcher’s Ship. Encore les Bretons (pourquoi ne suis-je pas surpris, sans déconner ?). Quelle mafia alors.

AVIS :

Comme il sait si bien le faire (lire ‘Les Cavaliers de la Mort’ pour s’en convaincre), Dan Abnett donne souffle et vie à un petit bout du Vieux Monde de manière aussi convaincante que prenante dans ce ‘A Ship Call Rumor’. On se fait rapidement happer par cette histoire de flibustiers au long cours, aussi exotique que fascinante pour l’habitué de la GW-Fiction, et suffisamment bien écrite pour être à la portée des nouveaux venus (après tout, tout le monde sait ce qu’est un pirate). Si on peut reprocher à ces quinze pages d’être très chargées en personnages, qui ne font pas forcément grand-chose d’intéressant une fois les présentations effectuées, et à l’action en elle-même de traîner en longueur, il s’agit d’un petit et logique prix à payer pour poser les fondations d’une serie feuilleton, qui semble avoir été pensée dès sa conception par Abnett et la BL comme publiable à terme comme un roman dont les chapitres seraient les nouvelles1 (ce qui sera le cas au final : ‘Fell Cargo’). On termine ce segment introductif avec une intrigue bien mise en place et une envie certaine de connaître la suite des aventures de Luka Silvaro et de ses hommes : c’est donc mission accomplie par Dan Abnett.

1 : Une pratique très courante à cette époque pour la Black Library, dont une bonne partie du catalogue lors de ses premières années était constitué de romans patchworks, aussi bien pour Warhammer Fantasy Battle (‘Tueur de Trolls’, ‘Hammers of Ulric’, ‘Gilead’s Blood’) que pour 40K (‘Ghostmaker’, ‘Brothers of the Snake’). On constate qu’Abnett a contribué à quatre de ces cinq exemples, ce qui en fait le champion du repackaging littéraire !

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The Beguiling – S. Mitchell [40K] – #35 :

INTRIGUE :

Nous retrouvons le Commissaire préféré de ton Garde Impérial préféré peu de temps après la campagne de Keffia (‘Sector 13’), sur la planète de Slawkenberg et engagé, aux côtés du 12ème Régiment d’artillerie de campagne de Valhalla (Jurgen, Divas et Mostrue sont de la partie), dans la purge du culte chaotique ayant déclenché une insurrection sur ce monde autrement paisible. Ou plutôt, des cultes chaotiques, comme nous allons le voir. Après quelques mois de routine agréable, passés à bombarder les positions ennemies à 71,99 pouces de la ligne de front le matin, déjeuner dans des petits bistrots sympathiques, et déguster de l’amasec vintage en charmante compagnie l’après-midi, notre fringant mais prudent héros se rend compte qu’il s’ennuie quelque peu, et décide de suivre une patrouille d’observateurs avancés de son régiment, accompagné de son fidèle Jurgen, pour voir du paysage et soigner sa réputation d’officier héroïque et proche de ses hommes.

Ce qui ne devait être qu’une simple balade en Salamander va bien sûr mal tourner, d’abord en raison d’une météo capricieuse et de l’absence de capote (livrée en option sur ce type de véhicule), puis à cause d’une embuscade maladroitement commise par un groupe de Prouteux en vadrouille, forçant les Valhallans à s’enfoncer dans une forêt profonde sur un petit chemin au lieu de rester sur la route (détruite par leur botte secrète : l’appel à un ami qui a une batterie de Basilisks sous ses ordres). Au bout de quatre heures de rallye pluvieux, Cain et ses charges retournent enfin à la civilisation, représentée par un manoir isolé mais apparemment occupé, comme son illumination l’atteste.

Ayant garé leur Salamander à quelque distance de la bâtisse afin de pouvoir la reconnaître discrètement, les Gardes sont surpris par l’arrivée désespérée d’une jeune fille affolée et fort peu vêtue, poursuivie par un petit groupe de cultistes de Nurgle. Si les maraudeurs pestiférés sont rapidement mis hors d’état de nuire, à défaut de puire, par les bidasses en goguette, et que la demoiselle en détresse, rapidement rejointe par quelques accortes amies, tombe dans les bras de ses sauveurs, Cain éprouve un vague mal-être (et une démangeaison palmaire de mauvais augure) devant la tournure prise par les événements. Quelque chose ne sent pas bon dans cette affaire, et ce n’est pas Jurgen (pas que, en tous cas)…

Début spoiler…Et en effet, la petite soirée que nos quatre militaires passent à l’Académie pour jeunes filles du monde de St Trynia, si elle s’avère mémorable, ne l’est pas pour les bonnes raisons, et se révèle aussi être la dernière pour deux des camarades de Cain. Alors que ce dernier se retrouve dans les quartiers privés de la directrice pour une séance de tantrisme extra-curriculum, l’ambiance retombe brutalement lorsque la voluptueuse Mademoiselle Duboir confie à son coup d’un soir qu’elle l’a tout de suite identifié comme un fidèle de Slaanesh. Ce que Cain ne pense pas qu’il est (encore1), merci pour lui. Il prend d’ailleurs la mouche au point d’abattre sans sommation son hôte après cette petite confidence. Et à propos de mouche, voici les Nurgleux qui reviennent à la charge, et prennent d’assaut le manoir et ses habitantes, offrant à Cain et à Jurgen (mis très mal à l’aise par le rentre dedans qu’il a subi toute la soirée de la part des prêtresses du plaisir sous camouflage) la couverture parfaite pour s’éclipser discrètement, laissant les dépouilles de leurs camarades malheureux au milieu du champ de bataille. Un petit coup de fil au Colonel Mostrue et un bombardement de la Chaos Star Academy plus tard, tout est bien qui finit bien pour le Héros de l’Imperium, qui décide suite à cette aventure de reprendre en main son hygiène de vie afin de ne plus être pris pour sex addict par la première cultiste venue. Non mais.Fin spoiler

1 : D’ailleurs à l’époque, Cain ne sait même pas trop qui sont les Dieux du Chaos (il l’apprendra plus tard en traînant avec l’Inquisitrice Vail). Mais comme Mitchell est partisan de la théorie des signes chaotiques (les noms et symboles des Dieux du Chaos sont tellement horribles que les entendre ou les voir provoque une réaction épidermique même chez les profanes), la confidence sur l’oreiller de Miss Duboir suffit à convaincre notre héros qu’il y a slaanguille sous resh.

AVIS :

Mitchell livre une nouvelle Cainesque tout ce qu’il y a de plus classique avec ce ‘The Beguiling’, qui mélange action, humour, grimdark et second degré avec un goût certain. Si l’expérience de lecture est assez plaisante, comme souvent avec les aventures du Commissaire le plus cool1 et coulant de tout le Segmentum, je regrette toutefois que Sandy Mitchell n’ait fait aucun effort pour ménager un peu de suspens sur l’opposition entre les deux factions antagonistes (Prout vs Meuh), qui nous est annoncée dès la première page, puis est mise en scène de façon très directe dès l’arrivée de Cain et ses hommes dans le manoir de Duboir. Etant certain de la capacité de Mitchell, en tant que scénariste et narrateur, à obtenir un résultat plus palpitant que ce très et trop convenu ‘The Beguiling’ (comme il a pu le montrer dans ‘Last Night at the Resplendent’ par exemple) s’il avait voulu s’en donner la peine, je reste un peu sur ma faim avec cette nouvelle, et ne la place donc pas parmi les tout meilleurs épisodes de la saga de Ciaphas Cain. Peut mieux faire et a mieux fait.

1 : Logique pour un officier rattaché à un régime de Valhalla, vous me direz.

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Meat Wagon – C. L. Werner [WFB] – #35 :

INTRIGUE :

WFB_Meat WagonVotre attention s’il vous plaît. La nouvelle qui va suivre comprenant un nombre élevé de personnages nommés (plus ou moins) importants pour notre intrigue, nous vous remercions par avance de suivre attentivement les présentations qui vont vous être faites de notre casting. Vous aurez été prévenus.

Et nous voici donc catapultés dans un relais routier minable sur la route reliant Erengrad à Zandri en passant par Nuln, où une belle bande de personnages attend que leur personnel de bord ait fait le plein et chargé les plateaux repas. Les écouter un instant suffit au lecteur sagace pour deviner où chacun se positionne sur l’organigramme de la nouvelle d’action med-fan1. Nous avons ainsi, par ordre d’apparition : le joueur de cartes (en os, because why not2)/escroc/joli cœur Feldherrn, le gras, riche, désagréable et xénophobe marchand de vodka Emil Steinmetz, sa « fiancée »/chaufferette achetée en soldes à son vieux père Lydia, et son garde du corps couturé et patibulaire, Ravna (surnommé un demi car il utilise une épée bâtarde). À cela, nous nous devons d’ajouter la Baronne von Raeder, vieille fille maniérée et hautaine, mais se baladant avec une rapière au côté, et le jeune ingénieur Nain Fergrim Pointefer, transportant avec lui des caisses frappées de runes auxquelles il tient comme à la prunelle de ses yeux. Pour finir, un mot sur les chauffeurs de ces messieurs-dames : l’Ostlander au fouet et aux chicots pourris, Ocker, et son comparse Strigani à tête de fouine et à moustache pleine de miettes (un signe sûr que c’est un filou… ou une fouine qui vient de tomber sur une baguette), Bresh. Pfiou, une bonne chose de faite.

Tout ce petit monde se dirige donc vers Nuln et doit cohabiter pour quelques heures, même si des tensions se manifestent déjà au sein du groupe. Le voyage du coche est cependant interrompu avant son terme par un fiacre-stopper planté au bord de la route. Reconnaissant un Répurgateur à la forme de son chapeau, les deux gredins tenant les rênes, et que le lecteur avait surpris quelques temps auparavant à échanger des remarques lourdes de sens hors d’écoute de leurs passagers, sont d’abord tentés de l’écraser, mais Mathias Thulmann (car c’était lui) avait habilement prévu le coup en demandant à son homme de main et tortionnaire particulier, Streng, de se positionner stratégiquement avec une arbalète chargée à proximité. Si Thulmann joue du pouce sur les grands chemins, c’est que son cheval à perdu un fer et qu’il a donc besoin d’être dépanné jusqu’à la forge la plus proche. Ne prenant pas les dénégations polies des conducteurs pour argent comptant, il s’installe donc posément dans la diligence, laissant son acolyte suivre cette dernière avec leurs chevaux, et propose un tour de table amical pour briser la glace entre les compagnons de voyage. Venant d’un type qui peut vous condamner au bûcher si vous éternuez de façon bizarre, pas sûr que cela fonctionne beaucoup.

En tous cas, cette rencontre fortuite n’empêche pas Ocker & Bresh de dérouler la suite de leur plan, et donc d’amener leur véhicule jusqu’au charmant petit village de Mureiste, Sylvanie. « Dites donc, c’est étrange que nous fûmes allâtes en direction du Nord-Est alors que la logique voullasse que nous nous dirigeassionnèrent vers le Sud-Ouest » commente ce finaud de Thulmann, à qui on a appris le Reikspiel littéraire et la géographie au Temple de Sigmar. Il ne faut donc pas s’étonner que notre héros dégaine une de ses pétoires de service lorsque l’équipage annonce une pause de quelques minutes à ses passagers, et interdise en des termes non incertains aux ruffians de bouger de leur siège. Cette situation des plus tendues (Streng étant venu appuyer les dires de son employeur avec sa propre arbalète) dégénère cependant tout à fait lorsque les habitants de Mureiste arrivent en masse taper au carreau du fiacre, et pas pour demander s’ils peuvent laver le pare-brise, non non. Car les locaux sont des goules, elles ont faim, et de bien mauvaises manières. Dans le tumulte qui s’en suit, notre compteur de mort horrible se déclenche enfin, grâce à la participation active d’Ocker, qui prend un carreau dans le bide de la part de Streng en tentant de dégainer son tromblon, tombe de son siège, se fait rouler dessus par la voiture qui s’emballe, et dévorer vivant par les relations professionnelles des son collègue. Pas mal pour un début. Bresh, de son côté, réussit à faire décrire des cercles à l’attelage devenu fou jusqu’à ce que le poison des cannibales fasse effet et terrasse les chevaux3. Le coche se renverse, manquant d’écraser Pointefer, mais ne faisant pas d’autres victimes que les chausses de Steinmetz, dont le transit intestinal est accéléré par la vue des goules. Toutefois, tous nos personnages, y compris Bresh, que Thulmann amène manu militari avec lui pour qu’il s’explique, réussissent à se réfugier dans le temple de Sigmar local, et à en barricader les portes.

Dès lors, il s’agit pour nos héros de s’organiser. Pendant que ses camarades fortifient leur position ou sanglotent dans leur coin, le Répurgateur torture un peu son suspect, arrivant à tirer de ce dernier la promesse d’une mort abominable délivrée d’une main de Maître par ce dernier. Il ne faut pas longtemps à Thulmann pour comprendre que les goules ne sont qu’un avant-goût d’une nuit très agitée qui s’annonce, et le zélote va donc prêter main-forte à ses acolytes, qu’il positionne à des endroits stratégiques dans l’attente du prochain assaut. À la tombée du jour, une chauve-souris géante vient déverser des litres de guano sur la grand-place où patientent les Muriestois, avant de se poser et de se changer en, je vous le donne en mille, Ozzy Osbourne. Ou presque. En vampire Stryge. Après s’être fait briefer sur les derniers événements, et avoir repris quelques forces en sirotant le messager4, il lance ses ouailles à l’attaque du monument, en leur indiquant de penser à faire le tour, cette fois-ci. Si la marée de viande écumante (voir « ils l’ont écrit ») ne parvient pas à faire autre chose que trembler les portes dans un premier temps, les nerfs fragiles de cette fiotte de Steinmetz manquent de condamner la team Sigmar lorsque le pleutre décide d’aller libérer Bresh dans l’espoir que ce dernier parvienne à le sauver. Malheureusement pour lui, et pour son nouvel obligé, Lydia donne l’alerte à Thulmann avant que le Strigani n’ait eu le temps de lui planter un couteau dans le dos. Privé de l’avantage de la surprise, les vingt centimètres d’acier du ruffian ne font pas le poids ni la longueur face à l’épée bénite du Répurgateur5, et le malappris se fait posément transpercer la gorge par son adversaire, qui peut aller redonner un coup de main très bienvenu à ses comparses.

C’est le moment que choisit le Stryge pour faire son entrée dans la place, par la fenêtre s’il vous plaît. Chemin faisant, il charcute horriblement la pauvre Baronne von Raeder6, pulvérise un banc et éventre Steinmetz, faisant un peu de ménage dans notre casting. Ses tentatives de griffer à mort Thumann sont cependant mises en échec par le jet d’eau bénite qu’il se prend dans la figure (ça brûle), et par les gros débuffs de zone que lui inflige le sol consacré du lieu saint dans lequel il se trouve. C’est ça aussi de ne pas demander à ses goules de raser le temple de Sigmar du village en temps et en heure. Devant tant de diableries, ou peut-être l’inverse, le vampire décide d’aller prendre l’air, entraînant avec lui ses hordes de groupies décérébrés. L’occasion pour les défenseurs de souffler un peu et de faire leurs comptes, le pauvre Ravna, méchamment tailladé par un ongle sale de goule, n’en ayant plus pour très longtemps…

C’est alors que Pointefer se souvient que le contenu de ses caisses n’est autre que de la poudre à canon. Gag. Jouant leur va-tout, les survivants envoient donc le Nain et le mourant poser une mèche dans les décombres de la diligence, pendant que Thulmann tente de distraire le Stryge. Cela marche tellement bien que, lorsque l’héroïque Ravna se sacrifie pour mettre le feu aux poudres, le buveur de sang est encore occupé à envoyer des gros doigts, ou griffes dans son cas , au Répurgateur depuis le sommet de la diligence. Bilan des courses : un centre ville dévasté, une vingtaine de goules déchiquetées, et un vampire en piteux état, que Thulmann achève d’un coup d’épée en plein cœur en punition de son tapage nocturne7. Ici s’achève notre histoire, les deux chasseurs de sorcières décidant de repartir avec leurs montures (habilement garées dans le temple par Streng un peu plus tôt), même déferrées, plutôt que de s’éterniser plus longtemps dans ce patelin paumé qu’est Mureiste. Et Thulmann de donner ce conseil avisé aux trois survivants de notre échappée belle (voyez si vous pouvez les identifier) : « je suis sûr que ça va marcher ».

1 : Et dans une certaine mesure, de déterminer qui a le plus de chances de mourir dans d’atroces souffrances au cours des prochaines pages.
2 : Même si le matériau utilisé me semble un peu saugrenu. Sans compter de la taille du squelette nécessaire pour tailler des cartes d’une taille suffisante. Sans doute un moyen pour les forces impériales de monétiser les cadavres d’Orques qui s’accumulent comme des feuilles mortes en automne après la Waaagh ! hebdomadaire.
3 : Qui n’ont pas reçu de nom et que je n’inclue donc pas à ma liste, à grand regret.
4 : Don’t shoot the runner, but drink them? Yes you can.
5 : Annule les sauvegardes invulnérables des Démons, coup fatal sur les sorciers à cœur noir.
6 : Dont le tort fut d’être une femme répudiée indépendante, et donc indigne de confiance pour ce misogyne de Thulmann.
7 : Non sans avoir balancé la petite réplique qui va bien juste avant, ici librement empruntée à ‘Le Bon, La Brute et le Truand’ (déjà pastiché par Werner dans sa série ‘Brunner, Bounty Hunter’.

AVIS :

On savait Werner particulièrement à son aise pour la mise en scène de nouvelles d’actions sérialisées, qu’il s’agisse pour lui de suivre une traque du chasseur de primes Brunner, ou une purification expresse dispensée par le zélé Mathias Thulmann. Cette réputation n’est pas usurpée ici, car cette Charcuterie Ambulante tient beaucoup mieux la route, et c’est heureux, que la diligence empruntée par nos héros pour se rendre à Nuln. En plus de bénéficier d’une atmosphère tendue tout à fait appréciable, en grande partie grâce au rythme soutenu imposé par l’auteur, et les quelques descriptions gore à souhait qu’il glisse au fil des pages, cette nouvelle parvient également à faire « vivre » (et mourir, dans beaucoup de cas) sa belle brochette de personnages de façon naturelle et équilibrée, et emprunte avec bonheur au genre du western, dont Werner est un fan assumé. La fameuse scène de l’attaque de la diligence par les Indiens, ou, plus proche de nous, l’attente tendue des 8 Salopards, partagent ainsi des similarités fortes avec le siège de temple de Sigmar par un Stryge et ses goules, preuve que dans la pop culture, tout est dans tout et inversement. Au final, encore une nouvelle solide à mettre au crédit d’un des chasseurs de lignes les plus réputés du Vieux Monde plutôt que du Far West, et une très bonne introduction du personnage de Mathias Thulmann aux non-initiés, si nécessaire.

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Warp Spawn – M. Ralphs [40K] – #35 :

INTRIGUE :

Ayant accepté à son bord un couple de clandestins et leur petite fille qui cherchaient à quitter la planète Vrantis III, le capitaine Matteus du transporteur Sable Bess ne se doute pas qu’il est sur le point de vivre la traversée la plus éprouvante de sa carrière. La famille idéale se révèle être un couple d’adorateurs du Chaos, et leur enfant la BFF des jumelles Apex, volontairement droguée par ses parents aimants afin de l’empêcher de jouer avec son ami imaginaire (je ne sais pas pour vous, mais ça m’évoque Marie Frisson et Gros Chat), un peu soupe au lait il faut bien le reconnaître. Loi de Murphy oblige, la maléfique fillette est bien sûr réanimée par l’équipage, dont la majeure partie ne vivra pas assez longtemps pour regretter cette décision. Dans le Warp, personne ne vous entend crier…

AVIS :

L’univers de Warhammer 40.000 est tellement vaste qu’il peut – en théorie – servir de cadre n’importe quel type de récit, même ceux les plus éloignés du standard de la Black Library (SF d’action). Partant, la décision de Matt Ralphs de signer une pure nouvelle d’horreur avec son Warp Spawn est loin d’être incongrue, d’autant plus que le bonhomme sait s’y prendre pour narrer des scènes cinégéniques en diable (oups). Le calvaire vécu part Matteus et ses comparses a beau ne pas être bien original, Ralphs parvient à instiller une atmosphère de slasher mâtiné d’épouvante surnaturelle à son propos, qui retombe malheureusement bien avant la conclusion (assez bancale) de la nouvelle.

Au final, si les deux premiers tiers de Warp Spawn sont un régal, le dernier tiers est franchement décevant, et aurait gagné à être plus développé par un auteur à court de place, de patience et/ou d’inspiration pour donner à son récit un final digne de ce nom. Dommage.

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Redhand’s Daughter – W. King [WFB] – #36 :

INTRIGUE :

WFB_Redhand's DaughterAprès avoir fait les 400 coups (de hache runique) en Arabie, quelques temps après leur retour d’Albion (Tueur de Géants), Gotrek et Felix se retrouvent sur le cuirassé nain du Capitaine Ahabsson, croisant sur les eaux du golfe d’Arabie depuis la forteresse de Barak Varr. Toujours à la recherche d’une fin glorieuse, le célèbre Tueur doit ronger son frein pendant la croisière, ce qu’il fait en s’enfilant pinte sur pinte et en gueulant sur Ceniormeteo, le dieu elfique des dépressions, tandis que Felix préfère meubler ses journées en regardant les dauphins et entretenant des pensées sinistres, comme à son habitude. Nos plaisanciers ne tardent cependant pas à être mis à l’épreuve (autrement, cela aurait été la nouvelle de Gotrek & Felix la plus ch*ante du monde), d’abord par la survenue d’un grain sévère, qui endommage bellement le Storm Hammer, puis par la rencontre avec un navire de pirates Orcs, qu’Ahabsson décide, en corsaire assermenté, d’aller piller. L’enthousiasme fiévreux du capitaine se heurte toutefois à quelques dures réalités, à commencer par les projectiles enflammés projetés par la catapulte de proue du vaisseau adverse, qui cabossent suffisamment le steamer nain pour que ce dernier se retrouve à portée d’abordage par l’équipage peaux-vertes, beaucoup plus nombreux que ses vis-à-vis. La bataille qui s’en suit permet à Gotrek de se dégourdir les orteils (pas mieux à espérer contre de simples boyz), et à Felix de voler à la rescousse d’une prisonnière de l’infâme Capitaine Goldtusk, qu’il réussit à escorter jusqu’au Storm Hammer avant que ce dernier ne parvienne à se désengager.

Vainqueurs éprouvés de l’affrontement, les Nains décident d’aller mouiller l’ancre sur l’une des îles toutes proches, encouragés en cela par le récit fait par la rescapée (Katja Murillo) du légendaire trésor que le pirate Redhand, qui se trouve être son père, a dissimulé sur cette dernière. Elle-même capitaine au long cours, elle promet à ses sauveurs de partager les bénéfices de son héritage s’ils l’aident à mettre la main dessus. Capturée par Goldtusk alors qu’elle voguait vers le butin avec son propre équipage, Katja n’a dû son salut qu’à l’avidité de l’Orc, qui a épargné sa vie en échange d’un aller simple vers le magot familial. Jamais les derniers à se lancer dans la quête de richesses mal acquises, Ahabsson et ses gars acceptent la proposition qui leur est faite, et tout ce petit monde (plus deux humains) débarque sur une île volcanique couverte d’une épaisse forêt où est sensé se trouver la fortune de Redhand.

Bien que charmé par le ravissant minois de la donzelle (ce qui est la raison pour laquelle il s’est rué à son secours en premier lieu), Felix se montre assez suspect des motivations de cette dernière, et ne peut s’empêcher de penser que Katja dissimule quelque chose à ses partenaires. Gotrek de son côté s’avère plus intéressé par la perspective de se frotter au monstrueux gardien d’une gemme légendaire conservée dans l’un des temples en ruines de l’île (dixit Katja, toujours), ou a défaut, par la régulation de la population locale de peaux vertes. L’enthousiasme général est à peine entamé par la disparition mystérieuse de plusieurs membres d’équipage au fur et à mesure que l’expédition s’enfonce dans la jungle, énigme rapidement résolue par un Gotrek peu tolérant envers les facéties des Gobelins arboricoles du cru. Après un pittoresque trail tropical, les aventuriers parviennent jusque dans la cité abandonnée promise par leur guide, qui se trouve être un lieu de villégiature couru par la gent orcoïde (un club Mork, sans doute), forçant nos héros à la plus grande discrétion. Même Gotrek, dont le premier but était pourtant de tailler des croupières aux locaux, accepte de faire crête basse jusqu’à ce que ses camarades aient pu sécuriser le trésor, ce qui est fort urbain de sa part. En même temps, ils sont sortis de la forêt, donc…

Une fois rendu dans le temple où Redhand aurait déposé ses bagages, et après avoir négocié de façon soupçonneusement facile au goût de ce rabat-joie de Felix l’accès jusqu’au cœur de l’édifice, qui dispose d’une installation géothermique de pointe sous la forme de puits de lave intégrés à la structure du bâtiment (attention à ne pas se brûler en prenant sa douche, tout de même), l’expédition se retrouve confrontée à un défi de taille, en la présence d’un Elémental de lave qui surgit de son jaccuzzi pour empêcher les intrus de faire main basse sur le trésor du pirate ainsi que sur l’énorme gemme qui fait office de décoration d’intérieur. Au lieu de s’émerveiller de la culture du gardien des lieux, qui s’exprime en Reikspiel parfait alors que sa prise de fonction remonte à des millénaires (ce sont les Anciens qui ont signé son contrat de travail), l’esprit mesquin de Felix ne peut s’empêcher de se concentrer sur le fait que MagMan semble connaître Katja, qu’il qualifie de sorcière (ce qui n’est pas très sympathique). De son côté, Gotrek se contente de foncer dans le tas (de roches en fusion) avec son ardeur habituelle, distrayant la Chose assez longtemps pour que Katja réussisse à s’emparer de la gemme, avant de disparaître dans un éclat de rire sardonique. On comprend alors que la capitaine corsaire n’était pas la fille, mais la femme de Redhand, qu’elle a poussé à prendre d’assaut le temple pour récupérer le diam’s des années plus tôt, sans succès. On comprend aussi que le joyau en question n’avait pas qu’une utilité symbolique, mais servait surtout de régulateur de l’activité tellurique du volcan local, qui se réveille violemment une fois la gemme dérobée.

Ayant tout de même réussi à refroidir les ardeurs du gardien, puis à le(s lui) briser menu, Gotrek et Felix en sont quittes pour une session de hack’n’slash intense pour sortir du temple avant que ce dernier ne soit noyé par la lave. Laissant leurs camarades survivants se débrouiller tous seuls comme des grands petits, le duo se fraie un chemin sanglant à travers les hordes de Gobelins que Goldtusk, arrivé sur place après le naufrage de son navire, a recruté pour… visiter le temple également je suppose1. Cette louable idée de sortie culturelle prend donc un tour funeste lorsque le Tueur et son comparse décident de couper la file, résultant en des centaines de morts parmi les visiteurs, dont Goldtusk en personne, décapité par un Gotrek littéralement chauffé à blanc. Ceci fait, il ne reste plus à nos inséparables qu’à partir en petites foulées vers la plage où mouille le Storm Hammer, avant que l’éruption du Krakatorka ne mette un terme honteux et cendreux à la carrière du Tueur. Spoiler alert : Ils s’en sortent. Si si.

1 : King ne donnant aucun signe que les Nains aient été détectés par les peaux vertes à leur arrivée.

AVIS :

Cette aventure conséquente (28 pages) permet à William King de renouer avec les origines littéraires de Gotrek & Felix, héros de nouvelles conduits plus tard par le succès à évoluer dans de plus longs formats. Se déroulant après les événements relatés dans Tueur de Géants, dernier roman signé de la série signé par King (et le moins réussi du lot à mon humble avis, comme quoi il a bien fait d’arrêter), Redhand’s Daughter peut être considéré comme l’ultime tour de piste des deux troublions sous la plume de leur créateur, et un écho aux longues nouvelles originelles du duo (Wolf Riders, The Dark Beneath the World). Bénéficiant d’une localisation exotique (je ne pense pas que quiconque se soit aventuré dans la Chaîne Mégaleane – qui n’apparaît sur aucune carte à ma connaissance – depuis lors), de péripéties rythmées et, elles aussi, assez innovantes pour le lecteur, comme la bataille navale introductive entre corsaires Nains et pirates peaux vertes, Redhand’s Daughter a un petit goût de pastiche de The Queen of the Black Coast (a.k.a. Conan en croisière), avec Katja en Belit et Gotrek & Felix se partageant le rôle du ténébreux Cimmerien. Ces considérations évacuées, on se retrouve cependant avec une soumission assez classique du sous-genre créé par King, qui déroule son propos et coche les cases du cahier des charges avec aisance plus que maestria. On notera pour terminer que l’auteur n’a pas encore tenu sa promesse de faire remettre Katja Murillo sur le chemin de nos baroudeurs, et qu’avec la destruction du monde de Warhammer (et donc celle de Katja et Felix), il lui sera assez difficile de tenir sa parole…

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Et voilà qui conclut cette revue de l’année 6 d’Inferno! Que dire d’autre à part qu’il reste deux années à couvrir et que ce sera bientôt le cas ? Stay tuned (and hydrated) et à la prochaine !

INFERNO! – ANNEE 4

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de l’année 4 d’Inferno!, le bimensuel de nouvelles, comics et articles de background publié par la Black Library entre 1997 et 2005. S’étendant de juillet 2000 à mai 2001, cette quatrième année regroupe pas moins de 24 courts formats issus des trois franchises soutenues par la BL à cette époque : Warhammer Fantasy Battle, Warhammer 40.000 et la petite dernière (au sale caractère) Necromunda. Croyez-le ou non, mais on ne fera jamais mieux en termes de quantité. Année quatre, année faste…

Inferno!_Année 4

Pas moins de 16 auteurs ont été mis à contribution pour produire cette abondante prose, dont deux (à l’époque) débutants dont le nom vous dira peut-être quelque chose : C. L. Werner (‘A Choice of Hatreds’) et Graham McNeill (‘Unforgiven’ et ‘Business as Usual’). À un tout autre niveau d’implication, Gav Thorpe et Jonathan Green se placent au premier rang des contributeurs de ces six numéros, avec trois nouvelles à mettre à l’actif de chacun. Enfin, même si son activité n’a pas été aussi frénétique que lors des années précédentes (ou suivantes, car il a vraiment été prolifique), l’incontournable Dan Abnett signe tout de même deux nouvelles (‘Red Rain’ et ‘Pestilence’) sur cet exercice.

Parmi les personnages notables et célébrités de niche nous ayant fait l’honneur de leur présence dans ces augustes et vénérables pages, on retrouve beaucoup de héros aujourd’hui méconnus des amateurs de GW-Fiction. Si les noms de Stefan Kumansky (‘The Gifts of Tal Dur’, ‘Debts of Blood’) ou Nathan Creed (‘Mama’s Boys’, ‘Boyz in the Hive’) vous sont familiers, vous faîtes partie d’une très petite minorité. Bande de nerds. Signalons également que cette année quatre a vu la création de héros aussi emblématiques que le Chasseur de Sorcières Mathias Thulmann (‘A Choice of Hatreds’), qui aura l’honneur de bénéficier de sa propre trilogie suite à ses débuts réussis, et le retour du Sergent Iron Snakes Priad (‘Red Rain’), déjà croisé dans ‘White Heat’.

Le décor de cette année 4 étant planté, il est temps de passer à l’étude détaillée et impitoyable de cet échantillon représentatif de la GW-Fiction du tournant du millénaire. All aboard the memory train…

Inferno! Année 4

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Ancient History – A. Chambers [40K] – #19 :

INTRIGUE :

40K_Ancient HistoryRecruté contre son gré comme équipier polyvalent du Retribution, fier vaisseau de la flotte impériale à rade de personnel, à l’issue d’une opération porte fermée (traduction : une fois qu’on est rentré, on ne peut plus sortir), Nathan, notre héros, découvre progressivement les joies et les peines de la vie de canonnier de marine, noble et utile occupation qu’il projette toutefois d’abandonner dès qu’une occasion de déserter se présentera à lui. Cette frilosité à s’engager sur le long terme dans une institution impériale pourtant aussi respectable que la Navy1 s’explique en partie par la présence d’un nuisible connu de Nathan, Kendrikson, dans l’équipage de Balthasar (le nom du macrocanon auquel notre homme a été affecté). Les deux forçats se sont quittés fâchés au cours d’une précédente collaboration, et bien que Nath’ ne serait pas contre une petite vendetta pour régler ses comptes avec son ex-nouveau collègue, il préférerait à tout prendre mettre quelques années lumières entre eux, un « accident » du travail étant si vite arrivé… En plus de ces problèmes relationnels, le Warp ne s’avère pas être un long fleuve tranquille, et sa traversée pèse lourdement sur l’estomac et la psyché des rats de cale. En témoigne le coup de sang passager d’un passager, Fetchin, qui succombe à une crise de claustrophobie démoniaque, puis à une décharge de fusil à pompe à bout portant, non sans avoir envoyé quelques badauds à l’hôpital et à la morgue auparavant.

Nathan a toutefois la chance de pouvoir compter sur le patronage bienveillant de Kron, canonnier vétéran dont l’accent chantant, les histoires passionnantes, les relations privilégiées avec le management et la connaissance intime des coursives du Retribution permettent au bizut d’acquérir des connaissances et compétences précieuses, monter dans la hiérarchie balthasaresque et, accessoirement, échapper à la tentative d’assassinat dont il fait les frais de la part de ce mauvais sujet de Kendrikson, qui se révèle être un Luminen2 infiltré.

Cette prise de fonction mouvementée culmine avec la toute première bataille spatiale à laquelle Nathan participe, baptême du feu à plus d’un titre au cours duquel il aura l’occasion de se frotter à l’ennemi de plus près que prévu sur sa fiche de poste, le crash d’une torpille d’abordage à proximité de son espace de co-working le forçant à prendre les armes pour défendre la vertu et l’intégrité de Balthasar contre les assauts païens de vils cultistes chaotiques, dont l’encadrant se trouve être un Space Marine renégat. Il faudra une nouvelle fois l’intervention décisive de Kron, qui sous ses abords décatis, se révèle être un individu décidément plein de ressources et d’énergie (il se relève d’un tir de pistolet bolter à bout portant et tase l’Astartes à mains nues), pour permettre à notre héros de se sortir de ce coup de Trafalgar. Les mystères de l’origine et des motivations du mentor de Nathan ne seront pas levés par Chambers avant la conclusion de cet ‘Ancient History3′, mais une chose est sûre, quand on est Kron, on est Kron.

1 : Sécurité de l’emploi, gîte et couvert offerts, destinations variées, activités physiques régulières… Ça c’est un job de rêve.
2 : Plus de quinze ans avant la sortie du Codex Adeptus Mechanicus, Chambers convoquait déjà des électro-prêtres dans ses nouvelles.
3 : Qui a peut-être été suivi d’une autre nouvelle, et aurait dû l’être ? Je suis sur le coup les aminches.

AVIS :

Nouvelle protéiforme et un peu foutraque, ‘Ancient History’ est une soumission plutôt hétérodoxe, mais loin d’être inintéressante de la part d’Andy Chambers. En multipliant les partis pris narratifs (cela commence comme un récit d’évasion, avant d’intégrer un passage « mythes et légendes », puis d’embrayer sur une révélation plutôt étrange sur un des personnages principaux, et de tourner à l’action pure et dure, pour se terminer sur un mystère vraiment mystérieux) et les péripéties, le grand méchant joueur n’a pas choisi la facilité, et son propos en paraît en conséquence décousu et incertain dans sa finalité. Pour autant, le simple fait de mettre sur le devant de la scène des personnages très peu abordés par la BL mais au moins aussi caractéristiques du grimdark de 40K que les Space Marines ou l’Inquisition (les « marins » de la Flotte Impériale) ne manquera pas d’attirer la curiosité bienveillante des lecteurs avides d’en apprendre plus sur la vie des travailleurs de la mer l’espace, ce en quoi Chambers se montre plutôt généreux. En outre, l’inclusion de la Complainte du Vieux Marin à la sauce 40K dans le récit s’avère être un interlude des plus intéressants entre deux scènes d’action, et ne manquera pas de susciter les hypothèses les plus radicales de la part des exégètes de tout poil qui constituent une part non négligeable du lectorat de la Black Library. La balance est donc plus que positive pour ‘Ancient History’ dont les apports fluff et l’originalité compensent largement les tâtonnements et… l’originalité (aussi).

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Mark of a Warrior – R. Williams [NDA] – #19 :

INTRIGUE :

NDA_Mark of a WarriorAprès avoir passé des années à jouer aux Gangers et aux Arbites avec ses petits camarades en rêvant du jour où il aurait enfin son flingue rien qu’à lui (la vraie marque d’un guerrier, clin d’œil au titre, ça c’est fait), un juv’ Goliath se présente à son examen de passage pour intégrer le gang local. Logiquement nerveux, mais souhaitant faire bonne impression à son chaperon, une sorte de Bane grimdark cachant de beaux restes sous ses abords défraîchis et son masque à oxygène, Yogo – appelons le comme ça – joue les blasés jusqu’à apprendre la nature de sa future épreuve : descendre dans un boyau de mine abandonnée pour aller chasser le milliasaur, et rapporter « kekchose eul’ ver peut pas viv’ sans », dixit l’Immortan Joe sous chimio, afin de prouve sa valeur. Pas vraiment une promenade de santé en perspective pour notre héros, qui pourra toutefois compter sur sa toute première pétoire (émotion), obligeamment prêtée par son évaluateur avant que les choses sérieuses ne commencent. Mais attention, comme tout bon Goliath qui se respecte, il s’agira de prouver sa force en usant de son arme, sans dépendre de cette dernière. Un point particulier du crédo Gogo que Yogo aura l’occasion de mettre en application dans les prochaines heures, nul doute.

Descendu dans la mine sans presqu’avoir eu l’air ridicule en accrochant sa ceinture à un crochet qui dépassait du mur au passage, Yogo rampe un peu, panique quelques fois, mais surtout fait des plans sur la comète en se rêvant un parcours météoritique parmi les Gangers du Sous-Monde, depuis son premier affrontement avec les Scavvies jusqu’à son couronnement d’Helmawr à la place de Helmawr. Cet enthousiasme juvénile, aussi appelé étourderie, manque de lui être fatal lorsqu’il entre sans s’en rendre compte sur le territoire d’un milliausaur, qui lui tombe sur le râble depuis le plafond de la mine. Le combat qui s’en suit reste longtemps mal engagé pour Yogo, dont la pétoire a la mauvaise idée de s’enrayer juste au moment où il aurait été utile de pouvoir descendre un mille-pattes géant et agressif à bout touchant. Mais la bestiole a tout de même l’amabilité de décéder en s’étougorgeant après avoir avalé le couteau du Goliath, le bout pointu en premier. Coincé sous le cadavre de son trophée, Yogo peut savourer sa victoire comme il se doit…

Début spoiler…Mais comme les bonnes choses ont une fin, il parvient tout de même à se dégager, retrouvant l’usage de ses membres et la circulation dans son bras droit (ce qui pique un peu après une demi-heure de garrotage). Là, il se rend compte de deux choses capitales : 1) son flingue ne s’est pas enrayé, il n’y avait en fait aucune balle dans le barillet du revolver (faire preuve de force, la dépendance céleumaltoussa toussa…), et 2) décapiter une créature qui a une carapace de pierre avec un éclat de canif, ça ne va pas être de la tarte. Une petite ellipse plus tard, Yogo, bien éprouvé, finit par sortir de la mine avec son trophée, qu’il jette aux pieds de son examinateur impassible. Ce dernier le reste même lorsque la nouvelle recrue lui décoche un crochet du droit bien mérité, avant de repartir vers le QG du gang, le Juv’ furibard sur l’épaule, en se gondolant comme une baleine. Ca doit être un rite Goliath.Fin spoiler

AVIS :

Petite nouvelle sympathique de la part de Richard Williams, ‘Mark of a Warrior’ fait mouche grâce à l’aisance stylistique de son auteur. En entrée, un beau McGuffin mettant en scène un jeu de gamins comme s’il s’agissait d’une traque mortelle. En plat de résistance, l’opposition savamment mise en scène entre la dureté et la cruauté du sous monde et l’insouciance, souvent dangereuse, du héros, qui est resté très jeune dans sa tête malgré son physique d’armoire à glace. Et en dessert, une utilisation à propos, et plutôt deux fois qu’une, considérant ce dont il est question ici, du fusil de Tchekov soigneusement intégré par Williams à son propos. La philosophie Goliath n’est certes pas diserte, mais elle contient quelques concepts à méditer. Le seul bémol que je mettrai à cette autrement appréciable soumission est la partie de spéléologie appliquée de la nouvelle, qui n’apporte pas grand-chose à l’intrigue et ralentit plutôt cette dernière. Mais à part cela, et ce n’est pas grand-chose, ce ‘Mark of a Warrior’ témoigne d’un examen de passage réussi pour la recrue Williams.

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Words of Blood – B. Counter [40K] – #19 :

INTRIGUE :

40K_Words of BloodSur la planète quasiment abandonnée d’Empyrion IX, le Commandeur Athellenas des Black Templars doit relever un défi de taille : empêcher une armée de 6.000 cultistes de Khorne de s’emparer du seul spatioport de ce monde minable, ce qui permettrait aux hordes dépravées et mal fringuées du terrible Manskinner de fondre sur Macharia pour y commettre un génocide. Le tout avec seulement trente Space Marines à disposition. Le rapport de force n’est pas en faveur de l’Astartes, mais Athellenas a… un plan (et pour un Black Templar, c’est déjà beaucoup). Le seul problème, c’est que ses frères risquent de ne pas l’apprécier du tout, ce qui va le contraindre à jouer très finement la partie1.

Du côté adverse, les préparatifs vont bon train pour ce qui ne devrait être qu’un massacre en bonne et due forme entre deux factions peu réputées pour leur tactique d’évitement. Le Manskinner, qui a reçu de sa divinité tutélaire le don démoniaque « parole de sang », ce qui lui permet de plonger son audimat dans une folie furieuse (et non pas de se mordre la langue à chaque fois qu’il prononce une phrase), prononce une petite causerie d’avant-match qui met ses ouailles de bonne humeur, et envoie sa cavalerie (si si) à l’assaut des positions retranchées des Marines. Il se doute que les fringants hussards ne feront pas long feu face à l’arsenal des Black Templars, mais cela devrait laisser le temps nécessaire au gros de ses forces d’arriver à portée de charge.

Conformément à ses pronostics, la brigade légère du bien nommé Die(ss) tombe glorieusement au champ d’honneur, sur le score sans appel de 210 morts à trois doigts tranchés. C’est alors que le rusé Athellenas dévoile la profondeur insondable de son génie stratégique, en ordonnant la retraite. Stupeur et bégaiements chez les meilleurs de l’Empereur, qui n’ont pas pour habitude d’abandonner du terrain à l’ennemi, à plus forte raison un temple millénaire à la gloire de Pépé, comme celui qu’ils occupent actuellement. Il faut donc claquer quelques PC au Commandeur pour passer le stratagème « Y a pas de mais », permettant un repli en bon ordre jusqu’à la ville voisine où une nouvelle position défensive est installée sans tarder.

Si cette manœuvre n’a pas fait consensus chez les Black Templars, elle a cependant compliqué la situation du Manskinner, dont l’emprise sur les éléments les plus foufous de son armée commence à s’effilocher. Malgré son éloquence sans pareille – en même temps, la plupart de ses suivants ont perdu l’usage de la parole, donc la compétition n’est pas féroce – Manski’ ne parvient pas à empêcher un de ses lieutenants, le Caporal Recoba, de partir à la chasse aux Marounes sans attendre les retardataires. L’ennui est que le charismatique officier embarque avec lui deux mille copains, divisant l’armée des cultistes en deux. Comme on peut s’y attendre, cet empressement à porter le combat à l’ennemi sera fatal pour Recoba et ses suivants, qui tomberont sous les bolts et les coups des Space Marines lors d’une embuscade savamment orchestrée par Athellenas et ses Sergents.

Cette nouvelle victoire est cependant rapidement ternie par la décision de Big A. de battre à nouveau en retraite, cette fois-ci pour une défense sur la ligne (ici le spatioport d’Empyrion IX). Cette annonce dévaste le Devastator Valerian, qui menace de se faire renégat plutôt que de commettre la forfaiture de la marche arrière, et n’accepte finalement de se plier aux instructions de son supérieur qu’après s’être fait menacer de sanctions disciplinaires dans cette vie et dans la suivante.

De son côté, le Manskinner enrage (comme d’hab’ vous me direz) de la couardise manifeste de ses adversaires, qui rend son armée sevrée de violence de plus en plus difficile à contrôler. Ayant compris qu’il s’agit d’un stratagème pour désorganiser ses forces, il tente de calmer les ardeurs de ses cultistes en exaltant les valeurs de la vengeance et de la patience, mais se fait brutalement interrompre par son dernier sous-fifre (Kireeah) avant d’avoir pu terminer son sermon. Bien que l’impoli paie son impudence de sa tête, proprement séparée de son corps par la paire de ciseaux géants que le Manskinner arbore à la place de son bras droit – c’est pratique pour inaugurer les bâtiments, je me demande pourquoi Charles III ne s’en est pas déjà équipé – le mal est fait et les Khorneux se lancent dans un sprint éperdu en direction du spatioport. Après avoir tenté de remettre un semblant d’ordre dans la horde en cisaillant de droite et de gauche, Manski’ décide de se joindre à la fête car après tout, les Marines n’ont plus nulle part où aller et l’avantage numérique est toujours largement en faveur des rouges…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur le besoin pathologique des Khorneux de cogner sur quelque chose ou quelqu’un dans les plus brefs délais, qui va jouer un bien mauvais tour aux hérétiques. Alors qu’ils ne sont plus qu’à quelques dizaines de mètres de leurs cibles, leur soif de sang finit par se retourner contre eux et l’armée du Manskinner se transforme en battle royal géante, de laquelle seuls quelques survivants confus et blessés émergent à la fin des combats pour tomber aussitôt sous les coups des Marines. C’était ce sur quoi comptait Athellenas, qui a interdit à ses frères d’ouvrir le feu pour ne pas permettre aux cultistes de se reconcentrer sur leurs priorités. Malin. Ce qu’il l’aurait été encore plus, ce serait d’avoir partagé son plan avec ses hommes pour s’assurer que tout se déroule bien, plutôt que de compter aveuglément sur la discipline et la loyauté vacillante de ces derniers. Mais comme Athellenas l’explique doctement à Valerian une fois la bataille remportée, les meneurs n’ont pas à se justifier auprès des exécutants. Ce n’est pas avec une telle mentalité que notre héros gagnera le prix de camaraderie, mais les résultats parlent d’eux-mêmes, et c’est plus qu’assez au 41ème millénaire…Fin spoiler

1 : Je choisis de penser qu’il s’est équipé d’un poing énergétique (qu’il n’utilisera pas une fois de la nouvelle, malgré ce que l’illustration grimdark à souhait laisse penser) pour donner l’impression à ses bourrins de collègues qu’il serait le premier à sauter dans la mêlée. Mais la moufle ne fait pas le moine de l’espace…

AVIS :

Words of Blood’ fait partie des nouvelles écrites pour explorer une situation paradoxale ou problématique si on se réfère au background canon de univers de Games Workshop1, ici : « que se passerait-il si le seul moyen pour des Black Templars de remporter une bataille était de battre en retraite ? ». Je précise qu’à l’époque où cette histoire a été écrite, les zélés fils de Dorn prenaient leur serment de défense de l’Imperium de manière beaucoup plus littérale – certains esprits chagrins pourraient dire « basse du front », mais il ne faut pas écouter ces vils persifleurs – que maintenant. Sur ces prémisses intéressantes, en tout cas plus qu’une vulgaire empoignade entre Space Marounes et mutants/hérétiques/Xenos (rayer la ou les mentions inutiles), Ben Counter développe un propos qui, s’il accuse aujourd’hui sérieusement son âge, mérite encore la lecture à mon sens.

En effet, si on fait abstraction des quelques éléments surannés de ‘Words of Blood’ (le serment de non-reculade des Black Templars, les attaques de cavalerie…), la trame de l’histoire reste solide. Mieux encore, cette nouvelle présente un parallélisme aussi élégant que satisfaisant entre les dilemmes tactiques et managériaux auxquels sont confrontés les deux commandants ennemis. Tant Athellenas que le Manskinner doivent en effet réfréner les penchants naturels de leurs troupes pour espérer l’emporter, et composer avec la mauvaise volonté de ces dernières à obéir à des ordres avec lesquels elles ne sont pas en phase. À ce petit jeu, la discipline naturelle des Space Marines finit par l’emporter (mais de très peu), provoquant la fin des hordes hérétiques de la manière la plus Khorneuse qui soit. Le vieux fluffiste qui sommeille en moi a d’ailleurs failli verser une larme (de sang) en lisant la harangue de la dernière chance faite par le Manskinner à ses troupes indisciplinées juste avant qu’elles ne piquent leur sprint fatal vers le spatioport d’Empyrion IX. Car oui, Khorne était dans l’archéofluff une divinité plus complexe que l’immonde bourrin qu’il est devenu au fil des versions2, et Counter mérite une accolade pour avoir reflété ces fifty shades of red dans sa nouvelle.

Boni appréciables, il s’est également donné la peine de développer un minimum sa galerie de personnages (les plus intéressants étant le Manskinner philosophe et ses lieutenants exaltés), et se révèle plutôt généreux en termes de fluff Black Templar, même s’il est permis de douter de la validité de ces informations plus de vingt ans après l’écriture de cette nouvelle (à l’époque, cette faction ne disposait pas de son propre Codex, et on pouvait donc y aller franco sur leur background). Pour ne rien gâcher, la nouvelle se termine par un petit twist final, un peu ruiné par le TGJSUO (Ta Gu*ule Je Suis Un Officier) que l’aimable Athellenas décoche au pauvre Valerian, mais on n’en tiendra pas rigueur à l’auteur. Bref, même si ‘Words of Blood’ a un peu vieilli depuis sa sortie (en 2000, on peut être miséricordieux), il elle ça se laisse lire sans problème encore aujourd’hui.

1 : Marc Gascoigne indique dans son introduction de l’anthologie ‘Let the Galaxy Burn’ que la Black Library a été (au moins en partie) créée à cette fin. C’est dire si ce « genre » est important.
2 : Quand on voit les dernières entrées du Codex World Eaters, on ne s’étonne pas que le mot « subtilité » s’écrive avec neuf lettres, et non pas huit…

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The Gifts of Tal Dur – N. McIntosh [WFB] – #20 :

INTRIGUE :

WFB_The Gift of Tal DurFraîchement revenus de leurs aventures à Erengrad (couvertes dans le roman Star of Erengrad), les aventuriers Stefan Kumansky et Bruno Hausmann font halte dans la petite ville de Mielstadt, où convergent les traces de leur ancien compagnon d’armes Alexei Zucharov, ayant eu la mauvaise idée de ramasser une babiole chaotique sur le champ de bataille. L’objet en question, sans doute un tract de la campagne présidentielle de François Hollande de 2012, l’a tellement convaincu que le changement, c’était maintenant, qu’il en a renié son allégeance ‘chaotique bonne’ pour rejoindre le camp de Tzeentch. Jugeant qu’il est de leur devoir d’empêcher leur comparse renégat de nuire, Stefan et Bruno ont poursuivi ce dernier à travers le Nord de l’Empire, confiants en leurs capacités de traqueurs pour mettre la main au collet de Zucharov avant que l’addition de ses déprédations ne soit trop salée.

À Mielstadt, nos héros n’ont rien de plus pressé que d’empêcher la pendaison arbitraire de l’infirmière de garde locale, soupçonnée, non sans raisons, par les locaux de bénéficier de pouvoirs surnaturels de guérison. N’ayant ni le temps, ni l’envie d’expliquer à une bande de rednecks agressifs les bienfaits reconnus de la balnéothérapie pour les patients en convalescence (la pauvresse, Katarina von Lucht de son nom, tenant un centre de cure thermale dans la forêt voisine, au lieu-dit de la source de Tal Dur), Stefan et Bruno se contentent de faire parler l’acier, sauvant Katarina d’un destin funeste mais s’attirant du même coup la neutralité malveillante du Graf de la ville, un certain Augustus Sierck (sans doute un parent éloigné de Detlef). La soirée passée à l’auberge locale en compagnie de ses sauveurs permet à Miss van Lucht de leur faire la pub de son établissement et des ses compétences de thérapeute, Tal Dur pouvant en effet accélérer la guérison de celui qui s’y baigne, mais seulement si ses pieds sont propres son âme est pure et qu’elle-même est présente pour superviser le procédé. Il n’y a pas à dire, elle sait comment verrouiller un business et préserver un gagne-pain. Enfreindre ces deux règles a généralement des conséquences fâcheuses, comme l’intervention d’un maître-nageur furibard armé d’une zweihander, ou quelque chose comme ça.

De leur côté, Stefan et Bruno ne perdent non plus pas de temps, le premier à briefer leur hôte sur la présence probable de Zucharov dans les parages et son souhait, tout aussi probable, d’utiliser le pouvoir de Tal Dur pour… se faire enlever le tatouage chaotique qui recouvre petit à petit sa peau (ce tract de François Hollande devait être très mal imprimé pour dégorger de la sorte). Eh, pourquoi pas après tout, le délit de faciès est une réalité même dans le Vieux Monde apparemment. Le second, quant à lui, chauffe suffisamment la serveuse de l’estaminet pour qu’elle lui laisse son adresse sur un bout de parchemin à la fin de son service, ce qui est une Victoire Majeure pour l’Empire, comme tous le reconnaîtront. Malheureusement, ou heureusement, en l’absence de Google Maps, et malgré le fait que la ville ne doit pas être si grande que ça, Bruno erre comme un gland toute la nuit sans arriver à bon port. Grand bien lui fasse car, à son insu, la serveuse était déjà maqué avec Zucharov, et cherchait donc à le faire tomber dans un piège (ou avait accepté de réaliser le fantasme de son nouveau petit copain en participant un plan à 3, même si l’esprit est plus Slaaneshi que Tzeentchien). La perfide aubergiste paiera toutefois cher son double jeu, son désir irrépressible d’allumer la lumière malgré les réticences de son coup d’un soir débouchant sur une crise de terreur nocturne aux conséquences fatales.

Le lendemain matin, Stefan est cueilli au creux du lit par le Graf et ses soldats, trop contents de mettre sur le dos des voyageurs le meurtre de la serveuse. Pas du genre à se laisser molester par une bande de bouseux après avoir sauvé l’Empire à quasi lui tout seul, Kumansky a vite fait d’apprendre aux forces de l’ordre la politesse en retournant leurs armes contre eux, et emmenant le Graf en balade à Tal Dur en compagnie de son sidekick lubrique. Là-bas, et après avoir libéré son otage (parce qu’il le vaut bien), Kumansky fait enfin face à sa Némésis, qui a capturé Katarina et se tient prêt à commettre l’irréparable. Le duel héroïque qui s’en suit verra le bien triompher de justesse, Stefan trouvant la rage de vaincre (ou plutôt, de péter le petit pont en bois sur lequel se trouve Zucharov à grands coups de latte) malgré ses graves blessures dans la réalisation soudaine que s’il meurt maintenant, il n’aura pas la possibilité d’aller se pinter la gueule avec son frère à Altdorf dans une semaine. À chacun ses motivations, il y a des Nains qui sont devenus berzerk pour moins que ça. Plouf font Stefy et Zuky en tombant dans le grand bain, qui ne leur réservera pas le même destin. Aidé à sortir de l’eau par Katarina, Kumansky émerge de l’onde amère frais comme un gardon et totalement guéri, tandis que son adversaire refait surface ridé comme un pruneau, avant d’être définitivement aspiré au fond de la piscine par… le poids de sa conscience coupable, j’imagine. Au moins, il meurt propre, l’encre chaotique ayant été lessivée par les eaux purificatrices de Tal Dur, décidément très efficaces.

Vient alors l’heure pour nos deux héros de repartir vers de nouvelles aventures (incluant donc une nuit de beuverie au Helmsman, qui a l’air de valoir vraiment le coup s’il parvient à ranimer les mourants), forts du sentiment du devoir accompli. Peut-être un peu déçu par le refus de Katarina de l’accompagner jusqu’à Altdorf – les affaires sont les affaires – Stefan peut toutefois se consoler par le chaste baiser que la belle lui accorde avant de le laisser repartir. Ce ne sera peut-être (sûrement même, my it-s-bloody-obvious-the-way-the-author-wrote-it sense is tingling) que partie remise…

AVIS :

Ayant lu il y a fooooooooort longtemps le roman Star of Erengrad, premier tome de la trilogie consacrée par Neil McIntosh au personnage de Stefan Kumansky, qui se terminait sur la victoire des gentils et la corruption d’Alexei Zucharov, je n’ai pas eu de difficulté à me plonger (haha) dans cette nouvelle, qui n’est autre que la suite logique du roman mentionné plus haut. Ceci dit, le bon travail de contextualisation qu’effectue McIntosh en introduction de son propos aurait permis à n’importe qui de comprendre facilement les tenants et aboutissants de l’intrigue déroulée dans ce The Gifts of Tal Dur, soumission simple mais pas simpliste, et d’honnête et robuste facture. Sur un canevas certes peu original dans l’absolu (le héros sauvant sa belle des griffes du méchant, l’épée à la main), mais relativement peu utilisé dans les écrits de la BL, où les protagonistes ont généralement autre chose à faire que secourir des damoiselles en détresse, l’auteur place un vernis légèrement grimdark mais totalement WFB, avec le Chaos venant jouer son rôle de force corruptrice et destructrice, retournant les frères d’armes l’un contre l’autre et laissant à son hôte malheureux quelques secondes pour réaliser l’étendue de sa folie avant que le voile de la mort ne tombe. So cinematic. Bref, un honnête filler dans les rayonnages bien achalandés de la Black Library, qui permettra au lecteur de se faire une bonne idée du style et des capacités de Neil McIntosh.

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The Plague Pit – J. Green [WFB] – #20 :

INTRIGUE :

WFB_The Plague PitLa vie de mercenaire est souvent plus glamour dans les livres qu’en réalité. Sauf quand c’est un livre de Jonathan Green. C’est le triste constat que font Torben Badenov et sa bande de joyeux drilles (le noble puritain Pieter Valburg, Oren « face de rat/oneliner » Scarfen, big boi Stanislav, old boi Alexi et that other boi Yuri), alors qu’ils se trouvent forcé de passer la nuit à la belle étoile dans la désolation sauvage de l’Ostermark profond. S’ils sont de sortie, c’est que leur mission actuelle consiste à assurer la sécurité de l’érudit Johannes Verfallen, passionné par les tribus de l’époque pré-impériale et prêt à débourser une coquette somme pour être escorté jusqu’au monolithe antique qu’il a l’intention d’étudier sous toutes les coutures. Bien que les critères d’hygiène corporelle de l’universitaire laissent sérieusement à désirer de l’aveu du capitaine mercenaire (Torben Badenov étant lui, comme chacun le sait, un mannequin l’Oréal s’ignorant et ignorant), les caisses de la fine équipe sont suffisamment vides pour qu’ils ne fassent pas la fine bouche devant cette offre. La soirée est toutefois brutalement interrompue par les vomissements suspects de Verfallen, que ses gardes avaient laissé à marmonner au pied de l’édifice pendant qu’ils s’échangeaient des remarques de haute volée sur la météo locale et les derniers résultats de Blood Bowl. Le sort de l’érudit est vite plié lorsque son estomac commence à enfler de manière inquiétante, avant de s’ouvrir et de répandre une ventrée (c’est le cas de le dire) d’asticots aux alentours. Le calvaire de Verfallen ne s’arrête pas là, puisqu’en fin de compte il finit transformé en Enfant du Chaos à tête de cheval, sous le regard vaguement circonspect et pas vraiment empathique des mercenaires.

Fidèle à sa nature chafouine, la bestiole nouvelle née se rue (c’est approprié direz vous) sur Badenov et Cie, qui n’ont cependant guère de mal à en venir à bout. Seul Alexi se fait souffler dans les naseaux par ce bourrin de bourrin, le marquant discrètement comme le-membre-de-la-bande-destiné-à-mourir-pour-apporter-un-peu-de-tension-à-l-histoire. Mais je m’avance en besogne. La tête de mule n’est pas sitôt équarrie que le temps tourne brutalement à l’orage, et que des ombres entourant le feu de camp sort une nuée de Nurglings, sans doute alléchés par l’idée de faire griller quelques chamallows sur les flammes. Peu partageurs, les mercenaires choisissent de déguerpir et d’aller se réfugier dans le moulin surplombant la colline toute proche de leur bivouac, et de se barricader en attendant que la tension retombe. Leur QG improvisé se révèle cependant être plus riche en surprises qu’en farine, comme la présence de nombreux ouvrages traitant de démonologie et de magie chaotique, lectures peu communes pour le meunier impérial moyen, l’atteste. Il faut l’intuition et la culture de Pieter Valburg, MVP récurrent des aventures de la bande de Badenov (plus que le personnage titre d’ailleurs, c’en est navrant), pour comprendre que ces grimoires appartenaient à Verfallen, et que ce dernier n’était pas un simple passionné des vieilles pierres, mais un sorcier cherchant à atteindre le statut de Prince Démon de Nurgle en lançant le rituel dont la formule était inscrite sur le monolithe qu’il étudiait. Malheureusement pour lui, il a prononcé palimpeste au lieu de palimpseste pendant l’incantation, et au lieu de devenir sa Majesté des Mouches, il n’a gagné qu’un skin tout pourri de BoJack Horseman. That’s life.

Ces révélations ne font cependant pas les affaires de nos héros, qui doivent défendre une épave thermique, très mal isolée, contre une nuée de petits Démons entreprenants. À ce jeu là, rien ne vaut l’utilisation de faux et de râteaux à la place de haches et d’épées (si tu veux Jonathan hein), mais même la quincaillerie de Jardiland ne constitue qu’un pis aller. Submergés par les Nurglings, qui ont mordu Alexi à la cheville, histoire de nous faire vraiment comprendre que c’est lui qui va y passer, les fiers compagnons doivent se replier dans le sous-sol du moulin, sur une idée originale de… Pieter. Il faut croire que même prendre une décision quand on n’a qu’une option est trop compliqué pour Torben Badenov, bellâtre benêt.

Leur nouvel environnement a beau être Nurglings-proof, le puits condamné par une grille en fer toute rouillée qui trône en son centre n’inspire pas franchement la confiance aux nouveaux-venus. À raison, car il communique avec le cairn funéraire de Morruut, un sorcier de Nurgle des temps très anciens, et le premier à avoir eu l’idée démoniaque de transcender son humanité. It didn’t work because of things, mais sa dépouille mortelle a été patiemment ramenée à la pseudo-vie par Verfallen dans le cadre des ses expérimentations, et les élucubrations de ce dernier ont redonné du poil de la bête à la moruue qui clapote au fond du trou. C’est à la fois un danger mortel mais également une chance d’en finir pour les mercenaires, qui supputent (enfin, surtout Pieter, comme d’habitude) que s’ils arrivent à exorciser le tas de morve qui braille en contrebas, la tempête s’arrêtera et les Nurglings seront bannis. Plus facile à dire qu’à faire évidemment, car Morruut ne l’entend pas de cette oreille de dinde (googlez pas ça hein), et va tenter de tentaculer les répurgateurs amateurs, avec quelques interludes consacrés à des numéros d’imitation (Verfallen d’abord, puis Alexi, après que le vieux schnoque soit tombé dans le puits) et de crachage de mouches (un grand classique du nurglisme) entre les sessions de papouilles à pseudopodes. Au terme d’une lutte acharnée, Pieter parvient presque à terminer le rite d’exorcisme, mais se fait entraîner en sous-sol par le Démon bien membré (la suite est heureusement hors champ). Ce n’est pas grave toutefois car Stanislav décapite Morruut/Alexi, mettant le Chaos KO. Ce n’est pas logique, mais après tout, on ne peut pas comprendre les Fab 4. Alors que le moulin s’écroule, les survivants s’extirpent de la ruine, parvenant à récupérer in extremis Pieter au passage (qui quant à lui récupère en douce un grimoire nurglesque), et ainsi à limiter leurs pertes à la portion congrue. Encore une victoire probante, mais mal rémunérée, pour la bande de Badenov dont le slogan devrait être « Mort ou Fauchés ».

AVIS :

Je dois avouer ici que lors de ma première lecture de ‘The Plague Pit’, il y a quelques années, j’avais trouvé cette histoire tellement creuse et caricaturale dans le genre « aventures d’une bande de héros dans un univers medieval fantastique » que je m’attendais à passer un mauvais moment en la relisant pour le compte de la chronique de ‘Lords of Valour’. Peut-être suis-je devenu moins exigeant, plus conciliant au fil des années (certaines critiques récentes de votre serviteur permettent toutefois d’en douter), mais en tous cas, ‘The Plague Pit’ est loin d’être la pire histoire de la bande de Badenov que j’ai pu lire à ce jour, et je tenais à le dire ici1. En effet, on ne s’y trouve pas confronté à des énormes trous dans l’intrigue comme dans ‘Dark Heart’, et l’arc narratif de la série progresse sensiblement entre le début et la fin (avec le début de la corruption de Pieter plus qu’à travers la disparition d’Alexi), ce qui est ce que l’on peut raisonnablement espérer de mieux de la part du Jonathan Green du début des années 2000, très franchement.

Le parti pris de l’auteur de mettre l’action au cœur de son histoire, et les difficultés de ce même Green de livrer autre chose que des scènes de combat dignes d’un livre dont vous êtes le héros écrit par un bot nourri aux runs de Dragon Slayer et Diablo, rendent la lecture un peu longuette et l’impression d’assister à un boss fight en bonne et due forme lorsque les héros affrontent Pater patterns Morruut vient sortir un peu plus le lecteur de son immersion med-fan, mais rien de rédhibitoire ici. Le plus gênant, mais distrayant, pour moi reste l’inutilité crasse de Torben Badenov, encore une fois complètement éclipsé par Pieter Valburg dès qu’une décision un minimum intelligente doit être prise. Les autres personnages sont tellement peu développés qu’il n’y a pas de compétition entre la tête et les jambes cheveux de l’équipe, et c’est d’ailleurs une autre lacune stylistique de Green : tuer des personnages ne marche que lorsque le lecteur ressent un minimum d’empathie pour ces derniers. Ce n’est pas le cas pour Alexi de Nuln, je n’ai pas de problème à le dire. Bref, c’est très moyen mais ça se laisse lire, et ça ne m’étonnerait pas que ce soit le haut du panier badenovien, alors…

1 : Pour être tout à fait clair, je considère tout de même que cette série est très dispensable, mais si vous tenez à la lire, ce sera peut-être l’un des épisodes les plus intéressants.

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Hive Fleet Horror – B. J. Bayley [40K] – #20 :

INTRIGUE :

40K_Hive Fleet HorrorJako Jaxabarm exerce la profession d’apothicaire (et pas d’Apothicaire, la minuscule est importante) sur une planète tellement quelconque qu’on saura seulement qu’elle est semi-industrielle1, et située dans le Segmentum Ultima, et gagne sa croûte en soignant les petits bobos du prolétariat local à grand renfort de baume du tigre (bleu). Un contrôle d’identité anodin au sortir d’une consultation rapidement expédiée avec un travailleur aux bras cloqués (Drenthan Drews) le met cependant dans de beaux draps. Par un malheureux – et inexpliqué – hasard, l’Arbitrator qui lui demande ses papiers l’identifie comme étant le Genetor van Leedrix, un Magus de l’Adeptus Mechanicus en fuite depuis des décennies. Ce qui est bien le cas, et provoque l’arrestation sommaire de Jako la fraude et de celui que le zélé fonctionnaire considère comme étant son acolyte (Drews).

Enfermés dans une cellule avec un Garde Impérial accusé de couardise devant l’ennemi, Jako, Drews et le lecteur en sont quitte pour un petit briefing sur la situation compliquée dans laquelle se trouve la planète. L’humble bidasse ne se fait en effet pas prier pour révéler à Jako que la Flotte Ruche Kraken est attendue en gare dans les prochaines heures2, et que les chances pour que la rencontre se passe bien sont assez faibles. Bon d’accord, Jako est un Psyker débutant (la raison pour laquelle il est en fuite depuis pas loin d’un siècle, sa différence n’ayant pas été bien reçue par ses collègues de travail), mais ce n’est pas une raison pour balancer des secrets défense au premier venu, Engagé Chochotte ! Comme pour confirmer les dires de leur informateur, une annonce micro retentit dans la caserne des Arbitrators, annonçant que tous les prisonniers sont priés d’aller mourir au combat contre l’essaim de Hormagaunts qui s’approche en bondissant de la cité. Les portes de la cellule s’ouvrent, des fusils lasers sont distribués, et pendant que le Garde démotivé préfère se suicider plutôt que de retourner au front, Jako et Drews profitent de la quille pour aller faire un tour en ville.

Las, cette escapade est bientôt interrompue par la soirée mousse que les Tyranides lancent soudainement sur la cité, et dont l’effet principal est d’empêtrer les défenseurs impériaux dans une sorte de barbe à papa Xenos, permettant aux envahisseurs de ramener tout ce beau monde dans leurs vaisseaux. C’est l’occasion pour nos héros (et pour le lecteur) d’en apprendre plus sur les motivations profondes de cette race extra-galactique – merci les pouvoirs psychiques de Jako pour justifier le remplissage éhonté auquel se livre Bayley – et d’assister aux premières loges à la terrible cruauté de ces créatures sanguinaires, qui dissèquent un (1) prisonnier avec un intérêt tout scientifique. LES MONSTRES.

Grands nerds devant l’Esprit de la Ruche, les Krakens sont tirés de leurs travaux pratiques par l’arrivée d’une escouade de Space Marines quelconques, qui se contentent de déposer une charge explosive dans la salle de classe avant de repartir en ignorant royalement les captifs humains survivants. Il en faut toutefois plus pour décourager nos deux héros de tenter de faire ami-ami avec les meilleurs de l’Empereur, et ils profitent de la confusion pour suivre à la trace leurs (presque) sauveteurs à travers les corridors organiques du vaisseau ruche, jusqu’au Thunderhawk que les Space Marines acceptent gentiment de partager avec des civils pour le retour au bercail. La nouvelle se termine avec l’explosion du vaisseau sur lequel Jako et Drews étaient retenus prisonniers, et sur le constat qu’il en reste cependant plein d’où il en vient. C’est ça l’embêtant avec les Tyranides, ils n’ont pas vraiment le sens de la mesure…

1 : Ce qui est assez honteux selon les standards de l’Imperium, où tous les concepts sont poussés à fond.
2 : A bord des fameux vaisseaux escargots qui forment le gros des flottes tyranides.

AVIS :

Hive Fleet Horror’ est sans doute la nouvelle de Barrington J. Bayley à avoir le plus mal vieilli de tout son catalogue. On peut à la rigueur passer l’éponge sur la vision très datée que l’auteur a et donne des Tyranides, ici dépeints comme des insectes géants pas foncièrement mauvais mais uniquement intéressés par la survie de l’espèce1, plutôt que comme l’horreur alien absolue qu’ils sont devenus dans le background actuel. Il ne faut pas oublier que Games Workshop a revu sa copie à propos de cette faction à plusieurs reprises, et qu’il fut un temps (certes lointain, et déjà révolu lorsque cette nouvelle a été publiée) où les Tyranides étaient effectivement relativement fréquentables. Soit.

Ce qui est en revanche impardonnable est l’absence d’intrigue et de rythme de cette nouvelle, qui prend le temps de nous présenter avec un luxe de détail disproportionné pour une histoire de 14 pages le passif de son protagoniste (sans que cela serve le récit d’une quelconque façon), l’affuble d’un side kick nommé à l’utilité toute relative, et leur fait vivre une « aventure » d’une simplicité digne de Fantômette ou du Club des Cinq. Certes, cela permet à Bayley de contextualiser ce qui semble être le but premier de ‘Hive Fleet Horror’, c’est-à-dire une présentation de la raison d’être des Tyranides pour les nuls et les newbies, mais le résultat est tellement décalé et téléphoné que je peine à croire qu’un éditeur de la Black Library ait donné son accord pour publier ce texte. Très décevant, et c’est d’autant plus triste qu’il s’agit de la dernière incursion de cet auteur iconique au 41ème millénaire. Au moins, l’illustration d’Adam Smith est très sympa…

1 : Et capable de débarquer sur une planète sans crier gare. L’Ombre dans le Warp, un concept inconnu pour Bayley.

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Deus ex Mechanicus – A. Chambers [40K] – #20 :

INTRIGUE :

Deus Ex MechanicusL’arrivée sur Naogeddon, monde mort et terne par excellence, de l’ingénieur et Techno-Prêtre (double cursus, t’as vu) Lakius Danzager et de son acolyte Osil manque de très mal se finir pour nos deux personnages, embarqué à bord d’un vaisseau à l’autopilote très bas de gamme. En chute libre depuis l’atmosphère haute de la planète, la navette occupée par les envoyés du Mechanicus est rebootée à temps par le dégourdi Lakius pour éviter un crash mortel à la surface désertique de ce roc sans vie, mais accueillant des ruines très anciennes qu’un Magos Explorator (Egal) souhaite étudier. En tant que spécialiste de la cryo-stase, Lakius dispose d’une expertise précieuse en matière de compréhension de technologie Necron (à ce stade, vous aviez sans doute déjà deviné qu’on prenait ce chemin…), et Egal l’a donc réquisitionné pour assister sa petite équipe de super geeks.

A peine remis de leur atterrissage mouvementé, Lakius et Osil doivent encaisser une nouvelle expérience traumatisante : l’attaque du camp du Mechanicus par quelques escouades de Guerriers Necrons, vomies comme toutes les six heures par la Necropole encore endormie qu’Egal a commencé à explorer. Bien que l’effet de surprise ne soit pas de leur côté, et que les servants de l’Omnimessie puissent compter sur une cohorte de Prétoriens ainsi que de solides fortifications pour les défendre, les robots squelettiques vendent chèrement leur châssis, forçant les adeptes à partir à la découverte de la crypte exhumée par le Magos avec une protection réduite.

De manière très prévisible, la progression du petit groupe (Egal, Lakius, Osil et quelques personnages secondaires à l’espérance de vie très limitée) rencontre une résistance qui va croissant, depuis des marches très hautes qui obligent les Prétoriens à rouler à deux à l’heure, jusqu’à des champs magnétiques générateurs de trouille, ou plus prosaïquement des vagues de Scarabées kamikazes. Au bout du compte, Lakius et Egal se retrouvent seuls dans la salle des bornes de chargement sarcophages de la Nécropole, tandis qu’Osil, qui s’est pris quelques échardes dans la fesse gauche pendant l’expédition indoor, a été ramené au campement de base par le dernier Pretorien pour désinfection et pose de pansement. La tension est à son comble…

Début spoiler…Commençons par évoquer le destin d’Osil, que son maître a chargé d’une mission simple mais capitale : réveiller au plus vite l’Assassin Eversor qui végète dans la soute de leur vaisseau. Lakius soupçonne en effet que la Necropole est en train de se réveiller, et que seule l’intervention d’une machine à tuer bourrée de Red Bull a une chance d’enrayer cette trajectoire menaçante. Malheureusement, la navette du Techno-Prêtre s’est fait coloniser par une nuée de… barnacles (vous croyiez que les Necrons s’en étaient tenus aux scarabées ? erreur) métalliques pendant l’absence de ses propriétaires, empêchant l’acolyte de sortir le tueur de sa torpeur. Voilà qui est dommage.

De leur côté, Lakius et Egal récupèrent un « Bâton de Lumière » dans le sarcophage (vide) du probable Phaëron du lieu, avant de prendre à leur tour le chemin de la sortie. Bien que le Magos assure à son compagnon que cette relique a le pouvoir de tenir à distance les gardiens de la Nécropole, Lakius décide de jouer la carte de la sécurité et de détruire le générateur de phase qui a ouvert le portail permettant d’accéder à l’intérieur du complexe, une fois les deux explorateurs sortis de ce dernier. Egal n’est pas d’accord, et la dispute académique dégénère rapidement en duel de carabine laser, au cours duquel Lakius colle un tir à pleine puissance en pleine tête de son estimé confrère, avant de réduire le générateur en cendres. Une conclusion regrettable, mais la fin justifie les moyens…

Début spoiler 2…Sauf qu’Egal refuse de rester au sol, et pour cause. Sous le fond de teint soigneusement appliqué, c’était un C’tan qui avait revêtu les robes écarlates du Mechanicus. On ne saura jamais ce qu’il cherchait à faire sur Naogeddon, à part troller quelques pauvres adeptes qui n’avaient rien demandé, bien sûr, mais comme on peut s’y attendre, les tirs désespérés de Lakius le font doucement rigoler. Beau joueur, il laisse ce dernier s’enfermer avec Osil dans le laboratoire installé par les chercheurs, avant de frapper doucement à la porte pour essayer de leur vendre des boîtes de biscuits pour financer sa classe de neige et/ou des bons du trésor moldave. Lorsque la paroi finit par céder sous ses coups, le C’tan s’aperçoit que ses proies n’ont pas été oisives, et ont bricolé une étrange machine avec les composants qu’ils avaient sous la main. That’s cute, but too little, too late

Début spoiler 3…Eh non. La machine en question était un générateur de stase, qui emprisonne fissa la truculente Echarde dans une bulle atemporelle. Fin. Comment, vous trouvez ça un peu tiré par les cheveux ? Mais qu’attendiez vous d’une histoire qui s’appelle presque Deus ex Machina, enfin ? Fin spoiler

AVIS :

Les nouvelles d’exploration de Nécropoles Necron, un sous-genre assez populaire de la littérature 40K, ne sont pas vraiment ma tasse de thé. J’ai toujours l’impression de lire la même histoire, basée autour d’un faux suspens (« eh non, ils ne dormaient pas en fait… SHOCKING ») et finissant généralement par une course effrénée vers la sortie de la petite bande de héros ayant eu la mauvaise idée de faire de l’archéologie chez les grands anciens galactiques. Ce ‘Deus Ex Mechanicus’ a pour lui de proposer des variations assez intéressantes à cette base éculée (l’intervention d’un C’tan transformiste1, la presque intervention d’un Assassin Eversor), ce dont je sais gré à Andy Chambers.

Malheureusement pour ce dernier, il ne suffit pas d’avoir des idées innovantes pour accoucher d’une nouvelle réussie : encore faut il les intégrer à l’intrigue et en soutenir le développement de manière un tant soit peu crédible, ce qui n’est pas le cas ici. On ne saura donc pas comment un Techno Adepte du Mechanicus a pu se retrouver en possession d’un Eversor (l’Adeptus Assassinarum n’étant pas vraiment connu pour sa générosité), comment le C’tan transformiste a pris la place d’Egal (ou pourquoi il s’est donné le mal de revenir sur sa planète natale avec des acolytes humains, si le Magos n’a toujours été qu’une couverture), ou ce qu’il se passe après que cette divinité en vadrouille se soit retrouvée piégée dans un champ de stase (ce qui pourrait sans doute intéresser l’Inquisition, et impacter fortement le fluff de Warhammer 40,000… mais je dis ça comme ça). Ou même à quoi sert la scène initiale de la nouvelle (le quasi-crash du vaisseau de nos deux lurons), dont il ne sera plus jamais fait mention par la suite et qui aurait pu être remplacée par une arrivée sur site des plus classiques sans que cela ne change rien à la suite. Trop brouillon.

1 : Qui avec le recul ressemble fortement à Trazyn l’Infini, dans le genre boute en train avide de connaissances. Vu l’âge canonique de cette nouvelle, cette similitude ne peut être autre chose qu’une coïncidence troublante…

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Red Rain – D. Abnett [40K] – #21 :

INTRIGUE :

40K_Red RainL’agrimonde Ceres est tombé sous la coupe d’une secte vénérant Khorne, menaçant les systèmes avoisinants de famine si la situation n’est pas corrigée dans les plus brefs délais. Mobilisés par les autorités compétentes, les Iron Snakes du Capitaine Phobor sont envoyé tataner du bouseux sanguinaire, sous le commandement avisé du Docteur de l’Inquisiteur Mabuse. Ce dernier, qui a sans doute rêvé de percer dans le one man show dans sa prime jeunesse vu le nombre de calembours éculés qu’il balance pendant le briefing, suggère que les Space Marines se rendent dans chacun des dix-sept hameaux qui parsèment la surface de la planète, à la recherche d’indices permettant de séparer le bon grain impérial de l’ivraie chaotique. Il semblerait en effet qu’au moins six communautés aient été corrompues, mini-épouvantail khorneux à l’appui.

Pour une raison non précisée, les Iron Snakes décident de faire leur tournée en Rhino au lieu d’utiliser leurs Thunderhawks, comme n’importe quel être doué de raison l’aurait fait. Peut-être est-ce l’absence du génial Petrok (‘White Heat’) qui a mené ce gâteux de Phobor prendre une décision stupide, ou peut-être que le Chapitre adore faire des balades en blindé dans l’arrière-pays. En tout cas, l’escouade Damocles du Sergent Priad passe quelques longues journées serrée sur les banquettes arrières de leur véhicule1. Le premier et le second villages (Nyru et Yyria) qu’ils visitent n’ont rien de suspect, la population du troisième (Flax) a été complètement massacrée par les cultistes, et le quatrième (Hekat) est un peu beaucoup trop calme, pour reprendre l’expression consacrée.

La fouille méthodique organisée par Priad ne donne pas grand-chose jusqu’à ce qu’une paire de nos surhommes se fasse violemment molester par un jaguar de Khorne (comprendre qu’il bouge tellement vite que personne ne voit trop à quoi il ressemble, mis à part une couleur rougeâtre, des crocs longs comme des couteaux et une queue barbelée) au détour d’une grange. Bilan : un blessé grave et un disparu, ce qui fiche un sacré coup au moral des Snakes, qui se voyaient jusque-là comme les plus grands, les plus forts et les plus beaux. Quelques minutes plus tard, la population du village est retrouvée terrée dans une cave, et explique à ses sauveurs qu’elle se cache des déprédations d’un monstre sanguinaire ayant déjà fait de nombreuses victimes et hante les rues désertées.

Jurant de faire la peau à cette ennuyeuse bestiole et de retrouver le frère Pindor, Priad envoie ses hommes ratisser la ville, et accomplit finalement ses deux objectifs, même si de façon sous-optimale. Le molosse démoniaque est renvoyé dans le Warp à coup de bolt, mais pas avant d’avoir déchiqueté le malheureux frère Illyus. Quant à Pindor, il est retrouvé par son escouade juste au moment où il allait se faire sacrifier par les Enfants de Khorne, qui cherchaient ainsi à invoquer un démon encore plus gros pour poursuivre leur campagne de terreur. Cet heureux dénouement est cependant un peu gâché par la révélation que la totalité des habitants de Hekat est constituée de cultistes, qui décident de venger la mort de Rantanplan en attaquant les Iron Snakes en masse. A ce petit jeu, les Space Marines sont toutefois assez forts, et au terme d’une nuit de combats acharnés, pendant laquelle deux autres serpents énergétiques passent l’arme à gauche (l’Apothicaire Memnes et le première classe Calignes), l’ordre règle à Hekat. Sa mission accomplie, l’escouade Damocles peut repartir en orbite boire un chti canon d’eau de mer en hommage à ses chers disparus, comme c’est la tradition, et poster des offres de recrutement sur l’intranet du Chapitre pour remplacer les pertes. La routine habituelle, quoi.

1 : Il faut cependant noter ici qu’Abnett semble avoir en tête tout autre chose que nous, humbles hobbyistes, quand il pense à un Rhino. Entre le pilotage au gouvernail qui s’effectue torse nu pour plus de confort et la hauteur sous plafond permettant à un colosse de plus de deux mètres de s’équipper d’une bannière dorsale avant de sortir, je crois qu’il n’a jamais jeté les yeux sur la glorieuse exiguïté d’un Rhino avant de prendre la plume.

AVIS :

Les choses s’améliorent un petit peu pour les Iron Snakes et Dan Abnett dans cette troisième nouvelle, qui bénéficie d’une intrigue et d’une atmosphère sensiblement plus travaillées que ce qu’on a pu lire dans ‘Black Gold’ et ‘White Heat’. L’escouade Damocles prend enfin un petit peu de profondeur, et l’inclusion d’un Inquisiteur, même affublé d’un nom aussi ridicule, et d’un culte hérétique caché permet à Abnett de flirter avec le style polar qu’il maîtrise beaucoup mieux que le bolter porn. Cette soumission souffre toutefois de deux défauts majeurs, le premier étant le manque criant de connaissance de l’auteur sur le background de l’Adeptus Astartes. Si le Rhino à géométrie variable remarqué plus haut n’est finalement qu’un exemple sans conséquence, d’autres fourvoiements fluffiques ont un vrai impact sur l’intrigue, ce qui est vraiment ennuyeux. On apprend ainsi que les Iron Snakes ont la promotion très rapidequ’ils ont de gros problèmes de discipline, ou encore que leur endoctrinement et leur résilience est très loin des standards habituels des Space Marines. On pourra me rétorquer qu’à l’époque de l’écriture de ‘Red Rain’, le background était encore assez permissif en la matière, mais à moins qu’Abnett n’ait sorti de ses tiroirs une vieillerie qu’il a remis à la BL sans se donner la peine de la mettre au goût du fluff, je ferais remarquer que ‘Red Rain’ a été publié en 2000, ce qui n’est pas non plus si lointain. Au final, les Iron Snakes se retrouvent dépeints comme une version inférieure des Fantômes de Gaunt du même auteur, ce qui ne devrait être absolument pas le cas.

Deuxièmement, la nouvelle se conclut de façon très abrupte après que le chien de Khorne ait été renvoyé à la niche. Alors que le rythme était assez lent (et prenant) jusque-là, Abnett décide de plier les choses en moins d’une page à partir de ce moment, et torche la battle royale de Hekat en une demi-page, mort de protagonistes incluse. Un dénouement un peu plus « aéré » aurait été bien plus appréciable à mes yeux, et je comprends mieux en refermant cette nouvelle pourquoi l’auteur s’est traîné une réputation de « bâcleur d’intrigue » au début de sa carrière. La critique est tout à fait légitime ici.

Finalement, la meilleure partie de ce ‘Red Rain’ restera, et de loin, la superbe illustration de Paul Dainton qui accompagnait la nouvelle lors de sa publication originale dans Inferno!. Peut encore et toujours mieux faire, donc.

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The Sound Which Wakes You – B. Chessell [WFB] – #21:

INTRIGUE :

Le jeune Tomas, fils cadet du forgeron du petit village de Montreuil, perdu dans les contreforts bretonniens des Montagnes Grises, en a gros. Comme tous les adolescents de son âge, il éprouve de grandes difficultés à respecter l’autorité, mais la colère de notre héros n’est pas seulement dirigée contre son père (Pierro), mais également et surtout contre le Marquis Gilbert de la Roserie, seigneur de Montreuil, despote impénitent et surtout ordonnateur de l’exécution du frère aîné de Tomas, après que ce dernier ait tué un des Sergents d’armes du village pour venger la mort de sa bien-aimée. Dégoûté par l’attitude placide et servile des Montreuillois devant les exactions de leur suzerain, Tomas occupe ses journées à planifier la Révolution avec un grand -R et des grands airs, qui permettra à son bled de jeter à bas la tyrannie gilbertienne.

Après une cuite au brandy avec son pote Luc, le blanc bec se décide à passer à l’action, ce qui consiste en son cas à aller foutre le feu à la haie entourant le château de Gilbert, et dont le domaine tire son nom. Cet acte plus délinquant que criminel fait grand bruit au sein du village, mais la réputation de hooligan de notre héros est de notoriété tellement publique que c’est chez lui que le Marquis fait une descente de police gendarmerie le soir même. Si Tomas, prévenu par son père du risque qu’il court, parvient à s’échapper en passant par le toit de la forge, le brave Pierro ne survit pas à sa tentative d’arrestation par la maréchaussée, et meurt l’épée à la main pour couvrir la fuite de son fiston. Désormais hors la loi, notre héros se rend dans la forêt toute proche où son père lui a indiqué d’aller, sans trop d’idée précise sur la suite qu’il souhaite donner à sa carrière de repris de justice…

Début spoiler…Sur place, il est rejoint par une douzaine d’hommes de Montreuil, qui lui expliquent qu’il est vraiment trop c*n vilain. Son feu de joie et les conséquences macabres de ce dernier sont venus faire obstacle au patient projet d’insurrection qu’ils planifiaient depuis des années, sous la houlette de Pierro. Le forgeron n’avait en effet pas pardonné non plus au Marquis la mort de son fils aîné, mais plutôt que de s’en plaindre bruyamment et futilement comme ce trublion de Tomas, avait patiemment réuni autour de lui des partisans et des épées, forgées incognito avec ses vieux stocks de minerai.

Désemparés par la disparition de leur chef, les conjurés consanguins décident de mettre Tomas aux affaires, le management héréditaire apparaissant sans doute comme d’une familiarité rassurante pour ces âmes simples. Fidèle à son approche cavalière et opportuniste, qui lui a si bien réussie jusqu’ici il faut le dire (…), Toto décide que cette nuit est le moment idéal pour déposer le Marquis, et sans plus de préparation, entraîne ses guérilleros en sabots jusqu’au château de leur Némésis.

Ayant réussi à mettre hors de combat une poignée de gardes grâce à l’effet de surprise, les Jacques en furie finissent par se retrouver confrontés à une forte troupe (environ 12) de Sergents d’armes. Laissant ses troupes se débrouiller face à la maréchaussée, Tomas s’introduit dans les quartiers privés de l’horrible Gilbert avec un compagnon pour pétitioner son suzerain à coup de colichemarde dans les ratiches. Ce dernier, réveillé par le tumulte de l’insurrection, est toutefois frais et dispos pour un duel au saut du lit, et malgré toute leur bonne volonté, Tomas et son sidekick ne sont pas de taille à lutter contre un escrimeur aguerri comme la Roserie. L’erreur de son excellence sera toutefois de vouloir jouer avec ses adversaires au lieu de les coucher fissa, et de faire un peu trop confiance à la solidité de la rapière fashion que lui avait forgé Pierro. Cassée nette après avoir rencontré un os un peu trop calcifié, la lame du joujou de Gigi fait défaut à son porteur au pire moment, et permet à Tomas de remporter le combat d’un horion de gueux bien dégueu’, mais indéniablement efficace.

La mort de leur maître et, surtout, la perspective de ne plus recevoir de solde, ayant conduit les Sergents survivants à déposer les armes, la vie peut reprendre son court à Montreuil. Sentant que sa place n’est plus parmi les siens, Tomas part tenter sa chance sur les routes de Bretonnie, tandis que le château de la Roserie tombe à l’abandon. Pour le reste, c’est bonnet blanc et flanc de poney, comme on dit du côté de Montsoir en Barreuil. Au moins, les roses ont repoussé…Fin spoiler

AVIS :

Ben Chessell se positionne comme le chaînon manquant entre la prose contemplative de Brian Craig1 et les productions classiques de la Black Library avec ‘The Sound Which Wakes You’ et son histoire de jacquerie à la petite semaine dans un village perdu de Bretonnie. Le style neutre et détaché utilisé par l’auteur pour décrire l’insurrection de Montreuil contre son cruel suzerain détonne fortement avec ce que l’on a l’habitude de lire en matière de GW-Fiction (hors Craig, encore une fois), mais l’expérience n’en est pas désagréable pour autant. Cette approche dépassionnée de son sujet permet même à Chessell de terminer la nouvelle avec un des excipits les plus sinistrement percutants (et donc en quelque sorte, grimdark) que la BL ait connu. ‘The Sound Which Wakes You’ est la chronique sociale de Bretonnie que personne n’attendait et qui n’a (très bizarrement…) pas fait école, mais qui mérite le détour pour son originalité et pour son exécution, dans la pure veine des travaux précédents de Ben Chessell, qui termine ici son parcours au sein de la GW-Fiction.

1 : Un autre auteur dont la Bretonnie est plus médiévale que fantastique.

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Mama’s Boys – J. Green [NDA] – #21 :

INTRIGUE :

NDA_Mama's BoysLa petite ville de Sulphur Creek, blottie dans un recoin du sous-monde comme une escarre dans un bourrelet, a vécu pendant des années sous la menace du gang des Kaynn, une famille de mutants scavvies aux mœurs pas très policées. Les déprédations homicidaires de la Degrada Familia, gouvernée d’une main de fer par la terrible Mama Kaynn, ont longtemps été gardées sous contrôle par un petit arrangement entre les colons et les desperados, les premiers fermant les yeux sur les disparitions occasionnelles de prospecteurs malchanceux en échange d’une relative tranquilité. Les déprédations excessives du petit dernier de la fratrie, Django, ont cependant attiré l’attention des Guilders, qui ont mis sa tête à prix. C’est vrai qu’un serial killer cannibale avec une vingtaine de victimes à son actif, ça fait un peu tache dans le décor. Les cinquante crédits offerts pour la remise de cet incorrigible garnement aux autorités ont attiré le chasseur de primes émérite Nathan Creed, qui parvient après un affrontement dans un entrepôt désert, à capturer le mauvais sujet et le jeter dans la prison locale.

Les choses sérieuses ne font que commencer pour notre héros, cependant. Comme Django Unchained le fait remarquer à son geôlier, les Kaynn, malgré tous leurs défauts, ont le sens de la famille, et le reste de la tribu va bientôt débarquer en ville pour libérer leur frérot et se venger de façon PEGI 18 sur Creed. Ces menaces glissent cependant sur le flegme du pistolero comme de la boue toxique sur les écailles d’un sumpkroc, qui indique à son prisonnier qu’il espère bien que le gang utilise son droit de visite. Le premier à se présenter, Tuntan, pense surprendre Creed en train de piquer un roupillon sous le porche de la prison, mais réalise vite son erreur lorsque notre héros lui troue le cuir avec ses fidèles pétoires après que le mutant ait dévoilé sa présence. Visiteur : 2 – Locaux : 0.

Piqués au vif malgré leurs écailles épaisses, les Kaynn débarquent en force de leur marigot pour se venger de l’estranger qui les tourmente. C’est l’occasion pour Green de nous présenter Buboe, Ezra, Loko et Creeping Spider Kaynn, chacun dotés de son arsenal personnel (globes empoisonnés, chien d’attaque) ou de compétences particulières (furtivité, mimétisme), qui ne font évidemment pas le poids face à l’awesomeness plaqué au scenarium enrichi de Creed, qui règle leur compte aux Dalton de fond de ruche sans trop se fouler, au grand dam de Django. Ce dernier reste toutefois confiant, car il lui reste encore un frère, et le plus coriace du lot : Gator. Kaynn le survivant et son bon pote Nuwt the Grinch ne font toutefois pas long feu non plus. Si le sumpkroc de compagnie de Gator parvient à mordiller un bras de Creed avant d’avaler une grenade, les deux assaillants ne parviennent qu’à détruire la prison avec leurs pitreries pyrotechniques, avant de se faire refroidir à leur tour. Leur ignoble sacrifice permet toutefois à Django de prendre la poudre d’escampette, ce qui n’arrange pas les affaires de notre héros…

Début spoiler…Mais Creed n’est pas devenu une légende du sous-monde en enfilant des perles, et il ramasse nonchalement un flingue qui trainait par terre avant d’exploser les rotules du fugitif pour lui apprendre à partir sans dire au revoir. Ce revers de fortune chagrine profondément Django, qui pensait sincèrement être protégé par l’Habeas Corpus necromundien, et commence à craindre pour sa vie, malgré la clause protectrice du contrat placé sur sa tête. Et il fait bien de douter, car Creed révèle au dernier des MohiKaynn que les Guilders ont en fait offert une récompense pour la mise hors d’état de nuire du gang des Kaynn dans son ensemble. Django a donc servi d’appât pour faire sortir sa parentèle de son marais toxique et permettre à notre héros d’accomplir sa mission sans ruiner ses bottes. Habile. Une fois que l’acariâtre Ma’ aura ramené ses verrues à Sulphur Creek, la réunion familiale organisée par Creed sera complète…Fin spoiler

AVIS :

Puisque les histoires de Nathan Creed sont des pastiches assumés des western spaghetti de la grande époque, il serait injuste de reprocher à Green son manque d’inventivité dans l’intrigue de ce ‘Mama’s Boys’, qui transpose le trope du héros solitaire opposé à un gang de voyous, et qui sort victorieux de cet affrontement inégal grâce à ses colts et sa vista1, à Necromunda. J’irai même plus loin en reconnaissant que notre homme fait ici un job tout à fait honnête, et même plaisant à lire une fois que l’on a compris à quel objet littéraire on avait affaire. Les confrontations entre le pistolero du sous-monde à la bande d’affreux mutants qui lui tient lieu d’adversaires sont certes dénuées de tout suspens, mais Green a pris soin de gratifier chaque Kaynn de sa propre fin, ce qui est un effort appréciable. On a même le droit à un petit twist final bien trouvé, ce qui n’est jamais garanti pour une soumission de GW-Fiction, et encore moins de la part de Jonathan Green : apprécions donc cette nouvelle sans prétention à sa juste valeur, que diable.

1 : Il y a probablement un film qui a servi d’inspiration à Green pour cette nouvelle, mais je manque de culture cinématographique pour l’identifier. Et puisque l’on parle du 7ème art, il ne vous aura sans doute pas échappé que l’illustration de cette nouvelle, signée John Gravato, dépeint Creed sous les traits de Clint Eastwood, alors qu’il est un sosie de Lee Van Cleef dans les illustrations de Des Henley.

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Son and Heir – I. Winterton [WFB] – #21 :

INTRIGUE :

WFB_Son & HeirAlors qu’il patrouillait gentiment sur le domaine de son patron, le Baron Gregory de Chambourt, le Chevalier du Graal Gilles Ettringer surprend un groupe d’Hommes Bêtes traînant sans masque ni attestation ni respect des gestes barrières à proximité d’une chapelle de la Dame. N’écoutant que son devoir, il se rue sur les mutants l’épée au clair et les met à l’amende (135 horions par tête de pipe), avant d’aller investiguer sur la raison qui poussait les Gors à squatter à côté d’un lieu saint. Il ne tarde pas à découvrir, monceaux de déchets et de cadavres torturés et/ou putréfiés à l’appui, que la chapelle a été profanée par des adorateurs du Chaos, dont un grand costaud en tenu d’Adam doté d’une énorme… capacité de régénération, et d’un sens de l’humour un peu particulier. Maîtrisé sans coup férir par Gilles, qui veut faire les choses dans les règles et offrir une expérience de torture judiciaire avant exécution interminable complète à son prisonnier, l’anarcho-nudiste est ramené jusqu’au château de Chambourt, en compagnie d’une complice également alpaguée sur les lieux du crime, et qui se révèle être la jeune sœur (Juliette) du Baron…

Ce dernier, comme le veut la tradition locale, était en train de se pinter la gueule avec quelques copains pendant que sa femme, la Dame Isobella, donnait naissance au premier enfant du couple. Dégrisé par la nouvelle de la souillure de ses terres et, très probablement, de sa sœur, considérée jusqu’ici comme un modèle de pureté, Greg pète une durite et donne carte blanche à ses tortionnaires pour attendrir un peu le suspect, qui n’a même pas consenti à donner son nom au Baron. Une heure, une tonsure expresse, une dizaine de dents et deux doigts en moins et une flagellation en bonne et due forme plus tard, le cultiste impénitent est ramené devant son juge, mais continue à prendre la situation à la légère. Il va mène jusqu’à annoncer qu’il est la Némésis du noble, et qu’il lui prendra absolument tout ce qui lui est cher dans les années à venir, à commencer par sa femme (il félicite tout de même l’heureux papa pour la naissance de son fils, parce que c’est pas un monstre absolu). Et en effet, lorsque Gregory se rue au chevet de sa femme après qu’un serviteur lui ait porté la nouvelle de la fin de l’accouchement, il est impuissant à stopper la gingivite foudroyante qui emporte Isobella dans ses bras. Le lendemain, c’est la fourbe Juliette qui se fait décapiter par un garde en situation de légitime défense, après qu’elle ait fait exploser la tête de deux de ses camarades d’un simple mot lorsqu’ils étaient venus lui apporter son petit déjeuner en cellule. Ca devait pas être le mot magique auquel ils s’attendaient, pour sûr. Pour ne rien arranger, le cultiste parvient, lui, à disparaître sans laisser de traces, même s’il laisse sa langue dans la poche du Baron (de plus en plus énervé, et on le comprend) au passage.

Avec tout ça, il n’est pas difficile de comprendre la paranoïa exacerbée de Gregory envers la sécurité de son fils (également appelé Gregory), qu’il maintient enfermé dans son château jusqu’à ses douze ans révolus. Finalement convaincu par l’adolescent de l’emmener à la chasse pour célébrer son anniversaire, Old Greg regrette rapidement son choix lorsque la colonne bretonienne tombe dans une embuscade d’Homme Bêtes. Bien que les assaillants soient repoussés au prix de lourdes pertes, Young Greg et Gilles Ettringer font partie des disparus, présumés capturés par la harde du Chaos. Et en effet, lorsque Gillou se réveille, il découvre avec stupeur que toute l’opération a été montée par une vieille connaissance : le streaker cultiste, (re)venu avec son grand couteau et son énorme b…onhommie. Un peu handicapé par son absence de langue, il arrive tout de même à faire comprendre au chevalier qu’il a des grands plans pour ses prisonniers, dont Greg Junior, grâce à ses compétences de mime. En douze ans, on a le temps de s’améliorer au Time’s Up, c’est vrai. Mais c’est sans compter sur la détermination de Gilles, qui parvient à se libérer de ses liens et à perturber le rituel sacrificiel des hordes chaotiques armé seulement d’un couteau à pain Monoprix ébréché, mais aussi et surtout sur l’arrivée providentielle de Papou Greg et de ses hommes, qui ont trouvé la trace des Hommes Bêtes et leur tombent dessus with extreme prejudice. Bilan des courses, le cultiste en chef se fait refaire le portrait par Gilles avant d’avoir pu exécuter le fils prodigue, et est ramené manu militari au château pour enfin répondre de ses crimes…

Début spoiler…Dûment torturé pendant les quelques jours qui ont été nécessaires à monter le bûcher sur lequel il est conduit en grande cérémonie, la Némésis de Chambourt ne fait plus le malin lorsqu’il est attaché au poteau. Il semble même demander grâce au Baron, mais sans langue ni dents et avec une mâchoire démantibulée, c’est dur de se faire comprendre. Gilles, qui a été salement amoché au cours de son héroïque intervention, assiste à l’exécution depuis le balcon de sa chambre, accompagné de Baby Greg. Intrigué par le changement radical de comportement du cultiste depuis sa seconde arrestation, le vieux chevalier finit par réaliser que quelque chose ne tourne pas rond… mais n’aura pas le temps de partager son horrible réalisation avec quiconque, car son compagnon lui balance la mère de tous les « OK Boomers » dans la face, ce qui lui brise littéralement son petit cœur fragile. Pendant qu’il agonise, « Greg » lui confirme ce qu’il vient de comprendre : le rituel interrompu quelques jours plus tôt avait pour but d’échanger les corps du cultiste et du fils du Baron, et c’est donc ce dernier qui a été brûlé en place publique. Le mot qu’il essayait de faire comprendre à son bourreau était « Père », mais ce dernier n’a évidemment pas capté le message. Ce petit secret emporté dans sa tombe par Gilles, Gregory the Kid a maintenant toute latitude pour poursuivre sa vendetta personnelle contre son bien aimé paternel…Fin spoiler

AVIS :

Ian Winterton n’a peut-être pas laissé derrière lui un corpus aussi impressionnant que d’autres contributeurs de la Black Library, mais ce dont son œuvre manque en quantité, elle le rattrape en qualité. C’est bien simple, à chaque fois que je lis ‘Son and Heir’, je termine cette nouvelle en concluant qu’il s’agit d’une des toutes meilleures jamais publiées pour Warhammer Fantasy Battle, et pour la GW-Fiction en général. En l’espace de 20 pages, Winterton déroule une histoire captivante, surprenante, et d’une noirceur exemplaire, soit tout ce que l’on peut attendre d’une soumission de la BL. Ce résultat spectaculaire est en grande partie atteinte grâce à la maîtrise impressionnante que notre homme a du rythme de sa narration (ce qui lui permet d’amener des rebondissements de manière brusque, ce qui n’est pas donné à tout le monde en littérature), et son usage consommé des allusions, qui terminent de façon percutante bon nombre des courtes séquences qui découpent le récit. Cela fait totalement oublier les petites approximations fluffiques de l’auteur (sorcier masculin, « ordre » des chevaliers du Graal…), pas parfaitement au fait des us et coutume de la maison. C’est pas grave hein. Pas grave du tout. J’incite vivement tout ceux qu’ils le peuvent et le souhaitent à lire ‘Son and Heir’, car voir Winterton à l’œuvre est beaucoup plus gratifiant que de s’enquiller ma morne prose. Clairement, l’un des joyaux cachés et oubliés de la GW-Fiction, que j’estime être de mon devoir que de faire sortir de son anonymat1.

1 : Même l’illustration d’Adrian Smith dans Inferno ! pète la classe. Une réussite absolue.

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Portrait of my Undying Lady – G. Rennie [WFB] – #21 :

INTRIGUE :

WFB_Portrait of my Undying LadyLe génial Giovanni Gottio, portraitiste reconnu mais un peu trop attaché à la représentation de la vérité crue et sans fard chez ses modèles pour son propre bien, est approché dans une taverne de Trantio par un généreux mécène, cherchant à le convaincre d’accepter une commission d’un genre un peu particulier. Malgré les trois pichets de vinasse royalement avancés par son interlocuteur, l’incorrigible Gottio, blessé dans son orgueil par l’accueil glacial que sa représentation de la femme de Lorenzo Lupo a reçu de la part de son commanditaire, refuse avec emphase d’accepter cette commande et tire sa révérence avec toute l’élégance permise par une cuite au gros rouge. Il est cependant difficile de refuser la proposition d’un Vampire quand on fait un mètre cinquante, avec un petit bedon et 3 grammes d’alcool dans le sang, comme l’immense Gottio ne tarde pas à le découvrir à ses dépends. Ramené manu militari par son nouveau meilleur ami (Mariato) jusqu’à son véhicule de fonction, le peintre sombre dans l’inconscience avant que le fiacre n’arrive à destination.

Se réveillant à l’intérieur d’une villa de campagne des environs de Trantio passablement délabrée, l’illustre Gottio est conduit jusqu’à celle qui va devenir sa muse, de gré ou de force : Dame Khemalla de Lahmia. Comme son titre, sa pâleur morbide et les nombreux portraits d’elle peints par des artistes ayant vécus il y a des siècles l’indiquent, Khemalla est une Vampire, dont l’un des vices les plus innocents est de se faire peindre par les maîtres de chaque époque, afin de pallier à son incapacité d’utiliser un miroir. Cela l’aide à ne pas sombrer dans la folie sanguinaire qui guette les buveurs de sang les plus vénérables, comme elle révèle sans ambages à son hôte. N’ayant pas d’autres choix que de s’exécuter sous peine de l’être, l’incomparable Gottio se met au travail pour accoucher de sa meilleure ou de sa dernière œuvre, comme il le remarque sombrement.

Au cours des nuits suivantes, notre héros va peu à peu découvrir la réalité, pas forcément toujours glamour, d’une cour vampirique. En plus de devoir squatter une demeure abandonnée, et donc franchement insalubre sur les bords, il doit s’habituer au rythme décalé auquel vivent ses geôliers, les bruits de succion persistants qui résonnent près de sa cellule, les ballets de chauves souris géantes jusqu’à pas d’heure, ou encore les interruptions brutales de sessions pour cause de vendettas contre une autre lignée. Pire que tout, l’époustouflant Gottio se fait carrément menacer par cette fouine de Mariato, très jaloux de l’intérêt que sa maîtresse porte au scribouillard. Il aurait dû apprendre à dessiner au lieu de menacer gratuitement son prochain ceci dit, car peu de temps après que l’extraordinaire(ment effrayé) Gottio ait balancé son camarade à Khemalla, Mariato devient boursier (c’est-à-dire que l’insondable Gottio trouve ses cendres à l’intérieur d’une bourse glissée sous son lit). Le harcèlement professionnel, c’est un vrai sujet chez les Lahmianes apparemment.

Enfin, la toile est complétée et l’exténué Gottio peut la présenter à sa commanditaire, qui s’apprête à partir pour des cieux plus cléments. Satisfaite du travail de son invisonnier, elle lui remet une coquette somme en dédommagement de ses services, ainsi qu’un élixir de longue vie dans la dernière coupe qu’ils partagent avant le départ de l’une et le coma de l’autre. De retour dans son gourbi minable par l’opération du sang esprit, le miraculé Gottio se découvre une nouvelle jeunesse grâce au tonique à l’hémoglobine de Dame Khemalla, et entreprend de mettre un peu d’ordre dans sa vie pour permettre à son talent d’être reconnu comme il se doit. C’est ce qui s’appelle être en veine.

AVIS :

Gordon Rennie s’autorise une aventure extra Zavantale avec ‘Portrait of My Undying Lady’, mettant en scène la Némésis du sage détective d’Altdorf, Dame Khemalla, dans un huis clos où elle n’apparaît pas comme la maléfique éminence grise de service (pour changer). Cette petite nouvelle, si elle ne s’avère pas spécialement rythmée ou palpitante, et n’apporte rien à l’arc narratif de Zavant en tant que tel, se laisse toutefois lire sans problème, et a le bon goût de comporter quelques détails fluffiques qui pourront intéresser les plus curieux des lecteurs. Un amuse-gueule littéraire tout à fait convenable, en quelque sorte.

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Suffer not the Unclean to Live – G. Thorpe [40K] – #22 :

INTRIGUE :

40K_Suffer not the Unclean to LiveC’est sur la planète de Karis Cephalon que les ambitions carriéristes du prêcheur Yakov ont été brutalement stoppées. Il faut dire que l’amour du bling-bling (Yakov est un Armormant) de notre héros lui ont attiré la morgue et la défiance du Cardinal Kodaczka, d’obédience Lucide, et donc bien moins porté sur la pompe et le clinquant que son subalterne. Ceci explique probablement que Yakov ait reçu la charge d’une paroisse située en territoire mutant, classe laborieuse et opprimée de Karis Cephalon, qui doit sûrement se spécialiser dans l’élevage de crevettes, la fabrication de briques et le tissage de tapis. Dans cette épreuve, tant pour son amour propre que pour son odorat, Yakov peut toutefois compter sur sa foi sincère en l’Empereur, et sur la dévotion véritable de ses ouailles, qui acceptent leur condition servile avec une constance admirable. Ou plutôt, acceptaient.

Car, comme le prêcheur ne tarde pas à le découvrir lors de son retour dans le bidonville qui lui sert de QG, une fois son cours de yoga du mercredi soir achevé, une épidémie s’est déclarée parmi les mutants, et ces derniers montrent des signes aisément compréhensibles d’énervement devant le manque à peu près total de réaction des autorités compétentes. Sachant qu’aller gueuler « On en a gros » devant la préfecture n’aura que des effets limités, et probablement déplaisants, Yakov convainc ses fidèles de prendre leur mal en patience, mais accepte tout de même, à la demande insistante de Lathesia, une jeune hors-la-loi altruiste dont la mutation consiste à être gothique, de faire doléance d’aspirine et de gel hydroalcoolique auprès de Kodaczka… qui refuse bien évidemment de consacrer le moindre kopeck à ce problème de santé publique. Et puis quoi encore. Laissant le prélat sur une maigre promesse de prière en faveur des nécessiteux, Yakov retourne dans sa banlieue, calme une nouvelle émeute naissante, et va se coucher. Il est toutefois réveillé en plein milieu de la nuit par Lathesia et son complice Byzanthus, qui ont remis une pièce dans la machine et réussi à générer une foule en colère digne de ce nom, après que le fossoyeur de la communauté ait été retrouvé égorgé. Malgré ses meilleurs efforts et son implication physique sans faille, Yakov ne parvient pas à dissiper la manif sauvage avant qu’elle se fasse disperser à coups de chevrotine laser par les forces de l’ordre. Et pas la peine d’attendre une contre-enquête de l’IGS.

La situation commence alors à échapper à notre héros, qui tente le lendemain de l’émeute matée dans le sang de convaincre Lathesia et sa bande d’arrêter leurs bêtises avant qu’il ne soit trop tard, mais ne parvient qu’à les intéresser à enquêter sur le meurtre du fossoyeur. Une visite au cimetière municipal plus tard, la bande fait l’acquisition d’un cercueil en métal, dont la particularité est d’être couvert de chaînes, comme pour empêcher son occupant d’en sortir. Pas le temps toutefois de percer ce mystère, car la planque des mutants est attaquée par les Enforcers. Byzanthus et les autres figurants vendent alors chèrement leur vie pour permettre à leur meneuse et au prêcheur de s’enfuir. Vous trouvez que ça va vite ? Accrochez-vous car Thorpe lâche les freins.

Toujours déterminés à tirer les choses au clair, Yakov et Lathesia décident de retourner dans le squat de cette dernière le jour suivant, pour enfin déterminer ce qui se cache dans le cercueil verrouillé qu’ils ont abandonné sur place. Ils font alors la connaissance d’un type louche qui se présente comme un free lance inquisitorial (il bosse pour l’Inquisition… sans en faire partie), lui aussi intéressé par ce mystérieux sarcophage. Et comme jamais deux sans trois est resté un proverbe très populaire au 41ème millénaire, les deux complices acceptent d’intégrer le nouveau-venu dans leur raid, sans lui demander plus de précisions sur ses motivations. À l’intérieur, la petite bande a la surprise de tomber en plein milieu d’un rituel manifestement chaotique, auquel participe rien de moins que le Gouverneur de Karis Cephalon. Parce qu’on peut être l’individu le plus puissant d’une planète et ne pas trouver un livreur pour amener un colis un peu encombrant jusqu’à son palais depuis une ZUS toute proche. Le problème des no go zones s’est manifestement perpétué dans le lointain futur. Bref, la fainéantise des uns (le Gouverneur et Thorpe) faisant le bonheur des autres (Yakov, Lathesia et leur invité mystère), la petite cérémonie païenne est interrompue par le mitraillage en règle des libertins, laissant le cercueil (et le Gouverneur) en possession du trio. Il reste alors une page et demie à Thorpe pour conclure, ce qui n’est pas suffisant pour trouver et utiliser une pince monseigneur, ni faire des présentations dignes de ce nom, mais assez pour que la tierce partie de confiance de notre histoire explique à ses compagnons que Keris Cephalon est sur le point de vivre cinq années très difficiles, que le Gouverneur a organisé la révolte de mutants pour pouvoir les sacrifier aux Dieux du Chaos, et qu’il pourrait tirer quelques ficelles pour permettre à Yakov d’être muté sur une planète plus tranquille. Noblement, notre héros décline cette offre, prétextant que ses chers mutants auront besoin de son aide dans l’épreuve à venir, mais quelque chose me dit qu’il n’en a pas fini avec l’Inquisition1

1 : Cette illustration vient du livre de règles Inquisitor et représente Yakov (le grand type) et l’investigateur Malovich (le hippie renfrogné), surplombant quelques Gilets Jaunes très colère.

AVIS :

Ça partait bien pour Thorpe avec cette plongée atmosphérique dans les bas fonds de Keris Cephalon, ‘Suffer…’ bénéficiant, une fois n’est pas coutume, d’un personnage principal et d’un contexte étonnement complexes et fouillés (aux vues des standards de l’auteur). Malheureusement, ce dernier a vu trop grand, ou plutôt trop long (ou pas assez, ça dépend du point de vue) avec son intrigue, qui se retrouve bâclée, estropiée et finalement catapultée à un prochain et hypothétique épisode au lieu de s’achever avec un peu de tenue et de dignité. La raison, comme dit ci-dessus, tient sans doute à la volonté de GW et de la BL de soutenir le lancement d’Inquisitor avec un peu de background romancé, comme d’autres auteurs (McNeill et ‘Payback’, par exemple) le firent également à la même époque. Mais si le motif est tout à fait compréhensible, l’exécution laisse franchement à désirer, et transforme ‘Suffer…’ en objet littéraire finalement aussi contrefait et difforme que les mutants dont le héros s’occupe. Vous parlez d’une mise en abyme ! J’espère franchement que Thorpe a fini son cycle Yakovien ailleurs, ne serait-ce que dans un rapport de bataille ou une nouvelle du White Dwarf, mais je n’en suis pas absolument convaincu…

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A Choice of Hatreds – C. L. Werner [WFB] – #22 :

INTRIGUE :

Alors que le petit village Petitvillage (Kleinsdorf en Reikspiel) se prépare à fêter comme il se doit le Wilhemstag en dansant, buvant, flirtant, et tirant des enclumes d’artifice1, deux cavaliers entrent dans la ville sans se soucier de la joyeuse ambiance qui y règne. Il s’agit du Répurgateur et fashion victim Mathias Thulmann et de son associé et tortionnaire de fonction, Streng2, en route pour aller chasser la sorcière dans le Stirland. C’est la saison. Pendant que son homme de main est heureux de passer la nuit à s’envoyer des pintes en racontant ses meilleures anecdotes de brodequins, dans l’espoir de matcher avec une locale, Thulmann préfère aller sagement se pieuter pour pouvoir reprendre la route dès potron minet le lendemain. Avisant une auberge convenable, il va ruiner le groove de son propriétaire en s’installant dans la meilleure chambre (la sienne), pour un quart du prix habituel, et en se faisant servir un copieux dîner pour se remettre de sa chevauchée. C’est Volkmar qui paie, après tout. L’arrivée du Chasseur de Sorcières n’est cependant pas passée inaperçue, et deux individus aux motivations diverses vont agir en conséquence…

Le premier d’entre eux est un noble du nom de Reinhardt von Lichtberg, promis à un brillant avenir dans la Reiksguard jusqu’à peu, mais désormais déterminé à faire la peau à Thulmann depuis que ce dernier a condamné sa fiancée Mina au bûcher (il l’a aussi un peu torturée avant, pour ne rien arranger). Le second est un marchand local, Gerhardt Knauf, qui est devenu cultiste de Tzeentch et sorcier amateur pour arranger ses affaires, et qui est convaincu que si le Répurgateur est arrivé en ville, c’est pour lui régler son compte. Il paie donc grassement une bande de mercenaires pour se débarrasser de l’importun, et va se barricader chez lui en attendant que ses gros bras viennent lui annoncer la bonne nouvelle. Comme on peut s’y attendre, Reinhardt et les reîtres de Knauf arrivent dans la chambre de Thulmann à peu près au même moment, ce qui permet à notre héros de jouer de la surprise commune pour tuer ou blesser les brutes locales, et menotter l’aristocrate revanchard à son lit, non pas pour une mise en scène improvisée de Fifty Shades (grim)Darker, mais pour empêcher le nobliau de lui chercher des noises pendant qu’il va s’expliquer franchement avec l’Herr Knauf, honteusement balancé par l’un de ses nervis. Car, contrairement à ce que son image de zélote fanatique le laisse à penser, Thulmann n’est pas insensible à la pitié ou à la miséricorde, et ne se contente pas d’exécuter froidement Reinhardt malgré son assaut caractérisé sur personne détentrice de l’autorité. Il prend même le temps de donner sa version de l’affaire Mina à son ancien amant, et de lui révéler que la belle a en fait été corrompue par une pilule du lendemain à base de malepierre que son médecin de famille lui avait remis pour arrêter une grossesse non désirée et ainsi permettre à Reinhardt de poursuivre sa carrière militaire au lieu de devoir se marier tôt pour élever son gosse. Rien ne vaut les préservatifs en peau de squig, c’est moi qui vous le dit.

Un peu plus loin, Knauf se ronge les sangs en attendant le retour de ses tueurs, mais comprend lorsque sa porte est ouverte d’un coup de pistolet qu’il va lui falloir trouver un plan B. Ou plutôt, recourir au système D, comme démoniaque. Notre homme grimpe donc dans son grenier pour invoquer une Horreur Rose, dans l’espoir qu’elle le défende contre le Répurgateur. Seulement, dans sa hâte, il oublie de se placer dans un pentacle répulsif, et devient donc la première victime du démon, qui le pèle puis l’avale comme une banane. Ca nous fait déjà deux victimes de protections défectueuses dans cette histoire : plus que jamais, sortez couverts les jeunes. C’est sur ces entrefaites que le beau, le grand, le brave Mathias Thulmann arrive à l’étage, pistolet et rapière à la lame d’argent bénie par le Grand Théogoniste en personne à la main… et se fait misérablement bolosser par l’Horreur qui lui fait face. Mais vraiment bien. Du niveau du « poussé dans les escaliers » + « piétiné comme un paillasson ». Heureusement que Knauf n’était pas un cultiste de Nurgle ou de Slaanesh (et ne parlons pas de Khorne, mais c’est rare pour un marchand) hein. Et le plus drôle dans tout ça, c’est quand notre héros parvient enfin sur un vieux malentendu à empaler le démon sur âme consacrée… il prend encore plus cher des mains des Horreurs Bleues qui arrivent ensuite. On repassera plus tard pour tenter de vaincre un Vampire, hein.

Il faut l’arrivée providentielle de Reinhardt, qui a pu se libérer en piquant la hachette que Thulmann avait laissé traîner sur un cadavre de mercenaire dans sa chambre, pour mettre fin aux tourments de Répurgateur. En bien mauvais état, il fait remarquer au jeune premier qu’un duel à l’épée ne serait guère équitable, et lorsque Reinhardt lui propose de régler ça au pistolet à la place, il accepte et prête à son adversaire une de ses pétoires… celle qui est déchargée, évidemment. De son côté, il n’a pas de scrupules pour loger une balle dans l’épaule du Capitaine Fracassé, histoire de lui apprendre à faire confiance à des inconnus et surtout le mettre hors d’état de nuire assez longtemps pour passer une nuit sereine. La nouvelle se termine avec un Reinhardt qui jure à Thulmann de revenir pour se venger, mais ceci sera une autre histoire…

1 : Une spécialité bucolique mais bougrement dangereuse, en plus d’être assez peu spectaculaire lorsqu’elle a lieu de nuit.
2 : Qui a fait sien l’adage bien connu « le gras c’est la vue ».

AVIS :

Première nouvelle consacrée par C. L. Werner (qui fait ainsi ses débuts au sein de la BL) à son personnage de Mathias Thulmann, anti-héros taciturne, antipathique mais vertueux (un peu comme le chasseur de primes Brunner, un autre favori de Werner), ‘A Choice of Hatreds’ démontre déjà la science de l’homme au chapeau en termes de mise en scène de courts formats très rythmés. En l’espace de 25 pages, on a ainsi droit à une intrigue assez complexe, ponctuée par des rebondissements, confrontations et explications savamment séquencés par un Werner maître de son art et de ses effets de narration. Si Thulmann lui-même ne se révèle pas être particulièrement mémorable ou attachant, on prend plaisir à lire le récit de sa nuit agitée, grâce à laquelle C. L. Werner réussit son entrée dans le monde de la GW-Fiction.

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Pestilence – D. Abnett [40K] – #22 :

INTRIGUE :

40K_PestilenceLorsque les forces impériales lancées à la conquête de Genovingia commencent à tomber comme des mouches sous les coups et les miasmes de la Peste d’Uhlren, les autorités compétentes agissent sans tarder. Et, une fois n’est pas coutume, leur réaction n’est ni brutale, ni sanglante, ni stupide, ou en tout cas pas tout de suite. Car c’est bien à Lemual Sark et à ses collègues érudits que le Maître de Guerre Rhyngold s’adresse, chargeant notre héros et ses homologues de fouiller les archives à la recherche de toute information qui pourrait s’avérer utile à l’endiguement du fléau.

Sark est, pour résumer grossièrement, un archiviste épidémiologique, double spécialisation très rare proposée uniquement par le centre universitaire Du Guesclin de Béziers. Il passe donc ses journées à enquêter sur les épidémies du passé, dans le but d’aider ses contemporains à se prémunir contre les joyeusetés concoctées à tour de chaudron par papy Nurgle. Après une harassante recherche Doctossimo durant laquelle il a appris à vingt-huit reprises qu’il avait contracté un cancer généralisé des cuticules, Sark finit par trouver une piste digne d’intérêt, qui l’emmène sur Symbal Iota, planète marine où tout le monde se déplace en catamaran et où Kevin Costner a été élevé au statut de saint impérial. C’est en effet là le dernier domicile connu de Fege Ebhoe, Général émérite du 23ème Régiment de Lanciers de Lammark, et survivant de la vague de varicelle carabinée qui a décimé ses hommes sur Pirody, il y a de cela bien des années. Avec un peu de chance, Sark pourra tirer au vétéran quelques confessions utiles pour les victimes de la Peste d’Uhlren, pour lesquelles ni l’homéopathie, ni l’hydroxychloroquine, ni l’ingestion d’eau de javel n’ont été efficaces.

Arrivé sur place avec son Serviteur Kalibane et un chapeau tellement ridicule qu’il manque de le faire interner d’office, Sark expose son cas au très relax frère Baptrice, qui s’occupe de l’administration de l’Hospice Saint Bastian, spécialisé dans l’accueil et le traitement de vétérans de la Garde Impériale complètement traumatisés par leur expérience du front. C’est en effet dans cette maison de repos d’un genre un peu spécial que Ebhoe a passé les trente-quatre dernières années, plongé dans le noir le plus total (une séquelle neurologique de son expérience sur Pirody). Après s’être un peu fait désirer, le patient finit par accepter de répondre aux questions de son visiteur, bien que cela semble manifestement beaucoup l’éprouver. Et pour cause, Pirody n’a pas vraiment été une partie de plaisir.

Envoyé au front contre des hordes de cultistes du Chaos, en plein été polaire et sans masques de sommeil (ce qui n’a pas dû aider), le 23ème Lanciers de Lammark s’est vite retrouvé débordé par la situation et assiégé sans espoir de secours par l’ennemi. Fort heureusement, une Compagnie de Space Marines des Doom Eagles (toujours dans les bons coups) était également présente pour leur prêter main forte, et empêcher la cité de tomber aux mains purulentes et malpropres des séides de Nurgle. Les Astartes ne purent en revanche pas faire grand-chose pour empêcher un mal aussi mortel que contagieux, sobrement baptisé le Tourment, de s’abattre sur la garnison et les civils, faisant des centaines puis des milliers de morts du côté loyaliste. Malgré tous les efforts de l’Apothicaire Subjunctus Valis, la situation continua de dégénérer jusqu’à… la coupure pub, déclenchée par la prononciation par Ebhoe d’un mot tellement sââââle que son voisin de cellule passe en mode berzerk et fait mine de sauter sur Sark, sauvé par l’intervention altruiste mais inefficace de son Serviteur, et surtout par les matraques énergétiques du personnel soignant de Saint Bastian. L’incident clos, Sark apprend qu’il lui sera demandé de quitter les lieux au matin pour éviter de perturber plus encore la vie jusqu’ici tranquille de l’hospice. Cela ne fait évidemment pas les affaires de notre détective, qui profite de la nuit pour rendre la visite de la dernière chance à Ebhoe…

Début spoiler…Déterminé à obtenir le fin mot de l’histoire, quitte à menacer son interlocuteur avec une lampe torche1, Lark apprend que la situation désespérée de Pirody a été sauvée au dernier moment par la découverte par Ebhoe que le vertueux et altruiste Valis était lui aussi totalement Tourmenté, et avait œuvré en sous-main pour propager le virus parmi les défenseurs (Space Marines compris) à l’aide de « vaccins » pas vraiment homologués par l’OGS. Trahi par un bubon disgracieux juste en dessous de son oreille, Valis fut promptement incinéré par le lance-flamme d’Ebhoe, qui paya chèrement son acte héroïque, l’incendie du laboratoire de l’Apothicaire corrompu lui ravageant le corps. Les hurlements du vétéran ont également comme effets secondaires pas très Charlie de plonger à nouveau l’asile dans la folie, menant à quelques morts parmi le personnel et les pensionnaires de Saint Bastian. Tout est cependant bien qui finit (presque) bien pour Sark, qui peut rentrer au bercail avec sa précieuse info, dont le Haut Commandement de la campagne de Genovingia se servira pour faire exécuter quelques dizaines de médecins, juste au cas où. Ebhoe, de son côté, est parti rejoindre l’Empereur, sa dernière crise d’hystérie ayant fait lâcher son cœur fragile. On pourra dire de lui qu’il a donné son corps à la science, au moins.Fin spoiler  

1 : « Nous affons les moyens de fous faire parler, Herr Ebhoe… »

AVIS :

Dan Abnett a plutôt réussi son coup avec ‘Pestilence’, courte nouvelle d’ambiance et de suspens à haute teneur en grimdark. On peut rapprocher ce one-shot des travaux inquisitoriaux de notre homme, ainsi que de la mini-série des aventures animalières de Valentin Drusher, où Abnett se fait un malin plaisir de plonger dans la vie quotidienne de l’Imperium, loin derrière les lignes de front et les combats sanguinaires illustrés dans le jeu de figurines, mais qui comporte son lot de caractéristiques allant du dérangeant à l’insoutenable. L’enquête de notre héros à la recherche d’une cure pour un mal surnaturel dans un asile pour aliénés est naturellement riche en glauquerie, ce qui permet à Abnett de jouer avec les préjugés de son lecteur : finalement, les bons samaritains de l’hospice ne sont pas une secte de cultistes chaotiques sous couverture, mais bien d’authentiques philanthropes cherchant véritablement à soulager la détresse de leurs patients (de manière très 40Kesque, certes). Il s’agit à mes yeux de la réussite la plus franche de ‘Pestilence’, sa révélation sur l’identité du patient 0 du Tourment n’étant pas vraiment renversante (dur de maintenir le suspens quand on a qu’un seul suspect aussi). Bref, une petite histoire assez sympathique mais pas mémorable, comme Dan Abnett en a écrit beaucoup au début de sa carrière au sein de la BL.

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Unforgiven – G. McNeill [40K] – #22 :

INTRIGUE :

40K_UnforgivenMission classique pour le Sergent Dark Angels Kaelen et son escouade de marsouins vert bouteille. Largués sur leur cible, une cathédrale quelconque1, par Thunderhawk furtif, les angles eud’la muerta se posent sans encombre sur une place grouillante d’ennemis, qui ne tardent pas à goûter à la colère des meilleurs de l’Empereur. Chargés d’accompagner le Chapelain Interrogateur2 Bareus jusqu’au mystérieux prophète ayant fait basculer la jusque là paisible Valedor dans l’hérésie la plus totale, Kaelen et ses hommes sont surpris d’entendre l’officier leur annoncer, après avoir regardé sous les jupes des filles cultistes comme un gros père vert (ce qu’il est), que le QG ennemi doit être capturé, et non pas exécuté, comme c’était jusqu’ici le plan. En privé, ce grand meneur d’homme de Bareus avoue sans détour à son sous-fifre qu’il s’attend à ce que tous les bidasses de l’escouade rejoignent la droite de l’Empereur au cours des prochaines minutes, ce qui énerve un peu notre Sergent, qui aurait bien aimé qu’on lui annonce sa participation à une mission suicide en temps et en heure. Histoire d’avoir pu demander à un camarade de dortoir de supprimer son historique de navigation avant de partir, sans doute. Quoi qu’il en soit, la prédiction funeste du Chapelain ne met pas longtemps avant de commencer à se réaliser, le pauvre frère Lucius payant de sa vie son ultime double screwgie de grenade à travers les vitraux de la cathédrale, mais permettant tout de même au reste de l’escouade de pénétrer à l’intérieur du bâtiment sans trop de casse3.

À l’intérieur, la résistance va croissante au fur et à mesure que nos braves héros se rapprochent de la dernière position connue de leur cible. Cette dernière profite que quelques apartés dans l’action frénétique de cette nouvelle endiablée pour commencer à se faire connaître, et, ô surprise, c’est très probablement peut-être certainement sans doute un Déchu. Mais on n’est pas sûr. En tout cas, si Bareus a des grands projets pour sa verdâtre Némésis, cette dernière n’est pas en reste, puisqu’elle instruit spécifiquement son second, Casta, de lui laisser s’occuper du Chapelain. Le reste des Space Marines peut cependant être massacré sans arrière-pensée, quelque chose que le mystérieux Ange des Lames, que le prophète charge son side kick de réveiller, devrait être capable de faire sans problème.

Un peu plus loin, Kaelan commence à se douter qu’il y a Luther sous Roc et qu’on ne lui a pas tout dit, lorsqu’il constate que la décoration d’intérieur de l’église a été refaite à base d’anges en feu, de planète qui explosent et de têtes de lion empaillées. En plus de cela, les vagues de cultistes qui s’abattent sur lui et ses frères, de moins en moins nombreux au fur et à mesure que McNeill les zigouille, sont habillés comme des cosplayers d’Impardonnés, ce qui est impardonnable. Malgré cela, Bareus ne consent pas à lui donner plus d’infos sur la nature véritable de sa mission, bien que notre balourd de Chapelain soit très fort pour mettre les pieds dans le plat. Devant tant de cachotteries, le Sergent Garcia se rabat sur les fondamentaux pour tenter d’atteindre un objectif qui paraît de plus en plus inatteignable, au fur et à mesure que les Astartes mordent la poussière. Heureusement pour lui, sa foi en l’Empereur et sa haine de l’onanisme l’aident à venir à bout de ses adversaires, jusqu’à ce que les survivants parviennent dans la salle du mini-boss de fin. C’est en effet là qu’il se trouvent confrontés à rien de moins que le premier Metabrutus de l’histoire, soit un Dreadnought muté monté sur crampons et exhibant fièrement son grillz et ses tablettes de chocolat aux alentours. Le pire dans tout ça, c’est que le fameux Ange des Lames est également un ex-Dark Angels, comme le symbole de son caisson le montre bien. Pas le temps de tergiverser pour nos héros cependant, il faut décarcasser le Père Ducroc.

Dans la bagarre qui s’ensuit, la plupart des survivants loyalistes se font écharper par Lââm, ne laissant en vie que Bas Rhésus, Koala et le pauvre frère Persus, qui commence à se douter qu’il ne finira pas la nouvelle en un seul morceau. À raison. Car c’est au tour du grand méchant de faire son entrée, qui se révèle être…

Début spoiler…Un Déchu. Et si. Incroyable. Je suis siégé de ma tombe. Le sinistre individu en question s’appelle Cephesus, et il a trouvé un hobby passionnant pour s’occuper depuis 10.000 ans : collectionner les Lames de la Raison des Chapelains Dark Angels qui cherchent à le capturer. La quincaillerie de Bareus lui permettra d’arriver à douze goodies, ce qui est score respectable sachant que même Molochia n’avait que dix perles sur son Rosarius. Le combat s’engage, et le Déchu parvient sans mal à trucider Persus, qui meurt en gueulant « Je le savaiiiiiiiis !!! », et à égorger Bareus avec son trousseau de clés énergétiques. La suffisance dont il fait preuve lui sera cependant fatale, car elle permettra à Kaelan, blessé mais pas vaincu, de lui arracher son Rosarius et sa précieuse sauvegarde invulnérable, avant de lui décocher un direct au foie et à la foi ravageur avec sa moufle. Traversé par un mal-être profond et le bras armé de son adversaire, Cephesus tombe raide mort au sol, et avec lui la rébellion de Valedor. Kaelan reçoit ensuite les clés du camion de la part du Chapelain mourant, qui lui vomit le mot « Deathwing » au visage dans un dernier souffle. C’est une nouvelle carrière qui s’ouvre pour notre Sergent, comme il l’annonce fièrement au Terminator de la Deathwing qui arrive peinard devant la cathédrale quelques minutes plus tard. À croire qu’on n’avait pas besoin de lui plus tôt. La relève est assurée.Fin spoiler

1 : Car nous sommes sur un monde cathédrale. Donc pour l’originalité, on repassera.
2 : Ca m’est venu comme ça mais… C’est tout de même ballot que les Dark Angels aient donné un titre spécial aux types chargés d’une mission top secrète que personne ne doit connaître. Parce que moi, si on me dit que Gérard Duchmol n’est pas comptable, mais « Comptable-Investigateur », je vais fatalement me demander ce qu’il cherche à investiguer. Et probablement me prendre un bolt dans la tête. Ou un contrôle fiscal.
3 : Le frère Marius se fracturant toutefois la hanche en glissant sur une peau de banane traîtreusement jetée par les hérétiques. Pas de quoi l’arrêter ceci dit.  

AVIS :

McNeill, qui ne devait pas être vieux à l’époque, signe une nouvelle Dark Angels des plus classiques avec ce ‘Unforgiven’, mettant évidemment en scène la traque d’un ennemi mystérieux se révélant au final être un Déchu. À croire que les lionceaux ne font que ça de leurs journées. À défaut de surprise et de suspens, il y a au moins de l’action dans cette histoire, mais pas grand-chose en termes de fluff, ce qui est dommage pour un Chapitre au passé aussi riche. On passera généreusement sur les quelques approximations et incongruités du récit, comme la disparition mystérieuse des jet-packs de l’escouade une fois rendue sur place (ça aurait pourtant pratique pour avancer jusqu’à la cible), ou le Chapelain le moins tenu au secret professionnel de l’univers, à mettre sur le compte d’une volonté manifeste de divertir le fanboy plutôt que de satisfaire le lecteur. Si vous voulez mon avis, ‘The Falls of Marakross’ de Steve Parker est en tous points supérieurs à cet ‘Unforgiven’, qui à défaut d’être pardonné, peut être oublié.

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Loyalty’s Reward – S. Jowett [40K] – #23 :

INTRIGUE :

40K_Loyalty's RewardNotre histoire commence par une scène tendue à l’arrière de l’honorable établissement du Cochon PFendu, taverne située à proximité du spatioport de Praxis, cité prospère d’Equus III. Mikhail Kravi, jeune loup à l’ambition féroce et bras droit d’un des Protektors affiliés à la puissante Maison Gaudi, est venu avec quelques gros bras de ses amis « persuader » le marchand Leon Kleist, un peu trop porté sur la dive bouteille pour son propre bien, d’offrir un superbe présent au nouveau Graf Gaudi lors de son intronisation prochaine. Cela serait un moyen judicieux de faire oublier à ce dernier les mots un peu lestes qu’un Leon rond comme une queue de pelle a eu à son égard il y a quelques jours, et dans une cité mise en coupe réglée par de puissants gangs depuis des siècles, s’attirer l’inimitié d’un Graf n’est pas une perspective attrayante. Convaincu par l’argumentaire de Mikhail autant que par son solide crochet du gauche, Leon le Persiffleur se fait un honneur de remettre à Viktor Gaudi une babiole hors de prix dès le surlendemain, lors de la cérémonie durant laquelle le jeune héritier prend officiellement le titre et la place de feu son grand-père Bruno.

Alors que Papi Gaudi préférait maintenir des relations cordiales et éviter les affrontements larvés avec les autres Maisons de Praxis, Viktor nourrit des rêves de conquêtes urbaines. Bien que sa faction compte parmi les plus puissantes de la ruche, elle n’est pas de taille à affronter frontalement tous ses rivaux… jusqu’à ce qu’un marchand (Brek) se présente avec une occasion en or : une cargaison de catapultes shuriken reconditionnées, qu’il est prêt à céder à vil prix au Graf ambitieux. C’est le début d’une OPA agressive sur les territoires des autres Maisons, dans laquelle Mikhail s’illustre particulièrement en organisant l’assassinat du Graf Reisiger, abattu avec ses conseillers les plus proches alors qu’ils dînaient dans un kebab de luxe. Récompensé par l’élévation au rang de Protektor, Mikhail est convié avec tous ses collègues à une petite soirée au manoir Gaudi, et se réveille le lendemain matin dans son appartement, nu comme un ver, couvert de sang et pris d’une gerbe carabinée. La nuit a dû être bonne !

Début spoiler…Les quelques souvenirs qui finissent par lui revenir après s’être envoyé une demi-bouteille de cointreau pour se remettre les idées en place ne sont cependant pas très sympathiques. Il a de vagues réminiscences de litanies prononcées dans une langue inconnue, en direction d’un bloc d’obsidienne couvert de runes bizarres. N’ayant pas atteint sa position en étant complètement obtus, et étant un croyant convaincu et pratiquant du culte impérial (comme la plupart des habitants de la pieuse Equus III), Mikhail comprend vite qu’il a assisté à des activités encore plus prohibées que la moyenne, et qu’il est de son devoir d’en alerter les autorités compétentes l’Ecclesiarchie. Il sèche donc le nouvel afterwork organisé par Viktor Gaudi et son pote Brek pour aller se confesser dans le temple le plus proche, espérant que sa coopération désintéressée (en partie tout du moins) lui permettra d’échapper au jugement réservé aux cultistes, même involontaires.

Le hasard faisant bien les choses, un Inquisiteur de l’Ordo Malleus (Belael) passait dans le coin, en même temps qu’un contingent de Chevaliers Gris. Tout ce petit monde débarque fissa à la casa Gaudi, et pas pour causer modernisme catalan, croyez-le bien. Au terme d’une opération rondement et prestement menée, tous les membres de la cabale de Tzeentch sont passés par le bolter, scellant la fin de la Maison Gaudi. Et la balance Mikhail, me direz-vous ?

Début spoiler 2…Bien qu’il se voie déjà pardonné, ordonné Prêtre et oint Cardinal sur un monde très lointain en reconnaissance de son impeccable probité, Belael avait d’autres idées en tête lorsqu’il lui a promis une « juste récompense » en échange de sa collaboration totale. Ayant été infecté par une présence démoniaque pendant sa soirée blackout chez Totor, comme tous les Protektors invités, Mikhail n’héritera donc que d’un rituel de purification (privé, c’est déjà appréciable) et d’un bolt dans la tête. Ce n’est pas pour rien qu’on parle du fardeau et non du bonheur de la loyauté…Fin spoiler

AVIS :

Bien des années avant le lancement de Warhammer Crime et de son approche résolument urbaine et quotidienne du 41ème millénaire, Simon Jowett signait avec ‘Loyalty’s Reward’ une très bonne nouvelle dans ce registre low-key. Librement inspirée du Parrain de Coppola, et relevée d’un zeste de conspiration chaotique à la Eisenhorn dans sa seconde moitié, cette histoire démontre qu’il est tout à fait possible d’intéresser le lecteur sans avoir besoin de mettre en scène des batailles gigantesques ou des machinations à l’échelle galactique. L’immersion est réussie, l’intrigue se déroule de manière fluide et parfois assez inventive pour de la GW-Fiction (petit Mcguffin réussi avec le tabassage du pauvre Leon en introduction) : c’est un travail soigné auquel on a droit. Mon seul petit regret porte sur le choix de Jowett du Chaos comme antagoniste, alors que les symptômes éprouvés par Mikhail le lendemain de sa « cuite » faisaient plutôt penser à une infestation Genestealer, ce qui aurait été (à mes yeux) encore plus viscéral – à tous niveaux. Top qualité.

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Debt of Blood – N. McIntosh [WFB] – #23 :

INTRIGUE :

WFB_Debt of BloodFinalement de retour à Altdorf après son road trip à Erengrad et dans le nord de l’Empire, l’aventurier Stefan Kumansky jouit d’un repos bien mérité et récolte les dividendes de ses actions héroïques en se faisant payer des coups à boire à l’occasion de l’Heldenstag, comme c’est la tradition. Soucieux de ne pas voir apparaître son frère, qui apparemment constitue son compagnon de beuverie favori1, Kumansky décide de se rendre directement chez ce dernier, et se retrouve fissa mis en garde à vue en compagnie de son frérot, trempé jusqu’au cou dans une sombre affaire de haute trahison, qui pourrait conduire à son incarcération à vie. Seul échappatoire pour les frangins Kumansky, le marché que leur propose Rheinhardt Kessler, l’autoritaire Prévôt du Conseil des Anciens d’Altdorf. Il s’agit pour Stefan de servir de chaperon à Heinrich von Diehl, scion d’une famille décadente ayant donné à l’Empire un sorcier du Chaos (Lothar) et un guerrier de Khorne (Kurt), rien que ça. Heinrich, lui, semble ok pour témoigner dans un procès d’importance devant se tenir dans quelques jours à Altdorf, et auquel sa chère famille souhaiterait vivement qu’il ne participe pas. La corruption légendaire des grandes cités ne rendant pas possible la mise en place d’un système de protection des témoins classique, Kessler décide donc de placer son mouchard #1 sous la protection d’un reître dont il ne sait pas grand-chose, et dont l’obéissance est acquise via un chantage familial. Je m’avance peut-être mais il me semble que nous sommes un tout petit peu hors procédure sur ce coup-là.

Toujours est-il que Stefan ne peut décemment pas refuser, et passe donc une semaine morne et tendue à s’assurer du bon état de santé de sa charge. Convoqué à une entrevue urgente avec Kessler dans une taverne à la veille de l’ouverture du procès, HvD est escorté par Kumansky et un poignée de gardes jusqu’au lieu du rendez-vous, qui se trouve être comme de juste rapidement assailli par une bande de… méchants (par manque de description des motivations des attaquants), menés par un mutant particulièrement véhément, que notre héros parviendra à vaincre grâce à l’usage ingénieux du traditionnel lustre en fer forgé que tout lieu de duel à l’épée se doit de comporter (c’est dans le cahier des charges des écrits med-fan Sword & Sorcery, j’ai vérifié). Manque de bol pour la petite bande, von Diehl se mange un carreau (d’arbalète, sinon ce serait moins grave) au moment de sortir de l’estaminet, résultant en une blessure non mortelle mais suffisamment grave pour que le passage à l’hospice de Shallya le plus proche devienne obligatoire. Ce dernier, tenu par la brave Sœur Agnetha, que des années de coupes budgétaires ont laissé toute seule pour tenir la permanence de quartier, permet à l’aristo décadent de reprendre quelques forces, mais ne sera pas en mesure de soutenir le siège en règle qui ne manquera pas d’être mis à la bâtisse incessamment sous peu. Très héroïquement, Kumansky ordonne à son dernier PNJ garde d’exfiltrer la street medic et reste seul avec son témoin, confiant dans sa capacité à le défendre contre toute nouvelle tentative d’homicide (kelhôme).

L’attente anxieuse de notre héros n’est que de courte durée, un discret bruissement derrière lui annonçant l’arrivée d’une tierce personne, armée d’une arbalète et d’intentions bien peu charitables envers le garde du corps de von Diehl. La nouvelle venue se révèle être Natalia Zucharov, sœur d’Alexei Zucharov, ancien compagnon d’armes de Kumansky ayant accompagné ce dernier jusqu’à Erengrad puis sombré dans l’adoration des Dieux Sombres sur un malentendu (Star of Erengrad), et ayant été finalement exécuté par ses anciens alliés sur le chemin du retour (The Gifts of Tal Dur). Comme on peut s’y attendre, Natalia a un râtelier contre Stefan, qu’elle accuse d’avoir assassiné son frère de sang-froid.  C’est elle qui a ouvert le feu sur les survivants de l’embuscade à la sortie de la taverne, et fiché un carreau dans le buffet de von Diehl du fait de sa maîtrise toute relative de l’arbalète. Elle a une excuse cependant, étant d’abord une apprentie du Collège Gris, ce qui explique sa capacité à apparaître derrière les gens sans crier gare. Sentant qu’un affreux malentendu est sur le point de se produire, Kumansky arrive à convaincre Zucharov d’escorter von Diehl en lieu sûr, arguant qu’elle lui doit bien ça après avoir manqué de le tuer deux heures plus tôt. Natalia accepte et emmène Heinrich jusqu’à la maison de Bruno Hausmann, le comparse de Stefan, jurant de revenir un peu plus tard pour terminer son affaire.

Cette fois-ci totalement seul, Kumansky est enfin libre de faire son héros, en repoussant des hordes de… méchants (là encore, la description est succincte) sortant du sol de l’hospice. Vaincu par la multitude après un combat épique, il a la surprise 1) de se réveiller et 2) de faire face à Kessler, apparemment très pressé de savoir où se trouve von Diehl. Il ne faut pas longtemps à  Stefan pour se rendre compte que son commanditaire est passé de l’autre bord, et cherche le noble pour lui faire la peau. Résolu à endurer stoïquement toutes les tortures que son ravisseur ne manquera pas de lui faire subir, Stefan refuse crânement d’obtempérer, mais se fait sauver des poucettes par l’arrivée de von Diehl, qui s’est rendu aux hommes de Kessler sans soupçonner l’entourloupe. Tout est-il perdu pour la team Gentil ? Non ! Car von Diehl était en fait Natalia Zucharov dissimulé par un sort d’illusion, et dans la cohue qui suit son coming out, la paire réussit à se libérer, régler son compte à Kessler (qui malgré ses rodomontades de boss de fin de niveau, s’écroule à la première touche de sa hitbox) et s’échapper par la fenêtre et jusqu’à la sécurité de la maison de Bruno, malgré le vertige handicapant de la donzelle, rattrapé in extremis par un Kumansky toujours chevaleresque.

Ayant réussi à déjouer les manigances de Kessler, et confiant dans la protection apportée par un de leurs amis hauts placés pour mener à bien leur mission, nos héros se quittent presque bons amis, la promesse de Natalia de revenir honorer la dette de sang contractée par Stefan suite au meurtre de son frère apparaissant comme bien hypothétique (encore cinq pages et elle finissait dans son lit). Mais ceci est une autre histoire…

1 : Voir The Gifts of Tal Dur, et les trésors de motivation tirés par notre héros de la soirée picole promise par son frangin lors du combat final.

AVIS :

Se déroulant (probablement) après les événements couverts dans Taint of Evil, cette nouvelle s’avère être assez complexe dans son intrigue, aux manigances politiques de la haute société d’Altdorf venant se mêler la vengeance personnelle de cette brave Natalia, que McIntosh fait apparaître comme une cruche d’un bout à l’autre de son récit. Tireuse à l’arbalète médiocre, arcaniste peu sûre d’elle (de son propre aveu, le sort qui a sauvé Kumansky aurait pu tout aussi bien le tuer, et le sceau magique laissé sur la porte de la maison de Bruno a été brisé à son retour), combattante pathétique, sujette au vertige et aux phrases absconses, la sœur Zucharov tient plus de la damoiselle en détresse que de la traqueuse mortelle qu’elle était censée être. Il semble qu’il s’agisse d’une constante chez McIntosh (voir le rôle de faire-valoir de Katarina von Lucht dans The Gifts of Tal Dur), qui pour sa défense écrivait à une époque où le Women’s empowerment n’était pas encore un concept à la mode dans le monde de la fiction med-fan. De son côté, l’héroïquement héroïque Stefan Kumansky s’en tire comme d’habitude avec les honneurs, seul son manque absolu de personnalité et d’intérêt venant rebuter le lecteur.

La réalisation de McIntosh s’avère par moment assez fébrile, les scènes de combat par exemple souffrant de leur caractère générique, l’intrépide jeune premier faisant face à des rangées de goons assez mal définis, ce qui empêche de vraiment s’impliquer dans ses péripéties. La palme est remise aux… choses qui sortent des sous-sols de l’hospice de Shallya, dont on ne sait pas s’il s’agit de mutants, de démons ou de morts-vivants, qui les a convoqués et pourquoi elles n’ont pas mis Kumansky en pièces après que ce dernier ait perdu son dernier point de vie. Non pas qu’une autre issue eut été possible, mais comme Kessler n’est jamais vraiment présenté comme capable de s’attacher les services de ce genre de gros bras (sinon, il n’aurait pas été mis en échec par un sort de niveau 1, je gage) et que le fourbe Prévôt est le seul antagoniste présenté dans la nouvelle, il aurait été logique qu’il soit l’orchestrateur direct de l’attaque. Bref, l’exécution de ce Debt of Blood pêche sérieusement, et comme les personnages mis en scène par McIntosh ne présentent en eux-mêmes pas grand intérêt, on se rabattra de guerre lasse sur les quelques éléments fluff mis à disposition par l’auteur pour se convaincre de finir la lecture de ce nouvel épisode de Kumansky & Hausmann, les Starsky & Hutch du Vieux Monde.

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Boyz in the Hive – J. Green [NDA] – #23 :

INTRIGUE :

NDA_Boyz in the HiveLorsqu’il n’est pas occupé à recoudre des Gangers amochés dans son officine, le Doc Haze (déjà croisé dans ‘Firestarter’) se passionne pour des sujets de recherche fondamentale, et c’est tout à son honneur. Le sous-monde de Necromunda n’étant pas super bien desservi (les travaux de la Grande Ruche Primus ont quelques millénaires de retard), il est assez rare que le Doc puisse mettre les gants sur des sujets d’expérimentation n’étant pas des sumpkrocs grognons ou des milliasaurs affamés. C’est donc un grand jour pour la blouse (à peu près) blanche lorsqu’une capsule de stase contenant un Ork s’écrase à proximité de son laboratoire. Commandé par le Gouverneur Helmawr pour l’enrichissement de sa ménagerie personnelle, le peau-verte s’est fait repérer par ces rabat-joie d’Arbites pendant son transit, menant à son abandon sans cérémonie dans un terrain vague du sous-monde. Privé de son forever home à cause de la mesquine administration impériale, ce pauvre petit Xenos est maintenant livré à lui-même sur une planète inconnue et hostile, et c’est fort triste.

N’écoutant que son grand cœur (un peu) et son désir d’expérimenter sur un sujet à la résistance proverbiale (surtout), Haze embauche une vieille connaissance, le chasseur de primes et cosplayeur de Lee Van Cleef émérite, Nathan Creed, pour lui ramener la paisible créature, vivante de préférence. Alleché par les 400 crédits en jeu, le pistolero accepte ce contrat à haut risque et part sans tarder remonter la piste de destruction laissée par l’imposant Boï derrière lui.

Bien qu’il arrive trop tard pour empêcher sa proie de dévaster une champignonière (bien aidé il faut dire par la maladresse et la malchance des péquenots du coin, que l’on peut tenir responsable de l’incendie de leur ferme), Creed surprend l’Ork alors que ce dernier s’invite à un règlement de comptes entre Escher et Cawdor, et parvient à mettre les deux gangs en fuite par ses propres moyens (qui a dit que les peaux-vertes ne savaient pas viser ?). Dans la confusion, notre héros parvient à administrer une dose généreuse d’anasthésiant au colosse vert grâce au pistolet hypodermique que lui a remis son commanditaire, mais l’Ork ne se laisse pas abattre aussi facilement et il faudra finalement lui fracasser la moitié du crane avec un crochet de grue – après lui avoir troué la peau une demi-douzaine de fois, pour faire bonne mesure – pour enfin le mettre au tapis.

Ce n’est toutefois pas la fin des problèmes pour Haze et Creed, car l’indomptable Xenos se réveille d’une humeur massacrante dans le laboratoire du Doc, avant que ce dernier n’ait pu l’entraver de manière appropriée. Résultat des courses : un Serviteur sévèrement amoché, un intérieur complètement dévasté, et un sujet d’expérimentation cristallisé en désespoir de cause, Haze autorisant Creed à régler son compte à l’Ork furibard, constatant le manque de bonne volonté manifeste du peau-verte à servir de cobaye. Au final, il faudra un bain de nitrogène liquide suivi par une ultime balle dum dum aux effets proprement fracassants pour mettre fin aux ravages du géant vert. C’est bien dommage pour Doc Haze (qui doit en plus de ça passer à la caisse car Creed estime – à juste titre – avoir accompli sa part du marché), mais tout n’est pas perdu pour le scientifique timbré. En effet, l’Ork a eu le temps de libérer quelques spores à la surface de Necromunda pendant son bref mais inoubliable passage sur la planète, et la nouvelle se termine sur un Doc Haze ravi d’avoir localisé un coin à champignons des plus prometteurs…

AVIS :

Après avoir évoqué le sujet de l’importation illégale d’espèces invasives dans ‘Firestarter’, Jonathan Green concrétise son idée de mettre le blasé Nathan Creed aux prises avec un adversaire à sa mesure (voire franchement plus grand que lui) dans ce mensonger1Boyz in the Hive’. Pas grand-chose à se mettre sous la dent dans cette nouvelle de pure action, dont la longueur est directement corelée à la résistance proprement inhumaine de son antagoniste, qui encaisse avec une fortitude admirable les balles et les beignes qu’un Creed protégé par son duster en scenarium lui balance dans la tronche pendant des pages entières. On appréciera tout de même (peut-être) le retour de Doc Haze, un des seuls personnages secondaires récurrents de la série, et à travers lui, l’effort fait par Green pour créer une continuité dans ce qui était jusqu’alors qu’une collection d’aventures assez décousues2. Les amateurs de fluff apprecieront (peut-être) également l’explication fournie par l’auteur sur le système de reproduction des Orks. Après tout, s’il doit y avoir une autorité indiscutable sur ce sujet hautement polémique, c’est bien quelqu’un qui s’appelle Green !

1 : Il n’y a qu’un Ork (les spores ne comptent pas) au casting de cette nouvelle, alors que le titre parle de Boyz. Je m’attendais à ce que Green révèle que le spécimen introduit sur Necromunda ne soit qu’un membre d’un groupe plus conséquent (ce qui aurait été fendard), mais il n’en est rien au final.
2 : On peut ainsi établir une succession chronologique entre ‘Firestarter’, ‘Mama’s Boys’ et ‘Boyz in the Hive’.

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Ancestral Honour – G. Thorpe [WFB] – #23 :

INTRIGUE :

La vie de Grimli (oui oui, je sais… l’oliphant dans la pièce) ‘Blacktooth’ Skrundigor à Karaz A Karak est aussi sombre et désespérée que le surnom que notre nabot de héros se trimballe. Nain à tout faire dans une taverne fréquentée par des mineurs bruyants, ivrognes et rancuniers, Grimli a passé une décennie à se faire snober par la grande majorité des clients de son établissement, pour la simple et bonne raison qu’il descend d’une lignée maudite par le Haut Roi en personne il y a plusieurs millénaires de cela. Son arrière15 grand-père Okrinok a en effet commis la faute grave, lourde et impardonnable de fuir un combat contre les Grobis, laissant en plan la fille chérie du souverain se faire friser les tresses par les peaux vertes en furie. À défaut d’avoir pu être retrouvé pour passer en conseil de discipline à l’époque des faits, Okrinok a condamné sa famille sur dix-sept générations à devenir la lie, ou plutôt, le fond de fût, de la société naine, ce qui explique les problèmes de connexion dont Grimli souffre au quotidien1. Après un nouveau shift misérable, il décide cependant de rendre son tablier et de prêter le serment du Tueur, se disant qu’il aura au moins la chance de se faire quelques potes avant de probablement mourir dans de tragiques circonstances et un futur assez proche. Après tout, 200 ans à faire la plonge sans espérer le moindre pourboire, ça fait beaucoup.

Alors qu’il s’apprête à pénétrer dans le temple de Grimnir de la forteresse, il est arrêté par un Tueur blanchi sous le harnais et sa coloration au henné naturel, répondant au nom de Dammaz (rancune en Khazalide). Ce dernier semble lire dans les pensées du jeune Nain, et lui propose tout de go de partir avec lui visiter Karak Azgal, où il a quelque chose d’important à lui montrer, avant que Grimli ne devienne un rouquin assermenté. Cette destination n’est pas anodine, car c’est là qu’Okrinok s’est couvert d’opprobre en laissant ses employeurs (il était garde du corps physionomiste pour les Nains de la haute – un peu contradictoire, je sais) se faire découper en rondelles alors qu’ils visitaient les mines de la forteresse, juste avant la chute de cette dernière. N’ayant rien d’autre à faire et à l’abri du besoin pour quelques mois grâce à la rupture conventionnelle négociée avec son patron, Grimli accepte, et la paire part pour le Sud.

Cette randonnée sauvage en duo permet à notre héros, qui n’avait jamais tenu une arme auparavant, de s’aguerrir en chemin, jusqu’à être capable d’occire un Troll en solo, comme Dammaz lui apprend patiemment. Après des centaines de kilomètres avalés, et autant de Gobelins et de Skavens occis au passage, les compagnons de la baston finissent par arriver dans la place to be. Les mystérieux pouvoirs de la mémoire ancestrale des Nains se réveillent alors, permettant à Grimli de revivre en rêve le drame ayant sali le blason des Skrundigor il y a tant d’années…

Début spoiler…Et comme on pouvait s’y attendre, la réalité était un peu plus complexe que ce que le seul survivant de l’embuscade a raconté à son suzerain, lorsqu’il s’est réveillé parmi les cadavres mais n’a pas vu celui d’Okrinok dans le tas. La mort du Prince et de la Princesse qu’il avait juré de protéger a fait basculer l’acariâtre nabot dans une folie sanguinaire, le menant à charger droit devant lui pour tuer le plus de Grobis possible, sans se soucier du qu’en dira-t-on ni de la cohésion de son unité. Cette percée funèbre a été mal perçue par ses collègues, et en absence de VAR (la technologie ne sera inventée de que 379 ans plus tard), le mal était fait et la messe dite pour Okrinok.

Ce n’est toutefois pas la fin des révélations pour Grimli, car à son réveil, Dammaz l’entraîne jusque dans une caverne naturelle, où se trouve une stalagmite géante constituée des restes calcifiés et empilés de centaines de Gobelins. Au sommet, piétinant ses innombrables victimes, c’est le cadavre d’Okrinok, figé dans la mort et par la magie d’un Shamane commissionné par un Grand Chef sportif dans l’âme, qui attend depuis des siècles que la vérité éclate enfin à son sujet. Et ce n’est pas une pure spéculation de ma part, mais bien le dessein du défunt, qui s’est réincarné en Dammaz pour sauver les miches et les tifs de son ultime descendant. Il aurait certes pu le faire avant (les seize générations séparant Okrinok de Grimli doivent se retourner dans leurs tombes), mais un Nain ne se hâte pas, c’est bien connu. Avant de disparaître, et de laisser son petit fillot se dém*erder seul pour sortir d’une forteresse infestée de peaux vertes et d’hommes rats, Dammaz/Okrinrok indique à Grimli de ramener avec lui son marteau gravé de la rune majeure de Sur La Vie De Ma Mère, faisant que son porteur est automatiquement cru sur parole2, afin de prouver ses dires. L’honneur des Skrundigor est en enfin lavé, ce qui correspond au happy end ultime chez les Dawi à ce qu’il me semble. Grimli peut mourir tranquille, et on me souffle d’ailleurs dans l’oreillette qu’il y a de grandes chances pour que ça soit effectivement passé comme ça…Fin spoiler

1 : Il se serait appelé Bluetooth, ça aurait pas été la même, je gage.
2 : Je ne vois pas comment Grimli peut convaincre autrement ce vieux ronchon de Thorgrim de rayer une rancune de son bottin autrement.

AVIS :

Si on met de côté les petites maladresses d’un Thorpe encore novice dans l’écriture de nouvelles au moment de la publication de cet ‘Ancestral Honour’ (le clin d’œil tellement appuyé qu’il en devient pastiche au ‘Seigneur des Anneaux’, la décision arbitraire du héros de changer de vie deux minute après le début de l’histoire), cette soumission s’avère assez plaisante pour un amateur de background romancé nain. Thorpe est à son aise pour dépeindre cette société dans ses particularismes et ses paradoxes, et la description qu’il fait de la vie d’un paria déshonoré comme Grimli est particulièrement intéressante à mes yeux. On comprend ainsi tout le « jusqu’au boutisme » des Nains, dont la rigueur morale est telle qu’ils ne voient pas de problèmes à punir les leurs sur des générations pour le crime isolé d’un seul individu. L’auteur emploie également le mythe, très spécifique à cette faction, de l’ancêtre réincarné pour venger un affront à son honneur tellement grave qu’il ne peut pas trouver le repos dans l’au-delà. C’est une caractéristique fascinante en termes de lore et de potentiel narratif des Nains (on peut penser à Grombrindal et aux ancêtres de Belegar, mais cela apparaît également dans la nouvelle ‘The Dark Beneath the World’ de William King), qui n’a été que peu mise en avant dans le fluff des suppléments de jeu (pour autant que je le sache), et je suis content que Gav Thorpe l’ait intégré à son récit, même si de manière un peu téléphonée. Une soumission qui démontre surtout que Thorpe est capable de faire honneur à son statut quand il travaille sur un sujet qui lui plaît et l’inspire visiblement, alors qu’il peut à l’inverse sombrer dans la caricature la plus indéfendable si le cœur n’y est pas1. ‘Ancestral Honour’ n’est pas spectaculaire, mais très solide, comme les œuvres de la race qu’elle dépeint.

1 : Voir ‘Tybalt’s Quest’, également publié dans ‘Lords of Valour’ pour s’en convaincre.

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Business as Usual – G. McNeill [40K] – #24 :

INTRIGUE :

40K_Business as UsualTrois mois après la victoire de l’Imperium sur la Flotte Ruche Leviathan sur le monde de Tarsis Ultra, la vie a retrouvé un cours plus ou moins normal dans la capitale planétaire, Erebus (rien à voir avec l’affreux vieillard ridé et son couteau tout chelou). Pour Snowdog et son gang de trafiquants de drogue, cela signifie la reprise d’activités illicites dans la zone tampon séparant le sous-monde de cette cité ruchette1 et la banlieue mal famée où rôde une faune aussi sauvage que mortelle. Et je ne parle pas uniquement des essaims tyranides qui squattent l’endroit à la suite de la destruction de leur vaisseau mère. La nouvelle débute ainsi sur une rencontre business assez tendue entre notre héros peroxydé et trois de ses acolytes (Lex, Silver et Tigerlily), et une bande de Jackboys cherchant à écouler une grande quantité de Kalma, sorte d’ecstasy grimdark.

Bien que la came soit de qualité, comme le trip cosmique du brave Lex, ayant pris sur lui de goûter le produit, le révèle sans ambages, le sixième sens de Snowdog le titille méchamment. Il se doute que ses interlocuteurs vont essayer de la lui faire à l’envers, et lorsque les Jackboys dégainent leurs pétoires pour piquer les crédits durement gagnés du Malamut, ce dernier ne se laisse pas faire. L’échange de tirs entre les deux gangs finit par tourner en faveur de celui composé à 100% de personnages nommés (comme c’est étrange), mais attire également l’attention de la patrouille d’Arbites du Capitaine Jakob Gunderson. Ce dernier voue une détestation cordiale à Snowdog, coupable de l’impardonnable crime de vente de dope dans son périmètre, et n’est que trop heureux d’entraîner ses hommes sur les lieux de l’échauffourée après que quelques bribes d’échanges radio entre Jackboys lui aient permis de connaître l’identité de leur adversaire.

L’arrivée de cette troisième faction rebat les cartes, et scelle surtout le destin du pauvre Lex, utilisé par un Snowdog loyal sans excès envers ses hommes comme bouclier humain contre les balles à guidage laser de Gunderson. L’utilisation judicieuse d’un chapelet de grenades artisanales récupérées sur le cadavre d’un Jackboy permet toutefois aux trois survivants de se ménager une sortie explosive (et de tuer une grande partie des camarades de Gunderson, qui étaient pourtant à deux jours de la retraite), mais leur course effrénée les amène en territoire tyranide, ce qui n’est pas l’idée du siècle, et encore moins du millénaire. Rattrapés par les deux Arbites survivants alors qu’ils contemplaient les cadavres récurés de quelques gangers malheureux dans le boyau des égouts qu’ils avaient empruntés pour filer à l’anglaise, Snowdog, Silver et Tigerlily se retrouvent en mauvaise posture. Gendarmes et voleurs se réconcilient cependant en un éclair lorsqu’une horde d’Hormagaunts interrompt leur règlement de comptes, et les humains décident sagement de se carapater le plus loin possible de la menace Xenos, à plus forte raison lorsque le Guerrier Tyranide qui manage la horde chitineuse arrive à son tour pour profiter des calories faciles que représentent nos héros.

La poursuite tunnelière qui s’ensuit n’est pas sans causer quelques pertes déchirantes (dans tous les sens du terme) parmi les hominidés, le dernier collègue de Gunderson gagnant une séance d’acupuncture tyran(n)ique, avant que la pauvre Tigerlily n’aille rejoindre Peter Pan, Sanguinius et Geneviève de Fontenay dans le pays imaginaire. Lorsque l’affreuse bestiole assomme Gundy et met la griffe broyeuse sur la veste gifesque (c’est beau le 41ème millénaire tout de même) de Snowdog, la messe semble dite pour nos héros…

Début spoiler…C’était toutefois sans compter sur le pouvoir de l’amitié la foi la Force la DROOOOOOGUE. En désespoir de cause, Snowdog balance en effet sans s’en rendre compte la totalité du stock de Kalma piqué aux Jackboys dans le gosier du Guerrier, provoquant un KO technique suivi d’une overdose fatale en moins de vingt secondes. Magnanime, El Doggo décide d’épargner la vie de Gunderson au lieu de profiter de son piteux état pour lui faire passer la matraque énergétique à gauche, et les deux gangers survivants s’en repartent vers d’autres aventures. Ils ne savaient pas encore qu’ils vivaient sur du temps empruntéFin spoiler

: Tarsis Ultra n’était censé avoir que 60 millions d’habitants avant de se prendre un enchaînement fatal Tyranides-Iron Warriors dans la biosphère, ce qui est positivement clairsemé à l’aune des standards impériaux.

AVIS :

Graham McNeill n’a jamais (pour autant que je le sache et au moment où cette chronique est publiée) écrit pour Necromunda, mais les amateurs de ce monde-ruche si bucolique ne seront pas dépaysés par ce ‘Business as Usual’. Des gangs ennemis qui s’étripent pour de la dope dans des usines en ruines et des terrains vagues toxiques, avant qu’une escouade d’Arbites nommée bavure et quelques bestioles atrabilaires ne viennent se mêler aux réjouissances : on est ici en terrain connu (mais dangereux tout de même, relancez vos 1 si vous pouvez). À titre personnel, il n’y a pas grand-chose qui me fasse vibrer dans cette nouvelle qui ne détonne absolument pas du mètre étalon de la GW-Fiction, et qui a plutôt mal vieilli sur certains aspects, notamment l’argot utilisé par Snowdog et ses acolytes, qui sonne aujourd’hui terriblement daté. À chacun son sale goût.

Pour la petite histoire de cette petite histoire, ‘Business as Usual’ a en fait été écrite avant ‘Warriors of Ultramar’, dans laquelle Snowdog fait également une apparition au côté d’Uriel Ventris et des héroïques défenseurs de Tarsis Ultra, même si elle prend place après les événements relatés dans ce roman. Voilà de quoi briller en société, sans nul doute.

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Raptor Down – G. Thorpe [40K] – #24 :

INTRIGUE :

40K_Raptor DownNous retrouvons le Commandant Jacques Jaeger de l’escadron Raptor, après les évènements couverts dans Acceptable Losses, et la prise de fonction compliquée et sanglante de notre héros à l’occasion d’une bataille spatiale contre un Rok Ork. 18 mois plus tard, le Divine Justice, croiseur impérial auquel les Raptors sont rattachés, est passé à autre chose, et fait partie de la flotte d’invasion du système de Mearopyis, que l’Imperium cherche à reprendre aux Noctal après quelques millénaires d’atermoiements (saleté de bureaucratie). Ayant eu largement le temps de se familiariser avec son nouveau poste, de se faire accepter par ses hommes et de terroriser les nouvelles recrues venues remplacer les pertes subies au cours de  la campagne précédente, Jacques le Fataliste1 supervise les opérations de soutien du déploiement de la Garde Impériale au sol, qui consistent surtout à aller bombarder les cibles les plus juteuses à la surface de la planète capitale du système, tâche grandement facilitée par l’absence de chasseurs à capacité de projection spatiale dans le camp d’en face, ce qui permet aux Maraudeurs de frapper avec une impunité assez totale.

Chargés d’une nouvelle mission de démolition de l’infrastructure militaire locale, les escadrons Raptor et Storm, accompagnés  de leurs écrans de chasseurs (pour une fois qu’ils sont là, ces vole au flanc) quittent leur vaisseau mère pour ce qui ne semble être qu’une formalité pour ces pilotes aguerris. Malgré la tentative malheureuse d’interception de la part des Noctal, prestement contrecarrée par le professionnalisme et les gros flingues impériaux, tout semble baigner dans l’huile de moteur pour Jaeger et ses hommes, jusqu’à ce que ce dernier ait la malheureuse et déplorable idée de… prendre une initiative. Ahlàlà. Pour sa défense, son projet d’attaque d’une colonne blindée Noctal, repérée par l’esprit de la machine d’un missile2, et dont l’utilisation fourbe de la géographie locale avait permis d’échapper aux scanners de la flotte jusqu’ici, partait d’une bonne intention : protéger l’avance des bidasses de la Garde et les empêcher d’être pris en tenaille par les défenseurs. Malheureusement, les grands projets de canyoning de Jaeger, pour prometteurs qu’ils aient semblé sur le papier (en voilà une activité de team building qu’elle est bonne !), se trouvent rapidement et violemment contrariés par la puissance de feu des assaillis. Et même si Thorpe ne se donne pas vraiment la peine de décrire la manière dont les Noctal parviennent à dégommer l’invincible armada de manière aussi brutale, le résultat de l’accrochage n’est pas franchement en faveur des Impériaux. Bien que ces derniers aient pu larguer quelques missiles sur zone, le bilan est très lourd, et même Jaeger ne s’en sort pas indemne, son appareil étant lui aussi abattu en plein vol, forçant l’impulsif et inconstant Commandant3 à évacuer la carlingue en compagnie de ses hommes. Se réveillant avec une jambe cassée dans le désert de Mearopyis, Jacquou le Croqueur de feuille de match doit maintenant digérer les conséquences humaines et matérielles de son coup de sang : avec deux tiers de ses Maraudeurs et la moitié des Thunderhawks passés en perte et profit, le bilan est lourd pour Herr Jaeger. Cela en valait-il la peine ? C’est sur cette question lourde de sens que nous quittons notre héros, qui pourra attendre d’être secouru en dessinant des faucons. C’est ça d’être une buse.

AVIS :

Suite de l’acceptable Acceptable LossesRaptor Down donne l’occasion à Gav Thorpe de nous tenir au courant de l’évolution de carrière ce bon vieux commandant Jaeger, et met l’escadron de ce dernier aux prises avec un nouvel ennemi et sur un nouveau théâtre d’opérations. Après l’espace froid et mortel qui a vu les Raptors aller au casse-pipe contre un Rok, nous sommes donc témoins d’une excursion atmosphérique dans les déserts de Mearopyis, ce qui illustre bien la versatilité des Maraudeurs impériaux. Sur la forme, la nouvelle de Thorpe se révèle être d’un niveau sensiblement égal à ses œuvres « spatiales » précédentes, c’est-à-dire très correct. Si on peut critiquer la prose de notre homme à bien des égards, il faut lui reconnaître une capacité à dépeindre un engagement aéronautique/spatial de manière convaincante et intéressante, beaucoup mieux que la plupart de ses collègues en tout cas. Sa maîtrise des unités (tant spatiales4 que temporelles5) et des facteurs propres à ce type de combat, comme la vitesse et la direction du vent, ou le niveau de carburant et des munitions embarqués rendent la lecture des péripéties aériennes de l’escadron Raptor plutôt prenante. Thorpe fait même du zèle en intégrant en début de récit une retransmission d’un affrontement spatial entre la flotte impériale et son homologue Noctal, que le supérieur de Jaeger se  repasse en boucle comme d’autres matent un top 10 NBA. Petit plaisir coupable, que nous lui pardonnons sans mal puisque le résultat est là aussi assez qualitatif.

L’intrigue et la construction de Raptor Down, en revanche, s’avèrent être moins satisfaisantes. La première est une variation sans originalité du scenario d’Acceptable Losses (un escadron de Maraudeurs chargé d’une mission où rien ne se passe comme prévu), ce qui n’est en soit pas un gros problème puisque la possibilité de Thorpe d’innover sur le sujet est passablement limitée (un Maraudeur, ça maraude, poingue). Ce qui est moins acceptable à mes yeux est la manière dont l’auteur fait passer Jaeger de Mr Baillezeubouque à Dr Folamour en l’espace de deux paragraphes, le chef d’escadre précautionneux se muant en tête brûlée sans qu’aucun élément préalablement établi par Thorpe sur le caractère de son personnage ne puisse laisser augurer ce changement radical de tempérament. Autre point plutôt mal géré par le Gav, le raid des Maraudeurs sur la colonne blindée, torché en même pas une page, et qui tient plus du tir au pigeon que de l’attaque en rase-motte. Le fait qu’on ne voit même pas à qui les impériaux sont confrontés, ce qui ne permet pas de comprendre pourquoi ils se font ainsi décimer par un adversaire totalement à leur merci sur le papier (à moins que les Raptors aient eu la malchance de tomber sur un convoi DCA Noctal), annihile toute tension narrative, les (bol)os des as se faisant canarder (un comble pour des raptors6) en l’espace de quelques secondes. Finalement, la conclusion même de la nouvelle ne m’est pas apparue comme particulièrement maîtrisée, les états d’âme douloureux de Jaeger alors qu’il se retrouve isolé avec ses hommes en territoire ennemi, ne suscitant qu’un distrait « so what ? » chez votre serviteur. À titre personnel, je pense que Thorpe a laissé ainsi la porte ouverte à un nouvel épisode (à ma connaissance jamais écrit), et que cette fin n’en était en fait pas vraiment une. Pas de chance, cela n’a débouché sur rien, et la dernière image que le lecteur emportera du commandant Jaeger sera celle du matelot du radeau de la Méduse fixant l’horizon d’un œil torve, le menton dans la main. Ce qui n’est pas commun, avouons-le.

1 : Il reconnaît lui-même qu’il n’est jamais heureux. Sauf quand il vole. Et encore, il stresse tellement que j’ai du mal à voir quel plaisir il tire de l’expérience. Pauvre bonhomme.
2 : On peut remercier le Techno-Adepte Ferrix, l’homme qui murmurait à l’oreille des (AGM-119) Pingouins.
3 : Pour un gars qui avait passé la nouvelle à ressasser son amour des plans qui se déroulent sans accrocs et la nécessité de se conformer aux règles établies, surtout quand elles touchent à la Santé & Sécurité, décider de se la jouer berzerk à la première colonne blindée, c’est assez surprenant.
4 : Quand on est un pilote de Maraudeur, 150 kilomètres, c’est proche.
5 : Quand on est un pilote de Maraudeur, 3 minutes, c’est long.
6 : ‘Rapace’ en anglais. Rien à voir avec les dinosaures donc.

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Jahama’s Lesson – M. Farrer [WFB] – #24 :

INTRIGUE :

Jahama's LessonLe Seigneur Khreos Maledict a quitté sa cité de Karond Kar avec armes et bagages pour mener un raid sur les côtes bretonniennes. Pillard invétéré, il a laissé la fougue de sa jeunesse derrière lui et cherche désormais à remporter ses campagnes en évitant de passer par la case « bataille rangée ». C’est à cette fin qu’il a recruté la Matriarche Miharan Diamo, et surtout son protégé, l’assassin Jahama, pour mener une opération de diversion au cœur du château du Duc d’Argent, dont l’armée pourrait s’opposer à celle des Elfes Noirs. Maledict a aussi embarqué son neveu (Khrait), officiellement pour le former au métier, mais d’abord et surtout pour pouvoir débiter d’interminables et pompeux monologues sur son génie stratégique. Nos quatre personnages débarquent en avance des troupes druchii pour accompagner Jahama jusqu’à l’endroit où sa mission d’infiltration doit commencer. Après avoir reçu la bénédiction de sa tutrice, le tueur prend la clé des champs et se dirige vers la forteresse ennemie.

Sur le chemin les ramenant vers l’Arche Noire que le Dynaste a affrétée pour sa virée shopping ultramarine, Khreos et Miharan échangent quelques piques au sujet des qualités de l’assassin. Le noble se fait un plaisir de révéler à la Matriarche que son élève va se retrouver confronté à une opposition exceptionnelle, le Duc d’Argent étant une force de la nature au tableau de chasse impressionnant, sans parler de son entourage de chevaliers endurcis et de fidèles hommes d’armes. Supprimer le commandant bretonnien ne sera donc pas une partie de plaisir pour Jahama, dont c’est pourtant la mission. Miharan ne se montre cependant pas très inquiète, et commence à raconter à l’oncle et au neveu la dernière épreuve à laquelle Jahama a dû se soumettre pour gagner ses galons d’assassin. Hellebron étant cette année-là d’une humeur particulièrement massacrante (on suppose qu’elle était en rade d’anti-rides), la mégère avait défié les impétrants de pénétrer dans son manoir bourré de pièges, et de prendre à son assassin personnel, le redouté (autant qu’inconnu, mais c’est plutôt flatteur dans ce métier) Hakoer, son collier d’argent serti d’un rubis. Comme ledit Hakoer avait hérité de l’Epée de Mort de son employeuse le temps de l’épreuve pour en relever encore un peu la difficulté, les bookmakers de Har Ganeth avaient mis une côte stratosphérique sur la promotion Kermit1. Le trio remonte à bord et se sépare pour se préparer à l’assaut contre les humains avant que la Matriarche ait pu finir son histoire, laissant Khreos et Khrait dubitatifs sur la véracité de son récit.

De son côté, Jahama ne traîne pas en besogne, et parvient à se glisser à l’intérieur du château d’Argent alors qu’un banquet célébrant une campagne victorieuse contre une harde d’Hommes Bêtes en maraude bat son plein. Mais eu lieu de se rendre dans la chambre du Duc pour se cacher dans un placard pour le surprendre en pyjama, l’assassin préfère foutre un bordel monstre dans les festivités bretonniennes, et de façon tout à fait visible qui plus est. Après avoir suriné/fléchetté/garrotté/savaté une dizaine de convives et de serviteurs, l’alerte générale est donnée et le Druchii meurtrier se retrouve confronté à une horde d’adversaires compensant leur manque d’armure et leur alcoolémie élevée par les vertus du juste courroux et de la motivation implacable. Malgré ses talents de combattant et d’acrobate, Jahama finit par se retrouver en mauvaise posture, et le Duc d’Argent en personne se fraie un chemin jusqu’à lui pour le défier en duel, dans la plus pure tradition locale. Peu intéressé par la proposition, l’Elfe Noir se contente d’envoyer sa dernière dague de jet dans la poitrine d’une Demoiselle qui avait commis l’erreur de traîner dans le coin, avant de littéralement tirer sa révérence et de s’enfuir du château, poursuivi par une meute d’humains vengeurs.

Retour du côté Druchii, où l’armée de Maledict progresse sans se presser vers la forteresse d’Argent. Khreos révèle en aparté à son neveu qu’il a mis Jahama sur une mission suicide, dont le but était de désorganiser les Bretonniens plutôt que de tuer leur Duc, et qu’il a pour projet d’arranger un regrettable accident pour Miharan avant que l’expédition ne se termine, afin qu’elle ne puisse pas lui tenir rigueur de la mort de son pupille. Ces confidences sont toutefois interrompues par une clameur qui retentit à l’horizon, alors que les Elfes Noirs sont encore en ordre dispersé…

Début spoiler…C’est l’armée du Duc d’Argent qui s’est portée à leur rencontre, et qui roule sur les pillards comme un 4×4 sur un crapaud (gothique). Dans la mêlée qui s’ensuit, Khreos est mortellement blessé par l’ennemi, et tente péniblement de ramper hors du champ de bataille pour rejoindre le littoral et l’Arche Noire qui y est amarrée. Sa lente progression est stoppée par Jahama, qui lui révèle qu’il a « malencontreusement » laissé tomber la carte sur laquelle l’itinéraire des Elfes Noirs était indiqué au moment où il quittait le château du Duc. C’est vraiment ballot, mes plus confuses dude ! Il s’agissait pour lui de donner une leçon à un noble arrogant, qui prétendait utiliser le culte de Khaine comme de vulgaires mercenaires, et d’inculquer le respect de cette ignoble institution au reste des puissants de Naggaroth. Avant qu’il ne soit abandonné par Jahama, qui après tout a un bateau à prendre, Khreos a le temps de remarquer que le responsable de sa chute porte un collier d’argent où brille un rubis…Fin spoiler

1 : Les classes d’Assassins Elfes Noirs sont baptisés en honneur des marionnettes du Muppets Show. Nul ne sait d’où vient cette tradition.

AVIS :

Pour sa seule incursion recensée dans le Vieux Monde, Matthew Farrer signe une petite fable grinçante illustrant parfaitement le caractère impitoyable et retors de la société elfe noire, un genre d’histoire dont on peut difficilement se lasser, dès lors que la qualité est au rendez-vous, ce qui est ici le cas. De plus, il prolonge le plaisir en mettant en scène avec un luxe de détails et une vraisemblance rarement atteints (à ma connaissance) dans la GW-Fiction deux pans incontournables du fluff des Druchii : piller les côtes du Vieux Monde d’une part, et assassiner leurs rivaux d’autre part. Si les Elfes Noirs sont votre faction de cœur, ‘Jahama’s Lesson’ est un must read absolu, et tant pis pour Khreos Maledict.

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The Emperor’s Will – D. Charters [40K] – #24 :

INTRIGUE :

40K_The Emperor's WillSur le chemin de leur monde chapitral (Taran (!!!) III) après une croisade victorieuse s’étant étalée sur quinze années, les Storm Warriors sont chargés d’écraser la rébellion fomentée par le gouverneur de Tesra IV avant de pouvoir reprendre leur périple vers leur planète d’origine. Bien que disposant des forces nécessaires pour mener à bien cette mission (600 Space Marines tout de même), le maître de Chapitre Calan hésite à lancer un assaut en règle sur les bastions des sécessionnistes, sachant qu’une telle approche engendrerait inévitablement de lourdes pertes chez les loyalistes, déjà fortement éprouvés par les combats qu’ils ont dû mener au cours de leur périple galactique.

Après plusieurs jours de statu quo, la flotte impériale orbitant autour de Tesra IV sans esquisser la moindre attaque (au grand émoi du premier capitaine des Storm Warriors, une sombre brute du nom de Kortar1, ainsi que du contingent de Black Templars qui passait par là), le dilemme de Calan trouve une solution grâce à l’arrivée de l’Inquisiteur Adrijssen, qui propose un modus operandi à même de faire retourner la planète séditieuse dans l’ample giron de l’Imperium, et ce sans tirer un coup de feu. Enfin si, un coup de feu. Mais quel coup de feu…

1 : Qui doit ressembler à peu près à ça, à en juger par ses lignes de texte.

AVIS :

Un commandant Space Marines adepte de la diplomatie, cela est suffisamment rare pour être souligné. Cette idée originale ne suffit cependant pas à faire de The Emperor’s Will une lecture des plus intéressantes, tant David Charters déroule son propos avec maladresse. S’il est possible de passer l’éponge sur les approximations fluffiques qui parsèment son texte (le maître de Chapitre qui appelle ses guerriers « gentlemen », l’invention du grade de lieutenant Space Marine, une flotte impériale laissée « en garnison » d’un monde…) du fait des âges canoniques au cours desquels ce dernier a été écrit, il est en revanche beaucoup plus difficile de faire abstraction des pures aberrations narratives qui affligent The Emperor’s Will. Des vaisseaux spatiaux qui se déplacent en ligne1 ?  Un commandant dépeint comme circonspect et économe de la vie de ses hommes qui décide sur un coup de sang de protéger la descente d’un drop pod non identifié largué par un vaisseau suspect, et ce en ordonnant à ses croiseurs de descendre dans l’atmosphère de la planète pour servir de diversion aux stations de défense ennemie ? Un gouverneur traître à l’Imperium et entretenant des relations privilégiées avec des cultes chaotiques, auquel on redonne les clés du pouvoir après une simple tape sur les fesses et un regard lourd de reproche2 ? Allons mon petit David, sois sérieux deux minutes !

Au final, The Emperor’s Will se situe à mi-chemin entre les délires datés des contributeurs historiques de la BL et la fade conformité des nouveaux auteurs de cette auguste maison d’édition, et réussit l’exploit d’emprunter les aspects négatifs de chaque école sans bénéficier de leurs points forts. It’s something.

1 : Je mentionne cette atteinte aux lois de la physique, somme toute assez mineure et sans aucun impact sur le reste de la nouvelle, car il s’agit littéralement de la première phrase du texte. Il y a des incipits qui ne donnent pas envie de prendre la suite au sérieux.
2 : Et que dire de ce Vindicare trotro balèze, qui risque sa vie et celles de milliers d’autres lors de son déploiement (le péquin dans le drop pod, c’était lui !), escalade en solo une montagne réputée infranchissable pour atteindre une position de tir idéale, reste en joue pendant des jours sans bouger dans un froid glacial, puis réalise un headshot impeccable sur une cible située à plusieurs kilomètres de là… sauf qu’au lieu de faire exploser la tête du traître, notre tireur d’élite se contente de lui injecter une dose d’un poison mortel (le gouverneur a l’impression de s’être fait piquer par un insecte, c’est dire si la balle utilisée était légère – et donc stable en vol – ), afin que Calan, venu en diplomate, puisse marchander la soumission du grand vilain Ignatius en échange d’un antidote. Je suis le seul qui trouve chaque étape de ce plan plus débile et tarabiscotée que la précédente?

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Et voilà qui conclut cette revue de l’année 4 d’Inferno!, qui a été, on peut le reconnaître avec le recul de quelques décennies (ouch), très riche. Comme toujours, la qualité n’a pas toujours été au rendez-vous, mais le lecteur habitué de la GW-Fiction fera avec – il/elle en a vu d’autres. La suite au prochain épisode.

INFERNO! – ANNEE 3

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue des nouvelles publiées dans les numéros #13 à #18 d’Inferno!, troisième année de publication du bimensuel couvrant la période allant de juillet 1999 à mai 2000). Feeling old yet ?

Même si Abnett n’est pas aussi omniprésent que pendant la saison précédente, il reste un des contributeurs principaux de la série étudiée aussi avec pas moins de trois soumissions, tout comme Gav Thorpe, Robert Earl et Gordon Rennie. Cette troisième année est également marquée sous le sceau de Neil Rutledge, qui en profita pour signer ses deux seules nouvelles pour le compte de la Black Library avant de partir vers d’autres cieux, et du grand revenant Brian Craig, qui avait fait les riches heures de la GW-Fiction des années avant que la BL ne soit lancée. Really not feeling old yet ?

Inferno!_Année 3

Cette année 3 voit les débuts de deux séries mineures dans l’univers de Warhammer 40.000 : celle des Iron Snakes (Black Gold, White Heat), soit rien de moins que le Chapitre Space Marines personnel de Dan Abnett, et celle d’Execution Hour (Baptism of FireMatters of Honour), décrivant de manière assez originale le déroulé de la guerre gothique depuis le point de vue du capitaine du Lord Solar Macharius. Il faut dire qu’à l’époque, Games Workshop venait juste de sortir le jeu Battlefleet Gothic, et si cela ne vous fait pas sentir le poids des années, vous êtes probablement un être immortel… Ah, et tant qu’on y est, et puisque je suis d’une humeur charitable, le Tybalt’s Quest de Gav Thorpe peut aussi être considéré comme l’épisode fondateur d’un arc narratif, puisque le brave Tybalt nous reviendra quelques mois plus tard dans Tybalt’s Battle1.

Le cadre étant posé, il est temps de partir à la (re)découverte des 23 nouvelles qui forment le corpus de cette troisième année infernale, afin d’établir si le presque quart de siècle qui nous sépare de leur publication initiale se fait sentir à la lecture. Accrochez-vous à votre siège, on va changer de millénaire…

1 : Et bien des années plus tard, Dan Abnett rachètera l’honneur de tous les Tybalt en donnant ce nom à l’un de ses seconds couteaux de l’Hérésie d’Horus. Un acte miséricordieux.

Inferno! Année 3

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Gilead’s Test – D. Abnett [WFB] – #13 :

INTRIGUE :

WFB_Gilead's TestCette fois-ci, c’est la bonne. Après s’être vengé de la mort de son frère jumeau (‘Gilead’s Wake’), puis sombré dans la dépression et finalement choisi de consacrer sa vie à combattre le mââââl sous toutes ses formes (‘Gilead’s Fate’), notre héros a enfin opéré sa pleine mue et atteint sa forme finale, celle de VHS (Vigilante Hagard et Sociopathe). Nous retrouvons donc l’autre duo G&F légendaire de Warhammer Fantasy Battle à la sortie d’un accrochage disputé contre une bande d’Elfes mutants (eh oui, ça existe), alors que nos amis cherchaient le chemin de la Tour de Talthos Elios afin d’aller rendre visite à leurs lointains cousins…

Les aléas de la guerre ont séparé le couple fusionnel (c’est pas moi qui le dit, c’est Abnett), laissant Fithvael émerger difficilement d’un KO sans graves conséquences pour sa vieille personne, mais désespéremment seul parmi les cadavres de ses adversaires. Petite consolation, sa fidèle jument ne l’a pas déserté, et le dévoué serviteur peut se lancer sur les traces de son maître disparu sans tarder (même si sa méthode d’investigation est tellement scrupuleuse qu’il lui faut une journée entière avant de décider par où partir). Gilead, de son côté, s’est fait piteusement assommer par la dernière de ses victimes, et a été récupéré par un des quelques survivants de son épisode shadow fast, qui l’a amené à la fameuse Tour. Si les Elfes pervertis qui occupent les lieux n’ont pas occis le fier héros, c’est qu’ils souhaitent le rallier à leur cause, ce qu’ils font en lui jetant un sort pendant qu’il est inconscient : à son réveil, il perçoit ses hôtes et leur domaine comme parfaitement hauts elfiques, et se remet donc doucement de son trauma crânien en bonne compagnie, pendant que son brave Fithvael s’enquille des nuits humides à sa recherche. Il n’y a pas de justice, décidément.

Fifi peut toutefois compter sur l’apparition fortuite d’un Mutelfe (appelons les comme ça) pour le remettre sur une piste qui menaçait de se refroidir salement (à son image). Pour vous refaire le topo : Fithvael est réveillé en sursaut par l’arrivée du maraud, sans doute trahi par sa mauvaise odeur, et lui pourrave le gu*ule – sans grands effets il faut bien le reconnaîte – jusqu’à ce que son placide adversaire décide de repartir. Pas né de la dernière pluie, l’ancêtre décide de laisser à sa proie une longueur d’avance, pensant – à juste titre – qu’elle finira par le mener jusqu’au lieu où Gilead est retenu. Tout fonctionne plutôt bien jusqu’à ce que le lièvre de Fithvael, sérieusement esquinté, s’effondre au sol et se fasse rattraper par son poursuivant. S’en suit alors une scène grotesque (qui est la raison pour laquelle je suis descendu dans ce niveau de détail, je l’avoue), au cours de laquelle Fithvael fait du bruit de façon menaçante à proximité de son gibier, dans l’espoir de le faire sortir de son coma, et pouvoir ainsi continuer sa traque. C’est complètement con, je vous l’accorde… et ça ne marche pas. Il y a bien une justice, finalement (cf paragraphe précédent).

De son côté, Gilead, qui a bien récupéré, et est tombé à moitié sous le charme de la fille de son hôte, la ravissante Gudula (WTF Dan ?), se dit qu’il est temps de se remettre en forme après avoir passé tout ce temps (le sort qui lui a été jeté transforme les jours en semaines) allité comme une grosse feignasse. Quelques sessions de salle plus tard, Gigi se met à en faire (du sale), sa redécouverte du shadow fast envoyant trois de ses sparring partners à l’infirmerie, sans que notre psychopate aux oreilles pointues ne s’en émeuve. Quel héros, vraiment. Il est temps que cette sinistre histoire arrive à son terme, ce qui se passe lorsque Fithvael, qui, par miracle, a fini par trouver la Trump Tower de la Drakwald, se fait chopper comme un bleu par la patrouille, et assommer à son tour sans sommation. Trop cléments, les Eliossiens le ramènent à l’intérieur pour tenter de le recruter à son tour, mais c’est sans compter sur Gilead, qui reconnaît son vieux compaing, et, ne se posant absolument pas la question de savoir pourquoi il est amené à la Tour comme un sac à patates, le fait monter dans ses quartiers pour lui prodiguer des soins. Se réveillant sans avoir été enchanté à son tour, Fithvael se rend compte que quelque chose cloche devant le choquant manque de réaction de son maître devant l’intérieur décrépit et l’aspect dégoulinant de ses hôtes. Le vieil Elfe fait toutefois comme si de rien n’était, jusqu’à ce que, grâce au pouvoir de l’amour (ou quelque chose comme ça), il arrive à lever le sort qui touchait Gilead, juste avant que ce dernier ne bascule totalement du côté moisi de la Force.

Si la sortie de la Matrix est douloureuse pour notre héros (notamment parce qu’il se rend compte qu’il a littéralement bouffé de la m*rde pendant des semaines), elle l’est incomparablement plus pour les perfides Mutelfes, qui se font tronçonner sans délai par la paire infernale. Ce n’est toutefois que la première étape de la nouvelle vendetta entreprise par Gigi, qui se dirige à grande hâte vers le fameux Tertre ayant perverti Talthos Elios, pour exercer une saine et cathartique vengeance sur le mââââl qui y rôde…

AVIS :

Péripétie franchement bizarre de la geste Gileadesque (encore que, on est très loin des niveaux de ‘Gilead’s Curse’), ce ‘Gilead’s Test’ comporte plusieurs étrangetés scénaristiques assez déplacées pour une soumission de Dan Abnett. Alors que les deux épisodes précédents s’étaient révélés être de courtes nouvelles robustement construites à la lecture agréable, ce plus long format, qui se termine d’ailleurs sur la promesse d’un grand nettoyage de printemps du fameux Tertre de Talthos Elios (jamais couvert dans Inferno!, ce Gilead’s Test étant le dernier épisode de la sage publié dans le magasine), se révèle une succession d’événements abscons et/ou inintéressants, emmenant le lecteur jusqu’au bout de ses 13 pages avec la grâce et la cadence du pauvre Mutelfe trucidé par Fithvael en chemin. Serait-ce le début de la fin pour le héros de Dan Abnett et Nik Vincent ? Ce n’est pas en lisant Inferno! que nous le saurons, mais le dernier passage de Fifi et Gigi dans les pages infernales ne fait pas vraiment plaisir à lire…

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Nightmare – G. Thorpe [40K] – #13 :

INTRIGUE :

Nous suivons les péripéties oniriques du jeune Joshua, dont l’adolescence a pris un sale tour depuis que sa famille et ses amis l’ont rejeté pour crime de sorcellerie, forçant le jeune homme à vivre seul dans le désert inhospitalier de la planète de Sha’ul. Seul ? Pas tout à fait. Une mystérieuse voix, que l’on appellera donc Daniel, lui tient compagnie et lui prodigue des conseils dans son exil, sans que le peu curieux Joshua s’interroge beaucoup sur l’origine de ce phénomène. Pour la première fois depuis que son ami imaginaire lui rend visite, la Voix a retentit dans son esprit alors qu’il était endormi, et lui propose rien de moins que de participer à une grande aventure, comme quand il était enfant et jouait au Space Marine, ainsi que font les bambins de l’Imperium.

Sur les indications de The Voice, Joshua part donc en vadrouille et commence à farmer du mob démoniaque de bas étage, grâce aux pouvoirs merveilleux de son esprit, capable de matérialiser des armes et des armures à volonté pour affronter toutes les épreuves de ce qui ressemble fort à un RPG en réalité virtuelle (ça doit être commun au 41ème millénaire). Bien que Joshua ne soit pas plus violent que la moyenne, l’aspect répugnant des créatures qu’il rencontre et l’assurance maintes fois répétées par la Voix que tout ça n’est qu’un rêve, conduisent notre héros à commettre un véritable massacre grâce à ses pouvoirs psychiques fantasmés.

Guidé par son GPS intégré, Joshua finit par arriver devant un bâtiment dont l’entrée est gardée par une grille de fer, dont il tort aisément les barreaux avant de se glisser dans un étroit tunnel en prenant la forme d’un serpent. Au bout du compte, il parvient dans une salle obscure où l’attend le « boss de fin », un tas de saindoux à tentacules que la Voix l’incite à tuer pour terminer sa quête. Bien fatigué par ses aventures et lassé de ces tueries incessantes, Joshua fait mine de refuser mais son compagnon excite son amertume et sa rage d’avoir été abandonné par ses proches à cause de sa différence jusqu’à ce que le jeune homme pète les plombs et étrangle à mains nues sa victime dans un accès de colère. Ceci fait, la Voix lui annonce qu’il n’a qu’à imaginer qu’il est de retour à son point de départ pour sortir de ce rêve étrange et pénétrant, et lui promet de le laisser désormais tranquille…

Début spoiler…A son réveil, Joshua a la surprise de découvrir qu’il n’est pas dans sa cahutte du désert, mais dans un jardin luxuriant qui ne peut être que celui du Gouverneur Planétaire Ree en personne. Surprenant la conversation de passants alors qu’il se cache dans les fourrés, il comprend alors qu’un mystérieux assassin a réussi à s’infiltrer dans le palais, massacrant les gardes et les sentinelles au cours de sa progression, défonçant tous les obstacles et se glissant dans les moindres interstices, jusqu’à parvenir dans la chambre du Gouverneur, retrouvé étranglé dans son lit au petit matin. La nouvelle se termine avec l’horrible réalisation par Joshua qu’il s’est fait grandiosement balader par celui qu’il considérait comme son seul ami, pendant que dans le Warp, un démon mineur de Tzeentch ricane follement en se tenant la bedaine…Fin spoiler

AVIS :

Gav Thorpe tenait une idée de nouvelle assez intéressante avec ce ‘Nightmare’ (Adventure Times à la sauce 40K, rien que ça), mais il pêche un peu par son exécution, qui ne laisse pas assez planer de mystère sur les actions accomplies par Joshua lors de sa virée nocturne à mon goût. Dès lors que Thorpe nous révèle que son héros a été chassé de son village après avoir été accusé d’être un sorcier (donc un Psyker en puissance), n’importe quel lecteur au fait de son fluff prendra le ‘it’s just a dream bro’ que la Voix sert à Joshua à toutes les sauces avec les pincettes de rigueur. J’ajoute que ‘Nightmare’ exploite le même filon qu’une vieille nouvelle de 40K, autrement plus mémorable car joyeusement foutraque (normal pour une soumission d’Ian Watson, vous me direz) : ‘Warped Stars’. L’imitation est la forme la plus sincère de flatterie, et on peut pardonner à un auteur – à l’époque – aussi vert que Gav Thorpe de vouloir s’inspirer d’un auteur vétéran et célébré comme Watson, mais cela ne vient pas non plus jouer en faveur de son travail. Bref, une petite nouvelle fort convenable mais absolument pas mémorable.

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Angels – R. Earl [40K] – #13 :

INTRIGUE :

Alors que la fin approche pour lui, après une longue vie de près de 50 ans (ce qui est apparemment respectable sur la planète féodale sur laquelle il vit), Bobby1 se remémore l’événement le plus marquant de son existence, un souvenir tellement puissant qu’il l’a guidé dans les moments charnières de sa vie, depuis l’accouchement de sa femme jusqu’à l’extermination d’une meute de loups un peu trop familiers. Cela s’est passé il y a bien longtemps, lorsqu’il n’était qu’un petit nenfant…

Né dans le petit village de Pasternach, Bobby connut une enfance rude mais heureuse dans ce hameau fort éloigné du tumulte grimdark d’une galaxie hostile, jusqu’à ce que des signes inquiétants se multiplient dans les environs immédiats du bourg. Les méthodes traditionnelles (envoyer une patrouille faire mumuse dans la forêt voisine) n’ayant, pour une fois, pas donné les résultats escomptés, une douce psychose commence à s’abattre sur Pasternach au fur et à mesure que des événements sinistres se produisent dans le voisinage (meurtre sauvage d’un vieil ermite qui résidait un peu en retrait du village, disparition de l’expédition de volontaires envoyés quérir de l’aide dans la ville la plus proche, incendie probable de cette dernière en pleine nuit). Décidés à se défendre contre les forces maléfiques qui crapahutent dans les sous-bois, les villageois transforment leur communauté en fort retranché, mais cela ne décourage pas la bande de mutants assoiffés de sang et de chair fraîche qui constitue la cause de leurs tracas de passer à l’attaque, au cœur d’une sombre nuit d’automne.

Malgré leur vaillance et leurs outils de ferme soigneusement affutés, tout aurait pu et dû très mal se finir pour les Pasternachois, très démunis face à la férocité et au nombre de leurs assaillants. Au moment où tout semblait perdu, cependant, quatre « anges » (d’après les mots du narrateur) font leur apparition sur la palissade ceignant le village, et commencent à tailler des croupières à la horde impie, avec une terrible efficacité qui ne manque pas d’impressionner le jeune Bobby. Ce qu’il ne peut pas savoir, en pauvre inculte qu’il est, c’est que les nouveaux arrivants sont des Space Marines2, et que le massacre d’une bande d’Hommes Bêtes en maraude n’est probablement qu’un échauffement avant leur tournoi de bière pong énergétique. Toujours est il que la bogossitude absolue de l’Astartes fait une très forte impression sur Bobby, qui tirera de ce souvenir impérissable la fortitude nécessaire pour affronter tous les aléas de sa morne vie de péquenot. Merci Pépé.

1 : Comme il n’a pas de nom, je lui en donne un.
2 : Robert Earl ne donne pas d’indication quant à leur allégeance, et comme leur livrée est bleue et verte, il est permis de penser qu’il ne s’agit pas nécessairement de loyalistes

AVIS :

Avant le lancement des gammes Warhammer Horror et Crime, rares étaient les nouvelles de 40K s’intéressant au point de vue des humbles sujets de l’Imperium, et à ce titre, ‘Angels’ est une œuvre intéressante et résolument précurseuse (?), puisqu’écrite plus de vingt ans avant que la Black Library fasse le pari de la diversification. Bien sûr, il y a bien des Space Marines au casting de cette courte nouvelle, mais Robert Earl garde volontairement et astucieusement la caméra braquée au niveau de son jeune et impressionnable héros, qui est au fond assez proche de la grande majorité des habitants de l’Imperium dans sa méconnaissance absolue de qui sont les Elus de l’Empereur. Ajoutez à cette bonne idée de positionnement narratif le talent de conteur d’Earl, et vous obtenez une des nouvelles courtes (10 pages ou moins) les plus efficaces du catalogue de la BL à mon humble avis. Un vrai masterclass en GW-Fiction.

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The Bretonnian Connection – J. Wallis [WFB] – #13 :

INTRIGUE :

WFB_The Bretonnian ConnectionNous retrouvons l’homme qui tua Liberty Valance Frère Gilbertus (‘The Dead Among Us’), l’ex-marchand devenu Prêtre de Morr Dieter Brossmann, peu de temps après la conclusion de la première nouvelle dont il était le (sombre, taciturne et antisocial) héros. Alors que le temple dans lequel notre ecclésiastique sert est encore en réparation, et que le clergé survivant tente tant bien que mal de creuser des tombes dans la terre encore gelée du Morrspark, une nouvelle d’importance parvient à leurs oreilles rougies par le froid de ce début de printemps : la Comtesse Sophia d’Altdorf, représentante de Karl Franz auprès de la cour du Graf, et, accessoirement, femme séparée du Dauphin de Bretonnie, a été retrouvée morte dans ses appartements, et pas de causes naturelles. Sophia étant une figure populaire dans la Cité du Loup Blanc, les Prêtres se préparent à quelques jours d’intense activité, la populace de Middenheim se tournant en grand nombre vers les Croque-Morrs pour obtenir un réconfort spirituel dans cette période troublée.

Cette agitation ne concerne cependant que marginalement notre héros, que son nouveau supérieur, Père Ralf, envoie collecter un cadavre de mendiant dans un hospice de l’Altquartier au lieu de le mobiliser pour répondre aux atermoiements de la foule. Ceci est somme toute assez logique car Dieter déteste tout le monde, lui y compris, et manque donc de l’empathie nécessaire pour cette tâche. Nous suivons donc Didi alors qu’il se rend là où sa fonction l’appelle, en fredonnant sa chanson préférée. Sur place, il a la surprise de constater que le macchabée était connu de lui, du temps où il était un des marchands les plus en vue de Middenheim : c’est bien ce vieux Reinhold, homme à tout faire, et surtout les mauvais coups, qui gît raide comme une planche sur une des paillasses de l’hospice. Passée la vague nostalgie suscitée par cette découverte, Dieter se livre à un rapide examen du cadavre, et n’est pas long à découvrir que les causes de la mort sont loin d’être naturelles. Déterminé à démasquer le coupable du meurtre de son ancien sous-fifre, Brossmann repart de l’Altquartier à la recherche d’une certaine Louise, désignée par le propriétaire des lieux comme la bonne amie du défunt, et qui est la dernière personne avec laquelle Reinhold a été vu.

Une fois la donzelle localisée, Dieter apprend qu’un de ses vieux ennemis est de retour en ville, et certainement pas pour lui conter fleurette. Du temps où il était aux affaires, notre héros a en effet cru malin de piéger un concurrent potentiel, le marchand Claus Grubheimer, surnommé Grubworm, qui souhaitait ouvrir un comptoir d’herbes de Loren dans la cité. Sous ses abords bonnasses, Brossmann s’est arrangé pour faire trouver par la milice urbaine des substances illicites dans les quartiers du Middenheimer d’origine Bretonnienne (c’est important), provoquant sa disgrâce et sa fuite. On savait rire à l’époque. Reinhold ayant aidé Brossmann à réaliser ce tour pendable (littéralement, le recel de lotus noir étant puni de mort), il suppute fortement que le décès violent de son ex-associé implique Grubworm, et que ce dernier ne va pas tarder à lui rendre une visite de courtoisie. Une fois ces informations obtenues de Louise, qui, comme son nom l’indique, est également une Bretonnienne d’origine, le Prêtre repart vers le temple, où il compte bien réaliser une autopsie de la dépouille de Reinhold.

Ces nobles projets sont toutefois contrariés par le déplaisir manifeste du Père Ralf, qui trouve que l’empathie de son inférieur laisse singulièrement à désirer, et insiste donc pour le faire participer à la messe funèbre donnée en l’honneur de Sophia, en pénitence de sa froideur manifeste. Contraint par cet impondérable, et de plus en plus inquiet pour son intégrité physique, Dieter change de plan et s’en va se rencarder auprès d’une autre de ses vieilles et interlopes connaissance, le bien nommé Grizzly Bruno (Koala Bob était absent ce jour là), qui accepte d’envoyer un de ses hommes localiser Grubworm au bénéfice du Prêtre. Ceci fait, ce dernier retrouve Louise, qu’il a sèchement rabroué au cours de leur précédent échange, au moment même où elle s’apprêtait à lui donner une information importante. C’est ballot. Bien heureusement, Dieter est un crack, et parvient sans mal à connecter entre elles toutes les pièces du puzzle à la seconde tentative. Prenez note : c’est Reinhold, dont la connaissance des tunnels sous Middenheim et les compétences de crochetage rendaient très qualifié pour le job, qui a assassiné la Comtesse Sophia. Pourquoi ? Eh bien, il semblerait que ce mauvais garçon, ayant eu vent du retour de Grubworm et devinant que ses heures étaient comptées, ait agi pour tirer sa révérence de façon « glorieuse »1, tout en vengeant sa chère et tendre au passage, qui s’était faite lourdée sans ménagement par Sophia quelques années plus tôt. Des motifs très profonds, comme vous pouvez le voir. Ayant convaincu la « veuve » de Reinhold de lui remettre l’anneau de fiançailles de la Comtesse, dérobée par le coupe-gorge comme preuve de son crime et moyen pour lui de se faire une place dans l’histoire, Dieter repart dare dare vers le temple, où la messe doit commencer sous peu.

Les choses s’accélèrent à son arrivée sur place, trop tard pour prendre la sienne dans la cérémonie (au grand déplaisir de Père Ralf), mais pile au bon moment pour croiser Grubworm. Peu confiant en ses chances de sortir d’un vainqueur d’une confrontation avec sa Némésis (pour tabasser les Nécromanciens rachitiques, il y a du monde par contre), Dieter s’enfuit dans l’aile résidentielle du bâtiment, jusqu’à sa cellule où il trouve un sac de poudre de lotus noir placé bien en évidence. Comprenant que Grubworm cherche à lui refaire la bonne blague qu’il avait organisé à ses dépends quelques années plus tôt, notre héros se saisit de la bourse incriminante, et profite de l’arrivée impromptue d’un de ses collègues, Frère Jakob, pour lui refiler en douce le chichon. Bien lui en prend, car la paire se fait arrêter à la sortie du temple par une patrouille de miliciens, rencardés par Grubworm, comme Dieter s’y attendait. Notre héros va-t-il laisser son innocent coreligionnaire se faire alpaguer à sa place ? Que nenni. Tirant parti des tours de passe passe que Reinhold lui a enseigné, il fait mine de sortir l’anneau de la comtesse du pourpoint de son accusateur, en gueulant « OH MAIS REGARDEZ CE QU’IL A DANS LA POCHE-EUH » à la cantonnade. Cette preuve très incriminante, couplée aux origines Bretonniennes de Grubworm, placent ce dernier dans une situation des plus délicates, et entraînent une réaction malheureuse (surtout pour Jakob) de sa part : dégainant un couteau, il tente de se faire justice lui-même, mais c’est sans compter l’égoïsme patenté de Dieter, qui prend soin de placer son collègue dans la trajectoire. Bilan des courses : Grubworm se fait lui-même occire séance tenante par un quidam révolté (qui se trouve être le complice de Grizzly Bruno), Jakob passe du statut de Prêtre de Morr à celui de Prêtre mort (notez la subtile différence), mais Dieter a réussi à sauver sa tonsure, ce qui est bien tout ce qui lui importe. La guerre probable entre l’Empire et la Bretonnie causée par cet incident diplomatique n’est d’ailleurs que le cadet de ses soucis, tout comme le fait que, si on regarde bien, c’est lui le méchant de l’histoire. Que voulez-vous, le Vieux Monde est un endroit cruel…

1 : On a affaire au Mark David Chapman du Vieux Monde, ou en tout cas, à un sévère syndrome d’Erostrate.

AVIS :

James Wallis relève la barre (qui était déjà assez haute) de sa série consacrée à Dieter Brossmann, le Dexter de Middenheim, avec cet excellent ‘The Bretonnian Connection’. Le lecteur a droit à une transposition réussie du roman noir dans le monde de Warhammer, qui se révèle être naturellement assez glauque, injuste et immorale pour que cette adaptation fonctionne à plein régime. En plus de proposer un récit d’enquête tout à fait correct, cette nouvelle permet de placer le héros de Wallis sous un nouvel angle, dont il sort plus approfondi que grandi. Exit le Prêtre de Morr ayant adopté la chasuble pour pouvoir continuer ses investigations sur la disparition de sa femme et de son fils : Brossmann apparaît comme un authentique salopard, prêt à tout pour éliminer la concurrence et préserver sa précieuse personne. Malgré ces révélations peu ragoutantes, Wallis parvient à conserver un fond de sympathie dans son personnage, que le lecteur aura bien du mal à haïr en dépit du caractère trouble de son passé, son réseau et ses agissements. Intéressant à plus d’un titre, autant par la plongée dans le Middenheim profond et la géopolitique du Vieux Monde qu’il offre, que dans la mise en scène de personnages plus complexes que la moyenne (pour la Black Library), ‘The Bretonnian Connection’ est l’une des toutes meilleures soumissions de James Wallis, ainsi que l’une des tentatives les plus abouties de la BL en termes de récit policier (ce qui est un peu triste pour Warhammer Crime, mais bon).

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Know Thine Enemy – G. Thorpe [40K] – #14 :

INTRIGUE :

40K_Know Thine EnemyLorsque la planète Slato et ses deux cent mille colons se trouvent menacés par les perfides Eldars, il incombe à la 4ème Compagnie des Salamanders de voler à la rescousse de cet agri-monde guère capable de se défendre seul contre les insaisissables Xenos. Nous suivons donc le Chapelain Ramesis et les trois escouades qu’il chaperonne alors que ce beau monde se dirige en Thunderhawk vers le portail Warp où se concentre la majorité des combats. Après avoir conduit les rites appropriés, formellement accueilli un frère de bataille novice (Xavier1) au sein de la Compagnie, et surtout briefé ses hommes – et le lecteur avec eux – sur les tenants et les aboutissants de leur mission, Ramesis est sauvé de l’indignité de devoir se lancer dans le stand up pour meubler la nouvelle par l’attaque d’un vaisseau eldar, qui force le Thunderhawk à se poser en catastrophe dans la pampa. Rien de très grave pour nos fiers surhommes, qui partent en petites foulées en direction du champ de bataille, après s’être rapidement coordonnés avec le reste du contingent Salamanders, sous les ordres du Capitaine Nubean et de l’Archiviste Zambias.

La session de décrassage des verts les amène à traverser un bois, où les attendaient quelques Rangers pas très dégourdis, et qui se font vite laminer par les intraitables (mais pas beaucoup plus malins2) Astartes. Cette échauffourée donne l’occasion à Thorpe de nous resservir une nouvelle tournée de dialogues ciselés, avant que les détachements de Ramesis et de Nubean n’accomplissent leur jonction, ce qui mène évidemment à plus de palabres entre les trois officiers. Moment de grâce absolu où les lignes défilent sans que les mots prononcés n’aient le plus traître intérêt : c’est un peu comme si on avait demandé à ChatGPT d’écrire un rapport de bataille 40K depuis le point de vue d’un mauvais commentateur sportif. Après avoir débattu pendant à peu près trois mille ans, notre fine équipe repart, toujours en courant, vers le portail Warp tant attendu (par le lecteur en tout cas) afin d’aider la Garde Impériale à défendre cette mystérieuse relique contre les attaques incessantes des Eldars. On apprend aussi qu’un Techno-Prêtre de l’Adeptus Mechanicus (Simeniz) a été dépêché sur place pour étudier la machinerie Xenos, qui doit donc être impérativement défendue et non détruite de manière préventive (ce qui serait tout de même ’achement plus pratique). ‘Ach !’ fait Ramesis, que son dédain pour les disciples de l’Omnimessie transforme soudainement en germanophone. On est plus à un cliché près, à ce stade.

Après avoir complété leur marathon, les Salamanders se positionnent autour du portail, confiants dans la tactique du camping éhonté pour remporter la victoire à la clock. Après tout, c’est ce qu’à fait l’Empereur pendant le Siège de Terra, et ça lui a bien réussi. Nouvelle scène de baston, nocturne cette fois-ci (sans doute un hommage à la planète natale de nos héros), pendant laquelle Thorpe finit d’égrener laborieusement les entrées du Codex Eldars V3, et où rien de bien intéressant ne se passe. Hors champ, Nubean décide d’aller taquiner le goujon avec son escouade de commandement et revient après quelques temps accompagné d’un Prophète et de deux Archontes. Stupéfaction chez Ramesis, qui ne comprend pas comment le Capitaine a pu parlementer avec l’ennemi, et manque de commettre une boulette en décochant un coup de crozius aux invités de son supérieur. En même temps, la haine est son métier, on ne peut pas lui reprocher d’être un peu intolérant sur les bords.

Revenus devant le portail pour, je vous le donne en mille, tailler le bout de gras, Salamanders et Eldars parviennent presque à se mettre d’accord sur la marche à suivre pour coopérer et ainsi empêcher la cabale du redoutable Kha-rehk d’activer la porte afin de piller Slato. C’était d’ailleurs l’objectif initial des Zoneilles, dont la tranquillité du Vaisseau Monde se serait retrouvée menacée à plus ou moins long terme en cas d’incursion réussie de la part de leurs méchants cousins sur la colonie impériale. Je dis « presque » car au moment où le Prophète commence à incanter pour désactiver la wifi, le portail commence à s’ouvrir et Ramesis a une réaction malheureuse : coller un pain au Xenos le plus proche. Après tout, il y a une bonne chance que ce soit de sa faute, pas vrai ? La situation dégénère totalement et les trois Eldars finissent en salami, Xavier s’illustrant particulièrement en assénant le coup de grâce au Prophète avec le crozius de Ramesis…

Début spoiler…Toutefois, cela n’empêche pas la nouvelle de se terminer sur une défaite critique de l’Imperium, la décision hâtive et xénophobe du Chapelain ayant permis aux Eldars Noirs d’ouvrir le portail et de déferler en masse sur les positions impériales. Ramesis a le temps de réaliser qu’il a vraiment chier dans la colle, l’alliance des Space Marines, Gardes Impériaux et Eldars ayant pu permettre de repousser les Drukharis, avant de se faire ôter son dernier point de vie par une foultitude de cabalites surexcités. Dans la vie, il faut savoir choisir ses combats.Fin spoiler

1 : Oui, LE Xav’ en personne. Gav Thorpe n’a jamais pu résister à un caméo de personnage nommé, c’est son péché mignon.
2 : Ramesis décide en effet de couper à travers bois alors que 1) son second lui avait fait part d’un fort risque d’embuscade, et 2) l’auspex de ce dernier avait confirmé la présence d’humanoïdes embusqués dans le bosquet.

AVIS :

Un jeune Gav Thorpe se frotte à la nouvelle de taille intermédiaire (32 pages), pour un résultat comiquement laborieux. C’est bien simple, plus de la moitié du texte de ce ‘Know Thine Enemy’ est constituée de passages de remplissage, alternant entre passages fluff (ne respectant d’ailleurs pas du tout le background1), expositions sans honte et dialogues creux. Ah, et de remise de casque aussi. Parmi les rares éléments rédempteurs de cette bouillie littéraire, citons tout de même l’idée de terminer la nouvelle sur une défaite sans appel des protagonistes (pas si fréquent dans la GW-Fiction), et l’enrichissement de l’historique du (pas encore) Chapelain Xavier. Pour le reste, nous qualifierons poliment cette nouvelle de travail de jeunesse assez peu abouti, et passerons à autre chose. Ça vaut mieux pour tout le monde.

1 : Entre les Space Marines qui considèrent l’Empereur comme un dieu, les 10 Compagnies de Salamanders (au lieu de sept) dénombrées par Thorpe, et le mépris total dont ces derniers font preuve pour la vie de leurs alliés humains, le fluffiste souffle fort à la lecture. L’auteur a fini maître du background chez GW, donc il s’est rattrapé après cela.

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Rat in the Walls – A. Hammond [NDA] – #14 :

INTRIGUE :

NDA_Rat in the WallsNous retrouvons Knife-Edge Liz, l’héroïne vengeresse de ‘A World Above’ dans un état comparable à celui dans lequel elle a passé la majeure partie de cette précédente nouvelle : pissant le sang, trop faible pour tenir debout et sujette à des évanouissements fréquents. La constance, c’est la marque des plus grand.e.s. Ayant troqué ses frusques d’Escher pour une exo-armure Spyrienne aussi fatiguée qu’elle-même, et les profondeurs rassurantes du sous monde pour les tuyaux d’aération de la haute ruche, Liz sévit depuis plusieurs jours parmi les rupins de Primus, cherchant à faire payer l’élite necromundienne la mort tragique du reste de son gang. Une quête des plus nobles, mais dont on se demande bien comment elle est mise en œuvre par l’intéressée, qui ne dispose que d’informations très limitées sur l’identité du responsable de ses malheurs, le puissant et mystérieux Terrak Ran’Lo. On supposera que l’intermédiaire avec lequel ce dernier organisait des virées sanglantes dans le sous monde, et que Liz a proprement massacré hors champ à la fin de ‘A World Above’ (Aldus Harkon), lui a donné quelques tuyaux avant de passer l’arme à gauche. Mais la piste reste assez mince pour une sauvageonne comme notre Lison, que son existence de ganger n’a pas préparée à opérer chez les bourges.

Après quelques pénibles reptations, Liz finit par entrer par effraction dans une résidence de haut standing, et s’effondre dans la salle de bains avant d’avoir pu déboucher le flacon de mercurochrome. Elle a toutefois de la chance de sa torpeur : au lieu de se faire sommairement exécuter par le propriétaire des lieux en plein coma, ou simplement abandonner dehors sur un tas d’ordures (biologiques, car on fait le tri sélectif en haut de spire), son hôte entreprend de la remettre sur pied avec bienveillance et diligence, se permettant même de lui effacer la plupart de ses disgracieuses cicatrices au passage. Bien évidemment, notre bon samaritain, qui se présente comme Kassat Ran’Lo, n’est en rien désintéressé. Rival de son parent Terrak, qui occupe un siège au conseil familial sur lequel il lorgne avec insistance, Kassat souhaite faire assassiner son encombrant cousin par Liz, à la faveur d’un bal qu’il organisera prochainement. Après avoir d’abord refuser de marcher de la combine, notre Escher convalescente finit par comprendre qu’elle n’a guère le choix, et qu’accepter cette mission lui donnera l’occasion d’expliquer sa manière de penser à Terrak, ce qui serait joindre l’utile à l’agressable.

Au bout de nombreuses leçons d’élocution et de menuet, Liz est fin prête à l’action. Le plan de son commanditaire est simple : faire entrer son assassin sur les lieux des réjouissances grâce à ses relations éloignées pour brouiller les pistes, et cacher un pistolet dans la sculpture de glace trônant au milieu du buffet pour contourner la sécurité. Cela aurait été presque intelligent si Kassat et Liz n’avaient cru bon d’aller discuter pendant le bal (sans que rien de très important ne le justifie en plus de cela), ce qui aurait donné une magnifique piste à exploiter aux enquêteurs si la nouvelle avait été une novella ou un roman. Ayant laissé Kassat s’eclipser de la petite sauterie, Liz passe enfin à l’action, faisant diversion en libérant un duo de gladiateurs à la fois enchaînés et déchaînés afin de pouvoir briser la glace avec Terrak Ran’Lo, et pas nécessairement dans cet ordre. Petite complication au programme, un Chasseur de Sorcières importun s’est joint aux réjouissances sans prévenir, mais un test de sauvegarde d’armure réussi de la part de notre tueuse lui permettra de remporter le duel de tir avec le servant des Ordos. Dès lors, régler son compte à ce vieux croulant de Terrak n’est qu’une formalité, comme échapper à une horde de gardes armés jusqu’aux dents pour rejoindre la planque de Kassat. La magie des ellipses…

Début spoiler…Sa mission accomplie, Liz aurait dû se douter que son employeur se retournerait contre elle, mais c’était sans compter son bon cœur et/ou sa tête vide. Si la fourberie de Kassat ne s’avère guère surprenante, la révélation de son identité secrète l’est davantage. C’est bien Terrak Ran’Lo qui a commandité son propre meurtre, ou plutôt celui d’un rival de la maison Ulantis, qui militait ironiquement pour l’interdiction des safaris urbains de la jeunesse syprienne. Le pistolet en sa possession ne fonctionnant évidemment pas contre son commanditaire, Liz fait ce qu’elle sait faire de mieux dans ces cas là, à savoir l’improvisation explosive. Un tir dans le velux du bureau de Terrak, sans doute situé très haut dans la stratosphère, provoque en effet une aspiration telle que les deux larrons se retrouvent en mauvaise posture, Liz accrochée à la rembarde et Terrak cramponné aux basques de la première1. Malgré les jérémiades de Ran’Lo, moins faraud depuis qu’il fait la planche à 10.000 mètres au dessus du sol, Liz préfère tout envoyer balader, sacrifiant ainsi sa vie pour accomplir sa vengeance. La légende raconte qu’elle plâne encore autour de la spire de Hive Primus à ce jour…Fin spoiler

1 : Car les rembardes n’ont pas de basques, c’est connu.

AVIS :

Conclusion de l’arc narratif débuté avec ‘A World Above’, ce ‘Rat in the Walls’ (clin d’œil à Lovecraft ?) cumule comme son prédécesseur bonnes idées et mise en œuvre poussive. Les points forts de cette nouvelle (révélation bien amenée de l’identité de Kassat, conclusion tragico-poétique pas si courante pour une soumission de la Black Library) passent malheureusement au second plan, masqués derrière manquements d’une intrigue (trop) visiblement au service de l’idée générale que Hammond avait de son histoire : le choc des civilisations entre une ganger Escher mal dégrossie mais droite dans ses bottes, et un notable de la spire, aussi raffiné que retors. Outre les questions de pure logique que le récit passe avantageusement sous silence1, le simple fait que Liz puisse faire illusion comme courtisane spyrienne en l’espace de quelques jours/semaines me semble très peu vraisemblable. On peut aussi regretter que la longueur limitée de ce texte n’ait pas permis à Hammond de développer un peu plus certains passages, comme l’apprivoisement de Smeagol Liz ou l’assassinat de Terrak Ran’Lo, ce qui aurait pu fluidifier/épicer davantage son propos. En résumé, un potentiel certain mais une exécution mal maîtrisée.

1 : Ou le monstrueux coup de chance de Terrak que sa Némésis vienne roter du sang sur le lino de sa salle de bain et nulle part ailleurs dans une cité ruche de milliards d’habitants…

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The Lives of Ferag Lion Wolf – B. J. Bayley [40K] – #14 :

INTRIGUE :

WFB_The Lives of Ferag Lion-WolfC’est une belle journée qui commence dans le palais de Ferag Lion-Wolf, Champion de Tzeentch ayant bien réussi dans la vie. Après avoir servi comme Space Marine dans les rangs des Purple Stars, notre héros a décidé d’aller relever de nouveaux défis en passant de l’autre côté du périph’ et de l’Œil de la Terreur, où il s’est taillé un petit empire. Aujourd’hui, il accueille un visiteur de marque, en la personne du Seigneur Quillilil (eh oui), autre Elu du Dieu du Changement dont il convoite le domaine (et réciproquement, comme on peut s’y attendre la part de disciples de Tzeentch).

Après avoir galamment secouru son hôte alors qu’il se faisait attaquer par des terroristes1 disques-jockeys pendant la descente vers son palais, Ferag ne peut résister à la tentation de faire une démonstration de ses pouvoirs de… maître Lego, aussitôt imité – mais en moins bien, évidemment – par Quillilil. Passées ces aménités, il est temps pour Fefe d’emmener son invité jusqu’à la table du festin qu’il a organisé pour lui, mais surtout de lui narrer par le menu les épisodes les plus mémorables de sa longue et épique vie.

On apprend ainsi que notre héros a reçu son nom si particulier après avoir vengé son père, sauvagement tué par un gigantesque lion-loup alors qu’il n’avait que huit ans (Ferag, pas son père), en réglant son compte en solo à la pénible bestiole, d’un coup d’épieu bien placé. Bien des années plus tard, Ferag s’est distingué en menant ses frères de bataille Purple Stars dans l’abordage inspiré d’un vaisseau ruche tyranide, d’une manière si convaincante que le Codex Astartes fut revu et corrigé pour l’occasion (nous dit-il). Enfin, ce fut le triomphe tactique de la bataille pour la planète-bol (si si), brillamment remportée contre les hordes énervées de Khorne et pestilentes de Nurgle, pour la plus grande gloire de Tzeentch. La régalade aurait pu continuer longtemps si un bloc de maçonnerie ne s’était pas décroché alors que les deux Elus passaient en contrebas, frappant Ferag en pleine tête et le faisant sombrer dans l’inconscience…

Début spoiler…Et à son réveil, les choses ne sont plus les mêmes pour notre héros. Exit sa vie rêvée de Champion du Chaos, et bonjour à la triste réalité : Ferag n’est en fait qu’Ulf Rampe-Bouse, un avorton ayant intégré un culte de Tzeentch pour tenter de gagner de l’influence, mais ayant manqué du courage nécessaire pour assassiner un rival politique, malgré les ordres clairs donnés par son Magister. Condamné à être transformé en Enfant du Chaos en punition de son échec, Ulf a été victime d’une ultime cruauté de la part de sa déité, qui n’est pas connue comme étant le Maître du Mensonge pour rien : un aperçu de la vie qu’il aurait pu avoir, si les étoiles avaient été alignées différemment, ou quelque chose comme ça. Alors que son corps se transforme en amas informe et que son esprit sombre dans la folie, nous laissons Ferag/Ulf se débattre avec l’épineuse question de ce qui est réel et de ce qui ne l’est pas. Critique de la raison pure, Kant tu nous tiens…Fin spoiler

1 : Comme quoi, on peut être un Seigneur du Chaos et détester l’anarchie.

AVIS :

Les nouvelles dont le twist final consiste à révéler que le protagoniste a rêvé ou halluciné tout ce qui nous a été présenté au cours des pages précédentes sont assez rare au sein du corpus de la Black Library1, aussi ‘The Lives of Ferag Lion-Wolf’ n’est pas aussi inimaginatif dans son intrigue que ce que le lecteur non familier avec la GW-Fiction pourrait en penser2. Avec son style flamboyant/ampoulé (c’est selon) assez unique parmi les auteurs de la Black Library, et sa vision quelque peu surannée – justifiable au vu de l’ancienneté de la nouvelle – du fluff, Barrington J. Bayley trousse une petite histoire tenant plus de la fable fantasy cruelle que du bolter porn qui était, et est toujours, la norme pour les courts formats 40K. Un acquired taste, comme disent nos amis anglais, qui peut ne pas convenir à tout le monde mais qui mérite le détour à mon avis.

1 : Mais de manière assez drôle, deux d’entre elles se suivent dans le recueil ‘Dark Imperium’, le ‘Nightmares’ de Gav Thorpe exploitant la même idée.
2 : Je dois indiquer ici que même Lovecraft a cédé à cette tentation, dans ce qui peut être considéré comme la moins lovecraftienne de ses nouvelles : ‘The Dream-Quest of Unknown Kadath’.

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Red Moon Over Altdorf – G. Rennie [WFB] – #14 :

INTRIGUE :

WFB_Red Moon Over AltdorfMorrslieb est de sortie au dessus de l’Empire, et plus précisément d’Altdorf où se déroule notre histoire. Comme on peut s’y attendre de la part d’une lune faite de malepierre, l’influence qu’elle fait planer sur la ville n’est pas très propice au calme et à la détente, ce qui fait les affaires du loup-garou millénaire (il a vu Sigmar revenir de la chasse au sanglier il y a fort longtemps) aux côtés duquel nous commençons la nouvelle. Loulou est revenu, comme tous les siècles environ, chasser dans la capitale impériale et grâce à ses super pouvoirs de vision du destin (en mode ultra violet après une tape sur la truffe), il peut choisir ses prochaines cibles en toute connaissance de cause. Et il a une idée très précise de ce qu’il cherche pour son retour aux affaires…

Dans un autre quartier de la ville, Zavant Konniger se réveille en sursaut, habité par la prémonition d’une convocation imminente à la cour impériale, et pas du tout par le réveil qu’il a oublié de décaler après le changement d’heure. Et en effet, il est mandé séance tenante par la Garde Civile qui s’est retrouvée avec un cadavre encombrant sur les bras : un riche marchand à la gorge déchiquetée et la tête à moitié arrachée, mais dont la bourse et les protubérances comestibles ont été ignorées par son assassin, ce qui disqualifie les pistes du crime crapuleux et de l’attaque de chiens errants. Chose inhabituelle, Konniger n’est pas le seul « consultant » employé par la maréchaussée d’Altdorf, puisque le Chasseur de Sorcières Marius van Sandt est également sur les lieux du crime quand le Sage Détective et son valet dissipé (Vido) arrivent. Van Sandt a été autorisé par le Dir’ Cab’ de Karl Franz, Otto von Bitternach, à enquêter sur ce cas et sur les six autres très similaires s’étant produit au cours des nuits précédentes, car le traqueur est sur la piste d’un loup garou qu’il soupçonne être responsable des récentes tueries. Les deux hommes acceptent de collaborer sur l’affaire afin de tenter de la résoudre le plus rapidement et discrètement possible, et pendant que van Sandt reste sur le terrain, Konniger décide d’aller rendre une petite visite à l’un de ses informants particuliers, le poète bretonnien Valois de Simone.

Ce dernier, dont les écrits enfiévrés n’ont pas été compris par la critique et injustement taxés de subversion chaotique, a gagné une résidence permanente dans l’asile municipal d’Altdorf, et continue son œuvre d’avant-garde en gravant les murs de sa cellule avec cure-dent rouillé. Si la discussion entre le dément et celui qui fut son avocat lors de son procès en hérésie ne semble pas voler bien haut pour le brave Vido, Konniger sort de l’entrevue avec sa tête des bons jours, certain d’avoir acquis une information capitale pour la suite des événements. Et c’est heureux car le loup garou en maraude n’a pas relâché ses efforts carnassiers : les deux compères sont donc sommés de se rendre sur une nouvelle scène de crime, hautement symbolique, la Konigsplatz. Ils y retrouvent van Sandt, qui trépigne d’impatience à l’idée de mettre la main au collet de sa proie, et entraine rapidement Konniger vers une rue adjacente où d’autres cadavres, plus récents, ont également été trouvés par la milice. Avant de partir avec le Chasseur de Sorcières, le Sherlock Holmes du Vieux Monde glisse une note manuscrite à son halfling de compagnie, et lui intime de la délivrer sans tarder à qui de droit, sans quoi il pourrait fort bien lui en cuire (à Zavant, pas à Vido)…

Début spoiler…Et en effet, le Sage Détective se retrouve rapidement dans de beaux draps lorsqu’il s’avère que van Sandt était le loup garou en question (ou plutôt, qu’il avait pris l’identité du Chasseur de Sorcières après lui avoir fait la peau dans la Drakwald1, quelques mois plus tôt). Le plan du lycanthrope était de prendre la place du fameux Konniger afin de pouvoir rendre une visite de courtoisie à Karl Franz – Loulou en veut encore à l’Empire de cette journée où il a perdu un duel de regard avec Ziggie, vingt cinq siècles plus tôt – et plaider à sa manière pour la condition animale bestiale. Un bien sombre dessein, heureusement contrecarré par la prévoyance légendaire de notre héros, qui ne se balade jamais sans sa petite bourse de poudre d’argent, dont il souffle le contenu dans le groin de son assaillant, avant de lui envoyer un Naubya Ka d’école (il a appris le bama lethwei auprès d’un maître cathayen). Tout cela aurait pu cependant très mal finir sans l’intervention providentielle et ridiculement efficace de Vaul Steiner, l’assassin officiel de l’Empereur, au moment où le loup garou reprenait ses esprits. Un lancer de dague en argent dans le cœur, et pouf malette pour Albert Lupin. L’arrivée de Steiner ne devait cependant rien au hasard, car c’est vers lui que Konniger avait envoyé Vido quelques minutes auparavant. Reste que si Loulou avait fait preuve d’originalité et entraîné sa cible sur la piste de danse du Macumba ou dans une galerie d’art contemporain au lieu d’opter pour l’ultra cliché cimetière abandonné, Konniger l’aurait eu dans le baba. Comme quoi, le conformisme est une maladie mortelle, tenez-le vous pour dit ! Fin spoiler

: Les loups garous auraient selon Rennie le pouvoir de prendre l’apparence de leurs victimes, en plus de s’accaparer leurs souvenirs et connaissances.

AVIS :

Gordon Rennie trousse une petite aventure à haute teneur en suspens et en fluff pour sa longueur modeste (13 pages), ce qui témoigne à la fois d’une bonne maîtrise narrative et scénaristique (logique de la part d’un auteur de comics) et d’un intérêt fort pour le background de Warhammer Fantasy Battle. Le mystère planant sur l’identité du loup garou n’est certes pas à l’épreuve de la sagacité d’un lecteur attentif et habitué aux codes du genre, même à la première lecture, mais l’œuvre reste d’une facture tout à fait remarquable quand on la compare aux standards, passés et actuels, de la Black Library. A ranger dans la même catégorie que ‘The Case of the Scarlet Cell’ : si vous avez aimé l’une, vous apprécierez l’autre.

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Black Gold – D. Abnett [40K] – #15 :

INTRIGUE :

40K_Black GoldSur la planète Rosetta, qui n’est ni petite, ni verte, une congrégation de 10 Space Marines du Chapitre des Iron Snakes est sur le point de débuter une mission de la plus haute importance : reprendre le contrôle d’un champ pétrolifère1, approvisionnant en carburant les forces motorisées de la Garde Impériale sur une douzaine de théâtres aux alentours. Ça en fait des comédies musicales, je sais. Avant que les choses sérieuses ne commencent, il convient cependant de céder à la tradition ancestrale du Chapitre, qui consiste à… humecter un rocher. Mais attention, pas avec n’importe quelle eau, malheureux. Seulement avec celle issue des océans d’Ithaka, où les Iron Snakes coulent des jours heureux (et c’est bien normal, le fer ne flotte pas). Ceci fait, l’escouade du Sergent Raphon2 (font font font les petites marionnetteuuuuh), accompagnée de l’Apothicaire/porteur de gourde Memnes, part à pinces à travers le désert de sel qui recouvre Rosetta en direction de sa cible. Comme l’a expliqué l’illustre Petrok lui-même pendant le briefing, cette mission requiert un sens du timing impeccable, en raison d’une particularité que nous pourrions qualifier de systémique. Rosetta orbite en effet autour de trois soleils, et la triple aube produit pendant un court laps de temps un jeu d’ombres et de lumières idéal pour lancer un assaut sans attirer l’attention des défenseurs. Dont acte.

Le début de l’opération se passe aussi bien que possible, l’attaque sneaky des Snakes prenant les quelques cultistes de faction – car c’est le vilain Chaos qui responsable de ce détournement de ressources capitales à l’effort de guerre impérial – totalement au dépourvu. Ça flingue et ça démembre dans la joie et la bonne humeur, jusqu’à ce que le frère Chilles perde son chill, puis sa vie, d’un tir de bolt en plein torse. It’s all fun and games until someone loses an eye(ron snake), comme dit le proverbe. Le responsable n’est autre qu’un crasseux et dégoûtant Dark Tusk, un cadre de Space Marines du Chaos inféodé à Nurgle3. Bien que le faquin se fasse prestement corriger par les camarades du défunt serpent, l’ambiance retombe d’un coup, et les actes d’humeur se multiplient du côté impérial. Bien que cela débloque le stratagème de bataille STRIKE hard pour nos héros, Raphon a besoin de recadrer ses ouailles avant qu’elles oublient pourquoi elles sont là, ce qui est tout de même inquiétant de la part de Space Marines loyalistes. Au bout du compte, les Iron Snakes parviennent à s’emparer des lieux, mais perdent encore deux des leurs dans la mêlée, dont ce fragile Raphon, qui réussit l’exploit de mourir d’une hémorragie consécutive à un bête empalement (et l’organe de Larraman, c’est pour les grox ?). Avant de décédey, il a toutefois le temps de faire don de sa griffe éclair au frère Priad – a.k.a. the Big Lebowlski – le désignant comme le nouvel officier de l’escouade, et de sa glande progénoïde à Memnes, qui achève littéralement le vétéran pendant l’extraction de la précieuse vésicule. Et pas avec son narthecium, hein : le bougre fait un arrêt cardiaque pendant l’opération. C’est bien la peine d’avoir deux cœurs, franchement.

Devenu manager dans des circonstances difficiles, Priad se fait également trahir par le scénario. Une analyse rapide de la qualité du pétrole extrait du champ révèle en effet que l’hydrocarbure est pollué par le Chaos (???), ce qui le rend évidemment impropre à l’utilisation. Raison de plus pour passer aux énergies renouvelables, moi je dis. Il faut se rendre à l’évidence : cette mission ne sera pas le succès escompté, et la mort de Chilles, Maced et Raphon est encore plus dure à avaler. Philosophe, le vénérable Apothicaire Memnes réconforte toutefois son jeune collègue en lui rappelant que l’important, c’est de particiPépé. Il ne reste plus qu’aux survivants à saboter la station pour empêcher le Chaos de mettre le tentacule sur ce qu’il cherchait à récupérer en capturant le champ pétrolifère, avant de se faire extraire en Thunderhawk. L’ambiance est logiquement morose de retour en orbite, mais comme les traditions sont importantes, les Iron Snakes se réconfortent en faisant tourner une flasque d’amasec eau de mer (toujours d’Ithaka, évidemment). On comprend mieux pourquoi ils ont mauvaise humeur…

1 : La nouvelle est tellement vieille que le promotheum n’existait pas encore à l’époque.
2 : À ne pas confondre avec le Sergent Rafen bien sûr. Another hard to swallow pill, I know.
3 : Ce qui est bizarre car les cultistes humains ont les couleurs de Tzeentch…

AVIS :

Black Gold’ a été la première confrontation entre deux monstres sacrés de 40K : Dan Abnett d’un côté, et la figure du Space Marines de l’autre. Bien que le premier ait réussi à maîtriser un sujet qui, de son propre aveu, ne le passionnait pas à l’origine du fait de son absence de failles, on perçoit effectivement dans cette courte nouvelle des lourdeurs inhabituelles de la part d’un cador tel que lui. La caractérisation des personnages est ainsi très limitée, ce qui tranche avec l’aisance avec laquelle Abnett parvient en temps normal à donner vie à ses protagonistes ; l’intrigue ne présente aucune surprise, et je me suis même surpris à déceler quelques faux raccords/incohérences fluffiques au détour des lignes, signe révélateur du peu d’investissement de l’auteur dans ce qui a sûrement été une commande de la BL pour voir si le (à l’époque) jeune prodige était aussi capable avec l’Astartes qu’avec le Garde Impérial classique. Comme quatre autres nouvelles consacrées aux Ails-Rhône Shnecks ont suivi, et qu’un recueil plus conséquent leur a même été dédié, j’en déduis qu’il a réussi son coup, mais je sors tout de même déçu de cette lecture.

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A Gentleman’s War – N. Rutledge [WFB] – #15 :

INTRIGUE :

WFB_A Gentleman's WarLa première campagne militaire d’Otto von Eisenkopf, jeune noble impérial à la tête farcie de glorieuses batailles et d’affrontements chevaleresques, ne se passe pas comme il l’avait prévu. Assigné à un contingent de Pistoliers mercenaires, menés par un vétéran à la barbe douteuse et à l’accent suspect (Molders), Otto fait ses classes d’une manière un peu trop terre à terre (comprendre qu’il rampe beaucoup dans les broussailles) à son goût. Chargé par le Graf von Eisenkopf, père de notre héros, de repérer l’avance d’une colonne de Bretonniens en vadrouille au bord de la frontière entre les deux nations, les tireurs montés ont tendu une embuscade à leurs adversaires, mais Otto, faisant mentir son patronyme, n’arrive pas à garder la tête froide et se plante soudainement au milieu du chemin pour annoncer aux éclaireurs du Duc de Boncenne qu’ils sont en état d’arrestation. Plus honorable, certes, mais beaucoup moins efficace. Fort heureusement pour les impériaux, Molders et ses hommes ne sont pas nés de la dernière pluie et parviennent à refermer leur piège sans trop de mal, tandis qu’Otto a l’occasion de rayer une ligne de sa bucket list en vainquant le chevalier menant les troupes bretoniennes en duel honorable, après un affrontement épique d’au moins deux secondes. Faisant honneur au code de la guerre entre gens riches, von Eisenkopf traite son prisonnier, Guillaume de Montvert, avec tous les égards dus à son rang, allant même jusqu’à lui laisser sa tente et son écuyer lors de son retour au campement du Graf. Un vrai gentilhomme.

Cette prévenance lui joue toutefois des tours car elle l’empêche de faire son rapport à son père avant que le Pistolier lui servant de nounou, une brute dénommée Lutyens, le fasse, et bitche méchamment sur le comportement inadapté du nobliau. Otto n’a pas le temps de s’appesantir sur le sujet toutefois, ni de déguster quelques cuisses de grenouille avec de Montvert au dîner, comme il l’avait prévu, car le Graf renvoie aussi sec les Pistoliers reconnaître la voie probable de l’arrivée des troupes du Duc, dont les vues sur les mines de charbon impériales ne font de mystère pour personne. C’est une petite victoire pour Otto, qui soutenait contre l’avis de Molders que les nobles et honnêtes Bretonniens passeraient forcément par la grand-route, en jouant du luth et déclamant des quatrains à la gloire de la Dame, avec un béret et une baguette pas trop cuite sous le bras. Mais avant de crier victoire (pas trop fort pour ne pas se faire repérer, évidemment), il faut galoper pendant une nuit depuis le camp impérial, une expérience qui laisse Toto un peu déconfit.

La déconvenue ne s’arrête pas là toutefois, puisqu’il s’avère rapidement que les Bretonniens ne sont pas en dessous du recours à de basses manœuvres, comme le cosplay de chevaliers pour faire croire à leurs ennemis que leur force principale passe bien par la grand-route. Cette supercherie ne résiste cependant pas à la longue-vue de facture naine de Molders, qui repart aussi sec vers le camp pour prévenir le Graf de la combine, un Otto bien penaud et de plus en plus fatigué à la traîne. Pour ne rien arranger, ce dernier apprend à son retour que le fourbe de Montvert a abusé de son hospitalité en volant un cheval et (probablement) assassinant son écuyer au passage, contre toutes les règles de la chevalerie. Et il faut déjà se remettre en selle, car il reste une chance aux impériaux de contrecarrer les plans de de Boncenne en tendant une embuscade à ses troupes alors que ces dernières progressent vers l’Empire.

Quelques heures de canasson plus tard, l’avant-garde du Graf débusque un site parfait pour un guet apens, et en attendant que l’ennemi daigne pointer le bout de ses chausses, Otto peut enfin se reposer un peu et méditer sur la réalité de la guerre, qui diffère beaucoup de ce à quoi il s’attendait, et pas en bien. Notre héros est toutefois suffisamment lucide et intègre pour réaliser que cette remise en question lui a été salutaire, en lui permettant de réévaluer la piètre opinion qu’il avait de Molders, des Pistoliers, des mercenaires, des Pistoliers mercenaires, et des tactiques de son père (dans le désordre). Lorsque la bataille finit par éclater, le jeune premier a finalement l’occasion de s’illustrer, en sauvant la vie de son capitaine, puis en vainquant à nouveau le meneur ennemi (de Boncenne) en combat singulier, au terme d’un duel bien plus accroché (et plus mortel aussi, le Duc perdant la tête à la fin du troisième round) que celui contre ce poseur de Guillaume de Montvert. Tout est bien qui finit bien en Karlfrancie, et Otto von Eisenkopf aura appris une bonne leçon au cours de cette première campagne : mieux vaut éviter de s’allonger sur une fourmilière, quand on peut éviter.

AVIS :

Neil Rutledge nous sert une nouvelle de campagne militaire/initiation d’un blanc bec à la vie assez convaincante, dans la même veine que ce Dan Abnett avait fait dans ‘Les Cavaliers de la Mort’, en un peu plus léger toutefois. Je pense que j’aurais davantage aimé ce ‘A Gentleman’s War’ si l’auteur avait choisi d’être un peu plus grimdark dans son approche, les Bretonniens de Rutledge tenant plus du stéréotype de Français moyen-âgeux à la sauce Monty Python que d’authentiques fidèles de la Dame du Lac, même si l’ensemble est encore une fois très correct. Un autre petit regret porte sur le choix de Rutledge de laisser tomber le personnage de Guillaume de Montvert, traître en puissance dont la duplicité ne faisait pas de doute, après l’arrivée au camp impérial, c’est-à-dire avant qu’il ait pu exprimer son véritable potentiel dramatique. Quelques petits détails que Neil Rutledge, et/ou son éditeur au sein de la BL, auraient pu travailler davantage, mais rien de rédhibitoire non plus.

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Hellbreak – B. Counter [40K] – #15 :

INTRIGUE :

40K_HellbreakLe Commissaire von Klas a eu la mauvaise idée d’être capturé vivant par les Eldars Noirs lorsque ces derniers ont annihilé son régiment, et son séjour à Commoragh se passe aussi bien, ou mal (c’est selon), que l’on peut l’imaginer. Identifié par ses tortionnaires comme officier, il a la chance douteuse de participer aux jeux donnés par la cabale de l’Échine Rompue (Broken Spine) en l’honneur de son maître, le positivement ancien Archon Kypselon. Rustre jusqu’au bout des ongles, von Klas a l’outrecuidance de remporter son duel face à une Céraste au style trop chargé pour son propre bien, et d’une manière si peu élégante (il lui pète le pif avant de l’empaler sur sa propre hallebarde… honteux) qu’il est prestement condamné à être écorché vif par l’Haemonculus personnel de Kypselon.

Survivre aux Intervilles1 de Commoragh a toutefois boosté le moral, déjà naturellement élevé, de notre brave Commissaire. Lorsque son tortionnaire (Verredaek) fait l’erreur de se présenter à lui sans l’avoir attaché au préalable, confiant qu’il est dans son aura de terreur pour figer sur place son nouveau sujet d’expérimentation, von Klas ne tarde pas à lui faire goûter à sa propre médecine, et s’échappe après lui avoir fauché sa main rasoir et son pistolet à aiguille, recrutant dans des geôles adjacentes quatre autres Gardes Impériaux malchanceux gardés en réserve par Verredaek. L’Haemonculus agressé n’aura guère le temps de s’excuser de sa nullité crasse auprès de son impitoyable employeur, qui le fait exécuter par sa Succube de compagnie (Yae) pour faute lourde, avant d’ordonner à cette dernière d’aller mettre un terme à l’excursion des Mon-keigh dans son territoire. Après tout, il a un rival ambitieux (Uergax de la cabale du Fil de la Lame) à mater, et ne peut se permettre qu’une bande de primates mal dégrossis sèment la pagaille à domicile.

Malheureusement pour Kyky, Yae ne sera pas très efficace dans sa traque, à tel point que von Klas et sa petite escouade parviennent à s’emparer de l’usine du Sybarite Laeveq, et des deux mille esclaves humains utilisés par ce dernier comme main d’œuvre, multipliant leur potentiel de nuisance. Pire, les mutins choisissent de se réfugier dans le temple que l’Archonte a fait élever à sa gloire (c’est un gars simple), ce qui constitue un crime de lèse-majesté impardonnable. Tant pis pour la prudence, Kypselon réunit le ban et l’arrière-ban de sa cabale et envoie ses pillards reprendre possession de la basilique gothique (elle est construite uniquement en os) aux zadistes en furie. Il commet toutefois l’erreur de sous-estimer la résolution du meneur adverse, trop content de faire s’effondrer le plafond de l’édifice sur les combattants au plus fort de la bataille, même si cela précipite l’écrasement de son insurrection raciale. Écrasé pour écrasé, autant que les Eldars Noirs participent à cette soirée crêpes, pas vrai ?

Début spoiler…La nouvelle se termine dans une cellule de la cabale, où un von Klas en bien piteux état après son coup d’éclat languit des jours durant, jusqu’à ce que ses geôliers lui amènent un compagnon d’infortune, qui se révèle être Kypselon en personne. Comme l’Archonte l’apprend à son valeureux adversaire, sa rébellion a coûté très cher à l’Echine Rompue, aussi bien en ressources qu’en cabalites, et ses rivaux du Fil de la Lame ont profité de ce moment de faiblesse pour attaquer et annihiler ce qu’il lui restait de suivants. Bien que von Klas sache qu’il ne lui reste plus longtemps à vivre, il peut toutefois savourer l’indéniable victoire qu’il a remporté sur son adversaire, qui n’aura certainement pas la chance de bénéficier de la mort rapide dont le Commissaire agonisant héritera…Fin spoiler

1 : Je m’interroge sur la pertinence de mettre un -s, la cité drukhari n’ayant pas d’équivalent.

AVIS :

Ben Counter nous plonge dans l’enfer de Commoragh avec maestria dans cette variation sur le thème de Spartacus, qui illustre parfaitement la cruauté des Eldars Noirs et la défiance de la Garde Impériale face à l’adversité. Au final, ces deux factions sortent grandies de ce ‘Hellbreak’, et le lecteur bénéficie d’une histoire purement grimdark, comme sa conclusion aussi satisfaisante que nihiliste le démontre pleinement. De la nouvelle 40K comme on aime.

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The Judas Goat – R. Earl [WFB] – #15 :

INTRIGUE :

Le Capitaine Gustav Mollens, vétéran blanchi sous le harnais mais un peu trop appréciatif de la dive bouteille, a écopé de la peu glorieuse mais nécessaire mission de ramener de nouvelles recrues depuis l’arrière-pays de Nuln jusqu’à la cité. À en juger par son besoin de poignarder à mort les blancs becs pris par des envies de rebellions, et par le taux élevé de désertion qui frappe son contingent, il ne doit pas faire un super boulot. Dans son malheur, Mollens a toutefois la chance d’avoir trouvé dans l’un de ses sous-fifres, un dénommé Gevalt, un second secourable et digne de confiance, qui l’aide à maintenir un peu d’ordre dans les rangs et qui ne rechigne pas à partager les tours de garde pour éviter que les volontaires démotivés par leurs six heures de marche quotidienne, avec paquetage complet sur le dos et chaussures à taille et forme unique (pied groit, 42 ¾), ne prenne la poudre d’escampette. Ce partage des tâches permet à Mollens de faire des insomnies plus longues sur son lit de camp, encore traumatisé qu’il est par sa rencontre tragique avec les Skavens dans les égouts de Nuln, cinq ans plus tôt. Seul survivant de son unité, il a depuis fait des pieds et des mains pour éviter de croiser de nouveau un raton de près ou de loin, et l’alcoolisme thérapeutique aidant, a fini par être relégué à cette affectation de second ordre, mais au moins au grand air.

Alors qu’il était en train de remonter un peu la pente, en tirant joie et fierté de l’application avec laquelle ses hommes apprennent le maniement de la lance sous sa férule, un événement fortuit et traumatique vient remettre la tête enfarinée de notre héros au fond de son havresac. Ayant surpris Gevalt s’enfoncer seul dans la forêt bordant le bivouac alors qu’il était de garde, Mollens prit le parti de suivre discrètement son faux jeton de second pour lui apprendre à décevoir les attentes d’un ivrogne gradé. Cependant, la petite bastonnade pour l’exemple qu’il prévoyait d’infliger au tire au flanc doit être remise à plus tard : si Gevalt a éprouvé le besoin de s’absenter, c’est pour s’entretenir avec son patron, qui se trouve être un Skaven, accompagné d’un Rat Ogre de fort beau gabarit. Tétanisé par l’apparition impromptue de sa Némésis, Mollens assiste à la scène et comprend qu’en fait de déserteurs, c’était Gevalt qui s’arrangeait pour envoyer des camarades drogués se faire cueillir comme des champignons au milieu de la nuit. La duplicité de Gege étant établie, il lui faut maintenant trouver un motif suffisant et irréfutable pour passer à l’action et le mettre hors d’état de nuire.

L’occasion se présente le lendemain, lorsque Mollens surprend Gevalt en train de faire boire du GHB à un camarade autour du feu de camp. Ayant feint le sommeil pour forcer la main du traître, Mo’ se « réveille » juste à temps pour contrecarrer le plan de ce dernier, mais lorsqu’il le confronte devant le reste de ses hommes, qu’il a fait réveiller pour l’occasion, le Capitaine manque de se faire arracher la jugulaire par l’agent double, qui avait décidément les dents longues. Mis KO par son adversaire1, lui-même maitrisé et ligoté par le reste des recrues après qu’il eut mis au tapis l’officier, Mollens émerge péniblement de sa torpeur, et décide qu’il est grand temps pour lui d’affronter sa peur. Il part donc seul dans la forêt, jouant le rôle de l’innocente brebis jetée en pâture aux souris, et indique à ses hommes de le suivre cinq minutes plus tard pour prendre les ratons à leur propre piège. Comme il le dit lui-même, un plan aussi simple n’a aucune chance d’échouer. Béni soit l’esprit trop étroit pour le doute, tout de même.

Et en effet, Mollens a un long (4 minutes 58 secondes précisément, il a même le temps d’observer les manucures de l’adversaire avec un soin particulier) moment de solitude lorsque les hommes, les rats et les Hommes Rats finissent par lui tomber dessus. Car les désertés n’ont pas été expédiés dans les galeries du Sous Monde, ou transformés en croquettes pour Vermines de Choc, mais changés en sorte de Zombies commandés par le Maître de Meute/Prophète Gris/Assassin2, toujours accompagné de son garde du corps bodybuildé. Ce combat peut paraître inégal, mais ce n’est pas bien connaître Gustav Mollens, qui one-shot le Rat Ogre d’un coup de lance bien placé… puis rate toutes ses attaques contre son propriétaire, et se fait à nouveau sauver par l’intervention de ses camarades, dont l’arrivée contraint le raton à se téléporter en sécurité. Après avoir achevé les souffrances des Zombifiés, Momo et ses ouailles rentrent au camp où les attendent le cadavre désarticulé et défiguré de Gevalt, sans aucun doute victime de la vengeance de son rat-pia de boss. Qu’importe, le complot a été contrecarré, et Mollens se sent désormais d’attaque à repartir casser du mutant dans les égouts, en souvenir des camarades, anciens et nouveaux, qu’il a perdus sous les griffes des Skavens. Best redemption arc ever since il y a 13 14 minutes, tbh.

1 : La honte tout de même quand on est sensé avoir 4 d’Endurance et 2 PV, face à un mec à 1 Attaque de Force 3 !
2 : Mickey a un Rat Ogre de compagnie, un bâton magique rétroéclairé et manie une dague empoisonnée avec la queue. Ca fait beaucoup pour un seul rat.

AVIS :

Robert Earl a prouvé qu’il savait écrire pour les Skavens (‘The Barbed Wire Cat’), mais cette maîtrise n’était apparemment pas innée chez lui, comme ce mollasson et fluffiquement improbable ‘The Judas Goat1 l’atteste. Cela ne se perçoit pas dans la chronique ci-dessus, mais le plus clair de la nouvelle est consacrée aux sensations et sentiments éprouvés par Mollens, qui varient assez fortement en fonction de son alcoolémie, ses heures de sommeil, ses syndromes post-traumatiques, ou encore le nombre de pifs de recrues fracassés pour l’exemple. Et là où ça coince, c’est qu’Earl n’est pas l’auteur de la BL le plus doué pour rendre ses personnages, si ce n’est sympathiques, au moins intéressants : la vie et l’œuvre de Gus’ Mollens, poivrot ratophobe, deviennent donc rapidement soûlantes. Sans autres personnages un tant soit peu développés pour servir de contrepoint au pas si brave que ça Capitaine (Gevalt n’est guère qu’une présence en arrière plan, et le Sergent que Mollens nomme pour prendre sa place après que sa traîtrise ait été révélé est tellement inutile que je n’ai même pas jugé bon d’en parler), le soliloque narratif de notre héros tourne au bide, et on pousse un soupir de soulagement lorsque le rideau tombe finalement. La Black Library comporte suffisamment de variations sur le thème Empire vs Skavens pour se contenter de l’avorton de la litière, m’est avis.

1 : Au cas où vous vous demanderiez, il s’agit d’une expression consacrée, désignant les animaux d’élevage dressés pour emmener leurs semblables à l’abattoir.

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Apothecary’s Honour – S. Jowett [40K] – #16 :

INTRIGUE :

40K_Apothecary's HonnorDéployée sur le monde d’Antillis IV pour aider les autorités locales à se défaire d’une invasion chaotique plus grave qu’anticipée, la Seconde Compagnie du Chapitre des Avenging Sons, menée par le Capitaine Selleus, s’est battue vaillamment mais cela n’a pas suffi. Isolé au milieu des bourrasques de cendres humaines conjurées par un géo-ingénieur plus ravagé du bulbe que la moyenne pour combattre les effets du changement climatique (eh, c’est un aérosol comme un autre), l’Apothicaire Korpus se consacre toutefois sans faiblir à son sacerdoce : récupérer les glandes progénoïdes de ses camarades tombés au combat. Il sait en effet qu’il s’agit d’une partie vitale de l’effort de guerre de l’Adeptus Astartes, qui se retrouverait rapidement réduit à peau carapace noire de chagrin sans la récolte et la réimplantation dans de nouveaux hôtes de ces précieux kystes. On le suit ainsi jusqu’au quasi-cadavre du Sergent Pereus, blessé à mort1 lors d’une escarmouche contre une bande de Space Marines du Chaos, qu’il accompagne pieusement dans ses derniers instants et déleste de ses mirifiques glandes, stockées dans le petit frigo personnel qu’il trimballe sur son armure. À la guerre comme à la guerre.

Sur le chemin du retour vers le QG château (en français dans le texte) de sa Compagnie, Korpus reçoit un message alarmant de la part de Selleus, lui annonçant que la campagne est perdue et lui ordonnant de se diriger sans tarder vers le spatioport où sont garés les Thunderhawks des Avenging Sons, et de les utiliser pour rejoindre leur vaisseau amiral. Il est en effet capital de renvoyer les Avenging Glandes jusqu’à l’Apothicarium chapitral, on a bien compris. De son côté, le Capitaine et ses derniers hommes préfèrent se faire exploser dans leur bastion plutôt que de s’offrir un dernier carré digne de ce nom, ce qui surprend fortement Korpus. Cela dit, un ordre est un ordre, et le zélé Apothicaire part donc en petites foulées en direction du hangar à aéronefs mis à disposition par les autorités d’Antillis IV, en espérant que ce dernier n’ait pas déjà été conquis par l’ennemi.

En chemin, notre héros tombe par hasard sur une escouade de Scouts dont on était sans nouvelles depuis plus d’une journée et que tout le monde avait donc considéré comme perdue corps et biens (faut pas se retrouver en zone blanche au 41ème millénaire). Coincés dans une friche industrielle par une horde de World Eaters ricanant à défaut d’être très doués, les novices auraient rapidement perdus la tête sans l’intervention décisive de Korpus, dont le poing énergétique – un choix d’équipement un peu bizarre pour quelqu’un sensé effectuer des actions chirurgicales sur le champ de bataille, mais passons – et l’effroyable mauvaise humeur, appelée Cœur Vengeur par les initiés, règlent rapidement leur compte aux affreux.

Au bout d’un voyage sans trop d’encombres, les survivants finissent par arriver jusqu’au spatioport et commencent à retaper le Thunderhawk le moins amoché du lot afin de pouvoir s’éclipser de la planète condamnée au nez et à la barbe énergétique des Khorneux. Bien évidemment, ils n’auront pas loisir de mener à bien cette mission d’extraction furtive, une nouvelle vague de renégats leur tombant dessus sans crier gare (en même temps, il n’y avait pas de train sur place) avant que Korpus et les Scouts n’aient eu le temps de boucher tous les trous de la carlingue avec du chewing-gum. Comble de malchance, les World Eaters sont menés par un Dreadnought équipé d’un canon laser, dont la portée risque d’être fatale au coucou déglingué des Avenging Sons. L’Apothicaire décide alors de mener une charge suicide avec les novices afin de permettre au Thunderhawk piloté par le seul Scout ayant passé son permis ULM de s’échapper, après avoir déposé ses précieuses glandes dans le minibar de l’appareil, bien sûr.

Cette contre-attaque inspirée est couronnée de succès, Korpus faisant entrer son poing énergétique en surchauffe après l’avoir coincé sous un piston du Dreadnought adverse, vaporisant la machine impie ainsi qu’une bonne partie de ses suivants, au modique prix d’un évanouissement pour notre viril héros (tous les Scouts meurent dans la bagarre par contre, mais on s’en fout un peu). Il a toutefois accompli brillamment sa mission, pas vrai ?

Début spoiler…Eh bien, non. La mauvaise nouvelle lui est transmise par un Space Marine hérétique ayant autrefois servi comme Apothicaire et qui a fermement attaché Korpus sur un chevalet d’opération dans l’attente de son réveil. Une légende noire parmi l’Adeptus Astartes, responsable de la création de nombreux monstres génétiquement modifiés se battant dans les rangs des Légions renégates. Je veux bien sûr parler de Fab…rikus. Si, si. Toute ressemblance avec un personnage nommé serait évidemment totalement fortuite. Fab’ révèle à son collègue et néanmoins prisonnier qu’il a été chargé par ses patrons chaotiques de trouver un moyen de recruter en masse de nouveaux Space Marines, ce qui n’est pas facile du fait de l’influence corruptrice du Warp sur les glandes progénoïdes des Astartes vétérans. Une seule solution pour contourner ce problème : aller taper dans les stocks de ces saintes nitouches de loyalistes, et c’était bien le but de la campagne d’Antillis IV. Cependant, les dernières actions du Capitaine Selleus ont fait capoter ce plan machiavélique, et l’entière opération se serait terminée par un fiasco retentissant pour les traîtres sans l’étourderie de Korpus, qui a « oublié » de prélever ses propres glandes et de les déposer dans le frigo du Thunderhawk avant de foncer dans le tas comme un demeuré. La boulette. Notre histoire se termine sur la scène pénible de l’opération sans anesthésie pratiquée sur ce glandu – et c’est bien le problème – d’Apothicaire, qui se désole en son for intérieur de sa propre stupidité. Charité bien ordonnée...Fin spoiler

1 : Je tique un peu du fait que Pereus se soit auto-diagnostiqué perdu pour la cause, sans que Korpus juge bon de faire son boulot de medic et de vérifier par lui-même la gravité de l’état de son camarade. Après tout, qu’est-ce qu’une paraplégie quand on possède la technologie nécessaire pour créer des Dreadnoughts ?

AVIS :

Simon Jowett signe une nouvelle franchement vintage pour le lecteur contemporain (qui sera peut-être surpris que le nom de Roboute Guilliman n’apparaisse pas une seule fois dans une histoire qui parle des Avenging Sons), explorant une des particularités du background des Space Marines : le rôle crucial des glandes progénoïdes dans leur organisation et leur culture.

Si l’idée est bonne, la réalisation n’est toutefois pas au-dessus de tout reproche : on passe à mes yeux beaucoup trop de temps à voir voler les bolts dans cette nouvelle, sans que l’auteur se consacre à faire monter la pression autour de Korpus, ni ne le confronte à des décisions véritablement difficiles, où il aurait eu à choisir entre son fameux honneur d’Apothicaire, et la mission vitale confiée par son supérieur. A cela viennent s’ajouter des petits irritants sans conséquence pour la structure de l’histoire, mais pénible à lire quoi qu’il en soit, comme la nullité crasse des World Eaters qui servent d’opposition aux vertueux Avenging Sons, pas foutus de régler leur compte à cinq Scouts et un Apothicaire mouflé même avec l’avantage du nombre.

On peut toutefois mettre au crédit de Jowett un twist final pas trop mal fichu (même si Korpus et Fabrikus ont vraiment une haute idée d’eux-mêmes pour penser que ce micro-événement risque de faire basculer le rapport de forces entre Imperium et Chaos) et quelques infos fluff relevant plus de la curiosité académique que de la source canonique1, cependant.

1 : C’est le même Jowett qui a doté le Chapitre des Iron Hearts de casque de VR pour s’entraîner au combat, et baptisé d’autorité un des Primarques disparus (voir ‘Hell in a Bottle’) : ses contributions au fluff Space Marine doivent être pris avec 72 pas de recul.

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The Ultimate Ritual – N. Jones & W. King [WFB] – #16 :

INTRIGUE :

Sur le campus de l’université de Nuln, deux hommes s’apprêtent à tenter une expérience à haut risque pour faire progresser les connaissances arcaniques de l’Empire. L’enthousiasme n’est pas égal entre le jeune Lothar von Diehl, qui piaffe littéralement d’impatience, et son ancien professeur Gerhardt Kleinhoffer, dont le trouillomètre se rapproche dangereusement de zéro au fur et à mesure que les préparatifs s’achèvent. C’est pourtant lui qui a traduit ‘Le Livre des Changements’ d’où von Diehl a tiré la formule de l’ultime rituel, promettant rien de moins qu’un aller-retour jusqu’à la Mer des Âmes, cette dimension parallèle où se trouve le loft des Dieux du Chaos. Mais de la théorie à la pratique, il y a un monde, et il faut toute la force de persuasion (et la superbe éloquence) de son disciple pour que Kleinhoffer accepte de jouer son rôle dans la suite des événements.

Si von Diehl a autant insisté pour avoir un témoin, c’est que son billet pour le néant est un Pass Duo, et que le Disque de Tzeentch qu’il invoque pour partir en vadrouille ne consent à partir qu’à plein, c’est à dire avec deux personnes sur le dos. Je peux comprendre que lorsqu’on vient d’aussi loin que le Warp, on apprécie de ne pas faire le voyage à vide, ceci dit. Une fois les usagers installés et les ceintures bouclées, le sous-boc volant fend l’air et l’espace, et part en direction du pôle Nord pour passer sur le périphérique cosmique. Le go fast qui s’en suit n’est pas de tout repos, car le Démon se fait prendre en chasse par des congénères affamés et attirés par l’âme de ses passagers. Fort heureusement, le Disque s’avère être un as du volant, qui parvient à semer ses poursuivants en faisant des sauts de puce de l’Immaterium au Materium, visitant quelques planètes très 40K dans l’esprit au passage. Enfin, nos héros arrivent devant la chambre du Grand Architecte, qui, coup de chance, accepte de les recevoir sans tarder.

Tzeentch est toutefois une divinité surbookée, qui n’a pas le temps de donner dans les mondanités. Il demande donc à ses visiteurs ce qui les amène et ce qu’il peut faire pour eux, et le manque de préparation (et la terreur panique) de Kleinhoffer lui joue un vilain tour. Comptant sur son acolyte pour meubler le blanc malaisant qui s’installe après la demande divine, il se fait avoir dans les grandes largeurs lorsque von Diehl explique candidement que l’estimé professeur est à la recherche de savoir. « OK » répond Tzeentch, qui, un peu troll sur les bords, débute un transfert de 999 Eo en direction du cerveau du pauvre prof, dont le cerveau entre en surchauffe au 3,963,635,619ème meme de Pepe the Frog qu’il reçoit en l’espace d’une demi-seconde. Von Diehl, qui a lancé un sort de streaming en pirate de la base de données de son acolyte, peut quant à lui déguster cette dankness avec plus de confort, même s’il doit cependant jurer allégeance à Tzeentch pour pouvoir repartir jusque dans le Monde Qui Etait Encore. C’était son projet depuis le début toutefois, et il n’a aucune difficulté à se délester de son âme en échange d’un apport infini de contenu Reddit. Revenu dans sa piaule universitaire, avec un Kleinhoffer rempli jusqu’au lorgnon d’infos confidentielles, et à peu près aussi incontinent que Wikileaks, von Diehl peut désormais se consacrer à préparer la Fin des Temps… ou à devenir une légende de 9Gag. Au choix.

AVIS :

Petite nouvelle d’ambiance et de fluff écrite à quatre mains, ‘The Ultimate Ritual’ multiplie les clins d’œil (à l’œuvre de King1 mais également à Warhammer 40.000) et offre au lecteur une visite romancée inédite (à ma connaissance) de la Mer des Âmes, ainsi qu’un authentique dialogue entre de simples mortels et un Dieu du Chaos, ce qui n’est pas banal. Par contre en termes d’intrigue, c’est aussi terne et sans surprise qu’un tronçon d’autoroute hors heures de pointe et vacances scolaires : peu étonnant pour une nouvelle de seulement treize pages, mais certains contributeurs de la BL ont prouvé qu’ils étaient capables de faire plus rythmé que ça sur ce genre de format, donc on peut légitimement reprocher à messieurs Jones et King de ne pas s’être trop foulés sur ce coup là.

1 : Les von Diehl sont la lignée récurrente de l’auteur, puisqu’on croise Kurt dans ‘The Laughter of Dark Gods’ et Gottfried et Manfred dans ‘Wolf Riders’. Famille assez malchanceuse au final car tous ses membres ont connu une mort violente et souvent chaotique (pas nécessairement dans cet ordre).

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Baptism of Fire – G. Rennie [40K] – #16 :

INTRIGUE :

40K_Baptism of FireLa guerre gothique vient d’être lancée par Abaddon (période emo), et le secteur éponyme a été salement amoché par les préliminaires rugueux de l’élu du Chaos. La période n’a pas que des mauvais côtés, notez, car le vide laissé par les nombreux morts et blessés que la Flotte Impériale déplore permet à de « jeunes » méritants, comme notre héros Leoten Semper, d’arriver aux affaires et de faire leurs preuves. Issu d’une longue et illustre1 lignée de marins de l’espace (à ne pas confondre avec vous savez qui), Leo n’est pas un perdreau de l’année mais c’est la première fois qu’il assume le capitanat d’un vaisseau de la taille du Lord Solar Macharius (trois kilomètres tout de même, il faut maîtriser les créneaux). Il espère donc faire bonne impression à son équipage, dont Rennie nous présente un échantillon assez représentatif, depuis le second necromundien jusqu’au bagnard recruté d’office, en passant par les Commissaire, Techno-prêtre et Navigateur de bord. Tout ce petit monde ne servant à rien pas grand-chose lors de ce Baptism of Fire, je fais donc une croix sur le tour de table.

LS a reçu pour mission de rejoindre un trio de destroyers dans un système Dolorosa afin de monter une force de combat opérationnelle et tenter de rendre la monnaie de sa pièce à ce faquin d’Abbie. Ce qu’il ne sait pas, c’est que le destin cruel a mis sur son chemin un adversaire redoutable, en la présence de Hendrik Morrau, capitaine fusionnel (et fusionné) du Contagion, autrefois connu sous le nom de Princ- Vexis. Six siècles plus tôt en effet, Morrau était un loyal sujet de l’Empereur, mais une quarantaine Warp s’étant éternisée l’a poussé, ainsi que son équipage, dans les bras gluants mais aimants de Nurgle. Depuis, il roule pour le Big 4 et s’amuse à martyriser les arrières-arrières-arrières-arrières-arrières petits-enfants de ses collègues de Flotte, grâce à son génie naturel et son expérience incomparable. Il est tellement méchant qu’il a un sidekick dénommé Adolph(us), c’est dire ! Lorsque nous faisons sa connaissance, il vient d’éparpiller façon puzzle l’escorte du LS Maki, et décide de rester tapi dans un coin du système pour surprendre un potentiel arrivant. C’est ce qui s’appelle avoir le nez creux.

Inconscient du danger, Leo Sans Papa finit par déboucher de la bretelle d’autoroute warpesque dans le secteur Dolorosa, et manque de se faire coller un poisson d’avril dans le dos par ce coquin de Morrau (qui utilise des torpilles plasma au lieu de bêtes poissons en papier, c’est plus original). Fort heureusement, le capitaine est un rookie prudent, et un regard opportun dans le rétroviseur lui permet de contrecarrer la manœuvre grâce à un super dérapage frein à main (c’est encore plus classe dans l’espace). Impressionné par les skills de son adversaire, Momo s’approche pour se présenter en bonnes et dues formes, et informer le camp adverse que la partie de chat et souris est officiellement lancée. Et en effet, le cache cache inter-dimensionnel va durer plusieurs jours, pendant lesquels le Macharius se fait malmener par son puissant et insaisissable adversaire, du Materium à l’Immaterium en passant par le Transmaterium. C’est parfois agréable de s’acharner sur plus petit que soit.

Dépassé par la situation, Leoten finit par comprendre qu’il lui faut tenter un coup de bluff pour espérer triompher de cet adversaire chevronné mais pas infaillible. Sa technique consistera à effectuer un strip tease gellerien (baisser à dessein l’intensité du champ de Geller de son vaisseau – qui est dans le Warp évidemment – pour simuler une avarie grave) afin d’attirer le Contagion à se rapprocher pour contempler son agonie… pour au final lui envoyer une volée de torpilles à bout touchant, ou presque. C’est complètement stupide comme plan ? Oui mais ça marche ici. Tel un vieux pervers incapable de se contrôler à la vue d’une culotte de lycéenne (#TortueGéniale), Morrauvash fonce dans le pruneau et se mange un panneau. Ou l’inverse. Quoi qu’il en soit, c’est une victoire nette et sans bavure pour la Flotte Impériale, et une première mission menée à bien par Leoten Semper-Et-Sans-Reproche. D’autres suivront, bien sûr…

1 : Et illustrée, en témoigne la monumentale galerie de portraits que les S conservent dans le manoir familial de <PLANETE>.

AVIS :

Gordon Rennie se frotte à l’exercice périlleux du « chapitre 01 », ou comment concilier beaucoup d’exposition et d’introduction (dans le but de mettre en place une intrigue de roman) dans un format de stand-alone. Bien que les auteurs de la Black Library se soient souvent essayés à ce tour de force narratif, peu y sont parvenus de façon convaincante, et je ne placerai pas Rennie dans cette catégorie à la lecture de ‘Baptism of Fire’. Le travail est fait de façon sérieuse, avec un soin de caractérisation de la future galerie de personnages récurrents du roman à mettre au crédit de l’auteur, mais l’amateur de nouvelles sortira lésé de ces treize pages dont plus de la moitié ne sert au final à rien dans la résolution de la mini-intrigue de ce mini-format.

L’opposition entre l’inexpérimenté Leoten et sa Nemesis corrompue est réduite à peau de chagrin (comme l’épiderme du second), et se résume à un demi-tour express – pompeusement renommé manœuvre d’Immerman ici – et à une partie de cache cache honteusement conclue en une demi-page, ce qui ne rendre pas dans ma définition de passionnant. Pire, Rennie semble avoir une compréhension très limitée de ce qu’est le Warp, en considérant cette dimension incompréhensible comme un simple filtre fuschia, dans laquelle il serait tout à fait possible pour deux vaisseaux d’échanger des volées et de se tourner autour, comme dans le Materium. J’aurais pu accepter que le Contagion soit plus à l’aise que sa proie dans cet environnement proprement démoniaque, mais le fait que le vaisseau impérial se débrouille sans trop de problème non plus, au point de baisser volontairement son champ de Geller pour appâter l’ennemi (sans conséquences néfastes pour l’équipage autre qu’un coup de colère du Techno-prêtre de garde), est disqualifiante. J’ai lu beaucoup plus de commentaires positifs que négatifs sur le dyptique gothique de Rennie, et m’attendait donc à mieux de sa part pour ce premier jet. J’espère qu’il a corrigé le tir par la suite.

1 : Ou techniquement chapitre 1 ici, puisque ‘Baptism of Fire’ sera placée au début de ‘Execution Hour’.

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Snares and Delusions – M. Farrer [40K] – #16 :

INTRIGUE :

40K_Snares &amp; DelusionsC’est un jour très spécial pour l’Apôtre Noir De Haan (Dan de son prénom) : après des millénaires passés à traquer le Vaisseau Monde de Varantha à travers la galaxie, tous les signes prédisent que l’heure de la confrontation finale est arrivée entre Word Bearers rancuniers et Eldars élusifs. Débarqué à la surface d’un monde vierge peuplé d’Exodites (rapidement matés) avec l’avant-garde de son ost, De Haan supervise la consécration du bâtiment offert par la Légion hérétique à la seule ville de la planète : la Cathédrale de la 5ème Bénédiction. Les styles jurent un peu mais c’est une attention touchante, il faut le reconnaître. Notre zélé héros est persuadé que ce monde minable dissimule des portails Warp reliés à Varantha, qu’il hait du plus profond de ses cœurs depuis le moment où les Eldars de ce Vaisseau Monde ont fait échouer dans le sang l’opération tractage et prosélytisme montée par le mentor de De Haan sur Sahch-V, contraignant les fils de Lorgar à une honteuse retraite. Depuis, l’Apôtre Noir a consacré sa vie à la traque de cette faction eldar, parvenant progressivement à resserrer l’étau autour du Vaisseau Monde honni. Preuve de l’inimitié tenace l’opposant à Varantha, il a même reçu une prédiction personnalisée de la bouche de l’un de ses Prophètes, juste avant que le crozius protéiforme1 de De Haan ne le réduise en bouillie : « lorsque tu poseras les yeux sur le cœur de Varantha, la messe sera dite2 ».

Les travaux avancent bien, les Exodites sont en voie avancée d’extermination, et les renforts qui patientent dans la barge de bataille en orbite de la planète ne vont pas tarder à descendre renforcer l’avant-garde : tout va pour le mieux dans la plus grimdark des galaxies, mais un événement troublant vient perturber la bonne humeur de De Haan. Au moment de prononcer son sermon de Haine o’clock, il a eu une panne d’inspiration subite. Son second Meer a beau lui répéter que ça peut arriver à tout le monde, le fier Apôtre est aussi gêné que perplexe après cet incident, mais finit par décider que c’est encore un signe que sa quête arrive à son terme, avant d’imaginer toutes les choses horribles qu’il fera subir à Varantha et à ses habitants une fois qu’il aura craqué le digicode. Positive thinking here. Après tout, les choses se déroulent tellement bien que ce n’est pas un petit blanc passager qui va faire dérailler l’Omphalos Daemonium, pas vrai ?

Début spoiler…Eh bien (et vous vous en doutiez, sagaces lecteurs que vous êtes), si. Surgissant de l’ombre et/ou de la banlieue pourrie de la ville Exodite – ça dépend des versions – les forces de Varantha attaquent la Cathédrale sans crier gare, avec la redoutable efficacité et le haut potentiel disruptif3 qui sont la marque des Eldars des Vaisseaux Mondes. Coupé de ses renforts et bientôt laissé seul survivant de son ost, De Haan a un peu de temps pour songer à la prophétie qui lui a été révélée, et surtout à l’interprétation très optimiste qu’il en a eu jusque-là. Car toutes les fins ne sont pas heureuses, comme l’Apôtre Noir ne tarde pas à le découvrir lorsque le cœur de Varantha, alias son Avatar de Khaine, entre dans la Cathédrale pour demander un petit tête à tête au confessionnel… Ite, missa est.Fin spoiler

1 : Il a le superpouvoir de changer de tête à chaque fois que De Haan pose les yeux dessus, ce qui est… cool.
2 : Ok, c’est pas la traduction littérale mais bon, avouez que c’est approprié pour un Word Bearers.
3 : Tous leurs points de commandement ont été claqués dans le stratagème « pièges à c*n », qui colle des blessures mortelles à toute figure s’approchant à 6 pas ou moins des 10 pions « râteau » placés par le joueur Eldar.

AVIS :

Une nouvelle moins intéressante par son intrigue (dont on devine la fin pratiquement dès le début, la faute aussi à un titre qui vend un peu trop la mèche) et ses personnages (assez quelconques) que par l’aisance stylistique dont fait preuve Matthew Farrer et surtout la bonne rasade de fluff qu’il nous sert au fil des pages, et qu’il a la bonne idée de répartir entre Word Bearers et Eldars. Pas sa meilleure, pour sûr, mais tout de même d’un très solide niveau.

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Faith – R. Earl [WFB] – #17 :

INTRIGUE :

WFB_FaithLe chevalier Gilles de Moreaux et son vieil écuyer perclus de rhumatismes, Claude Blanquette1, campent à la dure dans le massif d’Orquemont alors que l’automne est déjà bien avancé. Si les deux hommes s’obstinent à barouder hors saison, c’est que Gillou est à la recherche d’un trophée digne de ce nom pour l’armoire familiale. Notre héros l’a en effet un peu mauvaise que son frérot Léon ait bouclé sa quête du Graal et emballé la Dame du Lac en deux semaines chrono (on a connu la déesse plus minaudière), et soit revenu au château paternel avec une tête de Troll de fort beau gabarit. De son côté, il n’a eu que des bêtes Orques à se mettre sous la lame, et désespère de trouver un adversaire digne de lui attirer la bénédiction de la Dame. Claude, plus prosaïquement, désespère de ne pas être rentré se mettre au chaud alors que l’hiver approche à grands pas, mais doit se contenter pour le moment de siroter son thé au coin du feu, enroulé dans sa fidèle courtepointe. Dans son malheur, le gueux doit reconnaître qu’il a de la chance, car Gilles est le premier de Moreaux qu’il sert à entretenir lui-même ses armes, et il a même poussé la sollicitude jusqu’à réaliser des cataplasmes pour les articulations douloureuses de son serviteur. C’est Martrud de Monfort qui serait fier.

Lorsque le duo rencontre par hasard un paysan envoyé par l’ancien de son village (Celliers) trouver de l’aide pour débarrasser la communauté d’un monstre responsable de la disparition d’une dizaine d’habitants, Gilles se dit qu’il tient sa chance de prouver sa bretonnitude autrement qu’en vidant des bouteilles de chouchen et en jouant du biniou, ce qui est appréciable. Ayant terminé les trois Witchers en mode hardcore lorsqu’il était ado, le chevalier n’a aucun mal à identifier le fléau de Celliers après une entrevue avec l’ancien du village, François. Il s’agit bien sûr d’un Vampire, because of reasons, et il n’aura qu’à attendre la bête à proximité de la crypte locale pour lui faire sa fête et enfin taper dans l’œil de cette mijaurée de Dame. Ayant laissé comme instructions à ses hôtes de rester groupés et de ne pas se séparer, même pour aller aux latrines, le temps qu’il règle leur problème, Gilles s’installe pour une veillée sépulcrale à côté du cimetière local, toujours accompagné par son fidèle Claude. Ce dernier, qui n’est plus tout jeune, finit par s’endormir avec la bénédiction de son maître, qui dispose quant à lui de la vertu de mise en veille de longue durée pour rester alerte toute la nuit durant.

Lorsque Claude se réveille, il se découvre seul à côté des cendres du feu de la veille, et craint d’abord qu’il soit arrivé malheur à son maître pendant qu’il sciait des bûches. Cependant, Gilles était seulement parti constater le décès d’une nouvelle victime de la bête, mordillée à mort par des mâchoires humaines. Comme les bouseux ont respecté les consignes du noble noble, et que le compagnon qui escortait le pauvre Jules au petit coin a disparu sans laisser de traces, Gilles en conclut que c’est ce fieffé coquin de Jacques qui est responsable des morts de Celliers, et jure sur son honneur de traquer le maraud. C’était surtout une ruse pour s’en aller au plus vite du village, maintenant que l’affaire semble être tirée au clair. Bien que satisfait d’avoir accompli son devoir, Gilles n’a toujours pas trouvé d’adversaires à sa valeur, et pense sérieusement à hiverner à Orquemont pour accélérer sa quête. Dans son infinie mansuétude, il renvoie Claude à Celliers pour lui éviter des engelures qui pourraient lui être fatales… et se fait rappeler sur place par son serviteur, car quelque chose d’inattendu se passe au village.

En effet, les paysans sont sur le départ, car la découverte du corps mutilé de Jacques peu après que Gilles et Claude se soient mis en chasse de ce dernier ne laisse que peu de doutes sur le fait que le monstre est toujours dans les parages. Touché dans son honneur et dans son amour propre par la réalisation de sa propre nullité, Gilles supplie François et ses gens de rester encore une nuit sur place, afin qu’il ait une ultime chance de se rattraper. Ne pouvant pas décemment dire non à un psychopathe en armure lourde, l’ancien accepte de surseoir son départ, et le chevalier décide d’aller prier à une mare toute proche pour trouver l’inspi’ qui lui manque tant…

Début spoiler…Lorsque Claude rejoint son maître après avoir ordonné aux péquenauds de se constituer en milice civile et de ne se déplacer que par packs de douze, une vision peu commune vient s’offrir à ses yeux fatigués : la Dame du Lac en personne vient crever la surface de l’étang devant lequel Gilles s’est agenouillé en prière, et s’approche langoureusement du chevalier pour lui rouler un bon gros patin. Déesse ou pas déesse, ce sont toutefois des manières de prédateur/rice sexuel.le, et Gilles décapite l’entreprenante couguar en hurlant « Mitou, hache dague balance ta gorre ! ». Claude, beaucoup plus vieux jeu que son maître, est d’abord horrifié de ce qu’il considère comme une horrible méprise, mais la transformation rapide qui frappe le cadavre de la « Dame », et révèle qu’elle tenait plus de la guenaude aquatique que de la pucelle romantique, le convainc bientôt que Gilles était dans son bon droit. Le mystère de Celliers est résolu pour de bon, et les deux compagnons peuvent prendre la route de Moreaux pour ajouter ce nouveau trophée au mur de la salle de billard du château. Lorsque Claude demande à son boss ce qui lui a fait comprendre qu’il y avait anguille sous roche, le chevalier répond que cette Dame n’avait pas les yeux marrons qu’une pure beauté bretonienne se doit d’avoir, comme toutes les légendes et chansons l’attestent. Ce qui est une raison valable, jusqu’à ce que l’écuyer rappelle à son maître que la Dame qui est apparue à son frère Léon avait les yeux verts, d’après les dires de ce dernier. Bref, c’est pas demain la veille qu’edgy Gilles va rencontrer son idole, moi je vous le dis…Fin spoiler

1 : En fait il n’a pas de nom de famille comme tous les paysans qui se respectent, mais comme son kif ultime c’est de se faire des capes de superhéros avec des couvertures, je crois qu’on peut l’appeler Blanket Man.

AVIS :

Robert Earl revisite le mythe du chevalier de la Quête avec une petite nouvelle qui montre que tout ce brille n’est pas forcément or. Si l’auteur nous gratifie d’un twist final digne de ce nom, il aurait à mon sens été bien inspiré de chercher à l’intégrer de manière convaincante dans le reste de son histoire. En l’état, la rencontre entre Gilles et la Dame de la Mare tient plus de la péripétie accidentelle que de la conclusion logique d’une intrigue bien construite, et tout ce qu’il s’est passé avant ce moment fatidique n’a, scénaristiquement parlant, servi à rien, ou à pas grand-chose. Je reconnais que les Bretonniens ne sont pas les protagonistes les plus faciles à mettre en scène de façon intéressante, leur noblesse et droiture intrinsèques ne laissant que peu d’opportunités à un auteur pour complexifier un peu le tableau de façon cohérente avec le fluff de la faction. On en a ici un bon exemple avec good guy Gilles, qui fait un protagoniste aussi mémorable que le Moxostoma anisurum moyen. Comme pour la quête du Graal, beaucoup d’appelés, mais peu d’élus.

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Who Mourns a Necromancer? – B. Craig [WFB] – #17 :

INTRIGUE :

WFB_Who Mourns a NecromancerC’est jour d’enterrement à Gisoreux, mais le défunt qui est emporté jusqu’à sa tombe, dans le cimetière de Colaincourt, ne peut se targuer de laisser une foule éplorée derrière lui. Et pour cause, seul un homme est venu rendre un dernier hommage à Lanfranc Chazal, Magister au sein de l’université locale : son vieil ami et collègue (et accessoirement Haut Prêtre de Verena), Alpheus Kalispera. Si ce dernier se retrouve seul à souffler comme un phoque – il a pas de cardio – sur la colline, devant une tombe anonyme et un prêtre de Morr pas franchement ravi d’officier, c’est à cause de la détestable réputation que se traînait le clerc Chazal sur ses vieux jours, celle d’un Nécromancien. Bien qu’il tienne à faire bonne figure dans cette situation à la fois tragique et humiliante, Kalispera est désolé de constater que ces petites biatches de l’université, qui n’avaient pourtant rien à reprocher à Chazal de son vivant, se soient faites toutes porter pâles plutôt que de l’accompagner. Aussi est il sincèrement ému lorsque surgit au milieu de l’office un jeune cavalier, certes en retard, mais décidé lui aussi à assister à la mise en terre du macchabée.

Le nouveau venu, du nom de Cesar Barbier, a été l’élève des deux Magisters il y a quelques années, avant de repartir sur le domaine de son père se préparer à prendre la succession du noble. Il avoue à Kalispera avoir gardé contact avec Chazal après sa diplomation, considérant le professeur comme un mentor ainsi que comme le père qu’il aurait bien aimé avoir, son géniteur étant l’archétype de l’homme de guerre totalement insensible aux sentiments et à la notion de respect de ses inférieurs. N’ayant pas d’autres choses à faire une fois la tombe rebouchée, Barbier et Kalispera se rendent chez le second pour poursuivre leur deuil autour d’un petit verre et d’un bon feu. L’ancien étudiant en profite pour faire une révélation lourde de sens à son hôte : contrairement à ce qu’il pensait, Lanfranc Chazal était bien un Nécromancien (comme son teint macabre et ses yeux enfoncés le laissaient pourtant à deviner). Mais, attention, un gentil Nécromancien. Ce qui change tout, ou en tout cas ouvre le débat.

Barbier se lance alors dans une chronique de sa vie tumultueuse depuis son retour dans sa famille, et de son mariage clandestin avec une charmante roturière du nom de Siri. Qui évidemment tomba enceinte1. Les deux tourtereaux avaient pour projet de tout plaquer et d’aller passer quelques années en exil dans l’Empire, le temps que la colère de papa Barbier (Christophe, sans doute) retombe, mais mirent trop longtemps à faire leurs bagages. Ramené au château paternel sous bonne garde, Cesar ne put qu’assister au meurtre de sang froid de sa bien aimée par son salopard de père, qui ne voyait vraiment pas le problème. Fort heureusement, le nobliau éploré parvint à convaincre Chazal, qui lui avait confié travailler de façon tout à fait théorique sur la Nécromancie afin de prouver que cette forme de magie n’était pas naturellement mauvaise, de passer à la pratique pour dépanner un pote dans le mal. Résultat des courses : le fantôme de Siri accepta de venir hanter la petite maison dans laquelle les jeunes mariés s’étaient installés, grâce un rituel certes interdit, et qui laissa des stigmates visibles sur la tronche et la santé du pauvre Chazal, mais parfaitement exécuté (et avec des extras sympas).

Troublé par la réalisation que son bon ami était finalement un pratiquant des arts sombres, et peut-être aussi surtout qu’il a été le dindon de la farce pendant toutes ces années, Kalispera ne sait trop quoi penser de la situation décrite pas son invité, qui se fait un devoir de lui sortir un discours sur l’injustice du monde digne d’un tracteur Solidaires Etudiant-e-s pour le persuader que, en vrai, la nécrophilie, c’est pas si pire (#ngl #tmtc). Le vieux maître n’en est pas si convaincu, mais il n’est pas d’humeur à débattre pendant des plombes avec Barbier, à qui il souhaite simplement de rester éternellement amoureux de son fantôme de femme, et de commencer dès à présent à réfléchir à l’organisation de la succession de son père (maintenant qu’il n’a plus de Nécropoto pour installer sa petite famille dans un autre bled). Pour le reste, les deux comparses tombent d’accord que Chazal était un vrai type bien, et on peut supposer qu’ils finissent la soirée ronds comme des queues de pelle, ainsi que de vrais Bretonniens le doivent en cette occasion particulière.

1 : Et dire que si j’avais chroniqué ‘Lords of Valour’ au moment de ma première lecture, je n’aurais pas pu sortir cette vanne. Je ne sais pas Dieu existe, mais Loec oui.

AVIS :

Nouvelle craigesque par excellence, ‘Who Mourns a Necromancer ?’ apporte au lecteur une perspective neuve sur un aspect notable et éminemment fantastique du monde de Warhammer, d’une manière que l’on peut qualifier de posée ou de planplan, selon ses goûts personnels1. Après avoir traité du Chaos dans ses précédents courts formats, Brian Craig s’attaque ici à la non-vie, mais c’est surtout l’occasion pour lui de poser la question du respect des normes, et du caractère artificiel, voire inique, de ces dernières dès lors que l’on y réfléchit un peu. Lanfranc Chazal doit il être condamné parce qu’il a pratiqué la Nécromancie, même s’il l’a fait de la manière la plus éthique qui soit ? Et que dire du père de Cesar Barbier, qui était dans son droit d’assassiner sa bru d’après les lois de Bretonnie, mais n’en demeure pas moins un meurtrier et un sale type en puissance ? On peut regretter que Craig n’ait pas choisi de mettre un peu plus en avant ce qui à mes yeux rendait cette incitation à la réflexion plus palpitante qu’une version romancée d’une conf’ sur Kelsen : la présence dans le monde de Warhammer Fantasy Battle de divinités et de magie (ce qui est la même chose au final). Alors que dans notre bête monde aseptisé, la réponse restera purement théorique, Craig aurait pu conclure que le mal existe réellement et dans l’absolu dans le Monde Qui Fut, comme en témoigne le spectaculaire glow down du plus gentil Nécromancien ever (ou le développement de maladies honteuses chez Barbier ?). Il ne l’a pas fait, tant pis : à chacun de se faire une opinion.

1 : Apparemment, l’artiste engagé par Inferno ! pour faire l’illustration de la nouvelle (John Wigley) ne savait pas à qui il avait affaire, et/ou n’a pas jugé bon de lire autre chose que le titre. 

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Small Cogs – N. Rutledge [40K] – #17 :

INTRIGUE :

40K_Small CogsSeule la mort met fin au devoir nous dit le proverbe, et ce n’est pas le Colonel Soth du 8ème Ulbaran qui viendra s’en plaindre. Ayant participé à la reprise de la planète de Luxoris Beta, confisquée par les Orks pendant des siècles, le régiment se retrouve mobilisé pour défendre la station d’épuration le Temple de l’Eau local contre une excursion eldar repérée au dernier moment par ces planqués du Haut Commandement. Malgré le fait que ses hommes doivent combattre en uniforme d’apparat, leur mission première étant de participer au défilé du 14 juillet local, Soth fait contre mauvaise fortune veste qui gratte bon cœur et organise un périmètre défensif autour du bâtiment visé par les Xenos. Le Temple de l’Eau contrôle en effet le système d’irrigation de la planète, en faisant une cible de choix pour les Eldars : inonder les basses terres de Luxoris Beta priverait en effet les défenseurs impérieux de la possibilité de déployer leurs véhicules blindés dans ce conflit.

Après avoir échangé quelques banalités avec le prêtre Jarendar, tout à fait confiant dans la protection qu’apportera l’Empereur à ses fidèles, Soth est appelé à son poste de commandement par son second (Hoddish) lorsque les Eldars lancent leur assaut. S’en suit une bataille urbaine tout à fait classique entre les deux factions, à la ténacité et la discipline des Gardes Impériaux s’opposant la vitesse et la technologie avancée des Xenos. En bon commandant, Soth met les mains dans le cambouis et mène une charge au fuseur contre un Falcon trop confiant, héritant d’une blessure à la cuisse mais permettant aux lignes impériales de tenir.

Un moment de répit entre deux attaques permet à notre héros d’inspecter le périmètre… et de manquer de tomber sous les tirs d’un Ranger isolé, finalement localisé et abattu sur un gros coup de chance par Soth. Il ne faut pas longtemps au sagace officier pour réaliser que le sniper n’a pas fait le déplacement seul, et que ses petits copains sont certainement en train de converger vers le Temple pendant que le reste des forces eldars fait diversion. Ne pouvant mobiliser un peloton entier sous peine de laisser ses lignes dangereusement dégarnies, Soth ordonne à Hoddish de lui envoyer trois Gardes pour tenter d’intercepter les infiltrateurs ennemis avant qu’il ne soit trop tard.

Je vous la fais courte : au prix d’une progression sanglante et de la perte de tous ses sidekicks, Soth parvient jusque dans la salle des machines du Temple, où il surprend le dernier Ranger en pleine lutte avec Jarendar. Le prêtre étant plus doué en parabole qu’en krav-maga, il ne tarde pas à rejoindre la droite de l’Empereur, tandis que Soth hérite pour sa part de quelques shurikens dans le thorax, lui faisant perdre la règle Objectif Sécurisé et lui donnant l’impression de voir les esprits de ses camarades défunts danser le harlem shuffle autour de lui. Ces hallucinations dissimulaient cependant l’arrivée d’un clutch player de chair et de sang : le novice de Jarendar – et son chandelier – qui règle son compte au pénible Xenos alors qu’il trifouillait les panneaux de commandes en fredonnant ‘Here comes the flood’. Bien fait. La nouvelle se termine sur la victoire des impériaux et l’évacuation de Soth vers l’hôpital le plus proche, mais pas avant qu’il n’ait bredouillé au Medic qui l’a stabilisé de faire passer à Hoddish la morale de cette histoire : prêter attention au moindre détail (small cogs). Que voilà une édifiante conclusion.

AVIS :

Pour sa seule incursion dans le 41ème millénaire (si on ne considère pas la nouvelle ‘Sisters’, écrite pour Necromunda), Neil Rutledge livre une bonne histoire de « Gardes Impériaux d’action », dans la droite lignée de ce que nous propose le légendaire Dan Abnett avec ses Fantômes de Gaunt. Chose appréciable, on a le droit en seulement 26 pages à une bataille rangée, suivie par une mission d’infiltration tournant au duel de snipers, ce qui est une variété tout à fait appréciable pour un court format. Les affrontements entre Garde Impériale et Eldars des Vaisseaux Mondes étant de plus assez rare dans la GW-Fiction, on appréciera d’autant plus ce ‘Small Cogs’ à sa juste valeur. Je valide.

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White Heat – D. Abnett [40K] – #18 :

INTRIGUE :

40K_White HeatNous retrouvons les Iron Snakes d’Ithaka sur une nouvelle mission colorée, quelques temps après les événements couverts dans ‘Black Gold’. Les serpents perçants sont cette fois chargés de reprendre la capitale planétaire d’Eidon, monde impérial squatté depuis quelques mois par les Eldars Noirs. Comme les 300.000 Gardes Impériaux budgétés par les autorités sectorielles ont failli à leur mission, il est plus que temps que les bidasses laissent place à de véritables professionnels de la guerre, j’ai nommé le Capitaine Héros (c’est vraiment son titre) Phobor et sa Compagnie de joyeux drilles, dont l’escouade Damocles, présentée dans ‘Black Gold’ fait partie. Nous rencontrons également l’illustre Petrok, Archiviste assisté de son état1 et légende vivante du Chapitre (et au-delà, puisque même les officiers de la Garde fangirl en sa présence). Pète-roc, qui a été retardé par un bombardement orbital, arrive sur le théâtre d’opération alors que Phobor a déjà lancé son attaque, et contrairement aux instructions laissées par le Capitaine, il décide d’aller dire bonjour à l’escouade laissée en réserve de l’autre côté d’Eidon City, dans le but d’intercepter les fuyards Drukharis. Comme vous le devinez, sagaces lecteurs, il s’agit évidemment de Priad et de ses bois, dont la mission ne relève finalement pas du tout de la sinécure.

Un curieux hasard a en effet voulu qu’un contingent significatif d’Eldars garde la section des murailles de la ville que l’escouade Damocles a été chargée d’attaquer. Le feu nourri subi par ses hommes force donc le Sergent Priad à réaliser un pro player move… faire tirer au lance plasma sur un mur afin de l’effondrer. Mais à se ruer dans la brèche avant de l’avoir ouverte, on se met à risque de se retrouver Sébastien gros-jean comme devant si (quand…) le jet pour blesser donne 1. Ce qui est le cas ici. Nos braves Iron Snakes se retrouvent donc en fâcheuse posture, à poil énergétique dans la pampa et sous un feu nourri, quand le salut arrive sous la forme baraquée de Petrok. Utilisant son awesomeness comme couvert lourd, l’Archiviste entame une bromance ultra lourde avec Priad, mais lui donne aussi un précieux conseil démontrant la profondeur insondable de sa sagesse : quand ça marche pas du premier coup, recommence. Et, ô miracle, le mur fâcheux finit par tomber en poussière, permettant aux Space Marines de pénétrer dans la cité martyr.

La suite n’est qu’un carnage sans nom ni intérêt, pendant lequel nos dix Astartes parviennent à massacrer des centaines (!!!) de Drukharis, sans subir aucune perte en retour. La partie la plus délicate de leur soirée sera finalement consacrée au déplacement des bombes laissées par les Xenos sur les conduits à phosphore d’Eidon City, sorte de course à la cuillère dont les Serpenfer se sortent encore une fois haut la main. Ceci fait, ils rentrent au bercail participer au traditionnel banquet de la victoire, où l’ombrageux Phobor les attend avec un air grognon (il voulait que Petrok le rejoigne pendant la bataille et lui dise à quel point il était génial). Le debrief sera peut-être un peu froid…

1 : Il se promène avec pas moins de 9 grouillots pour lui porter ses affaires, sans doute pour relancer l’emploi sur Ithaka, mais tout de même. Notons pour sa défense qu’il ne s’entoure pas des esprits les plus brillants, ce qui peut justifier de compenser la qualité par la quantité.

AVIS :

J’espérais qu’Abnett élève le niveau par rapport à ‘Black Gold’ dans ce deuxième épisode de sa série consacrée aux Iron Snakes, et j’ai été très déçu. Non seulement on se retrouve à nouveau avec une Space Marinade totalement insipide (voire caricaturale, quand on constate la facilité déconcertante avec laquelle l’escouade Damocles annihile 40.000 fois son coût en points en l’espace de vingt minutes), mais l’auteur des ‘Fantômes de Gaunt’ passe totalement à côté de son sujet en matière de caractérisation, ce qui est pourtant un de ses points forts reconnus. Entre Phobor le boudeur, Petrok le lover et Rodos l’abruti, le transparent Sergent Priad passerait presque pour un modèle. On a également droit à des petits irritants, sans conséquence pour l’histoire en tant que telle, mais révélateur d’un haut niveau de je m’en foutisme de la part d’Abnett et de son éditeur, comme la mention du Primarque (au lieu de Maître de Chapitre) Seydon, ou encore un échange d’arme involontaire en plein combat (Petrok hérite de la griffe énergétique de Priad le temps d’un paragraphe). Ce résultat est d’autant plus décevant que Dan Abnett avait rendu une copie autrement plus propre quelques mois auparavant avec ‘A Blooding’ (Inferno ! #6), autre nouvelle mettant en scène l’assaut d’une ville du point de vue de troupes impériales. La motivation a clairement péché ici, et les Iron Snakes ne marquent pas de points avec ce ‘White Heat’.

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Tybalt’s Quest – G. Thorpe [WFB] – #18 :

INTRIGUE :

WFB_Tybalt's QuestDans le brouillard brumeux d’une nuit nocturne, le noble chevalier Tybalt se rend en direction d’un cimetière de tombes, accomplissant ainsi le désir de volonté d’un fantôme spectral lui étant apparu dans ses rêves oniriques… Hum. Je pourrais continuer longtemps comme ça, mais les plaisanteries les plus courtes étant les moins longues, nous allons repasser sur une narration un peu moins lourdement pesante. Merci Gav. Ayant passé plusieurs longues minutes, et autant de pages, à attacher son cheval à un piquet, ouvrir la grille du cimetière, trébucher sur un rat, et occire un pauvre sanglier innocent qui passait seulement dans le coin1, Tyty finit enfin par arriver jusqu’à la crypte où repose le Duc de Laroche, qui lui a demandé d’accourir en toute hâte pour combattre un terrible danger s’étant manifesté dans le cimetière de Moreux. Mais évidemment, ce gros troll de Laroche n’a pas pensé à se présenter ni à donner les coordonnées GPS de son mausolée au pauvre Tybalt, vous pensez bien. Un coup d’œil sur son blason a fait l’affaire, évidemment. Ce qui a conduit notre héros à perdre quatre mois à éplucher tous les registres d’héraldique à sa disposition pour finalement identifier les armes du brave (c’était un Graaleux, tout de même) Pierrot et localiser sa dernière demeure. Moi je dis que le fantôme aurait dû apparaître à un gueux livreur Deliveroo, l’affaire était pliée en 25 minutes. Menfin.

Une fois sur place, Tybalt est à nouveau visité par Laroche, posay comme jamay dans son petit pied à terre. Mis à part des tournures de phrases un peu rigolotes, le vioque se révèle être un hôte affable et charmant, qui avait juste besoin de trouver un champion de ce nom pour contrecarrer les plans d’un Nécromancien de bas niveau (puisqu’il n’a pas été foutu de lever une armée depuis l’envoi du SOS (du) fantôme…). Toujours cette histoire de quatre mois de latence, ça ne devrait pas mais ça m’énerve. Le cimetière de Moreux est en effet très spécial. En plus de servir d’ossuaire depuis des temps immémoriaux, il s’agit de l’endroit très précis où Gilles le Breton a reçu sa première vision de la Dame. On pouvait se demander ce qu’il faisait à camper dans un tel endroit pour commencer, mais ce serait une autre histoire. Toujours est-il que l’honneur de la Bretonnie impose que Tybalt empêche un pratiquant des arts noirs de souiller de sa présence et de sa nullité crasse ce monument historique classé au patrimoine imputrescible de l’humanité. Le jouvenceau n’est franchement pas chaud à l’idée de partir à la chasse d’un sorcier capable de relever les morts, seul dans un cimetière, mais Laroche ne lui laisse pas le choix. Il lui prête cependant son heaume enchanté et sa mirifique Résistance à la Magie (3) pour lui faciliter un peu la tâche.

La suite, cela ne vous surprendra guère, est consacrée à la « traque » du Nécromancien par Tybalt. Après une première rencontre pendant laquelle on a tout loisir d’admirer que la camelote de Laroche works just fine, et de réaliser que Tybalt est vraiment pathétique (il se fait sonner par un coup de bâton sur son heaume, donné par un vieillard boiteux d’un mètre cinquante), le preux chevalier erre un peu entre les tombes, repasse en mode facile avec une petite prière à la Dame (qui lui permet soudainement d’entendre les incantations du Nécromancien à 300 mètres), rencontre quatre squelettes animés dont il a le plus grand mal à se défaire, et finit par confronter enfin son affreuse Némésis, protégée par une puissante escorte de… six squelettes. Qui tombent en morceaux dès que Tybalt s’approche. On peut se demander pourquoi ça n’a pas fait la même chose pour les morts vivants précédents, mais la réponse est « on s’en fout ». S’en suit un dialogue relativement interminable (quand on le compare à la longueur de la nouvelle et à son intérêt intrinsèque), pendant lequel on apprend que si le Nécromancien était si méchant, c’est parce qu’il avait lui-même peur de la mort. On s’en fout là aussi, merci. Au bout du suspense, Tybalt finit par décapiter le maraud, ramener l’équilibre dans la Force et la paix dans le voisinage, et la nouvelle se termine avec l’ajout d’une nouvelle corvée d’utilité publique sur la to do list des vilains de Moreux : entretenir un peu mieux leur cimetière, décidément très mal fréquenté. Voilà qui ne va pas arranger le déficit des collectivités locales, c’est moi qui vous le dit.

1 : Il a aussi essayé de voir des sons. Sans succès.

AVIS :

Gav Thorpe se cherche comme auteur de nouvelles fantastiques dans ce ‘Tybalt’s Quest’, et malheureusement pour tout le monde, il ne se trouve pas. Le style est aussi pâteux et cartonné qu’un mauvais pudding, l’intrigue tient en une demi-ligne (police 54), les péripéties sont sont plus dignes d’un nanar fauché que d’une production littéraire libérée de la prosaïque contrainte d’un budget à respecter : si on veut être aussi miséricordieux que l’aimable Duc de Laroche, on accordera quelque point à Thorpe pour les bouts de fluff (pas vraiment reluisants) qu’il a glissé dans sa copie. Pour le reste, le seul point fort de ‘Tybalt’s Quest’ est de faire moins de vingt pages, ce qui rend sa lecture, à défaut d’agréable, courte. Un mauvais moment de et à passé/er.

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Battle of the Archeosaurs – B. J. Bayley [40K] – #18 :

INTRIGUE :

40K_Battle of the ArcheosaursLa planète ABL 1034, colonisée par l’humanité en des temps forts lointains puis laissée à mariner dans son jus pendant la Longue Nuit, a été redécouverte par l’Imperium. Idéalement situé pour devenir une capitale sous-sectorielle, comme Mont de Marsan avant lui, ce monde primitif aurait dû être conquis ou reconquis par le régiment de Gardes Impériaux dépêché sur place sans le moindre effort, mais voilà : les bidasses ont été toutes massacrées par la population locale, malgré le très faible niveau technologique de cette dernière. Une deuxième expédition, mécanisée celle-là, n’a pas connu un sort plus favorable, faisant d’ABL 1034 une sorte de village gaulois galactique, résistant vaillamment contre l’envahisseur romain impérial. Foin de druide à la faucille en or ou de potion magique ici : la raison de cette défiance étonnante se trouve dans la présence d’une mégafaune domestiquée par les natifs, et baptisée archéosaures par les Magos Biologis en raison de la ressemblance des dites bestioles avec les lézards géants qui peuplaient Terra il y a des millions d’années.

Comme on le sait bien ici, ni la patience ni la bienveillance de Pépé ne sont sans limite, au contraire de ses armées, qui sont elles proprement inextinguibles. La troisième fois sera donc la bonne pour l’Imperium, qui décide de mettre le paquet pour s’assurer d’une victoire probante et envoie pas un, mais deux Titans Warlord mettre de l’ordre sur ABL 1034. Bien que les Princeps des machines envoyées sur place (Gaerius et Efferim) doutent fortement que l’ennemi soit en mesure de les inquiéter, la discipline légendaire de l’Adeptus Titanicus les empêche de livrer le fond de leur pensée aux gradés de la Flotte et de la Garde avec lesquels ils partagent la séance de briefing pré-déploiement. Et puisqu’ils sont sur place, autant faire le job, pas vrai ?

Cette belle confiance est rapidement, même si temporairement, ébranlée par la vision qui attend les Princeps lors de leur descente à la surface de la planète : pas moins de cinq épaves de Gargants ork jonchant la plaine choisie par le commandement impérial pour déployer ses forces. Bien que Gaerius choisisse de croire qu’il s’agit d’une conséquence de la nature belliqueuse des Xenos, tout prêts à se battre en eux en absence d’ennemis valables, plutôt que d’un fait d’armes des indigènes, son aveuglement béat ne va pas durer longtemps. L’arrivée de la troisième vague d’assaillants n’est en effet pas passée inaperçue chez les locaux (en même temps, on parle de marcheurs d’assaut de plus de trente mètres de haut, c’est voyant), et la tribu la plus proche n’est pas longue à envoyer ses guerriers et deux archéosaures livrer bataille aux nouveaux venus. On apprend à l’occasion d’un petit passage raconté depuis le point de vue de l’un des deux seuls survivants de la deuxième vague impériale, et reconverti en étendard vivant par les autochtones, que ces derniers arrivent à contrôler leurs montures grâce à des pieux métalliques fichés dans le crâne des archéosaures à des endroits précis, et dont les vibrations permettent d’activer certaines zones du cerveau de ces grosses bestioles. C’est tout simple, mais il fallait y penser (et surtout, trouver un moyen de mettre l’idée en pratique…).

Le combat s’engage donc entre les Titans et les Kaijus, et le petit rictus de suffisance qui flottait sur les lèvres du Princeps Gaerius est rapidement remplacé par une grimace d’incrédulité devant la résistance incroyable de ses adversaires, puis par de la panique pure et simple lorsque les archéosaures déclenchent leur combo spéciale « jet de flammes/cabrage/coup de queue », mettant au tapis le Warlord d’Efferim et laissant la machine rescapée composer seule avec les deux dinosaures énervés qui lui font face. L’entraînement et la discipline de l’équipage du Titan survivant (et les gros flingues dont il dispose) permettent toutefois à Gaerius d’arracher une victoire mineure en abattant les lézards géants à bout portant avant qu’ils n’aient pu lui faire des papouilles. C’était moins une pour la crème de la crème de l’Omnimessie…

Début spoiler…Et ce n’est surtout que partie remise pour la tribu vaincue, dont le nouveau chef décide que l’heure n’est plus aux combats honorables en 2 contre 2. Ayant bien compris que les armées impériales ne reculeraient devant rien pour s’emparer de la planète, il envoie dès le lendemain l’intégralité de son cheptel, soit une centaine d’archéosaures, piétiner les positions adverses. Le Titan mal en point de Gaerius ne peut pas s’opposer à une telle démonstration de force, et la troisième campagne se termine aussi ignominieusement que les précédentes.

Notre nouvelle quant à elle se conclut sur la décision prise par des gros bonnets de l’Imperium de régler une fois pour toutes cet ennuyeux, coûteux et humiliant problème en déchainant un petit Exterminatus sur la planète rebelle, quand bien même ça l’abimerait un peu, au moins à moyen terme. Un constat partagé à grand cri par notre ami Gaerius, qui a survécu à la débâcle et a été « adopté » par la tribu d’ABL 1034, où il sert maintenant de décoration frontale d’archéosaure. Voilà une reconversion réussie. Fin spoiler

AVIS :

Une nouvelle « et si ? » par excellence, ‘Battle of the Archeosaurs’ permet à une des plumes les plus libres de la première époque de la Black Library de mettre en scène une bataille assez improbable et donc totalement savoureuse entre Titans Warlord et dinosaures géants, le tout avec un respect du fluff que l’on ne peut qu’admirer. On ne verra probablement plus rien de tel dans le catalogue de la BL (tant pis ou tant mieux, je vous laisse seuls juges), ce qui est une autre raison pour les amateurs de GW-Fiction de prendre connaissance de cet OVNI de la littérature 40K.

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Matters of Honour – G. Rennie [40K] – #18 :

INTRIGUE :

40K_Matters of HonourQuelque temps après les événements relatés dans ‘Baptism of Fire’, nous retrouvons le Lord Solar Macharius, son capitaine Leo Semper et son équipage foultitudineux, dans une nouvelle mission à haut ris- en fait non. Les aléas de la guerre gothique, dans laquelle le Macharius sert avec distinction comme escorteur de vaisseaux civils (pas très funky mais il faut bien que quelqu’un le fasse), mènent les autorités compétentes à mettre nos héros sur une mission un peu plus intéressante : intercepter le Bellerophon, un croiseur dont l’équipage est récemment passé au Chaos et cherche désormais à rejoindre l’espace ennemi pour remettre à Abaddon des informations top moumoute (et Pépé sait qu’Abaddon aime les perruques). L’honneur de la Flotte Impériale (surtout) et l’équilibre des forces (un peu) sont en jeu, il faudra donc servir sans faillir une fois encore.

Grâce à des prévisions très précises de l’itinéraire poursuivi par le Bellerophon et un Warp assez calme en cette saison, le Macharius parvient à intercepter sa proie dans le système de Delphi. L’affrontement est assez déséquilibré, mais dans le « bon » sens pour changer : ce sont en effet les Impériaux qui ont l’avantage de la taille et de la puissance de feu sur les affreux renégats, menés par le Lieutenant Magell (ça se prononce comme ça en VO, je veux rien savoir). Ce dernier avait d’abord espéré pouvoir distancer ses poursuivants, mais un raid de Maraudeurs rondement mené désempare totalement Bebel, prouvant au passage que l’on a toujours besoin d’un plus petit que soi, surtout si le petit en question vole vite et peut larguer des missiles à tête chercheuse. L’ennemi étant à sa merci, le Capitaine Semper décide de laisser son second, le capable mais sanguin (il a occupé les premières pages de la nouvelle à tuer en duel un officier qui l’avait mal regardé) Hito Ulanti, choisir la manière dont le coup fatal doit être porté. Désireux de faire ses preuves, ce dernier choisit l’option la plus exposée : aborder le Bellerophon et le reprendre aux traîtres par les armes, afin d’épargner le vaisseau et de récupérer les précieuses informations dérobées par les Magell et compagnie. Dont acte.

L’assaut en question, s’il ne présente guère de suspens quant à son issue (même Rennie le dit), permet toutefois à un autre personnage rapidement croisé dans ‘Baptism of Fire’, le conscrit un brin psychotique Maxim Borusa, de se mettre en valeur à son tour. Envoyé en première ligne armé de sa fidèle clé à molette porte-bonheur, tel le Gérard Lambert du 41ème millénaire, Max réussit à nouveau à friendly firer son supérieur hiérarchique dans le feu de l’action, mais aussi et surtout, à sauver les miches d’Ulanti pendant son duel avec son homologue1, sécurisant par là-même un transfert dans des quartiers un peu plus sympathiques que le fond de cale du Macharius. Ça c’est un petit gars qui ira loin.

La nouvelle se termine avec un peu plus d’information sur la documentation qu’Abaddon tenait tant à récupérer. Il s’agit de plans des mystérieuses Forteresses Noires, clés de voûte de la flotte gothique et cibles principales de la 12ème Croisade Noire, comme nous le savons désormais. Pour l’heure, Leo et ses comparses ne savent pas trop quoi faire de cette révélation, et Aby se console de l’interception inopportune du Macharius en contemplant son futur véhicule de fonction sortir de l’usine : rien de moins que le Planet Killer, et avec les sièges chauffants et le radar de recul s’il vous plait…

1 : Il arrive à temps pour fermer le clapet de Magell, c’est approprié je pense.

AVIS :

Après des débuts poussifs, Rennie fait bien mieux dans cette seconde nouvelle consacrée à l’univers si particulier de la guerre dans l’espaaaaaace. Exit les introductions à rallonge qui au final ne servent à rien à l’intrigue, et bonjour les descriptions des aspects pratiques de cette forme de combat fascinante et injustement ignorée par la BL. Qu’il s’agisse de contextualiser le rôle des Astropathes, de décrire une mission de Maraudeurs, de dépeindre les complexes relations de pouvoir et traditions qui sous-tendent l’institution Flotte Impériale, ou encore de mettre en scène la brutalité d’un abordage, même « basique » (péquins contre péquins, pas de Space Marines ou de démons pour jouer les trouble-fêtes), Gordon Rennie répond présent. Son choix de poursuivre la caractérisation des personnages passés en revue dans ‘Baptism of Fire’ de manière plus sélective – seuls Ulanti et Borusa sont traités ici – est également payant, et permet à ces deux figures de gagner une profondeur assez intéressante. Seuls quelques erreurs d’étourderie sans gravité (explosions dans l’espace, confusion entre Adeptus Arbites et Astartes), et un suspens des plus limités (le doute est très rapidement levé sur le fait que la mission du Macharius sera un succès) sont à lui reprocher, mais rien qui ne viennent sérieusement entraver le plaisir de lecture. Dommage qu’il se soit arrêté d’écrire des nouvelles pour cette série après ce ‘Matters of Honour’, car il avait atteint un niveau intéressant… Restent évidemment les deux romans1 qu’il a signé avant de voguer vers d’autres cieux à se mettre sous la dent, pour les fans éperdus de Leo ‘the G.O.A.T.E.E.’ Semper.

1 : ‘Execution Hour’ et ‘Shadowpoint’.

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Et voilà qui termine cette revue de la troisième année d’Inferno!, où grandeur et décadence se sont une nouvelle fois mélangées. À l’heure où cette chronique est mise en ligne, il semble que la Black Library ait à nouveau mis le concept au frigo car aucune nouvelle publication siglée de l’iconique appellation n’est à prévoir dans les mois qui viennent. J’en suis le premier désolé, mais comme Inferno! a déjà prouvé qu’il pouvait rejaillir de ses cendres (ce qui est approprié, avec un tel nom), il faut espérer que nous aurons l’occasion de nous pencher sur autre chose que des rétrospectives à plus de vingt ans dans les prochaines années. D’ici là, il me reste encore quelques numéros à passer en revue…

WORDS OF BLOOD [40K]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du recueil ‘Words of Blood, publié par la Black Library en 2002 et consacré au côté 40K de la GW-Fiction. Comme la plupart des anthologies de cette époque, celle-ci est constituée en majorité de nouvelles éditées quelques années plus tôt dans les pages du bimensuel Inferno! (entre les numéros #19 et #28, pour être précis). La proverbiale exception venant confirmer la règle se trouve être ‘Ork Hunter’, petite abnetterie inédite venant compléter le sommaire.

Words of Blood

En plus de ce célèbre (à l’échelle du Zhobby, tout du moins) contributeur, on retrouve un trio d’auteurs vétérans signant comme Papa Gaunt – même si c’est plutôt Gregor Eisenhorn qui est de sortie cette fois-ci – deux entrées chacun dans ce ‘Words of Blood’ : Ben Counter, à qui nous devons la nouvelle éponyme, Gav Thorpe et Graham McNeill. Le line up est renforcé par trois noms qui évoqueront peut-être des souvenirs aux connoisseurs ou aux plus anciens des lecteurs de cette chronique : Andy Chambers, Simon Jowett et Jonathan Curran (ici rebaptisé Curren). Côté personnage majeur de la GW-Fiction, mis à part le grumpysitor précédemment nommé, on remarque la présence d’un jeune et prometteur Sergent Ultramarines dénommé Uriel Ventris, qui aura peut-être la chance de faire une carrière littéraire dans les années qui suivent, et celle du taulard au cœur d’or (non) Kage… Le cadre étant planté et les protagonistes introduits, il est temps de saisir l’objet du délit à bras le corps et de commencer à numéroter ses abattis. Ça va saigner.

Words of Blood

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Words of Blood – B. Counter :

INTRIGUE :

40K_Words of BloodSur la planète quasiment abandonnée d’Empyrion IX, le Commandeur Athellenas des Black Templars doit relever un défi de taille : empêcher une armée de 6.000 cultistes de Khorne de s’emparer du seul spatioport de ce monde minable, ce qui permettrait aux hordes dépravées et mal fringuées du terrible Manskinner de fondre sur Macharia pour y commettre un génocide. Le tout avec seulement trente Space Marines à disposition. Le rapport de force n’est pas en faveur de l’Astartes, mais Athellenas a… un plan (et pour un Black Templar, c’est déjà beaucoup). Le seul problème, c’est que ses frères risquent de ne pas l’apprécier du tout, ce qui va le contraindre à jouer très finement la partie1.

Du côté adverse, les préparatifs vont bon train pour ce qui ne devrait être qu’un massacre en bonne et due forme entre deux factions peu réputées pour leur tactique d’évitement. Le Manskinner, qui a reçu de sa divinité tutélaire le don démoniaque « parole de sang », ce qui lui permet de plonger son audimat dans une folie furieuse (et non pas de se mordre la langue à chaque fois qu’il prononce une phrase), prononce une petite causerie d’avant-match qui met ses ouailles de bonne humeur, et envoie sa cavalerie (si si) à l’assaut des positions retranchées des Marines. Il se doute que les fringants hussards ne feront pas long feu face à l’arsenal des Black Templars, mais cela devrait laisser le temps nécessaire au gros de ses forces d’arriver à portée de charge.

Conformément à ses pronostics, la brigade légère du bien nommé Die(ss) tombe glorieusement au champ d’honneur, sur le score sans appel de 210 morts à trois doigts tranchés. C’est alors que le rusé Athellenas dévoile la profondeur insondable de son génie stratégique, en ordonnant la retraite. Stupeur et bégaiements chez les meilleurs de l’Empereur, qui n’ont pas pour habitude d’abandonner du terrain à l’ennemi, à plus forte raison un temple millénaire à la gloire de Pépé, comme celui qu’ils occupent actuellement. Il faut donc claquer quelques PC au Commandeur pour passer le stratagème « Y a pas de mais », permettant un repli en bon ordre jusqu’à la ville voisine où une nouvelle position défensive est installée sans tarder.

Si cette manœuvre n’a pas fait consensus chez les Black Templars, elle a cependant compliqué la situation du Manskinner, dont l’emprise sur les éléments les plus foufous de son armée commence à s’effilocher. Malgré son éloquence sans pareille – en même temps, la plupart de ses suivants ont perdu l’usage de la parole, donc la compétition n’est pas féroce – Manski’ ne parvient pas à empêcher un de ses lieutenants, le Caporal Recoba, de partir à la chasse aux Marounes sans attendre les retardataires. L’ennui est que le charismatique officier embarque avec lui deux mille copains, divisant l’armée des cultistes en deux. Comme on peut s’y attendre, cet empressement à porter le combat à l’ennemi sera fatal pour Recoba et ses suivants, qui tomberont sous les bolts et les coups des Space Marines lors d’une embuscade savamment orchestrée par Athellenas et ses Sergents.

Cette nouvelle victoire est cependant rapidement ternie par la décision de Big A. de battre à nouveau en retraite, cette fois-ci pour une défense sur la ligne (ici le spatioport d’Empyrion IX). Cette annonce dévaste le Devastator Valerian, qui menace de se faire renégat plutôt que de commettre la forfaiture de la marche arrière, et n’accepte finalement de se plier aux instructions de son supérieur qu’après s’être fait menacer de sanctions disciplinaires dans cette vie et dans la suivante.

De son côté, le Manskinner enrage (comme d’hab’ vous me direz) de la couardise manifeste de ses adversaires, qui rend son armée sevrée de violence de plus en plus difficile à contrôler. Ayant compris qu’il s’agit d’un stratagème pour désorganiser ses forces, il tente de calmer les ardeurs de ses cultistes en exaltant les valeurs de la vengeance et de la patience, mais se fait brutalement interrompre par son dernier sous-fifre (Kireeah) avant d’avoir pu terminer son sermon. Bien que l’impoli paie son impudence de sa tête, proprement séparée de son corps par la paire de ciseaux géants que le Manskinner arbore à la place de son bras droit – c’est pratique pour inaugurer les bâtiments, je me demande pourquoi Charles III ne s’en est pas déjà équipé – le mal est fait et les Khorneux se lancent dans un sprint éperdu en direction du spatioport. Après avoir tenté de remettre un semblant d’ordre dans la horde en cisaillant de droite et de gauche, Manski’ décide de se joindre à la fête car après tout, les Marines n’ont plus nulle part où aller et l’avantage numérique est toujours largement en faveur des rouges…

Début spoiler…Mais c’était sans compter sur le besoin pathologique des Khorneux de cogner sur quelque chose ou quelqu’un dans les plus brefs délais, qui va jouer un bien mauvais tour aux hérétiques. Alors qu’ils ne sont plus qu’à quelques dizaines de mètres de leurs cibles, leur soif de sang finit par se retourner contre eux et l’armée du Manskinner se transforme en battle royal géante, de laquelle seuls quelques survivants confus et blessés émergent à la fin des combats pour tomber aussitôt sous les coups des Marines. C’était ce sur quoi comptait Athellenas, qui a interdit à ses frères d’ouvrir le feu pour ne pas permettre aux cultistes de se reconcentrer sur leurs priorités. Malin. Ce qu’il l’aurait été encore plus, ce serait d’avoir partagé son plan avec ses hommes pour s’assurer que tout se déroule bien, plutôt que de compter aveuglément sur la discipline et la loyauté vacillante de ces derniers. Mais comme Athellenas l’explique doctement à Valerian une fois la bataille remportée, les meneurs n’ont pas à se justifier auprès des exécutants. Ce n’est pas avec une telle mentalité que notre héros gagnera le prix de camaraderie, mais les résultats parlent d’eux-mêmes, et c’est plus qu’assez au 41ème millénaire…Fin spoiler

1 : Je choisis de penser qu’il s’est équipé d’un poing énergétique (qu’il n’utilisera pas une fois de la nouvelle, malgré ce que l’illustration grimdark à souhait laisse penser) pour donner l’impression à ses bourrins de collègues qu’il serait le premier à sauter dans la mêlée. Mais la moufle ne fait pas le moine de l’espace…

AVIS :

Words of Blood’ fait partie des nouvelles écrites pour explorer une situation paradoxale ou problématique si on se réfère au background canon de univers de Games Workshop1, ici : « que se passerait-il si le seul moyen pour des Black Templars de remporter une bataille était de battre en retraite ? ». Je précise qu’à l’époque où cette histoire a été écrite, les zélés fils de Dorn prenaient leur serment de défense de l’Imperium de manière beaucoup plus littérale – certains esprits chagrins pourraient dire « basse du front », mais il ne faut pas écouter ces vils persifleurs – que maintenant. Sur ces prémisses intéressantes, en tout cas plus qu’une vulgaire empoignade entre Space Marounes et mutants/hérétiques/Xenos (rayer la ou les mentions inutiles), Ben Counter développe un propos qui, s’il accuse aujourd’hui sérieusement son âge, mérite encore la lecture à mon sens.

En effet, si on fait abstraction des quelques éléments surannés de ‘Words of Blood’ (le serment de non-reculade des Black Templars, les attaques de cavalerie…), la trame de l’histoire reste solide. Mieux encore, cette nouvelle présente un parallélisme aussi élégant que satisfaisant entre les dilemmes tactiques et managériaux auxquels sont confrontés les deux commandants ennemis. Tant Athellenas que le Manskinner doivent en effet réfréner les penchants naturels de leurs troupes pour espérer l’emporter, et composer avec la mauvaise volonté de ces dernières à obéir à des ordres avec lesquels elles ne sont pas en phase. À ce petit jeu, la discipline naturelle des Space Marines finit par l’emporter (mais de très peu), provoquant la fin des hordes hérétiques de la manière la plus Khorneuse qui soit. Le vieux fluffiste qui sommeille en moi a d’ailleurs failli verser une larme (de sang) en lisant la harangue de la dernière chance faite par le Manskinner à ses troupes indisciplinées juste avant qu’elles ne piquent leur sprint fatal vers le spatioport d’Empyrion IX. Car oui, Khorne était dans l’archéofluff une divinité plus complexe que l’immonde bourrin qu’il est devenu au fil des versions2, et Counter mérite une accolade pour avoir reflété ces fifty shades of red dans sa nouvelle.

Boni appréciables, il s’est également donné la peine de développer un minimum sa galerie de personnages (les plus intéressants étant le Manskinner philosophe et ses lieutenants exaltés), et se révèle plutôt généreux en termes de fluff Black Templar, même s’il est permis de douter de la validité de ces informations plus de vingt ans après l’écriture de cette nouvelle (à l’époque, cette faction ne disposait pas de son propre Codex, et on pouvait donc y aller franco sur leur background). Pour ne rien gâcher, la nouvelle se termine par un petit twist final, un peu ruiné par le TGJSUO (Ta Gu*ule Je Suis Un Officier) que l’aimable Athellenas décoche au pauvre Valerian, mais on n’en tiendra pas rigueur à l’auteur. Bref, même si ‘Words of Blood’ a un peu vieilli depuis sa sortie (en 2000, on peut être miséricordieux), il elle ça se laisse lire sans problème encore aujourd’hui.

1 : Marc Gascoigne indique dans son introduction de l’anthologie ‘Let the Galaxy Burn’ que la Black Library a été (au moins en partie) créée à cette fin. C’est dire si ce « genre » est important.
2 : Quand on voit les dernières entrées du Codex World Eaters, on ne s’étonne pas que le mot « subtilité » s’écrive avec neuf lettres, et non pas huit…

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Raptor Down – G. Thorpe :

INTRIGUE :

40K_Raptor DownNous retrouvons le Commandant Jacques Jaeger de l’escadron Raptor, après les évènements couverts dans ‘Acceptable Losses’, et la prise de fonction compliquée et sanglante de notre héros à l’occasion d’une bataille spatiale contre un Rok Ork. 18 mois plus tard, le Divine Justice, croiseur impérial auquel les Raptors sont rattachés, est passé à autre chose, et fait partie de la flotte d’invasion du système de Mearopyis, que l’Imperium cherche à reprendre aux Noctal après quelques millénaires d’atermoiements (saleté de bureaucratie). Ayant eu largement le temps de se familiariser avec son nouveau poste, de se faire accepter par ses hommes et de terroriser les nouvelles recrues venues remplacer les pertes subies au cours de  la campagne précédente, Jacques le Fataliste1 supervise les opérations de soutien du déploiement de la Garde Impériale au sol, qui consistent surtout à aller bombarder les cibles les plus juteuses à la surface de la planète capitale du système, tâche grandement facilitée par l’absence de chasseurs à capacité de projection spatiale dans le camp d’en face, ce qui permet aux Maraudeurs de frapper avec une impunité assez totale.

Chargés d’une nouvelle mission de démolition de l’infrastructure militaire locale, les escadrons Raptor et Storm, accompagnés  de leurs écrans de chasseurs (pour une fois qu’ils sont là, ces vole au flanc) quittent leur vaisseau mère pour ce qui ne semble être qu’une formalité pour ces pilotes aguerris. Malgré la tentative malheureuse d’interception de la part des Noctal, prestement contrecarrée par le professionnalisme et les gros flingues impériaux, tout semble baigner dans l’huile de moteur pour Jaeger et ses hommes, jusqu’à ce que ce dernier ait la malheureuse et déplorable idée de… prendre une initiative. Ahlàlà. Pour sa défense, son projet d’attaque d’une colonne blindée Noctal, repérée par l’esprit de la machine d’un missile2, et dont l’utilisation fourbe de la géographie locale avait permis d’échapper aux scanners de la flotte jusqu’ici, partait d’une bonne intention : protéger l’avance des bidasses de la Garde et les empêcher d’être pris en tenaille par les défenseurs. Malheureusement, les grands projets de canyoning de Jaeger, pour prometteurs qu’ils aient semblé sur le papier (en voilà une activité de team building qu’elle est bonne !), se trouvent rapidement et violemment contrariés par la puissance de feu des assaillis. Et même si Thorpe ne se donne pas vraiment la peine de décrire la manière dont les Noctal parviennent à dégommer l’invincible armada de manière aussi brutale, le résultat de l’accrochage n’est pas franchement en faveur des Impériaux. Bien que ces derniers aient pu larguer quelques missiles sur zone, le bilan est très lourd, et même Jaeger ne s’en sort pas indemne, son appareil étant lui aussi abattu en plein vol, forçant l’impulsif et inconstant Commandant3 à évacuer la carlingue en compagnie de ses hommes. Se réveillant avec une jambe cassée dans le désert de Mearopyis, Jacquou le Croqueur de feuille de match doit maintenant digérer les conséquences humaines et matérielles de son coup de sang : avec deux tiers de ses Maraudeurs et la moitié des Thunderhawks passés en perte et profit, le bilan est lourd pour Herr Jaeger. Cela en valait-il la peine ? C’est sur cette question lourde de sens que nous quittons notre héros, qui pourra attendre d’être secouru en dessinant des faucons. C’est ça d’être une buse.

AVIS :

Suite de l’acceptable Acceptable Losses, Raptor Down donne l’occasion à Gav Thorpe de nous tenir au courant de l’évolution de carrière ce bon vieux commandant Jaeger, et met l’escadron de ce dernier aux prises avec un nouvel ennemi et sur un nouveau théâtre d’opérations. Après l’espace froid et mortel qui a vu les Raptors aller au casse-pipe contre un Rok, nous sommes donc témoins d’une excursion atmosphérique dans les déserts de Mearopyis, ce qui illustre bien la versatilité des Maraudeurs impériaux. Sur la forme, la nouvelle de Thorpe se révèle être d’un niveau sensiblement égal à ses œuvres « spatiales » précédentes, c’est-à-dire très correct. Si on peut critiquer la prose de notre homme à bien des égards, il faut lui reconnaître une capacité à dépeindre un engagement aéronautique/spatial de manière convaincante et intéressante, beaucoup mieux que la plupart de ses collègues en tout cas. Sa maîtrise des unités (tant spatiales4 que temporelles5) et des facteurs propres à ce type de combat, comme la vitesse et la direction du vent, ou le niveau de carburant et des munitions embarqués rendent la lecture des péripéties aériennes de l’escadron Raptor plutôt prenante. Thorpe fait même du zèle en intégrant en début de récit une retransmission d’un affrontement spatial entre la flotte impériale et son homologue Noctal, que le supérieur de Jaeger se  repasse en boucle comme d’autres matent un top 10 NBA. Petit plaisir coupable, que nous lui pardonnons sans mal puisque le résultat est là aussi assez qualitatif.

L’intrigue et la construction de Raptor Down, en revanche, s’avèrent être moins satisfaisantes. La première est une variation sans originalité du scenario d’Acceptable Losses (un escadron de Maraudeurs chargé d’une mission où rien ne se passe comme prévu), ce qui n’est en soit pas un gros problème puisque la possibilité de Thorpe d’innover sur le sujet est passablement limitée (un Maraudeur, ça maraude, poingue). Ce qui est moins acceptable à mes yeux est la manière dont l’auteur fait passer Jaeger de Mr Baillezeubouque à Dr Folamour en l’espace de deux paragraphes, le chef d’escadre précautionneux se muant en tête brûlée sans qu’aucun élément préalablement établi par Thorpe sur le caractère de son personnage ne puisse laisser augurer ce changement radical de tempérament. Autre point plutôt mal géré par le Gav, le raid des Maraudeurs sur la colonne blindée, torché en même pas une page, et qui tient plus du tir au pigeon que de l’attaque en rase-motte. Le fait qu’on ne voit même pas à qui les impériaux sont confrontés, ce qui ne permet pas de comprendre pourquoi ils se font ainsi décimer par un adversaire totalement à leur merci sur le papier (à moins que les Raptors aient eu la malchance de tomber sur un convoi DCA Noctal), annihile toute tension narrative, les (bol)os des as se faisant canarder (un comble pour des raptors6) en l’espace de quelques secondes. Finalement, la conclusion même de la nouvelle ne m’est pas apparue comme particulièrement maîtrisée, les états d’âme douloureux de Jaeger alors qu’il se retrouve isolé avec ses hommes en territoire ennemi, ne suscitant qu’un distrait « so what ? » chez votre serviteur. À titre personnel, je pense que Thorpe a laissé ainsi la porte ouverte à un nouvel épisode (à ma connaissance jamais écrit), et que cette fin n’en était en fait pas vraiment une. Pas de chance, cela n’a débouché sur rien, et la dernière image que le lecteur emportera du commandant Jaeger sera celle du matelot du radeau de la Méduse fixant l’horizon d’un œil torve, le menton dans la main. Ce qui n’est pas commun, avouons-le.

1 : Il reconnaît lui-même qu’il n’est jamais heureux. Sauf quand il vole. Et encore, il stresse tellement que j’ai du mal à voir quel plaisir il tire de l’expérience. Pauvre bonhomme.
2 : On peut remercier le Techno-Adepte Ferrix, l’homme qui murmurait à l’oreille des (AGM-119) Pingouins.
3 : Pour un gars qui avait passé la nouvelle à ressasser son amour des plans qui se déroulent sans accrocs et la nécessité de se conformer aux règles établies, surtout quand elles touchent à la Santé & Sécurité, décider de se la jouer berzerk à la première colonne blindée, c’est assez surprenant.
4 : Quand on est un pilote de Maraudeur, 150 kilomètres, c’est proche.
5 : Quand on est un pilote de Maraudeur, 3 minutes, c’est long.
6 : ‘Rapace’ en anglais. Rien à voir avec les dinosaures donc.

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Chains of Command – G. McNeill :

INTRIGUE :

Chains of CommandEngagé dans la campagne de pacification de Thracia avec un contingent d’Ultramarines placé sous le commandement du Capitaine Idaeus, le Sergent Uriel Ventris a été chargé de mener l’assaut sur le pont 2-4, tenu par les rebelles ayant eu l’audace de se soulever contre le bienveillant Empereur, et qu’il convient de faire sauter pour éviter que la contre-attaque de la Garde Impériale en direction de la capitale planétaire ne soit prise de flanc. Après quelques paragraphes de « mes sens sont vraiment trop développés lolilol » #ImTheBest #YouCantWriteAstartesWithoutStar, qui expliquent en grande partie pourquoi personne n’aime les Ultramarines, Ventris accomplit sa mission, déclenchant un assaut en règle de ses petits copains bleu pervenche et vert sapin sur la position adverse. Désespérément surclassés, les défenseurs se font hacher menu, et les meilleurs de l’Empereur s’organisent pour tenir le pont assez longtemps pour permettre au vénérable Techmarine Tomasin de placer les explosifs qui permettront de faire écrouler l’ouvrage d’art dans la gorge en contrebas.

Nous faisons la connaissance du Capitaine Idaeus, un officier vétéran et proche de ses hommes, connu pour son approche distanciée du saint Codex Astartes, ce qui n’en finit pas de sidérer le rigoriste Ventris. Ce même Idaeus a d’ailleurs fait montre de ses tendances libertaires en menant la charge contre un nid de bolters lourds, au lieu d’attendre le soutien du reste de ses hommes, comme ce planqué de Guilliman l’avait pourtant préconisé dans ses écrits. Depuis cinquante ans qu’ils combattent ensemble, Idaeus n’a pas réussi à convaincre son bras droit de l’avantage de s’écarter de temps en temps du manuel d’utilisation de la guerre écrit par le Primarque, et ce n’est pas aujourd’hui que ça va ch… Ah, on me dit dans l’oreillette que c’est précisément l’objet de cette nouvelle. Bigre.

Comme tous les vétérans dignes de leurs médailles, Idaeus fait confiance à son instinct, et ce dernier lui hurle (il est un peu sourd) que quelque chose en tourne pas rond, malgré le fait que la mission se déroule jusqu’ici parfaitement comme prévu. Ce malaise le conduit à mener une mission d’inspection de l’autre côté du pont, Ventris à ses côtés, pour juger du boulot effectué par les Scouts déployés par les Ultramarines en territoire ennemi. Et, évidemment, il s’avère qu’une importante colonne blindée progressait discrètement (c’est possible si on met des patins sur les chenilles) en direction du pont, ce qui va devoir forcer le vénérable Tomasin à se bouger les vénérables miches, ce qui n’est pas facile quand on est plus refait qu’un Iron Hands en fin de carrière (souvenir d’une rencontre torride avec un Carnifex entreprenant sur Ichar IV). Tout aussi évidemment, rien ne se passe comme prévu à partir de ce moment, les Scouts, le Thunderhawk qui devait évacuer les Ultramarines, et le vénérable Tomasin tombant tous sous le feu de l’ennemi, ce qui force Idaeus et ses compagnons à monter une défense désespérée du pont, le temps que 1) un autre transport arrive, et 2) quelqu’un trouve une idée brillante pour faire péter la passerelle, ce qui reste tout de même l’objet principal de la mission de nos marsouins énergétiques.

Je vous passe les longues scènes de baston dont nous gratifie McNeill, et qui permettent à Ventris de montrer qu’il en a dans le slibard, pour aller directement au moment où notre futur héros réalise qu’il suffit de déclencher une charge de démolition à proximité des explosifs posés par l’irrécupérable Tomasin pour déclencher une réaction en chaîne qui devrait provoquer les résultats escomptés. Petit problème, l’escouade de Space Marines d’Assaut envoyés réaliser cette mission se fait pincer en chemin par les Night Lords qui coordonnent la rébellion chaotique, et les incapables finissent crucifiés sur le pare chocs des Rhinos des fils de Curze pour leur apprendre la vie. Devant ce spectacle insoutenable, Idaeus et Ventris sont très colère, et cette rage leur permet de repousser l’assaut des renégats au prix de lourdes pertes. Alors que le deuxième Thunderhawk approche de la position intenable des Ultramarines, l’heure des choix arrive pour la bleusaille…

Début spoiler…Le noble Idaeus décide de partir faire exploser le pont à la mano, malgré ses chances de réussite quasi nulles, et ordonne à Ventris de mener les quatre rescapés de cette folle nuit, ainsi que son épée énergétique de maître, jusqu’au point d’extraction. Les cœurs gros, le Sergent s’exécute, et est témoin de l’héroïque sacrifice de son mentor dans les poutrelles et les travées du pont 2-4, la bande de Raptors laissée en garnison par les Night Lords ne parvenant pas à lui régler son compte avant que le Capitaine fasse feu avec un pistolet plasma dérobé à l’ennemi sur une charge de démolition laissée négligemment sur place1. C’est donc une victoire indéniable pour l’Imperium, et le début de la saga d’Uriel Ventris, qui héritera du commandement de la 4ème Compagnie à la suite de la campagne de Thracia.Fin spoiler

1 : On pourrait aussi se demander pourquoi les Night Lords n’ont pas détaché les explosifs laissés par le vénérable Tomasin sur les piliers du pont quand ils en avaient l’occasion. Encore une preuve que l’abus de Chaos est mauvais pour le cerveau.

AVIS :

Si l’idée de lire une nouvelle d’action dont le héros est un Ultramarines peut sembler intrinsèquement barbante à un lecteur de 2020, qui a sans doute pu pratiquer l’exercice à de nombreuses reprises grâce/à cause de l’obsession de la Black Library pour ce genre de productions, il faut être juste avec Graham McNeill et Uriel Ventris, et rappeler que ‘Chains of Command’ a été à sa sortie (2001) une des premières et plus abouties Space Marinades (saveur vanille) qui soient. Les innombrables ersatz et proxys publiés depuis ne l’ont pas aidé à bien vieillir, ni le style de l’auteur, ni les personnages mis en scènes, ni l’intrigue exposée n’étant particulièrement dignes d’éloges, mais le résultat n’est pas indigne pour autant. À l’époque où il est attendu d’un héros Space Marines un peu plus qu’un grade de Capitaine et une vague tendance à se poser des questions existentielles (ce qui était suffisant il y a 15-20 ans), je laisse le soin au lecteur de décider si une figure comme Uriel Ventris est toujours pertinente, ou bien s’il est temps d’accorder une retraite bien méritée à l’aïeul de tous les héros d’action énergétique de la Black Library.

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Loyalty’s Reward – S. Jowett :

INTRIGUE :

40K_Loyalty's RewardNotre histoire commence par une scène tendue à l’arrière de l’honorable établissement du Cochon PFendu, taverne située à proximité du spatioport de Praxis, cité prospère d’Equus III. Mikhail Kravi, jeune loup à l’ambition féroce et bras droit d’un des Protektors affiliés à la puissante Maison Gaudi, est venu avec quelques gros bras de ses amis « persuader » le marchand Leon Kleist, un peu trop porté sur la dive bouteille pour son propre bien, d’offrir un superbe présent au nouveau Graf Gaudi lors de son intronisation prochaine. Cela serait un moyen judicieux de faire oublier à ce dernier les mots un peu lestes qu’un Leon rond comme une queue de pelle a eu à son égard il y a quelques jours, et dans une cité mise en coupe réglée par de puissants gangs depuis des siècles, s’attirer l’inimitié d’un Graf n’est pas une perspective attrayante. Convaincu par l’argumentaire de Mikhail autant que par son solide crochet du gauche, Leon le Persiffleur se fait un honneur de remettre à Viktor Gaudi une babiole hors de prix dès le surlendemain, lors de la cérémonie durant laquelle le jeune héritier prend officiellement le titre et la place de feu son grand-père Bruno.

Alors que Papi Gaudi préférait maintenir des relations cordiales et éviter les affrontements larvés avec les autres Maisons de Praxis, Viktor nourrit des rêves de conquêtes urbaines. Bien que sa faction compte parmi les plus puissantes de la ruche, elle n’est pas de taille à affronter frontalement tous ses rivaux… jusqu’à ce qu’un marchand (Brek) se présente avec une occasion en or : une cargaison de catapultes shuriken reconditionnées, qu’il est prêt à céder à vil prix au Graf ambitieux. C’est le début d’une OPA agressive sur les territoires des autres Maisons, dans laquelle Mikhail s’illustre particulièrement en organisant l’assassinat du Graf Reisiger, abattu avec ses conseillers les plus proches alors qu’ils dînaient dans un kebab de luxe. Récompensé par l’élévation au rang de Protektor, Mikhail est convié avec tous ses collègues à une petite soirée au manoir Gaudi, et se réveille le lendemain matin dans son appartement, nu comme un ver, couvert de sang et pris d’une gerbe carabinée. La nuit a dû être bonne !

Début spoiler…Les quelques souvenirs qui finissent par lui revenir après s’être envoyé une demi-bouteille de cointreau pour se remettre les idées en place ne sont cependant pas très sympathiques. Il a de vagues réminiscences de litanies prononcées dans une langue inconnue, en direction d’un bloc d’obsidienne couvert de runes bizarres. N’ayant pas atteint sa position en étant complètement obtus, et étant un croyant convaincu et pratiquant du culte impérial (comme la plupart des habitants de la pieuse Equus III), Mikhail comprend vite qu’il a assisté à des activités encore plus prohibées que la moyenne, et qu’il est de son devoir d’en alerter les autorités compétentes l’Ecclesiarchie. Il sèche donc le nouvel afterwork organisé par Viktor Gaudi et son pote Brek pour aller se confesser dans le temple le plus proche, espérant que sa coopération désintéressée (en partie tout du moins) lui permettra d’échapper au jugement réservé aux cultistes, même involontaires.

Le hasard faisant bien les choses, un Inquisiteur de l’Ordo Malleus (Belael) passait dans le coin, en même temps qu’un contingent de Chevaliers Gris. Tout ce petit monde débarque fissa à la casa Gaudi, et pas pour causer modernisme catalan, croyez-le bien. Au terme d’une opération rondement et prestement menée, tous les membres de la cabale de Tzeentch sont passés par le bolter, scellant la fin de la Maison Gaudi. Et la balance Mikhail, me direz-vous ?

Début spoiler 2…Bien qu’il se voie déjà pardonné, ordonné Prêtre et oint Cardinal sur un monde très lointain en reconnaissance de son impeccable probité, Belael avait d’autres idées en tête lorsqu’il lui a promis une « juste récompense » en échange de sa collaboration totale. Ayant été infecté par une présence démoniaque pendant sa soirée blackout chez Totor, comme tous les Protektors invités, Mikhail n’héritera donc que d’un rituel de purification (privé, c’est déjà appréciable) et d’un bolt dans la tête. Ce n’est pas pour rien qu’on parle du fardeau et non du bonheur de la loyauté…Fin spoiler

AVIS :

Bien des années avant le lancement de Warhammer Crime et de son approche résolument urbaine et quotidienne du 41ème millénaire, Simon Jowett signait avec ‘Loyalty’s Reward’ une très bonne nouvelle dans ce registre low-key. Librement inspirée du Parrain de Coppola, et relevée d’un zeste de conspiration chaotique à la Eisenhorn dans sa seconde moitié, cette histoire démontre qu’il est tout à fait possible d’intéresser le lecteur sans avoir besoin de mettre en scène des batailles gigantesques ou des machinations à l’échelle galactique. L’immersion est réussie, l’intrigue se déroule de manière fluide et parfois assez inventive pour de la GW-Fiction (petit Mcguffin réussi avec le tabassage du pauvre Leon en introduction) : c’est un travail soigné auquel on a droit. Mon seul petit regret porte sur le choix de Jowett du Chaos comme antagoniste, alors que les symptômes éprouvés par Mikhail le lendemain de sa « cuite » faisaient plutôt penser à une infestation Genestealer, ce qui aurait été (à mes yeux) encore plus viscéral – à tous niveaux. Top qualité.

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Deus Ex Mechanicus – A. Chambers :

INTRIGUE :

Deus Ex MechanicusL’arrivée sur Naogeddon, monde mort et terne par excellence, de l’ingénieur et Techno-Prêtre (double cursus, t’as vu) Lakius Danzager et de son acolyte Osil manque de très mal se finir pour nos deux personnages, embarqué à bord d’un vaisseau à l’autopilote très bas de gamme. En chute libre depuis l’atmosphère haute de la planète, la navette occupée par les envoyés du Mechanicus est rebootée à temps par le dégourdi Lakius pour éviter un crash mortel à la surface désertique de ce roc sans vie, mais accueillant des ruines très anciennes qu’un Magos Explorator (Egal) souhaite étudier. En tant que spécialiste de la cryo-stase, Lakius dispose d’une expertise précieuse en matière de compréhension de technologie Necron (à ce stade, vous aviez sans doute déjà deviné qu’on prenait ce chemin…), et Egal l’a donc réquisitionné pour assister sa petite équipe de super geeks.

A peine remis de leur atterrissage mouvementé, Lakius et Osil doivent encaisser une nouvelle expérience traumatisante : l’attaque du camp du Mechanicus par quelques escouades de Guerriers Necrons, vomies comme toutes les six heures par la Necropole encore endormie qu’Egal a commencé à explorer. Bien que l’effet de surprise ne soit pas de leur côté, et que les servants de l’Omnimessie puissent compter sur une cohorte de Prétoriens ainsi que de solides fortifications pour les défendre, les robots squelettiques vendent chèrement leur châssis, forçant les adeptes à partir à la découverte de la crypte exhumée par le Magos avec une protection réduite.

De manière très prévisible, la progression du petit groupe (Egal, Lakius, Osil et quelques personnages secondaires à l’espérance de vie très limitée) rencontre une résistance qui va croissant, depuis des marches très hautes qui obligent les Prétoriens à rouler à deux à l’heure, jusqu’à des champs magnétiques générateurs de trouille, ou plus prosaïquement des vagues de Scarabées kamikazes. Au bout du compte, Lakius et Egal se retrouvent seuls dans la salle des bornes de chargement sarcophages de la Nécropole, tandis qu’Osil, qui s’est pris quelques échardes dans la fesse gauche pendant l’expédition indoor, a été ramené au campement de base par le dernier Pretorien pour désinfection et pose de pansement. La tension est à son comble…

Début spoiler…Commençons par évoquer le destin d’Osil, que son maître a chargé d’une mission simple mais capitale : réveiller au plus vite l’Assassin Eversor qui végète dans la soute de leur vaisseau. Lakius soupçonne en effet que la Necropole est en train de se réveiller, et que seule l’intervention d’une machine à tuer bourrée de Red Bull a une chance d’enrayer cette trajectoire menaçante. Malheureusement, la navette du Techno-Prêtre s’est fait coloniser par une nuée de… barnacles (vous croyiez que les Necrons s’en étaient tenus aux scarabées ? erreur) métalliques pendant l’absence de ses propriétaires, empêchant l’acolyte de sortir le tueur de sa torpeur. Voilà qui est dommage.

De leur côté, Lakius et Egal récupèrent un « Bâton de Lumière » dans le sarcophage (vide) du probable Phaëron du lieu, avant de prendre à leur tour le chemin de la sortie. Bien que le Magos assure à son compagnon que cette relique a le pouvoir de tenir à distance les gardiens de la Nécropole, Lakius décide de jouer la carte de la sécurité et de détruire le générateur de phase qui a ouvert le portail permettant d’accéder à l’intérieur du complexe, une fois les deux explorateurs sortis de ce dernier. Egal n’est pas d’accord, et la dispute académique dégénère rapidement en duel de carabine laser, au cours duquel Lakius colle un tir à pleine puissance en pleine tête de son estimé confrère, avant de réduire le générateur en cendres. Une conclusion regrettable, mais la fin justifie les moyens…

Début spoiler 2…Sauf qu’Egal refuse de rester au sol, et pour cause. Sous le fond de teint soigneusement appliqué, c’était un C’tan qui avait revêtu les robes écarlates du Mechanicus. On ne saura jamais ce qu’il cherchait à faire sur Naogeddon, à part troller quelques pauvres adeptes qui n’avaient rien demandé, bien sûr, mais comme on peut s’y attendre, les tirs désespérés de Lakius le font doucement rigoler. Beau joueur, il laisse ce dernier s’enfermer avec Osil dans le laboratoire installé par les chercheurs, avant de frapper doucement à la porte pour essayer de leur vendre des boîtes de biscuits pour financer sa classe de neige et/ou des bons du trésor moldave. Lorsque la paroi finit par céder sous ses coups, le C’tan s’aperçoit que ses proies n’ont pas été oisives, et ont bricolé une étrange machine avec les composants qu’ils avaient sous la main. That’s cute, but too little, too late

Début spoiler 3…Eh non. La machine en question était un générateur de stase, qui emprisonne fissa la truculente Echarde dans une bulle atemporelle. Fin. Comment, vous trouvez ça un peu tiré par les cheveux ? Mais qu’attendiez vous d’une histoire qui s’appelle presque Deus ex Machina, enfin ? Fin spoiler

AVIS :

Les nouvelles d’exploration de Nécropoles Necron, un sous-genre assez populaire de la littérature 40K, ne sont pas vraiment ma tasse de thé. J’ai toujours l’impression de lire la même histoire, basée autour d’un faux suspens (« eh non, ils ne dormaient pas en fait… SHOCKING ») et finissant généralement par une course effrénée vers la sortie de la petite bande de héros ayant eu la mauvaise idée de faire de l’archéologie chez les grands anciens galactiques. Ce ‘Deus Ex Mechanicus’ a pour lui de proposer des variations assez intéressantes à cette base éculée (l’intervention d’un C’tan transformiste1, la presque intervention d’un Assassin Eversor), ce dont je sais gré à Andy Chambers.

Malheureusement pour ce dernier, il ne suffit pas d’avoir des idées innovantes pour accoucher d’une nouvelle réussie : encore faut il les intégrer à l’intrigue et en soutenir le développement de manière un tant soit peu crédible, ce qui n’est pas le cas ici. On ne saura donc pas comment un Techno Adepte du Mechanicus a pu se retrouver en possession d’un Eversor (l’Adeptus Assassinarum n’étant pas vraiment connu pour sa générosité), comment le C’tan transformiste a pris la place d’Egal (ou pourquoi il s’est donné le mal de revenir sur sa planète natale avec des acolytes humains, si le Magos n’a toujours été qu’une couverture), ou ce qu’il se passe après que cette divinité en vadrouille se soit retrouvée piégée dans un champ de stase (ce qui pourrait sans doute intéresser l’Inquisition, et impacter fortement le fluff de Warhammer 40,000… mais je dis ça comme ça). Ou même à quoi sert la scène initiale de la nouvelle (le quasi-crash du vaisseau de nos deux lurons), dont il ne sera plus jamais fait mention par la suite et qui aurait pu être remplacée par une arrivée sur site des plus classiques sans que cela ne change rien à la suite. Trop brouillon.

1 : Qui avec le recul ressemble fortement à Trazyn l’Infini, dans le genre boute en train avide de connaissances. Vu l’âge canonique de cette nouvelle, cette similitude ne peut être autre chose qu’une coïncidence troublante…

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Barathrum – J. Curran :

INTRIGUE :

40K_BarathrumLorsque l’Inquisiteur Anselm est appelé par un vieil ami sur la planète de Barathrum pour élucider la série de morts violentes ayant endeuillé l’expédition de l’Adeptus Mechanicus en charge de l’excavation de la cité souterraine découverte à la surface de ce monde mort, il ne s’attendait pas à recroiser la route de son ancien mentor, Grogan. Les deux hommes se sont séparés en mauvais terme après une enquête bâclée sur Tantalus il y a bien des années de cela, à la suite de laquelle le puritain Grogan a déclaré un Exterminatus que son élève trouvait bien précipité. Guère enchanté par la présence de son collègue et néanmoins rival sur cette affaire sordide (rapport aux cadavres horriblement mutilés laissés par le tueur) et poussiéreuse (rapport aux interminables tunnels que nos héros passent la moitié de la nouvelle à parcourir), Anselm fait contre mauvaise fortune bon cœur et collabore en bonne intelligence avec Grogan, que le passage du temps n’a pas du tout adouci.

Une analyse poussée des victimes permet à Anselm, dont l’une des spécialités semble être la médecine légale, d’établir que ces dernières ont toutes été amputées d’un membre ou d’un organe différent, avec une précision chirurgicale qui plus est. Cette conclusion des plus sinistres passe au second plan lorsque les deux fins limiers des Ordos sont alertés par le Magos Explorator en charge de l’expédition (Eremet) qu’un portail gigantesque a été découvert par ses équipes. Scellé et couvert d’inscriptions écrites dans une langue indéchiffrable (à court terme tout du moins), l’édifice est également protégé par un champ électrique qui carbonise le premier Technoprêtre ayant eu la mauvaise idée d’y poser la méchadendrite. Pour le bouillant Grogan, cet incident est la preuve irréfutable que le Chaos est à l’œuvre sur Barathrum, et il s’empresse de suspendre les fouilles, au grand désespoir d’Eremet. Connaissant les méthodes employées par son ancien boss, Anselm se doute que les malheureux archéologistes ne tarderont pas à être soumis à un interrogatoire serré dont pas un ne sortira indemne. Cherchant à éviter à son vieil ami Cantor ce sort peu enviable, il poursuit donc les recherches de son côté… en piquant un somme. Dans un rêve que l’on peut qualifier de prémonitoire, il est mis en présence de l’Empereur en personne, fièrement juché sur sa chaise percée plaquée or, mais les traits aquilins du Maître de l’Humanité se transforment en ceux d’une hyène, et très mauvaise actrice avec cela1.

Ce pénible cauchemar est heureusement interrompu par l’arrivée d’Eremet, qui apporte à son hôte le résultat de l’expertise (expresse) réalisée par les savants de l’Inquisition sur le texte mystérieux gravé sur le portail récemment mis à jour. Comme on peut s’en douter, ce n’est pas la recette de l’aligot que les précédents habitants de Barathrum ont tenu à transmettre aux générations futures, mais un avertissement sans frais sur l’indicible (et illisible) menace dormant dans la crypte ainsi condamnée. Car ce n’est rien de moins que le Prince Démon Szarach’il qui patiente dans la cité morte, enfermé dans ce tombeau par les efforts de l’Inquisiteur Amaril il y a des milliers d’années. Grogan avait donc raison ! Mais d’ailleurs, où est-il ?

Eh bien, sur les lieux du crime pardi. Ayant surpris Cantor bravant le couvre-feu qu’il avait déclaré, l’Inquisiteur a suivi discrètement le Technoprêtre réfractaire jusqu’au portail interdit, et l’a chopé en train de se livrer à un rituel passablement chaotique. Il s’avère que le servant du Dieu Machine s’est fait hacker par l’esprit néfaste de Szarach’il, qui compte bien profiter de l’arrivée de l’expédition pour se faire la malle. Mais notre démon est très exigeant : alors qu’il aurait pu se contenter de posséder le premier humain passant à sa portée, comme le pauvre Cantor, il cherche également à se venger d’Amaril en infiltrant les rangs de l’Inquisition, et a pour cela besoin qu’un représentant des saints Ordos tombe sous son influence. Et tant qu’à faire, Anselm, qui est plus jeune et plus swag (il ne porte pas de moustaches) que ce vieux tromblon de Grogan, serait le candidat idéal. Tout cela nous est longuement raconté par un Szarach’il dont la passion pour le monologue de grand méchant ne présage rien de bon pour le succès de son entreprise…

Pour l’heure, Grogan croise le fer avec la terrible créature que Cantor a mis sur pied avec les organes de ses collègues… et l’abat sans trop de difficulté. Ce n’était toutefois qu’une diversion, permettant à un Cantor lévitant de desceller le portail et de libérer le terrible Démon… ou en tout cas son essence, qui s’empresse de posséder Grogan (Cantor s’écrase sur le sol comme une bouse et meurt après avoir présenté ses plus plates excuses). Sur ces entrefaites, Anselm arrive in da club et un (court) duel s’engage entre les deux Inquisiteurs. Ayant réussi à reprendre le contrôle de son corps pour un instant, Grogan décharge son hellgun sur le plafond en lave mi-cuite de la crypte, provoquant son enfouissement en même temps qu’incinération sous quelques tonnes/mètres cube de magma coagulé. Son sacrifice altruiste autant que le coup de moins bien de Szarach’il, qui ne parvient plus à sauter d’hôte en hôte comme il l’avait fait précédemment, permet de mettre un terme à cette escapade démoniaque, et de préserver l’Imperium d’une (sans doute) terrible menace.

1 : N’ayant qu’une version papier de cette nouvelle à disposition, je ne peux pas faire de capture d’écran pour prouver mes dires, mais sachez que l’apparition démoniaque interpelle notre héros somnolent de la sorte : “Anselm ! Anselm my servant, you have come to me. Anselm ! Anselm, Anselm ! Open the door!”

AVIS :

La tentative de Jonathan Curran de dépeindre les activités inquisitoriales ne s’avère guère probantes dans ce ‘Barathrum’ très moyen, qui explore plusieurs ambiances (slasher, thriller, roman noir, horreur…) sans réussir à s’en approprier aucune. Cette base bancale est de plus handicapée par le manque de maîtrise du lore de 40K par Curran, qui semble considérer les Inquisiteurs comme des détectives privés de choc, envoyés par leur hiérarchie enquêter en solitaire sur des affaires étranges. Pour ne rien arranger, les machinations de l’antagoniste sont inutilement complexes, et l’auteur ne semble même pas avoir pris le soin de se relire1. Ça fait beaucoup de problèmes pour une nouvelle qui peut être mis en comparaison avec les travaux inquisitoriaux, autrement plus réussis, de Dan Abnett, publiés pour les premiers d’entre eux à la même époque que ‘Barathrum’. Comme la nécropole d’où elle tire son nom, cette histoire mérite l’oubli profond dans lequel elle a été plongée depuis des millénaires.

1 : “The Inquisition is a tool” (Grogan, p. 9). “The Inquisition is not a tool” (Grogan, p. 23).

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Missing in Action – D. Abnett :

INTRIGUE :

40K_Missing in ActionÀ peu près remis de son aventureuse traque du Necroteuch (‘Xenos’), au cours de laquelle il a débloqué le skin exclusif Buster Keaton, Gregor Eisenhorn a été remis en service actif par les Saints Ordos, qui lui ont donné une mission bidon sur Sameter pour lui remettre le pied à l’étrier en douceur. Comme quoi, on peut ordonner des Exterminatus sans sourciller et gérer ses subalternes avec une profonde humanité. L’affaire n’ayant rien donné, les enquêteurs s’apprêtent à plier bagage lorsqu’un ministre du gouverneur sollicite une audience pour avoir l’avis d’un expert reconnu sur une série de meurtres qui ont tout l’air d’être l’œuvre d’un culte chaotique. Les quatre victimes identifiées à ce jour ont en effet toutes eu les mains, les yeux et la langue enlevés (voire plus si affinités). Flairant un défi digne de ses talents, Greg’ accepte de reprendre le dossier, et commence sa petite enquête de voisinage en compagnie de ses associés (la Paria fashion victim Bequin, l’ex-Arbites Fischig, le pilote Betancore et le Savant Aemos).

Les interrogatoires des voisins, l’examen des cadavres des victimes et d’un suspect trop lent, les informations déterrées par Aemos et le flair éprouvé d’Eisenhorn ne mettent que quelques heures/pages à identifier une piste prometteuse, qui mène nos héros sur les traces d’un régiment de Sameter ayant combattu sur Surealis il y a une vingtaine d’années. Marqués autant par les horreurs du Chaos que par les rayons UV des soleils de ce système, les vétérans qui ont regagné leurs pénates lorsque le régiment a été débandé auraient basculé dans la psychose et se seraient mis à fliquer en douce leurs compatriotes, en faisant disparaître les individus suspectés d’hérésie. C’est l’hypothèse qui reçoit les faveurs grimaçantes d’Eisenhorn en tout cas, et qui le mène jusqu’au lieu de conscription du régiment en question, laissé depuis longtemps à l’abandon…

Début spoiler…Et où une trentaine de vétérans, se sachant traqués à titre préventif par les Arbites locaux après que l’Inquisiteur se soit ouvert de ses soupçons, se sont regroupés pour se rappeler le bon vieux temps. Le petit cœur sensible de Greg saigne devant le spectacle des délaissés de Sameter, abandonnés comme des vieilles chaussettes par l’Imperium à la fin de leur service, sans même une réserve de biaffine suffisante pour traiter leur peau carbonisée. Beau joueur, notre héros décide donc de raisonner ces brebis égarées et trop bronzées, mais fait un jet critique sur son jet de persuasion et l’affaire tourne rapidement au méchoui. Trop coriace pour être mis en difficulté par une bande de mobs de bas étage, Eisenhorn perd tout de même sa main gauche dans la bagarre, victime d’un tir de sniper à gros doigts malhabiles. L’affaire est toutefois résolue, et l’Inquisiteur peut retourner sur Gudrun avec la satisfaction du devoir accompli, et un sale goût de grimdark au fond du gosier.Fin spoiler

AVIS :

Petit interlude inquisitorial comme Abnett en a signé quelques uns au cours de l’écriture des trilogies ‘Eisenhorn’ et ‘Ravenor’, ‘Missing In Action’ voit Greg le missionnaire mener une enquête en deux temps trois mouvements en compagnie d’une bonne partie de sa clique (il manque Harlon Nayl et Kara Swolle, sans compter la barquette Ravenor), dans une ambiance empruntant plus au film noir qu’à la SF « spectaculaire » (pouvoirs psychiques et Xenos en folie). C’est simple, on pourrait assez facilement adapter cette histoire à notre époque, pour en faire un récit policier tel que Grange, Vargas ou Cohen pourraient en écrire. Tout cela est plus sympathique qu’essentiel, et permet de constater, si besoin était, que Dan Abnett est un auteur plus accompli que la plupart des auteurs de la BL, et est tout à fait capable de signer une nouvelle à la fois sans prétention et de très bon standing. À savourer sans modération pour les lecteurs familiers de la série, et à découvrir sans réserve par ceux qui ne le sont pas (encore).

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Liberty – G. Thorpe :

INTRIGUE :

40K_LibertyÀ la suite des événements couverts dans le premier tome de la saga des Last Chancers (‘13th Legion’), le Colonel Schaeffer passe en coup de vent sur la planète prison de Ghovul pour y mettre au frais le seul survivant du concours de survie organisé par l’intraitable et intuable officier ces trois dernières années : Kage. Ce dernier, officiellement pardonné à la fin du roman mais ayant raté sa réinsertion en trucidant quelques officiers un soir de beuverie, s’est vu accordé une Lastest Chance par Schaeffer, bien conscient du potentiel de cette machine à tuer. Comme on peut s’en douter, cet épisode carcéral ne va pas se dérouler sans anicroche.

Outre le fait que la tour que partage Kage avec 200 autres gibiers de potence n’a rien à envier à la Talaudière, et que son compagnon de cellule, le velu et vorace Marn1, ronfle comme un Squig enrhumé, c’est surtout le manque d’activité physique et le sentiment d’abandon qu’il ressent au bout de quelques semaines qui fait péter les plombs à notre héros. Quand un de ses codétenus insiste lourdement pour avoir son tour avec le sac de frappe que l’ex-Légionnaire Pénal martyrise depuis trente minutes à grands coups de latte, Kage saute à la gorge du faquin et lui administre une correction terminale, fracassant quelques os chez les matons qui essaient de s’interposer au passage. L’administration pénitentiaire tenant à conserver le monopole de la violence (pas forcément légitime) dans son établissement, ce déchainement de violence vaut à Kage seulement quelques coups de knout, Schaeffer ayant explicitement ordonné au gouverneur Skandlegrist de trop endommager cet élément prometteur pendant son absence.

Cela ne décourage pourtant pas le K. de persévérer dans ses comportements séditieux. Dès que son dos en lambeaux a suffisamment cicatrisé pour lui permettre de regagner sa cellule, il commence à organiser une tentative d’évasion. Ayant récupéré une cuillère laissée sans surveillance à la cantine, il passe quelques nuits à l’aiguiser en secret sur les murs de sa cellule, avant de passer à l’action d’une façon aussi brutale que court-termiste (sa signature). Après avoir à moitié étouffé Marn avec son oreiller (bien fait) et perforé le poumon avec son scalpel de fortune pour faire croire aux matons que son compagnon de cellule faisait un œdème pulmonaire, Kage se fraie un chemin sanglant à travers les malheureux gardiens dépêchés dans sa cellule, puis grimpe jusqu’en haut de la tour en faisant monter son body count à un niveau stratosphérique. Seul point d’échappatoire du vincularum, le sommet est l’endroit idéal pour passer à l’étape suivant de cette grande évasion un peu improvisée, et fausser compagnie aux sbires de Schaeffer…

Début spoiler…Sauf que dans un Impérium d’un million de mondes, il est tout à fait possible de construire des prisons sur des planètes absolument vides. C’est ce dont Kage se rend compte lorsqu’il contemple le paysage lunaire et désolé de Ghovul qui s’étend jusqu’à l’horizon. N’ayant littéralement nulle part où aller, il se rend sans faire d’histoires lorsque la huitième vague de gardes chiourmes le met en joue, et se met à espérer du fond du cœur que Schaeffer vienne lui rendre visite sans tarder. Putain qu’il est blême, le HLM…Fin spoiler

1 : Qui s’appelle comme ça car il engloutit ses repas en trente secondes montre en main. D’où l’expression « Marn l’a avalé ».

AVIS :

Petite nouvelle de transition entre ‘13th Legion’ et ‘Annihilation Squad’, ‘Liberty’ nous offre une sorte de seul en scène de Kage, qui démontre de manière probante qu’il est vraiment un très sale type. La narration à la première personne et le ton décalé utilisés par Thorpe rendent toutefois son anti-héros assez sympathique, et le récit de ses mésaventures carcérales se lit sans problème. La conclusion de l’histoire ne surprendra pas les lecteurs familiers de la série, mais Thorpe garde son propos suffisamment court et rythmé pour que cette absence de suspens ne soit pas rédhibitoire. Ça passe.

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Ork Hunter – D. Abnett :

INTRIGUE :

Ork HunterLa première mission de l’unité du Caporal Ondy Scalber dans la ceinture équatoriale d’Armageddon se passe assez mal. Déployés avec les Chasseurs d’Orks vétérans du Boss Keyser (les Ecorcheurs), les propres sur eux Jopalliens comprennent rapidement que leurs alliés ne les voient au mieux comme des appâts à peaux vertes, au pire comme des poids morts dont ils n’hésiteront pas une seconde à se débarrasser si la situation l’impose. Le Capitaine Lorit lui-même en fait l’amère expérience lors d’une pause en pleine jungle, le non-respect de la consigne de silence absolu donnée par Keyser lui valant d’abord un étranglement de la part d’un Ecorcheur, puis un direct dans la gorge décoché par Keyser en personne lorsqu’il fait mine de se plaindre de cette agression.

Les méthodes des Ecorcheurs ne manquent cependant pas d’efficacité, et leur affinité avec l’enfer vert dans lequel ils évoluent depuis des années leur permet de surprendre une colonie d’Orks sauvages s’étant acclimatée aux mangroves étouffantes d’Armageddon1. L’affrontement est aussi violent et sanglant que l’on peut se l’imaginer, et bien qu’Ondy gagne le respect, ainsi que le surnom de Bon Œil (et un véritable œil d’Ork en trophée), des Ecorcheurs grâce à son engagement total dans cette lutte sans merci, la plupart de ses camarades de Jopall ne passent pas l’épreuve du feu2, ou commencent à le regarder bizarrement. Qu’importe pour Ondy Bon Œil, qui speedrun son passage de Garde Impérial BCBG à vétéran psychotique en l’espace d’un après-midi, terminé par un combat singulier entre Keyser et le Boss Ork de la colonie décimée par les Ecorcheurs. Vous parlez d’une expérience marquante…

1 : On peut considérer que Dan Abnett a prophétisé l’arrivée des Kruleboyz près de vingt ans avant que la première figurine de cette faction ne soit commercialisée. Quel cador.
2 : Ou se font euthanasier de manière préventive par leurs chaperons au premier signe de détresse psychologique venu. C’est ainsi que le pauvre (Mishell) Rokar se prend une dague dans le sternum après avoir initié une partie de chat perché au mauvais moment. En même temps, il était plus taillé pour la banquise que pour la jungle…

AVIS :

Dan Abnett qui écrit une histoire de Gardes Impériaux, c’est assez banal. Dan Abnett qui écrit une histoire de Gardes Impériaux qui ne soient pas des Fantômes de Gaunt1, en revanche, c’est plutôt rare (il y a eu ‘The Fall of Malvolion’ et je crois que c’est à peu près tout). On sent tout de même que notre homme évolue en territoire connu dans ce sympathique ‘Ork Hunter’, qui semble être un petit exercice de style pour cet auteur vétéran : mettre en scène des Gardes d’élite, mais complètement antipathiques (alors que Gaunt et ses ouailles sont – à part Rawne, et encore, et Lijah Cuu – des crèmes). Le pari est réussi, et donne même envie de suivre la descente aux enfers (verts) du Caporal Scalber sur le long terme. Et comme Abnett ne rechigne jamais à relier a posteriori ses vieux one-shots avec le reste du Daniverse (de manière plus ou moins naturelle et élégante, il est vrai) il se pourrait que cela se produise un jour…

1 : Mais qui se déplacent tout de même comme des éclaireurs de Tanith, parce que certaines habitudes ont la vie dure.

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Business as Usual – G. McNeill :

INTRIGUE :

40K_Business as UsualTrois mois après la victoire de l’Imperium sur la Flotte Ruche Leviathan sur le monde de Tarsis Ultra, la vie a retrouvé un cours plus ou moins normal dans la capitale planétaire, Erebus (rien à voir avec l’affreux vieillard ridé et son couteau tout chelou). Pour Snowdog et son gang de trafiquants de drogue, cela signifie la reprise d’activités illicites dans la zone tampon séparant le sous-monde de cette cité ruchette1 et la banlieue mal famée où rôde une faune aussi sauvage que mortelle. Et je ne parle pas uniquement des essaims tyranides qui squattent l’endroit à la suite de la destruction de leur vaisseau mère. La nouvelle débute ainsi sur une rencontre business assez tendue entre notre héros peroxydé et trois de ses acolytes (Lex, Silver et Tigerlily), et une bande de Jackboys cherchant à écouler une grande quantité de Kalma, sorte d’ecstasy grimdark.

Bien que la came soit de qualité, comme le trip cosmique du brave Lex, ayant pris sur lui de goûter le produit, le révèle sans ambages, le sixième sens de Snowdog le titille méchamment. Il se doute que ses interlocuteurs vont essayer de la lui faire à l’envers, et lorsque les Jackboys dégainent leurs pétoires pour piquer les crédits durement gagnés du Malamut, ce dernier ne se laisse pas faire. L’échange de tirs entre les deux gangs finit par tourner en faveur de celui composé à 100% de personnages nommés (comme c’est étrange), mais attire également l’attention de la patrouille d’Arbites du Capitaine Jakob Gunderson. Ce dernier voue une détestation cordiale à Snowdog, coupable de l’impardonnable crime de vente de dope dans son périmètre, et n’est que trop heureux d’entraîner ses hommes sur les lieux de l’échauffourée après que quelques bribes d’échanges radio entre Jackboys lui aient permis de connaître l’identité de leur adversaire.

L’arrivée de cette troisième faction rebat les cartes, et scelle surtout le destin du pauvre Lex, utilisé par un Snowdog loyal sans excès envers ses hommes comme bouclier humain contre les balles à guidage laser de Gunderson. L’utilisation judicieuse d’un chapelet de grenades artisanales récupérées sur le cadavre d’un Jackboy permet toutefois aux trois survivants de se ménager une sortie explosive (et de tuer une grande partie des camarades de Gunderson, qui étaient pourtant à deux jours de la retraite), mais leur course effrénée les amène en territoire tyranide, ce qui n’est pas l’idée du siècle, et encore moins du millénaire. Rattrapés par les deux Arbites survivants alors qu’ils contemplaient les cadavres récurés de quelques gangers malheureux dans le boyau des égouts qu’ils avaient empruntés pour filer à l’anglaise, Snowdog, Silver et Tigerlily se retrouvent en mauvaise posture. Gendarmes et voleurs se réconcilient cependant en un éclair lorsqu’une horde d’Hormagaunts interrompt leur règlement de comptes, et les humains décident sagement de se carapater le plus loin possible de la menace Xenos, à plus forte raison lorsque le Guerrier Tyranide qui manage la horde chitineuse arrive à son tour pour profiter des calories faciles que représentent nos héros.

La poursuite tunnelière qui s’ensuit n’est pas sans causer quelques pertes déchirantes (dans tous les sens du terme) parmi les hominidés, le dernier collègue de Gunderson gagnant une séance d’acupuncture tyran(n)ique, avant que la pauvre Tigerlily n’aille rejoindre Peter Pan, Sanguinius et Geneviève de Fontenay dans le pays imaginaire. Lorsque l’affreuse bestiole assomme Gundy et met la griffe broyeuse sur la veste gifesque (c’est beau le 41ème millénaire tout de même) de Snowdog, la messe semble dite pour nos héros…

Début spoiler…C’était toutefois sans compter sur le pouvoir de l’amitié la foi la Force la DROOOOOOGUE. En désespoir de cause, Snowdog balance en effet sans s’en rendre compte la totalité du stock de Kalma piqué aux Jackboys dans le gosier du Guerrier, provoquant un KO technique suivi d’une overdose fatale en moins de vingt secondes. Magnanime, El Doggo décide d’épargner la vie de Gunderson au lieu de profiter de son piteux état pour lui faire passer la matraque énergétique à gauche, et les deux gangers survivants s’en repartent vers d’autres aventures. Ils ne savaient pas encore qu’ils vivaient sur du temps empruntéFin spoiler

: Tarsis Ultra n’était censé avoir que 60 millions d’habitants avant de se prendre un enchaînement fatal Tyranides-Iron Warriors dans la biosphère, ce qui est positivement clairsemé à l’aune des standards impériaux.

AVIS :

Graham McNeill n’a jamais (pour autant que je le sache et au moment où cette chronique est publiée) écrit pour Necromunda, mais les amateurs de ce monde-ruche si bucolique ne seront pas dépaysés par ce ‘Business as Usual’. Des gangs ennemis qui s’étripent pour de la dope dans des usines en ruines et des terrains vagues toxiques, avant qu’une escouade d’Arbites nommée bavure et quelques bestioles atrabilaires ne viennent se mêler aux réjouissances : on est ici en terrain connu (mais dangereux tout de même, relancez vos 1 si vous pouvez). À titre personnel, il n’y a pas grand-chose qui me fasse vibrer dans cette nouvelle qui ne détonne absolument pas du mètre étalon de la GW-Fiction, et qui a plutôt mal vieilli sur certains aspects, notamment l’argot utilisé par Snowdog et ses acolytes, qui sonne aujourd’hui terriblement daté. À chacun son sale goût.

Pour la petite histoire de cette petite histoire, ‘Business as Usual’ a en fait été écrite avant ‘Warriors of Ultramar’, dans laquelle Snowdog fait également une apparition au côté d’Uriel Ventris et des héroïques défenseurs de Tarsis Ultra, même si elle prend place après les événements relatés dans ce roman. Voilà de quoi briller en société, sans nul doute.

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Defixio – B. Counter :

INTRIGUE :

40K_DefixioNous embarquons à bord du Leman Russ Exterminator Defixio, rattaché à un contingent de Chem-Dogs de Savlar, au cours de la campagne menée par la Garde Impériale contre une Waaagh ! Ork sur le monde de Jaegersweld. Parmi les membres d’équipage, le jeune Samiel peine à se faire une place pour une raison aussi simple que stupide : ayant survécu par miracle à la destruction de son précédent véhicule de fonction, ses nouveaux camarades (Karra-Vrass, Graek, Damrid, Dniep et Kallin) considèrent qu’il a « consommé » toutes ses réserves de chance, et que cela va porter la poisse au Defixio. Un accrochage rugueux avec une bande de Bikers Orks, pendant lequel le tank hérite d’une belle balafre de coque et l’horrible Graek d’une balle perdue fatale, ne fait pas grand-chose pour les convaincre de réviser leur jugement.

Isolé en territoire ennemi, le Leman Russ déglingué doit maintenant se frayer un chemin jusqu’au camp impérial le plus proche, tenu par le 24ème régiment de Cadia. Cela représente près de trois jours de route dans un environnement hostile, mais, sans autre perspective, les Chem-Dogs se lancent à corps perdu et à tombeau ouvert dans ce raid de tous les dangers. Alors qu’ils avançaient à bon rythme, un champ de mines posées par des Orks farceurs les force à faire une halte dans la pampa, le temps que Samiel leur ouvre un passage en identifiant les explosifs, permettant au bricoleur Dniep de les désamorcer plus rapidement dans un second temps. Cet arrêt au stand prend une tournure funeste lorsqu’un autre Kult’ de la Vitess’ tombe sans crier gare sur le Defixio alors qu’il patientait en double file que Samiel ait fini sa petite affaire. Assistant de loin à l’attaque, ce dernier décide d’aider ses camarades par une action aussi brave que suicidaire : utiliser le pistolet lance-fusée qu’on lui avait remis pour attirer l’attention des peaux vertes. Et ça marche. Intrigué par la belle rouge tirée par notre héros, les Orks se ruent sur sa position, ne réalisant que trop tard qu’ils s’engagent littéralement en terrain miné. Le bouquet final qui s’en suit permet à la fois de se débarrasser des motards indésirables, et d’accélérer le processus de déminage débuté par Samiel (qui survit encore une fois miraculeusement à une situation improbable). C’est ce qu’on appelle un win-win.

Sans d’autres difficultés techniques ou autochtones grognons pour les empêcher de reprendre leur route, les hardis tankistes filent à toute berzingue vers la terre promise, et finissent par arriver à proximité du camp de leurs camarades de lutte. Encore une colline à passer, et ce sera la quille…

Début spoiler…Qui se transforme toutefois en tuile lorsque nos héros découvrent que le QG Cadien a été attaqué et squatté par une tribu d’Orks. Pour une culture qui s’enorgueillit tellement de tenir la ligne, c’est une faute professionnelle autant qu’éthique, si vous voulez mon avis. C’est surtout une cruelle désillusion pour les Chem-Dogs, qui se voyaient déjà engloutir leur pâtée bien méritée et se lover dans leur coucouche panier. Il faut toute la fortitude du chef de char Karra-Vrass pour remobiliser ses hommes et leur rappeler que leur devoir en tant que soldats impériaux est de mourir au combat en emportant le plus possible de Xenos avec eux dans la tombe. N’ayant c’est vrai rien de mieux à faire, les servants du Defixio reprennent du poil de la bête et livrent un combat homérique contre la patrouille d’Orks qui finit par les localiser. Submergé par les vagues vertes, le brave petit châssis finit par rompre sous les coups de boutoirs des Boyz, mais pas avant d’avoir clairsemé leurs rangs de manière drastique. Une fin honorable pour de telles crapules (et je ne parle pas des Orks)…

Début spoiler 2…Enfin, presque pour tout le monde. Fidèle à sa réputation de catalyseur de chatte, Samiel se débrouille une fois encore pour survivre à la baston, alors que tout le monde meurt autour de lui. Récupéré quelques heures plus tard sous l’épave carbonisée du Defixio par un bataillon de Cadiens qui passait dans le coin, le chien chimique le plus chanceux de l’univers en est quitte pour quelques semaines chez le véto, le temps que ses pattes brûlées cicatrisent. Il se fait la réflexion qu’il aura encore plus de mal à trouver une nouvelle unité de rattachement avec un casier aussi chargé que le sien, mais ce sera une préoccupation pour plus tard…Fin spoiler

AVIS :

Sans doute une des premières nouvelles « embarquées » (c’est-à-dire prenant place dans un char ou un aéronef) de la GW-Fiction, mais loin d’être la plus marquante ou intéressante de ce sous-genre, ‘Defixio’ permet au moins d’en apprendre un peu plus sur les Chem-Dogs de Savlar, l’un des régiments de Gardes Impériaux à l’histoire la plus particulière qui soit. Pour le reste, c’est de l’action très classique, avec un peu de camaraderie virile et quelques gros coups de chance pour napper le tout. Counter a fait mieux.

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Et c’est tout pour cette revue de ‘Words of Blood‘, anthologie dont on sent le poids des années à la lecture. Si vous êtes indulgents, ou intéressés par la GW-Fiction d’un autre temps, ce recueil peut mériter le détour. Sinon, il vous est loisible de passer votre chemin sans rater grand-chose de marquant.

DARK IMPERIUM [40K]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette critique de ‘Dark Imperium’ (premier du nom1), recueil de nouvelles se déroulant dans le sombre et lointain futur du 41ème millénaire et sorti par la Black Library en l’an de grâce 2001. Auparavant, presque2 toutes les histoires comprises dans ce vénérable ouvrage avait eu l’honneur de figurer dans un numéro du bimensuel Inferno !, entre Mai 1999 et Septembre 2000. Il s’agit donc du 2ème recueil infernal de Warhammer 40.000, après ‘Into the Maelstrom’ (chroniqué ici). On retrouve à la manœuvre et à l’édition l’un des premiers patrons de cette auguste revue, Andy Jones, accompagné pour l’occasion par son mythique successeur, Marc Gascoigne.

Dark Imperium

Au programme, 13 nouvelles signées par 9 auteurs, dont le plus sollicité n’est absolument pas celui auquel vous pensez, et dont vous n’avez peut-être jamais entendu parler si vous n’êtes pas un adepte des vieilleries de la GW-Fiction ou de la Science-Fiction britannique de la fin du XXème siècle : l’inénarrable Barrington J. Bayley. Notre homme apporte en effet trois pierres à la somme littéraire qu’est ‘Dark Imperium’, faisant de ce recueil l’un des plus singuliers de tout le corpus de la BL (comme on ne tardera pas à le voir). Il est suivi par les mieux identifiés Gav Thorpe et Ben Counter, avec chacun deux nouvelles à leur actif. William King, Matthew Farrer, Robert Earl, Neil Rutledge, Simon Jowett et Andy Chambers viennent compléter le casting. Le nom des combattants ayant été proclamé dans l’arène, il est temps de passer en revue la qualité de leur prose et d’établir si cette dernière a résisté à l’épreuve du temps.

1 : La trilogie consacrée par Guy Haley au conflit fraternel entre Mr. Blue et Mr. Green ayant en effet repris cette appellation. Comme quoi, Games Workshop n’a pas attendu notre époque pour cataloguer l’empire de Pépé 1er comme une honnête dystopie.
2 : L’exception étant ‘The Wrath of Khârn'(William King), qui fut publié dans le numéro 231 du White Dwarf anglais à la toute fin de M2.

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Apothecary’s Honour – S. Jowett :

INTRIGUE:

Déployée sur le monde d’Antillis IV pour aider les autorités locales à se défaire d’une invasion chaotique plus grave qu’anticipée, la Seconde Compagnie du Chapitre des Avenging Sons, menée par le Capitaine Selleus, s’est battue vaillamment mais cela n’a pas suffi. Isolé au milieu des bourrasques de cendres humaines conjurées par un géo-ingénieur plus ravagé du bulbe que la moyenne pour combattre les effets du changement climatique (eh, c’est un aérosol comme un autre), l’Apothicaire Korpus se consacre toutefois sans faiblir à son sacerdoce : récupérer les glandes progénoïdes de ses camarades tombés au combat. Il sait en effet qu’il s’agit d’une partie vitale de l’effort de guerre de l’Adeptus Astartes, qui se retrouverait rapidement réduit à peau carapace noire de chagrin sans la récolte et la réimplantation dans de nouveaux hôtes de ces précieux kystes. On le suit ainsi jusqu’au quasi-cadavre du Sergent Pereus, blessé à mort1 lors d’une escarmouche contre une bande de Space Marines du Chaos, qu’il accompagne pieusement dans ses derniers instants et déleste de ses mirifiques glandes, stockées dans le petit frigo personnel qu’il trimballe sur son armure. À la guerre comme à la guerre.

Sur le chemin du retour vers le QG château (en français dans le texte) de sa Compagnie, Korpus reçoit un message alarmant de la part de Selleus, lui annonçant que la campagne est perdue et lui ordonnant de se diriger sans tarder vers le spatioport où sont garés les Thunderhawks des Avenging Sons, et de les utiliser pour rejoindre leur vaisseau amiral. Il est en effet capital de renvoyer les Avenging Glandes jusqu’à l’Apothicarium chapitral, on a bien compris. De son côté, le Capitaine et ses derniers hommes préfèrent se faire exploser dans leur bastion plutôt que de s’offrir un dernier carré digne de ce nom, ce qui surprend fortement Korpus. Cela dit, un ordre est un ordre, et le zélé Apothicaire part donc en petites foulées en direction du hangar à aéronefs mis à disposition par les autorités d’Antillis IV, en espérant que ce dernier n’ait pas déjà été conquis par l’ennemi.

En chemin, notre héros tombe par hasard sur une escouade de Scouts dont on était sans nouvelles depuis plus d’une journée et que tout le monde avait donc considéré comme perdue corps et biens (faut pas se retrouver en zone blanche au 41ème millénaire). Coincés dans une friche industrielle par une horde de World Eaters ricanant à défaut d’être très doués, les novices auraient rapidement perdus la tête sans l’intervention décisive de Korpus, dont le poing énergétique – un choix d’équipement un peu bizarre pour quelqu’un sensé effectuer des actions chirurgicales sur le champ de bataille, mais passons – et l’effroyable mauvaise humeur, appelée Cœur Vengeur par les initiés, règlent rapidement leur compte aux affreux.

Au bout d’un voyage sans trop d’encombres, les survivants finissent par arriver jusqu’au spatioport et commencent à retaper le Thunderhawk le moins amoché du lot afin de pouvoir s’éclipser de la planète condamnée au nez et à la barbe énergétique des Khorneux. Bien évidemment, ils n’auront pas loisir de mener à bien cette mission d’extraction furtive, une nouvelle vague de renégats leur tombant dessus sans crier gare (en même temps, il n’y avait pas de train sur place) avant que Korpus et les Scouts n’aient eu le temps de boucher tous les trous de la carlingue avec du chewing-gum. Comble de malchance, les World Eaters sont menés par un Dreadnought équipé d’un canon laser, dont la portée risque d’être fatale au coucou déglingué des Avenging Sons. L’Apothicaire décide alors de mener une charge suicide avec les novices afin de permettre au Thunderhawk piloté par le seul Scout ayant passé son permis ULM de s’échapper, après avoir déposé ses précieuses glandes dans le minibar de l’appareil, bien sûr.

Cette contre-attaque inspirée est couronnée de succès, Korpus faisant entrer son poing énergétique en surchauffe après l’avoir coincé sous un piston du Dreadnought adverse, vaporisant la machine impie ainsi qu’une bonne partie de ses suivants, au modique prix d’un évanouissement pour notre viril héros (tous les Scouts meurent dans la bagarre par contre, mais on s’en fout un peu). Il a toutefois accompli brillamment sa mission, pas vrai ?

Début spoiler…Eh bien, non. La mauvaise nouvelle lui est transmise par un Space Marine hérétique ayant autrefois servi comme Apothicaire et qui a fermement attaché Korpus sur un chevalet d’opération dans l’attente de son réveil. Une légende noire parmi l’Adeptus Astartes, responsable de la création de nombreux monstres génétiquement modifiés se battant dans les rangs des Légions renégates. Je veux bien sûr parler de Fab…rikus. Si si. Toute ressemblance avec un personnage nommé serait évidemment totalement fortuite. Fab’ révèle à son collègue et néanmoins prisonnier qu’il a été chargé par ses patrons chaotiques de trouver un moyen de recruter en masse de nouveaux Space Marines, ce qui n’est pas facile du fait de l’influence corruptrice du Warp sur les glandes progénoïdes des Astartes vétérans. Une seule solution pour contourner ce problème : aller taper dans les stocks de ces saintes nitouches de loyalistes, et c’était bien le but de la campagne d’Antillis IV. Cependant, les dernières actions du Capitaine Selleus ont fait capoter ce plan machiavélique, et l’entière opération se serait terminée par un fiasco retentissant pour les traîtres sans l’étourderie de Korpus, qui a « oublié » de prélever ses propres glandes et de les déposer dans le frigo du Thunderhawk avant de foncer dans le tas comme un demeuré. La boulette. Notre histoire se termine sur la scène pénible de l’opération sans anesthésie pratiquée sur ce glandu – et c’est bien le problème – d’Apothicaire, qui se désole en son for intérieur de sa propre stupidité. Charité bien ordonnée…Fin spoiler

1 : Je tique un peu du fait que Pereus se soit auto-diagnostiqué perdu pour la cause, sans que Korpus juge bon de faire son boulot de medic et de vérifier par lui-même la gravité de l’état de son camarade. Après tout, qu’est-ce qu’une paraplégie quand on possède la technologie nécessaire pour créer des Dreadnoughts ?

AVIS:

Simon Jowett signe une nouvelle franchement vintage pour le lecteur contemporain (qui sera peut-être surpris que le nom de Roboute Guilliman n’apparaisse pas une seule fois dans une histoire qui parle des Avenging Sons), explorant une des particularités du background des Space Marines : le rôle crucial des glandes progénoïdes dans leur organisation et leur culture.

Si l’idée est bonne, la réalisation n’est toutefois pas au-dessus de tout reproche : on passe à mes yeux beaucoup trop de temps à voir voler les bolts dans cette nouvelle, sans que l’auteur se consacre à faire monter la pression autour de Korpus, ni ne le confronte à des décisions véritablement difficiles, où il aurait eu à choisir entre son fameux honneur d’Apothicaire, et la mission vitale confiée par son supérieur. A cela viennent s’ajouter des petits irritants sans conséquence pour la structure de l’histoire, mais pénible à lire quoi qu’il en soit, comme la nullité crasse des World Eaters qui servent d’opposition aux vertueux Avenging Sons, pas foutus de régler leur compte à cinq Scouts et un Apothicaire mouflé même avec l’avantage du nombre.

On peut toutefois mettre au crédit de Jowett un twist final pas trop mal fichu (même si Korpus et Fabrikus ont vraiment une haute idée d’eux-mêmes pour penser que ce micro-événement risque de faire basculer le rapport de forces entre Imperium et Chaos) et quelques infos fluff relevant plus de la curiosité académique que de la source canonique1, cependant.

1 : C’est le même Jowett qui a doté le Chapitre des Iron Hearts de casque de VR pour s’entraîner au combat, et baptisé d’autorité un des Primarques disparus (voir ‘Hell in a Bottle’) : ses contributions au fluff Space Marine doivent être pris avec 72 pas de recul.

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Daemonblood – B. Counter :

INTRIGUE:

Sur la planète (forcément bleeue) de Saafir, Papy Nurgle est sur le point de rafler le vote populaire, au grand dam des défenseurs impériaux dépéchés par Pépé (l’autre) pour passer la serpilière. Isolés par les aléas de la guerre, la Sœur de Bataille Aescarion et le Sergent Ultramarines Castus se retrouvent dans les souterrains de la capitale planétaire (éponyme), où se trouve s’étend une station d’épuration possédée par le Warp, forme physique imposante du Prince Démon Parmenides le Vil. Comme il est difficile de passer par l’épée, ou, dans le cas de cette brutale d’Aescarion par la hache énergétique, une flaque de morve et d’excréments couvrant plusieurs hectares, M. et Mme Meilleurs de l’Empereur sont bien embêtés. Profitant de leur désarroi, le vil Parmenides lave/salit le cerveau du Space Marine avec ses confidences crasseuses sur l’état de la galaxie, transformant le pauvre Castus en séide chaotique. Immunisée à cet insidieux virus par sa foi dévorante et absolue, Aescarion n’est cependant pas de taille à achever les souffrances et les errances métaphysiques de son compagnon, et ne doit son salut qu’à la robustesse de son jetpack, qui la ramène à la surface avant qu’elle ne se retrouve féminicidée par le renégat.

On n’échappe cependant pas aussi facilement à cette force puissante qu’est la Destinée au 41ème millénaire, et les routes d’Aescarion et de Castus se croiseront à deux nouvelles reprises pendant les décennies suivantes. La première fois lors de la purge d’un Space Hulk squaté par les suivants de Parmenides, dont Castus est devenu le porte-parole officiel. Castoche aurait pu se faire trouer les pores par un peloton de Sistas judicieusement gardé en réserve par Aescarion, n’eut été la compétence « corps de mouches » développée par le M. Impropre de Saafir, et qui lui permet de tirer sa révérence sans dommage. La seconde, et dernière fois, se déroule sur le vaisseau du Seigneur du Chaos, le Defixio1, et avec la bénédiction de l’Inquisition, qui souhaitait contenir l’expansion cancéreuse de l’empire spatial de Parmenides en envoyant un petit Exterminatus bien senti sur Saafir. Il fallait bien ça à la Canonnesse de l’Ordre du Calice d’Ebène, auquel Aescarion appartient, pour autoriser l’impulsive et revancharde vétérante à se mesurer une nouvelle fois avec sa Némésis. Les deux précédentes tentatives ayant eu un coût élevé en termes de vies de Sœurs de Bataille aguerries, on comprend sa réticence à permettre à sa sous-fifre de sortir à nouveau le karscher. La connaissance intime de notre héroïne de la mentalité et des forces et faiblesses de Castus en faisait toutefois la meilleure candidate pour mener l’expédition impériale jusqu’à bonne orbite, en dépit de la défense acharnée orchestrée par le fidèle Castus du pré de la décharge carrée de son seigneur et maître.

Ayant soigneusement préparé son combat en oignant sa hache de gel Harpic, Aescarion parvient assez facilement à vaincre son adversaire, mais ne l’achève pas immédiatement. Elle souhaite en effet le faire revenir du côté lumineux, et aseptisé, de la force avant qu’il ne soit trop tard, et parvient (assez facilement *2) à convaincre Castus de retourner sa veste énergétique. Cachant une balise de visée, ou quelque chose comme ça, entre deux bourrelets du champion déchu, elle envoie son ancien camarade apporter ses salutations les plus distinguées à Parmenides dans les profondeurs de Saafir, permettant à l’ex Ultramarine de partir avec les mains sales, certes, mais une ardoise propre2. C’est ce qu’on appelle passer l’éponge, grimdark style.

1 : Je précise car Counter a écrit une autre nouvelle portant ce nom, pour ceux que ça intéresse.
2 : Le fait que Parmenides ne se souvienne même pas du nom de son champion après toutes ces décennies de collaboration à également dû convaincre ce dernier d’envoyer tout balader.

AVIS :

Bien des années ont passé et bien des textes ont été écrits depuis, mais il faut se rappeler que c’est avec ‘Daemonblood’ qu’un tout jeune Ben Counter a fait ses débuts pour la Black Library, dans un numéro d’Inferno ! Si je ne placerais pas cette petite nouvelle parmi les meilleures soumissions de cet auteur, capable du moins convaincant1 comme du meilleur, cette première tentative a plutôt bien vieillie (notamment quand on la compare à certaines nouvelles publiées au début des années 2000), et s’avère assez solide dans sa réalisation, même si très peu originale dans son propos. Les milliards de Space Marinades qui nous ont été servies par la BL au cours des dernières décennies y sont sûrement pour quelque chose…

Ici, on peut tout de même mettre au crédit de Counter une conclusion un peu plus originale que le traditionnel « le-méchant-chaoteux-meurt-sur-un-gros-malentendu-avant-d’avoir-pu-mettre-son-plan-presque-infaillible-à-exécution», avec l’exploration d’un thème assez rare dans l’univers grimdark de 40K : la rédemption.  Cela compense largement à mes yeux les points techniques sur lesquels on pourrait venir lui chercher des noises, comme l’apparente facilité avec laquelle une « simple » Sœur de Bataille vétérante arrive à tailler des croupières à un Seigneur de la Peste. On apprendra d’ailleurs par la suite que la bonne Aescarion est une véritable héroïne d’action, ayant plus d’un Space Marine à son tableau de chasse, ce qui pourrait être perçu comme du féminisme de GW-Fiction avant-gardiste de la part de Ben Counter. Quel visionnaire alors…

1 : Vus les loustics qui ont bossé pour la BL, je ne peux pas décemment utiliser le qualificatif de pire pour la prose de Ben Counter. Il y a bien plus mauvais que lui.

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Nightmare – G. Thorpe :

INTRIGUE:

Nous suivons les péripéties oniriques du jeune Joshua, dont l’adolescence a pris un sale tour depuis que sa famille et ses amis l’ont rejeté pour crime de sorcellerie, forçant le jeune homme à vivre seul dans le désert inhospitalier de la planète de Sha’ul. Seul ? Pas tout à fait. Une mystérieuse voix, que l’on appellera donc Daniel, lui tient compagnie et lui prodigue des conseils dans son exil, sans que le peu curieux Joshua s’interroge beaucoup sur l’origine de ce phénomène. Pour la première fois depuis que son ami imaginaire lui rend visite, la Voix a retentit dans son esprit alors qu’il était endormi, et lui propose rien de moins que de participer à une grande aventure, comme quand il était enfant et jouait au Space Marine, ainsi que font les bambins de l’Imperium.

Sur les indications de The Voice, Joshua part donc en vadrouille et commence à farmer du mob démoniaque de bas étage, grâce aux pouvoirs merveilleux de son esprit, capable de matérialiser des armes et des armures à volonté pour affronter toutes les épreuves de ce qui ressemble fort à un RPG en réalité virtuelle (ça doit être commun au 41ème millénaire). Bien que Joshua ne soit pas plus violent que la moyenne, l’aspect répugnant des créatures qu’il rencontre et l’assurance maintes fois répétées par la Voix que tout ça n’est qu’un rêve, conduisent notre héros à commettre un véritable massacre grâce à ses pouvoirs psychiques fantasmés.

Guidé par son GPS intégré, Joshua finit par arriver devant un bâtiment dont l’entrée est gardée par une grille de fer, dont il tort aisément les barreaux avant de se glisser dans un étroit tunnel en prenant la forme d’un serpent. Au bout du compte, il parvient dans une salle obscure où l’attend le « boss de fin », un tas de saindoux à tentacules que la Voix l’incite à tuer pour terminer sa quête. Bien fatigué par ses aventures et lassé de ces tueries incessantes, Joshua fait mine de refuser mais son compagnon excite son amertume et sa rage d’avoir été abandonné par ses proches à cause de sa différence jusqu’à ce que le jeune homme pète les plombs et étrangle à mains nues sa victime dans un accès de colère. Ceci fait, la Voix lui annonce qu’il n’a qu’à imaginer qu’il est de retour à son point de départ pour sortir de ce rêve étrange et pénétrant, et lui promet de le laisser désormais tranquille…

Début spoiler…A son réveil, Joshua a la surprise de découvrir qu’il n’est pas dans sa cahutte du désert, mais dans un jardin luxuriant qui ne peut être que celui du Gouverneur Planétaire Ree en personne. Surprenant la conversation de passants alors qu’il se cache dans les fourrés, il comprend alors qu’un mystérieux assassin a réussi à s’infiltrer dans le palais, massacrant les gardes et les sentinelles au cours de sa progression, défonçant tous les obstacles et se glissant dans les moindres interstices, jusqu’à parvenir dans la chambre du Gouverneur, retrouvé étranglé dans son lit au petit matin. La nouvelle se termine avec l’horrible réalisation par Joshua qu’il s’est fait grandiosement balader par celui qu’il considérait comme son seul ami, pendant que dans le Warp, un démon mineur de Tzeentch ricane follement en se tenant la bedaine…Fin spoiler

AVIS:

Gav Thorpe tenait une idée de nouvelle assez intéressante avec ce ‘Nightmare’ (Adventure Times à la sauce 40K, rien que ça), mais il pêche un peu par son exécution, qui ne laisse pas assez planer de mystère sur les actions accomplies par Joshua lors de sa virée nocturne à mon goût. Dès lors que Thorpe nous révèle que son héros a été chassé de son village après avoir été accusé d’être un sorcier (donc un Psyker en puissance), n’importe quel lecteur au fait de son fluff prendra le ‘it’s just a dream bro’ que la Voix sert à Joshua à toutes les sauces avec les pincettes de rigueur. J’ajoute que ‘Nightmare’ exploite le même filon qu’une vieille nouvelle de 40K, autrement plus mémorable car joyeusement foutraque (normal pour une soumission d’Ian Watson, vous me direz) : ‘Warped Stars’. L’imitation est la forme la plus sincère de flatterie, et on peut pardonner à un auteur – à l’époque – aussi vert que Gav Thorpe de vouloir s’inspirer d’un auteur vétéran et célébré comme Watson, mais cela ne vient pas non plus jouer en faveur de son travail. Bref, une petite nouvelle fort convenable mais absolument pas mémorable.

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The Lives of Ferag Lion-Wolf – B. J. Bayley :

INTRIGUE:

C’est une belle journée qui commence dans le palais de Ferag Lion-Wolf, Champion de Tzeentch ayant bien réussi dans la vie. Après avoir servi comme Space Marine dans les rangs des Purple Stars, notre héros a décidé d’aller relever de nouveaux défis en passant de l’autre côté du périph’ et de l’Œil de la Terreur, où il s’est taillé un petit empire. Aujourd’hui, il accueille un visiteur de marque, en la personne du Seigneur Quillilil (eh oui), autre Elu du Dieu du Changement dont il convoite le domaine (et réciproquement, comme on peut s’y attendre la part de disciples de Tzeentch).

Après avoir galamment secouru son hôte alors qu’il se faisait attaquer par des terroristes1 disques-jockeys pendant la descente vers son palais, Ferag ne peut résister à la tentation de faire une démonstration de ses pouvoirs de… maître Lego, aussitôt imité – mais en moins bien, évidemment – par Quillilil. Passées ces aménités, il est temps pour Fefe d’emmener son invité jusqu’à la table du festin qu’il a organisé pour lui, mais surtout de lui narrer par le menu les épisodes les plus mémorables de sa longue et épique vie.

On apprend ainsi que notre héros a reçu son nom si particulier après avoir vengé son père, sauvagement tué par un gigantesque lion-loup alors qu’il n’avait que huit ans (Ferag, pas son père), en réglant son compte en solo à la pénible bestiole, d’un coup d’épieu bien placé. Bien des années plus tard, Ferag s’est distingué en menant ses frères de bataille Purple Stars dans l’abordage inspiré d’un vaisseau ruche tyranide, d’une manière si convaincante que le Codex Astartes fut revu et corrigé pour l’occasion (nous dit-il). Enfin, ce fut le triomphe tactique de la bataille pour la planète-bol (si si), brillamment remportée contre les hordes énervées de Khorne et pestilentes de Nurgle, pour la plus grande gloire de Tzeentch. La régalade aurait pu continuer longtemps si un bloc de maçonnerie ne s’était pas décroché alors que les deux Elus passaient en contrebas, frappant Ferag en pleine tête et le faisant sombrer dans l’inconscience…

Début spoiler…Et à son réveil, les choses ne sont plus les mêmes pour notre héros. Exit sa vie rêvée de Champion du Chaos, et bonjour à la triste réalité : Ferag n’est en fait qu’Ulf Rampe-Bouse, un avorton ayant intégré un culte de Tzeentch pour tenter de gagner de l’influence, mais ayant manqué du courage nécessaire pour assassiner un rival politique, malgré les ordres clairs donnés par son Magister. Condamné à être transformé en Enfant du Chaos en punition de son échec, Ulf a été victime d’une ultime cruauté de la part de sa déité, qui n’est pas connue comme étant le Maître du Mensonge pour rien : un aperçu de la vie qu’il aurait pu avoir, si les étoiles avaient été alignées différemment, ou quelque chose comme ça. Alors que son corps se transforme en amas informe et que son esprit sombre dans la folie, nous laissons Ferag/Ulf se débattre avec l’épineuse question de ce qui est réel et de ce qui ne l’est pas. Critique de la raison pure, Kant tu nous tiens…Fin spoiler

1 : Comme quoi, on peut être un Seigneur du Chaos et détester l’anarchie.

AVIS:

Les nouvelles dont le twist final consiste à révéler que le protagoniste a rêvé ou halluciné tout ce qui nous a été présenté au cours des pages précédentes sont assez rare au sein du corpus de la Black Library1, aussi ‘The Lives of Ferag Lion-Wolf’ n’est pas aussi inimaginatif dans son intrigue que ce que le lecteur non familier avec la GW-Fiction pourrait en penser2. Avec son style flamboyant/ampoulé (c’est selon) assez unique parmi les auteurs de la Black Library, et sa vision quelque peu surannée – justifiable au vu de l’ancienneté de la nouvelle – du fluff, Barrington J. Bayley trousse une petite histoire tenant plus de la fable fantasy cruelle que du bolter porn qui était, et est toujours, la norme pour les courts formats 40K. Un acquired taste, comme disent nos amis anglais, qui peut ne pas convenir à tout le monde mais qui mérite le détour à mon avis.

1 : Mais de manière assez drôle, deux d’entre elles se suivent dans le recueil ‘Dark Imperium’, le ‘Nightmares’ de Gav Thorpe exploitant la même idée.
2 : Je dois indiquer ici que même Lovecraft a cédé à cette tentation, dans ce qui peut être considéré comme la moins lovecraftienne de ses nouvelles : ‘The Dream-Quest of Unknown Kadath’.

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Small Cogs – N. Rutledge :

INTRIGUE:

Seule la mort met fin au devoir nous dit le proverbe, et ce n’est pas le Colonel Soth du 8ème Ulbaran qui viendra s’en plaindre. Ayant participé à la reprise de la planète de Luxoris Beta, confisquée par les Orks pendant des siècles, le régiment se retrouve mobilisé pour défendre la station d’épuration le Temple de l’Eau local contre une excursion eldar repérée au dernier moment par ces planqués du Haut Commandement. Malgré le fait que ses hommes doivent combattre en uniforme d’apparat, leur mission première étant de participer au défilé du 14 juillet local, Soth fait contre mauvaise fortune veste qui gratte bon cœur et organise un périmètre défensif autour du bâtiment visé par les Xenos. Le Temple de l’Eau contrôle en effet le système d’irrigation de la planète, en faisant une cible de choix pour les Eldars : inonder les basses terres de Luxoris Beta priverait en effet les défenseurs impérieux de la possibilité de déployer leurs véhicules blindés dans ce conflit.

Après avoir échangé quelques banalités avec le prêtre Jarendar, tout à fait confiant dans la protection qu’apportera l’Empereur à ses fidèles, Soth est appelé à son poste de commandement par son second (Hoddish) lorsque les Eldars lancent leur assaut. S’en suit une bataille urbaine tout à fait classique entre les deux factions, à la ténacité et la discipline des Gardes Impériaux s’opposant la vitesse et la technologie avancée des Xenos. En bon commandant, Soth met les mains dans le cambouis et mène une charge au fuseur contre un Falcon trop confiant, héritant d’une blessure à la cuisse mais permettant aux lignes impériales de tenir.

Un moment de répit entre deux attaques permet à notre héros d’inspecter le périmètre… et de manquer de tomber sous les tirs d’un Ranger isolé, finalement localisé et abattu sur un gros coup de chance par Soth. Il ne faut pas longtemps au sagace officier pour réaliser que le sniper n’a pas fait le déplacement seul, et que ses petits copains sont certainement en train de converger vers le Temple pendant que le reste des forces eldars fait diversion. Ne pouvant mobiliser un peloton entier sous peine de laisser ses lignes dangereusement dégarnies, Soth ordonne à Hoddish de lui envoyer trois Gardes pour tenter d’intercepter les infiltrateurs ennemis avant qu’il ne soit trop tard.

Je vous la fais courte : au prix d’une progression sanglante et de la perte de tous ses sidekicks, Soth parvient jusque dans la salle des machines du Temple, où il surprend le dernier Ranger en pleine lutte avec Jarendar. Le prêtre étant plus doué en parabole qu’en krav-maga, il ne tarde pas à rejoindre la droite de l’Empereur, tandis que Soth hérite pour sa part de quelques shurikens dans le thorax, lui faisant perdre la règle Objectif Sécurisé et lui donnant l’impression de voir les esprits de ses camarades défunts danser le harlem shuffle autour de lui. Ces hallucinations dissimulaient cependant l’arrivée d’un clutch player de chair et de sang : le novice de Jarendar – et son chandelier – qui règle son compte au pénible Xenos alors qu’il trifouillait les panneaux de commandes en fredonnant ‘Here comes the flood’. Bien fait. La nouvelle se termine sur la victoire des impériaux et l’évacuation de Soth vers l’hôpital le plus proche, mais pas avant qu’il n’ait bredouillé au Medic qui l’a stabilisé de faire passer à Hoddish la morale de cette histoire : prêter attention au moindre détail (small cogs). Que voilà une édifiante conclusion.

AVIS:

Pour sa seule incursion dans le 41ème millénaire (si on ne considère pas la nouvelle ‘Sisters’, écrite pour Necromunda), Neil Rutledge livre une bonne histoire de « Gardes Impériaux d’action », dans la droite lignée de ce que nous propose le légendaire Dan Abnett avec ses Fantômes de Gaunt. Chose appréciable, on a le droit en seulement 26 pages à une bataille rangée, suivie par une mission d’infiltration tournant au duel de snipers, ce qui est une variété tout à fait appréciable pour un court format. Les affrontements entre Garde Impériale et Eldars des Vaisseaux Mondes étant de plus assez rare dans la GW-Fiction, on appréciera d’autant plus ce ‘Small Cogs’ à sa juste valeur. Je valide

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Angels – R. Earl :

INTRIGUE:

Alors que la fin approche pour lui, après une longue vie de près de 50 ans (ce qui est apparemment respectable sur la planète féodale sur laquelle il vit), Bobby1 se remémore l’événement le plus marquant de son existence, un souvenir tellement puissant qu’il l’a guidé dans les moments charnières de sa vie, depuis l’accouchement de sa femme jusqu’à l’extermination d’une meute de loups un peu trop familiers. Cela s’est passé il y a bien longtemps, lorsqu’il n’était qu’un petit nenfant…

Né dans le petit village de Pasternach, Bobby connut une enfance rude mais heureuse dans ce hameau fort éloigné du tumulte grimdark d’une galaxie hostile, jusqu’à ce que des signes inquiétants se multiplient dans les environs immédiats du bourg. Les méthodes traditionnelles (envoyer une patrouille faire mumuse dans la forêt voisine) n’ayant, pour une fois, pas donné les résultats escomptés, une douce psychose commence à s’abattre sur Pasternach au fur et à mesure que des événements sinistres se produisent dans le voisinage (meurtre sauvage d’un vieil ermite qui résidait un peu en retrait du village, disparition de l’expédition de volontaires envoyés quérir de l’aide dans la ville la plus proche, incendie probable de cette dernière en pleine nuit). Décidés à se défendre contre les forces maléfiques qui crapahutent dans les sous-bois, les villageois transforment leur communauté en fort retranché, mais cela ne décourage pas la bande de mutants assoiffés de sang et de chair fraîche qui constitue la cause de leurs tracas de passer à l’attaque, au cœur d’une sombre nuit d’automne.

Malgré leur vaillance et leurs outils de ferme soigneusement affutés, tout aurait pu et dû très mal se finir pour les Pasternachois, très démunis face à la férocité et au nombre de leurs assaillants. Au moment où tout semblait perdu, cependant, quatre « anges » (d’après les mots du narrateur) font leur apparition sur la palissade ceignant le village, et commencent à tailler des croupières à la horde impie, avec une terrible efficacité qui ne manque pas d’impressionner le jeune Bobby. Ce qu’il ne peut pas savoir, en pauvre inculte qu’il est, c’est que les nouveaux arrivants sont des Space Marines2, et que le massacre d’une bande d’Hommes Bêtes en maraude n’est probablement qu’un échauffement avant leur tournoi de bière pong énergétique. Toujours est il que la bogossitude absolue de l’Astartes fait une très forte impression sur Bobby, qui tirera de ce souvenir impérissable la fortitude nécessaire pour affronter tous les aléas de sa morne vie de péquenot. Merci Pépé.

1 : Comme il n’a pas de nom, je lui en donne un.
2 : Robert Earl ne donne pas d’indication quant à leur allégeance, et comme leur livrée est bleue et verte, il est permis de penser qu’il ne s’agit pas nécessairement de loyalistes

AVIS:

Avant le lancement des gammes Warhammer Horror et Crime, rares étaient les nouvelles de 40K s’intéressant au point de vue des humbles sujets de l’Imperium, et à ce titre, ‘Angels’ est une œuvre intéressante et résolument précurseuse (?), puisqu’écrite plus de vingt ans avant que la Black Library fasse le pari de la diversification. Bien sûr, il y a bien des Space Marines au casting de cette courte nouvelle, mais Robert Earl garde volontairement et astucieusement la caméra braquée au niveau de son jeune et impressionnable héros, qui est au fond assez proche de la grande majorité des habitants de l’Imperium dans sa méconnaissance absolue de qui sont les Elus de l’Empereur. Ajoutez à cette bonne idée de positionnement narratif le talent de conteur d’Earl, et vous obtenez une des nouvelles courtes (10 pages ou moins) les plus efficaces du catalogue de la BL à mon humble avis. Un vrai masterclass en GW-Fiction.

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Hellbreak – B. Counter :

INTRIGUE:

Le Commissaire von Klas a eu la mauvaise idée d’être capturé vivant par les Eldars Noirs lorsque ces derniers ont annihilé son régiment, et son séjour à Commoragh se passe aussi bien, ou mal (c’est selon), que l’on peut l’imaginer. Identifié par ses tortionnaires comme officier, il a la chance douteuse de participer aux jeux donnés par la cabale de l’Échine Rompue (Broken Spine) en l’honneur de son maître, le positivement ancien Archon Kypselon. Rustre jusqu’au bout des ongles, von Klas a l’outrecuidance de remporter son duel face à une Céraste au style trop chargé pour son propre bien, et d’une manière si peu élégante (il lui pète le pif avant de l’empaler sur sa propre hallebarde… honteux) qu’il est prestement condamné à être écorché vif par l’Haemonculus personnel de Kypselon.

Survivre aux Intervilles1 de Commoragh a toutefois boosté le moral, déjà naturellement élevé, de notre brave Commissaire. Lorsque son tortionnaire (Verredaek) fait l’erreur de se présenter à lui sans l’avoir attaché au préalable, confiant qu’il est dans son aura de terreur pour figer sur place son nouveau sujet d’expérimentation, von Klas ne tarde pas à lui faire goûter à sa propre médecine, et s’échappe après lui avoir fauché sa main rasoir et son pistolet à aiguille, recrutant dans des geôles adjacentes quatre autres Gardes Impériaux malchanceux gardés en réserve par Verredaek. L’Haemonculus agressé n’aura guère le temps de s’excuser de sa nullité crasse auprès de son impitoyable employeur, qui le fait exécuter par sa Succube de compagnie (Yae) pour faute lourde, avant d’ordonner à cette dernière d’aller mettre un terme à l’excursion des Mon-keigh dans son territoire. Après tout, il a un rival ambitieux (Uergax de la cabale du Fil de la Lame) à mater, et ne peut se permettre qu’une bande de primates mal dégrossis sèment la pagaille à domicile.

Malheureusement pour Kyky, Yae ne sera pas très efficace dans sa traque, à tel point que von Klas et sa petite escouade parviennent à s’emparer de l’usine du Sybarite Laeveq, et des deux mille esclaves humains utilisés par ce dernier comme main d’œuvre, multipliant leur potentiel de nuisance. Pire, les mutins choisissent de se réfugier dans le temple que l’Archonte a fait élever à sa gloire (c’est un gars simple), ce qui constitue un crime de lèse-majesté impardonnable. Tant pis pour la prudence, Kypselon réunit le ban et l’arrière-ban de sa cabale et envoie ses pillards reprendre possession de la basilique gothique (elle est construite uniquement en os) aux zadistes en furie. Il commet toutefois l’erreur de sous-estimer la résolution du meneur adverse, trop content de faire s’effondrer le plafond de l’édifice sur les combattants au plus fort de la bataille, même si cela précipite l’écrasement de son insurrection raciale. Écrasé pour écrasé, autant que les Eldars Noirs participent à cette soirée crêpes, pas vrai ?

Début spoiler…La nouvelle se termine dans une cellule de la cabale, où un von Klas en bien piteux état après son coup d’éclat languit des jours durant, jusqu’à ce que ses geôliers lui amènent un compagnon d’infortune, qui se révèle être Kypselon en personne. Comme l’Archonte l’apprend à son valeureux adversaire, sa rébellion a coûté très cher à l’Echine Rompue, aussi bien en ressources qu’en cabalites, et ses rivaux du Fil de la Lame ont profité de ce moment de faiblesse pour attaquer et annihiler ce qu’il lui restait de suivants. Bien que von Klas sache qu’il ne lui reste plus longtemps à vivre, il peut toutefois savourer l’indéniable victoire qu’il a remporté sur son adversaire, qui n’aura certainement pas la chance de bénéficier de la mort rapide dont le Commissaire agonisant héritera…Fin spoiler

1 : Je m’interroge sur la pertinence de mettre un -s, la cité drukhari n’ayant pas d’équivalent.

AVIS:

Ben Counter nous plonge dans l’enfer de Commoragh avec maestria dans cette variation sur le thème de Spartacus, qui illustre parfaitement la cruauté des Eldars Noirs et la défiance de la Garde Impériale face à l’adversité. Au final, ces deux factions sortent grandies de ce ‘Hellbreak’, et le lecteur bénéficie d’une histoire purement grimdark, comme sa conclusion aussi satisfaisante que nihiliste le démontre pleinement. De la nouvelle 40K comme on aime.

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Battle of the Archeosaurs – B. J. Bayley :

INTRIGUE:

La planète ABL 1034, colonisée par l’humanité en des temps forts lointains puis laissée à mariner dans son jus pendant la Longue Nuit, a été redécouverte par l’Imperium. Idéalement situé pour devenir une capitale sous-sectorielle, comme Mont de Marsan avant lui, ce monde primitif aurait dû être conquis ou reconquis par le régiment de Gardes Impériaux dépêché sur place sans le moindre effort, mais voilà : les bidasses ont été toutes massacrées par la population locale, malgré le très faible niveau technologique de cette dernière. Une deuxième expédition, mécanisée celle-là, n’a pas connu un sort plus favorable, faisant d’ABL 1034 une sorte de village gaulois galactique, résistant vaillamment contre l’envahisseur romain impérial. Foin de druide à la faucille en or ou de potion magique ici : la raison de cette défiance étonnante se trouve dans la présence d’une mégafaune domestiquée par les natifs, et baptisée archéosaures par les Magos Biologis en raison de la ressemblance des dites bestioles avec les lézards géants qui peuplaient Terra il y a des millions d’années.

Comme on le sait bien ici, ni la patience ni la bienveillance de Pépé ne sont sans limite, au contraire de ses armées, qui sont elles proprement inextinguibles. La troisième fois sera donc la bonne pour l’Imperium, qui décide de mettre le paquet pour s’assurer d’une victoire probante et envoie pas un, mais deux Titans Warlord mettre de l’ordre sur ABL 1034. Bien que les Princeps des machines envoyées sur place (Gaerius et Efferim) doutent fortement que l’ennemi soit en mesure de les inquiéter, la discipline légendaire de l’Adeptus Titanicus les empêche de livrer le fond de leur pensée aux gradés de la Flotte et de la Garde avec lesquels ils partagent la séance de briefing pré-déploiement. Et puisqu’ils sont sur place, autant faire le job, pas vrai ?

Cette belle confiance est rapidement, même si temporairement, ébranlée par la vision qui attend les Princeps lors de leur descente à la surface de la planète : pas moins de cinq épaves de Gargants ork jonchant la plaine choisie par le commandement impérial pour déployer ses forces. Bien que Gaerius choisisse de croire qu’il s’agit d’une conséquence de la nature belliqueuse des Xenos, tout prêts à se battre en eux en absence d’ennemis valables, plutôt que d’un fait d’armes des indigènes, son aveuglement béat ne va pas durer longtemps. L’arrivée de la troisième vague d’assaillants n’est en effet pas passée inaperçue chez les locaux (en même temps, on parle de marcheurs d’assaut de plus de trente mètres de haut, c’est voyant), et la tribu la plus proche n’est pas longue à envoyer ses guerriers et deux archéosaures livrer bataille aux nouveaux venus. On apprend à l’occasion d’un petit passage raconté depuis le point de vue de l’un des deux seuls survivants de la deuxième vague impériale, et reconverti en étendard vivant par les autochtones, que ces derniers arrivent à contrôler leurs montures grâce à des pieux métalliques fichés dans le crâne des archéosaures à des endroits précis, et dont les vibrations permettent d’activer certaines zones du cerveau de ces grosses bestioles. C’est tout simple, mais il fallait y penser (et surtout, trouver un moyen de mettre l’idée en pratique…).

Le combat s’engage donc entre les Titans et les Kaijus, et le petit rictus de suffisance qui flottait sur les lèvres du Princeps Gaerius est rapidement remplacé par une grimace d’incrédulité devant la résistance incroyable de ses adversaires, puis par de la panique pure et simple lorsque les archéosaures déclenchent leur combo spéciale « jet de flammes/cabrage/coup de queue », mettant au tapis le Warlord d’Efferim et laissant la machine rescapée composer seule avec les deux dinosaures énervés qui lui font face. L’entraînement et la discipline de l’équipage du Titan survivant (et les gros flingues dont il dispose) permettent toutefois à Gaerius d’arracher une victoire mineure en abattant les lézards géants à bout portant avant qu’ils n’aient pu lui faire des papouilles. C’était moins une pour la crème de la crème de l’Omnimessie…

Début spoiler…Et ce n’est surtout que partie remise pour la tribu vaincue, dont le nouveau chef décide que l’heure n’est plus aux combats honorables en 2 contre 2. Ayant bien compris que les armées impériales ne reculeraient devant rien pour s’emparer de la planète, il envoie dès le lendemain l’intégralité de son cheptel, soit une centaine d’archéosaures, piétiner les positions adverses. Le Titan mal en point de Gaerius ne peut pas s’opposer à une telle démonstration de force, et la troisième campagne se termine aussi ignominieusement que les précédentes.

Notre nouvelle quant à elle se conclut sur la décision prise par des gros bonnets de l’Imperium de régler une fois pour toutes cet ennuyeux, coûteux et humiliant problème en déchainant un petit Exterminatus sur la planète rebelle, quand bien même ça l’abimerait un peu, au moins à moyen terme. Un constat partagé à grand cri par notre ami Gaerius, qui a survécu à la débâcle et a été « adopté » par la tribu d’ABL 1034, où il sert maintenant de décoration frontale d’archéosaure. Voilà une reconversion réussie.Fin spoiler  

AVIS:

Une nouvelle « et si ? » par excellence, ‘Battle of the Archeosaurs’ permet à une des plumes les plus libres de la première époque de la Black Library de mettre en scène une bataille assez improbable et donc totalement savoureuse entre Titans Warlord et dinosaures géants, le tout avec un respect du fluff que l’on ne peut qu’admirer. On ne verra probablement plus rien de tel dans le catalogue de la BL (tant pis ou tant mieux, je vous laisse seuls juges), ce qui est une autre raison pour les amateurs de GW-Fiction de prendre connaissance de cet OVNI de la littérature 40K.

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Know Thine Enemy – G. Thorpe :

INTRIGUE:

Lorsque la planète Slato et ses deux cent mille colons se trouvent menacés par les perfides Eldars, il incombe à la 4ème Compagnie des Salamanders de voler à la rescousse de cet agri-monde guère capable de se défendre seul contre les insaisissables Xenos. Nous suivons donc le Chapelain Ramesis et les trois escouades qu’il chaperonne alors que ce beau monde se dirige en Thunderhawk vers le portail Warp où se concentre la majorité des combats. Après avoir conduit les rites appropriés, formellement accueilli un frère de bataille novice (Xavier1) au sein de la Compagnie, et surtout briefé ses hommes – et le lecteur avec eux – sur les tenants et les aboutissants de leur mission, Ramesis est sauvé de l’indignité de devoir se lancer dans le stand up pour meubler la nouvelle par l’attaque d’un vaisseau eldar, qui force le Thunderhawk à se poser en catastrophe dans la pampa. Rien de très grave pour nos fiers surhommes, qui partent en petites foulées en direction du champ de bataille, après s’être rapidement coordonnés avec le reste du contingent Salamanders, sous les ordres du Capitaine Nubean et de l’Archiviste Zambias.

La session de décrassage des verts les amène à traverser un bois, où les attendaient quelques Rangers pas très dégourdis, et qui se font vite laminer par les intraitables (mais pas beaucoup plus malins2) Astartes. Cette échauffourée donne l’occasion à Thorpe de nous resservir une nouvelle tournée de dialogues ciselés, avant que les détachements de Ramesis et de Nubean n’accomplissent leur jonction, ce qui mène évidemment à plus de palabres entre les trois officiers. Moment de grâce absolu où les lignes défilent sans que les mots prononcés n’aient le plus traître intérêt : c’est un peu comme si on avait demandé à ChatGPT d’écrire un rapport de bataille 40K depuis le point de vue d’un mauvais commentateur sportif. Après avoir débattu pendant à peu près trois mille ans, notre fine équipe repart, toujours en courant, vers le portail Warp tant attendu (par le lecteur en tout cas) afin d’aider la Garde Impériale à défendre cette mystérieuse relique contre les attaques incessantes des Eldars. On apprend aussi qu’un Techno-Prêtre de l’Adeptus Mechanicus (Simeniz) a été dépêché sur place pour étudier la machinerie Xenos, qui doit donc être impérativement défendue et non détruite de manière préventive (ce qui serait tout de même ’achement plus pratique). ‘Ach !’ fait Ramesis, que son dédain pour les disciples de l’Omnimessie transforme soudainement en germanophone. On est plus à un cliché près, à ce stade.

Après avoir complété leur marathon, les Salamanders se positionnent autour du portail, confiants dans la tactique du camping éhonté pour remporter la victoire à la clock. Après tout, c’est ce qu’à fait l’Empereur pendant le Siège de Terra, et ça lui a bien réussi. Nouvelle scène de baston, nocturne cette fois-ci (sans doute un hommage à la planète natale de nos héros), pendant laquelle Thorpe finit d’égrener laborieusement les entrées du Codex Eldars V3, et où rien de bien intéressant ne se passe. Hors champ, Nubean décide d’aller taquiner le goujon avec son escouade de commandement et revient après quelques temps accompagné d’un Prophète et de deux Archontes. Stupéfaction chez Ramesis, qui ne comprend pas comment le Capitaine a pu parlementer avec l’ennemi, et manque de commettre une boulette en décochant un coup de crozius aux invités de son supérieur. En même temps, la haine est son métier, on ne peut pas lui reprocher d’être un peu intolérant sur les bords.

Revenus devant le portail pour, je vous le donne en mille, tailler le bout de gras, Salamanders et Eldars parviennent presque à se mettre d’accord sur la marche à suivre pour coopérer et ainsi empêcher la cabale du redoutable Kha-rehk d’activer la porte afin de piller Slato. C’était d’ailleurs l’objectif initial des Zoneilles, dont la tranquillité du Vaisseau Monde se serait retrouvée menacée à plus ou moins long terme en cas d’incursion réussie de la part de leurs méchants cousins sur la colonie impériale. Je dis « presque » car au moment où le Prophète commence à incanter pour désactiver la wifi, le portail commence à s’ouvrir et Ramesis a une réaction malheureuse : coller un pain au Xenos le plus proche. Après tout, il y a une bonne chance que ce soit de sa faute, pas vrai ? La situation dégénère totalement et les trois Eldars finissent en salami, Xavier s’illustrant particulièrement en assénant le coup de grâce au Prophète avec le crozius de Ramesis…

Début spoiler…Toutefois, cela n’empêche pas la nouvelle de se terminer sur une défaite critique de l’Imperium, la décision hâtive et xénophobe du Chapelain ayant permis aux Eldars Noirs d’ouvrir le portail et de déferler en masse sur les positions impériales. Ramesis a le temps de réaliser qu’il a vraiment chier dans la colle, l’alliance des Space Marines, Gardes Impériaux et Eldars ayant pu permettre de repousser les Drukharis, avant de se faire ôter son dernier point de vie par une foultitude de cabalites surexcités. Dans la vie, il faut savoir choisir ses combats.Fin spoiler

1 : Oui, LE Xav’ en personne. Gav Thorpe n’a jamais pu résister à un caméo de personnage nommé, c’est son péché mignon.
2 : Ramesis décide en effet de couper à travers bois alors que 1) son second lui avait fait part d’un fort risque d’embuscade, et 2) l’auspex de ce dernier avait confirmé la présence d’humanoïdes embusqués dans le bosquet.

AVIS:

Un jeune Gav Thorpe se frotte à la nouvelle de taille intermédiaire (32 pages), pour un résultat comiquement laborieux. C’est bien simple, plus de la moitié du texte de ce ‘Know Thine Enemy’ est constituée de passages de remplissage, alternant entre passages fluff (ne respectant d’ailleurs pas du tout le background1), expositions sans honte et dialogues creux. Ah, et de remise de casque aussi. Parmi les rares éléments rédempteurs de cette bouillie littéraire, citons tout de même l’idée de terminer la nouvelle sur une défaite sans appel des protagonistes (pas si fréquent dans la GW-Fiction), et l’enrichissement de l’historique du (pas encore) Chapelain Xavier. Pour le reste, nous qualifierons poliment cette nouvelle de travail de jeunesse assez peu abouti, et passerons à autre chose. Ça vaut mieux pour tout le monde.

1 : Entre les Space Marines qui considèrent l’Empereur comme un dieu, les 10 Compagnies de Salamanders (au lieu de sept) dénombrées par Thorpe, et le mépris total dont ces derniers font preuve pour la vie de leurs alliés humains, le fluffiste souffle fort à la lecture. L’auteur a fini maître du background chez GW, donc il s’est rattrapé après cela.

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The Wrath of Khârn – W. King :

INTRIGUE:

The Wrath of KhârnLa régularité, c’est la clé de la longévité. Il suffit de regarder Khârn (10.000 printemps et 2.243 meurtres – pour cette campagne – au compteur au début de notre histoire) pour s’en convaincre : le bougre aime toujours autant ce qu’il fait depuis dix millénaires, et cela lui a permis de garder la vigueur d’un jeune homme malgré une existence aventureuse et une hygiène de vie questionnable. Un véritable exemple pour la jeunesse, moi je dis. Nous cueillons le petit chaperon rouge sang au détour d’un champ de bataille situé sur un monde démon dédié à Slaanesh, sur lequel Mr Félon mène une attaque avec ses enthousiastes Berzerkers pour détruire une relique impie gardée au sein du Temple de l’Indulgence Superlative (tout un programme) : le Cœur du Désir.

Comme on peut s’en douter, il n’y a personne dans la team duckface qui soit capable de rivaliser avec notre héros dans le noble art du combat rapproché, et Khârn ne met que quelques pages à enfoncer les défenses ennemies, détruisant l’intégrité physique et ruinant les justaucorps moulants de tous ceux qui ont le malheur de croiser sa route. Il finit par parvenir avec quelques copains jusqu’à la salle principale du Temple, où les attendait le chef des Slaaneshi, alangui comme il se doit sur un trône enfermant l’essence d’un Démon Majeur : le fameux Cœur du Désir !

Si l’aura de sensualité et de concupiscence qui émane de la chaise démoniaque pique un peu les yeux de notre farouche champion, ses effets sont décuplés sur ses humbles suivants, qui à sa grande colère succombent tous à l’étreinte lascive du Prince des Plaisirs. Juste le temps de corriger de manière définitive ces gougnafiers, et Khârn peut se concentrer sur le cas du cultiste en chef, dont l’inqualifiable familiarité1 n’est pas le moindre de ses péchés. Encore une fois, l’affaire est vite expédiée, quelques moulinets de Gorechild ayant vite fait d’apprendre la bienséance à ce hippie dévergondé, et ce malgré son intéressante capacité à continuer à contrôler ses membres après qu’ils aient été tranchés.

Le boss final de notre récit s’avère être le Cœur du Désir, ou plus précisément l’entité démoniaque qui y est prisonnière. Cette dernière commet l’impardonnable erreur de suggérer à Khârn qu’un type qui s’appelle « le Félon » peut sans problème s’asseoir sur sa loyauté à Khorne (et sur le trône de Slaanesh par la même occasion), alors que notre héros est justement fier de sa loyauté exclusive au dieu du Sang. S’il a trahi ses camarades World Eaters, c’est justement parce qu’il considérait qu’ils s’étaient détournés des commandements de Khorne ! Cette bévue sera lourde de conséquence pour le Cœur du Désir, qui se prend un grand coup de hache tronçonneuse dans le dossier et termine la nouvelle en pièces détachées. Si vous tendez bien l’oreille, vous pourrez entendre Khârn fredonner I’m still standing alors qu’il regagne son vaisseau avec la satisfaction du devoir accompli…

1 : Il appelle Khârn « vieille branche », ce qui n’est pas très pro.

AVIS:

Nous sommes en présence de la toute première apparition de Khârn dans la GW-Fiction, et c’est peu de choses que de dire que de l’eau – ou peut-être du sang – a coulé sous les ponts depuis ces débuts brut(aux) de décoffrage signés de la main de William King. Ce personnage iconique a en effet gagné une profondeur très intéressante à travers son traitement dans l’Hérésie d’Horus, et que l’on ne retrouve absolument pas dans ‘The Wrath of Khârn1, mais il serait assez injuste de le reprocher à King à mon avis. Ici, nous sommes en présence du champion de Khorne altéré de sang dans sa plus pure forme, et dont la plus grande force est son inextinguible soif de combat et de meurtre ; c’est d’ailleurs la « morale » de l’histoire servie par un William King qui n’a pas franchement poussé son talent de scénariste. Cette nouvelle pourrait être qualifiée de simpliste et d’indigente au vu des standards actuels de la Black Library, mais si on la considère dans le contexte de sa première publication (en 2001, et dans un White Dwarf), un peu de mansuétude est tolérable. À lire si vous êtes un aficionado dévoué du Félon, très dispensable sinon.

1 : Un jeu de mots typiquement anglo-saxon, car faisant référence au film ‘The Wrath of Khan’ de la série Star Trek.

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Ancient History – A. Chambers :

INTRIGUE:

Recruté contre son gré comme équipier polyvalent du Retribution, fier vaisseau de la flotte impériale à rade de personnel, à l’issue d’une opération porte fermée (traduction : une fois qu’on est rentré, on ne peut plus sortir), Nathan, notre héros, découvre progressivement les joies et les peines de la vie de canonnier de marine, noble et utile occupation qu’il projette toutefois d’abandonner dès qu’une occasion de déserter se présentera à lui. Cette frilosité à s’engager sur le long terme dans une institution impériale pourtant aussi respectable que la Navy1 s’explique en partie par la présence d’un nuisible connu de Nathan, Kendrikson, dans l’équipage de Balthasar (le nom du macrocanon auquel notre homme a été affecté). Les deux forçats se sont quittés fâchés au cours d’une précédente collaboration, et bien que Nath’ ne serait pas contre une petite vendetta pour régler ses comptes avec son ex-nouveau collègue, il préférerait à tout prendre mettre quelques années lumières entre eux, un « accident » du travail étant si vite arrivé… En plus de ces problèmes relationnels, le Warp ne s’avère pas être un long fleuve tranquille, et sa traversée pèse lourdement sur l’estomac et la psyché des rats de cale. En témoigne le coup de sang passager d’un passager, Fetchin, qui succombe à une crise de claustrophobie démoniaque, puis à une décharge de fusil à pompe à bout portant, non sans avoir envoyé quelques badauds à l’hôpital et à la morgue auparavant.

Nathan a toutefois la chance de pouvoir compter sur le patronage bienveillant de Kron, canonnier vétéran dont l’accent chantant, les histoires passionnantes, les relations privilégiées avec le management et la connaissance intime des coursives du Retribution permettent au bizut d’acquérir des connaissances et compétences précieuses, monter dans la hiérarchie balthasaresque et, accessoirement, échapper à la tentative d’assassinat dont il fait les frais de la part de ce mauvais sujet de Kendrikson, qui se révèle être un Luminen2 infiltré.

Cette prise de fonction mouvementée culmine avec la toute première bataille spatiale à laquelle Nathan participe, baptême du feu à plus d’un titre au cours duquel il aura l’occasion de se frotter à l’ennemi de plus près que prévu sur sa fiche de poste, le crash d’une torpille d’abordage à proximité de son espace de co-working le forçant à prendre les armes pour défendre la vertu et l’intégrité de Balthasar contre les assauts païens de vils cultistes chaotiques, dont l’encadrant se trouve être un Space Marine renégat. Il faudra une nouvelle fois l’intervention décisive de Kron, qui sous ses abords décatis, se révèle être un individu décidément plein de ressources et d’énergie (il se relève d’un tir de pistolet bolter à bout portant et tase l’Astartes à mains nues), pour permettre à notre héros de se sortir de ce coup de Trafalgar. Les mystères de l’origine et des motivations du mentor de Nathan ne seront pas levés par Chambers avant la conclusion de cet ‘Ancient History3′, mais une chose est sûre, quand on est Kron, on est Kron.

1 : Sécurité de l’emploi, gîte et couvert offerts, destinations variées, activités physiques régulières… Ça c’est un job de rêve.
2 : Plus de quinze ans avant la sortie du Codex Adeptus Mechanicus, Chambers convoquait déjà des électro-prêtres dans ses nouvelles.
3 : Qui a peut-être été suivi d’une autre nouvelle, et aurait dû l’être ? Je suis sur le coup les aminches.

AVIS:

Nouvelle protéiforme et un peu foutraque, ‘Ancient History’ est une soumission plutôt hétérodoxe, mais loin d’être inintéressante de la part d’Andy Chambers. En multipliant les partis pris narratifs (cela commence comme un récit d’évasion, avant d’intégrer un passage « mythes et légendes », puis d’embrayer sur une révélation plutôt étrange sur un des personnages principaux, et de tourner à l’action pure et dure, pour se terminer sur un mystère vraiment mystérieux) et les péripéties, le grand méchant joueur n’a pas choisi la facilité, et son propos en paraît en conséquence décousu et incertain dans sa finalité. Pour autant, le simple fait de mettre sur le devant de la scène des personnages très peu abordés par la BL mais au moins aussi caractéristiques du grimdark de 40K que les Space Marines ou l’Inquisition (les « marins » de la Flotte Impériale) ne manquera pas d’attirer la curiosité bienveillante des lecteurs avides d’en apprendre plus sur la vie des travailleurs de la mer l’espace, ce en quoi Chambers se montre plutôt généreux. En outre, l’inclusion de la Complainte du Vieux Marin à la sauce 40K dans le récit s’avère être un interlude des plus intéressants entre deux scènes d’action, et ne manquera pas de susciter les hypothèses les plus radicales de la part des exégètes de tout poil qui constituent une part non négligeable du lectorat de la Black Library. La balance est donc plus que positive pour ‘Ancient History’ dont les apports fluff et l’originalité compensent largement les tâtonnements et… l’originalité (aussi).

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Snares and Delusions – M. Farrer :

INTRIGUE:

40K_Snares &amp; DelusionsC’est un jour très spécial pour l’Apôtre Noir De Haan (Dan de son prénom) : après des millénaires passés à traquer le Vaisseau Monde de Varantha à travers la galaxie, tous les signes prédisent que l’heure de la confrontation finale est arrivée entre Word Bearers rancuniers et Eldars élusifs. Débarqué à la surface d’un monde vierge peuplé d’Exodites (rapidement matés) avec l’avant-garde de son ost, De Haan supervise la consécration du bâtiment offert par la Légion hérétique à la seule ville de la planète : la Cathédrale de la 5ème Bénédiction. Les styles jurent un peu mais c’est une attention touchante, il faut le reconnaître. Notre zélé héros est persuadé que ce monde minable dissimule des portails Warp reliés à Varantha, qu’il hait du plus profond de ses cœurs depuis le moment où les Eldars de ce Vaisseau Monde ont fait échouer dans le sang l’opération tractage et prosélytisme montée par le mentor de De Haan sur Sahch-V, contraignant les fils de Lorgar à une honteuse retraite. Depuis, l’Apôtre Noir a consacré sa vie à la traque de cette faction eldar, parvenant progressivement à resserrer l’étau autour du Vaisseau Monde honni. Preuve de l’inimitié tenace l’opposant à Varantha, il a même reçu une prédiction personnalisée de la bouche de l’un de ses Prophètes, juste avant que le crozius protéiforme1 de De Haan ne le réduise en bouillie : « lorsque tu poseras les yeux sur le cœur de Varantha, la messe sera dite2 ».

Les travaux avancent bien, les Exodites sont en voie avancée d’extermination, et les renforts qui patientent dans la barge de bataille en orbite de la planète ne vont pas tarder à descendre renforcer l’avant-garde : tout va pour le mieux dans la plus grimdark des galaxies, mais un événement troublant vient perturber la bonne humeur de De Haan. Au moment de prononcer son sermon de Haine o’clock, il a eu une panne d’inspiration subite. Son second Meer a beau lui répéter que ça peut arriver à tout le monde, le fier Apôtre est aussi gêné que perplexe après cet incident, mais finit par décider que c’est encore un signe que sa quête arrive à son terme, avant d’imaginer toutes les choses horribles qu’il fera subir à Varantha et à ses habitants une fois qu’il aura craqué le digicode. Positive thinking here. Après tout, les choses se déroulent tellement bien que ce n’est pas un petit blanc passager qui va faire dérailler l’Omphalos Daemonium, pas vrai ?

Début spoiler…Eh bien (et vous vous en doutiez, sagaces lecteurs que vous êtes), si. Surgissant de l’ombre et/ou de la banlieue pourrie de la ville Exodite – ça dépend des versions – les forces de Varantha attaquent la Cathédrale sans crier gare, avec la redoutable efficacité et le haut potentiel disruptif3 qui sont la marque des Eldars des Vaisseaux Mondes. Coupé de ses renforts et bientôt laissé seul survivant de son ost, De Haan a un peu de temps pour songer à la prophétie qui lui a été révélée, et surtout à l’interprétation très optimiste qu’il en a eu jusque-là. Car toutes les fins ne sont pas heureuses, comme l’Apôtre Noir ne tarde pas à le découvrir lorsque le cœur de Varantha, alias son Avatar de Khaine, entre dans la Cathédrale pour demander un petit tête à tête au confessionnel… Ite, missa est.Fin spoiler

1 : Il a le superpouvoir de changer de tête à chaque fois que De Haan pose les yeux dessus, ce qui est… cool.
2 : Ok, c’est pas la traduction littérale mais bon, avouez que c’est approprié pour un Word Bearers.
3 : Tous leurs points de commandement ont été claqués dans le stratagème « pièges à c*n », qui colle des blessures mortelles à toute figure s’approchant à 6 pas ou moins des 10 pions « râteau » placés par le joueur Eldar.

AVIS:

Une nouvelle moins intéressante par son intrigue (dont on devine la fin pratiquement dès le début, la faute aussi à un titre qui vend un peu trop la mèche) et ses personnages (assez quelconques) que par l’aisance stylistique dont fait preuve Matthew Farrer et surtout la bonne rasade de fluff qu’il nous sert au fil des pages, et qu’il a la bonne idée de répartir entre Word Bearers et Eldars. Pas sa meilleure, pour sûr, mais tout de même d’un très solide niveau.

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Hive Fleet Horror – B. J. Bayley :

INTRIGUE:

Jako Jaxabarm exerce la profession d’apothicaire (et pas d’Apothicaire, la minuscule est importante) sur une planète tellement quelconque qu’on saura seulement qu’elle est semi-industrielle1, et située dans le Segmentum Ultima, et gagne sa croûte en soignant les petits bobos du prolétariat local à grand renfort de baume du tigre (bleu). Un contrôle d’identité anodin au sortir d’une consultation rapidement expédiée avec un travailleur aux bras cloqués (Drenthan Drews) le met cependant dans de beaux draps. Par un malheureux – et inexpliqué – hasard, l’Arbitrator qui lui demande ses papiers l’identifie comme étant le Genetor van Leedrix, un Magus de l’Adeptus Mechanicus en fuite depuis des décennies. Ce qui est bien le cas, et provoque l’arrestation sommaire de Jako la fraude et de celui que le zélé fonctionnaire considère comme étant son acolyte (Drews).

Enfermés dans une cellule avec un Garde Impérial accusé de couardise devant l’ennemi, Jako, Drews et le lecteur en sont quitte pour un petit briefing sur la situation compliquée dans laquelle se trouve la planète. L’humble bidasse ne se fait en effet pas prier pour révéler à Jako que la Flotte Ruche Kraken est attendue en gare dans les prochaines heures2, et que les chances pour que la rencontre se passe bien sont assez faibles. Bon d’accord, Jako est un Psyker débutant (la raison pour laquelle il est en fuite depuis pas loin d’un siècle, sa différence n’ayant pas été bien reçue par ses collègues de travail), mais ce n’est pas une raison pour balancer des secrets défense au premier venu, Engagé Chochotte ! Comme pour confirmer les dires de leur informateur, une annonce micro retentit dans la caserne des Arbitrators, annonçant que tous les prisonniers sont priés d’aller mourir au combat contre l’essaim de Hormagaunts qui s’approche en bondissant de la cité. Les portes de la cellule s’ouvrent, des fusils lasers sont distribués, et pendant que le Garde démotivé préfère se suicider plutôt que de retourner au front, Jako et Drews profitent de la quille pour aller faire un tour en ville.

Las, cette escapade est bientôt interrompue par la soirée mousse que les Tyranides lancent soudainement sur la cité, et dont l’effet principal est d’empêtrer les défenseurs impériaux dans une sorte de barbe à papa Xenos, permettant aux envahisseurs de ramener tout ce beau monde dans leurs vaisseaux. C’est l’occasion pour nos héros (et pour le lecteur) d’en apprendre plus sur les motivations profondes de cette race extra-galactique – merci les pouvoirs psychiques de Jako pour justifier le remplissage éhonté auquel se livre Bayley – et d’assister aux premières loges à la terrible cruauté de ces créatures sanguinaires, qui dissèquent un (1) prisonnier avec un intérêt tout scientifique. LES MONSTRES.

Grands nerds devant l’Esprit de la Ruche, les Krakens sont tirés de leurs travaux pratiques par l’arrivée d’une escouade de Space Marines quelconques, qui se contentent de déposer une charge explosive dans la salle de classe avant de repartir en ignorant royalement les captifs humains survivants. Il en faut toutefois plus pour décourager nos deux héros de tenter de faire ami-ami avec les meilleurs de l’Empereur, et ils profitent de la confusion pour suivre à la trace leurs (presque) sauveteurs à travers les corridors organiques du vaisseau ruche, jusqu’au Thunderhawk que les Space Marines acceptent gentiment de partager avec des civils pour le retour au bercail. La nouvelle se termine avec l’explosion du vaisseau sur lequel Jako et Drews étaient retenus prisonniers, et sur le constat qu’il en reste cependant plein d’où il en vient. C’est ça l’embêtant avec les Tyranides, ils n’ont pas vraiment le sens de la mesure…

1 : Ce qui est assez honteux selon les standards de l’Imperium, où tous les concepts sont poussés à fond.
2 : A bord des fameux vaisseaux escargots qui forment le gros des flottes tyranides.

AVIS:

Hive Fleet Horror’ est sans doute la nouvelle de Barrington J. Bayley à avoir le plus mal vieilli de tout son catalogue. On peut à la rigueur passer l’éponge sur la vision très datée que l’auteur a et donne des Tyranides, ici dépeints comme des insectes géants pas foncièrement mauvais mais uniquement intéressés par la survie de l’espèce1, plutôt que comme l’horreur alien absolue qu’ils sont devenus dans le background actuel. Il ne faut pas oublier que Games Workshop a revu sa copie à propos de cette faction à plusieurs reprises, et qu’il fut un temps (certes lointain, et déjà révolu lorsque cette nouvelle a été publiée) où les Tyranides étaient effectivement relativement fréquentables. Soit.

Ce qui est en revanche impardonnable est l’absence d’intrigue et de rythme de cette nouvelle, qui prend le temps de nous présenter avec un luxe de détail disproportionné pour une histoire de 14 pages le passif de son protagoniste (sans que cela serve le récit d’une quelconque façon), l’affuble d’un side kick nommé à l’utilité toute relative, et leur fait vivre une « aventure » d’une simplicité digne de Fantômette ou du Club des Cinq. Certes, cela permet à Bayley de contextualiser ce qui semble être le but premier de ‘Hive Fleet Horror’, c’est-à-dire une présentation de la raison d’être des Tyranides pour les nuls et les newbies, mais le résultat est tellement décalé et téléphoné que je peine à croire qu’un éditeur de la Black Library ait donné son accord pour publier ce texte. Très décevant, et c’est d’autant plus triste qu’il s’agit de la dernière incursion de cet auteur iconique au 41ème millénaire. Au moins, l’illustration d’Adam Smith est très sympa…

1 : Et capable de débarquer sur une planète sans crier gare. L’Ombre dans le Warp, un concept inconnu pour Bayley.

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Ce sera tout pour moi sur ‘Dark Imperium‘, un recueil 40K « à l’ancienne » mais sans doute plus original que la moyenne des publications du même calibre de son époque grâce à l’inclusion de trois nouvelles de l’incomparable Bayley au sommaire. Comme on l’a vu plus haut, cette excentricité ne rime pas toujours avec qualité, mais cela permet au moins de garder un souvenir un peu plus vivace de cet ouvrage après en avoir fini sa lecture. On peut aussi mettre à crédit de cet ouvrage et de ses auteurs et éditeurs la multitude des points de vue et des factions abordés dans ‘Dark Imperium’, depuis la classique Space Marinade jusqu’au quotidien de personnages bien moins iconiques que l’Adeptus Astartes de base, comme le paysan de ‘Angels‘, le cultiste de ‘The Lives of Ferag Lion-Wolf‘, ou encore le « matelot » de ‘Ancient History‘. Bref, un joyeux pot pourri de courts formats, représentant bien ce qu’était la GW-Fiction à cette époque de son histoire.

WAY OF THE DEAD [WFB]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette chronique de ‘Way of the Dead’, recueil de nouvelles se déroulant dans le monde de la bataille de la fantaisie du marteau de guerre (voilà un concept qu’il est profond). Comme ses prédécesseurs directs (‘Realms of Chaos’ et ‘Lords of Valour’), ‘Way of the Dead’ est composé1 de courts formats publiés dans les pages d’Inferno!, plus précisément entre les numéros 24 et 34, ce qui correspond à la période 2001 à 2002. Il est à noter qu’il s’agit de la dernière anthologie proprement « infernale » pour WFB, les nouvelles de fantasy publiées par la suite dans le bimensuel de la BL ayant été compilées sans grande logique dans plusieurs ouvrages (‘Tales of the Old World’, ‘The Cold Hand of Betrayal’, ‘Swords of the Empire’…). On y retrouve un certain nombre de têtes connues du lecteur habitué de la maison, comme Brunner le chasseur de primes, Angelika Fleischer la pillarde récupératrice de champs de bataille, ou encore la tristement célèbre bande de mercenaires de Torben Badenov. À la différence de ses prédécesseurs directs cependant, ‘Way of the Dead’ est toujours (au moment où cette chronique est écrite) disponible à l’achat sur le site de la Black Library – mais seulement en format numérique, faut pas déconner non plus – ce qui en facilite grandement l’accès et la découverte par le public intéressé.

Way of the Dead

Si on se penche sur les contributeurs de cet insigne opus, il convient de reconnaître que Brian Craig (une novella) et C. L. Werner (deux nouvelles) occupent les premiers rôles dans la distribution concoctée par les compères Gascoigne et Dunn. Ils sont épaulés par les plumes capables de Matthew Farrer (première – et unique – soumission pour WFB), Graham McNeill, Jonathan Green, Robin D. Laws, et des deux Simon (Jowett et Spurrier). Un casting assez représentatif des débuts des années 2000 au sein de la BL, avec quelques noms qui parleront au lecteur d’aujourd’hui, j’en suis sûr. Notre propos étant ainsi introduit, il est plus que temps de nous hasarder sur le chemin des morts, en espérant qu’il ne soit pas aussi mal famé que celui emprunté par Aragorn et Cie dans leur quête d’un raccourci vers Minas Tirith…

1 : En majorité, pas exclusivement, car la novella ‘The Road to Damnation’ de Brian Craig constitue un inédit. Logique pour une histoire de plus de cinquante pages.

Way of the Dead

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Glow – S. Spurrier :

INTRIGUE :

GlowC’est la fin de l’automne à Talabheim, et le Temple de Sigmar local, dirigé par le capitaine Richt ‘Hmm’ Karver, enquête sur une addiction d’un nouvel ordre qui s’étend dans les bas-fonds de la cité. Le Glow, une poudre verte de composition inconnue, fait en effet des ravages parmi les déshérités de la métropole cratérisée. Très addictif, il a en outre comme fâcheux effet secondaire de provoquer des mutations spontanées chez ses utilisateurs réguliers, ce qui n’est pas du tout du goût de ce gentleman de Karver. Après avoir mené un raid dans un taudis dont l’adresse lui avait été donnée par un suspect, l’impeccable capitaine repart avec un cadavre frais de junkie agressif ainsi qu’une petite réserve de la substance en question, qu’il choisit d’ajouter à la diète du rat géant skaven qu’il a adopté comme animal de compagnie après une purge des souterrains de Talabheim l’année passée. Le savoir fait le pouvoir, c’est bien connu.

Les mois passent et l’hiver arrive sur l’Empire, sans que la filière locale de Glow soit démantelée malgré les meilleurs efforts de Karver et de ses hommes (Kubler, Holst et Spielmunn). L’épidémie ne fait au contraire que progresser, ce qui force les chasseurs de sorcières crackheads à muscler leurs méthodes, déjà assez viriles. Interrogatoires menés au tison, menaces d’envoyer leurs indics au bûcher s’ils ne s’activent pas et autres descentes dans la ville tous flingues dehors se multiplient. C’est au cours de l’une d’entre elles que Karver commet une bavure : surpris par la réaction de l’occupant d’un laboratoire clandestin où le Glow était produit, il déchargea sa pétoire sur ce qui se révéla être, après inspection post mortem, une fillette réduite en esclavage par le maître du cartel pour la confection des tablettes inondant la cité. Enchaînée dans son local et ayant été privée de langue par son tortionnaire, elle cherchait seulement à expliquer pourquoi elle n’était pas en capacité d’obtempérer aux ordres des Templiers lorsqu’un Karver sur les nerfs lui envoya un pruneau dans le caisson pour slow play. Ce sont des choses qui arrivent…

L’opération ne fut cependant pas un total échec, notre héros mettant le gant sur la poudre entrant dans la composition du Glow en fouillant le laboratoire. Ayant fait pression sur un sorcier de Jade pour obtenir une expertise express, il reçut la confirmation de ses soupçons : l’ingrédient actif du Glow était bien de la malepierre. Une erreur de manipulation de la part du thaumaturge lui permit de recevoir une autre information utile : la substance toxique se trouvait à la fois dans le gant utilisé pour recueillir la poudre dans le laboratoire, mais également à l’extérieur de ce dernier, indiquant sans équivoque que Karver avait manipulé de la malepierre peu de temps auparavant. Un résultat étrange, à moins que…

Début spoiler…À moins que la broche ornée d’une pierre verte que son meilleur disciple, Kubler, portait à la boutonnière ce jour-là n’ait pas été montée d’une émeraude, comme il le pensait, mais d’un minéral bien plus sinistre. La confrontation entre les deux hommes prend place dans la chambre froide creusée sous le Temple de Sigmar, dans lequel les répurgateurs stockent leurs cadavres contaminés dans l’attente du dégel. Ayant participé à la purge des terriers skavens en compagnie de son mentor, Kubler avait eu la mauvaise idée de s’intéresser à la malepierre utilisée comme monnaie d’échange par ces derniers, et qui le transforma rapidement en méchant de série B.

Ayant dupé la vigilance de son supérieur jusqu’à son fashion faux pas en matière d’accessorisation de sa tenue, Kubler est pris au dépourvu lorsque Karver le trouve en train de faire les poches des corps de Guerriers des Clans gardés en réserve par les Templiers à la recherche de cailloux verts. La surprise change toutefois de camp après qu’un Kubler gravement blessé par le tir de son patron passe en mode Technomage et avale d’un seul coup tous les éclats de malepierre qu’il trimballait sur lui, se transformant en mutant à la force et à la rapidité décuplés. C’est au tour de Karver de se retrouver dans les cordes, mais notre héros avait gardé un atout dans sa manche, ou plutôt au bout d’une chaîne : son rat de compagnie. Transformé en abomination (et pas Abomination, ça ne serait pas rentré dans son bureau) poilue par sa consommation régulière de Glow, Ratatouille est libéré par son maître et ne perd pas une seconde pour creuser un terrier dans la bedaine de Kubler afin d’accéder à la malepierre récemment consommée par le ruffian. Cet affrontement sans merci résulte en la mort simultanée des deux adversaires, laissant Karver le seul survivant de ce truel chaotique. Il faudra penser à passer un coup de mop, tout de même.Fin spoiler

AVIS :

Spurrier transpose avec succès une enquête des stups dans le monde de Warhammer Fantasy Battle avec ce ‘Glow’, qui illustre le sombre mais palpitant quotidien des Templiers de Sigmar lorsqu’ils n’ont pas de sorcières à se mettre sous la dent. Ambiance poisseuse, action rythmée, twist final bien amené… Simon Spurrier démontre l’étendue de ses talents de scénariste et sa valeur comme contributeur à la GW-Fiction avec cette nouvelle, qui sera malheureusement sa seule incursion dans le Monde qui Fut. Comme le hamster adoptif de Richt Karver, on aurait bien aimé avoir du rab’.

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Head Hunting – R. D. Laws :

INTRIGUE :

Head HuntingRetour au Col du Feu Noir (car c’est là que ça se Passe… mouéhéhé) en compagnie d’Angelika Fleischer et de son protecteur (ce qu’il pense) /stalker (ce qu’elle pense), Franziskus. C’est une journée normale pour Angie, qui exerce l’utile profession de récupératrice des champs de bataille, et a localisé le site d’une embuscade grâce aux croassements des corbeaux faisant bombance sur les cadavres abandonnés. Bien que Franziskus, en aristocrate principiel qu’il est, trouve la pratique dégradante, il faut bien que quelqu’un se charge de remettre sur le marché les biens et espèces qui resteraient sinon à prendre la pluie sur leurs défunts propriétaires, au lieu de créer du PIB, comme Baltazar Gelt le voudrait. La moisson du jour est plutôt bonne (un anneau nain pouvant servir de bracelet – les Dawi ont des doigts boudinés – et quelques pièces pour s’acheter un Sub’ en rentrant), mais se fait interrompre par un bruit caractéristique et de mauvais augure : celui d’une hache taillant de la barbaque. Prudents, les deux looters se cachent sur le bord de la route et surprennent peu de temps après un voyageur marchant avec une hache sur l’épaule et un sac suspect à la ceinture.

L’explication de texte entre les trois larrons permet au nouvel arrivant, qui se présente comme le professeur Victor Schreber, de dissiper tout malentendu quant à son accoutrement. Certes, il se balade avec un sac de têtes tranchées, et certes, c’est lui qui les a séparées de leurs précédents propriétaires, mais il l’a fait pour la science. Schreber est en effet un expert en phrénologie, et collectionne les crânes afin de percer le mystère des humeurs et des sentiments de ses semblables. Voyant que le bougre est seulement un gros nerd, et pas un psychopathe en puissance, Angelika et Franziskus ne le retiennent pas plus, mais à leur grande surprise, le prof a eu proposition à leur faire. Il revient en effet du petit village de Verldorf, situé en amont du Col, où il espérait pouvoir collecter un spécimen unique : le crâne du malandrin notoire appelé Potocki, récemment capturé et exécuté pour ses mauvaises actions par les Verldorfer. Ces derniers n’ont pas accepté l’offre, pourtant généreuse, de Schreber de leur prendre la tête (on les comprend), et l’ont chassé à coup de pierres lorsqu’il a insisté. Déterminé à agrandir sa collection, il propose donc deux cents shillings à nos héros en l’échange du crâne tant convoité, à collecter après livraison du paquet à son domicile. Il leur remet également une boîte rembourrée pour faciliter le transport et éviter toute casse pendant le voyage. La présence d’un cadenas pour fermer ladite boîte ne manque par contre pas d’interroger Franziskus…

Après un voyage sans encombre, Angie et Frankie arrivent à Verldorf, hameau misérable dont la principale attraction est le gibet où croupit un cadavre bien amoché, suspendu dans une cage en fer. Malgré son état décati, Potocki terrifie visiblement les locaux, qui refusent de parler de lui en dépit des perches que leur tend une Angelika preneuse d’informations pour faciliter son futur larcin. Ce n’est pas grave, elle fera sans, en bonne professionnelle qu’elle est. Ayant pris résidence dans l’auberge locale, les deux Bonereapers avant l’heure se glissent dehors au cœur de la nuit pour aller perpétrer leur forfait, neutralisant au passage l’alarme que l’aubergiste avait installé à sa fenêtre pour empêcher les mauvais payeurs de s’échapper sans régler l’addition. C’est du moins ce qu’Angelika et son side kick supputent, jusqu’à que l’horrible vérité leur saute littéralement à la figure…

Début spoiler…Potocki n’était en fait pas aussi mort qu’il n’y paraissait, et lorsqu’Angelika fait mine de le raser à l’œil, le cadavre s’anime et l’attaque furieusement. Bien qu’elle s’en sorte sans dommage, le raffut causé par l’affrontement réveille Verldorf, forçant notre héroïne à sortir une masterclass d’improvisation. Elle n’a pas été prise la main dans le sac en train d’attenter à l’intégrité d’un cadavre, non non : elle a été prise d’une crise de somnambulisme causée par l’influence maligne de la goule locale, dont personne, absolument personne ne l’a mis au courant. SKANDHAL !!! Totalement mystifiés par la prestation de leur hôte, les Verldorfer retournent se coucher sans faire d’esclandres, après avoir expliqué que la situation actuelle est le seul moyen qu’ils ont trouvé pour tenir à l’œil l’increvable et intenable Potocki, qui les tourmente depuis des générations et dont la vitalité maléfique défie l’imagination. Faute avouée étant à demi pardonnée, Angelika et Franziskus retournent également se pieuter…

…Et refont une sortie sans tarder, utilisant cette fois-ci la clé qu’Angelika a dérobé à l’aubergiste pendant qu’il lui présentait ses plus plates excuses, ce qui simplifie grandement l’opération « Louis XVI » planifiée par nos héros. Bien que Potocki ne se laisse pas faire, et que le bruit attire à nouveau les villageois hors de leurs masures, la tête finit par être collectée, et les deux gredins peuvent s’enfuir à toutes jambes en direction du manoir de Schreber.

Comme on pouvait s’y attendre de la part d’un employeur ayant omis de préciser ce « petit » détail au moment du briefing, Schreber se révèle être un mauvais payeur, qui sort un pistolet de son armoire au lieu des deux cents shillings promis. Angie avait toutefois prévu le coup, et se contente d’ouvrir la boîte contenant la tête de Potocki en direction de l’érudit félon. Pris au dépourvu par la manœuvre et par le crâne pourrissant qui lui saute à la jugulaire, Schreber est rapidement hors du coup (et hors de cou), ce qui laisse à Angelika et Franziskus toute latitude pour fouiller son domicile à la recherche d’un dédommagement, une fois qu’ils ont pris soin de réduire la tête enragée en bouillie, bien sûr. Au final, les deux comparses repartent avec un nouveau pistolet, ce qui n’est pas beaucoup mais déjà mieux que rien. Ils constatent d’un air détaché que la traînée informe qui était la tête de Potocki semble également être sur le départ, mais à la vitesse où elle progresse, le bougre ne devrait pas faire parler de lui avant cent vingt cinq ans. La Fin des Temps n’attend pour personne…Fin spoiler

AVIS :

Seconde (et à ma connaissance dernière) nouvelle consacrée par Laws à son personnage fétiche d’Angelika Fleischer, ‘Head Hunting’ semble tout droit sorti de l’imagination d’un DM facétieux, et peut se lire comme tel. Malgré l’horreur que représente un cadavre animé (de mauvais sentiments) et apparemment invulnérable, le ton léger avec lequel Robin D. Laws narre cette histoire la fait basculer dans le royaume de la comic fantasy, mais pas dans la parodie pure et simple de Warhammer Fantasy Battle, ce qui est appréciable. Un sympathique interlude entre deux lectures plus sombres.

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The Small Ones – C. L. Werner :

INTRIGUE :

The Small OnesLa vie paisible du village de Marburg, perdu au milieu du Stirland profond (aussi appelé Stirland), est bouleversée par l’arrivée impromptue d’un Sorcier du Chaos mal en point (Thyssen Krotzigk), en fuite après que sa congrégation ait été passée par l’épée par la Garde Noire de Morr du Capitaine Ernst Ditmarr. Prêtre de Morr à l’esprit mal tourné, Thyssen avait profité de sa nomination dans une paroisse reculée pour se vouer à l’étude et à la vénération des Dieux du Chaos avec une totale impunité, jusqu’à ce que le rectorat lui envoie un inspecteur (auquel il arriva un regrettable accident), puis un bataillon de Templiers. La bataille qui fit rage entre cultistes et gothiques se solda par la victoire de ces derniers, mais Thyssen parvint malgré tout à s’enfuir (en clopinant, du fait d’une jambe cassée), laissant Ditmarr avec une manche vide (le feu, ça brûle) et un désir de vengeance inextinguible.

Les Fab Four faisant bien les choses, Thyssen est découvert par une bande d’enfants du coin alors qu’ils jouaient dans la forêt. Ayant tiré le don « sosie d’Alf, mais en grimdark » sur le tableau de l’Œil des Dieux (comprendre qu’il ressemble au fruit des relations incestueuses entre un Gamorréen et un Ewok), le petit Sorcier se fait instantanément adopter par Keren, fille du meunier de Marburg, fan de furries et forme non évoluée de Karen, qui convainc tout aussi rapidement ses camarades (Paul, Therese et Kurt) de cacher celui qu’elle considère comme un prince victime d’une malédiction dans le moulin abandonné du rival de son père (auquel il arriva un regrettable accident, bis). C’est le jackpot pour Thyssen, qui peut se rétablir tranquillement et confortablement grâce aux victuailles que les enfants de Marburg prélèvent dans le garde-manger familial pour son bénéfice, tout en commençant à corrompre son jeune public grâce aux contes séditieux sur Sigmar et les Quatre Princes dont il les abreuve. Après tout, c’est vrai qu’il ressemble beaucoup à Père Castor.

La situation de Thyssen est toutefois précaire, les Marburgeois ne restant pas les bras croisés devant la disparition d’un nombre croissant de leurs rejetons, qui préfèrent squatter dans le moulin de leur copain porcin plutôt que de trimer sang et eau pour leurs vieux (on les comprend). Ils commencent par engager un pisteur pour remonter la trace des disparus… auquel il arrive un regrettable accident, ter. Un peu plus tard, Thyssen mène une vendetta contre le vieux prêtre de Sigmar Hackl, proche de convaincre le conseil municipal de mettre des Répurgateurs sur le coup. Bien que le combat reste longtemps indécis entre le vieillard chétif et l’avorton boiteux (un match d’une violence insoutenable, retransmis à travers les Royaumes du Chaos), Thyssen finit par avoir raison du sigmarite, et met en scène son cadavre pour que, vous l’avez deviné, cela ait l’air d’un regrettable accident. Je ne sais pas si le concept de l’assurance-vie existait dans l’Empire avant la Fin des Temps, mais si c’est le cas, l’activité devait être implantée dans le Stirland.

C’est le moment que choisissent Ditmarr et sa gueule de porte-bonheur pour arriver à Marburg. Toujours sur la piste de sa Némésis poilue, le Garde de Morr disgracié (il s’est fait virer par l’ordre pour abandon de poste) n’est pas contre donner un coup de la seule main qu’il lui reste aux bouseux du coin dans leur problème de fugues infantiles. De son côté, Thyssen considère la venue fortuite de son persécuteur comme un nouveau cadeau des Dieux Noirs, et envoie donc l’un de ses enfants perdus attirer le Templier jusqu’à son QG, pendant qu’il réfléchit à la mise en scène d’un nouvel accident regrettable. Cependant, le messager en culottes courtes sous-estime la méfiance du Garde Noir, qui comprend rapidement que quelque chose ne tourne pas rond dans l’histoire qu’on lui sert, et ne se rend pas seul sur les lieux, comme il aurait dû le faire. En effet, il ordonne aux placides Marburgeois de mettre le feu au moulin au moindre bruit suspect, et, bien qu’ils aient conscience que la plupart de leurs rejetons soient présents dans l’édifice, ils suivent à la lettre les consignes de Ditmarr après que ce dernier se soit fait submerger par ses petits adversaires. Encore une arnaque à l’assurance, ça.

Dans le chaos qui s’ensuit, le Templier ne parvient qu’à crever un œil à Thyssen avant que ce dernier ne prenne à nouveau la poudre d’escampette, laissant ses cultistes puérils faire le coup de feu. L’un d’eux se fait d’ailleurs brièvement posséder par un Buveur de Sang (c’est les hormones) alors qu’il était sur le point de sacrifier Ditmarr pour la plus grande gloire de Khorne, et bastonne le Garde Noir comme plâtre pendant les trente secondes que durent son feat. Bien que le coriace chevalier parvienne à se sortir du brasier après cette tannée surprise, il décède de ses blessures le lendemain, après que les villageois lui aient fait croire que le corps de Thyssen avait été retrouvé dans les décombres du moulin…

Début spoiler…Alors qu’en fait, le Sorcier de poche était déjà loin de Marburg, mais pas dans une situation idéale. La nouvelle se termine en effet sur sa rencontre avec une bande de Gors qui semblent plus emballés par une dégustation de saucisson que par l’accueil d’un nouveau mutant. On ne peut pas leur en vouloir cela dit : le Pumbagor ne faisait pas encore partie du bestiaire des Bêtes du Chaos au moment où cette nouvelle a été écrite…Fin spoiler

AVIS :

Si on ne compte plus les nouvelles de GW-Fiction où des guerriers surhumains s’affrontent pour faire triompher leurs idéaux, celles mettant en scène leurs exacts opposés sont en revanche beaucoup plus rares. On peut donc remercier C. L. Werner d’avoir livré sa version de ‘Sa Majesté des Mouches1 pour Warhammer Fantasy Battle avec ce ‘The Little Ones’, sorte de huis-clos psychologique où le potentiel malaisant d’une bande d’enfants manipulés par un être maléfique est exploité de bien belle façon. Je mets aussi au crédit de l’auteur un séquençage impeccable du récit, qui alterne entre Thyssen, ses petits protégés, et Ditmarr, ainsi que les contes de Sigmar et des Quatre Princes, sorte d’histoire dans l’histoire qui aurait mérité d’être racontée dans une nouvelle séparée. Seul petit bémol : une conclusion un peu bâclée, qui ne donne pas d’indication sur le sort des enfants de Marburg (si Ditmarr a réussi à s’échapper du moulin après avoir boxé deux rounds contre un Sanguinaire, la marmaille chaotique a de bonnes chances de s’en être tirée) et laisse le destin de Thyssen en suspens. On reste cependant en présence d’une très bonne soumission de la part de Werner, dont l’originalité se doit d’être reconnue.

1 : Une comparaison d’autant plus apte que le grand méchant de l’histoire a/est dans les deux cas une tête de cochon.

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Three Knights – G. McNeill :

INTRIGUE :

WFB_Three KnightsLes trois frères Massone, Luc, Fontaine (?) et Belmonde (!?!), ont entrepris une quête d’aucuns considèreraient comme ambitieuse, pour le dire poliment : purger à eux seuls les ruines du Fort du Sang, autrefois bastion des tristement célèbres Vampires Dragons de Sang, et soigneusement évité par tous les voyageurs sains d’esprit depuis sa destruction il y a des décennies. Cette idée chevaleresquement stupide est celle de l’aîné du trio, Luc, qui s’est taillé une réputation de bretteur sans égal d’un bout à l’autre du Vieux Monde. Ses cadets (et par vertu de leur noms débiles, side kicks) ont accepté de lui prêter main forte dans son entreprise hardie, bien que ne disposant pas d’un pedigree aussi ronflant que Lulu. D’ailleurs, Belmonde n’est même pas encore un véritable chevalier du Royaume, ce qui vous situe le niveau moyen de la fine équipe.

Après avoir fait leur arrêt réglementaire dans le village bretonnien puant et boueux (Gugarde) situé sur la route du Fort, et avoir tout aussi réglementairement refusé d’écouter les sages conseils du vétéran couturé qui picolait à la taverne locale, et avait pu en son jeune temps se rendre compte par lui-même qu’un Vampire n’était pas un adversaire à prendre à la légère1, les frangins repartent le lendemain avec un guide en direction de la forteresse maudite. Les choses sérieuses et mortelles commencent réellement à la tombée de la nuit, lorsque les quatre montagnards amateurs se font attaquer par une meute de loups funestes, qui croquent prestement le guide et la mule de bât de l’équipe. Une nuit passée à prélever de la biodiversité pourrissante, et une journée à peiner dans la neige et le froid plus tard, c’est enfin le Fort du Sang qui se présente devant nos héros, qui entrent prestement se mettre au sec et se remettre de leurs émotions.

Guidés par Luc jusqu’à la salle des festins de la bâtisse abandonnée, les frères Massone se font cueillir comme des bleus par une vague de squelettes s’étant animés à la nuit tombée, et qui voient d’une mauvaise orbite trois punks à cheval venir squatter chez leurs ex-patrons. La quantité venant toujours à bout de la qualité, les chevaliers se font acculer dans un coin de la salle, et Fontaine finit embroché comme un döner kebab, au grand désarroi de ses frérots. Luc prend alors sa grosse voix et exige à parler au(x) directeur(s)… ce qui fait battre en retraite les squelettes et arriver un trio de Dragons de Sang, plus intrigués par la déclaration du paladin qu’il a réussi à tuer l’un des leurs qu’animés de chrétiennes (et pour cause, c’est pas le bon univers) intentions envers leurs hôtes du soir…

Début spoiler 1…Ayant prouvé ses dires en solotant une des brutes qui lui avait mal parlé, Luc abat ensuite ses cartes en décapitant en traître Belmonde, afin de prouver aux Dragons de Sang qu’il possède à la fois le talent martial et la fibre morale, ou plutôt son absence, nécessaires pour rejoindre leur ordre. En effet, le chevalier désire bénéficier de la vie éternelle dont disposent les Vampires, et ses grands discours de purge du Fort du Sang n’étaient en fait qu’une ruse pour attirer ses idéalistes de frangins jusqu’au repaire des fils de Harkon. Interloqué par cette demande excentrique, le Kastellan finit par s’exécuter et s’approche de Luc pour lui donner le baiser de sang…

Début spoiler 2…Ou plutôt lui cracher dans la jugulaire, car on se rend compte lors de l’attaque punitive sur Gugarde qui termine la nouvelle que le fier et brave chevalier s’est reconverti, contre sa volonté sans doute, en nécrophage ahuri. Pas le plan de carrière auquel Luc aspirait, mais une salutaire, si définitive, leçon de modestie inculquée à ce dernier par les très select Dragons de Sang. Après tout, le Roy dit nous voulons…Fin spoiler

1 : En bonus, Fontaine et Belmonde participent à la soirée open mic’ en reprenant leurs rôles de plus mauvais duo d’acteurs du Monde qui Fut.

AVIS :

Nouvelle très solide de la part de Graham McNeill, ‘Three Knights’ offre un concentré de grimdark à la sauce WFB à son lecteur à travers les péripéties plus ou moins chevaleresques de ses héros. En plus de mettre en perspective la proverbiale droiture des paladins de Bretonnie, qui tient finalement assez souvent de la légende urbaine rurale, cette nouvelle dispose d’une intrigue bien pensée et mise en place (une deuxième lecture de ‘Three Knights’ permet de repérer les jalons laissés par McNeill au cours des premières pages pour préparer sa conclusion), ainsi que d’une chute impeccable en termes d’exécution. Peut-être le meilleur court format de cet auteur pour Warhammer Fantasy Battle.

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The Road to Damnation – B. Craig :

INTRIGUE :

The Road to DamnationQu’est-ce qui peut pousser un noble estalien (Luis Quintal) et un pirate arabien (Memet Ashraf) à collaborer au lieu de se tailler des croupières, dans la plus pure tradition de leurs nations respectives ? Dans le monde hostile et cruel de Warhammer, où les gens civilisés sont rares, la réponse est : bien des choses. Dans le cas présent, il s’avère que nos deux comparses se sont retrouvés échoués dans les Badlands après que leurs navires aient fait naufrage. Cette région du Vieux Monde étant largement plus connue pour ses innombrables dangers que pour ses petits ports de pêche bucoliques, Quintal et Ashraf ont eu tôt fait de mettre leur bisbille de côté pour maximiser leurs chances de survie. Un choix d’autant plus sensé lorsqu’on est poursuivi par une bande de maraudeurs Orques & Gobelins, comme c’est le cas pour nos deux héros.

Bien qu’étant capables de se défendre (Ashraf à l’arc et Quintal au sabre), leur désavantage numérique et l’épuisement de leurs montures ne les incite pas à l’optimisme. Les compadres se sont en effet enfoncés profondément dans les terres sauvages, à la recherche de la mystérieuse cité antique que le cousin de Quintal avait découvert lors d’une précédente expédition, et qui regorgeait selon lui de gemmes et de trésors. Ce périple les a amenés aux portes du désert nehekharien, dont la chaleur et le sable ont prélevé un lourd tribut sur leurs montures. Sans accès rapide à une source, le fataliste Ashraf considère que les chevaux ne passeront pas la journée (alors qu’un sanglier orque peut cavaler des jours sans boire, encore une preuve de la supériorité de la gent porcine), ce qui condamnera les humains à une mort lente des mains des peaux vertes. La chance des aventuriers semble toutefois tourner lorsqu’ils trouvent une ancienne route, puis repèrent un vol de vautours tournoyant au-dessus d’un sanglier en détresse. Cela n’inspire rien d’autre à Quintal qu’une envie de saucisson, mais son compagnon a tôt fait de comprendre que l’animal avait localisé une source d’eau grâce à son flair, mais n’a pas pu y accéder pour la bonne et simple raison qu’il s’agissait d’un puits couvert. Cette découverte fortuite requinque nos héros, qui feront cependant trajectoire à part pour la suite de la nouvelle, la corde utilisée pour descendre Quintal dans le puits afin de remplir leurs gourdes cédant brutalement, faisant choir l’Estalien dans une rivière souterraine qui l’emporte aussitôt en aval. Envoyer le gars qui s’appelle littéralement « 100 kilos » faire de la varappe n’était peut-être pas le meilleur plan qui soit…

Cette séance de de canyoning improvisée n’est toutefois pas fatale à Quintal, qui finit par arriver dans un bassin donnant sur les niveaux inférieurs d’une sorte de temple. Après quelques heures à errer dans les ténèbres à la recherche d’une sortie, il finit par arriver dans une grande salle où plusieurs arbres centenaires ont poussé, et dont les branches lui permettront de rejoindre les ouvertures ménagées en hauteur, et donnant sur l’extérieur. Il repère aussi un peu de loot à récupérer au passage, à savoir un sceptre rehaussé de pierres précieuses dans la main d’une grande statue dominant ce qui se trouve être un autel sacrificiel, et présentant la particularité d’être moitié homme et moitié femme (#NousSachons). Se croyant tiré d’affaire, il s’autorise donc un petit somme réparateur pour recharger ses batteries… et ne tarde pas à s’en mordre les doigts lorsqu’il est surpris à son réveil par l’arrivée des peaux-vertes dans le temple. Bien que disposant d’une longueur d’avance, ses poursuivants devant élargir les ouvertures à moitié effondrées pour accéder au bâtiment, son isolation et son absence d’arme (il avait confié son sabre à Ashraf avant de partir en spéléo) semblent le condamner à court terme. S’étant réfugié dans les niveaux inférieurs du temple pour tenter de mettre le plus de distance entre ses bullies et lui, il a la surprise d’entendre une voix résonner dans sa tête et lui proposer un marché : son âme contre un bundle de cadeaux fantastiques, dont une vision infrarouge et un service de protection assuré par une vingtaine d’Ushabtis. A court d’options, Quintal accepte (sans même savoir ce qu’est un Ushabti, il y aurait pu avoir entourloupe si la voix avait été celle d’un Démon de Zuvassin), et constate grâce à sa nouvelle acuité visuelle que ce qu’il avait considéré comme étant de simples statues de crocodiles se mettent effectivement à bouger, et à poursuivre les Gobelins envoyés en éclaireurs dans le temple par leurs gros copains verts.

De son côté, Ashraf s’est aventuré dans la cité déserte après avoir abreuvé les chevaux, jugeant probable que son compagnon ait été emporté dans cette direction par le courant. Il assiste aux travaux d’excavation sauvage menés par les peaux vertes pour accéder au temple, sans se douter d’abord des raisons de leur enthousiasme pour cette ruine, et se glisse à l’intérieur du bâtiment à leur suite pour tenter d’en éliminer le plus possible tant que la bande n’est pas au complet. Juché sur un des arbres du temple, il assiste aux premières loges à un match de catch par équipe des plus originaux, les Orques et Gobelins faisant face à des Ushabtis visiblement plus intéressés par faire de gros câlins à leurs adversaires qu’à les réduire en morceaux. Hésitant sur la conduite à suivre et en faveur de qui intervenir, Ashraf se retrouve lui aussi désarmé après que des serpents venimeux aient décidé de s’installer sur son arc et ses flèches, forçant l’Arabien à les laisser tomber pour éviter une morsure. Il assiste ensuite à l’arrivée d’un Quintal visiblement pas dans son état normal, et dont l’entrée en jeu permet à la team Crocos de remporter le match sans coup férir (#ImpactPlayer).

La cérémonie de sacrifice des peaux vertes à laquelle Quintal se livre ensuite (en même temps qu’à un monologue digne du méchant de série B qu’il est devenu) est interrompue par l’incendie déclenché par Ashraf dans les branches de l’arbre où il s’était réfugié, manière pour lui de détourner l’attention de son ex-collègue et de ses gardes du corps sauriens, le temps qu’il puisse se glisser dans les niveaux inférieurs du temple, où il pense avoir de meilleures chances de survie. Cette stratégie fonctionne, mais Quintal prend l’interruption de séance et la combustion de ses Ushabtis (très inflammables) avec un recul digne d’un paresseux sous tranquillisants, et se contente de ramasser le sceptre que tenait l’idole – définitivement Slaaneshi – du temple lorsque la chaleur du brasier la fait tomber en morceaux, avant de suivre Ashraf.

La réunion entre les deux partenaires, si elle s’engage de manière très courtoise, menace de dégénérer à tout moment, Ashraf étant à ce stade convaincu que son camarade est devenu le serviteur d’une puissance néfaste. Lorsque Quintal lui propose de renouveler leur collaboration, et de le suivre sur la route de la damnation, l’Arabien pèse soigneusement ses options…

Début spoiler…Et décide finalement d’accepter. Après tout, et comme il le reconnaît lui-même sans honte, il n’est pas un enfant de chœur, et ses chances de se sortir du guêpier dans lequel il s’est mis sans l’assistance de Quintal et de ses nouveaux pouvoirs sont infinitésimales, pour le dire poliment. C’est ainsi qu’une nouvelle grande puissance (régionale) fit son apparition sur la mappemonde géopolitique du Vieux Monde : les Rois des Tombes du Chaos. Que voilà un exemple d’assimilation réussie !Fin spoiler   

AVIS :

Brian Craig s’est toujours tenu à part des autres auteurs de la Black Library, même à l’époque où ce contingent était si réduit qu’il en formait une bonne partie à lui seul. Son approche personnelle de la fantasy était en effet bien trop classique et, osons le terme, intellectuelle, pour une GW-Fiction plutôt portée sur l’action et l’aventure (une inclinaison normale pour la division littéraire d’un jeu de batailles fantastiques, il faut le reconnaître). ‘The Road to Damnation’, une de ses dernières nouvelles publiées pour le compte de cette franchise, peut être considérée comme sa soumission la plus alignée avec le BL-style que les éditeurs vétérans Marc Gascoigne et Christian Dunn établirent dans les premières années d’existence de la Black Library1. Mais si son intrigue ne détonne pas avec celles des travaux de ses camarades d’écurie, ‘The Road to Damnation’ porte très clairement la patte de Craig, tant sur le fond que sur la forme.

Le récit des mésaventures de Quintal et Ashraf se fait en effet à un rythme relativement posé, loin de la frénésie d’action que l’on associe avec les courts formats de la BL (un sentiment renforcé par la tendance de Craig à intégrer à sa narration les réflexions de ses personnages), et reste particulièrement prosaïque et « à hauteur d’homme » pour une nouvelle se déroulant dans le monde Warhammer Fantasy Battle, un univers défini en grande partie par l’action de forces divines et surnaturelles, auxquelles les mortels ne peuvent en général pas se soustraire. Cela se percevait dans d’autres travaux de Brian Craig (‘Who Mourns a Necromancer ?’, ‘The Winter Wind’), mais l’auteur vétéran pousse ici le paradoxe encore plus loin, puisque cette novella met en scène une authentique corruption chaotique, immédiatement identifiée comme telle par Quintal et Ashraf (ce qui fait une grosse différence par rapport au sort des héros de ‘A Gardener in Parravon’ et ‘The Light of Transfiguration’, qui tombent – parfois littéralement – dans le Chaos sans s’en rendre compte), mais qui semble être sous sa plume devenir un processus presque banal, et non un événement traumatisant. Pour un contributeur moins talentueux que Craig, cette approche aurait fini en hors sujet total, mais la pilule passe ici très bien, dès lors que le lecteur s’acclimate aux particularités narratives et stylistiques de l’auteur. On en est quitte pour cinquante pages d’exploration d’un temple antique dédié à une divinité maléfique, à la manière d’une aventure de Conan le Cimmérien ou de Solomon Kane, et il serait dommage de bouder son plaisir.

Le seul bémol que je mettrai à ‘The Road to Damnation’ est relative au background. Alors que Craig avait toujours montré des bonnes dispositions à respecter le lore de Warhammer Fantasy Battle, il nous sert ici un crossover très (trop) ambitieux entre le fluff des Rois des Tombes et celui des serviteurs du Chaos, et dont on dira pudiquement qu’il n’a pas fait école. Ironiquement, lorsque la BL lèvera le voile sur les origines de Nagash, bien des années plus tard, l’hypothèse d’un culte de Slaanesh clandestin à Nehekhara se fera moins farfelue2. Cela ne gène pas le plaisir de lecture, mais invite à considérer les informations fluffiques relayées dans la nouvelle avec des pincettes. Un petit prix à payer pour profiter de la Craig’s touch

1 : ‘The Road to Damnation’ a été publiée dans le recueil ‘Way of the Dead’ (ça en fait des noms de rues sympathiques !), en 2003.
2 : Nagash apprenant la magie noire d’une cabale d’Elfes Noirs menée par une Sorcière, peut-être familière avec les croyances de Morathi…

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Mark of the Beast – J. Green :

INTRIGUE :

Mark of the BeastSoldat de carrière dans l’armée du Tzar de Kislev, Torben Badenov a gravi les échelons jusqu’à devenir le commandant d’une unité d’éclaireurs montés (15 exactement, et tous présentés par Green dès la première page de la nouvelle1). Pour son grand malheur, il sert sous le Capitaine Arman Yasharov, un noble kislevite aussi incompétent que méprisant, et bien décidé à faire tout ce qui est en son pouvoir pour revenir le plus tôt possible vidanger le samovar de la Reine des Glaces (en tout bien tout honneur, bien sûr). La bande d’Hommes Bêtes que son armée poursuit, et qui signe ses méfaits en apposant la titulaire « marque de la bête » dans les décombres des villages qu’elle a rasée2, bénéficie donc d’un avantage certain sur ses adversaires humains, et le pauvre Badenov en est réduit à limiter les dégâts causés par le leadership exécrable de son officier.

Envoyés par Yasharov pister la trace de la harde, qui semble avoir fait des prisonniers lors de sa dernière attaque, comme le faible nombre de cadavres trouvés dans les ruines du hameau où la nouvelle débute le laisse à penser, Badenov et ses scouts se font surprendre en rase taïga par une bande d’Ungors dépêchés par le Seigneur des Bêtes Gashrakk Blackhoof pour faire le service d’ordre à proximité de son campement. Gashrakk est en effet un visionnaire, dont le grand dessein est de réveiller le Seigneur du Dawa (Lord of Misrule en V.O.), une déité 100% chaotique que les légendes des Bêtes du Chaos font reposer en dessous de la pierre des hardes de la tribu de la Corne Noire. Pour permettre au Dawaster de sortir de son trou et de régner à nouveau sur son « royaume de confusion » (sicoù on n’écoute que du Genesis à fond les ballons, j’imagine), le big G. a un plan : sacrifier un nombre suffisant de prisonniers au Chaos, en mettant le feu à une effigie géante d’Homme Bête construit avec des cages en bois. Et moi qui pensait qu’ils ne savaient rien faire de leurs dix (?) doigts (?), me voilà corrigé. L’approche peu subtile de Yasharov ayant alerté le chamane Cathbad, Gashrakk sait que son projet X risque d’être interrompu par des Kislevites en maraude, et a donc envoyé quelques bandes désœuvrées contrecarrer la manœuvre. Il a aussi envoyé une doublette de chars à sangleboucs, malheureusement pour les cavaliers légers de Badenov, qui sont contraints à se replier en désordre après l’intervention des panzers adverses, abandonnant quelques morts et blessés sur le champ de bataille.

De retour au campement kislévite, Badenov réussit à obtenir de son Capitaine l’autorisation de lancer une mission d’infiltration de la base adverse (repérée par d’autres scouts, plus doués, eux) pour tenter de libérer ses camarades prisonniers, et peut-être secourir quelques civils au passage. Yasharov n’est absolument pas convaincu par la menace posée par un rituel sacrificiel qu’il s’agirait d’empêcher avant que l’attaque de son armée ne débute, mais il laisse tout de même à son sous-fifre jusqu’à la tombée de la nuit pour mettre à exécution son plan, après quoi il donnera l’assaut. Réduits à mi-effectifs à ce stade de la nouvelle, les Badenov’s Baddies profitent d’un coup de pouce de la part du script pour progresser vers leur objectif : le campement des Hommes Bêtes a été établi sur un ancien oppidum ungol, et compte bien entendu un souterrain secret reliant le centre de la place forte à l’extérieur. Haaa. Et nos héros trouvent bien sûr ce souterrain secret en l’espace de trois minutes. Hooo. Leur chance tourne cependant lorsqu’ils découvrent que les Gors ont décidé d’installer leurs latrines à l’endroit où le tunnel émerge dans leur campement. Un petit prix à payer pour speed runner cette quête, cependant.

De son côté, Gashrakk ne s’est pas tourné les sabots et a entamé le rite de réveil démoniaque/feu de joie païen avec Cathbad. L’arrivée imminente de l’armée kislevite, que sa bande d’Ungors n’a manifestement pas arrêtée (comme c’est bizarre) force toutefois le Seigneur des Hardes à accélérer le protocole, et à balancer une torche sur son bonhomme (bête) carnaval avant que le chamane n’ait pu terminer de réciter « je te tiens par la barbichette » 666 fois de suite. C’est le moment que choisissent Badenov et ses hommes pour lancer leur attaque sur les mutants, confiants dans le fait qu’il ne leur faudra tenir que quelques minutes avant que le reste de leurs forces n’arrivent en renfort, pas vrai ? PAS VRAI ? En cela, ils ont sous-estimé le jemenfoutisme de Yasharov, qui se contente d’envoyer quelques cavaliers barricader les portes du campement (?) pour empêcher les Hommes Bêtes de sortir. Car apparemment, ces derniers savent construire des statues en bois de 10 mètres de haut, mais le concept de distance de sécurité par rapport à un foyer de combustion leur est inconnu. La magie du scénario…

Toujours est-il que cette défection de dernière minute ne fait pas les affaires de nos héros. Si Cathbad se fait assez facilement soloter par Arnwolf le Norse, Badenov n’a pas la partie facile contre Gashrakk. Finalement, un anneau nasal trop solidement fixé, un crochet attaché à une chaîne elle-même fixée à la pierre des hardes, et surtout un positionnement malheureux du Seigneur des Blettes vis-à-vis de l’angle de chute de son effigie enflammée, auront raison du pauvre Blackhoof. C’est ce qu’on appelle un bûcher des vanités, vraiment. S’il ne réussit pas à réveiller le Dawaster et perd toute sa tribu en même temps que sa vie dans cette folle soirée (les Hommes Bêtes le sont vraiment, faut croire), il peut au moins se réconforter en songeant que tous les villageois capturés ont également fini en marshmallow (donc je ne comprends pas pourquoi son plan n’a pas marché… à moins que les invocations de Cathbad soient vraiment capitales), ainsi que la plupart des hommes de Badenov. En comptant l’évasion miraculeuse d’Oran et de Manfred, qui avaient été faits prisonniers par les Ungors, nos héros ne sont plus que six, et c’est assez naturellement qu’ils décident de déserter pour devenir des mercenaires, loin de l’incompétente brutalité des officiers placés là par leur famille. D’ailleurs, à ce propos…

Début spoiler…Il n’est jamais trop tard pour se venger de mauvais traitements, surtout quand on n’a plus rien à perdre. Badenov et Oran rendent donc visite à Yasharov au cœur de la nuit, et procèdent à un échange du meilleur goût : ils laissent la tête calcinée de Gashrakk dans le lit de l’aristocrate, Le Parrain-style, et vont planter la sienne sur une pique à l’extérieur du camp kislévite, avant de partir voir ailleurs s’ils y sont. On connaît la suite…Fin spoiler

1 : Et si vous pensez que je n’ai pas la patience ou la mesquinerie nécessaire pour relayer l’information, vous devez être nouveau ici : Torben Badenov, Oran Scarfen, Vladimir Grozny, Alexi, Arkady et Andrei Tolyev, Manfred, Oleg Chenkov, Arnwolf, Zabrov, Mikhail Polenko, Yuri Gorsk Kiryl, Evgenii, Cheslav, Stefan. Il n’en resteraque six  à la fin, ne vous attachez pas trop.
2 : Parfois en utilisant des matériaux… plus biodégradables que d’autres.

AVIS :

S’il ne s’agit pas de la première nouvelle écrite par Jonathan Green pour sa bande de mercenaires préférés, ‘Mark of the Beast’ peut au moins se prévaloir d’être le premier épisode de la série qui donnera au final le recueil ‘The Dead and the Damned’. Le résultat n’est pas aussi navrant qu’il a pu être dans d’autres péripéties badenoviennes, la haute teneur en action (bas du front) injectée par Green dans cette aventure l’empêchant de trop s’empêtrer dans son scénario, même si ce dernier apparaît tout de même très fragile dès lors qu’on a le malheur de s’intéresser un peu trop à lui. Si le héros s’appelle Badenov, l’auteur a pour sa part bien mérité le nom de Good Enough… De la cheap fantasy très peu intéressante, à moins que vous ne cherchiez à voir ce que le BL style a produit de plus suranné.

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Jahama’s Lesson – M. Farrer :

INTRIGUE :

Jahama's LessonLe Seigneur Khreos Maledict a quitté sa cité de Karond Kar avec armes et bagages pour mener un raid sur les côtes bretonniennes. Pillard invétéré, il a laissé la fougue de sa jeunesse derrière lui et cherche désormais à remporter ses campagnes en évitant de passer par la case « bataille rangée ». C’est à cette fin qu’il a recruté la Matriarche Miharan Diamo, et surtout son protégé, l’assassin Jahama, pour mener une opération de diversion au cœur du château du Duc d’Argent, dont l’armée pourrait s’opposer à celle des Elfes Noirs. Maledict a aussi embarqué son neveu (Khrait), officiellement pour le former au métier, mais d’abord et surtout pour pouvoir débiter d’interminables et pompeux monologues sur son génie stratégique. Nos quatre personnages débarquent en avance des troupes druchii pour accompagner Jahama jusqu’à l’endroit où sa mission d’infiltration doit commencer. Après avoir reçu la bénédiction de sa tutrice, le tueur prend la clé des champs et se dirige vers la forteresse ennemie.

Sur le chemin les ramenant vers l’Arche Noire que le Dynaste a affrétée pour sa virée shopping ultramarine, Khreos et Miharan échangent quelques piques au sujet des qualités de l’assassin. Le noble se fait un plaisir de révéler à la Matriarche que son élève va se retrouver confronté à une opposition exceptionnelle, le Duc d’Argent étant une force de la nature au tableau de chasse impressionnant, sans parler de son entourage de chevaliers endurcis et de fidèles hommes d’armes. Supprimer le commandant bretonnien ne sera donc pas une partie de plaisir pour Jahama, dont c’est pourtant la mission. Miharan ne se montre cependant pas très inquiète, et commence à raconter à l’oncle et au neveu la dernière épreuve à laquelle Jahama a dû se soumettre pour gagner ses galons d’assassin. Hellebron étant cette année-là d’une humeur particulièrement massacrante (on suppose qu’elle était en rade d’anti-rides), la mégère avait défié les impétrants de pénétrer dans son manoir bourré de pièges, et de prendre à son assassin personnel, le redouté (autant qu’inconnu, mais c’est plutôt flatteur dans ce métier) Hakoer, son collier d’argent serti d’un rubis. Comme ledit Hakoer avait hérité de l’Epée de Mort de son employeuse le temps de l’épreuve pour en relever encore un peu la difficulté, les bookmakers de Har Ganeth avaient mis une côte stratosphérique sur la promotion Kermit1. Le trio remonte à bord et se sépare pour se préparer à l’assaut contre les humains avant que la Matriarche ait pu finir son histoire, laissant Khreos et Khrait dubitatifs sur la véracité de son récit.

De son côté, Jahama ne traîne pas en besogne, et parvient à se glisser à l’intérieur du château d’Argent alors qu’un banquet célébrant une campagne victorieuse contre une harde d’Hommes Bêtes en maraude bat son plein. Mais eu lieu de se rendre dans la chambre du Duc pour se cacher dans un placard pour le surprendre en pyjama, l’assassin préfère foutre un bordel monstre dans les festivités bretonniennes, et de façon tout à fait visible qui plus est. Après avoir suriné/fléchetté/garrotté/savaté une dizaine de convives et de serviteurs, l’alerte générale est donnée et le Druchii meurtrier se retrouve confronté à une horde d’adversaires compensant leur manque d’armure et leur alcoolémie élevée par les vertus du juste courroux et de la motivation implacable. Malgré ses talents de combattant et d’acrobate, Jahama finit par se retrouver en mauvaise posture, et le Duc d’Argent en personne se fraie un chemin jusqu’à lui pour le défier en duel, dans la plus pure tradition locale. Peu intéressé par la proposition, l’Elfe Noir se contente d’envoyer sa dernière dague de jet dans la poitrine d’une Demoiselle qui avait commis l’erreur de traîner dans le coin, avant de littéralement tirer sa révérence et de s’enfuir du château, poursuivi par une meute d’humains vengeurs.

Retour du côté Druchii, où l’armée de Maledict progresse sans se presser vers la forteresse d’Argent. Khreos révèle en aparté à son neveu qu’il a mis Jahama sur une mission suicide, dont le but était de désorganiser les Bretonniens plutôt que de tuer leur Duc, et qu’il a pour projet d’arranger un regrettable accident pour Miharan avant que l’expédition ne se termine, afin qu’elle ne puisse pas lui tenir rigueur de la mort de son pupille. Ces confidences sont toutefois interrompues par une clameur qui retentit à l’horizon, alors que les Elfes Noirs sont encore en ordre dispersé…

Début spoiler…C’est l’armée du Duc d’Argent qui s’est portée à leur rencontre, et qui roule sur les pillards comme un 4×4 sur un crapaud (gothique). Dans la mêlée qui s’ensuit, Khreos est mortellement blessé par l’ennemi, et tente péniblement de ramper hors du champ de bataille pour rejoindre le littoral et l’Arche Noire qui y est amarrée. Sa lente progression est stoppée par Jahama, qui lui révèle qu’il a « malencontreusement » laissé tomber la carte sur laquelle l’itinéraire des Elfes Noirs était indiqué au moment où il quittait le château du Duc. C’est vraiment ballot, mes plus confuses dude ! Il s’agissait pour lui de donner une leçon à un noble arrogant, qui prétendait utiliser le culte de Khaine comme de vulgaires mercenaires, et d’inculquer le respect de cette ignoble institution au reste des puissants de Naggaroth. Avant qu’il ne soit abandonné par Jahama, qui après tout a un bateau à prendre, Khreos a le temps de remarquer que le responsable de sa chute porte un collier d’argent où brille un rubis…Fin spoiler

1 : Les classes d’Assassins Elfes Noirs sont baptisés en honneur des marionnettes du Muppets Show. Nul ne sait d’où vient cette tradition.

AVIS :

Pour sa seule incursion recensée dans le Vieux Monde, Matthew Farrer signe une petite fable grinçante illustrant parfaitement le caractère impitoyable et retors de la société elfe noire, un genre d’histoire dont on peut difficilement se lasser, dès lors que la qualité est au rendez-vous, ce qui est ici le cas. De plus, il prolonge le plaisir en mettant en scène avec un luxe de détails et une vraisemblance rarement atteints (à ma connaissance) dans la GW-Fiction deux pans incontournables du fluff des Druchii : piller les côtes du Vieux Monde d’une part, et assassiner leurs rivaux d’autre part. Si les Elfes Noirs sont votre faction de cœur, ‘Jahama’s Lesson’ est un must read absolu, et tant pis pour Khreos Maledict.

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A Good Thief – S. Jowett :

INTRIGUE :

A Good ThiefFrançois Villon est un poète (naaaaaan ???) à l’esprit vif et à la langue bien pendue, ce qui lui cause autant de problèmes que d’opportunités. Forcé à l’exil de sa Marienburg natale après que les vers qu’il a composés sur les activités extra-maritales de la femme de l’un des princes marchands de la cité soient parvenus aux oreilles du mari cocu, il a trouvé refuge dans la petite ville de Wallenholt, et est devenu le poète de cour du Graf local. Une occupation indigne de ses talents, qui sont de son avis de spécialiste, superlatifs, mais qui lui permet de vivoter tranquillement aux crochets de son mécène.

La situation de Villon se complique lorsque le Graf de Wallenholt reçoit la visite d’une délégation de notables impériaux, dans laquelle se trouve un parent de la Frau von Klacht, dont les frasques libertines ont été mises en vers (et contre tous) par notre poète. Reconnu par le visiteur, Villon est fissa envoyé à la case prison par son employeur, qui préfère logiquement se séparer de son flagorneur licencié plutôt que d’hériter d’une guerre commerciale avec l’un des marchands les plus influents du Vieux Monde. Par chance pour Villon, la petite soirée pendant laquelle son destin s’est joué s’est déroulée devant un autre témoin, d’opinion plus favorable envers le rimailleur de cour. Le Magister (puisqu’on ne le connaîtra pas sous d’autres noms) organise l’évasion de notre héros pendant son transfert vers Marienburg, et lui remet une mission très spéciale en échange de ce coup de pouce inespéré : il doit se rendre dans un village du Reikwald tombé sous la coupe du bandit Gerhard Kraus, et mettre la main sur un artefact magique que le même Kraus a acquis pour le compte du Magister, avant de décider de le garder pour lui. Tout cela est bien mystérieux.

A son arrivée à Krausberg, Villon ne perd pas de temps à s’encanailler avec les hommes du seigneur brigand, qui reste lui complètement reclus dans ses quartiers. Il lui faudra attendre une nuit de beuverie pendant laquelle son public lui demande de réciter pour la énième fois son ode épique sur Frau von Klacht pour que Kraus daigne faire son apparition, et défie Villon à un duel… de poésie. Original, n’est-ce pas ? Le brigand n’est cependant pas un adepte du free style, et se contente de réciter les strophes tirées d’un petit livre qu’il a amené avec lui, et dont la nature arcanique ne fait rapidement pas de doute à Villon, qui se fait happer par la déclamation de Kraus au même titre que le reste de l’assemblée. Il est évident que c’est l’objet que le Magister l’a envoyé reprendre au mercenaire indélicat, et Villon décide d’agir la nuit même, profitant du gros coup de mou subi par Kraus après la fin de sa prestation. L’art est épuisant, c’est vrai.

Voleur avant d’être poète, Villon n’a aucun mal à se glisser dans la chambre du bandit et à mettre la main sur le livre en question, dont l’influence néfaste n’est pas à sous-estimer. Ne pouvant corrompre directement notre héros (qui est analphabète, et c’est bien pour cela que le Magister l’a choisi en premier lieu) comme il l’a fait pour Kraus, le grimoire possède ce dernier et un combat féroce s’engage entre les deux chineurs d’antiquités pour la possession du grimoire. Villon finit par remporter le match et s’enfuit par la fenêtre avec son butin sous le bras, laissant Kraus éborgné et exposé comme fraude littéraire (une double sanction bien sévère, si vous voulez mon avis). Après un voyage vers Altdorf, où le Magister lui a donné rendez-vous, le poète remet le bouquin tant convoité à son commanditaire, qui le jette immédiatement dans le feu, OPA Gandalf-style. Contrairement à l’Anneau Unique, le parchemin est inflammable et l’ouvrage maudit (askip) finit en fumée. Voilà une nouvelle menace qui planait insidieusement sur l’Empire écartée pour de bon…

Début spoiler…Enfin presque. Villon a en effet jugé malin de donner au Magister un livre dérobé au hasard dans la bibliothèque municipale la plus proche, préférant trouver un riche gogo pour lui acheter le vrai grimoire un peu plus tard. A malin, malin et demi cependant : le Magister ne met pas longtemps à se rendre compte qu’il a été dupé, et se fait un plaisir de faire arrêter Villon pour lui apprendre à jouer des tours aux puissants de ce monde. Par chance pour notre poète-escroc, M a une nouvelle mission à lui confier, ce qui est toujours mieux que danser la gigue des pendus (en attendant d’en composer la ballade, bien sûr)…Fin spoiler

AVIS :

Simon Jowett prend son temps et déroule une histoire originale de poète-voleur missionné pour dérober un grimoire de sonnets à un seigneur bandit trop cultivé pour son propre bien (je vous défie de trouver une intrigue comparable dans tout le corpus de la GW-Fiction) dans ce ‘A Good Thief’, dont la moitié des pages est finalement consacrée à la présentation du héros. Jowett est suffisamment doué avec sa plume pour que le lecteur n’ait pas l’impression de se faire flouer dans la manœuvre, mais il ne reste pas moins que cette nouvelle ressemble plus à l’introduction d’un roman, qui n’aura au final pas été écrit1, qu’à une œuvre indépendante. Une sympathique curiosité.

1 : Un puissant et mystérieux commanditaire œuvrant en secret pour le bien de l’Empire recrute des agents doués de talents particuliers parmi le gibier de potence impérial ? Ça me dit vaguement quelque chose

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What Price Vengeance? – C. L. Werner :

INTRIGUE :

What Price VengeanceLa bande de mercenaires tiléens du Capitaine Ursio a connu de meilleurs jours : engagée par le rusé Vicomte Augustine de Chegney pour brigander en son nom sur les terres de ses voisins, elle a failli à sa mission et a en conséquence essuyé une attaque meurtrière de la part d’autres sbires de l’implacable Bretonien, peu enclin à laisser des témoins de sa vilénie ternir sa réputation. Il paraît que les chevaliers du Royaume sont h.o.n.o.r.a.b.l.e.s après tout. Malheureusement pour Gus, les reitres ont survécu, et sont maintenant assoiffés de vengeance. Profitant de la bonté de Claudan de Chegney (fils du premier), ils investissent donc la place forte que ce dernier occupe au nom de son père – et qu’il a dérobé à un autre voisin, impérial celui-ci – en prétextant chercher à s’abriter des terribles orages des Montagnes Grises… et passent tous les habitants du château par le fil de l’épée pour se passer les nerfs. Tous ? Pas tout à fait. À malin, malin à demi : Ursio repart donc se cacher dans la campagne avoisinante avec le jeune fils de feu Claudan et sa nourrice, et charge le gouverneur du noble trucidé d’aller porter sa demande de rançon à Augustine.

Bien que n’étant pas vraiment un enfant de chœur, comme on a pu le voir plus haut, le Vicomte est un family man, ne serait-ce que parce qu’il est trop bête d’agrandir le fief familial uniquement pour le voir disparaître à sa mort, faute d’héritiers. N’ayant plus que Claudan Junior (que nous appellerons Cloclo) de ce côté-là, il est prêt à dépenser sans compter pour retrouver l’usufruit de son petit-fils, mais est convaincu par son conseiller (Plaisant) de ne pas négocier avec des terroristes, et de recruter à la place un tueur professionnel pour aller récupérer le bébé à ses ravisseurs. Cela tombe bien, Plaisant a justement un nom à souffler à son patron : celui du redoutable Brunner, un impérial que l’on dit de noble ascendance (ça compte pour les Bretonniens), et n’ayant jamais failli à la tâche. Augustine envoie donc son sénéchal recruter le chasseur de primes… qui refuse de prendre la mission, malgré les 200 couronnes d’or sonnantes et trébuchantes que le bon Plaise lui fait miroiter. Enfin, il fait mine de refuser plutôt, le temps de laisser un Plaisant très colère repartir de la taverne dans laquelle le rendez-vous a pris place, et se faire embusquer quelques mètres plus loin par un groupe de truands de bas étage, qui n’ont pas pu résister à la grosse bourse (au singulier ça va) du sénéchal. Cette avidité leur sera fatale, Brunner sortant des ombres au moment fatidique pour leur régler leur compte avec une efficacité consumée, et empocher au passage les quelques pièces d’argent que la mort de ces soudards lui rapporteront. Y a pas de petits profits.

Un peu plus tard, nous retrouvons le taciturne mercenaire sur les terres du Vicomte, qu’il semble très bien connaître. Ayant joué le rôle de l’innocent (mais tout de même très bien armé) voyageur pour attirer trois des hommes d’Ursio à se montrer auprès de son feu de camp, il a tôt fait d’en envoyer deux chez Morio (le Morr tiléen), gardant le troisième en vie pour qu’il lui indique où se sont cachés ses petits camarades. Et si la tour de guet abandonnée que les kidnappeurs ont choisi comme repaire semblait être un endroit parfait pour surveiller les environs, on s’aperçoit bien vite que Brunner joue vraiment à domicile, puisqu’il pénètre dans le donjon au nez et à la barbe des sentinelles grâce à sa connaissance du passage secret reliant l’édifice à un tunnel à proximité. Cet avantage lui permet de neutraliser discrètement (au début) les hommes d’Ursio, laissant ce dernier seulement accompagné de ses deux derniers lieutenants, et de ce cher Cloclo (la nourrice ayant été étranglée par un mercenaire nerveux après que Brunner ait arrêté le mode silencieux, et commencé à castagner du sbire sans retenue), dans la salle principale de la tour.

Ce remake Battle de ‘Trois Hommes et un Couffin’ ne se termine pas aussi bien que l’œuvre originale pour le trio en question. Les compagnons d’Ursio tombent rapidement sous les balles et les lames du chasseur de primes, ce qui laisse leur Capitaine s’échapper en courant avec le bébé dans les bras… jusqu’à ce qu’il fasse la rencontre des chausse-trapes que Brunner a pris soin de semer en bas de l’escalier de la tour, ce qui ruine ses sneakers et l’envoie au tapis (et le pauvre Cloclo avec, encore un drame des bébés secoués). Lorsque le Tiléen voit sa Némésis apparaître sur le pallier, il tente de le convaincre de le ramener avec lui chez de Chegney, ce que Brunner accepte… partiellement. Comme il le révèle à sa victime, le Vicomte n’a en effet payé que pour sa tête, le reste de son anatomie peut donc rester sur place.

La nouvelle se termine avec un face à face entre Brunner et de Chegney, le premier annonçant à son employeur que, malheureusement, Cloclo n’a pas survécu à sa capture. Dévasté par la nouvelle, le noble accepte tout de même d’honorer sa part du contrat et remet à son chasseur de tête (qui n’est pas revenu les mains vides) la moitié restante de la somme convenue, avant de lui donner congé…

Début spoiler…Mais la scène « post-credit » (si je puis dire) révèle que Brunner a menti, et gardé le bébé avec lui. Ne pouvant l’élever seul, il le confie à un couple de marchands, auxquels il remet également la prime versée par de Chegney. On comprend quand il présente Cloclo comme étant également son petit-fils que le chasseur de primes était en fait le Graf Von Drakenburg dont de Chegney a usurpé le domaine, marié de force la fille à son fils, et vendu à des esclavagistes pour s’en débarrasser. Cela explique la connaissance approfondie des terres des Von Drakenburg dont Brunner dispose, et son peu d’empressement à rendre Cloclo à Gus. La garde partagée est un plat qui se mange froid.Fin spoiler

AVIS :

Après nous avoir fait don de Mathias Thulmann quelques infernaux numéros plus tôt, C. L. Werner remet le couvert avec ‘What Price Vengeance ?’, nouvelle introductive de l’un de ses personnages les plus marquants, le chasseur de primes Brunner. Le charme opère immédiatement dans cette histoire de prise d’otage (violente) et d’opération de libération (tout aussi violente), l’auteur parvenant à nous embarquer d’un tour de plume dans les bas-fonds du Vieux Monde en compagnie de brigands sanguinaires, de nobles cauteleux et de mercenaires impitoyables. L’intrigue est très solide, le déroulé plaisant à lire et idéalement dosé (Werner fait partie de ces bons écrivains qui savent prendre leur temps sans qu’on ait l’impression qu’ils meublent, qualité trop souvent absente des écrits de la Black Library à mon goût), la conclusion apporte sa petite révélation bien sentie et finement préparée par Werner au cours des pages précédentes, il y a du fluff et des one liners bien sentis… Que demande le peuple ?

Le seul petit défaut qu’on pourrait reprocher à cette masterclass med-fan est la tonne de descriptions vestimentaires dont Werner nous abreuve dès lors qu’un personnage important nous est introduit pour la première fois, une excentricité qu’on ne retrouve chez personne d’autre au sein de la BL à ma connaissance. A part ça, on a affaire à une nouvelle de très haute volée, tout comme l’anti-héros qu’elle nous présente.

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Et voilà qui termine cette revue de ‘Way of the Dead’, une anthologie qui a ma foi fort bien vieillie quand on la compare aux autres recueils de nouvelles de Warhammer Fantasy Battle, et même à ceux d’Age of Sigmar, à tel point que je le conseille comme point d’entrée dans cette franchise pour tous les lecteurs souhaitant découvrir le Monde qui Fut. La qualité est en effet largement au rendez-vous, et même l’histoire la plus faible du lot (désolé Jonathan Green) se révèle intéressante à lire d’un point de vue académique (le mot est lâché), puisqu’elle permet de déterminer le « plancher » qualitatif de la GW-Fiction moderne1. Par ailleurs, ‘Way of the Dead’ se paie également le luxe d’être assez diversifié pour un recueil de seulement neuf nouvelles, des soumissions assez classiques cohabitant avec le charme un peu suranné de Brian Craig ou le second degré presque assumé de Robin D. Laws. Enfin, il faut souligner que cet opus met en avant quelques un des héros majeurs de WFB, et qui plus est, au début de leurs aventures, ce qui achève de faire de ‘Way of the Dead’ le recueil introductif par excellence.

1 : Je garde les très vieux recueils de nouvelles, prédatant la Black Library (‘Ignorant Armies’, ‘Red Thirst’ et ‘Wolf Riders’, chroniqués , et si ça vous intéresse) à part. Si certaines de leurs histoires s’intègrent parfaitement dans le corpus classique de Warhammer Fantasy Battle, d’autres sont par contre tellement différentes de ce que nous considérons comme étant la norme de la GW-Fiction qu’il serait déloyal d’établir un comparatif.

INFERNO! – ANNEE 2

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue des nouvelles publiées dans les numéros #7 à #12 d’Inferno !, soit la seconde année de publication de cet auguste et vénérable bimensuel (Juillet 98 à Mai 99). Si l’on jette un œil sur les auteurs mis à contribution pour ces six numéros, on constate qu’Abnett le jeune caracole en tête des charts avec pas moins de quatre soumissions à son nom, en majorité consacrée à Warhammer Fantasy Battle. Il est suivi d’assez loin (2 nouvelles) par deux autres figures de la Black Library : l’inoxydable Gav Thorpe et l’immarcescible Bill King. Notons enfin l’arrivée pendant cette période de plusieurs plumes notables : Matthew Farrer (‘Badlands Skelter’s Downhive Monster Show’) et Ben Counter (‘Daemonblood’), Hall of Famers de la BL, et Barrington J. Bayley (‘Children of the Emperor’) comme invité de marque et caution SF de ce jeune magazine.

Inferno!_Année 2

Les 21 nouvelles regroupées ici présentent la GW-Fiction dans toute sa foisonnante diversité, explorant les recoins les plus reculés du Monde qui Fut et du 41ème millénaire (y compris Necromunda) avec une liberté et une inventivité qui laisseront progressivement la place à plus de contrôle de la part des maîtres du fluff de Nottingham. Que vous soyez à la recherche d’une romance avec un loup-garou (‘Wolf in the Fold’), ou de Space Marines se frottant à la réalité virtuelle (‘Hell in a Bottle’), il n’y a qu’ici que vous trouverez quelque chose tout ce qu’il y a de plus officiel à vous mettre sous la dent.

On trouve également dans cette anthologie de vrais classiques, qui peuvent se comparer favorablement avec des nouvelles écrites plus de vingt ans plus tard, comme ‘In the Belly of the Beast’ (King) ou ‘Acceptable Losses’ (Thorpe). C’est également en cette fin de millénaire que l’indispensable Zavant Konniger fit ses premiers pas et savantes déductions sous la plume de Gordon Rennie (‘The Affair of the Araby Exhibit’). Vous l’aurez compris, cette deuxième année infernale mérite le coup d’œil pour tous les amateurs de GW-Fiction, qu’ils soient nostalgiques de ce passé mythique ou pas. En selle pour un petit tour du propriétaire bibliothécaire.

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A Company of Wolves – D. Abnett [WFB] – #7 :

INTRIGUE :

WFB_A Company of WolvesUne compagnie de Chevaliers du Loup Blanc plongée en plein doute existentielle à la suite de la mort de leur commandant au cours d’un raid mal négocié dans la Drakwald quelques mois plus tôt retourne en forêt pour une session de teambuilding mâtinée de skullbashing. Les problèmes affligeant nos héros, que l’on ne peut pas qualifier de sans peur (le vétéran Gruber a le trouillomètre à zéro depuis le décès tragique de son supérieur et ami Jurgen) ni de sans reproche (dans le désordre : Morgenstern a un gros problème d’alcool, Anspach est un parieur pathologique, Vandam une tête brûlée carriériste, et le nouveau chef, Ganz, a moins de charisme que la tête de loup qui orne son armure) sont nombreux, mais le Grand Maître de l’ordre a bon espoir que l’air pur, la nature préservée et les hordes de mutants assoifées de sang qui hantent la Drakwald parviendront à guérir la compagnie rouge de son spleen persistant. Preuve de sa confiance dans ses hommes, il leur a même confié le précieux étendard de Vess1 pour cette virée forestière, ce qui relève un peu le moral des troupes.

Le plan de Ganz consistant à errer dans les bois jusqu’à tomber sur une bande de néfastes à massacrer au nom d’Ulric, notre petite bande baguenaude cavalièrement jusqu’à faire la rencontre de quelques Hommes-Bêtes venus se recueillir devant une idole païenne. L’escarmouche qui s’en suit, si elle ne dure pas longtemps et se termine par une victoire sans appel pour le camp impérial, révèle toutefois de façon criante les maux profonds qui affectent la compagnie. Gruber refuse ainsi de charger l’ennemi, prétextant la perte de fer de sa monture, Morgenstern est couché net par une branche basse qu’il n’a pas pu esquiver, Vandam fonce tête baissée à la poursuite des fuyards malgré les ordres de Ganz, et Von Glick, sommé de le faire revenir au bercail, se fait grièvement blesser par un Ungor embusqué sur le chemin du retour. Cette blessure force les templiers à monter le camp pour la nuit en plein cœur de la Drakwald, et à perdre un des leurs sous les flèches des Hommes-Bêtes (on peut saluer la prescience d’Abnett sur le sujet) pour couronner le tout.

Alors que la compagnie semble sur le point de se désagréger, tel le premier boys band venu après un second album décevant, l’inspiration finit par frapper les loulous, qui décident de tenter le tout pour le tout. Faisant mine de laisser derrière eux leurs morts, blessés et étendard sous faible garde, les chevaliers tournent bride vers Middenheim, espérant ainsi attirer le reste de la harde à découvert. Ce qui ne manque évidemment pas d’arriver. La vaillante action d’arrière-garde conduite par Aric, Gruber et Von Glick permet de retenir les mutants assez longtemps pour que la cavalerie arrive revienne, et annihile les cornus d’une dévastatrice charge de flanc d’école. Bonus appréciable : il s’agissait de la même bande de fieffés violeurs de poules responsables de la mort de Jurgen, qui se trouve donc vengé de façon satisfaisante. Au final, et malgré la mort au combat de Vandam (sans doute en plein grand écart facial) et de Von Glick, nos héros peuvent prendre le chemin du retour unis comme jamais et à nouveau pleinement opérationnels. Une vraie fin de loup(s), en somme.

: Car Vess de Loup (blanc), évidemment. Je ne vois pas d’autres explications satisfaisantes et n’accepterai pas de contestations.

AVIS :

Dans la foulée du lancement réussi de la série des Fantômes de Gaunt dans les pages d’Inferno!, Abnett se livre à un exercice similaire avec ce ‘A Company of Wolves’, introduisant au lecteur une confrérie de templiers du Loup Blanc, dont les exploits seront relatés dans une succession de nouvelles, puis compilées et conclues dans le roman ‘Hammers of Ulric’. Bien que cette péripétie inaugurale soit relatée avec l’aisance habituelle de la plume Alpha de la Black Library, j’ai trouvé le résultat final un peu moins réussi qu’à l’accoutumée. Parmi les raisons de ce (léger) coup de moins bien, j’identifie le nombre important de protagonistes et la « singularisation » moins aboutie de ces derniers (sauf pour Morgenstern, catalogué comic relief de façon outrageuse, ce qui est un autre défaut), une intrigue somme toute assez banale combinée à une mise en scène parfois complaisante1, ou encore la très nette sensation qu’Abnett avait déjà acté qu’il ferait vivre ses nouveaux héros sur plusieurs nouvelles, et a traité A Company… comme un chapitre introductif plutôt qu’un stand-alone (ce qui relève plus de la faute de goût que de la catastrophe industrielle, certes). Pour autant, on a tout de même droit à du Dan Abnett tout ce qu’il y a de plus solide, avec des personnages attachants dès lors qu’on arrive à les différencier les uns des autres, des scènes d’action prenantes où la mort frappe sans prévenir, et une exécution globalement propre. Rien de grave donc.

1 : La possibilité qu’un chevalier puisse se prendre une flèche dans le cou alors qu’il dort au milieu de ses frères d’armes, protégé par des sentinelles habituées des choses de la guerre, et n’être découvert qu’au petit matin, ne me semble pas des plus réalistes. À un autre niveau, le « tour de pâté de maisons » effectué par le gros des troupes (et je ne parle pas de Morgenstern) pour surprendre la harde d’Hommes-Bêtes… qui se trouve être la même que celle qui a tué Jurgen quelques mois plus tôt (#WIJH) est un expédient un peu trop facile à mon goût.  

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Children of the Emperor – B. J. Bayley [40K] – #7 :

INTRIGUE :

Ayant échappé de justesse à la destruction du vaisseau qui transportait son régiment jusqu’à sa nouvelle affectation, le Garde Impérial Floscan Hartoum n’a d’autre choix que de faire atterrir sa capsule de sauvetage à la surface d’une planète mystérieuse dans l’attente d’être secouru. Recueilli par une tribu d’abhumains (deux paires de jambes) dont la mutation a été volontairement déclenchée par leurs ancêtres colons afin de lutter contre la forte gravité de leur monde d’adoption, Hartoum verra son courage et sa vision de l’Imperium sérieusement testés au cours de son séjour chez les enfants perdus de l’Empereur.

AVIS :

Children of the Emperor est une petite gemme, et sa lecture est fortement conseillée à tous les esprits curieux familiers des publications de la Black Library. Cette nouvelle jette en effet un éclairage particulier et très dépaysant sur l’univers de Warhammer 40.000, en prenant toutefois garde de bien respecter le background qui existait à l’époque, attention aussi délicate que louable de la part d’un auteur aussi établi que Barrington J Bayley. L’un des charmes de Children of the Emperor est ainsi son absence d’aberrations fluffiques, preuve indubitable du sérieux travail de « documentation » effectué par Bayley avant la rédaction de ce texte1 (tous les contributeurs de la BL ne peuvent en dire autant, pas vrai Nik Vincent ?).

Mais les principales plus-values apportées par la plume experte de Bayley restent son style, affirmé, maîtrisé et très différent des canons de la BL (ce qui fait tout son intérêt), ainsi que son expérience d’écrivain de SF vétéran, qui lui permet d’attirer l’attention du lecteur sur des points jamais soulevés jusqu’ici par les autres auteurs de la maison (comme les variations de gravité d’une planète à l’autre, et les conséquences de ce changement sur un organisme humain normal) ; mais également d’amener son public à réfléchir sur des questions aussi centrales que celle de la tolérance envers la mutation (et donc du droit à la différence de manière plus large) au sein d’un Imperium dont la psychorigidité sur ce sujet – personnifiée par le personnage du Commissaire Leminkanen, zélote écumant et pas très futé – apparaît comme assez grotesque, eut égard à son histoire millénaire et au million de planètes qui le compose. Bref, on peut remercier Barrington J Bayley pour l’amical coup de pied dans la fourmilière qu’il a mis dans le background de Warhammer 40.000, qui n’était (et n’est toujours) pas au-dessus de tous reproches à l’époque, malgré le soin que lui a apporté Priestley et Cie au moment de son élaboration.

1 : Il va même jusqu’à faire mention d’éléments de background un peu avancés, tels que les fameux Schémas de Construction Standardisés. Chapeau l’artiste.

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The Chaos Beneath – M. Brendan [WFB] – #7 :

INTRIGUE :

WFB_The Chaos BeneathÀ la suite d’une cérémonie d’invocation quelque peu salopée par des cultistes amateurs, un Prince Démon de Tzeentch se retrouve coincé dans le corps d’un hôte mort. Assumant l’identité du cadavre qu’il habite, c’est-à-dire celle d’Obediah Cain, chasseur de sorcières un brin malchanceux, le démon convainc Michael de La Lune (si si), apprenti sorcier fraîchement renvoyé du Collège de Magie de Marienburg pour manque d’aptitudes à l’exercice des arts occultes, de lui rapporter une copie du 3ème Tome du Liber Nagash. Cette dernière repose en effet dans une bibliothèque du Collège, protégée par de puissants enchantements que le Prince Démon n’est pas en mesure de briser en son état actuel. Michael va-t-il s’apercevoir des noirs desseins poursuivis par son acolyte avant qu’il ne soit trop tard ?

AVIS :

Encore une déclinaison sur le thème de l’objet magique maléfique que le héros doit rapporter au méchant à son insu. The Chaos Beneath n’est donc pas la nouvelle la plus originale de la Black Library, ni la mieux écrite d’ailleurs : que peut-on donc avancer afin de justifier sa lecture ? Pour être tout à fait honnête, pas grand-chose si ce n’est le ton assez léger employé par Brendan, transformant du même coup le Prince Démon en méchant de cartoon plutôt qu’en implacable antagoniste. Ajoutez une pincée de fluff, et vous aurez fait le tour de tous les points forts de The Chaos Beneath. Ce qui ne fait pas lourd, je vous l’accorde.

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The Hollows of Hell – D. Abnett [40K] – #8 :

INTRIGUE :

The Hollows of HellNouvel épisode de La Croisade s’amuse et nouveau théâtre d’opérations pour Gaunt et ses Fantômes, qui participent à l’invasion du monde ruche de Caligula, en compagnie de millions d’autres Gardes Impériaux. Déployés par navettes à la surface de la planète depuis le transporteur Navarre, les Tanith doivent essuyer une DCA nourrie (ce qui était attendu), ainsi qu’une tempête psychique conjurée au pire moment par les assiégés (ce qui est plus surprenant). Résultat des courses : le transport de Gaunt, où se trouvaient également le Major Rawne, Bragg, Caffran et Milo (pour ne citer que les têtes d’affiche fantômatiques), dévie fortement de son cap, et s’écrase dans l’une des cuvettes parsemant la planète, qui se trouve être colonisée par une forêt tropicale. Protégés par leur invincibilité scénaristique, nos héros émergent crânement des décombres de l’appareil et se préparent au long trekk jusqu’aux lignes amies qui les attend, le crochet imprévu initié par le blow-out de leur Astropathe1 les ayant conduits trente miles au nord de leur cible, en plein territoire ennemi. Cette réalisation inspirera à Bragg cette phrase immortelle, qui constitue la meilleure citation de toute la série, point à la ligne. Pas de quoi perturber l’inflexible Commissaire cependant, qui entraîne les survivants dans une excursion verte vers une base isolée située à proximité du crash.

Cette avanie technique laisse Corbec seul en charge des Tanith ayant réussi à atterrir sans problèmes, et le Colonel se tire fort honnêtement de sa mission. Confrontés à une atmosphère oppressante et teintée de corruption psychique, les braves forestiers progressent du mieux qu’ils peuvent dans la jungle urbaine que constitue la banlieue de la ruche Nero, jusqu’à ce que leur rencontre avec un polyplacophore démoniaque, heureusement mis en fuite par une crise de nerfs de Larkin (qui sort de ses gonds après avoir vu des Furbies crucifiés par les cultistes – des poupées d’accord, mais des Furbies, c’est trop – ), ne force Corbec à faire une pause technique. Se sentant dépassée par la situation, notre barbouze barbue décide d’utiliser un de ses jokers pour progresser dans la partie, et passe donc un coup de fil à un ami, qui se trouve être officier sur le Navarre. Usant de ses influences, ce dernier parvient à mettre en application le plan de Maître Corbec : la macro cannonisation de la cité sensible où les Fantômes sont embourbés, opération peu régulière mais couronnée de succès, comme la fin brutale de la tempête psychique suite à l’arasement de la ZUS le démontre. Problem solved.

De son côté, Gaunt finit par arriver en vue de l’installation convoitée, défendue à son grand dam par quelques Serviteurs de combat un peu trop zélés. Ce regrettable malentendu sera toutefois rapidement réglé, sans qu’aucune perte ne soit à déplorer parmi les forces en présences disposant d’un cerveau intégral. À l’intérieur, le Commissaire a la surprise de découvrir une de ses vieilles connaissances, l’agent de renseignement Rael Tagore, qui, quand il n’essaie pas d’entre en contact avec les Elohim, enquête sur le réseau d’espions mis en place par le très paranoïaque Maccaroth depuis sa prise de fonctions. Soupçonnant beaucoup de choses mais sans l’ombre d’une preuve tangible (un point commun avec notre Raël), Tagore accepte toutefois de ramener ses hôtes sur le front grâce à la navette qu’il avait utilisée pour se mettre au vert peu avant le début de l’offensive impériale. La nouvelle se termine ainsi par une heureuse réunification régimentaire, et la conjuration par Gaunt et Tagore du bon vieux temps sur Estragon Prime. Ah, Estragon Prime. Il y aurait beaucoup à dire sur cette singulière planète, mais ceci est une autre histoire…

1 : Maladresse ou mauvaise appréciation fluffique de la part d’Abnett, la présence dudit Astropathe dans une navette de déploiement de troupes de la Garde Impériale laisse à penser que l’opération a mobilisé quelques centaines de milliers de psykers assermentés du côté impérial.

AVIS :

Pour la première fois depuis le début de sa série, Abnett marque le coup avec une soumission sensiblement inférieure à ce dont il nous avait habitués précédemment. En plus de se révéler d’un intérêt assez quelconque en termes d’intrigue, que soit côté cour (Corbec et ses hommes jouent à la guéguerre avec quelques cultistes, avant d’appeler l’artillerie spatiale et revendiquer une victoire assez mesquine) ou jardin (Gaunt fait de la randonnée et s’inscrit sur Copains d’Avant), l’auteur prend des libertés assez grandes avec le fluff de 40K, tendance que l’on avait déjà vu à l’œuvre dans de précédentes nouvelles – notamment à travers les World Eaters gérés en 2-2 par les Fantômes dans ‘A Blooding’ – mais qui prend une autre dimension dans ‘The Hollows of Hell’. En plus de l’intégration malheureuse d’un Astropathe à l’histoire, l’identification immédiate par l’impayable Varl du caractère démoniaque du mollusque géant rencontré par les Tanith, et l’absence de censure inquisitoriale suite à cette entrevue malaisante au possible, interrogent. N’ayant que de vagues souvenirs de ‘Ghostmaker’, second tome de la série des ‘Fantômes de Gaunt’ dans lequel Abnett a collecté toutes les nouvelles publiées dans Inferno ! avant l’écriture de ‘Premier & Unique’, je ne pourrais dire si ‘The Hollows of Hell’ a été retravaillée par son auteur avant la sortie de ce roman-recueil. Toujours est-il que nous tenons ici l’un des maillons les plus faibles d’une saga autrement plus robuste.

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Gilead’s Fate – D. Abnett [WFB] – #8 :

INTRIGUE :

WFB_GIlead's FateRevenus de leur quête de vengeance décennale (‘Gilead’s Wake’), Gilead et Fithvael ont réinvesti le domaine de Tor Anrok, propriété légitime autant que décatie du premier. La traque du tueur de Galeth, le jumeau de notre héros, a en effet porté un coup fatal à la lignée déjà périclitante de Lothain, dont Gilou est le dernier représentant, et Fithvael l’unique suivant encore vivant. Alors que son majordome préfère camper en forêt et se consacrer à l’entretien de ses domaines horticoles, Gilead a lui sombré dans la dépression et l’alcoolisme, et attend la cirrhose fatale qui aura raison de son spleen (ainsi que de son foie) et de son Endurance de 3. Un événement imprévu va toutefois forcer notre héros dépravé à sortir de sa stupeur…

Entre ainsi en scène Betsen Corpath (Serge de son prénom1), qui, comme Gilead, se trouve être la dernière survivante de sa lignée. Fille de marchands de Munzig, Betsen a perdu toute sa famille au cours d’une terrible soirée, où l’intégralité des Corpath ainsi que tous leurs servants ont été massacré dans leur maison par un meurtrier inconnu. La jeune fille n’a dû son salut qu’à son absence du domaine familial au moment des faits, ses parents l’ayant envoyé faire un stage de demoiselle de compagnie à la cour de Middenheim. Eprouvée par cette tragédie, mais résolue à obtenir justice, Betsen s’est livrée au cours des deux années qui suivirent le Munzig Zweihander Massacre, comme le crime aurait été surnommé par les locaux si j’en avais fait partie, à une investigation fouillée, lui ayant permis de concentrer ses soupçons sur la personne de Lugos, autre marchand de Munzig à la réputation sulfureuse. Malheureusement pour la teenager vengeresse, ses capacités à confronter Lulu sont pratiquement inexistantes, le bougre ayant l’influence et la richesse nécessaires pour entretenir une garde personnelle rivalisant avec la milice locale. En désespoir de cause, Betsen décide donc d’utiliser les bonnes vieilles méthodes de sa défunte (elle aussi) nourrice, à savoir aller déposer plainte au tribunal elfique local, qui se trouve être à côté de la source d’Eilonthay. Les légendes populaires veulent en effet que les habitants de la Tour de Tor Anrok portent secours aux malheureux qui établissent une main courante en ce lieu, à supposer qu’ils le trouvent – ce qui n’est pas facile – et que leur cause soit juste.

Ayant localisé cette fameuse source après des mois de trekking dans les Principautés Frontalières, et ouvert 4 GR Pays dans la foulée, Betsen s’en retourne fréquemment plaider sa cause auprès de l’onde aussi amère qu’elle-même, et finit par émouvoir (ou importuner, c’est selon) Fithvael, qui élaguait à proximité. Notre bonelfe décide d’aller informer son patron de la doléance de la jeune fille, à laquelle il serait de son devoir et de son honneur de répondre. Malheureusement pour le majordome au grand cœur, Gilead, qui a bu trois dés à coudre de cidre brut la soirée précédente, a horriblement mal aux cheveux (qu’il a longs) et ne se montre ni empathique, ni coopératif, en dépit du heroshaming éhonté auquel se livre Fithvael. Ayant échappé aux jets de boutanche de son maître furibard, Fifi décide d’aller régler lui-même le problème… et échoue comme une bouse. Ramassé à l’article de la mort devant l’entrée de Tor Anrok par un Gilead un peu plus sobre le lendemain matin, le vieillard se retrouve cloué au lit, mais peut au moins se réconforter en réalisant qu’il a atteint son but, le calvaire de son meilleur ami ayant donné à Gilead, comme à Rocky Balboa, John Wick et Robert McCall avant/après lui, la motivation nécessaire pour botter quelques fesses.

Après avoir pris contact avec Betsen et reçu un briefing sommaire de la situation, notre vigilante titubant se met en chasse, emmenant sa commanditaire avec lui pour… le fun on dirait, son aide n’étant absolument pas nécessaire. Plutôt que de s’embêter à corroborer les allégations de Miss Corpath, qui, après tout, aurait pu faire fausse route du haut de ses quinze ans, Gilou opte pour une approche radicale, et se fraye un chemin sanglant dans la demeure de sa cible, jusqu’à faire intrusion dans sa salle à manger en plein milieu de son dîner, ce qui n’est pas très poli. S’en suit une séquence d’action frénétique, où la shadowfasttitude de Gilead en fait voir de toutes les couleurs – mais surtout du rouge sang – aux sbires de Lugos. Détail marrant, ce n’est qu’après avoir occis la majorité du personnel du marchand, qui n’avait sans doute rien à voir avec les meurtres des Corpath, que notre héros demande la confirmation qu’il est bien chez Mr Lugos, qui a alors la meilleure réaction possible au vu de la situation : 1) balancer une réplique badass, 2) gagner du temps en confessant ses crimes jusqu’à l’arrivée de son garde du corps personnel, une montagne de muscles chaotiques (ou une montagne chaotique de muscles, ça marche aussi) du nom de Siddroc.

Confronté à un adversaire un peu plus coriace, et sans aucun doute responsable de la triste et graphique fin de la famille Corpath, Gilead fait moins le malin, et casse même son épée sur l’armure de plates du Sid. Il faudra une attaque suicidaire, dans tous les sens du terme, pour tromper la vigilance et la protection quasi-intégrale du colosse, provoquant la fuite éperdue mais d’assez courte durée de Lugos, dégommé en pleine course par une Betsen planquée avec son arbalète à la sortie du manoir. Détail marrant bis, cette dernière (la fille, pas l’arbalète hein) demandera elle aussi une confirmation qu’elle a bien descendu la bonne personne après avoir appuyé sur la détente. Dans les Principautés Frontalières, on tire d’abord, on pose les questions après (#MutantLivesMatter).

Cette quête vengeresse terminée, Gilead laisse Betsen gérer les indélébiles traumatismes et névroses provoqués par la perte de sa famille et le meurtre du responsable de cette dernière à sa convenance (easy peasy quand on a quinze ans, personne sur qui compter, et bientôt soupçonné du meurtre d’un notable et de tout son personnel) et repart au chevet de son domestique. Une fois remis sur pied, les deux compères décident de repartir à l’aventure, non sans avoir mis le feu à la Tour de Tor Anrok afin de tirer un trait définitif sur leur passé2. Le destin de Gilead (et donc de Fithvael) sera d’écumer le Vieux Monde en quête d’innocents à secourir, de torts à venger, et de couteaux à remouler. Il n’y a pas de sottes professions.

1 : Ce n’est pas vrai et il y a des chances que les plus jeunes des lecteurs ne comprennent pas la référence, mais je trouve ça fendard d’imaginer une frêle donzelle de 15 ans sous les traits du French Reaper.
2 : En fait, c’était une arnaque à l’assurance. Mais ça ferait mauvais genre dans une saga épique.

AVIS :

Après avoir posé ses personnages dans l’introductif et probablement pensé comme un one shotGilead’s Wake’, Abnett remet Gilead et Fithvael sur le devant de la scène dans une petite nouvelle plus intéressante dans ce qu’elle dit de la déchéance morale et physique d’un héros dont la race pouvait laisser penser qu’il serait immunisé à ce genre de désagréments, que dans la narration de la revanche prise par Betsen sur les meurtriers de sa famille. Cela ne veut pas dire pour autant que cette soumission ne mérite pas le détour (ne serait-ce que pour la réalisation que Gilead est en fait le Batman du Vieux Monde – ou au moins de Munzig – et Fithvael son Alfred), mais plutôt que ses points forts (à mes yeux) sont plus « périphériques », si l’on me passe l’expression, que d’habitude pour un récit de Dan Abnett. Ainsi la scène d’ouverture, qui débute sur la charmante description d’une fratrie de jeunes enfants régalés de contes par leur nourrice, et qui bascule en un éclair sur la description bien gore de leur cadavre, illustre la maestria de l’auteur en termes de narration. Pour le reste, Abnett prend soin de préparer la suite, et l’on sait d’ores et déjà que l’on aura des nouvelles des deux comparses à l’avenir. On the road again

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The Raven’s Claw – J. Curran [40K] – #8 :

INTRIGUE :

Début de journée difficile pour Veronique Sanson, le héros de The Raven’s Claw (nouvelle au titre potterien s’il en est). Tiré d’une gueule de bois carabinée par le quasi-crash de son vaisseau en plein cœur d’une zone de guerre urbaine, notre protagoniste se rend rapidement compte que 1) il n’a absolument aucun souvenir de qui il est, et 2) il fait visiblement partie d’un régiment de Légionnaires Pénaux. Vivement le week-end.

AVIS :

Jouant honnêtement de cette ficelle narrative bien connue qu’est l’amnésie du héros, Curran trousse une petite nouvelle ma foi fort potable, si on la replace dans son contexte (c’est-à-dire 1999, une époque où les contributeurs de la BL n’étaient pas tenus d’être docteurs -es fluff pour proposer leur travail1). Le background est en effet quelque peu malmené au cours du récit, en particulier au moment de la conclusion de l’histoire, qui aurait pu être mieux négociée, surtout au vu du choix effectué par l’auteur à son endroit2. Ce manque de maîtrise du background de Warhammer 40.000 est d’autant plus gênant que Curran termine son histoire avec un exposé bancal sur la nature de l’Imperium, dont il donne une image biaisée, et finalement assez fausse3. Bref, une mention passable bien méritée.

1 : Non pas que ce soit actuellement le cas aujourd’hui d’ailleurs (l’espoir fait vivre).
2 : Vero se révèle être un (et non pas une – d’après le fluff, c’est rare mais pas impossible – ) assassin Callidus, envoyé sur le terrain afin de faire la peau à un Gouverneur planétaire félon. Sauf que l’utilisation faite par Vero (Averius de son vrai nom) de la fameuse polymorphine est complètement marginale (« Et hop, je passe de L à M en taille de veste ! Ils ne me reconnaîtront jamais ! »), ce qui est tout de même dommage étant donné que c’est cette dernière qui fait tout le charme de cette caste particulière. Étant donné les spécificités de cette mission (à savoir, la présence d’un psyker prescient aux côtés du Gouverneur), un Culexus aurait à mon sens bien mieux fait l’affaire. Quant à la Raven’s Claw qui donne son titre à la nouvelle, il s’agit d’une sorte de neuro-gantelet subdermal, arme appartenant davantage à l’arsenal des assassins Eversor qu’à leurs consœurs Callidus.
3 : Selon Curran, l’Imperium a envoyé Vero recueillir la confession du Gouverneur renégat, car, ayant trahi la confiance de l’Empereur, ce dernier se trouve être un hérétique (nié ?), et tout hérétique doit se repentir avant de recevoir sa punition (nié ?). Et Vero d’expliquer que la rébellion aurait pu être matée en deux deux, et qu’une force d’intervention constituée de plusieurs régiments de Gardes Impériaux ainsi que d’un contingent de White Scars attend tranquillement en orbite son feu vert avant de débarquer sur la planète remettre un peu d’ordre dans tout ce bordel. Et tout ce temps gâché, toutes ces ressources dépensées, toutes ces vies perdues, pour quoi ? Pour permettre à Vero d’absoudre sa cible de ses pêchés. Amen.

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Hell in a Bottle – S. Jowett [40K] – #8 :

INTRIGUE :

40K_Hell in a BottleLe Sergent Instructeur Tydaeus des Iron Hearts doit faire face à une situation inédite: la machine Mimesis, simulateur de conflits utilisé pour l’entraînement des recrues du Chapitre, a été envahie par un ost démoniaque, mené par le prince démon Kargon. N’ayant pas réalisés que leur dernière conquête était un monde virtuel, les démons se retrouvent bloqués dans la réalité numérique de la machine, à la merci d’un Tydaeus qui doit maintenant décider s’il préfère la jouer safe (débrancher Mimesis et l’envoyer à l’incinérateur) ou héroïque (débuter une « partie » et aller botter les fesses calleuses de Kargon en live).

AVIS :

Hell in a Bottle est sans doute la nouvelle la plus étrange d’Into the Maelstrom, voire de toutes les publications 40K de la Black Library. L’argument du récit, déjà très peu banal en lui-même (« et si les Space Marines s’entraînaient sur des bornes de shoot ‘em up ? »), se combine en effet à une interprétation pour le moins libérale du fluff de la part de Simon Jowett, qui n’hésite pas à nommer un des Primarques inconnus dans le cours du récit, ou encore à dépeindre son héros en employé de bureau désabusé plutôt qu’en inflexible moine-guerrier. Il faut dire que Tydaeus n’est, à proprement parler, pas vraiment un Space Marines, son corps ayant rejeté les implants génétiques lui étant destiné au cours de son initiation. Le Chapitre des Iron Hearts étant néanmoins très humain (malgré ce que laisse penser leur nom), notre héros a été reclassé à un poste de non-combattant au lieu d’être transformé en serviteur, ou pire. Dans les ténèbres d’un lointain futur, la loi handicap de 2005 est toujours en vigueur. Bravo.

De l’autre côté de la matrice, le prince démon Kargon n’est pas vraiment reste, sa diction sifflante et ses pratiques sexuelles peu banales (ce n’est pas pour rien qu’on l’appelle Seed-Bearer, monsieur inséminant personnellement les planètes qu’il a conquis avec des spermatozoïdes chaotiques) faisant de lui une Nemesis pittoresque pour Tydaeus, qui, bien sûr, ne résistera pas à l’envie d’aller casser du démon, pensant (à tort) qu’il ne pourrait rien lui arriver de plus fâcheux que d’être déconnecté du serveur une fois tous ses points de vie envolés.

Parenthèse parodique (volontaire ou non) de l’univers gothique de Warhammer 40.000, Hell in a Bottle est un souvenir d’une époque révolue de l’histoire de la Black Library, pendant laquelle les contributeurs pouvaient se permettre d’écrire tout ce qui leur passait par la tête. Et, rien que pour ça, cette nouvelle mérite d’être lue.

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A Wolf in Sheep’s Clothing – D. Abnett [WFB] – #9 :

INTRIGUE :

WFB_Wolf in Sheep's ClothingAprès le succès de leur session de team building dans la Drakwald (‘A Company of Wolves’), nous retrouvons les chevaliers de la Compagnie Blanche de l’ordre du Loup Blanc (the whitest of the white) alors qu’ils s’apprêtent à partir dans une nouvelle mission, beaucoup moins funky qu’ils ne l’espéraient de prime abord. Le Graf de Middenheim a en effet reçu une missive désespérée d’un de ses cousins, le Margrave Ganmark, dont le domaine a été attaqué et incendié par une bande de galapiats, et qui se retrouve donc SDF par la force des choses. Alors qu’il revient aux pompeux et hautains Chevaliers Panthères de traquer les coupables de cet abominable forfait, les Loups Blancs doivent se contenter d’escorter cousin Hubert, sa famille et ses gens, jusqu’à la sécurité de Middenheim. Autant dire que le Commandant Ganz doit essuyer une grogne bien compréhensible de la part de ses hommes, parmi lesquels on compte deux nouveaux : le bleu-bite Krieg Drakken, et le sang bleu Lowenhertz.

Après un aller sans embûches, nos templiers prennent en charge leurs protégés, et se consolent légèrement en constatant que la femme du Margrave, Gudrun, est vraiment bonnasse. Il n’y a que le jeune Drakken pour reluquer davantage la servante Lenya que la plantureuse maîtresse de maison, que le cousin Hub’ a épousé quelque temps après la mort de sa première femme. Les introductions étant faites et le barda chargé dans les chariots, la troupe repart vers la cité, pendant que les Panthères de Von Volk/t se lancent à la poursuite des mécréants. Bien évidemment, ces derniers éviteront facilement la confrontation avec leurs traqueurs, et se concentreront sur les loulous et les migrants. Surpris une première fois par un assaut de Nazguls puant la cannelle, qui laissera le pauvre Drakken tout estafilé, les chevaliers devront relever le plus difficile des défis : utiliser leurs neurones. Car, si pour le lecteur, il ne fait rapidement aucun doute que les stoners spectraux1 sont à la recherche de quelque chose ou de quelqu’un voyageant avec les templiers, pour ces derniers, le mystère est à la limite de l’insoluble. C’est d’ailleurs tout juste si Ganz ne condamne pas Lowenhertz au bûcher pour avoir émis l’hypothèse précédente, qui relevait pourtant du bon sens plus que de la mise en pratique de savoirs interdits…

Début spoilerAu final, et après avoir essuyé une nouvelle vague de goons à la faveur d’un bivouac en pleine forêt, les Loups Blancs finiront par identifier la source de tous leurs maux, qui se trouve être, non pas l’exotique bimbo avec qui le Margrave a refait sa vie, comme le soupçonnait ce misogyne de Gruber, mais la vieille nourrice rom’ des enfants du pater familias, elle aussi arrivée récemment dans l’entourage de l’aristocrate. Plus particulièrement, l’aïeule trimballe avec elle un bijou en forme de griffe, qui lui porte apparemment chance mais que ses ancêtres ont certainement dérobé dans une tombe arabienne, et que ses propriétaires légitimes souhaitent vivement récupérer. Leurs adversaires pouvant respawner toutes les deux heures, Ganz, dans un éclair de génie inhabituel, réalise qu’il doit prendre des mesures drastiques pour arracher la victoire avant que ses hommes se fassent massacrer. Peu enclin à restituer la babiole avec un petit mot d’excuse, comme on le ferait de nos jours, le fier chevalier préfère réduire en poudre le colifichet sépulcral, bousillant le marteau de Lowenhertz dans la manœuvre (c’est du bizutage). Nazguls jusqu’au bout, les assaillants se dissipent alors dans un gémissement piteux, permettant à nos héros de reprendre leur route au matin sans plus d’interruptions. La nouvelle se termine sur leur retour triomphal à Middenheim, et sur la remise par Ganz à Lowenhertz du marteau de feu Von Glick, en dédommagement de l’arme perdue en chemin. Dans l’Empire plus qu’ailleurs, les bons comtes électeurs font les bons amis.Fin spoiler

1 : Ils ont les yeux rouges et ne s’expriment qu’en grognements inintelligibles.

AVIS :

Abnett poursuit sa série (louve) blanche sur des bases sensiblement similaires à celles posées dans ‘A Company of Wolves’, même si l’intrigue se montre un peu plus fouillée et complexe que lors des débuts de Ganz et Cie. Si la révélation de l’identité du responsable des malheurs du Margrave ne risque pas de surprendre grand-monde, on peut tout de même mettre au crédit de Dan Abnett l’inclusion d’une authentique et valable fausse piste dans sa nouvelle, ce qui, pour une soumission de 12 pages, est un accomplissement notable. Pour le reste, on se contentera d’un peu de character development pour nos vaillants chevaliers, qui gagnent deux nouvelles recrues dans ce second épisode, dont au moins une (Lowenhertz) semble tenir à cœur à l’auteur ; ainsi que quelques scènes d’actions très potables.

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Wolf in the Fold – B. Chessell [WFB] – #9 :

INTRIGUE :

WFB_Wolf in the FoldLe sommeil de l’Archidiacre Kaslain de Nuln est interrompu en pleine nuit par l’arrivée impromptue d’un visiteur de marque, venu chercher l’absolution que seul un haut prêtre de Sigmar peut conférer. Mortellement blessé, l’assassin légendaire connu comme la Guêpe Tiléenne (Tilean Wasp) se vide de son sang dans les appartements privés du prélat, dédiant ses derniers instants au récit du seul crime de sa longue carrière pour lequel il éprouve le besoin de se confesser : l’assassinat d’un prêtre.

AVIS :

Si l’histoire narrée par Ben Chessell dans Wolf in the Fold n’est pas aussi aboutie que son Hatred, et que la conclusion de cette courte nouvelle ne s’avère pas être une grande surprise, sa lecture n’en est pas moins agréable, et ce pour deux raisons principales.

La première, c’est l’audace manifestée par ce novice de la Black Library, qui pour sa deuxième soumission, s’offre le privilège de tuer un personnage nommé (l’archilecteur Kaslain, abordé dans les Livres Armées de l’Empire – c’est était un électeur impérial – et dans quelques suppléments du jeu de rôle). Bon, d’accord, il ne s’agissait pas vraiment d’une figure de premier plan du fluff, mais tout de même.

La seconde, et la plus importante à mes yeux, c’est le complet changement de style opéré par Chessell entre Hatred et Wolf in the Fold, sans que ses talents de conteur ne pâtissent de cette transformation. La grande majorité des auteurs de la BL ayant une patte facilement identifiable (pour le meilleur ou le pire) et abordant toujours leur sujet avec le même angle d’attaque, il est remarquable qu’une plume de cette auguste maison soit d’une « agilité » littéraire suffisante pour proposer deux récits si différents l’un de l’autre que l’on aurait pu sans mal les attribuer à deux contributeurs distincts. Si Hatred possédait une ambiance mélancolique et désincarnée, Wolf in the Fold se caractérise au contraire par un style riche et un goût prononcé pour le détail, assez proche dans l’esprit de celui de Brian Craig.

En conclusion, une autre excellente livraison de la part de Ben Chessell, dont la très courte carrière au sein de la Black Library apparaît décidément comme une de ces injustices dont la vie a le secret.

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The Lake – T. R. Summers [NDA] – #9 :

INTRIGUE :

Les dernières semaines ont été dures pour le gang des Brassers de Lord Orl, meneur Orlock qui se rêvait seigneur éboueur du sous-monde. Affaibli par une guerre territoriale constante contre les Goliaths de la Main Noire (encore eux1), les Orlocks ont de plus perdu leur précieux puits lors d’un récent tremblement de ruche, les laissant à la merci d’individus peu scrupuleux pour se sortir de ce mauvais pas. D’individus comme le Guilder Rorget Ahn, par exemple, qui a proposé à Lord Orl de s’associer dans une affaire a priori juteuse : la chasse aux mulk spiders infestant un petit lac souterrain que le même séisme qui a enfoui le puits des Brassers a rendu accessible, après des siècles coupé du reste de Necromunda. Les yeux de ces bestioles, semblables à des gemmes, sont très recherchés par les riches du haut de ruche, et leur vente devrait permettre aux Orlock de se remettre d’aplomb. Bien entendu, chasser des argyronètes géantes ayant colonisé une mare hautement toxique monté sur un pédalo fatigué (le semi rigide proposé par Rorget coûtait trop cher à la location) n’est pas une entreprise de tout repos, mais il en faut plus pour décourager nos hardis Gangers, qui jettent donc leurs lignes sur le plan d’eau de liquide sans tarder.

Les péripéties violentes et humides ne tarderont pas à leur tomber dessus comme un mange-visage de Catachan sur l’arrière-arrière-arrière374 petit fils de Logan Paul2, aux inévitables morts causées par l’agressive faune locale venant s’ajouter celles provoquée par l’épique bataille navale entre Brassers et Main Noire, également embauchés par ce traître de Rorget Ahn pour cette mission lacustre. Lord Orl, en bon leader, n’hésite pas une seconde à mouiller le maillot, mais sans doute plus qu’il ne l’avait prévu. Une baignade involontaire dans les boues de vidange violacées faisant office de lac lui est en effet imposée à la suite de l’explosion de son canoë, et s’il parvient à regagner son QG avec ses quelques hommes restants et un sac d’yeux de mulk spiders pour leur peine, il ne tarde pas à développer une forte fièvre et une purulence de mauvais aloi, que les bons soins du Dokker Hack’n’Slash ne parviennent pas à traiter. Comble de déveine, les précieuses gemmes collectées lors de la mémorable partie de pêche ne tardent pas à fondre comme neige radioactive au soleil, laissant les Brassers dans une situation encore plus désespérée que précédemment.

Fort heureusement, il reste encore sa légitime vengeance contre Rorget Ahn pour motiver Lord Orl, de moins en moins présentable à mesure que les jours passent et que les mutations causées par sa baignade impromptue se manifestent. S’étant surpris à boulotter goulument un bras gardé par Dokker comme pièce détachée dans son officine (on ne sait jamais de quoi on aura besoin pour rafistoler un Ganger de passage), Orl décide de s’isoler du reste de ses hommes pour leur propre bien, et retourne vers le lac, inexplicablement attiré par une pulsion inconsciente… ou peut-être par le secret espoir de retrouver l’Apple Watch qu’il a perdue sur place lors de sa dernière visite…

Début spoiler…Une nouvelle séquence de baignade, suivie d’une épiphanie aussi totale que brutale et non expliquée (il arrive sur une île au milieu du lac et paf, l’illumination le frappe), mènent assez logiquement à la réalisation par Lord Orl et le lecteur que les mulk spiders qui vivent dans cet écosystème unique en son genre ne sont autres que les formes mutées des malheureux qui ont bu la tasse et la crasse mutagène, cancérigène et reprotoxique de cette onde véritablement amère3. D’ailleurs, notre héros reconnaît son bras droit R’daff, emporté par le fond par une araignée entreprenante lors de la première expédition, parmi le comité d’accueil qui s’est réuni pour lui souhaiter la bienvenue dans sa nouvelle communauté. Acceptant son sort sans se plaindre, Lord Orl a toutefois une dernière virée dans le monde civilisé à faire avant de prendre définitivement sa retraite et d’aller faire des bulles dans l’eau avec ses petits copains. Sa cible : ce bougre de Rorget Ahn, à qui il offre gracieusement le pot de l’amitié pour solde de tout compte. Je vous laisse deviner ce qu’il y avait dans le verre…Fin spoiler

1 : Déjà croisés dans ‘The Day of Thirst’, du même auteur. Comme on le verra plus loin, les Goliaths de Krug n’arrivent pas à prendre les points à l’extérieur, ce qui est embêtant quand on lutte pour le maintien la survie.
2 : Youtuber trololol comme son aïeul.
3 : Les mystérieux « Gene Lords », et leur sale manie de collecter et stocker l’ADN des formes de vie croisant leur route dans la cuve recherche qui est devenue ce fameux lac après des millénaires d’abandon, sont à blâmer ici.

AVIS :

Summers mène assez bien sa barque (mouahaha) avec ‘The Lake’, qui présente les deux qualités appréciables pour une nouvelle d’une intrigue n’étant pas prévisible des pages à l’avance – au moins dans la première moitié du récit – et d’une construction bien fichue, où la boucle se retrouve bouclée à la fin du récit. On appréciera également le cadre assez original de cette histoire pour une soumission siglée Necromunda, sans doute l’une des franchises de la GW-Fiction où l’on s’attend le moins à ce qu’un « lac » serve de décor. Le seul reproche que je ferai à Summers est relatif à son inclusion très artificielle, et à mes yeux inutile, des « Gene Lords » dans son propos. Pourquoi faire entrer une faction de démiurges mystérieux et une réalisation proprement miraculeuse de leur implication par Orl dans ses déboires, quand un bon vieux recours au Chaos (après tout, il est question de mutation ici) aurait pu faire l’affaire plus simplement et « proprement » ? Comme le mieux, le tarabiscoté est l’ennemi du bien, et je pense que ‘The Lake’ aurait gagné à rester en terrain fluffique connu. Mais le résultat reste tout de même satisfaisant.

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Acceptable Losses – G. Thorpe [40K] – #9 :

INTRIGUE :

40K_Acceptable LossesNommé à la tête du tristement célèbre escadron de Maraudeurs Raptor, le commandant Jaeger a l’occasion de prouver la valeur de ses hommes au cours d’une mission aussi vitale que périlleuse : la destruction des réacteurs d’un Space Hulk grouillant d’orks. Livrés à eux-mêmes dans l’immensité hostile de l’espace, les Raptors se rendront rapidement compte qu’il n’y a pas d’ennemi plus mortel que l’ami dans lequel on a placé (à tort) sa confiance.

AVIS :

Après les Nains et les Hauts Elfes, Battlefleet Gothic est l’une des lubies du bon Gav Thorpe, qui ne manque jamais une occasion de mettre en scène une petite bataille spatiale dans ses écrits futuristes. Sachant qu’Into the Maelstrom (et donc Acceptable Losses, par la même occasion) a été publié en 1999, soit l’année de sortie du livre de règles BFG, il était inévitable que cette nouvelle fasse la part belle à des héros maîtrisant l’art subtil de la guerre dans l’espace.

Cette nouvelle conséquente (33 pages, ce qui en fait la plus longue du recueil) se divise ainsi en deux parties distinctes. La première (un tiers) voit Jaeger et ses hommes faire connaissance, les premières impressions mitigées faisant rapidement place à une véritable camaraderie entre un commandant sévère-mais-humain et des équipages indisciplinés-mais-courageux-et-loyaux (et l’Oscar du meilleur scénario original est attribué à…). Thorpe sait qu’il doit en passer par là pour que la suite de son récit tienne la route et s’exécute de bonne grâce, son style passe-partout lui permettant d’expédier cette introduction sans trop lasser le lecteur (en partie grâce à la partie « contes et légendes de l’Imperium »).

La deuxième partie (deux tiers) est une description minutieuse de la mission plus ou moins suicide de l’escadron Raptor, sur lequel s’acharne bien entendu un sort contraire : escorte de Thunderbolts retirée au dernier moment, Rok en maraude à négocier en solo, rencontre inopinée avec une escadrille de chassa-bombas, cible protégée par une hénôrme batterie de lance-plasma… autant de petits riens qui font que la vie d’un pilote de Maraudeur vaut d’être vécue (et se termine de manière prématurée). Fort de son expertise dans le sujet, Thorpe réussit à faire de ce compte rendu une expérience plaisante, tant par son originalité que par son enthousiasme perceptible pour cette forme de combat, dont les règles diffèrent considérablement de la classique bataille rangée de fantassins et de véhicules à laquelle l’amateur de 40K a droit d’habitude.

Bon, ça reste du Thorpe, et du Thorpe « primitif » qui plus est, ce qui signifie que l’histoire en elle-même ne vole pas beaucoup plus haut qu’un plongeur de la mort ayant fait un six sur son jet d’incident de tir (ouais, j’ai pas peur des mélanges). En même temps, difficile de révolutionner l’art de la nouvelle de science-fiction avec un pitch aussi ingrat qu’une bataille spatiale vue depuis l’intérieur d’un cockpit de Maraudeur. On a donc le droit à une triple dose d’héroïsme désintéressé et de sacrifice pour la bonne cause, généreusement saupoudrés de « bon sang, c’était moins une »1 et de « mais où est notre écran de chasseurs ? » : une fois de temps en temps, pourquoi pas.

Bref, Thorpe réussit assez bien son coup avec Acceptable Losses, un de ses meilleurs courts formats pour la BL à date, et fait mieux que tenir la comparaison avec beaucoup des nouvelles plus récentes intégrées à On Wings of Blood.

1 : Appelons ça le syndrome de l’Etoile de la Mort.

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In the Belly of the Beast – W. King [40K] – #10 :

INTRIGUE :

40K_In the Belly of the BeastUne escouade de Griffes Sanglantes menée par un Garde Loup est envoyée explorer l’intérieur d’un vaisseau tyranide. Même si la Grande Dévoreuse a la tête dans le biomorphe après quelques éons passés à dériver dans la galaxie, les Loulous vont vite se rendre compte qu’entrer par effraction chez les cafards de l’espace est une très, très mauvaise idée.

AVIS :

In the Belly of the Beast est la nouvelle de type « et si ? » par excellence. Son principal intérêt est de permettre au lecteur de découvrir un pan jusqu’ici peu exploré du fluff, ici la structure et le fonctionnement d’un bio vaisseau tyranide. King accomplit cette mission avec sérieux et réussite, et parvient à décrire ce petit monde complétement alien (c’est le cas de le dire) à l’esprit humain de manière convaincante, insistant bien sur sa perfection organique et son aspect oppressant. Il enrichit en outre son propos en décrivant la progression des Space Wolves depuis le point de vue de chacune des Griffes Sanglantes, dont les réactions varient entre rage bestiale (Egil), prémonition funeste (Njal), légèreté feinte (Gunnar) ou encore crainte dissimulée (Sven). L’éveil progressif de l’écosystème tyranide en réponse à l’intrusion des marounes donne enfin l’occasion à l’auteur de relever son texte de quelques passages d’action tout à fait convenables, et d’une poignée de décès astucieusement gores (mention spéciale à la disparition de Njal).

On peut en revanche regretter le manque flagrant d’inspiration de King au moment d’insérer In the Belly of the Beast dans l’univers de 40K. Comment, en effet, justifier l’envoi d’une (seule) escouade de Space Marines inexpérimentés dans une mission aussi dangereuse que l’exploration d’un vaisseau tyranide, même inerte ? Réponse de l’intéressé : nos héros sont assignés à un navire marchand (et quand je dis assigné, c’est en mode larbin hein : à côté, la Wolfblade c’est une nomination honorifique), dont le capitaine, apparemment ignare au dernier stade, n’est pas foutu de repérer une bioconstruction tyranide quand il en croise une (manque évident de culture générale également partagé par le sergent Hakon, ceci dit). Le navigateur de bord – un homme cultivé, lui – a beau insister lourdement pour que ce mystérieux vaisseau soit détruit sur le champ, le capitaine envoie tout de même ses loulous de compagnie explorer ce dernier dans l’espoir de « découvrir quelque chose dont l’Imperium pourrait avoir l’utilité ». Pour un point de départ pourri, c’est un point de départ pourri. Dans la même veine, on ne peut que s’émerveiller de l’innocence des Space Wolves, qui ne réalisent qu’ils sont au cœur d’un vaisseau tyranide qu’au moment où ils débarquent dans la salle centrale et assistent au réveil d’une tripotée de guerriers. Allo nan mais allo quoi.

En dépit des quelques couleuvres que King tente de faire avaler au lecteur pour justifier les actions stupides de ses personnages, In the Belly of the Beast est une nouvelle honorable, dont l’ambiance d’horreur lovecraftienne détonne agréablement des productions classiques de la BL, où l’action omniprésente laisse peu de place au développement d’atmosphères oppressantes dignes de ce nom.

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The Affair of the Araby Exhibit (Buried Secrets) – G. Rennie [WFB] – #10 :

INTRIGUE :

La tranquille soirée de réflexion-chichon sur la théorie du Chaos1 de Zavant Konniger, érudit iconoclaste et détective privé de l’extrême, est interrompue par l’arrivée impromptue d’un émissaire du culte de Sigmar au domicile du Sage Enquêteur. Un cambriolage a eu lieu dans les archives de l’institution, et l’expertise de l’ancien prêtre est requise pour remonter la piste des ruffians, qui n’ont pas hésité à stranguler deux pauvres gardes qui ne faisaient que leur devoir pour faire main basse sur… quelque chose2. Sa propre demande d’accréditation à l’accès de la nouvelle exposition arabienne, où s’est déroulée ce regretable incident, lui ayant été refusée il y a quelques jours, Zavant saute sur l’occasion de mettre son nez, qu’il a prononcé et arqué, dans les réserves du culte, et part sur les lieux du crime en compagnie du factotum sigmarite et de son fidèle serviteur Halfling, Vido.

Sur place, les capacités d’observation et d’analyse du fin limier, doublées de sa prodigieuse culture générale, et de sa correspondance épistolaire avec le frère Wollen, jeune archiviste passionné de culture arabienne, et principal suspect du double meurtre du fait de sa disparition mystérieuse, permettent à Zavant d’identifier en quelques minutes les coupables de cet effroyable forfait : le culte d’Ishmail, des adorateurs de démons made in Arabie, contactés par le mal-avisé Wollen (retrouvé garroté au fond d’un sarcophage) pour la vente d’une des jarres démoniaques dans laquelle ont été scellés les sombres maîtres du culte, il y a fooooooort longtemps. Ce n’est pas la première transaction Le Bon Coin qui tourne mal, mais il convient désormais d’agir prestement pour empêcher les cultistes, qui ont profité des nombreux passages secrets reliant le district sigmarite d’Altdorf au reste de la cité, de profiter de leur bien mal acquis. Ayant repéré dans le registre fluvial, qu’il lit tous les matins avec son verre de lait de quinoa bio dynamique, l’arrivée d’une nef arabienne dans le port de la ville, c’est vers les quais que Konniger entraîne son monde et la cavalerie, espérant arraisonner les fuyards avant qu’ils n’aient pu se faire la malle.

Bien évidemment, les cultistes ne s’en laissent pas compter, et pendant que son patron les corrige bellement à grands coups de gaffe dans les gencives, Vido doit trouver un moyen de stopper le vaisseau avant qu’il ait passé les portes de la cité. Une heureuse réaction en chaîne (de cabestan) fera jeter l’ancre au navire avant la ligne d’arrivée, le ralentissant assez pour que les zélés zélotes de Sigmar y mettent le feu à grand renfort de flèches embrasées. Un plongeon dans les eaux saumâtres du Reik, et une quasi noyade dans le cas de Vido, plus tard, l’amphore maudite gît par le fond du fleuve, ce qui devrait la mettre à l’abri des attentions déplacées de cultistes chaotiques pendant quelques millénaires. Après tout, quelles sont les chances qu’une paire de Halflings aille pêcher le gros à cet endroit, le jour de l’anniversaire de celui qui s’appelle Smeagol ? Négligeable, très négligeable…

: Qui est moins funky que notre théorie du chaos. Sur l’axe Goldblum, on se rapproche plus de Seth Brundle que d’Ian Malcolm.
2 : Ces archives ne seraient pas dignes de ce nom si elles étaient correctement archivées, bien sûr.

AVIS :

Grand début du personnage de Zavant Konniger dans les pages d’Inferno !, et, par la même occasion, dans la GW-Fiction, ‘The Affair of the Araby Exhibit’ établit en une quinzaine de pages les prémisses de la série de Rennie, pastiche décomplexée du Sherlock Holmes de Conan Doyle à la sauce Warhammer, et mélange bien équilibré d’enquête policière et d’action frénétique, à haute teneur en fluff et comique de situation (ce qui n’empêche pas l’auteur d’insérer une bonne dose de grimdark à son propos de temps à autre, comme dans ‘The Scarlet Case’). La brieveté de la nouvelle ne permet pas à Gordon Rennie de développer un whodunit digne de ce nom, mais sa maîtrise de la narration et du rythme, provenant sant doute de ses compétences de scénariste de comics, compense largement cette absence de challenge intellectuel pour le lecteur (à vrai dire, la série des Konniger ne se positionnera jamais vraiment sur ce créneau). De la pulp fiction rondement écrite, et assez originale par rapport au reste des publications de la Black Library : en a-t-on jamais assez ?

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Sisters – N. Rutledge [NDA] – #10 :

INTRIGUE :

La dernière empoignade auquel son gang d’Eschers a participé s’est mal passé pour Blades : malgré la victoire sans conteste obtenue contre la patriarchie, les féministes du sous-monde ont perdu l’une des leurs, Katz, la sœur de leur bien-aimée leader.e. Et même pas aux mains de l’ennemi qui plus est, mais bêtement et salement, la jouvencelle ayant glissé sur une flaque d’huile et étant tombée dans une mare de boue toxique. Tout le monde n’étant pas Harley Queen, c’en fut fait de Katz, qui aurait pourtant pu et dû retomber sur ses patz. Monde cruel.

Après avoir tenté sans succès de noyer son chagrin dans l’alcool (impossible quand on ne tient pas ce dernier), Blades décide de partir en mission de nettoyage dans les environs d’Ashcliff, le village qu’elle et ses filles « protègent » des menaces extérieures. À la fois pour s’occuper l’esprit, mais également pour montrer à ses subordonnées qu’elle est toujours la patronne, et ne pas laisser croire que la place de Pacha Mama est à prendre. Au menu de ce soir (après le fameux ragoût de Licksy, le barman sénile mais gentil du seul rade d’Ashcliff), un Zombie égaré, comme il en vient de temps en temps dans le voisinage. Guidé par le scout Ratskin qui a repéré la créature décérébrée, Blades part en chasse avec son fidèle fusil à pompe et une paire de lunettes de vision nocturne.

En chemin, le duo s’arrête chez le prospecteur Jakey, fils de Jake, fils de Joe, dont un des oncles a eu la mauvaise idée de braver le couvre-feu sans attestation, et s’est fait salement esquinter par le Zombie pour sa peine. Bien que Ma Honka, sa sœur, semble déterminée à soigner le blessé, les règles sont les règles et Blades se fait un devoir de les appliquer et de planter un stylet dans le cœur de l’inconscient inconscient. Le respect des gestes barrières, on connaît la chanson. Ceci fait, l’Escher de garde emboîte le pas à son guide indigène, qui l’emmène dans les galeries de la mine où le mort vivant s’est enterré, et qui se trouve être l’endroit où Blades et Katz ont passé une bonne partie de leur enfance à chasser l’araignée géante et le rat mutant. Que de souvenirs…

Début spoiler…Comme vous vous en doutez si vous savez comment une intrigue de nouvelle fonctionne, le Zombie en question se trouve être Katz. #SansBlague Il n’y a que Blades que cela surprend, et choque fortement, à tel point que c’est au Ratskin que revient la tâche de mettre fin aux souffrances errances de la revenant d’un tir de mousquet bien placé. Cette bonne action ne sera cependant pas récompensée, Blades ne pouvant supporter la sale blague qu’elle croit que le Ratskin lui a fait (il savait que c’était Katz et qu’elles étaient sœurs, mais n’a rien dit), ni prendre le risque qu’il révèle à tout le monde que Blades a probablement tué un innocent par excès de zèle, Katz n’étant techniquement pas un Zombie, mais quelque chose comme The Toxic Avenger.e (et donc non contagieuse, en tout cas pas de cette façon). Un tir de fusil à pompe a l’arrière du crâne règle l’affaire de façon définitive à défaut d’être élégante, laissant enfin toute latitude à Blades pour commencer/terminer son deuil. La morale pourrait être quelque chose comme ‘Souvent femme (à fusil) varie, bien fol qui s’y fie (bouffi)’. En tout cas, c’est empowering.Fin spoiler

AVIS :

Neil Rutledge livre une histoire qui lorgne franchement du côté du Western (une inspiration assez évidente de Necromunda), et qui se laisse lire sans problème malgré le manque total de surprise au niveau de l’identité du Zombie. Cette déception est toutefois compensée par le soin qu’a pris l’auteur de soigner l’authenticité de son récit, par exemple en incluant du jargon local (worms pour les habitants d’Ashcliff, scragger pour être tué…), et par la conclusion glorieusement immorale (c’est le véritable héros de l’histoire qui se fait descendre par derrière et pour couvrir la bévue de sa partenaire), et donc tout à fait adaptée, de cette nouvelle sororitaire (?).

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Ulric’s Children – W. King [WFB] – #11 :

INTRIGUE :

WFB_Ulric's ChildrenUne nouvelle fois égarés dans une impénétrable forêt des moins accueillantes (décidément, c’est une constante), Gotrek et Felix, backpackers de l’extrême1, doivent braver la neige, le froid et la perspective d’une meute de loups affamés lorsque le rideau se lève sur Ulric’s Children. Quant aux fameux enfants d’Ulric qui ont donné leur nom à cette nouvelle, nous apprenons bientôt qu’il s’agit du nom populaire des loups-garous, considérés comme les descendants des relations tumultueuses du Dieu avec quelques accortes mortelles dans des temps très anciens. Figures légendaires du bestiaire impérial, leur existence paraît soudainement bien plus probable à Felix alors qu’il s’échine dans les congères à la suite du Tueur, des vocalises lupines plein les oreilles. Le grand blond à la cape rouge n’a toutefois guère le temps de ressasser son habituelle litanie misérabiliste que Gotrek, dont l’ouïe est aussi fine que son animal totem (l’acraga coa2), part en sprint dans les sous-bois en direction de la clameur d’une bataille toute proche… et disparaît corps et bien de notre histoire, tel un vulgaire PNJ de Skyrim, laissant Felix seul aux commandes de cette dernière.

Arrivé sur les lieux de l’esclandre, Felix se retrouve confronté à la méfiante hostilité d’une petite troupe de soldats, venant de repousser non sans mal les assauts d’une harde lupine. Prudence étant mère de sûreté, les survivants décident de faire prisonnier le bon samaritain, qui se retrouve menotté comme un vulgaire gilet jaune à l’arrière de la carriole des routiers – pas vraiment sympas pour le coup – où il fait la connaissance d’une autre prisonnière du comte Hrothgar, une dénommée Katarina dont le calme glacial et les remarques sibyllines semblent indiquer une inquiétante proximité avec la meute aux trousses de la soldatesque impériale. Pour ne rien arranger, Felix attire l’attention du sorcier de compagnie de son ravisseur, un certain Voorman dont ni l’haleine fétide, ni l’intérêt déplacé pour sa personne, ne sont au goût de notre héros, qui ne peut que maudire les oreilles aiguisées et les courtes jambes de son compagnon d’infortune.

Rendue quelques heures plus tard au pavillon de chasse de Hrothgar, la troupe investit les lieux et jette Felix et sa camarade dans une geôle sombre, froide mais pas vraiment bien fermée, ce qui se révélera assez utile par la suite, comme nous allons le voir. La visite de Voorman permet à Blondin d’en apprendre un peu plus sur sa situation, qui se révèle être assez précaire : le comte et son thaumaturge s’avèrent être des cultistes de Tzeentch, fomentant quelque obscur et indubitablement dangereux dessein, dont la réalisation nécessite l’implication du père de Katarina, loup-garou au pedigree impeccable. Ergo la capture de la gente demoiselle, ergo les attaques répétées de la part de la gent lupine que Hrothgar (du Nord) et ses sbires ont subi jusqu’ici. Si Felix ne souhaite pas ingérer dans les affaires des uns et des autres, il ne lui faut pas longtemps pour déterminer qu’il a davantage intérêt à coopérer avec Katarina que de faire cavalier seul. Profitant de l’étourderie manifeste de Voorman, qui repart sans verrouiller la porte, et de la confusion générale générée par l’intrusion de la meute dans l’enceinte fortifiée, la faute, une fois encore, à un verrou oublié, les gardés à vue se font la malle et se séparent rapidement.

Pendant que Katarina va faire ami ami avec les quadrupèdes, Felix erre dans les couloirs, et finit par surprendre une conversation entre Hrothgar et Voorman venant confirmer ses sombres pressentiments sur le dessein poursuivi par les deux crapules. Le sorcier parti euthanasier quelques clebards à grand coup de boules de feu, Felix sort de sa cachette, assomme Hrothgar et lui subtilise la dague magique avec laquelle le faquin avait menacé le mage quelques instants auparavant. Tout est alors prêt pour que le dénouement tant attendu (ou pas) prenne place. Un autre coup de chance (décidément, Felix n’a pas volé son nom) conduit le Baudelaire impérial dans une pièce où Voorman se confronte au grand méchant loup, que l’on devine être le père aimant de Katarina. Le triomphe du lycanthrope, qui décapite le sorcier d’un revers de patte, est toutefois de courte durée, l’esprit vengeur de l’arcaniste venant posséder son assassin quelques secondes après la décollation du premier par le second. C’était en effet l’objectif poursuivi par Voorman, qui souhaitait faire siennes l’immortalité et l’invulnérabilité supposées des loups-garous, et ainsi attendre pépouze la fin des temps. Bien entendu, sa rencontre avec Felix, et surtout, sa dague enchantée dérobée à Hrothgar, viendra mettre un terme définitif aux rêves de grandeur de notre ami le furry. Il reste alors 10 lignes à King pour terminer son histoire, ce qu’il fait en faisant arriver Gotrek (enfin !) et Katarina, la seconde prisonnière du premier. Quel sort le duo réservera-t-il à l’orpheline, pas vraiment innocente certes, mais qui ne leur a rien fait de mal à proprement parler ? Eh bien, on ne le saura pas (dans cette nouvelle en tout cas). Concluons sur ce constat, toujours d’actualité, que lorsqu’il y a un flou, c’est qu’il y a un loup. Et inversement.

1 : Dommage que la Fin des Temps ait pris place avant que le projet ‘J’irai occire chez vous’ se soit concrétisé. Je suis sûr que ça aurait fait un carton d’audience.
2 : D’où croyez-vous que la teinte orange de sa crète venait, enfin ? Et, oui, les mites font partie des espèces dotées de l’audition la plus performante du règne animal.

AVIS :

Il est assez dommage que Ulric’s Children laisse le lecteur sur sa faim (de loup, donc), car le récit brossé par King avait un potentiel certain, que la brieveté de l’histoire empêche de s’exprimer de manière aboutie. Je suis persuadé qu’une dizaine de pages supplémentaires après que Felix et Katarina soient sortis de leur cachot aurait pu permettre à cette nouvelle de se terminer de façon plus convaincante que l’enchaînement de non-péripéties qui mène au dénouement lapidaire et lacunaire qui est le sien. Pour tout dire, la dernière demi-page d’Ulric’s Children mérite la lecture afin de prendre la pleine mesure du caractère comiquement abrupt de sa conclusion. Il y avait pourtant beaucoup de pistes intéressantes à explorer avant de rayer la ligne « Tueur de Loup » de la bucket slaying list du petit rouquin teigneux, et notamment le personnage de Katarina, sorte d’Ulrika1 avant l’heure que King place au cœur de son récit avant de laisser totalement tomber. Un vrai loupé, si on me permet l’usage de cette tournure.

Si le choix de King de se passer de son personnage tutélaire pour cette soumission peut surprendre le lecteur, le pari aurait pu s’avérer payant si l’auteur avait permis à Herr Jaeger de s’illustrer de façon convaincante et spécifique : si Gotrek est une machine de guerre invincible, qui résout tous les problèmes auquel il est confronté à coup de hache, Felix aurait pu compenser par une approche un peu plus cérébrale et astucieuse de la situation. Ce n’est pas le cas ici, notre héros enchaînant les coups de chance critiques sans véritable réflexion de sa part. En cela, la comparaison avec l’élève Long n’est clairement pas à l’avantage du maître King, le premier faisant preuve d’une véritable aisance scénaristique, quand le second a davantage tendance à passer en maniaque automatique, les prouesses martiales du Nain disgracié venant meubler les intrigues simplistes concoctées par son auteur. Si la passation n’était pas encore proche au moment de la publication de Ulric’s Children (Mars 1999, soit 4 ans avant la sortie de Tueur de Géant, le dernier roman de King dans la série – à ce jour –), il est possible qu’une certaine lassitude ait déjà été à l’œuvre chez King à ce moment, ce qui expliquerait le caractère inachevé de cette nouvelle. Quoi qu’il en soit, cette dernière ne fait définitivement pas partie des bonnes pages de la saga de Gotrek et Felix, et sa lecture n’est indispensable qu’aux fans transis de la série.

1 : C’est-à-dire la jeune fille frappée d’une malédiction passible de mort dans les sociétés civilisées du Vieux Monde (la lycanthropie pour l’une, le vampirisme pour l’autre), mais dont les motivations ne sont pas intrinsèquement mauvaises, et qui demande juste à ce qu’on la laisse tranquille.

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Badlands Skelter’s Downhive Monster Show – M. Farrer [NDA] – #11 :

INTRIGUE :

NDA_Badlands Skelter's Downhive Monster ShowSkelter et sa bande de joyeux saltimbanques, acrobates et spécimens de foire voyagent de ville en ville dans la banlieue des ruches necromundiennes, garant leurs roulottes et dressant leur barnum sur les grand-places pour le bonheur des petits et des grands. De passage à Fever’s Break, la troupe ne va pas tarder à découvrir que cette charmante bourgade compte une forte proportion de résidents très, mais alors très conservateurs, que l’arrivée de baladins bariolés, basanés et écailleux (il y a un Scaly dans le lot) n’enchante pas le moins du monde. Et bien que la première confrontation avec l’éructant Jago, chef de la milice Cawdor locale, se solde par une victoire sans appel des visiteurs, grâce aux talents de pistolero de Skelter et à la charge de la brigade légère (des sump toads), ce n’est évidemment que partie remise pour l’affrontement entre carnavaleux et porteurs de masque. Une rivalité haute en couleurs et spectaculaire, s’il en est.

L’acte deux de cette bisbille se joue devant le tribunal local, quelques heures plus tard : le procédurier Jago a fait accuser les forains de ne pas respecter les diverses lois en vigueur à Necromunda en ce qui concerne le transport d’espèces menacées et menaçantes, le paiement des heures supplémentaires d’intermittents du spectacle, ou encore le contrôle de l’inertie psychique des sujets impériaux. Si le timing du dépôt de ces plaintes contraint Skelter à rembourser les billets de sa première représentation (un sort pire que la mort pour notre honnête bateleur), pour cause d’annulation de dernière minute, notre héros dispose bien de tous les permis et licenses nécessaires pour exercer sa noble et utile profession, ce qui rabat le clapet de son détracteur, dont l’éloquence ampoulée ne sauve pas du ridicule. Ce n’est toutefois pas la fin des ennuis pour les artistes persécutés, qui devront faire face à une attaque en bonne et due forme de la part du gang Cawdor au grand complet pendant leur représentation suivante, une bonne partie de leur public se révélant être des cultistes en civils n’attendant que le signal de leur chef pour mettre à bas les masques. Ou le contraire.

Dans la confusion qui s’en suit, nous emboîtons le pas à quelques personnages de la troupe (Skelter, le chasseur de primes retraité Kamusz, la dresseuse Tara, le Scaly Issig) alors qu’ils corrigent bellement les zélotes, plus doués pour chanter à la messe le dimanche que pour purger un cirque au lance-flamme. Pour des raisons qui m’ont échappé, les Cawdors semblent en avoir particulièrement contre les (nombreux) enfants de la troupe, ce qui n’est pas très gentil pour commencer, et met logiquement nos héros en rogne. Acculé à une roulotte avec le fils de Skelter comme otage, Jago rate sa sortie comme il a à peu près tout raté avant cela, et finit projeté dans l’enclos à ripper-jacks avec des conséquences aussi sanglantes que définitives, sans avoir pu mener à bien ses sombres desseins infanticides. Tout est donc bien qui finit bien, et la petite bande peut quitter sans regret Fever’s Break pour sa prochaine étape, qu’on leur souhaite moins agitée que celle-ci.

AVIS :

Farrer avait les cartes en main et le talent nécessaire pour faire de cette nouvelle au titre artistiquement alambiqué1 un petit OVNI drôlatique dans l’univers autrement plus violent et bas du front de Necromunda, mais force est de constater que la sauce n’a pas superbement pris dans ce ‘Badlands…’, et j’en suis le premier désolé. Si cette nouvelle a quelques moments de grâce comique, comme le trilogue de sourds entre Skelter, Kamusz et Tara dans l’antichambre du juge de Fever’s Break, elle semble hésiter entre un traitement au premier ou second degré de son sujet, avant de se terminer sur une scène d’action aux enjeux confus (pourquoi les Cawdors en ont-ils spécifiquement après la marmaille ?) et à l’exécution sans saveur. Pour les amateurs de GW-fiction loufoque mettant en vedette une troupe de baladins, leur ménagerie à la limite de la légalité et leurs déboires avec le bon peuple de la ville où ils ont planté leurs tentes, on conseillera donc l’ancien mais plus abouti ‘Pulg’s Grand Carnival’, preuve incontestable que la production littéraire commanditée par Games Workshop est d’une richesse insoupçonnée.

1 : En même temps, venant de l’auteur de ‘The Headstone and the Hammerstone Kings’, ce n’est pas très étonnant. Bon, il a écrit ‘Faces’ aussi, c’est donc qu’il sait faire simple quand il a envie.

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The Blessed Ones – R. Kellock [WFB] – #11 :

INTRIGUE :

Truand minable, Jurgen Kuhnslieb se voit forcer d’accepter une mission un peu particulière afin de pouvoir rembourser les nombreuses dettes de jeu qu’il a contractées. Chargé par un jeune noble décadent de voler un tableau dont son propriétaire ne souhaite pas se séparer, Jurgen va rapidement se rendre compte qu’il s’est empêtré dans une affaire aux proportions insoupçonnées, et que ses employeurs ne sont pas du genre à laisser un cambrioleur à la petite semaine se mettre en travers de leur chemin.

AVIS :

The Blessed Ones aurait sans doute gagné à être développé en « moyen format » (50 – 100 pages), plutôt que de se retrouver confiné à la vingtaine de pages de sa version définitive. La banalité de l’intrigue proposée par Rani Kellock, cousue de fil blanc et à la conclusion courue d’avance dès les premières lignes1, aurait pu ainsi être compensée par la mise en place d’une ambiance réellement oppressante, soulignant la traque impitoyable dont Jurgen fait l’objet de la part de ses clients. L’instillation d’une atmosphère de roman noir ne pouvant se faire que sur la durée, la relative brièveté de la nouvelle de Kellock ne lui a pas permis de parvenir à un résultat concluant, ce qui s’avère au final être assez dommageable.

1 : C’est bien simple, si un riche notable engage une petite frappe pour récupérer un artefact d’un genre un peu spécial, il y a environ 143,87% de chances que le commanditaire se révèle être un cultiste du Chaos/nécromancien/membre d’une organisation secrète.

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Ancient Lances – A. Hammond [40K] – #11 :

INTRIGUE :

40K_Ancient LancesDe retour sur son Attila natale après des années de bons et loyaux services, le commandeur Al’Kahan découvre avec stupeur que son monde et ses compatriotes se sont détournés de leur mode de vie ancestral, et se font exploiter sans vergogne par les marchands de l’Imperium. Outré par cette infamie, il rejoint ce qu’il reste de sa tribu, et l’entraine dans une vendetta sanglante contre des voisins indélicats, ayant fait leurs les pâturages et les troupeaux des clans environnants. La victoire acquise, il repart aussi sec dans le vaisseau par lequel il est arrivé, ayant visiblement décidé de passer sa retraite ailleurs que de ce bled paumé. Merde, ils n’ont même pas la wifi.

AVIS :

SAncient Lances s’avère plus consistant qu’Emperor’s Grace (dont le personnage principal, le Commissaire Streck, fait deux brèves apparitions en début et fin de nouvelle, sans qu’on comprenne trop ce qu’il vient faire dans cette histoire1), la seconde publication d’Alex Hammond comporte elle aussi son lot d’imperfections. On notera tout d’abord que l’auteur orthographie « Atilla » la planète d’Al’Kahan, ce qui laisse planer un gros doute aussi bien sur sa maitrise du background de la Garde Impériale que sur son niveau de culture générale. Deuxièmement, la meilleure progression narrative d’Ancient Lances par rapport à Emperor’s Grace (comprendre que la première se termine de manière un peu plus compréhensible que la seconde) n’empêche pas Hammond de perdre le lecteur par endroits, la faute à une absence de mise en exergue de points importants pour la compréhension de son propos.

Par exemple, lorsqu’Al’Kahan sort du vaisseau spatial qui l’a ramené sur Attila au début de la nouvelle, il se fait contrôler par deux Gardes Impériaux d’un autre régiment, qui lui demandent de présenter ses papiers. Notre héros s’exécute… et leur casse la gueule. Violence gratuite d’un vétéran psychotique ? Pas exactement, les victimes d’Al’Kahan appartenant au XIIIème régiment de Prakash, sauvé de la destruction quelques pages plus tôt par le sacrifice de la cavalerie Attilane. On peut donc comprendre que le vieux commandeur n’ait pas apprécié l’intervention des Prakashiens, et le leur ai fait savoir de manière appuyée. Seulement voilà, Hammond ne facilite pas ce travail de déduction, puisqu’il ne prend pas la peine de rappeler de manière explicite la cause de la rancune d’Al’Kahan envers ces deux pauvres bidasses, (trop) confiant qu’il est dans la capacité du lecteur à faire le lien entre les trois micro-passages où est mentionné le XIIIème Prakashien (dispersés sur neuf pages). Faut pas baisser la garde.

J’ai également eu du mal à accrocher au personnage d’Al’Kahan, vétéran couturé aux motivations aussi nébuleuses que son sens tactique2. Comme le fait remarquer le méchant de l’histoire juste avant de se faire trucider par le Zapata des grandes steppes, notre héros a beau gueuler contre les ravages de la galaxisation (c’est le même principe que la mondialisation, mais à l’échelle supérieure) sur Attila et se faire le défenseur des anciennes traditions de la planète, il ne se gêne pas pour utiliser l’arsenal de la Garde Impériale, beaucoup plus avancé que les armes de fer et de corne utilisées par ses compatriotes, afin de faire triompher sa cause. Bref, faîtes ce que je dis, mais ne regardez pas comment je le fais. On notera aussi qu’Al’kahan se barre juste après la victoire de son camp (abandonnant une deuxième fois sa femme et son – second – mari, mutilé par ses bons soins au passage), très probablement pour prendre possession de la province d’un autre monde lui ayant été promise en récompense de ses impeccables états de service. C’est ce qu’on appelle avoir de la suite dans les idées.

Toutefois, Ancient Lances est toutefois plus sympathique que pénible, en grande partie grâce aux détails de fluff apportés par un Hammond assez crédible dans son propos. Cette nouvelle a également le mérite de traiter des frictions pouvant naître de la rencontre de plusieurs cultures d’un niveau technologique très différent, sujet intéressant à aborder dans le cadre d’un empire galactique d’un million de mondes, où cette question doit évidemment se poser de manière récurrente sur pas mal de planètes. En conclusion, si vous ne deviez lire qu’un seul texte de Hammond, c’est celui-là que je vous recommande, et de loin.

1Ancient Lances se déroule un peu avant Emperor’s Grace, mais les deux nouvelles n’ont d’autre point commun que la présence de Streck dans l’un et l’autre. Je n’ai d’ailleurs pas bien compris pourquoi Ancient Lances figure après The Emperor’s Grace dans Into the Maelstrom, soit à l’inverse de l’ordre chronologique. Peut-être Hammond avait-il pour projet de développer une série dont Sterck serait le héros ? Malheureusement pour lui, Ibram Gaunt (et plus tard Ciaphas Cain) avait déjà pris la place du Commissaire héroïque au sein de la Black Library.
2« Salut tout le monde, c’est Al’Kahan ! Ça fait 30 ans que je vous ai quitté, mais maintenant que je suis revenu, vous allez tous faire exactement ce que je dis. »
« Et pourquoi ? »
« Parce que sinon, je vais devenir très méchant. Et comme presque tous les hommes en âge de se battre sont morts, je ne vois pas comment vous pourriez m’empêcher de devenir le nouveau chef de tribu. D’ailleurs, voilà la femme que j’ai épousée juste avant de partir me battre pour l’Empereur (je suis un vrai gentleman). Elle n’a pas l’air très contente de me voir, mais je vais lui offrir la main tranchée de son deuxième mari, ça lui fera plaisir. »
« Bon ok. On n’a pas le choix de toute façon. Mais on te prévient, on s’est fait volé tout notre cheptel par le clan d’à côté, dont le chef a construit une forteresse imprenable depuis laquelle il pille les terres alentours en toute impunité. »
« Pas de problème, j’en fais mon affaire. En ma qualité de soldat vétéran, je vous propose ce plan infaillible : nous allons charger les murs de son bastion à cheval, comme on le faisait à mon époque ! »
« C’est complètement con. »
« Et toi, à la prochaine remarque désobligeante, t’es complètement mort. Nan, mais en fait, je vous ai ramené quelques lances à têtes explosives, ça devrait faire de gros trous dans les murs, qui nous permettront de passer. »
« Ok, mais comment on arrive à s’approcher assez près pour utiliser ces armes fabuleuses ? La forteresse est entourée de pieux en acier, spécialement conçus pour briser une charge de cavalerie. »
« C’est pas un problème, j’ai également un fusil plasma, qui me permettra de détruire ces obstacles pendant notre glorieuse chevauchée ! »
« Heu, tu veux dire avant notre glorieuse chevauchée, non ? Genre on envoie un éclaireur préparer le terrain pour éviter les mauvaise surprises. »
« Pas du tout, on charge comme des débiles un ennemi bien retranché et mieux armé que nous, en faisant une confiance aveugle à mes talents de tireur. C’est non négociable. »
« C’est complètement c- »

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Daemonblood – B. Counter [40K] – #12 :

INTRIGUE :

DaemonbloodSur la planète (forcément bleeue) de Saafir, Papy Nurgle est sur le point de rafler le vote populaire, au grand dam des défenseurs impériaux dépéchés par Pépé (l’autre) pour passer la serpilière. Isolés par les aléas de la guerre, la Sœur de Bataille Aescarion et le Sergent Ultramarines Castus se retrouvent dans les souterrains de la capitale planétaire (éponyme), où se trouve s’étend une station d’épuration possédée par le Warp, forme physique imposante du Prince Démon Parmenides le Vil. Comme il est difficile de passer par l’épée, ou, dans le cas de cette brutale d’Aescarion par la hache énergétique, une flaque de morve et d’excréments couvrant plusieurs hectares, M. et Mme Meilleurs de l’Empereur sont bien embêtés. Profitant de leur désarroi, le vil Parmenides lave/salit le cerveau du Space Marine avec ses confidences crasseuses sur l’état de la galaxie, transformant le pauvre Castus en séide chaotique. Immunisée à cet insidieux virus par sa foi dévorante et absolue, Aescarion n’est cependant pas de taille à achever les souffrances et les errances métaphysiques de son compagnon, et ne doit son salut qu’à la robustesse de son jetpack, qui la ramène à la surface avant qu’elle ne se retrouve féminicidée par le renégat.

On n’échappe cependant pas aussi facilement à cette force puissante qu’est la Destinée au 41ème millénaire, et les routes d’Aescarion et de Castus se croiseront à deux nouvelles reprises pendant les décennies suivantes. La première fois lors de la purge d’un Space Hulk squaté par les suivants de Parmenides, dont Castus est devenu le porte-parole officiel. Castoche aurait pu se faire trouer les pores par un peloton de Sistas judicieusement gardé en réserve par Aescarion, n’eut été la compétence « corps de mouches » développée par le M. Impropre de Saafir, et qui lui permet de tirer sa révérence sans dommage. La seconde, et dernière fois, se déroule sur le vaisseau du Seigneur du Chaos, le Defixio1, et avec la bénédiction de l’Inquisition, qui souhaitait contenir l’expansion cancéreuse de l’empire spatial de Parmenides en envoyant un petit Exterminatus bien senti sur Saafir. Il fallait bien ça à la Canonnesse de l’Ordre du Calice d’Ebène, auquel Aescarion appartient, pour autoriser l’impulsive et revancharde vétérante à se mesurer une nouvelle fois avec sa Némésis. Les deux précédentes tentatives ayant eu un coût élevé en termes de vies de Sœurs de Bataille aguerries, on comprend sa réticence à permettre à sa sous-fifre de sortir à nouveau le karscher. La connaissance intime de notre héroïne de la mentalité et des forces et faiblesses de Castus en faisait toutefois la meilleure candidate pour mener l’expédition impériale jusqu’à bonne orbite, en dépit de la défense acharnée orchestrée par le fidèle Castus du pré de la décharge carrée de son seigneur et maître.

Ayant soigneusement préparé son combat en oignant sa hache de gel Harpic, Aescarion parvient assez facilement à vaincre son adversaire, mais ne l’achève pas immédiatement. Elle souhaite en effet le faire revenir du côté lumineux, et aseptisé, de la force avant qu’il ne soit trop tard, et parvient (assez facilement *2) à convaincre Castus de retourner sa veste énergétique. Cachant une balise de visée, ou quelque chose comme ça, entre deux bourrelets du champion déchu, elle envoie son ancien camarade apporter ses salutations les plus distinguées à Parmenides dans les profondeurs de Saafir, permettant à l’ex Ultramarine de partir avec les mains sales, certes, mais une ardoise propre2. C’est ce qu’on appelle passer l’éponge, grimdark style.

1 : Je précise car Counter a écrit une autre nouvelle portant ce nom, pour ceux que ça intéresse.
2 : Le fait que Parmenides ne se souvienne même pas du nom de son champion après toutes ces décennies de collaboration à également dû convaincre ce dernier d’envoyer tout balader.

AVIS :

Bien des années ont passé et bien des textes ont été écrits depuis, mais il faut se rappeler que c’est avec ‘Daemonblood’ qu’un tout jeune Ben Counter a fait ses débuts pour la Black Library, dans un numéro d’Inferno ! Si je ne placerais pas cette petite nouvelle parmi les meilleures soumissions de cet auteur, capable du moins convaincant1 comme du meilleur, cette première tentative a plutôt bien vieillie (notamment quand on la compare à certaines nouvelles publiées au début des années 2000), et s’avère assez solide dans sa réalisation, même si très peu originale dans son propos. Les milliards de Space Marinades qui nous ont été servies par la BL au cours des dernières décennies y sont sûrement pour quelque chose…

Ici, on peut tout de même mettre au crédit de Counter une conclusion un peu plus originale que le traditionnel « le-méchant-chaoteux-meurt-sur-un-gros-malentendu-avant-d’avoir-pu-mettre-son-plan-presque-infaillible-à-exécution », avec l’exploration d’un thème assez rare dans l’univers grimdark de 40K : la rédemption.  Cela compense largement à mes yeux les points techniques sur lesquels on pourrait venir lui chercher des noises, comme l’apparente facilité avec laquelle une « simple » Sœur de Bataille vétérante arrive à tailler des croupières à un Seigneur de la Peste. On apprendra d’ailleurs par la suite que la bonne Aescarion est une véritable héroïne d’action, ayant plus d’un Space Marine à son tableau de chasse, ce qui pourrait être perçu comme du féminisme de GW-Fiction avant-gardiste de la part de Ben Counter. Quel visionnaire alors…

1 : Vus les loustics qui ont bossé pour la BL, je ne peux pas décemment utiliser le qualificatif de pire pour la prose de Ben Counter. Il y a bien plus mauvais que lui.

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Deliverance – G. Thorpe [40K] – #12 :

INTRIGUE :

Sur la planète Georgia, ou un nom équivalent étant donné que sa « capitale » se nomme Deliverance et que ses habitants sont des rednecks tout ce qu’il y a de plus primitif, le hagard Araga, chasseur-cueilleur (de champignons hallucinogènes) de son état voit son trip roots tourner au psychédélique morbide lorsqu’une spore mycétique contenant un Lictor sautillant s’écrase à quelque distance de sa position. Trop stone pour faire autre chose que contempler le Xenos s’approcher en faisant des claquettes et agitant son chapeau haut de forme (il n’y a pas à dire, c’est de la bonne), notre brave McGuffin est sauvé d’une descente brutale et d’une mort certaine par l’arrivée à point nommé d’un peloton de Last Chancers, mené par notre ami et confident Kage, qui fait sa fête à l’immigrant clandestin avec une brutale efficacité qui aurait arraché des larmes de joie à Trump en personne.

Cette menue péripétie est le point de départ du récit de la défense de Deliverance par une force impériale regroupant, en plus des Légionnaires Pénaux de choc de l’impayable Colonel Schaeffer, une milice de braves indigènes et un contingent de Sœurs de Bataille, contre les hordes chitineuses du Grand Dévoreur. L’occasion pour Thorpe de confronter ses petits chouchous à une galerie de créatures sanguinaires et décérébrées, aux noms aussi étranges que Franx, Letts, Feonix, Truko et Kruzo, pour ne citer que quelques-unes de ces immondes formes de vie. Bref, la vie d’un organisme Tyranide n’est pas rose tous les jours, à supposer qu’il distingue la couleur. De son côté, le Lieutenant Kage narre avec son style inimitable la défense inspirée du périmètre impérial qu’il assure avec ses hommes. Et lui aussi est bon pour un passage en revue du bestiaire opposé, aux Gargouilles succédant des Termagaunts, Guerriers et même, Hormagaunt Ormahgard un petit Carnifex plutôt farouche. Il laisse toutefois le soin à son increvable autant qu’inflexible supérieur le soin de se farcir le Prince Tyranide qui mène l’assaut, ce que Schaeffer fait avec professionnalisme1 (et hors champ, ce qui est encore plus rapide). Bénéficiant de son armure en scenarium, même s’il finit la nouvelle à l’infirmerie, tout l’enjeu pour Kage est de conserver intacte la motivation fluctuante de sa mauvaise troupe, ce qu’il fait en alternant argumentaire pessimiste2, discours inspirant et mensonges éhontés, lorsqu’il aperçoit l’arrivée de transports de gardes impériaux et comprend que cette bonne nouvelle risque d’entrainer un coupable relâchement chez ses Légionnaires. Décidément, même au 41ème millénaire, le management reste un art délicat.

1 : Quel dommage qu’il n’ait pas été là sur Macragge pour baby-sitter cet empoté de Calgar contre le Maître des Essaims. Avec lui, ça n’aurait pas traîné.
2 : Top Ten Reasons of NOT Running Away From A Fight Against Tyranids (Number 3 Will SHOCK You ! – normal c’est un Trygon – ).

AVIS :

La défense d’un bastion quelconque contre une attaque de Tyranides est devenue au fil des années l’un des scénarios les plus communs dans le catalogue de la Black Library, et même si Deliverance1 peut se targuer d’être l’un des premiers textes couvrant le sujet publié par la BL, il y a fort à parier que le lecteur soit déjà familier de ce type de propos. L’approche méthodique que Thorpe utilise pour mener sa barque, en passant d’un type de bestiole hargneuse à l’autre et présentant pour chacune ses principales caractéristiques dans la foulée, à défaut d’être follement originale, remplit convenablement sa mission. La gouaille habituelle de Kage permet de faire passer plus facilement la pilule pour les lecteurs les plus blasés, et les insinuations du caractère paranormal de Schaeffer, qui donne également de sa personne lors des combats (chose assez rarement couverte dans les récits Last Chancers, généralement centrés sur Kage et les pauvres malheureux qui lui servent de réservoir à points de vie), apportent un supplément d’intérêt à Deliverance, même si cette piste intéressante n’est qu’à peine effleurée par Thorpe. Pour le reste, cette nouvelle est tout ce que l’on est en droit d’attendre de la part d’un affrontement entre la Garde Impériale et les cafards de l’espace, avec un body count des plus respectables et de l’héroïsme cheap à foison.

1 : On peut voir dans ce choix de nom un présage de la future relation particulière entretenue par Gav Thorpe et Corax. Nous étions au moment de la publication initiale de cette nouvelle huit ans avant le début de l’Hérésie d’Horus.

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The Doorway Between – R. Davidson [WFB] – #12 :

INTRIGUE :

WFB_The Doorway BetweenFrantz Heidel, chasseur de sorcières agoraphobe, est engagé par le baron von Kleist pour retrouver le pendentif qui lui a été dérobé par une bande de mutants sur la route de Bechafen. Escorté par un pisteur à tête de fouine du nom de Karl Sassen, notre héros se lance à la poursuite des voleurs dans l’arrière-pays de la capitale de l’Ostermark, sans se douter que son employeur ne lui pas dit toute la vérité au sujet de l’artefact qu’il doit récupérer.

AVIS :

The Doorway Between est un récit très classique (la quête d’un objet magique qui se révèle être maléfique), conduit d’une manière tout aussi classique par Rjurik Davidson. Sans être mauvaise, cette nouvelle est toutefois loin d’être mémorable, et ne mérite au mieux qu’une lecture rapide, tant il est possible de trouver mieux ailleurs dans le catalogue de la Black Library (pour les amateurs de chasseurs de sorcières, la trilogie Mathias Thulmann de C.L. Werner est à mon goût bien supérieure).

Lorgnant sur la fin vers la buddy story, lorsque Heidel et son rival Immanuel Mendelsohn sont contraints de faire équipe pour contrecarrer les plans de leur ennemi commun, The Doorway Between aurait sans doute gagné en intérêt si Davidson s’était davantage écarté des chemins battus de l’heroic-fantasy.

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Et voilà qui conclut ce voyage dans la memory lane infernale, plus de vingt ans après la publication initiale de ces nouvelles de l’An II d’Inferno!. À l’heure où le futur de cette revue devenue recueil est plus incertain que jamais1, revisiter ce glorieux et fantasque passé ne peut pas faire de mal. Rendez-vous prochainement ici-même pour le troisième volet de cette saga au long cours…

1 : Amazon nous informe (au moment où cette revue est postée) qu’un recueil thématique ‘Inferno! presents The Emperor’s Finest’, similaire à celui proposé l’année dernière (‘Inferno! presents The Inquisition’) sortira en Novembre 2022. Après ça, on ne peut plus qu’espérer…

BRINGERS OF DEATH [40K]

Bonjour et bienvenue dans cette revue critique de ‘Bringers of Death’, une anthologie de nouvelles siglées Warhammer 40.000 publiée par la Black Library en l’an de grâce 2005. Cette période constitue une charnière dans l’histoire de la GW short-fiction car avec l’arrêt de la publication du bimensuel Inferno! en Janvier de cette année, la source principale de courts formats utilisés par la maison d’édition de Nottingham pour constituer des recueils se trouva tarie. Cela n’empêche pas trois des cinq nouvelles au sommaire de ce court opus (250 pages) de provenir de cette légendaire manne d’œuvres grimdark, mais on sent que le fond du tonneau a été râclé pour mettre sur pied cette anthologie, son prédécesseur ‘What Price Victory‘ (2004) ayant récupéré les morceaux de choix pour sa propre constitution. On notera également au passage la couverture « 3 D-isée », dans l’une des premières tentatives de la Black Library de s’approprier ce style d’illustration très à la mode à l’époque. Je laisse chacun juger du résultat, et me contenterai de dire que je suis bien content que l’on soit revenu à plus de sobriété (et de classe) depuis.

Sommaire Bringers of Death [40K]

Avec seulement cinq nouvelles à chroniquer, le tour d’horizon des contributeurs de ‘Bringers of Death‘ est vite bouclé. C’est Simon Jowett qui s’installe aux commandes du bouquin avec sa novella et pièce centrale ‘Xenocide‘. Il est accompagné de l’incontournable (pour l’époque) Sandy Mitchell et de son personnage fétiche de Ciaphas Cain (‘Sector 13‘), ainsi que de trois auteurs dont le seul nom hurle « années 2000 » plus fort qu’une Banshee ébouillantée: Mike Lee (‘Even Unto Death‘), Mitchel Scanlon (‘Red Reward’) et l’inénarrable C. S. Goto (‘Menshad Korum’), pas encore frappé du sceau noir de l’ignominie puisque c’est bien son nom qui est mis en avant sous la photo de profil de Jean-Michel Ultramar pour attirer le chaland. Autre temps, autre mœurs. Espérons vraiment que le proverbe voulant qu’on ne doive pas juger un livre en regardant sa couverture se vérifie ici, sinon le résultat risque de ne pas être joli à lire…

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Even Unto Death – M. Lee :

INTRIGUE :

Si la guerre sur Armageddon attire tous les regards, la périphérie de cette planète bénie des dieux de la guerre (et abandonnée par les autres) n’est pas sans intérêt non plus. C’est ainsi que la Grande Compagnie du Seigneur Loup Haldane Ironhammer s’est retrouvée assignée à la traque du fuyant mais pénible Big Boss Skargutz the Render1, fléau du système de Volturna. Les tactiques de hit and run des peaux vertes ayant empêché la Garde Impériale d’alpaguer les maraud(eur)s, c’est aux Space Wolves qu’incombe la mission de stopper les déprédations des Orks. Malheureusement, Skargutz est définitivement très rusé, et alors que les Space Marines pensent l’avoir piégé à la surface de Cambion, ce sont les fils de Fenris qui tombent dans une embuscade mortelle, le brouillage soudain des communications entre les Scouts déployés au sol et le gros des forces attendant en orbite menant les loulous à se précipiter dans leur propre gueule. Comme quoi, on peut être lupin sans aimer le larsen.

Bilan des courses : de la Grande Compagnie ne restent plus que les Scouts de Skaflock Sightblinder, Garde Loup croisé avec un serpent solide, les Griffes Sanglantes de Kjarl Grimblood, roux-kie sans âme ni self-control, et le vieux Prêtre Loup Rothgar. Comble du déshonneur, le corps du Seigneur Loup a été dérobé par les Orks, comme son armure Terminator découpée à l’ouvre boit’kitu le laisse à penser. Cet affront ne pouvant pas rester impuni, les derniers fils de Russ font le serment d’aller venger leur patron tombé au champ d’honneur, et se mettent en chasse guidés par leur odorat infaillible et l’odeur de fauve du regretté Ironhammer.

La coopération entre les vétérans de Skaflock et les blancs-becs de Kjarl (Rothgar est resté faire des mots croisés sur le site du massacre) ne se passe cependant pas très bien, le second voyant dans l’approche prudente et peu violente du premier une preuve de lâcheté. Il faudra que quelques sidekicks tombent sous les balles des Orks après avoir perdu à un-deux-trois soleil à proximité d’une base avancée pour que les Griffes Sanglantes s’en remettent à l’expertise des Scouts, et que la fine équipe parvienne jusqu’au QG secret de Skargutz, à la faveur d’une session de stop clandestine à l’arrière d’un Truk envoyé par les peaux vertes quérir du renfort après que les Space Wolves aient mis en scène un assaut sur l’avant-poste.

Cette traque furtive prend fin lorsque les Space Marines arrivent dans le réfectoire des Orks, où Skargutz s’amuse comme un fou à prendre la pose en chasseur triomphant avec le cadavre d’Ironhammer comme trophée. Outrés par ce manque de respect, les loubards chargent dans le tas, et bien que dépassés par le nombre, l’effet de surprise et leur râââââââââââge de vaincre leur donne d’abord l’avantage contre les peaux vertes. C’est toutefois sans compter sans l’intervention d’un Eldar Noir, apparemment recruté par Skargutz pour brouiller les communications impériales (et sans doute faire les balances au karaorké), et dont le champ de force surboosté et le fouet neurocide viennent à bout d’un bon nombre d’impériaux. Cette bonne vieille saturation finit cependant par faire effet, et après avoir raté son 2+, le DJ emo fait la connaissance du poing énergétique de Kjarl. Il ne reste plus alors à nos deux héros qu’à venger leur officier en découpant le Découpeur, ce qui est accompli de façon hachée et givrée. L’honneur est sauf. En bonus, les loulous trouvent sur le cadavre du Drukhari la télécommande à larsen qui empêchait de coordonner les opérations avec la flotte, et après mûre réflexion, décident de la fracasser, ce qui règle leur problème d’acouphène. L’histoire se termine avec la destruction programmée de la base de feu Skargutz par le feu, en guise de bûcher funéraire d’Ironhammer. Il faudra à nos quelques survivants trouver le chemin de la sortie malgré la présence de milliers d’Orks dans les trois prochaines minutes pour pouvoir espérer rendre des comptes à Rothgar, mais impossible n’est pas F…enrissien, c’est bien connu.

1 : À ne pas confondre avec Rudolph the Reindeer. Pour les différencier c’est facile : il y en a un qui a un nez rouge qui clignote, et l’autre qui croit encore au Père Noël.

AVIS :

Avant de mettre en scène cette opposition dans sa nouvelle ‘Wolf at the Gate’/’Dans la Gueule du Loup’ pour le compte de l’Hérésie d’Horus, Mike Lee signa avec ‘Even Unto Death’ le récit d’un affrontement entre les nobles Space Wolves et les, ou dans ce cas, le, fourbe(s) Eldar(s) Noir(s). Avec quelques Orks en garniture pour rajouter de la verdure. Le résultat ne m’a pas vraiment convaincu je dois dire, l’inclusion du Drukhari dans l’intrigue n’apportant rien à cette dernière, et son absence de contextualisation (Skargutz a laissé une annonce sur la Toile pour recruter un ingénieur du son peut-être ?) posant plus de questions qu’elle suscite l’adhésion. Pour le reste, c’est du très classique, Lee combinant un scénario de traque avec les codes du buddy movie et de la Space Marinade. Ca tire dans tous les sens et ça rue dans les brancards et quand la poussière retombe, c’est Pépé qui triomphe. All hail the all-father, toussa toussa…

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Red Reward – M. Scanlon :

INTRIGUE :

Alors qu’il vaquait tranquillement à ses occupations dans les tranchées défendant la cité de Broucheroc contre les assauts des Orks, le Sergent Chelkar se fait interrompre dans l’animation de son activité « relocalisation de cadavre » par l’arrivée de quatre garde chiourmes rattachés au Commissariat. Ces derniers ont reçu l’ordre d’escorter notre héros jusqu’au QG de campagne, où le Commissaire Valk a quelques questions à lui poser. Après une marche éprouvante durant laquelle il se pète le pif à force de rater ses tests de terrain difficile1, suivie d’un petit tabassage en règle pour rendre le témoin coopératif, le Sergent est enfin mis au courant de ce dont il en retourne, ou plutôt de celui : c’est en effet le Lieutenant Lorannus qui intéresse Valk, et Chelkar, préférant s’exécuter plutôt que l’être, se fait un devoir de fournir un compte-rendu circonstancié sur le personnage.

Quelques jours auparavant, la division de Chelkar, occupée depuis dix longues années à défendre Broucheroc et ses réserves stratégiques de prométheum contre les appétits hydrocarburés des Xenos, avait reçu un coup de pouce de la part du destin (un peu) et du Haut Commandement (surtout), sous la forme d’un drop pod s’étant écrasé dans le no man’s land séparant les tranchées impériales des lignes orks. Mais attention, pas un Drop Pod plein de Space Marines hargneux et durs à cuire hein. Un drop pod rempli jusqu’à la gueule de Gardes Impériaux fraîchement affectés à cette zone de guerre, et dont le grand uniforme bleu poudré et les toques à plume feraient passer celui des Mordiens pour le nec plus ultra en termes de discrétion. Ce qui est toujours mieux que la cargaison de ballons de baudruche que les bidasses ont reçu la dernière fois, mais pas de beaucoup : d’une part parce que malgré les meilleurs efforts de Chelkar et de ses hommes pour couvrir la retraite des nouveaux-venus, la grande majorité termine sous les balles et les bombes des Orks, et d’autre part car leur officier commandant, le fameux Lieutenant Lorannus, sauvé in extremis d’une mort probable alors qu’il secouait le poing de manière menaçante en direction des lignes ennemies par l’intervention héroïque de Chelkar, se révèle bientôt être un illuminé de la pire espèce, combinant le courage suicidaire d’un Custer avec le flair tactique d’un Haig. Mais la hiérarchie doit être respectée, et comme son grade le place au-dessus de l’expérimenté Chelkar, c’est bien Lorannus qui se retrouve aux commandes de la division.

Dès lors, Chelkar s’applique à faire du damage-control afin de contrebalancer les idées ineptes de son nouveau supérieur. Cela aurait pu se terminer par un limogeage en bonne et due forme, mais une nouvelle offensive des peaux vertes vient sauver la carrière du Sergent et/ou l’intégrité physique du Lieutenant. Chacun positionné sur une aile, les deux officiers s’illustrent au cours de la bataille : Chelkar en attirant les assaillants dans un goulot d’étranglement où la première vague motorisée des Orks est rincée au lance-flammes, et Laurent Nus en contre chargeant sabre au clair l’assaut d’infanterie des Xenos, une initiative si spectaculairement stupide qu’elle convainc les peaux vertes de battre prudemment en retraite. Malheureusement pour lui, ce coup de génie poker militaire sera le dernier pour Lorannus, abattu au champ d’honneur par un sniper Grot revanchard. Chelkar, qui avait réussi à motiver sa division à monter au soutien de leur commandant, un peu seul au milieu du no man’s land, ne peut que recueillir les derniers mots de ce dernier, qui meurt en protestant qu’il n’est décidément pas un traître à l’Imperium.

Car c’est bien ce qui lui était reproché, et ce qui a conduit Chelkar, qui a commis la bévue de recommander son supérieur pour une distinction posthume, dans le viseur impitoyable du Commissariat. Un cousin de Lorannus avait en effet été désigné coupable de traîtrise envers l’Imperium quelques mois plus tôt, et Lolo aurait dû, comme c’est la procédure dans ces cas là, être purgé avec le reste de sa famille pour s’assurer de la résolution du problème. Une erreur administrative l’ayant envoyé se battre à Broucheroc au lieu de répondre des crimes de sa lignée, Lorannus a eu la chance de mourir au combat plutôt qu’exécuté par son propre camp. De son côté, Chelkar peut retrouver le service actif sans d’autres formalités, son récit ayant convaincu Valk de l’absence d’esprit factieux dans l’initiative prise par le Sergent pour honorer la mémoire de son frère d’armes. Sur le chemin du retour, Chelkar croit apercevoir le cadavre de Lorannus brûler sur un des bûchers réservés aux dépouilles des Orks tués la veille (le sol de Broucheroc étant considéré comme trop sacré pour y enterrer des Xenos) : une preuve supplémentaire s’il en fallait que l’Imperium ne jette pas le bébé avec l’eau du bain, il atomise le village à la place. Le micro-management, c’est bon pour les Eldars.

1 : Et on n’a pas le droit à une sauvegarde de couvert quand on a les mains attachées dans le dos, c’est canon.

AVIS :

Mitchel Scanlon avait une idée à faire passer dans sa nouvelle, celle de l’absurdité et du cynisme propres à l’Imperium dans le traitement de ses affaires internes, qui mène souvent à ce que nous considérons comme des injustices flagrantes soient commises. Cette idée est convenablement véhiculée à travers l’exemple du Lieutenant Lorannus, victime expiatoire d’un crime qu’il n’a pas commis et de l’infinie adversité au risque des autorités impériales depuis qu’un certain H. Lupercal a causé un foin pas possible aux alentours de M30. L’idée d’offrir à ce personnage une rédemption après l’avoir présenté comme un dangereux incompétent est intéressante, mais pas assez développée à mon sens, tout comme la veine de comique littéralement troupier s’incarnant dans les bidasses Davir (Astérix) et Bulaven (Obélix). En trente pages, il y avait pourtant la place nécessaire pour accentuer le trait, mais Scanlon s’est à mon sens un peu dispersé dans sa narration, obtenant au final une histoire cohérente et correcte, mais sans plus.

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Menshad Korum – C. S. Goto :

INTRIGUE :

40K_Menshad KorumL’Exarque Vlalmerch du clan Saeemrar a été assassiné dans son sanctuaire de Saim-Hann, et sa pierre d’âme volée. Le défunt n’était pas seulement un seigneur de guerre respecté, mais également le Menshad Korum, ou Guerrier Perdu, statut honorifique autant qu’horrifique, car reflétant les irrépressibles penchants meurtriers du bonhomme. Pratique pour mener ses troupes à la victoire et mettre le feu (Vlalmerch a fait trois siècles de service dans le temple Dragon de Feu avant de retourner au bercail) au dancefloor, moins adapté en revanche à une paisible retraite dans le réseau d’infinité servant d’EHPAD aux Eldars canés. C’est pourtant ce que ses assassins, l’Exarque Guerrier Scorpion Arbariar et l’Arccube (mi-Archonte, mi-Succube, c’est une Guerrière Concept) Bureea, ont derrière la tête1, et elles se hâtent lentement vers le cœur du Vaisseau Monde pour aller plugger la babiole sur le disque dur de Saim-Hann. Pourquoi me direz-vous ? Eh bien, c’est compliqué et nébuleux, mais j’ai cru comprendre que c’était l’option la moins pire se présentant aux conjurés, averties par des visions troubles de la corruption totale de Vlalmerch et donc du danger de 1) le laisser vivre et 2) laisser sa pierre d’âme enchâssée dans son armure rituelle, où elle pervertirait à coup sûr son successeur. Les clans Chevaucheurs Sauvages étant fondamentalement opposés à la décharge sauvage de déchets dans l’espace, l’option de balancer discretos le caillou par un hublot ne fut pas retenue, déclenchant au bout du compte une guerre civile entre Saeemrar et Scorpionidas (Arbariar et Bureea ayant eu l’excellente idée de partir en mission commando avec des shurikens en forme de scorpion, permettant aux suivants de Vlalmerch d’identifier les coupables en deux secondes).

Avant de commencer la vendetta que le meurtre de V’la l’Merch impose, il faut toutefois offrir au défunt des obsèques dignes de son rang, et surtout, choisir son successeur parmi les guerriers du clan. Cette prérogative revient normalement à un Prescient, mais voyant que personne n’écoute ses mises en garde, ce dernier lâche rapidement l’affaire et se désintéresse du sujet, faisant de Quereshir, fils de Vlalmerch, l’heureux nouveau possesseur de l’armure paternelle. Après une session d’essayage compliquée, relevant plus de l’enfilage de camisole de force enduite de poil à gratter que du subtil alignement des pierres esprits des anciens porteurs avec l’esprit de l’impétrant, c’est enfin l’heure de la revanche, et Quereshir emmène ses forces toquer à la porte du temple des Scorpionidas pour une petite explication de texte. S’en suit une boucherie sans nom ni subtilité, au cours de laquelle tombent un grand nombre d’Eldars, y compris Bureea (la Psyker au mental le plus fragile qui soit) et Lureeal (le second de Quereshir) qui le valait bien alors que son armure ne valait, elle, rien.

Au bout du suspense, ou en tout cas de la dernière ligne droite vers le port USB central, Quereshir et Arbariar finissent par s’affronter (quand je vous disais que cette dernière n’avait pas une grosse pointe de vitesse, je n’exagérais pas2), et le Menshad Korum sort logiquement vainqueur de ce duel inégal. Il faut dire que quand il n’y a pas de piliers pour renvoyer les shurikens, c’est tout de suite plus dur pour Arbie. Malgré les supplications de cette dernière, Quereshir récupère la pierre paternelle et la replace sur son armure, ignorant sa noirceur de mauvais aloi…

Début spoiler…Et, ô surprise, il se fait immédiatement souljacker par la présence dérangée de Vlalmerch, confirmant les craintes de la désormais défunte Arbariar. À l’autre bout de la galaxie, cette bonne vieille Lelith Hesperax, qui avait été vaincue il y a un siècle de cela par l’alliance des clans Saeemrar et Scorpionidas, s’interrompt un instant entre deux décapitations de Succubes (une pratique sadomasochiste extrême mais courante chez les Drukharis) et réception de brouillard parfumé au terreau pour partir d’un grand rire machiavélique. ‘Twas her all along, bien sûr, et la corruption de Vlalmerch autant que la guerre civile ayant endeuillée Saim-Hann sont de son fait. Demandez pas comment par contre, car la bougresse s’est contentée de se faire fesser en beauté face caméra par Vlalmerch et Arbariar lors de leur précédent affrontement, ce qui n’explique pas comment son plan diabolique a pu se mettre en place. À moins que le pacte qu’elle a conclu avec Slaanesh y soit pour quelque chose. Wait… Les Eldars Noirs n’ont peut-être pas de Psykers (enfin si, ils ont Lelith WAIT…), mais ils maîtrisent l’art cryptique du TGCM. Ca se vaut, moi je dis.Fin spoiler  

1 : Vlalmerch ayant lui derrière la sienne un éclat de shuriken lui ayant été fatal, la redoutable technique du ricochet sur pilier de moelle spectrale étant venue à bout de ce guerrier suprême, mais joueur de billard médiocre.
2 : Les Saeemrar ont tout de même eu le temps d’organiser les funérailles de leur chef, les essayages de son successeur, et l’assaut sur le temple Scorpionidas, sans qu’Arbariar soit foutue de voyager jusqu’au cœur de Saim Hann avec sa bécane à vitesse sonique. Je la vois comme ça hein.

AVIS :

Goto s’embourbe dans des facilités scénaristiques aussi inexplicables que regrettables avec ce ‘Menshad Korum’, venant ruiner les sincères efforts qu’il déploie en introduction pour dépeindre la culture eldar (fonctionnement de la Voie et des temples aspects, importance du psychisme, géopolitique des clans de Saim-Hann…). On est en droit de considérer cette tentative comme pas très subtile, les personnages se balançant des vagues d’émotions dans les gencives comme nous autres pauvres Mon-keigh nous enverrions des seaux d’eau à la figure, mais on doit au moins reconnaître que Goto a essayé de dépayser son lectorat (sans respecter le background établi, certes). Malheureusement, tant l’intrigue que son déroulé s’avèrent rapidement problématiques, empêchant de prendre longtemps au sérieux cette histoire à la fois bêtement simple et stupidement complexe. Le tout donne l’impression de servir d’introduction à un arc narratif qui aurait été développé ailleurs par l’auteur (histoire de comprendre le rôle d’Hesperax dans la choukhroute et l’identité de la mystérieuse divinité avec laquelle elle a conclu un pacte1), et à en croire certains retours de fans, ce serait plus ou moins le cas2. Bref, une nouvelle qui ne viendra pas relever la réputation de notre homme parmi les amateurs de GW-Fiction, ce qui est dommage car il y avait un potentiel assez intéressant dans cette histoire.

1 : D’instinct, j’aurais dit Slaanesh, mais la description qu’en fait Goto laisse plutôt penser à Nurgle.
2 : Il semblerait que ‘Menshad Korum’ ait été intégré, au moins en partie, dans le roman ‘Warrior Coven’ (en piste pour le prix du roman de la BL à la couverture la plus moche).

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Xenocide – S. Jowett :

INTRIGUE :

Le monde d’Agra, ou Samax IV selon les registres impériaux, est frappé par une catastrophe à laquelle ses placides habitants et leur niveau technologique digne du début de notre XIXème siècle sont peu préparés à faire face : une Waaagh ! Ork. Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, les locaux empoignent cependant leurs piques et leurs mousquets pour tenter d’enrayer la progression des envahisseurs, avec des succès limités, comme on peut s’en douter. Nous suivons particulièrement les mésaventures de Brael Corfe, un hardi fermier devenu capitaine de milice (itinéraire Mel Gibsonesque s’il en est), alors qu’il mène sa petite troupe de francs tireurs dans une retraite combattante jusqu’à la dernière cité tenue par les Agrans : la ville sainte de Mallax, siège de la secte des Varks et capitale technologique de la planète (ce qui veut dire des mousquets à canon rayé et des mangonneaux sur les remparts).

Brael doit en grande partie sa survie au cours de l’année de combats incessants menés contre les peaux vertes à une bonne étoile particulièrement attentionnée, qui lui donne des intuitions géniales à intervalles réguliers, au prix de migraines carabinées cependant. Si cette chance persistante lui permet de sortir en un seul morceau des nombreux affrontements contre un adversaire plus fort, plus résistant et mieux équipé (un comble tout de même pour les Orks) que ses miliciens, le sort d’Agra semble toutefois être scellé lorsque la Waaagh ! parvient enfin aux portes de Mallax et y met le siège. Alors que les bombardements s’intensifient et que les Orks sont sur le point d’enlever les murs, un évènement peu commun prend place…

Début spoiler 1…Les Space Marines du Chapitre des Iron Hawks débarquent avec classe et maestria, mettant en déroute les Xenos qui s’attendaient à rencontrer des fourches et des escopettes, et non des épées tronçonneuses et des pistolets bolters. Blessé lors des combats, Brael suit de loin la suite de la campagne, durant laquelle les envahisseurs sont rapidement mis en déroute par l’intervention combinée de la Garde et des Astartes, attirés vers Samax IV par les SOS désespérés envoyés par les Varks depuis leur temple/station radio. Pour les locaux, qui avaient relégué l’Imperium au statut de mythe après avoir été isolé de ce dernier pendant plus d’un millénaire, la surprise est grande et l’acclimatation brutale, même si l’action décisive de ces cousins éloignés bardés de gadgets hi-tech a évidemment été très appréciée. Tous ses hommes étant repartis au front pour aider à chasser les derniers Orks de la planète, il tarde à Brael de faire de même, et lorsqu’il est enfin déclaré apte, il se précipite au QG impérial pour reprendre du service…

Début spoiler 2…Ou plutôt, il l’aurait fait si sa route n’avait pas croisé celle de l’Inquisitrice Selene Infantus, en mission d’audit parmi la population de Samax IV afin de déterminer le pourcentage de mutants parmi cette dernière. Ayant candidement raconté son histoire à celle qu’il considérait simplement comme une nana en toge venant à son chevet par pure compassion, Brael est prestement parqué dans un camp avec les autres Psykers potentiels de Mallax, et termine l’histoire à bord d’une navette en route vers un Vaisseau Noir. Welcome back to the Imperium, peasants.Fin spoiler

AVIS :

Simon Jowett signe une guérilla novella de bon niveau et revisitant le classique affrontement entre l’Imperium et les Orks avec ce ‘Xenocide’. Si le texte fait la part belle à l’action, à travers de multiples escarmouches (dans un village, dans une forêt, dans une mine, en environnement urbain…) sanglantes, Jowett n’oublie pas de mettre son histoire en perspective du background de 40K tel que nous le connaissons, d’abord à travers les Varks (les derniers vestiges de la civilisation impériale1 sur Samax IV, responsables à la fois de l’arrivée des Orks et de l’Imperium à cause de leurs émissions pirates), puis par les yeux peu amènes de l’Inquisition. La conclusion du récit ne surprendra pas les amateurs de prose grimdark, mais la centaine de pages que le lecteur a passé aux côtés de Brael2, qui a bien des égards nous est plus proche que le protagoniste impérial moyen de la GW-Fiction, permet à l’ultime rebondissement de porter malgré tout. Une soumission qui s’écarte des sentiers battus de la Black Library, tout en conservant toutes les caractéristiques attendues de ce genre de littérature : à (re)découvrir sans réserve.

1 : Une trouvaille assez sympa de la part de l’auteur a été de dépeindre les prêtres Varks comme des cyclopes congénitaux. Comme les Varks étaient à l’origine en charge de la communication avec le reste de l’Imperium, et devaient donc compter dans leurs rangs les Astropathes de la planète, il n’est pas compliqué de comprendre comment la perte de connaissances et la montée du mysticisme a eu ce résultat.  
2 : Qui entretient une ressemblance troublante avec le personnage d’Agun Soric (civil devenu chef de guerre, potentiel psychique latent s’exprimant sous la forme d’intuitions inexpliquées… et même fin tragique sans doute) des Fantômes de Gaunt. ‘Xenocide’ ayant été publié deux ans après ‘Sabbat Martyr’, on peut penser que c’est un hommage de Jowett à Abnett.

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Sector 13 – S. Mitchell :

INTRIGUE :

40K_Sector ThirteenAprès les événements de Desolatia (‘Fight or Flight’), le Commissaire Cain profite enfin de la vie et d’un théâtre d’opérations beaucoup plus calme sur l’agrimonde de Keffia, où une coalition de régiments impériaux est à pied d’œuvre pour purger une infestation de Genestealers. Son rattachement à une compagnie d’artilleurs et sa popularité naissante donnent en effet à notre héros beaucoup d’occasions de faire son devoir de façon plaisante : à des kilomètres de la ligne de front et/ou à proximité des hors d’œuvre du Gouverneur local. Une vraie sinécure en quelque sorte, que le talent de Cain pour se mettre tout seul dans de sales draps va bien sûr interrompre de la plus brutale des façons.

Au début de la nouvelle, le Commissaire pensait pourtant avoir finement joué en trouvant un prétexte en plasbéton de décliner l’invitation du Colonel Mostrue de participer à un briefing de haut niveau, honneur lui ayant certainement valu de finir en première ligne sur une quelconque offensive décisive. Très peu pour Cain, qui a donc fait remarquer à l’officier qu’il était de son devoir d’aller superviser le rapatriement d’une poignée de Gardes des Glaces mis au trou par l’Arbites local, à la suite de troubles du voisinage dans la ville de Pagus Parva. Une tâche ingrate, mais qu’il faut bien faire, surtout quand cela permet de passer du temps avec la plastique Sergent Wynetha Phu. L’Empereur le veut, toussa toussa.

Rendu sur place avec son fidèle Jurgen, Cain badine un peu avec l’accorte Arbites, tout en sortant son numéro de Commissaire c’est juste mais vert (et inversement) aux cinq pochtrons bagarreurs qui ont causé du grabuge la nuit dernière. Bien que peu intéressé par les accusations de ses charges envers les locaux, qui auraient mis des roofies dans leurs verres pour leur faire les poches en douce, Cain accepte d’aller faire une enquête de voisinage (avec Wynetha bien sûr) pour tirer les choses au clair. Ses pas le conduisent alors jusqu’au bar du Crescent Moon, où travaille la sculpturale Kamella, escort girl rurale et ultime souvenir que gardent les Gardes de leur dernière soirée. Confrontés à la méfiance du propriétaire, qui ne consent à ouvrir la porte que devant le risque élevé de se la faire enfoncer par les enforcers – un comble –, Cain, Wynetha et le planton qu’elle a amené avec elle pour faire le nombre et grimper le bodycount à peu de frais1 sont forcés de prendre leur grosse voix impériale pour convaincre l’habitant de les laisser accéder à la chambre de Kamella. Et c’est là que les choses se corsent pour nos héros, car les paumes de Cain se mettent à le chatouiller, super pouvoir indiquant de façon indubitable que quelque diablerie est à l’œuvre…

Début spoiler…Et en effet, Kamella se trahit en demandant au Commissaire s’il aime ce qu’il voit (elle était nue sous ses vêtements à ce moment là) en utilisant son patronyme, qu’elle n’avait aucun moyen de connaître. La seule explication logique (mises à part celles basées sur la relative célébrité de Cain ou une ouïe un peu plus fine que la moyenne) est que la donzelle est capable de communiquer par télépathie avec le barman, comme deux hybrides Genestealers peuvent le faire. C’est le début des ennuis pour nos héros, qui se retrouvent vite assaillis par un essaim entier de cultistes plus ou moins présentables. Laissant l’Arbites inconnu mourir au champ d’horreur, comme convenu, Cain et Wynetha parviennent à s’échapper de ce guêpier et à rejoindre le commissariat (pas le sien, le nôtre, enfin je me comprends), où les attendent Jurgen et les cinq Gardes biturés. Bien que la bâtisse soit solidement construite et capable de soutenir un siège, la situation des impériaux ne va pas en s’améliorant car il s’avère bientôt que deux des bidasses ont chopés une MST tyrannique à trop fricoter avec l’habitant.e, et sont tombés sous la coupe de l’essaim. Contraints de se replier sur le toit du bâtiment après que leurs collègues aient fait défection et ouverts la porte aux hordes baveuses et chitineuses de Pagus Parva, Cain et Cie ne doivent leur salut qu’à l’arrivée propice et totalement inespérée d’un régiment de Cadiens, qui venait sans doute prendre un peu de bon temps après une campagne éprouvante sur le front, le vrai, le dur, le velu. Pas de chance pour les troupes de choc, il faudra passer sur le corps des filles de joie locales avant de leur passer… C’est peu conseillé de toute façon.

L’histoire se termine triplement bien pour Cain, qui écope d’une médaille, d’une réputation héroïque encore grandie (alors qu’il a simplement et bêtement pété les plombs en plein combat), et d’un regard lascif de Wynetha lors de la soirée de remise des honneurs. Vu comme ça, on aurait presque envie de s’engager.Fin spoiler

1 : Mitchell ne se donne même pas la peine de le baptiser, c’est dire s’il était mal barré le garçon.

AVIS :

Comme l’illustration d’époque qui accompagne cette chronique le fait subtilement remarquer, ‘Sector 13’ (le nom de la zone autour de Pagus Parva) est une nouvelle collector, remontant aux tout premiers chapitres de la longue, troublée et caustique histoire de Ciaphas Cain. 2003, pour être précis. La recette est la même que pour toutes les autres soumissions de Sandy Mitchell pour cette série : une approche décomplexée (les Anglais ont la jolie formule de tongue-in-cheek) du background de Warhammer 40.000 avec un gros B, permettant au personnage de sitcom qu’est Cain de vivre des aventures palpitantes à son corps défendant. Après avoir enquillé de nombreuses itérations de cette formule consacrée, qui a offert une carrière respectable à Mitchell au sein de la Black Library, je dois reconnaître que certains épisodes sont plus réussis que d’autres, et ‘Sector 13’ fait partie du haut du panier. Il m’est difficile de quantifier précisément ce qui fait de cette nouvelle un succès, mais il me semble que le rythme est plus enjoué, et les blagues plus efficaces que pour d’autres courts formats de Sandy Mitchell. Bref, c’est une des (més)aventures les plus satisfaisantes de l’incorrigible et incorrigé Ciaphas Cain que nous tenons là, et un point d’entrée idéal pour tout novice cherchant à se frotter à cette légende de la Black Library.

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Et voilà qui achève cette revue de ‘Bringers of Death’, dont ni la taille ni le contenu ne lui permettront de se démarquer particulièrement de la masse des recueils de nouvelles 40K publiés par la Black Library (laquelle abandonnera peu après ce format pour revenir à des anthologies plus conséquentes). Témoin et, par bien des aspects, « victime » de son époque (cela vaut autant pour la fin d’Inferno! que pour la collaboration avec C. S. Goto que les choix esthétiques douteux), ‘Bringers of Death’ est à réserver aux archéologues intrépides et résolus de la GW-Fiction plutôt qu’à un public non-averti, qui aura de toute façon du mal à tomber sur cet ouvrage par hasard. Même si la lecture de cet opus est, vous l’aurez compris, loin d’être essentielle, sa simple existence suffit à démontrer la richesse incroyable du catalogue de la BL, et méritait à ce titre une investigation. On peut maintenant passer à la suite.

STATUS : DEADZONE [NDA]

Bonjour et bienvenue dans cette revue critique de ‘Status : Deadzone’, l’un des premiers (2000) recueils de nouvelles publiés par l’alors nouvellement créée Black Library (1997), et le premier consacré à la sous-franchise reine de l’époque, Necromunda. Lancé en 1996, ce jeu d’escarmouches entre gangs du sous monde de la planète éponyme bénéficia d’une couverture marketing et publicitaire importante de la part de Games Workshop, ce qui se traduisit par la publication de nombreuses nouvelles illustrant le quotidien nihiliste et violent des bandes de guerrier.e.s des ruches. Le bi-mensuel ‘Inferno !’ fut un réceptacle privilégié de la prose nécromundesque du tournant du millénaire, et fournit l’essentiel des histoires au sommaire de ‘Status : Deadzone’. Il n’y a en effet que la novellaDescent’ de Simon Jowett pour faire figure d’authentique inédit parmi les onze soumissions de cet opus, la taille respectable de ce pas-si-court-format n’ayant pas rendu possible son inclusion dans un numéro d’Inferno ! Plus c’est long, moins c’est court, comme disent les philosophes Goliaths…

À l’heure où cette chronique est mise en ligne, Necromunda a réussi à retrouver grâce auprès de sa maison mère après une longue traversée du désert dans les années 2000 et 2010 (comme la plupart des sous-franchises de GW, il faut bien le reconnaître). D’un point de vue littéraire, ce come-back se manifeste autant par la publication de nouveaux ouvrages (‘Uprising’, ‘Terminal Overkill’, ‘Soulless Fury’, ‘Spark of Revolution’…) que par la remise au goût du jour de parutions vintage (la première trilogie des ‘Kal Jerico’). À titre personnel, je ne pense pas que ‘Status : Deadzone’ bénéficiera d’un nouveau tirage1, notamment parce que tous les auteurs qui ont contribué à cette anthologie ont arrêté de travailler avec la Black Library depuis des années2, voire des décennies pour certains. Partant, braquer les projecteurs et potentiellement susciter l’attente des fans sur des contributeurs qui n’écriront, selon toute logique, plus pour vous paraît être une décision hasardeuse même pour la BL. Le casting de vétérans qui ont participé à ce recueil évoquera peut-être quelques souvenirs à certains d’entre vous (Farrer, Green et Rennie ayant signé plus d’une histoire pour la GW-Fiction en leur temps), et pour les autres, il est toujours temps de se plonger dans les strates inférieures de la littérature nécromundesque, tels des chasseurs d’archeotech descendant dans le sous monde à la recherche de merveilles enfouies. Je ne promets pas que nous trouvions un Goncourt égaré, mais je m’engage au moins à ce que l’expérience soit sans danger. Enfin, presque.

1 : Je ne compte pas la sortie en format e-book de 2015 comme une réédition digne de ce nom.
2 : Il n’y a que Jonathan Green qui ait fait un caméo en one shot (à ce jour) dans l’histoire récente de la Black Library, avec ‘Journey of the Magi’. Mais je modèrerais mes attentes en matière de nouvelles aventures de Nathan Creed, si j’étais vous…

Status_Deadzone

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A World Above – A. Hammond :

NDA_A World AboveINTRIGUE :

Aldus Harkon occupe la noble profession d’organisateur de voyages pour CSP+, et nous le suivons jusqu’au lieu de prise en charge de ses derniers clients en date, une petite bande de gosses de riches surexcités à l’idée de s’encanailler dans les favelas d’un pays du tiers monde. Comme notre histoire se passe sur la ruche Primus de Necromunda, il faut toutefois apporter quelques nuances à ce tableau jusqu’ici fort banal. Le service que propose Harkon tient en effet plus du safari que de l’escapade touristique boboïsante, avec les résidents du sous-monde dans le rôle de la faune sauvage et des Spyriens sur-équipés dans celui des dentistes américains1. Ayant manqué de se faire écraser par le vaisseau des fils et filles de Guilders lors de son atterrissage sur le tarmac, alors qu’il tuait le temps en glaviotant d’un air pénétré sur le rebord de la ruche, notre flegmatique et phlegmatique G.O. rassure ses Ran’Lo de clients sur la qualité de la prestation qu’il leur a vendue : il y aura de l’action et du fun à gogo pour les gogos, ce n’est pas la première excursion en terre inconnue qu’il organise, que diable !

Un peu plus tard et beaucoup plus bas, nous faisons la connaissance de Knife-Edge Liz, chef d’un gang d’Eschers dont la grande majorité des membres vient de connaître une fin brutale. Elle-même un peu esquintée par un combat d’une violence telle qu’elle a du mal à s’en souvenir, elle ne peut que constater que ses filles se sont faites féminicider de manière contondante, tranchante et pénétrante, ce qui en dit long sur les standards de gender equality à Necromunda. Quelques flashbacks épars et pas vraiment linéaires permettent au lecteur de recoller les morceaux de cet après-midi décidément très agité : mises sur un mauvais coup par Harkon, Liz et son gang ont vu leur projet d’embuscade d’une cargaison de matos Orlock échouer de façon spectaculairement sanglante, les chasseuses tombant dans le piège tendu par les Ran’Lo présentés plus haut. Dans l’affrontement qui s’en suivit, Liz vit périr ses BFF Bekka (Corinne Masiero avec un bolter lourd) et Kat (la Princesse Peach, mais en plus empotée) sous les coups des assaillants, ce qui la mit suffisamment en rogne pour lui permettre d’exterminer à elle seule la totalité de l’équipe adverse. Performance aussi impressionnante que statistiquement improbable, pour qui est familier du système de jeu, mais toujours est-il que Liz termine la partie comme Last Woman Limping, ce qui est toujours ça de pris.

Attirée par les gémissements de l’une de ses victimes/bourreaux, rendue aveugle par un coup pris à la tête, Liz fait preuve d’un peu de compassion en accompagnant la future macchabée dans ses derniers instants. Cela lui permet de réaliser qu’en dépit des différences de culture, statut et richesse qui les séparent, la Spyrienne et elle sont très similaire… ce qui est une raison de plus de la laisser crever comme un rat sur un tas d’ordures. Personne n’est gentil ni altruiste dans le sous monde, et chaque mort douloureuse est amplement méritée.

La nouvelle se termine avec une nouvelle rencontre entre Harkon et ses clients, réduits à leur portion congrue du fait de la disparition tragique de tous les Spyriens dans l’échauffourée précédemment exposée. Et de fait, c’est Liz qui a pris la place de sa dernière victime en date dans l’exo-squelette de celle-ci pour donner le change à l’onctueux intermédiaire. Comme elle l’annonce à un Harkon qui risque de passer un sale quart d’heure, la traque ne fait que commencer…

1 : Un jour cette référence sera complètement obscure pour le lecteur, mais j’ai bon espoir qu’en 2021, elle soit encore compréhensible.

AVIS :

On ne va pas se le cacher, les Spyriens font partie des factions de Necromunda au fluff le plus intéressant, et toute nouvelle les intégrant à son casting jouit donc d’un a priori favorable de la part de votre serviteur. Le capital sympathie de ‘A World Above’ est toutefois grandement dilapidé par Alex Hammond dans la série de flashbacks assez obscurs qui constitue le cœur de son propos, et à travers laquelle le lecteur finit par comprendre pourquoi et comment Liz et une Spyrienne aveugle sympathisent (presque) après que la poudre ait fini de parler. Cette intrigue a beau être intéressante dans l’absolu, et se terminer de façon convenablement grimdark en sus, l’exécution n’est pas aussi propre qu’il aurait été souhaitable pour un plaisir de lecture optimal. On n’est pas passé loin de la pépite Necromundienne, et la suite des aventures vengeresses de Knife Edge Liz (‘Rat in the Walls’) pourrait être franchement sympathique si Hammond règle un peu sa mire, mais ‘A World Above’ a laissé un goût marqué et rédhibitoire d’inachevé à votre serviteur.

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The Day of Thirst – T. R. Summers :

INTRIGUE :

Vous, fringant et amène lecteur, incarnez une recrue Goliath sur le point d’intégrer le gang de la Main Noire, et parti s’en jeter un petit au bar du coin pour marquer l’occasion. Votre interlocuteur est le taulier du rade en question, un individu ouvert aux ragots et aux confidences, qui va se faire un malin plaisir de vous expliquer pourquoi ce recrutement par Krug Face-Mauler, le chef de la Main Noire, n’est peut-être pas une aussi bonne nouvelle que ça…

Quelques jours plus tôt, l’auguste établissement de Furet (le surnom du barman) et QG officieux de la Main Noire avait reçu la visite de courtoise de l’imposante Mother Dark et de ses Eschers, venus rappeler à Krug qu’il leur devait un sacrifice dans le cadre de leur pacte de non agression, et que la livraison était attendue dans quatre heures précises au lieu dit des Pierre Soiffardes (Drinking Stones), sans quoi ça allait chauffer. N’ayant pas jugé bon d’informer ses hommes du petit arrangement passé avec les Eschers, et blessé dans son honneur de mâle alpha qu’une bonne femme vienne lui foutre la honte devant sa bande, Krug se souvint que la meilleure attaque était l’offensive, et monta sur le tas une opération punitive en mobilisant les quelques gangers qu’il avait sous la main (qu’il a noire), ainsi que Furet pour faire le nombre. Manque de pot, le remontage du bolter lourd manié par le balèze de l’équipe (Dramuck) prit tellement de temps que le petit groupe ne rattrapa pas Mother Dark et ses soubrettes en territoire Goliath, comme cela était initialement prévu.

Le règlement de comptes se passa donc à proximité des Pierres Soiffardes, et finit par tourner en faveur de la team XX, dont la prise à revers de la bande de Krug sonna le glas des velléités machistes des crétins à crête. Laissant Dramuck empalé sur le mobilier urbain après que son bolter lourd eut explosé (maudite surchauffe) et Furet enfoui sous un tas de gravats pour sa peine, Krug décida que la meilleure défense était la fuite et détala sans demander son reste. De son côté Furet parvint à faire son trou et à filer à son tour quelques heures plus tard, non sans avoir été témoin contre sa volonté de la fin douloureuse et sanglante de Dramuck, épilé à la cire chaude, liposucé sans anesthésie et surtout écorché à vif par ses tortionnaires pour nourrir le corgi de Mother Dark, enfermé sous les Pierres Soiffardes et impatient d’aller marquer son territoire dans le sous monde quand sa mémère décidera de l’emmener en balade.

Fin du flashback et retour au bar, où Furet s’interroge tout haut sur la vraie motivation de Krug de remplacer le défunt Dramuck par votre honorable personne. Est-ce vraiment pour renforcer son gang, ou simplement pour pouvoir fournir à Mother Dark une nouvelle victime sacrifiable lorsqu’elle en fera la demande ? Mal en a pris à notre pipelette car vous décidez de filer sans demander votre reste, et surtout sans payer votre verre de WildSnake. Petit chenapan que vous êtes.

AVIS :

Résultats mitigés pour Tully R. Summers avec ce ‘The Day of Thirst’, très correct sur la forme mais moins intéressant sur le fond. L’aisance narrative dont l’auteur fait preuve pour brosser en quelques pages le compte rendu d’un accrochage classique entre Goliaths et Eschers se retrouve en effet battue en brèche par l’inclusion d’éléments trop sommairement couverts pour ne pas paraître étranges. Un chef de gang Goliath qui manigance en secret avec des Eschers pour éviter la confrontation ? Une sororité chaotique qui invoque des démons sous les fontaines ? Tout cela n’est pas incompatible avec le background de Necromunda dans l’absolu1, mais balancer ces idées sans les contextualiser ni les étayer de quelque façon que ce soit dans une nouvelle de cinq pages donne logiquement l’impression d’une mécompréhension de l’historique et de l’ambiance du sous monde, tels que décrits dans les sources officielles du jeu. Il faut savoir se contenter de peu et apporter modestement son gravillon à l’édifice, plutôt que de chercher à mettre des coups de pied dans la fourmilière (rarement une bonne idée quand on parle de cités ruches…).

1 : D’ailleurs une des règles fondamentales du fluff est que tout peut se justifier si l’on s’en donne les moyens.

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Bad Spirits – J. Green :

INTRIGUE :

Dans l’univers impitoyable du Far West Down, il est un nom qui inspire la crainte même plus endurci des gangers et au plus sanguinaire des mutants : Nathan Creed. Chasseur de Primes de profession et de titre1, Nath’ est le résultat que l’on aurait obtenu si Clint Eastwood avait tourné dans un film post-apocalyptique italien dans la foulée des ses Western spaghetti. Promenant son charisme minéral, ses mégots de cigarillos et ses deux pétoires de gros calibre d’un bout à l’autre du sous monde, Nathan Creed règle les problèmes des uns et des autres contre crédits sonnants et trébuchants, et de manière définitive.

Chargé par un vieux chef Ratskin (Thunderslag) dont la moitié de la tribu a été massacrée par une bête mystérieuse, et l’autre moitié a décidé de lui faire faux bond pour aller se venger sur les habitants « civilisés » de l’avant poste le plus proche (because why not), de faire lumière sur ces événements tragiques, Creed débarque dans le riant bourg de Toxic Sump pour mener sa petite enquête. Son passage obligatoire dans le saloon local lui permet de prendre le pouls de l’opinion publique, tout aussi stupide, raciste et prompte au lynchage que l’on peut se l’imaginer. Il fait également la connaissance d’un certain Cyrus Beckerman, qui lui conseille vivement de quitter la ville au plus vite, afin de ne pas connaître le même sort que les colons sommairement scalpés par les Peaux Rouges en furie. Il en faut évidemment bien plus pour décourager un professionnel comme Creed, dont l’intérêt est piqué par le décès brutal et suspect de Quinn (l’Eskimo), un prospecteur local venu s’en jeter un petit pour se remonter le moral après avoir échappé de très peu à la hache de guerre des Ratskins renégats. Comme le malheureux s’est étouffé après avoir descendu d’un trait un verre de WildSnake que lui avait tendu l’affable Beckerman, c’est naturellement vers ce dernier que les soupçons de notre héros se portent.

Ayant décidé d’inspecter les fouilles du défunt, Creed se fait surprendre dans son étude des empreintes parsemant la grotte mise à jour par Quinn par l’inévitable Beckerman, qui se révèle être un ganger Van Saar en maraude. Plus stalker que killer, Beckie ne parvient pas à régler son compte au chasseur de primes, qui blesse son adversaire et profite de l’effondrement d’une partie de la galerie souterraine, causée par la chute de son adversaire sur un détonateur enclenché qui traînait négligemment au sol (comme quoi, ça n’arrive pas que dans les cartoons), pour fausser compagnie au faux jeton. Ne pouvant plus ressortir, Creed est contraint de se frayer un chemin dans les profondeurs du sous monde, négociant avec brio un attroupement de Zombies de la Peste peu farouches, dans ce qui ressemble au parcours de FPS le plus bullet timé de l’univers. Le hasard (et le manque de pages) faisant bien les choses, Nath’ finit par déboucher dans une caverne remplie d’archeotech où Ratskins et Van Saar sont à deux doigts de se mettre sur le nez. On comprend que les seconds achètent aux premiers les artefacts qu’ils remontent des couches inférieures de la ruche, et que l’embrouille a été causée par la prime de risque demandées par les locaux, inquiets des déprédations causées par le mystérieux monstre sur lequel Creed enquête.

Comme s’il avait deviné que la progression de l’intrigue passait par lui, le monstre en question finit par arriver sur les lieux, sauvant au passage les miches de Nathan Creed dont le manteau flottant avait malencontreusement fait tomber une bouteille au sol, lui attirant un feu nourri de la part des conspirateurs. Un prix acceptable à payer pour être fashion en toutes circonstances (et que l’on a une armure en scénarium enrichi). Laissant les goons se faire massacrer par l’élément perturbateur, rien de plus qu’un vieux cyborg de garde réveillé par les fouilles explosives des colons, Creed cherche à s’éclipser en catimini, mais croise à nouveau la route de Beckermann. Toujours aussi empoté, le Van Saar ne parvient ni à déclencher l’explosion qui aurait enfoui la caverne et ses occupants sous des tonnes de roche, ni à régler une bonne foi pour toutes son compte au gun slinger, avant que le monstre ne vienne l’empaler sur sa griffe et lui arracher la tête pour faire bonne mesure. Fort heureusement, Creed réussira là où son adversaire avait lamentablement échoué, réglant définitivement le problème du chef Thunderslag et apaisant l’esprit des morts par la même occasion. Ne pouvant pas partir vers le lointain sur son cheval et dans le soleil couchant pour des raisons évidentes, notre héros s’en va dignement à pinces sous la lueur vacillante de néons en fin de vie. Ce qui est presque aussi bien.

1 : Green passe un temps inconfortablement long à appeler son personnage « The Bounty Hunter » en début de nouvelle, avant de passer aux familiarités.

AVIS :

Première nouvelle de Nathan Creed, le second pistolero le plus connu de Necromunda (après Kal Jerico), ce qui est tout de même malheureux pour Green compte tenu de la compétition limitée sur ce créneau, ‘Bad Spirits’ est un pastiche de western tout à fait quelconque et à l’intrigue aussi friable que les cavernes dans lesquelles se déroule notre propos. Entre le monstre qui émerge sur un gros coup de déveine (alors que tout auteur digne de ce nom aurait pu imaginer une raison un minimum intéressante/inventive/connectée au reste de l’histoire à sa venue), les coups de chance successifs de Creed pour parvenir à ses fins, et le manque d’intérêt absolu du méchant de l’histoire, il n’y a pas grand-chose à sauver et à retenir des débuts de Creed dans le sous monde. Une entrée en matière finalement à l’image de la série en elle-même, à laquelle Green ne donna jamais les moyens de s’élever au-dessus de son pitch de base (Mon Curé chez les Nudistes Lee Van Cleef à Necromunda). Il faut vraiment être un archéoBListe acharné pour convoquer le souvenir de Nathan Creed aujourd’hui… et c’était déjà valable à l’époque.

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Badlands Skelter’s Downhive Monster Show – M. Farrer :

NDA_Badlands Skelter's Downhive Monster ShowINTRIGUE :

Skelter et sa bande de joyeux saltimbanques, acrobates et spécimens de foire voyagent de ville en ville dans la banlieue des ruches necromundiennes, garant leurs roulottes et dressant leur barnum sur les grand-places pour le bonheur des petits et des grands. De passage à Fever’s Break, la troupe ne va pas tarder à découvrir que cette charmante bourgade compte une forte proportion de résidents très, mais alors très conservateurs, que l’arrivée de baladins bariolés, basanés et écailleux (il y a un Scaly dans le lot) n’enchante pas le moins du monde. Et bien que la première confrontation avec l’éructant Jago, chef de la milice Cawdor locale, se solde par une victoire sans appel des visiteurs, grâce aux talents de pistolero de Skelter et à la charge de la brigade légère (des sump toads), ce n’est évidemment que partie remise pour l’affrontement entre carnavaleux et porteurs de masque. Une rivalité haute en couleurs et spectaculaire, s’il en est.

L’acte deux de cette bisbille se joue devant le tribunal local, quelques heures plus tard : le procédurier Jago a fait accuser les forains de ne pas respecter les diverses lois en vigueur à Necromunda en ce qui concerne le transport d’espèces menacées et menaçantes, le paiement des heures supplémentaires d’intermittents du spectacle, ou encore le contrôle de l’inertie psychique des sujets impériaux. Si le timing du dépôt de ces plaintes contraint Skelter à rembourser les billets de sa première représentation (un sort pire que la mort pour notre honnête bateleur), pour cause d’annulation de dernière minute, notre héros dispose bien de tous les permis et licenses nécessaires pour exercer sa noble et utile profession, ce qui rabat le clapet de son détracteur, dont l’éloquence ampoulée ne sauve pas du ridicule. Ce n’est toutefois pas la fin des ennuis pour les artistes persécutés, qui devront faire face à une attaque en bonne et due forme de la part du gang Cawdor au grand complet pendant leur représentation suivante, une bonne partie de leur public se révélant être des cultistes en civils n’attendant que le signal de leur chef pour mettre à bas les masques. Ou le contraire.

Dans la confusion qui s’en suit, nous emboîtons le pas à quelques personnages de la troupe (Skelter, le chasseur de primes retraité Kamusz, la dresseuse Tara, le Scaly Issig) alors qu’ils corrigent bellement les zélotes, plus doués pour chanter à la messe le dimanche que pour purger un cirque au lance-flamme. Pour des raisons qui m’ont échappé, les Cawdors semblent en avoir particulièrement contre les (nombreux) enfants de la troupe, ce qui n’est pas très gentil pour commencer, et met logiquement nos héros en rogne. Acculé à une roulotte avec le fils de Skelter comme otage, Jago rate sa sortie comme il a à peu près tout raté avant cela, et finit projeté dans l’enclos à ripper-jacks avec des conséquences aussi sanglantes que définitives, sans avoir pu mener à bien ses sombres desseins infanticides. Tout est donc bien qui finit bien, et la petite bande peut quitter sans regret Fever’s Break pour sa prochaine étape, qu’on leur souhaite moins agitée que celle-ci.

AVIS :

Farrer avait les cartes en main et le talent nécessaire pour faire de cette nouvelle au titre artistiquement alambiqué1 un petit OVNI drôlatique dans l’univers autrement plus violent et bas du front de Necromunda, mais force est de constater que la sauce n’a pas superbement pris dans ce ‘Badlands…’, et j’en suis le premier désolé. Si cette nouvelle a quelques moments de grâce comique, comme le trilogue de sourds entre Skelter, Kamusz et Tara dans l’antichambre du juge de Fever’s Break, elle semble hésiter entre un traitement au premier ou second degré de son sujet, avant de se terminer sur une scène d’action aux enjeux confus (pourquoi les Cawdors en ont-ils spécifiquement après la marmaille ?) et à l’exécution sans saveur. Pour les amateurs de GW-fiction loufoque mettant en vedette une troupe de baladins, leur ménagerie à la limite de la légalité et leurs déboires avec le bon peuple de la ville où ils ont planté leurs tentes, on conseillera donc l’ancien mais plus abouti ‘Pulg’s Grand Carnival’, preuve incontestable que la production littéraire commanditée par Games Workshop est d’une richesse insoupçonnée.

1 : En même temps, venant de l’auteur de ‘The Headstone and the Hammerstone Kings’, ce n’est pas très étonnant. Bon, il a écrit ‘Faces’ aussi, c’est donc qu’il sait faire simple quand il a envie.

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Mark of a Warrior – R. Williams :

NDA_Mark of a WarriorINTRIGUE :

Après avoir passé des années à jouer aux Gangers et aux Arbites avec ses petits camarades en rêvant du jour où il aurait enfin son flingue rien qu’à lui (la vraie marque d’un guerrier, clin d’œil au titre, ça c’est fait), un juv’ Goliath se présente à son examen de passage pour intégrer le gang local. Logiquement nerveux, mais souhaitant faire bonne impression à son chaperon, une sorte de Bane grimdark cachant de beaux restes sous ses abords défraîchis et son masque à oxygène, Yogo – appelons le comme ça – joue les blasés jusqu’à apprendre la nature de sa future épreuve : descendre dans un boyau de mine abandonnée pour aller chasser le milliasaur, et rapporter « kekchose eul’ ver peut pas viv’ sans », dixit l’Immortan Joe sous chimio, afin de prouve sa valeur. Pas vraiment une promenade de santé en perspective pour notre héros, qui pourra toutefois compter sur sa toute première pétoire (émotion), obligeamment prêtée par son évaluateur avant que les choses sérieuses ne commencent. Mais attention, comme tout bon Goliath qui se respecte, il s’agira de prouver sa force en usant de son arme, sans dépendre de cette dernière. Un point particulier du crédo Gogo que Yogo aura l’occasion de mettre en application dans les prochaines heures, nul doute.

Descendu dans la mine sans presqu’avoir eu l’air ridicule en accrochant sa ceinture à un crochet qui dépassait du mur au passage, Yogo rampe un peu, panique quelques fois, mais surtout fait des plans sur la comète en se rêvant un parcours météoritique parmi les Gangers du Sous-Monde, depuis son premier affrontement avec les Scavvies jusqu’à son couronnement d’Helmawr à la place de Helmawr. Cet enthousiasme juvénile, aussi appelé étourderie, manque de lui être fatal lorsqu’il entre sans s’en rendre compte sur le territoire d’un milliausaur, qui lui tombe sur le râble depuis le plafond de la mine. Le combat qui s’en suit reste longtemps mal engagé pour Yogo, dont la pétoire a la mauvaise idée de s’enrayer juste au moment où il aurait été utile de pouvoir descendre un mille-pattes géant et agressif à bout touchant. Mais la bestiole a tout de même l’amabilité de décéder en s’étougorgeant après avoir avalé le couteau du Goliath, le bout pointu en premier. Coincé sous le cadavre de son trophée, Yogo peut savourer sa victoire comme il se doit…

Début spoiler…Mais comme les bonnes choses ont une fin, il parvient tout de même à se dégager, retrouvant l’usage de ses membres et la circulation dans son bras droit (ce qui pique un peu après une demi-heure de garrotage). Là, il se rend compte de deux choses capitales : 1) son flingue ne s’est pas enrayé, il n’y avait en fait aucune balle dans le barillet du revolver (faire preuve de force, la dépendance céleumal, toussa toussa…), et 2) décapiter une créature qui a une carapace de pierre avec un éclat de canif, ça ne va pas être de la tarte. Une petite ellipse plus tard, Yogo, bien éprouvé, finit par sortir de la mine avec son trophée, qu’il jette aux pieds de son examinateur impassible. Ce dernier le reste même lorsque la nouvelle recrue lui décoche un crochet du droit bien mérité, avant de repartir vers le QG du gang, le Juv’ furibard sur l’épaule, en se gondolant comme une baleine. Ca doit être un rite Goliath.Fin spoiler

AVIS :

Petite nouvelle sympathique de la part de Richard Williams, ‘Mark of a Warrior’ fait mouche grâce à l’aisance stylistique de son auteur. En entrée, un beau McGuffin mettant en scène un jeu de gamins comme s’il s’agissait d’une traque mortelle. En plat de résistance, l’opposition savamment mise en scène entre la dureté et la cruauté du sous monde et l’insouciance, souvent dangereuse, du héros, qui est resté très jeune dans sa tête malgré son physique d’armoire à glace. Et en dessert, une utilisation à propos, et plutôt deux fois qu’une, considérant ce dont il est question ici, du fusil de Tchekov soigneusement intégré par Williams à son propos. La philosophie Goliath n’est certes pas diserte, mais elle contient quelques concepts à méditer. Le seul bémol que je mettrai à cette autrement appréciable soumission est la partie de spéléologie appliquée de la nouvelle, qui n’apporte pas grand-chose à l’intrigue et ralentit plutôt cette dernière. Mais à part cela, et ce n’est pas grand-chose, ce ‘Mark of a Warrior’ témoigne d’un examen de passage réussi pour la recrue Williams.

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The Demon Bottle – A. Hammond :

INTRIGUE :

Dure journée pour Sarak le (demi) Ratskin. Réveillé de bon matin (07:00) par une tentative de meurtre raciste intentée par un prêcheur Cawdor au tempérament plus incandescent que son lance-flamme – et heureusement pour notre héros –, notre ivrogne désoeuvré échappe de justesse au lynchage et s’en va se remettre de ses émotions en assouvissant son penchant coupable pour la dive bouteille. Son statut d’homme à tout faire de la colonie du sous monde où il occupe la position exaltée de marginal alcoolique lui vaut cependant de risquer à nouveau sa vie dans la même matinée, sa mission de nettoyage du conduit d’aération de son lieu de villégiature habituel passant à un cheveu du drame. C’est que la faune locale de Necromunda est autrement plus agressive et mortelle que nos bêtes grenouilles et hérissons. Cela ne fait que renforcer sa motivation d’émigrer vers le haut de la ruche, qu’il s’imagine être une sorte de Disneyland peuplé de pole dancers parfumées. Son désir d’une vie meilleure est toutefois contrarié par une rencontre pas vraiment fortuite avec les sbires d’Otto Gunta, un gros bonnet du crime local, qui souhaite instamment lui parler et n’a pas pour coutume d’attendre le bon vouloir de ses débiteurs.

Une injection de tranquilisants et un réveil difficile plus tard, Sarak se retrouve dans une position qui l’est tout autant. Gunta demande à être remboursé séance tenante, mais la valeur des possessions physiques du (demi) Ratskin ne couvre pas la moitié de son encours, même en prenant en compte la vente de son cadavre à l’usine Findus la plus proche. Qu’à cela ne tienne, les talents d’exterminateur de nuisibles de Sarak donnent une idée au parrain, dont le territoire a été envahi par une bande de mutants cannibales difficile à déloger (saleté de trève hivernale). Le poivrot n’a qu’à s’arranger pour régler son compte au chef des squatteurs, par exemple en glissant un peu d’eau de javel dans son hydroxychloroquine, et son ardoise sera effacée. Plus facile qu’à dire qu’à faire, mais sous le regard vigilant et la menace implicite du gros bras de Gunta, un (demi) cyborg nommé Lugtekk, Sarak n’a d’autres choix qu’obtempérer. Il peut heureusement compter sur les largesses de son employeur, qui lui fournit un déguisement convaincant de Scavvy ainsi qu’un cadavre frais pour la soupe de ses futurs meilleurs copains, avant de partir en mission.

Cette journée déjà riche en événements va alors prendre un tour encore plus frénétique, puisqu’après avoir réussi à gagner la confiance de ses hôtes, Sarak parvient à glisser les pilules empoisonnées de Gunta dans la bouteille de WildSnake de sa cible (Hoegas), mais est témoin du meurtre de cette dernière par un rival mécontent (Blotta). Devenu calife à la place du calife, cet infâme communiste de Blotta insiste pour que tous les membres de la tribu prennent une rasade à sa boutanche – son coup d’état n’a été causé que par l’égoïsme de Hoegas, c’est dire s’il avait soif – à commencer par Sarak. Notre héros s’exécute, espérant survivre assez longtemps pour recevoir un éventuel antidote de la part de Gunta, mais doit avant cela suivre les Scavvies dans l’attaque d’une caravane de Guilders. Le cadavre apporté par le (demi) Ratskin avait en effet une carte sur lui, assez détaillée pour donner envie à une bande de goules basses du front de fomenter une embuscade. Il s’agissait évidemment d’un piège de Gunta, dont les hommes occupent les lieux et commencent à flinguer à tout va les mutants en goguette. Comme si la situation n’était pas assez critique, Sarak finit par se rendre compte que les pilules magiques qu’il a glissé dans le pinard sont du spook, une substance psychoactive provoquant au mieux des hallucinations, au pire des possessions démoniaques. Notre héros n’étant pas dans un bon jour, c’est le deuxième cas de figure qui se produit, et le (demi) Ratskin se retrouve contraint de partager son corps avec le démon le plus chill du Warp1, ce qui est tout de même pratique pour encaisser une fusillade à bout portant sans effets secondaires désagréables, comme la mort par exemple. Sarak n’a cependant pas dit son dernier mot, et abat sa dernière carte pour faire la nique à ses bullies avant de tirer sa révérence : atteindre le Nirvana sans crier gare, ce qui met fin à la possession, et faire un gros calin au mafieux alors qu’il a été transformé en torche humaine par son infection chaotique, pour entraîner Gunta dans la tombe. Je ne sais pas si on peut lier ce décès aux dangers de l’alcoolisme, mais il y a définitivement une morale à cette histoire, si on cherche bien.

1 : Vous en connaissez beaucoup des neverborn qui appellent leur hôte « boyo » ?

AVIS :

Difficile de dire si c’était l’effet recherché par Alex Hammond lorsqu’il a écrit ‘The Demon Bottle’, mais on ressort de cette courte (9 pages) nouvelle avec un début de mal de crâne similaire à celui que pourrait causer une gueule de bois. En cause, la deuxième moitié hystérique de cette histoire, qui fait s’enchaîner les péripéties avec une frénésie digne d’un Héraut Exalté de Khorne. Ce grand final foutraque vient très largement masquer les points positifs que l’on pouvait mettre au crédit de Hammond, comme sa réflexion sur les illusions que les habitants du sous monde se font de la réalité des étages mieux famés de la ruche Prime1, ou les petites touches humoristiques que l’auteur a intégré à sa narration. Un éditeur critique aurait demandé à ce que la fin de ‘The Demon Bottle’ soit plus cohérente, ou accordé cinq pages de plus pour laisser l’intrigue respirer un peu plus, mais à l’époque farouche à laquelle ce texte a été écrit et publié, je doute que la BL disposait des ressources et de l’envie nécessaires pour soigner la qualité de ses sorties. On peut d’ailleurs toujours se poser la question aujourd’hui d’ailleurs. Dommage donc pour ‘The Demon Bottle’, que l’on peut remiser sans regret sur la pile des nouvelles médiocres de la Black Library.

1 : Sujet en partie récupéré par l’auteur pour ‘Rat in the Walls’ ceci dit.

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Rites of Passage – G. Rennie :

INTRIGUE :

Une nouvelle fournée de jeunes Orlocks se préparent à passer l’épreuve pratique du bac necromundesque, à savoir partir se fritter avec les affreux d’en face (ces c*nnards de Cawdor) dans une arène désolée située au beau milieu du sous monde. Il y a là le gros costaud Dorn, probablement baptisé ainsi car ses parents étaient fans du Trône de Fer, ses lieutenants putatifs Mikhal et Lan, et les frangins Mallin (qui l’est) et Jaal (qui ne l’est pas car ça ne veut rien dire : faîtes un effort tout de même). Ce dernier a été adopté par la famille de Mallin après que la sienne ait été assassinée par des gangers rivaux, et occupe le poste ingrat mais indispensable dans tout groupe de souffre-douleur attitré. Après avoir reçu un discours inspirant de leur instructeur, les djeun’s partent à l’aventure dans la pampa, certains de revenir d’ici deux jours avec les preuves de leur victoire contre la canaille estrangère et bigote.

Ce que le club des cinq ne peut pas savoir, c’est que rôde dans les parages un Spyrien solitaire, tellement accro au meurtre sauvage de prolo’ qu’il n’est jamais remonté à la surface depuis sa dernière virée. Engoncé dans son armure dernier cri (à plusieurs titres, comme nous le verrons plus tard), le Chasseur, car c’est ainsi qu’il se nomme1, ne dit pas non à un petit massacre d’adolescents attardés, après avoir fait des sashimis de leurs rivaux Cawdors quelques heures plus tôt. Le premier à y passer sera le malchanceux Mallin, qui se fait emporter dans les airs (moins une main) par le traqueur des ombres, malgré l’avertissement de dernière minute seconde que lui avait lancé son frère. Que l’on découvre être un Psyker latent, ce qui n’est pas un statut beaucoup plus enviable que punching ball à bully, si vous voulez mon avis. D’ailleurs, ce balourd de Dorn, aussi épais et dense mentalement qu’une fortification érigée par son saint patron, manque de se passer les nerfs en flinguant son sous-fifre, dont la prescience lui semble être la preuve d’une connivence entre Jaal et le Spyrien. Cependant, l’appel à l’aide de Mallin qui s’élève d’un tas de décombres à quelque distance du lieu de l’embuscade suspend le procès en trahison que Dorn était en train de conduire sur le pouce (ou le poing ? avec un nom pareil), et les quatre survivants partent en direction des cris pour tenter de secourir leur comparse…

Début spoiler…Qui bien évidemment, était mort depuis longtemps à leur arrivée, comme son cadavre crucifié et décapité l’atteste formellement. C’était une ruse du Chasseur, qui avait enregistré les derniers instants de sa proie, pour attirer le reste du gang dans un nouveau piège. Cette fois-ci, c’est l’hécatombe, et Dorn, Mikhal et Lan décèdent violemment, ne laissant que Jaal debout, mais en fuite, pour la team Orlock. Le rapport de force est déséquilibré, mais le Spyrien s’amuse trop pour sonner rapidement l’hallali, et il ne se doute évidemment pas que le teenager maigrelet qu’il finit par coincer sur une passerelle a plus d’un tour dans son cortex. Le stress de sa mort prochaine provoque une poussée télékinésique chez Jaal, ce qui fait un gros trou dans la plateforme, forcément branlante et rouillée, où le tête à tête avait lieu. Normalement pas un problème pour le Chasseur, dont l’armure a une fonction bat grappin, mais figurez vous que Jaal est un prodige psychique, comptant parmi ses nouvelles compétences celle de « l’auto-tune balistique ». Un nom compliqué et sans doute inventé de toutes pièces, qui veut dire qu’en se concentrant très fort, il est capable de réaliser des tirs proprement improbables grâce un correcteur de trajectoire venu tout droit du Warp (comme Jul, ce qui fait un autre point commun avec l’auto-tune). Vous devinez la suite : un hotshot improbable sur le filin du Spyrien, précipité dans l’abysse avec son armure dernier cri. Et même pas le sien en plus. Il n’avait pas reset les réglages, ce chien.

La nouvelle se termine, non pas sur des retrouvailles joyeuses à Orlock city, mais sur le constat par le reste du gang de la disparition de leurs ados. Jaal assiste de loin à la fermeture des portes du campement, ayant compris qu’en tant que Psyker, il n’avait plus sa place auprès de sa famille adoptive. Le début d’une existence de paria solitaire dans le sous-monde, sans doute courte et violente mais certainement riche en émotions, qui ne sera cependant pas narrée ici. ENDS.Fin spoiler

1 : Et son pronom est ‘it’, si vous voulez tout savoir. Be an ally.

AVIS :

Nouvelle histoire sur le passage à l’âge adulte dans l’univers pas tendre de Necromunda (il y a aussi ‘Mark of a Warrior’, pour ceux qui demandent), ‘Rites of Passage’ démontre que Gordon Rennie sait mettre en scène une nouvelle d’action de manière potable, ce qui n’est guère étonnant au vu de son passif d’auteur de comics. Rien n’est particulièrement mémorable dans ces quelques pages, mais tout tient de debout et s’enchaîne sans heurt ni incohérence, ce qui est déjà un niveau appréciable pour de la GW-Fiction. Si c’est une de vos premières lectures necromundesques, vous auriez pu tomber sur bien pire. Si vous êtes déjà familier avec cette riante planète, à la fois trop et absolument pas urbaine, vous auriez pu tomber sur bien mieux. Tout est affaire d’équilibrage, j’imagine.

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Sisters – N. Rutledge :

INTRIGUE :

La dernière empoignade auquel son gang d’Eschers a participé s’est mal passé pour Blades : malgré la victoire sans conteste obtenue contre la patriarchie, les féministes du sous-monde ont perdu l’une des leurs, Katz, la sœur de leur bien-aimée leader.e. Et même pas aux mains de l’ennemi qui plus est, mais bêtement et salement, la jouvencelle ayant glissé sur une flaque d’huile et étant tombée dans une mare de boue toxique. Tout le monde n’étant pas Harley Queen, c’en fut fait de Katz, qui aurait pourtant pu et dû retomber sur ses patz. Monde cruel.

Après avoir tenté sans succès de noyer son chagrin dans l’alcool (impossible quand on ne tient pas ce dernier), Blades décide de partir en mission de nettoyage dans les environs d’Ashcliff, le village qu’elle et ses filles « protègent » des menaces extérieures. À la fois pour s’occuper l’esprit, mais également pour montrer à ses subordonnées qu’elle est toujours la patronne, et ne pas laisser croire que la place de Pacha Mama est à prendre. Au menu de ce soir (après le fameux ragoût de Licksy, le barman sénile mais gentil du seul rade d’Ashcliff), un Zombie égaré, comme il en vient de temps en temps dans le voisinage. Guidé par le scout Ratskin qui a repéré la créature décérébrée, Blades part en chasse avec son fidèle fusil à pompe et une paire de lunettes de vision nocturne.

En chemin, le duo s’arrête chez le prospecteur Jakey, fils de Jake, fils de Joe, dont un des oncles a eu la mauvaise idée de braver le couvre-feu sans attestation, et s’est fait salement esquinter par le Zombie pour sa peine. Bien que Ma Honka, sa sœur, semble déterminée à soigner le blessé, les règles sont les règles et Blades se fait un devoir de les appliquer et de planter un stylet dans le cœur de l’inconscient inconscient. Le respect des gestes barrières, on connaît la chanson. Ceci fait, l’Escher de garde emboîte le pas à son guide indigène, qui l’emmène dans les galeries de la mine où le mort vivant s’est enterré, et qui se trouve être l’endroit où Blades et Katz ont passé une bonne partie de leur enfance à chasser l’araignée géante et le rat mutant. Que de souvenirs…

Début spoiler…Comme vous vous en doutez si vous savez comment une intrigue de nouvelle fonctionne, le Zombie en question se trouve être Katz. #SansBlague Il n’y a que Blades que cela surprend, et choque fortement, à tel point que c’est au Ratskin que revient la tâche de mettre fin aux souffrances errances de la revenant d’un tir de mousquet bien placé. Cette bonne action ne sera cependant pas récompensée, Blades ne pouvant supporter la sale blague qu’elle croit que le Ratskin lui a fait (il savait que c’était Katz et qu’elles étaient sœurs, mais n’a rien dit), ni prendre le risque qu’il révèle à tout le monde que Blades a probablement tué un innocent par excès de zèle, Katz n’étant techniquement pas un Zombie, mais quelque chose comme The Toxic Avenger.e (et donc non contagieuse, en tout cas pas de cette façon). Un tir de fusil à pompe a l’arrière du crâne règle l’affaire de façon définitive à défaut d’être élégante, laissant enfin toute latitude à Blades pour commencer/terminer son deuil. La morale pourrait être quelque chose comme ‘Souvent femme (à fusil) varie, bien fol qui s’y fie (bouffi)’. En tout cas, c’est empowering.Fin spoiler

AVIS :

Neil Rutledge livre une histoire qui lorgne franchement du côté du Western (une inspiration assez évidente de Necromunda), et qui se laisse lire sans problème malgré le manque total de surprise au niveau de l’identité du Zombie. Cette déception est toutefois compensée par le soin qu’a pris l’auteur de soigner l’authenticité de son récit, par exemple en incluant du jargon local (worms pour les habitants d’Ashcliff, scragger pour être tué…), et par la conclusion glorieusement immorale (c’est le véritable héros de l’histoire qui se fait descendre par derrière et pour couvrir la bévue de sa partenaire), et donc tout à fait adaptée, de cette nouvelle sororitaire (?).

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The Lake – T. R. Summers :

INTRIGUE :

Les dernières semaines ont été dures pour le gang des Brassers de Lord Orl, meneur Orlock qui se rêvait seigneur éboueur du sous-monde. Affaibli par une guerre territoriale constante contre les Goliaths de la Main Noire (encore eux1), les Orlocks ont de plus perdu leur précieux puits lors d’un récent tremblement de ruche, les laissant à la merci d’individus peu scrupuleux pour se sortir de ce mauvais pas. D’individus comme le Guilder Rorget Ahn, par exemple, qui a proposé à Lord Orl de s’associer dans une affaire a priori juteuse : la chasse aux mulk spiders infestant un petit lac souterrain que le même séisme qui a enfoui le puits des Brassers a rendu accessible, après des siècles coupé du reste de Necromunda. Les yeux de ces bestioles, semblables à des gemmes, sont très recherchés par les riches du haut de ruche, et leur vente devrait permettre aux Orlock de se remettre d’aplomb. Bien entendu, chasser des argyronètes géantes ayant colonisé une mare hautement toxique monté sur un pédalo fatigué (le semi rigide proposé par Rorget coûtait trop cher à la location) n’est pas une entreprise de tout repos, mais il en faut plus pour décourager nos hardis Gangers, qui jettent donc leurs lignes sur le plan d’eau de liquide sans tarder.

Les péripéties violentes et humides ne tarderont pas à leur tomber dessus comme un mange-visage de Catachan sur l’arrière-arrière-arrière374 petit fils de Logan Paul2, aux inévitables morts causées par l’agressive faune locale venant s’ajouter celles provoquée par l’épique bataille navale entre Brassers et Main Noire, également embauchés par ce traître de Rorget Ahn pour cette mission lacustre. Lord Orl, en bon leader, n’hésite pas une seconde à mouiller le maillot, mais sans doute plus qu’il ne l’avait prévu. Une baignade involontaire dans les boues de vidange violacées faisant office de lac lui est en effet imposée à la suite de l’explosion de son canoë, et s’il parvient à regagner son QG avec ses quelques hommes restants et un sac d’yeux de mulk spiders pour leur peine, il ne tarde pas à développer une forte fièvre et une purulence de mauvais aloi, que les bons soins du Dokker Hack’n’Slash ne parviennent pas à traiter. Comble de déveine, les précieuses gemmes collectées lors de la mémorable partie de pêche ne tardent pas à fondre comme neige radioactive au soleil, laissant les Brassers dans une situation encore plus désespérée que précédemment.

Fort heureusement, il reste encore sa légitime vengeance contre Rorget Ahn pour motiver Lord Orl, de moins en moins présentable à mesure que les jours passent et que les mutations causées par sa baignade impromptue se manifestent. S’étant surpris à boulotter goulument un bras gardé par Dokker comme pièce détachée dans son officine (on ne sait jamais de quoi on aura besoin pour rafistoler un Ganger de passage), Orl décide de s’isoler du reste de ses hommes pour leur propre bien, et retourne vers le lac, inexplicablement attiré par une pulsion inconsciente… ou peut-être par le secret espoir de retrouver l’Apple Watch qu’il a perdue sur place lors de sa dernière visite…

Début spoiler…Une nouvelle séquence de baignade, suivie d’une épiphanie aussi totale que brutale et non expliquée (il arrive sur une île au milieu du lac et paf, l’illumination le frappe), mènent assez logiquement à la réalisation par Lord Orl et le lecteur que les mulk spiders qui vivent dans cet écosystème unique en son genre ne sont autres que les formes mutées des malheureux qui ont bu la tasse et la crasse mutagène, cancérigène et reprotoxique de cette onde véritablement amère3. D’ailleurs, notre héros reconnaît son bras droit R’daff, emporté par le fond par une araignée entreprenante lors de la première expédition, parmi le comité d’accueil qui s’est réuni pour lui souhaiter la bienvenue dans sa nouvelle communauté. Acceptant son sort sans se plaindre, Lord Orl a toutefois une dernière virée dans le monde civilisé à faire avant de prendre définitivement sa retraite et d’aller faire des bulles dans l’eau avec ses petits copains. Sa cible : ce bougre de Rorget Ahn, à qui il offre gracieusement le pot de l’amitié pour solde de tout compte. Je vous laisse deviner ce qu’il y avait dans le verre…Fin spoiler

1 : Déjà croisés dans ‘The Day of Thirst’, du même auteur. Comme on le verra plus loin, les Goliaths de Krug n’arrivent pas à prendre les points à l’extérieur, ce qui est embêtant quand on lutte pour le maintien la survie.
2 : Youtuber trololol comme son aïeul.
3 : Les mystérieux « Gene Lords », et leur sale manie de collecter et stocker l’ADN des formes de vie croisant leur route dans la cuve recherche qui est devenue ce fameux lac après des millénaires d’abandon, sont à blâmer ici.

AVIS :

Summers mène assez bien sa barque (mouahaha) avec ‘The Lake’, qui présente les deux qualités appréciables pour une nouvelle d’une intrigue n’étant pas prévisible des pages à l’avance – au moins dans la première moitié du récit – et d’une construction bien fichue, où la boucle se retrouve bouclée à la fin du récit. On appréciera également le cadre assez original de cette histoire pour une soumission siglée Necromunda, sans doute l’une des franchises de la GW-Fiction où l’on s’attend le moins à ce qu’un « lac » serve de décor. Le seul reproche que je ferai à Summers est relatif à son inclusion très artificielle, et à mes yeux inutile, des « Gene Lords » dans son propos. Pourquoi faire entrer une faction de démiurges mystérieux et une réalisation proprement miraculeuse de leur implication par Orl dans ses déboires, quand un bon vieux recours au Chaos (après tout, il est question de mutation ici) aurait pu faire l’affaire plus simplement et « proprement » ? Comme le mieux, le tarabiscoté est l’ennemi du bien, et je pense que ‘The Lake’ aurait gagné à rester en terrain fluffique connu. Mais le résultat reste tout de même satisfaisant.

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Rat in the Wall – A. Hammond :

NDA_Rat in the WallsINTRIGUE :

Nous retrouvons Knife-Edge Liz, l’héroïne vengeresse de ‘A World Above’ dans un état comparable à celui dans lequel elle a passé la majeure partie de cette précédente nouvelle : pissant le sang, trop faible pour tenir debout et sujette à des évanouissements fréquents. La constance, c’est la marque des plus grand.e.s. Ayant troqué ses frusques d’Escher pour une exo-armure Spyrienne aussi fatiguée qu’elle-même, et les profondeurs rassurantes du sous monde pour les tuyaux d’aération de la haute ruche, Liz sévit depuis plusieurs jours parmi les rupins de Primus, cherchant à faire payer l’élite necromundienne la mort tragique du reste de son gang. Une quête des plus nobles, mais dont on se demande bien comment elle est mise en œuvre par l’intéressée, qui ne dispose que d’informations très limitées sur l’identité du responsable de ses malheurs, le puissant et mystérieux Terrak Ran’Lo. On supposera que l’intermédiaire avec lequel ce dernier organisait des virées sanglantes dans le sous monde, et que Liz a proprement massacré hors champ à la fin de ‘A World Above’ (Aldus Harkon), lui a donné quelques tuyaux avant de passer l’arme à gauche. Mais la piste reste assez mince pour une sauvageonne comme notre Lison, que son existence de ganger n’a pas préparée à opérer chez les bourges.

Après quelques pénibles reptations, Liz finit par entrer par effraction dans une résidence de haut standing, et s’effondre dans la salle de bains avant d’avoir pu déboucher le flacon de mercurochrome. Elle a toutefois de la chance de sa torpeur : au lieu de se faire sommairement exécuter par le propriétaire des lieux en plein coma, ou simplement abandonner dehors sur un tas d’ordures (biologiques, car on fait le tri sélectif en haut de spire), son hôte entreprend de la remettre sur pied avec bienveillance et diligence, se permettant même de lui effacer la plupart de ses disgracieuses cicatrices au passage. Bien évidemment, notre bon samaritain, qui se présente comme Kassat Ran’Lo, n’est en rien désintéressé. Rival de son parent Terrak, qui occupe un siège au conseil familial sur lequel il lorgne avec insistance, Kassat souhaite faire assassiner son encombrant cousin par Liz, à la faveur d’un bal qu’il organisera prochainement. Après avoir d’abord refuser de marcher de la combine, notre Escher convalescente finit par comprendre qu’elle n’a guère le choix, et qu’accepter cette mission lui donnera l’occasion d’expliquer sa manière de penser à Terrak, ce qui serait joindre l’utile à l’agressable.

Au bout de nombreuses leçons d’élocution et de menuet, Liz est fin prête à l’action. Le plan de son commanditaire est simple : faire entrer son assassin sur les lieux des réjouissances grâce à ses relations éloignées pour brouiller les pistes, et cacher un pistolet dans la sculpture de glace trônant au milieu du buffet pour contourner la sécurité. Cela aurait été presque intelligent si Kassat et Liz n’avaient cru bon d’aller discuter pendant le bal (sans que rien de très important ne le justifie en plus de cela), ce qui aurait donné une magnifique piste à exploiter aux enquêteurs si la nouvelle avait été une novella ou un roman. Ayant laissé Kassat s’eclipser de la petite sauterie, Liz passe enfin à l’action, faisant diversion en libérant un duo de gladiateurs à la fois enchaînés et déchaînés afin de pouvoir briser la glace avec Terrak Ran’Lo, et pas nécessairement dans cet ordre. Petite complication au programme, un Chasseur de Sorcières importun s’est joint aux réjouissances sans prévenir, mais un test de sauvegarde d’armure réussi de la part de notre tueuse lui permettra de remporter le duel de tir avec le servant des Ordos. Dès lors, régler son compte à ce vieux croulant de Terrak n’est qu’une formalité, comme échapper à une horde de gardes armés jusqu’aux dents pour rejoindre la planque de Kassat. La magie des ellipses…

Début spoiler…Sa mission accomplie, Liz aurait dû se douter que son employeur se retournerait contre elle, mais c’était sans compter son bon cœur et/ou sa tête vide. Si la fourberie de Kassat ne s’avère guère surprenante, la révélation de son identité secrète l’est davantage. C’est bien Terrak Ran’Lo qui a commandité son propre meurtre, ou plutôt celui d’un rival de la maison Ulantis, qui militait ironiquement pour l’interdiction des safaris urbains de la jeunesse syprienne. Le pistolet en sa possession ne fonctionnant évidemment pas contre son commanditaire, Liz fait ce qu’elle sait faire de mieux dans ces cas là, à savoir l’improvisation explosive. Un tir dans le velux du bureau de Terrak, sans doute situé très haut dans la stratosphère, provoque en effet une aspiration telle que les deux larrons se retrouvent en mauvaise posture, Liz accrochée à la rembarde et Terrak cramponné aux basques de la première1. Malgré les jérémiades de Ran’Lo, moins faraud depuis qu’il fait la planche à 10.000 mètres au dessus du sol, Liz préfère tout envoyer balader, sacrifiant ainsi sa vie pour accomplir sa vengeance. La légende raconte qu’elle plâne encore autour de la spire de Hive Primus à ce jour…Fin spoiler

1 : Car les rembardes n’ont pas de basques, c’est connu. 

AVIS :

Conclusion de l’arc narratif débuté avec ‘A World Above’, ce ‘Rat in the Walls’ (clin d’œil à Lovecraft ?) cumule comme son prédécesseur bonnes idées et mise en œuvre poussive. Les points forts de cette nouvelle (révélation bien amenée de l’identité de Kassat, conclusion tragico-poétique pas si courante pour une soumission de la Black Library) passent malheureusement au second plan, masqués derrière manquements d’une intrigue (trop) visiblement au service de l’idée générale que Hammond avait de son histoire : le choc des civilisations entre une ganger Escher mal dégrossie mais droite dans ses bottes, et un notable de la spire, aussi raffiné que retors. Outre les questions de pure logique que le récit passe avantageusement sous silence1, le simple fait que Liz puisse faire illusion comme courtisane spyrienne en l’espace de quelques jours/semaines me semble très peu vraisemblable. On peut aussi regretter que la longueur limitée de ce texte n’ait pas permis à Hammond de développer un peu plus certains passages, comme l’apprivoisement de Smeagol Liz ou l’assassinat de Terrak Ran’Lo, ce qui aurait pu fluidifier/épicer davantage son propos. En résumé, un potentiel certain mais une exécution mal maîtrisée.

1 : Ou le monstrueux coup de chance de Terrak que sa Némésis vienne roter du sang sur le lino de sa salle de bain et nulle part ailleurs dans une cité ruche de milliards d’habitants…

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Descent – S. Jowett :

INTRIGUE :

La cérémonie de bénédiction des prochains Chasseurs (faut pas dire Spyriens, c’est un terme ploutophobe des raclures de fond de ruche) de la Maison Ty, à laquelle assistait le cousin Kayne (Ty Helios de son nom complet), est brutalement et violemment interrompue par l’irruption d’une exo-armure Orrus dans le temple où se tient l’office. Plus rayée qu’un châssis de Clio de 90 ayant été laissé à l’abandon sur le parking d’une cité sensible, l’armure ouvre le feu sur la noble assistance et provoque un mouvement de foule mortel mais compréhensible. Il faut l’intervention pleine de sang froid de Kayne pour mettre fin au massacre, le nobliau ramassant un fusil tombé au sol pour placer un magnifique throat shot sur l’invité surprise. Ce dernier se révèle, à la stupéfaction générale et à l’embarras de son tueur, Ty Helios Bael, frère de ce dernier et supposé mort dans le sous monde depuis des semaines. Kayne a en effet été le seul Chasseur de son équipe à remonter dans la Spire lors de sa propre initiation, et a raconté à sa maisonnée que ses comparses avaient été victimes d’une embuscade de Gangers à laquelle il avait été le seul à réchapper. Une version battue en brèche par le retour fracassant de Bael, qui a le temps de révéler avant de mourir que les Chasseurs perdus attendent que le sieur Kayne leur fasse l’honneur d’une visite dans les meilleurs délais, invitation que le scion de la maison Ty ne peut pas refuser. Il en va (doublement) de son honneur.

Nous suivons alors les descentes (celle réalisée avec Bael et Cie, et celle entreprise avec les Chasseurs dont la bénédiction a été interrompue) de Kayne dans le sous monde, chacune riche en aventures, affrontements, mystères et trahisons. En parallèle, et parfois tangente, deux autres arcs narratifs sont déroulés par Simon Jowett dans cette longue novella : celui du pasteur Vex, Rédemptionniste Cawdor repenti ayant troqué son fanatisme (et son lance-flamme) pour la protection des mutants de bas de ruche (et un bolter), et celui d’une mystérieuse affliction progressant dans le sous monde, transformant ses victimes en zombies décérébrés mais souriants, s’exprimant avec des cliquetis insectiles et semble-t-il colonisés par une technologie subdermale impie. Que s’est-il vraiment passé lors de la première Chasse de Kayne ? Parviendra-t-il à retrouver ses compagnons disparus ? Vex et ses miliciens peuvent-ils tenir face à la croisade lancée par les Cawdors contre le village de Hope’s End ? Qui est responsable de la techno-épidémie qui sévit dans les zones les plus reculées de la ruche Primus, et en quel but ? Pour avoir la réponse à ces questions, il va falloir descendre

AVIS :

Novella singulière et conséquente (111 pages) venant clôturer le recueil ‘Status : Deadzone’, ‘Descent’ est une expérience de lecture comme la Black Library en réserve parfois, et sans doute la meilleure soumission relative à Necromunda qu’il m’ait été donnée de lire à ce jour. Simon Jowett embarque son lecteur dans une visite guidée de la ruche Primus, depuis l’opulence feutrée et les cabales mortelles des dynasties de haut de spire jusqu’aux paysages désolés et dévastés du sous monde, où la loi du plus fort et du plus violent règne sans partage. On y croise la plupart des factions du jeu (Spyriens, Cawdor, Escher, Orlock, Goliath, Delaque, Scavvies), ainsi que de remarquables extras, comme l’équipage du Queequeg, un sous marin sillonnant les mers toxiques de la planète pour aller chasser la raft spider1. Sans doute pas ce qu’on fait de plus intuitif en matière de mise en scène necromundesque, mais une superbe manière d’élargir un peu l’angle de vue classique de la lutte entre gangs rivaux pour un bout de terrain vague et un pack de bière, que la majorité des auteurs ayant collaboré à cette franchise ont utilisé sous une forme ou une autre. Une des réussites de Jowett est ainsi de rappeler que Necromunda n’est pas seulement une arène de combats urbains, mais un monde ruche bien intégré au sein de l’Imperium, et que le background de Warhammer 40.000 peut tout à fait trouver sa place dans une histoire centrée sur la ruche Primus de la planète de l’araignée. SCS détraqués, Inquisiteurs circonspects et Space Marines sans pitié font ainsi partie intégrante de l’intrigue de ‘Descent’, que j’ai choisi à dessein de ne pas relater de façon exhaustive afin de ne pas gâcher la découverte de cette pépite oubliée de la GW-Fiction2. Car oui, c’est de ce niveau. Et ça se respecte.

1 : Un cross over audacieux mais percutant entre le steam punk grimdark et ‘Moby Dick’.
2 : ‘Descent’ n’a été publié que dans ‘Status : Deadzone’, alors que la plupart des nouvelles au sommaire de ce recueil ont été rééditées dans ‘Necromunda Omnibus’. C’est assez drôle de voir que la BL a choisi de se passer du pire ‘Bad Spirits’ et du meilleur dans la sélection du contenu de cette anthologie…

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Et voilà qui termine cette revue de ‘Status : Deadzone‘, premier recueil totalement urbain de la Black Library. Comme toujours, il y a du bon et du moins bon à retenir de cet opus, et je dois avouer que, malgré mon peu d’affinité pour la franchise Necromunda (sentiment dû à la sensation que rien de vraiment radical ne peut se passer dans cet univers de guerre des gangs), cet ouvrage m’a plutôt plu. Je mets ça au crédit de la qualité et l’inventivité de certaines soumissions et auteurs, à commencer par l’incontournable ‘Descent’ de Jowett, qui justifie l’acquisition du bouquin a elle seule, mais le diptyque ‘A World Above‘/’Rat in the Walls‘ est assez sympathique dans l’esprit, tout comme les récits d’initiation de ‘Rite of Passage’ et ‘Mark of a Warrior‘. On peut aussi mettre au crédit de Gascoigne et Jones, les deux éditeurs en charge de la sélection des textes, la claire volonté de faire figurer le plus grand nombre de factions possibles dans cette anthologie, qui mérite donc doublement son nom. Si les Delaque et les Van Saar font pâle figure (normal pour les premiers vous me direz) par rapport aux Goliaths, Eschers, Scavvies et Spyriens, personne n’est totalement laissé pour compte, comme cela arrive malheureusement assez souvent dans les recueils consacrés aux autres franchises de la GW-Fiction. Bref, ‘Status : Deadzone‘ est une collection de nouvelles siglées Necromunda tout ce qu’il y a de plus honorable pour une production Black Library, et un accès convenable et sûr aux désolations pittoresques et impitoyables du sous monde pour les curieux et les adeptes de jungle urbaine. N’oubliez pas votre stubber, par contre…