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BLACK LIBRARY CELEBRATION 2024 [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de la Black Library Celebration 2024, le recueil de courts formats de GW-Fiction offert annuellement à tous les quidams curieux de découvrir, ou redécouvrir, les travaux des auteurs de la BL1. Déclinée en trois langues (anglais, allemand et français), cette mini anthologie propose à chaque fois cinq nouvelles tirées du vaste catalogue de la GW-Fiction, et « sensées » illustrer la diversité de ce dernier. Les guillemets sont ici de rigueur car si la BLC 2024 en version originale accomplit parfaitement cette mission en alignant des représentants de toutes les franchises majeures de la maison d’édition de Nottingham (40K, l’Hérésie d’Horus, Age of Sigmar, Warhammer Horror et Warhammer Crime), les ouvrages français et allemands se cantonnent eux à 40K et à l’Hérésie d’Horus, ce qui est encore plus restrictif que l’année précédente (chroniquée ici), où Age of Sigmar avait encore droit de cité, ou de citation. Les Royaumes Mortels n’auront jamais été plus inaccessibles aux non anglophones qu’en 2024, et c’est bien triste pour cet univers.

1 : Il faut tout de même acheter un petit quelque chose sur le site de Games Workshop pour recevoir une version papier, ou sur celui de la Black Library pour pouvoir télécharger toutes les versions numériques. Comme les contenus diffèrent en fonction de la langue, je ne saurais trop vous conseiller de passer par le site de la BL si vous voulez en avoir pour votre argent.

Black Library Celebration 2024

Si on s’attarde sur le sommaire de ces trois livrets, on remarque que c’est Mike Brooks qui fait figure de figure tutélaire de ce millésime, puisqu’une nouvelle mettant en scène l’ineffable Ufthak Blackhawk (‘Tant qu’y a le Warp, y a Moyen’ // ‘Wo da Warp is’, is’ auch ‘n Weg’) ou son ambitieux sidekick Snaggi Littletoof – représenté en couverture – (‘Packin’ Heat’) est présente dans toutes les versions2. Pour le reste, les contenus varient fortement et c’est sans surprise la VO qui s’en tire le mieux aussi bien en diversité (voir ci-dessus) qu’en nouveautés, aucune des nouvelles anglaises n’étant plus vieille que 2022. Les versions française et allemande se partagent quant à elles de plus antiques histoires, dont deux (‘La Tour Foudroyée’ // ‘Der vom Blitz getroffene Turm’ et ‘La Pureté de l’Ignorance’ // ‘Die Reinheit der Ignoranz’) en commun.

Comme tous les ans, je m’attarderai particulièrement sur le caractère « pédagogique » des nouvelles sélectionnées par la BL pour figurer dans ces recueils destinés à un public novice, afin de juger de la pertinence du choix des pontes de Nottingham, en plus des traditionnels retours sur l’intrigue et la qualité de ces histoires. Le cadre étant posé, il est temps de se mettre à l’ouvrage.

2 : Cette mise en avant n’a rien d’étonnant quand on sait qu’Ufthak Blackhawk bénéficie également de sa propre figurine à l’occasion de la Black Library Celebration 2024.

Black Library Celebration 2024

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Packin’ Heat – M. Brooks [40K] :

INTRIGUE :

Packin' HeatDans l’entourage fourni et bigarré du Big Boss Ufthak Blackhawk, il y a au moins un individu qui n’adule pas le colosse Blood Moon dont le ramage se mesure au plumage blindage : le Grot Snaggi Littletoof. Ayant rejoint à son corps défendant la TekWaaagh! après avoir traversé le portail dimensionnel de trop (‘Brutal Kunnin’’), Snaggi a trouvé en Ufthak sa Némésis absolue. Très ambitieux, il avait pour projet de devenir le Boss de sa propre bande, et comptait sur son intellect supérieur pour compenser un physique peu imposant. Manque de bol, Ufthak est au moins aussi malin que lui, et pourrait écraser l’avorton d’un seul doigt : face à ce qu’il considère comme une concurrence déloyale (depuis quand les Orks ont le droit d’être intelligents, hein ?), Snaggi est obligé de ronger son frein, et guetter une opportunité pour se débarrasser de son puissant rival.

Ayant gagné les bonnes grâces de Nizwick, le Grot personnel d’Ufthak, qu’il soupçonne de cacher un esprit retors derrière une apparente stupidité (et pire, un attachement à sa condition servile !), Snaggi croit tenir une chance lorsque son nouveau meilleur copain lui révèle qu’il a « un plan pour Ufthak », et l’entraîne en direction d’une caverne située à proximité du camp. Il s’agit d’un lieu que les Exodites Eldars ayant eu le malheur d’occuper la planète avant l’arrivée de la TekWaaagh ! ont défendu âprement, et dont ils ont fait s’effondrer l’entrée pour empêcher les peaux vertes de venir le profaner. Guère connus pour leur patience, surtout lorsqu’il reste des ennemis à castagner, les Orks ont eu tôt fait de se désintéresser de cette colline caillouteuse, mais les Grots sont d’une nature plus attentive, et Nizwick est persuadé qu’un trésor est caché dans les galeries souterraines. Profitant de leur petite taille pour se glisser dans une anfractuosité laissée ouverte par l’éboulement, les deux canailles partent donc à l’aventure.

Si pour Nizwick, il ne s’agit que d’une sympathique balade en compagnie d’un bon copain, le suspicieux Snaggi se fait des nœuds au cerveau à force de surinterpréter chaque action de son camarade, et de tirer des plans sur la comète au moindre changement de luminosité et de température (véridique). Ça doit être épuisant d’être lui. Les Grots parviennent finalement dans une caverne décorée de peintures rupestres, et surplombant un lac de lave du plus bel effet, puis poursuivent leur chemin jusqu’à une petite salle où, miracle, semble les attendre une ancienne relique. Il s’agit d’un fusil à fission, sans doute oublié sur place par un Dragon de Feu venu faire un EVG il y a quelques millénaires, et Snaggi LE VEUUUUUT. Il se voit déjà vaporiser tous les Orks sur son chemin pour saisir le pouvoir et mener la TekWaaagh! à la place d’Ufthak, mais encore lui faudra-t-il mettre les griffes sur cette arme miraculeuse. Elle est en effet défendue par un trèèèèèès vieux gardien (et peut-être Gardien) tellement hors de forme qu’il réussit l’exploit de se faire vaincre en combat singulier par un Grot. Cela ne l’empêche pas de rigoler lorsque le secourable Nizwick se saisit du fusil pour aider Snaggi à se défaire de lui, pressentant la catastrophe qui s’abat sur les peaux vertes après qu’ils aient fait feu (haha). L’onde de choc provoque en effet une réaction en chaîne qui réveille le volcan et commence à faire s’effondrer la caverne, forçant les Grots à se carapater en vitesse vers la sortie. Ils parviennent à se tirer de ce mauvais pas, mais au grand dam de Snaggi, c’est Nizwick qui monopolise la possession de leur trouvaille, ce qui le force à être spectateur de la surprise que ce dernier réserve à Ufthak à son retour…

Début spoiler…Au lieu de profiter de l’inattention du Boss pour le vaporiser depuis un coin sombre, comme LUI aurait fait, Snaggi à l’horreur de constater que son nigaud de comparse voulait simplement faire un cadeau à Ufthak, parce qu’il l’aime bien. Comble de malheur, l’Ork a tôt fait de réduire la précieuse arme en miettes, offensé qu’on ait pu penser qu’il ait besoin de matos Eldar pour briller en société. Une occasion en or gâchée par un authentique crétin que Snaggi voyait à tort comme un rival en manigances… le coup est rude pour Mini Molaire. Cette leçon valait bien un fromage fusil à fission, sans doute…Fin spoiler

AVIS :

Parmi tous les auteurs ayant contribué à la GW-Fiction, seule une fraction a eu l’occasion de mettre en scène un héros récurrent. Encore moins nombreux sont ceux qui ont consacré aux sidekicks de ce dernier leurs propres (mes)aventures1. Mike Brooks a un peu précipité les choses en propulsant sur le devant de la scène Snaggi Littletoof, Grot ayant eu son quart d’heure de gloire dans le roman ‘Brutal Kunin’’, alors que la mini-franchise qu’il a crée ne comptait qu’un long et deux courts formats. C’est en tout cas mon avis à la fin de la lecture de ce ‘Packin’ Heat’, qui ne m’a que très moyennement captivé, en grande partie parce que Brooks supposait son héros beaucoup plus intéressant qu’il ne l’était réellement. Alors qu’il avait réussi à contextualiser sa galerie de peaux vertes en goguette dans ‘Road Rage’, il n’a pas fait beaucoup d’efforts ici pour permettre au lecteur n’ayant jamais côtoyé le rusé Snaggi de s’investir dans ce personnage vraiment très caricatural (mais après tout, c’est un Grot). Premier point négatif.

L’autre défaut manifeste de conception de ‘Packin’ Heat’ est la fastidieuse tendance de Mike Brooks à faire commenter chaque action de l’intrigue par un Snaggi paranoïaque à l’extrême. Nos deux héros ne peuvent littéralement pas faire un pas sans qu’on ait droit à un paragraphe entier sur les états d’âmes de Littletoof, qui pense toujours qu’on essaie de lui nuire, ou qui réfléchit à comment nuire à autrui. Je reconnais que c’est sans doute comme ça qu’un Grot fonctionne, mais était-il nécessaire de répéter ce schéma ad nauseam ? A moins que cette nouvelle ait été écrite pour une audience de poissons rouges (très intelligents pour le coup), quelques mentions en début d’histoire auraient à mon sens largement suffit pour planter le décor, et leur absence par la suite aurait permis de fluidifier le déroulé de l’intrigue – qui est finalement assez simpliste, quand on la compare au nombre de pages qu’elle couvre.

Bref, je sors aussi déçu de cette nouvelle que son personnage principal, ce qui m’étonne pour une soumission de Brooks : le punk de la BL m’avait habitué à mieux que ça. Notons tout de même que ‘Packin’ Heat’ est la première publication de la Black Library dans laquelle les Squats Ligues de Votann apparaissent. C’est bien la seule raison de s’en souvenir.

1 : On peut songer aux nouvelles consacrées aux suivants de Gregor Eisenhorn (‘Playing Patience’) et Gideon Ravenor (‘Lepidopterophobia’), ou à ‘A Mug Recaf’ et ‘The Smallest Detail’, starring la légende Jurgen (l’assistant de Ciaphas Cain).  

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Maintenant que ‘Warboss’ est véritablement disponible (alors que l’ouvrage n’avait bénéficié que d’une sortie limitée au moment où cette nouvelle avait été initialement publiée), les critiques que j’avais formulées sur la difficulté pour le lecteur de resituer Snaggi Littletoof ne sont plus aussi valides qu’elles avaient pu l’être. Cela dit, il est permis de douter que le public non-initié auquel la Black Library Celebration 2024 est destinée soit particulièrement au fait des liens entre ce petit chenapan et son nouveau Boss, Ufthak Blackhawk. Comme ce dernier est à la fois plus intéressant en tant que personnage, et plus connu du grand public, j’aurais préféré que la Black Library porte son choix sur une des deux nouvelles que Brooks a dédié au personnage (‘Where Dere’s Da Warp Dere’s A Way’ ou ‘Road Rage’). Une fois n’est pas coutume, ce sont donc les versions française et allemande qui s’en sortent le mieux.

A COMPLETER PAR :

Les romans ‘Brutal Kunnin’ // ‘Ruze Brutale’, ‘Warboss’ // ‘Chef de Guerre’ et  ‘Da Big Dakka’ // ‘Eul’ Gros Dakka’, et les nouvelles ‘Where Dere’s Da Warp Dere’s A Way’ // ‘Tant qu’y a le Warp, y a moyen’ et ‘Road Rage’ (non traduite), tous signés de Mike Brooks.

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The Waste, the Worm, and the Witch – G. Kloster [AoS] :

INTRIGUE :

The Waste, the Worm and the WitchNous retrouvons la vampire Ruinemâne Nyssa Volari peu de temps après les événements de ‘Anger & Ash’ et la perte de sa mère de sang, Vasara, brûlée au dixième degré lors de l’embuscade tendue par les nomades de la bande du Poing. Au grand déplaisir de notre héroïne sanguine, Vasara a décidé d’occuper sa non non-vie à hanter ses pensées et à hurler des choses incohérentes dans sa tête, ce qui menace de faire tomber sa belle-fille dans la folie la plus profonde. Pour ne rien arranger, le petit royaume vampirique gouverné par le père de sang de Nyssa, Corsovo, est menacé par les incursions répétées des Chercheurs de Soleil, une faction humaine un peu trop vertueuse et éclairée au goût des buveurs de sang. La nouvelle s’ouvre ainsi par une escarmouche durant laquelle la schizophrénie galopante de Nyssa l’empêche de mener à bien l’attaque surprise qu’elle avait planifiée, permettant à sa proie, la Lieutenant Takora, d’échapper une nouvelle fois à ses crocs.

De retour au Palais Gris qui sert de capitale au domaine paternel, Nyssa apprend de la bouche de l’un de ses gardes du corps (Erant) qu’il connaît une sorcière ayant le pouvoir de parler avec les morts, et qui pourrait donc aider sa patronne à se débarrasser de sa squateuse mentale. N’ayant plus grand-chose à tuer et du temps à perdre (et l’inverse), Nyssa s’embarque dans cette quête Doctolibesque, accompagnée de ses fidèles gorilles (Erant, donc, et sa comparse Rill). Après un trekk sans histoire ni ravitaillement dans les plaines cendreuses qui entourent le volcan Temero, le trio finit par croiser la route de la sorcière de la décharge1, qui fait son office de PNJ et demande à ce que lui soit remis un croc de verre de boue d’une longueur respectable avant de consentir à aider Nyssa. Les Ruinemânes partent donc sur la zone de farmage de cette noble bestiole, un lac peu profond situé à quelque distance.

Comme on pouvait s’y attendre, la mission n’est pas aussi simple qu’il n’y paraissait sur le papier. Les vers de boue en question sont en effet très coriaces, et ont la sale tendance à faire repousser les extrémités dont les vampires les amputent à grands moulinets d’épée aussi vite qu’ils en sont privés. Cela ne serait pas un gros problème pour des bretteurs de la classe de Nyssa et compagnie si les crocs des individus tailladés n’étaient pas d’une taille insuffisante pour satisfaire à la demande de la sorcière, et ne se dissolvaient pas dans l’air une fois prélevés. Quand ça veut pas, ça veut pas.

Le rapport de force s’inverse lorsque the mother of all mudworms fait son apparition, tel un boss de fin de donjon après que ses minions aient été vaincus. D’une taille bien supérieure à celle de ses congénères, Lombricator a également les crocs, ce qui est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle pour les chasseurs de vampires. Il faudra une coopération sans faille entre Nyssa, Erant et Rill pour parvenir à tronçonner une longueur convenable du ténia géant, dont les dents plantées dans le bras de Miss Volari au cours de la bataille resteront heureusement en un seul morceau après que le trio ait pris la poudre d’escampette.

De retour devant la sorcière, Nyssa lui remet la quenotte demandée, et obtient en échange un conseil de psychiatre (« faîtes le deuil de votre perte ») en lieu et place du rite nécromantique trop stylé qu’elle espérait recevoir. Cela chagrine fortement notre héroïne, qui décide de faire goûter à cette charlatan sa propre médecine en lui enfonçant le croc dans la jugulaire, mais s’en trouve empêchée par la disparition soudaine (et salutaire) de cette dernière – la sorcière, pas la molaire. Nyssa se rend cependant compte peu après qu’il y avait de la logique dans la folie de l’enchanteresse, puisque la voix de sa mère semble désormais être consciente de son état, et consent à ne plus hurler « AU FEEEEEEEEEEEUUUUUUUUUU2 » à tout bout de champ, comme elle faisait auparavant. A la place, elle lui prodiguera ses sages conseils depuis l’outre-tombe, comme la mère attentionnée – mais insupportable – qu’elle était jusqu’à son regrettable accident. Pas l’idéal pour une esprit libre comme Nyssa, mais un progrès certain par rapport à sa précédente condition.

1 : Witch of the Waste en V.O., ce qui sonne mieux en plus d’être un clin d’œil au Magicien d’Oz.
2 : Vasara semble également détester cordialement une certaine Lira, qui l’aurait trahie et dont elle souhaite se venger. Il est probable que ce personnage apparaisse dans la suite de la série, je me permets donc de le mentionner ici.

AVIS :

Deuxième épisode des aventures de Nyssa Volari, ‘The Waste…’ se révèle être une side quest sans beaucoup d’intérêt, ce qui est dommage car Gary Kloster aurait pu utiliser cette nouvelle pour contextualiser un peu plus ses personnages, leurs relations et leurs histoires. L’avantage de son approche est qu’il n’y a pas besoin d’avoir lu ‘Anger & Ash’ pour faire sens de cette histoire, mais le résultat n’est pas spectaculaire, ni même très utile pour la suite de la série (à moins que la voix de mommy Vasara joue un rôle par la suite). Si Kloster veut concurrencer le Cado Ezechiar de John French, il va falloir qu’il se donne un peu plus de mal.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme dit ci-dessus, ‘The Waste…’ a pour lui d’être accessible aux nouveaux venus, et contre lui d’être moins intéressant que ce que John French nous a donné avec ses nouvelles consacrées à Cado Ezechiar, autre vampire en vogue des Royaumes Mortels au moment où cette chronique est écrite. Je comprends très bien la stratégie de diversification opérée par la Black Library par la mise en avant d’une nouvelle héroïne (Cado Ezechiar ayant eu le droit au même traitement en 2022), mais c’est le lecteur qui en sort lésé, à mon humble avis.

A COMPLETER PAR :

Le roman ‘The Last Volari’ et la nouvelle ‘Anger and Ash’ (non traduits), par Gary Kloster.

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The Shel’tain Affair – J. Reid [HH] :

INTRIGUE :

The Shel'tain AffairComme pour Faramir longtemps avant elle, c’est au tour d’Amendera Kendel de prouver sa valeur. Fraîchement nommée Agentia Tertius par Malcador le Sigilite, sa première mission la place en effet loin de sa zone de confort (massacrer des démons et faire vomir des Psykers), car elle nécessite une approche subtile que l’ex-Sœur du Silence est bien loin de maîtriser. Envoyée enquêter sur les agissements du Haut Duc Ceithyr, dont la tête ne revenait pas à l’acariâtre Régent de Terra pour une raison qu’il n’a pas daigner lui expliquer, Amendera n’a pas la moindre idée de comment s’y prendre pour percer à jour le honteux petit secret de son hôte, qui se fait un plaisir de lui offrir une visite guidée de sa distillerie de whisky et de sa ferme de cyber-Highland (on suppose qu’il pousse le vice jusqu’à lui offrir du haggis, le monstre) pour montrer qu’il n’a rien à cacher à l’adjointe de Malcador. Après quelques heures infructueuses, Kendel décide de plier les gaules et d’aller confesser sa nullité auprès de son employeur – en espérant qu’il ne mettra pas fin à sa période d’essai – et accepte l’offre de Ceithyr d’être raccompagnée en voiture jusqu’à son Arvus.

Les choses prennent toutefois un tour aussi désagréable qu’intéressant lorsque le chauffeur du Duc tente de lui coller un pruneau dans le buffet, avant de déclencher la bombe cachée sous la carrosserie du véhicule (une option pratique quand on veut se débarrasser d’un invité indésirable… et c’est à peu près tout), qui, si elle épargne notre héroïne, pique toutefois son intérêt professionnel et la motive à retourner dans le manoir de son hôte indélicat. Considérant à juste titre qu’il vaut mieux faire profil bas vu les circonstances, Kendel passe par l’entrée de service et arrive dans le sous-sol du Duc, où elle ne met pas longtemps à liquider les quelques malheureux domestiques et gardes qui passent à sa portée. Lorsque Ceithyr finit par être informé que sa cible a survécu à la tentative d’assassinat, il panique et ordonne à ses hommes d’aller protéger les couveuses de toute urgence, ce qui ne manque pas d’intéresser notre héroïne, qui a entretemps subtilisé l’oreillette d’une de ses victimes pour se tenir informée des derniers potins. Direction les couveuses, donc.

Il s’avère que Ceithyr est un passionné de génétique appliquée, et a installé sous son manoir un laboratoire pour élever du Psyker, passe-temps très certainement prohibé par ce killjoy d’Empereur (faîtes ce que je dis, pas ce que je fais, tout ça…). Dérivés de son patrimoine génétique, les créations du Duc lui servaient à prédire l’avenir de sa lignée, ce qui lui avait été très utile pendant la période d’incertitude que furent les guerres d’unification. Grâce aux conseils de ses « enfants », Ceithyr put placer ses billes sur le bon canasson (JapPépéloup) et sortir son épingle du jeu alors que ses rivaux moins inspirés goûtaient à la colère des Guerriers Tonnerre. Cette histoire est racontée à Amendera par l’une des filles génétiques du Duc, qu’elle ne porte pas dans son cœur du fait des mauvais traitements qu’il inflige à ses bâtards (enfermés au garage ad vitam aeternam, c’est vraiment pas l’éclate). C’est elle qui a averti son papounet abhorré de la chute de sa dynastie s’il avait le malheur de laisser partir l’envoyée de Malcador, ce qui a conduit le superstitieux aristocrate à organiser l’attentat que l’on sait en catastrophe. Elle se rattrape à présent en conseillant à une Kendel à court d’options lorsque Ceithyr débarque avec ses sbires de viser le champ anti-psi maintenu par le prudent Duc autour des cuves amniotiques où la plupart de ses rejetons sont maintenus en stase plutôt que d’essayer de se faire justice directement en envoyant une bastos à son presque assassin.

Résultat des courses : l’un des Psykers en conserve qui flottait à l’arrière-plan décide qu’il est grand temps de tuer le père, comme lui avait conseillé son thérapeute, et réduit Ceithyr et ses gardes en bouillie à la seule force de son petit cerveau musclé, avant de mourir d’épuisement. Pas rancunière pour un sou, Kendel décide d’épargner la fille du défunt Duc et de la ramener avec elle chez Malcador, pensant qu’une voyante agréée pourrait être utile à son boss pour préparer le siège de Terra. Vu comment l’Hérésie se termine pour lui, on peut conclure qu’il a refusé qu’on lui tire les cartes…

AVIS :

L’Hérésie d’Horus a beau être d’abord l’histoire d’une guerre fratricide opposant des légions de surhommes génétiquement modifiés, il s’est passé autre chose qu’une interminable Space Marinade pendant les sept ans qu’a duré cet événement fondateur (et destructeur, aussi). La nouvelle que signe Jude Reid, qui relève plus du thriller policier que du bolt porn, a donc sa place dans cette saga tentaculaire, même si on peut être pardonné de considérer qu’il s’agit d’une péripétie mineure et périphérique par rapport à l’arc principal. Le fait qu’elle ait été publiée en 2022, au moment où le Siège de Terra vivait ses heures les plus intenses, n’aide pas non plus à s’enthousiasmer pour cette histoire que l’on pourrait qualifier de « basse intensité ».

Reid livre une copie sérieuse ici, qui pourra rappeler aux plus anciens la deuxième partie du ‘Blood Games’ de Dan Abnett (ça ne nous rajeunit pas), mais qui ne satisfera pas les lecteurs souhaitant voir l’intrigue globale de l’Hérésie progresser, même modestement, à travers les courts formats égrenés par la Black Library en cette fin d’Hérésie. Je trouve également dommage que Jude Reid n’ait pas cherché à prendre la suite de l’autre nouvelle récente consacrée à Amendera Kendel (‘The Serpent’s Dance’ de Mike Brooks), ce qui aurait pu créer un mini-arc sympathique sur la lutte des agents de Malcador contre l’Alpha Legion. On verra si l’Agentia Tertius refera parler d’elle avant que la poussière ne retombe définitivement sur cette franchise…

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Au risque de me répéter, je reste convaincu que le choix de la Black Library d’intégrer dans ses recueils pour néophytes des nouvelles destinées à des lecteurs bien au fait des derniers événements de l’Hérésie d’Horus et cherchant à se tenir informés de ces derniers (avec un an et demi de retard, c’est le prix de la gratuité) n’est pas le plus heureux qui soit. On atteint avec ‘The Shel’tain Affair’ des sommets (ou des abysses), car introduire l’Hérésie d’Horus, guerre galactique où le Space Marine est roi, via une nouvelle de huis clos se déroulant dans une île perdue du nord de l’Ecosse me semble relever du trollage le plus éhonté. Un hors sujet total.

A COMPLETER PAR :

Si c’est votre première incursion dans l’Hérésie d’Horus, allez sans plus tarder lire ‘Horus Rising’ // ‘L’Ascension d’Horus’ (Dan Abnett) pour avoir les bases. Si vous êtes un faux débutant ou que le personnage d’Amendera Kendel vous a passionné, vous pouvez la retrouver dans le roman ‘The Flight of the Eisenstein’ // ‘La Fuite de l’Eisenstein’ et les nouvelles ‘The Voice’ // ‘La Voix’, ‘Ghosts Speak Not’ // ‘Les Fantômes ne parlent pas’ (James Swallow) et ‘The Serpent’s Dance’ (Mike Brooks).

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Pain Engine – C. Thursten [WHR] :

INTRIGUE :

Pain EngineOù l’on suit la longue et – forcément – macabre quête d’un Haemonculus drukhari pour acquérir un modèle de Talos customisé, qui avait fureur/des ravages lors d’une olympiade à Commoragh où notre héros était présent. Nommée Steeve Seethe, cette belle bestiole ne se révèle pas d’une approche facile : après avoir sacrifié, comme il s’y attendait, tous ses suivants dans les divers pièges mortels protégeant le laboratoire du créateur d’Achille Talos, l’Haemonculus pénètre seul dans le repaire de son estimé mais insaisissable collègue.

Là, il se retrouve face à un prototype inachevé de Talos, et entouré par divers cadavres en état de décomposition plus ou moins avancé, à travers lesquels le constructeur de Seethe s’exprime. Notre héros, qui n’est pas né de la dernière pluie acide, comprend rapidement qu’il est soumis à un véritable entretien d’embauche, et doit ainsi répondre au grand classique « racontez-moi trois projets dont vous êtes particulièrement fier (et pourquoi) ». Jamais mal à l’aise quand il s’agit de parler de sa vie et de son œuvre, l’Haemonculus décrit par le menu les diverses tribulations et collaborations (s’étant toujours très mal finies pour ses partenaires, bizarrement) qui lui ont permis d’arriver jusqu’ici.

Il y a ainsi eu une joint-venture avec un Fleshcrafter du nom de Vyst, exécuté par le successeur de l’Archonte auquel nos compères avaient juré allégeance, et transformé en Grotesque après une éternité de résurrections débilitantes. Il y eut ensuite un M.O.U. avec la Boulangère Pain-Master Talec, vaporisée par un tir de destructeur bien placé après qu’elle se fut montrée plus intéressée par réaliser des tests de Rorschach dans des entrailles de Cabalites que de progresser dans la quête de Seethe. Enfin, notre Haemonculus trouva rigolo de contaminer un camarade (Sziadan) avec un parasite très spécialisé, qui fit fusionner son âme avec son squelette. Squelette qui demanda ensuite le divorce avec le reste du corps du malheureux Drukhari. Et l’obtint. Just a prank, bro. Impressionnant, certes, mais serait-ce suffisant pour gagner le respect d’un artisan aussi doué que Papa Steeve ?

Début spoiler…Et la réponse est oui. Mais comme les histoires d’Eldars Noirs ne peuvent pas bien se terminer (c’est contractuel), notre héros se rend bientôt compte qu’il ne va pas repartir avec Seethe. Plutôt, il va devenir Seethe, comme le modèle de Talos à moitié construit qui trônait au milieu du laboratoire depuis le début de la nouvelle le laissait à peine entrevoir. Appelez ça la poire d’angoisse de Tchekhov. Le rideau tombe sur le début de la transformation de l’Haemonculeur haemonculé, alors que le capot du Talos se referme sur la forme frêle de notre héros. Tel est pris qui croyait (ap)prendre…Fin spoiler

AVIS :

J’ai moyennement apprécié cette soumission de Chris Thursten, que j’ai trouvé très maniérée au niveau de son style (c’est rare pour des écrits de la Black Library, mais ça arrive, coucou Nik Vincent), et très lacunaire au niveau de son intrigue. Le fait que le twist final de la nouvelle soit éventé au cours des premières pages (la manière dont ‘Pain Engine’ est construit ne ménage aucun suspens sur sa conclusion) ne m’a pas non plus mis dans de très bonnes conditions, je dois avouer. Pour finir, l’aspect horrifique est assez limité, ce qui est un comble pour une histoire mettant en scène l’entrée la plus gore du Codex le plus dérangeant de Warhammer 40.000. Du potentiel, certainement, mais encore non réalisé pour autant que je puisse le dire.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

C’est toujours bien d’avoir des représentants des franchises « mineures » de la Black Library dans des recueils d’initiation comme les Black Library Celebration, nous sommes d’accord. Ce qui serait encore mieux, c’est que les nouvelles « témoins » choisies pour représenter lesdites franchises soient suffisamment intéressantes pour donner aux néophytes l’envie de les découvrir plus avant. Malheureusement, ‘Pain Engine’ est une soumission trop moyenne pour accomplir cela (de mon point de vue tout du moins), et c’est d’autant plus dommage que la gamme Warhammer Horror ne manque pas de nouvelles plus abouties que celle-ci. 11/20 pour l’effort, mais pas au-delà.

A COMPLETER PAR :

Les recueils de nouvelles Warhammer Horror, dont les trois premiers (‘Maledictions’ // ‘Malédictions’, ‘Invocations’ // ‘Invocations’ et ‘The Wicked and the Damned’ // ‘Les Déments et les Damnés’) ont été traduits en français.

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Chains – J. D. Beer [WCR] :

INTRIGUE :

ChainsMelita Voronova a toujours été une grande professionnelle, mais l’affaire sur laquelle elle travaille depuis deux mois lui tient particulièrement, profondément et viscéralement à cœur. Employée par le cartel Valtteri comme consultante spéciale en sécurité, ou quelque chose du même tonneau, notre héroïne a enquêté sur une série d’attaques ciblant les convois de ses patrons, et perpétrées en partie grâce aux pouvoirs d’un Psyker du nom d’Alim. Ce dernier, loin de coopérer de son plein gré à cette entreprise criminelle, avait été asservi, torturé et exploité par un baron du crime local, l’ex-Sanctioner Jorg Rakove. Localisé et libéré par Melita, Alim a eu recours à une procédure de suicide assisté pour mettre fin à son existence de malheur, en déversant sans consentement libre, informé et préalable tous ses souvenirs douloureux dans l’esprit de sa libératrice, forçant cette dernière à lui coller une balle dans la tête pour stopper le déluge mémoriel. Hantée par le calvaire d’Alim, qu’elle revit à intervalles réguliers dès qu’elle entend ou voit des choses qui lui rappellent les conditions terribles dans lesquelles le mutant a été retenu, Melita est déterminée comme jamais à localiser Rakove et le remettre à ses employeurs, voire plus si affinités.

En cette soirée pluvieuse à Varangantua, et après une nouvelle séance d’hallucinations assez éprouvante déclenchée par le bruit de la ventilation, Melita part avec son partenaire et garde du corps Edi Kamensk en direction du Spoil, une des nombreuses Zones Urbaines Sensibles d’Alecto. Le duo a été rencardé sur le fait que le tout-puissant Anderti Sorokin, chef du gang Har Dhrol, retenait Rakove dans un endroit de sa connaissance, et a reçu carte blanche de la part des Valtteri pour négocier une remise en mains propres. Bien que rompue à l’art délicat des négociations avec des partenaires louches, et à la dangereuse, si colorée, vie nocturne du Spoil, Melita aborde la soirée et le club défraichi où Sorokin a installé son QG de manière circonspecte. Elle sait en effet qu’elle devra jouer finement pour obtenir un deal avec le fantasque mais impitoyable boss mafieux, et ne tient absolument pas à ce que sa cible lui file entre les doigts.

Si la conversation entre nos deux larrons s’engage sur des bases aimables, il ne faut pas longtemps avant que Sorokin ne teste la résolution et la ténacité de son interlocutrice, en lui proposant de parier sur le vainqueur du combat de gladiateurs qui se déroule en contrebas de sa loge. Flairant le piège, Melita ne répond rien avant que le duel se termine par une amputation en bonne et due forme, et annonce qu’elle aurait choisi le gagnant. THAT’S NOT HOW YOU DO IT GURL. Peu amusé par la proposition, Sorokin propose un nouveau mini-jeu à ses invités : si Edi descend dans l’arène et remporte son combat, ils auront Rakove. Alors que le chevaleresque garde du corps est prêt à relever le défi, au grand dam de sa partenaire, déchirée entre son désir de coincer Rakove et la sécurité de la seule personne qui compte pour elle, Sorokin se ravise à nouveau (quel Dhrol de farceur alors), et accepte de négocier de façon civilisée. Après quelques propositions poliment refusées, Melita finit par toucher une corde sensible chez le gangster au grand cœur, dont le rêve est de développer le Spoil afin d’offrir une vie meilleure à ses habitants (c’est beau). Plutôt qu’une grosse pile de crédits impériaux ou un traitement rejuvenat chez les meilleurs spécialistes, ce sont des camions poubelle et des stations d’épuration made in Mechanicus qui permettent de sceller le marché. Tope là mon gars, et pumbagor qui s’en dédit.

Le lendemain, Melita et Edi accompagnent les mercenaires des Valtteri à l’adresse convenue, afin d’assister à l’arrestation tant attendue de cet ignoble ordure de Rakove. BIEN ÉVIDEMMENT, tout ne se passe pas comme prévu, le colis parvenant à se saisir de l’arme d’un de ses surveillants au moment de l’échange, et forçant les mercenaires à l’abattre sur place. Vous parlez d’une boulette alors. Cela énerve au plus haut point Melita, qui avait prévu de faire le sale boulot elle-même dès qu’elle en aurait eu l’occasion (oups mon doigt a glissé sur la détente de mon flingue, comme c’est cocasse), mais notre héroïne tourmentée finit par se convaincre, avec l’aide du perspicace et psychologue Edi, qu’il est temps de tourner la page et que Rakove n’a eu que ce qu’il méritait. Générique.

AVIS :

Jonathan D. Beer donne une suite (et probablement une fin, en tout cas à cet arc) à la nouvelle ‘Service’ (‘Sanction & Sin’), qui relatait les premiers temps de la traque de Jorg Rakove par Melita Voronova. Si l’intrigue en elle-même n’est pas tellement mémorable, et se conclut par un ersatz de twist final, l’auteur parvient à distiller au fil des pages une authentique atmosphère de thriller glauque et moite, tout à fait adaptée à la ligne éditoriale de Warhammer Crime. Beer prouve ici qu’il est capable de créer et de faire évoluer des personnages assez fouillés (mention spéciale à Andreti Sorokin, qui est le véritable héros de ‘Chains’) et maîtrise superbement les codes et clés du background impérial de 40K, deux indéniables points forts pour un contributeur de la Black Library. Je suis donc très intéressé de lire la suite, si suite il y a.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Contrairement à ‘Pain Engine’, ‘Chains’ se révèle d’une lecture intéressante, et constitue à ce titre une très bonne entrée dans sa franchise de rattachement, la glauque, poisseuse, cruelle et urbaine Warhammer Crime. Sa présence au sommaire de la Black Library Celebration 2024 est donc une bonne chose.

A COMPLETER PAR :

Le recueil ‘Sanction and Sin’ et le roman ‘The King of the Spoil’ (Jonathan D. Beer) où le personnage de Melita Voronova est introduit, et les romans ‘Bloodlines’ // ‘Lignées Sanglantes’ (Chris Wraight) et ‘Flesh and Steel’ // ‘La Chair et l’Acier’ (Guy Haley), et la nouvelle ‘Aberrants’ // ‘Aberrations’ (Chris Wraight), seules entrées de la gamme traduites en français pour le moment.

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Tant qu’y a le Warp, y’a Moyen – M. Brooks [40K] :

INTRIGUE :

Where dere's da warp dere's a wayAssistant de direction d’une bande de Pistol Boyz Bad Moon rattachée à la Waaagh ! de Da Meklord, Ufthak Blackhawk vit à fond le rêve américain Ork, fait de bagarres, d’abordages et de compétitions pour devenir le boss à la place du boss. Le o+1 de notre héros est Badgit Snazzhammer, charismatique, à défaut d’être cérébral, Nob et tirant son nom de son arme de prédilection, un combi marteau énergétique/lime à ongles, qu’il ne dédaigne pas utiliser pour motiver les troupes lorsque le besoin s’en fait sentir. Chargés par Da Meklord en personne de sécuriser la salle du réacteur Warp d’un vaisseau de l’Adeptus Mechanicus afin de permettre à un Mek inventif de jouer avec la tek’ des zoms, Ufthak, Badgit et consorks prennent le premier ‘Ullbreaker pour aller apporter leurs sentiments et bourre-pifs les meilleurs aux fidèles de l’Omnimessie.

Une fois sur place, et après avoir dérouillé une malheureuse patrouille qui tentait de faire son devoir, nos Orks se mettent à errer dans les coursives du croiseur martien, les indications du Mek à roulette1 leur servant de GPS manquant en précisions. Au petit jeu du porte/monstre/trésor, les peaux-vertes finissent par tomber sur plus fort et plus dur qu’eux, comme le malheureux Badgit en fait l’expérience lorsque lui prend la mauvaise idée de charger un Kastelan opérant comme physionomiste à l’entrée de la boite de Warp. Comme quoi, foncer tête baissée est le meilleur moyen pour la perdre. À toute chose malheur est bon, car le décès de son chef permet à Ufthak de s’improviser leader de la bande de Pistol Boyz, malgré les protestations de Mogrot Redtoof, l’autre bras droit de feu Snazzhammer. Ruzé mais brutal, Ufthak accouche d’une tactique de diversion qui lui permet d’arriver au contact de l’angry robot, récupérer l’arme de fonction de son boss, et terrasser l’ennuyeux androïde au cours d’un corps à corps épique et piquant, et même détonnant, l’usage malavisé d’une arme à contondante à champ de force sur le réacteur du Kastelan dispersant Ufthawk façon puzzle2.

Ce n’est toute fois pas la fin pour notre héros, les Orks étant, comme chacun sait, plutôt coriaces. Se réveillant très diminué, mais se réveillant tout de même (ce qui est déjà pas mal quand on n’est plus qu’une tête sur un demi-tronc), Ufthak se voit proposer par le Dok Drozfang, qui accompagnait la bande, un marché qu’il ne peut décemment pas refuser. En un tour de scie circulaire et quelques agrafes, voilà la tête du Boy greffée sur le corps de Badgit, sans trop d’effets secondaires. Ça c’est ce qu’on peut appeler de la chirurgie reconstructrice. Remis de ses émotions, bien qu’ayant – et c’est compréhensible – un peu mal aux cheveux qu’il n’a pas, Ufgit (Badthak ?) refait son retard sur le reste des Boyz, calme les ardeurs de ce parvenu de Mogrot et lui reprend le bâton marteau de parole, et invite le Mek à appuyer sur le gros bouton rouge qu’il a branché sur le moteur Warp du croiseur. Selon les savants calculs de l’ingéniork, cette machine devrait permettre au vaisseau de rebrousser chemin jusqu’à sa planète d’origine, monde forge plein de tek’ à piller…

Début spoiler Malheureusement, le buzzer magique a surtout pour effet de remplir le croiseur de démons, ce qui ne refroidit pas le légendaire enthousiasme peau-verte, bien au contraire. Ils commençaient justement à s’ennuyer…Fin spoiler

AVIS :

Nouvelle rigolork (c’est le dernier mot-valise à base d’Ork, je le jure) de Mike Brooks, et à laquelle je décerne la palme d’argent du titre le plus inventif (catégorie 5 mots et plus), derrière l’indétrônable Badlands Skelter’s Downhive Monster Show de Matthew Farrer, ‘Tant qu’y a le Warp…’ n’a pas grand-chose à offrir au lecteur à part une plongée humoristique dans le quotidien, forcément agité, d’un Boy. Les péripéties grand-guinorkesque (j’ai menti) s’enchaînent de manière plaisante, mais ne vous attendez pas à une conclusion édifiante, ou même intéressante, à cette nouvelle.

1 : Car oui, il n’y en a qu’une dans son cas, on peut parler de monorkwheel.
2 : Après l’Interrogatrice Spinoza dans ‘Argent’, c’est la deuxième nouvelle de la BL qui souligne les dangers des masses énergétiques pour leur porteur. Faut-il voir une ligne éditoriale de Nottingham ?

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Une nouvelle très drôle, à contre-courant de la chape grimdark qui pèse lourdement sur la littérature 40K, et qui vient démontrer que même dans les ténèbres du lointain futur, on peut parfois bien se marrer. Rien que pour cela, ‘Tant qu’y a le Warp…’ mérite la lecture, et notamment celle des néophytes qui peuvent peut-être se dire que les travaux de la Black Library sont un peu trop déprimants pour leur goût (pour être honnête, cette nouvelle est plutôt l’exception qui confirme la règle) : il faut toujours laisser sa chance au produit, surtout quand il est gratuit ! Ajoutons à cela le fait que cette nouvelle est la parfaite introduction au personnage d’Ufthak Blackhawk (Buzenoire en VF), et on tient un choix de casting parfait de la part des éditeurs de la BL.

A COMPLETER PAR :

Les romans ‘Brutal Kunnin’ // ‘Ruze Brutale’, ‘Warboss’ // ‘Chef de Guerre’ et  ‘Da Big Dakka’ // ‘Eul’ Gros Dakka’, et les nouvelles  et ‘Road Rage’ et ‘Packin’ Heat’ (non traduites), tous signés de Mike Brooks.

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La Tour Foudroyée – D. Abnett [HH] :

INTRIGUE :

The Lightning TowerSur la Terra impériale du 31ème millénaire, la trahison d’Horus, Primarque, Maître de Guerre et fils favori de l’Empereur, est encore fraîche que ce dernier, jamais à repousser à la décennie suivante ce qui peut être fait cette année, ordonne à son manœuvre portugais inwittien de fiston de fortifier son Palais, en préparation d’un siège qu’il voit déjà se profiler à l’horizon, bien que ce qui deviendra l’Hérésie d’Horus n’en soit encore qu’à ses prémisses. S’exécutant sans broncher, Rogal Dorn, car c’était lui (quelle surprise), se met au travail avec ardeur, bien qu’il lui en coûte de devoir construire des casemates et des miradors sur un site classé au patrimoine galactique de l’humanité. Les considérations esthétiques du Primaçon, habituellement aveugle à toute beauté, ne manquent pas de surprendre ses collègues de truelle (Vadok Singh, le Contremaître de Guerre) et proches collaborateurs (Sigismund, pas encore disgracié, et Archamus, pas encore empalé) parmi lesquels on compte heureusement un psychiatre homologué en la personne de Malcador le Sigilite.

Ayant surpris Rogal traîner sur les remparts du Palais dans le pyjama en pilou qu’il tient de son grand-père1 (un signe manifeste de déprime), le Premier Seigneur de Terra comprend qu’il est de son devoir d’intervenir, et invite donc le rejeton de son boss à une consultation privée dans ses appartements. Ne pouvant décemment pas partir sur le complexe d’Oedipe avec la moitié des Primarques déjà décidés à tuer le père, Malcador opte pour une approche un peu différente, et demande à son interlocuteur ce qui l’effraie, afin de comprendre d’où vient le spleen persistant du Prétorien. Fort à propos, la question avait déjà été soumise à Dorn quelque temps auparavant, lui laissant le temps de considérer le sujet. Ayant décrété qu’il ne craignait personne, le Primarque tente de se donner l’air profond en répondant qu’il avait peur de ce qu’il ne comprenait pas, comme les règles de la belote, la communication de la Black Library ou encore les causes ayant poussé la moitié des Légions impériales à rejoindre la cause d’Horus. Malheureusement pour lui, il en faut plus pour berner le Sigilite, qui sort de ses tiroirs un jeu de cartes ayant appartenu à Konrad Curze, frère ennemi ayant failli tuer Dorn sur Cheraut après une dispute. Voyant son patient tourner au flave2, Malcador enchaîne sur une thérapie accélérée et tire les cartes à ce dernier, avec des résultats plutôt inquiétants. Mais évidemment, ce n’est qu’un jeu, haha. Ça fera 83 €.

La nouvelle se termine sur un Rogal Dorn un peu plus gaillard depuis sa discussion cathartique avec son prof principal, qui se prépare à repousser les assauts des traîtres avec un petit jeu de tower defence. Surpris par son Père en train de niaiser au lieu de faire ses devoirs, le Primarque dissipé jure toutefois qu’il ne laissera pas tomber son Pôpa, qui repart donc sur le Trône l’esprit tranquille mais le colon obstrué (la constipation, quel fléau). Rendez-vous dans sept ans pour que ça commence à vraiment chier sur Terra.

1 : Qui devait s’appeler Hodor pour que sa robe de chambre aille à son petit fils naturel. Je ne veux pas penser à l’alternative.
2 : C’est un jaune pâle. Non, je ne connaissais pas ce terme avant d’écrire cette chronique. Oui, je vais dès à présent tenter de le placer discrètement dans autant de conversations que possible.

AVIS :

À l’heure où cette chronique est écrite, ‘La Tour Foudroyée’ affiche plus d’une décennie au compteur, faisant partie des premiers textes écrits pour l’Hérésie d’Horus lorsque le projet fut initié par la Black Library en 2007, ce qui ne nous rajeunit pas. Pour ceux qui ont vécu l’épopée littéraire que constitue cette saga, cette nouvelle occupe sans doute une place particulière, le témoin d’une époque où le lecteur, probablement enthousiaste, mais peut-être dubitatif, devant cet OLNI, se demandait à quelle sauce il allait être mangé. Ayant sans doute voulu assurer le coup, la BL avait fait le sage choix de confier le début de la série à des contributeurs expérimentés, l’incontournable Dan Abnett en tête. Et force est de constater que, comme son Horus Rising pour les romans de l’Hérésie, ‘La Tour Foudroyée’ a parfaitement accompli sa mission, c’est à dire fournir des fondations solides et inspirantes aux publications qui suivirent (qui se comptent aujourd’hui en centaines pour les nouvelles). Bénéficiant de la maîtrise narrative et de la patte littéraire du Wordmaster, cette soumission demeure à mes yeux l’une des meilleures introductions disponibles à cette franchise dans la franchise qu’est l’Hérésie d’Horus. En une vingtaine de pages, elle parvient ainsi à poser les bases de l’intrigue (une trahison monumentale mettant en péril le règne du bon Roy Empereur), présenter quelques personnages cruciaux, donner un aperçu satisfaisant de l’univers et de l’atmosphère de cette fin de 31ème millénaire, et esquisser la perte d’innocence que se révélera être ce conflit galactique. Si, en plus, le lecteur connaît ses classiques, il aura droit en sus à quelques détails fluff assez sympathiques, variant du cool-à-savoir-mais-pas-vraiment-important (la barboteuse de Rogal) au cryptique-mais-probablement-lourd-de-sens (le tirage de Malcador). Bref, véritablement la pierre sur laquelle la Black Library a construit sa cathédrale, et une « relique » de l’Hérésie à laquelle il convient de rendre hommage.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Les habitués de mes chroniques (qu’ils en soient remerciés) vont certainement se dire à ce stade : « depuis le temps qu’il serine que le seul bon choix de nouvelle pour ce type de recueil introductif est ‘La Tour Foudroyée’ pour l’Hérésie d’Horus, il doit être aux anges ». Et ils auront raison. Pour les lecteurs non familiers de mes grommellements sur le sujet, j’ai souvent reproché à la Black Library de faire figurer dans ses ouvrages à destination d’un public non averti des nouvelles de l’Hérésie d’Horus tout simplement incompréhensibles pour ce dernier (cf mon retour sur ‘The Shel’tain Affair’ ci-dessus). Cette critique ne tient pas pour ‘La Tour Foudroyée’, qui est littéralement et littérairement la nouvelle introduisant cette gigantesque saga, un peu comme les textes défilants au début des films Star Wars. Il est assez drôle de remarquer que la BL est revenue à la raison après la conclusion de l’Hérésie, le troisième tome de ‘La Fin et la Mort’ étant sorti quelques jours avant la Black Library Celebration 2024. Mieux vaut tard que jamais, I guess…

A COMPLETER PAR :

Si c’est votre première incursion dans l’Hérésie d’Horus, allez sans plus tarder lire ‘Horus Rising’ // ‘L’Ascension d’Horus’ (Dan Abnett) pour avoir les bases.

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La Pureté de l’Ignorance – J. French [40K] :

INTRIGUE :

The Purity of ignoranceNotre nouvelle commence par l’interrogatoire serré mais décousu subi par le Lieutenant Ianthe du Régiment des Agathian Sky Sharks. En face de l’officier, un prêcheur impérial s’étant introduit comme Josef, se montre très intéressé par les états de service de son interlocutrice, qui peine à comprendre pourquoi il tient tant à ce qu’elle les passe en revue en boucle1. Il s’agit toutefois de la première fois qu’Ianthe collabore avec l’Inquisition à laquelle Josef appartient, et notre héroïne se dit que cela doit faire partie de la procédure de recrutement classique des saints Ordos, et se plie donc sans broncher au petit jeu du déroulé de CV. Il n’y a de toutes façons pas grand-chose à gagner à mettre un rogne un représentant d’une institution qui peut vitrifier votre monde natal sans avoir à se justifier, n’est-ce pas ?

Ailleurs, sur le monde de Tularlen, la Gouverneure Sul Nereid s’éveille dans le luxe de ses quartiers privés. La pauvresse a fait un horrible cauchemar, mais rien qui ne puisse être oublié par un bon petit déjeuner et une représentation privée du dernier ballet donné à l’opéra de la spire. En cela, Nereid a la chance de pouvoir compter sur la dévotion et le professionnalisme de son majordome Saliktris, qui semble toujours deviner ce qui lui ferait plaisir et se met en quatre pour satisfaire les envies et appétits de sa maîtresse. Et cette dernière a bien besoin de se détendre de temps à autres, les soucis posés par la gestion d’un monde impérial étant bien lourds à supporter.

Le premier acte du Lac des Razorwings est toutefois brutalement interrompu par l’arrivée de l’Inquisiteur Covenant et de sa suite, qui plutôt que de se faire annoncer au rez-de-chaussée de la ruche, ont opté pour une entrée fracassante par la baie vitrée, vérifiant une nouvelle fois le dicton que personne ne s’attend à ce que l’Inquisition passe par les velux. Coco et Cie sont confrontés à une vision d’horreur de 4.3 sur l’échelle du Nighthaunter2, musiciens et danseurs se révélant être des cultistes lourdement pimpés selon les goûts pointus, acérés même, du Prince du Chaos. Saliktris, quant à lui, est un authentique Héraut de Slaanesh, trop heureux d’obtempérer lorsque sa maîtresse lui ordonne de chasser les importuns, et par la force s’il le faut. Dans la bagarre qui s’en suit, Ianthe bénéficie d’une introduction approfondie aux us et coutumes chaotiques, la mélée confuse mais colorée qui engloutit les quartiers gouverneuriaux prélevant un lourd tribut sur les membres de son escouade ainsi que sur sa santé mentale.  À ses côtés, Covenant et ses sidekicks réguliers (Josef et Severita), plus aguerris que leur nouvelle recrue, s’illustrent de sanglante façon, jusqu’à ce que Salikris soit banni dans le Warp, et que cette fieffée profiteuse de Nereid écope d’un blâme, pardon d’un blam !, lorsque Ianthe parvient à la mettre face à ses responsabilités et au canon de sa carabine laser.

Début spoilerLe cœur de l’infection ayant été purgé, il ne reste plus au représentant de l’Ordo Malleus de donner quelques directives à son personnel pour que les quelques milliers de personnes ayant eu le malheur de fréquenter la défunte au cours des dernières années soient rapidement mises hors service. Dura lex sed lex. Se pose également la question du devenir d’Ianthe, qui, au cours de l’opération, a retrouvé la mémoire, et compris qu’elle servait en fait Covenant depuis de nombreuses années, mais avait été consciencieusement reformatée à la suite de chaque mission pendant laquelle elle avait été exposée au Chaos (ce qui doit arriver assez souvent dans ce type de profession), pour le salut de son âme et la sécurité de tous. Il lui appartient donc de faire le choix auquel elle est soumise à chaque réunion retex : un lavage de cerveau ou un bolt dans la tête. Présenté comme ça, c’est assez facile de trancher. Mais cette fois, à la surprise générale, Covenant adouci un peu le deal proposé à son sous-fifre, en lui proposant de continuer à le servir avec toute sa tête, jugeant, pour des raisons qui ne seront pas partagées avec l’humble lecteur, qu’elle est prête à vivre avec le poids de la connaissance de la réalité fondamentale de l’univers3. La conclusion de la nouvelle nous apprend qu’Ianthe a choisi de renoncer à la fameuse pureté de l’ignorance, et donc progressé au sein du cénacle d’acolytes de son boss, puisque c’est désormais elle qui remplace Josef pour les entretiens préliminaires. Si cela ne fait pas d’elle une interrogatrice, je ne sais plus à quel saint me vouer.Fin spoiler

AVIS :

Connaissant les capacités de French, je m’attendais à ce que ‘La Pureté de l’Ignorance’ soit d’un niveau un peu supérieur à ce qui a été présenté ici. Reposant sur une série de révélations, sa nouvelle souffre à mes yeux de ne pas suffisamment « préparer le terrain » à ces dernières, qui arrivent donc sans jouer à plein. Si la corruption de la Gouverneure est cousue de fil blanc, bien que les passages introductifs narrés de son point de vue laissent à penser que tout va parfaitement bien sur Tularlen, c’est l’amnésie induite de son héroïne qui aurait vraiment gagné à être davantage exploitée. Point de flashbacks fugaces, de sensations de déjà vu inexplicables ou de réminiscences troublantes pour Ianthe en effet, qui est confrontée, et le lecteur avec elle, au constat de ses nombreux brainwashing de façon brutale, alors que la suture psychique qui lui avait été faite tenait jusqu’à ce moment parfaitement bien. Au lieu d’une nouvelle à twist final, nous nous retrouvons donc « seulement » avec une illustration romancée d’une dure réalité (encore une) de l’Inquisition, qui n’hésitera pas à se débarrasser des éléments ou des individus pouvant poser un problème à l’accomplissement de sa mission sacrée. Cela est certes éducateur, mais cela aurait pu être intéressant d’un point de vue littéraire en sus. Petite déception donc.

1 : N’oublions pas que le bon Josef est sourd comme un pot. Il avait peut-être seulement oublié de brancher son sonotone aujourd’hui.
2 : Un des héritages peu connus mais essentiels que ce brave Curze a laissé à l’Imperium.
3 : Ou peut-être qu’il en avait marre de lui expliquer comment fonctionnait l’imprimante tous les quatre matins.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

L’Inquisition et la GW-Fiction, c’est une histoire d’amour qui dure plus de trente ans et qui nous a donné quelques-unes des meilleures séries publiées par la Black Library : il est donc logique et approprié qu’un membre des Saints Ordos ait été invité à représenter son institution dans les pages de la Black Library Celebration 2024. Comme dit plus haut, ‘La Pureté de l’Ignorance’ n’est pas la meilleure nouvelle signée par French, ni même la meilleure nouvelle de son cycle Covenant, mais elle reste tout à fait lisible et « fait le job » de manière propre, même si peu inspirée.

A COMPLETER PAR :

Les romans ‘Resurrection’ // ‘Résurrection’ et ‘Incarnation’ (traduits en français) et l’anthologie de nouvelles ‘Divination’ (non traduite) que John French a consacré à l’Inquisiteur Covenant et à sa suite. Si vous aimez l’Inquisition, c’est votre chance car les séries ‘Eisenhorn’, ‘Ravenor’ et ‘Bequin’ (Dan Abnett) ont toutes été traduites en français par la Black Library.

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La Tentation de Cain – S. Mitchell [40K] :

INTRIGUE :

The BeguilingNous retrouvons le Commissaire préféré de ton Garde Impérial préféré peu de temps après la campagne de Keffia (‘Sector 13’), sur la planète de Slawkenberg et engagé, aux côtés du 12ème Régiment d’artillerie de campagne de Valhalla (Jurgen, Divas et Mostrue sont de la partie), dans la purge du culte chaotique ayant déclenché une insurrection sur ce monde autrement paisible. Ou plutôt, des cultes chaotiques, comme nous allons le voir. Après quelques mois de routine agréable, passés à bombarder les positions ennemies à 71,99 pouces de la ligne de front le matin, déjeuner dans des petits bistrots sympathiques, et déguster de l’amasec vintage en charmante compagnie l’après-midi, notre fringant mais prudent héros se rend compte qu’il s’ennuie quelque peu, et décide de suivre une patrouille d’observateurs avancés de son régiment, accompagné de son fidèle Jurgen, pour voir du paysage et soigner sa réputation d’officier héroïque et proche de ses hommes.

Ce qui ne devait être qu’une simple balade en Salamander va bien sûr mal tourner, d’abord en raison d’une météo capricieuse et de l’absence de capote (livrée en option sur ce type de véhicule), puis à cause d’une embuscade maladroitement commise par un groupe de Prouteux en vadrouille, forçant les Valhallans à s’enfoncer dans une forêt profonde sur un petit chemin au lieu de rester sur la route (détruite par leur botte secrète : l’appel à un ami qui a une batterie de Basilisks sous ses ordres). Au bout de quatre heures de rallye pluvieux, Cain et ses charges retournent enfin à la civilisation, représentée par un manoir isolé mais apparemment occupé, comme son illumination l’atteste.

Ayant garé leur Salamander à quelque distance de la bâtisse afin de pouvoir la reconnaître discrètement, les Gardes sont surpris par l’arrivée désespérée d’une jeune fille affolée et fort peu vêtue, poursuivie par un petit groupe de cultistes de Nurgle. Si les maraudeurs pestiférés sont rapidement mis hors d’état de nuire, à défaut de puire, par les bidasses en goguette, et que la demoiselle en détresse, rapidement rejointe par quelques accortes amies, tombe dans les bras de ses sauveurs, Cain éprouve un vague mal-être (et une démangeaison palmaire de mauvais augure) devant la tournure prise par les événements. Quelque chose ne sent pas bon dans cette affaire, et ce n’est pas Jurgen (pas que, en tous cas)…

Début spoiler…Et en effet, la petite soirée que nos quatre militaires passent à l’Académie pour jeunes filles du monde de St Trynia, si elle s’avère mémorable, ne l’est pas pour les bonnes raisons, et se révèle aussi être la dernière pour deux des camarades de Cain. Alors que ce dernier se retrouve dans les quartiers privés de la directrice pour une séance de tantrisme extra-curriculum, l’ambiance retombe brutalement lorsque la voluptueuse Mademoiselle Duboir confie à son coup d’un soir qu’elle l’a tout de suite identifié comme un fidèle de Slaanesh. Ce que Cain ne pense pas qu’il est (encore1), merci pour lui. Il prend d’ailleurs la mouche au point d’abattre sans sommation son hôte après cette petite confidence. Et à propos de mouche, voici les Nurgleux qui reviennent à la charge, et prennent d’assaut le manoir et ses habitantes, offrant à Cain et à Jurgen (mis très mal à l’aise par le rentre dedans qu’il a subi toute la soirée de la part des prêtresses du plaisir sous camouflage) la couverture parfaite pour s’éclipser discrètement, laissant les dépouilles de leurs camarades malheureux au milieu du champ de bataille. Un petit coup de fil au Colonel Mostrue et un bombardement de la Chaos Star Academy plus tard, tout est bien qui finit bien pour le Héros de l’Imperium, qui décide suite à cette aventure de reprendre en main son hygiène de vie afin de ne plus être pris pour sex addict par la première cultiste venue. Non mais.Fin spoiler

1 : D’ailleurs à l’époque, Cain ne sait même pas trop qui sont les Dieux du Chaos (il l’apprendra plus tard en traînant avec l’Inquisitrice Vail). Mais comme Mitchell est partisan de la théorie des signes chaotiques (les noms et symboles des Dieux du Chaos sont tellement horribles que les entendre ou les voir provoque une réaction épidermique même chez les profanes), la confidence sur l’oreiller de Miss Duboir suffit à convaincre notre héros qu’il y a slaanguille sous resh.

AVIS :

Mitchell livre une nouvelle Cainesque tout ce qu’il y a de plus classique avec ce ‘La Tentation de Cain’, qui mélange action, humour, grimdark et second degré avec un goût certain. Si l’expérience de lecture est assez plaisante, comme souvent avec les aventures du Commissaire le plus cool1 et coulant de tout le Segmentum, je regrette toutefois que Sandy Mitchell n’ait fait aucun effort pour ménager un peu de suspens sur l’opposition entre les deux factions antagonistes (Prout vs Meuh), qui nous est annoncée dès la première page, puis est mise en scène de façon très directe dès l’arrivée de Cain et ses hommes dans le manoir de Duboir. Etant certain de la capacité de Mitchell, en tant que scénariste et narrateur, à obtenir un résultat plus palpitant que ce très et trop convenu ‘La Tentation de Cain’ (comme il a pu le montrer dans ‘Last Night at the Resplendent’ par exemple) s’il avait voulu s’en donner la peine, je reste un peu sur ma faim avec cette nouvelle, et ne la place donc pas parmi les tout meilleurs épisodes de la saga de Ciaphas Cain. Peut mieux faire et a mieux fait.

1 : Logique pour un officier rattaché à un régime de Valhalla, vous me direz.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Je parlais plus haut de l’amour de la Black Library pour l’Inquisition, eh bien il ne le cède qu’à celui pour les Commissaires de la Garde Impériale, sans doute la profession la plus représentée dans les pages de la GW-Fiction (si on met à part l’omniprésent Space Marine, bien sûr). Comparé à ses collègues, Ciaphas Cain détonne fortement et c’est tant mieux, car un peu de normalité et de second degré dans une galaxie au bord de l’explosion et de l’implosion n’est pas pour me déplaire. Je n’ai donc rien à redire à la présence de ‘La Tentation de Cain’ dans les pages de cette anthologie introductive, même si la BL aurait pu choisir un meilleur épisode de la tentaculaire carrière de CC.

A COMPLETER PAR :

Le premier tome des aventures de notre fringant héros, convenablement nommé ‘Hero of the Imperium’ // ‘Héros de l’Imperium’.

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Le Gouffre Abyssal – A. Dembski-Bowden [HH] :

INTRIGUE :

Gravement blessé dans le crash de son appareil au cours d’une glorieuse victoire impériale, le chef d’escadron Orthos Ulatal a été réaffecté au service des archives de la Grande Croisade, son corps étant trop endommagé pour lui permettre de s’envoyer en l’air comme autrefois. La réception par notre héros cabossé et amer d’un rapport d’un genre particulier va l’arracher à la monotonie pré-dépressive qui constituait son nouvel ordinaire : un certain Khayon des Khenetai, légionnaire Thousand Sons, a en effet proféré de graves accusations à l’encontre des Night Lords de Konrad Curze, alors que les deux Légions « coopéraient » au cours de la campagne de pacification de Zoah, plus connue sous le nom de « Dévastation de Zoah ». Après avoir cherché conseil – un peu – et échangé quelques remarques acerbes – surtout – avec son ancienne camarade et désormais remplaçante, Perdita, Lulu décide qu’il est de son devoir de faire toute la lumière sur cette bisbille inédite entre deux Légiones Astartes. La révélation de conflits larvés entre les champions de l’humanité risquerait en effet d’avoir un effet désastreux sur le moral des troupes, gavées de propagande impériale où tout le monde il est bô, tout le monde il est jenti (sauf le fourbe et puant ENNEMI, bien sûr).

Après un voyage mouvementé et donc vomitif à travers l’espace impérial, Ulatal parvient jusqu’au Nightfall, vaisseau amiral des Night Lords, et demande à être reçu par un des archivistes (et pas Archivistes) de la Légion, afin d’entendre la version des natifs de Nostramo sur les événements de Zoah. À sa grande, et pas franchement heureuse, surprise, c’est le Premier Capitaine de la VIIIème Légion, ce farceur de Sevatar, qui vient finalement toquer à sa porte, pour lui proposer un deal aux conséquences potentiellement funestes : enterrer le rapport de ce couillon de Khayon comme n’importe quel fonctionnaire sensé l’aurait fait depuis belle lurette, ou apprendre ce qu’il s’est réellement passé entre Night Lords et Thousand Sons sur Zoah…

Début spoiler…Comme la nouvelle aurait été beaucoup moins intéressante si Ulatal avait choisi la première option, nous embrayons donc sur un flash back des familles familial, durant lequel nous suivons Sevatar et son bodycam assister aux délibérations houleuses du camp impérial à propos de la Tour de la Sérénité, monument servant de bibliothèque et d’archives à la civilisation de Zoah, prestement incorporée à l’Imperium après un petit massacre pédagogique dont Curze à le secret. Ce même Curze serait d’avis de réduire la tour en poussière, comme le demande le manuel du parfait petit légionnaire, afin que les dangereuses connaissances qu’elle renferme ne viennent pas risquer de contredire la Vérité Impériale. Magnus (également présent) est bien sûr opposé à ce projet d’autodafé, et implore son frère de lui laisser le temps de contacter l’Empereur afin que ce dernier puisse trancher la question. Mais Konrad reste intraitable, et finit par ordonner à Sevatar de commencer le bombardement de la tour, malgré le fait que les Thousand Sons soient positionnés autour de cette dernière et la protègent grâce à leurs pouvoirs psychiques. Après avoir fait son Captain America pendant à peu près 12 secondes, Maggie finit par lâcher l’affaire, mais promet à Curze qu’il en parlera au manager (i. e. Pépé). Bilan des courses : la Tour de la Sérénité finit en gravats, son incommensurable et incommensuré savoir avec elle.

Ayant été témoin de ce clash frontal entre deux des fils de l’Empereur, Ulatal n’est guère surpris lorsque Sevatar prend son élan pour lui refaire le portrait à coup de glaive tronçonneur, cette information hautement sensible ne pouvant être ébruitée en dehors de la grande famille des Astartes. Notre héros est toutefois sauvé, non pas par le gong, mais par le Shang (un autre Capitaine des Night Lords), qui annonce à Sevatar que sa future victime a été nommée officier sur un des vaisseaux de la Légion, le Voidmaw. La nouvelle se termine sur le choix laissé à Ulatal : accepter son nouveau poste ou emporter son secret dans la tombe…Fin spoiler

AVIS :

Aaron Dembski-Bowden opère une fois encore sa magie narrative avec ce ‘The Abyssal Edge’, qui replonge le lecteur dans les savoureux paradoxes des Night Lords pré-Hérésie (un sujet de prédilection de cet auteur). On y retrouve bien sûr l’incontournable Sevatar, égal à lui-même en matière de killer one-liners, je m’en foutisme insolent1 et droiture morale bien cachée, mais le clou du spectacle est évidemment la joute verbale entre Konrad Curze et Magnus le Rouge au sujet de la Tour de la Sérénité. Dembski-Bowden prend soin de dépeindre les deux protagonistes de façon équilibrée, chacun ayant ses qualités (l’esprit critique de Magnus, qui lui donne la perspective nécessaire pour aller à l’encontre d’un édit impérial qu’il trouve stupide ; la « magnanimité » de Curze, qui a déterminé que l’utilisation de tactiques de terreur était la manière la plus efficace et la moins meurtrière pour conquérir Zoah) et ses défauts (l’indignation sélective de Magnus, qui a laissé les Night Lords mener la campagne comme ils le souhaitaient et ne s’oppose à eux que lorsqu’ils décident de raser la Tour de la Sérénité ; et ai-je vraiment besoin de souligner les problèmes de Curze2 ?), ce qui laisse au lecteur le soin de déterminer pour qui il prend fait et cause à la fin de la nouvelle.

Reste la partie consacrée à Ulatal, qui me paraît être trop développée pour un personnage à usage unique, et qui se conclut avec une indication assez nette que la gueule cassée se trouve un nouveau job parmi les auxiliaires humains de la Légion. Comme ADB a mis sous les feux des projecteurs les pilotes des escadrons de chasseurs de la flotte des Night Lords3 dans d’autres textes, je m’attendais à ce qu’Ulatal reparaisse à un moment ou à un autre dans le corpus nostramien de cet auteur, mais mes recherches n’ont rien donné à ce jour. Cela n’empêche pas de savourer cette nouvelle à son plein potentiel, mais pose la question de ce que voulait faire l’auteur avec ce personnage. À suivre ?

1 : La scène où Curze et Magnus lui disent en même temps de la fermer vaut son pesant de viande de grox.
2 : Le fait que l’on en apprenne plus sur Magnus dans ‘The Abyssal Edge’ que sur Konrad Curze me mène à considérer que cette nouvelle devrait être liée au premier plutôt qu’au second dans une optique ‘Primarques’.
3 : Particulièrement la pilote Taye Karenna, commandante de l’escadron des Voilés et chauffeur privé de Sevatar dans ‘Prince of Crows’.

ET POUR LES NOUVEAUX ?

Comme on arrive en fin de chronique et que vous avez sans doute une bonne idée de ce que je pourrais dire dans cette section après avoir lu mes retours sur ‘The Shel’tain Affair’ et ‘La Tour Foudroyée’, je me contenterai de souligner que l’une des nombreuses qualités d’Aaron Dembski-Bowden en matière d’écriture est sa capacité à mettre en scène des personnages complexes, profonds et attachants. Il est donc possible d’apprécier ‘Le Gouffre Abyssal’ en raison de la simple présence de l’impayable Sevatar. Ce qui est assez heureux, car demander à un néophyte de comprendre toutes les implications de la presque guerre entre Night Lords et Thousand Sons dans le contexte d’une Grande Croisade pré-Edit de Nikaea est… comment dire… assez ambitieux ?

A COMPLETER PAR :

Si vous êtes plutôt Night Lords, allez lire ‘Savage Weapons’ // ‘Des Armes Brutales’ et ‘Prince of Crows’ // ‘Le Prince des Corbeaux’ (Aaron Dembski-Bowden) et ‘Konrad Curze : Nighthaunter’ // ‘Konrad Curze : Hante-la-Nuit’ (Guy Haley) pour en apprendre plus sur ces joyeux drilles. Si vous êtes plutôt Thousand Sons, faîtes vous un avis sur l’éventuelle responsabilité de Magnus le Rouge en lisant ‘A Thousand Sons’ // ‘Un Millier de Fils’ (Graham McNeill) et ‘Prospero Burns’ // ‘Prospero Brûle’ (Dan Abnett).

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Et voilà qui conclut cette revue de la Black Library Celebration 2024, dont je vous invite à vous faire votre propre opinion car après tout, elle est (presque) gratuite et (en partie) disponible en français. Pour ma part, je retiens du bien, du moyen et du mauvais pour les deux versions chroniquées plus haut, mais je ne peux conclure cette critique sans remercier la Black Library de continuer à jouer le jeu de l’accessibilité et de proposer pour la septième année consécutive cet échantillon représentatif de sa prose au plus grand nombre. Continuez comme ça.

SUMMER OF READING 2016 [40K-HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue, convenablement estivale, du Summer of Reading 2016, recueil de sept nouvelles publiées par la Black Library pendant l’été 2016 (jusqu’ici, c’est assez simple, et ça devrait le rester). Après une édition 2015 proprement gargantuesque, avec pas moins de 21 histoires proposées au lecteur, 2016 se révéla être l’année de la maturité pour le format des SoR : un panaché de sept nouvelles rattachées aux franchises majeures de la GW-Fiction1… et une couverture absolument pas funky, que j’ai donc remplacé pour donner un peu plus de panache à cette sélection.

Summer of Reading 2016

Avec deux soumissions hérétiques et cinq siglées 40K, le Summer of Reading 2016 est d’abord destiné aux amateurs de science-fiction, bien qu’il ne faille jamais sous-estimer la capacité des contributeurs de la BL à s’affranchir des conventions pour livrer des nouvelles résolument surprenantes (en bien ou en moins bien). Et le casting réuni pour cette anthologie se révèle assez prometteur à ce niveau, puisqu’on y retrouve aussi bien des « grandes plumes » habituées à mettre leur patte aux univers pour lesquels ils écrivent (Abnett, Wraight, French…) que de auteurs vétérans n’ayant pas peur de tenter des trucs, ou des petits nouveaux n’ayant pas froid aux yeux. Sans plus attendre, repartons donc à la découverte du millésime 2016, à l’époque où nos célébrités préférées s’amusaient à tomber comme des mouches…

1 : Bien qu’Age of Sigmar ait fêté ses un an au moment où le SoR a été mis en ligne, cette nouvelle franchise n’a cependant pas bénéficié d’une mise avant dans le cru de cette année, ce qui illustre bien les débuts difficiles d’AoS avec la BL.

Summer of Reading 2016

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Blackshield – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE :

BlackshieldLa fin de la récré approche à grands pas pour Khorak de la Death Guard et ses quelques frères d’armes survivants, ayant fait sécession de leur Légion après le siège de Molech et s’étant transformés en pirates galactiques nourrissant le vague projet de faire payer son hypocrisie à Mortarion depuis lors. Poursuivis par de mystérieux adversaires jusqu’à l’orbite du monde hostile d’Agarvian, les non alignés sont contraints d’abandonner leur vaisseau (le joliment nommé Ghogolla… je pense que ces nerds de Thousand Sons – et leur énervante maîtrise de toutes les langues mortes de la galaxie, y compris le français – ont dû bien se foutre d’eux pendant la Grande Croisade) et de se poser en catastrophe à la surface de ce caillou aussi minable que gazeux, espérant que leur légendaire fortitude leur permettra de gagner un avantage sur ce champ de bataille des plus difficiles.

Après une marche éprouvante à travers les marais spongieux qui constituent l’unique écosystème d’Argavian, Khokho and the boyz finissent par trouver un endroit idéal pour livrer leur dernier carré (ça tombe bien, ils ne sont plus que quatre), une fois que leurs poursuivants les auront rattrapés, bien sûr. Littéralement quatre jours plus tard, une petite force de Space Marines passablement exténués par cet UTMB1 finit par arriver à portée de bolter, et se fait donc accueillir bellement par les Death Guards qui barbotaient dans la bouillasse sans bouger le petit doigt depuis un petit moment2.

Si les premiers instants de l’accrochage tournent logiquement en faveur des défenseurs embusqués, le nombre de leurs assaillants finit par renverser le rapport de forces, et Khorak, bien protégé par son armure Terminator et son statut de protagoniste, finit par se retrouver seul face à un véritable peloton d’exécution. Bravache jusqu’au bout, il défie en duel le meneur adverse, dont l’héraldique est totalement noire, comme celle de ses suivants. Souhaitant au moins savoir qui sera responsable de son futur et inévitable trépas, l’ex Death Shroud bombarde son homologue de question, jusqu’à ce que ce dernier consente à révéler son identité…

Début spoiler 1…Et, surprise, il s’agit d’un frérot, comme sa capacité à respirer l’air vicié d’Argavian sans protection le laisse apparaître. Les points communs ne s’arrêtent pas là, car Crysos Morturg (son petit nom) est également un renégat Death Guard, ayant été laissé pour mort sur le champ de bataille d’Isstvan III après la purge des premières Légions traîtresses par leurs frères d’armes. Ayant survécu au prix d’une reconstitution quasi-complète de son anatomie, Crysos s’est depuis donné comme mission de traquer et détruire les forces Death Guard sur lesquelles il arrive à mettre la prothèse, en compagnie d’un contingent issus des tristement célèbres Légions Brisées, renommé Black Shields en référence à leur héraldique monocolore. Comprenant qu’il partage le même but que son poursuivant, et malgré la perte regrettable de son vaisseau et ses camarades, Khorak semble prêt à passer l’éponge sur les derniers événements et à repartir du bon pied avec ses nouveaux copains, lorsqu’un accident fâcheux se produit…

Début spoiler 2…Un de ses frères d’armes, qui n’était pas tout à fait mort au final, s’extirpe de son bain de boue pour réaliser un headshot parfait sur le front dégarni et ridé de Jason Statham Crysos, avant d’être transformé en hachis parmentier par la riposte des Black Shields. Cette mort tragique et ironique aurait toutefois préférable pour Khorak à la réalité dont il est témoin, Crysos parvenant à stopper le projectile fatal grâce à ses pouvoirs psychiques. Ayant laissé tomber Mortarion, mais pas son endoctrinement psychophobe, Khorak renonce à rejoindre la team noiraud et préfère tomber au champ d’honneur en essayant de faire goûter de sa faux à Crysos, tentative évidemment vouée à l’échec et dans laquelle il perd le dernier de ses points de vie.

De retour sur son vaisseau, et plus qu’un peu dépité par la tournure qu’ont pris les événements, Crysos décide de mettre le cap sur Terra pour solliciter rien de moins qu’une audience avec l’Empereur en personne (qui n’a sans doute rien d’autre à faire en ce moment), afin d’attirer Son auguste regard sur les services rendus par Robocopmarine et sa bande d’irréguliers. On lui souhaite bien du courage…Fin spoiler

1 : Ultra Trail du Marécage Boueux. Le Mont Blanc a été rasé à la fin de M29 pour construire un centre commercial.
2 : Les amateurs de hard SF me feront remarquer, avec raison, qu’aucune indication n’est donnée sur la longueur du jour sur Agarvian. Il se peut donc que nos héros n’aient attendu que trois minutes avant que la bagarre ne s’engage, mais ce serait beaucoup moins badass, reconnaissons-le.

AVIS :

Chris Wraight se paie le luxe d’introduire une nouvelle faction (certes mineure) à l’Hérésie d’Horus avec ce ‘Blackshield’, ce qui n’est pas donné à tout le monde, et le fait plutôt bien (même s’il passera immédiatement le flambeau à l’infatigable Josh Reynolds après la publication de cette nouvelle). On a ici le droit à une histoire bien ficelée, n’oubliant pas de donner au lecteur sa ration d’action brutale, ni de mettre en relief les conséquences de l’Hérésie pour les personnages lambda qui y sont confrontés. Seul léger bémol : il est nécessaire de maîtriser un minimum le fluff hérétique (en particulier les événements d’Isstvan III et de Molech) pour bien comprendre de quoi Khorak et Crysos discutent lors de leur petit tête à tête agarvien et pourquoi ils sont autant surpris l’un que l’autre de la présence de leur vis-à-vis. En outre, et comme beaucoup d’arcs narratifs ébauchés à cette période charnière de l’Hérésie d’Horus, on reste pour le moment sans nouvelle du space trip vers Terra qui sert d’ouverture à ‘Blackshield’, ce qui est un peu dommage.

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Gates of the Devourer – D. Annandale [40K] :

INTRIGUE :

Gates of the DevourerQuel est le point commun entre Ferantha Krezoc, Princeps du Titan Warlord Gloria Vastator de la Legio Pallidus Mor, et Albrecht Feisler, Gouverneur de la planète Khania ? En cette fin de 41ème millénaire, la réponse est : un sommeil perturbé (je sais, c’est assez banal et pas vraiment grimdark), encore que pour des raisons totalement différentes. Krezoc est un workaholic qui ressent psychologiquement l’absence de communion avec l’esprit de sa grosse machine lorsqu’elle n’est pas en opération, alors que Feisler fait juste les frais de l’Ombre dans le Warp, sa planète se faisant attaquer sans crier gare1, ni rien du tout d’ailleurs, par une petite flotte ruche affamée. Ces deux personnages seront nos yeux et nos oreilles dans le récit de la lutte entre l’Imperium et les Tyranides pour Khania, casting complété par le Capitaine Harth Deyers du 66ème régiment blindé de Katara, envoyé à la rescousse de la planète attaquée dans l’espoir d’enrayer la progression des Xenos avant que Katara se retrouve à son tour en haut de leur to eat list.

Nous suivons donc l’arrivée en orbite de la demi-Légion Pallidus Mor, placée sous le commandement du très cool Maréchal Balzhan, quelques semaines après le début du conflit. Bien qu’ils n’aient pas trainés en route, les PM sont les dernières forces impériales à rejoindre le théâtre d’opérations, devancés par la Flotte Impériale (qui a pris la mission à la légère, s’est contentée d’envoyer quelques vaisseaux, et s’est faite bellement fesser par les Tytys en conséquence), les transports du 66ème Kataran, et ceux de la demie-Légion des Imperial Hunters. A leur arrivée, la situation est loin d’être idéale pour les défenseurs, acculés dans la cité-ruche de Gelon du côtés des Gardes Impériaux, et en cours de déploiement pour les Hunters, dont le commandant (Syagrius) semble vouloir compenser le nom vernaculaire de sa Légion par une arrogance et une condescendance sans limite à l’égard des nouveaux venus. Bien que ce comportement énerve rapidement l’irascible Krezoc, elle est rappelée à ses obligations par Balzhan, qui accepte sans broncher que son homologue dicte la stratégie de l’avance des Titans.

S’en suit une promenade bucolique dans la pampa khanienne, à peine perturbée par la contre-attaque de quelques millions de Gaunts et Gargouilles, trop heureux de se jeter sous les pieds et sur le parebrise de marcheurs impériaux pour les ralentir. Bien que la menace soit minime pour des Titans en pleine forme, l’approche très agressive des Imperial Hunters comparée à celle plus posée des Pallidus Mor ne tarde pas à menacer la cohésion d’unité entre les deux Légions, ce qui permet aux Xenos d’isoler et de détruire quelques machines adverses. Les hasards de la bataille font que le Gloria Vastator soit chargé par Balzhan de garder les arrières de l’Augustus Secutor du pompeux Syagrius après que ce dernier ait décidé de sprinter en solo vers la banlieue dévastée de Gelon pour en soulager les défenseurs, ou plus vraisemblablement mettre à jour sa story Instagram avec un selfie duckface et une mention #FirstOnSite. Malheureusement pour les Gundams impériaux, un Hierophant se trouve sur leur chemin, et pour une fois, il semblerait que ce soit la petite bête qui aille manger la grosse…

Début spoilerLe Hierophant met en effet à profit son agilité et ses réflexes bien supérieurs à ceux du pataud Augustus Secutor pour lui infliger des dommages critiques, et aurait sans doute réussi à se payer la (grosse) tête de Syagrius sans l’intervention salutaire du Gloria Vastator de Krezoc, qui parvient à détourner l’attention du Bio-Titan de sa proie, et à lui coller suffisamment de touches de Force 30 dans son petit ventre mou pour envoyer la bestiole au tapis (même si c’est ce poseur de Syagrius qui lui assène le coup fatal, et engrange donc l’XP).

Privés de la présence charismatique de leur gigantesque mascotte, les essaims Tyranides se débandent et se font facilement annihiler par les efforts combinés de la Garde, des Legio Titanicus et de la Flotte Impériale, sauvant ainsi Khania… pour deux jours. La nouvelle se termine en effet sur l’annonce de l’arrivée de renforts tyranides en orbite de la planète. Il faudrait installer un interphone avec caméra à proximité du point de Mandeville du système, ça éviterait ce genre de sale surprise…Fin spoiler

1 : Ou plutôt, et pour être tout à fait exact, sans être entendue par le reste de l’Imperium. Ce qui n’empêche pas ce dernier de réagir (et promptement avec ça) car dans les ténèbres du lointain futur, c’est encore le silence qui est le plus inquiétant.

AVIS :

David Annandale nous propose un compte-rendu romancé tout à fait plaisant d’un siège opposant les forces de l’Imperium à celles de la Grande Dévoreuse, alternant entre scènes d’action frénétique et descriptions de la difficile collaboration entre les contingents des Legio Titanicus, ce qui devrait combler tous les types de lecteur de la GW-Fiction. L’alternance des points de vue adoptés au cours de la nouvelle fonctionne assez bien, même si le Gouverneur Albrecht Feisler et le Capitaine Harth Deyers ne bénéficient pas du même traitement que la Princeps Ferantha Krezoc, ce qui m’a d’abord étonné, avant que quelques recherches fassent apparaître que ‘Gates of the Devourer’ est en fait le prélude au roman qu’Annandale a consacré à la Legio Pallidus Mor (‘Warlord : Fury of the God Machine’). Le dénouement de la campagne de Khania est relaté dans les premiers chapitres de ce bouquin, ce qui explique également la brutalité avec laquelle cette nouvelle se termine. Qu’on se rassure toutefois, cette scission narrative n’empêche pas d’apprécier ‘Gates of the Devourer’ à sa juste valeur, et on tient ici une des meilleures soumissions de David Annandale en matière de war fiction.

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Deathwatch: Swordwind – I. St. Martin [40K] :

INTRIGUE :

Deathwatch_SwordwindNous suivons en parallèle deux des journées les plus pourries (sans doute des lundis) de la vie du Frère de Bataille Adoni, du Chapitre des Mortifactors. La première fut celle de sa dernière mission pour le compte de la Deathwatch, pendant laquelle il parvint à grand peine, et au prix du sacrifice de tous les autres membres de son escouade, à faire la peau à un Prophète Eldar responsable de la destruction de treize planètes impériales, pour des raisons que la décence nous interdit de mentionner ici. Arrivé au boss fight en compagnie d’un autre membre des Mortifactors, l’héroïque Sobor en personne (faites comme si vous le connaissiez, ça lui fera plaisir), Adoni parvint à mener à bien le psykocide malgré le fait que les combattants se soient retrouvés projetés dans le vide intersidéral après la détonation mal avisée d’une bombe à fusion à proximité d’un dôme à simple vitrage – les Eldars ne savent pas construire en dur, c’est connu. Sobor n’eut toutefois pas cette chance, les milliers d’échardes en moelle spectrale décochées par le Psyker Zoneille à bout portant ayant raison de son endurance surhumaine. Une fin indigne pour un héros de son calibre, mais tout le monde perd des PVs de la honte de temps en temps. Dans son dernier souffle, Sobor fit jurer à son compatriote de ramener son épée, brisée en deux au cours du combat, à la Basilica Mortis, forteresse chapitrale des Mortifactors. Tout cela est fort triste, on peut le reconnaitre.

Sa deuxième journée pénible fut justement celle de son retour au bercail, avec pour toutes possessions l’épée en kit et le crâne de son camarade (l’Inquisition n’est pas du genre à laisser ses anciens combattants repartir avec leur matos de fonction). Tenu par un serment de silence sur son passé dans les Ordos, sous peine de condamner son Chapitre à la destruction pure et simple, Adoni refuse de s’étendre sur les circonstances de la mort de Sobor, malgré la demande formulée par le Maître du Chapitre en personne, Magyar. Pour ne rien arranger, les Mortifactors traversent une mauvaise passe, leur monde chapitral (Posul) ayant été boulotté par la flotte ruche Léviathan sans qu’ils ne puissent le sauver, et leurs effectifs étant tombés à un niveau dangereusement bas suite aux pertes subies dans cet affrontement titanesque. L’ambiance sur la Basilica Mortis est donc encore plus gloomy que d’habitude, ce qui est approprié à la cérémonie d’hommage à Sobor que Magyar organise séance tenante, et à laquelle Adoni assiste bien évidemment…

Début spoiler…Lorsque les Archivistes présents dans l’assistance commencent à saigner du nez de manière incontrôlée et fatale pour la plupart d’entre eux, il devient clair qu’un invité imprévu est venu se joindre à la veillée funèbre. Il s’agit de l’Exarque Bahzakhain, a.k.a. Swordwind, venue avec quelques potes venger la mort de leur Prophète de malheur en annihilant les dernières forces des Mortifactors. Le combat qui s’en suit verra l’Exarque réussir à décapiter en douce le pauvre Magyar, pendant que la bataille fait rage aux alentours. Cette vision éprouvante, loin de démoraliser Adoni, lui donne un regain de motivation pour aller s’enquiller du Xenos, et la nouvelle se termine alors que notre inflexible héros se rue sur Bahzakhain, l’épée fracassée de Sobor à la main. Un combat très déséquilibré sur le papier, mais comme on l’a vu plus tôt dans cette chronique, personne n’est à l’abri d’un échec critique sur ses jets de sauvegarde d’armure…Fin spoiler

AVIS :

Avec ce ‘Swordwind’, Ian St. Martin signe une très bonne nouvelle pour les fans des Mortifactors, de la Deathwatch et du grimdark en général, plongeant le lecteur dans l’éprouvant quotidien des guerriers d’élite de l’Ordo Xenos, et leur toute aussi éprouvante retraite, pour peu qu’ils se soient faits des ennemis rancuniers au cours de leur service. St. Martin parvient à créer une réelle tension autour de ses personnages en l’espace de quelques lignes, réussissant l’exploit de nous intéresser au destin de Space Marines à peine introduits (ou figures très mineures du background, comme pour le Maître de Chapitre Magyar), ce qui n’est pas à la portée de tous les auteurs de la Black Library, loin s’en faut. Il se permet aussi de reprendre en main le fluff des Mortifactors, et si ces derniers s’en sortent plutôt mal, l’avalanche de calamités qui leur ait tombé sur le museau depuis l’arrivée de la flotte ruche Leviathan les rend cependant beaucoup sympathiques et mémorables qu’ils ne l’étaient auparavant (on peut appeler ça le syndrome Scythes of the Emperor). Une petite gemme de la littérature 40K, qui mériterait certainement une réédition dans une anthologie grand public.

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Stormseeker – A. Worley [40K] :

INTRIGUE :

StormseekerRattaché à une expédition punitive menée par les Deathwolves envers une cabale de pillards Drukhari, le Prêtre de Fer Anvarr Rustmane se retrouve contraint et forcé de participer à une frappe éclair contre les insaisissables Xenos à la surface du monde désolé et désolant de Vityris, où ces derniers ont capturé les résidents d’une station de recherche. Piégés sur place par les manigances d’une faction rivale, les Drukhari constituent une cible rêvée pour les Space Wolves avides de revanche, à condition que ces derniers ne traînent pas en route. Cette fenêtre de tir réduite ne fait cependant pas le bonheur de Rustmane, dont la récente communion avec l’Esprit de la Machine de son Stormwolf lui a appris que ce dernier ne se contenterait plus de la pelisse puante et pleine de vermine qui lui servait jusqu’à présent de pare-givre. N’ayant pas pu trouver de relique convenable pour apaiser ce caprice imprévu, le Prêtre de Fer doit donc braver le déplaisir de sa monture et emmener sa cargaison de Griffes Sanglantes chanteurs jusqu’à la surface de Vityris, quoi qu’il en coûte.

La mission de notre héros se voit davantage compliquée par l’arrivée soudaine sur les lieux de l’empoignade d’un trio de Razorwings, mené par la sœur de l’Archonte en rade, forçant Rustmane à mener sa propre escadrille de Stormwolfs et Stormfangs à l’assaut des invités surprises. Jongler entre le déplaisir de son vaisseau, les appels en absence du Garde Loup Skaldr Frostbiter, en charge de la mission1, et les intentions meurtrières des Tom-Tom et Nana Drukhari ne sera pas une partie de plaisir, mais Rustie a suffisamment de bouteille et de bouteilles (boire ou conduire, pourquoi choisir ?) pour mener à bien cette mission…

1 : Harald a dû emmener Icetooth chez le vétérinaire pour lui tailler les griffes.

AVIS :

Drôle de soumission de la part d’Alec Worley, qui prend avec Stormseeker le contrepied d’un certain nombre d’éléments établis du fluff, pour un résultat qui, s’il ne peut pas être qualifié de désagréable, et se révèle même être assez distrayant par son parti pris assez léger, ne s’inscrit pas vraiment dans l’atmosphère générale du 41ème millénaire. Personnage haut en couleurs, Anvarr Rustmane n’est pas le moindre des éléments perturbateurs de cette histoire, sa tendance à l’alcoolisme et à l’accumulation compulsive de reliques plus ou moins ragoutantes, tranchant fortement avec l’image classique du Techmarine tel que le lecteur se le représente. Accompagné de son loup mécanique Cogfang (disposant de l’option « tonnelet de mjod intégré », en bon Saint Bernard grimdark), Rustmane ne se départit jamais de sa bonne humeur, mis à part lorsque les Griffes Sanglantes qu’il transporte dans son Stormclaw se mettent à chanter un peu trop fort, ce qui ne doit pas arranger sa gueule de bois fer persistante. Cette approche décomplexée de la guerre est émulée par Frostbite, jamais avare en petites blagues alors même qu’il emmène ses guerriers au front1, tandis que de l’autre côté du champ de bataille, le véritable amour fraternel qui semble unir Iruthyr et Izabella Xynariis est assez surprenant de la part de ressortissants de Commoragh.

Difficile d’en vouloir à Worley cela dit, quand on considère ce que la Black Library lui a demandé, c’est à dire une nouvelle dithyrambique sur les Stormwolf et Stormfang, probablement les aéronefs 1) les moins aérodynamiques de la gamme 40K, et 2) équipés de l’arme la plus cartoonesque de l’arsenal impérial (je veux bien sûr parler du mirifique canon Helfrost, tout droit tiré du Batman & Robin de 1997). C’est dans ce genre de situation que l’on comprend mieux pourquoi on parle de l’humour comme la politesse du désespoir…

1 : D’ailleurs, sa harangue héroïque se trouvera brutalement interrompue par une fléchette empoisonnée Drukhari en pleine gorge, sans autre effet indésirable qu’une sévère crise d’épilepsie et une blessure mortelle de son amour-propre. Pour citer le sage Tuco : « When you have to shoot, shoot. Don’t talk ».

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Myriad – R. Sanders [HH] :

INTRIGUE :

MyriadNous suivons l’ex Princeps Kallistra Lennox et sa petite bande de loyalistes alors qu’ils mènent des opérations de sabotage à la surface de Mars, tentant à leur humble niveau de mettre des bâtons dans les chenilles du Mechanicus Noir qui règne en maître sur la planète rouge. Après avoir détruit l’Ajax Abominata, un Titan Warlord qui patientait dans la pampa que les Imperial Fists arrêtent leur blocus orbital pour rejoindre les hordes horusiennes, Lennox et ses ouailles répondent au SOS d’un martien en détresse sur le chemin du retour vers la base secrète de la résistance. Ils arrivent sur le lieu d’un accrochage entre une équipe de récupérateurs loyalistes et les forces du sinistre Gordicor, chargé par Kelbor-Hal de traquer les fidèles de l’Omnimessie, et se préparent à faire une nouvelle fois parler la poudre.

À la grande surprise de nos héros, leurs adversaires semblent cependant s’être entretués pour une raison inexpliquée peu de temps après leur arrivée sur site, leur facilitant grandement le travail et leur permettant de mettre la main sur du matos de premier choix parmi les décombres, en la figure d’un robot Kastelan presque neuf. L’automate a bien une espèce de protubérance mécanique non identifiée au milieu du torse, mais cela n’empêche pas Lennox et ses sous-fifres de l’embarquer dans le coffre de leur tunnelier de service, et de reprendre le chemin de la base Invalis en compagnie des camarades qu’ils ont secourus.

Une mauvaise nouvelle attend toutefois la Princeps Disney à son arrivée au poste de commandement des insurgés, dirigé par le presque mort mais toujours vaillant (il lui reste l’usage de la main droite, et pour un gamer, c’est plus que suffisant) Raman Synk : les forces de l’Ordo Reductor de cette brute de Gordicor se sont inexplicablement mises en route en direction d’Invalis peu de temps après le raid sur l’Ajax Abominata, ce qui ne peut que signifier qu’ils ont réussi à suivre la trace des loyalistes. Aussi pragmatiques que l’on pouvait s’y attendre de la part d’ingénieurs de leur calibre, Lennox et ses supérieurs ne tardent pas à soupçonner que la cause de leur problème vient de leur trouvaille miraculeuse, laissée en quarantaine dans un hangar en compagnie d’une nouvelle recrue enthousiaste mais pas encore testée, Lenk 4/12 (ces noms, ces noms…). Comme pour confirmer leurs suspicions, le Kastelan inerte reprend soudainement du service, et commence à pomper goulument la base de données d’Invalis sans que les adeptes ne puissent rien faire. En effet, l’appareil monté sur la carlingue du robot de combat est identifié (un peu tard) par le docte Synk comme la marque de la Myriade Tabula, une intelligence artificielle ayant tenté de conquérir la galaxie par le passé, et mise sous clé à fin d’étude par le Mechanicum après avoir été vaincue de haute lutte. Et l’IA semble très déterminée à prendre sa revanche…

Début spoiler…Fort heureusement pour les loyalistes, Mme Tabula considère, dans son infinie sagesse, qu’ils ne sont pas une menace, ce qui est à la fois rassurant et insultant, et se concentre exclusivement sur la purge du Mechanicus Noir, à commencer par l’émetteur corrompu que le pauvre Lenk 4/12 transportait dans son bedon sans même le savoir, et qui est prestement confisqué et détruit par le Kastelan « possédé », sauvant du même coup la base Invalis d’une attaque de Gordicor.

Peu optimistes quant à leur chance de neutraliser la Myriade, Synk et ses complices décident de faire contre mauvaise fortune bon cœur core et de capitaliser sur la haine que l’IA semble vouer au Chaos pour poursuivre leur lutte contre Kelbor-Hal et ses sbires. En effet, la puissance et la pureté logique du code tabulaire permet de retourner les machines corrompues les uns contre les autres, comme cela a été le cas lorsque Lennox et ses hommes ont répondu à l’appel à l’aide de leurs camarades, un peu plus tôt dans la journée. Il ne leur reste plus qu’à suivre le plan en 4.267 étapes concoctés par la Myriade pour parvenir à leurs fins, et avec un peu de chance, appuyer sur le bouton Reset juste avant que cette dernière parvienne à assujettir l’univers, comme elle en a l’intention. Tout sera une affaire de timingFin spoiler 

AVIS :

Les lecteurs familiers du fluff de l’Hérésie d’Horus savent que le Schisme de Mars a constitué un événement important de cette campagne cataclysmique, que la Black Library a cependant traité assez légèrement dans sa couverture de cette dernière. Partant, il est difficile de cracher sur une nouvelle traitant de ce théâtre particulier, même si Rob Sanders livre une copie assez particulière avec ce ‘Myriad’, continuation logique de la novellaCybernetica’ (où la Myriade Tabula apparaît pour la première fois), et qui semble n’être qu’une succession de péripéties mineures (détruire un Titan, secourir des copains en rade…) jusqu’à ce qu’un littéral Deus Ex Machina se produise et le rideau tombe sur Kallistra Lennox et sa looooongue liste de camarades nommés1. Mars méritait mieux.

1 : Ce qui semble indique que Rob Sanders avait l’intention de développer cet arc dans d’autres publications, si vous voulez mon avis. Pas de chance, ‘Myriad’ a été son dernier travail pour l’Hérésie d’Horus…

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The Purity of Ignorance – J. French [40K] :

INTRIGUE :

The Purity of ignoranceNotre nouvelle commence par l’interrogatoire serré mais décousu subi par le Lieutenant Ianthe du Régiment des Agathian Sky Sharks. En face de l’officier, un prêcheur impérial s’étant introduit comme Josef, se montre très intéressé par les états de service de son interlocutrice, qui peine à comprendre pourquoi il tient tant à ce qu’elle les passe en revue en boucle1. Il s’agit toutefois de la première fois qu’Ianthe collabore avec l’Inquisition à laquelle Josef appartient, et notre héroïne se dit que cela doit faire partie de la procédure de recrutement classique des saints Ordos, et se plie donc sans broncher au petit jeu du déroulé de CV. Il n’y a de toutes façons pas grand-chose à gagner à mettre un rogne un représentant d’une institution qui peut vitrifier votre monde natal sans avoir à se justifier, n’est-ce pas ?

Ailleurs, sur le monde de Tularlen, la Gouverneure Sul Nereid s’éveille dans le luxe de ses quartiers privés. La pauvresse a fait un horrible cauchemar, mais rien qui ne puisse être oublié par un bon petit déjeuner et une représentation privée du dernier ballet donné à l’opéra de la spire. En cela, Nereid a la chance de pouvoir compter sur la dévotion et le professionnalisme de son majordome Saliktris, qui semble toujours deviner ce qui lui ferait plaisir et se met en quatre pour satisfaire les envies et appétits de sa maîtresse. Et cette dernière a bien besoin de se détendre de temps à autres, les soucis posés par la gestion d’un monde impérial étant bien lourds à supporter.

Le premier acte du Lac des Razorwings est toutefois brutalement interrompu par l’arrivée de l’Inquisiteur Covenant et de sa suite, qui plutôt que de se faire annoncer au rez-de-chaussée de la ruche, ont opté pour une entrée fracassante par la baie vitrée, vérifiant une nouvelle fois le dicton que personne ne s’attend à ce que l’Inquisition passe par les velux. Coco et Cie sont confrontés à une vision d’horreur de 4.3 sur l’échelle du Nighthaunter2, musiciens et danseurs se révélant être des cultistes lourdement pimpés selon les goûts pointus, acérés même, du Prince du Chaos. Saliktris, quant à lui, est un authentique Héraut de Slaanesh, trop heureux d’obtempérer lorsque sa maîtresse lui ordonne de chasser les importuns, et par la force s’il le faut. Dans la bagarre qui s’en suit, Ianthe bénéficie d’une introduction approfondie aux us et coutumes chaotiques, la mélée confuse mais colorée qui engloutit les quartiers gouverneuriaux prélevant un lourd tribut sur les membres de son escouade ainsi que sur sa santé mentale.  À ses côtés, Covenant et ses sidekicks réguliers (Josef et Severita), plus aguerris que leur nouvelle recrue, s’illustrent de sanglante façon, jusqu’à ce que Salikris soit banni dans le Warp, et que cette fieffée profiteuse de Nereid écope d’un blâme, pardon d’un blam !, lorsque Ianthe parvient à la mettre face à ses responsabilités et au canon de sa carabine laser.

Début spoilerLe cœur de l’infection ayant été purgé, il ne reste plus au représentant de l’Ordo Malleus de donner quelques directives à son personnel pour que les quelques milliers de personnes ayant eu le malheur de fréquenter la défunte au cours des dernières années soient rapidement mises hors service. Dura lex sed lex. Se pose également la question du devenir d’Ianthe, qui, au cours de l’opération, a retrouvé la mémoire, et compris qu’elle servait en fait Covenant depuis de nombreuses années, mais avait été consciencieusement reformatée à la suite de chaque mission pendant laquelle elle avait été exposée au Chaos (ce qui doit arriver assez souvent dans ce type de profession), pour le salut de son âme et la sécurité de tous. Il lui appartient donc de faire le choix auquel elle est soumise à chaque réunion retex : un lavage de cerveau ou un bolt dans la tête. Présenté comme ça, c’est assez facile de trancher. Mais cette fois, à la surprise générale, Covenant adouci un peu le deal proposé à son sous-fifre, en lui proposant de continuer à le servir avec toute sa tête, jugeant, pour des raisons qui ne seront pas partagées avec l’humble lecteur, qu’elle est prête à vivre avec le poids de la connaissance de la réalité fondamentale de l’univers3. La conclusion de la nouvelle nous apprend qu’Ianthe a choisi de renoncer à la fameuse pureté de l’ignorance, et donc progressé au sein du cénacle d’acolytes de son boss, puisque c’est désormais elle qui remplace Josef pour les entretiens préliminaires. Si cela ne fait pas d’elle une interrogatrice, je ne sais plus à quel saint me vouer.Fin spoiler

1 : N’oublions pas que le bon Josef est sourd comme un pot. Il avait peut-être seulement oublié de brancher son sonotone aujourd’hui.
2 : Un des héritages peu connus mais essentiels que ce brave Curze a laissé à l’Imperium.
3 : Ou peut-être qu’il en avait marre de lui expliquer comment fonctionnait l’imprimante tous les quatre matins.

AVIS :

Connaissant les capacités de French, je m’attendais à ce que son The Purity of Ignorance soit d’un niveau un peu supérieur à ce qui a été présenté ici. Reposant sur une série de révélations, sa nouvelle souffre à mes yeux de ne pas suffisamment « préparer le terrain » à ces dernières, qui arrivent donc sans jouer à plein. Si la corruption de la Gouverneure est cousue de fil blanc, bien que les passages introductifs narrés de son point de vue laissent à penser que tout va parfaitement bien sur Tularlen, c’est l’amnésie induite de son héroïne qui aurait vraiment gagné à être davantage exploitée. Point de flashbacks fugaces, de sensations de déjà vu inexplicables ou de réminiscences troublantes pour Ianthe en effet, qui est confrontée, et le lecteur avec elle, au constat de ses nombreux brainwashing de façon brutale, alors que la suture psychique qui lui avait été faite tenait jusqu’à ce moment parfaitement bien. Au lieu d’une nouvelle à twist final, nous nous retrouvons donc « seulement » avec une illustration romancée d’une dure réalité (encore une) de l’Inquisition, qui n’hésitera pas à se débarrasser des éléments ou des individus pouvant poser un problème à l’accomplissement de sa mission sacrée. Cela est certes éducateur (n’oublions pas que la nouvelle a été incluse dans l’anthologie Croisade et Autres Récits), mais cela aurait pu être intéressant d’un point de vue littéraire en sus. Petite déception donc.

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The Keeler Image – D. Abnett [40K] :

INTRIGUE :

The Keeler ImageBien que blacklisté par sa hiérarchie et activement recherché par ses collègues puritains, Gregor Eisenhorn n’est pas du genre à se la couler douce dans sa villa de Gudrun en regardant l’Imperium sombrer, comme il en aurait pourtant le droit. Aussi, lorsque ce noble et souriant buriné vieillard apprend grâce à son réseau d’informateurs qu’une vente aux enchères va être organisée dans le palais de Medonae le Morphale, et qu’un objet très particulier sera proposé à l’acquisition à cette occasion, il ne lui faut pas longtemps pour décider de faire le voyage afin de suivre le déroulement de la transaction.

Arrivé à la surface de la bucolique Pallik1, Greg le Grabataire ne perd pas de temps à se rendre dans l’humble demeure de son hôte, où il est immédiatement reconnu pour ce qu’il est (un Inquisiteur, pour ceux qui ne suivent pas ou qui ne sont pas familiers de la série). Pas de très bon augure pour quelqu’un qui se trouve sur la liste des most wanted du sous-secteur, mais rien qui ne vienne perturber la bonhommie d’Eisenhorn, qui de toute façon est privé d’expression faciale depuis quelques décennies à ce stade de sa carrière. Accueilli par la Bouche de Medonae, un Psyker servant d’avatar vivant à son gros lard de maître, notre flegmatique héros est directement conduit devant l’objet ayant suscité son intérêt, et qui se trouve être… un polaroïd. Mais attention, un polaroïd vieux de 10.000 ans (gasp), pris par nulle autre qu’Euphrati Keeler du temps où elle n’avait pas encore sombré dans le mysticisme (gasp), et dont le sujet n’est autre que ce fieffé fripon d’Horus (GAAAASP). Pour quiconque a de vagues notions de cet obscur événement que l’on nomme l’Hérésie d’Horus, il est clair que cette relique est beaucoup plus qu’une curiosité picturale, d’autant plus que son heureux acquéreur repartira avec quelques notes rédigées de la main de Keeler, dans lesquelles cette dernière a candidement exprimé son avis sur des sujets aussi tabous que la divinité de l’Empereur et l’existence de Démons. Les mœurs étaient plus libres au 31ème millénaire.

Eisenhorn sympathise avec un autre visiteur, Sejan Karyl, également très intéressé par cette authentique photo souvenir, et très au courant de beaucoup de choses qu’un simple quidam ne devrait pas savoir, à commencer par la présence de l’Inquisitrice Halanor Kurtecz de l’Ordo Hereticus. Eisenhorn est convaincu que cette dernière est en fait une agente de l’insidieux Cognitae, qu’il combat sans relâche depuis le début de sa carrière, et espère même qu’il s’agit de Lilean Chase, la maîtresse de cette organisation aussi criminelle que chaotique. C’est la raison pour laquelle il a fait le déplacement, et compte bien régler ses comptes avec les cultistes dès qu’il en aura l’occasion. Sa vendetta personnelle doit cependant attendre, Medonae sollicitant un tête à tête avant le début de la vente, qu’il serait impoli de refuser…

Début spoilerConduit en présence de ce beau bébé (9 tonnes, tout de même) atteint d’un léger trouble alimentaire, Eisenhorn promet de ne pas engager de poursuites à l’égard de son hôte une fois que les enchères auront été conclues, crainte assez compréhensible de la part d’un loyal sujet impérial ayant attiré l’attention des Saints Ordos. Les pouvoirs psychiques de Papy Greg lui permettent cependant de déceler que Medonae a agi sous la contrainte, et échappe grâce à ses réflexes surhumains (je demande la VAR : il a plus de deux cents ans au compteur et tient debout grâce à un exosquelette en fonte…) à une tentative d’assassinat par servo-crânes interposés, bientôt rejoints par un trio d’hommes de main de l’Inquisition, bien décidés à alpaguer l’old timer. Eisenhorn en a toutefois sous le capot, et parvient à se débarrasser de ses assaillants grâce à l’intervention opportune de ce bon vieil Harlon Nayl, envoyé en repérage avant son boss et dont les talents avec les armes à feu ne sont plus à prouver.

Comprenant que sa couverture, pour miteuse et trouée qu’elle ait été pour commencer, a été éventée, Eisenhorn décide de s’attarder un peu malgré les risques, confiant que Chase ne pourra pas laisser passer l’occasion de mettre la main sur la photographie de Keeler avant de repartir. En cela, il a presque raison, car si un membre du Cognitae est bel est bien surpris en train d’embarquer la précieuse image ainsi que les notes accompagnant cette dernière, il ne s’agit pas de Mme Chaise mais d’un de ses agents, Sejan Karyl. Ce dernier, un peu trop confiant dans ses aptitudes psychiques, se permet de se foutre de la gue*le du pauvre Greg quand il révèle candidement qu’il croyait que Kurtecz était Chase. En réalité, Kurtecz est une authentique détentrice de rosette, et c’est elle qui a forcé Medonae à rendre publique la vente de la relique hérétique, afin de forcer Eisenhorn à se montrer. Tel est pris qui croyait prendre.

Fort heureusement pour notre héros, un peu dépassé par les événements, ce plantage stratégique monumental peut être rattrapé par l’usage de la bonne vieille force brute, comme Karyl ne tarde pas à en faire les frais. Bien que le forban ait réussi à mettre Nayl au tapis, il n’est pas de taille à lutter avec un Greg très mais alors très chafouin, qui lui balance un grand MÄRDE à la figure, ce qui lui fait traverser un mur et l’immole par le feu, en même temps que les notes compromettantes sur lesquelles le Cognitae cherchait à mettre la main. Ceci fait, Eisenhorn utilise son dernier joker : l’appel à un ami familier démoniaque, et Cherubael n’est que trop heureux de venir calmer les ardeurs des Scions Tempestus que Kurtecz a envoyé sur place. Il ne reste plus qu’à attendre que Medea Betancore arrive pour raccompagner tout ce petit monde jusqu’au vaisseau, en essayant de s’imaginer quel son avait le rire d’Horus. A cela, la science a une réponse. Fin spoiler

1 : Qui comme la planète Rosetta, sur laquelle Abnett avait placé l’intrigue de la nouvelle ‘Black Gold’, orbite autour de trois soleils. Ça n’aura pas vraiment d’importance sur le déroulé de l’histoire, mais je suis fier de m’en être souvenu, et tenais donc à flexer un peu ici.

AVIS :

Ça fait du bien de prendre des nouvelles d’une légende de la Black Library telle que Gregor Eisenhorn, et Dan Abnett soigne le retour aux affaires de son personnage fétiche dans ce ‘The Keeler Image’, qui fera sans doute autant plaisir aux amateurs du 31ème que du 41ème millénaire, grâce à « la participation » d’Euphrati Keeler dans l’intrigue. On retrouve dans ces quelques pages tous les ingrédients d’une bonne nouvelle inquisitoriale, Abnett-style : immersion rapide et réussie dans un environnement à la fois fortement marqué 40K et dépaysant pour le lecteur, personnages aussi troubles qu’intéressants, narration nerveuse, scènes d’action efficaces. Si comme moi, cette histoire est la première consacrée à Eisenhorn que vous lisez depuis un bout de temps, ne vous étonnez pas si l’envie vous prend de reprendre la trilogie originelle, ou de vous embarquer dans la suite des (mes)aventures du papy le plus résistant de l’Imperium.

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Et voilà qui termine cette revue du Summer of Reading 2016, et je dois dire que ce millésime s’avéra être particulièrement réussi, avec des soumissions de qualité en nombre (ce qui est bien), et aucune sortie de route à déplorer (ce qui est bien aussi).  Si toutes les semaines thématiques proposées par la BL était de ce niveau, je serais le plus heureux des chroniqueurs… On peut toujours rêver.

BLACK LIBRARY CELEBRATION 2018 [Recueil]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue du recueil/échantillon gratuit sorti par la Black Library en 2018, à l’occasion de sa célébration annuelle. Si mes recherches sont exactes, il s’agissait de la première fois que l’auguste maison au marteau noir expérimentait avec ce format, qu’elle a continué à supporter jusqu’à aujourd’hui. A l’époque pas encore décliné en plusieurs langues, ni proposé en format numérique, ce petit livret contient six histoires, à raison de deux par franchise majeur de la BL (40K, Age of Sigmar et l’Hérésie d’Horus). Au niveau des contributeurs, on retrouve la fine fleur des auteurs de l’époque, dont pas moins de quatre Seigneurs de Terra (French, Haley, Dembski-Bowden et Wraight), ce qui en fait peut-être la mini-anthologie la plus premium du lot.

Black Library Celebration 2018

Comme d’habitude, l’examen qui suit portera sur une dimension supplémentaire à mes revues habituelles, à savoir la pertinence de proposer la nouvelle en question à un public par nature pas du tout au courant des publications de la BL. Une sélection forcément difficile, eut égard à la richesse et la complexité des univers de la GW-Fiction, mais dont la réussite ou l’échec pourrait avoir un effet important sur le développement de la fanbase de la maison d’édition de Nottingham. Le millésime 2018 a-t-il passé l’épreuve du feu noob ? C’est ce que nous allons voir.

Black Library Celebration 2018

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The Absolution of Swords – J. French [40K] :

INTRIGUE:

The Absolution of SwordsPar une nuit frisquette dont Dominicus Prime a le secret, un trio de figures enrobées se dirige vers la forme imposante de la Haute Chapelle, dont l’accès a pourtant été interdit par le Prefectus Prior Gul. Lorsqu’une patrouille de gardes a la mauvaise idée de leur barrer la route, les marcheurs jettent à bas leurs masques (et chasubles), et forcent leur chemin jusqu’au bâtiment où les attendent – sans le savoir encore – Aristas Gul et son bedaud Lumn, qui se croient avoir été convoqués par leur contact au sein de la 10ème Voie pour un point d’avancement surprise. Nos trois compères sont l’Inquisiteur Covenant, la Sœur Repentia Severita (qui ajoute pieusement le KO des deux gardes qu’elle a molestés dans l’exercice de leurs fonctions à son ardoise de péchés), et le Prieur Josef, et s’ils ont fait le voyage dans ce trou perdu de la galaxie alors qu’un Conclave est sur le point de débuter sur Ero, c’est qu’ils ont de bonnes raisons.

Un peu plus loin, sur la même planète, deux autres agents de l’homme au catogan tentent d’obtenir leurs entrées dans le night club le plus privé de Dominicus Prime : la salle de pause de la 10ème Voie. Ils ont dû pour cela négocier leur passage à travers des kilomètres de couloirs, fumoirs et dortoirs, graissant les pattes des pèlerins de faction tout du long, jusqu’à faire la connaissance d’un gros malabar peu aimable, qui accepte toutefois de les mener à confesse après avoir vu les (faux) tatouages et entendu les (bonnes) réponses de ces visiteurs impromptus. Pour continuer les présentations, il s’agit du blasé Cleander Von Castellan, marchand libre-mais-pas-vraiment-en-fait, et de l’imperturbable Koleg, ex-soldat aussi mortel que morne. Seul petit problème, la brute fait du zèle dans son interrogatoire, et pose une dernière question à laquelle Cleander n’a pas la réponse. Son improvisation ne donnant rien, le rogue trader est contraint d’écourter l’entrevue en dégainant ses fidèles pistolets à aiguilles, ce qui règle le problème de façon élégante (plus qu’un bolter, en tout cas). Ceci fait, les deux agents sont libres de s’engager dans l’escalier qui les mènera jusqu’à leur destination, peut-être finale.

Retour dans la Haute Chapelle, où de foie jaune de Gul en est quitte pour une petite leçon de catéchisme. Car le bon Prior couvre depuis trois ans les agissements démoniaques de la 10ème Voie, depuis qu’il a reçu la visite d’un Inquisiteur radical ayant confirmé ses doutes athéistes sur la non-divinité de l’Empereur. Bon prince, Covenant est venu offrir une chance d’absolution au grox égaré, en échange de quelques tuyaux sur son commanditaire, ce que Gul est plutôt prêt à faire, mais ce que Lumn, moins moinillon muet que démon déguisé, n’est pas très chaud pour autoriser. L’inévitable baston qui fait suite à ce léger différend est remportée de haute lutte par l’Inquisition, mais creuse un gros trou dans la réserve de points de vie (et la couche de graisse protectrice) de Josef, en plus de mettre Severita sur les rotules. Heureusement que le boss et sa grande épée énergétique sont là, tout de même.

Sous terre, c’est à peu près le même topo pour Cleander et Koleg, après qu’ils soient parvenus à une crypte contenant un pédiluve, un Psyker enchaîné, une foule de cultistes enragés, et un démon d’intérieur qui n’a pas été nourri depuis longtemps. Pendant que Koleg maintient les hostiles à distance à grand renfort de gomme cogne et grenades de désencerclement, Cleander, qui a eu une bonne éducation et se charge donc de réfléchir pour deux, réalise que la situation se simplifierait sans doute beaucoup si le Psyker captif était sorti de l’équation, ce qu’il fait d’une petite torsion des cervicales, avec la bénédiction de l’intéressé. Et en effet, cette déconnexion warpique brutale renvoie le démon dans les limbes, ce qui est suffisant pour permettre à Koleg de terminer les hostiles tout seul comme un grand. Leur mission accomplie, et peu emballés à l’idée de faire le ménage, les deux hommes reprennent le chemin de la surface pour prendre un Champomy.

Notre nouvelle se termine avec la fin de l’interrogatoire psychique de Gul, mené d’esprit de maître par Mylasa, la Psyker de fonction de Covenant. Cette dernière offre à son sujet un départ apaisé, après quelques semaines de franches tortures dont elle a effacé la trace de sa mémoire, en reconnaissance du manque de bol colossal de Gul, coupable d’avoir obéi à un Inquisiteur soupçonné d’être tombé du mauvais côté de la barrière. Les souvenirs du Prior seront utiles à Covenant pour exposer la duplicité de son collègue lors du Conclave de guerre qui prendra place dans quelques semaines à Ero, et auquel les deux hommes participeront. Cela n’est cependant plus l’affaire de Gul, qui finit sa vie un verre à la main et sur le bord de mer, de façon purement psychique certes, mais plus agréablement que la grande majorité des citoyens de l’Imperium. C’est l’Inquisition qui régale.

AVIS:

John French signe une très bonne introduction à sa saga inquisitoriale avec ‘The Absolution of Swords’, qui se déroule juste avant les événements de ‘Resurrection’ et permet de se familiariser en douceur avec la galerie de personnages gravitant autour de Covenant, et découvrir la rivalité professionnelle qu’il entretient avec Talicto. Considérant que les duels fratricides au sein de l’Inquisition donnaient les intrigues les plus intéressantes de ce sous-genre de la GW-Fiction, ‘The Absolution…’ a piqué mon intérêt et donné sérieusement envie d’en savoir plus sur l’héritier présomptif d’Eisenhorn1 (qui a aussi eu affaire à un collègue radical en son jeune temps). Pour ne rien gâcher, le récit en lui-même est tout à fait digeste, mélangeant scènes d’action efficaces et atmosphère poisseusement grimdark, comme on est en droit de l’attendre de la part d’une soumission de ce type. Bref, si vous débutez avec Coco, voici la nouvelle qu’il vous faut, loin devant les « introspections » que French a dédié à chacun des serviteurs de Catogan-man (‘The Purity of Ignorance’, ‘The Spirit of Cogs’), qui sont à réserver aux lecteurs déjà familiers du bon Inquisiteur.

1 : Ou plutôt contemporain, car les deux personnages ont été créés pour le jeu Inquisitor, il y a fort longtemps.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Une très bonne introduction au côté grimdark de Warhammer 40K en général, doublée d’une très bonne introduction à la série des Guerres Horusiennes en particulier: la Black Library s’offre et nous offre un combo gagnant avec ‘The Absolution of Swords‘. Rien à dire sur ce coup là.

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A Trick of the Light – J. Reynolds [40K] :

INTRIGUE:

A Trick of the LightOù il sera question des premiers moments de ce fripon de Lukas parmi les Space Wolves, et de la façon dont ce turbulent ex-personnage nommé parvint à s’emparer de la pelisse d’un doppelgangrel, haut fait jamais égalé de mémoire de Long Croc. Notre histoire commence de façon assez classique par un gros plan sur un novice en petite tenue courant comme un dératé sur la banquise en direction du Croc, après avoir été jeté hors d’un Stormwolf par son tuteur Prêtre Loup. Comme tous les impétrants du Chapitre, Lukas doit maîtriser le Canis Helix et réussir à revenir à la forteresse des Space Wolves1, ce qui n’est pas une mince affaire. Forte tête devant l’éternel l’Allfather, Lulu va même jusqu’à se poser la question de sa coopération à cette épreuve brutale, et à laquelle il n’a jamais donné son consentement. Contrairement à la majorité des jeunes hommes de Fenris, il ne rêvait en effet pas de rejoindre les mythiques Guerriers du Ciel, mais était assez satisfait d’occuper le rôle du branleur/lover de sa communauté, au grand dam des époux et à la grande satisfaction des épouses de cette dernière. Embarqué contre son gré dans une expédition de chasse qui eut la malchance de contester un élan à un doppelgangrel peu partageur, Lukas vit tous ses camarades mourir les uns après les autres sous les griffes/crocs/tentacules/pinces du changeforme. Le flegmatique rouquin eut toutefois sa revanche lorsque la bête s’attaqua à son auguste personne, et la blessa grièvement au cours du combat, ce qui convainquit le Prêtre Loup qui suivait la confrontation à distance de récupérer cet individu prometteur avant qu’il ne se vide de son sang sur la toundra gelée.

Ce que Lukas ne tarde pas à découvrir, alors qu’il trotte en petites foulées vers le Croc sous un délicieux grésil fenrissien, c’est que sous son aspect pince-sans-rire, le Prêtre Loup qu’il l’a recueilli a lui aussi de l’humour. La preuve en est qu’il l’a laissé pile à l’endroit où il l’avait ramassé après sa bataille contre le doppelgangrel, et ce dernier – qui n’a apparemment pas bougé d’endroit pendant les quelques jours/semaines/mois nécessaires à la préparation des novices au test final de leur introduction – est bien décidé à régler ses comptes avec sa proie. Avant que les deux adversaires puissent s’expliquer, il faudra à Lukas se défaire des attentions d’un kraken affamé, et, pire, se faire faire la leçon par les fantômes de ses compagnons de chasse (son mentor Kvelduf, son cousin Thord et sa sex friend Gunnhild), ainsi que par les apparitions de son Prêtre Loup et de son Prêtre des Runes référents, pour faire bonne mesure2. Comme tout ce petit monde revient au moins deux fois hanter le pauvre Lukas, il passe au final plus de temps à essayer de détendre l’atmosphère en balançant quelques one liners dont il a le secret qu’à combattre la mégafaune de Fenris.

On a tout de même droit au récit circonstancié de la lutte, cette fois à mort, entre le Trompeur et le Trumpiste3, remportée comme prévu par le premier après quelques échanges accrochés. En hommage à ses comparses défunts, Lukas prélève la peau de la bête et refuse de la jeter à son arrivée au Croc. La suite appartient, si ce n’est à l’histoire, au moins au Codex Space Wolves V5…

: On peut donc dire qu’il est sur la route de la Rout, mouahaha.
2 : Il y a même Pépé qui vient dire bonjour à la fin, et repart en se tenant la bedaine après que Lukas lui ait raconté l’histoire de Guilliman qui repeint son plafond. Un grand classique.
3 : Une entité qui déforme en permanence la réalité pour duper ceux qui cherchent à le confronter. Et en plus, le changeforme avait une casquette MAGA (Make Asaheim Great Again), c’est presque certain.

AVIS:

Toujours à l’aise dans l’exercice délicat du développement du fluff sommairement présenté dans les suppléments de jeu (lire ‘The Gods Demand’ pour s’en convaincre), Josh Reynolds opère sa science narrative sur la figure de Lukas le Trompeur, à laquelle il consacrera un audio drama (‘The Art of Provocation’) et un roman (éponyme). Sans grande révélation pouvant expliquer pourquoi Lulu est aussi pénible (short story shorter : il a toujours été comme ça), cette nouvelle est plus sympathique qu’intéressante, et est sans doute à réserver aux lecteurs voulant en savoir plus sur cette figure du lore Space Wolves, et/ou à ceux qui cherchent à savoir si un (ici futur) Space Marine peut faire de l’humour, qu’au tout venant.   

ET POUR LES NOUVEAUX?

Choisir une nouvelle centrée autour d’un personnage pas vraiment connu (sorry Lukas) pour figurer dans un recueil introductif est une décision risquée : à mon humble avis, des têtes d’affiche du calibre d’Uriel Ventris ou Abaddon auraient mieux fait l’affaire. Comme l’histoire déroulée par Josh Reynolds couvre également un pan central du background (le trail du Canis Helix) d’un des Chapitres Space Marines les plus fameux qui soient, sa lecture est toutefois assez appropriée pour des nouveaux venus dans la GW-Fiction. On peut également souligner qu’inclure une nouvelle dont le ton varie un peu du grimdark premier degré, et donc un peu plombant, qui transpire largement des ouvrages de la Black Library, est également assez malin de la part des pontes de Nottingham. Bref, un bilan plutôt positif.

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Bear Eater – D. Guymer [AoS] :

INTRIGUE:

Bear EaterToujours en maraude dans les Royaumes Mortels (ici en Ghur) avec ses Astral Templars pour le compte du patron, Hamilcar Bear Eater voit une occasion en or d’agrandir le protectorat sigmarite se présenter à lui lorsqu’il arrive en vue de la cité de Jercho. Miraculeusement épargnée des déprédations des hordes du Chaos, cette ville ferait un bastion idéal pour les croisés d’Azyr… si Hamilcar arrive à convaincre son monarque, le Roi Soleil Joraad el Ranoon, de rejoindre le camp de l’Ordre. Rien de plus facile pour notre héros, dont les prouesses martiales ne sont égalées que par ses talents de diplomate (du moins c’est comme ça qu’il voit les choses, en sa qualité de plus grand fan de lui-même).

Après une petite parade militaire réalisée dans des conditions éprouvantes (#SousLeSoleilExactement), même pour des immortels en sigmarite, Hamilcar et ses lieutenants (le vieux bougon Broudiccan et un random dude du nom de Thracius) sont pris à parti par une émissaire de Jojo et sommés de laisser leurs armes au vestiaire pour respecter le protocole officiel. Lorsque nos trois compères finissent par obtempérer, ils ont la désagréable de surprise de constater qu’ils sont tombés dans un piège, une petite armée de gardes se déversant dans le hall avec des velléités peu charitables envers les Stormcasts.

Punk à chien gryffhound dans l’âme, Hamilcar ne perd pas de temps à tenter de résoudre ce conflit par la parole, et commence à zlataner à tout va les malheureux mortels qui lui passent sous la main. Ayant manifestement sous-estimés la puissance de leurs adversaires, les miliciens de Jercho finissent par battre en retraite, laissant toute latitude à notre héros de monter une expédition punitive envers ce pendard de Joraad el Ranoon (officiellement) et d’annexer la cité pour la plus grande gloire de Sigmar (officieusement)1. Sur le chemin de la salle du trône, il rencontre une vieille connaissance, le général Sarmiel el Talame, avec qui il a fait le coup de feu contre les Sankrit quelques semaines auparavant, et qui l’avait mis sur la route de Jercho après la bataille de Heliopalis. Miraculeusement convaincu par Hamilcar en l’espace de deux répliques qu’il était dans le camp des méchants, Sarmiel fait défection de la Garde Solaire et accepte de guider ses gros copains jusqu’au Palais de la Lune, où le Roi Soleil tient sa cour.

En route vers son objectif, Hamilcar développe un point de côté persistant2 et se retrouve confronté, en plus des bidasses solaires qui défendent le Palais, à des vampires feulant, preuve irréfutable du passage de ce coquin de Mannfred von Castein (ennemi juré de notre héros depuis qu’il s’est fait tuer par le Mortarque3) par Jercho. Il en faut toutefois plus pour empêcher l’injouable Mimil – qui se paie le luxe d’infliger une Mike Tyson à un suceur de sang un peu trop sûr de lui – de se frayer un chemin jusqu’à l’affreux Jojo. Ce dernier ne peut compter que sur ses rayons, des serviteurs totalement assujettis à sa volonté, pour faire office de derniers défenseurs, et place Hamilcar devant un dilemme cornélien pour le héros du Bien (avec un grand B et un grand nez) qu’il est : massacrer des innocents pour atteindre son objectif, ou les épargner et laisser le Roi Soleil s’en tirer à peu de frais…

Début spoiler…Malheureusement pour Joraad el Ranoon, une troisième voie était possible, à savoir embrocher le lumineux monarque sur son trône d’un jet de hallebarde bien senti. La mort rapide et sanglante du roitelet permet au moins d’établir qu’il n’avait pas été changé en vampire par Mannfred von Carstein, ce qui est… une information. Et le savoir est le pouvoir, paraît-il. La nouvelle s’achève sur cette conquête nette et (presque) sans bavure d’une nouvelle Cité de Sigmar par les Astral Templars. Du travail bien fait.Fin spoiler

1 : On peut remercier Guymer d’adapter un grand classique de la culture britannique à la sauce d’Age of Sigmar. Appelons ça le Fardeau du Mangeur d’Ours Blanc.
2 : Qui ne sera pas expliqué dans la suite de la nouvelle et n’aura pas d’impact sur la conclusion de cette dernière, mais suggère fortement que Guymer avait quelque chose de particulier en tête au moment de l’écriture.
3 : Voir ‘Beasts of Cartha’.

AVIS:

Je ressors de ce ‘Bear Eater’ avec une persistante sensation de gâchis au fond de la gorge (ou peut-être du cerveau), ce qui me désole au plus haut point compte tenu de mon attachement pour le personnage de Hamilcar, une des premières têtes d’affiche moderne (comprendre, un brin complexe) des Royaumes Mortels, et qui faisait ici ses grands débuts dans la carrière. En cause, le choix de David Guymer de placer son intrigue dans un cadre exotique et singulier (donc intéressant) en diable, mais de confiner ce dernier à une toile de fond au profit d’une nième baston entre Stormcast Eternals et locaux impénitents. La deuxième moitié de la nouvelle vient ainsi ruiner le travail de world building de la première, en se focalisant uniquement sur les exploits martiaux du fortiche Hamilcar, qui parviendra une fois encore et sans aucune surprise à vaincre l’affreux vilain que la destinée lui a mis sur son chemin. Et comme les compétences martiales de sa Némésis du jour (ou de la nuit) culminent à « lever le bras d’un air vaguement menaçant », on n’a même pas le droit à un combat final digne de ce nom, comme cela avait été le cas lors d’épisodes précédents de la série.

De manière générale, il se perçoit bien trop clairement à la lecture que ‘Bear Eater’ n’est qu’un segment d’un arc narratif bien plus large, dans la droite ligne des événements relatés dans ‘The Realmgate Wars’, écrits à quatre mains par Guymer et Josh Reynolds lors des premières années d’Age of Sigmar. Les références à la traque de Mannfred von Carstein sont tellement nombreuses au fil des pages que je soupçonne que cette nouvelle devait initialement faire partie d’une nouvelle tétralogie (comme ‘The Hunt for Nagash’ et ‘Knights of Vengeance’), avant que le projet soit abandonné pour une raison non précisée. Cela expliquerait aussi cette fin des plus abruptes ainsi que le traitement bizarre réservé au personnage de Sarmiel el Talame, qui semble avoir un passif conséquent avec Hamilcar et ses Astral Templars : je suis prêt à mettre une pièce sur le fait que cette première rencontre aurait dû faire l’objet d’une nouvelle ou d’un audio drama. Bref, un véritable et regrettable accident de parcours pour la paire Guymer & Hamilcar, sans doute causé par les errements éditoriaux de la Black Library à l’époque.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Mettre un personnage récurrent de la BL en avant dans un recueil promotionnel est une tactique courante et sensée d’un point de vue marketing, et comme ‘Bear Eater‘ marque les débuts de Hamilcar dans la carrière, il s’agissait d’un choix logique. Cependant, cette nouvelle n’est pas la meilleure, ni la plus représentative du style « high fantasy détendu du slip » que Guymer a signé pour ce héros charismatique (‘The Hardest Word‘ est supérieur sur les deux plans, et a été initialement publié en 2017, donc à temps pour figurer dans ce recueil), ce qui fait de sa sélection une petite faute de goût.

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Pantheon – G. Haley [AoS] :

INTRIGUE:

PantheonÀ une époque lointaine et plus heureuse, Sigmar prit sur lui de faire construire l’équivalent de Strasbourg (une ville avec du cachet + un lieu de rassemblement pour les décideurs politiques) sur la plus haute montagne d’Azyr. Nommé Highheim, ce qui sonne convenablement alsacien vous le reconnaitrez, ce complexe accueillit pendant un temps, voire une ère, les Dieux (plus ou moins) civilisés qui formèrent le panthéon des Royaumes Mortels. Puis le Chaos arriva, et chacun repartit dans ses pénates, laissant le pauvre Ziggy errer comme une âme en peine dans les allées désertes de la Theopolis.

La guerre totale décrétée par le divin barbu contre les quatre affreux est toutefois l’occasion pour le premier de réactiver ses vieux réseaux, et par une belle mâtinée pas encore tout à fait ensoleillée, il invite Alarielle à faire un Teams (avec webcam) pour parler du bon vieux temps. Au début franchement sur la défensive – ne pas oublier que la blitzkrieg sigmarienne a failli très mal finir pour elle – la Déesse finit par se détendre un peu, et accepte d’accompagner son hôte jusqu’à la place centrale du Highheim, où se trouve comme de juste une pièce d’eau. Mais attention, ce n’est pas n’importe quoi : plutôt qu’un bête bassin avec une fontaine rococo et des fientes de pigeon sur la margelle, il s’agit d’un miroir argenté créé par le mage Sanasay Bayla, et offert au Panthéon comme cadeau, outil et avertissement. Bayla, qui n’était pas la moitié d’un abruti, a en effet réussi à réaliser une œuvre qui permet à qui la contemple de voyager dans l’espace et dans le temps. Si Sigmar a tenu à ce qu’Alarielle vienne avec lui devant le miroir, ce n’est pas pour tenter de conclure avec la seule Déesse un tant soit peu accorte de son entourage (on est d’accord que Morathi est un peu creepy sur les bords), mais pour mater ensemble la vie de Brian Bayla, qui en plus d’être distrayante – on parle tout de même d’un type qui a réussi à maîtriser cinq des huit formes de magie – pourrait se révéler instructive.

La caméra se braque donc sur le mage prodige, au moment où une crise existentielle le saisit. A force d’exceller en tout, notre homme ne sait plus quel but se donner dans la vie, et après mûre réflexion, il décide d’aller vérifier si les Royaumes Mortels ont bien une fin physique, just for the thrill of it. La première étape de cette odyssée est de fact checker le sujet auprès d’une sommité en la matière, et comme Bayla a le bras long et le cœur bien accroché, il monte tout en haut du minaret du temple de Teclis le plus proche, entre en transe et se téléporte directement auprès du Dieu, qui lui assure que l’on peut bien s’asseoir sur le rebord du monde1. Cependant, cela n’est pas donné au premier clampin venu, car il faut passer par une porte secrète qui ne peut s’ouvrir qu’avec une clé forgée exprès par Grugni, puis terrasser un monstre immortel. Ca fait cher le coup d’œil.

Ce topo ne fait cependant pas peur à Bayla, qui abandonne séance tenance femme et enfants pour se lancer dans ce trek de l’extrême, ce qui l’occupe pendant quelques années. S’il ne parvient pas à négocier une audience auprès du Dieu forgeron lorsqu’il se rend à son temple de Chamon, il réussit tout du moins à obtenir un double de la clé en partageant sa Rince-Cochon avec le Nain Blanc (qui passait dans le coin). Il trouve également une astuce pour venir à bout du loup géant (Afrener) qui garde l’accès au bord du monde en se suicidant à 99% pour pouvoir rencontre Nagash, qui accepte d’euthanasier l’encombrant clébard en échange de cinq siècles et cinq jours de servitude post-mortem. Faut ce qu’il faut.

Ces obstacles enfin négociés, Bayla peut enfin boucler son périple, et contempler l’immensité magique et chaotique où les Royaumes (ici Ghyran) commencent et s’achèvent. Il est cependant immédiatement alpagué par un Magister de Tzeentch, qui essaie de lui vendre un plan de carrière mirobolant en l’échange de son âme, mais qui commet l’erreur de révéler que l’équilibre perso-pro ne serait alors pas vraiment respecté. Car Bayla est, au fond de lui, un authentique pater familias, et toutes ses pérégrinations lui ont ouvert les yeux sur le fait qu’il n’a pas été très présent au cours de la dernière décennie. Raccrochant violemment au bec de son démarcheur (ou l’équivalent dans les Royaumes Mortels), il repart dare dare en direction de son foyer, non sans avoir eu la vision d’une époque lointaine où ce dernier serait frappé par la guerre. Sachant qu’il ne serait plus là pour le voir, et donc l’empêcher, il décide de créer son fameux miroir pour que les Dieux puissent s’en servir dans leur veille constante contre le Chaos. Ce qui nous ramène au point de départ et à Highheim.

La nouvelle se termine sur un petit speech de Sigmar à sa bonne amie, qu’il voudrait plus active auprès des mortels afin de contrecarrer les fake news répandues par le Chaos à propos de la vie éternelle qui attendrait les serviteurs des puissances de la ruine. Qui de plus qualifié que la Déesse de la Vie pour porter ce message optimiste et philosophique auprès des habitants des Royaumes Mortels, hein ? Alarielle lâche un gros « mouais, j’y penserais » et repart semer du gazon en Ghyran, laissant Sigmar passer la mop et fermer la lumière sur Higgheim. C’est pas tous les jours facile d’être un petit patron.

1 : C’est malin, je vois maintenant Teclis avec la moustache de Francis Cabrel.

AVIS:

On savait Guy Haley très à l’aise dans le registre « mythique », qu’il est l’un des seuls contributeurs de la Black Library à pratiquer de manière régulière1, et ‘Pantheon’ est sans doute sa soumission de référence en la matière. Il parvient en effet à mettre en scène une épopée légendaire comparable à celle Gilgamesh (un héros d’une puissance quasi-divine s’embarque dans une quête impossible), transposée dans l’univers d’Age of Sigmar, et même plus largement, de la GW-Fiction, comme les références au Monde qui Fut qui émaillent le récit le dénotent. On se laisse embarquer dans ce voyage très différent des nouvelles ordinaires de la BL, où le moindre personnage est un Dieu, une Bête Zodiacale ou un individu mythique, et qui se termine comme souvent dans ce type de littérature par un enseignement moral à méditer (ici un bon carpe diem des familles). C’est à la fois rafraichissant et bien réalisé, et mérite donc vraiment d’être lu par celles et ceux qui souhaitent explorer le catalogue de la Black Library à la sauce AoS. Un classique en devenir, à mon humble opinion.

1 : Voir sa série sur le Prince Maesa, par exemple.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Même si cette nouvelle n’est pas la plus « didactique » qui soit (on n’apprend pas grand-chose sur les factions d’Age of Sigmar en tant que tel), son approche, que je qualifierais de surplombante, du lore, envisagé depuis la perspective exaltée des Dieux et puissants héros des Royaumes Mortels, en fait une lecture tout à fait appropriée pour des nouveaux venus. C’est tellement plus intéressant à lire qu’une banale empoignade entre une cohorte de Stormcast Eternals et une armée chaotique/de la mort/de la destruction (rayez les mentions inappropriées) qui constituait la majeure partie des nouvelles des premiers temps d’AoS! Un classique, je vous disais. 

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The Last Son of Prospero – C. Wraight [HH] :

INTRIGUE:

The Last Son of ProsperoRamené sur Terra grâce aux efforts conjoints des White Scars, qu’il a aidé à sortir de la tempête Warp dans laquelle ils étaient encalminés, et des Elus de Malcador le Sigilite, le Sergent Revuel Arvida des Thousand Sons n’est plus vraiment au pic de sa forme à son arrivée sur le monde Trône. En cause, cette cochonnerie de malédiction du changement, un temps contenue par Magnus le Rouge, mais à présent hors de tout contrôle. Exfiltré vers l’infirmerie privée du Régent de Terra au nez et à la moustache de Jaghatai Khan, pour que Papi Mougeot puisse jouer au docteur avec ses abattis, le pauvre Arvida n’est plus qu’un tas de chair décoloré et instable, mais auquel son âme s’accroche encore avec l’énergie du désespoir.

Pendant que Malcador joue du scalpel avec plus de ténacité que d’efficacité (6 heures d’opération, tout de même), puis doit expliquer à un Jag’ hors de lui pourquoi il a cru bon de lui emprunter celui que le Primarque considère comme étant son obligé – et notre gonze prend les serments très au sérieux – Arvida expérimente des visions mystiques, où le passé et le présent s’entremêlent. Après quelques flashbacks peu intéressants, il fait la rencontre de son progéniteur borgne, ou plutôt de l’un de ses éclats1, qui a choisi de rester sur Terra… pour demander pardon à l’Empereur, j’imagine ? Toujours est-il que cette fraction du Roi Ecarlate est tirée de sa stupeur hébétée par l’arrivée de celui qui peut prétendre être le dernier fils de Prospero, et commence à se matérialiser dans la salle d’opération, juste à temps pour éviter à Jaghatai de faire avaler son bâton à Malcador pour lui apprendre à piquer les sauvegardes invulnérables pupilles des autres.

Cette apparition, c’était sur quoi le rusé vieillard comptait, lui qui cherchait un moyen de sécuriser les niveaux inférieurs du Palais Impérial en y installant un concierge avec un DEUG en occultisme. Malheureusement, la mayonnaise ne prend pas, ce qui laisse le champ libre au motivational speaker de Chogoris pour venir hurler des encouragements dans l’oreille la direction générale de son poulain. Miracle des miracles, cela marche beaucoup mieux que la combine de Malcador, et l’âme d’Arvida finit par fusionner avec l’éclat de Magnus, gagnant au passage une cure de beauté spectaculaire (les jeunes disent un glow up), qui redonne à notre comateux héros forme humaine. C’est ce qu’on appelle dans le jargon un coup d’éclat. Le rideau tombe sur une séance de présentation en bonne et due forme entre les membres du casting de cette nouvelle. Plutôt que de se prénommer Marvidus ou Manuel le Vouge, comme il en avait pourtant le droit et la possibilité, le « nouveau-né » s’introduit sous le nom d’Ianius, qui était le tutélaire (i.e. la mascotte démoniaque) d’Arvida au cours de sa carrière dans la Légion. Quelque chose me dit qu’on n’a pas encore fini d’entendre parler de lui…

1 : Parce que n’est plus Magn-I, c’est Magn-Us.

AVIS:

Chris Wraight signe une nouvelle pour connoisseurs de l’Hérésie d’Horus avec ‘The Last Son of Prospero’, qui ne peut être pleinement compris et apprécié qu’en maîtrisant, outre l’arc consacré par cet auteur au personnage de Revuel Arvida (‘Rebirth’, ‘Allegiance’), ceux propres à Malcador le Sigilite et ses élus (‘The Sigillite’), à Magnus (‘The Crimson King’) et aux White Scars (‘The Path of Heaven’, ‘Scars’)… ce qui fait un sacré bagage, mine de rien. Pour les happy few ayant investi assez de temps dans la maîtrise de l’Hérésie littéraire, cette nouvelle est à la fois intéressante sur le plan narratif et fluffique, ce qui est suffisamment rare pour être souligné, et apprécié. Pour les autres, qui formeront je crois la majorité, le bilan risque d’être un peu moins positif. Même si Wraight livre un récit de rédemption miraculeuse qui reste compréhensible pour un faux débutant (si vous ne savez pas qui sont Magnus, Jaghatai Khan et Malcador, ça va picoter), c’est bien le contexte dans lequel ‘The Last Son of Prospero’ se déroule qui fait tout l’intérêt de cette nouvelle. A ne pas mettre entre toutes les mains donc, ou en tous cas, à ne pas aborder sans préparation.

ET POUR LES NOUVEAUX?

Comme souligné juste au-dessus, vraiment très peu, tant la nouvelle est destinée à un public de vétérans. C’est donc un raté assez phénoménal de la part de la BL que d’avoir choisi une des nouvelles les moins appropriées à figurer dans un recueil d’i-ni-tia-tion à la GW-Fiction de tout le corpus de l’Hérésie d’Horus, alors que ce dernier comptait déjà des dizaines de courts formats qui auraient beaucoup mieux fait l’affaire. Dans le doute, toujours mettre ‘La Tour Foudroyée‘, c’est pourtant simple!

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Into Exile – A. Dembski-Bowden [HH] :

INTRIGUE:

Into ExileSommité reconnue de son domaine d’expertise (la techno-archéologie), le Magos Arkhan Land coulait des jours heureux sur Mars à diriger des fouilles dans les niveaux inférieurs de la planète rouge et à remettre la main sur des gadgets funky de l’Âge d’Or de la technologie (on raconte même qu’il a un Tamagotchi), quand l’Hérésie s’invita sur le monde forge. Bien que considérant cette guerre idéologique comme parfaitement en-dessous de lui, le Didier Raoult de M31 se retrouva à son corps défendant au cœur d’une lutte d’influence entre loyalistes et renégats, chacun des deux camps voulant bénéficier de son génie dans le meilleur des cas, et en priver son adversaire dans le pire. C’est ainsi que Malcador chargea Rogal Dorn de « convaincre » Land d’accepter un poste sur Terra, mission barbante que le Primarque se dépêcha de refiler à Sigismund, qui fit de même jusqu’à ce qu’elle échût au Légionnaire Nicanor, dont le statut de simple bidasse ne lui permettait pas de se défausser du job sur quelqu’un d’autre. Il aurait dû prendre un stagiaire, moi je dis.

Envoyé sur une Mars contrôlée en majorité par les forces du Fabricator General Kelbor-Hal, Nicanor parvint à se frayer un chemin jusqu’au laboratoire d’Arkhan Land, qui après avoir fait sa diva, conclut à la vision d’un bolter braqué sur son gros nez qu’il était dans son intérêt de suivre son nouveau copain tout jaune jusqu’au vaisseau de réfugiés qu’il lui servirait de ticket de sortie de la planète. Bien entendu, le voyage ne pouvait ne pas se passer sans encombres (bien que le complexe de supériorité chevillé au corps et le manque absolu de tact de Land menacent de faire dégénérer chaque conversation en pugilat), et les trois – Land emporte avec lui son singe mécanique de compagnie, Raghavan Sapien – ne tarde pas à découvrir qu’il est suivi…

Début spoiler…Leur stalker n’est autre qu’un automate Vorax, qui en a après les technomiches du technoarchélogiste, et n’accepte pas « non », ou même une rafale de bolts en pleine face, comme une réponse. Les nombreuses inimitiés que notre héros et sa grande gueule ont cultivé depuis des années rendent l’identification des commanditaires de cet assassinat impossible, mais il ne s’agit que d’un détail pour Nicanor, dont la mission reste de faire évacuer son colis en un seul morceau, quelqu’en soit le prix. Après avoir gagné un peu de temps en détruisant le pont où le Vorax avait lancé son attaque avec une charge melta, héritant au passage d’un criblage de chevrotine carabiné, le Space Marine choisit héroïquement de faire une Gandalf le Gris Jaune lorsque la machine tueuse les rattrapa à nouveau, à quelques centaines de mètres du Uber Pool réservé par ces radins d’Imperial Fists pour le transfert de Land.

Pas au mieux de sa forme et totalement surclassé par son adversaire mécanique, Nicanor réussit toutefois à tenir assez longtemps pour permettre à Arkhan Land et sa grosse pointe de vitesse de rejoindre bon port et prendre le chemin du monde Trône. Le rideau « tombe » (voir ci-dessous) sur le cadavre du brave Légionnaire reposant dans la poussière ocre de Mars, tandis que Land a un sursaut temporaire et passager d’humanité en pensant au sacrifice désintéressé de son protecteur.Fin spoiler 

AVIS:

On peut toujours compter sur Aaron Dembski-Bowden pour proposer quelque chose d’intéressant dans les nouvelles qu’il écrit pour la Black Library, et ce ‘Into Exile’ ne fait pas exception. Ici, notre homme s’aventure sur le terrain de la construction narrative, en optant pour une succession de vignettes (10 en tout) déroulant le récit de la fuite d’Arkhan Land, une des figures de l’Hérésie dont Dembski-Bowden s’est entiché, depuis Mars jusqu’à Terra, de manière antéchronologique. L’histoire s’ouvre donc avec le départ du Vorax des lieux du combat final avec Nicanor, et la navette spatiale prise par Land déjà partie en orbite. On remonte ensuite le temps, pour retracer l’histoire dont on connaît déjà la fin, mais qui se révèle être tout de même agréable à suivre et assez rythmée, malgré le manque de suspens qui est la conséquence logique de ce parti pris Memento-esque. Bref, un exercice de style des plus concluants de la part de la golden plume de la BL, qui mérite d’être lu (et pas seulement résumé).

ET POUR LES NOUVEAUX?

On partait de très loin avec l’entrée précédente, mais la BL fait mieux que se rattraper en misant sur cette nouvelle, qui, si elle se bonifie également à la lecture si on connaît le lore de 30K et de 40K (ce qui est logique pour une franchise qui a été créée pour enrichir le fluff), présente la caractéristique d’être aussi intéressante sur la forme que sur le fond. Et si le dernier doit se mériter, la première est à la portée de tous, ce qui fait de ‘Into Exile‘ un bon produit promotionnel à mes yeux, qui pourrait même aider à casser l’image de sous-littérature qui colle à la Black Library, en montrant que cette dernière compte parmi ses contributeurs des auteurs assez imaginatifs et doués pour proposer des histoires du calibre de celle-ci. Pas énormément, c’est vrai, mais il y en a.

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Voilà qui conclut cette revue du recueil introductif 2018 de la Black Library. Comme toujours, saluons une nouvelle fois l’initiative de la maison d’édition de Nottingham de mettre à disposition de façon gracieuse ces quelques nouvelles: c’est un geste appréciable dans l’absolu, et auquel rien ne l’obligeait. En ce qui concerne la qualité et la pertinence des six courts formats décortiqués ci-dessus, je dois dire que le millésime 2018 se situe dans le haut du panier, avec deux histoires à la fois excellentes et grand public, et aucune soumission totalement dispensable, même si certaines étaient clairement destinées à une audience déjà familière des publications de la BL. L’exemple à suivre pour les recueils des années à venir.

 

BLACK LIBRARY CELEBRATION WEEK 2019 [Recueil]

Bonjour à tous, et bienvenue dans cette revue totalement à contre-temps des cinq nouvelles ayant formé la Black Library Celebration Week 2019. Après avoir traité le millésime 2022 (ici), l’envie m’a pris de boucler la boucle en remontant aux origines du concept, mis en place par la BL il y a quatre ans. Si le nombre de nouvelles proposées a décru au cours de éditions (de 6 en 2019 et 2020 à 5 en 2021 et 2022), le principe de base est resté le même: un inédit mis à disposition chaque jour pendant une – petite – semaine à l’occasion de la Black Library Celebration annuelle, avec un effort consenti de la part des éditeurs de Nottingham pour offrir un panorama assez complet des différentes franchises de la GW-Fiction.

Black Library Celebration Week 2019

Le printemps 2019 ayant vu le lancement de la dernière phase de l’Hérésie d’Horus avec la publication de ‘The Solar War‘ en Mars, il était assez logique que la BL mette le paquet sur cette série au cours du millésime festif qui nous intéresse ici: pas moins de trois nouvelles y sont consacrées, dont une signée de la main d’un des Seigneurs de Terra, Aaron Dembski-Bowden. L’absence totale d’histoires siglées Age of Sigmar constitue à l’inverse un choix incompréhensible de la part de Games Workshop, qui sera heureusement corrigé dès l’année suivante. Restent donc trois nouvelles pour 40K, rédigées par un trio d’auteurs ayant déjà ou étant amené à faire leurs preuves : John French, Rachel Harrison et Guy Haley. Les quatre années écoulées depuis cette semaine fatidique, et la republication de certains de ces courts formats dans d’autres anthologies aura certainement un impact sur la critique de ces travaux, mais comme a pensé Pépé en voyant arriver Rob’ et Lionel en orbite de Terra alors qu’on le mettait sur le trône ++Mieux vaut tard que jamais++

Black Library Celebration Week 2019

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Bringer of Sorrow – A. Dembski-Bowden [HH] :

INTRIGUE :

Bringer of SorrowAlors que sur Terra, tout le monde se prépare à l’arrivée des horribles hordes horusiennes (Ho ho ho), nous retrouvons un couple de personnages des plus singuliers, coincés sur le Monde Trône par la force des choses. À ma droite, le génial mais asocial au plus haut point Arkhan Land, techo-archéologue de renom et polymathe à ses heures perdues, en plus d’être très certainement l’idole absolue de cet arriviste de Cawl. À ma gauche, le Capitaine Blood Angels Zephon (peut-être nommé ainsi à cause de sa tendance aux flatulences), victime d’une maladie auto-immune ayant conduit son organisme à rejeter ses implants de Space Marines, et assigné à l’inauguration des chrysanthèmes par sa hiérarchie en conséquence depuis quelques années. Une bien triste mise au placard pour le fameux Porteur de Tourments de la Grande Croisade!

Ayant fraternisé à l’occasion de la Guerre dans la Toile, à laquelle ils ont participé dans la mesure de leurs moyens (‘Le Maître de l’Humanité‘), les deux méta-hommes contemplent l’arrivée de la Légion de Sanguinius, qui n’est pas sans arracher quelques larmes de joie à ce fragile de Zephon. Land, qui est un être rationnel, lui, ne comprend pas bien la cause de ces épanchements hormonaux, démonstration imparable à l’appui. Qu’importe, Zephon est la patience et la bienveillance incarnées, et le techo-archéologue n’est pas loin de considérer le grabataire en armure rouge qui sert de perchoir à son psyber-macaque (les Jokaero, ça fait vraiment peuple) comme un ami, ce qui l’amène à lui proposer – à trois reprises car Zeph’ n’écoutait pas les deux premières – une séance de chirurgie réparatrice, ce que l’Astartes accepte de grand cœur.

Un peu plus tard, dans le laboratoire de Land, ce dernier débute une opération de grande ampleur visant à remplacer les ressorts de sommier, tringles à rideau et autres rustines en chewing-gum qu’il a mis à profit pour remettre sur pied son comparse lorsque les démons sont venus toquer à la porte pendant que Pépé était sur le trône. Pour efficace que se soit avéré ce bricolage, en effet, les conséquences de long terme pour Zephon ne se sont pas avérées plaisantes. Mettant à profit ses connaissances scientifiques poussées, son approche radicalement hétérodoxe (pour ne pas dire hérétique) du problème, et sa réserve personnelle de gadgets récupérés de ci de là au cours de ses fouilles précédentes (dont un implant cérébral très probablement piqué à un homme de fer), Land parvient à retaper à neuf le Blood Angel, qui déborde donc de gratitude à sa sortie de catalepsie. La pureté du moment est toutefois battue en brèche lorsque Zephon se rend compte que l’intervention du Martien en exil a été motivée, non pas par son sens de l’amitié, mais par son désir d’obtenir une entrevue avec Sanguinius pour le convaincre d’aller botter le joint de culasse du séditieux de Kelbor-Hal, ce que ce jean et jaune foutre de Dorn s’est montré incapable de faire. Blessé dans son for intérieur par la froideur de Land, Zephon promet toutefois de faire ce qu’il peut pour organiser la rencontre.

Quelques jours après cette opération à corps ouvert, Big Nose et son ouistiti attendent dans l’antichambre de la suite Aphelion, réquisitionnée par l’Ange pour la durée de son séjour sur Terra. Lorsqu’un membre de la Garde Sanguinienne se pose à ses côtés pour lui signifier que le Primarque attend son bon plaisir entre l’EAP de Raldoron et son Skype avec le Khan, Land ne met pas longtemps à comprendre que derrière l’armure clinquante et le masque doré du Rocket Man se cache Zephon, réintégré dans ses fonctions actives à la suite d’une visite médicale apparemment concluante. Ce qui fait chaud à son petit cœur de Martien, tout de même.

AVIS :

Exercice de style plus drolatique que dramatique de la part d’ADB, cette petite nouvelle remet en scène deux personnages déjà utilisés par l’auteur dans des travaux précédents, et permet à ce dernier de souligner un peu plus l’opposition/complémentarité fondamentale entre le noble, droit et émotif Zephon, et l’acariâtre, rationnel mais néanmoins génial Arkhan Land. Parfait en mouche du coche protégé par ses relations hauts placées (il a causé à l’Empereur, tout de même) et totalement étranger à la moindre notion de savoir-être et d’entregent, le Arkhan le Martien révèle un côté un peu plus sombre de sa personnalité sous la plume de Dembski-Bowden. De son côté, Zephon a bien du mal à sécuriser sa place d’autre personnage principal, concurrencé bassement par le singe adoptif de son comparse et la mention de Diocletian. C’est dire s’il est charismatique. Bref, un petit extra littéraire sans grandes conséquences pour l’Hérésie avec un grand H, mais qui bénéficie du savoir-faire d’ADB pour faire passer un bon moment au lecteur. 

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The Mistress of Threads – J. French [40K] :

INTRIGUE :

The Mistress of ThreadsChez les libres marchands, les liens du sang sont, si ce n’est sacrés, au moins très importants, particulièrement lors d’un coup dur. C’est donc tout naturellement que Cressida Syr Morio contacte sa cousine Viola von Castellan afin de solliciter son aide dans une affaire louche qu’elle a récemment mis au grand jour. Tête pensante de la dynastie décadente des Morio après son mariage arrangé avec Osric Morio, Cressida croyait avoir réussi à se faire une place aux soleils1, une destinée peu évidente pour celle qui n’avait été jusqu’ici que la « Cousine Cress’ » dans l’arbre généalogique des illustres van Castellan. L’ouverture de la Cicatrix Maledictum plongea cependant la petite affaire familiale des Morio dans la tourmente, le fret intra galactique étant difficile à déplacer lorsque l’Imperium est coupé en deux par des tempêtes Warp et que la lumière de l’Astronomicon est montée sur courant alternatif. Une solution tombée du ciel se présenta cependant en cette heure dramatique, sous la forme du cartel Cytos, une organisation commerciale et religieuse à la réputation impeccable (les Quakers de 40K), et toute prête à secourir la maison Morio en son heure de déboire, en échange de la possibilité d’utiliser les flottes et installations de cette dernière.

Cet arrangement permit aux Morio d’encaisser cette période de troubles, mais au hasard d’une découverte fortuite dans son manoir de Mithras, Cressida réalisa que les sympathiques et propres sur eux Cytos faisaient circuler des spécimens un peu trop funky à son goût sous couvert de colissimos siglés Morio. Soupçonnant que les Cytos ont déjà mis en place une surveillance de ses faits et gestes, elle ne peut que se tourner vers sa chère cousine Viola, qu’elle sait être de mèche avec l’Inquisiteur Catogan Covenant, et peut-être en mesure de l’aider à régler cet épineux problème…

Début spoiler…Seulement voilà, on ne peut pas compter que les Saints Ordos pour agir dans l’intérêt bien compris de ceux qui les sollicitent (on n’est pas dans Ca Peut Vous Arriver ici) mais seulement dans celui de la pérennité de l’Imperium. Si Viola prend la missive de Cressida très au sérieux, et organise une collecte d’informations/préparation d’intervention en un temps record, grâce à son carnet d’adresses des plus fournis et ses talents consumés de stratégiste – qui lui ont valu le surnom de Maîtresse des Fils – le résultat final n’est guère du goût de la principale intéressée. Ayant acquis la certitude, autopsie à l’appui, que le cartel Cytos n’est qu’une couverture d’un Culte Genestealers, Viola obtient le feu vert de son illustre patron pour purger ces affreux Xenos. L’opération Chauve Qui Peut est lancée sans tarder, et voit une escouade de la Deathwatch prendre d’assaut le manoir de Viran où Cressida était placée en résidence très surveillée par ses partenaires commerciaux, ce qui se solde par sa « libération » mais également et surtout par l’élimination d’un des Magus de Cytos, venu questionner lui-même Cressida après avoir eu vent de ses dernières manigances.

La nouvelle se termine avec un dernier échange, beaucoup plus froid, entre les deux cousines : Cressida reprochant à Viola d’avoir déclenché l’annihilation préventive de la maison Morio par pure bitcherie, ne lui laissant d’autre choix de carrière que pèlerine en route vers Terra en classe économique. La vilenie. Magnanime, Viola se contente de répondre qu’elle n’a pas le temps pour les gens négatifs, en tant que business women overbookée H24, mais qu’elle prendra un pumpkin latte avec Cress’ dès que cette dernière sera de retour de son petit périple tantrique dans le Segmentum Solar. Enjoy your holidays, guuuuuuurl !!! XOXOFin spoiler

1 : Avec un million de mondes dans l’Imperium, le pluriel est toléré.

AVIS :

John French enrichit son corpus de nouvelles dédiées aux nombreux et variés acolytes de l’Inquisiteur Covenant avec ce ‘The Mistress of Threads’, qui suit de plus près Viola von Castellan (et un peu son frère Cleander), libre marchande mais pas vraiment en fait puisque sa maison a été mise sous tutelle de l’Inquisition en punition des errements de quelques-uns de ses membres les moins inspirés. En plus de nous gratifier d’une enquête inquisitoriale en bonne et due forme, pleine d’éléments fluff qui feront plaisir aux amateurs, comme à la belle époque où Dan Abnett publiait des nouvelles du bon Gregouze Cornedeglace dans Inferno !, French démontre que sous ses abords respectables, il est capable de faire preuve de plus d’inventivité formelle dans ses soumissions que 95% des autres contributeurs de la BL. La nouvelle est en effet constituée de pas moins de 30 sections successives, qui permettent de suivre le déroulé de l’intrigue à travers des échanges épistolaires, des mails professionnels (ou l’équivalent 40K), des échanges de SMS (idem), ou encore des retranscriptions de conversations ou d’interrogatoires. Tout cela marche ma foi fort bien, et est très rafraîchissant à lire, ce qui fait de ‘The Mistress of Threads’ la meilleure nouvelle du cycle ‘The Horusian Wars’, et peut-être même la meilleure nouvelle de John French pour la BL à ce jour.

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Lantern’s Light – J. Swallow [HH] :

INTRIGUE :

Lantern's LightDepuis une année, Mortarion se morfond dans le système de Barbarus, après que ce dernier ait été intégré à l’Imperium par la volonté de son divin souverain, Pépé 1er. Bien que cette période ait permis au Primarque d’apprendre beaucoup sur le royaume galactique de son Père, la Grande Croisade et la place qu’il devra bientôt prendre dans cette dernière, Morty et son esprit rebelle (il a une petite voix dans la tête qui prend un malin plaisir à poser toutes les questions malaisantes) ne se satisfont pas de la situation. Pour faire simple, la seule chose qu’il trouve vraiment cool est le lien qu’il a réussi à tisser avec ses Dusk Raiders, bientôt renommés en Death Guard en l’honneur des compagnons de lutte qui l’ont soutenu sur Barbarus. Pour le reste, c’est la soupe à la grimace, comme si dans le corps gigantesque de notre héros se cachait un collégien complexé (ce qui est peut-être le cas, vu la vitesse à laquelle les Primarques grandissent).

Aujourd’hui est un jour spécial, cependant, puisque son Pôpa l’a invité à le rejoindre sur son vaisseau amiral, afin d’avoir une discussion avec son plus jeune rejeton. Ne pouvant pas s’enfermer dans sa chambre en écoutant The Cure, comme tout bon ado emo qui se respecte, Mortarion se rend sur le Bucephelus comme convenu, mais prend un malin plaisir à crash the party en piétinant le protocole de ses grosses bottes cloutées. Hôte gracieux s’il en est, l’Empereur ne s’en formalise pas et propose à son fiston une petite balade en tête, loin des petits fours et orchestres de chambre qui semblent taper sur les nerfs de son nihiliste de fils. Seulement, à vouloir en mettre plein la vue à ce dernier1, Papy gâteau ne parvient qu’à faire croître le ressentiment de Morty à son égard. Ce dernier n’a en effet toujours pas digéré la manière dont la campagne de Barbarus s’est terminée : lui crachant ses poumons et suintant du pus par tous les pores, et l’Empereur se téléportant par magie devant Necare (seigneur suprême de Barbarus et père adoptif de Mo’) pour lui voler son kill. On sent donc que les relations ne seront jamais au beau fixe entre ces deux là, mais que pouvait attendre donc de la part d’un Primarque ayant grandi sur une planète perpétuellement recouverte de nuages verdâtres ?

Un peu plus tard, l’Empereur tente une autre avancée, en amenant Son fils dans le « modeste » atelier où il se délasse l’esprit et les doigts lorsqu’il a un peu de temps libre. Comme Il le révèle à Morty, Il offre à chacun de Ses Primarques un cadeau fait de Son auguste et blanche main avant que ces derniers ne partent rejoindre la Grande Croisade, et c’est ainsi que Mortarion hérite d’un magnifique cimeter-. En fait non. Le goujat refuse tout net de se séparer de sa faux énergétique, ce qui crispe légèrement l’Empereur. Pour ne pas avoir l’air de refuser le cadeau paternel, Mortarion s’empare d’une autre relique qui traînait dans le coin, le pistolet Lanterne que Pépé a gardé comme souvenir de sa conquête de la planète Shenlong. Et voilà comment une bouderie puérile a fait de Morty le Primarque pistolero. The more you know…

La nouvelle se termine avec un Empereur sensiblement agacé par les caprices de Son Fils, et qui fait ce qu’il a l’habitude de faire depuis cinquante ans quand quelque chose Le gonfle : refiler la patate chaude à ce brave Horus. Comme Lulu la Percale tenait à rencontrer au plus tôt son nouveau frérot, il attendait patiemment dans une antichambre du Bucephelus, ce qui donne l’occasion à Pépé d’aller martyriser un sac de frappe à la salle de gym pendant que Ses fistons font connaissance. Pas tous les jours faciles d’être un père célibataire de famille nombreuse…

1 : La discussion dans la coursive avait pour but principal de montrer à Mortarion le véhicule de fonction gracieusement offert par l’Empereur, l’Endurance. On raconte que les derniers arbres de la forêt amazonienne ont été coupés pour produire le papier cadeau nécessaire à l’emballage.

AVIS :

James Swallow signe peut-être sa meilleure soumission consacrée à Mortarion avec Lantern’s Light, nouvelle qui explore de manière assez fine la psyché torturée du Primarque de Barbarus, et la relation complexe qu’il a toujours entretenue avec l’Empereur. Tout l’intérêt de ces quelques pages repose dans la dualité des sentiments ressentis par le nouveau patron des Dusk Raiders : a-t-il raison de considérer Pépé comme un tyran égoïste et incapable de considérer les autres que comme des expédients à utiliser comme bon lui semble, ou est il juste sujet à une paranoïa aigüe, sans doute renforcée par l’enfance traumatisante qu’il a subi avec son père adoptif ? Ce sera au lecteur de décider, et c’est bien mieux ainsi. En bonus, on a le droit à pas mal de détails fluff, ce qui est toujours appréciable, et à un Empereur pas totalement à côté de Ses pompes (ce qui est malheureusement souvent le cas lorsqu’Il intervient personnellement dans un récit de la BL). Je recommande donc une nouvelle de James Swallow, et c’est assez rare pour le souligner.

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Trials – R. Harrison [40K] :

INTRIGUE :

TrialsLa guerre sur Atraxis s’est littéralement embourbée, forçant les défenseurs impériaux à patienter dans leurs tunnels pendant que les cultistes chaotiques (Sighted) bombardent leurs positions sans merci. Pour tuer le temps à défaut des soldats de son régiment d’adoption, la Commissaire Severina Raine fait des rondes régulières le long de la tranchée souterraine où le 11ème Fusilier d’Antari attend des jours si ce n’est meilleurs, au moins plus actifs. Ses devoirs lui laissent cependant suffisamment de temps pour aller taper la discute avec son acolyte Andren Fel, Capitaine Storm Trooper et armurier émérite. Unis par le fait d’être tous deux passés par l’école d’excellence qu’est la Schola Progeniam, les deux officiers échangent quelques anecdotes sur leurs parcours respectifs, tout en sirotant un peu d’eau gazeuse huileuse et grignotant des barres de grox soufflé. Aujourd’hui, la discussion tourne autour du délicat sujet de l’épreuve pratique de dernière année, redoutée de tous les étudiants depuis des temps immémoriaux.

Pour Andren Fel, le test a consisté en une épreuve d’orientation en mode hardcore, s’étant déroulée dans les bois ténébreux d’Antari. Abandonné en pyjama et en crocs, drogué, menotté et seulement équipé d’un couteau à beurre émoussé, le jeune Fel a eu trois jours pour retrouver le chemin de son école, sous peine de… redoublement j’imagine ? A côté de ça, les marathons de Barkley c’est pour les mioches et leurs grand-mères. Bien entendu, le Capitaine a réussi à boucler ce petit trek primesautier dans les temps, écopant au passage d’une belle cicatrice après avoir dû repousser les assauts d’un couple de wyldwolves en maraude.

Severina Raine, quant à elle, a eu droit à une épreuve en intérieur, mais pas moins dangereuse et difficile que celle de son acolyte. Ayant constaté que les élèves de dernière année de sa promotion disparaissait régulièrement dans les semaines précédant la diplomation, la méfiante Severina avait pris le parti de ne plus dormir que d’un œil, et avec une arme à portée de main, au cas où l’épreuve consistait à survivre à un mariage traditionnel kirghize. Bien lui en a pris car cela lui a permis de contrecarrer les desseins feminicides d’un de ses camarades de promotion, Yuzoh, qui se présenta une nuit avec un pistolet et des intentions peu charitables au pied de sa couchette. Mis en fuite par une attaque Gros Yeux bien exécutée par la déjà pas commode Severina, Yuzoh disparut à son tour. Quelques jours plus tard, l’élève Raine reçut une convocation de la part des intraitables abbés de la Schola, l’invitant à se rendre sans délai en salle 504, où son épreuve finale prendrait place…

Début spoiler…Comme on pouvait s’y attendre, Severina retrouva sur place Yuzoh, enchaîné à la cellule, ainsi que le pistolet que ce dernier aurait dû utiliser pour réussir sa propre épreuve, qui était de supprimer sa camarade. Un peu rude comme travaux pratiques, mais quand on forme des Commissaires, il faut bien mettre les étudiants en conditions réelles à un moment donné. Malgré les larmes et supplications de Yuzoh, Severina n’hésita pas longtemps avant de prendre le shoot, gagnant ses galons d’officier et éliminant du même coup un candidat indigne de la casquette commissariale. Un win-win en quelque sorte.Fin spoiler

AVIS :

Petite nouvelle explorant le passé mystérieux et le passif meurtrier de Severina Raine (et celui d’un des personnages secondaires de la saga, pour faire bonne mesure), ‘Trials’ est une variation tout à fait satisfaisante sur le thème du ‘there is only war’. Rachel Harrison compense le manque de suspens de son propos (il est évident que les deux protagonistes vont survivre à leur épreuve, quelque soit la difficulté de cette dernière) en dépeignant les institutions impériales dans toute leur inhumaine rigueur, et montre au passage que même les humbles Gardes Impériaux disposent dans leurs rangs d’individus absolument exceptionnels, tant sur le plan physique que mental. Rien qui ne nécessite le détour si vous êtes un vétéran de la GW-Fiction, mais une soumission robuste de la part de Harrison quoi qu’il en soit.

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Ghost of Nuceria – I. St. Martin [HH] :

INTRIGUE :

Ghost of NuceriaLa fin approche sur Nuceria pour Grongron et sa petite bande de gladiateurs rebelles. Après avoir ravagé l’arrière-pays au cours d’une révolte sanglante, qui a permis au Primarque aux dreadlocks de gagner le titre de Mangeur de Cités (we see what you did here), les derniers myrmidons grimdark ont été repoussés dans les montagnes par les armées des high riders. Comme personne n’avait pensé à prendre des pyjamas en pilou au cours du sac de la dernière ville (Hozzean) et que le fond de l’air est franchement frais en cette saison, le nombre de nos intrépides mais courts vêtus guerriers fond comme neige au soleil, malgré le recours à des techniques de conservation de chaleur éprouvées1. Seul Angron semble ne pas souffrir de ces conditions météorologiques peu clémentes, mais en tant que surhomme génétiquement modifié et constamment énervé, le contraire eut été étonnant. Pendant que ses camarades font des pogos thermiques dans une caverne, il patrouille donc aux alentours, et surprend un éclaireur ennemi qui perd rapidement la tête. La baston finale est pour bientôt.

De retour au camp de base, l’altruiste Primarque donne un peu de son sang à boire à ses troupes pour leur donner du cœur au ventre, et tout ce petit monde se prépare à vendre chèrement sa peau contre les hordes innombrables des high riders, qui viennent sonner à la porte quelques heures plus tard. Les dirigeants de Nuceria sont prêts à passer l’éponge sur les dernières excentricités d’Angron si ce dernier accepte de rentrer au bercail sans faire d’histoires, mais Gladiator refuse tout net de faire le jeu du système, et préfère mourir aux côtés de ses frères et sœurs d’armes avec honneur. La bataille qui s’engage après ces négociations infructueuses est aussi sanglante que déséquilibrée, mais alors qu’il vient de découper à main nue sa Némésis du jour (l’énorme commentateur vedette des combats de gladiateurs sur Nuceria, appelons-le Mierre Penez), il se retrouve soudainement figé sur place par une force inconnue, qui lui souffle à l’oreillette quelque chose du style +Viens dire bonjour à ton Pépé+. Angie n’est pas très chaud, mais on ne lui laisse pas le choix, et il se retrouve téléporté sans sommation sur le vaisseau de son Illustre Géniteur, qui commet l’erreur de libérer Son fiston de la clé de cerveau qui le tenait en respect. Bilan des courses : un Adeptus Custodes un peu trop faraud réduit en compression de Cesar, ce qui tend légèrement les relations entre le Père et le fils.

D’habitude un peu plus à l’écoute des états d’âme de ses rejetons, Pépé se montre particulièrement obtus et péremptoire, et informe Angron qu’il prendra la tête de sa Légion et l’aidera à conquérir la galaxie, que ça lui plaise ou non. A nouveau enfermé dans une camisole de force psychique, Grongron ne peut pas faire grand-chose à part penser à des gros mots particulièrement osés comme « gros pif » ou « vieux beau2 », ce qui fait déborder le vase de la patience infinie mais pas trop de l’Empereur. Ce dernier balance donc Son impertinent de fils sur le pont du vaisseau amiral des War Hounds et repart aussi sec vaquer à d’autres tâches, laissant aux pauvres Space Marines qui se faisaient une joie de rencontrer leur père génétique le soin de gérer la GROSSE colère d’Angron. La suite va vous surprendre…

1 : Je suis sûr que c’est cela qui a attiré l’attention de Pépé. Après tout, on ne s’inspire pas du manchot Empereur impunément.
2 : Plus sérieusement, on a l’explication du titre de la nouvelle lorsque qu’Angron informe l’Empereur que celui qui combattra pour lui ne sera qu’un fantôme, car lui-même est mort sur Nuceria au côté de ses compagnons. Ce à quoi Pépé répond « K ». RUDE.

AVIS :

Ian St. Martin boucle la boucle (ou tresse la corde, ce serait plus fluff) de l’origin story du plus colérique des Primarques avec ce court mais satisfaisant ‘Ghost of Nuceria’, qui se termine une demi-seconde avant le début de la nouvelle ‘After Desh’ea’ de Matthew Farrer, publiée dix ans plus tôt dans le tout premier recueil dédié à l’Hérésie d’Horus. Ça ne nous rajeunit pas. Etant un amateur impénitent de l’enrichissement du background par épisodes romancés interposés, ce parti pris ne pouvait que me convenir, à condition que la réalisation n’en fut pas indigente, ce qui est le cas ici. St. Martin a semble-t-il pris le temps de réviser le travail de ses prédécesseurs et de se pencher sur la psyché de son personnage principal avant de prendre la plume, ce qui se ressent bien dans ses écrits.

Angron n’avait pas besoin d’une raison particulière pour haïr l’Empereur par rapport à ce que le fluff établi nous indiquait d’ores et déjà (ce n’est pas très dur de détester le type qui sacrifie vos frères et sœurs d’armes pour ses propres motifs mégalomaniaques, d’autant plus qu’il n’avait qu’à lever le petit doigt pour sauver tout le monde), mais le parallèle fait entre les détestables high riders et l’intraitable Pépé, qui ont tous besoin d’Angron et se contrefichent de ce que ce dernier en pense, est bien trouvé. Ça ne nous donne pas plus d’informations sur les raisons profondes du dick move de Big E, mais ce n’est pas à mon sens le but de cette nouvelle, donc tout va bien de ce côté. Bref, une nouvelle incontournable pour les amateurs de fluff primarquiel, ce qui est encourageant pour un contributeur aussi nouveau que Ian St. Martin, et une date de publication aussi avancée dans le déroulement de l’Hérésie.

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Redeemer – G. Haley [40K] :

INTRIGUE :

RedeemerOn a tous déjà été confronté à ce moment, plus ou moins long, pendant lequel une chanson – souvent débile, comme La Danse des CanardsT’Es Si Mignon ou Despacito – nous restait collée dans la tête malgré tous nos efforts pour forcer notre cerveau de passer à autre chose. Eh bien cette expérience abominable, c’est le quotidien d’Astorath l’Inflexible, Grand Chapelain des Blood Angels et Rédempteur des Égarés, dont il entend les fredaines pathétiques lui rabâcher les oreilles dès que l’un d’entre eux sombre totalement dans la Rage Noire. Il est alors de son devoir de rappliquer dare dare pour abréger les souffrances (les leurs et les siennes) à grands coups de hache, ce qui le conduit à passer sa vie dans l’espace, voyageant de zones de guerres en théâtres d’opérations dans son véhicule de fonction (l’Eminence Sanguis), accompagné de quelques fidèles acolytes. Aujourd’hui, direction Asque, d’où proviennent les échos lointains de Djadja joués à la flûte à bec par un Snotling asthmatique, ce qui est passablement désagréable, vous en conviendrez.

Laissant le fidèle Sergent Dolomen garder le vaisseau, comme il en a l’habitude1, Astorath part à la rencontre de l’escouade de Blood Angels affectés par le mâââl, escorté par le Prêtre Sanguinien Artemos et guidé par un trio de locaux, fortement impressionnés par la panoplie macabre de leur visiteur (qui fait moins le malin lorsque les ailes factices de son jet pack se prennent dans les branches sur le chemin, ceci dit). En chemin, les bouseux apprennent au Grand Chapelain que leur monde est victime depuis plusieurs décennies des attaques d’une race de Xenos peu sympathiques, baptisés les Silencieux par les pragmatiques Asquiens, et qui ont forcé ces derniers à abandonner leur cité ensoleillée pour se réfugier dans les forêts de champignons insalubres et humides recouvrant la majeure partie de la planète. Leurs appels à l’aide étant resté lettre morte pendant des décennies, l’ouverture de la Cicatrix n’aidant certainement pas, il leur a fallu prendre leur mal en patience et apprendre à vivre comme Yoda sur Dagobah, la Force en moins, le temps qu’une demi-escouade de Blood Angels soit dépêchée sur place pour botter le train aux Silencieux. Tout se passait très bien jusqu’à ce qu’un des Astartes ne pique une colère noire pour un motif indéterminé, et fausse compagnie à ses camarades pour aller baguenauder dans les sous-bois d’Asque.

Cette version est confirmée par le trio de Primaris qu’Astorath et Artemos rencontrent à leur retour de patrouille, et encore traumatisés par le pétage de plomb de leur mentor, le Sergent Erasmus, après que leurs hôtes leur aient apportés un steak d’ordes bien cuit au lieu de saignant. Détail important, Erasmus était un Space Marine de la vieille école, et pas un Primaris, dont la résistance à la Soif Rouge et à la Rage Noire relève encore de la théorie et des boniments de Belisarius Cawl. Ayant recueilli assez d’indices pour procéder à la traque et à la rédemption d’Erasmus, dont le séjour sur Asque sera le dernier échange culturel, Astorath se prépare à apporter la paix à la brebis énergétique égarée, siphonant un peu de rouge à la veine d’Artemos pour se donner du cœur à l’ouvrage, mais refusant catégoriquement que son acolyte vienne lui porter main forte dans sa mission sacrée. La confidentialité de la relation patient-thérapeute/confesseur/bourreau doit être respectée, que diable.

Après une petite partie de beat ‘em all sur le chemin de la ville abandonnée par les Asquais (les Silencieux trouvant malin de s’attaquer à Astorath à son passage, malgré leur corps de lâche et leur équipement rudimentaire), notre héros parvient enfin à localiser Erasmus, complètement enragé et donc persuadé de purger le Vengeful Spirit en lieu et place de son Primarque, alors qu’il massacre en fait la colonie de Silencieux ayant investi les habitations des colons après le départ de ces derniers. L’arrivée du Grand Chapelain fait définitivement pencher la balance en faveur de l’Imperium, et après que les derniers mobs aient été farmés, il est temps pour l’ultime séance de psychiatrie du Sergent Erasmus, administrée de main et de hache énergétique de maître par Astorath. Guidé par son amour fraternel et sa miséricorde absolue, le Rédempteur rédemptionne avec retenue, se contentant de saigner son patient pour saper sa force plutôt que de le décapiter sans sommation. Ah, il lui coupe une jambe aussi, mais seulement pour qu’Erasmus se tienne enfin tranquille, et qu’il puisse lui adresser une imposition des mains salutaire, permettant à l’égaré d’enfin refaire surface, et de mourir dans la lumière de Sanguinius et de l’Empereur. C’est presque une happy end, en fait. Ce problème résolu, et les glandes d’Erasmus récoltées, il est temps pour Astorath et Artemos de repartir sur les routes, la version de Bella exécutée au mirliton et à la scie musicale venant lui trotter dans la tête lui indiquant qu’un autre frère a besoin de ses bons offices…

1 : La planque ultime pour un Blood Angels tout de même. M’est avis que Dolomen a dû faire une remarque désobligeante lors du dernier vernissage de Dante pour avoir été affecté à une mission aussi chiante.

AVIS :

Guy Haley s’empare du personnage d’Astorath l’Inflexible (possiblement le Blood Angels doté du background au plus fort potentiel narratif) et nous sert une petite mise en situation dont il a le secret, soulignant à la fois les caractéristiques saillantes de son héros et levant le voile sur des aspects de sa personnalité et de son passé non abordés par les quelques paragraphes qui lui sont dédiés dans le Codex Blood Angels. Sur cette base éprouvée, Haley trouve également le moyen de faire le lien avec le lore avec un grand L (ce qui est approprié pour un personnage avec des grande ailes), en mentionnant l’ouverture de la Cicatrix et la dévastation de Baal, ainsi qu’en abordant la question fondamentale de la vulnérabilité potentielle des Primaris Blood Angels aux tares du matériel génétique de leur Primarque. Le résultat est très solide, à défaut d’être particulièrement original, et on se prend à espérer que la BL commissionne Haley pour d’autres travaux mettant l’Inspection Générale faite (sur)homme en vedette.

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Au final, ce coup d’essai se rapproche plus du coup de maître que du coup dans l’eau, toutes les nouvelles proposées au cours de cette semaine s’avérant au minimum solide, et parfois plus que cela. Il aurait fallu seulement prendre soin d’intégrer Age of Sigmar dans le programme des réjouissances pour que le sans faute soit considéré, mais cela sera pour une autre fois. Un bon millésime pour les amateurs de GW-Fiction, heureusement republié en partie dans d’autres recueils pour en faciliter l’acquisition.

THE HAMMER AND THE EAGLE [40K/AoS]

Bonjour et bienvenue dans cette critique du nouvel ouvrage introductif publié par la Black Library, un beau pavé de 621 pages sobrement nommé ‘The Hammer & the Eagle‘ (ou ‘L’Aigle & le Marteau‘ en version française, que Nottingham a eu l’amabilité de sortir en même temps que la VO). Cette large couverture est due en partie au fait que les nouvelles qui sont proposées au lecteur sont presque toutes des rééditions, pour certaines de textes assez anciens. Comme l’indique Nick Kyme dans sa préface, ce type de publication « universelle(s) » est assez rare pour la BL, qui a pour habitude de séparer les serviettes des torchons, et les bolters et des arquebuses (voir ‘Sacrosaint & Autres Récits et ‘Croisade & Autres Récits pour s’en convaincre). Cette fois-ci cependant, la ligne éditoriale choisie par la maison d’édition était assez large pour permettre aux deux franchises majeures de Games Workshop d’être représentées dans un même opus, et pour cause: il n’y a pas grand-chose de plus commun à une histoire que la présence de personnages.

Sommaire The Hammer & the Eagle (MIS)

Pour être tout à fait exact, ce sont bien les icônes de Warhammer 40.000 et d’Age of Sigmar qui sont ici mises en avant et célébrées, catégorie plus restrictive (encore que) que celle regroupant les myriades de héros et anti-héros peuplant les pages des romans et nouvelles de la Black Library. On devine sans mal que la sélection a dû être drastique1 pour déterminer qui méritait cette reconnaissance suprême, en particulier du côté des Royaumes Mortels, dont la relative jeunesse met ses protagonistes sur un pied d’égalité (les grands anciens Gotrek et Nefarata trichant un peu à ce titre). Si certains noms (Ibram Gaunt, Uriel Ventris, Gregor Eisenhorn, Abaddon2…) sonnent comme une évidence, d’autres seront sans doute moins familiers au lecteur, même chevronné. L’occasion de se familiariser avec de futures têtes d’affiche comme Severina Raine, Navradaran, Hamicar-Bear Eater et Callis & Toll. C’est en tout cas tout le mal qu’on leur souhaite.

Partons donc à la découverte de cette galerie de people haute en couleurs, et tentons de voir si la Black Library a réussi à son travail de sélection avec ces 27 nouvelles (pour 18 auteurs) et accouché d’un ouvrage digne d’intérêt. Sur le plan financier, c’est quasiment certain, mais sur le plan littéraire, cela reste à établir…

1 : Encore que je soupçonne Nick Kyme d’avoir pistonné les personnages dont il avait la charge, comme Cato Sicarius et Adrax Agatone. C’est en particulier vrai pour le second, dont le nom n’est pas (encore) universellement connu, et ne bénéficie que d’une couverture minime dans cette anthologie (nouvelle de 5 pages). Les ravages du népotisme…
2 : Bizarrement classé comme Space Marine, aux côtés de Mephiston et Astorath. Je penche pour une étourderie du maquettiste plutôt que pour une révélation sur la véritable allégeance du bonhomme. Mais ça pourrait expliquer pourquoi il lui a fallu 13 tentatives pour péter deux pylônes. 

The Hammer and the Eagle

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Endurance – C. Wraight [40K] :

EnduranceICÔNE : DRAGAN, POTENCIER DE LA DEATH GUARD

INTRIGUE :

Sur le monde ruche de Lystra, l’escouade du frère Sarrien des Imperial Talons livre un combat d’arrière-garde aussi noble que vain contre les hordes innombrables des Zombies de la Peste ayant plus ou moins remplacées la population locale. Envoyés au casse-pipe pour permettre à un fonctionnaire de l’Adeptus Administratum obèse et tire au flanc (du moins, c’est comme ça que Sarrien se le représente) de maintenir son quota de dîme mensuel, ou autre raison purement technocratique, les braves Space Marines tiennent la ligne du mieux qu’ils peuvent, mais même leur constitution suprahumaine commence à donner d’inquiétants signes de fatigue. Pour ne rien arranger, les lignes de ravitaillement avec le reste de l’Imperium sont totalement coupées, ne laissant à nos fiers héros que la bonne vieille énergie cinétique pour défendre le domaine de l’immortel Empereur contre la corruption galopante titubante représentée par les Stumblers. Isolé de ses frères pour maximiser l’efficacité du soutien martial et moral que les Astartes représentent pour leurs alliés de la Garde, Sarrien débute la soirée comme toutes les autres auparavant : il chante chante chante ce rythme qui lui plaît (Endure ! For the Emperor ! Stand Fast ! Chihuahua !) et il tape tape tape (c’est sa façon d’aimer). On comprend cependant assez clairement que notre héros en a gros, et qu’il n’y a que son exemplaire éthique qui le pousse à suivre des ordres qui lui semblent totalement débiles.

À quelques encablures de cette planète condamnée, nous faisons la connaissance de notre deuxième protagoniste, le réfléchi (il ne court jamais) et hédoniste Dragan, Death Guard appartenant à la faction des Lords of Silence. Bénéficiant d’un quartier libre entre deux opérations de grande ampleur, Dragan a embarqué sa coterie sur son vaisseau personnel, l’Incaligant, et vogue là où le Warp le mène, massacrant tous les Impériaux qui lui tombent sous le moignon au passage. Les petits plaisirs de la vie, il n’y a que ça de vrai. Ayant fondu (dans tous les sens du terme) sur un transporteur de troupes de la Garde Impériale dépêché sans escorte en renforts de Lystra, Dragan décide sur un coup de tête, une fois le carnage expédié, d’emmener ses ouailles sur le monde en question, où il suppute (en même temps qu’il supure) qu’une distraction peut être trouvée.

Nous retrouvons ensuite Sarrien, toujours plus amer et toujours plus crevé, qui décide d’aller rôder derrière les lignes ennemies pour… le fun ? (étant donné que les défenseurs sont au bout du rouleau et s’attendent tous à crever, et que l’adversaire n’a aucune chaîne de commandement à décapiter ni de cibles stratégiques à prendre, l’utilité de la manœuvre me semble obscure). Bien que durement éprouvé par des semaines de combat sans répit, notre surhomme se révèle malgré tout capable de faire mordre la poussière à son poids en Stumblers, voire plus, jusqu’à ce qu’il tombe sur un Fatty dont l’odeur corporelle, ou l’aura de zenitude, c’est selon, est telle qu’il a bien du mal à lever la main sur lui. Malgré l’attitude résolument peace man du gros lard, Sarrien parvient à le décoller proprement, non sans que sa victime n’ait eu le temps de le prévenir 1) des dangers physiques et mentaux du surmenage (il devait être élu au CHSCT dans sa première vie), 2) de l’arrivée prochaine du Potencier (Gallowsman). Bien en peine de faire quelque chose de cette information, et sappé comme jamais, l’Imperial Talon décide de se rentrer, avec l’espoir futile de trouver un McDo encore ouvert sur le chemin pour s’envoyer un bon Coca bien frais.

De son côté, Dragan a fini par arriver en orbite autour de Lystra, et emmène sa bande sur les lieux du dernier conflit agitant encore la planète, dans l’espoir de trouver un adversaire de valeur. Escortés par quelques cohortes de die hard fans, les Lords of Silence progressent pondéreusement vers la ligne de front, où les attendent…

Spoiler Des Iron Warriors. Eh oui. Car en fait, Sarrien et Dragan ont visité Lystra à deux moments distincts, petite surprise savamment préparée par Wraight. Il est d’ailleurs fortement suggéré que Sarrien est devenu Glask (le second de Dragan, qui passe son temps à l’appeler Potencier – au grand ennui de son boss – et dont la jambe torse pourrait être la conséquence de la blessure subie par Sarrien au même endroit à la fin de la campagne) peu de temps après sa rencontre avec le gros plein de pus, lorsque, finalement submergé par le nombre de ses ennemis et l’amertume envers l’Imperium, il a décidé que sa survie était plus importante que son devoir. Ceci dit, le récit se termine sur un flou artistique et un amoncellement de Zombies affamés sur Sarrien, dont le salut final n’est pas garanti, ralliement à papa Nurgle bien acté par ce dernier ou pas. Quelques dizaines/centaines/milliers d’années plus tard, Dragan est quant à lui saisi d’une impression de déjà vu alors qu’il corrode les armures chromées de ces frimeurs de la IVème, ce qui ne fait que renforcer l’hypothèse de la défection de Mr Talon. Fin du spoiler

AVIS :

Mis à part le manque de clarté de sa conclusion (voir la partie spoiler ci-dessus), Endurance est une soumission solide de la part de l’ami Wraight, sans doute rédigée en accompagnement de son roman The Lords of Silence pour un galop d’essai littéraire. En quelques pages, Chris arrive ainsi à donner une véritable profondeur à ses répugnants héros, dont l’attitude chill, thrill & kill les distingue clairement des autres factions d’Astartes chaotiques et renégats de notre sombre galaxie, en plus de s’accorder parfaitement avec la philosophie débonnaire de Papa Nurgle, ce qui ne gâche rien. Sans rien galvauder de leur nature éminemment mauvaise, Wraight réussit également à rendre attachant (sans mauvais jeu de mots) le personnage de Dragan, dont le caractère égal et l’approche désinvolte de sa pestilentielle vocation le font apparaître comme éminemment plus sympathique que le Seigneur du Chaos lambda de la BL. De l’autre côté du ring, Sarrien s’avère moins mémorable, mais le récit que fait l’auteur de la lutte désespérée du loyaliste pour retarder l’inévitable, de part son caractère assez original (il combat en solo, et pas avec le reste de son escouade) et la bonne prise en compte des effets débilitants de la fatigue et des blessures sur la constitution d’un Space Marine – qui reste une machine de guerre insurpassable, mais peut se mettre dans le rouge s’il tire trop sur la corde – s’avère prenant et plaisant, sur les quelques pages qu’il dure. Une nouvelle SM comme je les aime donc : courte dans son propos, précise dans son dessein, efficace dans sa réalisation et à twist dans sa conclusion. Prenez-en de la graine, les rookies.

Gardant une nouvelle en fois en tête le but premier d’un recueil tel que celui dans lequel elle a été incluse, j’ajouterai pour conclure qu’Endurance fait un beau boulot de présentation d’une faction amenée à jouer un rôle important dans l’univers 40K (la Death Guard), en plus de donner assez envie de lire le long format mettant en vedette les Lords of Silence. Que l’exploration d’un concept central du fluff, le ralliement d’un Space Marine loyaliste au Chaos, soit également présente pour l’instruction des lecteurs novices ajoute encore a l’intérêt du propos, qui mérite donc largement sa place dans le Black Library Celebration 2019.

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Execution – R. Harrison [40K] :

ExecutionICÔNE : SEVERINA RAINE, COMMISSAIRE

INTRIGUE :

Sur la morne plaine de Morne, surplombée par la forteresse du même nom, la Commissaire Severina Raine est confrontée à des problèmes d’autorité. Les gros flingues employés par les rebelles défendant le bastion convoité par le haut commandement impérial ont transformé les Fenwalkers du Sergent Keld en Bloodsplatters, ce qui a sérieusement entamé le moral de l’officier supérieur du 11ème Fusilier d’Antari, le Capitaine Tevar Lun. Pas de chance pour ce dernier, ses désirs de reconsidérer l’attaque sur les murs ennemis sont balayés d’un revers de main par Raine, qui n’a d’autre choix lorsque Lun persiste dans sa couardise que de lui coller un bolt entre les deux yeux devant le reste de ses troupes. Propulsée commandante de l’opération par la force (et l’impact) des choses, la première tâche de Raine sera de tourner la colère – légitime – de ses soldats vers les hérétiques Drastiens plutôt que son humble personne. Heureusement, les Antari sont des sujets pieux et disciplinés de l’Imperium, et la carrière de la Commissaire peut se poursuivre plus loin que la troisième page de sa première nouvelle, ce qui est un stade important pour cette classe de personnages. À propos de personnages, profitons-en pour faire un petit tour de table des VIP de la nouvelle, qui sont, histoire de Gardes Impériaux oblige, assez nombreux. Dans le désordre, nous faisons ainsi la connaissance du Capitaine Stormtrooper Andren Fel et ses Duskhounds, du Sergent Daven Wyck et ses Wyldfolk, de la Psyker sanctionnée Lydia Zane et de l’ingénieure militaire Yulia Crys, qui joueront tous un rôle dans la nouvelle.

Cette session de remotivation achevée, il faut maintenant négocier la prise des tranchées adverses pour arriver jusqu’au bouclier cinétique qui protège la forteresse du bombardement impérial, en exploitant les quelques minutes offertes par le rechargement des mitrailleuses lourdes ennemies. Inutile de dire que les Antari se sortent haut la main de cette épreuve, rencontrant quelques bidasses chaotiques en chemin, et perdant au passage une poignée de PNJ, comme le veut la tradition. Au contact de la muraille, Crys parvient à faire un beau trou dans la cloison des hérétiques, permettant aux Antari de pénétrer dans la place sans difficultés. Cette progression rondement menée est entrecoupée de passages en flashback remontant à la nuit précédant l’assaut, pendant laquelle Raine et Fel se sont livrés à leur rituel habituel de dégustation de thé et échange d’anecdotes. On en apprend ainsi plus sur le folklore d’Antari, très représenté dans les noms des escouades du régiment, et sur l’enfance, forcément difficile, de l’héroïne dans le Scholam de Gloam. Plus précisément, la fois où elle a mené deux de ses camarades dans une campagne de dératisation officieuse, s’étant soldée par un succès relatif (extermination du nid de vermine, mais début d’incendie du bâtiment et mort violente de ses comparses dans l’opération). L’occasion pour elle d’apprendre à assumer les conséquences de ses actes, comme elle continue à le faire à ce jour.

Retour à Morne, où les Antari doivent maintenant trouver un moyen de dissiper le bouclier cinétique qui protège toujours la forteresse pour permettre au reste des forces impériales de leur venir en aide. Pas grand-chose à dire sur cette section de combat urbain des plus classiques, qui verra nos personnages s’illustrer contre les hordes de cultistes (très semblables au Pacte du Sang, le masque en moins) et les renforts Ogryns de l’ennemi. L’indispensable Zane est au four et au moulin, protégeant ses camarades avec un bouclier psychique de son cru, et balançant des mandales mentales monumentales à quiconque a le malheur de la regarder de travers. Notons également le caractère sadique de Wyck, et son addiction aux drogues de combat, qui le placent à mi-chemin entre Rawne et Cuuh en matière d’équivalence Tanithienne. Il est déjà entendu que Raine aura à s’occuper de cet élément utile mais incontrôlable, et qui ne peut pas la blairer parce qu’elle n’est pas d’Antari, dans la suite de ses aventures.

Arrivés à l’étage où les rebelles ont stocké leurs munitions, les survivants de l’infiltration retiennent la contre-offensive adverse assez longtemps pour permettre à Crys d’installer un dispositif explosif qui devrait permettre la pacification expresse de ce théâtre, si employé correctement. Zane, dont les pouvoirs incluent la précognition, flaire le coup fourré de Raine, qui place le devoir avant des choses aussi triviales que le bien-être au travail ou la survie des troupes qu’elle a sous ses ordres, mais accepte tout de même de jouer le jeu, bien qu’elle révèle en aparté à la Commissaire que ses visions s’arrêtent après l’explosion de la poudrière de Morne. Raine ordonne alors la retraite jusqu’aux murs du bastion, avant que la situation des impériaux ne deviennent trop intenable, et les force à appuyer sur le bouton un peu plus tôt que prévu…

Début spoiler…S’en suit une explosion catastrophique, à la létalité exacerbée par l’effet couvercle du bouclier de Morne, qui empêche l’énergie dégagée de se diffuser aux alentours, et revient donc dans les dents et les tissus mous des troupes présentes dans la forteresse, qui n’ont d’autres choix que de tomber raides mortes. Cette fin renversante est toutefois épargnée au groupe de Raine, protégé par la MVP Zane, qui prend difficilement sur elle pour abriter ses collègues derrière son fameux bouclier psychique. L’effort consenti ruine toutefois irrémédiablement son rimmel et ses globes oculaires, qui lui coulent sur les joues dans la plus grande tradition des comédies romantiques hollywoodiennes. Voilà pourquoi elle ne voyait plus rien après cette détonation. Prix de la camaraderie pour Lydia Zane, vraiment. C’est toutefois une victoire indéniable pour l’Imperium qui se profile, accomplie grâce à la vaillance et au dévouement (en partie involontaire, Raine ayant menti à ses soldats en leur indiquant que les renforts étaient en chemin) du 11ème Fusilier d’Antari, qui n’a perdu que très peu de personnages nommés, et donc importants, dans la bagarre. C’est ce vieux Tevar Lun qui peut être fier de ses hommes (et femmes) depuis l’au-delà.Fin spoiler   

AVIS :

Si vous êtes familiers de la Black Library, il y a de bonnes chances que la lecture de cet ‘Execution’ vous fasse penser aux tribulations martiales du Premier et Unique de Tanith, ce qui n’est guère étonnant quand on compare les castings et les styles de Rachel Harrison et de Dan Abnett1. Etant donné le gouffre qui sépare ces deux séries en termes de publications, il faudra attendre un peu pour s’amuser à une analyse croisée de ces dernières, mais je dois dire que cette nouvelle introduit très proprement, et de façon satisfaisante, les personnages importants du 11ème Fusilier d’Antari, et constitue donc un point de départ tout indiqué pour qui souhaite suivre de plus près la trajectoire de ce nouveau régiment nommé de la GW-Fiction. Harrison présente bien sa galerie de protagonistes, souligne leurs affinités et inimitiés respectives, et ébauche quelques points saillants de leur histoire personnelle, qui sera sans doute au cœur de la suite de leurs aventures. On a également droit à une bone dose de fluff made in Antari, ce qui n’est certes pas essentiel pour la compréhension de Warhammer 40.000, mais dénote toutefois d’un sérieux travail de « caractérisation » de la part de l’auteur, et favorise l’immersion dans l’histoire et l’intérêt pour les personnages mis en scène dans cette dernière. Tant qu’on parle du background, je dois également souligner que cela fait plaisir de voir un.e Commissaire héroïque enfin faire son devoir, c’est-à-dire exécuter un officier refusant ses ordres, sans bénéficier de circonstances atténuantes. La disparition prématurée du Capitaine Lun, présenté comme un type bien et un bon soldat, est donc à savourer2 à sa juste valeur. Enfin, d’un point de vue purement narratif, Harrison rend une copie satisfaisante avec cette nouvelle de Gardes Impériaux de films d’action, nerveuse et sans temps morts. Rien d’exceptionnel ici, mais rien à jeter non plus. Pour boucler la boucle, je dirai que Rachel Harrison signe avec ‘Execution’ une nouvelle d’un meilleur niveau que ce que Dan Abnett avait publié au tout début des ‘Fantômes de Gaunt’. Reste à voir si la suite sera à la hauteur…

1 : Vu la manière dont le second remercie la première dans ses derniers bouquins, il y a de fortes chances que les deux aient l’habitude de travailler ensemble, et que Harrison ait voulu émuler le « maître » dans ses écrits. 
2 : Quelle belle remarque de psychopathe tout de même. Mais c’est vrai, toi-même tu le sais.

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The Battle for Markgraaf Hive – J. Hill [40K] :

The Battle of Markgraaf HiveICÔNE : MINKA LESK, GARDE DU 101EME CADIEN

INTRIGUE :

Comme les plus sagaces des lecteurs de cette chronique l’auront certainement deviné, la nouvelle du sieur Hill traite donc de la bataille pour la ruche Markgraaf1, opération de reconquête et pacification à laquelle l’unité de Minka Lensk, héroïne récurrente de l’auteur, à le plaisir et l’avantage de participer, en compagnie du \[|{™#{ème Cadien (comprendre qu’entre les pertes au combat non remplacées et les fusions régimentaires qui s’en suivent, les numéros défilent plus rapidement que lors d’une soirée bingo à l’Ehpad de Bois-Robert-sur-Veule).

Au menu de ce qui peut sans doute être considéré comme un séminaire annuel pour les derniers des Targaryen – cette manie de coller des yeux violets aux protagonistes pour les distinguer de la masse… –, une activité de team building dans les ténèbres des niveaux inférieurs de la ruche en question, avec les habituels cultistes hargneux-mais-bon-ça-va-on-a-vu-pire en lieu et place des assiettes en céramique à décorer, qui étaient à la mode en ce genre d’occasions quelques millénaires plus tôt. Une fois la séance initiale de laser game terminée, on enchaîne avec une découverte de la faune locale, qui consiste en des rats de la taille d’un rat et des asticots de la taille d’un chien (appelons-les maxticots), suivie par une session d’aqua-relax dans un bassin naturel, sous les ordres d’un Commissaire-Nageur un brin autoritaire.

À peine le temps de réaliser que les maxticots ne font pas de bons candidats au fish pédicure, à moins d’être un Ogryn peu chatouilleux, qu’il faut enchaîner avec une initiation à l’escrime médiévale/escape game sous la houlette de Philippe Chaos-therine (il coupe sa hache… et il rallume sa hache…), Space Marine renégat reconverti en coach de vie. Cette journée intense se termine par quelques longueurs de brasse coulée, un temps calme de 10 minutes devant une œuvre d’art moderne convenablement moche, et un ultime passage au hammam (mais habillé, ce qui est concept). Ce n’est pas tout le monde qui a la chance de vivre des séminaires aussi riches. Merci qui ? Merci Abby !

À ne pas confondre avec la ruche Steffigraaf, qui malgré quelques revers, est toujours au service de l’Empereur.

AVIS :

Propulsé directement dans le feu de l’action dès les premières lignes de The Battle… (au moins, le titre n’est pas mensonger), le lecteur aura sans doute quelques difficultés à comprendre les tenants et les aboutissants de cette successions de péripéties aussi guerrières que brouillonnes, expédiées sans tact, ni finesse, ni connecteurs logiques (ce qui surprend au début, irrite au milieu, et fait marrer à la fin) par un Justin Hill aussi maître de son propos qu’un élève de CM1 couchant par écrit le récit de ses vacances de printemps.

Si le début de la nouvelle fait illusion, tout se corse à l’arrivée sur la mare aux maxticots, théâtre d’une empoignade confuse, suivi de l’arrivée d’un groupe de survivants – dont un Valhallan, qui passait dans le coin – mené par un Commissaire, suivi de l’exécution d’un Garde qui trouvait l’eau trop froide, suivi de l’arrivée du random Chaotic Space Marine de base, suivi d’une ré-empoignade confuse, suivie d’une fuite éperdue de l’héroïne jusqu’au fond du bassin, suivi d’un questionnement philosophique sur la destinée des Cadiens survivants, suivi d’un séchage express, inexpliqué et interprété comme miraculeux par une Minka à laquelle il ne faut pas grand chose, des vêtements de nos héros, suivi de la fin du récit, qui s’achève donc davantage comme un chapitre de roman qu’un court format digne de ce nom, faute d’un dénouement digne de ce nom (sauf si être coincé à deux sans matos dans une caverne inondée peuplée de vers carnivores géants et squattée par des hordes d’hérétiques peu aimables et un Space Marine du Chaos altéré de sang constitue un explicit satisfaisant, bien sûr1).

Pauvre en termes de fluff, d’informations sur le passif de Mina Lensk, et d’une assez grande banalité dans son propos, The Battle… lorgnait peut-être du côté de la saga Gaunt’s Ghosts, et notamment du siège de Vervunhive couvert dans Necropolis, pour son inspiration, mais le fruit (plein d’asticots, donc) est tombé trèèèès loin de l’arbre. Pour laisser le mot de la fin, en même temps que du début, car j’aime bien boucler des boucles sur mon temps libre, à Hill en personne : « What the hell is happening ? »

1 : Si c’est le cas, vous êtes bizarre.

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The Smallest Detail – S. Mitchell [40K] :

The Smallest DetailICÔNE : CIAPHAS CAIN, COMMISSAIRE & HÉROS DE L’IMPERIUM

INTRIGUE :

À la recherche de petits extras pour égayer l’ordinaire de son cher Commissaire Cain, le brave Jurgen a pris sur lui de visiter les entrepôts de la milice de Helengon, monde banal sur lequel la Garde a été déployée pour écraser une insurrection l’étant tout autant. Usant de la considérable influence de son supérieur pour impressionner le responsable de l’entrepôt, un certain Sergent Merser, l’homme à tout faire du Héros de l’Imperium déambule longuement entre les travées et les étagères, emplissant sa musette des spécialités culinaires locales les plus appétissantes, à commencer par un saucisson d’anguille de sable tout simplement comestible, ce qui est déjà plus que ce que la majorité des rations du Ministorum peuvent revendiquer. Ces emplettes complétées, Jurgen se dirige tranquillement vers la sortie du site, mais remarque rapidement qu’il a été pris en filature par des amateurs, ce qui ne le trouble pas outre mesure1. Et en effet, l’embuscade dans laquelle il prend soin de tomber, et qu’il déjoue grâce à son entraînement et équipement supérieur, n’aurait pas cassé trois pattes à une Sentinelle. Seul petit problème, l’échange de tirs entre notre héros et son dernier adversaire a eu pour effet de déclencher un incendie (c’est ça que de s’abriter derrière des fûts de prométhéum), rendant l’identification des assaillants de Jurgen difficile.

Rejoint par la Prévôte Liana, qui se trouve en charge de l’enquête de cette tentative d’assassinat caractérisé, et par le Sergent Merser, qui accepte de jeter un œil sur les inventaires des autres entrepôts de la milice pour tenter de comprendre comment les tueurs en (im)puissance ont réussi à trouver uniformes et fusil laser2, Jurgen accepte de coopérer à l’investigation, mais seulement jusqu’au moment où il devra rentrer au camp pour préparer le jambon-purée de Cain. Très étrangement, l’étude des documents officiels ne donne rien, les inventaires inspectés par Merser étant trop mal tenus pour détecter des absences ou surplus de matériel (contrairement aux siens, d’une impeccable et implacable précision). Le dossier menaçant de piétiner, Jurgen prend congé, indiquant à ses comparses son intention de rentrer au bercail à pied, comme il est venu…

Début spoiler…Sauf qu’il était en fait venu en moto (une Salamander n’étant pas pratique dans une ville pas encore en ruines, et donc pleine de feux rouges, de livreurs Deliveroo et de petites mamies en déambulateur), et qu’il a fait exprès de mettre Merser sur une fausse piste, car il se doutait de la participation du Sergent dans la conspiration le visant. Aussi, lorsqu’il le voit sortir en courant de l’entrepôt quelques minutes après lui et sauter dans une camionnette qui part à fond de train pour rattraper le piéton qui n’en était pas un, Jurgen prévient Liana et se met en filature de la taupe, qu’il rattrape et immobilise au premier carrefour venu. Finalement, il s’avère que toute cette affaire n’a été qu’un énorme et regrettable (pour Merser, et plus encore pour ses complices) malentendu, le Sergent faisant partie d’un gang détournant de la nourriture pour la revendre à prix d’or sur le marché noir. Persuadé que Jurgen allait le dénoncer auprès de Cain (ce que l’aide de camp n’avait pas du tout l’intention de faire, car comme il le reconnaît lui-même, tout le monde fait ça), Merser a tenté de réduire le Valhallan odoriférant au silence, avec des résultats médiocres. Ironie de l’histoire, ce sont ses inventaires trop parfaits qui ont mis la puce à l’oreille de Jurgen, qui, en tant que Garde vétéran, sait bien que ce genre de documents sont par nature inexacts. Encore une fois, le mieux a été l’ennemi du bien !Fin spoiler

1 : Quand on est un vétéran ayant combattu les Tyranides et les Necrons à plusieurs reprises, plus grand-chose ne vous excite.
2 : L’absence de -s est volontaire, car sur les trois assaillants, un seul était convenablement armé.

AVIS :

Si cette petite nouvelle mettant à l’honneur le fidèle sidekick de Ciaphas Cain plutôt que ce dernier1 se laisse lire sans problème, et permet au lecteur non familier de l’approche particulière que Sandy Mitchell a du grimdark de découvrir cette dernière, je m’interroge sur la pertinence de l’intégrer dans un recueil dédié aux icônes de la GW-Fiction, dont Jurgen ne fait définitivement pas partie. Ce ne sont pourtant pas les courts formats où Cain tient la vedette qui manquent, et qui auraient à mes yeux bien mieux fait l’affaire ici. Je suis également un peu déçu que le titre équivoque de l’histoire n’ait au final débouché sur rien dans le dénouement de l’intrigue. Mitchell nous montre en effet Jurgen prendre en note mentale le nom d’un parfait inconnu, parce qu’on ne sait jamais, ça peut servir… sauf que ça n’a servi à rien ici. Le fusil de laser de Tchekov, ça te dit quelque chose ? Bref, ‘The Smallest Detail’ est loin d’être la meilleure, ni la plus adaptée, des nouvelles de Ciaphas Cain que l’on puisse parcourir, et je recommanderai donc au lecteur de retenter sa chance avec une autre soumission pour prendre la véritable mesure du Héros de l’Imperium.

1 : Ce n’est pas le premier texte de ce type, l’hyper court format ‘A Mug of Recaff’ étant également centré sur Jurgen.

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Of Their Lives in the Ruins of Their Cities – D. Abnett [40K] :

Of Their Lives...ICÔNE : IBRAM GAUNT, COMMISSAIRE GÉNÉRAL DU PREMIER & UNIQUE DE TANITH

INTRIGUE :

Nous suivons le premier et unique Commissaire-Colonel Ibram Gaunt, en charge du régiment du même statut, dans les premiers temps – assez difficiles – de son affectation à la tête des Tanith. Encore inexpérimentés, bien qu’ayant déjà soufflé dans les naseaux des Sang Bleu de Volpone en prenant la ville de Voltis à leur place, les futurs de Fantômes ont subi la vengeance mesquine de Noches Sturm et ont été chargés de mener une mission de reconnaissance dans les ruines de la seconde cité de Voltemand, Kosdorf, pendant que le gros de la croisade partait vers d’autres théâtres d’opération. L’équivalent de « va voir là bas si j’y suis » en termes militaires, ce qui n’aide pas vraiment à motiver la troupe. Cette dernière, toujours traumatisée par la perte de son monde natal, en veut méchamment à Gaunt, et le Commissaire a bien du mal à briser la glace avec ses nouvelles troupes, dont il ne pense pas grand-chose de positif pour le moment. Il songe même sérieusement à accepter l’offre que lui avait faite son vieux copain Blenner, un petit piston bien placé pour remettre sa carrière sur les rails, et laisser ces tree huggers de Tanith derrière lui. Il conserve à cet effet la lettre que son camarade lui a écrite dans la poche de son uniforme, comme un joker à abattre en cas de besoin.

La nouvelle décrit l’opération de reconnaissance montée par Gaunt et Corbec pour explorer Kosdorf avant que le gros du contingent impérial soit prêt à avancer, et qui, ô surprise, se passe très mal. Il s’avère rapidement que l’Archennemi a conservé des amis séides dans la ville, des cohortes de forces de défense planétaire rendues folles par les maléfices du Chaos et le manque de nourriture. Voulant gérer la situation comme un grand, Gaunt opte pour une retraite combattante, afin de laisser le temps à Caffran, son adjudant intérimaire depuis la mort de Sym sur Tanith (et avant que Gaunt n’embauche Milo pour ne plus avoir à entendre les « steuplé msieur steuplééééééééééééééé » du gamin), de prévenir le reste du régiment du problème rencontré (comme d’habitude, la radio ne marche pas, sinon c’est pas drôle). Cette situation stressante (les Doskorfers étant adeptes de la guerre psychologique et se faisant passer pour les véritables fantômes de Tanith pour saper le moral de l’adversaire) lui permettra de prendre la mesure des hommes qui le servent, depuis le cordial Corbec jusqu’à l’instable Larkin, en passant par l’imprécis (mais pas cette fois) Bragg, le clairvoyant Domor ou l’insaisissable Mkoll. Lorsque les renforts finissent enfin par arriver, menés par l’au fond pas si méchant que ça Major Rawne et sa bande de vauriens1, tout est bien qui finit bien pour les Tanith, qui sortent un peu plus unis de cette escarmouche. Symbole de l’enterrement de la hache en nalwood de guerre entre Gaunt et ses bidasses, le premier brûle la lettre de Blenner2 à son retour au campement, liant ainsi son destin avec celui de ses Fantômes. La suite fait partie de l’histoire de la GW-Fiction…

1 : Qui s’étaient amusés à faire les poches de leur officier et lui avait soutiré la lettre de Blenner, au grand désarroi de Gaunt. Ils lui ont toutefois rendu à la fin de la nouvelle.
2 : On peut supposer que la missive contenait l’adresse mail et le numéro de téléphone de Blenner, que Gaunt n’avait pas enregistrés ailleurs. Sinon je ne vois pas en quoi ce geste incendiaire empêcherait notre héros de saisir sa chance de mutation.

AVIS :

Longue nouvelle (50 pages tout de même) se taillant la part du lion dans tous les recueils dans lesquels elle a été incluse (dont ‘The Hammer & the Eagle’), ‘Of Their Lives…’ est le récit d’introduction ultime aux Fantômes de Gaunt, écrit par Dan Abnett avec ce but particulier en tête, au moment où la saga avait déjà atteint son statut légendaire parmi la communauté. Il est intéressant à ce titre de la comparer à des travaux plus anciens, mais sensiblement similaires car relatant l’apprivoisement mutuel entre le Commissaire-Colonel et ses nouvelles recrues. Les contributions d’Abnett à la première mouture d’Inferno ! (‘Ghostmaker’ – la nouvelle – , ‘A Blooding’, ‘The Hollows of Hell’) traitent ainsi de ce sujet de manière fort logique, à fins de présentation et d’établissement de cette nouvelle (à l’époque) série. Un peu plus tard, Abnett se fendit d’un ‘In Remembrance’ prenant place après ‘Necropolis’, et donnant à nouveau au lecteur novice un échantillon représentatif en même temps qu’un tour de table des personnalités importantes, du Premier et Unique de Tanith. ‘Of Their Lives…’ est la version revue, corrigée et probablement définitive de ce didacticiel narratif, présentant une fois encore les personnages « initiaux1 » de la série, leurs personnalités, leurs motivations et leurs rapports les uns par rapport aux autres. Ce côté social est particulièrement exploré ici, et justifie bien plus les 50 pages de la nouvelle que l’intrigue, relativement simple, qui sous-tend cette dernière.

Si ‘Of Their Lives…’ est d’abord destinée à un public non familier avec les Fantômes de Gaunt, Abnett n’oublie pas ses vétérans et s’amuse à glisser de nombreux clins d’œil à la suite des événements, que seuls les connaisseurs pourront détecter. La destinée de certains Tanith est esquissée de façon prophétique (Caffran, Feygor, Beltayn…) parfois jusqu’à un stade avancé de la saga (dialogue « bon pied bon œil » entre Larkin et Gaunt), tout comme celle de Noches Sturm, à qui Milo promet un retour de bâton karmique que le Volpone recevra bien quelques années plus tard. Notons également la référence croisée aux travaux inquisitoriaux d’Abnett, nouvelle passerelle/easter egg à recenser dans le « Daniverse ». Au final, cette nouvelle accomplit parfaitement son objectif, de façon peut-être un peu transparente pour le lecteur avisé, mais Dan Abnett, égal à lui-même, signe un texte suffisamment solide pour que tout le monde y trouve son compte. Si vous voulez découvrir un des mythes fondateurs et structurants de la Black Library, ‘Of Their Lives…’ est donc le point de départ idéal pour se familiariser avec une saga aussi colossale que celle des Fantômes de Gaunt.

1 : Note à l’attention des lecteurs ne connaissant par les Fantômes de Gaunt : Abnett a pris un malin plaisir à rajouter des personnages non Tanith à son casting au fur et à mesure des campagnes du régiment. Si vous pensez qu’il y a une foule de noms à retenir ici, attendez un peu de lire ‘The Lost’ ou ‘The Victory’.

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Mercy – D. Ware [40K] :

MercyICÔNE : AUGUSTA, SŒUR SUPÉRIEURE DE L’ORDRE DE LA ROSE DE SANG

INTRIGUE :

Sur le monde de Lautis, isolé dans l’arrière-pays de l’Ultima Segmentus, une escouade de Sœurs de Bataille de l’Ordre de la Rose de Sang menée par la Sœur Supérieure Augusta Santorus explore les ruines d’une cathédrale impériale, peut-être dédiée à Sainte Mina, et peut-être dédiée à Saint Maclou (qui peut dire ?), à la recherche de… quelque chose. Escortées par un missionnaire de l’Ecclésiarchie (Lysimachus Tanichus), ayant pris sur lui de ranimer la flame de la foi en l’Empereur parmi la plèbe locale après des siècles d’isolement et d’obscurantisme, l’Adeptus Sororita s’est en effet lancé dans une quête aussi pressante que floue pour une statue pouvant être liée aux origines de l’Ordre. On ne saura jamais pourquoi l’identification du patrimoine sacré constitue une priorité telle pour les membres de la Rose de Sang, mais toujours est-il que nos intrépides sistas se retrouvent fort dépourvues quand la Waaagh ! locale fut venue.

Coincées dans les ruines de la maison de Pépé (Question : peut-on considérer les temples impériaux comme des Ehpads, de ce fait ?), Santorus et ses sous-fifres optent alors pour un dernier carré héroïque et commencent à arroser les peaux vertes de bolts et d’imprécations en Haut Gothique, avec des effets spectaculaires, tant sur les effectifs de la horde ork que sur la culture générale du lecteur. Las, cela ne suffit pas à décourager les belliqueux Xenos de forcer l’entrée du lieu saint sous le seul poids du nombre, forçant les fifilles survivantes à, je vous le donne en mille, engager les brutes au corps à corps. Et pas n’importe comment, qui plus est : à mains nues. Oui, vous avez bien lu, ô incrédules lecteurs : c’est bien à coup de poing et de pied (pas de crépage de chignon possible avec les Orks malheureusement) que Santorus et consœurs tombent sur le râble, plutôt costaud, des aliens mécréants. Et le meilleur dans tout ça, c’est qu’elles leur mettent une énorme race, à l’image d’une Sœur Supérieure déchainée et tenant facilement tête à un Warboss Blood Axe, avec et sans arme. Pourquoi avoir des progénoïdes quand on peut avoir des stéroïdes ?

Les Orks finalement mis en déroute, et leur chef exécuté d’un bolt en pleine tête après un sommaire interrogatoire ayant permis de mettre à jour la duplicité de ce traître de Tanichus (c’est un nom de fourbe, je l’ai toujours dit), il est temps pour Augusta de (se) rendre justice afin des réparer les torts subis (une Soeur décédée d’allergie à la grenade, et quatre permanentes totalement ruinées). Guidée par une inspiration soudaine, et sans doute divine, elle décrète donc la mort du félon, ignorant ses piteuses justifications pseudo humanitaires, et l’annexion de Lautis au sein du protectorat de l’Ordre. Pourquoi ? Parce que. The end.

AVIS :

Que garder de Mercy, première soumission de la newbie Dannie Ware pour la Black Library ? Pas grand-chose, malheureusement. Sur le fond, l’intrigue proposée tient en une demi-ligne (attention, vous êtes prêts ? “Sistas versus Orks dans une cathédrale”. Ta-daaaaa!), et le “twist” final gardé en réserve par l’auteur tombe tellement à plat qu’on aurait même du mal à le considérer comme tel. Que Tanichus ait mené son escorte dans un piège, soit. Mais apprendre que la motivation profonde des Orks, et la raison pour laquelle ils ont accepté la proposition du missionnaire, est la récupération des armes d’une pauvre escouade de cinq Sororitas, no way. L’histoire a beau se dérouler dans l’Ultima profond, plus cheap que ça, c’est fouiller les poubelles des colons locaux pour récupérer les bouteilles d’amasec consignées au Simply Market du coin. Respectez-vous tout de même, Messieurs les peaux vertes.

Sur la forme, on aura bien du mal à pardonner à Ware les libertés qu’elle prend avec quelques principes fondateurs et porteurs du fluff de GW, au premier du rang duquel on trouve l’axiome : “Les Orks sont des forces de la nature”. Faire triompher une escouade de Space Marines d’Assaut vétérans d’une empoignade contre ce type d’adversaires, pourquoi pas (et encore). Mais une poignée de Sœurs de Bataille qui tatane comme qui rigole dix fois leur nombre et cent fois leur poids en géants verts, sans subir une seule perte dans le feu de l’action, et en recourant à des prises de catch histoire de faire kwioul, non merci. Ajoutez à cela un character development aux abonnés absents et quelques incongruités (comme une statue disposée de telle façon à ce qu’elle soit tournée vers Sainte Terra… donc vers l’Ouest-Sud-Ouest, c’est bien connu) sans conséquences pour le récit mais pas pour la crédibilité de ce dernier, et vous obtenez une nouvelle à remiser dans le fond des cartons du second choix de la BL. Mercy ? Sans façons.

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Thorn Wishes Talon – D. Abnett [40K] :

Thorn Wishes TalonICÔNE : GREGOR EISENHORN & GIDEON RAVENOR, INQUISITEURS DE L’ORDO XENOS

INTRIGUE :

Par une sombre nuit d’orage, un petit groupe de mystérieux individus débarque sur la planète Malinter, et prend la direction d’une tour en ruines où un rendez-vous a été fixé avec une tierce partie anonyme. Voilà qui est bien brumeux, voire fumeux, vous en conviendrez. Sur le chemin, les marcheurs sont attaqués par 6/7 hostiles, donnant l’occasion à Abnett de présenter ses protagonistes de façon convenable. À tout seigneur container, tout honneur, commençons par le meneur de la bande, l’Inquisiteur Gideon Ravenor, puissant Psyker réduit à l’état de loque humaine lors d’un attentat chaotique il y a bien longtemps, et confiné dans un fauteuil flottant énergétique depuis lors. Il a amené avec lui quelques copains pour lui servir de garde de la carrosserie : l’Interrogateur Carl Thonius, incarnation parfaite du hacker nerd passant la moitié de son temps à se plaindre, et l’autre à balancer des vannes caustiques, les hommes et femmes de main Harlon Nayl, Kara Swole et Zeph Mathuin, et la télékine Patience Kys. Seul Gigi sait ce qui les attend sur Malinter, et il refuse obstinément de s’en ouvrir à ses collaborateurs, même après que cette première embuscade, prélude à de nombreuses autres, se soit terminée en faveur des visiteurs (grâce à la combo mortellement efficace lévitation forcée + canon d’assaut rotatif).

La progression de nos héros devient de plus en plus difficile au fur et à mesure qu’ils s’approchent du sommet de la tour, des hordes des cultistes chaotiques se mettant en travers de leur route dans le but d’empêcher la rencontre de haut niveau (à tout point de vue) de se produire. Laissant Thonius, Nayl et Mathuin retenir la plèbe et échanger des blagounettes, ce Dom Juan de Ravenor entraîne Kys et Swole à sa suite jusqu’au rooftop du gratte ciel, où les attend ce bon vieux Gregor Eisenhorn, mentor de Gideon et ex-employeur de Kara. Disparu de la circulation depuis des lustres, et présumé mort ou radical par l’Imperium (voir la trilogie ‘Eisenhorn’ d’Abnett à ce sujet), Greg le Grabataire est toujours actif dans le game et déterminé à s’opposer au Chaos par tous les moyens nécessaires, y compris en retournant ses armes et méthodes contre lui. Le seul équipier conservé par Eisenhorn dans sa lutte contre l’anarchie galactique est ainsi le possédé Cherubael, qui lui sert de gros bras mais également d’auxiliaire de vie (dur de monter en haut d’une tour de 500 mètres – sans ascenseur – quand on est invalide à 93%1). Ces retrouvailles émouvantes entre les deux invalides tournent rapidement à la réunion professionnelle, Eisenhorn ayant voulu prévenir son disciple de l’intérêt que lui portent les membres de la Divine Fraternité, un culte chaotique spécialisé dans les catastrophes à venir. D’après leurs dernières (pré)visions, Ravenor, ou quelqu’un de son entourage, jouera un rôle décisif dans l’incarnation du démon Sliite dans notre dimension, ce qui aura évidemment des conséquences néfastes pour l’Imperium. Une barquette avertie en valant deux, Eisenhorn tenait à faire passer le message à son ancien Interrogateur, qui décide naturellement de… continuer ses investigations sur Eustis Majoris, précisément là où le démon fera son entrée dans le Matérium. Mais attention, en faisant attention.

Un peu plus bas, le Supreme NTM (Nayl, Thonius & Mathuin) a bien du mal à gérer le Dreadnought que les cultistes ont fait venir en renfort. Ils parviennent cependant à le retenir suffisamment longtemps avec leurs grenades krak (un peu) et chamailleries (surtout) pour que les Inquisiteurs se traînent enfin à leur niveau, leur conciliabule achevé, et règlent son compte à la menaçante machine. Le reste n’est qu’une formalité, et après un joyeux massacre de chaoteux et un salut au club des anciens (Nayl et Swole ayant commencé par servir Gregor avant de rejoindre Gideon), Ravenor et Eisenhorn se séparent à nouveau, peut-être pour la dernière fois. La suite sera racontée dans ‘Ravenor Returned’, le deuxième tome de la trilogie consacrée par Abnett au Stephen Hawkins du 41ème millénaire.

1 : Ce qui pose la question : pourquoi Eisenhorn a-t-il donné rendez-vous à son pupille, à la mobilité également réduite, dans un endroit aussi difficile à atteindre ? Autrement que pour le côté grandiose, s’entend ?

AVIS :

Abnett trouve un prétexte assez quelconque pour réunifier le temps d’une nouvelle la team GG de l’Inquisition, et on peut lui en être gré. Il est clair à la lecture de ‘Thorn Wishes Talon’ que l’équilibre des forces penche en faveur de Ravenor (dont la saga était en cours d’écriture au moment de la première publication de cette nouvelle), Eisenhorn en étant réduit à faire un cameo plutôt qu’à participer réellement à l’intrigue. En ce sens, cette nouvelle donnera sans doute plus envie au lecteur de se pencher sur les aventures de Gideon le gai luron plutôt que sur celles de Gregor Trompe-la-Mort, même si les deux séries méritent définitivement la lecture. On prend plaisir à voir opérer une équipe d’agents de l’Inquisition, constituée d’individus au caractère bien trempé et aux compétences uniques, ce qui donne un cocktail savamment mixé d’action et de punchlines, saupoudré par quelques éléments de fluff dignes d’intérêt, dans le plus pur style d’Abnett. Je place ‘Thorn Wishes Talon’ en dessous des histoires policières/roman noir (‘Missing in Action’, ‘Backcloth for a Coin Additional’) et détaillant l’origine/la destinée de personnages secondaires importants des travaux inquisitoriaux de Dan Abnett (‘Playing Patience’, ‘The Strange Demise of Titus Endor’), mais vous pouvez tout de même y aller les yeux fermés (ou pas, c’est tout de même plus pratique pour lire un texte).

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The Wreckage – D. Annandale [40K] :

The WreckageICÔNE : SEBASTIAN YARRICK, COMMISSAIRE

INTRIGUE :

Où il sera question des premières années de service de Sebastian Yarrick, avant qu’il ne devienne la légende acariâtre que l’Imperium connaît et adore redoute. Déjà engagé aux côtés de la Légion d’Acier d’Armaggedon, notre héros se retrouve en mauvaise posture lors de la traque d’une bande de pirates hérétiques ayant fait du vilain dans le secteur de Statheros, et qui semble avoir un coup d’avance sur ses adversaires impériaux. Débarqué à la surface d’Aionos, une lune servant de décharge à vaisseaux spatiaux en fin de vie, le 252ème Régiment de la Légion d’Acier tombe dans une embuscade qui le force à s’abriter derrière une épave (d’où le titre. Ça, c’est fait.), en attendant des jours meilleurs, ou un coup de génie militaire de la part du Capitaine Jeren Marsec, leader charismatique mais tête brûlée de l’expédition. Yarrick, bien moins dominateur que dans ses dernières années, se contente d’observer avec circonspection la tournure que prennent les événements, échangeant quelques remarques acerbes avec son pote Otto Hanoszek, Sergent expérimenté du 252ème, avec lequel il partage quelques doutes sur la qualité du Capitaine Marsec. Ce dernier, qui a vraiment la confiance, se permet de faire des blagues au sujet de son Commissaire, et propose en toute simplicité de charger en masse les lignes ennemies (situées en hauteur et mieux fortifiées que celles des impériaux) afin de forcer les hérétiques à se concentrer au même endroit pour repousser l’attaque, les transformant en cible facile pour la frégate d’Armaggedon (Castellan Belasco) qui stationne en orbite. Moyennement emballé par ce plan à 80% suicidaire, Yarrick accepte tout de même de marcher dans la combine, mais le coup de bluff de Marsec ne donne rien. Il semble en effet que le fourbe ennemi se soit fait la malle au lieu de tenir sa position, comme il était convenu qu’il le fasse.

Dépité autant que déboussolé par ce coup du sort, Marsec contacte la frégate pour annuler la frappe orbitale, mais réalise un peu tard qu’il vient de re-re-retomber dans un piège, les hérétiques ayant capturé le vaisseau et n’attendant que la confirmation du Capitaine que ses troupes forment un gros tas bien compact au sol pour donner du macrocanon. Le subtil accent nazillard de l’opérateur radio auquel Marsec s’adresse met toutefois la puce à l’oreille de Yarrick, qui parvient à sauver quelques meubles en ordonnant une dispersion stratégique quelques instants avant que la catastrophe ne frappe. La situation du 252ème est toutefois des plus précaires, réduit à quelques escouades éparses, mené par un officier totalement hébété par la tournure qu’on prit les événements, et confronté, en plus des pirates de l’espace, à une escouade de Space Marines du Chaos des tristement célèbres Harkanor’s Reavers (la Légion des Damnés, goût Hérésie).

Prenant en charge les opérations le temps que Marsec sorte de sa torpeur, Yarrick entraîne ses survivants dans un complexe de pyramides enfoui sous le sol de Aionos, et découvert par le bombardement spatial. Je ne vous ferai pas l’insulte de laisser planer l’ombre d’un suspens sur la présence de Necrons dans cette nécropole, car c’est évidement le cas. Pris entre le marteau du Chaos et l’enclume des Xenos, Yarrick parvient à feinter son monde en passant en mode furtif, laissant les hérétiques menés par leurs gros copains énergétiques se ruer sur les robots tueurs, avec des résultats concluants. Un bonheur n’arrivant jamais seul, nos héros apprennent que l’équipage du Castellan Belasco a réussi à se libérer et est sur le point de reprendre le contrôle du vaisseau, ce qui permettrait au 252ème de tirer sa révérence sur cette victoire mineure. Problème, le bombardement a séparé les Gardes Impériaux en deux, et le groupe mené par le Sergent Hanoszek est confronté à la même situation que celui de Yarrick (hérétiques, Space Marines du Chaos, pyramide…), sans bénéficier de la présence scénaristiquement salvatrice de ce dernier.

Conscient que la situation de ses camarades est sans espoir1, Yarrick essaie de convaincre Marsec, qui a enfin repris ses esprits, de ne pas jouer au héros en essayant de monter une opération de secours vouée à l’échec. En vain. Seb la Frite passe alors en mode Commissaire et colle un bolt dans la tête de l’officier, qui n’attendait que ça en fait, histoire de mourir en martyre au lieu de devoir justifier son incompétence auprès du haut commandement à son retour. Grand prince, Yarrick annonce lui-même à Hanoszek qu’il a été désigné volontaire pour mourir au nom de l’Empereur, ce que ce dernier accepte avec stoïcisme, et laisse sa radio ouverte jusqu’au bout pour recueillir les derniers râles des héroïques bidasses. Kelôm.

1 : Ils sont confrontés à 3 Astartes du Chaos. 3 ! C’est Gaunt qui doit doucement rigoler dans son coin.

AVIS :

Une nouvelle sur Yarrick où aucun Ork ne vient pointer le bout de son (absence de) nez, cela fait bizarre, tant cette race de Xenos est centrale dans la saga du vieux Commissaire. Le récit que fait Annandale du début de la carrière du héros d’Armaggedon, que l’on découvre déjà animé de puissantes convictions quant à la manière d’accomplir son devoir, même s’il se laisse ici marcher sur les pieds par cette fantoche de Marsec, ne s’avère pas vraiment mémorable, et je pense que le nombre très important de factions convoquées dans cette courte nouvelle joue un rôle important dans ce constat de bofitude. Était-il vraiment nécessaire de faire intervenir les Necrons (qui n’apparaissent même pas directement dans le récit d’ailleurs) dans cette péripétie mineure de la carrière de Yarrick ? Cela renforce en tout cas le running gag de la nécropole enfouie sous trois centimètres de sable, et qui se réveille dès que le chien du héros la déterre par inadvertance en creusant un trou pour son os. À vouloir jouer à la fois sur le tableau de la psychologie (Yarrick se retrouve confronté à un dilemme moral qui aura des conséquences sur la suite de sa vie) et de l’action (Yarrick doit mener ses hommes à la victoire en dépit des circonstances) en aussi peu de pages, Annandale score moyennement sur les deux dimensions, et ce faisant, ne rend pas vraiment service au héros qu’il est sensé glorifier.

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Rite of Pain – N. Kyme [40K] :

Rite of PainICÔNE : ADRAX AGATONE, CAPITAINE DE LA TROISIÈME COMPAGNIE DES SALAMANDERS

INTRIGUE :

Malgré leur réputation de gros nounours, les Salamanders ne sont pas exempts de pratiques douteuses. La scène qui se déroule en ouverture de ‘Rite of Pain’ (une nouvelle qui ne traite pas de la manière de faire une Tradition à la mie moelleuse et à la croûte ferme, ce qui est, de l’avis général, très dommage) le démontre bien. Un trio de tortionnaires s’amuse en effet à pyrograver le torse d’un prisonnier enchaîné à une table d’opération, en lui recommandant de « sentir le moment » et « accueillir la souffrance », préceptes admirables en théorie mais dont l’individu se trouvant du mauvais côté du fer rouge a du mal à faire usage. Nos trois larrons sont le Capitaine Adrax Agatone, le Chapelain manchot Elysius, et Jean-Alphonse Diplodocus, prêtre tisonnier. Ils semblent avoir des difficultés à convaincre leur invité des vertus de leur philosophie masochiste, pour des raisons qui seront gardées sous silence par Nick Kyme. On apprendra juste que le gonze qui joue le rôle du steak sur le grill de la cafétéria des Salamanders est sauvage et dangereux, et a déjà occis sept collègues de Jean-Alphonse avant d’être appréhendé.

Aux grands maux les grands remèdes, Elysius demande et obtient un tête à tête avec le prisonnier pour lui apprendre une bonne leçon. Pendant qu’Adrax et Jean-Alphonse prennent une pause clope à l’extérieur, le Chapelain libère sa victime… et lui refait le portrait d’une main experte, tout en continuant à le poker avec son tisonnier, jusqu’à ce que le malappris demande grâce et récite son catéchisme comme il faut. Avant que le rideau ne tombe, nous faisons donc la connaissance de frère Zartath, qui semble avoir été confirmé comme Salamander après ce bizutage en règle, et malgré le fait qu’il soit capable de faire pousser des griffes d’os depuis ses avant-bras. Ils prennent des mutants maintenant sur Nocturne ?

AVIS :

J’avoue avoir un peu triché en préparant la critique de cette nouvellinette (5 pages) de Kyme, que son auteur a gardé volontairement obscure pour qui n’est pas familier des travaux nocturnes de l’auteur-éditeur de la BL. Il s’avère que ‘Rite of Pain’ se situe à la croisée des événements relatés dans ‘Nocturne’ et ‘Rebirth’, et a certainement été sélectionnée pour l’inclusion dans ‘The Hammer & the Eagle’ sur la base de la participation du Capitaine Adrax Agatone à cet épisode très mineur du ‘Tome du Feu’, nom de l’anthologie consacrée par Kyme à ses chers lézards. Nouvelle figure de proue du Chapitre depuis la sortie de sa figurine et de son profil dans le Codex Space Marines, Agatone n’est cependant qu’un second rôle lointain dans la saga vulcanisée de Nick Kyme, par rapport au duo Dak’ir et Tsu’Gan sur lequel l’essentiel de la série repose. Faut-il voir un nouveau départ pour les Salamanders au sein de la BL ? Sans doute, mais on leur souhaite des écrits plus intéressants et détaillés que ce min…uscule ‘Rite of Pain’, qui ne présente ni ne suscite guère d’intérêt pour le lecteur.

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Chains of Command – G. McNeill [40K] :

Chains of CommandICÔNE : URIEL VENTRIS, CAPITAINE DE LA QUATRIÈME COMPAGNIE DES ULTRAMARINES

INTRIGUE :

Engagé dans la campagne de pacification de Thracia avec un contingent d’Ultramarines placé sous le commandement du Capitaine Idaeus, le Sergent Uriel Ventris a été chargé de mener l’assaut sur le pont 2-4, tenu par les rebelles ayant eu l’audace de se soulever contre le bienveillant Empereur, et qu’il convient de faire sauter pour éviter que la contre-attaque de la Garde Impériale en direction de la capitale planétaire ne soit prise de flanc. Après quelques paragraphes de « mes sens sont vraiment trop développés lolilol » #ImTheBest #YouCantWriteAstartesWithoutStar, qui expliquent en grande partie pourquoi personne n’aime les Ultramarines, Ventris accomplit sa mission, déclenchant un assaut en règle de ses petits copains bleu pervenche et vert sapin sur la position adverse. Désespérément surclassés, les défenseurs se font hacher menu, et les meilleurs de l’Empereur s’organisent pour tenir le pont assez longtemps pour permettre au vénérable Techmarine Tomasin de placer les explosifs qui permettront de faire écrouler l’ouvrage d’art dans la gorge en contrebas.

Nous faisons la connaissance du Capitaine Idaeus, un officier vétéran et proche de ses hommes, connu pour son approche distanciée du saint Codex Astartes, ce qui n’en finit pas de sidérer le rigoriste Ventris. Ce même Idaeus a d’ailleurs fait montre de ses tendances libertaires en menant la charge contre un nid de bolters lourds, au lieu d’attendre le soutien du reste de ses hommes, comme ce planqué de Guilliman l’avait pourtant préconisé dans ses écrits. Depuis cinquante ans qu’ils combattent ensemble, Idaeus n’a pas réussi à convaincre son bras droit de l’avantage de s’écarter de temps en temps du manuel d’utilisation de la guerre écrit par le Primarque, et ce n’est pas aujourd’hui que ça va ch… Ah, on me dit dans l’oreillette que c’est précisément l’objet de cette nouvelle. Bigre.

Comme tous les vétérans dignes de leurs médailles, Idaeus fait confiance à son instinct, et ce dernier lui hurle (il est un peu sourd) que quelque chose en tourne pas rond, malgré le fait que la mission se déroule jusqu’ici parfaitement comme prévu. Ce malaise le conduit à mener une mission d’inspection de l’autre côté du pont, Ventris à ses côtés, pour juger du boulot effectué par les Scouts déployés par les Ultramarines en territoire ennemi. Et, évidemment, il s’avère qu’une importante colonne blindée progressait discrètement (c’est possible si on met des patins sur les chenilles) en direction du pont, ce qui va devoir forcer le vénérable Tomasin à se bouger les vénérables miches, ce qui n’est pas facile quand on est plus refait qu’un Iron Hands en fin de carrière (souvenir d’une rencontre torride avec un Carnifex entreprenant sur Ichar IV). Tout aussi évidemment, rien ne se passe comme prévu à partir de ce moment, les Scouts, le Thunderhawk qui devait évacuer les Ultramarines, et le vénérable Tomasin tombant tous sous le feu de l’ennemi, ce qui force Idaeus et ses compagnons à monter une défense désespérée du pont, le temps que 1) un autre transport arrive, et 2) quelqu’un trouve une idée brillante pour faire péter la passerelle, ce qui reste tout de même l’objet principal de la mission de nos marsouins énergétiques.

Je vous passe les longues scènes de baston dont nous gratifie McNeill, et qui permettent à Ventris de montrer qu’il en a dans le slibard, pour aller directement au moment où notre futur héros réalise qu’il suffit de déclencher une charge de démolition à proximité des explosifs posés par l’irrécupérable Tomasin pour déclencher une réaction en chaîne qui devrait provoquer les résultats escomptés. Petit problème, l’escouade de Space Marines d’Assaut envoyés réaliser cette mission se fait pincer en chemin par les Night Lords qui coordonnent la rébellion chaotique, et les incapables finissent crucifiés sur le pare chocs des Rhinos des fils de Curze pour leur apprendre la vie. Devant ce spectacle insoutenable, Idaeus et Ventris sont très colère, et cette rage leur permet de repousser l’assaut des renégats au prix de lourdes pertes. Alors que le deuxième Thunderhawk approche de la position intenable des Ultramarines, l’heure des choix arrive pour la bleusaille…

Début spoiler…Le noble Idaeus décide de partir faire exploser le pont à la mano, malgré ses chances de réussite quasi nulles, et ordonne à Ventris de mener les quatre rescapés de cette folle nuit, ainsi que son épée énergétique de maître, jusqu’au point d’extraction. Les cœurs gros, le Sergent s’exécute, et est témoin de l’héroïque sacrifice de son mentor dans les poutrelles et les travées du pont 2-4, la bande de Raptors laissée en garnison par les Night Lords ne parvenant pas à lui régler son compte avant que le Capitaine fasse feu avec un pistolet plasma dérobé à l’ennemi sur une charge de démolition laissée négligemment sur place1. C’est donc une victoire indéniable pour l’Imperium, et le début de la saga d’Uriel Ventris, qui héritera du commandement de la 4ème Compagnie à la suite de la campagne de Thracia.Fin spoiler

1 : On pourrait aussi se demander pourquoi les Night Lords n’ont pas détaché les explosifs laissés par le vénérable Tomasin sur les piliers du pont quand ils en avaient l’occasion. Encore une preuve que l’abus de Chaos est mauvais pour le cerveau.

AVIS :

Si l’idée de lire une nouvelle d’action dont le héros est un Ultramarines peut sembler intrinsèquement barbante à un lecteur de 2020, qui a sans doute pu pratiquer l’exercice à de nombreuses reprises grâce/à cause de l’obsession de la Black Library pour ce genre de productions, il faut être juste avec Graham McNeill et Uriel Ventris, et rappeler que ‘Chains of Command’ a été à sa sortie (2001) une des premières et plus abouties Space Marinades (saveur vanille) qui soient. Les innombrables ersatz et proxys publiés depuis ne l’ont pas aidé à bien vieillir, ni le style de l’auteur, ni les personnages mis en scènes, ni l’intrigue exposée n’étant particulièrement dignes d’éloges, mais le résultat n’est pas indigne pour autant. À l’époque où il est attendu d’un héros Space Marines un peu plus qu’un grade de Capitaine et une vague tendance à se poser des questions existentielles (ce qui était suffisant il y a 15-20 ans), je laisse le soin au lecteur de décider si une figure comme Uriel Ventris est toujours pertinente, ou bien s’il est temps d’accorder une retraite bien méritée à l’aïeul de tous les héros d’action énergétique de la Black Library.

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Eclipse of Hope – D. Hinks [40K] :

Eclipse of HopeICÔNE : MEPHISTON, CHEF ARCHIVISTE DES BLOOD ANGELS

INTRIGUE :

Appelés à l’aide par la Garde de Fer de Mordia, elle-même sollicitée par les habitants de Supplicium Secundus en leur heure de besoin, les Blood Angels ont répondu en envoyant Mephiston et quelques potes dans le système en question. Les vampires énergétiques arrivent toutefois trop tard à la surface de la planète, et ne peuvent que constater que la totalité de sa population, ainsi que les braves Mordian débarqués pour faire le service d’ordre, se sont entre tués dans une orgie de massacre à faire se pâmer un héraut de Khorne. Mephiston trouve le spectacle de la plaine jonchée de cadavres jusqu’à l’horizon plutôt poétique, mais se garde bien de partager cette réflexion pas très Charlie avec ses sous fifres. Les questions que les Astartes et le lecteur se posent sont en partie résolues par l’arrivée de l’ultime survivant de cette battle royale planétaire, un Colonel Mordian complètement ravagé du bulbe, qui agresse violemment le brave Sergent Gamigin en grognant comme une bête enragée. Courtois mais un peu rude, le surhomme dans la pampa finit par tordre le cou au minus qui lui salit ses plates avec ses grosses mains pleines de doigts, mais semble récupérer le mal qui tourmentait son assaillant au passage, et commence à montrer des signes d’énervement qui n’augurent rien de bon venant d’un colosse génétiquement modifié et armé jusqu’aux canines. Heureusement, Mephiston est là pour faire un peu d’hypnose suggestive, ce qui permet à Gamigin de décompresser sans avoir tué personne (à part le Mordian bien sûr, mais il ne compte pas vraiment).

De retour sur leur vaisseau, les Blood Angels découvrent la flotte de secours des Mordians, complètement désertée et remplie de cadavres. Les puissantes capacités déductives de Mephiston ne mettent pas longtemps à soupçonner que les transports de troupe ont été victimes de la même rage irrépressible que celle qui a décimé Supplicium Secundus, et la réception d’un nouvel appel à l’aide, celui-là venant de Supplicum Tertius, située un peu plus loin dans le système, vient confirmer les craintes de Seigneur de la Mort. Le virus du VENER-40.000 circule encore dans la zone, et il est du devoir des Blood Angels d’en trouver la cause et la cure.

Parti dare dare vers la planète souffrante, dont les masses laborieuses commencent à s’entre-tuer avec méthode et enthousiasme, le croiseur d’attaque Crimson Exhortation manque d’être percuté en chemin par un vaisseau non identifié, ce qui ne peut pas être une coïncidence dans un milieu aussi espacé que… l’espace. Et en effet, le nouveau venu se révèle être l’Eclipse of Hope, ou plutôt son portrait robot dessiné par un enfant de 6 ans (comprendre que les proportions ne sont pas très bien respectées), une barge de bataille perdue par le Chapitre pendant la 5ème Croisade Noire. L’étude de la trajectoire du vaisseau fantôme ne laisse aucun doute à Mephiston : c’est bien la cause de la folie meurtrière qui a infecté Supplicum Secundus et Tertius, et il doit être détruit en conséquence. Plus facile à dire qu’à faire cependant, l’Eclipse encaissant sans problème et sans dégâts apparents un tir direct de canon nova. Comprenant que le Warp est à l’œuvre, Mephiston décide d’aller régler le problème à l’ancienne, B.A. style, c’est-à-dire en envoyant une poignée de vétérans purger l’épave de l’intérieur, comme cela a si bien réussi au Chapitre par le passé (remember Secoris ?). En plus de notre souriant héros et du Sergent Gamigin, résolu à prouver à l’univers combien il est cool, on retrouve un Chapelain, un Techmarine, un Prêtre Sanguinien et un Épistolier dans l’équipe des rouges. Tout ce petit monde aborde l’Eclipse, qui est une sorte de fantasme semi-solide, se nourrissant des souvenirs de ses hôtes pour prendre une forme concrète, et se dirige vers la salle de commandement du vaisseau, où se situe probablement le nœud du problème.

En chemin, la rage instillée par l’épave est gardée sous contrôle par les Blood Angels, qui ont tous pris un Lexomil dans leur lait fraise avant de partir en mission, mais la manifestation d’un petit groupe de Sanguinaires à proximité de l’objectif des Astartes force ces derniers à passer en mode agressif, avec des résultats mitigés, la sainte colère des meilleurs de l’Empereur provoquant le spawnage de plus en plus rapide de leurs adversaires. Il revient à Mephiston, comme le héros qu’il est, de prendre les choses en main et de remettre ses compagnons sur la bonne route. Ses pouvoirs psychiques lui ayant permis de déterminer que la source du problème se trouvait dans le Librarium, et non sur le pont, il convoque un bouclier d’apathie, ou quelque chose comme ça, permettant à ses gardes du corps de s’extirper de la mêlée et de progresser jusqu’à la bibliothèque de l’Eclipse, où la messe devra être dite…

Début spoiler…Laissant les normies monter la garde devant la porte, Mephiston et l’Epistolier Stolas pénètrent dans le saint des saints, où se trouvent des bouquins démoniaques de fort belle taille, une carte du système de Pallevon, ainsi qu’une statue de Mephiston zieutant un des grimoires de façon insistante. Le signal est clair, et bien que le Seigneur de la Mort ait la discipline nécessaire pour s’arracher de la contemplation de l’ouvrage maudit, une fois les premières pages parcourues, Stolas se fait corrompre comme un bleu entre le sommaire et la préface. Il brûlera donc avec le reste du Librarium, purifié de manière définitive par un Mephiston qui ne transige pas avec ses principes. L’Eclipse dûment désinfecté de sa peste warpique, et la situation revenue sous contrôle sur Supplicium Tertius, Mephiston est libre de poursuivre sa quête de réponses en direction de Pallevon, où l’attend un autre revenant du Chapitre…Fin spoiler

AVIS :

Avant que Darius Hinks ne reprenne en main la carrière littéraire de Mephiston, c’était David Annandale qui avait la charge du Seigneur de la Mort, auquel il a consacré cette nouvelle et le roman ‘Lord of Death’. Ces deux histoires s’inscrivent dans le même arc narratif, ‘Eclipse of Hope’ faisant office de prologue à ‘Lord of Death’, et accomplissant bien cette fonction, donnant envie au lecteur de connaître la suite des aventures du grand blond avec une humeur noire. Je dois également reconnaître avoir été agréablement surpris par le style déployé par Annandale dans sa narration, d’un niveau nettement supérieur à sa propre moyenne. Cela contribue grandement au caractère digeste d’une nouvelle qui ne serait sans cela rien d’autre qu’une énième Space Marinade. Une des soumissions les plus abouties d’Annandale hors de son créneau horrifique de prédilection, et donc à lire de préférence aux (nombreux) autres textes moins convaincants signés par cet auteur.

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Redeemer – G. Haley [40K] :

RedeemerICÔNE : ASTORATH, HAUT CHAPELAIN DES BLOOD ANGELS

INTRIGUE :

On a tous déjà été confronté à ce moment, plus ou moins long, pendant lequel une chanson – souvent débile, comme La Danse des Canards, T’Es Si Mignon ou Despacito – nous restait collée dans la tête malgré tous nos efforts pour forcer notre cerveau de passer à autre chose. Eh bien cette expérience abominable, c’est le quotidien d’Astorath l’Inflexible, Grand Chapelain des Blood Angels et Rédempteur des Égarés, dont il entend les fredaines pathétiques lui rabâcher les oreilles dès que l’un d’entre eux sombre totalement dans la Rage Noire. Il est alors de son devoir de rappliquer dare dare pour abréger les souffrances (les leurs et les siennes) à grands coups de hache, ce qui le conduit à passer sa vie dans l’espace, voyageant de zones de guerres en théâtres d’opérations dans son véhicule de fonction (l’Eminence Sanguis), accompagné de quelques fidèles acolytes. Aujourd’hui, direction Asque, d’où proviennent les échos lointains de Djadja joués à la flûte à bec par un Snotling asthmatique, ce qui est passablement désagréable, vous en conviendrez.

Laissant le fidèle Sergent Dolomen garder le vaisseau, comme il en a l’habitude1, Astorath part à la rencontre de l’escouade de Blood Angels affectés par le mâââl, escorté par le Prêtre Sanguinien Artemos et guidé par un trio de locaux, fortement impressionnés par la panoplie macabre de leur visiteur (qui fait moins le malin lorsque les ailes factices de son jet pack se prennent dans les branches sur le chemin, ceci dit). En chemin, les bouseux apprennent au Grand Chapelain que leur monde est victime depuis plusieurs décennies des attaques d’une race de Xenos peu sympathiques, baptisés les Silencieux par les pragmatiques Asquiens, et qui ont forcé ces derniers à abandonner leur cité ensoleillée pour se réfugier dans les forêts de champignons insalubres et humides recouvrant la majeure partie de la planète. Leurs appels à l’aide étant resté lettre morte pendant des décennies, l’ouverture de la Cicatrix n’aidant certainement pas, il leur a fallu prendre leur mal en patience et apprendre à vivre comme Yoda sur Dagobah, la Force en moins, le temps qu’une demi-escouade de Blood Angels soit dépêchée sur place pour botter le train aux Silencieux. Tout se passait très bien jusqu’à ce qu’un des Astartes ne pique une colère noire pour un motif indéterminé, et fausse compagnie à ses camarades pour aller baguenauder dans les sous-bois d’Asque.

Cette version est confirmée par le trio de Primaris qu’Astorath et Artemos rencontrent à leur retour de patrouille, et encore traumatisés par le pétage de plomb de leur mentor, le Sergent Erasmus, après que leurs hôtes leur aient apportés un steak d’ordes bien cuit au lieu de saignant. Détail important, Erasmus était un Space Marine de la vieille école, et pas un Primaris, dont la résistance à la Soif Rouge et à la Rage Noire relève encore de la théorie et des boniments de Belisarius Cawl. Ayant recueilli assez d’indices pour procéder à la traque et à la rédemption d’Erasmus, dont le séjour sur Asque sera le dernier échange culturel, Astorath se prépare à apporter la paix à la brebis énergétique égarée, siphonant un peu de rouge à la veine d’Artemos pour se donner du cœur à l’ouvrage, mais refusant catégoriquement que son acolyte vienne lui porter main forte dans sa mission sacrée. La confidentialité de la relation patient-thérapeute/confesseur/bourreau doit être respectée, que diable.

Après une petite partie de beat ‘em all sur le chemin de la ville abandonnée par les Asquais (les Silencieux trouvant malin de s’attaquer à Astorath à son passage, malgré leur corps de lâche et leur équipement rudimentaire), notre héros parvient enfin à localiser Erasmus, complètement enragé et donc persuadé de purger le Vengeful Spirit en lieu et place de son Primarque, alors qu’il massacre en fait la colonie de Silencieux ayant investi les habitations des colons après le départ de ces derniers. L’arrivée du Grand Chapelain fait définitivement pencher la balance en faveur de l’Imperium, et après que les derniers mobs aient été farmés, il est temps pour l’ultime séance de psychiatrie du Sergent Erasmus, administrée de main et de hache énergétique de maître par Astorath. Guidé par son amour fraternel et sa miséricorde absolue, le Rédempteur rédemptionne avec retenue, se contentant de saigner son patient pour saper sa force plutôt que de le décapiter sans sommation. Ah, il lui coupe une jambe aussi, mais seulement pour qu’Erasmus se tienne enfin tranquille, et qu’il puisse lui adresser une imposition des mains salutaire, permettant à l’égaré d’enfin refaire surface, et de mourir dans la lumière de Sanguinius et de l’Empereur. C’est presque une happy end, en fait. Ce problème résolu, et les glandes d’Erasmus récoltées, il est temps pour Astorath et Artemos de repartir sur les routes, la version de Bella exécutée au mirliton et à la scie musicale venant lui trotter dans la tête lui indiquant qu’un autre frère a besoin de ses bons offices…

1 : La planque ultime pour un Blood Angels tout de même. M’est avis que Dolomen a dû faire une remarque désobligeante lors du dernier vernissage de Dante pour avoir été affecté à une mission aussi chiante.

AVIS :

Guy Haley s’empare du personnage d’Astorath l’Inflexible (possiblement le Blood Angels doté du background au plus fort potentiel narratif) et nous sert une petite mise en situation dont il a le secret, soulignant à la fois les caractéristiques saillantes de son héros et levant le voile sur des aspects de sa personnalité et de son passé non abordés par les quelques paragraphes qui lui sont dédiés dans le Codex Blood Angels. Sur cette base éprouvée, Haley trouve également le moyen de faire le lien avec le lore avec un grand L (ce qui est approprié pour un personnage avec des grande ailes), en mentionnant l’ouverture de la Cicatrix et la dévastation de Baal, ainsi qu’en abordant la question fondamentale de la vulnérabilité potentielle des Primaris Blood Angels aux tares du matériel génétique de leur Primarque. Le résultat est très solide, à défaut d’être particulièrement original, et on se prend à espérer que la BL commissionne Haley pour d’autres travaux mettant l’Inspection Générale faite (sur)homme en vedette.

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Extinction – A. Dembski-Bowden [40K] :

ExtinctionICÔNE : EZEKYLE ABADDON, MAÎTRE DE GUERRE DE LA BLACK LEGION

INTRIGUE :

On ne le sait que trop, les lendemains de cuite sont difficiles. Quand la tournée des bars en question a duré sept ans, impliqué des centaines de milliards de participants sur des milliers de planètes, dont quelques dizaines ont brûlé au passage, et s’est terminée par un projet X débridé dans la maison familiale avec le capitaine de soirée qui s’étouffe dans son vomi sur la banquette arrière de sa Kangoo défoncée, il est somme toute logique d’avoir, très, mais alors trèèèèèèèèèèèèèèès mal aux cheveux pendant quelques temps. Surtout quand on s’appelle Ezekyle Abaddon, et qu’on a un goût immodéré pour les manbuns en palmier1. Nous reviendrons sur le cas de ce mauvais sujet un peu plus tard.

Extinction place donc son propos dans la période trouble qui succède à l’Hérésie d’Horus, qui, si elle n’a pas été une partie de plaisir pour l’Imperium, n’a pas été de tout repos non plus pour les Astartes rebelles, réfugiés dans l’Œil de la Terreur et en proie à de bien compréhensibles dissensions internes en l’absence d’un grand chauve costaud pour claquer le beignet aux éléments perturbateurs. Mais, comme l’éructe Borge Grassens, Prince Démon poète à la moustache remplie de Nurglings : « Or sous les cieux sous vergogne//C’est un usage bien établi//Dès qu’il s’agit de rosser des Sons of Horus//Tout le monde se réconcilie2 ». Tel le chouchou de la maîtresse ayant rappelé à cette dernière qu’elle avait oublié de ramasser les expressions écrites de la classe deux minutes avant la sonnerie, les guerriers de feu le Maître de Guerre se retrouvent en butte à l’hostilité non dissimulée de leurs petits camarades de jeu, qui leur reprochent, non sans raison, d’être responsables de la galère dans laquelle ils se trouvent désormais.

Nous faisons donc la rencontre, pour beaucoup d’entre eux juste avant une capture infamante, un décès prématuré, ou pire, de quelques fistons d’importance, alors qu’ils se retrouvent entraînés dans des explications de texte sans fin avec leurs cousins issus de germain. Le Sergent Kallen Garax peine à trouver les mots justes (pas facile quand on parle Chtonien et le gonze d’en face Nostraman) pour apaiser un gang de bikers Night Lords. Le Techmarine Sovan Khayral insiste impuissant à l’incendie de son véhicule de fonction des mains huileuses d’une bande de Death Guard désœuvrés. Le Capitaine Nebuchar Desh finit par rendre l’âme après une séance un peu trop soutenue avec son/sa Dominatrice Emperor’s Children, qui devra se trouver d’autres chats à fouetter. L’humble frère Zarien Sharak, coursé par une meute de World Eaters souhaitant lui voler son goûter (quand on n’a pas de monde à manger, il faut bien compenser), signe un bail de sous-location mal avisé avec un Démon mal élevé qui le met fissa à la porte de son âme à son corps défendant (ou le contraire). Erekan Juric, Capitaine Reaver, se fait incendier par la bande à Kahotep sur le chemin de la maison. Même la fameuse Kangoo d’Horus traîne son mal-être depuis la disparition du patron, remisée qu’elle a été dans un quelconque parking sous-terrain de l’Œil par ce galopin d’Abaddon.

C’est par un aparté dévolu à ce diable d’Ezekyle que se termine Extinction. Ayant tout bonnement pris un congé proprement sabbatique pour se ressourcer et faire le point sur sa vie, et voyageant de planète en planète pour visiter les attractions touristiques qu’elles ont à proposer (une pyramide ici, un mausolée là, un temple plus loin… c’est une sortie culturelle), Abby regarde de loin ses anciens frères se faire mettre la tête dans la cuvette des toilettes chimiques de leurs Rhinos, guère intéressé par les déboires de sa Légion. Quelque chose me dit toutefois que cela ne durera pas éternellement…

1 : Ca irrite le cuir chevelu comme pas possible et c’est très mauvais pour le bulbe.
2 : La rime est pauvre mais l’argent ne fait pas le bonheur.

AVIS :

Prologue à sa saga consacrée aux origines de la Black Legion, cette Extinction permet à Dembski-Bowden d’afficher sa maîtrise de la nouvelle d’ambiance. Il ne se passe en effet pas grand-chose dans ce court format, la succession de vignettes illustrant les déboires de la marmaille horusienne permettant seulement de prendre la mesure de la mauvaise passe que cette dernière traverse, orpheline de Primarque, traumatisée par sa défaite sur Terra, n’ayant plus d’objectif autre que la survie et ciblée à outrance par ses partenaires de crime. Pour autant, Extinction reste l’une des lectures les plus agréables de Croisade & Autres Récits, la patte d’ADB rendant chaque passage intéressant, chaque personnage attachant, et préparant parfaitement le terrain pour le début de la geste Abaddonienne, que le lecteur aura envie d’approfondir après en avoir terminé avec cet amuse-gueule, je gage. Il est fort l’animal, il est fort.

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Prodigal – J. Reynolds [40K] :

ProdigalICÔNE : FABIUS BILE, APOTHICAIRE DES EMPEROR’S CHILDREN

INTRIGUE :

Alors qu’il couve, quasi littéralement, sa nouvelle génération d’enfants-cobayes, spécimens de la nouvelle humanité qu’il appelle de ses vœux et crée de ses recherches, Fabius Bile reçoit la visite d’une présence démoniaque furtive et rigolarde, envoyée par l’un de ses nombreux ennemis pour mettre fin à ses expérimentations. Pas de chance pour le rejeton du Warp, Fab en a vu d’autres, et ordonne posément à l’esprit de la machine du Vesalius, son vaisseau amiral, de sceller son laboratorium pour lui permettre de localiser l’agent contaminateur importun et lui passer l’animus à l’eau de javel, comme la procédure le demande. Si la baston qui s’en suit ne fait de victimes que parmi la collection d’occulobes et de glandes de Betcher gardés par l’Apothicaire fou, les choses manquent de mal tourner pour ce dernier après que le premier démon assassin soit rejoint par un second. L’arrivée opportune de Melusine, la « fille » aînée de Bile, permet toutefois de mettre fin aux débats avant que le laboratoire ne soit complètement ravagé. Si Mel a pu intervenir en ce moment décisif, c’est parce qu’elle est elle-même plus qu’à moitié démoniaque, une orientation qui déçoit beaucoup son géniteur, mais qu’il accepte, en père modèle moderne et philosophe. S’en suit un dialogue entre les deux générations de Bile, qui génère plus de questions qu’il n’apporte de réponses, à commencer par les motivations ayant poussé Melusine à venir à la rescousse de son vieux, et à lui transmettre des avertissements à la demande de… Fantomas ? Jack l’Eventreur ? the masked singer ? Le suspens restera entier, en partie à cause de la folie manifeste de Fabienne (son vrai nom), qui a du mal à se situer entre le passé, le présent et le futur, et le choix de Fabius de ne pas poser la question qui pourtant le travaille autant que le lecteur. L’entrevue se termine sur le départ précipité de Melusine, qui « n’aime pas parler aux fantômes » (sic), et laisse donc son vieux pôpa méditer sur l’ingratitude de la jeunesse et sur l’inexorable passage des années, ou, dans son cas, des millénaires. Bile reste toutefois convaincu de l’intérêt et du caractère fondamental de ses recherches, qu’il continuera à mener en dépit de l’opposition d’une galaxie obscurantiste. C’est cela que d’être en avance sur son temps…

AVIS :

‘Prodigal’ apprend beaucoup de choses sur la vie et l’œuvre de Fabius Bile (et à travers lui sur les Emperor’s Children et les Légions renégates), ce qui en fait un bon point de départ pour quiconque souhaite se plonger dans le corpus que la Black Library a dédié à son charismatique et échevelé savant fou, écrit en bonne partie par le même Josh Reynolds. Je ne suis en revanche pas certain que les lecteurs familiers du personnage et de sa saga y trouvent de grandes sources de satisfaction, le retour de Melusine (la fille prodigue annoncée par le titre) ne faisant finalement pas progresser les relations entre les deux personnages d’un iota. Une bonne petite nouvelle d’ambiance/d’acclimatation donc, mais en rien essentielle à la bonne compréhension des chroniques bilieuses et billesques de Reynolds.

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Veil of Darkness – N. Kyme [40K] :

Veil of DarknessICÔNE : CATO SICARIUS, CAPITAINE DE LA SECONDE COMPAGNIE DES ULTRAMARINES

INTRIGUE :

Vous souvenez vous de Damnos et de sa chute, amis lecteurs ? Si l’épisode fut malheureux pour l’Imperium, il eut au moins l’avantage de mettre l’insupportable Cato Sicarius, Capitaine de la Seconde Compagnie des Ultramarines, en face de sa nullité crasse et d’un adversaire qui lui apprit bellement la vie, le Seigneur Necron « Immortel » (Undying), qui lui planta sa faux dans le bidon au terme d’un duel épique (selon Sicarius)/de cinq secondes (selon les observateurs présents). Un souvenir à chérir en ce millénaire hostile…

Notre histoire commence quelques temps après cet affrontement fatidique, Cato revenant à lui dans une cuve de bacta et, fidèle à lui-même, commençant le premier jour du reste de sa vie1 en rabrouant le fidèle Apothicaire Venatio, qui a pourtant passé les derniers jours à le remettre en forme. Apprenant la défaite des Ultramarines et la perte du vénérable Agrippen, Sicarius pique sa crise et fracasse d’un coup de poing la vitre de sa cuve amniotique pour se passer les nerfs (et il aurait fait pire s’il avait eu son épée). Et dire que les World Eaters sont accusés d’être psychopathes. Avant qu’il n’ait pu détruire de fond en comble l’Apothicarion, l’arrivée soudaine de son rival devant l’éternel, Severus Agemman, contraint notre turbulent zéro à retrouver son calme. Le Capitaine de la Première Compagnie est venu informer son collègue et inférieur qu’il est convoqué devant Marneus Calgar dans six heures pour expliquer pourquoi et comment il a cru bon de déféquer dans la super glu lors de la campagne de Damnos. Sicarius, qui n’est pas passé en conseil de discipline depuis la fin de ses études, prend évidemment très mal la nouvelle, et fidèle à la légendaire équanimité de Guilliman, balance quelques réflexions désagréables à Agemman pour extérioriser sa frustration, manquant de peu de se ramasser une baffe énergétique pour sa peine.

Avec si peu de temps pour préparer son dossier, Sicarius n’a bien sûr rien de plus pressé que d’aller récupérer ses armes et armures à l’Armourium, où il a la désagréable surprise de constater que des bouts de Guerriers Necrons décomposés ont été stockés pour étude par les Techmarines du Chapitre. Flairant une combine de la part de l’ennemi, maître incontesté du leave no trace2, Sicarius ne peut cependant convaincre Vantor, le techos en faction, de mettre à la benne ces déchets dangereux. Il expérimente à cette occasion une vision plutôt inquiétante de sa Némésis métallique, le laissant littéralement sur les genoux (pendant que Vantor, qui n’a absolument pas trouvé anormal que son interlocuteur s’effondre au sol en suffoquant comme un poisson hors de l’eau, est retourné vaquer à ses occupations). De nouveau maître de lui-même, Sicarius repart donc rédiger son rapp- taper le carton en salle d’entraînement avec le Sergent Daceus, qui mérite une statue au sein du Temple de la Correction pour supporter un supérieur aussi imbuvable que lui. On apprend à l’occasion du duel amical entre les deux Ultramarines qu’en plus d’être prétentieux au possible, Sicarius est également mauvais perdant et vicieusement mesquin, puisqu’il enfreint volontairement les règles du combat pour pouvoir scorer une touche contre Daceus, qui était sur le point de le vaincre. Une nouvelle vision ténébreuse s’abat alors sur le Capitaine, qui manque de tuer le Sergent en pensant revivre son duel contre le Roi Necron (mais ne s’excuse pas le moins du monde lorsque l’illusion se dissipe, évidemment). Tout à sa paranoïa, Cat’ éventre un pauvre Serviteur de combat qui ne lui avait rien fait, juste pour être sûr que le soulèvement des machines n’était pas d’actualité, avant de se rappeler qu’il ne lui reste que 10 minutes avant de comparaître devant Calgar, et qu’il n’a rien préparé pour sa défense. Accompagné par le bien brave Daceus, Sicarius se présente à son audience, certain que sa belle gueule et ses états de service lui éviteront le blâme qu’il mérite pourtant de toute évidence…

Début spoiler 1La correctionnelle lui est  évitée par la tentative d’assassinat dont est victime le pauvre Marneus, décidément dans tous les mauvais coups, de la part d’un Deathmark Necron sorti de nulle part, comme cela est son droit le plus strict. Ce n’est que le prélude à une invasion en règle de la Forteresse de Hera par les fourbes Xenos, qui profitent du goût des Ultramarines pour les souvenirs de campagne pour pénétrer en masse dans l’Armourium, faisant sa fête à Vantor au passage, avant de se diriger vers l’Apothecarion pour en terminer avec le Grand Schtroumpf. Isolés de leurs frères de bataille par les artifices Necrons, Sicarius, Daceus, Agemman et les gardes d’honneur de Calgar tentent de renverser la situation en déphasant le Vizir porteur du Voile de Ténèbres, ce qu’ils parviennent à faire, mais cela n’empêche pas le Roi Necron de faire son entrée sur le champ de bataille, et de porter le coup de grâce au Maître de Chapitre, après que tous ses défenseurs aient été passés au fil du khopesh. À moins que…

Début spoiler 2…À moins qu’il ne s’agisse que d’un rêve, évidemment. Ou plutôt, d’une vision du futur. Retour donc à la cuve de biactol du début de la nouvelle, d’où Sicarius réémerge, sa légendaire mauvaise humeur remplacée par un sentiment de déjà vu irrépressible. Et en effet, il a connaissance de tout ce que ses interlocuteurs cherchent à lui dire, ainsi que du stockage des pièces détachés Necron dans l’arrière boutique de l’Armourium, qu’il se dépêche d’aller valoriser énergétiquement (pour une fois, c’est approprié) malgré les protestations de Vantor. Ceci fait, il est libre d’aller répondre de ses actes devant Marneus Calgar sans craindre pour la vie de ce dernier, qui souhaitait simplement le voir pour lui annoncer qu’il a lui aussi eu ce rêve étrange et pénétrant, dans lequel le Roi Necron se paie sa tête. Ce crime de lèse majesté ne pouvant rester impuni, Calgar autorise son Capitaine à jouer la belle, lorsque l’occasion se présentera. Comme on disait à l’époque, Delenda Necrono.Fin spoiler

1 : C’était la première fois qu’un adversaire le blessait gravement lors d’un duel. Lui, Cato Sicarius, Maître du Guet, Chevalier Champion de Macragge, GrAnD dUc De TaLaSsAr et HaUt SuZeRaIn D’uLtRaMaR !!! Il se serait plaint au directeur, s’il avait pu.
2 : On peut reprocher beaucoup de choses aux Necrons, mais au moins, ils ne polluent pas.

AVIS :

Je suis face à un paradoxe au moment de donner mon avis sur ce ‘Veil of Darkness’. Je ne saurai dire en effet si le dégoût profond que m’inspire Cato Sicarius, aussi connu sous le nom de « Everything Wrong with the Ultramarines », est à considérer comme une réussite ou comme un échec de la part de Nick Kyme. Il ne fait aucun doute que ce dernier a volontairement accentué le trait pour donner à son protagoniste une personnalité marquée, pour ne pas dire autre chose, comme il l’avait déjà fait avec le personnage de Tsu’Gan dans sa série sur les Salamanders. Cependant, à faire de Sicarius une tête à claque absolue, il prend le risque de dégoûter le lecteur de ce héros infect, ce qui n’est pas conseillé lorsque l’on souhaite vendre des bouquins. En tout cas, il ne faudra pas compter sur moi pour suivre avec intérêt les péripéties de la Mimi Geignarde de l’Ultima Segmentum, qui pâtit sans doute du grand nombre d’icônes du Chapitre ayant également eu les honneurs de la BL (Ventris, Calgar, Chronus, Tellion, Kastor & Polixis… et maintenant Guilliman, sans compter la ménagerie hérétique de la Légion), et dont il lui faut bien se démarquer. La stratégie du sale gosse de Kyme, pour efficace qu’elle soit, est donc à double tranchant.

Si on fait abstraction du caractère difficile de son héros, ‘Veil of Darkness’ est une honnête nouvelle d’action, bénéficiant d’un twist final convenable, à défaut d’être particulièrement efficace (évidemment que Calgar et Agemman ne peuvent pas finir leur carrière au détour d’un paragraphe d’une obscure nouvelle consacrée à Sicarius), et présentant de façon convenable le passif et les motivations de son héros. L’un dans l’autre, c’est donc une bonne introduction aux aventures de Cato Sicarius, si tant est que vous ayez l’envie de les suivre, ce dont je vous laisse décider en votre âme et conscience…

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Fireheart – G. Thorpe [40K] :

FireheartICÔNE : YVRAINE, ÉMISSAIRE D’YNNEAD

INTRIGUE :

Envoyée par Yvraine comme émissaire auprès des Eldars du Saim Hann afin d’obtenir de l’aide dans la quête des mondes de Morai-Heg, la Céraste Druthkala Shadowspite (Drudru pour les intimes) a bien du mal à convaincre ses hôtes de prêter une oreille pointue attentive à ses doléances. Car étonnamment, les Zoneilles sont égoïstes et mesquins. Qui l’eut pensé, vraiment ? Alors que les Clans réunis en assemblés dans le bois de Vincennes du Vaisseau Monde n’en finissent plus de se crêper le chignon, et que Druthkala tue le temps, faute de mieux, en imaginant les sévices qu’elle pourrait infliger à ses lointains cousins, Nuadhu du Clan Fireheart fait son apparition, en retard comme à son habitude. Bien que seulement héritier putatif du Clan, l’état végétatif de son père lui donne le pouvoir de décider à sa place, et un seul regard sur les courbes généreuses et l’armure minimaliste de la diplomate Ynnari convainquent notre dalleux de héros qu’il doit lui venir en aide pour s’en faire bien voir, et plus si affinités. Le choix d’Yvraine d’envoyer une bombasse plutôt qu’un érudit fait tout d’un coup plus de sens…

La mission de Shadowspite et de ses nouveaux amis est assez simple : mener une reconnaissance sur le monde vierge d’Agarimethea, où un vaisseau Exodite patiente en double file orbitale depuis quelques semaines, ce qui indique que quelque chose ne tourne pas rond à la surface. Après un petit go fast dans la Toile, dans la plus pure tradition des Wild Riders, les bikers au serpent arrive sur place, où ils ne mettent pas longtemps à repérer un complexe Necron défigurant le paysage champêtre, comme un magasin Bricodépôt construit au milieu d’un parc naturel. La présence de l’ennemi primordial des Eldars sur une planète qui devrait pourtant être exempte de toute souillure provoque des réactions mitigées dans la compagnie. Ceux qui réfléchissent avec le cerveau (Caelledhin, la demi-sœur du héros) sont pour une retraite prudente, ceux qui réfléchissent avec un autre organe (Nuadhu, qui n’en finit plus de baver sur les jambes de Shadowspite) insistent pour aller jeter un œil sur site, afin de peut-être trouver une arme qui pourrait aider les Eldars dans leur lutte contre les Necrontyr. Nuadhu étant techniquement aux commandes (même si cet incapable a laissé le pilotage de sa Vyper à son chauffeur de fonction), l’expédition fait fi de toute prudence et va se garer devant la pyramide principale. Bien évidemment, le calme qui baigne les lieux n’est qu’apparent, et lorsque Nuadhu pose la main sur la surface inerte du monument aux des morts, une alarme se déclenche et le ciel se remplit bientôt de tirs de désintégrateurs et d’aéronefs Necrons.

La fuite éperdue qui s’en suit voit la disparition tragique d’un certain nombre de cousins Fireheart, victimes des tirs ennemis, du relief ou du troupeau de dinosaures local (obligatoire sur un monde vierge). J’imagine qu’il en reste encore plein de là où ils viennent, et on ne pleurera donc pas trop sur leur sort. Les Eldars, bien diminués par la tournure qu’ont pris les événements, et la stupidité crasse de leur chef, jurent toutefois de revenir pour rendre aux Necrons la monnaie de leur pièce, ce qui sera fait dans ‘Wild Rider’/’Le Cavalier Rebelle’, le deuxième bouquin consacré aux suivants d’Ynnead par Gav Thorpe.

AVIS :

Je dois avouer tout de suite que je n’ai pour le moment pas réussi à m’intéresser aux Ynnari, ce qui est un handicap pour qui veut effectuer une chronique impartiale d’une nouvelle consacrée à cette nouvelle faction de 40K. Toutefois, même si les cultistes d’Ynnead avaient bénéficié de ma légendaire bienveillante neutralité, je pense que mon jugement de ce ‘Fireheart’ serait resté sévère. Il n’y en a en effet pas grand-chose à tirer de cette histoire, mis à part quelques fragments de fluff sur l’organisation et la culture de Saim Hann, et le nom du canasson de Khaine, ce qui n’est pas lourd. Pour le reste, on assiste à un festival de gaffes, puis de baffes, provoqué par l’incompétence notoire de Nuadhu, dont la concupiscence irréfléchie mettra Saim Hann en danger, et, surtout, donnera à peu de frais à Thorpe le pitch d’un de ses bouquins. C’est à une nouvelle purement et crânement utilitaire que nous avons affaire ici, qu’il convient de lire à l’extrême limite en prologue de ‘Wild Rider’ et c’est bien tout.

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Blood Guilt – C. Wraight [40K] :

ICÔNE : NAVRADARAN, EPHOROI DE L’ADEPTUS CUSTODES

INTRIGUE :

Notre nouvelle débute avec une petite mise en contexte de la fonction de Custodiens, qui a connu bien des évolutions depuis les jours dorés de la Grande Croisade. On apprend ainsi que les Über Super Dupper de l’Empereur vivent dans une maison sans balcon sans toiture, où il n’y a même pas d’abeilles sur les pots de confiture1, même pas d’oiseaux, même pas la nature, et c’est même pas une maison. Ce qui est logique, puisque c’est la tour de l’Hégémon. Tour avalée par l’urbanisation galopante qu’a connu le Monde Trône au cours des derniers dix millénaires, mais tour tout de même. Parmi les 10.000 hauts fonctionnaires que compte cette noble institution, une majorité est affectée à la recherche fondamentale ou à la garde du Trône d’Or, et seuls quelques rares individus, les Ephoroi, ont l’occasion de se dégourdir les spalières en traquant les suspects désignés par leurs collègues du bureau des légendes. C’est à l’une de ces opérations très spéciales que nous convie Chris Wraight, aux côtés de Navradaran, enquêteur très spécial au service exclusif de sa Majesté.

C’est toutefois sur la proie de Nanar, le Seigneur Sleox, que la caméra se braque, alors que le noble se hâte vers le garage de son manoir en compagnie de son assistante Ysica. On devine sans mal que Sleox a des choses à se reprocher, et souhaite de toute urgence quitter Terra pour des cieux plus cléments plutôt que de devoir répondre de ses actes. Les éternels embouteillages du périphérique terran manquent toutefois de permettre au notable en fuite de se faire pincer avant d’arriver jusqu’au spatioport, un aéronef à l’allure menaçante ayant pris en chasse la limousine de Sleox sur le chemin du terminal. Au prix d’un sprint échevelé dans les coursives du bâtiment jusqu’à sa navette privée, le grand ponte et la petite main parviennent toutefois à rejoindre leur objectif avant d’être appréhendé par les forces de l’ordre. Une fois le vaisseau décollé et en route vers l’orbite, Sleox commence à se détendre, et se dirige vers le minibar pour s’en jeter un petit bien mérité…

Début spoiler…Mais découvre avec stupéfaction qu’un colosse en auramite a déjà fait main basse sur ses réserves, et sirote un jus de tomate (pas d’alcool en service) accoudé au comptoir. Un bolt non explosif (donc, une balle, j’imagine) dans le caisson plus tard, Sleox passe de vie à trépas dans l’incompréhension la plus totale. Et pour cause, la vraie cible de Navradaran n’était pas ce pantouflard de Seigneur, mais bien son assistante personnelle, qui cache sous une apparence banale un pouvoir de nuisance considérable, aiguisé par des millénaires de planque dans la haute société terrane. Le temps que la navette ne vienne se poser dans le QG des Arbites le plus proche, le Custodien et l’intrigante chaotique discutent de tout et de rien, le premier cherchant à percer à jour les motivations de sa captive, et la seconde à endormir sa vigilance pour pouvoir se suicider avant d’être soumise à l’interrogatoire, ce qu’elle ne parviendra pas à faire, malheureusement pour elle. On apprendra tout de même qu’elle considère que les Custodiens ne sont pas prêts du tout à s’opposer à la prochaine attaque d’Abaddon le Fléau, toujours partant pour aller pousser Pépé dans les orties.

La nouvelle se termine avec le compte rendu de Navradaran à Valoris, ce qui nous vaut un nouvel échange de graves platitudes sur l’état de l’Imperium et le devoir des Custodiens, ainsi qu’un petit aperçu de ce que le futur réserve au Sombre Imperium : un retour des filles de l’Empereur, qui devra être favorisé et encouragé par les 10.000 dans la mesure de leurs capacités, qui ne sont tout de même pas minables.Fin spoiler

1 : Mais qui est toujours éclairée avec des bougies en cire d’abeille, ce qui est un luxe indécent au 41ème millénaire.

AVIS :

Comme beaucoup de ses camarades de jeu, Chris Wraight écrit des nouvelles de liaison entre les romans de ses séries de long cours, et ‘Blood Guilt’ se place dans cette catégorie de publications charnières (‘The Emperor’s Legion’ et ‘The Regent’s Shadow’). Comme peu de ses camarades de jeu, Chris Wraight, parvient souvent (mais pas toujours, cf ‘Argent’) à donner à ce type de courts formats un intérêt pour le lecteur opportuniste. Ici, on a le droit à un petit cours d’histoire sur la Tour de l’Hegemon au fin des millénaires, puis à une révélation savamment mise en scène à propos de l’identité de la cible de Navradaran, et pour finir, à quelques considérations stratégico-politiques (la spécialité de Wraight) entre deux personnages très au fait de la situation de l’Imperium, ce qui donne trois bonnes raisons de s’atteler à la lecture de cette petite histoire, et donne plutôt envie d’en apprendre en plus sur la vie trépidante de Nanar et Valoche, gardiens émérites de Papy Mougeot.

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Argent – C. Wraight [40K] :

ArgentICÔNE : LUCE SPINOZA, INTERROGATRICE DE L’ORDO HERETICUS

INTRIGUE :

Je m’appelle Luce Spinoza, je suis Interrogatrice au service de l’Inquisiteur Joffen Tur, et ceci est mon histoire. Au moment où nous faisons connaissance, je gésis telle une loque sur le sommier de ma cellule, les deux bras dans le plâtre et la tête dans le Culexus. J’entends le pas lourd de mon tout aussi lourd (vous allez rapidement comprendre pourquoi) patron approcher dans le couloir, et je n’ai que le temps de me remémorer les événements qui m’ont conduit à l’état de grabataire que le voilà à mon chevet. Comme vous, il cherche à savoir comment diable Horus j’ai réussi à me mettre dans un tel état. Pour cela, un petit flashback s’impose. Je m’appelle Luce Spinoza, et ces dernières heures n’ont pas été de tout repos.

Tout avait pourtant commencé de manière très classique. Nous étions arrivés en orbite du monde ruche de Forfoda pour enquêter sur les raisons de la rébellion ayant mené la planète à entrer en sécession ouverte contre le règne éclairé et éclairant de notre bien-aimé Empereur. Tur avait insisté pour prendre son utilitaire de fonction plutôt que sa limousine, soi-disant pour faire passer le message auprès des autres forces impériales que ce théâtre d’opération l’intéressait à peine. Mouarf. Il était tout de même venu, et la seule conséquence pratique de cette démonstration de morgue cryptique fut que les copains et moi dûmes nous serrer sur les sièges arrière de sa Kangoo au lieu de chiller tranquille à côté du minibar, comme à notre habitude.

Lors du briefing de la mission, Tur nous avait fait part de son plan. Afin d’éviter que nos alliés Imperial Fists ne dessoudent les meneurs de la rébellion avant que nous n’ayons pu les cuisiner, il était impératif de leur griller la politesse là où c’était possible, ou de réfréner leurs ardeurs homicidaires lorsqu’ils étaient déjà à pied d’œuvre. Je m’attendais à être affectée à l’équipe du boss, comme c’est habituellement le cas, mais mes quinze minutes de retard au point équipe hebdomadaire du lundi précédent n’avaient de toute évidence été ni oublié, ni pardonné, car Tur m’a au contraire chargé de la supervision d’une opération annexe, en solo avec les Astartes. Ca m’apprendra à aller en boîte le dimanche soir.

Un peu plus tard, je fis connaissance avec la bande de surhommes que j’avais pour mission d’encadrer, afin d’assurer la capture de l’assistante de direction du gouverneur rebelle, une certaine Servia, localisée en haut d’une spire annexe de Forfoda (c’était sans doute son jour de télétravail – chanceuse –). Dès mon arrivée au Strategium, j’ai compris que la partie allait être tendue. Je n’ai en effet pas senti une grande sympathie envers ma personne de la part de mes collègues de bourreau (Jaune, Jaune d’Œuf, Jaune Trois, Jaune Quatre, Jaune Cinq, et un Chapelain, Erastus), confirmant les rumeurs insistantes dépeignant les Imperial Fists comme une bande de suprématistes meninistes. C’était bien ma veine. Heureusement que j’avais passé mon BAFA pour encadrer les pupilles de la Scholam lors des colonies pénales de vacances lorsque j’étais jeune fille au pair sur Dimmamar. J’ai donc remis en place ces butors dans le plus grand des calmes, et leur ai bien fait comprendre que c’était moi la boss. Non mais.

À partir de là, tout s’est enchaîné très rapidement. Notre taxi nous a déposé quelques étages en dessous du F3 de Servia, et mes gros copains souffrés faisant souffrir le service d’ordre des traîtres avec une brutalité consommée. J’aurais peut-être pu les aider à rentrer plus facilement (c’est comme en boîte, il vaut mieux laisser passer les filles devant quand on est une bande de mecs), mais ils étaient déterminés à finir la mission à temps pour ne pas rater le début de Dorna l’Exterminatrice, et je n’avançais visiblement pas assez vite pour eux. J’ai toutefois pu rattraper le groupe maillot jaune une fois l’appartement de Super Nanny investi, car cette dernière, ainsi que les amis qu’elle recevait à notre arrivée, étaient en pleine réunion Tupperware, avec des mutations pas vraiment ragoutantes à la place des contenants en plastique (de toutes façons, il vaut mieux utiliser du verre, c’est bien plus sain). La sain(t)e fureur des Mrs Propres, goût Paic Citron, eut beau s’abattre comme un ouragan de fraîcheur sur le taudis de Servia, l’issue du match restait incertaine, d’autant plus que le brave Erestus était franchement à la peine contre la maîtresse de maison, qui lui avait arraché sa mop énergétique des mains au moment où je suis arrivée sur place (rapide pause make up sur le pallier, pour ne pas rater ma première impression).

N’écoutant que mon courage, j’ai bondi entre le canapé et la table basse afin de récupérer l’instrument de travail de l’immaculé Chapelain. Par le pacemaker de l’Empereur, ce truc pesait le poids d’un grox mort ! Pas étonnant qu’ils soient aussi baraqués chez les Fists, s’ils n’utilisent que de la fonte pour réaliser leurs objets du quotidien. Voyant qu’Erestus était trop occupé à repousser les poisseuses avances de son hôte pour récupérer son hochet, j’ai pris le problème à bras le corps et ai assené à la maraude un horion digne de Jaune Henry en personne. Je me sentais trop fraîche… jusqu’à ce que je réalise que le champ disrupteur du bouzin était poussé au max, et que je n’avais ni l’armure, ni la musculature nécessaires pour encaisser le contrecoup de mon revers à deux mains. Résultat : un vol plané de trois mètres à travers le salon, une paire de radius concassée, une manucure ruinée, mais une victoire assurée pour l’Imperium, la résistance de Servia et Cie ayant été brisée en même temps que la colonne vertébrale de cette dernière. À peine le temps de m’assurer que les nettoyeurs de choc ne réglaient pas son compte à la grosse tache de gras (parce qu’en plus d’être misogynes, les Imperial Fists sont grossophobes : c’est la Ligue du Lol en fait) dans un excès de zèle, ce que j’aurais eu du mal à expliquer au boss, et j’ai sombré dans une salutaire et bien méritée inconscience, avec la satisfaction du devoir accompli. Vous savez tout.

Fondu au noir et lancement du générique, précédé du texte suivant :

L’Interrogratice Luce Spinoza poursuivit sa carrière au sein de l’Ordo Hereticus avec distinction, où elle sert désormais l’Inquisiteur Crawl sur Terra. Pendant sa convalescence, le Chapelain Erestus vint lui rendre visite afin de lui offrir le Crozius Arcanum avec lequel elle avait éreinté la vile Servia. Relique millénaire des Imperial Fists, cette arme nommée Argent ne pouvait être maniée que par des guerriers du Chapitre… jusqu’à ce que Spinoza ne vienne la looter en loucedé apparemment. Raccourci et allégé pour permettre à sa nouvelle porteuse de le manier sans risquer la PLS à chaque attaque, Argent continue à apporter le courroux de l’Empereur à Ses ennemis, et incarne la précieuse et indispensable collaboration entre les serviteurs du Maître de l’Humanité.

De son côté, Erestus fit une demande auprès des services généraux du Chapitre pour obtenir un modèle plus récent de Crozius, ce qui lui avait été précédemment refusé. Mis devant le fait accompli, le DRH du Phalanx n’eut d’autre choix que de s’exécuter. Tout le monde est gagnant.

AVIS :

Les habitués de ces chroniques savent quelle importance j’attache à la présence de twist final dans les nouvelles que je dissèque. Cet élément est en effet à mes yeux indissociable du genre en question, et c’est sur la présence et la pertinence de ce dernier que l’on peut souvent juger de la qualité d’un auteur et d’une soumission. La Black Library n’étant pas reconnue comme une maison d’édition aux standards très élevés (ce qui est logique au vu de sa mission première : fournir du fluff à foison pour faire rentrer des biffetons plutôt que de chercher à décrocher le Man Booker Prize), l’amateur de nouvelles devra souvent se résigner à des conclusions « plates », voire absconses s’il n’a vraiment pas de chance.

Le cas de cet Argent de Chris Wraight est un peu particulier, en ce que le twist final du récit s’avère être proprement méta, cas de figure que je n’avais rencontré jusqu’à présent. Tant la construction du récit à base de flashback que le pedigree respectable de l’auteur en matière de narration laissaient en effet entrevoir un dénouement un tant soit peu spectaculaire à cette nouvelle abordant le thème ma foi assez intéressant de la difficile coopération entre agents de l’Inquisition et guerriers de l’Adeptus Astartes. Le cadre posé, et l’incontournable séquence de Space Marines de films d’action évacuée, on se prépare à recevoir une conclusion édifiante de la part de Wraight, à même d’expliquer tant le titre que la finalité de la nouvelle… pour au final réaliser que nous sommes en présence d’une vulgaire digression n’ayant pour but que d’expliquer au lecteur comment Luce Spinoza, personnage récurrent de la série Vaults of Terra a reçu sa matraque de fonction (que l’on voit en couverture de The Hollow Mountain).

Pour une surprise, c’est une surprise, reconnaissons cela à Mr Wraight, qui nous avait cependant habitués à des soumissions un peu plus ambitieuses en termes de contenu. Drôle d’idée des éditeurs de la Black Library que d’avoir choisi de faire débuter le recueil Lords & Tyrants finalement très quelconque, et qui aurait eu davantage sa place en filler entre les tomes 1 et 2 de Vaults of Terra dans le futur omnibus de la série. Chris Wraight a beau avoir suffisamment de métier pour rendre l’expérience tout à fait supportable, on sort de cette dernière un rien blasé1, ce qui n’augure rien de bon pour les quinze nouvelles suivantes. Si plaie d’argent n’est pas mortelle (la preuve, Servia a survécu !), sa lecture, elle aussi, n’a rien de mortel. Et c’est bien le problème.

1 : Au risque de me répéter, tournons-nous une fois de plus vers l’étalon Abnett pour définir ce qu’une bonne nouvelle filler peut être. La comparaison la plus évidente à mes yeux est à faire avec Missing in Action (comment Eisenhorn a perdu la main, littéralement) et Playing Patience (comment Ravenor a recruté Miss Kys). Ces publications n’ont rien d’essentiel dans les arcs narratifs développé par Abnett pour ses personnages, mais sont suffisamment bien tournés pour pouvoir être lu par le tout venant, et non pas destinés uniquement aux plus dévots serviteurs des saints Ordos.

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The Absolution of Swords – J. French [40K] :

The Absolution of SwordsICÔNE : COVENANT, INQUISITEUR DE L’ORDO MALLEUS

INTRIGUE :

Par une nuit frisquette dont Dominicus Prime a le secret, un trio de figures enrobées se dirige vers la forme imposante de la Haute Chapelle, dont l’accès a pourtant été interdit par le Prefectus Prior Gul. Lorsqu’une patrouille de gardes a la mauvaise idée de leur barrer la route, les marcheurs jettent à bas leurs masques (et chasubles), et forcent leur chemin jusqu’au bâtiment où les attendent – sans le savoir encore – Aristas Gul et son bedaud Lumn, qui se croient avoir été convoqués par leur contact au sein de la 10ème Voie pour un point d’avancement surprise. Nos trois compères sont l’Inquisiteur Covenant, la Sœur Repentia Severita (qui ajoute pieusement le KO des deux gardes qu’elle a molestés dans l’exercice de leurs fonctions à son ardoise de péchés), et le Prieur Josef, et s’ils ont fait le voyage dans ce trou perdu de la galaxie alors qu’un Conclave est sur le point de débuter sur Ero, c’est qu’ils ont de bonnes raisons.

Un peu plus loin, sur la même planète, deux autres agents de l’homme au catogan tentent d’obtenir leurs entrées dans le night club le plus privé de Dominicus Prime : la salle de pause de la 10ème Voie. Ils ont dû pour cela négocier leur passage à travers des kilomètres de couloirs, fumoirs et dortoirs, graissant les pattes des pèlerins de faction tout du long, jusqu’à faire la connaissance d’un gros malabar peu aimable, qui accepte toutefois de les mener à confesse après avoir vu les (faux) tatouages et entendu les (bonnes) réponses de ces visiteurs impromptus. Pour continuer les présentations, il s’agit du blasé Cleander Von Castellan, marchand libre-mais-pas-vraiment-en-fait, et de l’imperturbable Koleg, ex-soldat aussi mortel que morne. Seul petit problème, la brute fait du zèle dans son interrogatoire, et pose une dernière question à laquelle Cleander n’a pas la réponse. Son improvisation ne donnant rien, le rogue trader est contraint d’écourter l’entrevue en dégainant ses fidèles pistolets à aiguilles, ce qui règle le problème de façon élégante (plus qu’un bolter, en tout cas). Ceci fait, les deux agents sont libres de s’engager dans l’escalier qui les mènera jusqu’à leur destination, peut-être finale.

Retour dans la Haute Chapelle, où de foie jaune de Gul en est quitte pour une petite leçon de catéchisme. Car le bon Prior couvre depuis trois ans les agissements démoniaques de la 10ème Voie, depuis qu’il a reçu la visite d’un Inquisiteur radical ayant confirmé ses doutes athéistes sur la non-divinité de l’Empereur. Bon prince, Covenant est venu offrir une chance d’absolution au grox égaré, en échange de quelques tuyaux sur son commanditaire, ce que Gul est plutôt prêt à faire, mais ce que Lumn, moins moinillon muet que démon déguisé, n’est pas très chaud pour autoriser. L’inévitable baston qui fait suite à ce léger différend est remportée de haute lutte par l’Inquisition, mais creuse un gros trou dans la réserve de points de vie (et la couche de graisse protectrice) de Josef, en plus de mettre Severita sur les rotules. Heureusement que le boss et sa grande épée énergétique sont là, tout de même.

Sous terre, c’est à peu près le même topo pour Cleander et Koleg, après qu’ils soient parvenus à une crypte contenant un pédiluve, un Psyker enchaîné, une foule de cultistes enragés, et un démon d’intérieur qui n’a pas été nourri depuis longtemps. Pendant que Koleg maintient les hostiles à distance à grand renfort de gomme cogne et grenades de désencerclement, Cleander, qui a eu une bonne éducation et se charge donc de réfléchir pour deux, réalise que la situation se simplifierait sans doute beaucoup si le Psyker captif était sorti de l’équation, ce qu’il fait d’une petite torsion des cervicales, avec la bénédiction de l’intéressé. Et en effet, cette déconnexion warpique brutale renvoie le démon dans les limbes, ce qui est suffisant pour permettre à Koleg de terminer les hostiles tout seul comme un grand. Leur mission accomplie, et peu emballés à l’idée de faire le ménage, les deux hommes reprennent le chemin de la surface pour prendre un Champomy.

Notre nouvelle se termine avec la fin de l’interrogatoire psychique de Gul, mené d’esprit de maître par Mylasa, la Psyker de fonction de Covenant. Cette dernière offre à son sujet un départ apaisé, après quelques semaines de franches tortures dont elle a effacé la trace de sa mémoire, en reconnaissance du manque de bol colossal de Gul, coupable d’avoir obéi à un Inquisiteur soupçonné d’être tombé du mauvais côté de la barrière. Les souvenirs du Prior seront utiles à Covenant pour exposer la duplicité de son collègue lors du Conclave de guerre qui prendra place dans quelques semaines à Ero, et auquel les deux hommes participeront. Cela n’est cependant plus l’affaire de Gul, qui finit sa vie un verre à la main et sur le bord de mer, de façon purement psychique certes, mais plus agréablement que la grande majorité des citoyens de l’Imperium. C’est l’Inquisition qui régale.

AVIS :

John French signe une très bonne introduction à sa saga inquisitoriale avec ‘The Absolution of Swords’, qui se déroule juste avant les événements de ‘Resurrection’ et permet de se familiariser en douceur avec la galerie de personnages gravitant autour de Covenant, et découvrir la rivalité professionnelle qu’il entretient avec Talicto. Considérant que les duels fratricides au sein de l’Inquisition donnaient les intrigues les plus intéressantes de ce sous-genre de la GW-Fiction, ‘The Absolution…’ a piqué mon intérêt et donné sérieusement envie d’en savoir plus sur l’héritier présomptif d’Eisenhorn1 (qui a aussi eu affaire à un collègue radical en son jeune temps). Pour ne rien gâcher, le récit en lui-même est tout à fait digeste, mélangeant scènes d’action efficaces et atmosphère poisseusement grimdark, comme on est en droit de l’attendre de la part d’une soumission de ce type. Bref, si vous débutez avec Coco, voici la nouvelle qu’il vous faut, loin devant les « introspections » que French a dédié à chacun des serviteurs de Catogan-man (‘The Purity of Ignorance’, ‘The Spirit of Cogs’), qui sont à réserver aux lecteurs déjà familiers du bon Inquisiteur.

1 : Ou plutôt contemporain, car les deux personnages ont été créés pour le jeu Inquisitor, il y a fort longtemps.

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Shadow Knight – A. Dembski-Bowden [40K] :

Shadow KnightICÔNE : TALOS VALCORAN, DIXIEME COMPAGNIE DES NIGHT LORDS

INTRIGUE :

À la recherche de matériel récupérable dans un Space Hulk, Talos et la première griffe de la dixième compagnie (Cyrion, Uzas, Xarl) tombent nez à nez avec une petite force de Blood Angels, bien décidés à reprendre l’épée que Talos a dérobée à un de leurs champions (cette obsession des Blood Angels pour Aurum – le nom de l’épée en question – constitue l’un des running gags de la saga, chaque tentative se soldant par un échec coûteux en vies d’Anges de la mort). Après avoir rapidement expédiés les pauvres scouts en combinaisons spatiales qui constituent la première vague des loyalistes, les quatre affreux se réunissent pour décider de la marche à suivre… et Talos est frappé par une vision, ce qui réduit drastiquement ses capacités de leader, et force ses acolytes à se débrouiller tout seuls. La narration restant malgré tout braquée sur le chef de la griffe, en dépit de son état comateux, la suite de l’accrochage entre Night Lords et Blood Angels est couverte en quelques lignes lapidaires, par le biais du compte rendu fait par Uzas et Xarl à Cyrion après les faits. Pareillement, la mini bataille spatiale entre les vaisseaux respectifs des deux forces est résumée en un paragraphe, ce qui est un peu court jeune homme.

AVIS :

Étrange nouvelle que ce Shadow Knight, commis par un Aaron Dembski-Bowden visiblement peu convaincu par son propos. Pour être honnête, ce texte semble être la réponse du berger à la bergère, cette dernière répondant au nom de Sarah Cawkwell et s’étant à de multiples reprises illustrée par la platitude navrante de ses écrits. Reprenant dans les grandes lignes le schéma narratif de Cause And Effect (à savoir, une sous-péripétie impliquant Gileas Ur’Ten, Space Marine du chapitre des Silver Skulls et héros récurrent de Miss Cawkwell – intérêt : nul – ), ADB livre ainsi un compte-rendu peu inspiré d’un épisode mineur de la vie de Talos, principal protagoniste de la (sinon) très bonne série des Night Lords.

Il va sans dire que la connaissance des personnages principaux de la série Night Lords ainsi que des événements relatés dans cette dernière constitue un prérequis appréciable (mais pas obligatoire) à la lecture de Shadow Knight, dont l’action se déroule peu avant l’attaque de la treizième croisade noire sur le système de Crythe, et constitue de fait une sorte d’avant-propos à la trilogie d’Aaron Dembski-Bowden. Au final, je pense que cette nouvelle aurait davantage eu sa place en introduction du (futur) omnibus Night Lords qu’en conclusion de ce onzième numéro de Hammer & Bolter, même si la lecture de ces quelques pages n’a absolument pas relevé du chemin de croix littéraire, le « pire » d’ADB surpassant allègrement le « meilleur » d’autres auteurs de la BL, il n’en demeure pas moins que Shadow Knight constitue à mes yeux la production la plus faible d’ADB à ce jour.

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Ghosts of Demesnus – J. Reynolds [AoS] :

Ghosts of DemesnusICÔNE : GARDUS STEELSOUL, LORD-CASTELLANT DES HALLOWED KNIGHTS

INTRIGUE :

Profitant d’une permission bien méritée, le Lord-Celestant Gardus Steel Soul, tourmenté par des rêves le ramenant sans cesse à son passé de mortel, s’embarque pour une croisière bucolique jusqu’à la cité où il a vécu sa première existence, dans l’espoir de pouvoir mettre des mots sur sa soudaine mélancolie. Débarqué incognito (enfin, aussi incognito qu’une taille et une stature de Stormcast Eternal peuvent conférer) dans la riante Demesnus, port fluvial d’importance du royaume de Ghyran, Gardus, autrefois Garradan, baguenaude pensivement de ruelles en parcs, à la recherche des bribes d’un passé déjà lointain. À peine a-t-il le temps de rosser un trio de faquins cherchant des noises à une accorte damoiselle en représailles de la lépreuse compagnie qu’elle entretient, et d’échanger quelques platitudes avec son professeur de philosophie de terminale, que les voix qui le hantent l’amènent droit dans les ruines de son ancien hospice. Dans une autre vie, Gardus était en effet ostéopathe guérisseur, et avait dédié sa vie et ses économies à accueillir les nécessiteux des alentours, avec un dévouement ayant fini par attirer l’œil de Sigmar en personne, qui, à la faveur d’une attaque de Skineaters1, drafta le malheureux praticien dans sa team de surhommes. Sûrement qu’il avait besoin d’un massage, aussi. Malgré l’aspect décrépit du lieu, laissé à l’abandon depuis belle lurette, Gardus a la surprise de tomber sur une communauté de squatteurs, pas vraiment présentables et majoritairement scrofuleux, pestiférés, voire pire, mais persuadés que Saint Garradan les a appelés en ce lieu pour qu’hommage lui soit rendu.

Un peu gêné par la situation, qu’il n’a en aucune mesure orchestrée, le probe Gardus accepte l’hospitalité de ses nouveaux amis, dont fait partie la pauvresse qu’il a secourue sur les docks quelques heures plus tôt. Cette dernière, et le Prêtre Guerrier de Sigmar invalide à 134% qui sert d’autorité morale à la croûteuse congrégation, attendent le prochain signe de Gare du Nord avec un zèle admirable, totalement oublieux aux réalités les plus basiques, comme le droit de propriété. D’où la visite de courtoisie que vient leur rendre le possesseur du terrain en question, un maquignon à la retraite du nom de Sargo Wale, bien décidé à lancer les travaux de réhabilitation de l’ancien hospice dans les meilleurs délais, et par la force s’il le faut. Il faut reconnaître qu’il a la loi de son côté, la trêve hivernale ayant expiré et le conseil municipal lui ayant délégué tout pouvoir pour faire triompher l’intérêt commun. Entre l’alignement légaliste bon de Wale et celui chaotique (un comble pour un Stormcast Eternal) bon de Gardus, aucun compromis ne peut être trouvé, mais, confiant dans son bon droit à défaut de l’être dans les chances de sa bande de ruffians face à l’opposition ferme et polie (comme son épée runique de deux mètres) du colosse servant de videur aux éclopés de l’hospice, le diplomate propriétaire laisse une journée entière de réflexion à la partie adverse, et s’en va comme un prince.

Ce délai supplémentaire sera mis à fort bon usage par Gardus, qui n’a pas toute l’éternité pour régler le problème qui le tourmente, tout comme Reynolds n’a pas 300 pages pour conclure son propos. La nuit suivante verra donc un esprit Kaonashi geignard s’extirper du sol pour aller se repaître des humeurs (de manière littérale et figurée) des malades endormis. Surpris par le Gardus de garde et son sixième sens de preux paladin, la mystérieuse entité se fait rapidement la malle, mais reparaît quelques heures plus tard, trop affamée pour prêter beaucoup d’attention au demi-Primarque qui patiente dans sa zone de spawn, des questions plein la bouche et une épée enchantée à la main. Manque de bol pour notre héros, l’amalgame pleurnichard qui lui fait face est plus intéressée par la boustifaille que par la discussion, et l’attaque sans sommation, sous le regard bienveillant de Wale, qui se révèle être un cultiste de Nurgle. Après avoir constaté que ses gros muscles ne sont d’aucune utilité face aux assauts de suçons de son adversaire, Gardus dégaine son special move, c’est à dire son énorme… empathie, et sert donc le démon dans ses bras puissants en lui susurrant des mots de réconfort aux oreilles. Et ça marche. Touché par tant de compassion, et sans doute un peu par la pure lumière céleste que Gardus est capable d’exsuder sur commande, telle une luciole d’Azyrheim (séquelle plutôt kioul de sa seconde reforge), la vilaine bête fond comme un lépreux dans un pédiluve, libérant une à une les âmes des malheureux qui lui servaient d’ancrage. Ceci fait, Gardus n’a plus qu’à régler son compte au traître Wale, qui malgré sa force démoniaque et son épée rouillée, ne fait pas le poids face au double quintal de JUSTICE du Stormcast Eternal. Convaincu d’avoir accompli sa mission, et débarassé Demesnus d’un détestable faux jeton, Steel Soul peut reprendre le ferry de 06:39 pour regagner sa caserne et l’éternelle lutte contre les ennemis de Sigmar. Voilà un week-end productif.

1 : Le nom peut faire peur, c’est vrai, mais si on y réfléchit deux secondes, il inclut également les Garra Rufa (poissons docteurs), d’excellents auxiliaires de pédicure. Du coup, la légende du Garra Dan en prend un coup.

AVIS :

Les turpitudes psychologiques de Gardus Steel Soul, pour lequel la conciliation du moi, surmoi et ça ne relève pas de la sinécure, ne m’ont que moyennement intéressées, comme la plupart des soumissions mettant au premier plan des Stormcast Eternals je dois le reconnaître. Reynolds m’ayant habitué à des nouvelles bien plus travaillées en termes d’intrigue et de progression narrative, la grande simplicité avec laquelle notre Action Man blanchi sous le harnais résout le problème auquel il est confronté, m’a laissé un goût d’inachevé. Toutefois, je dois reconnaître que l’inclusion de The Ghosts of Demesnus dans cette anthologie introductive est un choix des plus pertinents de la part des éditeurs de la BL, puisqu’il permet aux nouveaux lecteurs de découvrir une facette intéressante de la faction reine de l’univers (la difficile conciliation entre leur passif de mortels et leur mission de soldats de Sigmar par les Stormcast Eternals), tout en les immergeant dans le quotidien d’une cité libre de Ghyran, loin des batailles contre les forces du Chaos déjà abondamment couvertes dans le jeu de figurines et les suppléments s’y rattachant.

Ajoutez à cela des personnages un brin complexes (en particulier Sargo Wale, qui est loin d’être un chef de culte à tendance mégalo-anarchique, comme c’est souvent le cas) et l’habituel nappage de fluff que Josh Reynolds se fait un point d’honneur à servir, et vous obtenez un récit d’une honnêteté insoupçonnable. On peut cependant reprocher à Ghosts…, même si dans une moindre mesure que pour God’s Gift, son manque de singularité, évidemment causé par le fait que Gardus est, comme Hamilcar, un héros récurrent de la BL, dont les aventures passées rejaillissent fatalement sur les évènements narrés dans la nouvelle. Ici, c’est l’inclusion du vieux sensei Yare, compagnon d’aventure d’une précédente épopée, qui fait figure de passage obligé à la valeur ajoutée assez limitée. Rien d’horripilant là non plus, mais pas l’idéal pour accrocher le lecteur novice ou indifférent. Bref, une première incursion honorable, à défaut d’être mémorable, dans le monde métallisé des meilleurs de Sigmar.

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One, Untended – D. Guymer [AoS] :

One, UntendedICÔNE : GOTREK GURNISSON, TUEUR

INTRIGUE :

Une fois n’est pas rancune, nous retrouvons le Tueur préféré de ton Tueur préféré, Gotrek Gurnisson, dans le mal le plus complet au début de cette nouvelle aventure, qui sera sans aucun doute trépidante, mais qui commence par être vomissante. Notre héros est en effet pris d’un mal de ventre carabiné, ce qui, de son aveu même à son acolyte Maleneth, ne lui était jamais arrivé avant. Et si l’Aelfe sigmarite, en bonne compagnonne qu’elle est, prend soin de tenir la crête de Gotrek pour éviter que cette dernière ne prenne une couleur et une texture encore plus dégoûtantes qu’à l’accoutumée, elle n’est pas étrangère à cette gueule de bois subite. Bien au contraire, c’est elle-même qui en est la cause, ses tentatives d’empoisonner le Nain afin de lui dérober la rune majeure de Krag Marteau Noir pour la ramener à Azyrheim n’ayant eu pas d’autres effets qu’un émétique avarié sur la robuste constitution du Tueur1. Ses vaillants efforts de se débarrasser de Gotrek devront cependant attendre un peu, car les éructations du transfuge du Monde qui Fut sont dérangés par une scène de ménage entre plusieurs individus aussi louches qu’imbibés. La raison de ce tapage nocturne se fait bientôt jour : un jeune bambin du nom de Tambrin a échappé à la vigilance légère de ses parents (Junas et Magda), et s’est semble-t-il enfoncé dans les catacombes d’Hammerhal Ghyra, que l’on dit hantées par le spectre vengeur d’Hanberra (à ne pas confondre avec celui d’Harambe, même si ça lui donnerait une bonne raison de persécuter les garçonnets), un ancien héros local ayant renoncé à servir Sigmar sous la forme d’un Stormcast Eternal à sa mort, et à la recherche des enfants qu’il n’avait pas pu sauver de son vivant depuis lors. La perspective de se frotter à un spectre légendaire pique bien évidemment l’intérêt professionnel de Gotrek, qui insiste pour prendre la tête de l’expédition de secours mise sur pied par les habitués de la taverne où les deux compères ont passé la nuit. En plus de Junas, qui sert de videur à l’auguste établissement, on retrouve la Ranger retraitée Halik et le Prêtre d’Alarielle Alanaer, qui serviront donc de meatshields aux véritables héros de l’histoire. Dommage que personne ne les ait prévenus.

La descente s’engage donc, et après quelques heures de progression dans les boyaux insalubres de la cité, un premier ennemi pointe le bout de ses moustaches. Il ne s’agit pas de Philippe Martinez, mais d’une bande de Moines de la Peste, peut-être syndiqués, squattant le bas de la cage d’escalier comme un gang de trafiquants de la cité Péri. Et à propos de périr, laissez moi vous dire que les ratons ne font pas long feu face à la colère incandescente de Gotrek, qui peut désormais passer en mode super saiyan lorsqu’il est très énervé, et élever la température autour de lui à des niveaux insupportables. Sa nouvelle hache de fonction, si elle est sans doute un peu moins cheatée que l’ancienne (dur de battre une arme forgée par Grugni pour Grimnir, tout de même), s’avère également très efficace, et la menace murine est donc prestement éliminée par les aventuriers, qui peuvent poursuivre leur route sans autre dommage qu’un pif écrasé par un coup de matraque pour Junas.

Le moment tant attendu de la confrontation avec Hanberra finit enfin par arriver, l’esprit ayant bien dérobé/envoûté Tanbrin (qui dort comme un bienheureux) car il l’avait pris pour son propre fils, Hangharth. Némésis de Gotrek oblige, le combat est bien plus serré que précédemment, la pauvre Halik rendant les armes et l’âme au premier cri poussé par le poltergeist kidnappeur, qui prouve au monde entier qu’il existe des Banshees masculines. Non mais. L’évanescence intermittente du fantôme n’est pas sans poser quelque problème au Tueur, ce qui ferait plutôt les affaires de Maleneth, toujours déterminée à récupérer la rune majeure tant convoitée de sa dépouille, mais il lui faut pour cela donner une raison à Hanberra de se battre à fond, ce que sa main mise sur Tambrin l’empêche de faire. La cultiste de Khaine repentie puise donc au fond de sa sacoche un clou de ci-gît Rolf2, souverain contre les ectoplasmes tenaces (et les Mortarques collants), et le frotte vigoureusement sur le bras porteur d’Hanberra pour lui subtiliser son précieux. N’ayant plus rien à perdre, le spectre va certainement réduire Gotrek en bouillie…

Début spoiler…Eh bien non (quelle surprise). Mais le plus étonnant n’est pas tant le résultat final que le dénouement, non violent, de cet affrontement. Le Tueur parvient en effet à faire entendre raison à son adversaire par le dialogue au lieu de lui faire manger sa hache, et ce dernier se dissipe donc de lui-même, comme le malentendu qui l’avait mené à dérober les enfants des autres depuis quelques siècles. Tout est donc bien qui finit bien (sauf pour Halik et la bière que Gotrek avait laissé sur le comptoir3), mais Maleneth la malhonnête devra trouver une autre combine pour récupérer la précieuse broquille incrustée dans le plastron de son compagnon.Fin spoiler

1 : Maleneth ne sait pas que la glotte de sa cible est marquée de la rune majeure de Cubi, le dieu Nain de l’alcoolisme.
2 : Vous me pardonnerez le calembour, mais traduire ‘wightclove’ en français n’est pas facile.
3 : À ce propos, il est probable que ce soit elle qui ait donné son nom à la nouvelle (que l’on pourrait traduire par ‘Laissé(e) sans surveillance’) et non pas Tanbrin.

AVIS :

David Guymer, qui avait écrit les dernières aventures de Gotrek (et Felix) dans le Vieux Monde, signe avec ‘One, Untended’ un parfait récit de transition et d’acclimatation pour les lecteurs familiers du personnage mais pas des Royaumes Mortels. Au-delà du déroulé précis de cette quête, tout à fait classique sauf dans son dénouement, ce sont les informations que l’auteur donne sur ce nouvel univers, les changements subis par son héros (nouvelle arme, nouvelle rune, nouveau sidekick) depuis qu’il y a fait son entrée, et les motivations, pas vraiment charitables, de Maleneth, qui rendent cette lecture intéressante, et même indispensable pour qui voudrait reprendre la suite de la geste de Gotrek sans passer par la case romanesque (‘Realmslayer’). L’auteur parvient également à aborder des éléments de fluff relevant de la sociopolitique, comme l’acculturation progressive des habitants de Ghyran aux mœurs d’Azyr, qui donnent une profondeur et un réalisme très appréciables à une franchise qui en manquait (et en manque toujours) cruellement par rapport à Warhammer Fantasy Battle. Bref, c’est une transition très réussie que Gotrek Gurnisson doit à David Guymer, bien que le flambeau des rancunes soit passé peu de temps après à Darius Hinks.

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Gods’ Gift – D. Guymer [AoS] :

Gods' GiftICÔNE : HAMILCAR BEAR-EATER, LORD-CASTELLANT DES ASTRAL TEMPLARS

INTRIGUE :

Prenant place après les évènements narrés dans Great Red et The Beasts of Cartha, pour ne citer que deux des précédentes aventures de notre fougueux héros, Gods’ Gift voit Hamilcar et quelques uns de ses potes des Astral Templars accomplir une mission d’intérêt général, sans doute pour avoir commis quelque tour pendable à une chambre rivale lors d’une permission à Hammerhall. Il s’agit en l’état de punir et faire stopper les exactions d’une bête monstrueuse s’amusant à disposer des hardis bûcherons d’un camp de colons récemment implanté dans les terres farouches de Ghur, tâche récréative pour des Stormcast Eternals de la trempe de nos gais lurons. Guidés par un local – Fage – qui malgré son âge vénérable semble tout émoustillé par la seule présence des Elus de Sigmar, Hamilcar & Cie s’embarquent donc dans une épopée aussi directe et rapide qu’une quête de zone de didacticiel de World of Warcraft.

Depuis le relevé de empreintes jusqu’à la constatation de l’heure du décès, ou plutôt, de l’abattage, il ne se passera ainsi qu’une petite journée, soit une vingtaine de pages pour le lecteur, juste le temps pour Ham’ de piquer un roupillon qui lui apportera un rêve plus ou moins prophétique, dans lequel un chêne vient lui chanter Je suis malade (ce qui est ‘achement dur pour un végétal, et mérite le respect), ce qui lui permettra de prendre une décision des plus inspirées quelques heures plus tard. La nouvelle se terminant pour un petit cliffhanger pas vraiment haletant, mais sans doute important pour la suite de la saga d’Hamilcar (Mark de son prénom), le lecteur en est quitte pour embrayer sur directement sur la première, ou plutôt le premier roman dédié à Guymer à sa coqueluche hirsute (Champion of the Gods), dans lequel il est presque certain que des réponses seront apportées aux questions laissées en suspens à la fin de Gods’ Gift.

: L’Homme Arbre qui s’était chargé de la besogne de déshumanisation – c’est comme la désinsectisation, mais avec des primates – servant de pied à terre racine à humus à une sylvaneth passablement enrhumée.

AVIS :

Malgré les dizaines de titres que compte sa bibliographie BL à l’heure actuelle, ce n’était que la deuxième soumission de Mr Guymer m’étant tombée sous la main depuis l’inaugural The Tilean Talisman, initialement publié en 2011. Et je dois dire que mon appréciation de l’œuvre du bonhomme est resté scrupuleusement identique, huit ans plus tard : des aptitudes certaines en terme de narration, avec des personnages au minimum distrayants, à défaut d’être immédiatement attachants (mention spéciale à Brouddican, l’Hillarion Lefuneste personnel de cette grande gueule d’Hamilcar), relevé par quelques notes boisées – c’est le cas de le dire – de fluff, plombées par une vacuité de l’intrigue assez rédhibitoire. C’est bien simple, celle de Gods’ Gift (d’ailleurs, on ne comprend pas vraiment quel est le don auquel Guymer fait référence dans le titre de sa nouvelle1) s’articule en deux temps trois mouvements, sans qu’on ait l’impression d’une quelconque progression entre le début et la fin de la nouvelle. Hamilcar traque un monstre. Hamilcar rêve d’un chêne. Hamilcar tombe dans une embuscade d’Hommes Bêtes (il faut bien qu’il montre qu’il est un cador du corps à corps). Hamilcar débouche sur un bosquet de chênes sacrés, gardé par… le monstre qu’il traquait. Coup de bol. Baston. Victoire. Fin.

Bref, rien de bien challengeant pour l’intellect du lecteur, qui aurait pu s’attendre à quelques liens de causalité entre les différents éléments constitutifs du propos de Guymer. Rien de tel ici, ou de manière tellement évidente et peu fine que les relever n’a pas grand intérêt. Comme dit plus haut, cela peut sans doute se justifier par le fait que Gods’ Gift est un rehaut littéraire à un travail plus conséquent, avec lequel l’auteur prend bien soin de faire la liaison. Telle la rondelle de tomate venant décorer une entrecôte frites, cette nouvelle peut être consommée si on a vraiment faim, mais ne remplira pas l’estomac pour autant. Et comme dit plus tôt (Décembre 2014, pour être précis), c’est plutôt cher payé pour ce que c’est. On me souffle dans l’oreillette que c’est fois ci, c’est gratuit. Bon. Mais avant cela, cela ne valait certes pas les 2,99€ demandés. Rem-bour-sez nos in-vi-tat-tions !

1 : Soit ce sont les visions vagues envoyées par Sigmar, soit c’est le photophore magique remis par icelui, et qui permettra à notre fier héros de venir à bout de Marylise Lebranchu. Au lecteur de décider s’il prend le messie ou la lanterne.

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The Dance of the Skulls – D. Annandale [AoS] :

The Dance of the SkullsICÔNE : NEFERATA, MORTARQUE DU SANG

INTRIGUE :

Invitée à honorer de sa présence un bal donné par la reine Ahalaset et le seigneur Nagen dans la cité de Mortannis, Nefarata se doute bien que cet évènement mondain n’est qu’un prétexte commode pour permettre à ces deux grandes lignées d’agir à ses dépends, ce qui ne l’empêche pas d’accepter gracieusement de se rendre sur place, n’ayant de toute façon rien d’autre de prévu ce soir là. Voyant d’un mauvais oeil le rapprochement s’étant récemment opéré entre Ahalaset et Nagen, la Mortarque de Sang suppute avec raison qu’un piège va lui être tendu, et se réjouit d’avance de cette (més)aventure, le quotidien de Nulahmia devant apparemment être assez terne.

Après avoir été accueillie avec tout le faste et la pompe liés à son r/sang (et infligé rateau sur rateau à ce pauvre Nagen, auquel elle promet toutefois une danse plus tard dans la soirée1), Neffie se voit proposer par son hôte une dégustation privée de crus tirés de l’hématothèque personnelle d’Ahalaset, ce qui ne se refuse pas. Guidée jusqu’à un salon lounge où l’attendent une dizaine d’esclaves qui s’appellent tous Mathusalem ou Réhoboam, notre rusée vampire à tôt fait d’identifier l’aiguille d’argent se terrant sous la roche, en l’occurrence un assassin assermenté doté d’une fourchette à escargot à la place du bras (c’est la mode à Hammerhal). Ayant raté son test d’Initiative, le faquin est toutefois aisément neutralisé par sa victime supposée, qui l’attache à son service d’un langoureux battement de cils. Satisfaite de la tournure prise par les évènements, et comme toute quinqua-millénaire de la bonne société après une dure journée de labeur, Neferata s’accorde un petit verre (et fracasse au passage toutes les « bouteilles », qui espéraient peut-être qu’on les laisse tranquille le temps qu’elles refassent le plein) aux frais de ses hôtes avant de revenir se joindre à la fête.

Là, il est temps pour la Lahmiane de porter l’estocade aux traîtres débusqués, et en musique s’il vous plaît, la danse des crânes consentie à ce benêt de Nagen donnant amplement le temps à notre héroïne de cimenter sa victoire en enchantant légèrement son cavalier, qui ne trouvera rien de plus malin lorsque l’assassin d’Ahalaset viendra sonner les douze coups de minuit à son ancienne patronne à l’aide de son argenterie intégrée, de lancer sa devise dans le silence de mort (héhé) qui s’ensuit. Cette dernière tombera à plat comme la totalité de ses blagues, et, mal comprise par la garde de la reine défunte, aura des conséquences tragiques pour notre pauvre Nagen. Un verre ça va, trois verres…

1 : En même temps, cette coquetterie de laisser dépasser une canine par dessus sa lèvre inférieure ne doit pas aider à lui donner un air très intelligent.

AVIS :

C’est peu de chose de dire que la prose de Herr Annandale n’était pas tenue en haute estime de ce côté du clavier, depuis la chronique de ses débuts pour la BL (The Carrion AnthemHammer & Bolter #11) jusqu’à aujourd’hui. Les choses ont légèrement évolué avec cette Danse des Crânes, qui s’affirme facilement comme la meilleure soumission de notre homme que j’ai pu lire à ce jour. Certes, on parle ici en progrès relatif plutôt qu’en performance absolue, cette courte nouvelle ne se comparant guère aux travaux d’auteurs que je considère être plus méritants que David Annandale, Abnett, Dembski-Bowden, Farrer et Fehervari en tête, pour n’en citer que quelques uns (la liste serait assez longue sinon), mais j’aurais trop beau jeu de ne pointer que les trous dans la cuirasse ou les défauts dans la raquette des travaux de ce régulier de la BL, si je ne soulignais pas également les sources de satisfaction à la lecture de ces derniers. L’Empereur sait qu’ils sont encore rares à cette heure.

Alors, quels sont les éléments positifs de La Danse des Crânes ? Pour commencer, une absence de ce que l’on peut presque appeler une « annandalerie », terme forgé par votre serviteur et désignant une mauvaise, grossière ou grotesque exploitation d’une idée de départ pourtant assez sympathique, pour des résultats évidemment décevants. Le huis-clos victorien qui nous est proposé ici ne pêche ainsi pas par excès de zèle ou manque de structuration, les péripéties s’enchaînant de façon tout à fait convenable et crédible, ce qui pourrait sembler aller de soi mais n’était pas gagné d’avance au vu du pedigree de l’auteur. On sent que ce dernier a réfléchi à la manière dont il devait dérouler son récit pour que le plan alambiqué de Nefarata puisse se dérouler sans (trop) d’accroc, et même si l’usage d’un petit TGCM en fin de nouvelle pour parfaire le triomphe de Mama Lahmia peut être noté, c’est finalement peu de chose comparé aux problèmes structurels émaillant quelques unes des précédentes soumissions de David Annandale.

Autre source de contentement, la description intéressante qui nous est faite de la haute société mort-vivante, nid de vipères aux crocs acérés et n’hésitant pas un instant à comploter pour précipiter la chute de leurs prochains, alors même que les ennemis extérieurs se comptent par milliers, et qu’un brin de solidarité entre macchabées ne serait pas de trop pour défendre le pré carré de Nagash. Le fait que cette société, mêlant vampires et humains à tous les échelons, apparaisse comme fonctionnelle et pérenne (en même temps, c’est bien le minimum quand on est immortel) est une autre réussite d’Annandale, qui parvient à donner un volume fort bienvenu à une faction qui jusque là se réduisait à des légions de squelettes traînant leur mélancolie dans des déserts violacés. On peut s’amuser aussi en Shyish, telle est la morale de cette petite histoire.

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The Old Ways – N. Horth [AoS] :

Callis and Toll_The Old WaysICÔNES : ARMAND CALLIS & HANNIVER TOLL, ORDRE DE SIGMAR

INTRIGUE :

Affecté à la surveillance de la cité d’Excelsis, dans le royaume de Ghur, le répurgateur de l’Ordre d’Azyr Halliver Toll, escorté de son sidekick Armand Callis, est envoyé par ses supérieurs tirer au clair une sombre histoire de disparition à Marshpoint, une ville agricole située en périphérie de la Cité des Secrets. Le fils aîné de la puissante famille Junica n’a en effet plus donné signe de vie après avoir eu maille à partir avec quelques soldats de l’autre grande famille locale, les Dezraed, qui l’ont poursuivi jusque dans les profondeurs de la forêt d’Ulwhyr. L’entente entre Junica et Dezraed n’ayant jamais été cordiale, c’est une vendetta en bonne et due forme qui menace d’éclater entre les Capulet et les Montaigu de Ghur, gueguerre qui mettrait en péril l’approvisionnement des régiments d’Excelsis en précieuse soie d’acier, ressource collectée depuis les fermes arachnides de Marshpoint. Il va donc de l’interêt général que cette triste affaire soit réglée dans les meilleurs délais, et qui de plus qualifié qu’un répurgateur pour traiter ce problème ?

Nous suivons donc Thalys et Colle au cours de l’enquête à laquelle ils se livrent à leur arrivée dans le bourg miteux et boueux de Marshpoint. Après un interrogatoire croisé des patriciens des deux familles, l’énorme et suintant Fenrol var Dezraed, autoproclamé Gardien de Marshpoint du fait de sa capacité de bloquer à lui seul l’entrée de la ville s’il lui prenait l’envie de s’asseoir en travers du portail, et le sec et irritable Kiervaan Junica, nos experts se rendent sur les lieux de la disparition à proprement parler, escortés par l’homme de confiance du patricien Junica, un natif du nom de Ghedren, et par un trio de gardes Dezraed. Et s’il se pourrait bien que la rivalité larvée entre familles nobles ait bien fait couler le sang, les enquêteurs feraient bien de prendre au sérieux les rumeurs entourant la Sorcière Blanche d’Ulwyhr. Après tout, ils ont pénétré sur son domaine…

AVIS:

C’est avec enthousiasme que j’avais vu revenir la figure iconique du chasseur de sorcières/répurgateur dans le lore d’Age of Sigmar, que son inclinaison high fantasy aurait pu « immuniser » à l’introduction de ce type de personnage, très grimdark par nature. La lutte contre les cultes chaotiques gangrénant le nouvel ordre rutilant de Sigmar constitue en effet à mes yeux un axe de développement des plus intéressants, et une prise de recul bienvenue sur le manichéisme caractéristique des premières années d’AoS. Encore fallait-il que l’image d’Epinal Hammerhal de l’inquisiteur traquant le vice et la trahison parmi les sujets obéissants de l’autorité centrale (préférablement divine, c’est plus classe) soit convenablement adaptée dans cette nouvelle franchise, la profession en question exigeant une rigueur morale confinant à la psychose, ce qui n’est pas franchement la norme parmi la soldatesque sigmarite (ces martel-sans-rire de Celestial Vindicators mis à part), dépeinte à de nombreuses reprises comme adepte du compromis et de la tempérance. Qu’en est-il avec la paire Callis & Toll, promise à un bel avenir au sein de la BL à en juger de la façon dont leurs noms ressortent dans tous les ouvrages auxquels ils ont été inclus ? Eh bien, c’est plutôt pas mal, encore que pas spécialement pour les raisons détaillées ci-dessus. Je m’explique.

Si le fanatisme (dans le bon sens du terme, car, si si, dans la littérature med-fan, cela existe) de nos héros laisse à désirer, la retenue dont fait preuve Toll, sensé être le vrai bad guy du duo, dans le jugement qu’il délivre au coupable, le plaçant à un petit 2 sur l’échelle de Mathias Thulmann (le référentiel absolu de la maison à cet égard), Horth se rattrape néanmoins en glissant quelques remarques de bon aloi à propos d’un certain White Reaper (Cerrus Sentanus sur son état civil), Stormcast Eternal pas vraiment Charlie, à tel point que son nom est utilisé pour effrayer les enfants d’Excelsis. Voilà un type qui mérite que l’on suive, et j’espère bien que ça sera le cas dans un futur pas trop lointain. Celà étant dit, The Old Ways a d’autres qualités, la première étant de proposer une petite enquête policière pas trop mal troussée au vu du nombre de pages limité avec lequel elle doit composer1, l’atmosphère horrifique du passage « sylvestre » du récit étant une autre source de satisfaction. D’autre part, cette nouvelle présente également l’intérêt de creuser le background de la cité libre d’Excelsis, qui devrait normalement ne pas disparaître corps et bien dans les annales du fluff, au vu du nombre d’apparitions qu’elle a faite dans divers écrits depuis son introduction dans le background. En apprendre plus sur cette bourgade présente donc un intérêt pour le fluffiste, tellement bombardé d’informations géographiques par ailleurs qu’on ne peut lui reprocher de ne pas prendre note de tout ce qu’on lui soumet.

Enfin, de façon plus large, elle fait ressortir un concept intéressant : le fossé existant entre natifs d’Azyr et populations locales au sein des cités libres, les seconds étant généralement mal considérés, voire méprisés par les premiers, qui les qualifient « d’Amendés » (traduction personnelle de Reclaimed, qui peut aussi s’entendre comme « Récupéré ») ou de « Sang Maudit » (curseblood), ce qui n’est pas très sympathique, mais ajoute de la profondeur à la société sigmarite. Quand on lit que même un personnage « égalitariste » comme Toll n’aurait pas de problème à raser toutes les forêts de Ghur pour pouvoir accélérer la colonisation de ce Royaume, au grand désarroi des locaux qui ont appris à vivre dans les étendues sauvages et à les respecter, on se dit que la possibilité d’un soulèvement des indigènes contre la métropole et ses représentants est une possibilité réelle… et c’est tant mieux en termes de potentiel narratif ! Bref, une plongée satisfaisante dans l’arrière-pays d’Excelsis, et une nouvelle qui vaut le coup d’être lue pour qui s’intéresse au fluff des cités libres.

On saluera également le twist proprement « meta » de Horth, qui fait dire à Toll qu’il avait identifié le coupable depuis belle lurette et attendait juste de voir combien de temps il faudrait à Callis (et donc au lecteur) pour faire de même. On ne me l’avait jamais faite celle-là.

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Hunting Shadows – A. Clark [AoS] :

Hunting ShadowsICÔNE : NEAVE BLACKTALON, KNIGHT-ZEPHYROS

INTRIGUE :

Neave Blacktalon, Knight-Zephyros des Hammers of Sigmar et chasseuse de têtes personnelle du grand barbu, opère traditionnellement seule. La mission sur laquelle son divin boss l’a mise, et qui l’a conduite sur les terres désolées d’Ashy, s’avère cependant tellement délicate que les autorités compétentes ont jugé bon de lui adjoindre du renfort, sous la forme du Knight-Venator Tarion Arl (et son aigle étoilé Krien) et d’une unité de Vanguard-Palladors, menée par une vieille connaissance avec laquelle elle a déjà coopéré pour disperser une bande de hippies ayant monté une opération escargot1 dans les Royaumes Mortels, Kalparius Foerunner. Je sais, je sais, cela fait beaucoup de jargon sigmarite en peu de lignes, mais rassurez-vous, savoir qui fait quoi est moins important que de se souvenir de la hiérarchie héroïque à l’œuvre dans cette nouvelle, qui décidera qui devra mourir et à quel moment.

Blacktalon les traîne un peu à l’idée de devoir faire équipe avec des collègues, mais un ordre est un ordre, et si l’on en juge par les charniers calcinés que sa proie (qu’elle peut traquer avec l’espèce de GPS sensoriel peu précis dont Sigmar lui a fait don) a laissé derrière elle, un peu d’aide sera en effet utile. Passée les formalités d’usage, la petite bande part donc en courant/volant/transmutant dans la direction indiquée par la chasseresse, qui ressent de façon diffuse que sa cible possède un moyen de brouiller sa ΣG embarquée. En gros, si elle est toujours capable de savoir vers où se diriger, elle ne peut pas jauger de la distance qui la sépare de son gibier, ce qui aura son importance plus tard. Pour l’heure, la fine équipe, en retard sur l’abomination qu’elle pourchasse, doit faire un choix potentiellement lourd de conséquences à proximité de la ville de Sigenvale, qui a reçu la visite du monstre et a été réduite en miettes/cendres par ce dernier. Neave est plutôt partante pour se remettre en route sans tarder, mais Tarion parvient à la convaincre de faire un crochet rapide par les ruines, histoire de secourir d’éventuels survivants. Malheureusement pour l’altruiste voltigeur, la Marque ténébreuse n’en a laissé aucun, et bien que les chasseurs puissent se passer les nerfs sur un pauvre corpsejaw ne faisant que ce que la nature l’a équipé pour faire (c’est-à-dire bouffer les cadavres croisant sa route), il se fait vite jour que le mystérieux prédateur/incendiaire/décapiteur est déjà loin des lieux du crime. Il faut donc à nos héros repartir sans tarder, d’autant plus que le cogfort sensé participer à la traque semble être avoir fait une mauvaise rencontre quelques kilomètres plus loin, comme le bruit de ses canons l’atteste sans doute possible.

Bien évidemment, les traqueurs arrivent trop tard sur place pour secourir la machine de guerre (représentez vous le fruit des amours incestueux entre une Forteresse de la Rédemption et une Arachnarok), qui s’est faite éventrer et toute sa garnison massacrée par l’insaissable bestiole. Blacktalon est colère devant ce carnage dont elle impute en partie la responsabilité à ce gros sensible de Tarion, mais avant qu’elle puisse reprendre les choses en main et relancer la poursuite, une forme colossale émerge soudainement du lac de montagne à côté duquel reposait la carcasse du cogfort…

Début spoiler…Les pouvoirs de brouillage arcanique dont dispose la cible des chasseurs lui a en effet permis de tendre un piège à ces derniers, qui se retrouvent confronter à… pour faire simple, représentez vous Clifford le grand chien rouge, mais dont la maîtresse ne serait pas la gentille et aimante Emily, mais Valkhia la Sanglante. C’est donc à un pitbull mécanique de Khorne de fort belle taille (et crachant le feu) que les Stormcast Eternals doivent faire face, avec des résultats au début peu concluants, comme on peut s’en douter. Très étrangement, ce sont d’abord les Palladors qui sont envoyés pallader par le juggernaut, rapidement suivis par le brave Foerunner, ne laissant que Blacktalon et Tarion, tous les deux sévèrement blessés, pour tenter de renverser la situation. Ce n’est cependant pas chose facile car leur ennemi est très grand, très fort, très rapide, très costaud, et sans faiblesse apparente, mis à part l’écoutille chaînée qui lui sert de nombril.

Après quelques moments difficiles dans les décombres du cogfort où les deux héros ont trouvé un refuge précaire, le temps de décapsuler quelques potions de vie, le traditionnel plan de la dernière chance est conçu et immédiatement mis à exécution, permettant aux gardes chasses de Sigmar de remporter la victoire. Pour information, le haut fait en question nécessitera que Neave se déchaîne, et que son comparse loge un tir de l’aigle dans un cratère volcanique chatouilleux, ce qui aura pour effet final de noyer l’habitacle de la machine démon dans la lave. Statistiquement improbable je vous l’accorde, mais la high fantasy et les nouvelles d’action de la BL ne s’embarrassent pas de détails de ce genre. Ceci fait, les deux Knights-…, devenus bons copains dans l’adversité, peuvent reprendre le chemin d’Azyr, où ils pourront passer une convalescence bien méritée, ou se suicider pour être reforgés et ainsi redevenir opérationnels plus rapidement. Les politiques sociales sigmarites sont un peu particulières…Fin spoiler

1 : Organisée par l’incontournable Horticulous Slimux bien sûr.

AVIS :

Introduction au personnage de Neave Blacktalon (et à celui de son sidekick, Tarion Arl), ‘Hunting Shadows’ met particulièrement l’accent sur les caractéristiques de super héros des Stormcast Eternals (Blacktalon bénéficie en effet de sens ultra développés, et est capable de courir grotesquement vite – pensez Bip Bip et Vil Coyote), faisant de cette traque monstrueuse une sorte d’adaptation de comics Marvel dans les Royaumes Mortels. Je ne dis pas que c’est foncièrement désagréable, mais ça surprend tout de même un peu. Autre point saillant de cette nouvelle, son côté technique en matière de bestiaire et de hiérarchie Stormcast Eternals. C’est bien simple, on dirait qu’Andy Clark a fait exprès d’aller piocher dans les entrées les plus baroques du Battletome pour trouver ses protagonistes, ce qui peut aisément dérouter/saoûler le lecteur non averti. En cela, ‘Hunting Shadows’ n’est pas très newbie-friendly, même si l’intrigue reste relativement facile à suivre, du fait du schéma narratif très simple utilisé par l’auteur. En fait, le seul suspense de l’histoire repose dans l’identité de la proie traquée par Blacktalon et ses sous fifres, qui, manque de pot, se trouve être une création inédite de la part de Clark (à moins que la gamme chaotique d’Age of Sigmar comporte un modèle de chien de métal géant). Manque de pot car le lecteur ne peut même pas au final tenter de deviner qui est derrière ces exactions sanglantes et fumantes en se basant sur sa connaissance du fluff. Petite frustration, mais frustration quand même. Pour conclure, j’ai été très moyennement convaincue par cette démonstration de force de la Wonder Woman d’Azyrheim, héroïne certes très balaise mais assez peu attachante. Peut-être que cela est corrigé dans le roman qu’Andy Clark lui a consacré ?

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Shiprats – C. L. Werner [AoS] :

ShipratsICÔNE : BROKRIN ULLISSONN, CAPITAINE KHARADRON

INTRIGUE :

La malchance légendaire qui colle à la carène du Dragon de Fer et la peau de son capitaine, le Kharadron Brokrin Ullisson s’abat une nouvelle fois sur le fier navire et son équipage. N’ayant pas trouvé de filon d’aether-or au cours de sa dernière campagne, le navire Duardin s’est résigné à se faire cargo de grain pour au moins rentrer dans ses frais, et a chargé une cargaison de blé dans la ville de Greypeak, qu’il espère vendre à bon prix de retour à Barak-Zilfin. Ce beau projet est toutefois menacé par la présence de passagers clandestins dans la cale du Dragon, une colonie de rats bien décidée à faire bombance sur les stocks des Arkanautes. Entre les petits barbus et les encore plus petits moustachus, il ne saurait y avoir de terrain d’entente, mais que faire pour débarrasser le vaisseau de l’infestation de vermine sans endommager ce dernier ? Alors que Brokrin et ses hommes se trouvent réduits à chasser les importuns à coups de pelle, avec des résultats peu concluants, comme on peut se l’imaginer, une bonne et potentiellement riche idée est soumise : pourquoi ne pas faire un détour par la Lamaserie de Kheitar, dont les moines ont par le passé rendu un fier service aux Kharadrons en débarassant le Dragon de la nuée de crapauds célestes (car apparemment, c’est un aléa climatique assez courant dans les Royaumes Mortels) qui avait élu domicile sur le navire à l’aide d’une fumigation un peu spéciale ? Aussi dit, aussitôt acté, la possibilité de soutirer aux bonzes une de leurs fameuses tapisseries pouvant même permettre d’espérer un profit au trésorier de la petite bande, passablement dépité par le tour pris par les évènements. Après tout, quoi de mieux qu’un lama pour venir à bout d’un rat1 ?

Arrivé sur place, Brokrin emmène une poignée de ses gars à la rencontre des paisibles habitants de Kheitar, dont les ancêtres étaient tellement zens qu’ils ont réussi à apprendre à un démon les bienfaits de la méditation. Brokrin, qui connaît personnellement le grand Lama (Serge), est bien étonné de voir apparaître à la place de son vieux pote un nouveau père supérieur (Bernard), qui a la peine de lui apprendre que Serge n’est pas simplement malade (comme on pouvait s’y attendre), mais a carrément atteint l’illumination en commettant le suicide rituel du tulku, un lent empoisonnement débouchant sur une momification graduelle de l’ascète. Malgré cette triste nouvelle, Bernard se montre particulièrement conciliant avec ses hôtes, acceptant non seulement de procéder à la dératisation demandée (sous réserve que les Duardins permettent aux rats de quitter le navire, car telle est le niveau d’antispécisme des bonzes), mais offrant même à leurs hôtes non pas une, mais cinq de leurs précieuses tapisseries, pour une contribution laissée à la discrétion des bénéficiaires. En celà, Bernard fait une grave erreur car cette générosité excessive ne manque de déclencher l’alerte piège à khon que tous les Kharadrons possèdent dans un coin de leur esprit. Suspectant une entourloupe, Brokrin charge donc un de ses matelots d’escorter les moines tapissiers jusqu’à bon port, tandis que lui et le reste de son khrew acceptent l’offre de Bernard de rendre visite à Serge, qui serait, contre toute évidence, encore vivant. Bernard commet alors sa deuxième boulette (pas aussi grave que celle du Bordeaux – Paris de 93, mais pas loin) : soucieux de faire respecter les traditions non-violentes de Kheitar (où même les démons fument du chichon), il somme ses visiteurs de déposer leurs lames avant d’entrer dans le saint des saints. Toujours un à lire les petites lignes du contrat et à trouver les failles dans les termes et conditions qui lui sont proposés, Brokrin fait remarquer à ses hommes que l’injonction du grand Lama ne couvre pas les armes à feu, et emboîte donc le pas à Bernard toujours armé de sa pétoire.

Un peu plus loin, les mirrifiques carpettes de Kheitar sont entreposées sans heurts dans la cale du Dragon de Fer, sous l’oeil attentif et circonspect d’un rattophobe déclaré, le sergent arquebusier Drumark, dont le paternel a été fauché dans la fleur de l’âge lors d’une bataille contre les Skavens. Souhaitant s’assurer que la vermine qui grignote son grain ne s’attaque pas aux précieux tapis, il laisse remonter ses comparses et attend dans la pénombre de voir comment les choses vont évoluer. Quelle n’est pas sa surprise de voir s’extraire des rouleaux apportés par les bonzes une demi-douzaine d’hommes-rats, qui comptaient sans doute s’infiltrer discrètement dans le navire en attendant de jouer un tour pendable à ses occupants légitimes ! Les plaisanteries les plus courtes étant les moins longues, Drumark a tôt fait de sonner la fin de la rat-cré, l’arsenal Kharadron ayant rapidement raison des manigances skavens. Tout celà n’augure toutefois rien de bon pour Brokrin et ses suivants, qui ne tardent pas non plus à découvrir le pot au rat, à la suite d’une performance misérable du Jeff Panacluc Skaven, un dénommé Kilvolt ayant « jeanmarquisé » le cadavre de Serge. Sommé de révéler au véritable maître de Kheitar les secrets de l’ingénierie Kharadron, Brokrin refuse avec noblesse, et met à profit la bévue de Bernard pour arroser les hommes rats venus à la rescousse de Kilvolt avec du Kharaplomb. L’algarade ne dure cependant pas longtemps, l’arrivée de Drumark et de ses arquebusiers convainquant définitivement les Skavens de la futilité de leur approche. Profitant de l’accalmie, Brokrin et Cie repartent ventre à terre sur le Dragon, non sans avoir pris soin de looter quelques tapisseries supplémentaires en guise de dédommagement. De voleur à vendeur de tapis, il n’y a que peu de choses au fond.

1 : Si vous répondez : un chat, sachez que le félin apporté à bord par les Duardins a fait acte de mutinerie peu de temps après sa prise de fonction. C’est ce qu s’appelle avoir un poil dans la patte.

AVIS:

Accompagnement au roman qu’il a consacré aux plus blindés des Duardins (Corsaires du Dragon de Fer//Overlords of the Iron Dragon), ce Rats de Cale de Werner s’avère être d’une lecture globalement satisfaisante. Notre homme retrouve avec bonheur ses victimes favorites (les Skavens), qu’il gratifie comme à son habitude d’une inventivité et d’une ambition proportionnellement inverse à leur compétence, pour un résultat aussi spectaculaire que dérangeant1. S’il y a un contributeur de la BL qui sait s’y prendre pour donner aux hommes rats leurs lettres de bassesse, c’est bien l’homme au chapeau, et on ne peut que souhaiter que Nottingham lui confie davantage de commandes portant sur les funestes et fumistes machinations des rejetons du Rat Cornu. On appréciera également l’exotisme du propos, la visite guidée de la Lamaserie de Kheitar permettant au lecteur de se remémorer l’immensité des Royaumes Mortels, où la présence d’une communauté de bonzes vénérant un démon du Chaos ayant trouvé la paix intérieure en téléchargeant Petit Bambou sur son portable est tout à fait possible. On peut regretter que l’accent ne soit pas davantage mis sur la culture des protagonistes, abordée assez succinctement à travers la mention des différentes fonctions des membres de l’équipage de l’Ang Drak et du fameux Code des Kharadron (qui sanctuarise les partenaires de commerce équitable, ce qui doit indiquer que les bananes et le chocolat sont tenus en haute estime par le Geldraad), mais que voulez-vous, on ne peut pas tout avoir dans une nouvelle de 25 pages. Le casting très développé des Arkanautes, conséquence logique de leur inclusion dans le roman cité plus haut, est un autre facteur pouvant diminuer (légèrement) le plaisir de lecture, mais, rassurez-vous, savoir qui est qui n’a que peu d’intérêt au final. Le plus important restant bien sûr de souquer les artimuses.

1 : Sérieusement, imaginer la transformation d’un cadavre de bonze en marionnette animée, c’est un coup à faire des cauchemars.

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Vous êtes encore là ? Félicitations pour être venus à bout de cette copieuse chronique, qui vous a je l’espère préparé à la lecture de l’omnibus en question, si le cœur vous en dit. Essayons de rassembler nos pensées pour terminer sur une impression d’ensemble de ‘The Hammer & the Eagle’, après avoir passé tant de temps à disséquer chacune des nouvelles constituant ce pavé. La question qu’il convient de trancher est la suivante : cet ouvrage remplit il la mission que la Black Library lui a donnée, à savoir initier les nouveaux lecteurs aux icônes de Warhammer 40.000 et Age of Sigmar à travers une sélection de courts formats ? Comme vous pouvez vous en douter, si vous êtes familiers de ces critiques, la réponse est oui et non.

La force et l’attrait principal de ‘The Hammer & the Eagle’ est de proposer, clé en main et livre en poche (si vous arrivez à trouver une poche assez grande, ou avez opté pour un format digital), la couverture la plus complète qui soit de la GW-Fiction à l’heure actuelle. On peut reprocher à la BL de ne pas avoir inclus de textes pour Warhammer Fantasy Battle, qui compte également son lot de personnalités marquantes (Gotrek & Felix, Malus Darkblade, Tyrion & Teclis, Zavant Konniger, les Black Hearts…) et disposant de leurs propres séries de livres, ou, de façon plus pragmatique, d’avoir fait l’impasse sur l’Hérésie d’Horus, Necromunda et Blood Bowl, univers et sous univers riches en héros et vilains hauts en couleurs. On peut également s’interroger sur l’absence de certaines figures et auteurs de 40K au sommaire de ce recueil (Roboute Guiliman version Sombre Imperium, Ragnar Crinière Noire, Lukas, Ahriman, Khârn, Lucius, Honsou, Farsight, Peter Fehervari et son Dark Coil, Steve Parker et ses Deathwatch…), et sur la présence d’icônes mineures – à ce jour – dans ce qui semble être le catalogue des VIP de la Black Library. Mais si on passe outre ces considérations, on doit reconnaître que la base fournie ici est solide et, si ce n’est exhaustive, au moins très étoffée, le tout pour un prix très modeste au vu des tarifs habituels de la maison (on est proche des 50% de réduction par rapport à une anthologie classique).

Autre paramètre à considérer, la pertinence du choix des nouvelles collectées dans ‘The Hammer & the Eagle’, qui devraient dans l’idéal introduire le nouveau lecteur à un personnage marquant de 40K ou d’Age of Sigmar, et lui donner envie de poursuivre l’aventure en achetant le roman venant après le court format qu’il a pu lire ici. Sur ce point, c’est carrément le grand écart entre les textes qui ont été écrits avec cet objectif en tête par des auteurs de bon niveau (‘Of Their Lives…’, ‘Execution’, ‘The Absolution of Swords’, ‘One, Untended’…), et les courts formats mis au sommaire par pur pragmatisme, qui peuvent être obscurs pour qui n’est pas déjà familier de la série à laquelle ils se raccrochent (‘Rite of Pain’, ‘Prodigal’, ‘Shadow Knight’, ‘Gods’ Gift’), ne pas directement traiter des icônes qu’ils sont sensés introduire (‘The Smallest Detail’, ‘Fireheart’), ne pas aborder de façon satisfaisante le parcours, la personnalité et/ou les motivations de l’icône en question (‘The Wreckage’, ‘Argent’), ou être tout simplement mal écrits (‘The Battle for Markgraaf Hive’, ‘Mercy’). Pour faire court, si on m’avait demandé de soumettre une liste de nouvelles pour les icônes sélectionnées par la BL, la moitié des histoires rassemblées ici auraient été remplacées, pour une raison ou pour une autre. Il est in fine dommage que certains lecteurs décident d’ignorer des séries de qualité sur la base d’une erreur de casting de Nottingham, ce qui arrivera fatalement ici. J’invite donc à donner une deuxième chance à toutes les icônes ne sortant pas grandies de cet omnibus, pour s’assurer que la première impression a bien été la bonne. La tendance des auteurs de la BL à écrire des nouvelles semi-indépendantes (c’est-à-dire compréhensibles, mais pas vraiment autonomes) de leurs romans ne doit en effet pas être sous-estimée.

C’est sur ces mots de sagesse (?), ou en tout cas d’expérience, que se termine cette revue de ‘The Hammer & the Eagle’, ouvrage imparfait mais qui a tout pour devenir un incontournable de l’offre de la Black Library dans les mois et années à venir, et qui, j’en suis sûr, initiera bon nombre de lecteurs aux joies de la GW-Fiction.

CRUSADE & OTHER STORIES [40K-HH]

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue critique de Croisade & Autres Récits, l’anthologie de nouvelles dédiée par la Black Library aux nouveaux arrivants dans le 41ème millénaire (mais pas que, comme nous le verrons plus tard). Comme cela avait été le cas pour Sacrosaint & Autres Récits, le pendant AoSesque du présent ouvrage, je tâcherai dans cette chronique de vous éclairer sur la valeur et l’intérêt que la lecture de Croisade… présente pour le hobbyiste, fut-il au début de son noviciat ou vétéran couturé de cicatrices et bardé d’augmétiques1.

À première vue, nous avons droit à un bien beau pavé de plus de 400 pages, disposant lui aussi d’une traduction française et allemande, et proposé à un tarif très concurrentiel (7 €). Derrière le cliché héroïque du frère Lieutenant Cassian, du temps où il tenait encore debout et pouvait passer les portes (no spoil), nous apprenons que ce ne sont pas moins de 12 contributeurs qui auront le plaisir et l’avantage autant que la délicate mission de nous faire découvrir les profondeurs sauvages de la galaxie telle qu’elle sera dans notre lointain futur. Si certains noms apparaîtront comme familiers à l’habitué de la BL (ou le deviendront bientôt pour celui qui persistera sur la voie du fanboy), tels que les Thorpe, Dembski-Bowden, Swallow ou encore Abnett, d’autres ont davantage de chance de n’évoquer qu’un froncement d’épaule ou un haussement de sourcil (ou l’inverse) chez l’impétrant. Clark, Fehervari, Parker et Goulding font souvent cet effet, mais cela ne doit pas nous empêcher d’aborder leurs soumissions avec un esprit ouvert et une plume acerbe, comme pour leurs petits camarades d’écritoire.

Sommaire Crusade & Other Stories (40K)

Depuis la liquidation (encore qu’émiettement serait sans doute un terme plus adapté, au vu de ce qui s’est passé) de la franchise Warhammer Fantasy Battle, Warhammer 40.000 est la doyenne de Games Workshop, et peut convoquer une trentaine d’années de fluff et à peine moins en termes d’œuvres de fiction pour l’instruction et la distraction du lecteur. Si vous lisez ces lignes, vous faîtes sans doute partie des convaincus/convertis du Hobby, et je n’aurais donc que peu de mal à vous persuader de l’intérêt de ce dernier. Mais si vous étiez un honnête et enthousiaste newbie, à la foi (et la dépendance au plastique) pas encore solidement ancrée, Croisade… serait-il l’ouvrage adéquat pour vous faire basculer pour de bon dans l’étreinte chaleureuse et amicale du grimdark ? La réponse dans 3… 2… π… 1…

1 : Pas de chance si vous êtes un Dreadnought par contre, la maison ne fait pas encore de podcast.

Croisade & Autres Récits

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Crusade – A. Clark :

INTRIGUE :

Alors que la Croisade Indomitus bat son plein, nous partons à la rencontre d’une force de Primaris Ultramarines, que les aléas de la guerre et les caprices du Warp a détourné de sa destination initiale. Ayant récemment ramené Knassos dans le rang (impérial), le Lieutenant Cassian et ses hommes émergent de l’Immaterium1 dans le système de Kalides, contraints et forcés d’y faire étape à la suite des avaries provoquées par la tempête Warp essuyée par le Primarch’s Sword, leur croiseur d’attaque de fonction. Leur propulseur Warp étant pour le moment hors service, les Ultramarines espèrent trouver sur le monde de Kalides Prime, coupé de l’Imperium depuis l’ouverture de la Cicatrix Maledictum, de quoi réparer leur joint de culasse (c’est toujours le joint de culasse), ou au moins envoyer un SMS d’excuse à Guilliman en utilisant le relai astropathique local. Par manque d’informations fraîches sur la situation de la planète, Cassian et ses lieutenants adjoints, l’Archiviste Keritraeus et le Chapelain Dematris optent pour une approche gardée, qui se révèlera sage car Kalides est assiégé par une bande de guerre de la Death Guard, ayant réduit la capitale planétaire, Dustrious, en ruines, et mis le siège à l’ultime forteresse de la cité, où se terre le collège des Astropathes. Bien que surclassés en nombre, les Primaris n’hésitent pas une seconde à voler, ou plutôt tomber, au secours des locaux, et engagent les troupes purulentes du Seigneur de la Peste Gurloch.

La campagne qui s’en suit verra les derniers nés de la famille Astartes exhiber leurs spécificités et matériel flambant neuf (mention spéciale aux Inceptors, qui partiront faire du flyboard au-dessus de Dustrious en préparation de l’arrivée du gros des troupes), épaulés quand le besoin s’en fait sentir par les restes d’un régiment de Cadiens bien éprouvés et totalement grippés, et une petite bande d’Eldars des Vaisseaux Mondes, dont la Prophétesse a vu en Cassian un futur allié d’importance pour la survie d’Yme’Loc, et n’hésite donc pas à crâmer une relique millionnaire2 pour tirer ce dernier et ses séides d’un bien mauvais pas. De l’autre côté du ring, les prouteux de Gurloch, un brave type très jovial mais tellement sale que même sa voix dégouline de sueur (ce qui n’est pas donné à tout le monde) encaissent et rendent les coups avec toute la fortitude caractéristique des fils de Mortarion, et continuent à préparer l’apothéose pesteuse que leur Seigneur fomente pour s’attirer les bonnes grâces du Grand-Père. Et comme toutes les bonnes choses dans la vie, ce bouquet (de germes) final doit mijoter un certain temps pour révéler toute sa saveur et son onctuosité. L’intervention des Guilliboys doit donc être supportée et contenue assez longtemps pour permettre au chef d’œuvre de Gurloch d’arriver à maturité, mais les loyalistes ont bien évidemment un tout autre avis sur la question…

AVIS :

Ayant été un brin échaudé par ma première expérience de novella « d’initiation » aux franchises de Games Workshop à la suite de la lecture du décevant Sacrosaint // Sacrosanct de C. L. Werner, j’abordai cette Croisade avec un sombre pressentiment. Après tout, si un auteur confirmé comme l’homme au chapeau n’était pas capable de rendre une copie intéressante en mettant en scène des Stormcast Eternals, quel espoir y avait-il qu’un petit nouveau comme Andy Clark fasse mieux avec des Ultramarines Primaris, sans doute la faction la plus lisse de tout Warhammer 40.000 ? Eh bien, qu’il soit écrit ici que j’avais tort de douter de Mr Clark, qui s’est sorti haut la main de cet exercice imposé des plus périlleux.

Croisade étant d’abord un récit destiné à faire vivre les figurines d’une boîte de jeu 40K (Dark Imperium) et d’introduire le background de cet univers aux nouveaux hobbyistes, la première satisfaction que l’on peut tirer de cette novella tient au fait qu’elle réalise cette mission de façon sérieuse mais non ennuyeuse, ce qui était ma crainte principale. Certes, Clark passe en revue avec un détail qui pourrait sembler excessif dans une soumission classique de la BL toutes les escouades et personnages de son casting, précisant à chaque fois son rôle et ses missions au sein de sa faction. Mais il réussit le tour de force de le faire sans trop forcer le trait, ce qui rend la lecture de sa prose supportable pour le vétéran. L’intrigue de son récit, pour simple qu’elle est, offre un cadre robuste à l’empoignade entre Ultramarines et Death Guard, et, si le déroulé de Croisade se concentre majoritairement sur des scènes de combat (ce qui est, encore une fois, logique au vu du cahier des charges de cette publication), Clark parvient à aller au-delà de l’escarmouche bête et méchante, en faisant le lien avec le « macro-fluff » que constitue la Croisade Indomitus, et au travers de cette dernière, le retour de Guilliman et l’avènement des Space Marines Primaris. Enfin, la conclusion de la novella réussit à équilibrer de façon intéressante les côtés grimdark (Cassian, grièvement blessé lors de son combat contre Gulroch, atterri dans un caisson de Dreadnought) et épique (caméo de Guilliman, qui félicite son fils3 de ses actions sur Kalides et rebooste roboute le moral de toute l’équipe en leur promettant une belle bagarre à ses côtés dans quelques jours) de 40K, ce qui donne au newbie une bonne idée de la tonalité des franchises de GW en général.

Au-delà de ces premières considérations, j’ai également apprécié le souci apporté par l’auteur à mettre en avant de façon positive toutes les forces en présence, y compris les antagonistes, ce que Werner n’avait pu ou voulu faire dans Sacrosaint. S’il n’y avait guère à s’employer pour les Primaris, dont la totalité du background hurle « onélégenti », les Cadiens et les Eldars ne sont pas en reste, les premiers étant dépeints comme des parangons de bravoure et de dévotion, se sachant surclassés et condamnés mais accomplissant leur devoir sans faillir jusqu’au bout4, les seconds comme les gardiens du destin de la galaxie et des psykers incomparables. La Death Guard n’est pas desservie non plus, et ne se contente pas de jouer les faire valoir pour la bleusaille de Guilliman. Dotés par Clark de qualités littéralement appréciables, dont une bonne humeur généralisée mais également une solidarité entre Légionnaires (ce qui nous change des méchants sociopathes qui détestent tout le monde), ainsi que d’une stratégie compréhensible et valable5, Gurloch et ses affreux font jeu égal avec Cassian et ses vertueux en termes d’investissement du lecteur, ce qui est suffisamment rare pour être souligné.

Enfin, je dois reconnaître à Andy Clark une réelle capacité à intégrer à son propos des éléments clairement calibrés pour le lecteur BL confirmé, ce qui révèle une maîtrise et un intérêt pour le fluff qui sont évidemment des éléments positifs. Parmi les bonnes idées ou Easter Eggs parsemant Croisade, citons la joie incrédule du Capitaine Dzansk lorsque Cassian lui apprend que Guilliman a ressuscité (on a tendance à oublier que l’information ne circule pas aisément à l’échelle galactique, surtout avec le brouilleur géant que représente la Cicatrix), le petit clin d’œil théorique/pratique tiré du Codex Astartes, ou encore la vision comateuse de Cassian après sa victoire contre Gulroch, qui laisse sous-entendre que c’est Sanguinius en personne qui vient proposer au héros meurtri de déposer les armes. Au final, ce que j’aurais pensé n’être qu’une introduction passable au recueil de nouvelles Croisade et Autres Récits s’est révélé comme une des bonnes surprises de cet ouvrage, et l’un des textes les plus intéressants de ce dernier. Bravo Mr Clark, bravo.

1 : La scène est assez drôle car on la suit depuis les yeux (?) d’une sonde de détection située à proximité du point de Mandeville du système, qui finit tel un moucheron sur le parechoc du fier vaisseau de l’Astartes. Il faudra rembourser messieurs.

2 : C’est encore plus vieux que millénaire, ce qui pour un Eldar, n’a pas grande valeur. Cependant, comme Cassian le fait justement remarquer, ce n’est pas parce qu’on lui balance un bout de bois carbonisé dans les bottes en prétendant qu’iI s’agit de la Canne du Rêveur (jamais entendu parler) qu’il va se mettre à genoux devant le premier Zoneille venu.

3 : Il aurait bien séché ses larmes aussi, mais sur un Dreadnought, c’est compliqué.

4 : À l’image du Capitaine Dzansk, dont le sacrifice altruiste et explosif ne fut pas pour rien dans l’issue heureuse du combat entre Cassian et Gurloch.

5 : La lecture de la novella permet ainsi de comprendre pourquoi Gurloch, qui en avait pourtant la capacité, n’a pas envahi la forteresse de Dustrious avant l’arrivée des Ultramarines. La raison donnée par Clark est à la fois crédible et fluff, ce qui à mettre à son crédit.

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The Lost King – R. McNiven :

INTRIGUE :

The Lost KingSur Fenris et sa grande banlieue, les choses vont plutôt mal pour les farouches fils de Russ. Bien que les manigances démoniaques d’une quelconque entité warpienne1 visant à détruire la street credibility des Space Wolves en diffusant sur les fréquences AM/FM du Segmentum un montage frauduleux et malhonnête (dîtes non aux fake news) mettant en scène une bande de loulous défouraillant du civil impérial sans retenue aient été contrecarrés, l’invasion du système par les résidents de l’Immaterium bat toujours son plein, forçant ses légitimes propriétaires à une purge systémique autant que systématique des planètes, lunes et stations spatiales touchées par le fléau. C’est l’occasion pour nous de faire la connaissance avec quelques sommités chapitrales, dont les Seigneurs Loups Sven Bloodhowl, Egil Ironwolf et Krom Dragongaze, chacun engagé avec sa Grande Compagnie sur un théâtre différent.

Ainsi, tandis que Sven fait trempette avec ses Firehowlers sur le littoral de Svellgard, dont les bancs de méduses ont pris des teintes, formes et intentions sinistres, Dragongaze se relève (il était à genoux, je n’invente rien) péniblement de son combat sur la station astropathique de Longhowl contre ce qu’on suppose être le cerveau de l’invasion démoniaque, vaincu et banni à grand mal et grands frais par les Drakeslayers, épaulés par une petite force de Chevaliers Gris (comme quoi, ils se sont rabibochés) menés par le Capitaine Stern. Mais le plus à plaindre est sans nul doute Ironwolf, qui rouille sur patte dans l’enfer putride qu’est devenu Midgardia, et se fait un sang d’encre pour son Maître de Chapitre, que tous les démons du système proclament comme étant mort. Bien sûr, on ne peut pas faire confiance à un être du Warp, mais l’absence de communication de la part des Champions de Fenris depuis qu’ils sont descendus dans les niveaux souterrains de la planète à la recherche du cœur de l’infection est troublante, pour ne pas dire inquiétante. Soucieux de ne pas laisser les sièges en cuir de grox de sa flotte de véhicules prendre l’humidité plus que de raison, Ironwolf renvoie tout son petit monde en orbite et part seul à la quête de son patron. Enfin, sur Frostheim, c’est ce bon vieux Canis Wolfborn qui prend le micro (sans doute pour le manger, étant donné qu’il ne sait pas parler) pour les Deathwolves2, occupés à nettoyer la Forteresse de Morkai des dernières poches chaotiques qui squattent les couloirs. Bien que l’ennemi soit repoussé, il n’en reste pas moins dangereux, comme les cadavres de Space Wolves que Canis trouve sur sa route en témoigne.

Tout celà serait bel et bien bon, si une Croisade impériale, menée par nul autre qu’Azrael et ses Dark Angels depuis le Roc, ne venait de se matérialiser dans le système de Fenris, pour enquêter sur la cause des récentes agitations et turbulences émanant du territoire des fils de Russ. On le sait, la Première Légion et la Vlka Fenryka ne s’entendent guère, et les fils proprets de Lion El’Jonson se réjouissent d’avance de mettre leur nez aquilin dans le panier à linge sale de la marmaille de Russ. Ce qui est assez hypocrite quand on y pense de la part de types qui s’appellent les Impardonnés et ont passé les 10 derniers millénaires à protéger leurs propres petits secrets honteux. Mais bon, comme toujours avec les Dark Angels, la mauvaise foi n’est jamais loin. Réunis pour un premier conseil de guerre sur le pont du Roc, les officiers supérieurs de la Croisade écoutent le jeune et prometteur Chapelain Elezar, pupille préférée d’Asmodai, les briefer sur la conjoncture géopolitique de Fenris, qui peut se résumer en trois mots : « c’est la m*rde ».

Aux grands mots et maux les grands remèdes, l’intraitable Chapelure propose tout naturellement un Exterminatus de Midgardia, bien qu’il sache pertinemment que le Loup Suprême est toujours en train d’y patauger. Ça lui ferait même plaisir, au fond. Malgré les réticences, rapidement écrasées, des autres commandants Space Marines présents, tout semble parti pour un lavage à grandes eaux de la pollution démoniaque de la planète, mais le triomphe annoncé d’Azrael se voit menacé par l’arrivée, non pas du Grand Schtroumpf, mais d’un Inquisiteur particulièrement collant et suspicieux, et pas le moins du monde impressionné par l’hostilité latente et les menaces à peine voilées que le Grand Maître Suprême émet à son égard. Après une entrevue aussi courte que glaciale, l’importun est raccompagné manu militari à son vaisseau, sans se douter un instant qu’il est épié du coin de l’œil par un doppelganger démoniaque ayant usurpé l’identité d’un officier Dark Angels. Par chance pour l’impavide Inquisiteur, the thing se montre plus intéressé par un tête à tête avec Elezar qu’avec lui, mais ce n’est sans doute que partie remise…

AVIS :

Il y a sans doute erreur sur le produit si l’on considère The Lost King comme une nouvelle, ainsi que cette soumission est présentée dans l’anthologie Crusade & Other Tales. De par sa structure même, il est plus judicieux de qualifier ce texte de chapitre introductif d’un roman, ce qui est en effet le cas si on considère Warzone Fenris comme tel. Cela n’aurait en soi pas été un problème, la BL ayant l’habitude d’inclure de tels extraits dans ses publications, mais cette méprise au niveau de la nomenclature est regrettable, surtout dans un ouvrage destiné aux nouveaux lecteurs, pas forcément au fait des errements réguliers de la maison d’édition en matière de communication. Ce premier constat évacué, nous nous retrouvons avec un court format présentant l’intérêt de passer en revue une bonne partie des cadres du Chapitre emblématique des Space Wolves, ainsi que leurs grands rivaux Dark Angels, tous deux dans une position délicate vis à vis de l’Inquisition, ce qui constitue une bonne introduction au lore de 40K. L’intrigue, pour autant qu’on puisse en juger, promet des choses intéressantes, la disparition (évidemment momentanée) d’un personnage connu du background de 40K et la promesse d’une confrontation (évidemment évitée) entre deux des Chapitres Space Marines les plus illustres, le tout sur fond d’invasion démoniaque, promettant quelques péripéties distrayantes. Pour peu que l’on soit familier avec les noms des personnages convoqués ici, dont la majorité sont assez célèbres pour disposer de leur propre page sur le Lexicanum, on aura droit à l’équivalent d’Avengers Endgame dans les ténèbres d’un lointain futur, et sans doute une des plus grosses productions en termes de casting de la BL de ces dernières années, juste derrière la 13ème Croisade Noire d’Abaddon pour le nombre de people qu’elle convoque. Ceci dit, le choix de McNiven de se coller au train d’Annandale et son Curse of the Wulfen, sans fournir au lecteur une introduction à son propos, ce qui n’aurait pas été du luxe à mon avis, vient compliquer l’immersion dans cette saga épique, dont le suivi en multiplexe se fait aux dépends de l’intensité narrative. Certes, nous n’en sommes qu’au début, mais qu’importe si ce dernier paraît petit, comme l’a dit Sebastien Thoreau. À vouloir offrir à son lectorat une super production littéraire dès les premières pages, l’auteur prend le risque de ne pas accrocher sa cible, qui aurait peut-être préféré un commencement plus fouillé et plus intime. Menfin, c’est mon avis.

1 : Comprendre que la transition avec l’ouvrage dont The Lost King prend la suite n’est pas clairement faite, et que le lecteur aurait pu bénéficier d’un ‘Previously, in the Fang’ pour savoir de quoi il en retourne.

2 : Harald étant occupé à donner ses croquettes à Icetooth.

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Honour of the Third G. Thorpe :

INTRIGUE :

Honour of the ThirdAlors qu’il n’était encore qu’un humble (et relativement) jeune à capuche traînant son spleen et sa calvitie naissante à la cantina du (Hard) Roc(k) (Café), Belial participa à la campagne de Durga Principe en qualité de Sergent Vétéran au sein de la 3ème Compagnie des Dark Angels. Menée par le Maître Nadael1, cette dernière se fit forte de mettre un point d’arrêt aux déprédations sanglantes des Skull-scythes du champion du Chaos Furion. Mais voilà, Furion était un furieux, et il eut tôt fait de plumer l’ange sombre à leur première entrevue, laissant les fils de Lion El’Jonson dans l’embarras et la galère. Désigné chef par interim malgré l’absence de désinence en -el de son nom, ce qui permet de juger à quel point notre homme était un cador, Belial ordonna à ses frères de se replier sur les pentes du mont Dawon, pendant que lui et une escouade de meatshields se chargeraient de leur gagner assez de temps pour permettre leur retraite.

Après avoir taillé des croupières à l’avant-garde antifa’, Belial et Cie se retrouvèrent toutefois confrontés à la mauvaise humeur massacrante et aux haches tronçonneuses du meneur adverse, qui eurent tôt fait de transformer une poignée d’Impardonnés en petit salé. Ceci n’arrangea certes pas le profil du Frère Lederon, qui était déjà peu gâté par la nature pour commencer, comme son nom l’indique. Brutalisé à son tour, mais mettant à profit sa science du combat et son épée tronçonneuse pour survivre au premier round, Belial était sur le point de manger sa chasuble lorsqu’il se souvint brutalement qu’il était également l’heureux possesseur d’un magnifique pistolet bolter, et colla donc un headshot des plus propres à ce pauvre Furion, qui en perdit littéralement la tête. Il aurait fallu claquer des points dans un gorgerin digne de ce nom mon petit père, au lieu de mettre toute sa faveur divine dans des hachoirs à gigot. Ahlala, ces jeunes alors. La décollation de son adversaire lui assurant un retour sans encombre jusqu’à ses frères, nous refermons ici le livre, ou plutôt, le fascicule, de la passionnante histoire de ce bure à cuir de Belial.

AVIS :

Cinq petites pages et puis s’en va : cet Honour of the Third fait partie des ultra-courts formats que la Black Library commandite de temps à autres, pour des raisons qui m’apparaissent encore comme bien mystérieuses à l’heure actuelle. On connaissait l’amour de Gav Thorpe pour les Impardonnés, qu’il a assaisonné à toutes les sauces au cours de la dernière décennie, et le voir s’emparer de la figure relativement connue de Belial pour lui donner un peu d’épaisseur fluffique n’est donc pas une surprise de taille. Reste que cette micro-péripétie n’apporte pas grand éclairage sur le caractère de notre héros cagoulé, mis à part qu’il arrive à s’épater lui-même de son talent au tir à 10 mètres. Pour le reste, ces cinq pages auraient pu tenir en un paragraphe dans une frise chronologique de Codex, pour toute la « valeur utile » qu’elles apportent au fluffiste. Bref, un format 1.000 mots qui ne vaut certes pas les 3.49 € que la BL en demande sur son site, si j’en suis seul juge, et qui ne mérite guère mieux qu’un statut de bouche-trou dans une anthologie ou un omnibus un peu maigrichon.

1 : Craint dans tout l’Imperium pour son rendement au bolter, d’où son surnom de Nadael ‘Rafale’.

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The Word of the Silent King – L. Goulding :

INTRIGUE :

The Word of the Silent KingSur le monde de Gehenna, le conflit opposant locataires impériaux et propriétaires Nécrons suit son petit bonhomme de chemin. Ayant reçu le précieux soutien de la 3ème Compagnie des Blood Angels, menée par le grimaçant Capitaine Tycho, et chaperonnée pour l’occasion par nul autre que Papy Dante, qui avait sans doute envie de se dérouiller les guiboles entre deux ateliers de sculpture sur glaise et dessin au fusain, les loyaux sujets de l’Empereur se montrent relativement confiants dans l’issue heureuse de cette algarade, malgré les légions de robots homicidaires que le sous-sol de Gehenna dégorge avec une belle constance. Le début de la nouvelle voit d’ailleurs le Sergent Vétéran Machiavi (c’est toujours mieux que Machiatto) mener son escouade de Marines à l’assaut des cohortes métalliques qui gambadent dans la pampa, pour des résultats d’une frustrante inutilité et des pertes sans cesse plus importantes pour les surhommes en rouge1. Il en faut toutefois plus pour calmer les ardeurs luddites de Mach’, qui se dirige tout droit vers une honorable noyade sous la masse en hurlant des obscénités, jusqu’à ce que, dans le plus grand des calmes, ses assaillants tournent leurs talons chromés et s’en aillent rejoindre leurs pénates, en répétant en boucle…recalcul…recalcul… En vertu de sa règle spéciale « et ils ne connaîtront pas la courtoisie », notre héros s’autorise la satisfaction de flinguer une poignée supplémentaire de cyborgs pendant leur pénible retraite, mais doit se rendre à l’évidence : quelque chose ne tourne pas rond.

Alors qu’il débriefe de cet étrange revirement de situation avec ses supérieurs dans le Strategium autour d’un petit pichet de rouge, Machiavi apprend que le conflit immobilier sur lequel il est engagé est sur le point de se doubler d’un léger problème de dévermination, une flotte ruche Tyranide ayant été détectée à proximité de Gehenna, qui n’aura décidément pas volé son nom. Pour ne rien arranger, la base avancée des Blood Angels se fait hacker par un certain Judicator-Prime, QUI NE SAIT PAS PARLER SANS GUE*LER, se présente comme le porte-parole du Roi Silencieux en personne, et vient interrompre le Baal masqué2. L’émissaire propose à ses valeureux adversaires de convenir de pourparlers pour établir une stratégie commune contre les cafards de l’espace. Malgré la grossièreté de l’intrusion, les fils de Sanguinius décident d’accepter l’invitation, et Dante, Tycho et Machiavi se rendent fissa au Devil’s Crag rencontrer leur homologue…

Début spoiler…Seulement, bien conscients de la chance unique qu’ils ont de pouvoir approcher de l’idole des petites bielles, ils ne font pas le déplacement sans prendre avec eux leur matos de fanboy, autrement dit une torpille cyclonique (eh oui, on est grimdark ou on ne l’est pas). Planquée dans la boîte à gants de leur Rhino de fonction, nos trois larrons n’ont qu’à fermer le poing pour réduire en cendres l’hémisphère où ils se trouvent. Fort heureusement pour eux, Szarekh, venu en toute simplicité, seulement accompagné de quelques milliers des Prétoriens, n’insiste pas pour serrer la main des ambassadeurs impériaux, sans quoi la notion d’incident diplomatique aurait trouvé son exemple le plus lamentable ever. Le Roi Silencieux a lui aussi préparé une surprise à ses invités, et ces derniers ont la désagréable surprise de constater que le Necron en chef porte un masque à l’effigie de Sanguinius. Affront. Et que ce masque de Sanguinius est plus réussi que celui de Dante. Affront mortel. Le vénérable Maître de Chapitre est tellement chafouin que son Parkinson manque d’avoir raison de lui. Il réussit toutefois à ne pas serrer le poing de colère, ce qui aurait eu des conséquences fâcheuses, et parvient à engager la discussion sans susciter la suspicion des Nécrons, qui cherchaient juste à faire plaisir à leurs hôtes (et mettre sur la table une proposition d’alliance qui traînait depuis 10.000 ans dans les cartons, soit une petite semaine pour les métalleux). Mais l’appropriation culturelle, c’est moche.

Après quelques échanges de banalités, les deux camps finissent par tomber d’accord sur la nécessité de coopérer pour se débarrasser des punaises galactiques, au grand contentement de Szarekh, qui glisse au passage un petit mot sympa à l’oreille de son nouveau pote, au mépris de l’étiquette. La coopération interraciale, voilà un concept qu’il est beau. Bien entendu, cette belle alliance n’est pas aussi bien intentionnée qu’il n’y paraît, chaque camp comptant bien exploiter ce qu’il prend pour de la bêtise crasse de la part de son vis à vis. Et à ce petit jeu, ce sont les Necrons qui sortent gagnants, laissant leurs frères d’armes encaisser le gros de l’assaut Tyranide et exfiltrant discrètement leur souverain aphone en plein cœur des combats, mettant par là même un point final aux rêves pieux de reformatage sauvage à l’encontre de ce dernier entretenus par les Blood Angels. 38.000 ans après Deep Blue et Kasparov, la machine s’est donc à nouveau jouée de l’humain. Rien d’étonnant celà dit : les seniors et l’informatique, ça fait deux, c’est connu.Fin Spoiler

AVIS :

Il est une règle informelle et malheureuse au sein de la BL voulant que les écrits mettant en scène des Necrons soient généralement assez peu qualitatifs. Outre le fait que le mutisme généralisé et les motivations minimalistes de cette faction la rendent assez ennuyeuse pour le lecteur, la tendance des contributeurs de la Black Library à utiliser l’exploration du tombeau mystérieux comme intrigue est assez assommante, la « chute » de ce genre de récit étant connue des pages à l’avance. On n’est cependant jamais à l’abri d’une bonne surprise, et The Word of the Silent King fait définitivement partie de ce type de soumission. Goulding fait en effet bon usage du fluff remanié des Croncrons, dont la parole s’est libérée et les ambitions pour la galaxie complexifiées un chouilla, ce qui n’est pas plus mal (d’un point de vue purement littéraire). Le parti pris de raconter son histoire en intercalant les interventions et points de vue d’un cyborg et d’un androïde permet de se familiariser avec chaque faction, et de dérouler le récit de façon somme toute assez neutre, même si les Necrons apparaissent à la lecture comme bien plus civilisés, intelligents et rusés que les brutasses psychotiques, ombrageuses et malhonnêtes qui leur font face… ce qui est d’autant plus savoureux compte tenu du pedigree des Blood Angels et leur réputation d’honorables esthètes.

Si on peut à la rigueur regretter le « sous-emploi » de l’imposant casting de célébrités rameutées par Goulding pour tenir les premiers et seconds rôles de sa nouvelle, en particulier du futur défunt Tycho, qui, fidèle à son titre de Maître du Sacrifice, passera le gros de l’histoire à tenir la chandelle à Dante, sans que sa propre légende funeste ne gagne en profondeur au passage, il faut aussi reconnaître à Goulding l’inclusion d’éléments fluff, pas forcément très impactants en termes d’implications, mais qui ne manqueront pas d’intérêt pour l’amateur, comme tout détail touchant à la Grande Croisade et aux Primarques d’ailleurs. Bref, une offrande des plus solides de la part de notre homme, qui prouve ainsi qu’il sait faire autre chose que manier la faux lorsqu’il tient le stylo. Mais si, c’est possible.

1 : Qui peuvent pourtant compter sur le script buggé des automates d’en face pour éviter l’écorchage. Le fonctionnaire Necron doit en effet viser avant de tirer, apparemment. Overwatch, vous dîtes ? 

2 : Avec Tycho et Dante dans la même pièce, il ne manque plus que le Sanguinator, Vanus Hammerhand et Wurzzag Ud Ura Zahubu pour que le carnaval débute.

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Extinction – A. Dembski-Bowden:

INTRIGUE :

ExtinctionOn ne le sait que trop, les lendemains de cuite sont difficiles. Quand la tournée des bars en question a duré sept ans, impliqué des centaines de milliards de participants sur des milliers de planètes, dont quelques dizaines ont brûlé au passage, et s’est terminée par un projet X débridé dans la maison familiale avec le capitaine de soirée qui s’étouffe dans son vomi sur la banquette arrière de sa Kangoo défoncée, il est somme toute logique d’avoir, très, mais alors trèèèèèèèèèèèèèèès mal aux cheveux pendant quelques temps. Surtout quand on s’appelle Ezekyle Abaddon, et qu’on a un goût immodéré pour les manbuns en palmier1. Nous reviendrons sur le cas de ce mauvais sujet un peu plus tard.

Extinction place donc son propos dans la période trouble qui succède à l’Hérésie d’Horus, qui, si elle n’a pas été une partie de plaisir pour l’Imperium, n’a pas été de tout repos non plus pour les Astartes rebelles, réfugiés dans l’Œil de la Terreur et en proie à de bien compréhensibles dissensions internes en l’absence d’un grand chauve costaud pour claquer le beignet aux éléments perturbateurs. Mais, comme l’éructe Borge Grassens, Prince Démon poète à la moustache remplie de Nurglings : « Or sous les cieux sous vergogne//C’est un usage bien établi//Dès qu’il s’agit de rosser des Sons of Horus//Tout le monde se réconcilie2 ». Tel le chouchou de la maîtresse ayant rappelé à cette dernière qu’elle avait oublié de ramasser les expressions écrites de la classe deux minutes avant la sonnerie, les guerriers de feu le Maître de Guerre se retrouvent en butte à l’hostilité non dissimulée de leurs petits camarades de jeu, qui leur reprochent, non sans raison, d’être responsables de la galère dans laquelle ils se trouvent désormais.

Nous faisons donc la rencontre, pour beaucoup d’entre eux juste avant une capture infamante, un décès prématuré, ou pire, de quelques fistons d’importance, alors qu’ils se retrouvent entraînés dans des explications de texte sans fin avec leurs cousins issus de germain. Le Sergent Kallen Garax peine à trouver les mots justes (pas facile quand on parle Chtonien et le gonze d’en face Nostraman) pour apaiser un gang de bikers Night Lords. Le Techmarine Sovan Khayral insiste impuissant à l’incendie de son véhicule de fonction des mains huileuses d’une bande de Death Guard désœuvrés. Le Capitaine Nebuchar Desh finit par rendre l’âme après une séance un peu trop soutenue avec son/sa Dominatrice Emperor’s Children, qui devra se trouver d’autres chats à fouetter. L’humble frère Zarien Sharak, coursé par une meute de World Eaters souhaitant lui voler son goûter (quand on n’a pas de monde à manger, il faut bien compenser), signe un bail de sous-location mal avisé avec un Démon mal élevé qui le met fissa à la porte de son âme à son corps défendant (ou le contraire). Erekan Juric, Capitaine Reaver, se fait incendier par la bande à Kahotep sur le chemin de la maison. Même la fameuse Kangoo d’Horus traîne son mal-être depuis la disparition du patron, remisée qu’elle a été dans un quelconque parking sous-terrain de l’Œil par ce galopin d’Abaddon.

C’est par un aparté dévolu à ce diable d’Ezekyle que se termine Extinction. Ayant tout bonnement pris un congé proprement sabbatique pour se ressourcer et faire le point sur sa vie, et voyageant de planète en planète pour visiter les attractions touristiques qu’elles ont à proposer (une pyramide ici, un mausolée là, un temple plus loin… c’est une sortie culturelle), Abby regarde de loin ses anciens frères se faire mettre la tête dans la cuvette des toilettes chimiques de leurs Rhinos, guère intéressé par les déboires de sa Légion. Quelque chose me dit toutefois que cela ne durera pas éternellement…

AVIS :

Prologue à sa saga consacrée aux origines de la Black Legion, cette Extinction permet à Dembski-Bowden d’afficher sa maîtrise de la nouvelle d’ambiance. Il ne se passe en effet pas grand-chose dans ce court format, la succession de vignettes illustrant les déboires de la marmaille horusienne permettant seulement de prendre la mesure de la mauvaise passe que cette dernière traverse, orpheline de Primarque, traumatisée par sa défaite sur Terra, n’ayant plus d’objectif autre que la survie et ciblée à outrance par ses partenaires de crime. Pour autant, Extinction reste l’une des lectures les plus agréables de Croisade & Autres Récits, la patte d’ADB rendant chaque passage intéressant, chaque personnage attachant, et préparant parfaitement le terrain pour le début de la geste Abaddonienne, que le lecteur aura envie d’approfondir après en avoir terminé avec cet amuse-gueule, je gage. Il est fort l’animal, il est fort.

1 : Ca irrite le cuir chevelu comme pas possible et c’est très mauvais pour le bulbe.

2 : La rime est pauvre mais l’argent ne fait pas le bonheur.

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Sarcophagus – D. Annandale :

INTRIGUE :

SarcophagusDu temps où Armageddon était encore la priorité de l’Imperium en termes de conflit, et bien avant que cette feignasse de Guilliman se tire enfin de dessous sa couette après sa grasse matinée plurimillénaire, nous retrouvons un héros impérial, un vrai, en la personne de cette vieille baderne de Commissaire Yarrick. Guéri de sa lubie offensive après la péripétie de Golgotha, Seb la Pince est tiré de sa pré-retraite par le retour de son vieux copain Ghazghkull, déterminé à fêter comme il se doit ses noces d’azalée avec Armageddon, qui débarque en forme et en force sur la planète, 57 ans plus tard. Notre propos traite d’une anecdote mineure ayant pris place durant la 3ème guerre planétaire (les guerres mondiales, c’est connoté), alors que Yarrick s’était octroyé un week-end de repos1 dans l’arrière rucher Armageddonesque.

Ayant pris un AirBnB dans la petite bourgade d’Anaon (3 milliards d’habitants à peine), notre stoïque senior accepte de jouer le jeu de la propagande en passant en revue les troupes, serrant quelques paluches et pinçant les joues des bébés (avec sa bonne main j’espère, sinon les parents risquent d’être un peu surpris), afin de soutenir le moral des assiégés. Ces formalités effectuées, il faut penser à retourner au front, le vrai, mais cela ne pourra pas se faire par voie aérienne pour cause de bataille entre Marauders impériaux et chassa-bombas orks dans la zone. Qu’à cela ne tienne, Yarrick use de son charme légendaire, de son regard de braise et de son haleine parfumée pour convaincre un convoi blindé en partance pour Tartarus de le prendre à son bord. C’est avec grand plaisir que le Capitaine Veit Morena de la Légion d’Acier accepte de prendre sous son aile et blindage renforcé le héros de tout un peuple, même si je me demande bien comment Yarrick arrive à rentrer son énorme engin dans un habitacle de tank fort exigu. Les voies de l’Empereur sont décidément impénétrables (mais les écoutilles de Leman Russ, non).

Malheureusement pour nos easy riders, la route n’est pas de tout repos. L’arrivée d’une paire de Gargants sur la ligne d’horizon force la colonne blindée à faire un large détour pour éviter cette fâcheuse rencontre, ce qui, en plus de mettre Yarrick en retard pour son épisode d’Inspecteur Morse du dimanche soir, met son escorte sur le chemin d’une escadrille Ork. Pris à découvert par un ennemi tout aussi mortel et invulnérable que les gundams peaux-vertes, les impériaux prennent une drache des plus sévères, qui retourne le tank du Commissaire priseur (plus facile que de fumer la pipe avec une seule main) comme une crêpe, et met ce dernier KO pendant un petit moment.

À son réveil, et constatant rapidement qu’il est probablement le seul survivant du véhicule grâce à son statut de personnage nommé et renommé, Yarrick se retrouve confronté à des problèmes pratiques d’un genre un peu spécial. Plongé dans le noir, sans possibilité de s’orienter et piégé par l’épaisseur même du blindage après que ce dernier lui ait probablement sauvé la vie, Seb se résout finalement, après une longue discussion avec lui-même (c’est moche la vieillesse tout de même) à pianoter la carlingue de son petit studio avec sa pince métallique, dans l’espoir d’attirer l’attention de quelque bon samaritain.  Après de longues heures de We Will Rok You qui durent sans aucun doute donner à notre héros une migraine carabinée, la délivrance pointe enfin le bout de son nez… qu’elle a court et camus, puisque c’est une bande d’Orks en maraude qui décide d’investiguer ce cas de tapage diurne/nocturne.

Dans son malheur, Yarrick a toutefois de la chance car les peaux vertes qui assaillent son bunker sont à peu près aussi bien équipés qu’un élève de Segpa à la fin du deuxième trimestre. Venus avec leurs fling’, leur kikoup’ et leur irrépressible bonne humeur, les Orks tombent comme des mouches devant l’intraitable grand-père, dont le regard sévère, le pistolet bolter et le direct du droit de super welter repoussent leurs assauts désordonnés. La situation reste toutefois précaire pour notre ami manchot, conscient que le poids du nombre, ou même une simple grenade bien placée, finiront fatalement par venir à bout de sa volonté farouche. C’est donc avec un soulagement non feint qu’il accueille l’arrivée à propos d’un Thunderhawk des Black Dragons, dont les occupants ont tôt fait de mettre la vermine verte en déroute. Sauvé par le (dra)gong, Yarrick est libre de retourner à ses pénates, mais réalise avec stupeur qu’il doit très probablement son sauvetage à son admirateur secret, qui a pris soin d’envoyer une bande de tire au flanc équipés de pistolets à bouchons sur la zone du raid aérien, plus pour attirer l’attention des impériaux que pour régler son compte au Commissaire. Quand on aime, on ne compte pas (la vie de ses boyz), c’est bien connu.

AVIS :

Première nouvelle consacrée par Annandale à sa figure fétiche lue par votre serviteur, Sarcophagus  ne m’a pas vraiment impressionnée. Si ni l’intrigue, ni le déroulé de cette histoire ne se sont révélés être objectivement mauvais, je ne peux m’empêcher de penser, après avoir terminé la lecture de cette dernière, que l’idée que l’auteur souhaitait exploiter ici (la relation d’amour-haine nouée entre Yarrick et Ghazghkull au fil des années et des affrontements) aurait pu être développée d’une façon plus convaincante. L’internement forcé du Commissaire donne certes l’occasion à Annandale d’explorer un registre assez peu usité en règle générale par la Black Library (le survivalisme), mais comme on sait pertinemment que le héros s’en sortira sans trop de casse, la tension narrative reste assez lâche. Autre déception, la pauvreté des apports fluff de ce Sarcophagus, qui jouait pourtant sur du velours en mettant en scène un des personnages les plus connus, au cours d’une des batailles les plus connues, sur une des planètes les plus connues, du background de Warhammer 40.000. Eh bien, malgré ces circonstances très favorables, il n’y a pas grand-chose à se mettre sous la dent, tant sur Yarrick que sur Armageddon. Bref, une assez grosse impression de gâchis pour ma part, et un cachetonnage sans gloire pour der Kommissar. Schaden.

1 : Et encore, ce n’est pas dit. De son propre aveu, la dernière fois qu’il s’est autorisé un break remonte à sa croisière sur le Space Hulk de Ghazghkull, et plus précisément aux quelques secondes de chute libre qui ont suivi sa projection dans une dorade par ce farceur de Big Boss. Depuis, plus rien. Ça c’est de l’économie d’énergie.

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The Purity of Ignorance – J. French :

INTRIGUE :

The Purity of ignoranceNotre nouvelle commence par l’interrogatoire serré mais décousu subi par le Lieutenant Ianthe du Régiment des Agathian Sky Sharks. En face de l’officier, un prêcheur impérial s’étant introduit comme Josef, se montre très intéressé par les états de service de son interlocutrice, qui peine à comprendre pourquoi il tient tant à ce qu’elle les passe en revue en boucle1. Il s’agit toutefois de la première fois qu’Ianthe collabore avec l’Inquisition à laquelle Josef appartient, et notre héroïne se dit que cela doit faire partie de la procédure de recrutement classique des saints Ordos, et se plie donc sans broncher au petit jeu du déroulé de CV. Il n’y a de toutes façons pas grand-chose à gagner à mettre un rogne un représentant d’une institution qui peut vitrifier votre monde natal sans avoir à se justifier, n’est-ce pas ?

Ailleurs, sur le monde de Tularlen, la Gouverneure Sul Nereid s’éveille dans le luxe de ses quartiers privés. La pauvresse a fait un horrible cauchemar, mais rien qui ne puisse être oublié par un bon petit déjeuner et une représentation privée du dernier ballet donné à l’opéra de la spire. En cela, Nereid a la chance de pouvoir compter sur la dévotion et le professionnalisme de son majordome Saliktris, qui semble toujours deviner ce qui lui ferait plaisir et se met en quatre pour satisfaire les envies et appétits de sa maîtresse. Et cette dernière a bien besoin de se détendre de temps à autres, les soucis posés par la gestion d’un monde impérial étant bien lourds à supporter.

Le premier acte du Lac des Razorwings est toutefois brutalement interrompu par l’arrivée de l’Inquisiteur Covenant et de sa suite, qui plutôt que de se faire annoncer au rez-de-chaussée de la ruche, ont opté pour une entrée fracassante par la baie vitrée, vérifiant une nouvelle fois le dicton que personne ne s’attend à ce que l’Inquisition passe par les velux. Coco et Cie sont confrontés à une vision d’horreur de 4.3 sur l’échelle du Nighthaunter2, musiciens et danseurs se révélant être des cultistes lourdement pimpés selon les goûts pointus, acérés même, du Prince du Chaos. Saliktris, quant à lui, est un authentique Héraut de Slaanesh, trop heureux d’obtempérer lorsque sa maîtresse lui ordonne de chasser les importuns, et par la force s’il le faut. Dans la bagarre qui s’en suit, Ianthe bénéficie d’une introduction approfondie aux us et coutumes chaotiques, la mélée confuse mais colorée qui engloutit les quartiers gouverneuriaux prélevant un lourd tribut sur les membres de son escouade ainsi que sur sa santé mentale.  À ses côtés, Covenant et ses sidekicks réguliers (Josef et Severita), plus aguerris que leur nouvelle recrue, s’illustrent de sanglante façon, jusqu’à ce que Salikris soit banni dans le Warp, et que cette fieffée profiteuse de Nereid écope d’un blâme, pardon d’un blam !, lorsque Ianthe parvient à la mettre face à ses responsabilités et au canon de sa carabine laser.

Début spoilerLe cœur de l’infection ayant été purgé, il ne reste plus au représentant de l’Ordo Malleus de donner quelques directives à son personnel pour que les quelques milliers de personnes ayant eu le malheur de fréquenter la défunte au cours des dernières années soient rapidement mises hors service. Dura lex sed lex. Se pose également la question du devenir d’Ianthe, qui, au cours de l’opération, a retrouvé la mémoire, et compris qu’elle servait en fait Covenant depuis de nombreuses années, mais avait été consciencieusement reformatée à la suite de chaque mission pendant laquelle elle avait été exposée au Chaos (ce qui doit arriver assez souvent dans ce type de profession), pour le salut de son âme et la sécurité de tous. Il lui appartient donc de faire le choix auquel elle est soumise à chaque réunion retex : un lavage de cerveau ou un bolt dans la tête. Présenté comme ça, c’est assez facile de trancher. Mais cette fois, à la surprise générale, Covenant adouci un peu le deal proposé à son sous-fifre, en lui proposant de continuer à le servir avec toute sa tête, jugeant, pour des raisons qui ne seront pas partagées avec l’humble lecteur, qu’elle est prête à vivre avec le poids de la connaissance de la réalité fondamentale de l’univers3. La conclusion de la nouvelle nous apprend qu’Ianthe a choisi de renoncer à la fameuse pureté de l’ignorance, et donc progressé au sein du cénacle d’acolytes de son boss, puisque c’est désormais elle qui remplace Josef pour les entretiens préliminaires. Si cela ne fait pas d’elle une interrogatrice, je ne sais plus à quel saint me vouer.Fin spoiler

AVIS :

Connaissant les capacités de French, je m’attendais à ce que son The Purity of Ignorance soit d’un niveau un peu supérieur à ce qui a été présenté ici. Reposant sur une série de révélations, sa nouvelle souffre à mes yeux de ne pas suffisamment « préparer le terrain » à ces dernières, qui arrivent donc sans jouer à plein. Si la corruption de la Gouverneure est cousue de fil blanc, bien que les passages introductifs narrés de son point de vue laissent à penser que tout va parfaitement bien sur Tularlen, c’est l’amnésie induite de son héroïne qui aurait vraiment gagné à être davantage exploitée. Point de flashbacks fugaces, de sensations de déjà vu inexplicables ou de réminiscences troublantes pour Ianthe en effet, qui est confrontée, et le lecteur avec elle, au constat de ses nombreux brainwashing de façon brutale, alors que la suture psychique qui lui avait été faite tenait jusqu’à ce moment parfaitement bien. Au lieu d’une nouvelle à twist final, nous nous retrouvons donc « seulement » avec une illustration romancée d’une dure réalité (encore une) de l’Inquisition, qui n’hésitera pas à se débarrasser des éléments ou des individus pouvant poser un problème à l’accomplissement de sa mission sacrée. Cela est certes éducateur (n’oublions pas que la nouvelle a été incluse dans l’anthologie Croisade et Autres Récits), mais cela aurait pu être intéressant d’un point de vue littéraire en sus. Petite déception donc.

1 : N’oublions pas que le bon Josef est sourd comme un pot. Il avait peut-être seulement oublié de brancher son sonotone aujourd’hui.

2 : Un des héritages peu connus mais essentiels que ce brave Curze a laissé à l’Imperium.

3 : Ou peut-être qu’il en avait marre de lui expliquer comment fonctionnait l’imprimante tous les quatre matins.

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Red & Black – J. Swallow :

INTRIGUE :

Red and BlackLa vie dans l’Adepta Sororitas n’est pas un long fleuve tranquille, contrairement à ce que les rapports officiels et le journal de 13h peuvent faire croire. Bien que le gros de l’activité consiste bien à aller purger des infidèles par le feu et la fureur d’un bout à l’autre de la galaxie, certaines missions un peu particulières peuvent échoir aux représentantes du Ministorum. Prenez la Céleste Mirya par exemple : convoquée par sa manager, la Prieure Lydia, alors qu’elle vaquait à ses occupations sur la station orbitale de Zhodon, la bonne Sœur apprend qu’elle et ses filles sont dépéchées sur la planète de Hollos, avec laquelle des contacts viennent d’être repris après une isolation plurimillénaire causée par des tempêtes Warp impénétrables. Si Lydia insiste lourdement pour que le bras ganté et armé de l’Ecclésiarchie soit du voyage, c’est parce que l’émissaire envoyée par Hollos pour poker l’Imperium se trouve être un clone, ou Replicae en anglatin du 41ème millénaire, ce qui est rigoureusement interdit par le culte impérial, comme les chaussettes sandales et les pizzas hawaïennes. Ce qui a sauvé l’ingénue diplomate hollosienne d’une mort rapide après sa prise de contact est justement la dévotion dont elle fait preuve envers l’Empereur, ce qui lui a gagné le bénéfice du doute auprès des autorités compétentes. Bref, Lydia instruit sa grouillotte de mener son enquête sur la situation de Hollos, et d’agir en conséquence si la planète se révèle particulièrement « inculte ». Mirya ne se fait pas prier (c’est le job de Lydia), et part sans tarder vers le monde prodigue, accompagnée de son escouade, d’un Magos Questor nommé Genus Nohlan, et de la fameuse Replicae, Rho.

Une fois arrivés sur place, les envoyés impériaux découvrent une planète prospère, pacifiée et pacifiste, mais, et c’est fâcheux, peuplée d’une forte minorité de Replicae, ce qui fait grincer les dents des fifilles de l’Empereur. Pire, les clones bénéficient d’un statut égal à celui des « vrais » gens, et forment même la classe dirigeante de Hollos, comme le prouve la composition du Conseil Suprême planétaire, dont six des huit membres (dont Rho, qui devait être la Jeanne Lassalle locale, pour partir en pèlerinage malgré son mandat électif) sont des Replicae. Bien que Rho fasse tout son possible pour arrondir les angles, Mirya ne se montre guère encline à la conciliation avec les sans nombrils, et sa méfiance instinctive se retrouve rapidement confirmée par l’attentat impromptu déclenché par de Rep’ sanguinaires (simplement appelés « les Rouges » par les citoyens respectables de Hollos, comme quoi, la lutte des classes ne s’est pas pacifiée dans le lointain futur). Ces derniers sont, repoussés à grand peine par les rafales disciplinées, puis, en dernier recours, les jets de prometheum embrasé, des Sororitas, guère aidées par la non-violence militante de leurs hôtes. Alors que Mirya fait mine de retourner à son vaisseau après avoir exprimé en termes non incertains à Rho et autres onomatopées qu’ils n’ont pas fini d’entendre parler d’elle, elle tombe dans l’embuscade montée par une des conseillères humaines d’Hollos (Ahven), dont les compétences relationnelles sont tellement limitées qu’elle trouve plus pratique d’envoyer de seringues hypodermiques que des mails d’invitation à son interlocutrice pour obtenir un rendez-vous discret.

Se réveillant péniblement dans les quartiers d’Ahven, Mirya est sur le point de donner à Hollos ses premiers martyrs lorsque son hôte parvient à apaiser sa furie vengeresse en révélant que beaucoup des humains de la planète ne supportent plus le joug des Replicae, qui ont pris les rênes du pouvoir il y a des siècles à la suite d’une guerre civile pendant laquelle ils avaient été utilisés comme soldats privés de volonté. Ayant réussi à évoluer et à développer leur libre arbitre, les Replicae, supérieurs à leurs maîtres sur tous les plans, ont fini par devenir la classe dirigeant de Hollos, et bien que leur règne soit assez bienveillant, les humains leur en veulent de leur avoir piqué leur place. Ahven implore donc Mirya d’aider les vrais sujets de l’Empereur à prendre en main leur destin, ce que Mirya semble plutôt disposée à faire, bien qu’elle reparte (pour de bon cette fois) sans avoir pris d’engagement ferme sur le sujet.

Le lendemain, les négociations sont définitivement interrompues par un nouveau coup de force des Rouges, qui sont utilisés comme armes de terreur par les humains rebelles contre les Replicae « Roses ». Le nombre des assaillant est tel que les Sororitas n’ont aucun espoir d’avoir gain de cause, d’autant plus que les cerveaux de l’insurrection, Ahven et sa clique, se sont révélés être des cultistes de Tzeentch, et ont écopé de quelques bolts correctifs pour leur peine lorsqu’ils ont tenté (sans succès) de rallier les filles de l’Empereur à leur petite révolution. Face à l’inaction défaitiste des Replicae, Mirya décide de prendre les choses en main, et ordonne à Nohlan, qui fricotait de son côté depuis le début de la mission, de libérer le virus egophage qu’il a mis au point en autopsiant un cadavre de Rouge la veille. Ce dernier réactivera le mode no brain des Replicae tel qu’il existait à la base chez les premiers modèles produits, avant que les clones ne développent une personnalité. Evidemment, Rho et consorts ne sont pas emballés par le projet, mais quand on est non violent à 40K, on n’a pas son mot au chapitre, et le reformatage massif de la population de Hollos est initié sans délai, permettant de repousser les assauts des Rouges grâce à la lobotomisation des Roses, envoyés au front comme de bons petits soldats.

La situation rétablie et l’ordre naturel restauré, Mirya et consœurs sont libres de retourner vaquer à leurs tâches usuelles dans le reste de l’Imperium, alors que les fonctionnaires des différentes institutions impériales débarquent par croiseurs entiers pour mettre la planète sous coupe réglée. Moralité : mieux vaut être seul (dans l’espace) que mal accompagné (d’osier).

AVIS :

Swallow et les Space Dévotes, c’est une affaire au moins aussi débattue que Swallow et les Space Vampires, et le consensus ne semble pas, là encore, pencher en faveur de notre amie l’hirondelle. Pour ma part, Red & Black m’a fait l’effet d’une soumission correcte sur sa forme, pas spécialement mémorable ni divertissante à lire, mais très loin d’être horrible. Pour qui n’a jamais pratiqué l’Adepta Sororitas (de façon littéraire, hein, bande de petits Slaaneshi dévergondés), cette nouvelle, qui est en fait l’adaptation d’un audio book, peut servir d’introduction convenable aux meilleuses de l’Empereur, même si on peut reprocher à Swallow de n’avoir fait ressortir que les caractéristiques les plus caricaturales de la faction (la coupe au bol, le mauvais caractère et les tendances pyromanes). Il aurait été à mon avis plus intéressant d’explorer les attributs les plus singuliers des ordres militants de l’Ecclésiarchie, surtout par rapport aux autres forces armées de l’Imperium que sont la Garde Impériale et les Space Marines. Pour moi, cela aurait pu se faire par une mise en avant du fanatisme des sœurettes (assez mal illustré par l’approche plutôt conciliante de Mirya, malgré ses bougonnements) et du lien particulier qu’elles entretiennent avec l’Empereur, miracles à l’appui. Au lieu de ça, la Céleste et ses tourterelles de combat se contentent de jouer aux gros bras, d’une façon tout à fait « classique », ce qui est dommage pour une nouvelle faisant partie d’un recueil introductif.

L’autre idée intéressante de Red & Black, les Replicae et la manière dont ils sont considérés par l’Imperium, aurait pu prendre une toute autre ampleur si Swallow avait poussé un peu plus le curseur de sa nouvelle vers la réflexion philosophique engendrée par cette cohabitation entre humains et clones. McNeill avait choisi cette approche dans The Last Church, sur un autre sujet certes, ce qui avait permis un échange abouti d’arguments entre les tenants de deux points de vue tranchés et inconciliables, mais raisonnables l’un comme l’autre. Ici, le lecteur n’a pas vraiment d’alternative à la synthesophobie ancrée des héroïnes (qui n’est guère explicitée d’ailleurs, l’Empereur ayant interdit les intelligences artificielles mais pas les expériences biologiques1 poussées, à ma connaissance), la non belligérance de Rho lui interdisant visiblement d’aller au clash avec ses invitées sur le sujet. Bon, c’est vrai que fâcher quelqu’un qui transporte des torpilles cycloniques, c’est pas franchement une bonne idée, mais tout de même, le débat d’idées aurait été intéressant, même si, au final, il était couru d’avance que l’histoire se terminerait mal pour les Replicae. S’il y a une constante dans l’Imperium de Pépé, c’est que l’Homo Normalis doit régner en maître…

: Il est d’ailleurs drôle de lire que les Soeurs considèrent un être n’étant pas né d’une matrice naturelle comme dépourvu d’âme… Ce sont les Primarques qui seraient ravis de l’apprendre.

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The Zheng Cipher – J. Reynolds :

INTRIGUE :

The Zheng CipherEnvoyée à la rescousse des habitants du monde minier Kotir-8, convoité par une flotte ruche souhaitant remédier à sa carence en fer sans manger d’épinards (on la comprend), l’escouade de Skitarii d’Alpha 6-Friest, vétérane dure à cuire et édentée de l’Omnimessie, se fraie un chemin à travers les hordes chitineuses jusqu’à l’ultime bastion impérial de la planète. Si les cafards de l’espace ne font pas long feu face aux carabines à radium de la soldatesque martienne, cette dernière n’est pas venue pour faire de l’humanitaire. Son seul objectif est de récupérer le testament du Magos Explorer Arcturus Zheng, porté disparu dans les Astres Fantômes et canonisé depuis par l’Omnimessie. La découverte fortuite sur Kotir-8 de ce qui serait l’ultime billet d’humeur de Zheng avant sa sortie des radars a fait de cette insignifiante planète une cible prioritaire pour les supérieurs d’Alpha, et cette dernière compte bien mener la mission qui lui a été confiée à son terme. Mais alors que les derniers défenseurs de Kotir se réjouissent à l’idée d’être évacués de leur monde condamné, il faudra bien que quelqu’un informe ces pauvres âmes que seule la mort met fin au devoir…

AVIS :

On a connu Josh Reynolds plus inspiré dans ses soumissions pour la BL. Le récit de la mission de sauvetage (ou plutôt de sauvegarde, vu que la cible est un paquet de bits) menée à fond l’irradiation par Alpha Blondie et ses Becquerel Boys se révèle être un shoot ‘em all des plus basiques, à peine relevé d’un fond de grimdark par le sacrifice, consenti de plus ou moins bon gré, des défenseurs impériaux afin de permettre aux dernières volontés de Zheng1 d’être récupérées par le notaire patientant en orbite. Si voir des Skitarii maniant des armes vraiment sales en action est plutôt sympathique, le manque d’originalité de ce Zheng Cipher s’avère rédhibitoire, et font de sa lecture une opération dispensable, pour le nouveau venu comme pour le vétéran. Circulez, il n’y a pas grand-chose à lire…

1 : Qui ne seront même pas communiquées au lecteur, qui attendait pourtant une petite révélation fluff pour sa peine… quelle cruauté, Mr Reynolds.

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A Sanctuary of Wyrms – P. Fehervari :

INTRIGUE :

A Sanctuary of WyrmsSortie minor, pour ne pas dire minable, de la promotion Pierre Bellemare de l’IEP (Institut des Etudes Potables) de T’au, la jeune Por’ui Vior’la Asharil de la Caste de l’Eau écope fort logiquement d’une première affectation loin d’être glamour au sein de l’empire. La voilà donc rendue sur Fi’draah (dont les trois premières lettres sont silencieuses), monde aussi attirant et salubre qu’une vieille éponge moisie à moitié immergée dans de l’eau croupie. Prétendant à qui veut l’entendre que c’était tout à fait ce qu’elle voulait faire, et qu’elle est très reconnaissante envers l’administration éthérée de ce poste valorisant (ce qui ne manque pas de susciter l’incompréhension, puis la défiance du sous-préfet placardisé – encore que pour la Caste de l’Eau, on pourrait dire bidetisé – auquel elle vient se présenter à son arrivée), Asharil peut toutefois maudire intérieurement sa mauvaise fortune lorsque son parcours d’intégration la mène à accompagner une expédition scientifique au cour des jungles impénétrables qui recouvrent le continent le plus sauvage de la planète, toujours contestée au Bien Suprême par les troupes de l’Imperium.

En compagnie de notre enthousiaste pipoteuse, nous retrouvons le cartographe Mutekh et son alternant Xanti, tous deux Terrestres jusqu’au bout des sabots, et la Shas’ui Jhi’Kaara, guerrière de feu intraitable et balafrée, escortée de sa fidèle bande de gue’las. Tout ce petit monde embarque pour une croisière au long cours dans les méandres marécageux du Coil, la zone de Fi’draah que Mutekh tient à reconnaître, malgré la très mauvaise réputation qu’elle a aux yeux des tribus d’humains dégénérés qui y vivent. Après quelques semaines à regarder la dengue et la dysenterie dans les yeux, nos intrépides explorateurs ont vent d’un lieudit pittoresque de la bouche des farouches Nirrhoda, les Sentinelles (les nôtres, pas les leurs, hein) locales, qui l’ont baptisé le Sanctuaire des Vers, en partie à cause des nombreux arbrémones (à la piqûre mortelle, sinon c’est pas drôle) qui ont colonisé l’île sur laquelle ce qui semble à nos héros être un complexe impérial abandonné a été construit. Mutekh tenant bien évidemment à investiguer cette trouvaille, la petite troupe débarque donc, essuie son premier mort (un humain ayant raté un test d’Initiative), et se retrouve victime de la nullité crasse d’Asharil, qui n’est pas foutue d’identifier le gros « I » barré de trois lignes horizontales embossé sur la porte d’entrée, ce qui me semble pourtant être le B.A.BA pour une diplomate diplômée. Il y a vraiment des Masters qui ne valent pas tripette.

Les aventuriers progressent dans les ténèbres moites du lieu, rencontrant sur leur passage des indices inquiétants sur la nature de la catastrophe qui a poussé les occupants de la station à prendre la poudre d’escampette, depuis les verrous placés à l’extérieur des portes pour empêcher quelque chose de sortir, jusqu’au cadavre isolé d’un techadepte qui a avalé son pistolet laser plutôt que de se laisser prendre par quelque chose. Evidemment, ça n’empêche pas le Tryphon Tournesol de l’expédition de pousser toujours plus en avant et profondément dans les ruines, et nos héros finissent par déboucher dans les niveaux inférieurs du complexe, où les choses prennent un tour beaucoup plus précis et sinistre…

Début spoiler…En effet, les T’aus directeurs exhument un charnier de cultistes Genestealers à l’humanité des plus douteuses, tandis qu’un peu plus loin, c’est le cadavre d’un Marine de la Deathwatch qui les attend (bien que personne dans le groupe ne soit foutu d’identifier l’allégeance du défunt1). Il en faut toutefois plus pour décourager Mutekh, qui entraîne ses baby-sitters jusqu’au cœur du réacteur, en croisant ça et là les restes du reste de l’escouade de la Chambre Militante de l’Ordo Xenos. Le malaise est à son comble lorsque les touristes débarquent dans le laboratoire central de la station, où un cadavre d’Iron Fist Deathwatch les attend, ainsi qu’une sorte de trompette de la mort géante. Ayant plus ou moins compris que l’endroit avait servi de base de recherche à l’Imperium sur les Genestealers, avant que quelque chose ne se passe, les détectives en herbe sont tirés de leur savante supputation par la bourde de Mutekh, qui fait exploser le champignon en essayant d’en prélever un morceau, avec des conséquences tragiques.

Les spores libérées par ce coup de scalpel mal avisé induisent en effet des changements rapides et douloureux chez les malheureux qui ont la malchance de les inhaler, les transformant en hybrides Genestealers en quelques secondes. Qui a dit que les trips aux champignons étaient sans danger ? Dans la bagarre qui s’en suit, la plupart des imprudents finissent en omelette, à l’exception de la coriace Jhi’Kaara et d’Asharil, piquée par un assaillant mais sauvée par le réveil inopiné de l’Iron Hand, qui puise dans ses derniers 1% de batterie pour pistonner un hybride un peu trop insistant, avant de se remettre en stase non sans avoir demandé le pouvoir un chargeur i-Phone à son obligée.

La suite et la fin de la fin de la nouvelle verra les trois rescapés décider de la marche à suivre, Jhi’Kaara remontant à la surface pour passer le message aux autorités locales, tandis que le cyborg, une fois dûment rechargé, et l’ondine, se sachant condamnée par le venin du Genestealer, décident d’aller purger le reste de la station, pour le Trône Suprême et le Bien de Terra, ou quelque chose comme ça. Sortez le fongicide, ça va charcler dans les chaumières.Fin spoiler

AVIS :

Peter Fehervari livre une adaptation à sa sauce du classique scénario de l’exploration d’un lieu qu’il aurait mieux valu laisser en paix, et parvient à sublimer son sujet en l’estampillant fortement 40K et « Dark Coil » (son coin de galaxie personnel), pour un résultat des plus dépaysants (T’au obligent), atmosphériques (intrigue oblige) et intéressants (une constante chez notre homme). On savait Fehervari très à l’aise avec les serviteurs du Bien Suprême, qui trouvent sous sa plume une profondeur et une complexité rare parmi les contributeurs de la BL, mais il ne démérite pas non plus avec la Deathwatch, qui, bien qu’elle soit ici représentée par un individu peu loquace (mais qui a de bonnes raisons pour cela), est utilisée tout à fait à propos. Par ailleurs, l’auteur fait progresser un peu le fluff des cultes Genestealers en démontrant que les prodigieuses capacités d’adaptation de l’espèce rend très dangereux le développement d’armes bactériologiques contre cette dernière, qui a toutes les chances de vaincre, puis de mettre à profit les toxines à laquelle elle est confrontée pour évoluer en une variante encore plus mortelle. De là à se retrouver confronter à des Genestealers solubles qui infecteraient les cours d’eau à la Prometheus, il n’y a qu’une ou deux expériences ratées de la part d’un Inquisiteur de l’Ordo Xenos un peu trop zélé. Bref, le danger que représente la Grande Dévoreuse pour la galaxie en ressort grandi, et c’est précisément ce qu’on aime lire sur les Tyranides, non ? Mention Bien (Suprême) pour Peter Fehervari, comme d’habitude j’ai envie de dire.

1 : Asharil prouvant son inutilité en faisant juste remarquer que le sens esthétique de l’Astartes laissait franchement à désirer (il faut dire qu’un Imperial Fists avec un bras argenté, c’est moche).

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Howl of the Banshee – G. Thorpe :

INTRIGUE :

Howl of the BansheeDans un Temple Aspect de Biel-Tan, un groupe de thérapie primale très porté sur la vocalisation du ça se réunit sous la houlette de l’Exarque Clyona. Les sœurs Banshees ont entendu l’appel de ce bâtard de Khaine (c’est elles qui le disent, pas moi), qui déteste utiliser des SMS, et se préparent à revêtir leurs masques de guerre et aller accomplir la volonté divine. Après un petit rituel d’auto-motivation à base de positive thinking shouting et de quelques gouttes de sang, les crieuses partent en effet sur le Vaisseau Monde abandonné de Lanimayesh, que la Christine Haas locale a vu entrer dans le deuxième décan de Jupiter, avec des conséquences funestes pour les verts et blancs.

Une fois sur place, et chargées de la protection rapprochée du Prophète de garde en compagnie de quelques Dragons de Feu et Gardiens, les pitchouns sont rapidement confrontées aux démons qui squattent les lieux depuis le départ des anciens proprios. Très motivées et vindicatives, mais pas disciplinées pour un caillou esprit, les Banshees foncent dans le tas avec abandon, ce qui finit par se payer cash lorsque la petite dernière de la bande, une nerveuse dénommée Kailleach, décide de se payer un Héraut de Khorne en solo, ce qui dépasse légèrement ses capacités et probabilités statistiques. Si la jeunette s’en sort avec quelques bleus, sa témérité coûte cher à ses collègues, l’Exarque et une autre pleureuse professionnelle finissant chargées sur leur pierre externe pour leur peine.

Confrontées au même problème qu’un Apothicaire Space Marines devant récupérer les glandes d’un frère de bataille tombé du mauvais côté de la barrière, les survivantes se retrouvent face à un dilemme éthico-logistique : que faire de la dépouille de Clyona, dont l’âme a rejoint celles de ses prédécesseurs dans la douzaine de pierres esprits que compte l’armure de l’Exarque ? Comme toutes les Eldars, les frangines sont bien trop fashion pour avoir des vraies poches (et les sacs à main sont restés au QG), ce qui rend la récupération problématique. Pressées par le temps, la sororité décide de finir la mission et de revenir looter le cadavre sur le chemin du retour, ce qui semble être une solution convenable.

Ayant permis au Prophète d’éteindre l’ordinateur de bord, resté en veille depuis des millénaires, en toute sécurité, les Banshees tournent les talons aiguilles pour aller chercher les restes mortels de leur infortunée patronne. C’est évidemment le moment que choisissent les démons pour lancer une attaque en force, ce qui complique considérablement l’opération, d’autant plus qu’un Prince Démon a décidé de se joindre aux réjouissances. Quelques chassés fouettés et triples axels plus tard, le colis est pourtant sécurisé par les survivantes, qui peuvent s’extraire de Lanimayesh à la faveur d’un portail conjuré par leur sherpa. C’était moins une. De retour dans le temple, nos héroïnes font ce qu’elles font le mieux, c’est à dire causer et se chamailler, et rendent un hommage assez tiède à l’impavide Clyona, dont la dévotion à Khaine avait pris le pas sur sa cordialité et sa sociabilité. Elle ne sera donc pas tellement regrettée (quelles pestes tout de même ces Zoneilles). La perte est d’autant moins grande que lors du pot de départ donné en l’honneur de la défunte, on comprend aisément que sa place va être briguée par Fiyanna (même si Fiygertrude et Fiyalberte étaient sur les rangs également). The showl must go on, comme on dit chez les Mon’keigh.

AVIS :

Pour pourvoyeur régulier de contenus Eldar qu’il soit pour le compte de la Black Library, Gav Thorpe a bien du mal à faire transparaître son enthousiasme pour cette ignoble race dans ses écrits. Howl of the Banshee est ainsi d’une triste banalité, qui s’avère d’autant plus décevante qu’il semble que l’auteur voulait traiter d’aspects « avancés » de la culture des Banshees, rituel de préparation à la bataille, nombreux échanges entre les guerrières masquées et retour d’expérience de ces dernières après la fin de la mission à l’appui. Mais au final, je suis au regret de vous apprendre que l’on n’apprend pas grand-chose de concret, ni ne ressortons avec une meilleure compréhension de la mentalité de cette secte de mégères vociférantes, de cette nouvelle. L’auteur dégaine son shuriken porn pour meubler les pages, et les babannes bannissent leur content de démons à grands coups d’espadons et de remarques mesquines, mais cela ne s’avère guère passionnant. Si vous ne saviez pas que les voies Eldars sont comme des toboggans aquatiques débouchant sur une piscine remplie de piranhas (comprendre que la pente est glissante mais qu’il y a tout intérêt à sortir de piste avant qu’il soit trop tard), maintenant c’est le cas. Sinon, vous venez sans doute de perdre 10 minutes de votre vie.

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Culling the Horde – S. Parker :

INTRIGUE :

Culling the HordeBien que la Waaagh ! Snagrod se soit retirée du monde de Rynn le squig entre les jambes à la suite de l’héroïque défense des Crimson Fists de leur fief (comme quoi, it’s not over until the fat astropath screech), la situation n’est pas encore revenue à la normale sur la planète. Des bandes de pillards Orks rôdent toujours dans l’arrière-pays rynnois, abandonnées par leurs congénères lors du reflux de la marée verte, et il revient aux Space Marines de Pedro Kantor de remettre un peu d’ordre dans la ruralité profonde du domaine du patron, des fois qu’il voudrait aller passer un petit week-end tranquille en province. Cette tâche ardue et ingrate occupe l’escouade de Fists qui nous sert de protagonistes, pas très codicielle dans sa composition du fait de la présence d’un Scout (Riallo) dans le lot, les compagnons d’armes (Mandell, Corella, Veristan et le Sergent Grimm) du Néophyte étant tous des frères de bataille confirmés.

Nos Marines de proximité sont sur la piste d’une bande de nuisibles, que son errance a conduit dans une ferme isolée, avec des résultats tragiques pour les habitants du patelin, retrouvés massacrés, ainsi que leurs animaux, par les peaux vertes en maraude. Alors que ses aînés fouillent les bâtiments à la recherche d’éventuels survivants ou d’ennemis en discutant le bout de gras, Riallo, en bon Scout, fait le guet dans le jardin. Cette sage précaution se retrouve soudainement justifiée lorsque les Orks, pas aussi épais que les Crimson Fists les considèrent, lancent une embuscade sur leurs poursuivants. Cachés sous les cadavres des aurochs qu’ils avaient abattus pour le feune, les Xenos peuvent attaquer les Astartes avec l’effet de surprise de leur côté, même si Riallo a le temps d’en reformer et déformer trois avant qu’ils n’envahissent (à nouveau) la ferme, laissant ses grands copains gérer le reste de la troupe.

L’émoi des mouflets pourpres retombant rapidement, Grimm et ses vétérans se mettent à pied d’œuvre avec le zèle et l’efficacité caractéristiques de leur Chapitre, et corrigent les faquins verdâtres sans guère tarder ni trop transpirer, bien aidés en cela par leur assistance balistique intégrée, qui permet de renvoyer les grenades à l’envoyeur avec une efficacité diabolique. Un petit gadget bien utile. L’assaut repoussé et les proies de l’escouade définitivement mises hors d’état de nuire, il ne reste plus qu’à la patrouille de mettre le feu aux ruines pour empêcher le développement de sporques. Le feu de joie manque toutefois de prendre un tour malheureux lorsqu’un cri perçant vient couvrir les craquements du brasier, révélateur de la présence de civils non identifiés dans les décombres1. Premier à réagir, l’indispensable Riallo, qui aura bien mérité la distinction de combattif de l’étape, se rue à l’intérieur, et parvient à extraire deux fillettes de l’incendie. C’est sur cette image d’espoir, et la promesse d’une promotion rapide pour le Scout, que s’achève la nouvelle. Et ils vécurent heureux servirent l’Empereur jusqu’à la fin de leurs jours…

AVIS :

Que voici une petite nouvelle sympathique de la part de Parker, qui met avec ce Culling the Horde un point final (à ce jour) à ses travaux Crimson Fists, après le roman consacré par notre homme au récit de la bataille pour le monde de Rynn. Bien que l’intrigue proposée ne soit guère originale, l’auteur parvient à intéresser le lecteur aux tribulations, somme toute assez routinières, de sa bande de Space Marines. Un zeste de character development, une pincée de fluff, une once d’optimisme (un vrai happy end dans une soumission de la BL, ça n’arrive pas tous les jours) pour relever un cœur de baston, et ça passe ma foi sans forcer. À le lire, écrire une histoire de Space Marines potable semblerait presque facile. Presque. La marque d’un talent certain.

: Et pourtant, les Space Marines sont censés avoir une ouïe très fine, non ? À croire que les Crimson Fists ont une oreille de Lyman enkystée.

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The Lightning Tower – D. Abnett :

INTRIGUE :

The Lightning TowerSur la Terra impériale du 31ème millénaire, la trahison d’Horus, Primarque, Maître de Guerre et fils favori de l’Empereur, est encore fraîche que ce dernier, jamais à repousser à la décennie suivante ce qui peut être fait cette année, ordonne à son manœuvre portugais inwittien de fiston de fortifier son Palais, en préparation d’un siège qu’il voit déjà se profiler à l’horizon, bien que ce qui deviendra l’Hérésie d’Horus n’en soit encore qu’à ses prémisses. S’exécutant sans broncher, Rogal Dorn, car c’était lui (quelle surprise), se met au travail avec ardeur, bien qu’il lui en coûte de devoir construire des casemates et des miradors sur un site classé au patrimoine galactique de l’humanité. Les considérations esthétiques du Primaçon, habituellement aveugle à toute beauté, ne manquent pas de surprendre ses collègues de truelle (Vadok Singh, le Contremaître de Guerre) et proches collaborateurs (Sigismund, pas encore disgracié, et Archamus, pas encore empalé) parmi lesquels on compte heureusement un psychiatre homologué en la personne de Malcador le Sigilite.

Ayant surpris Rogal traîner sur les remparts du Palais dans le pyjama en pilou qu’il tient de son grand-père1 (un signe manifeste de déprime), le Premier Seigneur de Terra comprend qu’il est de son devoir d’intervenir, et invite donc le rejeton de son boss à une consultation privée dans ses appartements. Ne pouvant décemment pas partir sur le complexe d’Oedipe avec la moitié des Primarques déjà décidés à tuer le père, Malcador opte pour une approche un peu différente, et demande à son interlocuteur ce qui l’effraie, afin de comprendre d’où vient le spleen persistant du Prétorien. Fort à propos, la question avait déjà été soumise à Dorn quelque temps auparavant, lui laissant le temps de considérer le sujet. Ayant décrété qu’il ne craignait personne, le Primarque tente de se donner l’air profond en répondant qu’il avait peur de ce qu’il ne comprenait pas, comme les règles de la belote, la communication de la Black Library ou encore les causes ayant poussé la moitié des Légions impériales à rejoindre la cause d’Horus. Malheureusement pour lui, il en faut plus pour berner le Sigilite, qui sort de ses tiroirs un jeu de cartes ayant appartenu à Konrad Curze, frère ennemi ayant failli tuer Dorn sur Cheraut après une dispute. Voyant son patient tourner au flave2, Malcador enchaîne sur une thérapie accélérée et tire les cartes à ce dernier, avec des résultats plutôt inquiétants. Mais évidemment, ce n’est qu’un jeu, haha. Ça fera 83 €.

La nouvelle se termine sur un Rogal Dorn un peu plus gaillard depuis sa discussion cathartique avec son prof principal, qui se prépare à repousser les assauts des traîtres avec un petit jeu de tower defence. Surpris par son Père en train de niaiser au lieu de faire ses devoirs, le Primarque dissipé jure toutefois qu’il ne laissera pas tomber son Pôpa, qui repart donc sur le Trône l’esprit tranquille mais le colon obstrué (la constipation, quel fléau). Rendez-vous dans sept ans pour que ça commence à vraiment chier sur Terra.

AVIS :

À l’heure où cette chronique est écrite, The Lightning Tower affiche plus d’une décennie au compteur, faisant partie des premiers textes écrits pour l’Hérésie d’Horus lorsque le projet fut initié par la Black Library en 2007, ce qui ne nous rajeunit pas. Pour ceux qui ont vécu l’épopée littéraire que constitue cette saga, cette nouvelle occupe sans doute une place particulière, le témoin d’une époque où le lecteur, probablement enthousiaste, mais peut-être dubitatif, devant cet OLNI, se demandait à quelle sauce il allait être mangé. Ayant sans doute voulu assurer le coup, la BL avait fait le sage choix de confier le début de la série à des contributeurs expérimentés, l’incontournable Dan Abnett en tête. Et force est de constater que, comme son Horus Rising pour les romans de l’Hérésie, The Lightning Tower a parfaitement accompli sa mission, c’est à dire fournir des fondations solides et inspirantes aux publications qui suivirent (qui se comptent aujourd’hui en centaines pour les nouvelles). Bénéficiant de la maîtrise narrative et de la patte littéraire du Wordmaster, cette soumission demeure à mes yeux l’une des meilleures introductions disponibles à cette franchise dans la franchise qu’est l’Hérésie d’Horus. En une vingtaine de pages, elle parvient ainsi à poser les bases de l’intrigue (une trahison monumentale mettant en péril le règne du bon Roy Empereur), présenter quelques personnages cruciaux, donner un aperçu satisfaisant de l’univers et de l’atmosphère de cette fin de 31ème millénaire, et esquisser la perte d’innocence que se révèlera être ce conflit galactique. Si, en plus, le lecteur connaît ses classiques, il aura droit en sus à quelques détails fluff assez sympathiques, variant du cool-à-savoir-mais-pas-vraiment-important (la barboteuse de Rogal) au cryptique-mais-probablement-lourd-de-sens (le tirage de Malcador). Bref, véritablement la pierre sur laquelle la Black Library a construit sa cathédrale, et une « relique » de l’Hérésie à laquelle il convient de rendre hommage.

1 : Qui devait s’appeler Hodor pour que sa robe de chambre aille à son petit fils naturel. Je ne veux pas penser à l’alternative.

2 : C’est un jaune pâle. Non, je ne connaissais pas ce terme avant d’écrire cette chronique. Oui, je vais dès à présent tenter de le placer discrètement dans autant de conversations que possible.

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Alors, que retenir au final de Croisade & Autres Récits ? Et comment cet ouvrage se compare-t-il à son cousin d’Age of Sigmar ? Comme pour la critique de ce dernier bouquin, commençons par nous mettre dans la peau d’un nouveau venu au sein du hobby, pour qui Croisade… a des chances d’être le premier livre de la Black Library qu’il consulte.

Premièrement, en termes d’introduction pure et dure au background du 41ème millénaire, avec le contenu fluff du livre de règles en maître étalon des sujets incontournables à couvrir, notre anthologie fait un travail plutôt correct. Toutes les factions de la franchise sont ainsi abordées, de plus ou moins près, à travers l’une ou l’autre des nouvelles, les Space Marines se taillant, comme de juste, la part du lion (6 apparitions). Quoi, qu’entends-je de ta part le nouveau ? Tu trouves ça « déséquilibré » et « injuste pour les autres armées » ? Ha ! Bienvenue dans les ténèbres du lointain futur, bleu-bite, une époque merveilleuse où une seule chose est sûre : ton nom sera oublié l’Adeptus Astartes est omniprésent. Les autres factions n’ont pas vraiment lieu de se plaindre, note bien, voire peuvent être carrément reconnaissantes aux éditeurs de la Black Library de leur inclusion sur la feuille de match, leur statut de second couteau (Adeptus Mechanicus, Deathwatch, Cultes Genestealers) aurait pu en effet les priver de sortie sans qu’on n’eût de raison de crier au scandale. Il n’y a que les malheureux Eldars Noirs qui peuvent s’estimer lésés par la composition du recueil, aucun Drukhari ne venant traîner son cafard, son sadisme et son sens particulier de la fête dans les pages de Croisade… Comme les Filles de Khaine avaient également été privées de participation à Sacrosaint & Autres Récits, on peut commencer à murmurer que quelqu’un à Nottingham a une dent contre les elfidés de couleur. Encore un coup comme ça et je saisis le CRAN, sans blague. Enfin, on notera que l’inclusion en fin d’ouvrage d’une nouvelle traitant de l’Hérésie d’Horus (écrite par Abnett, qui plus est) est un ajout des plus pertinents de la part de la BL, et s’avère tout à fait légitime pour un ouvrage introductif tel que Croisade… Faire la même chose pour Necromunda, voire Blackstone Fortress, n’aurait pas été déplacé non plus, même si la place aurait sans doute commencé à manquer.

Deuxièmement, et peut-être de façon plus importante, le lecteur est également quitte pour une plongée dans les eaux troubles du grimdark, ce qui est d’une importance cruciale pour celui qui s’intéresse à 40K. Ce qui est d’autant plus appréciable, c’est que le concept est décliné en plusieurs « saveurs » au fil des différentes nouvelles : entre le nihilisme désespéré/ant de la conclusion de Rouge & Noir et du Testament de Zheng et la touche de sacrifice héroïque de Croisade et du Sanctuaire des Vers, on a droit à une palette variée d’histoires se finissant généralement mal, mais, de temps en temps, en permettant tout de même au protagoniste de sortir la tête haute de son (més)aventure1. Chose assez rare pour le souligner, nous sommes même en présence d’un authentique happy ending dans un des cas, le sauvetage d’une paire de frêles enfançons2 par les Crimson Fists de Décimer la Horde relevant presque de la mièvrerie guimauvesque selon les standards rugueux de la BL (je ne prends pas en compte Warhammer Adventures pour le moment). Quoi, que dis-tu le newbie ? « Elles ont tout de même perdu toute leur famille, torturée à mort par les Orks ? » Pfff, c’est le quotidien de tout un chacun ici petit. Ca forge le caractère, ce genre de péripétie. Bref, tiens-le-toi pour dit : le vrai malheur est de mourir sans avoir accompli son devoir.

Troisièmement, on était également en droit d’attendre quelques éléments de néo-fluff (post Cicatrix Malleficum pour simplifier) de la part de Croisade… Etrangement, ce n’est pas vraiment le cas, novella titre mise à part. Les désormais incontournables Primaris se sont faits relativement discrets dans cette anthologie passée l’empoignade de Kalides Prime, Guilliman ne fait qu’un petit caméo, Abaddon apparaît avant même d’avoir lancé sa première Croisade Noire, sans parler de la 13ème (il devait penser que l’affaire serait pliée en deux temps, trois mouvements à l’époque), les Blood Angels reçoivent un petit teaser de la dévastation de Baal, et Ynnead est aussi endormi que Biel’Tan est en pleine forme. Il n’y a que les Necrons et les Space Wolves qui bénéficient d’une approche « contemporaine », évènements de Croisade mis à part. Bref, si vous êtes un fan de fluff frais, ne cherchez pas longtemps de fontaine à la source de ce recueil et allez remplir votre seau au Lexicanum.

Quatrièmement, et pour faire le lien avec le point ci-dessus, le casting convoqué est par contre assez riche, avec une tripotée de têtes connues (surtout impériales il est vrai) présentes dans ces pages. Depuis les presque célèbres Capitaines Krom Dragongaze et Egil Iron Wolf des Space Wolves jusqu’aux quasi-frères ennemis Guilliman et Abaddon, c’est le (Gol)gotha du 41ème millénaire qui nous fait l’honneur de sa présence. Utile pour commencer à cerner les noms qui comptent à l’échelle de la galaxie.

Cinquièmement, le panel de contributeurs rassemblé pour cette anthologie est des plus intéressants, puisqu’il mélange, comme dit en introduction de cette chronique, noms établis, membres de la « nouvelle vague » (ou Waaagh! ?) de la BL et nouveaux venus. Ayant mon avis, plus ou moins tranché et favorable, sur chacun des auteurs qui ont participé à la mise sur pied de Croisade…, j’invite le lecteur intéressé par ce dernier à se reporter à mes autres chroniques pour connaître le fond de ma pensée sur cette cohorte. Je dirai simplement que les différences de niveau – somme toute subjective, car à chacun son sale goût – qui ont de grandes chances de sauter aux yeux de notre brave newbie sont tout à fait normales, et représentatives de la prose publiée par la Black Library. Eh oui, mon pôv’ Timmy, il va falloir t’y faire : la BL peut publier des OLNI, objets littéraires non identifiés, et parfois, non comestibles. Apprendre chez qui s’approvisionner pour éviter les mauvaises surprises – après tout, l’argent ne pousse pas sur les arbres3 – fait partie du parcours initiatique du bibliothécaire stagiaire, et c’est tant mieux que Croisade… ne soit ni outrageusement bon, ni honteusement nul, dans son contenu. Et au cas où tu te le demandes, candide impétrant, oui, la Black Library pourra chercher à te refourguer des nouvelles de moins de 10 pages au prix fort sur son site internet. Honour of the Third n’est donc pas un accident de parcours, mais un appel à la vigilance.

En complément du point ci-dessus, je regrette en revanche que la BL n’ait pas jugé bon d’initier les nouveaux lecteurs à ses « classiques », tels que les séries Les Fantômes de Gaunt, les trilogies Eisenhorn et Ravenor, ou encore les sagas Uriel Ventris, Ciaphas Cain ou Night Lords, pour n’en citer que quelques-unes. Toutes disposent en effet d’un corpus de nouvelles pouvant servir de bonnes introductions aux romans les constituant, et sont suffisamment qualitatives pour mériter le coup de pub. Je comprends que la Black Library ait souhaité mettre en avant ses nouvelles publications, mais parfois les « next reads » proposés sont loin d’être intuitifs4, en plus de proposer des ouvrages d’une qualité incertaine.

Cette revue « newbie-friendly » effectuée, regagnons nos pénates et jetons sur l’objet du délit un regard de lecteur confirmé. Comme cela a été le cas pour son siamois med-fan Sacrosaint & Autres Récits, Croisade… a pour lui un prix (macro)canon et une traduction française5, qui en font un incontournable pour les amateurs de nouvelles 40K anglophobes et les quidams intéressés par ce format et cette franchise ne souhaitant pas investir plus que de raison dans leur initiation. Le contenu en lui-même est assez satisfaisant, même si je n’ai pas eu de coup de cœur aussi marqué pour l’une des nouvelles au sommaire de Croisade… que cela avait été le cas pour Sacrosaint… De manière générale, tous les contributeurs se sont révélés égaux à eux-mêmes, en bien (Dembski-Bowden, Fehervari, Parker, Abnett) comme en moins bien/kind-of-ok/passable (le reste). Une différence majeure par rapport à l’ouvrage consacré à Age of Sigmar réside cependant dans la qualité de la novella introductive et éponyme de ces deux bouquins. Là où C. L. Werner (m’)avait franchement déçu avec ses tribulations stormcastées, Andy Clark livre un travail très robuste et plaisant à lire, parvenant à sublimer une bête boîte de base en affrontement bien mis en scène et contextualisé, utile pour le newbie, intéressant pour le vétéran, digeste pour les deux. Une vraie bonne surprise pour ma part donc, et la preuve que les Primaris peuvent choisir la filière L s’ils sont bien encadrés. Bref, un recueil assez honnête par rapport aux standards de la maison, et qui vaut largement Lords & Tyrants (l’autre anthologie 40K récente), tant en rapport quantité que qualité prix.

Eh bien, je crois que nous en sommes venus à bout, amis lecteurs ! Voici qui termine cette chronique de Croisade & Autres Récits, et le dyptique consacré aux recueils de nouvelles introductifs publiés récemment par la Black Library. J’espère que ces revues critiques vous auront été utiles et/ou agréables, et vous donne rendez-vous prochainement pour de nouveaux retours brutalement honnêtes (ou honnêtement brutaux, en fonction de mon humeur) sur les ouvrages de la BL. Pour la série « didactique » en cours, ce sera sûrement à Warhammer Adventures de passer à la moulinette. Après tout, on ne peut pas mettre n’importe quoi entre les mains de nos chères têtes blondes. À bientôt !

1 : Quand il est capable de lever cette dernière, pas vrai Cassian ?

2 : C’est d’autant plus gentillet que les fillettes ne pourront pas devenir des aspirants Crimson Fists pour une bête histoire de chromosome Y manquant. C’est une vie de patachon qui les attend à la Schola Progeniam, oui.  

3 : Sauf sur Beta-Küyllnh’Thet, mais depuis son invasion par la Death Guard à la suite de l’ouverture de la Cicatrix, elle ne produit plus que des liquidités.

4 : Si vous avez aimé Yarrick qui tape sur des peaux-vertes (et c’est numéro 1), vous aimerez sans doute le récit des dernières heures de Cadia, pas vrai ? Un peu rude pour notre pauvre Annandale, qui a consacré les plus belles années de sa vie à étoffer la biographie du vieux schnock le plus acariâtre du Segmentum.

5 : Sauf ‘The Word of the Silent King’, remplacée en VF par ‘Les Seigneurs de Borsis’, et ‘Honour of the Third’, purement et simplement retirée du line-up français. Et pourtant, ce n’était pas la plus longue à traduire.